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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 15 septembre 1998 - Vol. 35 N° 85

Consultation générale sur le projet de loi n° 451 - Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé et d'autres dispositions législatives


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Table des matières

Auditions


Intervenants
Mme Nicole Léger, président suppléante
M. Jean Garon, président
M. André Boisclair
M. Thomas J. Mulcair
M. Michel Rivard
M. Geoffrey Kelley
*M. Denis Cusson, RCLALQ
*M. Michel C. Globensky, Équifax Canada inc.
*Mme Odette Auger, idem
*M. Raymond Doray, idem
*Mme France Thibault, AQAM
*Mme Stéphanie Gourgues, AAPI
*Mme Louise Roy, idem
* M. Ura Greenbaum, Association pour la défense des personnes et des biens sous curatelle publique
*Mme Denise Chalut, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Quatorze heures cinq minutes)

La Présidente (Mme Léger): Si vous voulez, on va commencer. Alors, je déclare la séance ouverte. Je vous rappelle le mandat de notre commission qui est de poursuivre la consultation générale et les audiences publiques sur le projet de loi n° 451, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé et d'autres dispositions législatives.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui. M. Rivard (Limoilou) remplace M. Gaulin (Taschereau) et M. Mulcair (Chomedey) remplace Mme Vaive (Chapleau).

La Présidente (Mme Léger): Merci. Je vais vous mentionner l'ordre du jour, si vous voulez bien. Alors, nous recevons, à 14 heures, le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec; à 14 h 45, Équifax Canada inc.; à 15 h 30, l'Association québécoise des archivistes médicales; à 16 h 15, l'Association sur l'accès et la protection de l'information; et, à 17 heures, l'Association pour la défense des personnes et des biens sous curatelle publique.


Auditions

Alors, je demanderais au groupe du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec de vouloir s'avancer, s'il vous plaît. Bonjour, monsieur. Vous voulez bien vous identifier?


Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ)

M. Cusson (Denis): Denis Cusson, comme coordonnateur-directeur du Regroupement. Mme Thibault et Mme Coziol s'excusent de ne pouvoir être présentes pour la présentation du mémoire.

D'entrée de jeu, on va faire un petit préambule pour mettre en contexte la loi des renseignements personnels dans le secteur privé en relation avec la question du logement, de façon précise, étant donné que pour voir l'application concrète d'une loi, c'est en la mettant dans sa pratique qu'on peut voir s'il y a des lacunes puis si les objectifs sont bien répondus.

Le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec existe depuis 1978; il regroupe à travers le Québec des organismes qui travaillent sur la problématique du logement. Le Regroupement regroupe présentement 16 organismes membres.

Le Regroupement se préoccupe et intervient sur la discrimination faite à l'endroit des ménages locataires pauvres depuis le début des années quatre-vingt, au moment où la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec et la Ligue des propriétaires de Montréal mettaient en place leur liste noire des locataires. L'intervention du Regroupement n'est pas étrangère à l'interdiction formelle inscrite dans le Code civil du Québec de refuser de louer un logement à une personne ayant exercé ses droits devant les tribunaux.

D'entrée de jeu, le Regroupement des comités logement et associations de locataires proclame sans aucune ambiguïté que le droit au logement est égal, sinon supérieur, à celui de la propriété privée. Il nous apparaît clairement que le logement n'est pas un bien de consommation comme les autres, mais, au contraire, un besoin essentiel, un droit, le premier jalon qui permet à une personne de s'intégrer et de participer à la société.

L'origine même de la loi instituant la Régie du logement atteste de ce droit. Ainsi, dans le livre blanc sur les relations propriétaires-locataires, de décembre 1977, le ministre responsable de l'Habitation énonçait certains principes se référant à ce droit. Par exemple, et je cite: «au-delà des relations contractuelles entre locataires et propriétaires, le gouvernement se doit également de protéger l'un des droits essentiels de tout citoyen, le droit au logement» et «pour tous les citoyens qui habitent les logements locatifs, le droit au logement est aussi important que le droit de propriété».

Or, ce droit au logement est sérieusement compromis compte tenu de l'appauvrissement de la population et de la discrimination basée sur les revenus des ménages locataires. C'est dans ce contexte que s'inscrit la prolifération de renseignements personnels exigés par les propriétaires immobiliers.

(14 h 10)

L'immobilier demeure un secteur économique rentable qui doit être contrôlé par des interventions gouvernementales soutenues. Cette réalité prend toute son importance quand on sait que 90 % des ménages locataires au Québec sont prisonniers de ce marché. En discriminant et en excluant les personnes assistées sociales, les chômeurs et les chômeuses, les travailleurs et travailleuses à faibles revenus, les étudiants et les étudiantes par l'usage de formulaires d'offre de location, les propriétaires investisseurs et les associations qui les représentent les confinent au parc de logements locatifs le plus détérioré, voire même à l'itinérance.

Pas de renseignements, pas de logement. Les formulaires de prélocation, la collecte d'informations personnelles sur les aspirants et aspirantes locataires n'ont qu'un seul but: permettre au propriétaire de choisir son locataire idéal. Ne pouvant plus dire tout haut: Je ne veux plus d'assistés sociaux, en raison de la Charte des droits de la personne, les propriétaires le font sous le couvert de la recherche de la solvabilité. Ils évitent ainsi de faire de la discrimination au sens de la Charte des droits.

Les renseignements qui sont collectés ne servent qu'à la sélection, puisqu'ils sont conservés par le propriétaire et peuvent servir à d'autres fins, comme à l'intrusion dans la vie privée de ses locataires et à un contrôle plus serré sur leur vie, pouvant aller jusqu'au harcèlement. Ils peuvent aussi être utilisés à des fins de chantage, d'intimidation pour que le propriétaire puisse ainsi se soustraire à ses obligations, entre autres concernant l'état du logement et de son entretien.

L'utilisation systématique de la collecte de renseignements, lors de demande de location de logement, n'est pas un phénomène récent. L'apparition du formulaire de bail obligatoire de la Régie du logement, à l'automne 1996, a mis fin à la prolifération de baux maison qui comportaient des clauses de collecte de renseignements personnels pour le moins discutables sur le plan légal. Mais le problème de la protection des renseignements personnels est tout de même resté entier avec les différents formulaires de prélocation et les annexes au bail circulant sur le marché. Ces formulaires contiennent des demandes de renseignements qui vont des numéros d'assurance sociale, d'assurance-maladie, de comptes bancaires, de cartes de crédit, de permis de conduire, la marque de voiture en passant par l'identification des enfants, des anciens employeurs, de la prise de photographie, etc.

On a relevé des formulaires contenant plus de 40 demandes de renseignements personnels. Bref, des formulaires qui contiennent une quantité clairement abusive de renseignements personnels, qui dépassent largement le cadre de la loi sur les renseignements personnels dans le marché privé, qui stipule que seuls les renseignements nécessaires à la location peuvent être exigés par un propriétaire. Le Regroupement des comités logement considère que les seuls renseignements nécessaires sont ceux prévus dans l'actuel bail obligatoire réalisé par la Régie du logement.

La personne qui se fait demander toute une panoplie de renseignements personnels par un propriétaire est confrontée à une situation délicate. D'une part, même si elle doute qu'il y a abus de la part du propriétaire et qu'elle est victime d'une atteinte dans sa vie privée, il y a de fortes chances pour qu'elle consente à donner les informations demandées pour ne pas perdre le logement convoité. Le propriétaire est favorisé par un rapport de force où il a le dernier mot: s'il n'y a pas de renseignements, il n'y a pas de logement. Il contrevient ainsi à l'article 9 de la loi qui nous dit très bien que «nul ne peut refuser d'acquiescer à une demande de biens ou de service [...] à cause du refus de la personne qui formule la demande de lui fournir un renseignement personnel [...]» et que, «en cas de doute un renseignement personnel est considéré non nécessaire».

D'autre part, même si le locataire est bien informé de ses droits et recours possibles concernant la protection des renseignements personnels et de la discrimination, il reste pris avec son dilemme de donner ou non les informations demandées, car les recours possibles ne lui rendront pas le logement refusé sur la base d'une non-divulgation de renseignements au propriétaire. Les faiblesses juridiques et l'inefficacité administrative de la Commission d'accès à l'information font en sorte que les formulaires de prélocation deviennent maintenant la première étape à la location d'un logement.

Les oublis dans le projet de loi n° 451. L'identification des acteurs dans la collecte et la détention de renseignements. Dans la collecte de renseignements personnels dans le domaine du logement locatif, nous retrouvons plusieurs acteurs dont les droits et obligations ne sont pas toujours faciles à établir. Il y a d'abord le locateur. Le locateur ou son représentant, qui peut être un concierge ou un gérant d'immeuble, c'est celui qui fait remplir le formulaire de demande de location duquel fait partie un formulaire de renseignements personnels.

Ce formulaire est remis généralement au propriétaire de l'immeuble s'il n'est pas le locateur de première ligne, s'il ne voit pas lui-même, donc, à la location de ses logements. Dans le cas d'une société immobilière, le formulaire peut transiter entre deux ou trois autres personnes avant de se rendre à la personne responsable. Le locateur ou le propriétaire, individu ou société, procèdent rarement par eux-mêmes à la vérification et à l'analyse du crédit du locataire.

La demande d'analyse peut prendre deux voies: La plus directe est le bureau de crédit – comme Équifax – duquel le propriétaire est membre. Être membre d'un bureau de crédit n'est pas toujours à la portée de tous; c'est pourquoi les associations de propriétaires immobiliers offrent aux propriétaires de bénéficier des services de bureaux de crédit en étant membre de leur association. Le formulaire de renseignements personnels transite alors dans les locaux d'associations de propriétaires immobiliers. Finalement, le formulaire va se retrouver, en dernière analyse, dans le bureau de crédit.

Les associations de propriétaires immobiliers occupent donc une place importante dans le processus de collecte de renseignements personnels lors de la recherche d'un logement. Ces associations, en plus d'être un lieu de transit, font l'édition et la distribution de formulaires. Ainsi, on standardise la collecte de renseignements.

Aux fins de la loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, comment identifier le rôle de chacun de ces acteurs? Qui est la personne qui constitue le dossier en vertu de la loi? À la lecture de l'article 4 et suivants, on peut considérer que tous les propriétaires immobiliers sont des personnes qui constituent des dossiers.

Le propriétaire doit donc indiquer l'objet du dossier, ne recueillir que les renseignements nécessaires à l'objet du dossier, ne recueillir que les renseignements de la personne concernée, à moins d'une autorisation de cette dernière pour s'assurer de l'exactitude des renseignements, inscrire la source des renseignements provenant d'un tiers, si le tiers est une entreprise, informer la personne concernée de la constitution d'un dossier, son objet, l'utilisation qui en sera faite, l'endroit où se trouve le dossier et les droits d'accès et de rectification. Presqu'aucun propriétaire ne fait cela.

Aucun n'informe le locataire de la constitution d'un dossier et de la possibilité de le consulter. Si on va plus loin dans la loi et que l'on regarde les obligations de confidentialité et de sécurité, on peut constater que là aussi peu de chose se fait. Qu'advient-il alors des dossiers des candidats et candidates locataires non retenus et de ceux et celles qui ne renouvellent pas leur bail?

Lequel de ces acteurs est un agent de renseignements personnels au sens de l'article 70? Selon la définition qui en est donnée à l'alinéa 2 de l'article 70, est considéré «agent de renseignements personnels celui qui fait le commerce de constituer des dossiers sur autrui, de préparer et de communiquer à des tiers des rapports de crédit au sujet du caractère, de la réputation ou de la solvabilité des personnes concernées par ces dossiers». Il peut y avoir des associations de propriétaires qui font le commerce de dossiers ou de rapports de crédit, mais généralement, ici, on parle des bureaux de crédit ou d'agences de recouvrement. Mais encore là on peut voir que, dans le lot d'acteurs, certains peuvent se retrouver à la fois agent de renseignements et aussi personne qui constitue des dossiers.

L'objet du dossier, l'utilisation des renseignements selon l'article 8. Les propriétaires immobiliers prétendent que la collection d'informations personnelles sert à évaluer la solvabilité du candidat ou de la candidate locataire. Cependant, lorsqu'ils sont interrogés sur l'utilité d'informations comme le numéro d'assurance-maladie, le numéro d'immatriculation de la voiture, du permis de conduire, la date de naissance, le numéro d'assurance sociale, de l'emploi occupé ou bien d'autres, ils répondent généralement que ces renseignements ne sont pas nécessaires pour évaluer la solvabilité du locataire. Ils finissent tous par contre par répondre que cela leur est utile en cas de déguerpissement.

Dans les faits, les propriétaires immobiliers mentent aux locataires sur l'utilisation qui sera faite des renseignements demandés. Nous savons aussi pertinemment que cela sert de leurre pour les locataires pauvres; on leur fait croire qu'une sérieuse étude est faite sur leur cas, et les gens, de bonne foi, pensent qu'ils pourraient avoir droit à un logement malgré leur pauvreté. Bon nombre de propriétaires ne conservent comme candidats locataires que ceux et celles qui occupent un emploi et ne donnent pas suite aux demandes venant des personnes sans emploi ou des étudiants.

(14 h 20)

L'obtention du service, avec l'article 9. Pas de renseignements, pas de logement, c'est la loi dans le logement locatif pour la location d'un logement. Contrairement à ce que nous dirait l'article 9 – que je ne vous rappellerai pas – le marché immobilier locatif ne l'entend pas ainsi, à savoir qu'un renseignement personnel est considéré non nécessaire en cas de doute. La personne locataire n'a pas de logement si elle ne donne pas toute l'information qui est demandée. Il n'y a aucun doute possible sur la pertinence d'un renseignement pour les propriétaires.

L'usage d'informations gouvernementales. On peut s'interroger sérieusement sur la collecte systématique de certains numéros qui sont à l'usage exclusif des gouvernements fédéral ou provincial. Il s'agit ici du numéro d'assurance sociale, du numéro d'assurance-maladie, du numéro de permis de conduire. Ces numéros donnent accès à des fichiers gouvernementaux, dont l'usage exclusif de services sociaux ou de droits de permis comme au niveau de l'automobile. Ils n'ont rien à voir avec la location d'un logement. Ce qui inquiète, c'est le fait que, s'ils sont demandés, voire exigés, il est possible d'avoir accès à des fichiers gouvernementaux. Il est donc impérieux, pour éviter toute fuite d'information, que le gouvernement interdise et punisse sévèrement quiconque en fait l'usage ou en demande l'information pour des fins non prévues par leur loi constituante.

Les recours et la Commission d'accès à l'information.

La Présidente (Mme Léger): Je peux vous demander de conclure tranquillement? Il vous reste à peu près une minute.

M. Cusson (Denis): O.K. Au niveau des recours, on voit qu'il y a un effort qui est fait au niveau de réduire les délais d'audition, en faisant en sorte qu'il y a seulement un commissaire qui peut suivre les dossiers. Mais par l'expérience qu'on a faite avec la Commission – qui prend déjà plus de six mois, dans certains cas un an, à étudier un dossier, même avec un seul commissaire – même si on réduisait de moitié le délai d'étude, ça serait encore trop long pour pouvoir obtenir le logement convoité.

Au niveau des pénalités prévues pour infraction à la loi, on déplore le fait que le gouvernement se sent comme étant la personne la plus lésée et non pas les individus. Il n'y a aucun dédommagement qui est donné aux individus alors que ce sont les droits des individus qui sont brimés et non pas le droit du gouvernement.

Au niveau des...

La Présidente (Mme Léger): Avant de terminer, avez-vous un dernier petit mot, là?

M. Cusson (Denis): Juste donner les principales recommandations que l'on fait. On demande que la Commission d'accès à l'information doit être dotée d'un pouvoir d'intervention en direct. Donc, qu'au moment de la collecte de renseignements personnels la Commission puisse intervenir sur le champ, comme ça se fait dans les cas de discrimination avec la Commission des droits de la personne.

La Commission doit être aussi dotée de pouvoirs coercitifs lors d'un non-respect de la loi ou des décisions qu'elle rend. Et qu'il soit formellement interdit de demander le numéro d'assurance sociale, le numéro d'assurance-maladie et de permis de conduire parce que ces renseignements donnent accès à des fichiers gouvernementaux. Dans l'application des sanctions – que ce soit lors d'amendes ou de dédommagements accordés aux victimes ou au moment d'ordonnance – que tous les acteurs impliqués, agent de location, propriétaire, association de propriétaires ou agents de renseignements, soient considérés selon leur mérite. On croit que le gouvernement ne peut se défaire de ses obligations sociales en permettant que se continue la discrimination à grande échelle.

La Présidente (Mme Léger): Alors, merci, M. Cusson. M. le ministre.

M. Boisclair: M. Cusson, je vous remercie pour votre présentation; elle est d'autant plus pertinente, puisque les membres de la commission, je pense, comprennent bien de part et d'autre la qualité de votre expertise. J'ai eu l'occasion de discuter des questions que vous soulevez, personnellement, avec vous, à l'occasion d'une rencontre que nous avons eue où vous avez soulevé les préoccupations qu'on retrouve dans votre mémoire. D'ailleurs, elles étaient résumées dans un dossier que vous avez peut-être déposé aux membres de la commission, mais effectivement – qui est celui que vous nous montrez à l'instant – où vous faites état de problèmes bien réels qui ont été vécus par des gens qui étaient à la recherche d'un logement.

C'est étrange qu'on se retrouve à avoir cette discussion aujourd'hui. Vous et moi avons tenté, à l'époque, de convaincre, alors que nous étions dans l'opposition, le gouvernement libéral d'adopter le bail obligatoire. M. Ryan était ministre de l'Habitation, à l'époque, et les libéraux s'opposaient à l'adoption par loi d'un bail type, qui est devenu le bail obligatoire, et on croyait, vous, moi et Mme Thibault, qui ne peut être avec nous aujourd'hui, que plusieurs de ces problèmes soulevés allaient être réglés par l'utilisation du bail obligatoire. On se retrouve au pouvoir, mon collègue Trudel, ministre des Affaires municipales, adopte l'idée du bail obligatoire, et on s'aperçoit rapidement que des gens en amont de la signature du bail exigent, dans des formulaires qui sont non prescrits, toutes sortes de renseignements, comme vous avez fait la démonstration. C'est un problème bien réel, je pense qu'il faut le regarder avec beaucoup d'attention.

Je suis toujours tenté, lorsque je suis confronté à des problèmes particuliers comme ceux que vous soulevez, à dire: Mon Dieu! ça serait peut-être tout simplement beaucoup plus simple si, dans la loi ou dans les règlements, on précisait quel genre de renseignements peuvent être utilisés. Ça serait la solution idéale; je mettrais dans la loi: Pour le bail, seuls peuvent être requis – je ne sais pas, moi – le nom et la liste des renseignements. Faire ça, ça serait adopter une approche sectorielle qui nous amènerait à le faire pour l'ensemble des secteurs d'activités. C'est ce que bien des gens sont venus nous demander, entre autres des gens du secteur privé, qu'on réglemente par secteur d'activité, dans des règlements, le type d'information et la qualité des informations qui peuvent être requises par la personne qui enquête sur une situation.

Tous les parlementaires avons mis de côté cette façon de faire. On a préféré avoir un modèle général et laisser le soin à la Commission, avec le temps et la jurisprudence, de clarifier, d'interpréter la loi en utilisant le critère de ce qui est utile et nécessaire, si ma mémoire est juste, nécessaire, ce qui est nécessaire. Alors, ce que je comprends, c'est que votre problème est avec la Commission un peu plus qu'avec la loi, et il est difficile pour nous, de l'Assemblée nationale, de donner des directives à la Commission. On ne peut pas le faire, d'ailleurs.

Vous m'avez interpellé sur le premier élément où vous dites: Il faudrait que la Commission se dote d'une directive. Je relis votre première recommandation: «Nous pressons la Commission d'accès à l'information d'émettre des directives claires concernant les renseignements nécessaires à la location d'un logement qui ne portent pas préjudice, encore une fois, aux personnes les plus pauvres de la société.»

Je croyais bien honnêtement que nous avions cheminé sur cette question entre le moment où nous nous sommes vus et aujourd'hui, d'autant plus que vous avez des contact avec la Commission d'accès à l'information. Donc, est-ce que vous pourriez, pendant les quelques instants qui sont à notre disposition, nous enquérir du type de relations que vous avez avec la Commission d'accès à l'information? Et peut-être nous éclairer, à savoir: Pourquoi la Commission n'a pas encore procédé à l'émission de cette directive?

M. Cusson (Denis): À l'heure actuelle, on accompagne les personnes qui vont porter des plaintes ou même, nous, on va en initier, soit pour le regroupement ou des organismes membres. Par exemple, le BAIL de Québec, qui est le Bureau d'animation et information logement de Québec, qui est un de nos groupes membres, a déposé deux plaintes à la Commission d'accès à l'information concernant – je ne donnerai pas les noms – un gestionnaire immobilier et un propriétaire individu sur l'usage de formulaires. Et les dossiers ont été déposés au printemps dernier.

Avec l'échange de communications qui se fait, la Commission qui va vérifier auprès du propriétaire ses prétentions dans son formulaire et ensuite on soumet au plaignant la réponse que le propriétaire formule pour expliquer ses faits et gestes fait en sorte qu'on se retrouve aujourd'hui à devoir répondre, donc, aux prétentions des deux propriétaires en question. Donc, si c'était un locataire qui avait déposé sa demande, on verrait déjà, la façon d'analyser des dossiers par la Commission, il est beaucoup trop long, il est beaucoup trop laborieux alors que, s'il y avait une audience de personne à personne devant un commissaire, ça se réglerait probablement plus vite. Et, s'il y avait une intervention de la part d'un commissaire enquêteur sur une plainte téléphonique – par exemple, je viens d'aller visiter un logement puis le propriétaire me demande une série d'informations, bon – qui se faisait aussi rapidement, à ce moment-là on se retrouverait dans une situation beaucoup plus facile à...

M. Boisclair: La directive?

M. Cusson (Denis): La directive, pour nous, c'était dans une optique de décision. C'est que la Régie...

M. Boisclair: Comment ça se fait? Pouvez-vous juste simplement nous enquérir, parce que...

(14 h 30)

M. Cusson (Denis): À l'heure actuelle, on n'a aucune décision en main qui nous permet de juger c'est quoi, les paramètres des informations nécessaires.

M. Boisclair: Je comprends bien qu'il n'y a pas de décision...

M. Cusson (Denis): Non.

M. Boisclair: ...mais, lorsque nous nous sommes vus, vous m'avez fait état d'une discussion, d'une rencontre que vous aviez eue ou vous alliez avoir avec les gens de la Commission d'accès à l'information.

M. Cusson (Denis): Avec les gens de la Commission.

M. Boisclair: Et vous avez fait cette demande pour que la Commission émette une directive.

M. Cusson (Denis): On a demandé à ce que la Commission rende des jugements le plus rapidement possible. Quand on parle de directives, ici, on parle de décisions qui donnent des paramètres, donc ça devient comme une directive. Mais le fait d'émettre des décisions sur des formulaires qui sont en circulation, ça va guider les acteurs sur qu'est-ce qui est nécessaire ou pas.

M. Boisclair: Oui. Effectivement que c'est une décision qui va le faire, mais la Commission peut aussi, dans des bulletins qu'elle envoie, faire état d'un certain nombre de préoccupations. Est-ce que pour le faire elle n'utilise que de ses décisions ou elle peut de son propre chef initier... Elle pourrait très bien, hein? Elle pourrait très bien le faire.

M. Cusson (Denis): On a eu des informations, par exemple, un peu contradictoires dans un sens, où dans un premier temps la Commission disait qu'elle ne recevait ou n'analyserait pas des demandes d'analyse de formulaires provenant d'associations s'il n'y a pas un locataire mis en cause. Dans un deuxième temps, quand on les a rencontrés, ils nous ont dit: Oui, on pourrait être favorable à ça. Donc, on peut présumer qu'ils peuvent faire des jugements déclaratoires sur des plaintes venant des associations.

M. Boisclair: Bien. Alors, écoutez, je vous remercie pour cette présentation.

La Présidente (Mme Léger): Alors, M. le porte-parole de l'opposition, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci beaucoup, Mme la Présidente. On tient à souhaiter la bienvenue à M. Cusson, représentant de l'association qui s'appelle le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec.

M. Cusson, d'abord je tiens à vous féliciter pour l'excellent travail que vous faites. Ça ne doit pas être une organisation qui est extrêmement bien nantie. J'imagine qu'il y a beaucoup d'heures de bénévolat ou de quasi bénévolat là-dedans, et vous devez vraiment croire fermement à votre cause et à votre mission et je tiens à vous féliciter.

Il y a une partie de la réponse que le ministre vous a fournie tantôt qui était véritablement kafkaïenne. Vous êtes arrivés, vous avez exposé une réelle situation vécue par du vrai monde dans la vraie vie. Vous avez dit: Voici les formulaires; ils nous demandent le numéro d'assurance-maladie et un paquet d'autres affaires. Je note ça notamment à la page 13 de votre mémoire. Mais on n'a pas besoin d'une autre directive, le ministre là-dessus il n'a pas tort. Il dit: Mais c'est déjà interdit. Donc, il se retourne vers vous, puis il dit: Donc, vous n'avez pas un problème avec la loi, vous avez un problème avec la Commission, mais, désolé, là-dessus je ne peux rien faire.

On est ici aujourd'hui pour parler de la loi, vous nous parlez d'un cas réel de non-application de la loi, puis la réponse du gouvernement du Parti québécois, c'est: Qu'à cela ne tienne; même si on est là pour rouvrir la loi puis pour parler de changements, on ne peut rien faire avec ça. Pour ma part, c'est une des plus grosses sottises que je n'ai jamais entendues depuis les 20 ans que je viens dans les commissions parlementaires, tantôt comme participant, puis maintenant comme élu. On est ici effectivement pour vous entendre, et c'est ce que l'opposition officielle vient de faire. On vous a bien entendus. Vous exposez vraiment, dans des termes sobres, simples, limpides, la situation vécue par des locataires au Québec, en dépit des belles dispositions législatives tantôt dans la loi d'accès tantôt dans la Charte des droits. C'est à nous, comme législateurs, de s'assurer qu'on met en place un système où ces beaux voeux, ces souhaits, se transforment dans des droits reconnus et respectés. C'est ça que vous êtes en train de nous demander de faire. De notre côté, on vous a entendus, puis nous on ne se satisfera pas de la réponse.

La semaine dernière, le ministre nous disait: J'espère que je vais pouvoir convaincre l'opposition officielle de me donner raison dans ma loi, ils ont voté contre le principe. Depuis le début, c'est ce qu'on tente de lui faire comprendre. C'est comme dans le dossier de la protection du consommateur. Ça lui a été montré noir sur blanc, que la loi n'est pas respectée. C'est écrit à l'article 223 de la Loi sur la protection du consommateur: «Un commerçant doit indiquer clairement et lisiblement sur chaque bien offert le prix de vente de ce bien.» Allez dans un supermarché aujourd'hui, ils ne mettent plus de prix. C'est aussi simple que ça. Ils n'en mettent pas.

Le ministre vient en commission parlementaire et il nous dit: On va refaire la loi. Mais dans quel but? La seule chose que le ministre a été capable de répondre quand ça a été soulevé en Chambre, c'était une application de la Loi sur la protection du consommateur, c'est: On a des rapports avec nos partenaires, on a des discussions avec nos partenaires, comme si, ça, ça venait expliquer pourquoi la loi n'est pas appliquée. Plus tard en après-midi, on va avoir un groupe représentant les gens qui ont des biens sous curatelle publique. Autre histoire d'horreur. Quel bon «move» est-ce que les péquistes ont fait? Ils ont pris la personne responsable de ces horreurs à la curatelle publique, ils l'ont mise présidente de l'Office de la protection du consommateur. Et après on se demande comment ça se fait que cette loi-là n'est plus appliquée aujourd'hui. Ça, c'est la vraie vie parlementaire, ici, avec le Parti québécois: des beaux voeux pieux qui se traduisent par une inaction totale, concrète.

Vendredi, on apprend à 15 h 30, par la voix de la Commission d'accès à l'information, qu'à bien y penser on ne peut rien faire avant l'année prochaine pour continuer l'enquête. Quand notre avocat, Me Pierre Bellavance, a contacté la Commission pour en savoir un peu plus, la réponse a été bien simple: le rôle est occupé, ils ne peuvent plus continuer l'enquête avant 1999. Comme si cette affaire-là était pareille comme toutes les autres. Et, de toute façon, le président de la Commission était ici, la semaine dernière, pour faire toute une belle distinction entre: Ce n'est pas vraiment une cause, donc je peux entendre tel avocat parce que c'est une enquête, et je n'entends pas vraiment des plaidoiries. En tout cas, c'est des affaires qui ne tiennent pas debout.

Mon collègue, Mme la Présidente, le député de Jacques-Cartier, aurait aussi des remarques et des questions à formuler. Mais de notre côté, on n'est pas du tout satisfait de l'approche du gouvernement du Parti québécois dans ce dossier, comme dans bien d'autres, et, nous, on a l'intention d'exiger une manière de faire dans cette loi-là, qui assure la protection de l'intérêt du public, contrairement à – ce que le témoignage vient de nous démontrer – ce qui prévaut actuellement. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Léger): M. le député de Limoilou.

M. Rivard: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, M. Cusson. Moi, je vous ramène à votre mémoire, dans vos recommandations, lorsque vous dites – vous avez écrit qu'il soit formellement interdit de demander le numéro d'assurance sociale, le numéro d'assurance-maladie, le permis de conduire, et, je vous ramène un peu plus loin, à la formule de renseignements personnels émise par Jean-Yves Dumont Immeubles enr. Est-ce que vous trouvez, quoi, abusif qu'on indique... Ici, on voit qu'on demande autant le numéro d'assurance sociale que le permis de conduire. Vous êtes totalement en désaccord qu'il y ait au moins une demande à cet effet, et je pense que vous invoquez que ces numéros peuvent donner accès à des informations gouvernementales non pertinentes.

Parce que, moi, je me demande comment un simple citoyen peut appeler, par exemple, à l'impôt, à la Sécurité du revenu, en donnant un numéro d'assurance sociale et qu'on puisse obtenir des renseignements dits confidentiels. Moi, je vois ça plutôt comme... Je vais vous donner un exemple. Il y a peut-être, si vous consultez l'annuaire téléphonique de Québec, 25 Pierre Tremblay et 10 P. Tremblay. Comment voulez-vous qu'un potentiel locataire se présente et que le propriétaire veuille faire une enquête que ce soit s'il n'y a que le nom et le prénom et s'il n'y a pas un autre signe distinctif pour qu'on puisse identifier quelle est la personne qui applique?

M. Cusson (Denis): Déjà, le propriétaire possède l'adresse actuelle du locataire. Donc, les deux P. Tremblay ne peuvent pas habiter, quand même, dans le même logement. D'ores et déjà, on peut faire une distinction entre des candidats locataires qui porteraient le même nom, et, si on a à faire une recherche de crédit au bureau de crédit, de toute façon ils sont supposés avoir l'information la plus récente, qui est celle de l'adresse actuelle du client.

À ce moment-là, je ne pense pas que l'usage du numéro d'assurance sociale... étant donné que, d'après ce que vous me dites, l'individu ne peut pas en faire un usage, donc d'aller chercher les informations, donc à quoi ça lui sert de l'avoir? S'il le demande – et c'est la crainte que l'on a – c'est qu'il peut en faire usage, c'est qu'il a un contact à quelque part qui peut en faire usage, que ça soit l'Association des propriétaires, que ça soit le bureau de crédit, que ça soit l'institution financière. Donc, il y a quelqu'un à quelque part qui est son contact, qui va lui ouvrir la porte, et c'est ça qu'on éviter, de permettre ces fuites-là qu'il pourrait y avoir.

M. Rivard: Pour ce qui est de la deuxième formule, un peu plus loin dans votre rapport, prélocation, on voit qu'ici, là, il n'y a que le numéro d'assurance sociale. Donc, vous servez la même réserve à l'effet qu'il ne doit pas y avoir de numéro d'assurance sociale, il ne faut pas avoir un signe distinctif. Vous êtes toujours de cet avis, qu'on ne doit pas donner quelque renseignement que ce soit dans les trois items que vous soulignez: numéro d'assurance sociale, numéro d'assurance-maladie et permis de conduire?

M. Cusson (Denis): Effectivement, parce que c'est des numéros qu'émet le gouvernement pour des fins très précises, et, si ces fins-là sont, par exemple, le numéro d'assurance sociale pour l'obtention de programmes sociaux, de services sociaux, à ce moment-là un individu qui ne rend pas de services sociaux n'a pas à avoir ce numéro d'information là. S'il n'est pas son employeur, il n'a pas à avoir son numéro d'assurance sociale. S'il veut l'engager comme concierge, ça, c'est une autre affaire, mais, si c'est simplement pour lui faire signer un bail, il n'a pas besoin de ce numéro d'assurance sociale là.

M. Rivard: Je vous remercie.

La Présidente (Mme Léger): M. le député de Jacques-Cartier.

(14 h 40)

M. Kelley: Merci beaucoup. Effectivement, je pense que vous avez raison, on ne peut pas même exiger... c'est prévu dans nos lois qu'on ne peut pas demander ces numéros. C'est vraiment si vous voulez prendre contact avec le gouvernement fédéral, il y a le numéro d'assurance sociale, pour avoir contact avec le médecin, ça prend notre numéro d'assurance-médicaments, mais il n'y a aucun lien avec la location d'un appartement et ces numéros.

Mais je veux vous poser la question: Souvent le bureau du député est une cour de dernier recours, si vous voulez, et on a à la fois les locataires qui viennent nous voir qui sont mécontents, des fois, c'est les propriétaires qui viennent nous voir qui sont mécontents. Quand je regarde votre annexe II, il y a une longue liste des renseignements qui sont demandés. Selon vous, qu'est-ce qu'un propriétaire peut demander? C'est quoi, le genre de renseignements qui serait raisonnable, qu'on peut exiger d'un locataire? Et à quel moment ou c'est quoi, le genre de demandes qui sont formulées de façon presque automatique par les propriétaires que vous trouvez exagérées ou pas nécessaires? Pouvez-vous me guider un petit peu?

M. Cusson (Denis): On revient toujours à l'objet de pourquoi je demande ces informations-là. Au printemps dernier, il y a eu quelques émissions à la télévision, par exemple J.E. en direct qui interviewait des propriétaires sur la question des renseignements personnels et de la discrimination parce qu'il y avait une journaliste qui s'était fait demander des informations, Mme Cazin, ce qui fait que, là, ça a comme saisi les médias parce qu'un de leurs membres était impliqué.

Quand les propriétaires sont pressés de questions, à savoir «Pourquoi vous demandez telle information?», ils finissent beaucoup par dire: Bien, ça, ce n'est pas vraiment nécessaire. Donc, à la liste de renseignements pas vraiment nécessaires pour la location, on se retrouve finalement avec nom, adresse, numéro de téléphone et – les gens peut-être d'Équifax tantôt pourront vous le dire – peut-être la date de naissance pour faire la distinction entre une personne et une autre.

On peut aller vérifier le dossier de crédit des personnes à partir de ces informations-là. C'est certain que je donne un nec plus ultra quand je donne le numéro d'assurance sociale puis que je donne d'autres types de fils conducteurs pour d'autres fichiers d'information. Effectivement, à ce moment-là il peut tout savoir sur ce que je fais. Donc, c'est pour ça que les éléments de base pour aller vérifier le dossier de crédit dans les bureaux de crédit, il n'y en a pas beaucoup. Ça n'en prend pas une liste de 40: nom, adresse, numéro de téléphone, la dernière adresse, peut-être des fois l'adresse précédente.

On a fait des vérifications qui nous ont conduits dans notre document Pas de renseignements, pas de logement , on a vérifié certains bureaux de crédit, où on s'est prêté comme cobaye, et on s'est rendu compte que certains bureaux avaient des informations, par exemple, plus complètes qu'Équifax. Par contre... puis on sait qu'Équifax, c'est une référence en termes de bureau de crédit. Ce qui fait qu'à ce moment-là on peut se demander de la pertinence au niveau de la justesse de l'information qu'on obtient par l'étude des crédits.

Puis il ne faut pas oublier aussi, quand on parle de vie réelle, c'est que les locataires, quoiqu'on en dise, sont très préoccupés à conserver leur logement. Ça ne leur tente pas de se balader d'un logement à l'autre. Même si le taux de roulement est quand même important, ça ne leur tente pas; surtout si on a des charges familiales, on ne peut pas partir du soir au lendemain avec les petits sur les bras puis se sauver de son logement. Ce qui fait les locataires vont être beaucoup plus préoccupés à s'assurer que le loyer est payé le 1er du mois, ou le 2 ou le 3, quand, le chèque d'aide sociale, il n'y a pas de retard dans l'envoi, que, par exemple, de s'assurer que la carte de crédit, que le prêt étudiant soient remboursés. On va prendre l'argent qui est prévu sur le compte Zellers, par exemple, puis on va le mettre sur le loyer. C'est moins grave de se faire enlever la carte Zellers que de perdre son loyer, puis les gens en sont bien conscients.

Donc, la question de la crainte, là, je dirais, qui devient obsessionnelle, la question du paiement de loyer, quand on voit sérieusement les chiffres concernant le non-paiement de loyer, qui touchent à peine moins de 1,3 % des revenus de location – et ça, je pars de l'étude faite par le ministère de la Sécurité du revenu – ça touche à peine 1,3 % des revenus de location globale, je pense que la mesure de protection que les propriétaires se donnent avec les formulaires de renseignements, c'est beaucoup trop bétonné. Ça devient, je dirais... On prend au départ la personne comme un fraudeur. C'est comme si vous rentriez dans un magasin à rayons puis qu'on vous demandait de mettre sur la table votre porte-monnaie pour s'assurer que vous n'êtes pas un voleur à l'étalage, là. C'est à peu près ça, l'espèce de mentalité qui semble régner à l'heure actuelle.

C'est pour ça que la question des renseignements qui sont exigibles, pour nous, ça demeure ce qui est prévu au bail. Puis à la limite, pour distinguer un individu par un autre, on peut toujours prendre la date de naissance, avec la restriction qu'on sait que la date de naissance, ça donne déjà une partie du numéro de la carte d'assurance-maladie.

M. Kelley: Non. Et je comprends fort bien, sur la question de non-paiement des loyers, mais, par contre souvent, le propriétaire qui vient nous voir, c'est la personne avec un seul logement à louer. Alors, quand il perd le loyer à 100 %, c'est une perte beaucoup plus difficile à supporter que quand, dans un grand bloc d'appartements et sur 1 000 locataires, il y en a un qui ne paie pas dans un mois. Ce n'est pas... l'impact pour la personne est beaucoup moins.

Merci beaucoup pour ça. Alors, vraiment, on peut... Quand je regarde la liste qui est ici, je trouve ça... Vous avez bien fait d'inclure ça en annexe, parce que c'est nettement exagéré, les choses qui sont demandées. Et merci beaucoup pour vos précisions.

La Présidente (Mme Léger): M. le ministre.

M. Boisclair: Oui. Notre invité aura compris que le député de Chomedey est à la hauteur de sa réputation, lui qui est connu, dans cette Assemblée nationale, pour être fort de son arrogance. C'est assez étrange de voir qu'il parle de la situation précaire des comités de logement. J'aimerais lui rappeler que jamais les comités de logement n'ont été financés comme ils le sont, même le Regroupement d'ailleurs. Et il peut aujourd'hui faire de grandes esclandres, il fut utile qu'il ait joint le geste à la parole alors que son gouvernement était au pouvoir.

Deuxièmement, nous aurons remarqué que, si effectivement il a raison de dire que nous sommes à la recherche de solutions, il n'a mis aucune proposition sur la table. Et la seule que je connaisse, et c'est pourtant là une voie que nous avons rejetée, que les parlementaires ont rejetée dans leur rapport qu'ils ont rendu public, ça aurait la proposition de réglementer par secteur d'activité. Et les membres de cette commission à laquelle vous vous adressez, monsieur, ont rejeté cette façon de faire. Alors, que le député aujourd'hui renie le rapport qu'il a signé il y a de ça quelques semaines, c'est son choix, mais ce n'est pas très crédible.

La question demeure donc pour nous. Et je vous la repose à nouveau, parce que je préfère votre réponse aux commentaires qui peuvent être les nôtres. Est-ce qu'il serait pertinent de mettre dans la loi ce que le législateur s'est toujours refusé à faire, soit dans la loi ou dans des règlements, par secteur d'activité, et de préciser quels sont les renseignements qui doivent être demandés ou pas?

(14 h 50)

Je vois Me Doray que nous entendrons et qui le réclame de longue date. Est-ce que c'est ça qu'il nous faudra faire un jour ou si on confirme plutôt le modèle québécois: on s'en tient aux principes qui sont définis dans la loi et on laisse à la commission le soin de préciser, par ses décisions, d'interpréter la loi et de clarifier la portée de la loi? Est-ce que votre expérience sur le terrain, en somme, devrait nous amener à revoir complètement le modèle que nous avons confirmé comme parlementaires à plusieurs reprises et à préciser dans la loi ce qui va être exigé ou si on s'en tient au modèle québécois que nous avons? Il est là, l'enjeu, et j'aimerais avoir votre opinion.

M. Cusson (Denis): Je pense qu'ici la loi vient appuyer et compléter la Charte des droits. Et c'est là que, dans la Charte des droits, il y a des droits qui sont reconnus, des droits sociaux, et il y a le principe, je pense que c'est le droit fondamental, à la non-discrimination. C'est reconnu dans la Charte. On n'a pas le droit de discriminer pour, entre autres – ce qui nous touche le plus proche pour nous autres niveau du logement – considération économique, pour condition sociale.

Je pense que la loi doit encadrer certains secteurs pour faire en sorte que ces volets de la Charte des droits soient protégés dans la réalité. Ça ne veut pas dire d'encadrer tous les secteurs; que ça soit la location d'une vidéocassette, ça n'a rien à voir avec la location d'un logement. Et c'est là qu'il faut... Je pense qu'il y a un encadrement à faire pour s'assurer que les droits sociaux soient protégés, sinon on reste dans une situation où tout est égal face à la loi, toute transaction est égale. Et ce n'est pas vrai, toute transaction n'est pas égale. Quand on transige pour obtenir un logement, un toit sur la tête, ce n'est pas égal à l'achat d'un frigidaire ou d'une voiture. Puis c'est là qu'on a comme un pas additionnel à faire. Ça ne veut pas dire d'encadrer tout mais d'encadrer ce qui est essentiel à la vie.

La Présidente (Mme Léger): Merci. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, Mme la Présidente. Dans les quelques minutes qui nous restent...

La Présidente (Mme Léger): Il vous reste deux minutes.

M. Mulcair: ...ça me fait plaisir de commencer en citant mon collègue le député de Jacques-Cartier qui s'est retourné vers moi tantôt en écoutant le ministre parler. Il a dit: Mais n'est-ce pas notre devoir premier que de s'assurer que ce qu'on fait fonctionne? Je crois que la lacune dont fait preuve le ministre aujourd'hui est surtout son incapacité de comprendre que ce n'est pas une attaque personnelle de l'association en question, du Regroupement; ils sont venus nous dire: Écoutez, vous avez des lois qui interdisent l'utilisation du numéro d'assurance-maladie et pourtant voici les formulaires qui sont utilisés, on est en train de le demander pareil.

Le ministre a beau dire: Bien, on s'est rencontré, ça n'a pas réglé le problème, vous avez rencontré la Commission d'accès. Non, la réalité, le fait – et c'est ce avec quoi le ministre a l'air d'avoir de la difficulté à composer, ce sont les réalités et les faits quotidiens – c'est qu'on continue illégalement et impunément de demander des renseignements qu'on n'a pas le droit de demander. Alors, moi, je vais suivre plutôt le conseil de mon collègue le député de Jacques-Cartier que les admonitions d'un ministre un peu piqué dans son orgueil mais qui n'a toujours pas compris où était le problème.

L'admonition première, c'est de s'assurer qu'en tant que législateurs ce que nous faisons se traduit dans la réalité par le respect des droits et de l'intérêt des citoyens. Et c'est ça dans le cas du logement. Et on a des exemples encore aujourd'hui. Alors, le point qui est soulevé à l'effet que ce n'est pas toujours vrai que ce sont les mêmes transactions, je pense que c'est un point très important, ce qui se traduit peut-être dans la réalité par une attention accrue de la part de l'organisme qui doit être là pour veiller à l'application de la loi sur l'accès à l'information et de la protection de la vie privée. C'est peut-être là qu'ils devraient concentrer leurs efforts, parce que, effectivement, lorsqu'il s'agit de savoir si oui ou non avec les enfants vous allez avoir une place chaude où dormir, bien, ce n'est pas tout à fait pareil qu'effectivement en achetant des guitares électriques.

De notre côté, quand un ministre est responsable de quelque chose, même s'il ne doit pas s'ingérer dans l'application quotidienne par l'organisme, il est quand même responsable de l'application de la loi. Et oui, de notre côté, le message du Regroupement a été bien entendu, Mme la Présidente. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Léger): Merci. Alors, merci, M. Cusson, qui représentait le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec. Nous allons recevoir maintenant Équifax Canada. Si vous voulez vous approcher, s'il vous plaît.

Alors, bonjour, messieurs, dames. Si vous voulez vous identifier, s'il vous plaît, avant de commencer votre...


Équifax Canada inc.

M. Globensky (Michel C.): Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, madame et messieurs, permettez-moi de me présenter et mes compagnons et compagne: Michel Globensky, relations gouvernementales et affaires vie privée; Me Raymond Doray; Mme Odette Auger, vice-présidente adjointe, exploitation et relations avec les consommateurs, qui est à Montréal; et Me Joël Heft, de Toronto, vice-président, affaires juridiques.

Merci de nous recevoir aujourd'hui. Équifax est une entreprise dont l'essentiel des activités consiste à recueillir, détenir et communiquer des renseignements de crédit concernant des individus ou des entreprises dans le but d'aider les institutions financières, les prêteurs et les commerçants, notamment les petites et moyennes entreprises, à prendre des décisions d'affaires tout en limitant les risques de pertes ou de mauvaises créances. Dans ce contexte, depuis plusieurs années déjà, Équifax suit attentivement l'évolution des valeurs des consommateurs ainsi que leurs préoccupations à l'égard du respect de la vie privée. Elle participe activement, avec le gouvernement du Canada et des provinces, aux consultations dans ce domaine.

Aujourd'hui, le consommateur qui désire emprunter de l'argent ou acheter des biens à crédit sait pertinemment que, suite à l'obtention d'un consentement, son expérience de crédit sera communiquée au prêteur et analysée par lui. Cette consultation autorisée et légitime des rapports de crédit par les institutions financières et autres prêteurs fait désormais partie des moeurs commerciales. Elle est connue et acceptée par les consommateurs et ne soulève plus la controverse.

Nous souhaitons aujourd'hui apporter notre contribution au niveau des commentaires relativement au projet de loi n° 451. Tout d'abord au niveau de l'accès aux renseignements à caractère public. Le projet de loi n° 451 fait écho à certaines préoccupations soulevées par Équifax dans son mémoire de septembre 1997 en proposant l'ajout de l'article 18.2 à la loi sur le secteur privé qui établit «qu'une personne qui exploite une entreprise peut, sans le consentement de la personne concernée, communiquer un renseignement qui a un caractère public en vertu de la loi». La portée et l'effet de ce nouvel article 18.2 sont cependant limités par l'article 13 du projet de loi, qui modifie l'article 55 de la loi sur l'accès, afin d'interdire aux organismes publics de communiquer un renseignement à caractère public contenu dans un registre, un rôle d'évaluation ou un autre fichier de même nature autrement qu'à l'unité.

Équifax craint que l'utilisation dans ces dispositions des mots «un registre, un rôle d'évaluation ou tout autre fichier de même nature contenant des renseignements à caractère public» ait pour effet d'interdire la communication aux agents de renseignements personnels, sur support informatisé, des informations publiques des plumitifs civils. Or, la communication de ces renseignements est essentielle pour leur permettre d'inscrire dans les dossiers de crédit les renseignements d'intérêt public qui ont impact direct sur la solvabilité d'une personne, qu'il s'agisse de faillite, saisie, condamnation à un paiement.

L'article 17 du projet de loi prévoit qu'un organisme public qui recueille un renseignement personnel auprès d'un tiers doit informer ce tiers de l'usage auquel ce renseignement est destiné ainsi que des catégories de personnes qui y auront accès. Cette obligation est susceptible de porter atteinte à la vie privée de la personne concernée. En effet, dans le cadre du recouvrement d'une créance ou de la recherche d'un débiteur fautif, il peut être nécessaire de contacter des tiers ou de recueillir des renseignements personnels auprès d'eux. Il semble difficilement justifiable, du point de vue du respect de la vie privée, que ces tiers soient informés des raisons qui incitent un organisme public ou son mandataire à révéler aux tiers les motifs d'un telle démarche.

(15 heures)

L'article 25 du projet de loi propose l'ajout d'un nouvel article, 70.1, à la loi sur l'accès afin d'interdire à un organisme public, sans le consentement des personnes concernées, de communiquer un fichier de renseignements personnels à un organisme public ou à une personne qui le requiert pour le comparer à un fichier qu'il détient, à moins que le requérant n'ait été autorisé par la Commission d'accès ou le gouvernement. Dans la mesure où la communication et la comparaison de fichiers dans le but de vérifier l'admissibilité d'un prestataire pour retracer un débiteur en défaut, pour recouvrer une créance due à un organisme public ou pour récupérer une prestation reçue illégalement ont, par le passé, été acceptés par la Commission d'accès. Équifax soumet que ces pratiques devraient être clairement autorisées par la loi.

L'article 43 du projet de loi propose l'adoption des articles 126.1 et 126.2 de la loi sur l'accès qui consacrent le pouvoir de la Commission de faire enquête sur toute matière relative à l'accès à un document ainsi que sur la protection des renseignements personnels détenus par un organisme public et lui reconnaissent le pouvoir de recommander ou d'ordonner à un organisme public toute mesure corrective propre à assurer l'accès aux documents ou la protection des renseignements personnels. Ces dispositions ne prévoient pas que la Commission doit préalablement consulter les tiers qui sont directement affectés par de telles recommandations ou ordonnances. Équifax croit que le législateur devrait prévoir une telle obligation que commandent les règles de justice naturelle.

Au niveau de la révocation du consentement, lorsqu'un prêteur, un assureur ou une autre entreprise qui fournit des biens ou des services à un consommateur demande à ce dernier de consentir à la communication ou à l'utilisation de renseignements personnels, cette exigence constitue un élément essentiel du contrat sans lequel l'entreprise n'accepterait pas de s'engager à fournir ces biens et ces services. Le prêteur a notamment besoin de vérifier certaines informations auprès de tiers, en cours d'exécution du contrat, afin de s'assurer que l'emprunteur ne se retrouve pas dans une situation de surendettement ou de faillite.

La position de la Commission d'accès voulant que le consentement à la communication ou à l'utilisation des renseignements personnels puisse être révoqué sans que cela affecte la validité du contrat principal pose de sérieuses difficultés aux entreprises et est susceptible de rompre l'équilibre entre les parties au contrat. C'est pourquoi nous croyons que le législateur ne saurait attendre que les tribunaux soient saisis de litiges portant sur la révocabilité du consentement avant d'intervenir. Il est urgent que le consommateur qui donne son consentement dans le cadre d'un contrat de biens ou de services sache dès maintenant que cette autorisation est irrévocable et qu'elle vaut pour toute la durée nécessaire à la réalisation des fins pour laquelle elle a été demandée.

En ce qui concerne l'article 13 de la loi sur le secteur privé, elle pourrait s'appliquer à tous les renseignements personnels détenus par une entreprise faisant affaire au Québec, qu'ils concernent une personne qui réside au Québec ou une personne qui réside à l'extérieur du Québec. La Commission d'accès a d'ailleurs donné une telle portée à l'article 13. Cette interprétation pose de graves difficultés aux entreprises dont les bases de données nationales ou internationales sont situées au Québec. Celles-ci pourraient être contraintes d'appliquer la loi québécoise aux renseignements qu'elles détiennent au sujet de citoyens d'une autre province ou d'un autre pays, alors que, dans ces juridictions, il n'y a souvent pas de loi exigeant l'obtention du consentement de la personne concernée pour communiquer ou utiliser des renseignements personnels. En conséquence, nous soumettons qu'une précision devrait être ajoutée à la loi sur le secteur privé afin d'indiquer que, sous réserve de l'article 17, la loi sur le secteur privé ne s'applique qu'aux renseignements concernant les personnes résidant au Québec.

Le projet de loi n° 451 n'apporte aucune solution au problème de la qualification des renseignements concernant les personnes qui, seules ou avec d'autres, exploitent une entreprise. Nous jugeons qu'il s'agit là d'une sérieuse carence qui devrait être corrigée en ajoutant, à l'article 2 de la loi sur le secteur privé, une mention indiquant clairement que les renseignements relatifs à l'exploitation d'une entreprise, quelle qu'en soit la forme juridique, ne sont pas des renseignements personnels.

L'interdiction d'utiliser des renseignements personnels dont l'objet est accompli. L'histoire législative démontre clairement que, en adoptant l'actuel article 10 de la loi sur le secteur privé, le législateur a voulu consacrer la règle selon laquelle les dossiers fermés ou inactifs des entreprises peuvent être conservés par celles-ci et rouverts avec le consentement de la personne concernée. Cette règle a cependant été assortie d'une réserve afin de permettre au gouvernement d'adopter des règlements sur la période de conservation de certains dossiers ou renseignements personnels. Certaines décisions rendues par la Commission d'accès à l'information semblent vouloir remettre en question ce choix législatif.

En conséquence, Équifax croit que le législateur devrait intervenir dès maintenant pour indiquer clairement dans la loi que les renseignements dont l'objet est accompli ou qui sont périmés peuvent être conservés par une entreprise et que celle-ci n'a pas l'obligation de les détruire. De même, nous réitérons que le gouvernement devrait rapidement, après consultation de la Commission d'accès et des personnes et entreprises intéressées, exercer le pouvoir réglementaire qui lui est conféré par l'article 90.3° pour adopter un règlement relatif à la période de conservation des dossiers de crédit et des renseignements de crédit.

Les modalités d'accès au dossier de crédit. Dans sa version actuelle, l'article 78 de la loi sur le secteur privé prévoit que les agents de renseignements personnels doivent soit permettre à la personne qui veut consulter son dossier d'en prendre connaissance gratuitement à un endroit de la région où elle est domiciliée ou par consultation téléphonique, soit lui transmettre copie du dossier par la poste ou la messagerie. Le projet de loi n° 451 modifie l'article 78 de manière à ce que les agents de renseignements personnels ne soient pas tenus de permettre la consultation en région des dossiers de crédit.

Équifax a conçu une version conviviale du dossier de crédit qui permet désormais au consommateur de comprendre aisément le sens et la portée des renseignements que nous détenons au sujet de son expérience de crédit. Tout consommateur peut désormais facilement comprendre sa fiche de crédit. Dans ce contexte, Équifax s'interroge cependant sur la pertinence de permettre l'accès au dossier de crédit sur place, alors que toutes les autres entreprises du Québec ne se voient pas imposer par la loi une telle obligation.

D'autre part, l'expérience démontre que les consommateurs ont besoin d'une certaine période de temps pour prendre connaissance et analyser le contenu de leur dossier de crédit et qu'ils doivent pouvoir vérifier certaines informations avant de formuler, si nécessaire, une demande de rectification. En conséquence, Équifax soumet que l'accès à un dossier de crédit devrait être assujetti aux mêmes règles de consultation que les autres dossiers visés par la loi sur le secteur privé.

Les dispositions pénales de la loi sur le secteur privé, en dernier lieu. Équifax croit opportun de souligner que le nouveau régime pénal proposé par le projet de loi n° 451 est difficilement conciliable avec la présence, dans cette loi, de normes floues et imprécises que la jurisprudence n'a malheureusement pas permis de préciser. On pensera, par exemple, aux concepts de «dossier», d'«objet de dossier», de «renseignements nécessaires à l'objet du dossier». Équifax note de plus que l'article 84 du projet de loi modifie le sixième paragraphe de l'article 91 de la loi sur le secteur privé de manière à ce que constitue une infraction le fait, pour une entreprise, de communiquer, sans le consentement de la personne concernée, un renseignement personnel, compte tenu des articles 17, 18 ou 18.1 de cette loi. Équifax soumet que cette infraction devrait être libellée de manière à tenir compte également des articles 15 et 20 de la loi sur le secteur privé.

Dans la même veine, le projet de loi propose la création d'une infraction lorsqu'une personne cherche à obtenir un renseignement personnel sans avoir qualité pour le connaître ou sans que le renseignement soit nécessaire à l'exercice de ses fonctions. Le libellé de cette infraction a de quoi surprendre et inquiéter. Constituerait désormais une infraction le simple fait, pour une personne qui oeuvre au sein d'une entreprise ou agit pour celle-ci à titre de mandataire, d'agent ou de prestataire d'un contrat de services, de demander un renseignement personnel auquel elle n'a pas droit. Puisqu'il s'agit d'une infraction de responsabilité stricte, la preuve de l'intention malveillante n'aurait pas à être établie par le poursuivant. Nous soumettons qu'une telle infraction pénale impose un fardeau démesuré aux personnes qui sont à l'emploi d'une entreprise ou qui agissent en son nom ou pour son compte, en requérant de leur part une connaissance poussée de la loi sur le secteur privé. Dans les circonstances, nous croyons qu'une telle infraction n'a pas sa place dans la loi, du moins selon le libellé proposé. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Léger): Merci, M. Globensky. M. le ministre.

M. Boisclair: M. Globensky, je voudrais vous remercier pour cette présentation. Comment dire? Vous êtes des habitués de cette commission, vos points de vue sont bien connus. Je comprends que nombre de vos recommandations qu'on retrouve à la fin de votre mémoire avaient déjà été présentées aux membres de la commission de la culture. Certaines n'ont pas été retenues, ni par le gouvernement ni par les membres de la commission de la culture qui, dans un rapport unanime, ont fait un certain nombre de recommandations, de propositions qui d'ailleurs ont largement inspiré la rédaction du projet de loi. Vous faites toutefois un certain nombre de propositions bien concrètes quant au contenu du projet de loi lui-même.

(15 h 10)

Pour votre information, sur la première recommandation sur l'article 13 du projet de loi, vous êtes peut-être déjà informé qu'effectivement il y a un problème de rédaction. Il faut revoir cet article. Quant au dernier point que vous avez soulevé dans votre présentation, il y a aussi des clarifications à apporter, puisque les parlementaires ont bien compris qu'il y avait certaines difficultés dans la façon dont les articles qui ont trait aux infractions étaient libellés, qu'il fallait préciser notre pensée.

C'était la première fois que je voyais ce genre de document, à la fin, en annexe à votre mémoire, la façon avec laquelle vous communiquez avec des gens qui s'informent du contenu de leur dossier de crédit. Je n'étais pas moi-même familier avec ce type d'information, cette façon de faire de votre entreprise. Je vous remercie de nous en informer.

Mais je voudrais profiter de votre présence parmi nous pour que vous nous fassiez part des contacts que vous avez avec la Commission d'accès à l'information. Apparaît de plus en plus comme problématique ce que le député d'opposition appelle une dichotomie entre ce qui se passe dans la vie et ce que la loi prévoit. Les lois prévoient bien des choses, et ce qui se passe dans la vie est une autre chose. Ce n'est pas parce qu'il y a un code criminel qu'il n'y a pas de gens qui commettent des offenses et qui vont outre aux dispositions de la loi. On essaie toutefois d'avoir des mécanismes de contrôle pour faire appliquer ces lois.

Est-ce que vous pourriez nous enquérir de vos rapports avec la Commission d'accès à l'information? Est-ce que, par exemple, des gens de la Commission se sont déjà rendus chez vous pour faire enquête et pour voir de quelle façon une entreprise qui détient des renseignements sensibles comme la vôtre s'acquittait de ses obligations qui sont prévues à la loi?

M. Globensky (Michel C.): Au niveau des contacts de la Commission d'accès, il y a eu une visite assez exhaustive d'un enquêteur-analyste de la Commission en 1995, je crois. À ce moment-là, c'était pour faire une vérification approfondie de la structure du fichier central des sinistres d'automobiles, qui avait été développé et qui était opéré, à ce moment-là, pour le compte du Groupement des assureurs par Équifax. D'ailleurs, le rapport qui avait été émis par la Commission d'accès à ce moment-là n'avait trouvé absolument rien à redire sur la façon dont Équifax faisait ça.

Pour ce qui est de l'aspect renseignements de crédit et dossiers de crédit, il n'y a pas eu de visite de la part de la Commission. J'ai eu l'occasion de me rendre aux bureaux de la Commission afin de faire des sessions d'étude, si on veut, avec le personnel de la Commission pour répondre à ses questions et lui expliquer le fonctionnement d'un agent de renseignements personnels tel qu'Équifax, la façon dont on traitait avec les consommateurs et répondre aux questions qu'il pouvait avoir à ce sujet-là. Je dois dire que ça a porté fruit parce que, somme toute, depuis janvier 1994 – et j'ai fait le calcul avant de partir ce matin – nous en sommes environ à une moyenne d'une plainte et quelques par mois, une demande d'examen de mésentente, si on veut, de la part de consommateurs québécois relativement à leur dossier de crédit ou à Équifax. Si on considère que nos affaires au Québec représentent à peu près 10 000 transactions par jour, c'est quand même bien et ça indique, je pense, que la Commission d'accès a fait un excellent travail au niveau de répondre aux appels, aux communications de consommateurs pour leur expliquer le fonctionnement d'un bureau de crédit.

Il y a une jurisprudence qui a été établie, au fil des années, relativement à la question de nos règles de purge, par exemple – je pense que nos règles de purge font partie du mémoire que nous avons soumis – et, à chaque fois, les quelques occasions où il y a eu débat devant commissaire pour des questions de règles de purge, on a toujours eu gain de cause, et je pense que ça a établi une jurisprudence qui permet aux représentants de la Commission de répondre aux appréhensions des consommateurs qui les appellent au sujet de leur dossier de crédit Équifax.

M. Boisclair: Je reviens à la question des plaintes. Vous nous dites: Une plainte environ par mois à la Commission. En relisant votre formulaire, je comprends que vous avez un service aux consommateurs. Est-ce qu'il y a un service de plaintes à l'intérieur de ce Service aux consommateurs? Et est-ce que vous recevez un nombre important de plaintes directement chez vous ou si elles s'en vont directement à la Commission?

M. Globensky (Michel C.): Les dossiers qui arrivent à mon attention sont ceux qui ont été escaladés au niveau de la Commission d'accès. Pour ce qui est des plaintes de moindre envergure, si on veut, ou qui ne sont pas rendues là, Mme Auger s'occupe de répondre aux consommateurs. Peut-être que Mme Auger pourrait ajouter quelques mots à ce sujet-là, sur les contacts qu'elle a avec les consommateurs à ce sujet-là.

La Présidente (Mme Léger): Mme Auger.

Mme Auger (Odette): En fait, le consommateur peut venir voir son dossier ou demander son dossier de crédit gratuitement, et, s'il a des questions ou s'il conteste quelque information que ce soit, à ce moment-là c'est vérifié le plus tôt possible pour revenir au consommateur régulièrement, l'informer de qu'est-ce qu'il en est. S'il y a révision, s'il y a nécessité de révision, à ce moment-là on fait la révision puis on envoie copie révisée aux créditeurs qui ont déjà demandé le dossier.

M. Boisclair: Est-ce que vous avez une idée du volume de dossiers qui vous amènent à faire une révision dans le dossier d'un consommateur que vous traitez dans une année ou dans un...

Mme Auger (Odette): Ah, c'est minime. Bien, il pourrait y avoir une mise à jour demandée pour une information qui date de trois mois, par exemple. Au niveau des correctifs, ça peut arriver. C'est quand même assez minime. Ça arriverait dans le cas d'une fiche qui aurait pu être mêlée ou...

M. Boisclair: Je comprends donc que le traitement des plaintes se fait, à votre avis, de façon efficace. Je comprends aussi que le volume de plaintes n'est pas très important, ni à la Commission ni chez vous directement à vos services. Je comprends aussi que la Commission est allée s'enquérir, dans des dossiers bien précis, de la façon dont vous vous acquittiez de vos obligations.

Est-ce que, dans vos rapports avec la Commission, il est prévu que celle-ci revienne à court terme ou repasse chez vous, reprenne contact avec vous pour voir de quelle façon, effectivement, vos banques de données sont non pas constituées, mais de quelle façon vous vous acquittez des obligations qui sont prévues à la loi?

M. Globensky (Michel C.): Ça n'a pas été discuté, mais évidemment je pense que nos relations avec les gens de la Commission sont telles que, sans même le leur dire, ils savent que nos portes sont ouvertes et, à tout moment, que, s'ils veulent venir faire des vérifications quelconques, nous sommes tout à fait à leur disposition.

M. Boisclair: Je vous remercie pour cette présentation, M. Globensky.

La Présidente (Mme Léger): Alors, M. le porte-parole de l'opposition, député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, Mme la Présidente. Toujours un plaisir de rencontrer les gens d'Équifax, qui sont parfois les Bonshommes Sept Heures des différents groupes qui viennent nous rencontrer. Mais ce sont toujours des présentations aussi professionnelles et ça augure bien pour votre capacité justement de gérer les aspects de la loi qui relèvent de vous. Puis d'ailleurs je dois dire que, anecdote à part, toutes les indications sont que des entreprises comme Équifax font un excellent job de respect de la loi et d'application. Le problème réel que, nous, on rencontre au jour le jour, c'est avec, comme l'exemple, tout à l'heure... Vous étiez là quand le représentant du regroupement dans le domaine du logement est venu pour expliquer comment ça se présente à un autre niveau. Là, peut-être que ce qu'on appellerait en anglais «the checks and balances» n'est pas nécessairement là.

J'aimerais me tourner justement vers la page 3 de votre mémoire et essayer de comprendre parce que je vous avoue que j'ai de la difficulté à voir concrètement qu'est-ce que cela peut représenter. Vous parlez de l'application de la loi sur le secteur privé aux renseignements concernant les non-résidents du Québec. Vous l'expliquez bien. Vous dites qu'il y a une interprétation qui a été donnée... La phrase est mieux, est tournée différemment de ça. Je vais la lire textuellement – j'ai appris à faire ça avec Me Doray: «La Commission d'accès à l'information a d'ailleurs donné une telle portée à l'article 13.»

Est-ce que vous pouvez, dans un premier temps, nous citer cette jurisprudence de la Commission d'accès, et la cause, et quelle sorte de cause c'était? Et, ensuite, pouvez-vous nous dire exactement, concrètement, dans la vie de tous les jours, pour votre entreprise, qu'est-ce que cela vous empêche de faire que vous pourriez faire, par ailleurs, juste pour que, nous, on puisse jauger en quelque sorte l'importance de cette interprétation donnée par la Commission d'accès?

M. Globensky (Michel C.): D'accord. Peut-être pendant que Me Dossier, Doray cherche son...

M. Mulcair: Me Dossier, oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Mulcair: Me Dossier revient souvent.

Des voix: Ha, ha, ha!

(15 h 20)

M. Globensky (Michel C.): Du côté pratico-pratique, le principal problème qu'on voit, c'est qu'une personne qui est à son compte et qui ne s'est pas incorporée nécessairement a des fournisseurs, a des comptes ouverts à son nom personnel. Mais, que ce soient des fournitures de bureau, que ce soit quoi que ce soit, il s'agit d'un compte commercial. C'est pour ses affaires et non pas pour sa résidence ou pour sa vie privée comme telle. Le problème qu'on voit, et ça peut se retrouver chez nous au niveau de nos dossiers, c'est qu'on a un fichier commercial et un fichier consommateurs. Nos fournisseurs également ont un fichier de leurs comptes-clients et, à ce moment-là, s'ils doivent apporter un traitement différent aux comptes des personnes qui ne sont pas incorporées de leurs comptes réellement commerciaux, ça cause un problème dans la gestion de ces comptes-là. Alors, du côté pratique c'est ça. Maintenant, Me Doray pour...

M. Mulcair: Bien, je pense que justement le Service anti-crime des assureurs a soulevé une partie de ça la semaine dernière, et ça, c'est pour les personnes faisant affaire sous leur propre nom qui est à la même page. Mais le bout sur lequel je voulais qu'on travaille un peu plus particulièrement, c'est concernant l'application de la loi sur le secteur privé aux renseignements concernant les non-résidents du Québec, cet aspect-là. Où sont les problèmes? Qu'est-ce que vous aimeriez pouvoir faire et que vous ne pouvez pas faire avec la loi telle qu'elle est appliquée actuellement par la Commission? Est-ce que c'est juste une interprétation déraisonnable? Nous, on veut savoir, dans le quotidien, qu'est-ce que ça empêche, vous ou d'autres entreprises au Québec, de faire à l'extérieur. Est-ce que vous avez des menottes que les compagnies en France qui vous font concurrence n'ont pas? Si oui, est-ce qu'on peut faire quelque chose pour aider là-dedans?

M. Globensky (Michel C.): Bien, le parallèle, c'est un petit peu au même titre que les renseignements commerciaux aux consommateurs. Vous avez une personne qui habite au Nouveau-Brunswick et dont les renseignements sont détenus, exemple, à Montréal, et une entreprise au Nouveau-Brunswick veut avoir des renseignements sur cette personne-là. Selon le libellé actuel de 17, l'entreprise en question est assujettie à la loi québécoise pour ce qui est de l'obtention du consentement avant d'obtenir des renseignements.

M. Mulcair: D'accord. Donc, normalement, si vous étiez une entreprise néo-brunswickoise traitant avec une autre entreprise de cette province et si votre demande était reçue comme ça, vous n'auriez pas à obtenir le consentement. Donc, la Commission applique d'une manière extraterritoriale ses dispositions législatives québécoises. C'est bien ça?

M. Globensky (Michel C.): C'est de cette façon-là que la loi 68 est libellée, dans le moment.

M. Mulcair: Je sais que c'est toujours difficile de chiffrer, mais, encore une fois, là, quotidiennement, en termes d'application de la loi, est-ce que ça cause des problèmes quotidiennement pour votre entreprise ou des difficultés?

M. Globensky (Michel C.): Non, ça ne cause pas de problème quotidien, sauf que, si, à un moment donné, on décidait d'une application ultrarigoureuse de la loi, ça créerait des problèmes.

M. Mulcair: Encore une fois, c'est une chose. Ce qu'on met sur papier puis comment on l'applique peut avoir une influence.

Alors, merci, M. le Président. Mon collègue le député de Jacques-Cartier avait une autre question.

Le Président (M. Garon): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Merci, M. le Président. J'ai juste deux petites questions. La première, c'est plutôt à titre de renseignement. Je vois dans l'annexe la fiche de crédit d'Équifax sur une clientèle une telle. Il n'y a pas des restrictions quant à l'utilisation du numéro d'assurance sociale? Est-ce qu'il y a des limites sur son utilisation ou si c'est quelque chose qu'Équifax peut utiliser? Si oui, pourquoi?

M. Globensky (Michel C.): Il y a des limites à ce niveau-là. Dans un premier temps, nos clients savent que le numéro d'assurance sociale est un renseignement optionnel. Tout en étant optionnel, il est excessivement utile pour justement, comme quelqu'un le soulevait tantôt, bien identifier une personne comparativement à une autre du même nom, ainsi de suite.

Lorsqu'un client nous communique le numéro d'assurance sociale d'une personne qui veut avoir du crédit, ce renseignement-là est utilisé pour faire la recherche de la banque de données. Si le numéro d'assurance sociale est au dossier, le numéro d'assurance sociale va paraître sur le rapport que le client va recevoir. Si le client ne connaît pas le numéro d'assurance sociale ou nous fournit un numéro d'assurance sociale qui n'est pas le même que celui que nous détenons, dans un premier temps, s'il n'avait pas le numéro d'assurance sociale, on ne lui donnera pas celui qu'on a. Si le numéro qu'il a est différent de celui que nous avons, nous lui signalons le fait qu'il y a peut-être un problème au niveau du numéro d'assurance sociale. En d'autres mots, en aucun temps nous ne divulguons le numéro d'assurance sociale à qui que ce soit. Et, incidemment, nos clients ne nous fourniront jamais à titre d'identifiants le numéro de téléphone, le numéro d'assurance-maladie, le numéro de permis de conduire. Ce ne sont pas des renseignements que nous retenons ou que nous utilisons dans la recherche de dossiers.

M. Kelley: Mais, quand vous avez dit: C'est optionnel, il n'y a aucune conséquence si on ne donne pas un numéro... Parce que, moi, règle générale, je ne le donne pas. C'est souvent quand on loue une vidéocassette, ou il y a beaucoup d'autres endroits qui exigent ça, et je dis non. Je ne le donne pas. Je ne donne pas mon numéro de téléphone non plus. Alors, quand vous avez dit que c'est optionnel, il n'y a aucune conséquence pour un de vos clients s'il ne fournit pas un numéro d'assurance sociale?

M. Globensky (Michel C.): Il peut y avoir des conséquences. C'est selon la qualité des autres renseignements qui seront utilisés lors de l'interrogation. C'est certain que, si le client fait affaire avec un consommateur qui habite à la même adresse depuis cinq ans, seulement son adresse serait suffisante, normalement, pour retrouver le dossier. Mais nous encourageons nos clients à nous fournir nom, adresse, adresse antérieure si ça fait moins de trois ans qu'il habite là, date de naissance, numéro d'assurance sociale optionnel. Ça permet à notre système de bien identifier, de bien cibler la personne concernée et de transmettre les renseignements sur la bonne personne et non pas sur son homonyme.

M. Kelley: Dans un autre ordre d'idées, parce que j'ai posé la même question au regroupement des locataires, pour vous, si vous avez des conseils à formuler aux propriétaires des logements, est-ce que le nom, l'adresse, le numéro de téléphone ou la date de naissance et l'adresse précédente peuvent être suffisants? Je ne sais pas si vous l'avez vu, mais il y a un grand formulaire qui est annexé à un mémoire présenté par le groupe précédent, avec une foule de renseignements. Mais, pour faire une vérification de crédit sur quelqu'un, dans la proposition qui est formulée par le regroupement, est-ce que nom, adresse et date de naissance, c'est suffisant pour faire une vérification appropriée?

M. Globensky (Michel C.): Bien, c'est un petit peu la même réponse que tantôt. Si la personne habite à la même adresse depuis quelques années et fait affaire de façon habituelle à crédit, il y a des fortes chances que son dossier soit retraçable seulement avec ça. Mais il y a une grande majorité de personnes qui déménage à toutes les années ou même plus fréquemment que ça.

Le formulaire en question, votre intervenant, tantôt, a suggéré que c'est un formulaire qui aboutissait chez l'agent de renseignements personnels. Ce n'est pas le cas, on n'a jamais vu ça. Nous, on sait ce dont on a besoin ou ce que nous demandons à nos clients pour bien identifier la personne selon notre fichier.

Maintenant, pour les fins d'un propriétaire, quels sont les autres renseignements dont il a besoin pour se satisfaire que c'est bien une personne légitime qui veut faire affaire avec lui? Malheureusement, je n'aurais pas l'expertise pour vous dire si l'ensemble des renseignements demandés sont suffisants ou exagérés, mais nous avons déjà fait une recommandation à ce sujet-là et je pense qu'elle a du mérite. Si les regroupements de propriétaires et la Commission d'accès s'entendaient sur quel est le minimum de renseignements qui sont normalement nécessaires pour une bonne identification d'une personne qui se propose comme locataire, ça réglerait bien des problèmes.

M. Kelley: Moi, je regarde ça et... J'ai ri, tantôt, comme tout père de famille parce qu'une des questions qui sont ici, c'est: Avez-vous déjà fait des chèques sans provision? Je pense que chaque parent, avec les enfants dans les écoles publiques gratuites au Québec, au mois de septembre, risque de répondre oui à cette question parce qu'il y a énormément de dépenses qu'il faut faire maintenant. Mais je trouve que c'est nettement exagéré. Alors, je pense que votre suggestion de réduire ça au propre minimum peut aider nos discussions. Merci beaucoup.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Boisclair: Je comprends qu'Équifax a son siège social au Canada.

M. Globensky (Michel C.): C'est bien ça, oui.

M. Boisclair: C'est donc dire que les banques de données que vous détenez sont toutes situées au Québec.

M. Globensky (Michel C.): Au Québec, à Montréal, à ville d'Anjou.

M. Boisclair: Oui, à ville d'Anjou. On connaît l'édifice. Vous détenez des renseignements sur de nombreux citoyens canadiens qui ne sont pas Québécois?

M. Globensky (Michel C.): En effet.

M. Boisclair: Est-ce qu'une analyse de la situation du droit dans les autres provinces justifie ce choix de venir s'établir au Québec ou si vous l'avez fait pour d'autres considérations que l'environnement législatif québécois?

(15 h 30)

M. Globensky (Michel C.): Bien, du côté pratico-pratique – et peut-être que Me Doray voudra rajouter quelque chose après – Équifax a eu son origine à partir des années soixante-dix. C'était tout simplement le Bureau de crédit de Montréal qui a acheté un bureau, et un autre bureau, et un autre bureau, et a établi un réseau à travers le Canada en demeurant toujours, comme siège social et base d'opération, à Montréal. C'est pour ça que nous sommes là. Alors, Me Doray, peut-être...

M. Boisclair: En somme, ma question serait la suivante: Est-ce que vous avez une réflexion canadienne sur la protection des renseignements personnels? Et le fait que vous ayez à détenir des renseignements sur de nombreux citoyens qui ne sont pas québécois, est-ce que ça vous amène à avoir une vision plus large de cette question des renseignements personnels, au-delà de la problématique québécoise et du contexte québécois dans lequel nous débattons de la question aujourd'hui?

M. Globensky (Michel C.): Oui. Bien, c'est-à-dire que, depuis les années soixante-dix, dans la plupart des autres provinces canadiennes, nous sommes assujettis à des législations provinciales relativement à la circulation de l'information, au consentement, dans certains cas, ou de la notification dans d'autres provinces. Alors, nous avons établi une façon de faire canadienne qui tenait en compte les plus sévères contraintes qui existaient dans les autres provinces canadiennes. C'est dans ce sens-là... Et Me Heft, à partir de Toronto, est en contact régulier avec les législateurs des autres provinces canadiennes. C'est dans ce contexte-là qu'on se tient au courant de l'évolution du dossier de la protection des renseignements personnels, des législations qui sont en voie d'émerger tant au fédéral que dans les autres provinces canadiennes. Alors, nous avons une vue d'ensemble, définitivement, à ce niveau-là.

M. Boisclair: Est-ce que Me Doray voulait compléter?

M. Doray (Raymond): Si vous permettez, M. le Président, M. le ministre, je pense que vous avez, au cours d'une présentation antérieure, soulevé justement une dimension, la dimension internationale ou extraterritoriale de l'application de la loi 68. Et, si vous me permettez, j'aimerais peut-être revenir là-dessus parce que c'est directement relié à la question que vous venez de poser à M. Globensky.

En fait, si je vous résume bien, vous faisiez valoir que le Québec pourrait peut-être avoir un avantage concurrentiel du fait qu'il assure aux renseignements personnels qui sont détenus dans les bases de données au Québec une protection qui satisfait aux critères d'adéquation de la directive européenne et que, somme toute, c'était le pari que le gouvernement faisait en ne modifiant vraisemblablement pas le champ d'application de la loi. C'est fort intéressant, ce que vous avez dit, mais je pense que ça mérite peut-être d'aller un peu plus loin dans la réflexion. Si vous me permettez, je vais essayer de le faire pendant les quelques prochaines minutes.

C'est qu'effectivement je pense que le Québec, la loi du Québec doit offrir, enfin, une protection adéquate pour tous les renseignements personnels concernant des individus qui résident dans des pays membres de l'Union européenne ou dans des pays qui offrent une protection. C'est-à-dire que, si un pays membre de l'Union européenne, ce pays, cette juridiction requiert le consentement, je pense que le Québec est bien placé, lorsque ces renseignements sont reçus ou détenus dans une base de données au Québec, à ce qu'on applique la réciprocité, c'est-à-dire une protection équivalente.

Le problème qui vous est soulevé dans le mémoire d'Équifax et dans quelques autres mémoires est un peu différent. C'est le cas des renseignements qui proviennent de juridictions où il n'y a pas de législations qui prévoient le consentement. C'est juste ça, le véritable problème. En fait, c'est extrêmement difficile pour une entreprise comme Équifax ou n'importe quelle autre entreprise d'exiger de ceux qui vont vouloir utiliser cette banque de données d'imposer le consentement alors que, par exemple, dans leur juridiction, la notification est suffisante. C'est tout.

M. Boisclair: Je comprends bien ça, mais la question est la suivante: Est-ce que, par exemple, le Québec, selon vous... Avec votre expérience canadienne, voire peut-être même internationale, vous pouvez peut-être nous renseigner pour voir s'il y a des communications transfrontières qui se font. Ce serait intéressant que vous puissiez répondre à cette question-là tout à l'heure.

Mais je regarde, par exemple, les réflexions que le gouvernement du Québec a faites sur le contenu des accords de commerce intérieur, où nous avons convenu, dans des dispositions bien précises, entre autres en matière d'harmonisation du droit de la protection des consommateurs, d'harmoniser le contenu des formulaires pour les gens qui oeuvrent dans le commerce de la vente itinérante, tout à fait spécialisée.

Est-ce que le Québec devrait se faire le promoteur? Est-ce que ce serait là utile de voir à ce que, à l'intérieur de l'ensemble canadien, il y ait une réflexion sur l'harmonisation des règles qui s'appliquent en matière de protection des renseignements personnels? Est-ce que ce serait utile et efficace, dans un contexte où de plus en plus d'entreprises font du commerce interprovincial, que ce genre de réflexion se fasse dans un contexte plus large que dans un ensemble québécois?

M. Globensky (Michel C.): Oui. Je pense que, quand on parle d'harmonisation... Et c'est l'essence même de notre structure chez Équifax, comme je le mentionnais tantôt, que, si nous avions à composer et à fournir des services en fonction, dans une province, de telle réglementation, dans une autre, de telle autre réglementation, on ne pourrait pas y arriver. Alors, nous avons établi des normes nationales qui voulaient chercher à harmoniser les exigences des différentes législations dans les différentes provinces. Me Doray, si vous voulez...

Le Président (M. Garon): ...est terminé. Alors, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Je tiens juste à souligner que, pour ce qui est des dispositions pénales, les objections que vous soulevez à la page 7, moins les préoccupations, on a tous vu ça la semaine dernière. Les dispositions pénales sont à revoir complètement.

De notre côté, M. le Président, on tenait juste à dire à quel point on a apprécié la présentation faite par Équifax aujourd'hui. Et j'ai une petite dernière question. M. Globensky a dit tout à l'heure que, avec le nom, l'adresse, des informations vraiment minimales, surtout si la personne fait affaire avec du crédit – je pense que c'était ça l'expression que vous avez employée...

Une question me vient à l'esprit, et j'aimerais juste savoir: Admettons quelqu'un qui travaille honnêtement, qui n'a jamais manqué un paiement, n'a pas changé de propriétaire quatre fois en 12 mois en sautant d'une place à une autre, a juste été bien stable mais ne fait nullement affaire avec du crédit. On se comprend? Quelqu'un qui n'a jamais voulu une carte de crédit, qui paie tout cash, achetait une voiture qui était de ses moyens, n'a jamais fait le financement d'une voiture. Est-ce que, théoriquement ou dans les faits, une personne qui n'a jamais fait affaire avec du crédit peut rencontrer des problèmes plus tard en l'absence d'un dossier de crédit proprement dit?

M. Globensky (Michel C.): Oui, évidemment, notre économie étant basée largement et essentiellement sur le crédit, nos clients, lorsqu'ils ont une décision à prendre, ils recherchent des références: Quelle est la réputation de crédit de cette personne-là? Qu'elle soit bonne, médiocre ou moyenne...

M. Mulcair: Ou comme la nôtre, quoi! Ha, ha, ha!

M. Globensky (Michel C.): ...ça va les aider. S'ils reçoivent une réponse de nous à l'effet que cette personne-là est inconnue, ça cause un problème dans le sens que le processus arrête. Ça prend un traitement spécial. Dans certains cas, il est possible que la personne se voit refuser du crédit parce qu'elle n'a aucun antécédent de crédit. Ça peut causer un problème, oui.

M. Mulcair: Donc, j'imagine que, dans le domaine du logement, ça peut être la même chose. Si on fait une enquête sur une personne basée sur le fait qu'elle a fait affaire avec du crédit, comme vous avez dit tantôt, s'il n'y a pas un tel dossier, ça peut peut-être allumer les mêmes voyants rouges sur le tableau de bord comme si elle avait eu des problèmes, parce que inexistant.

M. Globensky (Michel C.): Bien, c'est-à-dire que, à ce moment-là, le nouveau propriétaire a toujours le loisir de contacter l'ancien propriétaire pour obtenir des références, qui va dire si c'est un bon payeur, ainsi de suite.

M. Mulcair: Oui, bien sûr. Bien sûr. Ça devient personnel, à ce moment-là, basé sur la personne. Merci.

(15 h 40)

Le Président (M. Garon): Je remercie les représentants d'Équifax Canada inc. de leur contribution aux travaux de cette commission. Le temps dévolu à chacun des partis est écoulé. J'invite maintenant l'Association québécoise des archivistes médicales à s'approcher de la table des délibérations.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Garon): Mme Thibault, nous avons 45 minutes: normalement 15 minutes pour vous, 15 minutes pour chacun des deux partis politiques pour vous interroger sur la teneur de votre mémoire. À vous la parole.


Association québécoise des archivistes médicales (AQAM)

Mme Thibault (France): Merci, M. Garon. Alors, l'Association québécoise des archivistes médicales est un organisme sans but lucratif regroupant déjà au-delà de 1 000 professionnelles de la santé qui oeuvrent dans plus de 450 établissements partout au Québec. Nous retrouvons donc des archivistes médicales dans les centres hospitaliers et de soins de courte durée, de longue durée, de réadaptation, dans les CLSC et, de plus en plus, dans les laboratoires de recherche.

L'archiviste médicale assume toutes les responsabilités relatives à la gestion, au traitement, à l'accès et à la protection de l'information contenue dans le dossier d'un usager qui reçoit des services de santé et des services sociaux.

La protection des renseignements personnels et le contrôle de l'accès à l'information constituent son premier rôle et sa responsabilité la plus importante envers le public. L'archiviste médicale a le devoir d'appliquer dans son milieu les lois régissant la confidentialité des dossiers de santé et de promouvoir la mise en pratique de ces mêmes lois. Par l'application stricte du secret professionnel, l'archiviste médicale travaille à la protection des droits de l'individu et au respect de sa vie privée.

De son côté, l'Association québécoise des archivistes médicales doit offrir à ses membres des services de support, de promotion et de formation assurant la reconnaissance de leurs compétences en gestion de l'information socio-médico-administrative. De plus, l'Association doit fournir à ses membres tous les moyens généralement reconnus pour leur permettre d'assurer la protection des droits des usagers en matière d'accès à l'information et du respect des lois ayant trait à l'accès et à la confidentialité.

C'est dans cette ligne de pensée que l'AQAM dépose respectueusement son mémoire portant sur le projet de loi n° 451, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé et d'autres dispositions législatives, devant la commission de la culture.

Alors, dans un premier temps, l'Association québécoise des archivistes médicales se réjouit des modifications apportées à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Notons, entre autres, que l'ajout du texte à l'article 53 qui précise maintenant la forme et la qualité du consentement d'une personne à la communication ou à l'utilisation d'un renseignement personnel la concernant va faciliter le travail de nos membres qui se questionnent régulièrement sur la durée de validité et la partie d'un consentement.

Également, l'ajout du texte à l'article 70 qui restreint la communication d'un fichier de renseignements personnels protégera de plus en plus la vie privée des gens.

Aussi, la modification de l'article 76 sensibilisera les organismes publics et évitera des collectes de renseignements personnels inutiles.

Ensuite, l'insertion du texte à l'article 126 incitera les organismes publics à accroître la prudence en matière d'accès et de protection des renseignements personnels.

Enfin, la modification à l'article 162 protégera encore plus le citoyen et facilitera le travail de l'archiviste médicale en matière de protection des renseignements personnels.

À l'article 66.1, il serait bon de préciser quelle loi pourra se prévaloir de cette insertion parce que, dans le quotidien, les personnes responsables de l'application de la loi sur l'accès risquent d'avoir des problèmes. Et je cite en exemple un policier qui se présente dans un établissement ou un CLSC pour savoir si un usager a consulté ou non. Devrons-nous lui répondre? C'est le genre de situations auxquelles nous risquons d'être confrontées.

La même réflexion se pose aussi pour l'article 67. L'article 68 ne risque-t-il pas d'aller à l'encontre de certains des objectifs visés, dont celui de restreindre la communication des fichiers informatisés?

Quelques éléments de réflexion que l'Association suggère. D'abord, la loi devrait préciser que la signature originale de l'usager est obligatoire pour autoriser tout accès à son dossier et énumérer avec précision les exceptions à cette règle, si de telles exceptions existent. Je reprends ici mon exemple, l'accès par un policier muni d'un mandat. De plus, l'autorisation devrait contenir des précisions sur l'établissement ou l'organisme concerné pour lequel l'autorisation a été émise. Et les photocopies d'autorisation ne devraient être acceptées en aucun cas.

Aussi, la loi devrait définir et identifier dans quelles circonstances il est permis et souhaitable d'accepter une signature d'autorisation d'accès par télécopieur en lieu et place de la signature originale de l'usager. Dans le même ordre d'idées, la loi devrait aussi préciser quels documents ou types de documents peuvent être échangés par télécopieur.

Ensuite, avec la transformation des réseaux d'information, la transmission électronique et la venue des inforoutes, l'AQAM est d'avis que la loi devrait préciser et définir des règles précises en cette matière. Actuellement, c'est le vide juridique et nous croyons que nous aurons bientôt de nombreux problèmes reliés à la confidentialité des données transmises électroniquement. Il en va de même pour la signature électronique. Est-elle légale? Devons-nous l'accepter dans les cas de demandes d'accès ou encore lorsqu'il s'agit d'un rapport officiel à inclure au dossier d'un usager?

Enfin, la loi prévoit que la Commission d'accès peut autoriser la divulgation de renseignements nominatifs à des fins d'étude, de recherche ou de statistique. Les notions d'étude, recherche et statistique devraient être précisées de manière à ne laisser aucune place à interprétation douteuse ou ambiguë laissant la porte ouverte à des pratiques contraires à l'esprit de la loi. Par exemple, il y a des sondages qui se font auprès des usagers, effectués par des firmes de sondage et ayant pour but de déterminer des taux de fréquentation, le tout sous prétexte d'effectuer des recherches.

En conclusion, l'Association québécoise des archivistes médicales est heureuse d'avoir eu l'opportunité de soumettre ses commentaires et réflexions dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi. À l'aube d'un nouveau millénaire, avec l'arrivée des nouvelles technologies dans le monde des communications, notre gouvernement se doit de prendre position dans le dossier de la protection des renseignements personnels. Il en va du respect de la vie privée des Québécois et Québécoises. Nous sommes ouverts aux solutions apportées par la technologie moderne, mais la protection du public et le droit à la confidentialité n'en demeurent pas moins notre première préoccupation. Aussi, l'AQAM compte vivement sur les modifications apportées par le projet de loi pour aider ses membres à préserver la confidentialité des informations qui sont contenues dans le dossier de santé. Merci.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Boisclair: Merci beaucoup, madame. C'est la première fois, je pense, que nous avons l'occasion de vous entendre ou que j'ai certainement, en tout cas, l'occasion de vous entendre en commission parlementaire. Ça me permet, d'abord, de connaître votre existence et de pouvoir aussi, par le fait même, apprécier votre travail. Donc, bienvenue à la commission de la culture, madame.

Je comprends que vous manifestez, de façon générale, un appui aux propositions gouvernementales qui sont contenues au projet de loi n° 451. Je vous en remercie. Je pense qu'il y a un vaste consensus qui se dégage, on pourra dire un appui général pour ne pas dire généralisé, en appui au projet de loi que j'ai déposé à l'Assemblée nationale. Je comprends que vous apportez aussi un certain nombre de commentaires. Je voudrais profiter de votre passage pour vous faire un petit commentaire et vous poser deux questions.

D'abord sur le commentaire de l'exemple que... En page 6 de votre mémoire, vous soulevez cet exemple du policier qui se présente au CLSC pour savoir si un usager a consulté ou non. Devons-nous lui répondre? La réponse, c'est que vous n'avez pas à lui répondre...

Mme Thibault (France): Exact.

M. Boisclair: ...puisque le régime général prévu à la loi d'accès fait aussi place à certaines exceptions pour des régimes particuliers qui assureraient une plus grande protection de la vie privé. C'est le cas du régime prévu à la loi sur la santé et services sociaux qui, malgré des dispositions générales de la loi sur l'accès et de la protection des renseignements personnels, s'applique. Donc, le préposé qui accueille ce policier ou cette policière n'a pas à signifier le passage ou non d'une personne.

Mais, pour des gens qui sont plus ou moins informés, je comprends que ça peut causer toutes sortes de difficultés d'interprétation et je peux comprendre qu'un préposé à la réception d'un établissement ne soit pas au fait de toutes ces subtilités. Mais je pense toutefois que les établissements du réseau de la santé et des services sociaux sont bien conscients du type d'informations qu'ils détiennent et aussi de leur très grande confidentialité. Je pense que les gens du réseau de la santé et des services sociaux ont certainement a priori développé – s'ils ne l'ont pas tous fait, sont à le faire – une espèce de culture de la confidentialité. Il y a lieu toutefois de demeurer toujours bien vigilant. Je pense que ce que vous faites même auprès de vos membres contribue certainement à accroître cette vision.

Là, il y a deux choses, par exemple, où jamais je n'ai été interpellé. À la page 7, vous nous dites: «La loi devrait préciser que la signature originale de l'usager est obligatoire pour autoriser tout accès à son dossier et énumérer avec précision les exceptions à cette règle, si de telles exceptions existent. De plus, l'autorisation devrait contenir des précisions sur l'établissement et/ou l'organisme pour lequel elle est émise. Les photocopies d'autorisation ne devraient être acceptées en aucun temps.»

(15 h 50)

Là, vous nous soulignez ça dans votre mémoire, vous l'inscrivez en caractères gras. Est-ce qu'il y a vraiment des problèmes? Est-ce que vous avez été particulièrement interpellée? Est-ce que vous pourriez peut-être nous faire part de votre expérience?

Mme Thibault (France): Oui. Bon. Moi, j'ai quand même travaillé 16 ans dans les établissements de santé. Je suis à la présidence, à la direction générale de l'Association depuis six mois. C'est un des problèmes que nous vivons de plus en plus. Il y a beaucoup de compagnies, bon, entre autres les compagnies d'assurances ou les... pas les médecins, c'est vraiment les compagnies qui colligent, dans le cadre des examens de santé ou dans l'émission de police d'assurance sur la vie, beaucoup d'informations. Nous, nous recevons des autorisations qui sont signées par le bénéficiaire, mais le consentement est comme «at large», si vous me prêtez l'expression.

Ça débarque chez nous et je ne suis pas certaine, moi, puis je parle au nom des membres, on n'est pas certaines que le bénéficiaire, en signant l'autorisation, est conscient que l'agent d'assurances part avec ça et peut aller fouiller dans tous les établissements de santé pour avoir tout le pedigree, son pedigree médical, si vous voulez. Donc, parfois on reçoit ces demandes-là, puis on se dit: Bon. Qu'est-ce qu'on fait? Est-ce que le client est au courant? S'il n'y a pas de date, s'il n'y a pas de délai précis concernant une hospitalisation précise ou un épisode de soins précis, nous, on est comme malvenues de dire: Bien, on va donner quoi comme information? Alors, souvent on va être obligées de référer par téléphone au client en lui disant: Vous avez donné un consentement à telle compagnie d'assurances pour qu'on leur donne accès à votre dossier. Maintenant, on fait quoi, là?

S'il n'y a pas de date, s'il n'y a pas d'épisode, il n'y a rien qui dit que deux, trois ans plus tard ces mêmes autorisations-là ne seront pas ressorties et réutilisées. Alors, dans le fond, c'est toujours dans l'objectif de préserver la vie privée des gens, du moins que le client, le bénéficiaire soit informé que des gens veulent avoir accès à son dossier de santé.

M. Boisclair: Quand vous recontactez ces personnes-là, il vous arrive donc de les informer du type de consentement qu'ils viennent de donner.

Mme Thibault (France): Oui.

M. Boisclair: Comment les gens réagissent lorsque vous les interpellez?

Mme Thibault (France): Il y a des gens qui disent: Oui, oui. C'est correct. Vous pouvez donner l'information. Et c'est arrivé qu'il y a des gens qui ont dit: Non. Je n'ai pas donné l'autorisation pour cet épisode-là. Alors, à ce moment-là, nous, on est comme mal prises parce que le formulaire qui a été signé par le bénéficiaire est comme large. Donc, si on refuse de donner de l'information à la personne qui la collige, on est aussi en défaut légalement.

M. Boisclair: Est-ce que vous avez le projet de loi sous les yeux?

Mme Thibault (France): Non. Je ne l'ai pas avec moi. Je m'excuse.

M. Boisclair: Est-ce que vous avez apprécié l'article 12? Je vous le lis: «Le consentement à la communication ou à l'utilisation d'un renseignement personnel doit être manifeste, libre, éclairé et être donné à des fins spécifiques. Ce consentement ne vaut que pour la durée nécessaire à la réalisation des fins pour lesquelles il a été demandé.»

Est-ce que vous retrouvez, dans cette rédaction, une réponse à vos préoccupations?

Mme Thibault (France): Oui, de plus en plus. Oui. Maintenant, je ne sais pas si c'est une trop grosse obligation, si ça peut créer des problèmes. Là où j'insisterais encore, ça serait d'arriver avec les signatures originales pour...

M. Boisclair: Oui. C'est là l'autre question: Pourquoi la signature originale? Puisque vous dites: «La loi devrait définir et identifier dans quelles circonstances il est permis et souhaitable d'accepter une signature d'autorisation d'accès par télécopieur en lieu et place de la signature originale de l'usager.»

Mme Thibault (France): Ça aussi, c'est une autre question qu'on se demandait. Est-ce qu'il y a possibilité, si on accepte... Bon. Peut-être que nos pensées vont trop loin. Est-ce qu'il y a possibilité de fausser les signatures par photocopie? Moi, je dirais que oui. On peut utiliser des signatures et vous pouvez truquer des signatures en photocopiant. Donc, si tu reçois des photocopies de documents qui sont signés, est-ce que ça peut être vrai, est-ce que ça peut être réel?

M. Boisclair: Concrètement, madame, là, moi, par exemple, je rencontre un assureur pour une assurance-vie.

Mme Thibault (France): Oui.

M. Boisclair: Sans doute, on réclame accès à mon dossier médical. Ça, c'est si on ne m'envoie pas dans un de leurs établissements désignés pour passer un certain nombre de tests et d'examens médicaux.

Mme Thibault (France): En plus. Vous allez avoir les deux.

M. Boisclair: Je signe un consentement. C'est ce consentement que vous recevez.

Mme Thibault (France): Normalement, non. Je reçois des photocopies de ce consentement-là. L'original est conservé dans votre dossier, chez l'assureur.

M. Boisclair: Et vous dites que la copie de ce consentement, ce n'est pas suffisant. Vous souhaiteriez avoir un original. Est-ce que je vous...

Mme Thibault (France): Pour nous, c'est... En tout cas, quand on reçoit l'original, on sait que, bon, ça a été vraiment signé par l'usager puis que c'est conservé dans notre dossier à nous aussi.

M. Boisclair: Est-ce qu'il y a eu des problèmes? Est-ce qu'il y a eu des cas de fraude où vous avez reçu ce qui serait l'équivalent d'une télécopie ou d'une photocopie d'un consentement qui s'est révélé, dans les faits, n'étant pas un consentement donné par le bénéficiaire?

Mme Thibault (France): Non. Pas à ma connaissance. Non.

M. Boisclair: D'accord. Je vous remercie beaucoup pour cette présentation, madame.

Le Président (M. Garon): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue à Mme Thibault et de la remercier pour sa présentation au nom des archivistes médicales ici, au Québec. On a eu effectivement l'occasion de rencontrer le groupe et, du temps de mon séjour à l'Office des professions, j'ai des bons souvenirs aussi d'avoir rencontré ces excellents professionnels que sont les archivistes médicales.

Maintenant, M. le Président, j'aurais voulu me concentrer sur un élément qui se retrouve à la page 7 de leur mémoire, parce que c'est un sujet qui a été abordé à plusieurs reprises et qui, à mon sens, est difficile à résoudre, peut-être, en termes législatifs, mais je pense que c'est extrêmement important de commencer à en parler maintenant. Vous dites que, avec la transformation des réseaux d'information, les transmissions électroniques et la venue des inforoutes, votre Association est d'avis que la loi devrait préciser et définir des règles précises en la matière. Vous dites qu'actuellement c'est le vide juridique et que vous croyez que nous aurons bientôt de nombreux problèmes reliés à la confidentialité des données transmises électroniquement. Encore une fois, des exemples concrets ou c'est une anticipation?

Mme Thibault (France): Non, il y a des exemples concrets. Bon. C'est des plaintes que j'ai reçues, c'est des demandes que j'ai reçues, formulées par les membres qui sont dans le quotidien. Des échanges d'informations interétablissements. Vous savez maintenant que les patients sont souvent transférés d'un établissement à un autre. Par exemple, en courte durée, ils sortent, ils sont transférés en CLSC, ou vice versa, ils retournent à l'hôpital par la suite. Les copies de dossiers sont transférées par fax. Ça arrive, mais c'est laissé là au poste ou quoi que ce soit. Ça cherche. Là, le médecin te rappelle: Je n'ai pas reçu le dossier. Bien oui, on va l'a envoyé, on a la confirmation d'envoi par fax. Ils te rappellent une demi-heure après: C'est correct, on l'a trouvé, il traînait ailleurs. Donc, c'est tout cet aspect-là. Il y a des dossiers qui risquent de se perdre. Dans le fond, ce n'est pas l'original, c'est des photocopies, mais c'est de l'information qui circule comme ça, à droite, à gauche.

Il y a aussi des archivistes qui refusent d'abonder dans ce sens-là. Nous, on n'envoie pas de dossiers par fax, à moins que ce ne soit extrêmement urgent. Maintenant, c'est quoi, l'urgence pour être autorisé à l'envoyer?

Alors, dans le fond, la question, c'est que c'est pour nous aider, nous autres aussi, à délimiter jusqu'où on est légales dans notre pratique quand on envoie des photocopies ou des documents qui sont inclus dans les dossiers. C'est toujours dans le but de préserver...

M. Mulcair: Vous avez complètement raison. Il y a une expression, on l'utilise, on dit: Nul n'est censé ignorer la loi. Mais là vous êtes en train de transiger avec des nouvelles réalités. La loi doit s'adapter. Votre expression était bien choisie: On ne sait pas jusqu'à quel point on est légales. Et c'est important, parce qu'il y a des peines, il y a des dispositions pénales, il y a des sanctions qui vont devenir lourdes pour quiconque enfreint une disposition de la loi. Et ce n'est pas suffisant de dire: Mais ce n'est pas notre intention. Si c'est ça qui est écrit, c'est possible d'avoir l'application de la sanction et de la peine.

Je pense qu'au moment où on sera appelés à revoir l'ensemble des dispositions pénales, ce sont des choses qu'on devrait maintenir à l'esprit, d'autant plus que plusieurs groupes qui étaient là la semaine dernière sont venus nous dire: Attention, vous êtes en train de créer des infractions possibles pour des personnes qui transmettent de l'information, et ça peut être même le commis, dans certains cas. Mais faites attention, parce qu'on peut bien assumer la responsabilité pour nos propres systèmes informatiques et la sécurité de l'information personnelle que ça renferme, mais, nous, on ne peut pas savoir si quelqu'un se branche sur notre lien avec l'autre branche de notre compagnie, admettons. Mais, dans le domaine public, ça serait la même chose; entre établissements, c'est la même chose. Qui est responsable si quelqu'un d'autre vient faucher votre système, si le système lui-même n'est pas sécuritaire?

On va apporter une attention particulière à ça lorsqu'on révisera la rédaction des dispositions des infractions, les amendes, les peines. On vous remercie beaucoup d'avoir soulevé ça. M. le Président, mon collègue le député de Jacques-Cartier avait également une question.

Le Président (M. Garon): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Avez-vous des commentaires avant ou...

Mme Thibault (France): Si je me permettais, moi, j'insisterais plus encore sur la façon de nous fournir des moyens, tu sais, de nous fournir, dans le fond, une réponse: Est-ce qu'on peut transférer de l'information par fax ou pas? Et c'est quoi, les moyens? Parce que c'est sûr que la nouvelle technologie... Et on vit dans un monde où tout est urgent, tout est pressé, on a beaucoup de transferts, de va-et-vient qui se passent. Maintenant, c'est de fournir des moyens aux professionnels qui ont à jongler avec le dossier. C'est plus là, je pense, qu'il faut aussi travailler. C'est notre besoin et c'est plus notre demande, à nous.

M. Kelley: Merci.

Le Président (M. Garon): M. le député de Limoilou.

(16 heures)

M. Rivard: Merci, M. le Président. Mme Thibault, vous y faites allusion un peu dans le bas de votre mémoire à la page 7, il semblerait qu'il y a certains établissements de santé qui abuseraient des informations, des données médicales pour des fins de recherche ou de sondage. Pensez-vous que, si c'était réel, la Commission d'accès à l'information devrait faire enquête?

Mme Thibault (France): Je crois que oui. Et cet élément-là je l'ai apporté dans mon mémoire suite à deux plaintes que j'ai reçues de deux membres différents qui m'ont demandé d'en parler, compte tenu que les membres étaient au courant qu'on déposait un mémoire devant la commission.

Et c'est arrivé à deux reprises dans deux établissements de santé, oui. Je pense que... Même, nous, les archivistes, quand on reçoit des autorisations qui sont signées de par nos supérieurs en disant, oui, on donne le O.K. à ces projets de recherche là, on n'a pas le pouvoir de dire non; il faut abonder aux décisions et aux ordres que nous recevons.

Bon, l'archiviste a communiqué avec l'Association en disant: Est-ce que tu peux m'aider, est-ce que tu peux faire des démarches, parce que, moi, j'ai comme les mains liées, je dois exécuter l'ordre que j'ai reçu? Alors, peut-être avoir des précisions très claires dans le projet de loi qu'est-ce qu'on entend par des projets de recherche.

M. Rivard: Merci.

Le Président (M. Garon): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Oui. Vous avez soulevé dans votre mémoire tous les changements à venir, parce que c'est évident, avec les nouvelles technologies, que le travail que font vos membres aujourd'hui va être complètement transformé d'ici 10 ans, d'ici cinq ans même. Les membres de la commission de la culture sont allés voir la Régie de l'assurance-maladie, qui ont fait une présentation sur le projet sur la carte-santé, le Motus, et j'aimerais savoir si votre Association est au courant des développements quant à la création des dossiers médicaux en cyberespace. Êtes-vous consulté? C'est quoi, vos suggestions? Parce que c'est évident qu'on peut attendre un autre cinq ans et, aux prochaines révisions quinquennales, modifier davantage la loi? Ou avez-vous des suggestions ou des précautions à nous formuler tout de suite quant au projet Motus et les changements qui vont venir?

Mme Thibault (France): Déjà, l'an passé, à cette période-ci, on avait été invité par les représentants de la Régie de l'assurance-maladie, qui nous ont déposé le projet sur la carte-santé, la carte dont vous parlez, et, oui, on avait fait un paquet de recommandations; on avait étudié le document, le dossier avec eux. Et je sais que présentement il y a un groupe de travail qui travaille très, très fort sur le dossier électronique, dans le fond sur la fameuse carte-santé, et il y a des archivistes de toutes les différentes régions du Québec qui siègent sur ce comité de travail. Alors...

M. Kelley: Est-ce que, ça, c'est un comité qui travaille avec la Régie même ou avec la filiale Motus? Parce que, une des choses que nous avons trouvée, comme membres de la commission de la culture, un petit peu inquiétante, oui, on a questionné la Régie, mais au bout de la ligne le design, la création et le fonctionnement de la carte-santé va aller dans une filiale qui s'appellerait Motus. Alors, c'est vraiment à part et à une certaine distance des parlementaires sur la gestion de la carte.

Alors, je veux m'assurer que, vous autres qui avez la riche connaissance pratico-pratique à tous les jours, c'est ça, comment gérer nos archives médicales, nos dossiers médicaux... Quand vous avez parlé des urgences, c'est quelque chose qui est encore plus vrai, parce que, dans la vie d'un député, le nombre de petites étiquettes roses par jour qui sont indiquées de rappeler de façon urgente, les enveloppes qui arrivent à nos bureaux avec pas un, pas deux, mais trois étiquettes urgentes... Alors, c'est quelque chose qui... il y a beaucoup d'abus de la notion d'urgence.

Ça, c'est des réflexions qui sont riches, et je veux juste m'assurer que votre expérience sera mise à contribution pour la filiale Motus dans le design, dans la conception d'une nouvelle carte-santé.

Mme Thibault (France): Je ne peux pas vous répondre au niveau de la filiale Motus, je ne connais pas ce dossier-là. Moi, je sais que les archivistes siègent sur un comité pour l'élaboration du fichier patient, si vous voulez. Pour que la carte soit fonctionnelle, nous devrons avoir, au niveau provincial, un fichier patient, et c'est là que les archiviste travaillent puis apportent leur expertise au niveau des données: quelle est la pertinence d'avoir telle, telle, telle donnée dans le fichier, comment reconnaître pour que ce soit fonctionnel dans tous les établissements de santé? C'est sur ce dossier-là qu'elles travaillent.

Maintenant, à l'autre niveau, non, ça se passe vraiment au niveau des services informatiques, puis là on monte dans les échelons, là.

M. Kelley: Non, mais c'est important, parce que, dans le projet, il y a également la question: Qui aura accès à quelle donnée? Parce que, si j'ai bien compris, le concept, c'est: un ambulancier peut avoir accès à quelques données, un pharmacien pourra avoir accès à quelques autres données, le médecin lui-même pourrait avoir un accès plus complet. Est-ce que vous autres, vous êtes consultées sur qui doit avoir accès à quels dossiers, à quel moment dans le design du système?

Mme Thibault (France): L'an passé, quand nous avons rencontré la régie régionale, le groupe qui travaillait sur le projet initial, oui, c'est tout ce volet-là qu'on avait travaillé, quelles données qu'on peut retrouver en première, en deuxième puis en troisième phase, oui.

M. Kelley: Parfait. Merci beaucoup.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Boisclair: Sur la question de la carte-santé, on est loin de la coupe aux lèvres, et il y a suffisamment de discussions qui ont eu lieu entre ministres dans différents comités ministériels pour qu'on puisse, en tout cas, certainement rassurer l'ensemble des parlementaires. Ce projet-là est toujours à l'étude, et il n'y a pas de décision, à ce jour, du Conseil des ministres sur cette question.

Je voudrais revenir sur les questions de fins d'études en recherches, statistiques, poursuivre sur la lancée de mon collègue député de Limoilou. Vous dites qu'il y a eu des problèmes. Est-ce que vous pouvez nous dire clairement... Vous dites: exemple, des sondages auprès des usagers effectués par des firmes de sondage et ayant pour but de déterminer des taux de fréquentation, le tout sous prétexte d'effectuer des recherches. Concrètement, qu'est-ce qui s'est passé? Quels sont les cas qu'on a portés à votre attention?

Mme Thibault (France): C'est deux cas identiques dans deux hôpitaux différents. Ce qui arrive, c'est que les usagers sont approchés pour... Ils signent, dans le fond, avec un consentement. Ils donnent l'autorisation d'avoir accès à leur dossier, mais, nous, on est obligé de fournir le nom, l'adresse, le numéro de téléphone des gens, et à ce moment-là c'est une firme qui fait un sondage auprès de la population. Et, pour que l'archiviste puisse fournir ces données nominales là, si vous voulez, ils se sont servis d'un consentement pour fins de recherche comme telle.

M. Boisclair: Donc, essentiellement la firme de sondage cherchait à constituer un échantillon.

Mme Thibault (France): Exactement. Un bassin, x, y, z...

M. Boisclair: C'est ça.

Mme Thibault (France): ...du centre hospitalier ou de l'établissement, comme vous...

M. Boisclair: C'est une question essentiellement de services à la clientèle, sondages sur la satisfaction des clients.

Mme Thibault (France): Je ne pourrais vous répondre c'était sur quoi exactement, le sondage. Il faudrait que je fouille dans mes dossiers.

M. Boisclair: Et ils ont interprété les articles 59 et 125 de la loi de façon, à votre avis, un peu abusive. C'est ce que je comprends?

Mme Thibault (France): Au sens élargi, oui. Nous, quand on interprète une recherche, ce sont des professionnels qui débarquent au services des archives puis on a besoin d'une série de dossiers traitant d'un sujet x, y, z. Et là, l'objectif, c'est vraiment de faire une recherche sur le diagnostic comme tel. Mais, là, de fournir les renseignements nominatifs – on parle d'adresses, de noms, de numéros de téléphone – pour qu'une firme extérieure téléphone aux gens...

M. Boisclair: Mais ce que je comprends, c'est que 125, c'est que c'est la Commission qui peut accorder à une personne ou à un organisme l'autorisation de recevoir, à des fins d'études, de recherches, de statistiques.

Mme Thibault (France): Oui.

Une voix: ...

M. Boisclair: Mais pas dans le secteur de la santé, me dit-on. Écoutez, c'est une question qu'il faudra regarder, madame; je vous remercie de l'avoir portée à notre attention.

(16 h 10)

Le Président (M. Garon): Je remercie la représentante de l'Association québécoise des archivistes médicales de la contribution apportée aux travaux de cette commission. J'invite maintenant les représentants de l'Association sur l'accès et la protection de l'information à s'approcher de la table des délibérations. Alors, comme l'Association sur l'accès... C'est eux autres? Ah, bon. O.K. Alors, je remercie les représentantes de l'Association sur l'accès et la protection de l'information de s'être approchées de la table. Nous avons 45 minutes ensemble; ça veut dire que normalement vous vous présentez, vous avez 15 minutes pour faire état de votre mémoire et ensuite 15 minutes pour chacun des deux partis pour vous poser des questions. Allez-y, Mme Larouche.


Association sur l'accès et la protection de l'information (AAPI)

Mme Gourgues (Stéphanie): Bonjour à tous. Je suis Stéphanie Gourgues, sur le conseil exécutif de l'Association. Je viens représenter Mme Denise Larouche, présidente de l'Association, qui s'excuse de son absence; elle a été retenue à Montréal aujourd'hui. Alors, si vous me permettez, je vais juste brièvement vous présenter l'Association. C'est l'Association sur l'accès...

Le Président (M. Garon): Est-ce que vous présentez la personne qui vous accompagne?

Mme Gourgues (Stéphanie): Oui, bien sûr, c'est Mme Louise Roy.

Mme Roy (Louise): Bonjour.

Le Président (M. Garon): Allez-y.

Mme Gourgues (Stéphanie): Alors, l'Association sur l'accès et la protection de l'information, c'est un organisme sans but lucratif qui a été constitué le 7 mai 1991. Elle compte plus de 300 membres provenant des secteurs public et privé. Le conseil d'administration est composé de sept membres élus en assemblée générale annuelle et il dirige et administre les activités de l'Association. Pouvant être membre: toute personne intéressée à la mise en application de toute loi favorisant l'accès aux documents et la protection des renseignements personnels.

La mission de l'Association, c'est de promouvoir et faciliter la mise en application et le respect des lois sur la protection des renseignements personnels, de former, d'informer et de sensibiliser les membres sur les divers sujets à la protection des renseignements personnels et la vie privée. On fait également de la formation continue par le biais de conférences, d'ateliers, de colloques, de congrès. On a également un journal qui s'appelle L'informateur public et privé , qui nous permet de rejoindre les membres.

On a une vaste expérience dans le domaine de la sensibilisation des membres et on est intervenu à plusieurs occasions en commission parlementaire. Alors, je vous présente tout de suite Mme Roy qui va vous parler de notre projet.

Mme Roy (Louise): Alors, bonjour à tous, les députés, M. le ministre, M. le Président – je ne pense pas que je l'ai fait dans le bon ordre, mais en tout cas. Ce que je pensais faire, c'est prendre le mémoire tout de suite dans sa substance, commencer dans les mesures proprement dites qui sont utilisées par les responsables dans la vie quotidienne, ensuite peut-être faire une section sur la question des échanges de communication et puis ensuite peut-être une section dans le secteur privé, quelles sont les mesures pour le secteur privé.

Alors, je vais commencer dans le mémoire tout de suite, à la page 7. Nous avions déjà fait un mémoire l'année dernière et nous rajoutons ou nous revenons pour demander, si c'est possible, aussi de prévoir également, pour la question du partage des frais, question accès, peut-être des frais pour le temps de recherche des documents et également des frais pour le traitement des dossiers. Ce qui arrive, c'est que tous les dossiers ne sont pas égaux nécessairement dans la pratique; il arrive des dossiers plus embêtants, beaucoup plus gros, qui prennent plus de temps des fois à localiser. C'est vraiment, des fois, une problématique.

Également, une autre problématique dans le même thème, c'est la problématique aussi de l'élagage des documents. Donc, ça prend parfois pas mal de temps aussi pour... Actuellement, on ne peut pas comptabiliser cette partie-là; on peut demander des frais pour les photocopies, mais il y a parfois des demandes qui requièrent beaucoup plus de temps. Peut-être un petit exemple pour illustrer ça: si on demande accès à tous les contrats ou les soumissions de l'organisme, à ce moment-là il peut y avoir des caisses et des caisses, d'abord à recueillir et ensuite à éplucher pour au moins protéger à la base les renseignements nominatifs.

Concernant le deuxième aspect, les demandes de précision, il arrive parfois que la demande d'accès n'est pas tout à fait aussi précise qu'on le souhaiterait. Alors, il arrive parfois qu'on a des problèmes pour rejoindre le demandeur et se faire expliquer exactement qu'est-ce qu'il veut avoir. Et là les délais courent contre l'organisme, et ce n'est vraiment pas de la mauvaise volonté. Parfois, c'est plus difficile; on peut téléphoner, on peut utiliser des moyens comme le fax, le courrier, pour finir par rejoindre la personne beaucoup plus tard qu'on l'espérait, et les délais sont écoulés à ce moment-là. Donc, si c'était possible de suspendre le délai de réponse jusqu'à ce que le demandeur ait précisé sa demande, c'est sûr que ce serait appréciable pour celui qui travaille à répondre aux demandes d'accès.

Concernant les motifs de refus, disons qu'il y a eu une jurisprudence récente qui a un peu inquiété, je pense, les gens qui travaillent à l'accès et qui prévoyait que, lorsque la demande porte sur un renseignement personnel faite par une personne qui est concernée, normalement on doit répondre dans un certain délai. Et, si on excède ce délai-là, la Commission disait: Bon, vous ne pouvez plus invoquer les motifs obligatoires. Toutefois, récemment la Commission est venu dire: Non, même les motifs impératifs, tel l'article 28, par exemple les documents d'enquête, ne pouvaient pas être protégés.

Alors, je dois dire que, du côté des gens qui travaillent pour appliquer la loi, là il y a eu une inquiétude supplémentaire, parce qu'on s'est dit, d'accord parfois si on dépasse le délai, on doit appliquer la loi, et, si la jurisprudence disait qu'on devait donner les documents facultatifs, ça allait, on vivait avec ça, mais, si on devait quand même révéler des renseignements que la loi nous oblige à protéger par ailleurs, le responsable de l'accès va être un peu coincé. Nous constatons que la Commission est de plus en plus sévère à ce sujet. Nous irons même jusqu'à dire que parfois elle ajoute des sanctions qui ne sont pas prévues dans la loi. Nous souhaitons que la loi soit modifiée afin qu'il soit clair qu'un organisme puisse invoquer un motif de refus, même en dehors du délai.

Je crois possible de quand même rejoindre les objectifs du législateur. Je pense que le législateur, lui, ne veut pas qu'on prenne par surprise le demandeur en arrivant comme ça, le jour de l'audition, puis en sortant des motifs qui ne seraient pas prévus avant. D'une autre façon aussi, c'est sûr qu'on devrait respecter les délais pour sortir les documents, le plus possible, et, si on ne le fait pas, que le demandeur puisse aller tout de suite à la Commission pour aller en révision.

Donc, ce que l'Association suggère, c'est soit de permettre à ce moment-là à l'organisme de transmettre ses motifs au moins 10 jours avant l'audience; comme ça, la personne sait qu'est-ce qui l'attend. Ou même peut-être avant, ça pourrait même être 60 jours après l'accusé réception par la Commission. Je pense que le législateur pourra trancher qu'est-ce qu'il lui convient. Mais je pense qu'au niveau des motifs de refus ça aiderait beaucoup les organismes à bien appliquer la loi sur l'accès.

Je passerais tout de suite également à la section sur, je pense, les nouveautés qui sont prévues dans la loi sur l'accès pour l'accès aux documents sur les supports de substitution pour les personnes handicapées. Le projet de loi prévoit un accès pour les personnes qui ont des déficiences visuelles ou auditives afin d'obtenir les documents sur un nouveau support. D'accord? Toutefois, il n'y a aucune discrétion qui est prévue pour l'organisme; il s'agit d'une obligation.

C'est sûr que nous sommes d'accord avec l'objectif. On peut imaginer une personne qui ne voit pas bien du tout ou qui ne voit pas, elle ne peut pas lire les documents, c'est certain. Toutefois, nous avons certaines craintes quant à l'impact d'une modification de telle envergure. Nous attendons aussi le règlement éventuel. Certainement qu'il y aura des frais de prévus et les situations où un organisme pourra être exempté d'une telle obligation, peut-être que l'organisme n'aura pas les reins assez solides dépendant peut-être de la clientèle et également de la taille des documents. On peut imaginer quelqu'un qui demande accès à son dossier, c'est très légitime, mais de faire transformer ça en braille je ne sais pas si tous les organismes vont avoir les reins assez solides pour ça.

Également, le pouvoir réglementaire ne semble pas tout à fait aussi clair qu'on le souhaiterait. Vous pouvez à ce moment-là peut-être préciser les cas où une personne peut être exemptée du paiement, d'autre part les cas où un organisme serait, lui, exempté de l'obligation de transférer sur un support. Je pense que tout ça pourrait être considéré lors de l'élaboration du règlement. Nous recommandons bien sûr la suspension de l'entrée en vigueur de cette disposition jusqu'à l'entrée en vigueur du règlement tel quel.

(16 h 20)

Les renseignements à caractère public maintenant. Nous avons quelques réticences quant à la rédaction de l'article 55 tel que modifié par le projet de loi. Cet article exigera-t-il des organismes la communication des renseignements de façon répétitive à l'unité lorsqu'il reçoit une demande d'accès pour des renseignements à caractère public ou encore est-ce que ça devra être fait comme une succession de demandes, une par une? Par exemple, si quelqu'un s'adresse à un ministère et lui demande les noms, titres et fonctions des sous-ministres, est-ce qu'il faudra répondre en plusieurs temps, puisqu'on n'a pas le droit de communiquer les renseignements autrement qu'à l'unité?

Ça peut faire des problèmes, en tout cas, d'engorgement et d'efficacité également. Je ne suis pas sûre si tous les renseignements à caractère public ont la même sensibilité, mais cependant nous sommes d'accord avec l'objectif de limiter la communication des banques de données à caractère public. Il faudra voir. Je pense que votre ministère est en train d'élaborer ou de regarder la sensibilité des renseignements à caractère public dans différentes lois, je crois.

Donc, je passerais tout de suite à la section également sur les échanges de renseignements personnels. Il y a pas mal de changements, dans cette section-là. Commençons tout de suite peut-être par le premier article qui concerne l'article 67. Alors, comme changement, à prime abord, désormais les organismes et les entreprises doivent aviser la Commission de la communication de renseignements qui sont nécessaires à l'application d'une loi. Toutefois, je dois dire qu'il y a certaines craintes qui demeurent malgré tout par rapport à cet article-là et les articles qui suivent aussi. Ce n'est vraiment pas évident.

Je pense que le législateur a voulu prévoir aussi la possibilité que des communications soient récursives. Ce n'est pas toujours possible pour l'organisme de le savoir à l'avance. Est-ce qu'il va y avoir le même organisme ou la même personne qui va se représenter pour demander le même type de renseignements? Alors, on a mis des exemples dans notre mémoire. Peut-être, pour illustrer ça un peu, le cas du policier qui se rend à l'école pour demander des informations au sujet des élèves. Est-ce que l'article 67 exigerait que la commission scolaire informe la Commission d'accès à l'information de la communication de renseignements à chaque fois que le policier se rend à l'école? Quand je lis les articles du projet de loi, je n'ai pas cette impression-là. Je pense que le législateur a dit: Bon, il y a des communications qui vont devenir récursives. Peut-être qu'on peut faire un avis que ça va être récursif. En tout cas.

Autre exemple, il arrive que la Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada demande, dans une même année, des renseignements concernant plusieurs individus. À chaque fois, c'est un seul individu. Est-ce que ça va être nécessaire d'informer la CAI à chaque fois? Parce que, en réalité, ces renseignements-là, c'est le même type de renseignements demandés par les mêmes organismes sur, probablement, le même article de loi.

Il y a peut-être la question du 90 jours. Ce n'est pas évident. L'organisme ne le sait pas toujours à l'avance. Peut-être que ce que le législateur a voulu dire aussi, c'était la question de l'avis qui devait être donné dans les 90 jours. Ce n'est pas évident. Le législateur pourrait prévoir à tout le moins, je pense que c'est le but de la Commission d'accès à l'information, de savoir – en tout cas, c'est la nouveauté qui est demandée aux organismes – quel genre de renseignements sont envoyés d'un organisme à l'autre quand c'est nécessaire à l'application d'une loi.

Je pense que la commission voulait savoir aussi si c'était récursif, puis si ça pouvait être fait également. On a mis dans notre mémoire aussi quelques suggestions. On n'est pas arrivé à une solution finale totale. Je pense qu'on dirait que si on parle à tel organisme, mettons, qui est décentralisé puis qu'on lui dit «Bien, pourriez-vous prendre en note une par une, dans l'année, les communications?», alors, là, l'organisme va peut-être avoir de la misère à arriver au point de vue de, ce qu'on peut dire, tâches administratives et d'efficacité.

Dans d'autres organismes, je pense à des organismes publics qui ont été sous enquête récemment par la Commission, il y a eu une recommandation qui a été faite d'indiquer les échanges de renseignements sous l'article 67 directement dans le rapport annuel. Je soumets qu'il y a peut-être différentes façons d'aviser cette fois-ci tout un chacun des types d'échanges de renseignements qui se font en vertu de l'article 67. Nous sommes, en tout cas, à l'Association, tout à fait disponibles pour en discuter davantage et consulter également nos membres là-dessus. Ce n'est pas évident.

Il y a également les articles 70 et suivants. Il y a eu l'article 68.1 qui a été aboli; toutefois, on retrouve, à l'article 70.1, un article qui lui ressemble beaucoup, qui parle de comparaison de fichiers, tout ça. J'ai eu des commentaires à l'Association me disant: D'une part, la Commission d'accès à l'information avait recommandé d'abolir cet article-là, mais on a un peu l'impression, à une première lecture en tout cas, qu'il se retrouve dans l'article 70.1. Alors, ça crée une certaine confusion. On se demande un peu pourquoi. Bon, ça, c'est question de mode de communication.

À 67, on retrouve un article qui nous dit: Bon, bien, quand on fait une communication de renseignements et que c'est nécessaire à l'application d'une loi, il y a un régime. Quand on tombe sur 68, là c'est autre chose, des renseignements pour l'application des programmes pour les fins d'un organisme. À 70.1, lorsqu'il s'agirait de comparer des fichiers, une autre façon de faire. Alors, ça crée encore de l'incertitude au niveau de quel régime on se situe.

Moi, je me souviens d'avoir vu des réunions où il y avait du monde de différents organismes puis il y avait un projet de communication de renseignements. Mais vraiment les gens voulaient appliquer la loi sur l'accès et se demandaient: Est-ce qu'on tombe sur 67 de la loi avec son régime de communication? Est-ce que c'est une communication de renseignements selon l'article 68? Est-ce que c'est une comparaison de fichiers? Est-ce qu'on est correct? Puis là la Commission avait aussi son opinion et, en tout cas, on essayait... Mais finalement ça a entraîné de grandes, grandes discussions. Ce que je pense, c'est que ce n'est pas encore évident pour moi à ce stade-ci si c'est rendu aussi simple que certains gens qui travaillent dans l'accès auraient souhaité. Alors, c'est de là nos remarques.

Je vais continuer également avec l'article 70 et 70.1. Dans l'article 70: l'«entente conclue en vertu de l'article 68 doit faire l'objet de l'avis favorable de la Commission» alors que la communication à des fins de comparaison de fichiers, à 70.1, doit faire l'objet d'une autorisation de la Commission. Peut-être qu'on vous l'a déjà soulevé, je ne sais pas trop, là. À tout événement, tout simplement pour le soulever, le vocabulaire différent dans ces deux articles-là peut amener une difficulté d'interprétation. Tout à l'heure on va se demander: Est-ce que c'est la même chose que la Commission contemplait? Est-ce que c'est ça qu'elle voulait, faire la même chose, c'est-à-dire donner son approbation? Toutefois, si jamais c'était autre chose, alors, là, on comprendrait qu'il y aurait des termes différents qui seraient employés. Mais à ce moment-là une précision serait souhaitée.

Le Président (M. Garon): Je voudrais vous dire que vous avez déjà fait presque 20 minutes. Il reste seulement... Il ne reste pas grand temps à chacun des partis.

Mme Roy (Louise): O.K. Je vais faire ça beaucoup plus rapidement puis je vais terminer puis vous laisser la parole à ce moment-là. Vous faites bien de me situer, M. le Président, je vois que j'étais hors d'ordre.

Le Président (M. Garon): C'est parce que, s'il ne reste plus de temps, ils ne pourront pas vous poser de questions.

Mme Roy (Louise): Vous avez raison. Alors je vais faire ça vite. Donc, vous avez sans doute lu 70.2. On s'est demandé si on n'allait pas au-delà de l'accès à l'information. Il y a des pouvoirs que la Commission a demandés en matière de surveillance pour les enquêtes, et je dois dire que l'Association appuie la demande de la Commission. Et puis il y a également une possibilité de simplifier la notion d'appel, d'abolir carrément la requête pour aller en appel, pour simplifier tout ça; l'Association est tout à fait favorable.

(16 h 30)

Peut-être juste un dernier mot sur la responsabilité pénale qui inquiète les gens dans le domaine des organismes publics. C'est que dans le domaine public, les organismes, on a un volet protection puis on a un volet accès à l'information alors que dans le secteur privé on a la protection des renseignements personnels. Alors, là, c'est sûr que, quand on prend connaissance du projet de loi puis on regarde, bon, une augmentation du fardeau, ça semble un peu plus embêtant, plus inquiétant, le régime de la mens rea, en tout cas, de responsabilité stricte, je veux dire, pour ce qui est de l'accès aux documents. Nous pensons plutôt que le régime de mens rea devrait demeurer en ce qui concerne l'accès aux documents.

Il y avait aussi certaines choses en matière de secteur privé. Tout simplement, ce que je voudrais dire, c'est ceci: c'est que nous croyons, nous aussi, qu'il devrait y avoir une espèce d'équilibre entre les termes dans le secteur public et dans le secteur privé, et des principes également. Alors, nous appuyons ça.

Finalement, un dernier mot. À l'article 34, tout simplement faire préciser un petit peu ce que le législateur voulait faire. Est-ce que le législateur voulait que tous les organismes doivent préciser les numéros d'article ou peut-être autre chose, à ce moment-là? Parce que ce n'est pas évident. Alors, je vais arrêter tout de suite ici peut-être pour laisser la chance à tout le monde de s'exprimer, parce que je vois que j'ai dépassé mon temps. Je m'en excuse. Merci.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Boisclair: Je voudrais vous remercier pour votre présentation. On avait pris connaissance du mémoire et des recommandations. Certaines de vos recommandations d'ailleurs étaient déjà connues. Dans vos recommandations, à la page 2 du mémoire, dès le début, vous nous faites état des recommandations qui n'ont pas été retenues. Ces questions ont été débattues entre nos collègues au Conseil des ministres, et je pense que les façons de faire proposées et retenues par le Conseil des ministres sont justes. À cet égard, je n'entends pas de nouveaux arguments dans votre présentation qui pourraient m'amener à présenter des modifications à la loi sur les quatre premières questions que vous avez soulevées.

Mme Roy (Louise): D'accord.

M. Boisclair: Nous avons déjà discuté de ces questions. Nous avons aussi écarté la possibilité de pouvoir amender, d'ajouter de nouveaux motifs pour ne pas rendre accessible un document. Les ministres du gouvernement et les membres du gouvernement souhaitent que nous imposions un régime de discipline assez strict sur ces questions et qu'à cet égard on soit, dans nos rapports avec les administrés, le plus clairs possible et que les choses se fassent le plus aisément aussi. Donc, je ne pense pas que sur ces questions nous reprendrons le débat.

Toutefois, comme bien d'autres personnes, vous mettez le doigt sur quelques difficultés de rédaction dans la loi. Votre recommandation 6, «que le législateur précise à l'article 55 proposé ce que signifie l'expression "qu'à l'unité"», il faut regarder cette question. Les membres de la commission parlementaire se sont aussi penchés sur cette question et conçoivent comme moi qu'il y a un danger à faire en sorte que les renseignements soient communiqués, soient téléchargés en bloc, des documents, des informations qui seraient détenus dans un fichier. Alors, c'est ce que nous tentons d'éviter. On cherche une bonne formule. À cet égard, si vous avez une bonne inspiration, n'hésitez pas à nous faire part de vos recommandations, puisqu'il faudra aller au-delà de préciser «qu'à l'unité». Les gens qui se sont exprimés avant vous ont aussi fait part d'autres difficultés dans la rédaction de cet article, donc il faut continuer à réfléchir sur cet article.

Sur la question de la responsabilité pénale, vous nous suggérez de maintenir le régime de mens rea pour les infractions concernant l'accès aux documents. C'est une question que nous allons effectivement aussi regarder. Ces modifications ont été apportées à l'époque par le ministère de la Justice. Les organismes ne s'y sont pas opposés au sein des différents comités ministériels où j'ai fait cheminer ce projet de loi, mais c'est une question que nous pourrons regarder à nouveau.

Alors, je vous remercie pour cette présentation. Et, pour les autres recommandations, elles seront aussi regardées attentivement.

Mme Roy (Louise): Merci.

Le Président (M. Garon): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Mme Larouche, Mme Roy, bienvenue et merci beaucoup pour votre présentation au nom de votre Association qui, rappelons-le, regroupe environ 300 intervenants travaillant principalement dans le domaine de la protection de la vie privée ou de l'accès aux documents, tantôt et surtout toujours dans le secteur public, mais, depuis l'avènement de la loi privée, aussi dans ce secteur-là.

J'aimerais savoir si vous avez eu l'occasion de prendre connaissance du rapport de la commission de la culture, notre étude du rapport quinquennal de la Commission d'accès. Est-ce que vous avez pu en prendre connaissance?

Mme Roy (Louise): Oui, je l'avais regardé. Pouvez-vous me rafraîchir la mémoire, pour voir si vous avez un point spécifique?

M. Mulcair: La partie qui m'intéressait de discuter avec vous vient vers la fin – en fait, même dans notre conclusion – parce que c'est intéressant de mettre en relief, à côté de ce que le ministre vient de dire... Les membres de cette commission ont dit à l'unanimité une chose qui, me semble, saute aux yeux, puis, avec le groupe de gens reliés à la curatelle publique, on ne saurait insister sur l'importance de ça. Il ne suffit pas d'énoncer des droits dans une loi, fût-elle prépondérante, pour les voir respecter; encore faut-il que des mécanismes efficaces de mise en oeuvre puissent les favoriser.

Une des choses que nous proposons par la suite dans notre document, c'est d'utiliser ce que certains experts appellent la «technique de l'audit informatique» – nous, on utilise ici un peu plus le terme «reddition de comptes» – pour s'assurer que l'on vérifie de la même manière l'audit venant de la vérification fiscale. Ça existe même en matière environnementale, comment faire la vérification, une sorte de reddition de comptes pour s'assurer que le minimum est en place. Est-ce que vous êtes d'accord avec une telle approche et est-ce que ça vous aiderait dans l'accomplissement de vos tâches?

Mme Roy (Louise): J'avoue que je ne connais pas tout à fait comment ça fonctionne, un audit. Mais, de toute façon, ça me fait penser à ce qui a été fait récemment dans les organismes publics par la Commission, qui est une forme d'audit, je pense. On est allé vérifier un petit peu comment les renseignements personnels sont protégés. Est-ce que c'est un peu ça que vous voulez dire par votre audit?

M. Mulcair: Oui. L'exigence de rendre compte pourrait... Dans le secteur public, l'exemple que l'on donne ici, ça pourrait consister à donner le détail dans le rapport annuel qui, aux termes de chaque loi sectorielle, doit être déposé à l'Assemblée nationale dans un délai x, à prévoir des règles strictes de reddition de comptes à l'intérieur du rapport annuel pour dire exactement qu'est-ce qu'on utilise comme moyens pour assurer le respect de la loi et la protection de la vie privée.

Dans le secteur privé, vous savez, ce n'est pas nécessaire d'envoyer un inspecteur du ministère de l'Environnement dans chaque site de chaque entreprise dans la province de Québec, mais il peut y avoir souvent, au moyen d'un professionnel dûment agréé, que ce soit un ingénieur professionnel ou que ce soit, dans le domaine de la comptabilité pour les entreprises, un comptable agréé, quelqu'un qui pourrait signer un état de compte, si vous voulez, signer le bilan de la protection de la vie privée dans l'entreprise ou dans le secteur public. Est-ce que c'est une approche qui pourrait cadrer avec ce que vous faites?

Mme Roy (Louise): Moi, je me dis: Si vous me demandez ce que j'en pense, c'est: Je trouve ça positif. Je pense que la préoccupation des gens qui appliquent la loi, c'est aussi de ne pas avoir un fardeau administratif trop lourd. Par contre, ils sont là pour appliquer la loi et ils sont d'accord avec cela et assez fiers, je pense. Donc, c'est de trouver la façon de le faire qui soit la plus efficace et qui donnerait de l'information à la Commission, d'une part, qui est chargée de vérifier l'application, mais aussi aux gens.

Toutefois, je dirais, dans le rapport annuel, c'est peut-être un moyen intéressant. Il s'agit, par contre, de vulgariser, pas de tout mettre des choses compliquées. D'ailleurs, dans le projet de loi, il y a des choses qui sont prévues, je pense: il y a les déclarations de fichiers, puis c'est un inventaire sommaire. Je pense que c'est une bonne idée, me semble-t-il, pour ne pas comme noyer le poisson mais donner les explications claires à savoir: Est-ce qu'il y a des bonnes mesures de sécurité sur les renseignements personnels? Qu'est-ce qui existe?

M. Mulcair: D'accord. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Garon): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Merci beaucoup. J'aimerais vous remercier pour trois passages dans votre mémoire que j'ai trouvés fort intéressants. Encore une fois, dans l'optique que c'est vous autres qui appliquez nos lois, on va avoir nos longs débats théoriques sur qu'est-ce qu'il faut mettre dans nos lois, mais c'est toujours très important d'avoir l'écho des personnes qui héritent de nos lois et doivent les appliquer après.

Le premier, c'est la notion de prendre à l'unité, alors la problématique que, si on fait la demande auprès du ministère d'avoir son organigramme... J'ai l'image dans ma tête, selon la page 11 de votre mémoire, qu'il faut prendre l'organigramme, et le couper en petits morceaux, et envoyer ça enveloppe par enveloppe pour quelqu'un qui aimerait avoir l'ensemble des responsabilités des sous-ministres et des sous-ministres adjoints. Alors, je pense que c'est bien dit là, les problèmes liés à essayer de réduire l'envoi des renseignements goutte par goutte. Ça risque d'avoir des problèmes d'application. Alors, merci pour ça.

(16 h 40)

Également, à la page 13, quand vous avez dit que, au bout de la ligne, avec «avis favorable» et «autorisation», souvent on arrive aux mêmes choses, si c'est vrai que c'est plus ou moins les mêmes choses, est-ce que le législateur avait une raison précise pour avoir un vocabulaire différent? Sinon, on est aussi bien de mettre ça dans le même langage pour éviter la confusion.

Le troisième commentaire ou question, c'est à la page 7, le temps de recherche. Avez-vous des exemples concrets où les frais de recherche sont très, très importants, des exemples concrets pour illustrer la problématique?

Mme Roy (Louise): En termes monétaires, moi, je ne l'ai pas calculé. C'est peut-être une lacune qu'on devrait relever, justement.

M. Kelley: Pas dans les chiffres, mais juste les domaines où on reçoit des demandes d'accès à l'information et où c'est les cahiers au complet ou des boîtes de documents.

Mme Roy (Louise): Je vais prendre un exemple qu'on m'a donné aussi lors du congrès de l'AAPI, et puis ça revenait, quand même. Le syndicat, mettons, décide de vérifier tous les contrats qui sont donnés pour vérifier s'il n'y a pas de sous-traitance ou je ne sais pas quoi. Alors, ça comporte toujours, quand un des syndicats demande accès à tous les contrats de services professionnels, des caisses et des caisses entières de documents, d'où un grand travail aussi d'élagage, un temps de recherche. Là, c'est plus un travail, je dirais, d'élagage. Il faut regarder tous les documents, tout ça. Ce type de dossiers là, je me demande si ce n'est pas plus du côté de l'accès qu'on a des gros dossiers comme ça. Côté également des demandes pour des soumissions, pour des appels d'offres, tous les documents qui... alors, là, ça comporte beaucoup de documents et beaucoup d'articles aussi à vérifier, bien sûr, pour vérifier qu'on n'en laisse pas passer. Dans ces cas-là, ça peut comporter des renseignements provenant de tiers, de personnes morales. Alors, il y a plusieurs articles qu'il faut comme vérifier pour être sûr de ne pas en manquer.

M. Kelley: Si j'ai bien compris, ce n'est pas uniquement les frais de photocopie, mais c'est la question du jugement de professionnels qui doivent regarder l'ensemble d'un dossier pour vérifier si effectivement ils doivent fournir ce document ou si ça, c'est un document qu'on ne peut pas donner ou qui n'est pas pertinent à la demande qui a été formulée.

Mme Roy (Louise): C'est plus ça que des photocopies dans ce type de demandes là. On en a quelques-unes de ce genre-là, et, quand ça rentre... ou un journaliste qui demande ce type de documents là. Tous les constats qui ont été émis par l'organisme dans les derniers mois, ça implique beaucoup de documents, beaucoup de recherches. Mais, parfois aussi, au premier abord, si la question est formulée de façon très large: Je voudrais avoir des informations sur l'âge, mettons la tarification d'un organisme avec l'âge ou des exigences qu'un organisme a par rapport à l'âge, mettons des exigences médicales pour conduire, des choses comme ça, alors ça veut dire qu'il faut vraiment réfléchir tout simplement, dans l'organisme, sur qu'est-ce qu'il peut y avoir là-dessus, donc contacter différentes personnes.

C'est sûr qu'il y a des listes de classement, qu'il y a des choses de prévues, qu'il y a de la gestion documentaire, mais aussi il y a l'intuition pour essayer de ne pas en oublier vraiment, parce que le devoir, c'est d'accéder aux documents puis c'est de ne pas en cacher, donc de contacter tout le monde puis de vérifier; si c'est décentralisé, comme c'est souvent le cas, bien, de vérifier dans les bureaux en province: Est-ce qu'ils ont quelque chose là-dessus, eux autres aussi? Alors, ça prend plus de temps avant qu'ils arrivent. Puis, après ça, si c'est des documents un peu qui demandent... ça peut être des caisses et des caisses à élaguer. Ça n'arrive pas tous les jours, remarquez, mais ces demandes-là demandent beaucoup de temps. C'est ça.

M. Kelley: Non, non, et il n'y a pas de solution facile non plus, mais c'est important de le soulever.

Mme Roy (Louise): Non, non, pas du tout.

M. Kelley: Juste en conclusion, je pense que quelqu'un m'a dit que c'est également un problème dans les dossiers de révision de l'évaluation foncière parce que souvent ça, c'est des dossiers énormes pour établir la valeur d'un immeuble à Montréal ou quelque chose comme ça, et je pense, au niveau des demandes d'accès, mais peut-être que je me trompe, qu'il y avait un autre témoin dans un autre contexte qui avait dit que souvent c'est très compliqué pour voir qu'est-ce qui est confidentiel, à quoi il peut avoir accès, parce que souvent ça, c'est des cahiers ou des boîtes d'archives après boîtes d'archives pour déterminer la valeur de, mettons, Place Ville-Marie ou un édifice comme ça. Ce n'est pas toujours facile.

Mme Roy (Louise): Vous mentionnez quelque chose justement que j'ai oublié de mentionner. Parfois, les documents sont archivés aussi. Alors, il faut, d'abord, y penser, après ça, les faire chercher, puis c'est des frais supplémentaires qu'on ne peut pas charger non plus. Mais ce n'est pas tous les jours, heureusement.

M. Kelley: Merci beaucoup.

Mme Roy (Louise): Merci.

Le Président (M. Garon): Je remercie les représentants de l'Association sur l'accès et la protection de l'information pour leur contribution aux travaux de la commission et j'invite maintenant les représentants de l'Association pour la défense des personnes et des biens sous curatelle publique à s'approcher à la table des délibérations.

Alors, Mme la présidente, Mme Chalut, comme nous avons – théoriquement – 45 minutes ensemble, c'est-à-dire que vous avez normalement 15 minutes pour votre exposé et 15 minutes pour l'exposé de chacun des partis, le parti ministériel et le parti de l'opposition, si vous voulez vous présenter, présenter les gens qui vous accompagnent, présenter votre Association, c'est à vous la parole.


Association pour la défense des personnes et des biens sous curatelle publique

M. Greenbaum (Ura): Merci, M. le Président. M. le ministre, MM. et Mmes les membres de la commission, premièrement, nous vous remercions pour l'invitation à être présents et à présenter nos points de vue sur les changements à être apportés à la loi sur l'accès à l'information.

J'aimerais d'abord présenter notre délégation: à ma gauche, ici – à votre droite – Mme Denise Chalut, la présidente de notre Association; à ma droite – votre gauche – M. Jean-Guy Potvin, vice-président de notre Association. On a assez d'expérience devant les commissions parlementaires, avec tout ce qui se déroule dans notre domaine, alors nous n'allons pas relire notre mémoire, sauf faire le résumé, pour ensuite engager vos questions, ce qui est le coeur des auditions ici.

Premièrement, un petit mot sur notre Association. Nous regroupons les usagers de la curatelle publique, dont parents, aidants et sympathisants, à travers la province. On a 272 membres, à date, et 600 partisans, et nous organisons leur action, et nous agissons comme porte-parole de leurs intérêts. Maintenant, ces gens-là se trouvent, vis-à-vis de ce projet de loi, ou enfin du mécanisme de l'accès à l'information, dans un contexte très, très particulier. Ce sont des gens sans défense, et leurs parents se trouvent débordés par d'autres priorités, comme il est énoncé dans notre mémoire: des problèmes médicaux, financiers, et ils doivent s'occuper des leurs. Alors, on aurait abouti à une population invisible, premièrement, et, deuxièmement, sans voix, des gens marginalisés, et donc ça se traduit en une marginalisation législative également... pas de problème. Ils sont oubliés, comme en fait foi le projet de loi dont vous êtes saisis aujourd'hui.

Deuxième aspect de ce contexte particulier. Les rapports du Protecteur du citoyen et du Vérificateur général, dernièrement, sur le Curateur public et l'engagement du gouvernement à faire le ménage à fond de cet organisme-là nous présentent une situation, comme tout le monde le sait – c'est de connaissance publique – très, très grave et majeure. Dans cette situation, il y a une partie des problèmes d'accès à l'information due au manque de transparence et d'ouverture dans cet organisme public. Maintenant, les problèmes de l'accès à l'information proviennent de deux sources. Premièrement, il y a une attitude où, en termes utilisés par le Protecteur du citoyen dans son rapport de novembre 1997, quant au problème de mentalité ou de culture, il n'y a pas d'ouverture, il n'y a pas de transparence dans le fonctionnement de la gestion de sa clientèle et des personnes inaptes.

(16 h 50)

Ce problème sur le fonctionnement tombe dans un autre cadre. Probablement que ça va être traité dans le redressement qui est en train de se faire. Alors, il ne touche pas vraiment à la loi d'accès à l'information. Par contre, il y a un deuxième volet. Il y a des failles dans le mécanisme d'accès, et ça, on va en discuter aujourd'hui.

Premièrement, j'aimerais faire pour l'Association un commentaire sur la valeur du travail en commission. Il est vraiment remarquable que, des gens comme nous, on puisse interrompre le processus législatif normal après la première lecture, intervenir en plein milieu et vous alerter: Attention! quelques problèmes et manquements vous ont échappé. Il y a un projet de loi déjà qui a reçu une première lecture, et pourtant des gens comme nous de la rue, de l'extérieur peuvent venir ici et vous signaler certains problèmes pour l'instant méconnus. Si jamais quelqu'un dédaigne ou minimise le travail en commission, voici un excellent exemple de sa valeur, le fait qu'on peut venir ici et soulever nos soucis, et je vous en remercie, messieurs, pour ça.

Ensuite, prochain chapitre dans notre mémoire. Il s'agit de la reproduction des textes de loi qui traitent de notre optique ou de nos soucis. Premièrement, il y a une petite correction au mémoire à apporter: c'est l'article 51 de la Loi sur le curateur public qui énonce la règle générale de la confidentialité. L'article 52, qui est produit en son entièreté, énonce les exceptions. Mais, sauf pour le numéro, ça ne change rien pour le texte de notre mémoire.

Arrivons maintenant au coeur de nos préoccupations: ce sont les problèmes de l'accès à l'information qu'on rencontre, nos membres et les gens que nous défendons. Premièrement, tous les organismes publics, dans quelque mesure, manipulent des renseignements personnels, mais, eux, ils restent sujets à la loi de l'accès à l'information. Il n'y a aucune raison d'exclure les renseignements personnels dans les dossiers du Curateur public de l'application de la loi de l'accès à l'information, comme il est maintenant particulièrement prévu à l'alinéa un de l'article 2.2 de la loi de l'accès à l'information. On ne trouve pas de justification pour cette exclusion-là. Deuxième problème dans le scénario: il n'y a aucune justification, à notre avis, non plus d'exclure la juridiction, la compétence de la Commission de l'accès à l'information, tel qu'il est fait maintenant à l'alinéa deux de l'article 2.2 de la loi sur l'accès à l'information. Pourtant, en ce moment, la Commission d'accès à l'information n'a pas de juridiction sur les informations contenues dans les dossiers des protégés de la curatelle publique.

Il y a un troisième problème. Dans le contexte qui nous préoccupe encore, il y a des objectifs contradictoires. D'abord, le Curateur public, selon l'article 51 de sa loi, doit protéger la confidentialité des renseignements dans les dossiers de ses protégés, mais en même temps il doit rendre compte aux parents et aux autres intéressés de sa gestion. Il arrive que ces tiers, d'après la loi aussi, ont un droit de regard et de surveillance. Mais, si leur droit d'accès dépend des caprices du Curateur public, comment peuvent-ils exercer cette fonction pleinement? C'est ça, la contradiction contenue dans la Loi sur le curateur public. Sans accès, si le Curateur public refuse l'accès, comment peuvent ces gens-là exercer leur droit, premièrement, et comment peut-il y avoir un regard et une surveillance sur les activités de la curatelle publique? Ça, ça aboutit à un des problèmes majeurs qu'on a vécus ou qui sont arrivés à la lumière des derniers mois.

Un autre problème de contexte: le conflit d'intérêts du Curateur public. L'article 52, paragraphes 3° et 4° de la Loi sur le curateur public autorise l'accès au dossier du protégé soit mineur ou majeur, mais il n'y a pas de tribunal indépendant, impartial et objectif qui décide, mais plutôt le Curateur public décide de l'accès en donnant son autorisation. Les parents ont droit, d'un côté, d'être consultés et d'exprimer un avis sur certains éléments de la gestion du protégé, mais, par contre, le Curateur public peut les en empêcher et les entraver d'avoir l'information. Si les parents ont le droit d'être consultés et d'exprimer leur avis, ils doivent avoir un droit d'accès au dossier afin de leur permettre de jouer leur rôle pleinement et efficacement, et ceci n'est pas le cas actuellement quand le Curateur public lui-même contrôle si la porte va être ouverte ou fermée.

Ensuite, un autre problème: le problème de recours. Pour l'accès aux informations dans les dossiers des protégés de la curatelle publique, ce n'est pas la Commission d'accès à l'information qui tranche les débats parce que sa compétence est exclue, comme j'ai dit tout à l'heure, par la loi sur l'accès à l'information. Donc, il faut recourir aux cours de droit commun, aux tribunaux de droit commun – la Cour supérieure, en principe. Alors, ça n'a pas d'allure. Tous les autres gens contre tous les autres organismes en vertu de toutes les autres lois ont une méthode et une procédure expéditives et économiques – se présenter à la Commission d'accès à l'information et obtenir dans un bref délai une décision sur les droits d'accès – tandis que, quand on voudrait protéger une personne incapable de se protéger, d'exercer ses droits, il faut recourir à la Cour supérieure avec sa procédure lourde, et coûteuse, et, en plus, longue. Alors, il y a une espèce de discrimination contre les gens qui sont les plus démunis et leur famille. Ça n'a pas d'allure. Il est de notre devoir de faire ressortir ce genre de problème.

Finalement, un autre problème que nous avons dégagé, c'est la question des pénalités à laquelle ce projet de loi, heureusement, s'adresse. Nous voulons simplement commenter que, sans conséquence réaliste des erreurs, des fautes des fonctionnaires, évidemment il y a une espèce d'incitation à l'insouciance des droits des citoyens, et nous l'avons vu assez, de notre expérience ici.

(17 heures)

Alors, face à ces problèmes, nous avons formulé 10 remèdes dans notre chapitre sur les recommandations. Je peux les résumer en cinq pour être bref. Premièrement, nous cherchons ou nous voulons éliminer l'autorisation du Curateur public quand il s'agit d'obtenir des informations, tel qu'il est rédigé maintenant dans l'article 52, sous-paragraphes 3° et 4° de la Loi sur la curatelle publique, pour donner à ceux qui y ont droit un droit de regard, un droit de surveillance, un droit d'être informés, la possibilité de réaliser, d'actualiser ces droits-là. Deuxièmement, nous proposons l'élimination également de l'exclusion de l'application de la loi sur l'accès à l'information, particulièrement comme il est prévu, en ce moment, dans l'alinéa un de l'article 2.2 de la loi sur l'accès à l'information. Troisièmement, nous proposons de rétablir les pouvoirs, la compétence de la Commission d'accès à l'information en éliminant l'alinéa 2 de l'article 2.2 de cette loi.

Nous accueillons ensuite avec enthousiasme l'assouplissement des conditions d'application des sanctions pour réprimer les actes non seulement intentionnels, mais de négligence aussi, parce que, comme nous l'avons élaboré dans notre mémoire, il y a des lacunes et des problèmes graves du fait qu'il n'y a pas de pénalisation réaliste en ce moment. Et la Commission hésite, même devant une preuve concluante de parjure. Je vais vous dire carrément, là, la Commission n'a pas agi parce que faute d'être capable de prouver l'intention, l'élément intentionnel, le mens rea, comme le ministre l'a dit tout à l'heure.

Et, dernièrement, nous proposions aussi d'introduire des pénalités nouvelles visant l'entrave aux ayants droit, que les pénalités prévues par la loi sur l'accès à l'information s'appliquent également aux articles pertinents dans la Loi sur le curateur public. Et ceci non plus n'est pas... Enfin, on n'en tient pas compte dans le projet de loi, et nous le proposons fortement, vigoureusement.

Je vous remercie, MM. les membres de la commission, et on est ouverts à vos questions.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Boisclair: C'est un ordre, ça, M. le Président?

Le Président (M. Garon): Non, mais c'est à vous.

M. Boisclair: Ha, ha, ha! M. Greenbaum, monsieur, madame, bienvenue à la commission de la culture. Je dois d'abord vous dire que je regrette bien sincèrement les conditions dans lesquelles vous avez dû faire votre témoignage. Je ne sais trop ce qui se passe sur la colline parlementaire, mais je regrette. Vous auriez droit à davantage de respect lorsque des gens viennent s'exprimer dans nos institutions. Je pense que la pollution sonore qui nous entoure est tout à fait inconvenante, et je m'en excuse.

Je voudrais vous dire le sérieux qu'il faut accorder à vos propositions, des propositions qui devront certainement être étudiées. Je dois vous dire bien honnêtement qu'elles n'ont pas été à ce jour étudiées, lorsqu'est venu le temps de la réflexion qui nous a conduit à proposer des amendements à la loi d'accès à l'information. Je pense d'ailleurs que les membres de la commission parlementaire n'ont pas non plus spécifiquement adressé cette question. Donc, c'est une question nouvelle qu'il nous faut regarder. Je comprends que ce que vous nous dites, c'est que la Commission d'accès à l'information ne peut renverser ou revoir une décision du Curateur public. Je pense qu'il y aurait lieu d'aller au fond de la réflexion que vous nous proposez.

Donc, l'engagement que je peux prendre devant mes collègues au nom du gouvernement du Québec, c'est certainement de regarder attentivement les choses. Est-ce que nous apporterons une réponse dans les modifications à la loi sur l'accès ou si nous le ferons dans un autre contexte? C'est la question qu'il reste à voir, parce que je vais vous dire la situation à laquelle je suis confronté en ce moment et qui est loin d'être simple: plus on regarde la Loi sur le curateur public, plus on est conscients qu'il nous faut des amendements à la loi, et, plus on regarde la loi, plus on s'aperçoit que les amendements doivent être nombreux.

Je donne, par exemple, un cas bien connu et dénoncé par le Vérificateur général: la gestion de la petite caisse des patients par les établissements. C'est une délégation de pouvoir qui se fait, contrairement aux dispositions de la loi. Je songe peut-être à déposer un projet de loi, qui serait un tout petit projet de loi, rapidement au mois d'octobre pour pouvoir corriger cette situation. Ce sont des choses qui mériteraient peut-être une attention immédiate.

D'un autre côté, vous savez que le gouvernement du Québec présentera une réflexion publique sur la mission du Curateur public. Au-delà de tous les débats auxquels nous assistons à l'heure actuelle, ma responsabilité, je pense, c'est de proposer aux parlementaires de l'Assemblée une réflexion de fond sur la mission, le financement, les rôles et le mandat du Curateur public. C'est ainsi que j'ai demandé à M. Jean-Claude Deschênes de nous appuyer dans cette réflexion. Concrètement, le gouvernement du Québec publiera dans les prochains mois soit un livre blanc, un livre vert. Il s'agira de voir où nous serons rendus dans notre réflexion pour faire un débat en commission parlementaire.

Vous avez souligné, M. Greenbaum, que le débat en commission parlementaire peut être utile et que c'est nécessaire, même, que des gens puissent venir s'exprimer. Je pense qu'il est grand temps que nous ayons un vrai débat public sur le Curateur, ses mandats et sa mission. Il sera d'autant plus important de le faire qu'il nous faut avoir une vision claire du rôle, de la mission de protection du Curateur public en sachant qu'il doit partager de ses responsabilités avec des professionnels de la santé, avec des établissements du réseau de la santé et qu'à cet égard il importe de bien définir les rôles de chacun.

Donc, il y a un débat plus large à faire sur la mission du Curateur. Et la question à laquelle je n'ai pas de réponse à ce moment-ci, c'est: Est-ce que je confierai vos recommandations à l'analyse de M. Deschênes pour que nous puissions en discuter dans un cadre plus large ou si nous profiterons des modifications à la loi pour donner immédiatement un pouvoir de révision à la Commission d'accès à l'information?

Je comprends qu'il y a des arguments qui sont assez forts qui plaideraient peut-être pour une réflexion plus immédiate. Vous dites, entre autres: Pourquoi certains citoyens seraient privés d'un accès simple à un mécanisme d'appel plutôt que les tribunaux de droit commun? Vous manifestez votre confiance en la Commission d'accès à l'information. Vous dites que les choses se font de façon simple, efficace, peu dispendieuse, aussi, pour le citoyen. Donc, cette question-là, elle doit être regardée. Donc, je voudrais vous remercier de cette présentation, vous dire le sérieux que j'accorde à vos recommandations.

Je profiterais aussi de l'occasion pour vous informer que, dans le cadre de la réforme administrative au Curateur public, le Curateur a procédé à l'embauche de Mme Évelyne Racette à titre de responsable de l'accès à l'information à compter du 1er septembre 1998. Mme Racette est détentrice d'un Baccalauréat ès sciences en administration publique. Elle détient une Maîtrise en travail social de l'Université McGill ainsi qu'un Baccalauréat en travail social de l'Université McGill. Elle a occupé des fonctions d'analyste à la Direction de l'analyse et de l'évaluation de la Commission d'accès à l'information du Québec. Vous comprenez donc l'expertise privilégiée de Mme Racette qu'elle pourra dorénavant partager avec le personnel du Curateur public.

Alors, voilà où j'en suis à ce moment-ci. Je veux aussi vous dire à nouveau la volonté du gouvernement du Québec de faire le ménage qui s'impose dans cette institution essentielle à l'exercice des droits des personnes les plus vulnérables de notre société. Je voudrais vous remercier, d'ailleurs, pour le travail que vous faites comme association.

M. Greenbaum (Ura): Merci, M. le ministre. Je vous remercie de nous donner un peu d'éclairage sur ce qui se réalise ou sur les intentions actuelles, parce que, même là, on est un peu dans la noirceur. On essaie de suivre le processus de redressement, mais je dois vous avouer que les informations là-dessus n'arrivent pas vite.

M. Boisclair: Vous n'avez pas eu copie du rapport qui a été déposé à...

M. Greenbaum (Ura): Ça, je l'ai obtenu de la curatelle publique, mais toutes les autres étapes et les noms des personnes que vous venez de nous annoncer, il y a une partie qui est nouvelle pour nous. Je suis bien content d'avoir été informé.

M. Boisclair: Moi, vraiment, M. Greenbaum, ma préoccupation, au-delà de tout le processus de révision administratif – c'est important, c'est nécessaire, puis on y met les meilleures énergies – la question qu'on doit se poser comme parlementaires, au-delà de l'administration, une fois que de bons gestionnaires s'occupent de ça – puis on fait tout ce qu'il y a à faire pour qu'il y ait de bons gestionnaires qui reprennent le contrôle puis qui remettent de l'ordre dans cette administration – la question, c'est la loi, c'est la mission. C'est ce que nous avons à décider entre nous.

Rapidement, j'ai demandé qu'on mette les processus nécessaires en place pour qu'on puisse faire cette réflexion-là. C'est celle qui est importante. Et, si on veut que cette institution, le Curateur public, ressorte de ses cendres, un débat sur la mission s'impose. Il se fera de façon très publique, en commission parlementaire, sur une proposition de livre blanc ou livre vert avec différentes pistes quant à l'avenir de cette organisation. Et les parlementaires, après ce débat, pourront par la suite discuter d'amendements, qui seront sans doute très significatifs, à la Loi sur le curateur public.

(17 h 10)

M. Greenbaum (Ura): Je prends note de vos engagements de la part du gouvernement. Il y a une remarque que j'aimerais apporter sur un élément que vous avez ressorti. Vous avez posé la question: Est-ce que c'est ici où on doit traiter les problèmes de l'accès à l'information aux dossiers des protégés de la curatelle publique ou dans le contexte du redressement ou la refonte de la Loi sur le curateur public?

Nous, comme organisme, nous l'avons proposé dans nos recommandations, et je le répète ici, c'est le moment, il faut saisir l'opportunité. Deux raisons. Premièrement, parce que le moment est propice. Il y a deux problèmes. On peut les régler d'un coup. Deuxième chose, si une partie des problèmes proviennent de la loi sur l'accès à l'information, on l'a ressorti, relevé dans notre mémoire, il y a l'article 2.2, alinéa 1, qui enlève l'application de la loi sur l'accès à l'information et l'alinéa 2 qui enlève la compétence de la Commission. Alors, si vous ne traitez pas ces problèmes qu'on vient de relever, ressortir dans le contexte de ce projet de loi, vous manquez l'opportunité et vous manquez de sérieux à nos préoccupations.

M. Boisclair: C'est pour ça, M. Greenbaum, que je dis que vous avez de très sérieux arguments...

M. Greenbaum (Ura): Je vous remercie.

M. Boisclair: ...qui militent en faveur d'une possible modification à la loi actuelle puisque, effectivement, il s'agit des pouvoirs de la Commission.

M. Greenbaum (Ura): Effectivement.

M. Boisclair: Mais je pense que nous pouvons aussi débattre du mérite d'une autre proposition dans un contexte plus large d'une réflexion quant à la mission du Curateur public et de la pertinence de donner un droit d'appel à la Commission d'accès aux décisions du Curateur public.

Alors, avant de vous dire que je fais l'un ou l'autre... Mais je veux vous dire d'abord que j'entends vos arguments. Avant de vous dire que je statue sur ce que je vais faire, je vais vous dire que je veux d'abord y réfléchir davantage. Votre mémoire est un des seuls que je n'avais pas lus avant aujourd'hui. J'en ai pris connaissance aujourd'hui. Je veux le faire analyser. Je veux discuter avec mes collègues au Conseil des ministres de cette question. Vous avez des arguments très forts qui militent en faveur de modifications dans le projet de loi.

M. Greenbaum (Ura): Je veux ajouter un troisième point sur pourquoi il faut le traiter immédiatement ou dans le contexte de ce projet de loi. Ça fait 50 ans que l'organisme existe. Ça fait 50 ans qu'on procède secrètement et on cache tout aux familles et aux protégés. Alors, il y a trois... Si les premier et deuxième ne sont pas convaincants, le troisième motif doit emporter. Mme Chalut...

M. Boisclair: Je vous dirais aussi que je suis le premier ministre responsable du Curateur qui autorise le Vérificateur général à rentrer au Curateur public.

M. Greenbaum (Ura): Je vous en remercie, parce que ça fait cinq ans qu'on fait le combat.

M. Boisclair: Je l'ai fait par souci de transparence. Je vais vous dire, ce sont mes réflexes, d'abord et avant tout, de parlementaire qui m'ont conditionné dans ce choix. Même si c'est aujourd'hui difficile pour le gouvernement de gérer cette crise, je pense que les conséquences auraient été encore pires si on ne s'était pas livrés à cet exercice. Soyez assurés qu'on va... Ça va coûter cher, le redressement, M. Greenbaum, très cher.

M. Greenbaum (Ura): Ça a déjà coûté cher aux victimes.

M. Boisclair: Oui. On peut discuter longtemps des victimes aussi, M. Greenbaum. Il y a des jugements qui ont été rendus dans certains dossiers.

Mme Chalut (Denise): Oui. Je voudrais ajouter quelque chose. À l'ère de l'an 2000, la curatelle publique a encore une administration du Moyen Âge. Cette administration est tellement confuse que l'accès à l'information vient de là. La curatrice publique, il n'y a pas tellement longtemps, Mme Juliette Bailly, déclarait qu'elle ne connaissait pas ses clients. Après 50 ans, j'ai l'impression que, si elle n'a pas un fichier à l'ordre... Comment peut-elle donner des renseignements aux gens quand elle ne sait même pas qui sont ses clients? Il y a un monsieur qui était là, sous la curatelle publique. Il a été presque 10 ans... Ça faisait 10 ans qu'il était décédé quand la curatelle a su que cette personne-là était décédée. Qui encaissait les chèques?

M. Boisclair: La question, c'est qu'il y a une administration précédente qui a diminué les effectifs du Curateur public de l'ordre de 16 %, si ce n'est pas davantage, de 16 %. Nous sommes à corriger le tir. Ça fait encore partie des choses que notre administration...

Mme Chalut (Denise): Est-ce que vous voulez parler un petit peu plus fort, s'il vous plaît? Peut-être que la curatelle m'a rendue sourde.

M. Boisclair: Il y a eu une diminution, sous l'administration libérale, de 16 % des effectifs au Curateur public. Lorsque Mme Robillard a fait adopter les modifications à la Loi sur le curateur public, on lui avait promis 100 postes. Elle n'a jamais eu ces 100 postes. Elle en a eu à peine 50. Sur ces 50, par la suite, on a imposé des compressions.

Ce que vous notez depuis deux ans, c'est une augmentation des effectifs du Curateur public. Soyez assurés qu'il faudra aller encore plus loin. La façon pour moi d'arriver à faire en sorte qu'il y ait davantage de gens qui travaillent au Curateur public, c'est de faire une réflexion de fond sur la mission, puisque c'est d'abord en regardant la mission que le Conseil du trésor va être capable de libérer davantage de postes. C'est à ça qu'on veut arriver, madame. Je vous remercie.

Le Président (M. Garon): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de saluer la présence avec nous cet après-midi, et de les remercier pour leur présentation, de Mme Chalut, M. Potvin et M. Greenbaum.

Je dois dire que, comme organisme largement bénévole, j'ai rarement vu un groupe travailler avec autant d'acharnement que votre groupe au cours des dernières quelques années, parce que ça ne fait pas si longtemps que ça que vous êtes structurés de cette manière-là. Grâce à vous, effectivement on a enfin une preuve objective, externe, sous forme de l'avis, l'analyse du Vérificateur général, preuve de ce que vous dites depuis longtemps, que rien ne va plus dans l'administration de la curatelle publique.

Pour les gens qui nous écoutent, ce n'est pas toujours facile de comprendre c'est quoi, quelle branche du gouvernement, qui fait quoi. La curatelle publique, si on peut le dire en termes simples, est un organisme créé par le gouvernement pour veiller à ce que le patrimoine, c'est-à-dire l'argent, les biens, la propriété, des personnes qui ne peuvent plus décider pour elles-mêmes, ça ne soit pas gaspillé par d'autres et que ça soit bien protégé. C'est un régime de protection.

Ce qui a été révélé dans le rapport du Vérificateur général, c'est une catastrophe, ni plus ni moins, en termes d'administration publique. De notre côté, peu importe qui était là, à quelle période et qui a fait quoi, on est persuadés que l'unique réponse ne réside pas, pour le dire dans le jargon administratif, dans l'ajout d'effectifs – ça veut dire embaucher d'autres fonctionnaires. Ce n'est pas ça, une solution. Il existe bien des groupes communautaires proches de leur communauté qui, avec une légère structure de surveillance, pourraient assurer autrement bien le rôle qui est soi-disant assumé à l'heure actuelle par la curatelle publique.

Au cours de l'été, j'ai lu cet étonnant titre dans les journaux, de la part du ministre de la Justice, M. Ménard, qui disait: Curatelle publique: pas de poursuites criminelles. Alors, ma première question pour vous est la suivante, en termes d'information, justement: Avez-vous réussi à obtenir de la part de M. Ménard, notre ministre de la Justice, la moindre indication de ce sur quoi il s'est basé pour dire: Il n'y aura pas de poursuites criminelles là-dedans? Moi, je vous avoue, sachant ce que je sais sur ce dossier-là, j'ai trouvé ça téméraire de sa part. M. Greenbaum, avez-vous pu obtenir des informations là-dessus?

M. Greenbaum (Ura): En réponse à cette question, je peux vous dire que, avant la parution dans les journaux et dans les médias de cette déclaration de la part du ministre de la Justice, il ne nous a jamais contacté, il n'a jamais contacté les membres de notre organisme. Aucune personne du ministère de la Justice n'a demandé de voir les dossiers qu'on a et les plaintes ou griefs qu'on a, absolument pas de contact avant d'être arrivé... Son avis, là, quand nous l'avons vu dans les médias, effectivement ça nous a fait sursauter, parce que, au moins, venez voir les preuves ou les éléments avant d'en arriver à une conclusion. Alors, on n'a pas eu de contact avant que cette publication soit faite de la part du ministre de la Justice.

M. Mulcair: Est-ce que vous savez s'il a fait une enquête? Avez-vous pu parler avec le ministre de la Justice? Est-ce qu'il a procédé à une enquête quelconque, de police ou autre, pour pouvoir faire l'affirmation qu'il n'y aurait pas de suites, en termes de poursuites criminelles, données à ce rapport accablant du Vérificateur général?

M. Greenbaum (Ura): D'après les informations qui sont venues à notre connaissance – et nous n'avons pas eu de contact direct avec le ministère même – les informations qui nous sont parvenues, apparemment il n'y a pas eu de démarche plus que simplement jeter un coup d'oeil sur le rapport du Vérificateur général.

M. Mulcair: Donc, pas d'enquête policière.

M. Greenbaum (Ura): Pas à notre connaissance, non.

M. Mulcair: Et même pas de contact auprès du seul groupe qui s'est distingué au cours des dernières années comme étant vraiment voué à la protection des intérêts des gens qui sont sous curatelle?

M. Greenbaum (Ura): À notre connaissance, effectivement il n'y a eu aucun contact, aucune demande d'information à notre groupe ou aux autres groupes qui travaillent, qui oeuvrent dans le même domaine. Je peux l'affirmer catégoriquement.

(17 h 20)

M. Mulcair: C'est vraiment étonnant. Et, en termes de transparence, avez-vous déjà formulé des demandes d'accès à l'information directement auprès de la curatelle publique, par exemple, pour savoir certaines choses d'eux autres? Je crois savoir qu'il y a eu une telle demande puis que vous avez pu apprendre par après que l'information dont ils niaient l'existence, ça existait bel et bien parce qu'ils en parlaient dans une revue interne. Est-ce que j'ai raison, là-dessus?

M. Greenbaum (Ura): Effectivement, j'en ai fait allusion sommairement dans mon exposé et je peux élaborer un peu plus longuement, vu que vous posez la question.

Nous avons fait une demande d'accès à l'information pour quelque chose de très, très public, comme exemple concret, des conférences publiques que le Curateur public offre, qui sont annoncées dans les journaux au fur et à mesure que les organismes organisent ces conférences-là.

Le représentant du Curateur public, premièrement, a refusé accès à ces informations manifestement publiques. Deuxièmement, j'ai fait une demande de révision à la Commission d'accès à l'information. Le représentant de l'accès à l'information du Curateur public est venu devant la Commission d'accès à l'information et, sous serment, a déclaré que les calendriers des conférences ou agendas des conférences n'existent pas, qu'il n'y a pas de tels documents. Nous avons appris par la suite, en recevant plusieurs années plus tard des bulletins internes de la curatelle publique, que chaque 15 jours il y avait une annonce dans ce bulletin interne de la curatelle publique du calendrier des conférences publiques que la curatelle donne à travers les organismes qui l'invitent. À quatre ou cinq chaque mois, constamment c'est indiqué.

Alors, tirez vos propres conclusions, mais la représentante de l'accès à l'information, ce qu'elle a dit sous serment n'était pas conforme à ce document interne du Curateur public qui a dévoilé tout à fait le contraire de ce qu'elle avait dit devant la Commission.

M. Mulcair: Est-ce qu'il y a eu des suites au fait que cette personne, un officier public soit allé dire sous serment le contraire de la réalité? À mon point de vue, ça vous donne complètement raison de vouloir ouvrir un peu les rideaux sur cette institution qui est la curatelle publique.

C'est un minimum, ce que vous êtes en train de nous demander aujourd'hui. On a le projet de loi n° 451. La loi sur l'accès est sur la table en ce moment. Pas besoin d'aller songer si on va faire un livre bleu, un livre vert, un livre beige, un livre rose sur d'autres choses, la question est vraiment celle-là, de savoir: Est-ce que, oui ou non, cette institution qui gère de l'argent de milliers de personnes, qui est un monstre bureaucratique qu'on ne saurait imaginer, qui ne fonctionne pas... Est-ce qu'on va se jeter la pierre les uns aux autres ou on va poser un geste concret dès maintenant pour au moins assurer, comme tout autre aspect de l'administration publique, que le monde principalement intéressé peut avoir droit d'accès à cette information? Oui, madame.

Mme Chalut (Denise): Moi, j'ai été 10 ans curatrice privée de ma mère et, quand je suis devenue curatrice privée, on m'a obligée à donner ma propre maison en garantie pour prouver ma bonne administration. S'ils trouvaient une faille dans mon administration, on me relevait de ma curatelle et on me pénalisait. Alors, pour moi, pour les curateurs privés...

Le Curateur public a 12 000 personnes sous sa juridiction. Il y a plus d'employés pour vérifier les comptes des curateurs privés qu'il y a d'employés pour prendre soin des 12 000 personnes pour lesquelles ils sont directement responsables. Et on nous oblige à donner 0,33 % du patrimoine qu'on administre parce que le Curateur public a droit de regard sur notre administration. Nous, on est obligés de donner une sûreté pour prouver notre bonne administration. Le Curateur public, je me pose des questions sur ce qu'il devrait donner pour prouver sa bonne administration.

M. Mulcair: Oui. Effectivement, c'est un très bon point. C'est la bonne vieille expression: Faites ce que je dis et non pas ce que je fais. Parce que, si effectivement les curateurs privés avaient agi de la sorte, ça aurait été un scandale de tout premier ordre. Mais on dirait que, parce que c'est de l'administration publique, on a un ministre de la Justice qui dit... Sur la base de rien, il n'y a pas eu d'enquête policière, il n'y a pas eu d'analyse plus poussée que l'ébauche fournie qui était déjà assez accablante merci par le Vérificateur général, et là, tout d'un coup, il peut tirer la conclusion étonnante suivante, c'est qu'il n'y a pas lieu d'avoir des poursuites pénales. C'est comme si, pour essayer de se justifier ou de dire que ce n'est pas si grave que ça, on tire une conclusion basée sur aucune prémisse.

Il n'y a pas eu d'analyse, il n'y a pas eu d'enquête, et c'est ça qui est tellement choquant dans cette histoire-là. Vous faites bien de continuer à pousser. Puis l'exemple que M. Greenbaum a donné tantôt est vraiment inquiétant. Un officier public, payé par l'État, va devant une Commission d'accès et dit, sous serment: Ce document n'existe pas. Ça augure mal pour comment ils vont veiller au respect de la loi après.

Mais, moi, je suis prêt à prendre la pari que votre recommandation principale, qui est de les assujettir à la loi, constitue au moins un pas dans la bonne direction. Parce que la transparence, ça va toujours aider dans l'administration. Si quelqu'un peut gérer en catimini, ça, ça va toujours être une occasion de faire des choses qui ne sont pas correctes. Tout le monde gagne s'il y a de la transparence. Tout le monde gagne. Nous allons vous appuyer dans votre demande parce qu'elle est raisonnable et elle est fondée.

Le Président (M. Garon): M. le ministre, il reste une minute.

M. Boisclair: Mais, M. Greenbaum, vous allez comprendre, comme moi, que je ne peux m'empêcher que de rire quand j'entends les grands discours du député de Chomedey: Tout le monde gagne quand il y a de la transparence. Il est membre d'un parti qui a été au pouvoir pendant neuf ans, qui a refusé l'accès au Vérificateur général fois après fois aux dossiers du Curateur public. Il appartient à un parti qui a été au gouvernement qui, en 1990, a modifié la Loi sur le curateur public, qui avait promis 100 postes, non seulement qui n'a pas donné les 100 postes, il en a uniquement donné 50, et, sur ces 50, il a imposé des compressions. Alors, aujourd'hui, ses grands discours vertueux, la crédibilité n'y est pas beaucoup.

Quant aux propos de mon collègue Ménard, ce que j'en comprends – je mets une réserve parce que je n'ai pas la référence exacte sous les yeux – à ce moment-ci, sur la base du rapport du Vérificateur général, je comprends que mon collègue dit qu'il n'y aura pas de poursuites qui se prendront. Toutefois, s'il y a d'autres faits qui sont portés à notre attention, le processus existe. Si, vous-même, il y a des faits qui devraient être portés à l'attention de la Sûreté du Québec et, par la suite, au Procureur général, il y aura des poursuites s'il y a matière.

Mais ce que je comprends des propos de mon collègue Ménard, c'est que, sur la base du rapport du Vérificateur général, qui a été scruté et fouillé par le ministère de la Justice, c'est qu'il nous dit qu'il n'y a pas matière à poursuites, mais il n'exclut pas le fait qu'un jour, si de nouveaux faits sont portés à son attention, il y ait des poursuites. Si vous êtes témoins de cas de fraude, la Sûreté du Québec et, par la suite, le processus par le biais du Procureur général sera enclenché. Voilà l'engagement du gouvernement. Ça tranche des propos vertueux de l'opposition, M. Greenbaum.

Le Président (M. Garon): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Encore une fois, on trouve ça extrêmement important que des groupes comme celui représenté ici aujourd'hui viennent exposer leurs griefs et faire part de leur expérience réelle, outre la partisanerie évidente de la part d'un ministre qui ne voit que, justement, un intérêt partisan dans un dossier qui malheureusement n'a rien à voir avec les intérêts partisans d'un parti politique ou d'un autre, mais a strictement à voir avec la protection du public.

Le ministre nous dit qu'il est tout en faveur de la transparence, mais c'est intéressant de noter qu'au mois d'août la Cour supérieure a dû rendre un jugement disant que ça n'a pas de bon sens que, sur les huit avocats qui sont dans la pièce à la commission d'enquête de la Commission d'accès à l'information, le seul pour lequel on a inventé un statut particulier, c'est-à-dire le seul qui n'a pas le droit de contre-interroger les témoins, y compris le premier ministre qui est dans cette affaire-là sous enquête – justement son bureau est sous enquête – c'était le seul qui n'était pas payé par le gouvernement du Québec.

Ça, c'est la grande vertu de la transparence du gouvernement du Parti québécois, et ce, malgré le fait qu'au mois d'août Marc Bergeron, l'avocat de la Commission d'accès à l'information, avait dit qu'il avait hâte de reprendre l'enquête. L'enquête, pour votre information, ne sera malheureusement pas reprise avant l'année prochaine, avant 1999. C'est ça, le point sur lequel ils ont vraiment hâte de montrer leur grande transparence.

(17 h 30)

On a vu à plusieurs reprises une ingérence politique directe dans le fonctionnement de nombreuses instances et organismes au gouvernement. C'est pour ça que j'étais tellement préoccupé d'apprendre que votre groupe n'avait pas été contacté par le ministère de la Justice. C'est l'enfance de l'art si un ministre de la Justice va dire publiquement que, dans cette affaire-là, dans une affaire que le ministre lui-même a qualifiée tantôt de crise – c'est son terme, pas le nôtre: Mais il n'y a pas de matière à des poursuites criminelles.

Et le ministre dit: Nous, notre gouvernement a fait ci, notre gouvernement a fait ça. Mais, croyez-le ou non, ça paraît plus long, mais ils viennent de commencer leur cinquième année. Ils n'ont pas le choix, ils vont être obligés de faire une élection bientôt. Le monde va pouvoir juger si un ministre de la Justice qui, en matière de la crise à la curatelle publique, dit: Il n'y a pas de matière à poursuites criminelles, mais qui n'a même pas pris la peine de contacter l'organisme principalement intéressé, et qu'il n'y a même pas eu d'enquête policière... Ce n'est basé sur rien. C'est de l'air, mais c'est pour faire disparaître les problèmes, justement, encore une fois, pour des raisons purement partisanes, comme l'intervention du ministre tantôt, de la même manière que, d'un coup de la baguette magique, ils font disparaître la Commission d'accès à l'information jusqu'à l'an prochain. Quand on a quelque chose à cacher, c'est comme ça qu'on agit.

M. le Président, de notre côté, on travaille en faveur d'une modification législative qui permettrait aux gens qui sont ici avec nous aujourd'hui, à l'Association pour la défense des personnes et des biens sous curatelle publique, de laisser entrer un peu de lumière dans la pièce sombre que constitue depuis 50 ans la curatelle publique au Québec. Je les remercie pour leur grand travail, leur travail acharné qui va produire des résultats. Nous, on va y veiller. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Garon): Alors, comme le temps accordé pour l'audition de ce mémoire est écoulé, je remercie les représentants de l'Association pour la défense des personnes et des biens sous curatelle publique de leur contribution aux travaux de cette commission. Et j'ajourne les travaux de la commission de la culture à demain matin, 9 h 30, dans cette même salle du salon rouge. Alors, je remercie tout le monde. Passez une bonne soirée, et à demain.

(Fin de la séance à 17 h 33)


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