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Version finale

38e législature, 1re session
(8 mai 2007 au 5 novembre 2008)

Le mardi 18 septembre 2007 - Vol. 40 N° 7

Consultation générale sur le document intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2008-2010


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures quarante-six minutes)

Le Président (M. Simard): Nous allons commencer nos travaux. Je constate qu'il y a le quorum et je déclare la séance de la Commission de la culture ouverte.

Je veux simplement demander à mes collègues de faire ce que parfois nous oublions, d'éteindre leurs cellulaires ou les mettre en mode de vibration, s'il vous plaît, parce que j'ai horreur, comme vous tous sans doute, que l'on interrompe surtout des invités avec la sonnerie d'un cellulaire. Merci beaucoup.

Alors, je rappelle, en ce début de commission, et je le rappellerai tout au long notre mandat, notre mandat, l'objet de cette séance est donc de procéder à une consultation générale sur le document intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2008-2010.

Mme la secrétaire, il y a des remplacements importants, alors voulez-vous nous les donner, s'il vous plaît?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bergman (D'Arcy-McGee) remplace M. Ouimet (Marquette); Mme Morissette (Charlesbourg) remplace M. Bonnardel (Shefford); et M. Lemay (Sainte-Marie?Saint-Jacques) remplace M. Curzi (Borduas).

Le Président (M. Simard): Nous sommes heureux d'avoir M. Lemay avec nous.

Tout de suite, je vous fais part de l'ordre du jour pour la matinée d'abord et ensuite pour l'après-midi. Il y a eu évidemment des changements, mais je pense qu'on devrait respecter ce qu'il y a ici présentement. Nous allons commencer dans quelques secondes par les remarques préliminaires d'abord du gouvernement, de l'opposition officielle et de la deuxième opposition, dans l'ordre. Le temps de ces remarques préliminaires est fixé à 15 minutes, 15 minutes, par entente. Alors, après les remarques préliminaires, le premier groupe, à 10 h 15, évidemment qui sera un petit peu en retard, plutôt vers 10 h 30, MM. Pierre Fortin, Marc Van Audenrode et Pierre Emmanuel Paradis; ensuite, à 11 h 15, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Nous ferons une suspension évidemment à 12 h 15, qui pourrait aller à 12 h 30 pour rattraper notre cinq minutes, vous vous en doutez bien, et ensuite nous aurons ABL Accès Accueil Basses-Laurentides; municipalité de Rawdon, à 15 heures; Québec Multi-Plus, à 16 heures; Service d'appui régional en immigration, 17 heures. Pour ajourner, là, de façon impérative à 18 heures. Voilà.

Je voudrais, avant que l'on débute, indiquer nos modes de fonctionnement. Vous avez vu, ce sont des périodes d'une heure qui se répartiront de la façon suivante: évidemment, 15 minutes seront données à chacun des groupes ? et je serai très rigoureux là-dessus ? pour présenter non pas une lecture complète parfois du mémoire, mais l'esprit, l'essentiel, pour ensuite amorcer une dialogue avec les trois partis, en commençant évidemment par le parti ministériel et normalement, en général, la ministre, qui voudra sans doute poser les premières questions. La répartition du temps, objectivement, là, devrait se faire comme ceci ? j'y mettrai un bémol après: 17 minutes pour le Parti libéral du Québec, 14 minutes pour l'ADQ et 13 minutes pour le Parti québécois, donc l'opposition officielle, 14 minutes, et la deuxième opposition, 13 minutes. Vous comprenez bien que c'est calqué le plus précisément possible sur les pourcentages de votes obtenus.

n (9 h 50) n

Cependant ? et M. le vice-président, que je salue, est avec nous ? nous le savons, il y a... ce que je favorise aussi, c'est le débat, et nous nous assurons de respecter les groupes qui viennent et qu'il y ait vraiment débat. Si parfois des questions doivent être sacrifiées, quelques minutes doivent être sacrifiées, je l'indique et je m'assure que l'équité soit maintenue jusqu'à la fin. Si vous avez la moindre remarque à faire ou plainte à diriger contre moi, faites-le sans hésiter, je vous assure que je serai ouvert à vos commentaires.

Remarques préliminaires

Alors, sans plus tarder, j'invite la ministre de l'Immigration ? et je ne voudrais pas modifier votre titre, madame ? et des Communautés culturelles à bien vouloir faire ses remarques préliminaires.

Mme Yolande James

Mme James: Merci, M. le Président. M. le Président, nous entamons aujourd'hui une consultation publique qui fait partie de nos habitudes démocratiques. Comme à tous les trois ans, nous nous présentons devant cette commission pour discuter de la planification de l'immigration permanente qui sera accueillie au Québec au cours des trois prochaines années. Par les consultations déjà tenues et nos travaux, nous tenterons de renouveler le consensus sur les objectifs de la politique d'immigration du Québec. Les recommandations que nous ferons sont de première importance puisqu'elles influenceront l'évolution du Québec et la vie de dizaines de milliers de personnes qui nourrissent le voeu de partager leur avenir avec les Québécois.

La démarche n'est pas nouvelle, mais le contexte, cette année, est particulier. Alors que s'ouvrent nos travaux, une autre commission, la commission sur les accommodements raisonnables, a entrepris une tournée du Québec. Je crois qu'il est important de distinguer les objectifs. Ce qui intéresse la commission Bouchard-Taylor, c'est la cohabitation entre les communautés qui composent le Québec d'aujourd'hui, c'est le mieux vivre- ensemble.

Ici, nous allons davantage porter notre regard sur ceux qui vont continuer d'arriver au cours des prochains mois, sur ceux qui vont venir bâtir le Québec avec nous au cours de la période 2008-2010. Car il est une réalité que l'on ne peut ignorer: ici, l'immigration remonte à nos origines et elle n'a jamais cessé, elle fait partie de notre histoire autant que notre avenir. Tout en disant cela, nous reconnaissons qu'il y a un malaise qui s'exprime au Québec à travers la question des accommodements raisonnables. Pendant que la commission Bouchard-Taylor cherchera les chemins de l'harmonie, nous, nous allons chercher les voies de l'équilibre: l'équilibre entre nos besoins de main-d'oeuvre et le profil des immigrants que nous sélectionnerons; l'équilibre entre nos aspirations comme société et les aspirations de ceux qui veulent choisir le Québec; l'équilibre entre notre capacité d'accueil et notre volonté d'accueil. En somme, ces deux commissions se révèlent complémentaires: d'une part, la recherche de l'harmonie, de l'autre, la recherche de l'équilibre. Ensemble, elles mèneront à un consensus renouvelé sur les valeurs contemporaines du Québec auxquelles devront adhérer les nouveaux arrivants pour que nous puissions tous ensemble redécouvrir la richesse de la diversité.

Comme ministre mais surtout comme citoyenne qui côtoie chaque jour des personnes issues de l'immigration, j'observe qu'elles viennent d'ailleurs pour marier leurs espoirs à ceux des Québécois. L'immigration enrichit notre nation. Elle ajoute à la richesse humaine des sociétés en mêlant les souvenirs et en fondant les aspirations. Elle ajoute à notre potentiel économique. C'est une main-d'oeuvre qui arrive alors que nous en avons besoin. À partir de 2011, la croissance de notre population active, du nombre de travailleurs, sera attribuable à 100 % à l'immigration. L'immigration ajoute aussi à notre capacité de faire notre place dans une économie mondialisée. Si nous voulons faire... vendre au monde entier, nous avons tout avantage à avoir des Québécois capables de parler avec le monde. Les nouveaux arrivants viennent de partout et enrichissent notre culture. Depuis 10 ans, 30 % des immigrants sont venus d'Asie et du Moyen-Orient, 25 % d'Europe, 25 % d'Afrique et 20 % des Amériques.

L'immigration vient aussi renforcer notre identité comme nation, puisque 60 % des nouveaux arrivants connaissent le français avant même d'arriver au Québec, et leurs enfants iront à l'école française. L'immigration est diversifiée et de plus en plus scolarisée. Près de 70 % des nouveaux arrivants ont complété des études postsecondaires avant leur arrivée. Puis, l'immigration ajoute au nombre des Québécois qui paient des impôts servant à financer nos soins de santé et nos écoles, elle ajoute au nombre de clients qui font vivre nos commerces. L'immigration, c'est Lino Saputo, c'est Boucar Diouf, c'est Michaëlle Jean. L'immigration finalement, c'est plus de Québécois pour faire grandir le Québec. Elle est par ailleurs et sera toujours un défi chez nous comme dans toutes les sociétés d'accueil. Ce défi est toutefois particulier au Québec parce que nous, Québécois, sommes nous-mêmes une minorité à l'échelle continentale. Nous sommes 7,5 millions au sein d'une Amérique du Nord peuplée de près de 300 millions d'habitants. Cela faire dire à certains que notre identité est fragile. C'est faux. J'ai la ferme conviction que notre identité est plus solide que jamais. Nous avons maintenu notre langue et notre culture pendant quatre siècles sans jamais nous replier sur nous-mêmes. Pour moi, c'est la preuve que notre identité, elle est forte. C'est aussi la preuve que nous avons posé les bons gestes par le passé.

On rappelait récemment que les premiers enfants de la loi 101 ont 30 ans. Je suis née avec cette loi. Ces enfants sont de toutes les couleurs, de toutes les origines. Ils partagent avec l'ensemble des Québécois le premier instrument de notre identité: la langue française, qui est bien vivante. Depuis que je suis enfant, j'ai vu le français gagner en vitalité à Montréal. Ce que je vois, c'est que plus Montréal se diversifie, plus Montréal se francise. Ce que j'ai vu de l'immigration et de l'intégration des immigrants est pour moi une des plus grandes réussites québécoises.

Au cours des dernières années, le gouvernement a consacré des efforts importants pour favoriser la présence des immigrants dans toutes les régions. Depuis 2004, nous avons travaillé de concert avec des municipalités, des chambres de commerce, Emploi-Québec et des gens du milieu afin de faciliter la présence, la recherche d'emploi et l'intégration des nouveaux arrivants en région. À travers les projets que nous supportons financièrement, c'est le milieu qui s'organise et qui détermine ses besoins. Les régions sont aussi actives pour attirer les nouveaux arrivants déjà installés dans la métropole. Par exemple, à Montréal, des rencontres d'information sont destinées aux immigrants. On leur présente des régions du Québec et on leur dit quels sont les emplois disponibles. Plusieurs de nos régions voient leur population diminuer. Nos régions ont besoin de s'ouvrir à l'immigration, mais avant tout elles doivent la désirer.

Dans le contexte québécois, un volet fondamental de toute la question de l'immigration est la francisation des nouveaux arrivants. C'est une priorité constante. Notre gouvernement a apporté des changements à la manière de franciser les immigrants. Nous avons intensifié les formations: le même nombre d'heures sur une plus courte période. Les résultats sont meilleurs et cela favorise l'intégration. Nous avons aussi développé la francisation à l'étranger. Nous dirigeons des candidats à l'immigration vers des cours de français pendant le cheminement de leurs dossiers. Nous leur exprimons avec affirmation l'importance de la connaissance du français pour améliorer de façon marquée un dossier de candidature. La francisation sera toujours prioritaire.

Dans le contexte actuel, il est important que je vous mentionne que chaque candidat à l'immigration, et ce, tout au long de son cheminement, se fait dire très clairement que le Québec est une société d'expression française, laïque et où les femmes et les hommes sont égaux. D'ailleurs, lorsqu'ils font le choix du Québec, les immigrants font le choix d'adopter nos valeurs fondamentales. Lorsqu'on parle d'immigration, on touche donc à tous les défis du Québec d'aujourd'hui: c'est la démographie, c'est l'économie, c'est l'occupation du territoire, c'est l'identité. Nous pouvons agir sur tous ces aspects puisque le Québec sélectionne à partir de ses propres critères tous les candidats à l'immigration qui font le choix du Québec. Dans cette discussion, cinq scénarios seront à la réflexion. Ils vont d'une réduction de près de 15 % de l'immigration jusqu'à une augmentation de près de 30 %. Le spectre est très large. Tous les scénarios évoqués pendant la consultation méritent d'être débattus.

n (10 heures) n

Je remercie à l'avance mes collègues parlementaires pour leur contribution à une discussion qui sera, je le sais, sereine et respectueuse. C'est une discussion de première importance qui s'amorce. Elle doit s'inspirer d'un idéal, celui d'une société ouverte, qui sera toujours plus exigeant que la tentation du repli que certains tentent de cultiver. Elle doit aussi porter une ambition: celle de grandir à notre propre rythme et dans l'harmonie. La fin de la semaine dernière, le premier ministre du Québec nous a proposé un défi emballant, et je le cite: «Plutôt que de mettre l'accent sur nos différences, on va travailler ensemble pour bâtir le Québec et attirer du monde. Le Québec a besoin de bras, le Québec a besoin de cerveaux, le Québec a besoin de coeur pour atteindre son plein potentiel économique.» Fin de la citation. C'est ce même défi que je vous invite à relever pendant cette commission parlementaire. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup et bravo pour votre discipline, inspiration peut-être pour vos collègues de l'opposition. Alors, j'invite tout de suite Mme la députée de Charlesbourg, qui est porte-parole, pendant cette commission, de l'opposition officielle en matière d'immigration, à faire ses remarques préliminaires.

Mme Catherine Morissette

Mme Morissette: Merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord, je voudrais saluer tous mes collègues. C'est agréable de vous revoir après cet été qui a été quand même chargé, mais bien agréable de prendre quelques vacances. Je voudrais saluer également à l'avance tous les groupes qui vont venir présenter leur mémoire ainsi que tous ceux qui ont participé à un effort de rédaction, que ce soit par la consultation en ligne ou simplement par écrit, mais qui n'auront pas l'occasion de venir présenter leur mémoire ici pendant la commission parlementaire.

L'opposition officielle se réjouit du débat que nous tiendrons sur la planification de l'immigration pour la période 2008-2010. Par contre, malgré le fait que la ministre ait invité des gens à participer cette consultation en grand nombre, seulement 51 personnes ont répondu au formulaire en ligne et pas tout à fait 60 mémoires ont été déposés. Nous espérons que l'effet que la consultation ait été lancée en pleine période estivale, avec très peu de temps pour préparer et déposer des documents, n'est pas la raison expliquant le nombre modeste de participants. Plusieurs groupes se sont cependant manifestés en ce sens auprès de l'opposition officielle.

Nous nous attristons également du fait que de nombreux groupes ayant déposé un mémoire ne seront pas entendus ici même, en commission parlementaire. La réflexion que nous entamons nécessite une panoplie d'opinions, et nous aurions préféré discuter de l'enjeu avec chacun des intervenants. Le document de consultation émis par les ministères ainsi que les récentes déclarations du premier ministre laissent deviner que le gouvernement se dirige vers une hausse importante des taux d'immigration pour les années 2008-2010. L'opposition officielle craint que ce positionnement anticipé n'aille décourager les intervenants de venir présenter une opinion contraire devant cette commission.

D'autre part, l'opposition officielle souhaite faire part de ses préoccupations quant au dossier de la planification de l'immigration. D'abord, quelques commentaires sur le document de consultation. Il est important pour une commission comme la nôtre de s'entendre d'abord sur la réalité des faits. Or, à cet égard, le document de consultation soulève plusieurs interrogations. D'abord, il n'y a à peu près rien sur l'expérience vécue des immigrants sur le marché du travail, et pourtant les données existent, notamment les données de recensement de Statistique Canada.

Deuxièmement, le document est fort jovialiste en ce qui concerne l'état du marché du travail québécois et les capacités d'intégration en emploi des personnes immigrantes. On nous dit que le marché du travail tourne à plein régime, que les entreprises expérimentent des pénuries de main-d'oeuvre et que l'immigration est la solution à tous nos maux. On semble oublier qu'en août dernier Statistique Canada enregistrait, au Québec, 285 200 personnes à la recherche active d'emploi, dont plusieurs dizaines de milliers d'immigrants.

De plus, un sondage CROP effectué en 2004 auprès d'entreprises québécoises de tous les secteurs relève que près du trois-quarts de ces entreprises embauchent moins de 5 % d'immigrants.

Troisièmement, les quelques données présentées nous semblent fort étranges à la lumière de celles présentées par Statistique Canada. Ainsi, on explique, à la page 23 du document, qu'entre 1991 et 2001 les nouveaux arrivants ont compté pour plus de 60 % de la croissance de la population active, et, dès 2011, la totalité de cette croissance pourrait provenir de l'immigration. La source de référence de ce pourcentage surprenant n'est pas indiquée dans le document. Nous avons donc effectué quelques vérifications à partir des données de recensement. On peut calculer qu'entre 1991 et 2001 l'accroissement dans la population active s'explique par une augmentation de 168 810 personnes actives provenant de la population non immigrante, soit 80,6 %, et une augmentation de 45 190 personnes provenant de la population immigrante, soit 21,6 %, et d'une diminution dans la population active des résidents non permanents, de moins 4 465 personnes, donc moins 2,1 %.

Nous sommes loin du 60 % énoncé dans le document du ministère. Nous déposons à cet effet un document qui présente certaines données concernant le marché du travail et les personnes immigrantes.

Quatrièmement, pourquoi le document de consultation ne fait-il pas davantage état des problèmes accrus d'intégration en emploi des personnes immigrantes? À cet effet, les données du recensement sont fort éloquentes. On constate que, depuis au moins 1991, les immigrants ont un taux de chômage beaucoup plus élevé que celui de la population non immigrante: en 2001, le taux de chômage des personnes immigrantes atteignait 142,7 % du taux de chômage des personnes non immigrantes. Leur taux d'emploi, soit le pourcentage de la population immigrante de 15 ans et plus qui a un emploi, était seulement de 88 % de celui des personnes non immigrantes. Et ces problèmes se sont accentués dans le temps alors que le marché du travail donne des signes de pénurie de main-d'oeuvre.

Comment expliquer ce phénomène? Ce sont là, à notre avis, des questions fort pertinentes qu'il faut se poser afin de favoriser l'intégration des nouveaux arrivants à la société québécoise car, selon nous, l'exercice d'un emploi rémunéré dans un milieu de travail constitue l'un des meilleurs outils d'intégration économique et sociale.

L'opposition officielle considère qu'il faut réduire l'écart entre le taux de chômage et le taux d'emploi des immigrants comparativement aux non-immigrants. Lorsque nous parlons d'intégration, nous abordons bien entendu la question de l'accès à l'emploi. Nous ne vendons pas du rêve, au Québec. Nous vendons des valeurs, des façons de faire, de la prospérité et une réelle chance de réussite. Cela doit cependant se traduire par des gestes concrets. Puis, il faut arriver à hausser les taux de rétention des immigrants économiques et les ramener au moins à la moyenne canadienne. Les statistiques démontrent que 80 % des immigrants investisseurs ne demeurent pas au Québec après leur arrivée. Le Québec sert donc de porte d'entrée mais n'est pas en mesure de soutenir les initiatives de ces immigrants économiques. Le départ de ces investisseurs prive le Québec non seulement de main-d'oeuvre, mais également de capitaux fort importants. Il s'agit ici des deux conditions essentielles à remplir avant de hausser le niveau d'immigration au Québec.

C'est pourquoi, tout au long de cette commission, nous poserons des questions sur les problèmes d'intégration des personnes immigrantes, car, pour pallier aux problèmes économiques que pose la démographie, encore faut-il améliorer le taux d'emploi de cette population, comme celle des travailleurs plus âgés. Si on réussissait à hausser le taux d'activité des immigrants au Québec au même niveau que celui des non-immigrants, les problèmes économiques liés à la démographie s'amélioreraient réellement.

De plus, les statistiques des dernières années démontrent que le Québec n'est pas en mesure d'atteindre les taux qu'il s'est fixés en matière d'immigration. Pour vous donner un ordre de grandeur, en 2006, le Québec accueillait 44 686 personnes, alors que l'objectif contenu dans le plan stratégique 2005-2008 pour l'année 2006 était fixé à 46 000 admissions. Même scénario en 2005, où le taux était fixé à 44 000 nouvelles entrées et que 43 312 personnes sont effectivement arrivées.

N'est-ce pas là un signe de mauvaise gestion et de banalisation de l'exercice menant à une planification de l'immigration? Nous souhaitons donc interagir par le biais de cette commission parlementaire avec les différents intervenants qui vivent la réalité de nos immigrants au quotidien. Nous voulons établir une discussion franche, honnête, orientée vers l'avenir et la prospérité du Québec. Nous voulons comprendre pourquoi les problèmes se sont accentués avec les années. Pourquoi les entreprises n'intègrent-elles pas facilement les nouveaux arrivants? Bien que plus instruits, ces nouveaux arrivants ont-ils les compétences recherchées par les entreprises? Leurs compétences sont-elles reconnues? Les autres professionnels ralentissent-ils l'intégration des immigrants? Les programmes sociaux et les programmes de francisation sont-ils bien adaptés à la situation? Voilà autant de questions qu'il faut se poser avant d'augmenter le seuil de nouveaux immigrants.

Car, si la tendance se maintient, comme le laissent présager les statistiques de l'enquête sur la population active, les nouveaux immigrants pourraient bien venir grossir la population totale mais grossir aussi le nombre de personnes involontairement inactives, ce que personne ne souhaite. Le Québec a la responsabilité de mettre en valeur la contribution des nouveaux arrivants. Merci.

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup, Mme la députée de Charlesbourg. J'invite maintenant le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques à nous faire part de ses remarques préliminaires.

M. Martin Lemay

M. Lemay: Merci beaucoup, M. le Président. Je vous salue. D'entrée de jeu, je voudrais m'excuser du retard que j'ai eu, je m'excuse. Alors, je vous salue. Je salue la ministre et toute son équipe, collaboratrices et collaborateurs. Je salue également mes collègues du parti ministériel, mes collègues de l'opposition officielle également et mon collègue d'Abitibi-Est. Et je salue d'entrée de jeu tous les gens également qui viendront, au courant des prochains jours, nous déposer les documents et nous entretenir sur cette importante question.

n (10 h 10) n

Alors, il nous fait plaisir de participer à cet exercice de consultation publique sur le plan triennal du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles. Cette consultation, il faut le dire, qui attirait dans le passé bien peu l'attention, revêt, cette année, une importance toute nouvelle. Et nous devons nous réjouir car trop rarement les enjeux réels de l'immigration au Québec alimentent le débat public. L'importance de l'immigration n'est pas à démontrer, il suffit de consulter les analyses démographiques pour s'en rendre compte. Le taux de natalité très bas conjugué au vieillissement de la population appelle à une politique d'immigration énergique et à des stratégies d'immigration novatrices. Par ailleurs, recevoir des dizaines de milliers de nouveaux arrivants annuellement amène inévitablement sont lot d'incompréhension, de tensions et d'ajustements de part et d'autre. Et ça, M. le Président, nous insistons là-dessus, c'est tout à fait normal.

De plus, ces débats, qui étaient jusqu'à tout récemment presque exclusivement montréalais, sont maintenant devenus panquébécois, et nous devons nous en féliciter car cette question ne regarde pas seulement Montréal, mais tout le Québec. Les solutions à l'intégration des nouveaux arrivants exigent une mobilisation de toute la société. Comme Montréalais, je me dois d'insister sur le fait que, malgré ces tensions et ces inquiétudes légitimes que l'on voit depuis quelques mois, la vie en société dans la métropole, M. le Président, se passe relativement bien. Il est important de souligner que nous avons sensiblement les mêmes interrogations que d'autres sociétés d'accueil dans le monde occidental, sauf dans le reste du Canada, où le multiculturalisme est non seulement la philosophie, mais la loi. Nous reviendrons sur ce sujet.

D'entrée de jeu, nous affirmons haut et fort, M. le Président, notre déception face au plan d'action proposé par le gouvernement, comme si ce débat très important pour le Québec n'était que quantitatif. Nous ne le répéterons jamais assez, le niveau d'immigration est également intimement lié à notre capacité d'intégration. Par «intégration», nous voulons dire la responsabilité des nouveaux arrivants de participer au meilleur de leurs capacités à la société d'accueil. Cette société d'accueil a également des responsabilités, car l'immigration est un contrat formel et moral qu'un nouveau citoyen et sa nouvelle société signent ensemble. Ces grands principes étant mis de l'avant, qu'en est-il dans la réalité? Au-delà des belles paroles, le gouvernement actuel a sabré dramatiquement dans le budget du ministère. De 127 millions qu'il était en 2003, il est aujourd'hui de 111 millions. Et paradoxalement le nombre d'immigrants augmente d'année en année. Ces coupures, équivalent à une diminution budgétaire réelle de plus de 33 % par immigrant, et ce, autre paradoxe, dans le contexte où la subvention du gouvernement fédéral augmente.

Alors, M. le Président, ça me ferait plaisir de déposer ces tableaux qui prouvent les dires du «baisse de budget par immigrant au Québec depuis quelques années», et également l'argent du fédéral qui n'est pas nécessairement utilisé à l'intégration et à la francisation ou directement au ministère de l'Immigration.

Alors, force est de constater que le discours de ce gouvernement est une chose, la réalité en est une toute autre. À la lumière du plan d'action gouvernemental, il est difficile sinon impossible d'affirmer que nous remplissons notre partie du contrat. Est-ce que nos efforts en francisation, en intégration en emploi et en régionalisation sont suffisants? Nous ne pouvons l'affirmer, car le document est muet en ce qui concerne les résultats du ministère et ses stratégies dans ces domaines, d'où notre profonde déception.

Par exemple, M. le Président, comment expliquer le fait que, pour 36 % des immigrants, des allophones, la langue de travail est principalement l'anglais? Ces chiffres sont inquiétants, et le ministère les rapporte dans son document d'orientation sans aucune explication, sans aucune mise en contexte, avec une légèreté déconcertante. Lorsque l'on sait que d'ici quelques années à peine la totalité de la croissance de la population sera issue de l'immigration, on peut se poser la question de l'impact qu'aura cette nouvelle donne sur la langue française, principalement à Montréal. Il nous semble qu'une étude prospective sur la pérennité du français, dans le contexte démographique que l'on connaît, serait fort utile pour nos travaux et pour le débat public. Malgré moult chiffres et analyses démographiques, pas un mot sur le portrait futur du Québec francophone.

En d'autres termes, il aurait été intéressant, sinon incontournable, de se projeter dans le temps, car les décisions d'aujourd'hui ont des conséquences sur la réalité de demain. Il en va de même pour l'intégration en emploi. Alors, que nous apprenions, pas plus tard, M. le Président, que la semaine dernière, que le taux de chômage est plus de 18 % chez les nouveaux arrivants qui sont au Québec entre un an et cinq ans, soit trois fois plus que les gens qui sont nés au Canada. De plus, la difficulté qu'ont les immigrants à faire reconnaître leur formation et leurs diplômes nous souligne la difficulté que ce gouvernement a à bien cibler ses priorités et à atteindre les objectifs, M. le Président, qu'il s'est lui-même fixés. L'autre défi, celui que pose la régionalisation de l'immigration, bien que soulignée... mais, encore ici, des pistes de solutions générales, sans analyse, sans objectifs. Comme les autres sociétés occidentales, les nouveaux arrivants se concentrent dans les régions métropolitaines. Au Québec, c'est 83 % des immigrants ou des allophones qui résident dans la région métropolitaine de Montréal, alors que, toujours dans le document du ministère, selon Emploi-Québec, la moitié des emplois disponibles sont à l'extérieur de cette même région. Malgré ces chiffres accablants pour le gouvernement, on ne sent pas le sentiment d'urgence qui normalement devrait l'animer en ce qui concerne la régionalisation. Vous l'aurez constaté, M. le Président, comment pouvons-nous sérieusement débattre du niveau de l'immigration sans un plan d'intégration digne de ce nom, un plan contenant non seulement quelques pistes de solution, mais également des objectifs attendus et des résultats clairs? Poser la question, c'est un peu y répondre.

Dans le débat auquel se livrent, ces dernière semaines, plusieurs citoyens concernés par le sujet de l'immigration au Québec, il m'apparaît important de préciser le point de vue du Parti québécois sur cette question. Dans un premier temps, je désire dénoncer l'habitude qu'a prise le chef de l'opposition officielle de lancer un pavé dans la mare et ensuite de disparaître de la scène, laissant tout le monde en plan. Un chef de l'opposition digne de ce titre ne se contente pas seulement de lancer des débats, mais il propose également des solutions. Il est facile de faire des déclarations à l'emporte-pièce et d'avoir l'attention des médias, il est plus difficile de soutenir les solutions que l'on propose et de tenter de convaincre la population de la justesse de celles-ci. Mais, pour convaincre de ses idées, M. le Président, encore faut-il en avoir.

Parlant de simplification, la question de l'immigration ne saurait se limiter à un enjeu uniquement économique, comme l'affirmait le premier ministre en fin de semaine. Nous avons parlé du taux de chômage scandaleux des nouveaux arrivants, ajouté aux coupures drastiques dont le ministère a été victime. Dans ce contexte, il faut être particulièrement culotté pour se poser en donneur de leçon comme l'a fait le ministre du Développement économique. L'immigration est d'abord et avant tout une aventure humaine. Le désir profond de vouloir améliorer son sort et celui de sa famille est le fondement des mouvements migratoires. Affirmer que ce sujet se limite au développement économique relève d'une vue de l'esprit réductrice. Les enjeux sociaux et culturels sont aussi importants, et faire fi de cette réalité en dit long sur le manque de sensibilité de ce gouvernement sur cette question.

Toujours est-il que pour nous, du Parti québécois, notre désir de rapatrier tous les pouvoirs en matière d'immigration ne surprendra personne. Assumer tous les pouvoirs fait partie de notre engagement politique. L'avenir de notre peuple passe, entre autres, par une politique d'immigration que nous devons contrôler totalement. Une entente, si bonne soit-elle, ne vaut jamais l'exclusivité des pouvoirs. Dans ce dossier, la symbolique est d'une grande importance; par conséquent, nous sommes d'avis que plus le message est clair, plus l'intégration s'en trouve facilitée. En effet, si les immigrants savent qu'ils s'en viennent au Québec, société française dont l'espace public est laïc et qui promeut l'égalité entre tous ses citoyens et citoyennes, moins le choc culturel sera grand, et ce, tant pour les immigrants que pour la société d'accueil. Ces messages et cette symbolique doivent changer radicalement. Nous ne pouvons nous permettre d'accueillir les nouveaux arrivants dans le multiculturalisme et le bilinguisme canadien mais bien dans une société respectueuse et ouverte pour ses minorités, certes, mais également désireuse de survivre et de s'épanouir comme peuple francophone d'Amérique. Nous avons confiance dans la force d'intégration de notre culture enrichie justement des différents apports des populations immigrantes au fil des ans, mais nous demeurons toujours fragiles et inquiets, entourés que nous sommes d'une population anglophone de plus de 330 millions d'individus. Comme si cela n'était pas suffisant, notre proximité avec la gigantesque machine à uniformiser les cultures que sont les États-Unis accentue encore plus cette fragilité.

Un autre message tout aussi important est celui que l'espace public est laïc. Si nous nous sommes écartés durant la Révolution tranquille du pouvoir du religieux dans l'espace public et politique, ce ne serait certainement pas pour y replonger, même à petite dose. C'est là où le bât blesse pour nous au Québec. Le multiculturalisme canadien n'intègre pas les populations immigrantes, il exacerbe les différences, dont les différences religieuses. Les diverses politiques fédérales, les chartes des droits et les différentes cours de justice en font souvent la preuve. D'autre part, il est primordial que les nouveaux arrivants comprennent clairement que l'égalité entre les femmes et les hommes est plus qu'un discours, c'est une réalité quotidienne pour laquelle il ne saurait y avoir aucune concession. Les femmes ont gagné de haute lutte leur place dans la société, il serait impensable de reculer à ce niveau.

n (10 h 20) n

Maintenant que le Parlement du Canada nous a reconnus comme nation à part entière, cette reconnaissance doit bien vouloir dire quelque chose. La responsabilité de l'immigration et de la citoyenneté est un pouvoir symbolique et réel pour une nation. Ce ne sont pas que des synonymes de démographie et de besoin de main-d'oeuvre, bien que ces facteurs soient importants. Il serait temps d'assumer cette responsabilité jusqu'au bout, d'envoyer des messages clairs et de se sortir enfin du multiculturalisme canadien.

D'ailleurs, quand le gouvernement le plus fédéraliste de l'histoire du Québec, le gouvernement actuel, M. le Président, décrit le partage des pouvoirs dans le domaine de l'immigration dans son propre document, il parle de contrainte. Ce n'est pas le Parti québécois qui dit ça, c'est le gouvernement actuel qui parle d'une contrainte; cela veut bien vouloir dire quelque chose.

Si nous exigeons tous les pouvoirs en immigration, c'est également pour les ressources financières, humaines et législatives. Avoir les ressources pour établir les choix stratégiques en ce domaine, c'est une chose, mais avoir les ressources pour faciliter l'intégration des immigrants à la société d'accueil en est une autre.

En terminant, notre proposition n'a aucunement comme fondement de remettre en cause une politique d'accueil des réfugiés. Il va de soi que nous sommes tout à fait en accord avec les différentes ententes et conventions internationales qui nous permettent d'accueillir des citoyens qui, dans leur pays, risquent leur vie ou des sévices pour des raisons politiques ou religieuses. Comme société relativement riche et développée, nous avons un devoir de supporter ceux et celles qui sont dans une situation difficile.

Donc, en conclusion, M. le Président, nous sommes d'avis que, pour des raisons démographiques, économiques, sociales et culturelles, le gouvernement doit augmenter légèrement le niveau d'immigration. Par contre, il faut que cette augmentation légère du taux d'immigration soit associée avec une politique d'intégration beaucoup plus énergique que nous le voyons actuellement. Donc, nous entendrons les différents individus et groupes qui viendront partager avec nous leurs perspectives sur ces importants enjeux. Et nous pouvons vous assurer, M. le Président, chers collègues de l'Assemblée nationale, que nous jouerons un rôle constructif dans ces échanges certainement fructueux que nous aurons. Merci.

Auditions

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup, M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques. Grâce à votre autodiscipline à tous et à toutes, vous avez réussi presque à rattraper notre retard. Et j'invite immédiatement le premier groupe d'invités à venir nous rejoindre. Au tour de Pierre Fortin, professeur d'économie à l'UQAM. Il y a M. Marc Van Audenrode qui se joint à eux et Pierre Emmanuel Paradis.

Je ne prendrai pas bien des heures à expliquer les consignes à Pierre Fortin, qui les connaît parfaitement et qui est un habitué de cette salle et de nos commissions. Je le salue avec beaucoup de plaisir et je l'invite au cours des 15 prochaines minutes, avec ses collègues, à essayer de synthétiser un mémoire riche et documenté. On vient de nous distribuer d'ailleurs des documents annexes importants. Je suis convaincu, Pierre Fortin, que vous n'allez pas tenter de les lire.

MM. Pierre Fortin, Marc Van Audenrode
et Pierre Emmanuel Paradis

M. Fortin (Pierre): Alors, je vais donner la parole tout d'abord à Pierre Emmanuel Paradis.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): Bonjour! Merci de nous recevoir. Donc, nous avons réalisé une analyse économique du Programme des immigrants investisseurs. Et puis, juste avant de vous présenter un résumé bref de notre étude, j'inviterais M. Vézina, qui est propriétaire d'une entreprise qui a bénéficié du financement du programme Immigrants investisseurs, à venir nous dire quelques mots.

Le Président (M. Simard): ...gentiment, me... parce que je ne vous avais pas sur ma liste, vous identifier, votre nom au complet et votre fonction, s'il vous plaît.

M. Vézina (Jocelyn): Mon nom est Jocelyn Vézina. Je suis président-directeur général de la compagnie TSO3 inc.

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup.

M. Vézina (Jocelyn): M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. membres de la commission, il me fait plaisir d'être ici aujourd'hui pour témoigner de l'apport important du programme Immigrants investisseurs au sein de notre entreprise. Mais, avant, permettez-moi de vous parler un peu de TSO3, une entreprise dont le siège social est situé ici, à Québec.

Chez TSO3, nous avons développé et nous offrons au marché une nouvelle technologie de stérilisation des instruments médicaux qui se veut une référence dans le domaine, une plateforme de stérilisation à l'ozone respectueuse de l'environnement et unique au monde, une technologie protégée par des brevets qui répond à des besoins insatisfaits, grandissants, en matière de réduction des coûts au sein des organisations du secteur de la santé, une technologie qui assure des soins de qualité aux patients ainsi que la sécurité aux utilisateurs grâce à une technologie tout à fait verte. Notre premier produit est destiné aux centrales de stérilisation en milieu hospitalier. Il est homologué par Santé Canada et la Food and Drug Administration, aux États-Unis. Nous sommes en phase de commercialisation en Amérique du Nord depuis le début 2006 avec 17 appareils vendus. Notre force de vente est en croissance, et nous développons un important pipeline d'acheteurs potentiels pour assurer notre rayonnement dans le marché dans les prochaines années.

Notre société a été fondée en 1998 et est devenue publique en août 2001. Aujourd'hui, elle est cotée à la Bourse de TSX à Toronto. Entre la fondation et l'inscription en bourse, soit en 1999, nous avons bénéficié d'un montant de 570 000 $ grâce au Programme investisseurs immigrants, une somme d'argent non négligeable, puisqu'elle représentait environ 25 % de l'équité de TSO3 à ce moment-là. Cette somme nous a permis d'accélérer le développement de notre stérilisateur à l'ozone par l'embauche de huit personnes supplémentaires. Par la suite, nous avons eu la chance de bénéficier de ce programme à nouveau, cette fois-ci à la hauteur de 1 million de dollars échelonné sur quatre ans. Ces sommes additionnelles ont contribué au financement de notre entreprise alors qu'elle ne générait pas encore de revenus. Elles ont permis, encore une fois, d'accélérer les démarches requises à la mise en marché de notre produit et de maintenir un nombre d'emplois qui est passé de 35 en 2002 à 71 à ce jour.

Nous estimons que le Programme investisseurs immigrants est un outil des plus valables pour attirer des immigrants ayant la capacité de contribuer à l'économie canadienne, et ce, à très court terme. Nous croyons également que l'existence de ce programme est trop peu connue à l'heure actuelle et nous espérons qu'il sera davantage mis de l'avant au cours des prochaines années, qu'il prendra de l'ampleur et que de nombreuses entreprises pourront en bénéficier, comme ça a été le cas pour TSO3. J'aurais le goût de vous dire que c'est certainement un des meilleurs outils financiers que TSO3 a eu l'occasion d'utiliser.

Je vous remercie beaucoup de votre attention. J'invite maintenant MM. Fortin et Paradis à vous présenter les résultats, les retombées de même que les défis de ce programme. Avec M. Marc Van Audenrode, vice-président du groupe d'analyse, ils ont réalisé une étude du programme et des enjeux économiques de l'immigration au Québec. Merci.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): Alors, merci. Comme notre temps est court, je vais vous passer ça rapidement. Donc, 60 % de tous les immigrants investisseurs au Canada se tournent vers le Québec. Il y a différents programmes, mais celui du Québec est celui qui fonctionne le mieux et en attire le plus, et puis c'est le résultat de vraiment une belle collaboration entre le ministère de l'Immigration, Investissement Québec, toutes les institutions financières qui en sont partenaires, Desjardins, Banque Nationale, et toute une série d'autres, et Emploi-Québec qui contribue également au programme.

Donc, juste très rapidement, il y a vraiment deux volets, qui sont distincts du programme Immigrants investisseurs, comme le nom le dit. D'abord, un immigrant transfère une somme de 400 000 $ à Investissement Québec contre un billet à échéance avec 0 % d'intérêt, qui lui permet de récupérer la somme investie au bout de cinq ans. Donc, le manque à gagner en intérêts, qui représente une valeur d'environ 75 000 $, est investi directement dans le programme Immigrants investisseurs. Alors, si l'immigrant et sa famille obtiennent un certificat de sélection du Québec, ils immigrent au Québec et sont acceptés par Immigration Canada. Au total, il y a 6 900 placements comme ça de 400 000 $, pour un total de 2,8 milliards, qui ont été effectués de 2001 à 2006. Ça, c'est pour le volet immigration. Maintenant, qu'est-ce qui se passe avec ces fonds-là? Les 75 000 $ sont récupérés et sont distribués d'abord aux PME, mais aussi aux institutions financières partenaires ainsi qu'à Investissement Québec, le ministère et Emploi-Québec.

n (10 h 30) n

Au total, il y a 1 400 projets de PME québécoises, répartis dans toutes les régions, qui ont bénéficié d'une aide financière qui a totalisé 260 millions de 2001 à 2006. On présente ici les six principaux constats de notre analyse. D'abord, c'est une création d'emplois à très faible coût; deuxièmement, le programme a un taux de rendement qui est absolument spectaculaire; troisièmement, ça permet de réaliser des investissements en région et beaucoup dans le secteur manufacturier. Les deux clés du succès sont, premièrement, l'appui des institutions financières, qui travaillent de tous les côtés pour en faire un succès, ainsi que le fait que tous les fonds viennent de l'étranger; ça ne vient pas des impôts, il n'y a pas de contrepartie locale. Cinquièmement, il y a une présence au Québec, effectivement, des immigrants investisseurs qui est plus faible que la moyenne, mais c'est très compréhensible, et ça pourrait être amélioré. Et finalement le programme pourrait s'accélérer si le ministère en avait les moyens.

Donc, création d'emplois à faible coût. Pour chaque dollar qui est contribué par le programme, ça permet de réaliser des investissements qui sont d'une valeur totale 11 fois supérieure, donc un investissement moyen de 2 millions pour une contribution financière venant du programme de 180 000 $. Ça a permis de créer au net 4 200 emplois dans l'économie du Québec et d'en maintenir au bas mot 40 000 autres et pour... On vous parlait d'efficacité, ce programme-là, dans les programmes d'Investissement Québec, reçoit... pas reçoit, mais donne 7 % des montants d'aide qui sont accordés, mais aide à créer ou maintenir 60 % de tous les emplois par Investissement Québec.

Vous voyez ici un portrait: en bleu, c'est le nombre de projets, donc qui maintenant est environ 350, 400 projets par année, puis on parle de financements globaux de 600 à 700 millions de dollars par année. En termes de taux de rendement du programme, le coût pour le gouvernement du Québec n'est que de 15 millions de dollars; par contre, ça aide à générer des rentrées d'argent pour le gouvernement de 109 millions, donc on parle d'un ratio avantage-coût de sept pour un, et une addition totale au revenu intérieur du Québec de 372 millions, donc un ratio avantage-coût de 25 pour un.

Quand on vous disait que c'est bien réparti entre les régions, si vous voyez la barre bleue qui est à gauche du graphique, on vous présente les contributions financières qui viennent du programme. La barre du milieu, c'est la répartition de l'emploi dans chacun des grands groupes de régions du Québec et, en rouge, c'est la réapparition de l'investissement privé. Donc, les contributions sont vraiment réparties à travers tout le territoire et aident, dans 87 % des cas, des investissements manufacturiers. Je passe la parole à M. Fortin maintenant.

M. Fortin (Pierre): Merci beaucoup. Je voudrais dire juste un mot sur la philosophie qu'il y a en arrière de ce programme-là: Qu'est-ce que c'était, l'idée géniale de Gérald Godin en 1985? C'était que... On accorde des points à toutes sortes de monde, des immigrants qu'on appelle les immigrants économiques. Lorsqu'ils ont des diplômes, ils ont des compétences, on vient ici, on leur donne des points quand ils ont ces compétences-là. Les entrepreneurs, il n'y a pas de diplôme d'entrepreneur. Alors, Godin s'est demandé: Comment est-ce qu'on pourrait faire pour accorder des points à ce monde-là pour substituer à l'absence de diplôme d'entrepreneur? Et puis, bon, ce qu'il a trouvé comme idée, ça a été justement ça: on leur fait faire à des PME québécoises qui ont besoin d'un coup de pouce un prêt sans intérêt de 400 000 $ pour cinq ans, et évidemment Mme Robic, qui a succédé à M. Godin en 1986, s'est emparée de l'idée, et puis ça a fonctionné à la planche depuis ce temps-là. Le succès québécois là-dedans est un succès boeuf, c'est 60 % de tous les argents d'immigrants investisseurs au Canada qui arrivent qui passent par le programme québécois.

Je voudrais revenir juste un petit peu en arrière de la création d'emplois à faible coût. Avant ça, là... Vous voyez, un des problèmes qu'on a à l'heure actuelle, dans cette diapo-là, vous le voyez, c'est que, depuis 2004, on voit qu'il y a un certain plafonnement à l'évolution du programme après une expansion quand même assez rapide de 2001 à 2004, et c'est là-dessus que je vais revenir un peu plus tard. Quelles sont les deux clés du succès, maintenant, du programme? Bien là, c'est clair que l'argent qui est prêté aux PME québécoises et qui aide à démarrer des entreprises comme celle de M. Vézina, c'est de l'argent qui n'est pas tiré des poches des contribuables d'ici, c'est de l'argent qui vient de l'extérieur. Donc, ce n'est pas de... C'est de l'argent qui nous coûte rien, à toutes fins pratiques. Ce que ça nous coûte, c'est l'implication de nos organismes publics, comme le ministère de l'Immigration, Investissement Québec, dans le programme, et c'est pour ça que ça donne un ratio avantage-coût tellement incroyable, je veux dire, sept à un, et, pour l'ensemble de l'économie du Québec, un ratio 25 à un.

L'autre raison: Pourquoi... Habituellement, au Québec, les gens se pensent moins bons qu'ailleurs. Comment ça se fait que, dans ce programme-là, on est tellement meilleurs que dans les autres provinces du Canada? Comment ça se fait qu'on réussit à capter 60 % de tous les fonds qui arrivent par des immigrants investisseurs au Canada? Bien, c'est à cause du partenariat qui existe entre le ministère, Investissement Québec et les institutions financières, comme Desjardins, La Laurentienne, la Banque Nationale et Industrielle Alliance. Il y en a une douzaine en tout cas qui sont signataires... des partenaires signataires de cette entente-là. Et ces gens-là, ce qu'ils font, ils font deux choses: ils agissent sur le programme à deux points de contact: un, pour aller chercher les immigrants, les identifier, évaluer leurs compétences économiques, et là les dossiers d'immigrants sont préparés, évidemment passés au ministère de l'Immigration qui, lui, détermine si ça vaut la peine de les accueillir, de leur décerner un certificat; et, deux, ils vont, ces institutions financières là, d'autre part... ils reçoivent les demandes des PME québécoises pour... qui font appel... qui veulent faire appel à ce programme-là, ils les évaluent aussi... ils évaluent la rentabilité, les perspectives des projets et soumettent les dossiers finalement à Investissement Québec. Alors, vous voyez qu'au départ on a une base de ces institutions financières là à la fois du... dans le volet immigration et le volet investissement, et finalement Investissement Québec, d'une part, et le ministère de l'Immigration, d'autre part, prennent les décisions définitives, comme il se doit. Évidemment, ce n'est pas des entreprises qui doivent prendre des décisions d'immigration, c'est l'État.

Alors donc, les deux grandes raisons du succès, c'est ça. C'est parce que... Pourquoi on fait mieux que les autres? C'est parce qu'on s'entraide entre institutions financières et gouvernement, et, deux, parce que l'argent qui vient n'a pas de contrepartie locale. L'argent qui est dans ce programme-là, ce n'est pas de l'argent qu'on va chercher dans les poches des contribuables québécois.

Le point 5 qu'on voulait soulever, c'est la présence au Québec des investisseurs immigrants. Il y a certains reproches qui sont faits aux immigrants investisseurs, basés sur leur taux de présence qui est faible. Il est vrai que, si vous prenez, dans les années quatre-vingt-quinze à deux mille quatre, c'est-à-dire pour 10 années, les immigrants investisseurs qui ont reçu un CSQ et qui ont été agréés par Immigration Canada, il y a 20 % d'entre eux qui sont présents au Québec en 2006. Cependant, le véritable pourcentage maintenant est plutôt de l'ordre de 50 %. Le 20 % sous-estime beaucoup, parce qu'il y a eu une remontée importante dans les trois, quatre dernières années. Et un des problèmes qu'on a eus, c'est évidemment l'entrée de Hong Kong dans la Chine, parce que, comme à Vancouver, de Montréal, il y a un grand nombre d'investisseurs ou de gens d'origine chinoise qui sont retournés à Hong Kong parce qu'ils avaient eu peur que ce soit le bordel à Hong Kong lors de la passation des pouvoirs, et donc les chiffres de 20 % de rétention sous-estiment considérablement la réalité parce qu'on est pognés avec cet épisode ponctuel là..

Et donc évidemment.. En plus, il faut comprendre que ce sont des gens qui sont fortunés, sont très actifs à l'échelle planétaire. Je veux dire... Évidemment, quand on leur demande s'ils sont chez eux, bien ils ne sont pas toujours chez eux. Allez chez Guy Laliberté, dans Les Laurentides, puis demandez si Guy est là: Bien non, il est à Las Vegas. Donc, il n'est pas présent. On ne peut pas reprocher à un investisseur international d'être seulement... à Guy Laliberté d'être seulement six mois par année au Québec. Donc ça, il faut, je pense, passer par-dessus ça.

Le Président (M. Simard): Votre temps est maintenant écoulé.

M. Fortin (Pierre): Bon, c'est ça.

Le Président (M. Simard): Une brève... un bref commentaire de conclusion, mais vous aurez l'occasion de revenir sur tout ça dans le dialogue qui va suivre.

n (10 h 40) n

M. Fortin (Pierre): C'est ça. Alors, je passe à la dernière... n° 6, mon dernier acétate. Ce qui est... Le message qu'on veut lancer ici, c'est que le potentiel de croissance de ce programme-là est très bon, c'est-à-dire, non seulement on a bien fait dans le passé, mais il y a danger qu'on plafonne, alors que le potentiel est énorme. La file d'attente s'allonge en Asie, puis au Moyen-Orient, puis au Maghreb pour obtenir un statut d'immigrant investisseur au Canada, en particulier au Québec, et donc l'attrait du programme continue de s'améliorer, et en même temps les institutions financières, ils ont les ressources, ils sont prêts à faire la job. Ce qui bloque à l'heure actuelle, c'est la contrainte imposée par Mme Jérôme-Forget à Mme James, dans le fond. Ce que ça prendrait dans le moment, c'est qu'on augmente considérablement les ressources allouées à ce programme-là, et évidemment c'est une décision du Conseil du trésor. On comprend très bien qu'on peut parfaitement appuyer l'idée que, si on veut alléger la fonction publique, qu'on remplace deux départs à la retraite par un nouvel employé seulement, mais on ne doit pas appliquer cette règle-là sans discernement. Il faut, dans le cas, par exemple, où on a un rendement de 25 $ pour 1 $ investi, comprendre que la situation exige une exception à la règle.

Le Président (M. Simard): C'est sur cette phrase que nous allons...

M. Fortin (Pierre): De trop?

Le Président (M. Simard): Non, non, non, pas du tout. Intéressante comme tout. Et d'ailleurs celle qui a été interpellée va pouvoir tout de suite prendre la parole. Alors, j'invite la ministre de l'Immigration à poser la première question.

Mme James: Alors, merci, M. le Président. Vous me permettrez d'entrée de jeu, M. Fortin ainsi que M. Vézina, M. Audet, M. Paradis, merci pour votre contribution à cette commission parlementaire et vraiment de la qualité de votre présentation ainsi que du mémoire que vous avez présenté.

Je pense que, vous l'avez très bien dit, M. Fortin, vous avez souligné de façon juste la contribution importante et le fait que ce programme-là fonctionne très bien grâce à la collaboration, entre autres, des différents partenaires, et je le reconnais.

J'ai été frappée par ce chiffre de 60 %. Comme vous l'avez dit, 60 % des gens qui ont, quand on a les moyens, quand on a les ressources, ils ont le choix d'aller où ils veulent dans le monde. Et, quand on regarde tous les programmes semblables au Québec, 60 % des gens choisissent le Québec, c'est une bonne chose. Et, comme vous l'avez dit, on est toujours ouverts à voir comment on pourra améliorer ça.

D'autres statistiques que vous avez évoquées, puis je souhaitais vous aborder là-dessus parce que j'ai pu sentir que vous voulez compléter ce que vous avez présenté. Lorsqu'on regarde justement l'investissement, le 2,9 milliards, et notamment le fait que ça a créé 4 200 emplois, M. Vézina, vous avez évoqué votre exemple du TSO3, là, un exemple parfait du fonctionnement puis des bénéfices de ce programme-là. Et ce qui me vient à l'esprit, puis j'aimerais vous entendre là-dessus: oui, on parle beaucoup de ce taux de rétention. Et, lorsqu'on regarde ça dans une période de 10 ans, c'est clair qu'on peut voir... il y a certaines gens qui vont reprocher du 20 %, mais, lorsqu'on regarde le pourcentage dans les trois prochaines années, qu'effectivement le taux de rétention ou de présence a doublé, évidemment je dirais que le fait que l'économie va bien, sans doute, est une des raisons pour laquelle ça se fait, et qu'on a pu se vanter de créer 4 200 emplois dans les régions, majoritairement, du Québec.

Mais, dans une perspective d'améliorer, hein, d'aller encore... Parce qu'on a l'exemple parfait d'un programme qui fonctionne bien, vous avez vous-même fait une recommandation où vous proposez d'introduire un nouveau volet du programme, hein, ciblant les candidats qui souhaitent investir puis s'impliquer dans une entreprise. Est-ce que vous pouvez nous en parler davantage? Ou M. Audet.

M. Audet (Marc): Bonjour. Mon nom est Marc Audet, je suis vice-président à la Fiducie Desjardins, Programme immigrants investisseurs. Donc, je représente un des intermédiaires financiers parmi la liste des 12 signataires de l'entente tripartite entre le ministère de l'Immigration et Investissement Québec. Donc effectivement le rôle que, nous, on joue est un rôle... On passe beaucoup de temps au cours de l'année à l'étranger pour recruter ces gens bien nantis.

Comme vous savez également, ces gens-là sont très sollicités également par d'autres pays. Le Québec a son programme immigrants, mais il y a d'autres pays aussi qui ont des programmes similaires. Et il faut regarder dans... Il faut comprendre que, par le profil des immigrants que nous ciblons, ceux-ci sont très recherchés par plusieurs pays parce qu'ils contribuent au développement économique. Et puis, la terre d'adoption qui va les accueillir, je pense, ça devient un point important. Les pays tentent de les attirer non seulement pour leurs qualités financières, mais aussi pour le niveau élevé d'éducation de leurs enfants. C'est eux à plus long terme qui vont faire le pont entre, je pense, la terre d'adoption et leur pays.

Donc, nous, on pense qu'effectivement, avec les immigrants investisseurs, on peut en faire beaucoup plus. On a fait, je pense, depuis 1986, un bon bout de chemin, c'est un succès. Et on veut s'assurer également de la pérennité du programme. Je pense qu'on doit se féliciter, tout le monde, le travail qu'on a accompli via les différents gouvernements qui ont passé depuis 1986. Et je pense que le message qu'on veut vous passer aujourd'hui, c'est que c'est un programme... On peut se féliciter, tout le monde ensemble. Je pense qu'on l'a dit, et il y a de la place à l'amélioration, effectivement. Et, comme M. Fortin le mentionnait, je pense qu'il y a différentes autres alternatives qu'on pourrait regarder pour améliorer justement le programme à différents niveaux, auxquels il nous fera plaisir de vous faire des recommandations plus spécifiques en tant que telles, compte tenu que le temps est limité, mais je pense qu'on peut faire beaucoup plus avec ces immigrants-là en tant que tels.

M. Fortin (Pierre): On pourrait en faire des ponts entre des entreprises du Québec et... Écoutez, il y a 80 % de ces immigrants investisseurs qui sont d'origine asiatique, principalement chinoise. Évidemment, la Chine est le plus grand marché qui mondialement se développe à l'heure actuelle. Une des idées, quand on parle ici d'immigrants investisseurs impliqués, ce serait d'utiliser nos immigrants investisseurs qui ont choisi le Québec comme ambassadeurs, comme contacts entre les PME du Québec et le marché chinois pour aider les importateurs d'ici, les exportateurs d'ici, les liens. Donc, ces gens-là pourraient dans une certaine mesure devenir des ponts entre le développement économique du Québec et les marchés asiatiques, qui connaissent un essor assez exceptionnel ces décennies-ci.

Mme James: Oui, dans une perspective aussi de renforcer des liens que ces investisseurs-là puissent avoir avec le Québec.

M. Fortin (Pierre): Exactement, exactement.

Mme James: Mais vous me permettez de vous poser la question face à votre rôle. Comment vous voyez-vous, en tant qu'intermédiaires financiers, comment souhaitez-vous vous impliquer davantage dans un développement plus enrichi de ce programme-là dans l'avenir, compte tenu que vous jouez un rôle quand même important, là, face à tout ça?

M. Audet (Marc): Il faut comprendre, depuis le début de l'historique du programme, pourquoi qu'il y a des institutions financières d'impliquées dans cette transaction-là. Je pense que, dans un premier volet, il y avait le côté immigration, à l'époque, qui était... vous êtes les spécialistes, à votre ministère, et on se rappelle, à l'époque des années 1985-1986, qu'est-ce qui était très populaire à l'époque au Québec, c'étaient les régimes d'épargne-actions, et, à l'époque, M. Godin et Mme Robic ont mentionné, dire: Ça nous prendrait des partenaires financiers. Et, bon, qui s'occupe de la gestion des fonds du patrimoine au Québec? C'étaient les institutions qui s'occupaient notamment des REA, donc tous les Trust général et les Fiducies Desjardins, etc. Donc, notre rôle est un rôle, nous, purement économique, dans un premier temps. Donc, on est un peu les ambassadeurs du Québec et de nos institutions respectives à l'étranger lorsqu'on se promène.

M. Fortin (Pierre): Pour résumer, eux autres, c'est des banquiers, eux autres. Alors, quand il y a un immigrant investisseur qui arrive, ils le regardent dans les yeux. Un banquier, ils savent qui c'est qui dit la vérité, qui c'est qui ne le dit pas. Ça fait que... Alors, ça permet... Ça évite au ministère de l'Immigration d'avoir à faire des vérifications. En fait, ils utilisent simplement leur expertise pour filtrer les candidats sur le plan économique.

M. Audet (Marc): Je crois qu'on a déjà fait quelques suggestions à l'effet que, je pense, au niveau des intermédiaires financiers, compte tenu qu'on a un réseau établi dans, je regarde chez nous, 70 pays, on a une clientèle qui vient de 70 pays différents, je pense qu'on peut amener... On fait une promotion du Québec, on met en avant-front les différentes ressources naturelles qu'on peut avoir, nos avantages économiques, recherche et développement, etc. Je pense que la clientèle, qu'elle soit chinoise, même si on sait que la grande majorité de celle-ci va s'établir à Vancouver, elle pourrait très bien venir s'établir ici, au Québec. La plupart des Chinois ne parlent ni français ni anglais, donc la barrière n'est pas nécessaire là. Je pense qu'on a une plus grande promotion à faire de notre terre d'accueil en tant que telle. Et je pense qu'au niveau macroéconomique je pense qu'il faut regarder ça d'un point de vue de société, pas nécessairement juste au point de vue d'immigration. Je pense qu'il va falloir regarder comment on peut faire, tout le monde ensemble, que ce soit avec le ministère du Développement économique, ministère de l'Éducation et de l'Immigration, de se mettre tout le monde ensemble pour voir comment on peut travailler davantage ensemble pour vérifier peut-être... d'accueillir davantage la deuxième génération que la première, parce que la première génération, malheureusement des fois c'est très difficile d'apprendre la deuxième, troisième langue. Mais les enfants sont des éponges. On va dans le Chinatown, à Montréal, et des fois on entend parler québécois, et ce sont des Chinois à côté de nous. Donc, je pense qu'on est capable, si on se donne un mandat de société, des différents ministères ensemble, je pense qu'on peut avoir une très belle réussite sur ce côté-là également pour faire un «spin» ? excusez-moi l'expression ? avec ces immigrants-là en tant que tels.

n (10 h 50) n

Mme James: Vous permettez, parce que je pense qu'il ne me restera pas grand...

Le Président (M. Simard): Six minutes.

Mme James: Six minutes, alors ça passe vite. Je voulais absolument aborder cette question de diversification des secteurs compte tenu de l'impact positif que ce programme a eu dans les régions du Québec. Quand on considère, c'est vous-même qui l'aviez dit, M. Fortin, que la grande partie de la création d'emplois aussi s'est faite partout sur le territoire québécois, c'est quelque chose qu'on a intérêt à renforcer puis à encourager dans les actions qu'on prendra dans l'avenir. Mais une des suggestions que vous avez apportées dans votre mémoire, c'est de voir une plus grande diversification de l'économie régionale, mais comment est-ce que vous voyez ça? Est-ce que vous pouvez développer sur cette question?

M. Fortin (Pierre): Si vous me permettez, je vais passer la parole à Pierre Emmanuel, qui se meurt de vous répondre.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): Bien, en fait, dans le... on pense souvent d'abord et avant tout au secteur manufacturier pour développer une économie. Mais, pour vous faire une histoire très courte, un secteur manufacturier qui est en santé, c'est un secteur manufacturier qui améliore sa productivité, et, s'il améliore sa productivité, ça veut dire produire autant avec moins de gens, souvent, et plus de machines. Donc, par définition, le secteur manufacturier peut donner l'impression qu'il va créer beaucoup d'emplois d'un coup, mais à terme le nombre... pour l'entreprise, pour qu'elle survive, surtout dans le contexte de concurrence mondiale qu'on vit maintenant, à terme il va falloir qu'elle diminue son nombre d'emplois, et puis c'est peut-être une mauvaise nouvelle pour les employés, mais, pour les entreprises, c'est leur façon de survivre. Alors, quand on parle de diversification, c'est justement de s'orienter vers toutes sortes d'autres secteurs.

M. Fortin (Pierre): ...façon de regarder le secteur des services aussi. À l'heure actuelle, au Québec, il n'y a pas plus d'emplois manufacturiers qu'il y en avait il y a 30 ans, en 1976. Je veux dire, le nombre d'emplois manufacturiers a augmenté, a baissé, il a augmenté, il a rebaissé, mais il n'y a pas plus d'emplois actuellement qu'il y en avait il y a 30 ans. Le gros de l'emploi s'est développé évidemment dans le secteur des services, et, comme il y a de toute façon beaucoup de liens entre le manufacturier puis les services, on pense que peut-être qu'il faudrait élargir un peu la base possible d'investissement pour les immigrants investisseurs dans d'autres secteurs.

Je prends juste, par exemple, j'ai deux enfants qui travaillent dans les jeux vidéos, un pour EA puis un autre pour Ubisoft, et c'est certain que, bon, eux autres, c'est du manufacturier d'un côté, mais aussi c'est de la création, c'est du développement de l'emploi, d'embauche un peu partout au Québec... à Québec et à Montréal notamment. Et, bon, à l'heure actuelle, je ne pense pas qu'on pourrait investir... on pourrait prendre ça comme secteur manufacturier. Mais, si on pense à l'avenir et qu'on... on comprend que le secteur manufacturier va continuer de baisser en pourcentage de l'économie, on va les soutenir autant qu'on peut, là, mais le jour n'est pas tellement loin où le secteur manufacturier au Québec, comme aux États-Unis, ne sera pas beaucoup plus gros que le secteur agricole, là. Et donc on ne peut pas avoir une stratégie de développement économique qui soit uniquement fondée sur le secteur manufacturier.

Mme James: Il faudrait s'ouvrir davantage.

Le Président (M. Simard): Vous avez encore quelques minutes.

Mme James: Une petite question finale. On a parlé beaucoup de la question de promotion, la question d'encourager ce programme-là qui fonctionne très bien, puis dans le mémoire vous avez parlé beaucoup de simplification des procédures, hein, administratives, parce qu'on veut quand même continuer à ce que les gens de l'extérieur puissent continuer de faire le choix du Québec. Concrètement, simplification de la lourdeur administrative, si vous aviez à nous faire des suggestions, tout en étant très, évidemment, respectueux, on veut s'assurer de faire les vérifications nécessaires face à notre politique d'immigration puis de s'assurer, comme vous l'avez bien dit, que ce sont des gens qui vont adhérer à nos valeurs... Il y a des valeurs qui sont non négociables ici, au Québec, mais évidemment on ne veut pas rendre ça plus difficile qu'il faut. Qu'est-ce que... quelles sont les suggestions que vous avez à nous apporter à ce sujet?

M. Fortin (Pierre): Mme la ministre, je pense que Marc et Pierre Emmanuel ont beaucoup d'idées là-dessus.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): O.K. Bien, moi, je vais... de façon générale, tout ce qui fait qu'un immigrant investisseur va passer moins de temps à remplir des papiers, c'est plus de temps qu'il va avoir pour investir, penser à des nouveaux projets, continuer à contribuer à notre économie ou à celle d'ailleurs. Donc... et puis, on parle vraiment d'obstacles administratifs au sens large, mais toujours justement, évidemment, dans le respect des lois puis avec des critères d'acceptation qui soient tout à fait aussi stricts. Peut-être que Marc a des suggestions plus concrètes, mais de façon générale c'est toujours un bon objectif récurrent et permanent à avoir en tête, de se dire... plutôt de voir comment est-ce qu'on pourrait ajouter une nuance, comment est-ce qu'on pourrait en enlever ou faciliter des choses.

M. Audet (Marc): Peut-être pour le bénéfice de l'auditoire, justement le ministère de l'Immigration a entamé, voilà quelques mois, une réflexion sur ses changements réglementaires justement dans le but de... pas nécessairement de simplifier... peut-être de simplifier en partie, mais de faciliter peut-être les définitions. On a un cadre réglementaire, on a des définitions: qu'est-ce qu'un immigrant investisseur, et notamment on essaie de s'assurer de la compétitivité du programme sur un plan tant national, parce qu'on a d'autres provinces qui ont des programmes similaires qui nous font une forte concurrence, mais on a d'autres pays aussi comme l'Australie, les États-Unis, l'Angleterre, et on est actuellement à la table de travail avec le ministère pour apporter certaines modifications, qui devraient éventuellement être publiées dans la Gazette un peu plus tard, dans les prochains mois, pour améliorer justement la fluidité des opérations et assurer une meilleure compétitivité du programme et avoir un plus grand flot d'immigrants qui pourraient se qualifier pour le Québec.

M. Fortin (Pierre): Si madame la ministre présidente du Conseil du trésor acquiesce aux demandes d'augmentation des ressources suffisantes pour permettre au programme de continuer son essor.

Mme James: Je vous entends. Merci.

Le Président (M. Simard): Sur ce, je pense que nous allons terminer cette partie de l'entretien. Et je vais inviter maintenant Mme la députée de Montmagny à poursuivre...

Une voix: De Charlesbourg.

Le Président (M. Simard): ... ? pardon, oui, de Charlesbourg, je ne sais pas ce que j'ai ce matin ? Mme la députée de Charlesbourg, à bien vouloir poser la première question pour l'opposition officielle.

Mme Morissette: Merci, M. le Président. Merci à vous quatre pour votre présentation. J'ai eu beaucoup de plaisir à prendre connaissance du mémoire. Je veux commencer par un bout de l'équation pour finir à l'autre bout, commencer par l'entrée de ces immigrants-là investisseurs. M. Fortin a rectifié certains chiffres. Je trouve ça intéressant, là, l'épisode de Hong Kong versus la Chine, ça peut remettre des choses en perspective. Par contre, vous dites qu'on est quand même à 50 % d'immigrants investisseurs qui quittent après cinq ans. Est-ce qu'il y a des choses qui sont mises en place, à votre connaissance, qui pourraient être améliorées pour inciter ce 50 % là qui quittent à rester?

M. Fortin (Pierre): À monter à 70 %, par exemple.

Mme Morissette: Oui, puis 90 %, là.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): Peut-être juste un élément, quelque chose qu'on a constaté, c'est que pour... On parle vraiment d'une catégorie d'immigrants qui est particulière et puis qui n'est vraiment pas comme la majorité, les gens d'affaires occupés, d'âge mûr, mobiles, etc. Donc, une des choses qu'on a constatées, c'est que justement toutes les difficultés possibles à justement améliorer la présence avaient un impact qui était plus lourd pour les immigrants investisseurs que pour toutes les autres catégories. Puis d'ailleurs c'est une des diapos sur lesquelles on a passé un peu rapidement. Si le PowerPoint veut collaborer avec moi, mais c'est la page où on a où on a les histogrammes, où est-ce qu'on voit que peu importe, par exemple... O.K., on l'a maintenant à l'écran. Donc, si vous regardez le graphique de droite, vous pouvez voir que, dans le graphique de droite, c'est la connaissance de la langue, donc ils connaissent le français, anglais seulement, ni français ni anglais. Donc, ceux qui ne connaissent ni le français ni anglais, on peut voir dans les autres catégories, par exemple la barre blanche ou la barre vert pâle, ça n'a pas l'air d'être un obstacle à leur présence au Québec, du tout. Par contre, quand on regarde chez les investisseurs, on regarde, puis c'est environ 10 % de présence.

Si on regarde du côté de la scolarité, on peut croire que plus on est scolarisé, plus c'est facile de se trouver un emploi, bien, même ceux qui sont les moins scolarisés, dans les autres catégories d'immigrants, qui est le graphique de gauche, bien les barres blanches et vertes sont aussi hautes que celles du côté droit, alors que, chez les immigrants investisseurs, l'éducation a un impact important sur leur présence. Donc, c'est de ça quand on parle de la sensibilité. Je ne sais pas si...

n(11 heures)n

M. Fortin (Pierre): Moi, j'ajouterais qu'il y a une affaire de coeur en arrière de ça, il n'y a pas juste une affaire de piastres puis de cennes. Ce qu'on veut, c'est que ces gens-là viennent ici, sentent qu'on les désire, qu'on les accueille, on les respecte sans passe-droits, et qu'une fois rendus ici, quand ils ont posé des questions, ça a pris deux jours à leur répondre et non pas deux ans, donc qu'il y a une certaine efficacité dans nos services administratifs, qu'ils sont désirés.

Par exemple, on peut travailler à développer les liens entre les entreprises, comme celle de M. Vézina, et les immigrants investisseurs qui ont contribué à son entreprise. Ça peut développer des liens. Ces gens-là, je veux dire, une fois qu'ils vont avoir apprécié l'accueil que le Québec va leur avoir donné, ils vont avoir le Québec dans leur coeur, ils vont être peinturés Québec d'un bord à l'autre, qu'ils se trouvent à Singapour, à Valparaiso ou à Khartoum. Je veux dire, c'est des gens... c'est des êtres humains comme tout le monde, et, bon, ils ne seront pas présents, ils vont faire partie du 50 % qui n'est pas là, mais ils vont faire des affaires qui éventuellement vont pouvoir rejaillir sur le Québec, et, encore, leurs enfants vont avoir été bien accueillis dans leurs écoles puis, dans la deuxième génération dont parlait Marc tout à l'heure, je veux dire, on va avoir des enfants qui vont avoir été élevés en conformité avec nos lois, la loi 101, et tout, et, bon, qu'ils vont poursuivre l'oeuvre du paternel ou de la maternelle, mais c'est surtout des paternels, hein, encore.

Donc, c'est comme ça qu'il faut voir les choses. Je ne sais pas, en termes de pourcentage...

Mme Morissette: Non, je comprends. Puis ma question était plus orientée vraiment: les incitatifs financiers, ou quelque chose comme ça, mais l'aspect que vous amenez est vraiment intéressant. Puis au niveau, je pense, aussi du quotidien, là, de simplifier administrativement, ça pourrait amener... D'autant plus, souvent, ces gens-là connaissent ni l'anglais ni français, s'embarquer dans une paperasserie, c'est peut-être un obstacle à...

M. Fortin (Pierre): M. Vézina est celui d'entre nous qui a vécu ces questions-là dans ses interactions, par exemple, avec Investissement Québec.

Mme Morissette: Voulez-vous compléter, M. Vézina?

M. Vézina (Jocelyn): Bien, nous, ça a été une belle histoire avec Immigrants investisseurs. Le programme, comme j'ai expliqué, nous a beaucoup aidés. Moi, je peux vous parler de rétention. La rétention s'est faite chez nous par les emplois qu'on a créés, les emplois que nous avons retenus. Ce sont des gens, chez nous, qui sont hautement scolarisés, hautement rémunérés. Et, nous, on a travaillé dans un premier temps directement avec les gens de la finance sur le premier programme, et par la suite on a travaillé avec Investissement Québec, et ça s'est très bien déroulé. On a eu des gens très coopératifs avec TSO3, ce sont des gens... un programme très flexible pour les entreprises. Et je vous rappelle qu'on ne peut pas trouver mieux qu'un investissement qui ne donne pas de dilution aux actionnaires. En fait, c'est sans coût pour l'entreprise, le programme investisseurs immigrants, et ça ne rapporte que des bénéfices, que des avantages. Alors, je ne peux pas vous dire mieux que ça.

Mme Morissette: Vous n'avez que des fleurs à lancer à Investissement Québec, c'est très bien. Je ne sais pas lequel d'entre vous va pouvoir me répondre. J'ai une question qui est peut-être un peu plus précise. Ce qu'on a compris d'avec ce que M. Vézina a dit, c'est que la collaboration des PME est extrêmement importante dans l'équation du programme dans son ensemble. Je ne sais pas qui pourra me répondre, en tout cas. On a su qu'il y a des nombreuses PME qui ont été cotisées par le ministère du Revenu dans les années 2002, 2003, 2004, 2005. Dans la foulée de ce programme-là, ça a été une interprétation un peu... bon, puis ça été une interprétation de la taxe sur le capital. Est-ce que quelqu'un sait où ces dossiers-là sont rendus maintenant ? il y a eu des corrections ? mais où c'en est rendu? Puis, notre crainte, je peux vous l'annoncer un peu, c'est que ça décourage les PME de s'embarquer dans ce processus-là. C'est des choses qui ont été mises en place sous le gouvernement du Parti québécois, prolongées par le gouvernement du Parti libéral, mais je voudrais savoir ce que vous savez là-dessus, finalement.

M. Audet (Marc): Je vais me permettre de répondre. Il faut juste bien comprendre pour ne pas mélanger les choses. Ce programme-là, au niveau... Oui, effectivement, certaines entreprises au Québec ont eu une petite surprise à un moment donné au niveau de la taxe sur le capital. Ça vient faire face au programme qui était en vigueur avant le 8 juin 2000, donc avant la venue d'Investissement Québec, en tant que tel, qui était un programme où les intermédiaires financiers, via les immigrants investisseurs, c'étaient des prêts directement qui étaient faits à une entreprise. Donc, comme TSO3 empruntait d'un immigrant, de M. Wong, de M. Lee, exactement. Depuis le 8 juin 2000, c'est une contribution financière non remboursable, donc c'était-u juste le montant escompté, la perte de rendement de l'immigrant qui est donnée directement. Donc, il n'y a plus de double montage financier.

Donc, au niveau taxe du capital, c'est un dossier... juste par les récentes politiques aussi de nos gouvernements qui fait que la taxe du capital diminue fait en sorte qu'il y en a de moins en moins qui ont été cotisés, et ceux qui ont été cotisés, il y a certains dossiers, là, qui ont été en appel. D'un autre côté, c'est un programme qui n'existe plus en tant que tel. Donc, on peut tourner la page, je pourrais dire, et c'est un peu pour ça qu'on a un nouveau montage financier, je vous dirais, dans l'ensemble, avec le gouvernement, pour ne pas que ce genre de chose revienne comme c'est arrivé avant 2000.

Mme Morissette: O.K., O.K., parfait. Parce que, moi, j'ai... c'est peut-être une certaine variation circonstancielle, là, mais dans votre tableau, à la page 10, on voyait qu'il y avait eu une hausse, mais ça semble plafonner au niveau du nombre de projets. Je pense que c'est M. Fortin qui en a parlé... je m'excuse, j'ai pris des notes des fois, au niveau, là, justement, du plafonnement qu'on risque d'atteindre, vous attribuez ça à quoi? Est-ce que c'est vraiment les contraintes que la ministre du Conseil du trésor au niveau des ressources qui sont allouées au ministère de l'Immigration ou est-ce qu'il pourrait avoir autre chose? Je vous laisse l'occasion d'élaborer finalement.

M. Fortin (Pierre): Notre homme du terrain va avoir une réponse.

Mme Morissette: Parfait. M. Audet, dans ce cas-là.

M. Audet (Marc): Mais, vous comprendrez, de façon générale, lorsque soit un gouvernement... lorsqu'on, entre guillemets, donne l'argent, je veux dire, à nos entreprises, les entreprises sont en ligne pour en bénéficier. Malheureusement, l'argent des immigrants, on ne l'imprime pas, il faut prendre un immigrant à la fois, il faut qu'il soit qualifié. À la suite, ça passe... en plus des autorités québécoises, on doit aller aux autorités fédérales, qui ont un délai aussi pour lequel il faut attendre et qui fait en sorte... et de façon générale, de façon, je dirais, planétaire, comme je vous mentionnais plus tôt, les immigrants investisseurs, il n'y a pas un nombre limité par année, qui dit, bon, qu'il y en a juste 5 000 dans le monde, puis Québec essaie de s'en accaparer une partie. Je vous dirais, là, le gâteau est aussi gros que le moyen qu'on va le travailler. Si, par exemple, je décide avec mon équipe de passer un mois de temps en Indonésie, on va en trouver, des clients en Indonésie, en tant que tel.

Donc, on peut... nous, notre rôle, la raison du partenariat avec Investissement Québec et le ministère, on fait un peu la promotion de trouver des niches, trouver des endroits où sont les gens, où sont les immigrants. Donc, si vous suivez un peu, comme M. Fortin le mentionnait, l'économie qui se passe un peu en Chine, à tous les jours, il y a des... peut-être dix nouveaux millionnaires par jour. Je lisais une revue justement avant-hier, on annonçait 150 000 Chinois qui valaient plus de 5 millions de dollars. Donc, ces gens-là, de plus en plus, si on fait une bonne promotion, on peut les attirer chez nous. Donc, si on en a plus, on peut en mettre plus dans le pipeline. Mais la capacité du ministère actuellement, ils ont un nombre limité d'officiers, il y a un «due diligence» qui a à être fait au niveau du travail de présélection, etc., qui fait en sorte qu'on ne veut pas... on crée certains goulot d'étranglement. Donc, si on a une meilleure capacité de traitement de dossiers, pour traiter un plus grand volume, bien on va avoir plus de fonds disponibles et on va pouvoir en faire bénéficier davantage à nos PME du Québec qui vont avoir... être davantage compétitives sur le marché international. Et j'apprécie le commentaire de M. Vézina, quand il a parlé, tantôt, de rétention. C'est effectivement, je pense, un prochain mandat peut-être de M. Fortin comme économiste: c'est quoi vraiment, l'impact de la rétention? Lorsqu'on mentionne les entreprises, on sait que l'Alberta recherche beaucoup d'emploi. On a certains Québécois qui s'en vont vers d'autres provinces, de garder ces emplois-là chez nous, ça vaut de l'or à mes yeux.

Mme Morissette: Est-ce qu'il me reste encore du temps? Oui?

Le Président (M. Simard): Vous avez encore deux minutes, là, presque deux minutes et demie, même.

Mme Morissette: Bon. Est-ce qu'il y a une file d'attente présentement au niveau des éventuels immigrants investisseurs qui se présentent à nos portes, ou bien vous cessez de faire de la prospection parce que le délai de traitement... Parce que j'imagine que ces gens-là n'ont pas de temps à perdre. Donc, quand ils arrivent puis c'est trop long, comment ça se passe, à ce moment-là?

M. Audet (Marc): Bien, je vous dirais, dans le secteur privé, on n'arrête jamais, donc on pèse tout le temps sur le gaz, excusez-moi l'expression. Si un programme fonctionne plus ou moins, il y a d'autres portes de sortie pour... donc on peut regarder vers d'autres provinces, en tant que tel. Actuellement, je pense, on a une très bonne collaboration avec le ministère de l'Immigration. De façon, je dirais, générale, les délais de traitement, pour le Québec, on parle d'environ, plus ou moins, peut-être huit mois. Donc, lorsqu'on dépose une demande d'immigration aujourd'hui, plus ou moins huit mois plus tard, le candidat a son entrevue et, s'il est accepté, il doit transférer ses fonds, ce qui est quand même très bien de... si on regarde de notre côté fédéral, il y a le même programme à Ottawa, et, à Ottawa, ils ont des délais peut-être de plus ou moins trois ans dans leur machine, en tant que tel.

Par contre, où le bât blesse sur notre côté, c'est beau que le client obtienne un certificat de sélection du Québec, qu'il a fait son investissement chez nous, mais il doit passer le statut à partir de... le côté statutaire, donc le médical et le sécuritaire auprès du fédéral. Et la finalité d'un immigrant, ce n'est pas un CSQ, c'est un visa, O.K.?, c'est avec son visa, et c'est là que je pense que le rôle du Québec devrait... c'est parce qu'on a des délais au côté fédéral. Donc, le côté, je pense, qu'il faudrait peut-être apporter au niveau du Québec, apporter un certain «push» pour aider à accélérer peut-être l'émission de visas, pour garder la compétitivité du programme du Québec.

n(11 h 10)n

M. Fortin (Pierre): ...chaleureuse pression sur le gouvernement fédéral pour s'activer un peu serait bienvenue.

Le Président (M. Simard): C'est terminé de ce côté-ci. Donc, j'invite le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques à poursuivre.

M. Lemay: Merci, M. le Président. À mon tour, je désire saluer les messieurs... leur présentation de forte qualité et aussi un dossier peut-être qui encore, hein, publiquement, on ne parle pas souvent. C'est très technique, c'est... et on voit que ça fonctionne. Donc, tant mieux, mais on voit également qu'il y a des défis importants, parce que justement ça fonctionne. Et, moi, ce que j'entends aujourd'hui de votre part, des gens qui êtes dans ce milieu-là, et je vais vous demander peut-être de réitérer certaines choses juste pour être certain qu'on a bien compris, en tout cas que, moi, j'ai bien compris.

Vous avez montré un graphique tout à l'heure, je pense que c'est M. Fortin, vous avez montré un graphique, qu'il y a une stagnation, là, depuis 2003-2004, 2004-2005, là, au niveau du... Bon, voilà. Peut-être nous réitérer un peu les... très certainement qu'il y a des raisons complexes, et tout, qui expliquent cette stagnation-là, mais peut-être nous le réitérer, là. Selon vous, là, sur le terrain, comment expliquer qu'un programme qui fonctionne, qui a des retombées, on l'a vu avec monsieur, qui a des retombées au Québec extraordinaires, comment se fait-il que ce programme-là stagne à l'heure actuelle? C'est un peu étonnant de voir ça.

M. Fortin (Pierre): C'est le... De la manière dont je le lis, c'est le frein au développement... à la disponibilité de ressources, c'est-à-dire que le programme a tendance à croître, l'attrait du Québec augmente avec le temps, les économies asiatiques se développent, comme mentionnait Marc tout à l'heure, tu as 10 nouveaux millionnaires par jour en Chine, il y a des gens qui veulent sortir une partie ou la totalité de leur argent, tout ça. Mais évidemment, si on veut augmenter, mettons, de... avec un potentiel de, je ne sais pas, de 10 % d'augmentation annuelle, puis que nos ressources comme agents d'immigration, par exemple, restent inchangées, bien là tout ce que ça peut faire s'il n'y a plus d'application, c'est que ça allonge les files d'attente et puis ça maintient les résultats aplatis.

Nous, notre souhait le plus cher après cette présentation-là, c'est que Mme Jérôme-Forget appelle Mme la ministre James et lui dise: Bien, écoute, je vais faire sauter ma règle «un nouvel employé seulement pour deux départs» puis je vais faire le contraire dans le cas du ministère de l'Immigration, notamment en raison du programme Immigrants investisseurs, pas seulement lui, là, mais c'est sûr... Et ça, d'ailleurs, c'est un point fondamental qui a été soulevé dans le débat politique. Il y a des gens qui disent: Oui, on veut plus d'immigrants, mais à condition que Québec y mette les ressources pour bien les accueillir, et je pense... C'est notre message fondamental, que les gens qui disent ça, ils ont parfaitement raison.

M. Lemay: Parce que, comme on l'a dit, M. le Président, c'est un débat, oui, quantitatif, bien sûr, avec les différentes catégories, mais également qualitatif, comment on fait le travail. Ma question s'adressait à monsieur du Mouvement Desjardins. J'ai bien compris? C'est ça?

Donc, vous, vous avez une équipe de démarchage à travers le monde qui rencontre ces gens-là et qui leur propose le Québec, et comme... Je pense que c'est important, ce que vous dites. Des gens d'affaires, il faut parler d'affaires, ça prend des gens d'affaires pour attirer ces gens-là.

Est-ce qu'on peut vous demander, sans rentrer dans les secrets de votre organisation, quel genre d'équipe vous avez? C'est des gens basés à travers le monde? Ou vous ciblez des endroits précis? Peut-être nous expliquer un peu la réalité, encore une fois sans rentrer dans les secrets de votre organisation, mais comment ça fonctionne exactement?

M. Audet (Marc): Bien, par exemple, chez nous, juste ici, à Montréal, on est une équipe de 25 personnes. On est les petites Nations unies du Mouvement Desjardins. J'ai une équipe qui parle 13 langues différentes, qui viennent de 10 nationalités différentes. On a une équipe aussi... J'ai quatre familles québécoises établies en Chine de façon permanente. C'est notre gros bassin. Donc, des Québécois de souche qui sont expatriés là-bas, et leur rôle, la manière qu'on travaille, nous, puis c'est la même dans toute l'industrie, c'est qu'on travaille avec un réseau de gens, parce que malheureusement on ne parle pas toujours la langue, on ne connaît pas toujours la culture, la façon de faire. Donc, on a des... on pourrait dire des conseillers en immigration ou ça peut être des consultants en immigration, ça peut être des avocats en immigration qui sont dans leur pays d'origine et qui font des séminaires, qui vont faire la promotion... qui peuvent faire la promotion soit de l'Île-du-Prince-Édouard, du Québec, de l'Australie, Nouvelle-Zélande.

Donc, nous, c'est tout par le package qu'on met en place, tout le soutien qu'on va leur donner qui fait en sorte qu'on leur dit: Bien, vous devriez privilégier à votre clientèle qui est intéressée d'aller dans un autre pays de les attirer vers le Québec. Donc, c'est sûr que, lorsqu'on parle à des gens qui sont établis à Singapour, ils ont peut-être un plus grand intérêt d'aller en Australie que d'aller au Canada, mais, quand on fait les points positifs de qu'est-ce que le Canada peut leur apporter, puis notamment le Québec... fait en sorte que, bon, ils les attirent davantage chez nous. Et tout le montage avec notamment le ministère de l'Immigration qui a deux bureaux de traitement des gens d'affaires à l'étranger, notamment un à Hong Kong et un à Damas pour le Moyen-Orient, fait en sorte qu'on peut donner un service que d'autres provinces n'ont pas nécessairement.

Donc, c'est un avantage que le Québec a notamment, puis je pense qu'on essaie de garder ce gap-là en tant que tel. Donc, c'est un peu une structure de gens qui sont dans différents pays et qui font la promotion du Québec. Donc, vous seriez surpris de voir le nombre de drapeaux du Québec ou du Canada dans différents pays, dans différents bureaux, dans différentes salles de conférence. Et souvent nous, qu'est-ce qu'on fait, on va sur place pour les supporter, pour passer le message en tant que tel au niveau du développement économique du Québec.

M. Lemay: Donc, ce que vous vivez sur le terrain, c'est d'une part, vous l'avez dit et vous avez insisté là-dessus à juste titre, je pense, c'est la compétition. Il y a une compétition farouche face à ces éventuels immigrants investisseurs. Donc, la qualité du service qu'on offre à ces gens-là est primordiale, parce que... Est-ce qu'on doit comprendre que la garantie que vous allez donner à ces gens-là que leur dossier va être traité assez rapidement, c'est fondamental dans le choix qu'ils vont faire? J'imagine. Est-ce qu'on peut dire ça?

M. Audet (Marc): Mais je vous dirai: à différents niveaux. La première étape, il faut que... Le programme du Québec est tributaire des règles de jeu du fédéral. Donc, les règles de jeu, comme Pierre Emmanuel a mentionné plus tôt, un immigrant investisseur doit avoir 800 000 $ d'équité nette, il doit avoir une expérience de gestion, il doit faire un placement de 400 000 $. Donc ça, c'est les règles qui nous sont dictées par le fédéral. Donc, c'est au fédéral de s'assurer que son programme lui-même de sa catégorie soit compétitif versus l'Australie, versus la Nouvelle-Zélande et autres, et, par la...

M. Fortin (Pierre): Au fédéral, c'est le filtrage médical et sécuritaire.

M. Audet (Marc): Donc, suite à ça, le Québec, là, c'est à nous par la suite de s'assurer que nos règles par rapport... Lorsqu'on dit: Oui, le Canada m'intéresse, bien on a notre service administratif de façon globale, le service qu'on offre. Donc, je pense, comme M. Fortin l'a mentionné plus tôt, je pense que l'entente tripartite que nous avons actuellement le ministère de l'Immigration et Investissement Québec et les intermédiaires financiers est unique, et c'est pour ça que ça fonctionne, et je pense que c'est ça qui fait qu'on rend peut-être d'autres provinces un peu... certains jaloux. Mais je pense qu'avec le partenariat privé-public c'est un beau modèle d'affaires en tant que tel, dans lequel je pense qu'on peut, oui, peaufiner certaines choses, mais je pense, oui, effectivement on peut rentrer de nouveaux immigrants au Québec pour le bénéfice de nos PME. C'est juste de voir qu'est-ce qu'on se donne comme orientations au niveau politique et économique au Québec.

M. Lemay: Une dernière question, M. le Président, et mon objectif n'est pas du tout de piéger qui que ce soit avec ma question, mais: Comment c'est perçu, comment c'est vécu, cette espèce de pouvoir concurrentiel, là? Il y a vous, il y a Investissement Québec, il y a le gouvernement du Québec, il y a le ministère de l'Immigration et il y a le fédéral qui, lui, a ses propres règles, a effectivement les enquêtes, fait les tests de santé puis les enquêtes de sécurité, et ça, quand ça commence, on ne sait jamais trop, trop quand ça peut terminer. Mais comment c'est perçu, ça? Et encore une fois ce n'est pas du tout... je veux savoir comment c'est vécu sur le terrain, là, ces espèces de pouvoirs, qui, souhaitons, ne sont pas contradictoires, là, mais...

M. Fortin (Pierre): Je pense que, du côté québécois, les immigrants investisseurs sont parfaitement conscients que, même s'il y a trois, quatre organismes qui sont impliqués, je veux dire, tout le monde marche la main dans la main, là, tu sais. Je pense que le Québec fait sa job, évidemment, encore une fois, dans les limites des ressources qui sont consacrées à ce programme-là. Bon, en ce qui concerne les relations avec le fédéral, je pense que Marc est plus à même que moi de le dire, mais il semble que les délais soient un peu plus longs de ce côté-là.

n(11 h 20)n

M. Lemay: Donc, si je comprends bien, et je termine là-dessus, M. le Président, le fédéral fixe les règles du début, ce que vous avez dit tout à l'heure, là, l'équité, la somme, et tout, et revient dans le portrait à la fin, quand le certificat est émis, et là il y a les tests de santé et l'enquête de sécurité sur la personne.

M. Fortin (Pierre): Mais le délai du début peut s'allonger, dans la mesure où, là, la demande est en train d'augmenter rapidement, si on n'a pas les ressources pour y répondre.

M. Lemay: C'est ça, exactement. D'accord, merci. Merci encore, messieurs.

M. Fortin (Pierre): Moi, je voudrais tout simplement juste faire une petite conclusion, M. le Président. Le principal message qu'on a à dire, c'est: Le Québec est en marche, il ne faut pas l'arrêter.

Le Président (M. Simard): Ça vaut dans bien des sujets. Je vous remercie beaucoup. M. Fortin et vos collègues qui vous accompagnent, merci beaucoup, un travail remarquable. Nous avons les documents, et soyez certains que la commission tiendra largement compte de vos commentaires. Merci beaucoup.

Et j'invite immédiatement le groupe suivant à venir prendre place. Il s'agit de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Simard): Nous allons pouvoir commencer. Nous avons donc une intervention ce matin d'un groupe qui est fréquemment en commission parlementaire, qui joue un rôle important justement dans ce dialogue avec différents secteurs de la société et l'Assemblée nationale, il s'agit de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Les représentants qui sont avec nous aujourd'hui: Simon Prévost, vice-président, Québec, et André Lavoie, analyste principal des politiques. Vous allez nous dire qui est qui, même si on le sait, et nous allons vous écouter. Vous connaissez la règle, 15 minutes pour nous donner l'essentiel de votre message.

Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante (FCEI)

M. Prévost (Simon): Tout à fait. Merci, M. le Président. Alors, mon nom est Simon Prévost, je suis, comme vous l'avez dit, vice-président, Québec; mon collègue, André Lavoie.

Écoutez, même si effectivement on est des invités fréquents de toutes sortes de commissions parlementaires, je vais prendre 15 secondes pour présenter la FCEI pour ceux qui ne la connaîtraient pas. Alors, la FCEI, c'est l'organisme patronal qui défend les intérêts des PME au Québec et aussi ailleurs dans le Canada. En ce qui nous concerne, on a 24 000 PME membres de notre organisation au Québec et 105 000 à l'échelle canadienne. Essentiellement, on est une organisation à but non lucratif, et la façon pour nous de défendre les intérêts de nos membres, c'est de les sonder régulièrement, c'est notre marque de commerce.

D'entrée de jeu, pour ce qui est du sujet qui nous occupe aujourd'hui, il nous apparaît important de préciser que l'immigration est un des moyens prometteurs à notre avis de revitaliser notre force de travail. Dans le cadre des travaux de la commission, la FCEI a jugé qu'il était important de communiquer aux parlementaires l'information qu'elle détenait quant à la pénurie de main-d'oeuvre dans les PME et à l'expérience vécue par les dirigeants des PME qui ont eu recours à l'immigration comme moyen de recruter des travailleurs dans leur entreprise. Donc, c'est vraiment sous cet angle-là que nous voulons, nous désirons intervenir, M. le Président, aujourd'hui. Donc, vous aurez deviné que nous ne nous prononcerons pas sur les niveaux d'immigration comme tels.

Les différentes informations que nous allons vous transmettre aujourd'hui sont basées sur une série de sondages récents que le FCEI a menés à la grandeur du pays, évidemment avec une forte proportion de répondants du Québec. Les résultats de ces sondages sont à notre avis particulièrement importants pour les travaux de la commission, puisqu'ils fournissent des éléments essentiels à la détermination du type d'immigrants qui devraient joindre les rangs de la population active pour mieux répondre aux besoins des PME.

Ces sondages nous ont permis de réaliser un portrait de la pénurie de main-d'oeuvre dans les PME du Québec, d'identifier évidemment par la même occasion le type de compétences qui étaient recherchées par les dirigeants de PME et éventuellement d'évaluer l'adéquation entre les immigrants sélectionnés par le système d'immigration et la demande d'employés dans les PME. J'y reviendrai plus précisément dans un instant.

Par ailleurs, d'autres données nous fournissent des informations très utiles quant à l'expérience vécue, M. le Président, par les dirigeants de PME qui ont eu recours à l'immigration comme moyen de recruter de la main-d'oeuvre dans les rangs de leurs employés. On y traite notamment des méthodes de recrutement, d'une part, qui sont utilisées par les dirigeants de PME, des principaux obstacles posés par les systèmes d'immigration et plus globalement de l'expérience d'intégration des nouveaux immigrants dans les PME du Québec. Finalement, nous allons terminer notre intervention par un bref commentaire sur la question des immigrants investisseurs, sous l'angle des moyens qui devraient être mis en place pour mieux les attirer au Québec et les inciter à y demeurer. Évidemment, ce ne sera pas une réplique de l'intervention que vous venez d'avoir, c'est un simple commentaire que nous allons baser sur les informations que nous avons recueillies lors de nos sondages.

D'abord, revenons sur la question de la pénurie de main-d'oeuvre. Avec le vieillissement de la population et le choc démographique qui en découle, la pénurie de main-d'oeuvre sur le marché du travail est un des sujets dont on a parlé le plus souvent dans les médias, sur le plan économique à tout le moins, au cours des dernières années, et ça a des répercussions sérieuses sur les PME et éventuellement bien sûr sur les perspectives de croissance économique.

Je ne vous cacherai pas qu'au sein des préoccupations des PME qu'on sonde, nous, depuis plus de 30 ans, la pénurie de main-d'oeuvre n'était absolument pas sur l'écran radar il y a une dizaine d'années, a commencé à y apparaître il y a cinq ans et elle est rendue parmi le top 3, comme on dit, des priorités des PME au cours des dernières années. À l'heure actuelle, certaines entreprises nous disent par ailleurs que la pénurie de main-d'oeuvre les empêche de développer de nouveaux marchés, les empêche d'accepter de nouveaux contrats. Donc, ce sont autant d'occasions économiques, de développement économique qui sont perdues.

Depuis quelques années, on a donc voulu savoir un peu plus ce qui en retournait de la pénurie de main-d'oeuvre, on a demandé à nos membres de préciser le nombre de postes restés vacants dans leur entreprise pendant plus de quatre mois. Et on s'est rendu compte que, l'année dernière, par exemple, au Québec, c'est plus de 32 000 postes qui ont été vacants pendant plus de quatre mois, et c'est particulièrement criant dans les petites, petites entreprises, qui ont moins de moyens pour aller combler les postes, qui sont moins équipées évidemment en ce qui a trait aux ressources humaines et dans le fond à la gestion de tout ce qui s'appelle la dotation de postes lorsqu'ils se libèrent. Donc, effectivement, c'est une préoccupation qui est particulièrement importante. Et évidemment, quand on fait le lien avec l'immigration, eh bien il va falloir se poser la question: Comment aider ces petites entreprises ? je ne parle pas de celles de 50 ou 100 employés mais véritablement celles de moins de 50 employés ? comment on peut les aider à utiliser l'immigration comme moyen pour combler ces pénuries de main-d'oeuvre?

Alors, pour avoir une meilleure idée encore et pour pouvoir évaluer l'adéquation entre la pénurie de main-d'oeuvre et ce qui est offert par le système d'immigration en termes d'immigrants économiques permanents ? ici, on ne parlera pas des travailleurs temporaires ? on a vérifié quels étaient les besoins des PME. Alors, ce qu'on a constaté, c'est que 42 % des entreprises ont une pénurie dans les professions qui exigent une formation collégiale ou un programme d'apprentissage, donc un métier dans ce cas-là. On a 37 % qui, eux, cherchent des gens qui ont une formation de niveau secondaire ou deux, comme on l'a vérifié dans notre sondage, deux ans de formation en cours d'emploi. Alors là, on parle aussi encore une fois, par exemple, des diplômes d'études professionnelles, et souvent dans les secteurs des métiers, par exemple soudeur, plombier, machiniste, ce genre de métiers. Donc, 13 % des répondants par ailleurs ont besoin d'un poste qui demande une formation en cours d'emploi.

Alors, globalement, quand on fait le constat global, c'est que c'est plus de 50 % des besoins des PME qui ne nécessitent pas plus qu'un diplôme de niveau secondaire. Évidemment, ça peut être des emplois qualifiés quand même, mais la formation à ce moment-là se fait en cours d'emploi, sur le tas, peut-être à travers des programmes de formation institutionnalisés mais une fois qu'on a trouvé un emploi. Donc ça, ça colore pas mal les besoins des PME.

n(11 h 30)n

Et ce qu'on a constaté par ailleurs, c'est que, du point de vue des employés professionnels, c'est 6 % seulement des besoins des PME. Et là ce qu'on a fait, c'est qu'on a fait un recoupement avec les données du ministère de l'Immigration à savoir, pour l'année 2006, qu'est-ce qu'on avait eu comme immigrants, et ce qu'on a constaté, c'est que, même si plus de 50 % des besoins sont tournés vers une main-d'oeuvre qui a une formation soit sur le tas et pas plus qu'un diplôme secondaire, eh bien on a très peu d'immigrants de ce côté-là. Alors, dans le cas du Québec, là, c'est plus de 50 % des immigrants qui en réalité avaient des qualifications professionnelles; ça, c'est juste 6 % des besoins des PME. Évidemment, on reconnaît qu'il y a eu des efforts qui sont faits, il y a eu des critères, la grille de sélection a été modifiée récemment, et le moins qu'on puisse dire, c'est que ça n'a pas eu encore d'effet sur le terrain, on verra à l'avenir si ça a eu des effets. Mais disons que, pour le moment, ce qu'il faut constater, c'est qu'il y a encore loin de la coupe aux lèvres pour avoir une immigration qui réponde directement aux besoins des PME.

Si on regarde de l'autre côté, les autres éléments qu'on avait vérifiés, du point de vue de l'expérience, du point de vue de l'embauche des immigrants, eh bien ce que l'on a constaté et ce qu'il est intéressant de noter, c'est que les méthodes de recrutement employées généralement par les PME ne sont pas différentes, qu'il s'agisse d'un immigrant ou d'un travailleur qui n'est pas un immigrant, les autres employés.

En fait, quand je dis «ils ne font pas de distinction», c'est une pluralité, disons, c'est plus du tiers des employeurs qui ne font absolument aucune différence. Par contre, pour les autres, dans l'ensemble, ceux qui ont été interrogés, il y a plusieurs obstacles qui ont été identifiés. Les principaux problèmes sont la complexité du système, la multiplication des formalités administratives, la difficulté de garder en emploi des immigrants ayant un statut temporaire. Donc ça, évidemment, il y a eu des modifications aussi qui ont été apportées, tant au niveau du Québec qu'au niveau du fédéral. Et là, là-dessus, il faudrait voir ? et je mets un gros bémol sur cette préoccupation-là, c'était une préoccupation lorsqu'on a fait le sondage ? il se pourrait que, du côté des employés temporaires, les données d'un nouveau sondage dans un an, dans deux ans, seraient substantiellement plus favorables. Retard dans les traitements de demandes dans les ambassades, etc., ce sont les types d'obstacles qui ont été identifiés dans nos études.

On a aussi constaté qu'il faut, du point de vue des PME, redoubler d'effort du point de vue des services d'accueil et d'intégration. C'est d'ailleurs tout aussi important pour le travailleur immigrant que pour ses collègues qui l'accueillent dans une entreprise. Il n'est donc pas surprenant dans ce contexte-là de voir que, malgré l'existence des services d'accueil et d'intégration, de plus en plus de dirigeants de PME font des efforts particuliers pour mieux intégrer les travailleurs immigrants qu'ils embauchent. De manière plus pointue, les principaux obstacles à l'intégration qui ont été notés, c'est qu'un peu plus de la moitié des membres ayant embauché un immigrant au cours des cinq dernières années ont affirmé avoir fait face à des problèmes, quel que soit le type d'immigrant embauché. Donc ça, c'est un constat de départ, la moitié ont dit qu'ils avaient eu des problèmes d'intégration.

De manière plus spécifique, les barrières linguistiques ont été mentionnés par deux PME sur trois. Les relations difficiles avec les autres employés en raison de différences culturelles et religieuses ont été mentionnées par une PME sur trois. Ça, ce sont les deux éléments les plus souvent mentionnés en termes d'intégration. On parlait tantôt des obstacles globaux à l'embauche d'immigrants, une fois qu'on les a embauchés, il y a un problème d'intégration, et ce sont les deux principaux aspects qui ont été mentionnés. Par ailleurs, comme de nombreux immigrants ont laissé derrière eux leurs familles, leurs amis, leur culture, ont dû assumer des coûts importants pour venir s'installer ici, plusieurs dirigeants de PME ont compris l'importance de les aider. Donc ça, c'est assez important aussi de le noter: Il est important que le milieu se prenne en charge aussi pour accueillir des immigrants, bien que ce ne soit pas... Il est évident aussi par la même occasion que ce n'est pas aux dirigeants de l'entreprise de porter le fardeau principal de l'intégration des immigrants, c'est un rôle social qui doit être assumé en bonne partie par l'État aussi. À la mesure de leurs moyens, c'est le tiers des PME qui ont embauché des immigrants qui ont essayé de leur faciliter les choses en leur offrant une certaine assistance. Quel type d'assistance? 42 % d'entre eux ont fourni une formation linguistique; il y a plus du tiers d'entre eux qui ont fourni une aide à l'établissement, par exemple, en trouvant un hébergement.

En terminant, on veut revenir sur un point qui faisait référence aux immigrants investisseurs. C'est le dernier point, M. le Président, qu'on veut aborder avant de répondre aux questions. Il y a carrément, dans le document de consultation du ministère, un constat qui est fait sur les faibles volumes d'admission au chapitre des immigrants investisseurs, de la difficulté à les retenir au Québec. D'après le ministère, et là je cite: «La hausse des admissions des gens d'affaires passe nécessairement par une amélioration de la performance du Québec au chapitre de la rétention des immigrants investisseurs.» Alors, qu'est-ce que ça veut dire, ça? Ça veut dire que parfois on les sélectionne, mais ils ne restent pas ici, et finalement ils finissent par ne jamais s'établir.

Par ailleurs, en ce qui a trait aux immigrants entrepreneurs et travailleurs autonomes, le document du ministère, encore une fois, trace un portrait plutôt sombre de la situation. Le ministère admet à ce niveau que les résultats ne sont pas au rendez-vous, de telle sorte qu'une réforme en profondeur s'impose. Comme vous le savez sans doute, toutes les actions de la FCEI ont toujours été guidées par l'importance de créer un climat économique favorable pour les gens d'affaires du Québec et de laisser libre cours à leur volonté d'entreprendre à l'intérieur d'un cadre de règles souples qui tiennent compte de la réalité quotidienne. Il va donc de soi que nous profitions de l'occasion qui nous est donnée aujourd'hui pour lancer un appel à l'importance d'alléger le fardeau fiscal et réglementaire des PME, qu'elles soient dirigées par des gens d'ici ou par des immigrants qui choisissent le Québec comme terre d'accueil.

Alors ça, ce que ça signifie, là, si je vous traduis ça en bon québécois, c'est que l'attractivité ? pour utiliser du mauvais français ? du Québec comme un lieu d'investissement évidemment n'est pas... est mise à mal par l'effet que la fiscalité des entreprises, notamment les PME, y est largement défavorable et aussi du fait que le fardeau réglementaire est particulièrement important. Donc, on appelle ça ici des conditions objectives pour faire des affaires au Québec, et ça, ça vaut pour tous les investisseurs, qu'ils soient immigrants ou non. Alors ça, c'est un frein non seulement à l'arrivée d'immigrants investisseurs, mais au développement économique tout court. Donc, évidemment, l'occasion était trop belle de le rappeler. Si on veut avoir un succès avec les immigrants économiques en général et avec les immigrants investisseurs en particulier, il faut améliorer substantiellement les conditions objectives pour faire des affaires au Québec.

En conclusion. Malgré un problème de pénurie de main-d'oeuvre de plus en plus criant nécessitant la recherche de solutions durables, la filière de l'immigration est malheureusement relativement peu utilisée par les PME, notamment évidemment dans l'entreprise de plus petite taille et bien sûr, vous vous en douterez, par celles qui sont en région. Les PME qui ont tenté l'expérience se sentent souvent exclues du processus d'immigration, puisque le système favorise particulièrement les immigrants ayant fait des études supérieures et possédant les qualifications universitaires évidemment sans tenir compte de leurs perspectives d'emploi nécessairement. Alors ça, c'est le cas des gens qui arrivent surqualifiés et qui ne trouvent pas nécessairement d'emploi dans leur domaine, qui vont devoir travailler dans des domaines où ils sont surqualifiés pour l'emploi, et ça, M. le Président, à notre avis, ce n'est pas les bases d'une immigration réussie. Une immigration réussie, on doit faire venir des gens qui sont qualifiés pour leur emploi, qui vont se trouver un emploi, vont faire venir leur famille, si elle n'est pas déjà avec eux, et ils vont être épanouis dans leur nouvelle terre d'accueil, et c'est ce que le système d'immigration évidemment devrait viser à faire. Si la barrière linguistique par ailleurs ainsi que les différences culturelles et religieuses avec les autres employés ont été perçues comme des obstacles à l'intégration des immigrants et en définitive bien sûr à leur recrutement éventuel, évidemment que des changements de mentalité s'imposent notamment dans la sélection des immigrants ainsi que dans les mesures de soutien à l'accueil à l'intégration, comme on l'a mentionné.

Finalement, j'aimerais conclure, M. le Président, par cinq recommandations que nous aimerions formuler au gouvernement à l'heure actuelle:

1° s'assurer que le processus de sélection soit modulé avec précision ? et j'insiste sur le mot «précision» ? de manière à répondre aux besoins du marché du travail. Comme je l'ai mentionné tantôt, il y a déjà des pas qui ont été faits dans cette direction-là. Maintenant, il faut aller beaucoup plus loin, c'est-à-dire qu'il faut vraiment vérifier quels sont les besoins et de s'assurer qu'il y ait une adéquation entre les besoins de main-d'oeuvre et la sélection des immigrants. Donc, on salue au passage, disons, la tendance actuelle, au ministère de l'Immigration, de se diriger vers une immigration qui soit plus sélective, mais je crois qu'on en est à peine aux premiers balbutiements d'une telle approche, et il faut aller plus loin;

2° réduire dans la mesure du possible les formalités administratives liées à l'immigration;

3° miser sur l'immigration comme moyen d'accroître notre prospérité et donc maintenir une fiscalité compétitive et un processus administratif flexible;

4° miser sur l'immigration pour préparer la relève des dirigeants de PME et adapter le Programme investisseurs immigrants afin de favoriser la relève entrepreneuriale. Alors ça, c'est un «twist», si vous me permettez l'expression, qu'on pourrait donner au programme, qui serait fort intéressant et utile pour l'économie du Québec. Et en terminant, M. le Président, il importe d'inciter les employeurs à évaluer leur rôle dans l'embauche et la rétention des immigrants et de leur fournir de meilleurs services d'accueil et d'intégration pour qu'ils puissent embaucher davantage d'immigrants. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard): Je vous remercie beaucoup. Vous avez été, à quatre secondes près, parfaitement discipliné. J'invite la ministre à en faire autant.

n(11 h 40)n

Mme James: Alors, je vais faire mon possible, M. le Président. Merci beaucoup, M. Lavoie et M. Prévost, merci beaucoup de votre présentation. Écoutez, vous avez... Je vais y aller direct au but. Vous avez soulevé plusieurs aspects importants, notamment la question de relève entrepreneuriale au Québec, et je tiens à le dire d'entrée de jeu que nous sommes, tous ici, je crois, très bien... très sensibilisés face aux problématiques et aux enjeux touchant à ce secteur et face à cette intégration-là. Alors, vous me permettrez dans un premier temps d'aborder la question très directement avec vous.

D'une part ? puis vous l'avez mentionné dans votre présentation ? vous savez que le gouvernement a fait beaucoup au niveau de la modification de la grille de sélection pour s'assurer justement d'un meilleur arrimage, hein. Elle est entrée en vigueur ça va faire un an au mois d'octobre. Évidemment, pour que les effets de cette modification-là se reflètent dans des statistiques, évidemment ça prend un certain temps, parce qu'on sait très bien que, du moment où l'immigrant est sélectionné par le Québec, son admission peut aller d'un an jusqu'à un an et demi, grosso modo, là. Mais, pour revenir à cette question-là, compte tenu du fait que nous avons effectué cette modification-là justement pour s'assurer d'accorder une intensité, je dis, de points au niveau d'une formation technique qui répond aux besoins ici, au Québec, j'entends que vous ne voyez pas des effets sur le terrain. Moi, ma première question pour vous serait de dire: Vous voulez aller plus loin. Mais concrètement, pratiquement, comment est-ce qu'on pourrait intensifier davantage au niveau de la sélection des immigrants?

M. Prévost (Simon): Bien, d'abord, effectivement vous avez raison sur le fait qu'il est probablement trop tôt pour en voir les effets sur le terrain, d'un tel changement à la grille. Et donc on en est très conscients. D'ailleurs, dans un rapport qu'on publiait l'année dernière, à la FCEI, sur l'immigration en général au pays, on avait spécifiquement fait part de ces modifications récentes à la grille et aux critères. Notre sondage donc date de 2006. Évidemment, donc, on était aux tout premiers pas de la mise en place de cette nouvelle grille là.

Ce qu'on veut dire aujourd'hui: d'abord, comme je l'ai mentionné, on veut saluer cette orientation-là. Ceci dit, quand on dit qu'on veut aller plus loin et... Bien, peut-être une petite parenthèse avant que je poursuive. C'est clair qu'en ce qui nous concerne c'est quelque chose qu'on va revalider évidemment au cours des prochaines années, là, donc, mais, quand je dis «au cours des prochaines années», il faut laisser le temps aux choses d'évoluer. Ceci étant dit, ce qu'on voulait faire ressortir à nouveau aujourd'hui, d'abord c'est l'importance du fossé, qui existait encore l'année dernière, et de peut-être insister là-dessus ? puis c'est notre première recommandation ? pour qu'il y ait peut-être plus de discussions entre le milieu des entreprises, et spécialement des PME, parce que ce sont elles qui véritablement sont les laissées-pour-compte, et le ministère. D'ailleurs, on travaille avec certains fonctionnaires de votre ministère à cette question-là. Mais ce qu'on veut, c'est réitérer l'importance d'aller dans cette direction-là, de se coller davantage aux besoins. Donc là, ce qu'il s'agirait de faire, ce n'est pas une question d'orientation, c'est une question d'intensité.

Donc, il y a des premiers pas qui ont été faits. Peut-être que ce serait déjà, un an plus tard, le temps de se rasseoir puis voir comment les besoins spécifiques des entreprises, comment sur le terrain, comment en région on est allé voir quels sont ces besoins-là, pour s'assurer qu'on ait les mécanismes en place pour vraiment, là... Au niveau du terrain, il faut que ça atterrisse. Parce qu'on fait des réformes, vous le savez, M. le Président, qui sont des réformes à des très hauts niveaux, stratosphériques, là, mais après ça il faut que ça atterrisse sur le terrain, et c'est notre préoccupation: que ça atterrisse bien sur le terrain, que ça atterrisse autant à Montréal, à Québec que dans les régions, et c'est le message qu'on voulait lancer avec notre première recommandation.

Mme James: Alors, je suis d'accord avec vous sur ce point, qu'il faut y aller dans une perspective où on se doit d'évoluer constamment et d'évaluer l'efficacité des mesures ou des changements qu'on fait. Mais, en même temps, avec la grille, vous convenez qu'il faut quand même faire en sorte de laisser un peu de temps passer pour s'assurer que tout fonctionne bien sur le terrain, comme vous dites, puis toujours dans une perspective de vouloir améliorer.

J'ai écouté évidemment attentivement toute votre présentation, mais tout particulièrement quand vous avez parlé de cette question d'intégration de l'immigrant aux entrepreneurs. Vous savez que c'est une collaboration qui s'est faite et avec le ministère de l'Immigration et avec celui d'Emploi-Québec pour faire en sorte que les gens... que des nouveaux arrivants, des immigrants autant que des gens des minorités visibles, puissent avoir une expérience de travail dans des petites et des moyennes entreprises québécoises. On sait que c'est quelque chose qui fonctionne bien. Déjà, juste depuis l'annonce de ce programme, c'est plus de 900 personnes qui ont pu bénéficier de l'expérience, et on a pu constater que 76 % des gens qui ont eu l'expérience ont pu décrocher un travail permanent.

Alors, dans la perspective que vous avez évoquée de vouloir arrimer ou de vouloir rapprocher et l'immigrant et les entrepreneurs ou des petites et moyennes entreprises québécoises, je pense que c'est un exemple de quelque chose qui fonctionne bien. Je ne sais pas si vous avez des échos là-dessus. Vous me permettrez... Je vais déjà embarquer sur la question... moi, je dis de gestion de la diversité, parce que, peu importe la personne qui lit, le fait... C'est 20 %, que je crois, que j'ai lu, que seulement 20 % des dirigeants ont mentionné avoir embauché un immigrant au cours des cinq dernières années, et on a vu que plus de la moitié des dirigeants d'entreprise ayant embauché un immigrant au cours des cinq dernières années ont mentionné avoir expérimenté des problèmes. Je crois là que vous avez... vous l'avez dit... vous l'avez mentionné sous la question d'intégration, mais, moi, je vois ça aussi dans la question de gestion de diversité, dans le fait que nous sommes dans une société qui est plurielle, et comment les entreprises québécoises autant que l'immigrant qui a ce devoir de s'intégrer, comment est-ce qu'on pourrait mieux travailler ensemble pour faire en sorte que cette gestion-là fonctionne bien.

Je sais que vous avez évoqué quelques solutions, recommandations ou discussions avec le ministère, peut-être nous dire un peu comment avancent les travaux à ce niveau-là, puis les recommandations que vous pourrez faire en ce sens, parce que, comme vous l'avez dit, évidemment on veut s'assurer de bénéficier de ce talent des gens qui choisissent de venir travailler ici.

M. Prévost (Simon): D'abord, s'il faut... si on revient sur le chiffre... Effectivement, le chiffre est un peu faible, hein, effectivement, du nombre de PME qui ont engagé un immigrant au cours des cinq dernières années. Donc, on parle de 20 %.

Là, il y a une question à savoir est-ce que c'est un manque de volonté des PME d'engager des immigrants ou si c'est le fait, par exemple, que les immigrants se retrouvent très géographiquement concentrés? Donc, ce qui est clair pour nous, c'est qu'il y a une problématique d'intégration qui se manifeste davantage dans les régions, et effectivement ce qu'on pourrait répondre à ça rapidement, c'est de dire: 20 %, oui, et, moi, j'ai 60 % de mon membership, à la FCEI, qui se trouve dans les régions. Évidemment, s'il n'y a pas d'immigrants, on voudrait en engager, il n'y en a pas, on ne peut pas faire grand-chose, hein?

Donc, d'une part, il y a un examen de conscience de la part des dirigeants de PME face à leur utilisation de ce bassin de main-d'oeuvre qui, même si jusqu'à maintenant n'était pas tout à fait arrimé à leurs besoins, peut être quand même employable, et le fait que... donc on ait des difficultés à les intégrer une fois qu'on a fait ce choix-là. Donc, la problématique, elle se situe à deux niveaux. Ce qui est certain, c'est qu'à partir de maintenant est-ce qu'il s'agit... ce n'est pas de déterminer dans le fond à qui la faute, là. Ce qui est clair, c'est que ce qu'on ressent, nous, quand on pose la question à nos gens, c'est que ceux qui sont spécialement en région et qui voudraient engager des immigrants ont l'impression que c'est extrêmement difficile, qu'il n'y a pas d'offre de travailleurs immigrants dans ces régions-là, que, si on voulait en avoir, que les services d'intégration ne sont probablement pas disponibles.

Je vous parle de perception. Peut-être qu'ils existent. Il y a une question de communication à l'heure actuelle, et je pense qu'il y a beaucoup de travail à faire de ce côté-là. Et, quand je dis qu'il y a un travail à faire du côté des entrepreneurs, un examen de conscience, bien je pense qu'il y a aussi un exercice de communication à faire aussi autant de notre part par ailleurs, et c'est pour ça qu'on s'est intéressés à la question, parce qu'on y voyait, comme je le disais, une façon extrêmement intéressante de venir bonifier notre marché du travail. Et donc autant de notre part en faisant, comment je dirais, en faisant la promotion de l'utilisation des immigrants comme travailleurs que, de la part évidemment du gouvernement, spécialement pour amener les immigrants en région et faciliter leur intégration dans un tel contexte.

Ce qui est clair, c'est qu'à l'heure actuelle, quand on parle de perception, on ne voit pas les effets de tous les efforts qui peuvent être consentis par le gouvernement du côté de l'intégration. Donc là, encore une fois, je pense qu'il faut... il va falloir gratter un peu plus profondément, là, pour bien comprendre où le bât blesse. À l'heure actuelle, ce qu'on a à vous proposer dans ce cas-ci, ce ne sont que des constats. Voici ce qui se passe, la réalité sur le terrain. Mais je pense que la prochaine étape, autant de votre part que de notre part, c'est d'essayer de comprendre les raisons profondes. Alors, c'est vraiment comme un portrait qu'on a dressé ici, mais c'est clair que ce n'est pas la fin de... Ce n'est pas le dernier mot; en fait, c'est le premier mot de l'histoire. Donc, il faut poursuivre.

n(11 h 50)n

La question de la francisation est aussi majeure quand on sort de Montréal ou même de Québec, mais même, je dirais, dès qu'on sort de Montréal, la question de la francisation est absolument cruciale. C'est pourquoi d'ailleurs il y a un fort pourcentage de dirigeants de PME qui ont engagé des immigrants qui ont senti le besoin eux-mêmes d'offrir une formation linguistique plus spécifique à leurs travailleurs immigrants. Donc ça, là, encore c'est une sonnette d'alarme. Ça veut dire: Est-ce qu'on a un problème avec les programmes de francisation? Je ne veux pas me prononcer directement là-dessus, mais encore là on a une évidence indirecte que ça ne semble pas suffisant, du point de vue des propriétaires de PME, et donc ils sentent le besoin d'en rajouter. Donc, peut-être un examen aussi à faire de ce côté-là.

Mme James: Vous me permettez de vous poser une question sur la question de la francisation, puis on reviendra peut-être sur la question de gestion de la diversité, parce que je trouve ça intéressant, ce que vous dites. Vous parlez du fait que vous voyez, face à une formation linguistique, un besoin à ce niveau-là, puis, lorsqu'on regarde les chiffres des dernières années, puis que ce soient 18 000 personnes, déjà cette année, qui ont pu bénéficier de la francisation et qu'il n'y a plus de liste d'attente à ce niveau-là, et que 60 % des gens ont une connaissance du français... Dans la dernière année, je vous dirais, on a consenti beaucoup d'efforts à répondre dans la façon... Ce n'est pas juste le fait d'offrir le français, mais d'offrir des cours de francisation puis de faire en sorte que les gens parlent, mais on veut que ce soit adapté dans leur milieu, avec les entreprises, avec vous. Est-ce que vous avez fait cette réflexion-là, ou peut-être vous allez le faire dans l'avenir?

Quels sont les moyens qu'on pourrait peut-être considérer, en partenariat avec le gouvernement ou même avec les organismes, pour s'assurer d'offrir un meilleur service ou un service spécialisé qui va répondre aux besoins des nouveaux arrivants et de vos besoins de vouloir intégrer quand même rapidement? On est dans le milieu des affaires, et on comprend très bien, pas pour trop résumer, qu'une intégration réussie, ça passe par quelqu'un qui peut bien parler français et qui peut travailler. Alors, est-ce que vous avez des idées à comment est-ce qu'on peut assurer une meilleure collaboration ou convergence de ces deux sujets importants, dans votre milieu?

M. Prévost (Simon): Ce qu'on constate, M. le Président, à cet égard-là, c'est que... Il y a peut-être une connaissance... encore une fois, c'est une question géographique. Enfin, il y a peut-être une connaissance et un bon degré de francisation, quand on est une PME, en quelque part, sur l'île de Montréal... Il semblerait, selon nos données encore une fois, que, dès qu'on sort de l'île de Montréal, on a peut-être un problème de... comment je dirais, pas de perception, mais de connaissance, carrément. Je ne suis pas certain que les différents programmes d'intégration soient largement connus, d'une part, dans les PME en général, peu importe où c'est situé, et spécialement si on est en région. Et là on est dans une problématique. C'est clair et net que, si je suis chez Desjardins ? on les connaît tous, ils ont un service de ressources humaines ? tous les programmes qui existent, possibles et imaginables, pour intégrer les immigrants sont connus, et, quand on tombe dans la PME, les dirigeants de PME, qui portent tous les chapeaux, qui en plus doivent veiller à la production dans l'entreprise, il faut aller les rejoindre.

Pour répondre directement à votre question, on n'a pas de recommandation spécifique à vous faire, mais je pense que vous venez de soulever une piste de réflexion intéressante sur du travail qui pourrait être fait à l'avenir, par exemple entre notre organisation et d'autres organisations qui représentent des entreprises et le ministère, pour être plus pointus, plus précis et aussi valider jusqu'à quel point ces outils-là sont utilisés et leur performance.

Mme James: Tout à fait. Alors, c'est une piste de réflexion qu'on pourra considérer. Peut-être aussi mentionner... ou vous entendre sur votre proposition de faire connaître les acheteurs potentiels parmi les immigrants. Comment ça pourrait se faire concrètement, là?

M. Prévost (Simon): Bon, écoutez, là, c'est tout un chantier, hein, qu'on ouvrirait là, et ce n'est pas un chantier sans difficulté, quand même, parce que d'abord le chantier de la relève en général dans l'entreprise est un chantier d'abord qui est important, considérant l'évolution démographique et le fait que plusieurs entrepreneurs, une forte proportion, plus de la moitié, vont prendre leur retraire au cours des prochaines années. Et donc il faut réagir. Et c'est une suggestion qu'on fait, puis je dois vous avouer là-dessus que, pour en avoir discuté à gauche, à droite, de cette possibilité-là d'utiliser les immigrants investisseurs dans un processus de relève et non pas de démarrage d'entreprise. Parce qu'on est beaucoup plus dans une dynamique d'entreprise en général quand on pense à ça, mais il y a des tonnes d'entreprises québécoises excessivement intéressantes qui vont être à vendre et qui sont déjà à vendre et qui sont à prendre. Maintenant, la question de l'intégration culturelle, dans ce cas-là, se pose avec encore plus d'acuité, probablement. Alors, ce qu'on nous a fait valoir, par exemple, c'est que ça va être très difficile pour un immigrant investisseur d'acheter une entreprise québécoise avec 99,9 % de Québécois, je dirais, de souche, faute d'un meilleur terme, là, et qu'à ce moment-là ça peut être excessivement compliqué de débarquer d'un autre pays et devenir le patron d'une entreprise pure laine, encore une fois, pour utiliser un mauvais terme.

Donc, là-dessus, moi, j'ai des doutes. Je pense que des achats, des ventes d'entreprises, il s'en fait régulièrement, mais évidemment, quand on parle de PME, c'est autre chose. Si on parle d'un actionnariat qui change de mains, ou Alcan qui est acheté par une autre entreprise, ça, ça n'a pas d'incidence particulière dans le quotidien des employés. Pour les PME, oui, il y aurait peut-être un défi d'intégration culturelle, mais je pense que là il y a une richesse. Et, du point de vue des immigrants investisseurs, il faut leur faire valoir les possibilités d'affaires extrêmement intéressantes qui se présentent au Québec et qui vont se présenter au cours des prochaines années.

Alors là, là-dessus, encore une fois, on veut lancer le débat sur cette question-là, parce qu'on n'a pas vu... on n'a pas vu... en tout cas, dans le débat jusqu'à maintenant, peut-être qu'on l'a manqué, mais on n'a pas vu ce lien qu'il y a à faire et qu'à notre avis... C'est le pendant de la pénurie de main-d'oeuvre, hein, soit dit en passant, parce que c'est une pénurie d'entrepreneurs qu'on a actuellement, au Québec, et ces immigrants investisseurs là peuvent être les entrepreneurs dont on a besoin pour prendre la relève. Et donc, je pense qu'il faut commencer à se poser la question. Maintenant, savoir comment on va y arriver, mon souhait le plus cher, c'est qu'on puisse s'asseoir avec tous les intervenants, autant gouvernemental que sur le terrain, pour voir comment ça peut se faire, mais il faut se dépêcher parce que le problème est vraiment... est criant.

Mme James: Malheureusement, c'est terminé. J'avais d'autres questions, mais... Une autre fois.

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup, Mme la ministre. Je passe la parole à Mme la députée de Charlesbourg. Je ne confondrai plus jamais.

Mme Morissette: Merci, M. le Président. Ah! C'est gentil. Tout d'abord, merci beaucoup pour votre présentation. J'ai trouvé votre document extrêmement intéressant, puis il y a plusieurs points qui ont attiré mon attention. En plus, vous les avez soulevés dans votre présentation, ça fait qu'on n'ira pas fouiller dans les petits détails, sauf pour une question. Mais on va commencer par le début.

Vous parlez de la modification des grilles d'évaluation qui ont été faites. Est-ce que la fédération a été consultée ou a été mise à partie dans ce... pour la modification de ces... des grilles?

M. Lavoie (André): Au moment, effectivement, on avait été informés... on a été en contact avec le cabinet au moment où il y avait eu les discussions, là, à l'automne 2006... en fait au courant de l'été 2006, là, on avait été en contact avec le cabinet de la ministre de l'époque, et ainsi que les fonctionnaires du ministère, et on était effectivement au fait. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, dans notre étude de l'automne 2006, en fait l'étude qui a fait l'objet du sondage au cours de l'été 2006, on avait pris la peine de mentionner justement spécifiquement les changements qui avaient été apportés. On avait souligné, là, les changements qui avaient été apportés, puisqu'il y avait une différence majeure avec certains autres programmes d'immigration à travers le Canada-oui, il y avait eu des discussions à ce moment-là ? et on avait réitéré justement notre préoccupation face aux pénuries de main-d'oeuvre puis à la nécessité, dans la grille d'évaluation, de répondre aux besoins au niveau de la sélection.

Mme Morissette: O.K. Là, c'est sûr qu'on ne peut pas en mesurer les effets à l'heure actuelle, puis ça, on l'a bien établi, mais est-ce que la grille reflète, à votre connaissance, les besoins qu'il y a sur le terrain présentement dans le marché du travail?

M. Lavoie (André): À deux niveaux, peut-être, je passerais la parole à M. Prévost par la suite. Mais, à deux niveaux, je vous dirais qu'au niveau... dans les 10 critères de sélection qui ont été retenus, bon, d'abord, lorsqu'on parle de la formation, de l'éducation et des diplômes obtenus au Québec, le domaine de la formation, de l'expérience, hein, c'est quand même... c'est quand même fondamental, parce que, tant au niveau de... en fait de la formation, c'est-à-dire de la diplomation que les immigrants peuvent avoir, mais aussi au niveau de l'expérience de travail, parce que c'est très important en termes de reconnaissance des compétences, parce que la compétence s'oriente sur la formation comme telle et également sur la pratique en milieu de travail de l'individu, mais aussi il y a une préoccupation au niveau de la connaissance linguistique. Et ça, je vous dirais que, là-dessus, ça répondait à nos préoccupations. Il y a également eu des efforts, qu'il faut souligner aussi, qui ont été faits au niveau du ministère, au niveau des travailleurs temporaires: La reconnaissance des étudiants, par exemple, la possibilité pour les étudiants d'occuper un travail, et ça constitue, il ne faut pas se leurrer, surtout dans le commerce de détail, ça constitue une main-d'oeuvre importante pour les dirigeants de PME. Donc, il y a eu des efforts qui ont été faits dans ce sens-là.

Donc... mais, oui, dans les critères de sélection qui ont été retenus, il y a des choses qui effectivement répondent à nos préoccupations. Maintenant, je réitère le message que M. Prévost disait tout à l'heure: Ce qui importe également, c'est que tout ça, dans les faits, il y ait un arrimage entre les critères de sélection qui existent actuellement et les besoins des PME, et que ça, ce soit véritablement connu dans les PME, ce que nous ne sentons pas actuellement à la lumière des données que nous avons.

Mme Morissette: O.K. M. Prévost a mentionné, là, que la pénurie de main-d'oeuvre, c'est quand même un phénomène qui est assez récent, là, on parle, dans les cinq dernières années environ, que les employeurs ont commencé à être plus à l'affût de main-d'oeuvre en prévision d'une pénurie, puis vous avez mentionné aussi qu'il y avait des efforts qui avaient été faits par les employeurs pour l'embauche d'immigrants. Est-ce que vous avez des exemples de genres d'initiatives qui ont été prises par les entreprises?

n(12 heures)n

M. Lavoie (André): Pas véritablement, dans mon cas.

M. Prévost (Simon): Bien, écoutez, nous, en général quand... En fait, pour répondre directement à votre question: Non, je n'ai pas d'exemple précis. De la façon dont on va chercher l'information, effectivement ça ne qualifie pas exactement comment ce 20 %, par exemple, des PME qui auraient engagé un travailleur immigrant, comment il s'y est pris.

Par contre, ce qu'on a pu vérifier par la bande, c'est: Quels ont été les problèmes qui ont été encourus? Donc, effectivement, si on veut faire venir quelqu'un qui est déjà à l'étranger, on peut parler de formalités administratives, si on a déjà identifié un travailleur qu'on veut faire venir, donc c'est la lourdeur administrative qui est un problème. Et ça, c'est en amont, si on veut. Et tout... En fait, les délais aussi qui sont particulièrement problématiques, et spécialement dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre, parce que la pénurie de main-d'oeuvre, ce n'est pas un problème à long terme, hein, c'est-à-dire, c'est un problème de long terme, qui va exister encore longtemps et qui va aller en s'accentuant avec l'évolution démographique du Québec si on n'y fait rien. Mais, même si on agit fermement sur l'immigration, par exemple, c'est clair qu'on va avoir un problème qui va être grandissant. Sauf que, si on prend... long terme mais dont les effets sont à très court terme, et dans ce sens-là le délai, ça peut être catastrophique pour des entrepreneurs parce qu'il faut attendre trop longtemps avant d'avoir accès aux travailleurs dont on a besoin. Donc ça, c'est le premier élément.

On pourrait répondre à la question en disant aussi: Une fois qu'ils ont été engagés, donc en aval, bien à ce moment-là on se rend compte que ce n'est pas si simple que d'engager un immigrant, il faut l'intégrer dans le milieu de travail. Ça, ce n'est pas juste travailler sur l'immigrant, il faut travailler sur les autres employés. Quand on parle de PME, spécialement quand on sort de la région métropolitaine, bien c'est un choc qui est culturel, un élément qui est un peu plus grand. Encore une fois, dans les plus grandes entreprises ou dans les PME qui sont implantées en milieu urbain multiculturel, si vous voulez, bien à ce moment-là c'est beaucoup plus simple. Mais le problème... pour résoudre la pénurie de main-d'oeuvre, le problème en général au Québec, entre guillemets, c'est qu'il faut, je dirais, il faut s'assurer qu'il y ait une immigration qui soit plus dispersée géographiquement. Et ça, je vous avouerai que c'est un problème qui est assez, qui est assez compliqué. On parlait des difficultés d'intégration. Encore là, on peut avoir des services d'intégration en région qui vont être conséquents quand on aura une immigration conséquente. Donc là, c'est encore une fois la question de la poule et de l'oeuf, et on commence par quoi?

Et l'autre problème qui est plus spécialement québécois: les Québécois d'origine eux-mêmes quittent les régions pour s'en aller vers les grandes centres. Donc, les immigrants ne sont pas plus fous que les autres, hein, s'ils ont l'impression que les opportunités économiques sont à Montréal, ils vont rester à Montréal, peu importent les services qu'on leur offre dans les régions. Donc, en discutant de ces questions-là, vous vous rendez compte qu'on discute carrément du type de développement économique qu'on veut avoir au Québec ou qu'on aura au Québec, incluant le développement des régions. Disons que ça dépasse largement... ça intègre la question de l'immigration comme ressource de main-d'oeuvre, mais ça dépasse largement ce cadre-là aussi.

Mme Morissette: Je comprends. D'ailleurs, vous avez parlé des structures que certaines PME se sentent un peu obligées de mettre en place au niveau de l'intégration et la francisation. Est-ce que vous avez une idée des coûts que ça engendre pour les entreprises?

M. Prévost (Simon): Non. Effectivement, on n'a pas vérifié quels étaient les coûts, à moins que je ne me trompe, là, on n'a pas vérifié les coûts impliqués. Écoutez, vous venez de me donner une excellente idée pour un autre excellent sondage, à la FCEI. En fait, on a vérifié, nous, toutes sortes de... on vérifie toutes sortes de choses à toutes sortes d'égards. Mais, évidemment, on ne peut pas... les dirigeants de PME, à un moment donné, il ne faut pas qu'ils aient l'impression que, quand ils sont membres de la FCEI, ils ne passent leur temps qu'à remplir des sondages, donc on y va mollo. Mais ce qui reste, c'est que, dans cette question-là, c'est clair qu'il y a des coûts. Nous, on l'a vérifié de d'autres manières, on a vérifié le coût de la réglementation et le coût qui était... et donc la réglementation qui touche évidemment l'immigration, c'est une chose. On peut présumer que les coûts d'intégration, il y a des coûts directs, hein, par exemple, de faire venir un professeur de français, puis il y a les coûts... Si c'est fait volontairement par des employés, par exemple, ou à l'interne, bien à ce moment-là il y a des coûts aussi qui ont une importance.

Ce qui est certain, c'est que les coûts pour les PME, comme dans le cas de la réglementation, les coûts pour les PME sont beaucoup plus lourds que pour une grande entreprise. En réglementation, par exemple, la conformité réglementaire, tous les règlements gouvernementaux, est cinq fois plus importante pour les PME. Donc, on peut présumer que c'est la même chose. Encore une fois, dans une grande entreprise, je prends toujours l'exemple de Desjardins, qui est un peu partout au Québec et qui a effectivement des travailleurs immigrants, c'est beaucoup moins coûteux par tête de pipe, si vous voulez, d'offrir ce type de service là. La PME est encore aux prises avec la même chose: peu de moyens, peu de ressources pour faire ce type de travail.

M. Lavoie (André): Si je peux me permettre de renchérir là-dessus. Vous savez, dans une PME, on a 75 % des PME du Québec qui ont moins de cinq employés, à peu près 90 % qui en ont moins de 10 à 15. Alors, dans une PME, vous vous retrouvez avec un employé, c'est 20 % de la force de travail, ou 25 %, ou même 50 % dans certains cas, donc, lorsque vous avez un dirigeant de PME qui a un poste disponible et qui doit faire de la formation linguistique pendant le travail... Vous savez, c'est une question de confiance, à un moment donné. Les employés dans une PME sont des gens qui doivent être polyvalents, qui doivent être débrouillards, qui doivent faire toutes les tâches. Et la personne immigrante qui a la tête ailleurs parce qu'elle doit justement, elle doit faire son apprentissage linguistique, son apprentissage culturel, elle doit s'installer, elle a des préoccupations au niveau de sa famille, vous savez, elle n'a pas la tête nécessairement au travail. Alors, nécessairement il va y avoir des coûts. On ne les a pas estimés, mais c'est clair qu'il va y avoir des coûts associés à cette intégration-là. Et c'est ça qu'on demande, c'est d'être capable... Oui, il y a une part de responsabilité, c'est clair, des milieux de travail, mais il y a une part de responsabilité sociale là-dedans. Et je pense que c'est très important qu'on fasse en sorte de faciliter le plus possible la tâche et aux travailleurs et aux employeurs dans ce domaine-là.

Mme Morissette: Avez-vous été en mesure de savoir, peut-être que c'est une décortication que vous n'avez pas pu faire, ou en tout cas... de mettre en place cette structure-là, est-ce qu'on retrouve ça surtout dans les PME de niveau urbain ou au niveau régional?

M. Lavoie (André): Pour être honnête avec vous, on pourrait le faire probablement, le croisement, mais je ne l'ai pas ici, mais c'est probablement quelque chose qui pourrait être possible. Encore faudrait-il voir si la ventilation des données nous permet de le faire, mais c'est une information qu'on pourrait vérifier, effectivement.

Mme Morissette: O.K. J'aimerais ça vous référer... Bien, en fait, vous n'avez pas besoin nécessairement d'aller voir. À la page 8 de votre document, le tableau 3, dans les Méthodes de recrutement de nouveaux immigrants, il y a, mentionné à la quatrième ligne, Recours à un programme gouvernemental ou à une agence d'immigration à but non lucratif. Moi, j'aimerais vous parler du nouveau phénomène des agences à but lucratif. Est-ce que vos clientèles, vos membres, est-ce que c'est une chose que vous avez commencé à entendre parler de façon plus importante? Je parle des agences, ce qui s'appelle les agences d'intégration, là, où ils chargent une somme soit à l'entreprise, soit à l'immigrant, soit aux deux pour faire le lien entre les deux.

M. Prévost (Simon): Bien, écoutez, ça existe depuis un certain temps de toute façon. Alors, est-ce que je dois... Première et bonne réponse, ce n'est pas quelque chose qui a été porté à notre attention comme une problématique spécifique.

Par contre, il y a quand même une porte de sortie dans nos données à ce niveau-là, c'est qu'il y a 7 % des répondants qui ont dit qu'ils ont utilisé une autre méthode. Donc, pour l'instant, ça se pourrait que ce soit une de ces autres méthodes là. Mais ce qui est clair, c'est que, nous, on a une façon, par exemple, d'aborder les problématiques, il y a les sondages, mais aussi le fait qu'on est en contact constant avec nos membres via notre service aux membres. Et, quand il y a des problématiques de ce type-là, du genre «les agences ambitionnent», par exemple, si c'était quelque chose qui arrivait, ce genre de commentaire qu'on pourrait entendre, on n'entend pas ce genre de commentaire là. Donc, pour l'instant, pour nous, je dirais que ce n'est pas une problématique qui a été portée à notre attention, c'est un peu sous le radar, si vous voulez, et on n'a pas de façon de savoir si c'est une bonne façon de faire, si c'est une moins bonne façon de faire, si les PME l'utilisent ou pas ou si elles s'en plaignent ou pas ou elles trouvent ça extraordinaire, parce qu'il se pourrait qu'elles trouvent ça très facilitant aussi. Donc, pour l'instant, là, on n'en sait pas plus là-dessus, mais ça m'étonnerait que ce soit un gros problème, en tout cas.

M. Lavoie (André): Vous m'ouvrez une porte qui est intéressante. Et je vous dirais que le fait justement qu'il y ait juste 16 % des PME qui ont recours à un programme gouvernemental indique la méconnaissance des structures dans les PME. Et je pense que c'est dans ce sens-là qu'on vous dit qu'il y a un travail à faire. Parce que les dirigeants de PME ne sont probablement pas au fait. Ça peut être une explication du fait qu'il y a si peu de dirigeants de PME qui se prévalent de la filière immigration.

M. Prévost (Simon): Et il y a aussi le fait qu'ils sont entrepreneurs par définition, donc en général, avant de penser à recourir à des programmes gouvernementaux, ils essaient de se débrouiller par eux-mêmes. Et donc ça, ça ne veut pas dire que ce n'est pas une bonne chose d'utiliser les programmes existants. Et là je reviens à ce que je mentionnais, M. le Président, tantôt, la question de la communication, je pense qu'il y a encore du travail à faire de ce côté-là.

Le Président (M. Simard): Je vous remercie, madame. Et j'invite maintenant le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques à poser ses questions.

n(12 h 10)n

M. Lemay: Merci, M. le Président. À mon tour, je vais saluer ces messieurs de la fédération. C'est un plaisir pour nous. C'est d'autant plus un plaisir que bien sûr les débats des grandes orientations, c'est important, mais il y a aussi comment, vous l'avez dit, hein, comment c'est vécu quotidiennement sur le terrain. Et, moi, à la lecture de votre document, je suis un peu abasourdi de lire qu'effectivement il y a des gens, des immigrants, des nouveaux arrivants qui sont embauchés et qu'on laisse littéralement le soin à ces PME là, d'une part, de franciser, d'autre part, d'intégrer. On se doutait un peu, à la lumière du document du ministère, qu'il y avait des efforts autres qui étaient faits, mais on est un peu abasourdi, et avec... Et, M. le Président, j'insiste sur le fait ? encore une fois, je l'ai dit dans mon propos tout à l'heure ? qu'il y ait des frictions, des tensions, qu'il y ait des... c'est tout à fait normal. Notre propos n'est pas d'insister là-dessus et de faire peur au monde, là, c'est tout à fait normal. D'ailleurs, quelqu'un de Baie-Comeau qui s'en va à Montréal a un choc, et vice versa, alors à plus forte raison quelqu'un qui arrive du Maghreb et... Bon. Alors, c'est tout à fait normal.

Mais, ceci étant dit, de le laisser sur les épaules des PME, et, comme vous le disiez tantôt, le patron souvent porte tous les chapeaux de l'entreprise... Donc, il y a un programme qui est méconnu par vos membres, manifestement, ou ça ne les intéresse pas. Mais comment font-ils, à ce moment-là? Franciser, intégrer, on ne peut pas tout faire dans la vie, et les PME, ces gens-là veulent que les gens soient opérationnels évidemment le plus rapidement possible. Alors, comment c'est vécu vraiment sur le terrain, ce type de...

M. Prévost (Simon): M. le Président, avant de répondre concrètement à la question, j'aimerais quand même préciser au député de Sainte-Marie?Saint-Jacques que c'est un peu exagéré de dire qu'on laisse le soin aux PME de faire le travail. Ce que, nous, on dit à travers notre sondage, c'est que les entrepreneurs sentent le besoin d'en faire. Donc, il y a une nuance. Est-ce que c'est parce qu'ils ne connaissent pas les programmes ou ils jugent que les programmes ne sont pas adaptés? Alors, il y a une bonne portion aussi de ça qui revient peut-être au fameux réflexe de l'entrepreneur, de dire: Bon, moi, il faut qu'il parle français, je vais m'organiser pour lui enseigner le français, sans vouloir nécessairement se perdre dans les dédales des programmes gouvernementaux. On parlait d'allégement réglementaire, ça pourrait être une autre façon; il ne s'agit pas juste de communiquer, mais il faudrait peut-être rendre les programmes plus faciles d'accès aussi.

Ceci étant dit, c'est clair qu'au-delà des nuances, à savoir qui fait quoi et comment c'est vécu, il est certain que ce qu'on dit ici à travers ces données-là, à travers cette perception-là des entrepreneurs, M. le Président, c'est qu'il y a un problème vécu sur le terrain concrètement, et on ne veut pas se prononcer à travers ça: où le bât blesse. On peut supposer que ces programmes ne sont pas suffisamment connus, sont méconnus, spécialement en région et spécialement des petites entreprises, qui sont, encore une fois, moins bien équipées pour être au courant de tout ce qui pourrait exister pour leur faciliter l'existence.

Donc, il y a deux choses, à ce moment-là, je pense, qu'il faudrait faire pour améliorer la situation sur le terrain: d'abord, 'assurer en tout temps ces programmes soient faciles d'accès et qu'ils soient d'ailleurs, soit dit en passant, adaptés aux besoins; alors ça, c'est quelque chose qu'il faudrait peut-être vérifier aussi, dans quelles mesures les programmes sont adaptés aux besoins, et, d'autre part, s'assurer que, s'ils sont disponibles, qu'ils soient largement offerts et connus.

M. Lemay: Une autre question, assez rapide. Je l'ai citée dans mon intervention, M. le Président, le ministère, dans ce document, à la page 25, dit que 34 % des allophones immigrants parlent principalement l'anglais au travail. Avez-vous des chiffres là-dessus? Moi, je suis aussi renversé de ça, 34 %, et 12 % parlent les deux. Donc, quand les deux sont concurrents, bien je ne veux pas m'embarquer trop loin, M. le Président, mais la concurrence, disons, entre le français et l'anglais, on sait qui gagne ultimement, mais, bon, ça, c'est une autre question. Et on ne sait pas c'est 34 % de quoi. Est-ce que c'est 34 % les 20 dernières années? Est-ce que c'est 34 % les 100 dernières années? Est-ce que c'est à Montréal? Est-ce que c'est en région? Quand on disait, tout à l'heure, en tout respect que les chiffres sortent, et il n'y a pas de contexte, rien, c'est un peu ça, là. Et peut-être que, monsieur, vous avez des études, vous faites des sondages souvent, donc je ne sais pas si vous avez des données là-dessus, là, mais...

M. Prévost (Simon): Bien, M. le Président, d'abord, la réponse va être assez courte: Non, on n'a pas vérifié ça, on n'a pas de données là-dessus. Et je dirais que la question du député s'adresse davantage au ministère, qui pourra sûrement l'éclairer davantage sur cette question-là. En ce qui nous concerne, ce n'est pas un point qu'on a vérifié.

M. Lemay: O.K. Dernière question rapide, M. le Président. Comment se passe la reconnaissance des diplômes, la formation? Avez-vous des données là-dessus aussi? Je ne sais pas, moi, au niveau... Est-ce qu'il y a des comptables, des... Avez-vous quelques données là-dessus?

M. Lavoie (André): Je vous dirais que... d'ailleurs, on a un sondage qui vient de partir sur la question de la formation de la main-d'oeuvre, donc, dans quelques semaines d'ici, on sera à même de vous éclairer. Toutefois, la reconnaissance des compétences est un problème qui déborde largement la question de l'immigration, je vous dirais, au Québec. Nous sommes à la Commission des partenaires du marché du travail, c'est une question à laquelle... il y a une politique de formation continue, que M. le président connaît bien d'ailleurs puisqu'il était ministre à l'époque, il y a toute une problématique autour de la reconnaissance des compétences, et c'est bien évident que, si la question de reconnaissance des compétences est une problématique au niveau de la main-d'oeuvre québécoise en général, le problème est tout aussi vrai, tout aussi criant pour les immigrants qui viennent s'installer au Québec.

M. Lemay: Merci. Ça va.

Le Président (M. Simard): Très bien. Merci beaucoup, M. Prévost, M. Lavoie. Je suis sûr que nous nous reverrons bientôt sur un autre projet de loi. Vous avez évidemment éclairé les travaux de la commission. Je remercie évidemment tous les membres de la commission et la ministre pour ce démarrage somme toute fort intéressant et encourageant pour la suite des choses. J'attire l'attention spécialement sur le vice-président de la commission, qui est rentré de mission à 1 heure, ce matin, alors... et que, je vous le jure, je l'ai surveillé, il n'a pas dormi une minute cet avant-midi. Alors, je suspends nos travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 16)

 

(Reprise à 14 h 5)

Le Président (M. Simard): Nous allons reprendre nos travaux, et j'invite donc les membres de la commission à bien prendre place en leur rappelant de s'assurer que leur téléphone cellulaire est bien fermé.

Le premier groupe que j'invite à prendre place devant nous, c'est Accès Accueil Action Basses-Laurentides. Le nom a beaucoup de A, mais... Voilà. MM. Alain Marginean et Claude Girard, nous allons vous écouter. Vous avez peut-être moins l'habitude que d'autres groupes, alors je vous dis tout de suite: en une heure, il faut faire le tour. C'est donc dire que vous avez 15 minutes au grand maximum pour nous livrer votre message, la première partie, puisqu'ensuite vous allez répondre aux questions des parlementaires, comme vous le savez. Alors, nous vous écoutons.

ABL Accès Accueil Action Basses-Laurentides

M. Marginean (Alain): M. Simard, M. le Président, merci de nous accueillir cet après-midi. En effet, ce n'est pas dans nos pratiques de nous présenter à l'Assemblée nationale, et on va tenter de se ramasser et d'aller le plus possible droit à ce que nous souhaitons.

Je tiens à nous excuser. Notre président, Jean-Jacques Drolet, qui est retraité et ancien directeur général adjoint de la commission scolaire de Laval, est à l'extérieur. Donc, c'est à lui que revenait le privilège de venir rencontrer la commission. Donc, en tant que vice-président, je vais tenter de mon mieux de le faire.

Je suis accompagné de M. Claude Girard, qui est le directeur d'ABL Basses-Laurentides. M. Girard est aussi commissaire à la commission scolaire Seigneurie-des-Mille-Îles depuis près de 15 ans et aussi président de la Société d'histoire des Basses-Laurentides. Quant à moi, je suis cadre au collège Lionel-Groulx, présentement en congé. Voilà.

Donc, on tenait à déposer un mémoire à la commission, puisque nous l'avions fait il y a trois ans maintenant, et on voulait à la fois rendre compte brièvement de ce trois ans d'activité et en même temps finalement énoncer certaines orientations qu'on souhaitait que le gouvernement prenne concernant ces questions de niveau d'immigration et de stratégie finalement accompagnant l'accueil et l'intégration de ces nouveaux arrivants et des immigrants.

Nous avons donc déposé un mémoire en cinq points où on a tenté à la fois, dans un premier temps, premier point, de faire un peu l'historique de nos actions des trois dernières années, qui à notre avis ont été significatives. Dans un deuxième temps, vous parler d'emploi. Dans un troisième temps, de parler de francisation, pour parler de partenariat, et ensuite finalement conclure sur un certain nombre d'orientations qu'on souhaite.

Je dois vous rappeler que la région des Basses-Laurentides n'est pas en soi une région au sens des régions tel qu'on l'entend. Il ne s'agit pas d'une région qui existe en tant que telle, mais il s'agit donc de la partie sud des Laurentides, qui comprend trois MRC: la MRC de Mirabel, celle de Deux-Montagnes ainsi que de Thérèse-de-Blainville. Il s'agit d'une partie de la couronne nord, celle qui est du côté ouest, côté est étant basse Lanaudière. Donc, on représente cette bande qui est environ large de 15 km et qui s'étend environ sur 40 km de long, qui compte 270 000 de population. Donc, plus de 50 % de la région des Laurentides se situe dans les Basses-Laurentides et est une région finalement qui se... ? une région donc dans le sens que nous l'entendons; qui se ? situe aussi dans la région du Montréal métropolitain, donc à la fois un pied dans la magnifique région des Laurentides et à la fois un pied dans le Montréal métropolitain.

n(14 h 10)n

On avait souligné finalement que cette situation créait un certain nombre d'éléments d'enjeux, sinon de problématiques, qui faisaient que la région était une des régions les plus importantes en termes de croissance. Il faut voir comment les villes à la fois de Sainte-Marthe, de Saint-Eustache, Sainte-Thérèse, Lorraine, je les nommerais tous, les taux de croissance de construction, le niveau d'emploi, mais comment en même temps les régions se développent d'une façon très homogène, et d'ailleurs de plus en plus homogène. Ce serait juste un rappel: le collège Lionel-Groulx, qui compte maintenant près de 5 000 étudiants, doit être le collège le plus homogène à travers le Québec, là, comptant moins de 0,5 % de population dite visible ou ethnique, là, hein. Il y a ce déplacement des gens de Montréal vers la banlieue, la banlieue nord, au-delà de Laval, et on n'arrive pas finalement à avoir une comparaison par rapport au sud. Je vais vous dire que Sainte-Thérèse et Sainte-Marthe font partie de la même région, par exemple, que Mont-Laurier. Il y a des progrès énormes qui ont été faits depuis sept, huit ans au niveau de la décentralisation et de la régionalisation. On arrive maintenant à avoir des statistiques par MRC, donc on peut faire les calculs. Mais je vous rappelle qu'il y a six ou sept ans on parlait des Laurentides, on parlait d'une région où c'est du bois ou c'est du tourisme, pendant qu'au niveau des Basses-Laurentides, là, on n'arrivait pas finalement à faire le constat.

Donc, la dernière fois qu'on s'est présenté en commission parlementaire, on disait qu'on invitait le ministère à pouvoir développer des stratégies paramétrées de façon différente d'une région à une autre et à vouloir considérer la sous-région des Basses-Laurentides comme une réalité propre, une réalité où les gens souhaitent accueillir et pouvoir finalement permettre à de nouveaux arrivants de s'intégrer. On faisait état de certaines expériences qui avaient été faites par le cégep Lionel-Groulx dans le cadre des modifications de stratégie concernant les COFI, de confier aux établissements d'enseignement postsecondaire les dossiers de francisation. En même temps, on mettait en évidence un certain nombre d'éléments de problématique: si Saint-Jérôme est une capitale régionale au même titre que Saint-Hyacinthe, Shawinigan ou Trois-Rivières, quand on parlait de Sainte-Thérèse ou de Saint-Eustache, on parlait aussi de la région du Montréal métropolitain, on signifiait qu'il y avait deux trains, deux métros de surface qui reliaient nos régions au centre-ville, et c'était peut-être plus facile de se rendre à Saint-Eustache que de partir de ville d'Anjou pour aller au centre-ville. Enfin, ça faisait partie des éléments de constat. Et donc on appelait le ministère à en tenir compte au niveau de ses stratégies.

Le deuxième élément qui nous concernait en était un au niveau de l'emploi. Le chômage étant très faible au niveau des Basses-Laurentides, on invitait les gens qui ont à circuler sur la 640, l'autoroute 15 et l'autoroute 13 à compter le nombre d'entreprises qui affichent «Nous embauchons. www, avec leur sigle» comme étant finalement un élément de problématique. L'autre point, et je veux terminer sur cette question-là, on signifiait que le ministère faisait le lien entre habiter en région et travailler en région. Nous, on faisait une distinction, on disait: On peut facilement habiter à Montréal et prendre le métro de surface, en 20 minutes, travailler dans les Basses-Laurentides, et que, dans un deuxième temps, les gens verraient bien à s'établir, connaissant notre belle région. Donc, c'était un élément de problématique, en disant qu'à la fois Montréal, Laval et Lanaudière... donc que ce n'étaient pas nécessairement des murs de Berlin, là, qui séparaient ces régions-là. On rappelait que le collège était à 2 km de la région de Lanaudière et à 2 km de Sainte-Rose, qui est à Laval. Donc, il fallait finalement, au niveau du Montréal métropolitain, revoir ces éléments-là.

Je pense que la ministre à l'époque, Mme Courchesne, a tenu compte finalement des éléments dont on a fait part. Et le projet qui a été développé, le plan qui a été développé par le ministère de l'Immigration au niveau de la régionalisation a tenu compte d'une stratégie un peu ? écoutez, on n'est pas nécessairement spécialistes de l'immigration, mais on vous dit ce qu'on pense, puis vous verrez; un peu ? à l'image de Lanaudière, c'est-à-dire d'y aller par pôle. Et on voulait finalement aujourd'hui rendre témoignage ? je passe au deuxième point ? que le plan qui a été adopté par la ministre au niveau du développement régional tenait compte des Basses-Laurentides, du centre des Laurentides et du nord des Laurentides, un peu, je pense, à l'image de Lanaudière, où on tient compte finalement de la région du sud-ouest, là, Terrebonne, Repentigny, Joliette et, plus à l'ouest... plus à l'est, là, Berthier.

Donc, élément important, le plan de travail, qui a été accepté par les partenaires et qui a fait l'objet d'une consultation en trois pôles, a donné finalement place au plan qui est appliqué. Et une de nos recommandations ou une des positions qu'on prenait dans notre document, c'était de signifier au ministère... On voulait dire bravo dans un premier temps, et ça, en toute humilité, mais on disait: Il fallait nécessairement maintenir le cap et accélérer finalement ce travail pour paramétrer les actions d'une façon différente entre les différentes régions de la région des Laurentides. Pour ceux et celles qui sont plus sensibles, c'est des éléments de problématique toujours à l'intérieur d'une région quand les espaces sont plus ou moins définis, on tenait à le dire. Mais c'était sans doute le premier ministère qui avait cette stratégie d'y aller par pôle, et ça nous semblait important finalement en matière d'immigration que d'autres ministères et même la Commission des droits de la personne adoptent finalement des orientations semblables. Vous savez que dans le secteur parapublic les établissements se doivent d'avoir, par exemple, des programmes d'accès à l'égalité. Bien, un programme d'accès à l'égalité à Sainte-Thérèse, pour un cégep, par exemple, ce n'est pas le même programme d'accès à l'égalité pour Saint-Jérôme. Puisque le collège fait partie du Montréal métropolitain, donc on doit tenir compte des clientèles ou de l'emploi au niveau du Montréal métropolitain. Il en va de même au niveau des deux CSS et au niveau de la commission scolaire.

Bref, il y a trois ans, pour arriver au premier point, suite aux discussions avec la direction régionale du ministère de l'Immigration, nous avons pu mettre en place l'organisme qui s'appelle ABL, Accueil Action Basses-Laurentides, pour l'immigration, qui est composé d'un conseil d'administration représenté des deux CSSS, c'est-à-dire de la région de Deux-Montagnes, de la région de Sainte-Thérèse, de la commission scolaire, du cégep ainsi que des trois CLD et de certains membres cooptés. L'objectif était d'essayer de se donner une stratégie commune ou du moins essayer de comprendre ? nous ne sommes pas des spécialistes de l'immigration ? finalement l'ensemble des enjeux et de permettre éventuellement une intégration harmonieuse au niveau finalement de nouveaux arrivants ou de personnes éventuellement intéressées à s'intégrer dans notre région, ce qui a donné lieu à ABL, comme on en rend compte au niveau finalement de notre document.

Au niveau de l'emploi ? le troisième point qu'on souligne ? on a eu un certain nombre d'éléments de problématique qui ont joué et qui jouent encore, puisque les... Et les solutions ne sont pas apportées. Elles sont peut-être d'aller dans le sens que le ministère de l'Immigration est allé, c'est-à-dire d'avoir des stratégies par sous-région. Mais le travail qui a été fait par le ministère d'Emploi-Québec, enfin Emploi-Québec, et les différents organismes nous a amenés rapidement à ces problématiques de structures: bon, des gens de Montréal qui voudraient venir travailler dans les Basses-Laurentides ? je vous rappelle, c'est 20 minutes en train, là, en métro de surface ? ces populations-là sont attachées à leur CLE de Montréal, ou des gens de Laval qui veulent traverser le pont, bien là la référence, c'est aussi le CLE de Laval; une personne qui veut suivre une formation dans le cadre des programmes de main-d'oeuvre n'a pas accès, parce que c'est de l'autre côté du pont, puis l'autre côté du pont, c'est Laurentides et ce n'est plus Laval; par contre, la personne à Mont-Laurier, qui est à 200 km plus au nord, elle, a accès. Donc, la problématique ? et vous êtes probablement plus spécialistes que nous ? au niveau des ententes interrégions ou d'interface entre les régions crée au niveau des Basses-Laurentides une problématique majeure. Qui comptabilise le placement, par exemple, d'immigrants hors Montréal? Si la personne part de Montréal, va s'établir à Saint-Jérôme, on appelle ça un «placement en région»; une personne qui part de Montréal, qui s'établit à Saint-Eustache, ce n'est plus un placement hors région, même si on fait partie de la région des Laurentides. Pour l'organisme de Montréal qui fait le placement, elle ne peut pas le comptabiliser, donc ne peut pas le rentrer dans ses résultats, hein. J'ai placé 10 personnes, mais je les ai placées à Saint-Eustache, ça ne compte pas, parce que ça fait partie du Montréal métropolitain. Mais, si je les place à Saint-Jérôme, c'est toujours la région des Laurentides, là je peux les comptabiliser. Vous voyez, des éléments de problématique, c'est assez technique, mais qui freinent constamment les interfaces, ou si la personne est placée via le CLE de Saint-Jérôme. Voici un élément au niveau de l'emploi qui nous semblait problématique.

n(14 h 20)n

Troisième point ? je vais terminer là-dessus, le 10 minutes ? c'est au niveau de la francisation. Il en allait de même, c'est-à-dire que les programmes de francisation, le collège Lionel-Groulx a été un des premiers, en l'an 1999, à mettre en place un programme expérimental qui était de dire: Il y a des gens de Montréal qui vont prendre le train, en 20 minutes, 15 minutes, 20 minutes, ils vont suivre des programmes de francisation, ils pourront connaître la région, les structures et éventuellement s'établir. Mais je rappelle que les gens de Montréal sont comptabilisés par la direction régionale de Montréal, et la même chose pour Laval, ainsi de suite. Ce qui fait que présentement les quelques personnes ? hein, je rappelle qu'au niveau du parler français à la maison, au niveau des Basses-Laurentides, c'est quel pourcentage?

M. Girard (Claude): C'est 2 %, moins de 2 %.

M. Marginean (Alain): Moins de 2 %. Donc, c'est une population qui est extrêmement homogène, parce que finalement ces interfaces-là nous isolent au niveau finalement de la sous-région. Donc, au niveau de la francisation, nous avons signifié la même chose, c'étaient des éléments techniques qu'il fallait qui soient revus à la lumière des orientations de la direction régionale. Et là-dessus, je vais terminer...

Le Président (M. Simard): Je suis obligé de vous interrompre à ce moment-ci, mais je suis sûr que vous avez soulevé plein de sujets intéressants et que les parlementaires ici vont pouvoir vous interroger. J'invite en premier lieu évidemment la ministre de l'Immigration à vous poser la première question.

Mme James: Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, M. Drolet, M. Girard, pour votre présentation et surtout pour vos efforts soutenus et continus au niveau de la grande question. Je vous écoute parler de la régionalisation. Pour les gens qui nous écoutent à la maison, on entend souvent ce terme-là puis on veut... je veux dire, au niveau des parlementaires et au ministère... l'importance de s'assurer d'une présence dans tout le territoire québécois en est une qui nous préoccupe énormément. Et je sais que votre organisme, vous travaillez, malgré des obstacles puis des défis importants face à votre région, notamment des Basses-Laurentides, de s'assurer d'une meilleure présence sur le territoire.

En vous écoutant... vous avez parlé beaucoup de cette question-là de transport en commun puis des défis face à un établissement pour une personne... de s'établir en région et les différents obstacles auxquels font face nos immigrants ou des nouveaux arrivants. Lorsqu'on regarde de façon plus générale la question de la régionalisation, puis vous avez eu raison d'évoquer ce que ma prédécesseure a fait dans son plan d'action, c'est-à-dire de vraiment regarder le fait de vouloir s'assurer d'une présence partout sur le territoire québécois... fait en sorte qu'il faut s'assurer que tous les acteurs dans les régions mêmes ne soient pas juste interpellés, mais soient les partenaires, soient les personnes qui décident de faire de l'immigration de leur façon. C'est vous dans la région qui êtes là, qui savez ce que vous avez besoin, mais, plus que ça, de savoir la meilleure façon d'accueillir afin de favoriser ce mariage entre la société d'accueil ou de la région en tant que telle puis de l'immigrant.

Puis, face à ça, vous n'avez pas pu l'évoquer dans votre présentation, mais c'est quelque chose qui était dans le mémoire, on a parlé énormément ou on a touché le sujet de la grille d'évaluation, on a parlé beaucoup de cette question de vouloir arrimer ce que les gens ont comme formation et les besoins en région. Je voudrais dans un premier temps vous entendre sur cet aspect-là, mais plus que ça, parce que je suis une de ces personnes qui pensent que, oui, il faut mettre l'accent sur la formation, parce que le travail étant important, mais on veut aussi que la personne puisse bien s'intégrer à tous les niveaux. On s'entend que, comme pour tout autre Québécois, ce n'est pas juste une question d'entrer au travail puis de rentrer chez nous, on veut se faire des amis, on veut s'intégrer au niveau scolaire, pour les enfants. Dans votre région, parlez-nous de ce que vous faites, de ce qui est en place, mais ce qui pourrait être bonifié pour favoriser ce mariage-là.

M. Marginean (Alain): Une des actions d'ABL, et on en a trois finalement, c'était, un, de sensibiliser nos propres décideurs et les citoyens de la région à cette ouverture; dans un deuxième temps, de favoriser des activités d'information et de formation auprès de nouveaux arrivants ou populations immigrantes, et, troisièmement, supporter. Je vais vous dire qu'un des éléments de résistance ? et ce n'est pas négatif ? il provient de notre propre perception que nous avons dans la région du développement. J'ai le goût de vous donner un exemple très terre-à-terre et très simple. La compagnie Bell Helicopter, je crois, des Belges qui arrivent dans notre région, ingénieurs, ont un placement de leur garçon à faire. Leur garçon est étudiant de niveau collégial, et, au collège, le registraire lui répond: Écoutez, on n'est pas habitués avec des étudiants étrangers, donc allez donc plutôt à Montmorency ou à Montréal, on va vous donner l'information, eux savent quoi faire avec ces clientèles-là. Parce que le collège a 700 élèves de plus cette année, c'est unique au Québec. Il y a une problématique, vous voyez, c'est à l'inverse, ce n'est pas une région qui a ce manque de population, qui est en chute, c'est une région qui connaît la plus forte croissance démographique au Québec.

Donc, la suffisance, le développement ? il faut aller à l'Hôpital de Saint-Eustache pour voir finalement ? la suffisance fait que généralement le premier réflexe est un réflexe de dire: Bon, il n'y a pas de problème, ça va. Et c'est pour ça que l'action qu'on essaie de mener en est une d'ouverture, en disant: Non. Il y a une question de richesse à l'interculturel, il faut s'ouvrir aux communautés, non pas parce que c'est un besoin immédiat... Parce que les structures sont comblées. On s'aperçoit qu'on a un grand nombre d'étudiants qui choisissent d'aller à l'université à Sherbrooke, à Québec, à Trois-Rivières, à Hull et non pas à Montréal. Il faut traverser la rivière des Mille Îles pour s'apercevoir qu'on a l'impression de changer de pays, et je n'exagère pas, hein?

L'homogénéité de la région fait finalement qu'il y a une suffisance qui fait qu'au niveau des structures ça va bien. Pourquoi avoir des programmes de francisation? Pourquoi avoir des programmes d'accueil? Pourquoi? Parce que ça fonctionne bien. Sauf que les jeunes que nous formons, que ce soit la commission scolaire, que ce soit au cégep, ne vivent pas et ne baignent pas dans la réalité, à notre avis, du Québec contemporain, d'aujourd'hui. Donc, c'est vraiment un paradigme différent qui nous anime et non pas finalement une recherche à tout prix. Il faut voir les taux de construction de maisons et de tout ça. La croissance est la plus forte au Québec, hein? Ça se situe... On dit «la région des Laurentides puis de Lanaudière», mais il faut voir Basses-Laurentides, ce n'est pas Laurentides. Et donc on dit: Oui. D'ailleurs, on le disait à votre ministère: Vous placez 15 étudiants qui ne parlent pas français dans nos murs, hein, on garantit, sûr et certain, qu'après trois mois ils parlent français, ils connaissent qui est Jacques Cartier. Ça, c'est sûr, c'est sûr et certain. C'est le collège le plus homogène dans sa population au Québec, à 5 000 étudiants. Ce n'est pas un problème de baisse de clientèle, ce n'est pas un problème de baisse de service ou de maintien, c'est l'inverse.

On dit qu'il y a un contexte particulier mais que les structures présentement, les structures de la régionalisation font des embûches à ce développement-là, et tous les défis sont là. C'est à ce niveau-là qu'on vient vous informer et non pas... et on comprend que dans les autres régions on vit une réalité différente. C'est vrai en santé, c'est vrai en éducation et c'est vrai aussi en immigration. Donc, ça appelle à des stratégies particulières, parce qu'il n'y a personne qui se sent menacé, au contraire.

n(14 h 30)n

Mme James: Je sais que des collègues vont poser des questions, moi, je trouve ça tellement intéressant, parce que les gens auraient peut-être tendance de penser, parce qu'on parle de pénurie de main-d'oeuvre, que l'immigration, c'est juste un mal nécessaire; moi, je trouve ça tellement important que vous vous ne parliez pas d'une question de pénurie ou de déficience au niveau du taux démographique mais du fait que vous reconnaissez cet enrichissement qu'apporte la diversité au sein de votre région, puis c'est important de le souligner puis je comprends que nous devrons être là en support des actions que vous souhaitez faire au niveau de l'attraction des nouveaux arrivants chez nous, compte tenu que, s'ils sont dans un milieu, comme vous dites, où ils pourront apprendre la langue très rapidement compte tenu du fait... la meilleure façon de l'apprendre, c'est avec les gens. Quand tout le monde parle en français, on apprend le français parce que, pour communiquer, il faut apprendre la langue.

Mais, au-delà de... au niveau des accueils, parce qu'on a parlé brièvement de la question de rétention également ce matin; oui, ce n'est pas une question de répondre au problème démographique chez vous, mais, au niveau des services d'accueil, comme je sais que, dans d'autres régions, on pose des gestes comme parrainer une famille à une autre, est-ce que vous êtes ouverts à ce genre de services à donner pour faciliter, encore là, le rapprochement qui pourrait se faire dans une région où, comme vous dites, la société d'accueil ou les gens de la région ne pourraient pas nécessairement sentir nécessairement le besoin de façon naturelle d'avoir des gens de l'extérieur venir s'établir, compte tenu que vous êtes déjà très peuplés dans votre région?

M. Marginean (Alain): Je vous dirais, Mme la ministre, il y a deux éléments: à la fois cette suffisance a fait que le dossier n'est pas une priorité, et il faut le voir au niveau des programmes d'accès que les établissements se sont donnés, ce n'est pas une priorité, mais en même temps nous sommes bien conscients, un certain nombre de personnes, et c'est le premier objectif d'ABL aussi d'allumer sur cette question-là... Je pense que de plus en plus les maires, les préfets, les députés sont de plus en plus conscients que l'homogénéité de cette région... et on parle de 270 000 personnes, ce n'est pas 30 000, 270 000, c'est presque Laval en termes de population. Cette homogénéité-là, elle est problématique. Ce n'est pas par gratuité puis peut-être par grandeur d'âme seulement, c'est qu'on se doit aussi de prendre ce virage au niveau de notre sous-région, parce que ça va se faire d'une manière comme d'une autre et ça ne se fera peut-être pas d'une façon qui est souhaitée et souhaitable.

Donc, que ce soit au niveau de l'emploi, au niveau de l'intégration d'un service public, à l'école, un peu partout, c'est comme... nous, on le ressent comme une obligation de se donner les mécanismes de s'ouvrir. Mais ce n'est pas seulement par gentillesse et gratuité, c'est qu'on pense que le jeune de notre région, quand il fait 10 km au sud, là, il faut qu'il pense qu'il est encore dans le même pays. Aussi simple que ça. C'est frappant. Je vous inviterais même à prendre même votre voiture, partez de Sainte-Eustache puis arrêtez à Laval, puis après ça à Montréal, c'est étonnant. C'est étonnant.

Le Président (M. Simard): Je vais maintenant passer la parole au député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Merci, M. le Président. Mme la ministre, chers collègues et représentants du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, et vous aussi, M. Marginean et M. Girard, d'abord vous remercier pour la qualité de votre présentation et, comme le disait Mme la ministre, l'intérêt que vous voyez en la personne immigrante, pas seulement l'intérêt pour répondre à des besoins, mais aussi la personne, l'apport qu'elle peut donner, cette richesse qu'elle peut apporter à une région.

Vous mentionnez que les Basses-Laurentides, l'établissement des personnes immigrantes doit être encouragé, on doit donc augmenter la venue des personnes immigrantes dans les Basses-Laurentides. Vous nous donnez deux raisons: d'abord accroître la diversité culturelle, je l'ai mentionné, et répondre aussi aux besoins de main-d'oeuvre des entreprises. Du même souffle, vous nous dites que tout le secteur des Basses-Laurentides, vous avez une croissance démographique qui est vraiment extraordinaire, et je peux en témoigner, étant tout près des Basses-Laurentides, mes garçons demeurent aussi dans les Basses-Laurentides, et c'est évident qu'il y a un boom démographique, en tout cas, de façon très évidente.

En même temps, vous nous dites qu'il y a des difficultés pour les entreprises à embaucher, à recruter du personnel, et malgré tout le taux de chômage reste un taux qui est relativement faible dans votre région. Moi, j'aimerais ça, je ne sais pas si c'est possible qu'on puisse nous préciser quelle serait l'ampleur d'une augmentation de l'immigration? Qu'est-ce que vous avez vraiment besoin par rapport à ce qu'on a actuellement? Il y a des débats au niveau de tout le Québec, vous avez entendu plusieurs hypothèses. On a 45 000 nouveaux arrivants à chaque année. Il y en a qui souhaiteraient peut-être... En tout cas, il y a des hypothèses qui font qu'il pourrait y en avoir moins, d'autres plus, etc. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, sur l'ampleur que devraient avoir les personnes immigrantes dans votre région particulièrement.

M. Marginean (Alain): Au niveau de l'ensemble du Québec, au niveau du quota, les discussions que nous avons eues, et nous ne sommes pas spécialistes, là, mais, avec notre perception, c'était qu'il n'y avait pas de contraintes, qu'il n'y avait pas de contraintes à ce niveau-là. Je vais vous faire une petite parenthèse. Nous avons aussi travaillé fort et dur et beaucoup discuté pour un mémoire à la commission sur les accommodements raisonnables, là, qui est un autre débat. Donc, et je dois vous dire ? qu'on a déjà déposé; et je dois vous dire ? qu'on n'y voit pas de contraintes de chiffres. C'est plutôt d'avoir les moyens de ses ambitions, c'est-à-dire de se doter de stratégies qui permettent aux personnes de s'intégrer convenablement et de nous faire partager cette richesse.

Je fais une parenthèse, mon nom c'est Marginean, d'origine roumaine, donc je crois à l'apport... nous croyons, plutôt, à l'apport et à la richesse de la diversité dans l'intégration, mais nous croyons: à un certain nombre de conditions ? et je pense que je respecte l'ensemble du groupe en disant ça ? pour permettre finalement à ce que les personnes se sentent bien et puissent participer en toute richesse au développement de la communauté. Donc, au niveau des... de notre conseil d'administration, dans les discussions que nous avons eues, on liait, d'ailleurs comme on l'indiquait dans notre mémoire, on liait finalement le nombre de nouveaux arrivants à notre possibilité d'intégration, et au niveau de la région, mais au niveau finalement du Québec. On regarde les actions... On s'est assez déplacé, plusieurs d'entre nous, à Toronto ou à Vancouver. On s'est aussi beaucoup déplacé, chacun de nous, à cause de nos fonctions, à l'étranger. Je pense qu'on a une perception d'amateur, mais, quand même, qui a sa valeur, et on pense que nous sommes une terre d'accueil, nous pensons que les nouveaux arrivants sont une ressource, un objet de croissance dans la mesure où, nous, finalement nous nous donnons les stratégies pour le faire.

M. Marsan: Merci.

Le Président (M. Simard): Merci. Alors, je me retourne maintenant vers Mme la députée de Soulanges, si je...

Mme Leblanc: Deux-Montagnes.

Le Président (M. Simard): Pardon, Deux-Montagnes. On est dans le même secteur, mais vous êtes dans les Basses-Laurentides; ça, il n'y a pas de doute là-dessus.

Mme Leblanc: Tout à fait, oui, oui, oui. Merci, M. le Président. Mme la ministre, chers collègues, M. Marginean et M. Girard. Bien écoutez, bravo pour votre implication. On connaît bien... je connais bien les Basses-Laurentides pour en représenter une partie. On connaît bien aussi le dynamisme de nos gens qui l'habitent, et je pense qu'aujourd'hui votre mémoire en témoigne.

Écoutez, moi, naturellement j'ai rencontré effectivement, là, le pôle universitaire dernièrement, là, M. Fallu, et, bon, je pense que c'est une excellente... le centre de formation, la reconnaissance des acquis. Vous avez beaucoup parlé aussi du collège Lionel-Groulx, qui est quand même un excellent pôle aussi pour ce type de formation. On sait également qu'actuellement dans notre région il y a un pénurie aussi de main-d'oeuvre spécialisée, entre autres, d'où, disons, la part du collège Lionel-Groulx qui serait très importante. Toutefois, on sait également aussi qu'actuellement le collège, comme vous l'avez dit tantôt, connaît un boom de ses élèves, et il y a surcapacité. Il y a également... on doit loger certains élèves, là, je ne sais pas si cette année ou l'année prochaine, dans des roulottes.

Donc, écoutez, face à ça, comment vous entrevoyez ça, là, si on reçoit favorablement l'avenue du pôle universitaire, là, versus... pour développer des acquis avec le collège Lionel-Groulx. Comment vous voyez tout cet arrimage-là?

n(14 h 40)n

M. Marginean (Alain): C'est une question... on revient à la même question, toujours, de suffisance, hein? Et on comprend qu'un établissement collégial, c'est sans doute le seul au Québec, qui accueille 700 élèves, ou 600 ou 700 élèves de plus ? imaginez, c'est pratiquement un cégep; en tout cas, ça en vaut deux sur la Côte-Nord ? ...l'impact que ça crée dans un contexte de restriction budgétaire. Donc, on peut penser que la francisation de 30 ou 40 personnes ? on y va d'opinion ? n'est pas nécessairement la priorité des priorités.

Nous, on pense que c'est quand même fondamental puis c'est important. Parce qu'au niveau... au-delà de l'apprentissage du français, vous savez que dans ces activités il y a toute une série d'informations, de formations qui sont données, qui permettent à ces personnes de connaître le tissu dans lequel elles s'insèrent, que ce soient des représentants de CLSC ou des représentants de la police communautaire, enfin il y a plein de gens qui sont vus. Et, dans ces activités, finalement les personnes, en plus de faire l'apprentissage du français, s'intègrent à un milieu. C'est évident que, si le programme de francisation pour des gens habitant dans les Basses-Laurentides se fait à Laval ou à Montréal, c'est évident qu'on vient de passer à côté de tout le volet qui concerne l'intégration au milieu. En même temps, on considère que les établissements livrent ce qu'ils vivent, hein, et donc tout le travail de sensibilisation et d'animation.

Nous avons émis l'hypothèse, et c'est vraiment une hypothèse, dans notre mémoire qu'étant donné que les ententes du ministère de l'Immigration ont été faites avec les cégeps et les universités à travers le Québec, exception près, là je pense à Montréal, que ce serait peut-être l'occasion, puisqu'il y a un pôle universitaire maintenant dans les Basses-Laurentides, que ce soit le pôle qui, en lien avec une des universités de Montréal, puisse offrir les programmes de francisation dans ses propres locaux. On est allé d'une hypothèse qui me semblait être peut-être la piste à analyser, la piste à étudier pour permettre une francisation qui pourrait avoir lieu dans les Basses-Laurentides.

L'élément suivant qu'on s'est permis de faire, à notre petite expérience, c'est que la question de la francisation nous semblait être un élément majeur au niveau des critères de l'accueil, mais qu'on s'est rendu compte aussi, mais par expérience, que des personnes venant de d'autres cultures et ne maîtrisant pas le français mais étant dans un processus de francisation bien structuré et bien structurant, bien, pouvaient leur permettre d'être aussi d'excellents citoyens, avec l'ensemble des possibilités et des avantages au profit de la communauté, un dernier point qu'on a soulevé dans notre mémoire, qui était un grand objet de réflexion entre nous. Je ne sais pas si je réponds bien à votre question?

Mme Leblanc: Oui, oui, oui. Une autre petite question. Écoutez, on sait que les Basses-Laurentides, les Laurentides, de par notre boum économique, on a du sous-financement constamment dans beaucoup de secteurs d'activité. Est-ce qu'actuellement c'est un frein à l'intégration de nos immigrants? On ne parle pas aussi du futur, là, mais actuellement est-ce que c'est un frein, votre enveloppe budgétaire, c'est un frein à votre...

M. Marginean (Alain): Nous avons quelques programmes de financement du ministère de l'Immigration, nous avons la participation, dans certaines activités, du Mouvement Desjardins, nous avons eu des contributions des établissements et de certaines villes qui participent à l'accueil des activités que nous menons. Je vous dirai qu'il y a toujours une problématique de financement, mais, d'une façon peut-être plus importante, et là je m'engage, la problématique des structures, des niveaux de décision, au niveau d'Emploi-Québec, au niveau des partenaires du marché du travail des Laurentides versus le Sud, le Nord, les problématiques de mur entre Laval, Lanaudière, Basses-Laurentides, ces éléments-là sont des éléments qui à notre avis freinent énormément le développement. Et on l'a vu par l'attitude... On a vu l'impact qu'a eu le développement du plan stratégique du ministère en trois sous-régions, l'impact positif. Mais je vous dis que ça n'a pas été facile au niveau du comité directeur. Il en va de soi, je pense, vous avez raison, au niveau de l'éducation, au niveau des services sociaux. On pourrait parler de l'Hôpital de Saint-Jérôme versus Saint-Eustache. Et c'est vrai à tous les niveaux. Et c'est vrai dans une région qui connaît une croissance exceptionnelle dans un contexte de décroissance.

Mme Leblanc: Merci. Je vais laisser ma collègue... Merci.

Le Président (M. Simard): Mme la députée de Charlesbourg.

Mme Morissette: Je vais vous sortir un petit peu de votre région, parce que j'ai laissé ma collègue vous poser les questions qui étaient plus centrées sur la région... parce que vous avez amené quelque chose que je trouve extrêmement intéressant. Quand vous dites, dans votre mémoire, qu'«au-delà des apprentissages de la langue les problèmes de francisation sont des leviers qui visent l'intégration des nouveaux immigrants dans la communauté où l'on souhaite qu'ils vivent», est-ce que vous pensez que ça pourrait être une idée intéressante à exploiter, d'offrir des cours... Je ne peux pas dire quel nom on pourrait donner à ces cours-là ou quels contenus ils seraient, mais aux gens qui parlent... aux immigrants qui parlent déjà français, afin qu'ils puissent davantage connaître le milieu? J'aimerais ça vous laisser la chance d'élaborer un peu là-dessus, là. Je vous vois hocher la tête, donc...

M. Girard (Claude): Je ne sais pas si je comprends bien la question. Vous nous dites finalement que des gens peuvent être français mais ne pas être américains, mais, nous, on peut être des Américains qui parlons français.

Une voix: On passait... Écoutez...

M. Girard (Claude): ...ça comprend le sens de votre question, madame.

Mme Morissette: O.K.

M. Marginean (Alain): Oui. Je pense que le fait de... au-delà de l'apprentissage du français, une connaissance... Une intégration culturelle est intéressante, et on voit, là... J'ai pu personnellement participer, parce que j'étais à Trois-Rivières, il y a plusieurs années, à l'intégration de Vietnamiens au moment où il n'y avait pas de COFI. Au-delà de l'apprentissage de la langue, les activités qui sont faites concernent l'intégration culturelle, et, oui, pourquoi pas, pour des gens qui maîtrisent le français ou la langue française, d'avoir un certain nombre d'activités qui permettent de connaître leur communauté et plus largement la culture.

On avait discuté aussi pourquoi le ministère n'a pas des programmes de formation en ligne pour des gens qui sont déjà à l'étranger dans des... Ça existe déjà? Bon. Donc, des éléments semblables bien en amont pour permettre finalement aux gens de vivre cette compréhension et cette intégration régionale.

Je dois vous dire aussi, l'autre élément qu'on se posait, pour avoir travaillé dans un certain nombre de pays: Est-ce que... Et je faisais la remarque aux collègues. Quand on est à Casablanca ou à Bogotà, est-ce qu'on dit qu'on est... que je suis de Rosemère ou je dis que je suis de Montréal, hein? Je dis que je suis de Montréal. Donc, quand des personnes arrivent, est-ce qu'on doit dire: Venez vous installer à Sainte-Thérèse, ou venez vous installer dans le Grand Montréal, et c'est 20 minutes de métro léger ou de métro de surface. Bon, il n'y a pas de Bombardier, mais... Tout est question de perspective. Et, dans ce sens-là, peut-être que les questions macro entre... pourquoi Toronto? C'est quoi, Montréal? Est-ce qu'on souhaite que Montréal devienne une mosaïque comme Toronto? Je pense que ce n'est pas nécessairement nos choix.

Au niveau des Basses-Laurentides, dans notre microsystème, oui, on a pensé qu'au-delà de la francisation... ou, si on tenait à la francisation, c'est parce qu'on a bien vu que, quand deux policières se présentent dans un programme de francisation puis expliquent aux personnes que, si ça ne va pas dans la maison, qu'ils peuvent aller à tel endroit, puis ils ont tel service, puis... Tout ça, et comment c'est... C'est vraiment important, hein. C'est du travail de base. Ou quand la représentante du CLSC vient expliquer les programmes de vaccination ou quand, à l'école, on informe sur les classes particulières au niveau de la francisation, c'est toute cette trame-là qui fait qu'on peut arriver finalement à avoir des personnes actives à part entière au niveau de la communauté.

Donc, au-delà de l'apprentissage du français, il s'agirait peut-être d'ouvrir plus large qu'à des programmes de francisation, mais à des programmes de... Est-ce qu'on doit dire le mot «intégration» ou...

Mme Morissette: Du milieu, oui.

M. Marginean (Alain): ...ou meilleure connaissance du milieu régional?

n(14 h 50)n

Mme Morissette: C'est ça parce que dans le fond les cours de francisation peuvent servir de porte pour faire connaître davantage le milieu en faisant venir des intervenants, mais les gens qui n'ont pas à suivre les cours de francisation n'ont pas nécessairement accès à ce genre... Parfait. C'était un peu là-dessus que je pensais que vous alliez, puis je suis bien contente de la précision.

Je pense que j'ai le temps pour une dernière question. À la page 4, vous n'avez pas besoin d'y aller, là, je vais le lire, mais vous dites que votre organisme peut davantage collaborer avec le CIBLE. Est-ce que... Comment... Vous dites... Dans le fond, vous dites: Vous pourriez davantage collaborer, mais est-ce qu'il y a un manque de financement? Est-ce qu'il y a un manque de... Je ne sais pas, parce que vous... C'est un manque de... Bien, je ne veux pas mettre des mots dans la bouche, là.

M. Marginean (Alain): D'accord. CIBLE est un organisme externe à Emploi-Québec qui a le mandat de... qui est comme un sous-traitant, un organisme externe qui voit à aider les gens à s'intégrer au milieu du travail, toutes populations confondues, pour des gens qui habitent les Basses-Laurentides. Mais on pense que la clientèle visée de l'intégration à l'emploi, ce n'est pas celle des Basses-Laurentides, c'est celle qui est 4 km plus au sud, à Laval, ou 10 km plus au sud, à Montréal. Ces organismes-là interviennent sur le territoire des Basses-Laurentides, leur clientèle étant celle du lieu de résidence et non pas du lieu de l'entreprise, hein. C'est comme si on disait: Oui, la majorité des... Non. Toutes les entreprises que nous visons sont sur notre territoire, mais un grand nombre des personnes qui sont visées sont hors territoire, et là c'est au niveau de la problématique d'Emploi-Québec de concilier finalement le lieu de résidence de la personne avec le lieu de travail, et là ça ne fonctionne pas.

Mme Morissette: Des idées de suggestions pour aider à une collaboration entre les centres locaux, ou des choses comme ça?

M. Marginean (Alain): Écoutez, nous ne sommes pas vraiment, comme... ? je reviens là-dessus ? spécialistes, mais on pense que le travail qui a été fait par le ministère de l'Immigration, d'aller d'une stratégie paramétrée d'une façon spécifique, aurait toutes les chances de permettre à trouver des solutions. On pense finalement que, si on pouvait s'asseoir puis sortir de ce paradigme ou de ce carcan, lieu de résidence-lieu de travail, on pense qu'on pourrait faire des choses. Mais ça implique que les organismes qui font des statistiques, bien là, changent leurs lunettes, hein, parce que c'est ça, hein, les gens sont financés par 10 placements, par huit déménagements. Et on peut facilement travailler, je répète, à Saint-Eustache puis travailler à Montréal, il y en a 125 000 qui font l'inverse, qui habitent dans les Basses-Laurentides, puis on voit les ponts le matin, qui travaillent à Montréal. Donc, il faut sortir, là, des carcans puis être assez imaginatif, puis là-dessus, bon, bien sûr qu'on est prêts à collaborer.

M. Girard (Claude): Tout comme ? si vous permettez; tout comme ? les gens peuvent demeurer à Montréal ou travailler dans les Basses-Laurentides, ils peuvent demeurer à Montréal puis suivre des cours de francisation dans les Basses-Laurentides. Ça, c'est aussi possible; ce n'est pas nécessaire qu'ils demeurent sur place, et ça, c'est une difficulté que nous avons.

Mme Morissette: O.K.

Le Président (M. Simard): Nous allons continuer cet échange ? merci, Mme la députée de Charlesbourg ? avec le critique du Parti québécois, du deuxième parti d'opposition, le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques.

M. Lemay: Merci, M. le Président. À mon tour, je désire saluer et vous remercier d'être présents parmi nous aujourd'hui pour nous donner un éclairage quand même particulier et fort intéressant. Et que... Faites-vous-en pas, là, que vous soyez... Vous êtes experts de votre région, et, pour nous, ça nous suffit.

Vous avez dit tout à l'heure: Les gens partent des Basses-Laurentides, s'en vont... Ils ont un premier choc à Laval, et, arrivés à Montréal, c'est un autre pays. C'est ce que vous avez dit tout à l'heure, hein, je n'interprète pas...

Une voix: ...

M. Lemay: Non, non, mais...

Le Président (M. Simard): Au premier degré, là.

M. Lemay: Oui, oui, oui! Est-ce que vous, encore une fois, qui êtes experts de votre région... Comment on peut expliquer qu'à un jet de pierre, en fait, il y a cette région qui, vous l'avez dit, explose au niveau démographique depuis quelques années déjà, au niveau de l'emploi, et tout, et que, deux ponts plus loin, vous êtes dans un autre pays, pour reprendre encore une fois l'expression que vous avez faite tout à l'heure? Comment... Est-ce que vous avez une explication de ce phénomène-là?

M. Marginean (Alain): Pour nous, un des éléments sûrement importants est au niveau des structures, et des structures de décision, hein. La décentralisation, la création des CLD et des CRE, dans les régions urbaines, doit amener un certain nombre de défaillances plus on s'approche de l'épicentre, hein. On y va d'une opinion. Plus on se rapproche des grands centres ? et c'est sans doute vrai pour l'ensemble des grandes villes à travers le monde où il y a une décentralisation, hein ? plus on se rapproche, les gens sont toujours tournés vers le noyau et non pas dans l'autre sens, hein. De Sainte-Thérèse, d'aller à Montréal, je peux y aller trois fois par jour, c'est à côté, c'est 15 km, à part les heures de pointe, mais, du centre-ville vers l'extérieur, on a l'impression qu'on s'en va au bout du monde. Comment expliquer? Je ne pourrais vous dire. Mais un élément important, les structures, on a été conscients, par rapport à Emploi-Québec, ou le ministère de l'Éducation, ou le ministère de l'Immigration, que les régions, l'interface des régions était vraiment une barrière, c'est clair. M. Girard parlait tantôt, c'est possible d'avoir des programmes de francisation. D'ailleurs, on souhaitait que les programmes de francisation au collège soient pour des clientèles de Montréal, parce qu'on se disait... Ce n'est pas une question de temps, hein, ça prend le même temps, là, je me répète, en train, partir de Parc-Extension pour venir au cégep Lionel-Groulx, c'est 17 minutes, c'est rien, prendre le cours, le programme de francisation au collège, et on en profite pour leur faire connaître la région, les jobs, les structures, l'emploi. On se disait: Quel beau mécanisme pour permettre aux gens finalement de découvrir; c'est à côté.

Mais, là aussi, je reviens là-dessus, la personne comptabilisée à Montréal, ce n'est pas la personne comptabilisée dans les Laurentides, et c'est deux régions à côté, et tout le monde tient à ses statistiques. Bon, on a recentralisé la direction de la francisation, les directions régionales avaient la responsabilité de francisation, donc on avait vis-à-vis nous des gens qui avaient une compréhension, il nous semble, plus grande des enjeux au niveau de la sous-région. À partir du moment où c'est centralisé à Montréal... écoutez, il y a des gens de Montréal, là, qui ne sont peut-être pas allés plus loin que Mirabel, je ne sais pas, ou Sainte-Thérèse. Et ce n'est pas juste une question de vision, c'est une question de comptabilité, de chiffres. C'est des chiffres, c'est des clients. Et les organismes financés par le ministère de l'Immigration pour la régionalisation, bien ils doivent compter leur nombre de clients qu'ils placent à l'extérieur. Et, nous, on disait: Bien, c'est une francisation, nous allons le faire, et peut-être que dans deux ans, dans trois ans, dans quatre ans, bien ils vont accrocher à l'emploi puis après ça ils vont accrocher finalement sur un déménagement.

M. Lemay: Vous disiez tout à l'heure, parlant de chiffres... et je comprends que la structure ne vous aide pas, les différentes structures gouvernementales ne vous aident pas, vous disiez tout à l'heure que, s'il y avait 10 nouveaux arrivants, 10 immigrants à Saint-Eustache, c'était calculé pour la région de Montréal. Est-ce que c'est ça que vous disiez tout à l'heure? Et, s'il y en avait huit à Saint-Jérôme, bien là c'était calculé pour les Laurentides. Pouvez-vous...

M. Marginean (Alain): Non. S'ils restent à Montréal et si certains organismes de placement qui sont financés par le ministère de l'Immigration, qui font du placement régional ? c'est dans le cadre du PARCI ou du PRI, là ? eux, si le placement est fait à Saint-Eustache ou à Sainte-Thérèse, ils sont dans le Montréal métropolitain, et, si la personne continue à habiter à Côte-des-Neiges, bien... La personne habite à Côte-des-Neiges mais prend le train à Saint-Laurent puis s'en va travailler à Saint-Eustache, cette personne-là n'est pas comptabilisée comme étant une personne en région. Et donc, l'organisme qui fait ce travail-là n'est pas financé pour ce travail-là.

M. Lemay: Cette affirmation est étrange, M. le Président, parce que, dans le document du ministère, quand on fait référence techniquement à la région montréalaise, on parle de Montréal, Laval et Longueuil. Ça veut dire que, dans le même ministère, il y aurait plusieurs définitions de la région métropolitaine, là. Alors, on comprend qu'à un moment donné on soit un peu... Quand le ministère présente ses documents, quand on dit «la région métropolitaine de Montréal», c'est Montréal, Laval, Longueuil. Et là vous nous dites aujourd'hui que, dans le cadre d'une régionalisation de l'immigration, le ministère a d'autres définitions au niveau de la...

M. Marginean (Alain): Le ministère de l'Immigration?

M. Lemay: Le ministère de l'Immigration a une définition différente, c'est ce que vous nous dites, là. Je ne veux pas vous mettre en porte-à-faux avec le ministère, je veux juste être certain qu'on se comprenne bien, là.

n(15 heures)n

M. Marginean (Alain): D'accord. Longueuil, Montréal, Laval, moi, j'entends parler que de Laval, Laurentides, Lanaudière, au niveau du ministère de l'Immigration. Je pense que les actions qui ont été faites en trois régions, les plans d'action, et après ça en sous-régions, quant à nous, ça devrait être le ministère qui est le plus clair. Ce n'est pas clair, mais il nous apparaît plus clair dans ses gestes. Les problématiques sont au niveau plus probablement d'Emploi-Québec et des ententes qu'Emploi-Québec fait avec ses organismes externes, et là ça nous dépasse, ça nous dépasse. Ce que nous savons, c'est qu'un organisme de Montréal qui fait du placement dans les Basses-Laurentides, ce n'est pas un placement en région, ça, on peut vous l'affirmer.

M. Girard (Claude): Oui, c'est parce qu'avec les organismes avec lesquels on travaille, je pense à PROMIS, par exemple, à Montréal, des choses comme ça, ils nous disent ceci: Si nous trouvons un emploi à quelqu'un à Saint-Eustache et que la personne demeure à Montréal, on n'est pas reconnu pour ça. Parce qu'eux sont payés quasiment à la pièce, dans le contrat, c'est quasi à la pièce, là. Mais, quand on a fait une brochure, que vous avez eue, qu'on vous a envoyée ? j'en ai vu quelques-uns, quelques-uns l'avaient ? puis on a dit: Les Basses-Laurentides, en banlieue de Montréal, ils ont dit: Ne dites jamais ça! Il faut parler de la région. C'est vrai qu'on est en région, mais, en même temps, moi, je paie les taxes à Montréal personnellement, là, pour le métro, pour tout ça, là. On fait partie... on est une région en porte-à-faux, on est dans les deux. Et, pour le ministère de l'Immigration, on considère qu'on est dans les Laurentides. Donc...

M. Lemay: Emploi-Québec, c'est Montréal.

M. Girard (Claude): Et, moi, quand je prends des groupes d'immigrants, que je leur fais visiter les Basses-Laurentides, que je leur vends ? c'est du marketing, faut pas le cacher ? il y a des choses que je dois faire et d'autres que je ne dois pas faire. Emploi-Québec, je ne peux pas y aller, parce qu'eux servent les gens des Basses-Laurentides qui résident là; or, alors les personnes que je reçois ne résident pas là. Bon. Alors, je les amène dans les écoles: Regardez, on va échanger avec des jeunes. On les amène dans les mairies, qu'ils prennent conscience qu'il y a des qualités de personne, ainsi de suite. Il faut aller plus loin. Puis, notre organisme, il a une enveloppe budgétaire très, très mince, là, il y a beaucoup de bénévoles là-dedans. Finalement, bon, comment faire pour mettre ces mécanismes-là sur pied puis vraiment... Il faut aller dans une sous-régionalisation, je pense.

M. Marginean (Alain): Je compléterais: Emploi-Québec est responsable, sur son territoire, de ses clientèles et de ses entreprises. Donc, une personne qui habite les Basses-Laurentides relève de la comptabilité d'Emploi-Québec Laurentides, l'entreprise aussi. Mais, quand les individus... quand les entreprises sont dans les Basses-Laurentides, donc c'est Emploi-Québec Laurentides, mais que les individus proviennent de Laval ou de Montréal, là il y a des individus qui sont sur des programmes d'Emploi-Québec Laval et des individus qui sont sur Emploi-Québec Montréal. Et là c'est des mécanismes de statistiques et d'actions et de développement. Et là c'est deux mondes. On offre des programmes pour les entreprises dans les Basses-Laurentides, mais on n'offre pas des programmes pour les individus habitant à Laval ou à Montréal pour venir traverser le pont.

M. Lemay: Ce qui pour vous pourrait faciliter la régionalisation de l'immigration.

M. Marginean (Alain): Mais tout à fait. Comme on faisait financer de la publicité à Mont-Laurier, qui est, je ne sais pas, là, 250 km, 300 km du collège, et non pas Sainte-Rose, qui est à 2 km, parce que c'est une frontière de région, mais une frontière de région en milieu densément peuplé. Entre Bois-des-Filion, Sainte-Rose, il y a trois régions qui concernent près de 500 000 de population. La densité urbaine dans les Basses-Laurentides est plus importante que la densité de population à Laval, hein? Si on isole les trois MRC, quatre avec Terrebonne... Les Moulins, plutôt, si on prend ces quatre MRC là, vous avez une densité de population, après Montréal, qui doit être la plus importante, mais qui se situe dans deux régions, dans deux sous-régions en interface avec trois régions, donc... et où tout le monde est à la recherche du client ou de comptabiliser son client. «J'ai placé huit personnes.» Alors, vous êtes à Sainte-Thérèse, on ne va pas jouer là.

Et c'est ce qu'on vous dit: Il faut revoir cette problématique-là. Nous, on fait notre bout de chemin et ça progresse. On pense que le ministère de l'Immigration a fait un travail ? la direction régionale, on tenait à le souligner; un travail ? de titan. On voulait absolument, c'était l'objectif de notre mémoire, mais en disant: Il ne faut pas lâcher. Et ça, on peut comprendre que des nouveaux arrivants ne comprennent rien là-dedans. On les échappe. Et pourquoi ils ne restent pas dans notre région? Pourquoi finalement ils finissent par s'en aller ou pourquoi ils s'en vont peut-être même à l'extérieur du Québec? C'est peut-être par des éléments semblables.

Une voix: ...pardon, M. le Président.

Le Président (M. Simard): Non, les dernières secondes... Ça va, parce qu'il vous reste 30 secondes. Alors, si c'était la dernière question, il me reste à vous remercier. Évidemment, vous avez abordé un problème sous un angle auquel nous ne sommes pas autant habitués que dans les cas habituels. C'est une région... Je connais le même phénomène sur la Rive-Sud, c'est des régions qui sont directement en contact avec Montréal et qui sont très homogènes, et vous avez posé les problèmes de façon intéressante, je vous en remercie tous les deux.

Alors, j'invite immédiatement le groupe suivant, qui est la municipalité de Rawdon, à prendre place, et je nous donne un cinq minutes de pause à tout le monde, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 15 h 6)

 

(Reprise à 15 h 12)

Le Président (M. Simard): Nos prochains invités sont de la ville de Rawdon. Nous avons Mme la mairesse qui est avec nous, Mme Louise Major, et le président du conseil interculturel de Rawdon ? hein, il y a un conseil interculturel à Rawdon, c'est déjà beaucoup ? M. Roger Dominguez. Alors, bienvenue parmi nous. Vous connaissez nos règles, vous avez une quinzaine de minutes nous faire votre présentation, et ensuite on vous pose des questions.

Municipalité de Rawdon

Mme Major (Louise): Alors, merci beaucoup, M. Simard, le président. Mme la ministre, Yolande James ? nous nous sommes déjà rencontrées ? et membres de la commission. Alors, nous vous remercions d'avoir accepté de nous recevoir aujourd'hui pour nous entendre autant sur notre mémoire, mais particulièrement peut-être aussi nous entendre sur, je dirais, l'expérience unique de Rawdon, et unique sous plusieurs aspects. Alors, on en discutera sûrement cet après-midi. Et c'est peut-être... ce n'est pas étranger. Justement, j'entendais les précédentes personnes faire leur présentation, et, quand on parle d'une sélection sous-régionale de l'immigration, eh bien, à notre première présentation de notre mémoire, en 2004, à la commission sur le même sujet, déjà nous avancions que les municipalités ont à être partie prenante et sont la pierre angulaire, d'après nous, pour une réussite de l'immigration, une intégration, surtout, réussie.

Alors, on... comme introduction, je veux un peu vous parler de Rawdon, naturellement: 10 000, environ, de population dans une MRC, la MRC de Matawini, qui a 45 000 de population, un territoire immense dans la région de Lanaudière. Les autres MRC qui la composent sont beaucoup plus petites en superficie.

Alors, Rawdon, qu'est-ce que Rawdon vient faire dans ce sujet d'immigration là? Eh bien, c'est 75 ans d'histoire d'immigration. Alors, assez particulier qu'on y retrouve 46 communautés culturelles différentes, environ 30 % de notre population est d'origines diverses. L'explication un petit peu de cette arrivée d'immigrants. Au début du siècle, c'étaient particulièrement les deux Grandes Guerres qui ont fait que les gens ont regardé vers la municipalité de Rawdon, parce que ça leur rappelait tout simplement les paysages de leur pays, d'Europe de l'Est particulièrement. Mais on s'est aperçu que, même après les deux Grandes Guerres, l'arrivée d'immigration asiatique a changé le tableau, mais ça l'a changé toujours positivement, parce que Rawdon s'est enrichi au fur et à mesure des années par sa diversité. On a aussi cinq dénominations religieuses différentes, un cimetière oecuménique, chose que vous ne retrouvez pas à pleins d'endroits, naturellement. Et l'apport aussi économique par des... l'installation d'entreprises créées par ces gens-là au fur et à mesure des années, un apport naturellement qu'on comprend très bien, social, communautaire, culturel aussi par l'arrivée d'artistes et d'artisans.

Mais, naturellement qu'en 2002, quand je suis arrivée à la mairie, c'était un fait, c'était quelque chose de particulier à Rawdon, mais que tout le monde reconnaissait sans pour autant qu'on aille plus loin. On le vivait de façon harmonieuse, et ce que nous voulions justement, c'est valoriser cette particularité et l'amener un peu plus loin justement, dans notre expérience en immigration. C'est pour ça qu'on appelle, nous, faire de l'accompagnement profitable avec nos citoyens. Parce que ça s'est beaucoup vécu, comme un peu ça se vivait au début du XXe siècle, l'accompagnement dans les choses ordinaires de la vie. Bon. C'étaient beaucoup les organismes qui s'entraidaient, les églises qui entraidaient. Et cette façon de faire là s'est perpétuée même jusqu'à maintenant.

Donc, si on revient à notre sujet, l'énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration, qui date de 1990, alors nous y adhérons grandement et nous le trouvons très actuel. Il date de 1990, pourtant, 17 ans plus tard, on en parle encore sur les mêmes enjeux: redressement de la situation démographique. Nous, à Matawinie, on n'est pas nécessairement en baisse démographique, parce qu'on observe une augmentation notable, 16 % d'augmentation de la population. Cependant, dénatalité et vieillissement de la population nous touchent quand même. Alors, si on voit plus loin en avant, il faut quand même s'en préoccuper maintenant.

La prospérité économique, bien quand, autrefois, on voyait peut-être une page ou deux d'offres d'emploi dans les journaux, alors que maintenant il y en a quatre pages, c'est déjà un indice que les entreprises commencent à regarder comment elles vont assurer la relève, chose qu'on observe et que parfois, en tant que mairesse aussi, les employeurs viennent nous voir: Bien, avez-vous, madame, des listes d'employés, des gens à nous référer?

Pérennité du caractère français. À Rawdon, même s'il y a plusieurs langues qui se parlent, même si dans notre personnel il y a des gens qui parlent russe et polonais, pour bien desservir notre clientèle, la pérennité du caractère français nous préoccupe.

L'ouverture sur le monde, bien ça va de soi pour nous. Les liens internationaux se font par notre population de façon courante, pas seulement par les entreprises, mais par la population de façon quotidienne.

Le succès de la politique d'immigration et le succès de l'intégration, oui, nous le voyons très lié à la connaissance du français dans la vie publique. Et la participation et la contribution de tous est attendue et favorisée. D'ailleurs, nous l'avons exprimé dans un document officiel à la municipalité, la Charte des droits du citoyen de Rawdon, où on fait quand même appel à la responsabilité mutuelle, autant de la personne d'origine que de l'arrivant, de se connaître et d'accepter mutuellement cette diversité dans la population qui est pluraliste, ouverte aux apports extérieurs dans la limite qu'impose le respect des valeurs démocratiques. C'est ce qu'on traduisait dans notre charte.

Nous sommes d'accord aussi avec les points qui sont ressortis dans Briller parmi les meilleurs et des valeurs partagées et des intérêts communs. Et ce qui nous préoccupe grandement, et ce qu'on a vécu par l'expérience, et ce qu'on voudrait aussi, surtout aujourd'hui, vous faire valoir, c'est comment il faut bien arrimer les besoins de la région, les besoins exprimés, puis je vais plutôt aller loin, par les sous-régions, et même, localement, de quoi avons-nous besoin, comment faire en sorte que ce qu'on appelle tantôt les besoins des employeurs soient comblés, comment faire en sorte aussi que le besoin du nouvel arrivant d'un emploi soit comblé. Et c'est en faisant cet arrimage-là de façon préalable, même à l'arrivée autant que possible.

Favoriser l'amorce dès l'étranger du parcours d'intégration et de la francisation. Bien sûr, il y a différentes façons de le faire, et on pourra s'en parler un petit peu plus.

Accélérer l'apprentissage du français, bien, chez nous, ça se fait, comme on le dit, de façon bien quotidienne, encore là par l'accompagnement bien personnalisé.

Lever les obstacles à l'insertion rapide et réussie au marché du travail. Par notre expérience aussi, on a remarqué que, oui, un peu comme il a été parlé précédemment, le fait que le centre local d'emploi desserve un résident là où il est, qu'ils ne peuvent le desservir pour un endroit où il voudrait aller s'installer, ça cause problème. On essaie présentement, nous, par différentes façons je ne dirais pas de contourner, mais de faire comprendre et d'innover dans la matière pour qu'on puisse faire cet arrimage-là et faire en sorte que le nouvel arrivant puisse savoir de quoi il est question quand il veut trouver un emploi chez nous.

Donner un soutien accru... pardon. Consolider les liens avec les communautés culturelles, bien ça se fait depuis tellement longtemps que c'est déjà installé, nous avons un centre d'interprétation multiethnique qui maintenant a 20 ans d'existence. Donc, les communautés se parlent et ont un lieu justement ces rencontres et ces échanges.

n(15 h 20)n

Donner un soutien accru aux employeurs et aux institutions en vue de bâtir un Québec inclusif, ça se fait particulièrement via les chambres de commerce, via le carrefour jeunesse-emploi. Bon. Les municipalités ont des contacts directs et privilégiés avec ces organismes.

Valoriser l'apport de l'immigration au développement du Québec et lutter contre la discrimination. Pour la valorisation de l'immigration, bien on a des événements particuliers qui se tiennent annuellement, Hommage interculturel de Rawdon, où on veut justement parler à ces gens-là qui depuis 75 ans le construisent, autant les gens de chez nous, les gens qu'on dirait Québécois d'origine, que les gens qui par leur apport des différentes communautés au fur et à mesure des années ont pu faire, comme on dit, grandir Rawdon.

La planification et les scénarios prônés par Rawdon, bien vous comprendrez naturellement qu'on favorise la croissance moyenne de l'immigration, mais par des techniques bien particulières. Au niveau économique, naturellement ce serait pour combler les postes en vue des retraites annoncées puis de ce qu'on voit comme courbe démographique qui s'annonce, autant pour notre région malgré l'augmentation de la population, et l'apport de jeunes travailleurs immigrants qui développeraient l'entreprenariat par une vision nouvelle des connaissances. On s'est aperçu justement que c'est un enrichissement que d'avoir des façons nouvelles, des façons autres de voir les choses, de voir les relations et d'avoir un dynamisme différent. On a des entreprises, bon, qui datent d'une cinquantaine d'années. On pense à des relèves autant des entreprises justement installées par des nouveaux arrivants que des entreprises installées par nos gens. Donc, il nous apparaît fort important de choisir l'immigration en fonction de l'âge et des compétences pour répondre aux besoins de l'endroit où le nouvel arrivant va s'installer.

Le recrutement. Alors ça aussi, pour naturellement bien cibler nos nouveaux arrivants, parce qu'on calcule que c'est très important. Il y a des phénomènes qui se passent, et je pense que toute municipalité voit ce qui peut se produire, on commence par les écoles. Bon. Baisse de la clientèle dans les écoles. Ce qu'on observe aussi, c'est baisse, qu'on dit, d'employés éventuels ou de relève, quand on regarde nos entreprises qui sont installées chez nous. Donc, on est conscients et on trouve important que le leadership local vienne gérer ces genres de problématiques là. C'est n'est pas en partant d'une organisation de structure plus haute qu'on y arrive, mais bien en exprimant vraiment le besoin de façon locale. Et on n'a pas gardé l'expérience juste pour Rawdon. Nous le savions, que dans la MRC de Matawinie les mêmes besoins s'exprimaient, sauf qu'on calculait qu'on avait déjà une expérience dans la gestion de la diversité et qu'on pouvait en faire profiter la région. Alors, c'est vraiment des constats régionaux de la MRC qui se sont faits auxquels, nous, on veut se greffer et aider pour installer des nouveaux arrivants non seulement à Rawdon, mais dans toute la MRC. Il s'agit seulement qu'on nous fasse signe.

Donc, les étapes de la démarche de Rawdon ont commencé, autant au niveau de la MRC, par les constats démographiques, économiques, etc., mais, pour vraiment y arriver, on est passé par la création du conseil interculturel de Rawdon, donc des citoyens de Rawdon qui en font partie, des personnes... des experts-conseils qui nous aident et qui font des recommandations au conseil municipal pour justement poser les actions requises dans ce domaine. Donc, c'est pourquoi la présence de M. Roger Dominguez, qui est le président du conseil interculturel, aujourd'hui.

Donc, ce n'est pas seulement aussi en actions à poser pour l'installation et l'intégration des nouveaux arrivants, mais c'est, comme on vous l'a mentionné tantôt, l'organisation d'événements pour créer ce climat, pour créer les événements, les occasions de rencontre entre les nouveaux arrivants et notre population, donc autant des gestes de reconnaissance que des événements de tous ordres. Mais une des actions très concrètes et qui fait justement le parallèle avec la présence aux deux commissions, notre mémoire d'il y a trois ans et aujourd'hui, c'est l'entente de partenariat avec le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, qui a été signée en juin 2005 et qui a donné naissance, via le programme régional d'intégration, à notre Service d'accueil et d'intégration du nouvel arrivant, dont on vous a fait la distribution tantôt.

Alors, c'est par ce... L'implantation de ce service d'accueil, naturellement il y avait un plan d'action qui y était lié, donc c'est par étape, c'est progressif, mais on voulait justement décrire les actions à poser dans le temps et comment on arriverait justement à livrer la mission dont on s'était doté. Le ministère, naturellement, accomplit un travail extraordinaire, qui est souvent peu reconnu, dans le recrutement, et c'est pour ça qu'on veut s'y associer, la municipalité, via la MRC aussi, pour qu'on favorise un recrutement qui corresponde aux besoins de nos localités. Donc, on veut aussi que notre population locale qui est déjà installée et qui est issue de l'immigration puisse aussi des fois nous faire des références de gens qui sont encore chez eux et qui auraient l'intention peut-être de faire la même démarche qu'eux quelques années plus tard, et qu'ils puissent nous les référer, pour qu'on puisse bien les accompagner.

Donc, il importe aux régions de s'impliquer collectivement à la préparation de l'intégration des nouveaux arrivants, et naturellement le soutien financier du ministère est très, très apprécié, parce que, oui, on fait... Déjà, la municipalité, quand on s'est mis à faire le décompte de ce qu'on donnait comme appui financier pour, je dirais, l'intégration des nouveaux arrivants, on a été même étonnés combien justement notre participation était importante, mais on avait quand même besoin de ce soutien financier pour aller un petit peu plus loin.

Pour ce qui est de la francisation, donc l'apprentissage du français dans le pays d'origine doit être augmenté, à notre avis, et reconnu par une pondération plus élevée. Et on pense qu'il y a différents mécanismes aussi qui pourraient favoriser cette augmentation d'apprentissage du français. Le monde académique québécois, là, qui doit s'impliquer dans la promotion du français à l'étranger. Il y a souvent des échanges culturels, des échanges pour des formations. Alors, la promotion du français pourrait être faite à ces moments-là, et l'échange aussi de compétences, que ce soient nos compétences ou les leurs qu'on acquiert, quant eux feraient le parcours d'immigration, bien c'est un enrichissement aussi parce que déjà on a fait cet échange-là avant même qu'ils arrivent. Donc, cette implication doit se faire en parallèle des efforts de recrutement du ministère et en collaboration avec les différents organismes. Parce qu'on vous en a parlé précédemment aussi, il y a différents organismes aussi qui peuvent nous référer des gens qu'ils accompagnent, et, nous, on peut prendre le relais.

Donc, le Québec ne maîtrisant pas la sélection et l'acceptation de tous les nouveaux arrivants qui bénéficient de programmes et qui voudraient ensuite demeurer au Québec, la francisation doit aussi se faire au niveau local, mais c'est beaucoup, chez nous, via des organismes communautaires. Puis, quasiment une petite anecdote: un jeune qui avait... qui a 14 ans, me disait qu'à son collège la francisation d'un Japonais qui est arrivé ne parlant que le japonais s'est faite avec les copains dans le milieu de l'école, puis il disait: Bien, madame, au bout de quatre mois, il pouvait nous envoyer promener dans notre langue française. Alors, ça en est un, des exemples chez nous.

Donc, l'intégration, on parle beaucoup du fait français, le fait d'apprendre la langue française, la maîtriser, mais c'est insuffisant s'il n'y a pas en même temps la connaissance, la transmission et l'acceptation des valeurs fondamentales québécoises de démocratie, d'égalité des sexes, de liberté religieuse, dans la vie privée, par les nouveaux arrivants, et c'est là que, d'après nous, notre accompagnement est profitable. Quand bien même on essaierait de monter un cours et que le plan de cours vienne détailler comment se vit le Québec, comment ça se vit au Québec... justement, comment ça se vit, c'est en le vivant, et c'est comme ça que, chez nous, ça s'apprend, c'est en le vivant. Quand on demande à un citoyen de Rawdon, il trouve quasiment la question comme: Pourquoi vous me la posez? On est tous des Rawdonois, on est tous des Québécois. L'origine, c'est bien secondaire pour les gens de chez nous.

Cependant, le nouvel arrivant a des besoins immédiats auxquels il faut répondre dès son arrivée: le logement et l'emploi, et je dirais même, c'est à peu près l'oeuf et la poule, c'est l'emploi aussi, parce que, si on lui assure qu'il va avoir un emploi, ça, le logement, on essaie de l'accompagner là aussi par des banques... Autant on a des banques de logements que des banques d'emplois. Nous sollicitons les employeurs directement pour savoir: Avez-vous des emplois disponibles? Parce que les employeurs nous ont aussi signifié... Ou des fois on n'a même pas le temps de l'inscrire sur le site du centre local d'emploi, mais de façon directe nous les sollicitons pour qu'ils nous disent où sont les emplois cachés parfois, ou avez-vous oublié de nous faire signe que vous aviez des emplois de disponibles? On a approché des propriétaires aussi: Seriez-vous disposés à recevoir des nouveaux arrivants? Nous avons aussi, via le CLD, il y a une subvention, nous avons un logement qui est un genre de logement temporaire, de transition; si le nouvel arrivant veut venir au moins faire les démarches de base, les premières semaines, c'est un logement temporaire pour accueillir la famille et procéder ensuite aux démarches pour s'installer.

n(15 h 30)n

Donc, les banques de logements, les banques d'emplois, mais nous l'accompagnons aussi dans les autres aspects de la vie. Donc, pour conclure, l'expérience a fonctionné. Après un an d'installation du service, deux nouvelles familles se sont installées avec cinq jeunes enfants en tout, deux jeunes couples, dont un dans une municipalité voisine, et d'autres familles qui sont en démarche pour s'installer chez nous. Voilà.

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup, Mme Major. Je pense que nous avons tous écouté avec grand plaisir ce que vous nous avez dit.

Je sais que je ne voudrais pas faire perdre une minute à personne, mais est-ce que vous pouvez m'expliquer rapidement: Pourquoi Rawdon a toujours été une terre d'accueil? Moi, j'ai des amis d'origine polonaise qui ont été élevés à Rawdon, d'autres, Ukrainiens. Qu'est-ce qui s'est passé à Rawdon pour qu'en plein milieu des Laurentides il y ait tout à coup cette tradition-là?

Mme Major (Louise): Bien, il y a une explication, comme je disais, peut-être un petit peu banale, que les paysages leur rappelaient ceux de l'Europe de l'Est.

Le Président (M. Simard): Oui. Mais à Saint-Donat aussi, mais c'est 100 % francophone.

Mme Major (Louise): Oui. Vous avez bien raison. Mais je dirai que ce sont des Québécois d'origine aussi qui ont facilité l'accès à la propriété à ces gens-là. Il n'y avait pas nécessairement un contrat notarié en bonne et due forme, mais il y a eu des gens de vision qui ont dit: Vous achetez ma propriété, tant par mois, ça va aller. Et ces gens-là, après ça, le mot s'est passé que l'accueil était favorable à Rawdon. Alors, de fil en aiguille, de famille en famille, d'entraide en entraide, c'est comme ça que ça s'est construit.

Le Président (M. Simard): ...ça aujourd'hui.

Mme Major (Louise): Et nous continuons ça aujourd'hui de la même façon.

Le Président (M. Simard): Alors, je m'excuse de cette intervention curieuse et j'invite la ministre à poser la première question.

Mme James: Ah! Ça m'a fait plaisir. Merci, M. le Président. Écoutez, Mme la mairesse, M. Dominguez, je vous félicite. C'est la première chose que j'ai à vous dire. Écoutez, on a eu... j'ai eu l'occasion et ce privilège de venir vous voir et de vous visiter lors de votre fête annuelle multiculturelle, et c'est à ce moment-là que je l'ai dit, puis je le pense toujours, et je vous cite souvent en exemple, que, quand on veut, on peut.

Et, lorsque je regarde l'ensemble non seulement de votre présentation, mais de l'action puis de la volonté que vous exprimez par votre plan d'action et le fait même, puis je relisais votre document hier, et, quand vous parlez du fait d'être.... de comprendre que vous êtes sur la première ligne, vous êtes les leaders, au niveau municipalités, vous avez souvent le premier contact avec les gens qui arrivent et vous êtes en mesure de répondre à vos besoins, et du fait que vous avez compris que l'immigration non seulement était souhaitable, mais était quelque chose qui pourrait enrichir la région et la municipalité, et l'a fait pendant bien des années, et que vous avez adopté un plan stratégique, mais de façon très disciplinée. On voit maintenant, vous l'avez présenté, les résultats de vos actions, qui sont tout à fait positives, puis j'invite les collègues et tout le monde d'aller voir comment ça se passe chez vous, parce que vous êtes vraiment le modèle à ce niveau-là.

Puis d'ailleurs, vous ne l'avez pas mentionné, mais, moi, je souhaitais le dire, parce que vous avez reçu ce prix, vous avez vraiment de quoi à être fiers, la ville de Rawdon a reçu le prix Ovation municipale pour son service d'accueil et d'intégration des nouveaux arrivants, pour leurs relations interculturelles et immigration. Alors, on voit pourquoi, et je souhaitais évidemment avant de vous poser quelques questions... parce qu'évidemment je veux vous entendre sur les conditions gagnantes, mais je trouvais que c'était important de faire état de tout ce que vous faites et de comprendre que ça ne s'est pas passé juste comme ça, vous avez fait en sorte, avec votre conseil, de prendre en main vos activités et de faire en sorte que les gens se sentent à l'aise, se sentent bienvenus et se sentent chez eux. J'ai été particulièrement touchée lorsque vous avez parlé, chez vous, «tout le monde comprend, la question ne se pose même pas»; ce sont des Rawdonois, ce sont des Québécois comme toute autre personne.

Est-ce que vous pouvez nous parler, puis je sais que mon collègue souhaite vous poser des questions également, sur cette charte? Parce que, dans le contexte actuel évidemment on est très préoccupés pour s'assurer, et pour l'immigrant et pour la société d'accueil, que cette personne-là puisse comprendre et savoir à tous les niveaux, on fait tous les efforts qu'il faut au niveau du cheminement de l'immigration, mais il faut arriver au pratico-pratique, comme je dis, lorsqu'on arrive dans notre ville, de comprendre: Voici les valeurs, voici qui nous sommes, et de s'assurer que ces gens-là adhèrent. Comment se fait l'approche, comment se fait l'éducation ou l'information face à ça, de s'assurer que chaque personne adhère à cette charte que vous avez évoquée tout à l'heure?

Mme Major (Louise): Naturellement, on en fait la présentation... Bon, on l'a fait tout d'abord à l'ensemble de nos citoyens. Cette démarche-là date de début 2004, donc c'est bien avant même qu'on en parle largement. Ça faisait partie du plan d'action même élaboré au départ avec le conseil interculturel. Mais ce que nous voulions, c'était déjà annoncer premièrement un fait, mais se préparer aussi au futur et le mettre un petit peu en libellé pour que les gens en prennent connaissance, autant dans l'organisation municipale que parmi les citoyens. Alors, on en a fait la présentation tout d'abord dans l'organisation municipale pour que ça se vive vraiment dans ceux qui accueillaient les premiers, mais ça s'est fait aussi au niveau de tous les organismes de la municipalité. Ils ont été invités pour en prendre connaissance, en discuter pour fins d'adoption par le conseil municipal. Donc, naturellement, on considérait déjà au départ quand même la Déclaration universelle des droits de l'homme, la Charte canadienne des droits et libertés, la Charte des droits et libertés de la personne du Québec et considérant que le Québec s'était déjà exprimé dans des documents comme la Déclaration du gouvernement du Québec sur les relations interethniques et interraciales et le fameux énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration, dont on a parlé tantôt.

C'est vraiment que la municipalité statuait qu'on intègre à notre vision puis à notre planification, ça a été même inscrit dans notre planification stratégique, pas seulement dans le plan d'action qu'on a adopté suite à notre service d'accueil, mais c'est vraiment dans notre planification stratégique de la municipalité, l'accueil, l'intégration et l'accompagnement. Donc, c'était bien avant même la venue de notre service d'accueil que nous l'avions libellé comme ça dans notre charte. Donc, sa fonction publique se préoccupe de l'intégration des groupes ethnoculturels; nous voulions que chacun se sente accompagné. Et les politiques municipales en tiennent compte. Bon, chacun des services municipaux, un peu comme on le fait en matière de politique familiale, on se préoccupe: est-ce que nos services vont aussi loin qu'ils le devraient en matière de politique familiale?, la même chose en matière d'intégration des nouveaux arrivants: est-ce que nos services desservent bien en cette matière-là, se préoccupent de cette diversité-là que nous avons sur le territoire? La municipalité ouverte à toute personne, quelles que soient son origine, sa religion, sa langue et sa culture.

Mais le plus important, c'était le dernier, je dirais: «La municipalité de Rawdon s'engage à combattre toute forme de préjugé raciste ou toute manifestation menant à l'exclusion d'un citoyen ou groupe de citoyens». Mais l'autre partie, c'est celle-là qu'il nous apparaissait important de libeller: «D'autre part, la municipalité s'attend à ce que chaque individu respecte la dignité et les droits de toute autre personne et souhaite que chacun s'informe et participe au maintien et au développement d'un environnement économique, social et culturel sain et dynamique.» Alors, c'est là tantôt ce que j'appelais une responsabilité mutuelle. On la met autant sur le nouvel arrivant que sur la personne d'origine. Et on essaie d'être à l'affût aussi de comment les gens réagissent. Nous l'avions vu, au départ, c'était... bon, nos citoyens se demandaient: Bon, y en aurait-il que pour les nouveaux arrivants? Mais non, quand ils ont vu que les 75 ans d'histoire étaient reconnus... puis il fallait aussi valoriser que ces gens-là y ont participé. Si Rawdon est devenu ce qu'il est, si aujourd'hui on peut vous parler de cette expérience-là, puis nous souhaitons aussi la faire fructifier et la faire naître ailleurs, il fallait reconnaître ces gens-là. Et, depuis qu'on a reconnu ces gens-là et cet apport-là de 75 ans d'histoire, les gens nous regardent aller puis participent à chacun des pas qu'on fait puis qu'on continue de faire au bénéfice autant de Rawdon que de la MRC puis qu'on souhaite de d'autres régions.

n(15 h 40)n

Mme James: Une dernière question avant que mon collègue puisse intervenir, parce que je trouve ça fascinant, votre expérience. Vous avez parlé des 75 dernières années puis le fait que la municipalité de Rawdon a reçu, accueilli des immigrants puis que l'immigration a beaucoup changé, mais vous avez eu cette capacité justement de vous ajuster à ces changements-là, évidemment en concertation avec le ministère et avec les organismes communautaires pour répondre aux besoins, puis on va continuer de travailler dans ce sens-là. Mais qu'est-ce que vous avez observé face aux changements? Vous n'étiez pas là il y a 75 ans, je comprends, mais à un moment donné votre municipalité, ça se voit très clairement par votre plan stratégique, vous avez eu prise de conscience pour dire: Il faut... c'est important pour nous et notre région d'agir au niveau de nos relations interculturelles, puis vous avez le conseil ? peut-être M. Dominguez souhaiterait commenter là-dessus. Mais, suite à cette prise de conscience là, vous avez pu, vous avez su embarquer toute la municipalité, c'est ce qui est vraiment impressionnant, par vos actions. Encore là, je répète, quand j'étais chez vous, on voyait toutes les différentes communautés culturelles, il y avait tous les Québécois d'origine francophone qui étaient tout autant, puis tout le monde participait au même niveau. De réussir ça, comment est-ce que vous avez stratégiquement lancé ce coup important, réussi?

Le Président (M. Simard): M. Dominguez.

M. Dominguez (Roger): Bien, ça s'est fait en encourageant les gens. L'histoire nous sert, par exemple. Écoutez, avant la guerre, avant la guerre de 1940, à Rawdon, les Églises se parlaient. On vous dit qu'on avait cinq églises, il y en a deux russes, l'Église unie, l'Église anglicane, l'Église catholique, française et anglaise. Et ces Églises-là se parlaient déjà. L'oecuménisme se pratiquait. Alors, oui, nous, actuellement, ce que l'on fait, c'est que l'on anime, on est un peu comme un chef d'orchestre. Mais déjà, au départ, il y a déjà un terreau fertile qui est là, mais le terreau, oui, il faut le nourrir. La municipalité... Mme Major vous a parlé du CIM, le Centre d'interprétation multiethnique, la municipalité, ne fait pas que le soutenir moralement, elle le soutient financièrement aussi. Par exemple, c'est la municipalité qui paie l'hypothèque de la bâtisse.

Alors, le CIM organise des dîners communautaires de différents... soit hollandais, soit russes, soit polonais, soit québécois, soit... il y a plusieurs, disons, repas de ce type-là. Il y a un petit musée, qui est un petit bijou, où des gens ont laissé les costumes, vous avez des costumes hollandais, vous avez des costumes russes, polonais, allemands, etc., et, je devrais dire, c'est une chance. Nous avons, au mois de juin ? et vous les avez rencontrés d'ailleurs ? une famille qui venait des Comores, et la madame venait du Burkina Faso, je pense. Oui, c'est une minorité visible, oui, ils habitent dans un quartier de Rawdon, ils ont un logement, ils habitent dans un quartier, ils n'ont pas de véhicule. Alors, la madame nous racontait ? on l'a vue, je pense, il y a une semaine ? elle nous racontait qu'elle s'en allait faire ses commissions. Pour faire ses commissions, le quartier où elle habite, c'est quand même à peu près 1 km, 1,5 km des magasins. Son voisin s'est arrêté: Madame ? elle était avec ses enfants; madame ? si vous voulez monter. Et il l'a attendue, il l'a ramenée. Et cette madame nous disait: Mais les voisins nous offrent des services. Ils sont venus nous voir et ils nous ont dit: Avez-vous besoin de quelque chose? Si vous voulez aller faire des commissions, vous n'avez pas d'auto, on va vous amener. Et je pense qu'il y en a un, il y a un des voisins qui leur a même proposé une voiture d'occasion qu'il avait, une deuxième ou troisième voiture.

Alors, on vit dans ce milieu-là. Mais il ne faut pas laisser les gens, par exemple, sans appui, il faut appuyer ces choses-là, et on le fait dans les loisirs, on le fait dans toutes les rencontres que l'on a avec les gens et les citoyens.

Mme Major (Louise): Si je peux compléter. La partie reconnaissance aussi, on s'est aperçu que c'est très valorisant, et ça permet justement de tabler là-dessus, parce que, la première année d'Hommage interculturel, les gens ne savaient pas exactement pourquoi, c'était dans quel but. Là ils se sont aperçus, ils ont reconnu vraiment d'eux-mêmes aussi que des gens avaient contribué à cet enrichissement. Ils faisaient la découverte d'entreprises que certains ne connaissaient pas, de savoir qu'un Polonais, il y a 50 ans, a fondé une entreprise en moulage de plastique qui maintenant est reconnue de façon mondiale en aviation, la fierté a retombé sur l'ensemble de la population. Et, depuis ce temps-là, bien, à chaque année, on est rendu qu'on attend qui va être reconnu en Hommage interculturel et on se dit même: on en a encore pour des années à reconnaître ceux qui y contribuent.

Puis là il y en a d'autres qui s'y ajoutent, mais cette reconnaissance-là en a fait faire la connaissance aussi à l'ensemble de la population.

Le Président (M. Simard): M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Mme la mairesse, M. Dominguez, vraiment, félicitations pour votre mémoire. C'est tellement positif sur l'immigration qu'on doit dire félicitations. Et je vois que vous employez le terme «nouveaux arrivants» au lieu de «immigrants», et c'est un terme qui est aussi valorisant. Vous êtes nouveau arrivant, vous êtes accueilli, vous êtes bienvenu dans la société. Et vous dites aussi que les nouveaux arrivants peuvent donner un ajout à l'économie locale en raison des idées nouvelles et aussi leur réseau de contacts, et je vois que vous avez, comme l'ont mentionné le président et Mme la ministre, une quarantaine de communautés culturelles différentes, sept dénominations religieuses, 32 organismes communautaires. Alors, vraiment, c'est incroyable, le dynamisme que vous avez dans votre ville, mais, en plus du leadership de la mairesse qui est une cause de tout cet effet positif, pouvez-vous nous expliquer les effets sur l'économie, comme vous le mentionnez, que les nouveaux arrivants peuvent causer en raison de leurs nouvelles idées, des idées nouvelles, et aussi de réseaux de contacts. C'est important qu'on voie le côté positif de l'immigration et l'effet positif sur l'économie en général, mais, avec votre expérience, j'aimerais vous entendre sur cette question.

Le Président (M. Simard): Vous répondez plus rapidement que vous avez été questionnés, s'il vous plaît.

Mme Major (Louise): Oui. Parfait. Alors, tantôt, je parlais d'une entreprise de moulage en plastique, mais on en a une autre aussi en moulage de plastique et une aussi qui était fabrication d'emballages, là, de produits d'emballage. C'est des entreprises dont une, bon, le propriétaire, qui était un immigrant, est décédé. Sauf que sa fille, qui était encore en France, a émigré maintenant pour prendre la relève de l'entreprise. Alors, elle aussi, elle a maintenant un autre réseau de contacts qu'elle avait établi pendant que son père était ici, pendant de nombreuses années, elle avait un autre réseau de contacts qui maintenant a fait en sorte que l'entreprise a pris encore un autre essor parce que son réseau de contacts était différent de celui de son père, qu'il avait tissé ici, mais qui a fait une plus-value encore à l'entreprise. Alors, il y a des relèves comme ça qui se font, comme faire immigrer quelqu'un de ton entourage que tu connais parce qu'il veut venir participer à ton entreprise. Bon, on parle d'un de nos derniers arrivants qui était médecin dans son pays d'origine et qui maintenant est en train de faire une maîtrise en gestion de qualité des services de soins de santé.

Donc, c'est un apport particulier, là. C'est... On n'a pas nécessairement à en faire la preuve davantage que de montrer ces exemples-là. On en a d'autres aussi en restauration. On n'a pas moins de trois restaurateurs... Notre restauration asiatique... Pardon, pas la restauration, mais l'immigration asiatique récente, c'est des restaurateurs, ce sont des restaurateurs qui se sont installés.

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup, et je passe immédiatement ? nous avons un petit peu de retard ? au député de Joliette qui va vous poser la première question.

M. Beaupré: Oui, merci, M. le Président. Tout d'abord, nous vous remercions de nous avoir présenté votre mémoire aujourd'hui. Rawdon étant situé dans la région de Lanaudière, je sais, comme vous le mentionnez à la page 4 de votre mémoire, que le bilan de l'immigration rawdonoise est plus que largement positif.

Ma première question: Est-ce que vous êtes satisfaits de la contribution de 150 000 $ du gouvernement pour la période du 25 juin 2005 au 1er septembre 2005? Puis, est-ce que le montant de 150 000 $ vous a été versé en entier par le gouvernement?

Mme Major (Louise): Bon. Nous avions... C'était par étape, puis on le conçoit très bien que c'était 50 000 $ par année sur trois ans, mais tout d'abord on devait avoir un plan d'action et des rapports d'étape aux six mois. Alors, les versements viennent avec les rapports d'étape. Parce qu'on s'était fixé des objectifs, et on conçoit très bien que les versements se font si on atteint ces objectifs-là qu'on s'est fixés de façon mutuelle.

M. Beaupré: O.K. Est-ce qu'il y a d'autres sommes qui ont été investies à travers les organismes communautaires dans votre municipalité par le gouvernement?

n(15 h 50)n

Mme Major (Louise): Non. C'est la municipalité. Ce que faisait la municipalité dans le fond a été, je dirais, même bonifié, là. Parce que, bon, là, on a parlé tantôt de l'appui financier de la municipalité vis-à-vis le Centre d'interprétation multiethnique, mais il y a l'organisation de nombreux événements. On a même un festival multiculturel annuel, bon, qui est financé en partie par la municipalité, en partie par des commanditaires privés et une partie, le CLD. Mais on a fait l'ajout financièrement, nous, de d'autres actions de la municipalité. Mais il n'y a pas eu d'autre argent provenant du ministère via des organismes. Il y a des organismes, bon, qui dans le fond vont nous référer des gens qui voudraient venir s'installer chez nous, parce que, bon, on commence à être connus, et naturellement on se fait connaître aussi, parce que ce recrutement-là se fait basé sur les objectifs qu'on s'était fixés avec le ministère. Donc, les organismes qui sont situés ailleurs qu'à Rawdon, parce qu'on n'en a pas particulièrement, là, qui s'occupent du recrutement, bien on le fait via des organismes qui sont installés ailleurs. Mais, eux, ils sont subventionnés mais sur d'autres bases, là. Nous, on n'a pas nécessairement une prise ni de connaissance sur comment ils sont subventionnés.

M. Beaupré: Merci. Depuis le 1er septembre 2007, est-ce qu'il y a une nouvelle entente qui est en préparation avec le gouvernement pour le financement de l'intégration des immigrants dans votre municipalité?

M. Major (Louise): Pour l'instant, non, mais on s'apprête à présenter notre prochain rapport, alors certainement qu'on va en discuter, parce que, bon, les effets sont bénéfiques. Puis on l'a dit, ce n'est pas seulement au bénéfice de Rawdon qu'on le voudrait, mais que d'autres municipalités vivent cette expérience et se dotent d'un service d'accueil, à notre avis, étant donné qu'une municipalité, c'est souvent la première structure auquel un citoyen se réfère. Et on pense que c'est encore la meilleure porte d'entrée, ça fait qu'on souhaite bien que le ministère puisse regarder ça pour d'autres municipalités.

M. Beaupré: Est-ce que vous avez des revendications à faire au gouvernement, là, relativement à l'élaboration d'une nouvelle entente, là, pour l'investissement par immigrant?

M. Major (Louise): Nous, on ne le voyait pas comme ça, par immigrant, bon, c'est via différents programmes...

M. Beaupré: Non, ce n'est pas par immigrant, désolé. Pour l'investissement du gouvernement du Québec, là, pour l'élaboration d'une nouvelle entente, là, comme vous avez eue entre le 25 juin 2005 et le 1er septembre 2007?

M. Major (Louise): Bien, comme, la nôtre, on souhaiterait du moins qu'elle se reconduise de la même façon. C'est sûr que, si elle était bonifiée, on pourrait davantage offrir des services, aller encore plus loin dans notre recrutement, mais, bon, on vous le dit...

Le Président (M. Simard): ...ne refusez pas d'argent.

M. Major (Louise): Non, on n'en refuse jamais, bien sûr. Sauf qu'on souhaiterait du moins qu'elle soit reconduite dans la même façon, là, parce que ça nous permet d'engager une personne, puis ça prend une personne à temps plein qui puisse le faire, là. Parce que c'est beaucoup le lien aussi entre les organismes puis via des structures, aussi, publiques et parapubliques, là, la MRC, le CLD, les carrefours jeunesse, toutes les structures régionales qui sont là, bien c'est cette personne-là qui fait les contacts puis qui justement suscite aussi les discussions pour parfois arriver à innover.

On l'a dit, on travaille avec le centre local d'emploi pour innover, trouver des nouvelles façons aussi de travailler, pour que ce soit, comme il avait été mentionné précédemment, là, que le travail soit fait où est le lieu de résidence. Parce que, si on parle de l'immigration en région, bien souvent on va les chercher dans les bassins où ils sont résidents.

M. Beaupré: Vous parlez dans votre mémoire de la pérennité du caractère français à Rawdon, est-ce que les ressources pour l'enseignement du français sont suffisantes dans le contexte actuel?

M. Major (Louise): Ce qu'on s'est aperçu, c'est que, bon, la forme actuelle via les commissions scolaires, ça prend un certain nombre de personnes par groupe pour partir les cours. Mais on innove aussi... Bien, on innove, ou plutôt on se sert de ce qu'on a sur le terrain, c'est via les organismes communautaires, via le milieu. On a donné l'exemple du jeune, tantôt, qui en quatre mois parlait très bien français. Alors, pour cette partie-là, on se sert du milieu. C'est sûr que, si on voit à un moment donné, on l'a dit, si, à un moment donné, il y a de petits groupes, on verra aussi comment on veut faire la francisation, l'améliorer. Mais c'est beaucoup le milieu qui le fait.

M. Beaupré: Je vais céder la parole à ma collègue de Charlesbourg.

Le Président (M. Simard): Très bien. Mme la députée de Charlesbourg.

Mme Morissette: ...ne me laisse pas de temps. Vraiment, félicitations pour votre succès, là, 30 %, c'est incroyable, là, c'est le triple de la moyenne nationale là, je pense que vous le réalisez très bien.

Je suis vraiment intéressée par votre concept de jumelage, d'accompagnement personnalisé. Comment ça fonctionne? Pouvez-vous m'en dire plus? Est-ce que c'est sous la responsabilité de la municipalité ou est-ce qu'il y a des organismes qui prennent ça en charge? Qui s'assure du suivi? Qui fait le jumelage? Vous voyez un peu? Oui, merci.

M. Dominguez (Roger): Alors, le jumelage, c'est la directrice du service d'accueil qui a contacté les groupes communautaires et, entre autres, le CIME, et l'organisation se fait à travers le groupe communautaire, il y a la référence du nouvel arrivant, et à ce moment-là quelqu'un va accompagner le nouvel arrivant. Le problème, c'est aussi la langue. Actuellement, les gens qui sont arrivés, on peut quand même rendre le service. Par exemple, nous avons une madame russe qui est arrivée, et il y a des gens au CIME qui parlent le russe. Donc, l'intégration se fait comme ça. Mais il faut suivre, et, nous, au niveau de ce travail, c'est un rôle de chef d'orchestre. Nous, on ne veut jamais remplacer les groupes communautaires. On va les aider, on va travailler avec les groupes communautaires, mais il n'est pas question de les remplacer. Ce qu'on fait, c'est qu'on les met en valeur, et les gens sont contents de faire ce travail-là, sont contents d'accompagner les gens. On a fait la même chose pour les meubles, par exemple. On vous dit qu'on a un appartement, bien il y a des gens qui donnent des meubles.

Mme Morissette: O.K. Est-ce que j'ai encore un peu de temps?

Le Président (M. Simard): Oui, il vous reste encore un peu de temps, vous pouvez poser une autre question.

Mme Morissette: O.K., parfait. Oui. Au niveau d'étendre votre concept que vous avez à Rawdon, est-ce qu'il y a eu des démarches de la part des municipalités environnantes ou de la part de la MRC qui étaient intéressées à votre façon de fonctionner, qui sont venues vous questionner, savoir de quelle façon ça pouvait s'exporter et s'appliquer ailleurs?

Mme Major (Louise): Oui, bien sûr, surtout les municipalités voisines, là, bon, puis, on l'a dit tantôt, il y a justement un nouvel arrivant qui s'est installé dans une municipalité voisine, puis il y travaille présentement, il y réside présentement. C'est sûr que ça fait son petit bonhomme de chemin, comme on dirait, puis les gens attendaient de voir aussi comment ça fonctionne, est-ce qu'il y a des réussites. Puis on le sait que c'est par une expérience réussie, concluante qu'on peut justement l'exporter, et c'est ce qu'on est en train de monter aussi. Bon. C'est quoi, la recette, sans pour autant que ce soit une recette à lire à la lettre? Mais c'est quoi, les éléments qu'il faut mettre en place pour pouvoir mieux l'exporter? Alors, pendant cette expérience-là de trois ans, c'était aussi de faire un libellé de, bon, comment vous vous y prenez, comment, nous, on s'y est pris puis qu'est-ce qui ont été les éléments de succès, qu'est-ce qu'il faut éviter ou sur quels aspects il faut prendre davantage, là, de recul ou sur quels aspects il faut mettre un petit peu plus d'efforts.

Alors, oui, on nous regarde aller. À date, aussi j'ai fait des présentations, parce qu'au niveau municipal l'Union des municipalités du Québec a fait la présentation d'une formation, une journée de formation avec le... On était accompagné du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, mais il y avait aussi un avocat pour parler des accommodements raisonnables, c'est un incontournable, mais il y avait aussi notre expérience qui était présentée, et bon nombre... Il y a des municipalités qui sont venues nous voir, il y a des organismes qui sont venus me voir pour savoir, bon: Écoutez, on aimerait ça que vous veniez présenter ça à nos élus, venir les convaincre que c'est possible. Puis on ne vous dit pas que ça se fait sans heurts, on ne vous dit pas que c'est magique, on ne vous dit pas que c'est infaillible, on vous dit: C'est possible, et voilà la façon dont il a été vécu chez nous et voilà comment on pense que ça peut se vivre à partir de maintenant. Parce qu'on le rappelait, on ne peut pas exporter partout 75 ans d'histoire ni une population comme la nôtre, là, puis ce n'est pas arrivé depuis trois ans, là, les 30 %, là, c'est longtemps avant. Mais c'est possible et c'est ces éléments-là de possibles qu'on veut décrire pour pouvoir mieux les exporter ailleurs.

Mme Morissette: J'ai encore un peu de temps? À votre opinion personnelle et de mairesse et de président de conseil, est-ce que, par exemple, une MRC ou une autre structure régionale pourrait jouer le même rôle pour la région que Rawdon, votre structure municipale fait pour l'ensemble de votre territoire, à votre opinion?

M. Dominguez (Roger): Oui, et c'est ce qu'on recommande.

Mme Morissette: O.K.

n(16 heures)n

M. Dominguez (Roger): Mais ça veut dire que la région ou la sous-région doit se prendre en main. Ça, ça veut dire qu'il ne faut pas attendre le ministère, il ne faut pas attendre l'Assemblée nationale, il ne faut pas attendre personne. Il faut diagnostiquer puis poser, observer ce qui se passe. Que ce soit au congrès de l'UMQ ou que ce soit, là, au moment de l'information, les gens nous disent: L'école élémentaire, on n'a plus qu'une vingtaine d'élèves. Mais c'est trop tard, c'est avant qu'il fallait réagir. On a eu aussi un monsieur qui dit: Bien, moi, je n'en ai pas, d'immigrants, puis j'en voudrais, puis il y a même deux, trois régions de Montréal qui sont comme ça. Il y a des autobus qui partent de Montréal et qui font 100 km pour apporter de la main-d'oeuvre, et, le soir, ils retournent à Montréal, mais je me dis: C'est vous qui faites rien, là. Vous devez aller voir cette main-d'oeuvre, vous devez leur proposer des logements, vous devez leur proposer de l'aide. Vous ne les aurez peut-être pas tous, mais vous allez en avoir quelques-uns, et c'est comme ça qu'on commence. Mais, si on attend que ça nous arrive, bien la réponse est non, on va attendre longtemps. On ne peut pas.

Mme Morissette: ...plus d'autonomie, à ce moment-là, par région puis d'aller de l'avant là-dedans.

M. Dominguez (Roger): Bien, oui. Et il faut que la municipalité, ou il faut que la MRC le mette dans son plan stratégique. Il faut... on vous a dit tout à l'heure... Mme Major vous a dit que la municipalité s'occupait puis veillait à l'intégration, mais je peux vous dire que même, un moment donné, la municipalité a pris un chasseur de têtes, on avait besoin de quelqu'un dans la fonction municipale. Eh bien, le chasseur de têtes est venu tout benoîtement nous dire qu'il avait enlevé tous les noms à consonance étrangère, tous les noms... et on lui a dit: Non, vous vous trompez, au contraire. On veut tout le monde, Québécois, noms à consonance étrangère ou autres. Et, oui, dans la fonction publique de la municipalité, oui, il y a du monde qui travaille et qui a des noms à consonance étrangère. Et il y en aura plus encore.

Mme Morissette: En tout cas, je vous remercie beaucoup. Je pense que vous êtes vraiment un exemple à suivre, une bonne source d'inspiration, en tout cas. Merci.

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup, Mme la députée. J'invite maintenant le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques à poser la prochaine question.

M. Lemay: Merci, M. le Président. Je vais être très bref, Mme la mairesse, M. le Président. Ça démontre, quand il y a du leadership et quand on se mobilise, on atteint les objectifs, en tout cas la plupart du temps, il n'y a pas vraiment de secret. J'ai une première question assez simple. Est-ce que vous allez déposer un mémoire devant la commission des messieurs Taylor et Bouchard?

Mme Major (Louise): La semaine prochaine, on va aller faire un témoignage.

M. Lemay: Vous allez faire un témoignage. Bon. Parfait, ça va mettre en... ça va donner une image autre, n'est-ce pas?

Mme Major (Louise): Nous le souhaitons.

M. Lemay: Pardon?

Mme Major (Louise): Nous le souhaitons.

M. Lemay: Oui, nous... alors, nous vous le souhaitons et nous nous le souhaitons également, que ça change un peu des perceptions de certaines choses. Je n'aurai qu'une question. Je comprends qu'un leadership, un plan d'action assumé, les ressources financières pour aller avec et de ne pas attendre l'accord des uns et des autres, mais il n'en demeure pas moins qu'avant vous, et je ne vous demande pas de juger des gens qui étaient et qui ont déposé un mémoire avant vous, là, évidemment, mais il n'en demeure pas moins que les différents ministères ont des structures, ont des régions, des sous-régions, et des fois c'est un petit peu difficile et on a entendu tout à l'heure les gens, la difficulté qu'ils avaient malgré la volonté qu'ils ont de recevoir des nouveaux arrivants ou des nouvelles arrivantes. Vous, avez-vous... même si ça fait quand même un bout de temps que vous le faites, avez-vous eu différentes problématiques à ce niveau-là aussi? Je pose la question, M. le Président, parce que, si les communautés se mobilisent, il va falloir que le gouvernement à un moment donné se mobilise également, là. Alors, on peut bien parler du ministère de l'Immigration, mais il y a aussi les autres ministères qui doivent également se mobiliser si on veut atteindre les objectifs qui sont les nôtres.

Alors, est-ce que... donc, ce que je comprends, c'est qu'à votre niveau les structures des différents ministères n'ont pas vraiment été un empêchement majeur à votre... à l'élaboration, d'une part, de votre plan d'action et à la mise en oeuvre par la suite, alors que d'autres nous ont dit que c'était un petit peu difficile à ce niveau-là.

Mme Major (Louise): C'est sûr que j'ai entendu précédemment les commentaires puis, oui, je reconnais que, oui, il peut y avoir ce genre de difficulté là. Nous, bon, où nous étions situés, bon, c'était... on était franchement dans la MRC Matawinie, région Lanaudière, il n'y avait pas...

M. Lemay: Vous êtes loin de la bête.

Mme Major (Louise): Loin de la bête, si vous l'appelez comme ça, là. Mais, avec les ministères où on a observé que des fois, bon, c'était, oui, il y avait des procédures qui étaient bien cadrées, peut-être bien rigides. L'exemple du centre local d'emploi, oui, on l'a mentionné. On a voulu organiser, bon, un salon de l'emploi, puis là on a demandé, bien: comment on peut fonctionner pour avoir une banque d'emplois, pour vraiment la bonifier avec la nôtre? Et c'est là qu'on s'est aperçu que, non, non, ça, c'est coulé, là. Le centre local d'emploi de Rawdon il dessert telle clientèle, on ne peut pas aller dans telle autre clientèle. On a observé ce genre de chose-là. Est-ce qu'on appellerait ça de la modulation de services, la modulation de clientèles, appelons ça comme on voudra, mais, oui, il y a ce genre peut-être d'irritant là qui pourrait être réglé. Mais à date on essaie justement de regarder pour en faire, ça aussi, la nomenclature de: voilà les irritants, voilà qu'est-ce qu'il faut, les points sur lesquels il faudrait travailler, celui-là, on l'a rencontré.

Pour ce qui est de la francisation, à date on a peut-être rencontré le phénomène que, bon, ça prend un certain nombre de personnes dans le groupe pour ouvrir le cours. Ça aussi, ça a été peut-être un autre irritant, qu'on n'a pas observé à date parce qu'avec le milieu on a pu se débrouiller, mais, si on pense que ça pourrait être exporté ailleurs, ce serait le genre de chose qu'il faudra regarder correctement.

M. Lemay: Parce que, et je termine là-dessus, M. le Président, ce que vous dites est très important, parce qu'effectivement il faut regarder les embûches, et, s'il y a moyen de faire en sorte que ces embûches-là ou ces technicalités soient amoindries pour atteindre les objectifs, je pense que ça pourrait être intéressant. Et si on parle d'un nombre et si vous les multipliez par cinq, 10, 15, 100, dans certains cas, du nombre de nouveaux arrivants, ça peut être quand même important. Donc, c'est important qu'on le sache pour la suite des choses, que ces irritants-là, si c'est possible, puissent être amoindris le plus possible.

Mme Major (Louise): Il y a aussi le bassin de population. Là, c'est sûr que Rawdon, 10 000 citoyens, dans la MRC complète, c'est 45 000. Bon, il y a des villes qui, à elles toutes seules, ont ce nombre-là. C'est sûr que là ça peut arriver qu'on a suffisamment de personnes pour combler un groupe, mais il faudra observer, dans les régions qui présentent à peu près le même tableau que la MRC de Matawinie, que de former un groupe, on a moins de bassin, là...

M. Lemay: Même bassin, mais votre territoire est très étendu...

Mme Major (Louise): Immense.

M. Lemay: ...donc il y a ça aussi: est-ce que ça implique des déplacements? On regardait la carte tantôt...

Mme Major (Louise): C'est grand, hein?

M. Lemay: La Tuque... En tout cas, il a fallu que je la regarde deux, trois fois pour me donner les distances, là. C'est quoi d'un bout à l'autre? C'est quelques heures de voiture, certainement, nord-sud, là?

Mme Major (Louise): Ah, oui, oui, oui. Pour traverser la MRC complète, c'est un bon deux heures, puis, même, on n'a même pas traversé les territoires non organisés ni...

Le Président (M. Simard): ...

M. Lemay: Non, non, non. Je ne voulais pas, M. le Président, comparer. Je ne voulais pas comparer ça, c'est que chacun a ses difficultés, et, si la MRC fait un plan d'action, il va falloir qu'elle tienne compte des distances, s'il y a une école, s'il y en a deux, s'il y en a trois, ou de classes de francisation, en tout cas c'est des problèmes réels auxquels il faut... Mais, en tout cas, quand on voit encore... je termine là-dessus, M. le Président, rapidement ? quand il y a un leadership d'assumé, quand les gens se mobilisent, on voit qu'on arrive à des succès quand même intéressants, et je peux vous dire que nous allons suivre avec intérêt votre passage à la commission de MM. Taylor, Bouchard. Merci beaucoup, fort intéressant.

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup, Mme la mairesse, M. Dominguez. Et j'invite tout de suite le groupe suivant à venir prendre place. Il s'agit de Québec Multi-Plus.

n(16 h 10)n

Mme Major (Louise): Merci, M. le Président.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Simard): Alors, nous reprenons nos travaux. Et nous avons le plaisir d'accueillir Québec Multi-Plus, un groupe qui va se présenter évidemment, qui n'est pas nécessairement connu de tout le monde. Je ne vais pas vous présenter, je vais vous demander de vous présenter vous-mêmes. Vous avez compris nos règles de fonctionnement, je pense. Vous avez une quinzaine de minutes pour nous présenter l'essentiel de vos préoccupations, de ce que vous voulez nous transmettre. Et puis ensuite les parlementaires à tour de rôle vous interrogeront.

Québec Multi-Plus

Mme Iturriaga (Ana Luisa): Merci. Bonjour. Moi, je suis Ana Luisa Iturriaga, directrice de Québec Multi-Plus. Je suis accompagnée d'Adina Samoila, qui est coordonnatrice de projets, et d'Antoine Makitou, qui travaille comme formateur avec moi. Parce que Québec Multi-Plus existe depuis à peu près environ 21 ans. Notre mandat, c'est la formation et la consultation en relations interculturelles. Donc, on a l'opportunité de pouvoir travailler avec les différents acteurs sociaux pour l'intégration et pour le rapprochement interculturel. On est un bébé du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, car, en 1984, on a, avant l'Année internationale de la jeunesse, ils ont eu l'idée de faire... d'organiser un groupe pour qu'il représente la jeunesse québécoise pluriethnique, et c'est là qu'on est né. Et finalement, depuis 1986, on travaille officiellement comme formateurs et consultants de relations interculturelles. Donc, c'est juste pour vous donner un petit peu notre profil d'organisme.

On peut vous dire aussi qu'on travaille au niveau de la recherche-action. On est très collé au terrain, donc on a l'opportunité de beaucoup toucher à différents secteurs de la population québécoise, ce qui nous donne l'opportunité de faire la recherche plus action. Et on n'a pas mis dans le mémoire justement la recherche qu'on a eue à réaliser pendant trois ans, qu'on a conclue, il n'est pas encore diffusé publiquement parce qu'on manque de financement, mais c'est Patrimoine canadien qui a financé. Parce que, quand il y a eu des travaux au niveau... les congrès en Sud Afrique, on voulait qu'au Canada aussi on identifie qu'est-ce qu'étaient les barrières contre la discrimination raciste. Mais, nous, on a opté pour faire plus un bilan sur l'accueil et l'intégration des immigrants.

Ce n'était pas le but du mémoire. Je vais présenter mon mémoire; juste pour vous dire que parfois il y a des études qui sont faites, terrain, qui n'arrivent pas à la place publique parce que faute des moyens, qu'on n'a pas, financiers, on ne peut pas le faire public. Mais on peut vous en parler tout au cours de notre présentation de ce qu'on a constaté, terrain. Et c'est ce qui un petit peu notre dynamisme, à Québec Multi-Plus, c'est qu'on est toujours à l'écoute des personnes qui viennent d'ailleurs, les secteurs sociaux comme intervenants communautaires, les paliers gouvernementaux qui interagissent avec les immigrants et les employeurs évidemment, qui sont les principaux aussi au niveau de l'intégration socioéconomique. Donc, si... Je vous présenterai plus si vous avez d'autres questions sur qu'est-ce que fait Québec Multi-Plus.

Donc, je vais vous présenter rapidement notre mémoire, vous avez eu l'occasion de le parcourir, je vais juste souligner certains aspects qu'on tient beaucoup à coeur. Pour nous, à Québec Multi-Plus, on est convaincus que l'immigration est un plus. Et de plus en plus, depuis l'énoncé politique de 1991, adopté par le ministère de l'Immigration, par le gouvernement du Québec, on a constaté qu'effectivement il y a beaucoup de talents, beaucoup de compétences qui sont... des gens qui sont venus recruter à l'extérieur. Et donc, pour nous, au niveau démographique, ça va de soi que l'immigration, c'est une jeunesse, c'est les jeunes qui viennent pour aider, aider le Québec, au développement démographique, économique, donc ça ne pose pas de questions, parce que c'est une terre d'immigration. C'est juste que le profil migratoire change et que parfois les moyens qu'on se donne ne sont pas toujours, je dirais, adéquats.

Et c'est ça qu'on a constaté dans notre recherche, c'est que, quand on est allé chercher des gens francophones compétents et qualifiés, il manquait parfois certains arrimages avec des ordres professionnels, avec des employeurs surtout et principalement les PME. Et je vais en parler un petit peu plus tard, je vais laisser Adina vous donner des constats qu'on a vécus avec les petites et moyennes entreprises québécoises.

Donc, au niveau de l'immigration, au niveau économique également, ça va de soi que le développement économique du Québec et du Canada dépend beaucoup de l'immigration. Je pense que, dans le congrès du Parti libéral, notre premier ministre du Québec aussi l'a soulignée, l'importance au niveau de la concurrence mondiale que doit vivre le Québec. Donc, on n'a pas à vous convaincre que l'immigration, on peut la soutenir. Même, nous, on est plus pour l'augmentation à 50 000, parce que c'était ça qui était prévu au moment de l'énoncé de politique, et on n'est jamais arrivé à l'atteindre, ce pourcentage-là, et ça semble quand même assez logique avec la dynamique du Québec.

Donc, si je passe un peu plus aux détails au niveau des... Au niveau de l'enjeu linguistique, juste vous dire qu'on en parle souvent, l'aspect linguistique, depuis dernièrement plus, mais, je peux vous dire, je suis un exemple d'intégration de la loi 101 et de tout l'effort du Québec pour l'intégration des immigrants. Quand je suis arrivée au Québec, je ne parlais pas un mot de français, et maintenant je vis, je m'exprime, mes journées, ça se passe tout le temps en français. Donc, c'est pour vous dire que les efforts de l'État québécois, ils ont donné des résultats. Peut-être qu'on n'a pas toujours la reconnaissance et la valorisation, on n'a pas toujours la chance non plus d'être sur la tribune publique, mais ils ont été là, et, depuis qu'il y a eu les francophones qui ont été cibles, il y a eu aussi beaucoup, beaucoup d'avancement, parce que, quand on cherche des francophones, c'est sûr que l'investissement au niveau de l'intégration va être moindre, moins lourd au niveau budgétaire.

Il reste néanmoins que qu'est-ce qu'on a constaté ? je vous le dis rapidement ? une problématique qu'on a reconnue, terrain, c'est que les gens qui sont du bassin méditerranéen, donc des gens souvent qui viennent d'Algérie, Maroc, Tunisie, Liban, donc des gens qui ont été choisis, l'Afrique francophone, donc des personnes qui ont déjà la langue, ils ont eu quand même des difficultés d'intégration pas par rapport à la langue, même si eux nous disent que le premier choc culturel qu'ils vivent, c'était le niveau de langage, mais il reste néanmoins que la difficulté, ça a été au niveau de la reconnaissance de leurs diplômes, de leurs acquis. Je ne sais pas si parfois, un peu, l'immigrant rêve et, un peu aussi, l'agent d'immigration veut tellement qu'il s'en vienne qu'il y a eu de fortes attentes. Et donc, dans ce bassin migratoire et, je pourrais dire, 17 ans, depuis 1991 à maintenant, on a constaté qu'il y a des gens francophones qui ont beaucoup, beaucoup vécu des frustrations. Donc, parfois, on a beau penser que francophone, bassin Méditerranée, ça pourrait être en même temps arabo-musulman, et, avec qu'est-ce qu'on connaît depuis le 11 septembre, évidemment il y a eu des barrières qui se sont installées, parfois non voulues mais parfois systématiques. Donc, ces gens-là, ils vivent encore, et on doit se pencher sur cette situation. On en a déjà parlé un peu lors de la consultation, l'automne passé, au niveau de la discrimination et le racisme, qu'on a présenté un mémoire.

Donc, je voulais juste vous souligner que ça aussi, on trouverait intéressant, en tant que groupe terrain, de voir cette consultation arriver en politique claire au niveau des barrières qu'il faut enlever au niveau de la discrimination, racisme, parce que, même si le Québec est une terre exemplaire en matière d'intégration, pour être une jeune nation, il reste quand même qu'il faut souligner qu'il y a encore des barrières, il y a encore du travail à faire ensemble.

Je vais passer maintenant au niveau plus qu'est-ce qui nous touche beaucoup, à Québec Multi-Plus, qui est l'intégration socioéconomique, et c'est parce qu'on a la chance de travailler beaucoup, beaucoup avec les employeurs, et on peut vous constater, en faire certains constats au niveau terrain. Il y a encore... Il y a des deux côtés, il faut quand même vous dire. En tant que formateurs, on peut vous dire qu'au niveau du savoir-être il y a un travail réciproque à faire: autant les employeurs, ils doivent travailler leur ouverture sur le monde et leurs connaissances sur qui sont les gens qui viennent d'ailleurs, autant les personnes qu'on accueille, elles se doivent de connaître les valeurs fondamentales, les façons de faire des employeurs québécois, c'est quoi, les règles qui régissent le marché du travail. Donc, toutes ces lacunes font en sorte que, quand les gens se rendent compte parfois, dans une entrevue, ou les gens sont nerveux, ou il y a des difficultés parfois communicationnelles, parce qu'on ne communique pas de la même manière d'une culture à l'autre, et, quand on vient d'arriver, on fait des gaffes quand on est devant un employeur et que notre vie dépend de cette personne-là, évidemment, c'est là que, nous, on va se pencher beaucoup, nos expériences au niveau de notre mémoire. Donc, il faut travailler beaucoup le savoir-être, autant des personnes nouvellement arrivées. Il faut aussi faire comprendre à un employeur, surtout la petite et moyenne entreprise québécoise, qui embauche beaucoup, que quelqu'un qui arrive, ce n'est pas quelqu'un qui arrive et qui tout de suite plonge, il est Québécois dès l'arrivée. On ne devient pas Québécois dès qu'on débarque de l'avion. On aimerait bien, ce serait plus opérationnel. Mais il reste quand même qu'il y a des bons exemples: j'ai Antoine Makitou, qui est arrivé en janvier, il a commencé à travailler avec nous un mois après. Donc, vous voyez, il y a d'excellents exemples d'intégration qu'on n'en parle pas dans les manchettes des médias.

n(16 h 20)n

Alors, juste rapidement pour vous dire, au niveau des employeurs, nous savons effectivement que depuis 2005 le gouvernement du Québec, il a un plan d'action qui cible justement les entreprises. Mais, pour être dans le terrain, on peut vous dire et on va vous le souligner tout au long de notre mémoire, que la situation parfois, au niveau théorique, au niveau des discours politiques, il reste, au niveau terrain, beaucoup de choses à faire. Une fois que les personnes arrivent devant l'employeur et une fois... ils ont tout le temps des refus. Je me suis amusée à regarder les manchettes juste de cet été, et, quand on voit qu'il y a des personnes arabes qui doivent changer leur nom pour pouvoir trouver un emploi, ça nous dit déjà que c'est criant. Il faut réagir. On ne peut pas se permettre, en ayant une si exemplaire charte québécoise et canadienne, de vivre des situations de même.

Donc, juste pour vous parler justement, la méconnaissance parfois, l'ignorance ou tout ce que fait l'État québécois pour aller recruter des personnes à l'étranger, c'est une des principales lacunes qui nous avons rencontrées au niveau des PME. Et je vais vous laisser plus parler de ces effets pervers du fait que parfois tout ce qui est dans les médias, c'est toujours ce qui est moins un succès. Je viens d'écouter la ville de Rawdon, que je connaissais déjà aussi leur succès, mais on n'entend jamais parler de ces exemples d'intégration, on entend toujours parler des cas plus sensationnalistes, et c'est dommage parce qu'ils enlèvent tous les atouts de la société québécoise sur l'ouverture, sur l'intégration.

Je tiens à vous dire, je suis allée en Belgique, j'ai rencontré des gens qui viennent de la Belgique pour s'inspirer du modèle québécois, mais on n'en parle pas dans les médias qu'il y a des Français et des Belges, beaucoup d'Européens qui viennent pour voir tout ce que l'État québécois fait pour l'intégration, parce qu'on ne sort pas. Nous, on est en dedans, mais les employeurs, ils ne savent pas tout ça. Donc, je vais laisser un peu Adina vous décrire un peu qu'est-ce qu'on a trouvé au niveau de notre travail ce printemps. On avait un projet au niveau des PME, et elle va vous dire un peu qu'est-ce qu'elle a dû vivre comme réticences auprès des PME.

Mme Samoila (Adina): Alors, rebonjour. Je voudrais partager avec vous aujourd'hui les conclusions de ce projet qui s'est déroulé sur six mois et qui a visé les petites et moyennes entreprises montréalaises, c'est-à-dire celles qui ont entre un et 99 employés, vraiment la petite, petite entreprise.

Le projet a été conçu en deux volets complémentaires et il visait le partage ou le transfert des pratiques de gestion de la diversité culturelle en entreprise. Et l'objectif dans le cadre de ce projet était de convaincre les PME qu'elles restaient compétitives en embauchant des professionnels immigrants et voir qu'elles pourraient augmenter leur compétitivité et éventuellement leur part de marché et leur clientèle, ce qui est intéressant de nos jours dans le contexte de mondialisation.

Mon équipe et moi, nous avons contacté à peu près 1 500 entreprises dans les quatre mois et demi du projet, et on leur a proposé de participer à des ateliers de discussion et de formation gratuits pour eux, et on a réussi à convaincre moins de 100 entreprises à participer effectivement à ces activités. Donc, moins de 100, ça veut dire 74, précisément. Et j'aimerais vous lire tout simplement les cinq conclusions auxquelles nous sommes arrivés à la fin de ce projet. Donc, tout d'abord, lorsque je dis, excusez-moi, lorsque je dis «PME», en fait je me réfère soit au propriétaire, soit au recruteur de cette entité économique, qui peut être aussi le propriétaire ou un partenaire ou tout simplement un employé qui est chargé de la gestion des ressources humaines.

Donc, les PME ne sont pas au courant des politiques gouvernementales concernant l'immigration et surtout elles ne connaissent pas les plans d'action du ministère de l'Immigration et du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, qui pourtant, ces plans, font référence aux besoins des PME et à leur coopération jugée essentielle dans le processus d'embauche des professionnels immigrants. Les PME ne connaissent pas trop les outils mis en place par ces ministères afin de faciliter l'insertion des nouveaux arrivants sur le marché du travail. C'est-à-dire, je vous donne un seul exemple: le programme PRIIME, qui n'est pas très connu et qui vise le... qui facilite l'intégration sur le marché de l'emploi, la première expérience sur le marché de l'emploi des nouveaux arrivants. Un autre exemple de programme qui n'est pas très connu, ce sont les programmes d'accès à l'égalité à l'emploi.

Les PME, dans une grande majorité, ne font pas preuve d'une vision à moyen ou long terme en ce qui concerne leur stratégie de ressources humaines. Les propriétaires, qui sont le plus souvent des recruteurs, acceptent et même encouragent une fluctuation accrue de personnel, avec les risques que ceci implique: interruption du rythme de travail de l'équipe, erreurs inhérentes aux débutants, implication réduite des employés dans le bien-être de l'entreprise. Il faut mentionner quand même que cette politique s'applique sans discrimination aux employés québécois et à ceux sortis de l'immigration, quoique les premiers puissent compter jusqu'à un certain point sur leur réseau personnel pour trouver assez rapidement un autre emploi.

Les PME ne sont pas au courant du potentiel des nouveaux arrivants et elles sont plutôt méfiantes quant aux expériences professionnelles acquises en dehors du Québec. Si nous acceptons qu'il s'agit ici d'une situation que nous retrouvons également chez les grandes entreprises, il faut préciser que certaines, la plupart des grandes entreprises, ont déjà créé et appliqué certaines stratégies qui permettent plus rapidement l'accès des nouveaux arrivants à des emplois qualifiés. On a des exemples concrets de la STM, de Montréal, et du Mouvement Desjardins.

Les PME ne possèdent pas des informations de nature culturelle qui leur permettraient de mieux comprendre les personnes issues des cultures non occidentales. Ils assument tout simplement qu'une fois au Québec ces personnes doivent renoncer rapidement et entièrement à leurs façons de faire et adopter la manière québécoise, sans réfléchir à la durée ou à la difficulté de ce processus. Ils ignorent qu'en procédant ainsi ils sont partiellement responsables du rejet social des personnes qui ne peuvent pas ou ne savent pas comment se comporter à la québécoise. Pire, ils seront parmi ceux qui supporteront le coût financier de cette marginalisation, conclusion qui est d'ailleurs connue et soulignée par toutes les études qui ont été faites sur ce sujet.

Les PME qui ont participé à nos ateliers ont compris qu'ils pouvaient rencontrer des professionnels très qualifiés parmi les nouveaux arrivants et ont compris que la diversité d'une équipe de travail ne nuisait pas à sa compétitivité. Mais plusieurs propriétaires ont remarqué que, si jamais un professionnel immigrant faisait une erreur, c'était en fait toute sa communauté culturelle qui payait le prix. Le préjugé était par la suite très difficile à disparaître. Ceci indique une grille supplémentaire qui existerait dans le cas des nouveaux arrivants. Des sessions d'information comme celles que nous organisons ont justement le mérite de souligner ces différences de traitement et ses conséquences et d'en conscientiser les auteurs.

Et la dernière: les PME ne mettent pas toujours en relation l'essor de leurs activités et la diversification de la clientèle, ce que les grandes entreprises ont dans la majorité déjà compris. Le partage des connaissances de nature culturelle pourrait les aider à mieux comprendre leurs clients d'origines diverses et par la suite favoriser le développement de la PME en question.

Laissez-moi vous dire que, parmi les 1 500 entreprises qu'on a contactées, il y avait tous les secteurs d'activité. Nommez n'importe quel secteur d'activité, on l'a déjà contacté. Et, parmi les recommandations les plus vraiment importantes qu'on aurait à faire, d'abord: afin de bénéficier de l'attention des PME et de pouvoir compter sur leur participation, il faudra leur proposer des projets qui touchent des problèmes concrets du processus de dotation. Les approches théoriques, les débats excessivement généralisés ne sont pas en mesure de trop les faire se déplacer, même à des activités gratuites. Nous devons insister aussi sur la promotion des outils mis en place par le palier gouvernemental provincial afin de faciliter l'insertion des nouveaux arrivants sur le marché du travail. Ça ne sert à rien d'avoir des beaux programmes qui ne sont pas connus et donc pas appliqués, et en général... mais ça, c'est un problème vraiment général, il faudra expliquer brièvement mais clairement les fondements de la politique d'immigration québécoise pour que les PME comprennent qu'il sera à leur avantage d'utiliser les compétences des professionnels immigrants et donc de les aider à s'intégrer plus rapidement dans leur nouvelle société. Le message transmis doit être sans équivoque.

La diversité est un atout de la société québécoise. D'ailleurs, dans les campagnes de recrutement menées à l'extérieur de la province ? je vous parle de mon expérience ? cette diversité est vendue en tant qu'attribut essentiel et durable qui assure la spécificité du Québec à l'intérieur du Canada et sur le continent nord-américain.

Voilà. C'est tout ce que j'avais à vous dire.

Le Président (M. Dubourg): Bon, d'accord. Merci, Mme Samoila.

Mme Iturriaga (Ana Luisa): On n'a plus de temps? Juste pour laisser, cinq secondes, glisser Antoine un mot sur...

Le Président (M. Dubourg): Oui, oui, oui, mais quoique... Bon. Les représentants, les parlementaires ici vont vous poser des questions, je présume que M. Makitou... mais, si toutefois vous voulez prendre quelques secondes, allez-y.

n(16 h 30)n

Mme Iturriaga (Ana Luisa): Je veux juste qu'il vous témoigne, quand, lui, il animait les ateliers de discussion, parce que, qu'est-ce qui était intéressant de ce projet, que, même si les gens ont refusé de venir, par la suite, quand on réussissait à replacer les 64 qui sont venus, il y a eu quand même des expériences très gagnantes, parce qu'on a appelé des gens qui étaient de la STM ou de Desjardins qui sont venus comme experts pour... des PME sur leur expérience qui était aussi très gagnante. Et donc Antoine pourrait juste rapidement dire comment les gens étaient surpris, juste glisser un mot de l'atelier de discussion.

M. Makitou (Antoine): Oui. Juste deux mots, parce que, bon, on a un peu dépassé notre temps. C'est vrai que c'est moi qui animais plus les ateliers de discussion sur la diversité culturelle en entreprise, et ensemble avec Ana on faisait l'information. Alors, on a eu la chance d'avoir le témoignage effectivement d'experts, comme Desjardins, de la STM, pour venir voir à peu près comment se passaient les ateliers et essayer d'encourager les petites et moyennes entreprises qui venaient participer à nos ateliers. Ce qui est vrai, c'est qu'ils ont remarqué des lacunes, que ma collègue Adina vous a mentionnées, mais, pour regagner plus de temps, j'aimerais effectivement donner libre cours aux discussions, à vos questions, et on répondra au fur et à mesure.

Le Président (M. Dubourg): Oui, avec grand plaisir. Donc, je vous remercie. Eh bien, tout de suite je vais passer la parole au parti ministériel, donc à Mme la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, Mme James.

Mme James: Merci beaucoup, M. le Président. Madame... Mesdames, je dois dire, monsieur, je suis évidemment très heureuse de vous retrouver. Vous savez très bien que Québec Multi-Plus est un organisme que je connais très bien, j'ai eu l'occasion de fêter votre vingtième anniversaire, mais je crois déjà que ça fait deux ans. Depuis, on a pu célébrer tout ça ensemble et le travail que vous faites.

Évidemment, en vous écoutant, vous faites un travail extraordinaire au niveau de la valorisation puis de la reconnaissance de l'apport de cette immigration au Québec, et l'apport économique, non seulement qu'elle peut apporter, parce qu'on parle toujours dans le discours de l'avenir, mais ce qu'elle a déjà apporté. Ce matin, on a entendu la deuxième présentation, qui nous a été faite par des représentants des petites et des moyennes entreprises, qui ont effectué des sondages, nous ont parlé longuement sur cette question de l'importance d'arrimer les besoins du Québec avec l'immigration qu'on fait venir. Et vous, justement, vous êtes là, ça fait plus de vingt ans maintenant que vous faites valoir l'importance de cette richesse. En quelque part, je pense que c'est important. Si on pouvait vous cloner partout au Québec, on pourrait voir à quel point vous faites un travail qui est important.

Je veux aborder un certain nombre de sujets avec vous, mais ce qui m'a touchée, et je pense que c'est important d'en parler, parce que vous êtes, vous l'avez évoqué aussi dans votre présentation, la difficulté, parce qu'il faut être clair sur la réalité que peuvent vivre certaines communautés face à ça... Oui, c'est important d'avoir les compétences, oui, c'est important que l'employeur puisse reconnaître la compétence de la personne, mais, une fois que cette personne ? ce n'est pas la fin de l'histoire, autrement dit ? s'intègre ou est embauchée, il y a toute cette question de gestion de la diversité en tant que telle. Vous avez mentionné dans votre mémoire cette question et ce débat... moi, je dirais, plus la façon que le débat a été peut-être soulevé par certains a créé une certaine méfiance à l'égard de cette immigration. Vous, vous avez été là pendant une vingtaine d'années, à cette immigration-là, et que ce serait important pour nous d'aller de l'avant, de bien s'assurer qu'on puisse se parler puis de trouver la façon de comment mieux vivre ensemble, c'est la façon que je le décris.

Moi, ce que j'aimerais vous entendre, puis je sais que vous avez ? j'étais là à ce moment-là ? présenté un mémoire notamment sur cette question de politique de lutte contre le racisme et puis de s'assurer qu'on... avec notre société plurielle, que nous avons choisie et rechoisie ensemble, les mesures qu'on pourrait mettre en place. Parce qu'on parle, comme je vous ai dit, souvent de la question de travailler en amont, c'est important le faire, mais ça n'arrête pas là. La gestion de la diversité, comment s'assurer qu'on puisse faire en sorte qu'on puisse se connaître, qu'on ne soit pas fermés, qu'on exige des deux parties de travailler ensemble, parce que dans le fond c'est tout le monde qui en bénéficie. Vous avez parlé de vos sessions d'information avec les PME, mais quelles suggestions pouvez-vous nous faire dans ce sens-là? Parce que je pense que c'est important d'adresser très directement la discrimination que les gens peuvent vivre face au fait qu'on ne se connaît pas puis qu'on pourrait céder à une tentation de repli quand c'est important de se parler. Comment avez-vous vécu ça durant les 20 dernières années? Puis des recommandations ou des suggestions que vous pourrez nous apporter à ce niveau-là.

Mme Iturriaga (Ana Luisa): Dans notre recherche, qu'on aimerait bien publier bientôt, on soulève que dans la structure d'accueil il y a eu beaucoup, beaucoup d'efforts de l'État et, on peut dire aussi, de tous ses partenaires, les organismes communautaires, et même des services de l'État qui ont été pour aider à l'intégration.

Mais il reste non moins qu'il y a des lacunes qui manquent, à travailler. Et vous avez parlé de tout le savoir-être, justement, mais les attitudes, les comportements qui vont freiner parfois les initiatives qui sont mises par des politiques mais qui arrivent à non être applicables, donc ça ne se traduit pas par le terrain. Donc, on arrive à un raté au niveau de l'intégration pour certains individus qui ont besoin de plus que d'autres.

On oublie souvent qu'on a soutenu beaucoup les paliers communautaires. Nous, qu'est-ce qu'on déplore, c'est ? je sais, ce n'est pas la bonne place, mais il faut que je le dise quand même ? que les paliers communautaires, ils ont beaucoup travaillé, ils ont beaucoup absorbé la main-d'oeuvre immigrante, des professionnels qui ont été intégrés par des programmes subventionnés par Emploi-Québec ou par d'autres paliers gouvernementaux. Et donc ce savoir, il est resté dans le milieu communautaire. Parfois, je vois beaucoup de Français aussi, des gens qui viennent de la France, qui n'ont pas arrivé non plus à intégrer des entreprises mais qui sont dans le communautaire. Et je me dis: C'est dommage, parce que c'est bien pour nous, le communautaire, on s'enrichit de talents, mais il reste que c'est des travailleurs de «cheap labor», des gens qui auraient pu être beaucoup plus productifs pour la société et qui auraient pu aussi aider à celles qui viennent après. Parce que, quand il y a quelqu'un qui est déjà ouvert, qui est déjà intégré, c'est un exemple de réussite et donc c'est contagieux. Donc, nous, on a identifié ça.

Un des problèmes souvent, même dans le milieu communautaire, même si on les soutient, c'est que les ressources ne sont tellement pas juste au niveau financier. Même dans le savoir-être, souvent, comme on embauche des gens qu'on ne peut pas payer beaucoup, donc on va prendre quelqu'un qui a besoin de s'intégrer, donc on prend quelqu'un qui ne connaît pas le patrimoine historique et culturel du Québec. Donc, souvent on n'a pas vraiment des intermédiaires qui peuvent intégrer. Ils vont aider parce qu'ils comprennent, ils sont ouverts à la personne qui arrive parce qu'ils sont de cette communauté, ils comprennent parce qu'ils sont immigrants, mais ils méconnaissent tout ce patrimoine, la charte, d'où vient tout l'enjeu linguistique, d'où vient l'enjeu démographique, c'est quoi, les politiques migratoires, pourquoi on accueille cet immigrant et pas l'autre immigrant. Donc, cette méconnaissance-là dans le réseau communautaire, nous, on l'a identifiée.

Et il y a dans les intervenants communautaires des lacunes au niveau de l'information. Quand c'est des étudiantes québécoises qui sortent de l'université et qui veulent s'impliquer, mais souvent ils manquent d'ouverture sur le monde ou la connaissance des autres cultures. Donc, on va aller travailler avec des professionnels immigrants en étant paternalistes, en leur disant: Ah! viens, mon petit, je vais prendre soin de toi, tu ne sais pas comment faire. Ça tourne mal avec la clientèle. Donc, vous voyez, nous, on a identifié des situations comme ça.

Autant nos personnes immigrantes, on les prend parce que dans un programme on veut l'aider, parfois il n'y a pas toute cette richesse du savoir-être québécois, donc... Mais, si on prend une jeune intervenante québécoise, mais parfois elle ne connaît pas l'ouverture sur le monde, elle ne peut pas comprendre la fierté de l'homme algérien qui arrive avec ses diplômes, et là elle dit: Bien, c'est ça, il est macho, il veut me traiter... parce que je suis une jeune finissante. Donc, on commence les conflits et les préjugés.

Donc, vous voyez, même dans le milieu communautaire, on a identifié des situations comme ça. Il y a du travail à faire avec les intervenants communautaires. Et ça, c'est à cause du manque de ressources financières pour avoir des équipes stables, avoir des gens toujours qui ont des... que c'est sûr qu'on peut garder. Donc, on perd à chaque fois parce que des gens se font récupérer par la fonction publique, vont ailleurs, mieux payés, mieux placés, mais tant mieux, qu'ils progressent au niveau professionnel, mais les milieux communautaires, ils restent quand même toujours négligés à ce point-là. Et aussi, souvent on est sollicités par les employeurs mais non payés. Donc, ça reste: Pourquoi on va payer une firme de consultants? Je ne vous parle pas juste au niveau de nous, je regarde par exemple les organismes qui sont financés pour l'employabilité, mais souvent ils ont devant des candidats, et tout le monde va chercher, mais il n'y a personne qui pense qu'ils ont économisé combien en agences de placement. Parce que la plupart des entreprises, elles passent par le privé, elles paient très, très cher pour aller chercher la main-d'oeuvre. Vous voyez, c'est ça, les choses qui ont ressorti fort.

n(16 h 40)n

Au niveau gouvernemental, je n'aime pas trop faire l'avocat du diable, mais il faut que je vous le dise, les gens, ils ont beaucoup reproché au ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale des fois le contact qu'ils ont eu avec le conseiller en emploi. Ils n'ont pas trouvé que ça a toujours été un support; au contraire, ils sentaient que c'était comme des... qu'il fallait convaincre et que c'était comme des barrières déjà à l'arrivée. C'est ça que, les gens, il ressortait dans notre recherche... Ils n'ont pas parlé beaucoup du ministère de l'Immigration, peut-être parce qu'avec eux il y avait toute la lune de miel: on a émigré, on a... tandis qu'Emploi-Québec c'est un peu la frustration, on n'a pas pu arriver au rêve migratoire que c'était l'emploi. Donc, c'est un peu qu'est-ce qu'on... Il y en a d'autres lacunes qu'on a trouvées au niveau de la recherche, mais on peut vous dire que c'est des détails comme ça.

Il y a des barrières au niveau du savoir-être des deux côtés, de la société d'accueil, des intervenants communautaires et bien sûr les PME, qui commencent à s'ouvrir à cette question parce qu'ils ont besoin pour continuer leur compétitivité, ils ont besoin de la main-d'oeuvre immigrante, ils n'ont plus le choix. Et ce qu'Antoine a rencontré, on peut vous dire, on a eu des alliés, maintenant on a des gens de PME qui s'impliquent dans notre conseil d'administration parce qu'ils sont tombés en amour avec ce qu'on fait, parce qu'ils ont compris que le Québec, ce n'est plus une question... Quand on est venu pour soumettre le mémoire, nous, c'était pour vous dire: On n'a même pas à réfléchir, 50 000, c'est qu'est-ce qui peut être assez gérable, du moment qu'on a tout le support qu'on a besoin pour le faire.

Mme James: ...j'étais très intéressée par ce que vous avez évoqué face à la réalité communautaire. On parle souvent des entreprises et le besoin de faire reconnaître l'apport de la main-d'oeuvre immigrante, mais aussi par rapport à une méconnaissance qui peut exister dans le milieu communautaire. Et vous êtes un partenaire privilégié non seulement du gouvernement, mais vous avez souvent un contact très important avec les gens qui arrivent au Québec.

Vous avez évoqué... puis de justesse vous avez évoqué des situations qu'on peut améliorer face à ça. Mais j'ai été très marquée lorsque vous avez parlé du fait que dans le monde le Québec est un modèle d'intégration, et qu'ailleurs les gens s'inspirent de notre façon de faire, et qu'on a quand même, malgré qu'il faut toujours y travailler, puis d'ailleurs je rappelle toujours, c'est la raison pour laquelle on se donne cette responsabilité de refaire le consensus et d'arriver à des niveaux... Alors, malgré les efforts qu'il faut continuer de faire, j'ai trouvé intéressant puis important que vous avez déjà fait une recommandation sur les seuils, au niveau d'une augmentation considérée légère, mais évidemment dans un contexte où on veut s'assurer de bien réussir notre immigration à ce niveau-là.

Vous avez aussi dit, peut-être que c'est un point de précision pour tout le monde ici, parce qu'on avait parlé du fait qu'on s'est fixé des objectifs de 55 000 depuis un certain temps, dans la politique originale, puis même, cette année, c'était de 44 000, puis, bon, je pense que c'était ma collègue, ce matin, qui disait: Mais on s'est fixé 46 000, mais il ne faut pas oublier non plus que ce n'est pas face à notre capacité et nos services que nous offrons que le volet d'admissibilité du fédéral, face aux vérifications de santé et de sécurité, qui sont davantage très importants à protéger également...

Ce que je veux en venir: Face à ce modèle québécois qui est déjà reconnu puis le rôle que, vous, vous jouez face à ça, quelle est la façon ou quelle est... si vous aviez à me donner une suggestion sur comment on pourrait valoriser pas juste le milieu communautaire, mais votre rôle à vous, parce que, de ce que j'ai vu jusqu'ici, je n'ai pas vu un autre Québec... je ne veux pas juste vous lancer des fleurs, je n'ai pas vu un autre Québec Multi-Plus qui fait justement cette valorisation puis de reconnaissance de cette main-d'oeuvre immigrante. Et le fait même que, monsieur, vous êtes là à en témoigner en commission parlementaire après six mois, ça démontre à quel point que non seulement vous êtes courageux, parce que je pense que tout le monde serait d'accord que, la première fois qu'on le fait, c'est quelque chose d'assez énervant, mais que vous êtes vraiment convaincu. Mais, considérant que le modèle québécois est le modèle, mais vous, face à ce que vous faites, je trouve qu'on a intérêt à multiplier ou à bonifier vos efforts. Comment est-ce qu'on pourrait le faire dans une éventuelle planification accrue de politique d'intégration?

Mme Iturriaga (Ana Luisa): Nous, au Québec Multi-Plus, on croit... et la preuve, Adina, ça fait trois ans, je pense, qu'elle est au Québec, Adina se heurtait beaucoup, beaucoup à des difficultés d'emploi, même si elle a des diplômes et des diplômes qui peuvent faire son histoire. Je vous dis, c'est quelqu'un qui me l'a référée même du gouvernement, il m'a dit: Prends-la, prends-la, elle sera excellente. Sans compter que peut-être le gouvernement a plus de budget que Québec Multi-Plus, évidemment. Mais Adina était tenace, elle m'a envoyé son C.V., elle a fait toute sa recherche d'emploi, comme l'ont conseillé ces organismes communautaires... comme club de recherche d'emploi. Donc, finalement, il y avait l'opportunité avec mon projet de pouvoir l'embaucher. Antoine est arrivé après, parce que la personne qu'on avait choisie, c'était une personne en ressources humaines. Nous, on avait besoin de quelqu'un pour travailler avec les petites et moyennes entreprises, quelqu'un en ressources humaines. Et cette dame-là, on lui a trouvé un emploi mieux payé ailleurs, donc elle a laissé le poste vacant de formateur.

Et, quand j'ai eu le C.V. d'Antoine... et je viens à la pratique. Vous, vous financez beaucoup des organismes communautaires, mais on ne reconnaît jamais le travail qu'ils font, excellent. Il y a des intervenants, même si je dis qu'il y a des lacunes, il y a quand même de très bons intervenants. Et, moi, je travaille avec ces partenaires-là. Donc, quand j'affiche des postes, je fais appel à Emploi-Québec et à mes partenaires. Et c'est un organisme qui m'a référé justement Antoine, mais il y avait d'autres C.V. fort intéressants. Antoine, il s'est battu avec des gens fort intéressants, mais qu'est-ce qui a fait le plus, je vais vous dire, pourquoi Antoine est ici aujourd'hui, c'est parce que, moi, j'ai su voir les talents de cet homme-là. Cet homme-là, il a travaillé pour l'ONU, en camp de réfugié en Afrique, il a travaillé avec la détresse humaine. Je me suis dit: Qui est le mieux pour travailler avec les employeurs que quelqu'un qui a connu la détresse humaine, qui a connu c'est quoi, vivre ailleurs? Et, en plus, qu'est-ce qu'il donnait le plus, pour donner la formation, ça prend quelqu'un qui connaît la politique, qui connaît le Québec et le Canada, évidemment. Antoine, en ayant travaillé pour l'ONU, connaissait les politiques des principaux pays migratoires. Mais regardez maintenant, aujourd'hui, il peut vous le dire, il a su tout de suite faire face aux défis de former des employeurs.

Mme James: Attention, on va vous le recruter, là. Vous allez le perdre.

M. Makitou (Antoine): Merci beaucoup. Juste un petit mot. C'est ce que je voulais aussi dire, c'est un problème de donnant-donnant aussi. Ça dépend aussi de l'individu lui-même pour s'intégrer. J'ai été effectivement faire de la présélection pour les candidats éligibles à l'immigration. Sur les 10 pays, jusqu'en 2005, qui avaient une politique d'immigration ? depuis 2005, ils sont devenus... le Canada, les États-Unis, l'Australie, vous les connaissez tous... Donc, j'ai fait de la présélection des candidats qui devraient venir ici, que j'ai envoyés aussi au Canada. Comme l'a dit Ana, je connais effectivement les politiques migratoires, ce qui m'a permis de vite m'intégrer au Québec et de faire des formations, à tel niveau que nous avions pu avoir des petites et moyennes entreprises qui ont adhéré à notre cause. Et ils sont devenus des ambassadeurs de la diversité culturelle. Et nous en sommes fiers, bien qu'ils ne sont pas nombreux, 74, mais nous pensons que, si une hirondelle ne fait pas le printemps, mais les 74 feront bien le printemps ici, au Québec.

Mme Iturriaga (Ana Luisa): Donc, il faut croire, il faut croire, il faut que tous les secteurs assument leur rôle. Il faut que l'État... l'État, il ne peut pas faire tout ça. C'est bien, qu'est-ce que vous faites aujourd'hui, mais il faut que tout le monde soit un peu en action et assume sa responsabilité en matière d'intégration. Si Antoine n'arrive pas à avoir un emploi parce que personne reconnaît ses compétences, bien, qu'il tombe au bien-être social, c'est moi qui vais payer le coût social pour ça, c'est moi qui vais payer pour la non-intégration. Et, malheureusement, c'est ça que vivent certaines personnes parce qu'elles n'ont pas su non plus être coachées. Parfois, il y a certaines personnes immigrantes qui vivent difficilement le parcours migratoire, et ils n'ont personne pour les soutenir.

Nous, on peut vous dire sans être un peu prétentieux, on devient comme une petite famille, les gens, ça nous accroche. Souvent, on a des gens qui viennent bénévoles. Maintenant, on fonctionne beaucoup comme ça, parce que les gens, ils disent: Mais on va à vos activités et on aime ce que vous faites et on veut, on veut entraider. Et donc c'est bien de voir que les gens, ils se font une famille. Je ne peux pas vous nier que dans le moment justement mes deux collègues sont bénévoles, ils ne sont pas rémunérés, parce que, nous, on n'a pas les structures pour se permettre d'avoir tant de personnes. Donc, c'est pour vous dire, ils croient et ils sont là. Et donc c'est ça qu'on a besoin. On a des gens, on a besoin des gens qui croient dans ce Québec.

n(16 h 50)n

Le Président (M. Dubourg): Bon. D'accord. Merci beaucoup, et je sui sûr, Mme la présidente... enfin, vous devez sûrement les féliciter, les remercier à tous les jours, comme vous êtes en train de le faire, là, ici, au niveau de la commission, pour le travail bénévole qu'ils font. Et ça, ça termine donc le temps pour la partie ministérielle. Donc, nous allons maintenant accorder la parole au deuxième groupe d'opposition... l'opposition officielle, je m'excuse! Oui, c'est vrai... et je reconnais donc la députée de Charlesbourg pour... nous allons donc passer pour une période de 14 minutes.

Mme Morissette: Merci, M. le Président. D'abord, félicitations pour la rédaction de ce mémoire que j'ai lu avec beaucoup d'intérêt puis merci d'être présents aujourd'hui pour la présentation. Ça nous permet de vous questionner davantage puis d'en savoir plus sur ce qu'il y a dans vos têtes et dans votre vécu. Je peux vous dire d'entrée de jeu qu'on est absolument sur la même longueur d'onde que vous en ce qui a trait à l'emploi des nouveaux arrivants, d'augmenter le taux d'emploi des nouveaux immigrants devrait être une priorité absolue à l'heure actuelle, avant de songer à faire une hausse importante. C'est notre position. Je l'ai exprimée ce matin dans les remarques préliminaires.

Donc, je voudrais en savoir un petit peu plus sur votre façon de voir les choses. Là, vous dites que les entreprises doivent s'ouvrir davantage. Je suis entièrement d'accord avec vous. De quelle façon? Avez-vous des suggestions? Est-ce qu'il devrait y avoir des incitatifs, ou est-ce que c'est un travail d'éducation sociale à long terme, ou quelque chose qu'on peut faire qui aurait de l'impact à plus court terme?

Mme Iturriaga (Ana Luisa): La structure d'une entreprise doit également être... Donc, il ne faut pas que ce soit juste individuel, parce que, dans une entreprise, si les dirigeants ne sont pas convaincus et les... non plus, on ne peut pas fonctionner, ça ne peut pas avancer. Donc, c'est sûr qu'il y a tout l'aspect de la culture dans l'entreprise qui doit adhérer à la diversité culturelle... et a une gestion saine. Parce qu'entendons-nous que c'est sûr qu'on ne peut pas toujours essayer d'étirer l'élastique, parce que ça peut péter. Donc, on est conscients que c'est gagnant-gagnant, comme a dit Antoine.

Mais, nous, on a opté pour des actions, pour... les gens, on a dit: Il faut qu'on les mette en contact. Donc, on a des activités qui permettent aux employeurs de venir rencontrer les personnes immigrantes, et on peut vous dire que ça a eu beaucoup, beaucoup de succès. On avait commencé avec un projet avec le ministère. Au début, on avait 45 personnes qui venaient à nos activités, et on a fini en augmentant à 60, 80, 100 personnes qui se déplacent. De là, on a environ 30 employeurs qui viennent parce qu'ils ont pu voir et constater qu'il y a des personnes très riches et intéressantes, et donc ça ne leur coûtait rien de venir. Dans le moment, ça ne leur coûte rien, jusqu'à date, mais nous, l'idée, c'était vraiment de créer l'idée d'échanger, se connaître, s'informer. Mais il faut que, si on veut du maintien, il faut que la structure complète de l'entreprise adhère en gestion de diversité saine et, dans le bon sens, une politique claire, une culture commune, un dialogue qui est vraiment commun, et que ce ne soit pas juste dans le détail de politique de l'entreprise, parce que sinon ça se perd.

Mme Samoila (Adina): Si vous permettez. Au niveau social, il faudrait quand même trouver un moyen de faire... de rendre connues les politiques du gouvernement, parce qu'on a constaté qu'il y a des employeurs, qui sont après tout des citoyens québécois, qui ne connaissaient pas les politiques de leur gouvernement, pour lequel ils ont voté ou non, ça, c'est leur problème, mais ils ne les connaissaient pas. Ils ne connaissaient... Il y en avait certains qui ne connaissaient même pas l'existence du ministère de l'Immigration, un ministère québécois. Ils ont dit: Oh! mais ça existe ici? C'était une personne qui avait 60 ans, québécoise d'origine, montréalaise. Donc... Parce que leur attitude de rejet se base en grande partie sur le manque d'information, et, là où il y a de l'information, elle est toujours filtrée par les médias, et ce n'est pas toujours la meilleure source d'information. Donc... Sinon, les politiques sont peut-être très bien faites, mais elles restent entre vous et nous, les spécialistes, ceux qui les font et ceux qui les lisent. Bon. Ça ne donne rien après tout, parce que ce ne sont pas les deux acteurs qui ont le pouvoir d'embaucher vraiment en masse des professionnels immigrants.

Donc, une plus profonde promotion de ces politiques et des outils qui puissent aider, au moins au début, l'intégration des nouveaux arrivants sur le marché. Parce que la petite entreprise a posé la question: C'est où, l'avantage pour moi si j'embauche un nouvel arrivant? Donc, il faut vraiment leur montrer qu'il y a des outils, qu'ils ne les connaissent pas du tout, qui pourraient les aider. Donc, au niveau social, c'est là qu'il faudrait vraiment, vraiment insister.

Mme Morissette: Oui. Bref, donc l'éducation un peu des chefs d'entreprise, si on veut? Puis, vous, vous... une partie de votre mission est axée là-dessus, mais je pense qu'à un moment donné il y a quand même des limites, surtout budgétaires, à ce que vous êtes en mesure de faire. Je comprends très bien.

Moi, j'ai trouvé ça vraiment intéressant quand vous dites que vous avez contacté 1 500 entreprises pour les inviter à venir vous joindre. Bon, il y a eu un succès quand même intéressant, presque 75, ça aurait été bien qu'il y en ait plus...

Une voix: ...

Mme Morissette: Pardon?

Mme Samoila (Adina): La cible était de 100. Donc...

Mme Morissette: La cible était de 100. Ah bien, quand même, ce n'est pas...

Mme Samoila (Adina): On a eu 75, 74.

Mme Morissette: Oui, oui, c'est bien, c'est bien. Mais je sais que vous êtes basés à Montréal, mais est-ce qu'il y a possibilité de... soit de vous-mêmes, ou bien d'exporter votre idée à d'autres organismes en région, à ce moment-là, pour informer les entreprises qui sont à l'extérieur de la région de Montréal, ou vraiment votre... pour l'instant, votre priorité, c'est la région de Montréal? J'essaie de voir, d'exporter des bonnes idées, là.

Mme Iturriaga (Ana Luisa): Mais, nous, on se déplace, hein? On va venir, en novembre, à un colloque fédéral faire une présentation. Donc, on vient à Québec, on va... on contribue aussi, on n'est pas... dans un projet avec le ministère de l'Immigration et Emploi-Québec pour la Fédération des chambres de commerce, on a été un des... choisis pour faire la formation. Donc, jusqu'à date, on n'a pas eu la chance d'aller loin en Abitibi, mais il y a d'autres formateurs qui ont commencé dans ce projet-là. On sait très bien qu'il y a des efforts qui sont faits, mais, comme on vous dit, ça passe beaucoup par les contacts quotidiens, c'est la quotidienneté. J'écoutais un peu qu'est-ce que disait notre prédécesseur, au niveau de la mairie, et, moi, je crois que dans la vie de quartier, dans la vie du travail, c'est là que les échanges sont beaucoup plus harmonieux, et je déplore que souvent on ne va pas mettre ça en valeur pour le Québec, parce que c'est juste... Moi, je vous assure, je suis fière d'être «mexicoise» et je trouve que parfois ça ne ressort pas assez. On vit en harmonie, on partage des espaces. Moi, je reste à la Rive-Sud, je suis en Montérégie, et je peux vous dire, il y a toutes sortes de groupes maintenant qui démarrent dans les environnements. On n'est pas juste à Montréal, de plus en plus en région. J'écoute des gens qui commencent à voir l'intégration, donc je me dis: C'est dommage qu'on ne parle pas de cet exemple de réussite. On a besoin, et c'est là que, nous, on met notre accent. Au plan de la communication, le ministère et même l'État québécois, il se doit de plus envoyer ces messages-là, qu'on travaille ensemble, qu'on bâtit ensemble. Et les résultats, ils sont concrets. Ça fait 40 ans que le Québec s'est ouvert au monde. Donc, pour une jeune nation, c'est déjà remarquable, parce que même des anciens pays où il y a eu l'immigration depuis toujours, il n'ont pas réussi à gérer cette immigration-là.

Donc, c'est déplorable que l'on ne fasse pas les éloges, mais il ne faut pas non plus se leurrer, il faut quand même parler des handicaps au niveau de l'intégration. Quand on a les professionnels... Moi, je côtoie tout le temps des professionnels, et, quand la ministre est venue en tant que marraine, elle a vu comment on mobilise des employeurs, on mobilise des personnes immigrantes pour qu'ils se rendent compte. Et on efface les barrières, on se rencontre. C'est les rencontres qui font en sorte... Moi, je ne suis pas trop pour le folklore, parce que ça me choque un peu quand on nous voit juste avec les chapeaux mexicains, je me dis: Je suis plus qu'un chapeau, j'ai plus de talent que ça. On m'a choisie, au Québec, pas pour mon chapeau, mais c'est de voir justement l'individu, les compétences, tout qu'est-ce qu'on a à découvrir. Et pour les immigrants qu'on a eu la chance, Antoine et Adina, dans nos cinq à sept qu'on organise, à Québec Multi-Plus... on peut vous dire, il y avait des personnes immigrantes qui ont dit: Aïe! Ils sont vraiment extraordinaires, les employeurs, on ne pensait pas qu'on pouvait les approcher comme ça, leur poser des questions, c'est formidable. Là, les barrières, les préjugés que l'employeur, c'est comme «il ne veut rien savoir, il est raciste», ils tombent. Donc, c'est réciproque. Je pense qu'il faut faire plus des lieux de rencontre, d'espaces de rencontre pour que les gens, les employeurs... je ne parle pas des... c'est sûr que dans les quartiers c'est aussi important, mais employeurs et personnes compétentes puissent se rencontrer et se découvrir ensemble.

Mme Morissette: Alors, merci beaucoup. Je veux dire, ça me donne plein d'idées. Je voudrais qu'on parle un petit peu... ? j'ai encore du temps? ? du recrutement. Là, vous en avez parlé... vous en avez parlé dans votre mémoire. Moi, j'aimerais ça qu'on parle... il y a des intervenants, un peu plus tôt, qui ont parlé de la surqualification de certains nouveaux arrivants, au moment du recrutement. Donc, des fois du recrutement qui n'est pas nécessairement au diapason des besoins du marché du travail. J'aurais aimé avoir votre opinion là-dessus.

n(17 heures)n

Mme Iturriaga (Ana Luisa): C'est quand même... il faut voir l'évolution de la politique migratoire au Québec. C'est sûr que, quand l'État québécois avait ciblé une migration professionnelle, c'était le besoin dans ce moment-là, mais par la suite on a constaté qu'il y avait d'autres aspects, comme les ordres professionnels. Donc, on pouvait avoir des ingénieurs, mais, s'ils ne faisaient pas partie de tous les préalables pour être dans l'ordre, ils ne pouvaient pas exercer. Donc, c'est sûr qu'il y avait tout ce travail-là qui était... aussi, je pense, depuis 2001, les ordres professionnels travaillent pour faire des efforts pour la reconnaissance. Il faut se donner du temps. Mais c'est sûr que les besoins venant du marché de l'emploi ont changé. Et on a juste à se promener dans n'importe quel parc industriel à travers la province, je peux vous dire, nous, on a vu comment on a un besoin, les employeurs ont besoin de travailleurs.

Donc, c'est maintenant, et je pense qu'avec l'amendement de la grille de sélection qui a été fait à l'automne on va voir. C'est sûr que ça prend du temps, mais c'est quand même déjà intéressant. Et, moi, je peux vous dire, il commence à se faire un peu de bouche-à-oreille, parce que dans l'immigration ça marche comme ça. Je sais que, par exemple, même au Mexique, on commence à en parler. Il y a des gens qui disent: Bon, maintenant, les techniciens, on va pouvoir avoir accès à émigrer, parce qu'on a cette familiarité. Je vous dis, il commence à y avoir comme plus d'information. Les étudiants étrangers, maintenant, ils ont plus de possibilités pour rester aussi. Donc, c'est des diplômes qui sont déjà québécois, ils ont déjà leurs réseaux. Donc, il y a des choses qui se font, mais il reste néanmoins que la conscience, je pourrais dire, la perception des employeurs, c'est que les gens ont trop de diplômes, ils n'ont pas de diplôme, on a toujours un prétexte pour écarter des C.V.

Moi, je peux vous dire qu'est-ce que je répète depuis 10 ans, il me semble que ça fait 10 ans qu'on répète ça: Les C.V., quand on ne peut pas prononcer le nom, c'est toujours le bas de la pile. Ils appellent ça «le bas de la pile». Si je ne peux pas dire «Samoila», je ne l'appelle pas, parce que c'est sûr que je vais avoir de la misère avec elle, tu sais? C'est toujours cette perception qu'immigration égale problèmes, ou diplôme étranger égale problèmes. Il faut enlever cette perception-là des recruteurs, mais, même les recruteurs les plus ouverts, ils peuvent vous dire qu'ils ont des barrières... leurs collègues. J'en ai entendu, des gens qui sont très ouverts, qui nous disent: J'ai des collègues que c'est: Non aux étrangers, c'est le bas de la pile automatiquement. Ça, c'est de la discrimination.

Mme Morissette: Ah! oui, oui. Absolument. C'est exactement ça le mot. Une dernière petite question rapide: Vous, vous seriez pour une augmentation légère, selon le scénario 3. Est-ce qu'à vos yeux ça doit s'accompagner d'une hausse des budgets qu'on accorde en intégration et en francisation ou si on pourrait se débrouiller avec les budgets qui sont maintenant accordés?

Mme Iturriaga (Ana Luisa): Je pense, et là vous pouvez m'aider, mes collègues, je pense qu'on peut... il faut que les structures... Moi, je trouve que le ministère de l'Immigration, il n'a pas toujours les moyens de pouvoir soutenir des causes qui sont quand même assez bien terrains, parce que c'est sûr qu'il y a beaucoup de demandes, des demandes qui viennent de différents milieux de vie, différents secteurs. C'est sûr, il y a l'aspect budgétaire, mais, moi, je dirais qu'il y a aussi des expériences qui sont à succès, qu'il faut écouter. Vous venez d'entendre des municipalités qui prennent des initiatives. Bon, il y a des entreprises aussi que... Moi, je trouve ça des fois dommage qu'ils ne gagnent de prix, parce qu'ils ne savent pas qu'il y a un prix de la citoyenneté et qu'ils peuvent être un exemple de gestion de la diversité. Mais il y a des PME qui ont grossi.

Plutôt, moi, je veux vous dire, on a dans notre C.A. quelqu'un qui fait partie d'une PME qui a environ 80 employés, et il dit, lui, au contraire, il faut qu'il rassure ses Québécois parce qu'il y a tellement de diversité dans ses équipes de travail, parce que, lui, dans son secteur, tout le savoir, il vient de l'étranger, européen et asiatique. Donc, dans ce secteur-là, lui, il reconnaît les compétences. Aussitôt qu'il a un C.V. il dit: Regarde, viens travailler, moi, je n'ai pas de problème. Donc, c'est des Québécois qui commencent à dire: Mais, qu'est-ce qui se passe? On commence à avoir trop de collègues de diverses origines. Mais, pour lui, ça ne pose pas de problème. Il dit: Mais il faut qu'on arrive à rassurer nos Québécois pour qu'ils adhèrent au projet. Et donc je pense qu'il y a plusieurs secteurs qui peuvent être mis en évidence. Ce n'est pas, souvent, des budgets, c'est souvent beaucoup, beaucoup, comme on vous a dit, Antoine et Adina, l'effort individuel, l'effort des individus, autant de l'immigrant que l'employeur.

Si on reste victime: Ah! non, ils ne veulent pas de moi. Je suis Noir, ou je suis Arabe, je suis musulman, c'est sûr qu'on part déjà mal. Mais, si cette personne fait les pas et qu'elle arrive, est embauchée et qu'aussitôt qu'on lui présente son équipe son équipe fait: Ah, yak!, parce que, moi, ma couleur, ça ne répond pas à la majorité, bien... Il y a des entreprises qui ont embauché et, parce que les équipes n'ont pas accepté, on a congédié. Donc, il n'y a pas juste embaucher, il faut aussi le maintien. Et c'est des choses qui ont été vécues. Et je veux vous dire que, même si la personne a toute la volonté, après une expérience comme ça, on vient de perdre quelqu'un de très bien, parce qu'on reste marqué des fois de ces situations-là.

Le Président (M. Dubourg): Merci.

M. Makitou (Antoine): Juste un petit ajout. Ce n'est pas un problème vraiment de budget, parce qu'avec un peu on peut faire beaucoup. Et surtout que le Québec, par rapport à son programme d'immigration, cible d'abord la francophonie. Est-ce que vous voyez? Parce que vous avez parlé de francisation. Donc, de ce côté, il n'y a pas assez de problèmes, parce que la majorité des immigrants qui arrivent ici sont francophones dès le départ. Donc, avec le peu de budget que le ministère dispose, il peut mieux faire, et, comme dit Ana, mais c'est un problème de faire la promotion de l'intégration de l'immigrant quand il arrive.

Le Président (M. Dubourg): Merci, M. Makitou.

M. Makitou (Antoine): Je vous en prie.

Le Président (M. Dubourg): Bien là, cette fois-ci, bon, on s'en va du côté du deuxième groupe d'opposition, et je reconnais le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques pour une période de 13 minutes.

M. Lemay: Merci, M. le Président. À mon tour, je vous salue, mesdames et monsieur, d'autant plus que votre organisme est dans ma circonscription électorale. Vous êtes dans le Vieux-Montréal. Alors, ce n'est pas un mauvais endroit pour avoir ses locaux, n'est-ce pas?

Rapidement. Je suis heureux de vous entendre parler de PME, parce qu'avant vous, ce matin, il y avait la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Ils ont fait un sondage, et ils partageaient avec nous ce matin la difficulté que les PME... ? et là, on ne parle pas des PME de 100, 150, 300 employés, là, on parle de PME de deux, quatre, 10, 15 employés ? qu'il y avait une ouverture. Je ne nie pas qu'il n'y a pas de travail de sensibilisation à faire, mais disons que l'organisme partait du principe qu'il y avait une ouverture, bien sûr pour leurs intérêts d'embauche de personnel, et la difficulté qu'ils avaient était non pas nécessairement la reconnaissance des diplômes, était qu'ils avaient en quelque sorte, d'une part, la francisation à faire et également l'intégration réelle de ces gens-là en emploi, et qu'ils n'avaient pas les ressources pour le faire, qu'ils n'ont peut-être pas la compétence ou qu'ils n'ont pas le temps, parce que très souvent les propriétaires, ils sont tout à la fois, hein? Donc, ce n'est pas de la mauvaise foi qu'ils avaient, c'est que, qu'est-ce que vous voulez, ils n'ont pas nécessairement les ressources, les compétences pour le faire, et à la rigueur ils considèrent que, en tout cas pour l'instant, à moins qu'il y ait un programme qui soit signé avec le gouvernement, ce n'est pas nécessairement leur rôle non plus. Donc, les gens arrivaient peut-être pas prêts comme il se doit à travailler, et il restait des étapes d'intégration à faire qui n'avaient pas été faites au départ.

Et, quand on parle de francisation, vous le soulignez à juste titre d'ailleurs, c'est vrai que la très grande majorité des nouveaux arrivants ont des connaissances à tout le moins minimes du français, sinon plus. Mais un français pour travailler, quelquefois, c'est plus que le français habituel, des termes techniques, et tout ça. J'aimerais vous entendre un peu là-dessus, à savoir: bien sûr, peut-être quelquefois il y a de la mauvaise foi, mais, des fois aussi, les propriétaires considèrent que ce n'est pas nécessairement leur rôle, qu'ils n'ont pas les ressources de faire cette mission sociale là, là, qui est de franciser et d'intégrer les gens.

Mme Iturriaga (Ana Luisa): Mais, vous voyez, qu'est-ce que vous venez de mentionner, on le dit dans le mémoire. On va chercher des francophones, des Français. Même des Français, ils ont des difficultés d'intégration au Québec, et c'est un petit peu choquant pour eux, parce que ce qu'on leur avait montré comme scénario... Et ? je pense, Adina vous l'a dit aussi, parce qu'elle vient de la Roumanie, elle avait déjà toute la maîtrise du français ? les minorités audibles, elles vivent des difficultés, et les minorités audibles, malheureusement, quand vous passez une entrevue ou quand vous êtes au téléphone, déjà on peut vous écarter. Ce n'est pas juste le nom, maintenant ça va être l'accent. Et là, je parle avec mon chapeau Mexique, parce que même moi, après 25 ans et avec tous mes efforts d'intégration linguistique, il y a encore des gens qui me parlent en anglais ou qui disent: Ah! Vous ne parlez pas, vous ne comprenez pas le français, hein?, parce que j'ai un accent. Donc, c'est parfois même par notre manière qu'on voit l'autre. Juste par un accent, on exclut quelqu'un, et je le déplore, parce que les Français, c'est un peu la plainte qu'ils font souvent. Déjà, le fait qu'ils aient un niveau de langage qui... ? des fois, ils sont assez repérables, hein, les Français de France ? bien ils ont vécu des difficultés, ils ont eu la difficulté à se faire accepter.

Donc, vous voyez, on a un problème d'ouverture, quand on parle de savoir-être. C'est sûr que la personne qui vient soit de Roumanie ou du Congo qui est francophone, il y a un pas vers l'intégration et pour l'effort pour comprendre l'opérationnel de la société québécoise, mais il reste que, si, au départ, moi, parce que ton accent, je t'enlève déjà des pointages et que je vois que je vais perdre du temps à t'intégrer...

n(17 h 10)n

M. Lemay: Et c'est là que l'échange, M. le Président, est intéressant. C'est que, comme la fédération nous disait ce matin, ce n'est pas nécessairement parce que... et généralisons, là, puis partons du principe que les gens sont de bonne foi. Ce n'est pas que les gens ont peur de l'autre ou du nouvel arrivant, c'est qu'ils n'ont pas les ressources... dans plusieurs cas, ils ont eu de la difficulté, indépendamment, là, des personnes. Donc, peut-être vous auriez intérêt à rentrer en contact avec eux d'ailleurs. Je trouverais ça... La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Je pense que vous auriez intérêt peut-être à leur parler. Ce serait fort intéressant, et, eux, ce qu'ils nous disaient ce matin dans leur sondage, c'est que les dirigeants de PME ont eu de la difficulté, non pas parce que c'étaient des nouveaux arrivants, c'est... Il fallait, d'une part, accélérer la francisation et, d'autre part aussi, l'intégration ni plus ni moins avec les autres travailleurs et travailleuses. Donc, c'est sûr que les gens qui ont connu ces difficultés-là... Et quelqu'un qui émigre... tous les trois, ce n'est pas facile, là. Donc... et c'est ça qu'ils ont partagé avec nous ce matin.

Donc, certains dirigeants de PME effectivement ont trouvé ça difficile, et encore là ce n'est pas de la mauvaise foi de leur part, c'est qu'ils se sont retrouvés avec un mandat qui n'était pas le leur. Eux, ils gèrent leur commerce, leur entreprise et ils ne sont pas financés, ils ne sont pas aidés pour faire ce geste-là.

Mme Samoila (Adina): Si vous me permettez, je veux juste ajouter le fait que, parmi les 1 500 entreprises qu'on a contactées, il y en avait sûrement qui avaient des besoins criants vraiment de spécialistes. Ils ne trouvaient pas à travers le réseau québécois. Il était épuisé. Tous les spécialistes en recrutement disent que le réseau doit être renouvelé de temps en temps et qu'à un moment donné il faut vraiment envisager les immigrants. Et eux, ils n'avaient pas de Québécois à embaucher, mais ils hésitaient à se tourner vers les immigrants professionnels. Et c'est vrai qu'il faut les, disons, les coacher au moment de... mais c'est valable aussi pour les employés québécois qui sont embauchés. Donc, il faut un effort minimal pour introduire à la culture de l'organisation n'importe quel nouvel employé, sauf que là c'est le manque qu'on a constaté de la part des employeurs. Et on ne leur confère pas un mandat qui n'est pas à être... à leur être confié en fait. Eux, ils n'ont pas d'information de niveau culturel pour pouvoir vraiment accélérer le processus d'intégration. En ne sachant rien sur quelqu'un qui vient d'une culture non occidentale, c'est très difficile de l'intégrer de manière rapide et opérationnelle.

Donc, juste en leur donnant le minimum d'information, ils pourraient à la rigueur comprendre qu'un, je ne sais pas, un professionnel qui vient d'Asie, ou d'Amérique du Sud, ou de n'importe où sauf l'Europe peut être opérationnel en très peu de temps. Il suffit tout simplement de comprendre comment arriver à son savoir-faire et comment arriver à exploiter son savoir-faire au bénéfice de l'entreprise. Et, lorsque j'ai parlé des PME et du fait qu'elles refusent d'embaucher carrément des immigrants, ce n'était pas au niveau... comme s'ils étaient un acteur qui consciemment refusait d'embaucher, mais, lorsqu'on a à peu près 1 300 réponses qui disent: Les immigrants, ça peut causer des problèmes dans mon entreprise, et je la gère depuis 13 ans, et je n'ai pas besoin d'immigrants pour la gérer pour les 13 ans à venir ? c'est une citation, c'est une réponse que j'ai reçue ? alors on commence à se poser des questions. C'est vrai, ce n'est pas leur mandat, mais pourtant, dans les documents ministériels, ils sont considérés comme l'employeur le plus grand au Québec. 80 % des emplois sont censés être offerts...

M. Lemay: On est un royaume de PME.

Mme Samoila (Adina): ...par les PME. Bien, alors, comment est-ce que ce pourcentage a été établi? À la suite de quelle consultation? Parce que les PME embauchent, mais ils sont censés quand même contribuer à l'intégration socioprofessionnelle des nouveaux arrivants.

M. Lemay: Mais des PME l'ont probablement appris en lisant les documents du ministère.

Mme Samoila (Adina): Ça, c'est sûr.

M. Lemay: C'est ça, le problème, justement, là. Donc, vous voyez, ce matin... M. le Président, je termine là-dessus. Je ne sais pas s'il reste un petit peu de temps, mais... Dans le fond, vous dites la même chose que la fédération, que nous avons reçue ce matin, de façon différente...

Mme Iturriaga (Ana Luisa): Mais, si vous me permettez, ils ont un devoir social, parce qu'il y a un contrat moral entre l'immigrant et la société d'accueil.

M. Lemay: Vous avez raison, il faut... On a effectivement tous un contrat moral. Vous avez tout à fait raison.

Mme Iturriaga (Ana Luisa): Mais, dans la politique migratoire, on dit que, la société d'accueil, ils s'assurent qu'ils puissent avoir les mêmes droits et l'accès aux mêmes services, dont l'emploi. Et donc l'entreprise... et, si je me rappelle bien du plan d'action de l'énoncé politique, c'est inscrit: Les entreprises se doivent de jouer leur rôle. Donc, on est tous... Et je reviens dans mon introduction, nous, on travaille avec tous les acteurs sociaux pour qu'on assume notre responsabilité, et le problème, c'est que, moi, ce que vous me dites, c'est qu'ils disent qu'ils n'ont pas de devoir. Je m'excuse, ça fait partie de l'enjeu économique qu'on joue actuellement au Québec, et ça se joue vraiment comme ça. Si jamais on ne me donne pas la responsabilité de prendre cette personne-là et lui donner peut-être le coaching deux jours supplémentaires, peut-être quelques heures supplémentaires, je vais être à côté de la track comme entreprise et comme citoyen, parce qu'on se doit de travailler ensemble. Et ce n'est plus un choix pour les Québécois, c'est notre devoir. Réciproque vraie, je parle en tant que...

Le Président (M. Simard): Merci infiniment. Vous avez...

M. Lemay: Je vous invite à rentrer à contact avec la fédération de ce matin. Je pense que ce serait intéressant que vous ayez une discussion avec eux, là. C'était fort intéressant.

Le Président (M. Simard): Alors, merci infiniment de votre participation. Je pense que les débats ont été très éclairants. Alors, sans plus tarder, parce que le temps file et que nous devons impérativement terminer à 18 heures, j'invite le Service d'appui régional en immigration à prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Simard): Je vous demanderais de prendre rapidement place parce que le temps file vite. Comme vous le savez, nous avons un impératif, puisque ça ne concerne pas que nous, là, de terminer à 18 heures, donc je demanderais, je vous propose, ensemble, là, de couper les temps de parole de tout le monde de six ou sept minutes, des deux côtés, et de demander à nos interlocuteurs, à nos invités d'être le plus brefs possible, s'ils peuvent aller en deçà du 15 minutes, ça nous arrangerait bien.

Alors, merci, bienvenue pour être venus aujourd'hui, merci d'être là. Et je laisserai le Service d'appui régional en immigration... on a parlé beaucoup de régionalisation aujourd'hui, je suis sûr qu'on va vous écouter avec attention.

Service d'appui régional
en immigration (SARI)

M. Touré (Jean-Marie): Merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, mesdames messieurs, bonjour. Merci de nous avoir donné l'opportunité de nous présenter devant vous afin de vous faire connaître notre point de vue sur la consultation ici présente concernant la planification des niveaux d'immigration 2008-2010. Mon nom est Jean-Marie Touré, je suis vice-président exécutif et directeur du SARI et j'ai avec moi le président de notre conseil d'administration, M. Éric Quimper, qui vous adressera tout à l'heure quelques mots.

Tout d'abord, permettez-moi de vous présenter notre organisme, le Service d'appui régional en immigration, communément appelé le SARI. Le SARI est donc un organisme à but non lucratif établi sur la Rive-Sud de Québec, dans la ville de Lévis, et dont la mission est de favoriser le vivre-ensemble et la participation citoyenne par la sensibilisation et l'intégration sociale, culturelle, économique et professionnelle des nouveaux arrivants. En d'autres termes, nous travaillons au niveau de l'accueil et de l'intégration des immigrants en région. Notre expertise en accueil et intégration des immigrants s'est développée par nos diverses interventions en région, particulièrement dans la région Chaudière-Appalaches, en milieu rural et semi-rural et aussi et surtout dans les milieux francophones hors Québec. Le SARI est aussi membre fondateur du réseau pancanadien d'organisations travaillant à l'accueil et l'intégration dans les zones à faible densité d'immigrants et de l'observatoire de l'Université de Sherbrooke. En somme, depuis plusieurs années, nous travaillons à l'accueil et l'intégration et surtout à la rétention des immigrants en région.

n(17 h 20)n

Malheureusement, force a été de constater que, malgré les enjeux politico-socioéconomiques que vit le Québec, il existe, nous le savons tous, ou du moins je l'espère, une dichotomie entre le Québec profond et le Québec urbain. Je m'explique. Comme toutes les grandes métropoles ? on sait que, la plupart du temps, les immigrants sont à Montréal; comme toutes les grandes métropoles ? Montréal attire et continuera d'attirer la grande majorité des nouveaux arrivants. Et, pour nous, c'est tout à fait normal. D'accord? Par contre, depuis quelques années, nous nous sommes dotés d'une politique de régionalisation, incitée par le ministère de l'Immigration, et qui en résumé cherche plus ou moins à favoriser l'établissement et l'intégration des immigrants en région, politique à laquelle massivement, sans trop la comprendre dans le temps, nous avons tous dit un gros oui. Et c'est là que le bât, il blesse, car il s'est installé depuis lors un dialogue de sourd entre le ministère, sa métropole et les grandes villes par rapport aux régions. En d'autres termes, car, d'un autre côté, tous les moyens sont à Montréal et, de l'autre, on veut éteindre des feux en région et on pense que l'immigration pourra éteindre ces dits feux.

Ce qui nous amène, par exemple, dans certaines MRC, dans certaines localités où l'immigration est ou commence à être une réalité. Il y a eu plusieurs projets d'accueil et d'intégration qui ont donné des résultats gagnants pour l'ensemble de la population, et cela, c'est beaucoup dû à la présence d'organismes d'accueil et d'intégration voués exclusivement aux néo-Québécois, et non pas dilués, là, dans des structures de service pour l'ensemble de la population. Par contre, dans les régions où les services d'accueil et d'intégration ont été dilués dans des organisations dont les services s'adressaient à l'ensemble de la population, nous avons assisté à un dysfonctionnement entre la volonté d'accueillir et d'intégrer les immigrants et le besoin réel de vitalisation de nos populations locales. Pour ce faire, la région de Chaudière-Appalaches en est un bon exemple. Donc là, je laisserais mon président vous parler, vous brosser un peu le portrait de la région Chaudière-Appalaches.

M. Quimper (Éric): Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, la régionalisation de l'immigration, c'est un travail de longue haleine. Cependant, les enjeux présentés dans votre document de référence ont déjà des répercussions importantes dans plusieurs régions du Québec, et de plus en plus l'immigration est considérée comme un axe de développement socioéconomique important. Pour ce qui nous concerne, la région Chaudière-Appalaches est déjà active en matière de régionalisation de l'immigration. Par exemple, des projets d'accueil et d'intégration d'immigrants sont en cours dans les MRC de Lotbinière, de L'Amiante, des Etchemins. Il y a des projets aussi en Beauce et à Lévis, bien sûr, qui démontrent l'intérêt porté pour la régionalisation de l'immigration dans la région.

Si on considère les données les plus récentes du ministère de l'Immigration, la région a accueilli, entre 1961 et 2001, 3 460 nouveaux arrivants. Entre 2002 et 2006, seulement 654 personnes projetaient de s'établir dans la région de Chaudière-Appalaches. Ça représente grosso modo 0,3 % du total des immigrants admis durant cette période. C'est peu, mais ces chiffres, ces résultats et ces chiffres n'indiquent pas cependant nécessairement les efforts qui ont été faits dans la région au niveau de la régionalisation de l'immigration. Malgré le peu de ressources financières pour les appuyer, les structures d'accueil et d'intégration se développent afin d'accueillir et d'intégrer socioéconomiquement les nouveaux arrivants, ce qui nous incite à penser que la région de Chaudière-Appalaches, et particulièrement la ville de Lévis, a une capacité d'accueil plus importante maintenant qu'il y a quelques années et qu'il faut en tenir compte maintenant.

Avec une population de près de 400 000 personnes, un développement économique croissant et des actions concrètes qui ont été posées pour développer des structures d'accueil et d'intégration, la région est prête à plus que doubler le nombre d'immigrants qu'elle reçoit. Il serait réaliste pour la région d'entrevoir, pour les prochaines années, l'accueil d'environ 1 000 personnes immigrantes sur sont territoire au cours des trois prochaines années. De son côté, la ville de Lévis est le centre principal au niveau... en termes démographiques, avec 131 232 habitants au recensement de 2006. C'est une région qui est très... c'est une région qui est une des villes des plus... je dirais que c'est une région qui gagnerait à être développée au niveau de la régionalisation de l'immigration. Premièrement, c'est une ville qui est située dans la grande région de la Capitale-Nationale, c'est aussi une région qui est aussi la voisine de la ville de Québec, qui est un pôle démographique important. C'est aussi la porte d'entrée ? ça, c'est important ? géographiquement, c'est la porte d'entrée de la région Chaudière-Appalaches mais aussi de l'Est du Québec. Au niveau socioéconomique, le milieu de Lévis est très dynamique, avec plusieurs projets, on n'a qu'à penser à Rabaska, à l'Université du Québec à Rimouski, qui s'est implantée maintenant à Lévis, l'Innoparc technologique, qui est de plus en plus dynamique, les Industries Davie, la Fédération des caisses populaires Desjardins, Ultramar aussi qui est présent. Alors, je vous lance la question: Pourquoi ne pas faire de Lévis le principal pôle de régionalisation au Québec?

Bon. Au niveau du volume d'immigration, nous, ce qu'on suggère, on suggère une augmentation légère des niveaux d'immigration, à 50 000, au cours des années 2008 et 2010. Pour ce qui est de nos recommandations, ce qu'il est important de mentionner, par exemple, c'est qu'une augmentation légère de l'immigration à 50 000 doit être accompagnée des ressources financières adéquates pour appuyer les structures d'accueil et d'intégration locales. C'est très important, on focusse beaucoup là-dessus. Une augmentation légère, oui, mais avec les ressources financières qui viennent avec cette décision-là.

Au niveau de nos recommandations, on recommande que le Service d'appui régional en immigration soit reconnu par le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles et par les autres ministères, Emploi-Québec et les autres organismes gouvernementaux, comme un partenaire important en matière d'immigration; que le SARI soit reconnu officiellement comme une ressource de la société d'accueil spécialisée dans l'intégration socioéconomique des personnes issues de l'immigration; que le SARI soit davantage mis à contribution pour l'insertion sociale et économique des personnes issues de l'immigration; que le SARI soit financé de façon récurrente et suffisante pour favoriser la consolidation de son expertise et le développement de ses compétences en matière d'accueil et d'intégration des personnes immigrantes; que le gouvernement du Québec reconnaisse la ville de Lévis et ses localités avoisinantes souhaitant accueillir plus d'immigrants... et sont aptes à favoriser leur intégration harmonieuse dans la société, et que nous devons recevoir notre juste part de nouveaux arrivants qui seront admis au cours des années 2008 à 2010, en fonction de la représentation de notre population dans l'ensemble du Québec et de nos besoins et réalités; être assurés d'obtenir toutes les ressources humaines, financières nécessaires nous permettant de créer des emplois suffisants et de mettre en place les structures favorisant une intégration rapide des personnes issues de l'immigration; que le processus d'accroissement et de régionalisation de l'immigration implique que la région et par le fait même les partenaires, comme le Service d'appui régional en immigration, soient impliqués, et ce, tout au long de l'exercice; que le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, en collaboration avec les leaders régionaux, participe à la promotion, l'identification, le recrutement des candidats à l'immigration, qu'il prenne en compte, lors de la sélection d'immigrants, des secteurs d'activité dominants et en émergence dans les régions ? on n'a qu'à penser aux biotechnologies, à l'agroalimentaire, la transformation du bois, la construction navale, et un arrimage avec les programmes ACCORD, par exemple ? que la catégorie des immigrants indépendants soit privilégiée, et ce, en regard des besoins exprimés par la région; que le gouvernement du Québec mette en place davantage de mesures et de moyens pour mieux informer et mieux sensibiliser toute la population des enjeux en cours et de l'importance de l'immigration pour le développement du Québec. Merci.

n(17 h 30)n

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup. J'invite tout de suite Mme la ministre à prendre la parole.

Mme James: Merci beaucoup, M. le Président. M. Touré, M. Quimper, merci beaucoup pour votre présentation et la qualité du mémoire que vous avez présenté. Écoutez, j'ai senti, vous l'avez très bien exprimée, la préoccupation que vous avez face à cette régionalisation puis d'assurer une présence de l'immigration notamment dans votre région. Je tiens à vous dire d'entrée de jeu que c'est quelque chose qui me préoccupe énormément, que vous avez raison de dire qu'on a des efforts à faire davantage pour assurer cette présence-là.

Mais je vous dirais, à la lumière non seulement des ententes de régionalisation que nous avons signées avec des villes et d'autres régions... et que notamment j'étais inspirée par... Je ne sais pas si vous avez pu entendre le témoignage de la mairesse de Rawdon et des services qu'ils ont pu mettre en place pour assurer une bonne intégration des immigrants sur leur territoire?

Nous sommes, comme ministère... Vous le savez, on a travaillé fort avec cette région-là, avec d'autres aussi, on travaille fort avec vous aussi... Je sais très bien que vous avez soumis des projets, qui sont à l'étude avec nous, qu'on pourra effectuer, mais, compte tenu du fait qu'on a cette opportunité de discuter de la question, c'est vrai qu'on veut s'assurer, puis vous l'avez exprimé à travers le fait, l'importance d'augmenter... j'ai senti que vous voulez vous assurer que les gens soient bien intégrés dans votre région. Mais, pour ce faire, il faut s'assurer qu'on a des bonnes structures d'accueil ou des services d'accueil en place chez vous qui vont faire en sorte à ce que des gens puissent y être, mais je veux vous entendre sur comment vous voyez les besoins. Compte tenu que vous êtes là, vous avez raison de le dire, vous êtes vraiment, les gens qui sont en région, dans la région en question, sont les mieux placés pour savoir les besoins que vous avez et la meilleure façon d'intégrer les gens.

Quelles sont ces structures d'accueil? C'est lourd comme termes, mais les services que vous allez ou que vous souhaitez donner à des gens lorsqu'ils arriveront chez vous.

M. Touré (Jean-Marie): Les structures d'accueil que nous comptons donner et que nous avons commencé à donner, c'est beaucoup au niveau de l'accueil, comment accueillir les nouveaux arrivants, les intégrer et les mêler dans la population locale. Il est sûr que le nerf de la guerre, comme on le dit tout le temps, c'est l'emploi, des emplois au niveau de la Rive-Sud, particulièrement à Lévis. Lévis est en plein boom économique. On a parlé de Rabaska, on a parlé de la Davie, de l'Innoparc, etc. Malheureusement, nous n'avons pas encore cette main-d'oeuvre là. Lévis n'est pas connue. D'accord? Beaucoup d'individus ont, comme je pourrais dire, le syndrome du pont. Traverser de l'autre bord pour aller au niveau de Lévis, étant donné que Lévis n'est pas trop connue, les gens n'y vont pas. C'est un peu Montréal-Longueuil. D'accord?

Mme James: Et puis je suis députée de Montréal, merci. Là, je comprends.

M. Touré (Jean-Marie): Voilà. C'est un peu le phénomène que nous avons à Lévis. Donc, il y a des efforts à faire, il est évident, de la part de nous autres qui sommes à Lévis, de faire connaître notre ville, en quelque part. D'accord? Chose que nous faisons.

Il y a aussi le choix au niveau des immigrants. C'est vrai que dire: On doit choisir nos immigrants, ce n'est pas «politically correct». D'accord? On doit faire connaître ce que nous avons à Lévis. Nous avons un cadre de vie qui est excellent, énormément d'emplois. Donc, on travaille beaucoup à l'intégration, à la sensibilisation, et c'est là que ça devient important, la sensibilisation, au niveau de la population locale, O.K., de l'apport de l'immigration. Et je pense que nous devons travailler énormément à ce niveau-là, et c'est ce que nous faisons, des campagnes de sensibilisation dans les entreprises. Nous nous servons énormément des regroupements d'entrepreneurs pour aller les sensibiliser. Et, par rapport à ça, ils deviennent... parce que, quand on ne connaît pas l'étranger, on a tout le temps des réticences. Mais, quand on commence à les apprivoiser... c'est ma théorie, ma philosophie que je redis tout le temps: Connaître, apprivoiser et gérer la différence. Et c'est par ça que nous travaillons beaucoup au niveau de Lévis, et tranquillement nous sommes arrivés à en intégrer de plus en plus.

Il y a la sensibilisation aussi au niveau des immigrants qui sont à Montréal eux-mêmes, pour leur faire connaître la région, non pas pour venir avoir, comme on dit communément, pour avoir une job pour se faire une expérience de travail et repartir, mais beaucoup plus pour y rester. Donc, la main-d'oeuvre que, là, présentement nous avons besoin, nous n'avons pas de maîtrisards, docteurs, et puis tout ça, c'est de la main-d'oeuvre, des ouvriers, des techniciens. C'est de ça que nous avons besoin en région. Mais ces gens-là, il faut les amener, les intégrer, mais ça nous prend aussi des moyens financiers.

Mme James: Je vous entends très clairement. Je veux vous faire part, je vous dirais, d'un témoignage, mais c'est personnes dans la région... dans votre région, à l'occasion d'une tournée que j'ai faite précédemment, qui m'ont parlé de cette question. Parce que j'ai toujours mis l'emphase, comme vous l'avez fait, sur la question de dire: Lorsqu'un immigrant choisit le Québec, déjà dépaysé de son pays d'origine, fait le choix de venir, c'est clair qu'il veut s'établir dans une région ou dans une ville, il veut être capable de travailler, de faire vivre sa famille. Alors, il y a des... quand même des obligations puis des responsabilités qui sont pressantes, comme trouver une éducation, et tout ça, et, s'il a un emploi, bon, c'est la porte d'entrée. Il y a des gens qui m'ont parlé des expériences qu'ils ont eues en région, où de façon très honnête ils ont pu décrocher, comme on dit, un emploi. Ils ont pu prendre la famille et déménager, réussir l'intégration au niveau de l'emploi, mais ils ont trouvé l'expérience pour eux si isolante et désagréable qu'ils ont quitté pour Montréal, où ils se sont retrouvés dans un milieu qui était à l'aise, où ils ont retrouvé des gens peut-être de leur même communauté, ou dans une situation qui était peut-être, au niveau financier, peu avantageuse pour eux, mais ils se sont retrouvés plus confortables.

Tout ça pour vous dire qu'on voit que la question de l'emploi est primordiale, mais il faut s'assurer que la société d'accueil ou la région soit, je vais vous dire, au premier plan, les leaders, comme à Rawdon, en étant un modèle extraordinaire dans ce mariage-là. Et vous, face à ça, parce que je vous entends sur la question d'emploi, au niveau... Je reviens sur la question de services d'accueil. Je sais qu'il y a certaines régions qui font, puis je trouve ça extraordinaire, un parrainage entre une société québécoise et la nouvelle famille pour leur montrer, leur présenter les gens de la région, de la municipalité, comment est-ce que ça fonctionne, les services, et tout ça. Est-ce que vous êtes prêts? Est-ce que vous avez pensé à ces genres de services là que vous pourrez offrir, dans l'éventualité qu'on puisse signer une entente?

M. Touré (Jean-Marie): Les services auxquels nous avons pensé... Par exemple, si nous prenons rien qu'au niveau de la ville, de la mairie, de la municipalité, de la ville, nous créons un service de jumelage, d'accord?, entre les habitants de la ville et les nouveaux arrivants. Nous créons aussi un jumelage entre les jeunes, des petits concours, des matchs entre... des matchs de soccer entre les jeunes, d'accord? Nous créons des activités. Si nous allons, par exemple, si nous regardons au niveau de l'Université du Québec, où, la semaine interculturelle, on en fait des activités, qui s'en vient. L'histoire du mois des Noirs, on en fait, des activités. Tout ça pour faire connaître. Et ce qui est agréable, c'est que la majorité des participants sont des Québécois de souche. Donc, on essaie d'amener non pas un développement ou une prise de connaissance de chacun dans son coin, mais on essaie d'apporter une fusion entre les nouveaux arrivants et la population locale.

M. Quimper (Éric): Juste pour rajouter un petit truc. C'est qu'on focusse beaucoup sur la question de l'emploi, en région, et c'est très important, mais il ne faut pas oublier que l'emploi, c'est un facteur dans un projet de vie. Il faut essayer de focusser sur l'emploi, mais en n'oubliant pas le reste, et c'est souvent le reste qui peut faire la différence dans la décision de rester, de s'établir. Parce que le problème en région, c'est la rétention. Donc, c'est important de toujours prendre en compte que, quand une personne immigrante, une famille vient s'établir en région, que c'est un projet de vie qu'il faut construire avec eux en tenant compte bien sûr de la question de l'emploi, mais jamais oublier que c'est un projet de vie.

Le Président (M. Simard): Merci. J'invite Mme la députée de Charlesbourg à poser la prochaine question.

n(17 h 40)n

Mme Morissette: Merci beaucoup, M. le Président. Comme on doit couper sur le temps, je vais avoir deux questions pour vous. Je pense que la deuxième va beaucoup vous amuser, mais la première, M. Touré en a parlé un peu: le syndrome du pont entre Québec et Lévis. Je suis de la région de Québec, toute ma famille est à Lévis, alors, moi, je n'ai pas le problème de traverser régulièrement. Mais je voudrais vous entendre sur... pas nécessairement des critiques, mais ça peut être constructif, entre le rôle que la capitale nationale prend au niveau de la régionalisation de l'immigration. Est-ce que la capitale éclipse un peu Lévis ou au contraire ne fait pas suffisamment d'efforts, que ces efforts-là pourraient rayonner, à ce moment-là, sur Chaudière-Appalaches? C'est un peu cette relation-là. Parce qu'on a entendu, ce matin, des gens des Basses-Laurentides qui nous parlaient de la difficulté qu'ils ont d'être si près de Montréal et de faire partie de la région métropolitaine, ça fait que je voulais avoir un peu la... voir quel était le son de cloche de votre côté, de l'autre bord de la 20.

M. Touré (Jean-Marie): O.K. Pour la capitale nationale, c'est sûr que tous les efforts sont mis sur la capitale nationale, parce que l'important, on parle de plus en plus, il faut retenir les immigrants au niveau de la capitale nationale, d'accord? On pense qu'au niveau de Québec ? je parle de la ville, la capitale nationale ? tout est beau, tout est fin, tout est... Évidemment, ça éclipse la région. Or, ce qu'il faut faire savoir aux gens, la problématique de la rétention des immigrants, au niveau de la capitale nationale, la problématique est différente qu'au niveau de la Rive-Sud. Les emplois, il faut le dire, ils ne sont pas au niveau de la... du moins, «ils ne sont pas», j'exagère; les emplois, il y en a au niveau de la capitale nationale, mais ceux qui sont au niveau de la Rive-Sud ne sont pas du même ordre. Il y a énormément d'emplois au niveau de la Rive-Sud qui n'ont rien de commun avec les emplois qu'on retrouve ici, au niveau de la Rive-Nord. Et toutes les démarches qui sont faites au niveau de l'immigration, la Rive-Nord, c'est-à-dire Québec, elle rayonne trop, au point de nous étouffer, O.K.? Il y a des gens, quand on leur parle, bon, bien, de la Rive-Sud, Lévis, ils ne savent pas c'est où. Pour eux, c'est Québec, c'est Québec. Mais, une fois qu'ils sont là, ils commencent à découvrir Québec. Quand on regarde, le matin, quand on va travailler à Lévis, le nombre de personnes qui quittent Québec pour aller travailler au niveau de Lévis, c'est effrayant. Il y en a énormément, O.K., et il y a de plus en plus des membres des communautés culturelles qui habitent Québec et qui vont travailler au niveau de Lévis.

Donc, oui, la capitale nationale nous étouffe un peu, et il est de notre ressort à nous, au niveau de la Rive-Sud, de parler beaucoup plus de nous et de rayonner beaucoup plus.

Mme Morissette: Parfait, merci. Je vais en venir à ma question qui va peut-être vous amuser. On verra. J'aimerais avoir votre opinion, si vous en avez une, sur l'effet que la relocalisation du ministère de l'Immigration à Québec pourrait avoir sur la régionalisation de l'immigration.

M. Touré (Jean-Marie): Là, en disant: Je pense que ça pourrait avoir... En tout cas, pour nous, si je suis un peu égoïste, là, ou beaucoup, très égoïste, ça aurait un effet positif, je pense, pour nous.

Une voix: ...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Touré (Jean-Marie): Je ne vais pas charrier jusque-là, mais on va la mettre à la tête des ponts, comme ça, tout le monde pourra en bénéficier. Ça pourrait être très intéressant, parce que nous, ce qu'on constate en tout cas... Bon. Moi, je parle de mon expérience, ça fait un bon nombre d'années que je suis à Québec, et dans le temps on n'avait même pas de direction régionale, quand on était à Québec. On a eu cette petite progression là; avec la direction régionale à Québec, ça a amené un peu de changement, mais il reste encore des choses à faire, parce qu'on pourrait en avoir beaucoup plus. Et c'est sûr que, si le ministère de l'Immigration était dans la région de la Capitale-Nationale, ça allait changer les choses, et toute la région en aurait bénéficié; et, quand je parle de toute la région, je parle de la région de la grande capitale nationale, y compris Charlevoix, la Rive-Sud et aller jusqu'à la Beauce, même. Donc, ça pourrait être quelque chose de... En tout cas, je ne dirais pas non.

Mme Morissette: Merci. On va laisser le temps qui reste. Merci beaucoup.

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup, Mme la députée de Charlesbourg, pour votre collaboration. J'invite maintenant le député de Sainte-Marie à poser les prochaines questions.

M. Lemay: Merci beaucoup, M. le Président. Ceci dit en tout respect, moi, la question, je ne l'avais trouvée nécessairement très drôle, là. Vous auriez...

Alors, messieurs, c'est un plaisir, c'est un plaisir de vous entendre et de lire votre document. On entend depuis plusieurs années parler de régionalisation, et tout et tout. On regarde les chiffres, malheureusement c'est très lent, effectivement. Vous auriez une chose... Et mes questions, là, ce n'est pas pour vous piéger ou pour que vous critiquiez le travail des uns et des autres, mais je pense qu'on cherche tous ici à améliorer les services, à améliorer les choses, et, considérant l'importance stratégique de l'immigration, je pense qu'on a tous intérêt à faire avancer...

Vous auriez une chose à changer, considérant le contexte qui est le vôtre et les enjeux, les difficultés, les embûches que vous vivez, vous auriez une chose à changer dans ce que vous nous avez décrit comme difficultés, et tout, qu'est-ce que ce serait? Je sais que c'est une question qui n'est pas facile, mais qu'est-ce que ce serait? Parce qu'à entendre... Je pense que c'est illusoire de penser, là, qu'on va apporter des changements révolutionnaires au ministère ou au gouvernement, peu importe qui est au gouvernement, là, en dedans de trois semaines, puis que, hein, ça va être réglé et... Sans ça, ce serait fait. Alors...

M. Quimper (Éric): Je pourrais peut-être commencer. Simplement de dire: Quelque chose qui doit changer, c'est le financement octroyé aux organismes d'accueil et d'intégration. C'est eux qui ont la charge d'accueillir et d'intégrer et c'est par eux que passe une bonne partie de la réussite du projet d'une personne immigrante de s'établir en région, et encore plus en milieu rural et semi-rural, où, bon, le contexte qu'on connaît des milieux ruraux, et tout ça... Je crois qu'avec une base solide locale, une structure d'accueil solide et locale bien financée, qui a les moyens de ses ambitions, c'est possible de faire avancer le dossier de la régionalisation considérablement.

M. Touré (Jean-Marie): Et aussi, ce qu'il faudrait changer... en tout cas, si j'avais une baguette magique, là, c'est que nous avons, je pense, c'est 14, 15 régions ? je ne me souviens plus exactement du nombre de régions, 17 régions ? chaque région a plus ou moins sa problématique au niveau de sa population, de ses emplois, de ses entreprises, etc. Nos jeunes quittent les régions pour partir. S'ils quittent les régions, c'est qu'ils n'y trouvent pas leur compte. Un, on a les CLD, les SADC, etc., qui sont en région. Pourquoi ne pas regrouper ces intervenants-là qui, eux, font des planifications pour le développement de leurs régions, O.K., qu'ils identifient c'est quoi, les besoins qu'ils ont par rapport à tout ça, donner la parole aux jeunes, c'est quoi qu'ils veulent, donner la parole aux immigrants, c'est quoi qu'ils veulent, qu'est-ce qui peut les amener au niveau de la région.

Si chaque région avait comme une espèce de plan de match et qu'il y ait une instance nationale, là, je ne sais pas... Par exemple, moi, je suis de la région Chaudière-Appalaches, je m'en vais au niveau du recrutement pour avoir des immigrants à l'international, O.K.? Je suis mieux, moi, de ma région, aller voir les immigrants... enfin, selon les besoins que j'ai, pouvoir sélectionner mes propres immigrants plutôt que de me baser sur un bassin où il y a des gens qui sont là et aller piger dans ce bassin-là. Excusez-moi du terme, là, comme je le dis, là, mais c'est un peu ça qui se fait en ce moment, d'accord? On a, je ne sais pas, moi, peut-être 40 000, 50 000 immigrants qui arrivent à Montréal, on se dit: Bon, O.K., ils sont là, d'accord, là, maintenant, il faut qu'on les amène en région. Est-ce que ces gens-là, selon leur profil, correspondent aux besoins des régions? Je ne le sais pas, O.K.? Mais, par contre, si j'avais le pouvoir de sélectionner en fonction de mes besoins, je pense que ça pourrait être un peu plus gagnant de ne pas le faire à l'aveuglette, là, mais, bon.

M. Lemay: Ou peut-être que c'est déjà fait, M. le Président, ou que vous soyez consultés au préalable. Est-ce que ce n'est pas le cas actuellement?

M. Touré (Jean-Marie): Là, actuellement, non, on n'est pas consultés. On n'est pas consultés. Je ne pense pas qu'il y ait des organismes en région pour lesquels on les consulte et pour sortir des critères d'immigration. Il y a la nouvelle grille qui est là, et on espère qu'avec la nouvelle grille ça va être positif, mais les intervenants socioéconomiques qui sont en région sont les premiers intervenants qu'on doit consulter.

M. Quimper (Éric): Et pour peut-être compléter ce que Jean-Marie dit, les nouveaux critères de sélection, c'est positif comme démarche, mais il ne faut pas oublier que la démarche de régionalisation d'immigration, présentement, c'est une démarche qui est principalement d'aller chercher des immigrants à Montréal pour aller les établir en région. Oui, la grille de sélection, c'est une étape positive dans tout ce processus-là, mais à court terme les immigrants sont à Montréal, et les critères n'ont pas été adaptés. Donc, il ne faut jamais oublier... oui, c'est une belle étape, mais il faut continuer à travailler sur la reconnaissance des acquis, des compétences, sur tout ce qui est adaptation de la main-d'oeuvre, l'ouverture des ordres professionnels. Il ne faut pas lâcher là-dessus, parce que ce n'est pas parce qu'on a adapté la grille de sélection que, demain matin, les choses vont changer en région, là, au niveau de la régionalisation de l'immigration.

n(17 h 50)n

M. Lemay: Donc, vous voyez, M. le Président, c'est comme si, dans le processus d'immigration, il y avait deux étapes, il y avait l'étape Montréal, et ensuite, si possible, il y a l'étape régionale, et là on voit les difficultés.

J'ai une dernière question, très rapide. Et je pense qu'il faut avoir cette discussion-là de façon constructive, au-delà de l'endroit où est le ministère, et tout ça, là, donc... Ce qu'on entend beaucoup également, c'est que le ministère est trop montréaliste, hein. Je suis de Montréal et j'ai ça comme défaut, entre autres choses. Mais est-ce que ça a des conséquences? Je pense qu'on peut en parler ouvertement, sans que ce soit de dire: Montréal ci, Montréal ça, là, mais je pense qu'on peut en parler de façon également positive, là. Et ce que je comprends de ce que vous avez dit tout à l'heure, effectivement les gens s'en vont à Montréal. Ils sont aiguillonnés à Montréal. Donc, vous, vous partez de loin, là. Pas géographiquement, évidemment, c'est tout près. N'est-ce pas? Mais vous devez aller convaincre quelqu'un de. Est-ce que je comprends bien là que c'est une des difficultés majeures que vous avez à l'heure actuelle? Donc, c'est trop montréaliste?

M. Touré (Jean-Marie): C'est trop montréaliste. C'est sûr que les immigrants, ils débarquent à Montréal. L'aéroport international, il est à Montréal. Quand on leur parle de Montréal, ils sont là. D'accord? Donc, ils débarquent à Montréal. Le premier contact qu'ils ont avec le Québec ou le Canada, c'est Montréal. D'accord? Bon. Maintenant, comment prendre les gens et les amener en région?

M. Lemay: Souvent, il y a de leur communauté qui sont là aussi.

M. Touré (Jean-Marie): Exact.

M. Lemay: La sécurité, c'est important aussi, là.

M. Touré (Jean-Marie): Exact. Mais les meilleurs cas d'intégration que personnellement, dans ma carrière ici, j'ai connus, c'est les immigrants qui étaient en région éloignée. Allez en Gaspésie, il y a des immigrants qui ont choisi eux-mêmes d'aller en Gaspésie. Pour rien au monde ils n'iraient vivre à Montréal. Il y en a d'autres qui sont allés à Matane. On en voit à Trois-Pistoles, on en voit partout. D'accord? Bon. Montréal, c'est sûr, la majorité, ils sont là. S'il y avait un moyen, une fois que les immigrants ont été sélectionnés, de les envoyer directement en région, peut-être que le taux de rétention serait beaucoup plus élevé. Je ne dis pas que tout le monde... Et l'objectif n'est pas de dire: Bon, bien, on prend 100 immigrants à Montréal, on les envoie en région, il faut que ces 100 là restent là. Je ne dis pas ça. Mais, si on a un taux de rétention un peu plus élevé en région, ce serait intéressant.

Mais, pour que l'immigrant puisse rester, par exemple, en région, la première des choses qu'il y a, c'est son emploi et son intégration sociale. Une fois que là il l'a, l'immigrant va rester en région. Que le ministère soit au niveau de Montréal... Bon, il est à Montréal en ce moment, mais qu'il décentralise au moins plus de services en région. O.K.? Par exemple, si on prend le ministère, la direction régionale de Québec, elle couvre Québec, le Saguenay, tout l'Est du Québec. Est-ce qu'une direction peut faire tout ça et se préoccuper de toutes les problématiques qui existent dans chaque région? C'est difficile. D'accord? Il faut mettre, je pense, d'autre chose, parce que, quand on voit, dans certaines régions, dans certaines MRC, que ceux qui s'occupent de l'accueil et de l'intégration, ce sont des regroupements comme les Chevaliers de Colomb ou les Filles d'Isabelle, il y a des questions à se poser. Je n'ai rien contre les Chevaliers de Colomb, là, O.K.? Mais il y a des questions à se poser: En quoi ils connaissent ou ils ont une expertise au niveau de l'immigration?

M. Lemay: Merci.

Le Président (M. Simard): Merci beaucoup. Peut-être une dernière question, parce qu'il ne reste que quelques secondes.

Mme James: Non, c'était un commentaire pour mon collègue. J'ai compris qu'il n'y a pas voulu le déplacement, le déménagement du ministère compte tenu que c'est dans son comté. Je respecte qu'il veut préserver l'intégrité d'avoir le ministère chez lui. Il faudrait dire que ce n'est pas un préjudice.

Le Président (M. Simard): C'est dans Saint-Henri... c'est Westmount?Saint-Henri.

Mme James: Ah! c'est à...

M. Lemay: C'est de l'autre côté de la rue McGill.

Mme James: Oui, je sais bien. C'est dans votre comté?

Une voix: C'est à la limite.

Mme James: À la limite? O.K.

Le Président (M. Simard): Jacques Chagnon ne serait pas très heureux de vous entendre.

M. Lemay: Mais ça participe à la beauté de McGill, là, à la rue McGill.

Mme James: Espérons qu'il n'écoute pas nos débats.

M. Lemay: Il manquerait quelque chose.

Le Président (M. Simard): On va en parler à Jacques Chagnon. Je ne suis pas sûr qu'il soit enthousiaste. Merci infiniment. C'est un débat qui n'est pas terminé, vous l'avez bien compris. Vous avez soulevé votre point de vue, votre intérêt à partir de votre point de vue. Je suis sûr que ça va continuer d'être au centre de nos débats au cours des prochaines semaines et probablement pour plusieurs années au Québec. Vous vouliez ajouter quelque chose, M. le député?

M. Lemay: M. le Président, si vous me permettez. Dans tout le débat aujourd'hui et qui aura lieu dans les prochains jours, et je m'excuse là de faire diversion un peu de... On va vous saluer convenablement. Il a été dit ce matin que le Conseil du trésor, en 2005, avait fait un rapport sur les dépenses du ministère de l'Immigration face à la subvention fédérale. Il a été dit ça ce matin. Pas en commission, mais à l'extérieur. Et à ma connaissance, c'est la première fois qu'on parle de ça. Donc, je vous demanderais, si ce n'était pas possible, que le ministère dépose cette analyse du Conseil du trésor en ce qui concerne comment est dépensée la subvention fédérale dans le cadre du ministère de l'Immigration. Est-ce que c'est le moment, est-ce que c'est la bonne commission pour ce faire? C'est pour ça que c'est une question d'information.

Le Président (M. Simard): La ministre vous entend, c'est tout ce que je peux vous dire. Le président n'a pas beaucoup d'influence là-dedans. La ministre peut cependant évidemment faire les démarches nécessaires.

Mme James: Vous demandez à ce que le ministère de l'Immigration dépose des documents qui sont entre les mains de la présidente du Conseil du trésor. C'est la présidente du Conseil du trésor qui sera en mesure de fournir ces informations. Merci.

Le Président (M. Simard): Merci infiniment encore et merci de chaque côté pour votre collaboration tout au long de la journée. Merci beaucoup, et je suspends nos travaux...

Une voix: ...

Le Président (M. Simard): ...j'ajourne, pardon, jusqu'à demain, 9 h 30.

(Fin de la séance à 17 h 56)


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