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(Neuf heures trois minutes)
Le Président (M. Doyon): Bienvenue, tout le monde. Je
déclare donc la séance de la commission de la culture ouverte.
Vous me permettrez de rappeler le mandat de la commission. C'est de
procéder à l'interpellation du député de Mercier,
adressée à la ministre des Communautés culturelles et de
l'Immigration, sur le sujet suivant: Les politiques gouvernementales en
matière d'immigration. C'est donc le mandat de cette commission pour ce
matin.
Je demanderais à Mme la secrétaire s'il y a des
remplacements annoncés.
La Secrétaire: Oui. M. Biais (Masson) est remplacé
par Mme Blackburn (Chicoutimi); M. Charbonneau (Saint-Jean) est remplacé
par M. Gobé (LaFontaine) et M. Lemire (Saint-Maurice) est
remplacé par M. Bordeleau (Acadie).
Le Président (M. Doyon): Merci. Un bref rappel des
règles qui président à cette séance. Dans un
premier temps, le député qui a demandé l'interpellation,
c'est-à-dire le député de Mercier, aura un temps de parole
de 10 minutes, suivi de la ministre pour également 10 minutes. Par la
suite, pour des périodes de cinq minutes, chacun pourra parler selon la
séquence suivante: un député de l'Opposition officielle,
cinq minutes; la ministre, cinq minutes; un député du groupe
ministériel, cinq minutes. Vingt minutes avant 11 heures, j'accorderai
donc 10 minutes de conclusion à la ministre et un temps
équivalent au député de Mercier.
Je vous signale également que, si un intervenant ne prend pas ou
n'écoule pas totalement les périodes de 5 minutes ou de 10
minutes qui lui sont allouées, cela ne réduit pas pour autant la
durée de l'interpellation. Et, finalement, le débat ne peut,
à moins d'un consentement, dépasser 11 heures, quelle que soit
l'heure du début des travaux. Donc, il est maintenant 9 h 5.
Là-dessus, j'accorde la parole, pour 10 minutes, à M. le
député de Mercier. M. le député.
Exposé du sujet M. Gérald Godin
M. Godin: M. le Président, je vous en remercie. Nous
allons tenter de nous conformer le plus possible aux règles que vous
venez de nous faire connaître. Alors, M. le Président, Mme la
ministre, s'il y a un sujet qui a ému les Québécois depuis
quelques années, c'est bien celui de l'immigration et on peut penser -
et je crois personnellement - que tout commence avec la question de ceux qu'on
a appelés les "boat people", en fait, les réfugiés de la
mer. À l'occasion du départ des Vietnamiens de leur pays et de
leurs difficultés dans le golfe du Tonkin, qui était
littéralement un désert, comme un désert marin si vous
voulez, les Québécois se sont ému de la situation, et
à l'instigation de leur curé ont voulu faire leur part pour venir
en aide à ces gens qui étaient les damnés de la terre. Et
c'est de cette époque que commence l'intérêt réel
des Québécois et des Québécoises pour cette
question-là. En fait, il y a eu - si on s'en souvient - 1000 paroisses
et organismes qui ont voulu parrainer des réfugiés de la mer. Et,
dans tout le Québec, de Dolbeau jusqu'à l'une des paroisses de
Montréal, des gens se sont précipités pour parrainer et
venir en aide à ces réfugiés de la mer. Le Québec a
ainsi découvert qu'il y avait là un pouvoir que la
Confédération lui confiait, mais qui n'est pas utilisé
jusqu'à maintenant, et a suivi l'entente Cullen-Couture qui permettait
au Québec de faire encore davantage pour venir en aide à ces
personnes, à ces réfugiés.
Le résultat, maintenant, on s'en rend compte quand on voyage dans
le Québec, c'est que, partout au Québec, il y a des
communautés vietnamiennes, à Sherbrooke, dans la région de
Mme la ministre, aussi bien que dans mon comté. Il y a des
familles...
Une voix: À Chicoutimi.
M. Godin: Et à Chicoutimi aussi. À Dolbeau, je ne
sais pas s'il y en encore, madame...
Une voix: Oui...
M. Godin: Et on a aussi constaté qu'il y a une tendance
des réfugiés et des immigrants de se rabattre sur Montréal
dès qu'ils en avaient l'occasion, parce qu'il y avait là des
institutions qui parlaient leur langue et une communauté suffisamment
nombreuse pour justifier la création de centres communautaires, de
caisses populaires et d'une masse critique, autrement dit, qui formait une
communauté réelle et donnait de la vie vietnamienne dans les
régions où ils étaient installés.
Et on peut dire que cette migration de population illustre encore
aujourd'hui la tendance profonde et naturelle des gens qu'on accueille ici et
qui va à rencontre de ce qu'on appelle la
démétropolisation. On a beau vouloir les déplacer de
Montréal vers des régions extérieures, on ne
réussit pas si certaines règles ne sont pas
respectées et dont on a pu se rendre compte à l'occasion
des migrations intérieures, en fait, intraquébécoises, si
vous voulez, des réfugiés de la mer.
Et, dans ce contexte-là, le ministre Jacques Couture qui, je
dirais, est le plus remarquable des ministres de l'Immigration depuis une
quinzaine d'années, incluant nos deux ministres ici présents, a
décidé de signer avec le fédéral une entente qui
s'appelle l'entente Cullen-Couture, parce que le ministre Cullen s'était
bien rendu compte que pour que cette campagne d'aide aux réfugiés
de la mer fonctionne, il fallait que le Québec ait des pouvoirs
supplémentaires. Là, ce qui nous inquiète, M. le
Président, et ce sur quoi on demandera à la ministre de
s'expliquer, c'est qu'il semble que l'entente Cullen-Couture est maintenant au
congélateur et que si on en croit les rapports de presse qu'on lit dans
Le Devoir ou dans La Presse, les deux journalistes sont formels, tout est
bloqué au niveau du gouvernement fédéral. Il n'y a plus
rien qui fonctionne. Pourtant, la ministre nous a promis, ainsi que le premier
ministre du Canada et le premier ministre du Québec, que l'immigration
serait le premier dossier à être réglé après
l'échec de l'accord du lac Meech. Évidemment, on attend encore.
C'est malheureusement le rôle du Québec en attendant le
fédéral, comme dans la pièce de Samuel Beckett "En
attendant Godot". On attend et rien ne bouge. Les ministres sont dans
l'impossibilité de donner des réponses parce qu'ils et elles n'en
ont pas. Le gouvernement fédéral joue avec les nerfs du
Québec, si on peut dire, et des ministères et des ministres,
parce qu'il promet de grands changements positifs et que rien ne vient. Donc,
il n'y a rien de plus désespérant pour un ministre ou une
ministre qui attend des pouvoirs pour agir que d'attendre en vain et de rester
sur sa faim, si on peut dire.
Le truc - parce que je pense qu'après tant d'années c'est
un truc - du gouvernement fédéral est simple: il nous promet
telle chose, on s'en contente parce que ça semble formel, mais à
mesure que le temps passe, on se rend compte que c'était de la foutaise.
Je pense qu'on doit s'unir, et l'Opposition et le gouvernement, dans une telle
situation pour brasser un peu les fonctionnaires et les autorités
fédérales pour que ce qui est promis aboutisse et surtout que
nous puissions, comme gouvernement du Québec, faire et poursuivre notre
action auprès des réfugiés de la mer et des autres
réfugiés - on sait qu'il y en a beaucoup dans le monde, je pense
qu'il y en a 12 000 000 - car sans ces pouvoirs qui étaient dans
l'entente Cullen-Couture qui semble pour l'instant au congélateur, nous
sommes moins en mesure d'aider les gens qui ont besoin de nous. Si le Canada a
remporté il y a quelques années, un prix émanant de l'ONU
et du Haut commissariat de l'ONU aux réfugiés, un prix soulignant
sa générosité et son intervention d'ouverture et
d'hospitalité, c'est grâce à l'action du Québec qui,
à l'époque, per capita, accueillait plus de
réfugiés que n'importe quelle autre partie du Canada.
Donc, je pense qu'il est temps que la ministre nous dise où en
sont rendues les négociations entre elle at le fédéral
pour que nous nous joignions à elle pour amener le fédéral
à redonner au Québec les pouvoirs qu'il avait sous l'entente
Cullen-Couture et que les promesses, presque formelles, du premier ministre du
Québec et de la ministre que le dossier de l'immigration serait le plus
urgent après l'échec de l'accord du lac Meech, pour que nous
puissions faire les pressions qui s'imposent au-delà des lettres aux
députés conservateurs du Québec afin que le
fédéral bouge. Nous savons très bien, par
expérience, que le fédéral ne bouge pas tant qu'il n'a pas
peur et, comme le disait, je ne me souviens plus qui, les seuls gouvernements
qui sont bons sont ceux qui ont peur. Je pense qu'il faudrait que nous nous
réunissions, les communautés culturelles de Montréal et du
reste du Québec, pour forcer le gouvernement fédéral
à livrer la marchandise et à faire passer l'immigration au
premier rang de ses préoccupations dans ses rapports avec le
Québec après l'échec de l'accord du lac Meech. Mme la
ministre, nous attendons de vous des réponses à ces questions
parce que nous avons eu des déclarations, bien sûr, presque des
promesses.
La ministre prévoit une entente avec Ottawa d'ici la fin de
l'été. Nous en sommes rendus déjà aux
premières neiges que l'entente n'a pas encore tombé de l'arbre.
Par conséquent, nous comptons sur elle, et c'est l'objectif de cette
interpellation, pour nous informer où en sont les négociations et
si elle croit encore et toujours que l'entente interviendra enfin. Quand elle
parle de l'été, on aimerait avoir une année. Est-ce que
c'est 1989, 1990 ou 1991? C'est la raison pour laquelle on a une
interpellation. Nous voulons avoir des précisions quant aux dates
qu'elle prévoit pour l'aboutissement de cette entente-là. (9 h
15)
Par ailleurs, le Québec avait mis sur pied, grâce à
ses politiques, sous le parapluie de Cullen-Couture, une politique pour garder
nos immigrants au Québec, de telle manière qu'en 1985, pour une
première fois depuis 20 ans, le solde migratoire du Québec
était positif. Donc, ça a été le fruit d'un travail
de plusieurs années et de plusieurs ministres, évidemment, sous
l'empire de l'entente Cullen-Couture. On avait réussi enfin à
convaincre nos nouveaux Québécois de rester chez nous et non pas
d'aller ailleurs, ce qui, en fait, était très coûteux parce
que nous avions couvert les frais de transport, souvent de leur pays d'origine
jusqu'ici, des cours de français en plus, à Bangkok ou ailleurs.
Et nous souhaitions que ces nouveaux citoyens du Québec restent chez
nous et maintiennent un solde migratoire positif. De plus, il y avait au
Québec
un déficit démographique important et l'immigration
contribuait légèrement à ie rétablir
positivement.
Pour toutes ces raisons, l'immigration au Québec est un facteur
extrêmement important de stabilité démographique culturelle
et économique. Et nous craignons de voir s'effriter, avec le temps, ou
s'effondrer cette architecture de règlements et de lois qui nous
permettait d'espérer pour l'avenir que nous maintiendrions ce solde
migratoire positif, et que nous pourrions enfin cesser de craindre que le poids
du Québec dans le Canada ne diminue sous une barre dangereuse.
Le Président (M. Doyon): M. le député, je
constate que le temps est écoulé, même de deux minutes.
Alors, avec votre permission, je permettrai à la ministre d'intervenir
pour 10 minutes. Vous pourrez revenir et continuer votre propos. Alors, Mme la
ministre, pour 10 minutes.
Réponse de la ministre Mme Monique
Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. J'aurai
l'occasion, dans les deux heures qui suivront, de répondre plus
directement au député de Mercier sur les sujets précis
qu'il a abordés lors de son intervention, c'est-à-dire l'entente
Canada-Québec, de même que la question de la rétention des
immigrants. Vous me permettrez de consacrer cette première intervention
au thème même inscrit au feuilleton, soit la politique
d'immigration.
Donc, l'interpellation de ce matin est particulièrement à
propos et significative. Dans le contexte des audiences publiques de la
Commission parlementaire élargie sur l'avenir du Québec, la
question de l'immigration devient, comme le disait le député de
Mercier, centrale. En effet, au moment où les Québécois et
Québécoises de toutes origines s'interrogent sur leur avenir et
sur le genre de société dans laquelle ils veulent vivre,
l'immigration et l'intégration deviennent des questions qu'il est
essentiel d'aborder avec franchise, lucidité et courage.
Disons, au départ, qu'il importe de porter cette question sur le
terrain du rationnel. C'est un sujet émotif entre tous. La
légitime recherche de la survie pour un peuple peut mener aux pires
excès si nous nous laissons guider par des réactions
instinctives. L'histoire du monde a malheureusement été trop
souvent parsemée de ce genre d'attitude téméraire aux
effets aussi imprévisibles que désastreux. S'il importe de
traiter le sujet avec mesure, l'immigration ne se limite pas pour autant
à la définition d'obscurs modèles économiques ou au
tracé de quelques graphiques sans âme.
Nous avons d'abord ici affaire à des personnes, des hommes, des
femmes, des parents et des enfants, des gens en situation de détresse,
à des manières d'être, à des façons de vivre
et, ultimement, de mourir. Le député de Mercier, j'en suis
convaincue, sera d'accord avec moi là-dessus. Le corridor à
l'intérieur duquel nous devons définir nos politiques est donc
étroit, raison de premier plan, s'il en est une, qui justifie la
participation de tous au départ. Les citoyens, les corporations
professionnelles, les institutions publiques et privées, les
Québécois de souches ancienne et récente, bref tous les
corps constitués de notre société doivent allier le dire
à l'agir.
À ce chapitre, le rôle du gouvernement du Québec
peut être qualifié de moteur. Non seulement doit-il innover, mais
il doit également être le gardien du respect envers autrui, de
l'équité et des droits de chacun. Dans la relève du
défi de l'immigration, il est aussi de sa responsabilité de
présenter clairement et sans détour les véritables enjeux
qui nous interpellent. Phénomène international largement
provoqué par l'éclatement des technologies nouvelles, les
personnes sont de plus en plus mobiles; les médias nous montrent
instantanément la chute du mur de Berlin; la libération de Nelson
Mandela; les capitaux ne connaissent plus les frontières; on entend
Charles Dutoit à Montréal ce soir, à New York samedi et
à Paris lundi. Le Québec ne peut échapper à ce
mouvement. La chute des frontières ne peut être sans ces
corollaires: les mouvements de population et l'augmentation considérable
des flux migratoires. Ces flux ont beaucoup changé au cours des 20
dernières années. La polarisation des richesses universelles en
est certainement, et malheureusement, à l'origine. Alors que nous avions
l'habitude de recevoir de l'immigration presque exclusivement européenne
par le passé, de plus en plus, les migrations internationales se font du
sud au nord et non plus de l'est vers l'ouest. Cette migration nous invitera
à définir davantage notre identité collective, nos valeurs
profondes. En effet, ces immigrants seront encore plus différents de
nous, tant par leur couleur, leur façon de vivre que par leur
manière d'être. Nous aurons, tant comme individus que comme
société, à affronter des différences sur une base
quotidienne, au travail, dans nos immeubles d'habitation et dans nos
loisirs.
Voilà le portrait, si superficiel sort-il, des tendances
lourdes en cours sur la planète et la situation à laquelle la
plupart des pays industrialisés sont confrontés actuellement.
Certains d'entre eux ont choisi de fermer leurs frontières, d'autres de
les ouvrir toutes grandes. Mais où donc doit se situer le Québec
et quel choix doit-il faire? Pour répondre à ces interrogations,
il faut prendre en compte la situation particulière du Québec et
envisager sérieusement certains enjeux spécifiques à notre
société.
Ils sont, à mon avis, de quatre ordres. Premièrement, le
Québec fait face à un déficit
démographique important. Le nombre de naissances au Québec
depuis plusieurs années ne suffit plus à maintenir le niveau
actuel de notre population. Avec un indice de fécondité se
situant autour de 1,5% tel qu'il l'est actuellement, le Québec, à
long terme, ne pourra survivre et ainsi assurer sa pérennité. Au
rythme actuel, les démographes prédisent que la population
commencera a chuter dans une trentaine d'années. Qu'adviendra-t-il de
notre avenir collectif si, par manque d'enfants, nous diminuions tellement que
nous étions menacés d'assimilation dans un ensemble
nord-américain qui a pour lui ia force du nombre? Sans être une
panacée, l'immigration peut nous aider à retarder une
échéance inquiétante, le temps de redresser notre taux de
natalité. Cette immigration permet de plus de ralentir quelque peu le
renversement de la pyramide d'âge où là, on constate le
vieillissement de la population active. Ce vieillissement a des
conséquences graves sur notre capacité, comme
société, à nous offrir les soins de santé et les
régimes de retraite auxquels nous sommes habitués.
Deuxièmement, l'immigration est aussi un stimulant important de
l'économie. Les travailleurs immigrants comblent nos besoins
immédiats de main-d'oeuvre. Ils jouent ainsi un rôle important
puisqu'ils constituent une force de travail qualifiée capable
immédiatement de répondre aux nouveaux défis que veulent
relever nos entreprises.
De plus, tout comme les investisseurs, les travailleurs amènent
avec eux un savoir-faire et des idées nouvelles qui dynamisent notre
économie. L'ensemble de la population immigrante augmente notre
marché intérieur et favorise tant l'émergence de nouvelles
entreprises que le développement des corporations existantes. Ainsi, le
mythe de l'immigrant voleur de jobs a déjà trop fait de chemin.
Il est faux, il est sans fondement. Et disons-le, xénophobe.
Troisièmement, l'ouverture d'une société c'est
aussi l'enrichissement culturel. En participant à la vie collective, les
nouveaux arrivants apportent à la société d'accueil des
idées, des projets qui la font progresser. C'est là un facteur
à ne pas négliger. Enfin, le Québec comme le Canada,
d'ailleurs, a également un rôle humanitaire à jouer. Notre
coin de pays est l'un des plus privilégiés de cette
planète. Avec un des niveaux de vie élevé du monde
occidental, nous avons une responsabilité vis-à-vis les plus
démunis de ce monde.
Nous n'entendons pas nous soustraire à ces devoirs. Québec
a déjà largement contribué à l'acceptation de
réfugiés, comme en faisait mention le député de
Mercier, sur son territoire, et nous entendons continuer à le faire.
Voilà donc quatre bonnes raisons d'ouvrir les portes du Québec:
démographie, prospérité, générosité
et enrichissement culturel. Ces avantages, le Québec doit les faire
comprendre à la société d'accueil afin qu'elle participe
pleinement au processus d'insertion des immigrants et des communautés
culturelles.
Voilà, M. le Président, les quatre piliers de notre
politique d'immigration. À cela se greffe bon nombre d'actions cans
plusieurs domaines. Nous aurons l'occasion, au cours des minutes qui viennent,
d'en faire état et ce qu'il faut retenir, à ce stade-ci de la
discussion, c'est que l'immigration est maintenant un enjeu de premier ordre
pour assurer l'avenir du Québec. Soyez assuré, M. le
Président, que le gouvernement libéral en est fort conscient et
est déterminé à continuer d'agir comme il le fait depuis
maintenant cinq ans. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. Je vais
maintenant donner la parole à M. le député de Mercier pour
la continuation de l'interpellation. M. le député.
Argumentation M. Gerald Godin
M. Godin: M. le Président, j'ai écouté avec
beaucoup d'attention les propos de la ministre, d'autant plus qu'elle commence
à peine à répondre aux questions que nous lui posons et
que nous nous posons. J'aimerais savoir de la ministre, M. le Président,
dans ses négociations avec le fédéral, quelles
étaient ses demandes et sur lesquelles de ces demandes elle croit avoir
marqué des points? Elle parlait des compensations financières,
qui est une des cassettes, en fait, du ministère depuis des
années, et que nous ne pouvons pas jouer le rôle à nous
imparti par nos négociations avec le fédéral depuis des
années si on n'a pas les montants dont on a besoin pour appliquer
vraiment dans la réalité les programmes dont nous sommes
dépositaires depuis l'entente Cullen-Couture.
Alors, nous aimerions savoir de la ministre, dans les
négociations qu'elles a eues avec le fédéral, sur quels
points elle pense avoir marqué des points, d'une part? Et d'autre part,
si elle croit que la promesse formelle de M. le premier ministre du Canada au
premier ministre du Québec - de Mulroney à Bourassa en fait...
Sur quels points elle croit que le fédéral va céder
vraiment des morceaux importants, parce que nous avons remarqué que dans
l'accord du lac Meech l'immigration était un point très
important. Nous nous en sommes réjouis à l'époque parce
que ça confirmait l'importance de l'immigration pour deux gouvernements
successifs, et leur intention de constitutionnaliser l'entente Cullen-Couture
ne faisait que démontrer à quel point cette entente était
importante pour le Québec, et à quel point elle répondait
aux besoins et aux attentes du Québec dans le domaine de l'immigration.
Nous aimerions savoir comment elle peut s'y prendre pour convaincre le
fédéral de donner suite aux engagements - verbaux,
évidemment, et pas autre chose - pris par le premier ministre du Canada
face au premier ministre du Québec suite à l'échec de
l'accord du lac Meech.
M. le Président, si on ne dépasse pas le niveau des
promesses verbales, comme on dit, et le niveau des déclarations de
bonnes intentions qui sont comme des incantations, en fait, à un dieu
qu'on ne connaît pas, comment peut-on espérer vraiment marquer des
points et aller chercher des morceaux importants de législation, de
budget, ou de transferts monétaires qui permettraient au Québec
de continuer à appliquer l'entente Cullen-Couture dans sa
totalité et de façon de plus en plus efficace? Alors, M. le
Président, c'est ma question à la ministre de l'Immigration.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député
de Mercier. Mme la ministre.
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, vous vous
souviendrez que l'accord du lac Meech donnait au Québec les outils
constitutionnels pour mieux planifier et contrôler notre immigration.
Entre autres, ça permettait à l'entente administrative
Cullen-Couture d'avoir une valeur constitutionnelle. Ça permettait
également d'étendre des pouvoirs de sélection. Ça
permettait également de transférer tous les services de
réception et d'intégration dont le Québec a absolument
besoin pour être le maître d'oeuvre de l'intégration de ses
immigrants. Ça permettait aussi des garanties quant au niveau
d'immigration. Je pense que, suite à l'échec de Meech, on peut
quand même affirmer que le caractère raisonnable de nos demandes
était, et est tout à fait légitime en matière de
sélection et d'intégration des immigrants. Ça,
c'était admis par tous. Et même le fédéral, vous
vous en souviendrez, avait accepté et voté à la Chambre
des communes l'accord du lac Meech. (9 h 30)
Tout comme le député de Mercier, je dois vous dire que je
suis très déçue de constater que cette entente n'est pas
encore signée et je suis déçue aussi de constater que la
réunion de l'aile conservatrice québécoise, au mont
Sainte-Anne, en fin de semaine dernière, n'a pas donné lieu
à un véritable débat sur le sujet. Vous vous souviendrez
que quelques jours avant la réunion des progressistes conservateurs, la
fin de semaine dernière, j'avais sollicité le concours des
députés ministériels, demandant à chacun de
contacter leur vis-à-vis progressiste conservateur pour leur faire
prendre conscience de l'importance pour le Québec de signer cette
entente Canada-Québec. J'avais, moi-même, aussi écrit
à l'ensemble des députés conservateurs qui avaient
renouvelé leur engagement après l'échec de Meech pour
qu'ils puissent intervenir et puissent essayer de faire infléchir la
décision du premier ministre. J'ose espérer aussi que le
comité parlementaire sur l'immigration, qui se réunira à
Ottawa le 22 novembre prochain, afin d'entendre la ministre
fédérale, Mme Barbara McDougall. Ils pourront réussir,
à ce moment-là, à expliquer la valse hésitation
d'Ottawa dans un dossier qui comporte des enjeux aussi fondamentaux pour le
Québec. Dans un dossier aussi déterminant pour l'avenir collectif
et pour la préservation du caractère distinct de la
société québécoise.
Je pense qu'il est temps que les Québécois aient l'heure
juste au moment où on se parle. Et je suis même très
heureuse ce matin qu'on puisse avoir cette interpellation et qu'on puisse
parler de cette entente.
Je suis tout à fait d'accord pour dire que les
Québécois s'attendent à avoir l'heure juste et qu'on le
signifie aussi à la population, qu'on nous signifie si, oui ou non, on
consent à la demande du Québec en vue d'obtenir des outils
absolument essentiels pour accroître sa capacité et son
efficacité d'action en matière de sélection et
d'intégration des immigrants.
Je pense qu'avec une bonne dose de bonne volonté de la part du
gouvernement fédéral, il nous apparaît encore possible de
régler ce dossier. Pour le moment, je n'entends pas encore lancer la
serviette. Je pense que les enjeux sont trop importants pour lancer la
serviette au moment où on se parle.
Le projet d'entente Canada-Québec en matière d'immigration
doit être ratifié dans les meilleurs délais. Et j'invite
encore, à ce moment-ci, les autorités fédérales
à émettre le signal de la conclusion prochaine de cette entente
et je compte toujours sur le concours des députés et
sénateurs conservateurs du Québec à cet effet.
Est-ce vraiment trop attendre de la part des députés
progressistes conservateurs du Québec que de leur demander de se faire
le reflet de la très grande majorité des Québécois
qui souhaitent que, tel que révélé par le sondage que j'ai
rendu public la semaine dernière, le Québec dispose de pouvoirs
accrus en matière d'immigration? Est-ce trop exiger de nos élus
progressistes-conservateurs québécois de travailler activement
à persuader leur premier ministre de satisfaire les objectifs
légitimes du Québec pour faire de l'immigration un atout en
faveur du développement sur le plan démographique,
économique, linguistique et socioculturel?
Je ne pense pas que ce soit se bercer d'illusions que d'espérer
que ces élus québécois de la formation politique
ministérielle sur la scène fédérale reconnaissent
que le suspense dans lequel se trouve le projet d'entente cause des
préjudices aux clientèles immigrantes de même que des
problèmes administratifs au gouvernement du Québec. Le retard
apporté au financement des cours de langue française de
même qu'à l'implantation d'une structure d'ac-
cueil de notre ministère à Dorval et à Mirabel, le
traitement du dossier immigrant investisseur, voilà autant d'exemples
concrets et explicites qui devraient avoir pour effet de confirmer la
légitimité des préoccupations québécoises
auprès des députés québécois
progressistes-conservateurs dans la capitale fédérale.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre, je dois vous
signaler que les cinq minutes sont écoulées. Vous pourrez
revenir. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. La ministre a bien
fait état des problèmes que pose le blocage actuel entre les
négociations fédérale et québécoise sur
l'immigration; nous les partageons et c'est ce qui appelle l'interpellation de
ce matin. Je le disais tout à l'heure; nous partageons ces
préoccupations touchant les effets particulièrement
négatifs de la capacité du Québec à intégrer
les immigrants et lorsqu'elle parle des défis du Québec, nous les
partageons également. Je voudrais en rappeler deux sur lesquels le
blocage actuel a des effets particulièrement négatifs. D'abord,
il y a le dossier des immigrants investisseurs sur lequel reviendra le
porte-parole officiel tout à l'heure, mais il y a également le
rôle d'enrichissement culturel et économique que pourront jouer
les immigrants qui s'installent chez nous à condition d'abord -je le
rappelle - que l'immigration ne soit pas exclusivement montréalaise et
qu'elle puisse aussi être un peu régionalisée.
J'ai un certain nombre de questions à poser et je suis
très préoccupée, parce que, au-delà de toutes les
démarches que la ministre a faites et que j'ai faites personnellement je
dois dire auprès du président de la table de l'Immigration
à Ottawa, Jean-Pierre Blackburn, il n'y a rien qui débloque et je
pense que le premier ministre Mulroney a été très clair
là-dessus, il a dit: Ça ira. Ottawa reporterait l'entente sur
l'immigration après la conclusion des débats constitutionnels du
Québec et s'il advenait que nous concluions ces débats
constitutionnels seulement dans une année, il n'y a rien qui dit que
ça pourra se faire quelque part au mois de juin l'an prochain. Ça
veut dire que ce serait reporté d'une année.
Ce qui est plus grave encore, c'est la déclaration de M.
Benoît Bouchard qui disait, et je le cite: la déclaration de M.
Mulroney "n'a rien à voir avec le fait qu'on veuille signifier quoi que
ce soit au Québec, insiste Benoît Bouchard, n'essayons pas d'y
voir encore un élément de soumission au Canada. Il y a des
problèmes financiers, révèle-t-il, plutôt il y a des
dizaines de millions en cause et le Canada n'a pas d'argent..."
Non seulement il y a ce problème qui fait que les autres
provinces canadiennes refusent les négociations à
caractère administratif entre le Québec et le Canada,
contrairement à ce qui avait été déclaré au
lendemain de l'échec de Meech, mais, ensuite, le Canada nous dit: On n'a
pas de sou. Je suis porté à le croire, c'est un gouvernement de
cassés et ça pose un problème, vous le savez, et on le
sait tous ici, c'est-à-dire que l'endettement est galopant et on n'a
aucun contrôle là-dessus au Québec. Alors, je dis: II y a
quatre ou cinq questions qui se posent, au-delà de toutes les pressions
que vous avez faites. Est-ce que vous voyez un peu la lumière au bout du
tunnel? Qu'est-ce qu'on peut dire à ceux et celles qui, actuellement,
essaient, de façon désespérée,
particulièrement dans la région de Montréal, de donner aux
nouveaux immigrants un minimum de services qui leur permettent d'abord de
s'intégrer à la communauté française et de
s'intégrer au marché du travail? Est-ce que vous voyez la
lumière au bout du tunnel? Et est-ce que vous pourriez nous dire, de
manière qu'on puisse peut-être intervenir, sur quoi l'entente
bloque? Est-ce que, comme M. Bouchard dit, on ne signe pas d'entente parce
qu'on n'a pas d'argent? Et ce n'est pas parce qu'on cède à la
pression des autres provinces qui refusent qu'on négocie,
Québec-Ottawa. Je voudrais savoir sur quoi ça bloque. Je voudrais
savoir aussi: on prétend que les exigences, qui avaient
été posées dans l'entente de 1987 sur l'immigration,
seraient moins basses. Qu'est-ce qui se négocie actuellement avec
Ottawa? Qu'est-ce qui se négocie avec Ottawa? L'entente 1987
prévoyait, entre autres, la sélection à l'étranger
et au pays des immigrants et des réfugiés: une garantie de 5 %
plus élevée que le pourcentage de la population
québécoise et que le Canada se retire des services de
réception, d'intégration et de compensation financière.
Alors, je voudrais savoir dans ces trois éléments-là ce
qui est encore sur la table des négociations, ce qui bloque et quel est
le montant de la compensation financière que vous demandez? Bon,
ça va. Moi, je n'irai pas plus loin parce que je pense, M. le
Président, vous me le dites, qu'on peut reprendre.
Le Président (M. Doyon): Oui. Mme Blackburn:
Très bien.
Le Président (M. Doyon): Oui, évidemment. Merci,
Mme la députée. Alors, j'ai interverti l'ordre, tout à
l'heure, c'était, normalement, un député
ministériel qui devait prendre la parole avant vous, Mme la
députée. Alors, je vais lui permettre de le faire; la ministre
pourra revenir tout de suite après. M. le député de
Richelieu.
M. Albert Khelfa
M. Khelfa: Merci, M. le Président. Depuis 1985, la
ministre a réorienté le ministère avec
deux objectifs en créant deux secteurs: le premier secteur
chargé du développement des politiques et des programmes, et un
deuxième secteur, le secteur des opérations responsables de
dispenser des services à la clientèle. Nous avons constaté
que le gouvernement du Québec, par l'entremise de la ministre, a
posé plusieurs gestes significatifs démontrant l'importance qu'il
attache à l'apprentissage du français par les immigrants, lequel
constitue sans contredit le moteur de leur intégration à la
société québécoise.
Jusqu'à 1987, le Programme national de formation en
établissement, défrayé par le gouvernement
fédéral, constituait, pour ainsi dire, la seule source de
financement pour la francisation des immigrants. Depuis l'arrivée au
pouvoir du gouvernement libéral, le financement québécois
s'est accru significativement, passant de 5 % à 14 % en cinq ans, donc,
triplant depuis 1986. En 1989-1990, environ 5 300 000 $ ont été
consacrés à la francisation dans le cadre des deux nouveaux
programmes que nous avons créés, à savoir le Programme
québécois de francisation des immigrants et le deuxième
programme, le Programme d'aide à la francisation des immigrants, ce
qu'on appelle le PQFI et le PAFI et ce, afin de rejoindre les clientèles
non desservies jusqu'alors, particulièrement les femmes ne se destinant
pas au marché du travail et les revendicateurs du statut de
réfugié qui ne sont pas admissibles au Programme national de
formation en établissement du gouvernement fédéral.
La mise en oeuvre, depuis quelques années, de formules
variées de cours à temps partiel dans les COFI ou en
collaboration avec les commissions scolaires et les organismes communautaires,
a, par ailleurs, augmenté l'accessibilité des services. À
titre d'exemple, une nouvelle formule de cours de français en milieu
scolaire, principalement destinés aux femmes des communautés
culturelles, a été élaborée et mise en place dans
trois commissions scolaires jusqu'à maintenant. En vertu des ententes
avec ces commissions scolaires, des parents, dont les enfants
fréquentent déjà l'école, ont commencé leur
apprentissage du français et de la vie québécoise à
la même école que leurs enfants et ce, pendant que ces derniers
sont en classe.
En définitive, M. le Président, c'est plus de 50 % du
budget du ministère qui est consacré, en 1990-1991, à des
activités de francisation. C'est des mesures concrètes, madame.
Le ministère a aussi entrepris une opération de
redéfinition et de consolidation des activités de francisation en
élaborant un régime de formation officiel et un plan de
développement pédagogique qui serviront de cadre à
l'ensemble de nos activités de francisation. Quant à l'effort de
formation linguistique initial des nouveaux arrivants d'âge scolaire qui
représentent environ 20 % de l'immigration totale, il a
été largement soutenu par le gouvernement libéral.
L'engagement de notre gouverne- ment, à cet égard, dépasse
18 000 000 $ par année. Par ailleurs, la bonification récente du
budget des mesures d'accueil spéciales a permis d'assurer une meilleure
insertion des élèves immigrants en régions.
De plus, face à l'accroissement du nombre d'élèves
sous-scolarisés ou appartenant à des communautés
linguistiques éloignées du français, le ministère
de l'Éducation du Québec autorise le prolongement de la
durée de séjour à l'accueil dans plus de 30 % des cas et
expérimente diverses formules répondant à des besoins
particuliers. Le ministère de l'Éducation a également
consenti des efforts importants sur le plan du développement
pédagogique. (9 h 45)
Afin d'épauler les écoles à haute densité
ethnique en matière d'intégration linguistique, le gouvernement
appuie l'initiative mise en oeuvre sur le plan local par des commissions
scolaires ou des cégeps. De plus, dans le cadre du plan de
développement du français, il a consacré, en 1989, des
budgets spéciaux totalisant près de 8 000 000 $ pour le seul
ministère de l'Éducation. Ces budgets servent au soutien
linguistique, en français, des élèves des
communautés culturelles. L'instauration de diverses mesures permettra de
répondre aux besoins des écoles à forte concentration
ethnique. Faire du français la langue du travail au Québec
constitue l'objectif du gouvernement libéral ainsi qu'une condition
essentielle à l'intégration linguistique des
Québécois des communautés culturelles.
En terminant, M. le Président, j'aimerais souligner que le
gouvernement a aussi annoncé des mesures de 3 000 000 $ qui seront
disponibles pour aider ces commissions scolaires. Et, en terminant, ce qui est
très important pour nous, la ministre l'a mentionné tout à
l'heure, c'est l'entente Canada-Québec. Elle est importante pour la
survie du Québec et nous devons la signer.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député
de Richelieu. Nous allons revenir à l'ordre original, tel que
prévu à cette interpellation. Mme la ministre, pour revenir aux
questions qui vous ont été posées par la
députée de Chicouti-mi.
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je dois dire que,
suite à cette attitude du fédéral, ce qu'on pourrait
penser être une volte-face, de ne pas vouloir signer immédiatement
l'entente Canada-Québec, mais ce que j'ai compris, moi aussi, c'est
qu'on voulait attendre après le rapport de la commission
Bélanger-Campeau. J'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, de
dire qu'il m'apparaissait qu'on faisait une très mauvaise lecture de la
réalité politique québécoise et que, s'il
s'agissait d'une stratégie, elle aurait un coût
politique. Je voudrais, bien sûr, pour répondre à la
question de la députée de Chicoutimi, lui dire que je ne peux pas
entrer nécessairement dans le détail de l'entente parce que les
demandes et les propositions des parties sont encore sur la table, elles ne
sont pas publiques, elles ne sont pas connues.
Cependant, je voudrais lui rappeler les trois grands principes qui
étaient d'ailleurs dans Meech, les trois principes et ce qu'on
revendiquait, ce qu'on demandait. Ce qui était important pour le
Québec, c'était de garantir le nombre d'immigrants
équivalant, . par exemple, au poids démographique,
c'est-à-dire 25 %, plus 5 % en cas de besoin démographique.
C'était aussi, pour le Québec, d'avoir la sélection
exclusive de ses immigrants. Et c'était aussi le transfert avec
compensation financière de tous les pouvoirs de francisation et
d'intégration.
Et ce qui est nouveau par rapport à l'entente de 1987, c'est
qu'en rapatriant l'argent pour pouvoir intégrer nos immigrants,
ça permettrait au Québec de pouvoir franciser les immigrants qui
ne parlent que l'anglais. Comme vous le savez, actuellement, le programme
national d'emploi, le PNFE, qui se donne dans les COFI, est un programme qui
s'adresse aux gens qui se destinent au marché du travail. Et, sont
éligibies, seulement les immigrants qui ne parlent ni le
français, ni l'anglais. Alors, pour nous, au Québec, comme nous
sommes une société distincte, il est important que nous puissions
aussi donner des cours de français aux immigrants qui parlent anglais.
Il faut absolument qu'on soit capables de leur donner des cours de
français pour qu'ils puissent aussi s'intégrer au marché
du travail.
Alors, je reviens toujours à cette entente Canada-Québec.
Comme je le disais tout à l'heure, les enjeux sont trop grands pour
pouvoir lancer la serviette immédiatement. Et j'interpelle toujours les
députés conservateurs, et je suis très heureuse de voir,
Mme la députée de Chicoutimi, que, vous aussi, vous avez
parlé à votre vis-à-vis. Je pense que c'est important
qu'on le fasse et qu'on leur fasse prendre conscience aussi de cette importance
pour le Québec de signer immédiatement cette entente. Parce que,
comme je le mentionnais, et je le redis, ce n'est pas au Québec à
payer l'échec de Meech; je pense que ce n'est pas au Québec. Et
actuellement, on a l'impression qu'en ne signant pas cette entente, il y a un
coût à payer pour le Québec. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. Alors,
toujours suivant l'ordre, maintenant, un député
ministériel. Si quelqu'un veut intervenir... M. le député
de LaFontaine?
M. Jean-Claude Gobé M. Gobé: M. le
Président, je vous remercie de m'accorder la parole en ce moment. Alors,
comme le faisaient valoir, d'ailleurs à juste titre, la
députée de Chicoutimi ainsi que la ministre de l'Immigration, un
des problèmes importants de l'immigration que nous allons
connaître et certainement devoir relever comme défi, va être
l'intégration des immigrants. C'est certainement, peut-être
là, l'un des effets les plus importants de cette grande opération
de l'immigration qui a pour but, comme on le sait, comme on le découvre,
de combler les déficits démographiques engendrés par le
faible taux de fécondité que nous connaissons au Québec,
1,4 % ou 1,5 %. El pour ce faire, c'est important de prendre des mesures, non
seulement à l'arrivée de ces immigrants, en termes de
francisation, il est vrai, mais au départ, je crois qu'il est important
de prendre des mesures préparatoires qui doivent commencer avec la
sélection des immigrants. Et pour ce faire, notre gouvernement, depuis
quelques années, a commencé à prendre un certain nombre de
mesures. On voit que depuis 1986, alors que la ministre Louise Robic
accédait à ce ministère, ensuite l'actuelle ministre, un
certain nombre de mesures ont été prises. Et, parmi les 33 600 et
quelques immigrants que nous avons accueillis au Québec en 1989, on peut
voir que 58 % provenaient de la catégorie des indépendants,
c'est-à-dire des personnes que l'on évalue peut-être
être capables, être en mesure de subvenir à leurs besoins et
de devenir assez rapidement autonomes grâce à leur
compétence, leur formation et leur capacité d'adaptation, bien
entendu.
Les efforts du gouvernement ont permis d'augmenter de façon
significative la part de ce mouvement qui contribue, à n'en pas douter,
au dynamisme économique du Québec. Rappelons-nous qu'il
n'était qu'à 35 % en 1985 et c'est là qu'on voit
l'importance des mesures qui ont été prises. Ce succès se
reflète plus particulièrement dans la sous-catégorie des
gens d'affaires et des travailleurs immigrants et c'est là une
réalisation concrète du ministère, ces dernières
années. On se souvient des efforts déployés par la
ministre Louise Robic, députée de l'est de Montréal,
d'ailleurs, très au fait de tous ces problèmes d'immigration qui,
bien entendu, comme on le sait, s'installent majoritairement dans cette
région de Montréal. Donc, je disais, on voit les résultats
de ces politiques qui ont été mises de l'avant depuis maintenant
cinq ans par notre gouvernement. Car depuis 1986, le gouvernement s'est
donné quand même une orientation économique en
matière d'immigration et on voit que l'accroissement des gens d'affaires
admis au Québec atteint 500 %. Depuis 1988, le Québec
reçoit en moyenne plus de 40 % des gens d'affaires ayant obtenu un visa
canadien et ces chiffres démontrent, encore une fois, ce que je disais,
c'est la conscience et l'importance que notre gouvernement attache à ce
genre d'immigration et à l'apport que ces immigrants
amènent au Québec. Leur arrivée représente
certainement un des facteurs les plus enrichissants de notre
société, et ça, à double point, par leur
connaissance des affaires, les marchés extérieurs internationaux
et les réseaux commerciaux déjà bien souvent
concrétisés de part et d'autre du continent.
On considère en général que l'actif d'un immigrant
investisseur, l'actif moyen, est d'environ de 500 000 $. Je crois que,
dernièrement, la ministre effectuait une mission en Orient et dès
son retour, suite à la lumière, à la perception de ce
voyage, elle a annoncé un certain nombre de mesures qui sont en voie
d'implantation au ministère et on voit que cela aura pour tâche,
comme raison, de faciliter la sélection et l'accueil et certainement
l'intégration de cette clientèle. Dans le futur, le
ministère accordera aussi beaucoup plus d'importance, et il le faudrait,
je le souhaite, à l'accueil des investisseurs en leur accordant un
service personnalisé. Car je crois qu'il est important de
préparer ces gens-là par des séances d'information
collective qui devraient porter non seulement sur l'immigration, mais sur les
caractéristiques de l'économie québécoise, sur les
attentes et les besoins économiques du Québec et sur l'ensemble
des services, bien entendu, que l'on met à leur disposition afin de
faciliter leur établissement au Québec. Et je crois que c'est
là aussi un genre de réalisation à venir dont l'Opposition
devrait être capable de se réjouir et de trouver positive dans nos
politiques gouvernementales.
Maintenant, il y a la sous-catégorie des travailleurs et c'est la
mise en oeuvre dès 1987... On voit, encore là, la vision du
gouvernement libéral. Quand nous sommes arrivés à la fin
de 1985 - et on le voit dès 1986 avec les immigrants investisseurs
dès 1987 avec les travailleurs - un certain nombre de programmes
spéciaux ont été mis en matière de recrutement et
c'a augmenté le nombre de candidats indépendants d'une
manière assez substantielle ainsi que le nombre d'immigrants qui parlent
français. En effet, les travailleurs sélectionnés en vertu
du Guide d'emploi du Québec et du Programme de l'emploi attesté
sont à plus de 65 % des francophones. Le nombre d'immigrants qui
déclarent connaître le français est passé de 5300 en
1984 à plus de 9500 en 1989 et je dois, là encore, je crois, avec
l'Opposition, concevoir qu'il y a là matière à
réjouissance.
Alors, en terminant, M. le Président, car je crois que le temps
est maintenant compté, si vous le permettez, l'immigration est vitale
pour l'avenir du Québec, pour l'avenir économique et
démographique, mais je crois qu'il ne faut pas perdre de vue que cette
politique d'immigration ne saurait être bénéfique pour
notre société qu'à condition d'être capable
d'intégrer ces immigrants, de les intégrer sans heurt, et
d'éviter que nous ayons de trop grands problèmes
d'intégration, autant au niveau de la langue parlée que de
l'emploi. Lorsqu'on sait qu'au Québec, actuellement, et dans la
région de Montréal où les gens s'installent...
Le Président (M. Doyon): ...M. le
député.
M. Gobé: ...on a des quartiers à 20 % de
chômage, je crois qu'il y a des mesures importantes à prendre afin
de faciliter l'intégration de ces gens-là au marché du
travail et donc à notre société.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. M. le député de Mercier, vous avez
maintenant la parole.
M. Gérald Godin
M. Godin: M. le Président, je vous remercie à mon
tour. Je pense qu'on peut s'attarder longuement sur la question des
investisseurs immigrants parce que voilà un programme où le
Québec était en avant ce sur toutes les provinces en concurrences
avec lui. Il faut se rappeler qu'à l'extérieur, nommément
à Hong Kong et en Allemagne, le Québec n'est pas seul en piste.
Ottawa y est et également les provinces telles la Colombie-Britannique
et l'Ontario.
Le Québec avait réussi, en imaginant un programme
très original et très généreux, à battre
toutes les autres provinces et les autres villes importantes, dont Vancouver et
Toronto, avec le résultat que le fédéral a modifié
les règles que le Québec avait établies et ses normes
à lui aussi et qui avaient rapporté au Québec le plus
grand nombre d'immigrants investisseurs de toutes les provinces canadiennes et
également 50 000 000 $ d'investissements par année. Le
résultat est simple. C'est à Montréal que l'on trouve, et
non pas à Vancouver ni à Toronto, la Banque de Hong Kong et ce
n'est pas, non plus, à Vancouver ou à Toronto, qu'on retrouve
l'édifice aménagé au-dessus de la Banque de Hong Kong et
qui est un édifice de condos de luxe réservé aux
immigrants de Hong Kong. Et, pour des raisons qui n'ont pas été
expliquées par la ministre, le fédéral a forcé le
Québec à modifier ses règles de manière à
réduire l'afflux d'immigrants investisseurs qui venaient de Hong Kong
surtout.
J'aimerais demander à la ministre comment les choses se sont
passées et si elle a l'intention de protester d'une façon ou
d'une autre contre le fait que le fédéral a imposé au
Québec des normes différentes de ce qu'il avait inventé
lui-même, de manière à ce que le Québec perde son
avantage comparatif par rapport à d'autres provinces et villes
canadiennes. On a été frappés par le silence de la
ministre dans ce dossier-là d'autant plus que voilà un groupe
d'immigrants qui était extrêmement rentable pour le Québec
et qui créait de l'emploi dans le Québec. Alors, est-ce que la
ministre peut nous dire pourquoi elle
n'a pas dit un mot? Et, deuxièmement, comment se sont faites les
tractations qui ont amené Ottawa à prêter l'oreille
à ce que demandaient Vancouver et Toronto et à ne pas
écouter Montréal ou Québec si Québec ou
Montréal ont dit quelque chose que nous, on n'a pas entendu, en tout
cas, de ce côté-ci de la Chambre?
Le Président (M. Khelfa): Merci, M. le
député de Mercier.
M. Godin: M. le Président, c'est ma note sur les
immigrants investisseurs, programmes mis au point par le gouvernement
précédent et qui ont rapporté au Québec un nombre
important d'immigrants avec des moyens, d'une part, avec des enfants, d'autre
part, et qui ont donc contribué au solde positif du Québec dans
ces années-là. M. le Président, c'est ma notule pour la
ministre.
Le Président (M. Khelfa): Merci, M. le
député de Mercier. Mme la ministre des Communautés
culturelles et de l'Immigration.
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Comme le
disait le député de Mercier, notre programme a connu de grands
succès. Cependant, je constate qu'il aurait été important
qu'on me pose la question à l'Assemblée nationale justement sur
ce programme d'immigrants investisseurs au moment où le gouvernement
fédéral a décidé de changer sa
réglementation, parce que ça m'aurait permis de faire part au
député de Mercier de toutes les interventions que j'ai faites
pour que le Québec puisse conserver son programme dans son entier. (10
heures)
Je dois vous dire, au départ, que le Québec a souscrit, au
tout début aux objectifs visés par le projet de règlement
du fédéral. Je pense qu'on ne peut pas dire qu'on est contre le
fait qu'on veut maximiser au plus haut point les retombées
économiques de ces programmes d'immigrants investisseurs.
On est d'accord aussi pour que chaque province puisse avoir sa part dans
ces différents programmes. On est d'accord aussi pour que les
investissements soient de plus en plus sécuritaires. Cependant, il
m'apparaît que le fédéral a voulu, par ces modifications,
corriger certaines lacunes observées dans le programme en vigueur dans
le reste du Canada parce que, comme vous le savez, notre programme
québécois est très différent du programme
appliqué dans le reste du Canada.
Avant de rencontrer mon homologue pour discuter du dossier, parce que
j'ai eu l'occasion de rencontrer Mme McDougall à cet effet, mon cabinet
a consulté la majorité des courtiers en valeurs mobilières
qui oeuvraient dans ce domai- ne. J'ai d'ailleurs obtenu l'appui de la presque
totalité de ces gens et vous vous souviendrez qu'ils ont même
émis un communiqué de presse et ils ont fart aussi des
recommandations auprès de Mme McDougall concernant les modifications
à ce programme.
Je pense que ce qui préoccupait davantage le milieu financier,
c'était l'injustice créée envers le Québec avec
l'entrée en vigueur dudit règlement. On se trouvait à
pénaliser le Québec face aux autres provinces à cause,
justement, comme je le mentionnais tout à l'heure, de la
spécificité de notre programme qui est très
différent de tous les autres programmes. Et aussi l'intervention du
Québec. Le Québec disait: qu'on ne peut pas modifier le programme
d'immigrants investisseurs à tous les six mois. Les investisseurs ont
besoin d'un peu plus de stabilité et d'un peu plus de
prévisibilité aussi.
Quand on veut investir, il faut savoir d'avance combien de temps notre
investissement sera investi. Il faut avoir plus de sécurité et de
stabilité. Il y avait aussi une crainte. La crainte du gouvernement du
Québec était au fait qu'en changeant les modalités de
notre programme, il pourrait y avoir un déversement de clientèle
vers d'autres programmes et aussi vers d'autres pays, entre autres, ce qui
aurait pour effet de priver les PME québécoises d'une bonne
source de financement. Comme on le mentionnait, lorsque je suis allée
à Hong Kong récemment, je me suis rendue compte que l'Australie
entre autres et la Nouvelle-Zélande sont très agressifs et
veulent avoir des immigrants investisseurs.
Donc, avec toutes ces préoccupations en tête, on a
négocié avec le gouvernement fédéral, comme je le
mentionnais. J'ai rencontré mon homologue Barbara McDougall. Les
courtiers en valeurs mobilières sont également intervenus. Et
j'ai obtenu récemment une lettre de Mme McDougall, qui était
datée du 26 octobre. Le règlement fédéral
s'appliquera au Québec 18 mois après son entrée en vigueur
dans le reste du Canada, et c'est ce qui faisait problème auprès
des courtiers en valeurs mobilières et des immigrants investisseurs
parce que, comme l'argent - lorsque nous sélectionnons un immigrant
investisseur - est transféré immédiatement au
Québec, que la période de trois ans commençait à
courir seulement lorsque l'immigrant investisseur arrivait au Québec et
que les délais pour l'émission des visas, entre autres à
Hong Kong, sont de deux ans et même au-delà de deux ans, à
ce moment-là, il peut arriver, dans certains cas, que la somme investie
le soit pour une période de sept ans au lieu de cinq ans.
Alors, nous sommes intervenus. J'ai obtenu cette période
transitoire pour que notre programme puisse demeurer aussi compétitif
que le reste du Canada, pour les 18 premiers mois de la mise en vigueur de la
réglementation, à compter du 7 décembre prochain. Je dois
vous dire, cependant, qu'en ce qui concerne les 250 000 $ à 350 000
$,
c'est-à-dire le niveau d'investissement, il semblerait,
d'après les courtiers en valeurs mobilières, que la
clientèle aura suffisamment de temps pour s'ajuster, compte tenu de la
période transitoire que nous avons obtenue de 18 mois, et qu'à ce
moment-là, malgré que nous sommes intervenus et qu'on aurait
préféré que cette augmentation sort plutôt graduelle
au lieu de passer de 250 000 $ à 350 000 $, il semblerait que la
clientèle pourrait s'ajuster.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre.
Maintenant, pour cinq minutes, M. le député de l'Acadie et,
ensuite, M. le député de Mercier.
M. Yvan Bordeleau
M. Bordeleau: Merci, M. le Président. D'abord, je dois
dire qu'à titre de député du comté de l'Acadie je
suis heureux d'intervenir aujourd'hui dans le cadre de cette interpellation sur
les politiques d'immigration puisque j'ai le privilège de vivre dans un
comté où il y a une proportion de l'ordre de 33 % d'allophones.
Je suis donc très honoré de pouvoir témoigner que ces
néo-Québécois, venus de culture et de tradition
très différentes des nôtres, constituent pour le
Québec un apport extraordinaire. Si, dans un des salons voisins, on
discute de l'avenir constitutionnel et politique du Québec, je crois que
nous sommes tous d'accord, ce matin - le gouvernement et l'Opposition - pour
dire que nous discutons, peut-être plus essentiellement, de la survie de
notre société.
Si l'apprentissage du français demeure, pour les membres des
communautés culturelles qui ne connaissent pas déjà cette
langue, la principale voie d'intégration à la
société québécoise, le gouvernement libéral
a, par contre, mis en oeuvre tout un ensemble de mesures pour leur assurer une
place égale dans tous les domaines de la vie de notre
société. En décembre 1986, le gouvernement libéral
adoptait la Déclaration du Québec sur les relations
interethniques et interraciales. Cette Déclaration, garantissant
l'égalité des chances pour tous les citoyens, a été
suivie de mesures concrètes dont l'une des plus importantes est le
Programme d'accès à légalité dans la fonction
publique pour les minorités visibles et les membres des
communautés culturelles de langue maternelle autre que française
ou anglaise. Le gouvernement libéral entend réserver 12 % de
toutes les embauches permanentes aux Québécois et
Québécoises issus des communautés culturelles; l'objectif
ultime étant d'assurer une représentantion de l'ordre de 9 % des
Québécois des communautés culturelles dans toutes les
catégories d'emploi de la fonction publique, ce qui correspond, de fait,
à leur disponibilité sur le marché du travail. Pour ce qui
est des entreprises privées, il est important de signaler qu'en avril
1989 le gouvernement libéral a mis en place un programme d'obligation
contractuelle. Ce programme oblige les entreprises privées de 100
employés et plus, à but lucratif, qui obtiennent des contrats ou
des subventions gouvernementales de 100 000 $ et plus, à établir
un programme d'accès à l'égalité pour les
minorités visibles. Dans le même esprit, le ministère des
Communautés culturelles et de l'Immigration, de même que la
Fédération professionnelle des journalistes du Québec, ont
mis en place un programme novateur appelé Nouveaux Visages. Partant du
constat d'une sous-représentation des membres des communautés
culturelles et plus particulièrement des minorités visibles dans
les médias francophones du Québec, ce programme vise à
assurer aux journalistes issus des communautés culturelles une
possibilité de stage professionnel dans les médias
québécois.
L'intégration harmonieuse des membres des communautés
culturelles interpelle non seulement le ministère des Communautés
culturelles et de l'Immigration mais tout le gouvernement. Afin de jouer son
rôle horizontal, le ministère des Communautés culturelles
et de l'Immigration a mis en place, au printemps 1989, un réseau de
répondants dans les cabinets politiques, dans les ministères et
les organismes gouvernementaux, et ce dans le but de sensibiliser tous les
intervenants administratifs et politiques à la réalité
continue de l'immigration et des communautés culturelles. Comme
l'intégration est un processus de réciprocité, il faut
également que la société québécoise et ses
institutions acceptent de s'ouvrir à cette diversité. Dans cette
optique, le 30 octobre dernier, l'Assemblée nationale a adopté
une motion sur la Semaine interculturelle nationale qui sera désormais
soulignée annuellement au Québec. Cette semaine aura pour but de
signaler plus particulièrement les réalisations méritoires
accomplies par des Québécois et des Québécoises de
communautés culturelles et de reconnaître l'effort d'ouverture
dont font preuve différents secteurs d'activité de la
société d'accueil.
Il serait important, M. le Président, de signaler que le
gouvernement libéral a également mis en place toute une
série de mesures ou d'interventions plus spécifiques à
certains ministères. Pensons seulement aux Services de santé et
services sociaux où, découlant du rapport Sirros, un nombre
important de projets sont maintenant en voie de réalisation. Ce rapport
vise à prendre en considération la dimension interculturelle dans
tous les programmes du ministère de la Santé et des Services
sociaux. Sur le pian scolaire, plusieurs mesures ont été mises en
place pour soutenir l'intégration des élèves des
communautés culturelles et assurer l'éducation interculturelle de
l'ensemble de la clientèle scolaire. Au niveau de la
sécurité publique, le ministère a créé un
comité consultatif sur les relations interculturelles et sociales qui
doit conseiller le ministre sur les actions à
entreprendre dans ce domaine. Enfin, soulignons qu'au ministère
des Communications, et plus particulièrement à Montréal,
on a fait des efforts énormes pour faciliter un meilleur accès
à l'information concernant les divers services et programmes
gouvernementaux et ce, dans le but de mieux répondre aux membres des
communautés culturelles.
Je pourrais citer beaucoup d'autres exemples, M. le Président,
mais je crois que ces exemples démontrent clairement la volonté
du gouvernement libéral d'agir en vue d'appuyer ce cheminement des
Québécois et des différentes communautés
culturelles vers leur pleine participation à la société
québécoise et de leur permettre d'apporter toute la contribution
dont ils sont capables à la vie de notre société.
Je suis tout à fait confiant que le gouvernement continuera
d'accentuer sa priorité et ses efforts dans ce domaine. Merci.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup, M. le
député de l'Acadie. M. le député de Mercier, je
crois.
M. Gérald Godin
M. Godin: Oui, M. le Président, une question à la
ministre qui contredit un peu ses propos de tout à l'heure, ses propos
lénifiants, ainsi que ceux de son collègue, le
député de Richelieu. On a reçu un communiqué de
gens, qui souhaitent, les investisseurs immobiliers du Québec, qu'il y
ait un afflux supplémentaire d'investisseurs de Hong Kong ou de
n'importe où dans le monde. Et, là, ils nous apprennent que le
ministère ou la ministre a réduit le quota d'entrevues par mois
à 65 entrevues par mois à Hong Kong et à 160 à
Montréal. Donc, voilà une décision de la ministre et du
ministère qui contredit carrément ses propos et qui laisse croire
qu'au fond, maigre qu'elle dise qu'elle tient beaucoup à avoir des
immigrants investisseurs, le comportement du ministère est à
l'effet contraire.
Alors, j'aimerais bien, M. le Président, que la ministre nous
dise quelle est la logique derrière une telle décision et qu'elle
s'en justifie, puisque l'interpellation a lieu uniquement pour ça,
qu'elle justifie ses comportements que le milieu trouve injustifiables,
inqualifiables ou comme ne devant pas exister. C'est ma question à la
ministre, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le
député. Mme la ministre.
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je pense que le
député de Mercier fait référence à un
communiqué de presse qui a été émis par
l'Association des consultants. Je dois tout simplement souligner, au
départ, que, nous, du ministère, nous faisons de l'immigration,
tandis que les consultants font des affaires. Je dois vous souligner que,
contrairement à ce qui est mentionné, le gouvernement a
finalement ajouté, a porté de 8 à 12 le nombre de
conseillers économiques qui sont attachés à la Direction
des services aux gens d'affaires. Notre bureau, entre autres, à Hong
Kong, est un des plus gros bureaux pour recruter, justement, les immigrants
investisseurs qui veulent venir au Québec, parce que, comme vous le
savez, en 1997, Hong Kong sera rétrocédée à la
Chine et, à ce moment-là, ces immigrants investisseurs veulent
quitter Hong Kong le plus rapidement.
Je dois aussi vous dire que nous avons restructuré les services
offerts actuellement à la clientèle et que nous n'aurons pas
moins d'immigrants investisseurs, c'est-à-dire que nous n'aurons pas
moins de clientèle cette année comparativement à
l'année dernière. Notre clientèle sera stable.
Cependant, ce qui est arrivé à Hong Kong, c'est que nos
conseillers ont fait, au cours des six premiers mois, les trois quarts des
niveaux de sélection qui leur étaient alloués et, en plus
de ça, c'est que le gouvernement fédéral, actuellement,
prend, à Hong Kong, tout près de deux ans à émettre
les visas. Et il semblerait, au moment où on se parle, que ces 24 mois
seraient maintenant rendus à 30 mois. Donc, le Québec a dû
ralentir, pour un certain temps, d'ici à la fin de l'année, ses
entrevues de sélection pour ne pas, non plus, alourdir et ne pas
créer de faux espoirs à ces gens étant donné que
ça prend maintenant tout près de 30 mois avant que l'on puisse
émettre les visas à Hong Kong.
Je dois vous dire que nous faisons tout pour que ces gens puissent venir
s'établir au Québec et non seulement s'établir, mais
investir au Québec. J'ai eu aussi l'occasion, lorsque je suis
allée à Hong Kong, de passer un message très important
afin que ces immigrants investisseurs ne se servent pas du Québec comme
un tremplin, mais bien investissent au Québec et demeurent au
Québec, puisque nous faisons de l'immigration. (10 h 15)
A mon retour, j'ai aussi annoncé une quantité de mesures
pour aider ces immigrants investisseurs à s'établir au
Québec et j'ai aussi, pour répondre... Peut-être, tout
à l'heure, je n'ai pas terminé ma réponse, M. le
Président, sur la question des immigrants investisseurs. Je dois vous
dire qu'en plus de la période transitoire que le Québec a
réussi à obtenir, et comme je le mentionnais tout à
l'heure, c'est sûr que j'aurais préféré obtenir gain
de cause sur tous les points, mais nous avons obtenu cette période
transitoire de 18 mois qui est absolument essentielle pour les immigrants
investisseurs, pour conserver notre programme d'immigrants investis-
seurs. Aussi, le gouvernement fédéral, conscient de la
possibilité qu'en modifiant la réglementation sur le programme
d'immigrants investisseurs, il y ait déversement de la clientèle
vers le programme entrepreneur, a accepté, à notre suggestion, de
créer un comité mixte pour étudier plus
sérieusement les conséquences de cette nouvelle
réglementation sur le mouvement des investisseurs et des
entrepreneurs.
Donc, dans un certain sens, M. le Président, bien sûr que
j'aurais préféré avoir gain de cause sur tous les points,
mais je suis satisfaite parce que nous avons pu préserver l'essentiel de
notre programme. Les intérêts économiques supérieurs
du Québec étaient importants et c'est ça qui a
guidé finalement notre action. Dans ce sens, je pense qu'en
préservant l'essentiel, ça nous permet de préserver notre
programme d'immigrants investisseurs et on ose espérer que nous pourrons
aussi avoir autant de succès qu'on en a eu dans les années
antérieures. Et je peux assurer le député de Mercier que
nous ne sélectionnerons pas moins, cette année, d'immigrants
investisseurs que nous ne l'avons fait l'année dernière.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. M. le
député de LaFontaine.
M. Jean-Claude Gobé
M. Gobé: Merci, M. le Président. Comme je l'ai
mentionné tout à l'heure, lorsque malheureusement mon temps fut
écoulé et que vous m'avez interrompu, un des principaux
défis qui attendent la société québécoise,
le Québec, dans les prochaines années, c'est bien entendu
l'intégration de ces immigrants dans notre société.
Lorsqu'on regarde le profil du nouvel immigrant qui arrive au Québec,
force est de constater que ce n'est plus le même profil de l'immigrant
qui venait chez nous, - j'en suis un d'ailleurs moi-même - il y a une
quinzaine, une vingtaine ou une trentaine d'années. On voit que ce sont
des gens qui viennent de régions ou de pays totalement
différents. Ils peuvent venir du Sud-Est asiatique, des Antilles, de
l'Amérique centrale, et cela nous amène et nous oblige à
réfléchir sur une nouvelle réalité, de nouvelles
manières de vivre de ces gens-là, de les intégrer avec
nous et de faire en sorte qu'ils deviennent des citoyens
québécois, canadiens à part entière.
Je crois que le ministère a, bien entendu, deux choses à
faire: d'abord, je le disais et je le répète, il a un rôle
très important au niveau de la sélection. Je crois que les
critères de sélection doivent correspondre à une
réalité économique et sociale du Québec, parce que
je crois qu'il serait illusoire de penser régler les problèmes
que nous connaissons au niveau démographique d'une manière
harmonieuse et intéressante pour les Québécois, mais aussi
pour ces immigrants-là qui vont venir chez nous, parce qu'une fois
qu'ils sont là, on les accueille pour qu'ils soient heureux et non pas
pour les rendre malheureux. Je crois qui! serait illusoire de penser que cela
va se faire sans heurt si nous ne prenons pas un certain nombre de mesures.
Alors, je crois qu'on devrait, pour le maintien de l'identité
culturelle francophone, française du Québec, mettre là
aussi un certain nombre de mesures - et je crois que le ministère, de ce
côté-là, fait quand même certains gestes, il y a
certainement des améliorations à apporter, des choses à
bonifier - entre autres, mettre l'accent sur le recrutement des immigrants
francophones, autant que possible des pays de la communauté francophone.
On voit qu'on a déjà signé avec la France une entente qui
vise à favoriser l'établissement au Québec de
ressortissants français dont la formation et l'expérience
correspondent aux besoins et aux moyens de notre société,
ça, à court, à moyen et à long terme, bien
entendu.
De notre côté, si on veut attirer cette qualité
d'immigrants, nous aurions peut-être quelques autres gestes à
faire. Dans trop de domaines encore, il y a des chasses gardées au
niveau de l'emploi, au niveau de certaines professions dites libérales,
les médecins, les avocats, des employés de la construction
où l'on voit qu'un certain nombre d'immigrants... Je me souviens du cas
de ce médecin vietnamien qui lavait la vaisselle dans un restaurant du
centre-ville alors qu'il avait une quinzaine d'années
d'expérience de médecine chez nous. Je crois qu'il y aurait
peut-être là une manière de favoriser l'immigration et
d'aider les régions en même temps. Peut-être que nous
pourrions recruter un certain nombre de professionnels qui, désirant
venir s'établir au Québec, accepteraient d'aller s'établir
en régions et pourraient exercer leur profession, car ça
correspond à une réalité, nous manquons en effet dans
certaines régions de médecins québécois ou
montréalais. Les jeunes, en particulier, ont beaucoup de
difficultés, les jeunes en particulier, à vouloir aller
s'établir en périphérie, du moins, plus qu'en
périphérie, dans les régions un peu plus
éloignées des grands centres. Je crois qu'il y a là
peut-être moyen d'harmoniser une immigration de qualité et les
besoins des régions car, ne nous leurrons pas, l'immigration, en grande
partie, va s'établir dans la région de Montréal.
Lorsqu'on voit les chiffres qui ont été
dernièrement annoncés par le gouvernement fédéral,
on parle d'à peu près 250 000 immigrants au Canada; on va dire un
quart pour le Québec. Disons que 50 000 personnes par année ne
serait pas un chiffre jeté en l'air. Je m'inquiète, à
juste titre, des moyens que nous allons mettre en oeuvre pour intégrer
ces 50 000 personnes dans la région de Montréal et on sait que,
là encore, ils ne vont pas à Westmount, ils ne vont pas à
ville Mont-Royal; ils vont dans l'est de Montréal,
dans Saint-Henri car un immigrant, en général, n'arrive
pas avec des moyens pour aller habiter dans ces villes comme Outremont ou
ailleurs. Ils vont dans les endroits les moins chers où le logement est
accessible et où les politiques d'habitation de la ville font que ces
logements sont là. Je crois que le ministère a un énorme
défi car on se rend compte que si ces immigrants vivent en trop fortes
concentrations, l'intégration va se faire à rebours et je ne vois
pas comment 75 % ou 60 % d'immigrants dans un même quartier pourraient
s'intégrer à la société québécoise.
Je crois que c'est plutôt un peu le contraire qui pourrait se
réaliser.
Je crois que nous avons là une énorme
responsabilité, comme gouvernement, dans ce domaine car nous pourrions
nous réveiller, dans quelques années, avec des problèmes
qui auraient été engendrés, avec bonne volonté,
pour régler une situation démographique, pour venir en aide
à des gens qui sont mal pris dans leur pays, qui sont des
réfugiés et que nous devons aider, comme démocrates et
comme citoyens. Nous pourrions créer des situations qui engendreraient,
pour la société québécoise et pour ces
gens-là aussi, d'autres difficultés et d'autres problèmes,
comme on peut le voir dans d'autres pays du monde où les gens n'ont pas
prévu ou n'ont pas planifié ce genre de
phénomène.
Alors, je crois que c'est là un des grands défis du
ministère. À ce titre, d'ailleurs...
Le Président (M. Doyon): Je dois vous interrompre, M. le
député.
M. Gobé: Oui, je termine, M. le Président. Deux
mots en terminant...
Le Président (M. Doyon): Oui, vous avez
dépassé votre temps.
M. Gobé:... parce que mon intervention n'aurait pas de
sens si je ne pouvais pas terminer.
Le Président (M. Doyon): Oui, mais il fallait y penser
avant.
M. Gobé: Je crois que ça ferait manquer aux
auditeurs qui nous écoutent nombreux, probablement, maintenant, et pour
l'Opposition, le but de mon intervention. Le gouvernement va présenter,
bientôt, un énoncé de politique sur l'immigration. Celui-ci
permettra de définir de manière plus précise non seulement
les orientations que devrait prendre le gouvernement à l'égard de
l'immigration et des immigrants, mais aussi de l'intégration. Je
souhaite que l'Opposition puisse prendre connaissance de cet
énoncé très rapidement et que cet énoncé,
aussi, contienne des mesures qui vont dans le sens...
Le Président (M. Doyon): Très bien.
M. Gobé:... de ce que j'ai énoncé
auparavant.
Le Président (M. Doyon): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Bien, merci, M. le Président. D'abord,
j'aurais trois commentaires et quelques questions, mais j'en aurais
peut-être une toute première à la suite de
l'énoncé des propos du député de...
Le Président (M. Doyon): LaFontaine.
Mme Blackburn:... Lafontaine. Quand sortira cet
énoncé de politique et est-ce que cet énoncé de
politique contiendra des mesures visant à régionaliser
l'immigration? Si c'est un enrichissement pour le Québec, ce n'est pas
encore évident pour les régions parce qu'on ne les a pas souvent
et, quand on les a, on ne les conserve pas beaucoup. Il faudrait voir
également si vous avez des données sur le taux de
rétention des immigrants parce qu'il ne s'agit pas juste d'en recevoir 5
% de plus que notre pourcentage relatif de la population canadienne, mais
encore faut-il les retenir. Ça, ça ne me semble pas
évident et j'aimerais savoir si vous avez des données sur la
capacité de rétention des immigrants lorsqu'ils s'installent en
régions. Souvent, après quelques années, quelques mois,
ils s'en viennent à Montréal, mais j'ai la conviction que ceux
qui ont commencé à connaître le Québec par les
régions s'y attachent plus facilement.
La ministre nous disait tout à l'heure... Je veux revenir
brièvement sur les négociations Québec-Ottawa. La ministre
nous dit, et je la crois: Je n'ai pas encore jeté la serviette. Je lui
dis bravo, mais j'ai deux questions. Elle va la tenir encore combien de temps
et, dans l'hypothèse ou elle devra jeter la serviette, est-ce qu'elle a
envisagé des alternatives? Parce qu'on a une situation, remarquons-le,
je dirais, quasiment catastrophique. Je ne veux pas jouer aux oiseaux de
malheur, mais vous le savez. On manque de budget et on est incapables d'assurer
l'intégration des immigrants à la majorité francophone. Si
le déclin démographique doit nous inquiéter, le glissement
trop grand des immigrants vers la minorité anglophone au Québec
est presque aussi inquiétant que le déclin démographique
par rapport à l'avenir et à l'identité
québécoise. Je pense que vous le savez ça aussi et,
ça, ça ne m'apparaît pas évident.
À présent, brièvement, sur le Programme des
investisseurs immigrants, vous nous dites: Les conseillers font des affaires et
le ministère fait
de l'immigration. Et vous avez augmenté de 8 à 12 le
nombre de consultants économiques. J'ai toujours entendu dire que le
Parti libéral favorisait la libre entreprise. Et s'il y avait là
quelque chose de particulièrement intéressant et, me semble-t-il,
efficace, c'était ces entreprises privées de conseillers qui,
effectivement, allaient chercher des investisseurs. Par ailleurs, les
directives, les nouvelles règles d'Ottawa en matière de soutien
ou d'encouragement aux immigrants investisseurs viennent pénaliser le
Québec parce que moins compétitives. Et, je pense que vous le
savez également, du fait qu'on a augmenté le niveau
d'investissements de 250 000 $ à 350 000 $, il y a des investisseurs qui
vont glisser davantage vers l'Australie et la Nouvelle-Zélande; je pense
que la ministre, également, le faisait remarquer. On finit toujours par
constater que, quand ça va bien, quand le Québec a le
génie de mettre en place des mesures intéressantes, le
fédéral vient toujours, mais toujours les contrer. Il va falloir
qu'à un moment donné on finisse par en tirer les conclusions qui
s'imposent.
Par rapport a l'intégration des immigrants, je fais juste relire
brièvement un paragraphe d'un editorial paru dans Le Soleil du 29
octobre 1990, sous la signature de M. Raymond Giroux qui disait, parlant
d'immigration: "Les francophones doivent aussi changer leur attitude, souvent
xénophobe. Si la loi 101 francise les nouveaux immigrants, elle n'a pas
rendu la majorité plus perméable aux nouvelles influences." Et il
disait: "L'intégration, elle, sera réussie le jour où les
habitudes électorales des allopho-nes suivront celles des francophones,
partageant leurs votes également entre les deux grands partis." Ce que
je partage, parce que c'est une mesure d'évaluation de
l'intégration à la majorité francophone qui est
particulièrement intéressante. Et on constate que même les
Français d'origine ne sont pas nécessairement
intégrés, çn ce sens-là, aux grandes tendances.
Mais, peu importe, je ferme là-dessus.
Je voudrais aborder deux questions très particulières,
celles des revendicateurs de statut et des programmes COFI, leur
capacité d'accueil. Les revendicateurs en attente de statut de
réfugiés, au Québec, au 1er mars 1990,
représentaient 52 237, en incluant leurs dépendants - ça
fait cinq minutes? Alors, la question est simple. Comme il y a seulement 1 900
000 $ du fédéral, destinés aux revendicateurs de statut,
comment va ce dossier? Combien de dossiers auront été
réglés cette année? Et comment ces revendicateurs de
statut s'intègrent-ils à la majorité?
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi. Mme...
Mme Blackburn: Je reviendrai, M. le Président, avec
d'autres questions touchant les COFI et la francisation.
Le Président (M. Doyon): Oui, si le temps nous le permet,
Mme la députée, puisqu'il est déjà 10 h 30. Mme la
ministre, vous avez la parole.
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: Vous comprendrez, M. le Président,
que je ne pourrai pas répondre en cinq minutes à toutes les
questions qui m'ont été adressées par la
députée de Chicoutimi. Entre autres, elle est revenue sur la
question des immigrants investisseurs, les revendicateurs de statut, l'entente
Canada-Québec et, rapidement, sur les COFI. Je vais répondre
à sa première question concernant les immigrants investisseurs,
pour compléter cette réponse. Je dois vous dire que les
consultants, ce sont des gens qui font du recrutement d'immigrants
investisseurs; et nous n'avons rien contre ça, au contraire. Sauf que ce
qui est important pour nous, c'est que ce recrutement soit fait d'une
façon que ça puisse répondre aux besoins
économiques du Québec, mais aussi aux besoins
démographiques du Québec. Et il faut absolument, aussi, que ces
consultants-là travaillent dans un encadrement, qu'il y ait certaines
balises. Il ne faut pas, non plus, que ces personnes qui viennent au
Québec perdent confiance envers les Québécois et le
gouvernement du Québec. Donc, pour nous, ce qui est important, c'est
qu'il faut sélectionner, bien sûr, en fonction de nos
critères. Il faut aussi que les investisseurs investissent au
Québec, qu'ils demeurent au Québec, qu'on les retienne au
Québec. (10 h 30)
Alors, ce sont les grands objectifs que nous voulons atteindre, en
termes d'immigrants investisseurs. C'est pourquoi j'ai annoncé, lorsque
je suis revenue de mon voyage, certaines mesures, entre autres, leur permettant
de mieux s'intégrer, des nouveaux services qu'on pourra leur offrir afin
qu'ils puissent mieux s'intégrer, entre autres, des séances
d'information, des séminaires traitant des aspects techniques,
juridiques, réglementaires et fiscaux, entre autres, en marketing, en
collaboration avec le ministère de l'Industrie et du Commerce, et aussi
faire en sorte que ces personnes puissent travailler avec les leaders
économiques du Québec, soit les chambres de commerce, les
commissaires industriels des différentes régions, pour être
capables de développer un réseau et non seulement de les
accueillir, mais de voir à ce qu'ils investissent véritablement
au Québec.
En ce qui concerne l'entente Canada-Québec, je dois dire à
la députée de Chicoutimi que - je le mentionnais - les enjeux
sont trop grands et que dans l'intérêt du Québec, dans
l'intérêt de l'ensemble de la population du
Québec, je n'ai pas le goût de lancer la serviette
immédiatement. C'est trop important. Et j'interpelle à nouveau
les personnes qui peuvent nous donner le coup de main, entre autres, les
députés conservateurs qui peuvent encore intervenir auprès
du premier ministre pour faire infléchir sa décision afin que
l'on puisse signer le plus rapidement possible l'entente Canada-Québec.
Je dois quand même rassurer la députée de Chicou-timi que,
quoiqu'il advienne, le Québec va prendre ses responsabilités.
J'aurai à annoncer prochainement une politique d'immigration et
d'intégration et, à ce moment-là, vous serez en mesure de
constater les différentes orientations du gouvernement en matière
d'immigration et d'intégration. Mais je dois vous dire que, quoiqu'il
advienne, nous allons prendre nos responsabilités et on sera en mesure
de faire connaître cette politique d'immigration et
d'intégration.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. M. le
député de l'Acadie.
M. Yvan Bordeleau
M. Bordeleau: Je dois dire que je suis un peu surpris ce matin de
voir que l'Opposition a demandé une interpellation sur la politique
d'immigration au Québec, d'autant plus que ce dossier, comme on l'a
déjà accepté de part et d'autre, est un dossier
prioritaire pour le gouvernement libéral actuel et ce, depuis que ce
gouvernement a pris les rênes du pouvoir en 1985. Il est important de
signaler un certain nombre de chiffres qui vont nous permettre peut-être
de mieux comprendre l'importance qu'accorde le gouvernement actuel à
toute la problématique de l'immigration.
D'abord, il est important de signaler que les crédits
budgétaires du ministère ont, au cours des trois dernières
années, augmenté de 83 %. Pour ce qui est du niveau
d'immigration, si on compare la situation en 1985 où le niveau
était de l'ordre de 15 000, il faut constater qu'en 1989 celui-ci se
situe à 34 000, ce qui manifeste clairement l'ouverture qu'a toujours
eue le gouvernement libéral face à l'apport de l'immigration dans
l'avenir de notre société. Mais, pour bien accueillir ces
nouveaux arrivants et leur permettre de s'intégrer, il a fallu mettre de
l'avant aussi un certain nombre de mesures d'intégration, et ici je me
réfère à plusieurs engagements électoraux de 1985
et de 1989 qui ont été, en bonne partie,
réalisés.
Si les députés du Parti québécois parlent
souvent de la francisation, c'est peut-être, au fond, pour essayer de
rattraper le temps perdu. Si on regarde avant 1987, il n'y avait pas au
Québec de programmes québécois de francisation. C'est en
1987, avec le gouvernement du Parti libéral, que les premiers programmes
québécois de francisation ont été mis en place et
les budgets n'ont cessé d'augmenter depuis ce moment. Tout à
l'heure, on parlait des COFI. Il faut peut-être souligner aussi que c'est
en 1981 que le COFI de Trois-Rivières a été fermé,
sous le règne du Parti québécois. En 1981
également, le Parti québécois publiait un volume qui
s'intitulait: "Autant de façons d'être Québécois"
et, dans cet écrit, on mettait un accent sur la nécessité
d'ouvrir la fonction publique aux Québécois des
communautés culturelles. C'était évidemment une belle
promesse, mais comme, souvent, les moyens n'ont pas accompagné cette
promesse. Comme la pensée magique n'a pas agi, il faut constater qu'en
1985 les résultats étaient assez faibles au moment où le
Parti libéral est arrivé au pouvoir. Alors, on s'est
engagé, en 1985, à appliquer la section 3 de la Charte des droits
de la personne et on l'a fait. On s'est engagé à créer en
1989 un véritable programme d'accès à
l'égalité. On n'a pas tardé à réaliser cet
engagement; l'hiver dernier, le programme était lancé. Pour
réussir l'intégration des immigrants, il ne faut pas juste faire
des discours, il faut aussi poser des gestes et je pense que le gouvernement
libéral l'a fait de façon très éloquente au cours
des dernières années.
Une autre comparaison. En 1981, le gouvernement du Parti
québécois avait modifié la loi du ministère pour
lui confier la responsabilité de planifier et de coordonner les
politiques relatives à la participation des communautés
culturelles à la vie nationale. Encore là, un objectif
intéressant, mais peu de moyens mis en place pour le réaliser.
Les groupes des communautés culturelles ont eu souvent à se
plaindre, et avec raison, que le ministère des Communautés
culturelles et de l'Immigration était devenu une espèce de
ghetto. Chaque fois que ces groupes allaient frapper à la porte d'autres
ministères, on les référait automatiquement au
ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration, comme
si c'était le seul ministère qui pouvait s'occuper d'eux.
D'ailleurs, lors du colloque du Parti québécois dans les
dernières semaines, ce fait a été mentionné par les
membres des communautés culturelles.
Le gouvernement, comme je l'ai mentionné tout à l'heure
dans une intervention précédente, a mis en place une série
de moyens pour assurer cette coordination gouvernementale et on en voit
maintenant les résultats. Par exemple, aux Affaires culturelles,
à la Régie du logement, à la Régie de l'assurance
automobile et au Tourisme, l'appareil gouvernemental commence à peine
à découvrir la réalité des communautés
culturelles. Il aura fallu attendre 10 ans après que le mandat ait
été donné au Parti québécois. Le
gouvernement du Parti québécois a peut-être beaucoup
parlé à ce moment-là, mais il a relativement peu agi.
En 1989, nous nous sommes engagés également à
rendre plus souples les programmes de francisation de façon à les
rendre plus accès-
sibles aux immigrants qui ont des horaires chargés. Soulignons
ici les ententes qui ont été signées dans les
dernières années avec certaines commissions scolaires pour que
celles-ci offrent en sous-traitance des cours de français aux parents
des enfants allophones qui fréquentent déjà leur
école.
M. le Président, on aurait pu continuer et parler
également de l'augmentation des certificats de sélection
émis à Paris qui étaient, en 1985, de 1613 et, en 1989, de
5050. Il y a eu un accroissement de 313 %. Il y aurait beaucoup d'autres choses
à dire sur ce sujet, mais je pense que le bilan du Parti libéral
et du gouvernement libéral est un bilan très positif et, dans ce
sens-là, l'énoncé de politique qui sera
présenté dans les prochaines semaines, va confirmer ces
orientations et cette ouverture du gouvernement libéral vers l'apport de
l'immigration et des communautés culturelles.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député
de l'Acadie. Mme la députée de Chicou-timi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Oui, M. le Président, je ne commencerai pas
une guerre de chiffres non plus qu'une guerre de statistiques, qui ne sont pas
toutes justes, il faut le rappeler. Rappelons au moins une chose. La
très grande majorité des programmes de soutien aux immigrants ont
été créés et mis sur pied par le gouvernement du
Parti québécois. Je pense que la vérité a ses
droits, comme le dirait un de vos collègues, et je pense que ça,
il fallait le dire. Par ailleurs, quant à l'intégration des
immigrants à la fonction publique, ça fait cinq ans que ce
gouvernement est là, il ne peut quand même pas toujours se
retourner en arrière pour savoir ce qu'on faisait. Il faudrait
peut-être que vous fassiez quelque chose.
Mais cela dit, parce que je ne veux pas m'en aller dans cette
direction-là, je voudrais ramener une question que j'ai posée. Il
y a 52 237 personnes en attente de statut de réfugié au
Québec. Où sont-elles, ces personnes, dans la machine et combien
de dossiers aura-t-on traités cette, année et depuis le 1er mars
1990 en particulier?
L'autre remarque, parce que la francisation constitue
l'élément fondamental d'intégration à la
communauté, alors vous reconnaissez ça et nous reconnaissons
ça. Que faites-vous avec la situation suivante: les centres
d'orientation et de formation des immigrants couvrent 40 % des besoins de la
clientèle. Alors, 20 000 immigrants. Vous en avez 8000 qui ont
effectivement accès à ces programmes, donc que faites-vous des 12
000 autres? La ministre soulevait tout à l'heure, avec beaucoup
d'à-propos et de justesse, le problème que posent les immigrants
qui parlent anglais, parce qu'on ne peut pas non plus les recevoir, alors il ne
faut pas se poser trop longtemps la question pour savoir à quelle
communauté ils s'intègrent.
Par ailleurs, il y a des données touchant les transferts
linguistiques. Ceux qui ne parlent ni le français ni l'anglais
continuent à parler leur langue maternelle à la maison. On
constate que, parmi ceux qui font le transfert linguistique et qui adoptent une
des deux langues, le français ou l'anglais, à la maison, il y a
deux fois plus de personnes qui choisissent l'anglais. Ça, ce sont des
chiffres, des réalités. Là, on ne parie pas de discours,
on parie de vraies données. Je me dis: Qu'est-ce qu'on fait avec
ça? Qu'est-ce qu'on fait avec les personnes qui sont en attente d'un
statut de réfugié? La ministre peut-elle nous dire - parce que
là, je prends une de ses déclarations qui a paru dans La
Presse du mercredi, 26 septembre 1990, touchant l'affaire Vesselin Petkov,
qui est un biologiste, je pense, un docteur en biologie, qui ne trouvait pas de
place pour avoir des cours. Et la ministre disait, à l'époque:
"Voilà quatre mois que nous adressons vainement des demandes au
fédéral. Cela illustre bien la nécessité pour le
Québec de contrôler l'ensemble du dossier de l'intégration
des immigrants, ressources comprises", ce que je partage avec elle, mais
j'irais plus loin.
Et elle ajoutait, et ça, ça m'a préoccupée
parce que ça ne vient pas de n'importe qui, ça vient de la
ministre, que cette situation entraîne une déperdition de 50 % des
gens inscrits sur la liste des PNFE. "Après six mois d'attente, ils
disent avoir perdu le goût d'apprendre le français". Moi, je
voudrais savoir combien on en a perdu de façon définitive? Est-ce
qu'il y a des suivis là-dessus qui nous permettent de confirmer les
données de la ministre, ce qui serait totalement, parfaitement
catastrophique? Vous l'admettez avec moi parce que là, on ne parie plus
de petites données. Ça se parie par dizaines de milliers de
personnes.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi. Je signale que cette interpellation tire
à sa fin. Il reste 10 minutes à la ministre pour donner la
réplique, suivi d'un dernier 10 minutes par le représentant de
l'Opposition officielle, de façon à ce que nous terminions
à 11 heures. Mme la ministre, pour 10 minutes.
Conclusions Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: J'aurais aimé pouvoir répondre
plus spécifiquement, mais étant donné que c'est la
conclusion, je vais essayer de faire un tour assez rapide. Au départ, M.
le Président, je voudrais, bien sûr, remercier l'Opposition qui a
donné l'occasion de démontrer
à la population tout le travail accompli par le gouvernement
libéral depuis 1985, en matière d'immigration. Je pense que les
actions ne manquent pas. Deux heures, bien sûr, on se rend compte que ce
n'est pas suffisant pour pouvoir aborder tous les sujets en profondeur. On y va
de façon très superficielle, parce que c'est difficile d'entrer;
c'est tellement technique et tellement important, ce sujet, ce dossier, qu'on
ne peut pas, dans deux heures, toucher tous les points en profondeur.
Alors, pour résumer, j'essaierai de regrouper en trois blocs nos
principales actions. Entre autres, en matière de sélection, je
dois vous dire que l'augmentation des indépendants est passée de
35 % en 1985, à 58 % en 1989. Et je dois vous dire, pour répondre
à la question sur la rétention, que la proportion des immigrants
toujours présents cinq ans après leur admission, si je me fie,
par exemple, au recensement de 1971, au Québec, cette proportion
était de 63 %, et au Canada de 72 %. Ce qui signifie un écart
d'environ neuf points. En 1986, au Québec, cette proportion était
de 70 % par rapport à 82 % au Canada, donc 12 points.
On voit quand même que de plus en plus, maintenant, nous retenons,
depuis 1970, entre autres, nos immigrants. Et quant aux transferts
linguistiques, chez les immigrés de souche plus récente,
c'est-à-dire ceux qui sont arrivés après 1971, les
transferts favorisent désormais le français à plus de 50
%. La plupart de ces jeunes immigrés ont commencé leur
scolarisation après 1976. Et ceux d'entre eux qui ont effectué un
transfert linguistique, l'ont fait vers le français à 69 %. Or,
on voit que, de plus en plus, la loi 101 fait ses effets, donne ses effets, et
bien sûr que lorsque nous arrivent des immigrants, lorsque nous arrivent
des personnes qui ne parient ni le français ni l'anglais, c'est toujours
plus difficile d'imposer à une première génération,
c'est toujours un peu plus difficile... Cependant, nous comptons
énormément et nous mettons beaucoup d'espoir quant à la
deuxième et à la troisième génération et
nous allons tout faire pour que ces personnes puissent s'intégrer
à la société francophone.
D'ailleurs, je dois dire qu'au niveau de la francisation, comme mes
collègues l'ont mentionné, on a créé quand
même depuis 1987 deux programmes qui sont des programmes à temps
partiel, qui étaient pour une clientèle un peu spécifique.
Ça vise, entre autres, les femmes qui sont à la maison. Ça
concerne également les revendicateurs de statut de réfugié
qui n'avaient pas accès et qui n'ont pas accès aux cours dans
les... au PNFE. Mais, finalement, par le truchement de nos cours à temps
partiel, ces personnes peuvent maintenant suivre des cours de français.
Il faut admettre aussi que 51 % des budgets du ministère sont
alloués a des activités de francisation et que, par rapport
à 1985, il y a eu quand même une augmentation de 400 % de nos
budgets quant à la francisation. (10 h 45)
Bien sûr, je n'aborde pas tous les budgets qui sont alloués
au ministère de l'Éducation pour les jeunes enfants et aussi pour
l'éducation aux adultes. Vous vous souvenez que la semaine
dernière mon collègue du ministère de l'Éducation a
annoncé un montant supplémentaire de 3 000 000 $ pour, justement,
répondre à la clientèle qui était en attente de
cours de français. Je dois aussi vous dire que nous avons signé
des ententes avec certaines commissions scolaires pour permettre aux immigrants
de suivre des cours de français dans les écoles de leurs enfants
et ça vise davantage les femmes, par exemple, qui sont à la
maison et qui peuvent venir suivre des cours de français au moment
où leurs enfants sont à l'école. Nous avons aussi
créé un nouveau programme pédagogique dans les COFI pour
mieux encadrer l'enseignement.
Bien sûr que plus d'argent est nécessaire et, comme je le
mentionnais, c'est inadmissible que des listes d'attente soient
prolongées comme on le connaît actuellement. Et je dois vous dire
que le budget du gouvernement fédéral a été
diminué de 17 % par rapport à une augmentation de la
clientèle de 12 %. Alors, bien sûr, on se rend compte qu'il y a un
transfert vers les programmes québécois parce que, compte tenu
que ces personnes ne peuvent pas avoir accès à des cours de
français dans ce cours qui est payé entièrement par le
gouvernement fédéral mais administré par le gouvernement
du Québec, ces personnes n'ont pas accès. Elles vont vers
d'autres cours offerts par le Québec. Je suis intervenue auprès
de mon homologue et je dois vous dire que j'ai quand même senti une
certaine ouverture de sa part. Je pense qu'elle connaît bien les besoins
du Québec à ce niveau et j'ose espérer que je devrais
normalement avoir une réponse incessamment et possiblement cet
après-midi à ce sujet-là, concernant un budget
supplémentaire pour l'enseignement des cours de français dans le
programme PNFE donné dans les COFI.
Je dois vous dire aussi que, depuis 1985, nous avons créé
le Programme d'accès à l'égalité qui a
été annoncé à plusieurs reprises sous l'ancien
gouvernement mais, finalement, qu'on n'a pu réaliser. Je parle aussi de
la Déclaration du gouvernement sur les relations interethniques et
interraciales, le programme Nouveaux Visages pour donner une chance aux
minorités visibles de s'implanter dans les médias du
Québec, les réseaux des répondants aux niveaux politique
et administratif parce que nous pensons que l'immigration ce n'est pas
uniquement l'affaire du ministère de l'Immigration et des
Communautés culturelles, mais bien de l'ensemble de tous les
ministères du gouvernement.
Mon collègue, le ministre délégué aux
Communautés culturelles, a annoncé récemment la
Semaine interculturelle nationale qui aura lieu le printemps prochain,
et je dois vous dire que le ministère a l'intention de jouer son
rôle horizontal - commme je le mentionnais, ce n'est pas uniquement
l'affaire du ministère des Communautés culturelles et de
l'Immigration, mais bien de l'ensemble des autres ministères - a
l'intention, aussi, avec la réorganisation du ministère, de
vraiment jouer son rôle horizontal avec tous les autres
ministères.
Donc, bref, nous avons tenu nos engagements. La population nous a
marqué son appréciation en nous faisant confiance à
nouveau en 1989. Notre travail est loin d'être terminé. Il nous
faut obtenir, comme on l'a mentionné à plusieurs reprises au
cours de cette interpellation, la signature de l'entente Canada-Québec.
C'est important pour le Québec. Nous déposerons bientôt un
énoncé de politique qui proposera une nouvelle route à
suivre pour les années à venir. Avec l'augmentation du nombre
d'immigrants et le défi de l'intégration, nous avons besoin de la
collaboration de tous, de la collaboration des autres ministères, de la
collaboration des différentes villes, de la collaboration des leaders
économiques, socio-économiques, et aussi de toutes les villes qui
sont impliquées dans le processus de régionalisation.
Je n'ai pas eu le temps de l'aborder, mais la question de la
régionalisation fera partie de la politique, mais elle est
déjà... Le processus, comment pourrais-je dire, le suivi fera,
bien sûr, partie de la politique, mais nous avons déjà
annoncé l'ouverture de différentes directions régionales,
entre autres, dans la région de Sherbrooke, à Hull et à
Québec. Et il y aura aussi deux régions dans Montréal
même.
Alors, le but de l'ouverture de ces différentes régions,
c'est, bien sûr, de préparer la population, mais aussi de
préparer le terrain pour la venue de nouveaux immigrants. Nous voulons
travailler avec l'OPDQ, avec le ministère de l'industrie et du Commerce.
Nous voulons travailler avec les gens du milieu pour qu'ils puissent faire
aussi le portrait des besoins régionaux en termes de main-d'oeuvre
qualifiée, en termes d'investissements, en termes de sous-traitance,
pour être capables de faire la relation entre les besoins
économiques du Québec et la sélection que nous faisons
à l'étranger.
M. le Président, je ne sais pas s'il me reste encore un peu de
temps.
Le Président (M. Gobé): II vous reste une
quarantaine de secondes, Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Bon. Compte tenu de l'augmentation du nombre
d'immigrants, comme je le mentionnais, le défi de l'intégration
est très important. Nous avons besoin de collaboration; y compris, bien
sûr, celle de l'Opposition et je suis sûre que nous pourrons
l'obtenir, je sais, entre autres, que nous avons toujours obtenu la
collaboration du député de Mercier qui est le responsable du
dossier de l'immigration et je dois vous dire que, suite à mes
nombreuses visites dans les communautés, les communautés ont
beaucoup d'estime pour le député de Mercier.
En terminant, M. le Président, je dois vous dire que l'enjeu est
trop grand et que le défi est emballant et je pense qu'il faut le
relever ensemble. Merci.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme la
ministre. Et, sur ces bonnes paroles à l'égard du
député de Mercier que j'aperçois maintenant, si, M. le
député, vous voulez prendre la parole pour une période de
10 minutes qui clôturera la fin de cette commission.
M. Gérald Godin
M. Godin: Oui, M. le Président. Je me rends compte que,
malgré les promesses verbales de M. Mulroney et de M.Bourassa, les
projets, pour ne pas dire les rêves en couleur de la ministre, ce qui est
bien normal, parce qu'à ce ministère-là on ne peut
qu'espérer que le fédéral bouge dans la bonne direction et
on peut en fin de compte qu'attendre.
M. le Président, je peux vous dire que c'est
désespérant, quand on voit les besoins du Québec et la
lenteur du gouvernement fédéral, de continuer à vivre dans
ce système-là. C'est la raison pour laquelle il y a dans le salon
rouge une commission qui siège et qui ne fait que reprendre en d'autres
termes ce que je viens de dire. Alors qu'on avait annoncé que
l'immigration serait le prochain dossier réglé par Ottawa et
Québec, sur une base bilatérale après l'échec de
l'accord du lac Meech, je me rends compte que le Québec est en
pénitence dans le coin et que loin de vouloir lui faire des concessions,
on le punit, on l'écarté des ententes positives pour nos
immigrants futurs et actuels. Donc, on tourne en rond, Mme la ministre. Pour
avoir été dans ce ministère-là quelques
années, je peux vous dire qu'il n'y a rien de plus
désespérant que ce qui se passe avec les fonctionnaires du
gouvernement fédéral dans le ministère, parce que,
effectivement, on a l'impression qu'ils sont sourds, aveugles et qu'ils ne
comprennent rien à ce qu'on leur demande.
L'autre jour, je vous ai vue à la télévision vous
plaindre vous-même et invoquer peut-être même un peu le bon
Dieu. Vous avez dit: Mon Dieu, qu'ils ne comprennent rien! Effectivement. Donc,
le seul moyen, c'est de changer d'école, M. le Président. Quand
la direction de l'école dans laquelle on est ne comprend rien et nous
met en pénitence dans le coin parce qu'elle n'est pas contente de nous,
on change d'école. Ça m'est arrivé plusieurs fois dans ma
carrière d'étudiant. Mes collègues diraient: Vous voyez le
résultat aussi.
Des voix: Ha, ha, ha! Une voix: C'est bon.
M. Godin: Je déplore quand même que les efforts que
le Québec met pour trouver des solutions à ces problèmes
dans le domaine de l'immigration et des immigrants investisseurs risquent
d'être perdus. Souvent, d'ailleurs, le Québec fait des
expériences que d'autres provinces viennent chercher ici et appliquent
à leurs candidats. Elles viennent nous chercher non seulement nos
idées, mais notre nombre, notre quota de personnes que nous pourrions
recruter. Là, il s'agit pour la ministre et le ministère
d'être rapides pour compenser les pertes que nous font subir les autres
provinces. Mais je dois dire, par ailleurs, que la diminution du nombre
d'entrevues, par mois, décidée par le ministère et la
ministre ne peut pas contribuer à faire augmenter de façon
satisfaisante le nombre d'investisseurs venant des pays où il y a
beaucoup de fric, beaucoup de peurs aussi de fuite de capitaux,
nommément à Hong Kong et dans d'autres parties du monde que la
ministre connaît aussi bien que moi.
Donc, je suggère à la ministre de se battre pour que nous
revenions au même montant de dollars à investir que nous avions
avant, ce qui a rapporté au Québec 50 000 000 $ par année,
en moyenne, depuis quelques années, si je me souviens bien, parce que si
elle se laisse piler sur les pieds, tôt ou tard, ils vont lui piler sur
le corps. Et, ça, ce n'est pas un cadeau. Avec les fonctionnaires
fédéraux que je connais, ce n'est pas un cadeau. Je ne parle pas
de votre sous-ministre qui a une expérience, je pense, dans plusieurs
niveaux de gouvernement et qui, mieux que personne, connaît les trucs et
les triques de ces fonctionnaires qui, malheureusement, ne travaillent pas pour
le Québec, mais travaillent pour le Canada. Quand on aura, nous aussi,
notre école, on mettra tous nos efforts, tout notre monde, tous nos
cerveaux au service de l'immigration au Québec. Les résultats
seront, j'en suis sûr, meilleurs que ce qu'on a vu au
fédéral depuis quelques années.
Également, les quotas d'entrevues par mois - 65 par mois à
Hong Kong, et 160 à Montréal - je pense que c'est des chiffres
trop bas. Effectivement, les investisseurs, c'est-à-dire les conseillers
en immigration se plaignent, pas seulement parce que ça leur rapporte
moins par année, par mois ou par semaine, mais parce qu'ils croient que
ça nuit au Québec que nous diminuions tellement le nombre de
personnes que votre ministère et vos agents, vos conseillers voient
chaque semaine ou chaque mois. Mme la ministre, un conseil de la part d'un
vieux en terminant: Augmentez donc le nombre d'entrevues par mois des candidats
qui veulent immigrer ici. Comme on sait qu'il y a une liste d'attente - j'en ai
été informé - on ne pourra que récolter plus
d'immigrants investisseurs, plus de retombées économiques pour le
Québec, plus de clients pour la Banque de Hong Kong qui s'est
établie à Montréal et non pas, comme je l'ai dit tout
à l'heure, ni à Vancouver ni à Toronto, ce qui est
surprenant, à première vue, parce qu'on prétendait
toujours que Toronto était la ville en pleine expansion tandis que
Montréal était en train de s'effondrer tranquillement, alors que
les Chinois, eux, choisissent Montréal comme lieu d'implantation de leur
banque au Canada. La Banque de Hong Kong est à Montréal, juste en
face d'Hydro-Québec, d'ailleurs. Peut-être qu'un jour
Hydro-Québec empruntera de l'argent à la Banque de Hong Kong.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Godin: Nous comptons sur vous, Mme la ministre, pour que, si
elle traverse la rue pour emprunter, il y ait assez de "cash" dans les coffres
de la Banque de Hong Kong, grâce aux investisseurs chinois, pour qu'ils
puissent le faire rapidement et développer enfin la Grande Baleine, le
petit esturgeon et tout ce que vous voulez, sur la Côte-Nord. Mais encore
faut-il vouloir se battre et pas seulement attendre que le
fédéral daigne - je dis bien daigne parce qu'ils se prennent pour
l'impératrice de Russie ou d'Angleterre, je ne le sais pas... Mais ils
bougent très lentement quand il s'agit du Québec. Comme je l'ai
déjà dit au début, le Québec est en
pénitence dans le coin, et il faudra beaucoup de patience et surtout
d'entêtement pour sortir du petit coin et convaincre ceux qui
décident. Parce que le problème du Québec, c'est qu'il ne
décide pas. Il est à la merci de fonctionnaires qui, souvent, ne
parlent pas notre langue, ne nous comprennent pas, n'endossent pas nos projets,
n'endossent pas, non plus, nos projets à long terme ni même nos
rêves. Au contraire, ils espèrent que ça ne marche pas pour
mieux venir nous aider après, comme si on était sur le BS.
Donc, il faut, pour y parvenir, que la ministre se batte, je dirais
à chaque seconde, millimètre par millimètre,
pour garder au moins ce qu'elle a, qui est dans l'entente Cullen-Couture et qui
est la base du pouvoir du Québec dans le domaine de l'immigration; qui a
été obtenu, d'ailleurs, M. le député de l'Acadie,
par un ministre péquiste, et qui est la base de ce que les
libéraux maintenant utilisent comme outil pour arriver à leurs
propres fins. Et d'ailleurs, que ce même gouvernement libéral
veuille faire de cette entente-là, signée par un ministre
"péquisse", comme on dit de l'autre bord, en fasse une partie de la
Constitution canadienne est bien la preuve qu'on ne fait pas, de ce
côté-ci, que des erreurs et que, au contraire, l'expérience
des deux peut servir. Quand on sera de l'autre bord, peut-être un jour
éventuellement, je rendrai hommage à ma
prédécesseure, dans une interpellation comme celle-ci, j'ima-
gine - tôt ou tard, on en aura une - pour ses bons coups. Je
dirai, Mme la ministre, nous vous remercions de ce que vous avez fait pour le
Québec, tout simplement. Et donc, je souhaite que, dans l'avenir, on
rende à César ce qui est à César et à la
Femme de César ce qui est à la Femme de César, en
l'occurrence vous, Mme la ministre, parce que au fond, que faisons-nous ici,
sinon appliquer une politique de continuité? Parce que nous savons tous
que l'immigration pour le Québec c'est bon, et pour le Québec et
pour les immigrants aussi si nous savons les accueillir avec respect, dans
l'honneur et l'enthousiasme, si le besoin en est.
M. le Président, je pense que j'ai terminé mon lyrisme
hebdomadaire. Comme je parle peu souvent ici, j'en profite quand j'ai la
chance. Et je souhaite à la ministre, donc, qu'elle continue à se
battre pouce par pouce pour garder au moins ce qu'on a et qu'elle compte sur
nous et pas seulement sur les députés conservateurs de son coin
ou du nôtre pour réveiller le gouvernement fédéral
parce qu'en principe, le gouvernement fédéral est en hibernation.
On peut conclure ça de son inaction depuis des années, sinon des
décennies, que ce gouvernement-là est en hibernation et ne se
réveille, quand le Québec demande quelque chose, que si on fait
très mal et qu'on crie très très très fort.
Autrement, ils dorment et ils disent: Ne nous en occupons pas; tôt ou
tard, ils vont disparaître. Mme la ministre, c'est mon message que je
vous fais dans cette interpellation qui se termine sur un message
d'amitié et de travail commun. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, M. le
député de Mercier. Je tiens à remercier tous les membres
de cette commission qui ont participé ce matin à cette
interpellation, MM. les fonctionnaires qui accompagnaient la ministre, les gens
du Secrétariat ainsi que tous les collègues. Alors, la commission
ayant maintenant accompli son mandat, je vais ajourner les travaux sine
die.
(Fin de la séance à 11 h 3)