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(Quinze heures trente-six minutes)
Le Président (M. Gobé): Veuillez prendre place afin
que la commission puisse commencer ses travaux. M. le député de
Charlevoix, nous vous souhaitons la bienvenue à cette commission. Mme la
ministre, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques,
pourriez-vous regagner vos places respectives?
Alors, je constate qu'il y a maintenant quorum dans notre commission et
je déclare donc la séance ouverte. Je vous rappelle... S'il vous
plaît! À l'ordre! Je vous rappelle le mandat de la commission qui
est de procéder à une consultation générale et
tenir des auditions publiques sur la proposition de politique de la culture et
des arts.
M. le secrétaire, y aurait-il des remplacements aujourd'hui?
Le Secrétaire: M. Godin (Mercier) est remplacé par
M. Jolivet (Laviolette), M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Alors, je vous remercie. M.
le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, avez-vous des
problèmes avec votre siège?
M. Boulerice: Oui, M. le Président. Mon siège de
parlementaire est solide, vous le savez, mais c'est mon siège en
commission qui laisse à désirer. Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gobé): Nous verrons ça dans
quelques années, M. le député. Donc, les remplacements, M.
le député de...
Le Secrétaire: Je les ai annoncés.
Le Président (M. Gobé): Y a-t-il des remplacements
du côté ministériel?
Le Secrétaire: Non, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Alors, je vous donnerai
maintenant lecture de l'ordre du jour pour la séance de cet
après-midi et je vous rappellerai que nous allons, à partir de 15
h 30, donc dès maintenant, recevoir les représentants du Conseil
régional de la culture Mauricie, Bois-Francs, Centre du Québec.
À 16 h 15, par la suite, nous allons rencontrer le Syndicat des
techniciens et techniciennes du cinéma et de la vidéo du
Québec, bien entendu. À 17 heures, nous rencontrerons la
Société des auteurs et compositeurs dramatiques pour, enfin,
à 17 h 45, rencontrer les représentants du Regroupement des
écoles de musique privées du Québec. Nous ajournerons nos
travaux à demain aux alentours de 18 h 30.
Alors, sans plus tarder, j'inviterais les représentants du
Conseil régional de la culture Mauricie, Bois-Francs, Centre du
Québec à venir prendre place en avant. Oui, M. le
député de Laviolette?
M. Jolivet: Vous avez dit "du Québec" tantôt.
Ça pourrait être d'Ottawa depuis ce qu'on a vu aujourd'hui.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gobé): Alors, madame et messieurs,
il me fait plaisir de vous accueillir.
J'apprécierais si vous vouliez bien vous présenter.
M. Babin (Pierre): Je suis M. Pierre Babin, vice-président
du Conseil régional de la culture. Je suis accompagné de Mme
Munroe de Montigny, qui est présidente de la Conférence des arts
visuels, et de M. Normand Ferrier Le Clerc, qui est le directeur
général du Conseil régional de la culture.
Le Président (M. Gobé): Bonjour et bienvenue parmi
nous. Vous pouvez maintenant commencer la présentation de votre
mémoire. Je vous rappelle rapidement que vous avez une période de
temps d'approximativement 15 minutes pour faire votre présentation ou
expliquer votre point. Par la suite, chaque parti de cette commission, soit Mme
la ministre des Affaires culturelles et M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques, porte-parole de l'Opposition en matière
d'Affaires culturelles, aura 15 minutes ou environ 15 minutes pour terminer la
discussion avec vous. Alors, vous avez maintenant la parole. Vous pouvez
commencer.
Conseil régional de la culture Mauricie,
Bois-Francs, Centre du Québec
M. Babin: M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM.
les députés, permettez-moi, en l'absence de notre
président, M. Brochu, qui est retenu chez lui, de vous présenter,
au nom des membres du conseil d'administration du Conseil régional de la
culture, les observations sur le projet de politique culturelle du
gouvernement.
Jusqu'ici, tout, sans doute, a été dit sur cette
proposition, mais non par nous. Alors, permettez-nous de vous exprimer nos
attentes à notre façon. D'abord, je ferai la lecture de la
communication préparée par notre président, M.
Brochu, et, ensuite, Mme Munroe vous fera valoir les
préoccupations particulières des créateurs de notre
région. Enfin, M. Ferrier Le Clerc vous transmettra les attentes de la
Conférence du patrimoine.
Mesdames, messieurs, notre démarche, au Québec, ou notre
recherche de notre façon d'être bien québécoise nous
a permis d'entrer de plain-pied dans la modernité pendant les
années soixante. Puis on a partagé des richesses et on s'est
donné des sécurités pendant les années
soixante-dix. Après 10 ans de restrictions, de solutions privées,
où les idéologies, la pensée ont été
évacuées à l'avantage d'un discours de profits, de
performances et de rendement, notre société a fini par
créer la discontinuité pendant les années quatre-vingt.
L'inconfort de cette discontinuité nous amène, depuis quelques
temps, à recommencer à discuter, à penser. On crée
partout des forums pour débattre de notre avenir collectif. La confusion
actuelle de notre société, tout autant que de ses leaders,
s'estompera uniquement quand nous aurons rétabli le contact avec notre
nature profonde, après avoir reconnu notre nature par notre culture,
dans nos propres milieux de vie, pas dans des tours à bureaux.
La centralisation, l'urbanisation de la pensée et la
normalisation gouvernementale et médiatique de la pensée ont
évacué la création, l'innovation et l'invention. Les
régions, les villes fortes, en région, génèrent un
dynamisme qui se meurt ou avorte sous les normes centralisatrices de
marché ou d'uniformité.
Pour l'essentiel, depuis Georges-Emile Lapalme, on en est toujours au
même point au Québec: la culture c'est important, mais ça
ne préoccupe personne au sommet du gouvernement. Rappelions-nous que le
livre vert pour l'évolution de la politique culturelle de 1976 n'a pas
trouvé preneur au bureau du premier ministre, le même premier
ministre qu'aujourd'hui. Et d'entrée de jeu, nous estimons que le
premier ministre doit se prononcer. La question ici, aujourd'hui, est de savoir
s'il est prêt à s'engager devant cette commission parlementaire.
Sans cette volonté, nous continuerons à changer de ministre,
à changer d'organigramme et de programmes de subventions à chaque
changement de ministre pour toujours être au même point: pondre
d'éloquents rapports, pondre des mémoires.
Quand vous parlez de l'efficacité du gouvernement dans la gestion
de la mission culturelle et de mandater le ministère des Affaires
culturelles pour qu'il soit le maître d'oeuvre de l'activité
culturelle, c'est un peu comme demander si un pommier doit donner des pommes.
Nous avons en somme, un ministère des affaires culturelles, mais avec un
ministre dont on aura le temps de se rappeler le nom.
En termes d'accès à la vie culturelle, la proposition de
politique culturelle aborde le Québec depuis Montréal, sa
métropole, Québec, sa capitale, et l'ensemble des régions
pour le reste de la population. C'est comme avoir des lunettes à trois
foyers, pendant qu'il existe des lunettes à foyer progressif. Il serait
utile que le gouvernement se dote de cette sorte de lunettes pour avoir, du
Québec, une vision claire, peu importe là où il regarde et
même d'où il regarde. Cela éviterait de sombrer dans le
tout économique, dans la fascination du résultat
économique et permettrait de réaliser que tout part, dans une
société, de l'homme; que tout part également des
territoires, parce qu'on est toujours, homme ou femme, homme ou femme de
quelque part, surtout dans un monde où l'on n'est plus de nulle part,
faute de culture.
Nous ne voulons pas d'une politique pour gérer des
épiphénomènes culturels, mais une pensée qui colle
à notre mémoire collective face aux collectivités
nouvelles et au fractionnement des groupes d'intérêt qui peuvent
colorer et enrichir nos comportements collectifs, ouverts et
différenciés.
Si le Québec manifeste de plus en plus d'exigences pour se
reconnaître dans des institutions plus efficaces et plus participatives
vis-à-vis du Canada, parce que l'on se reconnaît de moins en moins
et même pas du tout dans un fédéralisme dilué, il en
est de même pour les régions au Québec, et même,
à l'intérieur de notre propre région, pour au moins quatre
pôles urbains, bien identifiés et bien affirmés. (15 h
45)
Les innovations sont étouffées par le central,
confrontées à une société individualisée,
repliée vers le privé, préoccupée de
carrière, de bonheur privé, de consommation dans un contexte
d'apathie politique et sans inspiration dépassant les sondages. Pour
réussir, l'action du gouvernement doit être appuyée par une
volonté de prendre les moyens, même si l'idée du
partenariat est toujours extrêmement sulfureuse pour les pouvoirs en
place.
Partenariat ne doit pas signifier pelleter sa neige ailleurs. Le monde
municipal n'est pas prêt à jouer une fonction de premier plan dans
le champs culturel, ni à assumer une charge financière
additionnelle. La mission culturelle est celle du gouvernement, même si
mieux que personne, les municipalités peuvent faire le pont et doivent
faire le pont entre les activités culturelles et le citoyen
lui-même.
La culture n'est pas un secteur parmi d'autres de l'activité
sociale mais plutôt un point de convergence de tous les secteurs, un
état d'être, une attitude qui imprime son dynamisme à tous
les aspects de la vie. La culture se vit au quotidien, se lie dans le temps et
s'exprime par l'économie. Si le quotidien est géré par la
politique, le temps, lui, est mesuré par la culture qui manifeste les
caractères et les pulsions des sociétés. Dans ce sens, la
forme et les moyens culturels génèrent l'économie dont la
personne humaine doit être à la fois le sujet et l'objet de
développement.
En un mot comme en mille, une politique culturelle doit être le
décalque de nos valeurs culturelles. Seule la culture pourra faire la
différence entre l'affolement et la sérénité dans
les débats qui s'engagent dans notre société. Les travaux
de votre commission, grâce à des contributions multiples, pourront
loger à l'enseigne de l'imagination, car c'est l'imagination qui nous
permet de vivre et la culture qui nous permet de vivre en
société. C'est aussi la diversité culturelle et des
opinions qui permet à la liberté intellectuelle et spirituelle de
s'épanouir. Notre politique culturelle devra le consigner. Sa
rédaction devra s'inspirer du coeur, laisser sa réglementation
à la raison et, finalement, nous donner un ministère de la
culture. Merci.
Le Président (M. Gobé): Madame.
Mme Munroe de Montigny (Marlene): M. le Président, Mme la
ministre de l'Assemblée, je représente les artistes en arts
visuels pour la région Mauricie-Bois-Francs et je parle aussi pour les
autres artistes créateurs de la région. On tient à
demeurer et à travailler en région, dans notre région
parce qu'on aime la qualité de vie. Aujourd'hui, c'est possible de
demeurer en région, et, avec les communications, d'être au
courant, et de faire un bon travail. On tient à notre qualité de
vie et je pense que de plus en plus les gens vont venir vers les régions
justement pour la qualité de vie. Et qui dit qualité de vie parle
nécessairement de qualité de culture.
Alors, pour nous, il faut être capable de faire la diffusion en
région et dans les grandes villes, que nos muses et nos galeries
accréditées ne fassent pas que recevoir le travail des
Montréalais. Réellement, par exemple, actuellement ils
reçoivent aussi notre travail. On veut que ça continue. On veut
que notre travail puisse circuler et aller aussi dans les grandes villes,
Montréal et Québec. On veut recevoir. On ne veut pas que
l'échange soit à sens unique, Montréal vers la
région 04, mais notre travail de créateur en région
également.
Évidemment, aujourd'hui c'est le village global, nous sommes tous
d'accord, et puis, comme je l'ai bien dit, avec les communications, ce n'est
pas parce qu'on est en région qu'on fait un travail régional. Je
pense qu'on peut faire un travail qui est à la mesure des gens qui
demeurent à New York, ou à Paris, ou à Montréal, ou
n'importe où.
Mais il y a aussi un reflet de notre travail, de la région
où on demeure. Je prend l'exemple de Riopelle. S'il était
resté à son atelier à Saint-Cyr, en dehors de Paris, et
s'il n'avait pas été à Montmagny, peut-être que ses
travaux récents n'auraient pas eu comme sujet l'oie blanche. Alors,
c'est aussi un aspect du travail en région. On ne peut pas tous
être à Montréal, mais il faut nous aider un peu. Bon,
ça c'est le deuxième point.
J'ai un autre point. Je pense que c'est très important que
l'excellence soit la priorité dans les choix d'oeuvres pour
représenter le Québec ou pour être vu à
Montréal. Je ne le répète pas trois fois, mais je trouve
que c'est assez important de parier de l'excellence; pour le dire trois fois;
je vous sauve le temps de le dire. Par contre, dans la vraie vie, il y a des
cliques. On a des cliques à Trois-Rivières, on a des cliques au
Cap. Mais nous, les gens en région, on n'a pas la chance d'être
dans ces milieux où les gens se côtoient, se connaissent et
s'entraident entre amis. Alors, dans ces choix d'excellence toujours, il
faudrait peut-être, puisqu'on n'a pas, disons, les connexions, nous
donner un petit coup de main pour que notre travail soit vu en dehors de notre
région. Merci.
M. Ferrier Le Clerc (Normand): II me reste une minute?
Le Président (M. Gobé): Oui, une minute.
M. Ferrier Le Clerc: Alors, ça ne sera pas long.
Étant donné qu'on a accordé très peu d'importance,
dans la proposition de M. Arpin, au patrimoine, j'aimerais prendre au moins une
minute pour vous dire que les gens qui se préoccupent du patrimoine chez
nous ont été pour le moins étonnés de constater
qu'on faisait très peu de cas du patrimoine dans cette
proposition-là. Pour nous, une politique culturelle ne saurait
évacuer le témoignage qui participe à notre mémoire
collective. Chaque milieu de vie, chaque région, nos capitales
possèdent des éléments symboles des étapes de notre
évolution et de nos valeurs. En faire abstraction au profit d'une
approche événementielle, c'est se couper de notre
héritage, c'est renier le vécu de nos pères.
Nous avons plaidé, dans notre mémoire, pour que vous
accordiez attention et conscience aux documents et aux éléments
symboles de tout le Québec, même s'il doit y avoir plusieurs
versions témoignant d'un mode de vie identique. En fait, c'est de
l'expérience humaine dont il est témoin, cet objet, et les lieux,
c'est la même approche. Ce sont ces témoignages de vie humaine,
d'expérience humaine qui importent. Alors, il peut y avoir plusieurs
objets qui témoignent de plusieurs expériences humaines et qui
méritent notre attention.
Les membres de notre conférence réclament, Mme la
ministre, une politique culturelle qui sauvegarde un si riche héritage
avant que l'ignorance, le culte du modernisme et parfois la honte de nos
origines simples l'aient complètement oblitéré,
occulté et nous réduisent à un marché de la culture
des autres. Le patrimoine est pourtant à un peuple ce que le code
génétique est à l'individu. Il est à la
récolte ce qu'est la terre. Nous insistons pour que votre approche, soit
dans cette politique, soit autrement, soit versée,
préoccupée de ce témoignage de ce qu'a
été la vie de ceux qui nous ont
précédés parce qu'ils éclairent notre vie
d'aujourd'hui. Merci.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci beaucoup. Je
passerai maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): II me fait plaisir
d'accueillir le député de Jacques-Cartier qui vient de se joindre
à nous. Si vous voulez la parole, M. le député, vous nous
le ferez savoir afin qu'on puisse répartir le temps entre les formations
et vous-même. Alors, Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Frulla-Hébert: Ça nous fait plaisir de vous
recevoir. D'ailleurs, nous avons reçu tous les CRC du Québec.
Ça me fait d'autant plus plaisir qu'effectivement votre région
est une région qui non seulement est extrêmement créatrice,
mais bouillonne de nouvelles idées aussi et est riche, très riche
au niveau patrimonial.
Quelques précisions, par exemple. Quand je regardais le
mémoire, enfin écrit par votre président... Vous savez, on
parle de politique culturelle et on dit: Ah! Est-ce que c'est encore en
discussion? En 1976, il y a eu l'effort de M. L'Allier, mais on se rappelle
qu'il y a eu les élections aussi. Alors, il n'y a pas eu de suite. Par
contre, par contre, tous les ministres qui ont eu la chance d'avoir le dossier
des Affaires culturelles ont fait avancer la cause, et ça, quel que soit
le parti ou le gouvernement en place. Mais ça fait 30 ans qu'on
développe et, après tant de temps, il y a une remise en question,
à savoir si notre façon de faire est viable pour les 30
prochaines années. Bon. C'est une question qui est large, mais c'est la
question qu'on se pose. C'est la première fois, d'ailleurs, que tous les
milieux, pas juste les milieux proprement dits culturels mais le
socio-économique, l'éducation, les municipalités,
participent à cette grande discussion.
Ceci dit, vous mentionnez aussi un peu votre réticence, au niveau
des municipalités, à vous embarquer. Vous savez que les
municipalités en soi... Si on veut la collaboration des
municipalités, c'est vraiment en partenariat et non pas en
délestage. On ne veut pas arriver et leur dire: Bien, voilà! Je
le pense sincèrement et c'est un acquis, ça, que le gouvernement
du Québec se doit d'avoir le leadership et d'être le maître
d'oeuvre du développement culturel. Mais ça nous prend des
partenaires, on n'a pas le choix, et on va aller chercher des partenaires au
niveau de l'éducation, au niveau du socio-économique, et il faut
aller chercher aussi des partenaires au niveau des municipalités, tout
simplement parce que c'est l'instance la plus proche des citoyens. La politique
culturelle, on va en faire ce qu'on veut bien en faire, c'est-à-dire
qu'il faut que le citoyen aussi participe.
Alors, c'est beaucoup plus dans ce contexte-là, notre approche
avec les municipalités. Et je dois dire qu'à la prochaine table
Québec-municipalités - ce sont les municipalités
elles-mêmes qui ont insisté pour avoir une table sur le
développement culturel... Alors, tout ça fait qu'il y a un
partenariat qui est très ouvert et il y a une volonté aussi, une
volonté de faire comprendre que la culture - vous l'avez
mentionné vous-même - c'est la base même d'une
qualité de vie et la base même aussi... C'est ce qui fait en sorte
qu'il y a un sentiment d'appartenance dans une région et dans une
ville.
Alors, je tenais seulement à faire cette mise au point. Enfin, M.
le Président, si vous le voulez bien, je vais céder la parole
à mon collègue.
Le Président (M. Doyon): Oui, M. le député
de Nicolet-Yamaska.
M. Richard: M. le Président...
Le Président (M. Doyon): Oui, j'aimerais obtenir tout
d'abord...
Une voix: Le consentement. Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Doyon): ...le consentement de cette
commission pour que le député puisse intervenir à titre
exceptionnel, étant donné qu'il n'est pas membre de la
commission. Est-ce qu'il y a consentement?
M. Boulerice: Que l'agriculture s'occupe de culture, nous nous en
réjouissons.
M. Richard: Magnifique!
Le Président (M. Doyon): Alors, vous pouvez y aller. Nous
allons essayer de moissonner avec vous.
M. Richard: Merci, M. le Président... Des voix: Ha,
ha, ha!
M. Richard: ...merci, chers collègues. Je suis très
heureux, premièrement, de faire partie de la même région
que la vôtre, Mauricie-Bois-Francs-Drummond. Maintenant, je vais passer
directement au questionnement. Dans votre mémoire, vous affirmez, entre
autres, que le gouvernement doit tracer la voie et définir une
stratégie globale à moyen et à long termes pour le
développement culturel. Mais, en même temps, vous dites, dans le
même document, que, par ailleurs, l'État devrait se mêler le
moins possible du secteur des arts et de la culture. Est-ce
qu'on pourrait me préciser, par exemple, la pensée au
niveau de la stratégie qui devrait être mise de l'avant par le
gouvernement et surtout, particulièrement dans quel secteur on devrait
porter ce type de stratégie? C'est dans le même document. On dit -
c'est un peu une antithèse - que le gouvernement devrait s'en
mêler, mais qu'il y a une limite à s'en mêler.
M. Ferrier Le Clerc: Le sens de cette observation vaut pour la
création elle-même, c'est-à-dire que l'artiste
lui-même, que ce soit un écrivain, un artiste peintre, un musicien
ou quoi que ce soit, a besoin de soutien et d'aide, mais non pas d'une forme
d'aide et de soutien qui constitue un carcan dans la démarche de
création ou dans la recherche qu'il manifeste dans ses oeuvres. C'est
dans ce sens-là que les artistes de la région, au moment
où on les a consultés, sollicitaient, oui, de l'aide, mais ils
appréhendaient... Pour certains, l'État peut facilement, soit par
des critères, soit par des normes, ou par des conditions et autres
choses du genre, établir des contraintes qui vont empêcher
l'artiste de libérer ce qu'il recherche ou ce qu'il trouve dans son mode
d'expression. Je répète que c'est peu importe la discipline.
Alors, les artistes n'ont pas fait état de contraintes
identifiées qui auraient constitué, jusqu'à date en tout
cas, des empêchements majeurs. Ils appréhendent cette forme
d'intervention là par rapport à la perception qu'ils ont de
certains comportements au niveau de la façon dont les subventions sont
accordées dans certains cas. Mais il n'y a pas eu de recherche
exhaustive pour identifier des cas très précis.
M. Richard: Vous me permettrez de dire que c'était,
à nos yeux, douteux un peu. On se disait: Comment se fait-il qu'ils
disent: Oui, intervenez, mais soyez limitatifs, soyez plus... Ça
répond à ma question. Maintenant, une autre question exactement
dans le sens où vous avez un court temps pour extrapoler, M. Le Clerc.
Dans le mémoire, vous déplorez, en fonction du rapport Arpin,
entre autres, le fait qu'il soit peu question du patrimoine architectural.
M. Ferrier Le Clerc: Oui.
M. Richard: Bon, dans quels termes, en fait, la future politique
culturelle du Québec pourrait-elle aborder la question, effectivement,
du patrimoine architectural? (16 heures)
M. Ferrier Le Clerc: Le patrimoine, dans son sens large, et
l'architecture en particulier, tout autant que les archives, d'ailleurs,
constituent à peu près ce qui reste d'une civilisation quand elle
est disparue. Si on regarde la mutilation ou la modification significative qui
s'est faite dans notre architecture traditionnelle au cours des 10 ou 20
dernières années, souvent avec des programmes gouvernementaux qui
avaient de très bonnes intentions pour intervenir et assister des gens
qui avaient des besoins impérieux, on a comme défiguré
notre paysage architectural.
Nous avons fait, nous, une représentation auprès des 170
municipalités de notre région pour vérifier leur
intérêt et leur sensibilité au profit de leur
héritage architectural. Vous savez, c'est fascinant. On passe dans un
petit village et on dit: Aïe, il "était-u" beau! Pourquoi? Parce
qu'il y a là une agglomération de maisons qui sont semblables,
qui sont belles, bien entretenues, avec des garnitures. Vous allez me dire:
Ça, c'est vivre au passé, mais c'est l'image qu'on retient. C'est
avec ça qu'on fait un calendrier. C'est avec ça qu'on
véhicule un souvenir. Même les grandes compagnies d'automobiles,
à l'heure actuelle, nous mettent dans des décors de cette
nature-là pour nous convaincre d'acheter une voiture moderne. Donc,
c'est parce que ça rejoint quelque chose de profond chez nous. Les
municipalités s'étaient déclarées
intéressées, sensibles à la chose et on a tenté de
développer une ressource pour les alimenter en matériel
d'information afin qu'elles puissent informer leurs citoyens, qui voulaient
modifier ou transformer leur maison, d'être sensibles à cet
aspect-là. Ça n'a pas eu de suite. Ce n'est pas dramatique en
soi. On n'en fait pas de reproche comme tel parce qu'on a passé pour des
innovateurs, comme le disait Mme la ministre tantôt, et les
fonctionnaires qui ont reçu cette demande-là ont
été tellement impressionnés qu'ils ont dit: Ce n'est pas
recevable. Ce n'est pas grave. On va revenir, si c'est comme ça qu'on
chemine. il reste qu'au niveau des archives, au niveau de l'architecture et de
certains éléments témoins qui ont marqué des
moments forts dans la vie d'une collectivité, on doit être
sensible à ça, et une politique du patrimoine devrait avoir cette
capacité d'identifier ces aspects-là et non pas de dire: Bon, eh
bien, un musée du bûcheron, il va y en avoir rien qu'un au
Québec, il n'y en aura pas deux. Je vous avoue que l'histoire de
l'Outaouais est aussi riche que celle de la Mauricie; celle du Saguenay ou de
l'Abitibi l'est tout autant, 150 ans plus tard, mais ce n'est pas grave. Ce qui
compte, ce sont les expériences de vie, les modes de vie qui se sont
développés là et, pour ces gens-là, c'est important
pour eux.
M. Richard: Merci, M. le Président. J'aurais une
dernière question, si vous le permettez. Quelles sont les
responsabilités additionnelles que vous aimeriez assumer? Dans votre
document, vous affirmez aussi que le gouvernement ne se sert tout simplement
pas suffisamment des conseils de la culture à travers le Québec.
Ça nous fait poser cette question-là. Ça veut dire: Bon,
écoutez, on est là. Servez-vous donc de nous, là.
Ça veut dire en même temps: Vous ne nous donnez pas assez de
responsabilités ou
vous nous donnez des tâches dont on aimerait mieux peut-être
être délestés pour en obtenir d'autres. Qu'est-ce que vous
aimeriez faire, en fait, éventuellement, comme conseil de la culture
dans nos régions?
M. Babin: Quoique, fondamentalement, on soit une organisation de
concertation d'abord des gens du milieu, la difficulté c'est que, bien
sûr, il y a des avantages à la régionalisation, à la
présence en région d'un bureau du ministère, sauf que tout
l'aspect de partage des rôles entre deux intervenants au niveau municipal
crée des difficultés d'intervention et des difficultés
d'appartenance pour le bénéficiaire même. Quand une
municipalité, un groupe culturel ou un artiste lui-même est en
démarche de demande de subvention ou d'élaboration de projet dans
un programme donné avec les fonctionnaires d'un ministère, son
intérêt, c'est de recevoir son bénéfice à
lui. Sa conscience d'appartenance à une région, si, dans ses
rapports avec le bureau du ministère, on ne lui permet pas de se
détacher de l'unique programme auquel il fait appel, de manifester son
intérêt ou son appartenance à une région, ça
ne lui donne pas une attache trop forte au Conseil régional de la
culture, si, par ailleurs, le Conseil régional est appelé
à donner une version, une appréciation des programmes ou des
politiques.
Cette double appartenance, en somme, je dirais, du... Quel est le moteur
du développement dans une région si ce n'est pas partager le
rôle de concertation, d'animation et le rôle de gestion ou
d'administration des affaires culturelles? On a des problèmes, à
ce moment-là, et c'est... En tout cas, chez nous, c'est ce qu'on a
vécu, c'est ce qu'on vit encore.
Le besoin d'animation a été longtemps fait par les
fonctionnaires du ministère, ce qui fait que ce n'est pas clair, le
rôle de l'un et de l'autre. Je pense qu'il va falloir départager
ça fortement pour que les gens qui veulent s'impliquer dans le
développement culturel d'une région puissent le faire dans ces
instances de concertation et d'implication au niveau quasi politique ou
politique. Ceux qui veulent gérer des affaires culturelles vont
travailler au développement de ces affaires culturelles là avec
les fonctionnaires.
Je pense qu'il y a une distinction à faire entre la vie
culturelle et son développement dans une région ou la gestion
qu'on fait de nos affaires culturelles en région. Ce ne sont pas
toujours les mêmes intervenants. Il faut distinguer ça aussi. Je
pense que c'est là qu'est la limite du rôle d'une instance de
concertation qui n'a pas à s'adresser juste aux
bénéficiaires du ministère des Affaires culturelles, mais
qui doit tenir compte de l'ensemble des besoins de la population qu'elle
dessert. Notre clientèle à nous ce n'est pas les
bénéficiaires du ministère, ce n'est pas les artistes, ce
n'est pas ceux qui reçoivent des subventions, c'est la population de la
région et c'est à eux... Et c'est cette
difficulté-là qui est mal définie dans la convention qui
nous lie avec le ministère et les relations que nous établissons
avec fe bureau régional.
Le Président (M. Doyon): M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Oui. Mme Munroe de Monti-gny, bienvenue à
cette commission. M. Babin et M. Le Clerc, heureux de vous revoir. Vous nous
avez présenté un mémoire de haute tenue. J'en suis
très heureux et c'est sans aucun doute l'avis que partage mon
collègue et ami le député de Laviolette. Je vais vous
poser une question et, après, vous comprendrez qu'il souhaite amorcer le
dialogue avec vous, rien n'est plus naturel, vous êtes de la même
région.
En page 7, vous dites: "Partenariat ne doit pas signifier pelleter sa
neige ailleurs." Je pense que vous lancez là un message de sympathie aux
municipalités qui ont vécu un pelletage dont elles ne sont pas
près de se remettre. Vous dites: "Le monde municipal n'est pas
prêt à jouer une fonction de premier plan dans le champ culturel,
ni à assumer une charge financière additionnelle." Je comprends
que c'est un constat, mais non pas un blocage dans le sens que vous souhaitez,
effectivement, que les municipalités - dans la mesure où on leur
donnera les moyens également, parce que le mot "pelletage" que vous avez
mis à l'avant est forcément un indicatif - finissent un jour, au
Québec, par jouer un rôle aussi actif dans le domaine de la
culture qu'on peut le voir dans la tradition européenne.
M. Babin: Excusez-moi, j'ai mal saisi la dernière
intervention, la dernière partie de votre intervention.
M. Boulerice: Je vous disais que... Bon. Vous avez parlé
du pelletage. Forcément, il y a eu un pelletage qui s'est fait dans un
autre domaine. Et vous avez dit: "Le monde municipal n'est pas prêt
à jouer une fonction de premier pian dans le champ culturel, ni à
assumer une charge financière additionnelle."
La question que je vous posais est que vous faites urt constat de la
situation, vous la déplorez, mais vous souhaitez - enfin, est-ce que je
lis bien entre les lignes? - que l'on en vienne un jour à ce que les
municipalités jouent un rôle de premier plan dans le domaine de la
culture, un peu dans la tradition européenne où les
municipalités sont très impliquées.
M. Babin: Exactement, parce que, évidemment, l'instance
politique la plus près du citoyen étant la municipalité,
ça revient à ce que je disais tantôt par rapport à
la place du citoyen dans la définition de son devenir culturel et
comment, nous, on veut que ces choses-là
s'harmonisent. Mais, si on parle de moyens des municipalités pour
y parvenir, je pense qu'on n'a pas le choix d'être vigilants aussi.
Prenons juste un exemple qui me préoccupe plus
particulièrement au niveau de la diffusion. Il y aura, en janvier
prochain, une nouvelle taxe et celle-ci, pour le domaine du spectacle, s'ajoute
à une taxe qu'on connaît déjà qui s'appelle la taxe
d'amusement. C'est qu'on a déjà voulu donner aux
municipalités des pouvoirs d'intervention avec des moyens d'intervention
en disant: II y a un champ de taxation qui vous appartient. Mais, à
partir de bientôt, ça coûtera au-dessus de 25 % de taxes
pour assister à un spectacle. Si on veut que la municipalité
puisse pouvoir intervenir dans l'évolution de la vie culturelle et jouer
son rôle de mettre en place des événements culturels pour
ses citoyens ou supporter des groupes de citoyens, je pense que c'est important
aussi de voir comment on développe ces moyens-là.
M. Boulerice: D'accord.
Le Président (M. Ooyon): M. le député.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'ai cru comprendre,
à la lecture de votre document, que vous faites mention qu'il y a
Québec, Montréal, et l'ensemble de toutes les régions,
mais que vous ne voulez pas être amalgamé au fait que vous
êtes une troisième partie d'un tout. Vous êtes, dans
l'ensemble, une partie importante. Vous semblez dire que les régions
sont peut-être un peu délaissées à ce
niveau-là.
Je vous pose la question au niveau du partenariat. Je continue dans
l'hypothèse de mon collègue. Il vous avait fait mention d'une
taxe, il fart toujours mention de 27,5 % d'augmentation à partir de l'an
prochain. Dans cette hypothèse, vous dites: On est une région, on
veut participer à l'éclosion, à l'ensemble du
Québec, de toute la culture, pas simplement être le bouche-trou
pour d'autres ou le rendez-vous de gens qui font une tournée à
travers le Québec, dans les salles de spectacles ou ailleurs, ou des
expositions.
Vous dites "partenariat". Si on se base sur les grosses discussions qui
se font actuellement à travers le Québec, sur une
décentralisation, sur une régionalisation, les gens disent: Une
décentralisation c'est bien beau, mais, si la décision appartient
à une centralisation au niveau régional, on n'est pas plus
intéressés non plus, si on parle de régionalisation, mais,
finalement, que c'est à Québec que la décision se prend et
puis qu'on a juste à l'appliquer. On veut un vrai partenariat. Ça
implique quoi, pour vous autres, un vrai partenariat? Est-ce que ça
implique que vous dites: On serait même prêt à avoir une
enveloppe qui pourrait être redistribuée régiona-lement et
qu'on aurait, selon certains critères, à aménager,
à discuter, faisant en sorte que cette enveloppe-là serait
administrée régionalement?
M. Babin: Je crois que, par rapport à l'intervention du
ministère des Affaires culturelles ou des affaires gérées
par ce ministère, il est important de voir la spécificité
de chacune des régions là-dessus. Je pense que des normes
nationales d'accès à un programme de subventions, ou d'aide aux
artistes, ou d'aide à la création, ou d'aide à la
production n'ont pas la même signification dans une région
qu'à Montréal, dans la métropole, ou à
Québec aussi. C'est une première distinction. Et ça, que
chacune des régions puisse, selon des instances définies,
utiliser, au meilleur de son besoin, l'argent disponible, je pense que
ça, c'est une partie importante de la garantie de l'évolution du
développement culturel dans nos régions.
Cependant, on ne veut pas dire que les régions, c'est une
troisième section dans le Québec. Je pense qu'il faut voir
ça plus spécifique pour chacune des régions. Je pense
qu'au Québec il y a des régions qui sont disctinctes les unes des
autres, mais ce n'est pas tout ça ensemble que l'on doit opposer
à Montréal ou a Québec comme pôle. Je pense que
chacune de ces régions-là a ses particularités et ses
besoins. C'est bien sûr que la Côte-Nord n'a pas les moyens, et
n'aura jamais les moyens, de faire vivre une troupe de théâtre
professionnelle, sauf que les gens qui habitent la Côte-Nord, comme la
Mauricie, ont besoin d'avoir accès à des productions de
théâtre. Si, dans leur évolution puis dans leur
façon de faire, ça s'appelle du théâtre dit, entre
guillemets, amateur, bien c'est quand même un accès à leur
culture et à la culture.
Mais ça, il faudrait aussi faire attention à ça, si
on veut qu'on ait une évolution et un développement. Quand les
gens auront apprivoisé le théâtre, ils pourront recevoir
une troupe professionnelle et puis ils pourront revoir des classiques ou des
pièces plus avant-gardistes dans leur région. Mais, en attendant,
ils ont besoin d'en vivre. Ils ont besoin du théâtre pour vivre
aussi, ils ont besoin de l'apprivoiser. C'est ça qu'il faut distinguer:
ce qui se passe dans les régions et ce qui se passe à
Montréal.
À Montréal, la municipalité intervient beaucoup
dans chaque quartier, donc il y a déjà une part importante de la
vie culturelle qui se développe là. Sauf que ce qui rejaillit sur
le Québec, c'est les choses qui sont dites nationales. C'est les
institutions nationales. On ne le voit pas, ce qui se passe dans les quartiers
à Montréal ou à Québec.
M. Jolivet: Pour aider les régions... Là, vous
m'ouvrez une porte, parce que j'ai fait partie, et d'autres aussi, à
l'époque, d'une troupe de théâtre à
Grand-Mère, qui s'appelait les Copains de Grand-Mère, qui a
donné une pépinière de gens qui sont allés ensuite
à Montréal ou ailleurs. Vous avez Louise Matteau, Normand
Gélinas de Shawinigan - je vais faire de la publicité - mon
frère, qui est à Radio-Canada,
Gérard. Ce sont des gens qui ont passé par un creuset qui
était le théâtre amateur chez nous, ce qui a donné
naissance à des gens à La Tuque qui sont des personnes qui
actuellement sont à Radio-Canada parce qu'ils ont appris le
théâtre d'abord à leur école, puis ils ont
continué. Ils ont eu de l'aide un peu, mais pas suffisamment. On a des
gens qui vont même à l'extérieur au niveau européen
actuellement, qui sont des gens dans la peinture, qui sont reconnus
là-bas et qui ne sont pas reconnus ici. Et ça, ça fait
toujours... Les municipalités ont de la difficulté à
reconnaître ça.
Donc, ce que vous êtes en train de dire, c'est que, si on avait la
possibilité de développer, dans notre région, notre
spécificité régionale, on aurait la chance d'être
une pépinière pour d'autres lieux, pas nécessairement
seulement au Québec, mais sur la scène internationale. C'est ce
que je crois comprendre.
M. Babin: Oui. C'est dans le sens aussi où notre
spécificité régionale... C'est qu'on a à peu
près tous besoin de la même chose, mais d'une façon
différente, qu'on soit n'importe où au Québec.
Pour reprendre votre exemple de formation de théâtre,
à ce moment-là il y avait des institutions qui s'appelaient les
collèges classiques ou autres, qui encadraient, qui animaient et qui
favorisaient ces troupes de théâtre là ou ces
organisations-là, et ça fonctionnait, ce qui a donné une
possibilité que Montréal ou Québec récupère
nos artistes. Et ça, pour chaque région, il y a des exemples
multiples.
M. Jolivet: Le partenariat que vous proposez, c'est d'être
ceux qui vont animer ce milieu-là pour permettre justement
l'éclosion de ces personnes. (16 h 15)
M. Ferrier Le Clerc: Oui. D'ailleurs, on a vécu dans la
région, en l'espace de six ou sept ans à peu près,
là, une aventure assez extraordinaire. Vous avez fait état
tantôt d'une petite enveloppe. Il y avait un aspect dans le budget du
bureau régional qui s'appelait l'enveloppe de développement
régional. Contrairement, on est la seule région dans le tout le
Québec qui n'a pas affecté cette petite enveloppe là - on
dit petite parce que ça jouait entre 30 000 $, 50 000 $, 60 000 $, 90
000 $ parfois, mais c'était quand même substantiel -
systématiquement en amélioration d'enveloppes normées - je
prends un jargon, là. On ne l'a pas fait, parce qu'on s'est dit...
L'expérience qu'on a faite avec le directeur du bureau régional
à l'époque, M. Bonneau, en particulier - grand bien lui fasse,
même s'il était l'abolisseur professionnel des conseils de la
culture au Québec à leur naissance, lorsqu'il est arrivé
chez nous - on l'a gagnée.
On s'est servi de cette enveloppe-là pour expérimenter des
choses. Alors, les résultats, au bout de cinq ou six ans, c'est le
moulin d'Ulver-ton. On a pris une portion de cet argent-là - on faisait
la concertation, M. Bonneau faisait les négociations et il avait bonne
gueule parce qu'il arrachait l'argent - et on a développé un
musée qui s'appelle le moulin d'Ulverton aujourd'hui. Avec ça, on
a fait l'expérience. On a expérimenté aussi, avec cette
enveloppe-là, la capacité des Mackinaw à devenir quelque
chose, une institution. On a expérimenté avec cette
enveloppe-là la capacité de Drummondville d'avoir un festival
mondial de folklore.
On a expérimenté comme ça une bonne douzaine
d'institutions reconnues, réputées à travers le monde,
dans certains cas dans notre région, qui, avec ça, ont fait la
démonstration de leur capacité d'être, de se manifester et
de rayonner. Au bout de deux ou trois ans, on avait un argument de poids pour
corriger l'enveloppe normée au ministère à Québec,
et l'amélioration des enveloppes disciplinaires s'est toute faite comme
ça en l'espace de sept ou huit ans. La seule place où on a
dérapé, où on n'a pas été capable, c'est le
patrimoine. Là, on a bloqué bien dur. Mais toutes les autres
enveloppes ont été doublées ou triplées avec ce
principe-là.
Alors, vous voyez, si les régions disposaient en intelligence,
dans une action de développement par rapport à une action de
gestion, d'administration, et en concertation l'une avec l'autre, en
complément l'une de l'autre, non pas en compétition... Un conseil
de la culture, ça peut faire faire une déprime à un
fonctionnaire, mais un fonctionnaire ça peut aussi désarticuler
un conseil de la culture. Et personne ne gagne là-dedans. Celui qui perd
le plus ce n'est pas le fonctionnaire ni le conseil, mais le milieu.
Vous pourrez, avec vos fonctionnaires, faire la lecture, faire une
recherche - il y a des gens qui aiment ça faire des recherches au
ministère - sur l'utilisation qu'on a faite de cette
enveloppe-là. On s'est fait faire des reproches par d'autres conseils de
la culture parce qu'on avait fait ça, mais, nous, on y a tenu
jusqu'à la dernière limite, jusqu'à il y a deux ans. C'est
comme ça qu'ont été initiées des tas de choses dans
la région. Alors, ce principe-là, en intelligence, entre deux
instances qui cohabitent et qui cherchent le même objectif,
l'intensité de la vie culturelle dans le territoire, donnerait
certainement plus de résultats que toutes sortes de grandes affaires,
pour employer une expression que j'ai entendue hier, qui finalement partent de
la raison et oublient le cordon du coeur qui donne un sens à la
raison.
Le Président (M. Doyon): M. le député soit
de Laviolette ou de Sainte-Marie-Saint-Jacques, voulez-vous remercier nos
invités?
M. Jolivet: Oui, je vous remercie. J'ai fait sortir ce que je
voulais de la part de Normand, en disant que l'expression que j'ai toujours
utilisée dans le temps, quand j'étais dans le syndicat,
c'était: On ne peut pas mettre à tous les hommes du Québec
- excusez-moi les femmes, là, mais prenons cet exemple-là - une
chemise de 15 de collet et 32 de manches. Notre collègue, le
député de Maskinongé et ministre, avec la formule dans le
développement régional, lui, ce qu'il emploie, ce qu'il dit
c'est: On doit adapter le chapeau à la tête et non pas la
tête au chapeau. Alors, dans ce contexte-là, les régions
pourront se développer et permettre à l'ensemble du corps
national de se développer. Merci beaucoup.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: Moi aussi, c'est à moi de vous
remercier. En fait, un petit détail qui a son importance, il n'y a pas
de taxe qui va s'appliquer au mois de janvier...
M. Babin: Ou plus tard, en son temps.
Mme Frulla-Hébert: ...ce qui nous donne, par contre,
encore aussi la latitude de regarder le dossier dans son ensemble, d'une part.
Deuxièmement, quand vous parlez d'instances qui cohabitent,
effectivement, il y a quelques années, le ministère
n'était pas décentralisé comme il l'est. On est le
ministère le plus décentralisé au gouvernement et, depuis
le mois d'avril, le ministère, au niveau de ses directions
régionales, a décentralisé aussi son budget. Donc, il y a
aussi maintenant - c'est comme un couple - un ajustement à faire autant
au niveau des conseils régionaux, missions, etc. et au niveau aussi des
directions régionales du ministère - on ne se le cache pas - pour
qu'ensemble on travaille conjointement et, vous l'avez si bien dit, pas l'un
contre l'autre, mais que l'un complète l'autre aussi. Alors, c'est dans
cette voie probable qu'on va regarder les choses et aussi, justement,
l'ensemble de la politique gouvernementale sur le développement des
régions. Merci beaucoup de votre présence.
Le Président (M. Doyon): Alors, ces remerciements
étant faits, je ne les répéterai pas. Simplement, nous
avons pris bonne note de vos propos. Alors, en vous permettant de vous retirer,
j'invite maintenant les représentants du Syndicat des techniciens et
techniciennes du cinéma et de la vidéo du Québec à
bien vouloir prendre place en avant. Il me fait plaisir, donc... Je les
accueille ici au nom de la commission. Je les invite à nous faire la
présentation qu'ils ont à nous faire. Ils disposent de 10
à 15 minutes pour ça. Ils peuvent le faire brièvement en
rappelant les grandes lignes de leur mémoire ou en faisant un
résumé, comme ils voudront. Après ça, les membres
de la commission vont engager la conversation et s'entretenir avec eux. Si vous
voulez bien tout d'abord vous présenter pour les fins d'enregistrement
de nos débats.
Syndicat des techniciens et techniciennes du
cinéma et de la vidéo du Québec
M. Houx (Patrice): Tout à fait. Je suis Patrice Houx,
président du Syndicat des techniciens et techniciennes du cinéma
et de la vidéo du Québec. À ma droite, Mme Babalou
Hamelin, qui est membre depuis plusieurs années du conseil de direction.
Je vous salue, M. le Président...
Le Président (M. Doyon): Bonjour à vous deux.
M. Houx: ...Mme la ministre, Mmes, MM. les membres et
participants de la commission. La façon dont je vais procéder,
étant donné que notre mémoire n'est pas très long,
c'est non pas le lire mot à mot, mais le commenter tout en lisant
certaines parties.
Mme la ministre, Mmes, MM. les membres de la commission, je voudrais
d'abord préciser notre position en expliquant pourquoi le STCVQ s'est
joint à la coalition ayant rejeté globalement le rapport Arpin en
conférence de presse. Je vais d'abord préciser que, quand nous
employons le terme "globalement", ce n'est pas que nous l'avons rejeté
dans le détail, c'est que nous avons reçu le rapport Arpin comme
un bloc. Nous n'avons eu le temps que de le juger comme un bloc. C'est de cette
façon-là qu'on a réagi, ce qui ne veut pas dire que, dans
le rapport Arpin, il n'y a pas des points que nous jugeons excellents. C'est
simplement que nous avons eu une réaction sur l'ensemble du rapport et
non pas au point par point.
Nous sommes l'association reconnue officiellement par le gouvernement du
Québec, par la Commission de reconnaissance des associations d'artistes
comme représentant tous les techniciens, artistes pour ce qui est des
tournages réalisés sur support film. Nous existons depuis
maintenant 22 ans et nous avons contribué, tout au long de ces
années, à l'avancement du cinéma et de la
télévision et à parfaire la stabilité de cette
industrie.
La raison d'être du STCVQ a pout objet l'étude, la
défense et le développement des intérêts
professionnels, économiques, sociaux et moraux des techniciens pigistes
membres oeuvrant dans le domaine de la production de documents ou d'oeuvres
audiovisuelles par procédés cinématographique,
magnétoscopique, photographique ou autres. Quand je vous cite cette
partie-là, c'est ce qui est partie interne de nos statuts et
règlements, c'est ce qui est notre raison d'être, notre raison
d'existence.
C'est, entre autres, parce que nous croyions que cette proposition de
politique de la culture et des arts, telle qu'elle est rédigée,
allait à l'encontre de nos objectifs qu'elle était pour
nous inacceptable, mais aussi parce que les propositions du rapport nous
semblaient extrêmement dangereuses pour toute l'industrie du
cinéma et de la télévision et pour (a culture en
général au Québec. Quand on dit "extrêmement
dangereuses", il faut quand même restreindre un peu. On ne pense pas que
ça peut faire sauter tout le système culturel au Québec,
mais on croit quand même qu'il germe des choses qu'on juge très
dangereuses pour l'industrie, telle qu'elle essaie de se stabiliser dans le
moment.
Ce n'est cependant pas pour rejeter le rapport Arpin du revers de la
main que nous l'avons dénoncé. C'est à cause de sa
présentation du rapatriement des pouvoirs comme solution de tous les
problèmes de la culture, sans être très clair sur les
modalités de ce rapatriement, en instituant, du même coup, des
superstructures bureaucratiques n'ayant aucune commune mesure avec la
réalité des besoins actuels du marché culturel et des
travailleurs culturels de toutes sortes.
Si on nous avait demandé il y a quelques mois notre avis sur la
nécessité d'un rapatriement aux Québécois des
pouvoirs sur leur culture, nous aurions sûrement été
d'accord et aurions collaboré à établir un projet de
politique réaliste dans le contexte actuel. Mais justement, la
proposition actuelle ne tient pas du tout compte de la réalité.
C'est-à-dire que nous ne sommes pas fondamentalement contre le fait que
les Québécois aient pleine main sur leur culture, bien au
contraire, mais la recette proposée par le rapport Arpin ne nous
plaît pas du tout. La précipitation du processus nous a aussi
profondément indisposés.
J'en profiterais pour excuser personnellement certaines fautes
d'orthographe ou de syntaxe qui se sont retrouvées dans mon rapport. Il
a été imprimé et envoyé par messager pour arriver
à peu près à cinq minutes d'avis, dans les limites que la
commission nous avait données. Ça a été
corrigé depuis le temps mais, évidemment, la copie que vous avez
en main...
À peine avions-nous reçu nos deux copies du rapport Arpin
qu'il aurait fallu arrêter toutes nos activités
journalières essentielles pour une lecture et une analyse
précipitée du rapport afin d'y répondre en commission
parlementaire. Je vous rappelle que le rapport Arpin, nous en avons reçu
deux copies. À cause de tout ce qui est loi des droits d'auteur, et tout
ça, que nous respectons énormément, nous ne pouvions pas
le photocopier et nous n'avions qu'une semaine et demie à deux semaines
environ pour l'analyser, ce qui était à peu près
impossible dans un processus démocratique.
Nous ne croyons pas que toutes les recommandations qui s'y trouvent,
bien au contraire, soient mauvaises, mais nous avons reçu le rapport
comme un bloc et nous l'avons considéré dans son ensemble. Je me
permets respectueusement de rappeler que nous ne pouvons profiter d'une
armée de personnel de bureau pour décortiquer un tel rapport et y
répondre efficacement. Nous devons fonctionner avec les ressources
très serrées, en argent et en personnel, dont nous disposons pour
répondre à toutes les exigences du fonctionnement quotidien de
notre organisme.-Cet aspect est d'ailleurs clairement expliqué dans le
rapport Arpin.
Le milieu du cinéma et de la télévision a fait, ces
dernières années, ses devoirs, tel que le souhaitait
l'État et l'exigeait la santé de l'industrie. Nous avons
amélioré les structures de notre industrie culturelle. Le
partenariat dans les relations que nous avons entre nous fonctionne bien,
même dans certains cas où nos intérêts divergent. La
réaction très claire que nous avons eue ensemble au rapport Arpin
lors d'une rencontre de concertation demandée par l'Institut
québécois du cinéma le démontre très
bien.
J'en profite pour rappeler que nous n'avons toujours pas de
représentant à l'Institut québécois du
cinéma depuis maintenant trois ans et n'avons donc pas eu notre mot
à dire dans la préparation du rapport, pas directement du moins.
La ministre nous avait pourtant promis que cette lacune serait corrigée
très rapidement lors de notre dernière visite ici même.
Cela n'a pas été fait et nous avons su par hasard, cette semaine
- je parle au moment de la rédaction du rapport - que c'était
parce que tous les représentants de l'IQC allaient être
nommés au mois d'octobre. Nous sommes maintenant à la mi-novembre
et je n'en ai toujours pas de nouvelles. Nous aurions mérité la
considération d'être avertis directement par la ministre.
Mais revenons au rapport. Que l'ensemble des associations du
cinéma et de la télévision décide de rejeter en
bloc le rapport Arpin doit être reçu comme un message très
clair: cette proposition est passée à côté de la
question, du moins en grande partie. Avant d'envisager le rapatriement des
pouvoirs liés à la culture et aux communications, il faut d'abord
faire le ménage de la maison destinée à les recevoir et il
ne faut pas que ces pouvoirs servent à alourdir sa structure au point de
ne la rendre accessible qu'à ceux qui en ont la charge.
J'ajouterai, pour notre part, que . certaines erreurs
prélevées dans le rapport Arpin nous ont fait douter de la
précision des renseignements qui s'y trouvent. Le rapport affirme, entre
autres, que le STCVQ représente 202 membres. En fait, le STCVQ
représente plus de 780 membres et plus de 1800 permissionnaires oeuvrant
principalement dans le milieu du cinéma au Québec, sans compter
les apprentis qui bénéficient de nouvelles politiques mises en
place cette année.
Je terminerai sur le rapport Arpin en le citant et en appuyant tout
à fait ie principe d'un fonctionnement de l'État
québécois selon trois axes équilatéraux: culture,
social et économie, et les trois grands principes de base qui vous
ont
souvent été répétés et qui se
retrouvent dans le rapport Arpln: La culture est un bien essentiel et la
dimension culturelle est nécessaire à la vie en
société, au même titre que les dimensions sociale et
économique; le droit à la vie culturelle fait partie des droits
de la personne et c'est pourquoi l'activité culturelle doit être
accessible à l'ensemble des citoyens; l'État a le devoir de
soutenir et de promouvoir la dimension culturelle de la société
en utilisant des moyens comparables à ceux qu'il prend pour soutenir et
promouvoir les dimensions sociale et économique de cette même
société.
L'avenir à court terme. Je reviendrai d'abord sur les 18 derniers
mois. Durant cette période, les membres du STCVQ, c'est-à-dire
tous les techniciens et professionnels pigistes du film au Québec, ont
profondément travaillé à accomplir leur métier en
favorisant la production cinématographique au Québec. C'est dans
cet esprit qu'ils se sont entendus avec les producteurs pour signer une
nouvelle entente collective adaptée à la réalité
actuelle et future en introduisant, entre autres une politique claire pour
adapter l'entente collective aux films dits artisanaux ou à petit
budget, des mécanismes pour favoriser la relève, entre autres,
des mécanismes pour les apprentis puisqu'en cinéma, actuellement,
tous les métiers s'apprennent sur le tas et qu'à ce
moment-là la méthode du compagnonnage nous semble être la
plus efficace, à condition d'avoir un compagnonnage bien organisé
et efficace.
Aussi, dans la nouvelle convention collective toujours, des
assouplissements pour l'engagement de temporaires et pour les relations entre
la production et les délégués ou les représentants
syndicaux, des méthodes beaucoup plus commodes pour établir les
horaires à toutes les étapes de la production, un système
pour harmoniser l'entente aux conditions changeantes pour intervenir au cours
des trois ans de son application, tout cela en acceptant une augmentation
moyenne, à la fin de l'entente collective en 1994, par rapport au
salaire minimum de 1988, de moins de 2 % sur 6 ans.
Toute la mentalité de nos relations avec l'employeur, les
producteurs, est d'être continuellement à l'écoute des
particularités de chaque tournage. C'est ce que les divers gouvernements
n'arrivent, de leur côté, toujours pas à faire. Si nous
avons pu, producteurs et techniciens, prendre un virage aussi fondamental dans
nos relations, pourquoi le gouvernement n'y arrive-t-il pas? Peut-être
devrait-il, entre autres, s'inspirer de la façon dont nous avons
qualifié nos dernières négociations: nous avons
parlé, nous avons écouté, nous nous sommes entendus.
Malheureusement, le gouvernement parle beaucoup mais ne semble pas
écouter ni entendre. (16 h 30)
Je ne signalerai ici que certaines des nécessités et des
corrections apportées à ce qui existe actuellement, sans
élaborer puisque, dans la plupart des cas, cela a déjà
été fait par divers organismes, dont le nôtre, par les
années passées. Nous sommes d'ailleurs prêts à
apporter les précisions demandées en commission
parlementaire.
Bien sûr, nous favorisons la création d'une politique
d'intégration du cinéma et de la télévision. Nous
sommes d'ailleurs prêts à collaborer à l'élaboration
d'une telle politique, ce que nous n'avons pas eu la chance de faire pour le
rapport Arpin puisque personne ne nous a demandé notre avis. Cette
politique devient de plus en plus nécessaire puisque les deux
médias sont maintenant définitivement interreliés.
La SOGIC doit en venir à un véritable fonctionnement
démocratique. Actuellement, nous avons l'impression d'être en face
d'un organisme des hautes sphères du pouvoir, ne rendant de compte
à personne et dont les décisions se prennent sans que personne ne
puisse comprendre ce qui les a motivées. L'Institut
québécois du cinéma, qui devrait d'ailleurs devenir
l'institut québécois du cinéma et de la
télévision, doit conserver non seulement son pouvoir de conseil,
mais on doit aussi lui rendre les pouvoirs qui lui permettraient de fixer
à la SOGIC un plan de travail et d'en vérifier l'application. Si
nous nous fions à ce qui s'est passé ces dernières
années à la SOGIC et aux nombreuses plaintes du milieu à
son propos, il est maintenant urgent d'agir en ce sens. Et qui serait plus
à même que les représentants du milieu, via l'Institut
québécois du cinéma, pour exercer ce contrôle sur la
SOGIC? Ce même milieu, qui soutient l'industrie du cinéma et, en
partie, de la télévision par ses activités, ce milieu que
l'Institut québécois du cinéma rencontrerait
périodiquement pour préciser ses besoins face à un
organisme comme la SOGIC dont le but premier est de l'aider.
La loi sur le statut de l'artiste doit aussi être amendée
urgemment. Actuellement, nous devrions déjà sentir les effets
bénéfiques de cette loi sur le statut fiscal des artistes. Mais,
dans notre cas, elle a créé un déséquilibre fiscal
chez les techniciens qui oeuvrent côte à côte lors des
tournages et avec les mêmes impératifs, les mêmes types de
rémunération, les mêmes obligations professionnelles, etc.,
mais avec un statut fiscal différent.
Nous voulons que, si le gouvernement s'entête à vouloir
décider arbitrairement qui, parmi les techniciens, est un artiste et qui
ne l'est pas, nous ayons tous des conditions équivalentes, puisque nous
faisons tous le même métier de pigiste, technicien du
cinéma et de la vidéo, avec les mêmes obligations, les
mêmes instabilités du métier de pigiste, les mêmes
exigences, mais pas les mêmes droits.
Puisque la loi sur la reconnaissance des associations d'artistes nous a
donné une reconnaissance légale pour tous les techniciens
artistes oeuvrant sur les productions réalisées sur support
film et que l'intention de la loi est de nous donner le pouvoir
d'obliger tout producteur à négocier avec nous les conditions de
travail de ces artistes, nous demandons au gouvernement de cesser le
financement des films qui sont tournés en dehors des structures
professionnelles établies par ses négociations, par le milieu.
Nous demandons par là au gouvernement de respecter ses propres
engagements et demandes de stabilisation et de ne plus encourager le tournage
de films dits au noir.
Puisque les intentions du gouvernement étaient de protéger
les artistes dans l'accomplissement de leur art, nous ne comprenons pas qu'il
accepte de financer des projets qui ne respectent pas les conditions minimales
de travail telles qu'elles ont été établies par le milieu
ou par les lois. Le gouvernement agit comme si, après avoir
établi un décret dans la construction, il faisait appel à
des travailleurs au noir pour construire ses propres édifices. Ce sont
donc toujours les mêmes qui finissent par payer la note, les techniciens
et leur association qui essaie de leur assurer une certaine
sécurité de travail. N'est-ce pas là encore une fois les
intentions de la loi?
Le ministère des Affaires culturelles doit aussi agir de
façon à ce que se concertent les divers organismes provinciaux et
fédéraux qui investissent dans la production de films et voir
à ce que cesse tout financement de projets qui ne rencontrent pas les
exigences professionnelles du marché.
Nous ne voulons pas par là nuire aux productions dites
artisanales ou à petit budget. Au contraire, nous nous montrons toujours
très coopératifs et collaborons à ces projets. Dans la
majorité des cas, d'ailleurs, les techniciens sont appelés
à investir de leur temps et une grande partie de leur salaire dans ces
projets. Mais nous faisons la différence entre ces projets et les
productions à gros budget qui se font hors des normes professionnelles.
Ce sont ces dernières qui minent ainsi toute l'industrie par leur
concurrence déloyale encouragée, sommes-nous obligés de
comprendre, par les gouvernements.
Je me permettrais, à ce niveau, de citer un rapport rendu public
par l'IQC dernièrement qui, en fait, résumait...
Mme Hamelin (Babalou): Oui, qui s'appelle "Le prix de la
liberté, la production cinématographique indépendante".
Alors, on y dit qu'en fait les techniciens ont été les...
Excusez, je vais vous... "Le Syndicat des techniciens et techniciennes a
toujours davantage fait preuve d'ouverture envers les projets des
indépendants que l'Association des producteurs". En fait, on prend la
peine de citer parce que je crois qu'effectivement les techniciens ont
toujours, de tout temps, donné de leur temps, de leurs sous, encourage
la production et ça continue toujours, d'ailleurs.
M. Houx: J'ai d'ailleurs reçu cette année de 10
à 12 projets à petit budget et aucun n'a été
refusé. Les seules exigences qu'on a eues, c'est que ça soit bien
structuré et sûr d'arriver à bout.
Une attention très particulière doit être
apportée au projet des enveloppes de financement accordées
à des producteurs pour des périodes déterminées. En
passant, sur ce projet, je dois avouer que nous sommes très inquiets
quant au fait de financer à l'avance des producteurs. Nous pensons qu'il
serait de beaucoup meilleure avenue de permettre à des producteurs de
commencer des préparations de tournage en attente de réponses,
par exemple, de la SOGIC, de Téléfilm ou autre. Mais créer
un ghetto entre deux sortes de producteurs, ceux qui ont du financement et ceux
qui n'en ont pas, risque surtout de miner tout ce qui est projet personnel,
projet d'auteur, etc.
Puisque le gouvernement désire établir une nouvelle
politique de la culture et des arts, un volet très particulier de cette
politique doit être réservé au cinéma et à la
télévision. Nous demandons cela pour des raisons qui nous
semblent évidentes. La télévision rejoint chaque jour tous
les Québécois chez eux et est le canal par lequel ils ont un
contact, non seulement le plus important, mais journalier avec la culture
d'ici, et ce, de leur plus petite enfance jusqu'à leur mort. La
télévision façonne une société et lui permet
de se regarder elle-même, à condition, bien sûr, de lui
donner une vision québécoise de qualité, répondant
à ses exigences, et non pas une vision majoritairement
étrangère.
Le cinéma reste encore la sortie culturelle
privilégiée de la majorité des Québécois.
Dans les deux cas, rien n'indique que cette situation est appelée
à changer, au contraire. Surtout dans le cas de la
télévision, tout indique que son importance ira en augmentant. Si
nous voulons être à même d'y répondre par un contenu
de qualité et bien intégré, il est déjà
très tard pour s'y préparer. Mais nous sommes prêts,
à condition que cela se fasse en complicité avec l'État et
non en se débattant contre lui.
La politique de la culture et des arts doit se faire en concertation
avec les intervenants du milieu et à la lumière de tous les
mémoires que vous avez reçus jusqu'à maintenant. Nous
sommes prêts à travailler encore à la préparation de
la politique culturelle globale du Québec, particulièrement quant
à son volet cinéma et télévision.
Je dirais un simple dernier mot. Au moment où la coalition de
l'Institut québécois du cinéma a dénoncé le
rapport Arpin, les journalistes se sont jetés sur le fait de dire que le
milieu du cinéma retournait sa veste de côté et devenait
profédéraiiste, etc., etc. Je crois que les journalistes sont
très facilement tombés dans le panneau de ce que c'était,
et c'était beaucoup autre chose.
Par rapport à la SOGIC, on nous a beau-
coup dit aussi, entre autres Mme Bissonnette à quelques reprises
dans Le Devoir, que nous nous plaignions de la SOGIC pour une question
de gros sous, ce qui n'est pas le cas. Bien sûr, nous en avons de ce
côté-là aussi, mais c'est d'abord et avant tout du
fonctionnement démocratique de la SOGIC dont nous nous sommes plaints.
C'est tout pour ma part. Je vous remercie de m'avoir écouté avec
patience.
Le Président (M. Doyon): Merci, monsieur Houx. Mme la
ministre.
Mme Frulla-Hébert: Merci beaucoup, M. Houx. Ça nous
fait plaisir de vous revoir, Mme Hamelin. Deux ou trois choses. Je dois vous
dire qu'effectivement, mon collègue et moi, quand on a vu toute cette
démonstration avant la commission parlementaire... moi, je dois vous
dire que, personnellement, j'ai été un peu surprise de la
réaction. Vous me donnez un peu la réponse dans le sens où
vous dites: On a rejeté globalement; on n'y est pas allé en
détail, mais on l'a fait globalement. Moi, je dois vous dire que, cette
réaction-là, honnêtement, je trouve ça un peu
dangereux, dans le sens où le rapport a été fait par un
groupe de gens professionnels, bien intentionnés, dont un membre - et,
vous savez, non le moindre - de l'IQC, à partir de recherches et de
données qu'on avait et essayant d'avoir justement une base de
discussion. Ils ont apporté toute leur attention, leur
expérience, leur savoir-faire, à partir de ce qu'on avait aussi
de documents, et ils sont arrivés avec un rapport. Et de dire: Bien,
nous autres, on ne l'a pas pris en considération en détail, on
l'a rejeté globalement...
Ma question, c'est que, si on en arrive à une politique
culturelle où on peut... On va travailler avec le milieu, on ne fait pas
un exercice fermé, comme vous pouvez le voir. On ne peut pas être
plus ouverts. Je pense que ça ne s'est jamais fait aussi ouvertement.
Est-ce que, parce que, bon, le ton pour certaines choses nous inquiète,
on va la rejeter globalement? C'est ça, à quelque part, qui m'a
vraiment inquiétée. Alors, c'est juste pour vous
éclairer.
Autre chose aussi, quand vous dites: Tout est basé sur le
rapatriement. Si on lit le rapport Arpin comme il faut, là, le rapport
Arpin nous dit: II ne faudrait pas non plus prendre le rapatriement comme une
échappatoire, au contraire. On parle d'une politique culturelle; un peu
ce que M. L'Allier disait, on va essayer de nettoyer chez nous, là,
puis, après ça, on verra dans son ensemble. Mais il ne faut pas
non plus dire: On va attendre le rapatriement pour faire quelque chose. C'est
ça que le rapport Arpin dit. Le rapport Arpin ne dit pas: S'il n'y a pas
de rapatriement, on ne fait rien. Alors, c'est cette réaction-là
qui m'a surprise.
Ensuite, vous dites: On a eu 15 jours. C'est qu'il faut comprendre aussi
la procédure par- lementaire. C'est que la politique a été
déposée à l'Assemblée nationale le 14 juin. Les
documents ont été expédiés, 3000 exemplaires,
partout à travers le Québec pour avoir une réimpression,
immédiatement, mais il faut se donner 65 jours avant de commencer et
d'aller en commission parlementaire. Ça, ce sont les règlements.
Donc, ce n'est pas 15 jours. Les gens nous disent: Oui, mais on était en
vacances. Bien oui, on était en vacances, mais je pense que la politique
culturelle, c'est quelque chose de plus important que les vacances. On
était en vacances, nous autres aussi, mais on travaillait.
Alors, c'est tout ça qui fait que la réaction, je l'ai
trouvée dangereuse. Qu'on dise: II y a telle chose qui ne fait pas notre
affaire... Et il y a des gens qui sont venus; on a entendu 182 mémoires
et personnes. Il y en a encore, des mémoires, sur 263 à date.
Qu'on dise: II y a telle chose qui ne fait pas notre affaire, telle chose que
vous avez oubliée, ça, c'est correct. Mais rejeter globalement,
dans l'ensemble, le travail, et tout ça, ça, ça nous a
chicoté un peu.
Alors, je reviens à ma question. Si on en arrive à
travailler ensemble tout ça et à dire: Bon, on fait une politique
culturelle et il y a des choses à être discutées, est-ce
que ça va être du revers de la main et est-ce qu'on dira: Bon,
bien, nous autres, tout le secteur, on rejette ça globalement parce
qu'il y a des irritants? Ça, j'en conviens qu'il y a des irritants. Je
suis d'accord avec vous, mais c'est tout ça qui nous a fait
réagir.
Mme Hamelin: Si vous me permettez, je vais vous donner une
première réponse que Patrice va compléter. Il y a beaucoup
de questions dans votre intervention. La première, c'est que l'Institut
du cinéma nous a convoqués le 11 septembre, si ma mémoire
est bonne. L'IQC, je crois que la réunion était, enfin,
très tard. Je comprends les délais que vous avez, mais nous, nos
délais étaient encore plus courts. Je veux dire, on devait
remettre nos mémoires quelques jours après. Donc, pour nous,
ça paraissait, de prime abord, comme une fausse consultation. Donc, tout
de suite, déjà, je dois dire que tout le monde était un
peu choqué par ça. Également, avec le nombre de
recommandations que le rapport Arpin fait, on ne peut pas discuter de ça
en une demi-journée ou en une journée. Il nous aurait fallu
beaucoup plus de temps. Ça, c'est évident.
Je pense que le fait que le milieu du cinéma, tout à coup,
se met en bloc, c'est peut-être parce qu'il lui a semblé qu'il y
avait un manque de volonté de la part du gouvernement de répondre
aux recommandations du milieu du cinéma. Je pense que le milieu du
cinéma, jusqu'ici... Je ne veux pas citer M. Cesare, qui disait que la
culture est un combat, mais je pense que le cinéma a toujours fait ses
devoirs. Il s'est toujours battu pour que cet art existe et
soit reconnu et, en fait, on avait l'impression - et c'est pour
ça que tout le monde s'est mis d'accord - qu'on ne tenait pas compte de
tous les mémoires et de toutes les recommandations qu'on faisait au
gouvernement. il est sûr, comme disait Patrice, que la question du
rapatriement n'aurait peut-être pas fait l'unanimité. On
était d'accord que la proposition était très floue et nous
semblait un peu déposée à la légère, mais
c'était surtout pour alerter, sonner une sonnette en disant:
Écoutez, si vous voulez vraiment qu'on travaille ensemble,
répondez déjà au moins à tout ce qu'on a
déposé et à tout ce qu'on a déjà
demandé.
Ça, c'est pour répondre. Je vais laisser M. Houx
continuer.
M. Houx: Je dirai simplement que, oui, je comprends les
délais et tout ça. Nous, notre organisme, nous avons reçu,
fin août, en tout cas, si je me rappelle bien, le rapport Arpin. La
réunion de l'IQC, je crois, avait lieu le 3 ou 4 septembre et je crois
que les mémoires devaient être envoyés pour le 11. On a
réussi, en discutant, et tout ça, à avoir quelques jours
pour l'envoyer, mais globalement, alors que, comme je disais, on ne pouvait pas
en faire de photocopies à cause du droit d'auteur - ce qui est une bonne
chose - et que j'ai 18 personnes sur mon conseil de direction à aller
chercher, à convoquer et à regarder, et tout ça, on s'est
retrouvés serrés dans le temps et, commencer à vouloir
analyser chaque petit point... (16 h 45)
Pour nous, ça nous semblait effectivement moins dangereux et plus
efficace de prendre en bloc le rapport Arpin et d'être précis, de
dire: Ce ne sont pas les 113 recommandations que nous rejetons. Nous rejetons
le mécanisme qui nous a amené ça sur la table et d'avoir
à y répondre. Avoir eu plus de temps, là on aurait pu
prendre chacune des recommandations, en fait surtout celles qui nous touchent
plus directement, et répondre en pour ou en contre. Bien sûr, il y
en a qui sont excellentes dedans, mais c'était très complexe.
Mme Frulla-Hébert: Vous savez... Juste une chose. Vous
savez, on se bat tous ici pour la culture, autant mon collègue,
moi-même, vous-même, et vous avez raison quand vous dites: Le
milieu, on se bat. Les créateurs vont arriver et ils vont dire: On se
bat, bon. Le Québec est relativement jeune. Le ministère a 30
ans, n'a que 30 ans. Si on se rappelle ce qui a été fait il y a
30 ans... Il y a des gens ici qui sont venus avec leur mémoire aussi -
enfin, je parle de leur mémoire en termes professionnels - nous rappeler
aussi ce qui s'est fait, la conférence des évêques, par
exemple, ce qui était et ce qui est maintenant. Alors, il faut
être fier aussi de ce qui a été fait durant 30 ans.
La seule chose, c'est qu'ayant un membre de l'IQC même sur le
conseil, j'espère juste que... Il faut réaliser aussi que cet
aspect-là, bien souvent, provenant d'un milieu aussi qui a dû se
battre, et tout ça, peut créer une réaction, parce que
vous dites: Bon, il nous semblait, il nous semblait, etc., mais qui donne,
finalement, vraiment une mauvaise impression de l'intention de ce qui est
déjà. En plus, c'est que vous aviez déjà un membre
de l'IQC.
Maintenant, je veux répondre aussi à quelque chose, parler
de...
Le Président (M. Doyon): Rapidement, Mme la ministre, il
reste à peine quelques instants.
Mme Frulla-Hébert: On n'est pas là-dessus et on
a... Oui, M. le Président, merci. On nous demande si on n'a pas
nommé des membres, etc. Juste pour vous dire qu'à cause de
certains délais aussi de l'IQC il n'y a aucun membre qui a
été nommé au conseil d'administration, aucun, et ça
va se faire vraiment sous peu. Ce que je vous ai dit à la commission sur
le cinéma, je le maintiens. Merci.
Le Président (M. Doyon): Je n'en doute pas. Brève
réponse, s'il vous plaît.
M. Houx: Très brève réponse. Je dirais tout
simplement que je suis d'accord avec, mais je dirais simplement que je suis
content qu'on l'ait rejeté globalement. Je crois que ça a
été, entre autres, une des raisons qui a déclenché
le nombre de rapports qui ont été déposés ici et
qui à brassé énormément de choses et
énormément de questionnements dans tous les sens. Je pense que
c'est une bonne chose.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. Houx. M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Oui. Mme Hamelin, M. Houx, à la blague, je
vous dirai que, si vous avez excusé certains aspects de votre
mémoire, je pense que vous n'aviez pas à le faire. Ce n'est pas
parce qu'on est à côté de l'église Immaculée
Conception qu'on est obligé de faire des miracles. La deuxième
chose, c'est que je vais vous chicaner amicalement. Lorsqu'il y a un document
qui émane de l'État et de ses ministères et que vous avez
peur de ne pas l'avoir ou de ne pas l'avoir à temps, faites donc comme
tous les organismes de Sainte-Marie-Saint-Jacques; composez le 525-2501, qui
est le bureau de votre député, et vous l'aurez. Ha, ha, ha!
M. Houx: Je sais que, du côté de l'Association des
producteurs, ils ont demandé d'en avoir d'autres copies. On leur a dit:
C'est impossible pour le moment. Ils ont demandé: Est-ce qu'on peut le
photocopier pour l'étudier? On leur a dit: Non, le droit d'auteur
l'interdit. Il n'y a pas eu moyen de leur côté. Je n'ai pas
vérifié person-
nellement, mais je sais que, de leur côté, il n'y a pas eu
moyen de le faire.
M. Boulerice: Ceci dit, l'offre de...
M. Houx: Mais j'y penserai la prochaine fois, je vous le
promets.
M. Boulerice: L'offre de service étant faite, M. Houx, je
serai heureux de remplir les commandes.
M. Houx: Tout à fait.
M. Boulerice: Bon. Ça, je ne vous le cacherai pas - et ma
collègue, la ministre des Affaires culturelles, vient d'en faire mention
- il est entendu que l'écriture journalistique de votre
conférence de presse, de la déclaration des gens de votre milieu
m'a heurté. Ça, je ne vous le cacherai pas. Il y a eu une
caricature aussi qui, moi, personnellement, m'a un peu blessé. Je pense
que les procès d'intention sont souvent les formes les plus
exécrables de procès. Mais, moi, j'ai compris des choses
là-dedans. Ceux qui oeuvrent dans le domaine de la
télévision ne sont quand même pas des imbéciles. Ils
savent fort bien que le gouvernement fédéral a des pouvoirs de
réglementation et des pouvoirs de législation que le
Québec n'a pas et que le rapatriement, tel que préconisé
à la fois dans le rapport Arpin et dans le rapport Allaire du Parti
libéral, ne signifie pas qu'on peut rapatrier Radio-Québec comme
tel. Mais est-ce qu'on a un CRTQ? Ah, ah! Drôle de question!
Alors, moi, je comprenais un peu en filigrane ce que vous ressentiez. Il
peut y avoir un rapatriement, mais le rapatriement pourrait être un
demi-rapatriement, tout compte fait, puisque, certains pouvoirs demeurant
encore au sein du gouvernement fédéral, ça ne vient en
définitive que compliquer vos actions et vos demandes à certains
niveaux. Moi, je suis conscient que tous les problèmes se règlent
au niveau des dédoublements de juridiction, etc., dans la mesure
où il n'y a qu'un seul intervenant. Mais ça, nous ne l'aurons
qu'avec la nécessaire souveraineté, la souveraineté
nécessaire.
Ceci étant dit, est-ce que vous croyez... On parle d'une
politique des arts et de la culture. Nous, nous parlons d'une politique des
arts, de la culture et des communications. Nous estimons que c'est trop
étroitement relié, que ce n'est plus possible de fonctionner avec
les structures actuelles, c'est-à-dire, au niveau du Québec, deux
ministères. Vous devez aller frapper souvent à deux portes et,
après ça, à une troisième. C'est pour ça que
tantôt vos collègues parlaient de lunettes à double foyer
quand on pourrait avoir des lunettes à foyer progressif. Est-ce que vous
croyez qu'on va plutôt aller vers une politique des arts, de la culture
et des communications de façon à avoir véritablement une
gestion intégrée de ces trois domaines-là qui sont
tellement reliés ensemble maintenant?
M. Houx: Oui. Ma réponse va avoir l'air un peu courte,
mais je crois que oui, effectivement, tout ce qui se passe actuellement en
arts, en culture et en communication est effectivement interrelié, qu'on
le veuille ou non, que ça nous plaise ou non. Ça fonctionne comme
ça. C'est la réalité et on est très fort sur
ça. Il faut être réaliste sur ce qui se passe. C'est un peu
pour ça que, quand on parle de fédéral et de provincial,
quand le milieu a réagi à ça... Le milieu, en
général, est beaucoup plus nationaliste québécois
que nationaliste canadien, en général. Sauf que, la, il a
placé dans des enveloppes les organismes avec qui les relations vont
bien et les organismes avec qui les relations vont mal. Malheureusement, il y
avait beaucoup d'organismes avec qui ça allait bien qui étaient
fédéraux et beaucoup d'organismes avec qui ça allait mal
qui étaient provinciaux. Mais effectivement, si on revient au point de
vue d'une politique intégrée arts, culture et communications, je
crois que c'est évident.
M. Boulerice: Bien gros de vos appréhensions - et
ça, il ne faut pas se le cacher, c'est en fonction du vieux dicton qui
dit: Chat échau-dé, là, et vous connaissez le reste -
viennent de la SOGIC, où les gens de votre milieu ont eu un
traitement... Je vous avoue avoir de la difficulté à trouver
l'épithète pour qualifier le traitement auquel vous avez eu
droit. Je pourrais donner un exemple. Vous êtes sans doute au courant de
ce projet de film qui avait été présenté par le
groupe Azinamé, qui relatait toute l'histoire, vous savez, de la
construction de la bombe nucléaire qui s'est faite à
Montréal, à l'Université de Montréal. La SOGIC les
a envoyés, excusez l'expression, comme on dit en bon
québécois, péter dans les fleurs. Alors, ils ont
réussi à le faire par eux-mêmes et maintenant, voyez-vous,
ça a remporté un prix. Et la ministre qui, à
l'époque, était titulaire, qui leur avait dit: C'est bien beau,
mais on va laisser faire, les a félicités récemment, ce
qui est apparu un peu odieux à ce groupe-là. Voilà qu'ils
sont sélectionnés pour le festival de Palaiseau, qui est en
banlieue sud-ouest de Paris, et qu'ils seront au festival de Tokyo.
Je pense que c'est un des exemples on ne peut plus éloquents du
traitement qui est réservé aux gens du milieu du cinéma et
de la télévision à la SOGIC. Mais, malgré les moult
récriminations qui ont été faites, rien n'a encore
été fait. Donc, ça ne vous incite pas, vous, à
regarder un projet de politique au moment où on vous dit qu'il y a
encore, dans le décor, un organisme qui va fonctionner comme il
fonctionne actuellement, et vous réclamez un fonctionnement
démocratique.
M. Houx: En fait, c'est ça. J'irais avec un exemple
beaucoup plus précis au niveau du fonctionnement de la SOGIC qui a
refusé de financer le film "Nelligan" en disant que ce n'était
pas un sujet pertinent au Québec. On se posera la question de la
façon dont on veut. Pour ce qui est... J'ai perdu le fil quant à
l'autre chose que je voulais dire. An oui!
Pour ce qui est de la politique des arts et de la culture, l'impression
qu'on en a un peu, c'est que, depuis sans doute 30 ans d'existence du
ministère, II se dépose des rapports, il se dépose des
projets venant du milieu, et tout ça et, à chaque fois, le
gouvernement nous revient en disant: Bon, d'accord, on sait ce qu'on va faire.
On vous propose, en rappel à tout ça, telle chose. On dit: Ce
n'est pas tout à fait ce qu'on avait demandé, mais, bon, on va
essayer ça, et ça ne fonctionne pas à notre goût. On
revient sur d'autres rapports, d'autres mémoires, et tout ça et
le gouvernement nous rappelle: O.K., on sait ce qu'on va faire. On va le faire
de cette façon. Ce n'est pas encore efficace et tel qu'on te voudrait.
On revient comme ça, on joue à cette chaise-là depuis des
années et c'est pour ça que le milieu, à un moment
donné, se lève et dit: Écoutez là, ça fait
des années qu'on dépose des rapports et qu'on dit la même
chose à chaque année, mais ça ne se retrouve jamais
là et ça ne fonctionne jamais comme on pense que ça
devrait fonctionner. Nous, de notre côté, on fait fonctionner
l'industrie, on la structure, on la rend efficace, et tout ça et on se
retrouve à être plus bloqués qu'aidés, dans certains
cas, par le gouvernement.
M. Boulerice: La situation de vos gens face à la
commission de reconnaissance du statut de l'artiste semble être
très problématique. Moi, j'avais suggéré, comme
mandat d'initiative à cette commission, que l'on regarde cette loi,
puisque c'était du droit nouveau, mais qu'il fallait peut-être
voir où on en était. Mais, dans votre cas, il semble qu'on ne se
soit pas rendu aux espérances.
M. Houx: On a eu plusieurs problèmes. Les intentions de la
loi sont très bonnes, ça, aucun problème de ce
côté-là. Ça s'est d'ailleurs parlé beaucoup
samedi dernier. Il y avait une conférence du groupe ALAI sur le statut
de l'artiste à laquelle j'ai assisté et le STCVQ a beaucoup servi
d'exemple parce qu'à un moment donné, quand notre cas est
passé, il a fallu déterminer qui était artiste et qui ne
l'était pas, ce qui a été extrêmement complexe. Ce
qui a fait qu'on s'est retrouvé avec une loi qui nous donne une
reconnaissance officielle comme organisation regroupant des artistes, qui nous
donne le pouvoir de négocier avec des producteurs, mais non pas
d'obliger d'arriver à une entente. On peut négocier tant que les
deux côtés négocient de bonne foi. Ça peut durer le
temps que ça peut durer et ça peut durer des années. Il
n'y a aucun mécanisme coercittf pour obliger d'arriver à
certaines ententes, sauf si, d'un côté ou de l'autre, il y a
négociation de mauvaise foi.
Pour ce qui est du statut fiscal que ça donne aux artistes de
pouvoir être des travailleurs autonomes, c'est un statut qui existe
déjà et, d'ailleurs, ça a amené certaines
facilités. Mais le fait de ne choisir que 16 postes d'artiste chez nous,
sur les 56 métiers qui existent, a fait que c'est devenu un argument
pour les producteurs avec qui nous négocions, qui, avant, ne se posaient
même pas la question à savoir s'ils négociaient pour tout
le monde en même temps. À partir du moment où on a
été reconnus seulement pour 16 postes, ils ont dit: Bien,
maintenant, on veut rien que vous parier pour 16 de vos postes; les autres, ils
n'existent pas. Bon, bien sûr, à cause de la solidarité du
milieu, ça n'a jamais causé trop de problèmes, mais
l'argument revient à chaque fois; un argument qui n'existait pas avant.
Ça ne nous a apporté rien de concret.
Mme Hamelin: Puis c'est terrible pour un syndicat d'être
quand même divisé. On ne divise pas un syndicat. Ça divise
un syndicat. Ça veut dire les artistes et les non-artistes. C'est
aberrant.
M. Houx: Mme Hamelin est une artiste et je n'en suis pas un.
Même si j'avais parlé de la qualité de la lumière,
ici, la dernière fois que je suis venu, aujourd'hui, je ne peux
évidemment pas le faire. Mais, par exemple, c'est ça, je veux
dire... Je pense que, à part la différence qu'elle soit une femme
et moi un homme, il n'y a pas de différence dans nos métiers en
tant que tels.
M. Boulerice: D'accord. Mme Hamelin...
Le Président (M. Doyon): Alors, quelques mots de
remerciement, M. le député.
M. Boulerice: Oui. Mme Hamelin et M. Houx, je vous remercie de
votre participation. Au-delà du contenu de votre mémoire,
où il y a effectivement des éléments fort
intéressants, je pense que votre présence aura aussi permis de
dissiper un malentendu et, pour emprunter à un film
célèbre, une méprise qui, normalement, ne devrait pas
avoir lieu pour ce qui est des gens du cinéma et de la
télévision versus une loi des arts, de la culture ou, ce que,
moi, je souhaite, arts, culture et communications.
Donc, merci pour votre présence. On a déjà vu votre
Syndicat pour la loi sur le statut de l'artiste, la Loi sur le cinéma.
Maintenant, nous voici avec ce projet de politique, mais j'espère que,
si vous devez revenir une quatrième fois, cette fois-ci, ce sera dans
une condition où on aura répondu à vos demandes comme
telles. Je le souhaite ardemment. Merci et bon retour
sur la rue Papineau.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre.
M. Houx: De notre côté, que vous n'ayez pas encore
des problèmes avec votre chaise, puisque vous en aviez
déjà la dernière fois où je suis venu.
M. Boulerlce: Vous voyez, le temps passe, mais ce n'est pas vrai
que les choses changent.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: C'est à mon tour de vous
remercier, d'une part. Deuxièmement, effectivement, je pense que je
joins ma voix à celle de mon collègue dans un sens où,
vous savez, tous les deux, ainsi que les membres de la commission, on travaille
fort pour qu'il y ait une politique des arts et de la culture. C'est la
première fois, d'ailleurs, que tous les milieux, l'éducation, le
socioculturel, tout le monde - ce n'est pas que notre milieu mais le milieu en
général - vient et participe aussi. On espère vraiment
continuer en ce sens.
Pour vous dire aussi qu'effectivement on est conscients qu'il y a
certains problèmes. Vous êtes venus pour la loi sur le statut de
l'artiste. Il y a des irritants, on va les regarder, mais elle est là et
c'est la première au monde. La Loi sur le cinéma, que nous avons
votée tous les deux unanimement, elle est là aussi. Alors, on va
essayer que tout soit parfait, mais, en attendant, je pense que ce qui est
important aussi, c'est de bouger et de faire avancer les choses. Alors, merci
encore de votre participation.
Le Président (M. Doyon): Au nom des membres de la
commission, je remercie M. Houx et Mme Hamelin d'avoir pris la peine de venir
nous rencontrer. Alors, simplement pour vous donner le temps de vous retirer de
la table, je suspends les travaux pour à peine une minute.
(Suspension de la séance à 17 h 1 )
(Reprise à 17 h 2)
Le Président (M. Doyon): La commission reprend ses
travaux. Nous allons maintenant entendre la Société des auteurs
et compositeurs dramatiques. Je les invite à bien vouloir s'avancer
à la table ici, devant moi.
C'est un plaisir d'avoir M. Marcel Beaulieu et Mme Elisabeth Schlittler
avec nous. Je leur souhaite la bienvenue. Je les invite tout simplement
à se conformer aux règles qu'ils connaissent parce qu'ils sont
ici depuis un certain temps. Donc, 10 à 15 minutes pour votre
présentation, ensuite, la discussion va commencer avec les membres de
cette commission.
Vous avez la parole.
Société des auteurs et compositeurs
dramatiques
Mme Schlittler (Elisabeth): Alors, M. le Président, Mme la
ministre, mesdames et messieurs, permettez-nous tout d'abord de vous remercier
de votre invitation à nous faire entendre, comme nous en avions
manifesté le souhait.
Comme nous l'avons écrit dans notre mémoire, il nous
apparaît important de pouvoir expliquer la nature des activités de
la Société des auteurs et compositeurs dramatiques, qui est une
société de gestion collective de droits d'auteurs, oeuvrant
principalement dans les domaines de la télévision, du
cinéma, de la radio et des arts de la scène.
Après avoir pris connaissance de la proposition de politique de
la culture et des arts, à laquelle nous sommes dans l'ensemble
favorables, nous nous interrogeons tout particulièrement sur la
signification de la recommandation 36d qui suggère la mise sur pied
d'une infrastructure complète de perception et de répartition et
pour établir les relations qui s'imposent avec les interlocuteurs
étrangers pour la perception des droits à l'échelle
internationale.
Est-ce que cette recommandation signifie qu'il faut créer de
nouvelles sociétés de gestion qui effectueront de la perception
et de la répartition? Est-ce qu'elle suggère la création
d'une société de gestion unique? Dans la première
hypothèse, nous estimons que les sociétés de gestion
actuellement en place couvrent les domaines importants, à savoir les
droits musicaux, les droits de reproduction et les droits de
représentations scéniques et audiovisuelles.
Dans la seconde hypothèse, soit la création d'une
société de gestion unique, nous estimons que cette recommandation
irait à rencontre de la pratique internationale et ne servirait pas la
cause des auteurs, vu les principes de gestion particuliers appliqués
aux différents secteurs. Par ailleurs, comme nous l'avons
déjà mentionné dans notre mémoire, il faut à
tout prix éviter de répéter l'expérience
malheureuse d'il y a quelques années, qui n'a contribué d'aucune
façon à faire progresser le droit d'auteur.
Durant les premières années du siècle, la SACD
percevait au Québec exclusivement les droits dus par les
théâtres aux auteurs francophones européens. Puis, avec
l'avènement de la télévision, des conventions ont
été conclues avec les télédiffuseurs
québécois pour percevoir la rémunération due aux
auteurs francophones européens d'ouvrages audiovisuels, radiophoniques
ou scéniques adaptés à ces modes d'exploitation. À
la suite du rayonnement des oeuvres québécoises sur la
scène européenne, les auteurs québécois ont
exprimé le souhait d'être représentés par une
société francophone internationale.
Depuis, plus de 350 auteurs québécois ont
adhéré à la SACD et, de ce fait, profitent de son
intervention aussi bien auprès des sociétés de
télévision québécoises qu'européennes. Il en
va de même pour les auteurs d'oeuvres scéniques qui sont
assurés d'être rémunérés pour la
représentation de leurs oeuvres à l'étranger, par notre
intermédiaire ou celui de sociétés soeurs, comme la SGAE
en Espagne, la VAP en URSS, et la SBAT au Brésil.
Une oeuvre née de l'imagination et de l'expérience d'un
auteur est un élément essentiel de la culture vivante. Elle n'est
pas un produit et ne peut être assimilée à un simple
service. Par son système de gestion collective, la SACD assure aux
auteurs d'être liés à la durée de vie
économique de leurs oeuvres. Son répertoire se compose d'oeuvres
scéniques, de pièces, de ballets, d'opéras,
d'opérettes, de revues, de comédies musicales, de mimes, de
sketches et d'oeuvres audiovisuelles qui sont constituées de
téléfilms, de séries, de feuilletons, de dessins
animés, de longs métrages et également d'oeuvres
radiophoniques.
Si l'auteur peut négocier seul ou avec l'aide de la SACD face aux
directeurs de théâtre et de tournée, II n'en est pas de
même dans le secteur de l'audiovisuel, car il se trouve confronté
à des organismes publics ou privés, sociétés de
télévision, de radiodiffusion, avec lesquels il lui est
impossible d'avoir un dialogue équilibré et face auxquels la
gestion collective du droit d'auteur est indispensable dans
l'intérêt des deux parties.
À ce jour, la SACD a conclu des ententes avec Radio-Canada,
Radio-Québec, Télé-Métropole,
Télévision Quatre Saisons et, en Europe, avec plus de 25
sociétés de télévision européennes, sur la
base de forfaits annuels répartis entre les auteurs, oeuvre par oeuvre,
selon l'utilisation de leur répertoire par les diffuseurs.
Pour les pays où la SACD n'a pas conclu d'entente, le producteur
est responsable de la rémunération due aux auteurs, aux
conditions établies par le contrat qui a été signé.
En ce qui a trait aux contrats intervenant entre un auteur et un producteur, il
est essentiel de préciser que l'auteur n'a pas à céder,
selon la formule consacrée, tous ses droits d'auteur. Afin d'être
en mesure d'exploiter une oeuvre audiovisuelle, le producteur ne doit obtenir
de l'auteur que l'autorisation de produire et d'exploiter ladite oeuvre aux
conditions financières déterminées par ledit contrat et,
bien sûr, en respectant le droit moral de l'auteur.
Au-delà des droits de diffusion télévisuelle et
scénique, des droits sont perçus en Europe et sont
également répartis au titre de la copie privée aux auteurs
québécois. Ces droits sont perçus auprès des
fabricants et des importateurs de cassettes et nous souhaitons vivement que
l'on instaure cette perception chez nous afin que les auteurs
bénéficient de cette rémunération qui leur est
due.
Dans le domaine théâtral, l'auteur décide de
l'opportunité de la représentation. L'auteur seul peut autoriser
ou interdire toute exploitation de son oeuvre. La SACD ne fait que
négocier des conditions de perception avec les utilisateurs. Elle
établit, après avoir obtenu l'accord de l'auteur, un contrat de
représentation qui définit l'ensemble des conditions et des
garanties applicables à l'exploitation. Elle perçoit ensuite les
droits dus. Il s'agit généralement d'un pourcentage sur les
entrées aux guichets. Les auteurs reçoivent
l'intégralité des sommes perçues sous la seule
déduction d'une retenue destinée à couvrir les frais
d'administration de la SACD.
En terminant, nous tenons à préciser que la SACD
québécoise n'est ni un syndicat, ni une entreprise commerciale,
ni une société subventionnée par des fonds publics, mais
bien une société qui a été chargée par ses
membres, auteurs, scénaristes, compositeurs, réalisateurs,
chorégraphes, metteurs en scène d'oeuvres à
caractère dramatique, de percevoir et de répartir leurs
droits.
Nous souhaitons que ces quelques informations auront pu préciser
la nature de nos activités et vous convaincre de la
nécessité de consulter une société de gestion
collective comme la nôtre lorsque le ministère des Affaires
culturelles entreprend des études qui touchent les auteurs que nous
représentons.
M. le Président, Mme la ministre, mesdames et messieurs, nous
vous remercions de l'attention que vous avez bien voulu nous accorder.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme Schlittler. Mme la
ministre.
Mme Frulla-Hébert: Merci beaucoup et merci beaucoup aussi,
Mme Schlittler, de votre offre de collaboration. J'aimerais qu'on parte
justement du point principal de votre mémoire, c'est-à-dire la
recommandation 36d du rapport Arpin et cette mise sur pied qui a
été proposée d'une infrastructure complète de
perception et de répartition.
On a beaucoup parlé du droit d'auteur. Il y a eu
évidemment la SPACQ et d'autres groupes qui aussi représentent et
qui sont des experts en droits d'auteur. C'est évidemment très,
très vivant comme discussion. Le droit d'auteur et la loi sur le droit
d'auteur étant fédérales aussi, notre intervention en est
une, finalement, de pression, si on veut, de conscientisation, de vigilance,
mais la loi demeure, au moment où on se parle,
fédérale.
Maintenant, il y a certains intervenants qui ont recommandé dans
leur mémoire que le Québec se dote lui-même d'une
véritable loi sur le droit d'auteur, beaucoup plus qu'une loi sur le
copyright. Maintenant, évidemment, leur argumentation repose,
finalement, sur le fait qu'une loi sur le droit d'auteur est beaucoup plus
conforme à notre tradition juridique que celle du copyright.
Donc, quelle différence fondamentale, pour vous qui le vivez,
faites-vous entre les deux types de législation et qu'est-ce que vous
pensez aussi d'une telle recommandation, c'est-à-dire d'aller plus vers
l'esprit de la loi ou, enfin, l'esprit d'une loi qui serait une loi sur le
droit d'auteur versus celle qu'on a présentement, c'est-à-dire
celle du copyright?
M. Beaulieu (Marcel): Permettez-moi de répondre. En fait
et forcément, en tant qu'auteur, je vais vous dire: II faut
privilégier une loi sur le droit d'auteur, c'est-à-dire donner
les outils nécessaires pour que les auteurs, les créateurs soient
liés à l'exploitation de leur oeuvre. Mais ceci est à la
base, c'est-à-dire que le possesseur des droits, par la loi du droit
d'auteur, est l'auteur, alors que le copyright, c'est l'exploitant, en fait,
entre guillemets, qui, somme toute, est possesseur des droits d'exploitation,
ce qui est une nuance, mais une nuance capitale, c'est-à-dire que c'est
à nous, à la base, auteurs, de pouvoir justement, au niveau
contractuel, au niveau entente, soit avec les producteurs en cinéma,
soit avec les télédiffuseurs dans certains cas, enfin avec ceux
avec qui nous devons composer, nous devons nous entendre... Il est capital que
nous ayons à la base les droits nécessaires pour justement
établir une forme de rémunération cohérente et non
pas aléatoire. Parce qu'il faut faire attention. Qu'il y ait une loi du
copyright, je crois qu'elle doit découler de la loi du droit d'auteur,
il est évident. Mais il faudrait qu'avant cette loi-là il y ait
la bonne base, la base essentielle, c'est-à-dire un droit d'auteur
appartenant à l'auteur, et qu'il puisse gérer forcément,
par l'entremise de ces associations, et par l'entremise de
sociétés de gestion, son droit, mais un droit qu'il doit
posséder à la base et non pas seulement un droit dit moral, mats
bien un droit dit juridique.
Mme Frulla-Hébert: Oui.
M. Beaulieu: Qu'il puisse dire: Voici, je cède ceci en
compensation de ceci. En fait, on ne cède jamais. Ce sont des licences
qui sont accordées, etc., par la loi du droit d'auteur, par la notion
d'auteur et non pas l'inverse, alors que le copyright, c'est une fois le
produit, en fait... et forcément c'est la continuité.
Mme Frulla-Hébert: En fait, ce que vous dites, d'une part,
c'est, bon - on se comprend bien, là - que le créateur a les
droits et le producteur versus... Présentement, le créateur
cède ses droits au producteur et c'est le producteur qui l'exploite.
M. Beaulieu: Oui. En fait...
Mme Frulla-Hébert: C'est simplifié, là.
M. Beaulieu: Oui, c'est simplifié, mais oui, ça
revient un peu à ça. En fait, on dit: Voici. Le créateur,
l'auteur qui conçoit l'oeuvre a les droits, mais, forcément,
qu'est-ce qu'on fait d'une oeuvre, par exemple d'un scénario? Moi,
j'écris des scénarios. Alors, qu'est-ce que je fais avec un
scénario? Je le mets dans mon tiroir, ça n'existe pas? Non merci.
Alors, j'ai besoin qu'il y ait production. Forcément. J'ai besoin qu'il
y ait exploitation de cette oeuvre-là pour en tirer aussi les profits
non seulement artistiques, mais pécuniaires.
Donc - et c'est là qu'est l'entente - on disait: Voici. Alors,
j'ai les droits de ceci. J'ai créé ceci et je vous accorde, nous
vous accordons les droits nécessaires dans les champs d'exploitation que
vous avez, etc. Mais, au départ, c'est à la personne, je dirais
c'est votre enfant. Alors, est-ce que vous laissez aux autres le soin de
décider ce que votre enfant va devenir? Non. C'est impossible. Alors,
c'est pour ça que le droit d'auteur, en fart, c'est le droit de
naissance, c'est tout simplement ça. C'est le lien que nous
possédons avec notre oeuvre au départ et, ensuite, c'est une
question de gérance commune.
Mme Frulla-Hébert: On a beaucoup discuté aussi de
la copie privée. Dans votre mémoire, vous disiez, de toute
façon, vous affirmiez que votre Société s'occupe de
répartir les droits au titre de la copie privée. Je veux savoir:
Est-ce qu'elle perçoit la redevance pour les oeuvres audiovisuelles
québécoises en France et dans les pays qui reconnaissent
finalement aussi les droits de la copie privée? Parce qu'il y a deux
discussions, dans un sens où, bon, il y a toute la question de la copie
privée où nous allons travailler avec la SPACQ aussitôt que
la commission sera terminée, là, pour voir vraiment ce qu'on peut
faire. Ça, c'est une chose. Deuxièmement, vous, votre
Société, est-ce qu'elle les perçoit aussi, ces
redevances-là, mais à travers...
Mme Schlittler: Bien, la Société, effectivement,
fait de la perception de copie privée, mais par l'intermédiaire
d'une société qui s'appelle Copie France, pour ce qui est des
droits à provenir de la copie privée, qui fait finalement la
répartition entre toutes les sociétés qui sont membres de
cet organisme qui s'appelle Copie France. Alors, la SACQ touche effectivement
des droits au titre de la copie privée, qu'elle répartit ensuite
aux auteurs québécois qui sont concernés par ces
droits-là. Mais disons que la SACD, dans ce domaine-là, est un
intermédiaire, parce qu'ils ont créé Copie France qui
s'occupe de cette perception et de cette répartition entre tous les
collèges d'auteurs et les collèges de producteurs
concernés. Alors, on est un intermédiaire. Mais on fait de la
répartition pour nos auteurs québécois, effectivement. (17
h 15)
Mme Frulla-Hébert: Ah bon! D'accord. Je vous disais
tantôt que nous avons reçu plusieurs groupes, autant l'ADISQ que
la SPACQ, l'UNEQ, l'UDA, donc ce sont tous, justement, des auteurs, des
créateurs qui y sont représentés, qui, finalement,
trouvent inéquitable toute la question, la loi telle qu'elle est
présentement pour eux. Deuxièmement, il y a toute la question des
droits voisins que le fédéral essaie de... Enfin, a entrouvert
une porte, mais, là, il s'agit aussi de les suivre de près.
Ensuite, encore là, comme je disais, la copie privée...
Est-ce que vous pensez qu'il est possible, pour toutes ces diverses
associations, d'arrimer leurs actions dans ce secteur, finalement, d'arrimer
leurs besoins pour n'en faire qu'un bloc et, si oui, de quelle façon
pourraient-elles y arriver?
M. Beaulieu: Oh, la question est large! En fait, je crois qu'il y
a des besoins spécifiques pour chaque domaine de création. En
fait, que l'on parle de l'audiovisuel, du cinéma, entre autres... en en
parlant, le cinéma, les salles, il n'y a aucune billetterie, il n'y a
rien. Alors, un exemple: Est-ce qu'une société devant percevoir,
je dirais, gérer des droits voisins, des grands droits, des droits avec
des distributeurs, des tenants de salles, etc., des
télédiffuseurs...
Vous savez, c'est un problème, on le sait, tout le monde le sait,
excessivement complexe, les droits et les redevances, entre autres, et tout.
Qu'une seule société le fasse, ce serait une
société qui engagerait beaucoup de gens, qui aurait
sûrement beaucoup de problèmes à l'intérieur. Parce
qu'on en discute souvent. Même nous, on se retrouve, certains membres,
à la SACD... Vous savez, il y a différents types de
créateurs et ces créateurs-là, plusieurs se retrouvent
dans les mêmes sociétés, et on diverge souvent d'opinion,
pour la simple et bonne raison que le parolier d'une chanson, l'auteur d'un
livret, l'auteur d'un téléfilm ou même la personne qui
réalise... en passant, elle n'a pas de droits d'auteur, elle n'est pas
reconnue.
Alors, tout ça fait qu'on se retrouve finalement avec... On
aurait une société qui aurait beaucoup de têtes. Ça,
c'est peut-être le danger ultime de tout vouloir regrouper. Enfin, moi,
ça m'apparaît très dangereux personnellement et, pour avoir
fait partie de la SARDEC, être encore membre de la SARDEC, de
différents organismes, c'est excessivement dangereux parce qu'il y a des
organismes qui sont de type syndical, d'autres des sociétés de
perception, de gestion, et tout, alors...
Mme Frulla-Hébert: C'est difficile de concilier.
M Beaulieu: Mais, moi, je vous dirais... Je ne crois pas qu'on
ait à dire oui ou non, mais il faut être...
Mme Frulla-Hébert: Prudent.
M. Beaulieu: ...excessivement prudent face à ça et
analyser ça par deux fois.
Le Président (M. Doyon): Merci. Mme
Frulla-Hébert : Parfait. Merci.
Le Président (M. Doyon): M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Oui, Mme Schlittler, M. Beaulieu, je regardais la
liste de votre comité d'auteurs. L'occasion est fort belle, je ne
saurais la rater. Je vous prierais de transmettre vraiment mes
félicitations les plus enthousiastes à Mme Laberge puisque,
dimanche soir, je suis allé voir "Le Fourgon". Je pense que c'est un
moment très fort de l'écriture théâtrale au
Québec. C'est vraiment extraordinaire, merveilleux.
M. Beaulieu: Ça nous fera plaisir de lui dire.
M. Boulerice: Oui. En plus, c'était à
l'intérieur d'une soirée-bénéfice pour un organisme
de ma circonscription en vertu de la fondation Jean-Claude Malépart,
donc un collègue qui a laissé sa marque dans mon quartier. Donc,
les artistes au service de grandes causes, sauf qu'il faudrait peut-être
épouser la leur une bonne fois. Ceci étant dit, je vais vous
poser deux questions. Il y en a une que vous allez peut-être trouver un
peu rude, mais, en tout cas, j'aurais aimé connaître votre
opinion. Mais ça, c'est la deuxième.
La première. Oui, des groupes l'ont dit, ma collègue, Mme
la ministre, vient d'en faire allusion aussi, certains nous ont
recommandé effectivement de se doter, au Québec, d'une loi
s'apparentant au droit voisin en fonction des grandes conventions
internationales qui existent, mais quelle serait la valeur d'une telle
politique au Quebec, compte tenu que c'est de juridiction
fédérale et que, si le fédéral ne bouge pas... Je
vais être très franc avec vous, là. Ils n'ont pas
bougé depuis 1924.
M. Beaulieu: On s'en aperçoit.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boulerice: Alors... Pardon?
M. Beaulieu: J'ai dit: On s'en aperçoit.
M. Boulerice: Vous vous en apercevez. Alors, vous savez, il y a
une masse d'inertie, là, j'ai bien peur, qui va être très
lourde à soulever. Je vous avoue que je serais tenté, mais je
me
dis: Est-ce que c'est un exercice pour un exercice? Je vais être
malheureux si j'en vote une puis que ça n'a pas d'effet. À moins
que l'on puisse obtenir de l'ensemble des intervenants sur notre territoire une
espèce de lien moral où ils s'engageraient solennellement, et
même, comme je le dis à la blague, en signant avec leur sang,
à la respecter même si elle n'a pas de force constitutionnelle.
Mais là, hein, l'utopie est un pays loin.
M. Beaulieu: Premièrement, c'est malheureux, je ne suis
pas juriste.
M. Boulerice: C'est peut-être heureux.
M. Beaulieu: Ha, ha, ha! Enfin! Évidemment, c'est un peu
ce que l'on disait tantôt. On en revient à oui, rapatrier la
culture, les mécanismes servant à promouvoir la culture, mais,
juridiquement aussi, nous avons besoin... Dans cet esprit-là, je crois
que tout gouvernement... et là je ne veux pas faire de politique, mais
ce que je veux dire, c'est que, si vous voulez rapatrier les
conséquences, les causes, il faudrait peut-être commencer par
avoir possession, justement, des outils nécessaires à la base. On
en parle pour en parler. On a dit que c'était un débat assez
libre. Je n'engage personne là-dedans, surtout pas aucune
société. Je parle en tant qu'artiste, c'est tout. Mais pour avoir
travaillé, potassé longtemps au niveau des droits, autant
voisins, au niveau des droits d'auteurs, des grands droits, et tout, c'est
évident que, pour l'instant, c'est purement théorique de la part
du ministère des Affaires culturelles du Québec d'imaginer de
pouvoir aider les artistes à ce niveau-là, pour l'instant du
moins.
M. Boulerice: Oui et... Je m'excuse. Est-ce que vous vouliez
ajouter quelque chose, là, Mme Schlittler? Non? O.K. Mais, M. Beaulieu,
bon, sans vouloir vous faire dire ce que soit vous ne voulez pas dire ou bien,
donc, vous n'avez pas le mandat de dire dans le cadre de cette
présentation, est-ce que c'est quand même votre sentiment,
même si la loi n'est pas là actuellement, au niveau du
ministère des Affaires culturelles du Québec, que le
Québec, son ministère, sa population, ses traditions, etc., est
beaucoup plus sensible à cette notion que peut l'être le
gouvernement fédéral, qui est un gouvernement largement,
majoritairement anglais, donc notion du copyright, et que, si on avait tous les
pouvoirs - écoutez, pour employer une expression américaine:
"Odds against tomorrow" - il y aurait plus de chances qu'au Québec on
vote une loi comme celle-là rapidement?
M. Beaulieu: Oui, traditionnellement, forcément. Parce
qu'on se souvient très bien que, comme les Américains ont
voté pour le "Labor Act", c'est-à-dire le travail
rémunéré à la pièce et des droits de suite,
c'est-à-dire un pourcentage x négocié à la
tête du client, à sa réputation, et tout... Ça,
c'est une chose. Alors qu'ici, traditionnellement, du côté
latin... D'ailleurs, ce n'est pas pour rien que la SACD est une
société française à la base, francophone, qui a
rayonné à travers toute la francophonie et non seulement la
francophonie, l'Europe en général, mais même la
déborde, et pour une raison: c'est que la notion du droit d'auteur n'est
pas saxonne, mais beaucoup plus latine, c'est-à-dire c'est...
Oui, pour répondre à la question, je dirais que oui, nous
sommes plus sensibles, forcément, je crois, ici. Parce que je sais qu'il
y a eu des débats, il y a plusieurs mois, au Sénat, et tout, et
c'était très compliqué parce qu'on voulait favoriser
l'accès, sans restriction du droit d'auteur, à tous les
consommateurs culturels, dû à une pensée traditionnelle
saxonne, c'est-à-dire du copyright. Nous, évidemment, on a
sauté ça de haut, je peux vous le dire tout de suite. Ça a
été horrible parce que... En fait, on s'est dit: Oui, mais
à ce compte-là, on peut déposséder n'importe qui de
n'importe quoi. Ce n'est pas grave, on va te payer, de toute façon. Ne
t'inquiète pas pour la somme, ça ne te regarde pas, mais on va te
payer.
Mais ça va au-delà de ça. Il y a aussi un droit
moral. Et ça, dans la notion du droit d'auteur, ce qui est
défendu par les sociétés de gestion, et tout, c'est aussi
ce fameux droit moral qui n'est pas un droit pour empêcher les gens de
l'exploiter. Au contraire, je l'ai dit tantôt, tout ce qu'on veut, c'est
qu'on exploite nos oeuvres intelligemment, mais aussi on veut être partie
prenante de cette exploitation-là, forcément, parce que nous
l'entraînons à la base, nous la provoquons, règle
générale, je dirais dans 99,9 % des cas. Alors, le copyright est
forcément une notion qui n'est pas inintéressante non plus, mais
dangereuse si elle est appliquée comme étant une loi du droit
d'auteur. Et ça, c'est excessivement dangereux pour nous.
M. Boulerice: La prochaine question, que j'ai le goût de
mettre entre guillemets, est bebête. C'est pour m'aider à
comprendre puis je vous avoue que j'ai eu un certain blocage. Très
à tort, certains croient que je suis un grand collectionneur.
Rassurez-vous, c'est faux. La collection Lavalin n'est pas chez moi; je n'ai
pas ces moyens-là. C'est malheureux, je suis le premier à le
regretter, mais disons que j'ai quelques pièces assez
intéressantes. J'ai fait l'acquisition récemment d'une
pièce. J'accepte bien, effectivement, que... Je n'ai quand même
pas altéré cette pièce, ça va de soi. Je n'ai quand
même pas changé le pastel, etc. Je vous avoue que j'étais
très tenté de la faire photographier et peut-être d'en
faire une carte de voeux personnalisée. J'accepte qu'il y ait quand
même des choses à payer, ça va de soi. tyais à
partir
de cette notion de droit de propriété et de droit voisin,
etc., l'auteur voulait aller jusqu'à me faire signer un papier disant
que, bon, alors, je l'avais payée tel montant, dans x années,
elle vaudra peut-être tant et que, si je devais la vendre, moi, ou que
mes héritiers devaient la vendre - mais, entre parenthèses, par
testament, ils ne peuvent pas la vendre à l'extérieur du
Québec, ha, ha! sinon ça s'en va dans les musées nationaux
- nous devrions partager - enfin, moi ou mes ayants droit - le montant de la
plus-value entre mes héritiers et les héritiers de l'auteur. Je
vous avoue que je suis tombé à la renverse. Je me disais: J'ai le
goût d'agir dans ce domaine-là, mais est-ce qu'on ne va pas un peu
à l'excès? (17 h 30)
M. Beaulieu: Bien, écoutez, je ne sais pas. Oui, c'est
effectivement... Je vous écoute parler depuis tantôt. Les
questions que vous posez... Je pense que, quand vous parlez du copyright...
Écoutez, je pense qu'une loi ne va pas sans l'autre - ça, c'est
personnel - mais que ça prend la première. Sauter tout de suite
à la deuxième, ça m'apparaît étonnant; c'est
se priver de la première et c'est se priver beaucoup. Parce que, avec
tous les modes de reproduction d'aujourd'hui, les modes de diffusion et les
modes de retransmission, on a forcément besoin aussi d'une loi, d'une
législation qui nous permette, justement, d'aller contrôler ces
formes nouvelles et à venir. Dans tous les contrats, d'ailleurs, qu'on
nous fait signer, on nous parle toujours de formes nouvelles et à venir.
On ne sait pas trop de quoi ils parlent, mais ce n'est pas trop grave,
qu'importe.
Pour en revenir à votre question M. le député, il y
a une chose qui... Moi, je vis avec une sculpteure présentement.
Savez-vous combien elle gagne par année? J'aime autant ne pas vous le
dire; tout le monde ici serait gêné. Heureusement qu'il y a un
autre artiste qui arrive à en faire un peu plus, parce que ce serait
terrible. Ce n'est pas une question d'exploitation, mais s'il y a une
plus-value... Quand je regarde les auteurs, traditionnellement, on a
accepté que ceux qui prennent la plume, ils aient droit, après
leur mort et pendant 50 ans... Il y a les ayants droit, et la succession, et
tout ça. Pourquoi quelqu'un ferait-il une peinture ou une sculpture, .
qui est forcément considérée comme une oeuvre unique, elle
prend une plus-value, etc., et en serait forcément dissocié?
Pourquoi tout artiste en arts visuels devrait-il attendre sa retraite pour
profiter un peu de son travail? Je ne le sais pas. Je n'en ai aucune
idée. Subséquemment, pourquoi pas après? Mais tout
ça, je le sais, n'est pas dans nos moeurs, dans nos habitudes. C'est
sûr que ça nous contraint toujours un peu, et c'est pour ça
que ça nous prendrait une loi équitable qui permette, justement,
d'éviter ces vides-tà, que ça devienne du personne
à personne.
Je vais vous dire que ce ne sont pas tous les créateurs qui sont
brillants et qui sont cohérents face à l'exploitation de leurs
oeuvres. J'en ai vu donner leur travail et j'en ai vu d'autres demander des
fortunes alors que ça ne valait rien. Mais ça, c'est un jugement
que je porte. Mais, au-delà du jugement, il y a des
inégalités incroyables parce que c'est à l'avenant. C'est
selon le pouvoir de négociation de chacun. Effectivement, vous pouvez
acquérir une toile ou une sculpture et l'artiste, pour des raisons x,
peut décider personnellement d'établir un contrat avec vous, qui
aura foi de loi, et d'y mettre des clauses aberrantes au moment où vous
voulez tellement l'oeuvre que vous allez signer, absolument. Alors,
forcément, oui, vous pouvez être-Sauf que, si on avait
l'éthique et une loi précise, bien ordonnée et bien
construite, je crois que ces problèmes-là ne se poseraient plus.
Ils seraient de l'ordre, presque, de la pensée collective, ce qui n'est
pas le cas pour l'instant, évidemment. Ça nous apparaît
aberrant de devoir payer un supplément à un artiste, soit un
peintre, soit un sculpteur, oui. Mais je crois que, dans l'avenir, il faudra
peut-être y penser.
Le Président (M. Doyon): Dernière question, M. le
député.
M. Boulerice: Brièvement, M. le Président.
L'absence d'une billetterie informatisée chez nous, ça fait
longtemps qu'on en parle, hein?
M. Beaulieu: Ça fait longtemps qu'on la souhaite. Vous
savez, une société de perception ne peut percevoir que si elle a
la possibilité de percevoir. Quand on pense au cinéma où
les gouvernements mettent des sommes énormes! Je ne ferai pas le
débat de la SOGIQ et de Téléfilm Canada, même si
j'ai déjà travaillé pour la Société
générale, à l'époque, du cinéma .
québécois. D'ailleurs, c'est un faux débat, à mon
avis. Bref, la billetterie, oui, on en a besoin. Comment les gouvernements
peuvent-ils mettre autant d'argent et laisser couler autant d'argent -
j'appelle ça laisser couler de l'argent - à des exploitants X,
qui sont parfois, vous savez... Je pense à certains exemples de films
qui ont été des succès extraordinaires - pour ne pas les
nommer, "Le déclin de l'empire américain" et d'autres films - et
il doit presque y avoir des batailles pour aller retirer un peu d'argent de la
part de ces créateurs-là. Je trouve ça inadmissible. C'est
justement parce qu'il n'y a pas de billetterie, justement parce que
l'exploitation de ces oeuvres-là, ce n'est qu'un marchandage, et un
marchandage où, forcément, le créateur est la
dernière personne qui y a droit, parce qu'il y a tellement
d'intervenants. Comment aller négocier? Est-ce qu'un réalisateur
ou un scénariste va aller négocier ses droits avec un exploitant
de salles - c'est impossible - en disant: II y a eu combien d'entrées?
Il ne se mettra pas à la
porte de tous les cinémas pour vérifier combien il y a eu
d'entrées. Donc, dans ce sens-là, oui, on a besoin d'une
billetterie, on a besoin d'un système de contrôle, tout
simplement.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. Beau-lieu.
M. Beaulieu: Je vous en prie.
M. Boulerice: Mme Schlittler, merci. Je vous remercie,
d'ailleurs, pour la documentation que vous avez eu la gentillesse de
m'adresser. M. Beaulieu, vous nous avez indiqué, avec votre
collègue, que c'était un vaste chantier, sauf que ce
n'était pas une raison de se mettre en branle immédiatement. Et
vous avez tendu la perche; votre conjointe est sculpteure, donc on se reparlera
sans doute.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: C'est à mon tour de vous
remercier, M. Beaulieu, Mme Schlittler. On se parle, et vous avez raison en
disant que c'est extrêmement complexe, tout ce dossier-là. On va
essayer d'y voir clair, malgré qu'effectivement il y ait deux
juridictions, donc ça complique. Et il semblerait... et c'est ce que
j'ai de la difficulté à comprendre; on va aller fouiller
après la commission. C'est que je ne comprends pas pourquoi, d'une
certaine façon, malgré les normes internationales, etc., les
auteurs canadiens aussi - un auteur est un auteur et a besoin de vivre - ne
demandent pas la même chose. Ou s'ils le font, ils ne le font
peut-être pas de façon aussi claire que nous, encore une fois.
Alors, on va essayer, finalement, de regarder, mais de regarder tout ça
dans son ensemble. Alors, merci d'avoir été ici.
M. Beaulieu: Nous vous remercions aussi, et bonne chance. C'est
un travail énorme que vous avez entrepris et qui vous attend encore.
Nous vous remercions de cet effort, et de le faire. Merci.
Le Président (M. Doyon): Alors, au nom des membres de la
commission, M. Beaulieu, Mme Schlittler, ça m'a fait plaisir de vous
recevoir. Je vous permets de vous retirer pour que nous puissions entendre les
représentants du Regroupement des écoles de musique
privées du Québec inc. Merci beaucoup.
J'inviterais maintenant ces personnes à bien vouloir prendre
place à la table de nos invités. Je suis très heureux que
nous puissions les avoir parmi nous. Je leur souhaite la bienvenue. Je les
invite à nous faire leur présentation de mémoire, enfin
à résumer leur propos d'une façon ou d'une autre, comme
ils le voudront bien, pour que nous puissions ensuite commencer la discussion
avec eux. Vous avez la parole.
Mme Boily (Brigitte): M. le Président, Mme la ministre,
mesdames et messieurs, il existe au Québec près de 150
écoles de musique, avec ou sans but lucratif.
Le Président (M. Doyon): J'ai négligé de
vous demander de bien vouloir vous identifier, s'il vous plaît.
Mme Boily: Oui, je suis Brigitte Boily, la secrétaire du
Regroupement des écoles de musique privées du Québec.
Le Président (M. Doyon): J'en conclus que c'est Mme
Morrier-Gauthier, l'autre personne.
Mme Morrier-Gauthier (Pauline): Pauline Morrier-Gauthier,
présidente du Regroupement des écoles de musique.
Le Président (M. Doyon): Très bien.
Regroupement des écoles de musique
privées du Québec inc.
Mme Boily: Alors, des écoles avec ou sans but lucratif,
qui possèdent présentement un permis de culture personnelle du
ministère de l'Éducation. 29 de ces écoles provenant de
diverses régions du Québec, telles la Côte-Nord, l'Estrie,
le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie, Montréal, Québec,
l'Abitibi-Témiscamingue et le Saguenay-Lac-Saint-Jean, forment le
Regroupement des écoles de musique privées du Québec. Il
regroupe au-delà de 7000 élèves et près de 350
professeurs.
Parmi les principaux objectifs retenus par les membres du Regroupement,
on remarque la reconnaissance d'un statut, la promotion de la qualité de
la formation musicale qu'ils transmettent, la promotion de leur
accessibilité, la recherche de sources de financement adéquates
et une concertation des actions auprès des instances gouvernementales
pour assurer leur viabilité et ainsi apporter des retombées, tant
au niveau local que régional et provincial.
Mme Morrier-Gauthier: Alors, après les membres de la
création, c'est la formation. On devrait aussi parler de
création, puisque nos écoles sont des créations du milieu.
Les membres du Regroupement des écoles de musique privées du
Québec ont examiné la proposition qui a été
présentée au ministère des Affaires culturelles par le
groupe-conseil présidé par M. Roland Arpin relativement à
la politique de la culture et des arts au Québec.
Directement concernés par la politique de la culture et des arts
du Québec, nous, du Regroupement des écoles de musique
privées du Québec, soucieux de l'avenir de la formation musicale
au Québec, semblons percevoir à la lecture de la proposition:
1° un désengagement total - puisque
absence de propos - en ce qui concerne la formation
spécialisée offerte par tout le réseau des écoles
de musique privées subventionnées par le ministère des
Affaires culturelles; 2° une ambiguïté en ce qui a trait aux
principales voies que devront emprunter au cours des 10 prochaines
années ceux qui se consacrent au développement de la culture et
à l'action culturelle.
Qu'adviendrait-il au soutien moral et financier du Regroupement des
écoles de musique privées du Québec? Alors, celui-ci
désire exposer ses craintes et élaborer les motifs justifiant le
bien-fondé du rôle du ministère des Affaires culturelles de
promouvoir et de soutenir, tant moralement que financièrement, les
écoles de musique privées. Il est primordial que les
écoles de musique privées possédant un permis
d'enseignement accordé officiellement par le ministère de
l'Éducation, ancrées dans la structure de la formation
générale spécialisée et professionnelle de la
musique, demeurent au sein du ministère des Affaires culturelles. Il en
va de sa survie. Qui soutiendra la formation musicale au Québec si le
ministère des Affaires culturelles ne le fait pas?
La musique a été reconnue depuis fort longtemps comme une
discipline privilégiée dans la formation des individus. Il faut
que chaque enfant ait réellement accès à une formation
musicale de qualité, quel que soit l'endroit où il est né,
où il habite, où il étudie. Le rôle des
écoles de musique privées est à considérer dans la
formation de base et préprofessionnelle. Leur présence dans des
milieux diversifiés améliore l'accessibilité des jeunes
musiciens et musiciennes qui veulent poursuivre des études musicales.
Cette formation, loin de doubler l'enseignement donné dans le secteur
public, est un complément essentiel à chaque élève
qui manifeste le désir de se spécialiser dans la formation
musicale. L'école publique suscite un premier éveil alors que
l'école de musique privée répond au besoin suscité
chez ceux qui souhaitent poursuivre une démarche musicale plus
approfondie.
Il faut reconnaître la compétence des écoles de
musique privées du Québec comme partenaires
privilégiés pour l'avancement du niveau musical au Québec.
Ces écoles suppléent à une lacune évidente et font
évoluer indéniablement la qualité de la formation
musicale. Ces écoles sont nées pour et par le milieu. Celui-ci a
créé cette spécialisation pour satisfaire un besoin
indispensable et pour compléter des services déjà offerts
par le ministère de l'Éducation - les commissions scolaires - et
par le ministère des Affaires culturelles - les conservatoires. Le
milieu a développé les écoles de musique privées
où l'on apprend la musique et où l'on vit la musique. Ces
écoles existent depuis une vingtaine d'années, sont
légalement structurées, clairement définies, ont des
objectifs précis et offrent des programmes officiels. Elles collaborent
étroitement avec les autres institutions offrant la formation musicale
afin de garantir l'accessibilité et la continuité de la formation
à tous les niveaux.
Ayant déjà reçu du ministère des Affaires
culturelles, le 13 février 1991, l'assurance que la question du volet
formation serait abordée par le groupe-conseil Arpin sur la politique
culturelle, le Regroupement des écoles de musique privées ne
comprend pas et s'étonne du silence du groupe-conseil Arpin qui,
malgré tout, timidement, propose à la fois une politique de
développement et d'accessibilité à la culture et une
politique qui semble être à rencontre, c'est-à-dire un
désengagement total du ministère des Affaires culturelles de la
formation musicale, et ce, à tous les niveaux.
Qu'adviendra-t-il de la formation musicale spécialisée?
Qu'adviendrait-il des professionnels de la musique, ces artistes
pédagogues enseignant dans les écoles de musique si celles-ci
venaient à disparaître? Qu'adviendra-il des artistes
créateurs et interprètes s'ils perdaient leurs revenus garantis
par ces écoles de musique pour leur enseignement? Qu'adviendra-t-il de
la mission des conservatoires sans l'existence des écoles de musique
privées en formation spécialisée? Et que dire de la
survivance de l'orchestre symphonique régional, de l'orchestre
préparatoire, des camps musicaux, et le reste?
Dans son avis au ministre de l'Éducation sur l'éducation
artistique à l'école, le Conseil supérieur de
l'éducation rappelle le bien-fondé des objectifs de
développement intégral définis pour ('éducation. Il
réaffirme l'importance irremplaçable de l'éducation
artistique, à la fois comme composante d'une formation de base
équilibrée et comme moyen de développer des facettes de
plus en plus reconnues comme déterminantes du processus d'apprentissage
lui-même. (17 h 45)
Tout le travail de formation ne se fait pas à l'école. Il
y a trop de contraintes d'horaire, de contraintes de temps. Alors, il faut
compléter par l'école de musique privée.
Je voudrais vous définir exactement ce que c'est, une
école de musique privée. C'est un milieu où non seulement
on apprend la musique, mais où l'on fait de la musique et où l'on
vit la musique. C'est un organisme sans but lucratif. C'est un milieu
accessible à la formation musicale. C'est un milieu où l'enfant
et l'adulte se côtoient dans la recherche, la découverte, la
création, l'expression et la communication. C'est un lieu où
chacun retrouve la satisfaction de ses besoins identifiés, l'atteinte de
ses objectifs. C'est un lieu où chacun façonne son idéal
culturel. C'est un lieu qui permet à chaque élève qui en
manifeste l'intérêt et les aptitudes d'atteindre, dans des
conditions essentielles, la formation musicale désirée. Alors,
cette formation, il peut l'obtenir à son rythme, à l'âge
désiré, dans la discipline de son choix, en cours individuel ou
en cours de groupe, avec un
professeur spécialiste de la discipline de son choix, en suivant
un programme spécifique et reconnu, c'est-à-dire menant à
la certification, et en suivant un programme garantissant la continuité
dans un environnement approprié et enrichissant, dans un milieu de vie
musicale où il y a des locaux aménagés, du matériel
spécialisé et adéquat, dans une ambiance vitale pour cet
art - regroupement de professeurs et d'élèves, possibilité
offerte aux parents d'assister aux cours - dans un milieu qui offre des
activités spécialisées complémentaires, tels
concerts, cliniques, classes de maître, musique d'ensemble, cours de
formation de base plus cours d'histoire de la musique, et le reste, avec un
encadrement personnalisé, compétent et indispensable. Toutes ces
écoles ont un calendrier pédagogique de 30 semaines.
Les objectifs pour ces écoles sont de favoriser la promotion de
la musique; de rendre l'éducation musicale graduelle et
spécialisée à la portée de tous; d'offrir des
méthodes nouvelles d'apprentissage; d'offrir une programmation souple
adaptée aux besoins et au rythme des étudiants; de permettre une
vie musicale aux étudiants en leur offrant la possibilité de
mettre en application dans l'immédiat les connaissances acquises aux
cours par une participation aux activités de l'école; enfin, de
préparer en vue d'études supérieures les étudiants
qui en manifestent le goût et les aptitudes par une reconnaissance de
droit et de permettre périodiquement aux étudiants ou à
des groupes d'étudiants de se produire en public.
Les professeurs de ces écoles possèdent une maîtrise
en musique, ou un baccalauréat en musique, ou un permis d'enseignement.
Quelques-uns détiennent un DEC, mais avec supervision de la direction.
Les professeurs doivent être autorisés par les écoles
reconnues afin de préparer et de présenter leurs
élèves aux examens de contrôle. En grande majorité,
les professeurs se perfectionnent de façon continue et assidue.
An niveau collaboration, d'une pan:, les écoles de musique sont
un apport vital au Conservatoire de musique du Québec dans le sens que
ces écoles préparent adéquatement les élèves
qui ont déjà choisi de devenir des musiciens professionnels. Il
en est de même pour les niveaux collégial et universitaire, les
camps musicaux, les orchestres, les harmonies. D'autre part, des collaborations
très étroites s'établissent en ce qui concerne les classes
de maître, les cliniques, les concerts conjoints, les concerts
d'élèves, les examens, l'orchestre symphonique, le
perfectionnement des maîtres, la publicité. De plus, elles sont un
soutien important pour les créateurs et leurs oeuvres, le marché
d'instruments de musique, de la musique en feuilles et du disque, des concerts,
de la radio, de la télévision. Il est important de remarquer que
les écoles de musique privées du Québec peuvent
répondre adéquatement et professionnellement à diverses
ententes avec les commissions scolaires.
Au niveau affiliation et contrôle, les écoles de musique
privées sont affiliées à de grandes écoles
reconnues provincialement pour la rigueur de leurs programmes et de leurs
examens. Ces grandes écoles reconnues provincialement sont
l'Académie de musique de Québec; le Conservatoire de musique du
Québec; l'École de musique de l'Université McGill;
l'École de musique Vincent d'Indy; l'École préparatoire de
musique de l'Université du Québec à Montréal;
l'Extension de l'École de musique de l'Université Laval; le
Mouvement de guitare classique La Soribande; le Mouvement musical Vivaldi; les
Petits violons.
Dans les écoles de musique privées du Québec, la
qualité de l'enseignement est assurée, supervisée,
contrôlée professionnellement grâce à l'aide de ces
écoles. Régulièrement, les professeurs suivent des stages
de pédagogie ou participent à des ateliers de formation ou
d'information concernant les programmes de ces grandes écoles. Des
musiciens nommés par ces institutions reconnues viennent annuellement
juger les examens, ou les élèves se rendent dans ces institutions
pour passer les examens. Les élèves défraient les
coûts des examens. Les grandes écoles reconnues remettent les
résultats d'examens, les diplômes et les commentaires des
juges.
Au niveau administration, toutes ces écoles sont
administrées par une assemblée générale et un
conseil d'administration. Elles sont toutes sans but lucratif. Au niveau
financement, les écoles de musique privées sont, d'une part,
partiellement aidées par le gouvernement municipal ou par des programmes
du gouvernement provincial - le ministère des Affaires culturelles et le
ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu -
et par des programmes du ministère de l'Emploi et de l'Immigration du
Canada, d'autre part, et pour la plus grande partie de leur budget, par
l'autofinancement, c'est-à-dire frais de cours, frais d'inscription,
activités-bénéfice, commandites, bénévolat,
il faut offrir les cours à un coût accessible, un coût qui
soit à la portée d'un plus grand nombre possible
d'élèves, de quelque milieu qu'ils soient, un coût qui
pourrait éviter toute discrimination socioculturelle, puisque chaque
jeune a droit à une formation intégrale.
Toutes les écoles de musique privées tiennent un
rôle primordial de préparation lointaine et immédiate dans
la formation générale, spécialisée et
professionnelle des musiciens et des musiciennes. Elles ont une vocation
spécifique dans l'organigramme de la structure et de la formation
musicale, secteurs privé et public, cette vocation spécifique
étant clairement identifiée en 1989 dans les actes du Sommet sur
l'avenir de la formation musicale au Québec, et je cite: "L'école
de musique privée est actuellement un pôle essentiel du
développement culturel de nombreux milieux." On en retrouve donc dans
toutes les régions. Elles contribuent au develop-
pement de la collectivité, transmettent des valeurs de base
à notre société et sont des employeurs importants.
Les écoles de musique sont un outil complémentaire et
spécifique. Il existe déjà une amorce dans le
développement d'ententes entre le privé et le public, entre ces
écoles et des commissions scolaires qui utilisent leurs ressources
musicales et pédagogiques lorsqu'elles les associent à leurs
écoles à vocation musicale, entre autres Arts-Études. La
qualité des services qui y sont donnés vient s'ajouter à
l'impact du secteur public et animer la vie artistique et culturelle en
général. Par un phénomène de mise en valeur des
ressources, elles servent de moteur à l'évolution musicale si
difficile à maintenir actuellement.
Les écoles de musique privées du Québec ont
été mises sur pied à force de travail et de
bénévolat. Elles se sont souciées de la qualité des
services de formation et doivent, à ce titre, maintenir un statut
d'établissements de formation spécialisée par des
professionnels. Assurer l'enseignement spécialisé qui mène
à la formation préprofessionnelle et professionnelle est une
tradition forte au Québec. Cependant, les contraintes politiques
fluctuantes, les moratoires sur les subventions de fonctionnement et d'aide
à l'équipement, qui durent depuis quatre ans chez ces organismes
de formation, ainsi que la disparition des fonds d'appariement entraînent
des problèmes sérieux de développement, voire même
de viabilité.
Nous croyons que le ministère des Affaires culturelles doit
réaliser l'importance du rôle des écoles de musique
privées du Québec et les consulter par l'entremise du
Regroupement des écoles de musique privées du Québec dans
Je processus d'élaboration des orientations de la formation musicale
dans notre province. Cette reconnaissance est essentielle pour les
écoles de musique privées qui vivent une situation
financière précaire. Leur survie est fragile et force nous est
donnée de constater l'essoufflement des permanents et des
bénévoles.
En résumé, les propositions du Regroupement des
écoles de musique privées du Québec, je1 les
formule ici:
Considérant que la formation musicale spécialisée
est déjà, depuis plus de 20 ans, offerte par des organismes
privés offrant des garanties d'enseignement de qualité et
l'importance de toute cette formation musicale au Québec, alors le
Regroupement des écoles de musique privées du Québec
propose: 1° Que le MAC considère la formation
spécialisée de la musique comme un volet essentiel du rôle
de son ministère; 2° Que la formation musicale
spécialisée soit accessible dans toutes les régions;
3° Que le MAC reconnaisse le Regroupement des écoles de musique
privées inc. comme une association culturelle provinciale; 4° Que le
MAC reconnaisse la complémentarité des efforts du REMPQ dans la
formation musicale au Québec; 5° Que le MAC reconnaisse le REMPQ
comme partenaire essentiel pour l'activité culturelle pour l'ensemble
des citoyens; 6° Que le MAC reconnaisse le REMPQ comme partenaire
privilégié pour la formation spécialisée de la
musique et, ainsi, pour l'avancement du niveau musical au Québec; 7°
Que le MAC soutienne économiquement les écoles de musique
privées faisant partie du REMPQ; 8° Que le MAC facilite
l'accessibilité à l'enseignement spécialisé offert
par les écoles de musique privées faisant partie du REMPQ; 9°
Enfin, que le MAC facilite les ententes entre le MEQ et le REMPQ pour des
projets complémentaires de formation.
Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, madame. Mme
la ministre, vous avez maintenant la parole.
Mme Frulla-Hébert: Merci beaucoup, Mme Morrier-Gauthier,
Mme Boily aussi. Vous dites: On a passé quand même rapidement, au
niveau du rapport Arpin, sur tout l'enseignement de la musique. Je voudrais
profiter de l'occasion pour souligner l'apport essentiel, justement, des
écoles de musique privées - j'en parlais avec M. Thibault -
à l'avancement et à la connaissance de la musique. Vous savez,
quand on élabore - et, de toute façon, on s'en était
parlé - une politique culturelle, c'est le temps de se remettre en
question au complet. Et ça, c'est dans tous les milieux qu'on se remet
en question. Et, à un moment donné, on s'est dit: Bon,
l'enseignement en soi, tout l'enseignement - je ne parle pas des orientations,
je ne parle pas, finalement, de l'analyse des besoins, mais ce dont on parle,
c'est de l'opération, écoles de musique, même
conservatoires - une fois que les orientations sont données, et tout
ça, est-ce que ça devrait être chez nous ou est-ce que
ça devrait aller au ministère de l'Éducation? Il y a la
formation aussi. Ils font de la formation professionnelle. Sont-ils mieux
équipés que nous pour répondre à vos besoins au
niveau des plans d'ensemble, en comprenant toujours que les orientations, puis
tout ça, relèvent quand même du ministère des
Affaires culturelles, puisque, bon, au niveau du dossier culture, ça
devrait relever du ministère des Affaires culturelles?
Mme Morrier-Gauthier: À l'école, dans le secteur
public, le temps est tellement restreint pour toutes les disciplines qui
existent que l'enseignement se fait par groupes. Et la différence
principale qui fait en sorte que les écoles de musique privées,
le conservatoire et les écoles du secteur public ne sont pas un
duplica-
ta, c'est que, dans le secteur public, on parie du violon, alors que,
dans les autres écoles, on en joue. C'est ce qui fait toute la
différence.
Mme Frulla-Hébert: Juste une précision. Je pense
que, pour bien me faire comprendre, moi, je ne dis pas: On abolit. Au
contraire, parce que c'est de l'enseignement spécialisé et c'est
de la formation. Moi, ce que je dis, c'est que le réseau, tout le
système - écoles de musique privées, conservatoires, etc.
- est-ce que ça devrait rester chez nous, au niveau des
opérations, ou s'en aller, toujours selon notre supervision en termes
d'orientation, de contenu, puis tout ça, en collaboration mais au
ministère de l'Éducation? C'est ça que je dis.
Mme Morrier-Gauthler: C'est sûr, parce que le mot
"éducation" est attaché à cette formule-là. Mais il
ne faut pas oublier, ici, que c'est l'éducation culturelle et une
éducation spécifique. Même si le ministère des
Affaires culturelles gardait les orientations, je ne pense pas qu'on puisse
jamais, dans le secteur public, avoir l'opportunité de remplacer ce que
le ministère des Affaires culturelles peut arriver à faire au
niveau de la formation culturelle, et spécialement du côté
de la musique.
Mme Frulla-Hébert: Moi, ce que je veux dire... Comme les
collèges privés, par exemple, existent dans le réseau,
comme l'enseignement spécialisé existe aussi dans le
réseau de l'éducation, moi, je dis: Est-ce que ce serait mieux de
garder le concept des écoles de musique privées? Pas dire: On va
les remplacer, et ce sont les écoles publiques qui donneront la
formation. Ce n'est pas ça, là. C'est le concept des
écoles de musique privées, comme les collèges
privés, comme la formation professionnelle, et puis tout ça, mais
au niveau du réseau de l'éducation, si on veut, faisant partie du
ministère de l'Éducation versus le ministère des Affaires
culturelles.
Mme Morrier-Gauthier: Oui, je comprends très bien, sauf
que...
Mme Frulla-Hébert: C'est ça, là, je ne veux
pas qu'on parie...
Mme Morrier-Gauthier: ...si les orientations sont bien
définies, on peut tout réussir. La seule chose qui manque, ce
sont les ressources financières. Si le ministère de
l'Éducation, financièrement, est en mesure de recevoir toute
cette éducation ou toute cette formation plus spécialisée,
moi, je dirais que c'est...
Mme Frulla-Hébert: Autrement dit, c'est...
Mme Morrier-Gauthier: ...sûr que, peut-être, le
ministère... Mais je regarde juste dans les régions;
peut-être que dans des secteurs qui sont privilégiés un peu
plus, comme Montréal, ces écoles... Chaque fois qu'une commission
scolaire veut ouvrir une école, à cause du
phénomène de douance, si on veut - alors, les arts, c'est un
petit peu la même chose si on veut les pousser - les gens s'objectent,
les professeurs s'objectent, les syndicats s'objectent. Ils ne veulent pas
privilégier une discipline plutôt qu'une autre. Alors, si on veut
instaurer des écoles à vocation, des écoles
Arts-Études, etc., dans les régions, c'est toujours plus
difficile. Compte tenu du fait que les payeurs de taxes sont encore les
mêmes, il faudrait arriver à changer toute la mentalité.
Peut-être que l'Éducation peut englober toute l'éducation,
y compris l'éducation culturelle, mais, à ce moment-là, il
y a l'éducation sportive, l'éducation au sens très large.
Alors que, là, le ministère des Affaires culturelles a un
rôle très précis: la culture. Et même, je pense
qu'à un moment donné, si le ministère des Affaires
culturelles disait: Vous, au ministère de l'Éducation, il faut
faire telle chose... Je ne sais pas jusqu'à quel point deux
ministères peuvent... En tout cas, moi, je pense que, s'il y a des sous
au ministère de l'Éducation pour recevoir toute cette formation,
ça peut se faire, mais il va falloir qu'à la base les principes
ou les grands objectifs généraux du ministère de
l'Éducation soient orientés de façon différente.
(18 heures)
Mme Frulla-Hébert: Quand on parie du programme
Arts-Études, est-ce que vous faites partie de... Vous dites que vous
faites partie de ces programmes-là. C'est parce qu'on a beaucoup
parlé avec les intervenants du monde de l'éducation, et on aura
un dernier intervenant, aussi, demain. Ils sont vraiment venus en bloc et il y
a un consensus. Ce n'est pas facile d'avoir des consensus, finalement,
spécialement au niveau du milieu et au niveau des affaires culturelles,
mais il y a certains consensus qui, finalement, émanent de cette
commission parlementaire. Il y en a un, c'est le rôle que le
ministère de l'Éducation doit jouer au niveau culturel,
c'est-à-dire que toute la sensibilisation culturelle passe par
là. J'étais au Salon du livre hier après-midi et des
jeunes sont venus. Il paraît qu'on voyait des jeunes dans les
allées, bouquinant. C'est tout ça, là, et ça
commence là. Je me dis: Qu'est-ce qu'il y aurait à faire? On se
demandait si le ministère de l'Éducation devait tout prendre. Ce
serait une bonne façon, justement, de conscientiser à
l'importance de mieux intégrer les deux. Ou, sinon, qu'est-ce qu'il y
aurait à faire, justement, pour avoir des programmes peut-être
mieux intégrés ou en faire plus au niveau du système
scolaire?
Mme Morrier-Gauthier Pour vous donner un exemple, dans notre
région, en ce qui concerne Arts-Études, c'est un programme qui
s'est préparé pendant trois ans et a eu comme résultat que
35 élèves en musique des écoles et
23 du conservatoire - donc, disons seulement 60 élèves sur
2500 à 3000 - peuvent y participer. Ce sont des élèves qui
ont fait des choix, bien sûr, mais on ne répondra pas, avec une
école Arts-Études, à une population, ou on ne donnera pas
l'accès à une société de jeunes en
général.
Maintenant, si le ministère de l'Éducation changeait ses
politiques et les rendait plus appropriées à l'unité
étudiante - on est toujours dans un grand ensemble, et c'est ce qui est
difficile - l'élève recevrait, à la base, une formation
générale et un goût qui lui permettraient d'atteindre la
formation plus spécialisée; le spécialisé va vers
le professionnel et, de là, au perfectionnement. Il faudrait qu'il y ait
de gros déblocages au ministère de l'Éducation pour
arriver à faire exactement ce qui se fait présentement de mieux,
et à une petite échelle. C'est encore à une petite
échelle.
Mme Frulla-Hébert: Parfait. Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la ministre. M.
le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, vous avez la parole.
M. Boulerice: Oui. Mme Morrier-Gauthier, Mme Boily, bonsoir et
bienvenue à cette commission. Vous avez bien fait de mentionner dans
votre mémoire le sommet de 1989 auquel, d'ailleurs, j'assistais. Je me
rappelle, d'ailleurs, la remarquable prestation de M. Lussato à ce
moment-là. Je pense qu'il en est sorti, effectivement, des actes fort
intéressants. Je sais qu'en fin de semaine prochaine ça se
discutera encore à Montréal.
Donc, moi, je vous dis d'emblée que j'ai de très grandes
réserves quant à un délestage de ce secteur vers un autre
ministère. C'est une opinion que partage mon collègue et ami, le
député de Jonquière, qui m'accompagne et qui, d'ailleurs,
interviendra. Je ne suis pas favorable à ce délestage, de peur
d'un certain nivellement. On reconnaît, d'ailleurs, l'importance de votre
Regroupement en termes de qualité de formation. Je sais que, dans fa
longue nomenclature des institutions qui vous sont apparentées, il y a
le Centre d'art de Préville auquel j'ai été
associé. J'espère que mon amie Véra continue toujours d'y
oeuvrer, et si vous la revoyez avant moi vous lui ferez mes salutations. Donc,
ceci étant dit, quant au positionnement de ma formation politique face
à votre Regroupement, la chose est faite. Maintenant, si vous le
permettez, mon collègue demandera le consentement de la commission,
parce qu'il désirerait que vous engagiez le dialogue avec lui. Le
député-maire de Jonquière a toujours eu de profonds
intérêts dans le développement de la musique.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Sainte-Marie-Saint-Jacques, avec une demande aussi explicative que celle
vous venez de faire, on ne saurait, je crois, de ce côté-ci,
refuser le consentement pour notre collègue, le député de
Jonquière. Vous avez la parole.
M. Dufour: Merci beaucoup, M. le Président. Je peux vous
dire que, oui, je me considère comme privilégié de pouvoir
m'adresser à des gens de mon milieu, que je connais bien, que j'ai vus
à l'oeuvre et qui ont produit des résultats extraordinaires avec
de faibles moyens. Je peux vous dire que le mémoire qui nous est
présenté est assez neutre, en fait, puisqu'il présente
l'aspect général du Regroupement des écoles de musique
privées du Québec. Mais j'aurais aimé, à partir du
général, aller un petit peu plus dans le détail. Je
voudrais demander, justement, en partant de ce principe-là, à Mme
Morrier-Gauthier ou à Mme Boily - parce que je sais que ça
pourrait peut-être toucher l'humilité de l'une ou l'autre, ou des
deux - combien d'élèves vous avez dans votre école?
Mme Morrier-Gauthier: Dans l'école... dans le secteur de
Jonquière?
M. Dufour: Dans l'Atelier de musique de Jonquière.
Mme Morrier-Gauthier: Entre 1000 et 1200 depuis une dizaine
d'années. À chaque année, donc, nous avons entre 1000 et
1200 élèves.
M. Dufour: Est-ce que vous pouvez me donner, de mémoire,
la participation de la municipalité à cette école?
Mme Morrier-Gauthier: La municipalité nous donne une
subvention monétaire de 18 000 $, 20 000 $ ou 22 000 $, variant d'une
année à l'autre. Elle nous loge également gratuitement
dans une école désaffectée qui appartient à la
commission scolaire et elle nous offre une partie du service de l'entretien,
donc les frais qui sont attachés à l'entretien de la
bâtisse. Elle nous permet également de travailler dans une autre
bâtisse qui appartient à la ville de Jonquière, soit le
centre culturel, et ce, tout à fait gratuitement. De plus, elle nous
prête du matériel didactique, des instruments de musique et elle
nous permet d'avoir accès à des services techniques qui sont
diversifiés, tels photocopie et secrétariat.
M. Dufour: Donc, l'implication de la ville est très forte
et régulière. Elle a une action soutenue. Au point de vue
monétaire, vous n'avez pas fait l'évaluation exacte des
coûts? Est-ce que vous avez l'évaluation exacte des coûts?
Par exemple, une école, quand on la chauffe, qu'on l'entretient, avec
les produits, etc., il y a un montant qui est assez important, parce que
c'était une école de 300 ou 400 élèves quand elle
était en fonction, en autant que je me
rappelle. Le centre culturel est un endroit où la
municipalité contribue, pour le fonctionnement, certainement au-dessus
de 100 000 $, pas mal plus que 100 000 $. On pourrait évaluer facilement
à 200 000 $, peut-être, l'implication de la municipalité si
on la mettait dans un cadre comme tel.
Est-ce que vous croyez que, si votre école était
transférée au ministère de l'Éducation, la
municipalité pourrait justifier de faire autant pour l'école?
Mme Morrier-Gauthier: J'en doute. Je pense que la
municipalité fait toujours des ententes avec la commission scolaire pour
le prêt de ses salles. Maintenant, nous avons déjà eu une
gratuité de la part de la commission scolaire et, après, ils nous
ont dit: Vous ne relevez pas de notre système, donc il faudra essayer de
trouver une autre solution. Et c'est la ville qui nous a aidés. Mais je
ne pense pas qu'on pourrait avoir cette opportunité-là, puisque,
déjà, c'est la commission scolaire qui fait payer la ville de
Jonquière pour l'entretien, la location, le loyer, le chauffage, l'eau
et tout le reste. Ce sont donc déjà des frais qui sont
chargés par la commission scolaire à notre organisme, mais
payés d'une autre façon.
M. Dufour: Vous avez en plus les participations des
étudiants, les frais de cours, la participation de la ville, quelque peu
le scolaire - je pense qu'ils doivent continuer un peu à vous supporter,
bon, d'une certaine façon - que vous avez aussi les campagnes de
financement. Et quand je parle de votre école comme telle, j'imagine que
toutes les écoles de musique au Québec procèdent un peu de
cette façon-là. Il y a peut-être des petites variantes;
elles ne sont pas toutes aussi grosses et aussi nombreuses au point de vue du
nombre d'élèves. Est-ce que vous avez des campagnes de support
par le public, du public, provenant du public?
Mme Morrier-Gauthier: Je pourrais parler de notre école,
mais je pourrais également dire que c'est la même chose qui se
répète dans toutes les écoles de la province.
M. Dufour: Non, mais ça, je pense qu'on fait la mise en
garde comme telle. On sait bien que, quand je m'adresse à vous, pour
votre école à vous ou l'école l'Atelier de musique de
Jonquière, ça veut dire que c'est sensiblement la même
chose ailleurs.
Mme Morrier-Gauthier: C'est ça.
M. Dufour: Mais, je pense qu'il faut particulariser, parce que,
sans ça, c'est difficile de se mettre dans un contexte. Parce que, moi,
ce que j'essaie de démontrer... Bien, vous verrez tout à l'heure
ce que j'essaie de démontrer.
Mme Morrier-Gauthier: Alors, présentement nous sommes en
campagne de financement. Nous faisons un tirage; d'autre part, nous vendons du
chocolat, des épinglettes, des chandails et différentes choses
dans la bâtisse. À l'extérieur, nous vendons des billets
pour le tirage d'une auto; nous espérons aller chercher quelque chose
comme 24 000 $. Nous préparons un grand concert à la fin de
l'année, avec des artistes invités, et nous remplissons une
grande salle de 1000 personnes. Nous essayons encore d'aller chercher des fonds
par l'entremise d'ambassadeurs. Alors, les ambassadeurs, nous les choisissons
au niveau des chefs d'entreprise, de l'industrie, du commerce - les
professionnels, en fait - et nous essayons de travailler avec les Chevaliers de
Colomb, les clubs Richelieu, et le reste. En fait, nous essayons d'aller
chercher tout ce qu'on peut dans le milieu. Et, d'année en année,
il faut recommencer. C'est toujours la même chose. Il faut recommencer.
Dépendamment des périodes où on arrive, des portes se
ferment, des portes s'ouvrent. Alors, il faut aller un petit peu partout pour
essayer de trouver des fonds.
M. Dufour: Pour la participation du public en
général, est-ce que vous pouvez quantifier à peu
près les montants que, chaque année, vous pouvez aller chercher
dans le milieu?
Mme Morrier-Gauthier: II faut toujours aller chercher à
peu près de 12 % à 15 % de notre budget dans le milieu. Et, pour
donner une idée, la subvention du ministère des Affaires
culturelles est de 4 %.
M. Dufour: Est-ce que vous connaissez beaucoup d'activités
scolaires qui reçoivent autant ou qui travaillent autant pour obtenir
des fonds de la part du public, de la part des mécènes, comme on
les appelle un peu partout? Est-ce que vous en connaissez, des activités
scolaires? Moi, j'en connais. Je peux vous en donner. Par exemple, à un
certain moment donné, il y a des élèves qui
décident d'aller faire un tour au Manitoba, un échange
d'étudiants; ils vont faire une activité très
spéciale pour ça, là, spécifiquement, mais il n'y a
pas de suite. C'est des hauts et puis des bas. Une équipe de hockey,
bien, c'est scolaire plus ou moins, là, mais ils vont faire certains
efforts pour trouver de l'argent. Est-ce que vous connaissez des groupes,
là, ou des... Par exemple, au niveau scolaire, il y a certainement des
campagnes de sécurité qui se font, mais je n'ai jamais vu de
campagne de promotion pour aller chercher des sommes d'argent du public. Est-ce
que vous pouvez nous en identifier?
Mme Morrier-Gauthier: En fait, j'enseigne également dans
le secteur public, à temps plein aussi. À chaque année, on
détermine tout simplement des concerts auxquels les élèves
vont
participer. Alors, cette année, il y aura un concert par
école, auquel tous les élèves pourront participer, et qui
engagera des fonds minimes de la part de chaque école au niveau du
comité d'orientation. Maintenant, de grands projets qui ont une
continuité, non. Ce sont toujours des choses ponctuelles, des
activités ponctuelles.
M. Dufour: En partant des deux principes ou d'un constat que,
d'une part, les municipalités s'impliquent beaucoup, règle
générale, avec les écoles de musique, que le public
participe, que les parents sont intéressés - puisque c'est en
dehors des heures scolaires que vous donnez ces cours-là, donc c'est une
augmentation à la culture de l'élève - si on
transfère au ministère de l'Éducation, ça va se
faire dans les heures des cours réguliers, à ce que je sache, en
grande partie. Est-ce que vous pouvez confirmer ou infirmer? (18 h 15)
Mme Morrier-Gauthier: Oui, peut-être que je pourrais
revenir à Arts-Études, projet auquel Mme la ministre faisait
référence tout à l'heure. Nous travaillons avec le projet
Arts-Études présentement, mais ce n'est pas la commission
scolaire qui investit des sommes pour les élèves au niveau
musique. Alors, c'est chaque élève qui paie ses cours, qui paie
son temps en musique. Ce que la commission scolaire nous apporte comme aide,
c'est qu'elle permet un horaire modifié, c'est-à-dire que les
élèves font leur temps de pédagogie le matin.
M. Dufour: Donc, je pense qu'il y a un danger, à travers
tout ça, qui nous guetterait. D'abord, c'est moins accessible. Le
programme Arts-Études, on peut dire qu'en principe tous les
étudiants y ont accès. Mais, en pratique, c'est encore
l'élite qui va en profiter. En fait, je pense que c'est un peu tout
ça. Mais je voudrais aller un petit peu plus loin. En tout cas, pour
moi, je m'inscris au même titre que mon collègue, le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, à l'effet que je
vois mal que ça puisse être transféré au
ministère de l'Éducation. Qu'on donne une formation
générale, oui, ça pourrait aller, mais si on veut aller un
peu plus loin, j'ai comme l'impression qu'on vient de fermer le couvercle puis
on va produire moins de choses, moins de résultats.
Souvent, on dit: On va juger l'arbre à ses fruits. Comme
école de musique populaire - on va l'appeler comme ça - moi, je
sais que votre enseignement, il est professionnel, il est pédagogique.
Je questionne au profit, peut-être, de la commission comme telle. Est-ce
que vous pouvez m'identifier des gens qui, chez vous, ont produit des
résultats, qui se sont produits sur la scène régionale,
nationale, internationale? Parce que, normalement, il faut pouvoir
l'identifier; ce n'est pas désincarné pour moi, là, ce que
vous faites.
C'est présent. J'en connais, des gens qui... Je ne veux pas
blesser votre modestie, mais j'espère que vous pouvez nous donner des
cas, indépendamment des personnes, où il y a eu des
résultats: des concours de musique du Canada, etc., tout ce qui se
passe. Est-ce que vous avez produit des choses de même dans votre
école?
Mme Morrier-Gauthier: C'est sûr qu'on a des
élèves... Hier, j'avais justement une communication d'une
élève qui fait partie de l'Orchestre symphonique de
Montréal. On a des élèves qui sont impliqués
maintenant dans ces grands ensembles là. On a des élèves
qui ont gagné des concours, qui en gagnent encore, de toute
façon, au niveau des concours de musique du Canada - que ce soit notre
école ou d'autres écoles, là - des concours provinciaux,
la même chose, et des élèves qui, après x
années, obtiennent des postes importants, des postes de valeur au niveau
de grands ensembles qui sont renommés, qui sont importants, en fait des
postes de prestige.
M. Dufour: Je sais que vous ne voudrez pas les identifier. Moi,
j'en connais, des gens. Madame a deux filles qui se distinguent
internationalement et... Une, en tout cas, se distingue internationalement;
l'autre est trop jeune mais ça va venir. Mais il n'y a pas seulement ces
cas-là, il y en a d'autres. Ce n'est pas une école familiale,
chez nous. C'est vraiment une école de musique. Les meilleurs, bien, ils
finissent par performer et ils vont un peu plus loin. Est-ce que vous en avez
beaucoup, par exemple, qui se dirigent, à partir de chez vous, dans les
conservatoires?
Mme Morrier-Gauthier: Oui. Nous travaillons beaucoup en
collaboration avec les conservatoires. Présentement, je ne sais pas
combien il y a d'élèves au conservatoire mais, en tout cas, je
pense que du nombre d'élèves qui sont au conservatoire
présentement, la moitié ou près de la moitié vient
de notre école de musique. Mais je dois dire que tous les
élèves qui sont au conservatoire viennent des écoles de
musique, par exemple. Il y a également le fait que le conservatoire
travaille dans notre région du côté
préprofessionnel. Alors, plus d'une centaine d'élèves qui
sont aptes, qui ont des dispositions précises quant à leur valeur
comme interprètes reçoivent un montant ou ont un cours
payé avec leur professeur dans nos écoles, pour se
préparer à l'enseignement professionnel au conservatoire. Alors,
ce sont des collaborations qui sont intenses, qui sont très profitables
et pour les écoles et pour les conservatoires.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, madame.
C'était tout le temps qui était... Peut-être un mot de
remerciement, M. le député de Jonquière? Ce sont des gens
de chez vous, là.
M. Dufour: Oui. Je voudrais surtout rendre hommage à
l'Atelier de musique de Jonquière qui, à mes yeux, et je l'ai dit
au départ, fait un travail extraordinaire dans le milieu. Mais je serais
curieux, en tout cas, d'aller un peu plus loin, parce qu'on parle de culture,
mais la culture, ça comprend toutes ses facettes, à mon point de
vue. Et je suis convaincu que les gens dont ils ont la charge ou dont ils
prennent la responsabilité pour un certain nombre d'heures de la
journée ou de la semaine, ce ne sont pas les enfants les plus
compliqués au point de vue délinquance. Moi, je suis certain
qu'ils font une oeuvre extraordinaire. L'école est bien tenue. Comme
maire ou comme ex-malre de la ville de Jonquière, j'ai eu l'occasion de
les voir à l'oeuvre, de les entendre, de vivre avec les jeunes qu'ils
ont en charge et puis avec les responsables et je pense bien que, chez nous,
ça a toujours été à l'enseigne du succès,
à l'enseigne aussi du sérieux et d'une volonté certaine de
se développer musicalement et aussi cultu-rellement.
C'est dans ce sens-là que je vois tout l'apport des écoles
privées. Je ne peux pas dire si c'est de même partout au
Québec. Je le suppose. J'ai bien confiance que c'est exactement ce qui
existe, d'autant plus que c'est une des écoles, chez nous, qui a
possiblement la plus nombreuse clientèle. Elle a toujours
été pénalisée par ce nombre, parce qu'il y a des
critères qui font, au ministère - à moins que ça
ait changé dernièrement - que, jusqu'à 500 ou 600
élèves, il y a un montant qui est donné et, plus que
ça, ils sont bloqués. Ça ne les a pas
empêchés d'avoir 1200 élèves et de continuer. Donc,
le ministère s'est impliqué mais pas très fortement.
Peut-être que ça serait bien qu'on regarde ça très
sérieusement pour voir s'il y a quelque chose à faire
là-dedans. J'ai bien confiance, et j'y crois, à cette
école-là. Merci beaucoup.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député. Nous partageons votre confiance. Mme la ministre, vous
avez un petit mot de remerciement?
Mme Frulla-Hébert: Merci, M. le Président. Mme
Morrier-Gauthier et Mme Boily aussi, je vous remercie. Vous nous avez
aidés aussi à cheminer dans notre discussion. C'est parce
qu'à un moment donné on regarde et on dit que le système
d'éducation - nous avons d'ailleurs le chef de cabinet de l'Enseignement
supérieur et de la Science avec nous - est un système qui,
globalement, est de 11 000 000 000 $ versus le budget des Affaires culturelles
où, veux veux pas, on essaie d'en donner à tout le monde mais...
Alors, on se dit: Où peut-on être plus efficaces? Mais toujours
avec l'objectif, par exemple, de donner, de dispenser le meilleur enseignement
possible et de promouvoir aussi la culture chez les jeunes. Alors, de là
part la discussion. Mais vous nous avez aidés à cheminer, alors
je vous remercie sincèrement d'avoir accepté notre
invitation.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la ministre. Mme
Morrier-Gauthier et Mme Boily, au nom des membres de cette commission, je tiens
à vous remercier. Ceci met fin à votre audition et aux travaux de
cette journée. Je vais donc maintenant ajourner les travaux de la
commission à demain matin, 10 h 15, en cette salle.
La commission est maintenant ajournée. Bon appétit
à tout le monde!
(Fin de la séance à 18 h 23)