(Dix heures trois minutes)
Le Président (M. Marsan): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Je rappelle le mandat de notre commission. Le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 38, Loi modifiant la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire et la Loi sur l'Université du Québec en matière de gouvernance, et sur le projet n° 44, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel en matière de gouvernance.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Malavoy (Taillon) remplace M. Pelletier (Saint-Hyacinthe).
Le Président (M. Marsan): Oui, et on m'indique également qu'il y a deux participations additionnelles: Mme Hivon, du comté de Joliette, et le député de Terrebonne, M. Traversy. J'aurais besoin d'avoir le consentement, on m'indique que vous voulez à l'occasion poser des questions. Alors, est-ce que les autres partis sont d'accord? Je présume que oui. Je vous remercie.
Alors, je peux lire l'ordre du jour de ce matin, c'est d'abord le cégep régional de Lanaudière qui est avec nous, et ensuite la Fédération nationale des enseignants et des enseignantes du Québec, et à 12 h 30 nous aurons la suspension habituelle.
Je voudrais rappeler le temps alloué pour la période de présentation et la période d'échange. C'est 15 minutes, l'exposé du cégep régional de Lanaudière ou de l'organisme, et ensuite 45 minutes réparties entre... la moitié du temps pour l'opposition officielle, la moitié du temps pour le parti ministériel, 22 min 30 s pour le parti formant le gouvernement, 18 minutes pour l'opposition officielle et 4 min 30 s pour le deuxième groupe d'opposition.
Alors, sans plus tarder, j'aimerais qu'on puisse débuter nos travaux, aujourd'hui, et j'inviterais le directeur général ou le président du conseil à nous faire la présentation des gens qui vous accompagnent. Nous vous remercions de vous être déplacés et d'être avec nous.
Auditions (suite)
Cégep régional de Lanaudière
M. Duval (François): Bonjour, M. le Président de la commission. Mme la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, Mme la députée de Taillon, Mme la sous-ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, Mmes et MM. membres de la Commission de l'éducation, chers amis, donc, au nom de mes collègues membres du conseil d'administration du cégep régional de Lanaudière et des membres de notre communauté collégiale, je voudrais d'abord vous remercier de prendre le temps de nous recevoir et de nous entendre.
À titre de président du conseil d'administration du cégep régional de Lanaudière et du Conseil d'établissement du collège constituant de Terrebonne, il m'importe de vous présenter les autres représentants du cégep qui m'accompagnent à cette table. Donc, à mon immédiate droite, j'ai M. Normand Shaffer. M. Shaffer est président du Conseil d'établissement du collège constituant de Terrebonne. M. Shaffer est registraire à l'Université du Québec à Trois-Rivières. À mon immédiate gauche, M. Claude Rivest. M. Rivest est membre du comité exécutif et du conseil d'administration du cégep régional de Lanaudière; il fut également membre du Conseil d'établissement du collège constituant de Joliette; M. Rivest est directeur du Centre d'emploi agricole à l'Union des producteurs agricoles de Lanaudière. À ma gauche également, Mme Céline Durand, qui est directrice du collège constituant de Terrebonne. Et, à ma droite, notre directeur général, M. Bernard Lachance.
Donc, je salue également la présence de nos deux députés de Lanaudière, la députée de Joliette et également le député de Terrebonne. Fait à souligner, notre député de Terrebonne est également un diplômé du jeune collège constituant de Terrebonne, donc on s'en réjouit.
Des voix: ...
Le Président (M. Marsan): On vous écoute, M. le président.
M. Duval (François): Merci beaucoup. Donc, je souligne également la présence de plusieurs membres de notre communauté collégiale. Il n'est pas mon intention de reprendre l'ensemble des éléments contenus dans notre mémoire, mais plutôt de tenter d'en résumer les principales recommandations.
Vous avez pu, à la lecture du mémoire, comprendre que nous avons porté une attention particulière au chapitre XVI, qui porte spécifiquement sur la gouvernance de notre cégep. Nous avons également participé aux travaux de la Fédération des cégeps sur le projet de loi n° 44 et sommes en accord avec les positions prises par l'assemblée générale du 12 août dernier. Donc, considérant que la fédération a fait des représentations sur les autres aspects de la loi, nous avons donc circonscrit nos interventions sur le chapitre qui nous importe, et je ferai de même dans ma présentation.
Comme vous le savez, la région administrative de Lanaudière a été créée il y a plus de 20 ans; elle est en pleine expansion. Sa population de plus de 430 000 habitants est répartie en trois sous-régions, dont les agglomérations centrales sont Joliette, Repentigny-L'Assomption et Terrebonne-Mascouche.
Il y a plus de 11 ans, un compromis historique a permis la création d'un nouveau modèle de gouvernance pour une institution de niveau collégial qui desservait l'ensemble d'une région administrative. Le gouvernement du Québec respectait ainsi son engagement de permettre au patrimoine éducatif des deux institutions bien établies, soit le cégep Joliette de Lanaudière et le collège de L'Assomption, de se perpétuer et de grandir. Il permettait l'installation d'un troisième collège à Terrebonne dans une communauté qui n'avait pas accès à l'enseignement collégial sur son territoire.
Du même souffle, et dans un souci d'établir une plus grande cohérence dans l'offre de services à l'échelle de notre région, le gouvernement mettait en place un nouveau mode de fonctionnement regroupant, à l'échelle régionale, les services administratifs ainsi qu'une gouvernance et une gestion de proximité des services aux étudiants et à la communauté, tout en permettant à chacun des trois collèges constituant de maintenir et de développer leur personnalité collective propre et leur spécificité.
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(10 h 10)
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Notre mode de gouvernance est basé sur le partage des responsabilités entre un cégep régional et ses trois collèges constituants, un conseil d'administration et ses trois collèges... conseils d'établissement, une direction générale et ses trois directions de collèges constituants. La responsabilité et l'imputabilité ultimes demeurent, pour la gouvernance, celles du conseil d'administration; pour les programmes d'études, celles du conseil d'établissement; et, pour la gestion, celles de la direction générale. Par analogie, à l'instar des grands courants de pensée moderne, il permet une véritable décentralisation des responsabilités de services aux citoyens, qui sont nos étudiants, assortie d'une autonomie et d'une imputabilité. Sa responsabilité est confiée à des conseils d'établissement qui sont composés des principaux acteurs de la communauté immédiate de ses collèges.
À l'échelle régionale, la définition des orientations éducatives et le déploiement des services administratifs se font sous la gouverne de conseils d'administration composés de représentants de chacune des communautés collégiales. Le souci de ses membres provenant de chacune des sous-régions est de s'assurer que l'ensemble des communautés reçoivent en complémentarité et équitablement des services éducatifs de qualité tout en répondant aux normes et standards définis par le ministère de l'Éducation et par notre conseil d'administration.
Cet automne, nous accueillons près de 6 000 étudiants, jeunes et adultes, répartis dans 60 programmes et dans trois collèges de taille moyenne qui ont leurs caractéristiques, leurs devis scolaires, leurs cartes de programmes, leurs projets éducatifs et leurs plans de réussite propres. Au fil des ans, nous avons développé un mode de partage des rôles et responsabilités entre nos trois collèges constituants et nos services régionaux qui se peaufine et qui nous permet de plus en plus de bien servir notre région.
Dans notre mémoire, nous avons fait ressortir quelques-unes de nos réalisations et avons insisté sur ce qui permet à notre modèle de gouverner actuellement. Lorsque le projet de loi antécédent, soit le projet de loi n° 110, avait été déposé, à l'automne dernier, celui-ci proposait de faire disparaître notre modèle actuel de gouvernance. Autant à l'intérieur de chacun de nos collèges que dans nos communautés à l'échelle régionale, la réaction a été assez vive. Nous avons fait de nombreuses représentations et nous avons été entendus par le premier ministre du Québec, M. Jean Charest, et son gouvernement, ainsi que par les députés de l'opposition. Nous apprécions au plus haut point que notre modèle soit maintenu. Certaines dispositions du projet de loi n° 44 en permettent même l'amélioration, et nous en sommes très heureux.
Bien sûr, nous sommes ici à la fois pour exprimer notre appréciation et aussi suggérer quelques améliorations au projet de loi. À cet égard, à la page 10 de notre mémoire, vous trouverez les commentaires portant spécifiquement sur le chapitre XVI. Plusieurs améliorations seront apportées à notre modèle de gouvernance si le chapitre XVI était adopté tel que libellé, et cela a bien été accueilli. Notons notamment la présence au conseil d'administration de trois représentants des enseignants et des étudiants, soit un par collège, et la nomination par le conseil d'administration de la majorité des membres externes des conseils d'établissement.
Nous suggérons cependant deux changements au projet de loi. D'abord, nous apprécierions que les directrices des collèges constituants demeurent membres à part entière du conseil d'administration. Considérant l'importance de leurs responsabilités notamment au niveau de la gestion de proximité et des liens qu'elles assurent entre l'ensemble des instances de leurs milieux respectifs et celles du conseil d'administration; considérant également la nature très particulière et l'importance des responsabilités qui leur sont dévolues, notamment à l'article 67 du projet de loi n° 44; considérant leur statut de hors cadre qui fait entre autres que leurs profils de compétence et les critères de leur évaluation sont établis par le conseil d'administration; considérant leurs responsabilités eu égard à la direction de leurs collèges respectifs; considérant le rôle primordial comme membres et comme personnes responsables d'assurer l'exécution des décisions du conseil d'établissement dont elles sont membres; et considérant le fait qu'elles exercent la présidence de la commission des études de leurs collèges, elles exercent le rôle de premier officier supérieur de leurs collèges constituants, et nous demandons qu'elles demeurent membres du conseil d'administration.
Deuxièmement, compte tenu de la responsabilité dévolue aux conseils d'établissement relative à la gestion des programmes et des services aux élèves, nous apprécierions que les conseils d'établissement soient les instances qui approuvent les plans de réussite et que le conseil d'administration par la suite les intègre à son plan d'action stratégique, comme nous l'avons fait en 2008 et précédemment en 2004. Nous demandons de modifier les articles 43 et 51 du chapitre XVI de la façon suivante: la version modifiée de l'article 43 pourrait se lire: «Le collège régional intègre le plan de réussite de chacun de ses trois collèges constituants à son plan stratégique pluriannuel.» Et l'article 51 pourrait se lire: «Le conseil d'établissement établit le plan de réussite du conseil constituant. Le cégep régional intègre les plans de réussite des collèges constituants et le plan stratégique établi par le ministre dans son plan stratégique pluriannuel.» La gouvernance de notre cégep est basée sur les principes rigoureux de démocratie, de transparence et de reddition de comptes. Elle est aussi basée sur le principe de l'autonomie donnée aux collèges constituants, du partage des activités nécessaires à la réalisation de notre mission entre nous et nos partenaires. Elle est fondée sur la confiance que nous avons réussi à construire entre nous, après de nombreuses discussions, dans un esprit de compromis et de consolidation d'une longue tradition d'enseignement collégial.
Le gouvernement du Québec s'était engagé, il y a plus de 11 ans, à mettre en place un modèle basé sur l'autonomie de la gestion pédagogique et de la gestion de la vie étudiante de chaque collège, et ce, dans une perspective de développement de chacune de nos communautés et de la région. Le gouvernement du Québec nous a fait confiance. Notre modèle de gouvernance vient à peine de prendre son élan. Nous avons pu apprécier le soutien obtenu de notre région et l'écoute reçue de notre ministre et des membres de l'Assemblée nationale quant au maintien de notre modèle de gouvernance. Les nombreuses réalisations qui sont à notre actif démontrent que nous avons relevé le défi et que nous souhaitons poursuivre en ce sens.
Le cégep régional de Lanaudière souscrit aux objectifs d'amélioration de sa gouvernance et s'y emploie d'ailleurs depuis quelques années. Il tient à assurer le gouvernement du Québec de sa pleine collaboration dans la mise en oeuvre des dispositions qui auront été adoptées par l'Assemblée nationale au terme de son processus de consultation conduisant à l'adoption du projet de loi.
Je vous remercie, M. le Président, et nous sommes maintenant disposés à répondre à vos questions.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, M. le président du cégep régional de Lanaudière. Juste avant de commencer nos échanges, j'aimerais demander l'autorisation, comme je l'ai fait plus tôt pour le député de Terrebonne et la députée de Joliette, d'autoriser le député de Lévis à prendre part à nos discussions. Alors, j'aurais besoin d'un consentement.
Des voix: ...
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Alors, maintenant, nous commençons nos échanges, et je cède la parole à la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Courchesne: Madame, messieurs, ça me fait un immense plaisir de vous accueillir ici, d'autant plus que... et je veux saluer, par le fait même, les députés qui se joignent à nous ce matin, et les députés particulièrement de votre région, de même que mes collègues parlementaires. Je dois dire que je suis très heureuse que vous preniez la peine de venir à Québec, de vous présenter devant nous. Parce qu'effectivement nous avons beaucoup, beaucoup discuté ensemble, nous avons beaucoup travaillé sur ce modèle de gouvernance, voulant reconnaître une spécificité que je dirais historique, même si 10 ans, peut-être que, pour vous, ça a été à la fois long et court. Mais, l'histoire de 10 ans, c'est somme toute assez court.
Rappelons que votre statut de cégep régional de Lanaudière découle d'une volonté politique de 1998 où cette vaste région de Lanaudière, qui comprend différents pôles, Joliette, Terrebonne, L'Assomption, jugeait en fait que chaque pôle pouvait obtenir un nouveau cégep, d'autant plus qu'il y a une croissance démographique assez impressionnante dans la région de Lanaudière depuis cette période-là. Et le gouvernement de l'époque a donc créé, par voie législative, ce statut de cégep régional de Lanaudière. Vous y avez mis conviction, effort, passion, temps, beaucoup pour, vous le dites vous-mêmes, développer ce modèle-là. Et vous nous dites dans votre présentation qu'il vient tout juste de prendre son envol. Alors, je peux tout à fait comprendre... je pouvais tout à fait être sensible à votre inquiétude au moment du dépôt du premier projet de loi. Et c'est pour ça que nous avons travaillé très, très fort, et je remercie d'ailleurs tous ceux, tant du ministère, la sous-ministre Hélène David et tous les gens de votre cégep, vous, M. le président, vous, M. le directeur général, qui avez porté la voix de votre région et surtout des hommes et des femmes qui font ce cégep, je dis «font», mais bâtissent, créent ce cégep.
n(10 h 20)n Et j'ai eu l'occasion de visiter particulièrement le campus de Terrebonne et je veux sincèrement vous féliciter pour relever l'ampleur de cette tâche qui est à la fois très stimulante pour vous mais en même temps aussi complexe étant donné les trois campus comme tels.
Vous nous demandez... Ce matin, moi, je vais aborder deux sujets, deux questions principales que vous souhaitez... pour lesquelles vous souhaitez des amendements. Une question qui, je crois, rejoint un peu la préoccupation de la Fédération des cégeps, parce que, dans votre cas, les trois directrices de collèges constituants, si je lis bien votre mémoire ? corrigez-moi si je me trompe ? sont aussi directrices des études. Donc, dans la foulée des représentations des cégeps, vous souhaitez bien sûr que ces personnes soient aussi membres du conseil d'administration. Donc, je veux savoir... Actuellement, on a beaucoup discuté ensemble du nombre de membres, on a convenu, et vous étiez, je crois, d'accord à l'époque, que 21 pouvait bien équilibrer... c'est une voie de compromis, on en convient, mais 21 pouvait être un nombre raisonnable qui permettait une représentativité à tous les niveaux.
Maintenant, si on les ajoutait puis qu'on voulait conserver la proportion de membres externes, donc je voudrais que vous me disiez à combien on augmente encore. Puis est-ce que c'est souhaitable d'avoir des conseils d'administration de 26, 27, 28 personnes et en quoi ce nombre peut faciliter ou améliorer l'efficacité? Ça, c'est d'abord ma première question sur... Et je complète pour vous laisser... Parce que vous êtes conscients aussi que les étudiants et probablement les professeurs voudraient eux aussi plus de représentativité. Les étudiants, par exemple, un étudiant du secteur général puis un étudiant du secteur de la formation technique. Donc, si on ajoute tout ça, là, on est rendus à plus que 30, là. Alors, je voudrais avoir vos commentaires là-dessus.
Le Président (M. Marsan): Me Duval.
M. Duval (François): Pour répondre à votre première question, Mme la ministre, c'est que, si on regarde... si on compare notre collège par rapport aux institutions collégiales standard, eux ont, disons, peut-être 17 représentants au conseil d'administration pour un collège. Si vous deviez accepter de rajouter les directrices des trois collèges comme membres du conseil d'administration, on serait à 24, et notre demande est 24, et on comprend que 24 représenteraient trois collèges au conseil d'administration. Nous avons trois régions, la permanence de la représentation sous-régionale se fait dans la continuité, surtout par la directrice du collège. Donc, la directrice du collège, elle, c'est une personne qui sera là tout le temps au conseil d'administration.
Nous, les membres externes, nous allons avec le temps se faire remplacer, mais la direction... la directrice ou le directeur de chaque collège sera toujours présent au conseil d'administration et viendra représenter sa sous-région, ses besoins, sa communauté. Donc, elle vient perpétuer la présence sous-régionale au conseil d'administration, elle vient apporter une répartition et un complément, je pense, à l'ensemble de la région. Donc, ce serait peut-être une... Le nombre, c'est un nombre, on est présentement 22, on serait capables de vivre à 24, je pense. Un argument pour dire que 24, 17, 15, je pense que c'est un nombre, et nous, on est capables de vivre avec 24 au conseil d'administration.
Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Qu'est-ce qui arrive avec le principe d'avoir 60 % de membres externes? À ce moment-là, si on ajoute trois personnes internes, on ne respecte plus ce 60 % ou cette majorité de membres externes.
Le Président (M. Marsan): Me Duval.
M. Duval (François): ...
Mme Courchesne: C'est pour ça que je dis que ça se peut qu'on soit obligés d'aller à plus que 24.
M. Duval (François): Je ne sais pas. Peut-être, M. le Président, si vous me permettez, peut-être sur ce point technique là, peut-être passer la parole à notre directeur général, M. Lachance.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Lachance.
M. Lachance (Bernard): Bon. Évidemment, premièrement, il semble, en tout cas chez nous, je dois vous dire, Mme la ministre, que les enseignants en tout cas étaient très contents qu'il y ait maintenant un représentant par collège constituant, représentant des enseignants. Je ne pense pas qu'il y ait vraiment de leur part de demande pour ajouter, là. Pour eux, c'était vraiment très satisfaisant et ça simplifie évidemment beaucoup notre fonctionnement. Notre règlement interne va être beaucoup plus simple parce qu'il y avait tout un principe de rotation qui était très complexe à mettre en place.
Du côté des étudiants, on n'a pas eu évidemment de discussion avec eux, mais on pense qu'il y a possibilité par nos règlements de régie interne de s'assurer qu'il y ait une rotation entre les préuniversitaires et les techniques. Alors, on a déjà une mécanique de ce genre-là, donc, on ne pense pas être obligés d'augmenter le nombre.
Ceci étant dit, c'est, on ne s'en cache pas, un peu la faiblesse de notre... on sait très bien que, là, on dépasse le 60-40 et là-dessus on est, en fait, 13 membres externes et 11 membres internes. Et là-dessus, si on augmentait, il faudrait qu'on augmente de façon beaucoup plus considérable le nombre pour respecter ce 40-60 là. Alors, ce qu'on vous demande, c'est de nous faire confiance. On vous dit: Écoutez, moi, je sais qu'on ne peut pas augmenter indéfiniment, on ne peut pas vous recommander d'aller à 30 membres du conseil d'administration; votre objectif, c'est d'en réduire le nombre, on le sait. Et donc il y a là un problème qui est particulier à notre collège. Je ne sais pas si mes collègues voudraient ajouter là-dessus, mais, oui, effectivement, vous pourriez ajouter un, deux ou trois membres externes, et ça brise un peu l'objectif que vous avez de réduire aussi le nombre des membres du conseil.
Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Soyez assuré qu'il n'y a aucune question de confiance dans la discussion que nous avons en ce moment, là. Je voudrais bien pouvoir aborder les problèmes ou les situations uniquement sur la base de la confiance, mais ce n'est pas du tout la confiance qui est en cause ici, aucunement. C'est plutôt, je dirais, un principe aussi d'équité par rapport à l'ensemble de la gouvernance des cégeps, mais, cela dit, je n'ai pas de difficulté non plus à faire en sorte que ce cégep-là maintienne d'abord son statut qui est exceptionnel, qui est unique au Québec. Les autres cégeps comme Champlain, par exemple, qui ont des campus satellites, n'ont pas ce statut de cégep régional comme vous l'avez. Donc, je l'ai dit, c'est une particularité historique que je respecte et que je veux bien reconnaître. Et ça, je pense qu'on a eu l'occasion, là, vous et moi, d'échanger longuement là-dessus, et c'est ce qu'on a voulu refléter par le projet de loi. Donc, ce sujet-là est effectivement matière à réflexion, mais je retiens de votre intervention qu'il n'en demeure pas moins que ces directrices des constituantes sont aussi des directrices des études. Je pense qu'il faut d'abord situer la discussion à ce niveau-là et prendre la décision à ce niveau de représentations qui sont faites par l'ensemble des cégeps.
L'autre sujet que je voudrais aborder avec vous, qui m'étonne un peu plus, cela dit, parce que, ça, je ne pense pas qu'on l'ait abordé comme tel lors de nos rencontres, mais vous demandez que le conseil d'administration intègre au plan stratégique le plan de réussite que chaque conseil d'établissement aura approuvé. Est-ce que ça veut dire que le conseil d'administration du cégep régional de Lanaudière n'approuvera pas les plans de réussite et qu'ils vont juste les intégrer à un plan stratégique?
Alors, ma question, c'est: Comment le conseil d'administration peut-il être imputable, puis comment peut-il rendre des comptes d'une responsabilité qu'il n'aura pas prise?
Le Président (M. Marsan): Me Duval?
M. Duval (François): Oui, M. le Président. Peut-être que monsieur... mon voisin, M. Shaffer, pourrait peut-être prendre la parole, s'il vous plaît.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Shaffer, la parole est à vous.
M. Shaffer (Normand): Merci. Bon, en tant que président du conseil d'établissement de L'Assomption, je crois que c'est important, déjà la pédagogie se vit dans chacun des collèges constituants. Et évidemment, pour nous, dans chacun de ces collèges constituants là, au niveau des aspects pédagogiques et au niveau des plans de réussite, c'est important qu'ils soient adaptés évidemment aux besoins de la clientèle que l'on dessert, à leurs caractéristiques, à leurs besoins et à leur façon de faire qui leur est propre.
Donc, dans ce contexte-là, c'est tout à fait, je pense, opportun et important que les plans de réussite soient déterminés... et établis et déterminés par les conseils d'établissement, qu'ils soient évidemment intégrés par le conseil d'administration dans le cadre de son plan stratégique puisqu'évidemment les plans de réussite font partie intégrante du plan de réussite.
Et je suis persuadé que, si les membres du conseil d'administration avaient des recommandations ou des commentaires à faire, au niveau des conseils d'établissement, sur un plan de réussite, je pense qu'ils seraient tout à fait les bienvenus qu'on en tienne compte. Mais pour nous, l'important, c'est évidemment que les plans de réussite soient le reflet de la pédagogie qu'on... qui sont développées dans chacun des collèges constituants.
n(10 h 30)nLe Président (M. Marsan): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci. Je comprends ça très bien. Mais là je vais résumer les deux questions, puis corrigez-moi si ma lecture n'est pas bonne: Mais là, que le conseil d'établissement définisse son plan de réussite, je comprends ça tout à fait, cela va de soi, mais le conseil d'établissement pourrait recommander son plan de réussite au conseil d'administration qui l'approuverait, et ça n'enlèverait aucune prérogative au conseil d'établissement.
Parce que là j'écoute attentivement, puis je me pose sincèrement la question, puis c'est bien amical, ce que je vais vous dire, là, ne prenez pas ça mal, mais je vais vous dire le fond de ma pensée: À quoi va servir votre conseil d'administration? Parce que vous me dites: Le plan de réussite, c'est le conseil d'établissement qui décide. Puis vous me dites: Les trois directrices d'établissement, ce sont elles ? ou eux, là, mais, dans ce cas-ci, ce sont des dames ? ce sont elles qui vont représenter nos constituantes et ce sont elles qui vont décider, ce sont elles qui vont avoir droit de vote au conseil, puis, elles, vont agir comme étant les patronnes des établissements. Mais ces directrices-là, elles ont un D.G., puis le cégep, là, il a un D.G. Le D.G. là, c'est quoi, son rôle? Puis le conseil d'administration, ça va être quoi, son rôle? Vous allez me dire: Ils vont approuver les budgets. Oui, mais vous conviendrez avec moi que le budget... il faut, avant d'approuver le budget, il faut qu'on soit aussi en lien avec ce qui se passe à l'intérieur de chacune des constituantes. Et le plan de réussite est un très gros morceau.
Alors, j'essaie de bien saisir. J'ai comme le sentiment qu'on se retrouve avec trois campus extraordinairement autonomes qui prennent beaucoup de décisions et je ne vois pas le lien entre les décisions qu'ils prennent et le conseil d'administration. Quelle est l'imputabilité du conseil d'administration? Et, quand vous me dites... et vous me dites: Bien, si le conseil d'administration a des remarques à faire sur le plan de réussite, je suis certaine que ça va super bien aller puis ils vont en tenir compte. J'aimerais ça que, dans la vraie vie, ce soit aussi facile et aussi simple, on n'aurait pas besoin de faire de lois. Mais, si on sent le besoin de faire une loi, c'est parce qu'il faut que ces rôles soient véritablement clarifiés. C'est comme dans un mariage, hein? Quand ça va bien, ça va bien. On ne fait pas des contrats de mariage pour quand ça va bien, on fait des contrats de mariage pour quand ça ne va pas bien. Alors, c'est un peu la même chose. Alors, j'aimerais que vous me clarifiiez cette situation-là, s'il vous plaît.
Le Président (M. Marsan): Me Duval.
M. Duval (François): Bon, si on regarde la façon que nous avons adopté notre plan stratégique, le dernier plan stratégique et la consultation qui a eu lieu pour l'adoption, donc chacune des trois commissions des études a été consultée, chacun des trois conseils d'établissement ont été consultés, l'ensemble de la communauté régionale a été consultée pour arriver à un plan stratégique qui a été adopté par le conseil d'administration et où s'est retrouvé les plans de réussite. Donc, c'est une intégration, mais, par le fait même, lorsqu'on adopte le plan stratégique et où le conseil d'administration revoit l'ensemble de tout ça, il revoit également, je pense, les plans de chacun des trois collèges. Ce n'est pas comme un chèque à la poste qui... puis on fait juste du copier-coller, et tout ça. Bien, en tout cas, moi, c'est ma façon, là, en tant qu'administrateur... je ne suis pas gestionnaire, je ne suis pas là à temps plein, mais c'est la façon que je l'ai vécu, là, dans les dernières années, là.
Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Je veux bien comprendre. Ce que vous me dites, c'est que le conseil d'administration adopte un plan stratégique. Et est-ce que les plans de réussite de chaque établissement doivent se conformer au plan stratégique? Parce que ce n'est pas comme ça que vous l'énoncez dans votre document. Dans votre document, vous souhaitez que les plans de réussite soient intégrés... approuvés par le conseil d'administration puis intégrés. Donc, que le conseil d'administration doit faire son plan stratégique en fonction du plan de réussite de chacun des établissements, qui a déjà été décidé. C'est pour ça que je pose la question: Quel est le véritable rôle du conseil d'administration face à son plan stratégique? Parce que ce que je comprends: c'est les trois constituantes qui dirigent... qui dirigent le conseil d'administration du cégep régional de Lanaudière. Puis ce n'est pas méchant...
M. Duval (François): Non, non.
Mme Courchesne: ...là, c'est un exercice de compréhension que j'essaie de faire.
Le Président (M. Marsan): Me Duval.
M. Duval (François): Dans un premier temps, je suis président du conseil d'établissement, disons, du collège de Terrebonne, et j'ai participé au plan de réussite du collège constituant de Terrebonne. D'autres membres l'ont fait aussi dans chacun de leurs collèges. Je ne sais pas, là, si... Avec votre permission, M. le Président, là, peut-être repasser la parole à notre directeur général qui pourrait peut-être élaborer, là, sur cette interprétation du terme...
Le Président (M. Marsan): M. Lachance.
M. Lachance (Bernard): Oui. Si on reprend... On va prendre l'exemple du plan stratégique qu'on a terminé. Ça a été une vaste consultation, effectivement. Et, au préalable, chacun des trois conseils d'établissement avaient déjà adopté ou étaient en processus d'adoptation, parce que ça s'est fait presque concurremment, leur plan de réussite. Il y a eu trois consultations successives des commissions des études de chacun des collèges et des conseils d'établissement et des recommandations unanimes. Et on s'enrichissait mutuellement, c'est-à-dire d'un collège... d'une commission des études à l'autre et d'un conseil d'établissement à l'autre. Notre plan, il a été largement critiqué, amélioré, et, au terme de cette consultation-là, c'est que la décision finale a été prise par le conseil d'administration du cégep. Ça a été un long processus, effectivement, avec des retours. Et ça a été, je pense, un processus extrêmement enrichissant, et mutuellement les collèges évidemment se sont nourris aussi des considérations des autres.
Ceci étant dit, le dernier... la décision ultime a été prise par le conseil d'administration, et, si on parle de la relation entre le directeur général et les directions des collèges constituants, bien entendu, on a un comité de planification qui a coordonné tout ça, et le directeur général évidemment, ma responsabilité à moi, c'était de m'assurer que chacune des directrices de collèges constituants fasse cette démarche-là en toute cohérence et avec des considérations provenant de leurs commissions des études respectives et de leurs conseils d'établissement. Alors, il y a eu une concertation permanente entre les directrices de collèges constituants et moi à ce sujet-là. Et, dans un cas d'ailleurs, il y a eu nos processus qui étaient presque en même temps parce que les délais n'étaient pas tout à fait les mêmes pour les trois collèges. Je ne sais pas si ça répond à vos questions.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, M. Lachance.
Mme Courchesne: Merci.
Le Président (M. Marsan): Ceci met un terme à notre première période d'échange avec le parti ministériel. Je vais maintenant reconnaître la porte-parole de l'opposition en matière d'enseignement supérieur, la députée de Taillon. Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Lachance, ainsi que les gens qui vous accompagnent. Je trouve ça intéressant de vous entendre parce que je trouve qu'à travers déjà la première période d'échange on voit poindre certains des enjeux qui vous touchent, vous, mais qui touchent aussi l'ensemble du projet de loi.
Je vais reprendre des questions un peu dans l'ordre de celles qu'on vient d'aborder. D'abord, j'aimerais que vous reveniez sur la question des directeurs des études qui sont en même temps directeurs de collèges. J'aimerais que vous me précisiez quel est leur rôle et quel serait le rapport au conseil d'administration, puisque vous demandez que ces trois personnes en fassent partie. Qu'est-ce que ça ferait comme différence par rapport à ce que le projet de loi propose?
Le Président (M. Marsan): Me Duval.
M. Duval (François): Avec votre permission, je passerais la parole à M. Shaffer, s'il vous plaît.
Le Président (M. Marsan): M. Shaffer.
M. Shaffer (Normand): Merci. Le rôle des directrices de collèges constituants, bon, est quand même assez... est très important. On l'a mentionné, elles jouent le rôle évidemment de l'équivalent des directrices ou directeurs des études dans les collèges traditionnels, mais c'est aussi ces personnes-là qui ont évidemment à mettre en place l'ensemble des mesures et l'application, là, des différentes décisions qui sont prises, soit par le conseil d'administration, soit par le conseil d'établissement.
Comme président d'un conseil d'établissement, je trouverais fort important que la directrice ou le directeur du collège constituant dont je préside le conseil puisse apporter au conseil d'administration l'ensemble des éléments et vraiment le vécu du collège constituant pour s'assurer qu'autant les recommandations qui sont faites par le conseil d'établissement ou ce qu'on adopte puissent bien éclairer les membres du conseil d'administration. C'est dans ce sens-là, je pense, qu'il faut voir la demande, là, de... notre demande concernant l'intégration des directrices au conseil d'administration.
n(10 h 40)nMme Malavoy: Je comprends que...
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Merci. Je comprends que ce sont des personnes clés. Autrement dit, il n'y a qu'elles qui aient ce regard global sur le vécu de chacun des collèges constituants, et, si ces personnes-là ne sont pas là, ce n'est pas les autres qui peuvent suppléer. Exact?
M. Duval (François): Juste peut-être pour rajouter, c'est que la directrice du collège fait une gestion de proximité. Donc, elle a la direction des études, elle a la direction de ses enseignants, des étudiants, elle a aussi la responsabilité de la relation avec la communauté, et sa présence au conseil d'administration vient aussi apporter ça. Donc, c'est la directrice qui, au jour le jour, est l'interface sous-régionale du collège par rapport à sa communauté.
On parle de gestion de proximité, puis c'est vraiment ça que la directrice fait. Elle vient gérer la proximité avec tous les éléments de son... elle rassemble tout ça. Comme exemple ? puis Mme Durand pourrait peut-être témoigner ? à Terrebonne, nous avons eu à gérer le transport des étudiants. Le collège est situé dans un parc industriel. Donc, la directrice a eu à négocier avec la commission de transport intermunicipale pour s'assurer que le transport des étudiants se fasse par le transport en commun. Elle a eu aussi également à aller financer les passes des étudiants. On a obtenu que le Mouvement Desjardins, y compris la commission de transport, paient la moitié du transport en commun des étudiants. Et cette gestion de proximité là, qui dépasse la Commission des études, qui dépasse aussi le plan de réussite... et c'est ce qu'elle apporte au conseil d'administration, et c'est cette personne-là qui est la permanente... qui a la permanence de cette gestion de proximité.
Moi, je suis au conseil d'établissement de Terrebonne. J'ai les deux postes: je suis au conseil d'administration, mais mon terme... mon mandat est limité dans le temps, mais la direction du collège de Terrebonne... Puis je parle de Terrebonne parce que je suis plus près de Terrebonne, mais ça s'applique autant à Joliette qu'à L'Assomption, c'est la proximité qu'elle vient refléter au conseil d'administration, elle doit le transpirer dans tous ses propos, je pense. C'est ce qu'elle apporte au conseil d'administration, c'est une valeur ajoutée, je pense, que...
Le Président (M. Marsan): Est-ce que, Mme Durand, vous voulez rajouter quelque chose?
Mme Durand (Céline): Non.
Le Président (M. Marsan): C'est bien.
Mme Durand (Céline): En fait, j'abonde dans le sens de mon président, évidemment, et je pense que la structure même du cégep régional appelle à cette... Bon, c'est un modèle très créateur, très créatif et en soi est un modèle qui appelle beaucoup la délégation et le partage du pouvoir et des rôles avec quatre instances de gouvernance dont une dans chacun des collèges et une ultime au niveau du cégep régional, et il y a aussi là un partage des responsabilités où le conseil d'administration a son... sa ligne de pouvoir, mais le conseil d'établissement a aussi la sienne au regard notamment des plans de réussite, de son budget et de sa vie collégiale dans sa «sous-région», là, si je peux prendre cette expression-là.
Le Président (M. Marsan): Merci. Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Bien, je vais en profiter, puisque mes collègues de cette région sont là, je vais leur donner la parole, et, s'il me reste du temps, j'aurais d'autres questions.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. le député de Terrebonne.
M. Traversy: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bien, tout d'abord, j'aimerais aussi saluer la présence de mon collègue Guillaume Tremblay, qui est en quelque sorte une réussite de ce collège régional. Félicitations, Guillaume!
Alors, là-dessus, je voulais simplement vérifier avec vous pour voir si j'ai bien compris. La directrice des constituantes est le lien entre le conseil d'administration, le conseil d'établissement, siège également sur la Commission des études, des fois même travaille avec les associations étudiantes. Elle a un rôle clé à jouer à travers les différentes constituantes. Et où la problématique se trouve, je crois, c'est au niveau du quota entre membres internes et externes.
Et, de ce que j'ai entendu, je veux que vous puissiez me dire si j'ai bien compris: le fait que le collège régional de Lanaudière soit unique au Québec ? et ça demande nécessairement que la formule de répartition ne soit peut-être pas identique à l'ensemble des autres cégeps ? et le fait de représenter des gens issus du secteur agroalimentaire de la région du nord de Lanaudière, de Joliette, des gens issus de la région de L'Assomption, des gens issus de la région de Terrebonne, amènent déjà, en son sein interne, différentes représentations qui mériteraient peut-être d'être tenues en compte dans le calcul pour le nombre de membres au conseil d'administration. Est-ce que j'ai... C'est un peu ça?
Le Président (M. Marsan): Me Duval.
M. Duval (François): Bien, si on regarde la composition de notre conseil d'administration, en plus des directrices qui représentent leurs collèges, nous avons aussi une représentation des membres internes et externes de chacun des trois collègues de chacune des trois régions. Il y a un équilibrage qui se fait, et leur présence ? des trois directrices ? au conseil d'administration ne vient pas banaliser l'ensemble de l'action du conseil d'administration. On ne vient pas être cannibalisés parce que j'ai trois directrices qui sont au conseil d'administration, c'est une voix de plus. C'est une voix qui est différente, c'est une approche qui est différente de moi qui représente le milieu socioéconomique de ma sous-région; la même chose que mon collègue, ici, qui représente le nord de Lanaudière qui est une région peut-être plus agricole; M. Shaffer, ici, qui représente l'Assomption, la même chose. Donc, je pense qu'il y a un équilibrage qui se fait, et leur présence ne devrait pas être traumatisante, je pense. Pour nous, en tout cas, elle ne l'est pas. On ne voudrait pas non plus, là, que ça se reflète, là, dans le projet de loi, là.
Le Président (M. Marsan): M. le député de Terrebonne, c'est terminé?
M. Traversy: C'est terminé.
Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la députée de Joliette, la parole est à vous.
Mme Hivon: Oui, merci. Rapidement, bien, je suis bien contente de vous entendre ce matin, et peut-être que c'est ça, ce qui suscite beaucoup de questions, c'est notamment le fait que vous êtes un cas unique et qu'on apprend à découvrir, plus on parle et plus on pose des questions sur justement l'unicité de l'expérience, je dirais, dans Lanaudière, avec les trois constituantes, et je pense que c'est pour ça qu'il y a beaucoup de pédagogie aussi à faire ce matin puis qu'on vous pose de nombreuses questions.
Moi, je pense qu'il faut être conscient qu'il y a eu beaucoup d'ouverture de la part de la région quand ce projet-là est arrivé. Je pense qu'il y a eu une belle ouverture mais qui s'est accompagnée d'un désir d'autonomie qui était normal dans les circonstances puisqu'on enlevait une petite part d'autonomie à deux des cégeps qui étaient déjà existants. Alors, c'est pour ça que je comprends tout à fait la revendication que vous déposez ce matin.
Évidemment, si elle était acceptée globalement pour les directions des études, vu que les directrices des constituantes cumulent les postes, votre demande serait acceptée, mais, moi, ce que je veux bien marquer, c'est que c'est une demande aussi qui est indépendante du fait de votre spécificité et que, si cette demande-là n'était pas retenue, votre demande ne devrait pas tomber automatiquement puisque vous avez un rôle spécial à jouer.
Moi, c'est ça, j'aurais peut-être aimé un petit peu plus de pédagogie, là, de la part de Mme la directrice de la constituante de Terrebonne, de nous dire en quoi votre rôle, je dirais, vraiment de gestionnaire, parce que vous avez le double chapeau... des cas dans le passé où, en siégeant au conseil d'administration évidemment, vous avez pu faire valoir les spécificités propres à votre établissement, et comment ça, ça a pu être traduit par des décisions du conseil qui autrement auraient pu peut-être être moins fidèles à votre réalité.
Le Président (M. Marsan): Alors, Me Duval?
M. Duval (François): Je m'excuse, je pense que la question s'adressait à Mme Durand.
Mme Hivon: Oui, mais...
M. Duval (François): O.K., excusez.
Mme Hivon: ...si quelqu'un d'autre veut y répondre, avec votre expérience...
Le Président (M. Marsan): Mme la directrice...
Mme Hivon: Oui.
Le Président (M. Marsan): Mme Durand.
n(10 h 50)nMme Durand (Céline): Oui. Merci, M. le Président. En fait, faire oeuvre de pédagogie, vous le disiez tantôt, c'est aussi un rôle qu'on peut avoir au sein même de nos instances sans désavouer aucunement la compétence des gens qui s'y trouvent, mais, puisque ce n'est pas leur quotidien, bien, souvent, on doit expliquer puis bien contextualiser les projets qu'on peut avoir.
Le fait d'être au sein du conseil d'administration nous amène à porter avec nous l'ensemble des projets de chacun des collèges constituants et de bien faire comprendre à un groupe régional la spécificité de chacun des collèges pour un projet particulier en soi ou même encore, des fois, sur un projet qui est porté plus par un collège mais qui touche les trois autres collèges, et on a... là-dessus, on est pas mal à géométrie variable, là, dans nos pratiques.
Mais un exemple de... On parlait tantôt des projets de réussite. Oui, c'est un aspect qui, actuellement, dans la loi, est approuvé... nos projets de réussite sont adoptés par nos collèges constituants. Les collèges constituants adoptent aussi leur propre budget, qui est en lien, en grande partie, avec le plan de réussite aussi, lequel est comme ratifié par le conseil d'administration dans le budget, d'une part, et, d'autre part, dans le plan de réussite pour... dans le plan stratégique pour ce qui est du plan de réussite, et ça nous permet donc de bien faire comprendre, de bien... je vais employer le terme «défendre», mais ce n'est pas à propos, là, c'est boiteux comme terme, mais, à tout le moins, faire bien ? c'est ça ? faire bien comprendre les enjeux de nos particularités au niveau d'un plan de réussite, par exemple, ou d'un projet. À Terrebonne, on vient d'adopter tout un programme sport-études qui n'a pas à être nécessairement ratifié par le conseil d'administration, mais, en ayant là la personne qui peut en parler, qui peut l'expliquer, qui va bien faire comprendre les enjeux, peut permettre aussi à un administrateur d'un secteur donné à vouloir, pour le cégep régional, à vouloir duplicater ce projet-là ailleurs ou à en faire...
Donc, on est là vraiment... et, sans prétendre être indispensables, je pense que notre rôle au sein du conseil d'administration est, à ce moment-ci, très positif et permet donc à l'ensemble des membres qui y sont à bien comprendre les enjeux. Et effectivement le directeur général en est, mais, de par notre séparation de partage de pouvoirs, le directeur général peut difficilement répondre, de façon de proximité, à l'ensemble des projets parce que souvent il va être appelé à être au niveau des tables plus régionales Lanaudière, tandis que, nous, en tant que directeurs de collège, on est plus, dans nos talles ou dans les localités, impliqués dans notre milieu au sein de chacune des sous-régions.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: J'aimerais revenir sur un élément qu'on a abordé aussi un petit peu plus tôt, parce que vous avez pris la peine, tout le monde ne fait pas ça, de reformuler deux articles, les articles 43 et 51, pour les dire d'une manière qui vous convienne mieux. Et je vais juste relire ce qui est dans le projet de loi.
Dans le projet de loi... Je vais prendre 43, là, ça va suffire. Dans le projet de loi, on dit: «Le collège régional étudie et approuve le plan de réussite de chacun [des] trois collèges constituants et l'intègre à son plan stratégique...» Vous, vous dites, au lieu de «étudie et approuve», «intègre le plan de réussite». Bon.
On en a parlé un peu tout à l'heure, mais, moi, je voudrais y revenir parce qu'il me semble qu'il y a derrière ces mots... Puis vous savez que, quand, nous, on fait de la législation, chaque mot doit avoir un sens, hein, on travaille au mot près. La ministre sait qu'on travaille aussi parfois à la virgule près et... Mais c'est important.
Mme Courchesne: ...la députée de Taillon.
Mme Malavoy: C'est important. Mais j'y tiens, je trouve qu'avoir le sens des mots est une chose qui est importante. Donc, si vous avez fait ce choix de mots, je vais vous dire ce que je... Ce que je comprends, c'est que, dit dans votre manière, ça donne beaucoup plus de poids et d'autonomie aux collèges constituants. C'est comme une façon de dire... Parce que, derrière les mots, il y a souvent une approche, une philosophie. C'est comme une façon de dire: Bien sûr, il y aura des allers et venues entre les deux parce qu'il y a un plan stratégique qui va être discuté, mais, quand les collèges vont nous arriver avec leurs plans de réussite, on va les intégrer. Donc, on va prendre pour acquis qu'ils ont travaillé correctement, qu'ils ont pris leurs précautions, que ce qu'ils nous apportent est quelque chose qui est correct, et donc on va l'intégrer. J'aimerais que vous me disiez si je comprends bien, parce que vraiment vous avez changé deux mots mais ce n'est pas pour rien, et je comprends que, derrière ça, il y a une approche que vous voulez défendre.
Le Président (M. Marsan): Me Duval.
M. Duval (François): Peut-être une première réponse puis je pourrais passer la parole à mes collègues. C'est parce qu'on le vit au jour le jour, l'adoption du plan de réussite, autant au niveau du collège constituant qu'au conseil d'administration. Ça ne se fait pas en vase clos, ce n'est pas un silo qui s'adopte tout seul. Les trois collèges entre eux en discutent. Il y a une adaptation pour les spécificités de chacun des collèges. Il y a une dynamique qui se fait là-dedans, puis on n'arrive pas, disons, à un conseil d'administration où on dépose le plan de réussite.
Et on semble dire, par le terme, qu'on prend le plan de réussite qui a été déposé, auquel on n'a pas participé comme conseil d'administration ou comme membre d'une partie du collège constituant, et qu'on l'a copié-collé dans notre plan de réussite, ce n'est pas vrai, ce n'est pas la vérité, Mme Malavoy. Ce n'est pas vraiment ça. Donc, peut-être que, nous, on est allés avec un terme qui était peut-être plus...
Vous, en tant que législateurs, vous aurez peut-être à préciser pour éviter que ce soit vraiment réducteur, le terme «intégrer». Ce n'était pas notre intention de réduire cette dynamique-là du plan d'adoption de chacun des trois collèges. On y participe au jour le jour, à certains niveaux. Ce n'est pas vraiment, là, un copier-coller, là, pour le conseil d'administration. Je comprends que le terme peut être refait, et notre choix du terme n'est peut-être pas ce que ça reflète, là. Le terme peut être réducteur, je comprends.
Le Président (M. Marsan): Donc, Mme la députée de Taillon, en terminant l'échange.
Mme Malavoy: En terminant, moi, je comprends aussi que c'est à nous de trouver une façon de respecter ce que vous vivez, qui fonctionne. Je comprends aussi que ça fonctionne, votre façon de faire, ces allers et retours entre le conseil d'administration et les collèges constituants, et donc qu'il ne faudrait surtout pas arriver non plus avec une vision telle que ça brise ce fonctionnement qui me semble relativement harmonieux dans ce que vous décrivez.
Le Président (M. Marsan): Me Duval, en terminant.
M. Duval (François): Et je pense que ça se fait dans le respect de l'autonomie relative de chacun des trois collèges, mais ce n'est pas une abdication du conseil d'administration vis-à-vis ces plans-là. Le terme peut être modifié selon votre bon jugement, là, je pense.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Alors, ceci termine l'échange avec l'opposition officielle. Je vais maintenant reconnaître le député de Chauveau, qui est porte-parole du deuxième groupe de l'opposition en matière d'éducation. M. le député de Chauveau.
M. Deltell: Merci beaucoup, M. le Président. Mes salutations, M. le Président, Mme la ministre, confrères et consoeurs députés. Je tiens d'ailleurs à souligner la présence nombreuse des députés de Lanaudière, je trouve que c'est un excellent exemple à suivre.
Madame, messieurs, bonjour, ça me fait plaisir de vous rencontrer. On comprend donc que votre cégep est un cégep à une géométrie bien particulière. C'est un peu une société distincte, qu'on aurait dit en d'autres temps et en d'autres moments.
Chez nous, à l'ADQ, on a des axes de réflexion par rapport à la gouvernance, par rapport à la façon de gérer les fonds publics et surtout par rapport à la vision que l'on a pour les entités gouvernementales ou enfin les entités qui ne sont pas directement gouvernementales mais comme vous, par exemple les cégeps, les institutions, les hôpitaux, tout ça, qui se déclinent donc en deux axes, soit l'autonomie et la décentralisation et également la responsabilité et la reddition de comptes afin d'éviter des dérives majeures qui ont pu survenir en d'autres temps concernant la gestion des fonds publics.
J'aimerais savoir, à votre point de vue, puisque votre cégep est bien particulier ? et c'est bien défini d'ailleurs, dans le projet de loi, que vous avez des particularités ? en quoi est-ce que le projet de loi vous donne plus d'autonomie et assure plus de décentralisation ou moins? Comment vous voyez ça, par rapport au projet de loi, sur la question de l'autonomie de votre cégep?
Le Président (M. Marsan): Me Duval.
M. Duval (François): Donc, dans un premier temps, au niveau de la représentation du conseil d'administration, je pense que la répartition est améliorée et nous est agréable. Donc, on a trois étudiants et trois enseignants de chacun des trois collèges qui viennent s'ajouter au conseil d'administration. Donc, à ce niveau-là, nous sommes satisfaits, là, du projet de loi pour la représentativité.
Je ne sais pas, là, si un des membres du... pourrait rajouter, là.
Le Président (M. Marsan): M. Lachance...
M. Deltell: ...
M. Lachance (Bernard): Oui. Je pense que ce qu'il est important de comprendre, c'est que, dans le chapitre XVI, il y a des articles qui donnent au conseil d'établissement des responsabilités qui autrement, pour d'autres collèges, sont dévolues au conseil d'administration: par exemple, toute l'application du règlement des études collégiales.
Vous savez, l'enseignement collégial est régi par deux règlements: un régime financier puis un régime pédagogique. La gestion, entre guillemets, de l'application du règlement des études collégiales se fait par le collège constituant. Ça, c'est différent et ça donne plus de responsabilités à chaque collège constituant, ce qui ne veut pas dire par ailleurs que le conseil d'administration n'a pas, au terme de tout ça, à voir ce qui est fait. Et la loi, le chapitre XVI, prévoit même que le conseil d'établissement doit faire rapport, et ce rapport-là est fait au conseil d'administration qui, lui, intègre les trois rapports.
Alors, j'utilise encore le mot «intégrer», là, parce qu'il y a vraiment un processus d'intégration qui se fait entre les trois collèges constituants et le conseil d'administration, mais chacun des collèges, chacune des communautés a une responsabilité plus grande par rapport à l'application du règlement des études collégiales, qui est le règlement qui, en fait, détermine un peu comment doivent se faire les extrants de notre système à nous, là. Le règlement des études collégiales, c'est ce qui détermine les extrants, puis on a un règlement financier qui, lui, détermine les intrants. Alors, je pense, c'est ça qui est la grosse différence, et qui donne vraiment beaucoup plus de pouvoirs aux collèges constituants, et qui nous permet d'avoir... aussi de tenir en compte, de façon... beaucoup plus facilement, des particularités de chacune des sous-régions.
n(11 heures)n Et tantôt on a parlé de la sous-région du nord avec le forestier, avec l'agricole, avec l'agroalimentaire. Alors, on a un collège là où il y a même des équipements très spécialisés dans le domaine, et ils ont, entre guillemets, des applications pédagogiques différentes parce qu'ils ont des programmes différents et des réalités différentes auxquelles ils répondent.
Le Président (M. Marsan): Il reste un peu de temps, M. le député de Chauveau. Une dernière intervention?
M. Deltell: Donc, je comprends que ça vous satisfait tel que c'est défini. Maintenant, juste les redditions de comptes, est-ce que le contribuable ? je comprends que, vous, dans votre gestion quotidienne, ça va, ça vous fait plaisir ? est-ce que le contribuable, lui, il en a pour son argent? Est-ce qu'il y a des moyens, des mécanismes qui empêchent des dérives financières comme on a connues ailleurs?
Le Président (M. Marsan): Me Duval.
M. Duval (François): Peut-être de passer la parole à...
Le Président (M. Marsan): M. Lachance.
M. Lachance (Bernard): Oui. Bien, évidemment, on est assujettis au même processus de reddition de comptes que tous les cégeps, avec vérification externe. Nous, on a notre propre comité de vérification déjà, là. Ce que la loi veut implanter, nous, on l'avait déjà mis en place. Mais, ceci étant dit, il y a d'autres, aussi, mécanismes de vérification qui sont assez complets, hein? Vous savez, on est quand même vérifiés de différentes façons. Ceci étant dit...
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, M. Lachance. Ceci termine nos échanges. Je vous remercie de vos interventions. Alors, je voudrais remercier Me Duval, M. Shaffer, M. Lachance, M. Rivest et Mme Durand. Et j'inviterais immédiatement la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec à venir prendre place. Nous ajournons pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 1)
(Reprise à 11 h 5)
Le Président (M. Marsan): Alors, à l'ordre! Nous allons reprendre nos travaux. Il me fait plaisir d'accueillir la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec. Et je voudrais vous mentionner... Ici, il y a un changement dans nos horaires, et je voudrais vous informer tout de suite. Alors, le total des échanges et de la présentation durera un maximum de 1 h 30, dont 30 minutes pour l'exposé de l'organisme et 60 minutes pour les échanges avec les membres de la commission. Le groupe formant le gouvernement aura 30 minutes; l'opposition officielle, 24 minutes; et le deuxième groupe d'opposition, six minutes. Après entente entre les partis, le deuxième groupe d'opposition interviendra après le parti ministériel.
Alors, je voudrais inviter M. Jean Trudelle, qui est le président de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants, à débuter son exposé et à nous présenter les gens qui vous accompagnent, M. Trudelle.
Fédération nationale des enseignantes
et des enseignants du Québec (FNEEQ)
M. Trudelle (Jean): Merci beaucoup. M. le Président, Mme la ministre, messieurs dames de l'opposition, d'abord, je vais vous remercier de donner à la FNEEQ l'occasion d'apporter son point de vue.
La FNEEQ représente 83 syndicats, plus de 25 000 membres, et l'immense majorité des membres sont en enseignement supérieur dans les syndicats de 41 cégeps, d'une dizaine d'universités, essentiellement des chargés de cours.
Alors, je suis président de la fédération. Marie Blais, à ma gauche, est vice-présidente et s'occupe du Regroupement université. Et nous sommes accompagnés de Claire Tremblay, qui est coordonnatrice aussi au Regroupement université.
Écoutez, une commission parlementaire, là, c'est bien, on est très contents de pouvoir y participer, mais, en même temps, ça arrive peut-être un peu tard dans le processus. Et, pour nous, ça ne remplace pas une consultation préalable sur des changements, s'il y en a, que pourraient avoir souhaités les différents acteurs du milieu. Si cette consultation-là avait eu lieu, nous pensons que les résultats auraient été sensiblement différents de ce qu'amènent les projets de loi. Et, pour nous, c'est déjà un problème en soi, comme l'a souligné d'ailleurs le Conseil supérieur de l'éducation. Les critiques sont nombreuses. Et, pour nous, bien, quand on convie les gens à des changements de culture importants, pour reprendre les mots de Mme la ministre, bien peut-être que l'adhésion des principaux intéressés est une condition préalable nécessaire.
Alors, je vais vous parler très brièvement des cégeps. Marie va compléter sur les universités. Il y a peut-être des choses qui se recoupent un peu, mais c'est normal, là. On va essayer d'éviter cependant les redites.
Dans les deux cas, pour nous, les projets de loi présentés souffrent d'un problème de pertinence. On lisait, dans les notes d'introduction de Mme la ministre au premier jour de la commission, qu'elle invoquait le droit du public de savoir, l'importance de rendre des comptes, etc. Or, on n'est pas sûrs, de notre côté, d'avoir senti dans la société québécoise ou ailleurs un quelconque mécontentement à l'égard des mécanismes actuels de la gouvernance. On n'a pas senti un appétit soudain de contrôle supplémentaire de la part de la population. Et s'appuyer, à ce titre-là, sur le scandale de l'UQAM, ça nous laisse un peu froids. D'une part, pour nous, dans la saga de l'UQAM, il n'y a rien qui peut être imputé au mode actuel de gouvernance d'établissement. Sachant en particulier que les membres du conseil d'administration en provenance de l'interne se sont montrés plus particulièrement critiques en ce qui concerne le projet de l'îlot Voyageur, est-ce que la démarche logique n'aurait pas été d'accroître leur présence plutôt que de la diminuer?
C'est un peu bizarre. La Caisse de dépôt, par exemple, peut perdre 40 milliards de dollars, la ministre de l'époque, nous dire que la gouvernance n'est pas en cause, et là il y a un scandale financier à l'université et, tout à coup, on veut chambouler les modèles de gouvernance non seulement dans toutes les universités, mais aussi dans tous les cégeps. On va être d'accord, une fois n'est pas coutume, avec la Fédération des cégeps pour vous dire qu'à notre avis il y a bien assez actuellement de mécanismes de contrôle dans les collèges.
Les projets de loi nous paraissent donc globalement très peu utiles, et malheureusement on pense aussi qu'ils sont porteurs de dérives qui nous inquiètent beaucoup. Quelques exemples. D'abord, la question des gens de l'externe. Les échos qu'on a des conseils d'administration dans les collèges actuellement sont que les gens de l'externe effectivement éprouvent beaucoup de misère à suivre les débats. Ils se rencontrent trois fois par session, ils reçoivent 400 pages à lire, ils sont difficilement capables de passer à travers ça, et ce n'est pas en augmentant leur nombre, à notre avis, en tout cas, qu'on va régler ce genre de problèmes. Ce n'est pas non plus par une petite formation.
Les enjeux importants dans les collèges, c'est toujours assez complexe, c'est toujours des choses sur lesquelles il faut s'informer, et le problème actuellement, bien, c'est que, quand on siège sur un conseil d'administration qui est celui d'une maison d'enseignement supérieur, bien, on n'est peut-être pas dans la même situation que quand on siège dans un conseil d'administration d'entreprise. Et dès lors il faut peut-être ajuster les choses.
n(11 h 10)n On veut appliquer le même modèle de gouvernance à tout le monde, indépendamment, par exemple, de la taille des cégeps. Il y a combien d'enseignantes, d'enseignants, d'élèves à Matane? Il y en a combien à Ahuntsic? Il y en a combien à Édouard-Montpetit? On veut que le modèle soit le même partout et on n'est pas sûr des recoupements qui peuvent exister entre les mécanismes actuels, les fonctions de différentes instances et celles que la loi voudrait confier, par exemple, aux trois comités que les conseils d'administration seraient obligés de mettre en place.
À titre d'exemple, on parle d'un comité qui devrait... bon, le comité sur les ressources humaines qui devrait mettre en place une politique de gestion des ressources humaines. Qu'est-ce que ça veut dire exactement? Est-ce que ce comité-là va remplacer les services actuels des ressources humaines? Est-ce qu'il y a quelque chose qui marche mal dans ces services actuels de ressources humaines?
Si on me demandait de but en blanc, bon: M. Trudelle, c'est quoi, le problème des gestions humaines dans les collèges? Bien, mon premier réflexe serait de vous dire: Écoutez, il y a un gros problème actuellement de recrutement. C'est rendu que les infirmières veulent aller travailler dans les hôpitaux plutôt que d'enseigner dans un cégep, on a peut-être un problème de ce côté-là. Alors, c'est ça, les problèmes terrain. Et on a l'air de répondre à ça en changeant les mécanismes de gouvernance sans qu'on sache exactement jusqu'où ça va aller dans le partage des responsabilités.
Mais, pour nous, le noeud du problème, c'est la collégialité dont il nous semble que la ministre sous-estime l'importance. Et ça, il ne s'agit pas seulement pour nous, là, d'un nombre de places au conseil d'administration. Il s'agit d'une participation directe. La proximité des personnels en général et des profs en particulier devrait imposer une influence réelle sur les décisions qui concernent l'accomplissement de la mission des établissements supérieurs. Réduire au total le pourcentage des gens de l'interne, pour nous, c'est un peu nier leur apport.
La présence de deux profs au conseil d'administration n'est pas modifiée. Mais il y a une petite phrase de plus dans le projet de loi qui donne un peu une idée de la direction dans laquelle on s'en va. Si on reconnaît que l'apport des profs dans un conseil d'administration doit être authentique et incontournable, bien il faut s'assurer que les enseignants qui siègent au conseil d'administration représentent effectivement l'opinion et la pensée des profs dans l'établissement. Alors, actuellement, il y a, dans chaque collège, des mécanismes qui font en sorte que les profs se nomment eux-mêmes leurs représentants. Et, quand les enjeux sont importants, bien ils en débattent entre eux avant de les représenter au conseil d'administration. Une petite phrase dans le projet de loi qui dit, bon: «dans une réunion convoquée à cette fin par la direction»... Pourquoi? On a déjà nos propres mécanismes, on ne sait pas trop à quoi on fait référence.
Est-ce qu'il est utile de créer une bataille entre les personnels de soutien et les professionnels pour une place au conseil d'administration? Les employés de soutien, ce n'est pas seulement des gens qui font l'entretien, c'est des techniciens de travaux pratiques, c'est des techniciens à la bibliothèque, etc., des gens qui sont proches des étudiants. Pourquoi les mettre en compétition avec les professionnels pour avoir une place au conseil d'administration? Pourquoi retirer la Direction des études? On est dans une maison d'enseignement. La Direction des études, et là-dessus aussi on est d'accord avec la Fédération des cégeps, la Direction des études joue un rôle majeur dans un établissement et, à partir du moment où on conçoit qu'un conseil d'administration ne doit pas prendre que des décisions administratives, il nous semble que sa présence serait essentielle sur le conseil.
Je voudrais vous donner un exemple concret, là ? parce qu'on parle souvent de grands principes ? de ce qu'on entend par la collégialité. Ça fait des années que nous réclamons dans les collèges qu'il y ait un mécanisme de gestion des litiges pédagogiques. Ça nous apparaît un essentiel dans les collèges. Là, dans les projets de loi, on veut confier cette responsabilité-là à l'administration, au conseil d'administration. Nous, on pense, et c'est dans la liste des responsabilités, là, et... nous, on pense que ce genre de choses là, ça doit être le résultat d'une démarche de collégialité parce qu'il y a trop de choses qui sont impliquées là-dedans: la responsabilité des étudiants, la responsabilité des associations étudiantes, la responsabilité des départements, l'autonomie professionnelle des profs, la responsabilité de la direction du collège, etc. Si on veut que ce genre de politique fonctionne, il faut l'élaborer en collégialité, et actuellement c'est à peu près le cas.
Quelques mots en terminant sur la reddition de comptes, j'entendais ça beaucoup ce matin, là. C'est, je dirais, un aspect du projet de loi qui nous inquiète beaucoup parce qu'on sent qu'on veut l'appliquer de façon plus serrée, par exemple, à un domaine comme la réussite. Je vais me borner à donner des exemples à ce titre-là parce que c'est une chose qui nous tient beaucoup à coeur et qu'on a tendance peut-être à sous-estimer. Qui est capable de dire aujourd'hui, à titre d'exemple, de combien de points de pourcentage les taux de réussite devraient-ils baisser parce qu'on a modifié les standards à l'entrée au collégial? Toutes choses étant égales par ailleurs, si on reçoit dans le collégial des élèves moins bien préparés au nom de l'accessibilité, ce qui est peut-être une bonne chose, on devrait observer des taux de réussite plus bas. Qui est capable de dire de combien devraient baisser les taux de réussite quand on a l'obligation plus large d'accueillir des étudiants et des étudiantes à besoins particuliers comme c'est le cas actuellement? Qui est capable de dire l'impact à la baisse sur les taux de réussite de l'hétérogénéité croissante des effectifs scolaires, de la hausse du nombre d'allophones qui nous est signalée dans les collèges de la région de Montréal, notamment? Les enfants de la réforme qui vont venir l'année prochaine, en septembre, ça va être quoi, l'impact sur les taux de réussite?
Alors, on est dans un contexte où il y a un paquet d'éléments à peu près pas mesurables qui exercent des pressions à la baisse sur les taux de réussite et on voudrait s'engager dans une logique où les collèges ont à fixer des cibles et à en rendre compte. Ça nous apparaît extrêmement dangereux. Ça ne nous apparaît pas du tout une voie intéressante. Comme on l'a écrit dans notre mémoire, ce n'est pas parce qu'on pèse un poulet à tous les jours qu'il engraisse.
Rendre des comptes et être imputables, on en est. Mais, en éducation et en éducation supérieure, on est dans un domaine où on doit rendre des comptes sur des moyens et où il est extrêmement difficile de rendre des comptes sur des résultats.
Alors, Marie va vous parler un peu des projets de loi au niveau des universités, puis évidemment on pourra revenir sur les questions.
Mme Blais (Marie): Alors, le...
Le Président (M. Marsan): Mme Blais. Excusez-moi. Je suis obligé de mentionner les noms. Je vous dis pourquoi: c'est pour ceux qui font la transcription de nos débats, alors c'est toujours important de savoir si c'est la bonne personne qui dit les bonnes choses. Alors, on vous écoute avec beaucoup d'intérêt.
Mme Blais (Marie): Vous avez tout à fait raison de me rappeler à l'ordre.
Le Président (M. Marsan): Merci.
Mme Blais (Marie): Et je ne suis pas sûre que... peut-être, d'autres fois, vous allez peut-être être obligé de me rappeler à l'ordre dans le feu de l'action.
Alors, le projet de loi n° 38 change la composition du conseil d'administration des universités, centralise le pouvoir aux mains de quelques administrateurs, uniformise le choix du premier président, remettant en cause le caractère propre de chaque établissement, leur culture, leur organisation en imposant une gouvernance hiérarchique plus centralisée.
Inspiré du secteur privé, ce projet de loi entre en contradiction avec une longue tradition universitaire où la collégialité domine. La FNEEQ rejette cette vision d'université, elle croit au contraire qu'il ne faut pas diminuer, mais renforcer la collégialité, que ce soit dans les universités ou dans les collèges. C'est cette collégialité qui assure la légitimité et la transparence nécessaires au processus décisionnel, alimente le sentiment d'appartenance des membres et contrôle la dérive instrumentaliste de l'université, et ce, afin de préserver l'intégrité de la mission universitaire.
La conception de la gouvernance que les projets de loi voudraient imposer aux établissements universitaires et aux collèges constitue une vision, une version remodelée de théories du management des entreprises, théories dépassées. Il s'agit d'une vision dictatoriale, du type «top-down», qui se traduit par une concentration des pouvoirs vers le haut du pouvoir de décision, par la supervision étroite des exécutants, par la recherche de l'efficacité axée sur des indicateurs de performance dont il faut comprendre qu'ils accentuent la concurrence entre les établissements.
Les projets de loi prétendent viser une saine gouvernance en mettant l'accent sur l'efficacité, l'efficience, la transparence, la responsabilité et l'imputabilité. Ne faudrait-il pas commencer par réfléchir sur ce que ces thèmes signifient pour les institutions d'enseignement et de recherche? La recherche de la qualité en enseignement supérieur, et elle nous tient à coeur, repose sur des critères différents de ceux de l'entreprise, critères qui peuvent tout à fait s'harmoniser à une gestion saine des fonds publics, mais qui ne peuvent poser la rentabilité immédiate comme facteur structurant.
On va donc examiner les changements dans la composition du conseil d'administration; on va se recouper parce que les projets de loi sont similaires. Le projet de loi propose un conseil d'administration composé de 60 % de membres externes. Alors, pour comprendre la logique, il faut examiner le rapport Toulouse. Les membres provenant de l'extérieur de l'université manifesteraient plus d'indépendance que les membres issus de l'interne. Les membres de la communauté universitaire ne véhiculeraient que l'agenda de leurs commettants et, de ce fait, ne pourraient défendre le bien commun. Ces commentaires relèvent plus de l'ordre de la perception que des faits.
Les membres internes ont eux aussi une certaine perception de la participation des membres externes. Ils proviennent généralement du milieu des affaires et ont parfois certaines difficultés à saisir la réalité universitaire. Donc, ce n'est pas seulement dans les collèges où il y a des problèmes, il y a des problèmes similaires dans les universités. Ils sont souvent absents des réunions. J'ai été huit ans au C.A. de l'UQAM, il y en a que j'ai vu seulement trois fois. Absents des réunions et approuvent les décisions en posant peu de questions, ils arrivent au C.A., et les enveloppes sont cachetées.
n(11 h 20)n À l'inverse, les questions des divers représentants de la communauté démontrent une connaissance de l'institution forçant souvent les directions universitaires à livrer l'information sur les dossiers importants. Nous comprenons que le groupe de travail composé majoritairement de dirigeants universitaires veuille éliminer les membres issus de l'interne. Ce qui étonne est que le gouvernement, qui prône la plus grande transparence en matière de gouvernance, cautionne une telle stratégie équivalant à donner carte blanche aux administrations universitaires.
La connaissance intime des enjeux locaux qu'ont les personnes de l'interne assure un éclairage essentiel au débat stratégique et constitue un gage de transparence tant pour la communauté universitaire que pour la société québécoise. L'adhésion de la communauté aux orientations stratégiques de l'établissement suppose une gouvernance qui la favorise. Cela doit se traduire par une véritable représentativité de la communauté universitaire aux diverses instances, dont le conseil d'administration. Pour nous, le conseil d'administration doit être vraiment diversifié et représentatif de l'ensemble de la communauté universitaire.
Une petite remarque sur la notion de communauté universitaire véhiculée par le projet de loi. Le projet de loi définit la communauté universitaire comme des membres du personnel de direction, le corps professoral, les autres employés et les étudiants. Cette définition est fort réductrice et reflète fort peu la réalité. Le projet de loi devrait reconnaître explicitement la contribution des autres personnels, soit notamment les chargés de cours, les étudiants salariés, qui ne peuvent être assimilés à du personnel non académique. Il y aurait lieu d'être plus explicite, comme l'était la Loi de l'Université du Québec.
Le conseil d'administration d'une université tire sa légitimité de sa représentativité. Il doit faire écho à l'ensemble de la communauté universitaire, et cette exigence s'applique également aux membres externes du C.A. Ces derniers doivent refléter les diverses composantes de la communauté dans laquelle s'inscrit l'université. Or, dans la plupart des universités, il se trouve que les membres externes proviennent essentiellement du milieu des affaires. Les membres externes doivent provenir de divers milieux, notamment des milieux social, communautaire et culturel. C'était dans la Loi de l'Université du Québec, et là ce n'est pas le gouvernement actuel, mais en général le gouvernement nommait des gens provenant du milieu des affaires. Mais c'était dans l'esprit de la Loi de l'Université du Québec, mais c'est absent dans le présent projet de loi. Pour nous, la transparence ne se limite pas à rendre des comptes à quelques administrateurs, mais plutôt à l'ensemble de la communauté universitaire et à la société en général. Il s'agit d'un principe incontournable d'une saine gouvernance.
On va passer maintenant à la centralisation des pouvoirs aux mains des membres du C.A. Le projet de loi propose une centralisation des pouvoirs aux mains du C.A. par le biais du rôle et des responsabilités qui lui sont directement dévolus mais aussi par la constitution de comités qui en relèveraient. Tels que rédigés, les projets de loi risquent de redoubler certaines structures et responsabilités de d'autres instances. Le rôle du C.A. glisse de la surveillance à l'exécution. Inévitablement, la mise en place de ces comités et plus particulièrement celui des ressources humaines amènera une ingérence dans les responsabilités dévolues à des instances existantes qui réunissent majoritairement les membres de la communauté, ce qui constituera une autre attaque à la collégialité.
De plus, nous croyons qu'une centralisation accrue des pouvoirs au sein du conseil et de ses comités internes peut mener à des décisions prises sous le seul angle administratif, voire financier, au détriment des enjeux académiques. Nous nous opposons donc fortement à un tel élargissement et à une telle concentration des pouvoirs du conseil d'administration et de ses éventuels comités. La complexité du système universitaire ne peut se permettre une telle simplification. C'est une vision à très court terme qui est ici proposée, une sorte de gestion opportuniste qui n'aura jamais les moyens de prendre en compte sérieusement la vision globale à long terme des missions de l'université.
Le projet de loi propose de changer le mode d'élection du premier dirigeant en entourant le processus d'une plus grande confidentialité. Pourquoi? Encore là, il faut regarder le rapport Toulouse, page 42. Prétendument afin d'obtenir la meilleure candidature possible et permettre à un éventuel candidat ? j'ajoute, provenant du milieu des affaires ? de postuler sans alerter son employeur. Ce modèle ressemble beaucoup à celui de l'entreprise privée et fait fi de la culture des universités habituées à plus de démocratie.
Je rappelle, la période menant au choix du premier dirigeant permet à la communauté de réfléchir périodiquement sur l'état et les perspectives de l'établissement, de se questionner, de questionner à ce sujet les candidats et les candidates et constitue ainsi un moment démocratique important au sein de la communauté. Chaque établissement universitaire possède actuellement sa propre démarche de sélection, de consultation et de nomination. Nous soutenons qu'une procédure commune aux universités reviendrait à nier une culture institutionnelle et les pratiques démocratiques établies par la coutume et les règles définies par la communauté.
Adopter une démarche discrétionnaire et fermée, tel que le préconise le projet de loi, serait une erreur, car elle ne saurait relever exclusivement du conseil d'administration. Une règle de nomination qui se traduirait par le fait d'imposer une personne dans cette fonction, que ce soit par cooptation au sein du conseil ou non, serait préjudiciable au bon fonctionnement de l'établissement. En entourant le choix du premier dirigeant du plus grand secret, le projet ne favorise pas la transparence, au contraire, il attaque directement la démocratie universitaire.
La reddition de comptes maintenant. Nous ne pouvons que souligner l'importance de ce principe quand il s'agit d'organismes publics subventionnés, et en grande partie par l'État, mais la reddition de comptes ne doit pas se limiter à la seule collecte d'indicateurs et de résultats quantitatifs annuels. Il faut se rappeler que les dirigeants des universités témoignent régulièrement de leur performance devant la Commission de l'éducation, ici, la loi n° 95. Il s'agit, selon nous, d'une opération très démocratique, les élus pouvant poser leurs questions directement au premier dirigeant. Lors de leur passage, les universités doivent fournir une série d'informations illustrant leur performance en enseignement et en recherche. À partir de ces données et des audiences, la commission établit, dans son rapport final, de nombreux constats et recommandations.
Nous nous interrogeons sur la pertinence d'établir une autre série d'indicateurs traitant de la qualité de l'enseignement et de la recherche de même que d'autres mesures de contrôle. Pour nous, il serait beaucoup plus opportun pour le réseau universitaire québécois d'assurer un suivi aux recommandations de la Commission de l'éducation. D'ailleurs, nous craignons que l'adoption de ce projet de loi remette en cause l'existence même de ces auditions, moment privilégié où les universités doivent rendre des comptes à la société québécoise.
S'il existe un problème dans la situation actuelle, cela n'a rien à voir ? et Jean le disait ? avec la composition ou les responsabilités des conseils d'administration. Nous relevons, à l'instar du Vérificateur général du Québec, que les universités ont des états financiers qui n'ont pas toujours toute la précision voulue. L'information fournie dans les états financiers des universités québécoises sur les contributions interfonds n'est généralement pas suffisante, je cite le Vérificateur, «pour que le lecteur puisse saisir l'effet de [celles-ci] sur les surplus ou les déficits d'exploitation du fonds de fonctionnement». Ça, c'est la page 2, la partie I, qui concerne l'Université du Québec à Montréal, lors de la vérification de l'Université du Québec à Montréal. C'est bien davantage de ce côté qu'il faudrait agir, exiger une transparence réelle dans l'information, dans l'information des états financiers. Et c'est une condition absolument nécessaire à ce que s'exercent correctement les responsabilités d'un conseil d'administration, quel que soit sa composition.
Pour la FNEEQ, cette question est cruciale, une réelle reddition de comptes doit se traduire par plus de transparence dans la présentation des états financiers, et cet aspect est absent dans le projet de loi actuel.
n(11 h 30)n Le projet de loi propose un modèle de gouvernance emprunté au monde des affaires qui serait supposément mieux adapté aux missions spécifiques des universités. Un tel changement dans la composition du conseil et une plus grande centralisation des pouvoirs aux mains des membres du C.A. seraient supposément garants d'une saine gestion.
Le projet de loi ne démontre aucunement en quoi l'importation de ces méthodes assurerait une saine gouvernance aux universités. Le projet de loi oublie que la formation, la création et la recherche ne sont pas des biens usuels. Rappelons qu'une université ne cherche pas à faire des profits, elle cherche à transmettre et à produire des connaissances afin de former des citoyens responsables. Un établissement d'enseignement supérieur n'est pas une entreprise privée et il ne doit pas être gouverné selon des principes empruntés au monde des affaires.
Selon nous, l'ensemble de la communauté doit être partie prenante partout dans le processus décisionnel. La collégialité doit rester au coeur de la gouvernance universitaire, car elle s'inscrit dans une longue tradition qui a fait ses preuves. C'est ainsi que se sont assurées la légitimité et la qualité des décisions. Il ne faut pas l'éroder mais au contraire chercher à la renforcer pour le bénéfice de l'université et la société. La transparence, la reddition de comptes sont d'une importance cruciale à l'université comme ailleurs. Pour la FNEEQ, les conseils d'administration de nos universités doivent être transparents non seulement à une poignée d'individus, mais à l'ensemble de la communauté universitaire ainsi qu'à la société en général.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, Mme Blais, M. Trudelle. Je comprends que votre exposé est terminé à ce moment-ci, je vous remercie bien. Et nous allons passer tout de suite à la première période d'échange, et je vais reconnaître... je vais donner la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et des Sports. Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Mesdames monsieur, merci d'être devant nous aujourd'hui. Vous avez livré une présentation et le contenu d'un mémoire avec fougue et passion, et, vous savez, je pense que la fougue et la passion sont certainement des qualités, parce qu'au Québec on a bâti notre société, au fil des dernières décennies, grâce à cette fougue et cette passion.
J'utiliserai ce 30 minutes de questions, parce que vous avez touché beaucoup d'aspects qui, à mon sens ? et je vous le dis comme je le pense ? méritent certainement d'être précisés, parce que j'ai pris note de certains des aspects que vous énoncez que je ne retrouve pas dans le projet de loi. Alors, je souhaite quand même rétablir le sens des articles de loi qui sont devant nous.
Le premier constat, que ce soit au niveau de M. Trudelle ou de vous, Mme Blais, vous faites le constat que, si nous voulons modifier le conseil d'administration des institutions, c'est pour donner aux universités et aux cégeps une gouvernance des milieux d'affaires. Et vous prenez pour acquis très fortement que les membres additionnels des conseils d'administration viendront des milieux d'affaires.
Or, le projet de loi est très clair. Il dit deux choses, le projet de loi. Il dit que les conseils d'administration devront définir le profil des membres et que ce profil des membres devra être soumis à la consultation de la communauté universitaire, tout comme toute décision importante dorénavant devra être soumise à la consultation de la communauté universitaire. Et ça, tout ça, ce profil-là devra dorénavant être public, et on dit que la composition du conseil devra refléter la diversité de la communauté où oeuvre l'institution, la diversité de l'expertise et des compétences.
Alors, ne voit-on pas là une belle occasion justement pour faire en sorte qu'on ne retrouve plus, parmi les membres externes, que des gens des milieux d'affaires? Chaque université devra définir le profil des gens qu'elle souhaite avoir sur son conseil d'administration, et ça, ça doit être public. Ça, c'est mon premier constat.
Mon deuxième constat, et c'est M. Trudelle qui en parle, vous dites... et le mémoire revient aussi au niveau des universités, vous dites: Ah! Vous savez, c'est tellement complexe, ce qui se passe dans nos institutions. Il y a tellement de littérature à lire, il y a tellement de dossiers. C'est épais, c'est exigeant. Moi, je vais vous dire franchement, parce que ce n'est pas la première fois que j'entends ce genre de remarque... On dit même... La députée de Taillon nous a même dit que de gérer une université, ce n'est pas comme gérer une entreprise de produits manufacturiers puis ce n'est pas comme gérer des employés de manufacture. Moi, je vous avoue que j'ai un peu de misère avec ça, parce que c'est comme si les gens qui étaient externes au milieu universitaire ou des cégeps n'avaient ni la capacité intellectuelle, ni le temps, ni la volonté, ni la capacité de tout comprendre comment ces maisons d'enseignement...
Est-ce que vous ne trouvez pas qu'il y a un petit côté arrogant à cela? Est-ce que vous ne pensez pas que des membres qui acceptent de siéger sur un conseil d'administration le font en toute conscience, en leur foi professionnelle, et qu'ils ont jugement... justement le devoir de lire les documents et de poser des questions? Et est-ce que vous ne voyez pas que l'obligation pour le conseil d'administration d'évaluer les membres du conseil, c'est justement pour faire en sorte que publiquement on dise combien de séances ils ont été présents et pas présents et que justement on soit capable d'évaluer s'ils sont capables de prendre connaissance de leurs dossiers et de poser les questions pertinentes? Est-ce que vous ne voyez pas là une avancée positive dans la capacité de clarifier ces questions-là comparativement à ce qui existe actuellement?
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Trudelle, la parole est à vous.
M. Trudelle (Jean): Bien, très brièvement. D'abord, on n'est pas contre la présence d'externes dans les C.A. Mais, si vous faites un procès d'intention aux externes, est-ce qu'on doit faire le même aux internes? Est-ce que vous ne croyez pas que les gens qui sont de l'interne, par exemple les personnels de soutien, là, qui vont peut-être être évacués, est-ce que vous pensez qu'eux ne font pas ce travail-là avec toute leur âme et conscience, et tout, là? Ce n'est pas ça qu'on dit. On déplore le fait que le nombre d'externes augmente par rapport au nombre d'internes. Un.
Ensuite, les échos qu'on a et dont on vous fait part aujourd'hui, ce n'est pas notre seule opinion, ce sont des échos qu'on entend sur le terrain. Et la question n'est pas de dire que des gens n'ont pas les capacités nécessaires pour. Ce qu'on dit, c'est que, dans un contexte d'enseignement supérieur, les dossiers qui arrivent sur les tables des conseils d'administration sont effectivement probablement plus complexes et plus lourds que ce qu'on peut-être trouver ailleurs. Pourquoi? Bien, parce que la mission de l'enseignement supérieur, ce n'est pas comparable à celle, par exemple, d'une entreprise privée.
Quand on parle de la... Tu sais, par exemple, je prends un exemple comme ça, prenez la cafétéria. À qui on va faire la sous-traitance de la cafétéria? Les étudiants ont une opinion là-dessus, les profs ont une opinion là-dessus, ce sont les premiers intéressés, et il y a des discussions qui se passent dans un collège. À un moment donné, la somme de choses... Juste lire là-dessus pour se faire une idée est énorme.
Alors, ce qu'on dit, c'est que, dans un milieu comme l'enseignement, les choses sont complexes, et les échos qu'on a des gens qui sont sur les conseils d'administration actuellement, les échos même de directions de collège, pas juste nous, là, les directions de collège nous disent aussi: On a un problème, parce que les gens qui viennent de l'externe ont de la misère à suivre. Alors, on n'est pas les seuls à dire ça, là. On dit: Il y a un problème là.
Est-ce que la solution consiste à étendre les pouvoirs du conseil d'administration? Est-ce que la solution consiste à mettre plus de membres? On n'est pas persuadés de ça, d'autant plus que le message qu'on reçoit en même temps, c'est que les gens de l'interne sont un petit peu tassés. Alors, vous comprenez que, le procès d'intention que vous faites aux gens de l'externe, on le reçoit aussi pour les gens de l'interne.
Marie, je ne sais pas si tu voulais compléter.
Le Président (M. Marsan): Oui, Mme Blais.
n(11 h 40)nMme Blais (Marie): Oui. À propos de la vision des gens, des... ce n'est pas que les gens ne sont pas... ne peuvent pas comprendre. Ce n'est pas ça, la question. C'est qu'il y a un problème d'intérêt. Ce qu'on a noté, ce que j'ai noté au fil du temps, pendant ces huit années au C.A. de l'UQAM, notamment... C'est mon expérience personnelle, sauf que, lorsque j'en parle, c'est partagé par plusieurs, pas seulement moi. Ce qu'on constate, c'est qu'il y a un problème d'intérêt, de présence, de temps. On trouve que les gens de l'interne posent trop de questions, prennent trop de temps, notamment sur la question budgétaire. Combien de fois on m'a reproché de poser un peu trop de questions? Et c'est le moment privilégié, on s'entend? Au moment du conseil, lorsqu'on adopte les budgets, c'est majeur, ce moment-là. Et qui posait des questions? C'était rarement le monde externe.
Ce que, nous, on voit, c'est que les gens de l'externe, ils sont toujours avec le premier dirigeant. C'est ça, notre perception. Elle est peut-être fausse, mais c'est toujours ça que l'on a vu.
Ce que j'ai noté par ailleurs, c'est que, de fait, le président du conseil, qui provenait de l'externe, était intéressé à l'UQAM, il avait un vrai intérêt. Le diplômé aussi avait un intérêt, c'était un V.P. de la Caisse de dépôt, il venait du privé, mais il manifestait un intérêt manifeste pour l'université. Mais il y en a que je n'ai jamais vus ou trois fois en trois ans. Il y a un problème.
La notion d'indépendance qui est présente dans ce projet de loi, puis qui est fort importante, puis vous basez tout, tout le projet sur cette notion-là, je noterai que l'IGOPP, un an plus tard, la remet en cause pour les entreprises privées. Ils se disent: Attention! Oui, on a fonctionné en fonction de ce concept, mais on s'aperçoit que, pour les entreprises privées, ça ne marche pas. Et là, malheureusement, je n'ai pas la citation de Warren Buffet, mais ça vaut la peine. Ce qu'il dit, à un moment donné, c'est que, écoutez, le mieux, c'est quand ils ne parlent pas, parce qu'au moins ils ne se mettent pas les pieds dans les plats.
Mais, ceci dit... Et ce qu'il dit, M. Allaire, c'est: Écoutez, l'important, c'est qu'il faut trouver des gens qui connaissent la réalité et qui ont un intérêt. Alors, c'est pour ça que, nous, ce changement au conseil d'administration, on est inquiets. Et je vous le dis franchement: On voit ça comme une carte blanche aux premiers dirigeants. C'est vraiment donner... parce qu'ils sont toujours... bien, ils sont un peu... bien, c'est ça, toujours un peu d'accord avec le premier dirigeant. C'est ça, notre inquiétude face à cette composition actuelle, et que ceux qui posent les questions, bien, finalement soient tassés...
Le Président (M. Marsan): ...
Mme Blais (Marie): ...et c'est ca que l'on voit. Excusez.
Le Président (M. Marsan): Oui. Alors, Mme la ministre.
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, est-ce que vous ne prenez pas le point de l'intervention où effectivement vous pourriez exiger qu'il y ait des gens autres que des milieux d'affaires? Est-ce que vous ne reconnaissez pas que le projet de loi est très clair à cet effet-là? Et pourquoi il n'y aurait pas des gens qui proviendraient des organisations communautaires, de l'UQAM, par exemple, du milieu culturel, du milieu même journalistique, des... Il y a des gens... Ça pourrait être extrêmement varié.
Donc, ce que je veux vous dire par rapport à ça, c'est que le projet de loi, il est très clair. Il permet effectivement que chaque université... Parce que chaque université pourra en définir. Et ce que je retiens de votre intervention, c'est aussi la nécessité, avec l'expérience terrain que vous avez, de revoir et de clarifier ces règles de gouvernance, parce que, d'une part, vous voulez le statu quo, puis, d'autre part, vous ne voulez pas du statu quo parce que ce que vous vivez n'est pas satisfaisant, et votre expérience ne semble pas du tout concluante à cet égard-là.
Cela dit, vous avez aussi, au niveau des cégeps, parlé de la centralisation des pouvoirs autour de ces comités. Or, les comités de ressources humaines, par exemple, n'ont pas à s'ingérer dans les affaires courantes du cégep ou de l'université. Mais est-ce que... Pourquoi un comité de ressources humaines ne pourrait pas recommander à son conseil d'administration, par exemple, comment faire face aux problèmes de recrutement? Il y a des orientations qui pourraient être dégagées, des politiques à suivre. Ces comités-là, ils ne vont pas centraliser les décisions; ces comités-là, ils vont élaborer des orientations et des politiques à être adoptées par le conseil d'administration. Mais on ne va pas... Dans une gouvernance de conseil d'administration, on ne va pas dans l'exécution des tâches.
Et, de la même façon, quand vous me parlez des indicateurs, la loi est très claire, je tiens à le préciser: d'aucune façon les indicateurs ne devront être d'ordre académique ou pédagogique. Ce ne seront que des indicateurs administratifs sur l'utilisation des ressources mais absolument pas sur les taux de réussite ou sur les taux de diplomation, à moins que, là, l'institution le veuille, mais la loi n'exige d'aucune façon, et la ministre, d'aucune façon, ou le ministre, ne va définir des indicateurs en matière de pédagogie ou en matière de réussite aux institutions.
Vous parlez beaucoup de collégialité. Moi, j'aimerais vous entendre sur la collégialité. Est-ce que la collégialité ne peut pas s'exercer aussi avec des membres de conseil d'administration pour lesquels... qu'on a choisis, parce que le gouvernement n'en choisit plus qu'un seul? Est-ce qu'on ne peut pas établir la collégialité dans cette nécessaire relation de confiance en respectant les responsabilités de chacun? Et est-ce que vous êtes d'accord avec le projet de loi, qui dit que toute décision, qu'elle soit stratégique, immobilière, toute décision impliquant les ressources de l'université ou du cégep devra être d'abord soumise pour consultation à la communauté universitaire avant le conseil et que les documents devront être rendus accessibles à la communauté universitaire ou du cégep? Est-ce que vous n'y voyez pas là quand même une avancée importante? Parce qu'actuellement il n'y a rien qui oblige une université ou un cégep à le faire.
Le Président (M. Marsan): M. Trudelle.
M. Trudelle (Jean): Dans le mémoire, on souligne que le projet de loi laisse, en ce qui nous concerne, beaucoup de questions sans réponse.
Alors, je vais prendre la balle au bond concernant la communauté collégiale. Il y a des pratiques dans les collèges actuellement. Il y a des groupes dans le collège: il y a les étudiants, il y a les profs, il y a les personnels de soutien, il y a les personnels professionnels. Ces groupes-là se réunissent, discutent des choses, discutent des choses qui concernent le collège, et donc il y a déjà des pratiques, O.K.? Elles ne sont peut-être pas parfaites, mais elles existent. Et ce qu'on ne comprend pas ? puis là je parle des cégeps surtout ? c'est: Qu'est-ce qu'il y a à changer, là, actuellement?
Nous, on aurait peut-être des changements à proposer; ils n'iraient peut-être pas dans cette direction-là. Parce que, quand on dit, dans le projet de loi, qu'il y a une obligation à consulter la communauté collégiale, qu'est-ce que ça veut dire exactement? Est-ce qu'un bon matin le conseil d'administration va dire que jeudi, à 3 heures, la communauté collégiale est convoquée? On ne le sait pas. Ce n'est pas écrit, ça, dans les projets de loi.
Alors, je suis content de vous entendre dire que, par exemple, les indicateurs de réussite, et tout ça, on a peur pour rien, mais on voit apparaître dans le projet de loi ? Mme Malavoy disait tout à l'heure: Les mots ne sont pas innocents ? le mot «performance» des collèges. Performance des collèges. On a peur de ce que ça peut vouloir dire. Les plans de réussite sont intégrés aux plans stratégiques des collèges, et on demande dans la loi des indicateurs, et des indicateurs quantitatifs.
Alors, je suis bien heureux de vous entendre dire, ce matin, que les taux de réussite ne sont pas là-dedans, mais ce n'est pas évident à la lecture de la loi. Et, quand on fait la somme de toutes ces questions-là, on se dit: Coudon, qu'est-ce qui marche si mal actuellement qu'on doive changer? Vous comprenez?
C'est sûr que les gens, là, les profs en particulier, quand ils entendent parler de la communauté collégiale qui sera consultée, dans le texte de loi, ils ne sont pas certains de ce que ça veut dire. Quand ils entendent dire que c'est le directeur général qui va convoquer une réunion des profs pour élire les gens qui vont être au C.A. ou pour les désigner, on a un petit peu peur que ça vienne bousculer les pratiques aussi de la collégialité, parce que ce que je vous disais tout à l'heure, puis je le répète: Si on veut authentiquement tenir compte de l'opinion d'un groupe de personnes dans un conseil d'administration, bien, il faut que l'opinion portée par les gens qui sont là soit effectivement celle de la communauté représentée. Et, là-dessus, bien, il y a effectivement des pratiques, puis on n'est pas trop sûrs de la manière avec laquelle on envisage de les modifier. Marie...
Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Blais, la parole est à vous.
Mme Blais (Marie): Oui. Écoutez, plusieurs choses. Première des choses, on dit: Dans le projet de loi, ce n'est pas indiqué que les gens vont venir de plusieurs profils. C'est exact que les gens vont... C'est exact que le C.A. va pouvoir définir son profil. Qui va définir? C'est les membres du C.A. actuels. Qui proviennent d'où? Du milieu des affaires. Alors, notre inquiétude, elle est là, O.K.? Elle est là. C'est que les gens actuellement qui proviennent... Et on a fait le tour, hein, des différents C.A.: ils viennent du milieu des affaires. Alors donc, l'inquiétude est là, c'est que les gens soient... Ils vont se définir, ils vont se coopter entre eux, donc ça risque d'être la république des amis. C'est ça que l'on craint, O.K.? Première des choses.
Deuxième des choses, l'assemblée universitaire. Bon, ça existe dans une université, entre autres à Montréal, à l'Université de Montréal. Cette assemblée-là est consultative. Consultative. L'assemblée a souvent émis des avis, et le C.A. n'en a pas tenu compte. C'est ça, notre crainte. C'est ça, notre crainte: parce que c'est une commission, une assemblée qui est consultative, bien, que ce soit juste une consultation, un forum comme un autre, tandis qu'actuellement ce que nous avons, c'est des instances où la communauté est présente, et on risque d'entrer en conflit avec des instances actuelles. Celle que vous proposez est consultative, et, pour nous, ça ne suffit pas. Je pense notamment au premier dirigeant, où l'assemblée universitaire, le comité de sélection avaient émis un avis, et le C.A. en a décidé autrement. C'est ça, notre inquiétude. C'est qu'on voit la réalité.
Et, autre inquiétude, c'est que, notamment dans les universités en région, qui sont nettement plus petites, ça risque d'être une structure en plus, tandis qu'actuellement il y a des instances qui fonctionnent, et on ne voit pas quels sont les problèmes que vous soumettez.
À propos de la reddition de comptes puis de la performance, je vous rappelle: la Commission de l'éducation demande plein d'indicateurs aux universités lors des auditions de la loi n° 95. C'est déjà là, le ministère en collige, et on se demande: Oui, mais le problème, c'est le suivi. Ce n'est pas juste de colliger les indicateurs, il y a des constats que vous émettez, et on attend encore. Puis je pense notamment à la compétition entre les universités; on attend encore le suivi.
n(11 h 50)nLe Président (M. Marsan): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Moi, je vous écoute, Mme Blais, puis ce que je comprends, c'est qu'actuellement vous n'êtes pas du tout satisfaite du fonctionnement actuel, parce que vous me témoignez de votre expérience, que je ne mets pas en doute. Je connais bien la situation de la gouvernance des universités, pas uniquement la vôtre. Donc, je ne mets pas en doute ce que vous rapportez, mais vous ne semblez pas du tout satisfaite, et vous n'êtes pas satisfaite du projet de loi. Alors, qu'est-ce que vous proposez exactement?
Mme Blais (Marie): Alors, ce que nous vous...
Le Président (M. Marsan): Mme Blais.
Mme Blais (Marie): Excusez. Je vous l'avais dit, que vous alliez être obligé d'intervenir auprès... Donc, écoutez, nous ce qu'on vous suggère, c'est plus de collégialité, que les...
Mme Courchesne: ...qu'est-ce que ça veut dire...
Mme Blais (Marie): Ça veut dire notamment que les personnels...
Mme Courchesne: ...dans votre esprit?
Mme Blais (Marie): Dans mon esprit, ça veut dire notamment... Parce qu'actuellement, au conseil d'administration, ce n'est pas tout le monde qui est représenté.
Mme Courchesne: Sur... M. le Président, permettez-moi de le dire, parce que ça fait plusieurs fois que vous revenez là-dessus, là.
Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Sur le personnel de soutien et le personnel professionnel, là, ça fait plusieurs personnes qui viennent devant nous, là, j'ai bien écouté. J'ai bien écouté, j'ai bien entendu le message. Je ne vous ferai pas part de ma décision aujourd'hui, ce n'est pas l'endroit, mais message reçu.
Donc, qu'est-ce que vous souhaiteriez par rapport... Si vous n'êtes pas satisfaite de ce que vous vivez puis vous n'aimez pas le projet de loi, qu'est-ce que veut dire le mot «collégialité» pour vous?
Le Président (M. Marsan): Mme Blais.
Mme Blais (Marie): Oui, il y a les professionnels, il y a les employés de soutien qui devraient être sur les conseils d'administration, et les auxiliaires d'enseignement. Parce que la réalité, elle est multiforme aujourd'hui. Donc, je vous dis: Il faut tenir compte de ce qui se passe. C'est pour ça que votre définition est un peu réductrice.
Actuellement, il y a des instances où des décisions... ? je pense notamment aux politiques de ressources humaines, O.K.? ? où il y a des comités, O.K., qui... où, de fait, on définit ou on cherche à définir ces politiques-là. Il faudrait les élargir, il faudrait que... Oui, il y a des décisions actuellement, mais il faudrait que ça ne se fasse seulement au conseil mais à plusieurs autres instances, que cette collégialité soit présente. C'est ça qu'on vous dit.
Ceci dit, les problèmes, la réalité, je n'ai jamais dit que ce qui se passait actuellement dans les universités, c'était hyperdramatique. Parce que justement, le problème qu'on a avec les projets de loi, on ne sait pas exactement à quel... quel problème on veut vraiment cibler.
Je pense notamment au rapport de l'IGOPP, qui dit: Bien, il faudrait une certaine coordination entre l'administration et l'académique. Ce qu'on vous dit... Non, mais c'est le problème que j'ai... Tu sais, je cherche à comprendre c'est quoi, quel problème veut-on régler. Mais, nous, ce qu'on vous dit: Ce n'est pas en centralisant aux mains de gens provenant de l'externe que ça va être la solution, au contraire. Ce qu'il faut faire, c'est améliorer ce qui existe actuellement, les comités, les instances, ouvrir, et que toute la collégialité se prenne à ce moment-là.
Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Mais je vous écoute encore, j'essaie de comprendre. Il reste qu'il y a un conseil d'administration pour chacune des institutions, et ce que... Parce qu'on augmente le nombre de membres externes. Puis très franchement, là, je vais vous le dire, pourquoi on l'augmente. Vous voulez le fond de ma pensée? Je vais vous le dire: Parce que les universités ont besoin des gens d'affaires pour aller chercher de l'argent. Ça, par exemple, quand ils font des campagnes de levée de fonds puis qu'ils font... ils vont chercher l'argent, on est supercontents. Ça, ils font ça bénévolement, puis on est bien contents de ça. Mais est-ce que vous ne pensez pas qu'effectivement, dans cette nécessité de diversité... à laquelle je crois profondément, parce que je suis totalement d'accord avec vous qu'un conseil d'administration doit refléter la communauté où l'institution oeuvre, et donc ça veut dire une représentativité élargie et pas uniquement des gens d'affaires. On s'entend là-dessus? On s'entend là-dessus?
Mme Blais (Marie): Absolument, c'est ce qu'on...
Mme Courchesne: Donc, à partir du moment où vous parlez de centralisation, bien, si on réussit à se doter d'un conseil d'administration qui soit véritablement représentatif avec ce que vous demandez pour le personnel de soutien, auxiliaire, etc., et ce que, moi, je dis qui est important, qu'il y ait une représentativité de l'ensemble de la société, à ce moment-là... et où on va définir des règles publiquement...
D'ailleurs, en passant, M. le Président, le choix du recteur, là, le projet de loi ne se mêle pas du choix du recteur, là. Le choix du recteur, c'est chaque établissement qui va conserver son choix de nomination. C'est très, très clair. Relisez l'article, le premier... Il est nommé par le conseil d'administration pour la durée que le conseil détermine et selon la procédure de nomination établie par la loi constitutive de l'établissement.
Ça fait que ça, là, le projet de loi ici que j'ai dans les mains, là, il ne va pas du tout établir la procédure de nomination, c'est la loi constitutive de l'établissement qui le fait. Qu'ils le fassent dans l'évaluation des candidatures de façon indépendante et confidentielle, oui... Bien, non, mais, franchement, si vous voulez avoir des candidats... Si, moi, je suis présidente d'une entreprise publique cotée en bourse puis que je veux changer de carrière puis je veux devenir candidat, pensez-vous qu'on va aller mettre ça sur la place publique, que je suis candidat? Ça ne marche pas de même, la société. L'évaluation doit se faire de façon confidentielle, mais la procédure de nomination du recteur, c'est selon la loi constitutive de l'établissement. Moi, je ne sais pas, l'importance des mots, dans ce cas-ci, l'article, au niveau des mots, il est très clair.
Donc, ce que je vous dis: Est-ce que vous ne pensez pas, face à cela, que... et qu'on oblige que tous ces éléments-là soient rendus publics... Vous me dites que la commission consultative de l'université existe, mais ? pas dans le cas de l'UQAM mais dans certaines universités ? est-ce que vous ne pensez pas que que le résultat de ces consultations-là soit public à l'ensemble de la population ne peut pas justement vous soutenir et vous aider à atteindre vos objectifs?
Le Président (M. Marsan): Alors, en terminant nos échanges, M. Trudelle.
M. Trudelle (Jean): Bien, je vais essayer d'y aller rapidement pour que Marie... Je vous écoute, Mme Courchesne, là, puis vous demandiez qu'est-ce qu'on aurait souhaité pour la collégialité. La réponse, pour nous, elle est simple ? je suis content de savoir que le message est reçu pour le personnel de soutien, et tout: Nous, on aurait souhaité davantage de place pour les gens de l'interne, pas moins. C'est déjà une première chose claire.
Et, quand je vous écoute dire que vous voulez plus de gens de l'interne et des gens du milieu des affaires, parce qu'on est bien contents quand ils vont...
Mme Courchesne: ...pas juste du milieu des affaires, ce n'est pas ça que j'ai dit.
M. Trudelle (Jean): Non, non, je sais, on est d'accord sur la représentativité. Mais vous nous dites, là, j'ai bien entendu, que, quand les gens d'affaires se lancent dans des campagnes de levée de fonds, on est bien contents. Je peux-tu vous dire que, nous, on n'est pas très contents? Parce que, si la capacité des écoles primaires, secondaires, des collèges et des universités à rayonner, à agir, puis tout ça, doit dépendre... Je sais que ce n'est pas ça que vous dites, mais vous nous dites quand même qu'on est bien contents quand les gens d'affaires font des levées de fonds et contribuent à tout ça, mais, nous, on n'est pas tout à fait contents, parce qu'à quelque part ça place les établissements dans des situations différenciées à cet égard-là. Et des exemples, on en aurait plusieurs. Peut-être pas à l'université, j'avoue que je connais plus les collèges que... mais on a aussi des syndicats, nous, d'écoles primaires et secondaires qui se retrouvent dans des situations comme celle-là, et ça nous inquiète beaucoup. Je vous répète que voir le mot «performance» apparaître dans les projets de loi, bien, à cet égard-là, on se pose des questions.
Marie, en terminant.
Le Président (M. Marsan): Très rapidement.
Mme Blais (Marie): Très rapidement. C'est parce que la meilleure représentativité de l'externe se fait au détriment de l'interne, et c'est ça qu'on ne peut pas accepter. Il est là, le problème. Le noeud est là. Un.
Deux, l'assemblée universitaire, parce que c'est l'exemple qui est cité là, mais vient, provient... Il y en a un, lieu, que, moi, je connais un peu plus, c'est celui de l'Université de Montréal. Il n'y en a pas ailleurs dans le réseau. On impose donc un modèle dans le réseau, O.K.? Ce qu'on vous dit que l'on connaît du réseau... de l'Université de Montréal, c'est que cette assemblée universitaire est consultative et que les décisions ne... souvent le C.A. n'en tient pas compte, c'est ça, le problème, et notamment pour l'élection au rectorat. Et, contrairement à... Et, si on impose ce modèle-là dans le réseau, je vous rappelle que, dans le réseau, il s'agit de véritables campagnes électorales, O.K.?
Le Président (M. Marsan): O.K.
Mme Blais (Marie): Et là, bien, on nous impose un modèle qui est... qui ne ressemble pas du tout à ce type de modèle d'élection.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Ceci termine notre premier échange avec le parti ministériel. Et, comme on s'est entendus plus tôt par consentement, je vais reconnaître immédiatement le député de Chauveau, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'éducation. M. le député.
n(12 heures)nM. Deltell: Merci beaucoup, M. le Président. Merci à mes collègues parlementaires de me permettre de parler tout de suite. Mesdames monsieur, ça me fait plaisir de vous accueillir à l'Assemblée nationale et de vous parler directement. Je vous ai entendus, je vous ai écoutés attentivement. Je ne peux pas dire que je suis en total accord avec ce que vous avez dit, mais vous le défendez avec passion, puis j'apprécie ça.
D'abord, j'ai deux questions à vous aborder, une première très courte, une deuxième... à vous avoir écoutés, je pense que vous allez pouvoir me donner plein d'informations, mais la première: Quel est, selon vous, le conseil d'administration idéal, dans la balance entre les gens de l'interne et les gens de l'externe? Mettons qu'on prend un conseil d'administration de 17 personnes, donc il y a déjà une... ce n'est pas un nombre... c'est un nombre où justement il va y avoir une majorité. Quelle est, selon vous, la balance idéale?
Le Président (M. Marsan): Mme Blais.
Mme Blais (Marie): Écoutez, pour nous, peut-être la situation actuelle, mais améliorée, donc avec une présence plus grande de gens de l'interne. J'avoue que ce n'est pas...
M. Deltell: ...des gens de l'interne?
Mme Blais (Marie): De l'interne, majoritaire. Puis ça, c'est... En tout cas, pour moi, personnellement, c'est... On n'en a pas discuté dans ces termes-là, mais c'est clair que, pour nous, ça ressemble beaucoup à ce type donc de profil. La raison, comme je vous dis, c'est que c'est vraiment les gens de l'interne qui posent des questions plus que l'externe.
Mais, ceci dit, il faut rappeler une chose: les conseils d'administration en général, ça fonctionne au consensus. Il n'y a pas vraiment... Il y a des questions qui sont posées, et on cherche à obtenir le consensus. Ce n'est pas l'opposition comme telle, d'où l'importance d'avoir le son, les interventions de la communauté et de l'externe les plus diversifiées possible, parce que c'est... on cherche à prendre les décisions, il n'y a pas nécessairement d'opposition. C'est pour ça qu'il faut plus enlever les indépendants. Il y a une sorte d'opposition, qui est dans le projet, qui fatigue énormément.
M. Deltell: Malheureusement, mon temps est conscrit, alors je ne pourrai pas aller trop loin. L'autre point que je veux aborder avec vous... Vous avez dit tout à l'heure qu'une université, bien, ce n'est pas là pour faire des profits, c'est là pour enseigner, c'est là pour la culture des gens, et tout ça, que donc on ne doit pas être gouvernés selon les principes du mode des affaires et que la fonction actuelle, la façon dont c'est fait actuellement, ça fonctionne.
Malheureusement, vous en avez parlé tout à l'heure, il y a eu une dérive, une dérive catastrophique, qui est l'îlot Voyageur. On sait qu'à deux reprises le gouvernement libéral avait été alerté, mais, à deux reprises, il n'a pas réagi. Par contre, on se retrouve aujourd'hui avec une facture horrible pour les contribuables. Si vous dites que ça fonctionne, comment ça se fait que la catastrophe est arrivée à l'îlot Voyageur? Expliquez-moi ça.
Le Président (M. Marsan): Mme Blais.
Mme Blais (Marie): D'une part, mais, d'autre part, c'est parce que les universités québécoises, parce que ce n'est pas le cas, selon... Parce que je pense qu'il faut lire la partie I du Vérificateur général sur... concernant ce qui s'est passé à l'UQAM, les pages 14 à 18, si je me rappelle bien. Vous allez bien saisir que les universités peuvent... parce qu'on fonctionne par fonds, et ils peuvent transférer d'un fonds à un autre, et c'est ça qui n'est pas transparent. Et ce que l'on demande, c'est que ces transferts de fonds soient faits plus transparemment... ? plus transparemment! ? soient faits plus transparents, ce qui fait qu'on va voir si, oui ou non, il y a des déficits ou des surplus. Parce que, de fait, quand tu es dans un C.A. d'université, tu n'es jamais sûr, tu sens qu'il y a une marge de manoeuvre, mais tu ne savais pas où elle est. Et, en lisant ce que le Vérificateur général du Québec a dit, bien, on comprend pourquoi. Et ça, c'est un enjeu majeur, parce qu'une des décisions importantes dans un C.A., bien c'est l'adoption des budgets, c'est l'examen des états financiers et, si on n'a pas le portrait exact... Et ce n'est pas seulement à l'UQAM, là, hein, c'est partout. Et ce qui se passe à l'UdeM actuellement, bien, il faut regarder de façon très attentive. Parce qu'actuellement il peut y avoir... les gens peuvent créer de façon fictive des déficits, mais en fait c'est pour aller vers l'immobilier. Alors, c'est ça, les questions qu'on se pose.
Le Président (M. Marsan): Oui, M. Trudelle, vous voulez...
M. Trudelle (Jean): Très rapidement. Écoutez, on n'a pas donné l'exemple de la Caisse de dépôt pour rien, là. Ce n'est pas par méchanceté, là, mais, je veux dire... Est-ce qu'on doit nécessairement changer toute la structure d'une gouvernance parce qu'il y aurait un problème quelque part? On peut se poser la question. Particulièrement, le problème est arrivé dans les universités. Est-ce qu'il y a un système qui permet nécessairement d'éviter des malversations, disons, qui peuvent être... Bon. Alors, c'est toutes ça, les questions qu'on a en tête, bon, et c'est pour ça qu'on est inquiets, là. Je veux dire, quand Marie parle du Vérificateur, le problème, c'est quoi? Est-ce que la transparence est suffisante dans les budgets? Ça, c'est déjà un problème qu'on pourrait régler. Est-ce qu'on ne peut pas augmenter le nombre d'internes? C'est eux autres qui sont les mieux placés pour juger de ces choses-là. C'est un peu ça qu'on répond.
Le Président (M. Marsan): M. le député de Chauveau.
M. Deltell: Bien, ça va. De toute façon, le temps est restreint.
Le Président (M. Marsan): En terminant, merci beaucoup. Alors, ceci termine la deuxième période d'échange avec le deuxième groupe d'opposition. Je vais maintenant reconnaître la députée de Taillon, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur. Mme la députée.
Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Bonjour. Je trouve ça tout à fait normal qu'il y ait un peu de passion dans les échanges parce que... moi-même, je me passionne d'ailleurs pour ces questions-là, parce qu'on touche à des choses qui sont importantes et, je me permets d'ajouter, à des choses dont les conséquences ne se verront pas forcément à très court terme.
Alors, je vais reprendre la fameuse image de la comparaison entre, par exemple, une université et une entreprise, une image que j'utilise parce que je trouve qu'elle est très parlante: du temps où j'étais députée de Sherbrooke, j'avais sur mon territoire une usine qui faisait des petites plaques pour faire des boîtes de conserve, des petites plaques d'aluminium pour faire des boîtes de conserve. Très intéressant à visiter. Et le dirigeant m'avait très bien expliqué que, si jamais il y avait, dans la chaîne, la moindre coche mal taillée, la petite... c'était un genre de petite galette d'aluminium, elle était rejetée. On savait tout de suite si on avait fait quelque chose de pas bien et on le corrigeait.
Dans le milieu de l'enseignement supérieur, les erreurs que l'on pourrait faire, je ne dis pas qu'on en fait assurément, mais les erreurs que l'on pourrait faire ne vont pas se voir forcément demain matin. Si, par exemple, on élimine tel type de programme, si, par exemple, on privilégie tel type de clientèle, si on décide d'ouvrir des campus à tel endroit ou tel endroit, ce n'est pas forcément demain matin qu'on verra, comme dans ma petite galette d'aluminium, qu'il y a une coche mal taillée. C'est pourquoi ce dont on parle avec raison soulève les passions.
Avec raison aussi, moi, je suis d'accord avec vous quand vous dites: Il aurait fallu une réflexion préalable. Moi, j'ai assisté, il y a maintenant presque deux ans, à toute la réflexion qui a mené à modifier la loi sur les commissions scolaires, sur la gouvernance et le mode électoral des commissions scolaires. Ça avait été précédé d'un grand forum national de 48 heures auquel j'avais participé. Dans ce cas-ci, il n'y a pas eu cette réflexion. Je veux bien qu'on parle de l'îlot Voyageur, mais à juste titre vous rappeler que c'est plutôt les gens de l'interne qui ont sonné l'alarme. Mais c'est un fait qu'en matière de réflexion globale sur les enjeux de l'enseignement supérieur on n'a pas eu ça. On a eu des projets de loi inspirés très largement des modes de gouvernance pour les sociétés d'État et d'un rapport qui avait été commandé mais qui a été préparé par un groupe restreint de gens. Donc, c'est normal qu'on se dise: Oups, attention là! Il n'y a pas eu de réflexion globale préalable de toute la société, maintenant on nous sert deux projets de loi.
Je vais revenir sur un élément, puis je suis sûre que vous pourrez renchérir, mais un élément précis, qui est le choix du premier dirigeant de l'université. Moi, j'essaie de le lire aussi attentivement, le projet de loi, puis ce n'est pas toujours facile parce qu'il y a des articles qui se répondent mais qui ne sont pas dans les mêmes sections. Ce projet de loi, je parle de celui des universités parce que c'est le premier jour où on peut en parler un peu ? pour les cégeps, j'ai indiqué déjà certaines choses les jours précédents ? le projet de loi permet à un conseil d'administration d'être composé à 75 % de gens internes... externes, pardon, puisqu'on dit: Il faut qu'il y ait au moins 25 % de gens internes. Le projet de loi aussi définit clairement qu'il y a un comité de ressources humaines composé très majoritairement de membres externes, puisqu'il y en a un seul de l'interne, et que ce comité va avoir à définir, élaborer, proposer un profil pour le premier dirigeant des universités. Ce profil va ensuite être pris en considération et approuvé, donc un geste formel, par le conseil d'administration qui peut, d'après le projet de loi, être composé à 75 % de gens externes. Cela veut dire que le premier dirigeant d'une université qui est ce qu'on appelle, excusez-moi le latinisme, le primus inter pares, le premier entre les pairs, principe très ancestral et bien ancré dans les universités, cette personne-là peut avoir un profil qui a été décidé par des gens qui ne proviennent pas ? je ne dis pas qu'ils n'ont pas de compétences ? mais qui ne proviennent pas... ou en très grande majorité qui ne proviennent pas de l'université. Je pense qu'on a raison de se poser des questions par rapport à ça.
Ce que j'aimerais peut-être que vous me disiez, c'est... Parce que là j'en profite pour, bon, faire état un peu de mon opinion. Si vous essayez d'illustrer, dans ce que vous connaissez des cégeps ou des universités, les dangers de... vous avez utilisé l'expression quelque part d'une approche «top-down» avec l'efficience, si vous essayez de l'illustrer dans ce que vous connaissez, ça pourrait donner lieu à quelles erreurs ou à quelles mauvaises orientations, peut-être pas une erreur, mais en tout cas des choix qui ne seraient pas les plus judicieux?
n(12 h 10)nLe Président (M. Marsan): Alors, M. Trudelle. M. Trudelle et ensuite Mme Blais. C'est ça? Merci.
M. Trudelle (Jean): Bien, écoutez, on entend... quand on parle de moderniser la gouvernance, les idées modernes de gouvernance font en sorte qu'on s'est rendu compte que plus les gens, ce qu'on pourrait appeler les exécutants au sens noble du terme, sont proches des lieux de décision, plus ils se sentent concernés, meilleure est la gouvernance parce que meilleur est le partage, je dirais, l'adhésion aux changements et aux décisions qui sont prises. Et ça, ça se vérifie dans les collèges que je connais, et ça se vérifie parce que c'est bien évident qu'un syndicat d'enseignants, par exemple, un syndicat de professionnels, un groupe étudiant, les dirigeants, les directeurs, les administrateurs ne sont pas spontanément tous du même avis sur une question donnée, n'est-ce pas? On sait ça.
Comment ces gens-là en arrivent-ils à un moment donné à faire consensus? S'ils y arrivent, bien là, il n'y a personne dans la boîte qui peut s'élever contre un tel consensus parce que c'est un consensus, parce qu'on se donne les mécanismes nécessaires pour discuter, pour travailler une question et pour trouver des solutions. C'est ça qu'on voit, nous, comme créneau à suivre.
Et, à l'inverse, bien, quand on a une gestion qui est «top-down», bien, on n'a pas cet effet-là, et, en éducation puis en éducation supérieure, je pense que les effets sont encore plus néfastes parce que justement, bien, les profs sont ceux qui portent la mission tous les jours, là.
Le Président (M. Marsan): Mme Blais.
Mme Blais (Marie): Oui. Vous avez mentionné le choix du premier président, et ça, je pense qu'il faut savoir, c'est fort différent d'une université à l'autre. Alors, c'est pour ça que, dans le projet de loi, ce que l'on perçoit, c'est une uniformisation. Ce que je veux souligner et répéter, c'est que les universités ont des visions propres, et elles y tiennent. Je pense notamment à l'Université Laval où il y a un corps électoral, où il y a notamment littéralement une campagne électorale, où la communauté universitaire s'implique. Le RASUL est fort important, s'implique, pose des questions aux candidats, et ça, je pense qu'il faut y tenir et il faut respecter ces façons de faire qui sont fort différentes.
Je voudrais revenir sur vos inquiétudes, que je partage tout à fait, c'est-à-dire que ce qu'on est... en fait, on le dit dans notre mémoire, mais que le profil soit défini par des gens provenant du milieu des affaires. Je vous rappelle que c'est ça, la réalité que l'on voit dans les universités aujourd'hui. Que les questions académiques soient prises sous la seule loupe du financier, c'est ça que l'on craint dans... Il y a des programmes où il y a peut-être moins d'étudiants mais qui sont fort importants dans des universités ? je pense à philosophie ? en région. Mais il faut pouvoir maintenir ces programmes-là. Et c'est ce type d'inquiétudes que l'on a, que des programmes qui sont peut-être moins utiles, paraissent moins utiles pour une communauté, bien, il ne faut pas oublier que, dans le milieu universitaire, bien, ces aspects-là sont importants, ces programmes-là sont importants.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Je vais préciser quelque chose. Il est vrai que le projet de loi indique que les universités pourront utiliser le processus auquel elles sont habituées dans le choix de nomination du recteur. Le problème que j'ai, c'est que ce choix de nomination sera fait en tenant compte d'un profil qui aura été décidé par un conseil d'administration qui pourra, à 75 %, être composé de membres externes. Et là il y a une importance énorme de donnée aux gens de l'externe. Après, on peut bien dire: C'est un collège électoral, ou c'est un comité, on peut dire: On respecte le processus, mais on aura donné à ces gens-là un poids très important pour définir de qui a-t-on besoin. Puis, pour suivre peut-être ma pensée juste un instant, le danger, c'est de se retrouver d'ici quelques années avec des recteurs d'université qui soient des gestionnaires et qu'ils ne soient plus des professeurs et des chercheurs. C'est ça, le danger. Et je pense que c'est un réel danger. On y reviendra parce qu'on aura le temps de discuter de ça.
Je voudrais peut-être poser une autre question, puis après je vais laisser la place à mes collègues qui en ont également. Je veux revenir à la question des indicateurs, là, qualitatifs et quantitatifs. Moi aussi, je m'inquiète de ça, l'article 4.0.45. On dit bien: «Le ministre, après consultation des présidents des conseils d'administration d'établissement, établit des indicateurs généraux qualitatifs et quantitatifs...» Puis, dans le quantitatif, quand on va voir un petit peu plus loin, quand on... je ne vous lirai pas tout l'article, mais on indique qu'on va tenir compte des résultats de l'année en regard de la mission, des valeurs, des objectifs de l'établissement. Donc là, on vient encadrer de façon importante... pas simplement le quantitatif, est-ce que votre budget est équilibré; le mot «qualitatif» le dit, ça ouvre la porte à pouvoir juger de l'ensemble de la mission d'une université. J'aimerais peut-être que vous réagissiez juste à cet aspect-là, puis ensuite je vais laisser mes collègues poursuivre.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Trudelle, d'abord.
M. Trudelle (Jean): Oui. Bien, vous savez, si ces deux projets de loi soulèvent des passions, c'est aussi parce que justement ils s'inscrivent dans une espèce de réflexion globale sur le rôle, la mission. Vous savez, toutes les sociétés modernes sont aux prises avec des problèmes importants, on a besoin de plus de travailleurs et de travailleuses qualifiés, donc les cégeps sont un peu sur la sellette. On a besoin de faire réussir. On se dirige vers une société du savoir, et, tout à coup, l'enseignement supérieur a des impératifs de réussite qu'il n'avait pas avant, sauf que la réponse qu'on perçoit, peut-être à tort, tant mieux si on nous convainc du contraire, la réponse qu'on perçoit, c'est que justement, pour faire face à ces besoins-là, le réflexe, c'est plus de contrôle, plus d'indicateurs, plus de mesures. Ça nous inquiète, ça nous inquiète.
Et Mme Courchesne disait d'ailleurs, je pense, dans le mot d'ouverture, si ma mémoire est exacte, que ça s'inscrit dans des tendances internationales, ce qui est tout à fait exact. Mais les tendances internationales des fois se trompent, ne vont pas dans la même direction. Et il y a des débats à faire. Qu'est-ce que c'est, la mission d'un collège? Si on considère que la mission d'un collège, c'est la réussite des élèves, je m'excuse, je le dis bien fret: On se trompe. Le collège, sa mission, c'est de faire tout en son pouvoir pour que le maximum d'élèves réussissent, ça, c'est vrai, mais on ne peut pas le tenir responsable... Je vous ai donné toute une liste de choses tantôt, là, qui vont venir exercer des pressions à la baisse à la réussite.
Alors, si la réponse qu'on a comme prof... Qu'est-ce que ça fait, un prof tous les jours? Ça essaie de faire réussir ses étudiants. Quand on dit à ce prof-là: Regarde, là, il y a des indicateurs dans ton collège, puis on va venir voir si ton collège, qui s'est doté d'un plan de réussite dans le plan stratégique, s'il a atteint ses objectifs... C'est comme ça qu'on le reçoit. Si ce n'est pas ça, là, je vous lance un cri du coeur: Enlevez-nous ça du projet de loi, ça va régler bien des problèmes. Mais on est très inquiets de cette tendance-là à y aller par une espèce de contrôle administratif des missions, alors qu'on est en enseignement supérieur et qu'on ne doit pas confondre l'obligation de résultat avec l'obligation de moyens. Parce que, si les choses restent toutes égales par ailleurs, le message qu'on a actuellement, c'est: Les profs, vous êtes un peu trop exigeants, slackez un peu, qu'on ait des bons taux de réussite. On ne veut pas ça, hein? Je pense qu'on s'entend tous qu'on ne veut pas ça.
Alors, encore une fois, la tendance qu'on voit... quand je vois apparaître, dans le projet de loi, le mot «performance des collèges», je m'inquiète un petit peu, là. Est-ce qu'il y a eu un débat social sur c'est quoi, la performance d'une mission d'un établissement d'enseignement supérieur, c'est quoi, la performance? Vous dites... Enfin, la ministre se défend de vouloir faire un glissement vers le secteur privé. Mais le mot «performance», moi, j'associe ça pas mal plus à la concurrence dans l'entreprise privée qu'au monde de l'enseignement supérieur.
Le Président (M. Marsan): Mme Blais.
n(12 h 20)nMme Blais (Marie): Oui. Votre inquiétude par rapport... eu égard au premier dirigeant, on a exactement la même, c'est-à-dire qu'on s'inquiète, étant donné le projet de loi, parce que c'est une réalité nord-américaine, qu'il y ait de plus en plus de recteurs qui proviennent du privé, c'est une réalité, et ça, on est inquiets.
Vous avez souligné le 4.0.45, le quatrième point, mais un établissement peut également convenir avec la ministre de certains indicateurs particuliers de manière à rendre compte de ses spécificités, notamment au regard de la qualité de l'enseignement et de la performance en matière d'enseignement et en matière de recherche. C'est juste pour vous dire qu'il y a des mots là, et je pense que ça mérite un débat.
Et vous l'avez dit, je pense que tout ce projet de loi, il y aurait eu un net avantage d'avoir un débat avant le dépôt du projet de loi. Et d'ailleurs, avec le projet de loi n° 107, l'ensemble de la communauté universitaire a émis d'énormes doutes, et malheureusement on n'en a pas tenu compte. On avait vraiment émis beaucoup de commentaires indiquant que ça n'allait pas dans la bonne direction et on a eu un papier collé. On est fort inquiets, on n'a pas tenu compte de nos réticences. Alors, c'est pour ça que, je pense, ça mérite un débat, et vous avez raison sur notamment toute la place du privé en enseignement supérieur.
Mme David était à l'UNESCO à Paris, on a vu que c'est un vrai débat que cette place du privé en enseignement supérieur. Et je pense qu'au Québec on devrait, avant de... parce que, pour nous, c'est une privatisation qui se fait de l'interne, mais il faudrait peut-être en discuter avant pour voir quelle est notre vision de l'enseignement supérieur avant d'imposer un tel projet de loi.
Alors, je pense que, de fait, vous avez raison, il y aurait lieu de tenir, bon, nous, on appelle, des états généraux sur l'université. Je pense que, sur l'université, ce serait fort pertinent.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Je cède la parole à mon collègue.
Le Président (M. Marsan): Oui. Alors, vous avez la parole. M. le député de Borduas.
M. Curzi: Merci, M. le Président. Bonjour. Moi, je veux revenir à ce qui nous a été dit tantôt, parce qu'il y a eu une démonstration par l'absurde un petit peu que les nombres étaient en contradiction avec les principes. Tantôt, le cégep régional de Lanaudière est venu nous dire que, si on voulait respecter le 60-40, on arriverait à une situation absurde où le nombre de membres friserait les 30, ce qui est comme inopérable au niveau d'un conseil d'administration. Et je pense que vous étiez d'accord, Mme la ministre, pour dire qu'il y avait quelque chose qui n'avait pas de bon sens. Cependant, leur argumentaire tend à démontrer qu'il est important qu'ils puissent retrouver dans leur structure, dans leur conseil d'administration, les directions générales de chacun des constituants du cégep de Lanaudière. Donc, on en arrive à cette situation où on est d'accord pour dire que le principe du 60-40 est moins important que le principe du respect de la mission fondamentale du cégep. Et, en ce sens-là, je trouve que cet exemple-là par l'absurde confirme ce que vous dites.
Et, si je comprends bien ce que vous dites, c'est que vous seriez, et je parle surtout des cégeps, d'accord pour qu'il y ait, par exemple... Ce que vous souhaitez, c'est de conserver une majorité de membres de l'interne à l'intérieur d'un conseil d'administration, que chacun des corps constitutifs soit bien représenté, et que vous ayez cette majorité-là.
Si vous aviez cette majorité-là, puis là je ne veux pas jouer les médiateurs ou les conciliateurs, mais, si vous conserviez cette collégialité représentée dûment au conseil d'administration, que vous étiez en mesure d'intégrer et de choisir ou de définir le profil, par exemple, des membres externes qui seraient forcément minoritaires, donc vous seriez partie prenante, je pense, d'un conseil d'administration qui saurait intégrer des gens qui viennent de différents milieux, puisque vous seriez, vous, aptes à définir quel devrait être le profil des membres externes à ce conseil d'administration là. Compte tenu de... Et donc, si on prolonge le raisonnement, si on applique ce raisonnement-là à l'ensemble des mesures du projet de loi, est-ce que votre attitude face au projet de loi, surtout le projet de loi sur les cégeps, serait différente si on vous assurait, par exemple, que vous allez conserver cette majorité-là et la possibilité que la collégialité définisse l'apport, je pense que personne ne nie, important de l'ensemble du milieu à la réussite du collégial?
Le Président (M. Marsan): M. Trudelle.
M. Trudelle (Jean): D'abord, juste une petite précision. Il faut faire attention. Quand on parle de la majorité des membres de l'interne, là, un directeur général, un directeur des études, on compte ça pour du monde interne. Ça ne veut pas dire qu'on a toujours le même avis, mettons. Les étudiants, alors... Tu sais. Bon. C'est ça, là. Quand on parle de membres de l'interne, ce n'est pas notre majorité, c'est une présence plus importante. Bon. Ça, c'est une chose.
Évidemment que ça nous ferait voir ce genre de projet de loi d'un autre oeil. Par ailleurs, on disait tout à l'heure: appliquer à une réalité qui nous semble bien fonctionner, relativement bien fonctionner, là. C'est une question d'équilibre, ces choses-là. Ça ne veut pas dire qu'on n'aurait pas des améliorations à souhaiter, tout ça, notamment dans les pratiques, mais c'est plus dans les pratiques peut-être de certains collèges. Ce n'est pas le modèle actuel qui empêche que les pratiques soient saines et collégiales, c'est plus peut-être la manière avec laquelle on l'applique.
Bouleverser les pratiques des collèges, bon, ce n'est pas... on n'est pas les premiers touchés, d'une certaine façon, c'est les administrations de collèges qui sont touchées, mais je pense qu'elles ont réagi. Écoutez, vous avez un petit collège à un moment donné, une petite constituante, 200, 300 étudiants. Bon. Est-ce que le conseil d'administration est obligé de faire trois comités, changer ses pratiques, vérifier qu'est-ce qui appartient au nouveau comité, qu'est-ce qui appartient au service des... Je vous donnais l'exemple simplement. Ça aussi, ça nous inquiète.
Par ailleurs, je répète, je reviens sur quelque chose souvent... peut-être que vous trouvez ça... peut-être que vous trouvez que ce sont des éléments très accessoires, dans le projet de loi, sur lesquels, nous, on insiste beaucoup, mais vous devez comprendre que, quand je parlais tantôt des défis sociaux, là, on est systématiquement là-dedans, on est systématiquement, sur le terrain, confrontés à ces défis-là qui nous sont renvoyés un peu par la société. Comment ça se fait que ça ne réussit pas plus dans les collèges? C'est ça, c'est avec ça qu'on vit tous les jours, là. C'est avec des élèves allophones qui nous arrivent, avec des élèves qui sont en difficulté d'apprentissage, toutes sortes d'affaires, les enfants de la réforme demain matin. C'est ça, notre quotidien de prof. Et on attend beaucoup que ces choses-là soient prises en compte, parce que le défi, il est social. C'est un défi qui touche toute la société puis... Bon. Les messages qu'on a, gouvernementaux, à cet égard-là sont des messages qui semblent aller vers plus de contrôle. Alors, vous voyez un peu la dynamique, là. Bon, ça, ça va. Si, demain matin, ça disparaît des projets de loi, bien, écoutez, là, on est dans un autre horizon.
Le Président (M. Marsan): Mme Blais, vous voulez...
Mme Blais (Marie): Mais par ailleurs il y a encore d'autres irritants. Et je rappelle la centralisation des pouvoirs notamment au comité de ressources humaines, l'uniformisation du choix du premier dirigeant. En fait, ce qu'on saisit mal, c'est pourquoi uniformiser. Pourquoi faire du mur-à-mur? Et c'est ça, et je pense que c'est là où on rejoint... et on se pose la question. Il y aurait peut-être lieu d'avoir une réflexion plus large avant d'uniformiser et de faire fi de la culture, des spécificités des universités. Vraiment, c'est important, dans les universités, les cultures. L'Université Laval, là, ce n'est pas l'UQAM, puis je peux vous le dire. On l'entend si on fait des assimilations trop rapides. Donc, il faut vraiment comprendre qu'une université en région, ce n'est pas la même chose qu'une université urbaine, et je pense qu'il faut refléter... respecter ces façons de faire et cette philosophie du réseau universitaire québécois.
Le Président (M. Marsan): D'accord. Alors, M. le député de Drummond, la parole est à vous.
M. Blanchet: Merci, M. le Président. Lorsqu'on se questionne sur les fondements de ces deux projets de loi là, on en arrive rapidement à quelque chose de philosophique et d'idéologique qui se revendique plus ou moins ouvertement de courants de pensée internationaux, et, dans cet esprit-là, j'apprécie beaucoup la longue citation en début de votre document, qui vient également d'une organisation... de deux organisations internationales fort reconnues, et qui va dans le sens contraire, aux limites de la dénonciation, et j'apprécie bien.
Je cherche ma zone de confort par rapport à votre intervention parce que de façon générale j'ai tendance à être d'accord avec beaucoup, beaucoup, beaucoup des points. Il y a certains nuances qui me préoccupent, dont une notion d'équilibre. Une notion d'équilibre. On assimile assez facilement les indépendants, les externes aux gens du milieu des affaires tant et si bien qu'on en arrive quasiment à créer une confrontation entre les gens du milieu des affaires et le milieu collégial, comme si ce n'étaient pas des milieux complémentaires. Je pense que, dans une certaine mesure, en particulier dans le contexte actuel, en particulier quand on travaille sur du raccrochage, sur de la continuité, sur de la fluidité entre un niveau et l'autre, c'est important.
Ce que je veux savoir... parce que je n'entends pas que vous ne voulez pas les voir, j'entends que vous voulez nuancer. Je voudrais savoir à quel nombre, à quel niveau, comment vous placeriez la présence des gens du milieu puis, je le dis, carrément, carrément du milieu des affaires? Ce sont les utilisateurs de ces mains-d'oeuvre-là spécialisées qu'on veut former, tout en gardant toujours la préoccupation de former aussi des citoyens et de toujours avoir une formation générale et un sens critique qui doit aussi être élaboré. Et aussi où vous placez l'équilibre entre...
Le Président (M. Marsan): Il reste un peu moins de 1 min 45 s.
M. Blanchet: Il reste 30 secondes... même pas, trois secondes à ma question. Où est-ce que vous placez l'équilibre entre la nomination des gens par l'interne et par le ministère au niveau collégial?
Le Président (M. Marsan): Alors, en terminant, M. Trudelle.
M. Trudelle (Jean): Écoutez, je vais essayer d'y aller rapidement. D'abord, on est tout à fait pour la diversité et on n'est pas en train de vilipender la présence de... Comprenons-nous bien là-dessus, là: la diversité des gens... de provenance des gens de l'externe, c'est une excellente chose. Qu'il y ait des gens du milieu des affaires sur les conseils d'administration surtout dans des cégeps, là, de régions ressources, des choses comme ça, on n'a pas de problème avec ça, là. Ce n'est pas...
Dans les universités, c'est un peu plus délicat parce que, dans les universités, il y a toute la question de la recherche, et donc la proximité entre... puis on connaît tout le débat entre l'importance de la recherche et de l'enseignement dans les universités; dans les cégeps, ça n'a pas la même dimension. Dans les universités, c'est quelque chose de beaucoup plus sensible et c'est pour ça que ça fait référence très rapidement à des questions extrêmement sensibles dont on pense qu'elles devraient être, comme Marie l'a dit, débattues. C'est pour ça que, dans le cadre des universités, ce qu'on demande quelque part, c'est qu'il y ait quelque chose comme des états généraux sur les universités, on ne demande pas ça pour les cégeps. On n'en veut pas.
Le Président (M. Marsan): M. Trudelle, Mme Blais et Mme Tremblay, nous vous remercions de nous avoir donné le point de vue de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec.
Alors, la commission suspend ses travaux jusqu'à 16 heures. Vous pouvez laisser vos effets personnels ici, les portes seront barrées. Bon appétit.
(Suspension de la séance à 12 h 30)
(Reprise à 16 h 13)
Le Président (M. Marsan): Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones.
Le mandat de la commission est de tenir des audiences publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 38, Loi modifiant la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire et la Loi sur l'Université du Québec en matière de gouvernance, et sur le projet de loi n° 44, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel en matière de gouvernance.
Alors, je suis très heureux d'accueillir la Centrale des syndicats du Québec qui auront 30 minutes pour nous exposer la position de votre organisation, et ensuite il y aura une période d'échange qui pourrait aller au maximum de 60 minutes.
Alors, je voudrais saluer le président, M. Réjean Parent. Il nous fait plaisir de vous accueillir. On s'excuse un petit peu des contretemps plus tôt, mais notre règlement nous oblige. Alors, M. Parent, je vous inviterais à nous présenter les gens qui vous accompagnent et à commencer votre exposé.
Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
M. Parent (Réjean): Merci, M. Marsan. Donc, à ma gauche, vous avez Bernard Bérubé, président de la fédération des professionnelles et professionnels de collèges; Mario Beauchemin, président de la Fédération des enseignantes et enseignants de collèges; Gabriel Danis, qui est conseiller à la centrale; et, à ma droite, la bonne larronne, finalement, Marie Racine, présidente de la Fédération du personnel de soutien de l'enseignement supérieur. Chacune des présidences de fédérations prendra la parole. On rentrera à l'intérieur du temps qui est prévu, puis je vous indiquerai à quel moment.
Je profite de l'occasion, compte tenu que c'était aujourd'hui l'ouverture de la session, pour vous souhaiter une bonne session parlementaire puis un travail fructueux. D'indiquer, d'entrée de jeu ? je vais jouer un peu à l'ouvreur de porte comme président de centrale, aujourd'hui, pour paver la voie à mes camarades présidences de fédérations ? les projets de loi qui sont apportés, on peut en saisir la substance; on peut, comme organisation syndicale, reconnaître le bien-fondé du désir gouvernemental d'améliorer les règles de gouvernance des universités et des collèges, puis d'apporter des améliorations, puis s'éviter des problèmes ou des problématiques qui ont été vécus au cours des dernières années. Ça, donc, de ce côté-là, là, d'entrée de jeu, vous dire que la centrale, ses fédérations ne recommandent pas puis n'exigent pas le retrait du projet de loi. Et on reconnaît, du côté ministériel, l'intérêt, bon, d'améliorer les règles de gouvernance.
Peut-être vous situer un peu aussi la centrale: présente dans l'ensemble des régions du Québec, urbain comme rural, donc avec la diversité de l'ensemble des personnels, donc la connaissance, je dirais, à mon point de vue, du vécu particulier qui peut se traduire autant en région qu'en milieu urbain puis en fonction des différentes catégories de personnels.
On comprend que, bon... c'est sûr que, dans la dynamique de ces dernières années, dans le courant de la nouvelle gestion publique, la volonté, je veux dire, de mieux gouverner nos institutions, s'assurer d'une certaine gestion par résultats... Encore que «résultats», faut-il voir comment il se définit, le résultat; il peut se définir d'une façon très comptable et ne traduira pas nécessairement la profondeur de la mission de certaines institutions. Ça fait que, ça aussi, quand on parle de nouvelle gestion publique, de nouvelle manière de faire, il y a un intérêt à voir qu'est-ce qu'on veut mesurer, comment est-ce qu'on veut finalement voir évoluer nos institutions d'enseignement supérieur.
Évidemment, toute la crise de l'UQAM, le dossier scolaire du Vieux-Montréal, ont entraîné certaines études, certaines recherches. Je présume qu'il y a des gens qui se sont dit: Il ne faut plus que ça nous arrive. Mais je regarde le rapport du Vérificateur général, le rapport Toulouse, certains constats qui sont posés là paraissaient, bon, tout à fait corrects, mais, quand on arrive dans le projet de loi, là, on trouve qu'il y a un hiatus ou une fracture entre ce qu'on a comme constat dans ces rapports et les recommandations qui figurent dans le projet de loi.
On constate ? je donne à titre d'exemple pour illustrer mon propos, on va dire dans le cas de l'UQAM ? que la mauvaise gestion du recteur, de ses subalternes, ses vice-recteurs... ont été des facteurs assez majeurs, une difficulté pour les administrateurs externes de pouvoir suivre parce qu'ils étaient, jusqu'à un certain point, sous la coupole du recteur puis ils manquaient d'information. Puis c'est à l'interne qu'on a été en mesure, je dirais, d'arrêter le massacre, et le projet de loi va dans une autre direction. Bon, il y a peut-être une explication savante, on ne la comprend pas.
Dans le cas des collèges, le Vérificateur général nous dit, bien: Il faut... Les relations d'affaires, les partenariats économiques des collèges, ils doivent être mieux supervisés, un meilleur contrôle. On trouve que, de ce côté-là, le gouvernement ne prend pas la balle au bond, apporte des corrections, je veux dire, dans la communauté collégiale. Bon, écoutez, peut-être que ça aurait pu continuer de se vivre comme ça se vivait, bon, mais il reste que la reddition de comptes... centre collégial de transfert technologique ou un meilleur encadrement des relations avec les partenaires économiques des collèges... là aussi, on trouve que le projet de loi, je veux dire, ne va pas assez loin.
Donc, dans ce contexte-là, on dit: Il y a des prétextes qui ont engendré peut-être une certaine urgence d'agir, mais il nous semble qu'à l'écriture c'est des volontés d'une meilleure gouvernance, une meilleure transparence... Disons, il y a des essais mais qui nous apparaissent trop timides à notre goût. Et là, à ce stade-ci, si vous permettez, M. le Président, je céderais la parole à Bernard Bérubé qui nous entretiendra sur la composition des conseils d'administration. Il sera suivi de Mario Beauchemin, sur la transparence, et Marie Racine fera une petite boucle sur le réseau universitaire.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Bérubé, la parole est à vous.
n(16 h 20)nM. Bérubé (Bernard): Oui, bonjour. Alors, mon exposé abordera trois points. Le premier point, c'est la question, la notion d'externes et d'indépendants; la deuxième, la composition même des conseils d'administration; et, la troisième, la question du processus de nomination des membres des conseils d'administration.
Bon, écoutez, au-delà d'une question sémantique entre «indépendants» et «externes», il nous apparaît important de revenir sur le fait que le projet de loi appelle ce que nous appelons, nous, des externes, des indépendants. Et sans doute que le projet de loi fait allusion, fait sienne l'opinion, le point de vue qui était défendu dans le rapport Toulouse.
Rapport Toulouse. Bien, il faut mentionner que ce rapport-là a été engendré par une majorité de gestionnaires. Donc, ce que nous retrouvons dans le rapport Toulouse, c'est un point de vue de gestionnaires, et on mettait en doute... c'est-à-dire, ce qu'on faisait, c'est qu'on disait que les membres provenant de l'extérieur des cégeps et des universités manifesteraient plus d'indépendance que les membres issus de l'interne. En effet, ces derniers véhiculeraient, selon le rapport Toulouse, l'agenda de leurs commettants.
Nous trouvons ces propos pour le moins blessants et offensants, parce que nous nous demandons en quoi les membres issus de l'interne seraient-ils moins préoccupés par le bien commun de la communauté que par celui de leurs membres. Et là je ferais référence à l'article 2 du projet de loi qui mentionne, dans la mission même des collèges, «les services à la collectivité». Bien, si on veut que les conseils d'administration quelque part représentent... ou présentent une image de la communauté, c'est important que les gens qui siègent au C.A. soient des gens qu'on peut appeler externes et non pas indépendants.
Et là aussi je réfère à quelque chose, parce que, dans le projet de loi, article 13, il est mentionné: «Le seul fait pour un membre du conseil d'administration ayant la qualité d'administrateur indépendant de se trouver, de façon ponctuelle, en situation de conflit d'intérêts n'affecte pas sa qualification.» Alors, pourquoi ne pas les appeler «externes» puisqu'on mentionne que ces gens, qu'on dit indépendants, peuvent être en conflits d'intérêts? Alors, tant qu'à avoir des gens qui potentiellement sont en conflit d'intérêts, autant mieux savoir quel intérêt est représenté par qui et que les choses se fassent dans la transparence, et que tout le monde sache qui siège et pourquoi siègent-ils au conseil d'administration.
Maintenant, par rapport à la composition du conseil d'administration, en rapport aussi avec ce que je viens de dire, nous trouvons et nous demandons, pour adhérer au projet de loi, que les conseils d'administration soient composés non seulement d'une majorité de membres internes faisant aussi, je dirais... répondant ainsi à une tradition de collégialité, de gestion participative qui existent encore dans les collèges, malgré l'autonomie effectivement qui, au cours de la dernière décennie, a entraîné parfois ou a diminué cette gestion participative... Mais jamais un groupe interne, à ce qu'on sache, n'a pris le pouvoir ou n'a dirigé un collège. Alors, si ce n'est pas le cas, pourquoi vouloir écarter, entre autres, certains groupes des conseils d'administration?
Et là, ici, lorsque la ministre, lors des transferts fédéraux... et qu'elle a consacré, entre autres... qu'elle a permis de consacrer une partie de ces transferts fédéraux là à revitaliser les services professionnels dans les collèges, écoutez, c'était un point positif, intéressant. Les collèges qui ont bien voulu le faire en ont profité, et les professionnels ont été de tout coeur dans la revitalisation de ces services-là, quitte à remettre en question des façons de faire, de ne pas avoir peur de revoir les choses, de faire les choses différentes, afin effectivement de répondre aux nouvelles exigences, que ce soit, là... qu'on parle des clientèles émergentes, des clientèles ayant des limitations fonctionnelles, qui sont des clientèles de plus en plus nombreuses dans nos collèges.
Alors, le personnel professionnel, entre autres, et de soutien ont été fort contents de ce pas fait par le gouvernement, mais en même temps, aujourd'hui, par le projet de loi... Parce que, bon, on dit que, par rapport à l'interne, il y a le directeur général, il y a deux enseignants, deux étudiants et une personne des autres personnels, ça exclut d'emblée soit un personnel de soutien ou un personnel professionnel. Et, comme le personnel professionnel est moins nombreux que le personnel de soutien, cette personne-là risque d'être un personnel de soutien, et tant mieux, parce que le personnel de soutien doit être aussi représenté au sein des conseils d'administration.
Cependant, ça exclut le personnel professionnel des collèges. Je vous rappellerai que ces gens-là sont des spécialistes de l'intervention, sont des spécialistes de la pédagogie, agissent dans des sphères importantes, auprès des enseignants, auprès des étudiants et auprès aussi des gestionnaires. Et il serait dommage, après de si bonnes actions, que de participer à la dévalorisation de la catégorie de personnel des professionnels dans les collèges. Et ils comptent bien continuer à faire profiter humblement au conseil d'administration de leur expertise. Et il y a des... Et une institution d'enseignement, c'est une institution dont la vocation pédagogique est au sein même de sa mission. De là, pour nous, notre incompréhension de vouloir exclure une catégorie du personnel des membres du C.A.
Par rapport aux nominations, il est mentionné que la ministre peut nommer, parmi les gens qu'elle appelle... que le projet de loi appelle «indépendants», trois... nommés par la ministre et la balance par la...
Mme Courchesne: Communauté.
M. Bérubé (Bernard): ...communauté. C'est ça, voilà. C'est ça. Nous aimerions que tous les membres que nous appelons externes, soient... Alors, les conseils d'administration pourraient transmettre à la ministre une liste et qu'elle procède par la suite à la nomination pour l'ensemble des membres du conseil d'administration. Alors, voilà par rapport aux nominations, ce qui mettrait fin à mon intervention.
Le Président (M. Marsan): M. Beauchemin?
M. Beauchemin (Mario): Oui, bonjour.
Le Président (M. Marsan): La parole est à vous.
M. Beauchemin (Mario): Merci. Bonjour, tout le monde. Je vais m'attarder plus particulièrement sur l'aspect de la transparence, qu'on retrouve dans le projet de loi. On considère que les mesures qui sont mises de l'avant pour rendre les séances des conseils d'administration, leurs réunions, plus transparentes sont insuffisantes. On salue bien sûr la mise en place d'un site Internet et la publication des noms, des curriculum vitae des différents administrateurs et administratrices et aussi le salaire du personnel hors-cadre.
Par contre, on trouve que ça ne va pas assez loin, c'est-à-dire que, dans un premier temps, la reddition de comptes se fait auprès de la ministre uniquement. Il y a des assemblées publiques, mais il y en a une aux trois ans seulement. Alors, nous, ce qu'on propose, c'est, dans un premier temps, que le public ait accès aux procès-verbaux des séances des conseils d'administration, ce qui n'est pas le cas présentement, et surtout de rendre publiques les séances des conseils d'administration parce que... pour deux raisons, principalement: c'est très, très, très difficile d'avoir accès aux séances des conseils d'administration. On fait beaucoup, là... On fait une utilisation abusive la plupart du temps... Et ça, ça se repose sur une vaste enquête qu'on a faite auprès de tous les membres de la communauté collégiale de la CSQ, en 2004, dans le cadre du Forum sur l'avenir de l'enseignement collégial, de l'ancien ministre de l'Éducation Pierre Reid, donc un mémoire CSQ pour l'ensemble du monde de l'éducation collégiale.
On utilise de façon abusive la règle du huis clos pour souvent exclure les personnes de la communauté collégiale. Aussitôt qu'on parle de relations de travail, et on sait que c'est un concept qui peut être quand même assez large, on exclut le personnel du milieu collégial des séances des conseils d'administration.
Avec l'article 12 aussi ? et c'est la deuxième raison, là, qui rend difficile l'accès public aux séances du C.A. ? avec l'article 12 de la loi sur les collèges, qui porte sur les conflits d'intérêts, on exclut aussi, presque d'emblée, lorsqu'on parle de conditions de travail, les membres du personnel. On les exclut du vote, ce avec quoi on est d'accord, mais est-ce qu'il faut les exclure des délibérations?
n(16 h 30)n À la limite, lorsqu'on adopte un budget, ça touche aussi les conditions de travail. Mais, dans certains conseils d'administration, on va jusque-là pour exclure le personnel. Donc, on croit, là, qu'il y a un travail à faire sur la règle du huis clos, sur l'article 12, dont on demandait le retrait en 2004, pour permettre une plus grande transparence et un accès plus facile et public aux différentes séances des conseils d'administration. Merci.
Le Président (M. Marsan): Merci, M. Beauchemin. Maintenant, je vais reconnaître Mme Racine.
Mme Racine (Marie): Bonjour. Alors, moi, je vais intervenir sur le projet de loi n° 38 concernant la gouvernance des universités.
La gouvernance des universités doit se coller à sa mission et respecter la culture et le caractère particulier de chaque établissement. Tout en faisant partager des visées communes dans la poursuite d'un idéal éducatif, le ministère doit faire confiance aux acteurs du terrain pour trouver des solutions qui respecteront la culture de chacun des milieux.
Comme le disait tout à l'heure M. Parent, dans le dossier de l'UQAM, le rapport du Vérificateur général désapprouve l'incompétence de l'ancienne direction. Étant donné que ce sont les administrateurs provenant de l'interne qui ont décelé les premiers les nombreuses irrégularités de l'UQAM, nous comprenons mal la volonté du gouvernement d'augmenter la proportion de membres externes sur les conseils d'administration des universités. Selon nous, il serait pertinent d'associer plus largement tous les autres membres de la communautaire universitaire qui démontrent une connaissance de l'établissement afin qu'une vision plus collégiale de la gouvernance puisse se dégager. Pour ces raisons, nous demandons qu'au sein de la composition des conseils d'administration une proportion majoritaire soit accordée aux représentantes et représentants de l'interne, en s'assurant que chacune des catégories de personnel y soit représentée.
Les conseils d'administration des universités doivent répondre non seulement à une poignée d'individus, mais à l'ensemble de la communauté universitaire ainsi qu'à la collectivité en général. C'est pourquoi nous recommandons, plutôt que d'introduire d'autres indicateurs, de rendre publiques les réunions des conseils d'administration de même que les procès-verbaux de ces réunions. Nous recommandons également que ces procès-verbaux soient transmis aux représentantes et représentants des différentes catégories de personnel ainsi qu'à celles et à ceux des étudiantes et étudiants de la communauté universitaire. Pourquoi en serait-il autrement dans un établissement public d'enseignement?
La consultation fréquente de la communauté universitaire par le conseil d'administration, notamment par le biais des assemblées universitaires, est aussi essentielle à une bonne gouvernance des universités.
Nous nous questionnons également sur la nécessité de demander aux conseils d'administration qu'ils s'assurent que la démarche de recherche de candidatures au poste de recteur se fasse de façon confidentielle. En effet, il serait important que la collectivité puisse prendre connaissance du bilan présenté par le recteur sortant ainsi que de l'analyse élaborée par le comité de mise en candidature qui fait état des besoins de l'institution et des qualités attendues chez le prochain recteur. Afin de permettre une démarche inclusive et participative, nous recommandons que la démarche de recherche de candidatures au poste de recteur permette une réelle participation de la communauté universitaire.
Le projet de loi n° 38 ne permet pas la présence d'observatrices et d'observateurs. En fait, il n'en fait pas mention, mais, si on se réfère au rapport Toulouse, la présence d'observatrices et d'observateurs serait un obstacle à une bonne gouvernance. Nous sommes d'avis que cela va à l'encontre d'une véritable transparence du processus décisionnel et qu'il faut conserver cette présence d'observateurs et d'observatrices au sein du C.A.
Le caractère éminemment public du réseau universitaire québécois commande une gouvernance transparente, ouverte et collégiale. Le fonctionnement, la mission et l'histoire propres de ces institutions commandent une collégialité forte et la nécessité de ne pas déconstruire le rapport historique entre le personnel et étudiantes et étudiants qui a toujours fait le succès des établissements d'enseignement supérieur du Québec. C'est pourquoi il est important de faire une place majoritaire aux membres issus de la communauté universitaire dans la composition des conseils d'administration et impératif que chacune des catégories de personnel y soit représentée.
Le Président (M. Marsan): Oui, M. Parent.
M. Parent (Réjean): En conclusion, si vous permettez, M. le Président, donc je pense que vous pouvez voir assez clairement les préoccupations qui nous habitent dans une dynamique... Je reprendrai les propositions pour bien les placer.
Donc, une participation au conseil d'administration qui favorise la diversité des personnels. Je pense que vous avez entendu le cri du coeur du président de la fédération des professionnels: on pense qu'une majorité d'internes, qui sera quand même diversifiée, avec un point de vue d'externes...
Et, sur cet aspect-là, une grande préoccupation: tout en référant à la ministre sur proposition de la communauté, éviter que ça devienne le club des bons copains, là. Puis ça, ce n'est pas nécessairement simple. Je ne dis pas qu'on a la clé, qu'on a la solution. Tu sais, ces nominations-là peuvent prendre une teneur politique. On dit, dans le projet de loi: Les administrateurs tireront le profil. Le club des bons amis puis des partisans... Puis je vous dirais que, dans certains milieux, là... Puis je vais être très prudent parce que je sais qu'il y a des gens qui ont été administrateurs sur des conseils scolaires ou des conseils d'administration de collège ou d'université, je ne veux pas insulter personne, mais la qualité n'est pas toujours égale. Et, dans ce cadre-là, je pense qu'il y a un défi de marque de pouvoir effectivement nommer des administrateurs compétents. On peut saluer, là, toute la question de la formation, et, sous cet aspect-là, moi, je pense que, la toile de fond de la collégialité, de l'adhésion de la communauté puis une certaine... une expertise interne dotée, je veux dire, d'une vision externe... je pense qu'il y a moyen d'arriver à un bon mélange puis de faire en sorte qu'un C.A. n'est pas nécessairement inféodé ou dominé par les hauts dirigeants.
La deuxième proposition, là, toute la question de la transparence, je pense qu'on a une proposition, je veux dire, somme toute, il me semble, qui fait plein de bon sens. Je comprends qu'il puisse y avoir des exceptions, puis il y a peut-être des décisions du conseil d'administration qui ne se retrouveraient pas dans un procès-verbal parce qu'elles ont une incidence, un peu comme on l'a dans la loi d'accès à l'information, mais je ne pense pas que c'est une solution que d'être transparent aux trois ans, puis tirer un voile le reste du temps, puis... Moi, je pense que, dans un contexte où ce sont des institutions publiques, les collèges comme les universités, que ça fonctionne à même les deniers publics, bien, qu'il y ait accès finalement aux procès-verbaux. Tu sais, à l'ère moderne, aujourd'hui, là, on ne se perd pas en papier. Je veux dire, sur ligne électronique, qu'on puisse avoir accès aux délibérations, qu'il y ait ouverture, qu'il puisse y avoir présence d'observateurs, qu'un conseil d'administration puisse s'enrichir de sa communauté, il me semble que ça... On dit que c'est... autant les collèges que les universités sont des leviers de développement; bien, il me semble que, si c'est des leviers de développement, que ce soit sur un plan social, culturel ou économique, je pense que le C.A. doit gouverner ouvert au monde et, en fait, rendre disponibles les procès-verbaux et la présence d'observateurs ou de personnes du public dans les réunions du conseil d'administration. Ça nous apparaît un minimum.
La troisième proposition touche le milieu universitaire. Quand on parle de... Moi, je pense que les meilleurs leaders, c'est ceux qui vont chercher l'adhésion de leur communauté. Je pense que vous en êtes des exemples, toutes et tous assis à cette table qui avez été chercher une adhésion significative de votre communauté. Bien, il me semble que, dans ce cadre-là, je veux dire, le recteur de l'université devrait... tu sais, là aussi, ça devrait se faire à livre ouvert, et il devrait y avoir une association de la communauté. Tel est le sens de la troisième proposition.
Et je pense que, tout en reconnaissant certains éléments, certains bien-fondés d'un modèle de gestion nouvelle gouvernance dans le système public, dans les institutions publiques, je pense qu'il faut être en mesure aussi de tenir compte de la mission complexe, des missions particulières des collèges et des universités. Et souvent la ministre me dit: C'est fini, le mur-à-mur, Réjean, mais je pense que, dans ce contexte-ci, dans ce contexte-ci, bien, il faudrait aussi faire preuve d'imagination et laisser place à certaines adaptations régionales ou locales. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Marsan): Alors, merci à vous. Nous allons ouvrir la période d'échange, et je vais immédiatement reconnaître la ministre de l'Éducation, des Loisirs et des Sports. Mme la ministre, vous avez la parole.
n(16 h 40)nMme Courchesne: Merci, M. le Président. Bonjour, madame, messieurs. Merci d'être là mais merci aussi pour votre présentation. Je veux vous dire d'emblée, parce que j'ai envie de vous le dire, que j'apprécie le ton de votre présentation, notamment. Et vous soulevez des aspects sur lesquels je souhaiterais revenir, mais qui à mon sens sont, somme toute, nuancés. Et je veux vous dire d'emblée que, sur la pertinence des assemblées publiques et des procès-verbaux, le projet de loi dit que les règlements de régie interne pourront stipuler effectivement la publication ou la tenue des séances publiques, ce avec quoi, vous le savez, je ne suis pas du tout en désaccord. Je vois tout à fait non seulement plausible, mais pertinent surtout que les procès-verbaux soient de nature publique. Ça, je n'ai pas de problème avec ça.
Maintenant, je crois comprendre de la présentation de monsieur qu'actuellement il y a une très grande majorité de séances qui, dans les cégeps notamment ? là, je ne parle pas des universités, je parle des cégeps ? sont déjà publiques, mais l'effet, l'effet qu'on y voit actuellement, c'est l'abondance des huis clos. Donc, je pense qu'effectivement... Moi, la façon dont j'ai voulu le présenter, c'est qu'à partir du moment où toutes ces règles doivent être publiques, à partir du moment où la communauté collégiale... ? et là je m'adresse aussi à la communauté universitaire ? où il doit y avoir beaucoup plus de transparence sur les règles de régie interne, sur les profils, sur un certain nombre de décisions qui sont énumérées dans la loi, c'est évident que, comme membre d'un conseil, membre responsable qui accepte de siéger dans un conseil d'administration, il y a un esprit qui veut davantage dicter la nature publique à la fois des délibérations, des prises de décision et bien sûr des procès-verbaux et des comptes rendus, puisqu'on parle de reddition de comptes, qui devront en être faits. Ça fait que je n'ai pas de... Je n'ai, bien au contraire, pas beaucoup de difficultés avec ça.
Vous revenez très sereinement sur la composition du conseil d'administration. J'ai eu l'occasion, ce matin, de m'exprimer sur le personnel professionnel et de soutien, qui sont, il faut bien l'admettre... puis je ne sous-estime pas leurs tâches, là, mais qui, en nombre, sont quand même moins nombreux dans les institutions. Alors, est-ce qu'on doit inclure une proportionnalité? Ça peut être à la fois lourd et complexe, et là ça ne permet plus à une institution de se doter de sa personnalité qui lui est propre. Moi, je ne voudrais pas tomber... aller aussi loin que ça, pour éviter qu'on ne puisse pas préserver des spécificités à un établissement plutôt qu'à un autre.
Mais vous demandez une majorité de membres internes. Moi, j'écoute, là, depuis... C'est notre deuxième semaine. Est-ce que vous ne trouvez pas qu'on est en train de développer dans ces discours ce que le député de Terrebonne disait ce matin, un peu cette opposition entre les membres internes et externes, en, d'une part, qualifiant que les membres externes sont très majoritairement du milieu des affaires? Je me suis exprimée là-dessus ce matin. Mais est-ce qu'on n'est pas en train de prendre le morceau par le mauvais bout? Et pourquoi on ne pourrait pas se dire: Si le conseil d'administration a comme responsabilité première l'intérêt commun de l'institution, pourquoi il faudrait qu'on s'oppose entre les internes et les externes? Pourquoi une telle méfiance? Est-ce que ce projet de loi est en train de mettre à jour un bris de confiance qui est beaucoup plus profond que ce que le projet de loi décrit?
Parce que, ce midi, je réfléchissais à ça puis je me disais: Ça ne se peut pas, là, qu'on soit si loin les uns des autres, parce que tous ceux qui se présentent devant nous ne sont pas satisfaits de la façon dont ça se passe, particulièrement, je dois l'admettre, dans les universités plus que dans les collèges. À ce moment-là, le projet de loi vient définir des paramètres, et là woups! Là, on sent qu'il y a cette tension en pensant que les uns ne peuvent pas comprendre puis que les autres sont mieux placés pour vraiment définir l'intérêt commun de l'institution, alors que, dans mon esprit, un conseil d'administration, c'est une équipe où les membres, par leur expertise et leurs compétences, doivent se compléter pour permettre à l'institution de prendre les meilleures décisions dans le meilleur intérêt.
Moi, je pense qu'on a une réflexion importante à faire à cet égard-là. Et, dans ce sens-là, vous dites: On voudrait des membres internes majoritaires. Mais est-ce que vous êtes en train de me dire que, si les membres internes sont majoritaires, ils sont à l'abri, à l'abri complètement de tout conflit d'intérêts quand ils siègent au conseil d'administration? Si on discute des budgets de recherche, par exemple, puis qu'on est soi-même un titulaire de chaire, on fait quoi? Est-ce qu'on se retire du conseil? Ça se passe comment? Il y a des notions possibles de conflit d'intérêts pour les membres internes. Je ne suis pas en train, là, de juger, ou d'accuser, ou quoi que ce soit; j'essaie de me mettre dans un principe objectif de gouvernance pour les uns et pour les autres, d'une part.
Alors, mettons qu'on dit: Un équilibre parfait, 50-50. Qui tranche en cas de non-accord? Est-ce que c'est le président qui a un vote prépondérant? Alors, dites-moi selon vous, avec les questions que je viens de poser, quel serait le conseil d'administration idéal.
Le Président (M. Marsan): M. Parent.
Mme Courchesne: ...
M. Parent (Réjean): Ah, je vous aime beaucoup, madame.
Mme Courchesne: Je suis contente, là, vous venez de me faire une déclaration publique, M. Parent. Elle sera retenue contre vous.
M. Parent (Réjean): Non, non, mais...
Le Président (M. Marsan): M. Parent, vous avez la parole.
M. Parent (Réjean): Non, mais c'est parce que c'est une question, là, le conseil d'administration idéal, et fort probablement que, si on l'avait trouvé, on ne formerait que des conseils d'administration idéaux. Quand on prend nos repères dans une dynamique, je dirais, que je regarde, dans le réseau scolaire, les conseils d'établissement où on a un 50-50 avec une présidence qui est assumée par les usagers et les usagères, est-ce que c'est un conseil d'administration, un conseil d'établissement ou... ce n'est pas un conseil d'administration, mais est-ce que c'est un conseil idéal? Moi, je... Tu sais, dans le cadre actuel, est-ce que les gens...
D'abord, j'apprécie, vous commencez à parler d'internes et externes, hein? Ça veut dire que finalement même les externes ne sont pas nécessairement indépendants, et ça, je pense qu'on va arriver à une conclusion assez rapide de ce côté-là. Il peut y avoir différents intérêts, puis ces engagements-là ne seront pas nécessairement à l'encontre des intérêts de la population. Et c'est un peu... Quand on mentionne: Autant à l'interne, il peut y avoir, oui, des intérêts, mais ces intérêts-là ne sont pas nécessairement à l'encontre de la clientèle étudiante puis...
Et, bon, d'avoir le modèle idéal aussi bête, je veux dire... Puis je pense que votre adjoint se rappelle sûrement de son rapport. Je reprends un élément qui a été publié le 29 octobre 1990: «Ainsi, dans une structure bicamérale, où le conseil d'administration comporte nombre de personnes qui ne travaillent pas à l'université, celles-ci ont une connaissance beaucoup moins bonne des dossiers et, partant, tendent naturellement à accepter le point de vue de l'Exécutif...» Donc, dans ce contexte-là, je pense que c'est carrément M. Pigeon qui a inspiré mes collègues, et donc...
Une voix: ...
M. Parent (Réjean): Non, mais, c'est pour ça, j'ose croire qu'il va appuyer notre proposition puis il va la faire cheminer.
Mais donc... Non, mais, dans le fond, comment faire en sorte qu'effectivement s'installe cette collégialité-là, on est d'accord avec vous, on ne doit pas percevoir en opposition interne et externe. Au contraire, on doit viser la création d'une certaine synergie entre les internes et les externes, s'assurer... Ce qu'on a vécu à l'UQAM, finalement, c'est qu'il y a du monde qui ne connaissent pas les affaires qui étaient... je ne veux pas relire le texte, mais finalement, en bout de course, ils ne comprenaient pas nécessairement tout ce qui les entourait, puis dominés par le haut dirigeant. Donc, c'est essayer d'avoir un certain équilibre. Et je pense que, même avec les internes, ils ne sont pas tous, je dirais, de la même orientation, de la même convergence. Ça fait que, là aussi, il y a une diversité qui contribuerait à l'équilibre.
Mais que, là, aujourd'hui, on vous dit: L'idéal, ce serait d'avoir une majorité d'internes; vous me dites: 50-50, c'est-u vivable?, moi, je pense que, si déjà on est en quête d'équilibre, je ne pense pas qu'il faille embarquer dans une proportionnelle, de dire: Bien, il y a tant de monde, on en met tant. Mais en même temps c'est difficile de dire à du monde: Écoute, vous êtes tellement petits que vous n'existez pas. Ça fait que je pense que le droit de cité est bon pour tout le monde.
Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci. Puis ça... M. Parent, je vous reconnais, je reconnais votre diplomatie.
Vous avez parlé de l'importance d'avoir des observateurs et des observatrices, que ce soit dans les universités... Moi, je veux tout de suite vous rassurer: Encore là, je n'adhère pas au rapport Toulouse, qui dit que la présence d'observateurs, observatrices n'est pas souhaitable. Normalement, c'est dans un règlement de régie interne que c'est déterminé, mais je pense que, tant pour les cégeps que pour les universités, les observateurs, le conseil d'administration peut en tout temps s'adjoindre des observateurs. Et habituellement ces observateurs sont là sur demande, mais doivent être présents, et je pense que le projet de loi n'empêche pas ça d'aucune façon.
Vous parlez, dans votre mémoire sur les collèges, d'un modèle d'autocontrôle collégial. Ça veut dire quoi ça, de l'autocontrôle collégial?
n(16 h 50)nM. Parent (Réjean): On va demander à ceux qui se contrôlent dans les collèges de se donner de l'élan. MM. les présidents.
M. Bérubé (Bernard): Oui, ça fait référence à...
Le Président (M. Marsan): Alors, c'est M. Bérubé. C'est ça? D'accord.
M. Bérubé (Bernard): Alors, ça fait référence à ce que nous mentionnions au tout début, c'est-à-dire à la gestion participative et à la gestion collégiale. Alors, c'est dans ce sens-là que ça a été amené et dit.
Alors, je voudrais juste revenir sur une chose, Mme la ministre, si vous me permettez. Oui? Lorsque vous dites qu'il y a un certain nombre de choses effectivement qui sont... que vous nommez qui sont de régie interne, bon, question de huis clos, procès-verbal, observateurs, etc., je peux vous témoigner que j'ai siégé sur quelques conseils d'administration, et il a fallu parfois, pendant des années, demander, par exemple, à ce qu'il y ait ne serait-ce qu'un plan de travail, là, bon, on rentre même dans... même des bilans qui soient faits, parce que ce n'était pas fait. On demandait à mettre fin au huis clos, qui était continuel dans certains collèges, à pouvoir avoir une période de questions, à pouvoir aussi laisser les observateurs, observatrices assister aux assemblées, et il y a temps et énergie qui ont été consacrés parfois.
Alors, on se dit: Tant qu'à revoir effectivement le fonctionnement des conseils d'administration, est-ce que ces questions doivent demeurer des questions de régie interne ou est-ce que le projet de loi ne pourrait pas préciser certains de ces éléments de régie interne?
Le Président (M. Marsan): Oui, Mme la ministre.
Mme Courchesne: Un tout petit commentaire. Je saisis bien le sens. Je ne conteste pas du tout ce que vous nous dites, probablement qu'il y a beaucoup d'améliorations à apporter à certains endroits. Ce que j'entends, ce que je comprends, c'est que vous souhaiteriez que le projet de loi soit plus précis sur certains de ces aspects-là. Parfait. Merci.
Le Président (M. Marsan): Alors, je vais maintenant reconnaître le député de Charlesbourg. M. le député.
M. Pigeon: Merci, M. le Président. Je vais, à mon tour, souhaiter la bienvenue, là, aux personnes qui représentent le Centrale des syndicats du Québec et féliciter M. Parent d'avoir bien fait ses devoirs. Et...
M. Parent (Réjean): Je n'ai pas tout lu, M. Pigeon.
M. Pigeon: Hein?
M. Parent (Réjean): Puis je n'ai pas tout lu.
M. Pigeon: Oh, mon... Oui, puis il y en aurait beaucoup à lire, j'en suis convaincu, ayant moi-même beaucoup écrit à ce sujet.
Et, pour dire les choses un peu rapidement, je pense que mon expérience personnelle peut avoir un certain intérêt, parce que, je vous l'ai dit tout à l'heure, j'ai représenté les professeurs au conseil d'administration de l'Université Laval pendant six ans et j'ai été recteur pendant quatre ans et demi, et donc ce qui me donne une diversité, là, de visions, si je puis dire. Et on a parlé tout à l'heure du conseil d'administration idéal, puis je vais dire quelques mots puis je vais vous demander votre avis sur ce que je vais vous dire.
Ce qui est certain, c'est que, depuis, je dirais, 20 ans, depuis une vingtaine d'années, la vision que collectivement les sociétés occidentales ont de la gouvernance, ça a changé. Et ça, je pense que c'est fondamental. Puis je pense que le rapport Toulouse, c'est un élément, mais le rapport Toulouse est un élément de réflexion sur la saine gouvernance. Il s'est formé l'Institut sur la gouvernance, donc M. Toulouse en fait partie. Il y a, à Québec, un collège des administrateurs de société, et maintenant on enseigne aux gens comment être un administrateur, comment être un membre du conseil d'administration.
Ce à quoi je veux en venir donc, c'est que, de plus en plus, les gens qui sont membres de conseils d'administration se rendent compte de plus en plus de l'importance de leur rôle, et du poids qu'ils doivent avoir, et du fait qu'ils ne sont pas que des gens qui vont appuyer la direction dans ses projets, mais qui vont vraiment être des chiens de garde, qui vont réfléchir, qui vont poser des questions. Et donc, en ce sens-là, le conseil d'administration idéal, moi, je vous dirais, c'est celui où toutes les personnes présentes prennent les décisions dans le meilleur intérêt de l'institution toujours, en faisant abstraction de leurs intérêts personnels ou de l'intérêt des groupes qu'ils représentent, et un conseil d'administration où il y a une grande diversité de points de vue et où, je dirais, le regard externe est très présent pour pouvoir jeter un éclairage différent. On sait tous que le regard externe, c'est quelque chose d'important.
Et donc on se retrouve avec un conseil d'administration qui va prendre les bonnes décisions, mais, pour prendre les bonnes décisions, il doit aussi avoir la bonne information, il doit avoir la diversité de points de vue, et c'est là qu'intervient la transparence qui est expliquée dans le projet de loi, les consultations qui sont exigées, et ainsi de suite. Et donc, si tout cela est bien organisé, si tout cela est bien fait, moi, je pense que les grands principes dont vous parlez, qui sont, je dirais, le respect des gens, la collégialité, etc., en fait ça va se vivre, parce que toutes les personnes vont vouloir s'assurer qu'elles prennent les meilleures décisions pour l'institution. Et, en ce sens-là, tous ont une grande responsabilité dans cet intérêt, dans la prise de décision.
Et, moi, je pense ? mais je vais vous écouter là-dessus ? je pense que le projet de loi, dans son ensemble, va vers ça. Il y a peut-être des améliorations à faire, et Mme la ministre est certainement ouverte à écouter, là, tous les points de vue qui vont s'exprimer, mais il y a un mot clé dans tout ça, c'est l'équilibre, l'équilibre des points de vue, la diversité et, au maximum, aussi diminuer les conflits d'intérêts possibles. Et donc il me semble que le projet de loi...
Et en plus on a parlé... J'ajouterais un dernier mot sur l'autonomie des universités. C'est un mot qu'on entend souvent, et, dans le projet de loi évidemment, pour ce qui est des universités, là, les membres qui ne viennent pas de la communauté universitaire ne sont pas nommés par la ministre, sauf pour une personne, je pense, et donc il y a quand même une grande autonomie.
Alors, moi, je voudrais voir. Dans ce que je viens de dire, est-ce qu'il y a des choses qui vous choquent? Est-ce que vous pensez que le modèle qui est préconisé, là, n'est vraiment pas adapté à une saine gestion?
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Parent.
M. Parent (Réjean): Bien, vous ne me choquez pas, vous ne me choquez pas, M. Pigeon. Mais, dans le fond, si je prends votre prémisse que des individus sont au-dessus, je veux dire, de clans d'appartenance, si je peux m'exprimer ainsi, et c'est l'intérêt suprême qui gouverne, on devrait prêter cette même indépendance ou cette même capacité de s'élever à celles et ceux qui sont à l'interne comme celles et ceux qui sont à l'externe, ce qui nous met dans une situation où on peut les garder encore plus responsables.
Parce que, là, vous m'amenez à vous relire un peu. Vous parlez quand il y a une minorité qui est non élue. C'est assez bon, le paragraphe: «Cette considération est fondamentale ? quand il y a une minorité qui... quand les élus internes, c'est-à-dire ceux qui siègent au conseil d'administration, sont en minorité ? démocratie et collégialité devant être préservées car il y a risque majeur que la "déresponsabilisation" qui suivrait la perte de la démocratie amène une démobilisation des forces vives de l'université.» Je pense que c'est encore vrai aujourd'hui. C'est vrai qu'on a évolué, qu'on connaît... Mais, moi, je pense que la dynamique, un organisme vigoureux, bien impliqué, ça suppose une mobilisation de l'ensemble de ses ressources. Donc, dans un contexte de conseil d'administration qui serait idéal, bien, je pense qu'on devrait retrouver l'ensemble des composantes, que ce soit à l'université ou que ce soit au collège. Je pense que les gens doivent arriver effectivement à s'élever au dessus de leur intérêt, mais on doit leur reconnaître ça, autant qu'ils soient à l'interne qu'à l'externe. Et je pense que, plus il y a de gens... Tu sais, dans d'autres entreprises, on va miser sur des gens qui connaissent l'entreprise, qui savent comment l'opérer, qui ont une certaine... Ils vont pouvoir apporter un point de vue externe.
D'ailleurs, on ne dit pas: Il ne doit pas y avoir de point de vue externe, hein? On n'a pas dit: Seulement que des internes. Mais on pense qu'on doit miser une bonne part, mobiliser aussi des ressources internes. Mais, ceci dit, je ne suis pas choqué encore.
Le Président (M. Marsan): M. le député de Charlesbourg.
n(17 heures)nM. Pigeon: Merci, M. le Président. Le texte que vous citez, que j'ai écrit avant d'être membre du conseil d'administration de l'université, j'ai un petit peu de vécu depuis ce temps-là. Et ce que je peux vous dire, c'est que ce qui est intéressant, il me semble, dans un conseil d'administration ? et là, encore une fois, là, je parle avec l'expérience ? ce qui est intéressant, c'est la diversité des points de vue. Et il y a eu une discussion ce matin, Mme la ministre en a fait état, là: il y a des gens qui croient qu'un conseil d'administration, finalement ce ne sont que des gens d'affaires. Moi, je pense que, si un collège ou une université est bien implanté dans son milieu, il va y avoir des représentants de toute la collectivité, qu'il s'agisse de l'interne et de l'externe, mais qu'il s'agisse à l'externe, par exemple, du milieu social, du milieu culturel, oui, du milieu des affaires, mais de tous les gens qui sont en interaction. Et donc il y a une clé dans un bon conseil d'administration. Et, si vous parlez des gens d'affaires, les gens d'affaires, eux, ils vont vous dire bien simplement: On ne veut pas nécessairement quelqu'un qui connaît bien l'entreprise dans un conseil d'administration d'affaires, on veut quelqu'un qui va, en bon Québécois, nous challenger et qui va être capable de nous pousser dans nos retranchements, et on aime bien avoir une diversité de points de vue, donc d'avoir des gens de divers horizons.
Un bon conseil d'administration, c'est des gens qui savent poser les bonnes questions, mais qui ont à coeur l'institution. Et donc, moi, je ne vois pas, dans le projet de loi actuel, qu'on puisse ne pas faire ça. Maintenant, on pourrait... on peut éventuellement faire de mauvais choix ? ce serait dommage. Quand on choisit les membres de conseils d'administration, je pense qu'il y a là une clé, et je pense que, dans le projet de loi, donc, on demande qu'il y ait des profils, et ainsi de suite. Donc, le projet de loi va dans une direction intéressante parce que veut faire en sorte que les gens qui sont au conseil d'administration représentent des points de vue variés. Et ce qui est important aussi, et je le répète, c'est que les gens du conseil d'administration, s'ils veulent prendre les bonnes décisions, et là je pourrais citer d'autres écrits que j'ai préparés il y a déjà quelque temps... je pense que c'est important que les gens du conseil d'administration aient la bonne information. Et donc, moi, je vous dirais là-dessus, là: Est-ce que vous ne croyez pas qu'une diversité de points de vue et de gens externes bien choisis, ça peut être très éclairant pour un collège ou une université?
Le Président (M. Marsan): M. Parent.
M. Parent (Réjean): Bien ça, à ce moment-là, la première question, tu sais, c'est vrai que, si on avait dit: Aucun intervenant externe, aucun administrateur externe, là on serait à découvert. On n'a pas remis en question cette diversité. Je vous dirais même qu'on souhaite cette diversité à l'interne également. Ça a été le cri du coeur de mon collègue professionnel qui dit: Prenez en compte la diversité de la communauté, toutes catégories. Et, moi, dans ce sens-là, je veux dire, l'enrichissement d'avoir un bon équilibre... Il y a des mots sur lesquels on va se rejoindre: Comment est-ce qu'on matérialise cet équilibre-là? Quelle allure ça prend dépendant des milieux?
Parce qu'en même temps, des fois, on a des mantras où là c'est une dynamique. Et les administrateurs externes, là, c'est la clé... Une majorité externe, ça met l'institution à l'abri de. Mais, à notre connaissance, là... Mais, comme c'est vous l'universitaire, si vous me dites qu'il y en a, des études, qui démontrent que les sciences exactes de la gestion nous démontrent hors de tout doute que ça prend une majorité d'externes pour être assurés qu'on va avoir un conseil d'administration idéal, bien, à notre connaissance, on n'a pas un point de vue qui va dans cette direction-là, un point de vue lourd puis un point de vue hors de tout doute, là. Ça fait que je pense que c'est dans ce sens-là, là, de la quête de l'équilibre, où se trouve l'équilibre. Et c'est pour ça que je trouvais que la question de la ministre est une question à un million.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Trois-Rivières.
Mme St-Amand: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bonjour. Merci d'être là. Effectivement, je pense que c'est un contexte de discussion qui est très riche. Vous avez parlé de la parité dans votre mémoire. Évidemment, vous savez que, pour notre gouvernement, la parité, c'est une priorité. Vous en parlez en disant que vous vouliez aussi la parité avec les membres externes... les membres externes... entre les groupes. Comment vous voyez ça à l'interne, dans les institutions, la parité?
M. Parent (Réjean): Là, on parle de la parité des genres, O.K., puis ainsi de suite.
Mme St-Amand: Oui, tout à fait.
M. Parent (Réjean): On parlait de la composition. À un moment donné...
Mme St-Amand: Oui, je m'excuse. La parité hommes-femmes, excusez-moi.
M. Parent (Réjean): Donc, la parité des genres. Il y a une chose qu'on voit, là: il faudrait s'assurer que, je dirais, cette condition-là ne soit pas seulement que l'oeuvre des internes ou de la responsabilité des internes. Je pense que ça s'impose, externes- internes. Pour siéger dans les organismes internationaux, il arrive souvent, tu sais ? puis Nord-Sud ? que la parité, c'est le Nord qui doit l'assumer parce que le Sud n'est pas rendu à la parité. Mais, comme on est tous au Nord, je présume que ça va être aussi vrai pour les internes que pour les externes.
Mme St-Amand: Est-ce que vous iriez jusqu'à dire...
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Trois-Rivières.
Mme St-Amand: Ah! je m'excuse, M. le Président. Est-ce que vous iriez jusqu'à dire que cette parité-là devrait être dans chaque groupe aussi: un étudiant, une étudiante, un enseignant, une enseignante?
Le Président (M. Marsan): M. Parent.
M. Parent (Réjean): On n'est pas dans le mur-à-mur, mais je pense qu'il faut tendre, au sein du conseil... Parce que là on peut s'imposer des règles très spécifiques puis pour tout le monde, mais, je ne sais pas, peut-être que ça va devenir impraticable. Parce que, quand il y a une seule personne dans un groupe donné, je présume qu'on ne demandera pas, là, une personne qui comporte les deux sexes.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parent (Réjean): Ça fait que, dans ce sens-là, il faut trouver, je pense, l'équilibre à l'intérieur. Puis il y a peut-être... Bon.
Puis, je le dis, je n'ai pas la recette exacte, je veux dire. Les règles qu'on s'est imposées dans d'autres organismes, il y a une certaine alternance aussi; une année donnée, c'est notre organisation, je veux dire, qui doit remplir la commande puis, l'année suivante, c'est une autre organisation. Donc, ça permet aussi, là, une certaine alternance puis à l'intérieur... dans le respect de chacune des organisations. Moi, je pense qu'il y a un défi organisationnel là, là, mais pas irréalisable, et surtout pas irréalisable, puis il faut... Parce que, bien des fois, là, la tendance, c'est de voir des inconvénients avant d'avoir commencé à le pratiquer. Mais je pense que l'exemple vient de haut avec le gouvernement, il faut que ça se traduise là aussi.
Le Président (M. Marsan): Merci. Alors, ceci termine l'échange avec le parti ministériel. Nous allons maintenant procéder aux échanges avec l'opposition officielle, et je vais reconnaître la députée qui est responsable des dossiers de l'enseignement supérieur, Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Là, ça fait des échanges plus longs, là; je commençais à avoir hâte que mon tour arrive. Bonjour, M. Parent, ainsi que les personnes qui vous accompagnent. Je pense que votre point de vue est important et intéressant.
Je vais me permettre, puisqu'on a un peu plus de temps, peut-être juste deux remarques d'abord, compte tenu de ce qu'on vient d'entendre, puis ensuite j'ai des questions plus précises à vous poser.
Mes deux remarques sont les suivantes. On dit, depuis le début de ces auditions, qu'il y a des risques de conflit d'intérêts de certains membres internes qui siégeraient sur des conseils d'administration. Moi, je souhaiterais qu'on fasse une réflexion un peu en profondeur sur ce qu'on appelle un «conflit d'intérêts». Parce que souvent c'est un mot qu'on utilise un peu facilement et un peu vite.
Par exemple, un professeur qui siégerait sur un organe décisionnel et qui plaide pour que l'on conserve de la recherche en philosophie, ce n'est pas parce qu'il est philosophe qu'il est en conflit d'intérêts. S'il en parle et s'il plaide pour ça, c'est parce qu'il s'y connaît, et c'est un apport. Donc, on n'est pas en conflit d'intérêts dès lors qu'on est dans un champ de notre compétence. On est en conflit d'intérêts si on a un intérêt personnel par rapport, par exemple, à un contrat particulier. Quelqu'un qui siégerait sur un C.A. et puis qui est propriétaire, je ne sais pas, moi, d'une maison de fournitures et qui s'organise pour que l'université aille chercher ses fournitures à cet endroit-là, c'est un conflit d'intérêts. Mais je veux qu'on fasse attention pour ne pas l'étendre à trop de choses parce que, sinon, on risque de vider les conseils d'administration de gens tout simplement qui s'y connaissent et qui plaident pour les bonnes causes.
Autre remarque aussi, un peu, d'introduction. La question n'est pas de savoir ici si les membres externes ont des compétences ou non, ou s'ils peuvent apporter un regard critique de «challenge» même, pour reprendre les termes de mon collègue de Charlesbourg, la question est de savoir: Est-ce que le rôle est important ou est-ce que le rôle doit être prépondérant? Ça, c'est au coeur des discussions que nous avons: «important» ne veut pas dire forcément «prépondérant». Jusqu'où ce regard des membres externes doit-il être important?
Alors, ça m'amène à peut-être ma première question, parce qu'une chose qui m'a étonnée un peu, c'est que, quand vous parlez des collèges, vous dites que la proportion majoritaire devrait être accordée aux représentants et représentantes de l'interne, hein? Donc, vous dites pour les collèges la même chose que ce que vous allez dire pour les universités dans l'autre mémoire. Puis, de fait, les collèges n'ont pas demandé ça. Ils n'ont pas... En tout cas, dans ce qu'on a eu jusqu'ici, ce qu'on est venu plaider, ce n'est pas le fait qu'il y ait plus de membres internes que de membres externes, mais c'est qu'on ait plus de pouvoirs sur le choix des membres externes. Entre autres, dans le projet de loi, sur les 11 membres externes, sur les 17 au total, il y en a 11 externes et il y en a huit qui seraient nommés par la ministre et trois par le collège. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus, sur, d'une part, la nécessité absolue d'avoir plus de gens de l'interne, mais aussi sur le fait que la ministre nomme huit personnes, ce qui semblait, pour les collèges qu'on a entendus, poser une difficulté.
n(17 h 10)nLe Président (M. Marsan): Alors, M. Parent? Alors, M. Bérubé, vous allez prendre la parole?
M. Bérubé (Bernard): Oui. À propos, bon... Effectivement, c'est intéressant lorsque vous abordez la question de la représentation externe avec les notions de «prépondérant» et «important». Je pense qu'il y a effectivement, là, une nuance importante, et... Voilà.
Par rapport à la nomination, alors, il est dit, à l'article 8a: «11 membres indépendants, dont huit nommés par le ministre et trois nommés par le conseil d'administration selon son règlement intérieur.» Je vous ai mentionné, en début, qu'on interrogeait la ministre, à savoir si les huit nominations qu'elle comptait faire, elle les ferait à partir d'une liste qui lui serait transmise par le conseil d'administration. Et, si c'est le cas, bien, à ce moment-là, pourquoi ne pas permettre au conseil d'administration de pouvoir nommer les membres de l'externe dans la totalité? Parce qu'à partir du moment où il y a cette procédure-là, pourquoi effectivement les conseils d'administration... On peut laisser effectivement le privilège à la ministre de les nommer mais à partir d'une liste qui serait établie par les conseils d'administration. Or, voilà notre position là-dessus.
Si les collèges ont une autre position que la nôtre, je ne pense pas qu'en termes de nomination ce qu'ils demandent soit différent de nous, mais nous n'en faisons pas une question prépondérante. Pour nous, la représentation à l'interne demeure une question prépondérante.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Donc, je comprends bien que, pour vous, dans des conseils d'administration de collège, il devrait y avoir une majorité de gens de l'interne.
M. Bérubé (Bernard): Oui.
Mme Malavoy: Je comprends. Du côté des universités, vous abordez ça dans le mémoire, concernant la loi n° 38, vous dites également qu'il doit y avoir une proportion majoritaire de gens à l'interne.
Je vais vous poser la question un peu différemment. Les universités actuellement ont des régimes à cet égard qui sont variés: il y a cinq universités dont les conseils d'administration, depuis longtemps, sont composés à majorité de membres externes. Et il y en a un certain nombre d'autres... Puis là je mets à part le réseau de l'université du Québec qui a donc des particularités, mais il y en a d'autres, comme l'Université de Sherbrooke que je connais bien, qui a, depuis toujours, une majorité de membres internes.
Est-ce que vous concevez que les universités puissent avoir de la liberté de ce point de vue là, c'est-à-dire... Bon, on va les entendre bientôt, là, elles ne sont pas encore venues nous parler, mais ce dont je vous parle, je sais que c'est quand même dans les discussions, c'est-à-dire que les universités souvent vont dire: Nous, ce qu'on veut, c'est éviter d'avoir un modèle qui s'applique à tout le monde de la même manière. L'Université McGill et l'Université de Sherbrooke n'ont pas les mêmes modes de fonctionnement, ont, les deux, des comptes à rendre aux citoyens du Québec mais n'ont pas les mêmes modes de fonctionnement, n'ont pas la même histoire, n'ont pas les mêmes traditions, n'ont pas la même culture qui les inspire, etc., et donc elles ont des modes différents, et souvent les universités vont préférer qu'on leur permette de conserver des particularités. J'aimerais ça vous entendre là-dessus, sur ce respect éventuel, là, des particularités, plutôt qu'une formule qui soit automatiquement la même pour tout le monde.
Le Président (M. Marsan): M. Parent.
M. Parent (Réjean): Bon. Après avoir plaidé la diversité, dans ce sens-là, je disais qu'on ne peut pas nécessairement avoir un modèle mur à mur, il faut prendre en compte certaines spécificités. Ça fait que, de ce côté-là, je dirais, l'esprit qui nous anime va dans cette direction-là.
Pourquoi on a dit: Pour l'ensemble, une majorité? Fort probablement, nous autres aussi, comme organisation, nos fédérations, un peu occultés par toute la dynamique de l'UQAM, ce qui ressortait du rapport du Vérificateur général, et... C'est que, dans le fond, si on manque de responsabilité à l'interne, je veux dire, on peut entraîner des crashs financiers assez majeurs. Et on ne se contera pas d'histoire, l'UQAM, là, c'est... Je pense qu'il y a un règlement aujourd'hui, mais on n'est pas encore au bout de nos peines. Puis, à partir du moment où on crée des pressions économiques indues sur un milieu, ça fait que, dans ce sens-là, c'est sûr que... comme s'assurer que le conseil d'administration ait une bonne connaissance, ne soit pas dominé ou inféodé par les hauts dirigeants.
Un coup que j'ai dit ça, vous me dites: Regardez, il y a des histoires différentes, il y a des fonctionnements différents, y a-tu moyen de regarder ça différemment? Dans l'absolu, là, de dire qu'il y a juste une manière de faire: non. Puis on peut regarder différemment, mais je pense qu'il faut s'éviter... Et là, tu sais, après avoir un peu pris un peu différentes directions... l'ancien recteur de l'Université Laval, je reconnais quand même, là, qu'il y a un équilibre à créer, il faut trouver la bonne façon de faire. Mais, moi, je pense que les universités doivent être plus transparentes. Je comprends l'indépendance, mais l'indépendance, ça fonctionne quand tu es indépendant puis que tu ne dépends de personne, puis que ce n'est pas les deniers publics, je veux dire, qui font vivre l'université. Et, dans ce contexte-là, je pense qu'il y a une nécessité de reddition de comptes, il y a une nécessité de transparence, mais être en mesure aussi de se donner toutes les garanties qu'on va avoir, autour du conseil d'administration, les bonnes personnes qui vont pouvoir mettre le doigt sur les bobos puis sonner l'alarme avant qu'on soit dans le mur. Parce que je pense à l'UQAM: elle a sonné quand on est rentrés dans le mur; ça aurait été mieux avant. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Marsan): Oui, Mme Racine, vous voulez commenter?
Mme Racine (Marie): S'il vous plaît, oui. Particulièrement pour les universités, ce qui est particulièrement important, c'est qu'il y ait une présence de toutes les catégories de personnel, comme tel. Il faut savoir que, dans les universités, ni les... Parce que, tout à l'heure, Mme la ministre parlait au niveau des observateurs puis on se disait: Oui, on peut s'adjoindre des observateurs occasionnellement, quand on en a besoin. Mais le personnel de soutien puis le personnel professionnel, dans les universités, sont considérés comme des observateurs, et donc ne sont là qu'au bon vouloir... ou on accepte qu'ils soient là pour... C'est très inégal, comme tel. Il y a des universités, comme à l'UQAT par exemple, qu'il y a une personne qui est observatrice, qui représente et le soutien et les professionnels. Dans d'autres universités, il y en a deux, observateurs. Mais il y a des universités que je représente qu'il n'y a aucun personnel de soutien au niveau des conseils d'administration.
Donc là, ce serait important d'essayer de garantir une place pour chacune des catégories de personnels, et en particulier le personnel de soutien puis les professionnels parce qu'ils n'ont pas droit de vote dans les conseils d'administration des universités, contrairement à ce qui se passait antérieurement, avant le projet de loi aussi, dans les collèges, parce qu'et le soutien et les professionnels ont droit de vote dans les collèges... avaient droit de vote dans les collèges. C'est un peu pour ça que... On est ici un peu pour demander... On voudrait que ça reste comme c'était au niveau des collèges; mais, dans les universités, on aimerait bien que ça devienne comme c'était dans les collèges avant les projets de loi.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Oui. Je voudrais juste que vous me précisiez une chose, voir si j'ai bien compris. Est-ce que vous me dites que, dans les universités, les personnels professionnels et de soutien n'ont pas de droit de vote dans les C.A., nulle part? C'est ça que vous me dites?
Mme Racine (Marie): Oui. Bien, moi, dans les universités que...
Le Président (M. Marsan): Mme Racine.
Mme Racine (Marie): Excusez. Dans les universités que je représente, j'ai fait le tour, et puis, non, ils sont là observateurs seulement.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Et ce que vous dites, c'est qu'il faudrait tout au moins...
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: ... ? merci ? il faudrait tout au moins... Moi, je ne suis pas plus disciplinée non plus, là. Il faudrait tout au moins que ces gens-là, dites-vous, aient une véritable présence avec le droit de vote.
Mme Racine (Marie): Exactement, oui.
Une voix: ...
Mme Malavoy: Il y en a trois qui l'ont?
Le Président (M. Marsan): Oui. Alors, je vais maintenant reconnaître le député de Borduas. M. le député.
M. Curzi: Merci, M. le Président. Bon après-midi. M. Parent, comme je veux profiter de votre sentiment amoureux aussi, je vais exprimer ce que j'essaie de... Moi, je... parce que je n'ai pas vraiment d'expérience dans cet univers-là, mais ce que je comprends, c'est que, dans le fond, là, qu'on soit interne ou externe, il y a un mensonge: tout le monde a toujours un intérêt. On défend toujours un intérêt, tout le monde a des intérêts, hein, on ne se contera pas de mensonge, et c'est très bien comme ça. C'est très bien que la collégialité ait un intérêt puisque l'intérêt supérieur de tous les intérêts, c'est qu'il faut que ça fonctionne. Il faut qu'on trouve une manière de conjuguer nos intérêts individuels pour arriver à ce que ça fonctionne puis que ça fonctionne le mieux possible pour tout le monde.
Donc, ce que je comprends, c'est qu'on cherche une sorte d'équilibre. Puis, dans le fond, on se retrouve avec des gens qui ont tous des intérêts et qui ont aussi en même temps des préjugés. Il y a un préjugé, que je partage un peu, qui est de dire: Oh! voilà, la collégialité a un certain préjugé contre le milieu, qui pourrait être un milieu des affaires. Et, à l'inverse, ce qu'on sent dans le projet de loi, ou ce que j'entends, c'est qu'il y aurait dans le projet de loi comme un préjugé sur le fait que, quand on fait partie de la collégialité, on a des intérêts qui sont plus importants. Dans le fond, ce qu'on cherche, c'est: Quel va être l'équilibre entre l'ensemble de ces intérêts-là puis comment faire pour dénouer les préjugés qu'on a les uns vis-à-vis des autres, si j'ose dire?
Puis là, dans ce sens-là, je me dis... quand je vous entends, je me dis: Pourquoi vous ne la rejetez pas complètement, cette loi-là? C'est donc que vous pensez ? ou, là, vous me corrigerez, hein? ? qu'il y a moyen peut-être d'arriver à une sorte d'équilibre entre les parties dans la mesure où vous conservez, vous, la majorité. Vous vous dites: Là, il y a un intérêt supérieur qui est connu depuis longtemps, qui fait qu'on pourrait définir mieux les gens qui vont venir de l'extérieur et qu'on pourrait définir des profils qui vont nous permettre d'être certains que la mission fondamentale que la collégialité représente va être enrichie de la part des autres.
n(17 h 20)nDes voix: ...
M. Curzi: C'est intéressant comme... Mais, dans un sens...
Mme Courchesne: ...
M. Curzi: C'est bon, hein, vous êtes... madame... Vous voyez, je suis en train d'avoir l'amour de la ministre...
Le Président (M. Marsan): La parole est au député de Borduas.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Curzi: ...alors que c'était votre amour à vous que je souhaitais, mais en tout cas... On est mêlés. Il doit y avoir des intérêts qui ne sont pas clairs en moi, mais...
Le Président (M. Marsan): Alors, M. le député de Borduas, vous avez la parole.
M. Curzi: Oui. Donc, maintenant... Donc, si vous ne rejetez pas le projet de loi, ça veut dire qu'en même temps, si vous satisfaisez à un certain nombre de vos demandes...
Une voix: Satisfaites.
M. Curzi: ...vous y voyez des intérêts. Et ce que je comprends, c'est que ce que vous trouvez intéressant dans ce projet de loi là, c'est qu'effectivement il y a une ouverture sur plus de transparence, plus de responsabilités et donc, en principe, une meilleure démocratie puis une meilleure lucidité, et on est... C'est ça, hein? Est-ce que ce portrait-là coïncide un peu avec votre position?
Le Président (M. Marsan): M. Parent.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parent (Réjean): Non... Bien, un, établir clairement, là, quand vous dites une majorité... Déjà, quand on parle de l'interne, en soi, là, on regarde ça comme si c'était un tout monolithique, mais l'interne, il n'est pas monolithique, il est diversifié lui-même: du personnel dirigeant, du personnel salarié. Donc, dans ce contexte-là, on n'est pas dans... tu sais, la majorité. Si vous avez la majorité en parlant de la CSQ, ce n'est pas la... Donc ça, pour être bien clair de ce côté-là, l'équilibre...
Moi, j'ai bien apprécié la question de Mme Malavoy quand elle dit: Conflit d'intérêts. Il faudrait peut-être revenir au conflit d'intérêts, parce que, c'est vrai, on a tous des intérêts, mais je pense que l'intérêt suprême, qui est l'objectif gouvernemental de réunir les gens autour de cette table-là, c'est qu'il y ait l'intérêt du bon fonctionnement du collège ou de l'université et de faire en sorte que les jeunes puissent grandir au Québec. Et, dans ce sens-là, l'expertise des uns et des autres...
Parce que, jusqu'à présent, là, je ne sais pas... Parce que ça fait deux fois qu'on revient... C'est comme si on crachait sur la communauté des affaires, là, puis il me semble qu'on n'a rien dit contre, nous autres, là. Je n'ai rien dit contre le...
Une voix: Non...
Une voix: ...pas contre la communauté des affaires...
M. Parent (Réjean): Non, non, mais... Ce que je veux... Je pense qu'on ne conteste pas, je veux dire, la diversité, la participation de cette diversité dont on parle. J'expliquais un peu le raisonnement qui nous anime, pourquoi on pense que l'interne... En tout cas, on doit avoir suffisamment de gens qui sont au fait des dossiers. Malheureusement, là, je... Encore là, je m'excuse de contredire M. Pigeon, mais il y a des rapports qui me sont faits, là. Je n'ai pas d'étude scientifique, ça fait que je vais y aller avec un bémol, mais des rapports qui nous sont faits des participants externes dans des conseils d'administration, ils ne sont pas rendus au stade de ce qu'il a décrit aujourd'hui.
Il y a des gens qui arrivent de l'externe, qui s'assoient au conseil d'administration, puis ils ouvrent leur enveloppe à ce moment-là, là. Ça fait que ça ne veut pas nécessairement dire qu'ils étaient fin prêts pour les délibérations, et fort probablement que ça fait partie des gens des années quatre-vingt-dix, ce monde-là, qui n'ouvrent pas leurs enveloppes puis qui sont dominés, pas par l'exécutif, mais par le directeur général du collège ou le recteur de l'université.
Mais la quête des équilibres et faire attention... Moi, je pense que Mme Malavoy a mis le doigt dessus. Le conflit d'intérêts, c'est quand tu te sers de ton poste pour en tirer un bénéfice personnel au détriment de la communauté. Là, tu es en conflit d'intérêts, puis tu as intérêt à aller faire ton tour ailleurs. C'est... c'est...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Marsan): Merci. Alors, je vais reconnaître maintenant la députée de Champlain.
Mme Champagne: M. Parent, madame, messieurs. Alors, après la sortie grandiose de mon collègue de Borduas, je me dis qu'il faut tendre vers l'équilibre. Et ce que j'entends depuis le début des auditions, ce que j'entends... ou ce que je vois, suite à la lecture des nombreux mémoires qu'on a reçus, là, près de 50 mémoires, il faut tendre vers l'équilibre. Alors, les intentions derrière le projet de loi ? puisqu'il y en a toujours, on ne fait pas un projet de loi quand on n'a pas une intention, du moins je ne crois pas ? c'est d'en arriver à donner à l'externe une place plus grande, toujours avec un objectif de transparence et autre, et on ne sent pas que c'est ça qui rejoint les gens, là. Ce qu'il faut aller... ou vers quoi il faut aller, c'est vers le fait, et j'en suis convaincue, même en vous entendant, qu'il faut chercher cet équilibre-là pour ne pas ni mésestimer les uns ni surestimer les autres, mais dire qu'autour d'une table il faut avoir les meilleures personnes pour prendre les meilleurs intérêts des gens qui ont à aller se chercher une formation, et on a encore un bon bout de chemin à faire.
Mais j'en arrive à ma question, sur laquelle je n'ai pas eu beaucoup d'écho de votre part, c'est sur la création de trois comités, là, que le projet de loi suggère. On a eu beaucoup de commentaires là-dessus, et ces trois comités-là semblent coûter un bras à ceux qui vont devoir les mettre en place. On parle du comité de gouvernance et d'éthique, du comité de vérification, puis du comité de ressources humaines. On a eu beaucoup de commentaires en disant: Ce n'est pas pertinent, ce n'est pas nécessaire; on a déjà, du moins au niveau des collèges, une cinquantaine de façons d'être gérés et d'être examinés sur toutes les faces, sur toutes les facettes. Alors, est-ce que vous avez une opinion là-dessus, sur l'arrivée de trois nouveaux comités et de surveillance, et de gouvernance, et de ressources humaines?
M. Parent (Réjean): Bien, je pourrais peut-être...
Le Président (M. Marsan): M. Parent.
M. Parent (Réjean): Je vais passer la rondelle, comme je disais au président en début de séance, au collègue. Mais, avant de lui passer la rondelle, vous indiquer, là: trop de comités, pas assez de comités, moi, je pense que, même s'il y en avait 74, comités, si on en introduit un nouveau qui a toute sa pertinence, ce n'est parce qu'il y en a 74 que le 75e, il ne faudrait pas le voir venir, là. Dans ce sens-là, on va asseoir notre jugement ou notre raisonnement sur: les instruments qu'on se donne sont-ils utiles, sont-ils pertinents, font-ils avancer, puis... Et là je vais laisser...
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Bérubé.
M. Bérubé (Bernard): Oui. Alors, par rapport aux trois comités que vous venez de mentionner, nous avons certaines inquiétudes. Je vous en énumère quelques-unes. Bien, entre autres, on dit que les comités sont composés de membres indépendants et d'au plus un membre issu de la communauté collégiale. Si on parle d'équilibre, pour nous il y a problème là aussi, si on parle de rechercher un équilibre et une représentation interne adéquate, d'une part.
D'autre part aussi, par rapport par exemple au comité des ressources humaines qui doit émettre, ériger, élaborer les règles pour la nomination du directeur général, on trouve qu'en termes de processus pour le directeur général ça doit recevoir l'assentiment de l'ensemble de la communauté en termes de processus, quel sera le processus pour effectivement nommer le directeur général.
Écoutez, une chose est certaine: si on parle de reddition de comptes, effectivement ça va emmener des travaux supplémentaires pour les gestionnaires, mais c'est dans leur mandat aussi auprès de leurs communautés, auprès de la communauté du collège, auprès de la communauté environnante et auprès de la ministre, de rendre des comptes. Puis, oui, effectivement, ça va drainer des ressources et des énergies, mais je pense que le but qu'on veut atteindre est légitime et qu'il faudra y consacrer les énergies et les ressources nécessaires.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Ceci termine le questionnement pour l'opposition officielle. Je vais maintenant reconnaître le député de Chauveau, porte-parole en matière d'éducation pour le deuxième groupe d'opposition. M. le député.
M. Deltell: Merci infiniment, M. le Président. Madame, messieurs, ça me fait plaisir de vous rencontrer. Parce que je vois M. Parent que j'avais connu en d'autres temps, alors que j'étais journaliste, et que j'ai interrogé de façon assez régulière merci, et c'était toujours agréable de vous rencontrer. Ça me fait plaisir de vous voir aujourd'hui, alors que je porte de nouveaux habits.
La raison pour laquelle on est ici aujourd'hui, c'est pour étudier un projet de loi sur la gouvernance des institutions postsecondaires. Et vous le mentionnez vous-même d'ailleurs dans votre rapport, qu'essentiellement la bougie d'allumage de ces projets de loi aujourd'hui, c'est la catastrophe financière de l'UQAM. Comme vous en faites état justement, est-ce que l'UQAM serait un prétexte à cette situation-là?, la réponse est fort claire, c'est, oui, c'est en raison de la catastrophe financière, en raison de la mauvaise gestion de ce projet-là qui coûte des millions de dollars aux Québécois aujourd'hui et dont on risque de payer... dont on risque de porter la cicatrice encore longtemps. C'est la raison pour laquelle on se retrouve aujourd'hui à revoir ça.
J'aimerais revenir avec vous sur la question de la gouvernance et des conseils d'administration internes, externes. Je sais que ce n'est pas la première fois qu'on en parle, mais c'est quand même au coeur de la réflexion qui nous est portée aujourd'hui. Vous souhaitez, on vous a bien compris, vous l'avez exprimé de façon très claire, que vous souhaitez davantage qu'il y ait une majorité de gens de l'interne par rapport aux gens de l'externe. C'est un point de vue qui se défend.
Puis, nous, dans notre vision autonomiste, qui ne se décline pas uniquement sur le plan constitutionnel, mais également sur le plan de la gestion des fonds publics, on souhaite que les dirigeants des institutions, que ce soient les écoles, que ce soient les hôpitaux, les CLSC, tout ça, fassent... aient plus d'autonomie, avec les responsabilités que ça amène et aussi la reddition de comptes que ça commande, pour celles et ceux qui paient pour tout ça, donc les citoyens. Cette vision-là donc d'autonomie fait en sorte qu'on croit aux gens qui ont les deux pieds dedans, c'est eux qui savent exactement ce qui se passe, quels sont les besoins.
Mais, puisqu'une école, une école postsecondaire, vise à former des élèves qui vont quitter le monde de l'école pour aller dans le monde du travail, parce qu'en soi, à moins qu'on ne sache pas trop quoi faire, à un moment donné, il faut qu'on quitte l'école pour aller travailler, puis tout ça, il est tout à fait légitime que des gens de l'extérieur, des gens du marché du travail puissent être présents et puissent aider l'institution postsecondaire, particulièrement les cégeps, où on forme beaucoup de gens dans les techniques, et tout ça. Et je peux comprendre ? vous en avez fait mention tout à l'heure, puis j'apprécie votre propos ? que nulle part dans ce document-là on ne retrouve des propos qui sont méprisants, ou le regard supérieur, ou la tristesse affichée face au monde des affaires. Je le salue d'ailleurs puis j'apprécie ce propos-là. Vous n'en faites pas des... Vous n'en faites pas des ennemis, vous en faites des alliés potentiels, puis c'est l'attitude qu'on doit avoir.
Mais les gens de l'extérieur, qui souhaitez-vous voir là-dedans? Est-ce que vous souhaitez voir des gens de l'industrie, des gens du marché du travail, des gens du monde socioéconomique? Et, quand je dis «le monde de l'industrie», je veux être bien précis avec vous, là: on ne voit pas le gars qui travaille à la shop, là, ou qui est directeur d'une usine, là, parce que vous formez des infirmières, vous formez des gens dans le domaine de la santé, vous formez des gens dans le domaine social. Et, quand je dis «des gens de l'extérieur, du marché du travail», ce n'est pas uniquement des gens d'affaires, mais c'est des gens aussi qui gèrent les activités sociales du Québec. Quel est, selon vous, de façon générale, le portrait que vous souhaitez voir des gens de l'extérieur?
n(17 h 30)nLe Président (M. Marsan): M. Parent.
M. Parent (Réjean): Bien, je vais revenir encore en disant que ça ne peut pas être les mêmes personnes partout, fort... On dit que nos collèges, que nos universités doivent être des leviers de développement, tant économique, social, culturel. Alors, partant de là, tu sais, dépendant des régions, dépendant des endroits, là, tu sais, il pourrait y avoir une typologie différente. On pourra compter sur un grand entrepreneur de la place, on pourra compter sur un directeur d'agence ou ça peut bien être le directeur du centre de santé et services sociaux qui peut être contributif dans un contexte où on est dans un milieu qui forme beaucoup en santé. Et, dans ce sens-là, là, je ne pense pas... Chose certaine: l'administrateur idéal, à mon point de vue, qu'il vienne des affaires, qu'il vienne du socioéconomique ou qu'il vienne du communautaire, je nous souhaite que ce soient des gens bien engagés qui s'impliqueront puis qui vont ouvrir leurs enveloppes avant d'arriver au conseil d'administration. Ça, ce serait déjà un pas dans la bonne direction.
Mais, moi, je pense que ça prend une diversité là aussi, et, dans ce contexte-là, là, je serais embêté de vous en dire plus sur la personne idéale ou la... Dépendant d'un endroit, il peut y avoir des incontournables, dépendant du tissu social, du tissu économique d'une région. Il me semble qu'on a intérêt à amener à la table des gens qui peuvent justement... Parce qu'on dit: Ces administrateurs externes là, venir... il faut se challenger mais en même temps éclairer, apporter, je veux dire, leurs réalités puis marquer les attentes que la communauté peut avoir à l'égard du collège ou de l'université. Ça fait que c'est ce qui, je pense... Là aussi, il faudrait avoir une diversité de provenances, puis en tenant compte des particularités de la région.
Le Président (M. Marsan): M. Parent, je vous remercie beaucoup. Je veux remercier également vos collègues, M. Bérubé, M. Beauchemin, Mme Racine, M. Danis.
J'inviterais maintenant la Confédération des syndicats nationaux à prendre place. Nous allons suspendre pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 34)
(Reprise à 17 h 38)
Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous allons poursuivre nos travaux. Et c'est avec plaisir que nous accueillons l'organisation de la Confédération des syndicats nationaux. Et je vais demander à la vice-présidente, Mme Denise Boucher, de nous présenter les gens qui vous accompagnent.
Confédération des syndicats nationaux (CSN)
Mme Boucher (Denise): Alors, bonjour, M. le Président, Mme la ministre, membres députés. Alors, à ma gauche, Ginette Guérin, présidente de la FEESP, et, à mon extrême gauche, Ginette Langlois, vice-présidente à la Fédération des professionnèles, et, à ma droite, Josée Roy, adjointe au comité exécutif de la CSN.
Alors, on y va, M. le Président?
Le Président (M. Marsan): Oui. Vous avez 30 minutes pour faire votre exposé, un maximum de 30 minutes.
Mme Boucher (Denise): O.K. Merci beaucoup. Alors, les déboires de l'UQAM dans la saga immobilière de l'îlot Voyageur et du Complexe des sciences sont la principale justification de cette réforme de la gouvernance des établissements d'enseignement supérieur proposée par les projets de loi n° 38 et n° 44. Ces problèmes ont exigé que le gouvernement du Québec investisse des centaines de millions de dollars pour recapitaliser l'UQAM. On comprend aisément la volonté d'éviter la répétition de tels événements, mais nous mettons en doute les moyens envisagés pour y arriver.
La CSN appuie cet objectif d'assurer la mise en place de mécanismes de gouvernance qui garantissent la capacité de ces institutions de remplir leur mission. Un certain nombre de considérations s'imposent cependant dans ce débat.
La CSN croit qu'une cause importante des problèmes vécus demeure l'impact des compressions budgétaires sur une période prolongée pour toutes ces institutions et, dans le cas de l'UQAM, l'effet combiné du sous-financement chronique avec le manque structurel d'équipements. De l'avis de la CSN, ces conditions imposées à nos institutions d'enseignement sont au moins aussi dangereuses pour leur capacité à remplir leur mission que les déficiences constatées. Nous continuerons à répéter qu'il est urgent d'assurer le réinvestissement en enseignement supérieur.
Enfin, le fiasco de l'UQAM est aussi le fiasco d'une approche de partenariat public-privé. On constate d'ailleurs que le gouvernement a officiellement abandonné ce mode pour le projet de réfection de l'échangeur Turcot et que de plus en plus de voix dans la population se lèvent pour le remettre en question.
n(17 h 40)n Nous partageons le principe qu'une institution qui dispose d'autonomie pour déterminer la manière de réaliser sa mission doit disposer d'une gouvernance d'autant plus forte que son autonomie est grande. Nos institutions d'enseignement disposent d'une autonomie relative quant à la détermination de leurs revenus. Elles ont cependant une autonomie assez grande pour disposer de budgets importants. Elles ont aussi à assurer l'encadrement et la persévérance des libertés d'enseignement et de recherche. La gouvernance doit permettre d'assurer cette double responsabilité sans étouffer ces libertés ou les soumettre à des intérêts internes... externes.
Ces exigences plaident pour une gouvernance de qualité et une présence forte de la communauté universitaire ou collégiale dans le conseil d'administration. Elles plaident aussi pour une approche qui respecte les traditions et les diversités de ces institutions. Une approche trop normative dans les structures à mettre en place ne nous semble donc pas appropriée.
Dans ce mémoire, nous insisterons sur les dispositions des projets de loi qui touchent la notion de l'indépendance des administrateurs. On parle de la FNEEQ, qui vous a déposé un mémoire et que vous avez entendue ce matin.
Alors, contexte de cette réforme. Alors, d'abord, cette réforme s'inscrit dans la foulée de profondes remises en question engendrées par les scandales dans les grandes entreprises comme Enron et WorldCom au début des années 2000. Ces scandales ont illustré l'incapacité des structures ou des mécanismes en place de déceler les problèmes et à contrôler les directions d'entreprise. L'encadrement légal s'est révélé insuffisant, et les procédures de contrôle internes et externes des entreprises, inadéquates.
On s'est fortement préoccupé depuis de l'enjeu majeur que constitue la gouvernance dans la capacité d'une organisation ou d'une entreprise de bien remplir sa mission. Ainsi, de nombreux gouvernements ou autorités réglementaires ont modifié les législations ou règlements pour assurer une plus grande intégrité et accroître la fiabilité de l'information financière. Ils ont cherché à rendre imputables les directions des sociétés et à rendre indépendants de celles-ci les conseils d'administration et leurs comités, ceci afin de mieux les contrôler et éviter que des décisions soient prises en fonction des intérêts de ces sociétés.
Cependant, la tendance lourde est à implanter un modèle unique dans les entreprises et les institutions, faisant fi des études et des recherches faites depuis plusieurs années en science des organisations, qui considèrent qu'il n'existe pas de règles universelles de gouvernance. En effet, la grande variété des entreprises et d'organisations publiques et privées, leur contexte, leur mission, leur finalité, leurs enjeux, leur financement, leur complexité, leur culture, la composition de leur personnel, etc., ont engendré dans l'histoire de nombreux modèles de pratiques de gouvernance qui ont le plus souvent favorisé leur fonctionnement. Il s'avère extrêmement réducteur de n'en promouvoir qu'un seul, particulièrement dans les établissements d'enseignement supérieur.
En outre, le modèle proposé dans les projets de loi favorise une dynamique hiérarchique au détriment d'une approche collégiale. Il prône, entre autres, une concentration des décisions à un conseil d'administration composé majoritairement de personnes de l'extérieur, considérées d'emblée comme indépendantes.
Pourtant, dans la presque totalité des scandales auxquels on réfère pour justifier les réformes, les conseils d'administration étaient composés majoritairement d'administrateurs externes. Presque toujours, ce sont les dirigeants qui ont trompé les conseils, étant ceux qui fournissaient l'information fausse ou tronquée. Dans le cas de l'entreprise privée, la vision à court terme, la recherche de profits rapides pour les actionnaires et la perspective de faramineux bonis pour les dirigeants ont également installé une dynamique malsaine sur le long terme.
Les institutions publiques, en particulier les établissements d'enseignement supérieur, sont infiniment différentes des entreprises privées. Ce sont des organisations complexes. Elles ne produisent pas de biens, ne cherchent pas les profits et ont peu de pouvoir de décision sur leurs revenus. Les universités et les cégeps produisent et transmettent des savoirs à travers les trois missions d'enseignement, de recherche et de service aux collectivités.
À cet égard, la CSN est heureuse de voir que la mission des cégeps a été précisée et enrichie, dans le projet de loi n° 44, pour affirmer leur appartenance à l'enseignement supérieur et leur rôle important dans la formation continue. Cependant, plusieurs questions restent sans réponse quant aux moyens que le gouvernement entend mettre à la disposition des cégeps pour leur permettre de se développer dans le sens de cette mission élargie.
Les savoirs sont multiples, regroupés dans de nombreuses disciplines, et ce sont les personnels, notamment les professeurs, les enseignantes et les enseignants et les chargés de cours, qui les alimentent, les font évoluer. Pour ce faire, l'autonomie est primordiale de même que les échanges continus entre personnes, entre disciplines, avec la direction, avec les étudiants et les étudiantes, les professionnels, les employés de soutien, etc. C'est ce qui compose la communauté universitaire ou cégépienne, complexe, grouillante, qui prend parfois du temps à parvenir à certaines décisions, visant ainsi une plus grande adhésion, et dont la réalité est souvent bien difficile à saisir de l'extérieur. À cela s'ajoute la culture organisationnelle qui, édifiée au fil de l'histoire de l'organisation, lui confère son caractère propre, oriente sa nature et mobilise son énergie.
La gouvernance d'une organisation publique, notamment d'un établissement d'enseignement supérieur, exige une transparence et une implication particulière des parties prenantes. C'est cette implication qui garantit le sentiment d'appartenance et une prise de décision plus favorable à l'institution dans son ensemble qu'aux intérêts particuliers. Cette implication est reconnue de longue date par la présence des étudiantes et étudiants et du personnel dans les structures de gouvernance, et spécifiquement dans les conseils d'administration.
Dans la réforme proposée, on fait le postulat que les membres du conseil d'administration provenant de l'interne sont en position de faiblesse par rapport aux dirigeants et ne peuvent donc pas se qualifier comme indépendants. C'est à partir de ce postulat qu'on prône une majorité de membres externes. De plus, en donnant au conseil le pouvoir de nommer le dirigeant principal, on considère que les pouvoirs seront ainsi mieux exercés.
Or, on peut également considérer que les membres externes, qui ont tous des occupations autres et bien souvent peu de temps, souffrent aussi d'une forme de dépendance en ce qu'ils doivent compter sur la direction pour comprendre l'organisation et ce qui se passe. Dans ce contexte, la CSN affirme que les salariés autres que les cadres membres des conseils d'administration doivent être considérés comme des administrateurs indépendants. Leur situation est évidemment liée intimement à celle de l'institution, mais, dans la mesure où la situation financière et la fonction dans l'organisation des salariés administrateurs ne dépendent pas de la direction, ceux-ci peuvent agir de façon indépendante.
Cette position est contraire à la philosophie développée depuis plusieurs... depuis quelques années au Québec, qui veut que le lien d'emploi entache irrémédiablement l'indépendance. Nous ne retenons pas cette approche et nous dénonçons la diminution de l'importance des personnels et des membres des communautés des institutions dans les conseils d'administration.
La CSN croit en la nécessité d'un équilibre de nombre entre les administrateurs internes et externes. Cet équilibre favorise une meilleure compréhension de la situation et des enjeux à l'interne pour les membres de l'extérieur, qui peuvent ainsi mieux utiliser leurs compétences et apporter leur contribution. Il permet à la communauté de l'institution de participer pleinement aux décisions stratégiques de l'établissement, la gestion ne pouvant être isolée de la mission dans un établissement voué à la production et à la diffusion des savoirs.
Tous les groupes doivent participer. À titre d'exemple, la CSN s'inquiète de constater que le projet de loi limite à un seul représentant le personnel non enseignant, ce qui risque d'exclure presque assurément le personnel de soutien.
De plus, il ne faudrait pas que les membres externes, dits indépendants, proviennent tous d'une classe d'administrateurs issus du monde des affaires qui ont une vision semblable des rapports sociaux et une connaissance limitée des réalités des institutions d'enseignement collégial et universitaire. Il est donc essentiel que la législation prévoie explicitement que les administrateurs externes aux institutions aient non seulement des compétences et des expériences diverses, mais reflètent aussi la diversité sociale, la prise en compte de visions variées des enjeux sociaux, culturels et économiques.
Certes, nous appuyons les exigences de compétence et d'intégrité pour les administrateurs de même que la mise en place de mécanismes précis pour traiter des conflits d'intérêt. Les personnels des établissements d'enseignement supérieur possèdent de grandes compétences dans des domaines très variés. Ils ont évidemment des intérêts dans l'institution et sont susceptibles de se retrouver en conflit d'intérêts lorsque différents sujets sont débattus, les plus évidents étant les questions de relations de travail. Il importe que les conseils d'administration se donnent des règles claires pour gérer ces conflits d'intérêts de façon à ne pas entacher l'indépendance des administrateurs. Une telle politique de gestion des conflits d'intérêts est d'ailleurs essentielle pour tous les administrateurs, salariés ou non, qui sont tous susceptibles de se retrouver dans une telle situation. Rappelons à cet effet que la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel en matière de gouvernance contient déjà des dispositions claires sur cette question.
La CSN partage également l'objectif de parité hommes-femmes aux conseils d'administration des établissements d'enseignement supérieur et son inscription dans la loi. En effet, la réalité de la place des femmes dans les postes de pouvoir étant encore extrêmement déficiente, il est absolument nécessaire de continuer à rappeler et à imposer cet objectif.
Le projet de loi prévoit que les conseils d'administration doivent former trois comités, soit les comités de vérification, d'éthique et gouvernance, et de ressources humaines. Ces comités doivent être composés de membres externes, dits indépendants, et d'au plus une personne de l'interne, ce qui veut dire qu'il pourrait n'y avoir personne de l'interne sur ces comités. Encore ici, on calque le modèle utilisé dans les entreprises privées sans plus de réflexion, et, pour la CSN, nous le répétons, dans les établissements d'enseignement supérieur, les salariés autres que les cadres doivent être considérés comme indépendants.
n(17 h 50)n Faut-il le rappeler, il y avait un comité de vérification, à l'UQAM, composé de membres de l'extérieur, mais il n'a rien fait pour empêcher le désastre. En fait, il semble qu'il n'était jamais réuni, ce qui illustre encore une fois qu'il ne suffit pas de constituer une structure et des règles, il faut également réfléchir aux moyens pour assurer leur fonctionnement.
Les mandats confiés au comité sur l'éthique et la gouvernance nous semblent appropriés. Cependant, nous questionnons le rôle du comité sur les ressources humaines dans ce type d'établissement quant aux salariés qui ne sont pas de la haute direction. D'une part, la détermination des conditions salariales et de travail du personnel fait déjà l'objet d'un encadrement très normé. D'autre part, il ne faudrait pas que les travaux de ce comité entrent en conflit avec ceux de structures déjà existantes dans les cégeps et les universités.
Quel partage des responsabilités serait fait, par exemple, entre les services actuels des ressources humaines et les prérogatives de ce comité? Il faudrait que ce partage soit clair entre ceux qui font les politiques des ressources humaines et ce comité dont le rôle devrait être de s'assurer que les choses soient faites correctement.
Par ailleurs, nous avons quelques préoccupations sur la faisabilité d'une telle structure, passablement lourde, dans les petits établissements. C'est le cas de quelques cégeps en région.
La CSN n'est pas contre le fait d'apporter des améliorations aux règles de gouvernance des institutions publiques, dont les établissements d'enseignement supérieur. Elle considère cependant que plusieurs des changements proposés n'empêcheront pas les dérives comme celle survenue à l'UQAM et qu'à cet égard une réelle consultation préalable serait nécessaire pour mieux cerner les changements qui pourraient être apportés. Y a-t-il d'ailleurs un système parfait qui peut garantir toute malversation?
Nous croyons qu'une volonté de faire vite dans ce dossier, devant une opinion publique secouée à juste titre, a favorisé une orientation qui va dans le sens du courant actuel de centralisation du pouvoir de décision, de renforcement de l'imputabilité et des mécanismes de reddition de comptes. Ces systèmes de gouvernance sur le modèle des entreprises privées permettent certainement d'identifier plus facilement des coupables en cas de dérapage, mais ils ne garantissent certainement pas que les décisions prises soient les meilleures quand on s'adresse à des organisations qui ont des missions complexes dont les finalités sont difficiles à évaluer comme les établissements d'enseignement supérieur. En l'occurrence, les bouleversements des structures actuelles nous semblent inappropriés et potentiellement dangereux.
La CSN croit qu'il y a place à une réflexion plus profonde pour trouver un modèle de gouvernance qui soit adapté à la réalité et à la particularité des organisations vouées à la production et à la diffusion des savoirs, où les personnels jouissent d'une grande autonomie, où les échanges entre toutes composantes sont essentiels. Ce modèle ne devrait pas considérer les personnels comme étant des administrateurs dépendants. La participation de la communauté universitaire aux décisions stratégiques est primordiale pour l'accomplissement de la mission des universités et des cégeps. De plus, il est essentiel que les administrateurs externes aux institutions reflètent la diversité sociale et la prise en compte de visions variées des enjeux sociaux, culturels et économiques.
Alors, M. le Président, j'ai pris 15 minutes. Alors, on est même prêts à vous donner une demi-heure, on peut prendre juste une heure pour faire le débat. Vous pourriez aller... Alors, on est prêts. Au lieu de prendre 1 h 30 min, prendre une heure pour faire... pour satisfaire tout le monde, et surtout ceux qui ont une petite fringale.
Le Président (M. Marsan): Madame... Mme Boucher...
Mme Boucher (Denise): J'ai vu tout à l'heure que vous avez mangé un petit peu.
Le Président (M. Marsan): Oui. Mme Boucher, je vous remercie pour votre exposé. Et nous allons prendre, comme vous pouvez le penser, le temps qu'il faut pour que les parlementaires puissent vous questionner.
Alors, tout de suite, j'inviterais la ministre de l'Éducation, des Loisirs et des Sports à rouvrir les débats et à prendre la parole.
Mme Courchesne: Merci beaucoup, mesdames. Merci. Soyez rassurées que, malgré le fait qu'il soit tout près de 18 heures, nous allons effectivement aller au fond des choses avec vous, puisque vous avez pris la peine d'être devant nous, de réfléchir à ces questions importantes de gouvernance et d'avoir, à travers ce document, communiqué votre pensée de même que celle de vos membres.
D'emblée, une petite précision, parce que c'est... ça fait plusieurs fois, et le député de Chauveau revient là-dessus inlassablement: je pense qu'il faut être prudent quand on dit que ces projets de loi sont déposés uniquement à cause de la situation de l'UQAM. Je pense que ce serait extrêmement simpliste et réducteur de croire que nous faisons ce travail-là en réaction exclusivement au dossier de l'UQAM, qui bien sûr a causé préjudice, a entraîné des soubresauts qui sont... et des situations non désirables.
Mais je pense que, lorsque nous gérons des fonds publics comme nous le faisons et que nous les confions... Parce que, très honnêtement, le gouvernement, quel qu'il soit, confie des sommes extrêmement importantes à ces institutions, et nous confions ces sommes à des dirigeants que sont les membres du conseil d'administration, bien sûr, les dirigeants, qu'ils soient directeurs généraux ou recteurs. Mais, en quelque part, notre société, au fil des décennies, a établi des modèles de gouvernance pour pouvoir gérer, entre autres, ces investissements, d'une part, mais aussi l'État dit que l'éducation est sa responsabilité mais dit à ces institutions: Définissez votre mission, définissez vos orientations stratégiques, faites vos choix, et nous allons vous fournir les ressources nécessaires pour y arriver. Il y a là quelque chose dont on ne parle pas depuis deux semaines, mais c'est quand même l'essence même ou la raison d'être d'une gouvernance, hein? Il faut être conscient de ça.
C'est pour ça que... Je ne vous dis pas que l'UQAM n'a pas eu une certaine influence, mais je nous mets en garde collectivement de croire que ces projets de loi là sont déposés uniquement parce qu'il y a eu l'UQAM. Je pense que c'est normal qu'un gouvernement, et qu'une société, veuille améliorer, au fil des ans, son modèle de gouvernance.
Et je veux vous dire, Mme Boucher, puisque vous avez été la porte-parole, d'emblée, que nous apporterons un amendement. Je vous le dis...
Une voix: ...
Mme Courchesne: Oui. Moi, je vais proposer cet amendement-là. Je vais le proposer, et je le dis ce soir parce qu'effectivement, puis à juste titre, et c'est légitime, c'est pour ça qu'il y a une commission parlementaire. C'est pour entendre, écouter, et c'est pour que les personnes qui travaillent au quotidien dans ces milieux nous fassent part de leurs réactions.
Et, moi, je veux vous dire que j'aime beaucoup votre dernière phrase, la dernière phrase de votre mémoire, et je veux vous dire que je partage tout à fait le fait que les conseils d'administration de ces institutions, qu'ils soient cégeps ou universités, doivent refléter «la diversité sociale et la prise en compte de visions variées des enjeux sociaux, culturels et économiques».
Je veux vous dire aujourd'hui qu'effectivement l'article de loi... Parce que, nous, on a voulu, dans l'article de loi tel qu'il est rédigé, refléter la nécessité d'y inclure la notion de diversité, mais qui, lorsqu'on lit l'article de loi, n'est probablement pas suffisamment précise, et que, dans ce sens-là, et je le répète, je l'ai dit aux intervenants avant vous, c'est vrai qu'actuellement, nos universités particulièrement, plus que les cégeps, cela dit, les conseils d'administration sont composés majoritairement de gens d'affaires, et ce n'est pas le reflet du milieu dans lequel l'institution oeuvre. Et, comme disait si bien le député de Charlesbourg... Puis j'ai beaucoup aimé son intervention sur la nécessité de la diversité des opinions, et des opinions, là, pas uniquement sur un fait banal, mais la diversité des opinions à partir d'une expertise et d'une compétence d'un individu qui va participer et contribuer à définir l'intérêt commun de l'institution.
Et je pense qu'en tout cas le Québec, très certainement, est tout à fait prêt et mûr pour qu'au sein de ces conseils d'administration, particulièrement en éducation, où nous avons des enjeux collectifs qui évoluent à une grande vitesse mais qui sont fondamentaux... Et, dans ce sens-là, j'aime beaucoup... et on en débattra au moment où nous serons encore en commission mais sur l'article par article, mais je veux vous dire que je suis très sensible et très favorable à cette prise de position et que ça rejoint en tous points non seulement les intentions de la ministre, mais aussi du gouvernement que je représente. Voilà.
Autre point: conflit d'intérêts.
Mme Boucher (Denise): ...
Mme Courchesne: Oui, absolument.
Le Président (M. Marsan): Oui. Alors, Mme Boucher.
n(18 heures)nMme Boucher (Denise): Alors, M. le Président, je suis contente de voir que c'était la phrase-choc qui permet un amendement, tu sais, je suis tout honorée de ça, quand même. Mais il reste que, pour nous, c'était important. Je pense que c'était nécessaire de le spécifier parce que ça n'apparaissait pas. Donc, nous, on est d'accord avec cet élément-là.
J'ose espérer qu'il y aura d'autres nouvelles, pendant notre présentation, sur d'autres amendements.
Une voix: ...
Mme Boucher (Denise): Ah! Je trouve ça malheureux parce que j'en venais sur la question des personnels pour qu'ils puissent être représentés. Mais en tout cas peut-être que ce sera pour un autre groupe, sans aucun doute, parce qu'il faut quand même faire plaisir à plusieurs autres groupes. Mais il n'y en aura pas d'autres, amendements? Ah, je vous fais confiance de toute façon, vous le savez, M. le Président.
Le Président (M. Marsan): Merci, Mme Boucher. Mme la ministre.
Mme Courchesne: Cela dit, M. le Président, revenons aux choses sérieuses. Je ne fais pas ça pour faire plaisir à quiconque, je fais ça parce que je pense que c'est extrêmement important pour la gouvernance de nos institutions, particulièrement des institutions qui se retrouvent dans toutes les régions du Québec. Et j'insiste pour préserver la personnalité et le caractère spécifique de chacune de ces institutions.
Cela dit, il y a une chose qui m'étonne dans votre mémoire, par ailleurs, je voudrais que vous m'éclairiez. Je ne saisis vraiment pas très bien le fait que des salariés qui oeuvrent dans une institution... et là vous introduisez la notion de dépendance et d'indépendance, et je voudrais que vous m'expliquiez en quoi des salariés qui ont à défendre des statuts... Et je comprends qu'on n'est pas dans le cadre d'une négociation de relations de travail. On sait très bien que, dans les conseils d'administration, on ne discute pas... on ne négocie pas les conditions de travail. On peut discuter des conditions de travail mais on ne les négocie pas, il y a d'autres tables pour ça.
Mais expliquez-moi pourquoi vous prétendez que des salariés n'ont pas ce lien de dépendance avec l'institution. Parce que, dans les faits, l'institution est quand même l'employeur. Ça, je ne comprends pas.
Le Président (M. Marsan): Mme Boucher.
Mme Boucher (Denise): Nous, ce qu'on a cherché à faire, c'était de peut-être élever la chose un petit peu plus, parce qu'on a l'impression souvent, parce qu'on est payés par un employeur X ou par une institution, qu'on a un volet de dépendance. Mais, quand les gens sont dans un conseil d'administration, les gens sont là parce qu'ils veulent que l'institution vive. Ils veulent être fiers de leur institution. Ils veulent... que ce soit dans un collège, que ce soit dans une université, ils veulent qu'elle soit plus performante, ils veulent qu'elle soit bien reconnue et ils veulent aussi être partie prenante de ça.
Mais, moi, je pense qu'un salarié dans un conseil d'administration peut être un indépendant. Il peut être capable de réfléchir, il peut être capable de soulever des questions sans nécessairement que ce soient des questions qui sont rattachées aux relations de travail, mais qui peuvent être rattachées à l'image que l'on veut donner à l'institution. Il y a des gens qui viennent dans des conseils d'administration puis qui viennent de l'extérieur, puis je ne parle pas... peu importent les conseils d'administration, mais qui arrivent et qui souvent portent un message, et ils oublient qu'ils sont membres d'un conseil d'administration et qu'ils doivent parler au nom de l'administration pour laquelle ils ont été mandatés.
Vous avez connu ça, Mme la ministre. On en connaît, on a des exemples dans à peu près tous les conseils d'administration. Et souvent il y a des gens qui sont capables de se sortir de ça et de dire: Non. Moi, la vision que je vais avoir, ça ne sera pas nécessairement une vision parce que je représente le monde syndical. On a déjà siégé sur un conseil d'administration sur lequel vous m'avez nommée, je vais le dire, la Commission des partenaires du marché du travail. Je suis la représentante de l'emploi. Je ne parle pas toujours au nom de Denise Boucher de la CSN, parce que j'ai une préoccupation. J'ai la préoccupation, quand je suis à ce conseil d'administration là, de parler de qualification de main-d'oeuvre, de parler de formation de main-d'oeuvre, de faire en sorte qu'on puisse parler d'une même voix pour aller chercher les argents auprès du fédéral, qui nous sont dus sur cette question-là.
Et pourtant je suis Denise Boucher de la CSN, mais je suis capable, quand je suis dans ce conseil d'administration là, d'avoir une vision qui est générale, globale pour répondre aux besoins du pourquoi je suis sur ce conseil d'administration là. Et je crois... et c'est pour ça que je pense que les salariés sont capables aussi d'avoir... qu'on puisse leur attribuer cette notion d'indépendance, parce qu'ils vont être capables aussi de répondre à ces besoins-là. C'est dans ce sens-là que nous l'avons mis, et nous y croyons.
Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Mais, Mme Boucher, à ce titre-là, c'est vrai pour tout le monde qui siège sur un conseil d'administration. C'est vrai pour un cadre, c'est vrai pour un chef d'entreprise. Tout individu est capable de prendre une distance par rapport à sa fonction pour justement s'élever au niveau où vous parlez. Ce n'est pas propre aux salariés. Un D.G. de cégep peut tout à fait être capable, à un moment donné, de s'inscrire dans une discussion vers une vision, vers une question fondamentale sur la mission même de son institution, sans être là... Il peut même situer son cégep dans le coeur d'une mobilisation régionale pour le développement culturel, social, économique de sa région, en disant: Le cégep... Bon. Etc. Mais ce que vous dites là, c'est vrai pour tout le monde.
Le Président (M. Marsan): Mme Boucher.
Mme Boucher (Denise): Mais pourquoi vous ne le considérez pas pour les salariés?
Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Mais, si vous me permettez... Mais ce que je veux vous dire, c'est: Pourquoi, à ce moment-là, y aurait-il une gouvernance? C'est pour ça qu'il faut que... C'est vrai pour vous, c'est vrai pour quelqu'un d'autre, mais, dans une société, nous devons nous donner une règle de base, sinon on ne se comprendra plus, sinon on n'arrivera pas à savoir qui dit vrai, qui est sincère, qui ne l'est pas. Malheureusement, ça fait partie de la nécessité de définir ces règles pour être capables de se comprendre et de s'assurer surtout ? et c'est ce qui me préoccupe, puis c'est pour ça qu'il y a des projets de loi devant nous ? surtout s'assurer que la population, qui contribue largement à ces institutions, comprenne la même chose que ceux qui sont sur ces conseils et qui décident, d'où la notion de transparence.
Bien, en tout cas, on s'entend, mais je veux juste vous dire que, si c'est vrai pour des salariés... et c'est là que j'ai bien aimé l'intervention du député de Borduas, c'est là où il faut effectivement rétablir ce climat de confiance, et faire tomber les préjugés des uns et des autres, et s'attarder à bien, bien réfléchir sur le rôle de n'importe quel membre du conseil d'administration. C'est d'abord et avant tout une responsabilité que d'être membre d'un conseil d'administration. Et c'est pour ça que la loi, elle veut, oui, qu'on soit capable de dire publiquement qui est présent aux assemblées puis qui ne l'est pas, puis qui joue un rôle actif au conseil d'administration puis qui ne le joue pas. C'est fondamental, parce que tu auras beau avoir n'importe quelle loi, n'importe quel modèle, ça demeure une responsabilité extrêmement importante que d'aucuns auront sous-estimée et pour lesquels je ne suis pas du tout en désaccord. Moi aussi, on me parle puis on me rapporte comment ça se passe dans... Je peux vous dire à peu près, dans tous les cégeps, toutes les universités, je peux vous dire qui joue son rôle correctement puis qui ne le joue pas correctement. Hein, on sait ça. Et c'est pour ça que j'ai senti le besoin de présenter cette loi sur la gouvernance.
Je veux revenir sur la notion de conflit d'intérêts...
Le Président (M. Marsan): ...je crois que Mme Roy voulait faire une intervention également.
Mme Courchesne: Ah, excusez-moi.
Le Président (M. Marsan): Et, tout de suite après, je vous laisse la parole, Mme la ministre.
Mme Courchesne: Oui, absolument. Excusez-moi. Je n'avais pas...
Mme Roy (Josée): Je voulais juste compléter. Ce qu'on essaie de faire ressortir, c'est que la notion d'indépendance ou de dépendance, elle est relative. Elle est relative pour les gens de l'extérieur qui dépendent de la direction pour avoir l'information, elle est relative pour les salariés. Oui, c'est leur employeur, mais ils ne sont pas nécessairement menacés de perdre leurs emplois s'ils ne sont pas d'accord avec quelque chose sur un conseil d'administration. On trouve que la notion de dépendance et d'indépendance, c'est quelque chose qui est très relatif, et qu'on doit plutôt parler de gens de l'interne et de l'externe, et qu'à ce titre-là c'est pour ça qu'on plaide pour un équilibre entre les gens de l'interne et de l'externe, un peu comme d'autres avant nous l'ont fait. On pense que c'est là qu'est la clé pour une bonne gouvernance dans une institution d'enseignement où, de longue tradition, la collégialité est installée, et beaucoup de gens en ce moment ont l'impression de perdre énormément par rapport à cette collégialité qui est présente dans ces institutions-là.
Le Président (M. Marsan): Mme la ministre, ça va? Oui. Mme la députée de Gatineau.
n(18 h 10)nMme Vallée: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, mesdames... en fait, bonsoir. Je souhaitais toucher un petit peu toute la question des différents comités qui sont créés par le projet de loi. Votre organisme, vous semblez d'accord avec le principe de la création des comités, des trois comités du conseil d'administration, mais je voulais vérifier avec vous, parce que votre mémoire était quand même... était très... était succinct, puis merci, mais je voulais m'assurer que vous êtes d'accord avec le principe de la création des comités. Et puis aussi voir comment vous percevez cette création de comités.
Mme Roy (Josée): Oui, bien, sur les comités...
Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Roy.
Mme Roy (Josée): Oui, merci. Sur les comités, on ne s'est pas étendus très longtemps, en fait on considère qu'il y a déjà beaucoup de choses dans les institutions d'enseignement, il y a beaucoup de comités déjà existants. On n'a pas de problème à ce qu'on crée un comité de vérification, un comité d'éthique et de gouvernance, un comité de relations humaines, mais à condition que ça ne vienne pas... Les comités déjà existants, de département, etc., où peut s'exprimer une prise de décision quand même assez décentralisée sur des questions de pédagogie, de contenu, etc., on pense que ça doit demeurer.
Qu'on se donne des comités plus formels, au niveau du conseil d'administration, on n'a rien contre, en autant que les rôles sont bien définis et qu'ils ne viennent pas permettre une centralisation encore plus grande comme le projet de loi le fait en centralisant beaucoup plus de pouvoirs au niveau du conseil d'administration. On pense que c'est des comités qui peuvent aider, mais à condition que leurs mandats soient bien définis, qu'ils ne viennent pas en contradiction avec les structures qui existent déjà dans les institutions. Et... J'ai perdu mon fil, excusez-moi. Bien, je vais arrêter là, je reviendrai.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée: Est-ce qu'il y aurait des ajouts ou des modifications qui devraient être apportés au sein du projet de loi pour permettre, là, justement que les comités, comme vous le dites, puissent jouer leur rôle? Est-ce qu'il manque quelque chose dans le projet de loi pour atténuer vos craintes? Ou est-ce qu'il y a des outils additionnels qui devraient être accordés ou apportés au sein de la législation pour permettre aux comités justement de jouer pleinement leur rôle et de pouvoir avoir le poids qui est souhaité?
Mme Roy (Josée): Comme on le dit dans...
Le Président (M. Marsan): Mme Roy.
Mme Roy (Josée): Oui. Comme on le dit dans le mémoire, on ne pense pas que c'est d'installer des structures et des règles, qui est l'unique façon de régler les problèmes, il faut aussi donner des moyens à ces comités-là. On rappelle qu'à l'UQAM le comité de vérification ne se réunissait pas souvent, et en plus il semble que les informations qui étaient données par la direction étaient erronées ou fausses. Et, en passant, Mme la ministre, on ne dit pas que c'est seulement l'UQAM qui... mais, mettons que c'était un facteur déclenchant, à juste titre, que ça a sonné les cloches.
Bien, c'est ça. En fait, ce n'est pas juste de changer les structures. Ces comités-là ont besoin de moyens pour assurer le fonctionnement de la formation, un calendrier de rencontre, de l'information, la transparence de l'information qui leur est donnée, et on devrait retrouver ça dans leur mandat et dans les moyens qui leur sont donnés.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. le député de Lévis, la parole est à vous.
M. Lehouillier: Oui. Merci, M. le Président. Alors, moi, je suis un peu comme le député de Borduas, c'est qu'au fond l'objectif du projet de loi, c'est vraiment promouvoir l'efficacité, la diversité et la représentativité. C'est ça, au fond, c'est les trois éléments majeurs du projet de loi.
Moi, j'ai toujours été, dans mon milieu, dans le comté de Lévis, un fervent participant de faire en sorte que, sur les conseils d'administration, on vise à s'assurer que la collectivité puisse participer. Donc, là, le conseil d'administration tel que proposé dans le projet de loi... l'idée, au fond, c'est de faire en sorte que les différentes composantes de la collectivité puissent... de l'établissement soient reflétées, donc que la réalité de notre milieu de vie soit reflétée au sein du conseil d'administration.
À partir du moment par exemple où, dans la loi, le conseil nomme la majorité des membres... Le gouvernement, c'est limité, les membres qu'il nommerait par rapport à ce que l'université ou les composantes vont pouvoir faire, puisque la communauté universitaire va nommer tous les autres membres, il y a un membre indépendant qui est nommé par le gouvernement. Donc, moi, à partir de ce moment-là, à partir du moment où effectivement on s'assure, comme la ministre l'a dit, qu'on reflète la diversité sociale et la prise en compte de visions variées des enjeux socioculturels, ne trouvez-vous pas ? je pose la question parce que, moi, ça m'interpelle beaucoup ? que justement on ferait en sorte que les gens n'arriveraient plus avec des enveloppes cachetées aux réunions du conseil d'administration mais que, là, on aurait une dynamique, parce que transparente auprès de la population? Bien, celui qui dort sur la switch au conseil d'administration, il serait détecté rapidement.
Alors, moi, ce que je trouve intéressant personnellement... mais là je me dis: N'est-ce pas que... Si on allait vers des membres indépendants mais qui sont privilégiés, puis qu'on va chercher vraiment une diversité dans les profils d'expérience ? puis vous avez raison quand vous dites «diversité sociale et [...] prise en compte de visions variées des enjeux sociaux» ? est-ce que, là, à ce moment-là, on ne corrige pas ce dont vous parliez tout à l'heure et est-ce qu'on ne fait pas un pas drôlement intéressant par rapport à notre population puis par rapport à la collectivité? Alors, je vous pose la question.
Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Boucher.
Mme Boucher (Denise): Tout à l'heure, j'ai remercié Mme la ministre de faire un amendement qui spécifiait que cet élément-là arrivait, donc, à votre question, je dis oui. Nous, ce qu'on ajoute cependant, c'est qu'on pense qu'il faut qu'il y ait aussi un équilibre entre les externes et les internes. C'est ça qu'on ajoute, nous.
Et la question de la transparence va jouer le rôle qu'elle a à jouer. La ministre tout à l'heure disait: Mais pourquoi on fait un... pourquoi on parle de gouvernance, pourquoi on met des projets de loi sur la gouvernance si on n'est pas capables de déterminer qui sont les dépendants puis les indépendants? Moi, je vais vous dire, là, ça, là...
Une voix: ...
Mme Boucher (Denise): Bien, vous ne l'avez pas dit comme ça, là, mais c'était de dire: Pourquoi les salariés... Pourquoi les salariés en feraient partie ou ils n'en feraient pas partie? Vous avez dit: Les salariés, pourquoi, nous, on les voit indépendants? Vous, vous avez dit: Non, moi, je... on les voit dépendants. Bon, tu sais, disons que j'ai tourné les coins ronds, j'ai simplifié ce que vous avez dit, mais c'est ça que vous avez dit tout à l'heure.
Nous, là, la gouvernance, on ne dit pas qu'on est contre. On n'a pas dit qu'on était contre. Ce qu'on dit dans notre document, c'est qu'on dit: Il y a des éléments sur lesquels il y a des choses qu'il faut considérer. Un des éléments, il va y avoir un amendement au projet de loi. On vient de le régler, celui-là, nous. Il y a un autre élément, par exemple, qui reste, c'est celui de l'équilibre externes-internes et, celui-là, il n'est pas là pour le moment. Et, pour nous, c'est celui-là maintenant. On ne peut pas penser que, parce que tu es salarié... Je ne suis pas d'accord avec la ministre, puis je suis prête à débattre, je ne suis pas d'accord avec la ministre quand elle dit que, non, les salariés, il faut qu'ils soient dépendants. Moi, je pense que les salariés qui croient à la mission de l'institution pour laquelle ils siègent sur le conseil d'administration... La ministre dit: On dit la même affaire. Mais en même temps elle ne veut pas les voir comme indépendants, elle ne veut les considérer comme indépendants, elle veut les voir comme dépendants. Nous, on dit: Voyons-les comme indépendants, et une partie du problème va être résolue, et on pourra aller chercher l'équilibre hommes-femmes.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Je vous remercie.
Mme Boucher (Denise): Pas l'équilibre hommes-femmes, mais l'équilibre administrateurs et internes-externes.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, Mme Boucher.
Mme Boucher (Denise): Mais, pour ce qui est de l'équilibre hommes-femmes, on est aussi d'accord.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie bien, et ça termine l'échange avec la partie ministérielle. Je vais maintenant reconnaître la députée de Taillon, porte-parole de l'opposition en matière d'enseignement supérieur. Mme la députée.
Mme Malavoy: Bonjour, Mme Boucher. Bonjour, mesdames. Merci d'être là. Merci d'être là à une heure, là, où manifestement vous avez encore beaucoup d'énergie. Mais ça nous fait du bien parce que c'est la dernière période avant un court ajournement. Je voudrais faire une première remarque puis, après, j'ai quelques questions à vous poser.
Ma remarque, c'est que, quand on parle de l'UQAM, je crois qu'il faut ? puis l'une d'entre vous l'a indiqué aussi ? il faut en parler comme d'un facteur précipitant. Les tendances lourdes viennent de cette orientation vers la gouvernance définie à l'OCDE, reprise dans le projet de loi sur les sociétés d'État, ici, au Québec, et c'est une tendance lourde qui se trouve un peu comme une... moi, je dirais, un peu comme une marée, là, et là on est rendus à englober les collèges et les universités sous ce concept-là.
Ce que l'UQAM a fait, c'est que ça a été un facteur précipitant, entre autres pour justifier aux yeux de la population ? même si, dans les faits, ce n'est pas les gens de l'interne qui étaient fautifs ? qu'il fallait redresser les choses. Et donc ça a été au moins un facteur précipitant, et on pourrait dire peut-être même un prétexte, parce que, quand on regarde ce que le Vérificateur général dit concernant l'UQAM, il n'en conclut pas que ce sont les administrateurs externes qui ont fait leur travail puis qu'il faut en rajouter. Ce n'est pas ça qu'il conclut. Bon. Je ferme la parenthèse là-dessus.
Vous dites beaucoup de choses dans votre mémoire. Je dirais que vos phrases sont denses, hein? Des fois, il y a des mémoires qui ont beaucoup, beaucoup de pages, et puis on redit les choses de trois, quatre manières. Vous, vos phrases sont denses, alors il y en a quelques-unes sur lesquelles j'aimerais peut-être que vous nous donniez un peu plus de chair ou que vous développiez un peu, non pas que je ne comprends pas le sens, mais je voudrais être sûre d'avoir tous les éléments de votre réflexion.
À la page 5, vous dites... vous faites un lien, au dernier paragraphe, entre... «une gouvernance d'autant plus forte que son autonomie est grande», hein? Vous parlez des institutions et vous dites: Dans le fond, nous partageons cette idée que plus l'autonomie est grande, plus la gouvernance pourra l'être aussi, pourra être forte. J'aimerais que vous m'expliquiez ce que vous mettez derrière ces mots-là, c'est-à-dire ce lien, ce lien indissociable entre autonomie et gouvernance.
n(18 h 20)nLe Président (M. Marsan): Mme Boucher.
Mme Boucher (Denise): Je dirais que vous... Vous le retrouvez presque dans la parenthèse, hein, quand on dit que ça prendrait dans ce cas-là des processus qui soient plus rigoureux, que ça prend aussi des garde-fous qui soient plus efficaces. Si on reprend à l'exemple par rapport au comité de vérification qui n'avait pas fait les vérifications qui s'imposaient dans le cas qui est cité ici, dans la question de l'UQAM, peut-être que, là, dans ces cas-là, il faut être beaucoup plus rigoureux. Il faut effectivement, compte tenu de cette forte autonomie, qu'on soit encore plus rigoureux, quitte à être encore plus... qu'on soit sûr que les gens se rencontrent, qu'ils aient tout ce qu'ils... qu'ils aient devant eux pour pouvoir faire les analyses qui s'imposent. C'est comme ça qu'il faut le voir. Donc, c'est sûr qu'à ce moment-là il faut renforcer, puis il faut être plus vigilants, puis il faut se donner...
Et le conseil d'administration ? peu importe le modèle de gouvernance, qu'il soit même celui actuel, avant même les projets de 38 ou de 44 ? doit aussi faire en sorte d'être... de se dire: Bien, peut-être que l'exemple qu'on a vu ou qu'on a entendu... on a peut-être intérêt, nous, à faire en sorte de corriger. On a peut-être des lacunes à l'interne. On a peut-être nous-mêmes à revoir quelques mécanismes. Mais ça, que ce soit 38, 44, peu importe, là, actuellement... Et je pense que les crises qu'on a connues, même en dehors de celle de l'UQAM... On en a connu dans les entreprises privées. Certaines se sont posé certaines questions dans leurs mécanismes de contrôle et les ont renforcés sans nécessairement passer par des lois. Alors, c'est dans ce sens-là qu'il faut le voir.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Bien, ce que je trouve intéressant, c'est que vous dites: Il y a une corrélation entre les deux. Autrement dit, si on a de l'autonomie, ça permet aussi de développer son sens des responsabilités, on pourrait dire, et donc de se doter de mécanismes qui permettent un meilleur contrôle.
Le Président (M. Marsan): Mme Boucher.
Mme Boucher (Denise): Ça, les conseils d'administration ont toute l'opportunité de pouvoir le faire.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Une autre chose dont vous parlez ? puis vous êtes revenue là-dessus dans la première partie de l'échange ? c'est la question du meilleur équilibre entre les membres internes et externes. Est-ce que vous vous êtes penchée sur la question de la proportion? Parce qu'il y a là un noeud important. Tout le monde convient qu'une fois qu'on a dit que les membres internes et externes peuvent avoir chacun leurs regards, chacun leurs intérêts, que probablement le mot «indépendant» n'est pas adéquat et qu'il y a des chances que ça devienne peut-être externe, une fois qu'on a dit ça, nous demeurons avec cette question centrale, de savoir: C'est quoi, l'équilibre? Puis là il y a lieu probablement aussi de distinguer ce qui est bon pour les collèges et ce qui est bon pour les universités, qui n'ont pas les mêmes traditions et qui n'ont pas les mêmes compositions de conseils d'administration.
Mais j'aimerais savoir, moi, si vous avez été plus loin dans la notion d'équilibre entre les deux. Est-ce que, par exemple, vous tranchez, vous, la question des membres internes par rapport à externes en termes de proportion ou est-ce que vous plaidez pour que ce soit variable selon les lieux? J'aimerais vous entendre là-dessus parce que, honnêtement, pour nous, là, une fois qu'on aura accepté un certain nombre d'amendements, et j'en vois venir, là, avec lesquels, je pense, je n'aurai pas de problèmes... mais ça, ça demeure pour moi central. Puis, si vous pouviez nous éclairer, ça me serait utile.
Le Président (M. Marsan): Mme Roy.
Mme Roy (Josée): Oui. Bien, je vous ai entendu tout à l'heure parler des universités du Québec, qui avaient des nombres variables, là, justement dans cet équilibre. C'est certain que, nous, dans cet équilibre-là, on voit une représentation de l'ensemble des personnels des universités et des cégeps. On sait qu'à beaucoup d'endroits le personnel de soutien ou les professionnels ne sont pas représentés. On pense qu'ils font partie de la communauté et qu'ils peuvent apporter une contribution certainement importante. Mais on dit aussi dans notre mémoire qu'il faut tenir compte des histoires de chacun, de la culture de chacun, de... parce que nos universités ont parfois de très longues histoires, il faut en tenir compte aussi. Je pense que c'est un peu pour ça qu'on appelait à... Les projets de loi sont arrivés, ils requièrent... ils ont peu d'adhésion de la part des gens des institutions. Il aurait peut-être été intéressant de prendre plus de temps pour aller chercher cette adhésion par un débat plus large avant. Là, on est devant les projets de loi, il y a peut-être moyen de rattraper certaines choses, mais il est clair que cet équilibre-là doit aussi avoir une notion... C'est beaucoup une notion d'équité et de participation, de participation aux décisions pour une meilleure adhésion de collégialité, on revient toujours aux mêmes choses, et de participation de l'ensemble des personnels. Alors, il ne faut pas en oublier. Ces institutions-là fonctionnent avec l'ensemble des gens qui y contribuent, et tous ces gens-là peuvent très bien avoir un apport, un grand apport au niveau des conseils d'administration.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Bien, si je renchéris sur ce que vous dites, effectivement, là, dans votre mémoire, vous parlez d'«une approche qui respecte les traditions et les diversités [des] institutions» et vous dites qu'une approche trop normative ne serait pas appropriée. Donc, ce que je retiens, c'est que vous seriez à l'aise avec un projet de loi qui ne soit pas ce qu'on appelle communément du mur-à-mur ou, en tout cas, qui puisse intégrer les particularités ? vous dites les traditions, la diversité ? des établissements qui sont en question. C'est ça?
Le Président (M. Marsan): Madame...
Mme Roy (Josée): Oui, tout à fait.
Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la députée de Taillon, la parole est à vous.
Mme Malavoy: Oui. J'ai une autre question. Il me semble que vous mettez le doigt sur quelque chose d'important. Je sais qu'on n'est pas dans l'étude article par article, mais quand même on va y venir. Vous parlez des fameux comités, là. Tout à l'heure, on a discuté de leur pertinence. Mais il y a une question que vous notez bien, je trouve, qui est préoccupante, c'est le fait que... Je vais citer, je vais lire ce que vous dites, là, à la page 10: «Ces comités doivent être composés de membres externes dits indépendants et d'au plus une personne de l'interne, ce qui veut dire qu'il pourrait n'y avoir personne de l'interne sur ces comités.» Alors... bien là, j'ai sorti le projet de loi, puis on dit bien que... Attendez un petit peu parce que je veux m'assurer, là, de bien comprendre ce que vous indiquez. Parce qu'il y a trois comités et, si «au plus [un] de l'interne» veut dire qu'il pourrait ne pas y en avoir, il pourrait y avoir trois comités où il n'y a personne de l'interne, si on pousse la logique. Il n'y a rien, dans la façon dont c'est libellé, dans la façon dont vous le comprenez, qui... C'est ce que vous avez compris. O.K.
Bien, moi, j'avoue que je l'avais lu, là, mais je me rends compte que c'est vraiment quelque chose à préciser, parce qu'on dit: «Tout comité ? là, je parle de l'article du projet de loi ? [...]est composé de membres indépendants et d'au plus un membre issu de la communauté universitaire.» Ce n'est pas «d'au moins» puis ce n'est pas «d'un», c'est «au plus». Ça fait que qu'est-ce qu'il y a en deçà d'au plus? C'est rien, c'est zéro, il me semble. C'est ça que vous avez détecté.
Qu'est-ce qui serait souhaitable, selon vous? Mettons que ces comités existent. Parce qu'il y a la question de savoir s'ils sont nécessaires. La Fédération des cégeps est venue nous dire: On a déjà des comités, on a des règlements, on a des procédures, on a des questionnaires. Bon. Eux disent: On n'a pas besoin de ces comités en plus. Mais, mettons qu'ils existent, selon vous, qu'est-ce qui serait souhaitable comme fonctionnement?
Mme Roy (Josée): Bien...
Le Président (M. Marsan): Mme Roy, la parole est à vous.
n(18 h 30)nMme Roy (Josée): Bien, c'est la... On pense la même chose que pour le conseil d'administration, il devrait y avoir là aussi un équilibre. Il devrait... minimalement une présence de quelqu'un de l'interne et on devrait aussi chercher là un équilibre. Il y a des compétences à l'interne sur ces différentes choses là. Pourquoi s'en priver? C'est ça, on chercherait l'équilibre là-dedans, mais on est quand même un peu d'accord, là, avec la Fédération des cégeps sur le fait que c'est une structure lourde. Surtout pour beaucoup de petites institutions, là, c'est quand même une structure lourde. C'est peut-être une structure qui est plus adaptée à une université. Les cégeps sont quand même dans un encadrement beaucoup plus serré, et il y a certains cégeps, là, pour lesquels ça pourra être difficile et représenter une lourdeur, là. Mais, si les comités existent, on viserait un équilibre.
Mme Malavoy: Et, là encore, sans...
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Oui. Là encore, vous dites «équilibre». En fait, vous ne vous prononcez pas sur la précision de l'équilibre, mais je comprends qu'«équilibre» va dans le sens de «meilleure représentation des gens de l'interne». On peut au moins comprendre...
Mme Roy (Josée): Tout à fait.
Mme Malavoy: ...au moins comprendre ça.
Le Président (M. Marsan): Mme Roy.
Mme Roy (Josée): Il faut qu'il y ait des gens de l'interne sur les comités.
Mme Malavoy: Oui, il faut qu'il y en ait suffisamment pour qu'ils aient un poids ? mettons que je garde pour le moment des termes généraux, là ? dans les décisions ou les recommandations qui seraient prises.
Le Président (M. Marsan): Mme Roy.
Mme Roy (Josée): Ça permet aussi d'éclairer les gens qui sont au comité d'un autre point de vue que l'unique point de vue de la direction. Ça nous semble absolument nécessaire que des gens du terrain soient présents, qui ont des compétences. Dans les universités, dans les cégeps, il y a des gens qui ont des compétences en comptabilité, en vérification, en éthique, en gouvernance. Pourquoi s'en priver? Les gens de l'externe n'ont pas nécessairement tous ces compétences-là non plus. On doit chercher à avoir les bonnes personnes sur les bons comités pour prendre les bonnes décisions, puis faire les bonnes actions, puis poser les bonnes questions. C'est beaucoup ça.
Mme Malavoy: Ma collègue de Champlain aurait une question.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Champlain, la parole est à vous.
Mme Champagne: Merci, M. le Président. Mesdames, bonjour. Oui, comme disait ma collègue, votre communiqué, il est à la fois petit, mais il est à la fois costaud. Il contient plein d'éléments, là, qui nous interpellent, comme vous le voyez, entre autres sur ces fameux comités là. Puis je vais continuer sur... dans le même vent, si on veut.
Il existe déjà des comités de surveillance. Il existe déjà, autant au cégep qu'à l'université ? à moins que je me trompe grandement, là ? des comités de surveillance, des comités d'éthique, peu importe le nom que ça porte, où on s'assure que les règles sont du moins respectées, puis il existe sûrement des comités de ressources humaines.
Alors, comment vous voyez de façon concrète, pratico-pratique, là, l'arrivée de ces trois comités-là? Ils s'inscrivent à l'intérieur? Ils défont les autres? Ceux qui sont là déjà, est-ce qu'ils comprennent des gens de l'interne? Est-ce qu'il y a déjà quelques personnes de l'externe dans ce genre de comité là? Parce que, pour moi, il est impensable que, dans les cégeps ou universités, on n'ait pas déjà un comité de ressources humaines, on n'ait pas déjà un comité d'éthique ou on n'ait pas déjà un comité au niveau finances. Ça ne se peut pas que ça n'existe pas. Alors, comment vous voyez s'imbriquer tout ça, là, cette espèce de casse-tête là, là? Parce qu'on va arriver sûrement à une conclusion à un moment donné, hein? Alors, l'équilibre, ça, je l'ai compris, vous le désirez, vous le souhaitez, et tous les groupes le désirent et le souhaitent également. Alors, comment vous voyez cet arrangement-là entre les comités déjà existants si on ne veut pas les multiplier puis les dédoubler, là? Vous le voyez comment, pratico-pratique, dans les faits, dans le concret de tous les jours?
Le Président (M. Marsan): Mme Roy.
Mme Roy (Josée): Bien, je... on n'a pas fait le tour de toutes les universités et tous les cégeps, là, je ne pourrais pas vous faire une nomenclature de ce qui existe puis de ce qui n'existe pas. Mais ce qu'on comprend, c'est que ce sera des comités du conseil d'administration. Nous, on a pris pour acquis que c'est le comité... c'étaient les comités qui allaient exister à partir du moment où la loi entrerait en vigueur, là, ce seraient des comités nouveaux, oui, qui relèvent du conseil d'administration, qui sont composés de membres du conseil d'administration, ces trois comités-là, là.
Nous, ce qu'on a compris là-dessus, c'est que probablement que la situation est assez variable d'une institution à l'autre, mais qu'il fallait minimalement ces trois comités-là, ce qui n'empêcherait pas, dans un souci de respecter la diversité aussi... Il y en a peut-être d'autres qui ont d'autres genres de comité. On ne voit pas que ça abolisse l'ensemble des comités que les institutions peuvent s'être donnés, mais on souhaite que minimalement les conseils d'administration aient ces comités-là comme une espèce de base, mais sans nécessairement tout... remettre en question les compositions des... les comités déjà existants dans les différentes institutions.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Champlain.
Mme Champagne: Je comprends bien que, s'il y avait équilibre en termes de représentativité, vous n'êtes pas en désaccord avec ces trois comités-là. C'est ça que je comprends. Puis là je vais aller encore un petit peu...
Une voix: ...
Mme Champagne: Oui?
Mme Boucher (Denise): Mais en même temps, ce qu'on dit aussi dans notre mémoire, c'est que les mandats doivent être clairs. Parce que, si le mandat du comité de ressources humaines, c'est de faire en sorte d'aller jouer dans l'autre comité qui est déjà régi par une autre loi, bien là, je pense que, là, il faudra chercher l'utilité. Donc, il faudra... le conseil d'administration aura à déterminer les mandats.
Bon, pourquoi ces trois comités-là arrivent? Josée l'a dit tout à l'heure: Sans aucun doute parce que c'est tellement variable. Peut-être qu'il y en a que c'étaient des modèles.
Mais, moi, je ne voudrais pas qu'on fasse en sorte que la gouvernance vienne tuer la vie universitaire ou la vie des collèges dans la façon dont ils décident de vouloir faire les choses, puis qu'on décide de tellement normer les affaires, puis que, là, on décide de vivre juste sur ça, puis qu'on oublie qu'à côté peut-être qu'on pourrait avoir d'autres bonnes idées, puis qu'on les oublie parce qu'on a une obligation de répondre à trois comités. Moi, ça, je serais déçue de ça, parce que les universités, de par leur modèle, la façon dont ils vivent, les collèges aussi, des fois ils font des trucs dans des régions qui répondent à un besoin de la région, mais peut-être que ça ne répond pas pour un autre collège, ça répond à un certain type de collège, ça répond à une université.
Alors, il ne faudrait pas qu'on devienne tellement normé qu'on tue la vie, la vie universitaire, la vie de la communauté universitaire, la vie des communautés des cégeps. Puis, si ça devient une structure lourde, et si ça devient du duplicata, je pense qu'on a à se poser la question: Est-ce que c'est nécessaire, oui ou non, ces trois comités-là? La question devra être posée, parce qu'à mon avis, si c'est faire du duplicata sur quelque chose qui existe déjà puis qu'il faut qu'on remette de l'argent là-dedans, j'aimerais mieux qu'on mette l'argent particulièrement, entre autres, sur un des volets dont on parle, entre autres, dans les collèges, parce qu'on leur attribue la question de la formation continue, mais il y a un problème actuellement, il y a des enveloppes fermées. Alors, je ne sais pas comment ils vont faire pour être capables de vivre sur ce volet-là avec les enveloppes fermées. Ça aussi, ça soulève un autre type de débat.
Alors, si on est pour faire des structures pour faire des structures puis qu'on met de l'argent dans les structures, j'aimerais mieux qu'on n'en fasse pas, de structures, puis qu'on les mette dans la formation continue. Ça, c'est beaucoup plus avantageux, d'ouvrir des enveloppes pour répondre à des besoins ponctuels de formation qu'on a de besoin actuellement.
Le Président (M. Marsan): Merci, Mme Boucher. Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Bien, je voudrais juste, en terminant, indiquer que ce que je retiens, moi, de votre mémoire, c'est un mot clé, qui est «autonomie». Il y a, dans le projet de loi, différents éléments qui peuvent nous faire craindre que l'autonomie soit en péril. Il y a le danger d'une structure uniforme, bon, vous dites, si tout le monde doit passer par les mêmes structures, le même moule. Il y a d'autres éléments, là, comme par exemple le pouvoir de nomination des membres externes pour les collèges par la ministre. C'est aussi... Les collèges disent: Manque d'autonomie. Il y a aussi le fait qu'en ce qui concerne les universités la ministre établit des indicateurs quantitatifs et qualitatifs, hein, d'atteinte des objectifs en vertu de la mission des établissements.
Donc, moi, ce que je retiens, là, si j'avais une chose à retenir, c'est vraiment que vous plaidez pour l'autonomie, le respect de l'autonomie au nom de la mission de ces établissements. Et ce sera intéressant, au fur et à mesure, de voir dans quelle mesure précisément cette autonomie est respectée ou encore est fragilisée par ce qui est apporté dans le projet de loi.
Le Président (M. Marsan): Mme Boucher, en terminant. Ça va?
Mme Boucher (Denise): Je suis d'accord.
Le Président (M. Marsan): Alors, est-ce que... Oui. Mme la députée, ça termine le questionnement avec l'opposition officielle. Je vais maintenant céder la parole à notre collègue le député de Chauveau, porte-parole dans le domaine de l'éducation pour le deuxième groupe d'opposition. M. le député.
M. Deltell: Merci infiniment, M. le Président. Mesdames, soyez les bienvenues. Je vous faisais un petit clin d'oeil tout à l'heure en disant que vous étiez tout à fait d'accord avec la parité hommes-femmes; je vois qu'actuellement ce n'est pas respecté, mais ça ne nous dérange pas, au contraire, vous êtes les bienvenues.
Mme Boucher (Denise): Non, mais c'est parce qu'on a fait l'équilibre pour le groupe d'avant.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Deltell: Ah! O.K. Mais il y avait une dame, il y avait une dame, par exemple.
Mme Boucher (Denise): Mais ils étaient pas mal plus de gars.
M. Deltell: On ne partira pas une chicane de syndicats ici, là. Moi, j'aime tout le monde.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. le député de Chauveau.
M. Deltell: Merci. Alors, M. le Président, j'ai évidemment beaucoup... Je pense que les gens de l'opposition officielle l'ont mentionné, en effet c'est un texte qui est très dense et fort apprécié, et vous allez vraiment au coeur, au coeur des points.
J'aimerais préciser avec vous certaines choses. Quand vous parlez, par exemple, des salariés membres du conseil d'administration qui doivent être considérés comme administrateurs indépendants, je sais que vous avez plaidé l'affaire, mais je vous avoue que je peux vous entendre davantage là-dessus, parce que, tu sais, qu'est-ce que ça donnerait de plus, d'avoir ce statut-là d'indépendant? Qu'est-ce qui fait que ça permettrait d'avoir davantage de prises de position? Puis pourquoi vous recherchez justement ce statut d'indépendant pour les gens que vous représentez qui seraient sur le conseil d'administration?
Le Président (M. Marsan): Mme Roy.
n(18 h 40)nMme Roy (Josée): En fait, ce n'est pas... on ne veut pas qu'ils aient un statut d'indépendant, on veut... C'est parce que, dans la marée dont Mme Malavoy parlait tout à l'heure, qui est, dans la plupart des conseils d'administration, de favoriser la venue de nombreux administrateurs externes, qu'on considère comme indépendants, on prend pour acquis qu'une personne qui est de l'interne est dépendante, et, nous, ce qu'on dit, c'est qu'on ne considère pas qu'une personne de l'interne est nécessairement dépendante. On ne devrait pas parler de ça, dépendant, indépendant, on devrait plutôt parler d'externe, interne, parce que dépendant, indépendant, ça fausse, ça fausse les choses parce qu'on pourrait... on peut dire des gens de l'externe qu'ils sont dépendants de la direction pour obtenir l'information, savoir ce qui se passe dans l'établissement, on peut dire des salariés qu'ils sont dépendants parce que leur salaire vient de l'établissement.
Alors, on considère que c'est une fausse façon d'aborder la chose et qu'on devrait plutôt parler d'externe, interne. Alors, pour nous, ce n'est pas un statut, là.
M. Deltell: Et, dans votre paragraphe, ici...
Le Président (M. Marsan): M. le député de Chauveau.
M. Deltell: Oui. Dans votre paragraphe ici, c'était bien précisé que vous souhaitez qu'ils soient indépendants. Je vous avoue que je cherchais...
Mme Roy (Josée): Qu'ils soient considérés comme indépendants.
Mme Boucher (Denise): Qu'ils soient considérés donc...
M. Deltell: Oui, c'est ça, là, je cherchais à savoir c'était quoi, la différence. Vous l'avez bien expliqué, je l'apprécie.
Un peu plus loin, justement dans la même page, vous parlez d'un équilibre de nombre entre administrateurs internes et externes. Tout à l'heure, vos prédécesseurs ? masculins ? ont souligné qu'eux, ils souhaitaient davantage plus des gens de l'interne, qu'ils soient majoritaires. Qu'est-ce que, vous, vous en pensez? Est-ce que vous partagez ce point de vue là?
Le Président (M. Marsan): Mme Boucher.
Mme Boucher (Denise): Nous, la seule chose qu'on a dite, c'est qu'on voulait que l'ensemble des personnels soient représentés. Alors, si la ministre décide de considérer qu'à tel... si on calcule, je ne sais pas, les professionnels et les enseignants, les employés de soutien, ça fait x, bien, il pourra autant y avoir de personnes qui pourraient provenir de l'externe. Nous, ce qu'on veut, c'est que les personnels soient représentés.
M. Deltell: Donc... Mais vous êtes... vous ne tenez pas à ce que...
Le Président (M. Marsan): M. le député de Chauveau.
M. Deltell: Merci, M. le Président.
Mme Boucher (Denise): Ce n'est pas ce qu'on a dit dans notre document. On parle d'équité, on parle d'égalité.
M. Deltell: D'équilibre. Non, c'est parce que, vous, vous parlez d'équilibre, c'est pour ça que je voulais savoir. Est-ce que vous souhaitez quand même que... puisque vous représentez vos gens, que vous soyez majoritaires?
Le Président (M. Marsan): Mme Boucher... Mme Roy.
Mme Roy (Josée): Bien, ce n'est pas une question de majorité, là. Mettons que l'équilibre, là, 50-50, ce serait le fun. Tu sais, ça ressemble pas mal à de l'équilibre, ça, 50-50. On ne tient pas nécessairement à une majorité puis on veut tenir compte de l'histoire des universités. Mais disons que 50-50, comme équilibre, c'est pas mal... c'est pas mal ça.
Le Président (M. Marsan): Mme Guérin, vous voulez faire un commentaire?
Mme Guérin (Ginette): Oui, s'il vous plaît. Bien, moi, je représente en particulier le personnel de soutien dans les universités et dans les collèges et je veux juste indiquer que, oui, on pense qu'on a le droit d'être là et on voudrait qu'une place nous soit réservée, comme ça l'est dans les commissions scolaires au niveau des conseils d'établissement.
Alors, ce modèle-là fonctionne très bien dans les écoles primaires et secondaires. Pourquoi ne pas le reprendre ailleurs? On est toujours dans le domaine de l'éducation. Et ce n'est pas parce qu'on veut prendre le contrôle des conseils d'établissement ou des conseils d'administration, on veut juste être là. On possède de l'information et on pense que notre place est là pour pouvoir livrer cette information-là pour que les décisions qui se prennent se prennent en toute connaissance de cause, tout simplement.
Mme Boucher (Denise): Et j'ajouterais quelque chose...
Le Président (M. Marsan): Mme Boucher, un dernier commentaire.
Mme Boucher (Denise): ...parce que ça fait deux fois que je vois la ministre qui dit tout le temps: Mais c'est qui qui va trancher? Mais, moi, je pense que, dans un conseil d'administration, l'objectif, c'est de trouver... À mon avis, ce n'est pas dans le vote. On est bien mieux de trouver le consensus, et là, dans le consensus, on fait en sorte qu'on a avancé, et là il n'y a pas personne qui a besoin de trancher. Parce que ça ne veut pas dire que ça va trancher internes puis externes en...
Une voix: ...
Mme Boucher (Denise): Non, mais c'est parce que vous dites... À chaque fois, vous avez dit: C'est qui qui va trancher? Mais, même si c'est 50-50, ça ne veut... 50-50, le monde, ils peuvent être... Disons qu'il y a 20 personnes, il y en a... il peut y en avoir 12 qui sont du même bord puis... ou 12 qui ne sont pas dans le même bord.
M. Deltell: Généralement, c'est 17, ce n'est pas... Ça ne se casse pas 50-50, généralement.
Le Président (M. Marsan): Mme Boucher, sur ce, nous vous remercions et nous remercions... nous remercions Mme Guérin, Mme Langlois et Mme Roy d'avoir exposé le point de vue de la Confédération des syndicats nationaux.
Mémoire déposé
Avant de terminer, je voudrais déposer les commentaires de la Protectrice du citoyen concernant le projet de loi n° 44. Et la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 44)
(Reprise à 20 h 3)
Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 38, Loi modifiant la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire et la Loi sur l'Université du Québec en matière de gouvernance, et sur le projet de loi n° 44, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel en matière de gouvernance.
Et nous avons l'occasion de recevoir, ce soir, l'Association pour une solidarité syndicale étudiante, et M. Christian Pépin est le secrétaire à la coordination. Je vais lui demander de nous faire la présentation des gens qui l'accompagnent, et vous avez une période maximale de 30 minutes pour nous faire votre présentation. Par la suite, il y aura les échanges habituels avec tous les partis. Alors, M. Pépin, la parole est à vous.
Association pour une solidarité
syndicale étudiante (ASSE)
M. Pépin (Christian): Donc, merci. Donc, Mmes, MM. les députés, bonsoir. Donc, je me présente: Christian Pépin, comme il a été dit, secrétaire à la coordination de l'Association pour une solidarité syndicale étudiante, l'ASSE, et également étudiant à l'UQAM.
Avec moi, ce soir, nous avons la présence d'Anne-Marie Provost, qui est secrétaire aux communications de notre organisation, également étudiante à l'UQAM et ayant été administratrice au cégep du Vieux-Montréal pendant un an; et à ma droite, ici, M. David Clément, un membre de l'ASSE, étudiant à l'Université du Québec en Outaouais et ayant une expérience de deux ans sur le conseil d'administration de l'UQO et toujours membre du conseil d'administration en question.
Donc, bien, brièvement, pour présenter la raison d'être de notre organisation, bien, tout d'abord, l'ASSE est née dans le cadre d'un vaste mouvement de contestation contre un nouvel ordre mondial qui tendait de plus en plus à vouloir soumettre l'ensemble des institutions de la société et des biens publics à la logique de la marchandisation, et plus précisément, je parle du vaste mouvement de contestation qui est né dans le cadre du Sommet des Amériques, à Québec, qui visait à s'opposer finalement à la Zone de libre-échange des Amériques.
Finalement, pour nous, à l'ASSE, ce moment-là fut un contexte de fondation qui visait finalement à défendre une autre vision d'un monde dans lequel la prédominance... la prééminence du profit ne viserait pas à passer avant le bien public et les besoins des êtres humains. Notre mobilisation, finalement, s'est continuée en visant finalement le droit à l'éducation.
Pour nous, la mission essentielle de notre organisation est de défendre les intérêts matériels et moraux de nos membres. Cela passe par une éducation publique, gratuite, laïque et de qualité. Et, en ce sens-là, pour nous, plusieurs mobilisations ont été faites à la suite d'une vaste contestation d'un nouvel ordre mondial basé sur la prééminence du profit. Et, en ce sens-là, nous avons été à l'avant-plan d'une mobilisation contre l'augmentation des frais de scolarité au Québec, contre des réformes dans l'aide financière aux études, qui dégradaient la condition étudiante.
Et, l'an passé, nous avons lancé une vaste campagne qui s'intitulait Pour un système public, libérons-nous du privé! qui en fait visait à s'opposer à la vague de privatisation de nos institutions, que ce soit d'enseignement ou de santé, au Québec. Cela a, entre autres, été l'occasion d'écrire en fait un manifeste qui a été signé par plus de 1 600 citoyens et citoyennes et une centaine d'organisations communautaires, syndicales, politiques et étudiantes, représentant plus de 200 000 personnes qui ont signé ce manifeste. Enfin, cette campagne a culminé, le 26 mars 2009, avec plus de 1 500 personnes qui ont pris la rue, et 19 000 étudiantes et étudiants étaient en grève pour mettre de l'avant ces revendications et dénoncer la logique du privé dans les institutions publiques.
Donc, on est ici en fait pour continuer de mettre de l'avant cette revendication-là, qui visait entre autres à exiger une démocratisation des conseils d'administration d'enseignement. Malheureusement, malgré une contestation de notre part et de plusieurs autres organisations syndicales et étudiantes au Québec, nous voyons que notre voix n'a malheureusement pas été entendue parce que le projet de loi dorénavant déposé, nos 38 et 44, n'a pas fait des modifications substantielles et, en résumé, consiste en quelques modifications cosmétiques.
Donc, avant de passer la parole à David Clément, qui sera finalement la personne qui présentera pour l'essentiel notre mémoire, nous tenons à souligner que ce mémoire-là, que nous avons déposé ici, en commission, a été débattu dans le cadre de nos assemblées générales étudiantes, donc selon les règles démocratiques de notre organisation, et a aussi été adopté unanimement dans notre congrès annuel de l'an passé.
Enfin, avant de céder la parole, je voudrais dire que, contrairement à ce qui a été affirmé par la ministre lors du premier jour des consultations: que les associations étudiantes auraient défendu davantage le projet que les directions des collèges, bien, je suis désolé de vous décevoir, mais, ce soir, vous allez voir que ce n'est pas l'ensemble des associations étudiantes qui sont d'accord avec les projets de loi actuels, bien au contraire. Et, nous, ce soir, nous allons critiquer davantage sévèrement les projets de loi que ces directions. Donc, je passe la parole à M. David Clément.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Clément, la parole est à vous.
n(20 h 10)nM. Clément (David): Merci, M. le Président. Comme mon collègue vient de le dire, on est ici, aujourd'hui, pas pour venir négocier avec le gouvernement, on est ici pour venir vous porter le message des membres de l'ASSE, qui a été adopté en congrès, après de longues discussions.
Contrairement à d'autres organisations, pour notre part on ne s'en vient pas proposer des modifications mineures à certains articles du projet de loi, on s'en vient vous dire que ce projet de loi là doit être rejeté dès maintenant, doit être retiré de la table du gouvernement... du Parlement pour qu'on puisse en discuter, mais pas sous la pression que le gouvernement actuel nous impose, c'est-à-dire en déposant des projets de loi, en faisant quelques auditions en commission parlementaire, et, par la suite, grâce à son gouvernement majoritaire, adopter un projet de loi qui est non voulu par la majorité des communautés universitaires et collégiales.
Donc, pourquoi qu'on est ici, ce soir? C'est justement pour vous présenter le mémoire qu'on vous a soumis. J'espère que l'ensemble des députés ont pu en prendre connaissance et l'ont lu attentivement. Dans le fond, le message qu'on s'en vient vous porter ce soir, c'est que les projets de loi qu'on discute actuellement, nos 38 et 44, s'ils sont adoptés, mettront à mort le système d'éducation public qu'on a pu connaître depuis 1968, au Québec, et auquel on s'attache chèrement, à l'ASSE.
Je commencerais la présentation du mémoire avec le fait qui, j'imagine, a apporté... ou une excuse, si on pourrait dire, pour déposer des projet de lois sur la gouvernance, c'est-à-dire le fiasco économique et académique qui a eu lieu à l'UQAM, dans la dernière année. On le sait bien, c'est la goutte qui a fait déborder le vase. Tout le monde s'entendait avant ça qu'effectivement la gestion des collèges, des cégeps et des universités était déficiente à plusieurs niveaux. Pour notre part, on trouve particulièrement que le niveau académique n'y est presque jamais et que la gouvernance de nos institutions postsecondaires est souvent centrée sur les principes économiques et financiers, ce qui les met à mal.
En parlant de ça, justement pour pouvoir commencer la commission parlementaire... notre audition sur un bon pied, on lancerait une question à la ministre, qu'elle pourra, je l'espère, répondre tantôt. Considérant qu'à l'UQAM le fiasco financier a été arrêté, a été dénoncé publiquement par les membres internes et non pas par les membres externes qui, eux, pour leur part, de manière complaisante, ont appuyé la direction de l'UQAM dans ce fiasco historique, on poserait la question: Pourquoi les projets de loi nos 38 et 44 ont été déposés au gouvernement, alors qu'a priori les projets de loi nos 107 et 110 l'avaient déjà été et avaient eu une réaction, ma foi, assez forte des communautés collégiales et universitaires, qui l'avaient rejeté du revers de la main?
Pour notre part, on considère, comme mon collègue l'a dit tantôt, que, contrairement à ce que la ministre a dit à la suite des consultations strictement sur le projet de loi n° 44, ce n'est pas vrai que l'ensemble des associations étudiantes trouvent ou saluent la pertinence des projets de loi qui ont été déposés. Pour notre part, on trouve qu'ils sont totalement impertinents dans le contexte actuel, et qu'il y a des troubles, dans notre système d'éducation, qui sont beaucoup plus importants que la composition des C.A. et surtout de l'augmentation des membres externes sur ces C.A. là. Si on regarde l'histoire des cégeps et des universités, et ce, à très court terme, les membres internes ont toujours eu leur importance capitale, à titre de rempart, face aux directions qui parfois pouvaient dévier des missions qui ont été instaurées ici même, à l'Assemblée nationale, de nos cégeps et de nos universités, qui, rappelons-le s'il le faut, est une mission académique, éducative, de développement et de transmission des connaissances et non pas une mission économique de rentabiliser des établissements d'éducation postsecondaire.
Comme on l'a vu aussi, les projets de loi sont particulièrement basés sur un rapport qui a été déposé par un institut dont l'acronyme est l'IGOPP, qui disait dans le fond que, selon elle... selon l'institut, qui s'est fait un groupe de travail avec des principals et des recteurs d'universités québécoises, que dans le fond la meilleure manière d'éviter soit des fiascos comme l'UQAM ou des dérapes de toutes sortes, c'était de donner une majorité absolue au monde qui proviennent de l'externe des établissements, en définissant les membres internes de ces communautés-là comme étant «dépendants». On n'a jamais argumenté sur le «dépendants» de quoi. On dit «dépendants» parce qu'ils sont étudiants, étudiantes, parce qu'ils sont salariés. Par contre, nous, ce qu'on amène ici, c'est qu'ils sont dépendants surtout de la mission de nos institutions d'éducation postsecondaire.
Ce qu'on a pu voir à l'UQAM et dans l'ensemble des autres universités et des cégeps, c'est que les membres internes habituellement sont là justement pour défendre ? ce que la loi leur oblige d'ailleurs ? la mission fondamentale de ces institutions-là qui ont été, encore une fois, adoptées ici. Et c'est le rôle de tout administrateur ou administratrice que de défendre cette mission-là, non pas de défendre la direction, non pas de défendre le gouvernement, de défendre la mission fondamentale de ces établissements. Et on croit que c'est les membres internes qui peuvent dans le fond être le rempart par rapport à cette mission-là.
Comme j'ai dit tantôt, le gouvernement semble, depuis environ une année, s'inquiéter de la gouvernance des cégeps et des universités à cause du fiasco de l'UQAM dans lequel dans le fond le gouvernement a quand même été un acteur important dans cette dérape, avec des manques de vérification. Nous, ce qu'on dit, c'est que ça fait longtemps que c'est comme ça et ça fait longtemps que la gouvernance peut être un problème dans les cégeps et les universités; par contre, que le problème de base à la source est, un, le sous-financement de ces institutions-là, qui amène des directions à faire de la gestion de coupure à peu près quotidiennement, et, de deux, la mission, qui a été transférée des universités où est-ce qu'on ne voit plus les universités comme étant un centre de développement et de transmission des connaissances, mais bien un centre de développement économique, ce qui est loin d'être sa mission de base.
Dans le fond, ce que le rapport de l'IGOPP et ce que les projets de loi nous proposent actuellement ? et je sais que la ministre l'a démenti dans les dernières auditions, mais, nous, on le réaffirme ? c'est que les projets de loi amènent une culture de l'entreprise privée au sein... ou veut amener ? parce que ce n'est pas encore adopté et, dans ce cas-là, on est heureux ? veut amener une culture de l'entreprise privée au sein de nos établissements d'éducation postsecondaire. Je pense qu'on a pu le voir, dans la dernière année, avec la crise économique internationale, les fiascos comme l'UQAM, malheureusement, la culture de l'entreprise privée n'a pas fait ses preuves pour sauver les meubles quand il est question de gouvernance. La plupart du temps, on a vu que l'entreprise privée était plus capable de défaire les meubles et de laisser ça par après en s'en allant et en laissant le public, pour ne pas utiliser le mot non politiquement correct, dans la bouette.
Donc, on va passer... je vais passer directement sur l'analyse de l'ASSE par rapport aux articles et à l'esprit surtout des projets de loi qui nous ont été présentés au courant de la session. Premièrement, la ministre et son gouvernement nous disent vouloir dans le fond protéger ou régler les problèmes d'imputabilité, de reddition de comptes. Pour notre part, ce qu'on voit dans les projets de loi, c'est qu'en aucun cas il n'y a une amélioration de la reddition de comptes qui pourrait être assurée. Il n'y a aucun cas, dans les projets de loi, qui va assurer une meilleure imputabilité. Pour notre part, ce qu'on voit, c'est que les projets de loi pourraient assurer des C.A. d'université encore plus opaques que ce qu'ils sont en ce moment.
Dans le fond, ce qu'on vous dit aujourd'hui, c'est que, si les projets de loi auraient été adoptés avant le fiasco de l'UQAM, que c'est les membres internes qui ont dénoncé ce fiasco-là, possiblement qu'encore aujourd'hui personne ne saurait qu'il y a une crise économique à l'UQAM parce que, comme ça a été le cas des externes et... des membres externes, il y a un appui à la direction qui est donné aveuglément.
Aussi, quand on regarde les projets de loi et le rapport de l'IGOPP, on peut faire un constat qui est assez simple ou assez clair, selon nous, mais qui peut être interprété effectivement, c'est quand on voit le problème de conflit d'intérêts où est-ce qu'on dit que les membres internes sont dépendants car ils ont un lien d'attache et que les membres indépendants, pour leur part, le sont... même si ils ou elles ont des conflits d'intérêts ponctuels. C'est qu'on découvre que la nouvelle gestion publique, on la voit d'une manière où est-ce que notre qualité d'administrateur ou d'administratrice se base plus sur notre incompréhension de l'institution dans laquelle on siège sur un C.A. plutôt que nos conflits d'intérêts économiques.
Pourtant, je pense qu'une des choses importantes, surtout quand on parle du système d'éducation et de l'ingérence du privé surtout dans les domaines académiques, le vrai problème, c'est les intérêts économiques, c'est les intérêts privés, c'est les intérêts idéologiques qui peuvent être placés là-bas. Et je pense qu'il y a des exemples qu'on pourrait passer au travers toute la soirée: à la limite, d'achat de cours qui se font présentement, dans les cégeps et universités, par des promoteurs immobiliers et d'autres membres de la société des affaires qui, en échange de dons, veulent pouvoir avoir des cours faits à leur mesure ou à la mesure de leur entreprise. Et on croit qu'avoir des C.A. composés majoritairement de ces membres externes ne pourrait que faciliter cette dérape de notre système d'éducation.
Mais le point le plus important et le plus dérangeant, et surtout je pense que c'est là-dessus que le débat a parti, c'est quand les projets de loi nos 107 et 110 ont été déposés l'année passée et que les 38 et 44 ont été déposés cette année, c'est qu'il y a un point, il y a un principe qui est fondamental, je pense, de la part du gouvernement, c'est de marginaliser la proportion des membres internes dans les lieux décisionnels des universités et des cégeps. On va pouvoir y revenir tantôt avec les trois comités. Il n'y a pas juste la composition du C.A. qui va être modifiée par les projets de loi s'ils sont adoptés, il va y avoir une épuration de tous les positionnements démocratiques qui étaient ou qui sont aujourd'hui assurés par les membres internes. Donc, dans le fond, ce qu'on voit dans les projets de loi, c'est qu'en plus d'acclamer les membres externes et leur pseudo-indépendance, on acclame surtout une chose, c'est que les membres de l'interne des cégeps et universités n'ont apparemment plus leur place dans les instances démocratiques de ces établissements publics.
Dans le fond, ultimement, c'est une digestion lente du dernier rempart de sécurité qu'on avait face aux directions collégiales et universitaires, qui pourraient avoir l'idée, pour quelconque raison, que ce soit économique ou idéologique, de déroger à la mission de nos établissements d'éducation postsecondaire, et ça, bien, nécessairement, on s'y oppose ardemment, car on y croit, à nos établissements d'éducation postsecondaire, on y croit surtout si leur mission est respectée. S'ils deviennent des usines à main-d'oeuvre qualifiée, on n'y croit plus. Ça ne vaudra pas la peine, ça ne sera plus des universités, ça va être des établissements au service de l'entreprise privée, des marchés régionaux, et, dans ce cas-là, par définition, ça ne serait plus une université.
n(20 h 20)n L'autre problème, comme on a pu le constater à l'UQAM, c'est que les membres externes, et ce, peu importe qu'ils proviennent du monde des affaires ou de quelconque autre partie de la société civile ? on fait vraiment une distinction entre les personnes qui sont internes à l'établissement et ceux qui sont externes ? c'est qu'habituellement on peut voir, de ces membres externes là, qu'ils ont une analyse qui est basée sur qu'est-ce qu'on peut voir dans notre monde actuel, sur deux colonnes: il y a les revenus, il y a les dépenses, et telle se fait l'analyse.
Dans une université, on ne peut pas fonctionner comme ça, ni dans les cégeps. Comme on voit, les membres internes, et pour ceux et celles qui ont peut-être fait le tour de certains C.A. ou rencontré les membres internes sur certains C.A., la plupart des membres internes ne verront pas la gouvernance d'une université ou l'adoption d'un budget strictement sur combien qu'il y a de déficit ou combien qu'il y a de gain, ils vont le voir sur est-ce qu'on est capables d'assurer notre mission, est-ce qu'on est capables d'élargir notre plan de cours, est-ce qu'on va être obligés de couper dans des programmes? La plupart du temps, les membres internes s'y opposent. Ce qu'on a pu voir à l'UQAM, c'est que, la plupart du temps, les externes appuient aveuglément ce massacre de la mission universitaire et collégiale.
Pour passer rapidement, dans le fond, sur les comités, je sais que ça a été discuté ici, on a pu entendre ce que la ministre et les autres députés en pensaient. Pour notre part, on considère... premièrement, il y a plusieurs universités et cégeps qui ont déjà des comités de ce genre, peut-être pas qui portent le même nom, mais chaque institution est libre, dans ses fonctions, de créer des comités pour l'aider dans son fonctionnement. Ce qu'on voit dans les trois comités qui sont proposés actuellement, c'est de créer une avant-garde au conseil d'administration, c'est-à-dire qu'il y aurait le vrai conseil d'administration où est-ce qu'effectivement il y aurait une majorité de membres externes, une majorité absolue de membres externes qui pourraient contrôler les décisions, et qu'en plus on purifie l'implication des membres internes, dans ces comités, qui vont nécessairement... Et j'imagine qu'ici, au Parlement aussi, vous pouvez le voir: quand un comité fait une recommandation à une instance, habituellement cette recommandation-là a une légitimité quasi parfaite.
Si je prends le cas de l'UQO puis quand une recommandation vient d'un comité, c'est assez dur de la débattre. Ça se débat et c'est légitime, mais malheureusement, souvent, ça passe dans le beurre, parce qu'on croit que ces comités-là ont la vérité infuse quant aux sujets qu'ils discutent.
Donc, pour notre part, autant qu'on soit contre la formation obligatoire de ces trois comités-là et des pouvoirs qui leur sont donnés, on est surtout contre encore une fois que le gouvernement va encore plus loin. On ne dit plus juste: Ça va être 60 %, ça va être deux tiers, on dit: Ça pourrait être le C.A. au complet, tous les membres externes vont pouvoir siéger sur le comité. Mais le point important, c'est que ça prend au plus un membre de l'interne. C'est un dénigrement ? comment je pourrais dire? ? fondamental de ce que sont les membres internes, de ce qu'est une communauté collégiale, de ce qu'est une communauté universitaire. Encore une fois, je le répète, on n'est pas dans une industrie, on n'est pas dans une entreprise privée qui produit des matériaux, on est dans un lieu de développement et de transmission des connaissances qui est essentiel à une société.
En parlant justement de la mission de ces établissements-là, je sais qu'il y a certaines associations étudiantes qui sont venues ici pour clamer la modification proposée par le gouvernement dans la mission des cégeps au Québec. Pour notre part, on la dénonce ardemment. Cette mission-là, qui était modifiée... Et, quand on regarde la loi actuelle, on voit que la mission... la mission des cégeps était l'éducation, avait un côté académique de forme générale et professionnelle. Aujourd'hui, quand on regarde la proposition qui est faite dans le projet de loi n° 44, c'est qu'on rend cette mission-là... elle devient la principale mission, mais on accorde maintenant une plus large mission au service à la collectivité. Et, si on le lit dans un sens large ? et j'imagine que vous allez le comprendre, ici, dans l'interprétation ? la collectivité peut être autant un citoyen ou une citoyenne qu'une entreprise privée de la région. Pour notre part, on voit cet ajout-là à la mission des cégeps comme étant une porte béante à ce que les cégeps deviennent des serviteurs dans le fond des entreprises privées dans leur région, ce qui n'est pas leur rôle, soit dit en passant.
Donc, dans le fond, ayant présenté ça... Et je pense qu'il reste en masse de temps, M. le Président?
Le Président (M. Marsan): Oui, allez-y.
M. Clément (David): Parfait. Nous, on croit tout simplement que le constat qui a été fait par la ministre et le gouvernement, c'est-à-dire qu'il manquait d'imputabilité, qu'il manquait de transparence et de reddition de comptes, on peut s'entendre là-dessus, comme que, voilà deux ans, quand la ministre de l'Éducation nous a dit: Il y a un sous-financement dans le système de l'éducation, on était d'accord là-dessus aussi. C'est des constats qui sont vrais. Les solutions qui sont amenées par le gouvernement, par exemple, sont à l'opposé total de la logique dans laquelle on devrait voir ces problèmes-là. On peut prendre l'exemple des frais de scolarité. Il y avait un problème de sous-financement, tout le monde s'entendait. La solution? Faire payer la population étudiante. Qu'est-ce qui est arrivé? Les universités ne sont pas plus financées aujourd'hui, le gouvernement s'est même permis de retirer des fonds dans le financement de ces universités-là.
Aujourd'hui, on nous dit: Il y a un problème dans la gouvernance des établissements d'enseignement postsecondaire, les cégeps autant que les universités. Quand on regarde la réaction majoritaire des communautés collégiales et universitaires, ce qu'on nous dit, c'est: La meilleure solution, là, c'est de se fier sur les internes. C'est d'avoir des internes qui vont être là, qui savent comment que ça se passe au jour le jour, qui vivent quotidiennement les conséquences des décisions des conseils d'administration dans les cégeps et universités. Pourtant, encore une fois, on est déçus. Il y a un rapport qui sort d'une organisation qui s'appelle l'IGOPP et on obtient des projets de loi qui vont dans la même direction que l'IGOPP propose sans pour autant qu'on ait prouvé que c'était plus ou moins crédible. Parce qu'on peut rappeler: l'IGOPP a sorti un document, en septembre 2008, où est-ce que, dans le fond, elle refroidissait son impression sur l'indépendance des membres externes et sur la qualification et les critères qu'on pouvait accorder à un membre indépendant en disant que, dans le fond, l'indépendance, ce n'était peut-être pas juste d'être externe à l'établissement, ça pouvait venir avec beaucoup d'autres critères de sélection. Donc, on croit tout simplement que la solution qui est envisagée aujourd'hui par le gouvernement est la pire des solutions. Ce n'est pas vrai, la pire, ce serait de donner le contrôle entier aux externes et au secteur privé. Mais la solution qui est proposée aujourd'hui, ce qu'on vient vous dire et ce qu'on espère qui va être entendu, c'est que ça ne réglera en rien la situation au sein des universités et des cégeps, ça va même l'aggraver.
Pour siéger sur un conseil d'administration à l'UQO, et Anne-Marie pourrait vous en faire part peut-être tantôt, les membres externes, la plupart du temps, sont dépendants: ils sont dépendants de l'information des directions collégiales et universitaires. Dans le cas de l'UQAM, le problème, si je suis obligé de le rappeler, c'était justement l'information qui était donnée par la direction universitaire qui cachait de l'information. Qui a été capable de mettre la puce à l'oreille de la communauté interne et des médias? C'est les membres internes au conseil d'administration, qui, eux, voyaient, parce qu'ils étaient là quotidiennement, que l'information qui était présentée par la direction était peut-être plus ou moins véridique. Finalement, elle s'est avérée même totalement... totalement mensongère, à la limite.
Donc, ce qu'on dit, c'est: Il faut absolument rejeter les projets de loi nos 38 et 44, il ne faut surtout pas procéder à leur adoption parce que ça serait mettre un clou dans le cercueil des cégeps et des universités, et surtout d'enlever le contrôle de ces institutions-là qui, depuis 40 ans, fonctionnent de manière collégiale et qui sont une fierté pour la plupart des organisations présentes dans le monde collégial et universitaire. Ça mettrait fin à cette collégialité-là, à ce mode démocratique ? ou, à tout le moins, minimalement démocratique ? qui ont cours présentement, dans les cégeps et universités, pour encore une fois donner toute la légitimité au secteur privé ainsi qu'à des acteurs externes aux cégeps et universités de décider de la bonne garde des établissements d'enseignement postsecondaire qui appartiennent dans le fond aux Québécois et aux Québécoises et non pas à l'entreprise privée.
Pour l'ASSE, dans le fond, la solution est simple, je l'ai dit tantôt, c'est de se fier nécessairement sur les membres internes. Mais, vu que ces universités et ces cégeps-là sont financés en très grande majorité ? et on aimerait qu'elles le soient en totalité ? par des fonds publics, on croit qu'elles se doivent d'être dirigées par des personnes qui y vivent quotidiennement, qui ont l'expérience quotidienne d'une université, d'un cégep, de l'académique. Parce qu'on s'entend, il n'y a pas juste des décisions économiques qui sont prises dans les conseils d'administration des cégeps et universités. De par leur mission, les plus importantes décisions sont d'ordre académique, sont d'ordre pédagogique, et on croit que les mieux placés pour pouvoir en débattre et apporter des points intéressants sont nécessairement les communautés respectives de ces établissements-là.
Finalement, je sais que la question va venir tantôt, donc on va lancer la réponse tout de suite: Notre solution idéale pour la composition d'un conseil d'administration, et ici on parle de l'idéal, ce serait pour nous tout simplement l'autogestion, c'est-à-dire que ces établissements-là soient gérés totalement par les communautés internes des cégeps et des universités. Par contre, dans une avenue, quand on regarde ce qui se passe en ce moment, où est-ce que la plupart du temps il y a une majorité de membres internes, une légère majorité de membres internes qui sont présents, on croit que c'est le minimum pour garantir une gestion démocratique, transparente, imputable et qui rend des comptes, autant au gouvernement, qu'à la population en général, qu'à sa communauté respective.
Donc, on vous lance là-dessus, on espère avoir des bonnes questions, et je vais repasser la parole à mon collègue.
Le Président (M. Marsan): M. Pépin.
n(20 h 30)nM. Pépin (Christian): Donc, bien, pour brièvement conclure, en fait je pense que, comme il a été dit, pour nous, si, dans le fond, on veut véritablement répondre aux problèmes qui sont soulevés actuellement par la ministre, ce n'est pas en allant dans la direction actuellement proposée, mais, bien au contraire, c'est une tout autre orientation qu'il faut faire.
Donc, pour nous, la meilleure manière de renforcir la collégialité, principe qui a été défendu, à maintes reprises par plusieurs organisations au sein de cette commission, c'est par la réappropriation des institutions d'enseignement par leurs communautés collégiales, universitaires respectives. Et, pour nous, ultimement, comme il a été dit, c'est l'autogestion qui doit être visée ultimement.
Mais une chose qu'on déplore puis qui a été dite dans la présentation, c'est la réduction, finalement, des problèmes ayant eu cours à l'UQAM, et plus largement dans l'ensemble de notre réseau d'enseignement, aux simples questions de gestion, d'administration, qui sont des termes qui renvoient à des enjeux neutres, finalement sans prise de position idéologique et finalement qui masquent les conflits qui sont à l'oeuvre et les visions qui s'opposent actuellement par rapport à ce que devrait être l'éducation au Québec. Et, pour nous, cette commission devrait être un endroit qui devrait élargir ces perspectives sur: Quels sont véritablement les enjeux qui sont à l'oeuvre? Et quels sont finalement les débats qu'on doit avoir ce soir?
Donc, au-delà de la seule question de la composition des conseils d'administration, nous pensons que, comme le Conseil du patronat a soulevé dans une lettre dans un quotidien, disant, dans le fond, que c'était l'occasion, cette commission, de parler de financement... Ils parlaient de financement des universités, et, pour nous, on doit parler de financement collégial. Par contre, contrairement au Conseil du patronat, pour nous, la direction, en termes de financement, ne doit pas aller dans le sens d'une libéralisation des droits de scolarité et d'une tarification croissante de l'éducation mais, bien au contraire, d'un réinvestissement massif en éducation qui viserait à reprendre... que l'État reprenne son rôle de financement public intégral, qui passerait, à terme, par l'instauration de la gratuité scolaire au Québec et par un régime adéquat de prêts et bourses.
Enfin, nous pensons que ce qui est à l'oeuvre actuellement dans les projets de loi, c'est une confusion de plus en plus importante quant à la nature de nos institutions actuellement au Québec, parce que nous croyons que, de plus en plus, les députés semblent de plus en plus soumis et suivre aveuglément les préceptes du nouvel ordre mondial qui vise à suivre les grands préceptes des grandes organisations internationales comme l'OCDE, le FMI, la Banque mondiale, et tout récemment par les recommandations d'organisations d'experts comme l'IGOPP, et nous pensons que cela vise finalement à soumettre de plus en plus nos institutions d'enseignement. Les sociétés d'État ont déjà été soumises à ces principes-là par le projet de loi n° 53. Maintenant, par les projets de loi n° 38 et n° 44, un nouvel assaut tente d'être fait par nos institutions, et nous pensons qu'un véritable débat de société s'impose afin de réhabiliter des principes clairs, sur lesquels devrait être faite notre gestion, qui seraient des défenses de principes académiques visant la qualité de l'éducation et visant l'accessibilité également de notre éducation au Québec.
Donc, en espérant que, ce soir, nous ne parlerons pas uniquement de gestion mais de vision politique de notre éducation au Québec. Puis c'est pour ça qu'on est là ce soir.
Le Président (M. Marsan): Alors, est-ce que ceci termine votre présentation?
M. Pépin (Christian): Oui.
Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie beaucoup, vous l'avez fait à l'intérieur du temps réparti.
Juste avant de laisser la parole à la ministre, je voudrais mentionner qu'à la fin de la session précédente nous avons déposé le projet... non pas le projet de loi mais les commentaires de la Protectrice du citoyen, et on va se faire un devoir de vous le distribuer ce soir.
Et je voudrais aussi avoir votre consentement pour... Nous accueillons notre collègue le député de Mercier. Ce dernier souhaiterait prendre la parole, et on m'indique que ce serait pour un délai très court, on parle de une ou deux minutes, et ce serait sur le temps imparti à l'opposition
Alors, si tout le monde est d'accord, nous allons immédiatement procéder. Je laisse la parole à la ministre de l'Éducation, des Loisirs et des Sports. Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Madame messieurs, d'abord, je veux vous remercier d'être venus jusqu'ici ce soir. Une commission parlementaire est effectivement un lieu démocratique pour pouvoir... pour que tout citoyen puisse exercer en toute liberté sa capacité de s'exprimer sur des projets de loi ou sur tout autre sujet que les commissions jugent utile de faire. Et je tiens à le dire parce que, quand on lit votre mémoire, c'est un mémoire qui a son franc-parler. Vous-même êtes des... en tout cas, des gens reconnus pour votre franc-parler, c'est le moins que l'on puisse dire. Et, au-delà des mots ou au-delà du... le ton a été excellent, cela dit, mais, au-delà des mots utilisés, surtout à la lecture de votre mémoire, parce que, sur certaines affirmations, vous allez très loin, et c'est votre droit le plus strict, mais vous allez très loin dans votre interprétation des intentions ou de la ministre ou du gouvernement.
Moi, je pars de votre titre, du titre de votre mémoire, qui dit: Le privé a besoin de nous... nous n'avons pas besoin du privé!, donc ça a l'avantage d'être clair. Mais deux d'entre vous, c'est ce que j'ai cru comprendre, siégez déjà sur des conseils d'administration de vos institutions, et, sur les conseils d'administration de ces institutions, si je prends l'UQO, par exemple, il y a des membres qui sont issus de ce qu'on peut appeler le privé. Je n'ai aucune idée, je ne connais pas les personnes personnellement, là, qui siègent sur le conseil d'administration de l'UQO. Je ne les ai pas toutes en mémoire non plus, je ne sais pas quels secteurs exactement elles représentent. Mais vous dites, dans votre mémoire, que... Et vous réclamez l'autogestion, c'est-à-dire que des gens issus du milieu académique ou du milieu de l'institution, parce que vous dites que ça «représente la meilleure solution à court, moyen et long terme afin d'assurer que ces établissements conservent leur caractère émancipateur, critique de la société et surtout [...] indépendant des intérêts marchands et privés, qui ne peuvent qu'entraver au développement critique de nouvelles connaissances ainsi qu'à leur transmission libre de toute censure ou de forme de tutelle».
Est-ce que vous ne croyez pas... Et là vous dites... Là, actuellement, vous vivez cette expérience-là. Donc, j'imagine que, si vous allez aussi loin, vous êtes les porte-parole, c'est donc que ces personnes qui ne sont pas issues du milieu ou des institutions vous empêchent de... et entravent votre développement critique de nouvelles connaissances, et ça entrave la transmission libre de toute censure ou formelle de tutelle. Est-ce que c'est vraiment ça que vous vivez au conseil d'administration de l'Université du Québec en Outaouais?
Le Président (M. Marsan): Alors, la... Excusez.
Mme Courchesne: Je termine. Ça, je veux vraiment être informée de ça. Et, l'autre chose, je voudrais que vous me disiez, à ce moment-là, si on élimine complètement les membres externes, comment un établissement va-t-il établir un lien avec son milieu social, son milieu culturel, et voire même son milieu économique?
Le Président (M. Marsan): Alors, la parole est à vous, M. Clément.
M. Clément (David): Oui. Bien, je vais répondre à votre première question, Mme la ministre, et je vais laisser mon collègue répondre à la deuxième.
En ce qui a trait à notre affirmation que l'intégration de membres externes, surtout majoritaires, comportant une idéologie qui habituellement est marchande et une vision de l'éducation ou de l'établissement qui est marchande... Je vais vous donner des exemples concrets.
Quand on adopte un budget à l'Université du Québec en Outaouais ou dans toute autre institution d'enseignement, il y a nécessairement la question financière qui va être là. Il y a nécessairement tout le questionnement, à savoir: Est-ce que l'université va être capable d'arriver à la fin de l'année avec des fonds? Par contre, dans une université, dans un cégep, ces questions-là ne devraient pas être la première question qu'on se pose. La première question devrait être: Est-ce que, si on atteint l'équilibre budgétaire, on va être obligés de sacrifier des programmes d'éducation? Est-ce qu'on va être obligés de sacrifier des fonds de recherche qui vont être donnés à certains professeurs? C'est toute là la notion de l'ingérence du secteur privé ou de l'idéologie marchande au sein de l'université, autant dans le conseil d'administration, c'est que c'est le conseil d'administration qui va prendre les décisions, qui va avoir un impact direct et quotidien sur l'académique au sein de ces institutions-là.
Donc, si on a une vision de développement, de transmission des connaissances, de services publics forts et accessibles à tous et à toutes, nécessairement que la question budgétaire va être importante, par définition, mais elle n'aura pas prédominance sur la question académique, elle n'aura pas prédominance sur la question du respect de la mission de ces établissements d'enseignement là. Habituellement, ce qu'on peut voir dans différents C.A., que ce soit à l'UQAM, à l'UQO ou ailleurs, c'est que, comme je le dis, les membres externes, le seul calcul ou la seule analyse qui est basée lors de l'adoption du budget, c'est de voir le zéro, faire sûr qu'il n'y a pas de déficit. Le reste, ce n'est pas important. Pour nous, qu'est-ce qui prédomine, c'est le côté académique et c'est la mission.
Le Président (M. Marsan): M. Pépin, pour le deuxième volet.
n(20 h 40)nM. Pépin (Christian): Oui. Donc, bien, pour répondre à la deuxième question de la ministre, qui semblait être préoccupée à savoir en quoi l'autogestion de nos institutions ou, à tout le moins, la majorité absolue de membres internes au sein de nos conseils d'administration... comment assurer finalement un lien avec la société si, dans le fond, ce principe-là semblerait être replié sur lui-même sans devoir finalement de comptes à personne, bien, tout d'abord, quand on parle d'autogestion, ça ne veut pas dire, dans le fond, qu'on ferme les portes à une présence de membres externes, sauf que, pour nous, c'est d'assurer que les droits de vote donc soient remis dans les mains des communautés collégiales et universitaires, qui sont à même le mieux de défendre les missions d'enseignement, chose que nous avons dite tout au long de notre présentation.
Par contre, ponctuellement, il n'y a aucun problème à ce que, pour des besoins, qu'ils soient sociaux, culturels ou autres, les conseils d'administration fassent appel à des consultants, à des personnes ayant autorité en la matière, qu'on parle de professeurs retraités d'une autre université, qu'on parle d'artistes venant de l'extérieur, nous n'avons aucun problème. Que ce soient même des gens issus du milieu, d'une PME de la région ou quoi que ce soit, pour nous, il n'y a aucun problème à ce que ces gens-là puissent être présents séance tenante, venir exprimer finalement leur expertise dans un certain domaine.
Par contre, nous désirons maintenir le pouvoir décisionnel dans les mains de ceux et celles qui faisons vivre quotidiennement les institutions, qui vivons les décisions des conseils d'administration. Et, en ce sens-là, nous pensons que le lien pourrait être très bien assuré en... non pas en leur donnant un pouvoir majoritaire décisionnel dans nos institutions, mais bien en leur permettant de venir exposer leurs visions respectives sur différents dossiers dont le conseil d'administration désirerait avoir des recommandations autres.
Finalement, je pense que le meilleur lien que nous assurons en tant qu'institution d'enseignement au Québec, le lien avec la société, bien, on le fait chaque jour quand la réflexion sur notre monde, sur la société dans laquelle on vit, que ce soit dans notre rapport à la nature, le rapport à l'État, le rapport à la société en général... que de nouvelles synthèses disciplinaires soient mises sur pied qui visent à repenser finalement les conditions de nos vies dans les sociétés contemporaines, comme nous parlons en sciences humaines ou en sciences de la nature, de notre rapport finalement à la vie biologique en général, en période de crise écologique, ces liens-là avec la société sont assurés quotidiennement dans cette mission fondamentale là de développement et de transmission de nouvelles connaissances, et, pour nous, cela ne dépend aucunement de la présence accrue de membres externes. Au contraire, pour nous, c'est ce lien-là finalement avec la société qui serait mis à mal, qui serait compromis par l'importation de critères et de principes complètement étrangers aux raisons d'être pour lesquelles nous avons mis sur pied l'éducation au Québec.
Donc, en ce sens-là, c'était pour ça qu'on voulait défendre finalement qu'il n'y ait pas l'idée d'une autonomie qui serait coupée du reste du monde. Au contraire, ce serait par cette autonomie-là que nous pourrions défendre véritablement le lien avec l'ensemble de la société au Québec et du reste du peuple des mondes... du monde entier. Voilà.
Le Président (M. Marsan): Mme Provost, vous voulez faire un commentaire?
Mme Provost (Anne-Marie): Oui. Bien, Mme la ministre souhaitait peut-être avoir une expérience concrète par rapport à un représentant étudiant sur un conseil d'administration.
Sans vivre au jour le jour une situation d'oppression par rapport à ma capacité d'émettre une critique, il faut plus voir ça comme une logique de système qui s'installe dans les conseils d'administration, où est-ce que la mission... bon, comme mes collègues l'ont maintes et maintes fois expliqué, je ne vais pas revenir là-dessus, mais où est-ce que la mission critique et humaniste d'une institution postsecondaire va être bafouée par des intérêts marchands. C'est que, dans les prises de décision, par exemple, au cégep, habituellement, il va y avoir 11 membres externes sur 19 membres qui composent le C.A. Souvent, ces membres externes vont suivre, si vous voulez, la logique marchande, et qui est également mise de l'avant par la direction. Et, si je comprends bien le principe de base des membres indépendants, ce serait d'assurer une sorte de contrepouvoir par rapport à la direction d'un cégep.
Or, pour moi, dans les faits, au cégep du Vieux Montréal en tous les cas, ce serait que ça fait le contraire, c'est plus des agents qui vont suivre un peu plus aveuglément ce que la direction va mettre de l'avant. Pour moi, les réelles personnes qui vont assurer un contrepouvoir, ça va être les membres internes élus de façon démocratique. Et, si je peux me permettre, pour moi «démocratique» a une connotation participative de prise de décision et pas juste d'être dans un lieu de consultation pour exprimer un point de vue. Donc, voilà.
Le Président (M. Marsan): Merci. Mme la députée de Trois-Rivières.
Mme St-Amand: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bonsoir. C'est la première fois que j'ai le privilège de vous rencontrer. Je vous dirais honnêtement que je suis un peu étonnée par vos propos. J'aimerais ça aller un petit peu plus loin.
Moi, je suis députée dans un comté qui est en région. Évidemment que nos collèges chez nous vivent une synergie assez extraordinaire avec tous les partenaires... avec beaucoup, je ne dirai pas «tous», mais avec beaucoup de partenaires du milieu. J'aimerais ça que vous alliez un petit peu plus loin dans votre vision des liens qu'un établissement devrait avoir tant au point de vue social qu'au point de vue économique avec sa communauté. Parce que, chez nous, je vous dirais que le milieu collégial fait partie de la communauté.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Clément.
M. Clément (David): Oui. En ce qui a trait aux partenariats avec le milieu, on peut s'entendre, hein, les cégeps, les universités, par définition, vont avoir des conséquences ou des finalités économiques ou de développement économique.
En ce qui a trait avec les liens avec les autres organisations, je ne repasserai pas sur qu'est-ce que mon collègue a dit. Une institution telle qu'un cégep ou une université, veux veux pas, va avoir un rayonnement dans sa région, mais il ne faudrait pas oublier son premier but, son premier fondement, c'est d'assurer une accessibilité à l'éducation, qu'elle soit collégiale ou universitaire, dans une région donnée, aux citoyens et citoyennes de cette région. C'est son premier but. Une fois que ça, c'est fait, on n'a rien contre qu'il y ait des conséquences ou qu'il y ait des finalités économiques à cette éducation-là.
Ce qu'on vient dire par contre, c'est que cette finalité économique là ne doit surtout pas être au début de l'équation. L'équation: le lien entre la région avec le marché économique, c'est que le cégep est là, a ses fondements académiques, se doit de créer, développer et transmettre des connaissances d'ordre général, professionnel, et que, par la suite, fasse... C'est une des critiques qu'on peut souvent entendre, de dire: Écoutez, si vous ne voulez pas que le privé s'ingère dans les institutions d'enseignement, ça veut dire que vous ne voulez pas que l'institution d'enseignement serve le privé. Par définition, oui. Par contre, on est d'accord avec la logique courante qu'un cégep ou une université, dans une région, va nécessairement... Que ce soit avec ses étudiants, étudiantes qui vont sortir de là avec un bac, qui vont nécessairement chercher un emploi, ou avec la recherche qui va développer des nouvelles choses, il va y avoir des finalités économiques qui vont servir à la région, à la province ou ailleurs dans le monde. Ce qu'on dit, par exemple, c'est que ce lien-là ne doit pas entraver la mission du cégep. Il faut que sa mission première soit toujours l'académique, soit l'éducation et non pas le développement économique, comme on croit ou, à tout le moins, comme on affirme que le gouvernement actuellement tente de voir les cégeps et les universités, et c'est là qu'on met un bémol sur le lien avec les marchés régionaux.
Le Président (M. Marsan): Rapidement, avant de céder la parole à Mme la députée de Trois-Rivières.
M. Pépin (Christian): Oui. Bien, pour enraciner davantage la réponse dans un des articles du projet de loi, en fait, on parle de vouloir mieux préciser la mission des cégeps en visant davantage à enraciner la mission des cégeps vers la recherche appliquée. Puis qu'est-ce qui est sous-jacent finalement à ça, c'est peut-être une logique qui finalement survalorise de plus en plus le présent face au long terme, puis ce présent-là, bien, c'est... À quoi vise-t-on à répondre par rapport à ces exigences-là, c'est véritablement être de plus en plus compétitif, au Québec, dans le cadre d'une économie mondiale qui implique des valeurs de plus en plus de concurrence, de compétitivité. Puis, pour nous, bien, malheureusement, quand, dans le fond, on importe ces critères-là ou ces considérations-là dans la définition des programmes, bien, malheureusement, on est peut-être en train de perdre finalement une des raisons d'être puis de comment s'était faite l'éducation depuis longtemps au Québec ? puis on parle même de plusieurs siècles par rapport aux universités ? qui était finalement de faire des synthèses des disciplines ou des savoir-faire techniques, au profit finalement de connaissances de plus en plus spécialisées, de pointe, visant des impératifs de profit de plus en plus à court terme, visant finalement à dégarnir tout le contenu fondamental de nos programmes. Puis ça, bien, on le remarque de plus en plus dans la multiplication des attestations d'études collégiales, qui se multiplient dans les cégeps aujourd'hui, qui visent finalement des formations de plus en plus courtes dans des buts d'intégration au marché de l'emploi, et malheureusement, bien, cela va au détriment finalement d'une véritable formation à la citoyenneté visant à critiquer finalement le monde dans lequel on vit.
n(20 h 50)n Donc, comme il a été dit, s'il y a, dans le fond, nécessité de formation de travailleurs, travailleuses dans la société québécoise, bien, cette visée-là de former de plus en plus à court terme des travailleurs, travailleuses dans des impératifs de profit de plus en plus immédiats vise même à mettre à mal un des principes qui avaient été au coeur des techniques dans les collèges, qui était la polyvalence, qui finalement permettait aux travailleurs, travailleuses, dans des situations économiques difficiles comme celle d'une crise économique, d'être capables finalement d'avoir une distance face aux différentes entreprises présentes. Mais, malheureusement, quand, dans le fond, ton diplôme vaut pour travailler dans une seule entreprise presque, tellement que la formation a été spécialisée, bien, on devient de plus en plus dans une dépendance des plus énormes. Quand finalement on parle d'indépendance actuellement dans les projets de loi, bien, l'indépendance, dans une formation pareille, n'existe aucunement, et l'autonomie individuelle est complètement sacrifiée.
Donc, c'est pour ça qu'on pense que c'est le temps de repenser à long terme l'avenir de notre éducation au Québec. Puis ce lien-là finalement avec les besoins économiques régionaux peut représenter une menace si on survalorise finalement trop les besoins de profit à court terme.
Le Président (M. Marsan): Je sais qu'il y a beaucoup de questions qui veulent être posées. Alors, je vais céder la parole à Mme la députée de Trois-Rivières une... Ça va?
Mme St-Amand: Peut-être juste une question ? merci, M. le Président ? en terminant. Vous parlez beaucoup de gouvernance à l'interne pour votre conseil d'administration. Au niveau de la parité hommes-femmes, pour votre conseil d'administration, est-ce que vous avez une opinion?
Le Président (M. Marsan): Oui, madame... Mme Provost.
Mme Provost (Anne-Marie): Bien, c'est dans les principes clairs et établis de l'ASSE que... Bon, on est un regroupement féministe, donc, pour nous, une parité serait probablement le plus à propos, si ça répond à votre question. Ça suivrait les principes fondateurs de notre organisation.
Le Président (M. Marsan): Merci. Madame... M. le député de Charlesbourg.
M. Pigeon: Merci, M. le Président. Bonsoir. Je sais que, généralement, les gens comme vous, vous faites bien vos devoirs puis vous étudiez vos dossiers, puis on l'apprécie, parce que ça apporte des éclairages intéressants.
Étant donné qu'on parle aujourd'hui de gouvernance des universités, de qualité de formation, moi, j'aurais une question pour vous autres. Dans le monde actuellement, vous avez dû regarder ça, comment sont les universités, comment elles sont gouvernées, etc. C'est quoi, les meilleures universités du point de vue de la formation, qui font vraiment de la formation citoyenne? Puis comment sont gouvernées ces universités-là?
Le Président (M. Marsan): Oui, M. Clément.
M. Clément (David): Oui. On n'a pas fait une étude détaillée de l'ensemble des universités et des collèges sur l'ensemble de la planète. Par contre, ce qu'on peut vous dire et vous affirmer hors de tout doute, et ce n'est pas seulement nous qui vont le dire, c'est qu'une université, quand elle est léguée aux esprits du secteur privé ? on peut voir aux États-Unis et ailleurs dans le Canada, ailleurs dans le monde aussi ? ça ne donne jamais des bons résultats. On voit des universités, si on parle juste de gouvernance, qui deviennent gérées de manière opaque et totalement marchande. Mais, si on parle d'accessibilité, parce que c'est quand même un des buts au Québec ? à tout le moins je l'espère, pour nous c'est une des bases fondamentales du système d'éducation ? ça a des conséquences désastreuses. Je veux dire, l'idéologie du secteur privé, l'idéologie du «new management» public qui est calqué sur l'entreprise privée n'a pas de fondement dans les universités et les cégeps réellement.
Le Président (M. Marsan): M. le député de Charlesbourg.
M. Pigeon: Merci, M. le Président. Mais parlez-moi de celles qui vont bien. Je comprends que vous me dites qu'il y a des universités qui ont une idéologie que vous ne souhaitez pas, je comprends ça très bien, mais est-ce qu'il y en a dans le monde, dans certains pays, en Europe, je ne sais pas, en Allemagne, l'Université Humboldt, je ne le sais pas, est-ce qu'il y a des universités, là, que vous connaissez où, je dirais, le modèle que vous proposez, là, serait quand même un exemple, où on pourrait se rattacher puis dire: Les gens qui sortent de là, ils ont une excellente formation technique et citoyenne, ils sont ouverts sur le monde, puis la gouvernance est organisée de telle, telle façon? Je serais curieux de voir. Je comprends bien les exemples négatifs; j'en chercherais un positif.
Le Président (M. Marsan): M. Pépin.
M. Pépin (Christian): Bien, actuellement, je pense qu'on peut penser que plusieurs de nos universités et cégeps au Québec actuellement sont encore capables de permettre finalement cette réflexion-là. On pense qu'au contraire... On n'est pas en train de dire que tout est perdu, que tout a été saccagé, mais on pense qu'au contraire il existe plusieurs universités ou cégeps dont nous sommes membres qui se donnent encore de très bons programmes de qualité.
Moi, j'en ai un. Moi, je proviens... un étudiant à l'Université du Québec à Montréal qui a une formation en sociologie et en philosophie, puis je peux vous dire que notre programme est un des meilleurs départements de sociologie en Amérique du Nord, et nous en sommes très fiers.
Sauf que, par contre, on pense que les... de plus en plus, avec les déboires financiers qu'il y a eu à l'UQAM, avec les projets de loi qu'on vise à promouvoir, bien, on pense que de plus en plus nos programmes, oui, sont mis à mal, puis, oui, nos classes sont de plus en plus bondées, puis, oui, nos banques de cours se sont rétrécies. Puis, dans le fond, en ce sens-là, on pense que... on vise à actionner la clochette d'alarme en vue de préserver ce qui est encore pour nous des programmes de qualité, mais qui sont malheureusement de plus en plus dans un état critique. Puis, si on continue à aller dans la direction qui est proposée actuellement dans le projet de loi, bien, peut-être, dans le fond, d'ici 20, 30, 40, 50 ans, 100 ans, peut-être quand on ne sera plus là, bien, peut-être que ces programmes de qualité là qui existent encore au Québec n'existeront plus. Puis on pense que c'est pour ça qu'on est là aujourd'hui, en espérant qu'on va être capables de sauvegarder, de préserver ce qu'il y a encore de bon dans notre système d'éducation au Québec, puis d'être capables de l'améliorer, puis de tendre vers les idéaux pour lesquels on est là ce soir.
Le Président (M. Marsan): Mme Provost, vous voulez faire une intervention?
Mme Provost (Anne-Marie): Non, c'est beau, merci.
Le Président (M. Marsan): Ça va? O.K. M. le député de Charlesbourg.
M. Pigeon: Merci, M. le Président. Juste un bref commentaire: En tout cas, je suis content d'entendre qu'il y a encore de la belle formation de qualité dans les collèges et universités québécoises. Je suis heureux d'entendre ça. C'est ce que je crois aussi. Je pense qu'on a d'excellentes universités et...
Une voix: ...
M. Pigeon: ...et d'excellents collèges, oui, voilà. Alors... Et je pense qu'on développe bien l'esprit critique dans les collèges et universités du Québec, je pense que c'est très bon.
Puis, sur une note un peu plus personnelle, je suis très heureux de savoir que le Département de sociologie de l'UQAM est un des meilleurs en Amérique du Nord. Je vous expliquerai pourquoi tout à l'heure.
Une voix: Sa fille...
M. Pigeon: Ma fille enseigne là.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Marsan): Alors, il y a un intérêt personnel. Alors, madame... Excusez.
M. Pigeon: Conflit d'intérêts. Je retire mes paroles, conflit d'intérêts.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Gatineau, vous avez la parole.
Mme Vallée: Oui, merci. Alors, merci, messieurs dames, pour votre présentation. Ma question s'adresserait à M. Clément, parce que vous avez... Évidemment, on est de la même région, et vous avez soulevé quelques... en tout cas vous avez retenu mon attention lorsque vous avez parlé de l'importance que le conseil d'administration se concentre sur des membres de l'interne. Et vous parlez de votre expérience à l'UQO, et la ministre, tout à l'heure, a effleuré... a traité de la question en vous adressant une question elle-même.
Mais actuellement votre perception ou votre vision de l'importance de laisser au C.A... de laisser des membres de l'interne au C.A. plutôt que d'aller recruter des gens à l'externe, j'imagine, est teintée de votre expérience personnelle. Qu'est-ce qui ne fonctionne pas à l'UQO dans la gestion? Parce qu'on... il y a des gens de la communauté d'affaires, il y a des gens des communautés culturelles, des membres des organismes communautaires qui siègent au sein de ce conseil d'administration là. Ce sont des gens qui, à mon avis, participent à l'élaboration des programmes.
Hier, entre autres, on a mis en valeur ce qui se fait au niveau du concept du Campus santé. Je pense que c'est justement un bel exemple, là, de la participation de l'UQO et des membres du conseil d'administration à l'élaboration de programmes qui sont en lien avec notre problématique et nos besoins régionaux, nos besoins criants, qui ne sont pas nécessairement des besoins du privé mais des besoins de l'ensemble de la population.
Alors, qu'est-ce qui ne fonctionne pas actuellement à l'UQO qui vous mène aujourd'hui à faire cette croisade?
Le Président (M. Marsan): En terminant, M. Clément.
M. Clément (David): Je ne savais point que c'était une croisade qu'on faisait actuellement. On essaie surtout de protéger ce qui reste de notre système d'éducation public. Mais, pour répondre à votre question, la différence entre les internes et les externes à l'UQO, je vous donnerai un exemple.
Il y a un programme de bac en sciences infirmières à l'Université du Québec en Outaouais. On sait que l'Outaouais est une région qui est malheureusement frappée par un manque flagrant d'infirmières, et, pour causes budgétaires, il y a eu des chances deux fois dans la dernière année où est-ce que ce programme-là soit fermé, donc que l'UQO, pour des raisons strictement financières, décide de renier un programme en sciences infirmières. Encore une fois, ça a été les membres internes qui se sont opposés à ça. Je vous donnerai un dernier exemple. On a justement eu une réunion hier soir pour discuter des projets de loi, comme on le fait aujourd'hui, et bizarrement, quand on regardait la discussion qu'il y avait, les seules personnes qui s'opposaient radicalement à ce que l'UQO appuie les projets de loi, à ce que l'UQO adopte une gouvernance de l'entreprise privée, c'étaient les membres internes. Et ce n'était pas pour leurs sièges, c'était pour la mission de l'éducation, la mission de l'université. Tout le monde voyait très bien vers quoi les projets de loi nous amenaient, et, selon moi, les membres internes, pour la plupart, ont beaucoup plus à coeur la mission fondamentale de l'Université du Québec en Outaouais.
Et je finirai avec un exemple qui vous a été couramment rapporté: c'est courant de voir des membres externes arriver avec une enveloppe avec leur nom dessus, cachetée, s'asseoir en conseil d'administration et l'ouvrir, comme si on serait arrivés ici, nous, avec une enveloppe cachetée, ne sachant pas ce qu'on s'en venait vous livrer comme discours, et qu'on s'assoit et qu'on débat. Pour moi, ce n'est pas de la saine gestion.
Le Président (M. Marsan): Merci. Alors, ceci termine les échanges avec le parti ministériel. Je vais maintenant reconnaître la députée de Taillon, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur. Mme la députée.
n(21 heures)nMme Malavoy: Merci. Bonsoir, messieurs et madame. Merci d'être là. C'est sûr que vous avez une façon de parler assez tranchante, je dirais, mais je trouve que ça a sa place. Je veux dire, dans le genre d'exercice que nous faisons ? puis j'ai été la première à souhaiter les consultations générales ? c'est pour avoir justement accès à différents points de vue, à différentes façons de nommer les choses, à différents modes d'expression.
Il y a un élément avec lequel je suis d'accord avec vous, c'est quand vous dites, à deux reprises dans votre mémoire, que tout cela aurait pu être précédé d'un débat public. Je le pense aussi. Je crois que, dans d'autres domaines, on ne se prive pas de faire un débat public avant de procéder à l'élaboration d'un projet de loi. Et, dans ce cas-ci, on connaît les racines du projet de loi, à la fois les racines à plus long terme, cette tendance à la gouvernance, qui est mondiale, les racines plus immédiates que sont le rapport Toulouse puis ce que, moi, j'appelle le facteur précipitant, qui est la crise de l'îlot Voyageur à l'UQAM. Tout ça a contribué à façonner des projets de loi mais qui, de fait, n'ont pas été l'objet d'un débat public en bonne et due forme avant qu'on transpose tout cela dans une nouvelle façon de gouverner les cégeps et les universités. Et honnêtement je le regrette parce que je trouve que, dans un débat public, on peut déjà non seulement prendre le pouls des différents milieux, mais aussi élaguer peut-être des choses, hein, qu'on ne voudrait pas retrouver, et puis ensuite s'attaquer au coeur de la question. Alors, là-dessus, je vous rejoins et... Bon, je ne fais que le constater parce que le débat public, on ne peut pas revenir en arrière. On a pour le moment deux projets de loi, donc, dont on doit disposer.
Mais vous n'y allez pas de main morte. Vous dites: Bon, c'est un recul de plus de 40 ans. Vous dites: Ce sont des modes de fonctionnement qui non seulement ne règlent pas le problème, mais aggravent le problème. Donc, j'aimerais vous entendre, peut-être dans une premier temps, préciser en quoi cela aggrave la situation par rapport à ce que nous connaissons déjà comme mode de fonctionnement.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Clément.
M. Clément (David): Oui. Bien, comme on l'a souligné tantôt ? puis je pense que c'est l'exemple flagrant que tout le monde va prendre, c'est-à-dire le cas de l'UQAM, comme vous l'avez mentionné, le cas de l'îlot Voyageur ? ce qu'on dit dans notre mémoire et pourquoi on croit que les projets de loi actuels ne feraient qu'aggraver la situation de dépérissement de nos institutions d'enseignement, c'est que l'îlot Voyageur, ceux qui l'ont sauvé, ceux qui l'ont dénoncé, ceux qui ont sauvé l'UQAM d'une dérive encore plus importante qu'elle a connue, ce sont ses membres internes, ce sont les étudiants, étudiantes, ce sont les professeurs. Les membres externes ? et Christian pourrait en témoigner, il est étudiant à l'UQAM ? appuyaient cette direction-là aveuglément. Et c'est d'ailleurs ce que le Vérificateur général du Québec a noté dans son rapport spécial, en disant que ces membres-là effectivement n'avaient pas toute l'information de la part de la direction, qui était fautive, mais qu'eux ne posaient pas plus de questions pour avoir accès à cette information-là ou, à tout le moins, pour mettre de la pression sur la direction.
Donc, pour notre part, ce qu'on dit et comme je l'ai mentionné tantôt, si les projets de loi actuels auraient été adoptés avant le scandale de l'îlot Voyageur, peut-être qu'en ce moment on ne le saurait même pas, qu'il y a un scandale à l'UQAM parce que ces informations-là seraient encore cachées. C'est grâce au grattage des membres internes qu'on a été capables de débusquer, dans le fond, les informations qui avaient été cachées par la direction et de mettre ça au grand public et de constater malheureusement l'état de la situation.
Quand on parle par la suite d'un recul en arrière, c'est comme on le dit dans l'introduction de notre mémoire: le système d'éducation au Québec, il a été bâti, dès 1968, sur un principe général: la collégialité dans sa gestion. Et ce qu'on veut faire aujourd'hui, et comme la ministre l'affirmait dans ses paroles préliminaires au début des commissions, apparemment qu'il faudrait suivre une tendance mondiale qui s'applique apparemment à toutes les institutions, qu'elles soient publiques ou privées. Bien, ce qu'on dit dans le mémoire aussi, c'est d'une manière particulièrement crue: La crise économique internationale nous démontre que ces principes de gestion là ne sont pas la solution au problème, elles sont le problème. C'est pourquoi qu'on s'oppose radicalement à la vision qu'il y a dans les projets de loi.
Et je finirai en disant qu'effectivement on aurait voulu avoir un vrai débat public, surtout après le dépôt des projets de loi nos 107, 110, qui avaient amené des critiques importantes de la part des communautés. On voit un gouvernement qui décide malgré tout de faire la sourde oreille et de représenter des projets de loi en sachant particulièrement que les communautés collégiales et universitaires y étaient opposées. On trouve que c'est totalement irresponsable. Et on ne dit pas qu'on a la vérité infuse; l'ASSE et ses membres ont leur position. Mais, nous, on croit que ce débat-là ne doit pas se faire ici, en commission parlementaire, avec trois représentants d'une organisation. On croit que ces débats-là doivent se faire dans les institutions d'enseignement collégial et universitaire et qu'on puisse avoir réellement un vrai débat public sur la question.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Il y a certaines craintes que vous exprimez, que je partage, puis il y a d'autres éléments sur lesquels je me demande jusqu'où vous allez, ou me je demande est-ce que vous n'allez pas finalement très, très loin et trop loin. Bon, je partage des craintes que vous pouvez avoir quant à l'importation d'un modèle qui est conçu pour d'autres types d'établissement que les établissements d'enseignement supérieur. Moi, je partage l'idée qu'en matière d'enseignement supérieur on a une mission très particulière et qui mérite qu'on gouverne en ayant des principes, entre autres, de «collégialité». C'est un des mots clés de votre mémoire.
Je pense aussi qu'en matière de gouvernance des cégeps et des universités, particulièrement des universités, on doit protéger la collégialité, parce que c'est ce qui leur a permis d'exister, de se développer, de remplir leur mission, justement en n'étant pas soumises aux vents et aux aléas des modes, bon, de gouvernance. Je partage certaines craintes.
Là où je ne suis pas sûre de vous suivre tout à fait, c'est quand vous exprimez de telles réticences par rapport aux membres externes, qu'à la limite vous les excluez complètement. C'est une chose pour moi que de dire: Les membres internes doivent garder une prépondérance ou un poids déterminant, puis c'en est une autre que de dire: Il ne doit y avoir que des membres internes, et les autres ont de toute façon un regard tellement biaisé qu'on ne peut pas leur donner de place.
Alors, j'aimerais que vous me précisiez ça: Est-ce que les membres externes sont vraiment à bannir ou est-ce que les membres externes peuvent, malgré tout, poser un regard qui soit intelligent, et qui soit critique, et qui soit un apport sur les conseils d'administration des établissements?
Le Président (M. Marsan): M. Pépin.
M. Pépin (Christian): Bien, en fait, je comprends les inquiétudes ou en fait les considérations soulevées actuellement. En fait, j'inviterais tous les députés ici présents à peut-être aller à la dernière page de notre mémoire qui, dans le fond, un peu distingue entre ce que nous pensons être, ce que nous revendiquons maintenant et ce que nous revendiquons idéalement.
En ce sens-là, je vais lire la troisième revendication, qui dit: «L'ASSE revendique que les conseils d'administration des cégeps et universités soient composés d'au moins une majorité absolue de membres internes, délégué-e-s par leurs instances syndicales ou associatives respectives et redevables devant ces dernières, dans une perspective d'autogestion par les communautés internes des établissements d'enseignement postsecondaire.» Donc, pour nous, des projets de loi qui auraient été déposés dans le sens d'une majorité absolue de membres internes auraient déjà beaucoup plus reçu un écho favorable de notre part, qui aurait maintenu le principe de collégialité. Par contre, nous pensons qu'il est important de peut-être mener le débat plus loin. Puis, je pense, en ce sens-là, que ? puis, ce soir, peut-être, on fait des références à l'histoire, à l'avenir ? c'est pour ça que, nous, on veut peut-être vouloir aller plus loin sur ce que nous devrions viser potentiellement à long terme, qui est le principe de réappropriation par les communautés collégiales et universitaires.
Mais, pour nous, ce principe-là ne vise pas à dénigrer la possibilité que des administrateurs, administratrices provenant de l'extérieur de l'institution aient une capacité à faire des recommandations qui sont capables de soulever des questionnements à propos de certaines décisions qui doivent être prises. Puis, en ce sens-là, bien, je crois que je l'ai déjà dit plus tôt, au sein de cette commission, on pense que ces membres-là doivent avoir une place. Puis, en ce sens-là, on ne pense pas qu'il faut fermer les portes de manière absolue à leur présence au sein d'un conseil d'administration. Mais, par contre, nous, l'idéal à long terme que nous visons, c'est que le pouvoir décisionnel des membres internes des conseils d'administration revient, idéalement, à long terme, dans les mains des administrateurs qui proviennent de l'intérieur des institutions, puis que, les membres externes, leur place dans nos conseils d'administration serait dans le fond d'avoir un droit de parole et un droit de proposition dans le sens... pour éclairer en fait et faire des recommandations à un conseil d'administration.
Donc, c'est en ce sens-là que, pour nous, je le répète, il n'y a pas l'idée de dire que... quand on dit, dans le fond: Libérons-nous du privé, ce n'est pas de dire qu'il n'y a plus aucune discussion à avoir avec le secteur qui ne serait pas directement lié à nos cégeps et universités, mais on pense qu'au contraire il y a un dialogue à avoir, mais cela n'implique pas de remettre le pouvoir décisionnel dans les mains de... majoritaire de membres externes. Voilà.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
n(21 h 10)nMme Malavoy: Et vous maintenez tout de même que l'autogestion serait la meilleure des solutions ? vous le dites à deux reprises, là, si je ne me trompe pas, dans la conclusion que vous venez d'évoquer, mais aussi avant, quand vous dites: L'autogestion des cégeps et des universités par leurs communautés respectives représente la meilleure solution à court, moyen et long terme. Donc...
C'est parce qu'il y a un débat en ce moment, hein, qui est important, si vous suivez, là, ce qui se passe ? je suis sûre que vous le faites ? qui est de savoir quelle est la proportion qu'il doit y avoir de membres internes et de membres externes sur les conseils d'administration, particulièrement en ce qui concerne les universités, puisque, dans leur cas, il y en a un bon nombre qui ont une majorité de membres internes, bon. Mais là, c'est une question de proportion.
Vous, votre idéal, c'est de dire: Nous pensons que l'idéal, c'est vraiment l'autogestion par les membres de la communauté interne. Je questionne ça, parce que, pour moi, c'est autre chose que de vouloir s'assurer que les membres internes aient une place prépondérante. C'est vraiment, à la limite, dire: Les membres externes ne peuvent pas être d'un apport tellement utile à long terme, mais les membres internes doivent petit à petit viser à prendre toute la place. Et je me questionne, à savoir: Est-ce qu'on n'est pas un peu à contresens, à contre-courant, quand on va jusque-là dans vos propos?
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Pépin? Non? M. Clément. Excusez.
M. Clément (David): Oui. Bien, premièrement, l'ASSE, historiquement, n'a jamais suivi le courant de la société occidentale et on en est fiers, d'être un contre-courant, si possible, et un certain rempart idéologique face à des dérives comme qu'on voit actuellement.
Par contre, dans le débat qui a été ouvert aujourd'hui... bien, pas aujourd'hui, avec le dépôt des projets de loi, comme qu'on l'a dit tantôt, ça aurait beaucoup mieux été pour en discuter si on n'aurait pas deux projets de loi comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Premier point.
Pour nous, c'est certain que les membres internes ont plus de connaissances, d'interactions, de... comment je pourrais dire? qu'ils sentent les conséquences au jour le jour des décisions que le C.A. va prendre, quelles soient budgétaires, académiques, on peut les nommer, conditions de travail ou quoi que ce soit. Et, à la limite, si les projets de loi ne seraient pas là, on aurait relancé la question à la ministre de l'Éducation et à son gouvernement.
Ou je vous la relance à vous, Mme la députée: Quel est l'apport des membres externes dans une instance décisionnelle où ils et elles ont un droit de vote sur, dans le fond, le développement de nos institutions d'enseignement collégial et universitaire? Comme mon collègue l'a dit tantôt, on ne dit pas, dans le mémoire, qu'on est bloqués à toute consultation, ou d'inviter un avocat lorsqu'il est question d'ordre juridique ou quoi que ce soit, on pourrait donner des exemples à l'infini. Ce qu'on dit, c'est que ces personnes-là, selon nous, ne devraient pas avoir dans l'absolu le pouvoir dans le C.A. des universités.
Oui, effectivement, comme mon collègue l'a dit, si on reprend le mode actuel, comme par exemple à l'UQO, bien, si tous les postes sont remplis, il y a une minime majorité d'internes qui est là, donc on peut voir ça comme un certain garde-fou. Mais, dans l'absolu, pour nous, une communauté collégiale ou universitaire, c'est une communauté qui est là, qui débat, qui développe et qui transmet des connaissances, et qui peut collectivement se donner des mandats, que ce soit académiques, de recherche ou quoi que ce soit.
Donc, oui, on le réaffirme, puis, je veux dire, je pense que c'est même logique à la base que, si on prend un acteur, surtout du monde des affaires ou du monde privé, il va y avoir une culture d'entreprise privée qui va s'intégrer. Pour nous, c'est la pire des choses qui peut arriver dans nos institutions d'enseignement. C'est pourquoi qu'on considère qu'un C.A. ou des instances décisionnelles composées en totalité de membres internes sont un beaucoup meilleur rempart au service public que sont les cégeps et les universités que d'avoir une proportion de membres qui y sont pour des raisons qu'on peut appeler nébuleuses et qui souvent appuient aveuglément la direction.
Je pense qu'on peut aussi se baser sur la culture et sur l'historique actuelles des membres socioéconomiques. Je pense, même la ministre... Mme la ministre de l'Éducation en a fait état, lorsqu'elle parlait de la culture, qu'il y avait présentement du changement de culture profond qu'amèneraient les projets de loi; on parlait que les membres externes et socioéconomiques, dans le fond, c'était une culture qui provenait du monde des affaires. Mais la culture, elle est là. Qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, cette culture-là est là, et c'est pourquoi on croit qu'actuellement leur rôle est peut-être plus ou moins important, mais que, si les deux projets de loi ne seraient pas sur la table, on pourrait en débattre beaucoup plus largement. Et, comme mon collègue l'a dit, actuellement on ne demande pas que demain l'ensemble des externes soient évacués manu militari des C.A. Ce qu'on dit, c'est que, si on doit avoir une discussion sur la gouvernance, pour nous, c'est l'autogestion, la solution.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Je sais que mon collègue de Drummond...
Le Président (M. Marsan): De Drummond?
Mme Malavoy: ...a aussi des questions.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. le député de Drummond, vous avez la parole.
M. Blanchet: Messieurs dame, bonjour. Au-delà du niveau de langage de rempart idéologique, j'ai l'impression que, si on utilisait le niveau de langage plus feutré de l'Assemblée nationale pour réécrire votre mémoire, vous ne seriez pas si loin que ça d'autres interventions qu'on a eues. Cela dit, aussi, je salue la diversité des voix étudiantes qui peuvent s'exprimer ici. Donc, ça me semble parfaitement souhaitable que l'énergie que vous y mettez soit présente ici.
J'ai une première petite question qui en est une de curiosité puis, après ça, j'en ai une un peu plus large. Vous avez dit qu'il y avait eu de longues discussions à l'intérieur de vos instances et dans vos assemblées générales, des discussions assez âpres, si ma mémoire est exacte, de ce que vous disiez par rapport à ces projets de loi. J'aimerais savoir un peu quelle était la teneur de ces discussions-là, parce que j'en déduis qu'à l'intérieur des institutions que vous représentez ça ne faisait pas nécessairement l'unanimité, la proposition qui était ou la position qui était avancée puisqu'il y a eu débat. Je suis curieux de connaître un peu la nature, si vous pouvez vous en faire les porte-parole, de ceux qui n'étaient pas du même avis.
Ensuite de ça, je ne peux pas partager le procès d'intention que vous semblez faire d'emblée à la quasi-totalité de ceux que le projet de loi appelle erronément, je suis d'accord, les «indépendants». Je reconnais que, dans la réduction grave du pourcentage des internes, il y a une espèce de désaveu de leur connaissance des institutions, et ça, je trouve ça déplorable. Et, lorsqu'on parle d'imputabilité, j'ai un malaise, à savoir que des membres en majorité sur un conseil d'administration étant considérés comme des membres externes ou indépendants comme seule imputabilité, lorsque les problèmes se manifestent de façon crue, ils ont juste à sacrer leur camp et leur imputabilité est finie. J'ai un problème avec ça aussi. Ils ne sont plus là, donc l'imputabilité a une limite assez claire pour les externes, tandis que les internes vont continuer à vivre dans cet environnement-là. Donc ça, c'est des réserves que je partage sûrement avec vous autres.
Le Président (M. Marsan): ...M. le député de Drummond, excusez. Si vous voulez qu'on laisse un peu de temps pour répondre, vous pouvez rapidement conclure.
M. Blanchet: Je concluais. Je vous remercie beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Marsan): Merci.
M. Blanchet: Dans la mesure où vous avez 40 000 membres et que la plupart de ces gens-là veulent aller sur le marché du travail, ma question est donc claire par rapport à ça: Comment faites-vous l'arrimage entre la formation que vous voulez que les institutions donnent et les besoins réels de l'économie? Parce qu'on a un problème entre l'adéquation de l'offre de main-d'oeuvre et des besoins de l'industrie.
Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Provost.
Mme Provost (Anne-Marie): Oui. Bien, premièrement, par rapport au langage de notre mémoire, je ne pense pas qu'on soit les seuls à avoir un langage relativement tranchant, si je me fie aux interventions de la FNEEQ et CSN que j'ai vues ce matin, en cette même commission parlementaire, donc... Mais ça, bon, c'est probablement un autre débat.
Par rapport au débat qu'il y a eu dans les assemblées générales, en fait, la prise de position par rapport aux projets de loi nos 107, 110, c'est comme ça qu'on les appelait à l'époque, rentrait dans le cadre, comme mon collègue l'expliquait plus tôt, d'une campagne contre la privatisation des institutions en général.
Pour ce qui est spécifiquement de la gouvernance, moi, ce que j'ai pu voir comme débat dans ma propre assemblée générale... je ne peux pas me faire vraiment la porte-parole de toutes les assemblées générales au Québec qui ont pris position là-dessus, mais, dans mon assemblée, c'est sûr que, quand on présente un projet de gestion des institutions postsecondaires alternatif à une gestion majoritaire des membres externes, pour ne prendre que ce point-là des projets de loi en général, et qu'on propose plus un système de participation accrue des membres de la communauté interne, c'est sûr que c'est attirant pour des gens qui sont habitués d'assister à des assemblées générales puis à participer à la vie démocratique de leur collègue ou de leur université, donc...
Puis je vous dirais que les débats sur la question de la gouvernance, il n'y en avait pas vraiment, puis, s'il y en avait, c'était plus sur une question de moyens: Est-ce qu'on va participer à des négociations avec le gouvernement? Est-ce qu'on va participer à des choses plus au niveau de la rue, dans les mobilisations de la rue? Le débat se situait surtout: Jusqu'où on va mettre de l'eau dans notre vin? Mais, en tant que tel, au niveau du rejet des projets de loi en tant que tel, il n'y avait pas vraiment de... Je ne sais pas si je suis claire ou...
Pour le dernier point, je vais laisser...
Le Président (M. Marsan): Très rapidement, M. Clément.
n(21 h 20)nM. Clément (David): Bien, je pense que, on l'a mentionné tantôt, pour nous, oui, il va y avoir une finalité économique, que ce soit sur le marché du travail ou autre, grâce aux cégeps et aux universités, Mais a priori, quand on organise, ou qu'on met sur pied, ou qu'on érige le fonctionnement de ces cégeps et ces universités-là, le calcul économique ou les besoins des entreprises privées de la région ne sont pas une priorité. Les cégeps et les universités ont une mission de développement et de transmission des connaissances, et, ce faisant, ils vont y avoir des finalités économiques sur le marché du travail et autres, mais ce n'est à prendre en prise de compte, à décider: O.K., bien, on a besoin d'ingénieurs dans telle région, donc on va couper les cours dans telle chose parce que des infirmières, on n'en a plus besoin, on a besoin d'ingénieurs. Pour nous, ces cégeps, universités là doivent offrir, dans chaque région du Québec, des programmes collégial et universitaires accessibles à tous et à toutes, peu importe le marché régional.
Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie. Ceci termine le débat avec l'opposition officielle. Je vais maintenant reconnaître le député de Chauveau, porte-parole dans le domaine de l'éducation pour le deuxième groupe d'opposition. M. le député de Chauveau.
M. Deltell: Merci infiniment, M. le Président. Madame messieurs, ça me plaisir de vous accueillir. Je salue avec vraiment beaucoup de plaisir votre témoignage aujourd'hui, auquel je ne souscris pas, mais je trouve ça fantastique que vous puissiez l'exercer. Comme j'ai soufflé à l'oreille tantôt à mon ami le député de Mercier, c'est de la démocratie extrême et c'est excellent. C'est ça qui est fantastique, qu'on puisse exposer comme ça les points de vue.
On est tous d'accord ici, il n'y a pas un député, ici, que vous aller trouver, qui est contre le principe que les écoles, les cégeps, les universités sont là d'abord et avant tout pour former les étudiants. Là où nos chemins se séparent, c'est sur le rôle que peut jouer l'entreprise privée dans la gestion de nos institutions. Comprenons-nous bien, moi, de mon côté, je n'ai pas le goût de donner les clés de l'université à une entreprise privée, mais je n'ai pas le goût non plus de les accueillir avec les propos que vous avez tenus, et je le dis en tout respect.
Parce que vous savez pourquoi? C'est que l'argent qu'on dépense dans nos écoles, dans nos cégeps, dans une université, cet argent-là, il ne tombe pas du ciel. Parce qu'il y a des hommes puis des femmes qui se lèvent le matin, puis qui vont travailler, puis qui vont gagner leur pain, puis qui vont gagner leur paie, puis qui voient la moitié de leur paie partir en taxes et impôts. Quand on voit les services qui sont donnés, il n'y a personne... moi, je ne connais personne qui est voleur, ça ne lui tente pas de voler, mais il veut en avoir pour son argent. Et, quand il voit la moitié de sa paie partir en taxes et impôts, il aimerait ça qu'il en ait un petit peu de retour là-dedans, et la plupart de ces gens-là ont été formés dans nos écoles.
Les gens qui travaillent dans les usines, qui sont des gens qui travaillent très fort, très bien, les gens qui travaillent dans les centres de recherche ont été formés dans nos cégeps, dans nos universités, dans le but justement d'aller travailler puis de gagner son pain quotidien et de s'assurer d'avoir une vie qui soit honorable. Et ces gens-là ont été formés, oui, dans nos écoles, pour pouvoir exercer le métier qu'ils aiment faire, et ça, bien, ils peuvent exercer le métier parce qu'ils ont été formés par les institutions qui leur ont donné les bons guides et ont pu travailler immédiatement après dans l'entreprise, oui, parfois privée.
Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Ce n'est pas une maladie vénérienne, l'entreprise privée au Québec, là. Au contraire, on peut être très fiers de nos entreprises privées au Québec, très, très fiers de ce qu'ils font, de ce qu'ils réalisent qui rayonne partout à travers le monde.
Parce que, la semaine dernière, j'étais à l'étranger et j'étais très fier de voir des avions fabriqués à Montréal qui avaient été conçus par nos ingénieurs, qui avaient été dessinés par des gens de chez nous, qui avaient été montés par des mécaniciens, par des techniciens formés chez nous, et, oui, ils travaillent pour une entreprise privée. Ce n'est pas grave, ça. Au contraire. Parce que, vous savez quoi? Les ingénieurs qui travaillent, les informaticiens qui conçoivent ces grands... cette fierté que nous avons ici, particulièrement à Québec et ailleurs aussi, concernant cette industrie du logiciel, ces ingénieurs-là qui sont formés chez nous, ces informaticiens-là qui sont formés chez nous s'en vont partout à travers le monde. Mais vous savez quoi? Quand ils vendent à travers le monde, c'est de l'argent neuf qui rentre chez nous, et ça permet de payer les cégeps, et les universités, et nos services qui sont très importants. Et c'est pour ça que je suis fier, moi, de l'entreprise privée du Québec.
Et, quand j'entends votre discours, qui est très... qui est un frein à l'entreprise privée à l'intérieur de nos universités, je ne suis pas d'accord avec vous. Ces gens-là sont... peuvent, là, nous aider. Je vous le répète: Il n'est pas question pour nous de donner les clés à l'entreprise privée, mais de les accueillir pour aider à mieux former nos étudiants, à mieux former nos hommes... nos jeunes hommes et nos jeunes femmes pour qu'ils puissent enrichir le Québec plus tard en travaillant, oui, dans l'entreprise privée. Et je le répète: Ce n'est pas un problème, ce n'est pas une maladie vénérienne, l'entreprise privée, j'en suis très fier.
Mon temps est court, je veux quand même vous poser une question. Vous avez ouvert la porte, et je le salue, parce que votre propos était... à mon point de vue, fermait la porte à toute présence extérieure aux conseils d'administration. Là, je vois que vous avez un peu précisé l'affaire. Ne parlons pas du système privé, ne parlons pas de l'entreprise privée, parlons plutôt du domaine socioéconomique ou sociocommunautaire. Mettons que, dans un cégep, vous avez une forte proportion de gens qui sont formés dans les soins infirmiers. Pourquoi est-ce que le directeur de l'agence de santé du coin ne pourrait pas siéger au conseil d'administration? Parce que, lui, il sait c'est quoi, les besoins, puis il voit là des gens qui seraient disponibles à travailler. Pourquoi fermer la porte à ces gens-là et pourquoi surtout leur empêcher d'avoir un pouvoir décisionnel sur l'avenir de l'éducation et de l'économie du Québec?
Le Président (M. Marsan): M. Clément, très rapidement. Il reste un peu... un petit peu plus que une minute pour votre réponse...
M. Clément (David): O.K.
Le Président (M. Marsan): ...et ensuite c'est le député de Mercier qui va prendre la parole.
M. Clément (David): Parfait. Bien, très rapidement, je veux dire, à la limite, je pense qu'on est d'accord avec une partie du propos. Comme je l'ai dit tantôt, l'éducation au Québec va effectivement avoir des finalités économiques. Là où est-ce qu'on commence à avoir un problème... et je vais vous donner un exemple concret. On parlait d'informaticiens tantôt. On va prendre l'exemple d'Ubisoft. On n'a rien contre qu'un informaticien ou un programmeur aille travailler chez Ubisoft après avoir fait son bac, sa maîtrise, son doc. C'est parfait, c'est son choix, c'est sa liberté. Là où est-ce qu'on a un problème, par exemple, c'est quand on a des écoles Ubisoft qui s'ouvrent.
Comme mon collègue l'a dit tantôt, on crée des travailleurs et des travailleuses, à cause de subventions privées, qui ne peuvent que travailler sur les produits d'Ubisoft. Ils sont donc des serviteurs d'une entreprise privée qui ont été éduqués ou qui ont été totalement éduqués par l'État avec des fonds publics. C'est l'entreprise privée qui, dans ce cas-là, vient chercher la paie des travailleurs, travailleuses qui se lèvent à chaque matin pour payer des impôts. C'est l'entreprise privée qui sauve en formation grâce à nos cégeps et à nos universités. On n'a aucun problème à ce qu'il y ait une éducation généraliste, c'est-à-dire qu'un informaticien, quand il sort de là, de l'université ou du cégep, il est capable de travailler sur tout, pas juste chez Ubisoft. Et c'est là que notre problème arrive avec les liens avec l'entreprise privée. C'est qu'il y en a une, finalité. Pas de trouble, on s'entend, ça va servir à ça et ça va être une conséquence économique de ça. Par contre, je terminerais en disant justement qu'on ne veut pas que ça devienne des universités du Québec à Ubisoft.
Le Président (M. Marsan): Alors, merci, M. Clément. La parole est maintenant au député de Mercier. M. le député.
M. Khadir: Merci, M. le Président. D'abord, comme c'est la première fois, depuis le retour des vacances, que je rencontre Mme la ministre de l'Éducation, d'avoir une pensée pour la perte qu'elle a subie cet été, en toute modestie. Ensuite, je dois dire que j'ai obtenu la réponse à mes questions au cours des débats qu'il y a eu.
J'aurai juste un simple commentaire. Je pense que le principe qui veut qu'il n'y ait pas une ingérence externe prépondérante dans la gestion interne des universités qui... par définition, hein, si on retrace l'histoire des universités, c'est des sociétés de savoir qui se sont constituées en toute indépendance et qui devaient le demeurer. Il y a eu des exemples patents d'ingérence: on se rappelle Galilée, que le pape a obligé de se dédire, par ingérence externe, parce que ça ne correspondait pas à un certain état...
Des voix: ...
M. Khadir: Non, ce n'est pas banal, si je retrace cet exemple-là. Évidemment, au Québec, on n'en est pas là. Heureusement, on a évolué. Ce n'est pas le même type d'ingérence, ce n'est pas les mêmes rapports de pouvoir.
Mais, comme une des représentantes, je pense, Mme Prévost... Anne-Marie Provost faisait mention tout à l'heure, c'est une question systémique. C'est-à-dire que, quand le privé a une prépondérance, les secteurs privés, les secteurs financiers, les secteurs d'intérêt, qui contrôlent déjà le pouvoir économique, ont intérêt à ce que le système ne bouge pas. Et, s'ils ont une prépondérance sur la génération de l'innovation, sur la génération des nouveaux savoirs dont on a besoin pour constamment améliorer nos sociétés, bien, il y a un conflit d'intérêts patent entre ces deux finalités-là. L'université est là pour générer de nouveaux savoirs, pour générer un nouveau sens, de nouveaux liens, alors que l'entreprise privée est là pour assurer le maintien du statu quo. Si l'un prédomine sur l'autre, on vient de tuer le savoir, on vient de tuer l'université. Donc, d'où l'importance de garder cette autonomie, cette indépendance et donc cette distance critique.
Puis je pense que d'ailleurs le fait que nos sociétés, notre société au Québec... Je pense que Mme la ministre a de quoi être fière. On a un système d'enseignement qui fait en sorte qu'on a trois jeunes ici avec lesquels je me sens en situation de pair, d'égalité, tellement le propos est complexe, est nuancé et solide. J'espère qu'on va maintenir ça. C'est grâce... C'est grandement dû à la démocratisation du savoir par l'indépendance dont jouissaient déjà nos institutions, depuis leur fondation, à cause des prémisses sur lesquelles on a bâti ce système d'éducation. Donc, si les étudiants aujourd'hui font appel de préserver cet aspect-là, je pense qu'il faut le prendre avec le plus grand sérieux.
Le Président (M. Marsan): M. le député de Mercier, je vous remercie pour votre commentaire. M. Pépin, Mme Provost et M. Clément, je vous remercie pour nous avoir fait connaître le propos de l'Association pour une solidarité syndicale étudiante.
La commission ajourne ses travaux sine die. Merci.
(Fin de la séance à 21 h 29)