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(Quinze heures six minutes)
Le Président (M. Doyon): Je déclare cette
séance ouverte. Tout d'abord, je voudrais souhaiter la bienvenue
à tout le monde, particulièrement au président de la
Commission et aux gens qui l'accompagnent - il va nous les présenter
tout à l'heure - de même qu'aux collègues de
l'Assemblée nationale, les députés membres de la
commission de la culture. J'espère que tout le monde a passé un
été reposant qui les prépare à la session qui s'en
vient.
Donc, je rappelle très brièvement le mandat de la
commission de la culture, qui est le suivant: étudier le rapport
d'activités 1989-1990 de la Commission d'accès à
l'information, conformément à l'article 119.1 de là Loi
sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection
des' renseignements personnels. C'est le mandat de cette commission. Je
demanderais à Mme la secrétaire de nous indiquer s'il y a des
remplacements à cette commission.
La Secrétaire: Oui. M. Bradet (Charlevoix) est
remplacé par M. Audet (Beauce-Nord) et M. Lemire (Saint-Maurice) est
remplacé par M. Leclerc (Taschereau).
Le Président (M. Doyon): Non, il est là, M. Lemire.
Ah non! M. Lemire est absent. Il est remplacé par qui?
La Secrétaire: Par M. Leclerc (Taschereau).
Le Président (M. Ooyon): Ah! M. Leclerc n'est pas
là.
Nous avons trois heures pour procéder à l'étude de
ce rapport. Sans perdre plus de temps, je vais demander tout d'abord s'il y a
des remarques préliminaires de part et d'autre. À tout seigneur
tout honneur, M. le critique officiel de l'Opposition, est-ce que vous avez des
remarques préliminaires à faire?
M. Boisclair: Non, si ce n'est que pour souhaiter la bienvenue au
président et aux membres de la Commission. Je ne sais pas,
peut-être que M. le président aurait, lui, des remarques.
Le Président (M. Doyon): Est-ce qu'il y a des remarques
préliminaires du côté ministériel? Je constate qu'il
n'y en a pas. Nous allons donc permettre au président de nous
présenter les personnes qui l'accompagnent, tout en lui souhaitant la
bienvenue comme je l'ai déjà fait, et lui laisser la parole pour
qu'il nous fasse la présentation de son rapport. M. le
président
O'Bready.
M. O'Bready (Jacques): Je vous remercie, M. le Président.
Je souhaite que ce retour des parlementaires, après les vacances
d'été, sur un sujet peut-être un peu austère, ne
soit pas trop difficile mais, à tout événement, au cours
des trois prochaines heures on tentera de rendre ces discussions les plus
intéressantes possible.
Je vous présente, à mon extrême gauche, Mme Carole
Wallace, commissaire, membre de la Commission d'accès à
l'information, et, à sa gauche, M. Jean Foisy, qui remplace M. Clarence
White comme directeur du Service d'analyse et d'évaluation, et, à
mon extrême droite, Me André Ouimet, directeur du Service
juridique. Avec votre permission, M. le Président, un peu plus tard au
cours de nos débats, s'il y a des questions à caractère
plus juridique ou technique, vous me permettrez de me référer
à ces personnes qui seront peut-être en mesure de donner des
réponses très précises.
Le Président (M. Doyon): Volontiers Remarques
préliminaires M. Jacques O'Bready
M. O'Bready: M. le Président, Mmes et MM. les
députés, il me fait plaisir d'être de nouveau devant la
commission parlementaire de la culture qui, en vertu de l'article 119.1 de la
Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la
protection des renseignements personnels, a été
désignée pour faire l'étude du rapport d'activités
de la Commission d'accès à l'information pour l'exercice
1989-1990.
Comme par les années passées, le rapport annuel de la
Commission a été conçu pour servir d'outil aux
utilisateurs de la loi sur l'accès. Il présente les objectifs de
la Commission. Il rappelle ses fonctions et ses pouvoirs. Il rapporte un
certain nombre de litiges qui ont connu leur dénouement devant la
Commission en matière d'adjudication, de surveillance et de
contrôle. Sans vouloir reprendre son contenu dans le détail, vous
me permettrez tout de même de vous livrer quelques chiffres, de vous
indiquer comment la Commission a rempli son rôle et ce vers quoi elle
tend.
Les interventions de la Commission comme tribunal. Dans l'exercice de
cette fonction, la Commission a déjà rendu 682 décisions,
depuis le 1er juillet 1984, dont 100 ont été portées en
appel devant la Cour du Québec, soit approximativement une
décision sur sept. Au cours de la période couverte par le
présent rapport, la
Commission a rendu 133 décisions sur des demandes de
révision qui lui ont été adressées. À titre
d'illustration, le rapport annuel fait état de certaines d'entre elles
plus significatives telles celles portant sur le droit d'accès aux
plaintes adressées aux organismes publics, celles concernant les frais
exigibles pour l'obtention des documents dans le secteur municipal et, enfin,
celles traitant de la procédure de renvoi devant l'organisme public
compétent pour l'accès à certains documents.
La protection des renseignements personnels, des chiffres qui parlent.
En plus de sa fonction d'adjudication, la Commission a également pour
mandat de surveiller et de contrôler la cueillette, l'utilisation et la
conservation des renseignements nominatifs par les organismes publics. Elle
s'acquitte de cette tâche de différentes façons, et le
rapport annuel en résume quelques-unes parmi les plus susceptibles
d'intérêt. Au total, les statistiques qui y sont compilées
démontrent qu'au cours de la période couverte, la Commission a
rendu 67 décisions à la suite de demandes d'autorisation de
recevoir communication de renseignement nominatifs sans le consentement des
personnes concernées, et ce, pour des fins de recherches,
d'études ou de statistiques, qu'elle a réalisé 33
enquêtes sur plaintes de citoyens, qu'elle a fourni 27 avis sur des
ententes de communication de renseignements nominatifs et 13 sur des projets de
loi ou de règlements. Outre ces activités, le rapport indique que
la Commission a complété son premier programme d'examen du
respect de la loi, que, de plus, elle a vérifié auprès de
tous les ministères et d'une dizaine d'organismes publics si,
conformément à la loi sur l'accès, ils se sont
dotés d'une liste de classement de leurs documents permettant aux
citoyens l'exercice de leur droit d'accès, et, enfin, qu'elle a
contacté quelque 169 organismes pour voir si leurs communications de
renseignements personnels étaient enregistrées
conformément aux exigences de l'article 67. 3 de la loi.
D'autre part, on y apprend qu'elle a maintenu une attitude ferme
à l'égard des organismes qui n'avaient pas encore produit leur
déclaration de fichiers. Tout au long de l'année, la Commission a
poursuivi son opération personnalisée de rappel pour inciter les
organismes qui n'avaient pas encore produit leur déclaration de fichiers
à se conformer à la loi. La plupart ont répondu
positivement. À ce jour, sur 3600 organismes assujettis, 246 sont encore
considérés comme délinquants aux yeux de la commission. Si
ce chiffre paraît important à première vue, il faut quand
même préciser que, de ce nombre, 156 sont de petites
municipalités de moins de 5000 habitants, dont 126 de moins de 1500 qui
ne disposent pas nécessairement des ressources nécessaires pour
effectuer une telle opération.
Dans l'ensemble, la Commission est satisfaite des résultats
obtenus. Elle évaluera quelles autres mesures pourraient être
mises en place afin que ce petit nombre d'organismes qui persistent à ne
pas se conformer a cette exigence de la loi sur l'accès s'en
acquittent.
Vers une approche par problématique. Le rapport annuel
révèle aussi que, pour la Commission d'accès à
l'information, l'année 1989-1990 en fut une d'évaluation et de
questionnement. Son objectif de développer de façon
particulière le volet de la loi qui concerne la protection des
renseignements personnels a soulevé chez elle de nombreuses
interrogations sur la manière d'exercer cette fonction avec le plus
d'efficacité. À l'aube de l'année 1990-1991, elle en a
profité pour jeter les bases d'une réorientation de ses
activités de surveillance et de contrôle de l'application de la
loi sur l'accès. Dorénavant, la Commission privilégiera
une approche par problématique, par opposition à une approche
centrée sur la recherche des infractions à la loi, telle que
développée jusqu'à présent. Cette nouvelle approche
moins menaçante et plus près de la recherche appliquée que
de la vérification lui permettra d'intervenir de façon
délibérée et en pleine connaissance de cause sur des
thèmes qu'elle aura choisi de traiter, parce qu'ils font soit
l'actualité, qu'ils proviennent de plaintes ou de pressions du milieu,
à ce poirn sensibles qu'ils méritent son attention. Des
politiques, des documents d'information, des suggestions, des lignes
directrices et même des directives pourront résulter de l'analyse
de la Commission et constituer les assises de ses vérifications
éventuelles.
De la lettre à l'esprit de la loi. Le rapport annuel mentionne
également cette préoccupation grandissante de la Commission qui
entend sensibiliser les organismes publics au fait qu'il y a une tendance de
plus en plus marquée au stockage de données sur les personnes, et
cela souvent sans raison. Pour elle, un des principes essentiels liés
à Ja protection de la vie privée est celui de la
nécessité. Si un organisme ne peut en justifier le besoin, il ne
devrait simplement pas recueillir et conserver un renseignement concernant une
personne.
Les révisions de la loi sur l'accès. Je ne
m'étendrai pas sur le dossier de la révision de la loi sur
l'accès, étant donné que vous avez déjà
reçu l'avis de la Commission sur le projet de loi 62 et qu'une autre
commission parlementaire, prévue pour les 11 et 12 septembre prochain,
nous permettra de préciser notre pensée en regard des amendements
qui sont proposés à /'actuelle loi sur l'accès.
Avant de terminer, j'aimerais, M. le Président, attirer votre
attention sur la progression continue que nous connaissons au niveau des
demandes qui nous sont adressées. Ainsi, depuis les trois
dernières années, les demandes de révision sont
passées de 249, en 1987-1988, à 387, en 1989-1990, pour une
augmentation de 55 %. Pendant la même période, les plaintes
des
citoyens sont passées, elles, de 23 à 61, une augmentation
de 165 %. De leur côté, les ressources financières et
humaines sont demeurées sensiblement au même niveau.
Depuis sa création, la première préoccupation de la
Commission a toujours été de chercher les meilleures
façons de faciliter, pour le citoyen, ses droits d'accès à
l'information et de protection des renseignements personnels. C'est ainsi que
l'information du citoyen a toujours été prioritaire pour la
Commission. De la même manière s'est-elle toujours efforcée
de maintenir une procédure de révision la plus souple possible.
La rapidité des décisions rendues et la spécialisation du
tribunal qu'est la Commission sont également des caractéristiques
qui prennent une importance particulière à l'égard du
droit du citoyen à l'information. Des délais qui
s'éternisent font généralement perdre beaucoup de valeur
à l'information convoitée et, dans certains cas, la rendront
inutile. Des procédures aussi rapides que possible sont, pour cette
raison, une priorité aux yeux de la Commission qui, jusqu'à
présent, a régl^ la plupart de ses dossiers de révision
dans des délais bien inférieurs à ceux des tribunaux
judiciaires.
La Commission a commencé son travail au moment même
où l'ensemble des services publics étaient astreints à de
sévères compressions budgétaires. Bien que cette situation
ait pu tempérer ses projets à certains moments, elle s'est
toujours efforcée de répondre avec promptitude aux demandes du
public. D'ici un mois, son siège social à Québec aura
déménagé ses pénates dans de nouveaux locaux mieux
adaptés à ses besoins et à ceux des citoyens qu'elle
dessert, avec un équipement technologique des plus modernes et des
mesures de sécurité au-delà de tout soupçon.
La Commission a fait son effort. Par contre, si la tendance se poursuit
et que les demandes de révision ne cessent de croître, il faudra
penser, inévitablement, à une augmentation des ressources
humaines et financières pour maintenir le même service de
qualité aux citoyens et citoyennes du Québec.
Alors, voilà, M. le Président, en guise de remarques
préliminaires, ce qui se veut un peu un tour d'horizon de notre rapport.
Avec beaucoup de p\a\s\r, \e répondrai aux questions des membres de \a
commission. Je précise immédiatement, quand même, que les
statistiques qui sont dans ça ne doivent pas prêter à une
interprétation négative, dans le sens que, si on me dit: II y a
165 % d'augmentation des plaintes, ou 55 % de demandes de révision,
ça ne veut pas nécessairement dire que le nombre d'infractions
à la loi est proportionnel à ça. Ça peut vouloir
dire que la loi est peut-être mieux connue, qu'elle est peut-être
plus utilisée par l'ensemble de la population québécoise.
Je tenais quand même à le souligner pour être certain que ce
genre d'information ne créait, auprès des membres de la
commission, aucune équivoque possible. Alors, je vous
répète que ce sera avec beaucoup de plaisir que mes
collaborateurs ou collaboratrices et moi pourrons répondre à vos
questions et à celles des membres de cette commission. Je vous
remercie.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le président.
Est-ce qu'il y a des questions?
M. Boisclair: Oui, il y a sûrement des questions.
Le Président (M. Doyon): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Je vais vous laisser le privilège de...
Le Président (M. Doyon): Vous êtes le premier qui
avez demandé la parole, vous l'avez.
Discussion générale
M. Boisclair: Merci, M. le Président. M. O'Bready, Madame,
Monsieur, je vous remercie pour cette présentation. Vous comprenez que
c'est quand même avec beaucoup d'intérêt que l'Opposition
officielle a pris connaissance de ce rapport-là et a porté une
attention particulière à la préparation des travaux
d'aujourd'hui puisqu'il y a déjà un bon bout de temps que les
membres de la Commission de la culture n'avaient pas eu l'occasion
d'échanger avec les membres de la commission. Je crois que
l'étude du rapport ne s'était pas faite l'an dernier. C'est un
peu à notre demande et en consultation avec le président de la
Commission et, comme la loi, d'ailleurs, le demande, qu'on se retrouve ici
aujourd'hui.
Peut-être rapidement, au niveau de la façon de travailler,
parce qu'on a quand même trois heures, soulever immédiatement un
certain nombre d'interrogations plus générales. Ensuite de
ça, peut-être vous faire part où on voudrait se rendre, en
suivant, bien sûr, le rapport de la façon dont il est
présenté. Alors, peut-être rapidement quelques grands
titres. Bien sûr, on parlera de vos activités de surveillance, des
organismes qui sont assujettis à la loi. Déjà, vous nous
avez fourni un certain nombre d'informations qui étaient plus à
jour que ce qu'on a trouvé dans le rapport présenté et
déposé à l'Assemblée nationale. Bien sûr,
c'est avec beaucoup d'intérêt qu'on reviendra sur toute la
question du cas d'Acrofax et du ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu, et aussi parler d'un certain nombre de choses
comme le secteur de la santé où la Commission est intervenue
à un certain nombre de reprises. On a vu des commentaires de la
Commission. Peut-être aussi revenir, si le temps nous le permet, sur
l'affaire Vallières, où la Commission devait faire enquête.
Alors, c'est un échange qu'on veut
agréable d'abord et avant tout.
On peut peut-être commencer, si vous me le permettez, M. le
Président. Vous parlez, vous l'avez souligné tout à
l'heure dans votre présentation, d'une approche que vous allez
maintenant définir par problématique au lieu d'y aller en
fonction de différentes enquêtes. Il y a un certain nombre de
problématiques où la Commission jugera prioritaire et,
lorsqu'elle le jugera nécessaire, interviendra. Cette nouvelle
définition qui, quand même, aura des conséquences
importantes sur la façon d'agir de la Commission aura été
précédée d'une vaste consultation auprès d'un
certain nombre d'intervenants. C'est ce que vous nous rappelez dans votre
rapport, alimenté par les résultats de cette vaste consultation,
à l'aube d'une nouvelle année financière aussi, que vous
allez en profiter pour jeter les bases d'une réorientation de ses
activités. Pourriez-vous peut-être nous entretenir rapidement sur
les détails de cette consultation-là? La liste des thèmes
qui ont été choisis et qui ont été mis à la
consultation du public?
M. O'Bready: Ce que je voudrais vous dire c'est que, d'abord,
cette consultation-là origine probablement de commentaires qui nous ont
été faits lors de l'exécution de notre programme de
surveillance. Vous vous rappellerez qu'au cours des années
antérieures, la Commission avait déterminé un certain
nombre de ministères ou organismes ou municipalités qui faisaient
l'objet de vérifications systématiques de l'application de la
loi. Et on nous a souvent reproché, au cours de ces
vérifications, d'avoir une approche, je vous dirais, un peu trop quasi
policière, dans le sens que la Commission s'arrêtait
peut-être à vérifier des quantités industrielles de
petites plaintes sur des sujets de toute espèce de nature. Par ailleurs,
on s'est aperçus, nous, et les organismes s'en sont également
aperçus, qu'il y avait des thèmes ou des objets de plaintes qui
revenaient très souvent. Un bel exemple: le genre de dossier
médical que des employeurs vont créer sur des employés.
Qu'est-ce qu'on doit retrouver dans un dossier médical? On sait que la
plupart vont créer un dossier médical sur un employé
à l'intérieur d'un ministère ou d'un organisme ou d'un
établissement scolaire ou d'un établissement de santé.
Alors, qu'est-ce qu'on a besoin de retrouver dans ça? Est-ce qu'on a
besoin vraiment de retrouver la quasi-totalité de l'histoire
médicale d'un individu, un peu comme son médecin en a besoin, ou
si on a plutôt besoin de savoir que l'individu est dans un état de
santé, par exemple, qui le rend apte à exercer les fonctions pour
lesquelles il est engagé? On avait beaucoup de plaintes sur ce genre de
constitution de dossiers médicaux. On a dit: Donc, voilà un
problème qu'on peut identifier qui peut être intéressant,
puis, comme on a beaucoup de plaintes sur ça, au lieu de traiter chacune
des petites plaintes individuellement, on va tenter de développer une
expertise autour de ça, puis, comme je le disais dans mon texte
tantôt, d'émettre peut-être certaines lignes directrices.
Mais je voudrais vous préciser quand même immédiatement, M.
le député, qu'il ne s'agit pas pour la Commission de refuser
d'enquêter sur des plaintes qui sont faites par des citoyens. Ça,
si c'est l'impression que j'ai pu donner, je voudrais absolument la clarifier
immédiatement. La Commission va définitivement continuer à
faire son boulot sur certaines plaintes qui ne peuvent pas toujours être
regroupées sous un thème quelconque.
Il y a d'autres thèmes aussi - il ne m'en vient pas à
l'esprit - mais qu'on retrouve souvent dans des plaintes. Alors, on veut
tenter, nous autres, effectivement, de faire, comme je vous le disais, une
approche à caractère un petit peu plus pédagogique et
peut-être un petit peu moins recherche quasi policière
d'infraction, sans vouloir mépriser, évidemment, le travail des
policiers. Ce n'est pas du tout le but de mon intervention, mais je pense que
nous ne sommes pas nécessairement des agents de la paix qui sont
chargés de réprimer le crime ou les infractions à la loi,
même si on peut le faire à l'occasion. Alors, dans le fond, nous
autres, c'est de tenter d'inculquer un peu à tout le monde, à
tous les organismes assujettis, cette culture. Je le disais tantôt, et
ça, je pense que c'est le défi des prochaines années,
c'est essentiellement sur la protection de la vie privée qu'on va
retrouver ça. Comme la Commission est en train de développer, par
exemple, une expertise, actuellement, et de tenter de dégager les lignes
directrices sur le SIDA, par exemple: Comment on doit traiter le dossier des
sidatiques et tout ça On sait que le commissaire canadien, le
commissaire ontarien, ont fait ce boulot-là. Nous autres on a eu des cas
très pénibles dans des établissements hospitaliers
où, effectivement, on révélait tout sur le dossier d'une
personne atteinte du SIDA, alors s'il y a quelques renseignements aussi
sensibles que ceux-là, je pense bien que vous aurez compris, là.
Alors c'est ce genre d'approche que nous souhaitons peut-être
développer à la Commission. Et quand je parle, évidemment,
de l'esprit et de la lettre de la loi, je veux dire que la Commission ne se
prend pas pour le législateur, elle n'a pas l'intention non plus de
changer la loi, ça appartient aux décideurs de faire ce
boulot-là. Mais je pense que, ce faisant, nous respectons à la
fois et la lettre et l'esprit de la loi, parce que je ne suis pas convaincu que
la loi sur l'accès et la protection des renseignements personnels a
été faite ou a été pensée uniquement dans le
but de déceler des infractions ou de trouver des coupables. C'est
plutôt, d'après moi, un genre de choix de société
qui fait qu'on veut qu'il y ait la plus grande transparence possible, mais
qu'en même temps on respecte la vie personnelle des individus. Alors
voilà, je ne sais pas si ça répond à votre
question, mais
c'est dans ce sens-là.
M. Boisclair: Oui, bien, effectivement. Si je comprends bien,
vraiment c'est une démarche parallèle que la Commission
entreprend, en plus de continuer à recevoir des plaintes des citoyens.
Cette approche par problématique viendra s'ajouter au travail que
déjà vous effectuez. Maintenant, je présume qu'au niveau
de l'organisation interne de la Commission, il doit y avoir un certain nombre
de réaménagements, si ce n'est qu'au niveau des tâches des
gens qui travaillent à la Commission. Vous parlez déjà
d'un vent de privatisation au niveau des contrats de recherche, qui seraient
accordés à l'extérieur.
M. O'Bready: Oui.
M. Boisclair: Jusqu'à quel point cette nouvelle
réalité va affecter l'organisation interne de la Commission?
M. O'Bready: Bon. Il est évident que la Commission ne
possède pas présentement toutes les ressources ni
financières ni humaines pour se lancer dans de vastes recherches,
parfois des recherches assez compliquées.
M. Boisclair: Oui, c'est ça.
M. O'Bready: II ne serait peut-être pas souhaitable qu'elle
le fasse non plus, en tout cas, du moins peut-être pas à ce
stade-ci. Alors je pense qu'il va s'agir pour nous autres de jumeler, ou de
donner des contrats à l'extérieur, ces travaux-là qui sont
faits avec des recherches que nous faisons chez nous, qui sont peut-être
un petit peu plus d'application pratique. Alors, présentement ce que
nous faisons, c'est qu'on donne des contrats à l'extérieur,
à des firmes qui sont spécialisées en recherche. Par
exemple on pourra peut-être parler des dossiers médicaux un peu
plus tard, mais c'est vraiment le premier mandat que nous avons donné.
Ce qui n'empêche pas les personnes qui sont chez nous, qui travaillent au
département de l'analyse et de l'évaluation, qui est, à
toutes fins pratiques, un département de recherche et de politiques, de
faire eux autres mêmes certaines recherches à partir de
données très factuelles contenues dans des dossiers qu'on doit
traiter et de tenter de voir comment on peut régler à la fois des
dossiers bien particuliers, mais en même temps dégager certaines
lignes directrices qui pourront servir pour une diffusion un petit peu plus
large.
Si vous me parlez de réaménagement, aussi, à
l'intérieur des travaux, évidemment, de la direction de l'analyse
et des politiques, c'est une petite unité. Alors quand on parle de
traiter des plaintes, évidemment on a des plaintes quand même
assez nombreuses. Ce qu'on pense faire, et je ne voudrais pas devancer
actuellement le travail qui est fait par cette direction-là, mais on est
en train de faire une réflexion: Comment va-t-on organiser le travail
des enquêteurs chez nous et des vérificateurs? Est-ce qu'on
pourrait avoir, par exemple, et je le donne strictement à titre
d'exemple, un genre de procédure un peu de petites créances, de
type tribunal des petites créances, pour des plaintes qui sont vraiment
bien particulières, bien sectorialisées? Puis on traite
ça, bon. Est-ce qu'on pourrait avoir une procédure de
médiation? C'est un thème sur lequel nous
réfléchissons beaucoup. Je dois vous dire que ce
thème-là est de plus en plus, c'est-à-dire que cette
procédure est de plus en plus utilisée, entre autres au niveau de
la province de TOntario, et qu'elle a ce gros avantage de déjudiciariser
les procédures et, souvent, de raccourcir les délais.
Bon, alors ce sont là peut-être quelques exemples que je
vous donne pour illustrer les méthodes ou en tout cas des changements
qu'on pense apporter dans nos méthodes de travail. Mais, si j'ai
même dit à la fin de mon texte que la Commission devrait se doter
de meilleures ressources financières et ressources humaines, d'abord,
premièrement, vous me permettrez cette boutade de dire que c'est
toujours de bon aloi pour un président d'organisme ou un sous-ministre
de dire qu'il manque à la fois d'argent et de personnel, mais je pense
que la Commission, avec 39 équivalents temps complet, qui est le nouveau
terme à la mode, ne pourra pas quand même absorber un volume de
travail indéfini. Alors voilà, il s'agit de faire preuve à
la fois d'imagination, mais d'utiliser des ressources extérieures, j'en
suis, je trouve que c'est très valable dans certains cas, mais on ne
peut pas toujours non plus aller uniquement à l'extérieur. Il
s'agit de faire un heureux mariage entre les deux.
Le Président (M. Doyon): Merci. M.
Boisclair:...
Le Président (M. Doyon): Permettez, M. le
député. Juste là-dessus, avant que peut-être... Je
ne sais si vous avez terminé sur ce point?
M. Boisclair: Oui, là-dessus, oui. (15 h 30)
Le Président (M. Doyon): En écoutant la
présentation que vous faites du rapport, M. le président, je me
rends compte que vous avez l'intention de donner une orientation nouvelle aux
activités de la Commission, c'est-à-dire que vous allez tenir
compte d'un nouveau facteur que vous appelez l'esprit de la loi et que, dans
ces circonstances-là, vous allez donc procéder par
problématique, c'est-à-dire l'ensemble de problèmes qui
vous paraissent plus urgents, plus présents ou plus immédiats que
les autres et que, pour agir de cette façon-là, vous allez vous
référer globalement à l'esprit de la loi.
Moi, je n'ai pas de problème personnellement avec ça. La
seule chose que j'aimerais savoir de vous, c'est que, pour moi, la loi sur
l'accès à l'information est une loi prépondérante,
une loi qui a une importance capitale et qui permet des actions bien
définies, qui peuvent aller parfois à rencontre de données
générales et qui permettent à la loi de s'appliquer. Ce
que je me demande, personnellement, c'est: Comment définit-on ce qu'est
l'esprit de la loi? Comme législateur, et je pense que vous me
permettrez de le faire comme député et parlementaire, et vous
comprendrez mon propos de même que je comprends ce que vous voulez faire,
c'est, comme législateur, il est admis et je pense que c'est comme
ça que ça fonctionne toujours, c'est que le législateur
doit dire les choses clairement et c'est à partir de là que doit
se faire l'application de la loi, à telle enseigne qu'on ne peut pas
avoir recours à d'autres moyens que ce que dit la loi. On ne peut
même pas faire appel aux propos d'un ministre sur l'explication d'un
article pour savoir ce que l'article veut dire. Quand il s'agit de plaider
devant les tribunaux, les juges en sont, et la commission est jusqu'à un
certain point un tribunal, restreints à tenir compte du verbatim, du mot
à mot de la loi.
Ce dont je voudrais m'assurer auprès de vous, M. le
président, c'est que l'interprétation, c'est-à-dire cet
appel à l'esprit de la loi ne donne pas ouverture à des
intentions qui ne seraient pas indiquées dans la loi. Je ne dis
même pas des intentions qui seraient contraires à celles des
législateurs. Il est possible que la loi soit ainsi faite qu'elle ne
permette pas l'exécution du véritable mandat. On peut discuter
là-dessus. À ce moment-là, le seul remède à
ça, c'est une modification de la loi. Le législateur doit
modifier la loi après avoir pesé le pour et le contre et tout
ça. L'inquiétude que je veux manifester, cette
préoccupation, c'est que cet appel à l'esprit de la loi ne mette
pas, premièrement, la Commission dans une situation difficile. Il y a un
droit d'appel, évidemment, éventuellement, et les tribunaux -
appelons-les les tribunaux supérieurs pour les fins de la discussion -
vont, eux, se baser sur le mot à mot de la loi, le verbatim de ce que la
loi dit, c'est-à-dire la façon dont s'est exprimé le
législateur. Et avec la modeste expérience de parlementaire que
j'ai, c'est - à ma mémoire, en tout cas - la première fois
que je vois un organisme dire: Nous, on a, jusqu'à maintenant,
procédé en fonction de la lettre de la loi et, maintenant, nous
allons aller au-delà de la lettre, nous allons tenir compte de l'esprit
de la loi. Ça, à mon avis, et c'est une opinion personnelle que
j'émets, ça peut constituer un précédent
considérable. Je ne dis pas un précédent dangereux ou quoi
que ce soit, mais, pour des législateurs, il est important que nous
soyons assurés, en toute circonstance, que la loi est appliquée
selon ce qui est écrit et pas plus que ça
Moi, je préférerais de beaucoup, pour fins de
sécurité juridique, que, si des pouvoirs nouveaux sont requis par
la Commission pour exécuter, pour mettre en oeuvre sa vocation, de ce
qu'elle considère être sa vocation et qu'elle ne soit pas capable
de le faire compte tenu du mot à mot de la lettre de la loi qu'il y ait
des modifications législatives apportées et que, si
c'était le cas, nous en discuterions en commission parlementaire les 11
et 12 septembre, je pense, plutôt que de s'aventurer sur un terrain
où la Commission dirait: Nous, nous avons, jusqu'à maintenant,
restreint notre action à la lettre de la loi et, maintenant, nous avons
l'intention, comme vous le dites dans votre présentation, d'aller
au-delà de ça. Et je suis sûr que vous avez fait une
réflexion. D'ailleurs, j'ai compris que c'étaient des
inquiétudes qui vous avaient aussi touché. Et je voudrais faire
part de ces inquiétudes-là. En tant que législateurs, nous
les partageons pleinement et que nous nous inquiéterions beaucoup - en
tout cas, moi, personnellement - qu'un organisme de l'importance et du
sérieux de la Commission décide dans ce qu'il croit être
l'esprit de la loi. Et là, ça devient subjectif, ça
devient une question d'évaluation de passer à une autre
façon de faire les choses que celle qui est la sienne.
Vous indiquez que vous ne voulez pas avoir une approche
policière. Et ça, je le conçois. Mais, d'un autre
côté, il ne faut pas oublier que vous avez un statut de tribunal
et que, si nos lois sont ainsi faites que pour qu'il y ait - je ne veux pas
dire d'énormité - crime, il faut qu'il y ait un plaignant, qu'il
y ait une victime à telle enseigne qu'on ne peut pas prétendre
qu'il y a eu vol s'il n'y a pas eu de plaignant, s'il n'y a pas eu quelqu'un
qui se plaint que telle chose ait disparu. La police ne peut pas venir me dire:
J'ai vu quelqu'un au volant de votre voiture aujourd'hui ou: Je constate que
votre voiture n'est plus dans la cour et je présume que quelqu'un l'a
prise. Est-ce que c'est le cas? Il faut qu'il y ait une plainte.
Et ça, ça a racine dans certaines précautions qui
doivent être prises pour demander à un organisme public d'agir.
J'aimerais vous entendre plus longuement là-dessus, comment vous pouvez
me rassurer comme législateur. Je suis prêt à vous laisser
aller, mais à l'intérieur de balises dont, moi, j'ai à
rendre compte à la population. Ce sont mes collègues et moi qui
sommes redevables des lois que nous adoptons. Nous devons les défendre
et nous devons être capables de les justifier. Et je serais bien mal venu
de donner comme excuse sur une application de la loi que je
considérerais par hypothèse abusive, à mon propre avis, et
dont la seule explication que j'aurais à donner, c'est que c'est
l'esprit de la loi qui s'applique.
Ça n'existe pas comme tel en droit, l'esprit de la loi. C'est
vrai que la lettre - comment dit-on - stérilise et l'esprit vivifie.
Mais méfions-
nous un peu. Il faut faire attention et je suis sûr que vous avez
réfléchi longuement, vous connaissant, à ces
écueils-là. Et j'aimerais vous entendre sur la façon que
vous avez de nous dire à nous, législateurs qui sommes ici pour
vous poser des questions, comment vous pouvez nous dire: Ne vous
inquiétez pas. Et vous savez, l'esprit de la loi, que ce soit
au-delà de la lettre ou que ce soit en deçà de la lettre,
et si c'est en deçà, ce n'est pas meilleur que si c'est
au-delà de la lettre, la lettre de la loi est la loi.
Et quand on dit le vieil axiome: La loi, c'est la loi, elle est
là. Elle est bonne, elle est mauvaise. Mais la loi, c'est la loi. Alors,
sans allonger plus longuement, j'aimerais vous entendre là-dessus.
M. O'Bready: M. le Président, je pense que c'est une
question fondamentale que vous soulevez. Et comme je l'ai dit tantôt, le
but de la commission, ce n'est définitivement pas de prendre la place du
législateur. Par contre, je vais peut-être faire un petit peu
d'historique juste pour situer ça un peu dans son véritable
contexte. Il faudrait se rappeler que la Commission d'accès a un
rôle qui est un petit peu différent de certains autres organismes.
Elle s'occupe de la défense de droits fondamentaux dans le sens qu'on a
à la fois, nous autres, un rôle de surveillance de l'application
de la loi et un rôle, après ça, d'adjudication. Et c'est
peut-être là que le problème commence à être
un petit peu plus aigu.
C'est que, quand on surveille l'application d'une loi en fonction de
normes purement techniques ou juridiques, on peut relever des pourcentages. On
peut relever, que sais-je, moi, différentes règles qui sont assez
encadrées. Au moment où on parle d'adjudication, il faut se
rappeler que la Commission, contrairement - et, là, je ne voudrais
absolument pas qu'on pense qu'on veut se comparer ni favorablement ni
défavorablement à quelque organisme que ce soit - par exemple,
à l'ombudsman, contrairement à la Commission des droits et
libertés, contrairement à, que sais-je, moi, nous, on ne fait pas
qu'exprimer des souhaits ou faire des recommandations. On rend des
décisions qui sont appelables devant la Cour du Québec.
Là, je ne voudrais pas entrer non plus dans un long exposé
juridique, mais il faut se rappeler que, quand on parle de défense Je
droits fondamentaux, on commence à toucher à autre chose que la
loi sur l'accès à l'information et de la protection des
renseignements nominatifs.
Je voudrais vous parler à la fois de l'esprit qui se
dégage du Code civil qui n'est pas encore en vigueur et de la Charte des
droits et libertés de la personne et je vais vous parler aussi de
certaines déductions qu'on peut faire de notre loi à nous, comme
on pourrait en faire, par exemple, de la Loi sur la protection du consommateur.
Si on pense, par exemple, à la charte, on nous plaide
régulièrement les chartes, il y a des dispositions dans la charte
qui disent que toute personne a droit au respect de sa vie privée,
à la protection de sa réputation, quelque chose de ce
genre-là. On a une section du Code civil qui n'est pas encore en vigueur
et on souhaite, nous, qu'elle soit mise en vigueur le plus rapidement possible,
qui dit à peu près la même chose dans les mêmes
termes. Je pense que c'est le chapitre XX, je ne me rappelle pas trop. Sauf que
ça, ça reste jusqu'à un certain point - permettez-moi
l'expression non négative, non péjorative - des voeux pieux.
Ça prend, après ça, des mécanismes pour appliquer
ça. C'est bien beau de dire que j'ai le droit à la protection de
ma vie privée, mais s'il faut que j'aille me battre en Cour
supérieure, en Cour d'appel et en Cour suprême et que ça me
coûte 50 000 $, tu sais, il y a des bonnes chances que du monde ne puisse
pas le faire.
La loi sur l'accès, pour l'interprétation qu'on en fait, a
été votée, à un moment donné, en 1982. Elle
a commencé à être appliquée surtout en 1984. On a
dit: On va commencer dans le secteur public. On va rendre très
transparents les administrations publiques, gouvernementales, municipales, le
réseau de la santé et le réseau scolaire. Mais ça,
ça ne veut pas dire que c'est tous azimuts. C'est qu'il y a des balises
dans ça. La preuve, il y a deux sortes d'exceptions de prévues
dans la loi. Il y a une sorte d'exceptions qui sont plutôt techniques,
les avis, les recommandations et tout ça, mais il y a des exceptions
fondamentales, comme la protection des renseignements nominatifs. Pour les
membres de la Commission d'accès, on dit: Protéger les
renseignements nominatifs, c'est vrai, il y a une définition. C'est
quelque chose qui peut identifier une personne physique et tout ça, mais
on pense que ça dépasse ça. On pense que, s'ils ont mis
ça dans la loi, si tu protèges les renseignements nominatifs,
c'est parce que tu veux protéger la personnalité de l'individu en
question, que tu veux protéger sa vie privée.
Alors, moi, je vous dis tout simplement que c'est une
interprétation. On ne peut pas, je pense, tout simplement prendre
l'encadrement de la loi. Ça, on peut le faire dans notre rôle de
surveillance, mais dans notre rôle d'adjudication, parce qu'on se ramasse
en Cour du Québec, parce qu'on peut se ramasser en évocation en
Cour supérieure, je peux vous dire qu'on vient de gagner une cause en
Cour d'appel contre un ministère du gouvernement qui va probablement
aller en Cour suprême. Alors, vous voyez que ça dépasse,
jusqu'à un certain point, certains paramètres qui peuvent
être appliqués par d'autres commissions ou organismes, ceci
à cause du rôle qui est double, qu'on a voulu donner à la
Commission d'accès en 1982, que je n'ai pas à discuter, moi.
Vous avez souligné, M. le Président, avec beaucoup
d'à-propos, qu'il y a probablement des
amendements qui devront être apportés à cette
loi-là. C'est normal, elle a un vécu de six ans, et on aura une
commission parlementaire pour en jaser, probablement avec d'autres
intervenants. Moi, je veux simplement donner l'assurance aux parlementaires que
la Commission n'a absolument pas l'intention de vouloir légiférer
et je peux vous dire, je peux prendre Mme Wallace à témoin, ici,
que, lors de nos réunions de commissaires, on se dit fréquemment:
Ce n'est pas à des commissaires de réécrire la loi. On ne
peut pas réécrire la loi dans des décisions; on ne peut
que l'interpréter ou l'appliquer et c'est aux législateurs...
Alors, moi, tout ce que je vous dis, par contre, c'est qu'on ne peut pas non
plus se fermer les yeux et à partir de choses qui sont quand même
exprimées à la fois dans le Code civil, dans la Charte des droits
et libertés et dans ce que moi j'appellerai, sans vouloir
présumer de leurs intentions à ce moment-là, mais pourquoi
on a fait la loi sur l'accès en 1982. J'y étais à d'autres
titres, alors c'est certainement parce qu'on voulait permettre la transparence
de l'appareil gouvernemental à différents paliers, mais pas,
comme je vous l'ai dit tantôt, tous azimuts, parce qu'on a mis des
balises, et dans ces balises-là, il y avait des balises de
renseignements nominatifs.
Alors, c'est un peu, si vous me le permettez, à la fois un
processus de déduction de ce qui s'est passé, à la fois un
contexte de choix de société qui s'est fait depuis 10 ans, pas
juste au niveau de notre loi, mais de celles que je vous ai mentionnées,
et à la fois aussi du rôle double qui est le nôtre. Je ne
sais pas si ça répond à votre question, mais c'est un peu
dans ce sens-là. Je suis tout à fait d'accord avec vous que ce
n'est pas le rôle de la Commission, nécessairement, de
réécrire la loi, mais de faire plutôt des suggestions. Il y
a une ministre responsable de la loi, actuellement. C'est à elle qu'on
doit faire les suggestions, ça c'est vrai. Je pense qu'on ne peut pas
non plus ignorer que la Commission, qu'elle le veuille ou non, se doit de
chercher un peu une certaine interprétation et la loi sur
l'accès, contrairement à d'autres lois que j'ai vues, qui sont
à caractère très technique, ce n'est pas toujours aussi
facile de dire que c'est 5 %, 7 % ou 22 %. Tu sais, il y a des zones. Je sais
qu'il y a des personnes qui aimeraient ça qu'on fasse - des fois, je le
dis avec un peu d'humour - un catalogue de ce qui est accessible, de ce qui ne
l'est pas et de ce qui est protégé. C'est presque impossible, et
plus on va dans l'application de la loi, plus on voit que ça se
complexifie. Je peux vous dire, moi, que les dernières auditions que
nous avons eues, les causes que nous avons présentement sont de plus en
plus complexes. Alors, on voit qu'il y a toujours de la place à
l'interprétation, et je peux vous dire que la charte nous est
plaidée de plus en plus comme le droit de la liberté de la presse
et d'accès à l'information du public nous est également
plaidé.
Alors, c'est de trouver dans tout ça l'espèce
d'équilibre heureux. Je pense que je ne peux pas vous donner, en tout
cas. pas au moment où on se parle, plus d'explications que ça.
Mais je suis prêt à tenter de le faire. (15 h 45)
Le Président (M. Doyon): Merci, M. le Président.
Enfin, ce que je constate, c'est que c'est un débat qui vous a
animé, que vous avez eu l'occasion de faire. Je ne veux pas prolonger
parce que je veux laisser aux collègues l'occasion de parler. Mais
à l'occasion, on pourra peut-être y revenir. Alors, merci des
explications. Je pense que ça nous permet de faire un bout de chemin. M.
le député de Gouin.
M. Boisclair: On va continuer dans cette même foulée
de l'esprit de la loi. Au mois de mai 1989, lorsque vous avez soumis un avis
concernant la cueillette de renseignements auprès de l'entreprise
privée dans le cas du ministre de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, vous
soulignez dans votre mémoire et permettez-moi de le citer au texte:
"Bien que l'entente soumise apparaisse conforme aux exigences de la loi sur
l'accès en ce qui a trait à la collecte de renseignements, la
Commission est d'opinion que celle-ci n'en respecte pas l'esprit." Et vous
soulevez un certain nombre de contradictions qui pourraient exister en vertu de
l'article 5, si je me souviens bien, de la Charte des droits et
libertés. Mais vous estimiez qu'il était du devoir de la
Commission d'alerter les organismes publics qui pourraient utiliser de tels
services de la même manière, des dangers que posent pour la
protection les renseignements personnels et une telle collecte de
renseignements. C'est tout le fameux cas d'Acrofax dont les médias ont
fait écho à plusieurs reprises. Vous avez manifesté
très clairement votre position. Ça ne pouvait être on ne
peut plus clair à cet égard là.
J'aimerais peut-être revenir un peu avec vous sur le cas
d'Acrofax. Il y a certaines modifications qui déjà dans le projet
de loi 62 sont apportées. J'y reviendrai tout à l'heure. Mais
suite à l'avis de la Commission, est-ce que le ministère de la
Main-d'oeuvre et de la Secu rite du revenu et de la Formation professionnelle
vous aurait donné un certain nombre d'indications qui auraient
peut-être permis de vous raviser ou de vous rassurer quant aux craintes
que vous aviez au moment de la présentation de votre avis au mois de
mai?
M. O'Bready: Oui, définitivement. D'abord, dans ce
dossier-là qui avait fait pas mal de vagues, je pense que tout le monde
était un petit peu au courant. Il y a eu différentes rencontres,
il y a eu différents pourparlers, il y a eu différentes
réactions au niveau ministériel et au niveau
sous-ministériel. Bon, alors, j'entretiens encore une correspondance
avec le ministre
titulaire et j'ai eu des rencontres avec le sous-ministre et nous nous
sommes entendus sur à peu près la majorité et je dirais
même la totalité, à toutes fins pratiques, de ce qui
pouvait porter ombrage. Et j'ai reçu récemment - je ne pense pas
dévoiler de secrets - une lettre du ministre titulaire qui me dit que,
bon, il y avait eu plusieurs intervenants dans ce dossier-là, vous vous
en souviendrez et le Protecteur du citoyen était intervenu et la
Commission des droits de la personne était intervenue également.
Nous étions intervenus bien sûr et tous sur le même sujet.
C'est-à-dire, ce qu'on voulait, nous, dans le fond, c'était bien
simple. On disait qu'on n'était pas nécessairement contre le fait
qu'on se serve des services d'Acrofax pour obtenir des données sur des
fraudeurs reconnus mais ce qu'on voulait éviter, vous me passerez
l'expression, c'étaient les parties de pêche, on allait chercher,
on tentait, bon... Alors, ça, on disait: Quand tu n'es pas
soupçonné d'avoir fait aucun crime, pourquoi on compilerait sur
ta vie toute une série de données. Je pense que personne de vous
autres, autour de la table, n'aimerait qu'on compile sur lui une espèce
de dossier quelconque s'il n'est soupçonné d'aucune
activité illicite ou qu'il ne doit pas de l'argent à
l'État ou qu'il n'a pas fraudé l'État. C'était
ça notre attitude. Alors, je peux vous dire, pour répondre
à votre question très précisément, que ce
contentieux avec le ministre de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu est en très bonne voie de
résolution, les rencontres tant au niveau ministériel qu'au
niveau sous-ministériel et au niveau des fonctionnaires du
ministère et des personnes chez nous, c'est un problème juridique
de terminologie dans le contrat. On nous a dit qu'on était même
prêt à modifier ce contrat-là mais on veut être bien
sûr qu'on règle le contentieux à la fois avec nous autres,
l'ombudsman et la Commission des droits et libertés. Alors,
voilà, je peux vous dire que ce dossier-là, à toutes fins
pratiques, pour nous, on considère que c'est une question de jours,
sinon de semaines, avant que les câbles ne soient bien attachés.
Je pense que c'est, à toutes fins pratiques, réglé.
M. Boisclair: Est-ce que l'entente, à ce jour, a
été modifiée?
M. O'Bready: L'entente, c'est ça... C'est que le
ministre...
M. Boisclair: Comment les discussions que vous avez eues avec le
ministre responsable et les autres intervenants dans le dossier, comment
concrètement se sont soldées ces discussions? Est-ce qu'il y aura
modification d'une façon très concrète du contrat qui a
été signé entre le ministère de la Main-d'oeuvre et
Acrofax?
M. O'Bready: Bon, la dernière lettre que j'ai reçue
du ministre titulaire est à l'effet que, oui, il est prêt à
modifier son entente pour qu'elle soit vraiment limitée à ce que
nous on souhaitait, c'est-à-dire qu'elle s'applique juste à ceux
qui devaient de l'argent à l'État ou qui étaient des
fraudeurs, pour éviter ce que j'ai appelé les expéditions
de pêche, c'est-à-dire sujet à l'approbation de ce
texte-là avec les deux autres intervenants qui sont, je le
répète, l'ombudsman et la Commission des droits et
libertés, ce serait réglé. Le ministre est prêt et
nous a signifié son intention de modifier ou, en tout cas, d'ajuster, je
dirais, le contrat à ces intentions, intentions qu'il avait d'ailleurs
déjà exprimées publiquement, si je ne m'abuse.
M. Boisclair: Est-ce qu'on pourrait avoir copie de cette
lettre-là?
M. O'Bready: Cette lettre-là est un document qui est
public. Je pense qu'elle ne contient pas de renseignements nominatifs.
M. Boisclair: Est-ce que vous pourriez transmettre...
M. O'Bready: J'ai le responsable de l'accès avec moi, ici,
Me Ouimet; alors, je lui donne votre demande et il va la traiter.
M. Boisclair: Est-ce qu'il y a un échéancier qui a
été fixé au niveau des modifications au contrat? Est-ce
que vous avez été capable d'évaluer, depuis la signature
de ce contrat-là, quel genre, de quelle façon on a utilisé
les services d'Acrofax, quelle quantité?
M. O'Bready: À date, nous n'avons eu aucune plainte de
bénéficiaires et...
M. Boisclair: Parce qu'ils ne sont pas au courant, parce qu'ils
ne sont pas avisés.
M. O'Bready: Pardon?
M. Boisclair: Parce qu'ils ne sont pas encore...
M. O'Bready: Non, ils ne sont pas avisés, mais je veux
dire que ces choses-là finissent par se savoir et je pense que notre
intervention a un deuxième effet sur la compagnie Acrofax
elle-même avec laquelle j'ai eu l'occasion d'échanger, ce qui est
un fait normal et, finalement, qui utilise un jeu de mots, une prudence de
Sioux actuellement.
M. Boisclair: Parce que votre M. White, qui est le directeur des
enquêtes, semblait un pou perplexe quant à l'utilisation de... Je
fais réfé rence à l'article de La Presse du jeudi 5
avril, qui est un peu inquiet de la façon... Il dit: "Quand on
connaît les conditions de travail dans les Centres de travail
Québec, on peut présumer
que l'ensemble du personnel a de fait accès aux informations
confidentielles." Est-ce que vous avez été rassurés
à cet égard-là?
M. O'Bready: Écoutez, je pense qu'on a
vérifié actuellement, au niveau du ministère de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle de quelle façon étaient à la fois
créés et traités les fichiers concernant des
renseignements nominatifs et moi, je dois vous dire qu'au moment où on
se parle, en tout cas, aujourd'hui, je n'ai aucune plainte sur mon bureau. Ce
que nous avons découvert nous a rassurés, pour le moment du
moins. Il est bien sûr, comme j'ai déjà répondu,
qu'on ne peut pas être partout avec le petit nombre d'enquêteurs
qu'on a, mais moi, je vous répète que ces plaintes-là se
sont quand même acheminées assez rapidement chez nous. Parce que
les gens sont très conscients maintenant ou, en tout cas, de plus en
plus conscients de leurs droits. Ils ont des organisations qui se
spécialisent dans la défense de ces droits-là et qui se
chargent de les renseigner. Mais, évidemment, je ne vous dis pas que
tout est parfait dans ce merveilleux monde, mais ce n'est quand même pas
un désastre non plus.
M. Boisclair: Parce que c'est un revirement, quand même,
important d'attitude. Si on regarde, dans le même article, vous disiez:
"L'ex-maire de Sherbrooke - permettez-moi d'en citer un extrait -
prévient que la loi permettrait à l'organisme de bloquer tout
simplement l'entente entre le ministère et Acrofax. Une des dispositions
de la loi aurait pu servir d'assise pour autoriser la Commission à
être plus agressive dans son avis, prévenait M. O'Bready." C'est
ce qui a été rapporté dans les journaux au mois d'avril.
Aujourd'hui, vous avez l'air rassuré, même très
rassuré. Qu'est-ce qui s'est passé?
M. O'Bready: II s'est passé que, comme je vous dis, on a
quand même eu...
M. Boisclair: Quelles assurances concrètes vous avez pour
qu'aujourd'hui...
M. O'Bready: C'est l'amendement au contrat. Dans le fond, tout
réside dans la question d'amendement au contrat. Nous, ce qu'on avait
dit, c'est que... On a déjà approuvé - je l'avais
expliqué dans le temps, si on veut revenir un peu dans l'histoire -
j'avais déjà expliqué que nous avions approuvé,
chez nous, des ententes avec Acrofax au niveau du ministère de
l'Enseignement supérieur, je pense, pour les gens qui étaient
débiteurs ou débitrices de bourses et qui ne payaient pas,
évidemment, selon les termes de l'entente, deuxièmement, au
niveau du ministère du Revenu. Mais ces ententes-là
étaient très balisées. Alors, ce qu'on avait
demandé, dans le fond, c'est que le ministère de la Main-d'oeuvre
balise son entente dans les mêmes termes. Et c'est ce qu'à notre
opinion, je vous le répète, c'est une question, il y avait un peu
de juridique dans ça aussi, on trouvait que les termes de l'entente
entre le MMSR et Acrofax étaient beaucoup trop larges. Alors, nous
avions demandé de les baliser mieux.
Les pourparlers que, moi, j'ai eus personnellement, c'a
été dans ce sens-là. Le ministre titulaire avait dit:
Effectivement, on veut se servir de cette entente-là pas pour des
parties de pêche, comme vous craignez, mais pour, effectivement,
percevoir de l'argent dû de personnes qui ont fraudé le
système ou, en tout cas, qui ont, de façon indue, reçu des
sommes d'argent. On nous dit: Écoutez, y a-t-il moyen d'ajuster le texte
à votre intention parce que les hommes et les intentions passent et les
textes demeurent? C'est à peu près ça qui nous a
rassurés. Je veux dire, nous, la loi est précisp sur ce qu'on
peut recueillir comme renseignements nominatifs sur une personne. L'application
d'une loi, des renseignements qui sont nécessaires, je ne reprendrai pas
tous les termes de la loi... Si on satisfait ces critères-là,
à la lumière un peu de notre jurisprudence, entre guillemets,
c'est ce que je vous répète. Alors, c'est ce qui a fait
évoluer la situation. Parce que là, vous vous reportez quand
même à des choses qui se sont passées, quelque chose comme
au mois de..., je ne me rappelle pas trop, avril, mai.
M. Boisclair: Avril.
M. O'Bready: Alors, là, voyez-vous, on est rendu quand
même quelques mois plus tard et je vous répète qu'il y a eu
plusieurs échanges et il y a eu plusieurs rencontres, à mon
niveau, au niveau de Me Ouimet, au niveau de M. Roy, qui n'est pas ici
aujourd'hui, pour attacher la partie technique, la partie juridique, corriger
ce qu'on pensait qui n'était pas correct. C'est ce qui fait que
l'attitude de la Commission évolue.
M. Boisclair: Je peux très bien comprendre que vos
convictions, en tout cas l'idée que vous avez du contrat, il y aura
certainement des modifications, mais quelle garantie et, concrètement,
quels amendements seront apportés au contrat pour que, aujourd'hui, vous
puissiez manifester autant d'assurance à l'égard de ce
contrat-là? Concrètement, qu'est-ce qui sera apporté et
dans quel délai? Parce que, au moment où on se parle, je peux
comprendre qu'il y a eu des discussions entre vous et le ministre responsable,
mais lorsqu'on n'a ni échéancier, lorsqu'on n'a ni assurance,
lorsqu'on n'a ni entente ni proposition de modification du contrat sur la
table, je pense que ça peut parfois être un peu délicat
de...
M. O'Bready: Bon. Alors, je voudrais juste vous
répéter que ce que moi j'ai, c'est que, à
mon retour de vacances, j'avais une lettre du ministre qui me disait:
Effectivement, on a reconsidéré tout ça, nous sommes
prêts à amender - de mémoire - le contrat dans les termes
que vous souhaitez. Et Me Ouimet me souligne que, lors d'une rencontre cette
semaine, on lui a dit que, d'ici 15 jours, ça devrait être
réglé.
M. Boisclair: Quels sont les amendements que vous avez...
M. O'Bready: C'est l'amendement, justement, que le paragraphe du
contrat, je pense que c'est à l'article 3, qui permettait un usage
à peu près tous azimuts des services d'Acrofax, soit vraiment
limité, dans les mêmes termes qu'il avait été
limité pour les débiteurs du ministère du Revenu et de
l'Enseignement supérieur, c'est-à-dire pour les véritables
fraudeurs du système ou encore ceux qui avaient reçu... Ce ne
sont pas tous des fraudeurs, il y en a qui reçoivent des sommes, par des
erreurs quelconques, puis qu'on veut récupérer. Alors, c'est
ça.
Nous autres, je vous le répète, on voulait éviter
une partie de pêche, que tout le monde soit soupçonné au
même titre, puis c'est ce qui avait donné lieu probablement
à des manchettes du type de quelque 300 000 bénéficiaires
de l'aide sociale sujets à enquête dans leur vie privée.
Alors, moi, la seule garantie que je peux vous donner... Mais ça, de
toute façon, ce sont des documents qui sont publics. Au moment où
le ministre déposera le contrat amendé je vais dire: Ce
document-là est un document accessible chez nous, alors, les membres de
la Commission, comme l'ensemble des parlementaires pourront vérifier si
le ministre a effectivement modifié son entente avec Acrofax dans les
termes qu'il dit qu'il va faire. Moi, ce que je peux vous dire aujourd'hui, je
n'ai aucune raison de douter de la bonne foi du ministre titulaire. C'est que
j'ai à la fois une lettre de sa part et Me Ouimet, de ses pourparlers
avec le secrétaire du ministère qui est responsable de l'action
au ministère de la Main-d'oeuvre, lui a dit que d'ici 15 jours tout
devrait être réglé. Il n'y a pas de cachette, je vous dis
pourquoi, c'est que le ministre titulaire voulait simplement à la fois
régler son contentieux avec nous, avec l'ombudsman et avec la Commission
des droits et libertés.
M. Boisclair: Oui. Je voudrais juste revenir, parce qu'il y a
quand même d'autres questions de fond qui étaient
soulevées. Est-ce que les membres de la Commission ont l'assurance que
les renseignements qui seront transmis à Acrofax, à cette
entreprise privée, ne seront pas transmis dans le dossier de l'individu
concerné? Parce que la crainte qui était soulevée par
plusieurs intervenants dans ce dossier-là, c'est qu'une fois les
renseignements personnels entre les mains de l'agence de crédit,
celle-ci pourrait en faire un peu ce qu'elle veut. Je comprends que c'est le
ministère qui va faire appel aux services d'Acrofax pour avoir un
certain nombre d'informations quant au dossier de l'individu, que ce soient son
adresse, ses comptes en banque, des choses semblables, mais Acrofax va aussi
détenir, par le fait même, on va lui transmettre de l'information,
et ces informations-là pourront être utilisées à
d'autres fins que celles prescrites par la loi.
M. O'Bready: C'est-à-dire qu'Acrofax n'a pas le droit
nécessairement de transmettre, lui, des informations qu'il
possède dans le dossier de l'individu. C'est-à-dire, le
ministère n'a pas le droit de transmettre à Acrofax des
informations qu'il possède, sauf de dire: Je veux avoir, par exemple, le
pedigree de l'individu X qui demeure à telle adresse. Il n'est pas
obligé de dire que cet individu-là doit, je ne sais pas moi, 25
000 $, par exemple, de dettes au ministère ou des choses comme
ça. Alors, si je comprends bien votre question: Est-ce qu'il y aura un
échange bilatéral du fait qu'Acrofax donne des informations au
ministère de la Main-d'oeuvre, est-ce que, le ministère de la
Main-d'oeuvre, ça lui donne le droit de transmettre son dossier
personnel? Pas du tout. Pas plus que si le ministère de la Santé
se servait d'Acrofax, par exemple, pas le ministère de la Santé
mais un hôpital quelconque se servait d'Acrofax, pour une raison que je
ne connais pas, pour retracer un patient, il aurait le droit de transmettre
à Acrofax le dossier médical de l'individu. Ça ne marche
pas comme ça. Les défenses qui existent dans la loi, qui
empêchent un organisme public de transmettre des renseignements
nominatifs qu'elle détient jouent. Ça, ces
défenses-là s'appliquent toujours. Écoutez, si ça
se fait, là, c'est... Nous, on va quand même vérifier.
Ça ne veut pas dire qu'on arrête puis que, une fois que l'entente
est modifiée, on va se satisfaire de ça. Ça ne nous
empêche pas. Je vous l'ai répété, les articles de la
loi nous permettent de surveiller l'application de la loi n'importe quel temps.
On peut se présenter en tout temps nous autres, au MMSR, comme à
n'importe quel autre ministère, puis on a des pouvoirs de commissaire
enquêteur, puis dire: Voici, on vient vérifier le respect de la
loi dans telle et telle et telle disposition. On peut le vérifier dans
l'ensemble de ces dispositions.
M. Boisclair: Alors, est-ce que vous pouvez aujourd'hui me donner
l'assurance que les renseignements que l'assisté social est
obligé de fournir pour pouvoir bénéficier de sa prestation
ne seront utilisés simplement à des fins qui sont prescrites par
la loi? (16 heures)
M. O'Bready: Bien, moi, je peux vous donner l'assurance que, si
le ministère n'enfreint pas la loi, il ne peut pas les
transférer, ces renseignements-là. Et, en tout cas, je ne
vois
pas pourquoi le ministère enfreindrait la loi, là,
volontairement. Je peux vous dire qu'on a fait une vérification quand
même in extenso au MMSR, parce que c'est un ministère doté
d'une grosse clientèle, on avait quand même un rapport en 50 et
quelques recommandations, d'ailleurs c'est mentionné dans notre rapport
annuel, et au moment où je vous parle il y en a deux qui restent
à toutes fins pratiques en suspens. Ça fait que le MMSR a quand
même collaboré avec nous pour se conformer à peu
près à tous les volets de la loi. Je ne veux pas, remarquez bien,
féliciter le MMSR plus qu'un autre, mais vu qu'on est sur ce
dossier-là, je n'ai aucune espèce d'objection à en parler,
il reste deux petites dispositions...
M. Boisclair: Oui.
M. O'Bready: ...sur 53 recommandations. On a même fait
changer les formules, l'utilisation de certaines formules, qui, on
considérait, donnaient trop de renseignements sur la personne. Un
exemple: un assisté social qui retournait au travail devait faire
remplir par son employeur une formule qui donnait la date du retour au travail,
et tout ça, bon. Il y avait certains codes là-dessus qui
permettaient justement au nouvel employeur de dire: Ah! J'ai affaire à
un ancien assisté social. Sur notre recommandation, le ministère
a accepté de modifier sa formule. Bon, c'est un exemple...
M. Boisclair: Mais...
M. O'Bready: Quand même, je veux dire, on est obligé
d'intervenir, notre rôle n'est pas toujours agréable, parce qu'on
dénonce des situations, mais je veux quand même donner aussi
l'envers de la médaille, pour ce ministère-là ou pour
n'importe quel autre, ce serait la même attitude de ma part, qu'il y a
quand même aussi des aspects positifs, les gens collaborent, puis,
donnons à César ce qui est à César.
M. Boisclair: Je suis d'accord avec ça. Est-ce que la
Commission a exigé que le citoyen concerné, lorsqu'il y aura
enquête qui sera faite auprès de l'entreprise privée, dans
le cas d'Acro-fax, est-ce que la Commission, dans ses discussions avec le
ministère, a cru bon d'exiger que, chaque fois que le ministère
va chercher de l'information dans une banque privée, il en informe le
citoyen concerné? Comme c'est le cas, entre autres, aux
États-Unis, où il y a eu des gros débats. Le
Congrès américain, à l'époque, avait exigé
qu'à chaque fois qu'une personne fait l'objet de recherche dans une
banque privée, que le citoyen en soit averti, parce que c'est même
votre, votre... j'oublie son titre exact, mais M. White, qui disait que
lui-même, son dossier de crédit n'était pas conforme
à la réalité. Donc, vous savez, les erreurs, vous savez
comment c'est difficile de faire modifier un dossier de crédit, la loi
d'accès ne s'étend pas encore au secteur privé, ainsi de
suite, là... Mais est-ce que la Commission dans ses discussions a
exigé que le bénéficiaire soit avisé lorsque le
ministère va chercher de l'information chez Acrofax?
M. O'Bready: Bon, je vais vous répondre que, pour ma part,
ça a été soulevé en ma présence. Je sais
qu'il devait y avoir une autre rencontre de prévue à un niveau
plus technique. Avec votre permission, M. le Président, je demanderais
peut-être à M. Foisy, qui remplace M. White, de dire où ils
sont rendus dans les pourparlers, parce que c'est leur direction qui...
Le Président (M. Paré): Oui, M. Foisy
M. Foisy (Jean): Merci. Ce que je peux vous dire, au moment
où on se parle, c'est que nous essayons, en termes de services de
recherche, de tirer les conclusions qui s'imposent concernant ce recours par
des organismes à des bureaux de crédit. Notamment, le point que
vous soulevez est important, celui par exemple que l'on informe, lorsque la
chose est possible, les personnes concernées. Il y a également
d'autres éléments qui entrent en ligne de compte, par exemple,
comme la possiblité, par exemple, que le bureau de crédit se
constitue lui-même une banque de données à partir des
renseignements. Au moment où on se parle, on essaie actuellement de
couvrir tous les angles qui concernent les bureaux de crédit, et quand
vous regardez la place que tiennent des bureaux de crédit dans
l'architecture générale de la communication de renseignements
entre les organismes gouvernementaux, entre les banques, entre les agences de
recouvrement, on doit prendre toutes les possibilités qui nous sont
offertes pour s'assurer que les principes de la loi vont être
respectés. Et un des principes de la loi, c'est que l'organisme, en
vertu de l'article 64, s'astreigne à ne recueillir que les
renseignements qui lui sont absolument nécessaires. Or, cette notion de
la nécessité, c'est celle qu'on essaie actuellement de
circonvenir dans l'analyse de tous les mandats de recherche, de tous les
mandats qui sont confiés à des organismes, à des
sociétés ou à des firmes du type d'Acrofax. Mais on n'a
pas, au moment où on se parle, établi tous les paramètres
de ce que pourrait être, par exemple, une directive destinée aux
organismes concernant le recours à de tels services.
M. Boisclair: Pour résumer, ce que vous me dites, c'est
que ça n'a pas été demandé? Ça a fait
l'objet de discussion, mais vous n'avez pas l'assurance que quelqu'un qui est
bénéficiaire de prestations d'assurance sociale, si jamais on va
vérifier dans son dossier de crédit...
M. Foisy: Au moment où on se parle, non.
M. Boisclair: Non. Parce que c'était là encore un
objet litigieux. J'essaie de voir au-delà de... La commission avait
soulevé, bien sûr, toute la question du problème, ce qu'on
appelle "aller à la pêche". Vous vouliez éviter qu'ils
puissent questionner dans n'importe quel dossier mais, moi, je crois que ce
serait important. J'exprime ce souhait de façon personnelle: au moins
que la personne, lorsqu'on va vérifier dans son dossier de
crédit, en soit avisée. Bien des gens se questionnent même
sur la légalité de ce geste parce que, lorsqu'une personne
demande une prestation d'aide sociale, jamais on ne lui demande son
consentement pour qu'on aille vérifier dans son dossier de
crédit. Vous êtes conscient de cette
réalité-là?
M. O'Bready: Oui. M. Ouimet voudrait peut-être ajouter
quelque chose sur ce contrat qui est...
M. Ouimet (André): En fait, on a trois contrats
présentement avec Acrofax. Il y a celui du ministère du Revenu,
il y a celui qui lie aussi le ministère de l'Éducation, en fait
le ministère de l'Enseignement supérieur, et il y a celui du
ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu.
Dans les deux premiers, il est prévu qu'il n'y a pas de trace de
consultation faite par les ministères qui est laissée au dossier
de la personne et, lorsque la personne consulte son dossier, il est
prévu aussi que la personne sait que le ministère du Revenu, par
exemple, a consulté son dossier. Je ne peux pas vous dire exactement si,
dans le cas du ministère de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu, on a les mêmes clauses au contrat.
M. Boisclair: Elles ne sont pas là. Ça ne sera pas
long.
M. Ouimet: Je n'ai pas le contrat sous les yeux
présentement.
M. Boisclair: Je l'ai, moi. Elles ne sont pas là.
M. Ouimet: Le problème, c'est d'avoir la dernière
version parce qu'il y a eu plusieurs versions.
M. Boisclair: J'ai le contrat qui a été
signé. M. Ouimet: Ah bon!
M. Boisclair: Je fonctionne avec les documents qu'on nous remet
et vous savez que ça n'a pas été simple d'avoir ce
contrat-là. Vous connaissez comme moi... On a demandé même
de débattre de ce contrat-là à l'occasion d'une commission
parlementaire spéciale qui a été demandée par ma
collègue, la députée de Hoche-laga-Maisonneuve.
Finalement, ce contrat-là, on l'a obtenu par la bande. On ne se fera pas
de cachette, personne. Moi, je discute du contrat qui est en vigueur à
l'heure actuelle et non pas des suppositions, des ententes verbales et des
lettres d'intention.
Mme Wallace (Carole): Est-ce que je peux juste dire quelque
chose? Je pense que c'est un bel exemple où il faut regarder non pas
juste la lettre de la loi mais l'esprit. C'est sûr que si on cherche dans
la lettre pour trouver où c'est écrit que le ministère
doit dire à une personne qu'il a consulté son dossier de
crédit, on ne va pas le retrouver dans la loi, mais l'esprit de la loi
veut qu'une personne sache quand un organisme public recueille des
renseignements à son sujet auprès d'un tiers. Alors je pense que
dans ce sens-là la proposition que vous faites est très
intéressante et je pense, à un moment donné, que c'est
sûr que ça doit revenir sur le tapis.
M. Boisclair: Ça doit absolument revenir. J'entendais M.
O'Bready, tout à l'heure, qui disait: On n'a pas reçu de
plaintes. Je pense que ce n'est pas par le nombre de plaintes qu'on va
justifier la pertinence des demandes qui sont faites. Si les gens ne sont
même pas avisés qu'on est allé vérifier dans leur
dossier de crédit, on a un droit tant et aussi longtemps qu'il y a un
recours qui peut s'exercer.
M. O'Bready: Je le sais. Je voudrais juste vous
répéter qu'en ma présence, lors d'une rencontre, il avait
été discuté... Je sais que M. White - il n'est
malheureusement pas ici - avait souligné ce fait que dans les deux
autres contrats que nous avions les gens étaient informés. Le
responsable de l'action à la MMSR avait répondu qu'il
était prêt à en discuter mais que ça pouvait
soulever certains problèmes d'efficacité, je ne le sais pas. Je
sais que M. White devait poursuivre les discussions sur ça. Moi,
écoutez, je n'ai pas d'objection à vous informer qu'il y aura un
amendement qui sera fait à cet effet-là. Je vous dis qu'il y en
aura un de fait sur la portée du contrat. Je pourrai vous le faire
savoir. Je regrette, mais je ne peux pas vraiment vous répondre sur
ça parce que je n'ai pas moi-même négocié cet
amendement-là. L'autre, je l'ai négocié parce qu'il
était assez fondamental, celui-là m'était apparu comme un
petit peu plus technique, mais je pourrai vous tenir au courant. Remarquez
qu'on ne veut pas le cacher. D'ailleurs ce document-là, une fois qu'il
sera déposé chez nous, d'après moi, deviendra un document
accessible, le document amendé. Alors, vous pourriez peut-être
avoir moins de trouble à l'avoir.
M. Boisclair: C'est parce que, vous comprenez, vous vous faites
très rassurant et j'aimerais bien me sentir aussi assuré que vous
et je n'ai pas grand-chose pour me rassurer, là,
si ce n'est, apparemment, une lettre de ministre et possiblement des
discussions qui vont se faire au moment où on... Possiblement qu'on
informera le citoyen concerné s'il y a... Dans tout ça, il y a un
changement d'attitude important de la part de la Commission, peut-être de
façon très justifiée, qui a été
rassurée, mais il y avait aussi toute la question du... J'aimerais
ça revenir au contrat, peut-être le contrat original. La crainte,
aussi, était le montant maximal du contrat qui était de 945 000
$. On pourrait faire un calcul rapide pour voir que c'est de là qu'est
partie toute la polémique. Bien sûr, c'était: Ne peut
excéder. Mais il peut quand même... Pourquoi on n'aurait pas mis
alors - je ne sais pas moi? -500 000 $ ou 200 000 $ ou si ces
enquêtes-là vont être faites sur un très petit nombre
de personnes qui sont présumées fraudeuses? La question, encore
là, demeure.
M. Messier: M. le Président.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Saint-Hyacinthe.
M. Messier: II me semble qu'on est très loin du rapport
annuel de la Commission. C'est parce que là vous posez une question et
c'est vraiment de l'interprétation parce que ce n'est pas le
président qui a signé le contrat, c'est le ministère de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et avec un autre
intervenant. Là, vous lui demandez d'interpréter la
négociation qui s'est faite entre deux parties qui ont été
convoquées pour le rapport annuel. Je comprends très bien le
point de vue, mais là, je ne suis pas pour entrer dans le détail
que, si M. le président s'avance là-dedans, on va le regarder
aller mais je pense qu'il va y avoir certains problèmes.
Le Président (M. Paré): Non, j'aimerais juste
rappeler que ici, si on étudie le rapport annuel, ça veut dire
qu'on a le droit de toucher des dossiers qui ont été
d'actualité au cours de l'année et effectivement...
M. Messier: Est-ce qu'on va entrer dans le détail de
l'entente signée à savoir pourquoi ça a été
signé à 500 000 $ et non à 600 000 $?
M. Boisclair: Pourquoi pas?
M. Messier: Quelle sorte de réponse vous allez avoir? Il
va dire: Ça ne me regarde pas. Il va attendre la réponse du
président, mais, moi, ma première réponse, je veux dire,
ça ne me regarde pas.
Le Président (M. Paré): J'aimerais juste rappeler
que nous sommes ici justement pour regarder le rapport annuel de la Commission.
Ça veut dire les activités, les gestes et les dossiers qui ont
été d'actualité au cours de l'année sur lesquels la
Commission s'est penchée. Comme ce fut un des dossiers...
M. Messier: J'en suis fort aise.
Le Président (M. Paré): ...sur lesquels la
Commission a pris une position publique, je crois qu'il est tout
à fait de mise qu'on puisse en discuter et aller au fond des choses.
M. Messier: II me semble que l'intervenant ce n'est pas le
président de la Commission qui devrait être là, c'est plus
le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu,
surtout s'il y a eu des amendements, surtout s'il y a négociation. En
tout cas, j'attends la réponse du président à savoir
pourquoi ça a été négocié à ce
prix-là. Mais avancez-moi là-dessus.
M. O'Bready: Moi, je ne peux définitivement pas vous
répondre sur ça. Je veux dire, je n'ai pas participé aux
négociations et personne de la Commission non plus. Moi, tout ce que je
peux vous répondre c'est que, évidemment, il y a eu beaucoup de
progrès dans les discussions qui ont entouré le contentieux
autour de ce dossier-là.
Deuxièmement, je vous dis qu'à date on semble se diriger
vers certains changements au contrat qui pourraient satisfaire les exigences de
la Commission, mais je n'ai jamais dit, et je ne dirai pas non plus, que nous
ne continuerons pas à surveiller l'application du contrat. Et seuls des
faits postérieurs que je ne peux pas deviner ou dont je ne peux pas
présumer l'existence aujourd'hui pourraient démontrer... Par
exemple, c'est bien évident ce que M. le député dit, si on
se rend à 900 000 $, bien à raison de 5 $ ou 6 $ l'enquête,
on pourrait peut-être faire un calcul mathématique et puis dire:
II y a pas mal de fraudeurs. Mais moi, je ne suis pas capable de tirer cette
conclusion-là.
M. Messier: Parfait, c'est le style de réponse que...
M. O'Bready: Très honnêtement, je ne veux pas
être... M. le Président, vous aurez compris que je ne peux pas
présumer...
M. Messier: Parce que notre rôle, ce n'est pas
d'évaluer.
M. O'Bready: Je vais répondre tout à fait
honnêtement aux membres de la commission. Je vous donne la situation
telle quelle est aujourd'hui, l'heure juste, je peux vous dire ça. Je
suis prêt à n'importe quel temps aussi à tenir la
commission informée de ce... D'ailleurs, ça va paraître
dans notre prochain rapport annuel, définitivement. Je crois que le
dossier sera...
M. Boisclair: Peut-être pour conclure, si on peut,
souhaitons juste que ça se règle.
M. O'Bready: Voilà.
M. Boisclair: Je félicite, peut-être, la Commission
pour le travail qui a été fait. Espérons que le ministre,
de qui on a pas de raison de douter de sa bonne foi dans ce dossier-là,
donnera suite à la lettre qu'il vous a transmise et qui vous a permis de
vous faire plus rassurant à l'égard de ce contrat-là.
Cependant, M. le Président je pense que c'est une
possibilité qu'on doit envisager, si le contrat n'était pas
réglé de façon satisfaisante à l'égard de la
Commission, est-ce que la Commission pourrait se prévaloir, par exemple,
des dispositions prévues à l'article 133 de la loi de la
commission d'accès et déposer, par exemple, un rapport
spécial à l'Assemblée nationale?
M. O'Bready: La Commission pourrait, entre autres choses, faire
ça. C'est bien clair. Je veux dire, comme M. Ouimet fait remarquer,
c'est qu'on leur a donné un avis final, nous autres, finalement, sur le
dossier, et cet avis-là pourra être transmis à
l'Assemblée nationale si, évidemment, on n'est pas d'accord,
comme la loi nous permet de le faire. C'est une des façons qu'on peut
utiliser, l'autre étant de le dénoncer dans le rapport annuel.
Bon, r.ïoi, aujourd'hui, je ne peux vraiment pas vous dire ce serait quoi
la solution ultime parce que tant que le dossier ne sera pas rendu à
l'étape finale...
M. Boisclair: Mais c'est une possibilité que vous
envisagez?
M. O'Bready: Oui, c'est une possibilité que...
M. Boisclair: Si jamais ça ne se réglait pas comme
vous le croyez, vous n'envisagez pas la possibilité de soumettre un
rapport spécial à l'Assemblée nationale?
M. O'Bready: On n'en a pas discuté actuellement
très honnêtement alors...
M. Boisclair: Vous n'en avez pas discuté.
M. O'Bready: Mais je vous dis que ça existe dans notre
loi. Alors, ce n'est pas exclu. C'est clair. (16 h 15)
M. Boisclair: Peut-être terminer juste sur cette petite
question-là. On aura l'occasion d'y revenir au moment de la discussion
sur le projet de loi 62 qui apporte un certain nombre de modifications. On
pourrait peut-être attendre mais, en tout cas, il y a un certain nombre
de questions qu'on se pose au niveau... Il y aura une modification par
l'article 46 de la loi 62. On dit: "L'article 25 de la Loi sur la
sécurité du revenu est modifié par l'addition, à la
fin du premier alinéa, de ce qui suit: malgré le paragraphe 4 de
l'article 57." On vient dans le fond tout simple- ment donner une protection
plus grande pour des renseignements personnels du nom, de l'adresse des
personnes qui en bénéficient. Il serait intéressant de
voir, et je pense qu'on en discutera en commission, exactement quelles vont
être les conséquences de cette modification.
M. O'Bready: D'accord. Comme vous le soulignez peut-être
sur la loi 62, si on s'entend, comme je vous le dis, par respect et à la
fois pour la procédure qui est prévue pour les 11 et 12
septembre, une commission consultative assez extensive, je n'ai absolument pas
prévu de discuter ni sur notre avis ni sur le projet de loi étant
donné que...
M. Boisclair: On y reviendra.
M. O'Bready: ...Mme la ministre sera ici peut-être pour
audi alteram partem.
M. Boisclair: Peut-être, M. le Président, changer de
sujet un peu et parler de l'application de la loi au secteur privé. Dans
l'introduction de votre rapport, la Commission rappelle "que, dans son rapport
"Une vie privée mieux respectée; un citoyen mieux
informé", elle proposait au gouvernement que la collecte de
renseignements personnels auprès d'organismes privés -
préférait du moins - soit dorénavant soumise à son
autorisation préalable." Quelles sont les attentes de la commission
à cet égard-là? Ça aussi, bien sûr, on en
discutera un peu à l'occasion du projet de loi 62. Est-ce que votre
réflexion là-dessus a évolué? La commission de la
culture, si je me souviens bien, avait cerné un certain nombre de champs
prioritaires, que ce soient le secteur bancaire et un autre, là.
M. O'Bready: Grosso modo, l'attitude de la Commission
était qu'elle partageait l'opinion, à ce moment-là, que
certains secteurs prioritaires, de mémoire, c'étaient les
banques, les compagnies d'assurances, les agences de crédit entre
autres, bon, c'étaient là certains des secteurs prioritaires du
secteur privé que la Commission d'accès, à ce
moment-là, disait, oui, je pense que ce serait intelligent qu'ils
puissent être assujettis à la loi ou à une loi
d'accès. Par après, un comité interministériel a
été créé sous l'égide du ministère de
la Justice. La Commission d'accès a participé par la
présence de M. White au cheminement de ces travaux-là. Il y a un
volumineux rapport qui a été publié, et on en a fait une
espèce de résumé un peu plus succinct. Une commission
parlementaire devait être convoquée, si ma mémoire est
fidèle, à l'automne dernier, au printemps. Finalement, ça
été remis.
Là, au moment où je vous parle, M. le
député, je ne sais pas quand la Justice voudrait convoquer cette
commission parlementaire pour entendre les intervenants sur
l'opportunité d'étendre au secteur privé ou, en tout cas,
à
certains domaines du secteur privé la loi d'accès ou une
loi d'accès et une loi de protection de renseignements privés. La
réflexion de la Commission est à peu près essentiellement
la même. Nous participerons à cette consultation-là. Nous
dirons: Nous sommes, à toutes fins pratiques, pas mal en accord avec les
résultats, avec les travaux du comité dont je vous ai
parlé tantôt. Et nous dirons probablement aussi qu'on pense
qu'avec des moyens financiers et avec des ressources humaines
appropriées, la Commission d'accès pourra être un outil
intéressant pour faire respecter cette extension-là au secteur
privé. Alors, c'est à peu près ce que nous faisons. Nous
sommes un peu en attente actuellement. On est un petit peu à la remorque
de cette commission parlementaire qui devrait être convoquée p~r
le ministère de la Justice. Ce n'est pas nous, les porteurs de ballon,
si vous me passez l'expression. Mais je vous répète qu'on pense
toujours, et je pense que vous voyez comment ça devient parfois
difficile, en tout cas, de séparer le secteur privé et le secteur
public.
Quand le législateur, je l'ai dit tantôt en réponse
à M. le Président, a décidé en 1982 de commencer
par couvrir le secteur public, bon, il a dit: J'ai une préoccupation de
transparence de l'appareil gouvernemental à différents palliers.
Le secteur privé, c'est sûr que ça peut entraîner
certaines difficultés. Je ne voudrais pas entrer là-dedans. Je ne
suis pas un grand spécialiste de ça. Là, il y a des
difficultés qui n'existent pas pour l'appareil gouvernemental, ne
serait-ce que des frontières, ne serait-ce que des lois
différentes, les banques, les caisses populaires - c'est un exemple que
je prends - les compagnies qui pourraient aller établir leur
siège social à Edmunston et à Hawkesbury en Ontario et il
arrive quoi? Alors, il y a toutes sortes de problématiques qu'on m'avait
dites, qu'on m'avait identifiées à mon arrivée à la
Commission. À date, on n'a pas eu l'occasion vraiment d'en
débattre sauf que, moi, de l'expérience que j'ai depuis deux ans
- Acrofax est un exemple et il pourra peut-être y en avoir d'autres - je
vois que parfois le secteur privé et le secteur public chevauchent dans
les mêmes dossiers et ça devient compliqué et ça va
devenir compliqué pour les citoyens aussi parce que, je vous le
répète, le Code civil est là. Ce sont beaucoup de voeux
pieux, à la section 20, ce n'est pas en vigueur, mais... En plus de
ça...
Je suis avocat et je sais que c'est bien beau de dire, dans le Code
civil, que tout le monde a droit au respect de sa vie privée, mais
d'intenter une poursuite en Cour supérieure et de se ramasser en appel,
etc., ce n'est pas toujours facile. Bon. La même chose existe... Il y a
une espèce de duplication, en tout cas. Tu sais, il y a la Loi sur la
protection du consommateur qui permet, par exemple, de faire corriger - me
dit-on - des renseignements qui se retrouvent chez Acrofax. Prenons le cas
d'Acrofax, c'est la plus grosse agence de crédit qu'il n'y a pas au
Québec, là. Ils peuvent faire corriger des données dans
ça, mais elle n'a pas la même procédure de correction que
nous autres, puis tout ce que la compagnie Acrofax peut faire - parce que j'ai
posé la question à un vice-président - c'est de mettre une
mention que M. O'Bready a demandé que son dossier soit corrigé,
mais elle ne le corrigera pas nécessairement. Il va y avoir une mention
dans le dossier. Ça respecte la loi. Alors, vous savez, Code civil, Loi
sur la protection du consommateur, loi d'accès à l'information,
le citoyen, dans tout ça, à un bon moment donné, il va
falloir qu'il se retrouve. Alors, moi, je pense que ma seule réponse,
c'est que oui, ça sera probablement opportun de l'étendre. Dans
quelle mesure? Je ne peux pas vous répondre aujourd'hui mais en tout
cas, les secteurs prioritaires... Vous m'avez posé la question:
"Partagez-vous toujours à peu près ce point de vue-là?" Je
vous réponds que oui parce que ce sont les secteurs les plus
visés. Je vous -ôponds que la commission, pour être un
véhicule intéressant, a le "know how" pour faire ça.
Maintenant, c'est bien évident que ça va demander un paquet de
discussions et ce n'est pas juste une question de dire que ça prend plus
de monde et plus d'argent. Je suis bien conscient que le gouvernement ne peut
pas en mettre comme ça, de façon absolument indéfinie,
mais ça devrait être quelque chose... D'après moi, si on
veut vraiment donner des suites à des dispositions qui sont
déjà énoncées également dans la charte, bien
ça pourrait être intéressant. Et on va participer
activement à ces discussions-là.
M. Boisclair: Puis vous avez déjà participé.
Il y a des gens qui ont été chez vous participer à des
colloques, en Europe et un peu partout.
M. O'Bready: Ah oui! Effectivement.
M. Boisclair: Comparativement à certains pays d'Europe, on
est loin derrière, en termes de réglementation. Puis il y a
déjà plusieurs réflexions qui se font, dans certains
milieux privés, quant à savoir de quelle façon on pourrait
étendre la loi au secteur privé. Est-ce que c'est, par exemple,
par une loi-cadre?
M. O'Bready: Réglementation.
M. Boisclair: II y a différentes possibilités,
là. Il y a des experts qui sont beaucoup mieux informés que moi
là-dessus, mais la question, on se la pose, et c'est un peu... Vous
comprenez la situation dans laquelle on est. Les gens se lancent tous un peu la
balle. Il y a le problème entre le ministère des Communications
et le ministère de la Justice. Un prend une certaine
responsabilité. Et là, tout le monde expimie son voeu de
l'étendre au secteur privé, mais il n'y a personne qui, dans le
fond, en fonction de
l'information qu'on a - mon opinion est peut-être biaisée -
semble prendre un leadership, présenter vraiment un plan d'action tenant
compte des restrictions et des contraintes que vous avez exprimées
très justement. Mais, j'aimerais tellement qu'il y ait une bougie
d'allumage, à quelque part, qui puisse faire partir le moteur, que
quelqu'un puisse assurer un leadership. Il y a, entre autres, la Ligue des
droits et libertés, il y a plusieurs groupes de pression, là, qui
s'articulent alentour de cette question-là. Et je suis convaincu que
vous avez plusieurs recherches qui ont été faites à
l'interne, chez vous, là-dessus. Sans doute que vous avez même
déjà des scénarios de prêts.
M. O'Bready: C'est-à-dire que nous sommes en train de
travailler à la préparation de commentaires qu'on voudra
soumettre à la commission parlementaire à ce moment-là. Je
pense que c'est M. Foisy qui chapeaute ce dossier-là. Mais je vous
répète que, bon, je n'ai pas à juger, moi, du travail du
ministère de la Justice, et je n'ai pas non plus à vouloir lui
refiler le bébé, là. Je vous dis simplement que les
travaux du comité étaient sous la férule du
ministère de la Justice et c'est lui qui doit convoquer la commission
parlementaire. Moi, je me rappelle tout simplement... À un moment
donné, je pense, lors d'un colloque du Barreau, mais là, je vous
dis ça sous toutes réserves, le ministre de la Justice avait
annoncé son intention d'édicter...
M. Boisclair: Oui. Il l'a annoncé en commission
parlementaire.
M. O'Bready: ...les dispositions du Code civil, je pense, le plus
rapidement.
M. Boisclair: II l'a anoncé en commission parlementaire,
sauf que les dispositions du Code civil, il veut les rentrer en application par
bloc, tout simplement.
M. O'Bready: Ah bon! En tout cas.
M. Boisclair: D'un seul coup et non pas par bloc.
M. O'Bready: Moi, je pense que de toute façon, à un
moment donné, les problèmes vont faire qu'on devra, je vous le
répète, tantôt, soit par... Évidemment, il y a
plusieurs façons de le faire aussi, là. Ça ne veut pas
dire que ça sera une loi astreignante au point de dire qu'on
pénalise tout le monde. Vous l'avez mentionné vous-même.
Ça pourrait être une loi-cadre. Certains pays d'Europe ont
adopté l'approche d'autoréglementation, dans le secteur banquier
entre autres, si je me rappelle bien. C'est vraiment un débat assez
complexe en lui-même qui fera l'objet de longues interventions. J'en suis
persuadé.
M. Boisclair: Peut-être que M. Foisy voulait...
M. Foisy: Pour compléter le propos de M. le
président, vous relirez, en annexe au rapport qui a été
produit par le ministère de la Justice, l'annexe consacrée
à l'étude de faisabilité qui a été
faite.
M. Boisclair: Je ne l'ai pas lue.
M. Foisy: Vous y trouverez des éléments
d'intérêt, entre autres choses la possibilité de mettre en
application, au niveau du secteur privé, des principes que l'on retrouve
dans la loi sur l'accès, notamment en ce qui concerne l'information
à donner à la personne concernée, la
nécessité de recueillir chez elle le consentement pour
communiquer les renseignements, ainsi de suite. Et, dans un autre volet, la
possibilité de mettre graduellement en application ce qui peut
s'avérer, somme toute, une réforme assez complexe. Or, la
commission, sans se commettre formellement, a été
représentée au niveau de l'élaboration de ce
rapport-là, qui avait été produit par trois personnes.
Vous y verrez que, dans le fond, il y a deux préoccupations, celle d'y
arriver, de permettre des conditions objectives d'application douce, et
deuxièmement, d'éviter un écueil, un piège qui
était tendu, finalement. C'est que devant la tâche à
accomplir, qu'il y ait une espèce, que ça
dégénère, si vous voulez, en conflit ou en concurrence
entre organismes, à savoir qui va appliquer la loi. Or, il y a des
principes, là, qui apparaissent dans ce volet-là, où on
dit: Ça va être important que ce soit un organisme, pas trois, pas
quatre. C'est peut-être préférable d'avoir une approche
globalisante plutôt que toute une série de lois sectorielles, mais
dans le but de faire avancer une réflexion, et non pas de promouvoir les
intérêts d'un organisme par rapport à un autre. C'est un
peu, si vous voulez, en clair, les écueils qu'on a voulu éviter,
c'est-à-dire que ça dégénère en conflit
entre organismes.
M. Boisclair: On soulevait tout à l'heure, dans la
discussion sur l'extension au secteur privé, aussi lorsqu'on parlait du
contrat au ministère de la Main-d'oeuvre... La Commission, dans son
rapport, nous parle qu'elle veut se refaire une image, veut faire des... Vous
soulevez ça dans votre rapport: La Commission veut se donner une
nouvelle image... Trois firmes de graphisme ont été
invitées à présenter des projets... Peu importe, c'est un
peu le prétexte qui me sert à poser ma question. On regarde le
volume, et, dans le fond, je comprends qu'il y a eu une nette augmentation des
plaintes des citoyens de 23 à 61, les demandes, 249 à 387,
là, si j'ai bien noté les chiffres que vous m'avez donnés
tout à l'heure. Il n'en demeure pas moins que c'est un tout petit
volume, si on compare,
entre autres, le nombre de plaintes qui sont déposées au
Protecteur du citoyen, par exemple. Je ne veux pas juger, vous recevez ce que
vous recevez, vous n'êtes pas là pour aller susciter des demandes,
mais est-ce que la Commission fait quand même un effort pour informer les
citoyens tout simplement de son existence? Des recours aussi qui existent pour
les citoyens? Comment vous voyez un peu cette mission-là de la
Commission?
M. O'Bready: Bon, écoutez...
M. Boisclair: Est-ce que vous avez des budgets, aussi, pour le
faire? C'est peut-être tout simplement ça?
M. O'Bready: Écoutez, la Commission,
définitivement, n'a pas comme mandat comme tel celui de faire de
l'information, en tout cas je parle sur une haute échelle. Moi, j'ai
toujours prétendu que ça pouvait être
considéré un peu comme un pouvoir ancillaire, si on me permet le
parallèle avec le droit corporatif, c'est-à-dire un pouvoir qui
te permet d'atteindre tes objectifs premiers. Bon. J'ai eu avec les
différents titulaires du ministère des Communications qui sont
responsables de la loi d'accès plusieurs discussions à cet
effet-là, et avec la titulaire en poste présentement, Mme
Hébert, je sais que Mme la ministre est préoccupée,
justement, de demander à son service de la loi d'accès de
consacrer plus de temps et plus d'argent à la fois sur la formation et
sur l'information. Pour vous répondre, à la Commission
d'accès, nous en faisons un peu, avec des moyens très
limités, parce que nous n'avons pas de budget comme tel. Nous n'avons
pas d'agent, vraiment, c'est-à-dire de direction de l'information. Nous
avons une agente d'information. Nous sommes présents, par contre,
personnellement, au niveau du président, au niveau des commissaires, au
niveau de l'ensemble du personnel de la Commission, avocats, dans toutes sortes
de congrès, conférences, colloques où on nous invite,
comme au dernier congrès du Barreau, Me Ouimet a animé un
atelier, moi je vais assister par exemple à des congrès, comme
l'Union des municipalités, Mme Wallace est allée à
différents colloques... Bon, tout le monde y va. Je vous
répète que c'est fait un peu avec les moyens du bord. Je suis
d'accord avec vous que la loi doit être mieux connue. Par contre, il ne
faut pas non plus faire la promotion de la loi comme étant, comment
dirais-je, une espèce de denrée, en disant au monde: Venez-vous
en, on vous attend puis on a du monde, puis faites des plaintes. Et, avec un
peu d'humour, je voudrais vous dire qu'on a peut-être 33 plaintes, mais
ce sont toutes des plaintes qui sont dans notre juridiction. Il y en a, des
fois, qui ont beaucoup de plaintes, mais ils en déclinent une grosse
partie hors juridiction. Ceci étant dit, sans
méchanceté.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boisciair: C'est correct, parce que je parlais à M.
Jacoby, récemment, qui me soulevait le même problème.
M. O'Bready: Mais vous savez, aussi, bon... Il faudrait...
M. Boisclair: C est parce que ce n'est pas...
M. O'Bready: II y a peut-être une chose que je voudrais
vous dire aussi. Ça, c'est peut-être important que, de
façon plus sérieuse, les membres de la commission parlementaire
réalisent que ce qui se rend chez nous, dans le fond, ce sont les cas
problèmes. Il faudrait vous dire que, dans certains organismes,
là, un organisme, récemment, une municipalité, je pense,
ou, non, un CLSC disait à Me Ouimet qu'il était rendu avec du
monde à plein temps pour traiter toutes les demandes d'accès.
Alors, il y a peut-être 90 % ou 95 % des demandes d'accès et de
consultation...
M. Boisclair: Qui sont réglées...
M. O'Bready: ...de ton dossier personnel qui se règlent au
niveau des responsables. Il y a énormément de progrès qui
a été fait dans ça, énormément de
progrès. Ça, il faut le dire quand même, là. Des
fois, on a des statistiques, mais moi, les statistiques, ceci étc t dit
sans critique pour le ministère des Communications qui fait des
statistiques, ce n'est pas facile de compiler des statistiques. C'est quoi, une
demande d'information en vertu de la loi, par rapport tout simplement à
une demande d'information? Je vais prendre une ville, je connais mieux ce
monsieur-là, tu sais. Tu ne t'adresses pas au responsable, ce n'est pas
compilé comme une demande d'information. (16 h 30)
Mais, effectivement, il faut vous dire qu'il y a une culture qui est en
train de s'établir. La loi, elle existe depuis, je vous disais, huit
ans, mais six ans d'application en juillet cette année. Six ans
d'application en juillet et je regardais ça, on est rendu à 1735
demandes de révision, en date du 31 juillet 1990. Ça, c'est plus
récent que le rapport annuel, divisé par six, parce que ça
fait six ans d'application, ça fait 290 demandes de révision par
année, à peu près ça. Mais ça, là,
écoutez, il y en a toute une quantité qui se règle au
niveau des responsables. Il y en a une quantité qui se règle,
aussi, des règlements, des désistements ou des règlements
hors cour, appelez ça comme vous voudrez, on en a de plus en plus chez
nous. Alors, il y a une culture, quand même, qui est en train de
s'implanter.
Il y a une certaine jurisprudence aussi qui s'est bâtie, comme,
par exemple, en matière d'accès aux documents. Il y a une
jurisprudence
dans ça. On commence à savoir, par exemple, que tel
document, la partie qui est accessible et la partie qui est un avis ou une
recommandation, on sait que... Alors, il se fait un petit peu de
médiation, chez nous. Mais la loi, elle sert beaucoup. Je suis d'accord
avec ça. C'est sûr qu'il ne faut pas prendre juste les
statistiques qu'il y a. Mais c'est important de vous mentionner quand
même que les responsables font un bon travail, je vous le dis parce qu'on
n'a pas souvent... On est plutôt sur la sellette quand on blâme
quelqu'un, mais, là, je veux quand même vous dire qu'il y a
beaucoup de responsables, au niveau dos différents organismes,
ministères, organismes, établissements de la santé, qui
font un excellent travail. On a encore certains cas problèmes. Nous
offrons de l'aide technique à ce monde-là, nous fournissons
certains formulaires, mais c'est sûr que... Ça peut donner parfois
l'impression que la loi ne sert pas.
Pour revenir à votre question originale, M. le
député, je pense que c'est important qu'on fasse de
l'information, que les gens sachent que... Et la Commission en fait, mais dans
les limites de ses moyens. Un bel exemple: cette année, nous avons fait
l'expérience de "La minute juridique" et c'a été
très bien, c'a éîé bon. Mais on ne pouvait pas
consacrer des milliers de dollars à ça parce qu'on n'a pas des
budgets très faramineux.
M. Boisclair: Sur un cas bien particulier, est-ce que la
Commission a rendu une décision dans le cas Directron Média?
M. O'Bready: De?
M. Boisclair: Oirectron Média.
M. O'Sready: II y a 14 ou 15 dossiers, à ma connaissance,
avec Directron Média. J'en ai rendu moi-même deux ou trois, qui ne
m'ont pas re,\oU nécessairement très populaire dans le milieu
municipal, mais que voulez-vous que j'y fasse.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. O'Bready: Je dois vous dire qu'il y en a qui sont en appel
également. Il y en a d'autres qui sont...
M. Boisclair: Le Directron Média, qui veut avoir les
banques de données de l'Inspecteur général des
institutions financières.
M. O'Bready: Cette décision a été rendue,
puis elle est en appel.
M. Boisclair: Quelle décision vous avez rendue dans ce
cas-là?
M. O'Bready: Ce n'est pas moi qui ai rendu la décision,
c'est Mme la commissaire Giroux. M. Boisclair: Mais c'est la
Commission.
M. O'Bready: Oui, c'est Mme Giroux. C'est une décision
sur... Vous parlez de l'Inspecteur général des institutions
financières?
M. Boisclair: Ils voulaient avoir accès à la
banque...
M. O'Bready: C'est une décision qui était
partagée, qui rendait certaines choses - de mémoire, là -
accessibles et d'autres pas, et les deux parties sont en appel. Donc personne
n'est content de la décision...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Doyon): ...et l'Inspecteur
général et Directron. Probablement un bon jugement.
M. Boisclair: Comment sont publiées, c'est une question,
vos décisions? C'est parfois difficile de les obtenir, peut-être
parce que je ne suis pas familier et que je suis quand même un nouveau.
Est-ce qu'elles sont publiées, est-ce qu'il y a un recueil, est-ce qu'il
y a...
M. O'Bready: Oui, nous sommes répertoriés dans
SOQUIJ.
M. Boisclair: Vous êtes dans SOQUIJ?
M. O'Bready: Nous sommes dans SOQUIJ, oui. Chaque mois, il y a un
fascicule qui paraît, mais on est limité à... Tous les
trois mois, excusez. Nous sommes limités à une centaine de
décisions par année. O.K.? Parce que les recueils sont... Par
contre, vous pouvez, chez nous, en tout temps, toute personne qui nous en fait
la demande de décisions non publiées, il y a même des
abonnés, chez nous, qui demandent de recevoir copie. Certains bureaux
d'avocats, certains ministères demandent d'avoir copie de toutes nos
décisions. Mais nos décisions sont répertoriées.
Elles sont toutes publiques. Elles sont parfois dénominalisées,
dans le sens que, si c'est une personne, par exemple, qui veut avoir
accès à son dossier personnel, ça va être
marqué A versus le ministère X...
M. Boisclair: On le voit très bien dans votre rapport.
M. O'Bready: Nos décisions sont toutes
répertoriées avec SOQUIJ et, bien voilà, tous ceux qui
sont abonnés... Évidemment, la plupart sont des bureaux
d'avocats, mais SOQUIJ a accès. Nos décisions, je vous le
répète, toutes nos décisions sont quand même
accessibles et toute personne qui veut... Si jamais vous
souhaitez en avoir des copies...
M. Boisclair: J'aurais peut-être le goût de soulever
avec vous toute la problématique de l'accès aux documents de
l'État. Entre autres, de quelle façon est la commercialisation,
que sont tentés d'en faire les gouvernements? Ça fera aussi
l'objet de discussions au moment du...
M. O'Bready: Au moment du projet de loi.
M. Boisclair:... projet de loi 62 parce qu'il y a toute la
question du couplage de fichiers.
M. O'Bready: La commercialisation, le changement de
finalité, est-ce que la loi sur l'accès a été faite
pour permettre à des entreprises comme Directron, par exemple - je
prends celle-là parce que vous la connaissez - d'y avoir accès
pour des fins commerciales, entre guillemets. C'est un débat qu'il
faudra certainement avoir parce que c'est une loi qui a quand même
beaucoup évolué depuis un certain nombre d'années, alors
il y a des choix...
M. Boisclair: Est-ce que vous souhaitez que ces
débats-là se fassent à l'occasion de l'adoption du projet
de loi 62 ou si vous préférez au moment de la révision
quinquennale de la loi?
M. O'Bready: Ça a commencé à être
discuté au moment de la première révision de la loi et il
y en aura une deuxième qui va se faire en 1992, je pense...
M. Boisclair: En 1992, oui.
M. O'Bready:... mais je suis convaincu que ça va
être soulevé au moment du projet de loi 62, c'est clair...
M. Boisclair: Oui.
M. O'Bready:... parce qu'il y a des dispositions qui font
qu'indirectement on y touche et je pense qu'il faut finir par en parler de
ça. D'après moi, c'est le souhait de tout le monde. Alors il
faudrait discuter. Est-ce que les banques de l'État doivent être
commercialisées? Est-ce que la loi sur l'accès permet à
n'importe quelle entreprise d'y avoir accès parce que c'est comme
ça dans la loi? Sinon, est-ce qu'on devrait procéder autrement?
Il y a beaucoup de personnes qui soulèvent, par exemple, le changement
de finalité. Des informations qui sont données à
l'État pour une fin très précise peuvent-elles servir
à d'autres fins sans le consentement de la personne? Voilà une
belle question à se poser.
M. Boisclair: II y avait la fameuse décision que vous avez
rendue dans la Communauté urbaine de Québec contre la Chambre
d'immeuble.
M. O'Bready: C'est-à-dire que dans ça il y en
a...
M. Boisclair: La Chambre d'immeuble, ça risque de...
M. O'Bready: C'est-à-dire que la Chambre d'immeuble, c'est
le juge Goodwin qui a rendu la décision à la Cour
supérieure. Lui, il a statué sur la notion de
propriété du rôle, si vous parlez de ça. Moi, j'ai
rendu une autre décision qui est en appel.
M. Boisclair: Vous avez rendu une décision qui
était contraire.
M. O'Bready: Qui est en appel d'ailleurs. C'est-à-dire que
non, elle n'était pas contraire, jamais.
M. Boisclair: Non?
M. O'Bready: Je statuais sur la détention et non sur la
propriété.
M. Boisclair: Je vous fais dire ça rapidement.
M. O'Bready: Je ne voudrais pas contredire un honorable juge de
la Cour supérieure, M. le député.
M. Boisclair: Ce n'était pas mon intention de...
M. O'Bready: Non, je le sais bien. Je vous dis ça avec un
peu d'humour.
M. Boisclair:.. mais je sais que cette décision que vous
avez rendue a soulevé un peu de...
M. O'Bready: Un peu de vagues. M.Boisclair: Un peu
beaucoup.
M. O'Bready: Elle est en appel actuellement. C'est parce que
c'était sur la notion de détention, je vous le rappelle, versus
la notion de propriété du rôle. Or, une communauté
urbaine détient un rôle. Il s'agira pour la Cour de statuer si
j'ai erré en droit.
M. Boisclair: Je vais vous souhaiter bonne chance.
Écoutez, peut-être revenir sur d'autres sujets qui sont
soulevés dans votre rapport annuel. Toute la question du secteur de la
santé qui a fait l'objet, encore là, de discussions. Les
médias s'y sont intéressés à cette fameuse carte
d'assurance-maladie à microprocesseur où vous avez bien eu
l'assurance du ministère et du ministre que la Commission serait
consultée à toutes les étapes du développement de
ce projet-
là. Qu'est-ce qu'il en est exactement? Est-ce qu'il y a eu des...
depuis la publication du rapport? Vous en faites état dans votre rapport
annuel, alors je présume que la Commission continue de
s'intéresser vivement à ce dossier-là. Est-ce que vous
pouvez peut-être nous informer à savoir où c'en est rendu
aujourd'hui? Parce qu'il y avait une expérience pilote, si je ne me
trompe pas, avec cinq hôpitaux où...
M. O'Bready: Sur la carte à microprocesseur?
M. Boisclair: C'est ça, oui.
M. O'Bready: il y avait deux volets dans le dossier.
Sommairement, je pourrais demander soit à M. Foisy ou à M. Ouimet
qui participent à des travaux de vous donner plus d'information
technique. Moi, je dois vous dire que le dossier avait deux volets. Un premier
volet qui était une informatisation des dossiers médicaux et
l'autre volet qui était l'utilisation éventuelle d'une carte
à microprocesseur pour le dossier médical d'une personne.
Effectivement, à la suite de représentations qui ont
été faites tant auprès du ministre de la Santé que
de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, dépendant de
ses champs de compétence, on nous a associés à certains
travaux par soit le biais, caractère un peu plus juridique, de Me Ouimet
ou, plus technique, du côté de M. White, premièrement.
Deuxièmement, nous avons confié, nous, à la Commission
d'accès un mandat de recherche à un groupe, je pense, que vous
connaissez, qui est le GRID, qui est en train de nous donner un peu les
éventuels impacts ou issues de l'informatisation, par exemple, des
dossiers médicaux, il avait développé une certaine
expertise à l'intérieur du GRID. Il y a plusieurs personnes qui -
je ne voudrais pas entrer dans les détails - mais ces
personnes-là travaillent présentement à l'exécution
du mandat. Un rapport doit nous être remis, quelque chose comme à
la fin d'octobre si ma mémoire est fidèle. Bon,
parallèlement, parce que je vous ai dit qu'on marchait un peu en
parallèle à la Commission d'accès. Parallèlement,
il se fait quand même des travaux chez nous au niveau de
l'informatisation des dossiers médicaux par Jean Foisy et ses
collègues. Du côté de la carte à microprocesseur,
là, il y a des incidences plus juridiques un peu et ça, c'est la
Régie de l'assurance. Me Ouimet suit, participe à des travaux
d'un comité avec différentes personnes. Il n'est peut-être
pas nécessaire de nommer tout ce monde-là, mais je dois vous dire
que nous sommes intimement présents. Mais là, encore là,
il faut toujours faire attention, nous autres, à un certain droit de
réserve aussi parce qu'on aura probablement une bonne journée
à statuer ou à se prononcer. Alors, je vous disais tantôt
que la Commission a deux rôles et on tente de les exercer avec le plus de
discernement possible.
M. Boisclair: C'est justement où je voulais en venir parce
que ça ne doit pas toujours être simple pour vous de participer
à ces travaux d'élaboration de nouveaux projets et
peut-être après les dénoncer ou les approuver parce que,
comme vous le soulignez avec pertinence, vous avez à vous prononcer.
Ça ne doit pas toujours être une tâche simple.
M. O'Bready: Non, ce n'est pas toujours facile et c'est pour
ça qu'il faut toujours faire attention qu'au moment où la
Commission... C'est toujours fait sous toutes réserves, mais c'est
sûr que les collaborateurs de la Commission qui participent à
ça ne lient pas comme telle la décision des commissaires, mais on
tente d'y aller avec, je vous dirai, le plus de discernement possible. C'est le
plus qu'on peut faire. Mais c'est un double rôle qui n'est pas toujours
facile à exercer. Mais, à date, en tout cas, c'a quand même
assez bien réussi. Je dois vous dire que les organismes respectent
beaucoup ça aussi. On ne tente pas de nous mettre en boîte.
M. Boisclair: Dans votre rapport annuel, à moins que
M...
M. Ouimet: Je veux ajouter quelque chose sur la carte à
microprocesseur particulièrement. Sur l'autre aussi, ça
s'applique aussi à l'informatisation. C'est qu'on essaie de
développer notre propre expertise parce qu'il y a des expériences
à l'extérieur du Québec qui se font. Il y a des projets
pilotes, par exemple, en France sur les cartes à microprocesseur. Alors,
on essaie d'avoir une expertise un peu indépendante de ce qui peut se
faire au Québec. Comme M. O'Bready disait aussi, dans le cas de
l'informatisation, on a confié un mandat à une firme, le GRID.
Donc, on développe notre propre expertise avant de donner nos avis
là-dessus.
M. Boisclair: Dans un cas peut-être plus particulier, vous
parlez de la ville de Montréal dans votre rapport en page 21, je crois.
Vous exprimez votre volonté de vous associer au processus visant
à introduire la carte à microprocesseur dans le réseau de
santé. Est-ce qu'au projet, particulièrement de la ville de
Montréal... En page 10 du rapport, vous me dites? Juste pour être
bien sûr que j'ai la bonne référence. C'est ça.
Qu'elle invitait la ville de Montréal à lui faire connaître
ses projets de tests de dépistage de drogue et d'examens médicaux
de préembauche. Qu'en est-il exactement de vos relations avec la ville
de Montréal? Est-ce que c'a été fait?
M. Ouimet: Ça, c'est une tout autre question que les
cartes à microprocesseur, c'est une informatisation dans le domaine des
dossiers médicaux.
M. Boisclair: C'est dans la section santé.
M. Ouimet: C'est ça. Dans le grand secteur santé.
Par le biais des journaux, on a appris que la ville de Montréal voulait
donner un contrat à l'effet de soumettre à des tests de
dépistage de drogue et d'examens médicaux de préembauche
certains de ses employés. Nous, on a dit: Compte tenu de la
problématique que ça soulève au niveau de la protection
des renseignements personnels, on aimerait être associés à
la démarche avant que le contrat ne soit signé. Or, il y a eu un
premier contact de fait avec le directeur général de la ville de
Montréal, qui était responsable de ce dossier, et lui nous a
effectivement informé que tout projet de contrat avec la firme qui
devait faire ces tests de dépistage-là était mis au neutre
pour le moment, le temps que des analyses soient faites. De notre
côté, il y a des gens qui sont en contact avec les
représentants de la ville pour qu'on développe aussi une
expertise, parce qu'à notre connaissance, c'est le ' premier organisme
public qui voudrait imposer des tests de dépistage. Au niveau canadien,
il y a eu un rapport du commissaire fédéral sur les tests de
dépistage. Ce rapport-là a été déposé
au mois de jur je pense, par le commissaire John Grace, juste avant son
départ. Et eux avaient aussi des projets, notamment pour l'armée,
pour le ministère des Transports et un autre ministère dont
j'oublie le nom. Eux avaient déjà des projets. Nous,
c'était le premier projet dont on se rendait compte au Québec, au
niveau public, et on a voulu intervenir tout de suite. Et comme je vous le dis,
l'intervention préalable de la Commission a fait que ça a
gelé le contrat à la ville de Montréal. (16 h 45)
M. Boisclair: Donc, c'est sur les tablettes?
M. Ouimet: Bien, sur les tablettes, je ne sais pas si c'est sur
les tablettes. Ça va sûrement revenir, éventuellement,
mais, pour l'instant, c'est au neutre.
Le Président (M. Doyon): Est-ce que cette
décision-là est due à votre intervention ou est-ce que
vous avez des indications pourquoi la décision de mettre la
pédale douce a été prise là-dessus? C'est
pourquoi?
M. Ouimet: Enfin, les explications qu'on a eues, c'est que la
firme qui procède aux examens médicaux de préembauche pour
la ville de Montréal avait ajouté ce service, si vous voulez,
dans le contrat. La firme dit: En plus des examens de préembauche qu'on
peut faire cette année, ce sont des tests de dépistage. Ça
avait passé dans la machine et c'est arrivé, finalement, sur la
table du conseil. On estime que notre intervention a dû contribuer
à réveiller les gens du conseil, mais il y en a d'autres aussi
qui sont intervenus. Je pense notamment au Syndicat des pompiers, je crois,
à la ville de Montréal, qui est intervenu pour dénoncer,
parce que les pompiers auraient été les premiers visés par
les tests de dépistage. Alors, on estime, nous, quand même, que
notre contribution a fait bloquer...
Le Président (M. Doyon): C'est quoi votre position
là-dessus, est-ce que vous en avez une?
M. Ouimet: Pour l'instant, on n'a pas de position finale.
M. Doyon: Vous avez simplement des inquiétudes ou
quoi?
M. O'Bready: C'est-à-dire que, comme Me Ouimet l'a dit,
nous autres, c'est que, au stockage de renseignements nominatifs qui peuvent
être fort sensibles, on veut bien savoir qui va avoir accès.
D'abord, un, est-ce que c'est nécessaire de compiler tout ça?
J'ai parlé, au début de mon intervention, après-midi, de
la nature du dossier médical qu'un employeur peut compiler sur un
employé. Alors, est-ce qu'il est nécessaire qu'il ait tout
ça? Deuxièmement, est-ce que la confidentialité de ce
fichier-là est assurée? Troisièmement, est-ce que la
qualification des personnes qu'ils consultent est également... Alors,
pour nous, c'est ça les limites de notre mandat, évidemment:
Est-ce que le fichier est nécessaire? Est-ce que les personnes qui le
consultent ont la qualité pour ce faire et est-ce que les données
qui sont dedans, évidemment, ne sont pas abusives? C'est comme quand on
parle de tests de toxicomanie ou de dépistage de drogue ou quoi que ce
soit, c'est évident qu'on peut aller très loin dans ça, je
veux dire on peut parler pendant pas mal de temps sur la nature du dossier
médical. Alors nous, je vous répète que c'est notre
préoccupation, on pense, à l'intérieur de notre mandat en
tout cas, à protéger la vie privée du monde par le biais
des données qui sont dans la loi concernant la protection des
renseignements nominatifs et leur utilisation. Mais, comme Me Ouimet l'a
expliqué, comme, en matière de tests de dépistage, c'est
une première, c'est sûr qu'on n'a pas encore établi de
grands paramètres, parce que là on escompte le faire.
M. Boisclair: Est-ce qu'on est toujours dans la même
foulée? Allez-y.
Le Président (M. Doyon): Simplement pour continuer, moi,
je comprends la préoccupation de la commission là-dessus,
ça fait partie de votre mandat, oui, bien sûr, comme bien d'autres
choses aussi, sauf qu'il fait aussi partie du mandat des employeurs de
protéger la vie du public en ayant des gens qui sont
préposés à fournir des services qui sont les services qui
exigent une capacité de réflexion et une capacité de
réaction. En tout cas, de s'assurer, comme employeur, que les gens qui
sont engagés et
embauchés et payés puissent rendre ces services-là,
c'est une préoccupation qui m'apparart aussi très valable de la
part d'un employeur qui engage quelqu'un, en l'occurence pour éteindre
des feux ou sauver des vies, d'avoir l'assurance que les gens qui sont
engagés sont des gens qui sont aptes à rendre ces
services-là.
Moi, il y a simplement une chose qui m'inquiète toujours
là-dessus, c'est que la personne qui serait éventuellement
victime, pour toutes sortes de raisons, d'une négligence qui ferait en
sorte que le service qui aurait pu la tirer d'affaire n'a pas été
rendu, ces gens-là ne sont pas organisés pour se faire entendre.
Premièrement, ils ne sont pas connus, c'est tout le monde, c'est nous
ici et ce n'est personne en même temps. Mais les gens qui sont soumis
à ces tests-là, eux, sont organisés par voie de syndicat.
Ils ont toutes sortes d'associations pour faire valoir leurs points de vue.
Moi, ce que j'aimerais de la Commission, c'est que vous regardiez le
côté protection des renseignements, mais aussi le
côté protection du public. Le public a le droit, et c'est
d'après moi la responsabilité de tout employeur, de s'assurer que
les gens qu'il engage, qu'il embauche sont des gens qui sont capables, qui ne
sont pas handicapés par toutes sortes de choses, que ce soient des
drogues ou que ce soit je ne sais pas quoi. Moi, ça ne me parait pas,
à première vue... Et je comprends qu'à partir de
là, on s'assure que, premièrement, les tests sont valables, qu'on
n'écrit pas n'importe quoi dans le dossier, qu'on s'assure que ceux qui
ont accès à ces données-là soient des gens qui y
ont droit et à qui ça peut servir, que ce ne soit pas ouvert
à tout le monde. Ça, je conçois ça, mais où
je tique un peu plus, c'est quand vous me dites: On regarde la
nécessité de ça.
À première vue, en tout cas, ceux qui sont peut-être
le plus en mesure d'apprécier la nécessité de ça,
ce sont ceux qui sont responsables, redevables et imputables à la
population sur les gestes et les engagements qu'ils font pour rendre des
services, que ce soit dans le domaine des incendies, dans le domaine policier,
dans le domaine de la qualité de l'eau, de la surveillance de
l'environnement ou quelque chose comme ça. Je me dis que tous et chacun
d'entre nous et le public en général ont droit d'avoir des gens
qui sont aptes à rendre ces services-là. La Commission - en tout
cas, ça me préoccupe un peu - mettait en cause la
nécessité de ça. Moi, je me dis que, quand je monte dans
un avion, je me trouve en bien meilleure position si je sais que le type qui
conduit l'avion a passé un certain nombre de tests. Ça ne me
scandalise pas. Je sais que celui qui doit passer les tests n'aime
peut-être pas ça, mais, moi, quand je suis dans l'avion, je veux
bien être sûr que le pilote dispose de tous ses moyens. Mais moi,
je ne suis pas capable de faire valoir mon point de vue, je ne suis pas
organisé, je suis M. Tout-le-Monde et je me demande, et c'est un peu
ça ma question, si la Commission tient compte de ces facteurs-là,
du besoin du public d'avoir une protection. Parce que, si on va à
l'extrême et on protège les gens qui doivent se soumettre à
des tests, bon, à première vue, ça paraît
très bien, mais si ça se fait au détriment d'autres
personnes qui, éventuellement, vont devoir payer le prix de cette
absence de tests-là, ça me paraît moins valable, en tout
cas.
M. O'Bready: Bien, écoutez, c'est comme je vous le disais
tantôt. La question de la ville de Montréal, c'est une
première. Alors, on n'a pas eu à statuer sur des tests de
toxicomanie comme tels, mais si je prends le principe général, M.
le Président, basé sur l'article 64 de la loi, on dit tout
simplement: "Nul ne peut, au nom d'un organisme public, recueillir un
renseignement nominatif si cela n'est pas nécessaire à l'exercice
des attributions de cet organisme ou à la mise en oeuvre d'un programme
dont il a la gestion." Donc, dans le fond, le critère de
nécessité, ça peut être l'évidence
même. C'est bien sûr que si vous me parlez d'un pilote d'avion, il
est bien important que cette personne-là ne soit pas sous l'influence de
drogue au moment où elle pilote un avion. Mais nous, le critère,
dans le fond, c'est un critère de nécessité. C'est un peu
le fardeau de la preuve de l'organisme de nous le démontrer. Dans
certains cas, c'est relativement facile. Dans d'autres cas, ça peut
être plus difficile, mais si c'est nécessaire à l'exercice
des attributions de cet organisme ou à la mise en oeuvre d'un programme
dont il a la gestion, nous, on ne s'objectera pas. Mais c'est sûr que le
critère de protection de la population comme tel, on va peut-être
en tenir compte, mais un petit peu indirectement dans cette
démonstration qui nous est faite de la nécessité.
Je ne voudrais prendre aucun exemple caricatural, mais mon Dieu! Bon,
peut-être que le test de toxicomanie - comme je vous le disais
tantôt - pour un pilote d'avion, c'est peut-être un exemple. Des
tests de non-alcoolisme, pour des chauffeurs de camion de plusieurs tonnes,
ça peut être un autre exemple. Alors, c'est ce sur quoi on se
base, si vous me permettez. On tient compte que, dans la société,
tu n'as pas juste des droits. Tu as aussi des responsabilités et des
obligations. C'est sûr que si tu travailles pour une entreprise qui
t'emploie comme policier, comme pompier, comme conducteur de camion ou à
quelque fonction que ce soit, comme infirmier dans un hôpital, comme
moniteur dans une école, il est bien évident que, je pense, la
Commission va tenir compte du fait qu'il y a un minimum d'exigences de la part
de l'employeur et que, justement, la personne est capable de faire sa job et
que c'est nécessaire pour elle de vérifier ça. Alors,
c'est le critère de l'article 64. Vous savez, je ne veux pas vous jouer
les articles de la loi. Il y a du gros bon sens aussi, dans tout
ça, qui s'applique à un bon moment donné. Mais
cette démonstration-là de nécessité, effectivement,
ce n'est pas nous autres qui la faisons. On laisse l'organisme nous dire: Oui,
c'est nécessaire pour nous de recueillir ces renseignements-là.
Si la Commission en est convaincue, je veux dire, elle passe son jugement,
point.
Une voix: Oui?
M. Ouimet: Ce que je peux me permettre d'ajouter, aussi, c'est
que ce n'est pas facile, toujours, de trancher une ligne, parce que - le mot
est un peu un jeu de mots dans ce cas-là - les tests de dépistage
de drogue, par exemple, ne sont pas à l'heure actuelle performants au
point de savoir si à l'heure où la personne passe le test, elle
est sous l'effet d'une drogue. Elle a peut-être déjà
été sous l'effet d'une drogue dans le mois
précédent, mais ça ne signifie pas qu'au moment où
elle pilote l'avion, elle est sous l'effet d'une drogue. Il y a ces questions
techniques, aussi, qu'il faut vérifier avant. Dépistage de
drogue, aussi, on a d'autres problèmes techniques. Prenons par exemple
les tests de dépistage. Les plus raffinés actuellement
dépistent ce qui n'est pas une drogue, mais dépistent des
aliments qui ont des effets comme la drogue, prenons par exemple le thé,
le café. La caféine est une drogue. Donc, ce sont toutes des
questions techniques auxquelles il faut répondre avant de donner un
avis.
M. Boisclair: Peut-être juste dans la même
foulée, juste m'éclairer là-dessus, parce que je ne suis
pas avocat, j'ai fait un an d'étude en droit, mais... Comment la
Commission se comporte? Parce que souvent je présume qu'on peut
invoquer, on peut plaider devant vous la charte, entre autres? Pour des cas de
dépistage, par exemple, si jamais c'est la situation... On reprend
l'exemple, parce que c'est de ça qu'on discute, on pourrait revenir au
cas du ministère de la Main-d'oeuvre avec Acrofax. Il y a
différents recours, et puis le citoyen a recours devant la Commission,
mais aussi un recours devant les tribunaux en vertu de la charte.
M. Ouimet: Ça n'exclut pas les autres recours que
l'individu peut exercer. Par exemple quelqu'un qui se verrait imposer un test
de dépistage pourrait porter plainte à l'heure actuelle à
la Commission. On ne sait pas si on arriverait à la conclusion, comme
dit M. O'Brea-dy, que c'est nécessaire ou non à l'exercice des
attributions de l'organisme, mais la personne aussi pourrait porter plainte
à la Commission des droits de la personne.
M. Boisclair: Mais quand vous rendez une
décision, vous regardez toujours une décision en fonction de la
loi habilitante, de la loi d'accès...
M. Ouimet: De notre loi. Nous on ne se prononcera pas...
M. Boisclair: Jamais vous n'irez prendre une décision en
invoquant, par exemple, la charte, des choses semblables?
M. O'Bready: Bien, c'est-à-dire que ça peut
arriver, puis encore là je ne voudrais pas dire ça de
façon générale. Un exemple, le secret professionnel qui
est prévu à la charte, bien, d'office tout tribunal quel qu'il
soit est obligé de l'appliquer.
M. Boisclair: En fonction de la jurisprudence.
M. O'Bready: Alors, je veux dire, c'est sûr que c'est
toujours là un argument de la charte. Maintenant, la loi d'accès
est prépondérante, c'est bien évident. Elle peut dans
certains cas constituer une dérogation à la charte, mais encore
faut-il... Je ne voudrais pas entrer, parce que là on pourrait parler de
jargon juridique longuement, mais qu'est-ce qui prévaut? Mais la loi
d'accès, dans le fond, est une application un peu concrète, comme
je le disais plus tôt dans l'après-midi, de certaines dispositions
de la charte, parce que la charte dit que tu as droit à la protection de
ta vie privée, puis notre loi dit: Tu protèges, tu fais ça
en protégeant des renseignements personnels. La Charte dit aussi que le
public a le droit à l'information, et comme je disais en réponse
au président tantôt, ce n'est pas nécessairement tous
azimuts, ça, il y a des balises.
M. Boisclair: Peut-être changer de sujet, M. le
Président.
Le Président (M. Doyon): Oui, allez.
M. Boisclair: Je vais parler de l'enquête que vous deviez
faire, qui a peut-être même déjà été
faite, je ne suis pas au courant, au cabinet de M. Vallières. En juin
dernier, on apprenait, par le biais des journaux, que deux membres de la
Commission d'accès à l'information feraient une enquête sur
la façon dont sont compilées et utilisées les informations
personnelles et confidentielles qui apparaissaient au fichier du
ministère des Transports et qui sont à la disposition du cabinet
du ministre délégué, M. Vallières. Est-ce que vous
pourriez peut-être faire le point, est-ce qu'il y a eu une
vérification...
M. O'Bready: Bon, alors, il y a eu plus qu'une
vérification. Je peux vous dire que cette enquête-là est
présentement en cours. La seule petite différence avec ce que
vous m'avez lu, c'est qu'au lieu d'être deux personnes, c'est un
enquêteur ou une enquêteure qui est en train d'effectuer
l'enquête, Mme Dion, qui est chez
nous. Alors Mme Dion a débuté son enquête dans les
derniers jours de juin et les premiers jours de juillet. Elle a eu des
rencontres tant au niveau du cabinet de M. Vallières qu'au niveau du
ministère de la voirie, je parle des autorités responsables du
personnel au ministère, fichier d'occasionnels. Elle a même fait
certaines vérifications au niveau de bureaux régionaux.
L'enquête, évidemment, c'est une enquête qui est quand
même assez longue, il y a plusieurs personnes à rencontrer. Vous
aurez compris qu'au cours de l'été, il y avait quand même
beaucoup de personnes qui étaient en vacances. Alors Mme Dion, j'ai
personnellement vérifié la semaine dernière, poursuit
toujours ses travaux. Elle doit avoir d'autres rencontres en début de
septembre avec des personnes qui sont revenues de vacances, au niveau, entre
autres, du service du personnel du ministère, et il y aura un rapport
préliminaire qui nous sera soumis, les trois commissaires, quelque part
avant la fin du mois de septembre, et qui, après ça, sera
transmis aux intéressés qui, en l'occurence, sont le cabinet du
ministre, le ministère et, selon notre procédure habituelle, qui
auront une vingtaine de jours pour nous faire leurs commentaires et, par
après, la commission rendra une décision finale, aura à
statuer si, effectivement, il y a eu, oui ou non, infraction; s'il y a eu
infraction, quelle sorte d'infraction et quel serait le remède à
apporter. (17 heures)
Je veux tout simplement vous préciser que, dans ce
dossier-là, évidemment, il y avait des choses qui sont de notre
ressort, d'autres qui le sont peut-être moins. Alors, nous, le mandat que
nous avons donné à notre enquêteur, ou "enquêtrice" -
mais je n'aime pas le mot, mais en tout cas - c'est qu'on devait
vérifier si, effectivement, on avait le droit de constituer un fichier
comme ça; deuxièmement, si les renseignements qui sont dedans
sont nécessaires; troisièmement, si les personnes qui le
consultent ou les obtiennent ont qualité, dis-je, pour ce faire, au sens
de notre loi et, quatrièmement, il y a toute une notion de consentement
dans ça, parce qu'il y a des consentements qui ont été
donnés.
Il y a une autre partie qui peut peut-être regarder plus, un
élément de discrimination et ça, évidemment, ce
sera référé: à un forum qui peut être la
Commission des droits et libertés. Nous, la commission, nous
enquêtons sur ce qui est à l'intérieur des
paramètres de la loi et, à date, il n'y a eu aucun accrochage. Je
veux dire qu'on a eu la collaboration des autorités de ce
ministère-là et les travaux se poursuivent. L'enquête n'est
pas terminée, pour les raisons que je vous explique.
M. Boisclair: Est-ce que vous allez vérifier si, dans le
mandat que vous avez donné à votre enquêteur, le
ministère est en possession de toutes les fiches de demandes d'emploi?
C'était ça la question, dans le fond. Je ne sais pas si vous vous
souvenez.
M. O'Bready: C'est-à-dire que c'étaient les
fichiers d'occasionnels, ça. Les fichiers d'occasionnels, vous savez, je
ne reprendrai pas tout l'historique, mais les fichiers d'occasionnels sont
centralisés maintenant, c'est-à-dire sont
décentralisés et sont répartis dans chacun des
ministères. Alors il s'agit de vérifier dans ce
ministère-là, est-ce que c'est fait selon les formes de la loi?
Deuxièmement, quand ça part de là, qui se sert de
ça? Dans le cas qu'on avait, il y en avait qui étaient au cabinet
du ministre. J'ai déjà répondu qu'à mon humble
opinion, sous toutes réserves, le ministre étant la plus haute
autorité, lui, il pouvait certainement consulter ça. Il faut voir
le cheminement. C'est assez complexe, effectivement. Surtout que le
ministère de la Voirie est un ministère
décentralisé, alors, il peut avoir beaucoup
décentralisé avec des bureaux régionaux, donc il peut
avoir des fiches qui viennent de là pour s'en aller au central et du
central... C'est ça que nous sommes en train de vérifier. Je ne
pourrais pas...
M. Boisclair: Est-ce que vous avez un
échéancier?
M. O'Bready: ...avec tout respect, si vous me permettez de ne pas
entrer dans les détails du rapport. D'abord, je n'ai pas eu de rapport,
comme tel, de la vérification, c'est-à-dire je n'ai pas de
rapport. C'est en marche. Moi, je vous dis que ça chemine normalement,
eu égard aux vacances de l'été puis, notre
"enquêtrice" là-dedans est une des "enquêtrices"
chevronnées chez nous. Alors, elle poursuit ses travaux.
Mais j'ai vérifié simplement parce que je m'attendais
à ce qu'on me pose la question. Quelque part, vers la fin de septembre,
on devrait avoir le rapport préliminaire, qui devra être soumis,
évidemment, aux trois commissaires, ça, c'est la procédure
très normale qui, elle, la Commission, en prend connaissance et,
après ça, elle le transmet aux intéressés qui ont
20 jours. D'habitude on donne 20 jours ouvrables, on peut accorder un
délai additionnel, dépendant de la complexité du dossier,
pour permettre aux intéressés de nous faire leurs commentaires.
Ils peuvent contester certains faits ou préciser certains
éléments.
M. Boisclair: Ensuite de ça, est-ce que ce rapport
préliminaire que vous soumettez au ministère est un document
public ou si c'est un document qui est...
M. Ouimet: Le rapport préliminaire?
M. Boisclair: Le rapport... Suite à la rencontre, vous
dites que vous recevrez un rapport, qu'il y a trois commissaires qui vont
soumettre...
M. Ouimet: On y donne accès en enlevant les renseignements
nominatifs.
M. Boisclair: Pardon?
M. Ouimet: On donne accès, à ceux qui le demandent,
en enlevant les renseignements nominatifs qu'il contient. Si, par exemple, il y
a des renseignements concernant des individus, des personnes physiques, on
enlève les renseignements concernant les personnes physiques.
M. Boisclair: Est-ce que vous faites état, dans votre
rapport annuel, de ces rapports-là...
M. Ouimet: Oui.
M. Boisclair: ...parce que, là, il faut distinguer deux
sortes de rapports. Une fois votre avis, une fois la consultation avec les
autorités responsables effectuée, vous soumettez un avis, mais il
y a tout le temps ce rapport préliminaire, dont vous me parlez. Est-ce
que vous en faites état dans votre rapport annuel, de l'ensemble? Je
parle bien des rapports préliminaires, je ne parle pas des avis qui ont
été faits.
M. Ouimet: C'est-à-dire que le rapport préliminaire
n'est qu'une éta^e. On parle, dans le rapport annuel, des rapports
finals d'enquêtes. Alors, c'est le point 4.2.2, aux pages 34 et
suivantes, où on a des enquêtes qui ont été
menées par la Commission et qui ont donné lieu à un
rapport final. Donc, il y a toujours eu la même séquence
d'événements dont vient de parler M. O'Bready, à savoir
une enquête, faite par un enquêteur de la Commission, un rapport
préliminaire envoyé aux parties et le rapport final.
M. Boisclair: Et dans le cas de l'avis au ministère de la
Main d'oeuvre sur Acrofax, c'était votre avis final?
M. Ouimet: Oui, ce n'était pas une enquête.
M. O'Bready: Ce n'était pas une enquête,
c'était un avis.
M. Boisclair: Ah! ce n'était pas une enquête, je
m'excuse. Pas de problème. Je comprends bien. Donc vous me dites que,
pour fin septembre, si tout va comme prévu, que vous seriez en mesure
de...
M. O'Bready: II semblerait, des informations que je
possède...
M. Boisclair: Avec les informations dont vous disposez.
M. O'Bready: ...actuellement, que ça devrait être
quelque chose comme vers la fin de septembre où ça sera soumis
à une assemblée plénière de la Commission.
M. Boisclair: Est-ce que vos avis sont toujours envoyés
aux membres de la commission de la culture?
M. O'Bready: Nos avis sur des projets de loi, vous voulez
dire?
M. Boisclair: Sur des projets de loi ou l'ensemble des avis que
la Commission peut émettre.
M. O'Bready: Non. Habituellement, nous avons adopté la
procédure suivante: des avis sur des projets de loi ou sur des
règlements sont envoyés à l'Assemblée nationale,
à la commission de la culture, aux ministres concernés et
à notre ministre responsable comme, par exemple, tous les avis qu'on a
donnés sur des projets de loi lors de la dernière session, j'en
ai transmis des copies à la présidence de la commission, copie
à Mme Hébert, copie au ministre responsable - par exemple si
c'est un dossier qui émanait du ministre de la Main d'oeuvre, on lui a
transmis copie de notre avis - et je pense qu'il y a également une copie
qui est transmise au bureau du président de l'Assemblée nationale
pour des fins de procédure. Nos plaintes ne sont pas transmises, par
exemple.
M. Boisclair: Non.
M. O'Bready: Nos rapports sur des plaintes, des enquêtes,
ce n'est pas transmis. Ça, c'est transmis sur demande. Mais les avi-o
que la Commission donne sur des projets de loi, je vous le
répète, ou sur les ententes aussi...
Une voix: Non.
M. O'Bready: Non, je m'excuse.
M. Boisclair: Comme le rapport d'enquête dans le cas
de...
M. O'Bready: Non, ce n'est pas transmis. On n'a pas une
diffusion. C'est transmis sur demande. C'est accessible, mais on ne le transmet
ni à l'Assemblée nationale, ni à la commission. On le
transmet si on nous le demande, mais il y a des plaintes qui sont
évidemment sans intérêt, probablement qu'elles sont
à caractère plus technique. Il y en a d'autres qui peuvent
être intéressantes. Si on nous le demande, comme Me Ouimet le dit,
et il y en a dont on fait rapport, évidemment, dans le rapport annuel
quand le dossier est terminé. Les rapports, eux, peuvent être
accessibles une fois dénominalisés de certains renseignements qui
ne tomberaient pas sous le coup des dispositions de l'article 147 qui
en rendent certains publics, par exemple, et tout ça.
M. Boisclair: Comment sont les relations entre la Commission et
le ministère des Communications? L'application de la loi relève
de la ministre des Communications. La Commission est un peu un tribunal
indépendant.
M. O'Bready: Complètement. Je le dis avec toute candeur,
les relations sont très cordiales mais, en même temps, sont
très... Je veux dire que le ministère n'intervient pas du tout
dans le processus de la Commission. Le ministère a un service de la loi,
évidemment, qui fait le travail et, nous, on donne un avis. Vous l'avez
vu lors de la loi 62. On n'est pas nécessairement toujours d'accord avec
le ministère et on leur dit, mais ce sont des relations qui sont
très professionnelles. Sur ce plan-là, je peux en
témoigner. Les seules autres relations que nous avons sont des relations
d'administration. Étant donné la petite taille de la Commission,
nous bénéficions des services de support du ministère des
Communications comme le service du personnel lorsqu'on a besoin de recruter
quelqu'un, le service du budget, ces services-là, mais la balance, je
peux vous dire que ça a été respecté. J'ai connu,
à date, trois ministres responsables, soit MM. French et Dutil et Mme
Hébert, et jamais personne ne s'est vraiment mêlé de nos
oignons. Je veux dire que chacun respecte sa juridiction propre mais les
relations sont quand même cordiales. Il ne faut quand même pas non
plus, je veux dire, vivre en vase clos. On se parle.
M. Boisclair: D'ailleurs, il y a un attaché politique qui
est chargé de faire le lien entre le cabinet et...
J'y vais un peu à bâtons rompus. Vous avez parlé
tout à l'heure, vous nous avez donné de nouveaux chiffres sur le
nombre d'organismes qui n'étaient toujours pas assujettis à la
loi.
M. O'Bready: Oui.
M. Boisclair: C'est 246, à ce jour, qui seraient
délinquants? Le dernier chiffre que vous avez donné dans votre
présentation.
M. O'Bready: Oui.
M. Boisclair: Vous dites qu'essentiellement il s'agit de petites
municipalités. Dans votre rapport de 1989-1990, vous indiquez votre
volonté de maintenir une attitude très ferme à cet
égard, de la même façon que vous le faisiez aussi dans
votre rapport précédent, 1988-1989. Il y a même eu, dans
certains cas, des procédures judiciaires qui ont été
entreprises. Il y a même, je pense, un hôpital qui a
été condamné à payer une amende quelconque.
M. O'Bready: Effectivement.
M. Boisclair: On peut peut-être regarder rapidement les 246
délinquants à ce jour. À part des petites
municipalités, est-ce qu'il y aurait des organismes publics importants
qui ne se seraient pas...
M. O'Bready: Je vais vous les donner par réseau si vous me
permettez. Les chiffres que j'ai ici sont en date du 24 août, c'est quand
même assez récent. Dans le secteur de la Santé et des
Services sociaux, il y a 18 délinquants: 2 CRSSS, 3 CLSC, 8 centres
d'accueil et 5 centres hospitaliers. Dans le secteur scolaire,
l'Éducation, 11 délinquants: 2 commissions scolaires, un
cégep, 8 établissements privés subventionnés,
aucune université. Dans le secteur municipal, et c'est là qu'on
retrouve le plus gros volume, 217, et, là, j'ai quand même voulu
vous faire la distinction tantôt, parce que je trouvais que ça
faisait une mauvaise image au secteur municipal. Vu mes
antécédents, ça me chicotait un peu. Mais, il y a 156
municipalités, 27 offices municipaux d'habitation, 32 régies
intermunicipales et 2 organismes municipaux autres. Par contre, dans ça,
comme je vous l'ai dit, ce sont presque toutes des petites
municipalités. Alors, moins de 1500 habitants, sur les 156, il y en 126.
Alors, je ne voudrais pas... Je les ai par région mais je pense que
ça ne donne rien de les identifier comme telles.
M. Boisclair: Dans tout ça, est-ce qu'il...
M. O'Bready: II n'y a aucune grosse... Je vous ai parlé
d'hôpitaux, mais il y a de petits hôpitaux, des fois, ou des petits
centres d'accueil. Bon, ce que nous faisons actuellement, c'est qu'on tente une
persuasion sur une base volontaire. Il y a toujours quelqu'un qui communique
avec l'organisme. On offre même des services techniques pour dire: On va
vous préparer les fiches et on va vous expliquer comment ça se
remplit et M. Foisy, ici, d'ailleurs, a fait un assez grand ménage au
niveau des offices municipaux d'habitation dont plusieurs sont de petites
unités. Et on a réglé, je pense, quelque 160 dossiers d'un
seul coup. On commence par faire une opération de persuasion.
Après ça, il y a une lettre du président dans des termes,
comme on dit en anglais "in so many words". Et puis, au bout de 30 jours,
évidemment, s'il n'y a pas de réponse, c'est transmis au
contentieux et là, on fait faire une vérification par un
enquêteur. On constate qu'il y a des fichiers. C'a été le
cas de l'hôpital que je vous ai mentionné tantôt. Il y avait
des fichiers. Il ne s'était pas conformé. On a
déposé une plainte aux sessions de la paix. Or, c'était
une première et, dans le fond, ce n'était pas pour collecter 100
$ d'amende qui s'en vont au fonds consolidé, c'était simplement
pour créer un peu un incitatif.
Le nombre est de moins en... Il y a deux ans, il était de quelque
600, 676, je pense. Vous voyez que c'a réduit considérablement.
Or, mais dans la majorité des cas, je suis obligé de vous dire
que ce sont de petites entités où bien souvent les gens ne sont
pas tellement familiers avec la loi, où il y a un gros changement. Je
pense à de petites municipalités, par exemple, où souvent
le secrétaire-trésorier ou la
secrétaire-trésorière est souvent à temps partiel.
Il est en même temps gérant de la caisse populaire, etc., et puis,
vous savez, parfois, ça change à toutes les années. Alors,
on a un petit problème et on tente de le régler. Je pense que
d'ici un an, on devrait être parvenu à ça. Mais je dois
vous dire qu'à quelques rares exceptions, l'hôpital en question en
a été une, je ne sais pas pour quelles raisons, mais en tout cas,
on n'a pas de réticence. Il n'y a pas bien bien du monde qui s'obstine
finalement. Dites-nous comment faire et on va les remplir les fichiers. Alors,
ce sont les délinquants que nous avons.
M. Boisclair: Est-ce que le fait qu'il y a de plus en plus
d'organismes qui se sont conformés à la loi est un des facteurs
qui a fait que le nombre de révisions d'une demande d'accès a
augmenté de quand même 30 %, de 202 à 261? C'est quand
même une augmentation...
M. O'Bready: Écoutez, il y a beaucoup de bouche à
oreille qui se fait dans ça, j'imagine, et comme je l'ai dit
tantôt, ce n'est pas nécessairement parce qu'il y a plus de
personnes qui sont en infraction à la loi, mais c'est peut-être
parce que la loi est mieux connue, il y a plus d'utilisation. Et même les
responsables aujourd'hui le disent aux personnes: Moi, je ne te donne pas le
document, mais voici toutes les instructions et tu peux aller devant la
Commission d'accès alors que, bien souvent, autrefois, ça ne se
faisait pas II refusait le document et ça finissait là. La
requérant ou la requérante en était quitte pour son rhume.
Mais actuellement, c'est beaucoup mieux structuré que ça, du
moins, dans la majorité des organismes de taille moyenne ou de grande
taille. On donne un feuillet qui dit aux gens exactement comment
procéder, où s'adresser, l'adresse de la Commission, etc. Alors,
la plus grande utilisation de la loi, selon moi, en tout cas, provient du fait
qu'elle est mieux connue et les responsables font peut-être mieux leur
job. Bon. Mais bon an mal an, je regarde ça. J'ai compilé des
chiffres pour m'amuser ce matin. Les trois derniers mois, on ¦ se tient
de 35 à 40 demandes de révision par mois. Or, ça augmente,
c'est sûr. Les demandes de révision, ça augmente.
M. Boisclair: Dans votre programme d'examen du respect de la loi
- encore là, je m'excuse, je change complètement de sujet - la
Commission procédait en 1988-89 à l'examen du respect de la loi
au sein de quatre organismes, ministre de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu, deux centres de services sociaux et
Télé-Université. En 1989-90, la commission a seulement
fait des vérifications au sein de la Régie des rentes du
Québec et ministre de la Main-d'oeuvre. Est-ce que le nombre d'examens,
vos priorités, comment vous établissez... Ce sont les
commissaires, je présume, qui, en fonction de... (17 h 15)
M. O'Bready: Oui, ce sont les commissaires essentiellement qui,
lors de, comment dirais-je, lorsqu'on prépare un peu nos orientations en
début d'année fiscale et tout ça, déterminent un
peu le programme de travail de nos collaborateurs, soit à cause de la
taille de l'organisme, à cause aussi du plus grand risque qu'on y
retrouve. Par exemple, certaines infractions, pas parce qu'elles sont plus
mauvaises que d'autres, mais parce qu'il y a une plus grosse quantité de
fichiers confidentiels, il y a des organismes qui détiennent
énormément de fichiers. On parlait tantôt du
ministère de la Main-d'oeuvre, c'en est un; la Régie de
l'assurance automobile en est un autre; la Régie de l'assurance-maladie
du Québec en est un; la Société d'habitation un certain
temps. Bon. Alors, les personnes qui bénéficient d'aide ou de
subventions de l'État. Alors, ça a été
déterminé pas parce que ces organismes-là étaient
des délinquants ou étaient des organismes qui ne collaboraient
pas, mais simplement parce qu'il y avait peut-être là un plus
grand risque. Il y a une université qui a été
vérifiée à un certain moment donné aussi.
L'université, c'est une autorité publique, c'était
l'Université Laval. Comment les fichiers de renseignements personnels
étaient gérés? C'est sûr qu'on y va avec, je vous le
dis, des effectifs assez restreints qu'on tente de cibler un peu, les
organismes un peu plus significatifs peut-être où on retrouve
peut-être le plus Alors, il n'y a pas d'autre critère que
ça. Je ne voudrais pas laisser de fausse impression.
M. Boisclair: Dans le cas de la Régie des rentes, vous
avez fait quatre recommandations dans votre rapport; vous en parlez en page 18.
Vous dites que ces recommandations seraient majoritairement satisfaites
à ce jour. Est-ce que vous pourriez peut-être nous dire qu'elle
est la réponse de la Régie et quelles sont ces recommandations
que vous avez faites?
M. O'Bready: On pourrait peut-être vous adresser le rapport
de la Régie.
M. Boisclair: Oui.
M. O'Bready: Ça fait longtemps, ça, la Régie
des rentes. Ça a été réglé en tout
début, je pense, de l'année 1989. Moi, si vous souhaitez, M. le
député...
M. Boisclair: Non, mais c'est réglé, là?
M. O'Bready: Oui, oui, c'est tout réglé, mais je
pourrais...
M. Boisclair: Tout est réglé.
M. O'Bready: Vous me demandez exactement c'était quoi
les...
M. Soisclair: O.K. Merci.
M. O'Bready: Je ne me rappelle pas, mais c'étaient des
recommandations à caractère assez relativement techniques dans ce
cas-là. On pourrait vous transmettre une copie du rapport finai. Nous
autres, ce qu'on fait, c'est que, quand on adresse un rapport comme ça,
il y a un suivi qui est fait auprès de l'organisme, puis là,
l'organisme nous dit: On s'est conformé aux recommandations 1, 4 et 6,
on va vous écrire dans un mois pour les recommandations 2, 3 et 5.
Après ça, finalement, ça s'épuise comme ça.
Alors, je pourrai vous transmettre, si vous le souhaitez, M. Ouimet...
M. Boisclair: Non, mais c'était juste pour savoir
où c'en était, si c'est réglé.
M. O'Bready: Ah! Mais ça, c'est réglé. Le
dossier de la Régie des rentes, il n'y a plus de contentieux.
M. Boisclair: Au ministère de la Main-d'oeuvre, il
resterait deux recommandations sur 50?
M. O'Bready: Deux recommandations sur le suivi: une
recommandation qui avait trait à une entente avec le ministère du
Revenu au moment de la période des impôts pour faire du
"matching", ça, ce n'est pas réglé; puis le
deuxième point c'était... Je pense qu'on l'énumère
dans ça en tout cas.
M. Boisclair: Oui, vous en parlez dans votre...
M. O'Bready: Avec la Régie de l'assurance automobile. On
pensait que, selon le protocole de l'entente, il y avait plus d'informations
que celles prévues, que l'entente qu'on avait, qui avaient
éîé transférées. Ça, M. Foisy me
disait que c'est en bonne route de se régler; c'est dans la bonne voie
de se régler ça aussi.
M. Boisclair: J'aimerais ça, si c'était possible,
que vous me fassiez parvenir exactement votre rapport que vous avez
envoyé et peut-être juste m'indiquer quelles sont les deux
recommandations qui sont encore en suspens de ce côté-là.
Si c'était possible.
M. O'Bready: Ce sont celles qui sont indiquées d'ailleurs
dans le rapport.
M. Boisclair: Oui, c'est ça, mais peut-être plus de
détails, exactement qu'est-ce qui en retourne. Vous soulevez dans votre
rapport, et je tenterais peut-être de faire un parallèle avec le
rapport du Vérificateur général, lorsque vous parlez de la
carte à microprocesseur, toute la question de la sécurité.
Bien sûr, au-delà de la protection des renseignements personnels,
il faut aussi se poser la question: Qui a accès à ces
renseignements personnels là? Il y a tout un système de
sécurité qui existe pour utiliser un système informatique.
Le Vérificateur général dans son rapport soulevait qu'il y
a de graves lacunes au niveau de la sécurité des systèmes
informatiques. En tout cas, il y a un certain nombre de recommandations qui ont
été faites par le Vérificateur général dans
son dernier rapport. Est-ce que c'est une situation que vous surveillez?
M. O'Bready: Oui. D'ailleurs, je pense que ce sont des
recommandations que le Vérificateur général nous a
transmises en disant: Vous, comme responsable de la protection des
données nominatives dans les différents ministères ou
organismes, il faudrait vous assurer que... Bon. On a chez nous une personne
qui est un peu spécialisée en matière de
sécurité informatique et on vient d'en engager une
deuxième. Ça, c'est quelque chose qui nous préoccupe au
plus haut point, effectivement, les codes d'accès, qui peut entrer dans
le système, comment, est-ce que ça laisse des traces? Là,
je ne voudrais pas jouer à l'expert, parce que je ne connais pas
grand-chose dans ça, mais, des exposés qu'on nous a faits, j'ai
compris que c'était une préoccupation parce que, bon, semble-t-il
que ça comporte des risques. Alors, quand je vous parlais tantôt
de qui pouvait consulter quoi, puis est-ce que les personnes qui consultent des
fichiers ont les qualifications pour le faire, c'est évident que par
l'informatique ces principes-là s'appliquent aussi. Je sais que pour la
carte à microprocesseur, pour en avoir très peu parlé mais
quand même, on me dit que, effectivement, ça, il va falloir
être bien certain que ce n'est pas n'importe qui qui va y avoir
accès, puis il va y avoir même, semble-t-il, des pistes
sélectives où une personne ne pourra avoir accès
qu'à des données qui la concernent sans, évidemmment,
avoir accès à l'ensemble d'un dossier. Mais là, c'est sous
toutes réserves.
M. Boisclair: Parce que c'est intéressant ce que dit le
Vérificateur général. II dit: "Sur dix organisations
vérifiées, deux n'avaient pas de coordonnateur à la
sécurité, six ne disposaient pas d'un programme de
sécurité appuyé sur une connaissance de l'ensemble des
risques courus, aucune organisation ne s'est dotée d'un
programme continu de sensibilisation à la sécurité
informatique, une seule organisation effectue une évaluation annuelle du
développement et du fonctionnement des mesures de
sécurité."
Vous voyez, là, l'ampleur du problème qui
déjà met en relief plusieurs intervenants. J'ai juste
essayé de m'intéresser un peu à cette question-ià
du développement du réseau informatique dans l'appareil
gouvernemental. Ce n'est pas simple puisqu'il y a plusieurs intervenants. Que
ce soit le Conseil du trésor, que ce soit le ministère des
Communications qui fournit une expertise, bon, Approvisionnements et Services,
il y a plusieurs personnes qui interviennent là-dedans. Il serait
peut-être intéressant que la Commission jette un coup d'oeil
important dans... fasse suite un peu au rapport du... Je ne sais pas de quelle
façon, dans votre champ d'action, pour l'année en cours, vous
avez l'intention de vous y intéresser.
M. O'Sready: Bien, nous, ce serait, comme je vous le
répétais tantôt, comme on vérifie lorsqu'on va dans
un organisme - au risque de me répéter - comment sont
gérés les fichiers. Alors, ça va être la même
chose, j'imagine, au niveau informatique. Sauf que je dois vous dire que,
jusqu'à tout récemment, nous n'avions pas, chez nous, beaucoup de
ressources en termes de personnes humaines qui étaient capables d'aller
faire ce genre de boulot-là. Avec le développement de
l'informatique - et vous soulevez un problème, bien sûr, qui est
assez complexe - on n'aura pas le choix. Je veux dire qu'il n'y a plus beaucoup
de choses qui sont sur support papier. C'est toujours la magnifique
informatique. Alors, c'est sûr que ça pose des problèmes
qui sont différents. Il va falloir s'en préoccuper. Nous avons
l'intention d'exercer notre rôle de surveillance dans ce
domaine-là comme ailleurs mais, évidemment, ça se...
M. Boisclair: De quelle façon la collaboration avec le...
parce qu'il va y avoir une collaboration qui pourrait se faire avec le
Vérificateur général sur ce dossier-là, je
présume?
M. O'Bready: Probablement que le Vérificateur
général... Je parle au nom de M. White, là, sous toutes
réserves. Il n'est pas ici mais, lorsque le Vérificateur
général nous avait écrit pour nous dire: Bon, bien
ça, ça peut vous intéresser, comme je vous le disais
tantôt, j'avais remis ça à M. White, et il m'avait dit
qu'il devait rencontrer quelqu'un du bureau du Vérificateur
général à quelque part, à l'automne. Mais
là, je vous le dis sous toutes réserves. Je sais qu'il y a un
premier contact qui a été établi, en tout cas, entre la
Direction de l'analyse et de l'évaluation, chez nous, et avec... pour
savoir un peu à quoi tout ça retournait. Maintenant, il y a quand
même du travail qui a été fait parce qu'on s'est
assuré... Je sais que lors de vérifications... je pense que c'est
à la Régie de l'assurance-maladie ou en tout cas...
Une voix: À la CSST.
M. O'Bready: Ou à la CSST. Bon, Mme Wallace me souligne
avec à propos qu'à la CSST il y a des vérifications qui
ont été effectuées. Oui, je me rappelle, pour...
comment... qui avait accès, par exemple, avec le dossier d'un
accidenté à partir d'un bureau régional. Je ne me rappelle
pas. Ça a éîé vérifié, ça.
Alors, on a déjà quelques balbutiements dans ce
domaine-là.
M. Boisclair: Comme ils causent d'ailleurs parfois des
problèmes dans nos bureaux de comté où on essaie d'avoir
de l'information sur quelqu'un qui a des problèmes avec la CSST et on se
fait dire: On n'a pas le droit, on ne peut pas communiquer les renseignements.
Ça dépend des gens avec qui on fait affaire, mais, dans bien des
cas, on nous transmet l'information, mais souvent...
M. O'Bready: À moins que vous ayez peut-être le
consentement de la personne et que vous puissiez le déposer à la
CSST, là, avec un mandat.
M. Boisclair: Bien, c'est ce que plusieurs députés
ont commencé à faire: faire signer des formulaires de
consentement pour avoir...
M. O'Bready: Oui, bien c'est parce qu'avec le consentement, c'est
peut-être... Je sais que c'est un outil qui peut... Sans vouloir entrer
dans un débat, je pense qu'il a déjà été
fait bien avant mon arrivée à la Commission, mais je pense que
les députés avaient déjà souligné la
difficulté que ça pourrait poser, la loi de l'accès, sur
leur boulot de bureau de comté.
M. Boisclair: II faudrait que vous nous aidiez à
élaborer un formulaire pour obtenir le consentement des...
Vous préparez une étude sur le couplage des fichiers.
M. O'Bready: Oui.
M. Boisclair: On me dit que ça devrait être
prêt bientôt.
M. O'Bready: Oui.
M. Boiscîair: Est-ce que ça va être prêt
pour l'étude du projet de loi 62?
M. O'Bready: Non. Je vais vous répondre que non, ça
ne sera pas prêt pour l'étude du projet de loi 62.
Définitivement pas. Il y a une première "draft", un premier
brouillon qui a été préparé, assez complexe, sur
lequel on a deux
personnes-ressources, chez nous, qui travaillent sur ça.
Ça ne sera pas complètement prêt et c'est un peu la raison
pour laquelle on avait demandé une espèce de statu quo. Mais on
aura probablement des choses à dire au niveau du projet de loi 62, mais
toute cette étude-là, comme telle, ne sera pas prête avant
beaucoup plus tard cet automne. Et elle aussi sera disponible, à ce
moment-là. Mais elle ne sera définitivement pas prête pour
le 11 et le 12. Ça, ce serait illusoire. C'est très complexe
comme dossier. Et on n'a que deux personnes. Et là, encore là, il
n'est pas impossible non plus qu'une fois notre étude terminée,
nous donnions un mandat quelconque à une firme de l'extérieur
pour venir, peut-être, valider certaines de nos données.
M. Boisclair: J'aurais fait le tour des questions que,
personnellement, j'avais à poser. Je ne sais pas si... Peut-être
conclure.
Le Président (M. Doyon): Peut-être juste demander...
C'est peut-être théorique la question que je vais poser, mais en
même temps que - ce ne sera pas long - les organismes ont l'obligation de
garder les renseignements, de les préserver et d'en réserver
l'accès à des groupes ou à des personnes bien
définies, est-ce que vous considérez que les organismes ont aussi
l'obligation de conserver tout simplement les renseignements qu'ils ont? Par
exemple, probablement, je ne sais pas si ça s'applique, est-ce qu'un
citoyen qui aurait besoin de renseignements en ce qui concerne - je dis
n'importe quoi ou à peu près là - ses contributions
à la Régie des rentes du Québec ou des choses comme
ça ou un dossier médical de 25 ans en arrière ou 50 ans en
arrière et qui se retrouverait dans l'impossibilité de retracer
ce dossier-là non pas parce qu'on l'a passé à d'autres,
tout simplement il est disparu, il s'est perdu, il a é^ effacé,
il a été détruit, il a été
écarté de quelque façon? Est-ce que vous considérez
qu'en même temps que les organismes peuvent re~"voir certains documents,
peuvent colliger certaines informations qu'ils ont, pour le bienfait et le
bénéfice des gens sur qui ces renseignements portent,
l'obligation de conserver ces renseignements-là, c'est-à-dire
qu'une fois que j'ai donné des renseignements à un organisme, que
l'organisme l'a recueilli légalement, est-ce que l'organisme, selon
vous, a l'obligation de le garder? Non seulement il ne peut pas le passer
à d'autres, le donner à d'autres sans avoir les accords
nécessaires etc., mais est-ce qu'il pourrait tout simplement dire: Moi,
je n'en ai plus besoin, je le détruis? Mais est-ce que ça ne
m'appartient pas un peu comme source de références, à un
moment donné, pour des renseignements que je pense qui existent toujours
que je sais avoir confiés, et là, à un moment
donné, le dossier n'existe plus et je n'ai plus ces
renseignements-là? Est-ce que j'ai un recours?
M. O'Bready: C'est-à-dire qu'il y a toute une série
de dispositions dans la Loi sur les archives. Notre loi à nous, ce
qu'elle prévoit c'est que, une fois qu'un organisme public qui n'a plus
besoin des renseignements qu'il a recueillis se doit de les détruire.
Sauf qu'il y a des calendriers de conservation qui sont établis au sens
de la Loi sur les archives. Il y a également des dispositions
légales. Je pense en particulier aux lois fiscales où le
ministère et l'organisme sont obligés de conserver pendant un
certain nombre d'années tout le dossier d'un payeur de taxes, etc., au
niveau de l'impôt, il me semble que c'est dix ans.
Le Président (M. Doyon): C'est correct ça.
M. O'Bready: Mais la balance, c'est régi vraiment par la
Loi sur les archives. Le seul article qu'il y a dans notre loi, à ma
connaissance, c'est un petit article 73 qui dit: Lorsque l'objet pour lequel un
renseignement nominatif a été recueilli est accompli, l'organisme
public doit le détruire, sous réserve de la Loi sur les archives.
Je sais que dans cette loi-là il y a un calendrier de conservation qui
doit être déposé aux Archives nationales. Je pense qu'il y
a toute une procédure. Je m'excuse de ne pas pouvoir vous...
Le Président (M. Doyon): Non, non.
M. O'Bready: Ça doit être approuvé par le
ministre. À mon humble opinion, c'est la seule obligation qui peut
exister.
Le Président (M. Doyon): D'accord. Vous vouliez conclure,
M. le député.
Conclusion
M. Boisclair: Peut-être conclure en remerciant le
président et les membres qui l'accompagnaient de s'être
livrés à cet exercice; ce n'est peut-être pas toujours
facile, mais je pense qu'on l'a fait dans un esprit de saine collaboration. Je
pense que ça nous a permis aussi de mettre en lumière un certain
nombre de priorités et de nous informer aussi où la Commission
s'en allait.
Quant à moi, je pourrais exprimer le souhait... Je pense qu'on va
de toute façon se revoir au moment de l'étude du projet de loi
62, mais il y quand même un certain nombre de préoccupations que
déjà on a été capable de mettre en évidence.
Souhaitons juste qu'elles puissent se traduire à l'occasion du
débat sur le projet de loi 62 et vous féliciter aussi pour le
travail qui a été fait; souvent le travail que vous faites on
n'en entend rarement parler, vous travaillez souvent dans l'ombre, et
féliciter les
gens qui sont avec vous et qui travaillent à la Commission
d'accès, vous remercier aussi de vous être prêtés
à cet exercice. Souhaitons juste qu'on pourra continuer à
entretenir des relations cordiales qu'on a commencé à faire.
M. O'Bready: C'est moi qui vous remercie, M. le Président,
mesdames et messieurs de la commission. J'ai peut-être commis une erreur,
un oubli, ce n'est pas une erreur, mais un oubli, au tout début de cette
audition. Je voulais excuser Mme la commissaire Giroux, qui est à ses
vacances annuelles, alors c'est la seule et unique raison pour laquelle elle
n'a pas assisté aujourd'hui à cette présentation. Et j'ai
oublié également de présenter, j'espère qu'ils sont
encore là, deux collaborateurs, Me Luc Frigon, qui est l'adjoint de
André Ouimet, et mon adjointe, Mme Maria Dion, qui a beaucoup de
misère à se tenir debout parce qu'elle s'est foulé un pied
en jouant au tennis.
Alors voilà... Ce n'est pas dû à son âge, M.
le Président. Ce sont des renseignements nominatifs, mais c'est de
notoriété publique.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boisclair:... vous n'avez pas le droit, ce sont des
renseignements nominatifs...
M. O'Bready: Alors je vous remercie de votre patience, de la
pertinence Je vos questions. Puis ça nous fera toujours plaisir de
collaborer avec les membres de la Commission.
Le Président (M. Doyon): M. le président, vous me
permettrez de vous remercier à mon tour, de vous assurer que la ministre
prendra sûrement connaissance avec beaucoup d'intérêt des
échanges que nous avons eus. Vous savez, je n'ai pas à vous le
dire, que la ministre des Communications est très
intéressée aux travaux que fait la Commission, votre Commission,
et qu'elle aura l'occasion sûrement, au-delà des rapports qui lui
seront faits par ses attachés politiques, de consulter le Journal des
débats.
Je veux aussi souligner en terminant que je pense que c'est un
précédent, cette commission a siégé dans les trois
mois du dépôt du rapport à l'Assemblée nationale, et
cette diligence dont a fait preuve la commission mérite d'être
soulignée, alors je voulais le dire en passant, parce que les
années précédentes, ça n'a pas toujours
été le cas. Dans les circonstances, je pense que ça vaut
ia peine de le dire.
Merci beaucoup. Bonne fin de journée.
Cette commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 17 h 32)