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(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Doyon): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Pour cette interpellation, je déclare que la séance de la
commission de la culture est ouverte et je rappelle que le mandat de la
commission est le suivant: il s'agit, pour nous, de procéder à
l'interpellation du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, qui
l'adresse à la ministre des Affaires culturelles, sur le sujet suivant:
La situation de l'industrie du spectacle et des arts de la scène. M. le
secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements annoncés?
Le Secrétaire: Non, M. le Président. Il n'y a aucun
remplacement.
Le Président (M. Doyon): Je vous rappelle très
brièvement les règles de cette séance d'interpellation.
Dans un premier temps, le député qui a demandé
l'interpellation, c'est-à-dire le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques, a 10 minutes. Le reste du temps est réparti
de la façon suivante: des périodes de 5 minutes sont
allouées dans l'ordre suivant: le député de l'Opposition,
c'est-à-dire le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, s'il
est seul ici; ensuite, la ministre et un député du groupe
ministériel. À 20 minutes de la fin de la séance,
j'accorderai une période de 10 minutes de conclusion à la
ministre et un temps équivalent au député qui a
demandé l'interpellation, le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
Donc, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, vous
avez la parole pour 10 minutes.
Exposé du sujet M. André
Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, le but de cette
interpellation est de rappeler au gouvernement, à quelques semaines
d'une décision sur le régime de taxation des activités
culturelles, les incidences cruciales d'une telle décision dans le
contexte de la crise actuelle subie par l'industrie du spectacle et des arts de
la scène. L'effet combiné de la récession et de la TPS a
provoqué, en 1991, une diminution dramatique des auditoires de l'ordre
de 30 % à 50 % aux spectacles dans les secteurs de la danse, du
théâtre, de la musique, de l'opéra, de la chanson et de
l'humour. Tous les secteurs écopent.
J'entends aborder la situation difficile de l'industrie du spectacle et
des arts de la scène à partir de deux principaux volets: la
taxation des activités culturelles et le soutien direct du
ministère des Affaires culturelles aux organismes du secteur des arts de
la scène.
Actuellement, le prix d'un billet de spectacle au Québec comporte
la TPS, c'est-à-dire la taxe fédérale de 7 %, plus la taxe
sur les divertissements de 10 % perçue par les municipalités.
Donc, un taux global de 17 %. L'imposition de la taxe québécoise
de 8 %, le 1er juillet prochain, porterait le taux cumulé de taxation
d'un billet de spectacle à 17 %, si on tient compte de la mesure
annoncée par M. Ryan. Les activités culturelles qui sont beaucoup
plus qu'un simple produit de consommation se retrouveraient avec un taux de
taxation nettement plus élevé que l'ensemble des produits de
consommation, exception faite de l'essence, de l'alcool et des cigarettes. Le
niveau de taxe élevé sur l'essence, l'alcool et les cigarettes
est justifié par le gouvernement en invoquant une demande
inélastique sur ces produits parce que ces produits sont, selon eux,
néfastes pour la santé et l'environnement. La culture est-elle
devenue, pour ce gouvernement, aussi nocive que la cigarette et l'alcool? Un
taux de taxation carrément suicidaire, particulièrement dans une
conjoncture de récession, parce que les sorties et les activités
culturelles font l'objet des premiers sacrifices des consommateurs qui se
serrent la ceinture en période de récession. La chute drastique
des auditoires en 1991, que j'invoquais, en constitue la triste
illustration.
Un taux de taxation de 26 % ou de 15,56 % sur les manifestations
culturelles devrait accentuer cette chute des auditoires avec, pour
résultat, la mise à mort de bien des organismes culturels.
L'État québécois doit prévenir cette situation en
réduisant le taux de taxation de la culture plutôt que d'agir en
pompier après qu'il eut constater les dégâts. Un tel taux,
au-delà de la récession, et je parle du taux de 26 %, aurait
été carrément néfaste, inacceptable pour les
raisons suivantes: Les perspectives restreintes du marché
québécois limitent déjà les possibilités de
consolidation et le développement des activités des artistes, des
producteurs et des diffuseurs. Faut-il rappeler l'étude de l'UNESCO qui
concluait qu'une culture ne peut survivre dans un État de moins de 10
000 000 d'habitants sans l'intervention soutenue de l'État à
l'endroit des organismes culturels et des artistes? Ce constat de l'UNESCO se
pose avec d'autant plus d'acuité et, dans le cas du Québec, seule
terre majoritairement francophone en Amérique du Nord, le gouvernement
québécois ne peut donc se dérober des
responsabilités découlant de sa situation géopolitique
s'il veut préserver et renforcer son caractère distinct. Ce
caractère de société distincte est d'abord et avant tout
le fruit de
son identité culturelle résultant des manifestations
diverses de ses créateurs, de ses producteurs, de ses diffuseurs et de
ses organismes culturels.
Un taux de taxation globale de 15,56 % provoquera une chute des revenus
de guichet des organismes de création, de production et de diffusion
culturelle. La très grande majorité de ceux-ci vit une situation
financière précaire, et non les moindres. Citons, à
l'exemple, l'Orchestre symphonique de Montréal, les Grands Ballets
canadiens, le Festival des films du monde, le Théâtre du Nouveau
Monde. Cette situation financière précaire qui se traduit, dans
certains cas, par un déficit accumulé d'opération de plus
en plus important, s'explique en partie par la récession et l'imposition
de la TPS, mais aussi par la détérioration du soutien financier
qu'ils reçoivent du ministère des Affaires culturelles par
rapport à la hausse des coûts de production et à la hausse
du coût de la vie. J'y reviendrai en détail ultérieurement,
M. le Président.
Enfin, en plus de contribuer à une détérioration
marquée de la situation financière des organismes culturels, un
taux de taxation de 26 % aurait rendu les manifestations culturelles de moins
en moins accessibles à un plus grand nombre de citoyens. Un tel taux de
taxation va carrément à rencontre de toute politique culturelle
qui doit avoir pour objectif d'assurer une accessibilité à la
culture au plus grand nombre. Le droit à la culture, c'est un droit
aussi important que le droit à la santé, à la justice ou
à l'éducation.
Il ne faut pas s'étonner, face à la menace que
représente la perspective, à court terme, d'un taux global de
taxation sur le prix d'un billet de spectacle, que les artistes, les
producteurs et les diffuseurs se soient mobilisés en créant, en
février dernier, la Coalition québécoise des arts de la
scène; non aux spectacles, non aux 26 % de taxe. Composé de
l'ADISQ, de l'OSM, RIDEAU, de la Guilde des musiciens, de l'Union des artistes,
du Regroupement des professionnels de la danse, de la Société
professionnelle des auteurs et compositeurs du Québec, de l'Opéra
de Montréal, des Grands Ballets canadiens et de l'Association des
organismes musicaux, la Coalition québécoise des arts de la
scène demande aux gouvernements, fédéral, provincial et
municipaux, de reconnaître le caractère essentiel de la
contribution du spectacle sur scène à la culture en accordant une
exemption générale de taxe sur le prix du billet de spectacle. Il
faut préserver l'accès du public aux arts de la scène et
relancer l'activité dans ce secteur.
De façon précise, la Coalition demande que le
fédéral exempte le domaine du spectacle de l'application de la
TPS, que la taxe d'amusement soit abolie en prévoyant un
mécanisme de compensation aux municipalités. L'on ne peut se
réjouir quand même qu'à la moitié seulement de
l'annonce faite hier par le ministre Ryan au congrès de l'Union des
municipalités. La Coalition demandait que le gouvernement
québécois renonce, comme dans le cas du livre, à percevoir
la TVQ dans le secteur des arts de la scène et du spectacle. Or, en
dépit des pressions répétées de la Coalition
auprès du gouvernement, Québec tarde à prendre une
décision globale en cette matière.
Dois-je rappeler à la ministre que le gouvernement n'a pas
attendu le discours sur le budget pour annoncer qu'il exempterait le livre de
l'application de la taxe de vente québécoise? Une décision
dans les meilleurs délais permettrait aux organismes culturels de mieux
planifier leurs activités, notamment au chapitre de la vente des
billets. Exemple, les théâtres d'été qui devront
commencer bientôt ou la vente d'abonnement pour la programmation
d'automne, qui se planifie actuellement. Le mauvais suspense a assez
duré. Les organismes culturels sont en droit de savoir ce que le
gouvernement entend faire afin de s'adapter et de s'ajuster. On sait que
diverses hypothèses circulent actuellement; j'y reviendrai au cours de
ma prochaine intervention. (10 h 20)
Je terminerai en disant à la ministre, qui prépare
actuellement la politique culturelle du gouvernement qui doit être rendue
publique à la mi-juin, dit-elle, que par sa décision sur le taux
de taxation sur le billet de spectacle, son gouvernement a une occasion
privilégiée de démontrer que la culture est une mission
essentielle de l'État, au même titre que l'économie,
l'éducation et la santé, comme le lui recommande le rapport
Arpin. Or, on apprend ce matin que le ministre des Affaires municipales entend
abolir la taxe d'amusement le 1er juillet prochain, sans garantie de
compensation, sans aucune garantie de compensation pleine et entière
pour les municipalités qui, sans une compensation à 100 %,
devront réduire leurs efforts en matière de culture. Cela laisse
en suspens une question fondamentale: La taxe québécoise de 8 %
s'appli-quera-t-elle en iieu et place de la taxe d'amusement? Est-ce que le
gouvernement entend exempter le secteur du spectacle et des arts de la
scène de l'application de la TVQ comme il l'a fait pour le livre? La
même logique, les mêmes prémisses et, donc, la même
conclusion qui ont prévalu pour le livre s'appliquent-elles aussi pour
le billet de spectacle?
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. Mme la ministre, vous avez maintenant la parole pour 10
minutes aussi.
Réponse de la ministre Mme Liza Frulla-Hébert Mme
Frulla-Hébert: Merci, M. le Président.
Premièrement, M. le Président, je voudrais profiter de ces
deux heures pour faire certaines mises au point nécessaires, non
seulement sur le phénomène de la taxation, mais aussi sur
l'ensemble de la situation des arts et de la culture au Québec. Je suis
persuadée que ce midi, le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques n'aura que des éloges à formuler
à l'égard de notre gouvernement.
Vous savez, M. le Président, il y a juste un an, j'affirmais
qu'une taxe de 26 % sur le spectacle représentait un fardeau beaucoup
trop lourd, voire même inconcevable, et je le crois encore. Par contre,
je veux faire aussi le point sur la situation, en espérant que le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques tienne, après, un
discours, tel le mien, plus positif.
Premièrement, outre le phénomène de taxation, le
milieu culturel, comme tous les autres secteurs d'activité, subit les
contrecoups de la récession, c'est sûr. Il faut rappeler, à
mon collègue député, l'étude sur le comportement
des consommateurs en matière culturelle qui évoquait
qu'aujourd'hui les Québécois font aussi face à de
multiples choix en termes de divertissement culturel. Ce nouveau
phénomène, expliqué en partie par les nouvelles
technologies, nous amène à une fragmentation de ce
marché.
À titre d'exemple, je pense au consommateur qui a le choix entre
une projection en salle, la location de vidéocassettes ou le
vision-nement d'un film à la télévision. Pour cette somme
d'argent, ce même consommateur peut également choisir d'aller au
théâtre, à l'opéra ou à un concert. Bref, M.
le Président, à l'aube de l'an 2000, nous devons adapter notre
action en tenant compte de ces nouvelles technologies qui vont continuer
à aller en se développant.
Cela dit, j'aimerais beaucoup, M. le Président, qu'on adopte un
discours plus progressiste, voire même visé vers l'avenir, pour
que nous puissions mettre ensemble toutes nos énergies pour travailler
au rayonnement de notre culture.
Maintenant, l'Opposition nous convie à parler d'économie.
Alors, nous allons parler d'économie, M. le Président. La
contribution gouvernementale pour les arts et la culture au Québec,
notamment pour le secteur des arts de la scène, joue le rôle de
levier économique majeur. C'est vrai. Elle garantit le fonds de
roulement qui assure la permanence des infrastructures et la gestion des
organismes. Ensuite, parce qu'elle accorde la reconnaissance dont ces
organismes ont besoin pour attirer d'autres partenaires et qu'elle concourt,
par le fait même, à générer des fonds privés.
Enfin, parce que l'engagement du gouvernement permet de soutenir le risque
inévitable lié à la création et à
l'innovation en matière culturelle.
À ce, je réponds à la remarque du
député d'en face qui disait que l'État doit soutenir la
culture. Eh bien, M. le Président, et je l'élaborerai de
façon beaucoup plus soutenue plus tard, nous allons prouver que nous
soutenons et nous continuerons de soutenir la culture. La contribution du
gouvernement, M. le Président, est aussi la base de développement
d'autres secteurs économiques significatifs. Je parle du tourisme, un
domaine qui est étroitement lié au rayonnement des produits
culturels et à leur visibilité par le plus grand nombre.
Considérant, M. le Président, que chaque dollar investi
par le gouvernement dans la culture génère un impact
économique considérable, nous avons privilégié,
depuis 1985-1986, différentes mesures et programmes qui ont permis de
soutenir la structuration et l'organisation des milieux culturels, de favoriser
l'excellence des différentes disciplines artistiques, d'assurer le
développement culturel des régions et d'affirmer le
développement culturel du Québec sur la scène
internationale.
Conséquemment à ces orientations qui témoignent de
la mission que nous nous sommes donnée quant au développement de
la culture au Québec, les investissements du gouvernement depuis
1986-1987, pour les arts de la scène, se sont accrus substantiellement.
Ainsi, de la formation, de la production et de la diffusion, maillons
essentiels à la vitalité des arts de la scène, les budgets
consentis à ces différentes fonctions ont connu une augmentation
enviable de près de 80 %. Ces crédits, qui représentaient
quelque 21 000 000 $ pour les secteurs de la musique, du théâtre,
de la danse et des arts multidisciplinaires, de la circulation et de la
diffusion des spectacles au Québec et à l'étranger,
incluant l'aide au disque, aux artistes professionnels et aux
événements majeurs en art de la scène, sont passés
à plus de 38 000 000 $ en 1991-1992. Quant aux infrastructures de
formation, de production et de diffusion culturelle, leur réalisation a
nécessité des investissements globaux de 141 000 000 $, dont une
portion significative de plus de 67 000 000 $ du ministère des Affaires
culturelles.
Cette volonté s'est notamment manifestée par une
législation appropriée pour les artistes des arts de la
scène, c'est-à-dire la loi 90 qui a été
sanctionnée en 1987 et qui accorde, depuis, un statut professionnel
unique au monde aux Québécois et aux Québécoises
qui oeuvrent dans le domaine des arts de la scène et du spectacle.
D'autre part, en supportant les tournées et les circuits de diffusion,
le gouvernement assure la démocratisation de la culture. Bien que nous
soyons conscients maintenant des besoins évidents d'amélioration,
on peut aussi constater des résultats encourageants. L'aide
évolutive du ministère des Affaires culturelles a permis un
rattrapage dans certains domaines, au cours des dernières
années.
Toutefois, certains éléments liés à la
nature même du secteur des arts de la scène et du spectacle le
rendent toujours fragile, et nous en sommes aussi très conscients.
Ainsi, il n'a pas
été possible de suivre la progression presque
exponentielle des budgets de plusieurs organismes dont les efforts et la
réussite débouchent sur un rayonnement national et international.
De même, si un créateur ou une créatrice peut davantage
envisager la possibilité, en 1992, de vivre de son art au Québec
qu'il y a 10 ans, par exemple, les conditions de travail de plusieurs artistes
n'en demeurent pas moins en deçà de la moyenne des autres
travailleurs. C'est là, M. le Président, l'une de mes
préoccupations majeures qui trouvera écho dans la politique
culturelle que je m'apprête à livrer sous peu. Même si nous
sommes tous fiers de l'évolution de nos institutions culturelles dans le
secteur des arts de la scène, tant en région que sur la
scène nationale, il n'en demeure pas moins qu'à certains
égards, leur stabilité demeure précaire.
Le marché québécois est un marché
limité qui subit une concurrence très forte de la culture
américaine et des produits étrangers. Les trois tests de ce
marché constituent, en effet, une caractéristique de premier
ordre en ce qui concerne la fragilité des secteurs des arts de la
scène. La démographie, M. le Président, présente
également des défis majeurs pour le futur. De nouveaux publics
s'annoncent avec des goûts et des besoins spécifiques, tandis que
le vieillissement de la population et la présence accrue des
communautés ethniques viennent modifier les règles du jeu. Quant
au facteur géographique, inutile d'insister sur l'immensité du
territoire qui exige une action fortement décentralisée pour
rejoindre culturellement tous les coins du Québec.
Le phénomène de la mondialisation, pour sa part, agit
autant sur la diffusion des oeuvres en territoire québécois que
sur leur exportation. Il introduit, particulièrement avec
l'éclatement des frontières et des technologies, comme je le
disais tantôt, de nouveaux standards de qualité
réclamés par la population québécoise et qui sont
un étalon pour tout produit qui aspire à un rayonnement
international. Ce phénomène, M. le Président, joue dans
tous les secteurs reliés à la culture et particulièrement
dans le secteur qui nous occupe aujourd'hui.
De plus, M. le Président, dans un contexte de climat
économique difficile relié à la récession, les
Québécois et Québécoises consomment la culture
à la maison aussi plutôt qu'en salle. Ceci a pour effet
d'engendrer, particulièrement depuis deux ans, comme le disait
tantôt mon collègue, une diminution sensible du nombre
d'abonnements et de la fréquentation de spectacles au Québec,
ainsi qu'une saturation, voire un retrait pour certains des commandites de
l'entreprise privée. Les conditions économiques, personne ne le
niera ici, ont une importance non négligeable sur le secteur culturel,
tant au niveau de la production que de la consommation. (10 h 30)
Ce qui m'amène, M. le Président, à parler
maintenant de taxation. Vous savez que le spectacle vivant et les
événements artistiques sont, actuellement, soumis à une
taxe d'amusement de 10 % imposée par les municipalités et, depuis
janvier 1991, à la TPS de 7 % du gouvernement fédéral. Or,
comme je l'ai mentionné à quatre ou cinq reprises dans cette
Assemblée et à la commission parlementaire sur les arts de la
culture, le 21 février dernier devant les représentants du monde
du spectacle aussi, 26 % de taxes sur les spectacles, c'est impensable. C'est
pourquoi je vous faisais part, dernièrement, M. le Président,
qu'en collaboration avec mes collègues, le ministre des Finances et le
ministre des Affaires municipales, nous évaluons présentement
divers scénarios en vue de trouver le moyen le plus approprié
pour atténuer le maximum de pression sur l'industrie du spectacle sans
pour autant taxer ces municipalités qui en donnent aussi beaucoup et qui
en remettent beaucoup au secteur culturel.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. Je suis
obligé de vous interrompre, compte tenu que les 10 minutes sont
terminées. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques,
vous avez maintenant 5 minutes.
Argumentation M. André Boulerice
M. Boulerice: Oui, M. le Président, trêve de
catalogues et d'applications sociologiques à la culture. La ministre
disait, le 26 février, effectivement, que 25,56 % d'ajoutés sur
le prix des billets sont totalement inacceptables. Quant au ministre des
Finances, à une réponse que je lui posais le 12 mars dernier sur
le taux de taxation de 26 %, celui-ci demandait à l'Opposition de lui
faire confiance et d'envisager la question dans un contexte plus large que le
seul volet des spectacles. C'est une réponse qui nous inquiète un
peu dans la mesure où, en situant la culture dans un contexte plus
large, à savoir l'entrée en vigueur de la TVQ sur les services,
le 1er juillet prochain, le ministre des Finances se trouve à nier ou
à minimiser la spécificité de la problématique du
taux cumulé de taxation sur le billet de spectacle.
Diverses hypothèses et scénarios font l'objet de
discussions, voire même de fuites. La semaine dernière, les
médias faisaient état de l'hypothèse suivante par suite
des discussions conduites par le ministre des Affaires municipales
auprès des municipalités: l'application des dispositions de la
loi 145 sur la fiscalité municipale interdisant aux municipalités
de taxer la culture et ainsi mettre fin à la taxe d'amusement de 10 %
sur le prix du billet de spectacle. Il faut se rappeler qu'en décembre
1990, dans la foulée de la réforme Ryan sur la fiscalité
municipale, le gouvernement voulait abolir la taxe d'amusement
mais avait dû reculer devant l'opposition des
municipalités. en juin 1991, en faisant adopter cette loi 145, le
ministre des affaires municipales rendait facultative l'imposition de la taxe
d'amusement en prévoyant, par règlement, les activités
à caractère culturel qui seraient exemptées d'une telle
taxe. or, à ce jour, on n'a vu nulle trace de ce règlement. en
lieu et place de la taxe d'amusement, selon ce scénario
évoqué dans les médias, le gouvernement du québec
appliquerait la tvq de 8 %, portant le taux global de taxation à 15,56 %
avec la tps, par rapport au taux cumulé actuel de 17 % résultant
de la tps et de la taxe d'amusement.
Dès les premières fuites de la semaine dernière
quant à la proposition du ministre Ryan, la réaction de la
Coalition québécoise des arts de la scène et celle des
municipalités ont été immédiates pour condamner ce
scénario. Pour la Coalition, ce scénario est inacceptable parce
qu'il maintient l'application de la taxe québécoise aux arts de
la scène et parce qu'il ne prévoit pas de mécanismes de
compensation équitable de la part du gouvernement du Québec
à l'égard des municipalités. Et du côté des
municipalités, le président de l'Union des municipalités
du Québec et maire de Charlesbourg, M. Mercier, a qualifié
d'inacceptable cette proposition du ministre des Affaires municipales
puisqu'elle n'offre qu'une compensation de 10 000 000 $ sur quatre ans par
rapport à une perte de revenus de l'ordre de 28 000 000 $ par
année en moyenne pour les municipalités. Et hier encore, au
congrès de l'Union des municipalités, les maires Doré, de
Montréal, et L'Allier, de Québec, ont condamné la
décision du ministre Ryan.
La Coalition et les municipalités ont raison de rejeter le
scénario de M. Ryan. Ce scénario, c'est la voie de la
facilité pour le gouvernement du Québec. Je vous relierai le
communiqué de presse de la Coalition qui disait: En effet, sans
exemption de la taxe québécoise, le milieu du spectacle ne ferait
que troquer le niveau actuel de 17 % de taxes contre 15,5 % à compter de
juillet prochain. Ce n'est certes pas avec cette infime baisse de 1,5 % que
l'on relancera le secteur des arts de la scène qui vit
présentement la pire crise de son histoire avec des baisses de 30 %
à 50 % de la fréquentation des salles et de l'offre de spectacles
à travers le Québec. Avec ce scénario, le Québec
refuse de porter l'odieux, par l'imposition de la taxe de 8 %, de faire grimper
le trop cumulé de taxation sur le billet de spectacle à 26 %. Il
s'agit plutôt de substituer la TVQ à la taxe d'amusement sans
compensation financière adéquate pour les municipalités,
les privant de 30 000 000 $ et donc, de moyens pour contribuer au financement
des activités culturelles sur leur territoire.
En clair, la décision du ministre Ryan laisse présager
l'entrée en vigueur de la TVQ sur les services le 1er juillet prochain
et applicable aux arts de la scène.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. Mme la ministre, pour cinq minutes aussi.
Mme Liza Frulla-Hébert
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, contrairement
aux allégations ou aux prétentions de l'Opposition, je pense que
le présent gouvernement est fort sensible au phénomène de
taxation, particulièrement dans le domaine culturel.
M. le Président, le présent gouvernement est le seul
gouvernement au Canada, et mon collègue d'en face l'a mentionné
tantôt, à avoir fait le choix de ne pas taxer les livres,
c'est-à-dire une injection de 32 000 000 $ par année dans le
secteur du livre et de l'édition, ce que le gouvernement
fédéral n'a jamais accepté de faire. Il est donc clair que
le présent gouvernement a pris le parti de la culture. Nous cherchons
des solutions à la situation qui prévaut dans le secteur du
spectacle, des arts et de la scène. Et, tel que je le disais auparavant,
nous sommes très conscients de la fragilité aussi de notre
culture.
Nous avons reconnu d'emblée que le phénomène de la
taxation, jumelé à la situation économique difficile,
crée un cul-de-sac dont il faut aussi nous sortir. Des rencontres et des
échanges, quelquefois virils mais toujours avec énormément
de respect, ont cours présentement avec mes collègues des
Affaires municipales et des Finances. Des gens de nos ministères et de
nos cabinets épluchent différents scénarios afin qu'une
décision soit prise avec tout l'éclairage nécessaire. M.
le Président, c'est pourquoi je rappellerai, et je rappelle encore
à l'Opposition que son intervention, si louable soit-elle, est fort
prématurée. pourquoi, m. le président, en sommes-nous
à approfondir certains scénarios? parce que le
phénomène de taxation se complexifie dans nos
sociétés occidentales. je donne quelques exemples pour illustrer
mon propos. en europe, par exemple - on parle beaucoup de l'europe - le taux de
taxation sur le spectacle varie de 2,10 % à 18,50 %. en france, le taux
de taxe sert, entre autres, à alimenter un fonds d'aide à la
production, lequel est présentement contesté par la commission
européenne. cette même commission économique
européenne, engagée dans la création du marché
unique pour 1993, préconise l'application d'une tva sur les spectacles
à 15 %, avec une variable de 5 % applicable selon que les arts de la
scène sont considérés comme des activités de loisir
ou comme des activités culturelles. les spécialistes
européens tentent présentement de définir les notions
liées à une activité de loisir par rapport à une
activité culturelle.
M. le Président, je vous fais grâce des incidences
reliées au GATT, mais je voudrais ici vous exprimer la complexité
de la problématique fiscale. Au Canada, la situation est aussi fort
variable. La taxe sur le spectacle oscille entre 7 % et 19,8 %
présentement. Rappelons qu'ici au
Québec la taxe sur les spectacles à 17 % est imputable
à un gouvernement fédéral - et ça me surprend, M.
le Président, que mon collègue d'en face ne le mentionne pas plus
souvent - qui est entré dans le champ de taxation avec sa TPS à 7
%, et à une taxe sur le divertissement de 10 % jusqu'ici
appliquée par nos administrations municipales. (10 h 40)
Les municipalités souhaitent conserver le pouvoir de taxation; le
milieu du spectacle évoque, à juste titre, qu'il est
surtaxé. Le gouvernement fédéral demeure, lui, silencieux,
mais s'impose comme un fardeau pour les spectacles au Québec. Le
gouvernement du Québec, qui a haussé ses budgets de 166 % dans le
soutien à la diffusion dans le secteur culturel depuis 1986-1987, fait
face à une critique de l'Opposition qui me semble aussi très
injuste.
Revenons à 1979 lors du débat d'une première
réforme en matière de fiscalité municipale. Le
présent gouvernement, celui de nos amis d'en face, a, lui, choisi de
conserver la taxe sur le divertissement alors qu'il avait, à
l'époque, la chance de l'abolir et d'amener d'autres mesures d'appui
gouvernemental. C'est de cette façon qu'il avait choisi d'appuyer le
spectacle et l'art de la scène, au Québec, en maintenant la taxe
de 10 % sur le milieu culturel. Il avait choisi de taxer plutôt que de
subventionner.
M. le Président, j'ai déjà affirmé qu'une
taxation à 26 % était trop élevée, voire
inacceptable. Comme nous l'avons si bien démontré en
décembre 1990, soyez assuré que nous faisons nos devoirs, et
j'invite l'Opposition à être attentive au cours des prochaines
semaines. L'Opposition nous a demandé de faire un choix qu'elle a
elle-même refusé de faire, M. le Président,
c'est-à-dire de détaxer. Elle nous demande d'avoir le courage qui
lui a manqué il y a aussi quelques années.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. M. le
député de Richelieu, pour cinq minutes.
M. Albert Khelfa
M. Khelfa: M. le Président, Je vous remercie de m'accorder
la parole à ce moment-ci, car je suis l'un de ceux qui croient que la
culture et l'activité culturelle qui en découle sont l'un des
fondements du développement de notre société
québécoise. Je suis également l'un de ceux qui sont
préoccupés par la situation du milieu du spectacle, des arts de
la scène, chez nous, au Québec. Mais contrairement à
l'Opposition, M. le Président, je crois que le présent
gouvernement, le gouvernement libéral, est celui qui peut dégager
les solutions à la problématique à laquelle nous sommes
confrontés.
M. le Président, j'ai aussi la conviction que le milieu culturel
croit que le présent gouverne- ment, le gouvernement libéral, est
le plus apte à intervenir. D'ailleurs, ses appels sont assez
éloquents. Je crois aussi que le milieu culturel est plus disposé
à placer sa confiance dans le présent gouvernement que dans les
gens qui ont composé le gouvernement péquiste de l'époque.
D'ailleurs, les travaux de la commission parlementaire sur la politique
culturelle, tenue l'automne dernier, l'ont bien illustré.
Permettez-moi, M. le Président, d'effectuer une mise au point sur
le phénomène de la taxation. Où nous situons-nous par
rapport à nos compétiteurs canadiens et étrangers?
À Londres, une TVA de 17,5 % s'applique sur le prix du billet. Elle est
comprise dans le prix de ce même billet. En France, le taux de taxe,
autour de 6 %, est destiné à un fonds en faveur de la production
des spectacles en français. Cette taxe parafiscale est contestée
par la Commission économique européenne et par les
Américains. La Commission économique européenne propose
entre-temps, pour 1993, l'application d'une TVA de 15 % sur les spectacles. En
Hollande, la taxe sur les spectacles se situe à 18,5 %. Au Canada, la
taxe sur les spectacles varie entre 7 % et 19,8 %, M. le Président,
comme l'a indiqué, plus tôt, Mme la ministre.
Cette variation est imputable à une série de facteurs. Par
exemple, en Ontario, le taux varie selon le prix du billet ou encore la
provenance du spectacle. Ailleurs, une exemption peut être applicable sur
les spectacles à connotation communautaire. Chez nous, au Québec,
elle se situe à 17 %, mais elle est imputable au gouvernement
fédéral pour une part de 7 % et aux administrations municipales
pour une part de 10 %. Donc, le gouvernement du Québec - je regarde le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques et j'espère qu'il va
comprendre - ne représente aucun poids sur la charge combinée de
la taxe sur les spectacles au Québec.
Que demande l'Opposition, M. le Président? L'Opposition demande
d'agir, mais agir là où elle a failli d'agir, elle, l'Opposition
comme telle. Rappelons-nous qu'en 1979, au moment de célébrer la
réforme fiscale par le PQ, il avait aussi été question de
l'abolition de la taxe sur le divertissement. Qu'est-ce qu'ils ont fait? Rien,
M. le Président. Le gouvernement péquiste a décidé
de maintenir cette taxe à 10 %. Donc, M. le Président, le
présent gouvernement, le gouvernement libéral, contrairement
à son prédécesseur le gouvernement péquiste, agit,
une action directe.
En terminant, M. le Président, j'aimerais et je souhaite que le
Parti québécois et l'Opposition - et je les y invite -
applaudissent fort l'action du gouvernement libéral d'aujourd'hui, car
la culture, pour le gouvernement libéral, c'est une matière
importante pour notre survie, au Québec.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup,
M. le député de Richelieu. M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques, pour cinq minutes aussi.
M. André Boulerice
M. Boulerice: Oui. Au moment où le gouvernement
libéral continue de se demander s'il appliquera ou non la TVQ et s'il
compensera pleinement pour la taxe d'amusement, il convient aussi
d'évaluer le soutien financier apporté par le ministère
des Affaires culturelles aux artistes et aux organismes culturels.
On se rappellera que lors de la campagne électorale de 1985, le
Parti libéral s'était engagé à consacrer 1 % du
budget de l'État au soutien de la culture. Or, sept ans plus tard, le
gouvernement n'a toujours pas honoré son engagement et, pire encore, la
part du budget du ministère des Affaires culturelles dévolue aux
organismes culturels ne cesse de décroître par rapport à la
part du budget consacré à la gestion interne du ministère
et aux sociétés d'État, c'est-à-dire
particulièrement les musées d'État qui accaparent
l'essentiel des augmentations du budget du ministère des Affaires
culturelles depuis cinq ans.
Ainsi, la ministre des Affaires culturelles affirme que les
crédits de son ministère, pour 1992-1993, s'élèvent
à 324 000 000 $, soit une augmentation de 35 000 000 $ ou une hausse de
12 % du budget du ministère des Affaires culturelles par rapport
à l'année dernière, et que cette hausse de 12 % est
supérieure à la hausse moyenne de 5 % consentie par le Conseil du
trésor à l'ensemble des ministères pour leur budget en
1992-1993. Or, M. le Président, cette hausse de budget ne profite pas
aux artistes, aux organismes culturels et aux régions qui se retrouvent,
pour l'essentiel, dans une situation de gel budgétaire.
Regardons la décomposition suivante de l'augmentation des
crédits de ces 35 700 000 $: 23 000 000 $ sont destinés au
service de la dette pour le financement des travaux de la Place des Arts, au
Musée du Québec, au Musée d'art contemporain et au
Musée des beaux-arts de Montréal; 10 700 000 $ sont
destinés à l'ouverture du Musée d'art contemporain et du
Musée des beaux-arts; renouvellement des ententes sur la mise en valeur
du patrimoine avec les villes de Québec et de Montréal;
contribution au redressement de la situation financière de l'Orchestre
symphonique de Montréal et des Grands Ballets canadiens;
élargissement du mandat de classement des vidéocassettes à
la Régie du cinéma; prise en charge de
l'amphithéâtre de Lanaudière par la Place des Arts. Il ne
reste donc que 2 000 000 $ pour tous les autres organismes culturels et les
artistes. La Place des Arts reçoit, quant à elle seule, plus de
16 200 000 $ de l'augmentation du budget de 1992-1993 du ministère pour
les travaux d'infrastructure et pour la prise en charge de
l'amphithéâtre du Festival International de Lanaudière. Ces
16 200 000 $ représentent 45 % de l'augmentation du budget du
ministère des Affaires culturelles pour 1992-1993.
Pour l'ensemble des organismes culturels, hormis la dizaine de ceux
visés par l'augmentation de 35 700 000 $, les crédits de
1992-1993 se traduisent par une situation de gel ou de stagnation
budgétaire. Ainsi, à titre d'exemple, les 150
bibliothèques municipales devront composer avec un budget global d'aide
au fonctionnement du ministère qui passe de 16 000 000 $, en 1991-1992,
à 16 274 000 $, soit une augmentation d'à peine 1, 6 %,
c'est-à-dire 1734 $ par bibliothèque. L'augmentation du budget du
ministère ne profite donc ni aux organismes culturels ni aux artistes ni
aux régions. Cette situation de gel ou de stagnation budgétaire
n'est pas nouvelle. Les troupes de théâtre, de danse, les arts
visuels, les bibliothèques, le secteur de la chanson et du disque, bref,
tous les secteurs de la création, de la production et de
l'interprétation subissent, depuis cinq ans, une diminution de la part
qui leur est dévolue dans le budget du ministère. (10 h 50)
Le constat est frappant. Il est navrant. Lorsqu'on procède
à une analyse des dépenses du ministère des Affaires
culturelles depuis l'année 1988-1989, dans les comptes publics, en
observant l'évolution budgétaire du ministère jusqu'aux
crédits de 1992-1993 déposés le 24 mars dernier par le
président du Conseil du trésor, une augmentation que je
qualifierais de bidon, M. le Président, quand on regarde le soutien aux
organismes culturels, aux artistes et aux régions, chanson qu'a
chantée la ministre au cours de la commission parlementaire.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. Mme la ministre.
Mme Liza Frulla-Hébert
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques aborde le sujet des
crédits alloués au ministère. Encore une fois, M. le
Président, il s'agit d'une réaction prématurée
puisqu'il sait très bien que nous aurons plusieurs heures pour en
discuter abondamment lors de l'étude des crédits du
ministère des Affaires culturelles dans quelques semaines, au
début mai en commission parlementaire. L'Assemblée nationale
prévoit donc, comme vous le savez, M. le Président, un processus
à cet effet. Mais, si le député de l'Opposition veut
parler de chiffres, eh bien je vais lui en donner, moi, des chiffres. Ces
chiffres démontrent une fois de plus que l'effort budgétaire
consenti par notre gouvernement aux affaires culturelles est nettement
supérieur à celui qui a été consenti sous le
gouvernement de nos amis d'en face. Le ministère des Affaires
culturelles voit ses crédits de 1992-1993 s'élever à 324
500 000$, pour une
augmentation de 12, 4 %, tandis que l'augmentation moyenne des
crédits du gouvernement est de 5, 8 %.
M. le Président, si j'entends et j'écoute
l'énumération que fait mon collègue d'en face en pariant
de musées, en parlant de Place des Arts, en pariant d'infrastructures,
entre autres, alors je me pose la question et je lui pose la question: Ces
infrastructures ne sont-elles pas des infrastructures d'abord culturelles?
Deuxièmement, infrastructures qui rendent la culture accessible aux
citoyens? Et troisièmement, le contenu n'appelle-t-il pas le contenant,
comme le disait si bien le rapport Arpln?
Le budget du ministère des Affaires culturelles est maintenant
rendu à 0,79 %, si on veut parier quand même du fameux 1 %; 0,79 %
du budget du gouvernement. Il était de 0,60 % en 1986-1987 quand nous
avons pris le pouvoir. Toutefois, plusieurs mesures gouvernementales dans le
domaine de la culture ne sont pas comptabilisées dans le budget du
ministère, et il faut quand même les mentionner, M. le
Président. Par exemple, la mesure de compensation sur la taxe de vente
sur les livres coûte, comme je le disais tantôt, 32 000 000 $ au
Trésor québécois. On ne la retrouve dans aucun budget.
Cette mesure à elle seule, ajoutée au budget du ministère
des Affaires culturelles, ferait monter la part du budget du ministère
à 0,86 % du budget de l'État. On doit penser aussi aux
crédits d'impôt consentis dans le secteur
cinématographique, une mesure qui est évaluée à 30
000 000 $. Ajoutée au budget du ministère, la part serait
maintenant de 0,94 %.
Cela dit, je veux maintenant vous donner quelques exemples des hausses
substantielles de crédits consentis dans le secteur culturel. Depuis
1986-1987, l'aide aux artistes professionnels a augmenté de 110 %;
l'aide à la diffusion, de 166 %. Pour sa part, l'aide à la
circulation de spectacles a augmenté de 169 % et l'aide à la
formation professionnelle, de 271 %. De façon globale, depuis 1986-1987,
le ministère des Affaires culturelles est l'un des ministères qui
ont connu la plus forte progression budgétaire de tous les
ministères. En crédits comparables, le ministère des
Affaires culturelles a vu son budget augmenter de 90 %. M. le Président,
ces chiffres démontrent clairement et hors de tout doute l'importance
qu'accorde mon gouvernement aux arts et à la culture.
Maintenant, laissez-moi le plaisir de faire une comparaison
éloquente. Nous allons examiner deux périodes de sept ans, soit
la première de 1979-1980 à 1985-1986 et la seconde de 1986-1987
à 1992-1993. Je vais comparer, pour ces deux périodes,
l'augmentation du budget du ministère des Affaires culturelles à
l'augmentation du budget gouvernemental. Pour la première
période, soit celle du gouvernement d'en face, le ministère des
Affaires culturelles a vu son budget augmenté de près de 96 000
000 $, tandis que son gouvernement augmentait son budget de 12 400 000 000 $.
La part relative de l'augmentation du ministère par rapport à
celle du gouvernement ne représente que 0,77 %. Pour la deuxième
période, soit sous notre gouvernement, les budgets du ministère
ont augmenté de 154 100 000 $ et les budgets du gouvernement, de 12 600
000 000 $. La partie relative de l'augmentation du budget du ministère
par rapport à celui du gouvernement traduit cet effort et
représente 1,22 %.
Premièrement, on doit constater une fois de plus la bonne gestion
des fonds publics de la part de notre gouvernement et deuxièmement, M.
le Président, le député de l'Opposition doit convenir avec
moi, suite à cette preuve mathématique, que l'effort
budgétaire consenti aux affaires culturelles est beaucoup plus grand
sous mon gouvernement que sous l'ancien. Nous avons fait mention, tout à
l'heure, de nombreuses réalisations en matière culturelle. Avec
les données que je viens de mentionner, il est clair que l'importance
accordée au secteur des affaires culturelles par mon gouvernement n'est
plus à mettre en doute.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. M. le
député de Taschereau.
M. Jean Lecierc
M. Lecierc: Sur le plan budgétaire toujours, M. le
Président, depuis 1986-1987, le ministère des Affaires
culturelles, et la ministre en a fait état, a vu son budget
haussé de 90 % en crédits comparables. Il est l'un des
ministères du gouvernement qui ont subi une hausse la plus
marquée. Voilà qui en dit long sur l'importance accordée
par le gouvernement aux affaires culturelles. Nous le savons tous, la situation
économique n'est pas facile. Aussi, notre formation politique a
hérité, comme vous le savez, lors de son arrivée au
pouvoir, de finances publiques en piètre état.
Toutefois, le budget consenti aux affaires culturelles a
progressé beaucoup plus rapidement que l'inflation et, comme le
mentionnaient mes collègues, les mesures budgétaires pour la
culture ont été fort nombreuses. Toutefois, ces mesures ne se
retrouvent pas toutes dans le budget du ministère des Affaires
culturelles. En effet, bien que les Affaires culturelles soient le principal
intervenant dans le domaine du soutien au secteur des arts et de la culture,
d'autres ministères ou organismes du gouvernement du Québec y
contribuent aussi financièrement.
Laissez-moi ici, donc, faire un bref survol de ces actions. Il y a
d'abord le ministère des Communications qui, par son action au niveau
des médias, contribue directement et indirectement au
développement de la culture québécoise. Il faut aussi
penser à Radio-Québec, qui est un acteur important dans la
diffusion de la culture
québécoise. Le ministère de l'Éducation est
un autre partenaire très actif dans le domaine des affaires culturelles.
C'est par lui que passe toute la sensibilisation du jeune public aux arts et
à la culture, ceux-là mêmes qui seront les consommateurs de
demain.
Cette question a d'ailleurs été abordée par de
nombreux intervenants lors de la commission parlementaire sur la politique
culturelle. Et je sais que la ministre des Affaires culturelles y est
très sensible. Le ministère des Affaires internationales,
à son tour, est lui aussi très actif dans le secteur culturel.
D'ailleurs, le ministre des Affaires internationales, M. Ciaccia, dans sa
politique internationale de l'automne dernier, a identifié la culture
comme une composante essentielle de l'action internationale du
Québec.
Cette politique propose de favoriser les échanges culturels avec
des partenaires étrangers. En effet, on mentionne dans ce document que
l'action internationale contribue à stimuler et renforcer le dynamisme
des créateurs québécois. La culture facilite la diffusion
et la distribution des productions québécoises sur des
marchés plus larges que le nôtre, qui est à la fois
restreint et largement ouvert, comme on le sait, aux productions
étrangères. Le ministère du Tourisme, celui du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche et l'ancien Office de planification et de
développement du Québec aident également, chacun dans leur
champ de compétence, le secteur culturel.
M. le Président, si on se base sur les données de
l'étude sur le financement des arts et de la culture au Québec,
on évalue les dépenses gouvernementales en matière de
culture à 543 000 000 $. Plus d'un demi-milliard de dollars par an.
C'est donc plus de 1,31 % du budget gouvernemental qui est alloué
à la culture. Je veux, par cette illustration, démontrer toute
l'importance qu'accorde notre gouvernement au secteur de la culture. Bien que
l'engagement que nous avons pris concerne le ministère des Affaires
culturelles, il est Important de démontrer que les actions du
gouvernement proviennent de différentes sources, de différents
ministères et organismes.
M. le Président, notre formation politique, au contraire de
l'ancien gouvernement, soutient concrètement la culture et continuera
à y apporter tous les appuis dont elle a besoin.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup, M. le
député. Mme la ministre. Pardon, M. le député de
Sainte-Marle-Salnt-Jacques, excusez-moi.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, pour ce gouvernement,
gérer son présent est tellement difficile qu'il
préfère se réfugier dans le passé. J'aborderai,
dans une notion que son premier ministre comprend bien mais qu'elle ne
maîtrise pas... On parlera en dollars constants. Elle va voir la
différence. En 1988-1989, la part du programme 2, Développement
des milieux culturels, qui regroupe l'ensemble des budgets d'aide au
fonctionnement des organismes culturels - je parle de troupes de danse, de
théâtre, de bibliothèques, d'édition de chansons, de
disques - avec une enveloppe globale de 120 000 000 $, représentait 51 %
du budget global du ministère. (11 heures)
Avec des crédits globaux de 133 500 000 $, l'enveloppe
dévolue dans les crédits 1992-1993 au programme 2,
Développement des milieux culturels, ne représente plus que 41,1
% du budget 1992-1993 du ministère, soit une diminution de plus de 10,3
% sur 5 ans, ce qui est quand même considérable. Pendant la
même période, l'enveloppe budgétaire du programme 1
destinée à la gestion interne du ministère passe de 27 300
000 $, en 1988-1989, à 45 800 000 $ en 1992-1993. En pourcentages, la
part de la gestion interne passe de 11,6 % en 1988-1989 à plus de 14,1 %
en 1992-1993. Le nombre de fonctionnaires autorisés au ministère
passe de 749, en 1988-1989, à 915 en 1992-1993. Ce sont les
organismes-conseils et surtout les sociétés d'État,
c'est-à-dire les musées d'État, qui
bénéficient pour l'essentiel de l'accroissement du budget du
ministère par suite des projets de construction du Musée de la
civilisation, du Musée du Québec, du Musée d'art
contemporain ainsi que de l'agrandissement du Musée des beaux-arts de
Montréal, musées privés subventionnés
regroupés dans le programme 4 du ministère.
Ces sociétés d'État ont vu leur enveloppe
budgétaire passer de 61 100 000 $ en 1988-1989 à 121 700 000 $
pour 1992. La part de l'enveloppe budgétaire qui leur est dévolue
dans le budget global du ministère est passée de 26 % à
37,5 %, soit une augmentation de 11,5 % par rapport à une diminution de
10,3 % de la part du budget consacré aux subventions d'aide au
fonctionnement des organismes de création, de production et de diffusion
culturelle. Cette diminution de l'effort budgétaire dévolue aux
organismes culturels par rapport aux sociétés d'État,
principalement les musées, contribue hors de tout doute à la
détérioration de la situation financière des organismes
culturels. Alors, on ne va pas s'étonner, dans un contexte de
récession, qu'avec la diminution des auditoires combinée à
une dévaluation réelle du soutien financier du ministère
des Affaires culturelles la très grande majorité des organismes
culturels - et pas les moindres, je vais nommer l'OSM, les Grands Ballets
canadiens, le Festival des films du monde, le Théâtre du Nouveau
Monde - éprouvent de très sérieuses difficultés
financières et voient s'accroître leur déficit
d'opération, amenant le ministère des Affaires culturelles
à agir comme pompier, dans certains cas, pour limiter les
dégâts. Et j'y reviendrai, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. Mme la ministre.
Mme Liza Frulla-Hébert
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, je comprends
que le député d'en face ne veuille pas parler du passé. Je
peux comprendre ça parce que toute vérité, selon certains,
n'est pas toujours agréable à entendre. Chose certaine, comme
gestionnaire, autant dans le secteur privé que maintenant dans le
secteur public, entre autres, quand on parle d'une augmentation de 90 % dans la
période de notre gouvernement, je pense que ça dépasse
amplement les dollars constants. Alors, je pense que c'est plutôt le
député d'en face qui a de la difficulté à
compter.
J'ai eu, tout à l'heure, l'occasion d'énoncer certains
chiffres qui donnent un aperçu global des investissements substantiels
du ministère dans le domaine des arts de la scène et du
spectacle, depuis 1985-1986. Le ministère s'est en effet donné
dès le départ un ensemble d'objectifs de soutien qui se sont
traduits par une pluralité de mesures. Ces mesures sont destinées
à mettre en valeur et à consolider les fonctions de
création, de formation, de production et de diffusion - on va en parler
- maillons génériques des arts de la scène, et ceci, en
concertation avec les différents milieux culturels.
Donc, je vais approfondir maintenant, pour le bénéfice de
cette Assemblée, certains des faits saillants de nos actions. Elles
illustrent fort bien la volonté du gouvernement libéral de donner
à la culture le maximum de moyens pour lui permettre de se
développer et de rayonner, tant au Québec qu'au plan
international.
Formation professionnelle. De 1986-1987 à aujourd'hui, les
budgets consentis à cette fonction de base de l'activité
professionnelle pour des organismes à but non lucratif se sont accrus de
plus de 271 % - ça dépasse largement les dollars constants -
passant de 780 000 $ à près de 3 000 000 $ en 1991-1992. Ces
données budgétaires, qui font abstraction du support à nos
conservatoires de musique et d'art dramatique, ont permis de consolider le
fonctionnement de l'École nationale de théâtre et les
activités des champs musicaux majeurs tel le Centre d'art d'Orford. Les
budgets supplémentaires consentis ont également permis
d'accélérer de façon significative, depuis 1989-1990, le
développement de la formation professionnelle en danse classique et
moderne. Enfin, ces sommes ont favorisé l'émergence de la
formation dans le domaine des arts du cirque par le biais de l'École
nationale du cirque qui, comme chacun le sait, contribue au rayonnement mondial
du Cirque du soleil et donne au Québec d'aujourd'hui une
réputation de premier plan dans un domaine novateur.
En production, en théâtre, en danse, en musique et en art
multidisciplinaire, et, encore là, M. le Président, il y a des
investissements importants qui ont été consentis depuis
1986-1987. Ainsi, au seul chapitre du théâtre - on va en parler,
du théâtre - c'est plus de 55 % d'augmentation qui ont
été consentis depuis 1986-1987; et, encore là, ça
dépasse largement les dollars constants. Pour la danse, il s'agit d'une
progression marquante de près de 90 %, alors que les budgets ont
pratiquement doublé à près de 3 200 000 $ pour supporter,
entre autres, tout le nouveau mouvement des jeunes chorégraphes
indépendants. Je pense à Ginette Laurin, Margie Gillis, entre
autres, dont la réputation d'excellence et d'innovation
chorégraphique déborde largement les frontières du
Québec, sans oublier, évidemment, Edouard Lock.
Nous avons également accordé, M. le Président,
depuis 1986-1987, une importance capitale - c'est vrai - autant au plan des
infrastructures, des mesures d'aide concrètes à la constitution
d'un réseau de diffuseurs que de l'aide à la consolidation des
événements majeurs, ceci afin d'assurer la présence et la
circulation de produits professionnels d'excellence sur tout le territoire
québécois.
Nos objectifs se voulaient précis: Assurer la présence de
structures d'accueil pluridisciplinaires sur l'ensemble du territoire et
Intensifier la longévité des produits du spectacle vivant. C'est
pour ça, M. le Président, que nous avons bâti des
infrastructures tant demandées aussi par le milieu. Bref, nous voulons
consolider le marché interne de la diffusion, mais surtout garantir une
plus grande accessibilité des collectivités régionales et
locales aux productions professionnelles des différents domaines des
arts de la scène et des variétés.
Encore là, les chiffres sont éloquents. Je veux parler des
événements majeurs, au cas où nos collègues d'en
face auraient tendance à vouloir minimiser notre volonté
réelle de soutenir la vitalité culturelle
québécoise. Ils ont connu une progression remarquable de l'aide
de l'État qui se chiffre à près de 180 % d'augmentation
depuis 1986-1987, qui est établie à quelque 3 100 000 $ en
1991-1992, c'est-à-dire notre intérêt à ce que le
Festival de théâtre des Amériques, le Festival
international de jazz de Montréal, celui du folklore de Drummondville et
combien d'autres puissent continuer à occuper une place plus qu'enviable
dans les grands réseaux internationaux des événements
d'envergure.
Dans le domaine du disque et du spectacle, le gouvernement
libéral a accéléré le développement d'une
industrie qui a pu, depuis sept ans, affirmer davantage sa présence sur
le marché de la consommation culturelle québécoise. En
effet...
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. Je suis
obligé de vous interrompre, compte tenu que le temps est
déjà écoulé, malheureusement; vous pourrez
continuer tout à l'heure. Alors, c'est maintenant au
député de
Charlevoix de nous faire valoir son point de vue pour cinq minutes.
M. Daniel Bradet
M. Bradet: Merci, M. le Président. Tel que le mentionnait,
tout à l'heure, la ministre des Affaires culturelles, nos acquis en
matière culturelle sont importants et notre gouvernement ne
néglige aucun effort, non seulement pour préserver ces acquis,
mais pour appuyer nos créateurs et nos entreprises. À preuve, on
dénombre aujourd'hui une cinquantaine d'organismes musicaux, plus de 130
compagnies de théâtre, près de 15 compagnies de danse,
quelque 60 centres d'artistes autogérés, environ 180 galeries
d'art commerciales, 150 lieux de spectacles, 344 musées et centres
d'exposition, 900 bibliothèques publiques ou affiliées aux
bibliothèques centrales de prêt et plus de 500 monuments et sites
culturels classés.
Dans le domaine des industries culturelles, on compte pas moins de 100
maisons d'édition, autant dans la production audiovisuelle, et
près de 40 entreprises dans le domaine de l'enregistrement sonore.
M. le Président, lorsque j'entends l'Opposition officielle
accuser à tort, comme représentant d'une région où
la culture est au premier plan depuis plus de 50 ans, je ne peux que leur
demander: Mais, où étiez-vous de 1976 a 1985? Depuis les 5
dernières années, des projets en attente depuis plus de 15 ans
ont été réalisés par le gouvernement libéral
et seulement dans Charlevoix. Qu'on pense au Musée régional de
Charlevoix, au Centre d'art de Baie-Saint-Paul, au Vieux Musée maritine,
au domaine Forget, a la Papeterie Saint-Gilles. Si c'est vrai que, dans
Charlevoix, 31 000 personnes se sont développées au niveau de la
culture depuis 1985, c'est aussi vrai pour l'ensemble du Québec. (11 h
10)
Pour appuyer ce dynamisme, M. le Président, le ministère
des Affaires culturelles déploie, chaque année, une panoplie de
programmes qui profitent, en bout de ligne, à tous les
Québécois et les Québécoises. Aussi, M. le
Président, pour démontrer la volonté de notre gouvernement
à appuyer les initiatives de nos créateurs et artisans et pour
assurer à notre industrie culturelle un développement optimal, je
me permettrai de rappeler certains programmes que le ministère des
Affaires culturelles a mis en place et qui se sont traduits par des
augmentations substantielles des subventions accordées.
Dans un premier temps, je rappelle que les crédits consentis au
ministère des Affaires culturelles ont augmenté de 12,4 % pour
l'année financière 1992-1993, des crédits qui
s'élèvent à 324 000 000 $. Plus particulièrement,
certains secteurs ont connu de fortes hausses. À titre d'exemple, au
cours des cinq dernières années, l'aide consentie à la
circulation de spectacles a augmenté de 169 %, passant de 520 000 $ en
1986 à 1 400 000 $ en 1991. Au cours des cinq dernières
années, l'aide accordée à la formation professionnelle est
passée de 780 000 $ à près de 3 000 000 $, une
augmentation de l'ordre de 271 %. Les programmes d'aide à la diffusion
de spectacles ont connu une hausse de 166 %, passant de 1 200 000 $ à 3
300 000 $. Au total, plus de 30 programmes qui, bon an mal an, permettent
à l'industrie culturelle de se développer. Des actions qui ont
été mises en place et qui démontrent, M. le
Président, la volonté de notre gouvernement de continuer à
assumer son rôle et ses responsabilités afin de défendre et
de supporter la culture québécoise.
M. le Président, les appuis à la cause culturelle ne
manquent pas au sein de notre gouvernement. Les récents
événements en témoignent. Entre autres, lorsque le
gouvernement a posé un geste qui indique bien l'intérêt
qu'il porte à nos cultures. C'est, en effet, en juillet dernier que le
gouvernement annonçait la tenue d'une commission parlementaire sur les
arts et la culture en vue d'élaborer la première politique
culturelle du Québec. Le gouvernement a non seulement invité la
communauté culturelle à se prononcer sur ce projet, mais
également le milieu des affaires, le monde municipal, celui de
l'éducation et les individus et institutions engagés dans le
rayonnement des richesses culturelles du Québec.
Avec ses 181 témoignages et ses 264 mémoires, M. le
Président, cette commission a été la deuxième en
importance dans toute l'histoire du Québec après la commission
Bélan-ger-Campeau. C'est donc dire l'intérêt qu'a
suscité cette démarche et cela démontre hors de tout doute
l'aptitude de notre gouvernement d'être à l'écoute du
milieu culturel.
M. le Président, notre gouvernement s'est fixé un
objectif: donner aux arts et à la culture la place qui leur revient dans
notre collectivité. En ce sens, plusieurs mesures ont été
mises en application pour atteindre cet objectif, mais d'autres mesures seront
développées, notamment pour accélérer la relance
dans l'industrie du spectacle.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, j'aimerais revenir sur la
détérioration de la situation financière des organismes
culturels. Cette détérioration, elle est attribuable en bonne
partie à l'érosion du soutien financier apporté aux
organismes culturels par le ministère des Affaires culturelles. Cette
érosion s'explique en bonne partie par le fait que l'augmentation du
budget dévolu au cours des cinq dernières années au
soutien des organismes culturels se situe en deçà du taux
d'inflation ou de l'indice des prix à la consommation reconnu par le
ministère des Finances, donc par son collègue.
En conséquence, malgré l'augmentation des crédits
au cours des cinq dernières années, la valeur réelle du
soutien financier de l'État a diminué, diminué parce que
cette augmentation se situait en deçà de la hausse du coût
de la vie et des coûts de production dans le cas qui nous occupe ce
matin. Si on avait maintenu la valeur réelle du soutien financier
consenti aux organismes culturels en 1988, en indexant le budget prévu
à cette fin au cours des cinq dernières années, le budget
1992 s'élèverait à 179 600 000 $ plutôt que le
budget de 133 500 000 $. Il y a donc un manque à gagner de 46 000 000 $
pour les organismes culturels. Et durant cette même période, le
budget du programme 4 dévolu principalement aux musées
d'État est passé de 61 000 000 $, en 1988-1989, à 121 000
000 $ en 1992-1993, alors que le budget indexé s'élèverait
à 90 000 000 $. Donc, dans ce cas, l'augmentation se situe à 30
800 000 $ au-delà de l'indexation de la valeur du budget consenti en
1988. Le budget du ministère des Affaires culturelles a augmenté
au cours des cinq dernières années, passant de 0,70 % du budget
global de l'État à 0,79 %. Mais à ce rythme, M. le
Président, il faudra attendre 10 ans avant que le gouvernement ne
consacre 1 % du budget à la culture. Il y a toujours un manque à
gagner de près de 90 000 000 $.
Et, comme nous l'avons constaté, cette augmentation de budget
profite davantage aux musées d'État et à la gestion
interne du ministère qu'aux organismes culturels. La valeur
réelle du soutien consenti par le ministère aux organismes
culturels n'a cessé de diminuer par rapport à la hausse du
coût de la vie. Il y a là un manque à gagner de l'ordre de
46 000 000 $ pour eux.
Et, puisqu'on parlait de commission, je vais vous citer un point du
rapport Arpin qui faisait le consensus auprès de tous les intervenants
et que la ministre semble avoir oublié. En page 68, on lisait, et je
cite: «L'effet conjugué de l'Inflation et de la non-Indexation des
subventions rend souvent anémiques les budgets de fonctionnement.
À écouter les milieux culturels et à étudier les
états financiers disponibles, il paraît évident que
même les mieux nantis d'entre eux ont vu, au cours des récentes
années, leur pouvoir financier décroître
considérablement. Sans arrêter ici des formules précises,
on ne peut que recommander des solutions de redressement de leur base
financière, à l'instar de ce qui s'est fait dans les
réseaux de l'éducation, de la santé, par exemple.»
On ne le retrouve pas dans les crédits.
Le groupe-conseil Arpin formulait une série de recommandations
visant à mettre fin à cette détérioration de la
situation financière difficile de la très grande majorité
des organismes culturels par les éléments suivants: Que soit
entreprise une opération de restauration des assises budgétaires,
budgets de base des organismes de création et de diffusion; que des
règles prévoient la récurrence d'une telle restauration
afin d'éviter la détérioration de la santé
financière des organismes par l'inflation; que cette mesure fasse
l'objet d'une priorité dans les demandes de budgets additionnels du
ministère des Affaires culturelles; que le ministère
élargisse les ententes triennales de financement au plus grand nombre
d'organismes culturels possible.
Or, à la lecture des crédits 1992-1993 du ministère
des Affaires culturelles, on ne trouve nulle trace de budgets additionnels
permettant d'entreprendre cette restauration des assises budgétaires des
organismes culturels recommandée dans le rapport Arpin. Ça augure
très mal pour la politique culturelle que la ministre veut
déposer, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Mme la ministre maintenant,
pour un autre cinq minutes.
Mme Liza Frulla-Hébert
Mme Frulla-Hébert: Là, M. le Président, on
va faire une mise au point tout de suite. D'abord, l'augmentation aux fonctions
culturelles dans les crédits 1992-1993 est de 9 % alors que l'inflation
est de 2,4 %. J'inviterais mon collègue d'en face à,
premièrement, réviser ses chiffres ou, deuxièmement,
savoir compter.
Deuxièmement, je veux rappeler aussi que les crédits n'ont
pas été adoptés et que le ministre des Finances n'a pas
déposé son budget. Donc, les chiffres qu'il avance sont non
fondés et, aussi, on ne peut pas les qualifier d'exacts.
Troisièmement, ça me surprend, M. le Président, que
mon collègue qui, finalement, se targue d'être culturel,
considère notre investissement dans l'infrastructure muséale et,
finalement, notre volonté à bâtir un vrai réseau
muséal comme étant non culturels. Ça, M. le
Président, ça me surprend beaucoup.
Maintenant, j'ai eu l'occasion tantôt de mentionner que cette
interpellation sur la situation des arts de la scène et du spectacle est
prématurée. J'ai eu maintes fois l'occasion aussi d'assurer aux
gens du milieu culturel - je l'ai prouvé d'ailleurs, M. le
Président, et ils me le témoignent aussi par leur confiance - que
je suis très sensible à leurs demandes. Je suis consciente, je
l'ai dit, et j'ai été la première à le dire, et ce,
l'année dernière, qu'une taxe sur les spectacles qui se situerait
au-dessus du niveau de 26 %, jumelée aux effets de la récession,
est totalement inacceptable.
M. le Président, mon gouvernement a
toujours démontré sa volonté et sa
détermination à mettre en oeuvre des actions en faveur du
développement de nos industries culturelles. Autrement dit, nous avons
été à l'écoute, nous sommes à
l'écoute de nos clientèles et nous continuerons d'appuyer nos
créateurs et artisans. (11 h 20)
À cet égard, j'aimerais attirer l'attention des membres de
cette Assemblée sur les politiques et réalisations du
ministère des Affaires culturelles que nous mettons de l'avant.
D'ailleurs, on va faire un petit retour sur le passé. C'est tout de
même en 1960 que le gouvernement, qui était un gouvernement
libéral à l'époque, se donne un rôle
prépondérant dans la défense de notre langue et de notre
culture en instituant le ministère des Affaires culturelles. Dans les
années soixante-dix, la culture se démocratise, le gouvernement
mise sur le développement culturel des régions. En 1980, la
structuration et l'organisation des milieux culturels, et plus
particulièrement l'amélioration du statut professionel des
artistes et des créateurs, jouent un rôle majeur.
En effet, M. le Président, par cette loi sur le statut de
l'artiste, «mon» gouvernement a démontré hors de tout
doute qu'il est à l'écoute des besoins et des attentes de la
clientèle. Le gouvernement du Québec se préoccupe du
statut de ses créateurs. Donc, de dire qu'on ne s'occupe pas des
créateurs et de la création, c'est totalement faux, comme en
témoigne la loi 78, ou Loi sur le statut professionnel des artistes des
arts visuels, des métiers d'art et de la littérature et sur leurs
contrats avec les diffuseurs. Cette loi reconnaît le statut d'artiste
professionnel aux artistes et aux auteurs. Cette loi réglemente
également l'ensemble des conditions économiques et sociales qui
entoure la production de l'oeuvre. Elle contribue à créer un
contexte favorable à l'exercice du métier d'auteur dans une
société confrontée à un marché
intérieur restreint et à une vive concurrence des produits
étrangers et des autres médias. En ce sens, M. le
Président, le gouvernement libéral a fait plus pour le milieu
culturel que le gouvernement du Parti québécois. Et ça, M.
le Président, mon collègue d'en face ne peut pas le nier,
même s'il ne veut pas revenir sur le passé.
Dans cet esprit, M. le Président, j'aimerais rappeler les actions
que le gouvernement libéral a prises face à l'introduction de la
taxe de vente, comme on le disait tantôt, sur les livres. M. le
Président, je m'en souviens très bien, puisque M. Bourassa venait
de me confier la responsabilité de gérer, à ce
moment-là, le portefeuille du ministère des Affaires culturelles.
Le gouvernement libéral a pris ses responsabilités et a reconnu
l'impact que pouvait avoir l'introduction de cette nouvelle taxe sur
l'industrie du livre, qui en est une très fagile.
M. le Président, mon gouvernement s'est aussi montré
sensible à l'égard de ce secteur d'activité et, en ce
sens, a voulu protéger les acquis tant dans le domaine de la lecture, de
l'édition et de la librairie, acquis obtenus à un prix
élevé, après des années d'acharnement et
d'incitation de la part du ministère des Affaires culturelles. Parce que
l'écrit, M. le Président, est et demeurera le média
privilégié de transmission de l'héritage d'un peuple, que
cet héritage soit littéraire, social, politique ou
économique. C'est pourquoi, M. le Président...
Le Président (M. Doyon): En terminant, Mme la
ministre.
Mme Frulla-Hébert: ...en terminant, mon gouvernement
annonçait, le 27 novembre 1990, que les consommateurs seraient
instantanément compensés pour la totalité de la taxe de
vente du Québec à l'égard des livres. Nous savons, M. le
Président, prendre nos responsabilités, nous savons aussi
considérer une situation qui est fragile, et je blâme aussi, un
peu, notre collègue d'en face de décrier une politique culturelle
qui - et on se l'est dit tous les deux - se voulait non partisane, d'une part,
et, deuxièmement, un outil précieux pour le développement
de la culture au Québec.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre.
Maintenant, je vais permettre au député de Charlevoix de
s'adresser à cette Assemblée pour cinq minutes aussi.
M. Daniel Bradet
M. Bradet: M. le Président, une fois de plus l'Opposition
officielle essaie de discréditer l'action du gouvernement libéral
en l'accusant à tort de ne pas prendre ses responsabilités
à l'égard du secteur culturel. Comme l'a mentionné ma
collègue, la ministre des Affaires culturelles, cette interpellation est
quelque peu prématurée puisque le gouvernement libéral a
eu maintes fois l'occasion de démontrer son aptitude à mettre
tous les moyens en place pour assurer au milieu culturel un dynamisme et une
vitalité qui profiteront à l'ensemble des Québécois
et des Québécoises. En effet, l'activité culturelle au
Québec représente 65 000 emplois et génère 3 500
000 000 $ dans notre économie. Dans cet esprit, notre gouvernement
reconnaît que l'effort que nous devons consacrer au développement
et au maintien de l'emploi dans un secteur est crucial et est aussi important
que celui que nous devons consacrer à préserver les emplois dans
d'autres secteurs économiques.
La ministre des Affaires culturelles a rappelé tout à
l'heure: Notre gouvernement a pris ses responsabilités, notamment en
accordant aux artistes québécois un statut qui leur permet de
prendre la juste part qui leur revient par le biais des modifications aux lois
québécoises de l'impôt. On peut rappeler également
les mesures prises à
l'égard de l'industrie du livre. L'Opposition officielle devrait
ainsi nous faire confiance et nous laisser travailler les coudées
franches. Mais, M. le Président, le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques semble avoir la mémoire courte. Aussi,
j'aimerais profiter de cette interpellation pour lui rappeler certains faits
qui témoignent du sens des responsabilités du gouvernement
libéral, notamment à l'égard de l'industrie du livre.
M. le Président, le gouvernement reconnaît depuis longtemps
l'importance de soutenir cette industrie. On ne le dira jamais assez, les
bienfaits de la lecture sont nombreux et ouvrent des perspectives nouvelles et
bénéfiques aux autres secteurs d'activité culturelle. Des
études, M. le Président, ont en effet démontré que
les lecteurs ont des pratiques culturelles plus diversifiées. Ils vont
plus souvent fréquenter les musées et les autres
établissements culturels, assister à des spectacles ou au
cinéma. En ce sens, M. le Président, j'aimerais profiter de
l'occasion pour rappeler au député de Sainte-Marie-Saint-Jacques
que le gouvernement du Québec n'a pas ménagé ses efforts
pour promouvoir la lecture et pour doter le Québec d'un réseau
culturel fort envié. On dénombre, en effet, 900
bibliothèques publiques ou affiliées aux bibliothèques
centrales de prêt, et ce, à travers l'ensemble du territoire
québécois. On ne compte pas moins de 100 maisons
d'édition, sans compter le réseau de distribution, et des
librairies qui permettent de rendre accessible le livre partout au
Québec et de faire rayonner davantage l'industrie
québécoise du livre sur les marchés étrangers.
M. le Président, posons-nous la question: Croyez-vous
sincèrement que la volonté de ma formation politique est de
mettre en péril tous ces acquis? Bien sûr que non. La mesure de
compensation de la taxe de vente sur le livre annoncée le 27 novembre
1990 est un exemple éloquent. En effet, à l'automne 1990, la
ministre des Affaires culturelles a démontré, hors de tout doute,
sa volonté de prendre la défense du milieu culturel. Je ne veux
pas y revenir, mais l'action du gouvernement a été claire et elle
démontre, une fois de plus, que le gouvernement libéral a fait
plus pour la culture que le gouvernement du Parti québécois. Par
ses programmes d'aide, ses interventions, notre gouvernement a travaillé
de concert avec les artistes, les créateurs, les entreprises culturelles
à rendre les arts et la culture accessibles partout, pour tous et
toutes.
En résumé, M. le Président, le gouvernement
n'entend pas négliger le secteur culturel. Il l'a montré, dans le
passé, et il le démontre aujourd'hui, notamment par
l'augmentation des crédits alloués au ministère des
Affaires culturelles, une augmentation de 12,4 % pour l'année 1992-1993.
Je tiens à le rappeler, car c'est une augmentation substantielle.
Avant de terminer, M. le Président, j'aimerais revenir sur les
modifications qui ont été apportées à la Loi sur le
cinéma en juin dernier, sujet qui a été abordé par
ma collègue, la ministre des Affaires culturelles. J'aimerais donner un
peu plus de détails sur ce sujet puisque ces mesures qui ont
été prises démontrent bien la sensibilité du
gouvernement libéral à l'égard du milieu culturel et sa
volonté de répondre à ses attentes. Rappelons donc que ces
modifications sont le résultat de consensus qui se sont
dégagés lors des audiences publiques tenues par l'Institut
québécois du cinéma et lors de la commission parlementaire
tenue en mai 1991, commission à laquelle j'ai eu l'occasion de
participer.
M. le Président, j'ai la ferme conviction que notre gouvernement
continuera d'appuyer le milieu culturel pour faire en sorte d'améliorer
la qualité de la vie culturelle dans chacune de nos 16 grandes
régions et, en ce sens, qu'il continuera d'être à
l'écoute des besoins et attentes de cette clientèle et à
travailler encore davantage à l'essor de notre culture. Je vous
remercie.
Le Président (M. Doyon): merci, m. le député
de charlevoix. maintenant, m. le député de
sainte-marie-saint-jacques, pour cinq minutes aussi.
M. André Boulerice
M. Boulerice: Oui. Les chiffres du budget, M. le
Président, ne sont pas des rumeurs, ils ont été
déposés par son collègue, le président du Conseil
du trésor. Si elle le trouve chiche et pingre, bien, je ne veux pas la
contredire; je vais même l'appuyer.
Revenons, M. le Président, au rôle des municipalités
dans la culture et le scénario Ryan, ce scénario soumis par le
ministre des Affaires municipales aux représentants des
municipalités et l'abolition de la taxe d'amusement perçue par
ces municipalités pour lui substituer la TVQ, parce qu'un tel
scénario aura une incidence fondamentale sur l'implication
financière des municipalités comme partenaires du
développement culturel.
Les municipalités du Québec investissaient, en 1991 - il
est bon de le citer - 230 000 000 $ dans le soutien à la culture. Elles
retiraient des revenus globaux de 28 000 000 $ avec la taxe d'amusement dont,
notamment, des revenus de l'ordre de 8 000 000 $ pour Montréal et 4 000
000 $ pour notre capitale. Or, l'on sait, au risque de se
répéter, que la ministre des Affaires culturelles entend rendre
publique la politique culturelle de son gouvernement à la mi-juin sur
les recommandations du rapport Arpin et sur les travaux de la commission
parlementaire chargée d'entendre les commentaires des intervenants
culturels.
Le rapport présenté en juin 1991 à la ministre par
le groupe-conseil présidé par M. Arpin, directeur
général du Musée de la civilisation, et proposant une
politique de la culture et
des arts plaide largement en faveur d'une implication accrue des
municipalités dans le secteur de la culture. Tout en recommandant, et je
le cite «un plus grand engagement des municipalités dans la
culture», le rapport Arpin mettait en garde le gouvernement - et je cite
de nouveau -«afin que les programmes culturels ne fassent pas l'objet
dé délestage de la part du gouvernement». C'était la
recommandation 78, si la ministre s'en rappelle. (11 h 30)
Or, en abolissant la taxe d'amusement sans compensation
financière adéquate aux municipalités, le gouvernement du
Québec va carrément à rencontre du rapport Arpin, qu'elle
avait commandé elle-même, en regard de l'implication accrue des
municipalités pour ce qui est de la culture.
Suite à la réforme Ryan sur la fiscalité municipale
qui s'est traduite par un pelletage de responsabilités dans la cour des
municipalités, et ceci sans compensation, avec pour résultat une
hausse importante de taxes municipales pour les contribuables, comment, mais
comment la ministre peut-elle envisager sérieusement, dans sa politique
culturelle, un nouveau partage des responsabilités entre le
ministère des Affaires culturelles et les municipalités, une
implication accrue de celles-ci alors que le gouvernement leur retire la taxe
d'amusement sans compensation financière appropriée?
Comment la ministre pourra-t-elle convaincre les municipalités
d'investir davantage en matière de culture, notamment au chapitre des
équipements culturels, en continuant de pratiquer cette politique de
terre brûlée et de délestage, en abolissant la taxe
d'amusement ou en réduisant, comme c'est le cas depuis cinq ans, le
niveau de l'aide apportée en subvention au fonctionnement des
bibliothèques municipales?
En 1991, l'aide moyenne aux municipalités ne
s'élève qu'à environ 7,9 % des budgets de fonctionnement
des bibliothèques. Les choses ne s'améliorent pas en 1992. Selon
les crédits déposés à l'Assemblée nationale
le 24 mars dernier, c'est-à-dire ce cahier par le Conseil du
trésor, l'on note une très faible augmentation de 1,6 % des
crédits dévolus en 1992 en aide au fonctionnement des
bibliothèques municipales, soit 16 274 000 $ par rapport à 16 013
991 $.
Si on scrute le sommaire des crédits de transfert du
ministère des Affaires culturelles, les 150 bibliothèques devront
se contenter d'une augmentation globale de 260 000 $, soit une augmentation
moyenne et risible de 1734 $ par bibliothèque. C'est pitoyable quand on
sait que le rattrapage qui s'impose dans ce secteur est considérable
puisque le Québec ne devance que Terre-Neuve dans l'ensemble du
Canada.
Non, Mme la ministre, l'abolition de la taxe d'amusement sans
compensation financière adéquate à l'égard des
municipalités, telle qu'en- visagée par votre collègue des
Affaires municipales, va saper tous vos efforts d'assurer un engagement accru
des municipalités dans le secteur de la culture, dans l'optique d'un
nouveau partage de responsabilités proposé par votre politique
culturelle sur la base des recommandations du rapport Arpin.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député
de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Mme la ministre, pour un dernier cinq minutes
avant de passer aux remarques finales de 10 minutes chacun.
Mme Liza Frulla-Hébert
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, on en parle
quand même depuis à peu près une heure et demie. Je pense
que là-dessus, mon collègue et moi, nous nous rejoignons
parfaitement, c'est-à-dire que taxation trop élevée
évidemment signifie un coût considérable au niveau de
l'assistance ou, enfin, de l'accessibilité du consommateur aux arts de
la scène, d'une part; deuxièmement, contribution des
municipalités dans le secteur municipal aussi, ou enfin contribution
importante, partage de responsabilités aussi important, puisque nous
sommes présentement à nous asseoir avec les municipalités
lors d'une table Québec-municipalités et autres tables
formées avec différents partenaires du milieu municipal pour
augmenter évidemment notre partenariat.
Mais, encore une fois, il faut quand même admettre que cette
dénonciation est très prématurée, puisque le
ministre des Affaires municipales a parié de l'abolition de la taxe de
10 %, mais, finalement, n'a pas mis de chiffre au niveau des compensations.
Nous sommes à travailler avec le ministre des Finances et le ministre
des Affaires municipales pour, justement, trouver une solution adéquate
et au phénomène de taxation, d'une part, et, deuxièmement,
pour inciter aussi le monde municipal à s'impliquer davantage dans le
secteur culturel.
Alors, là-dessus, M. le Président, je dis: réaction
un peu prématurée. Je pense que les jours qui viennent vont
probablement apporter des réponses à
«l'interlocution» de mon collègue d'en face. Maintenant,
j'invite aussi mon collègue d'en face à adopter peut-être
avec nous, face à une politique culturelle qui s'en vient, un discours
qui n'est pas souvent entendu, mais un discours quand même qui se doit
d'être fort utile pour remettre dans un certain secteur notre secteur
culturel, c'est-à-dire - et tout le secteur - l'économie de la
culture.
M. le Président, je voudrais rappeler quelques chiffres. Le
secteur culturel représente une activité économique de
l'ordre de 3 500 000 000 $ par année. Si on le compare à nos 22
secteurs manufacturiers, le secteur culturel arrive au neuvième rang
quant à la valeur des livraisons. Près de 60 % des
activités
sont générées par les ventes de biens et de
services. Par exemple, en 1990, les Québécois ont acheté
des disques pour 345 000 000 $. Ils ont assisté à des spectacles,
malgré une baisse, pour 105 000 000 $. Ils se sont procuré des
livres pour 470 000 000 $. Pour cette année, les bibliothèques
publiques ont acheté pour à peu près 20 000 000 $ de
livres. Les gens ont dépensé 215 000 000 $ dans l'achat de films
ou la location de vidéocassettes, et 85 000 000 $ au cinéma.
On retrouve plus de 25 000 emplois dans ce que l'on définit comme
industrie culturelle. Si on ajoute tous les autres emplois associés au
secteur culturel global, par exemple, musées ou bibliothèques, on
parle de 75 000 emplois. Les industries culturelles comptent aussi sur plus de
2500 PME, et ce réparti à travers le territoire et toutes les
régions du Québec. Le gouvernement du Québec a
dévoilé sa stratégie de développement
économique en décembre dernier et nous avons, avec mon
collègue le ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Gérald
Tremblay, fait connaître les 13 grappes industrielles identifiées
comme concurrentielles ou stratégiques. Une de ces grappes
stratégiques était celle des industries culturelles,
conçue et élaborée par le ministère des Affaires
culturelles. C'est la première fois que le gouvernement reconnaît
dans une politique l'apport économique de l'activité culturelle.
Voilà un constat que j'entends désormais porter haut et fort dans
un langage inspiré par la passion de nos artistes et par la certitude de
nos gains économiques légitimes. Et j'invite mon collègue
d'en face à en faire autant.
Les grappes industrielles ne font pas que définir une
réalité actuelle, elles définissent également les
valeurs essentielles d'une économie à valeur ajoutée. Au
cours des dernières années, nous avons enregistré des
acquis formidables dans le secteur des industries culturelles. En même
temps, nous avons pu identifier aussi des lacunes importantes, des lacunes qui
ne concernaient ni le dynamisme, ni la compétence du milieu, mais
plutôt la zone grise où nageaient depuis toujours les entreprises
culturelles et la taille plutôt modeste de la majorité d'entre
elles. En ce sens, la création d'une grappe des industries culturelles
et son insertion dans la stratégie industrielle du Québec est un
début de réponse à ces préoccupations.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. Alors,
nous sommes maintenant en période finale. Je m'en voudrais de ne pas
participer très brièvement à ce débat en indiquant
que comme...
M. Boulerlce: M. le Président... Le Président
(M. Doyon): Oui? M. Boulerice: II reste cinq minutes.
Le Président (M. Doyon): Non. Il va vous rester chacun 10
minutes, à moins 20, pour terminer à midi les interventions.
M. Boulerice: On a commencé à 10 h 10 à
cause du retard de Mme la ministre.
Le Président (M. Doyon): Nous avons commencé
à 10 h 5. On aurait pu commencer à 10 h 5, on a commencé
à 10 h 10, compte tenu des cinq minutes que vous-même vous avez
prises, M. le député.
M. Boulerice: Mais qui étaient en conséquence de
celles de la ministre, monsieur. J'étais ici à 9 h 56.
Le Président (M. Doyon): J'ai constaté que nous
avons commencé à 10 h 10. Il y avait une première absence
de cinq minutes et une deuxième absence de cinq minutes, ce qui fait que
nous finirons à midi, comme je l'indique.
M. Boulerice: Est-ce qu'il y a consentement de la part de la
ministre que je fasse mon cinq minutes, M. le Président? Mon dernier
cinq minutes.
Mme Frulla-Hébert: Est-ce qu'on a consentement?
Le Président (M. Doyon): Est-ce qu'il y a
consentement?
Mme Frulla-Hébert: Bon, s'il y a consentement...
Le Président (M. Doyon): Consentement. Nous finirons
à 12 h 10. Alors, je m'en voudrais de ne pas prendre deux minutes pour
indiquer que, comme témoin de la vie culturelle dans la région de
Québec, force m'est de constater que cette vitalité est plus
active que jamais, et je voulais tout simplement apporter un témoignage
de l'intervention très active du ministère des Affaires
culturelles, que ce soit pour des infrastructures comme le Capitol, le Palais
Montcalm, l'entente avec la ville de Québec. Je ne veux pas oublier la
salle Albert-Rousseau. Le théâtre est plus vivant, plus
présent que jamais dans la région de Québec.
C'est des constatations qu'il nous est permis de faire. Le Salon du
livre revit et le fait sous une nouvelle forme. Alors, tout ça, c'est
des constatations que moi, comme député depuis 10 ans ici, dans
la région de Québec, je suis en mesure de faire, un certain
nombre de comparaisons, et j'en arrive à ces conclusions. Alors, tout
simplement, je voulais indiquer ce témoignage de ma part.
Et maintenant, je reconnais le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques, pour un dernier cinq minutes. Non, je m'excuse,
c'est le député de
Taschereau qui fera cinq minutes, maintenant. M. Jean Leclerc
M. Leclerc: Merci, M. le Président. En décembre
dernier, le gouvernement faisait une annonce importante par son ministre de
l'Industrie et du Commerce: la stratégie de développement
économique. Cette stratégie industrielle a été
accueillie avec beaucoup d'enthousiasme par les différents Intervenants
économiques du Québec. Voici une autre preuve que notre formation
politique, même en période économiquement difficile, sait
agir et sait utiliser les moyens dont elle dispose pour concevoir une
stratégie de relance dans notre économie. (11 h 40)
Oui, nous avons une vision à moyen et à long terme. Mais
en décembre dernier, un pas important a été franchi par
notre gouvernement. Pour la première fois, le secteur culturel
était reconnu officiellement au coeur d'une stratégie de
développement économique. Ma collègue mentionnait il y a
quelques instants les données démontrant clairement l'apport
économique majeur des industries culturelles au Québec. Le
potentiel de croissance des industries culturelles québécoises
est réel, et nous reconnaissons donc sa contribution majeure au
développement du Québec. La formation politique de nos
vis-à-vis ne peut se vanter d'avoir fait autant.
Le ministère des Affaires culturelles a donc conçu la
grappe stratégique des industries culturelles. Une «grappe
industrielle» est une expression consacrée qui représente
un ensemble d'industries dans un même secteur d'activité. Ces
industries interagissent, se regroupent et se concurrencent entre elles pour
accroître leur compétitivité et accélérer
leur croissance. Laissez-moi vous donner quelques exemples concrets pour
illustrer la grappe des industries culturelles.
Tout d'abord, quatre secteurs d'activité ont été
identifiés, soit celui du film, de la télévision et de la
vidéo, celui du disque et du spectacle, celui du livre et enfin celui de
l'artisanat. À la base de cette grappe, on retrouve le créateur.
Comme le disait ma collègue, la création est la matière
première des industries culturelles. Entre le créateur et le
consommateur, il y a plusieurs étapes: la production, la distribution et
le commerce au détail, autant de maillons d'une chaîne qui
correspondent à autant d'activités économiques
importantes.
Parions maintenant de la synergie entre ces secteurs. Je pense, par
exemple, à un roman qui est écrit, imprimé et
distribué. Ce même roman peut être adapté pour la
télévision, le cinéma et, par la suite, vendu ou
loué sous forme de vidéocassette. Une musique pourra être
créée pour cette production et, pourquoi pas, se retrouver sur
disque compact.
En d'autres termes, Une même oeuvre de création conduit
à de multiples retombées. On atteint alors une
véritable synergie. Dans le secteur culturel comme dans d'autres, la
synergie est comme un second souffle qui crée un dynamisme nouveau, et
la valeur ajoutée fait toute la différence dans un marché
concurrentiel. La stratégie de développement économique
repose sur l'encouragement de cet effet de synergie. Pour l'industrie
culturelle, il y a là un nouvel éclairage et un nouveau
positionnement qui revêtent une importance majeure et qui deviennent un
véritable défi à la fois pour le milieu, le gouvernement
et la société québécoise.
En effet, si l'on se réfère à des valeurs
essentielles d'une économie à valeur ajoutée, on parle
alors de capitalisation d'entreprise, de qualité des ressources
humaines, de main-d'oeuvre qualifiée utilisant des équipements
modernes, de défi technologique impliquant recherche,
développement et innovation, enfin de design intégré dans
tout le processus de fabrication. La stratégie des groupes industriels
repose sur la prémisse suivante: dans un monde de plus en plus
compétitif, le succès ne sera plus jamais le fruit d'efforts
individuels déployés pour atteindre des objectifs à court
terme, mais il découlera dorénavant de la mise en commun de nos
efforts.
Avec cette stratégie des grappes où s'insèrent les
industries culturelles, avec la politique culturelle que s'apprête
à déposer ma collègue, la ministre des Affaires
culturelles, on peut maintenant affirmer vraiment que le gouvernement
démontre concrètement qu'il donne à la culture toute la
place qu'elle mérite. Il affirme aussi qu'il entend continuer à
la soutenir pour qu'elle poursuive son développement et son
rayonnement.
Le Président (M. Doyon): merci beaucoup, m. le
député de taschereau. m. le député de
sainte-marie-saint-jacques, maintenant, pour les dernières cinq
minutes.
Une voix: Non, c'est la ministre.
Le Président (M. Doyon): Oui, vous aurez 10 minutes
après.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, les artistes et les
organismes culturels étant les grands oubliés, les
régions, malheureusement, s'ajoutent. Le taux de taxation sur les
billets de spectacle a une incidence directe sur l'accessibilité
à la culture; la proximité d'équipements culturels affecte
aussi directement l'accessibilité à la culture.
Des études, dont certaines d'ailleurs produites par le
ministère des Affaires culturelles, confirment l'étroite relation
entre les pratiques culturelles des individus et la proximité de telles
activités. Le rapport Arpin soulignait les problèmes que posent
les carences du réseau québécois d'équipements
culturels eh région en termes,
dis-je, d'accessibilité à la culture, et je cite:
«L'ensemble régional du Québec, sauf exception, n'est pas
encore assez bien équipé pour assurer sa production locale et
recevoir les activités culturelles que les organismes de diffusion
pourraient lui procurer en provenance de Québec, de Montréal, des
régions ou de l'extérieur du Québec. En effet, si l'on
fait exception des bibliothèques et, dans une certaine mesure, des
musées, les équipements culturels sont inégalement
distribués dans l'ensemble des régions.» C'est la page 131
du rapport. «Les carences du réseau d'équipements culturels
en région soulèvent non seulement des problèmes quant
à l'accessibilité aux manifestations culturelles pour les
individus habitant ces régions, forcément, mais elles ont aussi
une incidence négative puisqu'elles limitent les possibilités de
développement des organismes culturels, faute d'équipements
adéquats. Les activités de tournée d'organismes du secteur
du spectacle et des arts de la scène ne rejoignent pas tout leur
marché potentiel. L'absence d'équipements culturels constitue
aussi un obstacle majeur à l'émergence de productions culturelles
locales. Au cours des dernières années, le gouvernement
québécois a réalisé des investissements importants
pour doter ces institutions nationales d'infrastructures adéquates pour
permettre à celles-ci, à l'exception de la Bibliothèque
nationale, d'assumer pleinement leur mandat.
Les travaux du Musée de la civilisation, du Musée du
Québec, de la Place des Arts, du Musée d'art contemporain sont
aujourd'hui parachevés. Il faut que l'État passe à
l'étape suivante, qui est celle de l'aménagement
d'équipements culturels répondant aux besoins exprimés par
les régions du Québec. En ce sens, le gouvernement doit donner
suite à la recommandation du rapport Arpin à l'effet que le
réseau des équipements soit graduellement complété
pour qu'on puisse y organiser des activités culturelles. Le
parachèvement des équipements culturels en région aurait
de multiples avantages: celui de favoriser l'accessibilité aux
activités culturelles dans l'ensemble des régions du
Québec, d'offrir aux organismes du secteur du spectacle et des arts de
la scène de nouveaux débouchés grâce à des
équipements adéquats, de faciliter l'émergence de
productions culturelles locales dans l'ensemble des régions. La
réalisation d'un tel plan de développement des équipements
culturels ne peut avoir de sens que dans la mesure où le
ministère s'assure de la participation des municipalités et des
organismes culturels à l'élaboration et à la
réalisation de ce plan.
Or, je le répète, en supprimant la taxe d'amusement sans
compensation financière adéquate dans le contexte de la
réforme de la fiscalité municipale, il est tout à fait
illusoire d'envisager un partenariat véritable entre le ministère
des Affaires culturelles et les munici- palités au chapitre des
équipements culturels.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député
de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Maintenant, selon l'article 302, 20 minutes
avant la fin de la séance, je vous indique que la ministre dispose de 10
minutes, comme remarques finales, et l'interpellation sera terminée par
le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques qui disposera d'un
dernier 10 minutes, pour sa part. Mme la ministre.
Conclusions Mme Liza Frulla-Hébert
Mme Frulla-Hébert: m. le président, avant de
terminer, j'aimerais tout simplement souligner qu'on ne peut pas nous
blâmer, d'un côté, de nous servir du service de la dette
pour doter le québec d'infrastructures importantes, autant au niveau de
la muséologie qu'au niveau des salles de spectacle et d'essayer de
compléter le réseau du québec et, deuxièmement,
nous blâmer d'avoir trop investi et de diminuer dans d'autres secteurs.
à ce moment-ci, nous accusons une augmentation de 12,4 % au niveau du
budget comparativement à 5,8 % du budget gouvernemental, et je pense que
cette augmentation englobe, finalement, tous ces secteurs, autant le
développement des infrastructures, d'une part, qu'une augmentation de 9
% donnée à nos artistes et aussi à nos
créateurs.
Ceci dit, M. le Président, je suis d'accord avec mon
collègue dans le sens où le phénomène de taxation
est extrêmement important au niveau de l'accessibilité du produit
culturel à nos consommateurs culturels, d'une part, et,
deuxièmement, trouver un moyen aussi pour inciter les
municipalités non seulement à continuer leur aide dans le
développement culturel, mais aussi à investir davantage.
Cela dit, M. le Président, en conclusion, la connaissance de
l'activité culturelle comme facteur important de notre économie
est l'une des actions majeures du gouvernement du Québec visant à
favoriser le développement de nos milieux culturels. La politique
culturelle sur les arts et la culture que je déposerai au début
de l'été constitue, pour sa part, une autre action
déterminante non seulement face à l'avenir de nos
créateurs et de nos créatrices, mais aussi face à
l'accessibilité des produits culturels. En d'autres mots, M. le
Président, cette politique aurait une orientation très claire,
celle d'établir à tous les échelons de la pyramide un
climat favorable à la création, aux créateurs et aux
créatrices, ainsi qu'à la diffusion de leurs oeuvres et des
produits qui leur sont associés.
Pour vous indiquer à quel point, M. le Président, nous
avons rempli notre mandat de consultation avec un éclatant
succès, je rappelle aux gens de cette commission que nous avons
entendu, en commission parlementaire, près de 181
témoignages et reçu 264 mémoires, ce qui fait de cette
commission la deuxième en importance dans l'histoire du Québec.
Tous étaient au rendez-vous, M. le Président, le milieu des arts
et de la culture, des affaires, des municipalités, eh oui, et le milieu
de l'éducation. Vraiment, M. le Président, le gouvernement a
été ainsi l'instigateur d'une véritable mobilisation
générale, et je verrais très mal que tous les membres de
cette Assemblée ne s'associent pas à la réalisation de ce
grand projet de société qui concerne autant les créateurs
et les créatrices que les industries culturelles, et autant la
population que le gouvernement.
La commission a eu le mérite, dans le cadre d'un exercice
démocratique sans précédent, de jeter un éclairage
sur les femmes et les hommes qui créent la culture au quotidien. Leur
désir d'être reconnus à part entière et de jouer un
rôle important dans notre société a été
exprimé avec force et conviction. Nous les avons compris et soyez
assuré, M. le Président, que nous mettrons tout en oeuvre et tous
nos efforts pour que ce désir se transforme en réalité. Je
l'ai déjà mentionné à plusieurs reprises, et je le
répète, car c'est là que se situe le coeur de toutes nos
actions: Ce sont nos créateurs et nos créatrices qui disent,
chantent, Interprètent et illustrent ce que le peuple
québécois a été, ce qu'il est et ce par quoi il se
reconnaît comme peuple distinct. Ces hommes et ces femmes qui ont ainsi
porté et portent toujours notre culture à bout de bras ont
évolué à pas de géant. Pour certains et certaines
d'entre eux, on peut presque parler d'histoire à succès. (11 h
50)
Sur le plan du disque, par exemple, on pense à Michel Rivard,
Johanne Blouin, Roch Voisine, Céline Dion. Nos compagnies et nos
artistes québécois continuent de connaître de grands
succès à l'étranger, lequel succès se
répercute chez nous. On pense à Carole Laure, Richard Desjardins,
Luc Plamondon, l'Orchestre symphonique de Montréal, les Grands Ballets,
Carbone 14, le Cirque du soleil, 0 Vertigo Danse, le Nouvel ensemble moderne.
Jamais, M. le Président, a-t-on reconnu autant de nouvelles productions
au Québec, tant en quantité qu'en qualité et en
diversité, qu'au cours de ces dernières années où
des initiatives particulièrement heureuses ont également vu le
jour. Entre autres, pour ceux et celles qui l'ignorent, je rappelle le
Réseau des organisateurs de spectacles de l'Est-du-Québec, le
ROSEQ, qui a notamment mis en place un réseau d'été
regroupant de petites salles de spectacles qui a connu, l'été
dernier, un succès phénoménal avec ce qu'on a
appelé «Les 100 shows de l'été».
Le taux d'occupation de ces spectacles, M. le Président, a
atteint 87 %, et les tournées ont amplement fait leurs frais. Je
souligne en passant que l'expérience se poursuit actuellement en saison
régulière et que le ministère des Affaires culturelles y
accorde son soutien financier. Le marché du spectacle traverse
actuellement une période difficile, c'est vrai, liée notamment
à la récession, mais tout n'est pas noir, et j'aimerais ici, dans
cette Chambre, qu'on cesse d'agiter des épouvantails et de nous mettre
des bâtons dans les roues alors que nous voulons travailler. Et nous
avons besoin de toutes nos énergies ensemble, collectivement, pour
travailler d'arrache-pied à la rédaction de cette politique
culturelle.
Non, M. le Président, tout n'est pas noir. Le professionnalisme
acquis au cours des 10 dernières années par nos diffuseurs
québécois, leur dynamisme et celui de nos artistes et organismes
de production ont créé une offre sans doute abondante dans le
secteur des arts de la scène et du spectacle, mais ils ont aussi
contribué à façonner le goût du public en
matière d'activités culturelles et à créer une
relève qui, déjà, donne des fruits, et cela n'est pas
rien.
Pour faire face aux problèmes immédiats, le
ministère des Affaires culturelles a récemment mis sur pied un
groupe de travail réunissant des diffuseurs, des producteurs et des
représentants du ministère qui discutent de la situation, tentent
d'identifier les actions les plus susceptibles d'épauler le
marché du spectacle.
Des échanges, je l'ai dit et je le répète,
quelquefois vifs mais toujours respectueux des responsabilités de chacun
ont cours entre nos ministère des Finances, des Affaires municipales et
des Affaires culturelles afin de nous conduire à des actions
concrètes. Il faut nous faire confiance, M. le Président,
l'action gouvernementale en matière de culture est en croissance depuis
six ans.
J'invite donc les membres de cette Assemblée, dont nos amis de
l'Opposition, à se joindre aux efforts que nous déployons pour
aider le secteur des arts de la scène et du spectacle à reprendre
son souffle. Je ne reprendrai pas ici la démonstration éloquente
que mes collègues ont réalisée, mais je rappelle à
l'Opposition que sa critique est aussi prématurée. J'invite
l'Opposition à demeurer attentive au cours des prochains jours quant
à la taxation, des prochaines semaines aussi quant à la politique
culturelle. Je lance le même appel à nos artistes, à nos
artisans, à nos créateurs des milieux de la scène et du
spectacle: les prochaines semaines seront significatives.
Je rappelle, de façon plus globale, que nous avons
été nombreux à discuter et à échanger sur
nos orientations culturelles l'automne dernier. Déjà beaucoup
d'énergies se sont engagées dans la poursuite d'un but que nous
nous sommes fixé, c'est-à-dire ensemble d'élaborer et de
doter le Québec d'une première politique culturelle et d'un plan
d'action qui lui sera jumelé.
M. le Président, je terminerai cette intervention en
réitérant ma conviction dans notre capacité de
réussir culturellement et en invitant
nos amis de l'Opposition à se joindre à cet effort
culturel. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, pour un dernier dix
minutes.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, il nous apparaît pour
le moins paradoxal de vanter les succès des artistes
québécois en France, au moment où la ministre ferme nos
services culturels à Paris. Ceci étant dit, l'ampleur de la crise
majeure qui affecte le secteur du spectacle et des arts de la scène
nécessite une action urgente du ministère des Affaires
culturelles. La chute des auditoires, sous l'effet de la récession et de
la TPS, est dramatique. La détérioration de la situation
financière de la majorité des organismes culturels est
attribuable, en bonne partie, à la non-indexation des budgets d'aide de
ce ministère. La perspective effarante de l'application de la TVQ sur le
billet de spectacle, portant le taux cumulé de taxation à 15,56
%, nous effraie également.
Notre interpellation exprime les inquiétudes légitimes des
artistes et des organismes culturels qui se sont regroupés au sein de la
Coalition québécoise des arts de la scène. Le gouvernement
doit agir dans cette situation de crise comme il l'a fait pour le livre. La
même logique et les mêmes arguments s'appliquent. En
décidant de ne pas appliquer la TVQ sur le billet de spectacle, le
gouvernement contribuera non seulement à favoriser une relance des
activités dans le secteur du spectacle et des arts de la scène,
mais il contribuera aussi à réduire la méfiance des
milieux culturels envers le ministère des Affaires culturelles,
méfiance exprimée à maintes reprises par les
témoignages des milieux culturels lors de la commission parlementaire
sur le rapport Arpin, à l'automne dernier.
Je le répète, le gouvernement peut rétablir en
partie un climat de confiance dans les milieux culturels en renonçant
à appliquer la TVQ. Il lui faudra aller plus loin et donner suite aux
recommandations du rapport Arpin sur le financement des organismes culturels,
en procédant à court terme à la restauration des assises
budgétaires des organismes culturels pour enrayer la
détérioration de leur situation financière due à la
non-Indexation des budgets de soutien aux artistes et aux organismes
culturels.
Or, je ne peux qu'exprimer ma vive déception à l'analyse
des crédits prévus pour 1992-1993 du ministère des
Affaires culturelles, puisque l'augmentation des crédits ne
bénéficie pas aux organismes culturels. Je dirai à la
ministre que la volonté d'agir ne suffit pas, il lui faut les moyens
d'agir selon sa politique culturelle. Sa politique culturelle ne demeurera
qu'une intention, et la morosité des milieux culturels ne fera que
s'accentuer.
Je prends acte que le gouvernement n'a pas renoncé à
appliquer la TVQ sur le billet de spectacle. Les municipalités, sans
compensation financière pleine et entière pour l'abolition de la
taxe d'amusement, seront condamnées à réduire leurs
investissements en matière culturelle dans le contexte de la
réforme Ryan sur la fiscalité municipale. Un taux de 15,56 % est
excessif dans la conjoncture actuelle. Quant au budget du ministère, il
manque toujours 85 700 000 $ pour atteindre l'objectif du 1 %. Au rythme
actuel, je le répète, il faudra encore au minimum 10 ans avant de
l'atteindre. (12 heures)
Détérioration du soutien financier aux artistes et aux
organismes culturels depuis cinq ans. Leur part du budget du ministère a
chuté de 51,4 %, en 1988, à 41,1 % en 1992-1993, une diminution
de plus de 10,3 % en cinq ans. La vérité, c'est que les
musées d'État et la gestion interne s'accaparent l'essentiel de
l'augmentation du budget depuis cinq ans. Les crédits 1992-1993 du
ministère n'ont fait que confirmer cette tendance. Cela augure bien mal
pour la politique culturelle qui, faute de moyens financiers adéquats
pour agir, ne fera qu'accroître la morosité, je le
répète, la méfiance des organismes à l'égard
du gouvernement, comme on a pu le constater - et je me dois encore là de
le répéter - lors des travaux de la commission parlementaire de
l'automne dernier.
Certes, les artistes ont obtenu, en 1987, un statut juridique, et je
m'en réjouis. Ils attendent toujours, depuis cinq ans, un statut fiscal
approprié qui ne vient pas. Ce matin, la Coalition du monde des arts et
de la culture pour le 1 % émettait un communiqué. Je vous en
lirai un extrait. «Malgré tous les efforts de la ministre en
poste, force est de constater que le reste du gouvernement est peu sensible
à la question des arts et de la culture.» Et j'ajouterai:
«...le silence inquiétant et indécent du premier ministre
face aux arts et à la culture...»
Les questions qui s'imposent par elles-mêmes à ce stade-ci
de la non-évolution de ce dossier sont les suivantes, et je continue de
lire le communiqué de la Coalition: «Le Parti libéral du
Québec nous a donc menti en 1985. Le premier ministre du Québec,
la vice-première ministre et l'ensemble du Conseil des ministres nous
ont donc menti le 20 avril 1988. Dans le contexte actuel et avec les
difficultés énormes que vivent les artistes et les organismes
producteurs, il ne saurait être question de se réjouir d'un maigre
montant de 7 000 000 $ attribué au fonds de transfert aux artistes, et
cela quand bien même on nous dirait que nous sommes bien chanceux que les
crédits de notre ministère soient augmentés de 12 %. Ce
pourcentage est de la poudre aux yeux quand on considère les sommes
impliquées. Notre message est clair: Que le chef de l'État -
mais, enfin, je me permets de
les contredire, nous avons un chef de gouvernement au Québec,
nous n'avons pas un chef d'État - et que son ministre des Finances
profitent des semaines qui viennent pour faire un examen de conscience et
s'assurent que les artistes aient enfin leur juste part dès le prochain
budget.» Et quand on regarde les crédits, les sommes d'argent
dévolues à vos grappes n'ont engendré que les raisins de
la colère de la part du milieu de la culture, Mme la ministre. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Très bien. Alors, ceci
termine l'interpellation. Le mandat de cette commission étant accompli,
j'ajourne les travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 4)