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(Neuf heures trente-neuf minutes)
Le Président (M. Gobé): Bonjour, mesdames et
messieurs. La commission de la culture va maintenant reprendre ses travaux, des
consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de
loi 117, Loi modifiant la Loi sur le cinéma. Je vous fais rapidement
lecture de l'ordre du jour. Mais, d'abord, est-ce qu'il y a des remplacements,
Mme la secrétaire?
La Secrétaire: II n'y a aucun remplacement.
Le Président (M. Gobé): II n'y a pas de
remplacement. Alors, nous allons entendre ce matin, à partir de 9 h 30,
la Canadian Motion Picture Distributors Association, pour une heure. Par la
suite, nous entendrons l'Association québécoise des distributeurs
et exportateurs de films et de vidéo. À 11 h 30, la
Fédération professionnelle des distributeurs et exportateurs de
films du Québec. Nous suspendrons les travaux jusqu'à 15 h 30
où nous recommencerons avec l'audition de l'Association des
commerçants de matériel vidéo du Québec. Par la
suite, à 16 h 30, nous entendrons l'Association des producteurs de films
et de télévision du Québec; à 17 h 30,
l'Association des propriétaires de cinémas du Québec et,
enfin, à 18 h 30, la Société générale des
industries culturelles. Et nous ajournerons à 19 h 30.
Je crois que les ententes restent les mêmes. C'est 20 minutes, 20
minutes, 20 minutes pour la présentation. Si le député
indépendant de D'Ar-cy-McGee daigne participer, nous verrons à
lui laisser le temps approprié à l'exercice de son droit de
parlementaire par entente commune, comme la commission l'a
démontré depuis le tout début au cours de ses audiences
d'ailleurs, à votre invitation, souvent, M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
Je crois qu'il n'y a pas de remarques préliminaires. Ça a
déjà été fait au début de la présente
ouverture de cette commission. Alors, je demanderais maintenant au porte-parole
de la Canadian Motion Picture Distributors Association de bien vouloir
commencer sa présentation. Vous avez 20 minutes pour ce faire.
Canadian Motion Picture Distributors
Association
M. Riordan (Brian): Merci, M. le Président. D'abord, je
veux préciser que nous représentons deux associations. Il y a,
d'abord, bien sûr, l'Association canadienne des distributeurs de films,
qui est, dans un certain sens, une succursale de la Motion Picture Export
Association of
America. Les deux associations participent à cette
présentation et, au nom de ces deux associations, je vous remercie de
cette opportunité de vous adresser quelques commentaires sur le projet
de loi.
Pour commencer, j'ai à vous annoncer un peu les personnes qui
sont présentes ici et, dans ce sens-là, j'ai une mauvaise
nouvelle et une bonne nouvelle. La bonne nouvelle, c'est que je ne vais pas
vous parler trop longtemps. Il n'y a rien de plus ennuyeux qu'un avocat qui lit
un mémoire. L'autre partie de la bonne nouvelle, c'est que nous avons
donc des représentants de plusieurs des compagnies membres des
associations. Mais la mauvaise nouvelle, c'est que les vedettes qu'on voulait
faire venir, comme Mickey Mouse et Indiana Jones, sont déjà
occupées ailleurs. Donc, on prendra quelques minutes avec des experts,
des gens qui travaillent quotidiennement dans le domaine du cinéma, dans
le domaine de la distribution de films et de vidéo. J'ai, d'abord,
à notre table, Millard Roth qui est président de l'Association
canadienne des distributeurs de films du Canada, siège social à
Toronto. J'ai M. Bill Soady, de la compagnie Tri-Star; Lise Bertrand qui est la
directrice pour la province de Québec pour la compagnie les Films
Paramount Canada et, last but not least, Gordon Edwards, le directeur
gérant pour Warner Home Video Canada.
Les compagnies membres des associations sont au Québec,
travaillent au Québec, oeuvrent au Québec depuis plus de 75 ans,
depuis le tout début de l'industrie du cinéma. Et, donc, elles
ont une connaissance, premièrement, si vous voulez, de la situation au
Québec, de la société québécoise, de cette
société qui est si distincte, si spéciale dans le contexte
nord-américain. Nos associations et nos compagnies qui font partie des
associations apprécient et comprennent la soif du peuple
québécois pour goûter aux cultures de partout au monde, y
compris à la culture des États-Unis et des pays anglophones au
monde qui sont, pour la plupart, les pays d'où viennent les films que
nous distribuons. Je parle toujours en avocat. Quand je dis "nous", je ne
distribue pas de films, mais je parle pour les compagnies.
Donc, la présence des films que distribuent les compagnies
membres est essentielle pour toute industrie du cinéma, toute industrie,
disons, moderne ou à jour. Et la preuve de cette longue vie au
Québec, c'est que le peuple québécois adore les produits
que distribuent nos compagnies, qu'elles distribuent et produisent parce
qu'elles portent les deux chapeaux. C'est des producteurs de films dans
certains cas et elles distribuent d'autres films appelés des
"pick-up".
Et le peuple québécois adore nos films et nous adorons
montrer nos films au peuple québécois. C'est une vraie histoire
d'amour, mais, pour que ça continue, il faut que les compagnies
demeurent en santé financière et fiscale. Après tout,
c'est un business comme tous les autres. Et, dans notre expérience, un
trop lourd fardeau d'interventions gouvernementales risque de mettre en
péril le bon déroulement de notre business. C'est pourquoi, dans
tous les pays où nous intervenons, où nous faisons affaire, nous
encourageons le gouvernement à se limiter à trop - je vais
utiliser un mot neutre - participer dans l'industrie pour que les
professionnels de l'industrie puissent faire leurs affaires comme ils savent
faire le mieux.
Dans cette optique et très brièvement, nous soulignons le
souci et l'inquiétude que nous crée une question fiscale qui se
pose au Québec actuellement, la question de la taxe d'amusement, surtout
avec la TPS québécoise, la TPS provinciale, qui va entrer en
vigueur dès le 1er janvier. Nous en avons parié brièvement
dans notre mémoire, je ne prendrai pas plus de temps que ça ce
matin. C'est simplement pour souligner notre appui aux opérateurs de
cinéma quand ils disent que ça risque de causer un tort
irréparable à l'industrie du cinéma, dans la saHe de
cinéma, et ce serait vraiment dommage de continuer à causer un
tort financier à ces gens-là parce que c'est le secteur de
l'industrie qui souffre le plus actuellement. D'ailleurs, nous soulignons et
nous apprécions aussi la position de ta ministre quant à cette
taxe et quant à l'abolition de cette taxe dès le 1er janvier.
Nous l'appuyons et nous espérons que le gouvernement verra la bonne
raison de cette abolition.
Maintenant, je passerai à la question du doublage. On commencera
tout de suite avec le doublage. Je sais que c'est une question qui vous
intéresse énormément. Juste avant de passer le plancher
à M. Soady, j'aimerais souligner un petit élément de
l'artide 83, c'est le 83. 1 qui est la question du nombre de copies d'un film
lorsque la version doublée en français est disponible.
D'ailleurs, ce n'est pas une modification parce que ça continue la
pratique actuelle. On ne pourra distribuer ou faire circuler plus de copies en
anglais que le nombre de copies en français. Nous soumettons que ce
n'est pas une règle qui reflète la réalité de
l'industrie, ni un vrai besoin culturel ou linguistique dans cette province.
Une fois que ta version française du film est disponible, ii n'y a
aucune justification pour limiter le nombre de copies en anglais. Le
marché, le public québécois fera ce travailla en
décidant d'acheter des billets d'entrée ou non. Mais le travail,
le but, l'objectif de la loi, c'est-à-dire d'avoir, d'obtenir la version
française aussi vite que possible étant déjà
atteint, à ce moment là il n'est plus nécessaire pour le
gouvernement d'intervenir pour limiter le nombre de copies en anglais.
C'est sûr qu'il y a des films qui sont plus attrayants pour les
anglophones que pour les francophones et vice versa. Votre souci, comme membres
du gouvernement ou membres de l'Assemblée nationale, ne devrait pas
être de contrôler le nombre de films une fois que vous avez obtenu
le but principal qui est de faire sortir la version française.
Maintenant, je passerai le plancher à M. Soady qui s'adressera en
anglais concernant d'autres, questions pratiques au niveau du doublage. Mr.
Soady.
M. Soady (William): Good morning, ladies and gentlemen. I am
executive vice-president of distribution for Tri-Star Pictures and, as such, I
am responsible for the theatrical distribution of Tri-Star Pictures throughout
North America. I am also involved in regular and direct communications
regarding the distribution of our films in virtually every country on
earth.
Throughout my life and career and until 1981, Canada was my home and the
film business has been my primary source of liveiyhood and entertainment. With
my broader responsibilities in distribution, I now reside in. Los Angeles. I
might point out Los Angeles weather today was not nearly as beautiful as it is
here, in Québec City.
I had the privilege of testifying before the Régie du
cinéma several years ago. Since then, I have been involved very actively
in Tri-Star Pictures distribution practices in the Province of
Québec.
We are sympathetic to the many objectives of the Cinema Act and
understand your right to promulgate this Act. Tri-Star Pictures vaines its
Québec business and has from its inception in 1982. Our objective is to
deliver to Quebeckers the best possible filmed entertainment at the same time
as other major centres in North America.
My purpose of being here today is to acquaint you with some of the
realities of our business and to urge you to reflect these realities in your
decisions. I am convinced that you can make modest adjustments to the proposed
amendments without inhibiting in any way the Minister's and the Government's
objectives.
Today, I shall address only the dubbing amendment proposed for Section
83. Let me add that I am addressing you on behalf of Tri-Star Pictures and as a
representative of the Motion Picture Export Association of America, which
represents all major motion picture companies.
Let me begin by pointing out with pride that over the last two years our
motion facture companies have significantly reduced the delay between the
release of their English language versions and French versions. At the same
time, a number of our member companies of the Association have deciced to dub
many of their
motion pictures in the Province of Québec. In fact, three
companies have taken the major step of dubbing all of their films in
Québec.
It must be underlined that these decisions were taken without the need
of provincial legislation. Ours is a business that is driven by the bottom
line. Simply, we are in business to make money. Thus, when we see a need, we
respond to the need. Thus, if the Québec movie-going public wants French
dubbed motion pictures earlier in the release of the motion picture, we, as
wise businessmen, will respond and try to satisfy the public, if the costs are
not too high.
I should also add that ours is very much a business of picture by
picture decisions and picture by picture statistics. Averages are neither
useful nor informative. Nevertheless, there are certain trends in the industry
that are causing all of our companies to examine the ways and means of
continuing to reduce the time delay between English and French theatrical
version. A short list would include the fact that the cost of marketing motion
pictures is increasing quickly. We would like to have the French release take
advantage of all of our marketing. Other important delivery methods such as
video, paperview, pay television and free television are now more important and
sometimes arrive sooner than before, and there is our continued concern for the
very serious implications of all forms of film piracy.
All of these business trends within the industry point to an earlier
release of French versions without the need for legislation. It is good
business to release the French and English versions of our films as closely as
possible and, if at all possible, not day and day. However, we must still
balance off the opportunity for additional revenues against incurring
unnecessarily high costs. There has never been a time in the history of our
industry when concern for cost has been greater, budgetary restraint more
diligent and efforts at cost reduction more vigorous. When we dub a picture in
this Province, we incur a cost of approximately $50 000 per title. As I am sure
you are aware, a Québec dubbed version is only useable in this market
and our company must duplicate this cost in Europe in order to supply the
balance of the French-speaking world. Of course, the opposite is not true. The
dubbed versions from Europe are quite acceptable in Québec. Therefore,
by dubbing in Québec, we incur a double cost.
I can relate to you a story of a film that the European version was not
acceptable in Québec. At that time, I was with Universal Pictures and we
released a film called "Slap Shot" which was dubbed in France by the Parisians
and they did not seem to understand the language that was spoken in the hockey
locker rooms by Paul Newman. George Whitehill directed the film, and when we
received the version from France, we decided that we would not subject the
people of Québec to this film and had it redubbed in this Province, and
"Slap Shot" at that time, in 1975, went on to be one of the most successful
dubbed films in the Province of Québec. So, there are times when the
business dictates it, we do make these decisions on our own.
Aside from monetary costs, there are other problems inherent in dubbing.
First, there is the creative restraint. By contract, usually a director has the
right to be directly involved in the entire dubbing process from the
preparation of the dubbing script to the selection of talent and control over
the dubbing process. Obviously, if that director is not available for whatever
reason, then the dubbing of a particular picture can be seriously delayed.
Delays can also be caused because of the unavailability of talent. You
can appreciate, I am sure, our desire to maintain some consistency and
credibility from the audience perspective, when it comes do dubbing certain
voices. The list goes on.
In Europe, as you know, the dubbing studios take a month-long summer
holiday, automatically creating a 30-day delay for any English picture released
towards the end of June that has not been dubbed at that time. As I said to you
earlier, this is a picture by picture business. It is impossible for us to
predict when any of these problems will impact seriously on a motion picture
that is performing well at the box office.
Unfortunately, the reality of our business is that the majority of our
motion pictures do not perform well at the box office and do not recoup their
cost. Additionally, it is impossible to predict what will be a hit. Many motion
pictures for which we have high expectations do not perform up to those
expectations. However, many pictures become major block-busters, Which we do
not expect. No one would have predicted "Home Alone" as a huge hit, which it
is. Thus, this a fragile, complex business, where a few major hits carry the
major losers. We are reluctant to incur additional costs unless we are
absolutely certain that the picture has a chance to recoup the additional
investment for dubbing, advertising and other related marketing expenses.
In the majority of instances, we will release a picture in the Province
with more than five copies. A responsibility to our customers, their audiences,
and their investment in theatres in this Province generally indicates a need
for more than five copies. In addition, we make a major investment in
advertising, in all media, in Québec newspapers and television, to
support our pictures and attract an audience to the theatres. The cost of
advertising has grown very substantially, and in order for us to recover those
costs, we, in fact, generally require more than five prints in a market the
size of Montréal.
Now, let me try to describe to you the reality of a highly successful
picture released in eight or nine copies in English and performing very well at
the box office, where the creative control of the picture, in this instance...
where contractual obligations required this picture to be dubbed in French in
France. The director is committed, prior to the English release, to travel to
France, to work with the dubbing studios on talent selection, script
supervision, and so forth. A number of problems can arise. For example, the
director has a problem with another film he is working on, causing him to delay
his trip to France. Additionally, he can become ill. These constraints can
apply to the lead actor as well. Therefore, although we have a commitment for a
dubbed version and have every reason to expect it to be delivered well before
the expiration of the 45 days, we now find ourselves in this uncontrollable
bind. What do we do? And who, in fact, suffers these circumstances?
The legislation, as currently drafted, would have us remove the picture
from up to seven or eight screens. The seven or eight Québec exhibiters
are likely not to be in a position to replace our film with something of equal
grossing potential in popularity. The Québec movie goer who has been
attracted to this film no longer has it available to him in his local theatre.
Only one print is on the screen, not the seven or eight which would satisfy the
Quebeckers' desire to see the film. Our promotion stopped, the indirect support
provided to the video release and pay television opening is not as great as it
might have been, and the entire Québec system suffers. Certainty not us.
The Quebeckers are most hurt They cannot see the movie which they want to see,
not because we, the motion picture industry, are intentially holding back the
French dubbed print, but because we cannot get the French dubbed print.
I can speak for Tri-Star. We are trying to dub our motion pictures in
Québec. However, we can only control that decision on motion pictures
that we own. For those which we distribute, by acquiring the distribution
rights, these are not dubbed in Québec. Instead, we must wait for a
dubbed version to be made in France. (10 heures)
Sometimes, although we try, this is impossible. For instance, Tri-Star
is proud to distribute Carolco Pictures. This summer we are opening Carolco's
Terminator 2", which we anticipate wl be a major hit. Terminator 2" will be
dubbed in France, not in Québec. If the proposed amendment were in force
now, and if problems arise in the dubbing, we would have to reduce Terminator"
to only one screen. Alternatively, we could be compelled to hold both versions
back until French versions were available. This would put Québec on the
same schedule as Paris, which is at least six months after the typical opening
of the French version in
Montréal.
Ladies and gentlemen, let me emphasize, theatre-going public and the
exhibitors who lose the prints are injured and lose much more than Tri-Star. We
value our Québec business. However, in the big picture, Tri-Star's
bottom line will not be much affected by our reducing the screens on Terminator
2". One of the objectives of the Cinema Act would be defeated, that is. the
objective of the spread of cinematic works and culture to all parts of
Québec would not be fulfilled.
We appreciate and respect the Government's objective to improve the
filmmaking infrastructure of this Province, which now includes an improved
dubbing capability. My company regularly takes advantage of these dubbing
facilities here, with motion pictures we own. But it is very clear to me that
the capacity of these facilities and the availability of talent is not
sufficient to service everyone's needs, and maintain the level of quality that
our films deserve and that the Quebecker consumer demands.
Like any industrial development strategy, there is a need for time,
patience and regular monitoring of our problems and accomplishments. The
influences and trends that I have tried to describe earlier will, I believe,
continue. However, ladies and gentlemen of this commission, in the meantime,
there is an absolute, essential need for the industry to have some safety valve
for those films which the Québec public wants to see, but for which
there is not a French dubbed version available within 45 days.
Some accommodation must be put into this legislation that recognizes the
reality of the legitimate objectives of the Province, the commercial needs of
our business, and needs and desires of the Québec movie-going
public.
The trends are clear. Our commitment to improving these trends should be
equally clear. The safety net is essential to maintaining the well-being of all
parties. I would encourage you as sincerely and as firmly as I can to recognize
the legitimate need of our companies in this regard, by allowing companies to
select two pictures that should be given exemptions up to 60 days, which in no
way exceeds the current rules. You will be introducing an added flexibility
which is fair, realistic, and supportive of the needs of the community whom you
represent.
Again, as I mentioned earlier, we are a business driven by profits, by
the bottom line. At a certain point, if it is not economic for Tri-Star
Pictures to distribute in Québec, if the costs are too high, the
consequences are obvious and unavoidable, we will not.
I urge you to try to satisfy the business realities of my business, the
Government's objectives and the movie-going public. Thank you for your
attention.
Le Président (M. Gobé): Thank you, Mr. Soady. Mme
la ministre, vous avez... Je m'excuse Me Riordan, mais les 20 minutes imparties
pour chaque groupe qui comparaît à cette commission veut
maintenant que Mme la ministre puisse dialoguer avec vous. Si les gens ont des
messages à lui passer, ça va être le moment de le faire
dans vos réponses aux questions qu'elle va vous poser. Et je dois
malheureusement, selon le règlement et la tradition en vigueur devant
les commissions parlementaires, lui passer la parole. Alors, Mme la ministre,
vous avez maintenant la parole.
Mme Frulla-Hébert: Je voudrais d'ailleurs d'abord,
premièrement, vous souhaiter la bienvenue à tous, and welcome all
of you, even those who came from Los Angeles and took time.
Parce que nous sommes à l'Assemblée nationale du
Québec, je vais, évidemment, poser mes questions en
français, mais s'il le faut, pour une meilleure compréhension
pour tous, je vais traduire un peu en anglais. So, I will do it in French but
for better comprehension, if need be, then I will translate in English.
Une voix: Question de doublage.
Mme Frulla-Hébert: Question de doublage, yes, that is how
we do business.
Le Président (M. Gobé): Les deux langues
officielles sont reconnues à cette commission.
Mme Frulla-Hébert: Deux choses, par exemple, avant de
commencer. Croyez-moi, venant moi-même de l'entreprise privée, je
comprends votre besoin, finalement, de nous dire que toute entreprise doit
être profitable. I understand what you are saying, that you are
business-driven. I come from private entreprise and I know what you mean. Mais,
au niveau du gouvernement, il faut comprendre aussi que tout en vous laissant
avoir ou faire des affaires de telle sorte que votre entreprise devienne et
demeure saine, nous avons aussi nos objectifs qui sont de deux ordres:
Protéger nos industries et protéger aussi notre culture. So we do
not have a choice, even if we encourage you. And we will do everything that is
possible for you to make good business in Québec. We have other
objectives that are: protect our culture and protect our own entreprises.
O.K.
Il y a deux choses, premièrement, qu'on n'a pas, et comme le
temps est restreint nous allons aller sur deux choses. Premièrement, la
distribution, because we did not have time to talk about distribution.
Distribution, et deuxièmement le doublage. Je vais commencer par la
distribution, puisqu'on n'a pas eu le temps d'en parler. Vous n'avez pas eu le
temps de nous présenter votre point de vue sur la distribution.
Une question d'abord: On a eu de grandes discussions avec plusieurs de
nos groupes. We are going to start with distribution, you did not have time to
talk about it. On a eu de grandes discussions avec nos groupes. Il y a une
question que je veux poser pour bien comprendre: Sur tout film incluant la
vidéocassette il y a quelqu'un qui a le droit de distribution. Est-ce
que c'est exact?
M. Soady: Yes, that is correct.
Mme Frulla-Hébert: There is somebody who has the rights of
distribution.
M. Soady: Yes, that is correct.
Mme Frulla-Hébert: O.K. Ces droits de distribution
appartiennent à une seule compagnie. It belongs to one company, does
it?
M. Soady: Sometimes each individual format can have a different
distributor, that is: a distributor may have the theatrical rights and somebody
else may own the video rights, and pay television other rights. I think that is
your question. They are not all necessarily owned by the same distribution
entity, or even the same company.
Mme Frulla-Hébert: O.K. So what you are saying is that you
can have one company having the rights for distributing a film, and another
company having the rights to distribute for video.
M. Soady: Yes.
Mme Frulla-Hébert: O.K. Now, if we are talking about
rights... Talk to me about rights. Qu'est-ce que ça comporte, ces
droits-là?
M. Soady: Rights are the rights to be able to... It is a license
to be able to exhibit the film or distribute the film in the market that you
own the rights for. An example: as I mentioned, Tri-Star has the theatrical
rights for Carolco Pictures, 'Terminator 2". We do not own the video rights to
'Terminator 2". We do not own the cable rights. We own the theatrical rights
only. Those rights give us the ability in the territories that we have them to
distribute it to what is described as a theatrical experience. That theatrical
experience can be a movie theatre, it can be a military base, ships at sea, but
it cannot be in the format of video.
Mme Frulla-Hébert: Yes.
M. Soady: I think maybe, going to your question, if a theatre
runs a film in video, not in 35 mm as currently is the standard, those rights
that we would have are not so much the format rather than the venue, the venue
being
theatre. Even though that theatre showed video, that is a theatrical
engagement. Therefore, those are our rights. The video rights are for home
use.
Mme Frulla-Hébert: But when we talk about rights, we talk
about "la reproduction", reproducing, "la distribution", distributing, and the
marketing.
M. Soady: Yes, but not the producing. The producing entity is the
person who owns all of the rights. The producer, the producing entity, then
either sells those rights to someone else, distributes himself or whatever.
All motion pictures that are made by our company are made with a
company. There is a production company that is formed. Each motion picture
becomes a business onto itself. When we are providing all of the money for the
production, we then control all of the rights for that production. But
controlling the rights does not control the filmmaker. The filmmaker is an
artist. It is his vision. He has tremendous input into how the film will be
marketed, how it will be released and, even, the running time, a number of
things. We, as producers or financiers, have input, but I must say that these
people generally do what they want, unfortunately.
Mme Frulla-Hébert: And if we talk about video, just for
our sake now, we really want to undestand this, since you are in the business
and you are doing it, and whatever. You are saying that, let us say, for
example, Terminator 2", I mean, you have got the rights for all film
distribution, for films "en salle".
M. Soady: Theatrical.
Mme Frulla-Hébert:... theatrical. Then, there is another
company or another distributor that has the rights to distribute it for home
video.
M. Soady: Yes, that is right
Mme Frulla-Hébert: Si les droits sont conservés par
les premiers détenteurs, "the first ones", est-ce qu'on convient alors
que ce qui est cédé au Québec, ce sont des concessions
à des grossistes?
Then you have the rights. So that means that what is left for
Québec is a sort of concession to wholesalers. Is that it?
M. Soady: I do not...
M. Riordan: Avec une différence. C'est plutôt une
question dans le domaine de la vidéo, je pense.
Mme Frulla-Hébert: Oui. Au niveau de la vidéo.
M. Riordan: M. Soady se limite plutôt aux salles de
cinéma. M. Edwards, de Warner Bros, est plus en mesure de
répondre à des questions concernant la distribution de
vidéos.
Mme Frulla-Hébert: On s'entend maintenant. On film rights
then, theatrical, that is fine. If we look at what is proliferating, which is
video, I would like to know exactly how it is done. The owners of the rights -
because it is complicated - versus then our own distributors in Québec.
That is why I was asking: What are those rights and the definition of those
rights and what do you do when you do have the rights?
M. Edwards (Gordon): In the case of Warner Brothers, in Warner
Brothers' pictures, we have all rights: we have television rights, we have
video rights, we have theatrical rights. In the case of HBO. which is also part
of our company, we nave all rights. In the case of Lorrimar, which is another
division of our company, we have ail rights. In the case of MGM, we have video
rights only; the theatrical rights are still owned and controlled by MGM. We,
as a company, Warner Brothers' time owners, participated with Pathé and
helped them acquire the MGM studio. For that purpose, we acquired video rights
throughout the world. So we have worldwide rights on MGM and we distribute MGM
video throughout the world. We do not distribute any rights; at this time, we
have nothing which we distribute solely for Canada or solely for Québec.
All the rights that we have are either North American or worldwide, depending,
once again, as Bill said, on the particular arrangements that are made in the
financing of the film when it is made. (10 h 15)
Mme Frulla-Hébert: So, then, what happens when... You have
got the video rights for the whole, you know, distribution rights for all the
countries. Is that...
M. Edwards: Yes.
Mme Frulla-Hébert: I understand. Right. So, what happens,
then, when you distribute in Québec? What happens?
M. Edwards: In Québec, we distribute through the
Québec distributors. There are about 10 or 12 of them, actually, that we
distribute to. We sell the product to them and they distribute it to the retail
market. They distribute it to video clubs, some 2000 video clubs. They
distribute it to our traditional wholesalers: Eaton. Simpson Sears. Woolco.
That segment of the business, as we describe it in the video business, is sell
through, it is the ability for the consumer to purchase. They also distribute
through the video clubs, the rental stores, as we call them.
So, there are two forms, there are two distinct businesses within this
framework as well. To try to put it into one business has been the difficulty
we have encountered in Québec because the cost of a video, in our case,
in the sell through market... We have been able to bring most of our catalogue
down to $19. 98, which allows the consumer to own this product. You can go and
buy "Rocky"; you can buy any of the movies, now, for $19. 98.
The development of the sell through business in Québec has been
impeded somewhat by the additional cost of stickering, the labour involved in
it, and the cost to the distributor of registering each one of these videos.
Unlike some people, where they have 1 distributor, as I said, we have 12
distributors. So, you end up having 12 registrations rather than 1
registration. If there was something that can be done to improve it, we will
see an enormous sell through business, if you like, developed.
In France, for example, the business is approaching 80 %. 80 % of their
total business, in France, is the sell through business. They are collectors of
videos. In England, it is over 60 %; in the United States, this year it will
probably be 50-50. In Canada, generally, we are about 25 %, price being the
problem. We have taken the step, at Warner's, at least, and MGM, of attempting
to develop this business, but it is only about 5 % to 10 % in Québec.
So, there is some attention that may be needed to help the industry down here
in developing and maybe some of the impediments that are in the way, right now,
could be taken out to make it easier for the regular traditional retailers to
enjoy that business.
Even the video clubs are beginning to get into the collectibles. Disney,
every year, has two or three titles. We have had "Batman" and others, "Indiana
Jones", from the other studios. So, the business is there and people do want to
collect it. It is very much like a book business, a record business, where they
want to have these movies, share them with the family and be able to watch them
when they feel like it.
Mme Frulla-Hébert: O. K. Certains distributeurs
québécois, some Québec distributors are asking us, le
gouvernement, dans notre loi, de prévoir une cession de droit exclusif,
a certain exclusivity when you give the rights, and it seems, throughout our
discussion, that the companies are opposing it. I would like to know why.
M. Edwards: We feel that the current distribution places better
serve the customer or the retailer of Québec; competition, we feel, is
the best way to bring the prices down. We know, in our discussions with
retailers, they feel that when there is an exclusivity given by a particular
company to a Québec distributor, they are free to sell at what price
they will. If you want the product, you have no choice. We feel that with a
group of distributors in the retail business, very much like the book business
or the record business, you have more opportunity to reach everybody. Every
retailer does not want to buy from a particular distributor. They may have some
particular reason, whether it be regional in nature or past history. So, they
want the opportunity to be able to buy where they will, at the price they want
to pay, which allows them a better margin, where they can make more money and
ultimately charge less for the retailer or, at least, for the consumer.
In one of the studies we have had done, by Alexander and Associates out
of New York, who do surveys throughout the United States and Canada, we have
discovered, and it could be a direct result of the additional cost in
Québec, that the price of rentals in Québec is substantially
higher than in other provinces, as a result of the added cost that is incurred
by the video clubs.
Mme Frulla-Hébert: O. K. We are stuck in a time frame
because I would continue for hours. I would like to talk about dubbing. With
your presentation, you are saying: Well, it is acceptable here to accept, if
you want, or our public will accept easily a French from France dubbed version.
Yesterday, we had a presentation from the Union des artistes, for example. A
very recent survey, that confirms our survey, says that now, more and more,
because our social tissue is changing and education level, et cetera, different
measures, educational measures that have been implemented are paying off and
there is resistance now, and more and more, to French dubs from France because
they are getting more colloquial - we saw it in Cannes, anyways. The problem
now is getting exactly the same as in France where they are saying that our
French, they do not understand it and now we are feeling a certain resistance.
In the survey, our people are saying that they feel now far away from what they
receive in French and 80 % of them highly prefer Québec dubbing. So, it
is, on one side, a good business and, on the other side, culturally more
acceptable.
Now, are you asking us to accept being... By your presentation, I refer
to. Are you asking us to accept being sort of treated in second plan or second
rate because we have to wait for this dubbed version, if you want, by France?
That is one question. Second question is: You are talking about doubling the
cost. Usually, a good dubbed version here, in Québec, is about $30 000
to $50 000 Canadian.
M. Edwards: More $50 000.
Mme Frulla-Hébert: More $50 000 Canadian? Canadian. Let us
say $40 000 U. S. This means
that if I go back and I refer to Mr. Valenti's saying, in playback, that
the average cost is about $23 000 000, is that a price too high to pay for,
first, doing good business in the Province? I know that 6 000 000, it is not a
big market but it is a profitable market, it is a good business, on one side.
Second, it is always, you know, like giving back also to an industry that wants
or needs it and is good enough to give it, to give a good product, and also a
population that is clearly saying to us now, more and more, that a French
dubbed version from France is less acceptable and is getting less and less
acceptable for consuming purposes.
M. Soady: I will try to respond to everything you said. First of
all, I and my colleagues have not seen a copy of the survey. So, if it would
be... if that was...
Mme Frulla-Hébert: No, we received it yesterday. It is
normal that you have not seen it, and we have some...
M. Soady: Oh! But it is very interesting. This is the first I
have been even made aware of it. We are not treating Québec as
second-class citizens, as you would point out. As a matter of fact, we are
doing everything to have Québec receive films in much faster tract, on
our films, as an industry than Europe, Japan and the rest of the world. It is
because the audience here has demanded it. The demand is there; we will meet
that demand and we go to great efforts to try to get. our French version into
Québec as quickly as possible, oftentimes a long time before it opens in
France.
To digress, before I left Los Angeles, I was in a meeting - and that is
why it was in my presentation - with the director, James Cameron, of
"Terminator 2" and he asked me where I was going. I said I was going to
Québec to discuss French dubbing. He said: It is no problem; we are not
releasing in France until October. He said: We have got lots of time to do the
French dub. I said: That is the point, you do not. And I said: It is something
we have to deal with immediately. We are not going to release 'Terminator 2" in
French in Québec in October. So, you know, get with the program.
So, that effort is there constantly in order to try to accommodate this
market. The cost of a motion picture, whether it is $25 000 000 or $35 000 000,
is the cost of making the motion picture. The additional cost of marketing the
motion picture and providing dubbing for that motion picture is just that:
additional cost. And, once you have a product, then, you look at the market
place and there are several movies in the Province of Québec that, after
advertising and costs, do not return $50 000 in box office, let alone profit.
Oftentimes, movies in the theatrical release do not work at all, and we do not
even get the money back that we expend on television.
So, whereas $40 000 or $50 000 US... The reason I am using Canadian
dollars is because that is what people pay when they go to the movies. So, we
pay $50 000 to Harold Green-berg's company to dub the movie in Canadian
dollars. When we release the movie, that is what Canadians pay for. And then,
we also are expending on television and newspaper of that money. And, believe
me, madam, there are many motion pictures that do not make that money back. So,
it is a consideration.
And, I would say that if, in fact, the public is rejecting, in their
mind, the language that is coming from France, it is the first I have heard of
it. I was always under the impression that the dubbing languages worldwide
continued to be the same. What I am told that they use here, they do not use
the dubbing facilities of Mr. Green-berg's. They do not use
"québécois" French. They use, in their terms - not mine -
Parisian French or international French.
Mme Frulla-Hébert: Just permit me to say, then, that if
this was true - which we think it is - then, in France, they would accept our
dubbing and they would not say that they did not understand it.
M. Soady: I think you are absolutely right, madam, that the
French should accept your dubbing. And this is a problem that has been tried to
be addressed by every government that has sat in this National Assembly since I
can remember. And if that problem could be solved, I am not saying that all
pictures would be dubbed in the Province of Québec but, certainly, there
would be more international trade between the two countries. (10 h 30)
Mme Frulla-Hébert: To finish, because time is pressing, I
understand your concern of entering in this market with the French copy as soon
as possible. One, it is, again, good business. Then, you profit from the
marketing effort and, so, everybody is happy. That is one side of it. The other
side is the industry. The other side is that we have good studios, extremely
good and efficient studios for dubbing, as was said. We asked questions
yesterday to different groups that were represented. We have a capacity of
employed of 21 % only, of using, "utilisation", 21 %only.
We have all our artists, we have comedians and whatever who would
benefit from the dubbing here in Québec, and I have trouble
understanding why you accept in a certain way or the company accepts the... It
is not only in France. I heard that it is also in South America, I think, for
Spanish. Why, then, is it acceptable for France and other countries that by a
sort of "décret gouvernemental", a government regula-
tion, all the dubbing has to be done in that country, if you want? And
why is it acceptable - ce n'est pas un précédent. So why is it
acceptable for other countries and would it not be for Québec,
considering the new numbers that we have, because these are our different
surveys that we are doing now? And also considering the general demand, not
only from the consumer but also now from the industry, technicians, producers
or, if you want, owners of those studios and also from our own union, if you
want. So, I am trying to see now why it is okay for one or different parts or
other parts of the world, if you want, other countries, and would it not be for
Québec which has a unique cultural and geographical sort of positioning
in the world, being 6 000 000 out of 330 000 000 anglophones, you know,
surrounding us?
M. Soady: It is... You can pass the legislation that all films
must be dubbed in the Province of Québec. I would say that not all films
will be, because all films will not be released. With all due respect of this
Province and the population, it is not as large a market as France and we can
make our money back in France on everything we release there. We cannot do that
in this unique Province here. The market is just not big enough.
I think it is a business. If you and your colleagues feel that that is
the legislation, that you are to form the legislation you want to take, I would
say to you that you will receive less films in this Province. That may be what
you want. I do not know. But if... That will be facts because then people have
to look at... people like me have to look at what is the return on our
investment. Although we like doing business here - it is, as you point out, a
good business - we are not in it for our health. We are in it because we make
money here, but once we stop making money or once it becomes so difficult or
impossible, then we will say: Well, we are sorry. We do not want to do this
anymore.
And I think you are rapidly approaching that. And I say that not with
any malice, I am just trying to point out to you that that is the fact. And,
listen, there are a lot of movies that we release that you probably do not want
to have here, but, you know, it is something that the public wants today. The
motion picture is the art form of the masses. People love it. They have an
insatiable appetite for it. They will... On a successful movie, you cannot keep
people out of theaters. On a picture that does not work, you cannot get them in
if you give it away free.
It is a very unique thing, and fragile. Although it is in places around
the world, it is considered a culture; movies are considered a culture. It goes
against what I do. I mean, we consider it a business and, hopefully, when it
really works, the culture and the business combine and, then, we have a movie
that is very successful and can tell a story for everyone.
If people reject the version that we put on the screen, we will see it
in the attendance and the dollars. There are several countries where we do not
dub at all, where the population speaks nothing but Spanish, and we release it
in subtitle. The reason we do it is because they prefer to hear the original
language, and they just pick up what they do not understand with subtitles.
That is just what they prefer and that is what we provide.
Mme Frulla-Hébert: So, just to finish... Le
Président (M. Bradet): Madame...
Mme Frulla-Hébert:... you are saying that... Because we do
have to understand this right; we have our demands and we also want, at least,
you know, for you to make good business in Québec also. You are saying
that you are providing, in other countries, what they demand. For some it is
subtitling - of course, it is less expensive - and for others, like us, we are
not used to subtitles.
M. Boulerice: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bradet): Oui, M.le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Je pense qu'en vertu des règlements de cette
commission il y a un temps réparti entre le parti ministériel et
l'Opposition officielle...
Mme Frulla-Hébert: Vous avez raison.
M. Boulerice:... et, de toute évidence, la
répartition du temps n'a pas été accordée à
sa juste satisfaction.
Le Président (M. Bradet): Alors, vous avez raison, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Je pense qu'on a
excédé de quatre ou cinq minutes.
M. Boulerice: Pardon?
Mme Frulla-Hébert: On peut lui accorder.
M. Boulerice: Dix, monsieur.
Le Président (M. Bradet): Dix minutes On va vous accorder
le même privilège. Alors, je vous reconnais, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: I think that...
Le Président (M. Bradet): Peut-être, oui, si
monsieur veut répondre à la question.
M. Boulerice:... our guest can answer the question, but that is
going to be the last one.
Mme Frulla-Hébert: Yes, it is true and you are right. We
have to observe time. It is only to say that if you accept giving in other
countries what people prefer, then, if the consumers here say that they do
prefer watching their version or hearing their version in not only French but
in Québec French, because they relate to that more, then, you would
accept, at least... And you are doing so, and you are doing an effort, and I
understand that, but, then, it is good business for you and you would accept a
sort of acquiescing to what people want.
M. Soady: Providing the financial arrangements make sense. I can
assure you that if... I just know the way things are. If this legislation
legislates that all pictures may need to be dubbed here, the cost of dubbing is
going to go up. It is a fact of life. When you have a monopoly, that happens.
It is then going... In spite of what the artists say, and I have no disrespect
for them, there is not enough people, currently, to be able to service that.
There may be. I mean, once it happens, the industry tends to gear up for it,
but I think that cost, madame, is really the point. In spite of the film
costing x number of millions of dollars, the incremental cost of the marketing
and the dubbing are a real factor. And then, one must look at the market place
Does it justify the release of the film?
I have been told on several occasions: Do not release it. We are not
going to make money in Québec on the French version. And I have said:
No, we have an obligation, if we are going to release it. So, in my own
feeling, if we are to release it in English, then, we should follow up with a
French release. And we try to do that, but it is a dollars-and-cents issue.
Thank you.
Le Président (M. Bradet): Merci, Mme la ministre. Je
reconnais maintenant le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques, en lui soulignant qu'il a aussi 30 minutes
d'intervention.
M. Boulerice: If you do not mind, I will just skip the protocol
and go straight away with the questioning...
M. Soady: Terrific!
M. Boulerice: so my time will be left We do consider that the new
Article 83 is kind of softer than the previous article, but your association is
still opposed to that new version of Article 83. You are even requesting an
exemption for two movies per year per company member of the association, in
regard to the dubbing obligations within the 60 days. Do you not think you are
going a little far?
M. Soady: What? Two per company? M. Boulerice: Yes.
M. Soady: Well, we operate as independent companies. We do not
operate as an association. I do not want one company... Let us say, if we had
ten for the association, then one company might be able to use five. Companies
operate independently.
We are asking for between 45 and 60 days. 45 days really is 42 days
because of weekends, holidays. Asking for a 15-day extension, I do not think it
is unreasonable at all.
As for two films per year, maybe it is not necessary to use that at all
in any given year. So, in answer to your question, no, I do not think it is
going too far.
M. Boulerice: Do you recognize that two movies out of three in
Québec, in their English original version, are subjected to no dubbing
in French and the average delay for dubbing them during the moratory is already
diminished by three days?
M. Roth (Millard): I do not know specifically what numbers you
are referring to, but we have been meticulously reporting on delays by our
companies for the past three years, and the number of days of delay, according
to our statistics for the eight companies which are members, is something
approximating 50 %. I think that when the Québec institute did its
survey, in fact, it recognized that there has been a very substantial
improvement in the number of days of delay, and as Mr. Soady indicated in his
presentation, there are a number of real commercial considerations that have
played a role, and will probably continue to play a role in reducing the
delay.
M. Boulerice: You said that you do not consider us as
second-class citizens. Could you recognize that 80 % of all - I do not know
what is the English word for "recettes brutes des cinémas
québécois". What? I am going to have a little help from my friend
from the Equality Party.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boulerice: They can be useful sometimes. Comment dit-on
"recettes brutes des cinémas québécois"?
M. Libman: The gross profit.
M. Boulerice: Exactly, thank you. I will vote for you next time,
I mean in the House. So, 80 % of it is made in Québec with your
movies
and if you refuse to do more dubbing here in Québec, you are kind
of increasing the French monopoly on dubbing. We are second class if we compare
to what you are doing with the French.
M. Soady: I do not comprehend really. I am sorry. We dub some of
our pictures in France. It is dubbed. My company dubs some of our pictures
here. I am trying to understand what you said. I think you said that 80 % of
the films currently released in French are dubbed in France. Is that what
you...
M. Boulerice: No. I said that 80 % of foreign movies now
presented in our movie theaters are American movies.
M. Soady: Oh yes! Okay. Pardon? (10 h 45)
M. Boulerice: Your movies, okay? It is a very important part, 80
%. The fact that those that are translated are translated in France, you give
advantages to the French dubbing industry instead of ours, and as the Minister
pointed out, our capacity is only at 21 % right now, which is dramatic for this
industry in this country.
M. Soady: Ido not know that the capacity is at 21 %. It
may well be. I am only familiar with what I am told, that if everyone or every
motion picture was dubbed in the Province, there are not the facilities to be
able to do it. So, whether the facilites are being used at 21 % or 50 % or
whatever, there is not the capacity to be able to do 100 %.
M. Boulerice: Do you find it acceptable for Quebeckers to wait
almost two months to see a movie translated into French?
M. Soady: Do I find it acceptable?
M. Boulerice: Yes. Because this is the situation right now.
M. Soady: Yes, it is the situation right now. You know, the
alternative, I mean, as I pointed out, we can have the whole system stopped and
release everything at the same time. I can tell you this, that it is oftentimes
very difficult to get the version that the film was shot in released on time.
That is why release dates are moved constantly. Films really are not finished
until a week to ten days prior to them reaching the theater, finished to the
point where the director signs off and says: That is my version, you can now go
ahead and make release prints. We cannot start to make the French track or the
French script until he is finished playing around with the film. And when he
stops doing that, then that is when we can start, if we can start right that
day. These delays are not ours; these delays are the fact of the filmmaking
process. It is not widgets, it is not something that can be stamped out; it is
something that is an art form. And when you are dealing with artists, they are
not oftentimes the most easy people to deal with.
M. Boulerice: Mr.Soady, you almost said to us that your
presence in Québec was philanthropic...
M. Soady: Philanthropic? M. Boulerice: Yes. M. Soady:
Charity? M. Boulerice: Yes. M. Soady: Huh!
M. Boulerice: You said: If we have to translate, we will not make
any money. We will have to leave this territory. You represent Tri-
Star, which is a very large company, so you probably have the figures.
How much money did you make out of your movies presented here in Québec
last year?
M. Soady: I can tell you what I grossed. I cannot tell you what I
made.
M. Boulerice: I am sorry, I did not...
M. Soady: I can tell you what the box office gross was...
M. Boulerice: Which was?
M. Soady:... which was around $6 000 000.
M. Boulerice: $6 000 000! If we start with that figure, what will
be the net profit?
M. Soady: Well, if we figure the average film rental on that box
office, around 35 %, 40 %, say, 40 % for easy math.
M. Boulerice: 40 %. M. Soady: Uh-huh.
M. Boulerice: And how much costs the dubbing, an average one?
M. Soady: $50 000.
M. Boulerice: $50 000. So you would still be making an
interesting profit.
M. Soady: How many pictures did you multiply $50 000 by?
M. Boulerice: Pardon?
M. Soady: How many pictures did you multiply the $50 000 by?
M. Boulerice: How many films?
M. Soady: I mean, you know that was not on one picture, that was
overall, on ten pictures that we released.
M. Boulerice: And how many films... M. Soady: Let us say
ten. You know... M. Boulerice: Ten.
M. Soady: On average. It is getting pretty narrow there, is it
not? And that does not count the publicity, the advertising, etc.
Philanthropy, no, but big profit center, also no. I would not insult you
by saying that we are doing business here because of charity or philanthropy.
It certainly was not my intention and if I gave you that impression, I
apologize.
M. Boulerice: You were silent, in your memoir, about Articles
109, 114 and 115 of the Cinema Act, included in the new Act. If we consider
your request, is this the kind of negotiating position that you have facing the
Government because the agreement that was signed in 1986, between Mrs. Bacon
and Mr. Valenti, is due to be renewed in December?
M. Riordan: Je pense que ce n'est peut-être pas le domaine
de M. Soady de parler de ces éléments techniques de la Loi sur le
cinéma au Québec, puisqu'il habite la Californie. Il n'a pas une
connaissance personnelle très directe. Nous, on peut en par; er, M. Roth
et moi, au niveau des associations, parce que nous les représentons ici
pour les fins de négociation avec le gouvernement. Votre question,
c'est: Est-ce que c'est une position de négociation?
M. Boulerice: Oui.
M. Riordan: On n'a pas commenté tous les articles de la
loi...
M. Boulerice: Enfin, l'exigence au renouvellement de
l'entente.
M. Riordan: Est-ce que c'est une exigence pour le renouvellement?
C'est notre position qu'on s'oppose à ces trois articles. On ne trouve
pas que c'est une façon efficace d'aider l'industrie du
cinéma.
I should say something in English, so that Mr. Roth will able to follow.
If you want to encourage the cinema industry by encouraging investment in
films, it is necessary to have a sufficient enough investment to make a
difference, and the revenues that could have been raised from the box office,
at Article 109, were trivial in comparison to what the industry really
needs.
In our view, it was a very popular, populist type of way of taking money
back from the ones who were benefiting from the system, but it was really not
solving the problem. It was not a realistic solution to the problem the
Government said it was trying to solve.
M. Boulerice: Je comprends bien que vous avez une opposition
marquée envers ces articles, mais la question que je vous pose est:
L'abrogation de ces articles est-elle une exigence de votre part, dans le cadre
des négociations sur le renouvellement de l'entente conclue?
M. Roth: The only comment that I would make with respect to 109
is that we are certainly on record there as being opposed in principle to the
mechanics of 109. We are certainly not opposed, in any way, to the Quebec
Government identifying ways and means to stimulate the making of films in this
Province. The business of our companies is to distribute films and if good
films are made here or elsewhere, they will make themselves available in a
competitive sense to bid for the rights of those pictures. But, as Mr. Riordan
has said, the numbers that would flow, even at the extreme end of the
percentages that were originally discussed in 109, would really not make a
serious dent in filmmaking per se.
And the other comment that I would make - I think that it is proven time
and time again - is that there is a lot of money today in the production system
in this Province and this Country, and money by itself is not what makes films.
It may be the glue that keeps the whole activity together. It truly is the
talent of filmmakers, and there are good filmmakers making good films. When
they make a good film, that film does not really need a whole lot of support,
because it gets support at the box office.
M. Boulerice: I do not want to torture you. but you did not
answer my questions. I know that you are not in opposition with the Government,
but my question was: Is the abrogation of Articles 109, 114 and 115 your
condition to renew you the agreement?
M. Roth: We have not established conditions for renewing any
agreement. I think we are on record with this Government, during the prior
negotiations, as being opposed to those conditions, and our position has not
changed from that.
M. Boulerice: Will the new agreement cover the video, because it
is excluded now?
M. Roth: We are in discussion with respect to video.
M. Boulerice: I see. Because in terms of the video, the agreement
should have been signed four years ago, but it has not been signed yet.
M. Roth: I am sorry?
M. Boulerice: I said the agreement on the video should have been
signed four years ago, I guess.
M. Roth: We did not have an agreement on video four years
ago.
M. Boulerice: Discussions started four years ago. I do agree with
you that maybe it was impossible to sign the next day, but it should have been
done a little earlier than that.
I guess that will be all for me. I will leave you in the hands of my
translator.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gobé): Thank you, Mr. Boulerice.
M. le...
M. Boulerice: You are welcome.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de DArcy-McGee. Je vous demanderais par contre d'être assez rapide parce
que nous avons déjà dépassé le temps d'une
quinzaine de minutes, en tenant compte du retard au moment où nous
avions commencé. Alors, peut-être pour quatre ou cinq minutes,
très rapidement, s'il vous plaît.
M. Libman: Actually, your presence here, the fact that it has
provoked the MNA from Sainte-Marie-Saint-Jacques to do his entire exchange in
English, I think, is enough of an impact you have already had on the foundation
of the National Assembly today. And I was quite impressed, as a matter of fact,
with my colleague from Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: It is just a question that my grandmother on my
mother's side was American, which puts me in a very special position: my
American roots and my pledge of allegiance to my country.
M. Libman: Which country?
M. Boulerice: Québec, of course.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de D'Arcy-McGee, si vous voulez aller au fait de votre intervention.
M. Libman: Oui, excusez-moi, excusez-moi, M. le Président.
Je sais que je devrais être bref.
Le Président (M. Gobé): Malheureusement, le temps
passe.
M. Libman: I would also like to concentrate a little bit on
Article 83 with you. This is actually the first group that shares my opinion on
Article 83. Yesterday, most of the groups felt that the imposition or the
constraint or the regulation, as such, in Article 83 was justified.
I would like to ask a couple of questions on your analysis of the
Article. Are you saying that by reducing the time frame to 45 days, it
compromises the quality of the dubbing of the film and it also puts into danger
the actual possibility of having a film ready to be dubbed in 45 days? Are
those two elements very clear here?
M. Soady: I think that certainly the latter, the ability to have
the film available in 45 days, is a concern. As I explained earlier, we will
attempt to try to meet those constraints, and we have asked for two films per
company, per year, to be exempt from those constraints, only requesting an
addition of 15 days, which is really not much.
M. Libman: But diminishing...
M. Soady: As far as the quality of the dubbing is concerned, I
would not be in a position to comment or to say that I would be the best person
to judge the quality of the dub.
M. Libman: If we ever get to the point whereby an English film
cannot be shown in Québec until the dubbed version or the subtitled
version is available at the same time, in fact, eliminating the time frame
completely, how would that impact on your position?
M. Soady: The Québec release of a motion picture would be
moved back until the French version was ready. It may be 45 days, it may be 6
months.
M. Libman: I am of the position that the francophone Quebecker
would prefer to be able to see an English film instead of having to wait for
the equivalent version to be ready, whether it is 45 days or, as you say, even
6 months later.
The last question I would like to ask is: Other precedents, other
situations, other countries or other States where you run into a similar
situation where you have to have a subtitled or a dubbed version in another
language in a prescribed time frame, do you deal with that in other instances
or is Québec the only area where you have to deal with that specific
situation?
M. Soady: I believe that Québec is the only country in the
world where we need to deal with that specific time frame. I am not, I think
Paris... I am sorry to be mumbling here, I am
just trying to... I believe it is the only place, and in all other
countries, we just delay the release of the film until the proper format is
available.
M. Libman: You deal with no other country that has a similar type
of regulation, as we have in Article 83 here, limiting the release of a film in
a language past a certain time frame. This regulation that we are dealing with
in this Act, Article 83, is unique to Québec, as far as you know.
M. Soady: Yes, as far as I know, this is the only place.
Le Président (M. Gobé): Thank you, Mr. Libman.
Étant donné que le temps est maintenant de beaucoup
dépassé, je demanderais à chacun des membres
d'émettre très rapidement les remerciements, afin que nous
puissions entendre le groupe suivant qui, lui, nous attend déjà
depuis 20 minutes. M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Well, I do not know who will negotiate with you;
there are rumors of general elections. But I will just say frankly that I would
like to negotiate with you.
Just to cut short, I hope we can meet again and go into details. I would
like to continue our dialogue. The fact that you are in LA. makes it a little
bit more attractive. So, I will probably see you soon.
M. Soady: We will be happy to receive you anytime you want to
come down.
M. Boulerice: The second week of July. Des voix: Ha, ha,
ha!
Le Président (M. Gobé): Thank you, Mr Boulerice.
Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: So, since you are negotiating with me
for a while, at least...
M. Boulerice: For a while!
M. Soady: I prefer to negotiate with her.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Frulla-Hébert: Thank you. Thank you
M. Boulerice: I know that she is more attractive than I am,
but...
Le Président (M. Gobé): Order please!
Mme Frulla-Hébert: The only thing that I. First of all, I
thank you for your being here and making the trip. Secondly, you know you have
to understand something which I did understand today, and it is specific to
private businesses, that is: for you a market is a market is a market. And for
us, we have to consider also the specificity, which is unique in the world, of
our market. Now, I just hope that our... We will work towards it, but there are
two objectives that we will combine, so that we can come to an agreement. Thank
you.
Le Président (M. Gobé): Thank you. Merci beaucoup.
Ceci met fin au témoignage de la Canadian Motion Picture Distributors
Association. Je vous remercie d'être venus et je demanderais, sans plus
tarder, étant donné le temps qui coule, à l'Association
québécoise des distributeurs et exportateurs de films et de
vidéo de bien vouloir se présenter en avant, s'il vous
plaît. La séance est suspendue pour une minute, le temps que les
gens viennent.
(Suspension de la séance à 11 h 5) (Reprise à 11 h
7)
Le Président (M. Gobé): La séance va
reprendre. Si vous voulez rapidement regagner vos places afin que nous
puissions commencer les travaux. Alors, j'inviterais l'Association
québécoise des distributeurs et exportateurs de films et de
vidéo à bien vouloir... S'il vous plaît!
Mme la ministre, nous apprécierions... Nous
apprécions.
Bonjour, monsieur. Je crois comprendre que vous représentez
l'Association.
Association québécoise des distributeurs
et exportateurs de films et de vidéo
M. Beaubien (Joseph): Oui. Mon nom est Joseph Beaubien. Je suis
le conseiller juridique de l'Association et notre vice-présidente va se
joindre à nous très bientôt.
Le Président (M. Gobé): Alors, sans plus tarder, je
vous demanderais de bien vouloir commencer la présentation de votre
mémoire.
M. Beaubien: D'abord, je vais vous dire que M. André Link,
le président, n'est pas ici aujourd'hui, mais il va comparaître
devant vous demain parce qu'il est aussi président de l'Institut
québécois du cinéma.
Le Président (M. Gobé): Nous en prenons bonne note
et je vous remercie. Vous pouvez procéder.
M. Beaubien: M. Malo.
M. Malo (René): Je voudrais juste vous mentionner quelque
chose avant de commencer
vraiment ce qui devrait être notre allocution parce que j'ai
été un petit peu surpris de l'orientation qu'ont prise les
débats qui ont précédé. À écouter
cette commission, on croirait que l'industrie du doublage est la pierre
angulaire de la culture québécoise. En effet, sur presque une
heure et demie qu'a duré cette discussion, je pense que tout ce qui est
question de doublage a pris 90 % du temps.
Le Président (M. Gobé): Je m'excuse, mais les
membres de cette commission sont là pour entendre des mémoires et
nous entendons tous les mémoires sans porter de jugement à ce
stade-ci. Nous vous accueillons pour prendre connaissance de votre
mémoire et j'apprécierais si vous pouviez en commencer la
présentation.
M. Malo: Ça en fait partie intégrante. Le
Président (M. Gobé): Merci, M Malo
M. Malo: Nous l'avons ajouté à la minute
même. On voudrait commencer, en fait, justement par la lecture d'une
lettre qui nous a été adressée, il y a quelque temps, par
Mme la ministre Bacon, à l'époque, concernant les
préoccupations que l'on avait sur la loi.
M. Beaubien: Justement, M. le Président, nous n'allons pas
vous lire tout le mémoire parce que, je pense, tout le monde en a pris
connaissance, mais je vous dirais que, dans notre cas, les annexes sont aussi
importantes que le mémoire comme tel. L'annexe D de notre
présentation est justement cette lettre. Je ne vais pas lire toute la
lettre, mais simplement trois paragraphes qui sont, je pense, essentiels dans
toute cette affaire.
Le deuxième paragraphe dit: "D'abord - ça, c'est Mme
Bacon, la vice-première ministre aujourd'hui - permettez-moi de
reconnaître avec vous l'excellence du climat de collaboration qui anime
nos rencontres et nos échanges depuis plus de trois ans. Je l'ai
toujours hautement apprécié et je tiens à vous
témoigner de mon souci de le maintenir." Donc, depuis le tout
début, depuis 1983, et même avant, nous avons toujours eu des
relations et des contacts très proches concernant cette question.
Et voici le paragraphe clé de Mme Bacon: "Je suis très
consciente, Monsieur le Président - elle s'adresse justement à M.
Link - que l'interprétation donnée par la Régie du
cinéma aux articles 118 à 122 diffère de celle que le
milieu - évidemment - et le gouvernement partageaient depuis 1983."
C'est le gouvernement - Mme Bacon - qui fait valoir que, justement, et le
milieu et le gouvernement... qu'il devait y avoir des changements. "La loi
reconnaît cependant à cet organisme la responsabilité de
son application et, partant, de son interprétation. Nous avons
l'assurance que c'est avec le plus grand souci de rigueur et
d'équité que la Régie assume cette
responsabilité."
À la page 2 de sa lettre, Mme Bacon nous amène justement
où on est aujourd'hui. "Ceci dit, Monsieur le Président, sachez
que je suis très préoccupée par nos difficultés de
mettre en application cette loi de 1983. Force m'est de reconnaître
qu'elle présente tellement de failles que je ne peux imaginer pouvoir
les "colmater" de façon solide et sérieuse. J'ai donc pris la
décision - et je l'annoncerai publiquement à très court
terme - de procéder à une révision en profondeur de la Loi
sur le cinéma. Je compte dès la session d'automne 1989
déposer à l'Assemblée nationale un avant-projet de loi en
ce sens " Et, là, nous nous trouvons avec cet avant-projet, deux ans
plus tard, et sans mention de l'article 118 qui a amené tout ce
débat.
Le Président (M. Gobé): M. Malo.
M. Malo: "Votée à l'unanimité par
l'Assemblée nationale en 1983, la Loi sur le cinéma visait, outre
les objectifs culturels, un certain nombre d'objectifs économiques, dont
le principal était de permettre aux entreprises
québécoises d'occuper une plus grande place sur le marché
de la distribution qui leur échappe encore maintenant dans une
proportion qui peut atteindre 97 %. Nous savons tous que ce sont les profits
des distributeurs qui sont réinvestis dans la production
cinématographique; or, cette saignée a pour conséquence un
sous-financement de la production québécoise qui oblige
l'État à soutenir largement le financement des projets
québécois. "L'objectif poursuivi par le gouvernement est
fortement appuyé, depuis des années, par l'industrie
québécoise du cinéma; le milieu du cinéma a eu
l'occasion de faire connaître ses points de vue lors des
différentes étapes du processus de consultation, dans le cadre
d'audiences publiques tenues par la Régie du cinéma et à
l'occasion de nombreuses consultations que le ministère a
réalisées, notamment auprès des représentants des
"majors" américains. Nous ne prenons donc personne par surprise, si ce
n'est ceux qui, peut-être, n'ont pas cru que nous étions
sérieux lorsque nous avons annoncé notre intention de
régler ce dossier. "À la voie de l'affrontement avec les
entreprises américaines, nous avons préféré celle
de la négociation. C'est ainsi que nous en sommes venus à une
entente avec la Motion Picture Export Association of America. "Au cours des
mois qui ont suivi la signature de l'entente avec la Motion Picture Export
Association of America, nous avons tenté de préciser le volet
vidéo afin d'arriver à une entente particulière sur cette
question. Nous n'en sommes pas venus à une entente malgré
beaucoup d'efforts de part et d'autre; nous avons par ailleurs la confirmation
que les "majors" reconnaissent nos objectifs. L'entente intervenue avec
les "majors", en décembre 1986, s'applique donc, tout comme la
loi, autant aux films qu'à la vidéo. "C'est ainsi qu'à
compter de septembre prochain plus de 50 articles de la Loi sur le
cinéma seront mis en vigueur. À partir de cette date, la
Régie du cinéma sera habilitée à délivrer
des permis de distribution de films, d'exploitation de salles et de gestion du
matériel vidéo et à veiller à l'application
administrative de l'entente avec les "majors". "Quant au règlement
concernant le dépôt des ententes de matériel vidéo,
attestant ce dépôt et les droits exigibles, ri vise à
contrôler la piraterie dans le domaine de la vidéo; il a pour
effet de favoriser les entreprises québécoises de distribution
sur le marché québécois, dans le respect des droits
d'auteur. "Tout ceci signifie que les entreprises québécoises
pourront profiter davantage du marché québécois de
distribution, ce qui permettra, je le répète, d'augmenter leur
capacité de soutenir financièrement la production
cinématographique québécoise. "Cela ne signifie pas,
toutefois, que la réglementation ne puisse soulever d'objections. Le
règlement sur le matériel vidéo en particulier pourrait
rencontrer des résistances. Je crois cependant que toutes les
entreprises qui font affaire au Québec sauront s'adapter à ces
nouvelles règles du jeu et se comporter en bons citoyens corporatifs. Il
incombera en effet aux entreprises québécoises et non
québécoises de se conformer à la Loi sur le cinéma
et aux règlements afférents, en prenant les dispositions qui
s'imposent afin que leurs produits puissent être légalement
distribués au Québec."
Tout ce que je viens de lire, ça ne pouvait pas être mieux
écrit et ça a été écrit par Mme Bacon, le 18
août 1988. Je pense que ça résume absolument et
complètement toute la philosophie qu'il y a toujours eu derrière
la loi sur la distribution. La question reste toujours la même: Veut-on
d'une industrie cinématographique au Québec? Si la réponse
est non, comme presque tout semble le démontrer, qu'on le dise
ouvertement. Les meilleurs créateurs s'expatrieront et vous vous
retrouverez avec une cinématographie à 90 % américaine et
il y a 1 % qui sera celle des fonctionnaires de la SOGIC.
Si la réponse est oui, prenez les mesures nécessaires,
même si ces mesures doivent être à rencontre des
intérêts serviles de certains et de la soif de pouvoir d'autres.
Redonnez à l'Institut ses pouvoirs d'orientation et d'approbation des
programmes. Qui mieux que l'industrie cinématographique sait ce qui est
bon pour l'industrie cinématographique? Il n'y a pas un fonctionnaire
qui sait mieux que nous ce qui est bon pour nous. Chacun des secteurs doit
être fort. Aucune industrie ne fabrique un produit s'il n'y a pas un
réseau de distribution et de mise en marché de ce produit. Or, un
réseau de distribution ne peut être rentable en ne distribuant
qu'un seul produit et encore moins quand il s'agit d'un produit
éphémère comme l'est le film.
Un distributeur doit avoir accès à plusieurs produits ou
faire faillite. C'est ce qui arrivera, dans les deux prochaines années,
à la très grande majorité des distributeurs
québécois qui sont artificiellement maintenus en vie par le fonds
de distribution de Téléfilm Canada. La politique de francisation
des écrans ayant éliminé les seuls films auxquels les
distributeurs avaient accès, c'est-à-dire les films
européens, la SOGIC ayant aboli le fonds automatique de distribution,
Radio-Québec ayant aboli sa case de cinéma d'auteur,
l'hécatombe surviendra dans un an et demi avec la fin du fonds de
distribution de Téléfilm Canada. Questions.
Le Président (M. Gobé): Merci, M Malo. Je vais
maintenant passer la parole à Mme la ministre des Affaires
culturelles.
Mme Frulla-Hébert: Merci, M. Malo. Bienvenue.
Premièrement, vous savez que c'est loin d'être notre intention de
ne pas favoriser les entreprises québécoises de distribution et
de faire en sorte qu'elles s'éteignent de leur belle mort. Ceci dit, je
veux revenir à la même question. Vous avez et vous soutenez une
position qui est unique, dans un certain sens. Il y a d'autres groupes,
finalement, qui ont des positions qui sont un peu différentes des
vôtres. D'une part, je veux seulement faire un aparté en disant
que, non, le doublage n'est pas la base de la culture québécoise;
c'est tout simplement que, suite à la présentation de l'UDA, il
était bon aussi d'appuyer, compte tenu de ce qu'on a entendu ce matin
par le groupe précédent.
Ceci dit, je veux vous poser, à vous deux, la même
question. Quand on parle de la distribution, quand on parle de droits, d'une
part, on a une définition, en tout cas, il semble y avoir une
définition en voyant le distributeur comme étant celui qui
distribue et, d'autre part, la définition du distributeur, c'est celui
qui a les droits, c'est-à-dire qui a les droits de reproduire, de
distribuer et aussi de faire la commercialisation. Expliquez-moi, pour vous,
c'est quoi être un distributeur, c'est quoi avoir des droits.
M. Malo: Être distributeur, ça consiste, partout
dans le monde, à acquérir des droits de distribution pour un ou
plusieurs médias de façon exclusive pour un territoire
donné, pour une période donnée. Une fois qu'on a acquis
ces droits là, on obtient du producteur, donc, la permission... Parce
que c'est un mandat, nous sommes des mandataires pour le producteur. Donc, le
distributeur est un mandataire; il représente le producteur. Dans ce
sens, il représente le droit d'auteur. Il a la permission, quand il
s'agit des droits pour les salles, à partir d'un internégatif, de
fabriquer des copies du film, autant de copies qu'il veut en montrer dans
le nombre de salles dans lesquelles il veut les montrer, premier droit,
et, automatiquement, ensuite, de faire la mise en marché de ce
film-là, de faire des ententes avec les salles de cinéma avec
lesquelles, justement, il s'entend sur le mode de partage des recettes. S'il
acquiert aussi les droits vidéo ou s'il acquiert seulement les droits
vidéo, c'est le même principe, c'est-à-dire qu'il acquiert
donc la représentation du droit d'auteur. Il obtient ce qu'on appelle
une copie maltresse, un "master", qu'il confie à un laboratoire à
qui il dit: Bon, vous allez me faire 2000 copies de ça qu'il vend
à un grossiste. Ce grossiste ensuite, lui, les vend à
différents vidéoclubs. Le distributeur est le seul, encore une
fois, qui fait la mise en marché, qui décide du nombre de copies
qu'il va faire et il est le seul responsable, face au producteur, du droit
d'auteur, ce qui fait que si, par exemple, il a les droits, supposons, pour
cinq ans, après cinq ans, il doit soit remettre au producteur la copie
maîtresse originale, soit la détruire, selon le bon vouloir
justement du producteur, et il doit aussi détruire ou remettre au
producteur, encore une fois, toutes les copies.
C'est donc un mandataire exclusif pour un droit précis. Il
n'achète pas des copies. Il n'achète pas le "master". Ça
ne lui appartient jamais. Même s'il paie pour, ça ne lui
appartient jamais. Après ça, dans la troisième
étape, la télévision, c'est la même chose,
c'est-à-dire qu'il est donc l'intermédiaire. Il représente
le producteur auprès des chaînes de télévision. Il
vend les droits de passage à des chaînes de
télévision et, encore une fois, quand ces droits-là sont
terminés, ces droits-là reviennent au producteur. Donc, le
distributeur est le mandataire exclusif dans un territoire donné, pour
une période donnée, d'un producteur qui, lui, a le droit
d'auteur.
Mme Frulla-Hébert: Alors, à ce moment-là,
vous parlez des droits globaux. Pour bien saisir aussi et comprendre la
discussion précédente avec le groupe précédent,
quand j'ai demandé à M. Edwards, au niveau de la vidéo,
par exemple, qui a les droits, M. Edwards m'a répondu, parlant de Warner
Brothers: Bien, nous, on a les droits à travers le monde et, quand on
arrive au Québec, à ce moment-là, on sous-contracte ou on
les passe à quelqu'un qui, lui, les distribue. Est-ce que c'est
ça qui se passe dans la vie? Ce que j'essaie de savoir, c'est que, si
eux ont les droits, est-ce que nos distributeurs québécois au
niveau de la vidéo, dans certains cas, deviennent des grossistes? C'est
ça?
M. Malo: Non. La confusion vient du fait que ce qu'on appelle en
français un grossiste en anglais s'appelle un "wholesaler", mais on
appelle aussi ça un "distributor". C'est venu je ne sais trop
d'où, mais la fonction de distributeur comme telle, en anglais, est
appelée "studio". Or, "studio", ce n'est pas une fonction, c'est un
état. Donc, il y a eu, si on veut, une mauvaise définition du mot
qui fait qu'à chaque fois que vous mentionnez distributeur, pour eux,
vous mentionnez grossiste.
Mme Frulla-Hébert: Hum, hum.
M. Malo: Et, donc, c'est de là que vient toute la
confusion. C'est-à-dire que Warner, quand ils acquièrent les
droits, justement des films de Lorrimar, par exemple, comme il mentionnait, ils
ont les droits exclusifs pour un territoire donné, pour une
période de temps donnée. Ils ont, par exemple, le territoire du
Canada pour une période de cinq ans. Ça comprend le territoire du
Québec. Ils ne rétrocèdent jamais ces droits-là,
c'est-à-dire qu'ils sont les seuls qui décident à quelle
date ça va sortir, combien de copies, combien ils vont dépenser
de publicité, combien de boîtiers, dans quel laboratoire ça
va être fait, dans quelle imprimerie vont être faits les
boîtiers. Ils sont les seuls à décider parce qu'ils sont
les seuls à avoir le mandat de distribution exclusive pour le
Canada.
Ensuite, qu'est-ce qu'ils font? Ils font, au Québec, la
même chose qu'ils font dans le reste du Canada, la même chose
qu'ils font aux États-Unis. Ils vendent à des grossistes, qui
sont leurs clients, pareil comme quand il s'agit... En salle, on ne vend pas
les copies parce que, là, ce sont des copies qui... Comme elles ne
s'usent pas, on loue la copie, d'une certaine façon, à une salle
de cinéma. Donc, c'est exactement la même chose, sauf que les
grossistes sont un intermédiaire, si on veut, supplémentaire, la
salle de cinéma étant le dernier point.
Dans le cas de la vidéo, le grossiste est un intermédiaire
supplémentaire entre le vidéoclub et le détenteur des
droits, sauf dans les cas où ce sont, justement, des cassettes que l'on
appelle pour la vente au consommateur; là, le grossiste pourra
peut-être vendre directement à des magasins ou vendre directement
à des consommateurs.
Mais le droit, tel que défini, de toute façon, dans toutes
les conventions internationales d'associations de distributeurs ou de
producteurs, tel que défini dans tous les contrats établis, que
ce soit par l'association des producteurs, par exemple, français ou par
l'AFMA qui est l'association des vendeurs indépendants
américains, le droit est exclusif pour un territoire donné, pour
une période donnée. Toute interprétation autre est
exclusive au Québec parce qu'il y a seulement au Québec qu'on a
interprété ça de façon différente.
Mme Frulla-Hébert: Autrement dit, M. Malo, pour clarifier,
si je comprends bien ce que vous dites, c'est qu'au Québec, pour la
vidéo, parce que, finalement, c'est surtout ce secteur-la, à part
le fait que ce soit des films québécois ou
des films autres que des films américains, les distributeurs sont
plus ce qu'on appelle des grossistes que des distributeurs, dans le sens
môme de "studio", si on veut.
M. Malo: Absolument. C'est certain. C'est-à-dire que la
définition qui est appliquée aujourd'hui a fait qu'il y a quelque
chose comme 275 distributeurs au Québec. Ça veut dire qu'il y en
aurait plus que dans tous les pays d'Europe et les États-Unis ensemble.
C'est une aberration incroyable. Ça n'existe à nulle part. Tout
le monde sait c'est quoi, un distributeur. C'est-à-dire la fonction de
distributeur, la responsabilité du distributeur, on sait c'est quoi dans
tous les pays du monde. Donc, c'est pour ça que, enfin, c'est impensable
d'avoir 275 distributeurs pour un même produit dans un même
pays.
Mme Frulla-Hébert: Oui
M. Malo: C'est parce qu'il y a la notion de protection du droit
d'auteur où il ne peut toujours y en avoir qu'un seul et même qui
est responsable, c'est-à-dire qu'à partir du moment où il
y a, par exemple, au niveau... Supposons que, sur le plan de la vidéo
justement, demain matin, il y a des gens qui ajoutent des scènes
pornographiques d'agression contre des enfants dans un film vidéo. Qui
va être responsable face à la Régie s'il y a 18
distributeurs du même film? Quand, sur le plan du film en salle, ce genre
de chose arrive, à ce moment-là, on a un responsable qui est
celui qui a la licence pour ce film-là. En vidéo actuellement,
tel que la loi est appliquée, il n'y a pas de responsable. Ça ne
saurait exister qu'il n'y ait pas un responsable pour un droit d'auteur. Que ce
soit dans le disque, que ce soit dans le livre, que ce soit dans le
cinéma, il y a toujours un seul détenteur ou représentant
du droit d'auteur pour un territoire donné, pour une période
donnée.
Mme Frulla-Hébert: M. Malo, rapidement parce que le temps
file, une dernière question. Vous demandez les droits exclusifs de
distribution dans le sens pur de distribution pour la vidéocassette.
Maintenant, il y a d'autres intervenants qu'on va entendre tantôt, qui
s'opposent à ça. Ceux-ci disent que l'exclusivité peut
avoir un impact sur le coût de la cassette, par exemple, pour les
commerces au détail. Est-ce que vous êtes capable rapidement
juste, finalement, d'élaborer votre position là-dessus? (11 h
30)
M. Malo: Actuellement, on vit une situation qui est tout
simplement détournée. Les vrais détenteurs des droits
exclusifs, de toute façon, exercent actuellement leur privilège
de déterminer les coûts. C'est-à-dire que, quand,
justement, Warner décide de vendre une cassette au Québec, ce
n'est pas ceux à qui il la vend qui déterminent le coût,
c'est lui qui détermine le coût. Sauf que ce n'est pas lui qui
vient chercher le permis actuellement, c'est ceux à qui il vend sa
cassette. Mais c'est lui qui détermine le coût.
Donc, si, demain matin, c'est lui qui vient chercher son permis, le
coût va être exactement le même. Ça ne changera
strictement rien. Ce sont les mêmes personnes qu'actuellement qui vont
être en possession des droits. Ça ne changera rien au niveau des
droits de 90 %. 95 % de ceux qui ont des droits actuellement,
c'est-à-dire basé sur l'entente qu'il y a eu avec les . majors"
américains où ils ont eu la clause grand-père et où
ils ont le droit d'être distributeurs au Québec. Donc, Hs ont le
droit, demain matin, de venir faire exactement ce qu'ils font actuellement,
sauf qu'au lieu de le faire de Toronto ils vont le faire de Montréal.
Mais ça ne changera strictement rien pour ce qui est de ces
cassettes-là Ça va changer quelque chose pour les quelques
distributeurs indépendants américains qui ne font pas partie de
l'association des "majors" américains. Mais pour tout ce qui concerne
les "majors" américains, la situation va rester exactement la même
qu'actuellement. C'est eux qui déterminent. Tous ceux qui, actuellement,
vont chercher des permis de distributeur à la Régie et qui ne
sont pas des vrais distributeurs, je mets n'importe qui au défi de me
dire que c'est eux qui ont fixé le prix de la cassette. Ce n'est pas eux
qui le fixent; c'est le détenteur des droits exclusifs qui le fixe.
Mme Frulla-Hébert: Parfait. Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la ministre M.
le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: M. Beaubien, M. Malo, dans votre mémoire,
j'ai remarqué que vous étiez d'accord avec le nouveau classement
des films en quatre catégories, sauf que la Régie du
cinéma nous dit que la quatrième catégorie est un peu
difficile d'application. La marge, 16 ans, etc., c'est un peu difficile. Vous
parlez de revoir le processus d'appel des décisions de la Régie
du cinéma sur la base des dispositions similaires à celles de la
SOGIC, sauf que, depuis le début de cette commission, je dois vous
avouer que c'est un peu la fin de la SOGIC actuellement. Alors, je ne sais pas
s'il est bon de...
M. Malo: Nous, on l'a à peine effleuré.
M. Boulerice: À peine effleuré, effectivement.
Inévitablement, je partage votre point de vue puisque j'ai la même
déception. Avant d'entrer à cette commission, j'ai relu ce
qu'avait dit la prédécesseure de la prédécesseure
de l'actuelle ministre - vous savez, ça change tellement que j'ai de la
difficulté à maintenir mon bottin à jour - et il n'y a
malheureusement
rien au niveau des droits d'auteur comme tels et, malheureusement, c'est
une grande déficience au niveau du Québec. Je crois que vous
êtes allés au fond des choses également dans votre
introduction, un peu comme notre bon ami, M. Lamothe, l'a fait hier, en posant
directement la question, et je suis heureux de voir ça, enfin je me sens
de moins en moins seul à vous entendre, M. Lamothe et vous: Est-ce que
l'on développe une cinématographie nationale ou bien si on se
cantonne dans la nationalisation des cinematographies étrangères?
Je pense que tout tient là-dedans et vous avez bien fait de le relever
pour une deuxième fois, la question est importante.
Vous avez souligné des départs vers l'étranger. On
ne va pas les nommer, mais c'est dramatique. On perd nos meilleurs
éléments qui se retrouvent ailleurs, parce que les conditions
sont de plus en plus avantageuses. Et, si c'est vrai dans la
cinématographie, vous savez comme moi que ça l'est dans la danse.
Regardons Eddy Toussaint qui a eu une route pavée jusqu'en Floride,
alors qu'ici, au Québec, on l'a laissé mourir. Donc, je pense que
ce sont des interrogations de base.
On va peut-être dire qu'il y a un comité; le comité
va remettre son rapport qui sera étudié par un comité qui
verra à établir quels sont les éléments que le
comité a préparés qui devraient faire l'objet d'une action
et un comité verra à faire l'action qui sera soumise à un
comité. Enfin, on n'en sortira pas. Mais, d'ici à ce que
ça arrive, ce qui me fait penser un peu à la pièce connue,
"En attendant Godot", qui finit par ne jamais arriver, au sujet de l'entente
que tous ont convenu d'appeler Bacon-Valenti signée, en bout de piste,
à Dorval, est-ce que vous croyez que cette entente-là a
augmenté de façon importante les revenus des distributeurs
québécois? Je ne vous demanderai pas ce que c'est un
distributeur, là.
M. Malo: La réponse est non et je vais vous dire pourquoi.
Je vais essayer de faire le plus bref historique possible. Comme vous savez,
votre gouvernement, M. Boulerice, est celui qui a passé la loi, mais,
malheureusement, ce n'est pas celui qui l'a mise en application. Je voudrais
même ici un petit peu rendre hommage à Mme Bacon qui a eu le
courage de la mettre en application. Naturellement, de fois en fois, tout est
édulcoré, c'est-à-dire entre le moment où la loi a
été... Même le premier projet de loi était plus
fort, le deuxième était moins fort, il n'a pas été
mis en application. Quand Mme Bacon est arrivée, pour le mettre en
application, elle a dit: Bon, on va faire une entente avec les
Américains pour ne pas qu'il y ait - carrément, il ne faut pas
mâcher les mots - de boycott. Donc, elle a dit: Voici ce qu'on peut
avoir.
Suite à une consultation, justement, il a été
entendu que les retombées qu'il devait y avoir pour nous étaient,
justement, les retombées de la vidéo, les retombées de la
vidéo indépendante et non pas des "majors" américains
parce que eux conservaient ce qu'ils avaient. Mais, au moins, il y avait une
toute petite parcelle des retombées économiques de la
distribution des vidéos indépendants américains,
c'est-à-dire qui ne sont pas distribués par les "majors"
américains. C'est les quelques miettes qui devaient être la
retombée de cette entente-là. Or, il s'est avéré
que la Régie du cinéma a décidé de ne pas
interpréter la loi comme elle avait été conçue dans
son esprit et comme tout le monde s'entendait sur ça, la Régie a
décidé de ne pas l'appliquer comme ça, ce qui a fait qu'on
est arrivé avec cette aberration, justement, que n'importe qui pouvait
être distributeur et que n'importe qui pouvait avoir les droits, ce qui a
fait que les retombées que l'on devait avoir, on ne les a pas eues.
Donc, il n'y a pas eu de retombées.
M. Boulerice: Votre part du marché, actuellement, elle est
quoi?
M. Malo: Dans l'ensemble des médias? M. Boulerice:
Oui.
M. Malo: Pour les distributeurs québécois, je
dirais quelque part entre 12 %et16 %.
M. Boulerice: Pas plus que ça.
M. Malo: Pas plus que ça. Ça varie. L'année
où il y a un film québécois qui éclate,
c'est-à-dire un "Déclin de l'empire américain", un
"Cruising bar", un "Jésus de Montréal", la part augmente de 2 %
ou quelque chose comme ça; sinon, ce n'est pas plus que ça. Et
c'est certain que, depuis deux ans, cette part-là a diminué et va
continuer à diminuer beaucoup à cause, malheureusement, de ce que
j'appellerais un voeu pieux et une intention extrêmement louable, mais
qui, malheureusement, a des répercussions extrêmement
néfastes sur les distributeurs québécois, qui est,
justement, la francisation des écrans. Qu'est-ce qui s'est passé,
justement? C'est qu'avant les distributeurs américains sortaient les
films en anglais et sortaient les versions françaises trois à six
mois plus tard. Donc, quand les versions françaises arrivaient sur les
écrans, elles n'arrivaient pas en même temps que les versions
anglaises, donc, elles n'avaient pas l'énorme machine publicitaire
nord-américaine derrière elles. Quand les films sortaient en
français, ils avaient très peu, beaucoup moins d'impact, ce qui
fait que les distributeurs québécois, de par leur
ingéniosité, réussissaient à faire venir dans les
salles de cinéma les spectateurs québécois pour voir des
films européens, pour voir des films québécois, pour voir
des films du monde entier. Maintenant que les films américains et
surtout les films les moins culturels américains, c'est-à-dire
les plus populaires,
sortent en même temps en français qu'en anglais, la
popularité des films non américains a baissé
énormément dans les deux dernières années, il n'y
a. presque plus de films non américains qui jpuent à
l'extérieur de la ville de Montréal. Même ici, à
Québec, les films européens font à peine une semaine ou
deux à l'affiche. Donc, on a une espèce de "backlash" que
j'appellerais culturel, c'est-à-dire que, là où on voulait
aider la francisation du Québec sur le plan culturel, qu'est-ce qu'on
est en train de faire? Ce qu'on est en train de faire, c'est imposer totalement
la culture américaine en français. C'est en français, mais
ça reste que c'est uniquement la culture américaine et, donc, les
Québécois n'ont plus accès à la culture
européenne, les Québécois n'ont plus accès
même à ce que j'appellerais la vraie culture américaine,
c'est-à-dire que les petits films américains, les films d'auteurs
américains, anglais ou australiens ne viennent plus au Québec
justement à cause de la politique de francisation.
Je pense que c'est un prix très lourd à payer pour la
francisation et Dieu sait si c'est quelque chose auquel je suis sensible, parce
que j'ai milité pendant de nombreuses années pour ça. Mais
je pense que, là, on s'est un petit peu, beaucoup trompé. Et
vouloir aujourd'hui encore plus serrer la vis, c'est-à-dire ramener les
60 jours à 45 jours, je pense que c'est même inutile parce que,
déjà, si on prend la moyenne, en 1990, entre les sorties
françaises et anglaises, c'est 34 jours, alors qu'en 1989 c'était
52 jours. C'est que les Américains ont compris que, de toute
façon, c'était plus payant de les sortir plus vite. Alors, on les
a forcés. Au début, ils ne voulaient pas et, maintenant, ils ont
compris que c'était plus payant. Donc, ils le font d'eux-mêmes,
sauf qu'ils le font d'autant plus avec les films qui sont les moins culturels,
c'est-à-dire les plus populaires. Je ne pense pas que le film dont on
parlait tantôt, justement, "Terminator", soit le film le plus culturel
que les Américains nous aient apporté. Ça m'apparaît
extrêmement grave et c'est pour ça que - c'est certain qu'on ne
peut plus revenir en arrière - moi, je souhaiterais beaucoup que l'on
s'arrête là où on en est, parce que je ne pense pas qu'il y
ait de danger là où on en est, sauf que je pense qu'au moins il
nous reste encore un peu de possibilité d'avoir accès à
d'autres cultures. Sans parler du fait que, pour les distributeurs
québécois, ça va devenir presque impossible, justement, de
distribuer les films qui sont distribués normalement par eux et qui sont
les films d'auteurs anglophones. Donc, tant les Québécois
anglophones que les Québécois bilingues ne pourront plus,
justement, avoir accès à ces films-là et je trouve
ça très dommage.
M. Boulerice: M. Malo, je pense que la politique de francisation
n'est pas incompatible avec une plus grande présence de films issus de
la francophonie. Je pense qu'il y a encore un engouement, heureusement, des
Québécois à regarder "Cyrano de Bergerac"...
M. Malo: Mais, là, vous me donnez l'exception.
M. Boulerice:... à regarder "Uranus".
M. Malo: Ça fait un an qu'on dit: "Cyrano". Donnez-moi un
autre titre.
M. Boulerice: "La Gloire de mon père", Te Château de
ma mère", les remakes de Pagnol.
M. Malo: Ces films-là n'ont pas pris l'affiche en dehors
de Montréal et de Québec.
M. Boulerice: C'est ça, laissez-moi terminer, M. Malo. Si,
géographiquement, dans cette salle, nous sommes éloignés,
nous sommes très près au niveau de la pensée. Ne
croyez-vous pas qu'un des problèmes aussi au niveau de la
présence de ces films, de la distribution... D'une part, les
régions n'ont pas de salles. Écoutez, je viens de faire une
tournée dans le Bas-du-Fleuve, c'est le désert. Il n'y a rien
à Rimouski. Heureusement, dans les villes comme Trois-Rivières,
il y a les espèces de cinémas de répertoire, mais
même encore là ça ne couvre pas. Mais vous ne trouvez pas
qu'un des problèmes fondamentaux de cela est que l'ensemble des
réseaux de salles n'est pas sous notre contrôle, il est sous des
intérêts autres que québécois? Et le seul
réseau de salles que nous avions a été vendu sans aucune
intervention de la part de la SOGIC commandée par la ministre, et
ça a été France Film. On n'a pas les salles.
Résultat, et je vous donne raison, on ne les voit pas ailleurs et "Le
Déclin de l'empire américain", on l'a vu au Crémazie, une
salle excentrique dans le nord, et à Place Longueuil, une salle
excentrique dans le sud. Ne croyez-vous pas que cela a un impact direct, le
réseau des salles? (11 h 45)
M. Malo: Non.
M. Boulerice: Non?
M. Malo: Je veux dire non dans le sens que, si vous regardez
toutes les salles de province où jouent, justement, le moins les films
européens, elles appartiennent toutes à des indépendants.
Que vous preniez Joliette, Trois-Rivières, Sherbrooke,
Saint-Jérôme, Saint-Georges de Beauce, Lévis, toutes ces
salles appartiennent à des indépendants qui ne jouent que des
films américains.
M. Boulerice: Oui, mais les salles...
M. Malo: Parce qu'ils veulent jouer le film américain qui
joue en même temps à Montréal et
dont la publicité rentre sur la télévision
américaine, sur le câble. Tout ça se tient. Justement,
quand "Terminator" va arriver, les Américains vont dépenser 15
000 000 $, 20 000 000 $ en Amérique du Nord, ça fait une vague,
une vague qui fart que ça se rend jusqu'à Saint-Georges de
Beauce. Si le film est disponible, l'exploitant veut l'avoir. S'il n'est pas
disponible, il va prendre autre chose. Mais on a tout fait pour le lui rendre
disponible et, maintenant, il est disponible.
M. Boulerice: Si je vous comprends bien, il y a des crues que
vous ne souhaitez pas pour la Beauce. Ha, ha, ha! Mais les salles en
région sont très souvent des sous-traitants, M. Malo.
M. Malo: Des sous-traitants?
M. Boulerice: Des sous-traitants des grands réseaux qui
sont à Montréal.
M. Malo: Non, les propriétaires de salles de province,
qu'est-ce qu'ils veulent? Ils veulent avoir les films qui marchent. Ce n'est
pas compliqué. C'est purement économique. Ne leur parlez pas de
culture, aux propriétaires de salles, je veux dire... Bon. Ils sont
très, très, très loin de là. Purement, purement,
purement, ils veulent les films qui sont les succès de l'heure. Avant,
ils ne pouvaient pas les avoir tout de suite, donc, ils prenaient les films que
les distributeurs indépendants leur donnaient. Puis, surtout, quand le
gros film américain devenait disponible trois mois, quatre mois plus
tard, ils le prenaient, sauf que, comme le film était moins "hot", au
lieu de faire quatre semaines à l'affiche, il faisait juste deux
semaines. Ces deux autres semaines-là, ils passaient des films
européens, des films québécois ou des films canadiens.
Aujourd'hui, le film fait quatre semaines, donc, tu ne peux plus aller dans ces
films-là, dans ces salles-là.
M. Boulerice: Est-ce qu'une des solutions pourrait être une
aide accrue à un réseau de cinémas parallèle?
M. Malo: Non, parce que la vague dont je parle se rend jusqu'aux
gens. C'est ça, le problème. Le cinéma américain
populaire est très populaire. C'est certain qu'il est très
populaire auprès des gens d'ici. Comme je vous l'ai expliqué,
c'est qu'avant, comme il était disponible un peu moins vite, il
était un peu moins populaire. Maintenant, comme on est dans la
décennie ou le siècle de la consommation rapide de la culture,
justement, on veut avoir ce qu'il y a de plus à la mode, ce qu'il y a de
plus "in", on veut pouvoir parler du dernier film. Donc, s'il est disponible,
tout le monde veut le voir. Donc, les propriétaires de salles veulent
l'avoir parce que les gens veulent le voir. Tout ça se tient. C'est
certain que les distributeurs québécois ne peuvent plus
maintenant distribuer un film québécois... Je vais vous donner
deux exemples. Quand j'ai sorti "Le Déclin de l'empire
américain", justement, on a dépensé pour le sortir,
à l'époque, quelque chose comme 25 000 $ ou 30 000 $. Quand on a
sorti "Cruising bar" l'année dernière, on a dû
dépenser 190 000 $ pour faire un lancement à peu près
semblable. Pourquoi beaucoup plus? Parce que, justement, on a une concurrence
beaucoup plus forte qu'avant des films américains.
C'est certain, et il ne faut pas se le cacher, que la popularité
des films américains est un phénomène mondial. Il ne faut
pas se mettre la tête dans le sable et jouer à l'autruche. Sauf
qu'entre accepter la réalité et pousser pour qu'on aille encore
plus vite vers la consommation de ces films, je trouve qu'il y a quand
même une marge que l'on pourrait respecter.
M. Boulerice: Je pense que vous avez raison quand vous parlez de
la télévision. Le premier média avec lequel on est en
contact, c'est la télévision. Il y a énormément de
lacunes, vous l'avez souligne, au niveau de la diffusion de films
québécois, de films canadiens et de films européens
à la télévision. Il y a une baisse marquée, on le
voit. C'est visible. Une des solutions, d'abord, serait - appelons-le comme
ça puisque c'est un vocabulaire assez usuel - un plan de relance, une
publicité accrue, un support à cette publicité. Je ne
serais pas gêné qu'il y ait un support étatique aux films
francophones pour créer une demande.
M. Malo: Mais pour ça, justement, il faut avoir des
moyens. Pour avoir des moyens, il faut que les distributeurs aient des revenus.
Comme je le disais tantôt, il ne faut pas se le cacher, les distributeurs
sont maintenus artificiellement par le fonds de distribution de
Téléfilm Canada qui se termine dans un an et demi. Quand la
"plogue" va être tirée, ça va faire mal; ça va faire
très, très mal parce que, justement, toutes les autres petites
choses qui nous soutenaient... Bon, on avait notre petit fief qui était
le Québec pour les films européens parce que, justement, il y a
juste au Québec, en Amérique du Nord, qu'on pouvait les voir. Il
y a plein de films européens qu'à New York ils ne voyaient pas.
Maintenant, même Montréal va devenir comme New York,
c'est-à-dire qu'on va voir les films européens qui se voient
à New York. C'est tout. Donc, on va devenir une ville
nord-américaine comme les autres, malheureusement.
Mais c'est toutes ces petites choses. Bon, Radio-Québec,
Radio-Canada, qui achetaient du film d'auteur et tout ça, eux autres,
ils ont tiré la "plogue", il n'y a plus de case, plus du tout, pour
ça. La SOGIC qui avait, avant, un programme d'aide automatique aux
distributeurs, pas beaucoup, une petite somme presque symbolique,
mais quand même, la première chose qu'ils ont faite, bang!
Ils ont enlevé ça. Là, tout ce qui reste, c'est le fonds
de distribution de Téléfilm et, quand ce ne sera plus là,
je crains qu'il n'y ait plus beaucoup de distributeurs québécois
qui vont être là. Et on ne peut pas penser avoir une industrie
juste de production, puts ne pas avoir de réseau de distribution pour
les faire voir, ces films-là. Ça, c'est essentiel. C'est
essentiel. Fabriquer un produit pour ne pas qu'il soit distribué, c'est
absolument inutile.
M. Boulerice: Brève question, M. Malo, puisque le temps
nous bouscule. L'article 109 disparaît. R n'est pas prévoyable
que, même dans un plan triennal, la SOGIC inclue beaucoup plus d'argent.
Qu'est-ce qu'on fait avec une cinémato-graphie nationale? On en fait
notre deuil?
M. Malo: Moi, je pense que... Enfin, nous avons eu fa chance,
à venir jusqu'ici, au Québec - malheureusement, ça
commence à être moins vrai - que nos créateurs ne partaient
pas ailleurs. Ils ne partaient pas ailleurs, d'une part, question de langue.
Contrairement au Canada anglais où les créateurs s'en vont
beaucoup aux Etats-Unis, les nôtres n'ont pas été
portés à s'en aller vers la France. On a vraiment des
créateurs extraordinaires. R faut vraiment, c'est la seule solution,
avoir un cinéma - notre marché étant petit, d'une part -
qui va être le plus populaire possible sur notre marché, mais
aussi qui va s'exporter. Pour ça, il ne s'agit pas de faire un
cinéma bâtard, de faire un cinéma à recette, pas du
tout; il s'agit de faire un cinéma original. Mais, pour faire un
cinéma original, il faut que les créateurs - et, quand je dis
"créateurs", j'inclus les producteurs dans ça, je mets mon
chapeau de producteur, et même les distributeurs qui ont quand même
une connaissance, justement, une sensibilité par rapport au
marché - que tous ces gens-là, en équipe, justement,
pensent et produisent des films, et non pas que ce soient, comme
malheureusement c'est de plus en plus, des fonctionnaires qui décident
des films qui vont se faire.
Je sais qu'il y a des choix et qu'il faut qu'ils se fassent, mais les
structures, telles qu'elles sont actuellement, ont fait que les fonctionnaires
sont devenus avec un pouvoir énorme. Je pense que, quand il y a eu la
première révision de la loi, ça a été une
très grave erreur d'enlever les pouvoirs d'orientation qu'avait
l'Institut du cinéma québécois et de redonner, d'une
certaine façon, après, ces pouvoirs-là officiellement
à la ministre, mais, en fait, ça revient beaucoup beaucoup plus
à la SOGIC qu'avant. La SOGIC a beaucoup plus de pouvoirs alors qu'avant
l'Institut qui est constitué... Il ne faut pas l'oublier, l'Institut, ce
n'est pas un corps, un organisme; c'est d'abord et avant tout un conseil de
l'ensemble des représentants de l'industrie. Et j'ai été,
heureusement pour moi parce que ça a été pour moi une
expérience extraordinaire, justement, sur le premier conseil de
l'Institut pendant trois ans et c'était formidable d'avoir, justement
tous les éléments de chacun des secteurs où, quand on
n'est pas ensemble, très souvent, ah oui, bon, les producteurs disent:
Les réalisateurs, ils tirent toujours la couverte, et les
réalisateurs disent: Les producteurs, c'est des bandits et tout
ça. Mais, quand on se retrouvait à une même table, il y
avait une entente extraordinaire, justement, où on en arrivait toujours
à savoir ce qui était le mieux pour l'industrie.
Aujourd'hui, on se fait dire par des gens qui n'ont jamais fait un film
de leur vie, qui ne connaissent rien, ni à la production, ni à la
mise en marché, ni à l'exportation de films, quels sont les films
qu'il faut faire, de quelle façon il faut les faire, quels sont les
programmes qu'il faut pousser, plutôt l'un que l'autre. Je trouve que
c'est une très, très grave erreur. Il faut revenir aux sources.
Les sources, c'est de demander aux gens ce qui est le meilleur pour eux. Et
c'est certain que ce n'est pas à eux à l'appliquer, ce sera
toujours à la SOGIC à l'appliquer, mais que les orientations et
Tap-probation des programmes passent par l'Institut, ça m'apparaît
une chose essentielle pour notre avenir.
Le Président (M. Gobé): Merci. M. Malo. M. le
député de Sainte-Marfe-Saint-Jacques. merci.
M. Boulerice: Un merci très vaste, M. Malo, M.
Beaubien.
Le Président (M. Gobé): Mme la ministre, un
remerciement très rapide, s'il vous plaît.
Mme Frulla-Hébert: Encore là, merci. Merci de votre
présence. Comme vous savez, on écoute ici tous les groupes.
Certains ont des points de vue autres, des points de vue totalement divergents
et on essaie, dans l'ensemble, de voir, pour la population
québécoise, d'une part, et pour l'industrie, de l'autre, les
mesures que l'on peut mettre en place pour remplir les divers objectifs qui
sont d'aider l'industrie dans toute sa chaîne et aussi de satisfaire le
public québécois qui, selon le dernier sondage de l'UDA, demande
aussi à 86 % des films américains.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la ministre. M.
Beaubien, M. Malo, merci beaucoup. Ceci met fin à votre intervention. Je
demanderais sans plus tarder, et je ne suspendrai pas les travaux, à la
Fédération professionnnelle des distributeurs et exportateurs de
films du Québec de bien vouloir prendre place tout de suite car nous
avons suffisamment de retard, et je demanderais aux membres de cette commission
de bien vouloir rester autour de la table pour que nous
puissions procéder tout de suite. Alors, je vous remercie
beaucoup et je vous demanderais de bien vouloir vous présenter et
commencer votre intervention sans plus tarder.
Fédération professionnelle des
distributeurs et exportateurs
de films du Québec
M. Joli-Coeur (Claude): Mme la ministre, membres de la commission
de la culture, mon nom est Claude Joli-Coeur, je suis président de la
Fédération. Je suis accompagné de M. Roger Khayat,
vice-président et trésorier.
Notre Fédération regroupe 12 entreprises de distribution
québécoises. Elle constitue le groupe le plus
représentatif de notre industrie. Notre mémoire a des
commentaires sur l'ensemble de la réforme législative et je vais
les reprendre dans l'ordre que la loi a déterminé.
Dans un premier temps, le plan triennal de soutien au secteur
privé du cinéma. Alors, nous saluons l'établissement d'un
tel plan triennal de soutien financier au secteur privé du
cinéma. Avec une telle politique au niveau financier, la SOGIC aura
maintenant la possibilité de mieux planifier ses investissements dans la
production et la distribution de films québécois. Nous
souhaitons, toutefois, que des moyens à la mesure des ambitions et des
possibilités du secteur privé du cinéma
québécois soient disponibles à la SOGIC. Sans l'injection
additionnelle de fonds, la cinématographie québécoise et
son exploitation demeureront limitées. À titre de distributeurs
des oeuvres audiovisuelles produites au Québec, les membres de la
Fédération se préoccupent grandement de la qualité
et du nombre de productions québécoises. Le succès et la
solidité de notre industrie dépendent directement de ces
produits. Nous recommandons donc que l'assistance financière soit la
plus automatique possible de façon à donner à l'industrie
toute la latitude nécessaire pour que le développement du
cinéma se fasse selon les besoins spécifiques du marché
québécois.
Le projet de loi propose d'ajouter quatre membres à la
composition du conseil d'administration de l'Institut québécois
du cinéma. Nous proposons que les télédiffuseurs hertziens
et payants aient chacun un siège au sein de l'Institut. Ces
télédiffuseurs jouent un rôle déterminant dans notre
industrie et il y a environ 10 sociétés établies au
Québec qui ont des obligations, par le Conseil de la radiodiffusion
canadienne, d'investir dans la production québécoise. Leur point
de vue au sein de l'Institut serait sûrement bénéfique
à l'orientation des politiques proposées par l'Institut. (12
heures)
Au niveau du classement, on a vu depuis le début des
années soixante que le Québec est certainement la
société en Amérique du Nord où la question du
classement des films a connu une évolution fulgurante. L'extension du
système de classement à la vidéo permettra sûrement
de normaliser les pratiques que la majorité des clubs vidéo avait
déjà l'habitude de respecter en matière d'accès au
matériel dont l'usage premier est destiné aux adultes. Il est
cependant malheureux que l'ensemble de cette industrie n'ait pas réussi
à temps à s'autodiscipliner afin d'éviter un
contrôle de l'État dans ce domaine. Dans ces circonstances, la
Fédération reconnaît le bien-fondé de la
législation proposée. Nous recommandons, toutefois, que la
Régie du cinéma tente d'harmoniser tout processus de classement
au niveau national afin d'éviter que les distributeurs n'aient à
traiter avec une dizaine d'organismes de classification différents.
L'émission des visas. Les changements législatifs
proposés en matière de version doublée en français
d'un film et en matière de version sous-titrée constituent
certainement une mesure répondant aux aspirations du public
québécois. La question du doublage avec la France demeure,
cependant, entière et la Fédération presse le gouvernement
du Québec de relancer ce dossier.
L'exploitation en salle demeure une entreprise très
risquée et la durée d'exploitation d'un film en salle est de plus
en plus courte compte tenu du très grand nombre de produits disponibles
et du nombre de salles qui demeure limité. Les distributeurs
québécois disposent de peu de moyens pour lancer leurs films et
font face à une concurrence exceptionnelle en ce qui a trait aux films
américains des membres du MPAA. Ces films, qui bénéficient
d'une notoriété à l'échelle du continent, sont
lancés avec des moyens considérables. Ils occupent un nombre
toujours très élevé des écrans
québécois. Dans ces circonstances, les films étrangers ou
québécois demeurent isolés et les moyens disponibles pour
leur mise en marché restent très restreints. La
Fédération propose donc que le soutien financier du gouvernement
québécois au secteur privé du cinéma comporte un
programme particulier visant à assister financièrement le
lancement de films distribués par les distributeurs
québécois. Cette assistance serait limitée au lancement
des films et non à leur acquisisition et l'aide de l'État ne
serait récupérable que des revenus provenant de la salle. Les
distributeurs québécois étant particulièrement
impliqués dans la distribution de films québécois et
européens, il s'agirait là d'une aide directe pour un
cinéma en langue française et un cinéma différent
de l'offre générale du produit américain.
Les permis de distributeur. L'ajout de l'article 105.3 constitue
certainement un complément souhaité à l'article 105.1. Il
est, en effet, difficile de concevoir que des distributeurs étrangers
puissent bénéficier d'un traitement particulier au Québec
alors que des distributeurs canadiens d'autres provinces ne peuvent faire
affaire ici. La pratique de l'article 105.1 a eu pour effet, par les
années passées, de créer un
phénomène de rejet des distributeurs
québécois dans d'autres provinces. On peut, entre autres, penser
au programme OFIP de l'Ontario; un film ne pouvait être financé
par ce programme sans qu'un distributeur exclusivement ontarien ne soit
impliqué. L'article 105.3 permettra, nous l'espérons, d'amenuiser
les disparités entre les distributeurs du pays.
On constate, au niveau du pouvoir de réglementation qui est
apporté par la réforme législative, encore des changements
entre les pouvoirs du gouvernement et ceux de la Régie. Notre
mémoire développe particulièrement le pouvoir de
réglementation pour la qualification d'un film québécois
qui est prévue à l'article 168.2 II existe déjà une
réglementation qui qualifie ce qu'est un film québécois,
mais la loi prévoit que 1a définition pourrait changer
rétroactivement. Nous nous inquiétons d'une telle
possibilité car le financement des productions audiovisuelles qui se
qualifient comme films québécois dépend souvent de
l'avantage financier lié à cette qualification. Par le
passé, il s'agissait de l'abri fiscal; maintenant, il s'agit du
crédit d'impôt. La possibilité qu'un tel film soit
décertifié parce que ne rencontrant plus de façon
rétroactive les critères qui étaient alors en vigueur est
susceptible de créer des conséquences financières
désastreuses pour les producteurs et, en bout de piste, pour les
distributeurs, si ces derniers ont été associés
financièrement à la production du film. Dans ces circonstances,
nous demandons qu'un mécanisme de "grand-périsation" soit mis en
place advenant une telle rétroaction du règlement.
Finalement, la question de l'article 118. La pratique a voulu que des
ententes non exclusives dans le domaine de la vidéo soient devenues un
processus courant pour la distribution de ces produits au Québec. La
Fédération soumet qu'imposer la mise en place d'ententes
exclusives de distribution, de par la loi, n'aurait pour ultime effet que de
bénéficier, à l'occasion, à quelques distributeurs.
Dans ces circonstances, nous soumettons que la pratique actuelle demeure la
meilleure façon de procéder compte tenu des contraintes actuelles
du marché.
Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. Mme la
ministre.
Mme Frulla-Hébert: Je voudrais d'abord vous souhaiter la
bienvenue. Deuxièmement, comme le temps nous presse encore, je vais
reprendre, sur le dernier point, ce que vous avez dit. D'une part, le groupe
précédent prône les ententes exclusives au niveau de la
vidéo, entre autres. Vous êtes dans la même industrie
représentant autant de groupes et vous êtes, en fait, contre les
ententes exclusives en disant aussi que, finalement, les ententes exclusives
amèneraient les distributeurs à faire, par exemple, des offres
financières pour distribuer le matériel vidéo au
Québec sans que ça donne plus de bénéfices
tangibles à l'industrie. J'aimerais que vous m'expliquiez deux choses.
D'abord, pour vous, encore une fois, la notion de distributeur, c'est quoi?
Parce que, si vous êtes contre les ententes exclusives, ça veut
dire que, pour vous, les distributeurs sont, dans la notion américaine
du terme, des grossistes, si je vous entends bien, d'une part. Est-ce que c'est
ça? Deuxièmement, expliquez-moi donc la position: puisque vous
êtes exactement dans la même industrie, finalement, comment peut-il
y avoir un groupe qui prône, oui, les ententes exclusives et l'autre qui
dit. Non, pas d'ententes exclusives?
M. Joli-Coeur: Au niveau de la vidéo, peut-être
qu'il y a une nécessité d'aborder ce média-là de
façon un peu différente de la salle et de la
télévision. La salle et la télévision
amènent plus naturellement la notion d'exclusivité. On peut
difficilement imaginer que plusieurs distributeurs aillent vendre le même
film à la télévision. De par le moyen technique de ce
média-là, c'est impensable. La salle, compte tenu de la
façon dont fonctionne l'industrie au Canada, c'est également
très difficile d'imaginer que deux distributeurs auraient les droits
pour le même film dans un même marché. La vidéo,
c'est un peu différent parce que la pratique a voulu qu'un
intermédiaire prenne une part très, très active dans la
mise en marché de la vidéo entre le détenteur des droits
et l'utilisateur. Au Québec et au Canada, on l'a vu, la pratique est
très courante de procéder par des grossistes qui ont chacun une
clientèle particulière. Au bout de la ligne, si on instaure la
notion d'exclusivité, on n'évitera pas les grossistes à
moins qu'on fasse un cartel artificiel et qu'un distributeur décide
d'éliminer certains grossistes pour mettre en marché leurs
produits. De notre point de vue, ça ne donnera rien de plus. Ça
va être sûrement avantageux pour le distributeur qui va avoir le
produit.
Dans notre association, il y a des distributeurs qui ont des lignes
exclusives en matière de vidéo, mais ils les ont obtenues de par
la seule loi du marché, pas par une obligation législative qui
force absolument à avoir une exclusivité. Si, par la loi,
l'exclusivité est amenée, si. moi, je suis détenteur des
droits et qu'il n'y a qu'une seule personne qui peut les distribuer dans le
marché québécois, c'est sûr que je vais leur
demander de me faire une proposition financière et je vais faire monter
les enchères.
On a vu exactement la même chose dans la distribution de films
canadiens. M y a quatre ans, avant que le fonds de Téléfilm
Canada existe, un distributeur pouvait acquérir au maximum pour 25 000 $
un Mm canadien J'ai vu des acquisi tions do filins qui onl 6lé des
grands succès du box-oflice au niveau des films québécois,
il y a quatre ans, avoir été acquis pour 25 000 $.
Maintenant, c'est impensable d'acquérir un film à moins de
200 000 $ du simple fait qu'on a établi un mécanisme artificiel
d'aide à l'acquisition, qui a fait que tout le monde se rue sur le
produit pour l'acquérir compte tenu de moyens qui n'ont rien à
voir avec le marché. Alors, on risque d'avoir exactement la même
situation en matière de vidéo compte tenu de la façon dont
les choses fonctionnent maintenant.
Mme Frulla-Hébert: Ce que vous dites alors...
M. Joli-Coeur: Je m'excuse. Pour compléter...
Mme Frulla-Hébert: Allez-y.
M. Joli-Coeur: ...au bout de la ligne, qui va perdre s'il y a une
trop forte enchère des distributeurs? Comme on procède par voie
de minimum garanti, c'est le distributeur québécois qui va
perdre. S'il fait bien, s'il récupère sa garantie, il ne sera pas
dans une meilleure position que si le produit avait été acquis
sans mécanisme d'exclusivité.
Mme Frulla-Hébert: Si je vous comprends bien, alors, vous
prônez plus la position de l'exclusivité par la loi du
marché, c'est-à-dire...
M. Joli-Coeur: Absolument.
Mme Frulla-Hébert: ...sans réglementation; en fait,
c'est tout simplement une proposition d'affaires.
M. Joli-Coeur: Absolument, oui.
Mme Frulla-Hébert: Je veux revenir aussi à la
notion de distributeur. Je reviens encore à votre définition de
distributeur. Encore une fois, si je vous entends bien, si j'ai bien
perçu, pour vous, alors, le distributeur, dans votre définition
de vidéo toujours, c'est un grossiste ici, au Québec, versus
celui qui a les droits de reproduire, de distribuer, tel qu'on le
définissait avec le groupe précédent. Est-ce que j'ai bien
compris, là?
M. Joli-Coeur: Mon collègue aimerait peut-être
préciser.
M. Khayat (Roger): Mme la ministre, un distributeur, finalement,
c'est la compagnie, c'est la personne physique qui prend le risque financier et
lui avance de l'argent pour des droits. Un grossiste? Le distributeur donne au
grossiste le droit de commander des copies. Un grossiste ne prend pas de risque
financier. Il y a x nombre de copies qui sont commandées d'un grossiste.
Le distributeur lui livre les copies et ça s'arrête là. Le
distributeur en tant que tel, c'est lui qui prend le risque. Si le film marche,
c'est lui qui fait de l'argent; si le film ne marche pas, il ne fait pas
d'argent. Alors, c'est ça, la notion entre les deux.
Nos collègues américains sont des distributeurs qui
passent par des grossistes et des sous-grossistes, ou des clubs vidéo
directement, ou des chaînes de clubs vidéo directement, qui
achètent directement d'eux. Si on rajoute un intervenant
supplémentaire, oui, il est possible que les prix montent. Cet
intervenant ne va pas travailler pour rien. Il va sûrement se prendre une
commission, il va sûrement se prendre quelque chose, peu importe le
produit.
L'esprit de la loi en tant que telle, on le comprend et c'est
très louable. Malheureusement, il est contourné; c'est ça
que la pratique démontre. Il est contourné d'une manière
où, finalement, les distributeurs ne sont pas les distributeurs, ne
prennent pas les décisions financières; ils deviennent tout
simplement des "front", excusez le terme anglais, ils deviennent tout
simplement des agents avec une certaine commission pour faire le travail, ce
qui va augmenter le prix. Si le cas était contraire, on serait pour
ça, oui. Mais on sait très bien que la pratique n'est pas
ça, malheureusement.
Mme Frulla-Hébert: Alors, si je comprends bien, au niveau
de la pratique, outre les intentions, ce sont les Américains qui
contrôlent.
M. Khayat: Au niveau de leurs produits, oui. Au niveau des
"pick-up" qu'ils font également, oui.
Mme Frulla-Hébert: Si je vous demande...
M. Khayat: Excusez-moi. Mais il y a certains distributeurs
québécois qui ont, quand même, des lignes
américaines.
Mme Frulla-Hébert: Oui.
M. Khayat: Mais ce sont des lignes américaines qu'ils ont
payées. C'est la loi du marché. Ils étaient prêts
à mettre de l'argent, ils l'ont mis. Je veux dire, on aurait pu
également le faire, nous. C'est une décision à prendre,
c'est une décision administrative, c'est une décision
d'affaires.
Mme Frulla-Hébert: Mais est-ce qu'il y a accès
à ça?
M. Khayat: Oui, il y a accès à ça.
Mme Frulla-Hébert: C'est-à-dire que, si un de nos
distributeurs décidait, lui...
M. Khayat: De proposer de l'argent.
Mme Frulla-Hébert: ...selon la vraie notion
de distributeur là, d'aller chercher justement les droits, de
payer pour...
M. Khayat: Payer pour.
Mme Frulla-Hébert:... et de venir les distribuer dans le
marché, est-ce qu'il a accès à ça ou s'il y a dans
la vraie pratique une espèce de - passez-moi l'expression -
protectionnisme des droits, ce qui fait que les Américains, eux, gardent
Leurs droits, tel qu'on a entendu tantôt au niveau de Warner Brothers, et
insistent pour les faire distribuer par ce que vous avez qualifié comme
étant des grossistes ou des "front"?
M. Khayat: Bien, mon collègue, et son compétiteur
qui a passé avant nous, a quand même les droits de distribution de
Paramount en français au Québec. Il est allé les chercher.
Il a quand même payé pour. Paramount, ce n'est quand même
pas la petite compagnie, c'est assez gros. Si un distributeur
québécois décide d'investir x nombre de millions pour
aller chercher Warner Brothers et que la proposition est saine
financièrement pour Warner Brothers, je ne verrais pas pourquoi Warner
Brothers dirait non. Paramount n'a pas dit non.
Mme Frulla-Hébert: Si la situation était telle
qu'au niveau de l'article 116 nous l'abrogions pour inclure, justement, la
notion d'exclusivité, si on veut, vous parlez d'un troisième
palier ou d'une espèce de troisième palier. Comment fait-on?
C'est facile de dire: Bon, bien, voici ce qui arrive là. Mais comment
fait-on pour abolir ce qu'on appelle le "front"? (12 h 15)
M. Khayat: Le problème, possiblement, n'est pas au niveau
de l'article, Mme la ministre. Le problème est possiblement au niveau de
la réglementation de la Régie. Nous avons un problème
majeur car le dépôt d'une simple lettre d'entente pour avoir les
droits de distribuer un produit en vidéo au Québec est suffisant.
Ce n'est pas un contrat direct avec un producteur et un distributeur; c'est un
distributeur qui accorde des droits, tout simplement par lettre, à des
sous-distributeurs pour aller chercher les timbres ou aller classifier les
films ou quoi que ce soit Possiblement, le problème est là; vous
vous ramassez possiblement avec 15, 20, 25 intervenants au niveau de la
Régie, et ça c'est un règlement, qui se ramassent avec les
mêmes droits. Peut-être que le problème est là.
Mme Frulla-Hébert: Mais, selon vous, qu'est-ce...
M. Khayat: Ce n'est pas tellement au niveau de l'article, c'est
au niveau de la réglementation.
Mme Frulla-Hébert: Oui, oui, d'accord, c'est au niveau de
la réglementation. Mais, si je vous disais: Bon, il faut y apporter des
changements et tout ça, selon vous, selon la pratique
présentement et votre expérience, qu'est-ce que ça devrait
être?
M. Khayat: Premièrement, il faudrait laisser la loi du
marché décider elle-même si un distributeur
québécois va aller chercher certains droits ou non. Il faut lui
laisser le choix, d'une part. D'autre part, au niveau de la
réglementation de la Régie, il y a beaucoup de travail à
faire afin de garder le contrôle, finalement, du nombre de copies
vidéo imprimées par celui qui a réellement les droits de
distribution, qu'il soit "major" américain, qu'il soit distributeur,
oui, mais pas obliger de faire passer un distributeur par un sous-distributeur
tout simplement comme "front".
Mme Frulla-Hébert: Pour vous, ce serait la façon
d'éviter les "fronts".
M. Khayat: Possiblement, oui. Mais c'est une question qui est
assez délicate, qui a besoin... On propose, d'ailleurs, dans notre
mémoire, avant que la Régie commence à réglementer,
de s'asseoir avec le monde concerné parce qu'if y a
énormément de mécanique impliquée dans cette
nouvelle loi et, avant que la Régie prenne des décisions, on
apprécierait beaucoup être consultés. C'est beaucoup plus
complexe que ça. Il y a beaucoup de problèmes. Même moi,
qui représente la compagnie France Film, j'ai eu un problème
dernièrement, il y a deux semaines, avec la Régie. Finalement,
j'avais déposé un contrat exclusif et quelqu'un d'autre avait
réussi à aller chercher un visa pour le même film. Bon, il
y a eu un problème là. Qu'est-ce qui s'est passé? Bon, on
va le savoir plus tard. Alors, il y a quelque chose. C'est beaucoup plus
complexe. Je pense que c'est à la Régie de s'asseoir avec les
intervenants et d'essayer de trouver une solution.
Mme Frulla-Hébert: Mais, finalement, si une telle
situation se passe, est-ce qu'on peut dire que c'est parce que la notion de
distributeur, donc de droits - parce que, quand tu as les droits, tu ne te
retrouves pas avec deux personnes allant chercher le même film... Alors,
est-ce que, finalement, le problème se situe beaucoup plus, comme on en
discutait tantôt, à ce niveau-là?
M. Khayat: Le distributeur est la personne qui a les droits. Les
autres, c'est des sous-distributeurs, c'est des grossistes, c'est des "fronts",
vous pouvez utiliser le terme que vous vouiez. Obliger un distributeur à
se trouver un paravent pour le Québec, c'est à peu près
ça que vous êtes en train de faire. Il va se trouver des
paravents. Il va se trouver des compagnies, des fausses compagnies, passer par
un intermédiaire pour distribuer son produit. Qu'est-ce
que ça va causer, ça? Ça va causer l'inflation des
prix, oui, et des clubs vidéo, entre autres, qui achètent
directement de certains distributeurs; ils vont être obligés de
passer seulement par un et il va y avoir inflation de prix. Mais, si, par
exemple, sans réglementer et sans obliger, du monde peut aller chercher
ces droits-là, bien, ça, c'est la loi du marché.
Là, je veux dire, bon, on a investi de l'argent, on essaie d'avoir un
retour, c'est comme ça que ça fonctionne. C'est comme le produit
européen. C'est le même problème. Je veux dire, on
achète un produit européen, on met de l'argent minimum garanti,
on le distribue ici à nos risques et périls. Et,
dernièrement, je tiens à vous dire que c'est à nos risques
et périls.
Mme Frulla-Hébert: Bon, bien, alors, les autres sujets que
vous avez abordés, on en prend bonne note et on va regarder ça au
niveau de la classification. Je veux juste, quand même, faire une mise au
point. Si on a parlé de classifier ou de reclassifier, ce n'était
pas parce que, au moment où on se parle, au niveau des marchands
vidéo, l'industrie ne s'autodisciplinait pas. Du tout. C'était
tout simplement au niveau d'un certain consensus social qui se faisait autour
de la violence de plus en plus recrudescente, d'une part, et,
deuxièmement, tout simplement, une question beaucoup plus de protection
de la jeunesse. Je tenais à mettre, quand même, ça au
clair. Alors, merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la ministre. M.
le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Oui. L'entente, qu'on a convenu d'appeler
Bacon-Valenti, vient à échéance en décembre. Est-ce
que vous souhaitez son renouvellement comme tel? Si oui, avez-vous des
améliorations à proposer afin de renforcer les entreprises
québécoises de distribution?
M. Joli-Coeur: Sur le renouvellement, sans aucun doute, dans la
mesure où un exercice de confrontation ne nous mènerait pas
très loin. Si l'entente n'est pas renouvelée, on peut quand
même imaginer qu'on va avoir des problèmes opérationnels au
niveau du produit américain, ici.
Au niveau de l'amélioration de la situation des distributeurs
québécois, c'est vraiment en ayant des mécanismes
d'assistance financière au niveau du lancement des films, comme on l'a
souligné dans notre mémoire. C'est la clé. Le lancement en
salle d'un film, c'est sa vitrine, c'est la condition de base pour un
succès en vidéo et, de nos jours, compte tenu d'un achat de plus
en plus sélectif des diffuseurs, c'est aussi la chance, si le film a eu
une notoriété de par ce lancement-là, la
possibilité que les gens veuillent le voir aussi à la
télévision et que les téléspectateurs guident le
choix des acheteurs.
On fait face à une situation dramatique maintenant où des
distributeurs québécois ont acheté beaucoup de films, ont
des stocks considérables de films, et les diffuseurs ne les
achètent plus. Peut-être qu'une des raisons pour lesquelles ils ne
veulent plus les acheter, c'est que les goûts des
téléspectateurs ont changé parce qu'il y a eu une
impossibilité de lancer des films, de donner ce goût du produit
différent, parce qu'il y a une banalisation du produit américain
qui est dramatique.
M. Boulerice: Vous avez formulé une proposition au
chapitre de l'aide à la diffusion. On sait que l'aide à la
diffusion, c'est, quand même, un maillon assez important dans l'industrie
cinématograhique. Vous avez parlé d'un programme d'aide pour le
lancement de films distribués par des Québécois. Ce
programme-là, il devrait être élaboré comment pour
répondre à vos attentes, d'une part? Deuxièmement, comment
se fait-il que la SOGIC - quoique nous n'ayons plus la Société
générale du cinéma qui, malheureusement, est disparue au
profit d'une nouvelle Société qui s'appelle la SOGIC - n'ait pas
encore mis sur pied un programme de mise en marche?
M. Joli-Coeur: On a tous beaucoup de réserves sur la
façon dont la SOGIC peut fonctionner au niveau du secteur de la
distribution, mais il reste qu'ils sont un peu victimes de la concurrence des
aides gouvernementales. Régulièrement, Téléfilm
Canada arrive avec des programmes d'aide qui sont plus attrayants que les
leurs, si bien qu'ils se trouvent relayés et ça meurt au
feuilleton, les gens décident de ne plus aller chez eux parce que les
programmes ne sont pas avantageux. Il reste que Téléfilm Canada
n'a quand même pas réponse à tout. Un mécanisme
d'aide par lequel uniquement l'aide au lancement... M. Malo, tout à
l'heure, mentionnait 200 000 $ pour lancer un film comme "Crusing bar". Lancer
un film comme "Une Histoire inventée", ça a coûté
aussi 200 000 $.
Le Président (M. Gobé): Malheureusement, je me dois
de vous interrompre car la cloche qui sonne est pour appeler un vote en Chambre
et je vais donc devoir libérer les députés afin qu'ils
puissent y aller. Alors, je vais suspendre les travaux et nous reviendrons. Le
vote peut durer une quinzaine de minutes.
M. Boulerice: Écoutez...
Le Président (M. Gobé): 15, 20 minutes,
peut-être plus.
M. Boulerice: ...ça va sonner encore deux minutes. Je vais
poser une dernière question à M. Joli-Coeur.
Le Président (M. Gobé): Oui, d'accord. À
ce
moment-là, on pourrait conclure maintenant.
M. Boulerice: Vous parlez d'harmoniser avec celle du Canada. Mais
comment ça se passe au Canada, le classement?
M. Joli-Coeur: Au niveau de l'aide au lancement de...
M. Boulerice: Non, non, en matière de classement de
matériel vidéo.
M. Joli-Coeur: Ah! en matière de classement. Il y a des
programmes qui sont différents dans quelques provinces; certains
programmes nécessitent d'avoir des timbres sur les cassettes. Il n'y a
pas une province qui est semblable présentement. Alors, le distributeur,
selon l'endroit où il envoie sa cassette, doit procéder à
un étiquetage qui peut être différent. Il peut avoir
affaire à des normes qui sont différentes.
Le Président (M. Gobé): Mme la ministre, le mot de
la fin.
Mme Frulla-Hébert: Je vous remercie, évidemment,
bon, les travaux l'exigeant. Je veux seulement faire un point aussi. Vous vous
êtes inquiétés du fait qu'un article du projet de loi
prévoit la rétroactivité au niveau du règlement sur
la reconnaissance du film québécois. Je veux tout simplement vous
rassurer: c'est une approche normale pour permettre de rendre applicable une
déclaration du ministre des Finances.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la ministre. Je
vous remercie beaucoup. On doit mettre fin cinq minutes plus tôt,
malheureusement, mais le vote a prédominance sur toutes nos
activités en cette Chambre. Alors, je suspends les travaux
jusqu'à 15 h 30 cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 26)
(Reprise à 15 h 46)
Le Président (M. Gobé): Un collègue a
présenté une motion non annoncée en Chambre et Mme la
ministre devait écouter attentivement ce qui se disait, comme tous les
parlementaires.
Ceci étant dit, je déclare la séance de la
commission de la culture ouverte. Nous allons donc, cet après-midi,
procéder à la suite des auditions prévues pour cette
journée. Je ferai un bref rappel de l'ordre du jour pour cet
après-midi. Alors, à partir de 15 h 30, donc, dès
maintenant, jusqu'à 16 h 30, nous allons entendre l'Association des
commerçants de matériel vidéo du Québec; de 16 h 30
à 17 h 30, l'Association des producteurs de films et de
télévision du Québec et, de 17 h 30 à 18 h 30,
l'Association des propriétaires de cinémas du Québec.
Enfin, nous clôturerons cette journée, si je peux le dire ainsi,
de 18 h 30 à 19 h 30, en entendant la Société
générale des industries culturelles.
M. Boulerice: II y a une erreur dans l'agenda, M. le
Président.
Le Président (M. Gobé): Oui, M. le
député.
M. Boulerice: À 19 h 30, vous devez ajouter: ouverture des
cérémonies pour l'anniversaire de la secrétaire de la
commission, Mme Tanguay.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gobé): Alors, nous en prenons
bonne note et soyez assurés que ça figurera au
procès-verbal. Je me joins à tous les membres de cette commission
pour lui souhaiter un joyeux anniversaire.
Alors, maintenant, je demanderai donc aux représentants de
l'Association des commerçants de matériel vidéo du
Québec de bien vouloir se présenter et de commencer leur
exposé.
Association des commerçants de matériel
vidéo du Québec
M. Martel (Jean-François): Merci, M. le Président.
Mon nom est Jean-François Martel. Je suis avocat de profession. Les
membres de l'Association, leur exécutif, m'ont donné le mandat
d'être leur porte-parole aujourd'hui devant vous. Je suis
accompagné de la présidente de l'Association, Mme Sylvie
Sauriol.
Le Président (M. Gobé): Bonjour, madame, bonjour,
monsieur. Vous pouvez commencer votre présentation.
M. Martel: Merci, M. le Président. Mme la ministre, madame
et messieurs les parlementaires, merci, d'abord, de nous accueillir dans le
cadre de ces consultations particulières. Je crois que cette invitation
traduit bien l'importance que vous reconnaissez à notre association
comme intervenant dans le milieu du cinéma québécois,
importance que l'on peut résumer par quelques chiffres. Je vous souligne
que, chaque fois, au cours de notre intervention, que nous nous
référerons à des données chiffrées, nous les
tirerons de cette étude, de ce rapport réalisé pour le
compte du ministère par l'Institut québécois du
cinéma, publié en mars 1990.
Donc, ce chaînon important du commerce au détail du
matériel vidéo au Québec représente un chiffre
d'affaires annuel de 200 000 000 $, 6000 emplois directs - je crois que c'est
un élément qu'il faut souligner - dans des centaines
d'entreprises québécoises, représente également 24
000 000 $ pour les gouvernements et constitue - je crois que, ça aussi,
il convient de le
souligner dans l'aspect culturel de notre mission - 2000 points de
distribution de la culture au Québec. Un beau chaînon dans
l'ensemble de l'industrie du cinéma, mais à la fois, bien que
ça puisse, au premier coup d'oeil, paraître paradoxal
peut-être, un secteur d'industrie fragile. Et, là encore, quelques
données chiffrées suffiront à le démontrer.
Depuis près de cinq ans maintenant, la location de
matériel vidéo, qui représente la large part du commerce
de nos membres, est en stagnation au Québec. En sept ans, le prix de
location d'une vidéocassette a diminué de 33 % en termes
réels, de 10 % en chiffres absolus. La marge bénéficiaire
du commerce de matériel vidéo au détail,
déjà mince, va en s'amenuisant d'année en année.
Les normes d'inventaire requis pour opérer ce genre de commerce ne
peuvent être financées par emprunt garanti. Enfin, le revenu moyen
généré par un commerce au détail de vidéo au
Québec est nettement inférieur à celui comparable
généré par des commerces identiques ailleurs au Canada ou
même à l'étranger.
Ce sont là des données qui vont camper les prises de
position de notre association puisqu'il y va du sort même de nos membres
et de leur survie dans l'avenir, à ce moment crucial où le
législateur s'apprête à intervenir de façon majeure
dans l'industrie.
Nous "adresserons" trois sujets qui nous intéressent
particulièrement. Bien sûr, le projet de loi en couvre bien
davantage, mais notre association a choisi de se limiter aux points qui ont un
impact direct sur l'exploitation de nos commerces. Le premier a trait au
classement du matériel vidéo, des films en général.
D'emblée et dès l'ouverture, je veux vous dire, au nom des
membres de l'Association, combien nous épousons les principes, les
objectifs poursuivis par la législation proposée. Evidemment, la
protection de notre jeunesse ne laisse personne insensible, en tout cas, parmi
les membres de notre association. Ce que nous élaborerons, toutefois,
dans notre mémoire dont vous avez sans doute pris connaissance, ce sont
certaines interrogations pour vous inciter à bien couvrir tous les
aspects de la question et à vous assurer que les dispositions nous
touchant et qui comportent une certaine part de contraintes ne resteront pas
vaines parce que isolées.
Il est bien sûr qu'un système de classement auquel seraient
soumis les détaillants de matériel vidéo s'avérera
inefficace, infructueux s'il n'est pas accompagné de bien d'autres
mesures, d'abord et avant tout, si je peux m'exprimer ainsi, de
l'éducation des adultes, des parents responsables de notre jeunesse,
puisque, par la nature même du matériel que nous vendons, que nous
mettons en marché, il s'agit d'une consommation, non pas publique, comme
c'est le cas, par exemple, pour les films en salle, mais privée,
à la maison. Donc, c'est à cet endroit où le produit sera
consommé que la surveillance devra être faite. Nous estimons que
les parents doivent être sensibilisés en premier lieu,
incités à assumer leur responsabilité première
à l'égard de notre jeunesse. Nous estimons également que
d'autres médias devront être appelés à être
partenaires dans cette mission sociale que vous nous propose/ Je fais
référence particulièrement au médium de la
télévision, que ce soit la télévision
conventionnelle ou qu'il s'agisse plutôt de la télévision
payante, ou même des nouvelles technologies de télévision
à la carte. Si les autorités gouvernementales n'obtiennent pas de
ce médium qu'il se discipline, les efforts que nous aurons ensemble
déployés seront vains.
Notre association s'est livrée à une étude de ce
qui est paru en avril 1990, en décembre 1990, en mai 1991, de juin 1990
à mars 1991, à la télévision. Bien sûr,
aujourd'hui, je ne vous ferai pas une lecture, une nomenclature complète
et exhaustive de ce que nous avons trouvé, mais seulement de quelques
extraits qui vous permettront, je crois, de constater combien il est important,
pour le succès même de l'entreprise que nous abordons ensemble
aujourd'hui, que vous ne négligiez pas cette dimension. Par exemple,
à la télévision conventionnelle, ouverte et accessible
à tous et à toutes, on peut constater qu'à des heures de
diffusion très accessibles aux jeunes, c'est-à-dire jamais plus
tard que 20 heures, on retrouve des titres qui ont été
diffusés et qui apparaissent dans le répertoire des films
classés "18 ans et plus" ou refusés par la Régie du
cinéma, dans le répertoire qui couvre la période de
janvier 1980 à septembre 1989, l'édition de novembre 1989. Donc,
à la télévision conventionnelle, à des heures qui
ne sont pas très tardives, 20 heures le soir, on retrouve des films que
notre Régie du cinéma considère comme devant être
réservés à un auditoire de 18 ans ou plus ou même
des films qui ont tout simplement été refusés par cette
régie pour diffusion au Québec.
Vous retrouverez, que ce soit sur les réseaux anglophones de
télévision payante ou sur les réseaux francophones, de
très nombreux films qui contiennent des avertissements concernant la
nudité: 30, par exemple, au mois d'avril 1990 et 26, en décembre
1990; 6 films, en avril 1990, contenaient un avertissement concernant la
violence extrême, 9, en décembre 1990. En mai 1991, sur 93 longs
métrages présentés à Super Écran, vous
verrez que 3 ne s'adressent qu'aux adultes, 9 renferment des scènes de
nudité, 10 renferment des scènes de nudité et de violence
et 18 renferment des scènes de violence. Donc, 40 longs métrages
sur 93 auraient dû être contrôlés pour que nos jeunes
n'y aient pas accès.
Il serait utopique et dangereux de se donner bonne conscience en
contrôlant la circulation du matériel vidéo au
détail sans aborder de front la question des autres médias.
Évidemment, notre secteur d'industrie ne peut, à lui seul,
régler tous les problèmes de notre société; il n'en
a pas les ressources et ce n'est pas son rôle. Notre gouvernement,
à cet égard-là, devra non seulement nous demander,
à nous, de faire notre part et de collaborer, mais il devra s'assurer
aussi que tous les partenaires mettront l'épaule à la roue.
Le deuxième point qui nous intéresse
particulièrement, c'est celui, bien sûr, de la distribution.
À cet égard, la position de l'Association est bien connue et
depuis fort longtemps. Malgré l'état précaire de sa
situation financière, notre association n'a jamais réclamé
de privilèges, n'a jamais réclamé qu'on assujettisse
d'autres intervenants du milieu du cinéma québécois
à des règles particulières, n'a jamais
rédamé que d'autres secteurs du cinéma
québécois nous soient subordonnés et nous ne changerons
pas cette attitude-là. Ce que nous réclamons, c'est que les
règles du marché libre, de la saine concurrence soient
préservées, j'irais même jusqu'à dire soient enfin
rétablies. (16 heures)
Bien sûr, les privilèges de certains nous ont nui par te
passé et risquent d'être encore plus néfastes dans
l'avenir, particulièrement lorsque quelques individus décident
d'en abuser. Nous ne sommes pas ici pour faire un bilan des interventions
gouvernementales passées. Par exemple, sur la raison d'être
même du privilège qui avait été accordé aux
distributeurs québécois, c'est-à-dire financer, supporter
le secteur de la production locale québécoise, nous n'avons pas
d'avis à exprimer sur ce que fut cette expérience. A-telle
résulté en un échec ou, au contraire, en une
réussite? Ce que nous constatons toutefois, c'est que, par l'abrogation,
dans le projet de loi, de l'article 109, cette mission semble bien
terminée, réussie ou pas. Cette obligation du secteur de la
distribution de soutenir celui de la production ne fera plus partie de la
loi.
Nous ne sommes pas ici pour vous réclamer de réinstaurer
une règle coercitive quelconque à l'égard d'un autre
secteur de l'industrie. Nous sommes ici pour vous dire que la raison
d'être du privilège accordé aux distributeurs originaires
ne faisant plus partie de la loi, nous ne voyons aucune raison, historique en
tout cas, de maintenir ce privilège. Nous sommes bien conscients que
certains intervenants voudraient, à l'inverse de ce que nous
prônons, aller plus loin encore au niveau du privilège des
distributeurs et le rendre, en quelque sorte, exclusif. Mais nous ne sommes pas
seuls - en tout cas, comme spectateurs, cet avant-midi, nous avons pu constater
que d'autres intervenants tiennent le même genre de discours que le
nôtre - à croire qu'il ne serait ni à l'avantage des
consommateurs québécois ni à l'avantage de l'industrie du
cinéma québécois que ce privilège soit maintenu et,
à plus forte raison, encore accru par une exclusivité totale, de
sorte que c'est une demande que nous vous faisons, étant donné
les changements survenus depuis l'ancienne loi, étant donné le
comportement de certains intervenants, d'abolir ce privilège parce que,
en fait, nous n'avons absolument, nous, les commerçants au
détail, aucune objection de principe à faire affaire avec des
distributeurs québécois. Il faut bien le comprendre. On ne veut
tout simplement pas que la loi nous force dans le choix de nos partenaires
d'affaires, surtout quand nos partenaires d'affaires s'avèrent nos plus
féroces compétiteurs.
Le troisième point que nous touchons dans notre mémoire,
c'est celui des mesures d'application et de contrôle prévues
à la loi. Il est bien sûr que la loi est importante, mais je pense
ne rien apprendre à personne ici en vous disant que toute la
réglementation qui en découlera sera tout aussi importante dans
le vécu quotidien des intervenants du milieu. Bien sûr, la loi
prévoit que les divers secteurs intéressés seront
consultés. Et c'est louable, c'est même nécessaire. Mais,
comme règle générale, nous vous demandons de faire preuve
de parcimonie dans ta loi et dans la réglementation, de ne pas
être un État omniprésent, intervenant et qui
s'ingère. Et nous prenons à témoin les informations qui
apparaissent à cette étude de l'Institut québécois
du cinéma à laquelle je vous référais tantôt,
particulièrement au tableau qui apparaît à la page 68 de ce
rapport où l'on note que le marché français de la
vidéocassette est un des plus réglementés au monde. En
utilisant les données disponibles dans cette étude-là,
nous constaterons que, si, au Québec, par habitant, il se dépense
30 $ par année en consommation de matériel vidéo, en
France, à cause de cette réglementation trop restreignante, il
s'en dépense 10 fois moins.
Si on prend l'exemple contraire des pays où les règles
gouvernementales sont, pour ainsi dire, réduites au minimum, sinon
totalement inexistantes, on constatera, en Australie, par exemple, que la
consommation annuelle par habitant augmente jusqu'à 41, 76 $. On
constatera au même tableau que le revenu moyen de nos entreprises de
détail québécoises est bien inférieur à ce
qu'il est ailleurs au Canada, à ce qu'il est aux États-Unis et
dans d'autres pays, si bien que l'ingérence gouvernementale n'est pas
souhaitable dans ce cas-ci. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Merci. M. Martel.
Votre temps est maintenant écoulé. Vous allez pouvoir
continuer à dialoguer avec Mme la ministre. Mme la ministre, vous avez
la parole.
Mme Frulla-Hébert: Je vous souhaite la bienvenue à
tous les deux, Mme Sauriol, Me Martel Permettez-moi de vous féliciter
pour la qualité de votre mémoire, d'une part. Vous nous avez
présenté, de façon très éloquente et aussi
très fouillée, la position des commerçants de
matériel vidéo. Je dois vous dire aussi qu'il est
primordial que tous les aspects des questions touchées par la Loi sur le
cinéma soient pris en considération et que ceux qui viendront la
modifier aussi soient pris en considération. Ce ne sera pas des
décisions faciles à prendre. Nous sommes là pour
ça, mais nous essayons, quand même, de le faire dans le plus grand
consensus possible.
Dans votre mémoire, vous avez touché, comme vous dites,
à trois choses, dont deux qui me préoccupent
particulièrement. Premièrement, vous êtes d'accord pour que
l'État intervienne plus vigoureusement afin d'assurer que, quant aux
produits qui sont mis à la disposition de la jeunesse, on ait une
meilleure garantie de leur protection, d'une part. Donc, on touche maintenant
au classement. J'aimerais savoir si le classement tel que
présenté dans le règlement, pour vous, au niveau de votre
commerce, c'est applicable.
M. Martel: Tel que présenté, madame, il comporte
d'énormes contraintes. La position adoptée par notre association
est la suivante. Il serait trop dommage de nous imposer toutes ces contraintes
et de ne pas atteindre l'objectif visé. C'est pourquoi nous "priorisons"
d'abord que les démarches vis-à-vis des parents et des autres
médias soient entreprises en même temps. Parce qu'il sera inutile,
absolument inutile, de nous imposer ces contraintes, au niveau de commerce de
détail, si on ne fait rien d'autre pour les deux autres aspects que je
mentionne.
Une fois que vous aurez élaboré cette attaque frontale,
globale, si je peux m'exprimer ainsi, oui, vous pourrez compter sur la
collaboration des commerçants au détail. Mais, et c'est là
qu'on rejoint le troisième point que j'abordais, les modalités,
que devraient-elles être? Il faut qu'elles soient les moins irritantes
possible, les plus efficaces possible et les plus abordables possible aussi
parce que personne ne roule sur l'or ici, y compris notre gouvernement.
Alors, je pense que les commerçants au détail sont ceux
qui, en premier lieu, sont capables de vous donner les mesures efficaces,
rentables, administrativement opérables pour atteindre votre objectif.
Il ne faut pas utiliser une médecine de cheval qui va tuer le patient,
autrement dit.
Mme Frulla-Hébert: Je comprends votre point. Maintenant,
vous savez, d'ailleurs, les coûts sociaux qu'engendre, bon, toute la
violence, l'exploitation sexuelle. De plus en plus, la technique fait en sorte
que les images sont tellement réelles qu'effectivement les enfants
peuvent en être profondément affectés. Nous avons
reçu, d'ailleurs, différents groupes représentant des
parents, des psychologues, des professeurs, etc., qui, eux, nous demandent
d'aller encore plus loin. Il s'agit maintenant de voir ce qui est faisable et
comment, finalement, trouver une espèce de juste mesure à
l'intérieur de tout ça.
Je suis d'accord quand vous dites qu'il y a lieu de faire des pressions
au niveau de la télévision. Bien que la télévision
relève d'un système, comme le CRTC là, qui est
fédéral, il est possible de le faire. Maintenant, dans la mesure
où nous faisons des pressions au niveau de la télévision,
il faut aussi, dans ce que nous contrôlons, pouvoir donner l'exemple,
parce que c'est difficile de dire à la télévision:
Réglementez-vous là et, nous, on le fera après. Alors, de
là l'intention de dire: Parfait, sur ce que, nous, on contrôle,
ensemble, on va essayer de pallier à ce qui fait ou ce qui semble faire
un consensus social, c'est-à-dire de protéger nos enfants, d'une
part, et, deuxièmement, ensuite, ensemble d'aller faire des pressions au
niveau des téléviseurs qui ne sont pas loin, non plus, non
d'accepter, mais qui sont assez conscients de leur rôle comme
éducateurs, veux veux pas, et de leur rôle social aussi pour se
plier à certaines exigences.
Ce qu'il ne faut pas, c'est avoir des mesures au niveau de la loi qui,
d'une part, soient là pour nous donner bonne conscience, comme vous
dites - et je reviendrai à l'article 109 tantôt - et, d'autre
part, qui ne soient pas applicables.
Alors, il y a le groupe, par exemple, des propriétaires des
salles de cinéma qui, eux, voient d'un très bon oeil un
classement un peu plus rigoureux, comme ça se fait partout ailleurs dans
le monde. Mais je voudrais aussi que ça soit applicable au niveau de la
vidéo. Alors, expliquez-moi comment. Si je vous renvoie la balle et que
je vous dis: II faudrait resserrer, il faudrait essayer de resserrer. Vous
faites votre effort, on sait que, bon, les cassettes, on parle de
"sexploitation", etc., sont mises à l'écart. Mais, si on vous
demande, là: Pour répondre à ce qui fait un consensus
social, aidez-nous à resserrer, qu'est-ce que vous me répondez
là-dessus?
Mme Sauriol (Sylvie): En fait, nous, de toute façon, on
s'est déjà prononcés à cet effet-là. Ce
qu'on vous recommandait et ce qu'on recommande aussi dans le mémoire,
c'est d'apposer un classement indicatif. Le but n'est pas de louer une
vidéocassette pour 18 ans à un mineur. Ce n'est pas du tout
ça. Il faut juste comprendre comment ça circule, une
vidéocassette. Il arrive, en tout cas, à l'occasion, que des
parents vont même appeler avec le téléphone cellulaire; ils
sont à la porte du commerce et ils disent: J'ai réservé
deux vidéocassettes, mon fils monte les chercher, pour les commerces qui
sont au deuxième étage, ils ne sont pas tous dans un
deuxième, je parle pour moi. On fait quoi dans ce temps-là? Je
dis: Non, vous montez. Et pour les retourner? Les gens vont venir chercher les
cassettes, mais, dans, je dirais, 40 %, 50 % et
puis même 60 % des cas, ce sont les enfants qui ramènent
les cassettes. Alors, pour manipuler la cassette à la sortie, pas de
problème. Pour la ramener, je dis à l'enfant: Non, non, je ne
peux pas l'accepter. Il faut que ce soit ton père qui me la rapporte. Il
y a un problème, là. (16 h 15)
Alors, on ne pense pas que le problème, c'est de manipuler la
cassette. On pense que la journée où on va rendre un classement
indicatif, où on va informer les gens que ce film-là est pour 13
ans, 16 ans, 18 ans... Quant aux 18 ans, ils sont déjà dans des
salles à part, donc où les jeunes n'ont pas accès. Alors,
pour les 18 ans, le problème ne se pose même pas, là. Ils
sont déjà dans une pièce, à l'intérieur du
magasin, où les jeunes n'ont pas le droit d'entrer. Pour les 13 ans et
les 16 ans, rendre l'information, juste pour les parents... Parce qu'il y a des
films qui peuvent être pour 13 ans et les parents peuvent décider
que leur enfant de 12 ans va l'écouter; ça, on n'a pas de
contrôle là-dessus, ça devient la décision du
parent. Il s'agirait juste de rendre cette information claire et accessible aux
parents. Il ne faudrait pas que ce soit un système très
compliqué où c'est tel timbre. S'il y avait déjà
juste des roulettes de timbres qui étaient fournies et qu'on disait:
Telle liste, c'est 13 ans et tu mets tous les timbres dessus, pour que ce ne
soit pas quelque chose de compliqué de dire que le titre du film "fitte"
avec l'âge et que, là, tu vas le repérer, parce qu'on a
aussi beaucoup de titres en inventaire, là.
Il ne faudrait pas, non plus, que ce classement-là ait pour effet
de retarder la sortie de certains films parce que la Régie aurait
à les visionner tous. Par exemple, tous les films erotiques qui vont
dans la salle des 18 ans. la Régie n'a pas à les visionner. Tu
mets le timbre 18 ans et ça va dans... Il y a d'autres lois qui
protègent pour empêcher que ce soit des cassettes
illégales. Donc, il y a d'autres lois qui sont déjà en
place pour protéger ça; ça fait que ça ne
changerait rien à ce niveau-là. Il faudrait avoir un
système simple, efficace où, finalement, les parents auraient
déjà... On serait un pas en avant de toutes les provinces et de
tout ce qui se fait au Canada, d'ailleurs. Dans la plupart des autres
provinces, les mesures qu'ils ont, c'est un cartable; ils repèrent le
titre et ils vont chercher la classification.
Mme Frulla-Hébert: Au niveau de la classification, par
exemple, je veux juste revenir à l'âge. Quand vous dites que les
parents envoient leurs enfants en chercher, etc., l'argument que d'autres
groupes nous apportaient, la semaine dernière, c'est qu'on restreint,
par contre, le permis de conduire à 16 ans, par exemple. On restreint
l'âge de la consommation d'alcool à 18 ans, par exemple. Et on
disait que, dans la plupart des écoles, maintenant, d'une façon
ou d'une autre, il y a des cartes, là. Les étudiants
possèdent, au secondaire, par exemple, une carte pour prendre l'autobus,
le transport en commun, etc. Donc, ils ont des identifications. Alors, selon
les autres groupes, compte tenu - c'est sûr que c'est plus de trouble,
là - des moyens à la disposition, c'est un faible prix à
payer pour le bénéfice qu'on peut en retirer comme protection de
la jeunesse.
M. Martel: Si vous me le permettez, madame, il y a une grande
distinction que peut-être ces groupes-là ne font pas lorsqu'ils
s'adressent à vous en vous citant ces exemples. La consommation
d'alcool, les salles de cinéma publiques, l'utilisation d'une
automobile, ce sont tous des comportements en public que l'on contrôle,
que l'on régit. Ce que vous devez envisager, quand vous voulez
"adresser" la question du matériel vidéo, c'est que ce n'est plus
un comportement public, mais bien une consommation en privé. Les
règles de contrôle ne peuvent pas être les mêmes.
Quand un commerçant remet de main à main à un jeune une
cassette vidéo, il n'y a pas consommation du produit à ce
moment-là. Ce qu'il faut contrôler, c'est la consommation du
produit, la visualisation du produit, dans certains cas, si l'enrobage est
inacceptable. D'accord? Mais le simple fait de tenir physiquement l'enrobage
entre ses mains ne porte aucun préjudice au jeune. Alors, c'est pour
ça que la solution à la consommation privée à la
maison doit être, par la force des choses, différente de tous ces
exemples que l'on vous cite et c'est pour ça que l'intervention active
des parents est à ce point cruciale, dans ce cas-ci.
C'est bien sûr que, quand on parle d'une salle de cinéma ou
d'un débit de boissons, là, à ce moment-là,
l'autorité parentale va être déléguée
à des personnes qui vont contrôler l'accès à ces
lieux-là qui sont autres que la maison. Mais à la maison, chez
eux, dans leur foyer, c'est les parents qui doivent exercer ce contrôle,
madame. Alors, c'est pourquoi |e pense qu'il faut faire cette
distinction-là.
Autant, par exemple, l'aménagement de certaines pièces
particulières, dans les commerces au détail, a pu être un
élément de réponse pour les films ou les matériels
pour 18 ans et plus, autant ça ne sera plus adéquat pour
distinguer un 13 ans, un 14 ans, un 16 ans, parce que, là, c'est
l'élément informatif qui doit primer. On doit savoir le contenu
bien plus que de le cacher dans tel ou tel autre coin. Donc, quand vous me
posez la question. Est-ce que, dans sa forme actuelle, le projet de loi
répond bien? avec respect, pas entièrement parce que la solution
pour ces autres catégories que les 18 ans ne passe certainement pas par
un aménagement intérieur des lieux du commerce.
Le Président (M. Gautrin): Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: Mais justement pour
terminer, je voudrais parler un peu de distribution. Vous parlez de
sensibilisation des parents. Vous avez raison là-dessus et les autres
groupes psychosociaux etc., aussi nous disent, finalement, que ça
commence par là, que ça commence par l'éducation. Mais ne
trouvez-vous pas que le fait qu'un parent se doive de venir lui-même
chercher la cassette pour 16 ans et plus, par exemple, qu'on demande que ce
soit un adulte, c'est une façon qui est assez forte, si on veut, pour le
conscientiser? Parce que c'est très différent d'arriver à
un parent et de l'écrire ou de le faire savoir sur la cassette versus de
lui dire: II faut que, toi, tu fasses l'acte d'aller la chercher, de l'amener
à la maison et, après ça, si tu veux la montrer à
ton enfant, c'est ta responsabilité. Excepté que, nous,
finalement, comme citoyens responsables, on trouve que c'est pour 16 ans et
plus, et que ça peut être dommageable, bon, qu'un enfant de 8 ans,
10 ans voie une cassette ou, enfin, un contenu semblable.
M. Martel: Ce que vous venez de dire est absolument logique,
madame. On doit le reconnaître. Et ce que vous venez de dire à la
toute fin de votre intervention, c'est qu'il faut informer, indiquer que, si le
parent décide de laisser aller et de laisser cette cassette-là
à la maison à l'accès de ses enfants, bien, ça sera
sa responsabilité. C'est ce que nous qualifions d'indicatif. Mais est-ce
qu'on aura atteint notre objectif si on n'a pas contrôlé la
télévision? Je faisais allusion tantôt à des
horaires de 20 heures le soir, midi le jour, mais, dans le fond, c'est nier
aussi l'existence du phénomène des appareils qui enregistrent les
émissions télévisées. Vous savez, quand même
un film passerait à 3 heures du matin, si on l'enregistre, on peut le
consommer à 14 heures aussi.
Alors, si on ne conscientise pas les parents à prendre toutes
leurs responsabilités à la maison, on va échouer
lamentablement. On aura peut-être eu l'illusion de révolutionner
le monde, mais on n'aura rien réglé comme problème. Ce qui
est important dans le fond, c'est d'éduquer et d'informer, d'indiquer ce
qu'il y a dans le produit qui pourrait être néfaste pour nos
jeunes ou pas.
Mme Frulla-Hébert: Parfait. J'aimerais
Le Président (M. Gautrin): Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: ...passer rapidement à
l'exclusivité ou la non-exclusivité au niveau de la distribution.
On a entendu plusieurs groupes ce matin II y a des groupes qui étaient
pour une certaine exclusivité au niveau de la distribution. D'autres
semblaient contre. Par contre, quand on pose des questions, on
s'aperçoit qu'il y a une espèce de point de ralliement et il
semblerait, en tout cas selon notre compréhension, que le mot, enfin, la
définition de distributeur n'est pas claire. C'est-à-dire que,
d'un côté, on parle de grossistes, c'est-à-dire de gens qui
distribuent, qui font l'acte de distribuer tout simplement, et, de l'autre, on
parle, et à juste titre, d'aller payer, chercher les droits et d'avoir
la responsabilité, finalement, de reproduire et de diffuser ce
produit-là.
Moi, j'aimerais que vous m'en partiez plus. Vous avez une très
grande réserve au niveau de cette exclusivité, au niveau des
distributeurs. Votre réserve se traduit aussi par une augmentation du
prix de la cassette, en bout de ligne, au niveau du consommateur. On est
très sensibles à ça, c'est sûr. Alors, j'aimerais
que vous élaboriez pour le bénéfice de la commission.
M. Martel: Ce dernier élément que vous venez de
mentionner, il ressort clairement de l'étude de l'Institut
québécois du cinéma. Alors, on n'a pas à revenir
là-dessus. Les coûts; il n'y a pas que cette raison-là,
mais les coûts sont là au Québec, évidemment, et ce
n'est pas en accordant une exclusivité totale qu'on va régler le
problème. Je pense que la raison impose qu'on considère
plutôt que c'est en laissant aller les règles du marché
qu'on va maintenir un niveau de compétition, de concurrence suffisant
pour faire en sorte que le consommateur paie le moins cher possible en bout de
ligne. C'est une règle fondamentale de l'économie de
marché. Bon.
Oui, on a une énorme réserve, madame. C'est un
euphémisme. On est contre le principe de l'exclusivité. Pas parce
que ça a trait à la définition d'un distributeur, cela ne
nous concerne pas. On est contre parce que ça nous assujettit, ça
nous subordonne à quelqu'un d'autre. Ça nous oblige à nous
approvisionner chez quelqu'un alors qu'on voudrait, comme notre
clientèle peut le faire, avoir le choix. C'est cette dimension-là
qui nous intéresse, nous. Vous savez, la définition idéale
d'un distributeur ou d'un grossiste, ça ne nous concerne pas. Ce qui est
important pour nous, c'est la liberté que nous avons ou que nous n'avons
pas de nous approvisionner aux meilleures conditions possible et là
où nous obtiendrons le meilleur service possible, dans les plus courts
délais possible, avec la plus grande variété possible et
ainsi de suite. C'est tout ce qui nous importe.
Nous sommes conscients du contrôle, par exemple, que l'État
veut exercer sur le piratage. J'entends encore les remarques d'un intervenant
ce matin. Mais je pense que des étiquettes numérotées qui
permettent d'identifier la source, comme c'est le cas actuellement, de chaque
cassette, évitent, en présence de plus d'un distributeur qui
aurait distribué cette cassette-là, de se méprendre sur la
personne responsable de tout écart aux dispositions de la loi ou des
règlements. Ce que je vous dis simplement, c'est que le système
actuel d'étiquettes est déjà une très grande
protection à cet égard-là. Ce que je peux vous rajouter
aussi, c'est: Que fait-on pour
le contrôle du matériel vidéo qui est en marketing
direct? Rien encore à cet égard-là.
Le Président (M. Gautrin): Votre temps semble
épuisé, à l'heure actuelle. Je vais passer maintenant fa
parole au porte-parole de l'Opposition en cette matière, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président Me Martel,
je regrette, mais je trouve que votre raisonnement ne tient pas. Vous fartes la
distinction entre acte public et acte privé. Je pense qu'on pourrait y
aller. Mais, que je sache, le distributeur, enfin, le vidéoclub auquel
je suis abonné donne des cartes à des gens qui ont 18 ans, ou 17
ans, ou 16 ans. Pour obtenir une carte d'un vidéoclub. il ne faut pas
obligatoirement avoir 18 ans.
Mme Sauriol: Oui.
M. Boulerice: II faut obligatoirement...
Mme Sauriol: Pour avoir une carte de membre?
M. Boulerice: Oui.
Mme Sauriol: Normalement, je veux dire, la plupart des clubs vont
demander le parent parce que, s'ils se font voler du matériel ou quelque
chose, ce n'est pas rien que la signature d'une personne mineure.
M. Boulerice: Comme caution. M. Martel:
Solvabilité.
M. Boulerice: Si j'ai 17 ans ou 16 ans et que je suie, sur le
marché du travail, que j'ai un emploi, il est fort probable que vous
n'exigerez pas cette caution-là, comme telle. Donc, j'ai 16 ans,
j'arrive et je prends une cassette chez vous. Vous me la remettez. C'est un
acte public. Le visionnement va peut-être être un acte
privé, mais le fait de la prendre, que vous la remettiez, c'est un acte
public. Alors, je suis en train de vous dire que c'est exactement la même
chose que lorsqu'on entre dans un dépanneur pour acheter du vin, de la
bière, etc. Il y a un contrôle. C'est une transaction publique.
Vous n'avez pas 18 ans, monsieur, jeune homme, mademoiselle; vous avez 16 ans,
donc vous n'en aurez pas. C'est pour apporter à la maison, c'est pour
une consommation privée. Je ne ferai pas de vente, mais il y a un
contrôle. Donc, si le contrôle se fait au dépanneur, en
amont, pour acheter une bouteille de vin, un "six-pack" de bière, pour
employer une expression courante, pourquoi cela ne se ferait-il pas dans un
vidéoclub? (16 h 30)
M. Martel: Évidemment, c'est le propre d'une
démocratie que l'on puisse diverger d'opinion. À ce que vous
venez de mentionner, je vous dirai tout simplement que, si votre raisonnement,
à vous, était celui qu'on devait tenir, par te contrôle en
amont que vous venez de mentionner, on aurait enrayé tous les
problèmes d'alcoolisme de notre jeunesse au Québec. Pourtant, ce
n'est pas le cas. C'est bien parce que la consommation privée existe,
n'est-ce pas?
M. Boulerice: Tout à fait. Mais dans quelle mesure - mais
là on va tomber dans le domaine de la médecine sociale et ce sera
à notre collègue, le ministre de la Santé,
peut-être, de venir nous répondre à cette commission; de
toute façon, je me dis que la culture est dans un état tel qu'il
faudrait peut-être faire intervenir le ministre de la Santé -
n'a-t-on pas, heureusement, permis à ce phénomène de ne
pas être plus grand qu'il ne l'est actuellement? Moi, je ne comprends pas
l'objection que vous avez à ce qu'on puisse exercer ce contrôle en
amont.
M. Martel: Parce qu'il a un coût et, tant qu'à
payer, puisque c'est nous qui le paierons, nous voulons que ce soit
efficace.
M. Boulerice: Mais, quand vous dites qu'il y a un coût, Me
Martel, quel est ce coût?
M. Martel: Ce coût? C'est de chambarder, comme t'expliquait
Mme Sauriol tantôt, des habitudes de consommateurs, d'une part; donc, au
niveau des recettes brutes, il y aurait une diminution. Ce coût encore
serait au niveau du contrôle: l'aménagement des lieux, si c'est
une solution que l'on retient en réglementation, ou le contrôle
par du personnel additionnel pour vérifier l'identité et
l'âge des consommateurs lorsqu'ils se présentent au comptoir et
bien d'autres coûts du même genre. Alors, H y a un coût
direct pour les commerçants au détail et on est prêts
à l'assumer puisque c'est notre devoir social, dit-on, mais on veut que
ça porte des fruits, tout simplement.
M. Boulerice: Mais le seul coût, Me Martel, est d'exiger
une carte d'identité, dans le cas d'un consommateur qui est adolescent.
Si moi. je me présente...
Mme Sauriol: Je m'excuse. Il faut aussi être conscients
que, quand vous allez dans un cinéma, il y a cinq salles et il y a cinq
films. Il y en a un qui est pour tous, il y a un qui est pour 13 ans, il y en a
un qui est pour 16 ans, il y en a un qui est pour 18 ans. Mais il y en a juste
cinq. Quand vous entrez dans un vidéoclub, il peut y avoir 3000 titres.
Chaque client arrive avec un titre différent, une classification
différente et ce sont des transactions qui sont rapides. Donc, oui, il y
a un coût, parce qu'il y
a quelqu'un qui va être là, qui va, un, insérer...
De toute façon, on n'en a pas présentement, de classification.
Pour les films pour 18 ans, il n'y a aucun problème, ils sont dans un
espace à part et seuls des gens de 18 ans et plus y ont accès.
C'est pour les autres films. Donc, il va falloir implanter, dans nos
systèmes informatiques, la catégorie d'âge. Il y a des
clubs qui ont 8000, 10 000, 20 000 cassettes en inventaire. À chacun des
titres, des numéros, aller mentionner la catégorie d'âge,
il y a des coûts énormes à ça.
M. Boulerice: Si, madame, la vignette que la Régie fait
apposer sur chaque cassette, il y en a une rouge pour 18 ans, une verte pour 16
ans, une jaune pour 13 ans, je ne vois pas...
Mme Sauriol: Disons que ça fait un système qui fait
un petit peu... Ça pourrait être un système, mais ça
va être un système qui va être un petit peu... Je vais faire
attention à mes mots, des fois, je m'emporte.
M. Boulerice: Emportez-vous, madame. Mme Sauriol: Non, je
me retiens. M. Boulerice: II ne faut jamais... Mme Sauriol: Non,
je me retiens. M. Boulerice: La passion, c'est bien.
Mme Sauriol: Pour le futur où la Régie arrive avec
un classement sur chacune des vidéocassettes... Encore là, comme
je le disais tantôt, il sort plus de films en vidéocassettes qu'il
n'en sort dans les salles de cinéma. Alors, 11 ne faudrait pas que
ça ait comme effet de retarder la sortie des vidéocassettes parce
qu'elles doivent être visionnées pour classement, quand, pour
certains films, il devrait y avoir un classement général. Par
exemple, pour les 18 ans, erotiques, pas besoin de tous les visionner; mettez
18 ans dessus, c'est simple et ça va être réglé.
Pour les classements éventuels, qu'est-ce que vous faites avec
les 10 000 films que j'ai dans mon magasin? Si on ne les classe pas, si on dit:
Tout le monde peut les voir, on n'aura pas rendu service à notre
population si on agit comme ça. On fait une moitié de mesure.
Tandis que, si vous arrivez et qu'on dit: On met un timbre indicatif...
Une voix: Non, mais juste avec la notion indicative, ils vont
être obligés de le faire, de toute façon.
Mme Sauriol: ...quelque chose qui est facile à faire,
facile à gérer pour les commerçants, c'est une autre
histoire.
M. Boulerice: Mais, madame, vous me dites ou votre procureur nous
dit en votre nom que vous êtes d'accord pour que ce soit indicatif, mais
vous allez être obligés de la mettre aussi. Veux veux pas, elle va
être là.
Mme Sauriol: Sur la pochette. On n'a pas besoin d'aller tout
refaire nos systèmes informatiques et il n'y a pas une mesure de
contrôle à chaque film d'aller voir, dans l'ordinateur, il
correspond à quelle catégorie d'âge. C'est là que
ça devient une opération qui va prendre des mois avant
d'être capables de...
M. Martel: Et de vérifier à chaque transaction
individuelle l'âge du consommateur, c'est l'autre aspect de la question
que vous posez. Indicatif, monsieur, on n'a qu'à effectivement annoncer
par des codes de couleurs, comme vous le suggérez, ou autrement le
contenu, à annoncer les couleurs, comme on dit, simplement. Bon. Mais,
si on veut le rendre restrictif, le classement, plutôt qu'indicatif,
là, il faut contrôler l'identité, l'âge, en
l'occurrence, du consommateur. Et ça, c'est une opération
additionnelle qui comporte son coût, parce qu'il ne faut pas croire que,
dans un commerce au détail de vidéocassettes, il passe un client
à l'heure. Dieu merci pour nos membres, il en passe beaucoup plus.
Alors, il faut être équipés en personnel, en
équipement d'aménagement pour répondre à cette
demande-là. Ce sont là des coûts importants.
M. Boulerice: Dans un autre ordre d'idées, vous avez
parlé d'une stagnation, d'une diminution de 33 % en chiffres
actualisés. À quoi l'attribuez-vous?
M. Martel: C'est le marché. M. Boulerice: Le
marché.
M. Martel: Ce que démontrent ces informations-là,
c'est que le secteur du commerce au détail de matériel
vidéo n'a pas beaucoup d'élasticité, ne peut pas
s'accommoder de contraintes additionnelles, est fragile, comme je le disais
tantôt, n'a pas besoin d'être accablé davantage, n'a pas
besoin qu'on limite sa marge de profit. Le consommateur semble être au
maximum de ce qu'il veut payer pour ce produit de consommation là et, si
les coûts augmentent, tout le secteur va être en situation
extrêmement difficile, sinon en danger de disparition. C'est ça
que ça veut dire.
M. Boulerice: L'impact de la scélérate TPS a sans
doute influé?
M. Martel: Ah non! Ces données-là, vous savez, sont
avant l'entrée en vigueur de la TPS puisqu'il s'agit...
M. Boulerice: Ah! Donc, c'est pire.
M. Martel: Oui.
M. Boulerice: C'est pire.
M. Martel: Mars 1990, le rapport.
M. Boulerice: On a commencé par un affrontement et, vous
voyez, les choses évoluent, on se rejoint. Donc, je ne sais pas si Mme
Sauriol va continuer à être passionnée, du moins, je
l'espère.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boulerice: Tout en reconnaissant le bien-fondé de vos
craintes quant à l'impact de ce système de
télévision à la carte, même si on peut utiliser le
faux-fuyant dans le contexte constitutionnel actuel, et je dis bien actuel, que
c'est un CRTC, qu'est-ce que vous attendez d'un gouvernement en tenues de
réglementation à cet égard?
M. Martel: Je me répète.
M. Boulerice: Ce n'est pas mauvais.
M. Martel: On ne veut pas empêcher quiconque de se lancer
dans le domaine de la radiodiffusion, que ce sort de juridiction
fédérale ou provinciale. Quant à nous, les gens sont
libres de commercer, ils sont libres de faire affaire là où bon
leur semble; tout ce qu'on demande, c'est la même règle:
laissez-nous libres; laissez-nous choisir nos partenaires d'affaires. On les
choisira et, si on se trompe, on paiera pour, tout simplement. On ne demande
pas de privilège, nous. On demande de faire commerce normalement, en
acceptant nos responsabilités de bons citoyens corporatifs, pas
plus.
Le Président (M. Messier): Mme Sauriol.
Mme Sauriol: Finalement, ce qu'on demande, c'est d'avoir la
possibilité de négocier sur un marché libre. On n'a pas
d'objection de principe, Me Martel l'a dit, à acheter des distributeurs
québécois, mais il y a une différence avec être
contraint à le faire. La journée où tu es contraint
à l'approvisionner chez l'un ou l'autre distributeur
québécois, il n'y a plus de négociations. C'est que tu
n'as pas le choix. Alors, d'un bord, on a un distributeur
québécois qui vient d'avoir un permis au CRTC, alors qui va
devenir, finalement, notre compétiteur direct, et, de l'autre bord, on a
la loi qui nous contraint à acheter de ce même
distributeur-là. Alors, ce qu'on veut, c'est être capables de
négocier avec. Le fait qu'il y ait cette obligation dans la loi afin de
nous contraindre à acheter des distributeurs québécois, en
fait, c'est un peu un non-sens.
M. Martel: D'ailleurs, je me rappelle, cet avant-midi, vous avez
vous-même posé cette question: Avec la disparition de 109,
qu'est-ce qui va arriver? Je ne pense pas que vous ayez eu une réponse
satisfaisante à votre question.
Le Président (M. Messier): Une dernière question,
M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques?
M. Boulerice: Ça va. Je me méfie un peu de Me
Martel Non, ceci est dit à la blague, je pense que vous le comprenez.
Ça va, vous avez répondu à mes questions et je vous en
remercie, Mme Sauriol, avec forcément un accent distinct que j'ai
apprécié.
Le Président (M. Messier): Merci. Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: Vous savez que, finalement, comme je le
disais dans mon préambule, tous ces propos qui ont souvent l'air
technique et les propos de détail ont aussi de grandes
répercussions, on en est très conscients, et les enjeux sont
importants. Il va falloir, évidemment, décider, prendre des
décisions. On est là pour ça, nous. Alors, on veut vous
remercier quand même, comme je le disais tantôt, de nous avoir
éclairés, d'avoir apporté des positions qui sont
différentes de ce que l'on avait entendu à date, des positions de
terrain, et on prendra tout ça en considération. Merci.
Le Président (M. Messier): Merci beaucoup. Merci, M.
Martel et Mme Sauriol. On vous prie de vous retirer. On va recevoir, avec
quelques minutes de retard, l'Association des producteurs de films et de
télévision du Québec. On va suspendre quelques
secondes.
(Suspension de la séance à 16 h 43)
(Reprise à 16 h 44)
Le Président (M. Gobé): Mesdames et messieurs,
rebonjour. Il nous fait plaisir de vous accueillir cet après-midi. Si je
comprends bien, vous représentez l'Association des producteurs de films
et de télévision du Québec. Peut-être vous
présenter et, par la suite, vous pourrez commencer votre
présentation.
Association des producteurs de films et de
télévision du Québec
Mme Baillargeon (Louise): M. le Président, Mme la
ministre, M. le sous-ministre, MM. et Mmes les députés, je suis
Louise Baillargeon. Je vous présente, à ma droite,
Marie-Josée Raymond, qui est productrice et qui sera notre porte-parole
aujourd'hui; Suzanne D'Amours, qui
est directrice générale adjointe à l'Association,
et M. René Malo, producteur également, qui s'est joint à
notre équipe en fin de journée.
Le Président (M. Gobé): Alors, bonjour, mesdames et
messieurs. Madame, vous avez la parole.
Mme Raymond (Marie-Josée): M. le Président, Mme la
ministre, Mmes et MM. les députés, l'Association des producteurs
de films et de télévision du Québec est heureuse de
répondre à l'invitation de la commission de la culture et de lui
transmettre le présent mémoire sur le projet de loi 117, Loi
modifiant la Loi sur le cinéma. Ce bref mémoire se concentre
principalement sur les dispositions du projet de loi 117 visant à
modifier les responsabilités respectives du ministre et de la SOGIQ
à l'égard du plan d'aide, à modifier la composition du
conseil d'administration de l'Institut, à abroger une série
d'articles non en vigueur et à redéfinir certains pouvoirs
réglementaires du gouvernement. Nous laisserons aux associations
professionnelles plus directement concernées et à l'Institut
québécois du cinéma, sur le conseil duquel nous sommes
représentés, le soin d'aborder les modifications concernant le
classement des films, les catégories de permis d'exploitation et le
commerce au détail du matériel vidéo.
Au chapitre relatif à l'aide financière, deux
modifications importantes sont proposées: te remplacement du plan d'aide
annuel par un plan triennal de soutien financier et le transfert au ministre de
la responsabilité d'établir le plan de soutien financier,
responsabilité impartie dans la présente loi à la SOGIQ.
Il va sans dire que nous appuyons sans réserve la première
modification proposée. Nous avons déjà souligné
à maintes reprises que, dans une industrie où il faut de 18
à 24 mois pour passer de l'idéation au produit fini, puis une
période de 2 à 3 ans pour être en mesure d'apprécier
quantitativement la relation qui s'est établie entre ce produit et les
publics québécois et étrangers, il est pratiquement
impossible d'évaluer sur une base annuelle la pertinence des
orientations ou le degré d'atteinte des objectifs
déterminés dans un plan d'aide ou un plan de soutien.
Un plan triennal de soutien sera donc beaucoup mieux adapté aux
réalités de notre industrie. Nous comprenons qu'avec ce plan
triennal de soutien financier le gouvernement sera ainsi en mesure de
déterminer à l'avance, pour une période de trois ans,
l'ampleur des crédits gouvernementaux qui seront affectés
à ce plan, ce qui devrait favoriser une meilleure planification, tant
pour la SOGIQ que pour l'industrie dans son ensemble.
En ce qui concerne le transfert de la responsabilité
d'établir le plan triennal de la SOGIQ au ministre - qui devra
l'élaborer en collaboration avec la SOGIQ et prendre l'avis de
l'Institut avant de l'arrêter - il s'agit, en fait, d'une extension des
pouvoirs ministériels déjà établis à
l'article 3. Dans la mesure, et seulement dans la mesure où ce pouvoir,
autrefois conféré à l'Institut, a été
rapatrié par le gouvernement, il apparaît effectivement plus
logique qu'il soit confié au ministre plutôt qu'à un
organisme administratif, et ce, d'autant que c'est au ministre que l'Institut
transmet ses avis et recommandations. Nous insistons, toutefois, pour que les
avis de l'Institut québécois du cinéma, qui regroupe des
représentants de tous les secteurs de l'industrie, soient pris en haute
considération par le ministre. Je pense que c'est important de rappeler
ici qu'il y eut une époque où c'était l'Institut qui
établissait les plans d'aide de la SOGIQ et que c'était
certainement un reflet plus fidèle des problèmes pertinents de
l'industrie.
Le projet de loi 117 propose d'augmenter de 11 à 13 le nombre de
membres du conseil d'administration de l'Institut, soit d'augmenter de 8
à 9 le nombre de membres appartenant à des associations
reconnues, de façon à inclure les commerçants au
détail de matériel vidéo, et d'augmenter de 3 à 4
le nombre de membres n'appartenant pas à des associations reconnues, de
façon à inclure un représentant des intérêts
des consommateurs.
L'Association s'inquiète de l'augmentation du nombre de membres
du conseil d'administration de l'Institut; règle générale,
plus un conseil est nombreux, plus il est difficile de concilier les
disponibilités de l'ensemble des membres et de le réunir en
entier. De plus, il lui est difficile également de fonctionner avec
toute la souplesse, la rapidité et l'efficacité
désirées.
C'est pourquoi nous proposons de maintenir à 11 le nombre de
membres du conseil, et ce, en ajoutant un représentant des
commerçants au détail de matériel vidéo, qui sont
concernés au premier chef par plusieurs dispositions du projet de loi
117, et en ramenant de 3 à 2 le nombre de membres n'appartenant pas
à des associations reconnues et représentant des champs
d'intérêt prioritaires pour l'Institut.
D'une part, nous considérons que l'Institut est en mesure de
recevoir les avis de groupes nombreux et diversifiés de consommateurs
sur les aspects concernant plus directement le grand public, et ce, en vertu du
pouvoir et du devoir d'audiences publiques prévu à l'article 36.
1.
D'autre part, le maintien à 11 du nombre de membres du conseil,
conjugué à l'addition d'une neuvième association reconnue
en vertu de l'article 18, permettrait d'éviter que l'Institut soit
habilité à siéger avec un quorum autorisant que la
majorité des membres présents n'appartienne pas à une
association reconnue, donc, sur 7 membres, en avoir seulement 4 qui proviennent
d'associations qui ne sont pas pertinentes au cinéma, tel que le
prévoit le projet de loi 117.
Nous croyons qu'une des fonctions primor-
diales de l'Institut est de représenter l'ensemble de
l'industrie, de réaliser des consensus entre les différentes
composantes de cette industrie et que, dans ce contexte, il n'est pas
souhaitable que l'Institut puisse, comme le prévoit le projet de loi
117, rendre des décisions et des avis avec, finalement, une
minorité de voix provenant des représentants d'associations
reconnues et représentatives des différents secteurs de
l'industrie du cinéma.
Donc, en maintenant te nombre de membres à 11, le quorum à
6 et en ramenant le nombre de membres n'appartenant pas à des
associations reconnues à 2, il sera toujours nécessaire d'avoir
une majorité de membres appartenant à des associations reconnues
pour avoir quorum.
Par ailleurs, nous appuyons la proposition d'ajout de l'article 105.3
qui permet de rendre admissibles à ta délivrance de permis
spéciaux les distributeurs de provinces avec lesquelles le ministre aura
conclu une entente à cet effet. Nous croyons, en effet, qu'une telle
disposition ne pourra que faciliter et favoriser la conclusion d'accords
gouvernementaux de coproduction entre les provinces, accords que nous appuyons
vivement et qui ne pourront qu'être utiles et bénéfiques
à notre industrie.
Plusieurs sections, sous-sections et articles non en vigueur de la Loi
sur le cinéma sont définitivement abrogés par le projet de
loi 117. Ça a de très graves conséquences. Ce qu'on retire
d'une loi arrête aussi d'être un bâton pour d'autres
intervenants. C'est le cas, notamment, de la section concernant les ententes
entre les exploitants et les distributeurs, de la sous-section concernant tes
permis de tournage et de l'article 109 prévoyant le
réinvestissement dans la production québécoise d'une part
des revenus de distribution réalisés au Québec.
S'il est compréhensible que ces articles, qui participaient d'un
dessein d'ensemble qui n'a pas été poursuivi et qui n'ont jamais
été en vigueur, soient aujourd'hui abrogés, l'Association
tient à souligner qu'elle regrette profondément l'abandon
apparent du principe de réinvestissement obligatoire sous-jacent
à l'article 109. En effet, 9 ou 10 ans après la publication du
rapport Fournier sur le cinéma et 9 ans après l'adoption de la
Loi sur le cinéma - ou 8 ans - nous nous retrouvons dans une situation
inchangée où seules les entreprises québécoises de
distribution consacrent une part de leurs revenus au financement des
productions québécoises, sous forme d'investissements ou
d'à-valoir.
Et le gouvernement n'a pas encore mis en place de mécanisme
obligeant, comme cela se fait en France et dans plusieurs pays
européens, les distributeurs étrangers oeuvrant sur son
territoire à verser directement à un fonds de financement des
productions québécoises une partie des revenus de distribution
qu'ils réalisent au Québec. Cela est d'autant plus regrettable
que ces entreprises étrangères de distribution ac- caparent
toujours une part considérable du marché de la distribution au
Québec.
Nous espérons donc vivement que l'abrogation de l'article 109 ne
consacre pas l'abandon définitif du gouvernement; que ce dernier demeure
ouvert à d'autres propositions visant à assurer une contribution
des distributeurs étrangers au financement des productions
québécoises proportionnelle aux revenus qu'ils encaissent sur
notre territoire.
Le projet de loi 117 propose, au paragraphe 2° du premier
alinéa de l'article 168, de conférer au gouvernement le pouvoir
d'établir des normes de reconnaissance d'un film comme film
québécois et il ajoute: "et définir des catégories
de films admissibles à cette reconnaissance ainsi que des
catégories de films qui en sont exclus". Nous nous opposons
énergiquement à cet ajout. Le Règlement sur la
reconnaissance d'un film comme film québécois a et doit conserver
pour objet de définir le caractère québécois d'un
film et non le terme "film" lui-même, qui est défini à
l'article 2 de la loi. Il n'appartient pas à ce règlement de
portée générale d'établir des catégories de
films "admissibles" ou "exclues" ou de restreindre de quelque façon la
portée du mot "film".
En effet, il est courant que des catégories de films soient
exclues de l'admissibilité à certains programmes, mais ces
exclusions varient nécessairement d'un programme à l'autre, en
fonction des objectifs poursuivis par des ministères ou des organismes
qui en ont la responsabilité. Ainsi, par exemple, le ministre des
Finances a annoncé récemment un programme de crédit
d'impôt à l'entreprise en vertu duquel les
"variétés" et les "magazines" sont exclus. Mais, dans la
même déclaration ministérielle, il annonçait la
création d'un nouveau programme, administré par la SOGIC,
où ces deux catégories sont admissibles. Autres exemples: si la
SOGIC, en vertu de ses règles internes, considère comme
catégories exclues ou non admissibles à son aide
financière les projets d'ordre publicitaire, didactique ou produits
à des fins scolaires, on peut aisément concevoir que le
ministère de l'Éducation puisse être
intéressé à soutenir financièrement la production
de films didactiques ou pédagogiques québécois ou, encore,
que te ministère des Communications élabore des programmes de
soutien à l'industrie de la production publicitaire
québécoise.
Il appartient donc à chacun des ministères ou organismes
gouvernementaux de préciser, dans ses propres programmes, les
catégories de films qu'il entend soutenir ou écarter, et ce, en
fonction de son mandat et de ses objectifs propres qui peuvent, d'ailleurs,
évoluer. Le Règlement sur la reconnaissance d'un film comme film
québécois doit, lui, demeurer neutre quant à la
portée du terme "film" et se limiter à définir ce qui fait
de ce film un film québécois.
Nous nous inquiétons également du deuxième
alinéa de l'article 168 qui stipule que le Règlement sur
la reconnaissance d'un film comme film québécois pourra
"rétroagir à une date antérieure à celle de son
entrée en vigueur". C'est un problème très difficile
à comprendre qu'on propose ce genre de mesure, parce que, si nous
comprenons bien, ça signifie qu'un producteur qui a
bénéficié d'une aide financière ou d'un avantage
fiscal quelconque pour un film reconnu comme film québécois en
vertu du règlement alors existant et en vigueur pourrait, trois mois,
six mois ou un an plus tard, se voir nier rétroactivement son droit
à cette assistance financière, déjà reçue,
dépensée et investie, en vertu d'un nouveau règlement
modifiant les normes de reconnaissance. C'est, vous en conviendrez, totalement
inadmissible. Et nous espérons que vous mesurerez les
conséquences financières extrêmement désastreuses
que pourrait avoir une telle rétroactivité et
l'épée de Damoclès que cela représenterait pour
l'ensemble des producteurs québécois si un tel pouvoir de
rétroaction était inscrit en permanence dans la Loi sur le
cinéma.
À la limite, nous serions disposés à accepter que,
pour la période de rétroaction antérieure à
l'entrée en vigueur d'un nouveau règlement, les deux
règlements soient parallèlement en vigueur. Autrement dit, que,
pour cette période donnée, un film puisse être reconnu
comme film québécois, soit en vertu du règlement alors
existant, soit en vertu du nouveau règlement à portée
rétroactive, et ce, au choix du producteur, de façon à ce
que nul ne puisse être pénalisé pour avoir scrupuleusement
respecté un règlement alors en vigueur. C'est pour nous un point
essentiel.
Voilà donc en bref, Mmes et MM. les membres de la commission,
l'essentiel des aspects du projet de loi 117 sur lesquels nous désirons
attirer votre attention. Nous espérons que nos propositions de
modifications pourront contribuer à améliorer ce projet de loi et
à rendre la Loi sur le cinéma, dans son ensemble, plus
précise, équitable et adaptée aux besoins de notre
industrie, en espérant que le but premier d'une Loi sur le cinéma
ne soit jamais oublié, soit de favoriser la production de films
québécois et l'existence d'une industrie cinématographique
forte et cohérente. Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup, madame. Il
me fait plaisir, maintenant, de passer la parole à Mme la ministre des
Affaires culturelles.
Mme Frulla-Hébert: Merci à vous tous et toutes. Je
veux retourner un peu en arrière parce que je veux, quand même,
préciser un certain point qui vous inquiète inutilement. Vous
savez que nous avons travaillé ensemble pendant quelques mois au niveau
des aménagements qui ont été apportés aux mesures
fiscales dans le dernier budget du ministre des Finances. Nous voulions, enfin,
mettre au point une formule qui pouvait satisfaire la demande des Finances et
qui pouvait aussi correspondre à vos attentes et aux besoins de
l'industrie de production cinématographique. Je pense, en tout cas,
compte tenu des réactions que nous avons eues, que ça n'a pas
été facile, mais que les besoins, de part et d'autre, ont
été, un, compris et, deuxièmement, comblés. (17
heures)
Au niveau de cette rétroactivité, ce n'est qu'une mesure
technique, tout simplement. Ça n'a rien à voir avec une
application possible ou non. C'est que le ministre des Finances a voulu que les
nouvelles mesures fiscales soient le mieux balisées possible - je ne
reviendrai pas sur toute la problématique - on l'a fait pendant un an et
demi, là - en identifiant les catégories de films qui devaient
bénéficier de la mesure. Maintenant, pour que ça puisse
s'appliquer - et ça, c'est tout simplement, comme je vous dis, tout
à fart technique - il est nécessaire que le règlement
cadre avec la décision et, pour qu'elle puisse s'appliquer aussi
à partir de la date de l'annonce, il faut que le règlement puisse
rétroagir. Alors, que ce soit à notre niveau ou à tous les
autres niveaux, c'est tout simplement une mesure technique. Alors, je veux
juste, en fait, quand même, apporter des précisions
là-dessus et vous calmer. C'est la mesure qui a été
annoncée. C'est la mesure qui est applicable. Point final, à la
ligne.
Mme Raymond: Si je comprends bien, Mme la ministre, on peut donc
avoir confiance qu'aucune mesure de rétroactivité n'affectera
négativement des productions en cours.
Mme Frulla-Hébert: Absolument.
Mme Baillargeon: Moi, j'aurais une question par rapport à
ça. Est-ce qu'il y aurait possibilité de l'inscrire comme tel
dans la loi, c'est-à-dire de spécifier que ça s'adresse
à une seule année donnée?
Mme Frulla-Hébert: Ça, là-dessus, bon, on
parle...
Mme Baillargeon: Je ne connais pas la technicalité,
là.
Mme Frulla-Hébert: C'est ça. On parle de mesures
fiscales. Là-dessus, on verra. Chose certaine, c'était tout
simplement pour que le ministre des Finances puisse appliquer ces mesures tant
attendues de part et d'autre depuis tant de mois. Maintenant, on verra pour que
ce soit très, très clair, mais rassurez-vous
là-dessus.
Les articles que nous avons abrogés. En 1983, évidemment,
il y a eu le projet de loi et c'était l'unanimité. Comme M. Malo
le disait si bien ce matin, avec raison d'ailleurs, le projet de
loi a été appliqué en 1987, lors d'une entente qui
a été formulée entre Mme Bacon et M. Valenti. On a
appliqué le projet de loi. Ça fait neuf ans que des articles sont
dans la loi. Présentement, ils sont là, ils sont inapplicables.
On peut les laisser là, ce qui n'est pas, finalement, une mesure commune
parce que, effectivement, quand un législateur fait un projet de loi,
spécialement au gouvernement, ce qui arrive, c'est que, quand les
articles ne sont pas applicables, on ne les laisse pas là. Quand on
révise la loi, on les enlève et on trouve, par contre, d'autres
mesures pour combler les besoins.
Alors, les articles ne sont pas là ou, enfin, n'ont pas
été mis là comme une espèce d'épée de
Damoclès au cas où ou, enfin, pour faire appel aux bonnes
consciences. Ils étaient mis là en 1963 pour qu'ils puissent
être applicables et l'avenir nous a montré que, de la façon
dont c'était formulé, c'était inapplicable.
Maintenant, je veux vous rappeler aussi qu'il y a un
énoncé de politique culturelle et il y a toute la question de la
politique au niveau du cinéma, ce qu'on attend. Et, à la demande
même de l'UDA, par exemple, c'est d'attendre l'énoncé de
politique culturelle pour ensuite appliquer la politique du cinéma et de
l'audiovisuel en concordance, parce qu'on n'est pas pour faire un projet d'un
côté et un autre d'un autre. Finalement, vous demandez la
concordance et vous avez raison. Je pense qu'il est temps que les mesures
fonctionnent de pair et en synergie et non pas à peu près l'une
contre l'autre.
Alors, c'est pourquoi nous abrogeons l'article 109, tout simplement
parce qu'il est inapplicable. Au moment où on se parle, cet
article-là est inapplicable. Est-ce que nous abrogeons le principe de
dire: Nous voulons réinvestir dans l'industrie? Ça, la
réponse est non. On sait qu'il y a un besoin de réinvestir dans
l'industrie. Comment le faire? Là, il faut le regarder
sérieusement, toujours en concordance aussi avec les mesures fiscales,
les finances, etc. Nous le faisons. Mais ce n'est pas le principe que nous
mettons en doute, c'est tout simplement l'inapplicabilité, si on veut,
de l'article en question.
Je veux revenir au niveau de l'IQC et, ensuite, parler un peu du plan
triennal. L'IQC, en tant qu'organisme-conseil, a un mandat non seulement par
rapport au plan de soutien financier, mais par rapport au chapitre III. Ce que
vous apportez, c'est que vous dites: Dans plusieurs aspects, l'IQC regroupe les
intervenants de l'industrie. Vous avez raison, l'IQC, en tant
qu'organisme-conseil, a non seulement l'oreille de la ministre ou du ministre
en poste, mais joue un rôle extrêmement important. La preuve, c'est
que les recommandations de l'IQC, dans la plupart des cas présentement,
sont à l'intérieur du projet de loi proposé.
Vous dites, par exemple, que vous ne seriez pas disposés à
considérer une représentation très réduite du
public. En tout cas, dites-moi si je me trompe. Par contre, on a
rencontré d'autres groupes, la semaine dernière
précisément, qui voudraient, eux, avoir une représentation
accrue du public en disant: Nous sommes le consommateur et nous recevons; donc,
on a un mot à dire. J'aimerais seulement que vous élaboriez
là-dessus parce qu'on a deux positions totalement contraires.
Mme Raymond: Avec plaisir. Puis-je simplement me permettre
peut-être un petit point d'ordre sur la notion d'article inapplicable?
J'ose quand même penser que le gouvernement, dans sa grande sagesse,
puisqu'il avait adopté cette loi à l'unanimité, devait
quand même voir qu'il y avait certaines vertus à ces
articles-là.
Mme Frulla-Hébert: Absolument.
Mme Raymond: En considérant qu'ils sont inapplicables, on
aurait certainement souhaité - peut-être à cause de notre
grand âge qui fait qu'on se rend compte que, des fois, les vides peuvent
se perpétuer - que ces articles soient abrogés après
l'instauration de nouveaux mécanismes pour atteindre les mêmes
buts. Là, malgré tout, si on suit un peu le processus
psychologique qui a, quand même, entouré la conclusion de
l'inapplicabilité de ces articles-là, on peut aussi se dire, de
l'autre côté de la frontière: Tiens, ils ont compris. Ils
ont "scrapé" ces articles-là. Je pense que, psychologiquement,
comme il n'y a rien qui les remplace, ça peut être perçu
comme une volonté de reculer. On ose espérer que ce n'est pas la
volonté du gouvernement. On vous fait confiance, donc, on attend avec
impatience toute mesure qui va, en fait, accorder à l'industrie... et
avoir comme effet des résultats identiques. Dans ce sens-là,
l'implantation de mesures de remplacement est extrêmement importante.
Au niveau de l'Institut, je voudrais simplement rappeler
qu'effectivement l'Institut est ce lieu privilégié où les
différents secteurs de l'industrie sont représentés. S'il
y a une chance d'en arriver à une industrie cohérente, donc,
pouvant profiter de politiques de cohérence, c'est dans te cadre de
l'Institut. Le fait que l'Institut performe avec tant d'efficacité nous
encourage certainement à dire que le rôle de l'Institut, dans
l'élaboration des plans d'aide gouvernementaux qui ne sont, finalement,
que le reflet d'une politique gouvernementale, pour nous, est crucial.
Quant au problème de la représentativité à
l'Institut, il y a déjà des membres qui représentent le
grand public. L'industrie cinématographique est très simple dans
sa manifestation ultime - c'est un film à l'écran - mais, dans
son élaboration, elle est excessivement complexe. On voit constamment -
et le peu de temps que j'ai passé dans cette salle m'a permis de le
constater - une confusion totale dans les termes,
même provenant de gens de l'industrie. Vous me permettrez de ne
pas faire de citation.
Enfin, il faut imaginer dans quelle angoisse se trouvent les gens du
public ordinaire qui sont appelés à siéger à
l'Institut pour débattre de problèmes très techniques et
très fondamentalement reliés à l'industrie, alors qu'il y
a peut-être des meilleurs forums. Parce que ce qu'il faut très
bien comprendre, c'est que notre but n'est pas d'exclure les voix du public par
rapport à la gestion globale de l'industrie et des rapports de
l'industrie avec le public. Peut-être que la Régie est un endroit
mieux placé pour accueillir ce genre de représentations. Mais,
quant au niveau strictement industriel - donc, ce secteur très
technique, en fait, que reflète l'Institut - dans le passé, on a
vu des gens de grande valeur qui ont été nommés justement
pour représenter l'intérêt public et qui, au bout de deux
ou trois mois, se sont totalement désintéressés, ont
arrêté de venir parce qu'ils se jugeaient eux-mêmes
incompétents pour apporter des arguments avec une certaine valeur dans
les débats qui ont cours à l'Institut. C'est là où
j'ai simplement peur, ne serait-ce qu'en nombre, qu'à un moment le
quorum permette que certaines décisions soient prises, très bien
fondées sur le plan de la philosophie du respect du public, mais
totalement inefficaces et irréalistes par rapport aux mécanismes
de l'industrie, et que ça soit fait dans un cas où le quorum soit
de quatre membres non représentatifs d'associations professionnelles et
industrielles versus trois, ce qui fait un quorum de sept. Donc, ce n'est
vraiment pas l'expression de certaines attitudes ou des préoccupations
du grand public qui nous pousse à vous mettre en garde contre cette
extension du nombre de participants à l'Institut, mais c'est
plutôt la pertinence que ce soit à l'Institut même. Je pense
que les personnes qui, déjà, représentent le grand public,
ont, dans le passé, fait face à ce genre de problème.
C'est avec cet objectif-là en vue qu'on vous soulignait...
Mme Frulla-Hébert: Technique.
Mme Raymond: ...qu'on croyait que c'était très
problématique et que ça pouvait entraîner l'Institut
à être obligé de faire des recommandations qui
équivalent à des voeux pieux et qui ne soient pas du tout le
reflet des besoins et des constatations de l'ensemble de l'industrie.
Mme Frulla-Hébert: Au niveau du plan de soutien financier,
soit un plan triennal, vous voyez le fait d'implanter, justement, ce plan
triennal, je pense, en tout cas, de façon positive.
Mme Raymond: Excellent.
Mme Frulla-Hébert: Maintenant, au niveau du
mécanisme, c'est-à-dire que le plan triennal ou, enfin, que les
modalités soient de la respon- sabilité, si on veut, directement
de la ministre, pour être appliquées par l'organisme versus ce qui
se passe maintenant, est-ce que vous pourriez élaborer? Est-ce que vous
voyez ça d'un bon oeil? Est-ce que vous voyez ça comme
étant une amélioration? Vous y avez touché tantôt,
mais j'aimerais que...
Mme Raymond: En fait, c'est un peu le reflet de la situation
actuelle. C'est certainement préférable que les grandes
orientations soient conçues et établies par le ministre, en
consultation avec l'IQC, et que la SOGIC conserve son rôle purement
administratif de politiques balisées par des plans d'action et des
objectifs à atteindre, définis justement par le ministre, en
collaboration avec l'Institut, parce que, pour nous, ce qu'il y a de plus
perturbant dans l'industrie, ce sont les changements constants dans les
politiques et dans les programmes d'aide. Donc, déjà avec
l'implantation d'un plan triennal, une politique qui pourrait devenir de plus
en plus à long terme, en tenant compte des impératifs de notre
industrie qui est changeante, bien sûr, mais quand même en sachant
que les fonds nécessaires et les programmes reflétant les
volontés d'orientation politique existent, je pense que c'est beaucoup
plus sain comme ça.
Mme Frulla-Hébert: En terminant, une dernière
question parce que vous parlez de l'organisme, etc. Tous les groupes qui nous
approchent, effectivement, et on y est très sympathiques, parlent d'un
besoin de fonds supplémentaires. Il y a tellement de choses à
faire. Et, là-dessus, évidemment, vous avez une oreille
sympathique. Par contre, il y a de l'argent qui est quand même
alloué. Il y a de l'argent qui est là. La SOGIC gère 13
000 000 $ dans différents programmes, je l'avoue. Il y a eu 1 500 000 $
donnés au programme La Relève, par exemple| Puis, entre autres,
il y a des mesures fiscales. Il y a, quand même, de l'aide qui se fait.
Maintenant, il faut que l'aide soit efficace. En terminant, est-ce que les
programmes qui ont été mis sur pied au fur et à mesure des
années, qui essaient d'être complémentaires avec ce qui
existe, au niveau de Téléfilm, par exemple, et puis qui essaient
d'occuper le terrain, sont efficaces? (17 h 15)
Mme Raymond: Je pense que vous touchez justement à un
point extrêmement sensible et c'est pour ça qu'on accueille avec
énormément de plaisir une planification triennale. C'est qu'il
faut éviter que, justement, des coups de barre soient donnés,
sûrement résultat d'intentions pieuses et très bonnes, mais
pas forcément prises de façon efficace et économe. On
parle effectivement d'un très petit montant d'argent à
gérer par la SOGIC. Il faut donc que ce soit fait en maximisant les
effets de ces très petits montants à investir et, des fois, des
projets qui peuvent
sembler louables, comme, justement, La Relève, peuvent être
faits au détriment de la stabilisation d'une industrie pour laquelle on
a payé pendant longtemps, justement. Et, au moment où on atteint
peut-être des résultats intéressants - je parlerais de
metteurs en scène qui sont prêts à performer - l'argent
tout à coup - et c'est là où je pense qu'une planification
à long terme est importante - sur une innovation très ponctuelle,
un coup de tête, là, on a un nouveau projet, c'est la
relève une année, c'est les vieux une autre année...
Je pense que toute planification un petit peu plus prévue
à long terme pourrait certainement maximiser l'argent de la SOGIC. Dans
ce sens-là, je pense qu'il y a certainement ce qu'on pourrait appeler du
"Band-Aid" dans les programmes de la SOGIC. Une année, on décide
de faire une chose; une autre année, on fait une autre chose. Ce n'est
pas consistant, ce n'est pas cohérent. Il ne faut jamais oublier que les
ententes internationales qu'on fait, par exemple, dans le cas de coproductions,
s'échelonnent des fois sur plus d'une année. On doit être
capables de dire à nos partenaires étrangers: Voici la
règle du jeu et que ça ne change pas constamment.
Donc, une politique à plus long terme, avec des programmes
reflétant cette politique-là, c'est certainement quelque chose de
tout à fait souhaitable. En sachant que, même là, on
souhaite que ces programmes soient peaufinés et améliorés,
mais qu'on n'essaye pas toujours: Si ça ne marche pas anotre
goût avec les plus vieux, on va s'en aller avec les jeunes, puis une
autre année... On a besoin de relève, mais on a aussi besoin de
conforter une industrie qui est, quand même, très jeune par
rapport à d'autres industries. Ce n'est pas en démissionnant sur
ceux sur lesquels on investit depuis des années qu'on va pouvoir
espérer asseoir notre industrie sur des bases solides.
Le Président (M. Gobé): Merci, madame. Je dois
maintenant passer la parole à M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Pour être dans le fil immédiat, tout
de suite - et je vais revenir après, pour l'introduction - si je vous
comprends bien, Mme Raymond, est-ce que vous souhaitez que l'Institut
québécois du cinéma soit associé du début
jusqu'à la fin dans le processus d'élaboration du plan triennal
et non pas uniquement à la fin, comme c'est le cas prévu
actuellement?
Mme Raymond: C'était comme ça avant. Je ne dis pas
que les choses ont toujours fonctionné en totale harmonie parce que,
quand il y a une ambiguïté, il peut y avoir des rivalités
d'organismes. Si les choses étaient claires, il me semble qu'avec la
maturité que l'Institut a prise on pourrait concevoir que les politiques
pour raient être justement élaborées avec le consensus de
l'industrie, discutées et établies de concert avec la ministre,
en sachant qu'on éviterait ainsi des surprises souvent énormes
que l'Institut doit, effectivement, ensuite gérer, puisque,
malgré tout, l'Institut est un peu plus, en fin de course, dans
l'élaboration de ces programmes. Donc, oui, effectivement, le souhait
est certainement que l'Institut, qui est, je le repète, la
représentation de l'industrie et, si vous voulez, le lieu d'entente et
de cohérence de l'industrie... Il me semble que ça serait plus
efficace, étant donné qu'on a très peu de ressources et
qu'on doit essayer de les maximiser, et de perdre un minimum de temps dans des
incompréhensions stériles de part et d'autre.
M. Malo: Si vous permettez, j'ai fait une intervention ce matin,
d'ailleurs, à cet effet-là, à savoir le rôle de
l'Institut versus le rôle de la SOGIC. Je pense qu'un des
problèmes majeurs auxquels on fait face depuis que l'Institut n'a plus
le pouvoir qu'il avait, si on peut dire, c'est justement - ce dont se
plaignent, je pense, à peu près toutes les associations - le peu
de consultation qu'il y a de la part de la SOGIC auprès des gens du
milieu. Le rôle que jouait l'Institut avant permettait automatiquement
cetteconsultation-là, puisque c'est eux qui donnaient les
orientations. Cela s'était avéré extrêmement
efficace. Il y a eu un changement à l'époque, je pense, dû
à la demande des gens qui avaient été nommés en
charge de la SOGIC. Cela ne s'est pas avéré extrêmement
efficace et je pense que, si on a la possibilité de le faire, on devrait
essayer de revenir en grande partie à ce qu'était l'Institut
avant, c'est-à-dire le corps du milieu qui donnait les orientations au
ministre, à la SOGIC, de ce qui devait être fait.
M. Boulerice: C'est ce qui prévalait avant décembre
1987, lorsqu'il y avait la Société générale du
cinéma, et l'Opposition était en total désaccord avec le
démantèlement de la Société générale
du cinéma. Effectivement, l'Institut québécois du
cinéma devait donner son aval; là. il est vaguement consultatif,
dans l'état actuel des choses. Parce qu'il n'a rien à faire, en
définitive, avec les programmes de la SOGIC comme tels et, de la
façon dont on le place actuellement dans la loi, je suis d'accord avec
vous pour vos inquiétudes.
Maintenant, une loi du cinéma, je pense que ça doit avoir
en premier lieu comme objectif de favoriser l'implantation, la consolidation,
le développement d'une cinématographie nationale. À deux
reprises, ce Parlement, à l'unanimité, a voté une loi du
cinéma où il y avait un article 109. Mme la ministre actuelle
vient de nous dire qu'au temps de Mme Bacon et moi, avec les autres
prédécesseurs au moment où les lois ont été
votées, nous étions dans l'erreur, que non, ce n'est pas
applicable, ce n'est pa assez, etc..
et qu'il nous faut l'enlever. D'une part, il y a effectivement un signal
extrêmement dangereux qui est envoyé, et ça, je suis
heureux que vous l'ayez noté, mais, par contre, on ne voit absolument
rien d'alternatif à l'abolition de l'article 109. Il n'y a absolument
rien. On ne le retrouve pas. Qu'est-ce que vous penseriez, comme mesure
alternative, si on réinjectait les revenus de la TVQ dans la
production?
Mme Raymond: Est-ce que c'est une annonce?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boulerice: Malheureusement non, madame.
Mme Raymond: Mais, écoutez, par ailleurs, la seule chose,
le seul point que je veux souligner, c'est que notre association a acquis une
grande maturité et qu'on s'est habitués mainte nant à
travailler avec le gouvernement, en étant conscients des
problèmes que pose l'administration d'un pays. Donc, effectivement,
même si on pouvait souhaiter qu'une taxe particulière devienne une
taxe dédiée, on s'est fait dire par plusieurs ministres des
Finances que notre régime fiscal n'allait pas dans la direction de taxes
dédiées. Donc, en fait, je crois que la modalité prise est
certainement à préciser, mais ce qui est plus important, je
crois, c'est la cohérence d'une industrie. La vertu de l'article 109
était, quand même, de tenir compte d'une réalité qui
est extrêmement néfaste et qui mine la cohérence de notre
industrie, c'est le fait que l'industrie ici ne contrôle pas ses outils
pour travailler.
C'est très clair, au Québec, l'exploitation est
contrôlée par des intérêts étrangers, la
distribution est contrôlée par des intérêts
étrangers, la vidéocassette est contrôlée par des
intérêts étrangers et la très petite marge de
manoeuvre qui reste aux intervenants normaux d'une industrie saine, à
toutes fins pratiques, se trouve encore minée par le retrait de cet
article 109 qui n'est, dans le fond, qu'un mécanisme parmi d'autres pour
effectivement éviter la fuite de capitaux qui pourraient être -
dans toute industrie mûre, c'est ce qui se passe - normalement
réinjectés dans l'industrie, parce que, dans le fond, l'argent
que les distributeurs américains font sur le dos des consommateurs
québécois, il est réinvesti dans l'industrie
cinématographique, malheureusement pas dans la nôtre.
Donc, ce qu'il faut, je pense, l'objectif fondamental d'une politique
cohérente, c'est d'avoir les trois pattes du trépied
économique de notre industrie, c'est-à-dire de la production
forte - et, Mme la ministre, on apprécie énormément les
mesures fiscales que vous venez d'élaborer en remplacement d'autres
mesures qui étaient certainement trop coûteuses pour leur
efficacité. Et c'est là où je parle d'un travail et dune
collaboration accomplis entre votre ministère et notre association.
Mais, au niveau de la distribution, tant qu'on aura cette fuite de
capitaux et aucune façon de compenser cette offre qu'on fait à
d'autres de notre territoire ici pour une exploitation de ressources qui nous
appartiennent très peu, je pense que c'est très dangereux. Pour
pousser l'argument un petit peu plus loin, on doit aussi se rappeler que
l'exploitation cinématographique est aussi entre les mains des
Américains. Donc, c'est un problème de structure industrielle qui
est à la base.
Bon, je pense que ce projet de loi, si je ne m'abuse, on peut
l'interpréter comme étant plutôt un exercice d'entretien
ménager. On fait de l'ordre. Si on ne se sert pas d'un balai, on le
jette. Mais il reste, quand même, qu'on aurait souhaité que le
"vacuum" électrique soit là avant que le balai soit mis au
rancart. Parce que, c'est bien évident, on se retrouve dans une
situation, malgré tout, où les gens peuvent interpréter
ceci comme un manque d'intérêt, un recul. On sait qu'il y a des
ressources énormes qui sont mises à la disposition de ces gens
pour, justement, profiter de chaque petite parcelle d'hésitation qu'on
leur donne et, dans ce sens-là, Mme la ministre, dès que vous
pourrez nous rassurer et nous dire quelles sont les mesures qui vont
remplacer...
Le Président (M. Gobé): Je m'excuse, madame, mais
vous devez vous adresser à M. le député, c'est sur son
temps, de Sainte-Marie-Saint-Jacques. C'est lui qui vous questionne et non Mme
la ministre, là.
Mme Raymond: Ah, excusez-moi.
Le Président (M. Gobé): Je vous demanderais de bien
vouloir vous adresser à M. le député.
Mme Raymond: Je m'excuse.
Le Président (M. Gobé): Les règles de cette
commission sont ainsi faites.
M. Boulerice: Par respect pour l'Opposition de demain.
Mme Raymond: Excusez-moi de cette confusion.
Le Président (M. Gobé): Vous dites cinq minutes et
M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques pourrait exiger
après ça du temps supplémentaire.
Mme Raymond: Ah, excusez-moi, c'est simplement parce que...
Le Président (M. Gobé): Je vous en prie.
Mme Raymond: ...il y a une harmonie, malgré tout, des
objectifs a atteindre dans ce cas-ci.
M. Boulerice: Mais vous allez convenir avec moi, Mme Raymond, que
l'ultime, le plus beau, le plus merveilleux et vraiment le souhaitable serait
qu'il n'y ait aucune TVQ sur les industries et tous les produits culturels.
Parce que je regarde, il y a vos collègues propriétaires de
salles de cinéma, qui sont ici dans la salle. La scélérate
TPS, la TVQ, la taxe d'amusement que les municipalités devront continuer
à charger puisqu'on les a "hold-upées", font que sur tout billet,
c'est 27 % de taxe bientôt. Une loi plus assassine, on meurt, c'est
vraiment le cas de le dire.
Mme Raymond: Je ne peux, effectivement, que bien constater que
toute taxation d'un produit culturel est la négation d'une politique
culturelle. Je pense que tous les pays qui mettent le développement de
leurs industries culturelles dans les priorités générales
se limitent dans leur taxation des produits culturels.
M. Boulerice: Mme Raymond, je ne sais pas si la ministre est
tisserande, mais elle a le pouvoir pour le moment, mais il y en a un que vous
ne voulez pas lui voir donner, c'est celui de déterminer par
règlement les catégories de films reconnus comme films
québécois. Est-ce que vous pourriez expliciter le pourquoi?
Mme Raymond: Bien, c'est simplement qu'un film
québécois, c'est quelque chose d'essentiel. On ne peut pas se
retrouver à chaque tournant avec des modifications de ce que constitue
un film québécois. J'estime que c'est un peu comme la
nationalité québécoise: on l'a ou on ne l'a pas, mais
ça s'improvise mal. Je pense que, là, il y a une confusion entre
deux secteurs de réglementation. Il y a la définition du film
québécois, d'un côté, et, de l'autre
côté il y a l'admissibilité de certains projets, de
certains produits à différents programmes. Je pense que notre
intervention reflète une certaine inquiétude, à savoir que
la définition de film québécois puisse, en fait,
être modifiée suivant les besoins. Je pense que la
définition de ce qu'est un film est faite très clairement dans la
loi. Il faut que la définition d'un film québécois soit
exposée très clairement une fois pour toutes et qu'ensuite, en
parallèle avec la définition d'un film québécois,
les programmes des différents organismes ou minis tères soient
limitatifs de certaines catégories de films québécois,
mais jamais sur la définition de film québécois.
M. Boulerice: Mme Raymond, je ne veux pas être flatteur,
mais je pense que vous avez exposé votre point de vue avec une
conviction, mais une conviction qui, forcément, est née de
l'expérience et, là-dessus, je pense... Mme Raymond: Et de
l'âge.
M. Boulerice: Oui. Ha, ha, ha! Mais, en parlant d'âge,
juste pour faire une petite remarque avant de nous quitter, notre ami Vigneault
se refuse au mot "relève" en disant: Mais personne n'est tombé.
Sauf que je pense qu'il y a risque de chute bientôt. Donc, essayons
d'aller vers la continuité et non pas d'être obligés de se
former une relève, ce qui nous coûterait énormément
cher non pas uniquement du point de vue économique, mais à tous
les points de vue.
Voilà! Je vous remercie, Mme Raymond, vos collègues et M.
Malo bis, pour l'occasion. Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Mme la ministre,
très rapidement, en conclusion.
Mme Frulla-Hébert: En terminant, mesdames, messieurs, je
vous ai dit que nous sommes très conscients. Deuxièmement, il
faut aussi reconnaître - M. le député connaît
ça, lui - que, quand on passe à un processus où on impose
ou, enfin, on revoit une loi, ça prend du temps, ce n'est pas un
exercice auquel on veut se soumettre à chaque année. On essaie
aussi d'avoir des mécanismes parallèles qui sont beaucoup plus
flexibles, justement pour correspondre à la flexibilité d'une
certaine industrie.
Je dois vous dire, par contre, que, d'une part - et vous le savez - je
suis très sensible aux craintes de l'industrie ou, enfin, à la
fragilité de l'industrie parce que c'est vrai qu'on est fragiles compte
tenu de notre situation géopolitique. Mais, quand on parle de
classement, quand on parle de protection de la jeunesse, quand on parle de
français à l'écran, quand on parle aussi de distribution,
suite aux groupes que nous avons entendus - et ça fait quelques jours,
maintenant, que nous sommes en commission parlementaire - dire que ce n'est que
passer un simple balai, je pense que c'est quand même une grosse
affirmation. Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la ministre Ceci
met fin à votre participation à cette commission et je vous
remercie. Sans plus tarder, je vais demander à l'Association des
propriétaires de cinémas du Québec de bien vouloir prendre
place à la table. Et, pour ce faire, je vais suspendre les travaux pour
une minute. La séance est suspendue.
(Suspension de la séance à 17 h 33)
(Reprise à 17 h 34)
Le Président (M. Gobé): La commission
reprend maintenant ses travaux et nous allons entendre l'Association des
propriétaires de cinémas du Québec, qui sera
représentée... À l'ordre, s'il vous plaît, madame!
Merci. Est-ce que vous pourriez vous présenter et présenter votre
vis-à-vis?
Association des propriétaires de cinémas
du Québec inc.
M. Venne (Marcel): Oui, certainement. Je m'appelle Marcel Venne.
Je suis vice-président de l'Association des propriétaires de
cinémas du Québec. Je remplace présentement M. Claude
Chabot, qui est à Cannes. Je suis un propriétaire de
cinéma indépendant qui opère un cinéma et un
ciné-parc à Joliette. À mes côtés, vous avez
M. Tom Fermanian, qui est également un propriétaire de salle
indépendante dans la région de Sainte-Adèle.
Le Président (M. Gobé): Bonjour, messieurs, et vous
pouvez commencer maintenant votre présentation.
M. Venne: Merci. Comme vous avez vu, notre mémoire est
fort court, concis et précis. Mais, par contre, je dois avouer qu'on se
demande, à partir de la nouvelle de la réforme de M. Ryan, un
petit peu ce qu'on est venus faire ici. C'est peut-être notre chant du
cygne, je ne le sais pas. Tantôt, j'assistais. J'entendais 27 % de taxes.
Oui, c'est la vérité. Je ne le croyais pas. Je ne pensais pas
ça possible, 27 % de taxes! Je ne sais pas comment on va faire pour s'en
sortir.
Avant de parler de la loi, je voulais dire ici la situation au
Québec - c'est l'Institut qui le dit, ce n'est pas moi: de 1975 à
1985, il y a eu une grande détérioration du parc de salles. Il y
a 62,3 % des salles de cinéma qui ont fermé au Québec et,
si vous reculez un autre 10 ans en arrière, vous avez un autre 30 % qui
ont encore fermé. Et, malgré ça, on surtaxe. La raison me
semble fort simple. C'est qu'on se dit que, finalement, 85 % de la recette est
faite par deux grands circuits: Cinéplex Odéon et Famous
Players.
Les indépendants, on est une cinquantaine. Ça ne
représente pas grand-chose sur l'électorat du Québec. On
n'est pas des médecins. La pression est moins forte un peu. Non, mais je
trouve ça bien bien triste. Vraiment, ça fait 20 ans que
j'opère là-dedans. J'ai investi beaucoup de temps, d'argent. J'ai
été président de l'Association pendant sept ou huit ans.
J'ai fait à peu près toutes les commissions. Me ramasser
là, j'avoue que c'est décevant. Je ne sais pas comment on va
faire pour réagir à ça. J'ai hâte de voir.
On essaie de contacter le ministre Ryan depuis je ne sais pas combien de
temps. J'ai hâte de voir, parce qu'on relève du ministère
des
Affaires culturelles, si on va être, nous aussi, un lieu culturel.
J'en doute. En tout cas, on verra. J'espère qu'on pourra en reparler
tantôt parce que je n'ai pas pu en parler à d'autres personnes du
gouvernement, malheureusement.
Donc, au niveau de la loi, on s'est arrêtés sur des points
bien précis. Je peux vous lire un petit peu ce qu'on a écrit.
Vous en avez sûrement pris connaissance. Tout simplement, pour vous
résumer, notre association existe effectivement depuis plus de 50 ans,
depuis 1932. On regroupe les deux grandes chaînes, Cinéplex
Odéon et Famous Players. On est à peu près 90 % des
écrans du Québec. Quand on dit 300, on est environ 300
écrans et non pas 300 salles de cinéma. Il y a déjà
eu 300 salles de cinéma au Québec. H y a plus de 50 % des
municipalités du Québec qui n'ont plus de salle de cinéma,
entre parenthèses. Ça s'est très
régionalisé. Il y a des grands centres, comme ici à
Québec, qui ont encore de nombreuses salles de cinéma, mais vous
n'avez pas besoin d'aller bien, bien loin en dehors de Québec pour vous
rendre compte qu'après Lévis il y en a très peu, des
salles de cinéma. Ça prend un gros bassin pour les faire
vivre.
Donc, on a été mandatés pour venir ici pour vous
parler un petit peu de nos réactions parce qu'on l'a fait souvent dans
d'autres buts. Ce qu'on déplore aussi, c'est que Mme Lise Bacon, qui
était ministre des Affaires culturelles à l'époque, en
1988, avait mandaté certains propriétaires de salles pour faire
un petit peu, je dirais, une évaluation du parc de salles, des
circonstances, de ce qui se passait à l'époque, pour essayer de
résoudre les problèmes. On a fait un rapport, qui s'appelait le
rapport Gen-dron, qui a été malheureusement tablette. On en a
tenu compte à deux reprises ici dans la présente loi. Je pense
que, pour nous, il y avait beaucoup plus que ça. Il y avait la survie
des cinémas indépendants au Québec dans ce
rapport-là. Je pense qu'on n'a pas voulu en tenir compte.
Les recommandations qu'on veut faire ici, c'est au niveau surtout de
deux articles: le fameux article 83 dont on parle souvent sur les délais
de sortie de films en langue autre que le français. Donc, ici, on a vu
un problème. Je peux vous le lire tel quel pour essayer de mieux
comprendre s'il y a des questions tantôt au niveau des 45 jours et des 65
jours. Donc, la proposition est faite en deux recommandations. La
première vise le nouvel amendement proposé à l'article 83.
Nous sommes en profond désaccord avec la solution proposée aux
paragraphes 4° et 5" dans la page 3 du sommaire du projet de loi, qui se
lit comme suit: L'article 4° dit: "d'accorder des visas temporaires d'une
durée de 45 jours si la demande touche plus de 5 copies de films en une
autre langue que le français et d'une durée de 60 jours si la
requête touche 5 copies et moins; ces dispositions seront fixées
par règlement". Donc, on est contre celui-là et
le cinquième aussi: "de permettre, à l'expiration de ce
délai, la disponibilité d'une copie qui recevra alors un visa
permanent".
Donc, nous recommandons que ces articles soient modifiés pour
plutôt se lire comme suit. Donc, l'article 4°, on le verrait de la
façon suivante, "d'accorder des visas temporaires d'une durée de
45 jours si la demande touche des films en une autre langue que le
français". Et l'article 5°: "si un film autre qu'en version
française se voit accorder trois visas d'exploitation ou moins, ce film
bénéficiera de la possibilité qu'un des trois visas soit
alors transformé en visa permanent.
Il est de la plus haute importance de comprendre que, si l'article 83
est modifié tel que rédigé dans le projet de loi 117, les
grands centres seront avantagés aux dépens des salles en
région. Jusqu'ici, les distributeurs, sans être aucunement
lésés, pouvaient octroyer des copies à des salles de
province, telles Sainte-Adèle, Cowansville, Sherbrooke et les autres,
qui peuvent jouer des films en anglais. Avec cette nouvelle législation,
ils préféreront sans doute restreindre à cinq copies, de
manière à bénéficier de la clémence de la
loi. En faisant ainsi, il est presque déjà certain que ces cinq
copies suffiront à peine à alimenter les marchés de
Montréal et de Québec. Ce seront encore les plus petits qui en
feront les frais.
Quand je dis ça, cinq copies, je parle de films porteurs. Il est
évident que cinq copies, cinq films porteurs en version anglaise, c'est
insuffisant. De là, les trois copies qu'on dit en version anglaise pour
des films limités, ça n'affecterait pas, ça ne toucherait
pas... Donc, c'est pourquoi nous affirmons unanimement qu'il serait d'autant
plus démocratique et équitable que la loi ramène de 60
à 45 jours tout visa temporaire décerné à un film
en une autre langue que le français. Cette mesure, en plus de
protéger les plus petits, incitera davantage les distributeurs à
accélérer la venue de tous les films en version française
et à s'ajuster au nouveaux délais qu'imposera la venue de la TV
à la carte, le "pay-per-view", qui s'en vient, qui a été
acceptée par le CRTC.
En ce qui concerne le paragraphe 5° du sommaire du projet de loi,
nous croyons qu'un visa permanent ne devrait s'appliquer qu'à des films
ayant obtenu un maximum de trois visas d'exploitation. Si nous nous permettons
d'apporter à l'article 5° l'exception d'un visa permanent touchant
les films qui verront leur exploitation faite à trois copies ou moins,
c'est dans le but, premièrement, de faciliter l'acceptation, dans son
ensemble, du projet de loi par les maisons américaines et,
deuxièmement, de comprendre et d'accepter la diffusion des films qui
n'ont qu'une exploitation restreinte et qui, souvent, sont dirigés vers
une population autre que francophone et qui ne seront probablement jamais
doublés ou sous titrés, tout simplement parce qu'il n'y a pas de
marché pour ces films-là. C'est des films d'art qui doivent
rester en version originale. Il n'y a pas d'intérêt pour des
versions doublées à ce moment-là.
Nous sommes persuadés que, si ce visa permanent s'appliquait sans
restriction, il ne ferait que retarder la venue des versions françaises
et, par le fait même, contrecarrer le but même du présent
projet de loi. Le problème est là. C'est que, si on extensionne
un permis pour tout le temps sur une copie en anglais, on a un problème
de sortie en français et c'est évident qu'on va subir des
délais par la suite. Ça, c'est sûr. Donc, nous avons
été surpris que cette mesure ait été ajoutée
au texte de loi, car nous croyons fermement que les moments difficiles qui ont
suivi l'application de cette loi sont maintenant révolus et qu'il n'est
plus dans l'intérêt de personne de raviver ce débat. Nous
comprenons également le but politique visé par le
législateur et c'est pourquoi nous croyons raisonnable et non
dommageable d'appliquer cette règle telle que stipulée dans notre
mémoire.
Il y a un autre changement qu'on voyait. C'était au niveau du
plan triennal de la SOGIC. Je vais vous le lire, pour être plus
précis dans l'énoncé. Donc, notre deuxième
recommandation modifie le nouvel article 8. 1 énoncé dans
l'article 2 du projet de loi 117, qui se lit comme suit: "Le ministre
établit un plan triennal de soutien financier au secteur privé du
cinéma. Ce plan énonce notamment les objectifs à
poursuivre au cours de la période prévue. "Il élabore ce
plan triennal en collaboration avec la Société
générale des industries culturelles, instituée par la Loi
sur la Société générale des industries culturelles.
Avant d'arrêter le plan triennal, le ministre prend l'avis de l'Institut
québécois du cinéma. "
Nous croyons que le plan triennal de soutien financier au secteur
privé du cinéma devrait être établi à partir
des objectifs et recommandations émis par les organismes du
ministère des Affaires culturelles, tels l'Institut
québécois du cinéma et la SOGIC, et non pas par le
ministre, mais ceci à long terme. Cependant, à court terme, vu
les problèmes actuels face à la Régie, à la SOGIC,
excusez-moi - parce qu' on n'a aucun problème avec la Régie; au
contraire, ça va très bien; il ne faudrait pas confondre; j'ai
assez de problèmes avec la SOGIC, croyez-moi, ça va mieux de
l'autre côté - nous souhaitons que le pouvoir décisionnel
de tout plan de soutien financier au secteur privé du cinéma soit
établi par le ministre en ce moment. Mais, par contre, on pourrait
rejoindre les vues de l'Institut sur un long terme.
En terminant, je voudrais vous remercier. Mais il y a deux points... Vu
que je parlais des structures et des organismes, effectivement, avec la
Régie du cinéma, il y a une période d'adaptation.
Ça s'est fait et, maintenant, ça va très bien. On est
très satisfaits. Je pense que tout va
dans le meilleur des mondes. (17 h 45)
Au niveau de l'Institut, on déplore que la dernière loi
l'ait un petit peu noyé. Finalement, pour nous, c'est un conseil
consultatif et je me demande si, effectivement, ses consultations sont
réellement prises en considération. Je ne le sais pas. Nous,
comme plusieurs, on aurait aimé que l'Institut ait plus de pouvoirs, que
le ministre le considère en premier. Je rejoins la madame qui
était ici tantôt. On va avoir le même problème si
l'Institut élabore des programmes et les impose à la SOGIC. La
SOGIC ne voudra pas les appliquer ou mettra les bâtons dans les roues
nécessaires pour qu'effectivement on se retape encore une bonne petite
loi dans à peu près quatre ou cinq ans, comme c'est notre
habitude au Québec de le faire. Moi, ça doit être la
quatrième que je vois passer et je ne suis pas tellement vieux. Le
problème est là. Comment fait-on pour essayer d'harmoniser tout
le monde pour le meilleur de l'industrie? Je ne le sais pas.
Je veux que ce ne soit pas plus long que ça, pas plus
compliqué. Vous avez, en deux temps trois mouvements, ce que notre
association pense, mais dites-vous bien que la loi, pour nous, c'est vraiment,
mais vraiment secondaire au prix des 27 % de taxes et qu'il y va de notre
survie. Je ne le crierai jamais assez, puis, croyez-moi, vous allez en entendre
parler jusqu'au 1er janvier. Ce n'est que le début du "party", je vous
le promets.
Le Président (M. Gobé): Merci, monsieur. Je vais
maintenant passer la parole à Mme la ministre des Affaires culturelles.
Vous avez la parole.
Mme Frulla-Hébert: Premièrement, je comprends
comment vous vous sentez, d'une part. Deuxièmement, il faut, quand
même, regarder dans son ensemble, au niveau de la loi de M. Ryan, le
partage. Il est aussi à noter que la taxe d'amusement sera facultative
au niveau des municipalités, mais que, par règlement
gouvernemental, on exclut certaines activités dites culturelles.
Comme ministre des Affaires culturelles, 27,4 %, je pense, c'est trop.
Alors, nous avons mis énormément de détermination à
faire accepter un principe par le ministère des Finances, qui
était très difficile. Je reviens à la taxation sur le
livre et à l'exonération do cotte taxation au niveau du livre.
Croyez-moi que, là, s'il y a un règlement, dans la loi du
ministère des Affaires municipales, exprès pour ça, c'est
beaucoup plus facile pour nous, finalement, de faire la liste et de dire: Ces
catégories dites culturelles là se devront d'être exclues.
Effectivement, nous allons travailler extrêmement fort pour que ce le
soit. Nous partageons, dune part, votre avis et, deuxièmement, nous
allons y mettre aussi tous les efforts nécessaires pour que ce le soit.
Alors, il ne faut pas, quand même, faire preuve de pessimisme, au
contraire. Nous avons travaillé fort, nous avons été
optimistes sur le livre et nous l'avons eu, comparativement à ce que le
fédéral a accordé au monde, à l'industrie du livre
et aux éditeurs. Alors, pour ceci, vous avez, quand même, la
ministre de votre bord.
Maintenant, je veux revenir à deux choses. D'abord, au niveau de
l'Institut, vous dites que l'Institut, bon, c'est un organisme... Je tiens,
quand même, à vous rassurer sur le rôle de l'Institut.
Premièrement, l'Institut n'a pas - je le disais tantôt -
finalement, qu'une importance, enfin, sur papier ou quoi que ce soit. Au
contraire, les recommandations de l'Institut, que ce soit au niveau du
classement, que ce soit au niveau du français à l'écran,
etc., sont inscrites telles quelles dans la loi, ce qui fait que la plupart des
recommandations de l'Institut sont dans la loi présentement et ont
été respectées. Alors, chose certaine, l'Institut a
énormément d'importance pour nous et l'organisme continuera
d'être aussi important.
Je veux revenir au niveau d'une remarque qui a été
apportée par différents groupes, dont un en particulier, ce
matin. C'est tout le problème de la distribution des films autres
qu'américains en salle. Il y a une grande inquiétude au niveau
des producteurs, des réalisateurs parce qu'on dit: On a beau essayer de
produire des bons films, les films ne sont pas vus. On a beau avoir des films,
s'ils ne sont pas vus, évidemment, les gens n'en consomment pas,
etc.
Je reviens à l'exemple qui, finalement, nous a été
aussi apporté ce matin en disant qu'un film porteur tel que "Le
Déclin de l'empire américain" a été vu dans une
salle et qu'il aurait mérité probablement une plus grande
diffusion. Expliquez-moi donc comment ça fonctionné. Sauf,
évidemment, les gros films où on ne prend pas de chance, les gros
films au box-office, les gros films porteurs - eux, c'est sûr - un film
américain, évidemment, c'est sûr, est-ce que c'est vrai de
dire que nos films québécois, par exemple, ou des films
étrangers qui mériteraient d'être vus, ceux qui sont
primés à Cannes présentement et que la population aimerait
probablement voir, on ne leur donne pas la chance ou on leur donne un temps
tellement court pour, justement, entrer des films de seconde classe, si on
veut, américains, par exemple?
M. Venne: Oui. Je vais essayer de vous expliquer la façon
dont, moi, je le perçois et, après, je passerai sûrement la
parole à M. Fermanian qui désire intervenir. Moi, je le vois au
niveau de deux choses: le film québécois, d'une part, et le film
européen, d'autre part. Au niveau du film québécois, je
pense que c'est souvent un gage de succès assuré en salle par los
temps qui courent On n'a qu'à voir les
recettes. Je vais vous donner un exemple qui est des fois surprenant. On
ne le réalise pas, mais, en dehors de Montréal, le
deuxième plus grand succès depuis les 20 dernières
années, après "ET. " et ça étéle film
"Cruising Bar" - on ne s'en rend même pas compte - en assistance brute.
Je ne parle pas en argent.
Donc, c'est significatif et, moi, je connais peu de propriétaires
de salles, peu importe l'allégeance ou sous quelle bannière ils
soient, qui vont refuser de jouer un film qui fait des sous. C'est aussi
bête que ça, malheureusement. Mais on a des intérêts
pécuniaires en premier. Donc, qu'on soit programmé par qui on
voudra, par telle agence de programmation ou tel circuit, je pense que les
films québécois, effectivement, ont toujours la primauté
dans les meilleures salles parce que, en plus, ce sont souvent eux qui nous
font des termes plus intéressants que les compagnies américaines.
Donc, on est encore plus intéressés à les jouer à
long terme.
Au niveau du film européen, ça devient plus difficile en
dehors des grands centres, je vous l'avoue. À Montréal et
à Québec, il y a un potentiel; ça fonctionne très
bien. En dehors de ça, on a demandé des programmes d'aide pour du
film dit, entre guillemets, de répertoire ou de qualité.
Malheureusement, on n'en a pas eu encore, mais je pense que, pour une diffusion
beaucoup plus large de films primés dans les festivals et ces
choses-là en dehors des grands centres, il va falloir avoir un soutien
financier à quelque part Certains le font, dans certaines salles, mais,
avec la fermeture, comme on le voit, et le changement de vocation des
cinémas de répertoire depuis les trois ou quatre dernières
années, ça me semble effectivement plus difficile en
région.
Mme Frulla-Hébert: Je veux revenir, quand même,
là-dessus. Bon, parlons des films québécois, par exemple.
Effectivement, il y a certains films québécois qui, comme vous
dites, sont des succès au box-office et des films porteurs. Quand on
reçoit un film américain, après les 11 000 000 $ de
promotion mis à travers les États-Unis, le Canada, etc., c'est
sûr que, même si, des fois, la qualité est moindre en termes
de contenu et aussi culturellement moindre, c'est un moins gros risque que de
dire: Bon, bien, voici maintenant un film québécois. Ça
semble bon, mais...
Est-ce que les salles, en général, selon votre
expérience aussi, Famous Players, Odéon, les grands
réseaux prennent des chances aussi sur le québécois ou si
on va, à cause de pressions extérieures ou à cause du
marché, seulement vers des valeurs sûres?
M. Venne: Seulement vers des valeurs sûres. S'il y a
quelque chose qui n'est pas sûr, c'est bien le lancement d'un film en
salle de cinéma, en partant, même pour un film américain.
Parce que j'ai déjà vu des grands succès américains
traduits en français et je vous avoue que ça n'a pas fait
grand-chose. Souvent, des comédies, c'est mal accepté. Donc,
c'est toujours un risque. Mais, au niveau québécois, je peux vous
garantir que 90 % des films, au minimum, sont présentés dans les
meilleurs délais, dans les meilleures salles. Il y a certains films,
effectivement, dans le film québécois, qui sont des films
d'auteur, des films plus difficiles. Ça peut arriver; c'est sûr et
certain. Ce sont des cas très limités et je serais prêt
à m'asseoir avec vous et à regarder la programmation sur
l'ensemble de l'année, en tout temps, et je peux vous garantir que ce
sont des cas d'exception.
Il y a une nette préférence pour le cinéma
québécois, je vous le garantis, en tout temps. Même les
deux grands circuits, si on peut avoir un film québécois, on les
demande, on les cherche; ils n'en produisent pas assez. C'est ça, notre
opinion; ce n'est pas l'inverse. On n'est lié par aucun. Parce que c'est
fini, le temps où on était lié avec les distributeurs
américains qui faisaient signer des contrats pour 20 films. C'est
à la pièce. Les termes sont chers. Donc, le film doit prouver
qu'il a de l'intérêt et on le joue si on y croit. Mais on croit
plus facilement, à partir des recettes qu'on a, auxfilms
québécois chez nous, bien souvent, qu'à certains
succès américains qui, vu le type particulier, sont plus durs
à vendre. C'est sûr que "Indiana Jones" sera toujours un grand
succès, mais il y en a d'autres que ceux-là.
Mme Frulla-Hébert: O. K. Quand vous dites, là:
C'est un succès, etc., est-ce qu'on fait la différence entre en
région - en région, effectivement, l'accès à
l'anglais, c'est tout de même moins acceptable - versus Montréal,
par exemple? J'exclus même Québec. Je parle de Montréal
versus le reste du Québec. À Montréal, par exemple,
l'accès aux salles de cinéma, grosse distribution, etc., pour un
film québécois, par exemple, est-ce que c'est aussi vrai?
M. Venne: II est évident qu'à Montréal les
gens sont choyés. Vous avez un plus grand nombre de films, un plus grand
nombre de salles, un plus grand nombre de produits européens. Il est
évident que ça ne se compare pas à la province où
on doit être plus sélectif. Effectivement, la population est
là; donc, le choix est là, c'est sûr et certain. À
Montréal, vous voyez, à partir du cinéma parallèle,
qui fait un très bon travail, du cinéma vraiment beaucoup plus
difficile jusqu'au cinéma très commercial, on a tout
l'éventail de tout le produit, ce qui n'est pas le cas,
évidemment, dans les salles de province.
Mme Frulla-Hébert: Oui. Juste pour spécifier ma
question. Au niveau des films québécois, par exemple, production
ici, est-ce qu'à Montréal un
film québécois bénéficierait d'autant de
visibilité en termes de distribution qu'un gros film américain?
J'essaie de m'expliquer pourquoi "Le Déclin de l'empire
américain", malgré que ce soit une salle très respectable,
était au Crémazie, quand il aurait pu être à la
grandeur. J'essaie juste de m'expliquer. Vous le vivez. Nous autres, on est de
l'extérieur.
M. Venne: Je peux très bien vous expliquer pourquoi. Je
pense que l'astuce est très bonne et ça a très bien
fonctionné- Le terme anglais, je m'excuse, c'est...
Une voix: Le "performing".
M. Venne: ...souvent de faire un cas exclusif, un "showcase" dans
une salle. C'est voulu de le faire comme ça et ça a fait des
records absolus qui ne se sont jamais vus au Crémazie. Donc, on l'a fait
durer pendant longtemps pour pouvoir le monter comme un événement
parce que c'était un événement. Ça a fait des
chiffres extraordinaires et c'était voulu qu'il reste là. Et il
est resté là très longtemps. Je pense que le producteur
distributeur est ici dans la salle. Il pourrait en parler lui-même. Je
pense qu'il était...
Une voix: Oui.
M. Venne: Oui, c'est ça. Tu es là. Je pense que les
chiffres étaient extraordinaires, ont parlé par
eux-mêmes.
M. Boulerice: Vous auriez pu me le dire. Ça fait cinq ans
que je dénonce ça.
M. Venne: Donc, à ce moment-là, c'est ça,
l'idée. Et, après ça, on est allés avec un plus
grand nombre de copies et on en a fait la distribution. Mais c'était
voulu comme ça. Le marketing était fait comme ça. Je pense
que c'était un coup extraordinaire. Ça a fait des records et je
pense que ça a bien servi le producteur, le distributeur et
l'exploitant, quant à moi.
Mme Frulla-Hébert: J'apprends que c'est voulu, mais,
effectivement, mon collègue député dénonce
ça depuis très longtemps. On se posait la question quand
même, sincèrement. Ce qui veut dire qu'un bon film
québécois, appuyé, etc., peut bénéficier,
s'il le veut bien, stratégie le voulant, d'autant de visibilité,
enfin, d'accès à la diffusion, etc., qu'un film américain.
C'est ça?
M. Venne: À mon sens, plus et beaucoup plus. C'est mieux
publicise. Il y a de l'aide gouvernementale dans ces lancements, soit par
Téléfilm, soit par la SOGIC, pour la publicité et ces
choses-là. Donc, si vous avez les budgets publicitaires, vous allez
avoir les salles qui vont avec, vous allez avoir les dates qui vont avec. Et,
d'après moi, quand c'est lancé ici, un film d'ici, c'est mieux
lancé qu'un film américain. C'est ma façon de voir les
choses.
Mme Frulla-Hébert: O.K. Rapidement parce qu'on... Autre
chose aussi, au niveau du français à l'écran, vous dites
45 jours sans exception, d'une part. Je veux toucher à quelque chose,
par exemple, parce que vous parlez de films québécois et de
vouloir avoir maintenant du produit québécois. Est-ce que, selon
votre expérience encore, vous diriez qu'un film qui... Est-ce que je
peux appliquer la même logique? Un film qui est québécois
maintenant, on se l'arrache parce que, habituellement bien fait; c'est le
même phénomène qu'à la télévision avec
les miniséries, c'est-à-dire que le public le veut. Est-ce que
c'est aussi vrai pour le doublage québécois versus le doublage en
français de France? Parce qu'on a eu, hier, un sondage Léger
& Léger qui nous disait que les Québécois nous disent
oui au doublage québécois. Maintenant, il y a réticence au
doublage français parce que, là, on se sert de plus en plus de
termes d'argot qui sont loin de notre parler, si on veut. Sinon, on se contente
présentement de l'anglais en attendant que la bonne copie sorte. Est-ce
que vous le vivez, ça? (18 heures)
M. Venne: Oui, au niveau du doublage, il faut savoir
qu'effectivement il y a plusieurs tendances. Il y a des gens qui
préfèrent voir un film en version originale. Ils le verront
toujours en version originale. Ils ne voudront jamais le voir en version
doublée.
Mme Frulla-Hébert: Oui.
M. Venne: C'est une partie, mais c'est une petite partie de la
population. La majeure partie veut voir le film dans sa langue, en version
doublée; donc, on voit le phénomème. D'ailleurs, à
la télévision, vous avez la même série avec un an de
retard entre l'anglais et le français, et le français bat par 10
fois les "rating". Donc, on le voit, l'intérêt est là. Au
niveau du doublage en français, ce qui est fait en France et ici: ici,
ça a l'avantage de faire sortir des films plus rapidement. Pour nous,
c'est important. Par contre, je dois avouer - je sais que je ne me ferai
peut-être pas des amis, mais je vous dois la vérité, je le
pense; ça fait 20 ans que je fais ça - qu'on a un problème
technique. On l'a souligné plusieurs fois. Souvent, la qualité du
doublage - je ne sais pas si c'est une question d'investissement d'argent du
distributeur - n'est pas à la hauteur. On a un problème. Dans
certains cas, on a fait un travail extraordinaire, mais, plus souvent
qu'autrement, on a un problème de technique. Donc, les gens se rendent
aujourd'hui facilement compte quand la copie est désynchronisée.
C'est fini, ce temps-là où les gens ne le voient pas. Je
m'excuse, mais ça se
voit. Et, quand on peut reconnaître: Ah oui! c'est vrai, je l'ai
vu dans telle émission ou qu'on peut reconnaître les voix aussi,
c'est un problème. Par contre, le phénomène que vous
soulignez de l'argot est un problème, vous avez raison, qu'on nous
souligne. Souvent, on ne comprend pas et c'est mal adapté au niveau de
la France. C'est vrai, il y a des délais. C'est de faire la part des
choses.
Mme Frulla-Hébert: Au niveau de l'industrie, il y a eu des
techniciens hier et on a reçu, finalement, différents groupes,
des syndicats, etc., qui nous disent, effectivement, que, plus on
développe une industrie, meilleurs on est. Chose certaine, c'est qu'au
niveau de la vitesse, de la qualité et tout ça, on dit que c'est
la même. Les studios sont employés à 21 %, ce qui fait
qu'il faut, quand même, développer une certaine expertise ou
continuer de développer une expertise; sinon, on va toujours vivre avec
ça aussi. On va attendre nos copies françaises et l'expertise ne
sera pas à la fine pointe, comme on le souhaite. Et eux nous disent, par
contre, que l'industrie, au moment où on se parte, serait prête
non seulement à donner une excellente qualité, mais plus on en
reçoit, évidemment, meilleurs on est. Est-ce que vous êtes
d'accord avec ça? C'est vous qui recevez ça.
M. Venne: II est évident que plus ils vont en faire, plus
ils vont avoir l'expérience et mieux ça va être. C'est
sûr et certain. Les 21 %, je ne sais pas d'où ça vient,
mais, là, vous me surprenez grandement. Il y a peut-être des
distributeurs qui me content des petites mente-ries quand ils me disent que,
pour faire doubler des films, ils ont de la misère à arriver dans
les temps. Là, vous me dites 21 %. Ça veut dire qu'ils peuvent
faire doubler le film dans le temps qu'ils veulent, comme ils veulent, à
moins qu'ils fassent toujours affaire avec les mêmes laboratoires et
qu'ils boudent tous les autres. Je ne vois pas d'où ce chiffre-là
peut arriver. En tout cas, ce n'est pas ce qu'on me dit.
Mme Frulla-Hébert: Mais ça vient de l'Union des
artistes; c'est l'Association des techniciens...
M. Venne: Oui, moi, je ne suis pas dans l'industrie du
doublage.
Mme Frulla-Hébert:... plus les producteurs, etc.
M. Venne: Le distributeur me dit qu'il y a des problèmes
à les faire doubler parce qu'ils sont plusieurs et qu'ils doivent
attendre. C'est ce que, moi, j'entends. Vous, vous me parlez de 21 %.
Mme Frulla-Hébert: C'est ce qu'on nous a dit, oui.
M. Venne: Bon, écoutez. Je ne sais pas. Je ne suis pas
expert là-dedans. Je ne fais pas de doublage, mais je peux vous dire que
j'ai un son de cloche différent. Au niveau du doublage, j'espère
qu'effectivement, et je le souhaite, ça vienne de mieux en mieux et que
les copies sortent dans les mêmes formats au Québec qu'elles
peuvent être faites en France. Quand on fait des films en Dolby
Stéréo, je pense qu'aujourd'hui ils devraient tous l'être
et ne pas essayer de couper 2000 $ peut-être pour ne pas avoir à
promener l'internégatif ou. je ne sais pas, la trame de son
stéréo, d'une place à l'autre. Au Québec, souvent,
on ne l'a pas en Dolby Stéréo. Maintenant que les films sont en
SR - il n'y a pas de terme français pour ça -"spectral
recording", il n'y en a même pas. Je pense qu'il n'y en a presque pas qui
sont faits au Québec dans ce format-là. Nous, on s'est
équipés parce que c'était la survie. On l'a fait, on a mis
beaucoup d'argent. On espérait qu'eux aussi auraient pu investir et le
faire. Je pense que, quand ils correspondront à cette
technique-là... Et je leur souhaite la meilleure chance du monde...
Mme Frulla-Hébert: Parfait. Merci.
M. Venne:.. quant à moi.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, M. Venne.
Mon collègue me fait une petite réflexion en aparté. Il
est vrai qu'en France on assiste à deux genres de traduction. Il y a le
français extrêmement courant où on peut entendre, au lieu
de "dépêche-toi" ou "grouille-toi", "magne-toi le popotin". Je
crois que ça fait un peu déplacé, ça sonne mal
à nos oreilles de Québécois francophones lorsqu'on entend
ça dans un film. La même chose, il m'est arrivé de voir des
séries télévisées traduites ici. à
Montréal, qui se passent à New York, une espèce de
série, de "soap" traduit, où l'acteur dit: "Je m'en vais à
Laval" et tout le monde sait pertinemment que ça ne se passe pas au
Québec. Alors, je pense que, des deux côtés, il y a
peut-être, là, une amélioration; de notre côté
à nous, peut-être une amélioration dans la qualité
et probablement qu'avec cette qualité-là on devrait être
capables d'aller compétitionner sur d'autres marchés francophones
en même temps aussi.
M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, maintenant, je
vous passe la parole.
M. Boulerice: M. Venne, baron Fermanian... Oui, je me
débrouille un peu dans votre langue. On vous dit qu'on a conscience des
problèmes reliés à la taxation, sauf que c'est beau de
dire qu'on en a conscience, mais je trouve que le coup de massue est tellement
fort que vous êtes en train de perdre connaissance. Et, si vous vous
devez à la vérité, je me dois de faire
éclater la vérité en cette commission. Depuis près
d'un an et demi, l'Opposition officielle réclame qu'il y ait un mandat
d'initiative de confié à la commission de la culture, qui est
l'impact des taxes sur les produits et les industries culturelles, mais le
parti ministériel s'y refuse depuis un an et demi. Et Dieu sait que nous
pourrions amener des éléments qui permettraient, d'une part, une
réflexion et, deuxièmement, peut-être de trouver des
avenues de solution, mais on s'y refuse. Alors, j'espère que le niveau
de conscience pourra aller - je vais inventer un mot - à Pagissance"
aussi; sinon, on n'en sortira pas. Et, puisqu'on parlait de cette TPS, est-ce
que vous avez, à date, un impact de la TPS, de la TVQ qui s'en vient,
taxe d'amusement, en diminution de fréquentation des salles de
cinéma - les ciné-parcs, c'est un petit peu difficile puisque
c'est saisonnier - en pourcentage, depuis janvier?
M. Venne: Je n'ai pas les derniers chiffres depuis janvier. Je
peux vous dire qu'effectivement on sent une baisse depuis l'augmentation de
prix et je vous dis que, depuis 50 ans, et ce n'est pas qu'ici, mais à
la grandeur de l'Amérique, dès que vous augmentez le prix, il y a
automatiquement une réduction de l'assistance. Ça fluctue,
ça monte un peu, ça redescend, mais, en bout de ligne, vous vous
ramassez toujours un petit peu plus bas. Et avec les 27 %... Je ne sais pas si
ça vous dit quelque chose, 10 $ pour aller au cinéma; j'ai
l'impression que ça dit peu de chose à beaucoup de monde. C'est
très cher, pour ne pas dire prohibitif, et on s'en va vers un prix comme
celui-là. Je vais vous dire: Les prix ont augmenté en janvier
sans tenir compte de nos propres augmentations, à nous, de nos
coûts, pour essayer d'amortir un peu la venue de la TPS. On nous remet
une autre taxe encore une fois et il ne faudra rien prendre pour nous.
Ça va faire plus que 24, 30 mois sans que je puisse augmenter mes
coûts pour faire face aux autres qui, eux, augmentent. Je vais arriver
encore négativement. Je ne peux pas arriver. Donc, c'est pour ça
que je vous dis que, de 8 $, on va peut-être parler de 9,50 $, presque 10
$. À mon sens, l'acceptation du public... Écoutez, vous le voyez
vous-mêmes, les mardis soir - je ne sais pas si vous fréquentez
les salles de cinéma des fois le mardi - j'ai peut-être
l'impression qu'il y a un peu de monde; s'il y a un peu de monde le mardi,
ça veut peut-être dire que les gens sont tannés de payer
des prix comme ceux-là. Ils vont se retourner de bord et ils vont dire:
Bien oui, mais les cassettes, c'est bien moins cher: 3,50 $ pour louer une
cassette, ce n'est pas cher, ça. Ils n'ont pas tort. Je pense qu'ils
n'ont pas tort. Pourquoi, à ce moment-là, n'y a-t-il pas la
même taxation pour le même produit, à deux paliers
différents? Pourquoi, tantôt, la télévision à
la carte n'aurait pas la fameuse taxe d'amusement? La cassette non plus? On va
être les seuls à se ramasser avec une triple taxation face au
même produit, sauf qu'on parle d'un délai de deux ou trois mois.
C'est ça qui arrive. Ça va être dur de vivre avec
ça. Moi, c'est ma perception.
M. Fermanian (Tom): Vous parlez également de films
québécois de tout genre, ça, ça donne aussi... Les
gens font des choix. Si les gens allaient au cinéma quatre fois par
mois, ils vont peut-être y aller deux, trois fois. Souvent, ça
peut encore encourager du gros produit américain, peut-être plus
que du film québécois. Entendons-nous, le monde, il dit: On
allait quatre fois au cinéma, on y va maintenant seulement trois fois.
Ça va être par sélection de qu'est-ce que le monde veut
voir.
M. Venne: Et c'est tout à fait vrai, vous le savez. Il y a
90 % ou 85 % de la recette en salles en Amérique qui est faite alentour
de 10 films. C'est simple. Mais, à ce prix-là, lesquels
allez-vous choisir? C'est ceux-là. C'est ceux-là. En France,
c'est le même problème: le cinéma américain monte en
flèche. Pourquoi? C'est toujours ça, on limite, on limite. Bien,
vous limitez vos sorties. Vous allez choisir possiblement "II danse avec les
loups" au lieu de choisir un autre film un peu moins connu. On ne le prend
plus, le beau risque; c'est trop cher. Et, quand on parle de lieu culturel,
c'est ça que je veux dire: Est-ce que la salle de cinéma va
être considérée comme un lieu culturel? C'est mon plus
grand souhait. Parce que, effectivement, je vais présenter des films
américains, vous avez raison, mais j'en ai besoin pour faire mes
paiements, pour tantôt présenter un beau risque. Même si je
n'ai de plan d'aide de personne, moi, j'en fais et plusieurs en font, du
cinéma de répertoire, avec le cégep local à
Joliette, pour vous donner un exemple. Il y en a d'autres qui en font, des
choses comme ça. Ça existe, on n'a pas besoin de programmes, on
le fait dans nos propres petits patelins pour essayer de répandre la
culture cinématographique. Mais faudrait-il que ma salle soit encore
ouverte pour que je puisse continuer à le faire.
M. Boulerice: Juste pour aller encore dans la même
idée, mais je veux passer à un autre sujet. On a peut-être
exempté de façon temporaire le livre. D'ailleurs, on avait fait
le calcul, l'addition des deux taxes rapportait plus aux gouvernements que
l'auteur recevait de droits sur la vente de son livre. Vous imaginez
l'aberration. Mais la suspension temporaire de la TVQ sur le livre
n'empêchera pas le tiers des librairies de fermer très
bientôt. Parlez avec un éditeur, il va vous dresser un portrait
aussi sombre que celui que vous faites au niveau du cinéma.
Mais ceci dit, M. Venne, je suis curieux,
quand on s'appelle Venne et qu'on exploite du cinéma à
Joliette, c'est qu'on est de Saint-Jacques de Montcalm, j'en suis
persuadé, avec un nom comme le vôtre.
M. Venne: Je vais vous décevoir. Ha, ha, ha!
M. Boulerice: Non?
M. Venne: Malheureusement non, je suis originaire de
Beauharnois.
M. Boulerice: De Beauharnois? Bon. Alors, ça aurait fait
plaisir à mon collègue Landry que vous veniez de Saint-Jacques de
Montcalm et à moi-même puisque je suis joliettain d'origine
Mais ceci dit, sur le plan triennal qui est proposé par le projet
de loi et, là, je cite: étant donné "la
problématique actuelle face à la SOGIC - bon, les accusés
seront amenés à la barre bientôt, là - vous
souhaitez que celle-ci ne soit pas associée à court terme au
processus d'élaboration de ce plan. Est-ce que, comme les
réalisateurs, les producteurs, les techniciens et les distributeurs,
vous avez très peu confiance en la SOGIC?
M. Venne: Vous me demandez si j'ai confiance, puis très
peu? Pas confiance du tout.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Venne: Des gens qui ne consultent jamais; on est
obligés d'appeler, d'écrire presque des lettres
enregistrées pour essayer de les rencontrer. C'est ça, la
réalité Plus fermé, puis "élitique" que ça,
ça ne se peut pas. Moi, j'ai été membre de l'Institut dans
le temps que tout le budget passait par là, je l'ai fait pendant trois
ans. On a dit. Conflit d'intérêts, on change la loi, puis
là on fait ça, on change ça. Aujourd'hui, c'est ça.
On est rendu, là, fonctionnaires à outrance, il n'y a plus rien
à faire. Quand on permet d'ouvrir des salles de cinéma dans une
région comme Joliette sur une étude de rentabilité qui dit
qu'il y a 180 000 personnes dans la région de Joliette, je vais vous
dire, là: II ne faut pas être allé plus loin qu'à 42
milles de Montréal, je vous le jure.
M. Boulerice: Et Dieu seul sait que c'est une ville très
"culturée". Si je vous ai bien compris aussi, M. Venne, c'est que vous
déplorez l'abolition de la Société générale
du cinéma qui existait et le lien qu'il y avait avec l'IQC.
M. Venne: Effectivement
M. Boulerice: Nous avions prévenu la ministre de
l'époque, la prédécesseure de la
prédécesseure de l'actuelle, mais on n'a pas voulu entendre
l'Opposition croyant que c'était un discours partisan. Mais non, le
milieu nous donnait des signes très clairs et très
évidents. Alors, je pense que vous avez été on ne peut
plus précis et surtout honnête de façon on ne peut plus
spontanée dans votre réponse: Pas du tout, merci.
M. Venne: Puis, je vais vous dire pourquoi. Parce qu'on est
peut-être un des secteurs de l'industrie du cinéma qu'on... Puis,
à part ça. je vais vous dire, la seule place où on peut
espérer avoir une aide, c'est là. Téléfilm Canada,
ça n'existe pas pour nous, on n'a pas droit à ça, on n'est
pas là-dedans. Nous autres, on n'est qu'au Québec, on est des
vrais Québécois et je suis content de l'être. Parfait, je
vais aller cogner, moi, à la SOGIC, pas de problème. Mais
faudrait-il qu'on puisse m'entendre, puis qu'on puisse faire un programme, puis
l'adapter, puis vivre avec. On n'a pas bougé, depuis six ans, les
enveloppes budgétaires, on reste toujours avec les mêmes;
ça veut dire qu'on veut nous éteindre tout simplement nos
programmes. C'est ce qu'on est en train de faire. On est aveugle. On leur a
suggéré dans le rapport Gendron un plan qui disait: On va
structurer, puis on va regarder où on peut en ouvrir des salles de
cinéma, puis à long terme ça va survivre. Aujourd'hui, on
en ouvre à tort et à travers, on ne vérifie pas, on va
dans n'importe quel marché. On paiera le prix de ce qui se fait
aujourd'hui d'ici cinq ans. Je vous le dis, vous le verrez, vous saurez me le
dire.
M. Boulerice: C'était ma dernière question, M.
Venne; j'allais vous dire: Faites-moi donc le point sur le rapport Gendron
versus la SOGIC.
M. Venne: Oh! Ce qu'on a demandé, nous, dans le rapport
Gendron, on demandait qu'à l'intérieur de la SOGIC,
effectivement, il y ait un organisme qui soit formé,
premièrement, qui s'occupe exclusivement de cinéma, de salles de
cinéma et de programmes de promotion. Donc, à ce
moment-là, on ne voyait plus d'intérêt, on se sentait
complètement noyés, d'une part, et on se demandait s'il y avait
lieu, au niveau du conseil d'administration, qu'il y ait des gens de
l'industrie qui soient présents. C'est à peu près
ça qu'on disait dans le rapport Gendron. Nous, c'est ça. Mais,
vous savez, je suis conscient, fort conscient, que j'ai beau mordre le bras qui
me nourrit, je ne sais pas si je serai sur la liste noire quand je sortirai
d'ici et je sais aussi très bien que ça ne changera pas demain
matin.
M. Boulerice: Je douterais qu'on exerce des représailles.
Si jamais on le fait, nous vivons en démocratie, alertez qui de droit.
Oui, M. Fer-manian.
M. Fermanian: Pourrais-je répondre? Tantôt. Mme la
ministre demandait à propos des films
québécois... On opère notre cinéma depuis 43
ans à Sainte-Adèle, c'est une entreprise familiale. Moi, je suis
là depuis à peu près 23 ou 24 ans. Depuis tout le temps,
quand il y a eu des films québécois valables ou le moindrement
commerciaux, dans notre cas ou dans le cas de la plupart des salles, il n'y a
jamais eu d'objection, même, Marcel, dans le temps des films comme
"Mustang", on recule en 1973, 1974. C'est la même chose même dans
les métropoles, Montréal, Québec. C'est traité
comme un autre film, c'est pour avoir des assistances, pour amener du monde au
cinéma. Je sais que, dans les grands circuits comme Cinéplex
Odéon et Famous Players, il y a des films, des fois, qui ne sont
peut-être pas commerciaux, du cinéma d'auteur et tout ça;
ils vont présenter ces films-là et on sait bien, à voir
les recettes, qu'il y a des pertes dans ces cinémas-là. Alors, ne
nous leurrons pas: pour n'importe quel film, qu'il soit
québécois, qu'il soit européen, qu'il soit
américain, on essaie de trouver un public, puis de faire venir du monde
au cinéma. Mais on a toujours..., en tout cas la plupart des films
québécois qui sont le moindrement valables sont
présentés en province et souvent avec beaucoup de succès.
Mais il faut dire qu'on ne peut pas s'attendre à voir du film d'auteur
dans les régions lointaines parce que, souvent, la population n'est pas
là pour ça; il y a peut-être quelques professeurs de
cégep et quelques étudiants en cinéma du coin qui vont
aller voir ça, mais M. et Mme Tartempion..., à moins que le film
soit très vendu, très vendu. Des fois, c'est du film très,
très "heavy". Je parle des films comme "Jacques et novembre" qui est
excellent, très bien fait et tout ça, mais ça ne s'adresse
peut-être pas à tous les publics. Alors, c'est le point de vue.
À Sainte-Adèle, on se spécialise dans les versions
originales et presque n'importe quel film québécois qu'on peut
présenter, on le présente, du plus gros succès au plus
petit, quand c'est disponible ou que ça a le moindrement eu une sortie
à Montréal ou à Québec. Il faut que ce soit un
petit peu connu. C'est tout.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Fer-manian. Mme
la ministre, en conclusion, rapidement, s'il vous plait.
Mme Frulla-Hébert: En conclusion. On vous remercie. Vous
nous rassurez parce que, évidemment, sur toute la problématique
des salles versus la distribution, on a eu, quand même, des avis
peut-être un peu contraires. Donc, c'est important, quand même, de
faire une certaine mise au point. Ça va nous servir.
Deuxièmement, je veux revenir et vous assurer que nous allons collaborer
ensemble quant à la mesure fiscale qui s'en vient. Nous trouvons
ça aussi très élevé, 24 %, d'une part. Je veux vous
assurer aussi que nous l'avons fait pour le livre et ce n'est pas temporaire.
J'ai beau lui dire, il ne comprend pas. Merci.
M. Boulerice: La coupe est annuelle. Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme le ministre.
Merci, M. Venne. Merci, M. Fermanian.
M. Boulerice: Ça, c'est un doublage fait en France, "Mme
le ministre". Au Québec, on dit "Mme la ministre".
Le Président (M. Gobé): S'il vous plaît! Ceci
va mettre fin à l'audition. Avant de partir, je tiendrais à vous
rappeler, moi aussi, que toute personne qui vient devant cette commission n'a
aucune crainte à avoir en ce qui concerne des listes noires ou autres
car les membres de cette commission sont les garants de la plus totale
liberté d'expression des gens qui viennent devant cette commission.
Alors, ceci étant dit, je vous remercie et je vais demander au groupe
suivant, soit les représentants de la Société
générale des industries culturelles, de bien vouloir venir
prendre place à cette table.
Alors, étant donné qu'ils ne sont pas là, y a-t-il,
Mme la secrétaire, des raisons pour cette absence? Je vais suspendre
quelques minutes afin que nous puissions avoir l'information. Donc, je suspends
les travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 18 h 20)
(Reprise à 18 h 23)
Le Président (M. Gobé): Si vous voulez bien
regagner vos places afin que nous puissions recommencer les travaux de cette
commission, Mme le ministre, M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques, MM. les députés.
Alors, la commission de la culture reprend maintenant ses travaux afin
de tenir des consultations particulières dans le cadre de l'étude
du projet de loi 117, Loi modifiant la Loi sur le cinéma. Nous allons
maintenant recevoir les représentants de la Société
générale des industries culturelles. Il me fait plaisir de saluer
M. Charles Denis, président-directeur général, qui est
accompagné, si j'en crois ce papier, par M. Robert Brisebois,
vice-président au secteur film. Est-ce exact?
M. Denis (Charles): C'est exact.
Le Président (M. Gobé): Bonjour, messieurs. Sans
plus attendre, vous pouvez maintenant procéder à votre
intervention qui peut durer jusqu'à un maximum de 20 minutes. Par la
suite, Mme la ministre pourra s'entretenir avec vous, ainsi que M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques qui est, comme on le sait,
le critique officiel de l'Opposition en matière d'affaires
culturelles. Vous avez la parole, M. le président.
Société générale des
industries culturelles
M. Denis: Merci beaucoup. M. le Président. Je voudrais,
tout d'abord, vous signaler une chose, disons, qui m'a l'air assez importante,
étant donné le grand respect des institutions parlementaires que
nous avons de notre côté Je dois vous souligner que le
secrétariat de la commission, afin de dissiper tout malentendu, nous
avait demandé de témoigner aujourd'hui, mercredi 22 mai. Nous
sommes aujourd'hui le mercredi 22 mai et nous sommes ici présents pour
témoigner et pour répondre respectueusement aux questions qui
pourraient nous être adressées. Je voulais simplement faire cette
petite mise au point qui m'apparaît assez importante à cause de
malentendu qui aurait peut-être pu surgir.
Le témoignage que la SOGIC peut apporter correspond à une
attitude que nous avons eue au cours dès consultations menées par
différentes personnes du ministère en ce qui concerne la
bonification, si vous voulez, de la Loi sur le cinéma. Nous sommes donc
ici pour vous faire valoir un certain nombre de points de vue concernant le
projet de loi 117, projet de loi dans lequel, en ce qui concerne la SOGIC,
l'aspect le plus important est l'instauration d'un plan triennal.
Ce plan triennal devra énoncer les objectifs à poursuivre
au cours des trois années qui suivront la période 1992-1993,
j'imagine, puisque 1991-1992, à l'heure actuelle, fait l'objet d'une
planification sur une base annuelle. Je pose un peu la question, je pense que
la planification triennale devra s'appliquer à partir de 1992-1993.
C'est une excellente proposition de la part de la ministre. Si les producteurs
de cinéma ont eu au cours des dernières années quelques
problèmes, c'est justement parce que la réglementation,
peut-être sous l'effet de besoins circonstanciés, a dû
évoluer pas mal. Je pense, par exemple, aux modifications qu'il a fallu
apporter à plusieurs reprises à la certification de films comme
films québécois. Je pense, par exemple, aux changements qu'a
connus l'abri fiscal qui a subi à trois reprises des modifications. Il y
a un contexte réglementaire qui a connu, donc, un certain nombre de
soubresauts justifiés, remarquez bien: la situation évoluait, les
coûts pour le gouvernement montaient constamment, il a fallu s'adapter,
mais on fonctionnait tout de même dans un contexte annuel.
Le caractère de permanence et de stabilité que la
proposition contenue dans le projet de loi 117 va apporter va être
extrêmement bénéfique. C'est ce que nous pensons à
la SOGIC. Nous sommes en contact constamment avec les intervenants les plus
divers de l'industrie cinématographique québécoise et nous
pouvons vous assurer que cet apport législatif sous la forme de cette
institution du plan triennal va être, à mon avis,
extrêmement bien reçu par les différents milieux qui
oeuvrent dans le domaine du cinéma, que ce soit les gens, qui s'occupent
de développement, qui s'occupent de production, qui s'occupent de
diffusion, qui s'occupent de promotion. Il est important que ces gens
bénéficient d'un contexte réglementaire stable.
Nous avons, en effet, proposé, au cours de nombreuses
consultations menées par le ministère et également dans le
cadre des différents intervenants et des différentes associations
avec lesquelles nous sommes en contact permanent, qu'à moyen terme -
c'était la proposition de la SOGIC et je suis très heureux de
voir que la ministre a largement tenu compte de nos représentations -
les intervenants puissent élaborer leurs projets dans un contexte qui
est doté de permanence. C'est pourquoi je tiens à vous assurer,
M. le Président, que la SOGIC appuie pleinement cette initiative qui
contribuera à donner stabilité et perspective à
l'industrie cinématographique québécoise.
Maintenant, quant à la planification, ce plan triennal, dans le
contexte économique dans lequel nous sommes, aura - je vous livre des
impressions, disons - une nature non pas impérative, mais sera beaucoup
plus de nature indicative. Ce plan triennal ne pourra pas entrer dans les
détails; il devra tenir compte de certaines conditions
générales. Par exemple, pensons à des
éléments comme le coût de l'argent. Le coût de
l'argent n'est pas quelque chose qui peut être prévu et
planifié. Vous savez que, dans ce domaine, dans ce secteur des
industries culturelles qu'est le cinéma, le coût de l'argent joue
un rôle considérable. Il y a un an, le taux d'intérêt
était tout à fait différent de celui que nous avons
à l'heure actuelle et, que ce soit pour le financement du
côté des prêteurs institutionnels ou du côté
des institutions comme, par exemple, la SOGIC, le coût de l'argent joue
un rôle considérable. Je pense que le plan triennal devra donc
comporter une certaine flexibilité de ce côté-là et
la collaboration de la SOGIC, sur laquelle la ministre peut compter pleinement,
soulignera à la ministre l'importance de garder, malgré tout, une
certaine souplesse à ce plan triennal.
Il s'agira de situer ce plan triennal à l'égard, je crois,
de quatre dimensions différentes. Il faudra tout d'abord envisager
l'élaboration du plan triennal dans le contexte de la politique du
cinéma. Il faudra, d'autre part, faire l'articulation entre ce plan
triennal et les objectifs de la SOGIC qui sont décrits dans la Loi sur
la SOGIC. Il faudra également arrimer le plan triennal avec les
fonctions de la SOGIC. Je reviendrai peut-être sur ces différents
points un peu plus longtemps, si c'est possible. Et, enfin, disons, il faudra
faire, disons, une équation, disons, entre plan triennal et programme
d'aide, en particulier en ce qui concerne les modifica-
tions à apporter aux formes de soutien et, d'autre part, la
portée du plan triennal dans ces quatre grands domaines du soutien
à la cinémato-graphie que sont te soutien au
développement, le soutien à la production, le soutien à la
diffusion et le soutien à la promotion.
Je pourrais peut-être entrer plus dans les détails et, pour
l'information de la commission permanente, vous décrire quelles sont,
par exemple, tes relations qui devront exister entre le plan triennal et la
politique du cinéma. La Loi sur le cinéma prévoit,
à l'article 4, que la politique du cinéma doit poursuivre six
objectifs. Il y aura donc nécessité d'arrimer ces objectifs avec
le plan triennal. Comment le plan triennal va-t-il avoir une influence sur
l'implantation et le développement de l'infrastructure industrielle et
commerciale du cinéma? Ce sont des questions qui vont devoir se poser
à la faveur de la réflexion qui va être menée par la
ministre avec la collaboration de la SOGIC. Il y aura également toute la
question du développement du cinéma et du développement et
de la diffusion des oeuvres. Il y a là, à l'heure actuelle, des
situations qui sont caractérisées par une certaine
stabilité. Il y a des droits de diffusion. Il va falloir que tout ce
corpus réglementaire et contractuel puisse subir l'influence d'une
planification, d'un plan triennal quant aux objectif? à poursuivre.
Il y a également la question de l'arrimage du plan triennal avec
le développement des entreprises québécoises dans le
domaine du cinéma. C'est une question importante qui a été
souvent soulevée. Le plan triennal devra certainement prévoir des
dispositions de nature à fournir aux entreprises
québécoises dans ie domaine de la cinématographie une
capitalisation suffisante pour leur permettre une certaine autonomie. Il y a
également la participation des entreprises de télévision
à la production et à la diffusion de films
québécois. Le plan triennal devra tenir compte d'un certain
nombre d'impératifs qui ne sont pas uniquement de juridiction
québécoise, mais qui sont également soumis à un
certain nombre de règlements provenant, notamment, d'organismes comme le
CRTC.
En ce qui concerne les objectifs de la SOGIC, la SOGIC entend faire en
sorte que les objectifs de la SOGIC soient influencés par le plan
triennal. Est-ce que je peux vous rappeler rapidement quels sont les objectifs
de la SOGIC? Ils sont de deux natures. D'une part, la SOGIC a pour objectif de
favoriser la création et le développement des entreprises
oeuvrant dans le domaine du cinéma. D'autre part, la SOGIC a pour objet
de contribuer, en ce qui concerne le cinéma, à accroître la
qualité, l'authenticité et la compétitivité des
produits des entreprises actives dans le domaine de l'industrie
cinématographique et de les aider à assurer la diffusion de leurs
produits. Ça, c'est un deuxième aspect que le plan triennal devra
attaquer.
Un autre aspect sur lequel le plan triennal devra porter, c'est la
question des fonctions de la SOGIC. Le plan triennal, en ce qui concerne les
fonctions de la SOGIC, devra contenir des dispositions concernant six domaines.
Concernant la reconnaissance des oeuvres comme oeuvres
québécoises, il y a là une fonction fondamentale de la
SOGIC, à savoir ce qu'on appelle d'une façon plus courante la
certification de films. D'ailleurs, il y a, dans le projet de loi que nous
étudions à l'heure actuelle, une disposition de concordance en ce
qui concerne la reconnaissance d'un film comme film québécois.
D'autre part, une deuxième fonction importante de la SOGIC, c'est de
promouvoir et d'aider la création cinématographique et la
production de films québécois, c'est-à-dire reconnus comme
québécois. À l'heure actuelle, il y a des critères
qui sont extrêmement précis en ce qui concerne la reconnaissance
d'un film comme film québécois, avec un système de points,
une grille, et tes entreprises qui soumettent au service de la certification de
la SOGIC des films doivent obtenir 6 points sur 10. Dans quelle mesure le plan
triennal pourra-t-il influencer, modifier le système de certification de
films québécois? Apparemment, à première vue,
cette, certification est assez indépendante de la planification. Mais,
encore une fois, tout dépendant des circonstances, je pense qu'il faudra
songer à ce que le plan triennal tienne compte ou,
éventuellement, ait des implications en ce qui concerne la certification
de films.
Également, l'une des fonctions de la SOGIC extrêmement
importante, c'est de promouvoir la distribution et l'exploitation de films au
Québec, ainsi que le développement des industries techniques, II
y a, du côté des nouvelles technologies, des développements
absolument bouleversants, et ça, c'est un point sur lequel je voudrais
élaborer un instant. Les nouvelles technologies, les effets
spéciaux, la haute définition, le grand écran, la
transmission par satellite, tout ce développement technologique
bouleversant à l'heure actuelle pour les entreprises et les institutions
devra être pris en compte par le plan triennal. Il y aura là des
ajustements à faire et c'est pour cela qu'une telle planification
permettra, je pense, au gouvernement d'avoir une approche beaucoup plus
fonctionnelle à l'égard des nouveaux problèmes
créés par les nouvelles technologies.
Une autre fonction importante de la SOGIC, c'est la promotion du
cinéma québécois non seulement à travers le
Québec, mais également sur les marchés internationaux. Il
y a là, à mon avis, une fonction fondamentale car les
marchés extérieurs, c'est à la fois une source de
réflexion, c'est à la fois une source de stimulation. Ça
peut être également une source de cofinance-ment, ça peut
être également un ressourcement des idées. On sait sans
doute l'importance qu'à la SOGIC nous avons attachée à ce
que j'appelle d'une façon raccourcie l'ouverture sur le monde. Nous
venons, d'ailleurs, de travailler très fort
afin de faciliter, de permettre la signature d'un accord de
coproduction, et je suis très heureux de signaler que c'est dans le
contexte de ce souci que la ministre des Affaires culturelles a signé
avec son homologue polonais un accord de coproduction, il y a deux semaines,
à Varsovie. Je vous donne des exemples très concrets de la
façon dont la SOGIC seconde la ministre afin que soit remplie cette
fonction qu'est la promotion sur la scène internationale du
cinéma québécois.
Une autre fonction de la SOGIC - et, là également, il
faudra en tenir compte au moment du plan triennal - c'est la participation des
entreprises de télévision à la production et à la
diffusion de films québécois. Il faut bien reconnaître que,
de plus en plus, le cinéma québécois se fait
connaître par le petit écran. Il va falloir que cette
planification triennale, avec toute la législation qui n'est pas
complètement entre les mains du Québec - je pense, par exemple,
au CRTC, je pense également à des organismes comme Radio-Canada
qui font énormément de choses, comme l'ONF. Je peux vous assurer
que là SOGIC fera le maximum de manière à ce que ces
consultations débouchent sur des résultats positifs; il faudra
faire le maximum de consultations avec ces organismes de manière
à ce que ce plan triennal soit adapté et approprié.
L'une des dernières fonctions de la SOGIC - et tout ça,
ça va s'inscrire dans les préoccupations du plan triennal - est
d'encourager la formation, la recherche, le développement et
l'innovation dans le domaine du cinéma. Il y a là une
préoccupation fondamentale. Là encore, je vous signale que, dans
le contexte de la réflexion que là ministre mène à
l'égard d'une école de cinéma, elle n'a pas
hésité à consacrer une journée entière
à la visite de l'École de cinéma de Lodz, en Pologne, qui
est l'une des écoles de cinéma les plus prestigieuses du monde,
où Roman Polanski, Kieslowski, Wajda ont été
formés. Je crois que la préparation, disons, de ce voyage,
disons, correspond non seulement à une fonction de la SOGIC, mais
également - et ça, je suis heureux de le signaler - à une
préoccupation fondamentale de la ministre.
Ces fonctions, donc, devront s'inscrire dans le plan triennal que la
ministre va élaborer avec notre collaboration pleine et entière.
Elle peut entièrement compter là-dessus.
En ce qui concerne les programmes d'aide... Est-ce que je parle trop
longtemps?
Le Président (M. Gobé): II vous reste une minute
sur votre temps, M. le président.
M. Denis: C'est un sujet qui me passionne, M. le
Président, et je pourrais vous en entretenir longtemps.
Le Président (M. Gobé): Je vois ça, avec
passion, d'ailleurs, mais, malheureusement, il vous reste à peu
près une minute.
M. Denis: Une minute, alors je termine.
Le Président (M. Gobé): Mais vous pourrez continuer
à dialoguer avec Mme la ministre et M. le député par la
suite, aux questions et réponses.
M. Denis: D'accord. Ce que je veux dire simplement, c'est que le
plan triennal devra aborder deux points importants, et je termine: d'une part,
les formes de soutien à la cinémato-graphie; d'autre part, les
domaines où s'exerce ce soutien. Et, là, je fais
référence aux quatre grands domaines d'intervention de là
SOGIC en matière de cinéma: développement, production,
diffusion, promotion. Voilà. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
président de la SOGIC Je vais maintenant passer la parole à Mme
la ministre des Affaires culturelles. Vous avez, vous aussi, 20 minutes. Le
dialogue peut s'établir, la règle le permet. Donc, questions et
réponses.
Mme Frulla-Hébert: M. le Président,
premièrement, je tiens aussi à apporter une clarification. La
SOGIC a refusé, tout simplement, d'amener un mémoire parce
qu'elle était en accord avec les principes de la loi et, effectivement,
c'est beaucoup plus au niveau de la politique que l'on discutera des programmes
de la SOGIC. On vous remercie d'être ici, quand même, à la
demande de la commission qui voulait vous voir et vous rencontrer. Vous, avez
accepté à très court délai d'être ici et nous
vous en remercions. (18 h 45)
Vous avez longuement abordé le programme triennal. On voit que
vous êtes d'accord avec le programme triennal, alors, ça nous fait
plaisir. D'ailleurs, ça a été vu comme une mesure - en
tout cas, on parle des groupes qu'on a entendus - qui donne, finalement, un
certain espoir au développement ou, enfin, un apport au
développement cinématographique. Par contre, il y a eu certaines
affirmations ici, au niveau de la commission, que nous allons aborder ou que
nous allons discuter ensemble, sur certains points d'ailleurs.
Premièrement, le français à l'écran. Vous
savez qu'au niveau de la loi on parte de français et de distribution
surtout; français, distribution, classement et autres, mais ça a
été les trois grands points. On touche aussi le français
à l'écran. Alors, est-ce que vous pouvez nous expliquer
clairement comment le programme d'aide à la diffusion régionale
pourrait rendre accessibles plus vite les copies françaises en
région? Parce que, évidemment, quand on regarde, d'ailleurs, le
"rapport" de l'UDA hier, c'est aussi une problématique dont on doit
tenir
compte et on sait que vous avez un programme au niveau de l'aide
à la diffusion. Alors, dites-moi donc - rapidement, parce que j'ai
quelques autres questions - comment ce programme d'aide peut s'appliquer,
vous-même, M. Denis, ou M. Brisebois.
M. Denis: Oui, je voudrais peut-être donner la parole sur
cette question à mon collaborateur, M. Brisebois. Je dirai simplement
rapidement que nous avons à l'heure actuelle un volet - tout peut
être amélioré et bonifié - très actif qui est
celui de l'aide à la diffusion régionale. La SOGIC
privilégie les films dans lesquels elle a investi et elle paie 100 % des
frais établis selon les normes d'un laboratoire québécois.
Et, pour les films étrangers - parce que la préoccupation est non
seulement de promouvoir le film québécois, mais également,
d'une façon générale, de promouvoir la culture
cinématographique - nous pouvons accepter une demande pour un film
étranger, mais, à ce moment-là, nous ne payons que 75 %
des frais établis selon les normes d'un laboratoire
québécois. Le principal critère auquel nous sommes
très attachés, c'est que nous devons être satisfaits de la
qualité du film bénéficiant d'une aide à la
diffusion régionale. Ça, c'est très important. Il y a eu
beaucoup de polémiques au sujet d'un certain nombre de films auxquels
nous avons refusé de fournir une aide à la diffusion
régionale parce que les professionnels de la SOGIC avaient
évalué, estimé - et là, encore une fois, vous
savez, c'est extrêmement difficile de faire plaisir à tout le
monde et à son père, comme disait La Fontaine - et parfois assez
courageusement devant certaines pressions, que certains films ne
méritaient pas l'aide de la SOGIC et nous leur avons dit: Nous ne
pensons pas que votre film est vraiment d'une qualité qui mérite
l'utilisation de fonds publics pour sa diffusion.
Mme Frulla-Hébert: Alors...
M. Denis: Oui, juste un moment. Je pense que nous sommes en train
de réfléchir, à l'heure actuelle, à une
bonification de l'aide à la diffusion régionale et je pense que,
peut-être sur ce point-là, M. Brisebois pourrait vous fournir
quelques précisions.
Le Président (M. Gobé): Allez-y, M. Brisebois, vous
avez la parole.
M. Brisebois (Robert): Voilà. C'est un programme qui est
sollicité chaque année assez largement. Nous avons aidé
l'an passé tout près d'une vingtaine de films, des films de
qualité, destinés surtout au cinéma pour enfants, dont la
moitié était des films québécois. C'est bien
évident qu'il est important que ces films soient distribués en
même temps que dans la métropole, en particulier, parce qu'il ne
sert à rien d'en- voyer un film en région s'il arrive trois
semaines ou un mois après que la diffusion en métropole ait
été complétée. Nous essayons d'encourager la
diffusion en région d'un film en même temps qu'il passe à
Montréal, parce qu'il ne faut pas oublier que ce programme s'adresse
à des endroits qui sont au moins à 30 kilomètres des
grands centres. Donc, on sait que les gens, que ce soit dans l'Est ou dans
l'Ouest du Québec, reçoivent ou La Presse ou Le Soleil
et sont au courant qu'il existe à Montréal ou à
Québec un film important et ils veulent le voir dans leur région.
C'est ce que nous privilégions. La façon de l'améliorer:
bien sûr, il suffirait à ce moment-là d'y mettre un peu
plus d'efforts matériels ou financiers, si vous voulez, parce que,
chaque année, notre budget à cet effet est largement
dépassé. Mais je dois dire que les demandes que nous avons
reçues cette année étaient tout à fait conformes
à cette politique et nous avons accordé, comme je vous l'ai dit,
une vingtaine de copies de films pour des films de qualité.
Mme Frulla-Hébert: Merci, M. Brisebois. Vous savez, on
parle beaucoup de qualité. Effectivement, c'est sûr que, quand on
travaille avec les fonds publics, on doit viser aussi la plus grande
qualité possible. Par contre, qualité - quand on a un projet, en
tout cas, j'imagine, parce que c'est une question d'expertise, oui, mais aussi
d'opinion, ce n'est pas quantitatif, c'est beaucoup plus qualitatif -
finalement, c'est peut-être un peu plus problématique à
juger.
Ceci dit, il y a certains groupes, plusieurs, je dirais, qui sont venus
durant cette semaine et qui ont, tout simplement, émis certains
commentaires, à savoir peut-être un peu le manque de
proximité de la SOGIC avec le milieu, par exemple, d'une part, ou encore
une acceptation au niveau des projets qui est peut-être beaucoup plus
stérile et administrative versus artistique. On a entendu ça
à plusieurs reprises. J'aimerais que vous commentiez un peu, rapidement,
sur le fonctionnement de tout ça, parce que c'est revenu vraiment
régulièrement.
M. Denis: Vous savez, Mme la ministre, on dit que gouverner,
c'est choisir. Si vous me permettez de paraphraser cette expression, je vous
dirais qu'administrer des fonds publics, c'est également choisir. J'ai
essayé, depuis que je suis à la SOGIC, de fonctionner dans un
contexte basé sur trois principes. L'équité, tout d'abord.
J'ai essayé constamment de faire en sorte que les décisions de la
SOGIC soient justes. C'est très difficile. On est dans le domaine de la
subjectivité la plus totale. C'est une des grandes industries de
l'imaginaire, le cinéma. Regardez, par exemple, ce qui vient de se
passer à Cannes. Regardez comment les décisions du jury à
Cannes sont contestées. Il y a des articles entiers dans les journaux
aujourd'hui qui contestent le choix du jury, qui est tout de même
dirigé par un
homme remarquable comme Polanski. Ça, c'est très difficile
de fonctionner dans un contexte d'équité. Je pense qu'il faut
s'entourer du maximum de professionnalisme dans l'émission d'une opinion
et c'est ce que nous avons essayé de faire avec le système que
nous avons. Nous avons un comité de sélection qui est
composé de huit personnes qui sont toutes des professionnelles, qui sont
depuis des années dans le cinéma, dans la production, dans la
distribution, dans la rédaction, dans la scénarisation.
Un autre grand principe avec lequel j'ai toujours fonctionné,
c'est le principe de l'ouverture. Il s'agit d'être ouvert. Et,
d'ailleurs, la SOGIC n'a jamais refusé de rencontrer personne. Je
pourrais vous soumettre une liste de rencontres qui ont eu lieu avec les
associations, toutes les associations que nous rencontrons à
différents rythmes. D'abord, lorsqu'un nouveau président
d'association est élu, j'établis immédiatement avec ce
président d'association des contacts. Nous nous rencontrons, etc., sur
une base, disons, plus informelle, tout d'abord. Ensuite, il y a très
souvent, à ma demande, une réunion de travail avec les gens du
secteur film de la SOGIC. Le vice-président passera le temps qu'il faut
de manière à faire le tour des problèmes que l'Association
va considérer comme importants. Ensuite, il y a tout le
phénomène de la consultation que nous menons au moment de la
préparation des projets de programmes que nous vous faisons parvenir
pour étude et acceptation.
Alors, écoutez, encore une fois, je peux vous dire une chose,
c'est équité, ouverture et, également, souci d'avoir une
organisation fonctionnelle. Je pense que, de ce côté-là,
mon expérience... Je suis un administrateur public depuis 1964, j'ai
occupé un grand nombre de fonctions et l'une des choses que je me suis
efforcé de faire à la SOGIC, c'est de mettre sur pied une
organisation fonctionnelle et qui soit en même temps à visage
humain. Et ça, c'est très important. Charles Denis retourne
toujours ses appels dans les 24 heures. Je suis toujours prêt à
rencontrer qui que ce soit. Et, évidemment, c'est un domaine où
il y a beaucoup d'opinions, les gens sont facilement prêts à faire
connaître une opinion dissidente. C'est un domaine vivant, c'est un
domaine où existe la polémique. Ce n'est pas monolithique,
l'industrie cinématographique; c'est un secteur qui est vivant, qui est
plein de contradictions, qui est extraordinaire, qui est passionnant.
Mme Frulla-Hébert: M. le président, je comprends
tout ça; seulement, je vais vous donner d'autres commentaires qui ont
été apportés et qui méritent, quand même,
d'être, je pense, éclaircis. On parle d'ouverture, on parle,
finalement, de concertation avec le milieu, beaucoup. Par contre, à ma
grande surprise, parce qu'on en était fiers, quand même, le
programme La Relève, par exemple, le programme 16-26, on déplore,
dans le milieu, il semblerait en tout cas, que ce programme qui est
destiné à la relève ait fait appel aussi à des
professionnels chevronnés, d'une part. Est-ce qu'il y a une raison
à ça? Parce que, finalement, quand on demande, au niveau de la
relève, si tes programmes, parce que, effectivement, on gère des
fonds publics... Alors, si on met des programmes en place, on veut bien qu'ils
soient efficaces. Et ce que l'on perçoit, c'est une espèce de
découragement général. Je voudrais comprendre, au moins
spécifiquement au niveau de ce programme-là, ce qu'il en est de
ce programme-là et pourquoi le programme a-t-il été servi
supposément à des professionnels versus le 16-26, tel qu'il
était... Il doit certainement y avoir une raison?
M. Denis: Oui. Écoutez, je voudrais passer la parole
à Robert Brisebois sur cette question parce que M Brisebois a
travaillé énormément sur ce programme dont, en tout cas,
d'une part, nous sommes très fiers, je dois vous dire ça. D'autre
part, c'est peut-être l'un des programmes de la SOGIC au sujet duquel
nous avons reçu le plus de lettres de remerciements et de
félicitations. Ça, il faut le dire, vous savez. Mais un exemple
très concret des résultats de ce programme, c'est grâce
à ce programme que nous avons eu un film d'animation par deux jeunes,
Nathalie Saint-Geiais et Marc Saint-Pierre, qui a été - pour un
coup d'essai c'est un coup de maître - sélectionné pour la
compétition officielle à Cannes. J'ai entendu dire qu'il y avait
eu des réticences parfois quant aux modalités d'application du
16-26 et, comme c'est un dossier dans lequel M. Brisebois a beaucoup investi,
je voudrais lui passer la parole là-dessus.
Le Président (M. Gobé): M. Brisebois. (19
heures)
M. Brisebois: D'abord, je dois dire que le programme 16-26 n'est
pas uniquement une opération qui a été menée avec
la SOGIC. Il faut bien comprendre que nous avions reçu une enveloppe de
1 500 000 $ à investir dans le domaine de la relève et des jeunes
créateurs. Là-dessus, la convention avec le ministère
prévoyait que 600 000 $ étaient consacrés à la
télévision et 900 000 $ au cinéma.
Nous avons mis sur pied un projet, qui s'appelait 16-26, pour la
télévision. Alors, nous avons consacré 600 000 $ pour le
projet TV des jeunes créateurs. Ces 600 000 $ ont
généré 5 000 000 $. Pourquoi? Parce que
Téléfilm est embarquée, parce que Radio-Québec a
mis de l'argent, parce que l'ONF a mis de l'argent. Donc, les 600 000 $ que
nous avons investis ont entraîné d'autres participants. Parmi ces
participants, bien sûr, il y avait Radio-Québec.
Quand on met sur pied un programme pour aider les jeunes
créateurs, on espère que ces jeunes puissent
bénéficier le plus largement possible de cette initiative. Nous
avions, à ce
moment-là, ouvert un concours dans toute la province pour attirer
des jeunes à nous soumettre des courts métrages,
c'est-à-dire des textes d'une durée de 26 minutes,
c'est-à-dire conformes à la télévision. Nous avons
reçu 580 textes de jeunes, d'excellente qualité, je dois dire.
Nous avons payé le développement de 48, de 24 et de 16 de ces
courts métrages au niveau du développement, parce que notre
objectif premier était d'aider le développement.
Quand, au niveau de la production, sont intervenues Radio-Québec,
Téléfilm et l'ONF, Radio-Québec en particulier a
exigé que si on voulait que ces courts métrages écrits par
des jeunes aboutissent définitivement à la
télévision, et c'était un des objectifs de ce programme -
ça ne sert à rien de faire écrire des jeunes si les textes
meurent sur les tablettes - il fallait une diffusion pour encourager ces
jeunes. Et c'est à ce moment-là que Radio-Québec, qui a
investi surtout en production et qui n'a pas investi en développement...
Nous, nos 600 000 $ étaient en développement; on a
été, si vous voulez, la locomotive de ce projet, nous lavons
enclenché. Mais, lorsque est venu le temps de diffuser ces courts
métrages qui avaient été, bien entendu, pilotés par
des producteurs, les 16 courts métrages ont été produits
avec un encadrement de producteurs chevronnés, et, bien sûr, un
certain nombre de ces courts métrages ont dû être produits
par des réalisateurs chevronnés de plus de 35 ans, parce que
Radio-Québec voulait s'assurer de la qualité, si vous voulez,
technique de la diffusion.
Mais, de toute façon, tous les jeunes qui ont contribué
à cette expérience en ont profité totalement. Et je dois
vous dire que les montants qui ont été consacrés à
cette fin ont été affectés à des jeunes de 18
à 35 ans, c'est-à-dire au niveau surtout du développement.
Ce n'est qu'en production que sont apparus des réalisateurs
chevronnés.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Brisebois. Merci,
Mme la ministre. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Oui. M. le Président, comme on dit en
langage cinématographique, la critique fut unanime, unanimement
négative face à la SOGIC: réalisateurs, producteurs,
techniciens, distributeurs, propriétaires de salles. On nous a dit que
rien de sérieux n'a été fait par rapport au rapport
Gendron. On nous a dit que pour avoir un accusé de réception - je
suis bien d'accord que vous retournez vos appels dans un délai de 24
heures - 2 à 3 mois d'attente avant d'avoir un accusé de
réception quant à la présentation dune demande. Au minimum
10 mois d'attente avant d'avoir une réponse quant à une aide
à la production. Refus de réponse quant au rejet dune demande
d'aide à la production.
Vous avez parlé du plan triennal. L'Associa- tion des
réalisateurs est même allée jusqu'à dire: Ne
rapatriez pas les fonds de Téléfilm pour les donner à la
SOGIC, on préfère que ça reste au fédéral.
Avouez que c'était quand même quelque chose, hein? On ajoutait que
c'était épouvantable. On a dit que vous souffriez,
peut-être pas vous personnellement, mais tout au moins la SOGIC, du
syndrome du box-office, c'est-à-dire que tout était
considéré uniquement en fonction de ce que ça rapporte en
salle, donc le modèle américain. On a dit que la gestion
n'était pas adaptée aux réalités du milieu. On a
souligné qu'il y a eu une abolition du programme automatique d'aide aux
distributeurs et sans en connaître les raisons. Et j'entendais
tantôt votre adjoint nous parler du programme des 16-26. Je vous avoue
que je trouve quand même un peu, pour ne pas dire surprenant tout au
moins que Michel Brault, pour lequel j'ai la plus grande des estimes, ait quand
même eu une subvention à l'intérieur de ce programme. Je
souhaite bien que M. Brault soit subventionné pour les magnifiques films
qu'il nous offre, mais, à l'intérieur du programme 16-26, avouez
que c'est quand même un peu particulier.
Je ne sais pas si vous avez eu le temps de lire et je ne sais pas s'ils
sont disponibles, on pourrait demander à Mme la secrétaire de la
commission la transmission, la transcription, dis-je plutôt. De toute
façon, il y a eu une transmission puisqu'il y a les bandes audio qui
existent. Mais tous les intervenants, à peu d'exceptions près,
ont véritablement condamné votre gestion en la qualifiant presque
d'une gestion de série B, de série B puisqu'on emploie un
vocabulaire cinématographique. Alors, admettez comme moi, M. Hardy, que
oui, la politique est peut-être de faire des choix... Je m'excuse, j'ai
dit M. Hardy, je pensais à la commission concernant le statut de
l'artiste. M. Denis, avouez que oui, la politique, c'est peut-être de
faire des choix, etc., mais réussir une unanimité de tous les
intervenants du milieu comme ça a été le cas durant cette
présente session, à l'étonnement du porte-parole, je dois
vous l'avouer, et forcément celui de la ministre, il y a des
interrogations sérieuses qui se posent à partir de
maintenant.
Et, quant au plan triennal, comment ça va être
opérable lorsque tous les intervenants en sont presque à dire -
tous, sauf eux... Vous êtes gestionnaire d'une société
d'État. Les sociétés d'État relèvent de
notre Parlement et nous sommes les interlocuteurs au niveau de ce Parlement.
Mettez-vous dans notre situation aussi.
Le Président (M. Gobé): M. le président de
la SOGIC, vous avez la parole.
M. Denis: Oui. Je vous remercie, M. le Président.
Écoutez, je voudrais d'abord, en guise d'introduction, en réponse
à vos remarques, aux
remarques du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques -
excusez-moi, M. le Président - je voudrais tout d'abord vous dire que
les critiques que vous avez entendues n'ont certainement pas dû porter
sur des dossiers précis parce qu'il y a parfois des délais. On
peut rentrer évidemment, si vous voulez, dans le substrat du travail
quotidien à la SOGIC et je pense que ça peut être quelque
chose d'extrêmement long. Il y a un problème qui se pose
fréquemment, c'est le problème des dossiers qui ne sont pas
complets. Les dossiers, pour qu'on puisse statuer dessus, doivent comporter un
certain nombre de documents. Il y a des dossiers qui ont été
réglés très rapidement. Nous avons reçu, par
exemple, dans certains cas - je pense à certains dossiers - une demande
au mois d'avril et les paiements s'effectuaient, ainsi que le tournage, au mois
de juin. Cest un phénomène qui arrive très
fréquemment. Le dossier n'est pas complet. Quand le dossier n'est pas
complet, on leur signale, on leur écrit, on leur dit, mais il est
évident que quand le dossier n'est pas complet on ne peut pas
procéder. C'est un point fondamental. Maintenant, encore une fois, si
vous pouviez me dire, si le député de Saint-Jacques pouvait me
dire, M. le Président, dans quel dossier... Nous avons des centaines de
dossiers à la SOGIC
Nous avons des témoignages de satisfaction qui nous arrivent
quotidiennement. Je ne comprends pas qu'on puisse dire que la critique est
unanime. J'ai des témoignages. Nous avons fait porter notre action et
nos efforts dans bien des domaines et nous avons aidé au maximum les
intervenants dans le domaine du cinéma. Encore une fois, c'est
l'éditeur Forbes de la revue Forbes qui disait que les critiques
accompagnent toujours le succès.
M. le Président, de ce côté-là, je pense que
le mariage de trois cultures a été réussi. Ç'a
été une opération délicate. Vous aviez une culture
de gens plutôt tournés vers la création, vous aviez
également la culture des gens de la SOOICC, qui était
plutôt une mentalité de banquiers, vous aviez également
l'apport des gens qui venaient de la direction des industries culturelles, du
commerce extérieur, qui misaient beaucoup sur la scène
internationale. Je dois vous confesser que le mariage de ces trois cultures a
été une opération délicate à laquelle j'ai
contribué beaucoup d'efforts. Je ne comprends pas que les
témoignages que je reçois quotidiennement ne se soient pas fait
entendre ici.
Que le député, M. le Président, me donne des
dossiers où, manifestement, nous avons fait preuve de négligence,
des dossiers où nous avons fait preuve de lenteur et, à ce
moment-là, on va vraiment discuter. La SOGIC est un organisme où
se trouvent des dossiers. Nous n'avons pas à participer à des
polémiques quotidiennes. Ce n'est pas le travail des administrateurs
publics qui sont à la SOGIC. Le travail des administrateurs publics
à la SOGIC, c'est de savoir quels sont les besoins de la
clientèle et de faire des propositions au gouvernement afin que des
programmes soient conçus qui répondent le mieux possible aux
besoins de la clientèle.
Il y a également un phénomène. C'est que nous
disons parfois non; dans 50 % des cas, c'est non. Et, lorsqu'on dit non d'une
façon justifiée, en faisant venir les gens, en leur disant:
Voici, pour telle et telle raison, ton dossier ne peut pas passer - non, mais
c'est important - à ce moment-là, évidemment, il se
crée un certain mécontentement. Et à ceci, moi, je vous
oppose, par exemple, les succès non pas seulement de box-office, mais
les succès quant à la qualité des films. Le cinéma
québécois est présent a Cannes. Il est en sélection
à Berlin. Il est en sélection pour les Oscar. Le cinéma
québécois est une remarquable réussite et je pense que
l'équipe que j'ai réussi à réunir autour de moi est
une équipe extrêmement fonctionnelle, extrêmement
dévouée. D'ailleurs, je vous signale que Time Magazine,
dans sa livraison du 14 mai 1990 - je m'excuse, je vous trouverai la date
exacte, mais je pense que c'est mai 1990 - disait qu'au Canada le seul
cinéma qui prospère, c'est le cinéma du Québec.
Allez-vous me dire que la SOGIC n'a pas joué un rôle
là-dedans?
M. Boulerice: Allez-vous me dire que Téléfilm n'est
quand même pas partie prenante? Et quand vous me dites, M. Denis, que la
critique est le fruit du succès, je pourrais peut-être emprunter
à Cyrano et dire: C'est quand même un peu court, c'est quand
même un peu court comme réponse. Et quant au non, le refus, bien,
moi, je vous dirai que vous aurez les noms, mais au cours d'un mandat de
surveillance qu'exercera cette commission face aux organismes étatiques,
ce qui est dévolu dans la loi constituant les commissions permanentes de
l'Assemblée nationale. À ce moment-là, vous les aurez.
Mais est-ce que vous trouvez décent à l'égard des gens du
milieu... Je veux dire, de vous, c'est incomplet mais tout le monde nous dit
que ça prend deux à trois mois avant d'avoir un accusé de
réception. Je veux dire, c'est bien entendu que, quand ça prend
deux à trois mois avant d'avoir un accusé de réception,
c'est un petit peu difficile de réagir. (19 h 15)
Deuxièmement, y a-t-il - je vais employer, si vous me permettez,
M. le Président, un terme anglais - dans votre service, puisque tout le
monde sait qu'il y a de la paperasserie, on ne peut pas y échapper, un
service de "coaching" qui aide les gens à remplir les formulaires? Je me
permettrais de vous souligner tout simplement que les demandes d'aide sociale,
eh bien, dans les bureaux de député, on aide les gens à
les remplir. Je pense que ça pourrait être utile, à
l'intérieur d'un service comme le vôtre, d'en avoir un s'il n'y en
a pas. Et les motifs ne sont
pas justifiés dans les lettres que les gens reçoivent lors
du refus.
Le Président (M. Gobé): M. le président,
oui, juste avant votre intervention, je rappellerai aux membres de cette
commission que nous sommes à étudier... Ce sont des consultations
particulières sur le projet de loi 117 et, à ce stade-ci, nous
l'avons encore peu abordé avec la SOGIC. Je crois que nous avons
demandé à la SOGIC de venir ici pour nous faire part de son
expertise quant à ce projet de loi et je crois que vous aviez raison, M.
le député de Sainte-Marie -Saint-Jacques, il y a des forums pour
ce genre de questionnement et pour obtenir les réponses que vous semblez
vouloir obtenir maintenant. Je crois que l'étude des crédits des
ministères en est un, il y a d'autres forums qui sont les mandats
d'initiative. Je crois qu'il vous sera loisible, à ce moment-là,
d'en faire la demande ou de vouloir fonctionner de cette
façon-là. Alors, je crois, M. Denis, que je vais vous permettre
de répondre rapidement à ces dernières questions et, par
la suite, je pense qu'on devrait quand même s'interroger sur le fond du
projet de loi, peut-être. M. le président de la SOGIC.
M. Denis: Merci, M. le Président. Quant au cas très
concret que le député vient de mentionner, durée
d'étude des dossiers, je voudrais tout de même que très
rapidement, parce que je comprends que le temps passe, le vice-président
fournisse un certain nombre d'informations quant au système de gestion
que nous avons à la SOGIC.
Le Président (M. Gobé): M. Brisebois, rapidement,
s'il vous plaît.
M. Brisebois: Alors, voilà. Évidemment, comme je
n'ai pas de dossier précis, il faut que je m'en remette à
l'ensemble des dossiers que nous acceptons et je dois dire que, de façon
générale, qu'on me parte de 30 jours pour passer dans le
processus d'un projet qui est déposé, c'est à peu
près le temps régulier que nous accordons à un dossier. Il
faut bien reconnaître que la SOGIC n'est pas le seul intervenant dans le
financement du cinéma. Il y a d'autres institutions, il y a d'autres
sources de financement qui, pour une raison ou pour une autre, peuvent se faire
attendre aussi. Donc, la SOGIC n'est pas le guichet unique. Il y a d'autres
guichets qui peuvent entraîner des délais, mais
généralement...
Je dois vous dire que, cette année, la Société a
investi dans 40 productions en 12 mois. Nous avons investi, c'est-à-dire
qu'à ce moment-là nous avons accueilli des projets, nous avons
étudié des projets, nous les avons passés à un
comité comparatif, nous avons fait lire les scénarios à
tout le monde et nous avons accordé une aide à 40 projets sur 87
que nous avons reçus en production. S'il avait fallu prendre six mois
pour chacun des projets, il y en aurait qui se feraient dans cinq ans. Donc, il
faut bien comprendre que les 40 projets dans lesquels nous avons investi, nous
les avons reçus entre le 1er avril 1990 et le 31 mars 1991, en plus des
projets que nous avons dû étudier avec la même rigueur et
que nous avons refusés. Et ça, ce n'est que pour la
production.
Si je prends, en plus, les 150 demandes que j'ai reçues en
développement, que la SOGIC a reçues et étudiées
séparément, et elle a accordé de l'aide à presque
70 sur 150, alors, tous ces projets mis ensemble, qui sont traités
à la SOGIC, ne peuvent pas prendre six mois ou quatre mois, parce que ce
serait impossible d'arriver au résultat que nous avons. Il est
évident que nous avons, avec certains projets, des retards
inévitables, mais pas toujours ayant la SOGIC comme responsable.
Remarquez que la SOGIC peut commettre des erreurs, peut se tromper. Nous
n'avons aucune perfection à présenter devant la commission, M. le
Président, et soyez persuadés que c'est une préoccupation
constante d'essayer et de contribuer à améliorer les rapports
entre tous les intervenants et la section film de la Société.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Brisebois. M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Oui, je vous rappellerais, M. le Président,
que comme la SOGIC sera associée au plan triennal il est tout à
fait normal que nous questionnions son habilité à mener à
bon port ce plan triennal.
Vous avez, M. Brisebois, parlé d'améliorer le dialogue
avec les intervenants. M. Denis a parlé de consultations permanentes
mais, encore là, propriétaires de salles, distributeurs,
techniciens, producteurs, réalisateurs nous disent qu'ils ne sont pas
consultés, qu'il n'y a pas de contact. À moins que vous ne me
disiez que ce sont tous des menteurs qui sont venus ici, là-
Une voix: Non, non...
M. Boulerice: ...ou qu'il y ait une vendetta pour faire un film
sicilien.
M. Brisebois: M. le Président, je ne sais pas.
Écoutez, chaque année, lorsque nous préparons les
programmes, nous rencontrons toutes les associations. Nous leur demandons
quelles sont leurs propositions et que ce soient les réalisateurs, les
producteurs, les distributeurs, nous les rencontrons, les propriétaires
de salles aussi. Nous les rencontrons à chaque année et nous
discutons avec eux des améliorations à apporter aux programmes
d'aide. Nous rediscutons de ces programmes d'aide avec les intervenants un peu
plus tard, avec le ministère. Donc, de prétendre qu'il n'y a
aucun dialogue avec ces gens, je ne sais pas, je ne sais vraiment pas, parce
que nous
participons aussi à des rencontres avec les organisations. J'ai
rencontré personnellement les présidents des principales
associations de producteurs, de réalisateurs, d'auteurs.
Évidemment, c'est possible qu'il y ait des gens qui aient soulevé
quelques critiques, mais, quant à moi, je dois dire que mes rapports
personnels avec le milieu sur ce plan-là restent assez
étroits.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Brisebois. En
conclusion, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Écoutez, quand Mme Lepage, qui est
présidente de l'Association des réalisateurs, nous dit
très carrément: Ils ne veulent pas nous rencontrer, je pense que
je ne vais quand même pas mettre en doute les paroles de Mme Lepage. Et
là, vous me faites signe que, malheureusement, je dois conclure.
Le Président (M. Gobé): Oui.
M. Boulerice: J'aurais aimé continuer à poser des
questions quant au rapport Gendron où on a eu les plus
sévères critiques. Je me demande comment on pourra aboutir
à un plan triennal au niveau de l'industrie cinématographique au
Québec quand on nous dit que le rapport Gendron, il n'y a aucun
progrès substantiel. C'est minime ce qui s'est fait à venir
jusqu'à date.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Vous avez terminé,
M. le président, monsieur de la SOGIC?
M. Denis: J'allais simplement signaler que la SOGIC a
contribué à la rénovation et à la construction de
24 salles au cours du dernier exercice.
M. Brisebois: Des nouvelles salles.
M. Denis: De nouvelles salles. Mais je pense que, de ce
côté-là, je ne sais pas ce que les gens qui sont venus...
Mais j'ai énormément de propriétaires de salles qui...
Le Président (M. Gobé): Oui, je vous...
M. Denis: ...m'envoient des lettres de témoignage
constamment au sujet de... Il y avait un article dans La Presse qui
signalait l'effervescence dans la rénovation et la construction des
salles, il y a encore dix jours, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, M. le
président. On pourrait argumenter longtemps...
M. Denis: Oui, oui.
Le Président (M. Gobé): ...et c'est une des raisons
pourquoi j'ai, tout à l'heure, rappelé à la discussion sur
le projet de loi parce qu'on ne peut pas dénoncer des choses d'un
côté sans répondre de l'autre; on ferait un débat
qui n'en finirait plus. Je ne crois pas que nous étions là, que
ce forum est là pour ça actuellement. Il sera là
peut-être dans l'avenir et il est souhaitable, d'après ce que
j'entends dire, qu'il se fasse. Malheureusement, on se... Et je n'aime pas ce
genre de situation où on ne peut pas donner tout le temps à tout
le monde pour s'exprimer. Donc, je vais devoir demander à Mme la
ministre de faire ses remarques finales et nous allons suspendre les travaux
par la suite.
Mme Frulla-Hébert: À cette heure-ci, (a remarque
finale est brève. Je pense qu'on est tous d'accord pour dire que la
SOGIC est le moteur ou, enfin, un des gros moteurs du développement
culturel au Québec et que sans l'apport de la SOGIC il y aurait certains
secteurs de l'industrie qui, vraiment, souffriraient
énormément.
Ceci dit, je pense qu'on est tous conscients, à ce
moment-là, de la responsabilité, autant de la gestion des fonds
publics, d'une part, mais aussi du développement de la création.
Et, à ce titre-là, d'une part, je vous remercie et,
deuxièmement, eh bien, ensemble on vena à revoir, finalement, les
critiques apportées et on essaiera de les rendre les plus constructives
possible. Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme le ministre. M.
Denis, M. Brisebois, au nom des membres de cette commission, je tiens à
vous remercier et soyez assurés que nous avons pris connaissance avec un
certain intérêt de vos remarques.
Ceci étant dit, je déclare maintenant la séance
terminée et je vais ajourner les travaux à demain matin, 9 h 30,
en la salle Louis-HJp-polyte-LaFontaine. Alors, bonsoir et bon appétit
à tout le monde.
(Fin de la séance à 19 h 26)