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(Quinze heures trente-huit minutes)
Le Président (M. Doyon): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission de la culture continue les travaux qui ont
été entrepris il y a maintenant quelques semaines et
procède à la continuation du mandat qui lui a été
accordé par l'Assemblée nationale. Il s'agit pour nous de
procéder à une consultation générale et à
des auditions publiques sur la proposition de politique de la culture, telle
que présentée à l'Assemblée nationale au mois de
juin l'an dernier. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
Le Secrétaire: II n'y a pas de remplacement, M. le
Président.
Le Président (M. Doyon): Tout simplement, nous allons
suivre les mêmes règles que d'habitude. Avant d'expliquer ces
règles, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, vous
m'avez demandé la parole?
M. Boulerice: Oui, M. le Président. Une question à
la présidence et, par voie de conséquence, peut-être
également au représentant du gouvernement, c'est-à-dire la
ministre des Affaires culturelles. M. le Président, je reçois
régulièrement à mon bureau de la correspondance de groupes
et organismes qui se sont inscrits à cette commission et qui, n'ayant
pas encore obtenu de date, s'interrogent à savoir s'ils seront entendus
à la commission. Est-ce que vous avez l'intention d'entendre tous les
groupes qui se sont dûment inscrits à cette commission?
Le Président (M. Doyon): La présidence a
été saisie du même genre de demande aussi. Ce que nous
avons fait jusqu'à maintenant, c'est que nous avons convoqué les
groupes une semaine à l'avance, c'est-à-dire que les groupes pour
la semaine prochaine sont déjà convoqués. Ces
gens-là savent, par voie de conséquence, qu'ils vont être
entendus. Maintenant, pour ce qui reste des groupes après la semaine
prochaine, ça reste à voir, mais normalement ça devrait
être décidé dans le courant de la semaine de façon
à ce que nous puissions prendre une décision à savoir
s'ils seront entendus maintenant ou peut-être plus tard, et de quelle
façon. De toute façon, moi, ce que je proposerais, c'est que le
représentant de l'Opposition avec Mme la ministre puissent s'en parler
en dehors de la commission. La présidence se conformera aux ententes qui
seront prises entre les deux partis, à ce moment-là.
M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Les règles qui nous
gouvernent sont les suivantes: 10, 15 minutes de présentation; ensuite,
le reste du temps pour discuter avec les gens qui nous visitent et qui nous
font l'honneur d'être présents avec nous. C'est comme ça
qu'on a procédé jusqu'à maintenant. Nous allons continuer
de le faire. Le président, bien sûr, devant se réserver le
droit d'intervenir pour faire respecter l'horaire, compte tenu du grand nombre
d'intervenants que nous avons à recevoir. Bien sûr, il nous en
reste encore plusieurs. Donc, il nous faut faire diligence et vous me verrez
dans l'obligation de rappeler aux honorables membres de cette commission que le
temps s'écoule parfois et qu'il nous faut abréger.
Je vois que les gens du groupe Juste pour Rire sont devant nous. Ils
sont déjà installés. Je leur souhaite la plus cordiale des
bienvenues. Je les invite, le plus sérieusement du monde, à nous
faire part de leur présentation. Après ça, on va entamer
la discussion avec eux. Tout d'abord, veuillez commencer par vous
présenter, s'il vous plaît.
Festival Juste pour Rire
M. Rozon (Gilbert): Mon nom est Gilbert Rozon. Mes compagnons de
route aujourd'hui sont...
M. lacobacci (Pascale): Pascale lacobacci, vice-président
au marketing.
M. Cournoyer (Louis): Louis Cournoyer, directeur
général du Festival Juste pour Rire.
Le Président (M. Doyon): Vous avez la parole.
M. Rozon: Je ne suis pas venu seul parce que c'est long de faire
la 20 tout seul.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rozon: M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM.
les députés, merci de me permettre d'exprimer ici quelques
opinions et convictions et de hasarder des suggestions; pas "bazarder".
Je fais dans le non-lucratif et le lucratif. J'ai à coeur ce qui
intéresse cette commission de la culture. Je suis sous l'humour comme
d'autres sont sous la musique ou le théâtre. L'humour a ses
registres: la parodie, la satire, le grotesque, l'absurde. L'humour s'exprime
dans différents genres: le cinéma, la télévision,
le théâtre, la
littérature. L'humour a ses vedettes: Deschamps, Chaplin,
Molière, Devos, Woody Allen, comme la musique a ses virtuoses. L'humour
a besoin et se préoccupe de formation. C'est mon attachement à
l'expression culturelle et à son avenir qui m'ont amené ici
aujourd'hui.
La relève et la formation. Quand je parle de relève, je
voudrais ici élaborer en vous racontant l'incursion de Juste pour Rire
en formation. En 1982, avec la dernière crise économique,
coïncidait curieusement l'émergence de nouveaux humoristes. En
1983, naissait le Festival Juste pour Rire qui profita du
phénomène. En 1985, à notre troisième année,
nous avons connu un essoufflement; nos jeunes débutants étaient
devenus vedettes, il n'y avait plus de relève. Bref, notre affiche
était la même depuis trois ans.
C'est alors que nous avons pris conscience de l'absence de structure de
formation dans notre métier. L'illuminé qui se voyait un jour
pratiquer le métier d'humoriste était laissé à
lui-même. Il y avait la Place des Arts et, pour y accéder, rien.
Nous avons, en conséquence, mis sur pied un système d'auditions
nationales. Nous avons lancé ensuite le projet des Lundis Juste pour
Rire à Québec et à Montréal pour que puissent
pratiquer nos candidats. En 1986, nous mettions sur pied au Québec, la
tournée Juste pour Rire encore une fois pour faire travailler nos quatre
meilleurs candidats des Lundis et des auditions. Ces trois premiers volets mis
en place, nous avons connu nos premiers résultats avec des Courtemanche,
JiCi Lauzon, Lemire et bien d'autres.
Par la suite, nous avons fondé l'École nationale de
l'humour, dirigée aujourd'hui par Louise Latraverse. L'École en
est à sa quatrième année. Elle accueille - pas - Louise,
l'École - 20 étudiants: 8 en écriture, 12 en jeu, ce qui
correspond approximativement à ce que le marché actuel peut
accueillir. Depuis sa création, l'École a contribué
à la carrière de Jean-Marc Parent, François Massicotte,
Patrick Huard, Claudine Mercier et combien d'autres qui vivent aujourd'hui de
cette profession. À titre d'exemple, huit des animateurs du matin au
réseau Radio-mutuel ont été repêchés de notre
système de formation.
Enfin, il y a quatre ans, nous avons créé Jeunes pour
Rire. Le but: sensibiliser les jeunes de niveau secondaire à la culture
et aux métiers reliés aux communications. Ce volet enseigne le
français, expression orale et écrite... avec humour, bien
sûr. Nous toucherons cette année plus de 350 000 étudiants,
dont plus de 6000 participeront activement. Ce programme fait
l'unanimité autant auprès des professeurs, des pédagogues
que des étudiants. Outre le fait qu'il aborde cette matière avec
le sourire, il oblige l'étudiant à être discipliné
et rigoureux. Les professeurs, quant à eux, apprécient que les
étudiants soient autant motivés. Un des critères pour la
participation est la qualité du français, en particulier, la
syntaxe - en fait, je ne sais même pas si je serais eligible - et les
choix de thèmes sont reliés à des préoccupations
sociales, tels la santé et l'environnement.
Beaucoup d'aspects restent pour nous à améliorer. Entre
autres, il nous faudrait établir un pont avec toutes les entreprises qui
peuvent accueillir des finissants: les réseaux TV, les agences de
publicité, les radiodtffuseurs, les producteurs de spectacles et de
théâtre, etc. Malgré cela, le bilan de ces cinq volets est
spectaculaire. Chaque année, depuis trois ans, 30 % de la programmation
du Festival Juste pour Rire peut être qualifiée de relève
et le milieu de l'humour a connu une stabilité sans
précédent depuis une dizaine d'années. Il faut savoir
qu'on occupe à peu près 40 % des productions de spectacles chaque
soir au Québec. La relève est à la culture ce que la
recherche et développement est à l'industrie
manufacturière. Il faut donc savoir soutenir la première
production d'un artiste comme il faut aussi maintenir et favoriser la
création d'infrastructures souples pour la formation dans tous les
domaines de la culture. Il faut en conséquence trouver des modes de
financement stables. Par exemple, un pourcentage de la TVQ perçu sur les
billets de spectacles pourrait être versé à Gilbert Rozon -
pardon - à un fonds précisément destiné à la
formation et à la relève. Ha, ha, ha! C'est une ligne qui n'a pas
passé; peu importe. Il faudra réévaluer le système
de formation actuel pour qu'existe une adéquation entre les besoins
réalistes du marché et le nombre de finisants par discipline.
Finalement, derrière tout créateur qui réussit, il
y a un bon gestionnaire. Et ce besoin est criant. Il faudra intégrer
à nos structures de formation traditionnelle, des programmes de
formation pour gestionnaires et entrepreneurs culturels.
Capitalisation des entreprises. En général, les
entreprises culturelles, comme d'autres, sont mal capitalisées. Pour
répondre à cette fragilité, il faut faire jouer un
rôle de détenteur de capital-actions à la SOGIC. Elle
pourrait être autorisée à des participations pouvant aller
jusqu'à 50 %, rachetables avec une plus-value préfixée.
Aussi, peut-être, un programme pourrait être mis en place pour
favoriser l'achat d'obligations garanties par la caisse de dépôt,
donnant droit à une déduction fiscale de 200 %.
Les masses critiques. La culture et la vitalité de son expression
reposent sur des performances exceptionnelles, ce que les gens d'affaires
appellent l'excellence. Ces prestations sont souvent le résultat d'un
grand talent d'une personne ou d'individus. Mais tout individualiste qu'elle
soit, la performance de qualité a besoin de support pour être
répétée, partagée, disséminée,
devenir inspirante et générer ainsi son propre succès. Ce
soutien sous-entend des expertises multidtsciplinaires, des efforts et des
ressources autant humaines que financières. Cela
implique, en conséquence, des regroupements et des
concentrations. Bref, une masse critique. Ainsi, l'acte de création peut
être suscité, réellement appuyé et promu. Cette
réalité, ce besoin, exige d'être reconnu
concrètement, sans culpabilisation. Il faut confirmer solidement ces
concentrations qui occupent un créneau - un à la fois au
Québec. Par exemple, en matière de festivals, il faudra savoir
amener les promoteurs à ne pas diluer énergie, capital,
auditoire, réseau, pour ce qui est d'envergure qui déborde nos
frontières. En culture comme ailleurs, ce sont les grands ensembles des
plus grosses entreprises qui peuvent être efficaces, résistants et
capables. Il nous faut de très grosses entreprises culturelles
québécoises, assez fortes pour soutenir, exporter nos talents et
nos idées sur la scène internationale. Il faut savoir inciter au
regroupement, favoriser la mise en commun ainsi que les concentrations
intégrées pour nous permettre d'être compétitifs
dans certaines niches au niveau mondial.
Montréal. Montréal, ces dernières années, a
su se tailler une position enviable en aérospatiale, en
télécommunications, transport, ingénierie, mode,
pharmaceutique et, j'ose affirmer, en création. Nous sommes
passés du produit culturel québécois qui plaisait parce
qu'exotique, au produit culturel fait au Québec, mais avec des
résonances internationales. Nos succès à l'étranger
sont de plus en plus nombreux: Denys Arcand, les "Contes pour tous" de Rock
Demers, le Cirque du Soleil, La La La Human Steps, l'OSM, le
théâtre de Robert Lepage, Céline Dion, "Surprise sur
prise", Michel Courtemanche, Roch Voisine, les expositions du Musée de
la civilisation, André-Philippe Gagnon, "Juste pour Rire", et j'en
passe, heureusement, sont autant d'exemples encourageants que notre culture
s'exporte.
Dans d'autres domaines, les succès de Jean-Claude Poitras en
mode, de Michel Dallaire en design industriel devraient nous rappeler que la
création s'exprimant dans le design est sûrement un des facteurs
les plus importants à la santé future des industries
manufacturières. Montréal est pratiquement un passage
obligé pour tout artiste québécois aspirant à une
carrière nationale ou, encore plus, internationale. Marché le
plus important au Québec, concentration de la plupart des entreprises
culturelles et de communication, elle commande son statut de métropole
culturelle. Mais il faut aller au-delà de cette expression et la
traduire dans l'affirmation d'un axe prioritaire de développement
économique et social pour Montréal par le gouvernement du
Québec.
Le privé. Le secteur privé jouera en culture un rôle
important pour plusieurs raisons. Entre autres, parce que la liberté
d'expression et la créativité qu'elle entraîne
s'accommodent mieux du capital non norme. Le courant de
néo-libéralisme en Occident a défini pour la culture un
nouveau paradigme: effort, marché, succès, profit,
autofinancement, risque et entrepreneur ont une place sans
précédent dans la pourtant jeune histoire de notre État
interventionniste.
Ce nouveau carré de sable, c'est une présence
incontournable des ressources privées pour financer une partie de plus
en plus plus importante des activités culturelles. Pour réaliser
cette transition, il faut cependant un appui et une compréhension de
l'État. Concrètement, il faut trouver des mécanismes
incitatifs à l'investissement privé dans la culture. Notamment,
par des avantages associés au succès d'une production. Par
exemple, aux États-Unis et en Angleterre, il existe un modèle
original de financement pour les grandes productions, les "Broadway shows".
Pour implanter ce mécanisme au Québec, il faudra apprivoiser
l'investisseur par des incitatifs fiscaux dégressifs. Il faudra aussi
penser à élargir l'application de bénéfices fiscaux
reliés au mécénat aux organismes culturels à but
non lucratif et non seulement aux organismes de charité.
Les organisations culturelles privées à succès. Il
faut aussi reconnaître que, dans le cas des festivals et du cirque, le
Québec a développé un modèle mariant le but non
lucratif et le but lucratif, qui lui est particulier. Cette formule obtient du
succès quant à la qualité, quant au public touché
et quant aux retombées domestiques et internationales.
Or, pour maintenir ce succès, pour consolider ces positionnements
du Québec et surtout de Montréal, il faut savoir maintenir des
appuis. Il ne faut pas pénaliser les efforts en laissant effriter le
support qui devient inversement proportionnel au succès. À
revenir à la case départ chaque fois, des énergies mises
à reconquérir des soutiens pourtant modestes mais essentiels ne
peuvent être dépensées à croître, aller de
l'avant et grandir.
Cette formule mixte, but non lucratif et but lucratif, est, en quelque
sorte, un nouveau type de partenariat avec le gouvernement. Il permet à
la partie lucrative d'utiliser tous les leviers dynamiques reliés
à l'entreprise privée, participation aux profits, actionnariat,
etc. Pour l'organisme à but non lucratif, quant à lui, les
charges exigées par la partie commerciale sont égales ou moins
élevées que les tarifs du marché.
L'État, pour sa part, n'a pas à les soutenir
financièrement de manière aussi importante que pour des
organismes à but non lucratif comparables au niveau de la taille et des
mandats. Aussi faudra-il, en toute justice, établir des ratios de
soutien qui permettront à ces organismes de se développer comme
ils le doivent.
Soutien à la création et à la diffusion. La rapport
Arpin propose avec justesse que la création et la diffusion soient
soutenues prioritairement. Parmi les moyens d'action possibles,
l'élimination de la TVQ pour toute oeuvre de création
québécoise ou, du moins, l'attribution d'une partie des revenus
qu'elle génère à un fonds de soutien à la
création serait probable-
ment le geste le plus significatif pouvant être posé par le
gouvernement. Quant à la diffusion, les récents règlements
de la SOGIC excluent les émissions de variétés et les
captations. Par conséquent, les producteurs de ces émissions
n'ont pas droit au crédit d'impôt, ce qui est contraire au
désir et au besoin de diffusion de spectacles québécois en
région.
De même, les émissions de télévision
produites par des Québécois et qui connaissent de grands
succès à l'étranger, telles "Surprise sur prise" et "Juste
pour Rire", ne peuvent obtenir la reconnaissance d'une émission
québécoise du seul fait qu'elles ne sont pas diffusées au
Québec. Pourtant, elles permettent à des centaines d'artisans de
faire des revenus en provenance de l'étranger.
En somme, un certain nombre d'idées-forces semblent dominer
l'élaboration d'une vision à long terme, dont les suivantes: que
la relève et la formation dans toutes les disciplines soient
fondamentales et essentielles, mais en autant qu'elles soient en
adéquation avec les besoins du marché; que la culture soit
incluse dans les axes prioritaires de développement économique et
social pour Montréal; consolider et maintenir l'appui à ce qui a
fait ses preuves et est performant; reconnaître que de grandes
opérations, de grosses entreprises culturelles, des organisations
complètes et sophistiquées sont essentielles pour susciter la
créativité, la diffuser et la rendre performante; intégrer
la participation privée, au niveau du financement comme de
l'organisation, en sachant valoriser l'un et l'autre par des mécanismes
fiscaux et parafiscaux souples, incitatifs et peu tracassiers; accepter que
l'investissement culturel, s'il est pour les individus qui oeuvrent un
investissement de temps, est pour les organisations un investissement
financier. Il représente pour l'État, particulièrement au
Québec, une présence budgétaire dont on doit
reconnaître l'importance.
En conclusion, je voudrais remercier et féliciter Mme la
ministre, le président et les membres de la commission de permettre au
milieu de venir exprimer ses préoccupations; c'est une initiative
heureuse. Je disais précédemment que nous avions beaucoup
progressé. Ces succès sont la résultante d'un dynamisme du
milieu, de la bonne foi et de la bonne volonté de nos politiciens, mais
ce n'est certainement pas le fait d'une concertation. Il y a quelques
années, quand l'économie allait bien, les gouvernements
répondaient aux besoins et tentaient de satisfaire toutes les
clientèles. Mais l'époque que nous traversons, les
déficits gouvernementaux, le taux de chômage et l'incertitude
constitutionnelle ne nous permettent pas de nous illusionner. L'argent ne
tombera pas du ciel, du moins pas les sommes que tous les ministères
réclament. Ça me fait penser au discours d'investiture de John F.
Kennedy qui avait déclaré, le jour où il avait
été mis en fonction: Ne demandez pas à l'État ce
qu'il peut faire pour vous; demandez-vous ce que vous pouvez faire pour
l'État.
Alors, nous sommes à l'heure des choix, à l'heure d'enfin
savoir où l'on va, à l'heure de décider de quelques
grandes priorités sociales. La morosité qui sévit n'est
pas que la conséquence d'une économie en récession. Du
moins, à mon avis, c'est plutôt une perte de foi, le sentiment
qu'il n'y a plus d'idéologie, de leadership et, par conséquent,
de vision. Le siècle qui se termine voit s'éteindre le
communisme; le capitalisme pur est malade. Les deux ont en commun une chose:
ils ont oublié l'homme. L'un, parce que trop idéaliste,
négligeait les motivations fondamentales de l'humain; l'autre, au nom de
la productivité, a éliminé graduellement la fierté
du travail bien fait et, par conséquent, a conduit à
l'individualisme.
Il nous faut, par conséquent, nous, les intervenants, nous
accrocher à une mission ainsi qu'à quelques priorités
fortes d'où découleront les objectifs dans tous nos secteurs
d'intervention. Nous vivrons 10 à 15 années difficiles, mais nous
nous devons de transmettre à nos enfants un héritage culturel
dont nous serons fiers. Le ministère des Affaires culturelles doit
ouvrir la voie avec un leadership clair, en nous dotant d'une vision et d'un
plan d'action. Il faut revenir à l'homme et à son oeuvre. Il nous
faut une vision de l'an 2000 pour la culture, au Québec, une vision qui
s'exprimera en une phrase.
Je fais confiance aux membres de la commission et à Mme la
ministre, et je sais que vous nous proposerez cette vision, cette mission et
les priorités que nous attendons depuis si longtemps. Merci.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup, M. Rozon. Mme la
ministre, vous pouvez commencer, si vous voulez bien.
Mme Frulla-Hébert: Merci, M. Rozon. Je vous souhaite la
bienvenue. On débute cette semaine de commission par vous. Vous avez,
premièrement, proposé plusieurs avenues au niveau de la
fiscalité, etc. Vous devriez être ministre des Finances, ça
aiderait un peu la culture. Mais, ceci dit, je vais aller...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Frulla-Hébert: ...je pense, directement au coeur des
choses. Vous savez que plusieurs groupes qui sont venus nous voir, que ce
soient des créateurs, que ce soient des musiciens, enfin, plusieurs
groupes du milieu culturel cette fois-ci, en commission, autant au niveau des
crédits - je me souviens de l'Orchestre symphonique de Québec,
par exemple - nous ont reproché - et je le dis très ouvertement -
d'investir à ce point dans des manifestations, autant Juste pour Rire
que le Festival de jazz, mais beaucoup dans Juste pour Rire, en disant que ces
manifestations
étaient naturellement populaires - je ne parle pas de
l'accessibilité versus la non-accessibilité de la culture,
entendons-nous - que comme organisation, c'était beaucoup plus facile
pour vous d'aller chercher des commandites, d'aller intéresser
l'entreprise privée parce qu'il y avait une grande visibilité,
d'aller chercher aussi des sommes d'argent directement des revenus
générés par la vente des billets et tous les produits
connexes et que, finalement, il fallait beaucoup plus se concentrer vers les
créateurs, vers la création, vers des disciplines qui sont
peut-être beaucoup moins connues, aussi faciles d'accès mais moins
connues; donc, d'avoir une action beaucoup plus pédagogique et de
laisser le marché faire le reste pour les entreprises qui sont plus
accessibles, plus commercialement aussi rentables. Qu'est-ce que vous
répondez à ça? Je pense qu'il n'y a pas une journée
de cette commission où on ne s'est pas fait dire ce genre de choses. (16
heures)
M. Rozon: Ils ont raison en partie. C'est certain que le rire est
populaire, l'humour est populaire, les gens en ont envie. Une des missions
qu'on s'est données, nous, à Juste pour Rire, c'est d'ennoblir
l'humour, c'est de s'en servir comme un outil pour augmenter la
tolérance chez les gens. L'humour n'était pas aussi populaire il
y a 10 ans au Québec. Il vivait même des problèmes assez
critiques. Il n'y avait pas de lieu pour travailler; H n'y avait pas de
festival; il n'y avait aucun moyen de diffusion. Je pense que Juste pour Rire
s'est préoccupé depuis sa fondation de le structurer, ce
marché de l'humour, ce milieu de l'humour, et on a créé,
en quelque sorte, une épine dorsale. C'est ma première
réponse. On est peut-être victimes, effectivement, du travail de
fond qu'on a fait, mais je crois que d'accuser ou de mettre en question un au
profit de l'autre, c'est déplacer un peu le débat, parce que,
personnellement, je crois que c'est effectivement très important de
soutenir la création, c'est le fondement de tout. Mais, maintenant, il
faut aussi soutenir la diffusion, parce que de la création sans
diffusion, elle demeure lettre morte. Je ne sais pas si ça répond
à votre question.
Mme Frulla-Hébert: Je vais revenir un peu
là-dessus. Au niveau du financement, par exemple, le jour où une
entreprise veut avoir un certain effort donc, a besoin du soutien
gouvernemental, ne serait-ce que pour partir, ne serait-ce que pour structurer
une discipline, ne serait-ce que la question formation et création,
à ce moment-là, on voit très bien, d'une certaine
façon, le rôle de l'État. Mais, une fois que l'entreprise
est partie, qu'elle a pris son envol, qu'elle est connue et puis que,
commercialement parlant, c'est une entreprise qui est très viable, dans
un sens où les industries s'associent facilement, etc., est-ce que
l'État devrait con- tinuer de la soutenir? Je vous le demande parce que,
dans le cas du Festival de jazz et même dans votre cas, on soutient
à combien? À 15 %, à 16 %, 20 %? Vous nous demandez
d'aller jusqu'à 25 %, mais, moi, je vous dis: Est-ce que vous avez
vraiment besoin de ça et est-ce qu'on peut beaucoup plus, une fois que
c'est parti, prendre cet argent, nous, et le réinvestir dans d'autres
entreprises qui ont plus de difficultés, d'une part, ou encore d'autres
qui veulent partir, compte tenu qu'il y a toujours des choix à
faire?
M. Rozon: Je vais vous répondre candidement, mais la
réalité bête et méchante fait qu'un festival, un
vrai festival qui se prétend être un festival qui accomplit ses
mandats, ne peut pas virtuellement être rentable. Ce n'est pas
prévu comme ça, ce n'est pas pensé comme ça puisque
vous accomplissez des mandats... Par exemple, on accueille 500 acheteurs
étrangers à chaque année. On accueille 200 journalistes.
Faire venir un artiste ou aider des jeunes qui débutent, ça nous
coûte aussi cher que de présenter des vedettes. Alors, si on s'en
va dans un esprit uniquement commercial, on devient un producteur privé.
On ne fait que présenter des grandes vedettes. On ne prend plus aucun
risque. On ne fait plus aucun échange. On se préoccupe juste de
la recette. Alors, là, on ne fait plus du tout un festival.
Je pense que l'État... Je l'expliquais dans mon mémoire en
disant que le mixte entreprises à but non lucratif et lucratif a permis,
par exemple, au Cirque du Soleil, aujourd'hui, d'être une entreprise
florissante et le Cirque, qui était pourtant perçu comme quelque
chose de commercial et un art mineur, est élevé ici, au
Québec, grâce à un travail fantastique de cette
équipe, à un art majeur au niveau international. On a, je pense,
jusqu'à un certain point, la chance d'avoir à Montréal
deux grands festivals, de jazz et d'humour, qui sont de renommée
internationale parce qu'il y a un vrai travail, mais aussi parce qu'il y a des
structures souples de financement autour. On n'est jamais venus demander de
financement au gouvernement pour tout ce qu'il est possible d'autofinancer. On
ne l'a jamais fait. On a maintenu les subventions à un niveau qui est
franchement très bas. Si on organisait un festival comme tel,
probablement que l'État s'impliquerait pour 30 % ou 40 %. On a tenu
ça à, je pense, 13 % ou 14 % de subventions et je ne compte pas
toute l'opération télévision qui s'autofinance parce qu'on
utilise le maximum de la dynamique commerciale. Mais vient un moment où
le 13 % ou 14 % qui a l'air abstrait, si on t'enlève, ce n'est plus un
festival que tu fais. Tu fais des shows pour faire de l'argent. Et là,
tu ne joues plus ton mandat. Les jeunes qu'on a développés depuis
six ou sept ans, les jeunes artistes, ce qu'on fait comme travail de fond de
rencontre entre la culture et le milieu scolaire au Québec... On est
dans toutes les écoles avec
un programme d'enseignement du français avec humour. Je pense que
c'est un contact avec la jeunesse qui est fondamental pour notre avenir. Si on
n'avait pas fait ça, je ne sais pas si on mériterait de s'appeler
"Festival". On serait peut-être autre chose. On serait producteur
privé. Moi, comme producteur privé, je ne viens pas demander de
subvention. J'essaie de m'autofinan-cer. J'essaie de calculer mon risque.
Mme Frulla-Hébert: En terminant, parce que je pense que
vous m'avez fait signe, M. le Président, et aux intervenants, vous dites
dans votre mémoire qu'il ne devrait y avoir qu'un festival majeur au
Québec dans une discipline donnée.
M. Rozon: Oui.
Mme Frulla-Hébert: C'est ça. J'aimerais que vous
élaboriez un peu là-dessus parce que plusieurs régions
sont venues et vont continuer à venir et elles nous disent: Bien non,
nous, on veut avoir l'accessibilité à tout. On veut être
aussi capables de profiter de tout ce qui se passe. Ce n'est pas juste les
Montréalais et ce n'est pas juste les gens de Québec qui y ont
droit. Alors, un, j'aimerais que vous m'expliquiez votre pensée et,
deuxièmement, pour vous aider, le Festival international du film qui a
lieu présentement en Abitibi, à Rouyn, dans cette
optique-là, est-ce qu'il devrait exister? C'est juste pour vous donner
un exemple, quand on dit que ça prend un événement majeur,
par exemple.
M. Rozon: J'ai envie de dire: Très bonne question.
Répondez donc! Ha, ha, ha! C'est sûr que c'est un sujet
délicat parce que de demander à l'État de... Je ne sais
pas comment approcher le problème véritablement. On a
parlé d'appellation contrôlée. On a trouvé toutes
sortes de formules. Il est certain que, quand je vous parle de choix pour un
État comme le Québec, avec 6 000 000 d'habitants, combien de
festivals internationaux d'humour on peut avoir, combien de festivals
internationaux de jazz on peut faire? Je pense qu'H faut tenter de composer
avec les organisations en place pour qu'on essaie peut-être de faire du
rayonnement en région. Nous, on a créé la tournée
Juste pour Rire, les Lundis, etc., pour rayonner à travers la province.
Je ne me sens pas menacé par la compétition, mais j'ai
l'impression que tantôt on va avoir des choix de société
fondamentaux. Alors, ou on revient à la théorie qu'on aide tout
le monde et, bon, que le meilleur gagne! C'est vrai, c'est une théorie
que, honnêtement, j'aurais pu soutenir il y a 10 ans, quand j'ai
commencé, c'est logique. Mais il y a aussi, j'ai l'impression, des
choix, il y a des priorités. Si je dirigeais une société,
moi, je me dirais, en ce moment: Je ne peux pas tout faire. C'est curieux, par
exemple, parce que je ne me sens pas menacé, moi, comme festival, pour
ça.
J'en parle, mais en même temps je me dis: Qu'est-ce qui peut
véritablement nous mettre en danger autant que ça, sinon qu'on va
tous chercher le même dollar? On nous a dit: Le 350e, il n'y aura aucun
problème, ça ne touchera pas les commandites. Il faut être
sur le marché de la commandite actuellement pour savoir qu'il y a un
vrai problème, parce qu'il y a un dollar et, si quelqu'un va le
chercher, il y a quelqu'un d'autre qui ne l'a pas. Alors, à un moment
donné, il y a des limites à ça.
Mme Frulla-Hébert: Donc, vous seriez d'accord, d'une
certaine façon, si je reviens au rapport Arpin, quand on parle de
consolidation - on parle de saupoudrage, mais on veut beaucoup plus dire
consolidation - à un moment donné, on a beaucoup
développé et peut-être que, pour une période
donnée, une consolidation des organismes en place serait une solution
qui serait la bienvenue.
M. Rozon: Absolument. Je crois qu'on est rendus mûrs pour
ça. Quand je parle de grosses entreprises québécoises,
vous savez, le Festival de jazz, moi, je les ai connus H y a 10 ans, ils
étaient trois personnes dans un sous-sol. Ils sont rendus
peut-être 200 dans cette équipe-là et je crois qu'ils font
un travatt important pour la culture québécoise à toutes
sortes d'égards, au niveau du disque, au niveau de la scène. Ils
sont présents à plusieurs endroits. Le Cirque du Soleil, avec ses
160 employés, son rayonnement international, fait vivre des gens qui,
récemment, ne vivaient pas de ce métier-là ou en vivaient
difficilement. Nous, je pense, en humour, on a humblement structure un peu. Et
il y en a d'autres qui s'en viennent. On arrive au point, là, où
on est comme à la puberté, si je pouvais prendre une
espèce d'analogie. On est en train de vivre notre puberté comme
organisation et on peut effectivement répartir l'ensemble du dollar sur
toutes les organisations ou on peut aider à consolider quelques leaders
et les amener plus loin. C'est un choix et, moi, je pense qu'on est rendus
là.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. Rozon. Le
député de LaFontaine m'a demandé la parole.
M. Gobé: Oui.
Le Président (M. Doyon): Malheureusement, le temps est
écoulé. Alors, je me vois dans l'obligation de passer la parole
au représentant de l'Opposition officielle, avec regret.
M. Boulerice: On tentera bien de lui laisser peut-être une
petite minute, M. le Président pour le consoler de son dimanche
désastreux dans l'impromptu d'Outremont no 2. Ha, ha, ha!
Le Président (M. Doyon): II préfère
peut-
être ne pas avoir de temps dans ce cas-là. Des voix:
Ha, ha, ha!
M. Boulerice: M. Rozon, M. Cournoyer, M. lacobacci....
M. Gobé: Le député pourra aller au festival
de l'humour quand sa carrière sera terminée. Je le remercie de
son attention. J'ai bien compris que vous m'avez donné la parole, M. le
député, c'est ça? Vous m'avez laissé la parole?
Le Président (M. Doyon): Je pense que, même s'il
voulait le faire, c'est une prérogative du président qu'il a
l'intention de garder. M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Vous ayant salué, messieurs, M. Rozon, quant
à vous, vous avez forcément ouvert la porte tantôt - donc,
vous allez me voir venir - quand vous avez dit: Nous sommes à l'aube de
choix fondamentaux. Donc, la question que je vais vous poser...
Forcément, si j'ai bien lu votre mémoire, vous faites allusions
à l'ONF, à Radio-Canada, etc. La question que je vous pose,
c'est: Pourquoi vous ne souhaitez pas que le Québec rapatrie l'ensemble
des responsabilités fédérales en matière de
culture, même s'il demeure à l'intérieur du régime
fédéral? Si on vous garantit le principe du "at arm's length",
qui semble recevoir l'acquiescement de tous, qu'il y ait un transport
latéral intégral de l'argent du fédéral au
Québec...
M. Rozon: Ça fait beaucoup de "si". Ha, ha, ha! Non, mais
c'est...
M. Boulerice: Ah, je vous l'accorde, il faut une volonté
politique; nous l'avons exprimée, nous: "transport latéral
intégral".
M. Rozon: Non, non, je comprends. Quand on nous pose cette
question, c'est évident qu'on a un choix, comme Québécois,
à faire bientôt; on va avoir un choix à faire: si on veut
être souverains ou si on veut continuer dans la
Confédération. Quand on aura fait ce choix-là, je pense
que va s'imposer la deuxième partie de la question. Mais, en supposant
qu'en restant dans le régime fédéral on puisse, comme vous
dites, rapatrier tous les fonds et recréer des organismes semblables, je
pense que c'est une hypothèse intéressante, mais, pour moi,
d'abord, je pose la condition de voir où est-ce qu'on s'en va. Ça
fait 15 ans que je fais ce métier, ça fait une trentaine
d'années, je crois, qu'il y a un ministère des Affaires
culturelles et il est à peu près temps qu'on ait un plan
d'action, qu'on ait une vision à savoir où on s'en va, qu'on se
fixe des objectifs. J'ai un petit peu de difficulté à
répondre à des questions, puis à donner des mandats en
blanc, tant que je ne sais pas précisément où est-ce que
s'en va notre ministère de la culture et quelles sont ses
priorités. Une fois que cette question fondamentale va être
posée, va être répondue et qu'on va avoir des objectifs, je
serai peut-être prêt à passer à l'étape
suivante.
M. Boulerice: Sans vouloir prolonger indéfiniment dans
cette question bien précise, parce qu'il y en a d'autres que je veux
aborder avec vous, vous êtes dans un domaine où la très
grande majorité de ceux qui oeuvrent sont inscrits, reçoivent la
très grande majorité de leurs cachets, dans tout ce grand domaine
de l'audiovisuel. Par cela, j'entends que ça peut être le film
également, ça peut être la télévision, etc.
Si on n'a pas un contrôle là-dessus, ça nous est difficile
d'établir les objectifs bien précis d'une politique culturelle,
sachant que des pans d'intervention aussi essentiels pour vous nous
échappent au départ, dans la première prémisse.
M. Rozon: J'ai une ministre et j'attends d'elle un plan. Quand
j'aurai ce plan-là, à moins qu'il soit complètement
impensable, invivable, mais je ne le crois pas, on va ensuite s'y accrocher,
puis travailler. Moi, j'ai besoin de contribuer à quelque chose comme
citoyen, de sentir que je contribue à l'épanouissement d'une
société, à son évolution. Quand vous faites un peu
référence au fédéral, à l'audiovisuel, etc.,
il est sûr que, depuis 30 ans, le fédéral nous a quand
même relativement bien servis, les gens de la culture, puisque
Téléfilm, l'ONF, Radio-Canada, nous ont laissés libres de
travailler et nous ont permis de vivre, de gagner notre vie. Pendant ce
temps-là, on se tâtait; c'était peut-être normal.
Mais si, maintenant, on décide exactement - je répète ce
que je dis - si on décide véritablement, si on fait nos choix de
société, je serai le premier à mettre l'épaule
à la roue, à travailler dans ce sens-là. Je serai le
premier à travailler, quels que soient les choix que les
Québécois feront.
M. Boulerice: M. Rozon...
M. Rozon: J'ai hâte qu'on le fasse, soit dit en
passant.
M. Boulerice: Ha, ha, ha! Nous le partageons. Est-ce que vous
pourriez peut-être me donner un petit peu, enfin, pas un peu, beaucoup,
plutôt, de détails sur la formule d'incitatif aux commandites
culturelles par le biais de l'appariement?
M. Rozon: La formule de l'appariement qui avait été
initiée - je pense qu'elle était à l'essai une
année, à ma connaissance; moi, j'ai connu ça, une
année - avait tellement eu de succès qu'ils ont été
obligés de la réduire un peu. C'est donc dire qu'il y avait quand
même eu un effet
clair sur la recherche de fonds privés. (16 h 15)
II est certain, pratico-pratique, que, quand vous allez chercher une
commandite, la première fois, avec un projet, c'est le moment le plus
difficile. Parce que les commanditaires vous demandent, en
général, trois ans d'existence pour vous financer. Alors, de
pouvoir dire: Si vous nous donnez tant, le gouvernement suit pour tel montant,
ça permet souvent d'initier de nouveaux projets. Par exemple, nous, l'an
prochain, en principe on va célébrer notre 10e anniversaire et on
a l'intention de faire certains événements spéciaux qu'on
veut commanditer. Et c'est très difficile, malgré qu'on ait 10
ans de succès, d'arriver avec une nouvelle idée forte, parce
qu'on demande à la voir avant de la commanditer. Ça, c'est le
principe des entrepreneurs privés. Alors, cette formule avait un
avantage.
Maintenant, je dois dire, encore là naïvement ou
candidement, que c'est certain que, dans les choix qui seront faits, c'est
possible que ça saute, cette possibilité. J'en offre une, comme
j'en ai offert une vingtaine d'hypothèses. Moi, je crois beaucoup aux
incitatifs fiscaux qu'on retire à un moment donné. Je donne
l'exemple de New York où, lorsqu'on finance, à Broadway, une
production de 5 000 000 $, on la divise en 500 actions à 10 000 $. Il y
a 500 actionnaires qui mettent 10 000 $ et le premier 5 000 000 $ leur est
retourné automatiquement. Et, ensuite, ils partagent 50-50 avec le
producteur. Ça permet de financer tous les shows du Strand à
Londres et de New York sur Broadway. N'essayez pas de faire ça au
Québec demain matin. Les gens ne suivront pas.
Alors, il faut les inciter pendant cinq ans, mais diminuer, les
habituer; après ça, on va avoir fait nos preuves et on va
exister, point. Ce qui me fait toujours peur, c'est des structures fiscales
qui, dans le fond, enrichissent les courtiers, les comptables, tout le monde,
mais nous éloignent du but fondamental qui est d'habituer les gens ou de
financer mieux notre culture.
M. Boulerice: Une dernière question, avant que ma
collègue, la députée de Chicoutimi, n'intervienne. Je l'ai
écrite, tellement elle est longue. Vous recommandez la fin du
saupoudrage. Est-ce que vous êtes conscients que cette pratique joue un
rôle essentiel dans le maintien d'activités de nombreux organismes
culturels en région, qui ne peuvent tout simplement pas se passer de
subventions, si modestes soient elles, que la fin du saupoudrage ne peut que
conduire à une certaine institutionnalisation de la culture, au
détriment de la relève ou des courants marginaux? Alors, ne
reconnaissez-vous pas que la fin du saupoudrage est une prémisse qui
fausse le débat sur le financement de la culture, parce qu'il implique
une rationalisation et non pas une augmentation des efforts budgétaires
en matière de culture?
M. Rozon: C'est pour ça que j'ai fait un peu à la
blague l'idée du fonds de saupoudrage. C'est que, jusqu'à un
certain point, c'est certain qu'il faut se garder ce qu'on appelle du "launch
money", de l'argent pour aider ceux qui débutent, pour peut-être
faire des expériences, mais un fonds particulier réservé
à ça. Ce qui est embêtant des fois, on ne le vit pas
tellement... Mon Dieu! Versailles.
M. Boulerice: Vous y êtes habitués.
M. Rozon: On est à la télévision? Je prends
l'exemple du ministère des Communications à Ottawa; il y avait
vraiment un problème avec le fonds PIC et ça n'a rien à
voir avec le ministère de la culture, mais, quand même, c'est un
problème fondamental. On était peut-être 7 ou 8 organismes
pour lesquels ce fonds avait été créé, 7 ou 8
événements majeurs; en dernier, on était 200. Il y en
avait 180 petits et 8 gros. Là, je dis n'importe quoi, mais tout le
monde venait pomper l'argent dans ce fonds-là pour le distribuer, pour
en faire le fameux fonds de saupoudrage. Est-ce que je réponds à
votre question? Parce que l'éclairage nous a un peu
détournés de...
M. Boulerice: Perturbés.
M. Rozon: C'est vous qui avez allumé ça? Mon Dieu!
Vous êtes équipés!
Le Président (M. Doyon): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour,
messieurs.
M. Rozon: Bonjour, madame.
Mme Blackburn: En fait, mon collègue, le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, a un peu abordé la
question du saupoudrage. Moi, je suis d'une région, le
Saguenay-Lac-Saint-Jean qui - je pense que c'est démontré - a
contribué à fournir plusieurs artistes, commentateurs,
journalistes - prenez tous les arts, la culture et les communications - qui se
produisent et qui travaillent à Montréal actuellement. On peut
dire que la région a été particulièrement
généreuse en ce qui concerne la relève. Quand on parle de
saupoudrage, quand on parie de concentrer l'action, de consolider - pour
utiliser les termes de Mme la ministre, tout à l'heure - la
consolidation des organismes en place, comme on n'ajoute pas d'argent dans la
caisse, ça veut généralement dire la mort totale de toute
subvention à des petites troupes, à des petits orchestres,
à des petits ensembles, à tous ces petits organismes qui se
créent, je dirais, quasiment quotidiennement dans notre
région,
très souvent dans notre région, qui, finalement, prennent,
comme un peu partout ailleurs, deux ans, trois ans à se faire un minimum
de petit marché. Après ça, ils vivent exclusivement sur la
petite subvention, minime, 7000 $, 8000 $, 9000 $ ou 10 000 $. On ne parle pas
de pactole, là.
Là, on est en train de dire qu'on va consolider ce qu'il y a et
qu'on ne les financera que sur des projets. Ça veut dire que les petits
sous qui leur permettaient d'essayer de se trouver des contacts, d'aller
chercher des fonds et de commencer à se faire faire des affiches - vous
savez comment ça fonctionne - bien, là, on leur dit: Vous ne les
aurez plus. Le temps qu'ils préparent le projet, ça prend des
sous pour préparer des projets, pour essayer d'imaginer comment on
pourrait monter un spectacle, aller vendre l'idée à deux ou trois
producteurs, à des entreprises privées, bien, là, on leur
dit: Vous ne les aurez plus, ces sous-là.
Ça, ça constitue, à mon avis, une partie de la
relève du Grand Montréal, parce qu'elle se fait aussi chez vous.
Comment est-ce qu'on réagit à ça? Je vous ai
écouté attentivement et vous avez un bon bout sur la
relève. Vous avez aussi un bon bout sur le financement et le soutien par
rapport aux avantages fiscaux, que je trouve intéressant, d'ailleurs.
Mais comment est-ce qu'on réagit? Semble-t-il qu'on a une caisse et
qu'ils n'envisagent pas d'en mettre et la façon d'en mettre, ce serait
de fermer certains des musées, et vous n'êtes sûrement pas
d'accord avec ça, les conservatoires... Alors, comme on ne peut pas, je
pense, aller en deçà de ce qu'on a et que ce gouvernement a
décidé qu'il voulait en donner un peu plus pour la consolidation
des organismes en place, qu'est-ce qu'on fait avec la relève en
région?
M. Rozon: Je suis d'accord avec vous sur le fond, madame. Il faut
aider, mais je pense qu'il faut faire des choix. Quand je dis "faire des
choix", on ne va pas entrer dans le gras et définir les budgets.
Mme Blackburn: II n'y a pas de gras.
M. Rozon: Non, je ne le sais, mais je veux dire que, quand on
fait un budget au ministère des Affaires culturelles - ce n'est pas
à moi à le faire, ce budget-là - je crois qu'il va falloir
peut-être se réserver des sommes pour, justement, supporter des
organismes en région qui en ont besoin. Pas juste en région,
même à Montréal; ça peut être une idée
d'une petite troupe de théâtre qui démarre à
Montréal. Ça peut être partout. Je n'ai pas de
problème avec ça. Je m'en réserve des budgets, moi, pour
prendre des risques à chaque année. De moins en moins, mais on
s'en réserve quand même, parce qu'on ne peut pas faire que des
trucs sûrs. Mais il faut quand même garder l'essentiel. Il n'y a
personne ici, je ne crois pas, qui soit venu témoigner à la
commission, qui roule sur l'or. On travaille tous très dur pour arriver
et, à un moment donné, quand je dis de faire des choix de
société, s'il y a un deuxième festival qui m'affaiblit,
bien, là, je ne pense pas qu'on s'aide, personne. Parce qu'on est sur le
point... On a la tête comme ça, là. On essaie de sortir,
d'amener ça plus loin pour que ça rayonne plus et d'aider plus de
monde, parce que n'oubliez pas qu'on a un effet multiplicateur. On en aide, du
monde. On en fait travailler, des gens et, si, nous, on a de la
difficulté à survivre, qu'on est toujours en train de regarder
juste l'essentiel, peut-être qu'on remplit mal notre mandat. On est
peut-être mieux d'avoir 7 enfants en santé que 14 maigrichons. Tu
sais, il va peut-être falloir, à un moment donné, dire:
Bien, il y a ça.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. Rozon. M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Rozon: Vous n'avez pas aimé cette
expression-là.
Le Président (M. Doyon): Malheureusement, le temps est
écoulé.
M. Boulerice: M. Rozon, merci. M. Rozon: Oui.
M. Boulerice: Je pense que vos commentaires, fort sérieux
malgré le ton quelquefois badin, mais réconfortant pour nous
parce qu'une commission, c'est long, sont de nature à nous
éclairer dans l'oeuvre qui nous attend. Je me permettrai, en guise de
remerciement, de dire: Oui, le milieu de la culture demande beaucoup de
mécénat très souvent. Il demande beaucoup à
l'État, mais je sais que le milieu de la culture épouse toujours
de grandes causes. Je sais pertinemment, de bouche à oreille, que vous
vous apprêtez à vous engager dans les restos du coeur. Je trouve
cette initiative extrêmement louable. Je vous incite à vous lancer
plus à fond et peut-être à donner l'exemple à
l'Assemblée nationale à ce niveau-là. Vous verrez
bientôt pourquoi je fais cette dernière petite allusion.
Espérons être partenaires.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: Oui. À mon tour, je me joins
à mon collègue pour vous remercier, d'une part, d'abord pour nous
avoir éclairés, parce que, effectivement, on parle souvent
d'humour et, des fois, on grince un peu à ça, versus l'aide
gouvernementale toujours et non pas versus sa place. J'aurais pensé,
d'ailleurs, que mon collègue, qui m'a taquinée plus d'une fois
sur le musée, aurait posé une question. Ceci dit, au niveau de
la...
M. Boulerice: II paraît qu'il faut une invitation pour y
aller.
Mme Frulla-Hébert: En tout cas, au niveau de la formation,
c'est sûr que vous êtes très présents dans toutes les
écoles et, si vous aidez, justement, à ce que les enfants
apprécient leur langue et travaillent mieux à maîtriser
leur langue, alors, ça aura valu la peine. Merci.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. Alors, il
me reste, au nom des membres de la commission, à vous remercier d'avoir
bien voulu nous consacrer ce bout de temps. Tout en vous permettant de vous
retirer, je vais maintenant indiquer à cette commission que le moment
est venu d'entendre... Suspension.
(Suspension de la séance à 16 h 26)
(Reprise à 16 h 27)
Le Président (M. Doyon): Donc, le moment est venu
d'entendre l'Orchestre Métropolitain de Montréal. Je signale aux
membres de cette commission que la présidence a l'intention de
débiter à l'intervenant qui suit le temps consacré aux
effusions, aux embrassades, aux bons souhaits, etc. C'est un choix que vous
ferez. Les effusions, il n'y a pas de problème avec ça; les
embrassades aussi, les souhaits de bonne année et de joyeux Noël,
de joyeuses Pâques, etc., mais ça sera débité sur le
temps de l'intervenant suivant. Alors, c'est un choix que les membres de la
commission font.
Nous entendrons, sans plus de délai, les représentants de
l'Orchestre Métropolitain de Montréal. Je leur souhaite la plus
cordiale des bienvenues et Mme Dupont Rémillard qui est avec nous,
bonjour.
Mme Dupont Rémillard (Marie): M. le
Président...
Le Président (M. Doyon): Vous connaissez les
règles. Vous savez que vous avez 10 à 15 minutes pour faire la
présentation. Vous vous présentez pour les fins du Journal des
débats et, après ça, la conversation s'engage pour le
temps qui reste...
Mme Dupont Rémillard: D'accord.
Le Président (M. Doyon): ...avec les membres de la
commission. Vous avez la parole.
Orchestre Métropolitain de
Montréal
Mme Dupont Rémillard: M. le Président, Mme la
ministre, MM. et Mmes les députés, nous sommes honorés de
nous présenter devant la commission parlementaire de la culture. Mon nom
est Marie Dupont Rémillard. Je suis directeur général de
l'Orchestre Métropolitain et je suis accompagnée de M.
Charles-Albert Poissant, qui est président de Donohue et membre de
l'exécutif de notre conseil d'administration, notre
trésorier.
Le Président (M. Doyon): Bienvenue.
Mme Dupont Rémillard: Nous avons longuement
hésité avant de nous présenter devant la commission
parlementaire sur la politique culturelle du Québec parce que
l'Orchestre Métropolitain a une histoire et une philosophie bien
particulière et nous n'étions pas convaincus de la
nécessité de nous faire entendre à ce moment-ci de notre
histoire et de celle de la commission parlementaire, puisque nous sommes en
plein développement et que nous innovons beaucoup encore au sein du
monde de la musique.
L'Orchestre Métropolitain a été fondé en
1981 par les meilleurs musiciens diplômés des conservatoires et
des facultés de musique du Québec. Ses 60 musiciens
réguliers ont une moyenne d'âge de 34 ans. Sa triple mission, soit
de contribuer à la vie culturelle de Montréal et de sa banlieue;
de promouvoir le talent des musiciens, compositeurs et chanteurs
québécois, incluant, lors de certains concerts, le choeur de
l'Orchestre Métropolitain, fondé par Agnès Grossmann; et
aussi, l'autre volet de sa mission, c'est de présenter des concerts avec
la collaboration des intervenants du monde de l'éducation afin de former
un nouveau public. L'Orchestre Métropolitain - je pense que je peux le
dire - fait désormais partie intégrante de la vie artistique de
Montréal.
L'Orchestre Métropolitain est différent des autres pour
trois raisons. La première, c'est le deuxième orchestre
symphonique à Montréal. Comme on vous l'a sans doute dit, il est
déjà difficile pour une ville de faire vivre un seul orchestre
symphonique. Alors, que dire d'un deuxième orchestre qui vit un peu en
marge du grand milieu culturel québécois et qui, pourtant, arrive
à survivre, à se développer et à cumuler des
surplus chaque année depuis cinq ans. En fait, nous avons dû
trouver ailleurs un espace culturel propre et nous l'occupons peu à
peu.
La deuxième différence de l'Orchestre
Métropolitain, c'est qu'il n'aurait pas dû être. Seulement,
voilà, il est né de la volonté de nos musiciens de se
trouver un travail. Il est issu du désir et de la détermination
de ces finissants du conservatoire et des écoles de musique qui
voulaient oeuvrer dans le secteur dans lequel ils avaient étudié
pendant de nombreuses années. Ce qui fait notre différence, c'est
que la culture corporative a donné naissance à un rapport
particulier de confiance entre l'administration et les permanents
syndiqués. Nous avons une convention collective souple,
légère, qui permet à l'administration et au syndicat
d'entretenir des rapports de productivité que l'on ne retrouve
nulle part ailleurs au Canada. Cela aussi nous rend différents et
nous permet de matérialiser des projets rapidement et efficacement.
Le troisième élément qui nous "diffère",
c'est le lien étroit qui nous unit à l'entreprise privée,
comme Quebecor, et ça constitue aussi une particularité de
l'Orchestre Métropolitain. La formule vaut la peine d'être
retenue, parce qu'il est fort intéressant que la personne chargée
de gérer les destinées d'organismes culturels ait une marge de
manoeuvre et la sécurité financière nécessaire pour
garantir des décisions visant le long terme plutôt que la
rentabilité à court terme. L'administration s'en trouve
renforcée dans son intégrité et son
objectivité.
Ce sont ces trois éléments: le marché particulier,
la structure syndicale souple et le lien étroit avec l'entreprise
privée qui font que l'Orchestre Métropolitain a pu continuer de
grandir et de prendre une place importante dans le milieu montréalais et
qui lui permettent d'innover.
L'excellence et la qualité, c'est la philosophie de base de
l'Orchestre Métropolitain à l'égard de son
développement. Nous sommes d'accord avec le rapport Arpin à
l'effet que seules l'excellence et la qualité sont garantes de la survie
d'un organisme. Ce sont les objectifs que nous poursuivons à notre
niveau, soit celui du développement du talent québécois,
et canadien. C'est notre mandat.
L'accessibilité et l'appartenance au milieu sont également
deux points qui constituent les paramètres de toute notre
démarche et cela se reflète dans toutes nos actions quant au
choix des projets que nous décidons d'amorcer. C'est dans cet esprit que
nous avons choisi que l'Orchestre Métropolitain ne performe pas
seulement à la Place des Arts.
Nous nous rendons en banlieue depuis trois ans, et cela, dans cinq
villes de la Communauté urbaine de Montréal, soit ville
Saint-Laurent, Verdun, Montréal-Nord, Hochelaga-Maisonneuve et
Pierrefonds, où nous présentons des concerts de façon
régulière trois fois l'an. Nous y avons développé
une clientèle d'environ 600 personnes par concert, un système de
billetterie autonome et un réseau de bénévoles pour
chacune des villes, et les commanditaires sont régionaux. Nos salles ne
sont plus assez grandes; nous en avons choisi de nouvelles cette année.
Les gens paient 6 $ pour assister à un concert auquel ils
n'assisteraient pas à la Place des Arts. Nous nous rendons chez les
gens, ils ne viennent pas chez nous. De plus, ils s'associent et s'identifient
à nous.
La série "Premières". Il en va de même pour la
série "Premières" qui s'adresse aux enfants de la Commission des
écoles catholiques de Montréal. Nous avons mis sur pied une
série de concerts gratuits pour enfants seulement. Cette série de
concerts est destinée aux 10 à 12 ans et présente, entre
autres, des solistes de 10 à 12 ans auxquels les enfants peuvent
s'identifier. L'originalité de notre démarche est la suivante:
nous offrons tout gratuitement: transport, collation et concert aux enfants de
milieux défavorisés afin de leur faire aimer la musique. Cette
série a été conçue avec la collaboration de la CECM
et intègre dans le cadre d'une démarche pédagogique les
matières suivantes: musique, français et arts plastiques. La
musique ainsi présentée devient accessible et développe
chez ces enfants un sens d'appartenance à l'Orchestre. Ce sont nos
futurs clients. Cette année, 6000 enfants assisteront à nos
présentations à la Place des Arts.
Accessibilité dans la mise en marché. Nous n'utilisons que
les médias qui sont près des gens. Notre mandat étant de
trouver un nouveau public, il nous fallait nous lier avec des médias
auxquels le public s'identifiait le plus. Ainsi, nous avons favorisé une
approche rock de la musique classique. Nous avons aussi utilisé les
hebdos et des journaux comme Le Journal de Montréal ou encore un
poste de radio comme CJMS. Les porte-parole de l'Orchestre Métropolitain
que nous avons retenus sont également ceux auxquels le grand public voue
une admiration sans bornes. Je pense à Marjo, Andrée Boucher,
Lucien Francoeur, Michel Tremblay, Mario Tremblay, Mitsou ou encore,
dernièrement, Céline Dion, et j'en passe.
Nous avons également installé un système de points
pour la mise en marché, le système multi points, donnant
accès, pour nos abonnés, à d'autres disciplines que la
musique. Nos abonnés peuvent ainsi recevoir en prime pour leur
abonnement des billets pour l'Opéra de Montréal, les Grands
Ballets ou encore au théâtre Jean-Duceppe.
En termes de financement aussi, on a favorisé
l'accessibilité. L'Orchestre Métropolitain étant le reflet
d'un nouveau type de public et devant tenir compte du fait que les grandes
corporations soutiennent avant tout l'OSM, il nous fallait nous tourner vers
d'autres sources. La campagne de financement corporative habituelle fut
maintenue, mais elle doit être complétée. Cette
année, compte tenu de notre notoriété grandissante, nous
descendons dans le métro où nous présentons des concerts
sympho-niques trois jours de suite. Enfin, je passe les détails, mais
c'est une façon pour nous encore d'être plus accessibles et que le
public s'identifie davantage à nous. Cela développera alors
l'appartenance du milieu populaire à l'Orchestre et confirmera notre
caractère accessible. En fait, toutes les démarches de
l'Orchestre Métropolitain se font en conformité avec l'image
qu'il veut donner: jeune, dynamique, excellent et accessible.
Commentaires et recommandations à l'égard du rapport
Arpin. Nous sommes d'accord avec les grands principes véhiculés
par le rapport, tels l'excellence, la création, la stabilité des
organismes culturels, l'ouverture au monde et à l'action
internationale, de même que le développement et le maintien
au Québec de la compétence professionnelle dans le domaine
culturel. Nous souscrivons aux grands principes évoqués, en
particulier celui de la saine gestion et de la participation du secteur
privé au développement des arts. Nous sommes tous pour la
vertu.
Les recommandations que nous faisons sont les suivantes. Nous
recommandons fortement que le ministère exige des équilibres
financiers au niveau du fonctionnement des organismes culturels, tout comme on
l'a exigé pour les municipalités. Je crois fermement que nous
devons tous tendre vers cet objectif.
Système de bonification. Le ministère pourrait même
instaurer un système de bonification à l'endroit des organismes
ayant atteint cet objectif. La pratique de camoufler certains surplus pourrait
ainsi disparaître. Il n'est pas rare que l'on ne dévoile pas les
surplus de peur que l'on sabre dans les subventions sous prétexte
d'aider ceux qui sont en difficulté.
La délimitation des champs d'action est aussi une recommandation
que nous faisons à l'effet que nous aimerions que le ministère
délimite les champs d'action des organismes culturels oeuvrant dans le
même secteur afin d'éviter le recoupement, les
dédoublements néfastes à l'égard du public. Si le
mandat d'un organisme est national et international, qu'il le demeure et ne
tente pas de se créer une niche régionale et vice versa.
Intégration. Nous aimerions qu'il y ait intégration de
certains organismes désirant travailler ensemble. Cela pourrait nous
permettre de réduire les frais de gestion importants, tout en assurant
des emplois mieux rémunérés à nos employés.
Cette notion n'exclut pas l'autonomie des organismes partenaires ou encore des
conseils d'administration.
Rigueur dans l'octroi des subventions. Nous souhaiterions une plus
grande rigueur dans l'octroi des subventions afin d'éviter le
saupoudrage inutile. Nous demandons aussi une plus grande objectivité
dans l'octroi de ces subventions. Nous désirerions que l'on évite
les conflits d'intérêts et que des citoyens fassent partie des
comités d'évaluation de différents organismes qui
demandent des subventions.
Nous aimerions aussi que le ministère des Affaires culturelles
suscite des rencontres annuelles par secteur, par région, pour favoriser
l'échange et la coordination entre les organismes. Nous aimerions
également que l'on instaure des cours de formation et de
perfectionnement, sous la gouverne des HEC, afin de renseigner les
gestionnaires sur les différentes formes de gestion et de
professionnaliser la gestion d'organismes culturels.
Nous serions aussi favorables à la nationalisation
complète de certains organismes. Je pense, entre autres, à l'OSM
qui le réclame ou encore à des grands organismes comme
l'opéra ou encore l'Orchestre symphonique de Québec. Je suis
d'accord pour la nationalisation, mais à la condition qu'ils le soient
totalement et qu'ils ne bénéficient pas des subventions du
secteur privé.
Bref, pour terminer, je suggérerais aussi la création
d'actions accréditives culturelles, un peu comme on l'a fait dans le
secteur minier pour la levée de fonds. Ça permettrait de
constituer un fonds de roulement pour certains organismes culturels et de les
former en corporations avec actionnaires ayant droit de regard sur la gestion
de l'organisme en question. Cela pourrait renflouer les coffres de certains
d'entre eux et assurer une meilleure utilisation du capital. Je vous remercie
de nous avoir permis de nous exprimer ici, devant la commission
parlementaire.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme Rémillard. M.
la ministre.
Mme Frulla-Hébert: Merci. Mme Rémillard et M.
Poissant, bienvenue. Premièrement, je tiens à vous
féliciter sincèrement du dynamisme dont fait part l'Orchestre
Métropolitain, d'une part, et aussi de sa façon très
innovatrice d'aborder certains publics, d'aborder les choses, et même
aussi, finalement, de se mettre lui-même en valeur et sur le
marché. Vous êtes très orientés vers
l'accessibilité. D'une part, comme vous dites, on se sert des journaux
qui sont aussi très populaires... Vous avez aussi la chance d'avoir un
mécène qui y croit beaucoup. Mais, quand même, action
pédagogique versus les enfants, entrer dans l'école... Donc, vous
vous êtes donné un mandat qui n'appartient qu'à vous seuls,
ce qui me fait poser cette question: Vous demandez, un peu comme l'Orchestre
symphonique de Montréal l'a fait et aussi comme l'Orchestre symphonique
de Québec, comme vous le dites, de catégoriser, d'une certaine
façon, les grands organismes en musique, c'est-à-dire des
orchestres dits nationaux versus d'autres qui sont plus régionaux.
Pourriez-vous élaborer un peu votre pensée là-dessus?
Mme Dupont Rémillard: Ça veut dire que... Si on se
situe au point de vue québécois, dans l'ensemble, je pense qu'une
ville doit avoir un orchestre symphonique. Il n'y a pas de problème, on
s'entend au niveau des principes. Une ville comme Québec doit avoir un
orchestre symphonique, une ville comme Montréal doit avoir un orchestre
symphonique.
Pour ce qui est de notre particularité, nous sommes le
deuxième orchestre symphonique à Montréal. Il deviendrait
important, à ce moment-ci, de définir les champs d'action de
chaque orchestre. Notre vocation étant régionale, nous acceptons
qu'elle le soit et nous sommes ravis du fait qu'elle soit régionale,
c'est-à-dire que notre mandat soit de développer des nouveaux
publics. Mais il serait très important, à ce moment-ci, que le
gouvernement soutienne suffisamment
I'OSM pour que l'Orchestre symphonique n'ait pas à se
préoccuper du régional et qu'il voie à une vocation et
à un rayonnement national et international. C'est en ce sens que je
favoriserais peut-être un soutien additionnel à l'OSM, mais que
son mandat soit très précis en ce sens qu'il se situe en termes
de solistes, par exemple, qu'il engage des solistes nationaux et internationaux
et qu'il nous laisse, nous, promouvoir les talents québécois qui
émergent de nos conservatoires.
Parfois, il peut arriver qu'il y ait conflit entre les deux orchestres
parce que, justement, nous sommes deux dans la même ville. Donc, si l'OSM
est suffisamment soutenu financièrement par le gouvernement, je pense
qu'à ce moment-là nous pourrons oeuvrer à notre niveau de
façon encore plus intense et nous pourrons développer de
nouvelles séries, mais à la condition que les mandats soient
très précis de part et d'autre. Notre particularité, nous,
c'est que nous sommes deux à Montréal, voyez-vous? J'en reviens
toujours à ça.
Mme Frulla-Hébert: Ce qui m'amène, d'ailleurs,
à deux questions. D'abord, vous parlez de rayonnement, de votre action
au niveau du rayonnement. Dans le fond, on subventionne 11 orchestres de
façon différente, mais c'est ça, quand même. On
soutient à peu près 11 orchestres. Donc, il y a eu une suggestion
de l'Orchestre symphonique de Québec, dans son mémoire, qui
disait: Bien, faites-nous voyager. Nous, on va faire la même chose,
c'est-à-dire qu'on aura, nous, un rayonnement qui est régional,
donc qui va desservir Québec et ses environs. Par contre, nous avons des
orchestres au Lac-Saint-Jean - par exemple, à Chicoutimi, on a un
orchestre extrêmement populaire, extrêmement dynamique - et aussi
ailleurs dans les régions. Alors, comment voyez-vous ça? Est-ce
que c'est possible, tel que vous le faites, de répéter cette
expérience-là, si on veut, dans la région de Québec
ou ailleurs?
Mme Dupont Rémillard: Je serais d'accord, moi, pour le
maintien d'orchestres symphoniques régionaux. Ce qui est
inquiétant, c'est plutôt la prolifération des orchestres
symphoniques, je dirais, municipaux. Il y en a partout maintenant. Ça,
je suis d'accord pour ça. Ce qu'il faudrait peut-être, c'est
plafonner le niveau des subventions de votre ministère pour ce type...
J'entendrais peut-être plafonner à 15 % du budget global la
contribution du ministère des Affaires culturelles pour tout le monde
et, après, aller selon vos priorités de développement. (16
h 45)
C'est-à-dire que, si vous désirez favoriser, par exemple,
le développement ou le rayonnement international de l'OSM, vous pourriez
additionner un 10 % de plus pour l'OSM et peut-être d'autres types...
C'est-à-dire y aller par projet et par ampleur de ce que voulez donner
à l'organisme. En fait, après avoir fait un plan de
développement global - parce que je pense qu'à ce moment-ci il
faut un plan de développement global - je pense qu'il devrait y avoir un
minimum de 15 % du budget global qui est fourni par votre ministère pour
le fonctionnement de ces orchestres-là.
Pour le budget total, on pourrait avoir une norme générale
et, selon le type de développement que vous entrevoyez, après
avoir consulté le milieu, je ferais peut-être des exceptions, si
vous voulez. On pourrait peut-être donner plus à l'OSM s'il doit
aller à l'international. Ça coûte une fortune d'aller
à l'international et c'est quand même le Québec qui est
représenté à l'international. On a un orchestre
merveilleux au niveau mondial. Pour nous, c'est superbe d'avoir cet
orchestre-là parce que ça nous permet de nous mesurer à
des gens qui sont très bons et, donc, le niveau augmente. Je serais
peut-être pour une uniformisation des subventions. Je ne sais pas si
financièrement c'est possible.
Mme Frulla-Hébert: Ça m'amène à ma
deuxième question. C'est que plusieurs de vos recommandations vont dans
le sens d'une plus grande intervention de l'État dans la gestion de la
culture. Par contre, il y a plusieurs groupes qui sont venus et, justement, ont
perçu du rapport Arpin cette volonté d'une plus grande
ingérence de l'État, ce qui, en fait, n'est pas le cas, mais il y
a cette perception. Les gens nous ont dit: Non, au contraire, il faut que
l'État puisse donner les grandes orientations et, finalement, sortir du
secteur le plus rapidement possible. Donc, il y a le principe de ce qu'on
appelle, d'un côté, le "arm's length" et l'autre principe que vous
semblez prôner. À moins que j'aie mal lu, vous semblez demander
une plus grande intervention de l'État. Est-ce que c'est le cas?
Mme Dupont Rémillard: C'est-à-dire que ce serait
important que l'État définisse ses priorités en termes de
perspectives de développement. Il est évident que, dans le
domaine de la musique, il y a énormément de corporations qui
poussent un peu partout. Il faudrait peut-être un plan directeur, a
savoir les grandes lignes où nous désirons nous en aller en
termes de groupes pour représenter la musique et, après, je
standardiserais les organismes qui veulent avoir accès à une
subvention. J'uniformiserais les critères et je développerais les
critères d'excellence où on veut aller. J'identifierais
clairement où on veut aller.
Si un orchestre a une vocation régionale, à ce
moment-là, le financement serait... Tout dépend de la
bonification que vous voudriez accorder à l'orchestre. S'il y avait un
système de pointage et d'évaluation de l'organisme qui demande
des subventions, ce serait un bon moyen de contrôler. Mais il faut quand
même
définir les organismes et les créneaux dans lesquels ils
doivent oeuvrer. Je pense que c'est fondamental; on ne peut pas y aller tous
azimuts.
M. Poissant (Charles-Albert): Mme la ministre, si vous me
permettez une observation additionnelle. Pour revenir à votre question
antérieure sur la régionalisation, si je peux me permettre, je
pense que vous pourriez facilement dire... Vous avez parle de l'orchestre de
Chicou-timi, je pense, et peut-être d'ailleurs. Il faudrait faire en
sorte que ces régions-là soient délimitées, en
fait, pour qu'ils n'aillent pas dans une région où il y a
déjà un orchestre existant ou vice versa. Ce n'est pas impensable
que vous puissiez arriver à dire: Voici votre région en ce qui
nous concerne, nous de l'Orchestre Métropolitain de Montréal, et
voici la région géographique pour un autre?
En ce qui concerne la présence du gouvernement, ce n'est pas tout
à fait ce.... On vous suggère d'établir des normes, des
guides, pour avoir une espèce d'uniformisation qui vous permettrait
peut-être d'arriver et de dire: Si vous rencontrez certaines de nos
exigences administratives, financières, de participation, etc., vous
pourriez bénéficier de telle ou telle subvention. Ça,
c'est à peu près ce qu'on vous demande. Je ne pense pas qu'on
voudrait que le gouvernement vienne s'immiscer, parce qu'on se considère
meilleurs administrateurs que vous, avec votre permission, madame.
Mme Frulla-Hébert: On se lest fait dire, d'ailleurs, par
un autre, par M. Landry.
Le Président (M. Doyon): Dernière question, Mme la
ministre.
Mme Frulla-Hébert: Alors, justement à vous, M.
Poissant. Au niveau des commandites privées, vous avez la chance d'avoir
- je le disais tantôt - un mécène, M. Péladeau, qui
croit beaucoup en l'orchestre. Au niveau des commandites privées, deux
choses. D'abord, est-ce que c'est difficile, ou est-ce que c'est plus
difficile, ou est-ce que les compagnies se joignent maintenant plus à
des entreprises dites culturelles? Entendons-nous, elles veulent avoir des
retombées et c'est bien normal. Deuxièmement, aussi, il y a
certains organismes qui nous disaient: C'est du surplus, d'une part, et aussi
non aux commandites parce qu'il peut y avoir aussi une certaine
ingérence au niveau de la création, de la programmation, etc.
Alors, il vaut mieux que l'État s'occupe de tout, ce qui est assez
difficile. Alors, dites-nous un peu comment vous fonctionnez au niveau de vos
commandites privées.
M. Poissant: Évidemment, je pourrais y répondre,
mais celle qui serait la plus apte à y répondre, c'est quand
même Marie Rémillard. Je pense qu'en principe c'est le parrainage
des deux qui est le plus intéressant: d'une pan", avoir ces commandites
privées là... Et je suis d'accord avec vous, je n'aimerais
peut-être pas qu'elles soient à un niveau tel, qu'elles puissent
commander la gestion, en somme, qu'elles contrôlent, si vous voulez.
Mais, règle générale, ce n'est pas ce qui se fait. C'est
que les commanditaires versent le montant qui leur est demandé -
certains organismes que nous avons - pour financer l'orchestre et il n'y pas
cette ingérence-là. Je pense bien qu'on ne la voudrait pas. Par
ailleurs, il y a le public qui finance une partie aussi par les droits
d'entrée et, troisièmement, il y a les subventions
gouvernementales.
Mais, si vous me posez la question à savoir: Est-ce qu'on
voudrait avoir... D'abord, le premier exposé de votre question disait:
Quelle est votre expérience, je pense, sur le... Bien, aujourd'hui,
à l'heure actuelle, c'est plus difficile, mais il y a quand même
dans l'industrie - et je peux prendre la mienne en exemple - de plus en plus
une conscience de la culture, je pense, et on le voit. Il y a une contribution.
Est-ce qu'elle est plus grande? Je ne pourrais pas vous le dire, mais il y a
quand même une acceptation du fait qu'on doit prendre notre rôle
dans cela, et on le fait; peut-être pas suffisamment, mais on le fait,
quand même. On pense qu'on n'est pas simplement des faiseurs d'argent,
mais qu'on doit avoir également notre contribution sociale dans le
milieu où nous sommes. Dans ce sens-là, je pense que, oui, je ne
dirais pas il y a une effervescence, mais il y a une amélioration
sensible sur la participation de l'industrie.
Le Président (M. Ooyon): Merci, M Poissant. M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Mme Rémillard, M. Poissant, bienvenue
à cette commission. Deux brefs commentaires avant de débuter le
questionnement. J'ai apprécié, M. Poissant, que vous fassiez
état de cette sensibilité de plus en plus grande que les
industriels ont envers la culture. Il est effectivement prouvé que, dans
le recrutement des employés, quel que soit le niveau, techniciens,
cadres, cadres supérieurs, une des premières questions qu'on va
vous poser au-delà du salaire que vous aller leur offrir est: Y a-t-il
un environnement culturel à l'usine où vous allez m'envoyer ou
à l'édifice administratif où je serai affecté? Bien
des intervenants de la même occupation que vous nous disent
qu'effectivement cela devient un grand incitatif dans le recrutement de leurs
employés. Donc, je pense qu'il était intéressant que vous
le fassiez.
Mme Dupont Rémillard, vous avez fait un commentaire tantôt
au sujet des orchestres et des orchestres régionaux. Je pense que vous
avez soulevé une question à laquelle il va falloir
réfléchir. Est-ce qu'il y a un orchestre à
Saint-Jérôme? Est-ce qu'il y a un orchestre à Joliette ou
bien avons-nous un orchestre régional Lau-
rentides-Lanaudière? Je pense que c'est une question qu'il va
falloir se poser à ce niveau-là. Je pense que, oui, il faut les
multiplier, mais il faut quand même être prudents dans la
multiplication.
Mme Dupont Rémillard: C'est très bien qu'il y ait
beaucoup d'orchestres.
M. Boulerice: Oui, mais...
Mme Dupont Rémillard: Le problème, c'est de savoir
lesquels on doit soutenir. Je pense qu'il faut avoir certains critères
d'objectivité pour choisir le type de financement qu'on leur accorde,
parce qu'il y en a vraiment partout et la qualité n'est pas la
même partout. Mais on ne peut pas empêcher les gens de créer
des orchestres. Ils peuvent en faire, mais de là à les
subventionner tous, il y a quand même une différence et une limite
aussi.
Pour en revenir juste une minute au financement, ce que M. Poissant
disait tantôt, ce qui est extraordinaire, nous on remarque que, puisque,
à Montréal, il y a deux orchestres, on est toujours
obligés d'innover. Alors, ce qui est superbe chez nous, c'est que le
public va devenir la base de notre financement, parce que les grandes
corporations ont tendance à aller vers l'autre. Maintenant, dans nos
campagnes de financement, ce sont les gens qui vont nous soutenir en
majorité. On a nos grands commanditaires, évidemment, on a un
grand mécène comme Quebecor. Mais, au fil des ans, les structures
qu'on est en train de mettre en place vont faire que ce sont nos abonnés
et tous les gens chez qui on s'en va en ce moment qui vont nous soutenir, ce
qui va faire que je ne pense pas qu'il y ait de compétition pour
l'obtention de commandites entre les deux orchestres à Montréal.
Alors, on poursuit dans le régional...
M. Boulerice: J'ai une autre question; vous vous doutez bien de
laquelle, Mme Rémillard. Vous parlez de votre association avec Quebecor
et vous la dites comme une particularité de l'Orchestre. Qu'est-ce que
ça a amené comme particularité d'avoir une association
avec quand même un puissant groupe? Quebecor, c'est 300 000 000 $, je
crois, au minimum, au Québec.
Mme Dupont Rémillard: C'est un peu plus.
M. Boulerice: C'est plus même? J'avoue que mes chiffres ne
sont peut-être pas nécessairement à date.
Mme Dupont Rémillard: Je pense que M. Poissant pourrait
bien nous répondre. Pour ce qui est de nous, l'association avec
Quebecor, ça a été la porte de salut, en fait, mais le
principe pourrait s'appliquer à d'autres organismes. Je pense que le
prêt de cadres à des organismes culturels par les grandes
entreprises, c'est une initiative qui peut porter fruit, qui pourrait
être répandue de façon plus grande au niveau des
orchestres. L'implication d'une compagnie, ça pourrait être le
prêt de cadres aussi, ce qui garantit une saine gestion. Le
problème, c'est la gestion dans les organismes culturels; c'est toujours
la gestion. Il y a le développement artistique, évidemment, mais
ça, il y a beaucoup de talent au Québec. Mais, si le prêt
de cadres est systématisé, le rapport peut être fabuleux
pour l'entreprise culturelle qui n'a pas à assumer, à ce
moment-là, le coût du prêt du cadre.
M. Boulerice: Je suis persuadé que M. Poissant va vouloir
rajouter... Vous me dites qu'une des grandes particularités est,
justement, le prêt de cadres venant de ce groupe; donc, ça a un
énorme avantage.
Mme Dupont Rémillard: C'est-à-dire que ça
sauve...
M. Boulerice: Les artistes n'ont comme préoccupation que
de créer...
Mme Dupont Rémillard: C'est ça. M.
Boulerice:... et non pas de gérer... Mme Dupont Rémillard:
Absolument.
M. Boulerice:... pas parce qu'ils gèrent mal - c'est faux
- mais on les distrait de leur oeuvre de création, à ce
moment-là.
Mme Dupont Rémillard: Absolument. Vous avez tout à
fait raison. Je pense que M. Poissant est d'accord que ça pourrait
être peut-être quelque chose qui est instauré de
façon plus systématique. Ce serait bien et une entreprise y
gagnerait aussi, parce qu'à ce moment-là aussi elle serait
sensibilisée au monde des arts et se rendrait compte de la
fragilité de la gestion dans le milieu des arts.
M. Boulerice: Vous avez parlé du camouflage des surplus de
certains organismes. Oui, cela peut toujours arriver, ça va de soi. Mais
quand vous parlez des équilibres financiers...
Mme Dupont Rémillard: Bien, je pense qu'on doit tendre
vers les équilibres financiers dans le milieu des arts comme dans le
milieu des affaires. Je pense que c'est un principe de base. Et je pense que
les subventions de fonctionnement devraient être en fonction, justement,
des équilibres financiers. Enfin, c'est ce que je pense
profondément, là; je ne sais pas si M. Poissant est d'accord. Les
municipalités ont été obligées de le faire à
un moment donné, et je pense que le milieu des arts devrait le faire
aussi...
M. Boulerice: Oui, mais...
Mme Dupont Rémillard: ...sauf peut-être dans les
projets spécifiques de développement. Mais, là, je pense
que j'ai une vision très particulière de ce milieu-là.
M. Boulerice: Mais, pour faire une image bête, Mme
Rémillard, bien oui, la municipalité offre un produit,
forcément, qui est universel: tout le monde veut une caserne de
sapeurs-pompiers, etc. Mais, dans le domaine de l'art, dans le domaine de la
culture, il y a toujours une part de risque. Vous allez peut-être, pour
une saison, établir une programmation qui est très belle et qui
est très sérieuse, mais il va arriver qu'elle ne rejoint
peut-être pas nécessairement un grand public, parce que les gens
disent: Ah bien, il n'y a pas de Bach cette année, je n'y vais pas. On
n'a pas de Bach...
Mme Dupont Rémillard: Ah...
M. Boulerice: ...ou du Ravel, etc., enfin, les grands classiques
dans la musique. Et c'est un peu la même chose au niveau du
théâtre. Une pièce peut-être un petit peu plus
difficile d'accès va amener des rentrées moins fortes. Donc, il y
a toujours une grande partie de risque, là.
Mme Dupont Rémillard: Mais, à ce
moment-là...
M. Boulerice: L'équilibre ne peut pas être
absolu.
Mme Dupont Rémillard: ...il pourrait y avoir des
subventions au niveau du budget de fonctionnement des saisons normales ou des
choses comme ça. Mais, au niveau du développement artistique pur,
il pourrait peut-être y avoir un volet spécifique pour ces
choses-là, un volet spécifique pour le développement et la
création de pointe. Je pense qu'on pourrait peut-être demander des
sommes additionnelles pour ce genre d'entreprise périlleuse.
M. Boulerice: La question que je voulais vous poser... Et je me
rattache au slogan merveilleux qu'avait utilisé l'Orchestre
Métropolitain, qui était: "Vous n'allez pas manger toujours au
même restaurant; alors, pourquoi aller toujours au même orchestre?"
qui avait été une publicité avec un sens de l'humour, mais
qui faisait effectivement réfléchir les gens. Je pense que cette
publicité-là a contribué, ça a aidé
énormément. Ça a provoqué un certain attachement de
la part des gens. On parie de levée de fonds. Il y a eu, à un
certain moment, au niveau de la levée de fonds, un instrument assez
intéressant qu'on a appelé l'appariement ou, comme on dit en
anglais, le "matching grant". Est-ce qu'un organisme comme le vôtre
souhaite voir réintro- duite une telle mesure au niveau du financement?
Il ne faisait pas uniquement appel au financement corporatif, il y avait une
petite incitation auprès du public aussi...
Mme Dupont Rémillard: Non, je vous avoue qu'on...
M. Boulerice: ...en disant: Si tu me donnes 10 $, hein, tu sais
que tu m'en donnes 20 $ en définitive.
Mme Dupont Rémillard: On a beaucoup apprécié
les subventions d'appariement, vraiment, c'a été extraordinaire
pour nous. On en a profité comme tout le monde. Ça nous a
justement permis de sauver l'orchestre parce que c'est arrivé au
moment... en 1987, je crois, cette subvention d'appariement. On en a
profité comme tous.
Mais, à ce moment-ci de notre existence, on n'a pas vraiment
besoin d'une subvention d'appariement. On est capables d'aller chercher des
sous ailleurs. Ce qui arrive, c'est qu'on vend des concerts aussi. Notre
situation est particulière, elle ne ressemble pas à celle des
autres. On vend des concerts, beaucoup de concerts privés, et on peut
dire qu'on va chercher 40 % de notre argent dans la vente de concerts, ce qui
est complètement différent. Les troupes de théâtre
ne vendent pas de pièces à des compagnies. Nous, on vend des
concerts. On a beaucoup de sorties et on est engagés souvent; donc, on
ne peut pas vraiment se comparer. Le marché que l'on a
développé est différent des autres. Alors, les
règles ne s'appliquent pas de la même façon. C'est
sûr qu'on aimerait ça avoir plus d'argent pour développer.
On va y arriver à notre rythme, mais de toute façon, on va y
arriver. L'argent entre; alors, on ne peut vraiment pas se plaindre. M.
Poissant?
Le Président (M. Doyon): Est-ce que vous vouliez rajouter,
M. Poissant?
M. Poissant: Non, je pense que c'est bien clair.
Mme Dupont Rémillard: Merci.
Le Président (M. Doyon): Vos conclusions, si vous voulez
bien.
M. Boulerice: Je vais vous remercier. Effectivement, les
approches que vous avez eues pour trouver de nouveaux marchés et surtout
de nouvelles clientèles, j'ai été en mesure de les voir,
notamment ces concerts à l'église Saint-Jean-Baptiste, dans un
quartier populaire qui n'était pas habitué à voir un
orchestre de musique classique s'y produire. Quand on parte de
démocratisation de la culture, je dois dire que l'Orchestre
Métropolitain de Montréal en a
probablement donné une des plus belles illustrations. Je vous
encourage à poursuivre. Merci, Mme Rémillard. Merci, M.
Poissant.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: Je me joins aussi à mon
collègue. La seule chose qu'on a à vous dire, c'est: Bravo pour
votre programme. Vous avez réussi, dans un même marché,
à trouver votre niche, à la développer et à ne pas
être en compétition avec l'autre, mais à travailler
ensemble, à être complémentaire d'une certaine
façon. On essaie d'habituer d'autres organismes à en faire
autant. Merci encore de votre présence, merci d'avoir été
ici.
Mme Dupont Rémillard: Merci de nous avoir entendus. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Doyon): Merci à vous, Mme
Rémillard. Merci, M. Poissant. Je suspends les travaux pour quelques
minutes.
(Suspension de la séance à 17 h 4)
(ReprisE 17 h 21)
Le Président (M. Doyon): Donc, après une suspension
qui ne dépendait pas de la commission, qui était due au retard de
nos invités, retard qui ne dépendait pas d'eux, semble-t-il, ils
ont pris Via Rail... Alors, vous pouvez prendre Via Rail, mais à
condition de le prendre la veille. Ha, ha, ha!
M. Boulerice: Toujours le fédéral. Des voix:
Ha, ha, ha!
Le Président (M. Doyon): Alors, je souhaite la bienvenue
au Groupe de travail sur le développement de la culture scientifique et
technique. Il nous reste malheureusement peu de temps, parce qu'il y a un autre
groupe que nous devons entendre avant la fin de nos travaux, à 18 h 30.
Là, c'est l'Outaouais? Oui? On a affaire à l'Outaouais. Oui,
c'est ça.
Une voix: Leur train était à l'heure.
Le Président (M. Doyon): Eux autres, leur train
était à l'heure. Les gens de l'Outaouais sont à
l'heure.
Une voix: Toujours.
Le Président (M. Doyon): M. le député, on
verra si vous êtes membre de la commission dans quelques instants.
Des voix: Ha,ha, ha!
Le Président (M. Doyon): Alors, je souhaite la bienvenue
aux Créateurs de l'Outaouais. Je les invite à faire leur
présentation. Le problème qu'on a, c'est que, l'autre groupe
n'étant pas arrivé, on ne sait pas s'il va arriver. En tout cas,
on va essayer d'improviser un peu, mais en vous consacrant le plus de temps
possible et en vous remerciant vraiment d'être parmi nous. Vous disposez
de 10, 15 minutes pour faire votre présentation. Après ça,
on va entamer la discussion avec vous pour le restant du temps, par voie de
discussion, de questions et réponses, si vous voulez bien participer.
Pour commencer, je vous inviterais à bien vouloir vous présenter.
Vous comprenez le français, oui? Assez?
Une voix: If you would explain it, yes.
Le Président (M. Doyon): Well, you have 10 or 15 minutes
to present your mémoire and then we will start the discussion with you
for the rest of the time. If you would start, please, by introducing yourself
and the people who are in front of me, so that we will know to whom we are
speaking and then we will take 10 or 15 minutes to listen to your presentation.
You can go ahead.
Outaouais Creators
Mme Peeler (Deirdre): We are still catching our breath. We have
travelled seven hours.
Le Président (M. Doyon): You can even have a glass of
water, if you want to.
Mme Peeler: Thank you. I am Deirdre Peeler, and I am a
professional artist and business person in Wakefield, Québec. I am
president of the Outaouais Creators, which is the association here now.
Mme Woods (Anna): I am Anna Woods. I am a painter, working full
time, living in Québec and a member of Outaouais Creators in Shaw-ville,
Québec.
Le Président (M. Doyon): And who is next?
Mme McLaughlin (Deborah): My name is
Deborah McLaughlin. I am a retired dancer and I worked in theater and
music. I am a member of Outaouais Creators and I live in Wakefield.
M. Neelin (Michael): My name is Michael Neelin. I am a landscape
and architectural artist. I am treasurer of Outaouais Creators and live in
Shawville, Québec.
Le Président (M. Doyon): Welcome to all of you. You can go
ahead.
Mme Peeler: I would like to say thank you
for inviting us. We thought we would have a few minutes to catch our
breath. I want to explain a little bit about who we are, the Outaouais
Creators, and then it will go down the line to our questions.
The Outaouais Creators is a network of regional professional artists,
writers, performers and craftspeople from urban and rural West Québec.
This includes active members from Buckingham to Mantwaki to Fort-Coulonge.
The Creators' network was formed in 1990, following a series of
information meetings with local artists, sponsored by Outaouais Alliance and
the Ministry of Cultural Affairs with Ludmila Pergat. A dedicated committee of
artists was formed out of which the Outaouais Creators organization was
founded. The prime objective at that point was to publish information from the
Ministry of Cultural Affairs on grant deadlines etc., as well as the artists
themselves sharing their ideas in English for the English-speaking creators in
the region. We number about 120.
The Outaouais Creators is operated by a volunteer board of directors and
its mandate is to provide information, encourage and promote professionalism in
the arts in the Outaouais, promote public awareness of the arts, improve the
economic situation of professional artists and improve links with all levels of
government and educational centres in West Québec.
The sole source of revenue to date is membership fees and our membership
is 25 $ per member, per year. These fees barely cover the publication of our
newsletter, which is published bimonthly. I have a copy of our newsletter with
me. The newsletter is sent to 150 individuals and organizations which provides
information in English on regional, provincial and national issues with
particular information regarding Ministry of Culture deadlines and
opportunities. The newsletter also provides the artists who are often
geographically and professionally isolated with an important network, which
lends some encouragement in their own endeavours.
The members of Outaouais Creators promote and are part of the two major
studio tours in the region, which draw thousands of people from the Hull-Ottawa
region. The Pontiac studio tour and the Artists And Their Environment tour not
only provide a venue for local artists but are promotors and assets for tourism
in the Outaouais region. We also sponsor professional seminars for our
membership as well as the public. Thank you.
Le Président (M. Doyon): Thank you.
M. Neelin: I wanted to take this opportunity to speak briefly
about one aspect that I saw arising in the Arpin Report, specifically that of
cultural education. As a young artist, I feel that it is very much in my
interest to address the issue of educating, first, our society with regard to
culture, and secondly, the need to educate our professional artists and
developing artists.
I was encouraged by the steps noted in the Report, the recommendations
relating to education and to the recognition in the Report that culture is an
asset, culture is something to be invested in. Investment to me means long term
commitment and I feel that one way of undertaking a long term commitment to
culture is through building awareness in our society of our cultural milieu and
of our artistic endeavours. This is an area where the regional diversity of
Québec is essential to the future growth of our culture. One area that
is addressed particularly in the Report that I would like to applaud is the
area of cultural education in our schools. I felt that if we are going to begin
to develop this asset, we need to do it at a very early age, but we also need
to continue it throughout our primary and secondary educational systems.
I feel also that it is very important to recognize - here we are, we are
speaking as the Outaouais Creators, as a regional arts group -the regional
diversity and uniqueness of our artists and of our creators. In order to
recognize this in our educational curriculum, I think what we need to do,
perhaps, is to begin bringing local artists into our schools, as well as
providing an expanded cultural curriculum from the Ministry of Education
provincewide. Another key aspect of education - obviously, education does not
stop when school ends - is to begin to educate the community in culture and to
involve the community in our artistic endeavours. This could be done through
seminars, through studio tours such as we are already doing in the Outaouais.
And I feel there is a need for expanded support from the government in this
area.
The second aspect of the whole question of cultural education is the
need to develop excellence in our artists, doing this through ongoing
professional development both of inspiring young artists and also mature
artists who need to continue to grow and to mature throughout their artistic
life. This begins with school, but then we need to continue by facilitating the
training of our artists. I think this is particularly a concern for us in the
regions.
In the big cities of Montréal and Québec City, it is
perhaps easier to be exposed to culture and to the artistic life of
Québec, whereas in the more outlying regions, it becomes very important
that the government plays a role in facilitating and in bringing to the public
the possibilities for education of artists.
This education and professional development of artists then needs to
continue through perhaps regional exchanges between our region and the cities,
or our region and other regions, other than West Québec, and through a
variety of initiatives that could be shared between the government, between the
Ministry of Cultural
Affairs, and the regional artistic associations.
In many cases, the artists' associations are already taking considerable
initiatives to promote the arts and to educate the public in their areas and to
involve them in cultural life. We are encouraged by the Department of Cultural
Affairs' initiative to become more involved in the life of professional artists
at the regional level. We would encourage them to support the existing regional
artistic associations and to enhance the communication going on, the dialogue
going on between the artists and the Ministère. Thank you.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup.
Mme McLaughlin: First of all, I would like to thank this
commission for inviting us. I would like to say that two years ago, when
Ludmila Pergat, who was the representative for non-francophone cultural
communities, called artists in the Outaouais and then Outaouais Alliance got in
touch with the multidisciplinary group of artists, at that point, there were
only half a dozen people who even realized that there was a Ministry of
Cultural Affairs, because we are very far from Québec City, and because
our general area is Hull-Ottawa.
Somehow, the artists had a very welcoming introduction through Ludmila's
encouraging meetings. She went to meetings in Shawville, Wakefield and Hull to
try and let people know what kinds of programs were being offered by the
Ministry. Since that time, she has been of great assistance to us in dealing
with a couple of difficult things, enhancing the communication and
understanding the great diversity of programs that are offered by the Ministry.
We think that this is a wonderful opportunity for us to begin a dialogue to let
you know a little bit about the artists in our area.
One of the things that is so important is the communication and this has
begun with the Ministry of Cultural Affairs in Hull and with Ludmila, but it is
also important that the communication be accessible in English. For example,
the Arpin Report had to be paid for to be translated so that we could
understand the issues involved and be able to respond to them, and the
translation was not available in time for the deadline. So we want you to
understand that we really appreciate when this effort is made to communicate
with artists in English, because these are very difficult and sometimes subtle
ideas, and we appreciate being addressed in our mother tongue. One of the
suggestions we have is that there be a 1-800 number available with a person in
charge of non-francophone affairs and with the "direction régionale", so
that artists in outlying areas can communicate with the "ministre des Affaires
culturelles" to clear up misunderstandings or understand when some proposition
is put forward, because people do live several hours from Hull.
Now, I would like to review the excerpts from a letter, which we will
submit today, along with several other books and information from Katharine
Fletcher, who is a writer living in Quyon, Québec. "As a member of
Outaouais Creators who is unable to attend this hearing session, I submit this
letter for your attention, outlining my concerns vis-à-vis the Arpin
Report. I am a freelance writer, author and publisher residing near Quyon,
Québec, whose language of business and communication is English. I have
major concerns about and a significant interest in Quebec's cultural dossier
and propose changes to it. "Specifically, I am extremely concerned about the
emphasis given to Montréal and Québec City. I therefore most
heartily applaud recommendations such as No. 51, which encourages the support
of outlying regions such as the one in which I live. I also fully support items
61, 62, 63 and 64, which emphasize the importance of literature, reading and
culture in the schools. "I would like you to know that as a writer in the
English language who resides in Québec, I have been personally unable to
receive provincial assitance for my own writing. My first book: "Historical
Walks: The Gatineau Park Story", was entirely self-published - I took a
personal financial risk to write, publish, promote and distribute it - and is
now a Canadian best-seller. I have sold over 6350 copies and 5000 is a Canadian
best-seller. I have been unable to receive any assistance for three printings.
I have been unable to receive any funding for future projects. I have been
unable to procure any assistance for its translation into French. Ironically,
the only assistance I have been able to receive for my personal writing is
through the Province of Ontario, through the Ontario Arts Council. I am
currently writing a book for McClelland & Stewart and the OAC gave me a
grant under the Works in progress for out-of-town province writers. "As a
minority language writer residing in Québec, I suffer from lack of
information available in English, and as an indication of my personal
commitment to fostering appreciation of the culture of Québec, I am
enclosing some relative materials which describe projects I have personally
helped to promote. And we will... "
These are excerpts from this letter that we will submit to you since she
wanted to put forward the concerns of writers. Thank you.
Le Président (M. Doyon): Thank you.
Mme Woods: O. K. It is an honour and a privilege to be here. It
is my understanding that this committee is formed to sollicit response to the
Arpin Report and we sent you our response.
We are making the assumption that you have it, that everyone here has
the report and has read it. So we are not covering items that are in the report
and expect that you will be asking questions about those later.
I wanted to start out by saying that as an organization we value a
community in which all members have equal political and economic privilege and
responsability, and our submission to you is partly based on that. The items
that I wish to cover are based on that too.
One of the things that I wanted to deal with was the economic situation
of artists in Québec and in Canada. Five years ago, when studies were
done, artists were the lowest income group in Canada, lower than people on
welfare, because many artists do not apply for welfare.
In the Arpin Report, there is an emphasis on creation and on creativity
and culture. But when you look at the reality of artists living in
Québec, the reality does not reflect the stated purpose in the Arpin
Report. So, as an artist, I would like to say to you, who are in the positions
of power: I would like to see you do things or make decisions that create
policy in that program that works to help improve the status of the
artists.
So, some suggestions around that would be in the area of education. Some
of the points have been touched on already and I am going to review
recommendations that we have under different areas from the viewpoint of
looking at increasing the income of artists, which, I think, is of extreme
importance.
So, under the heading of education, one thing would be to involve
artists in educational programs by paying them professional fees. If you are
going to be looking at promoting culture in Québec and developing
curriculum within schools, hire artists as consultants for the curriculum, pay
them professionally, create programs within communities, numerous programs for
artists and residents. Have them go into the schools. Have them provide
services within the community and pay them for their services. Have artists
teaching educators. One way to really promote culture is to teach educators
about art, so that they are able to incorporate it daily into their curriculum,
whether their curriculum is history or in other areas. It does not have to just
be painting or drawing or music. The educators need to know more, and there
should be workshops using artists in those workshops.
Something that would be helpful for artists, for the development of
artists would be to encourage programs to pay artists to teach other artists or
to work as a mentor with developing artists, to encourage that kind of
programming for the development of arts within Québec.
There is a tremendous ressource. When our group first met and we sat
around the table with staff from your regional office, none of us were known to
the regional office at that time and we were not known to one another, and
there were people in our group, myself included, who exhibited or performed
internationally and nationally, but have had no exhibits or performances within
Québec. There is a tremendous ressource in West-Quebec of artists.
Because we are so far out, we are unknown within the centers of Québec
or Montréal.
Another thing that would be helpful to artists working within their
profession would be to somehow begin a program of accreditation for teaching
and training that might be outside of the university or other recognized
institutions.
The next category would be economic, looking at ways to bring up or
improve the situation of the artists economically. For visual artists, one
would be looking at a program to guarantee exhibition fees to Québec
artists, just tossed out as an idea.
Another is pensions. Most Québec artists do not qualify for
pensions. Another would be looking at income tax. What can be done to help the
artists, to the low income artist regarding income tax? Another is tax
incentives to purchasers of art. To eliminate tax on cultural products might be
a suggestion. Also, to provide tax incentives to corporations.
Another recommendation in the area of communications would be to provide
toll-free numbers for artists, which Deborah already mentioned, from outlying
regions, so we can get information, we can know of programs that are going
on.
Another would be to publicize notice of competitions and programs in
local newspapers and then announce and publicize the results of the
competitions in English communities in English and in French. And also send
notice of competitions directly to the artists and the artists' associations in
their language. We have a terrible time getting any information about arts
programming, and it is not because we do not try and we are not interested. We
are very interested. (17 h 45)
Another suggestion that we would like to make at this time of change for
Québec - and perhaps this has been done, we do not know - is to look at
other models that exist and just some that we are aware of is in Ireland. They
honor their writers and their writers do not pay income tax. In Brandon,
Manitoba, in the late 70's, there was a three-year pilot project done on
guaranteed income. That was quite successful. It might be worthwhile to get the
results of that program and take a look at guaranteeing a minimum standard of
living to artists in Québec. In Norway, the Government of Norway
provides residences and studios free of charge to artists and then provides
some with a guaranteed minimum incoma In Japan, artists and artworks are
considered national treasures. Thank you.
Le Président (M. Doyon): So, you are ready for the
questions. Mme la ministre.
Mme McLaughlin: There is one more thing that we wanted to add and
that was the concern that Québec do everything possible to increase the
funding to 1 % and that takes the will of everyone here because whose lives are
at stake? It is the life of artists and we would like to make sure that some of
the benefits trickle down to the daily life of artists, so that they can
continue to be artists.
The second thing is that, at this point, a lot of people in our area
feel that, as we are still getting to know what the Ministry of Cultural
Affairs offers, we still require a federal presence which can enhance certains
activities. Well, Québec Cultural Affairs does so wonderful things in
training and is looking at education, which is a provincial jurisdiction.
There are still some things that the Federal Government provides that we
find very beneficial such as the opportunity to travel to Victoria, Prince
Edward Island and have liaison with other professionals. And so, there is a
question about the control and funding of culture residing in Québec and
also, the question of the arm's length policy.
For example, recently, there was an exibit in Ottawa, at the National
Gallery, that consisted of some wooden shacks outside the National Gallery.
Now, this was quite controversial and this was only one of the number of
artists, but, because he was exibiting what is the reality of living and
circumstances in many countries in the world where people live in little shacks
like this outside of the wonderful, beautiful Gallery, he became very
controversial.
If this is too closely linked to the political people who actually give
the dollars, then it seems like the owners come back on you for deciding what
should or should not be a public domaine. So, there has to be an arm's length
almost like a crown corporation at some point if culture is in Québec
only. Otherwise, we have, you know, different status, as it now stands, but the
same with the municipalities.
Some municipalities and municipal politicians are very leery of doing
perhaps more experimental work that is not sort of the reassuring type of work
that people are used to, but is more contemporary because they feel they have
to account for every tax dollar in exactly how it is spent. So, the freedom of
the artists is a very particular balance and yet we absolutely need the
government support because, nationally, culture is a very important aspect of
life, and we do hardly endorse parts of the Arpin Report which talk about its
integral part of life and contributing to the good of all. Thank you.
Le Président (M. Doyon): Thank you very much. Mme la
ministre.
Mme Frulla-Hébert: Thank you. I welcome you here. And when
you are saying that West Québec is very prolific, as far as artists and
creative part, you are right. There is a lot of, you know, sort of creative
ideas and also influences that come from Western Québec. The thing is -
and this is the question I have to ask you - being so much near, as a
neighborhood, let us say, to Ottawa, which is the national capital... It is not
even a region like another region. It is the national capital. You know, all
our national museums, a lot of them are located there and, of course, the
Parliament. So, you have access directly to it and it is not far. So, how do
you feel? You are talking a lot about being and evolving in Québec, but
as an artist do you feel more, I would say, part of sort of the Canadian frame
or, you know, being more within the Québec artists' community?
Mme McLaughlin: I would like to answer that. I think that many of
the artists look upon Hull-Ottawa, and that includes Gatineau and Aylmer, which
is the third largest area in this province, but they look upon this area as
sort of their urban area. However, many artists do live in the country. They
live a couple of hours out of town because they can afford to have studios.
They enjoy the atmosphere that is conducive to the visual arts, in particular,
although our group is multidisciplinary. But in terms of participation, there
is a lot of participation with the urban area and vice versa, through the
studio, tourist people come from Eastern Ontario up to Gatineau or up to
Pontiac. I mean, they bring to us dollars to...
Une voix:... trip. Ha, ha, ha!
Mme McLaughlin: Yeah. So, there is definitely a participation and
there is also a very strong Canadian feeling, but there is also Québec
feeling and so we may wear many hats. There is an Outaouais feeling and there
is a very strong nourishment that comes from living in such a beautiful country
area that allows us the freedom to work and provides at the same time access to
national and sometimes international stimulations that Montréal
provides, and so does Québec City, and so does Toronto. So I hope that
answers your question and then maybe someone else who wants...
Mme Woods: I would like to speak about that too. Living in West
Québec, I feel quite isolated from the rest of Québec. As I said
before, it is extremely difficult to get any information and I am living in
Québec by choice. I want to live in Québec. I think Québec
has a lot to offer me and there is a rich and a vibrant culture here, but I
find it very difficult to know what is going on, to feel like I am part of the
culture, part of Montréal or Québec City. It is
difficult to get information, whereas in Ottawa, the Ottawa City program
for arts and public buildings is very well publicized, and an effort is made on
that part of the city to contact artists and let them know step by step what is
happening. So, there is an effort there to include me, even though I live 80
miles away, in that community of artists. An effort that I do not feel coming
from the province that I live in.
Le Président (M. Doyon): Merci. Est-ce qu'il y a
consentement pour que M. le député de Gatineau puisse
intervenir?
M. Boulerice: De Gatineau ou Papineau?
Le Président (M. Doyon): De Papineau, pardon.
Consentement? M. le député.
M. MacMillan: Vous connaissez mon comté, mon cher
collègue. Vous le mentionnez souvent à l'Assemblée
nationale. Alors, merci, M. le Président, de me donner la
permission.
I would like to welcome you, on my part and my colleagues from the
Ottawa region. I was surely glad when I found out today that you were going to
come here and present something on the policies of cultural affairs in the
province of Québec. I read your report, a short notice, this afternoon,
but the question I would like to ask... I would like you to tell Mme la
ministre the real problems in the Outaouais region. You have mentioned some of
them, but you have talked globally about your problems. But I want you just
take a couple of minutes to tell us and the people here what really are the
problems. And, second question, what is the improvement that you would want in
our region to help you, people, to continue to improve the culture where you
are apt or where you work in? I do not think that that was mentioned enough, as
far as I am concerned.
I know you have talked about problems of all the province of
Québec, but I would like you to talk about our beautiful Outaouais
region. I do not think we are far away from Québec or Montréal,
so it is time to really talk about the problems that we have in our region and
maybe, after that, we can help your people to get closer to the new policies
that will follow in the next year or so.
Mme McLaughlin: From Katharine's letter, for example, she says:
"Here, in our local communities of Shawville, Quyon, Aylmer - and that would
include Buckingham and some of those other areas - teachers in the artistic
literary committee are frustrated at the lack of funding for an arts in the
schools program. "
In other words, there are people living in Buckingham or Shawville,
wonderful, talented artists, craftspeople and writers who could participate in
the schools program. And unfor- tunately it comes down to budget and who covers
what. A lot of schools, at the secondary level, do have some kind of program in
music and visual arts, but at the elementary school level, it is not so
prevalent, and I think that it is up to the Ministry of Cultural Affairs to
increase the budget, so that artists can become residents in the schools and
that they can be paid a living wage for doing what they are doing.
M. MacMillan: So other regions the province of Québec are
getting money to do that and we are not getting it in our region?
Mme McLaughlin: In that case, no. I understand that, at one time,
there was an arts in the schools program and it is now recommended that it come
back into existence in the Arpin Report. In our region, I think, one of the
things that I would like to see is support and recognition in terms of the
kinds of studio tours that we would like to see developed. It brings a lot
of... It enhances the tourism, when people drive up the Gatineau or drive up
the Pontiac, they stop and they look at the different galleries and the
different exhibits, and they come specifically...
Mme Peeler: Well, the arts spin off businesses. The restaurants
do well, as well as the artists, as well as any other business on the route.
And we have expanded, last year, from one week-end now to two week-ends. And we
are full from 10 o'clock in the morning till 6 o'clock at night, people
streaming for two solid week-ends for studio tours. I am sorry, I interrupted
you, but...
Mme McLaughlin: Yes. Also, there is a request to have... She
talks about it in here, as well. "We must have access to a fluently bilingual
ministre des Affaires culturelles' representative here, in the outlying region,
because there is such a strong professional network of English-speaking
artists. " She feels that it is necessary to have that as well as
congratulations to the Ministry of Cultural Affairs for putting someone to have
a permanent position to deal with issues of non-francophone affairs.
I understand that may be happening. Certainly, in the past, we have
really appreciated having an ongoing position and I hope this becomes something
that will help. Because if we knew problems, through this 1-800 number that you
are going to install in Montréal, we can call this person and say: "Jay,
we are having a few problems. Could you, please, check it out?" And that
relieves some of the pressure on the "direction régionale", because they
are very responsive, but it will help also if they have that kind of input.
And another level... For example, the
Outaouais Creators has been publishing their newsletter in English. They
would really like to publish it bilingually. They would really like to have
funds available to translate some of their works, such as Katharine Fletcher's
work, into French and also, vice versa, that some of Québec's works and
artists in French be translated into English because there is a large
interested Canadian, American and international market for works. And so
translations are very sensitive things and it requires funds to do it
correctly, to insure that kind of communication.
Une voix: I would like to say...
Le Président (M. Doyon): The last few words, because I
have to give the occasion to the members for the Opposition. You can go ahead
for a few seconds.
Une voix: A few seconds. O. K. With our organization also, we
find we have professionals who would like to teach and no classroom space
available. It is just as interest courses to the adults in the communities. We
need some community centers, something like this where we can go and teach,
where we ourselves can put our filing cabinet. These are very basic needs.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup. Merci. M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. (18 heures)
M. Boulerice: Oui. Mesdames et messieurs, vous êtes le
premier groupe d'artistes de la région de l'Outaouais qui se
présente avec forcément un contenu qui, à bien des
égards, est intéressant. I do not know what is the English word
for it. Maybe my two colleagues could help me. Comment on dit ça,
"saupoudrage"? You have probably heard about that word, "saupoudrage", in the
Arpin Report, the multiplying of small allowances. The Arpin Commission has a
recommandation that we should stop it.
Mme McLaughlin: I do not know.
M. Boulerice: It is because I do not know what is the English
word for "saupoudrage", madame.
Mme McLaughlin: Could you give me another word, please, and speak
a little louder?
M. Boulerice: The word "saupoudrage" means those small grants
that are multiplied and that are given to small groups or creators.
Mme McLaughlin: Oh, small grants!
M. Boulerice: Small grants, yes. The Arpin Commission recommends
that we should put an end to it. Do you believe that, in a region... If we stop
it, what can happen is that we will institutionalize certain groups, but there
are little cultural organizations in regions that will suffer for this.
Mme McLaughlin: Well, certainly, the institutions that have
worked so hard must be supported and continue to be maintained. And it is
laudable, in the Arpin Report, that they are looking at a three-year support
program, so that you can start to plan. However, it is also very important that
groups that have previously not, maybe, been in the center of things be
considered and that more attention be paid to the regions.
For example, if our group is a new group, in reality, people have been
living and working as artists for quite a long time. So I think that support
should be given to groups like ours. It can come in resources. It does not have
to come just in dollars and cents. It can come in ways in which the Ministry
itself starts to enhance its communication with the regions.
Mme Woods: I think that if moneys were put just into a few
selected programs, it would be very stifling to the development of culture in
Québec. I am not saying to not support programs, but I think it is very
important to also support emerging groups, emerging art, to allow for
creativity within Québec culture, it is extremely important.
M. Boulerice: When I read your memo, I could feel that you had
certain fears regarding the role and the actions of the proposed Québec
Ministry of Cultural Affairs. If I was granting you the arm's length principle,
making sure that the same distance should prevail when we elaborate programs
and then one comes to give grants, we would create what we have at the federal
level, which is the Art Council, would your fear disappear?
Mme McLaughlin: I think the apprehensions come because what the
Ministry of Cultural Affairs can do and how serious Québec is about
supporting its cultural creators, that we do not have enough experience to
really know yet the seriousness of the commitment. For example, the funding has
not reached 1 % for the last number of governments. It is a problem inherent
that when culture and so forth... There is, maybe temporary, five seconds of
fame and glory, but the reality is quite different for working artists. So I
think we would like to have a chance to be better acquainted with how the
system does work, so that we can feel more confident.
But, as well, there is something about having several different avenues
and sources, if one... For example, the federal programs do things that the
provincial programs cannot do. Education is a provincial jurisdiction and it
is
very important that this be developed and followed. But there are things
that can happen between artists going from Prince Edward Island to
Québec City, to Toronto, to Kelowna B.C. meeting and meeting with their
peers and exchanging information, plus the chance for Québec artists to
be seen outside of this province.
Let me take an example. As a dancer, there are things that
Montréal is well known for: les Grands Ballets canadiens, the jazz, les
Ballets Jazz, absolutely superb, and some modern dance. However, there are
other places where different kinds of dances is happening, such as in Toronto.
And there are different people that an artist may choose to apprentice with or
groups of people that they would want to work with.
So a dancer, actually, has a very small field in Canada itself and
sometimes has to go to the United States or Europe to enhance his training or
to have the artistic expression that is very important to them. So, the more
open the attitude and the more freely that artists can pursue their career with
vigour, the more and more passion and vitality that they feel in the work,
their more that comes back into our society because people may go to Europe for
a couple of years, but they come back.
M. Boulerice: But if I do understand you, it is not exactly a
question of fear, as I used the word, but it is a question of credibility.
There have been so many promises with no result that you question the
credibility of this Department to achieve a global policy.
Mme McLaughlin: I would not even say it is credibility. I think
it is still that... For example, the Ministry has been very good in the last
couple of years because people have known about the Ministry of Cultural
Affairs. They have been able to apply for grants and some have succeeded on
merit, the merit of their project. But the first thing is getting in the door.
The second thing is that the "ministre des Affaires culturelles" contributed
towards one of the studio art tours this year, which made that possible and
that was graciously accepted and lauded because it is quite expensive to
advertise and make sure that a studio tour is done in a professional .way.
However, there are few things, for example, the fact that the translation has
been so slow in the Arpin Report, it was very disturbing and... I have lost my
train of thought. Ha, ha, ha!
M. Boulerice: As a writer, how do you suffer from not having a
real copyright law? As a matter of fact, for my colleague, it is federal and
the last law dates from 1924.
Mme McLaughlin: I would suggest that what you could do is contact
Katharine Fletcher, who is the writer, who would love to talk to you about what
she and the author writers have been concerned about. You are regarding
copyright and books?
M. Boulerice: Yes. And even the other notion which is european,
"les droits voisins".
Mme McLaughlin: The what?
M. Boulerice: "Les droits voisins". Copyright is
reproduction...
Mme McLaughlin: Yes.
M. Boulerice: ...but "droits voisins" is the intellectual
property of your oeuvre.
Mme McLaughlin: Yes. Well, right now, I believe the Canadian
Conference of the Arts has put forward proposals on copyright and on copyright
of intellectual ideas, and I am not anymore conversant in that at this
point.
Mme Woods: Actually, tomorrow night, in Ottawa, we are having a
seminar on copyright for arts, for both writers and visual artists, to inform
ourselves more of copyright law that exists and potential changes.
M. Boulerice: My last question, because there is another group
who was on the train and the train did arrive. What should be the place of the
Outaouais in a cultural policy for Québec?
Le Président (M. Doyon): You have one minute to answer
that.
M. Boulerice: Because the Outaouais region is very peculiar.
Mme McLaughlin: Yes. Well, the policy, I would suggest, is to
support through a greater budget the "ministre des Affaires..., direction
régionale", so that the professional artists who have just come into the
system can start to partake and not affect other people who happen to know
about it, not affect their opportunities. So the pie must be made larger for
that area. Also, yes, there has to be communication in English and we suggest
to have 1-800 numbers with the non-francophone liaison and with the "Direction
régionale", so that people from outlying areas can call and clarify the
process.
We would also very much like to have this publicized. We do not often
get The Gazette. We may not, in fact, know of things that are happening
and if there are new initiative programs, they have to be broadcasted. So we
would like to work in improving the communication between the "Direction
régionale" and the artists who live all through the area, whether this
is done through newspapers, English and French, and regional newspapers, or the
Ottawa Citizen,
which is like The Gazette to you in Montréal, or whether
this, is done through contacts with Outaouais Creators which would then have
the additional onus of us paying for our own mailing to let people know what is
going on, or whether this is done through you, from the "Direction
régionale" actually mailing out correspondence to everyone on a mailing
list, and we would be delighted...
Le Président (M. Doyon): Je suis obligé de vous
interrompre, madame. M. le député, si vous voulez bien remercier
nos invités parce qu'il nous reste à peine quelques minutes pour
entendre les personnes qui sont en retard. M. le député.
M. Boulerice: I think that you have given us the real picture of
your situation. So thank you for coming.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: I just want to thank you and to do what
I think more personally, I will ask my colleague.
Le Président (M. Doyon): M. le député de
Hull, avec le consentement de la commission.
M. LeSage: Yes, I would like to thank you for coming at this
commission to speak out your griefs. So I hope the conclusions of your request
will be granted to you and that, in the future, the culture of the
English-speaking people in the Outaouais region will be more lively. Thank
you.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. I wish to thank you and I want to apologize for having
pushed you a little bit because, I know, you had just come inside the room and
we had to ask you to start right away. I apologize for that and I thank you for
coming.
Une voix:...
Le Président (M. Doyon): O.K. Leave it on the desk. We
will look after that. Thank you.
Alors, j'invite maintenant le Groupe de travail sur le
développement de la culture scientifique et technique à bien
vouloir s'avancer et à prendre la place des gens qui quittent
actuellement la table.
Je suggère que les conversations puissent se continuer à
l'extérieur, s'il vous plaît, pour que nous puissions terminer nos
travaux. Merci beaucoup, M. le député.
M. Boulerice: M. le Président, il est impoli envers le
chef de l'Opposition, impoli envers le président de la commission.
Le Président (M. Doyon): C'est regrettable.
Donc, je souhaite la bienvenue à... Je pense que nous avons
devant nous Mme Claude Benoit. Je lui indique que, dû au retard qui n'est
pas de sa faute, je comprends bien, cette commission n'a pu, évidemment,
l'entendre à 17 heures, comme c'était prévu. Il nous reste
à peine 15 minutes à vous consacrer et, dès maintenant, je
vous laisse la parole.
Groupe de travail sur le développement de la
culture scientifique et technique
Mme Benoit (Claude): Merci. J'espère que l'apéritif
sera agréable et pas trop long. Je m'excuse encore. On ne contrôle
pas nos transports en commun tellement. J'ai été prise dans le
train. Le groupe de travail est un groupe ad hoc qui s'est réuni pour
faire une réflexion et déposer des propos articulés au
sujet de la proposition de culture et des arts qui a été
déposée en septembre.
Je voudrais rappeler les recommandations: faire état d'une
réflexion sur la culture et la culture scientifique et technique,
proposer une problématique et suggérer peut-être des
éléments d'orientation pour le développement de ce point
dans la future politique de la culture et des arts.
Je rappelle brièvement les recommandations de notre groupe de
travail. D'abord, nous avons souhaité que soit reconnue la culture
scientifique et technique comme une composante à part entière de
la culture. Nous souhaitons que, dans la future politique des arts et de la
culture, soient précisés la place et le rôle de la culture
scientifique et technique. Nous souhaitons que soit désigné
clairement un ministère, préférable-ment le
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, comme
ministère responsable de la culture scientifique et technique et, dans
le cadre de l'élaboration d'une politique spécifique sous sa
responsabilité, nous souhaitons que soient précisées les
orientations et les voies de développement privilégées.
(18 h 15)
Nous avons recommandé de prendre les mesures nécessaires
pour bien évaluer les impacts du rapatriement au Québec des fonds
fédéraux destinés à la culture, en tenant compte du
contexte spécifique des programmes de développement et de
promotion de la culture scientifique et technique et, ce faisant, de statuer
clairement sur les modes de concertation, de transition et
d'opérationalisation de ce rapatriement.
Je voudrais prendre quelques minutes, maintenant, pour vous faire
état un peu de ce qu'est la culture scientifique et technique,
puisqu'elle a été omise au rapport. Il nous apparaissait
important peut-être d'outiller les membres du comité de
différents points à ce titre. Pour nous, la culture en
général représente l'ensemble des façons
d'être, d'agir, de communiquer et de se représenter le monde, pour
un
groupe ou une société donnés. Il apparaît de
plus en plus difficile de concevoir la culture selon un secteur ou une
discipline précise. La civilisation de communications dans laquelle nous
vivons commande une vision globale intégrée. Le
développement des réseaux d'information, de production et de
diffusion oblige à des réflexes analogiques, à la
compréhension des processus, à la rétroaction, à la
conceptualisation. L'une des composantes de la culture, la culture scientifique
et technique, peut se définir comme les rapports que les individus et
les groupes entretiennent vis-à-vis des sciences et des techniques.
Nous voulons apporter ici des éléments d'information
relativement aux dimensions que prend la culture scientifique et technique et
qui pourraient inspirer la réflexion au niveau des catégories en
développement culturel. La culture scientifique et technique a une
dimension de création qui signifie l'élaboration de contenus
scientifiques et techniques; une dimension de production qui renvoie, par
exemple, à l'édition, à la réalisation
d'expositions ou d'équipements spécialisés, de films,
d'activités diverses; la distribution qui concerne la diffusion de ces
produits, leur vente, leur itinérance; la sensibilisation des
marchés, qui désigne l'éducation culturelle,
traditionnellement présente au coeur du projet de la culture
scientifique et technique qui a toujours fait des marchés jeunesse et
scolaires ses clientèles privilégiées.
La culture scientifique et technique se manifeste sous
différentes formes: l'édition, la littérature
spécialisée, les magazines, les journaux grand public, le
cinéma, la télévision, les arts d'interprétation,
les musées et autres lieux d'exposition. La culture scientifique et
technique a pris une couleur très particulière au Québec,
qui la distingue. La culture scientifique au Québec se manifeste aussi
par des activités de loisir, des clubs sciences, des ateliers d'amateurs
répandus à travers la province, des produits éducatifs qui
se développent de plus en plus, des trousses, des mini-expositions.
Alors, la culture scientifique et technique réussit, selon les
moyens de diffusion utilisés, à transmettre des usages
(compétences et savoir-faire) et à transmettre des
représentations (formation des opinions, renforcement des attitudes) qui
en font un élément actif du développement social et
économique de notre collectivité. Elle permet également de
combler peu à peu le fossé qui s'est creusé entre les
individus, la science et la technique. Elle crée dans le public le
sentiment que celles-ci ne sont pas réservées à une
élite. Elle assure la socialisation des connaissances en science et en
techniques en rendant publics des faits qui émanent de l'univers de la
science et en en imprégnant la conscience collective.
La culture nous renvoie à l'ensemble des connaissances, des
savoir-faire qui permettent aux citoyens et aux citoyennes de mieux con-
naître, apprécier et participer à la réalité
présente de leur cadre de vie, autant dans sa richesse historique,
artistique et scientifique que dans la complexité de son
évolution. Par ailleurs, à l'instar d'autres champs culturels, la
culture scientifique et technique génère, par ses
activités et son développement, d'importantes retombées au
niveau économique et social. En contribuant directement à la
formation de nouveaux scientifiques et technologues, ainsi qu'à
l'émergence d'une main-d'oeuvre mieux adaptée aux changements
technologiques, en sensibilisant la population aux enjeux réels du
développement scientifique et technique, elle sert les entreprises des
secteurs les plus prometteurs, comme les télécommunications,
l'industrie pharmaceutique et les biotechnologies.
Le développement de la culture scientifique et technique
présente une problématique particulière, tant par ses
contenus que par les structures qui la soutiennent, l'animent et la
développent. Mais le projet d'émancipation de l'individu et la
définition de celui-ci en tant que citoyen du monde moderne en font un
élément important, voire une composante essentielle à la
culture dite générale.
La proposition pour une politique des arts et de la culture
déposée en septembre dernier, à la différence des
politiques culturelles québécoises qui se sont
succédé à ce jour, n'accorde pas à la culture
scientifique et technique la reconnaissance qu'elle mérite. Nous
comprenons mal cette omission, d'autant plus que le Québec peut se
réclamer d'une tradition aussi vivante qu'originale en vulgarisation
scientifique et en loisir associatif à caractère
scientifique.
La culture scientifique et technique doit donc absolument, selon nous,
être considérée - de manière tout à la fois
spécifique et intégrée - comme une composante essentielle
de la culture au sens large, culture trop souvent réduite aux seuls
champs des arts et des lettres. Il s'agit là d'un point qui, selon nous,
devra être absolument corrigé dans l'élaboration de la
politique des arts et de la culture.
Je voudrais maintenant vous livrer une réflexion que nous avons
faite sur différents éléments d'une problématique
du développement de la culture scientifique et technique. Quatre
problèmes se posent au développement de ce secteur.
Il s'agit, d'abord, d'un secteur à structurer. Au plan des
contenus culturels, on devrait renforcer les secteurs dans lesquels le
Québec affirme déjà une forte présence et
développer progressivement les autres disciplines ou secteurs en
fonction de thématiques prioritaires, de clientèles cibles
à toucher, afin d'assurer le rayonnement des activités
d'excellence des institutions impliquées et de confirmer notre position
culturelle internationale.
Deuxième problème: les acteurs à réunir. Les
Québécois et Québécoises doivent occuper
une place centrale dans l'élaboration du projet de diffusion de
la culture scientifique et technique. Ils sont, bien entendu, les
premières clientèles cibles, mais ils représentent
également les porte-parole auprès des touristes et des
communautés culturelles, tout comme ils sont des ambassadeurs du
Québec à l'étranger.
Les intervenants du milieu à concerter. La culture scientifique
et technique est l'oeuvre conjuguée d'un ensemble d'intervenants qu'il
est important de rassembler et de supporter. Les producteurs de savoir
disposent d'expériences et de savoirs susceptibles d'alimenter le
processus de création et de diffusion. Les diffuseurs du savoir, les
muséologues, éducateurs, travailleurs, designers, concepteurs,
communicateurs articulent les messages et les moyens dans le but d'informer la
démarche culturelle des individus et des groupes. Les partenaires
interviennent au plan du soutien à la création, à la
production et à la diffusion.
Une situation à améliorer. Au plan des équipements
culturels particulièrement, les musées, les centres d'exposition,
les expositions temporaires itinérantes, des améliorations,
fondées sur l'engagement des différents paliers de gouvernement,
de l'entreprise privée et du public, devront être amorcées
pour combler les lacunes importantes, entre autres, l'absence
d'équipements majeurs dans le domaine des sciences et des techniques, la
nécessité de consolider ou de développer des
équipements dans certains champs disciplinaires en fonction de contenus
prioritaires à promouvoir ou de clientèles cibles à
servir; la nécessité de confirmer les orientations
stratégiques de la consolidation et du développement des
équipements majeurs; la nécessité de la mise en valeur de
collections privées, institutionnelles et publiques; l'insuffisance de
ressources professionnelles qualifiées pour la conception, la
production, la gestion et un besoin de programmes de formation
intégrés et adéquats; le manque de concertation entre les
différents intervenants culturels; l'absence de programmes
adéquats pour certains segments de clientèle et, enfin, une
faiblesse généralisée au plan de la promotion des
équipements et de leurs activités.
Des actions à prendre. Si on voulait, dans le cadre d'une
politique culturelle, prendre des actions pour le développement de la
culture scientifique et technique, on devrait viser l'objectif
général de consolider et d'accroître chez les individus les
connaissances, les outils et les pratiques nécessaires à une
meilleure maîtrise des éléments de la vie quotidienne. Nos
actions devront contribuer à une compréhension des
phénomènes et des multiples changements scientifiques et
technologiques qui marquent notre société et notre
environnement.
Des objectifs spécifiques. Quelques suggestions: renforcer les
axes forts et structurants du Québec au niveau des dimensions de la
culture scientifique et technique et de ses formes; valoriser et "prioriser"
les projets qui comblent les besoins précis du milieu culturel en
privilégiant ceux qui font déjà l'objet d'un consensus;
consolider et mettre en valeur les réalisations existantes;
privilégier les projets dont la gestion relève d'une direction
culturelle administrative forte, pertinente et cohérente;
privilégier les projets dont la taille et le contenu respectent les
modèles et les échelles de développement adaptés
aux ressources québécoises; privilégier les projets dont
le développement au niveau du contenu et des approches permet de
franchir les différentes étapes de développement, amenant
les productions québécoises à se situer à la fine
pointe des réalisations internationales; privilégier des projets
dont la viabilité financière est prise en compte et
assurée à long terme; privilégier des projets pour
accroître la position concurrentielle du Québec au plan national
et international, en tenant compte à la fois des critères
d'excellence, d'originalité et de diversité.
Trois stratégies pour ce faire, avant de conclure. Une
première étape, celle du rattrapage. Il faut répondre
à des besoins déjà identifiés faisant l'objet de
consensus, mais non comblés actuellement. Par exemple, la mise sur pied
d'un équipement majeur dans le domaine des sciences et des techniques
à Montréal est attendue et désirée depuis plus de
15 ans.
Une deuxième étape, la consolidation. Il s'agit de
bonifier les activités existantes ou de renforcer le fonctionnement et
le rayonnement d'organismes et d'industries déjà
implantés. Par exemple, élargir la distribution de productions
audiovisuelles au marché de l'éducation ou de la vente au
détail.
Enfin, le développement, dernière étape. Il s'agit
de développer de façon complémentaire, à partir
d'une planification stratégique adéquate, les réseaux de
distribution actuels et prévus, et d'ouvrir de nouveaux secteurs,
d'occuper d'autres marchés, d'élargir les clientèles
touchées; par exemple, la mise sur pied d'un réseau de
distribution de produits éducatifs et culturels, tels des valises, des
jeux, des logiciels.
Les quelques propos que nous venons de tenir ne sont que
l'ébauche d'une discussion plus large qui devra animer le milieu de la
culture scientifique et technique. Je n'ai pas pu décrire avec autant de
force qu'elle le mériterait l'effervescence qui anime le milieu de la
culture scientifique et technique au Québec. Je n'ai pas abordé,
non plus, spécifiquement les champs de la communication et de la
vulgarisation scientifiques, ni l'évolution étonnante de la
muséologie scientifique ces dernières années.
La future politique constituera, croyons-nous, un lieu
privilégié pour souligner l'existence, voire le rayonnement, des
forces québécoises en culture scientifique et technique, pour
lever l'ambiguïté qui entoure encore l'identification d'un
ministère responsable et pour reconnaître clairement l'importance
de la culture dans
notre société. Merci.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup, madame.
Mme la ministre, il vous reste à peu près le temps de
réagir brièvement à la présentation de notre
invitée.
Mme Frulla-Hébert: Je vous remercie. Le temps nous presse.
La seule chose, je pense, sur laquelle je dois vous rassurer... On a eu une
représentation ici d'autres groupes au niveau de la culture scientifique
et technique. Vous dites aussi que la politique des arts et de la culture
confirme clairement le leadership du ministère de l'Enseignement
supérieur, ce sur quoi on est d'accord, dans le sens où c'est
impossible pour nous... On peut travailler en parallèle, comme on le
fait avec le musée de la science et de la technologie, mais on n'a
pas... C'est dans le cadre même et la fonction même du
ministère de l'Enseignement supérieur de prendre le leadership
là-dessus et de travailler avec nous à l'implantation. Alors,
c'est une remarque. Comme le temps nous presse, je veux vous rassurer
là-dessus.
Le Président (M. Doyon): M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques, même genre de...
M. Boulerice: Oui, mais en faisant quand même remarquer que
Mme Benoit a réintroduit, elle aussi, ce projet qui, malheureusement,
est stoppé et qui est essentiel, si on veut parler de culture
scientifique et de culture technique, qui est une vraie maison des sciences et
des techniques à Montréal, il va de soi, puisque le bassin
important est là et qu'on peut y amener les gens. Mais, si on n'a pas
cette illustration, ce moyen très tactile, en définitive,
d'apprivoiser la culture scientifique et technique, je pense qu'on aura beau
avoir les meilleurs programmes qui soient, dans les meilleures écoles
qui soient, on n'aura probablement pas atteint notre but. Quand je vous entends
parler, j'ai toujours image du parc de la Villette et de l'importance qu'il a
eu dans le développement de la culture scientifique et technologique en
France. Merci, Mme Benoit.
Le Président (M. Doyon): Alors, Mme la ministre,
peut-être simplement dire au revoir et merci et nous devrons
suspendre.
Mme Frulla-Hébert: Effectivement, il y a le fameux projet
du musée de la science et de la technologie travaillé de pair,
effort provincial et fédéral. C'est dans les cartons, d'ailleurs,
du ministère de l'Enseignement supérieur. Mais, là-dessus,
je suis d'accord avec mon collègue que, comparativement ne serait-ce
qu'à l'expérience ontarienne, ça nous prend aussi une
maison de la science et technologie. Là-dessus, on peut vous donner,
finalement, une aide en poussant sur le projet, encore une fois, en laissant le
ministère de l'Enseignement supérieur comme maître d'oeuvre
de ce projet.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre.
Alors, Mme Benoit, il me reste à vous remercier, en vous faisant
part que ce sont des contraintes dont nous ne sommes pas maîtres qui nous
imposent de suspendre nos travaux pour le moment jusqu'à 20 heures. Je
suspends donc les travaux.
(Suspension de la séance à 18 h 29)
(Reprise à 20 h 8)
Le Président (M. Gobé): La commission de la culture
reprend ses travaux. Nous allons sans plus tarder demander aux
représentants de l'Association de la vidéo indépendante du
Québec de bien vouloir venir prendre place en avant.
M. Boulerice: Prenez les rouges.
Le Président (M. Gobé): C'est la couleur de
l'avenir.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boulerice: L'avenir est bloqué.
Le Président (M. Gobé): Fiez-vous à nous
pour le débloquer, mon cher ami. Alors, bonsoir, mesdames et messieurs.
Il me fait plaisir de vous accueillir. Si vous voulez maintenant vous
présenter après ça, nous allons avec plaisir vous
écouter dans la présentation de votre mémoire.
Association de la vidéo indépendante du
Québec
M. Brunelle (Charles-Mathieu): Charles-Mathieu Brunelle. Je suis
président de l'Association de la vidéo indépendante du
Québec.
Le Président (M. Gobé): Bonsoir, monsieur.
M. Brunelle: Immédiatement à ma gauche,
Françoise Dugray, secrétaire.
Le Président (M. Gobé): Bonjour, madame.
M. Brunelle: À l'extrême gauche, Agnès
Maltais, administratrice.
Le Président (M. Gobé): Bonsoir.
M. Brunelle: À ma droite, Robert Faguy,
trésorier.
Le Président (M. Gobé): Bonsoir, M. Faguy. Alors,
vous pouvez commencer la présentation de
votre mémoire.
M. Brunelle: Mme la ministre, Mmes et MM. les commissaires,
j'aimerais d'abord vous remercier de nous avoir accordé une audience
aujourd'hui, dans le cadre de la politique de la culture et des arts. Nous ne
pouvons, dans un premier temps, qu'être d'accord avec la conclusion de la
proposition. Nous aurions souhaité, cependant, que cette conclusion
fasse partie également de l'introduction. En effet, la notion de
priorité, voire d'urgence d'accorder aux arts et à la culture une
place de choix dans la société est, à notre avis, le point
central, le point à régler une fois pour toutes. Je me permets de
citer cette conclusion: "Pour le Québec, accorder à la culture
une place à la table des grandes idées, des grands projets, des
vastes choix et lui donner une voix équivalente à celle qu'on
accorde aux autres grandes missions de l'État, c'est procéder
à une révision radicale; c'est accepter l'idée que les
richesses de l'imagination, du coeur, de la création sont elles aussi
des leviers qui font grandir la société," etc. C'est, à
notre avis, la base de la revendication globale du milieu face à
l'appareil politique depuis belle lurette. À partir du moment où
le milieu ressentira cette volonté, à partir du moment où
un véritable changement s'annoncera, alors le véritable travail
pourra commencer.
Effectivement, et nous vous en félicitons, il y a lieu de
consulter le milieu avant d'effectuer tout changement. On vit dans une
société dans laquelle il s'avère de plus en plus
nécessaire d'impliquer les regroupements, les associations afin
d'établir, ceci à la base même de la population, non
seulement la prise de conscience nécessaire pour ces changements, mais
également afin de sonder l'expertise que ces associations et
regroupements possèdent dans leur domaine respectif.
Il est évident que, pour nous, la proposition de politique de la
culture et des arts propose des mécanismes qui nous inquiètent,
compte tenu de l'absence totale de la création vidéographique des
programmes du ministère des Affaires culturelles. Nous n'avons donc,
pour ainsi dire, en dehors de certains organismes financés à
l'intérieur du secteur des arts visuels, aucun interlocuteur au niveau
provincial. Il est essentiel d'établir un dialogue constant avec le
milieu et, à ce titre, nous sommes plus qu'heureux de collaborer avec le
ministère des Affaires culturelles afin de bien présenter
l'ensemble des besoins de notre communauté.
L'AVIQ est née d'un besoin urgent de regrouper les intervenants
de la création vidéo-graphique québécoise. A ce
titre, nous sommes un organisme national qui effectue les
représentations nécessaires afin que la vidéo soit
reconnue comme forme de création à part entière au
même titre que les arts visuels ou les arts d'interprétation, pour
ne nommer que ceux-ci. L'AVIQ regroupe donc 11 organismes: des collectifs de
création, des centres d'accès et des distributeurs
représentant 500 créateurs.
Mme Dugray (Françoise): Je dois vous expliquer ce qu'est
la vidéo, mais je vais d'abord dire de quel groupe nous sommes pour vous
donner un aperçu des groupes que vous connaissez peut-être.
Agnès fait partie de Vidéo Femmes; Charles-Mathieu, de
Prime-Vidéo; Robert, de Obscure; et je fais partie du
VidéoGraphe.
La vidéo est un médium technologique qui ne peut exister
sans instrumentation. Sa spécificité se caractérise par un
travail basé sur la démarche personnelle d'un artiste. La
recherche, l'expérimentation et la création se font dans
plusieurs genres, que ce soit fiction, documentaire, vidéo d'art,
installations, vidéo-danse, vidéo-théâtre ou
expérimentations de toutes sortes. L'aspect non conventionnel de sa
pratique dans tous ces genres en fait une discipline à part
entière, reconnue sur le plan international, avec ses auteurs et ses
tendances. Elle entretient, certes, des liens étroits avec d'autres
disciplines, étant un outil ou le complément idéal
à d'autres formes artistiques. La vidéo possède aussi un
intérêt archivistique aisément reconnu parce que
utilitaire, et ce, depuis sa création. Elle est également un
outil de formation parce qu'elle sert d'expérimentation dans le domaine
audiovisuel.
Il existe quatre pôles de travail à la création
vidéographique. L'artiste est à la base de toute création,
travaillant à toutes les étapes, mais prioritairement à la
préproduction, donc à la scénarisation de tout concept.
Cet artiste peut être lié à un centre de production ou
groupe vidéo. Ce sont des collectifs qui ont une relation
idéologique, que ce soit le féminisme ou alors la recherche et
l'expérimentation visuelle ou sonore, ou autre. En troisième
lieu, il existe des centres d'accès qui fournissent l'encadrement
technique et technologique nécessaire à toute création
vidéographique. En quatrième lieu, il existe des distributeurs
qui développent des marchés spécifiques à la
vidéo, que ce soit festival, galerie, réseau social ou autre.
Mme Maltais (Agnès): Les membres de l'AVIQ se
définissent tous comme faisant de la vidéo indépendante.
Que signifie cette particularité? Qu'est-ce qui nous unit et nous
singularise?
En gros, c'est que tous les membres de l'AVIQ laissent à
l'artiste le contrôle artistique et le droit editorial sur sa
création en tout temps, sans aucune ingérence, sans aucune
censure. Nous ne sommes pas des industries culturelles. Quand se met en branle
le processus de création d'une oeuvre vidéographique, le besoin
n'est pas de répondre à une finalité commerciale, mais
bien de répondre à une finalité artistique.
C'est-à-dire que c'est à l'artiste d'abord que revient le
désir de créer
une oeuvre, ensuite le processus se met en branle.
De plus, cette notion d'indépendance se retrouve dans tous les
secteurs de la production de l'oeuvre. Chaque secteur est autonome et l'artiste
peut choisir indifféremment de produire lui-même, de faire sa
propre distribution, de travailler avec l'équipement qu'il
possède ou de fonctionner avec le centre d'accès qu'il
désire. Les notions d'indépendance et de liberté sont les
fondements de notre existence.
M. Faguy (Robert): Alors, juste pour vous présenter un
petit peu la situation présente pour le soutien de la vidéo
indépendante, je peux vous dire qu'étant donné que nous ne
nous considérons pas comme des industries culturelles, à ce
moment-là, les programmes de la SOGIC ne nous sont pas ouverts d'une
façon évidente. Alors, il reste le ministère des Affaires
culturelles et, grâce à la loi sur le statut de l'artiste, qui a
aidé beaucoup d'affaires, en passant, il y a deux ans, la vidéo
d'art a fait partie des arts visuels. Présentement, il y a 2 organismes
sur les 11 qu'on représente qui sont subventionnés par le
ministère des Affaires culturelles. Or, tous ces organismes obtiennent
un appui et une reconnaissance d'autres paliers - pour ne pas les nommer - du
Conseil des arts du Canada. C'est pour vous dire que le Conseil des arts du
Canada a senti le besoin, il y a 20 ans, de créer une section des arts
médiatiques autonome pour reconnaître les besoins évidents
des créateurs en vidéo.
En ce qui a trait maintenant aux artistes pour qui la vidéo peut
être un outil de création dans les formes qu'a
énumérées tantôt Françoise, je peux vous dire
que, présentement, au ministère des Affaires culturelles, les
artistes ne peuvent obtenir que du financement sur la base de
scénarisation, donc ce qu'on appelle, dans le jargon, de la
préproduction en vidéo, et ne peuvent en aucun temps soumettre
des projets de production autonome pour réaliser une bande, ce qui
cause, bien sûr, un problème, vous vous en doutez bien.
Pour le Conseil des arts, il existe, bien sûr, toutes les bourses
de recherche et des bourses de production qui s'élèvent à
des montants quelque peu plus élevés que ce que le
ministère peut offrir dans ces conditions-là.
M. Brunelle: Si l'on accepte le fait que cette politique
proposée est une proposition, il est encore temps de discuter et d'y
participer. Il est donc essentiel pour nous d'apporter ici les souhaits de
notre communauté.
Le médium vidéo fait partie intégrante de la
recherche et du développement d'une manière
générale car elle est non seulement liée au
développement technologique, mais elle est profondément
imbriquée dans le développement des autres formes d'art.
La société évoluant de plus en plus dans un univers
technologique, il est fondamental que les artistes aient accès aux
nouvelles technologies, qu'ils aient l'occasion de domestiquer ces appareils.
À toutes fins pratiques, il est important de réaliser que la
création vidéographique et, d'une manière plus
générale, les arts médiatiques seront
définitivement des formes de création du XXIe siècle. On
n'a qu'à penser aux recherches de pointe, l'infographie, l'image
assistée par ordinateur, l'électroacoustique, etc., la
deuxième vie du théâtre, de la danse, de la diffusion, etc.
C'est aussi l'outil de diffusion de l'avenir de par son potentiel
d'infiltration dans nos salons.
Il faut tenir compte de l'ensemble du processus de création et
soutenir les quatre pôles: l'artiste, les collectifs de production, les
centres d'accès et les distributeurs. Il est essentiel de
développer une accessibilité au médium vidéo dans
toutes les régions du Québec, ainsi que d'élaborer des
programmes de formation spécifiques à ce médium. Nous
souhaitons donc que, de toute urgence, une section des arts médiatiques
soit créée au sein du ministère des Affaires culturelles
en collaboration avec le milieu.
La proposition de politique de la culture et des arts soulève
certains questionnements. Vous constaterez qu'il est difficile d'envisager un
rapatriement quand tout un secteur d'activité artistique est absent des
programmes existants. On disparaît ou on se retrouve dans un vacuum
insupportable. De toute façon, avant d'acheter un condominium, le
minimum que l'on veut voir, ce sont les plans. Ce n'est pas beaucoup demander
quand, en plus, on est prêt à faire des suggestions de dessin.
Le Président (M. Doyon): Avez-vous terminé votre
présentation?
Une voix: Non.
Une voix: Deux petites minutes?
Le Président (M. Doyon): Oui, bien sûr, allez!
M. Faguy: Alors, deuxième questionnement par rapport au
rapport de la commission Arpin. J'ai l'impression qu'il faut bien distinguer
les deux pôles. C'est-à-dire que le rapport Arpin commence
très bien en parlant de la création, mais, à un moment
donné, il y a une sorte de détournement au profit des industries
culturelles. J'ai l'impression qu'on mélange à souhait ces deux
formes-là. La création et les industries culturelles
correspondent à deux formes de logique; c'est tes mots mêmes qui
l'expliquent: la création, l'industrie. Ce n'est pas
nécessairement évident que l'industrie doit être
créative, bien sûr, mais ça répond à deux
formes de logique. À notre avis, le rapport ne prend pas en
considéra-
tion cette dichotomie-là qui existe entre les deux, n'appuie pas
assez, d'une façon évidente, tous les processus de
création. Du moins, c'est ce que ça nous laisse présager,
surtout en ce qui concerne, bien sûr, toute la référence
à la SOGIC qui est le seul répondant, finalement, du
cinéma et on ose espérer que la vidéo est incluse
là-dedans. Alors, vous comprendrez très bien qu'il y a un
problème à ce niveau-là. On veut carrément que la
vidéo soit reconnue comme un processus de création avant
tout.
Mme Maltais: On ne comprend pas, non plus, l'argumentation qui
accompagne la recommandation du rapport d'en finir avec le saupoudrage de
subventions. On est tous contre le saupoudrage, bien sûr, mais pas dans
le sens de couper le nombre de groupes subventionnés, mais plutôt
d'en finir avec les subventions qui tombent à la graine et qui arrivent
à la graine. Il existe au Québec un manque
désespérant de soutien à la création et à
l'innovation. Le peu de saupoudrage, si jamais il s'en fait, c'est le seul
facteur de risque qui puisse peut-être mener à de nouvelles
finalités artistiques ou qui puisse servir à encourager les plus
osés, les plus novateurs. En plus, on est en droit de se demander quels
seront les critères qui aideront le MAC à juger de la haute
qualité d'un projet, critère qui est en jeu pour décider
si on saupoudre ou non, pour décider qui cessera de recevoir ce que
j'appelle la poudre de perlimpinpin des maigres subventions qui vont aux
artistes. Je parle de poudre de perlimpinpin ici, mesdames et messieurs, parce
qu'il faut être magicien pour faire de l'art au Québec,
particulièrement de la vidéo, avec le peu de sous qu'on
reçoit.
Ensuite, dans le rapport, on trouve déjà une
ébauche de ce qu'on veut faire comme type de sélection. C'est
écrit: "C'est de vision que le ministère des Affaires culturelles
a besoin - ce n'est pas nous qui le disons - et il en aura de plus en plus
besoin au cours des prochaines années, une large vision qui le pousse
à prendre des initiatives, à favoriser des organismes et des
projets hautement professionnels, à faire des choix courageux, car les
ressources sont rares." Il s'agit là d'un sérieux avertissement
pour nous: Ne soyez pas seulement professionnels, soyez hautement
professionnels si vous voulez survivre. Et on dit ici que le courage politique
sera de choisir qui mourra. On n'est pas tout à fait d'accord.
Mme Dugray: Par rapport aux régions maintenant, nous ne
sommes absolument pas d'accord avec votre argumentation sur les régions.
Pour nous, il est inconcevable de ne penser aux régions qu'en tant que
récepteurs des fabrications de la métropole. Nous savons
pertinemment que des groupes de production en vidéo se forment
actuellement à Chicoutimi, à Rimouski et à Hull, entre
autres; ces jeunes doivent avoir droit à l'équipement
nécessaire à toute expérimentation. Les fermetures, entre
autres, des télévisions que l'on sait ont amené des
bouleversements et des exodes désolants pour la vitalité de
l'ensemble de la création québécoise.
Mme Maltais: Autre chose à propos du transfert aux
municipalités. On est présentement en pleine période de
retrait du gouvernement provincial de la fiscalité municipale. N'est-il
pas normal de craindre que la culture soit laissée dans les mains des
municipalités sans qu'on ne leur laisse l'argent pour la soutenir et, en
plus, quand on sait que les municipalités ne sont absolument pas
sensibilisées au fait culturel? Alors, le délestage reste trop
dangereux à ce stade-ci des relations provinciales-municipales.
Autre chose: il s'agit du paragraphe sur la diversification des sources
de financement que vous trouverez en page 31, où l'État devrait
mettre l'accent sur les grands équipements à caractère
national, le soutien à la création, les budgets de base des
organismes culturels. Les municipalités pourraient privilégier
les équipements régionaux et la production locale et
régionale de niveau professionnel.
Alors, nous nous demandons, nous, tout à coup, ce que signifie ce
cloisonnement très précis entre les sources de financement, mais
qui ne s'accompagne d'aucune justification dans la politique. Nous craignons
que très rapidement les organismes, entre autres - moi, je suis de
Québec, avec Vidéo Femmes - les organismes des régions et
de la région de Québec, deviennent des organismes
régionaux et soient renvoyés aux municipalités pour
trouver du financement. Le MAC s'en laverait alors joyeusement les mains. Nous
pouvons appuyer nos craintes sur les disparités existant
déjà entre les subventions accordées aux organismes de
Québec et de Montréal, disparités maintes fois
dénoncées, et qui se trouveraient justifiées ici.
M. Brunelle: Avant de conclure, au niveau des structures
administratives proposées, nous trouvons inquiétant de
créer un observatoire qui, finalement, vérifierait l'application
de la politique culturelle, quand on sait pertinemment bien que, si le
ministère des Affaires culturelles est mandaté, il est plus que
compétent pour s'assurer de l'application de ses politiques.
Au niveau aussi des structures administratives supplémentaires
(le comité consultatif), je dois vous dire que ça nous fait
plaisir de venir discuter ici et qu'on est prêt, l'ensemble du milieu,
à discuter avec le ministère des Affaires culturelles. Donc, le
comité consultatif pourrait peut-être comprendre l'ensemble des
associations et des regroupements.
Bref, nous endossons le principe d'une politique culturelle. Nous
souhaitons ardemment que le dialogue se poursuive et considérons que
cette proposition est un document de travail qui, suite aux
recommandations et aux correctifs ainsi apportés, devra être
endossé par l'ensemble des regroupements et associations qui
représentent le milieu des arts et de la culture au Québec. On
est prêts à travailler et à collaborer. Après tout,
on n'est pas pressés, ça fait 30 ans qu'on attend.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup. Mme la
ministre.
Mme Frulla-Hébert: Justement parce que ça fait 30
ans qu'on l'attend, on est pressés vraiment de la faire et de la
déposer, croyez-moi. Ha, ha, ha!
J'ai plusieurs questions à vous poser. Premièrement, au
niveau du retard que nous avons, que le ministère a et affiche dans le
domaine de la création, mais autre que - et pardonnez-moi l'expression -
ce qui est habituel à voir ou à entendre, là-dessus, il y
a quand même du chemin à faire. J'aimerais revenir à
certaines sources de financement et, aussi, à la responsabilité
gouvernementale. Je vais revenir, par ce fait même, à la SOGIC
versus Téléfilm versus le ministère versus le Conseil des
arts.
Le ministère versus le Conseil des arts. Vous faites affaire avec
le Conseil des arts depuis, vous nous dites, 10 ans, je pense. C'est
ça?
Des voix: Vingt.
Mme Frulla-Hébert: Vingt? C'est pire. Vingt ans. On a
beaucoup parlé du Conseil des arts, ici, à cette commission,
versus le ministère des Affaires culturelles, dans un sens où le
Conseil des arts semble avoir une certaine façon - malgré que ce
n'est pas toujours des compliments non plus - d'agir et de distribuer,
c'est-à-dire d'avoir une distance par rapport, justement, à
l'organisme gouvernemental et d'être l'espèce de trait d'union
entre le milieu, C'arm's length". Comment faites-vous affaire avec le Conseil
des arts à ce niveau-là? Est-ce qu'il y a un programme? D'une
part, est-ce que c'est des jurys? Est-ce que...
M. Brunelle: En fait, le principe, c'est qu'on fait affaire,
d'abord, avec la section des arts médiatiques, qui regroupe l'ensemble
des arts avec support technologique. Cette section a des jurys annuels,
biannuels, quatre fols par année pour les individus et pour les
organismes. Ces jurys sont formés par des pairs qui sont choisis
à travers le Canada et l'évaluation de chaque organisme est
faite. Il y a un budget complètement séparé pour cette
section-là.
Mme Frulla-Hébert: Maintenant, quand vous parlez des arts
médiatiques au niveau du Conseil des arts, ça regroupe?
M. Brunelle: Les arts médiatiques regroupent
l'électroacoustique, enfin, ce qu'on appelle la composition audio.
Mme Frulla-Hébert: Oui.
M. Brunelle: L'holographie, le cinéma, la vidéo et
l'image assistée par ordinateur.
Mme Frulla-Hébert: Donc, ça fait partie du
même programme.
M. Brunelle: Oui.
Mme Frulla-Hébert: Maintenant, au niveau de
Téléfilm, Téléfilm a lancé un nouveau
programme, il y a à peu près trois semaines, un mois, en tout
cas, c'est ce qu'on a vu d'annoncé, un programme qui s'adresse à
la production indépendante. Est-ce que vous avez accès à
ce programme?
M. Faguy: Certains de nos organismes y ont accès. C'est un
programme qui existait, si je suis correct, dans un ancien ministère,
Approvisionnements et Services, sur des fonds destinés à la
production indépendante. Alors, à un moment donné, le
fonds a comme perdu et ils ont récupéré, semble-t-il, aux
informations que j'ai... Ils ont vu qu'il y avait un problème de
financement du cinéma et de la vidéo indépendante. Ils
appellent ça de la vidéo destinée à des
marchés secondaires. Alors, dans les faits, c'est quand même une
méthode industrielle de faire, ça répond encore aux
critères de Téléfilm ou de la SOGIC, c'est-à-dire
de prendre en compte vraiment le marché auquel on s'adresse. Ce qui
n'est pas nécessairement notre façon de faire, il faut bien le
comprendre.
Mme Frulla-Hébert: Comme tout est à faire ici,
à part l'aide, évidemment, le statut de l'artiste, etc., quelle
serait, selon vous, avec les expériences que vous vivez
présentement au niveau du fédéral et, finalement, la
connaissance de vos besoins, la meilleure façon, en termes de
financement, au niveau de l'État? Est-ce que ce serait à
l'intérieur même d'un programme du ministère? Est-ce que ce
serait au niveau d'un programme spécial au niveau de la SOGIC? (20 h
30)
M. Brunelle: II est évident que, dans un premier temps,
nous - il y a certains organismes qui sont reconnus à l'intérieur
des arts visuels -on est heureux à l'intérieur des arts visuels,
mais ça ne suffit pas pour les besoins de l'ensemble de la
communauté.
Mme Frulla-Hébert: Ah! Parce que ça ne couvre pas
tout l'ensemble.
M. Brunelle: Donc, d'abord, ce qu'on aimerait, c'est,
effectivement, qu'il y ait une
section qui soit créée à l'intérieur du
ministère des Affaires culturelles pour les arts médiatiques. Il
est évident aussi que, quand on parle de création et quand on
parle de diffusion de cette création, de recherche et d'innovation, et
c'est séculaire la relation que nous avons avec la SOGIC, c'est, pour
ainsi dire, totalement incompatible quand on parle d'industries culturelles.
Alors, nous, c'est clair qu'on veut quand même demeurer à
l'intérieur du ministère des arts et de la culture, si jamais
ça allait jusque-là.
Mme Dugray: II faut dire aussi que c'est vraiment un
département à part que nous voulons parce que, reconnue à
travers les arts visuels, la vidéo est un médium vraiment
technologique qui a des besoins autres. Alors, il faut vraiment qu'il y ait de
l'équipement et tout. Même à l'intérieur, par
exemple, des arts médiatiques au Conseil des arts, il y a une section
vidéo qui correspond réellement aux besoins, parce que le
médium existe réellement comme tel. Alors, c'est ou bien au
ministère des Affaires culturelles ou dans un département autre
ailleurs, mais vraiment spécifique à la vidéo.
M. Faguy: II faut bien comprendre aussi qu'on ne veut pas non
plus nécessairement un cloisonnement, c'est-à-dire une section
des arts médiatiques qui règle seulement ses affaires ensemble,
parce que la vidéo, on l'a noté tantôt, c'est quand
même un outil qui sert aussi à d'autres formes d'art,
c'est-à-dire que c'est un outil de création autonome, bien
sûr, mais il faudrait prendre en compte un peu une ouverture des
programmes, faire en sorte que... Souvent, il y a des arts multidisciplinaires.
Je fais partie d'un collectif multidisciplinaire.
Mme Frulla-Hébert: Oui.
M. Faguy: On fait autant de la vidéo que des arts visuels
et du théâtre et, lorsqu'on arrive avec des demandes de
subvention, c'est un joyeux casse-tête, merci. Alors, il faut quand
même qu'il y ait une sorte de souplesse entre les programmes. Que ces
programmes-là puissent, d'une certaine façon, s'imbriquer,
trouver des mécanismes qui font en sorte qu'une demande peut être
recevable, oui. On parle souvent de guichet unique, à une place, qui
soit le ministère, mais qu'ensuite les agents qui sont là, qui
devraient être beaucoup plus des agents provenant du milieu, en ce qui
nous concerne... On aimerait beaucoup que les personnes qui gèrent ces
programmes-là aient une très bonne connaissance du milieu. C'est
souvent le cas problématique avec le ministère, lorsqu'on parlait
de structure, tout à l'heure. Probablement que la grande
différence aussi avec le Conseil des arts, c'est que les personnes qui
gèrent ces programmes-là proviennent souvent du milieu. Elles ne
sont pas soumises à toute une hiérarchie politi- que et
bureaucratique qui fait en sorte qu'à un moment donné, lorsqu'il
y a un changement d'agent qui ne connaît pas du tout le domaine,
ça arrive très souvent, il faut tout recommencer à
zéro. C'est absolument incroyable. À ce moment-là, nos
dossiers n'évoluent pas du tout. Ça, c'est probablement la grande
différence là-dedans. Alors, cette souplesse-là de
programme, mais qu'au moins on puisse en discuter à l'intérieur
d'un programme bien précis qui est celui des arts médiatiques ou
des arts technologiques, appelons-le comme on le voudra, mais c'est le trou
noir présentement, auquel le ministère ne répond pas.
Le Président (M. Doyon): Merci. M. le député
de Saint-Hyacinthe.
M. Messier: Oui. Une question brève parce que le temps
avance. Dans votre mémoire, à la page 13, vous défendez le
rôle des régions. Le rôle des régions devrait
être mis en évidence au niveau du développement culturel et
des arts. Et vous dites, du même souffle - je pense que c'est madame -
qu'il faut faire attention au niveau des municipalités. Mais, s'il y
avait décentralisation ou si on jouait un rôle important dans les
régions au niveau du développement des arts et de la culture, qui
est votre intervenant si ce n'est pas les municipalités?
Mme Maltais: II n'y a aucun intervenant, en ce moment, dans les
régions. Je ne crois pas que de donner aux municipalités la
responsabilité de la vidéo, entre autres, des arts
médiatiques, soit une bonne chose à faire parce que les
municipalités, particulièrement en région, ne sont pas
sensibilisées à investir dans la culture. Ça commence
à peine à Montréal. À Québec, on vient
d'avoir un bureau des arts et de la culture. On n'a pas encore de conseil de la
culture à la CTCUQ. Alors, c'est nous obliger à repartir à
zéro. Il y a des structures, il y a des artistes qui travaillent en
région, qui essaient de produire. Il faut les soutenir, il faut que les
directions régionales créent des sections des arts
médiatiques. Il faut qu'il y ait des pôles de production dans
chaque région. Et ça ne doit pas être les
municipalités qui doivent avoir la responsabilité de gérer
la culture en région, ce serait une erreur. Elles ne sont pas sensibles
à ça du tout.
Le Président (M. Doyon): M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Mesdames et messieurs, bienvenue. Quant à
votre dernière remarque, je ne suis pas loin de partager un peu votre
point de vue. Plusieurs municipalités sont venues, plusieurs maires sont
venus, plusieurs ont montré leur sensibilité particulière.
Disons qu'il y a peut-être une nouvelle génération
d'édiles municipaux qui arrive, mais je partage votre
point de vue que ce n'est pas vrai que tous les secteurs de
création au niveau de l'art doivent nécessairement passer vers
les municipalités. On y arrivera peut-être un jour, mais je ne
pense pas qu'il faille faire à ce niveau-là le délestage
au niveau des municipalités, comme un autre ministère a fait un
délestage dans la cour des municipalités, ce qui réduit
leur marge financière. Ceci étant dit, vous avez prononcé
le nom de la SOGIC; lorsqu'on le prononce en cette commission, on a tendance a
sortir les gousses d'ail et les croix pour que le vampire se retire. Vous
êtes, vous aussi, critiques à l'égard de la SOGIC. Des
intervenants avaient la nostalgie de la Société
générale des industries du cinéma - je ne sais pas si vous
partagez cette nostalgie-là - où, paraît-il, le contact
était mieux, les discussions étaient plus profitables. Dans votre
cas à vous, qu'est-ce que vous lui reprochez de façon très
spécifique?
M. Brunelle: Essentiellement, il y a une chose qui est une
aberration inimaginable, la voici: tout financement de projet de
création vidéo est lié à la vente. Ça, pour
moi, c'est le bout! S'il y avait un peintre qui voulait avoir une subvention
pour peindre, il faudrait que son tableau soit garanti d'être vendu.
Ça, pour nous, c'est... J'arrête là.
Mme Maltais: Si je peux ajouter, il y a une histoire par rapport
à la SOGIC et ses relations avec les petits organismes culturels qui ne
s'appellent pas industries culturelles. Mettons qu'ils n'ont pas le don de
nouer des relations harmonieuses avec nous particulièrement.
M. Boulerice: Nous vous avons compris. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Faguy: II n'y a pas de nostalgie par rapport à d'autres
formes anciennes. Comme vous l'avez mentionné, l'intitulé est
toujours: des industries du cinéma et nous sommes quand même assez
dégagés de cette notion-là. Il faut bien le
comprendre.
M. Boulerice: Je ne suis pas là pour défendre ce
qu'il y avait nécessairement avant, sauf que les gens du cinéma
s'estimaient mieux servis à l'époque de l'ancienne que de
l'actuelle où, si on ne porte pas jabot et dentelle, à ce
moment-là, le dialogue est difficile. Votre inquiétude à
l'égard du rapatriement des responsabilités
fédérales s'explique, si je vous comprends bien, par le peu de
considération du ministère des Affaires culturelles à
votre endroit, par rapport à celle que vous avez, notamment, de la part
du Conseil des arts, mais aussi par l'absence de garantie que les sommes
rapatriées seraient réinjectées latéralement et
intégralement - j'insiste sur ces deux qualificatifs - dans les secteurs
correspondants de la part du gouvernement qui l'aurait fait. Vous reprochez
aussi, comme d'autres organismes, et ça n'ajoute pas à la
crédibilité forcément, de ne pas avoir respecté
l'objectif du 1 %. Vous avez mentionné le statut de l'artiste, soit,
mais ce n'est qu'un statut, puisque cela n'a pas été
accompagné du statut fiscal des artistes. Donc, c'était bien,
mais ce n'était pas suffisant.
Alors, est-ce qu'en principe le rapatriement des responsabilités
serait acceptable aux conditions suivantes: l'assurance que les budgets
rapatriés soient réinjectés latéralement et
intégralement dans les secteurs correspondants par diverses mesures de
soutien forcément aux arts, et la mise sur pied d'un organisme
subvention-naire autonome - certains donnent l'exemple d'un
Téléfilm québécois - chargé de gérer
les budgets de programmes de soutien pour les secteurs de l'audiovisuel, dont
inévitablement celui de la vidéo indépendante, et cet
organisme respectant le principe du "arm's length"?
M. Brunelle: Là, il y a comme une légère
dichotomie, si je peux m'exprimer ainsi. Si on parle du "arm's length" et qu'on
parle d'un... Moi, je m'attendais à ce que vous disiez, par exemple, un
Conseil des arts du Québec. Téléfilm Canada n'a pas de
préoccupation d"'arm's length" et n'a pas d'histoire, non plus,
reliée à la création. C'est pour ça que, pour nous,
on est vraiment dans un vacuum assez important.
M. Boulerice: J'ai mentionné Téléfilm, parce
qu'il faut retransposer quand même les organismes pour lesquels,
actuellement, les gens n'expriment pas des propos négatifs.
Téléfilm est bien perçu. Entre parenthèses, vous
savez, il y avait un Conseil des arts au Québec.
M. Brunelle: Oui, en 1966. Mme Dugray: II a
été aboli.
M. Boulerice: II a été aboli, il y a deux ans.
J'avais dit: Ne faites pas ça, tout d'un coup qu'on en aurait
besoin.
Mme Maltais: Si je peux m'exprimer ainsi, je vous dirai qu'on est
d'accord avec le rapatriement, si vous rapatriez d'abord le respect, la
structure et la philosophie. Je pense que vous comprenez ce qu'on veut
dire.
M. Faguy: En ce qui concerne l'argent, je peux très bien
vous dire qu'au Conseil des arts la section des arts médiatiques, c'est
une des plus jeunes et elle a encore du chemin à faire pour en arriver
vraiment à une reconnaissance aussi. C'est-à-dire que la
reconnaissance est là, mais, en termes financiers, ça ne monte
pas non plus. Le Conseil des arts est pris aussi dans l'appareil politique. Et
ça, j'aime quand même le
préciser, parce qu'on peut très bien dire que la structure
est très bien, mais il y a un manque évident de volonté
politique à la voir monter en flèche, à la voir soutenir
la création à ce niveau-là. La section des arts
médiatiques, à l'intérieur de ça, manque de
financement à cet égard-là aussi. Je veux quand même
le remettre sur table.
M. Boulerice: Quand on parle des régions - et vous en avez
fait mention - et qu'on lit le rapport Arpin, on est un peu tenté par la
phrase de Cyrano: "C'est un peu court" au niveau des régions. Ça
fait effectivement fausse route, à mon point de vue. Les régions
ne sont qu'un réceptacle. C'est mon opinion. Moi, je dis qu'on parle de
culture en région, mais il y a également une culture des
régions. Des régions ont réussi à développer
- vous m'excuserez le terme - des produits - parlons aussi peut-être de
production, parlons peut-être de création -des choses qui leur
sont typiques et qui sont originales.
M. Brunelle: Je pense qu'on est très d'accord avec
ça. C'est évident que, pour nous autres, le discours des
régions est très important. On peut dire que la vidéo est
vraiment un moyen privilégié de faire battre le coeur d'une
région, d'une certaine façon, ou, du moins, d'en prendre le
pouls. La vidéo, si on se souvient bien, ça a quand même
commencé lorsque les équipements de captation ont commencé
à être légers. On a commencé à se promener un
petit peu à travers tout. On filmait tout, il y avait une espèce
de grande période de démocratisation. On filmait absolument tout,
etc. Ça s'est stabilisé. Maintenant, on est capable de mieux
filmer, de bien filmer. À cet égard, j'ai l'impression que le
discours régional, du moins en ce qui concerne la vidéo, est
très important, parce que l'outil même, la vidéo, le
médium même qui n'est pas nécessairement conçu en
fonction de la télévision - je pense qu'il faut se le rappeler -
la diffusion de la vidéo est, à maints égards, très
large, autant en circuit fermé, autant pour ce qui est des galeries en
arts visuels, autant aussi pour ce qui serait une sorte de diffusion "at large"
en télévision, mais une télévision qui soit ouverte
à ce genre de produit, ce qui n'est pas le cas présentement. Il
faut très bien dire que les télévisions sont les censeurs
absolument incroyables de l'appareil gouvernemental, d'un côté, et
aussi les censeurs d'une société bien pensante, etc. Les
télévisions communautaires, comme elles existent
présentement, ne permettent pas non plus l'expression entière de
la création. Ce qu'on voudrait, c'est vraiment faire en sorte qu'une
politique culturelle puisse aussi se préoccuper de ces
problèmes-là, autant de la diffusion que de la production.
Le Président (M. Doyon): Je vous demande- rais, M. le
député, une dernière question et les remerciements.
M. Boulerice: Très brièvement, êtes-vous en
train de me dire... J'ai presque le goût de dire: Dites-moi que, oui,
c'est ça que vous voulez dire. Vous avez mentionné l'abandon de
la régionalisation au niveau de la télévision, à
Radio-Québec, à partir de 1986, à Radio-Canada
récemment, donc un vacuum terrible. Êtes-vous en train de me dire
que, dans une hypothèse où on restructure les émetteurs
régionaux sur l'ensemble du territoire, un des principaux points d'appui
que l'on pourrait avoir au niveau d'une programmation qui nous viendrait des
régions et qui serait diffusée réseau pourrait s'appuyer,
justement, sur l'expertise - j'essaie de trouver le mot, je ne le trouve pas;
je vais employer un mot latin, je m'excuse - et le "brainstorming" d'un groupe
comme le vôtre, l'Association de la vidéo indépendante, un
peu comme de grands réseaux achètent des téléfilms?
Donc, les antennes régionales pourraient se servir d'un organisme comme
le vôtre pour constituer des productions. (20 h 45)
M. Faguy: Mais dans une structure complètement
différente de ce qui existe présentement. Ça existe,
d'ailleurs, dans d'autres pays où les régions peuvent avoir
accès à leurs créations, à leurs propres stars,
d'une certaine façon, embarquer dans le "star system". On est loin de
ça. Mais, d'une certaine façon aussi, ils reconnaissent le
travail des artistes qui travaillent en région et en métropole.
Et ça, je pense que c'est important de faire circuler ces
idées-là.
Mme Maltais: Je ne sais pas, M. le député, ce que
vous voulez nous faire dire, mais ce que nous voulons vous faire entendre,
c'est qu'on a besoin de pôles de production. Partout au Québec,
les régions se meurent. Les artistes s'en vont et ça ne produit
plus. Si on laisse les artistes des régions sans moyen de production,
sans accès à des centres de production de vidéo, ils se
retrouvent à l'époque médiévale en arts. On est au
XXIe siècle. Il faut parler. On travaille maintenant avec la
vidéo en danse, en théâtre. Alors, il faut que nos artistes
qui sont en train de grandir aient accès à la vidéo. Et
là, on pourrait tomber dans la formation aussi.
Le Président (M. Doyon): Un dernier mot, madame.
Mme Dugray: J'étais à Radio-Québec à
Rimouski. J'ai travaillé là pendant... Quand ça a
fermé, il a fallu partir. Radio-Canada a fait la même chose. C'est
terrible à Matane maintenant. Même les galeries qui étaient
liées à... Il y avait une vie culturelle qui se passait
là. Maintenant,
ces travailleurs-là sont obligés de partir. Alors, tout ce
cercle-là, tout ce que ça... Il y avait des festivals
vidéo. Il y avait des choses qui se passaient pendant qu'on était
là parce qu'on était une vingtaine. Dans toutes les
régions, c'était la même chose. Alors, maintenant, c'est ce
vacuum-là qui est énorme et on veut qu'il reprenne parce qu'il y
a encore des forces vives, mais qui sont en exode et...
M. Boulerice: II y a urgence d'agir.
Mme Ougray: II y a urgence?
M. Boulerice: D'agir.
Mme Dugray: Absolument, absolument.
Le Président (M. Doyon): Un dernier mot, M. le
député.
M. Boulerice: Merci de votre participation. J'y...
Le Président (M. Doyon): Vous voulez faire de même,
Mme la ministre.
M. Boulerice: ...trouve matière.
Mme Frulla-Hébert: Rapidement, merci de votre
présentation. Effectivement, il y a un manque. On est ici pour apporter
des changements. Donc, c'est un point à noter.
On aurait pu discuter aussi au niveau de toutes les nouvelles
technologies. Il y a plusieurs intervenants qui sont venus en commission
parlementaire, tel M. Chagnon. On parle de télévision à la
carte maintenant; dans 10 ans, tout le paysage télévisuel va
être totalement différent de ce qu'on connaît
présentement. Alors, c'est sûr que le talent doit être
développé pour faire face à cette production. On
prédit d'ailleurs des heures de production énormes, ne serait-ce
que pour compétitionner avec l'invasion américaine. Alors, on va
regarder ça de très près. Merci.
Le Président (M. Doyon): Au nom de la commission, je tiens
à vous remercier. Prenez le temps de vous retirer pour que nous
puissions continuer le travail que nous avons à faire. Merci beaucoup
encore.
C'est maintenant le tour du Groupement des arts visuels de Victoriaville
de se faire entendre. Je les invite à prendre place en avant, à
la place qui leur est réservée.
Comme vous étiez ici quand nous avons repris nos travaux tout
à l'heure, à 20 heures, je m'abstiendrai de vous rappeler comment
on fonctionne. Je vous donne dès maintenant la parole, en vous demandant
de bien vouloir vous identifier pour les fins de la transcription de nos
débats. Vous avez la parole.
GRAVE
M. Luneau (Laurent): Nous sommes deux représentants du
GRAVE. Je vous présente Mme Thérèse Domingue,
coordonnatrice au GRAVE, et je suis Laurent Luneau, des relations publiques du
GRAVE.
Le Président (M. Doyon): Bienvenue. Allez, vous avez la
parole.
M. Luneau: C'est avec plaisir que nous répondons à
l'invitation qui nous a été faite de présenter devant
cette commission le mémoire que nous lui avons déjà
soumis.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais vous parler un petit
peu de notre groupement que vous ne connaissez pas, sauf Mme la ministre que
nous avons déjà rencontrée. Alors, je voudrais vous dire
que le Groupement des arts visuels de Victoriaville a été
fondé en 1985 par des artistes professionnels de la région des
Bois-Francs. C'était, à l'origine, un regroupement d'artistes qui
s'était donné comme mission de sensibiliser la population locale
à l'art actuel, tout en offrant certains services à ses membres.
Depuis, le GRAVE est devenu un centre d'artistes dont l'objectif principal est
toujours de rendre les arts visuels contemporains plus présents et plus
accessibles par la programmation régulière d'expositions, la
production d'événements ponctuels et la participation des membres
au débat culturel. Ça explique aussi pourquoi nous avons
présenté un mémoire et nous sommes ici ce soir.
Le groupe compte maintenant 17 membres actifs qui sont, pour la plupart,
des artistes fraîchement émoulus de l'université et
au-delà de 70 membres associés.
Le GRAVE a déjà reçu dans ses murs des grands noms
dont Armand Vaillancourt, Serge Lemoyne, Graham Cantieni, etc., beaucoup
d'artistes locaux et des artistes des autres régions.
Cette mise au point étant faite, j'arrive dans le vif du sujet.
Notre intention n'est pas de refaire la lecture du mémoire que nous
avons présenté, mais plutôt d'en expliciter les grandes
lignes à la lumière de notre vécu de centre d'artistes
oeuvrant en région. Bien que nous ayons accueilli favorablement la
proposition du rapport Arpin dans son ensemble, comme nous le disions,
d'ailleurs, dans le mémoire, nous voulons vous faire part des
inquiétudes que nous inspirent certaines recommandations et des
objections que soulèvent d'autres propositions. Ces craintes et ces
objections se manifestent vis-à-vis de trois sujets particuliers: la
définition des régions et pôles, le partage des
responsabilités avec les municipalités et l'amélioration
de l'efficacité administrative.
D'abord, au premier niveau, la définition des pôles. Le
rapport Arpin divise la province en
trois grands pôles: Montréal, Québec et le reste.
Pour nous, c'est un fait acquis depuis longtemps. Cette polarisation du
Québec dans le secteur culturel nous fait justement problème. On
a l'impression que le gouvernement, et le rapport Arpin le confirme,
considère les pôles comme des vases communicants et que ce qu'on
va injecter comme subventions dans les grands centres va se répercuter
automatiquement dans les régions. Nous ne sommes pas sûrs que
ça fonctionne suivant ce principe des vases communicants. Pour nous, le
développement de la culture au Québec devrait se faire de
façon harmonieuse en suivant sensiblement le même rythme de
croissance dans toutes les régions du Québec, à partir,
évidemment, d'une infrastructure de base. Nous croyons en effet que, si
on arrivait à susciter dans toutes les populations régionales un
intérêt pour l'art actuel, si on arrivait à créer
des habitudes culturelles dans la population de toutes les régions du
Québec, l'industrie culturelle dans les grands pôles ne s'en
porterait que mieux. Les grandes expositions du Musée des beaux-arts ne
seraient-elles pas plus fréquentées si toute la population du
Québec était préparée à les visiter? D'autre
part, comment éduquer cette population si elle doit toujours se rendre
à Montréal ou à Québec pour être
témoin d'événements culturels importants? Il s'agit donc
d'un cercle vicieux. Nous pensons qu'on ne pourra le briser qu'en accordant un
soutien plus grand aux organismes qui oeuvrent en région car c'est
à eux, je pense, de faire l'éducation de la population
région par région. Les organismes qui oeuvrent en région
ont justement la mission de sensibiliser les populations aux formes d'art
actuelles.
Je ne sais pas si vous connaissez la région des Bols-Francs. On
parle souvent de Victoria-ville comme la ville de la poutine et des centres
d'achat. En fait, c'est vrai. Nous faisons pitié. Vous connaissez
sûrement le FIMAV, ce Festival international de musique actuelle. Avant
de présenter les spectacles, ils ont à travailler pendant au
moins une semaine à préparer et à transformer une salle de
loisir en salle de spectacle. C'est la même chose pour les troupes de
théâtre qui oeuvrent dans notre région. Il y a la troupe
À mitaine à mi-temps, il y a la troupe à Wilfrid. Chaque
fois qu'une pièce est présentée, c'est d'abord un travail
d'une semaine pour transformer une salle de regroupement, une salle
d'étudiants en une salle de théâtre. Je ne dis pas que la
faute revient nécessairement au ministère; je vous dis ce qui est
chez nous.
Donc, nous faisons vraiment pitié au niveau de l'infrastructure
et, en même temps, il y a une activité culturelle
débordante. Nous suscitons l'admiration parce que nous faisons des
miracles et, dans ce sens, nous pouvons dire que nous sommes des
créateurs. C'est vrai autant pour les services offerts à la
population que pour les artistes eux-mêmes. Il faut presque toujours se
déplacer à Montréal pour les séminaires de toutes
sortes: sur la fiscalité, sur le statut de l'artiste, sur les produits
toxiques, etc. Pour les grandes conférences, il faut se déplacer
à Montréal. Donc, pour les services, on est bienvenus à
Montréal, mais pour se faire voir, il faut repasser le lendemain.
Il nous semble que les recommandations du rapport Arpin à ce
sujet ne vont pas régler tous nos problèmes. Bien sûr, on
recommande de fournir aux régions les équipements de base.
Effectivement, c'est la base, bien qu'une infrastructure ne garantisse pas
nécessairement un ensemble de services aux artistes et à la
population. On confie aux musées d'État la tâche
d'élaborer des programmes d'activités à l'intention des
régions. Si ça veut dire de faire connaître les artistes
des régions, soit; sinon, qu'est-ce que ça veut dire? Pour nous,
cette recommandation prend, à nos yeux, un caractère un peu
paternaliste qui témoigne d'une méconnaissance de la
problématique des régions et du potentiel des organismes en
place.
À notre avis, le rapport arrive un petit peu trop tard, dans le
sens que les organismes régionaux se sont déjà pris en
main, ils ont déjà bien cerné la problématique et
ils ont déjà envisagé des solutions depuis un certain
temps. Ce qui manque, évidemment, c'est l'argent. En tout cas, c'est le
cas pour nous, au GRAVE. Je veux juste énumérer un petit peu des
choses qu'on a faites ou qu'on voudrait faire, mais qu'on ne peut pas faire
sans argent. Nous avons organisé, par exemple, en mai dernier, une
exposition-échange avec des artistes d'une autre région. Nous
avons organisé pour cet automne un atelier en région sur la
fiscalité, pour les artistes. Nous avons déjà fait de la
diffusion au niveau scolaire et, actuellement, on a un projet qui est en
attente de subvention. Depuis un an, nous demandons de l'argent pour faire un
répertoire de toutes les galeries, groupements, centres de diffusion
dans les régions du Québec, dans le but de créer un
réseau provincial d'échange pour les artistes. Pour nous, ce
serait une façon de régler, en partie, le problème de
l'éloignement. Nous n'avons pas d'argent pour le réaliser.
Nous avons un projet d'échange avec un groupe de jeunes artistes
du Mexique. Les premières démarches ont été faites
en 1987 et le projet est tout fin prêt. Ce qui manque encore, c'est
l'argent pour le réaliser. Ce qui veut dire que, dans notre
région, au niveau des arts visuels, nous avons des
éléments de solution à nos problèmes, mais il nous
manque le financement. Bien sûr qu'on a besoin des musées
d'État, bien sûr qu'on a besoin des grands organismes de
diffusion, bien sûr qu'on aimerait que le ministère de la culture
prenne les dispositions pour nous permettre de nous faire voir ailleurs que
dans notre région, mais il nous semble qu'il faut avant tout qu'on
reconnaisse et qu'on respon-
sabilise les organismes comme le nôtre en continuant de les
subventionner et peut-être davantage. Voilà ce que nous vivons
comme problématique au niveau de la polarisation.
Le deuxième volet qui nous inquiète
particulièrement, et je pense que vous en avez sûrement entendu
parler assez souvent, c'est celui du partage des responsabilités avec
les municipalités. Là-dessus, nos craintes sont assez vives.
Disons d'abord que, théoriquement, on est d'accord qu'il
s'établisse un partenariat avec les municipalités. C'est dans la
pratique que les problèmes se posent. Le rapport propose de faire du
nouveau ministère de la culture le maître d'oeuvre en
matière culturelle, mais, en même temps, il propose un partage des
responsabilités avec les municipalités sous la forme d'un
partenariat.
D'abord, les municipalités dans les régions ont-elles la
volonté et, nous, nous osons dire: Ont-elles la compétence pour
assumer ces nouvelles responsabilités? Permettez-nous de citer, encore
une fois, notre région en exemple. Le dossier d'une maison de la culture
piétine chez nous depuis 1981. Le conseil municipal n'a cessé de
répéter le geste du pas en avant suivi de deux pas en
arrière, depuis 1981, de sorte que, 10 ans après, bien que le
ministère des Affaires culturelles ait donné son aval et
débloqué les fonds en 1988, Victoriaville n'a toujours pas son
centre culturel. Et, s'il arrive un jour - et là, on dit que c'est une
priorité - il sera amputé de sa salle de spectacle. Alors, les
problèmes du FIMAV, les problèmes des troupes de
théâtre ne sont toujours pas réglés. (21 heures)
Un autre exemple. En septembre, la ville nous a offert un local pour
aménager une nouvelle galerie, un local qu'elle nous loue, et ce local,
nous avons dû l'aménager nous-mêmes au coût de 700
heures de bénévolat fournies par les membres actifs. C'est vous
dire l'intérêt que la municipalité, chez nous, porte
à la culture. On ne leur en veut pas nécessairement, mais ce que
nous disons, c'est que ces gens-là ne sont pas vendus à
l'idée de la culture qu'ils associent d'ailleurs souvent aux loisirs.
D'ailleurs, chez nous, le service à la municipalité s'appelle le
Service des loisirs et de la culture, et l'appendice date de l'an
passé.
Comment peut-on confier la responsabilité d'éduquer une
population en arts visuels et dans tout le domaine des arts si les personnes en
place n'ont ni l'intérêt, ni la volonté, ni la
compétence de le faire? Comment le ministère peut-il
prétendre pouvoir arriver à changer ces mentalités des
dirigeants des municipalités? Je parle des petites municipalités,
parce qu'il y a quand même de plus grandes municipalités où
ça fonctionne. Alors, pour nous, c'est un peu utopique parce que nous
vivons la situation depuis longtemps et il nous semble que c'est peine perdue.
D'ailleurs, le témoignage des municipalités qui sont intervenues
dans ce débat à cette commission même, depuis le
début, est assez éloquent et vient confirmer nos
appréhensions.
D'autre part, il y a d'autres questions qui se posent. À supposer
que les municipalités soient encore en mesure d'assumer ces nouvelles
responsabilités, qui nous garantit que le transfert de moyens de la part
du gouvernement sera proportionnel au transfert des pouvoirs? Qui garantit aux
municipalités qu'elles n'auront pas à créer une taxe
déguisée sur la culture? Elles ont encore en mémoire le
transfert de responsabilités dans le domaine de la voirie, du transport
en commun et de la police. Alors, pour elles, ce rapport serait-il un
prétexte pour que le gouvernement se désengage
financièrement d'un autre dossier? Et, alors, c'est les organismes comme
le nôtre et les artistes qui en sont membres qui vont devenir les
premières victimes d'un partage de pouvoirs qui n'offrirait pas
certaines garanties et qui ne tiendrait pas compte des besoins particuliers de
chaque région.
Quant au troisième volet, celui de l'efficacité
administrative, il va un peu plus dans le sens des recommandations du rapport
Arpin. D'abord, disons d'emblée que nous appuyons fortement la
recommandation de rapatrier au Québec tous les pouvoirs en
matière de culture pour les raisons que le rapport lui-même donne
et, dans le même ordre d'idées, nous croyons qu'il ne faut pas
multiplier les paliers d'intervention, mais plutôt essayer de les
restreindre pour des raisons d'efficacité et de coût.
Le rapport parle en particulier de discuter de la pertinence des CRC.
Nous, nous allons plus loin et nous la mettons en doute, cette pertinence, car
- en tout cas, c'est le cas dans notre région - le conseil
régional de la culture ne sert pas les besoins réels de ses
membres. Son rôle de consultation et de concertation n'a pas d'issue.
Comment, en effet, concevoir une concertation entre des groupes qui ont des
besoins immédiats différents bien que parents d'une certaine
façon?
Encore en exemple notre région. Chez nous, le CRC n'a pas
réussi, cette année, à tenir une seule réunion
faute de quorum. Alors, pour nous, c'est l'Indice d'un malaise profond. Je
pense que c'est un palier inutile, que les directions régionales n'ont
pas besoin d'intermédiaire entre elles et les organismes en place et je
pense que le contact direct est plus efficace. Par exemple, nous obtenons
beaucoup plus de services du Regroupement des centres autogérés
du Québec.
Voilà, livrées d'une autre façon, nos objections et
nos craintes formulées à partir d'une expérience que les
contraintes rendent souvent pénible, mais toujours stimulante à
cause des défis qu'elles nous lancent et que nous relevons à
grands coups de bénévolat.
Nous voulons travailler avec vous à conférer à la
mission culturelle le statut et la place
qui lui reviennent, nous voulons être des partenaires avant et
pendant l'application d'une politique sur la culture, nous voulons surtout
continuer d'être après son application.
Nous vous remercions de votre attention, Mme la ministre et MM. et Mmes
les membres de la commission.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup. Mme la
ministre.
Mme Frulla-Hébert: Je vous remercie et je vous souhaite la
bienvenue en cette soirée. D'ailleurs, quand on s'était
rencontrés en août dernier, on a pu constater, de toute
façon, sur place la diversité et aussi toute l'effervescence de
la région de la Mauricie-Bois-Francs. Alors, quand on parle des
régions et de l'importance des régions - et on s'en était
parlé d'ailleurs -là-dessus non seulement je vous l'accorde, mais
c'est capital. Alors, ça, c'est un principe qui fait consensus
d'ailleurs, évidemment, à la commission et je pense que c'est
à ne pas discuter.
Vous parlez de la municipalité et il faut en parler. On se
rappelle, quand on s'est vus, le maire était là, puis il y avait
eu ce fameux article dans Le Devoir qui notait, justement, le vide, dans
la municipalité précisément de Vic-toriaville, quant aux
équipements culturels. Vous parlez de votre centre culturel qui, depuis
1981, est censé se bâtir. Vous nous dites que maintenant ça
devient une priorité. Il semblait, par exemple, qu'à la
municipalité, poussée probablement aussi par les autres, parce
que, évidemment, le réveil des autres fait en sorte que tu as
l'air fou un peu quand tu restes endormi, il y avait une certaine
sensibilisation. C'est Important, la relation avec la municipalité, sans
parler, évidemment, de délestage, mais que les
municipalités, par exemple, considèrent le domaine culturel aussi
important que le domaine des loisirs ou le domaine du sport, ce
domaine-là qui a pris tant de place. On se rappelle, on bâtissait
beaucoup plus d'arénas. En fait, ça prenait moins de temps pour
bâtir des arenas qu'une bibliothèque. Alors, est-ce que vous
sentez quand même un certain changement? Vous en avez parlé
tantôt, mais je veux quand même être plus spécifique
là-dessus, parce que, veux veux pas, le ministère a beau vouloir,
à quelque part la municipalité, elle aussi, doit, à son
niveau à elle, suivre, sinon c'est peine perdue.
M. Luneau: C'est pour ça, d'ailleurs, qu'on se pose des
questions sur les recommandations du rapport Arpin. Comment penser qu'un
partenariat entre le ministère de la culture et les municipalités
puisse s'établir quand les municipalités ont des réactions
semblables? S'il y a un espoir de changement chez nous, c'est uniquement
à cause de la politique, disons. C'est peut-être une concurrence
avec une municipalité voisine qui va faire en sorte que ça va
changer. Ou bien si la population disait: On veut une maison de la culture,
c'est sûr qu'il y en aurait une. Le problème, il est, dans les
municipalités, politique. Il n'y a personne dans les conseils qui a un
intérêt pour la culture et qui veut développer le culturel.
On va le faire quand on sera forcés de le faire. Je pense que c'est la
problématique chez nous et j'ai l'impression que c'est un peu comme
ça dans plusieurs régions.
Mme Frulla-Hébert: Parce qu'on a vu, quand même, des
témoignages de plusieurs municipalités. Oui, là, vous avez
raison. On se rappelle un peu le témoignage de Magog, de North Hatley,
où les maires eux-mêmes avaient soit des galeries, soit des
collections, ou étaient écrivains eux-mêmes, peintres.
C'est ça. Mais, évidemment, là, c'était
effervescent en termes culturels. Donc, d'après vous, la seule solution,
c'est vraiment d'avoir sur le conseil ou, finalement, à la mairie
quelqu'un qui a cette sensibilité-là, sinon il n'y a pas
de...
M. Luneau: Bien, il nous semble, en tout cas.
Mme Frulla-Hébert: Je veux aussi parler de la diffusion
des arts en région. Est-ce qu'il y a des mesures qui devraient
être mises en place, par exemple, pour favoriser la création et la
diffusion des arts, notamment auprès des jeunes créateurs, en
région? Tout le volet recherche et développement.
M. Luneau: II y a déjà des mesures qui sont en
place. Il y a déjà des programmes du ministère qui
favorisent, par exemple, des projets pour la relève. Ce que le rapport
propose, c'est des interventions magistrales, disons, au niveau des
musées d'État, des organismes de diffusion. Nous, ce qu'on dit,
c'est qu'il faudrait que le travail qui est fait dans les régions par
les organismes soit reconnu parce que c'est un travail de qualité qui se
fait. Je pense qu'on en est un peu une preuve dans notre région. On
reçoit des grands noms. Malgré une absence d'infrastructures, on
réussit à faire des choses, quand même, assez importantes.
Je ne sais pas quelle autre mesure le ministère pourrait mettre de
l'avant pour faire développer l'art en région, sinon d'encourager
des organismes comme le nôtre. J'ai parlé de projets tantôt.
Ce projet d'échange avec le Mexique, c'est un projet qui nous tenait
beaucoup à coeur et les artistes qu'on a sélectionnés au
Mexique, ce sont des artistes de qualité, ce n'est pas des faiseurs
d'images. Alors, pour nous, c'était un projet important et ça
nous aurait permis aussi d'aller au Mexique. Alors, ce genre de projet
là, puisque les grands centres sont difficilement accessibles pour nous,
au moins afin de se faire voir dans d'autres régions, de se faire voir
ailleurs dans d'autres pays, c'est, pour nous, une voie possible,
une voie à explorer.
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, je passe la
parole à ma collègue de Châteauguay.
Le Président (M. Doyon): Elle ne me l'a pas
demandée.
Mme Cardinal: Je peux parler, M. le Président?
Le Président (M. Ooyon): Si vous me la demandez, Mme la
députée. Mme la députée de Châteauguay.
Mme Cardinal: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Je ne peux pas deviner, moi.
Mme Cardinal: Vous soulignez, dans votre mémoire,
l'importance d'accroître notre action sur un plan international. Dans
votre secteur, quels types d'intervention gouvernementale pourrait-on
privilégier, par exemple, pour faciliter cet accroissement au niveau
international?
M. Luneau: Bien, nous, ce qu'on souhaitait, c'est que, d'accord,
on envoie des personnes à l'étranger, mais on pourrait aussi, je
ne sais pas, par l'intermédiaire des universités, faire venir des
gens de l'extérieur, pas seulement à Montréal, mais les
amener en région aussi. Nous, c'est une chose à laquelle on
pense. Plutôt que de toujours envoyer des gens à
l'extérieur pour se perfectionner, on pourrait aussi faire venir parfois
des gens de l'extérieur chez nous et pas juste à Montréal.
Je ne sais pas par l'intermédiaire de quel organisme; moi, je pense aux
universités, mais il y a sûrement quelque chose aussi à
exploiter de ce côté-là.
Mme Cardinal: Est-ce qu'à ce moment-là les
régions... Ce serait, évidemment, avantageux d'avoir ce genre
d'échanges, mais vous avez mentionné ce manque
d'équipement dans bien des cas qui ne favorise pas toujours,
malheureusement, ces échanges. Est-ce que ce serait aussi dans ce sens
que vous aimeriez peut-être qu'on y arrive, en centralisant mieux
davantage, par exemple, une région pour un point donné quant
à une activité au niveau international, comme échange
international?
M. Luneau: Oui, bien sûr, on pourrait créer des
événements régionaux. D'ailleurs, il y a des
régions qui se spécialisent. Chez nous, au niveau des arts de la
musique, par exemple, il y a ce Festival international de musique actuelle qui
met Victoriaville sur la carte de la musique actuelle. Il y a, à
Trois-Rivières, ce Festival de la poésie qui est un
événement qui est subventionné par le ministère. Ce
genre d'événement là, oui, on pense que c'est
efficace.
Mme Cardinal: II y aurait intérêt à se
regrouper, à s'orienter vers une sensibilisation.
M. Luneau: Oui.
Mme Cardinal: Peut-être qu'à ce moment-là -
on a beaucoup parlé des municipalités - on pourrait aussi
développer ce secteur culturel plutôt que, comme vous le
mentionnez si bien, le secteur loisirs, assez souvent on ne lui reconnaît
pas la même Importance. Merci.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la
députée. M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Oui. Madame, monsieur, ma première question,
et le terme est brusque. Vous ne pensez pas que vous êtes en train de
vous étrangler vous-mêmes quand vous dites qu'il faut mettre fin
au saupoudrage? Ça risque de conduire à l'institutionnalisation
de certains groupes au détriment de plusieurs autres,
particulièrement les organismes de la relève, les organismes
culturels des régions, des organismes qui sont marginaux en raison de
leur caractère peut-être non conformiste, novateur, original dans
leur production.
Mme Domingue (Thérèse): Non, non, tout
dépend de quelle façon vous interprétez le saupoudrage.
Nous, quand on a parlé, en tout cas, qu'on aurait peut-être voulu
limiter le saupoudrage, c'était, justement, pour un peu renforcir un
projet qu'on avait peut-être, avec un répertoire, de former comme
un réseau. Il y a beaucoup de projets où il y a des
dédoublements, finalement, en région. Avec l'éloignement,
souvent on fait les mêmes projets ou presque les mêmes. Il y a un
dédoublement de coûts qu'on doit assumer pour chacun des
côtés. Avec un outil, où il pourrait y avoir une
collaboration, à ce moment-là, sur beaucoup de projets
individuels, il y aurait des sommes d'argent qui pourraient être
récupérées.
M. Boulerice: Bon, si je vous comprends bien, vous dites: Non, on
n'est pas contre le saupoudrage, sauf que vous dites qu'il y a
dédoublement et l'économie d'échelle qui pourrait
être faite en évitant le dédoublement permettrait de
consolider. Mais vous acceptez qu'un petit organisme se retrouve en situation
de demande et, même si la portion de subvention n'est pas
extrêmement forte, ça peut être le déclencheur de
quelque chose, à un moment donné. C'est dans ce sens-là
que vous l'avez dit.
Mme Domingue: Oui, le saupoudrage n'était pas fait dans le
sens qu'un organisme... Je pense qu'on ne peut pas dire un petit organisme. Il
a
quand même sa valeur, peu importe. Ce n'était pas dans ce
sens-là. C'était vraiment dans le but de toucher au
dédoublement qui se fait présentement de toute façon.
M. Luneau: Si vous permettez. Il y a de l'argent aussi qui n'est
pas versé directement, mais il y a souvent de l'argent qui est
versé indirectement, je ne sais pas, par l'intermédiaire d'un
député, par exemple, et ça, on considérait
ça comme du saupoudrage parce que ce n'est pas fait suivant les voies
officielles. Pour nous, le saupoudrage, c'était ça,
c'était de l'argent qui était dispersé un peu partout,
mais non pas par la voie officielle.
M. Boulerice: D'accord. M. Luneau, pourquoi souhaitez-vous que la
cartographie qui est dans le rapport Arpin ne se limite qu'aux
équipements, mais ne s'étende pas aussi aux centres de
création? Enfin...
M. Luneau: On pense plutôt le contraire. Nous, ce qu'on
voudrait...
M. Boulerice: Non, non, c'est ça que j'ai dit.
M. Luneau: Oui.
M. Boulerice: La fatigue aidant, M. Luneau, vous devez être
indulgent à mon égard. La question que je vous posais est:
Pourquoi souhaitez-vous que ça s'étende aussi aux centres de
création?
M. Luneau: Oui, parce que c'était un de nos projets pour
lesquels on a demandé une subvention. Pour nous, c'était
important de répertorier dans toutes les régions du Québec
tout ce qui se faisait, toutes les galeries, tous les centres d'artistes, dans
le but d'arriver à créer un réseau entre les artistes des
régions. Alors, c'est une façon pour nous de créer un
chemin parallèle pour sortir les artistes des régions et leur
permettre d'aller ailleurs. Alors, c'est pour ça qu'on était
d'accord avec la recommandation du rapport Arpin et on voulait qu'elle aille
plus loin, que ce répertoire se fasse pour tous les types de galeries,
de centres d'artistes et tout ça.
M. Boulerice: On est sur la même longueur d'onde parce que
je lisais votre mémoire et j'écoutais votre intervention
tantôt. Oui, il y a une culture en région, dans le sens qu'on y
amène des choses, et vous n'êtes pas fermés. Vous dites:
Bon, on est ouverts, cela va de soi. Mais vous parlez également de la
culture des régions, puisque les régions ont
développé, si vous permettez ce mot familier, mais qui vient du
langage militaire, des créneaux particuliers, etc. Donc, il y a un
potentiel de création, donc il faut nécessairement le soutien
à la création et aux organismes aussi qui, à un moment
donné, sous-tendent ceci. Un des moyens suggérés de
soutien est venu de plusieurs intervenants qui disaient que les régions
devaient être dotées d'enveloppes autonomes et qu'elles
étaient en mesure de gérer elles-mêmes ces enveloppes.
Est-ce qu'une région comme la vôtre souscrit à ce principe
et répond: Oui, présent, nous, on est capables, à partir
d'une enveloppe, de gérer?
M. Luneau: Quand vous parlez des régions, est-ce que vous
parlez des municipalités ou si vous parlez...
M. Boulerice: Non, je parle des régions. Vous, c'est la
Mauricie-Bois-Francs, comme il y a le Saguenay-Lac-Saint-Jean. Il y aura nos
amis de Lanaudière tantôt.
M. Luneau: Mais je comprends mal, parce que, là, je me
demande: L'enveloppe, comment elle est distribuée? Elle est
distribuée pour un partage, mais vous voulez dire que c'est les
organismes qui vont se partager l'enveloppe?
M. Boulerice: On déterminerait: bon, il y a un budget pour
la culture, mais on donnerait aux régions leur enveloppe, une enveloppe
monétaire. Écoutez, votre région, bassin de population...
Enfin, il pourrait y avoir une foule d'éléments à
considérer. Voilà, la région a tant et c'est vous, en
région, en concertation, qui gérez cette enveloppe.
M. Luneau: Moi, je pense que la concertation est toujours assez
difficile quand il y a beaucoup d'organismes à caractère
différent. Je pense qu'une fois le partage fait les organismes sont en
mesure de gérer les budgets. La problématique est peut-être
au niveau du partage. Mais je pense que, oui, théoriquement, les
régions sont en mesure d'administrer l'enveloppe parce que, en tout cas
dans notre région, les organismes qui sont là sont des organismes
sérieux, ils sont là depuis un certain temps, ils ont fait leurs
preuves. Je pense qu'ils sont en mesure de le faire, théoriquement
pariant.
M. Boulerice: D'accord. Je vous remercie.
Le Président (M. Ooyon): Merci beaucoup, M. Luneau. Mme la
ministre, un mot de remerciement, si vous voulez bien.
Mme Frulla-Hébert: Moi aussi, je me joins à mon
collègue pour vous remercier. Évidemment, encore une fois, on va
travailler très fort sur votre municipalité - ce n'est pas un
honneur d'être un désert - d'une part, et, deuxièmement,
évidemment, parce qu'on est quand même un ministère
très décentralisé, aussi au niveau des programmes et des
ententes triennales. Alors, ça
aussi, au niveau de la gestion, ça devrait aider. Alors, merci
d'être ici.
M. Luneau: Nous vous remercions beaucoup.
Le Président (M. Doyon): Alors, merci à vous, M.
Luneau, à Mme Domingue, d'être venus nous rencontrer. La
commission suspend ses travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 21 h 22)
(Reprise à 21 h 24)
Le Président (M. Doyon): Maintenant que le Conseil
régional de la culture de Lanaudière a pris place à la
table de nos invités, je lui souhaite la bienvenue. Ils sont ici avec
nous depuis maintenant quelque temps. Ils savent comment nous procédons.
Je leur demande tout simplement de bien vouloir s'identifier pour les fins de
la transcription de nos débats. Ensuite, vous disposerez de 10, 15
minutes pour nous entretenir de votre sujet et, après ça, la
conversation s'engagera avec les membres de la commission jusqu'à ce que
je suspende ou ajourne les travaux. Vous avez la parole.
Conseil régional de la culture de
Lanaudière
Une voix: Est-ce qu'on commence par la gauche?
Mme Ross (Céline): Céline Ross.
M. Gaudet (Stéphane): Stéphane Gaudet, du CRC.
Mme Martin (Françoise): Françoise Martin,
administratrice au CRC.
M. Morissonneau (Christian): Christian Morissonneau,
président.
Mme Beauchemin (Lise): Lise Beauchemin, directrice du CRC.
Mme Barrette (Danielle): Danielle Barrette, je suis une
employée du CRC.
Le Président (M. Doyon): Soyez les bienvenus, tous et
chacun et chacune.
Mme Martin: Merci. J'ai le plaisir de vous faire la lecture.
J'imagine que ça devient lourd et pénible pour tout le monde ici
présent. Après une heure et demie d'écoute, on vous
lève notre chapeau, parce que, vraiment, c'est incroyable, toute cette
distance et ces longs textes. Mais quand même, il nous fait plaisir
d'être ici ce soir et on remercie Mme la ministre Frulla-Hébert de
nous accorder l'opportunité de présenter à la commission
sur la culture le point de vue de régionalistes, l'intérêt
des créateurs et de récepteurs, d'organisateurs, de
consommateurs, de partenaires et de penseurs du champ culturel lanaudois.
Ça serait beaucoup plus drôle de chanter, de danser ou de vous
faire un petit numéro de théâtre, mais, quand même,
on va essayer de vous situer un peu.
Certainement que la majorité des gens ici nous connaissent
déjà comme région. À proximité de la
région de Montréal, Lanaudière est la région
où, depuis plus d'une dizaine d'années, nous enregistrons le plus
haut taux d'augmentation de la population au Québec. La moyenne
enregistrée est environ de 10 % par cinq ans, nous plaçant loin
devant les Laurentides, Laval ou encore la Montérégie.
L'accroissement de la population est majoritairement imputable à
l'arrivée de nouveaux résidents, particulièrement dans les
secteurs du sud, soit Repentigny, Le Gardeur, Terrebonne et Mascouche. Il
importe de mentionner que plus de 51 % de la population lanaudoise
réside dans six municipalités de Lanaudière. Ces
municipalités, comme je disais tantôt, sont dans le sud et sont en
pleine croissance. Si on se transporte dans le temps, en l'an 2046 on
prévoit une augmentation de l'ordre de 45 %. Présentement,
au-delà de 320 000 personnes vivent réparties en six MRC et dans
une réserve attikamek, soit la Manouane.
Chez nous, la grande entreprise est peu présente. L'entreprise
d'environ 50 employés, en quantité plus abondante, se retrouve
dispersée sur tout le territoire. Les services municipaux,
gouvernementaux, de santé, de services sociaux et scolaires demeurent
les géants de l'emploi professionnel. En plus de la motoneige et de la
villégiature, Lanaudière est devenue un attrait touristique
majeur avec l'amphithéâtre du Festival international de
Lanaudière, le Musée d'art de Joliette, le festival Fleuve et
musique de Repentigny et I'île-des-Moulins que vous connaissez sans
doute.
Lanaudière n'est pas uniquement un lieu de résidence
secondaire pour artistes à carrière nationale, mais aussi un
milieu géniteur d'artistes créateurs et producteurs. On pense
à Angèle Dubeau, Robert Marien, Réjean Ducharme, Luc
Beauséjour, Pascale Giguère. Après avoir obtenu une
formation de base au collégial, l'artiste lanaudois doit
compléter ses études universitaires hors région. Certains
y reviennent pour exercer leur profession et toutes les contingences
rattachées; ça veut dire qu'ils peuvent passer de la conciergerie
au marketing jusqu'à l'enseignement.
Enfin, chez nous, le consommateur lanaudois apprécie et encourage
plusieurs formes d'art, c'est important de le souligner, parce qu'on
s'intéresse tout autant au traditionnel qu'à l'art actuel, on
s'intéresse au "country" ou à la musique classique, et c'est chez
nous et dans les régions avoisinantes qu'on peut apprécier
ces
arts. Mais l'accroissement récent de la population nous oblige
à constater des besoins d'équipements culturels, des besoins de
bibliothèques et de salles de spectacle. Vous connaissez aussi la
réforme Ryan comme nous et, chez nous, au Conseil régional de la
culture, on retrouve cinq maires dont les municipalités de 1500 à
5000 habitants ne prétendent aucunement posséder l'expertise des
besoins de leur population, voire même des préoccupations
culturelles. Il y a peut-être des secteurs où il se sentent plus
à l'aise, mais en termes culturels, c'est très fragile. Pour Mme
Lise Perreault, par exemple, maire de Saint-Côme, les
municipalités lanaudoises ne sont encore qu'aux balbutiements en ce qui
a trait à leur présence et à leurs activités sur le
plan culturel.
Les intervenants de notre milieu viennent au Conseil régional de
la culture pour chercher de l'information, autant au niveau des lois, des
ressources à accorder aux artistes, aux responsabilités envers
l'électeur, les consommateurs et les protecteurs des biens culturels. Le
Conseil régional de la culture de Lanaudière, ainsi que certains
groupes des milieux culturels lanaudois s'inquiètent de certains propos
du rapport Arpin recommandant la disparition du saupoudrage. Vous en entendez
parler très régulièrement, mais, pour nous, ce financement
mineur symbolise le droit à la vie culturelle pour l'artiste. En
1990-1991, chez nous, une troupe de théâtre a reçu 15 000 $
de subvention du ministère des Affaires culturelles. Cette mise de fonds
leur a permis d'aller chercher d'autres subventions à Emploi et
Immigration Canada. Cette reconnaissance de leurs pairs leur a insufflé
énergie et combativité. Sept comédiens marionnettistes et
gérants ont pu travailler un an avec ce financement de base. Ils ont
monté des tournées à travers les régions du
Québec, rendant accessible la vie culturelle à l'ensemble des
citoyens et des citoyennes. La vie artistique des régions a autant
besoin d'argent que les organismes, événements ou productions de
Montréal et Québec.
Nous sommes conscients que plusieurs défis restent à
relever pour le créateur: une administration transparente, un
partenariat financier avec les municipalités et les entreprises
privées, un déblocage avec les médias. Du
côté du consommateur, des crédits d'impôt
faciliteraient des acquisitions. La proximité d'équipements
augmenterait la fréquentation. Une place prépondérante aux
arts et à la culture dans les médias accorderait davantage de
crédibilité aux produits offerts.
Pour nous, l'accroissement de la population fait, nul doute, que l'on
choisit Lanaudière pour sa qualité de vie. On y habite de plus en
plus car on y trouve une excellence dans le quotidien. Un ministère des
Affaires culturelles ou de la culture doit considérer les besoins des
régions, ainsi que l'identité de Lanaudière. Le Conseil
régional de la culture de Lanaudière désire souligner son
expertise du fait régional lanaudois et vous répète ses
services d'information, de collaboration, de concertation, de rassemblement
auprès de la population lanaudoise et du ministère des Affaires
culturelles.
Ici se termine la partie intellectuelle et théorique. J'aimerais
profiter d'une petite minute pour ajouter peut-être des
éléments qui viennent du coeur, parce que je pense que, personne
ne peut le nier, les gens qui sont ici et d'autres dans Lanaudière
travaillent fort et désirent que, par des petits gestes; la
reconnaissance du milieu puisse se poursuivre et puisse être vécue
chez nous.
Contrairement à d'autres - puis on sait qu'il n'y a pas de
règle magique, qu'il n'y a pas de solution miracle - on pense que c'est
important de maintenir une complémentarité entre les
municipalités, le ministère des Affaires culturelles, le Conseil
régional de la culture dans chacune des régions, les organismes
et les artistes. Il y a des tiraillements, il y a des incompréhensions,
mais je pense que c'est la base du développement et de l'avancement des
artistes et des organismes qui les représentent.
On désire vraiment conserver chez nous la pratique et la
diffusion, dans nos milieux, parce que ce qui se vit à Repentigny,
à Joliette, à L'Assomption, à Mascouche ou à
Terrebonne, c'est précieux pour les gens qui y vivent et qui vont y
trouver un intérêt. C'est bien agréable quand on est
près de Montréal, comme nous à Terrebonne, de pouvoir s'y
rendre et d'avoir une autre vie culturelle, différente, parce qu'elle
est vraiment différente. Mais, chez nous, c'est important de maintenir
le développement du potentiel de créateurs parce qu'il a un
impact social, économique et culturel très fort. Si on pense
à l'île-des-Moulins, au Festival de peinture de Mascouche,
à des organismes comme les Petits pas jacadiens, au symbole de notre
région, la ceinture fléchée, il existe des choses et c'est
important qu'on ait les moyens de poursuivre ce développement.
Une dernière petite parenthèse. En tant que
bibliothécaire responsable des arts et de la culture à la ville
de Terrebonne, j'aimerais attirer votre attention sur l'absence des
bibliothèques dans le rapport Arpin; vous le savez déjà,
on vous l'a dit à plusieurs reprises. Il est certain que le rapport
Sauvageau existe et qu'il met en application tout doucement certaines des
recommandations qui avaient été faites. En tout cas, pour le
vivre chez nous, puis le Conseil est de cet avis, l'intégration de la
culture et des bibliothèques est quand même un
élément et un point forts. Ça ne règle pas tous les
problèmes, mais c'est important, quand on parle de culture, qu'on parle
de bibliothèques en même temps, et les gens ne sont pas toujours
rassurés sur cet état de fait.
Je vous remercie de croire à la passion culturelle qui passe par
Saint-Côme, à L'Assomp-
tion, à Joliette et à Terrebonne. Merci de croire encore
au Conseil régional de la culture de Lanaudière et d'avoir bien
voulu nous accueillir ce soir.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup. Mme la
ministre.
Mme Frulla-Hébert: En fait, c'est un plaisir pour nous,
d'ailleurs, de vous accueillir, d'une part. Deuxièmement, et notre
député m'en faisait mention, effectivement quand on parle de
Lanaudière, on a souvent en tête, évidemment, le Festival.
Et, comme on le mentionnait, le Festival, bon, ce n'est pas tout, et on le
sait, parce qu'il y a tout ce qui se passe à Terrebonne, ce qui se passe
aussi, comme vous l'avez mentionné, partout ailleurs. Mais c'est
sûr qu'il y a le Festival de Lanaudière, à Joliette, et on
a été très actifs dans ce dossier-là,
évidemment. Mais ceci dit, c'est une région qui, malgré sa
périphérie versus Montréal, est très active
elle-même, en soi.
Ceci dit, je m'en voudrais de ne pas laisser quand même, M. le
Président, mon temps à notre député, si la
commission et vous, vous le voulez bien.
Le Président (M. Doyon): Est-ce qu'il y a consentement
pour que le député de Berthier puisse intervenir?
Une voix: Est-ce qu'on peut voir les questions avant?
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Doyon): Pas plus que les
réponses.
M. Houde: Je pense qu'elles vont aller dans le même sens,
jusqu'à un certain point, du fait qu'il connaît la région.
Merci, M. le Président. Avec votre permission, j'aimerais saluer les
gens de la belle grande région de Lanaudière qui part de
Repentigny, Le Gardeur et qui va jusqu'à Saint-Michel-des-Saints inclus.
J'aimerais en même temps féliciter votre président du CRC
de sa nomination comme conseiller à la paroisse de Saint-Zénon,
qui est dans mon comté, nouvellement arrivé, élu presque
immédiatement. Il faut croire qu'il a des qualités pour
être capable de remplir cette charge-là. Félicitations, M.
Moris-sonneau.
Ma première question. Le passé d'un organisme le porte
toujours garant du présent et de l'avenir. Quelles sont les actions du
Conseil régional de la culture de Lanaudière qui ont servi le
développement culturel et économique régional?
M. Morlssonneau: II faudrait que je vous fasse un petit
historique. Vous savez que nous, à l'inverse de certains projets, on est
passés de la souveraineté-association à la
souveraineté. On était mariés, de gré ou de force,
à notre voisin qui s'appelle les Laurentides et on n'arrivait pas
à faire un mariage d'amour. Alors, on a décidé que
peut-être on pouvait exister "autonomique-ment". Et, avant que la
région soit reconnue, puis, bon, mon Dieu! on a payé ça
cher, le budget a été un peu renié, on le paie encore
d'ailleurs, on n'a jamais pu ajuster notre budget après ce
divorce-là. Il en est des organismes comme des couples: c'est
très coûteux de se séparer. Mais, tout de suite, dès
le sommet économique de 1983, le Conseil a été le
maître d'oeuvre du symbole régional. Je me rappelle, à
Joliette, on l'avait... Les gens nous ont pris très, très vite
comme le porte-parole de la culture, même presque l'image. On a
participé à tous les schémas d'aménagement. Toutes
les MRC nous envoyaient leurs brouillons qu'elles étaient en train de
faire avec des firmes ou entre elles, et on leur disait: Regardez, vous avez
oublié telle ou telle chose. La plupart en ont tenu compte, ils ont
intégré nos recommandations.
Par exemple, on a fait un guide aussi, qu'on appelle le Guide de
Lanaudière, qui est encore unique dans les régions du
Québec, il n'y a pas l'équivalent encore. Eh oui! on avait
été un peu impérialiste, on avait embarqué ia MRC
des Moulins que les gouvernants hésitaient à laisser dans un
bloc, qui devait s'appeler Laval bloc nord, ou dans les Laurentides ou chez
nous. On a été assez visionnaires pour penser que Terrebonne
faisait partie de Lanaudière. Les gens de Terrebonne sont bien contents
d'en faire partie. On a fait une exposition, Histoire de la région
verte. On a monté des dossiers. Regardez le plus gros dossier; si vous
alliez dans les filières du Conseil, vous verriez "vieux palais de
justice de L'Assomption", qui est une réussite au sommet
économique. Tout le monde n'a fait que des éloges de la dame qui
est la cheville ouvrière, ou la "ma tante" comme je l'appelle, du
développement culturel de L'Assomption, à travers son vieux
palais de justice. Les projets sont pratiquement tous passés par le
Conseil. Le dernier sommet économique a été une grande
réussite culturelle et je pense que le Conseil a contribué
à ça.
Tous les créateurs, tous les artistes, tous les gens qui ont eu
besoin d'assistance à travers les programmes du temps où on avait
encore des jurys autonomes, qu'on a perdus depuis pour toutes sortes de
raisons... Entre autres, en patrimoine, c'était nous qui
décidions où devait aller l'argent; maintenant, on le partage,
c'est interrégional. Le sommet économique. On a été
au CRD et je me rappelle m'être battu personnellement pour qu'on ait la
ceinture fléchée comme symbole, donc un produit culturel et non
quelque produit inventé comme on en voit souvent. On a été
les membres fondateurs du sommet économique permanent, ce qui fait
qu'on
a un siège d'office, membres fondateurs de l'office du tourisme
et ainsi de suite. On nous voit dans beaucoup d'organisations qui naissent et
qui vivent encore de la belle façon.
Je pense qu'on est un outil de concertation, donc politique. Je pense
aussi qu'on a beaucoup contribué à la construction de la
reconnaissance régionale. Alors, nous savons trop, au Conseil, ce qu'est
Lanaudière pour que, d'un seul coup, le rapport Arpin l'oublierait et
ferait que, après tout, Lanaudière ayant la chance - ou
malchance, comme vous voudrez - d'être à la
périphérie soit considérée comme la grande
banlieue, le terrain de Jeux dans le Grand Montréal. Non. Au moment
où Terrebonne s'identifie aussi à la MRC des Moulins, Repentigny
à la MRC de L'Assomption, il est en train de se créer un sens de
l'identité, puis voilà que ça nous échapperait.
Non. On ne le prend pas comme Conseil, puis on ne le prend pas comme
intervenant régional.
Aussi, la plupart d'entre nous, on a passé tellement de temps,
bénévoles dans des réunions, des concertations, des
déplacements qui, je pense, ont évité du travail a des
fonctionnaires. Puis, vous savez très bien que les fonctionnaires sont
quand même payés plus cher que les bénévoles chez
nous. Donc, tout ce temps depuis des années qu'on consacre à ce
que la région ait du sens, que les artistes aient du sens d'y vivre, je
pense que ça vaut la peine - on vous le rappelle ici et on vous remercie
de nous avoir entendus - qu'il y ait quelque chose comme Lanaudière
région reconnue et un Conseil pour s'en occuper à travers nos
programmes. Nous sommes, les administrateurs et les gens qui y sont membres,
des gens sincèrement convaincus que le développement culturel
peut passer par un organisme.
Regardez, Françoise l'a dit tantôt, il y a cinq maires
parmi nous et on est en train de créer un nouveau poste qui permettra un
autre siège de maire. Ce qui fait que la vision, au moment où les
gouvernants pensent qu'on peut décentraliser vis-à-vis des
municipalités, on l'applique, nous, on a un représentant de
chaque MRC chez nous, pas juste disciplinaire. Pour toutes sortes de raisons,
je pense que Lanaudière doit être gardée comme
région autonome et pas oubliée dans le rapport, avec son Conseil
où les gens sont sincèrement intéressés au
développement. Je vous remercie.
M. Houde: Merci, M. le président. Tantôt, vous avez
noté qu'il y a des choses qui vous échappent encore. Vous savez
que la région est bien jeune.
M. Morissonneau: Oui, j'aurais pu le dire.
M. Houde: Elle est bien jeune pour être reconnue
officielle. Ma deuxième question. Une partie du mémoire du CRCL
touchait le financement des arts et de la culture. En région, est-il
plus difficile de trouver le financement?
M. Morissonneau: Je vais passer à Stéphane...
M. Gaudet: Je vais prendre la position d'un organisme dans une
région comme Lanaudière, un petit organisme. La ministre l'a
souligné, Lanaudière est connue par son Festival, c'est
évident, par son musée, par de grandes activités comme le
Festival de Mascouche, le festival Fleuve et musique. Mais, parmi tout
ça, il y a des gens qui oeuvrent à la base, qui oeuvrent dans de
petits groupes, qui ont des centres d'intérêt qui leur sont
typiques. Ces gens-là, face à des décisions parfois... On
a parlé, et vous en avez certainement entendu parler, de la question du
saupoudrage. Pour ces gens-là, c'est la survie. Qu'est-ce que vous
voulez? (21 h 45)
Quand on annonce une subvention de 2 000 000 $, 3 000 000 $, de
plusieurs millions à un gros organisme, eux, ils traversent trois
phases. Premièrement, la colère: Les maudits, c'est rien qu'eux
autres qui ont l'argent, puis nous autres, on n'a jamais rien. Deuxième
phase, la crise de larmes: On n'est bons à rien et on est tristes et,
mon Dieu! qu'on fait pitié. Pour finalement aboutir à dire: Bof!
ça a marché l'année passée; on va recommencer
encore cette année, ça a l'air. Bon, bien, si ça a
marché depuis tout ce temps-là, c'est parce qu'il y a des
bénévoles en arrière de ça qui travaillent
très fort et ces gens-là finissent par... On devient
fatigués de dire: Bof! Bof! on va s'arranger. Bof! on va s'arranger.
Mais vient un temps où, à force de dire des "bof!", on ne va pas
plus loin. On n'a pas la capacité de se développer, on n'a pas la
capacité de planifier à long terme.
Là où la difficulté est encore plus grande, c'est
que ces organismes-là, les gros organismes les court-circuitent un petit
peu parce que ces gens-là, quand vient le temps d'aller chercher du
financement au niveau du secteur privé, c'est très difficile. Ils
vont cogner à la porte d'une compagnie comme Scott Paper, les Papiers
Scott, et on leur dit: Désolé! nous, on a tout donné au
Festival. Bien, c'est une réalité dans les régions et,
dans la région de Lanaudière, c'est très vrai. Pour
l'avoir vécu moi-même, je vous dis que ça fonctionne comme
ça.
Donc, à ce niveau-là, c'est difficile de dire: Bon, sur
qui allons-nous nous rabattre? Au niveau du gouvernement? Difficile. On est
petit, on est plein de bonne volonté et on veut bien, mais ce n'est
peut-être pas assez. Bon, on va aller voir quelqu'un qui nous
connaît peut-être mieux, on va aller voir les municipalités.
Les municipalités, par les temps qui courent, ne sont pas très,
si on peut dire, ouvertes à de nouveaux investissements, surtout pas au
niveau culturel. Dans un avenir prochain où, peut-être, les
finances finiront par s'améliorer et où la chose
culturelle sera plus développée au niveau des
municipalités, je crois que ça va être une
possibilité à envisager. Mais, pour ce qui est de maintenant,
à moyen et court terme, il n'y a pas d'argent à aller chercher
à ce niveau-là. Déjà, les quelques
municipalités qui font leur effort ont fait leur effort maximal. Au
niveau d'une petite municipalité, on peut difficilement dire: Bon,
pourriez-vous nous débloquer 30 000 $, 40 000 $ ou 50 000 $? Ce n'est
pas évident du tout, du tout, du tout. Et surtout, ce n'est pas
évident de faire accepter ça par... Les élus municipaux
sont peut-être prêts à le donner, mais faire accepter
ça par la population, ce n'est pas toujours évident, même
si la cause est bien belle, est bien bonne.
En région, pour se financer, c'est très difficile. Il faut
faire preuve d'imagination. Souvent, on leur reproche leur manque de saine
gestion. C'est un petit peu difficile d'être bon gestionnaire quand on
n'a pas les fonds. C'est difficile de dire: On va avoir nos choses, on va
planifier nos projets en fonction de ce qu'on a. Quand on n'a rien, on ne peut
pas faire grand-chose. On fait ce qu'on peut. Donc, on ne peut pas leur
reprocher leur manque de gestion. Quand tu n'as rien à "gestionnei*, tu
ne peux pas "gestionner" beaucoup. Ce n'est pas leur faute.
Deuxièmement, c'est le niveau bénévole, ce sont des
gens qui, justement, donnent leur temps, qui donnent souvent leur argent, ils
s'investissent beaucoup. Ce n'est pas des citrons, ces gens-là, il faut
arrêter de les presser. Quand c'est toujours les mêmes, le "bof!"
devient pesant. En région, c'est très difficile pour les petits
organismes et pour les petits organismes qui, éventuellement, pourraient
percer et devenir de grands organismes. Qu'on pense au Festival, ça ne
s'est pas lancé du jour au lendemain. En région, on doit faire
des efforts, mais ces efforts-là doivent être reconnus et je pense
qu'il serait temps qu'au niveau politique on reconnaisse les efforts qui sont
faits et qu'on donne plus qu'une tape dans le dos et de dire:
Félicitations. Je pense que ce serait Important de dire: Allons-y donc
et procédons.
Le Président (M. Doyon): Merci. M. le député
de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Houde: Je n'ai pas terminé, M. le Président.
Une voix:...
M. Houde: O.K. Allez-y, allez-y, allez-y. Excusez-moi.
Une voix: Le temps est écoulé pour nous.
M. Boulerice: Je suis prêt à consentir, M. le
Président, si vous voulez être tolérant...
M. Houde: Allez-y. Je reviendrai par la suite.
M. Boulerice: ...une question de plus de la part de mon
collègue, le député de Berthier.
Le Président (M. Doyon): Alors, allez, M. le
député de Berthier, et réponse rapide, s'il vous
plaît.
M. Houde: Merci. Dans votre mémoire, vous affirmez qu'il
faut d'abord assurer la collaboration, la sensibilisation et la concertation
entre les municipalités. Ma question a deux volets. Que fait le Conseil
régional de la culture de Lanau-dière à cet égard?
Avez-vous des suggestions sur les moyens qui seraient les plus efficaces pour
atteindre un tel objectif? Allez-y, M. Morisson-neau.
M. Morissonneau: Je l'ai dit tantôt, je l'a!
évoqué, on a un représentant par MRC et on a la chance que
cinq maires siègent avec nous, cinq maires qui y croient. Alors que vous
savez que la plupart sont occupés à toutes sortes de
réunions municipales, des congrès de l'Union des MRC, de l'Union
des municipalités, ils viennent chez nous en croyant que les
municipalités ont leur part à faire. Comment vont-ils le faire?
Ça reste la grande affaire au moment où les budgets risquent
d'être alourdis pour toute autre chose que la culture, entre nous,
là. Mais ils y croient et je pense que c'est une de nos réussites
au Conseil que d'avoir réussi à sensibiliser au moins quelques
municipalités et d'avoir réussi à sensibiliser toutes les
MRC. Alors, non seulement on a déjà cet acquis-là, mais on
veut le grossir avec un poste nouveau qui sera clairement identifié
comme municipalité. Les moyens après, je veux dire, les gens
retournent chez eux, en parlent au conseil municipal. Mais il est
évident que les MRC croient en nous en déléguant leurs
représentants élus. Je pense qu'on a réussi cet
objectif-là, la sensibilisation, ou on est en bonne voie de le faire, en
tout cas.
Le Président (M. Doyon): Merci. M le député
de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: M. le Président, Mme la ministre, chers
collègues, surtout chers amis, quand vous entendez la fougue et la
conviction de M. Morissonneau, ne vous inquiétez plus. Si vous retrouvez
la même fougue et, j'ose espérer, la même conviction quand
le député de Joliette et celui de Sainte-Marie-Saint-Jacques
interviennent en Chambre, c'est un trait caractéristique. J'en profite,
d'ailleurs; M. Chevrette m'a demandé de vous présenter ses
excuses. Il est vraiment désolé, mais un inconvénient de
toute dernière minute l'empêche, malheureusement, d'être
à la commission et soyez certains qu'il le regrette
profondément.
Mme la ministre, j'aurais le goût - ce serait insulter nos
invités - de me lancer et de vous parler de ma région natale,
parce que c'est une région qui est aux marches de Montréal. C'est
une région - et je pense que nos amis l'ont bien dit - qui n'a jamais
voulu se laisser satelliser par la métropole. Elle a toujours voulu,
cette région, développer sa personnalité, en jouant sur
ses forces et en se disant quelquefois que ses faiblesses pouvaient, à
quelques occasions, se retourner et devenir des forces.
Je vous ai écouté tantôt parler de l'absence d'un
discours plus articulé au niveau des bibliothèque, dans le
rapport Arpin. Mais le centre de la vie culturelle dans ma ville natale - et
vous allez voir, au fur et à mesure que je vais parler avec vous, que je
vais reprendre les "J" de Joliette et de Saint-Jacques, l'accent va me revenir
tranquillement - c'était la librairie René Martin, sur la Place
Bourget, qui était un salon littéraire presque. Et ça se
poursuivait à la bibliothèque qui était extraordinaire et
qui était également une galerie d'art avec des Krleghoff
extraordinaires, puisque les Clercs de Saint-Viateur étaient
extrêmement présents. Et ça l'était également
à L'Assomption avec les prêtres séculiers qui avaient un
collège où il y avait une énorme activité - elle
est encore là - culturelle. Et je pourrais encore rattacher toutes les
ficelles qui lient les villes et les municipalités de ce territoire et,
effectivement, mentionner Terre-bonne qui est peut-être un peu plus jeune
que Joliette ou L'Assomption, mais qui n'en a quand même pas perdu en
qualité. C'est une région, oui, qui a produit peut-être
beaucoup de politiciens, de Barrette à Chevrette, de Masse à
Boulerice, si vous me permettez de me citer, en bifurquant par Marcoux, Roch
LaSalle et Georges-Emile Lapalme.
Puis, c'est une région, effectivement, aussi qui a donné
au Québec beaucoup de grands noms. Je ne veux pas vous faire le
reproche, parce que c'est toujours odieux, une enumeration, on oublie toujours
quelqu'un. Mais il y en a une en particulier pour laquelle j'ai toujours une
énorme affection, Mme Lasnier qui est sans doute une des plus grandes
poétesses québécoises. J'allais saccager son jardin quand
j'étais jeune. Que voulez-vous? Mais j'ai été
initié à la poésie en guise de réprimande et je me
sens beaucoup mieux maintenant. J'aimerais ça que des jeunes puissent
avoir une telle réprimande. Saccagez un petit peu le jardin de la
voisine et vous allez connaître la poésie; c'est merveilleux.
Ceci étant dit, puisque la nostalgie n'a qu'un temps et qu'il
faut quand même penser à l'avenir, vous connaissez ma position
quant aux conseils régionaux de la culture. Elle est très claire.
Je n'ai jamais dévié de discours depuis six ans. Sauf que je ne
vous le cacherai pas, certains intervenants disent: Nous, le conseil
régional de la culture, on ne sait pas à quoi ça sert, on
n'est pas intéressés, etc. Qu'est-ce qui a fait que ce conseil de
la culture - qui a été bicéphale un certain temps et
maintenant vous avez pleine et entière souveraineté, tout en
continuant de dialoguer et d'échanger avec vos voisins et amis des
Laurentides - a réussi à prendre une place aussi importante dans
notre région?
M. Morissonneau: Regardez. Ce n'est pas tant le nombre de gens
qui y croyaient que... Bien, j'ai un mot qui est peut-être
démodé, mais je pense qu'on avait la foi. Il y a plusieurs
années - je n'ai pas toujours été président, mais
il y a longtemps, j'allais dire, que je milite, mais je n'aime pas ce
mot-là - que je m'implique, puis d'autres... Il y a un carré de
fidèles qui, je veux dire, ont fait... Regardez. On faisait des
tournées de MRC. On allait expliquer aux gens qu'est-ce que
c'était que le Conseil. Et je pense que, pour toutes les actions
variées, pas juste appliquer les programmes, on n'a jamais doublé
les fonctionnaires. On les a même complémentés. Ce n'est
même peut-être pas assez. On allait plus loin que ce que pourra
jamais faire un ministère dans une région, c'est-à-dire
prendre des initiatives pour faire connaître la région, des
conférences, par exemple, se laisser inviter par l'UPA. Il y a eu les
états généraux du monde rural. Bien, ils ont invité
le président du Conseil régional de la culture à aller
parler: C'est quoi? Qu'est-ce que la culture aurait à dire sur le monde
rural, la culture historique? Décider de faire un guide, ce
n'était pas écrit dans notre charte ou dans nos objectifs, ni
dans les moyens de les réussir. On a fait un guide. Ça s'est
diffusé. Je veux dire, tout le monde ou toutes les municipalités
ont ce guide-là. Il se vend encore à la librairie Martin qui a
déménagé, parce que les choses changent dans ce bas monde;
elle est rendue sur une rue banale maintenant, mais on y vend le guide. Tu
sais, des tas d'actions de ce genre-là. Une foire culturelle à
Rawdon; mon Dieu! ça remonte déjà à 1983. Toutes
sortes d'initiatives.
Comme je l'ai dit tantôt, on était souvent dans les
entreprises pionnières, l'office du tourisme. Quand ça se
fondait: Ah! il faut que les gens de la culture soient là. Il faut que
les gens de la culture soient là. Et très, très vite on a
été identifié à quelqu'un qui croit au
développement culturel et qui est au-dessus des partis. Je ne pense pas
qu'on nous identifiait à quelque parti que ce soit. M. Houde est
là. M. Boulerice est de l'autre bord. On était aussi pour toutes
les disciplines. Mais, vraiment, il y a toujours eu une représentation
équitable de toutes les disciplines et aussi des territoires. Je pense
que c'était une bonne idée, ça, que chaque MRC envoie un
représentant.
Puis, aussi, bien, mon Dieu! la personnalité de quelques-uns qui
ont été de toutes les batailles, le sommet économique de
1983, le dernier, puis, comme je l'ai dit tantôt, le CRD, l'office du
tourisme et d'autres organismes. On
est allés chercher les gens du sud. Les gens se plaignaient en
disant: C'est Joliette. Bon, allez. On est allés faire des
conférences à Repentigny, à Terrebonne. Le maire Forget
nous avait reçus en disant: Oui, je viens de Lanaudière,
maintenant j'embarque. Allez. Aussitôt, des gens sont venus
représenter; Françoise est là qui en témoigne, et
ainsi de suite. Ce n'est pas du miracle. C'est du travail sincère et
passionné, parce que sans passion on n'y serait pas arrivés.
Parce qu'on n'avait pas d'argent. On a un budget qui est parmi les plus faibles
de tous les conseils. Je vous l'ai dit tantôt, on a vraiment payé
notre séparation. Vraiment, on l'a payée. Je veux dire, une
rapide enquête dans la région vous montrerait qu'on a
été sur tous les fronts ou à peu près. (22
heures)
M. Boulerice: Bon. Naturellement, je me dois à une
certaine sympathie face à ma région, sauf que ma justice doit
être distributive. Vous dites: "II est possible d'envisager que la taxe
d'amusement collectée par certaines municipalités (qui, dans
certains cas, s'ajoutera à la TPS et à la TVQ) soit remise dans
le réseau culturel sous la forme d'une participation au fonds
régional." Alors, deux volets. Le fonds régional comme tel. Mais
vous ne semblez pas préconiser l'abolition pure et simple de toute taxe
sur oeuvre ou manifestation culturelle et, venant de vous, ça
m'inquiète un peu.
M. Gaudet: Écoutez, dans le rapport Arpin, on
préconisait une diminution à 3 % de la taxe de vente. Ce qu'on
peut dire, c'est que, si on décide d'abolir ou de diminuer la taxe, il y
aura toujours quelqu'un pour dire: Bon, regardez, encore la culture qui a tout;
pourquoi eux sont-ils exemptés et, nous autres, on ne l'est pas? La
seule façon qui est une façon très bonne d'y arriver
justement, c'est en fonction de la taxe de vente: que la taxe de vente soit
saisie, mais que cette taxe de vente soit réinvestie au niveau de la
culture. Donc, ce qui est préconisé dans le mémoire, c'est
que, justement, par cette compensation-là, on réussirait à
arriver au 1 % qui, jusqu'à aujourd'hui, est encore la politique du
gouvernement en place d'investissement dans la culture. C'est une façon
très juste, je crois, quand même. On n'affecterait pas, on
n'agirait pas de façon discriminatoire, mais de façon positive au
niveau de la culture. On ne peut pas dire: Pourquoi exempter la culture?
Là, ça va être un autre secteur qui va dire: Bien, nous
autres aussi, on veut être exemptés. Je crois que les
bénéfices qui en résulteraient, c'est que, si les gens
sont prêts à payer pour... La culture est un service, mais,
justement, le milieu culturel ne veut pas se désister de la TPS.
Possiblement que certains pourraient dire: Oui, on aimerait mieux pas de TPS ou
de TVQ, mais une façon de rendre ça équitable - de toute
façon, on peut vivre avec - c'est qu'elle soit collectée, mais
qu'elle soit remise par la suite, qu'elle soit réinjectée au
niveau de la culture et qu'elle ne serve pas à payer, je ne sais pas, de
l'asphalte, on pourrait dire en Abitibi, sur deux kilomètres. Mais on
peut dire que l'argent serait réinvesti et serait utile. Ce serait une
façon de conscientiser quand même. Ça a un coût, la
culture; bien, que les gens soient prêts à le payer en
consommant.
M. Boulerice: Une autre question. Dans une région comme
Lanaudière, vous avez fait état de quelques compagnies de grande
importance, vous avez parlé des Papiers Scott à Crabtree,
Crabtree Mills, comme on disait, quand j'étais jeune. D'ailleurs, M. le
maire de Crabtree vous salue, il est ici, et vous le savez. Compte tenu de la
non-abondance, si vous voulez... À L'Assomption, mon Dieu! il y a Hupp
Canada qui est le plus gros; je ne pense pas que les arsenaux militaires soient
des mécènes, j'en douterais. À Joliette, il y a toujours
la Scott dont on parlait, Firestone et, peut-être, je pense qu'il y a
Cascades, Domtar ou Cascades, je ne me souviens plus.
Une voix: II y a Cascades.
M. Boulerice: C'est Cascades, oui, maintenant. D'accord. Donc, le
bassin finit par être limité. Dans quelle mesure un programme
comme le fonds d'appariement ne pourrait-il pas être utile dans un milieu
dit régional? Est-ce que, au départ, il y a des organismes chez
vous qui en ont bénéficié à l'époque
où il existait? Il y a eu deux phases. Il y a eu la première
phase qui était 1 $ pour 1 $ et, après, ça a
été modifié, c'était 0,50 $ pour 1 $. J'avais
protesté contre la diminution, mais il y avait quand même le
principe du fonds d'appariement qui subsistait et qui m'apparaissait
intéressant.
M. Gaudet: Comme vous le disiez, au niveau des corporations qui
existent dans les régions, justement, l'argent est limité.
Premièrement, les compagnies ne sont pas, justement, des
mécènes sauf quelques exceptions comme, par exemple, M. Lamarre
pour Lavalin. Donc, ces gens-là ont des budgets, si on peut dire, de
dons. On peut appeler ça des dons de charité, soyons clairs; on
met la culture au même niveau que les dons de charité. Ensuite,
vient un budget de publicité. Donc, il y a une partie de ces
budgets-là qui va aller dans des événements, mais des
événements qui vont avoir des répercussions assez
importantes au niveau de la population. Cet argent-là, au niveau de
petits organismes, n'est pas disponible.
Pour en revenir à la question du saupoudrage, une façon de
rendre plus efficace, si on peut dire, la distribution des fonds qu'on
préconise au niveau d'un fonds régional, on préconise
aussi la mise sur pied d'un comité qui serait, si on peut dire,
branché sur la population, sur ces organismes-là qui seraient
près du milieu. Donc, on pourrait, de façon plus aisée,
répartir des
montants qui ne seraient quand même pas énormes. Au niveau
de la taxation au Québec; on pourrait aller chercher au niveau des
produits culturels 143 000 000 $, O.K., en taxant le secteur culturel. Donc,
143 000 000 $ répartis par tête d'habitant, selon une
répartition justifiable, on aboutirait à un fonds de 700 000 $
pour la région de Lanaudière. Avec 700 000 $, je vais vous dire,
distribués à des petits organismes et à des artistes, vous
en verriez de l'ébullition au niveau artistique et au niveau culturel
dans la région de Lanaudière parce que c'est un milieu où
on fait beaucoup avec peu et le CRC est un de ces exemples-là avec les
budgets limités avec lesquels il vit. Je crois qu'au niveau des
organismes c'est la même chose. Les gens diraient: Ah! si j'avais 50 000
$, je ferais des miracles. Bon, 50 000 $, ce n'est vraiment pas beaucoup, c'est
une goutte d'eau. Avec 50 000 $, c'est vrai qu'on ne fait plus grand-chose
aujourd'hui. Mais des gens comme ça, dans leur milieu, dans leur zone
d'influence qui est parfois restreinte, finiraient par pouvoir rayonner.
Le Président (M. Doyon): Une dernière question, M.
le député.
M. Boulerice: Oui, une dernière question. Il y a
forcément une concertation qui est importante qui est faite avec les
municipalités, les municipalités régionales de
comté, une participation, etc. Ma dernière question, c'est:
Est-ce qu'on peut songer sérieusement à une implication accrue
des municipalités dans le secteur suite à la réforme Ryan?
Si vous me répondez non, combien de temps cela va-t-il nous prendre
avant de rattraper ce temps qu'on s'est enlevé volontairement?
Le Président (M. Doyon): Oui, madame.
Mme Beauchemin: Les municipalités, il n'y en a aucune
d'entre elles qui a actuellement une politique de la culture. Dans nos
municipalités, on a évalué à 35 % celles qui n'ont
aucun service, ni mandataire, ni boîte postale pour toute question qui
touche au sujet culturel. On se rend compte avec les maires avec lesquels on
travaille, qui sont très près de nous, qu'ils ont un besoin
d'information tout d'abord. C'est le premier intérêt. C'est pour
ça qu'ils sont chez nous. Ils voient aussi. Ils sont très bien
informés. Certains sont membres délégués à
l'UMRCQ. Ils savent très bien que ça s'en vient, que ce sera un
des prochains dossiers qu'ils auront à gérer. Ils sont quand
même inquiets parce qu'ils n'ont pas la structure chez nous. Alors,
combien de temps ça prendra? Je n'en ai aucune idée. Nous n'en
avons aucune idée. Il y a des intérêts, il y a des soucis,
il y a des inquiétudes. Comment peut se faire ce transfert aussi? Ce
sont des points d'interrogation. Nous, actuellement, on est prêts
à leur accorder avec le peu de person- nel que l'on a, si on peut dire,
tout le soutien et la collaboration que l'on pourra leur accorder.
Mais combien de temps, quels moyens? On ne le sait pas. On ne peut pas
vous en suggérer.
M. Boulerice: Si j'en ajoutais, j'ai peur qu'on
considérerait cela comme de la flatterie compte tenu de nos origines.
Alors, j'emploierai ce vieux dicton bruxellois qui dit que, lorsque le coeur
parle, les mots viennent courts. Donc, merci.
Le Président (M. Doyon): Merci. Mme la ministre... M. le
député de Berthier, vous voulez dire le dernier mot? Allez.
M. Houde: Merci bien sincèrement de vous être
déplacés et d'avoir présenté un mémoire qui
parle par lui-même. Je veux souligner, encore une fois, que je suis
entièrement d'accord avec vous autres; le bénévolat que
vous avez mis là-dedans depuis nombre d'années, on le
reconnaît, je pense, aujourd'hui. Je pense bien que Mme la ministre est
bien consciente de ça, du bénévolat qui se fait
là-dedans. Sans bénévolat, il n'y aurait rien qui se
ferait dans bien des organismes, et surtout dans celui-là. Je vous
remercie beaucoup.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. Au nom des membres de la commission, au nom de Mme la
ministre, il me reste à vous remercier d'avoir bien voulu venir nous
rencontrer, d'avoir attendu aussi longtemps que vous l'avez fait et d'avoir
voulu rester avec nous aussi tard. Il me reste maintenant à ajourner les
travaux jusqu'à demain matin, 9 h 30.
(Fin de la séance à 22 h 11)