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Version finale

39e législature, 1re session
(13 janvier 2009 au 22 février 2011)

Le jeudi 1 octobre 2009 - Vol. 41 N° 7

Consultation générale et auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 44 - Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel en matière de gouvernance et du projet de loi n° 38 - Loi modifiant la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire et la Loi sur l'Université du Québec en matière de gouvernance


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Table des matières

Auditions (suite)

Mémoires déposés

Remarques finales

Autres intervenants

Mme Francine Charbonneau

M. Émilien Pelletier

M. Michel Pigeon

M. Gilles Lehouillier

Mme Noëlla Champagne

* M. Jean Grégoire, FEUQ

* M. Laurent Viau, idem

* M. Louis-Philippe Savoie, idem

* Mme Carole Beaulieu, SPPUS

* M. Robert Tétrault, idem

* M. François Boone, idem

* M. Sylvain Mercier, AELIES

* Mme Fanny Tremblay-Racicot, idem

* Mme Rachel Schroeder-Tabah, MAGE-UQAC

* Mme Léa St-Pierre Castonguay, idem

* M. Pierre-Luc Gagné, idem

* M. David Maurice, REMDUS

* M. Barham Thiam, idem

* M. Joël Lagrandeur, idem

* Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures vingt minutes)

Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 38, Loi modifiant la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire et Loi sur l'Université du Québec en matière de gouvernance, et sur le projet de loi n° 44, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel en matière de gouvernance.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Malavoy (Taillon) remplace M. Blanchet (Drummond).

Le Président (M. Marsan): L'ordre du jour: nous recevons, ce matin, la Fédération étudiante universitaire du Québec et par la suite le syndicat des professeurs et professeures de l'Université de Sherbrooke.

Auditions (suite)

Alors, il me fait plaisir de vous présenter immédiatement les représentants de la Fédération étudiante universitaire du Québec, M. Jean Grégoire, le président. M. Grégoire, je vais vous demander de nous présenter les gens qui vous accompagnent et de débuter votre présentation. Vous avez jusqu'à un maximum de 15 minutes pour ce faire.

Fédération étudiante universitaire
du Québec (FEUQ)

M. Grégoire (Jean): Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. membres de la commission, bonjour et merci. Permettez-moi de vous présenter Louis-Philippe Savoie, vice-président aux affaires universitaires, et Laurent Viau, coordonnateur à la recherche.

Permettez-moi également de vous faire une petite mention sur la Fédération étudiante universitaire du Québec, la FEUQ. Elle représente 16 associations membres et compte plus de 125 000 étudiants universitaires. La FEUQ est également le plus grand groupe jeunes au Québec et défend, depuis maintenant plus de 20 ans, les étudiants universitaires.

M. le Président, comme la majorité des groupes qui se sont présentés devant cette commission, la Fédération étudiante universitaire du Québec est d'avis qu'une majorité de membres externes sur les conseils d'administration n'est en aucun cas un gage de bonne gouvernance. Dans son projet de loi, Mme la ministre Courchesne propose que les conseils d'administration soient composés à 60 % de membres supposément indépendants. Or, dans les faits, la notion d'indépendants demeure trompeuse. Il ne s'agit pas de membres indépendants mais plutôt de membres externes. Pour la FEUQ, il n'existe pas d'autre solution qu'une modification majeure pour que les conseils d'administration soient composés majoritairement de membres provenant de la communauté universitaire puisqu'ils sont les mieux placés pour prendre les bonnes décisions quant à la gestion de leur université.

Soyons clairs, la proposition de la ministre à l'effet d'imposer une forte majorité de membres externes porterait atteinte à la qualité des universités québécoises. Ce n'est pas que nous sommes opposés à la présence de membres externes sur les conseils d'administration, bien au contraire. Ils apportent, selon nous, avec eux une vision différente qui peut aider à rapprocher l'université de la population. Évidemment, ceux-ci doivent provenir de milieux qui sont diversifiés, que ce soient les cégeps, les commissions scolaires, le milieu culturel et communautaire, les entreprises locales, et non pas seulement du milieu des affaires.

Peut-être que, selon certaines théories, une majorité de membres externes serait préférable. Maintenant, nous ne sommes pas ici pour débattre de théories, mais de réalités concrètes, et, dans la réalité concrète, vécue au quotidien dans les établissements universitaires, une majorité de membres externes sur les conseils d'administration n'est pas un gage de bonne gouvernance, je le répète. Dans la réalité, ce sont les membres internes qui posent les questions difficiles, ce sont les membres internes qui maîtrisent les dossiers, et ce sont les membres internes qui font preuve d'indépendance face à la direction.

De plus, l'université est une organisation très complexe qui comporte plusieurs paliers, et, pour effectuer un réel changement dans une université, il est nécessaire que le conseil d'administration ait l'appui de la communauté universitaire; il faut que la communauté soit réellement impliquée dans la décision. À l'inverse, des décisions dans lesquelles la communauté ne se sentirait ou ne serait pas impliquée pourraient entraîner de fortes réticences au changement et éventuellement ralentir le développement des universités.

Si ce qu'on cherche est un conseil d'administration compétent, alors, pourquoi mettre de côté les membres en provenance de l'interne? Quand, même une figure clé de l'économie américaine comme Warren Buffet affirme, et je cite, que, «les membres externes ont en général apporté une contribution minime au mieux et trop souvent négative», il y a lieu de se poser de sérieuses questions sur le modèle qui est proposé ici. Quand on sait qu'à l'UQAM ce sont les membres internes du conseil qui ont tiré la sonnette d'alarme, on peut se demander en quoi il faudrait récompenser ceux qui sont restés silencieux, qui ont été trompés par le rectorat.

En somme, le concept d'indépendance proposé par le projet de loi est trompeur. De toute façon, selon nous, l'indépendance complète et totale face à une institution comme une université est pratiquement impossible à atteindre.

Dans les consultations précédentes, on a souvent cité le rapport Toulouse. Mais ce qui ressort d'un autre document plus récent de l'IGOPP, c'est l'importance de l'indépendance face à la direction et l'implication à long terme dans l'institution des membres du conseil d'administration. C'est de légitimité dont on parle ici et c'est de compétence dont on parle ici. La logique veut donc, selon nous, qu'une majorité des sièges soit réservée aux membres internes de la communauté universitaire. En intégrant la communauté au processus décisionnel, on peut s'assurer de leur adhésion et ainsi assurer la réalisation des objectifs de l'université. Pour la FEUQ, c'est ça, une bonne gouvernance. Dans un même ordre d'idées, il serait pertinent également que la loi prescrive que les étudiants soient présents sur les conseils d'administration, à raison d'au moins un par groupe distinct d'accréditation.

Maintenant, avant de se plonger dans les mesures de reddition de comptes, qui, selon nous, devraient être poussées plus loin dans le projet de loi, la FEUQ tient à faire la lumière sur ce qu'elle entend par autonomie, imputabilité et transparence. Pour la FEUQ, il n'y a aucune contradiction entre autonomie et imputabilité. D'exiger aux universités des mécanismes de reddition de comptes, en d'autres termes, d'accroître l'imputabilité des universités face à la population, aux élus et à la communauté universitaire, ne vient en aucun cas limiter l'autonomie de l'université.

Bien sûr, les universités doivent jouir du maximum de pouvoirs pour déterminer leurs choix académiques et leurs axes de recherche. Maintenant, ces choix, lorsqu'ils sont justes et réfléchis, selon nous, devraient être très faciles à défendre, auprès de la population, et devraient même permettre de rassurer les gens sur la qualité de nos établissements d'enseignement supérieur. De plus, nos universités doivent être fières de défendre les choix académiques qu'ils ont accomplis, leur grande réussite, et cela, dans la plus grande transparence. Également, étant donné que les universités sont financées à plus de 70 % par l'État, il est normal, selon nous, que l'État exige une forme de reddition de comptes des universités. L'État doit s'assurer que les universités gèrent les fonds publics de manière responsable.

C'est ce qui nous amène à affirmer que l'autonomie est la possibilité pour les universités de fixer leurs propres objectifs. La transparence, elle, est la responsabilité qui doit être attendue des universités afin de rassurer la population. L'imputabilité est le devoir des universités de défendre et justifier leurs choix et l'atteinte de leurs résultats auprès de la communauté universitaire, des élus, de la population en général. En définitive, l'imputabilité légitimise l'autonomie.

À ce sujet, la fédération est d'avis que certaines mesures de reddition de comptes proposées par le projet de loi devraient être accrues. Notre mémoire fait état de diverses améliorations que nous aimerions voir, mais nous mettrons l'accent sur seulement certaines d'entre elles.

En ce qui a trait aux indicateurs, ils ne doivent pas devenir des contrats de performance, mais plutôt des outils pour disposer d'informations précises sur le réseau universitaire. Ces outils doivent être axés autant sur le qualitatif que le quantitatif. Plus on a d'information, plus on est en mesure d'évaluer la qualité de nos universités et améliorer leur reddition de comptes devant la Commission permanente de l'éducation.

Les universités ne doivent pas avoir peur de leur bilan. Ils devraient l'assumer sereinement, et en tirer les conclusions nécessaires, et agir en vue de s'améliorer. De plus, pour nous, les indicateurs généraux... pour les indicateurs généraux en fait, il serait nécessaire de consulter les regroupements nationaux, que ce soient d'étudiants, de professeurs, de chargés de cours et du personnel des universités. Pour fixer les indicateurs particuliers, ce serait à l'instance représentative de la communauté universitaire de les fixer, ou, à tout le moins, d'être consultée afin de les fixer. À ce sujet, la Loi sur la gouvernance devrait également permettre à ces mêmes représentants de venir témoigner des avancées de leur université lors des audiences des dirigeants d'établissement.

Il serait également pertinent de se pencher sur la question de la création d'un organisme indépendant chargé d'évaluer la qualité de l'enseignement, l'utilisation des fonds publics et d'améliorer la concertation entre les établissements universitaires. La tendance à l'échelle mondiale est à l'augmentation de l'autonomie des institutions. Maintenant, on remarque qu'avec une plus grande autonomie on peut aussi voir une augmentation de l'imputabilité. Pour y arriver, plusieurs pays ont opté pour des organismes indépendants qui ne sont pas à la fois juge et partie afin d'évaluer la qualité des universités.

n (11 h 30) n

D'ailleurs, un exemple existe également au Québec, ici même, avec la Commission de l'évaluation de l'enseignement collégial. Suite aux différentes consultations, on a pu constater que ce type de formule est revenu à quelques reprises déjà, que ce soit sous le nom de Conseil des universités ou commission de l'évaluation des universités québécoises. Bien que cette formule-là ne soit pas le principal sujet de la présente audience, nous croyons tout de même qu'il s'agit d'une avenue à explorer.

Pour ce qui est de l'autonomie, il serait pertinent de rayer du projet de loi la notion de confidentialité pour la nomination du premier dirigeant. Nous croyons que la notion de confidentialité vient limiter certains processus déjà existants qui font office de traditions, qui démocratisent la nomination du premier dirigeant.

Pour conclure, plus de un mois d'audiences et après plusieurs mémoires de très grande qualité, une ligne directrice semble émerger. On constate qu'il est impensable pour la grande majorité même des interlocuteurs, dont la FEUQ fait partie, de voir un projet de loi passer à côté de son objectif en priorisant une majorité d'externes dans la composition du conseil d'administration.

Cela dit, la fédération demande depuis longtemps une meilleure reddition de comptes, et la série d'améliorations proposées dans notre mémoire permettent d'y arriver pleinement.

Finalement, ce n'est pas anodin si notre mémoire s'intitule Imputabilité, transparence et collégialité: trois priorités pour les universités québécoises!. L'imputabilité, pour nous, fait référence à la nécessaire reddition de comptes qui doit s'opérer auprès de la ministre, des contribuables et de la communauté universitaire. La transparence est nécessaire pour éviter les dérives. La collégialité est le modèle le plus approprié pour assurer une saine gouvernance des établissements d'enseignement supérieur. Une gouvernance qui ne respecterait pas ces trois principes dirigeraient, selon nous, notre système universitaire tout droit vers un mur, elle réduirait le rayonnement du Québec sur la scène internationale et nuirait de manière durable aux efforts qui ont été déployés pour maintenir des universités de haut calibre au Québec. Merci.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, M. Grégoire, pour nous avoir donné le point de vue de la Fédération étudiante universitaire du Québec. Nous allons immédiatement poursuivre avec la période d'échange, et je vais reconnaître la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Messieurs, bonjour et bienvenue. Mes premiers mots seront pour m'excuser de cette courte absence, mais c'était vraiment un cas de force majeure. Ce n'est pas mon habitude. Cela dit, j'ai bien lu votre mémoire. Il est tout aussi bien fait que ceux de vos prédécesseurs ? parce qu'hier j'ai eu l'occasion de saluer l'excellence du travail de tous les étudiants qui ont participé à cette commission parlementaire ? et vous reprenez essentiellement... ou en tout cas passablement les propos de la FAECUM, que nous avons reçue hier soir. Donc, dans un sens, c'est bien parce qu'on peut continuer sur cette même discussion que nous avons eue.

Vous comprendrez que ce qui m'intéresse au plus haut point, c'est le fait que vous souhaitez aussi la création d'un organisme indépendant d'évaluation des universités du Québec, et vous dites: Notamment, avec le mandat d'évaluer l'atteinte des objectifs fixés et l'utilisation des fonds publics par les universités. Moi, j'aimerais que vous me disiez de qui serait composé... de quel type de personnes, quel serait le profil des personnes qui siégeraient sur cet organisme. On a compris le mandat. Et qui les nommerait? Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de réfléchir à ça, cela dit, là. Mais ça m'intéresse de voir un peu comment vous définiriez la composition d'un tel organisme.

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Oui. Alors, on ne s'est pas penchés dans le détail sur la composition de cet organisme-là. Ce qu'on demande, c'est un organisme qui vient vraiment effectuer, là, le suivi, la vérification des indicateurs qui ont été mis en place. L'important, selon nous, c'est que cette organisation-là ne soit pas ni juge ni partie, c'est-à-dire qu'il n'y ait pas, dans le fond, une ingérence d'une quelconque instance à l'intérieur de cette organisation-là. Donc, ce serait important que les gens qui soient sur cette organisation-là soient très compétents en termes d'éducation, aient des capacités pour évaluer justement les indicateurs qui sont présentés. Mais, dans le fond, on n'a pas de critère spécifique sur les gens qui devraient y siéger.

Le Président (M. Marsan): Oui. M. Viau.

M. Viau (Laurent): Si vous me permettez de compléter là-dessus, nous, ce qu'on avance dans le mémoire, c'est que le corollaire de l'autonomie doit être l'imputabilité. Les exemples internationaux qu'on donne, ce sont des exemples où justement il y a eu une décentralisation des réseaux universitaires, une autonomie accrue des réseaux universitaires. À ce moment-là, ce qu'on a fait, c'est qu'on a confié un peu le rôle de contrôle des universités à des organismes d'audit pour être en mesure d'améliorer principalement les processus aussi à l'intérieur des universités. Ce qu'on vise, c'est un processus d'amélioration continu avant tout, puis c'est dans ce sens-là qu'on amenait cette proposition-là.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Courchesne: Je trouve ça intéressant que vous abordiez le sujet par le... et insistiez surtout sur l'imputabilité. Au fond, on dirait que, dans votre cas et le cas de la FAECUM, vous avez abordé l'angle de la gouvernance beaucoup sur cet aspect-là, c'est-à-dire qu'on sent que, dans vos mémoires, il y a une force liée à la nécessité de cette imputabilité-là.

Dans votre modèle... Puis là vous dites aussi l'autonomie, je comprends «imputabilité», mais vous dites: On va décentraliser pour renforcer l'autonomie. Mais prenons des exemples plus concrets de réalités que nous vivons en ce moment. Si nous prenons l'exemple d'une université, sans la nommer, qui décide, pour être, puis j'insiste, dans la moyenne médiane des universités canadiennes, parce que c'est le choix qu'elle fait, pour être dans la moyenne des universités canadiennes, réalise, après une étude sérieuse de comparaison, qu'elle a de la difficulté à aller recruter certains doyens de faculté, par exemple, ou même certains dirigeants, donc décide d'augmenter de façon importante sa rémunération, donc, dans votre modèle de gouvernance, mis à part le fait qu'il y aurait consultation auprès de la communauté universitaire, dans votre modèle, quels seraient les mécanismes pour peut-être retirer la décision, pour peut-être la faire changer ou peut-être agir? Parce que, dans votre organisme de contrôle, vous dites: C'est un mandat d'audit. Mais le mandat d'audit, à un moment donné, il s'applique à est-ce qu'on prend trop d'argent pour ceci ou pour cela. Tu sais, habituellement, une entreprise se gère entre 8 % et 12 % de frais administratifs. Or, si votre comité d'audit dit: Cette université se gère à 15 %, 16 % de frais d'administration, comment ça se passe, dans votre modèle de gouvernance, pour que vous puissiez arriver à faire changer les choses?

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Tout d'abord, on est ici sur une situation excessivement précise. Ce serait alors au conseil d'administration, selon nous, là, de décider. On parle de décisions qui sont internes. On a mis essentiellement l'accent sur le fait que le conseil d'administration devait être composé de membres de la communauté universitaire, de membres internes, et, si, eux, de leur côté, jugent qu'une telle décision est pour le bienfait de l'université, à ce moment-là... En fait, si le conseil d'administration juge ça et qu'en plus il est majoritaire, donc, à ce moment-là, que les membres de la communauté universitaire sont pleinement investis de cette décision-là, on ne voit pas nécessairement de problème à ce niveau-là. Ce n'est pas une question de reddition de comptes; la reddition de comptes, c'est tout simplement que cette décision-là soit rendue publique et que l'université l'assume pleinement.

Bon, maintenant, ce qui est important à comprendre aussi, c'est que les indicateurs qui seraient vérifiés par cette commission indépendante aussi, par l'idée de commission indépendante, seraient fixés à deux niveaux: on parle d'indicateurs externes et d'indicateurs internes ? ou en fait c'est particuliers et généraux, si je ne me trompe pas dans le projet de loi. Pour ce qui est des indicateurs particuliers qui touchent vraiment l'université comme telle et le développement qu'elle se fixe, ils seraient déterminés en collaboration avec la communauté universitaire, donc d'une manière collégiale et sans nécessairement brimer l'autonomie de l'université. Pour ce qui est des indicateurs généraux, on demande également à ce que soient consultés les divers représentants nationaux, que ce soient des étudiants, des professeurs, des chargés de cours ou des employés. À ce niveau-là, il y aurait quand même une consultation qui serait faite, également de manière collégiale, et qui ne viendrait pas non plus d'une manière très, très large limiter l'autonomie des universités.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

n (11 h 40) n

Mme Courchesne: Vous comprendrez que le sens de mes questions, c'est que, dans vos modèles, vos modèles s'appliquent pour des situations où ça va bien. Moi, je veux comprendre comment ça se passe quand on réalise qu'il y a une situation, quelle qu'elle soit ? j'ai pris la rémunération, on pourrait prendre un plan d'immobilisation, mais on pourrait aussi parler des orientations stratégiques d'une université, là ? où c'est un point qui est encore beaucoup... qui est encore sensible. Moi, ce que je veux savoir, c'est: Dans ces cas-là... Et je vais poser une autre question: Dans le cas où j'imagine que vous reconnaissez que le ou la ministre de l'Éducation a une responsabilité ultime face à l'éducation et face aussi aux investissements qui sont faits dans le réseau de l'éducation, moi, je veux savoir, dans ce modèle-là, quel est le rôle de la ministre, du gouvernement, parce qu'elle est membre d'un gouvernement, elle prend des décisions au nom du gouvernement. Donc, quel est son rôle et qui est imputable, en tout dernier lieu, dans cette reddition de comptes face à la population, pas uniquement la communauté universitaire, mais face à l'ensemble des citoyens du Québec qui investissent dans le réseau universitaire?

Le Président (M. Marsan): M. Savoie.

M. Savoie (Louis-Philippe): Pour ce qui est de la première partie de la question, donc, qui touche les cas de mauvaise gestion grave, dans ce cas-là, nous, ce qu'on pourrait envisager dans ce cas-là, ce serait un élargissement du mandat du Vérificateur général du Québec pour qu'il puisse aller vérifier les processus pour voir... pour voir, dans les cas extrêmement problématiques, venir cibler véritablement quelles ont été les causes des problèmes.

L'expérience par exemple au niveau de l'Université du Québec à Montréal, le rapport du Vérificateur général, en deux tomes, s'est avéré être extrêmement complet et s'est avéré extrêmement instructif en ce qui a trait à ce cas particulier, et il y a là peut-être quelque chose à aller gratter en particulier comme orientation.

Pour ce qui est de la deuxième partie de la réponse, je vais laisser un de mes collègues y aller.

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Oui. Pour ce qui est du rôle comme tel de la ministre, selon nous, c'est de rassurer la population à l'effet que les universités... en fait, être en mesure de rassurer la population à l'effet que les universités sont bien développées et que le réseau universitaire est fort au Québec.

Pour ce qui est du rôle de la commission indépendante, qu'on aimerait fixer, à ce moment-là, son rôle précis serait de fixer les indicateurs, en collaboration avec les universités et les organisations, le ministère, et s'assurer que les universités collaborent entre elles, discutent entre elles ou ont un milieu d'échange pour atteindre ces indicateurs-là.

Maintenant, pour ce qui est de l'Assemblée nationale comme telle, c'est de s'assurer... bon, aux trois ans en ce moment, mais de s'assurer que les dépenses des universités sont bien faites, sont faites d'une manière généralement dans l'intérêt du développement des universités, et c'est aux différents députés, aux différents représentants de l'Assemblée nationale de s'assurer que justement le réseau universitaire, dans son ensemble, globalement, se développe bien en faisant la vérification auprès des premiers dirigeants.

Maintenant, les premiers dirigeants auraient la chance de défendre beaucoup plus activement ou... en fait, beaucoup plus précisément leur établissement si les différents députés, les différents membres de l'Assemblée nationale avaient des outils pour mieux comprendre ce qui se passe dans les universités et pour mieux évaluer si les universités atteignent leurs objectifs ou non, et c'est un peu l'idée de la commission de vérification.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Courchesne: La ministre, est-ce qu'elle est imputable?

M. Grégoire (Jean): La ministre est tout à fait imputable.

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Pardon. La ministre est tout à fait imputable de...

Mme Courchesne: Oui, mais...

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Courchesne: Est-ce que ce... Comment pensez-vous... puis qu'un ministre ou une ministre, vous dites, doit rassurer la population? Elle est imputable, mais comment elle fait pour s'assurer justement que toutes les universités vivent des règles claires de gouvernance qui la mettent... qui mettent la population à l'abri de situations... Puis je ne parle pas juste des désastres, là, tu sais. Moi, là, je ne suis pas dans le scénario catastrophe, mais je suis dans des scénarios de prises de décision qui influencent la vie universitaire puis qui a des conséquences sur la vie universitaire, tant sur le plan administratif que sur le plan des orientations stratégiques et même de la mission. Autrement dit, il faut qu'elle possède ces outils-là pour être en mesure, elle aussi, d'assumer et d'assurer son imputabilité face à la population.

Donc, les recteurs nous ont demandé des ententes de partenariat. Les recteurs nous ont dit: On est tous d'accord avec les principes de la loi... tout ce qu'il y a dans la loi, même les membres majoritaires, on est tous d'accord avec ça, mais on veut des ententes particulières qu'on réviserait périodiquement avec la ministre. Est-ce que vous croyez que ça, c'est rassurant pour un membre du gouvernement?

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Nous, ce qu'on comprend, c'est que... Bon, d'une part, il y a un mécanisme qui existe déjà, qui est les audiences de la loi n° 95; ça doit être renforcé, ça doit être renforcé davantage. D'autre part, on comprend que la ministre aimerait... Mme la ministre aimerait fixer des indicateurs avec les universités pour justement, bon, assurer une certaine surveillance de ce qui se passe au niveau de, bon, la reddition de comptes des universités, ce pour quoi on pense qu'il... en fait, il devrait y avoir un élargissement au niveau de la loi, on devrait consulter davantage également la communauté universitaire, que ça ne se fasse pas seulement avec le conseil d'administration.

Maintenant, dans tous les cas, la ministre, lorsqu'elle a en sa possession des indicateurs, lorsqu'elle a en sa possession une commission indépendante qui serait chargée d'évaluer les différents objectifs et les atteintes de ces objectifs-là par les universités, lorsqu'elle a en sa possession du matériel détaillé qui permet de voir le développement des universités d'une manière qualitative ou quantitative, a par la suite la possibilité de légiférer. Et je pense que c'est là le rôle d'un ministre.

Le Président (M. Marsan): M. Viau.

M. Viau (Laurent): Si vous me permettez, en complémentaire, la ministre de l'Éducation a les outils également, par le biais des règles budgétaires qui sont écrites à chaque année, par les plans quinquennaux d'investissement qui sont évalués d'un partenariat avec les universités, d'évaluer un peu, d'avoir un contrôle aussi un petit peu plus... un peu plus constant de la gestion qui est faite dans les universités, de la façon que les sommes sont allouées.

Ce qu'il faut comprendre aussi, c'est que l'université n'est pas le primaire, n'est pas le secondaire. On a fait le choix, au Québec, puis c'est généralement une pratique qui est admise dans la plupart des pays de l'OCDE minimalement, que les universités ont une large autonomie, et c'est basés sur cette autonomie-là qu'on est capables de développer le savoir de façon autonome pour le bien-être du développement de la société.

Mme Courchesne: Merci.

Le Président (M. Marsan): Merci. Mme la députée des Mille-Îles.

Mme Charbonneau: Bonjour, merci pour votre présentation. Je vais en profiter pour vous faire un merci particulier, puisqu'on a reçu plusieurs groupes jeunes ou étudiants, on ne sait jamais quel qualificatif prendre. La plupart... ou plusieurs nous ont demandé de stopper les travaux, d'arrêter, de changer de perspective, et, de votre côté, vous avez travaillé le dossier d'une façon différente. Donc, merci. Des fois, c'est plaisant d'avoir des gens qui nous parlent de modifications plutôt que d'arrêter.

Dans votre présentation, M. le Président, vous avez dit quelque chose qui m'a étonnée, mais en même temps j'aimerais vous entendre là-dessus, c'est-à-dire que vous avez dit que les gens de l'externe pourraient ralentir les changements au niveau de l'université. J'imagine que le fameux proverbe que d'avoir le nez collé sur l'arbre on ne voit pas la forêt est quelque peu différent dans votre perspective. Donc, j'aimerais que vous puissiez élaborer sur cette affirmation-là.

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Bien, tout d'abord, merci pour le commentaire. Effectivement, la fédération travaille de manière pragmatique, et ce, sur la plupart des dossiers qui nous sont proposés. Donc, oui, c'est une façon de travailler qu'on privilégie à la fédération.

Maintenant, pour ce qui est de... justement le fait de ralentir, c'est qu'en fait, selon nous, si on met une minorité de membres provenant de la communauté universitaire ou de membres internes sur les conseils d'administration et que des décisions qui sont prises sur le conseil d'administration vont à l'encontre de ce qu'eux aimeraient voir comme changements ou de ce qu'eux aimeraient voir comme améliorations à leur université, il existe une panoplie, en fait une myriade d'instances, de sous-instances, de comités, de structures ? l'université, c'est excessivement grand ? et, à ce moment-là, il est possible, à plusieurs niveaux, à plusieurs paliers, de bloquer ou enfin tout simplement de refuser ce changement-là. C'est vraiment une question de réticence au changement. Si la communauté universitaire ne veut pas effectuer un changement qui a été proposé, même si le conseil d'administration aimerait le pousser davantage, il y a de très fortes chances que ce soit plus lourd, plus difficile et qu'éventuellement ce changement-là ne s'effectue pas ou ne s'effectue pas dans sa totalité.

Donc, on est d'avis que, pour s'assurer que les changements se fassent plus rapidement, plus facilement et également que ce soient des changements qui soient bénéfiques pour l'institution, une majorité de membres internes serait à privilégier sur le conseil d'administration et qu'ils se sentent ainsi imprégnés de la décision qui a été prise.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Mille-Îles.

n (11 h 50) n

Mme Charbonneau: Merci. Je comprends un peu plus. D'après cette perspective-là, je comprends un peu plus où vous alliez.

Maintenant, j'aimerais revenir un petit peu sur la reddition de comptes. Vous sembliez, et avec raison, dire que ça en prendrait plus et ça en prendrait sous différentes formes. Je me demandais si vous aviez réfléchi aux façons de la faire et dans cette... Tantôt, vous avez parlé de la communauté, vous avez parlé de l'interne, de l'externe, mais vous la voyez comment, puisque, de votre génération, les technologies et les façons de faire peuvent être vues d'une façon différente, donc, de votre côté, la reddition de comptes?

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Oui. Je vais commencer, ensuite, je vais laisser la parole à M. Savoie. Je pense qu'au niveau de la reddition de comptes il y a plusieurs petits mécanismes ? et ils sont expliqués, là, dans le mémoire qu'on vous a présenté ? qui pourraient être améliorés davantage. Notamment, là, au niveau de justement les procès-verbaux qui sont envoyés au ministère, on serait d'avis que la communauté universitaire devrait y avoir accès également en ligne.

Ce qu'on dit dans le fond, c'est que les universités doivent préserver leur autonomie, les choix qu'ils doivent faire au niveau académique, au niveau de la recherche, mais la reddition de comptes, pour nous, s'articule justement du fait que, étant donné qu'on leur donne une plus grande autonomie, on doit nécessairement savoir ce que les conseils d'administration font, ce que les universités font avec les fonds publics, et ils devraient être fiers d'expliquer ces choix-là.

Je ne sais pas si Louis-Philippe...

Le Président (M. Marsan): M. Savoie.

M. Savoie (Louis-Philippe): Dans le fond, en ce qui a trait à la reddition de comptes, les éléments majeurs qu'on amène, c'est d'une part ça prend des indicateurs qui sont clairs, qui sont bien conçus, qui suscitent l'adhésion aussi. Si c'est des indicateurs qui sont plus ou moins bien construits... Je vais me permettre de dévier un petit peu, mais on a pu le voir, par exemple, avec... si un indicateur est mal conçu, on a pu le voir avec le classement du Maclean's qu'il y a eu récemment où est-ce qu'ils s'étaient tout simplement trompés dans un indicateur, ce qui surclassifiait Longueuil par rapport aux autres villes. Je me suis senti un petit peu mal en tant que Longueuillois, mais quand même...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Savoie (Louis-Philippe): ...ce serait un premier élément, effectivement.

Ce serait un premier élément aussi en ce qui a trait à la reddition de comptes pour ce qui est de la loi n° 95. Ça fait très longtemps que la FEUQ demande un renforcement de cette loi-là. On croit que les audiences... les rapports qui sont présentés là doivent être beaucoup plus efficaces, les rapports doivent être plus clairs, mieux conçus pour permettre aux députés de mieux accomplir leur travail et mieux pouvoir comprendre un peu toute la complexité de l'établissement universitaire qui se présente devant eux.

Aussi, ça prend une démarche un peu plus participative en ce qui a trait à ces audiences-là, donc que les représentants de la communauté puissent être présents pour pouvoir, eux aussi, commenter le bilan, parce qu'évidemment en fonction... un premier dirigeant ne va pas nécessairement avoir la même vision de ce qui se passe à l'université qu'un professeur ou un étudiant, et ça, c'est tout à fait normal.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Mille-Îles, en terminant.

Mme Charbonneau: En terminant, dans le mémoire, vous faites un lien avec le Vérificateur général. Vous voulez lui donner un rôle très précis, vous voulez qu'on l'inscrive dans la loi. Par contre, en ce moment, le Vérificateur général a un rôle sensiblement comme vous voulez écrire. Je me demandais si vous pouviez nous expliquer votre perspective par rapport à ça: Qu'est-ce qu'on doit écrire qui lui donne plus, au Vérificateur général, en ce moment?

Le Président (M. Marsan): M. Viau.

M. Viau (Laurent): Si vous me permettez, présentement, la loi permet déjà au Vérificateur général de mettre son nez dans les affaires des universités si tant est qu'il sente qu'il y a un besoin. Nous, ce qu'on recommande dans le mémoire, c'est d'ajouter des éléments, dans la loi, qui font en sorte que, d'une part, si la ministre sent qu'il y a un besoin d'aller fouiller dans les universités, pour que le Vérificateur puisse avoir accès aux livres des universités, qu'il puisse le faire plus facilement, de façon plus systématique; et, deuxièmement, que, si la Commission permanente de l'éducation, par exemple, suite aux audiences de la loi n° 95, estime qu'il y a un problème de gestion à l'intérieur d'une université, qu'ils puissent recommander et que, par cette recommandation même, le Vérificateur général puisse aller vérifier qu'est-ce qui se passe à l'intérieur de l'université en question.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie. Ceci termine les premiers échanges avec le parti ministériel. Nous allons poursuivre avec l'opposition officielle, et je vais reconnaître la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de recherche et de développement, Mme la députée de Taillon, pour un temps équivalent au parti ministériel. La parole est à vous, Mme la députée.

Mme Malavoy: Je vous remercie. Bonjour, messieurs. Merci d'être là, merci d'enrichir notre dernière journée de consultations, et, comme à chaque fois il y a des éléments nouveaux qui sont apportés par les gens qui viennent nous parler, il y en a qui se recoupent et il y a des choses qui sont nouvelles.

Il y a une chose qui est différente dans votre approche, effectivement, vous proposez un certain nombre de modifications, et vous dites, seulement à la toute fin: Il faudrait une réflexion d'envergure sur l'avenir des universités. D'autres sont venus nous dire: Il faudrait d'abord une réflexion d'envergure, et après, éventuellement, un projet de loi. Vous, vous parlez de cela au terme de votre analyse des projets de loi. Je voudrais juste savoir quelle est votre position là-dessus. J'aimerais que vous la précisiez pour bien comprendre, là, ce que vous entendez par «réflexion» et à quel moment elle devrait survenir.

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Bon. En fait, en deux temps, là, tout d'abord pour ce qui est de notre approche ici, en ce moment, c'est une approche qu'on veut pragmatique ou, en fait, qu'on croit pragmatique. Un projet de loi a été présenté et on croit qu'apporter des modifications à ce projet de loi, le commenter, éventuellement faire aussi le survol des points qui ne font absolument pas notre affaire, comme par exemple la composition du conseil d'administration, est la façon de faire ou, en fait, l'approche à privilégier ici. On est dans un esprit de discussion. Selon nous, c'est le moment pour en discuter et amener nos propositions, qu'on juge tout à fait pertinentes. L'approche également qu'on a choisi de faire, c'est de voir le projet de loi dans son ensemble et de le détailler excessivement pour mettre le projet de loi à notre image, à l'image que les étudiants privilégient, dans le fond, pour ce projet de loi là.

Maintenant, on est toujours d'avis qu'effectivement ça prendrait une consultation plus large sur l'éducation dans son ensemble. À cet effet-là ? et c'est la deuxième partie de ma réponse ? ça fait déjà plus de un an que la fédération réclame une consultation d'envergure sur l'éducation, et non pas seulement sur l'éducation postsecondaire, mais sur l'éducation dans son ensemble.

Le constat qu'on fait est le suivant: ça fait maintenant plus de 40 ans que la commission Parent a eu lieu. 40 ans plus tard, bon, on a réussi à laïciser nos écoles, on est arrivés à démocratiser le système d'éducation, à augmenter grandement l'accessibilité, à permettre aux gens, aux étudiants... en fait aux gens de recevoir une formation, d'augmenter leur quantité de savoir, mais également d'augmenter la richesse du Québec. On croit que la commission Parent a permis au système d'éducation, 40 ans plus tard en fait, de prendre une avance sur le plan international.

Maintenant, on a peur éventuellement que cette avance-là se perde tranquillement, étant donné que justement on discute plutôt de modifications à la gouvernance ou de petites modifications à gauche, à droite sur, bon, est-ce qu'on chiffre ou on lettre les bulletins. Ces modifications-là sont à la carte, sont très, très précises et ne favoriseront pas à long terme une évolution de notre système d'éducation et le maintien de notre système d'éducation à l'avant-garde des systèmes d'éducation qu'il y a dans le monde. Donc, on est d'avis qu'on devrait même aller plus loin et demander une très large commission d'enquête sur l'éducation du début à la fin, une commission très précise qui proposerait des modifications ou des améliorations à amener au système d'éducation pour les 40 prochaines années.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Je comprends parfaitement ce que vous me dites. Je comprends la cohérence de ça. Même, vous allez plus loin que l'éducation postsecondaire. Mais la difficulté que j'ai, c'est qu'à partir du moment où on travaillerait et on adopterait un projet de loi, même bonifié, on consacre dans un texte législatif déjà des orientations, c'est difficile après de faire un grand débat public qui viendrait remettre en question des éléments qu'on aurait récemment approuvés. Il y a comme toute une vision de la gouvernance des universités ? la même chose pour les cégeps, puisque, nous, on aura deux lois à travailler... qui sont assez fortement orientées dans ces projets de loi, et ce serait malaisé après de revenir pour dire: Bien, maintenant, on recommence l'exercice plus largement. C'est là que j'ai une certaine perplexité par rapport à votre démarche, mais pas un élément critique, là. C'est juste que, nous, au terme de l'exercice, il faudra voir quelles sont les positions qu'on prend. Et vous avez une position pragmatique, je le comprends, mais, s'il y avait une démarche d'envergure, vous y participeriez parce que vous trouvez aussi que c'est nécessaire?

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Pour la deuxième partie de la question, effectivement, on participerait si une démarche d'envergure avait lieu.

Maintenant, on a depuis longtemps demandé une meilleure reddition de comptes des universités, on parle depuis longtemps, à la fédération, d'imputabilité et de transparence et on juge qu'à ce niveau-là le projet de loi ne doit pas nécessairement attendre. Ça fait longtemps qu'on réclame plus d'imputabilité, plus de transparence de la part des universités. Cela dit, on a un fort problème avec la composition des conseils d'administration, et ce problème-là, selon nous, porte atteinte en partie à la collégialité des universités et en partie également à leur autonomie.

Maintenant, c'est un projet qui est, selon nous, quand même fort important. Ça fait, comme je dis, plusieurs années qu'on demande ce projet-là, donc je ne vois pas nécessairement la nécessité d'attendre une très large ou une très vaste consultation, surtout que ce qu'on demande, de notre côté, est beaucoup plus sévère. Une commission d'enquête sur l'ensemble de l'éducation pourrait prendre, quoi, de trois à cinq ans à réaliser. On juge que c'est effectivement un problème à régler maintenant, la notion d'imputabilité et de transparence.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Bien, je comprends bien que, si on peut enlever du projet de loi ce qui ne fait pas votre affaire et garder ce qui fait votre affaire, vous diriez: Bien, c'est toujours ça d'acquis. C'est ça?

M. Grégoire (Jean): En fait...

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): En fait, c'est surtout enlever ce qui ne fait pas notre affaire...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Malavoy: O.K.

M. Grégoire (Jean): ..qui est la partie que l'on pousse quand même...

Le Président (M. Marsan): On avait bien compris. Mme la députée de Taillon.

n (12 heures) n

Mme Malavoy: Bien, je voudrais poursuivre pour bien comprendre votre opinion. Vous dites, dans les premières pages de votre mémoire: «...l'État ne doit [...] pas s'immiscer dans la gestion quotidienne d'un établissement universitaire.» L'État doit plutôt «superviser les gestionnaires universitaires», plutôt superviser.

Puis, un peu plus loin, puis vous en avez parlé tout à l'heure, vous acceptez que la ministre établisse les indicateurs qualitatifs et quantitatifs, et, moi, honnêtement j'aimerais comprendre ça, parce que d'autres sont venus nous dire: Attention! Si la ministre a un rôle important dans la définition des indicateurs, c'est une forme d'introduction dans la gestion des universités. Tout va être, bien sûr, dans qu'est-ce qu'on appelle indicateur, qu'est-ce qu'on met derrière quantitatif ou qualitatif, mais ce seront quand même les indicateurs qui vont déterminer quel est le résultat attendu, comment est-ce qu'on atteint les objectifs qu'on s'est fixés dans nos orientations stratégiques.

Alors, je voudrais bien comprendre comment faire pour à la fois éviter que l'État s'immisce dans la gestion des universités puis en même temps donner à la ministre précisément, là, ce que vous dites dans votre mémoire ? là, je le cite au texte, là ? que la ministre établit les indicateurs?

M. Grégoire (Jean): D'une part...

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Pardon. Excusez-moi. D'une part, on demande que la ministre fixe ces indicateurs-là non pas avec le conseil d'administration, comme c'est le cas actuellement dans le projet de loi, mais bien avec la communauté universitaire pour les indicateurs spécifiques et avec les représentants nationaux des groupes d'étudiants, de professeurs, chargés de cours, etc., pour ce qui est des indicateurs généraux.

Maintenant, je ne suis pas un spécialiste, comme disait... En fait, non, on n'est pas des spécialistes, comme disait M. Savoie, des indicateurs. On n'est pas ici pour déterminer maintenant ces indicateurs-là.

Cela dit, j'espère, et j'espère fortement, que les indicateurs ne viendront pas s'immiscer dans la gestion quotidienne des universités. J'espère qu'un indicateur ne sera pas, en fait, de baser, par exemple, le nombre de jours qu'il doit y avoir dans une semaine universitaire, j'espère que ces indicateurs-là ne viendront pas fixer l'heure d'ouverture et de fermeture des universités et j'espère également que ces indicateurs-là ne viendront pas déterminer spécifiquement la gamme de cours qu'une université peut offrir. C'est à l'université, c'est à la communauté universitaire d'offrir ces cours-là. J'espère qu'il va avoir assez de sens... En fait, je crois que justement une commission indépendante pourrait aider à ce processus-là, d'une part, de collaboration entre le ministère et la communauté universitaire, mais également entre les différentes universités pour établir des indicateurs qui sont, bon, qualitatifs et quantitatifs, mais qui sont réalistes.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: On n'est, vous et moi, pas spécialistes de ces questions-là, mais on peut quand même supposer que des indicateurs vont se préoccuper de certains éléments de performance, pour employer ce mot-là, et qu'on va, par exemple, vouloir introduire dans les indicateurs des éléments touchant aux clientèles que l'on dessert, à la diplomation. Rien que ça, là, rien que ça, ça touche à des orientations stratégiques. Je ne dis pas que les universités ne peuvent pas être préoccupées de leur taux de diplomation, mais je peux quand même imaginer que, selon le type d'université, selon le type de clientèle, selon les défis auxquels les étudiants ont à faire face dans telle ou telle université, le taux de diplomation peut être variable. Puis, moi, j'aimerais que les gens qui vont déterminer ces indicateurs puissent le faire en introduisant toute la modulation nécessaire pour tenir compte des différences entre les universités. Les campus ne sont pas habités par les mêmes types de clientèle, et donc c'est pour ça que je vous questionne.

Alors, dans le projet de loi, il y a vraiment un article qui parle de la détermination par la ministre d'indicateurs, et cet élément-là que d'autres ont questionné, vous, vous l'endossez. C'est pour ça que, moi, je vous pose des questions, pour être sûre de bien comprendre en quoi cela va dans le sens de votre volonté de maintenir l'autonomie des universités, tout en assurant, pensez-vous, je crois, là, une meilleure reddition de comptes.

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Savoie, je crois que vous voulez prendre la parole.

M. Savoie (Louis-Philippe): Oui. Pour ce qui est des indicateurs, on est tout à fait d'accord: diverses universités vont présenter diverses populations étudiantes qui vont avoir divers profils, et ça, c'est tout à fait normal.

Un exemple très concret: par exemple, l'Université de Montréal ne va pas nécessairement fonctionner de la même façon que l'Université du Québec à Chicoutimi. L'Université de Montréal est beaucoup plus grosse, est située sur l'île de Montréal et est établie depuis très longtemps, alors que l'UQAC est relativement jeune, a une population très fortement composée d'étudiants de première génération.

Donc, c'est des questions qu'il faut toujours garder en tête, et on pense que justement, en s'assurant d'une bonne adhésion de la communauté universitaire dans la construction des indicateurs, c'est le genre de choses qui doivent ressortir. C'est quelque chose... Les indicateurs doivent être extrêmement bien conçus, parce que, si les indicateurs sont moins bien construits, essentiellement, personne ne va y adhérer, et ça va tout simplement faire un rapport qui va dire: Ah, tiens! Voici une série d'indicateurs qui ne me servent à rien parce que je n'ai pas les informations nécessaires pour pouvoir les traiter. De simplement savoir le taux de diplomation de l'Université de Montréal et de l'Université du Québec à Chicoutimi, de regarder les deux, en soi, ne dit pas grand-chose, à part que c'est deux chiffres différents, selon toute vraisemblance.

Le Président (M. Marsan): Oui, M. Viau.

M. Viau (Laurent): Pour compléter là-dessus, je pense qu'il faut être bien clair. On parle, depuis le début de cette commission-là, d'indicateurs de qualité, puis ça me semble déconnecté de la réalité. Nous, ce qu'on vise avec ça, c'est principalement un processus d'amélioration continue. C'est à ça que ça doit servir.

Vous parliez tout à l'heure de cibles de diplomation. Si, par exemple ? on prenait l'exemple de l'Université de Montréal ? à l'Université de Montréal, le taux de diplomation au premier cycle universitaire est de, par exemple, 60 %, ce qu'on peut espérer atteindre peut-être dans les cinq prochaines années, c'est de faire passer ce taux de diplomation là à 65 %, à 70 %. C'est justement l'idée de se donner des barèmes pour être en mesure, sur certains aspects stratégiques, de pouvoir s'améliorer constamment, puis c'est là-dessus que, nous autres, on se base lorsqu'on parle d'indicateurs de qualité.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Tout ça ne tient que si les instances représentatives qui doivent être consultées le sont vraiment. C'est un tout, là, ce que vous dites, c'est-à-dire qu'on ne peut pas juste retenir ce morceau-là puis ne pas voir que, dans votre mémoire, vous voulez donner de l'importance à un certain nombre de groupes mais aussi d'instances qui doivent être véritablement associées à la détermination, entre autres, des indicateurs. Je comprends bien que c'est un tout. On ne peut pas enlever un morceau puis garder juste le haut de la pyramide.

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Effectivement, on ne peut pas garder seulement certains éléments isolés, parce qu'à ce moment-là la réflexion ne tient plus la route. Mais, comme j'expliquais tout à l'heure, l'université est un milieu excessivement complexe avec beaucoup d'instances, beaucoup de paliers, beaucoup de niveaux, également beaucoup de gens qui vivent à l'intérieur même des universités et qui se regroupent dans différentes instances, bon, puis qui participent à la vie de différentes communautés, que ce soient professeurs, chargés de cours, etc. On ne peut pas, et c'est un peu l'idée qu'il y a derrière aussi une consultation générale à plus longue échéance, traiter l'université seulement par parties, ou par critères, ou par simples petits éléments. Il faut, quand on traite de l'université ou quand on traite d'une partie de l'université, le traiter en bloc et avoir une vision d'ensemble sur ce qui se passe dans un certain domaine.

C'est ce qu'on a fait en se penchant sur la gouvernance. On a vu le projet de loi dans son ensemble, en modifiant les critères qui, comme vous l'entendiez tantôt, faisaient ou ne faisaient pas notre affaire. Nous, on le voit plutôt comme des modifications qui sont essentielles ou qui sont un peu moins essentielles au bon fonctionnement de ce projet de loi là sur la gouvernance, et c'est ce qu'on a présenté en bloc, effectivement. C'est une seule proposition.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Bien, je vais prendre un autre élément, et puis ensuite je sais que mon collègue de Saint-Hyacinthe voudra prendre la parole.

Lorsque vous parlez du profil de compétence du premier dirigeant, vous introduisez l'idée qu'il faudrait que ce profil soit approuvé par l'instance représentative de la communauté. Puis, juste pour que les gens qui connaissent moins le projet de loi que vous et moi, là, comprennent bien, actuellement, dans le projet de loi, ce profil de compétence est déterminé par un comité de ressources humaines composé essentiellement de membres externes. Ce profil de compétence est entériné par un conseil d'administration composé très majoritairement de membres externes. C'est ça actuellement dans le projet de loi. Bon. Vous, vous dites: Le choix du premier dirigeant, ça concerne la communauté universitaire, et nous voulons nous assurer que non seulement la communauté soit consultée, mais... Je pense avoir bien compris quand vous dites qu'il faudrait que ce profil soit même approuvé par la communauté universitaire. Donc, vous voulez rééquilibrer le pouvoir de la communauté universitaire dans un certain nombre de domaines, mais celui-là est quand même important, parce que choisir son premier dirigeant, ça peut avoir des impacts pour l'avenir des choses.

Le Président (M. Marsan): M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Bien, je vais revenir encore une fois à la notion très complexe d'université et la quantité d'instances, la quantité de gens qui y vivent. On croit qu'un premier dirigeant d'une université n'est pas un simple administrateur ou une simple personne qui ne fait qu'exécuter le rôle d'un conseil d'administration. On croit que ça va au-delà de ça. C'est un leader, c'est quelqu'un qui porte une mission. C'est quelqu'un qui doit également faire... en fait, être approuvé ou, en fait, être supporté par la communauté universitaire qu'il va diriger pour de nombreuses années.

C'est comparable également à un élu face à une population, un premier dirigeant. C'est pourquoi on est essentiellement contre la notion de... en fait la notion de confidentialité qu'il y a dans la nomination, et également qu'on serait davantage... on se pencherait davantage sur la capacité ou la possibilité pour la communauté universitaire de déterminer et d'adopter le profil de compétence du dirigeant, étant donné que ce sont eux, selon nous, qui sont à même de savoir le type de dirigeant qu'ils souhaitent avoir et les compétences que ce dirigeant-là doit avoir pour le bien-fondé de l'institution.

n (12 h 10) n

Le Président (M. Marsan): Alors, M. le député de Saint-Hyacinthe, la parole est à vous.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Alors, merci, M. le Président. Alors, je tiens à vous souhaiter la bienvenue. Je suis très heureux de voir MM. Grégoire, Savoie et Viau présenter un mémoire. Je suis toujours surpris puis étonné de la qualité des mémoires qui ont été présentés par les jeunes représentants des étudiants universitaires, et c'est bon signe pour l'avenir. En tout cas, je pense qu'on est entre bonnes mains.

Et maintenant je voulais parler... Dans votre présentation, à la page 1, on parle d'imputabilité. On dit: «[L'imputabilité] doit toutefois se jouer dans un cadre d'autonomie universitaire. L'autonomie est essentielle pour préserver la mission de l'université en tant que lieu de développement du savoir et de transmission de la connaissance.»

Alors, votre notion d'imputabilité versus l'autonomie universitaire, j'aimerais en entendre un peu plus là-dessus, savoir si, un conseil d'administration qui serait formé en majorité de membres externes, on peut parler d'imputabilité au même titre que vous en parlez dans votre mémoire.

Le Président (M. Marsan): M. Savoie.

M. Savoie (Louis-Philippe): Merci. Donc, d'abord, pour ce qui est du conseil d'administration, au risque de nous répéter, nous sommes opposés à la modification qui rendrait majoritaires les membres externes sur les conseils d'administration. Ça, pour nous, c'est un absolu.

Par contre, en ce qui a trait au lien entre autonomie et imputabilité, pour nous, l'université, étant donné qu'elle dépense des fonds publics et qu'elle est redevable envers un certain nombre d'acteurs, la ministre, la population et sa communauté, elle doit nécessairement être imputable. Cette imputabilité-là permet l'autonomie. Elle permet finalement à l'université de témoigner de son excellence, de dire au grand jour: Regardez, nous avons accompli toutes ces actions; nous en sommes fiers, nous ne nous en cachons pas; au contraire, nous croyons que nous avons bien accompli notre mission en tant qu'établissement. Et, lorsque cette démonstration est faite, c'est la meilleure façon de préserver, de garantir et d'augmenter l'autonomie des universités. Si on sait que nos universités sont bonnes, si on sait que nos universités accomplissent bien leurs missions, dans ce cas-là, tant la ministre, la population que la communauté universitaire souhaitera définitivement et pourra adhérer à un projet qui soit plus autonomiste, si je peux m'exprimer ainsi.

Le Président (M. Marsan): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Si je comprends bien l'intervention ? je veux juste m'assurer ? c'est, si je comprends votre... dans votre mémoire, vous mentionnez une majorité de membres internes pour le conseil d'administration. Maintenant, admettons que la nature du projet de loi actuellement, c'est une majorité de membres externes, ça touche directement l'imputabilité, selon vos dires. Alors, je veux juste comprendre qu'il faut absolument... Quelle serait la proportion, selon vous, de membres internes versus membres externes pour que l'imputabilité soit à son maximum ou soit plus compréhensible ou plus acceptable, mettons, pour vous?

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Grégoire.

M. Grégoire (Jean): Oui. En fait, il faut bien comprendre: tout le travail qu'on a fait, du début jusqu'à la fin, est basé sur la notion que le conseil d'administration ne doit pas, en aucun cas, être composé d'une majorité de membres externes. Selon nous, c'est la partie qui est irrecevable, qui est inconcevable de ce projet de loi. Ça ne fait absolument aucun sens, ça ne tient pas la route et ça ne correspond pas du tout à la réalité des universités, à la réalité académique, à la réalité également de, bon, comme on disait, petite société. Donc, ça ne correspond pas du tout à la réalité des universités, et cette partie-là doit être rejetée d'emblée. Donc, on traite tout le projet de loi... ou, en fait, toute l'approche qu'on a est basée sur le fait que le conseil d'administration devrait être majoritairement composé de membres internes.

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Grégoire, M. Savoie, M. Viau, je voudrais vous remercier de nous avoir exposé la position de la Fédération étudiante universitaire du Québec.

J'inviterais maintenant le Syndicat des professeures et professeurs de l'Université de Sherbrooke à venir se présenter devant la commission. Je vais suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 15)

 

(Reprise à 12 h 19)

Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Et nous somme heureux d'accueillir le Syndicat des professeures et professeurs de l'Université de Sherbrooke.

Mme Carole Beaulieu, vous êtes la présidente de ce syndicat. Je vais vous demander de nous présenter les gens qui vous accompagnent et de débuter votre présentation, qui ne devrait pas dépasser plus que 15 minutes. Mme Beaulieu, vous avez la parole.

Syndicat des professeures et professeurs
de l'Université de Sherbrooke (SPPUS)

Mme Beaulieu (Carole): Si vous le permettez, je vais passer la parole à Robert Tétrault, parce que c'est lui qui a été le responsable de l'écriture du mémoire, mais je me permettrai par la suite de faire des commentaires aussi.

Le Président (M. Marsan): Oui. Vous pouvez nous présenter les gens qui vous accompagnent... ou M. Tétrault, vous allez nous présenter les gens qui vous accompagnent?

Mme Beaulieu (Carole): Oui. Oui, c'est ça.

Le Président (M. Marsan): Alors, la parole est à vous, M. Robert Tétrault.

n(12 h 20)n

M. Tétrault (Robert): Merci, M. le Président. Donc, M. le Président, Mme la ministre, Mme la porte-parole de l'opposition officielle, Mmes et MM. les députés, nous remercions la Commission de la culture et de l'éducation de nous offrir l'occasion de présenter notre mémoire sur le projet de loi n° 38.

Donc, mon nom est Robert Tétrault. Je suis vice-président du Syndicat des professeures et professeurs de l'Université de Sherbrooke. Je vous présente donc les personnes qui m'accompagnent: à ma gauche, à l'extrémité, Mme Cheryl Gosselin, présidente de l'Association of Professors of Bishop's University; M. François Boone, président de l'association des ingénieurs-professeurs de la Faculté des sciences appliquées; à ma droite, Mme Carole Beaulieu, présidente du Syndicat des professeures et professeurs de l'Université de Sherbrooke; par la suite, le Pr Bernard Courteau, professeur retraité, président de l'Association des professeures et professeurs retraités de l'Université de Sherbrooke; et enfin M. Pierre Lavigne, secrétaire de l'Association des professeures et professeurs de la Faculté de médecine de l'Université de Sherbrooke.

Le Président (M. Marsan): Merci beaucoup. Vous pouvez commencer.

M. Tétrault (Robert): Alors, l'ensemble des associations et syndicats de professeures et professeurs de l'Université de Sherbrooke et de l'Université de Bishop's se trouvent ici représentés. Ces associations comptent ensemble plus de 1 200 membres. Ces cinq groupements sont tous unis dans une position commune face au projet de loi n° 38, et, à ma connaissance, c'est véritablement une première dans l'histoire de nos universités respectives qu'il y a un tel front commun des associations de professeurs. Maintenant, si le péril qui nous unit n'était pas si grand, on pourrait s'en réjouir davantage.

Une voix: ...

M. Tétreault (Robert): Péril, péril.

Les personnes qui se présentent devant vous ce matin sont des dirigeants d'association et de syndicat, mais ces personnes sont d'abord et avant tout des professeurs: M. Boone, à ma gauche, est professeur de génie électrique et de génie électronique, Mme Gosselin est professeure de sociologie, Mme Beaulieu est professeure de biologie, M. Courteau a eu une longue carrière de professeur de mathématiques, M. Lavigne est professeur au Département de pharmacologie, et je suis professeur à la Faculté de droit.

En tant que professeurs, nous avons l'université à coeur. Notre propre université, cela va de soi, mais également l'université en tant qu'institution. Et, parce que nous avons l'université à coeur, nous demandons le retrait du projet de loi n° 38. Nous demandons plutôt la tenue d'états généraux sur l'université.

Vous me permettrez d'ajouter qu'en suivant les travaux de la commission, particulièrement ces derniers jours, nous avons pu constater qu'au-delà de nos divergences d'opinions Mme la ministre, Mme la porte-parole de l'opposition officielle et les membres de cette commission ont également l'université à coeur. On l'a senti très nettement.

Vous avez pris connaissance de notre mémoire, qui a pour titre Préserver des universités libres, démocratiques et responsables. Je ne reprendrai pas tous les éléments du mémoire, là. Je crois opportun d'aborder dans cet exposé quelques questions qui ont retenu l'attention des membres de la commission au cours des derniers jours, et je traiterai plus spécifiquement de la présence et du rôle des membres externes au sein des conseils d'administration, premier point; de la collégialité, de ce que cela signifie et comment ça se vit à l'université; de la gouvernance proposée par le projet de loi, comment nous la percevons; et enfin traiter de l'idée même d'une loi sur la gouvernance. Je m'en tiendrai à ces quatre points là, et on pourra aborder d'autre chose éventuellement en réponse à des questions.

Quant à la présence et au rôle des membres externes au sein des conseils d'administration, d'emblée, nous considérons que l'université est une institution au service de la société. Elle est principalement financée par des fonds publics, et les représentants de la société ont certainement leur place au sein des conseils d'administration. C'est une question de proportion, essentiellement.

Les membres externes sont souvent, et très souvent, des diplômés de nos institutions et ils sont très heureux et fiers de mettre à contribution leurs talents et leurs connaissances au bénéfice de leur université, une contribution dont l'université aurait tort de se priver. Malheureusement, en raison de la complexité des structures universitaires et de ses modes de fonctionnement, les membres externes sont parfois dépassés par les sujets, par les questions.

On évoque la possibilité de mettre sur pied des programmes de formation pour administrateurs externes. Bon, en soi, l'idée n'est certainement pas mauvaise, là. On ne peut pas être contre le fait qu'on cherche à faire en sorte que les gens au sein des conseils d'administration soient le mieux équipés ou outillés possible pour accomplir leurs obligations. Mais j'imagine ce que serait la tâche d'un formateur, par exemple, qui est appelé à donner un cours accéléré sur les rouages de l'université, là, parce que les gens sont nommés, puis ils commencent déjà à fonctionner comme membres des conseils d'administration, puis il faut qu'ils apprennent tout en même temps, là.

Or, imaginez qu'on ait à présenter ce qu'est un professeur à l'université. Bien, à l'université, il y a toutes sortes de variétés de professeur: il y a des professeurs suppléants, des professeurs titulaires, des professeurs chargés d'enseignement, des professeurs invités, des professeurs associés, des professeurs sous octroi de recherche, des professeurs à plein temps géographique ? on a ça chez nous ? et enfin, professeurs émérites. Alors, qui fait quoi? Qui est quoi? Quelles sont les caractéristiques de chacune? Puis il y a des décisions qui sont reliées au fait qu'on ait tel ou tel statut.

Vous me direz: Les membres externes n'ont pas à connaître tous ces détails. Bon, il y a un risque d'avoir beaucoup de détails du genre dont, les membres externes, on voudra les dispenser, là, si c'est ça. On devra peut-être s'en tenir juste aux questions financières, qui sont peut-être plus simples, finalement, là, plutôt que de parler de structure, puis ainsi de suite.

Alors, d'ici à ce qu'il ait reçu tous les éléments de formation qui le rendraient capable de porter un jugement critique, le membre externe appelé à trancher des questions difficiles au conseil d'administration se fiera vraisemblablement au bon jugement du premier dirigeant, qu'il soit de la variété recteur, de la variété chancelier, de la variété président ou autres. Or, pour une gestion universitaire rigoureuse de la part des conseils d'administration, devrait-on dire, pour une saine gestion, nous avons la ferme conviction qu'il est nécessaire d'assurer une présence importante de membres de la communauté universitaire qui soit en mesure de faire contrepoids à l'ascendant qu'exerce inévitablement la rectrice ou le recteur auprès des membres externes.

Ça, c'était le point sur la question des membres externes. On pourra y revenir sous forme de question.

La collégialité, ce que c'est et comment ça se vit à l'université. Vous en avez entendu parler très largement, de la collégialité. Je crois utile d'y revenir. La collégialité, de façon très simplifiée, est une forme d'exercice de pouvoir par des assemblées formées de pairs, formées d'égaux. À l'université, de nombreuses questions sont soumises à des assemblées de professeurs qui analysent la situation et décident par vote majoritaire. Parfois, les assemblées n'ont qu'un rôle consultatif, mais souvent c'est décisionnel. Très souvent, c'est décisionnel.

De savants collègues, parmi lesquels d'éminents universitaires qui se sont présentés devant vous, pourraient retracer les origines historiques, les fondements de la gestion collégiale au sein des universités. Je me contenterai plus modestement de vous présenter un exemple parmi d'autres de gestion collégiale quand ça s'applique à l'embauche et aux promotions.

Partant du postulat que le corps professoral constitue l'élément central qui fonde la valeur et la réputation d'une université, toute décision concernant l'embauche, la permanence et les promotions revêt une grande importance. Les postes de professeur sont convoités. La permanence ne s'acquiert normalement qu'au terme d'une probation de cinq ans. Une fois acquise, par contre, le professeur bénéficie d'un régime qui lui permet de se consacrer à ses tâches de recherche et d'enseignement en bénéficiant d'une pleine liberté académique.

Les décisions d'assemblée de professeurs en matière d'embauche et de promotion ont des effets à très long terme. Dans ces matières, la collégialité et la complaisance, ce n'est pas synonyme. Le processus est ardu, et ça donne parfois lieu à des situations très conflictuelles, et j'emploie un euphémisme. Le modèle que je viens de décrire se reproduit à bien des niveaux à l'université et s'applique à toutes sortes de situations.

J'entendais hier, je pense que c'est quelqu'un du Conseil du patronat, affirmer que les gens de l'interne ne peuvent pas juger les gens de l'interne, ce n'est pas possible, là. Bien, je vous dis que juger l'interne par l'interne, à tous les jours, à l'université, c'est ce qu'on fait. C'est ce qu'on fait, et de façon parfois sévère.

En milieu universitaire, la critique fait partie de la culture. Collégialité et rigueur ne sont pas, donc, opposées. Chez les professeurs, chez les permanents comme les plus jeunes, le jugement des pairs, l'estime des pairs est souvent la chose la plus crainte et la plus recherchée, l'estime des pairs, et j'ajouterais peut-être la plus fragile, parce que, si on l'a déjà eue, il n'y a rien qui garantit qu'on l'aura toujours.

L'université est donc une organisation complexe, et l'exercice en collégialité des pouvoirs décisionnels n'est pas très répandu au sein d'autres institutions, ce qui peut expliquer l'incompréhension dans certains milieux. Les gens ne savent pas comment on peut fonctionner, mais on fonctionne comme ça.

Ce qui m'amène à évoquer très brièvement, M. le Président, deux autres points à propos desquels, si nécessaire, on abrégera et on pourra élaborer en réponse à des questions. Il y a le fameux modèle de la saine gouvernance, proposé ou préconisé par le projet de loi n° 38. Bon, là-dessus, on va faire preuve de jugement critique.

Le modèle de saine gouvernance préconisé par le projet de loi n° 38. À l'université, l'idée qu'il existe une vérité révélée n'est pas très bien reçue; on est en milieu scientifique, là. Le modèle de saine gouvernance préconisé par le projet de loi n° 38 est présenté comme universellement reconnu et scientifiquement éprouvé. On aura peut-être été tentés de dire... de mentionner qu'il est immuable et intemporel, là. Si on était allés jusque-là, on serait rendus à parler de principe de droit naturel auquel Aristote, Cicéron ou Thomas d'Aquin faisait référence, là.

n(12 h 30)n

Le Président (M. Marsan): Il vous reste trois minutes, Monsieur...

M. Tétrault (Robert): Je complète.

Le Président (M. Marsan): ...M. Tétrault.

M. Tétrault (Robert): En tout respect, ce modèle, comme d'autres, comporte ses limites et ne saurait certainement pas être appliqué sans nuance au domaine universitaire. On a fait référence à des études, là, qui mettent en doute ou portent un jugement critique là-dessus.

Dernier point, M. le Président, le recours à la loi pour imposer ce modèle de gouvernance. Nos universités ont été créées par des lois. Ce sont des lois qui consacrent leur existence, qui encadrent leurs pouvoirs et leurs modes de fonctionnement. Mais il y a aussi d'autres formes de lois, et la loi, dans sa formulation la plus simple, c'est l'expression de la volonté d'un souverain qui entend faire obéir... ou se faire obéir en recourant, au besoin, à la force publique. Nous avons l'impression que la loi n° 38 se rapproche parfois davantage du second modèle que du premier.

Quelle impérieuse nécessité pousse le gouvernement à adopter cette loi? Faut-il recourir à une loi pour contraindre les universités à se conformer au modèle? Au cours des travaux de la commission, on a constaté que vous étiez, vous-mêmes, perplexes et que vous vous interrogiez par rapport à beaucoup de questions. Ça nous amène à conclure ou à croire que toutes ces questions-là doivent être explorées davantage avant de se traduire dans un projet de loi, d'où la demande de retirer le projet de loi et de convoquer des états généraux de l'université. Et je termine là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, M. Tétrault. Nous allons immédiatement débuter nos échanges, et je vais reconnaître la ministre de l'Éducation, du Sport et des Loisirs. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs, merci d'être venus en si grand nombre devant nous. J'ai bien parcouru votre mémoire, mais je peux vous dire que vous avez une extraordinaire ambassadrice en la députée de Taillon puisqu'elle connaît bien votre université, et je peux dire que depuis que l'on se connaît qu'elle me parle de l'Université de Sherbrooke, puis ça, ça fait beaucoup d'années. Et je peux vous dire qu'elle en parle toujours avec tellement de fierté et d'honneur. Je tiens à le dire, il faut rendre à César ce qui appartient à César. Et j'apprécie les gens qui ont cette loyauté envers leurs origines, et je crois que la députée de Taillon démontre cela, puis particulièrement depuis maintenant deux ans que nous sommes vis-à-vis. Alors, vous comprendrez qu'elle utilise souvent l'Université de Sherbrooke comme phare, p-h-a-r-e, et comme exemple aussi. Donc, je tenais à le dire parce que vous avez pris la peine de présenter ce mémoire-là.

Comme c'est la dernière journée, je me permettrai aussi de souligner quelques points sur pourquoi il y a une loi sur la gouvernance. Après trois semaines... trois semaines? Ça fait trois semaines qu'on est en commission? D'abord, vous êtes des universitaires, je crois que vous aurez compris que la gouvernance, c'est totalement différent de la gestion, hein? Un conseil d'administration, si on lui demande des règles de gouvernance, ce n'est pas pour s'immiscer dans la gestion quotidienne de l'université. Donc, je veux vous rassurer tout de suite: Il n'est absolument pas question que le conseil d'administration s'immisce dans le processus d'embauche des professeurs. Puis ça, je pense, là, que, si on faisait le tour des conseils d'administration d'université, là, même chez les membres externes, là, il n'y a personne ? puis j'en connais beaucoup, beaucoup, y compris chez vous, là ? il n'y a personne qui pense, là, qu'il doit s'immiscer dans le processus de l'embauche des profs et même de l'évaluation des profs.

Par contre ? et c'est là que je voudrais que vous réagissiez ? la CREPUQ et plusieurs associations de professeurs disent: On ne veut pas de loi, mais je... La CREPUQ, en tout cas, elle, elle est claire, elle dit: Nous, on veut des ententes de partenariat. J'imagine que vous êtes d'accord qu'il faut qu'il y ait quelque chose, quelque part, parce qu'à la fin de la journée le gouvernement est responsable. Donc, il me semble que, si on procédait par entente, ce serait... Une entente ne crée pas des obligations de la part des membres du conseil, de la part des administrateurs, ça ne crée pas... Une entente, c'est une négociation entre deux parties, au bon vouloir des deux parties. Puis, moi, quand j'entends «négociation», là, dans ma courte carrière, quand on négocie, veux veux pas, il y a des compromis quelque part, sinon il n'y a pas de négociation; il y a des échanges quelque part, sinon il n'y a pas de négociation, et il n'y a pas non plus, surtout, ce sens de l'obligation. Et là imaginez-vous que la ministre signe des ententes de partenariat avec 18 universités, puis là on respecte... Puis je suis d'accord à respecter les diversités, mais, en termes strictement de gouvernance, comment la population va être rassurée si... Et en plus on dit que ça peut être réévalué périodiquement, on peut changer ça, là, comme on veut. Une loi, ça détermine une continuité. Et, quand on gère 4 ou 5 milliards de fonds publics, il me semble qu'on a besoin de cette stabilité et de cette continuité.

Moi, je voudrais que vous réagissiez à cette question. Si vous étiez ministre de l'Éducation, comment être convaincu que chaque administrateur ? interne ou externe, je n'ai pas de problème avec ça, là ? ait l'obligation de respecter non seulement certaines règles, mais ait aussi l'obligation de prendre des décisions dans le meilleur intérêt de l'établissement?

Cela dit, je vous demande aussi l'effort de vous mettre dans la place du citoyen, qui, lui, dit à la ministre: Moi, j'ai besoin de comprendre, pas uniquement ce qui se passe à l'Université de Sherbrooke, pas uniquement ce qui se passe à l'Université de Montréal, moi, j'ai besoin que, vous, la ministre, là, responsable de toutes les universités, vous me disiez comment vous entendez faire respecter des obligations aux administrateurs de toutes les universités. Je vous laisse la parole.

Le Président (M. Marsan): Mme Beaulieu.

n(12 h 40)n

Mme Beaulieu (Carole): Donc, je vais dire, de prime abord, qu'on n'est absolument pas contre la reddition de comptes. Je crois que tout organisme public, parapublic, universitaire d'enseignement doit avoir une reddition de comptes. Pour nous, où le projet blesse beaucoup, c'est, lorsque vous avez un conseil d'administration, le conseil d'administration reçoit son information de la direction de l'université. Plus vous allez avoir des gens de l'externe sur ce comité... ce conseil d'administration, moins il va y avoir de gens de l'interne et plus les cadres vont être proportionnellement nombreux pour représenter l'interne. Donc, ce qui arrive, c'est que l'information que les gens du conseil d'administration vont recevoir va venir pratiquement que de la direction de l'université. Donc, le but du projet de loi, qui était de diversifier les expertises en ajoutant des gens de l'extérieur, oui, vous allez avoir plus d'expertise externe, mais vous allez avoir moins d'information venant de l'interne. Et, à l'université, étant donné que vous avez un mode de gestion tout à fait collégial, si vous n'avez votre information que de la haute direction de l'université, vous vous privez effectivement de bien des voix.

Donc, si vous composez un conseil d'administration où il y a beaucoup de gens de l'externe, ça peut paraître une bonne façon de... oui, de rendre des comptes, mais, d'un autre côté, l'effet pervers de ça, c'est que l'information devient quasiment monolithique, vient de la direction de l'université. Donc, c'est pour ça que je crois que, dans le monde universitaire, on a une si forte opposition contre cette composition du conseil d'administration: parce qu'on craint que le pouvoir va être concentré dans les mains de la haute direction de l'université. Donc, je dirais que, si vous voulez créer plus de transparence, ce n'est pas nécessairement en mettant plus de gens de l'extérieur que vous allez avoir plus de transparence. Avec un mode de gestion collégial comme on a à l'université, ce qui se passe, c'est que c'est très rare qu'un projet arrive d'en haut pour aller vers le bas, la plupart des projets partent de la base pour monter vers le haut.

Donc, lorsqu'on voit, par exemple dans le projet de loi, que c'est la responsabilité du conseil d'administration de déterminer les orientations stratégiques de l'institution, ça peut paraître, pour la population, quelque chose de rassurant, mais dans les faits ça ne peut pas marcher comme ça. Parce que qu'est-ce que va faire l'institution? L'institution va aller à la base, va dire: Qu'est-ce que vous faites, à la base? Ça va passer donc du département, à la faculté, aux instances multifacultaires, pour aller vers la direction. Mais ça ne sera... C'est impossible que le conseil d'administration décide des orientations stratégiques d'une institution. On aura beau le mettre dans une loi, ce n'est pas possible. Donc...

Le Président (M. Marsan): Alors, madame...

Une voix: ...

Mme Beaulieu (Carole): Oui?

Le Président (M. Marsan): Allez-y, Mme Beaulieu.

Mme Beaulieu (Carole): Donc, ce que je voulais dire, finalement, c'est pour ça que, oui, on est bien prêts à rendre des comptes, mais il faut savoir que ce n'est pas en mettant plus de gens de l'externe que vous allez avoir une meilleure reddition de comptes, je pense qu'au contraire vous allez avoir... Vous donnez beaucoup, beaucoup de pouvoirs aux directions d'universités et vous enlevez des pouvoirs à la base, qui fait la force de l'université.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Mme Courchesne: Bien, j'apprécie tellement que vous le disiez aussi clairement. La chose suivante, c'est que... Et je veux vous dire tout de suite, là, que je partage entièrement votre opinion sur le fait qu'effectivement, dans les universités, toutes les universités, trop d'informations proviennent uniquement de quelques dirigeants, un nombre extrêmement minime de dirigeants. Parce que peut-être même que, si, souvent, on avait, dans ces réunions-là, la parole du doyen, peut-être qu'on aurait aussi un son de cloche plus nuancé. En tout cas, je partage ça, je suis d'accord avec ça, j'ai eu l'occasion de le dire.

Mais, en toute franchise, quand nous avons rédigé cette loi, pour éviter ça, c'était l'article 4.0.21 qui dit que, très clairement, puis, dans mon esprit, là, c'était... j'y tenais beaucoup, beaucoup, beaucoup, c'est-à-dire qu'avant toute décision, avant, au préalable, avant que le conseil d'administration prenne quelque décision que ce soit en matière d'orientations stratégiques, en matière d'immobilisations, en matière de projets qui peuvent changer la mission de l'université, il fallait, avant, que le conseil d'administration soumette ce projet-là à la communauté universitaire, non seulement ça, pas la veille du conseil d'administration, mais dans un délai suffisamment raisonnable, et en plus avait l'obligation de transmettre tous les documents pertinents pour cette consultation-là à la communauté universitaire. C'est du jamais-vu, là, du jamais-vu.

Attendez, je termine. Là, vous allez me dire: Ce n'est peut-être pas suffisant. Moi, je veux vous dire aussi que je connais beaucoup le fonctionnement avec les communautés universitaires des autres universités, moins de Sherbrooke. Chez vous, je connais moins, mais la députée de Taillon nous parle beaucoup de la collégialité, donc elle doit sûrement exister, mais en même temps il y a des profs d'université qui sont venus nous dire: Attention, là! Ça ne marche pas si bien que ça, la collégialité, là. C'est bien beau, là, mais, en fond, les dirigeants, là, ils nous disent bien ce qu'ils veulent nous dire quand ils veulent nous le dire puis ils nous mettent devant des faits accomplis. Puis vous me faites signe de la tête que oui, ça fait que j'imagine que c'est la même chose chez vous. Alors, c'est pour ça que l'article 4.0.21 était là.

Il y a des profs qui sont venus nous dire: Nous, on vivrait avec ça si on rajoutait «de concert avec la communauté universitaire» pour chacun des éléments que je viens de vous dire. Bon. Par contre, il ne faut pas être naïfs, là, je ne pense pas qu'on... on peut aller dans la collégialité, mais pas nécessairement dans la cogestion, toujours parce que les administrateurs ont des obligations. Donc, ce que vous me dites, c'est que ce qui vous heurte, c'est cet aspect-là. Comment réagissez-vous, vous, à l'article 4.0.21?

Le Président (M. Marsan): Mme Beaulieu.

Mme Beaulieu (Carole): Bon. On croit que, dans la plupart des cas, dans la plupart des décisions à l'université, la consultation n'est pas nécessaire parce que la consultation se fait au départ. Lorsque le projet arrive en haut, il a déjà été approuvé. Si vous partez d'un projet qui part d'un département, la collégialité, c'est ça, ça part d'un département. Ça va monter à la faculté, la faculté va donner son opinion. Si ça ne fait pas l'affaire, ça retourne au département. Lorsque ça monte à la faculté, par la suite, ça va aller au conseil des études, qui est un ensemble de regroupements de facultés, si vous voulez, et ainsi de suite. Donc, les seuls projets pour lesquels il est essentiel d'avoir une consultation, ce n'est pas les grandes orientations stratégiques parce que tout le monde les établit ensemble et ça monte vers le haut. Les projets où c'est nécessaire d'avoir une consultation, c'est les projets qui sont créés par la direction de l'université, ce n'est pas les projets qui sont créés à la base. Et ça, il faut avoir des mécanismes justement internes pour obliger les... mais c'est des... je crois que c'est interne, c'est des mécanismes internes qui fait que les dirigeants doivent avoir la confiance de sa base et avoir une certaine transparence.

Mme Courchesne: Moi, madame...

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Courchesne: ...ce que j'ai entendu ici, et mon expérience depuis pas juste deux ans et demi, hein, j'ai été universitaire, moi aussi, j'ai encore beaucoup, beaucoup... je connais encore beaucoup de professeurs dans plusieurs universités, je les côtoie, des amis, puis, moi, ce que j'entends, là, c'est, quand ça vient d'en haut, là, c'est là que le bât blesse, et c'est là que ça accroche, là, avec la communauté universitaire. Alors, quoi de mieux qu'une loi? Moi, je ne vois pas comment... Vous me dites: C'est des mécanismes internes. Moi, j'entends des professeurs qui n'ont pas réussi à faire changer ça, là, dans leur université. Ils ont beau en parler, ils ont beau, tu sais, dire publiquement: Aïe! Ça ne marche pas, là, bien, je ne sens pas... Puis là, quand ça ne marche pas, bien là, on demande à la ministre une enquête. Voyons donc! Mettez-vous à ma place.

Alors, la loi, elle... puis peut-être que l'article 4.0.21, il faut le changer, il faut l'améliorer, là, il faut le bonifier, mais ce qu'il dit, c'est justement: Avant que le conseil d'administration prenne une décision sur un projet qui émane de lui, il a l'obligation d'aller voir la communauté, puis pas juste aller juste vite, vite, vite, on vous présente le projet. Non, non, non, doivent fournir les documents qui justifient le projet et la prise de décision. Moi, je ne sais pas, là. Dites-moi comment, autrement que par une loi, une ministre de l'Éducation peut imposer ça au milieu universitaire pour aider la communauté universitaire puis, je vous dirais, majoritairement son corps professoral.

Le Président (M. Marsan): M. Tétrault.

M. Tétrault (Robert): Mme la ministre, en fait, le problème est réel, puis je comprends très bien votre dilemme puis votre difficulté. Et, quand on est en présence d'une situation comme celle-là, en fait, les administrations souvent ont tendance un peu à agir dans leur coin sans trop, trop chercher à rendre de comptes. Maintenant, avec les auditions, vous avez pu vous rendre compte de la variété des réalités, des disparités qui peuvent exister entre institutions. Et prévoir un modèle uniforme qui, à ce moment-là, répond aux besoins de chacun puis répond aux besoins, comme vous dites, de la population d'avoir une reddition de comptes qui soit crédible dans le contexte des universités, ce n'est pas facile et, en voulant bien faire avec des dispositions de la nature de celles que vous présentez... Et là-dessus on pourrait regarder, détail par détail, dans le projet de loi, il y a tel élément qui est intéressant, il y a tel... Mais notre attitude a été à date de dire: C'est peut-être intéressant, c'est peut-être valable pour cet aspect-là, mais il y a un problème fondamental qu'on a avec ce projet de loi, et on vous l'a exprimé, ce problème fondamental, qui est la question de l'externe-interne puis la perception à l'effet que les universités risquent de perdre leur autonomie dans le cadre du projet de loi.

Maintenant, dans la mesure où ces problèmes-là vont demeurer, que le projet de loi soit adopté ou pas, de toute façon, même s'il est adopté, il est possible que, dans son application, ce soit très difficile de parvenir aux objectifs que vous poursuivez. On est portés à croire qu'il y aura peut-être plus de possibilités de parvenir à un résultat satisfaisant pour le ministère, pour les universités, pour les professeurs si on prend le temps de tenir une discussion franche, ouverte et large sur la gouvernance universitaire. Mais il y a d'autres problèmes aussi que la gouvernance universitaire. Bon, est-ce que... évidemment, si vous dites: Est-ce qu'on reporte ça, à ce moment-là, aux calendes grecques? Peut-être. Est-ce qu'on fait preuve d'idéalisme? Peut-être. Mais est-ce qu'on peut néanmoins tenter la chose? C'est l'invitation qu'on vous fait.

n(12 h 50)n

Le Président (M. Marsan): M. le député de Charlesbourg, rapidement, j'ai aussi votre collègue le député de Lévis qui veut prendre la parole. Il reste à peu près quatre minutes.

M. Pigeon: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, madame, messieurs... mesdames, messieurs. Et je veux vous dire, d'entrée de jeu, que, moi aussi, j'aime bien l'Université de Sherbrooke puisqu'en 1987 j'ai fondé un centre de recherche avec l'Université de Sherbrooke, dans un domaine que plusieurs personnes connaissent beaucoup, le béton, et donc une très bonne université, particulièrement dans le domaine des structures en béton.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pigeon: D'autre part, je me permets de souligner que j'ai une certaine expérience du conseil d'administration de l'Université Laval, ayant siégé non seulement comme recteur, mais aussi comme représentant des profs pendant six ans. Et je voudrais, moi, vous amener sur le terrain rapidement de l'articulation des pouvoirs entre les différentes instances.

Puis je vous cite ça très brièvement: À l'Université Laval, il y a un conseil universitaire où siège, comme vous le savez, là, étudiants, professeurs, etc., il y a un conseil d'administration. Et, dans le cas du budget, par exemple, de la manière dont c'est fait, le conseil universitaire doit se prononcer sur le budget. Et, s'il n'est pas d'accord, là le conseil d'administration peut l'adopter mais à une majorité qualifiée des deux tiers. Alors, je me demandais si vous aviez réfléchi à ce genre de mécanisme là pour, je dirais, amener un peu plus de prise, ce que vous souhaitez, disons, de collégialité ou de prise de la communauté sur les grandes décisions.

Le Président (M. Marsan): Mme Beaulieu? M. Tétrault.

M. Tétrault (Robert): Mon collègue François Boone, ici, m'indique qu'il pourrait souhaiter répondre à cette question.

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Boone.

M. Boone (François): Moi, j'ai deux exemples à donner pour cette réponse-là qui sont deux décisions qui viennent, une du conseil d'administration, l'autre qui vient de plus haut encore, où on n'a consulté personne. Il s'agit du CEGI, le Centre d'excellence de génie de l'information. Une subvention de 24 millions de dollars a été donnée, on doit construire un bâtiment. Ce dossier a été traité en toute confidentialité pendant cinq ans, et la décision a été prise sans qu'aucune instance de l'université ait été saisie.

La semaine dernière, la faculté s'est engagée pour 6,6 millions de dollars sur un prêt de 30 ans, avec un taux de 5,64 %. On ne nous a pas demandé notre avis. Le gouvernement du Québec, par son premier ministre Jean Charest, a annoncé, le 1er septembre, un investissement de 195 millions avec le fédéral à Bromont. Est-ce que c'est passé devant une instance universitaire? Non. Jamais. Donc, on dit qu'on n'est pas... Mais les projets nous sortent comme ça, on n'a pas été saisis des projets. Et, oui, nous n'avons jamais donné une opinion là-dessus, mais on doit faire avec. C'étaient deux exemples que je voulais donner, qui sont récents, là, et qui sont passés, je ne sais pas par où.

Le Président (M. Marsan): M. le député de Charlesbourg.

M. Pigeon: Oui. Merci, M. le Président. Oui, mais ma question n'était pas celle-là, moi... Je comprends que vous avez vécu ce... mais je vous demandais justement si vous aviez pensé à articuler le travail des différentes instances de façon justement à ce que ça se passe comme ça, c'était bien le sens de ma question.

Le Président (M. Marsan): M. Tétrault.

M. Tétrault (Robert): À l'Université de Sherbrooke, on a complété récemment une révision de l'ensemble des statuts. Et il y a eu une recomposition des mécanismes où il y a eu des instances, Conseil de l'enseignement, Conseil de la recherche, de nouvelles créations pour peut-être mieux faire en sorte que le travail se fasse au niveau des instances académiques. Mais la perception qu'on a à ce niveau-là, c'est qu'à partir du moment où il y a des incidences financières, ça nous sort des mains, et c'est là où on a beaucoup de difficultés. On a exprimé nos réserves et nos réticences à l'égard du projet, on va vivre avec, on va voir ce que ça donne. Mais, à ce moment-là, on est un peu, là...

M. Pigeon: Mais...

Une voix: ...la loi...

M. Pigeon: Non, mais c'est justement, là. Parce que, moi, je suis en train de vous parler de non pas ce que vous avez vécu, mais qu'est-ce qu'il faudrait faire.

Mme Beaulieu (Carole): C'est justement...

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Beaulieu, quelques secondes, le mot de la fin.

M. Pigeon: C'est ça que je vous demande.

Mme Beaulieu (Carole): O.K. Donc, essentiellement, ce qu'on dit, c'est que, pour qu'une université marche bien dans un système collégial, il faut qu'on soit représentés dans tous les niveaux des prises de décision. Si vous voulez, par exemple, que les gens continuent à être mobilisés et à travailler, il faut qu'ils sachent que leur décision a, comment dire... il faut qu'ils sachent que leur position puisse être exprimée à tous les niveaux de l'université. Et donc les détacher, lorsqu'on arrive au conseil d'administration, c'est d'envoyer un mauvais signal. Ça leur dit: Quand c'est les choses qui sont administratives, bien là, on va mettre ça dans les mains de l'externe qui, eux, sont plus aptes à juger que vous parce que vous êtres comme parti pris. Mais c'est vrai...

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Beaulieu, je vous remercie beaucoup.

Mme Beaulieu (Carole): Pardon.

Le Président (M. Marsan): Ceci termine nos échanges avec le parti ministériel. Nous allons poursuivre avec l'opposition officielle, et je vais reconnaître la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de recherche et de développement. Mme la députée de Taillon, la parole est à vous.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Bonjour. Effectivement, je... c'est vrai que je me réfère souvent à l'Université de Sherbrooke comme d'un modèle que j'ai bien connu mais qui m'a permis, je crois, d'avoir une vision assez fine de la façon dont fonctionne une université, et je dois dire que ça m'est d'ailleurs très utile dans l'exercice que nous faisons en ce moment. Je salue également les gens de Bishop, parce que vous êtes bien associés dans votre démarche, et donc je trouve ça important que... que vous soyez là également.

Je trouve qu'il y a des choses tout à fait claires que vous avez dites, mais je vais les reprendre pour insister là-dessus. Dans le modèle qu'on appelle managérial, qui a été nommé comme ça dans bien des mémoires, ce que l'on retient, c'est qu'il y a une vision hiérarchique de la direction. C'est-à-dire qu'il y a des gens qui dirigent, appuyés de gens qui peuvent concevoir des choses, et ensuite il y a des gens qui exécutent. Je simplifie un peu, là, mais bon.

Dans une université, la matière étant le savoir, c'est vraiment à la base que ce savoir se transmet, mais aussi se développe, se crée. On a des créateurs. On n'a pas juste des chercheurs, on a aussi des créateurs, et donc les bonnes idées de développement viennent effectivement des gens dont le métier est entièrement consacré à ça.

Puis, Mme Beaulieu, vous expliquiez tout à fait clairement comment ça se passe dans une faculté; je l'ai vécu, moi aussi. C'est là qu'on dit, par exemple, on pense qu'il y a des besoins pour développer des programmes pour telle clientèle, et c'est passé au crible de toutes sortes de considérations, bien évidemment jusqu'à ce que finalement l'université dise: On vous endosse et puis on va aller à l'externe pour faire évaluer le projet. Donc ça se passe comme ça.

Puisque les projets partent de la base, donc ce n'est pas pensable pour vous de donner trop de poids à des décideurs en hauts lieux qui ne connaîtraient pas cette dynamique-là. Est-ce que vous pensez qu'un rééquilibrage du poids relatif des gens internes, externes, dans le conseil d'administration, serait une garantie de mieux respecter et comprendre le processus de... finalement, le processus d'une université, simplement dans l'atteinte de ses objectifs?

Mme Beaulieu (Carole): Bien...

Le Président (M. Marsan): Mme Beaulieu.

n(13 heures)n

Mme Beaulieu (Carole): Certainement, je crois qu'un rééquilibrage va permettre d'atteindre ça, et je vais vous dire pourquoi: Parce que je... Je peux comprendre qu'à l'extérieur, lorsqu'on dit: C'est l'interne qui se juge, ça peut paraître quelque chose d'assez incompréhensible, parce qu'on va se dire: Mon Dieu! C'est... ils sont entre eux, ils vont se faire des cadeaux. Mais, en fait, lorsque les universitaires critiquent quelque chose, ils émettent une position, et c'est très rare, et c'est peut-être quelque chose d'exceptionnel qu'on soit tous ici ensemble aujourd'hui, c'est très rare que des universitaires ont une opinion qui est commune, et, pour nous, c'est quelque chose de tellement important, cette critique-là de l'institution, qu'on l'a même fait inscrire dans la convention collective.

Et, si vous me permettez, je vais vous lire, ça va prendre une seconde, je vais vous lire l'article 10.01 de la convention collective du SPPUS qui dit ceci ? et je vais le dire juste au masculin, mais ça inclut bien sûr les dames: «...tout professeur bénéficie de la liberté académique. Dans son essence, la liberté académique est le droit d'exercer ses fonctions sans être contraint d'adhérer à une doctrine particulière, tout en respectant la liberté d'opinion d'autrui. Elle inclut pour [...] le professeur la responsabilité critique par rapport à son institution et à la sauvegarde de sa mission.»

Donc, imaginez-vous beaucoup d'institutions où et l'employeur et les employés auraient inscrit que ça fait partie du devoir de l'employé de faire une critique de son institution? Donc, la base de l'université, c'est ça, c'est qu'on est capables ensemble de faire une critique des choses.

Ça ne veut pas dire qu'on veut exclure les gens, mais on veut leur donner une place pour leur permettre d'apprécier l'université. Si on n'est pas assez à leur parler, ils vont entendre une voix, représentative, certes, d'une direction à l'université, mais qui ne représentera pas tous les aspects que l'on vit. Plus vous allez diminuer le nombre d'internes dans le conseil d'administration, plus vous allez avoir un seul type de voix pour les gens de l'externe. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'en mettant plus de gens de l'interne sur ces conseils-là ils vont entendre la direction, mais, pour certains autres dossiers, ils vont dire: Oui, bien sûr, on vous présente ça, mais sachez que, lorsque ça a passé, les différentes instances, il y a eu beaucoup d'opposition, etc. Donc, on augmente la voix de l'interne pour le conseil d'administration. Je pense même que c'est rendre un service aux gens de l'externe d'avoir beaucoup de voix différentes de l'interne, parce qu'ils vont mieux comprendre ce qu'est l'université, ils n'auront pas une vision unique de l'université.

Donc, moi, quand je dis à certaines entreprises avec qui je travaille que, parmi mes devoirs, un de mes devoirs, c'est la responsabilité critique par rapport à mon institution, ils restent toujours surpris. Et, moi, je suis présidente du syndicat des professeurs, puis bien sûr on a certains intérêts corporatistes, je ne m'en cache pas, mais mon premier devoir en tant que présidente de syndicat de professeurs, c'est de sauvegarder l'université. Ce n'est certainement pas de dire: Je veux avoir une semaine de plus de congé à la fin de l'année.

Donc, c'est vraiment incrusté à l'intérieur de l'université, la critique, la responsabilité critique des membres de l'interne. Et c'est certain que les gens de l'externe aussi peuvent avoir une vision qui est différente, peuvent apporter cette vision différente là, mais, si on veut bien les informer, il faut qu'ils aient... qu'ils entendent une multitude de voix, et c'est pour ça qu'on a tellement de problèmes avec le fait de mettre beaucoup de gens de l'extérieur et peu de gens de l'intérieur dans ces conseils d'administration là.

L'autre chose que l'on pense aussi ? je m'excuse de prendre beaucoup de place, messieurs dames ? c'est que, si vous voulez que la base continue à faire son travail, à créer de l'innovation, à créer, à changer la structure, il faut que la base ait l'assurance qu'elle est entendue à tous les niveaux. On ne peut pas juste dire à la base: Travaillez, travaillez, travaillez; lorsqu'on va arriver en haut, bien là il y a des sous qui sont impliqués là-dedans, vous n'avez plus un mot à dire. Il faut éviter que les gens aient cette perception-là, donc il faut continuer à avoir beaucoup de gens de l'interne à toutes les instances possibles.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Bien, je trouve ça très pertinent, honnêtement, ce que vous dites. Et je comprends que l'inquiétude pour vous, c'est que finalement ce ne soit même pas une prédominance... je veux vérifier si j'ai bien compris, là, mais ce ne soit même pas une prédominance des membres externes par rapport aux membres internes. C'est que vous dites: S'il y a trop de membres externes, peu importe, «trop», ce que ça veut dire, mais en tout cas s'il y en a trop, étant donné leurs relations avec la direction, ils n'apporteront pas les points de vue critiques diversifiés dont on a besoin. Donc, on risque d'avoir, qu'ils soient 55 %, 60 % ou 65 %, ou peu importe, on risque d'avoir comme une voix consolidée, là, avec tous ces gens, et en opposition ou en tout cas face à une critique émergente de la communauté universitaire. Et donc ça, là, c'est comme un danger majeur que vous voyez dans l'application de la loi telle qu'elle est là.

Mme Beaulieu (Carole): ...

Le Président (M. Marsan): Mme Beaulieu.

Mme Beaulieu (Carole): Et il ne faut pas minimiser l'ascendant que peut avoir et un président de conseil d'administration et un dirigeant d'université. Ces personnes-là ont un ascendant absolument incroyable, donc c'est important, étant donné l'ascendant. Le recteur, ou la rectrice d'université, ou le principal ? on l'appellera comme on voudra ? nous, on dit: C'est le pair des pairs. Donc, il est choisi parmi les pairs. C'est le meilleur pair possible, si vous voulez. Pour qu'il y ait cette crédibilité-là, pour qu'on le nomme recteur, c'est une personne nécessairement qui a beaucoup d'ascendant. Il en a déjà beaucoup à l'interne, mais il va en avoir encore plus à l'externe. Donc, c'est important, pour les gens de l'externe, d'entendre d'autres voix, même si cette personne-là est reconnue par ses pairs, effectivement.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: On a évoqué tout à l'heure des exemples de dérive immobilière. On l'a fait tout au long de cette commission. M. Boone, tout à l'heure vous avez évoqué des décisions prises en ce sens-là, par rapport auxquelles vous n'avez pas été associé. Puis, moi, j'ai vraiment une préoccupation par rapport à ce projet de loi, en me disant: Mais est-ce que ça va améliorer les choses de ce point de vue là? On sait tous quels sont les problèmes qu'il y a eu récemment, mais est-ce que ces modalités prévues par le projet de loi vont nous aider à éviter cela ou pas? C'est ça, la question. Ce n'est pas de dire: Est-ce que c'était bien d'avoir des dérives ou pas? Non, c'est: Est-ce que ça va nous aider à éviter ces dérives ou pas? J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Marsan): M. Tétrault.

M. Tétrault (Robert): À ce sujet-là, en fait, ce qu'on peut observer ou ce qu'on a pu observer, c'est que les problèmes auxquels on fait référence, les dérives, les aventures qui se sont révélées désastreuses ont été souvent le fait d'administrateurs universitaires aux abois, qui faisaient preuve de créativité dans le montage de projets financiers pour aller chercher des fonds dont ils étaient privés, à toutes fins pratiques, là. Faute de financement adéquat, les universités et les dirigeants d'université sont parfois amenés à se lancer dans des entreprises périlleuses, hasardeuses et à se lancer aussi dans des opérations de recherche à tout prix de clientèle, de création de nouveaux produits éducatifs à valeur ajoutée, et ainsi de suite, là, qui sont tout à fait étrangères... ce sont des attitudes qui sont tout à fait étrangères à ce qu'on connaît à l'université, où on cherche une crédibilité. Lorsqu'il s'agit d'offrir un diplôme, que ce soit un microprogramme ou ainsi de suite, et qu'on a l'impression parfois que vous avez une entreprise privée dans les coulisses qui attend essentiellement l'étiquette «Université de Sherbrooke» pour donner de la crédibilité à son produit, ça nous fatigue. Donc, il y a toutes sortes de situations.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Oui. J'aurais une dernière question: Comment assurer une meilleure reddition de comptes? Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour que cet aspect-là de la gestion, et de la direction, et de la gouvernance ? pour employer le mot ? de nos universités soit mieux assuré?

Mme Beaulieu (Carole): Ça va vous paraître...

Le Président (M. Marsan): Mme Beaulieu.

Mme Beaulieu (Carole): Excusez-moi, hein? J'ai l'habitude de répondre directement quand on me parle.

Donc, je crois qu'il faut se parler. Et, lorsqu'on demande justement des états généraux, c'est parce qu'on croit que ce n'est pas parfait, l'université. On n'est pas ici pour dire: Le modèle est parfait, puis il ne faut pas le changer. Ce qu'on dit aujourd'hui, c'est qu'on pense que le projet de loi ne règle pas les choses.

Je n'ai pas la solution pour vous. Vous avez peut-être des idées vous-même, plein de personnes ont des idées. Je pense qu'il faut se parler. Le message qu'on vous envoie aujourd'hui, ce n'est pas de dire non parce qu'on s'oppose absolument à ce qu'il y ait des changements dans l'université; on en réclame, nous aussi, des changements. Ce qu'on dit, c'est: Parlons-nous. Essayons, en tant que...

Moi, je viens d'un milieu très modeste. Je suis très, très redevable au Québec pour l'éducation que j'ai obtenue dans le public et j'espère que les enfants de mes enfants seront toujours redevables au système de l'éducation. Et je pense qu'il est temps de se poser des questions sur nos universités et de ne pas essayer de rapiécer à la pièce différents problèmes. Je pense qu'il faut se parler. Donc, ma réponse, ce serait: Parlons-nous, Mme Malavoy.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

n(13 h 10)n

Mme Malavoy: Bien, votre réponse, finalement, c'est de dire: Ce projet de loi ne règle pas les problèmes dont nous convenons tous. Donc, vous, vous dites: Il faut ouvrir le jeu, il faut ouvrir la réflexion.

Mme Beaulieu (Carole): ...ouvrir le débat.

Mme Malavoy: O.K. Ça va pour moi.

Le Président (M. Marsan): Ça va? Alors, Mme Beaulieu, M. Tétrault, M. Boone, Mme Gosselin, M. Courteau, M. Lavigne, je voudrais vous remercier de nous avoir présenté le point de vue du Syndicat des professeures et professeurs de l'Université de Sherbrooke.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures. Ne laissez pas vos documents sur la table, il y a une autre rencontre après celle-ci. Merci. Bon appétit.

(Suspension de la séance à 13 h 11)

 

(Reprise à 15 h 6)

Le Président (M. Marsan): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 38, Loi modifiant la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire et la Loi sur l'Université du Québec en matière de gouvernance, et sur le projet de loi n° 44, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel en matière de gouvernance.

Cet après-midi, nous allons recevoir trois groupes: l'Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures; ensuite, le Mouvement des associations générales étudiantes de l'Université du Québec à Chicoutimi; et enfin le Regroupement des étudiantes et étudiants de maîtrise, de diplôme et de doctorat de l'Université de Sherbrooke. Par la suite, nous aurons les remarques finales.

Alors, je vais immédiatement céder la parole à M. Sylvain Mercier, qui est président de l'Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures. Et je vous prierais, M. Mercier, de nous présenter la personne qui vous accompagne, et de débuter votre présentation, pour un maximum de 15 minutes.

Association des étudiantes et
étudiants de Laval inscrits aux
études supérieures (AELIES)

M. Mercier (Sylvain): Très bien, M. le Président. Mme la ministre, parlementaires, je vous présente Mme Fanny Tremblay-Racicot, vice-présidente à l'externe de l'AELIES. Elle assurera la deuxième partie de la présentation. Alors, tout d'abord, je suis président de l'AELIES, mais aussi membre du conseil d'administration de l'Université Laval.

L'AELIES représente près de 9 500 étudiants inscrits aux cycles supérieurs de l'Université Laval. L'AELIES est fondée... mais sous son ancien nom, l'Union des gradués inscrits à Laval, et nous sommes l'une des plus anciennes associations des cycles supérieurs au Canada. Outre la défense des droits et la promotion des intérêts des étudiants, l'AELIES offre des services à ses membres: subventions, soirées culturelles, accompagnement dans des situations pédagogiques, et aussi deux organismes de diffusion du savoir populaire, soit Le Lab-oratoire public et La Chaire publique AELIES. D'ailleurs, en passant, La Chaire publique recevra, lundi soir, M. Hubert Reeves, lors de La Chaire publique.

Nous sommes également partie prenante et très engagés dans les conseils, comités et commissions de l'Université Laval, où nous nommons des représentants étudiants. Nous allons recevoir aussi, en avril prochain, le GG13. Il s'agit du regroupement des 13 associations des cycles supérieurs issues des 13 plus grandes universités de recherche ou axées sur la recherche au Canada. Nous faisons aussi partie de la TACEQ, la Table de concertation étudiante du Québec, et nous collaborons aussi avec d'autres associations nationales et locales sur des dossiers ponctuels qui concernent les étudiants.

Et je céderais maintenant la parole à Fanny, qui va nous présenter le mémoire que nous avons déposé.

Le Président (M. Marsan): Mme Tremblay-Racicot, la parole est à vous.

n(15 h 10)n

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): Alors, bonjour, Mme la ministre, chers Mmes et MM. les parlementaires. Donc, mon nom est Fanny Tremblay-Racicot. Je suis étudiante à l'Université Laval, à la maîtrise en sciences politiques, mais aujourd'hui je porte le chapeau de vice-présidente à l'externe de l'AELIES, qui est l'association des cycles supérieurs... des étudiants inscrits aux cycles supérieurs à l'Université Laval.

Donc, je vais procéder à la lecture de notre court mémoire pour étayer, là, les diverses positions de l'AELIES, là, au regard du projet de loi. C'est important de mentionner aussi qu'en tant qu'association étudiante on a aussi déposé un mémoire, là, conjointement avec la TACEQ, qui est la Table de concertation étudiante, là, du Québec. Donc, on a aussi participé, là, au mémoire qu'a déposé la TACEQ. Donc, je vais procéder à la lecture de notre mémoire.

Alors, nos critiques portent tant sur le fond que sur la forme du projet de loi, puis ils peuvent se recouper en cinq axes: soit d'abord l'esprit de la loi, la composition du conseil d'administration, la reddition de comptes, la sélection du recteur, ainsi que le financement des universités. Vous constaterez que nos positions, là, à quelques exceptions près, sont très analogues à celles, là, de l'ensemble de la communauté universitaire, là, qui vous ont été présentées.

Donc, concernant l'esprit de la loi, le projet de loi n° 38 propose d'appliquer de manière uniforme les principes du nouveau management public à l'administration des universités, et ce, dans le but d'en améliorer l'indépendance et la transparence. Cependant, là, les modifications aux instances décisionnelles et aux procédures qui sont proposées vont à l'encontre de ces principes fondamentaux qui sont propres à un service public, lesquels ne peuvent pas être confondus à ceux d'une entreprise publique. En définitive, les modifications proposées auront comme effet de retirer le pouvoir décisionnel des membres de la communauté universitaire sur leur établissement, remettant ainsi en cause les principes séculaires de collégialité, d'autonomie et, ultimement, de liberté académique des universités.

Au lieu de corriger le modèle managérialiste, tel que le propose le projet de loi n° 38, il serait nécessaire de renforcer un modèle d'organisation davantage collégial, garant du respect des intérêts de l'institution. En outre, nous sommes d'avis qu'un tel projet de loi, puisque proposé sans être appuyé sur une réflexion collective des principaux intéressés, soit les étudiants, les professeurs et le personnel administratif des universités québécoises, est illégitime.

Maintenant, pour ce qui est de la composition du conseil d'administration, contrairement à l'esprit de la loi selon lequel les intérêts des universités seraient mieux servis par les membres externes qui posséderaient la qualité d'«indépendants» ? ce qui n'a jamais été démontré empiriquement ? nous sommes convaincus que ces intérêts sont mieux servis par ses membres, soit la communauté universitaire composée des enseignants, des étudiants, des membres du personnel administratif et des administrateurs. En ce sens, le modèle proposé par le projet de loi concentrera le pouvoir dans les mains d'un petit groupe externe à la communauté, ce qui risque de conduire à un mode de gouvernance oligarchique, opaque et dépendant du haut-dirigeant et, ultimement, la direction de l'université. En ce sens, nous sommes d'avis que les membres externes détiennent déjà un trop grand nombre de sièges sur les conseils d'administration des universités et que leur présence devrait être minimale. Ainsi, les membres de la communauté universitaire devraient représenter une proportion minimale de deux tiers des membres du conseil d'administration. En outre, la composition du conseil d'administration devrait représenter la diversité des membres de la communauté universitaire, donc plusieurs syndicats, associations universitaires, unités administratives, et traiter ceux-ci de manière égale.

Pour ce qui est maintenant de la reddition de comptes, les principes de saine gouvernance qui sont édictés dans le projet de loi, donc, les principes d'efficacité, d'efficience, de transparence, de responsabilité et d'imputabilité, seraient moins bien servis par l'institution des comités... des trois comités, là ? gouvernance, finances publiques et ressources humaines ? qui sont composés presque exclusivement de membres externes. Substituer les instances qui existent déjà dans les universités par trois comités, en plus de brimer l'autonomie universitaire, aurait comme effet direct de concentrer le pouvoir dans les mains de membres externes qui sont nommés par cooptation, qui cumuleront les fonctions.

Le respect du principe de collégialité. L'application de mesures de transparence, comme des séances publiques, des procès-verbaux accessibles et des huis-clos exceptionnels, et l'instauration de processus de reddition de comptes sont les véritables garants de l'imputabilité puis de la bonne gouvernance.

Finalement, pour ce qui est de la... bien, finalement... un avant-dernier point, pour ce qui est de la sélection du recteur, nous sommes d'avis que le recteur devrait être sélectionné par la communauté universitaire, selon une procédure choisie par celle-ci, mais de préférence élective. En ce sens-là, on ne comprend pas pourquoi l'examen des candidatures devrait être confidentiel.

Finalement, pour ce qui est du financement des universités, nous estimons que les concepts de gouvernance et de mode de financement sont indissociables. Une autonomie financière est une condition nécessaire à une gouvernance efficace. En effet, c'est le sous-financement chronique et la trop grande proportion de membres externes sur le conseil d'administration de l'université qui est à la source des déboires de l'UQAM concernant l'îlot Voyageur.

Finalement, nous craignons que la présence majoritaire de membres externes sur les conseils d'administration des universités se solde par une plus grande propension aux conflits d'intérêts, qu'ils soient ponctuels ou philanthropiques, un appel plus grand aux PPP, ainsi qu'à une hausse des frais de scolarité.

Finalement, je terminerais mon exposé par vous rappeler les trois positions qu'on tient, là, ensemble avec la CADEUL, le REMDUS ainsi que les cycles supérieurs de McGill, donc les quatre organisations qui sont membres de la TACEQ. Donc, d'abord, nous recommandons que les universités demeurent maîtres de la définition de leur structure institutionnelle, et ce, afin d'assurer leur autonomie universitaire et leur liberté académique au sens où le définit le Conseil supérieur de l'éducation.

Deuxièmement, nous recommandons que le projet de loi n° 38 modifiant la Loi sur les établissements d'enseignement des niveaux universitaires et la Loi sur l'Université du Québec en matière de gouvernance soit retiré.

Finalement, nous recommandons que le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport concentre ses efforts sur l'élaboration de stratégies afin de régler le sous-financement du réseau universitaire, facteur aggravant les mauvais comportements de gestion.

Alors, voilà, ça faisait un tour de notre mémoire. Maintenant, je vous laisse la parole, puis plus tard on pourrait répondre aux questions que vous avez concernant notre mémoire. Merci.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie de nous avoir donné la position de l'Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures, et je vais reconnaître immédiatement la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport. Mme la ministre, vous avez la parole pour débuter nos échanges.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Madame, monsieur, merci d'être présents aujourd'hui avec nous. Bien sûr, j'imagine que vous avez suivi nos échanges avec notamment la table de concertation, hier, qui était devant nous, de même que nos échanges avec toutes les associations étudiantes. Mais vous êtes représentants des étudiants qui sont aux cycles supérieurs, c'est ce que je comprends, hein? Maîtrise, doctorat, c'est ce que je comprends?

Alors, si vous me permettez, j'aimerais peut-être aborder un aspect avec vous qui peut-être vous rejoint, qui est celui de la liberté académique, hein? Parce que j'imagine que... bien, non seulement j'imagine, quand on fait une maîtrise et un doctorat, on est forcément lié au monde de la recherche, davantage. Et vous dites, dans votre mémoire, que les modifications... ou le projet de loi actuel remet en cause le principe de liberté académique des universités.

Or, depuis trois semaines, et la loi est claire, le projet de loi est clair à cet égard-là, nous disons et je soutiens que les conseils d'administration n'ont pas à se mêler directement de tout le volet académique d'une université, et encore moins la recherche, encore moins la recherche. Parce que là vous allez me répondre qu'indirectement, quand on approuve les orientations stratégiques, indirectement, quand, même, on approuve des budgets, quand on approuve... quand on prend certaines décisions, ça peut avoir une influence sur la vie académique, mais là on parle de liberté académique, pour moi, il y a aussi une nuance par rapport à la liberté académique.

Je ne pense pas... Puis je ne pense pas, même... Puis peut-être que... Mais non, je ne pense pas, même, qu'actuellement les conseils d'administration, tels qu'ils sont formés dans toutes les universités, à ma... Moi, en tout cas, depuis que je suis ministre de l'Éducation ou même depuis que je suis ministre tout court, il n'a jamais été porté à ma connaissance qu'un conseil d'administration avait brimé une liberté académique, là, ou même une liberté de recherche, là, scientifique. Moi, j'aimerais vous entendre là-dessus, là, j'aimerais que vous précisiez votre pensée, pourquoi vous allez aussi loin.

Le Président (M. Marsan): Alors, madame, ou... Mme Tremblay-Racicot.

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): Oui. En fait, pour cet élément-là de liberté académique, ça a trait, là, au financement de certains programmes qui ont à... qui auraient à répondre à des indicateurs. Donc, il y a certains pans de l'éducation qui seraient touchés, là, certains programmes qui seraient touchés par certains indicateurs, et c'est en ce sens-là, là, que... c'est au niveau davantage du financement de certains programmes, certaines facultés qui pourraient être touchés, là, de manière indirecte par le projet de loi.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

n(15 h 20)n

Mme Courchesne: C'est donc dire que vous êtes contre toute forme d'évaluation de l'université. Quand on parle, dans le projet de loi, des indicateurs qualitatifs et quantitatifs, ce que vous dites: À partir du moment où il y a des indicateurs, le conseil d'administration peut décider qu'il accepte qu'il finance ou qu'il ne finance pas un programme. Ça, ce serait votre compréhension du projet de loi, alors que ce n'est pas... Le projet de loi, il ne va pas aussi loin que ça, là, et, encore une fois, à ma connaissance, il n'y a pas beaucoup de programmes qui sont fermés dans les universités, croyez-moi. Il n'y en a pas beaucoup, dans une année, des programmes qui sont fermés, puis je les ai pas mal tous parce que j'en approuve plusieurs. Et donc j'essaie de comprendre. Alors que, par exemple, chez vous, à l'Université Laval, c'est une majorité de membres externes qui sont sur le conseil d'administration ? il y a plus de membres externes que de membres internes ? il me semble que... ou donnez-moi des exemples où vous avez senti qu'il y a des facultés ou des départements qui avaient été lésés jusqu'à maintenant dans ce sens-là. Et dites-moi si, contrairement, en fait... Parce que je crois comprendre que vous avez une position contraire à la FEUQ ou à la FAECUM qui, eux, disent: Nous, on est d'accord avec des indicateurs de qualité, qu'on se compare avec les meilleurs, qu'on soit capables de rendre des comptes sur la capacité de l'université d'être parmi les meilleures au monde. Je voudrais avoir votre réaction à ça.

Le Président (M. Marsan): Mme Tremblay-Racicot.

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): En fait, par rapport à certaines facultés, c'est davantage au niveau du sous-financement, là. Il y a certaines facultés qui sont vraiment plus délaissées, et, pour l'embauche des professeurs, c'est plus difficile. Moi-même, je suis à la maîtrise, je suis appelée à donner des cours. Normalement, pour l'embauche des professeurs en sciences sociales, c'est vraiment, c'est vraiment... c'est davantage au niveau du sous-financement. Puis je suis très heureuse que vous soyez sensible à cette question de liberté académique, puis ça me rassure, même. Votre position me rassure.

  Pour ce qui est des indicateurs maintenant, il va falloir regarder comment va être mis en oeuvre le projet de loi, mais ça reste que ça va être très difficile, parce que chaque institution a sa charte, chaque institution a ses commissions, conseils. Il y a déjà un mode de fonctionnement propre à chaque université. Donc, moi, j'ai des grandes craintes par rapport à la mise en oeuvre du projet de loi, comment ça va se faire.

Maintenant, pour ce qui est des indicateurs, il y a déjà beaucoup de processus de reddition de comptes dont les universités, là... auxquels les universités doivent répondre. Donc, je ne crois pas que la solution réside dans l'imposition d'un nouveau processus de reddition de comptes, il y en a déjà plusieurs. Je crois que la réponse à la gouvernance des universités réside davantage dans la question du règlement du sous-financement puis dans un mode collégial, là, de prise de décision.

Puis j'aimerais que vous m'expliquiez, là, comment vous envisagez la mise en oeuvre du projet de loi dans chaque université. Est-ce que toutes les chartes vont devoir être réouvertes? La réouverture de chartes implique des débats au conseil d'administration. Il y a le conseil universitaire à l'Université Laval. Est-ce que ses pouvoirs vont être diminués de quelque manière que ce soit? J'espère que non.

L'inverse, vous me dites, c'est... je suis contente de l'entendre, mais j'aimerais que vous m'expliquiez comment va être mis en oeuvre le projet de loi, là.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Courchesne: J'aime ça. Bien oui, hein, c'est moi qui est supposée vous poser des questions. C'est fait pour ça, les commissions parlementaires.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Courchesne: La période de questions, c'est à 10 heures le matin, puis la députée de Taillon, elle fait ça super bien.

Une voix: ...

Mme Courchesne: Non, mais ça fait deux jours qu'elle veut m'en poser une, puis, elle, son leader ne veut pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Marsan): Là, là... Bien.

Mme Courchesne: Cela dit, cela dit... Parce que je le sais quand elle a une question à me poser.

Le Président (M. Marsan): Alors, on va revenir à notre projet de loi.

Mme Courchesne: C'est important, ce que... D'abord, je veux vous rassurer, tu sais. Pour moi, c'est très clair dans mon esprit que, s'il y a indicateurs, la définition des indicateurs, ça ne peut pas être les mêmes indicateurs pour toutes les universités, tu sais. La loi, et on l'a dit souvent, doit préserver les spécificités de chaque université, et les indicateurs sont une belle façon de démontrer qu'il est possible de le faire. Ça fait que, tout de suite, je vous rassure à ça.

Puis vous m'avez... J'ai perdu le fil de ma pensée par rapport à cela, mais... Donc, j'essaie de comprendre... Puis je comprends qu'il y ait des craintes, tu sais, je suis tout à fait consciente, et d'ailleurs la commission parlementaire nous éclaire sur la profondeur et la nature des craintes, et une commission parlementaire, c'est fait aussi pour que, par la suite, nous puissions améliorer le projet de loi. C'est impossible pour quiconque et pour quelque gouvernement d'arriver avec une première mouture d'un projet de loi puis de dire: Ah! tout est beau, tout est parfait puis on adopte ça les yeux fermés, là. Donc, moi, j'ai toujours été très ouverte, dans ce processus-là, pour qu'on puisse y arriver. Donc, je pense que, si ça peut...

Ah oui! Et là votre autre question, on revient à l'article 4.0.21, qui est un article historique. C'est du jamais-vu qu'on exige d'un conseil d'administration de faire... de consulter avant de prendre une décision importante sur des orientations, sur des plans d'immobilisations, sur des changements majeurs, et que ça doit être fait bien avant la prise de décision, cette consultation de la communauté universitaire, et les documents doivent être disponibles, les documents du projet doivent être disponibles pour que la communauté universitaire puisse y arriver.

Je pose une dernière question parce que je veux laisser la parole à mes collègues. Si vous souhaitez que la communauté universitaire joue un rôle plus grand, comment pensez-vous que vous allez y arriver, comment pensez-vous que vous allez convaincre le conseil d'administration de l'Université Laval, aujourd'hui, de laisser une plus grande place à la communauté universitaire? Comment vous allez les obliger? Et comment on fait pour nous assurer auprès de la population que les administrateurs n'ont pas juste des responsabilités, mais bien des obligations? Qui va être garant de ça, là?

Le Président (M. Marsan): M. Mercier.

M. Mercier (Sylvain): Je dois dire que déjà les administrateurs à l'Université Laval, en tout cas ceux qui proviennent de l'Université Laval, sont déjà bien conscients des responsabilités qu'ils ont, et ils sont capables de faire la différence entre leur position personnelle et la position idéale pour l'université, pour son avancement, pour qu'elle puisse bien fonctionner. Ça, je pense que c'est déjà clair dans la tête des membres du conseil d'administration de l'université.

Je pense qu'il est plus facile pour un conseil d'administration provenant... ou que la majorité des membres proviennent de la même institution de comprendre son développement organique. Chaque université a ses modes de fonctionnement, qui sont plus ou moins complexes, dépendamment de la grosseur de l'université, de son histoire, de ses façons de faire. Et je prends juste l'Université Laval, qui est une université quand même assez âgée, qui a des façons de faire établies qui nous apparaissent aujourd'hui... qui nous apparaissaient aussi assez bien constituées. Je prends juste le conseil universitaire qui... l'article de loi que vous venez de mentionner ressemble drôlement à notre conseil universitaire où est-ce que, par exemple, le budget est présenté à la communauté universitaire avant même qu'il soit présenté au conseil d'administration. Il est voté. Il doit être voté. S'il ne passe pas en conseil universitaire, le conseil d'administration doit le refaire. Et je pense juste au dernier exercice qu'il y a eu à l'Université Laval, le budget a passé, mais n'a pas passé à l'unanimité. Ça, ça veut dire, woups! il y a peut-être des pistes d'amélioration. Et ça, si les membres de la communauté universitaire sont partie prenante des décisions de l'université, je pense que c'est beaucoup plus facile que des membres externes qui ne connaissent pas tout le fonctionnement de l'université, qui est déjà assez complexe.

Mme Courchesne: ...

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Courchesne: Vous êtes conscients, là, que vous êtes probablement la seule université ? ou une des seules ? que la CU approuve le budget, là. Il n'y en a pas beaucoup, là. Alors, je répète ma question, tu sais: Comment la ministre peut exiger d'une université et comment elle peut s'assurer que... Tant mieux si ça va super bien à l'Université Laval, mais il y a 18 universités, là. Alors, vous comprenez le sens de la responsabilité du gouvernement face à ces questions-là. C'est impossible qu'un ministère... ou qu'une ministre puisse être complètement, face à la population, rassurée si les règles ne sont pas claires pour tout le monde.

Cela dit, la gouvernance, ce n'est pas la gestion de l'université. Les règles, les grandes règles sur les obligations des administrateurs sont les mêmes pour tout le monde, mais, par la suite, la régie interne peut être propre à chacune des universités. La loi, elle ne va pas si loin que ça, là.

Le Président (M. Marsan): Mme Tremblay-Racicot.

n(15 h 30)n

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): La loi va quand même assez loin, dans le sens qu'elle oblige une certaine composition, là, des membres du conseil d'administration, certains conseils qui doivent être créés, la composition de ces conseils-là, les règles pour la nomination des membres du conseil d'administration, les critères, les...

Ensuite de ça, pourquoi vous n'avez pas envisagé, là, peut-être des ententes spécifiques avec les universités, comme la CREPUQ vous l'a suggéré? Ça aurait été peut-être un remède, là, moins... une pilule moins dure à avaler si ça avait été l'objet d'ententes spécifiques respectant chacune des universités, là.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Courchesne: M. le Président, j'ai répondu ce matin à cette question-là. Je ne veux pas prendre de temps, parce que je veux que mes... le but, c'est que mes collègues vous posent des questions. Mais je vais revenir en remarques finales de la commission là-dessus.

Le Président (M. Marsan): Alors, M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, merci pour la présentation de votre mémoire. C'est fort intéressant, et je pense que c'est bien présenté aussi. Donc, merci beaucoup.

Moi, j'avais une question, parce qu'un des... En fait, il y a deux grands objectifs du projet de loi qui, moi, m'interpellent comme élu. Un premier objectif du projet de loi, c'est de définir une reddition de comptes plus complète et transparente du conseil d'administration. C'est ça, l'objectif qui est poursuivi, et, face à ça, il y a des attentes au niveau de la population.

Ce que vous dites, dans la reddition de comptes, c'est que vous dites que les principes de saine gouvernance vont être moins bien servis par l'institution de trois comités, là, les trois comités qui sont prévus dans le projet de loi, gouvernance, finances, ressources humaines, et que vous allez... vous dites que finalement, pour faire la reddition de comptes, il faut vraiment qu'on s'assure du respect du principe de la collégialité. Donc, ça va dans le sens de ce que vous dites: c'est les gens à l'interne qui sont les plus en mesure de gérer l'université. Grosso modo, c'est ça. Et c'est ce que vous dites: Il faut respecter la collégialité puis il faut appliquer des mesures de transparence, mais vous... les moyens que vous prévoyez, c'est les séances publiques, les procès-verbaux puis des huis clos exceptionnels. Puis vous parlez de l'instauration d'un processus de reddition de comptes.

J'aimerais ça vous entendre, parce qu'au fond, à partir du moment où on dit: Respectez la collégialité de l'université, est-ce que vous croyez qu'au nom du respect des principes de collégialité on se doit de dire: Bon, bien, faites-nous confiance pour la reddition de comptes? J'aimerais vous entendre sur les moyens que vous proposez, à supposer qu'il y a une collégialité interne, pour assurer la reddition de comptes puis répondre aux attentes de la population puis également de la ministre, qui est imputable en bout de piste, alors à partir du moment où on vous dit: Bravo! allez-y, gérez l'université, on vous donne les fonds publics, merci, bonjour. Alors, moi, c'est ça que j'ai un petit peu de misère à comprendre, c'est: Quels sont les moyens que vous proposez pour assurer cette reddition de comptes là?

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Tremblay-Racicot.

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): Oui, merci pour votre question. En fait, les universités sont déjà soumises, là, à plusieurs processus de reddition de comptes, à plusieurs lois. Je vais vous les nommer: Loi sur les investissements universitaires, plan quinquennal d'investissements universitaires, règles budgétaires du MELS, protocole d'entente et suivi des projets des investissements universitaires, Loi sur l'APPPQ, loi sur les contrats sur les organismes publics. Il y a déjà tous ces processus de reddition de comptes, sinon il y aurait l'assemblée générale annuelle qui existe. C'est une instance qui existe déjà dans les universités, mais qui n'est pas nécessairement exploitée comme on voudrait qu'elle le soit.

Donc, si les instances qui existent déjà à l'université jouaient pleinement leur rôle, je crois qu'on irait plus loin. Pour le principe, surtout pour ce qui est du principe de responsabilité, là, des dirigeants universitaires envers leur communauté universitaire, là, l'assemblée générale annuelle serait une instance, là, privilégiée. Sinon, il faudrait... c'est des mesures de transparence que... comme j'ai dit, des procès-verbaux qui sont accessibles, des huis clos qui sont exceptionnels, des séances qui sont publiques. Donc, c'est par des processus qui existent, qui existent déjà.

Le Président (M. Marsan): M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: O.K. Bien, c'est... De toute façon, au niveau de nombreuses lois, il ne faut pas oublier que c'est à tous les trois ans souvent et qu'à partir de ce moment-là, pendant trois ans, donc vous êtes... l'université est comme laissée à elle-même par rapport à la reddition de comptes, alors que le projet de loi veut justement faire en sorte qu'on ait une reddition de comptes plus complète, d'où la création des trois instances, ce qui permettrait d'avoir vraiment une certaine...

J'avais une autre question, finalement, qui est la dernière. Par rapport aux membres externes, par rapport aux membres externes, est-ce que... Parce que vous dites, par rapport aux membres externes, ici, là: «...nous sommes d'avis que les membres externes détiennent déjà un trop grand nombre de sièges sur les conseils d'administration [...] et que leur présence devrait être minimale.» On assiste, dans les régions du Québec, à une participation de plus en plus grande à tous les niveaux des intervenants socioéconomiques, pas juste les intervenants économiques, les intervenants socioéconomiques, qui se disent: Regarde, moi, j'aimerais ça participer, et j'ai l'expertise, puis j'ai le profil d'expérience qu'il faut, etc. Est-ce que vous pensez que l'université, c'est comme quelque chose qui se gère à l'interne de soi ou est-ce que vous croyez vraiment à l'implication du milieu dans la gestion de l'université?

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Tremblay-Racicot.

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): Les membres externes détiennent déjà une très grande place. Oui, leur expertise est bienvenue, là, mais ce n'est pas la plus essentielle, ce n'est pas la plus nécessaire. Ce n'est pas nécessairement les gens qui comprennent vraiment les logiques internes, les intérêts, les intérêts des institutions. Puis souvent ils connaissent... c'est la méconnaissance des dossiers.

Donc, oui, les membres externes, là, sont bienvenus, mais ce n'est pas les gens qui seraient les plus à même de gérer, là, l'université, là.

Le Président (M. Marsan): M. le député de Charlesbourg, en terminant.

M. Pigeon: Oui. Merci, M. le Président. Bien, je vais me permettre juste de faire un peu de pouce, comme on dit, sur ce que vous venez de dire, puisque M. Mercier siège au conseil d'administration de l'Université Laval. On a beaucoup entendu récemment, bon, qu'à l'UQAM les membres externes n'avaient pas fait leur travail, etc. Parlez-nous brièvement de votre expérience personnelle. Comment ça se passe au conseil d'administration, que vous vivez? Puis est-ce que les internes jouent bien leur rôle? Est-ce que les externes jouent bien leur rôle? Comment ça se passe?

Le Président (M. Marsan): M. Mercier, en terminant aussi.

M. Mercier (Sylvain): Oui. Alors, bon, pour ce que j'ai pu voir, parce que ça ne fait pas quand même longtemps que je siège au conseil d'administration de l'Université Laval, mais, quand même, ce que j'ai pu voir, c'est que, bon, les externes jouent bien leur rôle, mais j'ai cru comprendre que les questions au conseil d'administration par rapport à la gestion qui est présentée, ou les documents qui nous sont soumis pour adoption, ou les résolutions qui passent, les questions proviennent davantage des membres de la communauté universitaire pour la façon, comment est gérée l'université. Les autres, en gros, disent oui ou non, mais en gros c'est oui, là, à ce qui est présenté. Mais j'ai très rarement vu... peut-être la dernière fois, où un membre nommé par le gouvernement a fait une intervention sur un truc, mais, sinon, habituellement c'est les membres de la communauté universitaire, étudiants, professeurs, enseignants, tout ça, qui vont poser davantage de questions lors du conseil d'administration pour davantage comprendre puis débroussailler un peu les choses qui sont présentées et même, des fois, amener de l'eau au moulin sur certaines pistes de solution. Souvent, les membres externes, bon, ils voient ça, mais ils ne comprennent pas toujours trop qu'est-ce qui se passe.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie beaucoup. Ceci termine notre échange avec le parti ministériel. Nous allons poursuivre avec l'opposition officielle, et je vais reconnaître la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de recherche et de développement. Mme la députée de Taillon, la parole est à vous.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Bonjour. Merci de nous accompagner dans ce dernier sprint avant la fin des consultations publiques. Puis soyez sûrs qu'à chaque fois, là, il y a comme un regard qui s'ajoute et qui est pertinent pour nous, même si on a entendu plusieurs, plusieurs groupes. Et vous représentez pour moi, je dirais, un groupe qui est fort important, parce que vous êtes à la fois des gens qui allez recevoir des services de formation dans une université, mais aussi vous êtes des universitaires, par la force des choses. Donc, vous n'avez pas... vous n'êtes pas des clients tout simplement, comme certains parfois voudraient bien le croire. Vous êtes chacun à votre niveau et, surtout quand vous êtes aux études supérieures, vous êtes souvent associés à des projets de recherche, vous êtes des universitaires en puissance pour plusieurs. Donc, je dirais que vous connaissez de l'intérieur ce qu'est une université. Vous le vivez de l'intérieur. Votre point de vue est donc important, même si vous n'y gagnez pas forcément votre vie.

Vous avez des mots forts dans votre mémoire, même s'il n'est pas très long. Vous commencez par dire que le projet de loi est illégitime, essentiellement à cause du processus qui a mené à sa constitution. J'aimerais peut-être que vous repreniez en développant un petit peu ces mots-là, parce que, dans votre texte, c'est une phrase dense, mais vous dites donc: C'est illégitime. Ça veut dire que ça n'a pas... Quand une loi est illégitime, là, c'est... c'est presque une contradiction dans les termes. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus pour commencer.

Le Président (M. Marsan): Mme Tremblay-Racicot.

n(15 h 40)n

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): C'est certain que le processus est légal, mais ça ne veut pas dire qu'il est illégitime. Il y a une nuance à faire. Pour moi, qu'est-ce qui aurait été un processus légitime, ça aurait été une consultation pas comme... pas comme celle aujourd'hui, là, c'est davantage une réflexion ouverte de la part des... Ça aurait pu prendre la forme d'états généraux, par exemple, donc un processus, là, de réflexion ouvert à tous les membres de la communauté ou aux principaux intéressés, qui se serait aussi attardé à la question du financement.

Donc, c'est sûr que le processus est légal, mais ce n'est pas légitime, je veux dire, il aurait fallu un processus ouvert avant, en amont.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: En amont, oui, je comprends bien. Une des questions que, moi, j'ai quand on parle de ce type de processus, c'est: Qui cela doit-il inclure? Alors, si je regarde, par exemple, les gens qui sont venus nous parler, comme on est dans le cadre de consultations publiques sur un projet de loi, c'est en très grande majorité les acteurs les plus immédiatement concernés, les directions, les professeurs, les étudiants, avec un certain nombre de groupes autres qui sont venus, comme l'ordre des comptables ou... qui sont venus.

Mais comment associer, je dirais, l'ensemble de la société québécoise à une réflexion collective sur des sujets qui à la fois sont complexes mais en même temps qui les concernent? Parce qu'une des raisons pour lesquelles on est ici, vous et moi, c'est que les universités gèrent des fonds publics, et donc on a à rendre des comptes à l'opinion publique de ce qu'on fait de cet argent-là.

Donc, avez-vous une idée de qui vous associeriez à une réflexion? Ça va jusqu'où, la réflexion?

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Tremblay-Racicot.

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): C'est une excellente question. En tant qu'étudiante, je crois que les parties... c'est les parties prenantes qui seraient les principales intéressées, là, pour répondre, mais c'est certain que la population doit être consultée à un moment ou à un autre. La manière dont elle devrait être consultée, c'est une excellente question. C'est une énigme.

Mme Malavoy: Donc, vous... Non, mais, en fait, ce n'est pas une question...

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon, excusez.

Mme Malavoy: Oui, merci. Là, on commence à accélérer le tempo.

C'est une question que je vous pose très honnêtement, là, parce que je trouve que c'est toujours l'aspect peut-être le plus difficile: c'est d'associer des gens qui ne sont pas immédiatement concernés.

Vous avez parlé des parties prenantes. Je pense que c'est hier, il y a un groupe qui nous a parlé de la théorie des parties prenantes. Je ne sais pas si c'est à ça que vous faites référence. Semble-t-il qu'il y a une théorie en gestion ou en gouvernance, là, que je ne connais pas bien mais qui s'appelle la théorie des parties prenantes.

Dans la discussion que nous avons eue juste un petit peu avant, en réponse aux questions... je crois que c'est de mon collègue de Charlesbourg, il vous a demandé d'évoquer votre expérience dans le... la participation à un conseil d'administration. Une des choses que certaines personnes nous ont dites puis qui est un élément d'inquiétude, puis là je court-circuite peut-être un peu les dernières semaines, mais il me semble avoir entendu assez régulièrement la crainte que les membres de l'externe ne soient pas suffisamment préparés ou n'aient pas suffisamment les clés pour comprendre de quoi il s'agit, je ne parle pas juste de gens dont les enveloppes n'étaient pas ouvertes, là, O.K., bon, mais n'aient pas forcément les outils pour décoder. On nous a dit: Des fois, c'est extrêmement complexe, on s'y perd un peu, surtout s'il s'agit de considérations d'ordre budgétaire. On nous a dit aussi ce que vous avez, je crois, évoqué tout à l'heure.

Finalement, on semble vouloir donner beaucoup de place aux membres externes, qu'on appelle, dans le projet de loi, indépendants, mais, à toutes fins pratiques, ces gens-là sont plus des gens qui vont appuyer la direction. Donc, l'esprit, à proprement parler, critique dont certains sont venus nous dire ce matin qu'il fait partie même de leur définition de tâches... Je pense que c'est dans la convention collective des professeurs de l'Université de Sherbrooke qu'on a bel et bien inscrit que d'avoir un esprit critique face à son institution, ça fait partie du rôle de professeur. Donc, cet aspect-là d'esprit critique, dans votre expérience, ne serait pas amélioré avec ce qu'on voit là dans le projet de loi. C'est une des choses que vous craignez?

Le Président (M. Marsan): M. Mercier.

M. Mercier (Sylvain): Je ne croirais pas que ce soit amélioré. En tout cas, avec l'expérience que j'ai, qui est courte, mais quand même, où est-ce que les personnes, les membres externes au conseil d'administration ne posent presque pas de questions et disent oui en aval à tout, probablement que certains comprennent très bien, d'autres ne comprennent pas tout bien les enjeux qui sont présents. Je ne peux pas juger sur... s'ils lisent ou pas les documents qui sont soumis. Ils sont soumis à l'avance; j'imagine qu'ils le font.

Il faut penser aussi que ces membres externes là... Quel est l'avantage d'un membre externe à siéger sur un conseil d'administration universitaire? Ça fait toujours une belle fleur au C.V., donc... Et qu'est-ce que ça leur donne comme avantage? Je me pose cette question-là et je me dis: Est-ce que ça... Il y a toute la question de vouloir aider l'institution, oui, mais est-ce que le regard critique est suffisant? Moi, l'expérience que j'ai, à mon avis, pour le moment, ils ne sont pas encore assez critiques lors des décisions, alors que la communauté universitaire, professeurs, étudiants, enseignants le sont davantage.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: En fait, ce que cela devrait être, c'est d'ajouter un regard autre, un regard qui n'est pas le regard des gens qui sont quotidiennement aux prises avec les enjeux, les défis et le travail de la communauté universitaire.

Mais il y a deux questions qui se posent. Il y en a une probablement, question, qui pourrait se régler avec de la formation, que les gens aient des séances de formation et puis qu'ils connaissent un certain nombre de règles du jeu.

L'autre question, qui est plus délicate, c'est le poids que l'on donne aux gens de l'extérieur. Est-ce qu'on leur donne le poids majoritaire? Il n'y a personne qui est venu nous dire, et, moi, je ne le crois pas non plus, que ce n'est pas bon d'avoir un regard de l'extérieur. Par exemple, même si la mission d'une université n'est pas d'être parfaitement superposée aux besoins immédiats du marché du travail, c'est beaucoup plus large que ça, il reste que d'avoir des employeurs qui se préoccupent de la formation, ça peut être utile pour les universités. Le problème, c'est le poids qu'on leur donne. Le problème, c'est de dire: Dorénavant, et au conseil d'administration et dans les trois comités qu'on met en place, ils ont le pouvoir déterminant. C'est là-dessus, là-dessus, je pense, qu'il y a un problème plus important. Vous dites oui. Vous le voyez de la même façon?

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): On est tout à fait d'accord avec vous.

Le Président (M. Marsan): Oui, Mme Tremblay-Racicot.

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): On est tout à fait d'accord avec vous, madame. Je vous remercie de votre regard. Merci.

Mme Malavoy: Alors, la question...

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Oui, merci. La question que je me pose et que je vous pose aussi, là, parce qu'on n'est pas en train de conclure sur les projets de loi, mais on termine bientôt donc les consultations, c'est: Reconnaissons qu'il y a un certain nombre de difficultés que vivent les universités aujourd'hui. On ne va pas dire qu'il n'y a aucun problème puis que, bon, tout est parfait. Il y en a qui sont venus nous le dire: des professeurs sont venus nous le dire, des étudiants sont venus nous le dire, des... Bon. Reconnaissons qu'il y a un certain nombre de difficultés.

De votre point de vue, qu'est-ce qu'il faudrait améliorer ou changer? C'est quoi, les enjeux majeurs auxquels vous êtes confrontés et qui mériteraient qu'on s'y attarde, peut-être qu'on fasse un projet de loi, là, mais qui mériteraient qu'on essaie de modifier nos pratiques?

Le Président (M. Marsan): Mme Tremblay-Racicot.

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): C'est sûr qu'en termes de gouvernance, pour nous, ce qui serait le plus important, c'est d'augmenter la proportion des membres internes à l'université sur les conseils d'administration. Puis ça, ça peut être fait, là, pas nécessairement par un projet de loi mais par des ententes spécifiques ou venir vraiment, là, de l'université elle-même, de un.

De deux, c'est la question du sous-financement. En ce moment, les universités sont en mode équivalent temps complet, là. Donc, ils passent par tous les moyens pour avoir davantage d'étudiants en équivalent temps complet, et ce, souvent au détriment, là, du cheminement académique des étudiants. Puis il y a une augmentation de frais partout. Les étudiants ont de la difficulté à suivre leur cheminement académique, puis les augmentations, là, les bourses qui viennent pour faciliter leur cheminement, là, elles ne sont pas tout le temps élevées, là, en conséquence.

Donc, d'abord régler la question de sous-financement, puis ensuite regarder au niveau, là, de la gestion des universités par... passer par là mais par une plus grande proportion de membres internes à l'université sur les conseils d'administration.

Je ne sais pas si, Sylvain, tu as d'autres points à ajouter là-dessus.

M. Mercier (Sylvain): Non, c'est pas mal ça. En fait...

Le Président (M. Marsan): M. Mercier.

n(15 h 50)n

M. Mercier (Sylvain): Oui, merci. C'est pas mal ça. En fait, au conseil d'administration, il y a beaucoup de questions qui sont d'ordre financier, hein? Et, quand on doit jouer avec ça, bien, on... que les universités manquent d'argent, c'est très difficile d'en arriver à des résultats qui sont d'ordre de développement durable pour l'université. On fait des choses à très court terme parce que le financement, il n'est pas là. Donc ça, je pense que c'est une des très grosses problématiques. On l'a mentionné, et je pense que d'autres l'ont fait également.

Et je pense qu'il y aurait à améliorer, dans peut-être les universités en général ? à l'Université Laval, ça va quand même bien ? la question de la transparence et de la partie prenante ou de la consultation des membres de l'université, tous les membres de l'université. Une université existe parce qu'il y a des étudiants, existe parce qu'il y a des professeurs, existe parce que ce bon monde là font fonctionner l'université, et, s'ils sont davantage consultés, il faut penser que ce monde-là font partie aussi de la société. C'est des gens comme vous et moi, là, qui vont à l'université. Il y a toutes les facultés, bien, ça veut dire qu'il y a des gens qui sont formés dans différents domaines, un peu comme la société. C'est un reflet, d'une façon ou d'une autre, de la société. Donc, il ne faut pas penser que ces gens-là sont des universitaires un peu coincés, là, sur leurs recherches, sur leurs choses, mais ils font aussi partie d'une société et ils en participent.

Donc, je parlais un petit peu de la consultation, dans le fond, plus large, universitaire qui ferait partie d'un processus de transparence, et je pense que ce que nous avons à l'Université Laval, avec le conseil universitaire, est déjà une très bonne piste de solution en ce sens-là.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Il y avait encore, je crois, une intervention.

Le Président (M. Marsan): Oui, excusez. Mme Tremblay-Racicot.

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): C'est important de mentionner aussi que les plus gros problèmes qu'on a à l'université lorsqu'on a des conflits, là, avec les administrations, c'est quand on n'a pas été consultés, quand on n'a pas fait partie du processus de décision dès le départ. C'est là qu'il y a des décisions qui se prennent qui... il y a certains éléments qui n'avaient pas été pris en considération, puis on se retrouve avec les problèmes à la fin parce qu'on n'a pas été consultés. Donc, c'est vraiment important, là, d'impliquer les parties prenantes, là, dès le départ pour qu'on arrive à des solutions qui conviennent à toutes les parties prenantes, là.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vais reconnaître maintenant Mme la députée de Champlain. La parole est à vous.

Mme Champagne: Merci, M. le Président. Alors, bonjour à vous deux. Vous êtes un peu nos desserts, hein, nous sommes sur la fin de cette commission parlementaire. C'est fin, hein? Alors donc... Bien, oui, alors vous pourriez être tous un peu nos enfants. Et on vous regarde aller, et vous êtes en deuxième et troisième année d'université, donc vous avez déjà un bon vécu.

Et je me rends compte, après avoir rencontré près de 50 groupes, là, qu'il y a comme un message qui passe, qui est un peu le suivant, puis je le dis dans mes mots, c'est: Utilisons la richesse qui est déjà là, là. Elle est là, là, puis servons-nous-en, puis servons-nous-en intelligemment, même au niveau des C.A. Et prenons garde à faire entrer... pas, absolument pas des ennemis, là, mais des gens de l'extérieur, là, qu'on... J'ai l'impression qu'on veut les préparer, les former, là. Regarde, là, en quelque part ils ont leur place, mais, moi, la petite conclusion que j'en tire rapidement avec vous autres, c'est qu'il y a nécessité de revoir, là, cette partie-là du projet de loi avec beaucoup de sérieux.

Une chose également, c'est que votre réflexion collective dont vous parlez, que certains ont appelée états généraux, elle est souhaitée, elle est souhaitable pour toutes sortes d'autres sujets, dont le financement. On sentait que tous les étudiants voulaient nous en parler, et même le Conseil du patronat voulait nous en parler. Et je disais hier à un groupe que je rêve de les voir devant vous à discuter pourquoi, eux autres, ils souhaiteraient une augmentation des frais de scolarité, puis en discuter, là, de collègue à collègue, parce que ce sont des gens qui ont tous des familles, qui ont des enfants, puis ils ont peut-être des bons arguments qu'il faudrait apporter. Moi aussi, je la souhaite, cette rencontre-là.

Et je vous amène sur la question. Il y a un groupe ou deux qui nous ont parlé de notre rôle comme parlementaires quand on reçoit les universités à tous les trois ans pour des redditions de comptes puis qui se disent que c'est plus une rencontre de revendication. Je me rappelle 2003-2007, tout le monde voulait 400 millions. Alors, après 50 fois, tu dis: Je pense que j'ai compris. Par contre, est-ce que j'ai le 400 millions? C'est toujours ça. Par contre, ça devrait être possiblement autre chose, cette rencontre-là, et certains étudiants ont même dit: On devrait nous-mêmes pouvoir aller rencontrer les parlementaires et leur dire, après deux ans, trois ans, ce qu'on aime et ce qu'on n'aime pas. Alors, qu'en pensez-vous?

Le Président (M. Marsan): M. Mercier.

M. Mercier (Sylvain): Je suis tout à fait d'accord avec ça. Je pense que ça prend davantage de discussion entre les parlementaires et peut-être les universités sur le mode de financement.

Également, ce que vous avez mentionné avec un états généraux, ce serait souhaité. Je ne sais pas où est-ce qu'on peut en faire la demande officielle, mais disons que j'en parle comme ça.

Excusez-moi. Pour en revenir à ce que vous disiez...

Mme Champagne: Peut-être une rencontre avec le Conseil du patronat. Pourquoi pas?

M. Mercier (Sylvain): Bien, en fait, une rencontre ouverte à tous, et ça, je pense que c'est principalement là la question, où est-ce que même la société québécoise pourrait s'impliquer d'une façon ou d'une autre, M. et Mme Tout-le-monde, dans ça, parce qu'ils ont leur mot à dire aussi. Ils sont pères de famille, elles sont mères de famille, ils ont des enfants, ou ils vont en avoir, ou ils en ont déjà eu, donc ils savent un peu qu'est-ce que c'est, l'éducation, et je pense que... Je ne pense pas qu'il y ait aucun citoyen au Québec qui serait contre l'éducation et contre la liberté actuelle qu'on a, compte tenu que c'est quand même relativement encore peu cher, étudier, et il faut que ça reste comme ça pour avoir accès. Si ça devient trop dispendieux, étudier, il y aura pas mal d'étudiants qui ne pourront pas compléter des études universitaires, et, comme nation, je pense qu'on s'en va vers quelque chose qui est négatif par rapport aux autres nations, qui seront probablement plus développées et plus instruites que nous.

Le Président (M. Marsan): Ceci termine nos échanges avec l'opposition officielle. Nous allons poursuivre avec le porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'éducation, d'identité et de culture. M. le député de Chauveau, la parole est à vous.

M. Deltell: Merci, M. le Président. Madame monsieur, bonjour. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Ça me fait plaisir de vous rencontrer ? ce ne sera pas tellement long, mesdames. Merci.

Je voulais vous dire: Je suis un ancien de l'Université Laval, donc j'ai un gros préjugé favorable. Et je crois que, s'il y a un endroit dans le monde universitaire au Québec où la collaboration de gens du secteur privé a été porteuse, et riche, et dense en retombées, c'est bien l'Université Laval. Je ne parlerai pas des extraordinaires performances de vos collègues sur le football, où ils démolissent toutes les universités les unes après les autres les dimanches après-midi, mais ça illustre quand même très bien le fait qu'on a réussi à développer un sentiment d'appartenance très fort, qui n'existait pas à l'époque où, moi, j'étais à l'école, parce que justement on a ouvert la porte à des gens de l'extérieur.

Puis, quand vous disiez tout à l'heure: Est-ce qu'il y a des... qu'est-ce que les gens de l'extérieur peuvent apporter?, ça serait quoi, leur... vous savez, il y a des gens qui aiment ça contribuer, puis qui aiment ça aussi offrir, puis qui ont une expertise, puis qui ont du potentiel, puis qui veulent redonner à ceux qui leur ont déjà beaucoup donné. Ça existe. Et je reprends encore les propos du député de Lévis, il y a deux jours, qui disait que, dans tous les milieux au Québec, il y a des gens d'extraordinaire potentiel qui ont à coeur l'avenir de leur région et qui peuvent et qui veulent s'investir, et qu'on doit les accueillir à bras ouverts dans les conseils d'administration, particulièrement des universités.

C'était un petit mot d'introduction pour la question que je veux vous amener sur la reddition de comptes, où vous dites que les trois comités, gouvernance, finances et ressources humaines, composés presque exclusivement de manque externe... de membres externes, pardon, bon, vous n'êtes pas tout à fait en faveur de ça. J'aimerais vous entendre, je veux vous écouter là-dessus. Qu'est-ce qui fait que, selon vous, des gens de l'interne seraient mieux que des gens de l'externe, en majorité, j'entends, pour ces trois comités? Je vous écoute.

Le Président (M. Marsan): M. Mercier ou Mme Tremblay-Racicot. Allez-y.

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): Oui, on dit oui aux membres externes mais dans une juste proportion. Pour nous, une juste proportion, ce n'est pas la majorité. Est-ce qu'on voit des étudiants aller siéger sur les conseils d'administration des grandes entreprises parce qu'ils ont une contribution à apporter? Pas nécessairement.

Donc, les trois comités sont... leur instauration serait déplorable dans la mesure où ils seraient composés en majorité de membres externes. S'ils étaient composés en majorité de membres internes, on n'y verrait pas de problème parce que ce serait un gage de respect, là, des intérêts, là, de l'université propres et non d'intérêts x qu'on ne connaît pas, là.

Le Président (M. Marsan): M. Mercier.

M. Mercier (Sylvain): Peut-être pour ajouter, il y a des intérêts, je dirais, des fois logiques ou ponctuels que les membres, ou une majorité de membres, ou exclusivement des membres externes ne pourraient pas voir dans ces comités-là, c'est-à-dire que des fois le fonctionnement de l'université, comme on l'a dit, ça peut être complexe. Il y a certains éléments qui... il faut voir, il faut connaître le... ou être à l'intérieur pour connaître certaines choses. Si c'est une majorité ou presque exclusivement des membres externes, ils ne verront pas ça passer, ils ne pourront pas être en mesure de bien réagir face à ce que l'université veut développer ou les projets qu'elle a, de sorte que, par après, ça peut être un peu plus compliqué parce qu'ils n'ont pas vu venir certains paramètres que, de l'interne, on aurait davantage vus. Donc, je pense qu'ils sont nécessaires, les membres externes, mais dans une juste proportion.

Le Président (M. Marsan): M. le député de Chauveau.

n(16 heures)n

M. Deltell: Merci, M. le Président. Ne croyez-vous pas que, si ces gens de l'externe étaient formés sur comment ça fonctionne, une université... C'est bien beau, avoir de la bonne volonté puis une expertise, mais, si on ne sait pas comment ça fonctionne, on n'est pas bien, bien avancé. Si ces gens-là avaient une formation obligatoire et rigoureuse...

Et, dans un deuxième temps, c'est justement, sans nécessairement être majoritaires à 95 %, mais s'ils étaient majoritaires, mais s'il y avait des gens de l'interne qui étaient présents pour leur sonner l'alarme, le cas échéant, vous ne pensez pas que justement ce serait une bonne combinaison?

Le Président (M. Marsan): Mme Tremblay-Racicot.

Mme Tremblay-Racicot (Fanny): En fait, on ne voit pas vraiment pourquoi les membres externes devraient être majoritaires. Ça vient d'où, ça? Les membres externes sont bienvenus, mais pas nécessairement au sein des conseils d'administration. Il y a des endroits, là, où ils peuvent apporter une contribution beaucoup plus profitable: peut-être dans le domaine de la recherche, dans le domaine des stages, de la coopération entre... l'arrimage entre l'entreprise et les études, des programmes coop, oui, c'est très bien, là, peut-être au sein des facultés, je ne sais pas, mais pas nécessairement au sein des conseils d'administration des universités. On ne voit pas en quoi ils devraient être majoritaires. Ça, on n'a pas encore compris ça, là. Si vous pourriez nous l'expliquer.

Le Président (M. Marsan): Ceci termine nos échanges aujourd'hui. Je voudrais vous remercier, Mme Tremblay-Racicot, M. Mercier, de nous avoir exposé le point de vue de l'Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures.

J'inviterais les représentants du Mouvement des associations générales étudiantes de l'Université du Québec à Chicoutimi à venir prendre place, s'il vous plaît.

Je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 1)

 

(Reprise à 16 h 5)

Le Président (M. Marsan): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Il nous fait plaisir d'accueillir le Mouvement des associations générales étudiantes de l'Université du Québec à Chicoutimi, et je reconnais immédiatement Mme Schroeder-Tabah, qui est la présidente. Je vais vous demander de nous présenter les gens qui vous accompagnent, et, par la suite, vous avez 15 minutes pour nous exposer... pour faire votre exposé. Merci.

Mouvement des associations générales
étudiantes de l'Université du Québec
à Chicoutimi (MAGE-UQAC)

Mme Schroeder-Tabah (Rachel): Merci, M. le Président. Mme la ministre, membres de la commission, nous aimerions tout d'abord commencer par... en vous remerciant de l'opportunité qui nous est offerte de présenter notre opinion, celle du Mouvement des associations générales étudiantes de l'Université du Québec à Chicoutimi.

J'ai avec moi, aujourd'hui, Pierre-Luc Gagné, qui est vice-président aux affaires institutionnelles au MAGE-UQAC. Il siège avec moi au conseil d'administration de l'Université du Québec à Chicoutimi ainsi qu'à trois autres conseils d'administration au sein de l'université. À ma droite, ici, nous avons Mme Léa St-Pierre Castonguay, vice-présidente aux affaires externes, qui siège à trois conseils d'administration de par sa tâche et par ses intérêts.

Alors, pour débuter, il est important de mentionner que le MAGE-UQAC se veut un important acteur de la région mais surtout de l'université de cette même région. Avec ses 6 500 membres et sa collaboration exemplaire avec la communauté universitaire, le MAGE-UQAC a un impact important sur le développement de l'université. Divers points concernant le projet de loi n° 38 seront traités à travers notre présentation, chacun de ces points a ses particularités et son importance propre, et nous sommes ouverts à toute question afin de pousser plus loin la réflexion collective sur le projet de loi.

Je passerai donc la parole à Léa St-Pierre Castonguay pour la prochaine partie.

Le Président (M. Marsan): Mme St-Pierre Castonguay, la parole est à vous.

Mme St-Pierre Castonguay (Léa): Merci, M. le Président. Mme la ministre, membres de la commission, nous voudrions commencer notre présentation par un point qui n'est pas couvert par les recommandations de notre mémoire, la reddition de comptes. Nous saluons les principes tels qu'ils sont présentés dans le projet de loi et croyons que leur application permettra aux communautés universitaires et à la population en général de mieux comprendre les décisions prises.

Le second point que nous voudrions discuter est le concept de parité hommes-femmes. Lors de la présence de l'IGOPP à cette commission, il a été discuté de la difficulté de remplir une parité parfaite de 50 %. Tout comme l'IGOPP, nous trouvons une parité de 50 % difficile à remplir. De plus, les professeurs, chargés de cours et les étudiants ont à nommer eux-mêmes les membres siégeant sur le C.A. de notre université, et nous trouvons difficile de réconcilier cette même liberté de nomination avec un devoir de parité. Puisque le projet de loi ne mentionne aucune méthode pour obtenir cette parité, nous sommes d'avis que 40 % d'hommes et 40 % de femmes, laissant un jeu de 20 %, permettraient à la communauté universitaire de mieux réconcilier le devoir important de parité avec le devoir de nomination de ces représentants sur le C.A.

Tout comme notre recteur, M. Belley, l'a mentionné lors de sa présence à titre de secrétaire-trésorier de la CREPUQ, nous voulons soulever le point de la différence appliquée aux C.A. du réseau UQ.

Les universités au Québec, elles sont soumises aux mêmes principes de financement, qu'elles soient membres du réseau UQ ou non. Ce financement est le même pour tous, et, à ce titre, il nous semble inconcevable que les UQ aient un nombre différent d'administrateurs provenant du gouvernement. Nous demandons donc que soit retirée l'exigence d'avoir plus de membres nommés par le gouvernement sur les C.A. du réseau de l'Université du Québec. De plus, l'apparence de contrôle provenant du gouvernement pourrait potentiellement miner la créativité et l'innovation de la communauté touchée, surtout si nous sommes les seules victimes de cette mesure.

Mme la ministre, considérant que vous proposez d'imposer plus d'administrateurs du gouvernement sur les conseils d'administration de l'UQ, nous sommes à même d'interpréter cette action comme étant une prémisse à un financement différencié des UQ versus les institutions dites privées.

Je voudrais passer la parole à M. Pierre-Luc Gagné.

n(16 h 10)n

Le Président (M. Marsan): M. Gagné, la parole est à vous.

M. Gagné (Pierre-Luc): Merci, M. le Président. Mme la ministre et les membres de la commission. Pour toute université, l'événement le plus important concernant sa gestion est la nomination de son recteur. Ça ne fait aucun doute. En lien avec l'importance de cet événement, nous devons, en premier lieu, féliciter l'aspect du projet de loi n° 38 concernant cet nomination en lien avec le réseau UQ. En donnant cette immense responsabilité directement aux conseils d'administration, alors que le gouvernement détenait ce droit par le passé, l'apparence de crédibilité de ces mêmes conseils d'administration s'en voit augmentée.

Cependant, la loi se réfère à la procédure de nomination établie par l'université comme étant valable si celle-ci assure des chances égales envers les membres internes et externes à l'université. Nous sommes d'accord sur ce principe, mais voulons mettre en garde la commission sur une interprétation qui n'assurerait pas une crédibilité pour les conseils d'administration.

En effet, un conseil d'administration qui s'accompagnerait d'un comité de sélection qui devrait répondre à des critères de confidentialité ne pourrait présenter qu'un seul candidat au C.A. afin de protéger les candidatures qui n'ont pas été retenues. Comment, alors, si le C.A. n'a accès qu'à un seul candidat, peut-il prendre une décision responsable? Une simple approbation sans être au courant du processus de sélection ne permet pas, selon nous, au C.A. de défendre sa décision en tant qu'entité.

Nous mettons en garde la commission, et, comme notre mémoire le mentionne, recommandons que les conseils d'administration puissent avoir accès à une pluralité de candidatures. De cette façon, ils pourront justifier leur décision. Évidemment, si les C.A. voient les candidats avant leur nomination, l'aspect de confidentialité est absent. Pourtant, un conseil d'administration peut signer un document de confidentialité au même titre qu'un comité de sélection.

Nous voudrions maintenant soulever le point de la présence d'un grand nombre de membres de la direction sur les C.A. des universités. Nous sommes entièrement d'accord de n'accorder présence sur les C.A. qu'au recteur, par désir de transparence. Cependant, nous nous questionnons sur la présence d'observateurs permanents provenant de la direction sur les conseils d'administration. Leur présence est requise pour les points dont ils sont les personnes de référence afin de permettre au C.A. de prendre une bonne décision, mais, de toujours les avoir assister à ces C.A. peut consister une atteinte à la crédibilité.

Je vais donc maintenant passer la parole à ma présidente.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Shreiber-Tabah.

Mme Shroeder-Tabah (Rachel): Oui. Merci, M. le Président. Donc, un point du projet de loi qui n'est pas discuté est la place laissée aux étudiants sur les conseils d'administration. Dans les faits, toutes les universités du Québec, au Québec, ont des places réservées aux étudiants, et nous ne voulons pas qu'elles voient ce nombre de place diminuer. La valeur apportée par les étudiants est indéniable. En tant que raison d'être des universités, nous apportons une particularité sur les C.A. qui ne se retrouve nulle part ailleurs.

Un point sur lequel nous tenons à soulever une discussion est la considération des membres étudiants comme des membres non indépendants. En tant qu'étudiants, nous ne contrevenons à aucun des critères d'indépendance tels que définis par le projet de loi, sauf celui d'être étudiants. Nous ne recevons pas un salaire de l'université, nous ne fournissons pas un bien ou un service, mais nous sommes considérés au même titre que les employés. La logique de cette affirmation n'est pas immédiatement apparente.

C'est pourquoi nous recommandons que les places étudiantes soient garanties dans ce projet de loi. Assister à des cours et utiliser les services connexes ne peut qu'améliorer notre apport. Il se peut qu'il y ait une apparence de manque de compétence, puisque nous n'avons pas l'expérience du reste des membres, mais nous sommes légitimes et la raison d'être de notre université. Les étudiants comprennent l'importance de la responsabilité d'administrateur, et nous prenons le temps de lire les documents et de connaître nos dossiers.

Nous recommandons donc deux étudiants par niveau d'accréditation. Chaque niveau d'accréditation possède une réalité différente qui se doit d'être présente au conseil d'administration.

À l'UQAC, il y a trois professeurs et un chargé de cours, donc quatre étudiants semblent justifiés. C'est peut-être une généralisation rapide, mais ça nous semble juste.

À titre d'information, nous avons, au MAGE-UQAC, épluché les procès-verbaux du conseil d'administration et nous avons observé que, même si les membres dits indépendants ne comptent que pour six des 17 membres, ils totalisent 70 % des absences pour la période entre septembre 2006 et mai 2008.

Je passerai donc la parole à M. Gagné pour la suite.

Le Président (M. Marsan): M. Gagné.

M. Gagné (Pierre-Luc): Merci, M. le Président. Un point souvent soulevé lors de cette commission est le concept d'indépendance mis en opposition au concept de compétence. Nous sommes également de l'avis que l'indépendance d'un conseil d'administration n'est pas en soi suffisante et que ce qui compte c'est la crédibilité des membres. Dans cette optique, nous voulons soulever un point sur la recommandation des membres indépendants.

Nous remettons en cause la méthode actuelle pour recommander un membre externe à l'UQAC. Présentement, la régie du recteur, qui est composée des membres de la gestion de l'université, s'assure de trouver des candidats qui sont compétents et représentent bien le fait régional. Nous croyons que cette méthode permet d'obtenir de bons candidats mais qui manquent de transparence. En effet, en étant recommandés par la direction de l'établissement, ces candidats ne manquent-ils pas de distance face à cette même direction?

Pour terminer, notre plus grande crainte face au projet de loi est de perdre la relation de concertation qui existe en ce moment à l'UQAC. C'est pour cette raison que nous demandons de conserver une majorité de membres internes. Je m'explique.

Puisque le C.A. de l'UQAC est composé à majorité de membres internes, ceux-ci doivent, lors des dossiers primordiaux, s'asseoir et concerter leur opinion pour obtenir une majorité. Les étudiants font partie de cette concertation. Si, par contre, le C.A. est composé d'une majorité de membres indépendants, nous craignons que cette concertation ne disparaisse. Les groupes qui siègent se radicaliseront pour que leur voix soit entendue, puisque la majorité claire sera entre les mains de membres dits indépendants.

À titre d'exemple, lors de la fin des années quatre-vingt-dix, l'UQAC s'est retrouvée dans une situation financière précaire. Pour pallier au problème, les professeurs ont accepté à l'époque une diminution de salaire de 6 %. Les syndicats étaient en accord, et le conseil d'administration a pu régler son problème financier. Ce besoin pour les membres de s'asseoir et de discuter pour obtenir une majorité a permis de travailler tous en accord, et l'UQAC tire encore aujourd'hui profit de cette concertation. C'est ce qui conclut notre présentation.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie beaucoup et je vais immédiatement reconnaître la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport. Nous allons débuter nos échanges. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Courchesne: Merci, mesdames, monsieur, merci d'avoir traversé le parc des Laurentides pour vous rendre jusqu'à nous. C'est fort apprécié.

D'abord, je dois dire que j'apprécie le fait que vous reconnaissez des éléments positifs du projet de loi. Vous avez mentionné la nomination du recteur, notamment, mais vous avez aussi mentionné, dans votre mémoire... salué, en tout cas, certains aspects positifs regardant la reddition de comptes. Parce que je crois que vous convenez qu'il y a des obligations qui doivent être assumées par le conseil d'administration. Et, dans ce sens-là, bien, je suis étonnée, au cours de cette dernière semaine, de voir qu'effectivement il y a des associations étudiantes qui diffèrent d'opinions entre elles. Et ça fait partie de notre système démocratique, et c'est pour ça qu'il y a une commission parlementaire.

Je répète qu'il a été impressionnant, tout au long de ces audiences, de voir la qualité des présentations des étudiants qui sont venus devant nous, avec des positions qui étaient fermes mais où on voit qu'il y a eu non seulement une réflexion, mais, dans votre cas, aussi je salue le fait que vous nous transmettez ce que vous vivez à l'Université du Québec à Chicoutimi, et ce que ça nous fait dire, c'est qu'effectivement ? puis ça, on l'a dit depuis le début ? la vie n'est pas nécessairement la même dans toutes les universités.

Par contre, comme ministre de l'Éducation membre d'un gouvernement, j'ai une responsabilité d'assurer une saine et rigoureuse gouvernance pour l'ensemble des universités. C'est ce qui explique l'importance de demander aux administrateurs d'exercer des obligations. Et je dois vous dire que vous prenez la peine... et je vais le dire publiquement puisque nos propos sont publics: Vous avez fait la recherche dans les procès-verbaux, vous avez cumulé une statistique de tous les procès-verbaux de mai 2006 à septembre 2008... ou l'inverse, septembre 2006 à mai 2008, et vous soulignez, alors que, dans les universités du Québec, les membres internes sont majoritaires, sont plus nombreux dans la plupart, vous avez noté que les externes cumulaient 70 % des absences. Je vous remercie de le dire.

Je vous remercie de le dire, il faut être honnête par rapport à ça. Et il est évident que tout ce débat autour de la gouvernance des universités, je souhaite qu'elle ait sensibilisé tous les administrateurs des conseils d'administration. Et ça fait partie des raisons pour lesquelles je juge et que le gouvernement juge qu'il faut légiférer. On a là un très, très, très bon exemple de ça. Alors, le projet de loi pourra certainement être amélioré. Et c'est pour ça aussi qu'il y a des commissions parlementaires, c'est pour nous permettre par la suite de bonifier et d'améliorer les projets de loi.

Vous dites aussi quelque chose d'important, vous revenez sur la notion d'indépendance puis vous dites: Il faudrait que l'indépendance soit aussi définie à l'égard de la direction de l'établissement. Vous êtes les premiers à nous dire qu'il y a trop de membres observateurs issus de la direction de l'institution présents au conseil d'administration. Je vous félicite pour ça aussi. On a beaucoup entendu que les membres externes suivaient beaucoup trop la direction des dirigeants de l'université. Il y avait comme une tendance naturelle à suivre trop l'opinion ou les recommandations des dirigeants.

Alors, quand vous nous parlez de... Moi, j'aimerais ça, à ce moment-là, que vous nous disiez ce que ce serait, selon vous, une proportion idéale d'administrateurs indépendants, parce que le député de Lévis va peut-être vous en parler tantôt, particulièrement dans des régions comme la vôtre, le foisonnement, l'implication, la... Tu sais, l'université est au coeur du développement social, culturel, même économique, mais il y a une réalité qui se vit chez vous qui ne se vit pas de la même façon dans un grand centre urbain.

Alors, est-ce que, chez vous, par exemple à Chicoutimi, l'intérêt du membre externe, quand il est présent, on s'entend, quand il assiste, est-ce que c'est un intérêt qui est plus fort ou plus important pour faire grandir l'université, pour permettre à l'université de se développer plus rapidement, même, plus rapidement, même?

n(16 h 20)n

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Gagné.

M. Gagné (Pierre-Luc): D'accord. Merci, Mme la ministre. Vous avez tout premièrement parlé de l'absence des membres. On voulait le souligner, c'est dans une mentalité d'amélioration des compétences des membres des conseils d'administration. Ce qu'on considère, c'est qu'il faut toujours essayer d'améliorer cette compétence. Donc, en soulignant cette absence plus prononcée de la part des membres indépendants, on veut rendre le problème public. On veut que les gens soient conscients qu'il y a un travail à faire sur ce point-là.

Par rapport à votre question du nombre de membres indépendants qui serait nécessaire par rapport à notre réalité régionale, nous, on le voit du point de vue du très bon lien qu'on a réussi à obtenir avec notre direction et notre communauté universitaires au fil des années. On travaille très bien. Et la crainte qu'on a, c'est qu'une modification du pouvoir politique qu'on a en ce moment viendrait affecter cette relation-là qu'on a avec la direction et la communauté universitaires.

Donc, en ce sens, présentement, avec une minorité de membres externes ? de membres indépendants, selon le projet de loi ? on est parfaitement confortables. Le rapport est très, très important. On a des membres de qualité qui siègent sur notre conseil d'administration à Chicoutimi. Mais on maintient que la relation que l'on a avec les membres qui viennent de l'interne est très importante parce qu'elle nous permet justement de se concerter, de s'asseoir avec les acteurs, de prendre des décisions que normalement on n'aurait pas prises par nous-mêmes et que normalement les professeurs, les chargés de cours n'auraient pas prises par eux-mêmes.

Cependant, je réitère notre désir de voir moins de membres de la direction siéger sur les conseils d'administration parce que leur présence ? c'est comme ce qui a été discuté par le passé à la commission ? influence énormément les membres indépendants. Donc, de voir seulement le recteur et d'avoir les membres de la direction à titre d'observateurs lors de leurs points, et non pas nécessairement à titre d'observateurs permanents qui sont là constamment sur le C.A. et qui prennent la parole, si on leur permet d'avoir ce type d'observateurs là, de leur empêcher le droit de vote, ça ne viendrait pas nécessairement changer beaucoup de choses. Donc, c'est ça.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Courchesne: C'est la présidente du Syndicat des professeurs de l'Université de Sherbrooke, ce matin, qui disait que les dirigeants des universités ont beaucoup d'ascendant, et c'est vrai.

Si on lie ça au fait des absences, est-ce que je comprends que vous êtes d'accord, par exemple, avec l'article de loi qui dit... Puis là je veux savoir si, selon vous, ça devrait être le président du conseil... Parce que le président du conseil a quand même un rôle important dans sa relation avec les membres du conseil, qu'ils soient internes ou externes, il est le président du conseil. Et il y avait un article de loi qui disait qu'il doit évaluer la performance des autres membres du conseil selon les critères établis par le conseil, y compris le premier dirigeant de l'entreprise. Moi, je veux avoir votre opinion, parce que, dans le cas de ceux dont vous nous parlez, si on les évalue... Parce que vous dites: Ça doit être décrit publiquement qu'il y a 70 % d'absence. Mais qui va le dire publiquement, tu sais, qui va le dire publiquement? Est-ce que vous êtes d'accord qu'une loi qui encadre ces règles-là, ça devient clair pour tout le monde? Quand tu acceptes d'être membre d'un conseil d'administration, bien, tu vas accepter d'être évalué mais d'être évalué justement sur tes présences et sur tes absences. Puis, si c'est bon pour les membres externes, pourquoi ce n'est pas bon pour les membres internes?

Je comprends que les membres internes... j'ai tout compris, là, depuis trois semaines, tout ce qu'on m'a dit sur les membres internes. Mais, tu sais, je veux dire, on est tous des êtres humains aussi, là. Dans les membres internes, il y en a des bons puis il y en a des moins bons. Puis, ce matin, on disait: Tu sais, les membres internes, ils peuvent être influencés aussi par l'ascendant des dirigeants, là. Ce n'est pas tout blanc et noir, là. Alors, je veux savoir est-ce que vous vivez bien avec un article comme celui-là?

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Gagné.

M. Gagné (Pierre-Luc): Je dois premièrement souligner qu'à l'UQAC on a une situation qui est unique au Québec alors que M. Belley, notre recteur, est également président du conseil d'administration. Donc, on est uniques, et il y a une clause, dans le projet de loi, on...

Mme Courchesne: ...qu'on ne peut pas cumuler les deux fonctions. Ha, ha, ha!

M. Gagné (Pierre-Luc): Exactement. La clause UQAC dans le projet de loi. Par contre, le projet de loi vient clarifier justement certains aspects sur la compétence des membres du conseil d'administration. Et, nous, dans les faits, ce qu'on observe, c'est que le conseil d'administration de l'UQAC est très au fait de sa situation.

Est-ce qu'on a nécessairement besoin d'un projet de loi pour améliorer nos compétences? J'en doute. Est-ce qu'on est capables de... par une directive, peu importe, d'améliorer... d'observer nos faiblesses, en tant que conseil d'administration, et les améliorer? Moi, je pense que oui. On n'est absolument pas contre une loi. Ça vient exactement clarifier qui est responsable: le président du conseil d'administration.

Comme je vous l'ai mentionné, on a une particularité. Il va falloir discuter des responsabilités qu'un nouveau président du conseil d'administration aurait, parce que justement on vivait dans une situation particulière. Mais on est relativement à l'aise avec le projet de loi sur cet aspect-là, oui.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vais maintenant reconnaître le député de Charlesbourg.

M. Pigeon: Oui. Merci, M. le Président. Bonjour... ou bonsoir, presque. Moi, ça m'a intéressé quand vous avez raconté que c'étaient des gens de grande qualité, les externes qui siégeaient. Et je pense que ça soulève un point qui mérite d'être souligné, je me permets de le faire, là.

Le choix des membres externes est extrêmement important. Vous avez soulevé le problème des absences, etc., et je pense qu'il faut absolument que, dans le faits et pas rien que dans le projet de loi, on puisse s'assurer que les membres externes sont bien choisis, qu'ils sont compétents, et qu'ils aiment beaucoup l'université, et qu'ils soient là vraiment pour l'aider. Et ça, je crois comprendre que vous trouvez que les personnes qui ont été choisies chez vous sont de bonnes personnes à ce sujet-là, et je suis heureux d'entendre ça.

Moi, j'aurais une question concernant ce que beaucoup ont soulevé comme étant un problème dans les universités, c'est la compétition entre universités. Et on a eu des profs qui sont venus ici, par eux-mêmes, qui nous ont fait une suggestion et qui a été de ressusciter, si je puis dire, le Conseil des universités, de sorte qu'il y aurait au Québec un organe où se discuterait, je dirais, un peu la stratégie générale universitaire du Québec et qui peut-être permettrait d'arbitrer certains conflits. Parce que, tout le monde le sait, là, la situation de la compétition, c'est... Avez-vous déjà pensé à ça? Ça vous dit quoi, ça, cette question-là de compétition, puis en même temps peut-être de cet organisme, le Conseil des universités?

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Schroeder-Tabah.

n(16 h 30)n

Mme Schroeder-Tabah (Rachel): Oui. Donc, c'est sûr que l'aspect de compétitivité peut être négatif et positif, négatif dans le sens où est-ce qu'on s'arrache nos étudiants: on veut le plus d'étudiants possible. Par contre, une compétitivité veut aussi dire que chacune des universités va se forcer peut-être plus à développer son champ de compétence et sa qualité en tant qu'université.

Ceci étant dit, une organisation qui viendrait mettre en concertation les différentes universités au niveau du Québec, ça existe en partie déjà au niveau de la CREPUQ où il y a une discussion qui peut se faire.

Je passerais peut-être la parole à Pierre-Luc pour en discuter plus, à ce niveau-là, d'une nouvelle organisation, la resuscitation de ce...

Le Président (M. Marsan): M. Gagné.

M. Gagné (Pierre-Luc): Le point, je le mets en perspective avec le réseau UQ où est-ce que présentement... ce n'est pas en lien avec le projet de loi n° 38, mais il y a dans l'air des discussions sur la place de l'Université du Québec. L'Université du Québec, en ce moment, effectue un peu cette tâche-là, est un petit peu le chien de garde, va s'assurer que la compétition qu'il y a au niveau des universités du Québec est saine.

Par contre, on ne voudrait justement pas voir les universités être laissées à eux-mêmes en matière de compétition, parce qu'on croit, oui, qu'une compétition peut être saine, mais se doit d'être, cependant quand même, régulée. Je dis «régulée», mais c'est beaucoup plus une question de discussion. Si les universités ont une plage pour discuter, ça ne peut qu'être positif. Si les universités s'assoient pour parler ensemble, comme ils le font déjà avec la CREPUQ, comme ils le font déjà au niveau de l'Université du Québec, ça ne peut être que positif.

Le Président (M. Marsan): M. le député de Charlesbourg.

M. Pigeon: Oui. Merci, M. le Président. J'aurais une dernière toute petite question. J'ai cru comprendre que certains d'entre vous étaient au conseil d'administration donc de l'Université du Québec à Chicoutimi, et un des éléments qui est souvent soulevé, c'est la question des conflits d'intérêts possibles des membres internes et aussi, dans certains cas, des membres externes.

Dans votre carrière d'administrateur, c'est-à-dire de membres du conseil d'administration, vous êtes-vous sentis des fois dans des positions difficiles où il y avait, bien sûr, intérêt, je dirais, des étudiants, mais au sens parfois financier ou autre, puis l'intérêt de l'université? Avez-vous senti ça?

Le Président (M. Marsan): Mme Schroeder-Tabah.

Mme Schroeder-Tabah (Rachel): Oui. Merci, M. le Président. C'est sûr que nous siégeons depuis le mois de mai de cette année, donc c'est beaucoup plus difficile de peut-être faire une grande discussion sur ce sujet. Par contre, les dossiers qui sont traités au conseil d'administration touchent toute la communauté universitaire et le mieux-être de cette université, et de la région, dans le cas du Saguenay?Lac-Saint-Jean, étant donné que c'est un des acteurs importants de la région.

Donc, en tant qu'étudiants, cette place que nous avons, oui, il peut y avoir des cas d'augmentation de frais afférents ou autres qui peuvent, oui, nous susciter plus d'intérêt ou qu'on peut dire: Est-ce qu'il y a une notion de conflit d'intérêts? je ne crois pas, je crois que l'opinion que les étudiants présentent est celle de tous les étudiants, qui vient non seulement... non, ce n'est pas parce qu'on ne veut pas juste chialer sur quelque chose, mais c'est vraiment une position que nous croyons juste et saine pour l'université. Je peux dire que, dans d'autres conseils d'administration où j'ai siégé, il y a eu des moments où est-ce que j'ai dit: Non, moi, je ne peux pas prendre cette décision, je suis en conflit... Et chacun des membres qui se présente là a une compétence et une capacité de faire cette distinction-là, et je crois que c'est important à noter.

Le Président (M. Marsan): Oui. M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: Alors, merci beaucoup pour le dépôt de votre mémoire. Je sais que votre université est branchée assez directement sur les principaux créneaux de développement de la région, donc c'est une université où il y a une interaction très forte entre le milieu régional et l'université, on le voit dans le quotidien. Et moi, dans votre conclusion, vous dites: «Des universités centrées sur la participation des membres de la communauté universitaire, avec une présence des membres de la communauté régionale et une place réservée aux étudiants qui soit directement affectée par les décisions des conseils d'administration, voilà ce que nous recommandons.» Donc, il est donc possible d'avoir des membres externes qui apportent un apport sérieux à l'université et positif.

Ma question est la suivante: Est-ce que je décode, dans votre intervention, qu'au fond ce qui fait que vous dites: Mais attention pour ne pas trop mettre de membres externes, c'est que vous dites: Il ne faut pas que ce soit uniquement à l'interne, des membres de la direction qui soient là. Est-ce que je vous décode bien quand vous dites ça? Puis, en disant, à ce moment-là, le fait qu'il y ait plus de membres internes de façon diversifiée, ça permet peut-être même aux membres externes d'être mieux informés. Est-ce que c'est ça que je décode?

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Gagné.

M. Gagné (Pierre-Luc): Oui. Quand on parle de membres externes, je ne vous dirais pas que c'est seulement une bonne chose, c'est essentiel d'avoir des membres indépendants sur les conseils d'administration. Surtout dans la situation régionale où est-ce qu'on se trouve, avec les membres que nous avons en ce moment, on peut vraiment engager des discussions claires et profondes sur les dossiers qui sont présentés à notre table.

Du point de vue des membres de la direction, c'est plutôt une crainte plus qu'une mise en garde profonde. Présentement, les membres de la direction qui siègent à l'UQAC ne vont pas nécessairement aller de l'avant, vont être présents. Ce que, nous, on met en garde, c'est justement sur cette présence-là, sur cette présence constante là, le risque, c'est de faire perdre de la crédibilité au conseil d'administration. Si les membres de la direction sont toujours présents comme ils le sont en ce moment, la crédibilité est moindre. Le conseil d'administration est vu par la communauté universitaire comme étant moins indépendant de cette même direction et donc va avoir plus de difficultés à aller à l'encontre de la direction quand c'est pour le bien de l'université. C'est pour cette raison-là qu'on met cette mise en garde là, et, d'un certain angle, d'un certain autre angle, on met en garde contre les trois membres qui sont nommés par le gouvernement, parce que présentement, à l'UQAC, ce nombre-là est de un: un membre est nommé par le gouvernement et on s'en arrange très bien. On se questionne sur la jonglerie que l'université va avoir à faire pour régler trois membres nommés par le gouvernement à l'intérieur de 17. C'est pour... Ça, c'est un autre aspect qu'on soulève aussi, là, un point de questionnement qui, je pense, est plus significatif que la présence des membres de la direction.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie. Ceci termine les échanges avec la partie ministérielle. Nous allons poursuivre avec l'opposition officielle, et je vais reconnaître la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de recherche et de développement, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Bonjour, merci d'être là avec nous pour les derniers moments de réflexion en consultations publiques.

Vous abordez plusieurs questions qui ont été abordées par d'autres, mais vous avez, sur certains éléments, un regard, je dirais, neuf, ou en tout cas qui ajoute une dimension qu'on n'avait pas jusqu'ici. Entre autres, quand vous parlez de l'indépendance des membres, vous dites, dans la première version, là, pas ce que vous avez lu, mais vous dites: Il faut revoir toute la notion d'indépendance des membres. Et vous vous référez d'ailleurs à votre analyse du rapport de l'IGOPP et vous dites: Ils n'ont pas conclu ce qu'on en a fait, de façon un peu simplifiée. J'aimerais vous entendre, peut-être là-dessus d'abord, sur ce qu'il faut revoir.

Mais j'enchaîne tout de suite avec une question plus précise sur vous, comme étudiants, que vous considérez comme étant aussi assez indépendants. Ça, c'est... Bien, je ne l'ai pas vu ailleurs. Vous dites: On devrait être considérés comme membres indépendants. Puis là vous dites: Parce qu'on n'a pas telle, et telle, et telle caractéristique. Donc, j'aimerais vraiment vous entendre sur la notion d'indépendance, comment vous la comprenez. Quels sont les biais qui sont donnés actuellement, dans le projet de loi, qui ne vous conviennent pas? Et en quoi, vous, vous seriez des gens indépendants?

Le Président (M. Marsan): Mme Schroeder-Tabah.

n(16 h 40)n

Mme Schroeder-Tabah (Rachel): Oui. Merci, M. le Président. Bon, premièrement, sur la notion d'indépendance, nous avons discuté, dans notre présentation tout à l'heure, que les membres externes, qu'on pourrait dire, sont choisis par la direction. Ils font une consultation à travers la région, mais par la suite ils choisissent les candidats qui... Donc, cette notion d'indépendance, dans ce cas-là, de la direction est un peu floue pour nous de voir que ces gens peuvent être indépendants s'ils sont choisis par cette même direction.

Par rapport aux étudiants, nous aussi, nous sommes indépendants de la direction de l'université dans le sens où nous sommes les principaux concernés par l'université, par contre, nous ne sommes pas... nous ne travaillons pas pour l'université dans le sens d'un emploi. Nous voulons le bien-être et nous avons à coeur le développement de notre université, donc, autant que les autres membres internes qui peuvent être indépendants d'une certaine façon aussi de la direction qu'ils sont juste des employés qui ne travaillent pas à l'administration générale de l'université. Donc, c'est tout un concept d'indépendance qui vient complètement flou pour nous dans ce sens-là où est-ce que l'indépendance ne peut pas être clairement définie et généralisée à tous. En tant qu'étudiants, nous sommes très conscients qu'il y a des différences à avoir entre ces différents groupes. Donc, c'est...

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Bien, si je pousse un tout petit peu plus loin, jusqu'ici certains nous ont dit: Remplaçons les termes «indépendants» par «externes». Donc, il y aurait des membres internes et des membres externes. Quand vous qui êtes de l'interne ? on ne peut pas nier que des étudiants soient de la communauté universitaire ? dites: Nous, on voudrait être considérés comme indépendants, donc ça veut dire qu'on ne peut pas juste dire «internes» et «externes». La notion d'indépendance ne recoupe pas, selon vous, le fait de l'appartenance ou non à la communauté universitaire.

Le Président (M. Marsan): Mme Schroeder-Tabah.

Mme Schroeder-Tabah (Rachel): En effet, l'indépendance ne dépend pas de la communauté externe ou interne, c'est vraiment une notion de la personne qui a une relation ou pas avec la direction. On parle beaucoup, dans notre cas, d'indépendance versus la direction. Donc, c'est là où est-ce qu'il faut se poser la question: Est-ce qu'il faut définir ce terme?

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Mais je remarque que c'est nouveau dans ce qu'on a eu comme échanges jusqu'ici, parce qu'à la limite on était plutôt en train de dire: Bon, bien, il y a des membres indépendants dans le projet de loi, mais est-ce qu'on doit les nommer autrement? Mais, vous, vous faites une réflexion d'une autre nature. Je ne sais pas ce qu'on en fera, comment on pourra l'intégrer, mais je souligne que c'est un élément effectivement intéressant de votre approche.

Autre réflexion que vous faites, c'est sur la présence des membres de la direction, O.K.? Donc, finalement, toute la question est de savoir quelles sont les meilleures conditions pour que les bonnes décisions se prennent et qu'il n'y ait pas prédominance de... ou poids politique trop important des gens qui sont déjà en place pour diriger. Soit que les membres externes soient simplement en train d'acquiescer à leurs orientations ou que, même, ils aient de l'ascendant sur les membres internes. Mais les membres de la direction ? je veux vous reprendre sur un aspect, là, parce que je me questionne ? vous ne voulez pas qu'ils soient, en trop grand nombre, présents au conseil d'administration. J'ai compris que ce n'était pas seulement membres votants, c'est même présents, c'est même qu'ils soient dans la pièce au moment où les délibérations se font.

Là où je vous renvoie la question, c'est que c'est facile de dire: Théoriquement, ils ne devraient venir que quand, à l'ordre du jour, il y a un point qui les concerne, mais, quand on est dans un conseil d'administration d'une université, il y a quand même beaucoup de liens entre les points. Ce n'est pas vrai qu'un dossier, par exemple, est uniquement à portée financière, il peut avoir une incidence sur le déroulement de la vie académique. Ce n'est pas vrai que parler, je ne sais pas, moi, du service aux étudiants concerne juste le vice-recteur ou la vice-rectrice qui s'occupe de cet aspect-là, ça peut aussi avoir des incidences sur les budgets. Alors donc, je voudrais mieux comprendre comment ce serait faisable que les gens de la direction ne soient pas là. Je comprends que vous disiez: On ne veut pas qu'ils aient le droit de vote, mais qu'ils ne soient pas là et qu'ils ne soient pas dans la discussion au moment où on essaie justement de mettre tous les morceaux ensemble pour avoir une décision cohérente...

Le Président (M. Marsan): Mme Schroeder-Tabah ou... M. Gagné.

M. Gagné (Pierre-Luc): Oui. Le questionnement est très bon. Je vous avoue que, nous, de la manière qu'on l'a vu au MAGE-UQAC, c'est du point de vue que, justement, la majorité des points qui sont discutés sont très clairement affectés à généralement un vice-recteur: vice-recteur Enseignement, Recherche, vice-recteur Secrétariat général, Ressources humaines, etc., et, à ce moment-là, ces recteurs-là ont à être présents.

Lorsqu'il y a des points qui vont aller chercher un cadre beaucoup plus large, nous, de la manière qu'on le voyait, c'est: le conseil d'administration est responsable du premier dirigeant de l'établissement, est responsable du recteur. Dans cette optique-là, le recteur, c'est sa responsabilité à lui d'aller défendre ces points-là face au conseil d'administration. La plupart du temps, un recteur va bien connaître ces points justement si c'est à être des points qui vont avoir un impact sur l'université au complet. Nous, on le voyait comme ça, parce que la responsabilité d'un conseil d'administration, une des responsabilités ? c'est dans le projet de loi ? elle est face au recteur. Et c'est comme ça que, nous, on réconciliait ce petit hic là de: bien là, il est là, mais on aurait quand même besoin de lui, là; il est absent, mais on aimerait l'avoir. Le recteur a cette responsabilité-là d'être au courant des points qui sont présentés, là.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Je comprends que cela vous semble suffisant, puis les autres viendraient à tour de rôle selon les points à l'ordre du jour. Je vais permettre à mon collègue, là, de prendre la place un peu.

Le Président (M. Marsan): Alors, M. le député de Saint-Hyacinthe, la parole est à vous.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Merci, M. le Président. Alors, bienvenue aux jeunes qui sont de l'Université de Chicoutimi, qui prennent la peine de venir nous présenter un mémoire aujourd'hui. Ça fait toujours plaisir de discuter et d'entendre les propos. Alors, votre mémoire est différent des autres mémoires étudiants qu'on a eus ici aujourd'hui. Il y a des notions qui sont très différentes. Et, moi, je veux faire du pouce un petit peu sur ce que Mme Malavoy, là, a ajouté tantôt.

Je veux bien comprendre qu'étant donné qu'une majorité de membres externes sont proposés par la loi n° 38 sur les C.A., est-ce qu'étant donné que vous vous considérez comme des membres externes sur les C.A., à ce moment-là, vous acceptez une majorité de membres externes ou bien si c'est une majorité interne? Je veux juste comprendre, là, votre vision.

Le Président (M. Marsan): M. Gagné.

M. Gagné (Pierre-Luc): On n'essaie pas d'avoir le beurre et l'argent du beurre, là, ici, quand même. Mais c'est dans un concept où est-ce que les étudiants ont... il n'y a pas seulement que la présence qui va influencer leur participation au C.A., mais à quel point est-ce qu'ils sont reconnus par le C.A. Nous, ce qu'on essaie de soulever, c'est la question de la présence des étudiants et qu'est-ce qu'ils peuvent apporter, en reconnaissant que ce sont des membres indépendants de la direction. Là, il y a peut-être une question de vocabulaire qui a été soulevée à plusieurs reprises, mais, nous, ce qu'on voit en termes d'indépendance, ce qu'on qualifie d'indépendance, c'est l'indépendance face à la direction. C'est ça, pour nous, qui est important. En ayant cette indépendance-là face à la direction, en la reconnaissant, je pense que là on peut reconnaître beaucoup plus les étudiants comme un élément primordial à un conseil d'administration d'université. C'est pour ça qu'on l'a formulé comme ça.

Le Président (M. Marsan): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Je peux prolonger? C'est dans un autre ordre d'idées, c'est... Dans vos recommandations, à un moment donné, vous mentionnez: «Nous recommandons que les comités responsables de l'évaluation des candidatures déposées soient [...] des comités de présélection» des candidats. Et je voudrais savoir, la composition de ces comités-là, c'est, j'imagine, par faculté, ou par spécialité, ou par programme. Comment vous voyez ça?

Le Président (M. Marsan): M. Gagné.

M. Gagné (Pierre-Luc): Donc, si je ne me trompe pas, présentement, la nomination du premier dirigeant, du recteur d'une université, pour un membre du réseau UQ, justement engage un comité de sélection. Donc, nous, ce qu'on veut prendre garde, c'est que justement ces comités de sélection là ne soient pas les seuls responsables de la nomination. Il faut absolument qu'un conseil d'administration puisse rendre compte de la décision de la nomination d'un recteur. Ce n'est pas à prendre à la légère, parce que la nomination d'un recteur, c'est l'élément le plus important de la gestion d'une université.

Donc, selon la procédure présente à l'UQAC, les comités de sélection vont être nommés par le C.A. Ça va être des membres que le C.A. et que l'assemblée des gouverneurs de l'UQ vont avoir décidé de placer sur ces comités de sélection là. Nous, ce qu'on veut ? on n'a aucun problème avec cette mesure-là ? c'est que les comités de sélection puissent présenter plus de un candidat au conseil d'administration pour que les conseils d'administration ce sont eux qui sont responsables de la décision ? puissent rendre une décision qu'ils sont ensuite capables de justifier. Si on ne sait pas c'est qui, les candidats qui voulaient être recteurs puis qu'on s'en est juste fait présenter un, comment est-ce qu'on fait pour dire qu'on a choisi le bon en tant que C.A.? Donc, c'est la question qu'on voulait soulever.

n(16 h 50)n

Le Président (M. Marsan): Ça termine? Ça termine le questionnement de l'opposition officielle. Je vais maintenant reconnaître le porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'éducation, d'identité et de culture. M. le député de Chauveau, la parole est à vous.

M. Deltell: Merci beaucoup, M. le Président. Mesdames, Monsieur, soyez les bienvenus à l'Assemblée nationale.

Trois éléments que j'ai retenus dans votre exposé tout à l'heure. Et, je m'en souviens très bien, comme citoyen, j'avais été très impressionné alors qu'à la fin des années 1990 il y avait eu une réduction de salaire de 6 % ? peut-être servir d'inspiration pour les jours qui... les mois qui viennent ? mais toujours est-il que c'était assez impressionnant. Et, vous l'avez bien relevé d'ailleurs dans votre mémoire, ça s'est fait avec le concours des syndicats. Et, quand on travaille ensemble, on a des beaux résultats. Quand les gens sont conscients qu'il en va même de la survie, on est capables de faire des grands pas tous ensemble. Et c'est tout à votre honneur de l'avoir relevé.

J'aime aussi votre proposition concernant la composition et la parité hommes-femmes. Ça m'a fait rire évidemment quand on fait une première lecture: 40 % hommes, 40 % femmes, bon, puis 20 %, ça va être quoi? Mais je trouve ça rudement intéressant parce qu'en effet, là, on établit un équilibre, mais aussi on vise d'abord et avant tout la compétence et la qualité des gens sur place. Et ça, honnêtement, c'est la première fois que je vois ça. Peut-être que je n'ai pas été assez attentif ailleurs, mais c'est la première fois que je vois ça, puis je trouve ça très intéressant. Je ne sais pas si vous avez trouvé inspiration en d'autres lieux, mais c'est fort intéressant.

Là, mon temps est un peu précieux, je veux donc vous poser une question. À la page 4, vous avez mentionné tout à l'heure que: «De plus, l'apparence de contrôle provenant du gouvernement ? quant à la nomination des membres ? pourrait potentiellement ? j'insiste sur le "potentiel", parce que, bon, ce n'est pas une règle absolue ? miner la créativité et l'innovation...»

Je suis un peu surpris et je veux vous entendre là-dessus: Comment, selon vous, des gens nommés, oui, par le gouvernement, mais c'est des gens de la place, c'est des gens du coin, c'est des gens qui ont à coeur, et c'est ce qu'on souhaite évidemment, qui ont à coeur l'intérêt de la communauté et l'intérêt de l'institution... pourquoi cette nomination-là pourrait potentiellement miner la créativité et l'innovation?

Le Président (M. Marsan): M. Gagné.

M. Gagné (Pierre-Luc): Oui. Le problème qu'on relève, ce n'est pas sur les gens en tant que tels, c'est sur la difficulté qu'on va avoir à intégrer ces gens-là. Présentement, on a une nomination du gouvernement, et je ne peux pas m'avancer pour mon université, mais, moi, je relève, à titre personnel, que cet apport-là est essentiel. Justement, comme vous l'avez mentionné, c'est des gens de la place qui sont nommés par le gouvernement. On a tout de même relevé que ces gens-là étaient recommandés par la régie du recteur. Donc, la distance entre la direction est peut-être absente un peu.

Pour répondre à votre question, ce minage-là de créativité, là ? je ne sais pas comment le formuler ? ce manque de créativité là et d'innovation proviendrait surtout du problème qu'on aurait à combler le conseil d'administration de ces trois personnes-là. Donc, dans l'éventualité d'un gouvernement changeant, on pourrait avoir à dire à trois personnes qui siégeaient par le passé sur le conseil d'administration, qui avaient des compétences de haute qualité sur notre conseil d'administration, on aurait peut-être à dire à ces gens-là: Bien, retournez chez vous parce qu'on s'en est fait nommer trois nouveaux. Et, nous, on a un conseil d'administration composé de 17 personnes, donc, trois nominations, c'est un pourcentage significatif. Donc, c'est ça qu'on relève. Ce n'est pas les gens en tant que tels qui vont créer un problème, mais c'est toute la structure qui entoure cette nomination-là qui pourrait miner la créativité et l'innovation.

M. Deltell: Je prends ça comme...

Le Président (M. Marsan): M. le député de Chauveau.

M. Deltell: Je prends ça comme une mise en garde. Je ne suis pas le... Je suis le législateur, mais ce n'est pas moi qui ai conçu le projet de loi. Mais je prends ça comme une mise en garde adressée au ministre de l'Éducation et à ses successeurs pour ne pas justement faire des nominations partisanes. Ça a été relevé d'ailleurs par les gens de McGill, si je me souviens bien. Et j'ai bonne confiance que, dans le domaine de l'éducation particulièrement, la partisanerie n'a pas sa place, et j'ai bonne confiance que votre propos sera accueilli avec enthousiasme. Merci infiniment.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Je voudrais vous remercier, Mme Schroeder-Tabah, M. Gagné, Mme St-Pierre Castonguay, pour nous avoir donné le point de vue du Mouvement des associations générales étudiantes de l'Université du Québec à Chicoutimi.

Sur ce, je vais suspendre quelques instants, en attendant le prochain groupe. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 54)

 

(Reprise à 16 h 56)

Le Président (M. Marsan): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux, et il nous fait plaisir d'accueillir le Regroupement des étudiantes et des étudiants de maîtrise, de diplôme et de doctorat de l'Université de Sherbrooke.

Alors, j'aimerais vous présenter M. David Maurice, et je vais vous demander de nous présenter les gens qui vous accompagnent et de procéder à votre exposé. Vous avez un maximum de 15 minutes. La parole est à vous, M. Maurice.

Regroupement des étudiantes et des
étudiants de maîtrise, de diplôme
et de doctorat de l'Université
de Sherbrooke (REMDUS)

M. Maurice (David): Merci, M. le Président. Alors, aujourd'hui, bon, nous venons représenter le Regroupement des étudiants de maîtrise, diplôme et doctorat de l'Université de Sherbrooke. Alors, je suis accompagné de M. Joël Lagrandeur, qui est attaché politique, et de M. Barham Thiam, qui est le président et à qui je laisserai l'honneur de débuter notre présentation.

M. Thiam (Barham): Merci. M. le Président, Mme la ministre...

Le Président (M. Marsan): C'est M. Thiam, c'est bien ça?

M. Thiam (Barham): Oui...

Le Président (M. Marsan): Je le prononce bien? Merci.

M. Thiam (Barham): Mmes, MM. les parlementaires, nous vous remercions de nous accueillir ce soir, à cette commission. Mon nom est Barham Thiam, comme il a dit tantôt. Je suis le président du Regroupement des étudiants de la maîtrise, de diplôme et de doctorat de l'Université de Sherbrooke.

Nous sommes une association de deux regroupements de deuxième et de troisième cycles et nous sommes également membres de la TACEQ, la Table de concertation des étudiants du Québec, qui a présenté son mémoire ici hier.

Mesdames et messieurs, depuis le dépôt du projet de loi n° 38 modifiant la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire et Loi sur l'Université du Québec en matière de gouvernance, cette loi qui impose une majorité des membres indépendants au sein des conseils d'administration des universités, obligeant ces dernières à une orientation typiquement mercantiliste, nous nous sommes penchés dessus afin de participer à la lutte pour l'indépendance de gestion et d'autonomie des universités.

Nous croyons qu'un cas isolé a servi d'excuse au gouvernement pour achever le long processus de contrôle et de domination des institutions d'enseignement pour les dépouiller de toute leur mission fondamentale qui est la promotion du savoir et de la recherche. Un enseignement de qualité n'a pas de prix, évidemment. Un encadrement approprié aussi nécessite beaucoup de moyens matériels et financiers. Nous pensons également que l'orientation de cette loi est plutôt entrepreneuriale que sociale. Quand on met la rentabilité comme mission des institutions d'enseignement en ignorant la vocation première qui est la formation de la société et le développement de la recherche, il devient dès lors urgent de dire: Non, ça suffit!

L'enseignement et la recherche ont besoin d'une autonomie et d'une grande indépendance et ils doivent être un choix primordial dans l'élaboration des politiques publiques pour tout État qui vise un développement économique, social et culturel de sa société. Nos universités sont-elles mal gouvernées ou sous-financées?

Nous pensons que nos universités... ou bien notre Université de Sherbrooke est un exemple de bonne gouvernance et de transparence, et tous les éléments pour une bonne gestion y sont réunis. Alors, il devient dangereux de généraliser à partir d'un cas isolé.

Nous pensons encore une fois, comme beaucoup qui ont conscience de l'importance et de la place de l'éducation et de la recherche dans une société qui se veut moderne, que ce projet de loi crée plus de problèmes qu'il n'en règle. Nous pensons, Mme la ministre, que ces réformes déforment plus qu'elles n'en forment. Avez-vous mesuré toutes les conséquences négatives que cette loi pourrait engendrer dans les universités sur le plan de la formation, de l'encadrement et de la recherche?

M. le Président, Mme la ministre, pour le développement de tout cela, je vais passer la parole à Joël Lagrandeur, notre attaché politique, qui va exposer notre mémoire, ensuite, David Maurice, notre vice-président à l'externe, qui va aller beaucoup plus loin. M. le Président, je voudrais passer la parole à Joël Lagrandeur.

n(17 heures)n

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Lagrandeur, la parole est à vous.

M. Lagrandeur (Joël): Merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes, MM. les députés. Mon nom est Joël Lagrandeur. Je suis attaché politique au REMDUS. Moi, ma tâche ici, ça va être essentiellement de résumer rapidement ce en quoi consiste notre mémoire. Essentiellement, nous, au Regroupement des étudiants et étudiantes de maîtrise, de diplôme et de doctorat de l'Université de Sherbrooke, nous croyons que le projet de loi n° 38, en plus de tenter de régler un problème qui n'existe pas à notre université, pourrait au contraire y amener certains problèmes.

Depuis une dizaine d'années, il y a eu diverses tentatives d'ingérence du gouvernement dans l'autonomie des universités, et on constate que, du moins à notre université mais aussi ailleurs, ça a rarement donné de bons résultats. Mais, à l'inverse, l'Université de Sherbrooke, lorsque laissée à elle-même pour s'occuper de sa gestion, elle a rarement erré dans sa gouvernance.

Pour faire un historique un peu des relations gouvernement-universités dans les 10 dernières années, on peut dire que c'est au début des années 2000 que le gouvernement québécois a commencé à s'immiscer de façon plus active dans la gouvernance des universités. Ça a commencé, en effet, avec les contrats de performance de M. Legault, qui était alors ministre de l'Éducation, et déjà, lors de l'annonce de ces contrats-là, les associations étudiantes de l'Université de Sherbrooke, bien que conscientes du fait que les universités avaient certains comptes à rendre au gouvernement, s'inquiétaient du fait que ces contrats-là pouvaient représenter une perte d'autonomie pour les universités, surtout vu le fait que le financement supplémentaire des universités était conditionnel au respect du contrat de performance.

Le projet a également inquiété divers autres intervenants de l'université, entre autres l'Association des professeures et professeurs retraités de l'Université de Sherbrooke, qui a décidé, cette année-là, de ne pas participer à la campagne de financement de l'université, et le doyen de la Faculté des sciences, qui voyait avec appréhension la... être levée la possibilité de fermer certains programmes, parmi lesquels les baccalauréats en mathématiques, en philosophie, en théologie, ainsi que les maîtrises en physique et en génie logiciel pour cause de non-rentabilité.

Malgré tout, le contrat a été signé au début de décembre 2000. À la signature du contrat, il y a eu un rattrapage financier, pour les quatre années précédentes, de 10 millions de dollars qui ont été versés. C'est venu essentiellement effacer la dette de l'université, qui était alors de 11,1 millions, et le reste de la dette a d'ailleurs été effacé avec des surplus dans un budget alloué à l'embauche de nouveaux professeurs. La somme totale versée à l'Université de Sherbrooke sur trois ans par le gouvernement était de l'ordre de 73,3 millions.

En février 2001 cependant, le gouvernement a décidé unilatéralement de suspendre les contrats de performance, ce qui a causé un réel problème à beaucoup d'universités qui avaient déjà inclus les sommes promises par le gouvernement dans ces budgets, et ça a pris une sortie en règle de M. Legault contre son propre gouvernement pour rétablir la poursuite des contrats.

En 2002 et ensuite, M. Simard, qui était le nouveau ministre de l'Éducation, qui a lancé l'idée d'étaler davantage dans le temps le versement des sommes promises par les contrats de performance, ça a fait dire à M. Béchard, le recteur de l'Université de Sherbrooke, que la proposition était sans doute due au manque de maîtrise des dossiers du nouveau ministre.

En décembre de la même année, alors que le gouvernement du Canada a annoncé qu'il verserait des subventions aux frais indirects de recherche aux universités, le gouvernement québécois a retiré une partie de son financement dans le même domaine, ce qui fait que l'Université de Sherbrooke, comme la plupart des autres universités, est restée déficitaire de ce côté-là, d'autant plus que le gouvernement fédéral a lui aussi retiré son financement pour cette année-là quelques mois plus tard. L'université s'est donc retrouvée, à ce moment-là, avec un déficit de 6,5 millions, ce qui a exigé deux ans de compression dans diverses facultés afin de rattraper ce déficit-là.

L'université a fini d'éliminer son déficit en 2004, alors même que les contrats de performance étaient déjà finis depuis un an. À cette époque, le recteur a constaté que les universités québécoises étaient toujours sous-financées par rapport à la moyenne des universités canadiennes. Pour régler une partie de ce problème-là, le gouvernement a permis aux universités, en 2007, d'augmenter progressivement les frais d'inscription, les frais afférents et surtout les frais pour les étudiants internationaux. L'Université de Sherbrooke, malgré sa bonne situation financière, a tout de même décidé de monter les frais des étudiants internationaux sous peine de ne pas recevoir de sommes supplémentaires éventuellement rendues disponibles par le gouvernement. Et on connaît la suite: en 2008, il y a eu la première mouture du projet de loi, qui a été refaite en juin, au grand déplaisir de tous les intervenants universitaires.

On s'est interrogés à savoir ce qu'allait apporter la loi à l'Université de Sherbrooke, au juste. Avant la dernière réforme de ses statuts, l'Université de Sherbrooke comptait une légère majorité de membres internes au sein de son conseil d'administration, mais malgré cela elle ne semble pas avoir connu de problème de gestion. Elle a réussi à éliminer ses dettes et son déficit, et ce, sans même la contrainte du contrat de performance. On pourrait dire peut-être que c'est grâce à ce contrat-là que l'université s'est débarrassée de ses dettes. Ce n'est pas tout à fait exact dans la mesure où le 10 millions qui a permis d'en effacer la plus grande partie était un versement d'une somme qui avait été retardé par le gouvernement. Et on peut également soutenir qu'une dette de 11,1 millions ce n'était pas tant que ça, malgré les... compte tenu des coupures sévères entraînées par la réforme Axworthy.

À l'inverse, on a constaté aussi que, quand le gouvernement se mêle de la gestion de l'université, il y a des problèmes qui surviennent. Il y a eu, à preuve, la fermeture ou la réorganisation de programmes pour cause de manque de rentabilité. Il y a eu des problèmes causés évidemment par les suspensions des contrats de performance et par la coupure de financement aux frais indirects de recherche, et il y a eu aussi certains troubles qui ont été causés dans certains organismes universitaires, pendant un certain nombre de mois, à cause de la hausse de 10 % des frais des étudiants internationaux.

Nous croyons que le projet de loi n° 32 découle directement des troubles financiers de l'UQAM et nous croyons que le gouvernement n'attendait qu'une bonne excuse pour s'immiscer directement dans la gestion des universités. Cette prise de contrôle déguisée, en plus de pouvoir potentiellement affecter sévèrement l'autonomie de la recherche en institution universitaire, pourrait bien, par l'inclusion d'une large majorité de membres externes au sein des conseils d'administration, créer des problèmes de gestion ou... de membres de l'externe qui suivent la direction sans se poser de question, comme c'est d'ailleurs arrivé à l'UQAM, ou alors d'autres problèmes qui pourraient être causés par un manque de diversité de la provenance de ces membres-là ou de leur indépendance réelle. Je vais maintenant passer la parole à M. Maurice.

Le Président (M. Marsan): M. Maurice, la parole est à vous.

M. Maurice (David): M. le Président, Mme la ministre et tous les membres de cette commission, merci beaucoup de nous recevoir ici ce soir. Comme vous avez pu le constater à la lecture de notre mémoire, nous sommes venus pour démontrer que le projet de loi n° 38, tel qu'il est présenté, peut s'avérer problématique s'il est imposé de façon systématique à l'ensemble des universités québécoises.

Clairement inscrit dans la tendance managériale que suggère la réingénierie de l'État mise de l'avant lors du premier mandat, ce projet de loi cache une problématique beaucoup plus profonde, qui est le sous-financement de l'éducation postsecondaire au Québec. C'est pourquoi nous réclamons, comme plusieurs groupes qui ont été entendus à cette commission avant nous, une consultation publique beaucoup plus large et qui prendrait la forme d'états généraux de l'éducation.

De notre côté, ce que nous avançons à travers notre mémoire, c'est qu'il est possible de tenir une bonne gestion de l'université dans un contexte où le conseil d'administration est composé en majorité de membres internes. C'est pourquoi nous nous opposons à l'imposition du projet de loi n° 38 qui interférera certainement dans nos principes de gestion à l'Université de Sherbrooke, qui nous ont pourtant bien réussi jusqu'à maintenant. Nous croyons tout comme vous que les membres externes ont leur place au sein des conseils d'administration dans les universités et que leurs compétences ainsi que leur indépendance du milieu universitaire peuvent apporter un regard différent aux décisions qui se prennent dans les instances. Toutefois, nous nous questionnons sur la nécessité de leur accorder une aussi forte majorité, et qui plus est à travers une loi, ainsi que sur les bienfaits que cela pourra apporter en matière de transparence et d'imputabilité. Nous croyons sincèrement que d'aller de l'avant avec une telle loi serait une décision dangereuse qui risquerait assurément de faire basculer le pouvoir entre les mains de l'équipe de direction et de diminuer considérablement l'intérêt des membres internes dans le devenir de leur institution, une composante essentielle à cette collégialité qui nous distingue du modèle entrepreneurial de gestion.

Mais, outre la qualité des personnes qui occupent les postes de gestionnaires dans une institution universitaire, la question principale reste la suivante: il faut gérer les déficits récurrents, c'est-à-dire des budgets de fonctionnement qui surpassent, année après année, les sommes investies par l'État. C'est donc dans cette optique que le gouvernement entend s'ingérer encore une fois dans la gestion des universités, et ce, avec les conséquences fâcheuses que nous avons énumérées dans notre mémoire, en tentant d'imposer un modèle managérial en remplacement de la tradition de collégialité dont bénéficient nos universités. Nous sommes convaincus que cela ne saura se faire sans mettre en péril la mission première de nos institutions d'enseignement postsecondaire, en donnant priorité aux impératifs administratifs sur les impératifs académiques.

Les indicateurs de performance et de rentabilité qui étaient d'ailleurs inscrits dans les contrats de performance ont mis en péril certains programmes à l'Université de Sherbrooke dans les dernières années, et nous craignons fortement que ce genre de situation se reproduise sous les auspices de ce projet de loi. Comment garantir à la communauté universitaire que cette vision de l'université ne portera pas atteinte aux programmes qui ne sont pas nécessairement rentables à court terme, comme c'est souvent le cas, bon, notamment en sciences humaines, d'où je suis moi-même issu, ou en ce qui a trait à la recherche fondamentale? L'université n'est certainement pas comme une entreprise où il suffirait de se départir d'une branche de la production jugée non rentable dans l'optique d'améliorer l'efficacité des autres secteurs.

n(17 h 10)n

Nous comprenons qu'il faut s'assurer de la transparence en ce qui a trait à la gestion des sommes qui sont octroyées par l'État aux universités québécoises et que les contribuables sont en droit de s'attendre à ce qu'il y ait une gestion efficace des fonds publics. Toutefois, nous voyons difficilement comment le projet de loi n° 38 pourrait leur assurer une certaine quiétude à ce sujet. Bon. D'un côté, l'esprit managérial qui est proposé ressemble étrangement aux principes de gestion qui ont été appliqués dans certains secteurs gouvernementaux, notamment, bon, à la Caisse de dépôt et placement, une gestion qui n'a pourtant pas su amoindrir les effets de la crise. Cette situation a pourtant été dépeinte comme un malheureux cas d'exception. De l'autre, la dérive immobilière de l'UQAM nous a été présentée comme un exemple type de la mauvaise gestion des universités, alors qu'il ne s'agissait pas effectivement là aussi d'un cas d'exception, et, qui plus est, tous s'entendent pour dire que les membres internes du conseil d'administration ont été les premiers à tirer la sonnette d'alarme.

De plus, si on regarde de près le modèle de gestion qui est proposé par le projet de loi n° 38, on se rend compte qu'il existe déjà à l'Université de Montréal. Pourtant, récemment, dans l'édition du Devoir du samedi 19 septembre, on apprenait que les membres de leur direction s'étaient octroyé d'importantes hausses salariales ? n'est-ce pas là une pratique courante dans le secteur privé ? et ce, malgré un budget de fonctionnement déficitaire.

Comment, dans ce contexte, convaincre les contribuables que ce projet de loi pourra indéniablement leur assurer une saine gestion des institutions universitaires? Nous n'avons pas la réponse à cette question mais sommes d'avis que de tenir des états généraux de l'éducation serait une démarche beaucoup plus transparente et ouverte et permettrait de mettre de l'avant d'autres façons de gérer nos universités et de confronter différents modèles afin d'en arriver à une formule qui serait immanquablement mieux adaptée à la réalité de nos institutions universitaires.

En conclusion, M. le Président, nous tenons à réitérer que l'Université de Sherbrooke a su, jusqu'à maintenant, tirer son épingle du jeu en matière de gestion, et ce, à travers une gouvernance impliquant une majorité de membres internes. Il serait important de tenir compte des spécificités de chacune des universités et de s'assurer que ces dernières conserveront l'autonomie de leur gestion interne, et cela ne peut certainement pas se faire par l'imposition d'un modèle de gestion qui ne cadre pas avec l'essence même de la mission universitaire. Merci beaucoup.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie pour votre présentation. Je vais immédiatement laisser la parole à la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Messieurs, vous êtes les derniers à venir nous présenter votre point de vue dans cette commission parlementaire. Mais vous êtes les derniers, mais pas les moindres, puisque vous venez de l'Université de Sherbrooke, ce n'est pas rien, hein? C'est vrai. La députée de Taillon est ravie et moi aussi, et moi aussi.

Mais ce que je trouve curieux, cela dit, peut-être que, là, la députée de Taillon va être un peu moins ravie, moi, je vous avoue que je suis un peu étonnée de voir avec quelle force vous faites le procès ou, en tout cas, le constat des années de François Legault comme ministre de l'Éducation. Vous êtes sévères. Vous êtes très, très sévères face à cette période-là. Mais je ne vous dirai pas que je m'en réjouis, ce ne serait pas gentil, mais je dois vous dire que ça apporte un éclairage très certainement à des perceptions du projet de loi qui ont été discutées avec nous depuis trois semaines.

Mais ma question est la suivante, écoutons-la bien, parce que, veux veux pas, il y a trois semaines de commission derrière nous: Est-ce que le fait que vous dites que vous ne voulez pas que les universités revivent l'ingérence, ce que vous appelez l'ingérence du gouvernement, par le biais des contrats de performance ne justifie pas en sorte justement pour la ministre, membre d'un gouvernement, de voir en la nécessité d'avoir des règles claires sur la gouvernance de nos universités justement avec comme objectif d'éloigner la ministre de la gestion interne des universités?

Pourquoi je dis ça? Parce que le projet de loi, ce qu'il veut, c'est de prévenir. Un projet de loi puis une loi, c'est souvent... ça s'inscrit souvent, pour un gouvernement, dans un processus de prévenir des situations qui seraient jugées par la population comme irresponsables, insoutenables, comme ne défendant pas les intérêts des Québécois et surtout comme ne satisfaisant pas à la gestion des fonds publics.

Alors, est-ce que le fait de donner des règles de gouvernance... Et gouvernance puis gestion d'université, là, j'imagine que vous êtes d'accord avec moi que ce sont deux choses différentes, là. Les contrats de performance pouvaient effectivement faire en sorte que le gouvernement était davantage dans les décisions... forçait davantage un type de décision et, je suis un peu d'accord avec vous, forçait des décisions d'ordre budgétaire. C'était, ça, une approche très financière de la gestion des universités.

Mais est-ce que le fait justement d'avoir cette loi, c'est dans le but de responsabiliser les conseils d'administration, de les rendre imputables, et surtout de leur donner des obligations comme administrateurs face à la communauté universitaire mais aussi face à l'ensemble de la population, puisqu'il faut, et les règles sont claires, établir des façons de présenter la reddition de comptes aux différents intéressés?

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Maurice.

M. Maurice (David): Oui, en fait, ce qu'on voit à travers ça puis, nous, l'éclairage qu'on a donné justement par rapport aux contrats de performance en tant que tels, c'est que justement c'était une façon pour le gouvernement d'aller imposer, si on veut, des indicateurs d'efficacité au niveau de la gestion.

Nous, ce qu'on perçoit par rapport à l'augmentation faramineuse quand même du nombre de membres externes, c'est d'arriver au même... d'avoir le même objectif... En fait, ce qu'on reproche, c'est d'avoir le même objectif mais d'entrer, si on veut, par la porte d'en arrière, c'est-à-dire par la porte des conseils d'administration. Nous, c'est dans cette optique-là en fait qu'on est venus présenter. Puis c'est ce qu'on pense. Puis on se demande justement en quoi ce projet de loi là puis le fait d'avoir justement l'obligation à ce niveau-là puis le désengagement, si on veut, par rapport à ça, du gouvernement en mettant, si on veut, l'obligation des membres externes sur les conseils d'administration, peut arriver justement à... Parce que, si on regarde dans le projet de loi, en fait c'est les mêmes indicateurs qui sont là. Donc, on fait juste le donner au niveau de l'efficience puis de la performance des universités en tant que telles. Nous, c'est ce qu'on a pris de ce projet-là. Je ne sais pas si, Joël, tu veux intervenir.

Le Président (M. Marsan): M. Lagrandeur.

M. Lagrandeur (Joël): Bien, essentiellement, c'est que, malgré tout, dans la formule actuelle qui est présentée par la ministre, on a malgré tout certaines craintes de dérapage. On ne voit pas exactement comment le projet de loi, là, vient corriger, vient empêcher, par exemple, une situation comme celle qui a pu se produire à l'UQAM de se reproduire.

Ce qu'on voudrait essentiellement, ce serait qu'on prenne plutôt le temps de réfléchir en consultant tous les intervenants universitaires afin d'avoir une meilleure idée de ce qui ferait l'affaire de tout le monde, dans le fond, en façon de gouvernance pour les universités.

Le Président (M. Marsan): Alors, M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: Oui, bonjour.

Le Président (M. Marsan): La parole est à vous.

M. Lehouillier: Oui, bonjour. Alors, merci pour le dépôt de votre mémoire. Bon. Moi, je retiens de votre mémoire qu'au fond ce que vous dites: Le passé est garant de l'avenir, donc le gouvernement cherche par toutes les raisons de s'immiscer dans la gestion des universités. Finalement, ça ressemble un peu à ça, donc.

Et là vous dites: «Mais cette prise de contrôle déguisée, en plus de pouvoir potentiellement affecter sévèrement l'autonomie de la recherche en institution, pourrait bien, en introduisant une large majorité de membres externes au sein du conseil d'administration[...], membres qui, pour des raisons évidentes, maîtrisent beaucoup moins [...] les dossiers internes et qui ont généralement tendance à suivre les idées de [...] direction...»

Par contre, ce que vous dites dans un autre temps, c'est que l'université, avec une légère majorité de membres internes... Et mon questionnement s'en vient. Une légère majorité, ça veut dire qu'il y avait... il y a des membres externes sur votre conseil d'administration. Alors, quel jugement... Est-ce que vous êtes membres du conseil d'administration?

Une voix: ...

M. Lehouillier: Bon. Quel jugement vous portez sur les membres du conseil d'administration externes de votre université?

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Maurice ou... M. Maurice.

M. Maurice (David): Bien, en fait, nous, ce qu'on craint en tant que tel, justement, c'est par rapport à toute la question justement de l'indépendance des membres externes. Puis on se demande justement en quoi cette indépendance-là... Puis on voit que, dans le projet de loi, il y a certains aspects justement qui viennent... qui sont un peu... qui sont peu clairs en tant que tels justement par rapport à cette définition-là justement de... la définition d'«indépendance». Même qu'il y a des choses qui viennent un petit peu à l'encontre par rapport à ça justement lorsqu'on parle des intérêts philanthropiques qui ne sont pas... qui ne menacent pas, si on veut, la qualité de membres externes, l'indépendance des membres externes ou...

Donc, on pense sincèrement qu'il y a des aspects... Puis je sais que, bon, à l'Université de Sherbrooke, comme il a été mentionné, on a une... c'est une légère majorité. D'ailleurs, les statuts qui ont été renouvelés cet été prévoient même une égalité, si on veut, entre les deux. Mais ça, c'est le genre de choses... c'est un genre de gestion, si on veut, qu'on n'a pas encore eu le temps de voir, si on veut, qu'est-ce qu'elle pourrait faire à l'Université de Sherbrooke, puis on ne pense pas nécessairement que ça puisse être une situation qui serait, je dirais... qui serait un avantage nécessairement pour la communauté universitaire à Sherbrooke.

n(17 h 20)n

Le Président (M. Marsan): M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: Juste pour continuer, là. En regard de l'Université de Sherbrooke, ce que vous dites, c'est que finalement... Est-ce que je comprends bien que vous dites que les membres externes suivent les idées de la direction? Est-ce que vous diriez qu'ils suivent les idées de la direction?

M. Maurice (David): En fait, c'est sûr que...

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Maurice.

M. Maurice (David): Désolé. En fait, c'est sûr que ce n'est pas nécessairement aussi évident, bon, que ça puisse paraître. En ce sens, évidemment, moi, je ne fais pas partie du conseil d'administration, donc c'est sûr qu'évidemment je n'ai pas pu voir des cas nécessairement, là, très précis à ce niveau-là. Par contre, à la recherche... à la lumière de, nous, ce qu'on a vu puis des gens qu'on a côtoyés qui... on pourrait dire justement que c'est une pratique par contre qui peut susciter, si on veut, une certaine crainte, là, par rapport aux associations étudiantes, même ne serait-ce qu'auprès des syndicats de professeurs, syndicats des chargés de cours. C'est une crainte qui est quand même très palpable, puis je pense que ce serait intéressant justement de... C'est pour ça que, nous, on demande en fait les états généraux de l'éducation, pour pouvoir arriver et faire une consultation en amont d'un projet de loi et non pas en aval, c'est-à-dire une consultation lorsque le projet de loi est déjà tout fait, où est-ce qu'on dit, bon, est-ce qu'il y a des virgules qui vous dérangent, et d'arriver justement avec une consultation où est-ce qu'on pourrait vraiment se prononcer, puis on pourrait vraiment avoir un débat d'idées pour voir s'il n'y aurait pas un modèle de gestion qui pourrait être plus adapté, si on veut, aux réalités de l'université québécoise.

M. Lehouillier: Donc, vous ne souhaitez pas qu'on...

Le Président (M. Marsan): M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: Vous ne souhaitez qu'on enlève tous les membres externes. Un équilibre, c'est ça que vous proposez ou...

Le Président (M. Marsan): M. Lagrandeur.

M. Lagrandeur (Joël): Bien, en fait, à ma connaissance, récemment, j'ai... bien, je n'ai pas eu connaissance directement qu'il y a eu comme des problèmes extrêmes à l'Université de Sherbrooke avec les membres externes. Et on est d'accord, on l'a dit d'ailleurs, M. Maurice l'a dit tout à l'heure, qu'on est d'accord avec le fait que ça prend effectivement des membres externes dans un conseil d'administration d'université. Ce qu'on a peur, par contre, c'est qu'en leur donnant une majorité absolue on puisse créer des situations qui... dans un cas où les membres externes suivraient éventuellement la direction, ça pourrait amener certains problèmes qui n'ont pas cours présentement à l'Université de Sherbrooke.

M. Lehouillier: Une dernière petite question, M. le Président.

Le Président (M. Marsan): M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: Dans l'équation que vous présentez vers la fin de votre mémoire, Gouvernement + gestion des universités = des universités impossibles à bien gérer, ce que vous dites, c'est cette affirmation-là. Ce que j'aimerais, par exemple, c'est que... Est-ce que vous voulez dire par là que l'État, qui est le principal bailleur de fonds des universités, ne doit pas en contrepartie exiger de reddition de comptes en retour ou... Parce que ça fait un peu curieux, là. C'est comme si vous faisiez abstraction du gouvernement, donc envoyez-nous le chèque puis on s'occupe du reste. Est-ce que c'est ça que ça veut dire?

Le Président (M. Marsan): M. Lagrandeur.

M. Lagrandeur (Joël): Ce qu'on dit, ce n'est pas que l'université n'a absolument aucun compte à rendre au gouvernement, bien au contraire. Je veux dire, c'est effectivement des fonds publics, et le public a le droit de pouvoir prendre connaissance de comment ces fonds-là sont utilisés. Là où il y a un problème, c'est quand le gouvernement entre plus directement dans ce qu'on appelle, dans le fond, l'autonomie des universités, quand il s'implique directement dans le processus décisionnel de comment cet argent-là est utilisé, finalement.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. J'aurais aimé dire «bonjour, madame messieurs», mais je vais me contenter de «bonjour, messieurs». On a beaucoup parlé... ça me fait un peu rigoler parce qu'on a beaucoup parlé de la parité hommes-femmes, c'est pour ça que je vous fais un peu la blague.

Vous avez parlé des états généraux, vous n'êtes pas les premiers, plusieurs groupes sont venus nous dire qu'ils en souhaitaient, et la plupart étaient conscients du temps qu'une... et la préparation que ça prend pour faire de bons états généraux. On sait qu'on peut calculer facilement entre deux à trois ans avant qu'on arrive à régler tout ce qui vient avec des états généraux. Par contre, entre-temps, en tant que membres du gouvernement, nous avons à rendre compte à la population, nous, des investissements qu'on fait en éducation. Donc, vous la voyez comment, la reddition de comptes jusque-là? Vous la voyez comment, la relation avec les citoyens qui interpellent le gouvernement pour les investissements qu'il fait en éducation?

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Maurice.

M. Maurice (David): Bien, en fait, effectivement, oui, ça prend du temps, faire des états généraux, puis ça peut être un processus qui est assez long. Par contre, il existe, dans beaucoup de secteurs, des documents qui ont été faits. Nous, ce qu'on déplore en fait, c'est qu'au niveau du projet de loi on se soit beaucoup trop inspiré de ce qui a été présenté par l'IGOPP et puis qu'on est allé chercher seulement certains aspects de la gestion qui, on a l'impression, faisaient peut-être l'affaire. Et donc, là, ce qu'on pense, nous, c'est qu'il y aurait peut-être intérêt justement à aller voir d'autres études qui ont été faites, notamment par la FQPPU, par les associations étudiantes. Il y a déjà beaucoup de documents qui sont là, puis je pense qu'on pourrait se baser aussi là-dessus puis essayer d'aller chercher plus d'informations à ce niveau-là, s'il y a quelque chose à faire, avant même d'aller... de toute façon, de mettre en place ces états généraux là, qui vont être de toute façon nécessaires, mais en même temps d'essayer de récupérer un petit peu tout ce qui a été fait, parce que, je pense, il y a quand même beaucoup de matériel qui a été fait et pas juste le rapport de l'IGOPP, là.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau: Je vous entends et je comprends très bien ce que vous me dites, mais vous n'êtes pas arrivés à me donner comment l'Université de Sherbrooke va rendre compte à sa population, aux concitoyens, aux contribuables de ce qu'elle fait, puisque, nous, comme gouvernement... et je suis sûre que vous le comprenez très bien puisque vous êtes des représentants de gens qui veulent que, vous, vous rendiez des comptes. Vous allez retourner... et j'espère que les gens que vous représentez seront fiers d'entendre votre reddition de comptes de votre rencontre d'aujourd'hui.

Moi, je fais partie d'un gouvernement qui vous donne 70 % de votre budget. Comment je fais pour donner une reddition de comptes à la population si, de votre côté, je n'en ai pas? Alors, est-ce que je peux savoir?

Le Président (M. Marsan): M. Lagrandeur.

M. Lagrandeur (Joël): Bien, à moins que je ne me trompe, premièrement, il me semble qu'il y a déjà des outils de reddition de comptes des universités au gouvernement. Et, sinon, il y aurait peut-être possibilité, en attendant de tenir les états généraux... Si je ne me trompe pas, dans le projet de loi, il y a une mesure qui prévoit que les universités doivent rendre... doivent faire un rapport au ministère à chaque année. Il y aurait peut-être moyen d'implémenter uniquement cette mesure-là en attendant de tenir les états généraux.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie bien. Nous allons poursuivre avec la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de recherche et de développement, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Bienvenue, messieurs. Là, c'est vrai, c'est vrai que c'est les derniers tours de parole d'un exercice, ma foi, qui aura été très, très enrichissant. Et, à chaque fois, on a un regard qui s'ajoute.

J'aimerais quand même noter des mots que vous avez dits d'entrée de jeu. Vous avez dit: Le projet de loi veut régler un problème qui n'existe pas, quelque chose comme ça. C'est ce que j'ai écrit pendant que vous parliez. Je ne suis pas sûre qu'il n'y ait pas des problèmes qui existent. En tout cas, moi, ce que je retiens de ce qu'on est venu me dire ces dernières semaines, c'est qu'il existe des problèmes, de transparence par exemple, des besoins de reddition de comptes, mais que le projet de loi n'y répond pas comme il faut ou encore pourrait même, pour certains, aggraver la situation au lieu de la régler, comme un remède qui rend plus malade qu'il ne guérit, quelque chose comme ça. Et j'aimerais vous entendre là-dessus, parce qu'au-delà de l'histoire de l'Université de Sherbrooke, dont je connais des aspects mais moins les derniers développements, au-delà de cette histoire particulière, quand vous pensez à ce qu'est une université dans la société québécoise, aux difficultés qu'elle traverse, aux problèmes qu'on a pu identifier ces dernières années, comment pensez-vous qu'on peut y faire face et trouver un bon remède, même si le mot est un peu simple peut-être, mais à ces difficultés-là et ne pas en tous les cas aggraver la situation?

Le Président (M. Marsan): Oui, M. Thiam.

M. Thiam (Barham): Bon, merci. C'est qu'effectivement le fait d'imposer une saine gestion, je pense, de pousser ou de dire qu'on nous impose une bonne... une saine gestion, c'est comme s'il n'y a pas une saine gestion dans les universités. Par contre, ce qu'on peut relater, c'est que, dans nos universités, il y a effectivement une saine gestion. Typiquement à l'Université de Sherbrooke, il y a une saine gestion. Alors, également, quand on pousse plus loin, le fait d'imposer les membres, 60 % de membres externes, donc ça peut être problématique, un modèle qu'on impose à toutes les universités. Je pense que des avancées ont eu... dans certains domaines, dans certaines universités qui sont liées à leur réalité, je pense, on peut leur donner cette autonomie-là et cette liberté d'aller voir, par rapport à leur réalité ou au contexte, d'essayer de voir quel est le modèle qui s'applique le mieux au lieu de leur imposer un certain modèle.

Le Président (M. Marsan): M. Lagrandeur.

n(17 h 30)n

M. Lagrandeur (Joël): En fait, pour revenir au problème qui n'existe pas, ça, c'est peut-être plutôt un problème de formulation de ma part. Je dirais peut-être plus qu'on voit mal le problème que le projet de loi viendrait régler.

Maintenant, pour régler les problèmes de façon générale dans le milieu universitaire, on croit, et on dit, et on répète que, selon nous, ça va passer par des états généraux de l'éducation. Essentiellement...

J'ai perdu mon idée. J'y reviendrai si je la retrouve.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: L'avez-vous retrouvée?

Une voix: M. David en aurait peut-être profité...

Le Président (M. Marsan): Alors, monsieur... M. Maurice.

M. Maurice (David): Oui. En fait, si la question est de savoir un petit peu comment rendre des comptes puis comment qu'on peut s'organiser pour que la population, la société soit au courant, soit consciente de comment sont gérés les fonds publics en rapport avec les universités, je pense effectivement que ça passe par une plus grande participation justement des gens qui évoluent au sein de cette université-là, parce qu'il faut comprendre que le modèle... le monde de l'éducation, ça comprend, ça touche beaucoup de gens en tant que tel, y compris les gens qui reçoivent cette formation-là. Si on commence à englober, si on veut, y compris les gens qui donnent cette formation, y compris les gens qui participent à cette formation-là, y compris les gens qui la reçoivent, je pense que ça fait déjà beaucoup de gens qui s'intéressent à cette question-là.

Donc, nous, on pense en effet que, oui, il faut avoir un modèle clair de reddition de comptes, ça, il n'y a pas de doute, mais on voit mal par contre comment ce projet de loi là en particulier arrive à nous fournir un modèle de reddition de comptes, si on veut, qui serait acceptable ou qui serait même acceptable en fait pour l'ensemble de la population.

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Lagrandeur.

M. Lagrandeur (Joël): J'ai retrouvé mon idée. Ce que j'allais dire essentiellement, c'est que le projet de loi qu'on a là actuellement ? j'ai même fait la comparaison, il y a... on sent clairement l'inspiration du rapport Toulouse à travers. Le problème avec le rapport Toulouse, c'est que les consultations qui ont été faites par le groupe qui l'a écrit ont été faites essentiellement auprès d'administrateurs d'université, des membres de conseil d'administration, des présidents de conseil d'administration, des recteurs. Or, il y a énormément d'autres types d'intervenants dans une université qui n'ont pas voix au chapitre dans ce rapport-là. C'est pour ça qu'on a l'impression qu'il manque quelque chose, en fait.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Bien, vous allez dans le sens de mon questionnement par rapport à vos positions, parce que vous craignez, puis je le comprends bien, qu'il y ait une trop grande intrusion du gouvernement, hein, dans la gestion des universités. Puis vous faites référence, bon, à un certain nombre d'éléments qui ont touché l'Université de Sherbrooke au cours des années.

Mais une des choses que je retiens, moi, que plusieurs sont venus dire, c'est qu'au-delà de l'intrusion du gouvernement il y a, à l'heure actuelle, une difficulté d'associer la communauté universitaire aux bonnes décisions, que tout n'est pas rose en cette matière, que...

Par exemple, vous avez évoqué des débats que je connais bien, là, quant à savoir si les programmes sont rentables ou non, puis je peux vous dire que la rentabilité des mathématiques, de la théologie et de la philosophie, regardez, moi, je suis entrée comme professeure à l'Université de Sherbrooke en 1977, puis c'était un thème récurrent. Bon. Et ça pose de véritables, de véritables problèmes de société. On a peut-être moins besoin en quantité de philosophes qu'on va avoir besoin de gens formés, je ne sais pas, moi, en génie, par exemple, mais seulement on a besoin d'en avoir. On a tellement besoin d'en avoir que parfois les grandes compagnies, quand ils ne savent plus à quel genre de personne se vouer pour les diriger, vont considérer qu'une formation en philosophie est une plus-value. Pourquoi? Parce qu'en principe la formation philosophique donne une largeur d'esprit et une envergure, un type de questionnement qui sont pertinents, même si, dans n'importe quelle entreprise, il faut en arriver à livrer un produit plus précis.

Ce type de réflexion là, il faut qu'elle puisse se faire, et il n'est pas inutile de se demander comment améliorer le fonctionnement des universités pour que les membres de la communauté universitaire puissent être véritablement associés à cette réflexion. Je comprends bien que la solution n'est pas de dire: On va faire venir plus de gens de l'extérieur, parce que ce n'est pas forcément leur regard qui, de ce point de vue là, va régler le problème. Mais donc je voudrais quand même que vous me parliez des besoins de la communauté universitaire actuellement, parce que je sens parfois un peu trop que vous me dites: Ça va très bien, alors laissez-nous continuer comme avant. Moi, je suis critique par rapport au projet de loi, c'est certain, mais en même temps je ne voudrais pas conclure que ça va bien et qu'on n'a rien à regarder, sauf de laisser les gens tranquilles chacun dans leur coin.

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Maurice.

M. Maurice (David): En fait, quand qu'on dit que ça va bien, on dit que ça va bien en question de gestion de crise en tant que telle parce qu'il n'y en a pas. Ce qui manque criement, c'est ce que... je veux dire, criamment, en fait, c'est du financement. C'est de ça qu'on a besoin. Présentement, nous, ce qu'on dit, c'est qu'à l'université on a quand même réussi à bien s'en sortir dans une situation où le financement manque et n'est pas nécessairement au rendez-vous comme on pourrait le souhaiter en tant que tel. Puis, de par l'idée que, bon, oui, la gestion universitaire a été mise à mal, je pense que c'est la gestion, la gouvernance tout court qui a été mise à mal dans les derniers mois, voire les dernières années. Donc, je ne pense pas que ce soit uniquement un problème universitaire.

Puis, comme on pourrait faire référence, c'est que c'est sûr qu'à l'université effectivement, oui, il y a des gens qui sont formés dans le cadre universitaire, qui sont requis, si on veut, par différentes entreprises de... du monde de l'entreprise en tant que tel justement pour venir faire... justement avoir une vision plus globale, si on veut. Donc, si ces gens-là sont issus de l'université, on se dit: Mais, à ce moment-là, pourquoi on n'aurait pas justement cette aptitude-là, cette capacité-là aussi à effectuer une saine gestion à l'interne, nonobstant du fait qu'effectivement, oui, on peut avoir certains membres externes qui viennent justement apporter un regard extérieur? Puis c'est sain, là, ce n'est pas un problème. L'idée, c'est qu'on se demande justement: Pourquoi en arriver à une proportion aussi grande?

Donc, l'idée, quand on dit que ça va bien, on ne dit pas que tout va bien à l'Université de Sherbrooke, et ce n'est pas vrai, l'idée, c'est qu'on dit... c'est qu'au niveau de la gouvernance, au niveau de la façon dont ont été gérées les sommes qui ont été accordées à l'université puis dont a été gérée cette gestion de crise, si on veut, on pense qu'on s'en est quand même bien tirés. Je pense que c'est ça qu'il faut retenir en tant que tel et non pas que la situation est parfaite à l'Université de Sherbrooke, loin de là.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Un des éléments qui a déclenché toute cette réflexion, bien, il y a des... ce qu'on appelle des facteurs précipitants. Il y a des tendances mondiales et aussi nationales, mais il y a aussi des facteurs précipitants, et ce que cela fait, c'est que ça interpelle l'opinion publique, qui se met à porter des jugements sur nos universités. Sans revenir dans les détails au cas de l'UQAM, ce en quoi ça a fait du tort aux universités, c'est une espèce d'image qui s'est mise à se promener de gaspillage de fonds publics et... Bon. Puis on peut comprendre que les universités soient sujettes à certains... à susciter des préjugés, on peut le comprendre. On peut comprendre qu'elles apparaissent pour plusieurs comme étant un monde un petit peu clos, un peu replié sur lui-même. Et le danger, c'est qu'on dise: À cause de ça, on va mettre un remède, comme je disais tout à l'heure, mais qui ne réglera pas le problème.

Toutefois, moi, je souhaite malgré tout trouver une façon d'associer... l'opinion publique, ça n'existe pas, mais au moins la société civile à la réflexion, au moins, au moins qu'on puisse dire: Bon, les universités, elles appartiennent à la collectivité, on y met tous de l'argent. Moi, je plaiderai toujours pour que les études supérieures coûtent le moins cher possible et que ça demeure un choix collectif. Pour moi, ça se défend, mais en contrepartie, bien sûr, il faut que l'image qui se dégage soit une image positive, ouverte, et que les gens se sentent en partie intégrés en tout cas à la réflexion.

Est-ce que vous avez une opinion sur cette façon d'associer la société civile à la réflexion quant aux orientations de nos grandes universités pour les prochaines années?

Le Président (M. Marsan): M. Maurice.

M. Maurice (David): Bien, effectivement, bon, vous avez parlé d'opinion publique. Ce que je trouve... ce qu'on aurait peut-être pu ajouter en fait dans ce mémoire, en tant que tel, c'est, bon, parler... Bon, il y a eu la dérive immobilière à l'UQAM. Par contre, il y a d'autres projets immobiliers qui ont fonctionné aussi à travers les universités, si je pense au pavillon Longueuil que l'Université de Sherbrooke a construit, qui a été non seulement construit dans les délais mais dans les budgets aussi. Donc, je pense qu'il y a moyen de présenter aussi des éléments, si on veut, qui ont été peut-être plus positifs au niveau de la gestion.

Là, je dis ça, puis encore là, bon, ça peut paraître un peu positiviste. Ce n'est pas nécessairement le meilleur... comment je pourrais dire ça, un exemple parfait non plus, par contre, mais par contre on peut voir qu'il y a eu quand même des éléments qui ont été un petit peu plus positifs, là, que ce qu'il y a eu à l'UQAM en tant que tel, et qui ne reflète pas nécessairement l'ensemble des projets qui ont été proposés puis qui ont été réalisés par les universités.

n(17 h 40)n

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Bien, moi, je vais simplement conclure, là, je vais laisser mon collègue de Chauveau poursuivre. Mais ce que je retiens de votre mémoire essentiellement, c'est que vous avez des craintes qu'on se donne des mécanismes qui non seulement ne règlent pas les problèmes, mais risquent d'en créer. C'est ce que je comprends. Vous craignez qu'on crée carrément des problèmes en mettant en place des mécanismes de gouvernance dont vous dites: On n'en a pas besoin à ce moment-ci.

Le Président (M. Marsan): M. Lagrandeur.

M. Lagrandeur (Joël): Essentiellement, effectivement, ce qu'on voudrait, c'est qu'au lieu de se précipiter avec un projet de loi pour faire changer l'opinion publique par rapport à un problème ponctuel on prenne le temps de faire la réflexion pour sortir quelque chose de vraiment efficace qui viendrait une fois pour toutes régler le problème.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci, Mme la députée de Taillon. Je vais maintenant reconnaître la porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'éducation, d'identité et de culture, M. le député de Chauveau.

M. Deltell: Merci, M. le Président. Messieurs, bonjour. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Mme la ministre en faisait état tout à l'heure, vous êtes de l'Université de Sherbrooke, endroit où Mme la députée de Taillon a travaillé mais également alma mater de notre premier ministre. Et il ne rate jamais une occasion, à juste titre d'ailleurs, de vanter les mérites de son alma mater, ce qu'il fait très bien, mais je vous avoue que, s'il a écouté les propos que vous avez tenus tout à l'heure, il ne risque pas tellement d'être heureux, parce que, de tout l'ensemble des propos qu'on a entendus depuis trois semaines, vous avez été, à mon sens, ceux qui avez été les plus durs à l'endroit du projet de loi. En parlant de contrôle, de domination, de dangereux, de déforme, vous êtes allés très loin. Je tenais juste à vous faire part de cette observation.

Maintenant, puisque vous êtes les derniers mais non les moindres à venir témoigner, et que, moi, c'est ma dernière question que j'ai le plaisir de vous poser, j'aimerais quand même ouvrir davantage sur l'espoir, et l'inspiration, et la stimulation que votre université peut nous donner, puisque vous faites état de la réalité que votre université a réussi à juguler le problème du financement, le problème de la dette, le problème du déficit, et tout ça, de belle façon, et que maintenant, bien, de façon générale, vous dites que ce n'est pas parfait, ce n'est pas le paradis, mais, de façon générale, c'est bien géré.

Donc, la question est très ouverte, et très positive, et très... et se veut donc stimulante: Pouvez-vous nous expliquer comment ça se fait que, chez vous, vous avez réussi ça? Quelle est votre vision? Quelles sont les leçons qu'on doit tirer de la façon dont l'université est gérée qui doivent inspirer les autres, les autres groupes, que ce soit aux cégeps ou aux universités?

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Maurice.

M. Maurice (David): Merci, M. le Président. En fait, essentiellement, nous, on vient ici pour revendiquer en fait l'autonomie des universités. Je pense que c'est ça qui est important puis je pense qu'en insistant sur ce principe-là, nous, ce qu'on met de l'avant en fait, c'est que les universités effectivement sont capables de se gérer. Ce qu'on pense, c'est que le projet de loi, en tout cas dans sa formule actuelle, ne vient pas nécessairement porter justement... n'est pas nécessairement une solution adéquate à l'ensemble des universités. Ce serait de penser en fait que c'est un modèle unique qui viendrait régler tous les problèmes de toutes les universités, et, nous, on pense en ce sens que ce n'est pas nécessairement une solution unique que ça prend. Donc, c'est dans cette optique-là.

Pour ce qui est effectivement de l'Université de Sherbrooke, je pense qu'on s'en est bien tirés. Donc, l'idée, c'est de voir justement à quel point... comment on ne pourrait pas justement voir pour donner une certaine confiance à nos universités malgré qu'il y a eu certains problèmes. On ne pense pas qu'il ne doit pas y avoir de reddition de comptes, on ne pense pas qu'il ne doit pas y avoir non plus de... justement de reddition de comptes des universités. On pense que c'est important justement de faire état de comment ça s'est bien passé puis peut-être de voir un peu comment qu'on pourrait utiliser, si on veut, ce modèle de gouvernance pour voir comment qu'on ne pourrait pas améliorer ou en tout cas tendre vers une amélioration. Mais l'idée, c'est d'avoir vraiment...

D'abord, on pense que ce serait intéressant vraiment justement, au niveau des états généraux, de questionner l'ensemble du milieu de l'éducation au Québec puis de voir justement de quoi... qu'est-ce qui pourrait se dégager comme consensus de ces états généraux là, premièrement, aussi, de voir un petit peu qu'est-ce qui a été fait comme études jusqu'à maintenant, qu'est-ce qui a déjà été dit, parce qu'il y a beaucoup de choses qui ont été dites, notamment sur la question du financement, même sur la question de la gestion, sur la question... Il y a beaucoup de choses qui ont été faites, puis on pense que ce serait très intéressant de prendre en compte tous ces aspects-là et d'avoir une solution... Tant qu'à avoir une solution systématique, là, une solution qui s'applique partout, bien, pourquoi ne pas justement prendre l'ensemble du problème des universités pour arriver à un document qui serait peut-être plus complet?

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Maurice, M. Lagrandeur, M. Thiam, je vous remercie de nous avoir donné le point de vue du Regroupement des étudiantes et des étudiants de maîtrise, de diplôme et de doctorat de l'Université de Sherbrooke.

Je vous demanderais de revenir... à tous les députés, de revenir à votre place pour qu'on puisse procéder aux remarques finales. Alors, je vais suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 45)

 

(Reprise à 17 h 47)

Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mémoires déposés

Avant de passer aux remarques finales, je vais procéder au dépôt des mémoires des organismes qui n'ont pas été entendus lors des auditions. Il s'agit des mémoires du cégep de Granby?Haute-Yamaska, l'Intersyndicale des personnels et de l'Association générale des étudiants de l'Université du Québec à Trois-Rivières, et le Protecteur du citoyen, et sur le projet de loi n° 44 et sur le projet de loi n° 38.

Remarques finales

Alors, nous allons procéder aux remarques finales. Le partage du temps est comme suit: 2 min 30 s pour le deuxième groupe d'opposition, cinq minutes pour l'opposition officielle, et 7 min 30 s pour le parti ministériel, et une minute pour le président.

Alors, j'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition à formuler ses remarques finales. M. le député de Chauveau, la parole est à vous.

M. Gérard Deltell

M. Deltell: Merci infiniment, M. le Président. Écoutez, comme plusieurs ici ou, enfin, quelques députés ici, je suis en pays neuf. C'était la première fois que j'assistais, comme député, à une consultation générale, et force est d'admettre que j'ai été absolument ébloui par la qualité des interventions, par la qualité des gens qui sont venus, par la qualité des documents nombreux et volumineux que nous avons eus, et je tenais à le souligner.

Également, je tiens à saluer la qualité d'écoute de la ministre, du groupe ministériel, de l'opposition officielle. Des échanges extrêmement constructifs. Il est évident que, quand on a deux députés qui ont fait carrière dans le monde universitaire, Mme la députée de Taillon et M. le député de Charlesbourg, ça ne nuit pas, et on a pu l'apprécier, et c'est tant mieux.

L'objectif de ce projet de loi, à notre point de vue, c'est d'éviter d'autres situations malheureuses comme on a connues avec l'îlot Voyageur. Est-ce que le projet de loi actuellement, dans sa forme actuelle, va répondre à cette interrogation-là? Nous ne croyons pas pour le moment. Mais, puisque, comme je le disais tout à l'heure, il y a une extraordinaire qualité d'écoute, on verra les amendements qui seront proposés. Et, avec tous les propos et commentaires qui ont été émis, je pense que ça peut être très porteur d'avenir.

Aussi, on a été très à l'affût des... j'ai été très attentif aux commentaires unanimes de gens... ou, enfin, quasi unanimes de gens qui sont venus pour dire qu'il fallait préserver la liberté académique. Et il y a eu des gros débats, beaucoup d'opposition concernant le nombre de gens de l'interne et de gens de l'externe, mais un point commun, c'est que tout le monde veut préserver la liberté académique des institutions. Et là-dessus, bien, on est tous d'accord. Évidemment, notre point de vue, nous, on est d'accord. Est-ce que le projet de loi préserve ça? Bien, on le verra à l'analyse article par article.

Et, voilà, je voulais donc simplement vous mentionner ça et que, pour nous, évidemment, éviter le désastre, ça amène des règles plus serrées, que des gens de l'extérieur doivent être présents, oui, mais doivent être conscients des responsabilités qui sont les leurs et aussi obtenir une formation adéquate pour qu'ils puissent assumer pleinement les responsabilités qui leur sont confiées. Merci, M. le Président.

n(17 h 50)n

Le Président (M. Marsan): Merci, M. le député de Chauveau. J'invite maintenant la porte-parole de l'opposition officielle à faire ses remarques finales. Mme la député de Taillon.

Mme Marie Malavoy

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Je voudrais à mon tour saluer les groupes qui sont venus. Ils ne sont pas tous ici ce soir, mais on les a bien, bien à l'esprit, et vraiment ça a été de haut calibre, les discussions. Moi, je vais relire des choses parce que je n'ai pas eu le temps de tout approfondir comme j'aurais voulu. Le moins que l'on puisse dire, c'est que cet exercice n'était pas inutile. Moi, je souhaitais des consultations générales, puis honnêtement je trouve, M. le Président, que ça a été formidable d'entendre toutes ces personnes nous expliquer, chacune à leur manière, leur vision de ce projet de loi.

Cela dit, il faut constater que ces projets de loi suscitent des inquiétudes. Et, quand je dis «ces projets de loi», je réfère à la fois à celui sur les collèges et celui sur les universités. Ils suscitent beaucoup d'inquiétudes, et, moi, je dirais, une première raison de ces inquiétudes, c'est moins à cause de ce qu'il y a ou ce qu'il n'y a pas dans les projets de loi, c'est parce qu'ils sont arrivés rapidement, sans qu'il y ait en amont une réflexion générale. Je n'ai pas compté combien de groupes sont venus dire qu'il faudrait des états généraux, je vais le faire, mais il y en a beaucoup. Et ce que ça indique, c'est que c'est un peu précipité d'aller tout de suite dans le contenu aussi détaillé d'un projet de loi.

Donc, première conclusion que je tire effectivement: il aurait fallu une consultation plus large. Ce qui est clair aussi, c'est qu'il faudra des modifications et une réflexion en profondeur pour savoir c'est quoi, la suite des choses.

Parlons un peu des collèges, parce qu'il ne faut pas les oublier. Ce n'est pas parce qu'ils ont été les premiers qu'on doit aujourd'hui les oublier. Ils sont venus nous dire que, dans l'état actuel des choses, il y a des éléments qui n'allaient pas du tout. Par exemple, le fait que le directeur des études ne soit pas là, ça n'a pas de sens pour un collège. Il faudra vraiment s'adresser très, très clairement à cette question-là et voir comment on la traite. Ils sont venus dire également qu'ils trouvaient que le gouvernement voulait prendre trop de place en nommant huit membres externes sur les 11. C'est des questions qu'il faudra se poser. Ce que je retiens essentiellement, c'est qu'ils trouvent que c'est lourd, que c'est encadrant et que, dans l'état actuel des choses, ils ne peuvent pas donner leur aval à ce projet de loi comme il est là.

Pour les universités, je dirais que c'est encore plus complexe, parce que plusieurs sont venus dire: On n'en veut pas, tout simplement, en plus de dire: On voudrait des états généraux. Les critiques sont plus sévères. Les critiques, essentiellement, elles ont visé à opposer deux modèles: un modèle managérial, qui est celui inspiré par les approches de gouvernance, et un modèle plus collégial. Je n'ai pas le temps de développer beaucoup, mais on peut au moins retenir du modèle collégial que c'est un modèle qui n'est pas hiérarchique, qu'il y a quelque chose qui part, qui émane de la base et qui ensuite va jusqu'au palier supérieur, et que, si on ne comprend pas cela, et que, si on a un mode de gestion où on donne au regard externe la prédominance, on se trompe probablement.

Et je terminerai simplement en disant, M. le Président, que, depuis 40 ans, les collèges et les universités au Québec nous ont permis de faire des bonds de géant dans l'accès aux études supérieures, dans la formation de gens dont on a besoin pour tenir les commandes de cette société. Pour les 40 prochaines années, il faut qu'on fasse les bons choix. Alors, je vous assure que je serai extrêmement attentive et rigoureuse pour la suite des choses, parce que ce n'est pas juste la responsabilité d'une porte-parole ou de collègues, c'est vraiment la suite de l'enseignement supérieur au Québec dont il est question, et je veux regarder ça avec énormément de prudence. Merci.

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la députée de Taillon. Mme la ministre, la parole est à vous pour vos remarques finales.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Mes remarques s'adresseront... tiendront compte évidemment de ce que nous avons entendu au cours de ces semaines au sujet des deux projets de loi. Comme parlementaire, j'ai écouté bien sûr avec beaucoup d'intérêt les suggestions et les commentaires de tous ceux et celles qui sont venus devant nous. J'ai été frappée par la très grande diversité des points de vue, allant du refus global à des suggestions qui sont très constructives pour améliorer les projets de loi. On ne peut donc pas dire qu'il y a une unanimité contre les projets de loi, M. le Président.

Ce que je remarque aussi, c'est que tous, tous ont reconnu l'importance des principes énoncés par les projets de loi. Tout le monde est venu dire que c'était, au sein de notre société, impératif que nous puissions nous gouverner de la bonne façon et selon les meilleures pratiques. Mais ce que j'ai compris aussi, c'est que... Et certains ont demandé de ne pas avoir de loi et d'avoir plutôt des ententes de partenariat, notamment du côté des universités. C'est probablement là où ça a été beaucoup plus fort.

M. le Président, comme parlementaire, comme parlementaire mais comme membre du gouvernement de ce côté-ci de la table, il m'apparaît très clair qu'il faille se donner aussi comme objectif de redonner confiance en ces institutions, l'opinion publique. Et ça, ça se passe dans nos comtés, ça se passe dans nos régions. On le sent, il ne faut pas nier cette réalité-là, mais nous souhaitons que la population reprenne confiance en ces institutions.

Si nous faisons, par exemple, une loi, c'est parce que nous considérons que cette loi va établir des obligations à des administrateurs. Mais c'est plus que ça, c'est plus que ça, parce qu'une loi ça a une force obligatoire. Une loi, ça ne met pas de limite de temps dans son application, puis une loi, ça poursuit forcément un objectif de transparence. Dans ce sens-là, M. le Président, c'est sûr que ces obligations d'impartialité, ces obligations d'indépendance, ces obligations d'efficacité, d'efficience, de transparence, nous croyons que c'est à travers une loi qu'un gouvernement responsable va établir ces règles.

Bien sûr qu'il faut que les universités aient des règles uniformes, mais ne confondons pas des règles uniformes avec la capacité de respecter la mission de chaque université dans les régions, de respecter la personnalité de chaque université dans les régions. Et le défi que nous aurons pour la suite des choses, M. le Président, c'est de conjuguer autonomie, collégialité, imputabilité et transparence. Voilà notre défi de parlementaire.

M. le Président, je souhaite ardemment que les partis d'opposition accepteront de collaborer étroitement avec nous et avec rigueur bien sûr pour améliorer le projet de loi. Et j'ai manifesté, au cours de ces audiences, des ouvertures très précises, mais il y en aura d'autres, et c'est à travers... et c'est dans la suite des choses que nous pourrons ensemble bonifier et améliorer, puisque nous avons bien écouté, nous avons entendu, nous avons compris. Il y a des messages importants, et ce sera à nous, par la suite, à transposer ça dans des articles de loi.

M. le Président, permettez-moi quelques minutes encore, d'abord pour remercier mes collègues de l'aile parlementaire. Ils sont toujours fidèles, loyaux. Vous avez bien participé. Merci pour la qualité de vos questions et de l'échange dans les débats.

Merci aux collègues du parti de... vis-à-vis du Parti québécois, vis-à-vis de l'ADQ, tous les deux, à tous les députés aussi de l'opposition officielle. J'ai tellement apprécié notre climat de travail. Je crois que ce n'était pas facile, on doit l'admettre, ce n'était pas une commission parlementaire facile, mais je vous remercie pour la qualité de l'écoute mais surtout la sérénité avec laquelle nous avons, de part et d'autre, apporté nos points de vue.

Vous ne m'en voudrez pas, chers collègues, de remercier bien sûr toute l'équipe derrière moi. Si vous saviez comment ils ont travaillé très, très fort. C'est complexe aussi pour ces équipes de pouvoir concilier ces points de vue. Je les remercie. J'espère qu'ils auront été d'un soutien pour vous dans votre travail.

M. le Président, vous avez mené cette consultation d'une main de maître, avec calme, avec efficacité, avec un sourire et... mais vous avez tenu l'horloge et vous avez tenu aussi le climat.

Merci au secrétariat, merci aux pages, merci aux techniciens. On ne le dit pas suffisamment, mais, sans vous, notre travail ne pourrait pas être bien compris par l'ensemble de la population.

n(18 heures)n

Et rassurez-vous et soyez convaincus que la suite des choses se fera bien sûr dans l'intérêt de l'avenir de l'éducation universitaire et postsecondaire, avec les cégeps, mais aussi avec l'intérêt très grand d'être un gouvernement responsable face à la population qui nous fait confiance pour gérer l'ensemble des fonds publics. Merci beaucoup, M. le Président.

Le président, M. Pierre Marsan

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la ministre. Et à mon tour de remercier tous ceux qui se sont présentés devant nous, et, dans plusieurs cas, ils venaient souvent de loin; ceux qui ont déposé également des mémoires.

Je voudrais vous remercier, Mme la ministre, aussi pour la conduite de nos travaux, les gens qui vous accompagnent dans votre ministère, les députés ministériels. Mme la porte-parole de l'opposition officielle, je voudrais vous remercier également et remercier vos recherchistes, les collègues députés et le porte-parole du deuxième groupe d'opposition. Je pense qu'il y a un travail extraordinaire qui a été fait.

Je voudrais souligner, vous l'avez fait, mais bien souligner le travail de Mme Stéphanie Boutin et de Mme Madeleine Lévesque, du secrétariat. Je voudrais remercier notre personnel technique, on ne les entend pas beaucoup, on ne les voit pas tout le temps, mais autant le personnel technique audio que vidéo. Remercier nos pages et évidemment tous nos téléspectateurs.

Mme la ministre, vous me faites signe que vous voulez dire un petit mot?

Mme Courchesne: Tout petit, parce que je m'en voudrais... J'ai souligné beaucoup la qualité des mémoires et la qualité des présentations de tous les groupes; je m'en voudrais de ne pas réitérer ces remerciements-là. Et surtout nous avons tellement une belle jeunesse étudiante. Continuez, ne lâchez pas. Et merci à tous ceux et celles qui ont voyagé des kilomètres pour venir nous rencontrer. Merci.

Le Président (M. Marsan): Alors, la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Bon retour, et soyez prudents. Merci.

(Fin de la séance à 18 h 2)


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