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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le vendredi 12 novembre 1999 - Vol. 36 N° 15

Interpellation : La situation du milieu culturel au Québec


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Table des matières

Journal des débats


(Dix heures cinq minutes)

Le Président (M. Cusano): Je déclare ouverte la séance de la commission de la culture. Le mandat de la commission pour cette séance est de procéder à l'interpellation adressée à Mme la ministre de la Culture par la députée de Sauvé sur le sujet suivant: La situation du milieu culturel au Québec.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Boulianne (Frontenac) est remplacé par M. Simard (Montmorency).

Le Président (M. Cusano): Merci. Je me permets, à ce moment-ci, de vous rappeler brièvement le déroulement d'une séance d'interpellation. Dans un premier temps, l'interpellante, Mme la députée de Sauvé, aura un temps de parole de 10 minutes, suivie de Mme la ministre pour également 10 minutes. Par la suite, des périodes de cinq minutes seront allouées selon la séquence suivante: un député de l'opposition officielle, Mme la ministre, un député du groupe ministériel. Vingt minutes avant midi, j'accorderai 10 minutes de conclusions à Mme la ministre et un temps de réplique égal à Mme la députée de Sauvé. De plus, si un intervenant n'utilise pas entièrement le temps qui lui est alloué, ceci ne réduit pas pour autant la durée de l'interpellation.

Puisque nous avons commencé cette séance à 10 h 6 min, à ce moment-ci, puisque le débat est d'une durée totale de deux heures, je demande qu'il y ait consentement pour qu'on termine à 12 h 6 min. Ça nous permettra de vous laisser parler, et je n'aurai pas à vous interrompre, à ce moment-là, Mme la ministre. Alors, on est prêt à commencer. Mme la députée de Sauvé.


Exposé du sujet


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je crois que le Parti libéral du Québec, le parti d'opposition, se devait de demander une interpellation sur la situation du milieu culturel au Québec, puisque nous sommes, je pense qu'il faut se le dire, en pleine crise. Il y a plusieurs crises qui sévissent actuellement dans la société québécoise. Le gouvernement les gère. Quelquefois, il les crée, on le sait, dans le milieu de la santé, dans le milieu de l'éducation. Et, dans le milieu culturel, on en a peut-être un peu moins parlé, mais il y a une crise importante qui sévit actuellement, et elle est en partie créée par l'action et plus souvent par l'inaction de ce gouvernement.

Je prends à témoin, par exemple, la situation des organismes sans but lucratif, qu'on pourrait appeler les organismes culturels, qui sont très souvent la base vivante du milieu de la création au Québec. Je pense plus particulièrement, par exemple, aux compagnies de théâtre, aux compagnies de danse, aux ateliers d'artistes. Et je pense que les gens qui nous écoutent situent ce dont on parle. C'est donc le milieu vivant où se situent les créateurs québécois. Et ce secteur-là, en ce moment, vit une crise très importante à cause de l'effet cumulatif de situations créées, de crises créées par ce gouvernement.

Je pense, par exemple, à la crise d'Emploi-Québec. Déjà, le milieu culturel vivait certaines situations difficiles avec Emploi-Québec parce que la décentralisation vers un niveau très local, l'influence qu'ont maintenant les centres locaux de développement, les CLD, sur les orientations des centres locaux d'emploi, qui gèrent les différents programmes d'emploi, faisaient en sorte que le milieu culturel avait de la difficulté à faire de bonnes représentations. Il est difficile pour le milieu culturel, qui vit des moments assez difficiles mais qui est toujours en situation financière assez précaire, de prendre le temps d'aller faire des représentations auprès d'instances locales comme des CLD pour que le milieu de la culture ait vraiment sa part, à un niveau local, des différents budgets d'Emploi-Québec.

Donc, déjà, la situation était assez problématique pour le milieu culturel. Mais là la crise d'Emploi-Québec, les coupures importantes, l'inaction – parce qu'il y a eu, à un moment donné, une période complète d'arrêt des programmes d'Emploi-Québec – ont fait en sorte qu'il y a plusieurs organismes culturels qui ne bénéficient plus du tout de création de postes. Or, c'étaient des postes importants pour eux. C'était une forme de soutien. C'étaient souvent des postes reliés au marketing, à la vente des billets, à l'administration, par exemple, et donc ça avait une influence certaine sur la rentabilité de ces organismes culturels là. En ce moment, la situation n'est pas réglée, et ça a un impact majeur sur les organismes culturels.

(10 h 10)

Bien sûr, on ne peut pas non plus passer sous silence la crise dans les écoles. Depuis cet automne, nous sommes dans une situation où les enfants du Québec, les étudiants ne bénéficient plus d'activités culturelles. C'est un enjeu dans la négociation entre ce gouvernement et les différents syndicats d'enseignants. Non seulement, je pense, il faut déplorer le fait que des étudiants, des enfants – on peut dire une génération, là – ne bénéficient pas en ce moment d'une certaine introduction à la culture ou ne peuvent pas apprécier différentes activités culturelles et faire des sorties culturelles, mais il faut aussi réaliser l'impact financier que ça a pour plusieurs organismes culturels. Et plusieurs nous ont confié spontanément qu'ils ne savent absolument pas, à cause des effets conjugués de la crise à Emploi-Québec et de la crise dans les écoles du Québec, comment ils vont faire pour finir l'année. La survie d'organismes culturels et même d'institutions culturelles est compromise par différentes crises créées par ce gouvernement.

Il faut aussi bien sûr parler du conflit de travail à la Place des Arts, qui a aussi créé énormément d'incertitude, d'incertitude financière dans des institutions culturelles importantes. On pense notamment aux Grands Ballets canadiens, qui ont vraiment lancé un cri d'alarme quant à leur survie, compte tenu de la situation qui sévissait, qui sévit toujours à la Place des Arts.

Parce qu'on sait qu'on a eu droit à une annonce hier disant que la Place des Arts n'offrira plus des services de techniciens. Mais je crois que ce qu'il faut comprendre dans l'annonce d'hier, c'est qu'on n'est plus juste devant un conflit de travail, on s'en va vers une saga juridique qui peut durer très, très longtemps. Et est-ce que les compagnies résidentes et les différentes institutions culturelles qui utilisent la Place des Arts vont vraiment réussir à passer au travers? C'est une question qui, pour ma part, est toujours là. Ça, c'était pour le milieu qu'on peut qualifier sans but lucratif, les organismes culturels.

Il y a un autre secteur qu'on qualifie plus des industries culturelles, l'autre secteur: même chose, une crise majeure. On sait qu'il y a eu des allégations dans les médias concernant notamment l'industrie des producteurs de films et de télévision, l'utilisation faite des argents publics dans ce secteur-là, les différentes subventions ou crédits d'impôt accordés. Et il n'y a eu aucun signaux envoyés par ce gouvernement qu'on allait vraiment faire au plus vite la lumière sur cette situation.

Cette crise dans le milieu des producteurs de films et de télévision, on pourra en parler plus en détail. Mais c'est une crise qui déteint sur l'ensemble de l'industrie culturelle, puisque le milieu du livre, le milieu du spectacle, qui attendaient des actions de ce gouvernement sous la forme, par exemple, de crédits d'impôt, qu'on puisse discuter du soutien donné à ces différentes industries... Bien, la crise dans le milieu de la télévision et du film déteint sur les autres industries culturelles, puisqu'on sait que, tant que la lumière ne sera pas faite sur la situation dans le film et la télévision, pour ce gouvernement, bien sûr, il est très difficile de parler de crédits d'impôt dans d'autres secteurs.

Et ça, ça se passe à un moment où, en plus, il est vraiment très important pour la culture au Québec de défendre la diversité des cultures lors des négociations de l'Organisation mondiale du commerce. Notre position est extrêmement fragilisée. Aller défendre la culture et le fait qu'on puisse donner des subventions, entre autres, aux industries culturelles ou – enfin, des subventions – différents supports financiers, ça commence à être très difficile de défendre ça au moment où il se vit une crise dans ce secteur-là au Québec.

Je pense que ce qui participe aussi à la crise, en ce moment, c'est vraiment aussi le... je pourrais qualifier ça honnêtement un peu de l'absence de la ministre, en ce moment, sur la scène publique au Québec, dans cette situation de crise, son absence et son silence. Il faut dire qu'il y a eu de grandes attentes quand la ministre de la Culture a été nommée. Ça a suscité beaucoup d'attentes. C'était quelqu'un qui provenait du milieu culturel, et on s'attendait à une grande sensibilité de sa part.

Puis elle avait aussi des grandes bottes à chausser, puisqu'on sait que les ministres de la Culture précédentes ont toutes été des ministres extrêmement fortes. Je pense à Mme Lise Bacon, qui était aussi vice-première ministre, à Mme Liza Frulla, qui a vraiment structuré le milieu de la culture en mettant sur pied le Conseil des arts et des lettres du Québec et la Société de développement des entreprises culturelles. Et je pense aussi à Mme Louise Beaudoin, qui a mené plusieurs chantiers de front lorsqu'elle était ministre de la Culture. Donc, les attentes sont très élevées.

Mais, en ce moment, il y a une réalité, c'est le fait qu'on ne parle pas de culture, entre autres, à l'Assemblée nationale. Je vous rappelle qu'à la session précédente il y a eu un seul projet de loi. Ce projet de loi concernait la Place des arts et le Grand Théâtre de Québec. Et c'est un projet de loi que la ministre n'a pas réussi à faire passer, à la fin, lorsqu'on est dans l'entonnoir puis qu'il faut faire passer les projets de loi à la fin de la session parlementaire. Bien, elle n'a pas gagné, semble-t-il, vis-à-vis de son leader, et ce projet de loi n'a pas été adopté. Tout de suite après, grève à la Place des arts. On comprend que le projet de loi n'a jamais été appelé parce que ça nous aurait permis d'échanger avec la ministre sur la situation à la Place des arts. Donc, le projet de loi est toujours en attente. Dans cette session parlementaire, aucun projet de loi en culture et en communications.

La commission de la culture, si ce n'était de l'interpellation de ce matin, ne siège pas de tout l'automne parce que ce gouvernement a décidé d'annuler les audiences publiques, le mandat de surveillance sur la SODEC et le CALQ, le Conseil des arts et des lettres du Québec, qui devaient avoir lieu durant le mois d'octobre. Il les a reportées au 1er février, je pense, vraiment au mépris des organismes culturels qui, dans des situations difficiles, avaient pris le temps et l'argent pour préparer des mémoires qu'ils avaient déposés. Ces mémoires sont donc déposés depuis le début du mois de septembre. Or, le gouvernement a décidé de reporter ça au 1er février, dans un contexte, pourtant, de crise importante.

On s'est dit: Bien, peut-être que la ministre fait des choses en dehors; ça se pourrait bien, s'il ne se passe rien à l'Assemblée nationale. On est allé sur le site Internet. Bien, pour le mois de novembre, en cours, aucun discours; pour le mois d'octobre, aucun discours également de la part de la ministre de la Culture. Il ne semble pas se passer grand-chose.

Le dossier important de la diversité culturelle, c'est un dossier, en ce moment, où tous les signaux nous indiquent que c'est un dossier qui relève toujours de la ministre des Relations internationales, la précédente ministre de la Culture, puisque le Comité québécois de la diversité culturelle est toujours sous la responsabilité de la ministre des Relations internationales. Il ne se passe rien dans les municipalités parce qu'il y a un moratoire sur la construction d'équipements culturels. Toujours pas de président nommé à la Société de développement des entreprises culturelles. Beaucoup d'interrogations sur la Grande Bibliothèque du Québec.

Vous comprendrez, M. le Président, qu'il nous fallait cette interpellation parce qu'on a plusieurs questions à poser. Et je pense que la ministre pourra remercier l'opposition officielle d'enfin amener le sujet de la culture à l'Assemblée nationale. Merci.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Sauvé. Mme la ministre, vous avez 10 minutes.


Réponse de la ministre


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs, je suis très heureuse aujourd'hui de – l'expression consacrée – subir cette interpellation. Un tel exercice me permettra de clarifier des choses – je pense que ça va être très important, après ce que je viens d'entendre – de rappeler les grandes orientations que je crois nécessaires de faire prendre au ministère de la Culture et des Communications du Québec, mon but n'étant rien de moins que de donner à ce ministère une nouvelle impulsion et de le mener plus loin que jamais. Pour moi, je l'ai souvent dit, c'est un cadeau d'avoir été nommée à ce poste de ministre au coeur de l'identité québécoise.

J'aimerais d'abord vous rappeler les préoccupations qui m'animent comme ministre et ensuite je reviendrai particulièrement sur les points... Au cours des interventions qui suivront, M. le Président, je reviendrai de façon plus pointue sur ce qu'a allégué la députée de l'opposition, qui demande à la ministre de défendre la culture, alors que, toute la semaine, j'ai vu ridiculiser les investissements en culture par les députés libéraux, qu'elle est membre de la commission de la culture avec droit de parole, alors qu'elle harangue la ministre pour qu'elle intervienne dans la commission de la culture, qu'elle refuse la motion sur la diversité culturelle présentée au mois de juin, alors qu'elle nous propose une motion d'appui à la coalition canadienne, tout à coup. Et j'attends toujours son avis sur le boycott de la CUQ.

Ce que je comprends aussi ce matin, à voir l'Assemblée, c'est que la culture n'intéresse pas beaucoup les libéraux, sauf la députée, qui fait bien son travail, puisque la semaine dernière il y avait interpellation sur les travailleurs en Outaouais... M. le Président, bien sûr, vous êtes présent – pardon – mais vous êtes ici à titre de président et vice-président. Mais je vous sais attaché à la culture. Mais, à la dernière interpellation sur les travailleurs en Outaouais, il y avait cinq députés libéraux. Aujourd'hui, la culture n'attire que la critique officielle.

Tout d'abord, les priorités. Les jeunes, qui représentent une des grandes priorités gouvernementales, sont interpellés au premier chef par la culture et les communications. Je pense bien sûr à ceux et à celles, et ils sont nombreux, qui rêvent d'un métier dans un de ces domaines. Quand nous parlons, au ministère, d'intégration de la relève, de création d'emplois et de formation professionnelle, nous parlons d'abord de ces jeunes-là.

Mais il y a aussi tous les jeunes du Québec. Ils sont aujourd'hui moins nombreux, en proportion, que nous ne l'étions à leur âge. Leur regard sur la culture et la vie n'est pas forcément semblable au nôtre. Ils sont très tôt ouverts au monde, très vite en contact avec les cultures d'ailleurs. Ils maîtrisent mieux que leurs aînés, pour la plupart, les nouvelles technologies. Ils créent et inventent le multimédia, au point de faire du Québec un des centres les plus novateurs au monde dans ce domaine. Ils animent les médias communautaires, font vivre une culture souterraine moins officielle mais souvent déterminante pour l'avenir. Ils s'approprient une musique, un langage, des rythmes et des modes de diffusion.

J'ai la chance de diriger un ministère qui a pour mission de démocratiser la culture, de transmettre l'amour de la langue française et de la culture québécoise, de rendre le plus accessible possible une culture riche, ouverte et diversifiée. Cela signifie également que nous devons être à l'écoute de la population et nous en rapprocher, certainement. Et je veux que nous soyons en particulier à l'écoute des jeunes, d'autant plus que le gouvernement auquel j'appartiens leur manifeste une très grande ouverture.

(10 h 20)

Le Sommet du Québec et de la jeunesse débutera bientôt. Il y sera question d'équité entre les générations, d'éducation, d'emploi et d'intégration. Il y sera aussi question de mise en valeur de notre culture. Nous devrons réfléchir, comme le suggérait le premier ministre dans le discours inaugural, à une stratégie à la fois économique et culturelle qui permette au Québec d'être actif dans la mondialisation sans y perdre son âme et d'en user comme d'une façon de renforcer son originalité. Pour bien préparer le volet culturel de ce Sommet, un groupe de travail est actuellement à l'oeuvre au ministère.

Une autre de mes préoccupations est de m'assurer que la création ne soit jamais étrangère à nos actions dans le domaine culturel. La création est le fondement des activités artistiques et culturelles. Qu'il s'agisse des oeuvres et des produits des individus, des organismes artistiques ou des entreprises culturelles, la création est la base sur laquelle reposent la vie et la dynamique culturelles. Dans ce contexte, l'opposition que l'on évoque parfois entre la création et les entreprises culturelles est erronée, puisque le domaine de la création est celui là même qui donne un sens, la valeur ajoutée à l'ensemble des activités artistiques et culturelles.

Alors, s'il est une mission prioritaire pour le ministère de la Culture et des Communications, c'est bien de favoriser la création artistique sous toutes ses formes, sur le théâtre, la musique, les arts visuels, les métiers d'art, la littérature. Mais, encore, ajoutez à cette liste d'autres créneaux de la création, tels que le cinéma, le disque, la production audiovisuelle ou le multimédia. Et j'annoncerai au fil des interventions tout l'argent qui a été investi puis la reconnaissance que nous avons envers le poids économique de la culture.

Nous nous préoccupons aussi de muséologie et de patrimoine. Au Québec, le patrimoine, dans ses multiples manifestations, est d'abord et avant tout un facteur d'identité culturelle, un facteur de cohésion sociale, une référence symbolique à laquelle peuvent se rattacher tous les Québécois et les Québécoises, un ciment qui assure, en somme, la pérennité de notre communauté. Alors, cette année, nous investirons près de 60 000 000 $ dans les institutions muséales et plus de 48 000 000 $ dans le patrimoine québécois afin d'en accroître l'accessibilité, de le mettre en valeur et d'en favoriser l'appropriation par l'ensemble des citoyens. Nous entendons travailler à la mise en valeur d'un patrimoine et d'une histoire qui nous sont propres, riches des influences des peuples autochtones, des régimes français et anglais et, depuis le XXe siècle, du monde entier.

Je compte donc, au cours de la prochaine année, mener à terme le travail d'élaboration d'une nouvelle politique d'intervention pour les musées. Nous avons, en septembre, révélé les grandes orientations en la matière, qui seront soumises à la consultation pour une mise en oeuvre en l'an 2000. Voilà un des grands travaux de la ministre pour les prochaines années.

Aussi, j'ai mis sur pied le comité Arpin. Il travaille à la définition d'une politique du patrimoine. Une telle démarche vise aussi bien les quartiers et bâtiments anciens que l'architecture, l'aménagement rural ou urbain du territoire, le paysage, le design et l'art public. Il est en effet grand temps de se donner collectivement une éthique pour les interventions humaines qui façonnent notre quotidien. La politique n'existe pas encore, mais des gestes sont posés comme, par exemple, le classement de l'épave de l'Empress of Ireland, qui constitue le premier bien culturel subaquatique québécois.

Nous sortons de plusieurs années difficiles qui ont forcé le gouvernement à faire des choix déchirants. Étant donné l'état des finances publiques, état qui a été causé par les années de laxisme du gouvernement libéral, avions-nous le choix? Pour faire face à ce défi, le gouvernement a fixé à notre société des objectifs budgétaires ambitieux qui ont été atteints. Mais, malgré ce contexte, un choix essentiel partagé par tous s'imposait et s'impose toujours: valoriser la création, l'innovation et miser sur l'apport exceptionnel de la culture et des communications au développement économique et social du Québec et à son rayonnement à l'étranger.

Toutefois, ces dernières années, faut-il le remarquer, le budget de la Culture a atteint, comme on le souhaitait depuis tant d'années, 1 % des dépenses publiques et il y est toujours. Le soutien au milieu des arts et de la culture et des entreprises culturelles a non seulement été préservé, mais, dans plusieurs cas, il a aussi été enrichi, principalement dans le domaine de la lecture, du livre, des arts et des lettres, de la muséologie, du patrimoine, du cinéma, de la chanson – il y a eu des grandes politiques – des médias communautaires, du développement international, de la sensibilisation et de la formation des jeunes.

Depuis 1995, M. le Président, il y a eu pour un peu plus de 463 000 000 $ d'investissements additionnels en matière de culture et de communications. Je dis bien 460 000 000 $ d'investissements additionnels, en sus du budget régulier du ministère, ce qui comprend les crédits directs, les fonds d'investissement, les immobilisations et les mesures fiscales. Et, en plus, des sources nouvelles de financement proviennent désormais du budget d'autres ministères.

M. le Président, en passant, je tiens à dire que je considère le ministère de la Culture.com – comme je m'amuse à le dire, puisque, comprenant le nouveau monde des technologies et de l'information, je me suis fait au langage des jeunes – comme un ministère du partenariat, car c'est dans le partenariat que l'on crée, que l'on se cultive, que l'on diffuse. C'est pourquoi notre gouvernement a élargi les bases du financement de la culture et des communications en misant davantage sur la fiscalité, avec de nouveaux crédits d'impôt.

Depuis les dernières années, notre gouvernement a pris d'importantes décisions en matière d'immobilisations, dont 100 000 000 $ pour le patrimoine religieux. On a même instauré un nouveau volet, que j'ai créé cette année avec le nouveau budget, qui est vraiment le volet du recyclage des édifices religieux pour qu'ils fassent partie... que l'enveloppe de ce qu'ont été ces édifices religieux existe encore dans notre patrimoine visuel, dans nos quartiers.

Avant le moratoire, 48 000 000 $ ont été autorisés pour des projets d'équipements culturels. Cependant, malgré le moratoire – il faut le dire, et c'est là qu'on parle d'investissements sérieux en culture et d'y croire, d'y croire vraiment – malgré tous ces problèmes de déficit structurel qu'on a éliminés, en plus, afin d'assurer principalement des parachèvements, des mises aux normes et des travaux urgents, 29 000 000 $ ont été inscrits de façon exceptionnelle au plan d'accélération des investissements du gouvernement. Et le gouvernement a, entre autres, annoncé la construction de la Grande Bibliothèque du Québec. Télé-Québec, qui est allée rechercher l'attention des Québécois et des Québécoises, a su se réinventer. En soirée, cet automne, l'écoute a augmenté de 20 % comparativement à 1998. Sa part de marché en soirée s'élève donc à 3 %, en comparaison de 2,4 %. Voilà.

Alors donc, malgré un contexte extrêmement difficile, notre gouvernement a été constant, innovateur dans ses choix. Il a reconnu l'importance de la mission culturelle gouvernementale, qui contribue de façon essentielle à l'essor de notre identité collective et au développement de l'économie du Québec. Je saurai garder ce cap pour l'avenir.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Sauvé, vous avez un droit de parole de cinq minutes.


Argumentation


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. La ministre vient de nous faire état longuement des réalisations au cours des dernières années. L'interpellation d'aujourd'hui, c'est pour parler de ce qui se passe depuis les 12 derniers mois, depuis qu'elle est la ministre de la Culture. Je reprends ce que j'ai dit d'entrée de jeu. Selon moi et selon plusieurs intervenants du milieu, le milieu de la culture, tant les organismes que les industries, est en état de crise. Et on va développer un peu ce sujet-là.

Par exemple, je parlais, d'entrée de jeu, de la crise à Emploi-Québec, au cours des derniers mois. C'est une crise importante qui a secoué le milieu culturel, tellement que, par exemple, le Conseil québécois du théâtre, que la ministre connaît très bien, a mené une enquête au cours des derniers mois sur l'impact de la crise à Emploi-Québec sur le milieu du théâtre. Et ça a permis de savoir que, par exemple, cette année, Emploi-Québec, dans la présente année financière jusqu'au moment de l'étude du Conseil québécois du théâtre, en termes de subventions salariales, donc de soutien pour la création de postes dans le milieu du théâtre, il y avait eu seulement et uniquement cinq postes d'alloués pour toutes les compagnies théâtrales au Québec. On est passé de 33 ou 36, si je ne me trompe pas, à cinq postes créés pour tout le milieu du théâtre au Québec. Le Conseil québécois du théâtre a émis un communiqué qui porte un titre très révélateur: Emploi-Québec et le théâtre, c'est le drame .

Il y a aussi, je le mentionnais, la crise dans les écoles, le fait qu'il y a carrément suspension des sorties culturelles. On sait que la ministre est allée rencontrer les représentants syndicaux au début de l'automne. Mais, écoutez, je pense qu'on était clairement devant une situation qui relève un peu du théâtre. Mais le théâtre, au moins, ça a certains résultats. Faire une sortie théâtrale, habituellement, au théâtre, on est soit touché, soit secoué, soit ému. Mais il faut admettre que, cette fois-ci, la ministre a raté son coup, puisque les représentants syndicaux sont restés carrément de glace devant les interventions de la ministre et que ça n'a pratiquement puis même carrément rien changé. Et cette crise dans les écoles, l'arrêt des sorties culturelles, je l'ai dit précédemment, a un impact majeur, sérieux, compromet la survie d'organismes culturels.

Et plus que ça. Je parle des organismes culturels, mais il faudrait peut-être parler des individus. Vous avez sûrement, comme moi, pu échanger avec des artistes qui avaient des contrats pour cet automne, entre autres, avec des compagnies théâtrales et qui se réveillent du jour au lendemain avec plus de contrat. Et ça, ça signifie carrément qu'ils n'ont plus de revenus. Et cette semaine, en cette Chambre, la ministre disait: Oui, la culture, les artistes ont le droit d'avoir leur pinte de lait dans le frigidaire. Bien, je l'interpelle. Oui, les artistes ont le droit d'avoir leur pinte de lait dans le frigidaire. Il faut intervenir dans cette crise majeure qui secoue en ce moment le milieu de la culture.

(10 h 30)

Parlons aussi de la Place des Arts, qui est une autre crise créée par ce gouvernement, qui secoue aussi le milieu culturel, là. Moi, je me pose des questions quand je vois qu'au mois d'août, par exemple, l'attachée de presse de la ministre, et je la cite, disait à un journaliste du Devoir : «Il y a des grèves qui peuvent parfois durer des années. C'est sûr qu'on ne le souhaite pas, mais ça peut arriver.» Moi, je crois que la ministre, par l'intermédiaire de son attachée de presse, a envoyé un signal évident qu'elle n'était pas intéressée à ce que ce conflit-là se règle. Est-ce qu'il y a des liens avec les grandes négociations de ce gouvernement dans le secteur public? La question se pose. Mais aucun signal n'a été envoyé de la part de la ministre que ce conflit-là devait se régler. Au contraire, elle a dit que ça ne la concernait pas, que ça relevait de son autre collègue.

Je pense, Mme la ministre, que ce que j'allègue est bien résumé... La conclusion de tout ça, c'est un article du Devoir du mardi 2 novembre, et je vais vous en citer rapidement quelques extraits. C'est sous la plume de Stéphane Baillargeon. «Boycottage – ça porte le titre Comédie d'horreurs – des activités pédagogiques, gel du financement, report de la commission sur la culture et contrecoups de la crise à Emploi-Québec: la rentrée d'automne frappe fort, très fort dans le milieu du théâtre. La scène craque de partout en ce moment.» D'autres extraits: «Ce qui rend d'autant plus choquant le report à l'an prochain des audiences de la commission de la culture. Le Conseil québécois du théâtre, comme d'autres groupes de pression, aurait bien aimé demander des comptes au gouvernement, gardien autoproclamé de la société distincte.»

Et puis il y a cette pathétique histoire d'Emploi-Québec et de ses effets jusqu'au coeur du beau milieu. Carl Allen, porte-parole du CQT, dit: «La situation est vraiment tragique pour certaines compagnies. C'est la crise de tous bords, tous côtés. Ça va mal, rien ne débouche du côté des mesures d'employabilité. C'est la catastrophe du côté du secteur scolaire, et le financement ne bouge pas. La situation est très difficile pour nous en ce moment.» Et le...

Le Président (M. Cusano): Merci...

Mme Beauchamp: ...journaliste termine en disant qu'il a été impossible d'obtenir un commentaire de la ministre Agnès Maltais. Est-ce qu'on peut l'avoir aujourd'hui, s'il vous plaît, votre commentaire?

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Sauvé. Votre temps étant écoulé, je cède la parole à Mme la ministre pour cinq minutes. Mme la ministre.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: On va, M. le Président, prendre les choses une par une. Bien expliquer, c'est important. Ce matin, il y a une interpellation qui nous permet vraiment de présenter l'état de situation. D'abord, le boycott des activités culturelles. Comme ministre de la Culture, j'ai été la première – la première – à sortir sur la place publique et à dire à quel point ce boycott pouvait faire mal à des organismes culturels. Mais j'aimerais comprendre quelle est la position de la critique officielle, est-ce qu'elle est d'accord avec la position de la CEQ? Où se situe-t-elle?

Parce qu'il faut bien comprendre le principe, là, on prend en otage le milieu culturel, on prend en otage le milieu artistique, et les enseignants et enseignantes le savent. Ils savent qu'en faisant cela ils prennent en otage des artistes, des compagnies qui ont un statut plus précaire. Il faut dire que même l'Union des artistes s'est levée à côté de la ministre de la Culture, puisque c'est ce que l'Union des artistes a mené. L'Union des artistes, je rappelle à la critique que c'est un syndicat. Un syndicat s'est levé et n'a pas dit: La ministre de la Culture est dans le champ. L'Union des artistes a dit: La ministre de la Culture a raison, il y a un sérieux problème, et il faut qu'un autre syndicat réagisse et cesse de prendre les artistes en otages. Parce que c'est bien de ça qu'on parle, de prendre les artistes en otages.

Je continue à dire que j'entends le cri d'alarme. Je l'ai repris, je l'ai lancé sur la place publique. Les artistes ont fait une proposition d'un fonds de dépannage, je reçois la proposition et je suis en train de l'étudier. Mais les syndicats d'enseignants se trompent de cible. Et, en interpellant la ministre comme ça, ce que fait la députée de l'opposition, c'est qu'elle encourage cette prise d'otages. Il ne faut pas broncher, c'est une question de principe. Partout dans le monde, quand il y a prise d'otages, on le sait maintenant, c'est inacceptable. C'est une façon de travailler inacceptable.

Alors, il n'y aura pas, sur mon dos, de prise d'otages des artistes, il faut que la CEQ cesse ce boycott des activités culturelles, tienne ses engagements envers les artistes. C'est ça, la voie de la solution. La voie de la solution, elle est là. Et bouger, à l'heure actuelle, c'est accepter qu'une prise d'otages des artistes soit un moyen de négociation pour d'autres secteurs, parce que c'est du secteur de l'éducation qu'on parle. C'est ça qui est important de comprendre comme principe. Une prise d'otages, c'est inacceptable.

Maintenant, parlons du boycott... Non, le boycott, ça va, la stratégie d'Emploi-Québec. Eh bien, un groupe de travail interministériel formé de représentants du ministère de la Culture, du ministère de la Santé et des Services sociaux, d'Emploi-Québec et du Conseil québécois des ressources humaines a été formé pour élaborer une proposition de stratégie de développement des ressources humaines en culture. Donc, on travaille pour l'avenir.

Mais qu'est-ce qu'on a, nous, comme données d'Emploi-Québec? C'est assez intéressant à savoir. Les données transmises par Emploi-Québec nous indiquent que cet organisme a contribué pour plus de 4 000 000 $, en 1999-2000, dans les entreprises du secteur culturel comparativement à près de 2 000 000 $ en 1998-1999. Alors, selon Emploi-Québec, une somme de plus de 1 500 000 $ sera dépensée jusqu'au 31 mars 2000 ou reportée pour 2000-2001, sinon. Il y a donc d'importantes sommes réservées pour la culture à Emploi-Québec, et Emploi-Québec est encore là.

Je ne nie pas qu'il y ait des organisations où il y a eu chambranlement, mais c'est toute la société qui été affectée par ça, le recentrage de la mission d'Emploi-Québec, parce que Emploi-Québec était tous azimuts, actuellement. C'était un des moyens qu'on avait trouvés pour soutenir plusieurs milieux. Alors, ce qu'on a fait, nous, les ministres, c'est que nous nous sommes dits: Recentrons la mission d'Emploi-Québec, c'est quelque chose d'extrêmement important. Et, là-dessus, j'appuie tout à fait la ministre, Mme Lemieux. Alors, recentrons la mission d'Emploi-Québec. Et on s'est formé un groupe interministériel qui voit à ce que, au cours de ce recentrage, il n'y ait pas d'organismes qui en subissent, à long terme, des contrecoups. Alors, on est en accompagnement, on est très près des organisations, on assume nos responsabilités et on a formé un groupe de travail interministériel pour l'avenir.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de Saint-Hyacinthe.


M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. Quand, il y a environ un an, j'ai reçu un appel de Mme la ministre de la Culture pour me demander d'être son adjoint parlementaire, je dois vous dire que j'ai été très flatté, très heureux. Très heureux parce que je connaissais un peu l'histoire, l'implication dans la culture de Mme la ministre. Très heureux aussi parce que le ministère de la Culture est pour moi un des plus beaux ministères. J'aime beaucoup tous les ministères, ça en prend dans tous les secteurs d'activité, mais on a le droit d'avoir des préférences, n'est-ce pas, M. le Président? Alors, le ministère de la Culture, pour moi, est un ministère extraordinaire.

Vous vous souviendrez qu'il a été fondé, mais sous une appellation différente, par M. Jean Lesage en 1960, quand il a nommé M. Lapalme ministre des Affaires culturelles. M. Lapalme avait été, avant M. Lesage, le chef du Parti libéral. Donc, ce n'était pas n'importe qui. Je pense, vous allez en convenir avec moi, n'est-ce pas, Mme la critique de l'opposition, que c'était quelqu'un. C'était quelqu'un, alors on l'a nommé ministre des Affaires culturelles. C'est dire à quel point, pour M. Lesage, c'était important, la culture. Mais tout ça a évolué avec le temps, et, peu à peu, on est passé des Affaires culturelles à la Culture.

Les Affaires culturelles évoquent l'idée des biens culturels, des produits culturels, de la création, alors que la Culture est une appellation plus englobante, rappelle aussi des biens qui sont créés par un peuple mais évoque aussi la spécificité de ce peuple, ce qui fait son identité, ce qui fait son être, ce qui fait son existence et qui conduit donc à des créations de grande valeur. C'est pour ça que je suis content qu'aujourd'hui on nous donne l'occasion de parler un peu plus de la culture à la population qui voit à travers cela l'expression de son être.

Donc, on est passé des Affaires culturelles à la Culture, et M. Laurin, en 1978, qui a été le ministre de la Culture sous le premier gouvernement du Parti québécois, disait: Le citoyen doit pouvoir accéder librement et facilement à tous les biens culturels – donc toutes les affaires culturelles. Il doit pouvoir participer, avec ses proches et au gré de ses affinités, à l'élaboration d'une culture vivante – donc la culture comme façon d'être du peuple – qui exprime à la fois son identité et ses choix existentiels. Voilà pourquoi, aujourd'hui, un des axes, si ce n'est l'axe principal du ministère de la Culture, c'est démocratiser la culture, faire en sorte que la culture soit vraiment l'expression de la vitalité du peuple et que le peuple se retrouve à travers l'expression culturelle et les événements culturels.

(10 h 40)

Dans cet objectif-là, pour réaliser cet objectif-là – je vous le rappelle, Mme la critique de l'opposition, je sais que ça vous intéresse au plus haut point – la première chose, c'est que le ministère veut s'attarder... veut vraiment mettre une attention particulière à sensibiliser les jeunes par l'éducation aux arts et à la culture en mettant l'accent sur les différents aspects de la culture, l'histoire et, évidemment, la culture scientifique.

Vous savez que la science, dans la culture québécoise, est quelque chose de fondamental. La culture québécoise prend sa source évidemment dans la langue française qui est le tronc commun de notre culture. Et vous vous souvenez, il y a quelques centaines d'années, à l'époque qu'on a appelée «l'époque des lumières» où les encyclopédistes avaient la prétention de faire le point sur toute la connaissance de cette époque-là, sur la science de l'époque... Et, avec le siècle des lumières, est venu par la suite Descartes, n'est-ce pas, qui a traduit dans la pensée française cette rigueur de la pensée, cette façon d'approcher les événements de façon rigoureuse, de façon scientifique. Et on arrive à aujourd'hui avec une contribution exceptionnelle de la culture française, par exemple, à la technologie et à la science des communications.

Il y aurait beaucoup, beaucoup à dire sur la façon dont la culture française qui s'est traduite au Québec par la langue française dans une culture unique et particulière, qui s'est traduite dans un effort et dans un apport exceptionnels dans le domaine des technologies et des communications... Mais, M. le Président, je sais que vous me faites signe que mon temps tire à sa fin, je veux seulement rappeler que la culture québécoise est une culture qui est très enracinée dans la façon de vivre du peuple et qui, parce que c'est un peuple plein de vitalité et de créativité, crée des biens culturels de haute valeur connus internationalement comme Notre-Dame-de-Paris , comme, par exemple, le Cirque du Soleil et beaucoup d'autres événements. Alors, je suis très fier d'appartenir à ce peuple et à ce gouvernement qui valorise la culture du peuple québécois.

Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Sauvé.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Écoutez, le député de Saint-Hyacinthe a sûrement raison de louer la culture. Je fais partie de ce groupe de personnes qui considèrent que la culture, c'est extrêmement important. Mais là je vous invite tous à revenir un petit peu plus sur terre parce qu'il y a une situation difficile, de crise pour les organismes culturels et les entreprises culturelles. Donc, parlons concrètement d'aider les gens qui, en ce moment, se demandent comment ils vont finir l'année.

Mais je vais aborder aussi un sujet, je pense, important pour ce gouvernement, c'est le projet de Grande Bibliothèque du Québec. On sait que ça a fait couler beaucoup d'encre, je pourrais donner quelques exemples d'articles: Questions pour la Grande Bibliothèque du Québec , Tempête pour une bibliothèque . Ça a fait couler beaucoup d'encre.

Le 1er juin dernier, en cette Chambre, j'ai posé la question à la ministre de la Culture si le projet de Grande Bibliothèque du Québec pouvait coûter plus cher que ce qui était prévu? On parlait à ce moment-là d'un 20 000 000 $ supplémentaire. La ministre a répondu, puis je pense que les journaux l'ont aussi bien relaté: La ministre Maltais affirme que le projet coûtera bien 85 000 000 $ . Un autre titre: Lise Bissonnette – qui est la présidente de la Grande Bibliothèque – n'aura pas 20 000 000 $ supplémentaires .

Or, il y a eu un reportage télévisé le 20 octobre dernier où on a reparlé de la situation de la Grande Bibliothèque et, dans ce reportage, il y a eu de nouveau une interrogation posée. La journaliste a posé la question à la présidente-directrice générale, la P.D.G. de la Grande Bibliothèque, s'il était vrai qu'il y avait toujours une demande de 20 000 000 $ supplémentaires? Cette fois-là, on ne le reliait pas à la construction de la bibliothèque, mais bien 20 000 000 $ supplémentaires en équipements, et la réponse – et je vous rappelle, là, que c'est suite à la réponse de la ministre au mois de juin – de la P.D.G. à un reportage, en tout cas, retransmis sur les ondes le 20 octobre dernier, ça a été de répondre: Toutes les hypothèses sont sur la table.

À la suite de ce dossier, il y a eu également une série de deux articles dans un quotidien montréalais, et je vous en cite des extraits. On dit: «Le budget de fonctionnement évalué par le comité Richard – qui est le comité qui a, si je puis dire, réfléchi sur le concept, le projet de Grande Bibliothèque – à 25 000 000 $ par an lui semble aussi un peu maigre.» On parle de la P.D.G. de la Grande Bibliothèque. «C'est le budget d'un gros cégep, soupire-t-elle. On va voir, quand on ouvrira, si c'est suffisant.»

Par la suite, il y a une autre citation, et là c'est la ministre de la Culture qui parle: «Le travail de la P.D.G., c'est de rêver pour sa société, rétorque la ministre Maltais, mais il faut valider les choix chaque fois qu'on désire sortir d'un budget. Mme la P.D.G. va se plier au budget disponible.» La journaliste conclut: «Le message est clair, mais l'est-il pour Mme Bissonnette? La volonté ministérielle semble être à mille lieues des préoccupations moins prosaïques de la P.D.G.» Et la journaliste conclut en disant: «Le débat entre l'élitisme – je crois qu'elle parle de Mme la P.D.G. – et l'accessibilité – je crois qu'elle parle de Mme la ministre – sera-t-il au coeur d'un prochain conflit?»

Chose certaine, Mme la ministre, on dirait que votre message n'a pas été entendu. Ou peut-être qu'il n'a pas été compris, mais, chose certaine, il y a quelqu'un qui est sous la responsabilité directe de votre ministère qui, à tout le moins, ne semble pas écouter. Donc, votre réponse a semblé peu porter, et je vous repose la question: Le budget de la Grande Bibliothèque sera-t-il de 85 000 000 $? Est-il vrai qu'il y a une hypothèse sur la table d'accorder au moins 20 000 000 $ supplémentaires en équipements? D'où cet argent pourrait-il provenir?

Et qu'est-ce que vous pensez de l'affirmation qui dit qu'on va voir quand on ouvrira si c'est suffisant, en parlant du budget de fonctionnement évalué à 25 000 000 $? Est-ce que vous considérez rassurant qu'une administratrice d'une société qui sera finalement un organisme d'État affirme ça? À moins que ce soit dans la façon de fonctionner et de gérer de votre gouvernement de dire: Bien, on va attendre, quand ça va ouvrir, de voir si 25 000 000 $, c'est suffisant. Je ne suis pas sûre, non plus, que ce soit rassurant pour la ville de Montréal, qui, en ce moment même, discute avec vous, a des discussions sur la contribution de la ville au budget de fonctionnement de la Grande Bibliothèque. Donc, parlons de choses concrètes, là, que se passera-t-il avec la Grande Bibliothèque? Comment allez-vous gérer ce dossier?

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Sauvé. Mme la ministre.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: M. le Président, il s'est dit beaucoup de choses sur la Grande Bibliothèque, il a coulé beaucoup d'encre dans les journaux. On sait que c'est un projet qui a été très attaqué par l'opposition. Depuis que je suis ministre, j'ai entendu ici, dans la Chambre, des remises en question, j'ai entendu des grands cris disant que les budgets allaient dépasser, j'ai entendu aussi que ça empêchait les investissements dans les autres bibliothèques publiques, alors qu'on a continué...

Je rappelle que, depuis la politique de la lecture et du livre, ce gouvernement a investi plus de 100 000 000 $ dans le livre, dans les bibliothèques et que ce sont des investissements majeurs et que c'est outre Bibliothèque, parce que la Grande Bibliothèque, actuellement, ne fait même pas partie de ces budgets de la politique de la lecture et du livre qu'on annonce. Donc, on investit de tous les côtés. Ça, c'est important de rappeler que les gens mettent parfois en opposition la Grande Bibliothèque et le réseau des bibliothèques publiques autonomes. Donc, on travaille sur les deux côtés à la fois.

La Grande Bibliothèque, c'est quelque chose qui était extrêmement important. La Grande Bibliothèque, c'est la réponse à deux graves problèmes. C'est d'abord les problèmes de la Bibliothèque centrale de Montréal. Ça faisait des années qu'on cherchait une solution à ce problème. La Bibliothèque centrale de Montréal était à l'étroit, et ça, Montréal, c'est 40 % de la population du Québec qui était mal desservie, qui avait des problèmes, et c'était sérieux comme problèmes. Il ne faut jamais l'oublier, il faut le mettre en balance. D'autre part, il y avait la Bibliothèque nationale qui avait des problèmes de diffusion de la collection québécoise. Alors, la Grande Bibliothèque, il faut toujours le rappeler, c'est une solution intelligente à un double problème, une solution qui a fait consensus et autour de laquelle il y a eu des discussions, des consultations. On en est venu à des hypothèses du comité Richard qui nous ont amenés à un budget qui est autour, aux environs – j'ai bien dit aux environs – de 85 000 000 $. On est en discussion.

Oui, j'ai dit que la présidente de la Grande Bibliothèque du Québec, son travail, c'est de rêver, oui, c'est de faire la meilleure bibliothèque possible. C'est non seulement son choix, c'est sa mission. C'est ce que je veux qu'elle fasse, qu'elle rêve au maximum, qu'elle ait des idées. Mais pourquoi on a choisi Lise Bissonnette? Parce que Lise Bissonnette aussi, c'est une dame de pensée, c'est une dame non seulement qui est une de nos élites intellectuelles que je salue, c'est aussi une femme qui a à coeur la vie, la lecture, l'accessibilité, la jeunesse. Il faut voir comment le projet est monté, parce que nous avons d'intenses discussions avec la P.D.G., avec toute l'équipe de la Grande Bibliothèque. Nous avons un projet formidable dans les mains qui devrait, dans à peu près deux semaines, aboutir au Conseil des ministres. Donc, on évolue très rapidement.

Et je sais qu'il y a beaucoup d'encre qui coule, je sais qu'il y a beaucoup de pellicule qui passe dans les médias, tout ça, mais je réitère que nous avons un budget qui devrait être respecté, qui devrait être aux alentours de 85 000 000 $. Ça peut varier, on cherche, mais c'est vraiment de ça. Alors, il n'y a pas de 20 000 000 $ à 30 000 000 $ de plus dans les airs actuellement, là. Quoi qu'il se soit dit dans les médias, quoi qu'aient rapporté les journalistes, la P.D.G. de la Grande Bibliothèque et la ministre sont actuellement en train de travailler de très près. Si une journaliste a vu mille lieues de différence, je ne me souviens pas, moi, au contraire, de lui avoir dit qu'on était à mille lieues de différence; je me souviens très bien de lui avoir dit qu'on se parlait régulièrement, que beaucoup de problèmes étaient solutionnés et qu'on se dirige vers une magnifique Grande Bibliothèque qui devrait arriver dans les délais prévus et dans les coûts prévus.

(10 h 50)

Et ça, ça n'a pas été facile à faire, c'était un dossier très difficile parce que c'était et la ville de Montréal et la Bibliothèque nationale et une nouvelle entité. Alors, au contraire, c'est, pour moi, un projet qui va très bien. On prend du temps parce qu'il est plus important... C'est un peu la méthode de gestion japonaise, vous savez, il vaut mieux prendre le temps pour y penser avant que de vouloir régler tous les problèmes après parce qu'on n'y a pas pensé avant. Alors, on est en train de prendre tous les problèmes, on va arriver avec un beau projet qui devrait être dans les budgets qui étaient prévus.

Une petite chose. Je voudrais rectifier quelque chose que vous avez dit au sujet du projet de loi de la Place des Arts et du Grand Théâtre de Québec. Nous étions prêts à l'adoption du projet de loi à la dernière session, mais c'est l'opposition qui a refusé son consentement au fait de passer ce projet de loi lors de la dernière session. Sous prétexte de partisanerie, ils ont négocié des travaux parlementaires sur le dos de la culture, tout comme j'ai vu certains députés cette semaine attaquer la culture régulièrement, attaquer le 1 %. Il faut se décider, hein? On est pour la culture ou bien c'est quelque chose qu'on jette aux orties quand on a d'autres projets ou des choses partisanes. Ici, de ce côté-ci, nous sommes pour la culture et nous essayons de faire avancer les dossiers le plus rapidement possible au mieux de nos moyens.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de Montmorency. En vous rappelant que vous avez cinq minutes, M. le député.


M. Jean-François Simard

M. Simard (Montmorency): Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je tiens à vous dire à quel point je suis heureux de me retrouver parmi vous cet avant-midi, bien sûr avec ma collègue ministre de la Culture, mon collègue de Saint-Hyacinthe et la critique de l'opposition que je salue.

Je ne crois pas que nous puissions faire un rapprochement étymologique entre le mot «capitale» et le mot «culture», mais, à titre de député de la région de Québec, je tiens à vous dire à quel point je suis honoré de savoir qu'une des nôtres, une députée de la région de Québec, est ministre de la Culture. Je crois que c'est un honneur pour notre région.

La culture est au centre, moi, comme député, de mes préoccupations, et j'aimerais rejoindre le souhait qu'a formulé tout à l'heure la critique de l'opposition, j'aurai un discours très empirique, très à la base. D'ailleurs, comment pourrait-il en être autrement, puisque Montmorency est une circonscription électorale qui jouit d'un très riche potentiel en matière de patrimoine culturel? Alors, permettez-moi, dans un premier temps, M. le Président, de vous faire un bref topo, une brève présentation de ce riche patrimoine culturel que nous avons dans Montmorency pour mieux illustrer, en s'enracinant dans le local, un beau défi qui attend la culture québécoise qui est celui de la valorisation économique de son patrimoine culturel.

Donc, bien sûr, plusieurs d'entre vous le savent, lorsqu'on pense à Montmorency, on pense à l'île d'Orléans, à l'île du poète Félix Leclerc. On pense à six formidables églises, dont certaines ont un cachet architectural unique en Amérique. On pense à une culture culinaire exceptionnellement prolifique. On pense, bien sûr, à la Côte-de-Beaupré, tout particulièrement à Château-Richer qui, comme vous le savez très bien, est la plus vieille paroisse canonique d'Amérique du Nord. La plupart des familles dites de souche ont un ancêtre qui s'est marié à Château-Richer. On pense, bien entendu, aussi à la côte de Beauport, au grand Beauport, au chemin Royal, que l'on appelait communément le chemin de nos ancêtres, sur lequel sont juchées de nombreuses maisons ancestrales qui font le bonheur des touristes qui empruntent ce chemin. On pense, bien entendu, à Sainte-Brigitte-de-Laval, municipalité champêtre qui est l'une des plus belles au Québec. On pense, bien sûr, à la chute Montmorency qui a donné son nom au comté que j'ai l'honneur de représenter ici et qui attire à elle seule plus de 800 000 visiteurs par année.

Vous savez que la rivière Montmorency était cette frontière tout à fait naturelle qui sépara un temps Wolfe de Montcalm. C'est à partir de la rivière Montmorency que Wolfe prépara son invasion militaire via l'anse au Foulon à l'automne de 1759. Bref, tout cela, M. le Président, en quelques instants pour vous rappeler le patrimoine exceptionnellement riche de Montmorency.

Il y a des centaines et des centaines de milliers de touristes qui, chaque année, viennent nous visiter, et il y a une nouvelle tendance qui émerge et qui va donc s'amplifier, qui vient du côté français. Vous savez qu'on a, bon an mal an, au Québec près de 400 000 Français qui viennent chez nous en touristes. Mais pourquoi? Pour découvrir notre culture. La culture, ça a aussi des consonances économiques, des consonances qui créent de l'emploi.

Vous savez qu'aux États-Unis il n'y a jamais eu, en termes absolus et relatifs, autant d'Américains qu'aujourd'hui qui ont atteint l'âge de 50 ans. Et vous savez que c'est une époque de la vie où, très souvent, lorsqu'on a eu des enfants qui sont soit déjà maintenant sur le marché du travail ou dans les études avancées, ils sont mariés, donc, et les couples de cet âge ont plus de temps pour eux, et toutes les études menées par l'OMC, l'Organisation mondiale du commerce, ou encore le Bureau international du travail prédisent que l'industrie du tourisme culturel est celle qui connaîtra le plus d'accroissement dans les années à venir. Et je crois qu'il nous faut être à l'écoute de ce marché qui s'offre à nous et qui, dans les années à venir, créera beaucoup d'emplois dans la grande région de Québec.

Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de...

M. Simard (Montmorency): M. le Président, il me reste 10 secondes, vous me permettrez de souligner que la ministre de la Culture a consenti un investissement de 330 000 $ pour sauver le manoir Mauvide-Genest, donc, à Saint-Jean, île d'Orléans.

Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Montmorency. Je cède maintenant la parole à la députée de Sauvé. Mme la députée.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Écoutez, M. le Président, je dois revenir sur une affirmation qu'a faite la ministre de la Culture lors de sa dernière intervention. Premièrement, lorsqu'elle va se retrouver, dans quelque temps, dans quelques mois, dans les banquettes de l'opposition, elle apprendra concrètement que l'opposition officielle ne décide de rien en cette Chambre. Elle n'a peut-être pas encore bien compris le jeu qui doit se jouer, la façon dont elle doit convaincre son leader, mais c'est ce gouvernement, et entre autres l'équipe de son leader, qui décide de quels projets de loi seront amenés à la fin d'une session parlementaire pour adoption, et il y a des faussetés qui se disent en cette Chambre qu'on doit vraiment rétablir. Donc, c'est son gouvernement qui décide des projets de loi qui seront adoptés, là, l'opposition officielle, elle est minoritaire, elle ne prend pas de décisions sur ça.

Deuxièmement, il a aussi été dit à un moment donné que le report de la commission de la culture, qui devait faire un mandat de surveillance sur la SODEC et le Conseil des arts et des lettres cet automne, c'était l'opposition officielle qui avait été exprimer son accord. C'était une fausseté et c'est maintenant inscrit au procès-verbal de la commission de la culture que, unanimement, à la fois les députés du côté ministériel et, bien sûr, les députés de l'opposition officielle ont déploré cette décision de son leader de reporter les séances de la commission de la culture.

Troisième affirmation erronée, le refus de l'opposition officielle d'endosser une motion, en juin dernier, sur la diversité culturelle. Je dois rappeler à Mme la ministre qu'elle a juste à aller voir dans les galées de cette fameuse journée où on avait imposé le bâillon à l'opposition officielle, où nos droits démocratiques étaient suspendus, que son gouvernement – elle-même, son leader, la ministre des Relations internationales – n'a jamais déposé en cette Chambre cette motion. Le communiqué était déjà prêt, là, pour dire que l'opposition s'y opposait, son gouvernement n'a jamais déposé la motion en cette Chambre.

Voici les faits rétablis, mais parlons de diversité culturelle. Effectivement, c'est un dossier extrêmement important qui me tient à coeur. Je dois rappeler qu'en juin 1998 – et je pense qu'on peut y lire une forme, presque, de testament politique – Mme Liza Frulla, alors députée de Marguerite-Bourgeoys – c'était la dernière intervention qu'elle a faite en cette Chambre – sa dernière intervention a été une motion d'appui à la Coalition sur la diversité culturelle qui s'était alors formée, et je pense que ça témoigne de l'importance que le Parti libéral du Québec a toujours accordée à ce dossier. C'est un dossier extrêmement important, et, en ce moment, il n'est pas clair pour nous, d'ailleurs, s'il est vraiment sous la responsabilité de la ministre de la Culture. Ça l'était clairement auparavant sous le mandat de sa prédécesseure, mais, en ce moment, par exemple, le Comité québécois sur la diversité culturelle, dont on a offert la présidence à Mme Marie Malavoy après sa défaite à la dernière élection, bien, ce Comité se retrouve sous la responsabilité de la ministre des Relations internationales.

(11 heures)

Récemment, la Coalition sur la diversité culturelle, qui est vraiment formée de plusieurs intervenants du milieu artistique et culturel avec des gens de toute allégeance politique – et je pense que vous le savez comme moi, Mme la ministre, on y retrouve des gens de toute allégeance politique – ils ont revendiqué le fait de dire que, dans ce dossier spécifique, il était important de travailler sur la plus grande échelle possible et ils ont souhaité l'élargissement de leur membership à l'échelle du Canada.

Ça a sûrement été très difficile pour Mme la ministre de répondre oui à une telle demande, on le sait. Parce que c'est difficile d'admettre, sur un dossier qui touche la culture, qui touche une notion même d'identité et de spécificité québécoise, qu'à des fins stratégiques et pour gagner notre point dans les grandes négociations qui se passent à l'échelle mondiale il soit important de jouer en équipe et de jouer sur la base la plus large possible. Mais c'était la revendication de ce qu'on peut appeler la société civile. Nos organismes, dans le milieu, ont souhaité jouer sur la plus grande échelle possible.

Et je vous cite leur communiqué. Ça provient carrément de la Coalition sur la diversité culturelle, dans leur communiqué de la semaine dernière: «Avec l'arrivée de ce nouveau partenaire, la Coalition sera présente et active à travers le Canada et pourra plus efficacement mener des actions concertées à la veille de la nouvelle ronde de négociations internationale de l'Organisation mondiale du commerce.»

J'ai proposé au gouvernement d'adopter une motion. C'est textuel. Dans la motion proposée par le Parti libéral du Québec, on proposait d'appuyer la Coalition dans sa volonté. J'ai repris un extrait du communiqué de la Coalition telle que cette société civile, ces gens de toute allégeance politique se définissent. Et je n'ai pas compris. Ce gouvernement a refusé, la semaine dernière, d'appuyer la Coalition sur la diversité culturelle.

Et j'aimerais terminer en rappelant à la ministre la lettre signée par le président de l'Union des artistes, M. Pierre Curzi, au printemps dernier, qui invitait le gouvernement du Québec à ne pas faire de la petite politique sur le dos de la diversité culturelle. Merci.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Sauvé. Mme la ministre.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: M. le Président, d'abord, sur la commission de la culture. Je pense que le thème global, ici, c'est la partisanerie. Est-ce que nous sommes partisans ou pas? C'est toujours bon de s'interroger. La députée de Sauvé est comme moi, elle est depuis un an en cette Chambre. Donc, il est normal qu'on s'interroge sur les gestes, les mouvements, qui a fait quoi, tout ça. C'est normal. On décide, nous, les jeunes... Vous savez, les jeunes députés, les jeunes ministres, on veut assainir, normalement. C'est ce qu'on désire. Que s'est-il passé autour de la commission de la culture? La députée de Sauvé sait très bien, très bien qu'une ministre ne peut pas intervenir dans les travaux d'une commission. Et c'est là un principe fondamental. Une ministre n'a rien à dire et ne doit pas intervenir. C'est là où travaillent les parlementaires, et toute leur liberté d'action est là.

Devant la difficulté de tenir les travaux à l'intérieur de trois commissions, le leader a offert une quatrième commission au parti de l'opposition. Il leur a dit: Écoutez, puisque la commission de la culture veut siéger, nous offrons une quatrième commission. Ça a été immédiatement refusé par l'opposition. Ça a été immédiatement refusé par l'opposition.

Nous avons offert une journée et demie. Il y avait une journée et demie de disponible. La commission, et c'est son indépendance, a jugé que ce n'était pas suffisant. C'est le choix des parlementaires. La ministre n'a pas été consultée. Et la députée de Sauvé fait partie de la commission, donc, elle, elle a le droit de parole. Elle, si elle y tenait, elle devait se lever, elle devait défendre la tenue de la commission aux dates qu'elle voulait. Elle devait le faire. Moi, je n'ai rien à dire parce que c'est l'indépendance des parlementaires. C'est très important.

Les auditions de la commission devaient se tenir début octobre. Ça a été reporté, à la demande des organismes, d'abord à la fin octobre et ensuite ça a été déplacé. Puisque l'opposition ne voulait pas d'une quatrième commission et puisque la commission ne voulait pas commencer les travaux en une journée et demie, ça a été déplacé en janvier, février. Eh bien, ce que j'ai demandé vraiment au leader, là, c'est que, janvier, février, ce ne sera pas déplacé. C'est ce que j'ai demandé. Mais c'est à la commission de faire son travail. Alors, ce que l'opposition a à choisir, c'est si la culture est vraiment prioritaire comme dossier.

La diversité culturelle, maintenant. Et là on va replacer des choses avec plaisir. La diversité culturelle n'est plus un dossier qui est seulement porté par la ministre de la Culture. Elle le porte principalement. D'ailleurs, si vous avez remarqué, c'est la ministre de la Culture qui va à Oaxaca discuter avec les autres ministres à l'intérieur du réseau des arts, des ministres de la Culture, le réseau informel mis sur pied par Mme la ministre du Patrimoine du Canada. Et je collabore avec elle. Nous additionnons nos voix selon la formule que le Québec a réussi à faire accepter par le gouvernement fédéral.

C'est la ministre de la Culture qui était à l'UNESCO, qui est allée prendre la parole devant 55 pays et expliquer, discuter, échanger et être à l'écoute. Parce qu'il ne s'agit pas seulement de parler, il s'agit d'écouter, et c'est là que c'est important. Nous, le gouvernement du Québec, nous avons pris une position gouvernementale. Nous sommes quatre ministères impliqués, le ministère des Relations internationales, le ministère de la Culture et des Communications, le ministère de l'Industrie et du Commerce et le ministère des Finances. J'entendais partout des ministres de la Culture, à l'UNESCO, qui disaient: Mais où sont nos ministres des Finances? Comment réussirons-nous à les convaincre? Ici, au Québec – et il n'y a que la France qui ait ça avec nous – nous avons une position gouvernementale en matière de diversité culturelle. C'est exceptionnel.

Et non seulement nous sommes en avance là-dessus, mais le Québec, le gouvernement du Québec, par la voix de la ministre de la Culture et des Communications, a été le premier à offrir de financer la Coalition pour la diversité culturelle. J'ai eu une rencontre avec eux, je leur ai demandé: De combien avez-vous besoin pour fonctionner, c'est tellement important? Et nous avons annoncé 100 000 $ pour la Coalition. Ce n'est pas des paroles, ça, ce n'est pas une motion, c'est immédiatement. Quels sont vos besoins, c'est un sujet important? 100 000 $ et, si vous allez chercher d'autres partenariats, un autre 100 000 $.

Nous avons réitéré cette annonce dans une conférence de presse avec la ministre du Patrimoine du Canada. Nous étions côte à côte, à l'UNESCO, et nous avons été côte à côte lors de cette annonce. Alors, dans ce cas-là, il y a addition des voix. Et, oui, je suis souverainiste, profondément souverainiste, je crois en la souveraineté du Québec. Nous devons récupérer tous nos pouvoirs, particulièrement en matière de culture et de communications. Nous devons porter notre voix nous-mêmes, surtout la voix de la culture, à travers le monde. Et ça faisait partie de la proposition d'amendement de motion que l'opposition a refusée: porter notre voix à travers le monde, particulièrement en matière de culture et de communications. Alors, il faut dire que là-dessus, un, nous sommes fermes, nous allons porter notre voix à travers le monde. Nous le faisons avec l'appui du Canada, mais pas avec l'appui de l'opposition – il faut le faire! Deuxièmement...

Le Président (M. Cusano): Merci, madame.

Mme Maltais: Voilà. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je dois céder la parole au député de Saint-Hyacinthe, lui rappelant qu'il a un droit de parole de cinq minutes. M. le député.


M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. Devant l'éloquence de Mme la ministre, j'étais absolument absorbé par ses propos et puis je vous avoue que c'est encourageant de faire partie d'un gouvernement où il y a tellement d'enthousiasme pour la culture. Et pourquoi il y a tellement d'enthousiasme pour la culture? Pourquoi le peuple québécois tient tellement à sa culture? Pourquoi il tient tellement à son identité? Pourquoi il tient tellement à être comme tous les autres peuples du monde, en contrôle de son état? C'est bizarre, partout dans le monde, c'est évident, personne ne se pose de question, et, ici, on se demande si ça devrait exister. C'est très, très curieux, hein. C'est très curieux qu'on se pose des questions sur des évidences. Et cependant tout le monde est d'accord sur le fait qu'on a une identité culturelle absolument particulière qui nous décrit, qui s'enracine dans notre histoire.

Et je voudrais seulement mentionner un tout petit peu, en passant, une chose qui est fondamentale de notre tradition culturelle. C'est le rôle joué par la religion dans la culture, dans la fabrication, dans le développement de la culture du peuple du Québec. Le gouvernement du Québec est un gouvernement qui reconnaît la séparation de la religion et de l'État. Ça, tout le monde est d'accord là-dessus. Mais cependant on reconnaît aussi que l'État et la culture du Québec ont été bâtis en grande partie par et avec l'influence de la religion dans les comportements sociaux.

Je me rappelle, quand j'étais tout petit et que mon grand-père me rappelait avec quelle fierté, lui, quand il était jeune, il avait contribué... Il était le charpentier en charge pour construire la flèche sur le clocher de l'église du village. Il était fier de ça. Et ça m'est resté. Ça m'est resté parce que l'église était un lieu de rassemblement pour l'intérieur – on entendait beaucoup de sermons bien sûr – et qui transférait et qui transmettait une culture, mais aussi pour le parvis, le clocher et le parvis. Pourquoi? Parce que, après la messe, c'était le lieu de rassemblement de toute la place. C'était la seule place commune qu'il y avait. La seule salle communautaire qu'il y avait, c'était ça. Et c'était sur le parvis qu'on échangeait, qu'on parlait des mariages, qu'on vendait des petits cochons et qu'enfin on vivait. Le peuple québécois vivait. Et c'est à travers tout cela qu'il a bâti sa culture.

C'est pour ça que notre gouvernement apporte tellement d'importance à conserver ces lieux de culture parce que ces lieux de culture expriment et ont bâti en partie l'identité, ont contribué à bâtir l'identité du peuple québécois. Entre autres, un trait caractéristique auquel je suis certain que la députée de Sauvé est très sensible, c'est l'esprit de solidarité. C'est sur le parvis de l'église que les corvées s'organisaient pour aller secourir telle famille qui avait perdu sa grange ou sa maison dans un incendie. Alors, cet esprit de solidarité s'est créé autour de ce phénomène traditionnel, de ce monument de la culture qu'est généralement l'église.

(11 h 10)

Donc, les créations culturelles du patrimoine religieux sont des lieux très importants, très importants pour exprimer la culture et exprimer la vitalité du peuple québécois dans les années passées, vitalité qui aujourd'hui se traduit par des créations culturelles reconnues mondialement. C'est pour ça que, moi, je trouve excessivement significatif, très significatif et tout à fait remarquable que le gouvernement du Québec, depuis quelques années, ait contribué à une hauteur de 100 000 000 $ pour conserver ce patrimoine religieux, parce qu'on y tient, parce que c'est l'expression de la culture du peuple.

À Sainte-Hyacinthe, la cathédrale a été rénovée en grande partie grâce à l'aide du ministère de la Culture. La chapelle du monastère du Précieux-Sang, un monastère de religieuses cloîtrées, qui est un bijou de chapelle, ouverte au public évidemment, a été rénovée aussi grâce à la contribution du gouvernement.

Alors, vous voyez, le gouvernement du Québec prend soin de la culture parce que la culture traduit l'identité de ce peuple, ce peuple qui veut vivre, ce peuple qui prendra les moyens pour vivre, ce peuple qui ne cesse pas de rayonner partout dans le monde, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, et ce peuple qui a hâte vraiment de contrôler tous les instruments, tous les instruments qui vont lui permettre de rassurer, d'exploiter, de développer sa culture et de contribuer, grâce à son identité et à ses traits caractéristiques et particuliers, à la culture mondiale. Je suis très fier de faire partie d'un gouvernement qui a une pensée logique, qui a une pensée, qui sait d'où il vient et qui sait où il s'en va. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Sauvé.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. L'organisation des travaux parlementaires, là, je ne pense pas que ça intéresse beaucoup le grand public, et, dans la situation de crise qui sévit actuellement dans le milieu de la culture, il ne faut pas y passer trop de temps. Mais je rappelle à la ministre que l'opposition officielle est minoritaire, qu'elle ne décide de rien. Et je lui suggère d'aller prendre un bon lunch avec le leader du gouvernement pour qu'il lui explique comment ça fonctionne. Donc, je prends le temps de préciser que je me sens très à l'aise dans la question de la commission de la culture parce que, devant l'ensemble des membres de la commission de la culture qui font partie de son gouvernement, ils seront tous témoins du fait que j'ai exprimé mon désaccord fermement avec la décision du leader de son gouvernement de reporter la commission de la culture.

Il y a des sujets extrêmement importants en ce moment qui, comme je le disais, secouent le milieu culturel. Et, Mme la ministre, je crois que nous nous devons d'aborder le sujet de la crise qui touche en ce moment les producteurs de films et de télévision. Il y a eu plusieurs allégations, soit sur les ondes ou dans les journaux, des allégations concernant... ça va de fraude fiscale à, à tout le moins, mauvaise utilisation d'argents publics dans ce secteur-là.

Depuis quelques semaines, je considère que, dans le milieu culturel en général mais plus particulièrement dans le milieu du film et de la télévision, il y a eu deux grandes réactions. La première, c'est de dire clairement: S'il y a une pomme pourrie dans le panier, s'il y en a une, il faut l'enlever pour ne pas que tout le milieu soit affecté par cette situation.

L'autre réaction, qui est à un autre niveau, est de dire: Oui, 10 ans après que ce milieu s'est consolidé, les règles du jeu, les règles du marché ont changé. Il faut sûrement faire une revue des programmes, des orientations prises dans ces programmes que nous avons adoptés ici, en cette Assemblée, il y a une dizaine d'années. Il faut sûrement revoir l'équilibre de l'effort public, des argents publics, l'équilibre donné entre le soutien aux entreprises, aux producteurs et le soutien aux créateurs, qui sont sûrement la base vivante liée à la culture du Québec. Il faut sûrement revoir les modalités administratives liées à ces programmes soit de soutien ou de crédit d'impôts, revoir les méthodes de contrôle et d'évaluation.

Moi, ce que j'ai interprété, c'est qu'il y avait une grande volonté qu'un leadership soit pris pour faire toute la lumière, toute la lumière tout simplement, mais toute la lumière sur ce dossier. Et d'ailleurs, lors de sa dernière assemblée générale, l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec – c'était vendredi matin dernier – a adopté une résolution qui se lit ainsi, j'en lis des extraits: «...l'APFTQ collaborera à toute initiative que les gouvernements pourraient mettre en place pour analyser les programmes, procédures et pratiques de financement, qu'elle souhaite participer avec les deux paliers de gouvernement au choix des moyens pour identifier les problèmes et qu'elle travaillera de concert avec eux pour proposer des correctifs au besoin.» Il faut souligner qu'il y a plusieurs producteurs de films et de télévision qui ne se reconnaissent pas dans les différents reportages qui sont faits actuellement sur les ondes. Donc, il y a une notion de faire la lumière au plus tôt.

J'ai pris moi-même contact avec le secteurs financiers, les banquiers, les prêteurs, aussi le secteur de la Bourse, où les commentaires qu'on m'a faits, ça allait de «oui, nous sommes refroidis» à «nous sommes paralysés», dans le sens que ce secteur financier, qui est un partenaire névralgique de notre industrie du film et de la télévision, attend, il attend également que la lumière soit faite avant d'investir de nouveau dans ce secteur-là.

Or, ce gouvernement, au lieu de faire la lumière, aurait voulu démontrer qu'il a quelque chose à cacher qu'il n'aurait pas fonctionné autrement. Il n'y a pas vraiment d'enquête. On n'examine pas la possibilité de faire une enquête ou pas, ici, alors que la GRC examine cette question et même la police de la Communauté urbaine de Montréal. On a demandé un rapport interne à la Société de développement des entreprises culturelles. Au même moment, la ministre a proposé que le président de la SODEC s'en aille et aille plutôt occuper le siège à TV5. Et on a reporté la commission de la culture, qui devait faire un mandat de surveillance sur la Société de développement des entreprises culturelles.

Donc, en ce moment, on est devant des producteurs frustrés que la situation ne soit pas rétablie. On est devant des artistes et des créateurs qui se posent beaucoup de questions sur l'équilibre dans les forces en présence. On est devant aussi des contribuables qui se posent des questions. La lumière doit être faite. Nous, nous proposons toute notre collaboration à ce gouvernement pour qu'il y ait des cadres de discussion où la lumière pourra être faite sur la situation dans le secteur du film et de la télévision. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Sauvé. Mme la ministre.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: M. le Président. D'abord, je pense que c'est important. Et, là-dessus, on a, je pense, une mutuelle inquiétude, dans le sens où les industries de la télévision et du cinéma sont des industries à impact économique et à impact identitaire extrêmement importants du Québec. Alors, je vais revenir là-dessus.

Mais, avant, il faut se rappeler que, comme ministre, j'ai été immédiatement attentive à ce qui se passait quand il y a eu allégation au fédéral concernant une compagnie. Immédiatement, le 1er octobre – donc, c'était vraiment dès le début, avant même les allégations au fédéral, il y avait simplement les articles dans les médias où une auteure dénonçait des compagnies, alors on n'était même pas dans les enquêtes au fédéral – j'ai demandé au président de la SODEC d'évaluer les fondements de ces allégations et aux gestionnaires responsables de l'administration des soutiens et des crédits d'impôt d'apprécier l'ensemble de la situation pour que je sois en mesure de porter un jugement éclairé. J'ai fait cela dès le départ.

Qu'est-ce qui s'est passé au gouvernement fédéral, à l'époque? Téléfilm Canada a émis un communiqué disant: Il n'y a aucun problème, de notre côté, tout va bien. Alors, je pense qu'ils ont peut-être été un peu rapides sur la gâchette pour sortir leur communiqué. Je pense qu'aujourd'hui ils ont réévalué. Mais on voit vraiment déjà la façon dont j'ai été attentive. Parce que c'est une industrie tellement importante, puis bien sûr, sur le plan économique, il y a des centaines d'emplois en jeu. Mais c'est une industrie tellement importante pour l'identité culturelle des Québécois et des Québécoises que je ne peux pas laisser planer de doutes sur l'ensemble de cette industrie. Je suis d'accord, Mme la députée. Là-dessus, comme je dis, on a vraiment un accord là-dessus. On s'en est parlé, d'ailleurs. C'est important. Alors, j'ai demandé une évaluation de la situation dès le départ.

D'autre part, tout de suite après, qu'est-ce qui s'est passé? Il y a eu allégation au fédéral, il y a eu demande d'enquête, et la GRC s'est mise à enquêter sur des compagnies. Ce que j'ai fait depuis... D'abord, au niveau québécois, il n'y a aucune plainte de déposée. À notre niveau, il n'y a pas plainte, donc il n'y a pas matière à enquête. Toutefois, j'ai demandé officiellement au ministère de la Sécurité publique de se mettre en lien avec la GRC aussitôt que l'enquête de la GRC sera terminée pour qu'on ait les résultats de l'enquête.

Nous aurons accès, je l'ai déjà dit ici, à l'Assemblée nationale, nous avons des accords administratifs qui nous permettent d'avoir accès à des résultats d'enquête. Alors, j'aurai entre les mains deux outils extrêmement importants: d'abord, l'évaluation globale de la SODEC sur la situation; deuxièmement, les résultats de l'enquête de la GRC. Mais ils devraient bien vouloir nous les fournir, puisqu'on a entente administrative. Donc, avec ces deux objets-là, je serai en mesure d'agir et j'agirai rapidement.

(11 h 20)

De la même façon que, dès qu'il y a eu des articles dans les médias qui laissaient soupçonner qu'il y avait des fraudes au niveau du cinéma et de la télévision, je n'ai non pas camouflé, non pas caché, mais dit: Je veux une évaluation de la situation, c'est trop important, c'est trop un secteur névralgique, même façon, j'agirai rapidement, car j'aurai entre les mains de quoi travailler. Alors ça, c'est pour rassurer.

Il faut se dire qu'est-ce que c'est, l'industrie de la télévision. Depuis l'entrée en vigueur de la mesure fiscale, en 1991, il y a 400 000 000 $ qui ont été affectés sous forme de crédits d'impôt, mais ça a donné un impact, un volume de production de près de 2 500 000 000 $ en huit ans. Donc, c'est majeur pour notre société.

Mais c'est aussi majeur de façon identitaire. Sur les 10 téléséries, les 10 téléromans les plus écoutés au Québec, en 1988-1989, il n'y avait, je crois, que deux téléromans québécois. Aujourd'hui, sur les 10 premiers, il n'y a qu'un téléroman qui ne soit pas québécois, je crois que c'est américain. Les deux plus écoutés étaient Dallas et Dynasty , en 1988-1989. Aujourd'hui, ce sont des téléromans québécois qui sont écoutés. On a retrouvé une fierté, on a retrouvé une identité et on a un star-système qui permet que les gens se reconnaissent dans leurs artistes, dans leurs vedettes, les retrouvent ensuite. Alors, c'est un système extrêmement important pour le Québec. Oui, Mme la députée, j'y suis extrêmement attentive.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de Montmorency, vous rappelant que vous avez bien cinq minutes.


M. Jean-François Simard

M. Simard (Montmorency): Merci de ce rappel, M. le Président. Alors, au cours de cette intervention, qui passe toujours trop vite, j'aimerais rappeler à cet auditoire qu'en ce qui nous concerne, de ce côté-ci du gouvernement, la culture n'est pas un simple secteur d'intervention auquel on pense une fois qu'on a satisfait les autres besoins de la population. Si tant est qu'il y ait une époque, un moment où on a plus que jamais besoin de la culture, c'est bien en ce moment. Et pourquoi?

Vous connaissez sans doute le grand sociologue américain Daniel Bell, qui, dans les années soixante-dix, parlait de la société postindustrielle. D'autres penseurs après lui ont un peu raffiné sa pensée. On pense notamment à Alvin Töffler, qui parlait de l'économie du savoir et de l'économie de l'information. Aujourd'hui, l'économie du savoir, c'est presque un cliché, c'est une idée reprise par plusieurs d'entre nous. On entend souvent cette expression dans tous les médias de la presse écrite et électronique. Mais on oublie souvent que, derrière ce savoir, se cache toute une entreprise très importante de créativité. Et c'est de la qualité des idées, donc de la culture, que dépend aujourd'hui très largement la compétitivité des économies nationales et, en l'occurrence, la nôtre.

Donc, l'économie du savoir appelle une culture qui est forte, une culture qui est originale, une culture qui est singulière. Et, non, contrairement à ce que nous avons entendu cette semaine en Chambre, la culture, ce n'est pas un luxe, c'est fondamental, ne serait-ce que d'un point de vue économique, dans notre société.

Comme vous le savez, M. le Président, évidemment, le défunt Conseil des affaires sociales parlait, dans les années quatre-vingt, de deux Québec dans un. Et le gouvernement est très sensible à cette situation. Tout à l'heure, la critique de l'opposition faisait référence à une crise. Et elle sait très bien que la crise, ça vient d'un... les racines étymologiques de ce mot, c'est-à-dire «choix». Et les crises appellent des choix. Et le gouvernement du Québec a fait des choix en matière culturelle, et notamment pour éviter qu'il y ait deux Québec dans un, comme en parlait le défunt Conseil des affaires sociales dans les années quatre-vingt.

À cet égard, permettez-moi de rappeler qu'en avril 1998 avait lieu ici même, à Québec, un sommet sur la lecture et le livre, qui était d'ailleurs présidé, on s'en souviendra, par M. Bouchard, par le premier ministre. Ce sommet a donc fait de la lecture et du livre une priorité gouvernementale à laquelle je tiens ici à m'associer. Et permettez-moi de rappeler que cette politique mettait en oeuvre un programme d'aide à l'éveil à la lecture et à l'écriture.

On sait qu'on a encore un nombre trop important de nos concitoyens qui ne peuvent pas lire et écrire, comme l'appelle désormais une économie dite du savoir. Permettez-moi de vous rappeler, donc, que notre gouvernement a augmenté de façon importante le budget alloué à l'éducation populaire et à l'alphabétisation. Et, pour pouvoir voir l'ampleur de l'effort d'un gouvernement, il faut parfois faire des comparaisons. Et permettez-moi de citer quelques chiffres. Ce budget, donc, était de 8 600 000 $ sous les Libéraux, en 1993-1994, et nous l'avons porté, nous, le gouvernement du Parti québécois, à 14 000 000 $ en 1995-1996 puis à 15 500 000 $ cette année.

Donc, à cet égard, M. le Président, permettez-moi de vous rappeler qu'un vigoureux plan d'action pour lutter contre l'analphabétisme sera mis en oeuvre rapidement, suivant l'adoption de la politique de formation continue. Il accordera une attention particulière à la prévention et à la sensibilisation, au maintien surtout des capacités de lecture et d'écriture, à l'accroissement de cette capacité de même qu'à la diversification des services offerts, notamment pour les jeunes de moins de cinq ans et leur famille, en milieu populaire.

Donc, pendant les quelques instants qu'il me reste, j'aimerais simplement vous rappeler que la culture, comme je l'ai dit au début, n'est pas un luxe, c'est fondamental dans une économie comme la nôtre. Et je suis heureux de constater qu'elle est au coeur des priorités gouvernementales. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Montmorency. Mme la députée de Sauvé.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Le député de Montmorency mentionnait que, lorsqu'il y a des crises, il y a des choix à faire. Et ça introduit bien un peu le thème que je voulais aborder par mon intervention, puisqu'il est arrivé à quelques occasions, puis je pourrai l'illustrer, que la ministre de la Culture laisse entendre qu'elle avait pris une décision, une orientation, mais c'est un peu, comme... Il faut le dire aux milieux culturels: Lorsque ce gouvernement et Mme la ministre prennent une décision, il n'y a rien de moins sûr que ça va rester comme la décision prise.

On va prendre l'exemple du patrimoine. On sait que, dans les cartons de travail de sa prédécesseure, il y avait le fait d'entamer une politique sur le patrimoine. Et, vraiment, je crois que c'est un dossier important. En commission parlementaire, au mois d'avril dernier, nous avons posé la question à Mme la ministre si, dans cette politique du patrimoine, elle avait l'intention d'y inclure ce que, moi, dans mes mots à moi j'avais appelé le patrimoine naturel. Mais j'avais abordé les questions liées au paysage, aux routes pittoresques, et tout ça. Mme la ministre m'a répondu, et je la cite: Oui, c'est une préoccupation, c'est ce que j'appelle le bout cadre de vie que vous appelez patrimoine naturel. C'est une préoccupation, et il faut en faire une politique gouvernementale; c'est ça, l'idée.

Quelques semaines plus tard, arrive un article dans le journal Le Devoir , où M. Roland Arpin, qui terminait d'ailleurs son mandat sur le comité sur le système de santé, a confirmé le fait qu'on l'avait approché pour le Groupe de travail sur la politique patrimoniale du Québec. Et là M. Arpin dit: «Il ne faut pas faire une tarte à la crème – je le cite. Le patrimoine, ça peut comprendre le paysage, mais je crois qu'il ne faut pas s'engager dans ce genre de débat et laisser le soin à d'autres d'aborder ce problème. Moi, j'ai plutôt proposé à la ministre de parler du patrimoine culturel.»

Arrive l'annonce de la formation du Comité sur le patrimoine culturel. Là, on se demandait bien qui mène, la ministre ou M. Arpin. Annonce sur la formation du Comité sur le patrimoine culturel, un journaliste lui pose la question: Est-ce que vous envisagez d'élargir la définition de «patrimoine» et d'y intégrer la notion de paysage? La ministre répond: Non, moi, je veux parler de patrimoine culturel, ça, c'est clair.

Ce matin, la ministre de la Culture, dans son introduction de 10 minutes, parle de son Comité de travail sur le patrimoine. Et qu'est-ce que j'apprends? Ça va comprendre le paysage et l'aspect cadre de vie. Mais peut-être que ça va rechanger parce que j'imagine qu'on est devant une situation peut-être un peu comme avec la présidente de la Grande Bibliothèque, la question qui se pose, c'est: Qui mène? La ministre ou ses responsables de dossiers? La question se pose. Mais, quand une décision est prise, elle n'est pas prise pour très longtemps.

(11 h 30)

Prenons l'exemple maintenant du livre. Il y a eu un comité qui a fait dépôt de son rapport au printemps dernier, c'était le Groupe de consolidation et rentabilité des librairies. L'Association des libraires a souligné ce rapport en mentionnant que le Groupe avait accouché d'une souris, puisque bien sûr il n'y a pas eu consensus, tel qu'on s'y attendait, le consensus n'est pas arrivé.

La ministre a fait une annonce. Elle a annoncé qu'elle retournait la question vers la commission du livre de la SODEC. En cette Chambre, nous l'avons avisée que ça nous apparaissait une décision douteuse, puisqu'au même moment la Société de développement des entreprises culturelles, qui gère des programmes de soutien pour les libraires, avait fait son choix, puisqu'elle participait financièrement, elle devenait actionnaire d'un consortium de librairies de grande surface. Donc, dans un débat qui parle, entre autres, de l'avenir des petits libraires par rapport aux grandes surfaces, la question se posait: Est-ce que la SODEC n'a pas fait son choix? Et pourquoi renvoyer toute cette question à la SODEC? Mais la ministre a dit: Il n'y a pas de problème.

Quelques semaines plus tard – ha! – on a changé d'idée et on crée un groupe de travail, finalement, sous la présidence de M. Gérald Larose, que je salue d'ailleurs, en passant. Dans ce nouveau comité de travail, on sait qu'il y a un groupe qui a déploré son absence, c'est la Fédération des coopératives québécoises en milieu scolaire, qui a écrit une lettre où elle dit: «La ministre de la Culture, Mme Agnès Maltais, semble avoir une vision obtuse du milieu du livre en excluant délibérément les librairies coopératives des travaux du comité Larose.» Mais, à leur place, je ne m'en ferais pas trop. Peut-être que la ministre de la Culture a décidé de ne pas les intégrer au comité de travail, bien qu'ils occupent une place stratégique dans le marché du livre au Québec, mais, compte tenu que ce n'est pas tout à fait clair, qui mène maintenant dans les dossiers de la culture, peut-être que M. Larose va leur faire une place, hein, peut-être qu'on va changer d'idée. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Sauvé. Mme la ministre.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Bon. Écoutez, M. le Président, le Groupe de travail sur la consolidation des librairies a déposé un rapport et il l'a déposé au printemps, je crois, si je me souviens bien. Et, dans ce rapport, il y avait quelque chose d'important. Les gens disaient: Nous n'avons pas réussi à terminer nos travaux, nous demandons qu'il y ait un autre comité qui se penche sur les pratiques commerciales. C'était une des recommandations du Groupe de travail, auquel tout le milieu du livre aurait participé. Les gens étaient vraiment insatisfaits à la sortie de ce rapport-là.

Alors, dès que j'ai sorti publiquement le rapport, j'ai dit qu'on allait former un groupe de travail sur les pratiques commerciales. Alors, ça a été sorti immédiatement. Et ce qui a été fait. J'ai pris le temps de trouver un président en lequel je suis vraiment... J'ai vraiment été heureuse d'annoncer qu'il avait daigné accepter ce travail. M. Gérald Larose est un fin négociateur, il a une énorme expérience. Mais, en plus, il a une grande culture, il adore le livre. Et c'est ça qui est intéressant, c'est qu'autour de ce comité ce sont maintenant vraiment des gens qui adorent le livre, qui y croient profondément et qui ont accepté de se rasseoir, malgré qu'ils soient des compétiteurs.

Parce que, finalement, dans toute cette chaîne, les éditeurs, les libraires, les distributeurs, les grands, les petits, même le marché scolaire – qui n'est que quand même 10 % du marché, il faut les ramener à leur juste proportion, mais ils sont importants parce qu'ils sont auprès des jeunes, ils ont une importance à cause de la pratique qu'ils ont, mais ils ont une importance relative en chiffres – donc j'avais tout ce monde-là. Et je suis très heureuse de la formation de ce comité, où d'ailleurs on a déjà exprimé... Dès la première réunion, on m'a fait savoir que c'était le comité vraiment de la bonne volonté où, pour une fois, vraiment, on essayait d'y aller de façon harmonieuse et de trouver des solutions. Parce que c'est ça qu'on est, là. On est à la recherche de solutions pratiques. C'est sur la pratique commerciale.

Le marché scolaire. J'ai rencontré les gens des coops. Et j'ai quand même un certain penchant pour le milieu coopératif, ayant été moi-même membre de coopératives pendant 18 ans, de coopératives d'habitation, toutefois, mais donc je connais ce type de fonctionnement, j'y crois. Étant donné son importance mais son importance relative au niveau des pratiques commerciales, ce que j'ai fait, c'est que j'ai demandé à M. Larose de travailler avec eux de façon ad hoc. Alors, il ne faudrait pas me dire que, quand ils entrent dans le comité, c'est parce que je n'ai pas dit qu'ils étaient...

Écoutez, il y a un groupe de travail. Ce groupe de travail rassemble les principaux joueurs, et, de façon ad hoc, au fil des discussions, se joindront les gens des coopératives, et ils ont accepté. Alors, de ce côté-là, je pense qu'on a réussi finalement à bien rétablir les choses et à faire que tout le milieu du livre travaille ensemble.

Au niveau du patrimoine. Il y a plusieurs notions dans le cadre de vie d'un patrimoine, les arrondissements naturels... Bon. Il y a une grande politique du patrimoine qu'on est en train d'élaborer. Cette politique du patrimoine est en train de se forger. C'est un groupe-conseil qui y travaille actuellement qui aura à faire la lumière sur ce type de problématique et proposera un partage des responsabilités en rapport avec ces questions, notamment avec un grand nombre d'autres ministères. Il y a vraiment un partage des responsabilités à faire. Mais le Groupe de travail est un groupe de travail sur le patrimoine culturel.

À côté de ça, il faut savoir que je vais avoir une politique des concours d'architecture, ce qui touche aussi au cadre de vie, aux arrondissements naturels, toute cette politique d'architecture là. Donc, il y a plusieurs travaux qui se font actuellement. On a déjà des arrondissements naturels. Alors, c'est un peu tout ça. Il y a l'aménagement du territoire aussi, l'urbanisation, sur lesquels on se penche. Donc, ce sont plusieurs blocs.

Mais ce qui est important, c'est que le groupe-conseil va travailler. Si la société en est rendue à un point de discussion où elle veut aborder ces problèmes et qu'elle amène une nouvelle façon, un nouvel angle de vie, bien, je recevrai avec plaisir les résultats des discussions de ce que m'amènera le groupe-conseil.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de Saint-Hyacinthe. M. le député.


M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. Comme on le voit bien, le gouvernement – et on l'a très bien vu dans l'exposé de Mme la ministre – pose un certain nombre de gestes concrets pour exprimer sa vision des choses et aussi pour encourager la création culturelle, la diffusion culturelle. Donc, le gouvernement a une vision et, d'un autre côté, il pose des gestes concrets pour réaliser cette vision des choses dans la promotion de la culture québécoise, dans son expression et dans le fait de la rendre la plus disponible possible pour tout citoyen ou toute citoyenne du Québec, de la rendre vraiment une expression qui soit à la portée de tous les citoyens.

Et, pour y arriver, eh bien, le ministère a mis en place un processus pour signer des ententes avec le plus grand nombre possible de municipalités. Parce que les municipalités sont le lieu de gouvernement le plus près du citoyen, et donc, en signant des ententes avec les municipalités, ça rend possible à la fois un encouragement très concret et à la fois aussi très régionalisé de la création de la culture et de la diffusion des événements culturels, des spectacles et des créations artistiques.

Il faut bien comprendre que, partout au Québec, on a et on crée et, quand on n'en a pas suffisamment, on développe des salles de spectacle, des lieux de rencontre, des lieux de création culturelle. À Saint-Hyacinthe, en particulier – j'en parle parce que je le connais bien, c'est mon coin, je sais que c'est partout pareil au Québec – nous, on s'enorgueillit d'être un lieu de culture déjà de vieille tradition où la musique a eu un rayonnement extraordinaire. Que l'on pense seulement, il y a 50 ans, à l'abbé Gadbois, qui a fait rayonner sur tout le Québec les racines culturelles du peuple. Et par la suite sont venus un nombre appréciable de groupes qui ont été très populaires et qui ont exprimé la culture québécoise sur toutes les scènes du Québec.

Actuellement, encore, tout ce processus de création culturelle et d'expression culturelle a donné lieu à la création de l'option théâtre, qui, depuis une trentaine d'années, forme des jeunes pour les arts de la scène. Donc, il y a toute une tradition culturelle. On a une société de diffusion des spectacles. Ce qui fait que tout ce processus qui est déjà ancré dans le terroir, dans la tradition, dans la façon d'être du peuple, chez nous, s'exprime dans de nouveaux instruments. Et c'est pour favoriser l'expansion de ces instruments qui rendent possible l'expression de la culture que des ententes se signent entre le ministère et plusieurs municipalités.

Il y a un peu plus de 60 unités, de 60 entités de base qui ont signé des ententes, avec le ministère, de politique culturelle. Et on se rend compte que ces municipalités qui signent ces ententes dépensent davantage dans la culture parce qu'elles ont compris qu'il y a là une source de développement culturel, d'expression des identités québécoises mais aussi d'enrichissement collectif. Dans la région de Québec, par exemple, on estime que 30 % à 40 % des dépenses effectuées par les touristes, soit 200 000 000 $ à 260 000 000 $ par an, vont à des activités culturelles. Donc, la culture est aussi un moyen d'enrichissement du développement économique collectif.

(11 h 40)

Au Lac-Saint-Jean, par exemple, La fabuleuse histoire , n'est-ce pas, qui est une création absolument magnifique... Ceux qui n'ont pas eu la chance d'aller la voir, je vous encourage à aller la voir, c'est vraiment magnifique. Sur une immense scène, à l'intérieur de l'aréna, on reprend l'histoire du peuple du Saguenay. Et, à travers le peuple saguenéen, c'est le peuple du Québec qui défile devant nous. Donc, cette activité-là, en plus d'être magnifique, crée 100 emplois directs et près de 200 emplois indirects dans le milieu. La culture, ça paie. Au Québec, on considère que 77 000 emplois sont liés à l'expression de la culture, 2 100 000 000 $ de salaires, 491 000 000 $ en impôts qui sont payés au gouvernement qui sont dus à la culture.

Donc, la vision du gouvernement du Québec est de développer la culture pour des raisons d'identité et pour des raisons économiques. C'est pour ça que les jeunes du Québec peuvent être fiers de ce gouvernement, peuvent être fiers de cette identité nationale, peuvent avoir cette fierté nationale qui leur permet de regarder l'avenir avec confiance. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Mme la députée de Sauvé.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Encore une fois, le député de Saint-Hyacinthe a mis la table pour une intervention que je souhaitais faire. On peut effectivement parler du rôle des municipalités en culture. Puis ça va nous amener à aborder un sujet qui concerne, en fait, des promesses d'argent pas tenues, où l'argent, en tout cas, n'arrive pas. Vous me voyez sûrement venir, Mme la ministre. Il y a eu un engagement...

Peut-être, en premier, je veux juste souligner... On a parlé, ici, du côté ministériel, de l'importance, donc, des municipalités en culture. C'est tout à fait vrai. Mais je veux juste souligner un fait indéniable, c'est que, dans le fameux Comité sur le patrimoine – Dieu sait que, localement, la question du patrimoine touche au premier chef des décisions qui doivent être prises par les municipalités – lors de l'annonce de la composition du Comité sur le patrimoine, il n'y avait pas de représentants du milieu municipal. Donc, il va falloir aussi, j'imagine, puisque la réponse, lorsqu'il manque quelqu'un autour de la table, c'est: De façon ad hoc, hein, ils seront invités, donc j'imagine que, de façon ad hoc... Mais j'espère qu'au moins les municipalités seront appelées à être de vrais partenaires, autour de cette table, qui parlent de patrimoine.

Maintenant, parlons de moratoire sur les équipements culturels. Les municipalités sont effectivement un partenaire de premier plan au niveau de la culture, si on parle en plus de démocratisation de la culture. Or, en ce moment, il y a de nombreux projets un peu partout en attente. On peut vous en citer quelques-uns, entre autres, des projets qui sont en attente dans des circonscriptions représentées par certains de mes collègues, ici, du côté de l'opposition officielle: la bibliothèque du Lac-Mégantic, le musée et centre d'interprétation de la Haute-Beauce, la bibliothèque de Clarendon, le complexe pour les arts visuels de Hull, la bibliothèque de Rock Forest, la bibliothèque de Châteauguay, le Centre de production et de diffusion de Carleton.

Pour que les gens nous comprennent bien, c'est qu'il y a, depuis la poursuite de l'objectif du déficit zéro, un moratoire. Donc, il n'y a plus de dépenses, à quelques exceptions près qui sont sous la discrétion de la ministre, dans des équipements, construction, rénovation, agrandissement d'équipements culturels.

Le premier ministre, le 1er novembre dernier, en campagne électorale, a pris l'engagement de tenir la promesse électorale que le moratoire sur les équipements culturels serait levé. Cette promesse a été tellement entendue, ça laissait tellement supposer que, s'il y avait réélection, le moratoire serait levé, que nous avons ici une lettre qui provient de la Direction de la Montérégie du ministère de la Culture, qui est datée du 2 mars 1999, où le fonctionnaire indique à des personnes qui... C'est du comté de Vaudreuil, pour un équipement dans la région de Vaudreuil, pour une bibliothèque, si je ne me trompe pas.

Bien, on répond dans cette lettre: «La levée du moratoire, attendue pour le 1er avril prochain, permettra aux clientèles admissibles de se prévaloir de ce programme.» Donc, il y avait une forte attente au sein du ministère, un signal avait été envoyé assez clairement que le moratoire, on s'y attendait pour bientôt.

Mais, effectivement, malgré l'atteinte du déficit zéro, malgré 1 400 000 000 $ qui sont arrivés du gouvernement fédéral, pas d'argent pour la levée du moratoire. La ministre a répondu à cette question dans une entrevue accordée au Devoir peu de temps après le dépôt du budget: «Il y a eu une question de priorisation. Nous avons plutôt répondu à des urgences au cours des deux dernières années.» M. le Président, je vous ai décrit la situation des urgences qu'il y avait en cours en ce moment dans le milieu de la culture, les nombreuses crises à régler. Là, je suis en train de comprendre que la levée du moratoire, si je me fie aux paroles de la ministre, ce n'est vraiment, mais alors là vraiment, vraiment pas pour bientôt.

Il y a un autre sujet que je voudrais aborder, là où les argents ont été annoncés mais où les organismes culturels n'en ont toujours pas vu la couleur, c'est le Fonds de stabilisation et de consolidation des arts et de la culture du Québec. Ça, c'est un organisme sans but lucratif que la ministre a formé. Elle a incité des personnes à fonder cet organisme et, à l'aide de crédits supplémentaires, elle y a investi 15 000 000 $. Donc, cet organisme aura à sa disposition 15 000 000 $ pour la stabilisation et la consolidation de certains organismes.

Dans le communiqué du 14 avril, on disait: «Sa structure organisationnelle, son plan d'affaires, son mode de fonctionnement seront annoncés d'ici quelques semaines.» Nous sommes sept mois plus tard. Lorsque, nous, nous avons téléphoné cette semaine pour savoir si, comme organisme culturel, des gens pouvaient déposer des demandes, on nous a dit: Ce n'est pas prêt. Nous ne savons pas encore comment on va fonctionner. Les formulaires ne sont pas prêts, et, de toute façon, tout doit être entériné par la ministre. Sept mois plus tard, M. le Président.

Mais, moi, j'aimerais obtenir au moins un engagement de la ministre, ici. Ce fonds doit servir, entre autres, à aider à résorber des déficits accumulés dans des organismes culturels. Est-ce qu'on peut s'entendre que les déficits que les organismes culturels, à cause de crises créées par votre gouvernement, vont avoir créés cette année ne seront pas considérés lorsqu'il y aura des actions? J'espère que ce fonds de 15 000 000 $ ne servira pas à effacer des déficits que vous avez vous-mêmes créés dans les organismes culturels cette année. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Sauvé. Avant de passer la parole à la ministre, j'aimerais rappeler qu'on est à l'étape des conclusions. Et Mme la ministre et la députée de Sauvé ont chacune un temps de parole de 10 minutes. Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.


Conclusions


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors, je rêvais de voir arriver au cours de l'interpellation quelques députés libéraux qui auraient pu nous faire croire que la culture avait une place vraiment prioritaire et importante. J'aurais aimé vous voir appuyée, Mme la députée. M. le Président, j'aurais aimé voir la députée appuyée. Ça aurait été bien vu de la part d'un gouvernement qui considère que la culture est prioritaire. Malheureusement, ce n'est pas le cas.

J'aimerais rappeler aussi que, s'il y a un moratoire sur les équipements culturels, c'est un moratoire qui est existant à travers tout le Québec et qu'il n'y a pas de favoritisme, de ce côté-ci. Alors, si on a entendu nommer des équipements dans des comtés du Parti libéral, je rappelle qu'il y a des salles de spectacle, il y a des équipements en attente à travers le Québec. J'ai ici, à côté de moi, le député, qui sait très bien que la salle de spectacle de Saint-Hyacinthe est sur la liste, la salle de spectacle de Rimouski, les cégeps de Granby, de Petite-Vallée. Ce sont des dossiers qui sont effectivement eux aussi en attente. Donc, de ce côté-là, pas de favoritisme mais un engagement électoral qui sera réglé, qui sera accompli au cours du présent mandat.

La ministre circule à travers le Québec. Que fait la ministre? Parce que c'est un peu la question qu'a posée, M. le Président, la députée en entrée de jeu: Que fait la ministre? La ministre circule au Québec. Elle était au Festival de Rouyn-Noranda, au Festival de la poésie de Trois-Rivières, elle était à Montréal, au Gala du commerce et du design, parce que c'est important. Elle a parcouru le Québec lors de la Semaine des bibliothèques, en l'ouvrant à ville LaSalle. Elle est allé défendre la diversité culturelle à Oaxaca, au Mexique, à Paris.

Elle est allée régler un problème crucial à Los Angeles sur le doublage. On n'en a même pas entendu parler, savez-vous. Je ne fais pas toujours les premières pages des médias, mais je règle. On avait des problèmes au niveau du doublage. Malheureusement, les bonnes nouvelles font rarement la première page, M. le Président. Il y a sept majors qui ont le droit de distribuer et de faire du doublage au Québec, seules six en faisaient. Jamais – la Universal, M. le sous-ministre? – ...

Une voix: Je crois, oui.

Mme Maltais: ...je crois, la Universal n'avait doublé, et Warner se retirait. Après ma visite à Los Angeles, Warner s'est remise à doubler et la Universal a pris sept contrats de doublage au Québec, signés chez Covitec. Donc, le dossier du doublage au Québec a fait un grand pas pendant que la ministre circule.

D'autre part, si vraiment la députée veut être rassurée et voir ce que fait la ministre, M. le Président, il y a eu 13 allocutions pendant le mois d'octobre: au Festival de la poésie de Trois-Rivières, 12 octobre; lancement du plan d'action de la capitale – c'est majeur, la section culture, et là on ne pourra pas dire que c'est seulement une oeuvre de ma prédécesseure, puisque, dès le début, j'étais de tous les débats, étant coprésidente du comité culture ici, dans la région, alors j'ai donc participé activement à l'élaboration de ce plan d'action, j'étais très fière de livrer, au bout de la ligne; la Cinémathèque québécoise; hommage à Arte; prix du journalisme Molson; Forum québécois du loisir, où j'ai fait une longue allocution; enfin, sur des dossiers extrêmement importants, Festival d'Abitibi, Gala de l'ADISQ. Bon. Alors, voilà, la ministre circule et la ministre travaille.

(11 h 50)

Je me souviens du boycott des activités culturelles par la CEQ. Il y a un éditorial ce matin dans Le Soleil qui dit: Un boycott qui fait mal . Et j'en suis consciente, je l'ai dit, j'ai été une des premières à dénoncer ce boycott. D'ailleurs, le journaliste, Jean Martel, dit bien: «La ministre de la Culture, Agnès Maltais, a vainement tenté de rétablir la liaison entre les syndiqués et les artistes.» Et c'est ce qu'il fallait qu'il se fasse. C'est ce qu'il faut qu'il se passe.

Et il y a en gros titre: La CEQ doit réévaluer son moyen de pression . Il faut viser la bonne cible. C'est la CEQ, ce n'est pas le gouvernement du Québec qui crée la crise. C'est la CEQ qui boycotte les activités culturelles, il est important de le rappeler. Là-dedans, ce sont les artistes qui sont victimes. Et ils sont victimes d'un boycott d'un syndicat, que je respecte, je respecte les enseignants, enseignantes, qui ont fait un immense travail au fil du temps, qui ont permis à la culture et à l'éducation de se rencontrer, qui ont permis à nombre d'activités de se faire sur le terrain, dans les écoles. Mais c'est la CEQ qui boycotte la culture et qui crée ce que la députée appelle une crise.

Quels sont les grands chantiers que la ministre a mis sur pied? Il y a la politique des concours d'architecture qui s'en vient. C'est quelque chose d'attendu avec plaisir. Ce sera une politique qui va nous permettre que les projets du ministère de la Culture... qui sera exemplaire à cet effet. Et il y aura une politique incitative pour les autres ministères. Donc, politique des concours d'architecture. Politique des musées, enfin, qui s'annonce, qui a été saluée par la Société des musées québécois, qui va être un grand moment, qui va être un beau moment, qui est vraiment, je dirais pour une ministre, là, une superbe annonce, enfin faire cette politique attendue depuis, je pense, ça fait...

Une voix: 10 ans.

Mme Maltais: ...10 ans, qu'on...

Autre chose qui est attendu depuis très longtemps, le Groupe de travail sur le patrimoine, qui, une fois qu'on aura ce rapport, permettra d'élaborer enfin une politique du patrimoine. Et ça, c'est 10, 15 ans d'attente. Le milieu est très satisfait.

Et, pour rassurer, M. le Président, la députée, Louise Quesnel, qui est une chercheure à l'Université Laval, qui est une spécialiste connue, reconnue, des relations avec le monde municipal, fait partie du groupe-conseil. Donc, il y a une attention. Mais les gens qui sont autour de ce groupe-conseil, ce sont des gens qui sont des spécialistes de la question, mais ils ne sont pas des gens de terrain et ils rencontrent les spécialistes et prennent avis. Donc, le groupe-conseil va rencontrer les municipalités, a ou va rencontrer les municipalités. Mais il y a déjà une forte préoccupation quant au milieu municipal dans ce groupe-conseil

Rapport sur les métiers d'art, où on cherche une stratégie, on cherche des stratégies de commercialisation parce qu'on de la production, mais on a besoin de commercialiser, d'avoir de la vision là-dedans. Alors, il y a de ce côté-là qu'on travaille.

Programme de recyclage des édifices religieux. C'est tout nouveau. Ça s'en vient, ça se met en branle. C'est qu'il faut ajouter toute la vision du Québec. On travaille avec des archevêchés, des diocèses, avec des fabriques. Ce sont des organisations autonomes. Alors, c'est quelque chose à mettre en branle. Mais il est en train de se faire un formidable mouvement pour redonner les édifices religieux aux collectivités. Et, comme ministre, je préconise que les édifices religieux qui ne seront pas restaurés et qui seront recyclés aillent d'abord à des organismes sans but lucratif, retournent à la communauté. C'est ça qu'on est en train d'examiner.

Fonds de consolidation. Vous l'avez dit, il y a 15 000 000 $ qui vont aller dans les organisations culturelles. C'est formidable. Ça s'en vient début décembre, je m'en suis assurée la semaine dernière. Début décembre, les programmes vont partir dans les organisations, et, avant la fin de l'année financière, normalement, les chèques devraient déjà rentrer dans les organisations. C'est quelque chose qui va se faire et qui va permettre justement d'insuffler de la nouvelle énergie, d'insuffler de l'argent neuf dans les organisations.

La diversité culturelle, qui est un dossier extrêmement important auquel nous accordons beaucoup d'importance, beaucoup d'importance. Le mémoire sur la Grande Bibliothèque va bientôt sortir, donc on va pouvoir rapidement débuter les travaux. La députée l'a bien souligné, j'ai été chercher de l'argent neuf dans l'argent qui est entré au dernier budget. Je souligne qu'on est allé chercher près de 75 000 000 $, cette année, en crédits additionnels sur ce 1 000 000 000 $.

La députée a fait une référence à la ministre précédente. Mme Frulla, que tout le monde respecte, qui a fait un magnifique travail, qui a sorti la politique culturelle, avait prévu des crédits additionnels en culture, du temps des libéraux: 14 000 000 $ en affirmation d'identité; 21 000 000 $ en soutien aux créateurs; accès et participation des citoyens à la vie culturelle, 22 000 000 $; pour 57 800 000 $ d'annoncés. Dans la politique culturelle de 1992, il y avait une annonce, 57 800 000 $. Les crédits obtenus sur trois ans, de 1993-1996, 19 000 000 $. Cette année, j'ai été chercher 75 000 000 $. Je suis très fière du travail que j'ai fait. Et, si Mme Frulla a su gagner le respect de la population, et des députés, et des artistes, et des gens, si Mme Beaudoin a été une successeure extraordinaire, je pense que je vais être capable de prendre la relève.

Voilà, c'est à peu près l'ensemble des choses. Il n'y a pas de crise. Il y a une situation difficile cet automne qui est vécue dans quelques ministères. Emploi-Québec, on a un groupe de travail, on est en train de travailler avec eux, mais il y a des investissements en culture. Il y a les négos qui sont difficiles. Place des Arts, il y a une décision de la Société de la Place des Arts qui vient d'être prise, alors il y a une décision d'affaires à l'effet qu'on ne rendra plus les services techniques. Ça va bien se passer.

Présentement, je dirais que, si jamais, M. le Président, la députée y voit crise, moi, j'y vois que tranquillement les solutions sont en train de s'amorcer et qu'on s'en va, encore une fois, vers une culture forte qui soutient une identité qui est un objet fondamental de la société québécoise. Merci.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Sauvé, vous rappelant que vous avez 10 minutes. Mme la députée.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je suis un peu estomaquée parce que je me dis: Il y a vraiment des caractéristiques profondes au sein de ce gouvernement. Je pense que la population, je pense aux gens ordinaires sur le terrain, lorsqu'ils ont vu la crise dans les hôpitaux cet été, ils ont aussi entendu ce gouvernement dire: Ce n'est pas vraiment une crise. La crise à Emploi-Québec, finalement, tout le monde, pratiquement unanimement – parce qu'on discute avec de vos collègues du côté ministériel – dans nos comtés, et tout ça, on a tous vu qu'il y a eu une crise profonde à Emploi-Québec. Mais, jour après jour, en cette Assemblée, le premier ministre et la ministre de l'Emploi se dont levés pour nous dire que tout allait bien.

Moi, j'espérais au moins qu'aujourd'hui on sorte d'ici avec un accord, puis un accord de collaboration pour dire: Hé! il faut qu'on crie fort parce qu'il y a une crise dans le milieu de la culture au niveau des organismes culturels, au niveau des entreprises culturelles. Et je pense que de ne pas se cacher les yeux, de ne pas se boucher les yeux et de le dire pourrait vous aider, Mme la ministre, à défendre encore mieux le milieu de la culture au sein de votre propre gouvernement.

Donc, si on est le moindrement à l'écoute soit des entrepreneurs soit des artistes, nous savons pertinemment qu'il y a une réalité de tous les jours qui veut que ces gens-là, soit que leurs entreprises, leurs organismes sont menacés, soit que les entreprises culturelles ont des problèmes de financement. Puis de façon très concrète. Il y a un paquet d'artistes qui ont perdu leurs contrats puis qui n'ont plus de quoi se payer la pinte de lait pour mettre dans le frigidaire. Donc, ça, c'est une réalité, là, concrète. Et, moi, je souhaite qu'on la dise et qu'on se dise qu'on va prendre des actions, avec le soutien bien sûr de l'opposition officielle, pour le plus vite possible régler ces crises dans le milieu de la culture.

Lorsqu'on a parlé de la crise à Emploi-Québec, il y a eu des répercussions immédiates et vraiment importantes sur des organismes culturels dans toutes les régions du Québec. Ce que j'entends, du côté de la ministre, c'est une autre réponse qui devient un peu une litanie du gouvernement. Qu'est-ce qu'on m'a répondu? C'est: On fait un comité, j'ai un comité de travail qui se penche là-dessus, et on travaille ensemble. Il y a eu un comité sur le secteur de la formation en culture. Ce comité-là s'était réuni à quelques occasions. Aux dernière nouvelles, ça faisait quelques mois qu'ils ne s'étaient pas rencontrés. Donc, des comités comme on voit dans le milieu de la santé puis un peu partout, on sait ce que ça donne. Les gens, sur le terrain, ils savent pertinemment ce que ça donne. C'est que, concrètement, pour cet automne, pour le printemps prochain, ca ne donne pas des emplois puis ça ne donne pas une vitalité au sein des organismes culturels.

Quand on parle des moyens de pression de la CEQ, je pense que, comme vous, il faut déplorer le fait qu'on prenne en otage un secteur. Ce qui est clair par ailleurs, c'est que ça témoigne en toutes lettres de la fragilité de tous les jours du milieu culturel. Mais ce qu'il ne faut pas oublier – vous-même, vous avez dit que l'éditorialiste du Soleil disait que la ministre de la Culture est vainement intervenue – c'est que ces moyens de pression là sont quand même issus d'un conflit de négociations où vous êtes partie prenante. Donc, pour moi, le gouvernement est au bout de la chaîne de cette situation vraiment critique qui se vit dans le milieu de la culture.

Parlons de la Place des arts. Vous avez dit: C'est réglé. Vous venez de dire: C'est réglé, on a décidé qu'on n'offrait plus les services techniques. Je suis vraiment étonnée que vous pensiez que c'est réglé. Pour moi, l'annonce d'hier, c'est le début d'une longue saga judiciaire parce que bien sûr cette décision va être contestée.

(12 heures)

Et, lorsqu'on prend du recul – parce que, admettons que la situation à la Place des arts, elle est particulière, elle est complexe, puis je prends le temps de préciser que, comme parti de l'opposition, on n'a pas notre place à la table de négociation, on ne sait pas tous les détails de ce conflit – il reste que l'annonce d'hier rend une situation un peu particulière. On est devant une société d'État qui gère un équipement culturel que vous considérez d'ailleurs national, qu'il y a des salles de spectacles, qu'il peut y avoir des productions de la part de la Place des Arts, mais on est devant, donc, une institution comme ça, puis il n'y aura pas de services techniques, on va fournir un service de placiers, et tout ça, mais pas le service technique.

Dans une perspective à long terme, la question se pose. Mais elle se pose aussi à la lumière du projet de loi n° 6, qui est toujours en attente d'adoption, puisque, dans ce projet de loi, au contraire de dire qu'on va enlever des services, vous avez un article qu'on a débattu ensemble en commission parlementaire qui dit que la Place des Arts pourra offrir de nouveaux services, des services particuliers. Donc, elle va offrir une panoplie de nouveaux services mais pas de services techniques. Enfin, moi, je me pose des questions.

On a remarqué que M. Louis Bernard est membre du conseil d'administration de la Place des Arts. C'est votre Louis Bernard à vous dans ce dossier-là, c'est le 9-1-1 du gouvernement. Mais, pour nous, là, il n'a pas tout à fait réglé cette question-là à votre place, Mme la ministre.

Maintenant, je voudrais inviter Mme la ministre à beaucoup, beaucoup de prudence dans le dossier des producteurs de films et de télévision. En Chambre et ici, encore aujourd'hui, elle associe la notion d'enquête avec le gouvernement fédéral avec Téléfilm directement. Je pense qu'il faut vraiment mettre les choses très claires. La GRC étudie en ce moment la possibilité de faire des enquêtes, et ces enquêtes ne sont pas sur Téléfilm. Et je pense que le milieu des producteurs de films et de télévision va vous demander d'être très prudente pour ne pas non plus faire peser des allégations sur Téléfilm, cette institution qui est aussi un contributeur financier extrêmement important dans l'industrie. Donc, ramenons les pendules à l'heure, il n'y a pas d'enquête sur Téléfilm Canada, mais il y a bien examen s'il doit y avoir des enquêtes menées sur certaines compagnies dans le domaine du film et de la télévision.

Vous avez dit qu'ici, au Québec, il n'y a pas de problème. Vous avez dit ça tantôt: On n'a pas de problème. Je pense que vous avez vous-même mentionné qu'il fallait être très prudent. Je vous répète qu'il y a deux souhaits exprimés continuellement par le milieu du film et de la télévision. Le premier, c'est que, s'il y a des pommes pourries dans le panier, elles doivent être enlevées. Le deuxième, c'est que, oui, tout le monde est d'accord pour dire qu'il doit y avoir une revue de nos programmes, de nos mécanismes de soutien, de nos moyens de contrôle de cette industrie.

Cette industrie a évolué au cours des dernières années. Elle est maintenant plus que jamais sur la scène internationale. Elle est bien sûr dépendante des secteurs financiers, bourses, banques, qui doivent l'appuyer. Mme la ministre, on n'a pas le droit de dire: Il n'y a pas de problème. Il y a au moins un problème, de faire la lumière sur cette situation, de vérifier si les allégations sont vraies ou pas. Dans ce dossier-là, on est plus que jamais à la recherche de la vérité, mais le plus vite possible. Parce qu'on ne peut pas attendre plusieurs mois, là. On ne pourra pas attendre le 1er février, le report de la commission de la culture. Il faut que ça soit fait le plus vite possible pour rassurer tous les acteurs.

Dans le dossier de la Grande Bibliothèque, qu'on a abordé, ce que j'ai compris, là, c'est que ce n'était pas décidé, hein? C'est 85 000 000 $, à peu près. On a eu droit à ce commentaire. J'espère que vous pourrez très bientôt confirmer quel est le montant qui sera octroyé à la Grande Bibliothèque. Parce que, à peu près 85 000 000 $, là, le «à peu près», on est à combien de plus? 5 000 000 $, 10 000 000 $, 15 000 000 $, 20 000 000 $? La question, pour moi, est toujours en suspens.

Sur la question également du patrimoine, j'ai mentionné vraiment, au fil des mois, les variations dans la décision de la ministre, si le Comité sur le patrimoine allait comprendre ou non la question du paysage. Tantôt, ce que j'ai compris, c'est qu'on a dit: Ah! il y a beaucoup de notions dans le patrimoine – peut-être que vous êtes en train de faire vos classes – mais ça finit avec: Mais il y a l'architecture, il y a des concours d'architecture qui vont être encadrés, et ça, finalement, tiens, tiens, je vais pouvoir accrocher la notion de cadre de vie au concours d'architecture. Là, ce n'est pas suffisant non plus, Mme la ministre, il va falloir une réponse claire: Est-ce que le Comité se penche sur le cadre de vie, sur la notion, entre autres, de paysage? Et les gens qui nous écoutent se rappelleront que ça aura été quelque chose de très important dans le cas du dossier de la côte des Éboulements, où, on le sait, la beauté du paysage de Charlevoix est compromise par les travaux gigantesques menés par ce gouvernement.

Sur la question du doublage de films, vous avez fait une intervention, à ma connaissance, et ça a été la même chose sur le dossier de la Coalition sur la diversité culturelle. Il vous arrive d'aller défendre des dossiers mais sans vraiment avoir pris contact avec le milieu auparavant. Donc, à ma connaissance, il n'y avait pas eu de rencontre avec, non plus, les distributeurs de films, par exemple, avant que vous alliez à Los Angeles, pas de rencontre avec la Coalition sur la diversité culturelle avant que vous alliez au Mexique, par exemple. Donc, on se pose des questions sur, vraiment, votre contact avec le milieu.

Moi, je veux rappeler ici, en terminant, vraiment les réalisations, entre autres, du Parti libéral du Québec dans le dossier de la culture. Vous l'avez vous-même mentionné. Je pense, par exemple, aux crédits d'impôt, à la notion de crédits d'impôt accordés par Gérard D. Levesque lorsqu'il était ministre des Finances, bien sûr à la loi sur le statut de l'artiste attribuée à Mme Lise Bacon, à la mise en place du Conseil des arts et des lettres du Québec et de la Société de développement des entreprises culturelles, qui est une réalisation de Mme Liza Frulla.

Je pense qu'on peut dire que vraiment on n'a pas de leçons à recevoir, de ce côté-ci de la Chambre, sur l'importance accordée à la culture. Je rappelle que, s'il est question de culture aujourd'hui à cette Assemblée nationale, ce n'est pas grâce au gouvernement parce qu'il n'y a pas de projet de loi, la commission de la culture ne siège pas. C'est bel et bien à la demande de l'opposition officielle qu'aujourd'hui on a pris deux heures pour enfin vraiment faire la lumière sur ce qui se passe dans le milieu de la culture.

En terminant, donc, on aura compris qu'ici on offre toute notre collaboration pour tenter de résorber au plus vite la crise qui sévit dans le milieu culturel. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Sauvé. La commission ayant accompli son mandat, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 6)


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