L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières

Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le mercredi 4 juin 1980 - Vol. 21 N° 289

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières


Journal des débats

 

Etude des crédits du ministère

des Consommateurs, Coopératives

et Institutions financières

(Vingt heures quinze minutes)

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières est réunie pour étudier les crédits du ministère pour l'année 1980-1981.

Les membres de la commission sont: M. Gagnon (Champlain), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Goulet (Bellechasse), M. Joron (Mille-Iles), M. Laberqe (Jeanne-Mance), M. Lavigne (Beauharnois), M. Michaud (Laprairie), M. Marquis (Matapédia) remplace M. Paquette (Rosemont), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Samson (Rouyn-Noranda).

M. Giasson: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): M. Saint-Germain est remplacé par M. Mathieu (Beauce-Sud).

Les intervenants sont M. Baril (Arthabaska), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. La-londe (Marguerite-Bourgeoys), M. Lefebvre (Viau), M. Martel (Richelieu)... Est-ce que M. Saint-Germain peut intervenir comme intervenant? D'accord.

Est-ce qu'il y a un rapporteur? M. le député de Laprairie?

M. Michaud: Avec plaisir, M. le Président, si les autres membres consentent.

Le Président (M. Boucher): Adopté à l'unanimité.

M. le ministre, pour les commentaires préliminaires.

Remarques préliminaires M. Guy Joron

M. Joron: M. le Président, madame, messieurs les membres de la commission, la commission permanente que nous formons s'est réunie à quelques reprises au cours de l'automne dernier afin de procéder à l'étude article par article de quelques projets de loi, mais c'est la première fois cependant que je procéderai à l'étude des crédits du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières depuis que j'en fus nommé titulaire, il y a quelque huit mois maintenant.

Je compte donc, au cours de ces remarques préliminaires, mettre l'accent sur les faits saillants qui ont marqué l'activité de mon ministère durant les mois passés et faire part aux membres de la commission des événements dont on peut raisonnablement prévoir la réalisation pendant l'année qui vient.

Ainsi, à l'Office de la protection du consommateur, beaucoup d'actions entreprises au cours de l'année ont résulté de l'adoption, par l'Assemblée nationale, de la loi 72, Loi sur la protection du consommateur.

La préparation de la réglementation afférente à la loi et la consultation qui en a découlé ont accaparé beaucoup des énergies de l'office au cours de l'année. De même, la campagne d'information qui a accompagné la mise en vigueur de la loi, le 30 avril dernier, a été préparée de longue date et tout nous porte à croire que cette campagne d'envergure atteindra les objectifs visés. En effet, dès la première semaine de la campagne d'information, les consommateurs se sont procuré 1 600 000 exemplaires de la brochure d'information sur la loi qui avait été placée à divers comptoirs d'information. Les responsables de l'office ont également procédé, au cours des derniers mois, à une consultation en vue d'établir le règlement de la loi sur le recouvrement de certaines créances. Un projet de règlement me sera d'ailleurs soumis dans les semaines qui viennent.

Enfin, les études et les consultations relatives à la protection du consommateur en matière immobilière vont bon train et se concrétiseront vraisemblablement pendant cette année. J'aimerais également souligner la publication récente des résultats d'une recherche intitulée la Société de consommation au Québec, que l'office a menée depuis l'automne 1977 et qui a été publiée tout récemment. L'étude, dans un premier temps, trace le profil des consommateurs québécois à partir de leur situation personnelle et porte, dans un second temps, sur les problèmes de consommation, en traitant, notamment, de l'étendue et de la fréquence de ces problèmes. Il s'agit là d'un document d'importance dans le domaine de la consommation au Québec.

Du côté des coopératives, l'année a été sans contredit marquée par la préparation et la tenue, en février dernier, du sommet sur la coopération qui a réuni, pour la première fois dans l'histoire du mouvement coopératif québécois, les représentants de tous les secteurs de la coopération autour d'une même table. Je voudrais d'ailleurs souligner devant les membres de cette commission le dynamisme et le sérieux dont il a été fait preuve autant au niveau de la préparation que de la tenue du sommet, tant chez le partenaire gouvernemental qu'au sein du milieu coopératif lui-même.

Les partenaires ont cherché, au moment du sommet, les moyens de réaliser leurs objectifs communs à savoir favoriser l'utilisation de la formule coopérative comme outil important du développement économique. Plusieurs engagements furent pris de part et d'autre en vue de consolider la présence coopérative là où elle est bien implantée et d'intensifier la création d'entreprises coopératives dans les secteurs économiques où leur présence est moins significative. Depuis le sommet, les fonctionnaires de mon ministère s'affairent à donner suite aux engagements contractés. Dès avril, un comité de travail était mandaté pour

étudier les modifications à être apportées à la Loi sur les associations coopératives et à la Loi sur les sociétés coopératives agricoles en vue de mieux adapter ces lois à la réalité actuelle. Le groupe de travail doit également concevoir un nouvel encadrement juridique pour les entreprises communautaires d'inspiration coopérative. Un autre comité, également en opération depuis le début d'avril, a entrepris une révision des lois des caisses d'épargne et de crédit et des caisses d'entraide économique et étudie plus particulièrement les dispositions qui concernent les pouvoirs de placement de ces institutions.

De façon générale, au terme du sommet, mon ministère s'est vu confier un mandat de coordination des lois et règlements administrés par divers ministères sectoriels, mais qui concernent l'activité des coopératives. Ainsi, dorénavant, tout projet de modification à ces lois et règlements devra être soumis à mon ministère avant d'être acheminé au Conseil des ministres. En raison de ce mandat de coordination, les fonctionnaires de mon ministère sont donc impliqués au sein de plusieurs groupes de travail qui ont été mis sur pied dans différents ministères, à la suite du sommet sur la coopération.

J'aimerais enfin rappeler aux membres de la commission l'entrée en vigueur récente de quelques autres lois administrées par mon ministère. Ainsi, la Loi modifiant la Loi sur les compagnies, sanctionnée en juin dernier, est entrée en vigueur le 30 janvier 1980 ainsi que les règlements d'application. Cette loi visait à assouplir les procédures d'incorporation au Québec. La Loi modifiant la Loi sur les assurances, adoptée en juin 1979, a été mise en vigueur, ainsi que le règlement d'application, en décembre dernier. Les dispositions de la loi visaient essentiellement à diversifier les sources de financement des assureurs à charte québécoise et à assouplir les normes de placement qui leur sont applicables.

Par ailleurs, le service des assurances travaille présentement en étroite collaboration avec l'Association des courtiers d'assurance en vue de dégager chez les membres de l'association un consensus sur les grands principes qui orienteront la révision de la Loi sur les courtiers d'assurance.

Enfin, les études relatives aux modifications à la Loi sur les valeurs mobilières se sont poursuivies tout au long de l'année et les responsables de la commission m'ont remis, il y a quelques jours à peine, le résultat de leurs travaux. J'espère être en mesure de déposer un projet de loi sur la question dès cet automne. La loi actuelle date, pour l'essentiel, de 1955, alors que fut adoptée la première loi québécoise consacrée aux valeurs mobilières. Cette première loi s'inspirait de la loi ontarienne de l'époque et n'est plus adaptée aujourd'hui à la réalité québécoise, tant au niveau du marché des valeurs mobilières qu'au niveau de la terminologie utilisée. Depuis 25 ans, on a apporté quelques modifications à la loi, principalement en 1973, mais ces modifications visaient à remédier à des problèmes particuliers, sans pour autant adapter la loi aux besoins d'aujourd'hui.

D'autre part, la législation en matière de valeurs mobilières connaît présentement une évolution à la grandeur du Canada. En 1978, l'Ontario a procédé à une révision en profondeur de sa loi. Le gouvernement fédéral a publié, en 1979, l'année dernière, un avant-projet de loi sur le marché des valeurs mobilières et toutes les provinces travaillent actuellement à la révision de leur loi. La nouvelle loi québécoise sera donc construite autour de trois grands thèmes: l'information du public et des porteurs de valeurs mobilières, l'encadrement de l'activité des professionnels et la protection de l'épargne.

Enfin, l'objectif premier de la loi sera de favoriser l'efficience du marché des valeurs mobilières. Voilà les faits saillants des quelque douze derniers mois et les perspectives d'avenir pour l'année qui vient.

En terminant, j'aimerais peut-être vous présenter... On pourra peut-être le faire au fur et à mesure, je ne veux pas prendre le temps de vous présenter tout le monde qu'il y a ici; au fur et à mesure qu'on appellera les programmes, je pourrai vous présenter les différents officiers membres du programme. Je voudrais commencer par vous présenter le sous-ministre, M. Jean-Marie Bouchard, qui est ici à la table; le sous-ministre adjoint, M. Victor Guerci, qui est ici avec nous également, et le sous-ministre associé aux coopératives, M. Adrien Rioux, qui est là aussi; M. Mo-reau, vice-président de l'Office de la protection du consommateur, qui est le premier élément à l'étude de nos crédits, est assis à ma droite. Je vous présenterai les autres membres au fur et à mesure. Voilà mes remarques.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Julien Giasson

M. Giasson: Je n'ai pas préparé de notes préliminaires, j'aurais tout simplement quelques questions à poser au ministre. Selon nos règles de procédure, après un premier tour de table, le ministre répond à des questions soulevées lors d'une première intervention des représentants de chaque parti politique.

Je lisais récemment dans une revue des propos que le ministre avait tenus répondant lors d'une interview. Il signalait, entre autres, la philosophie ou les projections qu'il voulait faire siennes. Il indiquait que, en parallèle à l'aspect protectionniste qu'avait son ministère — il faisait sans doute référence à la protection du consommateur — il voulait faire de son ministère un outil de développement économique. Le ministre n'est pas obligé de me répondre immédiatement, mais qu'est-ce que vous recherchez exactement lorsque vous voulez ajouter ou développer surtout la dimension de développement économique à l'intérieur de votre ministère?

Vous avez également fait part d'intentions ou de visions que vous aviez vis-à-vis du comportement de l'épargne au Québec, comment l'épargne

était contrôlée, de quelle façon elle était dirigée et vous entendiez, selon les propos que vous aviez tenus — si vous avez été cité assez parfaitement — vraiment vous pencher à fond de ce côté-là.

Là encore, il serait intéressant de connaître les projections ou les perspectives que vous entendez développer et quel rôle vous entendez y jouer.

Vous voulez également toucher à l'examen dans le domaine du régime de rentes, des rentes supplémentaires, surtout au Québec. Il s'agit encore d'une masse d'argent qui a une importance et qui doit aller un peu dans les projections que vous avez vis-à-vis de l'utilisation de l'épargne, la canalisation, le contrôle, ainsi de suite.

Ce sont là les éléments sur lesquels j'aimerais que le ministre nous fournisse plus de précisions. Vous aviez indiqué qu'en ce qui a trait à la protection du consommateur vous jugiez qu'on avait franchi suffisamment de chemin dans cette voie et que tous les outils étaient là, qu'il s'agissait de les utiliser et que peut-être on avait voulu, à une certaine époque, apporter de la surprotection, tellement on avait poussé loin la législation, la réglementation, les contrôles, à un point où on se demandait — et je partage votre opinion là-dessus — si on n'avait pas de la surprotection, si on ne voulait pas conduire le consommateur par la main, peut-être ne pas lui laisser assez de marge de manoeuvre personnelle pour faire ses choix et se comporter en adulte devant notre monde de consommation.

M. le Président, j'arrête là mes propos; nous pourrons revenir plus tard sur ces sujets.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. M. le député de Bellechasse.

M. Bertrand Goulet

M. Goulet: Si le ministre veut répondre tout de suite ou... Très brièvement, M. le Président, M. le ministre, mesdames, messieurs, bien sûr, l'année qui s'est écoulée s'est révélée plutôt tranquille pour le ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières, surtout du côté législatif, comparativement à ce qu'on avait connu en 1977 et 1978 où nous avions eu des années très intenses au niveau de la législation dans ce ministère, le projet de loi no 72 et le projet de loi no 67, je crois, sur l'assurance...

Par contre, on peut déceler trois faits importants qui auront sûrement une certaine influence sur les politiques futures de ce ministère. Ces trois éléments sont: d'abord, le sommet coopératif, le sommet sur la coopération tenu fin janvier, début février 1980, qui devrait donner certains résultats au cours de l'année qu'on entame. On a cru comprendre que le gouvernement avait fait certaines ouvertures sur la plupart des demandes du secteur coopératif. Il ne reste plus au gouvernement qu'à agir dans le sens qu'il laissait entendre et à ne pas décevoir le secteur coopératif qui, semble-t-il, a été satisfait du déroulement de ce sommet.

Comme le faisait remarquer le président du Conseil de la coopération du Québec, cette rencontre marque le début d'une véritable intercoopération entre certains secteurs du mouvement coopératif. Depuis quinze ans, on parle d'inter-coopérer; je pense qu'il serait l'heure maintenant de passer aux actes. Le gouvernement devra faire sa grande part de ce côté-là. (20 h 30)

Comme deuxième élément important qu'on a retenu cette année, on verra les premiers effets de la mise en vigueur de la nouvelle Loi sur la protection du consommateur. Même si cela fait longtemps qu'on en a discuté, pour nous, c'est tout nouveau au niveau de l'application. Il est encore trop tôt pour juger de l'efficacité de cette loi et des coûts qu'elle pourra peut-être entraîner, mais, quand même, on pourra voir cela au cours de cette année. Chose certaine, il faut laisser les divers agents composer avec la nouvelle loi et faire ensuite les ajustements qui s'imposeront, mais ces ajustements devront se faire au cours de la présente année.

Le dernier élément, M. le Président, on l'attend encore. C'est l'étude que le gouvernement nous a promise sur l'épargne des Québécois. On se rappellera que, lors du dépôt de l'énoncé de politique économique "Bâtir le Québec", on nous avait promis que ce document serait suivi d'une politique sur l'épargne, afin d'assurer aux épargnants la maîtrise de leur environnement économique. Le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières a parlé ou parlait de quelque chose comme $100 000 000 000 d'actifs financiers au total, lors d'une allocution qu'il a prononcée devant la Chambre de commerce du Québec ou la Chambre de commerce de Montréal. En tout cas, cela se passait à Montréal. On aimerait savoir de la part du ministre quand il sera possible de prendre connaissance de ce document, un document qui devrait présenter un tableau complet de ce qu'est l'épargne québécoise, son importance, d'où elle vient, où elle va et qui la contrôle.

Quant à moi, ce sont les trois éléments majeurs que je retiens, M. le Président, au début de l'étude de ces crédits. J'aurais d'autres commentaires touchant certains points plus spécifiques, mais, afin d'accélérer les travaux de cette commission, je les formulerai au fur et à mesure qu'on étudiera chaque programme du ministère, comme l'assurance automobile, l'Office de la protection du consommateur et la coopération.

Voilà les remarques préliminaires que je voulais livrer. Quant à moi, j'aimerais mieux qu'on entame programme par programme et on pourra poser des questions plus spécifiques concernant ces programmes.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Bellechasse. M. le ministre.

M. Guy Joron

M. Joron: Je ne veux pas allonger inutilement mes propos avant qu'on aborde l'étude des crédits programme par programme, mais, brièvement, je

tenterai de répondre aux questions que les membres de la commission viennent de soulever. Si j'en oublie, on pourrait y revenir ensuite morceau par morceau, au fur et à mesure que cela se présentera.

Le député de Montmagny-L'Islet soulignait que le ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières avait, depuis son origine, eu une vocation qu'on pourrait qualifier de protectionniste. C'est largement vrai. Je pense que la perception que le public a eue de ce ministère à ce jour, c'est celle d'un ministère de protection dans le sens qu'il était chargé de voir à ce que l'épargne de la population que les institutions financières reçoivent soit placée, utilisée et gérée de façon sécuritaire, que l'épargnant soit protégé. La même chose vaut pour la Commission des valeurs mobilières, qui est chargée non seulement de voir à ce qu'il existe un marché financier sain au Québec, mais de voir surtout à ce que les détenteurs de titres soient protégés, que l'épargnant soit protégé. Quand, dans les années soixante-dix, s'est développée de plus en plus la notion de protection du consommateur, on a greffé au ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières cette responsabilité probablement parce que c'était le ministère le plus axé dans la voie de la protection, si vous voulez. C'est de cette façon qu'on a rattaché toute la question du consommateur au ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières.

Pour répondre à la question que me posait le député de Montmagny-L'Islet, à savoir ce que j'ai voulu dire quand, lors d'une entrevue, je disais que le ministère devrait, tout en conservant évidemment le rôle premier que la loi lui donne, celui de protéger les épargnants, devenir davantage axé dans l'optique du développement économique. Avec justement les épargnes — je rejoins une question que soulevait le député de Bellechasse — lorsqu'on considère la masse d'argent qui a été confiée par les épargnants québécois aux différentes institutions qui relèvent de ce ministère, on s'aperçoit qu'il y a là une masse considérable. En gros, on pourrait — si quelques chiffres peuvent être intéressants — illustrer l'importance de cette masse d'épargne.

A la fin de 1978, il y avait au Québec environ $33 000 000 000 confiés à des institutions de dépôt, c'est-à-dire des banques à charte, qui ne relèvent pas de nous, qui sont évidemment de juridiction fédérale, les caisses d'épargne et de crédit qui, elles, relèvent de nous, les sociétés de fiducie, qui relèvent de nous. Ces trois titres, ces institutions détenaient $33 000 000 000; dans les compagnies d'assurance-vie, on retrouvait à la fin de 1978 un actif équivalent à un peu plus de $10 000 000 000 également, qui sont des sommes mises de côté pour permettre aux assureurs-vie de faire face à leurs obligations envers des assurés québécois.

Nous voilà rendus à $43 000 000 000, ce à quoi on peut ajouter, bien que ça ne relève pas directement de ce ministère-ci, les $10 000 000 000 et plus d'épargne que canalise le Régime des rentes vers la Caisse de dépôt; là, vous en êtes rendus à $53 000 000 000 et ce n'est encore qu'une partie de la masse totale. Il faudrait pouvoir ajouter tous les régimes de rentes privés et supplémentaires qui peuvent exister et dont on a des statistiques approximatives seulement. Finalement, il faudrait y ajouter tout ce qui est des placements privés et qui ne sont pas comptabilisés dans tout ce que je viens de dire. Si vous détenez des obligations, des actions ou quelque autre placement que ce soit, ce n'est pas comptabilisé dans le total que je viens de donner, si bien que, si vous ajoutez en plus à ces valeurs mobilières les valeurs immobilières que peuvent détenir les Québécois, on s'aperçoit que l'épargne globale de la société québécoise dépasse probablement très largement les $100 000 000 000 au moment où on se parle.

La majeure partie de ça relève directement ou indirectement d'institutions financières qui relèvent elles-mêmes de notre ministère. Evidemment, le ministère, s'il s'implique de façon non plus à exclusivement protéger l'épargnant— ce qu'il doit continuer de faire — mais s'il a comme préoccupation, en même temps, de dynamiser les institutions financières, de voir à ce qu'elles emploient les sommes qui leur sont confiées de la manière la plus rentable, la plus dynamique possible pour le développement économique du Québec, on voit la vocation possible du ministère se transférer en un ministère relativement statique, un ministère qui devient très dynamique et qui fait partie des ministères à développement économique.

Comment peut-il faire pour dynamiser les institutions? C'est nous qui faisons les règles du jeu qui encadrent ces institutions. En parlant tout à l'heure, j'ai mentionné, au cours de mes remarques préliminaires, quelque chose qui découle du sommet sur la coopération, un engagement qui découle de ce sommet. J'ai dit que nous voulons revoir la Loi des caisses d'épargne et de crédit de façon à élargir leur pouvoir de placement. Je n'entrerai pas dans les détails à ce moment-ci, on le fera quand la loi arrivera; ce n'est pas encore pour demain matin, ça ne se fera très certainement pas avant l'automne, mais on aura très probablement l'occasion d'en discuter en cette année 1980. On a un exemple par lequel le ministère peut influer sur le développement économique.

Ensuite, il y a tout un rôle, qui n'est pas législatif du tout, mais qui est plus du ressort, si vous voulez, des relations que le gouvernement, que les hommes politiques, que les officiers du ministère peuvent entretenir avec les gérants de ces institutions financières. Cela ne dépend pas de la législation, cela dépend des hommes et des femmes, cela dépend de la mentalité. Il faut bien l'avouer, et je pense que le député de Montmagny-L'Islet que je vois sourire et qui est dans le domaine financier depuis assez longtemps sait très bien à quoi je veux en venir, on a eu au Québec, essentiellement, une mentalité en matière de placements, disons, contentons-nous pour l'instant de

dire, conservatrice, pas très dynamique. Je ne suis pas du tout un tenant du risque, mais, entre les placements folichons, les placements risqués et les placements ultra-conservateurs, il y a toute une marge. Il y a un secteur que les Québécois, comme individus autant que comme institutions, ont délaissé, c'est le placement sous forme d'actions. Les Québécois ont préféré prêter leur argent sous forme d'obligations, sous forme de prêts hypothécaires plutôt que de devenir propriétaires; ils ont préféré prendre des prêts hypothécaires plutôt que d'être le propriétaire de l'édifice, ou bien ils ont préféré acheter des obligations plutôt que d'acheter des actions d'une entreprise, par exemple.

Ceci a fait que, bien qu'on ait accumulé des masses d'épargne considérables, l'ampleur de cette épargne ne correspond pas du tout au contrôle efficace que l'on exerce sur l'économie du Québec, parce que ce qui procure le contrôle et le pouvoir de décision, ce n'est pas celui qui a prêté l'argent, c'est celui qui détient les actions, celui qui détient la propriété. C'est en train de changer, évidemment. Je pense que cela pourrait être encouragé, pas tant par les lois que par la parole ou enfin les relations que nous pouvons avoir quotidiennement avec les gérants des différentes institutions financières, les gérants des grands portefeuilles québécois.

L'étude sur l'épargne, enfin — je terminerai là-dessus — à laquelle faisait allusion le député de Bellechasse, cette étude qui, en fait, dans ce sens, prend une espèce de photographie, si vous voulez, de la réalité de l'épargne québécoise aujourd'hui: d'où vient-elle, où est-elle placée, à quoi sert-elle, ainsi de suite, cette vaste étude et les recommandations qui l'accompagnent, je vous rappellerai que c'est un mandat qui a été confié au ministre d'Etat au Développement économique. Le comité de développement économique n'a pas pris de décision finale à savoir quand ce rapport serait rendu public. Moi, je ne peux pas, évidemment, engager le ministre d'Etat au Développement économique, parce que c'est lui qui en avait le mandat, c'est à lui que le Conseil des ministres avait donné le mandat de réaliser cette étude qui a évidemment mis à contribution notre ministère, mais l'étude comme telle, c'est au ministre d'Etat au Développement économique de la rendre publique au moment qu'il aura choisi.

Pour l'instant, je ne peux répondre à cette partie de la question. Voilà, en gros, ce que je voulais ajouter à la suite des questions que posaient mes collègues et, encore une fois, si j'en ai oublié, je tâcherai d'y revenir au fur et à mesure que les discussions se dérouleront.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Montmagny-L'Islet.

Discussion générale

M. Giasson: Je remercie le ministre de nous avoir apporté des précisions. C'est fort intéressant, le secteur de l'épargne et les orientations qui pourraient être données dans ce sens. Les nouvelles orientations en soi ne créent pas de l'épargne additionnelle. On a mentionné que, dans le secteur bancaire, les caisses d'épargne et de crédit et les fiducies, il pouvait y avoir $33 000 000 000. De quelle manière l'action ou les interventions de son ministère pourraient-elles modifier en profondeur les politiques de placement et une nouvelle orientation dans le placement des sommes qu'on retrouve dans les institutions que je viens de mentionner? (20 h 45)

M. Joron: On n'aura pas de révolution dans ce domaine. Ce dont on parle, ce sont des changements à la marge. Evidemment, les $15 000 000 000, par exemple, qui sont confiés aux différentes caisse d'épargne et de crédit existantes au Québec, c'est déjà placé, c'est prêté sous différentes formes, soit en prêts hypothécaires, en ci en ça, en obligations, un peu en actions, etc., et cela ne revirera pas de bord du jour au lendemain.

Mais, en permettant, par exemple, de placer un peu plus sur actions que ce que la loi permet à l'heure actuelle...

M. Giasson: Si vous me permettez, pour les institutions qui ont le contrôle de ces masses d'argent et non pas les individus qui ont des épargnes à l'intérieur des entreprises, est-ce que cela nécessite des changements aux lois?

M. Joron: Oui, cela nécessite des changements aux lois. Les caisses d'épargne et de crédit nous demandent depuis longtemps d'élargir leurs pouvoirs de placement, pour leur donner plus de flexibilité. Dans le passé, les lois ont été très conservatrices, très prudentes, peut-être un peu ultra-prudentes à cet égard et la marge de manoeuvre en termes de placement de ces institutions est plus limitée que celle d'autres institutions financières dans d'autres provinces, dans d'autres Etats américains, par exemple. On veut élargir le cadre, pas énormément, mais de façon que, progressivement, des fonds puissent être orientés vers des secteurs. On pense surtout au développement des entreprises, au développement industriel par opposition à des placements plus du type bas de laine comme prêts hypothécaires et ainsi de suite. C'est ce genre de modifications législatives qui sont loin d'être révolutionnaires, encore une fois, et qui constituaient la marge, mais qui, avec le temps, peuvent graduellement changer la situation, d'autant plus que la masse de l'épargne elle-même, surtout dans des années d'inflation comme celle que l'on vit depuis cinq ans, augmente d'année en année et relativement rapidement. Cela ne prend pas beaucoup de temps finalement pour qu'au bout d'un certain nombre d'années le portrait, si vous voulez, des placements de nos institutions financières, si je me reporte dans cinq ans d'ici, puisse être sensiblement différent de ce qu'il est maintenant.

M. Giasson: Mais, effectivement, s'il y avait des changements dans les politiques de place-

ment de manière que nos entreprises qu'on vient de citer se dirigent plus ou davantage vers le capital de risque, le capital-actions, est-ce qu'on peut en déduire que, pour ces organismes ou ces entreprises, il y aurait une meilleure rentabilité sur le placement d'argent ou s'ils devraient céder peut-être sur la rentabilité, étant donné l'élément de risque qu'on retrouve à l'intérieur de cette forme de placement?

M. Joron: Encore une fois, il faudrait s'entendre quand on parle de risque. On parle toujours de risque mesuré, de risque dans le sens où les banquiers parlent de risque; ce n'est pas dans le même sens que les spéculateurs boursiers parlent de risque. C'est toujours un risque très qualifié.

Je pense que cela pourrait avoir tendance à élever le rendement sur les fonds placés par ces institutions financières. Cela devrait normalement leur procurer un meilleur rendement sur leurs placements. Je le crois. Je parle d'élargir les pouvoirs de placement. On a aussi parlé de modifier la loi dans le sens de permettre aux caisses d'épargne d'être beaucoup plus dynamiques sur le marché des prêts commerciaux, des prêts industriels, leur permettre d'agir en somme comme les banques à charte le font à titre de banques d'affaires, de banques commerciales, ce que les caisses d'épargne, jusqu'à ce jour, ont à peine touché quand elles l'ont fait indirectement. En effet, la loi à cet égard n'est pas aussi permissive pour elles que la loi fédérale ne l'est pour les banques, par exemple, mais on veut les mettre sur un pied de concurrence qui leur permette d'être aussi dynamiques et aussi concurrentielles que les banques peuvent l'être aux niveaux commercial et industriel.

M. Mathieu: Dans le même ordre d'idées, M. le ministre, vous touchez là un point très sensible. Ma pratique notariale m'indique qu'on part d'une petite entreprise de peine et de misère, la caisse populaire prête sur nantissement commercial en prenant beaucoup de risque parce qu'elle a confiance dans la garantie morale des fondateurs, des promoteurs et, au bout de sept ou huit ans, on se ramasse avec quelque chose d'intéressant, une assiette intéressante, la compagnie a bien progressé et là, on s'aperçoit que nos lois obligent l'institution, l'industrie à s'orienter vers les banques, parce que les garanties ne sont plus suffisantes. Les caisses populaires n'ont pas l'équivalent de l'article 88 de la Loi des banques et il y a manque de dynamisme. On s'aperçoit qu'on prépare l'assiette au beurre et, quand elle est belle, on l'envoie aux banques. Je crois que c'est assez urgent d'agir dans ce domaine. Je l'ai souvent constaté dans ma pratique de notaire.

M. Joron: Je suis très heureux du témoignage que vous apportez. Vous avez fort bien illustré l'une des raisons pour lesquelles je pense qu'il devient maintenant urgent de modifier la Loi des caisses d'épargne et de crédit. C'est ce qu'elles nous ont d'ailleurs fait valoir — toutes sans exception — à l'occasion du sommet sur la coopération.

M. Giasson: Pour ce qui est des blocs d'épargnes qui sont entre les mains des compagnies d'assurances — que ce soient des compagnies d'assurance-vie ou encore des compagnies d'assurance générale qui font également du placement — est-ce que vous jugez qu'à l'intérieur des lois qui régissent les entreprises d'assurances, on devrait apporter également des changements de manière à donner plus de possibilité ou de marge, parce que les lois sont assez limitatives dans le pourcentage des épargnes ou des actifs qui peuvent être investis en capital-actions?

M. Joron: Dans le cas des assurances, dans le cas des compagnies d'assurance-vie, la loi leur permet d'aller jusqu'à 30% de leur portefeuille, mais je vous avoue qu'au moment où on se parle, je pense avoir fait un calcul à partir des états financiers de la fin de l'année 1978 qui démontrait que, pour les compagnies d'assurance-vie disons québécoises, dont le centre de décision est au Québec, le pourcentage de leurs fonds placés sous direction, si ma mémoire est fidèle, était voisin de 5% ou 6% alors que déjà la loi leur permet d'aller à 30%. Là, ce n'est pas la loi qui les en empêche, c'est plus une mentalité, c'est une question de changement de mentalité, probablement. C'est très inégal. Il y en a qui sont beaucoup plus modernes que d'autres, si vous voulez, à cet égard.

Il faut dire aussi que cela peut être très variable d'une année à l'autre. Évidemment, il y a des cycles à la Bourse et il y a des gérants de portefeuille qui, à certains moments, choisissent, presque d'évaluer complètement le champ des placements sous forme de titres, sous forme d'actions, quitte à réinvestir massivement quand les perspectives boursières semblent meilleures. Tout cela fait que les statistiques peuvent être interprétées avec une certaine souplesse. Malgré tout, c'est un fait que les compagnies québécoises d'assurance-vie, à cet égard, si on les compare aux autres compagnies canadiennes d'assurance-vie, ont été beaucoup plus timides. Mais ce n'est pas la loi qui les en empêche, ce sont des traditions.

M. Giasson: Est-ce que le ministre juge que les politiques en vigueur à la Caisse de dépôt et placement, qui gère encore des masse de capitaux importantes, sont assez dynamiques? Est-ce que, pour lui, la direction de la Caisse de dépôt et de placement est ouverte à des placements en capital-actions?

M. Joron: C'est une prolongation de la période des questions de ce matin?

M. Giasson: Non, j'aimerais avoir votre avis de ce côté-là!

M. Joron: J'ai un avis personnel, qui n'est pas nécessairement celui du ministre tuteur ou responsable de la Caisse de dépôt ou celui du gouvernement, je l'ai exprimé, j'ai déjà dit que la Caisse de dépôt aurait pu être plus "agressive " à cet égard qu'elle ne l'a été dans le passé, malgré

que les fonds... Je pense que cela a varié autour de 15% à peu près, les fonds que la caisse a consacrés aux placements sous forme d'actions alors que la loi permet d'aller jusqu'à 30%. Là encore, il faut tenir compte des cycles boursiers. Les actions ne sont pas tout le temps aussi attrayantes qu'à d'autres moments.

Si vous me demandez une opinion personnelle, je n'hésite pas à vous dire que la caisse a été plus conservatrice, à mon avis — je peux me tromper, tout cela est relatif — qu'autrement jusqu'à ce jour. Mais, progressivement, depuis quelques années... Ces choses ne changent jamais du jour au lendemain, très rapidement, mais je pense que, depuis quelques années, la caisse a fait preuve d'évolution à cet égard dans le sens, d'une part, de la participation. Elle a pris une participation importante à un certain nombre d'entreprises; elle a même commencé à déléguer de ses représentants à certains conseils d'administration. Je pense que la caisse s'oriente dans la bonne voie mais, encore une fois, c'est mon appréciation personnelle tout simplement.

M. Giasson: Lorsque vous faites référence à l'épargne des Québécois à l'intérieur de régimes supplémentaires de rentes, quel est l'ordre de grandeur approximatif? J'ai l'impression qu'on retrouve une partie de ces épargnes à l'intérieur des blocs d'argent que nous avons dans les compagnies d'assurances et dans les fiducies. Tous ces régimes supplémentaires ne sont pas nécessairement à l'extérieur de ces groupes auxquels on a fait allusion.

M. Joron: Oui, d'accord, ce que vous dites là, c'est vrai pour une partie. Dans le cas des fiducies, par exemple, quand je citais des chiffres tout à l'heure, je disais qu'il y avait, à la fin de 1978, pour $33 000 000 000 d'épargne québécoise déposée auprès des banques à charte, des caisses d'épargne et de crédit et des sociétés de fiducie. Mais c'est seulement à titre de dépôt.

Si des successions, par exemple, sont administrés par des compagnies de fiducie, si des régimes de rentes privés sont administrés par des compagnies de fiducie, ils ne figureraient pas dans le total que je vous ai donné. Alors, à combien les estimer? Ce n'est pas facile. Je vous avoue qu'immédiatement je n'ai pas le chiffre en tête. Mais, globalement, je pense qu'il y a à peu près autant dans les régimes de rentes privés supplémentaires, sinon même davantage, que dans le régime public qui est autour de $10 000 000 000 au moment où on se parle. Il y a probablement encore quelque chose comme $10 000 000 000 qui flotte quelque part, dont on n'a pas tenu compte ici, qui est administré soit par des compagnies de fiducie ou par des compagnies d'assurance-vie mais dans un portefeuille séparé de celui dont je faisais mention tout à l'heure, qui ne correspond qu'aux actifs correspondant aux obligations envers les assurés québécois.

Ces chiffres, la raison pour laquelle, au cours de l'entrevue que vous mentionniez un peu plus tôt, je mentionnais cela, c'est une partie considérable de l'épargne générée... La plupart de ces systèmes de fonds de retraite privés fonctionnent sous forme de contribution moitié par l'employé, moitié par l'employeur, et ainsi de suite. La plupart du temps, ils sont gérés par l'employeur. C'est l'employeur, dans la plupart des cas, qui décide de les administrer lui-même. Cela arrive encore dans un très grand nombre d'entreprises, c'est le cas dans les plus grosses, comme Bell Canada, le Canadien national, ainsi de suite, qui gèrent leur propre fonds de retraite de leurs employés; ce portefeuille représente, dans le cas du CN, je pense, $2 000 000 000, quelque chose comme cela. C'est gigantesque, c'est considérable. Dans le cas du Canadien pacifique, cela doit être énorme aussi; dans le cas de Bell Canada, vous pouvez vous imaginer également que ce doit être une masse considérable d'épargne. Alors, il y a beaucoup d'entreprises qui gèrent elles-mêmes le fonds de retraite en question ou, dans d'autres cas, qui le confient à une compagnie de fiducie ou à une compagnie d'assurances.

Ce que je disais, c'est que, comme pour la moitié, il s'agit d'une épargne prélevée sur le salaire des employés, quand les syndicats négocient des conventions collectives, ils devraient avoir le souci de participer, pour une partie tout au moins, à l'administration des fonds auxquels les syndiqués contribuent et voir où est placé cet argent, auprès de quelle institution, ainsi de suite. Dans ce sens, c'est moins une action législative de la part du gouvernement, si vous voulez, qu'une action des syndicats; dans la négociation de leurs conventions collectives, ils devraient, à mon avis, s'intéresser davantage à cette question de la gestion des fonds de rentes supplémentaires. Ce sont des masses d'argent assez considérables.

M. Giasson: En définitive, vous ne prévoyez aucune mesure particulière de façon à canaliser différemment l'épargne québécoise? (21 heures)

M. Joron: II faut dire que, globalement, il y a des mesures. On parlait un peu plus tôt de moderniser notre loi sur les caisses d'épargne et de crédit pour élargir les pouvoirs de placement. Il y a des choses comme ça. Peut-être que j'en oublie au moment où on se parle, mais, globalement, je ne pense pas que la canalisation de l'épargne soit quelque chose qui se légifère. C'est ma pensée personnelle. Je ne pense pas que ce soit la législation ou la coercition législative de quelque forme que ce soit qui en est l'instrument. D'ailleurs, on est à un certain niveau de développement ici. On a une multitude d'institutions financières différentes dont plusieurs sont contrôlées par des Québécois. On a largement dépassé le stade où notre seul recours pour canaliser l'épargne des Québécois serait de légiférer. Je pense que la société québécoise est beaucoup plus développée et beaucoup plus complexe que cela. Vous savez que — vous le savez sûrement parce que vous êtes dans le domaine de l'assurance — on ne légifère pas si facilement que cela

non plus sur une matière aussi volatile que l'épargne ou que l'argent. Il suffit de légiférer pour penser l'orienter dans tel sens pour qu'avant que la loi soit imprimée, elle soit partie dans l'autre sens. Je ne pense pas que ce soit la façon de faire.

M. Giasson: M. le Président, je laisse faire mes collègues.

Le Président (M. Boucher): On peut passer, j'espère, au programme 1, Protection du public. Les membres sont-ils d'accord pour qu'on en étudie tous les éléments et qu'on adopte le programme au complet?

Protection du public

M. Mathieu: J'ai certaines remarques préliminaires relativement à l'Office de la protection du consommateur. Je peux les faire tout de suite ou tout à l'heure, à n'importe quel moment. Je peux y aller tout de suite?

Une Voix: D'accord.

M. Mathieu: Evidemment, je suis tout à fait d'accord avec les buts et objectifs poursuivis par cette Loi de la protection du consommateur. Je pense que cela s'imposait et cela s'impose encore.

Pour la loi qui est entrée en vigueur le 30 avril, je crois qu'il y a certains problèmes de rodage qui vont exiger certaines modifications, à mon sens, parce que en réalité, on peut obtenir un but contraire à celui recherché. J'aimerais apporter ici certains exemples concrets pour tâcher de démontrer le bien-fondé de mes remarques. J'ai reçu évidemment, comme sans doute beaucoup d'autres d'entre vous — et peut-être le cabinet du ministre également — après le 30 avril, lorsque cette loi est entrée en vigueur, beaucoup de représentations de la part de la Fédération des garagistes. Il y a certains articles... Par exemple, l'article 151 de cette loi dit que le commerçant ou le manufacturier assume les frais raisonnables de remorquage ou de dépannage de l'automobile. Evidemment, j'imagine que la jurisprudence nous dira ce que sont des frais raisonnables mais c'est le pauvre citoyen justiciable qui va être obligé de faire les frais de cette jurisprudence qui va payer pour les autres. Peut-être y aurait-il lieu de le préciser davantage.

Également, lorsqu'on oblige les garagistes à faire une évaluation, je crois que c'est justifié dans certains cas, probablement en ville et moins à la campagne, parce que la notion d'"usager" et de "garagiste" est infime. Vous comprenez, à la campagne, tout le monde se connaît. Il y a une chose qui me surprend un peu. C'est sûr que l'on peut renoncer à cette évaluation, mais par un écrit de la main du consommateur, si je ne me trompe. On lui fait faire une espèce de testament olographe. Même si ce n'était pas un écrit de sa main, voyez-vous le pauvre consommateur — il y en a qui écrivent avec beaucoup de difficulté — commencer à dresser un écrit de sa main à lui? Je crois que cela mériterait un amendement pour que l'écrit soit fait de n'importe quelle manière, parce que ce n'est pas un acte tellement considérable de la nature d'un testament, par exemple, qui, lui est un acte très important pour un individu. Il serait bon d'avoir vos commentaires tout à l'heure, mais je crois que cela mériterait une modification pour que l'écrit dont il est question soit rédigé pas nécessairement de la main de celui qui veut renoncer à l'évaluation. C'est l'article 168.

Pour ce qui est des fameuses garanties, dans la notion de protection du consommateur, si on avait affaire seulement à des voitures neuves, il n'y aurait pas de problème pour obtenir une garantie de trois mois ou 10 000 kilomètres. Mais lorsqu'on a affaire, par exemple, à un particulier qui achète une voiture d'occasion — vous savez qu'il y avait un marché fort répandu de justiciables qui achètent une seconde voiture pour voyager à leur cabane à sucre, à leur garage; un achat de S400 ou $500, pour passer l'hiver — avec cette loi qui oblige le garagiste à fournir une garantie de trois mois, 5000 milles ou selon le cas A, B ou C, vous comprenez que le marché de cette sorte de voitures vient de s'éteindre, parce que, si le garagiste est obligé de garantir la voiture pour trois mois ou 5000 kilomètres, il ne la vendra pas $500 ou $1000; il va la vendre $2000. C'est la conséquence pratique. Donc, c'est notre justiciable au bout de la course qui fait les frais de cette protection qui devient du superflu.

Je crois qu'il y aurait lieu, comme on l'a prévu pour l'évaluation, de prévoir que le citoyen, le consommateur puisse renoncer à la garantie dans ces cas, s'il le désire. Je crois que c'est surprotéger le consommateur que de l'astreindre de l'obliger à accepter la garantie.

Également, dans le cas de pièces usagées, l'article 176 le dit. Dans mon comté, il y a tout un réseau de garagistes qui vendent des pièces usagées. Il m'est arrivé d'avoir une voiture qui ne servait pas tellement. La transmission faisait défaut, ou n'importe quelle pièce. J'arrive au garage et le garagiste me dit: Voici, je vais t'installer une transmission pour $75, aucune garantie. Si elle va, c'est correct; si elle ne va pas, tu l'endureras. Je voudrais avoir la faculté de renoncer à la garantie. Je crois que cela m'avantagerait plus que d'être obligé de la subir parce que, pour une voiture qui vaut $300 ou $400, si je fais installer une transmission de $400 ou $500, je ferais mieux de remiser ma voiture ou de l'envoyer au rebut tout simplement.

Il y a un autre point très important, c'est qu'on accroche la garantie à la voiture et non au propriétaire dans certains cas. L'article 152 prévoit cela. Par exemple, vous avez certains garagistes spécialisés dans le domaine du système d'échappement. Ils vous garantissent le système d'échappement à vie, s'ils le posent, tant que vous êtes propriétaire. Alors, la garantie est attachée au propriétaire. Là, la loi transporte la garantie à l'automobile elle-même. On voit cela régulièrement dans le domaine du système d'échappement et des amortisseurs. Vous comprenez que si c'est pour la vie de la

voiture, quand la personne a une voiture vieille de sept ou huit ans, ou de trois ans, et fait poser un système d'échappement garanti à vie, cela devient exorbitant pour le garagiste, pour le commerçant, parce que, si la voiture dure dix ans ou quinze ans, il faut qu'il renouvelle le système d'échappement ou les amortisseurs. La conséquence pratique, c'est que, dans mon bout, en tout cas — ce doit être la même chose ailleurs — la garantie à vie vient de s'éteindre. Il y a beaucoup de consommateurs — j'en suis un — qui avaient sur la voiture certaines pièces garanties à vie et cela ne sera plus possible à l'avenir.

Dans une saine philosophie de véritable protection du consommateur, en tout cas au nom de la Fédération des garagistes et de beaucoup de consommateurs de mon comté et d'ailleurs dans la province, je n'en doute pas, je crois qu'il y aurait lieu — je répète mes lignes de chapitre — d'abord d'accrocher la garantie au propriétaire de la voiture et non à la voiture, comme c'était avant et, ensuite, de pouvoir renoncer à la garantie. Si je suis tout à fait consentant et que cela me paie, dans un cas donné, à renoncer à cette garantie, je ne vois pas en quoi je serais pénalisé d'y renoncer. C'est à moi à évaluer la situation et non pas au législateur à le faire pour moi, parce que la conséquence pratique, c'est que cela me pénalise.

Donc, ce sont des choses qui sont extrêmement importantes. Également, vous comprenez que, pour nos garagistes artisans, à la campagne — je ne parle pas pour la ville, je ne connais pas la situation — ce ne sont pas des notaires qui ont le crayon prêt à la main et qui sont capables d'arriver et de remplir toute cette paperasse. On leur impose d'énormes tracasseries administratives, il me semble que les demandes que je formule en ce moment devraient être étudiées avec beaucoup de soin et ceci, je le répète non pas, dans le but d'apporter un amendement qui viserait à diminuer la protection du consommateur; je crois que vous me comprenez bien.

Il y a eu des réunions générales de garagistes à quelques endroits de la province, j'ai reçu des représentations de la Fédération provinciale des garagistes et c'était surtout la teneur de leurs revendications. J'aimerais que l'on puisse échanger davantage dans ce domaine et j'espère qu'il pourra être fait droit à ces suggestions ou ces recommandations.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Joron: M. le Président, les remarques que le député de Beauce-Sud vient de faire ont plus trait à l'étude du projet de loi no 72 lui-même qu'à l'étude des crédits du ministère, mais je veux bien quand même engager la discussion avec lui sur les sujets qu'il vient de soulever. Ceci nous conduirait à des amendements à apporter éventuellement à la loi 72, mais je suis de ceux qui croient que toutes les lois peuvent être améliorées, sont perfectibles.

Quant aux raisons qui ont amené le législateur à écrire la loi telle qu'elle l'est, j'aimerais deman- der à M. Moreau, le vice-président de l'office, de vous faire part du point de vue qui a prévalu ou des raisons qui ont amené le législateur, à l'époque, à écrire la loi telle qu'elle l'est, ce qui ne voudra pas dire nécessairement que ça répondra en tout point aux interrogations que vous soulevez. Je tiens à vous dire dès le départ, de toute façon, que les propos que vous tenez ou les suggestions que vous faites restent consignés et pourront certainement servir un jour à l'amélioration des lois, si la réponse ne vous satisfait pas.

Le Président (M. Boucher): M. Moreau.

M. Mathieu: Juste un mot. Je suis d'accord, M. le ministre, nous ne sommes pas ici à l'étude de la loi 72, mais je crois que c'est le forum approprié dans le moment pour apporter ma suggestion, autrement, il faudrait aller devant l'Assemblée nationale, pendant une des périodes de questions, et je trouverais ça abusif.

M. Joron: Non, c'est exact, c'est le forum approprié.

M. Mathieu: D'autant plus que nous avons ici les ressources appropriées.

M. Joron: Avec plaisir!

Le Président (M. Boucher): M. Moreau.

M. Joron: De façon générale, je dirais que le domaine de l'automobile fait l'objet, auprès de nos bureaux régionaux, de plaintes très nombreuses. C'est par dizaines de milliers que nous recevons, finalement, chaque année, dans les bureaux, des plaintes qui concernent l'automobile et particulièrement les garanties, ce qui dénote que les consommateurs vivent un réel problème. C'est la raison pour laquelle le législateur a cru bon d'apporter des articles dans le domaine de l'automobile et des motocyclettes, principalement sur les sujets que vous avez tantôt mentionnés.

Si je reprends les articles un à un, je m'arrêterai d'abord à l'article 151 et je crois que la question que vous avez posée, vous y avez également apporté la réponse lorsque vous avez mentionné que, quand on parle de frais raisonnables, ce sont évidemment les tribunaux qui vont apprécier, au cas où un litige civil surviendrait.

Il est bien évident que si un consommateur veut réclamer à peu près le double du tarif habituel pour le remorquage, il est loin d'être certain que les tribunaux vont lui donner raison. La loi ne pouvait évidemment pas fixer un tarif et indiquer quel était le coût horaire ou encore le coût d'un dépannage, le tout dépendant du millage effectué par le garagiste. Il était, je crois, normal que le législateur prévoie que ce soit un montant raisonnable qui puisse être réclamé. Je pense que le consommateur pourrait certainement causer un problème s'il voulait ambitionner, parce qu'il n'est pas certain que le commerçant accepterait de payer un montant qui est exorbitant. (21 h 15)

Passons maintenant à l'article sur les garanties, c'est-à-dire les catégories A, B, C et D que vous avez mentionnées, auxquelles vous avez fait allusion tantôt. Votre exemple portait sur de vieilles autos qui, parfois, servent pour aller à son chalet d'été ou encore aller à la pêche; ce sont des autos qui, selon vos dires, peuvent valoir entre $500 et $1000. Je pense qu'au prix actuel des automobiles, il est assez clair que lorsqu'une auto se vend $500 ou $1000, elle tombe presque toujours dans la catégorie D, c'est-à-dire la catégorie qui prévoit qu'il n'y a finalement aucune garantie. Si l'on parle d'une auto de $500, disons, je pense qu'il serait assez surprenant qu'elle tombe dans la catégorie A, c'est-à-dire la catégorie des autos qui ont moins de deux ans d'existence, ni la catégorie B, où l'existence de l'auto se situe entre deux et trois ans. Quant à la C, c'est entre cinq ans et trois ans. Je pense qu'entre cinq ans et trois ans, il est assez rare qu'on retrouve un véhicule d'une valeur de $500.

Vous avez également parlé de la renonciation du consommateur à l'estimation de réparations. Il est vrai que la loi prévoit que le consommateur doit renoncer de sa main à l'estimation; la raison, c'est que beaucoup de consommateurs se sont plaints dans les bureaux régionaux que des estimations n'étaient pas faites. Or l'expérience enseigne, je pense, que le consommateur qui n'a pas à renoncer de sa main va facilement signer des formules qu'il ne prendra parfois pas la peine de lire pour une foule de raisons et c'est beaucoup plus clair, je pense, entre les parties lorsque le consommateur renonce par écrit, qu'il sait vraiment à quoi il s'est engagé; il est clair également que les parties se sont bel et bien entendues pour que la réparation se fasse sans une estimation. C'est certainement l'avantage de la renonciation de la main du consommateur. S'il y avait un amendement prévoyant d'éliminer cette renonciation écrite de la main du consommateur, on pourrait se retrouver dans des situations où le consommateur prétend ne pas avoir eu connaissance qu'on lui demandait de renoncer à cette estimation.

Finalement, il faudrait voir, je pense, à l'usage. Cela fait un mois que la loi est en vigueur. Est-ce que, dans six mois ou dans un an, on va réaliser que beaucoup de consommateurs trouvent qu'il est difficile ou astreignant de devoir renoncer ou non. Je pense que c'est l'expérience qui peut nous l'enseigner et il n'est pas certain que finalement le consommateur n'aime pas cette formule qui est prévue présentement dans la loi.

Vous avez parlé également de l'article 176, les pièces usagées. Il est vrai que les pièces usagées sont garanties au même titre que les pièces neuves. Le législateur a certainement voulu à ce moment que le consommateur puisse en avoir pour son argent. Lorsque l'on fait poser une pièce usagée sur un véhicule, il est sans doute normal que cette pièce puisse avoir une durabilité d'au moins trois mois. Prenons le cas d'un radiateur: si la durabilité risque de n'être que d'un mois parce qu'elle est usagée, quand on connaît le coût non seulement des pièces, mais de la main-d'oeuvre, le consommateur aurait certainement préféré savoir à l'avance que la pièce risquait de ne pas durer trois mois et éviter peut-être de faire réparer la pièce de nouveau lorsque très souvent la main-d'oeuvre est beaucoup plus dispendieuse que la pièce à remplacer. S'il n'est pas certain que la pièce a une durabilité d'au moins trois mois, je pense que le consommateur, de façon générale, va préférer payer un peu plus cher la pièce neuve et éviter peut-être de retourner dans un mois et payer des frais considérables de main-d'oeuvre.

Vous avez également parlé de l'article 152, qui mentionne que la garantie s'attache davantage à la voiture plutôt qu'au propriétaire. C'est un fait aussi que la garantie est là pour couvrir le bien de consommation quel que soit le propriétaire qui possède ce bien de consommation. Si l'on mentionne qu'un tuyau d'échappement, par exemple, est garantie à vie, il faudrait savoir à vie de qui, est-ce que c'est à vie de la pièce ou à vie du propriétaire du véhicule? Je pense que personne, finalement, ne sait vraiment quelle est la durée de la garantie lorsqu'on mentionne que la pièce est garantie à vie, c'est-à-dire tant que le propriétaire conserve son véhicule. Je pense que ce ne sont pas les garanties les plus claires que peuvent espérer les consommateurs. Les garanties les plus claires sont celles qui indiquent exactement pour combien de temps une pièce est garantie, quel qu'en soit le propriétaire.

Vous avez également mentionné que ces demandes devraient être étudiées avec soin, étant donné qu'il y va de l'intérêt du consommateur. Il faudrait qu'elles soient étudiées avec soin, mais toujours en étudiant avec soin également, en contrepartie, quels sont les désavantages que l'ancien système présentait pour le consommateur et quels sont les plaintes et les problèmes qu'affrontaient les consommateurs. C'est en mesurant aussi des inconvénients qu'on en arrive finalement à établir qu'il est peut-être préférable qu'il y ait de petites contraintes comme celles-là, mais qui feront drôlement profiter le consommateur de l'argent, par exemple, qu'il investit pour acheter un bien de consommation.

M. Mathieu: Je demeure persuadé, M. le Président, que, dans l'ensemble — c'est mon opinion et c'est sûrement contestable, je vous donne le droit de conserver votre point de vue — ces articles ne bénéficieront pas au consommateur. Je le dis d'après mon expérience dans la pratique de ma profession.

M. Joron: Cela fait, encore une fois, un mois que la loi est en vigueur; je pense que, pour être en mesure d'en arriver à une conclusion comme celle-là, il faut certainement vivre avec elle. Il y a une chose qui est peut-être remarquable, c'est que les commerçants qui doivent maintenant respecter cette loi n'ont pas toujours eu l'occasion de bien comprendre le mécanisme de cette loi et de s'y ajuster. C'est la raison pour laquelle, depuis un mois, des employés de l'office, principalement au

service des enquêtes, ont rencontré énormément de garagistes. Cette opération va se terminer bientôt et ils auront rencontré au-delà de 1500 garagistes, afin de leur distribuer le guide d'application de la loi dans ce domaine, de discuter avec eux du contenu de la loi, de la façon de l'appliquer. Je pense que, lorsque les garagistes vont bien en comprendre le mécanisme, beaucoup de difficultés prévues, comme celles-là, vont s'aplanir d'elles-mêmes. Mais c'est certainement l'expérience qui va pouvoir nous enseigner quelle est la conclusion à apporter.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: A la suite des commentaires que nous a fournis M. Moreau tout à l'heure, si j'ai bien compris, vous nous avez dit que, dans les bureaux régionaux, ce sont des plaintes par dizaines de milliers...

M. Joron: En effet.

M. Giasson: ... qui ont été portées, uniquement dans le secteur de l'automobile.

M. Joron: Non, dans le secteur de l'automobile et des garanties. Évidemment, c'est difficile pour nous de savoir quel est le nombre précis de plaintes portées dans le domaine des garanties qui touchaient spécifiquement l'automobile. Nous n'avons pas le détail, la statistique des plaintes sur les garanties. C'est ce qui, cependant, nous permet de conclure que la question des garanties préoccupe au premier plan les consommateurs, et ceux-ci affrontent des problèmes considérables, puisque c'est l'un des sujets majeurs de plaintes des consommateurs, cette question des garanties, que ce soit dans le domaine de l'automobile, de l'électroménager ou dans d'autres domaines.

M. Giasson: Mais quand vous citez des cas par dizaines de milliers, c'est dans quelle période de temps?

M. Joron: Dans une période d'un an. Chaque année, les bureaux régionaux reçoivent quelques centaines de milliers de plaintes. L'an passé, ils ont reçu 223 000 plaintes et demandes d'information.

M. Giasson: Pas d'information, mais des plaintes.

M. Joron: C'est cela, de plaintes et de demandes d'information. Cette année, depuis un mois, il y a eu une augmentation assez considérable par rapport au mois de mai de l'année dernière, une augmentation d'environ 35% de plaintes des consommateurs.

M. Giasson: Et, en général, est-ce qu'elles se révèlent fondées, toutes ces plaintes?

M. Joron: Non, pas nécessairement. Evidemment, il y a beaucoup de demandes qui ne sont pas nécessairement fondées; beaucoup d'entre elles le sont.

M. Giasson: Dans quelle proportion?

M. Joron: Maintenant, quel est le pourcentage? C'est difficile à dire, parce qu'il y a toujours la première étape dans un bureau régional; c'est d'abord l'étape médiation. Lorsqu'un consommateur se plaint, il reçoit toute l'information dont il a besoin et il est invité à rencontrer le commerçant et à essayer de s'entendre avec lui sur le problème en litige. S'il ne peut pas s'entendre, les employés du bureau régional peuvent l'aider dans cette médiation. Donc, beaucoup de plaintes, une quantité considérable, se règlent à ce niveau de la médiation. Une fois cette médiation terminée, cela passe évidemment à d'autres étapes comme, par exemple, les tribunaux ou encore le traitement des plaintes dans les contentieux de l'office. Il est difficile de dire quel est le pourcentage de plaintes réellement fondées puisque très souvent les consommateurs et les commerçants en arrivent à une entente pour le règlement du cas en litige.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Oui, M. le Président. Au niveau de la protection du public, au niveau de l'information comme telle, surtout par différents communiqués, soit par le biais de la télévision ou encore de certaines revues, je demande au ministre s'il ne croit pas qu'il y aurait possibilité d'amélioration au niveau de l'information scolaire, au niveau des jeunes. Des conférences il y en a eu par région quelque chose comme de 2 à 20 au maximum. Si je prends la grande région de Québec, au niveau de l'information scolaire et des séances d'information, je pense qu'il y aurait lieu d'aller encore plus de l'avant de ce côté quant à la protection du consommateur, au niveau de l'information comme telle, de la sensibilisation des jeunes.

On voit des annonces à la télévision ou encore la revue "Protégez-vous". D'accord, cela s'adresse aux gens de 16, 18 ans et plus, mais je parle des jeunes de la fin du niveau primaire, dès le début du secondaire. Est-ce qu'il y a quelque chose qui se fait? Je pense que c'est là qu'on doit casser la population, si vous voulez, et l'habituer à des pratiques qui satisferaient ou qui donneraient des résultats plus tard. Ne croyez-vous pas qu'au niveau scolaire, au niveau des jeunes, il y aurait possibilité d'amélioration?

M. Joron: Absolument, je suis tout à fait de l'avis du député de Bellechasse. D'ailleurs, l'office, il faut bien le dire, n'est pas tellement vieux. On est en train de brûler les étapes à certains égards, on fait des pas de géant.

Pour répondre à votre question, peut-être que M. Moreau pourrait nous tracer le portrait de ce

qui se fait à cet égard et de ce qui est prévu pour l'année prochaine ou les années à venir.

L'année dernière, dans le domaine de l'éducation à la consommation au niveau primaire, il y a eu d'abord une série d'émissions qui ont été produites par l'Office de la protection du consommateur, des émissions dont le titre était: Kébékio au pays de convoitises. Ces treize émissions qui sont passées à Radio-Canada et à Radio-Québec enseignaient aux enfants un comportement rationnel dans le domaine de la consommation. A la suite de cette expérience, l'office a préparé un document pédagogique annexé à ces émissions Kébékio qui ont été diffusées dans toutes les commissions scolaires du Québec et dans toutes les écoles de sorte que les professeurs, au niveau primaire, ont eu l'occasion, à partir du vidéo et du document pédagogique, de continuer l'éducation à la consommation qui avait été amorcée par ces émissions de télévision.

Partant de là, l'Office de la protection du consommateur est présentement en train de refaire un cahier de français qui existait déjà dans le domaine de la consommation et qui a servi dans les écoles au cours des dernières années, mais il le refait présentement en fonction de la nouvelle loi. Ce cahier de français fera d'ailleurs l'objet de cours aux étudiants non pas en septembre 1980 mais en septembre 1981 dans le cadre du cours des sciences humaines des étudiants de secondaire I, si je ne m'abuse. L'office est également en train de préparer des documents pédagogiques qui vont s'adresser à des étudiants de secondaire V entre autres, dans le domaine du crédit, et ces documents devraient être prêts pour septembre 1980. L'office a donc finalement amorcé son éducation à la consommation l'an passé auprès des enfants et il l'amplifie pour l'année qui s'en vient, pour les deux prochaines années.

M. Goulet: Cela va être intégré au programme pédagogique.

M. Joron: Absolument, à l'intérieur du cours de sciences humaines. (21 h 30)

M. Goulet: Je ne sais pas s'il y a d'autres questions. Au sujet de la revue Protégez-vous, vous avez fait un test et à peu près tout le monde — quasiment 100% des gens — semble satisfait de cette revue. Je ne sais pas trop, 95% ou 98% des gens sont satisfaits; disons que la grande totalité ou la quasi-totalité des Québécois sont satisfaits de cette revue.

Lorsqu'on parle de tout près de trois quarts de million de dollars pour cette revue, est-ce que les tests pour comparer certains produits sont compris à l'intérieur de ce montant, le coût des tests?

M. Joron: Absolument. Le programme de tests de l'an passé était, si je ne m'abuse, de $75 000.

M. Goulet: Je vous pose la question: Ne trouvez-vous pas que trois quarts de million pour cette revue, c'est de l'argent?

M. Joron: Oui.

M. Goulet: Je m'excuse, M. le ministre. Le ministre des Finances, M. Parizeau, a déjà dit, à un moment donné — je ne me souviens pas sur quelle tribune — qu'il faudrait arrêter, dans chaque ministère, d'imprimer des revues, que cela sortait à coups de millions. Quand on voit cette revue Protégez-vous, je ne sais pas. J'ai été surpris d'ailleurs de voir que les Québécois étaient satisfaits à 98%, non pas que je conteste cette revue, car s'il y a une revue que je regarde à chaque mois... Je ne sais pas, il y a certains tests, quant à l'objectivité desquels j'aurais aimé savoir comment ils avaient été faits et par qui. Je vous le dis, j'avais certaines réticences concernant différents tests. Mais quand je vois trois quarts de million pour cette revue, surtout que les gens — cela, je ne l'ai pas compris l'an passé, on n'a pas pu avoir la réponse, c'est vrai que ce n'était pas vous, M. le ministre — qui distribuent les produits ou qui fabriquent les produits qui sont jugés de première qualité ne peuvent pas s'en servir dans leur publicité...

Si, par exemple, au niveau du ministère de l'Agriculture, on attribue le — comment appelle-ton cela — lys d'or pour le meilleur producteur de fromage, on lui permet de dire, sur son étiquette: L'an passé, ou en 1979, c'est telle coopérative ou telle fromagerie qui a gagné. Il y a des experts, des connaisseurs, des gens crédibles qui ont évalué différents produits et ont dit: Bon, voici le meilleur fromage au Québec d'après nous, dans le cheddar; et on lui permet de faire sa publicité. Le premier "scoreur" de la Ligue nationale a le droit d'avoir le trophée chez lui. Pourquoi, dans la revue Protégez-vous, si vraiment ces tests sont objectifs — je n'en doute pas, d'après ce qu'on nous a dit l'an passé, sauf peut-être un ou deux dont on pourra discuter de nouveau — ne pourrait-on pas le permettre? Ce serait vraiment protéger le consommateur. Vous autres, cela vous coûte $700 000 pour faire connaître aux gens quels sont, d'après vous, les bons produits et vous êtes désintéressés parce que vous ne vendez pas ces produits. Si vous nous dites que c'est ce stylo qui offre la meilleure qualité, d'après vous, vous êtes vraiment désintéressés et c'est censé être vrai.

Alors, le fabricant de ce stylo, pourquoi ne pourrait-il pas amplifier sa publicité et dire: C'est vrai, le meilleur stylo, ce n'est pas moi qui le dis, ce sont des gens objectifs. Ils vous aideraient à faire votre publicité et à protéger le consommateur et, au lieu de dépenser $700 000, vous pourriez peut-être en dépenser $500 000 et faire moins de publicité. C'est ce que je n'ai jamais compris.

M. Joron: M. le Président, je serais peut-être tenté de répondre à une partie de la question du député de Bellechasse, quitte à ce que M. Moreau complète ma réponse, sur les raisons qui font que cette publicité n'est pas permise. Il y en a peut-être une qui m'apparaît, à première vue... Le test fait aujourd'hui conclut, par exemple, que ce stylo est très bien. Si, à partir de cela, il était permis au

manufacturier de ce stylo d'en faire la publicité, il n'y a rien qui garantit l'office qui a fait le test que le produit, dans trois mois ou dans six mois, est toujours le même et correspond toujours aux mêmes normes qu'au moment où le test a été fait.

M. Goulet: Vous me permettrez peut-être tout de suite une petite question là-dessus. C'est justement là que je voulais en venir; si vous ne permettez pas, pour cette raison...

M. Joron: J'en aurais peut-être d'autres aussi.

M. Goulet: Je m'excuse de vous interrompre. Sur ce point précis, au niveau de l'objectivité, ne pensez-vous pas que vous pouvez causer préjudice à une autre compagnie de stylos qui, au moment où le test a été fait, s'est peut-être classée la quatorzième compagnie et, deux mois après, pourrait être la première s'il y avait un autre test de fait? C'est justement là que j'ai un peu peur que votre revue, au niveau de l'objectivité, crée des préjudices à certains manufacturiers de produits.

M. Joron: D'accord, mais je demanderai à M. Moreau de répondre sur cette question des tests tout à l'heure. Sur la question du financement du coût de la revue, par exemple, je pourrais vous dire qu'effectivement, au moment où l'on se parle, le Conseil du trésor est à la toute veille, s'il ne l'a pas déjà fait, d'émettre un avis, une recommandation à savoir si la revue ne devrait pas, à compter peut-être, par exemple, de l'année 1981, l'année prochaine, être vendue de façon à viser l'autofinancement. Je pense, pour en avoir discuté de façon préalable — je ne peux pas vous livrer l'avis officiel du Conseil du trésor, il ne l'a pas fait encore — que c'est dans cette direction qu'on s'en va et il est peut-être possible qu'à la même date l'année prochaine, si on se retrouve à l'étude des crédits de ce ministère, il n'y ait plus ce poste et que la revue soit...

M. Goulet: Vous avez commandé une étude là-dessus à savoir, si elle était vendue, si les gens l'achèteraient. Vous avez commandé une étude au ministère là-dessus? Cela a-t-il été concluant?

M. Joron: Oui. En même temps, M. Moreau répondra à cette partie. C'est ce que je voulais dire. C'est probablement dans cette direction qu'on se dirige quant au financement de la revue. Peut-être que M. Moreau... Voulez-vous compléter sur cette question?

Concernant la question des tests, pour quelle raison les commerçants ne peuvent pas récupérer finalement le résultat des tests et s'en servir dans leur publicité, une des principales raisons est le fait que le test se fait à un moment donné et donne un résultat donné. Ce résultat n'est pas nécessairement vrai l'année suivante lorsque la compagnie modifie sa façon de fabriquer son produit. également, si la compagnie pouvait se servir du résultat paru dans Protégez-vous pour mousser son pro- duit, il pourrait arriver certaines situations. On sait qu'une campagne de publicité prend un certain temps avant de se préparer. Il pourrait arriver que la diffusion de sa campagne de publicité se fasse quelques mois après la parution d'un test et il pourrait arriver que le consommateur pense que ce produit est le meilleur alors qu'avec le temps il s'est fait surpasser par des concurrents qui, depuis ce temps-là, ont amélioré leur technique ou, encore, ont corrigé certaines choses dans leurs produits à la lumière, justement, des résultats du test. C'est certainement dangereux, d'autant plus qu'il est toujours dangereux qu'un organisme comme l'office serve de caution, finalement, à un produit et que les consommateurs puissent l'acheter, compte tenu de ce que je vous ai dit tantôt, les yeux fermés en se disant que l'office a cautionné ce test. En Europe, il y a beaucoup d'organismes gouvernementaux et privés qui font également des tests; ces organismes, à notre connaissance, ne permettent pas que les entreprises puissent se servir du résultat et mentionner qu'elles sont arrivées premières à un test. Je comprends que ce n'est pas une preuve d'autorité, mais c'est pour montrer qu'il y a une certaine constante auprès des organismes qui font des tests et qu'ils ont là-dessus à peu près la même politique. Les tests à l'office, cela fait deux ans que cela existe à peu près. C'est l'opinion que nous avons à l'office. On voit des dangers considérables à ce que les compagnies puissent récupérer finalement la caution de l'office pour promouvoir leurs produits. Nous ne sommes pas convaincus que cela ne comporte pas des dangers importants.

Concernant Protégez-vous, effectivement, il y a eu une étude qui a été faite sur la faisabilité de la vente à la demande du Conseil du trésor et, à la suite de cette étude, l'office a remis au Conseil du trésor les conclusions de celle-ci mais aucune décision n'a encore été prise pour le moment. Le Conseil du trésor devrait se prononcer dans les prochaines semaines ou dans les prochains mois sur la vente ou la non-vente de Protégez-vous.

Quant à l'opinion de l'office sur la vente, si jamais le Conseil du trésor le décidait comme tel, certainement que l'office mettrait en marche tous les mécanismes nécessaires pour procéder à cette vente.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: J'aurais une autre question. Je ne sais pas si mes collègues... Je ne veux pas...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Ce n'est pas dans mes habitudes de... Au niveau des bureaux, je représente la circonscription de Bellechasse. Il y a des municipalités qui sont à 70 milles, 100, 110 kilomètres de Québec. On fait partie de la région de Québec. La Beauce fait partie de la région de Québec, sauf erreur. Il y a des bureaux régionaux qui reçoivent

environ 200, 300 ou 400 plaintes. Comparativement, à Québec, vous en recevez peut-être 2500 et à Montréal, peut-être de 3000 à 4000. On a, dans nos régions, des CLSC ou d'autres organismes semblables. Je ne parle pas d'avoir un bureau sophistiqué avec tout ce qu'il faut. Ne pensez-vous pas qu'on pourrait décentraliser un peu pour en arriver avec peut-être une personne, à l'intérieur d'un CLSC, c'est-à-dire une personne qui serait rattachée directement à l'Office de la protection du consommateur de façon que, quand les gens de nos comtés ont affaire à l'office, ils ne soient pas obligés de payer un appel interurbain de $2, $3 ou $4. On pourrait prendre l'information au niveau régional, appeler à Québec ou à Montréal et transmettre l'information par la suite; ce serait un service parce que, nous aussi, dans nos régions, on paie des taxes et des impôts. On paie au même taux que les gens de Québec et de Montréal. Quand on veut avoir ces informations, c'est la même chose au niveau de tous les ministères, dans mon comté — je donne cela comme exemple, M. le Président — au niveau du service juridique, au niveau d'à peu près tous les services, il n'y en a pas. On n'a aucun bureau de commission scolaire régionale dans notre circonscription; on fait affaire avec les autres comtés et dans à peu près tous les domaines, comme au niveau de l'accès à la justice, sauf une cour de petites créances qu'on va fermer temporairement, on est obligé d'aller dans d'autres comtés. Pourquoi serions-nous toujours obligés de payer plus que les autres pour avoir accès aux services? Je ne dis pas d'avoir un bureau de 50 employés, mais surtout qu'on ait des locaux. Dans ma région, je pense au CLSC de Lac-Etchemin; on pourrait avoir une ligne directe avec l'Office de la protection du consommateur qui pourrait transmettre...

M. Joron: II y a une chose que l'office a commencé à faire depuis un an, peut-être même un peu plus. C'est ce qu'il appelle des bureaux satellites, c'est-à-dire que ce ne sont pas des bureaux permanents, mais c'est un employé de l'office qui se rend, par exemple, une fois par semaine dans un local qui peut être un coin mis à la disposition de l'office par une institution locale. Ce peut être une caisse populaire ou alors un autre bureau du gouvernement. Ce peut être un CLSC, justement, comme vous dites; c'est un bon exemple. Nous avons commencé cela dans un certain nombre de municipalités. On l'a fait à Matane, Rivière-du-Loup, Dolbeau, Alma, La-Baie, La Tuque, Grand-Mère, Drummondville, Granby, Thetford-Mines, Maniwaki, Chandler, Grande-Vallée, aux Îles-de-la-Madeleine. Il n'y en a pas dans le comté de Bellechasse sur cette liste-là, malheureusement. Cette expérience, on a l'intention de l'élargir progressivement. C'est une chose qu'on envisage.

Une autre chose qu'on est en train d'étudier à l'office à l'heure actuelle, ce sont les coûts des appels interurbains. Pour les consommateurs qui veulent communiquer avec un bureau régional, ce sera sans frais. On est en train d'étudier ce que cela représenterait. On ne va pas s'engager sur-le- champ, mais on est en train de l'évaluer parce que, effectivement, la question que vous posez est plus que pertinente; on se la pose à l'office depuis longtemps. Il n'y a pas de raison que les consommateurs des régions moins proches des grands centres soient moins bien protégés. C'est sûr, ils n'ont pas à payer plus. Alors on essaie de trouver le moyen d'offrir le même service. Ce peut être soit par le biais de ces bureaux satellites qui sont ambulants, plus ou moins, ou par le biais des frais de communication qui seraient assumés par l'office. M. Moreau.

C'est-à-dire que présentement nous sommes en train d'étudier la question. Encore la semaine passée, on envisageait la possibilité que l'on puisse assumer les frais virés à partir de l'automne prochain.

(21 h 45)

M. Goulet: Changement de sujet, M. le Président. L'an dernier, j'avais posé à Mme la ministre, Mme Payette, une question. Elle m'avait dit que ce n'était pas de juridiction provinciale et je le sais. Actuellement, au Québec, chez ceux qui sont un peu dans le commerce et même entre individus, on déplore une pratique que je ne dirais pas courante, mais je vais qualifier ça d'épidémie, les fameux chèques sans provisions. Je ne parle pas d'un chèque fait à une compagnie. Vous allez dire: Oui, mais ce sont les banques et les banques sont de juridiction fédérale, mais j'aurais aimé que le gouvernement du Québec, par la voix de son ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières et celle du président de l'office, fasse des pressions auprès d'un autre palier de gouvernement, de façon qu'on puisse enrayer cette épidémie du chèque sans provisions.

Si vous allez à la Cour des petites créances... Cela se passe entre individus, l'ami arrive, emprunte $20 ou arrive à l'épicerie... C'est pour protéger ceux qui sont également des consommateurs, de petits propriétaires, je pense à de petites épiceries du coin, etc., aux petits garagistes; c'est vraiment une épidémie.

On n'a rien ici. Pourquoi n'aurait-on pas quelque chose comme en Italie, où des chèques sans provisions, il n'y en a pas, ou comme aux Etats-Unis, ici, plus près. Ce n'est pas de votre juridiction, mais je pense que c'est l'endroit pour en parler; moi, je peux écrire, comme député, ou le petit marchand du coin, ou un individu peut écrire, mais est-ce que l'Office de la protection du consommateur a fait des pressions auprès d'Ottawa, ou auprès de je ne sais quel ministère à Ottawa, de façon qu'on arrive à quelque chose peut-être comme en Italie? Le ministre fait signe que oui, il sait probablement comment ça fonctionne, il ne se fait pas de chèque sans provisions. Aux États-Unis, c'est la même chose, un chèque, c'est sacré, n'est-ce pas?

Il y a 10 ou 20 ans, on voyait beaucoup moins de chèques, ça se faisait plutôt par échange d'argent; aujourd'hui c'est par cartes de crédit et par chèques. Tout le monde, même les adolescents ont un carnet de chèques dans leur poche et,

quand ils n'ont pas d'argent, ils signent un chèque. Allez à la Cour des petites créances et vous allez voir. Je ne sais pas si vous avez des statistiques là-dessus, mais vous ne pensez pas qu'on pourrait faire pression, tous ensemble, surtout l'office, afin qu'on trouve une solution? Je ne l'ai pas, mais il y a d'autres pays qui ont la solution et il ne se fait pas de chèque sans provisions. Ici, c'est devenu une pratique. Si on voulait protéger le consommateur, on le protège de qui? On le protège d'autres consommateurs ou d'autres individus.

De toute façon, je crois que c'est une véritable épidémie, ces chèques sans provisions.

M. Joron: Je ne sais pas à quel point ça relève de l'office particulièrement, du ministère en général ou encore même du ministère de la Justice, mais je vous avoue ne pas connaître la législation; vous mentionnez l'Italie comme exemple. C'est vrai qu'en Europe, en général, c'est quelque chose qu'on ne voit à peu près jamais des chèques sans provisions; aux États-Unis, je le sais moins, mais, en Europe, je savais qu'on voit ça très rarement. Est-ce une question de tradition, de moeurs, de mentalité ou si c'est la législation? Je ne le sais pas. Peut-être connaissez-vous la raison. Est-ce qu'il y a une législation spécifique en Italie, que vous mentionniez, ou ailleurs, qui rend celui qui ferait des chèques sans provisions susceptible de peines tellement exorbitantes que le risque est trop grand, alors que ça n'existe pas ici?

C'est pourquoi je dis: Est-ce que ça relève de nous ici ou du ministère de la Justice? Est-ce que ça fait partie d'amendements qui pourraient être apportés à notre Code civil, à notre Code criminel?

M. Goulet: Moi non plus, M. le Président, je ne sais pas si ça relève du ministère de la Justice ou d'un autre palier. Je sais que, pour les banques, c'est un autre palier de gouvernement, mais je pense que l'Office de la protection du consommateur pourrait — en tout cas, ça fait deux ans que j'en parle — s'y intéresser, et si c'est le ministère de la Justice...

M. Joron: Voilà un sujet que l'on pourrait soumettre à son service de recherche.

M. Goulet: C'est une suggestion que je fais, mais je crois que c'est l'endroit. Je n'aurais pas osé soulever une question en Chambre, mais je pense que c'est l'endroit approprié pour y réfléchir.

M. Joron: C'est une bonne question et qui devrait être transmise.

M. Goulet: Dans un autre ordre d'idées, je sais que le ministre va prendre ça en considération. En ce qui concerne la loi 72, mais sur la protection du consommateur comme tel, pour les vendeurs itinérants et les vendeurs d'automobiles usagées, l'an passé, on nous avait promis que quand le projet de loi serait officiel, on aurait des contrats types, on insérerait dans le projet de loi des contrats types; malheureusement, lorsque je l'ai reçu, je n'en ai pas vu. On avait discuté longtemps — ceux qui ont travaillé à cette loi — la raison de ça; on veut vraiment protéger le public, tout le monde est de bonne foi, en tout cas la très grande majorité, que ce soient les vendeurs d'automobiles usagées, les vendeurs itinérants qui vont voir des bureaux d'avocats, ça coûte très cher pour dresser un plan de contrat. On épluche la loi, on dresse un plan de contrat qui semble satisfaisant mais quand l'office met la main dessus, il te manque une virgule, ou un texte est trop petit l'autre est trop gros, ainsi de suite. Pourquoi ne fait-on pas un contrat? On nous l'avait promis, cela avait été une promesse formelle du ministre. Je me souviens, je pense que c'est en troisième lecture, j'avais dit: Si vous nous le promettez, je vais être en faveur. C'était une des raisons en tout cas, il y en avait plusieurs. Le ministre a dit: Oui, il n'y a pas de problème. La loi est sortie et on ne l'a pas. Est-ce qu'on peut revenir là-dessus?

M. Joron: Je ne crois pas que c'était une promesse que d'inclure des contrats types dans le projet de loi, c'est-à-dire que les contrats deviennent obligatoires. Je pense que le ministre avait dit que l'office pourrait préparer des contrats types, dont les commerçants pourraient se servir facultativement. Effectivement, l'office est en train de rédiger des contrats types. Il y en a beaucoup d'entre eux dont l'ébauche primaire est faite et qui sont sur le point d'aboutir. Etant donné qu'ils n'étaient pas prêts pour la mise en vigueur de la loi, l'office s'est astreint à recevoir tous les contrats soumis par les commerçants pour vérification afin de s'assurer qu'ils soient conformes à la loi. Effectivement, c'est par dizaines que le contentieux étudie, pas seulement depuis le 30 avril, mais avant le 30 avril, des contrats types et des réponses rapides sont données aux commerçants sur la légalité du contrat, de sorte que lorsque c'est passé entre les mains du contentieux, les commerçants peuvent s'en servir sans aucun problème et sans aucune crainte.

Si un commerçant désire être assuré que le contrat qu'il veut employer est conforme à la loi, il peut nous le soumettre et nous allons le vérifier et lui donner notre opinion.

M. Goulet: Je m'excuse, M. le Président. C'est tout à fait nouveau parce que justement on nous dit: On n'a pas d'opinion à émettre là-dessus. Voici la loi, faites préparer un contrat, allez voir un bureau juridique, organisez-vous pour que le contrat soit conforme. C'est justement ce qu'on répond. Ecoutez, je ne mets pas en doute la parole de monsieur, mais c'est le contraire qui se passe. On ne veut pas étudier un plan de contrat et dire: D'accord, fais-le imprimer, dépense $3000, $4000, $8000, $10 000 pour en faire imprimer des quantités et il va être correct. Ce n'est pas cela, on dit: Quand il sera imprimé, viens nous voir. C'est justement là, des fois, qu'il est trop tard.

M. Joron: Ce qu'on dit c'est: Lorsque le projet de contrat sera prêt, venez nous le soumettre avant de le faire imprimer. Nous allons l'examiner et nous allons vous donner notre opinion par écrit, au besoin, de sorte que vous pourrez ensuite faire imprimer votre contrat. Si vous me dites le contraire, cela me surprendrait.

M. Goulet: Je suis heureux d'entendre cela parce que, justement, on n'a pas voulu me donner d'opinion.

M. Joron: Je serais heureux qu'il soit soumis à nouveau parce que la politique à l'office est présentement de recevoir les contrats qu'on nous soumet, de les examiner et d'émettre notre opinion.

M. Goulet: Toujours concernant ces types de vendeurs, M. le Président, vous savez qu'au niveau des fameuses mises de côté, on exige que ce soit remis en fiducie ou encore, par exemple, qu'un vendeur itinérant n'ait pas droit de percevoir d'argent tant que le bien n'est pas livré. Je n'ai malheureusement pas la lettre, mais je pourrai l'apporter à une autre séance. Lorsque le ministère du Revenu vient vérifier des livres, on a eu des plaintes de l'association de ces vendeurs, j'ai écrit, cela fait un an, j'ai récrit et j'ai eu dernièrement une réponse disant: On va étudier cela. Le ministère du Revenu oblige le commerçant à payer la taxe immédiatement quand le contrat est signé, mais, par contre, l'Office de la protection du consommateur défend de percevoir un sou, de percevoir même la taxe. Il y a vraiment un dilemme. J'ai écrit, je ne me souviens pas à quel monsieur au ministère et il m'a dit: Oui, on a oublié notre réponse, je ne sais pas trop, on va étudier cela et je n'ai pas encore eu la réponse.

M. Joron: Au ministère du Revenu? Je sais qu'on est en discussion à l'heure actuelle...

M. Goulet: Je ne sais pas à quel ministère, je pourrais le vérifier, mais le problème demeure quand même. Il y a un dilemme. On n'a pas le droit de percevoir l'argent et les vendeurs itinérants, les vendeurs d'autos usagées, tout ce monde dit: Qui a raison, le ministère du Revenu ou l'office? Est-ce que cela va être...

M. Joron: Ce que le ministère du Revenu demande dans ces cas, c'est que les sommes perçues par les commerçants soient remises au plus tard le 15 du mois suivant. Cela veut donc dire que si vous signez un contrat avec un commerçant le 1er mai 1980, il y a un délai de réflexion de dix jours si vous ne livrez pas tout de suite la marchandise. Si vous recevez le paiement à la fin de ce délai, c'est-à-dire le 10 mai, vous avez droit de le percevoir et vous devez faire remise de la somme de la taxe au ministère du Revenu le 15 du mois suivant. Évidemment, il peut arriver des cas extrêmes, relativement rares, où vous percevez. Vous, vous signez un contrat le 30 mai 1980, il y a le délai de réflexion de dix jours parce que vous ne livrez pas la marchandise, cela vous mène au 10 juin. Au 10 juin, vous pouvez à ce moment percevoir une somme d'argent et vous avez jusqu'au 15 juin pour la faire parvenir au ministère du Revenu. Mais cela comporte quand même une difficulté technique et je vous comprends bien. Nous sommes présentement, à l'office, en discussion avec les fonctionnaires du ministère du Revenu pour essayer d'aplanir cette difficulté et faire en sorte que tout cela soit cohérent, qu'il n'y ait pas de problème pour les commerçants. Nos discussions sont sur le point d'aboutir, parce que nous avons eu plusieurs rondes de discussions avec eux, et on devrait être en mesure de résoudre cela bientôt.

Mais, encore une fois, pour la majorité des cas, le problème ne devrait pas se poser, puisqu'il faut faire la remise le 15 du mois suivant.

M. Goulet: Oui, je comprends, quand c'est pour dix jours pour un vendeur itinérant, mais ce n'est pas seulement là-dessus. Vous avez, peut-être pas à cette période-ci, mais en septembre, octobre, novembre, beaucoup de ventes, et même les magasins à rayons vont faire une facture pour un montant assez élevé, une mise de côté, par exemple, pour livraison à Noël, trois mois plus tard. Le client dit: D'accord, je suis de bonne foi, je donne $10. Lorsque le vérificateur du ministère du Revenu passe et exige la taxe de vente sur tout le contrat au lieu de l'exiger sur les $10 perçus, tel que vous venez de le dire, c'est là qu'est le problème. Ce n'est pas seulement pour les dix jours et il y en a beaucoup de mises de côté qui se font.

M. Joron: La discussion avec le ministère du Revenu porte également sur ce problème.

M. Goulet: Parfait.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Merci, M. le Président. J'en profite pour faire part d'une préoccupation. J'avais déjà écrit à la présidente de l'Office de la protection du consommateur, il y a quatre ou cinq ans. Je n'ai pas ma copie de lettre ici, mais je l'ai à mon bureau. Le problème est le suivant: lorsqu'un consommateur achète une voiture ou une maison mobile d'un autre consommateur, on n'est jamais certain si ce bien vendu est grevé d'un lien ou d'un privilège quelconque. Lorsqu'on a affaire à un immeuble, on peut connaître l'état des liens, des endettements, des hypothèques, on va au bureau d'enregistrement où on a le registre, on dit: Telle propriété est assujettie à telle hypothèque, tel lien. Maintenant, prenons le cas d'un individu qui achète d'un autre consommateur; deux consommateurs font affaires ensemble. L'individu achète une voiture automobile et il paie $5000, il paie comptant au vendeur et, au bout de deux ou trois mois, arrive le créancier qui désire

se prévaloir de son lien, parce qu'il n'a pas été payé. Il reprend l'automobile. Notre consommateur qui a acheté de l'autre consommateur a donc payé un bien, on le lui enlève et il n'a aucun recours, parce que, normalement, le vendeur est insolvable dans des cas semblables. J'avais donc écrit à la présidente de l'Office de la protection du consommateur, parce que j'avais eu en main certains exemples américains. Aux États-Unis, lorsque vous achetez une voiture, vous avez l'enregistrement de la voiture et cet enregistrement doit suivre la voiture sa vie entière. Alors, vous avez là-dedans le premier vendeur, le premier acheteur et il y a une colonne qui marque l'état des liens. S'il y a un lien de $8000 sur la voiture, au moment où le lien est payé, c'est indiqué sur l'enregistrement, et le titre suit la voiture, lorsqu'il vous arrive un individu qui vend sa voiture. On a le même problème nous, les notaires, pour les maisons mobiles, les roulottes. Un individu nous arrive et dit: Fais-moi un contrat, j'achète une roulotte, je paie $12 000. On dit au vendeur: Garantis-nous qu'il n'y a pas de lien. C'est une banque n'importe où qui peut avoir un lien là-dessus, mais on n'est pas capable de le savoir. J'avais transmis cette information à l'Office de la protection du consommateur et je pourrais facilement retrouver mon dossier. Il me semble que ce serait tellement facile d'émettre un titre au début pour ce bien, qui pourrait être une automobile ou une maison mobile, et ce titre devrait suivre obligatoirement de manière qu'à défaut de registre, comme on a le cas dans le domaine immobilier, on ait le titre qui serait sanctionné par la loi et qui ferait foi des liens qu'il y a contre ce bien. Il me semble que ce serait la solution idéale, parce qu'il y a des milliers et des milliers de dollars perdus par de petits épargnants dans des transactions semblables sans qu'on puisse avoir de recours. Je ne sais pas s'il y à un projet là-dessus.

M. Joron: Pas au niveau de l'office, puisque la Loi de la protection du consommateur en fait a pour but de régir les relations entre les consommateurs et les commerçants. Cela ne veut pas dire que le problème que vous soulevez n'est pas pour autant réel, il l'est. J'allais vous demander ce que la présidente, à l'époque, a répondu. (22 heures)

M. Mathieu: Elle m'avait répondu qu'elle était très intéressée à étudier ce problème-là, qu'elle le prenait en sérieuse considération. J'avais envoyé une photocopie de tous les documents concernés qui émanaient d'un Etat des Etats-Unis; finalement, j'ai communiqué deux ou trois fois et puis j'ai arrêté de le faire.

M. Joron: C'est peut-être quelque chose qui intéresserait au premier chef l'office de révision du Code civil ou alors, indirectement, peut-être le Bureau des véhicules automobiles, dans la mesure où il s'occupe de l'immatriculation des véhicules. Quelque part entre les deux, la suggestion pourrait être transmise. Moi, je la trouve très intéressante. Je veux bien m'engager personnellement à la transmettre à mon collègue de la Justice et à mon collègue des Transports. Je ne pense pas que ce soit l'office qui règle ce cas; par contre, je ne sais pas si vous, messieurs les juristes — j'en vois deux devant moi et il y en a un à ma droite — avez d'autres suggestions pour régler ce problème.

Ce serait peut-être intéressant de vérifier le projet de l'office de révision du Code civil, je ne suis pas certain qu'il n'y ait pas quelque chose de prévu là-dessus.

M. Mathieu: C'est possible. Je sais qu'on parle de l'hypothèque mobilière dans le projet de révision, mais de là à avoir un titre sur un bien mobilier semblable, je ne sais pas de quelle manière le registre serait établi. C'est facile, dans le domaine immobilier, on a le bureau d'enregistrement. Quand notre code s'est fait, en 1866, évidemment, c'était le bien immeuble qui était important, on disait: res mobilis res vilis; bien meuble, bien vil.

Maintenant, à notre époque, c'est le contraire, le domaine immobilier a perdu de son ampleur quant au domaine mobilier. Je crois que c'est une préoccupation que nous devrions avoir ensemble.

M. Joron: Vous avez raison, je la partage.

Le Président (M. Boucher): Oui, M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Au niveau des associations subventionnées, on a environ $500 000, je pense, ou un peu plus. C'est peut-être une question d'opinion et, si le ministre aime mieux ne pas y répondre, je n'ai pas d'objection. Est-ce que ça vaut le coup? C'est peut-être direct, mais, en tout cas... Comme il peut voir, ce n'est pas la question d'un juriste, certain!

M. Joron: Ce n'est peut-être pas au ministre qu'il faudrait le demander, c'est aux associations qui en ont bénéficié.

M. Goulet: II avait été question, l'an passé, d'abolir cela; sauf erreur, il y a eu des pressions de faites, un budget a été voté, les sommes d'argent ont tardé à venir parce que, justement, le ministère ne semblait pas trop croire... En tout cas, je ne veux pas généraliser, mais...

Je vous pose simplement la question: Est-ce que ces $500 000... C'est censé être du travail bénévole au niveau de l'information, des rencontres avec le public; justement, je me demande si ça ne serait pas mieux... Je ne vous dis pas que c'est la vraie solution, mais on pourrait prendre un bureau régional rattaché directement à l'office, payé par l'office, et dire: C'est ce que tu vas dire, tu vas faire ça, point. C'est ce que je veux dire.

M. Joron: C'est très variable d'une association à l'autre. Dans certains cas, cela représente probablement la vie ou la mort; dans d'autres cas, c'est peut-être très différent, mais je vais demander à M. Moreau de vous expliquer la logique derrière ces subventions.

Chaque année, nous recevons, du moins depuis deux ans, des demandes de subvention qui totalisent quelques millions de dollars; je pense que, l'an passé, c'était environ $2 000 000, $2 308 000, ce qui démontre que les associations de consommateurs ne sont certainement pas d'avis qu'elles ne devraient pas être subventionnées. Ce qu'il y a d'intéressant, avec les associations de consommateurs, c'est qu'elles complètent certainement le travail que fait l'office, mais elles peuvent également oeuvrer dans des domaines où l'office est moins actif. Je pense, par exemple, à une association qui s'occupe principalement des problèmes d'automobiles. Il vient un temps que ces gens acquièrent une expertise assez formidable, étant donné qu'ils n'oeuvrent que dans ce domaine en particulier. Ces associations sont, je pense, également de bons chiens de garde pour l'organisme gouvernemental qui a des programmes et qui se fait très souvent aussi pousser dans le dos par les associations privées de consommateurs qui lui demandent d'intervenir sur tel problème ou encore qui lui démontrent qu'il y a moyen d'intervenir sur tel problème parce qu'elles l'ont fait et que l'office ne l'a pas fait. Je pense que c'est une saine émulation entre un organisme gouvernemental comme l'office et des organismes privés qui peuvent manifester un certain dynamisme sur un aspect précis de la consommation sur lequel l'office n'insiste pas assez. Dans ce sens, je pense qu'il y a place pour eux. L'an passé, le budget alloué était de $557 000 pour les associations de consommateurs. Je ne suis pas certain que ce n'était pas de l'argent bien placé.

M. Goulet: Dans votre propre publicité, celle que vous payez — c'est peut-être une mauvaise interprétation que j'en fais ou que certaines personnes en font — mais à un moment donné, je me demande si vous n'incitez pas les gens à dire: Vous êtes capable de voler de vos propres ailes, vous n'avez pas besoin de faire partie d'une association de consommateurs. Je pense ici au message véhiculé par Yvon Deschamps, ou bien je ne le comprends pas, mais il a l'air de dire aux gens: Ecoutez, ils se sentent obligés de faire partie d'une association de consommateurs; en voulant dire: Tu n'a pas besoin d'être là-dedans. Et, vous me dites: Oui, on paie $500 000 pour cela. D'un autre côté, vous faites de la publicité pour dire: Ecoutez, vous n'avez pas besoin de cela. Ou je ne comprends pas votre message! C'est fort possible parce qu'il y a plusieurs messages qui ont été véhiculés par le gouvernement depuis quelque temps qui sont difficiles à comprendre.

Une Voix: C'est un message humoristique.

M. Goulet: S'il est humoristique, cela coûte cher pour faire de l'humour. Je veux dire, on va le faire ici et on ne se fera pas payer pour cela.

M. Joron: Le sens du message est tout à fait différent. Bien au contraire, on incite, comme vous le savez, les consommateurs à se rassembler, à prendre leurs problèmes en main, à devenir autonomes en faisant partie d'association de consommateurs. Je ne pense pas que c'était tout à fait le sens du message.

M. Goulet: C'est pour les inciter à faire partie. Ah bon!

M. Joron: Justement.

M. Goulet: II est mal... en tout cas!

M. Lavigne: J'ai justement passé une réflexion à ma femme la dernière fois que j'ai vu le message, j'ai dit: II est trop subtil, tout le monde ne le comprendra pas. On vient de me le confirmer.

M. Joron: Nous allons, comme chaque année, faire faire une étude pour vérifier l'impact de ce message, on verra bien.

M. Goulet: C'est vrai que Deschamps est dur à comprendre, surtout quand il travaille pour le oui mais, en tout cas, ce n'est pas grave.

Une dernière question, M. le Président, au niveau de l'élément 1 du programme 1. Au niveau des vendeurs itinérants, vous avez des permis par catégorie et par évaluation du bien vendu, plus de $100 ou moins de $100. Par catégorie, si le vendeur agit seul ou agit avec dix autres représentants, ou 50, ou 500. Au niveau de l'automobile, vous n'avez pas cela. Cela fait quatre ou cinq fois que des gens viennent à mon bureau et disent: Pourquoi un vendeur d'automobiles usagées, par exemple, ou un vendeur d'automobiles qui gagne sa vie avec cela, qui est propriétaire unique, qui est le seul vendeur, le seul administrateur de son commerce, doit-il avoir un permis comme celui qui en vend 3000 par année ou 2000 par année, exactement le même permis? Vous exigez exactement les mêmes garanties de cette personne. Pourquoi?

M. Joron: Dans le domaine de la vente d'automobiles, l'office n'émet plus maintenant de permis. C'est le Bureau des véhicules automobiles qui le fait.

M. Goulet: Bien, l'office n'émet plus de permis. Dans les faits, il n'y a rien de changé, c'est la même garantie. Je veux dire, c'est pour protéger. Pourquoi demandez-vous une garantie? C'est pour protéger le consommateur, et que ce soit le Bureau des véhicules automobiles par votre entremise, ou que vous lui ayez remis la balle par la loi 72, c'est le même problème.

M. Joron: Ce n'est pas le même...

M. Goulet: Vous me dites: Va voir le Bureau des véhicules automobiles. Mais, justement, vous avez administré ce programme longtemps; pourquoi ne feriez-vous pas, vous autres, une suggestion au Bureau des véhicules automobiles?

M. Joron: Ce n'est pas le même type de biens de consommation lorsqu'on vend des biens de consommation dont le montant est inférieur à $100 comme pour la vente itinérante. Les obligations des commerçants ne sont pas les mêmes que lorsqu'on vend des véhicules usagés qui, habituellement, ne veulent pas tellement... cela peut varier. Je pense bien que l'écart entre le prix d'une automobile usagée et le prix d'une autre auto n'est pas aussi considérable que l'écart entre un bien que l'on peut vendre parfois $50 et parfois 25 fois plus que ce montant de $50. Alors, c'est peut-être normal que la technique d'émission des permis ne soit pas la même. Mais je vous avoue là-dessus qu'on n'a jamais eu de représentation négative à l'office sur le fait — à ma connaissance, en tout cas — que le système n'était pas le même pour ce type de permis.

M. Goulet: Ce n'était pas au niveau de l'écart du prix, bien sûr; c'était surtout au niveau de l'écart, de la quantité d'objets vendus. Un garage qui transige 200 véhicules ou 2000 véhicules par année avait le même permis dans votre temps, et encore aujourd'hui, que celui qui en commerce 25. C'est ce que je voulais dire.

M. Joron: Je prends votre suggestion en note et nous allons certainement examiner cette question.

M. Goulet: Alors, M. le Président, pour le programme 1, l'élément 1, quant à moi. Je ne sais pas si...

Le Président (M. Boucher): Est-ce que le programme 1 est adopté?

M. Giasson: Pas globalement. Une Voix: Globalement...

Le Président (M. Boucher): Voulez-vous continuer sur le programme 1?

M. Goulet: Seulement l'élément 2. Au niveau des vendeurs — pas les vendeurs, ils n'aiment pas se faire appeler vendeurs — des courtiers en immeubles ou des représentants en immeubles, il y a tout un "turn-over". Est-ce normal que, dans une année, on émette 2000 permis? Est-ce normal?

M. Joron: Oui, cela a toujours été comme cela. On assiste cette année à une augmentation des demandes de permis qui est probablement un signe de regain d'activité dans le domaine immobilier un peu partout dans le Québec, ce qui n'est pas un mauvais indice, en soi. M. Martel, surintendant du service du courtage immobilier, pourrait peut-être vous dire l'expérience des années passées, si ce "turn-over" a toujours été aussi considérable qu'il l'a été l'année dernière et pourquoi.

Oui, le "turn-over." a été effectivement aussi important d'une année à l'autre. C'est un sujet de préoccupation pour nous puisque cela peut dénoter, de la part de certains courtiers qui embauchent de nouveaux vendeurs, un manque de sérieux, un manque de sélection réelle, de sorte que plusieurs personnes, près de 2500 à 3000 personnes, sont invitées chaque année à faire partie des diverses agences immobilières. Il va de soi que, lorsqu'on discute de ce problème avec les associations ou les chambres d'immeuble, on nous répond toujours que ce phénomène est identique dans le domaine de l'assurance et dans tous les autres secteurs du domaine de la vente. C'est-à-dire que même si les entreprises consacrent plus de temps, de ressources à la sélection de leurs futurs agents, il demeure qu'ils sont jugés aux actes. Dans le domaine de l'immeuble, notre étude de 1976 nous a démontré que les employeurs, les courtiers employeurs portent un jugement dans les neuf premiers mois après l'obtention du permis de vendeur par leur employé. Si l'agent n'a pas fait de ventes jugées satisfaisantes, rentables pour l'entreprise, ces personnes sont remerciées et les entreprises procèdent immédiatement au recrutement d'autres personnes.

Seulement à titre d'information, on a remarqué qu'à la fin de l'automne et au début de l'hiver, principalement au cours du mois de mars, lorsque les taux d'intérêt se sont mis à galoper vers le haut, quand on aurait espéré que le taux de recrutement des nouveaux agents puisse se stabiliser et même réduire, on s'est aperçu que malgré qu'il y ait eu 1500 personnes qui aient abandonné l'immeuble au cours des mois de novembre, décembre et janvier, les entreprises de courtage en ont recruté autant.

M. Giasson: ... les taux d'intérêt.

M. Joron: Par contre, ce qu'il est peut-être intéressant de signaler, c'est que, l'année dernière, le taux de succès aux examens a été de 62%, alors que, l'année précédente, il avait été de 51%. Cela tend à démontrer, d'une part — et les examens ne deviennent pas nécessairement plus faciles d'une année à l'autre, c'est probablement le contraire qui se passe — je pense, que progressivement, la qualité et le niveau de scolarisation aussi augmentent. Le niveau de préparation augmente. La qualité des vendeurs, des agents immobiliers s'améliore d'année en année. Je pense que c'est reflété un peu par ces statistiques qui sont maintenant voisines, nous dit-on, des statistiques américaines. (22 h 15)

Oui, cela suit la courbe de scolarisation. Nous avons de plus en plus de diplômés universitaires qui se lancent dans le domaine de l'immobilier. Nos examens, comme on vient de le mentionner, touchent de plus en plus des domaines nouveaux comme, en matière de mathématiques, la nouvelle loi sur le zonage agricole. D'ici quelques mois, l'évaluation immobilière fera partie des examens de qualification de sorte qu'on espère, par ce moyen — c'est-à-dire que c'est la seule arme que nous possédons au niveau de la qualification —

faire en sorte que les courtiers soient plus prudents dans leur sélection, c'est-à-dire qu'ils tentent de maximiser leurs chances dans le choix de leurs candidats pour que ces candidats puissent réussir leurs examens.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Bellechasse.

La contrepublicité

M. Goulet: Une petite question au niveau de l'élément 3, la contrepublicité. Est-ce que vous avez dû aller chercher d'autres sommes d'argent que ce que vous aviez à...

Une Voix: Sur le même sujet.

M. Laberge: J'aurais eu une question sur le courtage immobilier justement.

M. Goulet: Oui, allez-y.

M. Laberge: Des gens sont venus me voir à mon bureau dernièrement concernant des plaintes à cet effet et je me demandais si ce genre de plainte avait été porté à la connaissance du surintendant, M. Martel. Les compagnies qui font du courtage immobilier ont beaucoup tendance à engager beaucoup de candidats qui, pendant leur entraînement, pendant leur formation comme on dit, se montent une banque de clients possibles. Quand ils ne réussissent pas leurs examens, évidemment, la banque de clients possibles appartient au bureau de courtage. Comme il n'y a pas de commission de payée à l'agent qui ne réussit pas son examen, il y a quelqu'un qui en bénéficie. C'est peut-être pour cela qu'il y a un énorme "turn-over", comme on dit.

Je ne sais pas. Je me pose la question à savoir s'il y a une solution possible à ce genre de problème.

M. Joron: Je n'en vois pas beaucoup, c'est-à-dire qu'on a vu le même phénomène dans le domaine des assurances où des candidats voulaient se lancer dans ce domaine et préparaient leur futurs clients et même profitaient de ce potentiel de mandat éventuel pour obtenir un emploi chez un courtier en immeubles. Il demeure que si, en vertu de la Loi sur le courtage immobilier il y a refus d'émettre le permis parce que le candidat ne satisfait pas aux exigences ou n'établit pas à la satisfaction du surintendant ses qualités, légalement les individus qui ont des propriétés à offrir en vente sont libres de rentrer en contrat de mandat avec un autre courtier. Je ne vois pas de solution qui relève de notre juridiction pour régler ce problème.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: J'aurais une courte question. C'est une préoccupation que j'ai depuis quelque temps. Lorsqu'un individu donne à un courtier un mandat de vendre son immeuble, il est toujours prévu que si, à la fin du mandat, le particulier vend son immeuble à une autre personne avec qui le courtier est entré en contact, la commission est payable. Le problème est le suivant. Souvent, le courtier dit: La vente s'est faite après la fin du mandat, mais j'étais entré en contact avec cet individu. J'ai toujours pensé qu'il serait possible, à la fin du mandat — j'en profite pour vous apporter cette suggestion — que le courtier donne au vendeur une liste des personnes avec qui il est entré en contact: Si tu vends à telle ou telle personne, la commission est payable, afin que le consommateur ne soit pas pris avec une action en recours de $8000 ou $10 000 parce que le courtier dit: Je suis entré en communication. L'autre personne dit: Je n'en ai pas eu connaissance, tu ne me l'as pas dit.

Ne feriez-vous pas de la réglementation, un amendement à cet effet? Dans ma pratique notariale, il m'arrive un courtier qui dit: "Le mandat est fini, ils vont vendre." J'aimerais avoir la certitude que l'acheteur n'est pas entré en contact avec le courtier, parfois, par un coup de téléphone ou n'importe quoi qui ne soit pas considéré comme la transaction résultant de ce fait-là. Il me semble que ce serait facile d'obliger le courtier à nous dire: A la fin du mandat, fournis-nous une liste de clients à qui la commission serait payable, s'il vend dans les trois mois suivants.

M. Joron: L'observation est très pertinente et c'est l'objet de plusieurs conflits et de plaintes que nous recevons présentement au service du courtage immobilier. Les courtiers ont la prudence, dans leurs contrats, leurs formulaires de mandats, d'introduire cette fameuse clause qui tend à les protéger, mais, personnellement, je trouve ça abusif qu'en contrepartie, le courtier ne divulgue pas à la fin les transactions qui ont été amorcées. Probablement, s'il y avait des litiges devant les tribunaux, qu'il reviendrait aux tribunaux d'apprécier le degré de négociation réel. Est-ce que le fait qu'un simple individu ait téléphoné ou se soit présenté à un cabinet immobilier pour feuilleter un catalogue suffirait à un courtier pour réclamer sa commission, après deux ou trois mois, après la fin d'un mandat? Non seulement ça serait désirable et souhaitable qu'il y ait divulgation de la part du courtier à son client mendant de la liste des personnes qui sont entrées en contact avec sa firme, mais aussi de la nature des interventions faites.

Dans le cadre de la loi actuelle — je ne peux pas répondre pour l'avenir — du moins en vertu de mes pouvoirs et de la présence que je dois avoir dans le milieu, c'est une question que je discute souvent avec les courtiers pour les inciter à divulguer le plus possible l'existence des négociations amorcées avant la fin des mandats. Jusqu'à quel point est-ce que je réussis? Je ne peux pas évaluer la question.

M. Mathieu: Vous ne pourriez pas amender la législation, M. le ministre?

M. Joron: On en prend bonne note.

M. Mathieu: Quand l'occasion se présente je dis au courtier: Viens me faire une déclaration que tu n'es pas entré en contact avec un tel, mais il ne veut pas, il refuse. Il me semble que ce serait dans l'optique d'une saine protection, ça éviterait peut-être de nombreux litiges.

M. Joron: Excellente suggestion, on va avoir un programme législatif chargé, on n'est pas près de faire des élections avec tout ce que vous demandez là.

M. Giasson: Vous admettrez que c'est encore très protectionniste.

M. Mathieu: Si vous passez vous-même les lois, c'est aussi bien de ne pas en faire.

M. Joron: On va être là encore au moins pour un an à faire des lois!

M. Giasson: Cela demeure protectionniste quand même!

M. Goulet: Si vous voulez parrainer vous-même les lois, vous êtes aussi bien de ne pas en faire tout de suite.

M. le Président, une très courte question — j'avais commencé à la formuler tout à l'heure — en ce qui concerne la contre-publicité. Est-ce qu'on a récupéré entièrement les 2% qui venaient des compagnies, en a-t-on eu besoin de plus ou s'ils n'ont pas tous été dépensés?

M. Joron: Je vais demander à M. Thomas-Louis Simard, le directeur des communications au ministère, de répondre à cette question, si vous le voulez bien.

Les budgets de contre-publicité, comme vous le savez sans doute, proviennent d'une taxe spéciale sur la publicité faite par le truchement des media électroniques; le montant qui nous est dévolu au titre de la contre-publicité dépend de la taxe qui est perçue et nous est retournée par le ministère du Revenu. Cela fluctue d'une année à l'autre. Règle générale, ça suit une courbe qui a tendance à augmenter parce que la publicité suit la même courbe et, l'inflation étant ce qu'elle est, les budgets augmentent.

M. Goulet: C'est-à-dire que, l'an passé, vous avez eu tout près de $3 000 000?

M. Joron: C'est ça.

M. Goulet: Ce sont les 2% qu'on a récupérés?

M. Joron: C'est ça.

M. Goulet: Vous êtes une année en arrière?

M. Joron: Non, c'est que, depuis que la taxe est perçue, on la perçoit l'année suivante, l'enveloppe nous est donnée l'année suivante.

M. Goulet: D'accord. On dit que cette publicité ne doit pas servir pour faire la publicité du gouvernement ou de certains projets de loi, etc. Mais les annonces qu'on voit à la télévision, qui décide de leur contenu, des gens qui vont les faire et comment c'est distribué? Je vais en prendre une au hasard; l'Office de la protection du consommateur, campagne de contre-publicité "Vous êtes donc chanceux". C'est justement notre ami Deschamps; $220 000, qu'est-ce que c'est cette somme de $220 000? On ne prendra pas toute la page, les $2 000 000, mais on va en prendre une de $220 000. Pourrait-on nous dire où sont allés ces $220 000? Ce que par exemple, celui qui fait l'émission, le personnage a eu, qui l'a choisi et qui a choisi le thème: "Au Québec il faut se tenir en santé", ou des choses comme ça? Vous savez, le fameux thème qu'on a dénoncé l'an passé parce que, justement, nous disions que c'était... Je n'aime pas employer le mot "subliminal", parce que, justement, ce n'est pas de la publicité subliminale, mais il y a eu énormément de questions en Chambre, il y a eu un document qui a été produit, et par notre formation politique et par le Parti libéral, au sujet des termes qu'on emploie, des personnages qu'on emploie? Qui décide ça et où va cet argent?

M. Joron: Si vous permettez, je vais vous expliquer rapidement le processus de l'attribution des budgets des comptes de publicité. Autrefois, c'était le CMPDS, le Comité ministériel permanent au développement social qui attribuait les budgets. Depuis l'an dernier, le CMPDS a formé un comité de cinq sous-ministres qui doit se pencher sur les projets présentés par le ministère et faire un choix; il détermine les projets qui correspondent aux critères qui sont retenus pour la contre-publicité. Une fois les projets retenus, au niveau des contenus, la réalisation des projets relève de chacun des ministères dont le projet est retenu. Pour ce qui regarde le thème de la campagne aussi bien que les comédiens qui sont utilisés, c'est l'agence de publicité qui est retenue selon la procédure du fichier central des fournisseurs, il y a un mécanisme prévu pour retenir les services d'une agence et c'est l'agence qui propose, de concert avec le directeur des communications des différents ministères sectoriels, un thème et un personnage qui va véhiculer le thème.

De façon générale, je dirais, à peu près 100% maintenant, pour les campagnes qui se poursuivent pendant de longues périodes, comme celles de l'Office de la protection du consommateur et des Affaires sociales, à la campagne de publicité est raccroché un budget de postrecherche qui permet d'évaluer l'impact de la campagne dans le public. Une recherche a été faite dans le cas de la campagne de Deschamps à la protection du consommateur, l'an dernier. La recherche se fait à tous les ans après chaque étape de la campagne. Les Affaires sociales et l'Office de la protection du consommateur le font.

Le sondage, lui, est fait par des firmes spécialisées qui font l'échantillonnage de la clientèle soit

par des entrevues, ou par des appels téléphoniques. Les sondages scientifiques sont faits par des firmes spécialisées.

M. Goulet: Vous avez des résultats qui doivent être assez drôles. Vous en avez fait faire deux ou trois par IQOP, j'espère que vous ne vous fiez pas aux résultats parce que cela doit être... Non, mais écoutez...

M. Joron: Je ne veux pas me prononcer là-dessus. Ce sont d'anciens permanents de l'Union Nationale. Ne le saviez-vous pas? Je parle du président, M. Nadeau.

M. Goulet: Justement, c'est comme vos textes dans la revue Protégez-vous; à un moment donné, il y a dix ans que le produit est écoulé; si le produit est changé au bout d'un mois, imaginez-vous au bout de dix ans. Ce n'est pas là-dessus, M. le Président, que j'en ai.

M. Joron: Ecoutez, dans votre cas, le produit a changé souvent. Il n'a pas fini...

M. Goulet: Le monsieur qui parle au nom du ministre — ses propos sont inscrits au nom du ministre — a touché un point important. Il a dit: Le choix des thèmes et des personnages est fait de concert avec cinq sous-ministres.

M. Joron: Excusez.

M. Goulet: Vous n'avez pas dit cela?

M. Joron: Le contenu comme le thème et le comédien qui est retenu pour véhiculer le thème sont choisis par chacun des ministères sectoriels qui ont la responsabilité de faire la campagne. Le comité choisit les projets, la réalisation des projets est sous la responsabilité de chacun des ministères sectoriels.

M. Goulet: Qui décide pour les ministères?

M. Joron: Le directeur des communications, avec le sous-ministre et le ministre.

M. Goulet: Le choix est fait par... M. Joron: Pour le choix de l'agence.

M. Goulet: Le choix du personnage et des thèmes est fait de concert avec un directeur des communications du ministère concerné.

M. Joron: C'est cela.

M. Goulet: C'est cela que vous avez dit.

M. Joron: C'est sa responsabilité...

M. Goulet: Cela fait un an qu'on voulait savoir qui faisait cela. Je vous remercie d'avoir répondu. Comment cela se fait-il que ce sont toujours les mêmes personnages qui reviennent comme Deschamps, Lussier et ces gars-là?

M. Giasson: Parce qu'ils sont bons.

M. Joron: Dans le cas de l'Office de la protection du consommateur, la recherche a démontré que le message véhiculé par Deschamps était bon.

M. Goulet: Ah bon!

M. Joron: Je ne veux pas m'engager au nom de l'office, mais que je sache, l'office envisageait même éventuellement de changer de personnage. La recherche a démontré...

M. Goulet: Une dernière question. J'ai pris un exemple ici parce que tout le monde le connaît. Dans $220 000, justement, le fameux message: Vous êtes donc chanceux... est-ce qu'on pourrait savoir combien le personnage a reçu? Je ne veux pas le savoir ce soir, mais demain. Y a-t-il quelqu'un qui peut savoir cela d'ici à demain avant qu'on adopte cela au total?

M. Joron: On peut trouver ce renseignement. M. Goulet: Non, simplement à titre d'exemple.

M. Joron: On pourrait relever le contrat qui a été donné à la firme de publicité et on pourrait avoir une idée des tarifs payés. Il est certain que l'on doit tenir compte des tarifs de l'Union des artistes dans tous les cas des comédiens qui sont membres de l'union. Donc, les tarifs versés sont les tarifs officiels. (22 h 30)

M. Goulet: Je voudrais en avoir un. Je ne voudrais pas être désagréable envers les membres de la commission. D'ici à demain ou si le ministre s'engage à déposer... Pour prendre l'exemple du message — on va en prendre un et les autres on les laissera tomber— "Vous êtes donc chanceux ", sur les $220 000, combien est-il allé à M. Deschamps, par exemple? On reviendra à d'autres ministères pour d'autres personnes. C'est parce qu'on est en train de faire une petite étude et cela nous sauverait du travail si on avait cela. On aimerait bien le savoir. Vous n'avez pas d'objection?

M. Joron: On va retourner à l'agence et au contrat pour le savoir, et plus vite on l'aura...

M. Goulet: Pour compléter, quant au programme 1, je n'ai pas d'autre question.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Effectivement, Yvon Deschamps dit au monde, au peuple: "Vous êtes donc chanceux". Mais il y a des gens du peuple qui trouvent que lui aussi est chanceux, parce que c'est toujours lui qui a la chance. C'est une chance qui va dans les deux sens.

M. Joron: Les recherches tentent à démontrer que les messages de l'Office de la protection du consommateur sont parmi ceux qui passent le mieux au niveau de la compréhension par le public. Ceux de l'Office de la protection du consommateur et ceux du ministère des Affaires sociales, comme "II faut se tenir en santé". Ce sont les deux messages qui ont la plus haute cote de notoriété.

Une Voix: ... les plus compliqués, les plus subtils...

M. Giasson: Les moins compris.

M. Joron: De notoriété, cela veut dire que les messages ont une certaine retention au niveau du contenu.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que le programme 1 est adopté?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Boucher): Adopté. Programme 2.

Contrôle et surveillance du développement des entreprises

M. Joron: Avant d'aborder le programme 2, M. le Président, si mes collègues le permettent, je voudrais leur présenter M. Michel Tanguay, qui est le directeur adjoint du Bureau du fichier central des entreprises, qui constitue l'élément 1 de ce programme 2; M. Hubert Gaudry, qui est le directeur du service des compagnies, qui constitue l'élément 2, et M. Marc Jean, qui est le directeur du service des associations coopératives, qui constitue l'élément 3. Bien entendu, il y a le sous-ministre associé aux coopératives, que je vous ai présenté tout à l'heure, M. Rioux.

On peut peut-être passer les éléments les uns à la suite des autres. Autrement on va être un peu encombré à la table.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Montmagny-L'Islet, pas de question? M. le député de Bellechasse? L'élément 1 est adopté? Elément 2.

M. Goulet: Pas trop vite, M. le Président.

M. Giasson: Le fichier central des entreprises, est-ce qu'il y a une évolution là-dedans ou si c'est une opération plutôt routinière?

M. Joron: Ce serait peut-être intéressant de demander à M. Tanguay de décrire aux membres de la commission, en gros, en quoi consiste ce service et, pour répondre plus spécifiquement à votre question, de demander si cela a évolué, si cela change ces années-ci.

En fait, le fichier central des entreprises a pour mandat de maintenir sur support magnétique l'ensemble des entreprises qui sont en affaires au Québec. Cela inclut, bien entendu, les corporations fédérales et provinciales ainsi que toutes les déclarations qui nous proviennent des bureaux des protonotaires au niveau des raisons sociales. On a aussi comme mandat de mettre à la disposition des ministères et organismes gouvernementaux les renseignements qui sont contenus dans ce fichier. Ces renseignements, soit dit en passant, sont des renseignements sur l'identité de l'entreprise.

M. Giasson: Ce n'est ni plus ni moins que l'inscription d'une entreprise, d'une société, d'une corporation. L'information se limite à cela?

M. Joron: C'est cela, son nom, son adresse, sa formation juridique, ses activités principales et les administrateurs.

M. Giasson: Quand les sociétés sont dissoutes, on vous avise?

M. Joron: On est avisé puis on ferme le dossier.

M. Giasson: Par les mêmes voies que l'information que vous recevez lors de la création?

M. Joron: C'est cela, au niveau des corporations, par le service des compagnies et, au niveau des raisons sociales, par les bureaux de protonotaire à travers la province.

M. Giasson: Cela veut dire que vous avez un contrôle quasi parfait sur l'existence des corporations, des sociétés en activité.

M. Joron: C'est cela.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: M. le Président, rapidement. Est-ce que la manière d'en être informé ce sont les rapports initiaux lorsqu'on incorpore une compagnie et le rapport annuel par la suite?

M. Joron: Au niveau des compagnies, c'est l'émission des lettres patentes, au moment de l'émission des lettres patentes aux corporations par le service des companies. Par la suite, on est tenu à jour par le rapport annuel des compagnies.

M. Mathieu: Si on incorpore une compagnie en vertu de la loi fédérale et que la compagnie ne vous donne pas un rapport initial, un rapport annuel, comment allez-vous le savoir?

M. Joron: On a une entente avec le ministère fédéral de la Consommation et des Corporations qui nous transmet la liste de toutes les corporations constituées par les lois fédérales.

M. Mathieu: Si une compagnie à charte fédérale ne vous soumet pas son rapport annuel, on

sait que c'est une charte provinciale et on ne reçoit pas le rapport au bout de trois ans, la sanction, c'est que les lettres patentes sont annulées. Si c'est une charte fédérale, quelle sera la sanction?

M. Joron: Cela relève du service des compagnies de voir à ce que le rapport annuel soit produit.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Rapidement. Vous ne cumulez aucune donnée, par exemple, au niveau des administrateurs. Vous savez ce que la compagnie fait, transige, son champ d'activité, mais vous ne cumulez aucune donnée au niveau des chiffres d'affaires, par exemple.

M. Joron: Non.

M. Goulet: Non, absolument rien?

M. Joron: Aucune donnée au niveau du capital-actions, aucune donnée pécuniaire. En fait, cela se résume à...

M. Goulet: Au niveau des dossiers juridiques d'un administrateur, vous n'avez rien de cela?

M. Joron: Non.

M. Goulet: Vous avez le nom de l'administrateur?

M. Joron: On a le nom simplement.

M. Goulet: Alors, si on appelle chez vous pour connaître la solvabilité d'une compagnie, vous n'avez pas affaire à cela du tout?

M. Joron: On n'a aucune information là-dessus.

M. Goulet: Vous n'avez aucune information et vous n'en cumulez pas non plus?

M. Joron: Non, absolument pas.

M. Goulet: D'accord. Concernant les compagnies qui ne produisent pas leur rapport à temps, à un moment donné — je n'accuse personne, je ne sais pas quand ça s'est fait — sauf erreur, il y avait eu un certain relâchement. L'année passée, vous aviez commencé à faire le ménage, je pense; comment a été votre affaire?

M. Joron: Je pense que le service des compagnies pourrait vous répondre à ce sujet.

M. Goulet: Bon, vous autres, c'est le fichier. Je voulais savoir si on en a fermé beaucoup. Il pourra nous le dire tout à l'heure.

M. Joron: II pourra vous donner les statistiques. Il peut répondre à cette question.

M. Goulet: Vous avez fait bien des croix dans votre fichier?

M. Joron: Pas mal!

M. Goulet: Je ne sais pas si...

M. Joron: Est-ce que je peux répondre maintenant? Oui, bon. Effectivement, j'allais dire que la perception du rapport annuel — ce n'est pas le terme exact, je m'en excuse — la réception du rapport annuel se fait chez nous. C'est nous qui sommes responsables de l'application de la loi concernant les renseignements sur les compagnies en vertu de laquelle le rapport annuel est exigé. Périodiquement, on fait ça à peu près une fois tous les deux ou trois ans, selon le besoin et l'encombrement de nos dossiers. On se rend compte qu'il y a un certain nombre de compagnies qui ne produisent plus leur rapport depuis un certain temps. On appelle alors au fichier central, parce que ce système est en bonne partie mécanisé, pour arriver à dresser une liste des compagnies qui ont fait défaut de produire leur rapport. On a des consultations avec le ministère du Revenu, évidemment, parce qu'on ne veut quand même pas dissoudre n'importe qui.

Une fois que ces consultations ont été faites, on fait paraître des avis dans la Gazette officielle. En même temps qu'on fait paraître l'avis dans la Gazette officielle, on expédie par la poste, pas par la poste recommandée, mais par la poste régulière, un avis aux derniers administrateurs qui sont indiqués dans notre dossier. On les prévient que, dans un certain délai, s'ils n'ont pas produit des rapports, la compagnie sera dissoute. Après cela, on attend. On octroie un certain délai; le délai, officiellement, a été fixé à 30 jours par le ministre.

A l'expiration des 30 jours, là on revoit le dossier pour voir si les rapports ont été produits. Si les rapports n'ont pas été produits, à ce moment-là, on procède à la publication d'un deuxième avis et c'est ce deuxième avis qui dissout la compagnie.

L'an dernier, pas l'année qui vient de s'écouler mais l'année précédente, nous avions fait une grande campagne de dissolution, on appelle cela de l'annulation massive, et nous avions dissout plus de 35 000 corporations. Évidemment, il s'agit uniquement de corporations constituées en vertu de lois québécoises, parce que nous ne pouvons pas dissoudre des corporations constituées en vertu d'autres lois que les lois québécoises; on n'a pas la juridiction pour leur donner naissance et on n'a pas la juridiction, non plus, pour les faire mourir.

Cette année, étant donné qu'il y avait eu une épuration assez importante l'année précédente, il n'y a pas eu énormément d'annulations. Par contre, on a l'intention à l'avenir, non pas de faire de grandes campagnes de dissolution comme celle-là, mais plutôt d'y aller d'une façon plus

régulière. C'est la façon dont on va procéder et cela nous sert en même temps pour épurer nos dossiers, c'est bien commode.

M. Goulet: M. le Président, quel pourcentage approximatif de compagnies ont été dissoutes après un deuxième avis, mais qui sont revenus à la charge? Est-ce qu'il y en a ou si, vraiment, après le deuxième avis, celles que vous avez dissoutes sont...

M. Joron: Non, il y en a quand même un certain nombre. Malheureusement, je n'ai pas la statistique officielle là-dessus. Il reste qu'on constate qu'il y a quand même quelques compagnies qui nous envoient les rapports que nous demandons. Evidemment, celles-là on les attend. C'est bien sûr qu'on ne va pas faire exprès pour faire tomber le couperet tout de suite à la fin du délai. Ce qu'on veut, au fond, c'est que les gens nous donnent signe de vie.

D'ailleurs, cette année, on a expédié aussi des mises en demeure à plusieurs compagnies parce que nous savons, nous sommes informés par le fichier central que ces compagnies sont actives — il y a beaucoup de compagnies fédérales, en particulier, qui sont actives — et qui ne produisent pas le rapport annuel. Alors, ces compagnies, parce que, comme gourdin on n'a pas seulement la dissolution, on peut aussi en poursuivre les administrateurs, on leur a dit que si elles ne fournissaient pas le rapport — d'ailleurs, c'étaient des compagnies qui étaient en retard de plusieurs années — on aurait la désagréable obligation de les y contraindre en les poursuivant devant les tribunaux. Et cela rentre, c'est admirable de voir cela. Alors, celles qui ne nous donnent pas de nouvelles, généralement, c'est parce qu'elles ne sont pas tellement actives. On n'a pas encore pris de poursuite, de toute façon, à ce sujet.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Quand on regarde à l'élément 1 du programme 2, $985 000 pour l'année, pour le fichier central, combien cela représente-t-il de compagnies fichées? Vous avez un total de combien?

M. Joron: A l'heure actuelle, au total, il y a 175 450 corporations, soit fédérales ou provinciales.

M. Lavigne: Fichées? M. Joron: Fichées, actives. M. Lavigne: Actives. M. Joron: Au Québec.

M. Lavigne: Est-ce que, d'une année à l'autre, pour la plupart, ce sont les mêmes corporations qui sont fichées?

M. Joron: Elles sont continuellement au fichier et on suit l'évolution de la corporation à partir de sa naissance jusqu'à ce qu'elle soit dissoute...

M. Lavigne: Oui.

M. Joron: ... soit en faillite, ou en concordat ou...

M. Lavigne: Et sur les quelques 175 000 que vous avez fichées, l'an passé, il y a eu une épuration de 35 000?

M. Joron: C'est cela, 35 000 corporations. Mais là, l'épuration qu'il y a eue, c'est au niveau des corporations québécoises.

M. Lavigne: Québécoises seulement.

M. Joron: Oui, qui sont créées en vertu des lois administrées par... Maintenant, je vous donnais le chiffre de 175 000; ce sont les corporations seulement. On a, en plus de cela, les sociétés, qui représentent 56 230 au 1er mars 1980, et puis 214 715 particuliers en affaires sous leur nom propre ou sous une raison sociale.

M. Lavigne: Cela représente combien d'employés dans le service du fichier comme tel?

M. Joron: Pour l'année qui vient de débuter, 55.

M. Lavigne: 55. C'est ce qui justifie, en fait, la grosse partie de la somme qui s'en va en salaires.

M. Joron: Effectivement. M. Lavigne: Merci.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Revenons au service des compagnies encore. On sait qu'il existe une procédure, à la Loi des compagnies, d'extinction des compagnies. Maintenant, c'est une procédure longue, qui est plus longue et plus dispendieuse que la constitution d'une compagnie, normalement. Plusieurs disent: Au lieu de prendre la procédure d'expulsion, on va cesser de produire le rapport annuel et on va la faire tomber. Si une compagnie choisit ce moyen, est-ce qu'il y a des sanctions qui peuvent, à un moment donné, résulter ou si vous l'éteignez sans autre sanction? (22 h 45)

M. Joron: Je crois que vous êtes un peu au courant de la façon de procéder. Oui, effectivement, c'est un petit problème qu'on a. Je dois dire qu'on ne considère pas que ce soit un problème absolument urgent. Mais il y a quand même un petit inconvénient à cela; c'est que, lorsqu'on procède par la voie de l'abandon de charte, effectivement, il y a des coûts à cela parce que généra-

lement il faut mettre en ordre les affaires de la compagnie et peut-être engager un avocat ou un notaire. Il y a des honoraires et tout cela. Je comprends évidemment que cela coûte quand même un peu plus cher que de laisser tout simplement le gouvernement entrer une épée et dire: C'est fini; c'est bien certain. Il y a beaucoup de compagnies qui vont précisément laisser tout simplement la corporation mourir toute seule au bout de quelques années.

En fait, non, il n'y a pas de sanction autre que celle de la dissolution, c'est-à-dire que ce qui va se produire, c'est qu'on va tout simplement faire publier les avis selon la procédure que j'ai indiquée tout à l'heure. Lorsqu'il s'agit d'une corporation dont le fichier central nous affirme qu'elle n'est plus active, on n'ira quand même pas faire exprès pour persécuter des gens, c'est bien sûr, sauf que, si on regarde cela sous l'angle de la loi, il reste quand même que le gouvernement ne peut pas avoir les mêmes certitudes. Je ne veux pas dire que les choses se passent nécessairement d'une façon malhonnête parce que j'imagine que, si c'était le cas, on aurait certainement des plaintes. Il reste que, dans le cas de l'abandon de charte, par exemple, les gens sont censés nous produire une requête dans laquelle ils vont nous affirmer sous la foi du serment que les dettes ont toutes été payées, que l'actif de la compagnie a été distribué ou qu'on a pris les précautions pour que les dettes soient acquittées vu que les créanciers ont renoncé et ainsi de suite.

Évidemment, dans le cas de la procédure d'annulation, comme la compagnie cesse purement et simplement de nous donner des signes de vie, on ne peut pas avoir ces garanties. Mais, au fond, on ne s'en fait pas trop parce qu'on se dit: Finalement, l'important, ce n'est pas que nous ayons la garantie. L'important, c'est que les créanciers aient été payés. Or, dans le cas où une compagnie sera éventuellement dissoute, il reste que, tant qu'elle n'est pas dissoute, les créanciers auraient des recours. S'il y a des gens qui avaient fraudé la compagnie, qui avaient distrait des sommes qui, normalement, reviendraient aux créanciers, je pense qu'en droit civil les créanciers auraient certainement des recours et probablement même au criminel contre les personnes qui se seraient enfuies avec ces sommes. J'ai bien l'impression que les autres mécanismes de notre droit et probablement des mécanismes de droit commun font en sorte qu'il n'y a quand même pas énormément de fraudes de ce côté. On n'est pas encore intervenu parce qu'on n'a pas eu vraiment de plaintes de ce côté. Dans certains cas, on en a eu et, à ce moment-là, on peut faire revivre la compagnie, même lorsque la compagnie a été dissoute par voie d'annulation, j'entends.

M. Mathieu: Je vois dans un autre domaine, selon le tableau soumis, dans les demandes d'incorporation, que le nombre d'incorporations en vertu de la première partie a diminué énormément depuis que le gouvernement fédéral accorde des lettres patentes avec sa nouvelle loi d'une person- ne seulement. Je trouve tout à fait heureux que le ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières se soit mis à la page dans ce domaine parce que c'était réellement un besoin. Je crois que les chiffres démontrent par eux-mêmes que ça répond à un besoin et que c'était attendu depuis passablement de temps.

M. Joron: Certainement. Effectivement, il y avait déjà un certain temps qu'on s'était rendu compte des besoins dans ce domaine et c'est la raison pour laquelle le projet de loi no 34 a été adopté en juin dernier. Évidemment, il faut un peu de temps. Le gouvernement fédéral avait quand même pris une certaine longueur d'avance et, en matière de législation, il faut y mettre le temps. On ne pouvait pas copier purement et simplement la loi fédérale pour toutes sortes de raisons dont certaines tiennent, par exemple, à la présence du droit civil dans notre province. Par conséquent, il faut faire quelques adaptations. Il y a aussi le style de rédaction qui n'est pas le même. Tout cela demande un peu de temps, mais, finalement, on est arrivé à sortir ce projet de loi no 34 et à le mettre en vigueur. Je dois dire que la réception a quand même été bonne. Evidemment, ce n'est pas encore la loi complète, c'est bien sûr. On ne peut pas s'attendre à avoir les mêmes résultats que si nous avions une législation entièrement nouvelle, mais, par contre, on a constaté un certain progrès.

M. Mathieu: En tout cas, je veux féliciter qui de droit. On n'est pas ici pour cela nécessairement, mais prenez-le quand cela passe.

M. Goulet: Le législateur.

M. Joron: On va laisser cela impersonnel.

M. Mathieu: Je crois que c'est très heureux et c'est un progrès remarquable.

M. Lavigne: Un bon gouvernement.

M. Goulet: Quand cela va bien, c'est le ministre.

M. Joron: Chez l'Opposition.

M. Goulet: Quand cela va bien, ce sont les fonctionnaires; quand cela ne va pas bien, c'est le ministre.

M. Mathieu: Je l'ai dit: Prenez-le quand cela passe. Je n'ai pas dit que c'était un bon gouvernement. J'ai dit que vous aviez de bons fonctionnaires.

M. Lavigne: Cela ne nuit pas.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que le programme 2 est adopté?

Une Voix: Oui.

M. Giasson: M. le Président.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Une information au sujet d'une compagnie qui est dissoute de par la volonté du service des compagnies pour des raisons justes et valables. Si la compagnie dissoute possède des actifs sans avoir nécessairement de passif, qu'advient-il des actifs de cette compagnie?

M. Joron: Vous parlez d'une annulation en vertu de la loi sur les renseignements?

M. Giasson: Pour refus de produire le rapport. Vous demandez la production du rapport et les actionnaires, le gérant ou le directeur négligent de le faire.

M. Joron: Dans un cas comme celui-là, la loi...

M. Giasson: Vous passez à l'opération de la fermeture de la compagnie dissoute.

M. Joron: Oui, d'accord. Evidemment, ce serait un cas où les administrateurs auraient oublié de distribuer l'actif parmi les actionnaires. Je voudrais tout de suite vous dire que votre cas n'est pas absolument impossible, mais j'ai l'impression que c'est quelque chose qui ne se présentera peut-être pas tellement souvent, parce que, si les administrateurs ont choisi de laisser la corporation aller à la dérive, je crois que la chose à laquelle ils auront probablement naturellement pensé, cela aurait été de se servir. J'ai l'impression que, de ce côté-là, les risques sont peut-être moins grands. Ce qui peut se produire, par contre, c'est que des créanciers n'aient pas été payés. Il est arrivé...

M. Giasson: Je suppose un cas où il n'y a pas de créanciers.

M. Joron: Alors, ce sont plutôt les actifs qui vous...

M. Giasson: La corporation possède des actifs, des terrains, des bâtiments.

M. Joron: Et vous voulez savoir si cela va aller à la couronne.

M. Giasson: Oui, c'est cela.

M. Joron: La Loi sur la Curatelle publique peut jouer. Seulement, si ma mémoire est fidèle, je pense que la Loi sur la Curatelle publique prévoit que le curateur public, pour être saisi, doit l'être en suivant une certaine procédure. En réalité, je suis d'avis qu'il y a dans la Loi sur la Curatelle publique une certaine contradiction. Je ne voudrais pas empiéter sur des domaines qui ne me regardent pas, mais c'est une opinion personnelle. Il y a une ambiguïté, en tout cas. On laisse en- tendre que cela se fait automatiquement et, par ailleurs, vous avez une réglementation qui implique qu'on doit adresser une demande particulière au curateur public pour qu'il agisse comme administrateur provisoire des biens. Maintenant, il n'y a pas propriété automatique. C'est une administration provisoire. D'ailleurs, je ne sais pas si, dans la refonte des lois de 1977, c'est encore l'article 12, mais il me semble que c'était l'article 12, paragraphe g), de la Loi sur la Curatelle publique qui précise cela. Il y a un autre article qui prévoit que le curateur public est d'office curateur aux successions vacantes. Je sais que le curateur peut se servir de l'une ou l'autre des deux dispositions. Mais je pense qu'il serait plus prudent d'interroger le curateur à ce sujet.

De toute manière, ce qu'il advient des biens dans un cas comme celui-là, si une personne veut faire une demande auprès du curateur public, elle peut le faire. A ce moment-là, le curateur public administrera les biens provisoirement jusqu'à ce qu'un tribunal se prononce sur la propriété des biens et, éventuellement, sur la liquidation. Maintenant, si entre-temps il intervient une demande pour faire revivre la compagnie, à ce moment-là, j'ai bien l'impression que le curateur public serait dessaisi de son administration provisoire et que la compagnie reprendrait sa propriété sur les biens. On pourrait, à ce moment-là, procéder à la liquidation, tout simplement.

M. Giasson: Donc, si la Curatelle publique fait l'administration, la gérance des biens et que les biens n'apportent aucun profit, c'est elle qui paie les taxes scolaires et municipales et ces choses-là.

M. Joron: En tant qu'administrateur, mais sur la masse.

M. Giasson: Et elle vend une partie des biens pour avoir l'argent pour faire face aux obligations.

M. Joron: Oui, sur la masse. M. Giasson: D'accord.

M. Joron: Je présume que c'est de cette façon qu'ils agissent. Écoutez, je ne peux quand même pas parler au nom du curateur public. Je pense que ce serait probablement à lui qu'il serait mieux de poser la question, mais mon opinion n'engage que moi ici, évidemment.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauharnois.

Associations coopératives

M. Lavigne: M. le ministre, je ne sais pas si vous pourriez me donner des explications, ou votre soutien, à l'élément 3. On voit une augmentation de presque le double. L'année passée, en 1979-1980, $1 700 000; on passe, en 1980-1981, à $2 400 000.

M. Joron: L'élément 3 du service des associations coopératives. Je peux peut-être demander, à ce moment-ci... A l'élément 3, vous dites?

M. Lavigne: Non, au programme 2, élément 3: Contrôle, surveillance...

M. Joron: Si je comprends bien, on en a terminé avec les éléments 1 et 2. Je vais demander à M. Rioux, sous-ministre associé aux coopératives, de se joindre à nous.

L'augmentation est causée par ce qui a été consenti à la SDC, la Société de développement coopératif.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: J'aimerais faire un commentaire introductif, si vous me le permettez, M. le Président. Je profite du fait que M. le directeur est avec nous pour avoir des renseignements; on n'a pas l'occasion d'avoir tous les jours ces personnes ressources à notre disposition.

J'ai oeuvré dans de nombreuses coopératives; je dois être membre d'environ dix dans le moment. J'ai été administrateur de plusieurs, j'ai été membre fondateur et premier gérant de la Caisse d'établissement de la Chaudière, je suis membre de la Coopérative de sucre d'érable du Québec et j'ai voulu fonder, à un moment donné, une association coopérative pour établir une clinique médicale dans mon village. C'était une entreprise d'environ $200 000 qui était payée à même des fonds privés et, finalement, ça c'est fait, c'est en marche, mais par un autre moyen.

Le problème de la fondation d'une coopérative, c'est qu'il faut passer par le Conseil de la coopération du Québec, qui nous assure l'authenticité coopérative. C'est bien ça? Finalement, nous avions environ 300 personnes dans le village qui voulaient bâtir une clinique médicale. Si on veut donner de l'emphase et de l'importance au monde de la coopération, il faut habituer nos gens à travailler avec ce véhicule. Je crois que c'est important. Dans nos petites paroisses, on a des coopératives agricoles, des chantiers coopératifs, des coopératives funéraires... Je ne les énumérerai pas toutes, mais j'ai été pas mal déçu parce qu'on m'a refusé en disant: La notion de membre usager dans le modèle que vous voulez lancer n'existe pas. On m'a dit: L'usager de votre clinique médicale, c'est le médecin, alors qu'on prétendait que l'usager serait toute personne qui se prévaudrait des services dispensés par la clinique médicale. Finalement, j'ai tâché de faire passer... Les gens de mon petit village ne comprenaient pas pourquoi j'essayais ça, parce que, eux, pour autant qu'ils aient une clinique médicale, que ce soit par n'importe quelle voie, ça ne leur fait rien, mais moi, je trouvais que c'était important d'habituer le monde à travailler au moyen de la coopérative.

Cette fameuse relation de membre usager me semble une notion pas mal dépassée dans le moment. Je ne veux pas critiquer les personnes qui sont prises pour appliquer ces programmes, mais je trouve ça très dépassé. Je me suis dit: On a eu des télévisions coopératives; le gars qui regardait la télévision devait-il avoir une carte? On lance ça sur les ondes et n'importe qui peut le capter; pour le journal, c'est la même chose. Pourquoi, lorsqu'on veut établir une clinique médicale, est-on restreint? On ne peut pas fonctionner par ce véhicule? On m'a dit: Allez-y avec la troisième partie de la Loi des compagnies. J'ai dit: Je le savais, je n'ai pas besoin d'aller me le faire dire par d'autres. Je me disais, moi qui voulais établir une coopérative: C'est comme si j'allais à une caisse populaire et demandais: Avez-vous tel service? Non. mais va à telle banque, elle l'a. Au lieu de me faire dire ça, je préférerais dire: On va tâcher d'adapter nos structures, nos normes pour qu'elles soient conformes aux besoins de l'époque actuelle. Alors, j'ai été pas mal déçu de ce refus. (23 heures)

Finalement, après avoir perdu plusieurs mois, j'ai procédé par la troisième partie de la Loi des compagnies et ça fonctionne bien. Mais, dans la mise en marche, ce n'est pas tout à fait pareil parce qu'en vertu de la présente partie il faut que le type paie sa cotisation régulièrement, annuellement. S'il arrête de payer, comme cela se passe normalement, et qu'il n'y en a pas un qui paie sa cotisation, la corporation peut s'éteindre par un vice de procédure. Or, une coopérative, je mets $5 en capital social et mon capital demeure légitime, légalise la situation même s'il n'y a pas de cotisation annuelle par la suite.

Je ne sais pas si c'est toujours en vigueur, ces notions de membre usager, on m'avait dit finalement que je ne connaissais rien de la coopérative. Je me dis: Peut-être que je ne connais rien, mais, en tout cas, je suis membre de dix et j'ai participé à plusieurs autres et il me semble qu'il y a un ajustement, une adaptation à faire dans ce domaine. Je revois également des mouvements très importants qui sont largement subventionnés dans le moment par les fonds publics. Je veux parler des regroupements forestiers.

Là, vous allez me dire: Cela n'a pas d'affaire avec nos crédits, mais je crois qu'indirectement c'est très important ce que je vais vous dire là. Je suis moi-même membre d'un regroupement forestier. Lorsque les personnes qui veulent mettre en marche ces regroupements forestiers vont dans les bureaux d'avocats, on leur dit: Bien, vous allez former une compagnie, selon la première partie de la Loi des compagnies, etc. Là, on tâche de faire des règlements pour que la compagnie fonctionne comme une coopérative alors que ce qu'on veut faire, c'est l'esprit d'une coopérative et l'État y consacre des millions et des millions. Moi, je prends un exemple. Je disais, à un moment donné, aux gens de mon regroupement forestier: Si. dans 20 ans, 30 ans, 40 ans, nous avons des actifs de $10 000 000 ou $5 000 000 et que nous décidons que c'est important d'éteindre notre compagnie, qu'est-ce qui va arriver? On va partager l'actif. C'est facile pour quelques personnes de prendre

le contrôle de la compagnie, mais on dit: Non, on établit des règlements pour interdire cela, mais des règlements, cela se change, par une assemblée annuelle, générale ou spéciale convoquée à cette fin. Cela se change, des règlements.

Si nous avons affaire à une coopérative, je prends le cas de celle des Producteurs de sucre d'érable dont je suis membre qui a des actifs de $8 000 000 ou $10 000 000 peut-être, je n'ai pas d'intérêt à provoquer la dissolution de cette institution, parce que ce que je retire, c'est mon capital social de $60. Je ne partage pas l'actif. Tandis que, dans le regroupement forestier dans lequel l'Etat, à juste titre — je ne veux pas faire une critique négative — investit des millions chaque année, mettons que dans 20, 30 ou 40 ans, quelqu'un dit: On s'approprie cette institution, c'est facile de changer les règlements et que trois, quatre ou cinq personnes qui la contrôlent dissolvent la compagnie et se partagent le pot aux roses. Je trouve cela tout à fait inadéquat comme formule et, encore une fois, je n'ai aucun doute à l'endroit des dirigeants de ces mouvements, à l'endroit de l'État qui investit des fonds là-dedans, parce qu'on veut que cela fonctionne comme une coopérative.

A mon regroupement à moi, je suis allé, j'ai dit: Pourquoi n'avez-vous pas pris une charte de coopérative en partant? Ils m'ont dit: C'est parce qu'on nous a dit que si on formait une coopérative et que cela n'allait pas bien, on était responsable personnellement et on ne veut pas être responsable personnellement, mais la coopérative a une entité juridique comme une compagnie. J'ai trouvé qu'ils avaient été mal renseignés. Moi, je crois, en conclusion de mes notes préliminaires que je veux voir interprétées d'une manière constructive, ce n'est pas une critique que je vous fais là, au contraire, c'est un secteur qui m'est cher et je veux profiter de ces quelques expériences pour faire une adaptation, si possible. Je voudrais donc que l'on facilite la mise sur pied d'une association coopérative, que cela ne prenne pas dix mois, un an d'études et qu'on arrive au bout de l'année en disant: II te manque une notion de membre usager ou une autre affaire et cela ne marchera pas ton affaire, premièrement.

Deuxièmement, lorsqu'il y a une demande faite de lettres patentes pour un regroupement forestier, on veut que ce soit l'esprit coopératif et on prend le véhicule compagnie. Vous voyez qu'il y a quelque chose qui ne marche pas là-dedans. Il faudrait qu'il y ait une éducation faite auprès des ministères concernés, Energie et Ressources ou autres. J'irais même plus loin, je crois que cela nous prendrait une loi spéciale pour changer le statut de nos regroupements forestiers en associations coopératives, pour la protection des intérêts du patrimoine, de ces regroupements qui appartiennent à la collectivité, à mon sens, et pour qu'on n'arrive pas dans 25, 30 ou 40 ans, et que quelques-uns prennent le contrôle et se partagent l'assiette.

Ce sont les commentaires préliminaires que j'avais à faire.

M. Joron: Juste avant que M. Rioux réponde, j'ajoute mes commentaires aux vôtres. Il y a une chose que je dois dire. Vous avez mentionné qu'au ministère de l'Énergie et des Ressources on devrait mieux diriger. Effectivement, il y a quelque chose d'intéressant qui découle — cela répond juste à une petite partie de vos commentaires — du dernier sommet. Le gouvernement s'était engagé, au cours du dernier sommet sur la coopération, dans tous les ministères qui ont à traiter avec des coopératives — il y en a plusieurs, sept, huit ou dix — à créer un bureau d'accueil ou à spécialiser des gens après les avoir entraînés, formés au coopératisme pour qu'ils puissent répondre spécifiquement aux coopérateurs dans leur secteur, que ce soit aux ministères de l'Énergie, des Ressources ou aux Terres et Forêts ou ailleurs, à quelqu'autre ministère. C'est arrivé souvent dans le passé, quand les coopérateurs approchaient l'appareil gouvernemental, qu'ils avaient affaire à des gens, qui sans être de mauvaise foi, ne connaissaient pas le système coopératif et ne pouvaient pas les guider ou les conseiller.

Maintenant, on n'aura plus cette carence et chaque ministère qui travaille dans un secteur où la présence coopérative existe pourra mieux renseigner et diriger son monde à l'avenir. C'est juste une petite partie de la réponse, mais je tenais à le dire, parce que c'est quand même intéressant.

M. Rioux, je suis sûr, voudrait apporter de plus amples réponses aux questions que vous avez soulevées.

Je crois qu'on peut apporter des réponses aux problèmes soulevés. Si on se réfère à l'exemple que vous avez donné tout à l'heure de la tentative de lancer dans votre milieu un organisme qui a été refusé par le Conseil de la coopération du Québec sous prétexte que ce n'était pas une coopérative, parce que cela ne correspondait pas aux exigences du membre usager qui est un principe coopératif, vous avez soulevé une question qui est très importante. Parce que ce n'est pas simplement chez vous que c'est arrivé, c'est arrivé à de nombreux endroits dans la province de Québec. Cela démontre qu'il y a, à l'heure actuelle, dans bien des milieux, des développements de ce genre où la population veut se prendre en main; à partir de ce moment, elle cherche une forme juridique qui lui paraît être la formule coopérative.

A présent, c'est évident que c'est l'esprit coopératif, cependant si on interprète — et là c'est le Conseil de la coopération du Québec qui le fait, parce qu'il doit donner un avis — strictement en regard des principes coopératifs, c'est qu'il y a véritablement l'élément que vous avez soulevé, celui qui, également, est l'argument du Conseil de la coopération du Québec, cela ne correspond pas au principe coopératif du membre usager.

Là, je ne veux pas entreprendre un débat doctrinal, mais par rapport à cette position du conseil, je dois dire que c'était également la position du service des associations coopératives. Dans l'exemple que vous avez donné par rapport à la télévision, c'est exact qu'il y a eu un poste de

télévision, mais il avait été refusé par le gouvernement du Québec, par notre ministère, c'était une incorporation fédérale. Au fédéral, évidemment, les gens n'ont pas les mêmes réticences et cela a donné cette télévision qui a fonctionné durant une période de deux ans. Il y a eu par la suite de nombreuses demandes qui ont été faites au Québec mais qui ont été refusées, simplement parce que la relation membre usager n'existait pas.

La relation membre usager — je ne veux pas entreprendre quelque chose sur le plan doctrinal — c'est quand même un principe qui doit être respecté pour la bonne raison que la coopérative étant la propriété de ses usagers, le jour où ce ne sont pas des usagers qui sont dans la coopérative, il y a une distorsion et il y a danger de problème; en tout cas, l'interprétation de la coopérative authentique, il faut que ce soit avec ses usagers. Une coopérative de consommation appartient aux consommateurs, c'est de caractère universel, parce que tout le monde est consommateur. Une coopérative de travailleurs, ce sont les travailleurs qui possèdent l'entreprise, mais il n'y a pas d'autres personnes que les travailleurs qui sont membres de la coopérative, parce que l'usager, c'est le travailleur. On pourrait donner des exemples pour toutes les formes, les catégories d'entreprises.

Cependant, vous avez soulevé un problème de taille: celui qu'il existe quand même dans le Québec de nombreux citoyens qui veulent se prendre en main. On n'avait pas véritablement de véhicule juridique. On se servait des compagnies et on faussait réellement toute la philosophie de la compagnie. On se sert de la troisième partie de la Loi des compagnies et, à partir de ce moment-là, cela ne correspond pas non plus aux objectifs et aux idéaux des citoyens. C'est pourquoi — M. le ministre le mentionnait tout à l'heure — dans la loi on a un mandat, celui de modifier les lois des associations coopératives et des coopératives agricoles, de créer une nouvelle loi qui sera pour les groupements communautaires, d'esprit coopératif, une loi qui sera également très souple. Cela pourra se transformer en coopérative, cela pourra même être considéré comme une précoopérative et cela permettra à ce moment-là aux citoyens de se prendre en main et de former des entreprises du genre de celles dont vous avez parlé dans la question que vous avez soulevée tout à l'heure.

Pour ce qui est d'un autre point très important, celui des regroupements forestiers, je peux vous dire que vous avez soulevé un point évident. Il faut bien le constater, il y en a à l'heure actuelle 34 au Québec et on se demande pourquoi ce ne sont pas des coopératives. Pourquoi ce ne sont pas des coopératives? Il fut un temps où le développement des entreprises, la préoccupation de les former dans un encadrement juridique n'était pas celle qui préside à l'heure actuelle. Je pense que ce sont des choses qui ne se produiront pas ou plus dans l'avenir. Au ministère des Terres et Forêts, avec la politique forestière pour le regroupement des boisés privés, il y a eu un modèle de défini par les chercheurs au ministère des Terres et Forêts du temps. On remonte, à ce moment-là, à 1971 environ et cela a donné lieu à la loi que tout le monde connaît, qui a fait former 34 groupements forestiers.

A présent, j'espère que, pour l'avenir, quand il se formera des groupements forestiers on utilisera la loi des associations coopératives parce que c'est véritablement cette loi qui correspond aux besoins de ces regroupements.

Je peux ajouter une chose, si vous me permettez de vous interrompre à ce moment-ci, M. Rioux. C'est que M. Bérubé doit soumettre justement la semaine prochaine au comité de développement économique une proposition qui vise à diriger vers la formule coopérative les gens qui solliciteraient la formation de tels regroupements à l'avenir. Cela s'en vient dans cette direction.

Donc, je pense que cela ne se produira plus dans l'avenir par rapport à cela. Vous avez parlé également des renseignements qui auraient pu être donnés à des groupements ou à des personnes qui ont voulu avoirde l'information, dans le sens que des fonctionnaires, je ne sais où, auraient dit, par exemple, que dans une coopérative la responsabilité n'était pas limitée et qu'à partir de ce moment on conseillait plutôt d'aller vers une entreprise à responsabilité limitée. Evidemment, je ne mets pas en doute que cela ait été dit, mais ce n'était certainement pas au service des coopératives que ça l'a été. On sait qu'une corporation est une entreprise à responsabilité limitée; à ce moment-là, c'est regrettable, mais je confirme avec vous que c'est entièrement faux, une coopérative est à responsabilité limitée.

Concernant les lettres patentes nouvelles pour les groupements forestiers, on en a parlé tout à l'heure. Vous avez soulevé un point et on le retrouvera avec la loi des groupements communautaires qui est en train de se former. Par rapport aux encadrements juridiques actuels de toutes ces formes d'entreprises qui bénéficient largement de subventions du gouvernement, cela n'assure en aucune circonstance que ces subventions ne retomberont pas à un moment donné dans les poches des individus. Je ne dirai pas pour faire de nouveaux riches, ça ne serait peut-être pas suffisant, mais, de toute façon, on aurait détourné à un moment donné les fins pour lesquelles les subventions auraient été données parce qu'on liquiderait l'entreprise et, à partir de ce moment-là, on se la partagerait entre les actionnaires, chose qu'on ne peut pas faire entre les coopératives. (23 h 15)

M. Mathieu: J'aurais juste un mot à ajouter au sujet de l'expérience des cliniques médicales quand le Conseil de la coopération nous dit que la relation d'usager n'est pas là. Eux disaient: L'usager, c'est le médecin. Nous, on disait: L'usager, c'est le patient. Il n'y a pas d'appel possible. Quand le Conseil de la coopération nous dit: C'est final, c'est final! Même si on trouve qu'on a peut-être autant raison qu'eux autres, il me semble qu'il devrait y avoir un appel quelque part d'une décision semblable du Conseil de la coopération.

Il y a une autre chose ensuite que je voulais... Cela devient un peu un handicap au développement du monde de la coopération. Ensuite, rela-

tivement à l'authenticité des coopératives, j'en suis, mais je crois que le service ou le Conseil de la coopération devrait également vérifier l'authenticité de la coopérative en fonction présentement. J'en connais qui ont été constituées il y a quelques années — vous devez certainement être au courant — pour échapper au plan conjoint, le plan conjoint en vertu de la loi de la Régie des marchés agricoles, dans le domaine de l'agriculture. Les coopératives sont soustraites à cela; alors, on formait des coopératives de boutique, on leur donnait une charte et elles échappaient au plan conjoint. Il me semble que ce serait important que le Conseil de la coopération se soucie également de vérifier l'actualité de l'authenticité de toutes les coopératives au Québec.

M. Joron: Voici, vous soulevez des points qui sont bien exacts. A présent, le rôle du conseil est dans la loi présentement; qu'est-ce qui se produira dans l'avenir, je ne le sais pas. Cependant, les points que vous soulevez sont des points qui, à l'heure actuelle, sont discutés au comité de législation qui est formé et qui étudie les lois. Alors, on sait qu'il y a des faiblesses dans nos lois; on sait — l'expérience l'a prouvé — après une quinzaine d'années d'expérience de cette loi, qu'il y a beaucoup de points auxquels il va falloir remédier.

A présent, tout cela sera étudié, d'autant plus que le comité a pour mandat de suggérer des modifications mais, également, cela se fait sur la base de consultations. Alors, les divers secteurs coopératifs sont consultés et on aura une loi qui va correspondre aux besoins du milieu et on apportera toutes les modifications nécessaires.

M. Mathieu: Alors, c'est une critique constructive; ce n'est pas comme un théoricien que je vous parle, c'est comme un coopérateur de la base, qui vit avec cela.

M. Joron: Je le comprends très bien et je l'apprécie d'ailleurs. Vous comprenez aussi, j'en suis sûr, la difficulté dans laquelle on se trouve, devant laquelle le législateur se trouve de se substituer aux coopérateurs et de définir les critères de la coopération. C'est là l'étroite marge dans laquelle il faut marcher. Ce n'est pas large.

M. Mathieu: Si on n'en parle jamais, M. le ministre, il n'y aura jamais de nouvel aiguillage. Il pourrait y en avoir, mais cela pourrait prendre plus de temps.

M. Joron: Oui, oui.

M. Giasson: M. Rioux, quand vous avez fait allusion tout à l'heure à l'ouverture du monde de la coopération à des groupements communautaires, quel est le modèle que vous avez à l'esprit ou les différents modèles de groupements communautaires?

M. Joron: On parle du centre médical; lorsque le conseil s'est référé à la notion du membre usager, à ce moment-là — je me souviens de ce cas — en somme, lui s'y référait dans le sens qu'il disait: II peut y avoir deux types de coopératives là-dedans; la coopérative qui appartient aux médecins qui, à partir de ce moment-là, sont regroupés et qui offrent à la population, au centre médical, des soins médicaux et les revenus constituent les revenus du médecin. C'est un type de coopérative.

Il y a la coopérative qui appartient aux patients, à ceux qui vont aller là éventuellement se servir du centre médical pour avoir des soins médicaux. Mais, généralement — ce sont des types de coopératives, je veux bien croire, ce serait du nouveau — on ne rencontre pas les usagers là-dedans, on rencontre l'ensemble de la population. C'est le milieu qui veut se donner, à un moment donné, une entreprise qui lui appartient. Le centre médical, cela m'apparaît un peu une entreprise communautaire; je pense aussi, en ce moment, à de nombreuses initiatives des milieux, surtout en milieux ruraux, qui disent tout à coup: Nous voulons avoir un centre paroissial, on veut avoir un foyer d'hébergement, on veut avoir tout un ensemble de services qu'on va se donner sous un seul toit mais on va réussir cela collectivement. C'est parce que cela va être les hommes, les femmes, les citoyens de la paroisse de Saint-Esprit qui vont se réunir ensemble. Ils vont fournir de l'argent et ils vont organiser une coopérative. On dit: Non, ce n'est pas une coopérative. C'est une entreprise communautaire. Tout est de savoir comment, à partir de ce moment-là, réussir à harmoniser les rapports entre des groupes d'intérêts qui sont différents là-dedans pour créer une entreprise communautaire. Une entreprise communautaire pourrait un jour se transformer en authentique coopérative lorsqu'elle retrouverait simplement des usagers. A partir de là, il s'agit d'introduire des dispositions pour passer d'une loi à une autre. D'ailleurs, c'est ce qu'on prévoit faire.

Il y a aussi d'autres types d'entreprises communautaires qui existent dans de nombreuses régions du Québec, notamment dans la région du Bas-Saint-Laurent. Vous avez toutes les sociétés intégrées d'exploitation des ressources, qui sont au nombre de quatorze dans la région du Bas-Saint-Laurent et qui sont toutes des entreprises communautaires. Ce sont des entreprises qui regroupent les commerçants, les cultivateurs, les ouvriers de leurs villages et ainsi de suite, et à partir de là, ces entreprises font toutes sortes d'activités économiques, des activités forestières, des activités d'agriculture, des activités industrielles. Elles font tout cela sous un même toit et cela fonctionne. Cela donne d'assez bons résultats; par contre, sous la forme coopérative, ce n'est pas acceptable. C'est dans l'ordre des principes coopératifs, parce que vous ne retrouvez pas l'usager membre, mais vous retrouvez la population membre.

M. Giasson: Mais êtes-vous conscient, M. Rioux, que ce ne sont pas des cas nombreux. Nous avons quelques coopératives qui vont fournir des services en volume plus grand à des gens

qui ne sont pas sociétaires, qui demeurent des coopératives annexées sociétaires, mais qui fournissent des services ou qui vendent des choses, des biens à des gens qui ne sont pas des sociétaires de la coopérative.

M. Joron: Oui, mais je ne sais pas où on va s'entendre sur la définition de membre usager. Je ne sais pas à quel type de coopérative vous faites allusion.

M. Giasson: Consommation. Certains magasins de consommation vendent énormément de biens, de produits à des gens qui ne sont pas sociétaires, mais qui veulent aller acheter à la coopérative quand même.

M. Joron: D'accord. Sur ce cas bien précis, c'est vrai, c'est exact qu'il y a des coopératives qui vendent à des non-membres en quantité, qui ont un chiffre d'affaires important avec des non-membres. On mesure au service des coopératives — on pourrait dire — l'activité coopérative de la manière suivante: une coopérative a des opérations en 1979. Elle a eu des opérations à 100% avec ses membres. Elle est pure à 100%. Si c'est à 80%, il y a 20% d'activités économiques à caractère capitaliste il y en a 80% qui sont des activités coopératives. Et là on suivra dans l'ordre, en diminuant; si ça arrive à 50%-50%, c'est 50% capitaliste et 50% coopératif. Quand vous suivez ce problème, c'est un problème qui existe au Québec, la législation actuelle ne nous permet pas d'intervenir dans ce cas, mais pour rendre nos coopératives plus coopératives, la prochaine législation aura certainement des dents et cela permettra de régulariser de telles situations. Je vous donnerai simplement un exemple de la loi ontarienne qui, elle, a un mécanisme pour prévoir des cas semblables où, sur une période qui est pondérée sur trois ans, une entreprise coopérative qui fait un chiffre d'affaires à moins de 50% avec ses membres est considérée tout simplement comme une corporation publiée dans la Gazette officielle et elle perd le droit d'être appelée une coopérative.

M. Giasson: Vous avez également le cas de coopératives d'amélioration des terres — elles ne sont pas nombreuses au Québec — qui se sont créées en vue de permettre à des producteurs agricoles de se doter d'équipements lourds pour faire des travaux sur des fermes, des travaux d'égouttement, d'épierrement, etc. Mais la coopérative a pris de l'expansion, a accru considérablement sa machinerie, est allée faire des excavations pour la construction de résidences, a obtenu des contrats du ministère des Transports, a fait des contrats de drainage pour l'office du drainage du ministère de l'Agriculture, s'est lancée dans l'entretien des chemins d'hiver et a développé un chiffre d'affaires très marqué, en partant, qui n'était pas un chiffre d'affaires destiné aux sociétaires, mais c'est une coopérative, je ne dis pas que c'est mauvais en soi. La coopérative s'est développée, a pris de l'expansion, est allée dans des champs d'activité qui n'étaient pas le propre des sociétaires. Cela répondait à des besoins du milieu. Ce n'était peut-être par pur. Elle a peut-être une partie impure et une partie pure, mais, peu importe, cela rend des services quand même, pour vous prouver que l'impureté peut avoir ses bons côtés.

Une Voix: Bravo!

M. Goulet: Y en a-t-il qui sont en désaccord avec cela?

Le Président (M. Boucher): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Rapidement. M. le ministre, M. Rioux, vous dites que la Direction des associations coopératives a pour mission de voir au développement des coopératives. Est-ce qu'on doit comprendre que c'est de veiller au développement ou à la formation ou de susciter le développement ou la formation? Quelle vocation y voyez-vous, les deux ou s'il y en a une qui est privilégiée?

M. Joron: Je vois les deux. La Direction des associations coopératives administre trois lois coopératives. A présent, dans l'administration de ces lois, elle exige qu'elles soient respectées et il y a tout un ensemble d'exigences à partir de ce moment-là qui permettent de faire une analyse continuelle et de voir si les coopératives respectent la loi et, également, pour la protection de leurs membres. Mais il y a aussi tout le volet du développement des coopératives. Alors, cette direction s'occupe du développement et je crois qu'on peut dire d'une façon concrète par l'apport de services techniques qu'elle fournit aux coopératives. Les services techniques qu'elle donne, c'est de nature assez générale, mais je soulignerai en passant que, depuis environ trois ans, c'est surtout dans le domaine de l'aide aux coopératives naissantes pour faire en sorte qu'une coopérative, au moment où elle est formée, par l'aide qu'on va lui apporter, puisse réussir et faire un succès économique dès sa première année. Lorsqu'on réussit cela, on a plus de chances que la coopérative, par la suite, puisse se développer normalement. Pour l'aider de cette manière-là, on a constaté, surtout dans certaines catégories de coopératives, qu'il fallait l'aider sur le plan technique, notamment par l'implantation d'un système de comptabilité, suivre également la coopérative et la superviser durant sa première année et voir à ce qu'en fin d'année il y ait une bonne analyse faite par une bonne firme de vérification qui voie à faire la vérification de cette coopérative. Ce sont des travaux que l'on fait régulièrement. C'est un suivi qu'on apporte à chaque coopérative qui se forme.

M. Goulet: J'aimerais savoir si mon jugement est objectif, si je dis que j'ai l'impression que, dans certains secteurs, on semble vouloir maintenir à tout prix — ce n'est pas une affirmation, c'est une

impression — les coopératives. Il y a eu des succès dans le domaine des coopératives de crédit, dans le domaine des coopératives agricoles, entre autres, dans nos régions, bien qu'elles aient dû aller dans d'autres secteurs qui ne touchaient pas le membre usager, tels les chemins d'hiver, comme le disait mon collègue de Montmagny-L'Islet. Les usagers, dans ce temps-là, est-ce que ce sont seulement les membres? Je ne le crois pas vu qu'il s'agit de contrats de construction de routes. Je pense, en particulier, aux coopératives d'habitation. Est-ce parce qu'on n'a pas trouvé la bonne formule? Est-ce parce que les lois actuelles ne favorisent pas la réussite de ces coopératives? Je pense surtout aux coopératives d'alimentation. On en a connu et on en connaît encore qui sont en sérieuse difficulté. Si elles étaient soumises aux mêmes normes que l'en-preprise privée, elles ne pourraient pas survivre ou elles auraient énormément de difficultés à survivre.

Je vous donne un exemple: au niveau des coopératives d'alimentation, comment se fait-il qu'on n'est pas capable d'intéresser la population et qu'on est toujours sur le bord de fermer ses portes, en tout cas, dans certains cas? On est obligé de leur permettre, par exemple, la vente de bière et de cidre qu'on ne permet pas aux supermarchés. C'est pour cette raison que je vous dis qu'elles ne sont pas soumises aux mêmes normes. Je pense à des coopératives agricoles où on va transporter de la moulée ou des instruments aratoires, où on va permettre de mettre un N sur un camion à dix roues ou sur un camion-remorque. Par contre, l'entreprise privée est obligée d'avoir un F qui coûte environ $1000 de plus. Je pense aux plans conjoints de tout à l'heure.

Je pose la question: Est-ce votre impression ou si mon impression est correcte de dire que, dans certains secteurs, la coopérative ou le système coopératif est... Je n'aime pas dire le mot "malade" parce qu'elle subit peut-être les contrecoups du fait que les lois ne sont pas adéquates. Mais cela dépend de quoi, en tout cas, dans le domaine de l'habitation et de l'alimentation, entre autres? Comment se fait-il qu'on réussisse dans le domaine de l'épargne et du crédit et que, dans les autres, on ait énormément de difficultés? (23 h 30)

Est-ce que le sommet de la coopération vous a permis de trouver cette solution, est-ce que, cette année, il y aura une loi qui fera en sorte que la vie sera plus rose pour ces gens? Je dis qu'il y en a qu'on semble vouloir maintenir à tout prix et, si elles étaient soumises aux mêmes normes que l'entreprise privée ou les compagnies — comme vous dites: le système capitaliste — elles auraient énormément de difficulté à survivre. Comment cela se fait-il?

M. Joron: Je vous l'ai dit: On se complète bien; j'aurais beaucoup de choses à dire!

M. Goulet: Je dis bien que c'est une impression, je ne le souhaite pas; je voudrais bien être compris, mais on le vit actuellement, en tout cas dans deux domaines.

M. Joron: Pour parler d'habitation, c'est le premier secteur que vous avez mentionné, il y a eu évidemment un arrêt du développement du secteur de l'habitation à partir des années 1971 jusqu'à il y a quatre ou cinq ans. Je ne voudrais pas commencer à faire l'analyse de cette situation; en somme, cela a été la coopérative d'habitation qui a réussi tant et aussi longtemps que cela a été pour la construction de maisons unifamiliales, mais c'étaient des coopératives qui, une fois qu'elles avaient atteint leurs objectifs, fermaient leurs portes, parce que, s'il y avait 50 terrains à construire, lorsque le cinquantième était construit, on faisait la dissolution de la coopérative. Cela a permis de construire 9000 maisons au Québec et cela a réellement donné de bons services. Cette formule a été abandonnée, je ne sais pourquoi ça ne reprend pas; il faut croire qu'il y a peut-être moins d'intérêt; on dit que l'on fait très peu de maisons unifamiliales aujourd'hui.

Il y a aussi eu l'habitation locative. La première expérience d'habitation locative a été un désastre, cela a traumatisé pas mal de gens et cela a fait fermer le dossier des coopératives d'habitation. Mais je pense qu'à l'heure actuelle, il faut regarder dans le secteur que j'appellerai l'habitation sociale, il y a quand même une relance très intéressante avec le programme de Logipop, qui est administré par la Société d'habitation du Québec.

Il y a eu un démarrage qui a été assez lent, mais, à l'heure actuelle, il est définitivement lancé; cette année, il s'est formé 77 coopératives d'habitation. Ces coopératives d'habitation sont très dynamiques et je pense que ça correspond également à un besoin de la société. Cela a un immense avantage, même si c'est dans un secteur, dans le volet de l'habitation sociale, celui de transférer aux occupants des coopératives d'habitation la responsabilité d'administrer leur logis, d'aimer ce logis, de mieux l'administrer, de se donner l'assurance que ça ne passera jamais à la spéculation et qu'ils n'ont pas besoin de la Régie des loyers pour se défendre parce que ça leur appartient. Ils exercent un contrôle sur l'augmentation des loyers.

A partir de ce moment, je considère que c'est un succès, c'est même un très grand succès dans ce domaine.

Pour ce qui est de déboucher dans d'autres formes de coopératives d'habitation, on verra; ça prenait des mécanismes, je pense, pour contribuer à faire ce développement. On verra, dans les prochaines années, comment ça va pouvoir déboucher. J'ai confiance que l'action de la Société de développement coopératif qui, à l'heure actuelle, tente de promouvoir le développement des coopératives d'habitation, connaîtra un succès, mais c'est l'avenir qui nous répondra.

Mais je me répète, je trouve que c'est un succès dans le domaine de l'habitation au point de vue de l'habitation sociale.

Pour ce qui est de la consommation, la consommation n'est pas un secteur important si on le considère par rapport à l'ensemble de l'économie de la distribution alimentaire parce qu'il représente 4%, mais là, c'est une bonne nouvelle, il y a eu quand même, pour l'année 1979-80, selon les statistiques arrêtées au 31 mars, une augmentation de 1% de la part du marché, c'est passé à 5%. Ce qui veut dire que prendre une part du marché de 1%, c'est déjà important. A partir de ce moment, je crois que le problème qu'il y avait dans ce secteur, c'était de pénétrer dans les grandes villes; on a connu un développement qui a tout de même été assez important dans le secteur de la consommation, alors qu'on était à l'époque d'un Québec rural. La dépopulation... Pour venir à faire de l'urbanisation et les coopératives étant en milieu rural, elles n'étaient pas en milieu urbain, il a fallu pénétrer les marchés urbains. Il y a eu plusieurs formules pour pénétrer les marchés urbains, mais sans succès; mais il y a la formule dite des Cooprix, à l'heure actuelle, et des magasins à grande surface; ça semble connaître un succès assez intéressant.

Je pense donc que c'est quand même un secteur qui est lancé, mais là où je ne partage pas votre opinion, c'est que, lorsque vous parlez des normes et critères dont ces coopératives pourraient bénéficier par rapport aux autres entreprises, je n'en vois pas, je vais même aller plus loin. On vit dans une société capitaliste. Toutes nos lois et nos réglementations ont été pensées, ont été faites, ont été conçues pour cette économie ambiante, dominante qu'est l'entreprise capitaliste. Je ne dis cela dans aucun sens péjoratif, mais pour qu'une coopérative vive à travers cela, cela devient énormément difficile. Il commence à y avoir des améliorations qui se font et je pense que cela va continuer. Cela va faciliter le développement des coopératives.

Vous avez mentionné, par exemple, les permis pour vendre de la bière et du cidre dans les coopératives, ce n'est pas un privilège. Pour l'ensemble des épiciers du Québec, que ce soit Métro, Richelieu, en somme, je parle de nos chaînes de volontaires, elles ont des permis de bière comme les coopératives.

Les entreprises qui n'ont pas de permis pour vendre de la bière et du cidre, c'est-à-dire la bière, pas le cidre, ce sont les chaînes de magasins intégrées uniquement. Quand je parle d'intégrées, ce sont nos grandes chaînes qu'on connaît très bien et que je ne voudrais pas identifier ici. Cependant, par rapport à ces chaînes, ils ont le permis de vendre du cidre, ils n'ont pas le permis de vendre de la bière. C'est que, par rapport aux coopératives, on pourrait les comparer avec les autres entreprises de distribution, elles n'ont aucun privilège.

Par rapport au camionnage, vous soulignez un problème que je ne connais pas. C'est possible, ce que vous me dites, mais j'aimerais vérifier dans l'avenir. Je note bien et je me pose des questions, à savoir si ce n'est pas plutôt une tolérance qui peut arriver, je ne le sais pas.

M. Giasson: Une coopérative qui possède une ferme, qui a une carte de producteur agricole, a le droit d'utiliser l'enregistrement qu'utilise le producteur agricole. Je connais des propriétaires de meuneries qui ont des fermes, qui ont des N également sur leur véhicule. Ce n'est pas particulier aux coopératives agricoles.

M. Joron: Alors, il n'y a pas de privilège donné aux coopératives.

M. Goulet: Si je résume, cela veut dire que, quand je vous demandais si les lois étaient mal faites pour aider le développement coopératif, c'est cela que vous avez dit: Les lois ont toutes été conçues pour le système — vous, vous appelez cela le système capitaliste — de la libre entreprise. Il faut faire attention. Il y a certains mots comme "socialiste", "capitaliste", que souvent on est mieux de ne pas employer. Je comprends.

Vous êtes conscient que les lois n'étaient pas faites pour favoriser... Si on a eu certaines difficultés, c'est parce que les lois n'étaient d'abord et avant tout pas faites en fonction de cela. C'est ce que vous nous avez dit.

M. Joron: Oui, c'est ce que j'ai dit. M. le ministre disait tout à l'heure qu'il y a des dispositions qui sont prises. Ces dispositions sont déjà enclenchées et fonctionnent très bien. Chaque fois qu'il y a des modifications à une réglementation ou à des lois, avant que ce soit adopté, cela arrive à notre ministère et c'est vérifié. Il faut, avant que le décret soit passé, qu'on ait eu l'approbation du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Une coopérative, normalement, naît d'un besoin. C'est la seule arme des démunis. Ensuite, si on veut que cela survive, il faut que la coopérative égale services. Quand c'est un groupe de pauvres diables ensemble, cela marche; quand la coopérative commence à faire des profits et qu'on se dispute à l'assemblée générale pour se partager les ristournes au lieu de les verser au fonds de réserve, on perd l'esprit. Je crois que cela prendrait une éducation plus intensive, plus permanente pour garder l'authenticité.

Il y a une chose que je voudrais vous demander. Tout à l'heure, vous parliez des entreprises communautaires. Est-ce que ces entreprises existent et si, oui, est-ce qu'elles ont la personnalité juridique?

M. Joron: J'ai parlé des entreprises communautaires, oui, elles existent et elles ont la personnalité juridique qui est une compagnie, qui a été aménagée pour correspondre à leurs besoins.

M. Mathieu: Mais le fonctionnement, c'est encore selon le mode d'une compagnie. On dit: On veut une coopérative, on met le véhicule qui

n'est pas tout à fait le bon, on tâche de s'acclimater comme le regroupement forestier. On veut une coopérative, mais on a le véhicule de la compagnie.

M. Joron: C'est parce qu'on n'a pas le cadre juridique approprié. C'est ce qu'on recherche.

M. Mathieu: Je pense qu'il faudrait l'inventer.

M. Joron: Bien oui, c'est ce qu'on espère trouver cette année, justement.

M. Goulet: Une dernière question. Le sommet sur la coopération va nous donner quoi de concret en 1980, M. le ministre?

M. Joron: M. Rioux était bien parti, j'aimerais avoir son point de vue pour voir ce qui est possible. Politiquement, tout est possible. Qu'est-ce que vous voulez, vous avez devant vous un gouvernement qui a, je ne sais pas combien de fois, non seulement répété son préjugé favorable au coopératisme, mais qui a posé des gestes en cette direction. Entre autres, ce n'est pas le moindre, on parlait de développement des coopératives, tout à l'heure, quand vous avez fait allusion au rôle du ministère. En fait, ce que vous demandiez, c'est si le ministère doit susciter la demande pour des coopératives ou simplement répondre à la demande. M. Rioux vous a dit comment on répondait aux demandes qui nous sont faites. Est-ce que c'est le rôle du ministère d'aller dans — c'est une question politique... Oui, nous, on souhaite susciter du développement coopératif, c'est la raison pour laquelle on met de l'argent dans la Société de développement coopératif qu'on a créée. Le député savait tout cela. Le programme Logipop en est un exemple.

C'est clair que ce sont les domaines où l'on voit qu'il y a des possibilités, après les succès qu'on a connus et qui sont historiques maintenant, dans le domaine financier, dans le domaine agro-alimentaire. On pense que, dans le domaine de l'habitation, il y a un avenir pour le développement de la formule coopérative, et dans le domaine de la consommation et des services aussi. C'est peut-être plus au début là, mais on voit naître des coopératives funéraires, par exemple, enfin dans différents domaines, dans différents autres services.

Ce que le ministère a l'intention de faire, en plus des sommes qui ont déjà été engagées dans la Société de développement coopératif et ce que cette société pourra faire, on ne pourra jamais se substituer aux coopérateurs. Tout ce qu'on peut faire, c'est de procurer un cadre juridique qui permette aux coopératives de croire qu'elles peuvent se développer.

On a signalé tout à l'heure, en discutant avec le député de Beauce-Sud, l'absence d'un cadre pour certains types de coopératives qui sont à mi-chemin entre une compagnie et la nécessité peut-être d'avoir un statut de précoopérative. Le même problème, on l'a retrouvé dans les coopératives de production, par exemple. On n'a pas tout à fait le cadre approprié, on le cherche. Il y a ces outils légaux qu'on cherche à mettre au point au cours de cette année.

En plus d'actions qui ont été entreprises, j'en ai signalé une toute à l'heure qui est au niveau de l'accueil dans les différents ministères. Cela a l'air de rien, mais les problèmes comme ceux qu'a évoqués le député de Beauce-Sud, on espère qu'à l'avenir ils ne se représenteront plus, parce que personne ne se fera répondre par un fonctionnaire dans un ministère, par exemple, qu'une coopérative n'a pas la responsabilité limitée comme une corporation. Avec l'entraînement de ceux qui auront à répondre au public, ces choses ne se produiront plus.

Enfin, ce sont les grandes lignes, mais j'inviterais peut-être le député, je vois que la chose l'intéresse particulièrement, peut-être, s'il veut prendre le temps d'aller... on a publié tout récemment le compte rendu du sommet sur la coopération. Vous allez y retrouver beaucoup plus de détails qu'on a le temps d'en évoquer ici, avec tous les engagements qui ont été pris par les différentes parties, non seulement par les différentes parties, mais par les coopérateurs eux-mêmes. Là, j'ai sans doute oublié des choses. Je ne sais pas si M. Rioux voudrait ajouter quelque chose. (23 h 45)

J'ajouterais peut-être une chose qu'a soulevée tout à l'heure M. le député de Beauce-Sud concernant le fait qu'il y avait des coopératives qui n'étaient pas suffisamment coopératives, où l'intérêt coopératif s'en allait, ce qui pourrait être at-tribuable à un manque d'éducation. A partir de ce moment-là, je pense que vous avez touché quelque chose de très juste. Le sommet a porté sur l'éducation coopérative, sur l'éducation économique, sur l'administration de l'entreprise coopérative, et on a cherché ensemble des formules pour tenter d'intéresser le ministère de l'Éducation et également notre ministère afin que le citoyen puisse être éduqué à la formule, éduqué à l'administration des entreprises, éduqué à l'économie d'une façon générale.

A partir de ce moment-là, sur ce plan, le ministère de l'Éducation a déjà commencé à préparer des programmes. C'est entendu que c'est une grosse machine, c'est lent, mais tranquillement on va introduire des cours dans les parties économiques, des notions de la coopération pour assurer une meilleure compréhension du phénomène coopératif québécois. A présent, au niveau de notre ministère, un engagement a été pris pour donner des cours de coopération aux fonctionnaires. Quand on parle de cours de coopération aux fonctionnaires, il ne s'agit pas de demander aux fonctionnaires d'être membres d'une coopérative pour devenir administrateur de caisse populaire ou de coopérative en général, mais par rapport aux programmes qu'ils administrent dans leurs fonctions respectives partout où ils ont affaires à une clientèle — dans l'administration de programmes de relance économique, les programmes de OSE et un peu toutes sortes de choses comme

cela — il arrive que les fonctionnaires n'étant pas suffisamment informés d'une formule qui existe et qui pourrait, à partir de ce moment, être utilisée par les citoyens, et même face au citoyen qui arrive aussi et qui veut s'incorporer en coopérative, le manque de connaissances du fonctionnaire par rapport à cette organisation juridique différente, il y a réellement une carence à combler. Actuellement, c'est déjà commencé; on est à mettre au point un cours pour les fonctionnaires qui se donnera dans le cours de l'automne et cela va se faire en collaboration avec l'ENAP.

A la direction des coopératives, on est à mettre au point, toujours dans le domaine de l'éducation coopérative, l'éducation coopérative qui va concerner le coopérateur en général au moment de la formation de son entreprise et on va aussi arriver à des choses énormément pratiques: le cours d'administration à l'administrateur d'une coopérative, comment s'administre une entreprise. En somme, il n'y a peut-être pas tellement de différence avec un autre type d'entreprise, mais il y a quand même aussi le fait d'administrer une entreprise qui a un caractère coopératif. Quand je parle de choses très pratiques, par exemple, c'est comment pouvoir établir un système de comptabilité comme aux petites gestions, ce qu'ils doivent exiger de leurs fonctionnaires, de leurs technocrates au point de vue de l'administration, comment analyser un bilan et des choses comme cela.

Il y a un autre volet, celui de cours qui seront donnés pour le personnel des coopératives, élément qui a peut-être été négligé jusqu'à présent, le technocrate des coopératives. Il y a aussi l'adaptation à la spécificité des diverses entreprises coopératives. Parfois, on parle de coopération, mais on en parle d'une façon générale. Une coopérative d'habitation a un caractère propre au point de vue de son administration. Pour une coopérative de consommation, c'est la même chose. Pour une coopérative agricole, c'est la même chose. Pour une coopérative de travailleurs, parce qu'on s'en va de plus en plus vers les coopératives de travailleurs, aussi. A partir de ce moment, on a un programme, au point de vue de l'éducation, qui est très détaillé et qui, à cause du sommet, a permis, je pense, de réaliser ça, et cela me paraît quelque chose qui augure bien pour l'avenir.

M. Giasson: A la suite du sommet, est-ce que vous avez senti que l'intercoopération serait quelque chose qui se développerait vraiment? Est-ce qu'on peut croire que des coopératives qui ont connu de forts développements dans des secteurs donnés sont prêtes à se mouiller vraiment pour apporter de l'aide, non pas uniquement au plan de l'éducation mais de l'aide tangible à d'autres groupes qui voudraient développer des coopératives dans des champs d'activités différents de ceux de ces grandes entreprises qui ont beaucoup de chemin de fait?

M. Joron: Nous n'avons pas encore d'indice sur des cas concrets de réalisation d'intercoopé-ration vécue. Cependant, les dirigeants des grands mouvements que vous venez de mentionner se sont engagés d'une façon très ferme lors du sommet dans le sens qu'ils allaient contribuer à aider le démarrage de petites coopératives, de nouvelles coopératives et ceci également dans de nouveaux secteurs d'activité économique. Je crois que la SDC, la Direction des coopératives, et ces grands mouvements, en somme tous ces intervenants-là, parce qu'on travaille étroitement ensemble, ne pourront pas faire autrement que d'arriver à des réalisations d'intercoopération, à un moment donné, dans des secteurs donnés. C'est une opinion.

M. Giasson: II se produit souvent que la coopérative est le moyen de relèvement de certains citoyens qui sont assez démunis, qui sont des gagne-petit. Ils n'ont pas la capacité de souscrire des parts sociales ou du capital de base qui est nécessaire à une coopérative à volume très élevé. On dit: On veut faciliter le développement du mouvement coopératif en ayant une part sociale qui est minime au départ. Mais, assez souvent, vous avez de ces entreprises coopératives qui n'ont pas pu atteindre un état de développement justement parce que la mise de fonds initiale n'était pas suffisante pour aller dans le développement des projets que ces gens-là avaient à l'esprit, tandis que s'il y avait eu une ouverture plus grande de la part d'autres entreprises coopératives qui seraient venues les soutenir par des prêts qui auraient pu représenter un élément risque certain, au moins on aurait pu dire qu'il y avait de l'intercoopération, non seulement au niveau de l'intention et de la parole, mais dans des faits concrets.

M. Joron: C'est exact, ce que vous dites. Cependant, la réponse que j'apporterai, M. le ministre l'avait apportée tout à l'heure. Je pense que c'est tout simplement pour corroborer ce qu'il a dit. L'implication des secteurs coopératifs dans l'intercoopération, j'ai l'impression qu'elle va se faire davantage mais, pour pallier justement un problème comme celui que vous venez de mentionner; la Société de développement coopératif a été créée pour cela; elle a commencé à agir dans ce sens-là. A l'heure actuelle, on ne peut pas dire que si une nouvelle coopérative connaît des problèmes, ce n'est pas dû au fait qu'elle va manquer de capital de risque parce que la SDC étudie chaque cas, et lorsque le coopérateur n'est pas capable d'apporter le capital nécessaire à la stabilisation économique de cette entreprise, c'est elle qui fournit l'argent pour faire le démarrage et la soutenir dans son développement.

M. Giasson: Effectivement, quelle est la somme totale engagée par la Société de développement coopératif derrière les projets d'aide ou de développement de coopératives nouvelles?

M. Joron: Cela commence, en fait, mais l'engagement du gouvernement, si ma mémoire est fidèle, est de $35 000 000 sur les cinq prochaines années. Est-ce bien cela?

M. Giasson: Oui, cela va, mais normalement, c'est quoi, l'engagement?

M. Joron: L'actif actuel de la SDC? On me dit qu'il y a à peu près $4 000 000 à $5 000 000 d'engagés dans les projets à l'heure actuelle.

Je peux répondre. Je me pose la question parce que, évidemment, je suis administrateur à la SDC. Actuellement, la SDC, pour l'année qui vient de s'écouler, a versé $2 700 000 pour du capital de risque dans les entreprises. Cependant, elle a à l'heure actuelle des engagements de $5 000 000 également pour des entreprises qui sont en voie de démarrage ou en voie de développement par rapport à des programmes.

M. Giasson: Quand vous parlez de $5 000 000 engagés, c'est sous quelle forme, cet engagement?

M. Joron: C'est un engagement parce que l'étude a été faite, une analyse a été faite et l'argent est prêt. On attend pour verser l'argent le moment où la mise en marche de l'entreprise aura été terminée parce que cela se fait progressivement et selon certaines conditions.

M. Giasson: Est-ce que ce serait un engagement sous forme de prêt ou sous forme de parts sociales?

M. Joron: La SDC, après étude, a pris comme méthode d'investissement la forme du prêt subordonné, mais c'est un prêt subordonné qui est exactement de même nature que le capital et ça, pour plusieurs raisons, mais c'est en fait du vrai capital de risque. Au lieu d'acheter des parts sociales ou d'acheter des parts privilégiées, elle établit la somme d'argent qu'elle va investir dans l'entreprise et le titre, qui est émis à partir de ce moment-là est sur base contractuelle. C'est un prêt subordonné et ce prêt subordonné rend exactement au même niveau que le capital social. En cas de faillite, cela voudrait dire que cela va aller après que tout le monde aura été payé au prorata. Je dirais que les taux d'intérêt également sont bonifiés. Les taux d'intérêt sont entre 8% et 11%. Plus la coopérative est en difficulté, plus le taux est bas.

M. Giasson: Dans le cahier que nous a remis le ministre et pour lequel on le remercie, on retrouve dans un des tableaux Service des associations coopératives, liste des dépenses de transfert, SDC projets spéciaux, $240 000 pour l'année financière 1978-1979. Qu'est-ce que vous entendez par projets spéciaux?

M. Joron: C'est la SDC qui a présenté au cours de 1979 une demande pour ne pas entamer... parce qu'elle n'avait pas suffisamment de capital. En somme, elle a pour son administration un capital qui est de l'ordre de $100 000 000. Il y a ensuite le capital qui sert pour les prêts. A partir de ce moment-là, elle avait des études à faire dans plusieurs domaines et elle a présenté une demande ce $240 000 pour entreprendre l'ensemble de ces études.

M. Giasson: Ce sont des sommes...

M. Joron: C'est pourquoi c'est disparu l'année suivante.

C'est cela.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Rapidement, M. le Président, il est 23 h 55. Au niveau sociologique, le gouvernement peut favoriser, en tout cas, des préjugés favorables, comme le ministre l'a dit, au développement coopératif. Est-ce qu'on a des chiffres comparatifs? Quand la SDC aura investi $35 000 000 comparativement à la SDI ou au MIC, dans le secteur privé ou dans l'autre système, on pourrait avoir investi $35 000 000; c'est un exemple... Il y en a un pour qui la notion de rentabilité est extrêmement importante, mais dans les coopératives aussi, quoiqu'on ait la notion de service aux membres.

A l'heure où on se parle, est-ce qu'on va avoir des chiffres prochainement par lesquels on pourrait comparer les bienfaits des sommes consenties par le gouvernement, que ce soit, par exemple, la SDI d'une part, ou la SDC de l'autre, à deux secteurs différents, au niveau des emplois créés, au niveau de la rentabilité de l'entreprise ou au niveau du service rendu à la société? Est-ce possible de comptabiliser cela et de comparer cela par la suite en disant: Voici, on a bien fait d'aller dans ce sens-là ou d'avoir un préjugé favorable au développement coopératif, plutôt que d'avoir pris ces $35 000 000 et de les avoir donnés? Est-ce qu'on a déjà, à l'heure actuelle, des chiffres ou si c'est...

M. Joron: Probablement pas en ce qui concerne la SDC puisqu'elle n'existe que depuis un an et demi ou environ, même pas tout à fait deux ans, je pense. La question est plus vaste. On en aura évidemment dans quelques années, mais j'imagine que chaque rapport annuel de la SDC contiendra ces informations. Plus généralement, qu'est-ce qu'on a comme point de critère, de comparaison? C'est l'expérience de ce qu'a donné la formule coopérative dans certains secteurs de l'économie du Québec.

Dans le domaine financier, évidemment, c'est là où c'est le plus important; on le voit très bien dans le domaine agro-alimentaire, dans le domaine agricole, on le voit aussi. De plus, on pourrait dire que tout n'est pas comptabilisable non plus, dans un sens, à cet égard. Par exemple, dans le domaine financier, si les caisses d'épargne et de crédit n'existaient pas au Québec, est-ce que les Québécois — je ne sais pas la réponse — contrôleraient aujourd'hui leur épargne et, partant de là, l'orientation de l'économie du Québec, dans la mesure où ils sont capables de le faire maintenant? Peut-être pas. Cela n'apparaîtra vraiment dans aucun livre de comptabilité, mais cela a

effectivement donné au milieu... Je pense que surtout les députés qui sont devant moi et qui ne viennent pas des grands centres urbains sont bien placés pour voir quel a pu être l'effet, au point de vue du développement régional, de pouvoir garder et contrôler l'épargne locale et de ne pas la voir partir pour les grands sièges sociaux des centres urbains.

Une bonne partie de l'épargne de la Beauce, par exemple, et c'est certainement vrai pour la région immédiatement à côté, est restée en Beau-ce peut-être justement grâce à l'existence de ces coopératives d'épargne et de crédit. On ne pourra jamais mesurer tout ça. Des mesures, des points de comparaison, il y en a qu'on peut aller chercher dans d'autres domaines à l'extérieur, dans d'autres pays ou dans d'autres provinces canadiennes, dans certains coins des États-Unis, en Europe, en Suède, notamment, en Angleterre.

Mais pour répondre spécifiquement à la question sur la SDC, c'est clair qu'il va falloir attendre quelques années avant de pouvoir en mesurer l'impact économique en termes de statistiques.

M. Giasson: J'ai vu se développer le mouvement coopératif dans un milieu comme le mien. Il y a une constante que j'ai remarquée presque toujours; c'est que les premiers sociétaires des coopératives qui se sont développées, au moment où j'étais jeune, c'étaient presque toujours des agriculteurs. Pourquoi ce phénomène? Même pour la caisse populaire chez nous, les premiers sociétaires ont été un groupe d'agriculteurs. (24 heures)

M. Joron: Oui, c'est parce que vous venez d'une région agricole, est-ce que vous l'avez constaté?

M. Giasson: II n'y avait pas seulement des agriculteurs dans la paroisse chez nous, il y avait de l'industrie et un peu d'autres professions.

M. Joron: On se lancerait peut-être dans l'analyse sociologique, je ne sais pas si on a le temps ou si on aurait jamais la réponse à de telles questions.

M. Giasson: La coopérative de consommation, le magasin coopératif, ce sont encore des agriculteurs qui l'ont lancé, ils n'étaient pas les seuls consommateurs du milieu.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous adoptez le programme 2, éléments 1, 2 et 3? Adopté.

M. Joron: M. le Président, si vous me permettez, juste avant qu'on se quitte, comme il y a certains fonctionnaires qui ne seront plus avec nous quand on continuera nos travaux demain, vous me permettrez sans doute au nom des membres de la commission de les remercier de leur participation à nos travaux.

M. Giasson: Mes remerciements.

Le Président (M. Boucher): La commission ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 0 h 2

Document(s) associé(s) à la séance