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(Neuf heures quarante minutes)
Le Président (M. Doyon): La commission de la culture
reprend ses travaux. Il s'agit pour nous de procéder à des
consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de
loi 117. C'est la Loi modifiant la Loi sur le cinéma. On a un certain
nombre d'intervenants à entendre cet avant-midi. Nous allons commencer
dès maintenant en invitant derechef l'Office des communications sociales
à bien vouloir s'avancer et prendre place en avant.
Auditions Office des communications sociales
Je souhaite la bienvenue à Mme Parrot. Je pense qu'elle devrait
être là. Je pense qu'elle est devant nous. Elle est
accompagnée de monsieur... d'après ce que j'ai su, soit M.
Boudreault ou M. Bérubé.
M. Boudreault (Miviile): M. le Président, M.
Bérubé était de retour de Cannes hier, tard dans la
soirée. Alors, il n'a pas pu être ici ce matin. C'est M. Lucien
Labelle, directeur général de l'Office, qui le remplace.
Le Président (M. Doyon): Nous lui souhaitons la bienvenue.
Alors, bienvenue à vous trois. Mme Parrot, les présentations
étant, à toutes fins pratiques, faites, nous vous invitons
à commencer votre présentation. Vous disposez d'une vingtaine de
minutes ou moins pour faire le résumé de ce que vous avez
à nous dire, de ce que vous voulez dire à la ministre et à
la commission. Ensuite, nous entreprendrons une discussion avec vous pour un
temps équivalent. Vous avez la parole.
Mme Parrot (Rolande): M. le Président, Mme la ministre des
Affaires culturelles, MM. les députés, c'est avec grand plaisir
que l'Office des communications sociales a accepté l'invitation faite
par la commission de la culture de discuter des modifications apportées,
par le projet de loi 117, à la Loi sur le cinéma.
Comme vous le savez, le cinéma est un moyen d'expression de la
pensée humaine, un médium de communication sociale, un art et un
langage, mais c'est aussi une activité industrielle et commerciale. Le
travail de révision de la loi qui encadre un secteur clé de la
culture québécoise est donc important et nécessaire, vu la
constante évolution de la problématique cinématographique,
entre autres, en ce qui concerne la politique de classification des films qui
sera le point le plus important de notre intervention. Nous tenons donc
à féliciter Mme la ministre des Affaires culturelles pour avoir
mené cet important projet à terme.
À titre d'organisme catholique engagé depuis plus de 30
ans dans un travail d'éducation du public par rapport aux médias,
l'Office des communications sociales s'intéresse depuis sa fondation au
cinéma et ce, à plus d'un titre. En effet, un de nos services, le
Service Information-Cinéma, dirigé par M. Bérubé
qui, comme vous le savez, est arrivé de Cannes hier soir et,
malheureusement, ne peut être présent ce matin, se consacre
entièrement à l'évaluation et à la diffusion
d'informations sur les films projetés au Québec dans les salles
de cinéma, offerts dans les clubs de vidéocassettes et
présentés sur les différentes chaînes de
télévision.
Le Service cinéma de l'OCS a d'ailleurs mis au point son propre
système de classement de films que l'on retrouve dans diverses
publications. Ce système n'a certes pas force de loi. Il se
présente simplement comme un guide avec pour but principal de signaler
aux spectateurs et spectatrices les oeuvres qui se distinguent sur les plans
artistique et moral.
L'Office des communications sociales a également produit au fil
des ans plusieurs mémoires correspondant à autant d'étapes
importantes dans l'élaboration et l'évolution de la politique
québécoise sur le cinéma. Déjà, en 1960,
l'OCS présentait un mémoire au premier ministre de
l'époque, l'honorable Jean Lesage, qui portait sur la
réglementation des séances de cinéma pour les enfants.
Plus récemment, en février 1990, notre organisme prenait position
lors des audiences publiques de l'Institut québécois du
cinéma sur le classement des films. De l'éducation
cinématographique à la situation de la langue française
dans le cinéma, ces interventions de l'Office des communications
sociales n'avaient, en bout de ligne, qu'un but: éclairer et aider les
consommatrices et les consommateurs placés au centre d'un environnement
médiatique riche et omniprésent où se mélangent
pêle-mêle les oeuvres de qualité et des productions de
moindre intérêt.
Par conséquent, les commentaires qui suivent reposent sur un
principe simple et clair: le respect du public, ses exigences, ses besoins et
ses goûts profonds. Ce respect du public implique notamment que la
production, ta distribution et l'exploitation des films doivent être
orientées vers la consommation par les usagers selon une orientation qui
soit à leur mesure et permette un épanouissement à partir
de ce qu'ils sont et de ce qu'ils aspirent à être. Ce respect du
public veut aussi dire que l'application des
normes édictées par règlement ou autrement se fasse
avec la participation effective des consommatrices et des consommateurs.
L'on ne saurait non plus respecter le public dans une démocratie
où le pluralisme prévaut sans tenir compte des différents
publics, en particulier des enfants, des adolescentes et des adolescents. Cela
suppose que les autorités responsables se donnent la peine
d'étudier les normes qui conviennent à chacun de ces publics, de
les formuler dans des règlements et de les appliquer au moyen de
mécanismes appropriés. Vu que la classification des films par
public a une incidence réelle sur la programmation,
l'établissement de ces normes doit être fait, on s'en doute bien,
par des gens compétents et représentatifs. Enfin, il demeure
impératif qu'une information adéquate soit fournie au public pour
que son choix s'exerce réellement en pleine liberté.
Comme chacun le sait, c'est à l'État qu'incombe la
responsabilité de classifier les films en fonction de l'âge des
spectateurs, cela dans une optique de protection des intérêts du
public. Comme la société qu'elle est censée
refléter est en perpétuel changement, cette classification n'est
jamais définitive et demande à être revue et
modifiée à intervalles réguliers. Cette révision
suppose la recherche d'un équilibre délicat entre une censure
tatillonne et une permissivité irresponsable. La politique
québécoise, à ce chapitre, révèle la
préoccupation du législateur d'atteindre cet équilibre, et
les modifications proposées par le projet de loi 117 s'inscrivent dans
cette évolution. Cette réforme se place dans une tendance
générale de création de nouvelles catégories de
classification susceptibles de mieux refléter le consensus social sur
l'accès aux productions cinématographiques. Cette nouvelle
classification rejoint d'ailleurs les réformes amorcées dans
d'autres pays, comme nous le soulignons en annexe de notre mémoire.
Toutefois, déterminer le consensus social sur l'Impact d'un film,
en particulier sur un jeune public, demeure un exercice extrêmement
exigeant où rien n'est jamais tout à fait acquis. Par exemple,
les opinions divergent sur l'impact de la violence contenue dans plusieurs
films accessibles aux jeunes. Si, pour certains experts, cette violence a une
influence néfaste chez un enfant en développement, d'autres
spécialistes affirment qu'aucun lien de cause à effet n'a encore
été clairement établi à ce chapitre. Encore
récemment, un débat public sur la question, tenu lors du
congrès de la Corporation des psychologues, soulignait cette difficile
évaluation des effets de cette violence au grand et au petit
écrans.
En plus de cette difficulté, les responsables de la
classification devront maintenant composer avec un plus grand nombre de
catégories. Tout en leur procurant une plus grande latitude, ces
catégories rendront leur tâche plus complexe. Jauger le consensus
social n'est pas toujours chose aisée au moment de déterminer si
le contenu d'un film entre dans la catégorie "16 ans et plus" ou "18 ans
et plus". Si chercher l'unanimité parfaite reste illusoire, il demeure
nécessaire d'user de jugement et d'appuyer celui-ci sur une
variété d'opinions la plus diversifiée possible. Dans son
mémoire présenté devant l'Institut québécois
du cinéma, l'Office des communications sociales recommandait de
maintenir l'essentiel du système actuel de classification tout en
donnant de nouveau à la catégorie "14 ans et plus" un
caractère contraignant. De plus, l'Office suggérait que des notes
brèves soient ajoutées dans la publicité des journaux sur
les problèmes particuliers des films placés dans les
catégories 14 ans et 18 ans, et aussi que les vidéocassettes
soient soumises aux mêmes exigences que les films présentés
en salle. Enfin, l'Office demandait qu'un comité consultatif soit
adjoint à la Régie du cinéma.
À la lumière des dispositions contenues dans le projet de
loi 117, l'Office juge que les propositions sur les nouvelles catégories
de classement des films constituent un compromis acceptable. L'Office se
réjouit également de la décision d'étendre cette
classification aux vidéocassettes, un secteur de l'industrie en pleine
expansion depuis quelques années. En effet, tracer une frontière
artificielle entre ces deux modes de distribution, la projection en salle et la
vidéocassette, va à l'encontre des objectifs de la loi. Tout en
sachant la difficulté que représente la mise en oeuvre d'une
telle mesure, nous croyons que son application rigoureuse servira les
intérêts du public.
Quant à l'évaluation du consensus social, elle
représente le pivot de l'application d'une politique de classification
des films. A ce sujet, les membres actuels de la Régie du cinéma
ont la difficile tâche de définir cette notion en constante
évolution. Ce travail sera encore plus délicat compte tenu des
différences parfois subtiles entre chaque catégorie. L'Office des
communications sociales propose donc qu'un comité consultatif
formé de représentants de divers groupes de la
société soit adjoint aux fonctionnaires de la Régie du
cinéma pour réagir sur divers problèmes ponctuels.
Idéalement, la composition de ce comité devrait réserver
une place importante aux parents, aux éducateurs et aux personnes de
moins de 30 ans. Ce comité n'aurait pas comme mandat de se substituer
à la Régie, mais de l'assister dans sa tâche et de lui
fournir des indications propres à l'aider dans son travail de
classification. Enfin, les personnes nommées le seraient pour une
période limitée dans le temps de façon à assurer un
certain roulement.
Un dernier élément que nous aimerions aborder concerne un
aspect souvent négligé, mais qui constitue un complément
indispensable à une politique de classification. On sait que le projet
de loi 117 donne la possibilité à la Régie du
cinéma de porter à l'attention du consommateur des
éléments de contenu sur les films classés "18 ans et
plus". L'Office des communications sociales estime que de telles notes
devraient également être portées à l'attention des
parents et éducateurs pour les catégories "16 ans et plus" et "13
ans et plus". À titre d'exemple, la cote 14 ans en Ontario porte la
qualification "accompagné d'un adulte" et signale, par des formules
brèves, les problèmes posés par un film qui contient des
scènes de violence ou aborde une problématique propre au monde
des adultes. Une information de cette nature, disponible au Québec,
serait sans nul doute utile aux parents ainsi qu'aux éducateurs qui se
situent en première ligne lorsqu'arrive le moment d'aider les jeunes
à choisir parmi les divers produits médiatiques offerts.
En terminant, permettez-moi de rappeler les avis et recommandations
formulés par l'Office des communications sociales dans son
mémoire. Tout d'abord, que les nouvelles catégories de
classification des films constituent un compromis acceptable tenant compte du
fait que leur champ d'application s'étend aux vidéocassettes.
Ensuite, il est souhaitable que la possibilité accordée à
la Régie de caractériser les films classés "18 ans et
plus" s'applique également aux films classés "16 ans et plus" et
"13 ans et plus" et que cette information soit transmise au public selon des
moyens appropriés.
Également, au sujet des dispositions du présent projet de
loi concernant l'Institut québécois du cinéma, l'Office
des communications sociales est favorable à l'accroissement du nombre de
sièges au conseil d'administration de cet Institut et à ce que
l'un de ces sièges soit réservé à un
représentant des consommateurs et consommatrices.
Enfin, nous recommandons la formation d'un comité consultatif
composé de représentants de groupes divers, notamment de parents,
et qu'il soit adjoint à la Régie du cinéma pour la
conseiller dans son travail de classification. Les membres de ce comité
disposeraient d'un mandat non renouvelable, limité dans le temps.
M. le Président, Mme la ministre et autres membres de la
commission, je vous remercie de votre bienveillante attention.
Le Président (M. Gobé): Merci madame. Je vais
maintenant reconnaître Mme la ministre des Affaires culturelles.
Mme Frulla-Hébert: Mme Parrot, messieurs.
Premièrement, je vous souhaite la bienvenue d'abord et je voudrais
souligner le rôle unique que joue l'Office des communications sociales
pour informer le public cinéphile sur tous les films
présentés, autant au cinéma qu'à la
télévision.
Vous remplissez aussi une tâche... On a beaucoup discuté
avec d'autres groupes, spécifi- quement la semaine dernière, de
la tâche que les parents et les éducateurs ont aussi au niveau de
la protection de la jeunesse et comme guides face aux enfants, tâche qui
est peut-être un peu plus difficile parce que le contexte social a
beaucoup changé. On parle de l'éclatement de la famille, on parle
des enfants qui sont laissés à eux-mêmes, souvent la
clé au cou, et qui se servent maintenant de la télévision
qui est devenue - à 26 heures d'écoute par semaine, par exemple -
un moyen d'éducation en sol.
Nous avons abordé plusieurs sujets au niveau de cette loi, mais
on va rester, si vous le voulez bien, au niveau du classement. Nous avons
évidemment pris les recommandations de l'Institut
québécois du cinéma et nous les avons soumises à
cette commission parlementaire. Il y a des groupes qui disent que ce n'est pas
suffisant. Il y en a d'autres qui disent que ça va être
difficilement applicable, spécifiquement au niveau de la
vidéo.
Vous semblez être d'accord avec les modifications et l'ajout d'une
classification qui est le "16 ans et plus". Selon vous qui informez, donc qui
vivez avec un problème tous les jours, deux choses: D'abord,
qualitativement, comment, selon vous, peut-on classer le 16 ans versus le 18
ans? Comment peut-on qualifier grande violence versus violence ordinaire?
Est-ce que, selon vous, c'est faisable? Deuxièmement, au niveau de la
vidéo, il y a un consensus pour dire que c'est souhaitable et qu'il faut
le faire, d'étendre la classification au niveau de la vidéo. Les
marchands de matériel vidéo nous disent que ça va
être très difficilement applicable, qu'on le laisse indicatif.
Comment, selon votre expérience, voyez-vous ça au niveau de
l'application, d'une part, et la première chose...
Mme Parrot: Si vous permettez, Mme la ministre, je vais laisser
la parole au directeur général qui est dans le quotidien.
M. Labelle (Lucien): Mme la ministre, vous posez deux questions,
si j'ai bien saisi. La première, c'est: Comment évaluer le
degré de violence pour classifier un film tel âge ou tel
âge? Et la deuxième, c'est le sujet de la vidéocassette.
C'est bien ça?
À la première question, il est certain qu'on ne peut pas
établir des critères objectifs. Dans le traitement d'un film, il
y a tellement de façons de faire que c'est à la suite
d'évaluations faites par des gens qui en consultent d'autres qu'on peut
arriver à dire: Bien, tel degré de violence peut être
supportable, disons, pour les jeunes de 13 ans ou de 16 ans. Donc, là,
on n'est jamais parvenus à établir, on a déjà
essayé d'établir des critères qu'on pourrait appeler
objectifs. Chaque film, c'est une entité qui doit être
examinée en soi. On ne peut pas dire, parce que, disons, il y a trois
assassinats dans
un film, là, ça va être 18 ans, et il y en a deux
dans un autre... Le traitement compte, là-dedans. Donc, sur cette
question précise, je ne peux pas vous donner la réponse
précise. Le rôle d'évalua-teur, par ailleurs, étant
donné que les personnes qui évaluent sont susceptibles de voir
s'émousser un peu le sens de l'évaluation, ça amène
nos évaluateurs à consulter beaucoup autour. C'est ce qu'il y a
un peu aussi en-dessous d'une recommandation que l'on fait, à savoir
qu'il y ait un comité consultatif pour aider ceux qui donnent des visas
aux films. Voici pour la première question.
La deuxième question portait sur la vidéocassette. Au
niveau de l'étude que nous avons faite, nous sommes tout à fait
d'accord, puisque nous l'avions déjà suggéré
à l'Institut, pour que le travail de classification qui se fait pour les
autres films soit fait pour les films en vidéocassettes. Nous nous
rendons compte que ce n'est pas facile et nous ne sommes pas entrés dans
les mécanismes qu'il faudrait mettre en oeuvre pour faire ce travail.
Donc, je ne veux pas vous dire qu'on est allés jusqu'au bout des
méthodes qu'il faudrait prendre, mais on estime que c'est non seulement
souhaitable mais pratiquement nécessaire qu'un travail parallèle
soit fait pour que l'accès aux vidéocassettes soit
effectué selon le même type de classification que pour les films
présentés en salle. (10 heures)
Mme Frulla-Hébert: Je voudrais revenir aux
catégories. On propose maintenant 13 ans, 16 ans, 18 ans. Il y a
d'autres groupes qui, pour toutes sortes de bonnes raisons,
préfèrent soit le 13 ou le 14 et 18, c'est-à-dire que la
classification 16 serait une classification de trop. Dans d'autres pays, on a
les trois classifications et on peut se baser sur certaines expériences
versus d'autres qui ont des classifications beaucoup plus larges. Est-ce que
vous pensez que c'est réaliste, pour vous, de classer les films à
13 ans, 16 ans et 18 ans? Selon vous - je sais que vous appuyez, là -
est-ce que c'est plus réaliste compte tenu de l'évolution? Vols
dites qu'une classification n'est jamais définitive, qu'elle doit
être revue à intervalles réguliers, pourquoi?
Évidemment, II y a eu l'évolution de la société et
l'évolution du consensus social aussi. Est-ce que vous pensez que c'est
un peu trop restrictif ou qu'il serait réaliste d'y aller avec les trois
classifications?
M. Labelle: Mme la ministre, notre première
réaction était telle que ce qui était déjà
existant, donc 14 ans et 18 ans; nous nous accommodions de cette
classification. Cependant, nous n'acceptions pas facilement que la cote 14 ans
soit simplement indicative. Le projet de loi 117 ajoute une catégorie.
Et sur cette catégorie, après y avoir réfléchi en
équipe, nous disons: Oui, ça peut être un compromis
acceptable. Il peut y avoir certains avantages parfois, pour les responsables
de la classification qui peuvent hésiter. Moins il y a de
catégories, bien sûr... On peut parfois dire: Si on avait une
catégorie et demie, ça ferait notre affaire. Alors, il peut y
avoir certains avantages avec toujours, bien sûr, l'incertitude... On
n'est pas dans un domaine... Il peut y avoir parfois - je ne dirais pas des
erreurs - un film qu'on aura classrflé ou classé une
première fois à 13 ans et, à la réflexion, on dira:
Non, il me semble que c'est trop fort. Mais, compte tenu de tout cela, le fait
qu'il y ait plus de catégories, ça peut être un certain
avantage pour les personnes chargées de la classification. Et c'est dans
ce sens que nous acceptons volontiers ce qui est proposé dans le projet
de loi 117.
Mme Frulla-Hébert: Excusez-moi. J'ai eu un message urgent.
Vous me dites, au niveau des catégories?
M. Labelle: Oui, en résumé, même si ce
n'était pas les termes dans lesquels nous avions réagi à
la consultation, nous acceptions la première classification, celle qui
existait auparavant, 14 ans et 18 ans. Mais quand on a pris connaissance du
projet de loi établissant une catégorie de plus 13 ans, 16 ans,
18 ans, nous avons considéré que cette classification
était fort acceptable. Donc, on n'a absolument pas de restrictions, pas
de réserves.
Mme Frulla-Hébert: Vous n'y voyez pas de problème,
de restriction?
M. Labelle: Pas de réserves, absolument pas.
Mme Frulla-Hébert: Vous parliez de... Parce qu'il y a
toujours une ligne fine entre la censure d'un côté et...
M. Labelle: Oui. J'ajoute que les personnos responsables peuvent
trouver ça parfois utile qu'il y ait plus de catégories.
Mme Frulla-Hébert: Dans un autre ordre d'idées,
vous demandez d'avoir un représentant au niveau de l'Institut
québécois du cinéma, représentant les
consommateurs. Il y a aussi des groupes qui siègent à l'Institut
québécois du cinéma qui disent que, finalement, l'Institut
est une instance qui est très technique. Ils ont émis leur
crainte à savoir que quelqu'un qui n'est pas du milieu, ou enfin qui
n'est pas du milieu de la production, diffusion, etc., qui ne travaille pas
vraiment dans le milieu, risquerait tout simplement, compte tenu des sujets, de
s'ennuyer. C'est à peu près ce qu'on nous a dit hier. Pourquoi
jugez-vous importante - et vraiment vous y tenez - l'utilité d'avoir un
représentant du consommateur au siège de l'Institut
québécois?
M. Labelle: À cette question, je dirais que les personnes
des autres groupes, comme c'est normal, vont avoir présents à
l'esprit les intérêts de leur groupe, tout en étant
capables, bien sûr, de se placer à un niveau de bien commun, comme
il se doit. Mais nous trouvons qu'il ne serait pas mauvais, même si une
personne n'est pas techniquement aussi avancée dans ses connaissances en
cinéma, nous trouvons important qu'il y ait là au moins une
personne de bon jugement capable de juger ou d'aider le groupe à juger
le film dans la perspective de l'intérêt du consommateur, comme
consommateur ou comme parent. C'est pour ça qu'on dit qu'il faut qu'il y
ait au moins une personne; ce n'est pas l'ensemble du groupe. Nous trouvons que
c'est important et c'est pour ça que nous appuyons cette idée qui
a été émise...
Mme Frulla-Hébert: D'avoir un comité, d'accord.
M. Labelle: ...encore une fois, sans aucune réserve et
même avec insistance. Nous n'avons pas la modalité. C'est toujours
le problème qu'on soulève. Comment la nommer? Qui va
représenter les consommateurs? On n'est pas entré dans la
modalité pour choisir cette personne, mais ça, je pense qu'il y a
moyen de trouver un mécanisme qui ferait que cette personne soit assez
intéressée par le cinéma et assez représentative
des intérêts des consommateurs pour ne pas s'ennuyer à ces
réunions, comme d'aucuns, peut-être, pourraient le craindre.
Mme Frulla-Hébert: Parfait. Une dernière question.
On parle de comité consultatif pour conseiller la Régie. Vous
précisez aussi que le comité ne se substituera pas,
évidemment, à la Régie, mais va lui fournir quand
même des indications. Ne croyez-vous pas que ça fait encore...
Ça alourdit et c'aura pour effet aussi non seulement d'alourdir le
processus mais, finalement, de... Si la Régie est là quand
même avec des personnes qui sont branchées non seulement dans le
milieu mais auprès de la population, qui ont les compétences
pour, finalement, classer, juger, etc., vous ne croyez pas qu'un comité
consultatif viendra tout simplement alourdir, versus ajouter, sachant que la
Régie peut toujours se retourner et demander à divers
groupes-conseils lorsqu'elle le juge bon?
M. Labelle: Oui, Mme la ministre. Cette recommandation, c'est la
troisième ou la quatrième fois que nous la faisons. Donc,
ça veut dire que, pour nous, ce serait un élément
important. À chaque fois que nous avons eu à intervenir quand il
y a eu des modifications à la Loi sur le cinéma, nous avons
toujours, et avec l'appui des gens que nous consultons, fait cette
recommandation pour la raison que... Bien sûr, on ne met d'aucune
façon en doute la compétence des gens dont c'est le travail, soit
des fonctionnaires qui vont travailler pour la classification des films,
absolument pas.
J'ai laissé entendre tout à l'heure qu'à force de
voir des films, notre façon de les voir ou de les juger peut
s'émousser sans même qu'on s'en rende compte, d'une part. D'autre
part, dans notre mémoire, nous parlons assez souvent du consensus
social. Il y a évolution. Quand on parle de moralité publique, il
y a évolution. Je pense que ça, c'est incontestable. Le seuil de
tolérance d'une collectivité peut être modifié. Il
est effectivement modifié. À ce moment-là, un
comité consultatif, on ne volt pas là des personnes, bien
sûr, qui vont travailler à temps plein, mais des personnes qui
vont se réunir quelques fols dans une année. Ce comité
serait probablement plus en mesure d'aider à jauger, comme nous disons,
le consensus social en ce qui concerne le cinéma ou l'impact du film,
tant dans les salies de cinéma qu'à la télévision
ou en vidéo. C'est dans ce sens-là que nous trouvons qu'il serait
important... On se rend bien compte que si on dit "alourdit", ça veut
dire une charge additionnelle. Bien sûr, c'est une charge additionnelle
et ça se traduit peut-être par un certain budget. Mais ne voyons
quand même pas un comité très lourd, très
considérable et qui se réunirait à toutes les semaines. Ce
serait beaucoup plus en termes de réunions sporadiques et de gens qui
seraient vraiment appelés à évaluer ce consensus social.
C'est pour cette raison, d'ailleurs, que dans ce comité, nous
suggérons qu'il y ait un roulement continuel.
Mme Frulla-Hébert: Merci.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. M. ie
député.
M. Boulerlce: Au-delà de vos propos très
intéressants auxquels j'ai porté énormément
d'attention, je ne peux quand même pas m'em-pêcher de vous dire que
vous évoquez pour moi des souvenirs - et j'en faisais part en
aparté à M. Chartrand, mon assistant - dans ma petite ville
natale de Joliette, place Bourget.
Mme Parrot: 54 Nord.
M. Boulerice: Voilà! Ces petits cartons...
Mme Parrot: Je m'en suis occupée pendant trois ans.
M. Boulerice: ...qui indiquaient la classification des films, et
ma mère profitait des courses du vendredi pour les lire. Et cela
déterminait mon allocation au cinéma pour le samedi soir ou le
dimanche après-midi. Ça ne va pas me rajeunir, mais
c'était à la belle époque, Mme la ministre, où il
n'y avait ni TPS ni TVQ et qu'on pouvait se taper trois films pour 0,75 $1 Ha,
ha,
ha!
Mme Frulla-Hébert: Le salaire était à 4000 $
par année.
M. Boulerice: Et je me souviens même de... Je pense que
tous les adolescents ont fait cela, les adolescentes et les adolescents. Deux
entraient, ouvraient les soupiraux des salles de bain et le restant du
lycée entrait. Mais je pense qu'il y a prescription pour ces
délits, ce qui fait que je m'en tire. En lisant votre mémoire,
vous jugez louable l'intention de la ministre quant à une
catégorisation - si c'est aussi difficile à appliquer que ce
l'est à prononcer, je pense qu'on va toucher le noeud du sujet -
l'établissement d'une catégorie 16-18 ans, mais vous dites que,
effectivement, son caractère applicable, ça devient beaucoup plus
difficile, parce qu'il faut faire entrer un paquet de "considérant", des
critères objectifs rigoureux. Mais c'est toujours difficile. Ça
peut devenir arbitraire, etc.
Mais la question que j'aimerais vous poser: Est-ce que vous ne convenez
pas que ce serait peut-être plus simple d'abandonner les 16 ans, compte
tenu de la grande difficulté d'application que cela soulève? La
Régie, d'ailleurs, nous en a parlé et va le faire de nouveau, il
serait peut-être plus simple d'établir une distinction pour la
catégorie de 18 ans, une distinction entre film pornographique et film
violent. Déjà, si on établissait cette distinction pour
les 18 ans, pensez-vous qu'on pourrait peut-être régler une partie
du problème?
M. Labelle: Est-ce que je comprends bien qu'il y a deux sujets
que vous soulevez? Le premier, ce serait l'élimination d'une
catégorie, 16 ans... (10 h 15)
M. Boulerice: Non, je ne dis pas de l'éliminer, parce
qu'elle n'existe pas légalement, actuellement, celle des 16 ans, sauf
que tous disent que si cela est louable comme Intention, on est loin de trouver
la solution qui rende cette catégorisation-là applicable. Donc,
je vous dis qu'à défaut de trouver les solutions qui rendent
applicable la classification des 16 ans, est-ce qu'on ne pourrait pas aller
vers une sous-catégorisation, dans le cas des 18 ans, entre films
pornographiques et films violents, ayant un contenu de violence? Je n'ai pas
besoin de vous donner des titres, vous les avez en mémoire comme
moi.
M. Labelle: Oui.
Le Président (M. Doyon): M. Labelle.
M. Labelle: Je ne pense pas, M. le député, que la
solution soit de ce côté-là. Au fond, vous suggérez
d'avoir, je ne sais pas, dans la catégorie des 18 ans, des films qui
seraient nettement pornographiques et, de l'autre, des films violents. Vous
pouvez avoir, peut-être, des films 18 ans, selon une troisième
catégorie, qui ne seraient ni pornographiques ni violents, mais dont le
sujet serait purement un sujet d'adulte. Je ne sais pas si de faire des
sous-catégories à l'intérieur d'une même... À
première vue, je ne vois pas facilement que ça puisse
régler le problème. Si je saisis bien votre pensée,
à mon point de vue...
M. Boulerice: Moi, je pensais à des films avec une
thématique particulièrement difficile.
Là, je vais vous donner un exemple: "La dernière tentation
du Christ".
Labelle: Oui. Ça, c'est un film, voyez-vous... C'est
matière d'opinion.
M. Boulerice: Est-ce qu'il serait accessible à 16 ans?
À 18 ans?
Labelle: C'est un film qui pourrait sûrement, à mon
point de vue, être accepté sans difficulté pour un public
de 16 ans. Là, c'est toujours matière d'opinion. Je ne sais pas
si un comité arriverait aux mêmes conclusions, mais, à mon
point de vue, il devrait être acceptable pour un public de 16 ans,
sûrement.
M. Boulerice: Là, on a parlé de films et on l'a
fait dans l'optique cinéma. Pour ce qui est des vidéos, du film
qui est sur un support vidéo, est-ce que vous souhaiteriez que ce soit
indicatif ou bien restrictif, l'implication du classement comme tel? Alors, on
dit: 13 ans, 16 ans - disons que la mesure est acceptée - 18 ans, etc.,
mais que c'est uniquement indicatif sur la cassette comme telle, ou bien si
c'est restrictif dans le sens qu'un commerçant de matériel
vidéo ne pourrait remettre à un adolescent de 13 ans une cassette
qui a été étiquetée 16 ans et 18 ans, comme il ne
pourrait remettre à 16 ans celle qui est étiquetée 18
ans?
Je sais, au dépari, qu'un étiquetage de caractère
indicatif est important pour les parents dans le choix comme tel, mais il ne
faut pas se leurrer, là. Les adolescents vont dans le commerce
vidéo avec leur propre carte, parce que certains en ont, même
plusieurs en ont, mais la plupart prennent la carte de papa ou de maman et vont
chercher des films. Je faisais, avec un autre groupe, un peu un
parallèle. Si vous envoyez votre jeune fille chez le dépanneur et
qu'elle a 14 ans, on ne va pas lui remettre les six bouteilles de bière
ou la bouteille de vin qu'elle veut. On va lui dire non.
M. Labelle: Vous avez employé le mot "restrictif. Bien
sûr, pour le visionnement même, le contrôle n'est pas facile
quand la cassette est en circulation, mais quand on va à un
vidéoclub, moi, je ne verrais pas que le propriétaire du
vidéoclub loue un film 18 ans à un jeune de 13
ans. Je pense qu'il faudrait que ce soit vraiment contraignant,
autrement, ça n'a presque plus de sens. Il faut que ce soit
contraignant. Il faudra respecter les catégories d'âge, soit pour
la vente des vidéocassettes, soit pour la location. Ensuite,
l'État ne peut plus suivre le film rendu dans un foyer. Pauvre gars,
c'est la responsabilité des parents de voir qui peut le visionner et
comment.
M. Boulerice: Non, non, ça, je suis d'accord avec vous.
C'est la responsabilité du parent de prendre un film et de le faire
visionner à ses adolescents ou ses adolescentes.
M. Labelle: Voilà. C'est ça. Oui.
M. Boulerice: Par contre, lorsqu'ils vont eux-mêmes en
chercher, la question se pose. Est-ce que nous imposons des obligations: oui,
vous leur remettez ou, non, vous ne leur remettez pas, ou bien donc on laisse
ça comme c'est le cas actuellement?
M. Labelle: Comme je vous le dis, moi, je ne verrais pas, si la
loi prévoit qu'il y a une classification, il faut qu'elle prenne le
moyen de la faire respecter pour la circulation de la vidéocassette
concernée. Donc, il faudrait respecter les paliers d'âge.
M. Boulerice: D'accord. Quels sont les éléments de
contenu que vous souhaitez au chapitre des mentions indicatives qui seraient
apposées en même temps que le classement du film selon les
catégories d'âge déterminées par la Régie?
Est-ce que vous pouvez donner des exemples concrets?
M. Labelle: Là où ça se fait, c'est
habituellement presque toujours les trois ou quatre - c'est dit de façon
très succincte - expressions comme, par exemple, langage grossier,
violence ou sujet pour un public adulte. C'est le genre de
caractérisation que l'on trouve, et spécialement en Ontario
où ça se fait couramment pour les films pour les 14 ans. Ce sont
des Indications qui sont données et qui peuvent être
précieuses pour les parents.
M. Boulerice: Est-ce que vous souhaitez également que cela
s'applique pour les cassettes vidéo, uniquement sur... pas juste sur la
publicité des journaux ou la critique?
M. Labelle: Pourquoi pas?
M. Boulerice: Pourquoi pas. D'accord. Je vous remercie.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup, M. le
député. Alors, ceci termine les questions qui devaient être
posées. J'inviterais Mme Parrot, M. Boudreault ainsi que M. Labelle
à bien vouloir céder leur place aux intervenants suivants. Mme la
ministre voudra sûrement les remercier rapidement et M. le
député.
Mme Frulla-Hébert: Oui. À vous tous, merci
d'être ici. Nous prenons bonne note, finalement, de vos recommandations
et aussi de votre souci qu'il y ait plus d'information, d'abord. Je pense que
c'est demandé, c'est un consensus, non seulement que l'on ciassifie mais
que l'on informe aussi. Donc, nous prenons bonne note et nous vous remercions
d'avoir été ici. Et merci aussi de travailler à notre
cause.
Le Président (M. Doyon): Alors, les remerciements de la
commission. Maintenant, j'inviterais, pour prendre la suite, les
représentants de la Régie du cinéma, M. Benjamin, Mme
Limoges et Mme Paquet, à bien vouloir s'approcher.
Régie du cinéma
Je souhaite la bienvenue aux gens de la Régie du cinéma.
Je vois qu'ils sont quatre. J'inviterais M. Benjamin, tout simplement, à
nous les présenter, à prendre les quelques minutes qui lui sont
allouées. C'est la même règle pour tout le monde, une
vingtaine de minutes, ou à peu près, pour présenter son
mémoire ou en faire un résumé; après ça, les
membres de la commission vont discuter avec vous pour une trentaine de minutes.
M. Benjamin, bonjour.
M. Benjamin (Claude): Merci, M. le Président. Mme la
ministre, Mmes, MM. les députés, il y a les membres de la
Régie que vous avez présentés et il y aussi Me Carole
Ducharme qui est avocate à la Régie.
Certains représentants devant la commission ont tenu à
souligner la qualité du travail de la Régie, je tiens tout
simplement à dire que cela est dû en grande partie à trois
collaborateurs qui sont derrière moi et qui sont Denis Belleville,
secrétaire de la Régie, Mme Carmen Watson, qui est directrice par
intérim de la Direction du classement des films, et M. Jean-Pierre
Gagnon, qui est directeur des permis et contrats.
Le Président (M. Doyon): Alors, bienvenue à tous.
Vous avez la parole.
M. Benjamin: D'entrée de jeu, il me faut vous dire que la
Régie du cinéma se réjouit que l'Assemblée
nationale ait été saisie d'un projet de loi visant à
modifier la Loi sur le cinéma. En effet, plusieurs
éléments militent en faveur de modifications à la loi afin
de la rendre davantage conforme à l'évolution
cinématographique et sociale et ce, notamment en matière de
classement des films et de promotion de la langue française au grand
écran. Le projet de loi propose aussi certaines modifications aux
condi-
tions d'exercice du mandat imparti à la Régie, ces
modifications permettant de contrer certaines difficultés que l'usage a
fait ressortir. Tout en étant largement d'accord avec l'ensemble des
modifications proposées, la Régie propose certains amendements
qui visent si possible à parfaire certains articles.
En matière de classement de films, l'ensemble des intervenants
conviennent qu'il est devenu nécessaire d'élargir le mandat de la
Régie afin que soient classés non seulement les films
destinés à la présentation en public, mais
également le matériel vidéo destiné à la
location ou à la vente au détail. Soulignons qu'au cours de la
présente année, celle qui a cours actuellement, plus de 3 000 000
de vidéocassettes seront offertes sur le marché au détail.
Malgré les obligations supplémentaires que cela impose aux
distributeurs et aux commerçants au détail de matériel
vidéo, la nécessité de protéger la jeunesse et de
rendre le système de classement cohérent et efficace, comme le
dit l'Institut, justifie amplement cette nouvelle mesure. Nous ne pouvons que
souhaiter vivement que le législateur fasse en sorte qu'un film
présenté en public et interdit à une certaine
catégorie de spectateurs ne puisse être loué ou vendu
à ces mêmes spectateurs dans les commerces au détail de
matériel vidéo. Et j'attirerais votre attention sur des exemples
absolument folichons, style Rouyn-Noranda, un cinéma où les 18
ans ne pouvant pas entrer, mais on vous dit: J'ai aussi un commerce de
matériel vidéo dans mon entrée. Si ça ne te fait
rien, ça va te coûter meilleur marché et tu vas pouvoir
l'avoir. On en est rendu à des aberrations de ce style.
À cet égard, la Régie se félicite que la
notion de protection de la jeunesse ait été introduite à
l'article 81 de la loi. C'est la première fois et cela mérite
d'être souligné. Il ne reste plus qu'à faire en sorte que
cette notion reçoive une application pleine et entière. Nous ne
pouvons souscrire à la position de ceux et celles qui voudraient que
l'on s'en tienne à informer. Nous ne pouvons non plus souscrire à
la position de ceux et celles qui voudraient que l'on n'applique pas les
dispositions contenues dans le projet de loi si on n'agit pas tout de suite et
de la même façon sur la télévision, comme certains
l'ont dit. Tout est dans tout et rien n'est dans rien. S'il faut attendre
d'avoir agi partout pour agir quelque part, je pense qu'on n'arrive nulle
part.
Pour ce qui est des catégories de classement, le visa
général ne posant aucune difficulté, nous allons nous
attarder aux autres catégories. "13 ans et plus": La catégorie
"13 ans et plus" nous semble devoir être retenue. Le passage de 14 ans
à 13 ans nous semble justifié, de même que le
caractère restrictif de cette catégorie. Comme chacun le sait,
l'adolescence est une période de croissance, d'évolution et de
changement. Quand commence-t-elle, quand se termine- t-elle, il n'est pas
facile de le déterminer avec certitude. Toutefois, tous s'entendent pour
dire qu'un enfant est parfois dans la période d'adolescence à 12
ans, souvent à 13 ans, et sûrement à 14 ans. C'est pourquoi
la Régie souscrit volontiers à l'introduction d'une nouvelle
catégorie, soit celle de "13 ans et plus". De plus, en imposant
l'obligation à un adulte d'accompagner un enfant de moins de 13 ans au
visionnement d'un film classé "13 ans et plus", nous nous assurons que
l'adulte sera partie prenante au choix d'un film pour un enfant de moins de 13
ans et qu'il sera, en outre, en mesure d'apporter à cet enfant tout le
soutien nécessaire le cas échéant. Je crois que 14 ans
indicatif était fait pour une société d'anges.
(10 h 30) "16 ans et plus"; Quant à la catégorie "16 ans
et plus", nous ne croyons pas qu'elle doive être retenue. La Régie
ne peut parvenir à bien cerner quels critères pourraient
permettre de déterminer qu'un film puisse être vu par des
personnes âgées de 16 ans et plus et qu'un autre ne puisse
être vu que par des personnes âgées de 18 ans et plus.
Pour sa part, l'IQC propose de limiter la catégorie "18 ans et
plus" aux films pornographiques ou de grande violence. Mais qu'est-ce que la
grande violence? Un meurtre à la minute? Plus de 10 coups de poing? Du
sang? Des membres déchiquetés, etc. ? Où situer la limite?
Il nous paraît extrêmement difficile de la démarquer entre
l'âge de 16 ans et celui de 18 ans. La Régie, honnêtement,
ne souhaite pas devoir emprunter cette voie. Elle préfère qu'on
s'en tienne à des catégories qui correspondent d'une part
à l'âge où on devient adolescent et, d'autre part, à
l'âge où on devient adulte.
L'adoption de cette catégorie aura pour effet de compliquer les
choses, nous semble-t-il, un peu pour tous, et son application sera
extrêmement difficile à assurer. Trop de catégories
applicables à autant de catégories d'âge entraîneront
trop de contrôle, notamment chez les commerçants au détail
de matériel vidéo, même dans les salles de cinéma et
les cinéparcs qui auront beaucoup de difficulté à
appliquer cette catégorie. La Régie tient de plus à
souligner que sur les huit mémoires déposés lors des
audiences publiques tenues en février 1990 par l'Institut, deux
seulement proposent l'ajout de la catégorie "16 ans et plus". La
Régie ne croit pas fondée la position de ceux qui ont
réclamé cette mesure et elle recommande en conséquence que
cette catégorie ne soit pas retenue.
La catégorie "18 ans et plus". La Régie tient à
insister sur la pertinence de classer les films qui représentent
principalement et explicitement des scènes d'activités sexuelles
dans une catégorie "18 ans et plus" distincte. De cette façon, il
sera aisé de contrôler l'étalage et la promotion de ces
produits à l'intérieur des commerces au détail de
matériel vidéo sans faire
subir le même sort au matériel vidéo classé
"18 ans et plus" en raison de sa thématique difficile ou violente. Les
produits dits de "sexploitation" seront traités comme ils sont
traités comme tels presque partout ailleurs dans le monde. En
conséquence, la Régie propose donc quatre catégories,
celle du "visa général", celle du "13 ans et plus", celle du "18
ans et plus" et celle du 18 ans et plus sexploitation.
Quant au français à l'écran, les objectifs
poursuivis depuis l'introduction de l'article 83 dans la Loi sur le
cinéma peuvent se résumer comme suit. Premièrement,
augmenter le nombre de films en langue ou en version française.
Deuxièmement, augmenter le nombre de projections de films en langue ou
en version française. Troisièmement, rendre les versions
françaises accessibles plus rapidement. Et quatrièmement,
favoriser le doublage de films au Québec. Ces objectifs ont-ils
été atteints? L'expérience nous démontre que
l'article 83 commence à donner certains des effets escomptés.
Depuis l'appel lancé par la ministre des Affaires culturelles,
Mme Lise Bacon, qui visait à inciter les distributeurs à
s'autodiscipliner afin de réaliser les objectifs de l'article 83, nous
pouvons constater une nette amélioration de la situation. Je suis
heureux de souligner que nous avons eu une réunion de travail tout
dernièrement avec des gens de l'Institut qui, eux aussi, ont
compilé des chiffres et pourront certainement vous en faire part, et
nous constatons les mêmes tendances au cours de la dernière
année. Leurs chiffres varient parce que la période n'est pas
exactement la même. Parfois, le critères qu'ils ont
utilisés ne sont pas exactement non plus les mêmes, mais dans
l'ensemble, les tendances sont les mêmes.
Je vais ajouter une autre donnée qui n'était pas dans le
mémoire parce que nous n'avions pas terminé la compilation
à ce moment-là. Du 1er avril 1990 au 31 mars 1991, donc au cours
du dernier exercice - la période du moratoire couvrait de mai à
mai, alors il n'y a pas grand différence, on est année pour
année - sur 206 films en version originale. anglaise, 110 films ont
été doublés ou sous-titrés, soit 53 % des films
comparativement à 36 % pendant le moratoire. C'est une nette
progression. Pour la première fois, le nombre de copies en langue
française a été supérieur à celui des copies
en langue anglaise, soit 1246 copies en langue française par rapport
à 947 copies en langue anglaise. Troisièmement, le délai
moyen - et c'est la nouvelle donnée - d'obtention d'un visa pour la
copie doublée ou sous-titrée en français d'un film est de
39, 4 jours après l'émission du visa pour la version originale.
Je vous rappelle que pendant le moratoire, c'était passé de
quelque chose comme soixante et quelque à soixante et quelque. On avait
quatre jours de progression. Là, on passe à 39, 4.
En outre, les dernières statistiques... Si la commission le
souhaite, je les tiens à la disposition de la commission, distributeur
par distributeur, "majors" par "majors". On est capable de vous donner combien
de jours ils prennent pour faire la version. Par exemple, Buena Vista prend 16,
5 jours. C'est possible d'y arriver. Columbia, 63, 5. MCA, 42, 8, et je
pourrais continuer ainsi; je pourrais vous les donner si vous le souhaitez.
En outre, les dernières statistiques compilées par le
Bureau de la statistique du Québec pour l'année 1990 nous
permettent de constater que si le nombre total de projections s'est accru de 2,
6 % à travers le Québec, le nombre de projections en langue
française a progressé, lui, de 7, 2 %. La Régie a
constaté de plus que la part des projections en langue française
est passée de 54, 9 % en 1988, à 58, 4 % en 1989, et à 61
% en 1990. L'assistance aux projections en langue française est
passée de 52, 5 % à 56, 3 %, à 57 % pour les mêmes
années.
Somme toute, l'industrie cinématographique commence à bien
saisir le message que lui lançaient les autorités politiques,
message qui reflétait les attentes de la population
québécoise. Cependant, il ne faut pas pour cela ne prendre aucune
autre mesure. Et il reste un problème, c'est celui de la région
de Montréal, qui a une situation tout à fait
particulière.
Les propositions de la Régie par rapport à l'article 83.
Premièrement, la Régie propose de maintenir le premier paragraphe
de l'actuel article 83. En effet, la Régie ne voit pas la
nécessité d'éliminer de ce paragraphe le sous-tltrage,
puisque les films sous-titrés en français ne représentent
qu'un faible pourcentage de copies françaises et sont en
général des films dits de répertoire et/ou à petite
diffusion. Pourquoi alors faire la vie plus dure à ce genre de films en
ne permettant pas à la copie autre qu'en langue française
d'obtenir un visa, lorsqu'il existe une copie sous-titrée en
français.
Par rapport à l'article 83. 2. Pour les films
présentés avec l'engagement de doubler ou de sous-titrer en
français les films au Québec, la Régie croit qu'il est
plus prudent de n'émettre que des visas temporaires de 45 jours,
puisqu'un contrat intervenu entre les parties peut toujours être
résilié pour divers motifs. On doit éviter de se retrouver
avec des visas permanents sur des copies autres qu'en langue française
alors qu'aucune version en français ne serait disponible.
Et troisièmement, la Régie est d'avis qu'il n'y a pas lieu
de distinguer entre les films pour lesquels on requiert de la Régie plus
de cinq visas et ceux pour lesquels on requiert moins de cinq visas pour des
copies en langue autre que française. En effet, la durée moyenne
d'exploitation d'un film variant de 30 à 40 jours, aux dires même
des exploitants de salles de cinéma, la période de 45 jours nous
paraît largement suffisante. La Régie considère par
ailleurs qu'il s'avère nécessaire d'accorder, à
l'expiration de
ce délai, un visa permanent par format pour une version en une
autre langue que le français.
Et s'il m'est permis de commenter une autre position qui a
été présentée à la Régie, l'Union des
artistes vous a fait une proposition - et je pense qu'elle mériterait
d'être étudiée de très près - à savoir
d'introduire dans la loi un délai maximal de 45 jours, quitte à
le modifier par vole réglementaire par la suite en diminuant, mais en
n'allant jamais au-dessus. Et je pense, passez-moi l'expression, que le "trend"
est pris, c'est-à-dire que les gens sont maintenant dans un courant de
prendre les choses plus rapidement. Je pense que de le fixer dans la loi... Il
me semble qu'il vaudrait la peine de s'attarder à cette recommandation
de l'Union des artistes.
Quant à l'industrie de la distribution, la Régie
considère qu'il y a lieu dans certains cas de resserrer le
contrôle des droits de distribution de matériel vidéo.
À cet égard, II y a lieu de modifier l'article 118 afin de
permettre à la Régie, le cas échéant, d'exiger tous
les documents qui permettent de remonter la chaîne des titres et
d'être ainsi à même de vérifier l'authenticité
et la validité des droits cédés. Actuellement, nous ne
sommes pas en mesure de le faire.
De la même façon, il y a lieu de resserrer le
contrôle à l'égard des droits de distribution pour la
présentation de films en public. Ainsi, la personne qui demande un visa
en vertu de l'article 79 de la loi devrait déposer à la
Régie, si elle est titulaire d'un permis de distributeur, le contrat de
distribution ou, selon le cas, la documentation exigible en application de
l'article 118.
Quant à l'article 28 du projet de loi créant l'article
105. 3 de la loi, la Régie vous a dit dans son mémoire qu'elle
souhaiterait que ne soit pas adopté cet article. Nous avons par ailleurs
entendu des gens qui sont venus vous dire qu'ils "souhaitaient" plutôt
qu'ils "souhaitent" qu'il soit adopté.
Nous avons des réserves, nous sommes réticents un peu,
mais nous sommes peut-être prêts à revoir notre position
là-dessus. On pourrait peut-être échanger.
Les dispositions transitoires et finales. Il est nécessaire
d'Insérer, au chapitre 4 de la loi, une disposition transitoire et
finale afin de déterminer quand la Régie commencera à
classer le matériel vidéo destiné au commerce au
détail. La Régie est d'avis qu'il n'y a pas lieu de chercher
à classer tout le matériel déjà mis sur le
marché. Une telle opération serait fort difficilement
réalisable, voire impossible. Il devient donc nécessaire
d'introduire un article transitoire qui se lirait comme suit: "L'article 76. 1
ne s'applique pas à l'égard d'un film pour lequel un certificat
de dépôt a été délivré par la
Régie avant l'entrée en vigueur de cet article. "
Il est également nécessaire d'insérer des
dispositions transitoires et finales afin d'assimiler les anciennes
catégories de classement aux nouvelles.
Voilà donc les grandes lignes de la position de la Régie
face au projet de loi 117. Il me fera plaisir maintenant de participer à
un échange, si vous le souhaitez, et de répondre à vos
questions.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup, M. Benjamin. Mme
la ministre.
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, à vous
tous, merci. Merci aussi de la contribution majeure lors de
l'élaboration du projet, d'une part; deuxièmement, je dois le
dire publiquement, je suis très heureuse du degré de satisfaction
qui semble émaner de la Régie; c'est rafraîchissant. Vu la
limite de temps, je vais me limiter au classement, je vais me limiter à
la distribution parce qu'on en a beaucoup parlé hier, et aussi à
certaines propositions au niveau du français. Vos autres
recommandations, de toute façon, vont finalement être prise en
compte lors de la lecture, ou enfin de la commission parlementaire où on
révisera article par article.
Notre objectif est clair, comme vous l'avez mentionné. On fait
reposer toutes nos propositions au niveau du classement, au niveau de la
protection de la jeunesse. D'abord, il faut, je pense, un consensus; il faut
classer autant le vidéo que le film en salle. Tout le monde nous a dit
ça; à la fin, on peut quand même faire certains
résumés. Par contre, l'IQC a fait des audiences publiques; on a
entendu des groupes qui, eux, prônaient le système des quatre
classes. C'étaient les classes 13 ans, 16 ans, et 18 ans. Vous nous
dites, et vous nous avez dit tout le long d'ailleurs, que, effectivement, 13
ans, oui, 18 ans et 18 ans plus, si on peut dire, parce que c'est difficile et
vous êtes, de toute façon, ceux qui classez.
Expliquez-moi donc... Je voudrais même revenir à l'exemple
dont on parlait tantôt. "La dernière tentation du Christ", par
exemple, où, dans une société où la religion est
proéminente, très, très forte, à ce
moment-là, on aurait tendance à classer 18 ans; donc, dans une
autre société où la religion prend un peu moins, si on
veut, d'importance, à ce moment-là, on peut, comme on le disait
tantôt, classer ce film-là 16 ans. Il semblerait que le 16 ans a
sa place, et j'aimerais que vous élaboriez un peu plus
là-dessus.
Vous me dites: C'est difficile de faire le distinction entre violence et
très grande violence. Je suis un peu d'accord puisqu'on travaille dans
le subjectif, dans le fond. Mais il semble rait, selon plusieurs groupes, que
le 16 ans - or va parler de l'application tantôt - comme
catégorie, compte tenu de l'évolution, compte tenu de
l'évolution de l'éducation aussi, nos enfants sont quand
même plus aptes à accepte certaines choses. Pourquoi? Parce que,
mal
heureusement, plus jeunes, ils sont mis face à certaines
situations, la télévision aidant. Alors, j'aimerais que vous
élaboriez un peu là-dessus. Pourquoi pas le 16 ans? Pourquoi 18
ans et 18 ans plus? Est-ce que c'est tout simplement une question de
mécanisme? Si vous me dites: Ce n'est pas applicable, bien, il faut
garder ça en ligne de compte, on ne met pas ça juste pour se
donner bonne conscience. Mais j'aimerais qu'on élabore
là-dessus.
Le Président (M. Doyon): M. Benjamin.
M. Benjamin: M. le Président, avant d'arriver à
cette position, nous avons voulu sérieusement faire l'examen loyal de la
proposition et nous avons réuni, mes collègues et moi, l'ensemble
des collaborateurs à la Régie, et notamment toute l'équipe
des examinateurs et des examinatrices. Et honnêtement, j'oserais dire,
parce que vous avez plongé du côté de la religion, ils ont
tous dit: Repoussez ce calice!
Des voix: Ha, ha, ha! (10 h 45)
M. Benjamin: Pourquoi? Parce que, passez-moi l'expression, le
"gap" entre le 16 ans et le 18 ans, il est tellement mince que nous nous
demandons, nous... Les éléments qu'on a très bien vus,
finalement, ce sont des films où une moyenne violence pourrait
être acceptable. Et bien! Nous, nous disons: C'est très difficile
d'arriver, entre ces deux âges-là, 16 et 18 ans, de le
démarquer très nettement. Quand vous avez d'ailleurs posé
la question, en tout respect d'ailleurs, pour le directeur de l'Office des
communications sociales tantôt, je suis désolé, mais il
vous a répondu: C'est délicat et peut-être qu'il faudrait
consulter le comité que nous vous avons recommandé de
créer. C'est à peu près toujours les réponses que
j'obtiens, moi, quand on me propose le 16 ans par rapport au 18 ans.
Quand je regarde, en plus, en terre d'Amérique, qu'est-ce qui se
fait, dans le reste du Canada, aux États-Unis, il y a toujours une marge
assez considérable, soit de 14 ans à 18 ans, soit de 13 ans
à 17 ans. Deuxièmement, si je prends les autres pays, un certain
nombre, et notamment les pays nordiques, ont retenu le 16 ans. Et de temps en
temps, du 16 ans et du 18 ans. Mais si je prends la France, elle s'est bien
gardée de mettre les films violents à 18 ans. Elle a
décidé que c'étaient des interdits 16 ans et des interdits
12 ans. Et il n'y a que le "sexploite" qui se retrouve dans le 18 ans. Et un
bon nombre d'autres pays aussi; je pourrais les passer un par un, mais je ne
suis pas pour me livrer à ça. Mais, dans l'ensemble, les gens ont
toujours un "gap" qui est au moins entre 13 ans et 17 ans ou entre 14 ans et 18
ans. L'adolescence, l'âge adulte. Mais l'autre, qui est en fin de
secondaire, à 16 ans, je ne vois vraiment pas l'avantage de lui en
donner un petit peu plus de moyens de violence, à lui ou à elle.
Et d'ailleurs, tout le monde, quand arrivent des phénomènes de
violence dans nos cités, dit: C'est effrayant, on les expose trop, et
même à cet âge, au niveau de l'adolescence.
Alors, je me dis, je ne vois pas beaucoup l'avantage de leur donner
accès, enfin, à un peu plus de violence, à ceux de 16 ans.
Moi, j'ai l'impression... On a essayé de voir les critères. Il y
a peut-être un ou deux films où ça serait possible, dans
des exemples que nous avons derrière la tête, de mettre à
16 ans. Mais très peu, madame, honnêtement, très peu. Je ne
me livrerai pas à l'examen de "La dernière tentation du Christ"
parce que vous comprenez, on est un tribunal et s'il fallait que je m'ouvre ici
et dise ce que j'en pense, et à un moment donné que je
décide les catégories de classement tantôt, ils vont venir
faire appel devant la Régie et ils vont dire: M. le Président,
vous avez déjà dit en commission parlementaire que... Donc, il
faut que je fasse attention. Je ne peux pas me prononcer sur des films. Mais je
reconnais que quelques unités pourraient être classées dans
le 16 ans.
Mais grosso modo, madame, je vous assure que les films que nous avons
classés 18 ans, l'année dernière et les années
précédentes, et les films que nous avons classés 14 ans
indicatif se retrouveront généralement, si vous avez suivi notre
recommandation, dans les catégories 18 ans et 13 ans. Et très peu
- mais très peu, je vous le dis très honnêtement - se
retrouveraient dans la catégorie 16 ans. Donc, je ne vois pas beaucoup
d'avantages à avoir cette catégorie-là dans laquelle nous
mettrions très peu de produits.
Mme Frulla-Hébert: Parce qu'on regarde nos groupes, le
Conseil du statut de la femme, Pacijou, etc., eux, étaient quand
même pour une catégorie médiane, si on veut, de 16 ans.
Mais en fait, l'idée, ce n'était pas de partir des films qui sont
présentement classés 18 ans et de les réduire à 16
ans, à moins qu'ils le soient injustement. Parce qu'on ne sait pas trop
où les mettre et parce que le 14 ans était indicatif, alors,
à ce moment-là, il fallait s'attendre aussi à ce que des
enfants de 10 ans ou 11 ans puissent voir des films qui sont classés
jusqu'à 18 ans. Mais, l'idée, c'était beaucoup plus aussi
pour redoser. Parce qu'il y a des films présentement qui sont -
corrigez-moi si j'ai tort - indicatifs 14 ans qui sont quand même, pour
certains, assez difficiles à prendre pour un enfant de 10 ans, 12 ans,
par exemple. C'était beaucoup plus pour rétablir, si on veut, un
certain ordre, et non pas pour prendre des films qui sont très violents
à 18 ans et les mettre dans la catégorie 16 ans.
M. Benjamin: J'ai toujours cru, madame, que si vous introduisiez
un 13 ans restrictif, c'était effectivement pour que ceux-là
soient classés 13 ans restrictif. Et c'est pour ça qu'on est
d'ac-
cord avec vous là-dessus. Pour ce qui est du 16 ans, est-ce que
vous voulez me dire, madame, que dans votre intention c'était de prendre
des films qui étaient catégorie 14 ans indicatif actuellement
pour les monter à 16 ans?
Mme Frulla-Hébert: Non. C'était quand même
pour amener une catégorie, de telle sorte que, comme l'Office des
communications sociales le disait tantôt, à vous, ça vous
donne quand même plus de choix que de dire: Qu'est-ce qu'on fait
là?
M. Benjamin: Mais quand vous lui avez demandé comment on
appliquerait ça? Il n'a pas eu beaucoup d'éléments de
réponse. Les groupes qui se sont présentés devant vous,
d'ailleurs, quand ils ont commencé tantôt, l'Office des
communications sociales, Ils ont dit: On ne détestait pas les trois
catégories, mais on n'aimait pas le 14 ans Indicatif. Pacljou vous
dirait la même affaire. Le Conseil du statut de la femme, j'ai
écouté attentivement, il y avait là beaucoup
d'élégance dans la présentation, mais je sentais qu'il y
avait quand même quelques hésitations. Il ne souhaitait pas qu'on
puisse prendre des choses de 18 ans et les baisser à 16 ans.
Je sens, dans le fond, que les consultations que nous avons
menées - en tout cas, moi, depuis deux ans et demi que je suis là
- m'ont toujours amené à penser que les gens, ce qui les
fatiguait éperdument, c'était le 14 ans indicatif. Et ça,
je pense qu'il y a moyen de le régler avec un 13 ans restrictif,
honnêtement.
Mme Frulla-Hébert: Bien alors, je reviens. Je pousse
encore un peu plus loin parce qu'on est à la fin et, après
ça, il va falloir prendre des décisions. Selon vous, selon votre
expérience et l'expérience de votre groupe, si on parle de
protection de la jeunesse, si on parie aussi de protection de la
société en général, avec la recrudescence de la
violence, entre autres à la TV, vous avez parfaitement raison. Mais si
on revient dans nos choses à nous, mieux vaut aller avec un 13 ans
restrictif, 18 ans et 18 ans plus si on veut, avec information pour la
protection même, qu'en arriver avec trois classifications où, si
je suis bien votre raisonnement, on pourrait voir dans la catégorie 16
ans des films qui sont présentement classés 18 ans, dans le
fond.
M. Benjamin: II y a juste un danger qu'il y ait un glissement,
à notre avis, de 18 ans à 16 ans...
Mme Frulla-Hébert: Ah! c'est ça. M.
Benjamin:... honnêtement.
Mme Frulla-Hébert: Bon. Alors, je veux juste encore
pousser plus loin. À ce moment-là, si, mettons, on va avec deux
catégories, vous maintiendrez, vous, le 13 ans restrictif versus un 14
ans, par exemple, restrictif.
M. Benjamin: Oui. Écoutez, je ne me querellerais pas
très longtemps avec les gens pour dire: C'est du 13, c'est du 14. Moi,
je pense que le choix que vous avez fait, dans le fond, de proposer 13 ans est
un choix fort acceptable. Comme je le disais dans ma présentation, 12,
14, 13, on est dans le juste milieu, c'est quelque chose d'acceptable. J'ai
l'impression, d'ailleurs, qu'il n'y a personne qui est venu vous dire... Je
n'ai vu aucun mémoire et je pense que ç'a attiré... Il n'y
a personne qui est venu vous dire: Ce n'est pas acceptable, votre 13 ans,
madame. Non, ils vous ont tous dit: Oui, c'est une catégorie très
acceptable et je pense que vous avez raison, mais il faut qu'il soit
restrictif, quant à moi, et vous avez raison d'opter de ce
côté-là.
Mme Frulla-Hébert: Autre chose aussi. Si on parie des
marchands de matériel vidéo, eux nous disent: Écoutez,
mettez ça indicatif...
M. Benjamin: Oui.
Mme Frulla-Hébert:... parce que ce n'est pas applicable,
parce que l'informatique, etc., et aussi parce qu'ils ont des gens qui sont
payés 4, 50 $ l'heure et, effectivement, il ne faut pas non plus...
C'est quand même 6000 emplois. Comment on fait? Selon vous d'ailleurs, ce
qu'ils nous disent, est-ce que c'est juste? Est-ce que c'est, en fait, avoir
peur de l'inconnu? Est-ce que c'est applicable? Sans non plus les
pénaliser, sachant que le "pay-per-view" s'en vient et sachant qu'ils
vont quand même avoir énormément de contraintes sur leurs
épaules.
M. Benjamin: J'écoutais le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques qui faisait des propositions en couleur. C'est
toujours possible d'appliquer cela. On retiendra peut-être ses services
pour conseiller la Régie sur le système, mais, blague à
part, nous pensons qu'ils ont de graves problèmes d'application avec
quatre catégories, honnêtement. Mais avec trois
catégories... Parce que celle du 18, dans le fond, ce n'est qu'une seule
catégorie, on veut juste la catégoriser davantage, c'est tout. Et
d'ailleurs, vous ne vous rendriez pas à nos arguments. Il serait
possible, au niveau du 18 ans, de... On peut qualifier, d'après une des
dispositions de la loi, donc, ça serait toujours possible de le faire,
ça. Alors, il y a une catégorie de 18 à contrôler et
il y a une catégorie de 13. Nous, nous pensons qu'avec deux seules
catégories restrictives, c'est facile d'application, c'est faisable dans
les commerces de matériel vidéo.
Il y a une chose qu'il va falloir aussi, par ailleurs, dire très
ouvertement. C'est qu'il serait temps qu'on arrête de considérer
le matériel
vidéo comme des chips et de la liqueur. Et je souhaite qu'arrive
le jour où on cessera d'avoir - je m'excuse de dire ça ici -
autant de permis de commerçants au détail où on retrouve
n'importe quoi dans n'importe quoi. J'ai l'impression que c'est là un
matériel qu'on ne doit pas traiter comme une barre de chocolat. J'opte,
quant à moi, pour que ces gens-là assument leurs
responsabilités et, comme ils l'ont toujours dit d'ailleurs, que pour ce
qui est du 18 ans, on ne loue pas ça à n'importe qui et n'importe
com-ment. Il y en a encore quelques-uns qui le font, mais j'ai l'impression
que, quand il s'agit d'un produit à 18 et à 13, on doit assumer
ses responsabilités comme les autres qui vendent des produits qui sont
destinés aux adultes et aux adolescents les assument dans d'autres
commerces.
Mme Frulla-Hébert: Merci, M. le Président. On va
parler rapidement de distribution. On a eu une grande discussion, toute la
journée hier pratiquement, sur la distribution, la définition
d'un distributeur. Il semble y avoir confusion au niveau du terme. Est-ce que
c'est un grossiste? Est-ce que c'est celui qui possède les droits? Vous
dites qu'il y a lieu de modifier l'article 118 pour permettre de remonter la
chaîne des titres. Est-ce que vous pourriez nous expliquer ça?
Parce que, effectivement, on voit que là, il y a quand même une
confusion ou un certain malaise.
M. Benjamin: C'est une industrie qui s'est
développée extrêmement rapidement. Au début des
années quatre-vingt, on n'en parlait presque pas. Mais à partir
des années 1982-1983, c'est une industrie qui a explosé. Nous
pensions nous-mêmes émettre quelque chose comme 800 000 à
900 000 étiquettes par année. Nous en sommes rendus et nous
prévoyons 3 000 000 pour cette année, au-delà de 3 000
000. Il y en a eu plus de 2 000 000 l'année dernière.
On nous dépose actuellement des ententes en certaines
matières sur lesquelles nous avons les plus grands doutes, mais compte
tenu des dispositions de la loi actuelle et de la façon dont elle est
rédigée, nous n'avons d'autre choix que d'accepter une lettre
d'entente qui spécifie que monsieur est autorisé à... De
temps en temps, nous réussissons à attraper des gens et notamment
en matière de "sexploitation", parce qu'il y en a un deuxième qui
arrive avec les mêmes droits et il est allé acheter ça on
sait où, aux États-Unis. Il revient d'une foire où
n'importe qui vend n'importe quoi, n'importe comment. Et il suffit de donner
une lettre d'entente devant la Régie pour qu'on la reconnaisse, parce
que la loi ne nous autorise pas à remettre en question, par exemple, une
lettre d'entente, telle qu'elle est déposée.
En d'autres produits, les choses se font bien, mais dans l'ensemble,
compte tenu des dispositions de la loi actuelle, je vous dis honnêtement
que la confusion dont on vous a parlé va perdurer si nous maintenons les
dispositions de la loi actuelle. Et c'est pour ça que nous vous
recommandons de nous permettre de remonter dans la chaîne des titres
comme on le fait quand on achète une terre ou une maison. On est capable
d'aller voir quelque part si, effectivement, celui qui a cédé
avait bien le droit de céder.
Mais, actuellement, on se livre à toutes sortes de choses. Par
exemple, M. Untel cède d'une façon exclusive à M. Untel
les droits sur ce film. Mais était-il le seul à les avoir, les
droits? Non, il y a un autre M. Untel à côté qui, lui
aussi, a cédé à M. Untel de façon exclusive. Alors,
ils sont deux à céder de façon exclusive, ce qui est vrai.
Il ne cède qu'à M. Untel, et lui ne cède qu'à M.
Untel, mais ces deux-là les avaient, les droits dessus.
Alors, on arrive à des situations qui sont complètement
aberrantes. Nous croyons honnêtement qu'il faut, d'une part, nous
permettre de remonter dans la chaîne des titres, permettre à la
Régie d'apprécier et, troisièmement, si possible, de mieux
définir ce qu'est la distribution. Et si vous permettez, il y a trois
éléments, je pense, qu'on peut retenir dans la distribution. Il y
a l'élément de reproduire l'?uvre et d'en faire des copies;
il y a l'élément de la mettre à la disposition,
c'est-à-dire, entre guillemets, de la distribuer a des commerces au
détail ou des salles et, troisièmement, il y a
l'élément d'en faire la mise en marché.
Ce n'est pas nécessaire de toujours les avoir réunis, mais
ce sont là trois éléments importants qui
caractérisent quelqu'un qui fait vraiment de la distribution, si on veut
parler de distributeurs et si on veut parler de droits de distribution.
Alors, c'est pour ça, Mme la ministre, même si nous ne
sommes pas allés jusque dans le détail dans notre mémoire,
peut-être vous serait-ii possible de régler cette question de la
façon suivante: Premièrement, en permettant à la
Régie de disposer des documents qu'il faut, de pouvoir apprécier
et, troisièmement, de définir ce que c'est que de distribuer ou
les droits de distribution.
Mme Frulla-Hébert: Autrement dit, votre suggestion... Ce
que je retiens, parce qu'on va continuer à en discuter, c'est de mettre
aussi dans la loi la définition pour clarifier ce qu'est un
distributeur.
M. Benjamin: Très juste, madame.
Mme Frulla-Hébert: Revenant sur la distribution, les
commerces de détail nous ont montré aussi que certains titres ne
leur étaient pas accessibles, parce qu'aucun distributeur ne...
M. Benjamin: Écoutez, madame, j'ai oublié
un élément, par ailleurs. Il y a toute la question de
l'exclusivité. Je pense que ce n'est pas nécessaire d'aller
jusque là. Ce qui est nécessaire, c'est de caractériser la
distribution par ces trois éléments. Et je pense que ce n'est pas
nécessaire de dire qu'il faut que ce soit cédé de
façon exclusive. S'il y en a deux qui peuvent acheter les droits, s'il y
en a trois qui peuvent acheter les droits, tant mieux pour eux. Alors, on a
toujours eu une très longue discussion dans le milieu sur la question de
l'exclusivité. J'ai l'impression qu'il faudrait plutôt canaliser
du côté des trois éléments qui permettent de
caractériser ce que c'est que de distribuer. Je m'excuse, madame,
d'avoir interrompu.
Mme Frulla-Hébert: Parfait, merci. Pour continuer, juste
au niveau des commerces au détail qui disent que certains titres ne leur
sont pas accessibles parce qu'aucun distributeur n'a voulu acquérir des
droits, eux se retournent et ils disent: À ce moment-là, on fait
quoi? Je pense qu'il y a une lacune, là. Est-ce qu'il y a des mesures
qu'on pourrait envisager pour les aider si le cas se présente? (11
heures)
M. Benjamin: II pourrait peut-être y avoir une mesure,
effectivement, à bien y réfléchir. Par exemple, il y a
deux associations qui représentent les distributeurs et qui se sont
présentées devant la commission. Je pense qu'il ne faudrait pas
ouvrir la porte trop largement et trop n'importe comment parce qu'on pourrait
aller s'approvisionner n'importe où sur n'importe quoi en
prétextant que... Il serait difficile à la Régie
d'apprécier ça, mais peut-être y a-t-il moyen que la
Régie puisse apprécier, effectivement, si c'est la situation. La
façon la meilleure de l'apprécier, ce serait d'obliger la
Régie à consulter, par exemple, les deux associations de
distributeurs en disant: Est-il vrai qu'aucun de vos membres ne veut tenter
d'obtenir les droits sur cette oeuvre-là pour pouvoir la distribuer au
Québec? Ce serait peut-être la façon de
rétrécir et de faire en sorte qu'on ne puisse pas aller
s'approvisionner en dehors du Québec pour n'Importe quel motif. Et les
deux associations de distributeurs veillant aux intérêts de leurs
membres seraient capables de nous dire: Oui, effectivement, c'est vrai. Ce
produit-là n'intéresse pas nos distributeurs
québécois et vous pouvez aller vous approvisionner ailleurs.
Effectivement, il y a des produits qui sont plus difficiles et les gens ne
veulent pas prendre trop de chances sur un certain nombre de produits.
Par ailleurs, il faut dire aussi qu'il faudrait bien que certains
distributeurs ne prennent pas que les produits qui sont très payants. Je
me rappelle que, dans l'édition scolaire, par exemple, on disait: Bien,
les ventes de volumes français du secondaire, vous allez faire de
l'argent avec ça, vous, éditeur untel, vous pourriez
peut-être prendre formation personnelle et sociale ou le solfège
qui va rapporter un peu moins et partager un petit peu entre vous la galette.
Peut-être qu'il serait possible aussi, en matière de films, que
certains, de temps en temps, acceptent d'aller chercher du vidéodisque,
par exemple pour les opéras, où ils vont faire un peu moins de
profit, et de partager un peu la chose. Mais pour répondre à
votre question, je pense que si les deux associations étaient mises dans
le coup et que la Régie était obligée de les consulter
avant d'autoriser un commerçant au détail à
s'approvisionner à l'extérieur, peut-être que ce serait une
voie de solution.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. Benjamin. M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Merci, M. le Président. M. Benjamin, je sais
que vous ne le prendrez pas par les mots comme tels, mats dans son esprit. Il y
a un vieux diction qui dit: À bon chat, bon rat. Ce qui fait que la
Régie a une équipe, je crois, extrêmement bien
constituée, avec un président qui n'est pas un président
d'apparat, mais on voit qu'il a une connaissance intime des dossiers, de
l'ensemble des dossiers. Je vous avoue que, quand la ministre disait que
c'était rafraîchissant pour l'ensemble des membres de la
commission de voir qu'un organisme prestigieux comme le vôtre, important
lorsque nous traitons d'un sujet comme celui-ci, un organisme, d'ailleurs, qui
ne fait l'objet d'aucune critique, ni en public ni en privé, je tiens
à vous le dire, et qui vient, d'ailleurs, très
spontanément à cette commission apporter son point de vue alors
qu'un autre organisme - pour ne pas le nommer, c'est la SOGIC - a
échappé, de justesse, d'ailleurs, à un mandat de
comparaître devant cette commission, je vous avoue que, pour nous, c'est
très intéressant de vous avoir ce matin. La seule chose que je
vous demanderais, c'est de continuer l'extraordinaire travail que la
Régie fait et d'adresser nos voeux à l'ensemble de votre
personnel. Quant à la catégorisation... Entre parenthèses,
on a parlé, tantôt, des classements. Je ne sais pas si vous avez
des statistiques, mais tous me disent qu'ils contestent très peu vos
classements.
M. Benjamin: Je vais parler des deux dernières
années et demie où j'étais là. Ça n'a rien
à faire avec moi, là. Les classements sont établis au
niveau d'une première instance, n'est-ce pas? C'est les examinateurs.
Nous avons en moyenne un ou deux appels par année sur les classements.
Je ne vous dis pas que ça satisfait tout le monde quand on
catégorise 18 ans, au contraire, parce que ça a beaucoup de
signification pour un distributeur quand nous classons un film 18 ans,
notamment pour ce qui est des ciné-parcs, mais nous avons à peu
près un ou deux appels par année, M. le député.
M. Boulerice: Alors, quant au classement comme tel, vous avez
exposé votre point de vue. Il rejoint celui de l'Opposition. Nous avons
aussi, effectivement, des réticences face à un classement 16 ans.
Vous avez tracé des médianes, 13 ou 14; je pense que ça
nous convient. Oui, je suis disponible pour l'étiquetage. De toute
façon, on a déjà travaillé ensemble, rien ne nous
empêche de continuer de nouveau.
Je vais parler du doublage. Sur la question de doublage, M. Benjamin,
vous dites que la situation du français sur nos écrans s'est
améliorée durant le moratoire. Je n'en disconviens pas, mais
est-ce que vous avez des statistiques précises pour les salles de
cinéma sur l'îlee de Montréal, quant aux projections en
français? La projection en français des gros succès
américains, ce qu'il est convenu d'appeler les "blockbusters", se fait
dans les cinémas de la couronne de Montréal, parce qu'il y a de
plus en plus de cinémas de banlieue qui s'établissent. Donc, je
suis en train de me demander: Est-ce que ce phénomène des
"blockbusters" et des cinémas de banlieue, ceux qui sont dans la
couronne, ça ne fausse peut-être pas nécessairement la
statistique? Vous savez comme moi que s'il y a eu une bataille pour le
français dans l'air, il doit y avoir du français sur les ondes et
du français sur les écrans, et c'est à Montréal que
le message doit être perçu par les immigrants.
M. Benjamin: Tantôt, M. le député, quand je
dressais le tableau de la situation, à savoir que ça
s'améliore et ça s'améliore considérablement dans
l'ensemble du Québec, j'ai tenu à dire qu'il restait un
problème sur l'île de Montréal. Les projections sur
I'île de Montréal au cours de l'année 1990, en langue
française... Et c'est ce qui importe; tout le reste, ça n'importe
pas, c'est les projections qui importent. Les projections, c'est 42 % sur
I'île de Montréal. C'est un progrès par rapport à
l'année précédente, qui était de l'ordre de 38 %,
mais il y a encore là un problème, à savoir que, tout le
monde le sait, il suffit de prendre la rue Sainte-Catherine - et mon
prédécesseur l'a déjà raconté en commission
parlementaire - dépendant du point où vous partez, vous allez
rencontrer une certaine langue.
Moi, je dis qu'il va falloir tantôt que l'on s'assoie avec
l'ensemble des exploitants de salles de cinéma pour voir comment, sur
l'île de Montréal, il y a moyen de rectifier un petit peu la
situation. Il y a du film qui se développe, comme vous le dites,
à Terrebonne, à Saint-Basile. Dans la couronne, on commence
à changer le portrait un peu de ce côté-là, mais il
n'en demeure pas moins que, sur l'île de Montréal, il y a encore
trop peu de français à l'écran. J'ai l'impression qu'il y
a encore des efforts à faire et ensemble, avec les exploitants, j'ai
l'impression qu'il va falloir les amener à réfléchir et
tenter de trouver des solutions. J'avoue que je ne les ai pas toutes faites,
ces solutions-là, comment il y a moyen d'y arriver, mais il demeure un
problème sur I'île de Montréal et il va falloir que
ça se rectifie.
J'attire l'attention, d'ailleurs, sur le fait que dans la région
de Québec, la situation s'est rectifiée de beaucoup. Il y a
là des exploitants qui ont assumé leurs responsabilités et
qui ont fait en sorte qu'on retrouve la part du français à
laquelle on devait s'attendre à l'écran dans la région de
Québec. Je pense qu'à Montréal il y a encore des efforts
à faire et je pense qu'en conviant les exploitants de salles de
cinéma, il y aura sûrement moyen d'y arriver.
M. Boulerice: Pour ce qui est de la région de
Québec, M. Benjamin, vous avez entièrement raison. Je vous avoue
que ç'a été un étonnement pour moi, mais un
étonnement dans le sens le plus négatif du terme, lorsque je suis
arrivé ici dans cette capitale, à titre de député,
de voir une omniprésence du cinéma. Place Québec, qui est
le plus près pour nous, députés, il s'agit de descendre
par le couloir...
M. Benjamin: Et Place Sainte-Foy.
M. Bouterice: Et Place Sainte-Foy, effectivement, je vous avoue
que c'était un peu décourageant. Je me demandais si je
n'étais pas de nouveau à l'ouest de la rue Saint-Laurent, que je
n'avais pas changé de circonscription ni de ville. Mais, quand vous
dites que oui, il faudra s'asseoir avec eux, je pense qu'effectivement c'est un
premier geste à poser, mais pour ce qui est de l'article 83, tel qu'il
est rédigé actuellement, est-ce que vous croyez que ça va
aider?
M. Benjamin: La proposition faite dans le projet de loi?
M. Boulerice: Dans le projet de loi.
M. Benjamin: Moi, je crois que oui. D'ailleurs, beaucoup de gens
se sont inquiétés ici devant vous, en disant: Oui, mais ça
va amener encore plus de produits américains doublés. Cela veut
dire qu'il va y avoir plus de français à l'écran, M. le
député, je pense. Effectivement, j'ai l'impression qu'avec les
dispositions que nous avons là, en mettant qu'il y a un maximum de 45
jours, j'ai l'impression que le message a été entendu, qu'il va
encore être davantage entendu et qu'il faudra qu'il soit encore davantage
entendu par certaines firmes de distributeurs.
Ce que j'ai entendu de la part de certains distributeurs
américains ici est plutôt désolant, M. le
député, et j'ai l'impression qu'il y a encore quelques compagnies
qui n'ont pas tout à fait compris le message. Elles commencent à
rectifier la situation, mais elles sont encore au-delà de la moyenne que
nous constatons pour l'ensemble. Ça s'améliore. Ça
s'améliore beaucoup, mais il y a
encore quelques compagnies où la moyenne est encore un petit peu
trop élevée; il va leur falloir faire des efforts pour rejoindre
l'objectif de 45 jours qu'a fixé la ministre. J'ai l'impression
qu'à ce moment-là, ça va s'améliorer
considérablement.
M. Boulerice: Le délai, M. Benjamin, était de, je
ne sais pas, une soixantaine de jours, puis vous nous avez dit qu'il
était tombé - dans le bon sens du terme - à environ 39
jours, peut-être 40 jours, quelque chose comme ça.
M. Benjamin: Oui. 39,4.
M. Boulerice: 39,4. Vous expliquez ça comment?
M. Benjamin: Je crois que, finalement, ils ont compris une
chose.
Une voix: II est payant de traduire des films en
français.
M. Boulerice: Ha, ha, ha!
M. Benjamin: Vous êtes là, monsieur? Non, mais je
veux dire, en...
M. Boulerice: Ce fut fait en franche camaraderie,
maître.
M. Benjamin: Bien oui. Nous échangeons
régulièrement. En maniant, je dirais, à la fois le
bâton et la carotte, c'est-à-dire qu'il y avait quand même
des dispositions législatives, etc., en échangeant de plus en
plus avec les gens pour voir qu'il y a tout à fait un
intérêt à exploiter en français pour répondre
aux attentes de la population québécoise, je pense que,
finalement, tout le monde parvient à comprendre que la clientèle
est désireuse d'avoir tel type de produit et que, quand on le lui offre,
elle vient. Dans l'ensemble, j'ai l'impression que tout le monde y voit son
profit, actuellement, à savoir que lorsqu'on ne retarde pas trop
considérablement pour écrémer le marché en
présentant d'abord en anglais, puis beaucoup plus tard en
français, tout le monde, je crois, vient à comprendre
tranquillement qu'il y va de son intérêt. Et comme ils le disent:
"We are in business", on est ici pour faire des affaires et les affaires sont
bonnes quand elles se font en français.
M. Boulerice: "And there is no business like show business". Mais
vous donnez une autre image des "majors" qu'on fait passer un peu pour des
boubous macoutes du cinéma. Vous êtes en train de me dire que ce
sont des gens quand même raisonnables, des gens qui comprennent que...
Mais c'est peut-être nous qui l'avons compris; on ne respecte que les
gens respectables, donc on a décidé d'être respectable, on
va être respecté. Vous avez quand même mentionné
quelques compagnies qui ont fait des efforts, pour doubler au Québec,
qui sont assez impressionnants. Donc, là, ce serait peut-être un
petit carré de résistance, quelque Vercingétorix, enfin,
quelques Astérix ou Obélix qui résistent, mais va pour
ça.
M. Benjamin: Nous qui avons travaillé à la
régionale de Chambly, M. le député, on pouvait
décerner parfois des étoiles à des gens: Buena Vista,
16,5; MGM, 20,3; Orion Pictures, 35,8; Warner, 40. Ce sont là des
moyennes fort appréciables et, effectivement, il y en a qui ont compris
et qui, aujourd'hui, sont en deçà de 45 jours. Il y en a
quelques-uns qui sont au-delà.
M. Boulerice: Si je comprends bien, pour toujours emprunter
à la cinématographie, il y a plus de "good" maintenant que de
"Bad and the Ugly". Si je vous ai compris, avant de vous poser...
M. Benjamin: On ne fait jamais la morale, à la
Régie, M. le député.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boulerice: ...une dernière question, pour ce qui est
des dates limites, vous ne souhaitez pas que ce soit un règlement
adopté en dehors de la loi mais à l'intérieur de la loi,
les 45 jours, quitte à le raccourcir, si besoin est, par une
réglementation, mais ça doit être inclus dans la loi.
M. Benjamin: Je vous répondrais, M. le
député, que je ne suis pas très inquiet que ce soit dedans
ou en dehors, je vais vous le dire franchement, parce que j'ai l'impression que
le message a été compris et que tout le monde... De toute
façon, les chiffres qui sont là, il ne faut pas toujours se
réjouir trop vite, bien sûr, c'est une première
année de net progrès, mais je pense que le message a
été compris. Symboliquement, par ailleurs, comme l'a dit l'Union
des artistes, je pense que c'est peut-être bon de l'inscrire dans la loi
en y mettant un maximum, quitte à pouvoir le modifier à la baisse
par voie réglementaire; mais je ne suis pas très inquiet, M. le
député.
M. Boulerice: La loi est un acte législatif du Parlement;
le règlement est un acte administratif du gouvernement.
M. Benjamin: Effectivement.
M. Boulerice: Voilà.
M. Benjamin: Par respect pour vous.
M. Boulerice: Merci, M. le Président et cher
ex-collègue, et futur peut-être, si je vais dans
l'étiquetage bientôt.
Au sujet de la distribution des films par distributeurs des autres
provinces, vous vous opposez au nouvel article 105.3 qui permet, je pense, aux
distributeurs du Canada anglais d'obtenir un permis spécial de
distribution au Québec, alors que l'ensemble des intervenants, eux,
estiment que cette mesure va favoriser le développement de
coproductions. (11 h 15)
M. Benjamin: C'est pour ça que j'ai dit tantôt dans
ma présentation, M. le député, que peut-être qu'on
doit changer d'opinion au niveau de la Régie. Mais j'en discutais encore
avec mes collègues au petit déjeuner ce matin et on a encore les
plus sérieuses réserves. Peut-être que l'on se trompe, mais
il y a une donnée fondamentale pour nous qui joue: c'est que si
quelqu'un, par exemple en Ontario, possède le marché canadien, on
a bien peur, nous, que finalement celui qui détient le plus gros
marché va ramasser l'autre marché aussi, qui s'appelle le
Québec. Et je ne suis pas certain que sous un dehors où ça
devient peut-être attirant pour certains, en disant: En matière de
coproduction, ça va nous ouvrir des marchés à
l'extérieur du Québec, moi, en tout cas, je suis inquiet. C'est
tout ce que je tenais à dire.
Pour le moins, si jamais on va dans le sens de l'article 105.3, je
recommanderais fortement qu'on prenne les dispositions pour faire en sorte que
les "majors" ne puissent pas venir vendre ou distribuer au Québec
d'autres produits que ceux dont il sera convenu par entente avec eux dans la
prochaine entente. Il serait facile d'aller s'établir en Ontario et de
venir par après - compte tenu qu'on serait dans une province qui a une
législation semblable à celle du Québec, qui a
signé une entente avec le Québec - ce serait facile d'aller
s'établir là et de venir vendre des produits au Québec par
après, et qui ne seraient par prévus dans l'entente entre le
gouvernement et les "majors". Je pense que là, il faudrait pour le moins
être extrêmement prudent.
M. Boulerice: M. Benjamin, mesdames, merci de votre participation
à cette commission. Je pense que la commission de la culture va s'en
souvenir longtemps.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: Mon cher président, et tous vos
collaborateurs, encore une fois merci à tous pour l'aide et le support,
d'une part. Deuxièmement je pense que vous venez, vous et l'Institut,
clore et résumer un peu la situation, ou enfin l'ensemble des
témoignages de groupes. On apprécie énormément.
Effectivement, nous essayons, dans la mesure du possible, non seulement d'avoir
une loi qui protège culturelle-ment nos Québécois et aussi
nos jeunes, mais aussi une loi qui peut aider au développement de
l'industrie, par exemple l'industrie du doublage. Il y a protection du
français, accès au français; on est en droit,
culturellement, de le demander et de l'exiger, mais aussi on peut
développer une industrie qui a le potentiel - plus on en fait, meilleur
on est - et qui serait là aussi pour créer
énormément d'emplois. Alors, merci encore de votre contribution
fort appréciée.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. Benjamin. Merci
à tous les gens qui vous accompagnaient. Le témoignage que vous
avez rendu a été extrêmement intéressant. J'ai la
conviction qu'il en sera tenu compte. Merci beaucoup. En vous permettant de
vous retirer, je demanderai, pour continuer nos travaux, à l'Institut
québécois du cinéma de bien vouloir prendre place en
avant.
Institut québécois du
cinéma
Le Président (M. Doyon): Les renseignements que j'ai
m'indiquent qu'il y a M. André Link qui est là et M. Bernard
Boucher. Est-ce qu'il sont là tous les deux? Alors, vous connaissez les
règles qui nous guident: une vingtaine de minutes pour la
présentation de votre mémoire, ou un résumé;
ensuite, la discussion s'engage avec les membres de la commission pour à
peu près une demi-heure. Si vous voulez bien faire la
présentation et commencer, vous avez la parole.
M. Boucher (Bernard): M. le Président, Mme la ministre,
MM. les députés, nous allons vous faire une présentation
qui ne sera pas tout à fait celle de notre mémoire, qui le
paraphrase et qui reprend et commente certains des éléments que
nous avons entendus devant la commission, parce que nous avons assisté
à tous les travaux depuis le début.
La commission parlementaire qui se termine aura à son tour
illustré ce que nous disions dans notre mémoire, à savoir
que la concertation d'intérêts aussi diversifiés que ceux
que nous retrouvons dans la profession cinématographique est difficile,
vu la singularité des intérêts en cause. Nous nous sommes
réjouis de voir que plusieurs de nos recommandations ont
été à la source des réformes contenues dans le
projet de loi 117. Nous constatons, à la fin de cette commission, que
les solutions mises de l'avant, si elles doivent, dans certains cas, être
adaptées, représentent encore des éléments de base
sur lesquels il faut appuyer la révision de la Loi sur le cinéma.
On ne revise pas une loi à chaque année. Il faut rechercher la
stabilité pour le bien de l'industrie et distinguer entre le
conjoncturel et le fondamental.
La planification. L'idée de planification triennale répond
à un besoin de continuité qui ne
peut que contribuer à un meilleur fonctionnement de l'industrie.
Pour l'Institut, planification et évaluation sont indissociables, donc
l'introduction d'un plan triennal de soutien financier est une bonne chose.
Comme nous le disions dans le mémoire, le plan pourra, de cette
manière, devenir un Instrument de travail pour le gouvernement qui
pourra évaluer ses institutions, mais aussi pour la profession qui
considère qu'il est fondamental d'analyser les forces et les faiblesses
de l'action qui est faite avec l'aide de fonds publics. Le gouvernement a
décidé, II y a quelques années, que l'évaluation de
programme est une fonction permanente et intégrée de gestion dans
le but d'élargir ses moyens lors de prises de décisions. Le
ministère des Affaires culturelles s'est donné une direction des
politiques et de l'évaluation qui a déjà produit des
bilans sectoriels. L'Instauration d'un plan triennal de soutien financier
représente donc l'occasion de mettre en place un processus qui donnera
au cinéma des moyens dont il ne dispose pas présentement.
Depuis le début de ces audiences, il a plusieurs fois
été question du projet de politique culturelle que prépare
le groupe-conseil sous la présidence de M. Roland Arpin. Il a aussi
été question de la politique sectorielle du cinéma. Comme
il se doit, cette politique que nous appelons, depuis déjà un
certain temps, viendra s'inscrire dans les paramètres de la politique
générale. Permettez-nous d'insister pour dire que cette politique
sectorielle devrait intégrer le cinéma et la
télévision, le cinéma et les médias afin
d'établir la cohésion, la cohérence dans l'action du
gouvernement du Québec. La ministre devrait, à notre avis, faire
porter tous ses efforts sur la mise en oeuvre de cette politique
accompagnée d'un plan d'action, triennal lui aussi. Que ce soit en
matière de formation, d'éducation, d'égalité
d'accès, de langue, de relations extérieures ou de
développement industriel, la ministre pourrait énoncer les termes
de sa politique sectorielle dans le plein cadre de ses compétences. Le
plan triennal de soutien financier, comme moyen de réalisation d'une
partie plus ou moins grande de ses orientations, se verrait alors situé
et renforcé dans son utilité.
On ne révise pas une loi à chaque année. L'Institut
croit que ce serait une erreur, pour une question de conjoncture, de remettre
en question l'indépendance dont devraient bénéficier les
gestionnaires du plan de soutien financier. La commission parlementaire a
démontré que le problème n'était pas dans la
capacité d'intervention ministérielle, et rien ne prouve qu'un
plan de soutien établi par la ministre lui permettra d'atteindre le
résultat souhaité. L'Institut croit plutôt que la politique
sectorielle et un plan d'action en découlant constituent des moyens plus
indiqués et qu'ils présentent un potentiel d'efficacité
tout aussi grand à la portée de la ministre.
Comme il nous apparaît absolument nécessaire que cette
politique et ces orientations soient établies en consultation
étroite avec le milieu professionnel, il nous semblerait indiqué
que la ministre conserve une distance raisonnable devant la confection des
outils d'action qu'elle aura ultimement à approuver. Malgré toute
l'importance que nous accordons au plan de soutien financier, nous ne voulons
pas qu'il se substitue à une politique du cinéma et de la
télévision.
Le classement. La protection de fa jeunesse donne tout son sens au
classement des films. Nous avons pu constater que les quatre catégories
proposées représentent jusqu'ici un large consensus qui est sans
doute lui-même un reflet du consensus social sur lequel doit s'appuyer
toute action en cette matière de classement. Les catégories de
classement sont là pour permettre à la jeunesse de voir des films
qui conviennent à son degré de maturité, tout en
s'harmonisant à ce que notre société fait
déjà en d'autres domaines envers la jeunesse. Notre
société, et bien d'autres, car de nombreux pays ont adopté
des systèmes de classement qui ont entre deux et sept classifications,
très souvent quatre classifications... 12 ans est, en quelque sorte,
l'âge charnière du passage du primaire au secondaire, de l'enfance
à l'adolescence. Cet âge implique une évolution du
degré de maturité et peut conduire à reconnaître
qu'il s'agit là d'une étape dans l'évolution d'un
individu, suffisamment marquante pour y modeler une catégorie de
classement. L'autre charnière se situe à 16 ans. Nous disions, il
y a un moment, qu'il faut considérer ce que la société
fait déjà en d'autres domaines. Est-ce que le législateur
et la société ne reconnaissent pas déjà qu'une
personne a atteint à 16 ans un degré suffisant de maturité
pour obtenir un permis de conduire, abandonner l'école si elle le
désire, obtenir un permis de port d'arme, se marier? Irait-elle,
après cela, jusqu'à lui dire qu'elle ne lui reconnaît pas
la compétence de voir des films comportant un certain degré de
complexité psychologique ou la confrontant à des valeurs morales
demandant un jugement mieux établi?
En réalité, "18 ans et plus" n'est pas une
catégorie. Ce que cela signifie, c'est que certains films existent, et
qu'une société libérale comme la nôtre avise la
jeunesse qu'ils sont réservés aux personnes majeures. Il restera
toujours à déterminer où se situe la frontière
distinguant un film présentant des scènes sexuelles explicites ou
de grande violence d'un autre. Ça ne sera ni plus simple, ni plus
difficile que de faire la distinction entre un film "13 ans et plus", et un
film "visa général". Nous n'allons pas tenter de le faire
ici.
Rappelons que la Régie a défini le consensus social comme
le partage de sentiments,
traditions, croyances, idées, opinions, valeurs sociales, et
standards de conduite par un groupe ou une société, à une
époque donnée. Comme nous le voyons, nous sommes dans 1'ordre du
qualitatif et non dans l'ordre du quantitatif. C'est sur cette notion de
qualitatif que se fera la distinction. Comme le disait la Corporation des
psychologues, lors des audiences publiques que nous avons tenues, le contexte
global dans lequel sont présentées les images violentes est donc
déterminant. Quelle que soit la catégorie, le classement d'un
film découle d'une lecture du consensus social et de la correspondance
entre l'esprit qui se dégage du film et ce consensus, le tout inscrit
dans le message que la catégorie véhicule à la
population.
De toute manière, il y aura quatre catégories, soit celles
proposées, soit un 18 ans qu'on gérera implicitement comme deux
catégories, avec toute la confusion qui en découle et qui ira en
s'accentuant. Il faut donc se donner comme objectif de marginaliser les films
ultra-violents, comme on l'a fait pour la pornographie. Il faut les isoler dans
quelques salles spécialisées ou dans quelques réduits dans
les vidéo-clubs. La façon d'y parvenir n'est sûrement pas
de les mettre dans la même catégorie que les oeuvres
cinématographiques difficiles.
Comme l'Institut le dit dans son mémoire, le principal avantage
des nouvelles catégories de classement sera de fournir à la
Régie une marge de manoeuvre réelle entre le "visa
général" et le "18 ans et plus". Tout en respectant l'esprit dans
lequel ces catégories ont été inscrites dans le projet de
loi, il sera dorénavant possible d'aborder le classement de l'oeuvre
cinématographique avec des nuances que ne permet pas le système
actuel.
Quant à l'élargissement du classement au secteur du
matériel vidéo, il doit se faire en adaptant son application aux
pratiques commerciales du secteur. Les cassettes devront dorénavant
porter une indication relative au classement des films offerts sur ce support.
Ce faisant, l'État assume la responsabilité d'informer la
clientèle qui, en bout de course, consommera en privé le
matériel vidéo offert. Si, de toute évidence, il faut un
système de classement, en aucun temps celui-ci ne pourra combler les
lacunes d'un manque d'information ou celles qu'une éducation
déficiente pourront engendrer. Le classement est un premier moyen
d'information. Il est mis en place dans l'intention de protéger la
jeunesse, mais il risque de ne devenir qu'un pauvre moyen répressif si
l'éducation à l'image et à la culture audiovisuelle ne
font pas bientôt partie de la connaissance offerte aux jeunes. Tout ceci
dit dans le respect de la position présentée par la
Régie.
Le français à l'écran. La grande question en ce qui
concerne le français à l'écran est de tenter de situer le
Québec dans la mouvance mondiale, il est vrai de dire que les films
américains occupent une large part des écrans, car ils
représentent quelque 74 % des projections. Et comme l'a
précisé le président de la Régie, nous allons
aussi, nous, vous présenter des statistiques qui varient quelque peu,
compte tenu de la période de saisie de données, mais qui, sur le
fond, vont dans le même sens que les statistiques qui vous ont
été présentées par la Régie.
Il faut aussi dire que plus de la moitié des projections, dont
les 74 % des projections faites des films américains, donc plus de la
moitié, 52 %, sont faites en français. Toutefois cette place
occupée sur nos écrans par les films américains n'est pas
nécessairement toute nouvelle. Ce qui est différent, c'est que
cette occupation du temps-écran s'est transformée et qu'elle se
fait massivement, et sur une courte période, en français. Comme
il y a une tradition, surtout à Montréal, d'écrans
dédiés à une langue, ce changement de situation a eu pour
effet d'exercer une pression sur les films en provenance d'autres pays, en
particulier européens. Il y a maintenant deux fols plus de copies en
français pour les films américains, mais les exploitants tardent
à changer la vocation linguistique de leurs salles. On parle de la rue
Sainte-Catherine, on en a donné des exemples un peu plus tôt.
En région le phénomène est différent. Les
propriétaires de salles l'ont abordé hier en disant qu'il est
plutôt de l'ordre de la composition socio-démographique de la
clientèle. Le cinéma est une activité culturelle encore la
plus fréquentée et la plus accessible, mais qui doit concurrencer
avec l'offre culturelle générale qui s'est accrue. La même
tranche de population est largement sollicitée, et elle a à
choisir entre diverses consommations artistiques et culturelles. (11 h 30)
Comme le bassin de population qui choisit les films à
caractère plus difficile est fonction d'un segment restreint de la
population, force est de reconnaître que l'offre en français en
région s'est transformée et qu'elle est maintenant plus fortement
composée de versions françaises de films américains.
Autrement dit, nous avions le dilemme suivant à envisager: Subir la
vague de films américains en anglais ou en français. Nous le
faisons en français, tant et si bien qu'en 1990, 56 % des 169 films en
version originale anglaise ont été offerts en français
dans un délai moyen de 34 jours, à raison de 11 copies en
français pour 4 copies en anglais.
Tout ceci aura permis que le nombre de projections en français
passe de 59,9 % qu'il était en 1988 à presque 62 % en 1990. Ceci
aura aussi permis que 62 films porteurs, soit ceux ayant enregistré des
recettes supérieures à 300 000 $, dont 18 % provenaient de la
France, du Québec et d'autres pays, fassent 55 % de leurs recettes en
français. Le tiers des films doublés l'a été au
Québec. Ceci est encore peu, considérant le potentiel de notre
industrie. Mais pour parvenir à une stratégie profitable
concer-
nant Le doublage, il faut envisager une solution intégrant
cinéma et télévision, car si nos studios ne sont
occupés qu'à 21 %, une grande partie de la solution au temps
d'occupation vient aussi de la télévision.
Après avoir entendu les représentations faites devant la
commission, l'Institut, à la lumière des données qu'il
possède sur la place du français à l'écran en 1990,
pense qu'il serait possible d'envisager d'allouer un délai
d'exploitation pouvant atteindre 45 jours pour un film en langue autre que le
français, avant la sortie d'une version française. Il devrait
être possible, comme le prévoit le projet de loi, de
réduire, le cas échéant, ce délai par la voie d'un
règlement en s'appuyant sur un monitoring, comme l'Institut est en
mesure d'en produire un annuellement. Le règlement pourrait
peut-être aussi prévoir une dérogation pour les cas
d'exception justifiés, c'est-à-dire les films qui ne pourraient
peut-être pas être visés en français à
l'intérieur du délai.
Les ententes de distribution: Le contrôle de la distribution des
films sur le territoire québécois, tout comme au Canada
d'ailleurs, a été l'objet de nombreux débats depuis
plusieurs années. La formule des ententes avec la ministre des Affaires
culturelles, introduite en 1987, correspond sans doute plus à la
remontée du libéralisme économique auquel nous avons
assisté pendant la dernière décennie. Qu'il s'agisse de
réalisme politique ou de stratégie, les ententes sont
désormais une composante de la loi sur le cinéma. Dans ce
contexte, l'Institut considère comme une bonne initiative l'insertion de
l'article 105. 3 qui permettra à la ministre de conclure avec un
ministère ou avec un organisme d'une autre province une entente de
distribution qui assurerait la réciprocité dans les mesures
prises.
Nous ne sommes pas si loin d'un consensus de l'industrie sur la question
des droits exclusifs. Les travaux de la commission ont bien illustré la
complexité qui réside jusque dans la définition même
des droits de distribution. Il est essentiel de clarifier la notion de droits
de distribution; l'Institut est d'accord avec l'idée d'inscrire une
définition de cette notion à l'article 118.
Permettez-nous de terminer en parlant un peu de l'Institut et de
souligner l'intérêt manifesté envers l'Institut tout au
long de ces audiences. Nous nous réjouissons de constater que nos
efforts en vue de la concertation de la profession sont reconnus. Les travaux
de recherche que nous effectuons sont utilisés
régulièrement. Les salles parallèles, les gens qui se
préoccupent d'éliminer la violence auprès des enfants, la
télévision conventionnelle et la télévision payante
se sont proposées ou ont été proposées comme des
champs d'Intérêt prioritaire. Dans le projet de loi, on parle de
la présence des consommateurs à l'Institut. Que diriez-vous, Mme
la ministre, d'accorder une voix à ceux qui en réclament
déjà une? Dans l'optique d'une politique du cinéma et de
la télévision, II faudrait peut-être penser, en termes de
représentativité, à un élargissement en ce sens.
Voilà, c'étaient nos commentaires, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Oui. Alors, Mme la
ministre, je vais maintenant vous passer la parole.
Mme Frulla-Hébert: Merci. Premièrement, je veux
souligner le rôle primordial des travaux préliminaires que vous
avez faits à la préparation du projet de loi. Hier, il y a
certains organismes qui disaient que l'Institut se devait d'avoir
énormément de poids auprès du ministre concerné et
que, finalement, ses recommandations devaient être
considérées en toute première ligne. Je veux tout
simplement vous assurer que c'est ce que nous avons fait et ce que nous
voulons, finalement, et nous avons la ferme intention de continuer à le
faire. Deuxièmement, je ne sais pas ce qui se passe chez vous, mais il
semblerait, à écouter tous les intervenants d'hier, que tout le
monde veut siéger à l'Institut. C'est bon signe qu'ils nous
demandent d'ajouter quatre membres d'une place, un membre de l'autre. Alors,
dans la mesure où nous serons raisonnables et que nous allons essayer de
garder, quand même, un fonctionnement qui soit efficace et rapide,
ensemble, nous essaierons de voir maintenant qui doit ou non siéger au
conseil d'administration de l'Institut.
Je vais essayer d'aborder encore une fois les sujets que nous avons
abordés durant toute la semaine et qui reviennent constamment, qui sont
le classement, la distribution et aussi le français.
Au niveau du classement, évidemment, votre position rejoint
certains groupes et est différente de celle de la Régie. Vous
semblez prôner une troisième classe, qui est 16 ans. Vous le
faites d'ailleurs à partir de consultations du milieu et des gens qui
siègent à votre conseil d'administration. Alors, je repose la
question. On vise la protection de la jeunesse, on vise à limiter les
dégâts de la violence, ou l'accès à la violence dans
la mesure où on est capable de le contrôler. On sait qu'on doit
donner plus d'information aux parents et aux éducateurs qui doivent
prendre leurs responsabilités. Mais, quant à nous, le groupe
précédent nous disait que 13 ans restrictif, 18 ans, 18 ans et
plus protégeraient beaucoup plus ou rempliraient beaucoup plus les
objectifs que d'en arriver avec une catégorie où il y a un 16 ans
qui se retrouve là et qu'il risque d'y avoir glissement du 18 ans
à 16 ans, de telle sorte qu'il y a des films qui peuvent
démontrer énormément de violence ou encore de
"sexploitation" qui pourraient se trouver dans une catégorie 16 ans
versus 18 ans. Je vous mets un peu en opposition, mais c'est parce que c'est
important pour nous de prendre des décisions.
M. Link (André): Si vous me permettez,
Mme la ministre. Nous sommes en Amérique du Nord. La plupart des
films que nous voyons proviennent de l'Amérique du Nord, soit du
Québec, soit du Canada, soit des États-Unis en grande
majorité, comme les statisques le démontrent, ou bien des pays de
l'Europe où, sensiblement, le même classement qui est
proposé existe, ou bien aux États-Unis, ou bien en Europe. Donc,
je pense que les films qui sont fabriqués aux États-Unis, si vous
regardez le classement qui est en vigueur aux États-Unis, correspond
très largement à ce que nous proposons et a ce qui a
été proposé. Aux États-Unis, maintenant, ils ont vu
la nécessité de faire une nouvelle catégorie qui est le
NC-17, qui est restrictive à l'âge de 17 ans, mais les films qui
sont classés R sont possibles pour quelqu'un de moins de 17 ans
accompagné par un parent pour assister à une projection de ce
film. Donc, je pense que le 18 ans, actuellement, pour nous, ce serait quelque
chose qui va trop loin, sauf pour des films qui demandent une plus grande
sévérité. Alors, je crois qu'il n'y a pas vraiment un
grand danger de basculer de 18 ans à 16 ans. Je ne pense pas.
M. Boucher: Si vous me permettez d'ajouter... Lorsqu'on est en
cette matière, on est dans l'ordre de l'intangible et, finalement, on
est dans l'ordre, en partie, des arguments rationalisés, et en partie
dans l'ordre des opinions. Et ce qu'il faut essayer de rechercher, c'est ce que
nous avons tenté de démontrer: Un effort de congruence avec ce
que la société a déjà, en elle-même, comme
comportement à l'endroit des différentes catégories
d'âge des gens. Selon qu'on a 16 ans, on a des autorisations dans une
société, selon qu'on a 18 ans, on en a d'autres. Et aussi, en
fait, c'est difficile d'en faire un débat de spécialistes, mais
de nombreux pays dans le monde, comme nous l'avons dit, ont adopté des
systèmes de classification à quatre catégories
correspondant justement à celles qui sont mises de l'avant dans le
projet de loi, c'est-à-dire un général, un 12 ans ou 13
ans accompagné ou 13 ans restrictif, un 16 ans et un 18 ans. Prenons
l'Espagne, par exemple, qui a ces quatre catégories et qui a
identifié la catégorie "S" comme étant la catégorie
des films pornographiques et violents.
Donc, en fait, l'hypothèse qu'on fait, c'est que si c'est
possible ailleurs, ça doit être possible chez nous aussi. C'est
aussi une question de système de valeurs parce qu'on dit: C'est que dans
une approche libérale. On pense que la société
reconnaît à des gens qui ont 16 ans la possibilité
d'être confrontés à des valeurs, à des
complexités psychologiques que véhiculent certains films; et 18
ans, en quelque sorte, ce n'est pas... Quand on dit qu'un film est 18 ans, on
dit finalement: Voilà, entre guillemets, un produit dangereux.
Voilà quelque chose qui existe, que nous n'interdisons pas, mais que
nous n'encourageons pas non plus à voir, qui est là, et donc qui
n'est accessible qu'aux adultes au sens de gens majeurs. C'est ça, le
sens du raisonnement.
Mme Frulla-Hébert: Mais on cherche aussi deux choses. On
cherche aussi à avoir une congruence entre ce qui se passe au niveau des
vidéos et au niveau des salles de cinéma. On ne peut pas avoir
deux systèmes, quand même. Deuxièmement, il semble aussi
que vous êtes d'accord qu'il va peut-être s'agir un peu, si je
reprends vos paroles, M. Link, d'un glissement. C'est sûr que pour les
distributeurs, ça peut être avantageux, mais il peut y avoir un
certain glissement. Nous autres, on cherche à protéger et non pas
à faire glisser. Vous ne trouvez pas que ce risque-là est
là, il est réel? Effectivement, on peut dire que, bon, la
société est plus permissive, etc., d'une part.
Deuxièmement, il y a tout le développement de la
technologie qui fait que nos images sont de plus en plus réalistes. On
s'approche tellement de la réalité qu'en quelque part, même
nous, comme adultes, souvent, on sort d'un film et on peut être
bouleversé pendant... En tout cas, moi, ça m'est arrivé
pendant quelques jours. Alors, vous ne trouvez pas que le risque qu'on
mentionnait tantôt, du glissement, c'est un risque qui est là et
qui peut être réel?
M. Boucher: Oui, parce que là, on a tendance à
vouloir réexaminer tout notre système en termes de
déplacement. En fait, ce qu'une nouvelle grille de classement devrait
avoir pour effet, c'est de repositionner le système d'analyse ou de
jugement qu'on a à l'endroit des films, et non pas de les analyser a
posteriori, comme de dire: Celui-ci serait passé de 14 ans
éducatif à 16, et celui-là serait passé de 18
à 16. En fait, c'est qu'on réintroduit toute une façon
d'envisager l'analyse des films qui sont offerts, et on se met à
examiner les films en regard du message qu'on veut véhiculer dans le
système de classement tel que formulé.
Effectivement, je pense qu'il ne faut pas le prendre strictement en
termes négatifs. L'idée d'introduire une catégorie 16 ans,
c'est effectivement parce qu'on reconnaît que la confusion qu'engendre,
je dirais, l'espèce de double système de classification sous la
catégorie 18 ans n'est profitable à personne. Il y a, dans la
catégorie 18 ans telle qu'elle existe actuellement, un certain nombre de
films qu'on assimile aux autres films dont, nous, on pense qu'ils devraient
être dans la catégorie 18 ans, c'est-à-dire les films
violents ou pornographiques, mais qui n'ont rien à voir... qui sont des
films que des personnes matures... Nous, on pense que cette
maturité-là, la société la reconnaît
déjà largement aux gens de 16 ans; ça pourrait être
possible. (11 h 45)
Mme Frulla-Hébert: Qu'est-ce qui se passe alors au niveau
des vidéos? Il me semble que
vous avez, si ma mémoire est bonne, un petit peu modifié
votre position au niveau de la vidéo. Nous, en fait, la position
première, c'est de dire: Même classement pour les deux, pas deux
systèmes. SI, au niveau des salles de cinéma, c'est restrictif,
restrictif 16 ans et 18 ans et plus, etc., eh bien, il faut que ce soit la
même chose pour les vidéos. Et on a vu la position, par exemple,
des marchands de vidéos, qui disaient: Écoutez, donnez de
l'information et, s'il vous plaît, indicatif. Trop de catégories,
ça va être un gros problème pour nous de l'appliquer.
Malgré les étiquettes de couleur, il semblerait que,
effectivement, compte tenu du personnel, compte tenu des demandes, de
l'achalandage, ça va être Impossible. On nous apporte... Le groupe
d'avant, la Régie, nous dit: Bien, si au moins il y a deux
catégories, mais qu'on les applique vraiment, c'est beaucoup plus
logique et applicable; et je vois maintenant votre position, à vous, qui
dites: Gardez ça de façon indicative pour la vidéo. Il me
semble que vous avez changé, là, si je ne me trompe pas.
M. Link: Les représentations faites par un des membres de
notre conseil, qui nous a renseigné sur les pratiques dans les
vidéoclubs, nous ont amenés à souscrire à leur
point de vue. Il y a, je pense, une grande différence dans la
consommation immédiate à l'intérieur d'une salle et
prendre ce produit et l'amener chez sol. Rien n'empêche un adulte de
prendre un film et, à l'intérieur de son foyer, de le montrer
à des enfants s'il le désire. Il n'y a pas de contrôle.
D'un autre côté, il y a un contrôle dans le foyer, quand
même, sur l'utilisation des magnétoscopes qui sont dans le foyer.
Alors, je pense que l'autorité parentale, c'est beaucoup plus facile
à exercer que de ne pas savoir où l'enfant va et assiste à
un spectacle à l'extérieur sans même la connaissance des
parents. Je pense que ça, c'est une des choses.
Et deuxièmement, nous pensons que le commerce de la vidéo
serait complètement bouleversé s'il fallait des
catégories. Dans notre esprit, quand on voulait que la classification
s'applique, c'était surtout pour les 18 ans parce qu'on ne voulait pas,
absolument pas, que des films de 18 ans puissent être remis entre les
mains de quelqu'un qui est en bas de cet âge. Alors, Je pense que c'est
pour ça que le conseil, après une longue hésitation, a
souscrit à cette proposition.
Mme Frulla-Hébert: Mais seriez-vous alors... Après
tout ce qu'on a entendu et tout ça, est-ce que vous maintenez cette
position-là? Ne seriez-vous pas plus... Enfin, seriez-vous prêt
à vous rallier, d'une certaine façon, à dire: Bien, on
aura le même système et ce sera restrictif, 13, par exemple, 13 ou
14, et restrictif 18, applicable autant au niveau de la vidéo qu'au
niveau du film?
M. Boucher: Je pense qu'il faudrait aller au-delà de
l'information qu'on possède actuellement sur la faisabilité
d'application de ces systèmes-là dans les vidéoclubs. Au
fond, II faudrait faire un examen plus approfondi de ce que représente
cet exercice de mise en application. On a tendance à comparer deux
supports de diffusion en faisant une équation entre les deux supports de
diffusion. Effectivement, je crois que les difficultés... Et
peut-être que, justement, devant notre conseil d'administration, la
démonstration a été faite de façon encore plus
convaincante qu'elle n'a pu être faite ici. Ça présente un
certain nombre de difficultés de transporter intégralement le
système d'application d'un support ou d'un lieu qui est la salle
à celui d'un autre support, la vidéo, qui est le
vidéoclub. Peut-être que, justement, il faudrait examiner ce
point-là plus attentivement dans sa faisabilité. Au fond, il ne
faut pas seulement en faire une question de principe, il faut en faire une
question de pratique. Et là-dessus, il faudrait encore, je crois,
démontrer à la satisfaction de qui que ce soit que cette
faisabilité-là nous permettrait d'atteindre les résultats
souhaités.
Mme Frulla-Hébert: Parfait. On va laisser un peu ce sujet.
On s'entend quand même qu'il faut aussi continuer à donner
énormément d'informations publiques, et le public en a... Je
pense que c'a été un consensus, ça, chez vous, que le
public, présentement, n'a pas assez d'informations. Est-ce que vous
avez...
M. Link: Absolument.
Mme Frulla-Hébert: On va passer à l'article 83.
Certains groupes, je dirais même la majorité, ont proposé
de ramener les délais à 45 jours, peu importe le nombre de
copies. Je pense qu'on fait un consensus autour du 45, qu'on le mette
là. Après ça, il s'agit de savoir si c'est dans un
règlement. Est-ce que c'est dans la loi, et tout ça? Mais il me
semble que les 45 jours, c'est un consensus qui est réaliste pour ceux
qui disent: "We want to make good business". Nous, on respecte ça parce
que c'est "the nature of the thing", mais d'un autre côté, qui est
réaliste aussi pour nous, nous disons: On a le droit d'avoir plus de
français à l'écran d'une part et, deuxièmement, on
a une industrie, nous aussi, à développer, qui est là, qui
est bonne et qui est prête à recevoir, à livrer et à
s'améliorer.
Au niveau des 45 jours, selon les données que vous avez
prélevées, premièrement, est-ce que vous maintenez
toujours cette position? Est-ce que c'est réaliste, maintenant, de dire
qu'on peut statuer sur 45 jours et que ceux qui n'entrent pas dans le
délai de 45 jours, eh bien, tant pis? "Terminator II", on ne l'aura pas,
tant pis. Alors, est-ce que vous êtes un peu d'accord avec ça ou,
finalement, devrait-on quand même accepter une copie
supplémentaire ou des excep-
tions, etc.? Je veux avoir votre position claire là-dessus.
M. Boucher: Ce qui nous avait amenés à proposer que
les films en plus de cinq copies soient ramenés à un délai
de 45 jours et que les films en cinq copies et moins puissent conserver un
délai comme celui qui est actuellement, c'était surtout l'analyse
du poids relativement marginal des films en cinq copies et moins à
l'écran. S'ils représentent un volume de films assez grand, il
représentent, en termes de projection - et ça, je suis absolument
d'accord avec la Régie là-dessus; un des éléments
qu'il faut considérer, une des variables à examiner toujours
attentivement, c'est le nombre de projections - eh bien, les films de cinq
copies et moins représentent, en nombre de projections et en recettes,
un poids relativement modeste dans l'opération.
Dans le contexte actuel, la thèse des 45 jours, nous l'avons mise
de l'avant et elle a non seulement été retenue, mais elle semble
se propager sur l'ensemble. Et fort probablement que, dans le contexte
d'exploitation des films où un faible pourcentage des films - 10 %, plus
ou moins - font quelque chose comme 90 % de la recette, les 45 jours sont
là et doivent - comme l'avançaient l'Union des artistes et
l'Association des industries techniques - sûrement se situer comme un
maximum.
D'ailleurs, c'est pour cette raison que, nous, nous sommes allés
dans notre proposition vers le règlement, l'idée du
règlement. C'était pour dire: On ne règle pas une fois
pour toutes la question du délai. La question du délai, elle
suppose une certaine flexibilité et, en l'inscrivant dans la loi avec
les copies, on s'éloigne de la capacité de réaction.
C'était la seule Intention qui était derrière cette
proposition, en se disant: Annuellement, on est capable de faire une analyse de
l'évolution du marché et, annuellement, on doit se donner la
flexibilité de pouvoir réagir au comportement du
marché.
Le consensus qui s'est dégagé autour des 45 jours, nous,
on pense qu'on peut s'y rallier sans difficulté. Par contre, il y aurait
peut-être à penser et il faudrait être attentif au fait que,
parfois, les 45 jours peuvent présenter des obstacles. Il peut y avoir
des impossibilités hors du contrôle du distributeur qui font que,
effectivement, une certaine forme de dérogation pourrait être
possible dans les cas où on pourrait avoir la démonstration
convaincante que, finalement, les 45 jours, on a tenté de les respecter,
mais qu'on n'y est pas arrivé.
Mme Frulla-Hébert: Donc, ce serait envisageable de dire 45
jours; vous prônez le règlement et fa flexibilité.
Effectivement, c'était l'intention du gouvernement aussi de se donner la
flexibilité et non pas d'augmenter... C'est rare, quand on met un
règlement en statuant sur un certain nombre de jours que, un an ou deux
ans après, on dise: Bien, là, on va retourner à 60. Je
pense que ça ne s'est jamais vu et que c'est politiquement inacceptable.
Alors, ce qu'on fait, c'est que pour se donner de la flexibilité,
justement comme vous dites, pour resserrer, chose certaine, il faut aussi
prévoir ce que vous me dites, des mécanismes au cas où il
y aurait bris technique, malgré que ça, c'est un incitatif
à doubler chez nous. Mais si, par exemple, il y a des problèmes
techniques, à ce moment-là, il faudrait prévoir soit par
la Régie, soit par un certain délai, un mécanisme pour
essayer de compenser ça, si je vous comprends bien.
M. Boucher: Oui, et c'est vrai que la tendance est marquée
maintenant. Le délai moyen, selon notre analyse, est autour de 34 jours.
Sur 169 titres, 95 ont été doublés pendant l'année
1990. Donc, il s'agit là d'une tendance. Le comportement des
distributeurs démontre que l'effort est consenti et qu'on s'en va dans
le sens d'offrir, parce que c'est rentable et parce que ça devient,
maintenant, un comportement admis, les films le plus rapidement possible en
français. Peut-être que, justement, toutes les analyses qui ont
été faites depuis trois ans sur le marché, le comportement
du public et les attentes du public sont des facteurs qui ont contribué
à convaincre.
Le Président (M. Doyon): Rapidement, Mme la ministre,
parce que votre temps est terminé.
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, une
dernière question. J'aurais voulu parler de distribution, là.
J'espère qu'on va en parler. Rapidement, il y a une idée qui me
passe par la tête. Selon, justement, vos analyses, tout ce que vous avez
ramassé, les tendances du marché, etc., si on met un délai
à 45 jours en prévoyant quand même s'il y a un bris et une
bonne justification, quelques mesures d'exception, mais après une bonne
justification, vous analysez aussi le comportement du consommateur. On a vu
ça aussi dans les sondages, dans l'étude de marché
Léger et Léger. Si on se dit: Bien, pour ceux qui ne sont pas
capables de livrer la marchandise dans les 45 jours, parce que, habituellement,
les "blockbusters" entrent bien avant le délai des 45 jours, alors, pour
ceux qui ne sont pas capables de livrer la marchandise dans les 45 jours, bien
tant pis. Est-ce que vous pensez que, d'une certaine façon, selon vos
sondages auprès de la population québécoise, pour
certaines exceptions, c'est acceptable? Est-ce que ce serait acceptable,
finalement? Est-ce qu'il y aurait un consensus?
M. Boucher: Là, on est dans l'ordre de
l'appréciation des choses un peu plus intangibles et plus
aléatoires, mais les attentes du public sont maintenant clairement
connues et je pense que ceux qui font les films les connaissent aussi.
Le public, de toute façon, veut la version française. Dans
le cas des films porteurs, je crois qu'il faudrait être très
maladroit pour ne pas la lui offrir.
Le Président (M. Doyon): Merci. M. le député
de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: M. le Président, quant à la
classification et son nivelage vers le bas, vous me donnez l'exemple de
l'Espagne en me disant que la chose est possible. Je répondrai qu'une
chose peut être possible, mais pas nécessairement souhaitable.
Dans notre cas, Je vous dis immédiatement que nous ne la souhaitons pas,
la catégorie 16 ans, j'entends.
M. Boucher: Catégorie 16 ans.
M. Boulerice: Selon le libellé du projet de loi, la
ministre prend avis de l'Institut avant d'adopter les orientations du plan
triennal, donc c'est à la fin du processus. Est-ce que vous souhaiteriez
plutôt être associé au processus d'élaboration du
plan triennal du début jusqu'à la fin?
M. Boucher: Oui, effectivement. En fait, si on tente, je dirais,
de hiérarchiser un peu les éléments, une politique du
cinéma, un plan d'action ministériel, un plan triennal de soutien
financier, ce sont là les instruments dont nous pouvons disposer pour
Intervenir. Pour nous, il est important que l'Institut puisse être
entendu et nous savons que nous pouvons l'être à chacune des
étapes, sauf que, effectivement, s'il était possible que la
préparation du plan de soutien financier... Là-dessus, nous avons
réaffirmé ce matin que nous croyons qu'il s'agit là d'un
instrument qui devrait être conçu par des gestionnaires de
l'application du plan en question. Au fond, ce serait dans la capacité
de dialogue avec la société en général que
l'Institut, en tant que lieu de concertation de la profession, en tant
qu'organisme qui a la capacité de représenter la
sensibilité, les intérêts et les attentes de la
profession... Ce serait tout à l'intérêt de ceux qui ont
à concevoir le plan de soutien financier de penser et de faire le plus
étroitement possible avec des représentants de ceux qui en sont
les destinataires et les bénéficiaires. En ce sens-là, je
dirais qu'à la limite, ce serait presque inverser la proposition.
Pourquoi des gens voudraient-ils se priver de la possibilité de
travailler avec nous et d'avoir un plan le mieux adapté possible aux
attentes de la profession? Et en ce sens-là, le plus tôt ça
se fait dans le processus, le mieux c'est. (12 heures)
M. Boulerice: Est-ce que vous souhaitez revenir à la
situation d'avant décembre 1987, où l'Institut approuvait
formellement les modalités d'aide destinée au secteur
privé du cinéma?
M. Boucher: Vous avez eu l'occasion d'entendre l'opinion de
beaucoup de groupes sur la question. Vous savez, l'important pour la
profession, c'est de s'assurer que son point de vue, que sa conviction de voir
les choses se réaliser de telle ou telle manière soit possible,
soit entendue. La modalité, vous savez, c'est toujours un peu
délicat d'aller dans un sens ou dans l'autre, sinon que la façon
d'y parvenir peut dépendre de la modulation des structures, mais peut
dépendre aussi des conjonctures et des contextes très
particuliers dans lesquels nous vivons.
M. Boulerice: Sur la question du plan triennal, est-ce que dans
les conditions actuelles, vous estimez que la SOGIC - qui, elle, a comparu;
vous, vous êtes entendu comme la Régie, ce qui est
différent - est-ce que vous estimez que la SOGIC est en mesure de livrer
la marchandise, comme gestionnaire?
M. Boucher: L'Institut a entendu les points de vue de la
profession depuis un certain temps à ce sujet. Vous nous avez
vous-même cités dans votre allocution d'ouverture. Nos
représentations ont été faites auprès de la
ministre et, en ce sens-là, je crois que l'Institut a fait ce qu'il
avait à faire dans le contexte.
M. Boulerice: Donc, ce que vous avez dit à Mme Robillard,
c'est-à-dire les reproches adressés à la SOGIC, et je
continue de vous citer: "...font l'unanimité dans la profession et
confirment qu'un fossé s'est creusé entre les deux. Son absence
des débats Importants, son attitude distante, son refus de travailler en
relation soutenue avec le milieu, la remise en question de sa compétence
professionnelle, sa bureaucratisation, son! autant de critiques
sévères entendues lors des consultations." Fin de la citation.
Extrait de la page 12 du document qui avait été adressé
à Mme Robillard. Vous les renouvelez à l'actuelle ministre des
Affaires culturelles.
M. Link: Malheureusement, nous n'avons pas noté une
amélioration sensible.
M. Bouierice: On n'a pas besoin de longues phrases pour exprimer
les choses qui sont connues. Vous avez bien répondu à la
question, M. Link, M. Boucher. Je vous remercie de votre présence
à cette commission.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. Mme la ministre, quelques remarques en terminant.
Remarques finales Mme Liza Frulla-Hébert Mme
Frulla-Hébert: Premièrement, je tiens
à remercier tous les membres de la commission de la culture, M.
le Président, cher député de Sainte-Marie-Saint-Jacques,
et collègues, mes collaborateurs qui ont travaillé
extrêmement fort les gens de nos organismes, instituts, enfin,
organismes-conseils, vous tous. Il y a certaines recommandations qui font
l'unanimité. On s'entend tous pour parler de la protection de la
jeunesse. Maintenant, il s'agit d'y trouver les mécanismes qui sont
appropriés et applicables. On essaiera d'ailleurs de trouver à ce
niveau-là un mécanisme qui s'appliquera de la même
façon au niveau de la vidéo et du film, si possible. On va
continuer à travailler là-dessus.
Au niveau du français à l'écran, eh bien, il n'y a
aucun doute qu'il faut développer l'industrie, d'une part, et que, comme
je le disais tantôt, le Québécois, le consommateur
québécois, le cinéphile québécois est en
droit d'avoir et de comprendre ce qu'il voit et de l'apprécier dans sa
langue. Alors, pour ce faire, on se réjouit du progrès, d'une
part, mais il faut que le progrès continue. Il semble y avoir un
consensus autour des 45 jours. À savoir si c'est dans un
règlement ou à l'intérieur même de la loi, nous
allons en discuter et on verra maintenant ce qui est le mieux à faire.
Chose certaine, c'est qu'on va faire un bout de chemin et les intervenants qui,
finalement, font affaire avec un gouvernement tel le gouvernement du
Québec devront aussi faire leur bout de chemin.
Quant à la distribution, il y a confusion dans la
définition d'un distributeur, de ce qu'est un distributeur. C'est revenu
à plusieurs reprises, alors nous allons tenter de le clarifier. Quant
aux articles que nous avons tout simplement abrogés parce qu'ils
étaient non applicables, nous essaierons de trouver un mécanisme
pour les remplacer. Chose certaine, c'est que les articles qui sont non
applicables ne resteront pas dans la loi parce que c'est inutile d'avoir des
articles pour se donner bonne conscience. Il faut quand même trouver
aussi des moyens pour voir à ce qu'ils soient remplacés de
façon plus efficace. Ceci dit, un gros, gros merci à tous et nous
espérons, évidemment, que, comme en 1983, comme la collaboration
en 1987, cette loi fasse l'unanimité. Merci.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. M. le
député, voulez-vous faire des remarques aussi?
M. André Boulerice
M. Boulerice: Oui. Pour apprécier la qualité des
mémoires qui nous ont été présentés, la
franchise des participants, M. le Président, qui sont venus à
cette commission, notamment aussi l'absence de complaisance de la part des
intervenants qui n'ont pas eu peur, pour paraphraser un général
célèbre, d'aller au fond des choses et de faire abstraction de
tout ce qui grouille ou grenouille et scriboullle peut-être dans
certaines structures bureaucratiques qu'on a dénoncées. Je pense
que cette commission a été une commission fort
Intéressante. J'ai eu l'occasion, quand même, d'en vivre
quelques-unes, M. le Président, au niveau de la commission de la
culture. Celle-ci, je le répète, par la qualité des
mémoires et les autres considérants que j'ai donnés en ont
fait, effectivement, une très intéressante.
Il y aura des étapes subséquentes à la loi, en
deuxième, troisième lectures, étude article par article,
etc., et je peux assurer les intervenants que nous avons pris bonne note de
leurs observations. Je souhaite que la ministre en ait fait autant, mais je ne
vais quand même pas lui faire un procès d'intention. On verra les
amendements possibles et souhaitables, parce que ça peut être
possible mais pas souhaitable, mais ça peut être souhaitable et on
peut prétendre que ce n'est pas possible. Alors, nous verrons bien, lors
du dépôt du projet final de la loi, dans quelle mesure les
interventions des intervenants auront été entendues et donc
transcrites dans l'écriture de la loi.
L'Opposition jouera bien le rôle qui lui est dévolu et
qu'elle a toujours, d'ailleurs, assumé avec beaucoup de vigilance dans
ce domaine, de voir à ce que satisfaction soit donnée, en ne
perdant pas de vue le cap sur lequel on doit se diriger et qui est le plus
important de tous. Pour employer une phrase qui a peut-être choqué
ma collègue et amie députée de Marguerite-Bour-geoys et
ministre des Affaires culturelles, il ne faudrait pas se borner à faire
de cette loi uniquement de l'entretien ménager, mais bien faire en sorte
que cette loi favorise l'établissement solide, je dis, d'une
cinématographie nationale au Québec.
Alors, je pense que cette commission s'est faite dans un climat
agréable, à l'exception d'un épisode dont nous nous
rappellerons. Je vous remercie, Mme la ministre, M. le Président, mes
collègues et, surtout, tous les intervenants, d'avoir participé
à cette commission sur le projet de loi 117, Loi modifiant la Loi sur le
cinéma.
Le Président (M. Doyon): Avant d'ajourner les travaux,
vous me permettrez, comme président, de souligner le travail qui a
été fait. Le processus législatif est un processus
compliqué, qui peut paraître long, mais qui a un certain nombre
d'exigences. La participation des intervenants a permis, justement, à ce
processus de se dérouler et de permettre aux législateurs que
nous sommes, et particulièrement à la ministre, de prendre
connaissance de divers points de vue.
Ça s'est fait dans une atmosphère et un climat favorables,
avec la participation de tous et chacun. Alors, Mme la ministre, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, chers collègues,
vous me permettrez tout d'abord, avant d'ajourner les travaux sine die, de
demander à Mme la secrétaire de déposer devant cette
commission des mémoires de groupes que nous n'avons pas
pu entendre ou qui n'ont pas voulu se faire entendre. Cinéma Pine
inc. - j'imagine que c'est "Pine" - Conseil des femmes de Montréal, le
Groupe Multimédia du Canada ainsi que le Mouvement Québec
français. Donc, ces mémoires seront déposés pour
consultation auprès de cette commission. Là-dessus, j'ajourne les
travaux sine die. Merci beaucoup à tous.
(Fin de la séance à 12 h 10)