(Dix heures seize minutes)
Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! À l'ordre, messieurs! La commission du budget et de l'administration est réunie afin d'entendre le sous-ministre du Revenu en vertu de l'article 8 de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.
Est-ce que, Mme la secrétaire, il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui. M. Bourbeau (Laporte) est remplacé par M. Williams (Nelligan); M. LeSage (Hull) est remplacé par M. Brodeur (Shefford).
Organisation des travaux
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. D'abord, je dois souhaiter également la bienvenue au ministre délégué au Revenu, qui est parmi nous et qui m'a demandé si on pouvait lui accorder la possibilité qu'il intervienne une couple de minutes au tout début de nos travaux, et après il nous laissera libre du fonctionnement.
Donc, les règles de l'audition sont: la séance débutera par la présentation du vidéo je ne sais pas si on appelle ça de même sur le travail au noir. Ensuite, il y aura les remarques préliminaires selon la répartition suivante: le porte-parole de l'opposition officielle aura 20 minutes, le porte-parole du groupe ministériel, 20 minutes, et les autres députés, s'il y en a, en respectant l'alternance, 20 minutes chacun. Le sous-ministre du Revenu aura également 20 minutes et le Vérificateur général aura aussi une présentation de quelques minutes. Une période d'échanges avec le sous-ministre du Revenu suivra les remarques préliminaires jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures cet après-midi.
Tel qu'il a été convenu à la séance de travail du 21 février dernier, la commission a invité le Vérificateur général à participer à ces travaux, et ce dernier pourra intervenir à différents moments au cours de cette séance, selon le besoin des membres. Les groupes parlementaires disposeront d'un temps de parole égal en respectant l'alternance dans les interventions, et le temps de parole inutilisé par un groupe parlementaire sera disponible pour l'autre groupe parlementaire. Le temps de réponse du sous-ministre du Revenu sera imputé au temps de parole du représentant du groupe parlementaire qui pose la question.
Ici, je dois vous dire que ça a l'air un peu technique, mais, habituellement, votre président a une assez grande souplesse et on s'entend souvent assez facilement puis on ne se mêle pas dans les temps de parole plus qu'il faut. Je vous rappelle également que nous avons convenu d'accepter la proposition du sous-ministre du Revenu quant à une présentation concernant le travail au noir. Si les membres sont d'accord, cette présentation pourrait avoir lieu immédiatement avant les remarques préliminaires. Donc, je donnerais, si vous en convenez, la parole au ministre d'abord pour nous faire sa présentation, ses remarques, et, après ça, on visionnera la présentation sur le travail au noir. Ça vous convient? Allez, M. le ministre.
Remarques préliminaires
M. Roger Bertrand
M. Bertrand (Portneuf): Merci, M. le Président. J'aimerais vous remercier et remercier les membres de la commission pour ces quelques minutes que vous me consentez, car je crois bien qu'il s'agit d'un agenda assez chargé aujourd'hui, puisque vous aurez l'occasion d'examiner... et de poser des questions sur les activités du ministère.
Je pense que c'est un vaste ministère dont les fonctions sont importantes à l'égard de toute la problématique des revenus. C'est un ministère qui est constamment en contact avec nos commettants, un des ministères qui ont probablement le plus de contacts avec nos citoyens. On voit donc l'importance que les choses se fassent de la meilleure façon possible, le plus efficacement possible en ce qui regarde la perception des revenus, mais également dans le respect des personnes, ce qui constitue les deux objectifs peut-être les plus importants, tels que je peux les comprendre aujourd'hui, du ministère, à savoir faire en sorte que, dans nos activités de perception de revenus, on s'assure, compte tenu de nos objectifs d'équité, justement, que ce qui est dû est payé, pas plus et pas moins, et que, d'autre part, la relation entre le ministère du Revenu et le gouvernement via le ministère du Revenu et chacun des citoyens maintienne la meilleure qualité possible. Bien qu'efficaces, donc, on demeure des personnes et des organismes qui entretiennent des contacts de qualité avec l'ensemble de nos concitoyens.
(10 h 20)
Je suis accompagné, bien sûr, de mon sous-ministre, M. Paré, à mon extrême droite, de Mme Francine Lacasse, du bureau du sous-ministre, à ma gauche, de mon conseiller politique, M. Alain Lavigne, et je laisserai le sous-ministre présenter ses collègues ultérieurement.
Je veux également féliciter la commission de son initiative de rencontrer les représentants du ministère du Revenu. Je pense que, dans notre démocratie, le rôle des commissions parlementaires m'apparaît être un rouage important de nos institutions, et le fait que les membres de la commission prennent la peine, justement, de rencontrer chacun des ministères sous sa juridiction ou dans son domaine de compétence de façon à les questionner sur leur administration, également de bonifier peut-être ce qu'on essaie de faire à l'aide des suggestions que vous auriez à faire, ça me paraît être une initiative fort importante pour nous. Je peux vous assurer de notre collaboration. On va essayer de vous donner les réponses les plus claires possible et en même temps de tenir compte le plus possible, également, des suggestions que vous auriez à faire pour améliorer soit la perception, soit la relation avec les citoyens dans le cadre de nos responsabilités.
Je dois vous dire que le travail du ministère du Revenu au cours des prochains mois, prochaines années, ne sera pas facile. Il sera compliqué par le fait que, à partir du moment où notre intention, comme gouvernement, est de ne pas augmenter les taxes, il faut s'assurer, donc, que celles qui sont dues soient payées, que ces revenus-là rentrent, et j'ai l'impression, à voir différents rapports dont j'ai pu prendre connaissance, que le choix va parfois être serré entre, par exemple, le Vérificateur général et le Protecteur du citoyen. Mais, en même temps, je pense que mon expérience, au niveau parlementaire, de la dernière année m'a certainement habitué à avancer dans des couloirs parfois serrés.
Alors, vous pouvez donc être assurés de notre collaboration. Il me fera plaisir, peut-être dans d'autres forums, de répondre à certaines questions davantage politiques. Que ce soit lors des engagements financiers ou lors de l'examen du budget, je serai très certainement disponible également pour fournir tous les éclairages possibles aux membres de la commission. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le ministre. Maintenant, j'inviterais M. le sous-ministre à débuter la présentation de son exposé sur le travail au noir.
Présentation audiovisuelle sur la problématique du travail au noir M. Pierre-André Paré
M. Paré (Pierre-André): Bonjour, tout le monde. Je remercie M. Bertrand de m'avoir accompagné pour le départ et pour cette première rencontre. Sans plus tarder, je demanderais à M. Daniel Boudreau, de notre bureau, de faire cette présentation de façon à ce qu'on ne perde pas de temps puis que vous puissiez bénéficier du maximum de temps pour poser des questions par la suite. Merci.
(Consultation)
M. Paré (Pierre-André): Si vous le permettez, M. le Président, en attendant que la technologie réussisse à s'adapter à cette commission ha, ha, ha! je voudrais mettre en perspective ce travail qui a été fait chez nous sur le travail au noir et qui a été fait dans des circonstances de grande collaboration avec l'ensemble des ministères, c'est-à-dire qu'on a pu obtenir la collaboration de sept ou huit ministères.
On s'apercevait qu'il y avait beaucoup d'évasion fiscale, le travail du Vérificateur général le mentionne. On en parle un peu sur toutes les tribunes. J'aimerais quand même vous rappeler une chose sur le travail au noir et l'évasion fiscale: c'est qu'il faut faire attention pour ne pas tomber dans le syndrome de ce que j'appelle la petite chaloupe avec le feu d'artifice puis le gros bateau, et je m'explique. Le travail au noir, ça représente un certain montant d'argent qui n'est pas récupéré auprès des gens, auprès de la population, auprès des citoyens, auprès des contribuables qui ne paient pas complètement leurs impôts, qui ne paient pas tout ou qui en cachent une partie. Vous allez voir tantôt les chiffres, ça représente une certaine proportion qui, aux yeux des gens en général, est un gros montant d'argent. Mais ce gros montant d'argent là est l'équivalent de 1/40 ou 1/20 des encaissements globaux du ministère.
L'an passé, on a perçu l'équivalent de 38 000 000 000 $, près de 39 000 000 000 $. Cette année, on se dirige vers des encaissements d'à peu près 41 000 000 000 $. Il se peut qu'on ait un manque de 1 000 000 000 $, 1 500 000 000 $ qui n'est pas perçu. Il se peut aussi que ce milliard-là, si on le met par rapport aux revenus au lieu de le mettre par rapport aux recettes, on ait des proportions différentes. Mais, lorsqu'on parle uniquement du travail au noir puis qu'on parle uniquement de la façon dont on peut l'enrayer, on parle de, soit si on est sur les revenus, 1/20 de la situation et, si on est sur les recettes, 1/40 de la situation. Et, quand on parle de 1/40 de la situation, ça me rappelle des moments où on discutait avec le Conseil du trésor et à plusieurs endroits sur des coupures de 1 000 000 $ sur un budget de 400 000 000 $ puis qu'on s'obstinait toute l'année sur 1 000 000 $, mais on ne regardait jamais ce qu'il y avait dans le gros bateau en arrière, qui passait sur le 400 000 000 $.
Alors, le ministère a comme responsabilité de bien s'assurer que sa base est toujours prête, est toujours conservée et que la base, de 41 000 000 000 $ ou de 40 000 000 000 $ qu'on perçoit, ou de 28 000 000 000 $ de revenus qui est inscrite... On verra la différence entre les recettes et les revenus et, le Vérificateur général et moi, on pourrait se joindre pour donner un petit cours de comptabilité si c'est nécessaire. Mais cette base-là, on ne doit pas l'échapper au profit de parler uniquement du 1 000 000 000 $; et c'est là qu'on voit tout le dommage que peut causer l'économie au noir. C'est même peut-être nous faire focusser sur des éléments qui sont plus ou moins importants. Si, par exemple, on travaille sur seulement 1 000 000 000 $ et que, le 40 000 000 000 $, on l'oublie, on peut avoir une certaine difficulté.
Je pense que, bientôt, on va avoir la présentation qui va commencer.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boudreau (Daniel): On s'excuse un petit peu des problèmes techniques.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Veuillez rester assis, monsieur.
M. Paré (Pierre-André): Oui. Je vais passer la parole à M. Boudreau et à M. Bordeleau, qui vont continuer à faire la présentation. Merci beaucoup, M. le Président, de votre clémence. Ha, ha, ha!
M. Boudreau (Daniel): Alors, il nous reste à ajuster la taille de l'écran pour pouvoir présenter le vidéo. Le vidéo qu'on va vous présenter fait suite au comité ministériel qui a été mis sur pied par M. Paré au mois de février dernier. C'est un comité qui regroupait des gens de toutes les directions générales du ministère.
M. Bordeleau (Michel): On s'excuse pour les problèmes technologiques, il y a beaucoup d'équipements ici qui sont tout à fait nouveaux pour nous.
Une voix: Ils ont été faits au noir.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boudreau (Daniel): Alors, comme je le disais, c'est la suite du comité. Le comité avait été mis sur pied pour analyser la problématique du travail au noir dans toutes ses composantes et aussi pour proposer une stratégie d'intervention à court terme, moyen terme et long terme. Donc, il y a des gestes qui vont ressortir des propositions qu'on va énoncer qui ne donneront pas des résultats nécessairement immédiatement, mais qui s'échelonnent sur une période de temps assez longue. Si on veut avoir des résultats vraiment concrets et des résultats durables, bien, à ce moment-là, il faut aussi poser les gestes qui vont amener des conclusions sur une base durable.
Le plan de la présentation sera la problématique générale, au début; la définition des termes utilisés; l'évaluation du phénomène, et, ici, on ne voudrait pas rentrer dans une guerre de chiffres, étant donné qu'il n'y a pas de statistiques officielles sur le travail au noir; alors, on a pris un petit peu un résultat de différentes études pour essayer de se faire une idée, mais c'est sûr que les statistiques officielles dans ce domaine-là sont tout à fait inexistantes; le portrait type des intervenants; les causes qui amènent le travail au noir et les conséquences qu'il entraîne; la stratégie d'intervention que l'on veut adopter au ministère; et une conclusion générale sur l'ensemble de la présentation.
(10 h 30)
Ici, on a le nombre de citoyens selon ce que les gens... la perception des gens sur le nombre de citoyens qui ne paient pas tous leurs impôts; alors, ceux qui pensent que c'est très important, 44 %, et important, 41 %. Donc, on voit que c'est une perception qui est très importante, au niveau des gens. Environ 85 % de la population croit que les gens éludent énormément d'argent. Que ça soit vrai ou pas, la perception des gens est très élevée à ce niveau-là.
Le travail au noir est une problématique québécoise. C'est une problématique qui s'étend à l'échelle du Québec, à l'échelle du Canada, puis c'est même mondial. Ce n'est pas particulier au Québec, ici. S'y attaquer nécessite l'appui du gouvernement et de la population dans son ensemble. C'est les deux éléments clés sur lesquels on va revenir tout au long de la présentation, ça prend l'appui des deux groupes. Si la population n'est pas prête à faire les sacrifices qui s'imposent, à ce moment-là, les gestes que le gouvernement peut poser sont quand même beaucoup plus limités.
La problématique québécoise. On a relevé certains extraits du discours inaugural de M. Parizeau, au mois d'octobre 1994, où on disait: Il s'est créé au Québec, ces dernières années, un climat malsain. C'est comme un concours où celui qui paie le moins de taxes gagne. Dans cette course à l'irresponsabilité, nous sommes tous perdants. Alors, si les gens font de plus en plus appel au travail au noir, bien, au fil d'arrivée, nous avons moins d'argent pour l'éducation, pour la formation, pour la santé. Il y a donc un problème de finances publiques. C'est profondément injuste à l'endroit de tous les citoyens qui paient, par principe, par devoir et par honnêteté, l'ensemble de leurs taxes. Donc, il y a une question d'équité en plus d'une question de finances publiques.
Le gouvernement propose à la population un pacte de coresponsabilité et de solidarité, ce qui démontre bien, je pense, l'engagement du gouvernement dans ce qu'on parlait tantôt. Ça prend un engagement de la population et du gouvernement. Alors, ici, dans le discours inaugural, M. Parizeau s'engage à percevoir de chacun ce qui est dû à l'État, à dépenser avec parcimonie et jugement, sans favoriser certains groupes d'intérêts, et à rétablir le lien de confiance. Le lien de confiance, ici, on va voir tout au long de l'exposé qu'il est aussi très important d'avoir un lien de confiance entre la population et le gouvernement.
En retour, le gouvernement demande aux Québécois de mettre un terme à la course folle vers l'illégalité. Il demande également aux commerçants et aux entrepreneurs de refuser d'escamoter les taxes qu'ils doivent percevoir et aux consommateurs de refuser le travail au noir, la contrebande ou l'évasion fiscale.
Pour commencer notre exposé, pour être sûrs qu'on s'entend tous sur les termes qu'on va utiliser, on va définir l'économie souterraine, le travail au noir. Et, au ministère du Revenu, souvent, c'est plus diffus, quelle est la distinction entre les revenus non déclarés, l'évasion fiscale et le travail au noir. C'est des choses qui se ressemblent beaucoup, mais il y a quand même des particularités propres à chacun.
L'économie souterraine, on a pris la définition de Pierre Fréchette, de l'Université Laval. C'est un concept qui est de nature économique on parle d'activité économique, ce n'est pas quelque chose d'occasionnel, c'est vraiment quelque chose de structuré, une activité économique, donc il y a possibilité de profit dont la production ou la dissimulation des revenus est habituellement illégale donc contrevient à une des lois de la société qui survient sur des marchés il ne faut pas que ce soit quelque chose qui se fasse occasionnellement ou de façon privée, c'est vraiment sur des marchés en marge de l'État et qui est ordinairement non comptabilisé dans le PIB. Alors, c'est la définition la plus large possible de ce qu'on peut appeler les activités au noir. C'est une définition qui est de nature économique.
Le travail au noir, la façon que, nous, on l'a défini pour les fins du ministère du Revenu, on reprend l'activité économique autre que criminelle. Alors, les activités criminelles sont exclues du document. Tout ce qu'on va voir à partir de maintenant, on ne fait pas appel à la notion d'activités criminelles. La drogue, les vols, etc., seront exclus.
Qui implique une prestation de travail. Comparativement à l'économie souterraine, le travail au noir fait appel à une prestation de travail, alors que l'économie souterraine peut faire appel à plus.
Une prestation de travail qui s'exécute en marge de la législation fiscale ou de la législation sociale. Une législation sociale, ça peut être quelqu'un qui est rémunéré, par exemple, en deça du salaire minimum. Alors, à ce moment-là, ça contrevient à une loi de nature sociale, c'est du travail au noir. Mais, pour les fins du ministère du Revenu, ça ne serait pas considéré du travail au noir. Ce qui est considéré du travail au noir, c'est lorsque l'activité est inconnue du ministère du Revenu. Alors, sur cette particularité-là, on va y revenir tantôt avec les prochains graphiques.
Alors, vous avez ici le travail au noir, les revenus non déclarés et l'évasion fiscale, et on va essayer de faire la distinction entre ces trois blocs-là.
M. Bordeleau (Michel): Si vous me permettez une interruption quelques secondes. L'exposé que M. Boudreau est en train de présenter va vous être remis, sous forme photocopiée, pour vous éviter de prendre des notes.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Pouvez-vous vous nommer, s'il vous plaît, monsieur?
M. Bordeleau (Michel): Michel Bordeleau, du ministère du Revenu. Donc, également, il y a un autre document que le rapport du comité de travail, que M. Boudreau a cité tout à l'heure, qui va vous être remis en même temps.
M. Boudreau (Daniel): Alors, si on revient à nos distinctions, un, le travail au noir, c'est une disposition sociale non respectée qui touche la prestation de services. Ça serait le cas, par exemple, d'un employé rémunéré à un taux horaire inférieur au salaire minimum. Étant donné qu'il n'y a pas d'évasion fiscale, bien, cette notion-là n'a pas été retenue dans le cadre du comité, où on s'attaquait surtout à la notion qu'il fallait qu'il y ait un impact sur l'évasion fiscale.
Le deuxième bloc, ce sont des revenus non déclarés. Ici aussi, étant donné qu'il n'y a pas d'impact sur l'évasion fiscale, c'est une notion qui a été écartée de l'analyse du comité. Ça serait, par exemple, des gains en capital qui seraient admissibles à l'exemption de gains en capital, par exemple, sur des revenus d'une vente d'actions de petites entreprises qui seraient éligibles aux gains en capital et qui ne seraient pas imposables.
Le bloc trois. Ici, c'est carrément de l'évasion fiscale. Mais c'est de l'évasion fiscale non pas en termes de revenus non déclarés ou d'activités économiques qui ont été menées en marge des lois fiscales, ça serait, par exemple, le cas d'une personne qui ne vit pas seule mais qui réclame des crédits pour personne vivant seule. Or, à ce moment-là, ça ne veut pas dire qu'elle a déclaré ou pas ses revenus, on n'a pas de notion. Alors, cette notion de trois, ici, c'est de l'évasion fiscale, mais, pour les fins de notre étude qui s'attaque aux revenus non déclarés ou au travail au noir, on l'a aussi exclue du document.
Le point quatre. Ici, ce sont des activités économiques dont les revenus ne sont pas déclarés mais qui n'ont aucun impact fiscal. Ça serait, par exemple, des gens à l'aide sociale qui pourraient faire des travaux qui ne seraient pas déclarés à l'aide sociale. Alors, ça serait du revenu non déclaré. Mais, étant donné qu'il n'y a pas d'impact fiscal parce que l'aide sociale ne serait pas imposée et que les gens ne gagneraient pas un revenu suffisant pour devenir imposables, il n'y a pas d'impact chez nous.
Alors, dans le cadre de l'analyse du présent comité, c'est les points 5, ici, qui ont été retenus, donc du travail au noir qui a un impact fiscal; des revenus non déclarés qui ont un impact fiscal; du travail au noir et des revenus non déclarés qui ont toujours un impact fiscal.
La distinction entre revenus non déclarés et travail au noir, on a dit que c'était une activité qui était connue du ministère. Alors, ici, on a, par exemple, un peintre qui effectue des travaux de peinture et dont les revenus sont non déclarés. L'activité d'un entrepreneur peintre qui fait de la peinture toute la semaine, mais que, le samedi, par exemple, il ferait des travaux de peinture et ne déclarerait pas ses revenus; l'entrepreneur peintre est connu au ministère du Revenu et, à ce moment-là, on dirait que les revenus de peinture qu'il fait la fin de semaine, c'est du revenu non déclaré. Par contre, si c'est un salarié qui fait des travaux de peinture, par exemple, un fonctionnaire qui ferait des travaux de peinture les fins de semaine, le fonctionnaire, le salarié est connu du ministère en tant que salarié, mais les travaux de peinture que le peintre va effectuer, que le fonctionnaire va effectuer les fins de semaine, c'est une activité d'entreprise qui, elle, n'est pas connue du ministère, et elle serait reliée au travail au noir.
Alors, vous allez comprendre que, dans les recommandations qu'on va faire, à un moment donné, les distinctions sont très difficiles à établir et les propositions que l'on va faire vont s'attaquer autant aux revenus non déclarés qu'au travail au noir. Donc, ce qu'on va faire comme évaluation, comme propositions, comme causes, touche l'ensemble des trois points qui sont ici numérotés par le chiffre cinq.
L'ampleur monétaire. Alors, ici, dans l'ampleur monétaire, on va regarder rapidement l'étude de Fortin & Fréchette et de Statistique Canada, on va aussi faire quelques évaluations pour le Canada et on va essayer de faire un estimé pour le Québec.
L'étude de Fortin & Fréchette, elle est intéressante puisque c'est une étude québécoise qui est très utilisée. Alors, dès qu'on commence à fouiller un petit peu le domaine des activités au noir, l'étude de Fréchette revient toujours sur le tapis. C'est une enquête qui a été réalisée directement auprès des ménages. Donc, on a fait une enquête, un échantillon auprès des ménages, on leur a posé certaines questions: Est-ce que vous travaillez au noir? Est-ce que vous engagez des travailleurs au noir, etc.? Donc, les résultats qu'on va obtenir sont des résultats qui sont des minimums, puisque c'est rare que les personnes vont avoir tendance à déclarer plus de revenus, par exemple, que la réalité; l'inverse est plutôt réaliste. C'est une évaluation qui a été réalisée en 1985 et qui n'a pas été mise à jour de façon structurelle depuis ce temps-là. Alors, il y a eu des mises à jour qui ont été faites en proportion du PIB, mais on n'a pas tenu compte de nouveaux phénomènes comme l'élargissement de la taxe de vente ou l'introduction de la TPS, etc. Et ça permet de réaliser des portraits types; les portraits types qu'on va voir un petit peu plus loin proviennent de cette analyse-là, ici.
(10 h 40)
L'étude de Statistique Canada, bien, elle, ici, ça provient d'un organisme de statistiques officielles, donc elle a des moyens techniques et des données statistiques à sa disposition qui sont énormes. C'est une étude qui est très récente, qui a été réalisée en 1994 pour l'année 1992. C'est une méthode d'estimation qui est fiable, qui est basée sur l'estimation des comptes nationaux au Canada. C'est une évaluation conservatrice qui inclut les entreprises, à l'opposé de l'étude de Fortin & Fréchette où on avait fait une enquête auprès des ménages. Alors, un ménage peut dépenser, par exemple, dans un bar pour s'acheter une consommation, mais il peut le faire de bonne foi et dire: Ce n'est pas du travail au noir. Mais si le restaurateur ne déclare pas ses revenus à l'État, bien, l'étude de Fréchette ne peut pas en tenir compte. L'étude de Statistique Canada tient compte de ces cas-là au niveau des entreprises. Donc, les résultats aussi vont être plus élevés que l'étude de Fortin & Fréchette.
On peut aussi obtenir des résultats détaillés par secteur d'activité. Si on met ça sur une échelle, ici, vous avez en bleu l'étude de Fortin & Fréchette, alors, c'est le 7,1. Ici, les chiffres ont sorti de la même couleur, l'étude de Fortin & Fréchette, c'est le 7,1, qu'on a ici, et le 9,6, que l'on a en 1992. Alors, on avait dit que c'étaient des résultats très faibles étant donné la nature de l'étude et que ça ne touchait que les individus et non les entreprises.
Vous avez l'étude de Statistique Canada, qui est en noir, ici. Alors, 10 700 000 000 $, en 1981, et la mise à jour en 1992, qui donne 35 800 000 000 $ pour le Canada.
Vous avez l'étude de Vaillancourt, qui donne 28 500 000 000 $ en 1981, 50 000 000 000 $ en 1986 et 89 000 000 000 $ en 1992. L'étude de Vaillancourt est basée sur des ratios monétaires. Alors, ça prend de l'argent liquide pour faire du travail au noir. Plus il y a de l'argent liquide dans l'économie par rapport à l'ensemble de la monnaie en circulation, bien, Vaillancourt conclut que la différence entre ces deux montants-là, c'est de l'économie souterraine. Alors, c'est normal que ça donne des montants très élevés puisque ça inclut aussi les activités criminelles et toute la thésaurisation aussi, qu'il prend en compte.
Vous avez finalement la colonne en blanc, ici, qui est la position de Finances Canada, qui a été établie en 1995, où on estime à 32 000 000 000 $ le montant de l'économie souterraine, qui est basé sur l'évaluation de Statistique Canada.
Alors, sans partir de guerre de chiffres puis dire lequel peut avoir raison ou tort, on s'aperçoit quand même que, peu importe l'analyse qui a été effectuée, il y a une croissance des montants, et c'est quand même des montants qui sont relativement élevés.
Au Canada, pour 1992, l'étude de Statistique Canada conclut à 35 800 000 000 $. Ça comprend les activités légales et illégales qui échappent au fisc. Si on exclut de ça la partie qui est illégale, qui est criminelle et qu'on a délibérément exclue de notre étude, qui est évaluée à 6 900 000 000 $, aussi par Statistique Canada, on obtient une production marchande légale qui échappe au fisc, de 28 800 000 000 $...
Une voix: ...
M. Boudreau (Daniel): À peu près 5,2, je crois. Une production marchande légale qui échappe au PIB et au fisc, 18 500 000 000 $. Donc, la différence entre les deux, c'est des variables, ce sont des données qui ont été prises en compte dans la comptabilité nationale par divers ajustements mais qui ne sont pas connues du fisc. Si on prend notre montant de 18 000 000 000 $ et qu'on essaie de le répartir par secteurs d'activité, ça donne à peu près ça, ici. Alors, vous remarquez que les repas à l'extérieur, les aliments, boissons et boissons alcooliques, donc ce qui est relié au domaine de l'alimentation et boissons, c'est environ le tiers de l'économie souterraine; vous avez la rénovation et la construction neuve qui représentent environ 20 % ou 1/5 du total aussi, et vous avez aussi plusieurs autres secteurs qui sont regroupés dans un bloc, à 30 %.
Alors, au Canada, l'évaluation du ministère des Finances, de 32 000 000 000 $, si on enlève la partie de 7 000 000 000 $ qui relève des activités criminelles, on pourrait parler d'un niveau d'évasion, pour le Canada, d'environ 25 000 000 000 $ ou de 3,5 % du PIB. Alors, si on essaie de voir un petit peu, au Québec, ce que ça pourrait donner, on pourrait prendre 3,5 % du PIB québécois et l'appliquer de façon intégrale. On pourrait aussi prendre 25 000 000 000 $ divisés par la population et prendre un ratio per capita et l'appliquer au Québec. Ça nous donnerait environ 912 $ per capita. On s'est interrogés à savoir si, au Québec, il y avait plus d'économie souterraine qu'ailleurs. On a trouvé un sondage qui nous dit, par exemple, la proportion des Canadiens qui évitent les taxes de vente; alors, au Canada, c'est 31 %, et pour le Québec, c'est 45 %. C'est plus élevé qu'ailleurs. On a peut-être un tempérament qui se prête plus à l'évasion fiscale. Donc, si on prend ces ratios-là, ça voudrait dire que 30 % de l'économie souterraine se retrouveraient au Québec. En appliquant un ratio de 30 %, on arriverait, au Québec, à une évaluation de 7 500 000 000 $. Si on prend une évaluation per capita ou en proportion du PIB, on aurait quelque chose autour de 6 000 000 000 $. Donc, on peut conclure qu'au Québec on aurait des données semblables, entre 6 000 000 000 $ et 7 000 000 000 $, qui pourraient échapper au gouvernement. Les pertes fiscales qui sont reliées, pour l'ensemble des gouvernements, varieraient entre 2 500 000 000 $ et 3 100 000 000 $. Donc, c'est le gouvernement provincial, fédéral et l'ensemble des gouvernements municipaux, et vous avez le gouvernement du Québec qui perdrait entre 1 100 000 000 $ et 1 400 000 000 $. Il faut faire attention aux données aussi. Ça ne veut pas dire que si, demain matin, on trouvait une recette miracle et qu'on éliminait complètement le travail au noir, ça ne veut pas nécessairement dire qu'on récupérerait 1 100 000 000 $, ou 1 400 000 000 $, puisqu'il y a quand même des travaux de rénovation au noir qui se font actuellement où il y a des matériaux, par exemple, sur lesquels la taxe a été perçue et remise au gouvernement et qui ne serait peut-être pas réalisée si on éliminait le travail au noir puisqu'ils deviendraient hors de prix, peut-être, pour certaines catégories de personnes. Mais il reste quand même que les pertes fiscales sont relativement importantes.
On va regarder maintenant le portrait type ou les éléments de motivation pour certains secteurs d'activité au niveau du travailleur au noir ou pour le donneur d'ouvrage. Alors, les participants à l'économie souterraine, ce serait environ 31 %. Un petit peu moins que le tiers de la population s'adonnerait à des activités au noir: 13 % à titre d'offreurs, 20 % à titre de donneurs. Il y a beaucoup plus de donneurs qu'il y a d'offreurs et la somme des deux donne un peu plus que 31 %, puisqu'il y en a qui sont à la fois offreurs et donneurs sur le marché au noir, et vous avez à peu près les deux tiers de la population qui ne touchent pas à ce secteur d'activité.
La probabilité la plus élevée pour un travailleur au noir au Québec, c'est la personne qui est célibataire, qui a moins de 25 ans, qui bénéficie de l'aide sociale et qui a une faible évaluation de la probabilité de se faire prendre, du niveau de pénalité si jamais elle se fait prendre et de la moralité qui est associée au travail au noir. Ces données-là sont tirées de l'étude de Fortin & Fréchette pour 1985.
Ici, vous avez différentes probabilités qui sont associées à différentes personnes. Si vous prenez, par exemple, en fonction de l'âge, plus l'âge augmente et plus la probabilité associée au travail au noir diminue. Et, dépendamment si vous vivez avec vos parents, ou vous êtes marié, ou vous êtes célibataire, ou vous vivez seul, la probabilité augmente de façon importante. Alors, si vous vivez avez vos parents, vous avez entre 18 et 24 ans, votre probabilité est autour de 8 %. Si vous quittez vos parents, vous vous en allez en appartement, votre probabilité monte à peu près à 18 %, et si on ajoute à ça le fait que la personne reçoit de l'aide sociale, on augmente ces pénalités de 14,9 %, ce qui le ferait passer autour de 30 % de probabilité.
Les impacts de divers éléments sur la probabilité de travailler au noir. Alors, vous avez ici une ligne à zéro. Ce qui est en haut de cette ligne-là, ce sont des éléments qui favorisent le travail au noir, et les éléments qui sont en bas, ce sont des éléments qui découragent le travail au noir. Donc, le fait pour un travailleur d'avoir une période de travail limitée sur le marché officiel est incitatif. Si la personne ne peut pas faire de temps supplémentaire et qu'elle a des besoins financiers, on va l'inciter à travailler au noir; la probabilité pour une personne qui ne peut pas faire de temps supplémentaire d'oeuvrer au noir est de 6,8 % supérieure.
Par contre, ici, vous avez trois facteurs qui peuvent influencer, où on peut avoir un impact sur le travail au noir. L'élément le plus important, 4,2 %, c'est au niveau de la moralité du travailleur; les travailleurs pour qui il n'y a aucun crime de travailler au noir, que c'est normal, que ça ne pénalise personne, bien, les travailleurs qui ont cette mentalité-là sont beaucoup plus enclins à travailler au noir que les autres.
Vous avez un élément qui est presque aussi important, ici, sur la perception de la probabilité d'être découvert, alors qu'au niveau de la perception du taux de pénalité, c'est très faible. Alors, si on majore les taux de pénalité, l'effet est beaucoup moins dissuasif que si on augmente la probabilité de se faire prendre. C'est comme si, sur l'autoroute par exemple, pour s'en aller à Montréal, si on double les pénalités pour la vitesse au volant, ça ne veut pas dire que les gens vont aller moins vite. Il s'agit de mettre un policier sur la route et on a un effet beaucoup plus dissuasif. C'est la même chose ici. Ça prend une présence pour que les gens aient un niveau de probabilité élevé de se faire prendre ou au moins la perception d'avoir un niveau de probabilité élevé.
La probabilité d'être un donneur d'ouvrage croît avec le revenu. Alors, elle passe de 10 % à 36 % chez les 40 000 $ et plus. Les dépenses annuelles sont autour de 1 700 $ à partir de 20 000 $ et sont inférieures pour les revenus de moindre importance. Au niveau de la tranche d'âge, c'est surtout celle des 25-39 ans qui est importante, et ça diminue avec l'âge. Au niveau des montants, c'est aussi le bloc des 25-39 ans et c'est souvent dans le secteur des frais de garde que l'on rencontre ces gens-là, ici.
Les causes du travail au noir. Alors, on a des causes économiques, on a des causes sociologiques et on a aussi des causes administratives. Or, au niveau des causes économiques, la première, ce sont des charges fiscales qui sont élevées, d'abord au niveau des particuliers. Si on regarde la proportion du revenu personnel qui va aux impôts sur le revenu, alors, en 1970, c'était autour de 16 % à 17 %. En 1992, on approche du 24 %. Il y a donc une croissance constante du niveau d'impôt qui est prélevé sur le revenu personnel.
(10 h 50)
Si on regarde au niveau des catégories d'individus. Alors, vous avez la partie pâle ici qui est le taux d'imposition. Or, le taux d'imposition augmente graduellement au fur et à mesure que le revenu des gens augmente. La partie en bleu ici, ce sont des pertes au niveau des transferts sociaux. Alors, les gens, par exemple, à mesure que le revenu augmente, se voient couper le remboursement d'impôt foncier, le crédit de taxe à la consommation, le crédit remboursable pour enfants à charge. Alors, l'ensemble de ces secteurs-là, quand vous avez 20 000 $, ce n'est pas tellement important. Par contre, quand vous arrivez autour de 26 000 $ à 30 000 $, c'est aussi important et même plus que le niveau d'imposition. Donc, pour une personne de 26 000 $, ici, qui a un taux d'imposition autour de 30 %, la perte des transferts fiscaux fait en sorte qu'elle se retrouve avec un taux d'imposition de 60 %, et il atteint même 73 % au niveau des gens de 30 000 $. Ici, les taux d'imposition comprennent le provincial et le fédéral. Alors, une personne de 30 000 $ qui fait 1 $ de revenu additionnel va laisser 0,73 $ dans les mains de l'État et il va lui rester 0,27 $.
Les charges fiscales élevées au niveau des entreprises. Alors, en plus des particuliers et au niveau des entreprises, les taxes sur les masses salariales, qui étaient autour de 5 % en 1980, sont aujourd'hui de 11 %. En termes de montants, les charges qui sont payées par les entrepreneurs sur les salaires des employés, en 1966, ça représentait environ 500 $; en 1993, au Québec, ça représente environ 2 600 $. Alors, chaque fois que l'employeur engage une personne, il peut s'attendre à débourser en moyenne 2 600 $ de frais connexes pour les charges fiscales qui sont attribuées à l'employeur.
En plus des particuliers et des entreprises, on peut regarder la fiscalité dans son ensemble par rapport à l'ensemble des pays. Alors, ici, au Canada, vous voyez que la croissance est continue entre 1980 et 1994. Au niveau des États-Unis, on observe aussi une croissance, par contre, la croissance est beaucoup moins élevée et on a un différentiel qui tend à s'agrandir, qui tend à s'éloigner de plus en plus. Au niveau des pays européens, on a une fiscalité qui ressemble plus à celle du Québec et on a des taux d'imposition qui sont relativement élevés, sauf que, depuis 1988, on voit qu'il y a quand même une baisse, à l'exception de l'Italie, bien sûr.
Le deuxième bloc, c'est au niveau du système fiscal, qui est jugé inéquitable. Alors, ici, ce n'est qu'une perception. C'est que les gens ont la perception que le système fiscal est injuste: Tout à fait d'accord, 56 %; plutôt d'accord, 18 %. Vous avez donc à peu près trois personnes sur quatre qui jugent le système injuste ou inéquitable, et, souvent, c'est une façon pour les gens de compenser; si les gens ont l'impression que le système est inéquitable, ils vont avoir tendance à se faire justice eux-mêmes. Donc, on a un incitatif à travailler au noir.
Au niveau des coûts excessifs de la main-d'oeuvre. On a fait une petite enquête l'automne dernier pour avoir des coûts comparatifs. Alors, une personne qui travaille au salaire minimum gagne 6,45 $ de l'heure; une personne au salaire industriel moyen gagne 18,23 $ de l'heure. Si elle veut faire des travaux de peinture, elle est obligée d'engager une personne à 36 $ de l'heure; des travaux de plomberie et d'électricité, à 46 $ de l'heure, ou de faire réparer son auto chez un concessionnaire, 74 $ de l'heure. Compte tenu des taux d'imposition que ces gens-là encourent, c'est aussi des revenus nets que ça prend pour payer nos dépenses, bien, à ce moment-là, c'est très difficile pour eux de pouvoir se payer des services de façon officielle.
Au niveau du volet sociologique, l'acceptation sociale de la fraude fiscale. Alors, les gens ont l'impression que la fraude fiscale, ça ne fait pas de victimes, que c'est accepté de tout le monde. Si on demandait aux gens: Est-ce que vous seriez prêts à faire un vol de banque? Probablement que très peu seraient d'accord. Par contre, quand on demande aux gens: Est-ce que vous seriez prêts à frauder si vous étiez certains de ne pas vous faire prendre? Bien, on a 47 % qui seraient tout à fait d'accord, 24 % qui seraient plutôt d'accord. Donc, presque trois personnes sur quatre seraient plutôt d'accord à frauder. D'après les statistiques les plus récentes que l'on a, c'est surtout au niveau des jeunes qu'on s'aperçoit que la moralité est de plus en plus faible et qu'il y a de plus en plus de goût de faire de l'évasion.
Il y a aussi le désir d'améliorer son niveau de vie. Alors, si on regarde le revenu net des ménages et, ici, les ménages, ce sont les personnes de moins de 65 ans, donc les ménages qui sont enclins soit à travailler au noir ou à encourager des travailleurs au noir. Et, ici, vous avez le revenu en dollars de 1993 donc on élimine l'effet de l'inflation alors, le revenu actuel est de 55 738 $ pour ces gens-là, alors qu'il y a à peine trois ans le revenu était de 58 000 $. Les effets de la récession se sont fait sentir, le revenu des gens a baissé de 3 000 $. Et, si on regarde comparativement à 1980, on s'aperçoit qu'en 1993 le revenu est de 1 000 $ inférieur à ce qu'il était en 1980. Donc, c'est souvent des incitatifs monétaires qui incitent à travailler au noir, les gens ont moins d'argent qu'ils en avaient il y a 13 ans. On a parlé tantôt des taux d'imposition; si on inclut l'impôt sur le revenu, le revenu baisse à 44 000 $, alors qu'en 1980 il était de 47 000 $, il y a donc une perte de revenus de 3 000 $ durant les 13 années et, comparativement à 1992, il y a eu une perte d'environ 1 000 $.
Le peu de crédibilité des gouvernements. Or, ici, on a demandé aux gens: Est-ce que vous avez l'impression que les gouvernements gaspillent une grande partie des impôts qu'ils perçoivent? C'est un sondage KPMG de 1994: Tout à fait d'accord, 69 %; plutôt d'accord, 17 %. Donc, environ 86 % des gens ont l'impression que les gouvernements gaspillent une partie des impôts qu'ils perçoivent.
Une voix: Ils ont raison aussi.
M. Boudreau (Daniel): Le degré de confiance des Québécois à l'égard des professions. On voit que, au niveau des fermiers, les Québécois ont très confiance aux fermiers, 93 %; aux médecins aussi. Lorsqu'on approche des juges, des fonctionnaires, 52 %, et des politiciens, 28 %. Alors, quand on parlait, au début, de l'importance de rétablir le lien de confiance, bien, on voit ici toute l'importance que ça peut revêtir.
Une voix: Les fonctionnaires, 52 %?
M. Boudreau (Daniel): 52 %.
Une voix: Vous êtes chanceux, vous autres.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: Vous n'avez pas besoin de vous faire élire, ils ont plus confiance en vous autres qu'en nous autres, c'est bien ça.
M. Boudreau (Daniel): Parmi les causes du travail au noir, le troisième volet, c'est le volet administratif, la bureaucratie gouvernementale qui est lourde et imposante. Seulement au ministère du Revenu, il existe 1 108 formulaires différents, disponibles dans les deux langues, ce qui fait 2 216 au total. Il existe aussi 550 formulaires internes. Au niveau des principales préoccupations des entreprises, c'est un sondage FCEI, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qui le classait comme le troisième élément le plus important: réglementation et bureaucratie gouvernementales, ça a été soulevé par environ 75 % des répondants.
Le volet administratif. On a aussi la diminution des contrôles administratifs. Alors, ici, on regarde le niveau de vérification au niveau fédéral entre 1980 et 1989. Alors, les particuliers, c'est la partie noire, plus foncée; la partie bleu pâle, ce sont les corporations. Alors, en 1980, on vérifiait environ 3,5 % des gens; aujourd'hui, c'est rendu environ 1,7 %, ça a diminué environ de moitié. Au niveau des compagnies, ça a été 1,8 %, ça a même monté un petit peu en haut de 2 %; aujourd'hui, c'est inférieur à 1 %. Une étude américaine a démontré que le déclin du taux de vérification aux États-Unis, de 2,9 % à 1.7 % donc, nous, on a un taux de diminution plus élevé que ça or, ce déclin-là était responsable à lui seul d'une baisse de niveau de déclaration volontaire variant entre 5 % chez les salariés c'est normal, les salariés, c'est difficile pour eux de cacher des revenus mais de 50 % pour les petits entrepreneurs. Alors, quand on parlait tantôt que, pour contrer le travail au noir, ce qui est important, c'est la présence, si on diminue la présence au niveau des gens, bien, ces gens-là ne se sentent pas vérifiés, ils ne se sentent pas contrôlés et il y a une tendance de plus en plus élevée à pouvoir éluder. Et on sait que de plus en plus la société moderne se dirige vers le type d'entrepreneurs qui sont de petits autonomes comparativement aux salariés qui existaient dans les années soixante, soixante-dix.
Les conséquences du travail au noir. On va reprendre les conséquences selon le même schème qu'on avait au niveau des causes. Alors, le volet économique, sociologique et administratif.
Le premier volet, c'est le volet économique, c'est la partie des pertes de revenus. Or, on a évalué tantôt autour de 1 100 000 000 $, 1 4 000 000 000 $, ce que ça représente. Bien, ici on ne voit pas très bien 1 300 000 000 $, ce sont les taxes sur le carburant. Alors, si on était capable de mettre un frein au travail au noir, ça représenterait une somme semblable à celle qu'on perçoit pour la taxe sur le carburant. C'est presque autant que tous les revenus que l'on perçoit des sociétés d'État et ça représente plus du tiers du montant, soit la péréquation ou le déficit. Donc, c'est des sommes d'argent qui sont quand même importantes.
En plus des pertes de revenus fiscaux, on a aussi une remise en question du système d'autocotisation. Le système d'autocotisation, c'est important pour le ministère du Revenu. Le ministère du Revenu ne veut pas jouer à la police. Plus les gens vont se conformer d'eux-mêmes, bien, plus c'est simple. Si les gens ne se conforment pas d'eux-mêmes, il faut mettre tout plein de contrôles. Alors, là, on se retrouve dans un État un peu du style policier. Ce n'est pas ce que le ministère du Revenu recherche et ce n'est pas ce que la société québécoise recherche, j'en suis persuadé.
On a aussi une fiscalité plus lourde qui est supportée par moins de citoyens. Alors, plus de gens oeuvrent au noir, les dépenses étant les mêmes, bien, ceux qui restent, qui sont des payeurs de taxes, doivent supporter un fardeau qui est plus lourd.
On a aussi un effet d'entraînement, on l'a vu notamment au niveau de la taxe sur la tabac quand il y avait la contrebande, on commence avec un élément et on agrandit de plus en plus notre cercle.
On a une compétition déloyale entre ceux qui paient leurs taxes et ceux qui ne paient pas leurs taxes et on vient fausser les indicateurs économiques. Alors, quand le gouvernement fait des politiques économiques ou budgétaires pour contrer une mauvaise situation économique, bien, peut-être que la situation économique, elle est faussée par des statistiques qu'on peut obtenir de divers organismes publics de renseignements.
(11 heures)
Les conséquences sociales. Alors, la conséquence qui va être la plus dangereuse, c'est l'institutionnalisation du phénomène. Quand on veut trouver un peintre ou un plombier, si notre premier réflexe est de demander à notre voisin s'il ne connaîtrait pas un bon plombier ou un bon peintre ou de regarder dans les annonces classées plutôt que dans les pages jaunes, bien, on commence à institutionnaliser le phénomène du travail au noir.
Diminution ou perte des acquis sociaux. Alors, on disait tantôt que, s'il y a beaucoup de travail au noir, les gouvernements ont moins d'argent. Alors, si on a moins d'argent, on est obligé de couper dans l'éducation, dans la santé, dans plein de domaines. Donc, on va perdre des acquis qu'on s'est donné des générations à pouvoir acquérir.
Absence de contrôle sur des produits achetés. Notamment, dans la commission ontarienne, on a dénoté, par exemple, que des transporteurs de carburant, à l'aller, transportaient du carburant et, au retour, transportaient des boissons alcooliques ou du vin. Alors, je ne sais pas si le nettoyage était toujours bien réalisé sur les camions. On a aussi une sécurité déficiente des travailleurs.
Au niveau des causes administratives, alors, c'est des vérifications qui sont plus complexes. Alors, c'est sûr que les gens vont s'ingénier à faire de plus en plus de petits travaux qui sont de plus en plus difficiles à pouvoir être détectés. On a aussi un paradoxe qui s'appelle l'augmentation de la réglementation ou diminution de la réglementation. Pour avoir un meilleur contrôle, on devrait prôner une augmentation de la réglementation. Par contre, dans certains secteurs, il y en a peut-être trop, de réglementation, puis, à ce moment-là, il faudrait diminuer. Alors, on a un peu un paradoxe dans ce domaine-là.
Alors, si on fait un sommaire de la situation à venir jusqu'à présent, on s'aperçoit que c'est un phénomène qui est en croissance, que les pertes fiscales pour le gouvernement du Québec sont sûrement de l'ordre de 1 000 000 000 $, que le tiers de la population serait impliqué soit à titre de donneur d'ouvrage ou d'offreur de services, que ce sont principalement des raisons financières qui motivent les intervenants et que l'institutionnalisation du phénomène pourrait mettre en péril le système d'autocotisation. Or, bien que la situation soit alarmante, il est quand même possible d'intervenir afin qu'elle ne dégénère pas davantage.
Alors, on va maintenant vous présenter un petit peu la situation, comment le ministère entrevoit de faire la lutte au travail au noir. Premièrement, on va regarder notre population, si notre population est apte, si on pense que la population est prête à faire les gestes pour pouvoir permettre au gouvernement de contrer l'économie souterraine. Alors, ici, vous avez la population divisée en quatre blocs. Vous avez la moitié dans la partie de gauche, la moitié dans la partie de droite. Ici, ce sont des gens modèles. Alors, eux, vous pouvez faire à peu près n'importe quoi, les gens sont toujours honnêtes et les gens, ce sont des gens respectueux. À l'opposé, vous avez un bloc, ici, où il n'y a à peu près rien à faire avec ces gens-là; peu importe le programme ou ce qu'on va faire, ces gens-là ont toujours tendance à vouloir éluder. Par contre, ce sur quoi on peut intervenir, ce sont les deux blocs, ici. Alors, ces gens-là, ce sont des gens honnêtes, mais qui sont quand même intéressés à regarder de l'autre côté. Et ces gens-là, ici, ce sont des gens qui peuvent être foncièrement honnêtes; par contre, ils ont traversé la clôture et ils sont peut-être intéressés à oeuvrer au noir. Notre stratégie est donc de prendre ces gens-là, ici, et d'essayer de les convertir pour les rendre de l'autre côté.
Alors, la stratégie globale du ministère, elle s'inscrit ici. Alors, vous voyez, ici, on a des prérequis dont on a besoin: on a besoin d'une volonté politique, une volonté populaire, et on a une stratégie qui touche l'éducation, le renforcement des outils, l'intervention sur le terrain et une approche externe on va revenir sur chacun de ces points-là l'objectif étant de réduire sur une base permanente le travail au noir. On dit bien réduire et non annuler on sait bien qu'annuler, ce serait peut-être utopique de penser ça sur une base permanente. Alors, ce qu'on veut, ce n'est pas nécessairement d'avoir des gestes qui vont donner des résultats demain matin, puis qu'après-demain les gens vont recommencer. Ce qu'on veut, c'est d'avoir des résultats sur une base permanente.
Or, au niveau des prérequis sociaux, on a besoin d'une volonté politique. On pense que, avec le pacte de coresponsabilité et de solidarité que le gouvernement a proposé au mois d'octobre, on a quand même un signe du gouvernement. On a aussi besoin d'une volonté populaire. Alors, des sondages du ministère nous indiquent... Est-ce qu'il n'y a que les imbéciles qui paient tous leurs impôts? Bien, il y a 54 % des gens qui disent: Non, ce n'est pas vrai, puis 19 % qui ne sont pas très d'accord. Donc, on a à peu près les trois quarts des gens qui ne considèrent pas que c'est farfelu ou que c'est utopique de payer des impôts, c'est normal de payer des impôts. Donc, il y a encore moyen d'agir. Et, lorsqu'on demande aux gens: Est-ce que le ministère devrait augmenter ses efforts pour contrer les fraudeurs? Augmenter considérablement, 52 %; augmenter un peu, 16 %. Alors, encore là, on a à peu près 75 %, 70 % de la population qui est prête à voir le ministère du Revenu augmenter ses efforts et 26 % qui est prête à les maintenir. Personne n'est prêt à ce que le ministère diminue ses efforts.
Alors, passons maintenant à chacun des postes de la stratégie. Au niveau de l'éducation, le principe de base qu'on va retenir, c'est de véhiculer des notions d'équité et de bonne gestion des fonds publics, qui doivent être véhiculées à chaque moment de l'intervention. Alors, l'équité, c'est de dire aux gens: Bien, il y a des gens qui fraudent et peut-être que les autres paient pour ces gens-là, donc, c'est normal que le ministère pose ces gestes. Et, aussi, de la bonne gestion des fonds publics. Si on veut continuer à s'offrir des services de santé et d'éducation, bien, le ministère du Revenu doit aller chercher les fonds nécessaires pour le gouvernement.
Au niveau de l'éducation, l'objectif poursuivi, c'est un objectif de transparence, de visibilité et d'alliance avec la population. Avant d'agir, d'imposer des pénalités, on va renseigner les gens, on va les informer. Donc, on veut doter le ministère du Revenu d'une image positive. On veut que les gens qui travaillent au ministère du Revenu soient fiers de travailler au ministère du Revenu. En fin de compte, si le gouvernement peut offrir les services qu'il offre, c'est en grande partie parce qu'il y a des gens au ministère du Revenu qui vont chercher les sommes nécessaires pour pouvoir se les offrir, ces services-là.
On veut aussi informer certains groupes cibles. Par exemple, souvent, il y a des immigrants qui peuvent arriver, et ces immigrants ne sont pas familiers avec notre système d'imposition. On peut les instruire sur l'assurance-maladie, sur l'aide sociale, mais ça serait peut-être bon aussi de les instruire sur les obligations fiscales que ces gens-là ont à respecter. Aussi, certains groupes de la population qui se retrouvent, par exemple, du jour au lendemain, salariés, travailleurs autonomes, bien, est-ce qu'ils sont au courant, par exemple, de toutes les obligations d'un travailleur autonome? Alors, il y a des possibilités d'information vis-à-vis de certains groupes cibles.
On va aussi diffuser et expliquer les actions du ministère du Revenu pour éviter que le ministère du Revenu se retrouve, par exemple, à faire la sellette dans les journaux pour un cas ou deux qui pourraient déroger à sa ligne de conduite. Mais, à ce moment-là, on va essayer de vendre le projet comme tel et on va essayer de se faire des alliés de la population sur ce projet-là.
On va aussi influencer et former les jeunes dans les écoles. Ici, c'est quelque chose qui n'est pas à court terme, c'est quelque chose qui est à long terme. On avait une vision un petit peu du genre de l'environnement. Qui aurait pensé, il y a 20 ans, qu'on aurait des collectes sélectives? Bien, la pression est venue par les jeunes. Les jeunes nous ont dit: Si on veut avoir un environnement plus tard, il faut agir dès maintenant. Alors, si on veut avoir des bénéfices sociaux ou avoir des avantages gouvernementaux plus tard, il faut peut-être agir maintenant et on a besoin de payer nos impôts. On veut aussi sensibiliser la population en général sur l'ensemble des finances publiques et l'obligation de payer les impôts.
Au niveau du renforcement des outils ministériels, on est conscient que le volet éducatif peut faire un bout de chemin mais qu'il ne suffira pas à agir seul. Donc, le ministère du Revenu va vouloir se doter d'outils mieux adaptés pour la détection et de mesures coercitives plus dissuasives. À cet effet-là, on va définir clairement nos besoins en information, on va aussi réviser la pertinence des informations exigées; d'aller chercher toute l'information qu'on a besoin, mais uniquement l'information qu'on a besoin d'aller chercher et, aussi, de s'associer à d'autres ministères, d'autres organismes qui peuvent aussi nous rendre des services; optimiser l'utilisation des données disponibles, donc possiblement augmenter la saisie des informations; d'augmenter les appariements; d'adopter des mesures coercitives plus dissuasives. On a vu que l'augmentation des pénalités, ce n'est pas nécessairement la meilleure façon de pouvoir lutter contre le travail au noir. Mais il y a peut-être des modes de pénalité qui sont beaucoup plus dissuasifs, si on joue, par exemple, sur la possibilité d'émettre des permis. Le gouvernement donne la permission par un permis. Si on empêche les gens d'avoir certaines permissions ou certains permis parce qu'ils n'ont pas payé l'ensemble de leurs devoirs fiscaux, à ce moment-là, il y a peut-être une possibilité d'avoir un effet dissuasif plus élevé.
L'intervention sur le terrain. Donc, une fois qu'on aura expliqué aux gens ce qu'on veut faire, qu'on se sera doté des outils, à ce moment-là, on va appliquer la loi dans toute sa rigueur pour amener les récalcitrants à se conformer. Alors, les gestes, il y a une progression dans ça. Ça ne veut pas dire qu'il faut finir notre dossier un, après ça, commencer le dossier deux et, après ça, commencer le dossier trois. Il y a des éléments qui peuvent se faire presque simultanément, mais il reste quand même qu'il y a progression logique pour chacun des gestes. Ici, c'est d'appliquer la loi dans toute sa rigueur. Une fois que la personne sera consciente des effets de ses gestes, à ce moment-là, c'est plus difficile pour elle de réclamer une annulation des intérêts ou des pénalités.
Augmenter la visibilité du ministère. On a dit que la perception de se faire prendre, c'était ce qui était le plus important chez les gens. Donc, augmenter la visibilité de se faire prendre de diverses façons, augmenter la perception d'être découverts, qui va ensemble, et renforcer les notions d'équité et de justice et de bonne gestion pour éviter que les gens pensent que le gouvernement ne s'attaque qu'à certains groupes de la population.
Pendant qu'on fait tous ces gestes à l'interne, il y a aussi une participation externe qu'il ne faut pas négliger, c'est d'inter-relier avec les autres ministères et organismes afin d'accroître l'efficacité. On a dit que le travail au noir, l'économie souterraine, c'était un volet qui touchait l'ensemble du Québec, ça touche l'ensemble du gouvernement. Alors, le ministère du Revenu est certainement un élément important dans ça, mais ce n'est pas le seul élément. Donc, on veut faire de ce dossier un véritable dossier interministériel, et, à ce moment-là, on va avoir la collaboration de tous les ministères, favoriser l'échange et la concertation entre les organismes, promouvoir ce dossier comme un projet de société incontournable.
(11 h 10)
Alors, voilà l'ensemble de la stratégie que le ministère est à mettre en place présentement. Alors, en conclusion sur le travail au noir, on peut dire que, compte tenu de la problématique des finances publiques, des sommes énormes impliquées, de la tendance qui se dessine, des conséquences économiques et sociales et du rôle et des engagements déjà annoncés du gouvernement, le comité est d'avis que le gouvernement a l'obligation morale d'agir, l'obligation financière d'agir, qu'il s'agit d'un dossier interministériel, que le ministère du Revenu est certes un acteur très important dans le dossier et qu'il est urgent d'agir. Alors, voilà!
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Boudreau. Avant de poursuivre nos travaux avec le porte-parole de l'opposition officielle, je vais suspendre quelques instants pour que nous puissions peut-être enlever les équipements qu'il y a devant nous et aussi pour faire de la lumière dans notre salle afin d'être mieux éclairés dans le questionnement que l'on poursuivra au cours de nos travaux. Donc, je suspends pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 12)
(Reprise à 11 h 20)
Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre, mesdames et messieurs. À l'ordre! La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux, et nous en sommes rendus aux remarques préliminaires. Je laisserais la parole au député de Nelligan pour son temps de parole, qui est de 20 minutes.
Remarques préliminaires (suite)
M. Russell Williams
M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Certainement, je ne prendrai pas les 20 minutes, parce que je pense que l'expérience qu'on peut avoir aujourd'hui, c'est plus important d'avoir une période de questions et réponses. Merci beaucoup d'avoir la chance d'être ici aujourd'hui. J'ai été juste récemment nommé porte-parole pour l'opposition en matière de revenu. Mais, avec ça, il me semble que je suis pas mal chanceux le timing de cette journée d'étude et j'ai une chance de demander beaucoup de mes questions directement aux personnes responsables du dossier.
J'ai toujours pensé que le ministère du Revenu joue un rôle crucial dans notre société, un des joueurs sur la première ligne, sur la bataille de la crédibilité. Et je vois, avec vos chiffres, que les fonctionnaires gagnent la bataille un peu plus que les politiciens, mais c'est une autre affaire, là. Mais je le pense, parce qu'il me semble que les citoyens doivent voir qu'il y a un système juste et, comme je dis, «fair». Il y a aussi un équilibre entre la collection des impôts et la distribution de cet argent, parce que, si le ministère du Revenu ne fait pas son job d'une façon efficace, c'est les autres programmes qui doivent payer le prix pour ça, le système d'éducation ou de santé. Particulièrement quand nous sommes en train de fermer des hôpitaux et de couper dans l'éducation, je pense qu'on doit vraiment étudier toutes les possibilités de s'assurer que nous avons un système juste et équitable.
Beaucoup de mes commentaires étaient actuellement inclus dans la présentation du ministère. Et, avec ça, je ne répéterai pas toutes les choses que j'ai déjà entendues, sauf que je voudrais dire avec sincérité que, après la présentation, j'ai actuellement plus de questions que j'en avais avant, et je vais y retourner plus tard, sur ces questions. Une chose qui m'a frappé, avec toutes les données que vous avez données pendant les dernières 20 à 25 minutes, c'est que, si nous avons autant de taux de statistiques, si on connaît les familles, si on connaît le type des fraudeurs, si on peut chiffrer tout ça, il me semble qu'on peut avoir les noms de ces personnes aussi. On pourrait faire toute une exploration générale sur ce dossier, mais il me semble que ces statistiques sont basées sur les vrais faits, et je voudrais explorer, un peu plus tard, comment on peut trouver les noms de ces personnes. Je pense que c'est votre objectif aussi.
En préparation pour cette rencontre d'aujourd'hui, j'ai relu le rapport du Vérificateur général, mais aussi le rapport du Protecteur du citoyen et le rapport annuel du ministère du Revenu. Je vois une certaine tension dynamique entre tous les trois rapports. Je voudrais explorer comment on peut avoir le ministère du Revenu plus efficace, mais aussi comment on peut avoir le ministère du Revenu plus humain. Parce que, comme député, j'ai plusieurs plaintes à mon bureau de comté de simples citoyens qui ont un contact avec le ministère du Revenu; il semble, dans leur opinion, qu'ils sont traités de coupables avant qu'ils aient commencé. Je pense qu'on doit explorer toute cette question du contact entre les citoyens et le ministère du Revenu. Particulièrement, peut-être qu'on peut utiliser le rapport du groupe de travail qui était mis sur pied en mars 1994 comme base de discussion sur ça.
Je voudrais certainement utiliser le long chapitre que le Vérificateur général a consacré dans son rapport annuel, c'était de la page 327 jusqu'à 353, où le Vérificateur critique assez sévèrement les pratiques du ministère du Revenu. Il a ciblé certainement beaucoup le travail au noir, et le travail au noir, comme vous l'avez mentionné, c'est quelque chose qui est difficile à évaluer, mais qui est une chose tellement dangereuse dans notre société.
Frankly, the black market economy is a kind of cancer that is directly directly affecting the confidence that we have in the democratic system and the notion of fair play, and I think all efforts that we can put towards that must be put towards dealing with the black market economy.
Le Vérificateur général a aussi mentionné beaucoup d'autres questions sur les problèmes des sociétés actives ou non actives. Il a aussi parlé des visites et inspections, qui sont maintenant moins de 2 %. Il a mentionné aussi les problèmes des pourboires. Il a mentionné aussi le problème de sensibilisation de la population, que je voudrais explorer avec vous pendant la journée.
Je voudrais aussi ajouter aujourd'hui qu'il y a le côté positif qui a été annoncé dans le dernier budget de M. Campeau, qui était assez optimiste quand il a annoncé une récupération de beaucoup d'argent avec la lutte contre le travail au noir. Je voudrais explorer... Maintenant, nous sommes presque rendus aux derniers jours de l'année financière. Je voudrais savoir: Effectivement, est-ce que c'était trop optimiste ou non? Je voudrais certainement avoir une bonne chance d'explorer ces questions avec vous. Finalement, M. le Président, je voudrais utiliser cette opportunité aujourd'hui de questionner l'augmentation des plaintes que le Protecteur du citoyen a eues. Je voudrais donner une chance au ministère du Revenu d'expliquer c'est quoi, le raisonnement de ces plaintes-là.
Finalement, je pense que toutes mes interventions d'aujourd'hui et, j'en suis convaincu, les interventions de l'autre côté et les réponses du sous-ministre sont basées sur le fait de nous assurer que nous avons le meilleur système, le système le plus efficace, le plus juste pour le peuple québécois. Peut-être, ensemble, on peut trouver la solution pour s'assurer que, un, on puisse collecter tous les impôts qui sont collectables, mais on peut faire ça d'une façon juste et équitable. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député de Nelligan. Nous en sommes toujours aux remarques préliminaires. Alors, je cède la parole au député de Masson.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai trouvé vos tableaux difficiles à commencer à se présenter, mais, une fois qu'ils ont commencé à se présenter, je les ai trouvés extraordinaires. Ça m'a renseigné beaucoup. Je me pose, moi aussi, plus de questions après qu'avant l'avoir vu. Je pense exactement comme mon confrère de l'autre côté.
J'ai eu quelques bribes qui me sont venues à l'esprit. D'abord, vous vous êtes adressé aux politiciens et vous nous avez dit, en des termes différents, là: On ne peut pas légiférer la conscience sociale ça voulait dire ça, un bout de la présentation seules la pression et la peur devant le récalcitrant à déclarer ses revenus, seule cette peur-là peut motiver une grande partie de ces gens-là à rentrer dans le système et à déclarer leurs revenus. Et je le crois, ça. On légifère puis on dit: On n'a pas le droit de tuer, puis il y en a qui tuent pareil. C'est une comparaison blafarde, toute comparaison est loufoque et bancale, mais je le dis quand même. Ça m'a frappé, ça, le fait que vous nous disiez que seule la peur... Et, même là, il y a une partie seulement des gens, si on est très présent et on leur fait peur, qui se rendraient du côté des honnêtes citoyens forcés. Il y a aussi toute l'échappatoire de nos lois fiscales permissives et le charme de nos grands juristes qui, pour ceux qui volent ou qui fraudent, vont en cour et perdent, et le gouvernement perd devant eux autres. Il y en a beaucoup qui se fient à ça. Je ne sais pas quelle est la part de nos revenus qu'on perd à cause de nos lois trop permissives ou de la trop grande qualité de nos avocats.
Je vais vous citer un petit exemple là-dessus, là, bien précis. J'avais, et j'ai encore, une boîte à chansons et des théâtres. Il y avait des taxes que l'on prend à la porte. J'avais la permission, dans une de mes salles, à 292 sièges. Alors, je donnais des billets d'admission jusqu'à 292. Si, après 292, j'entrais, mettons, 392 personnes, les 100 supplémentaires, je ne leur donnais pas de billet pour m'autoaccuser moi-même, disait le président de cette époque, pas moi, là, je me mets comme exemple. Bon. Mais les 100... Si les inspecteurs viennent, ils se rendent compte que, dans la salle, il y a 100 personnes qui sont là, donc 100 personnes où le revenu est au noir pour le propriétaire, ils décident d'aller en cour. Ils viennent avant le spectacle, comptent le monde, il faut qu'ils sortent 100 personnes de là, parce que vous avez le droit, d'abord, pour le feu, à 292, et vous en avez 389. Il faut qu'ils en sortent une centaine. Les gens sortent, la personne reçoit une accusation d'avoir permis à des gens d'assister à un spectacle sans donner des billets de taxe d'amusement.
(11 h 30)
Un an et demi après, bien sûr, ça s'en va en cour, les gens prennent une heure et demie, deux heures... de la ville, à Montréal, elle dit: Bien, voici, voici, nous avons compté le monde, ils sont sortis. Alors, en l'occurrence, l'accusé n'a pas d'avocat, demande de parler pour se défendre lui-même, et cette personne arrive devant M. le juge: Dites-moi quand c'est le temps d'aller. Alors, c'est à vous, venez vous défendre. Il arrive: M. le juge, je suis coupable de l'accusation qu'on voulait me porter, mais je suis innocent de l'accusation qu'on me porte. On a demandé des explications. Il a dit: Ils viennent de prendre une heure et demie pour dire qu'ils ont fait sortir 100 personnes, puis vous les accusez d'avoir permis d'assister à un spectacle. Ils viennent dire qu'ils les ont fait sortir. S'ils les ont fait sortir, ils n'ont donc pas assisté, donc il n'est pas coupable. Il était coupable pareil. Comprenez-vous ce que je veux dire? Parce qu'il les a fait monter au deuxième puis il a donné le show au deuxième après, mais ils n'ont jamais payé pareil pour. Nos situations... Nos avocats sont intelligents, les gens qui sont dans la fraude fiscale sont super brillants et nos lois sont excessivement permissives. Ça, c'est un côté que les gens à qui on fait peur... On n'a pas d'attrape, là, sauf du côté légal, pour y aller de façon plus serrée.
Deuxième volet que j'ai compris dans cet exposé-là. Je crois qu'on doit avoir comme action, vous devriez nous dire, comme action, que, malgré la période de coupures que nous traversons, aucune coupure de poste. Au contraire, il devrait y avoir plus de gens engagés pour voir à récupérer les sommes que le gouvernement a à récupérer, parce qu'une personne... je ne connais pas les chiffres exacts, mais une personne a un salaire x et elle récolte x à la troisième ou à la quatrième puissance. Donc, son salaire n'est pas une dépense réelle. S'il gagne 50 000 $ par année puis il va en chercher 500 000 $, il a plus que gagné son salaire. Si on coupe ce poste-là, il faudrait qu'on se défende, au Revenu, devant les coupures qui s'en viennent, pour avoir des postes de percepteurs, non en couper mais en ajouter, parce que c'est des gens qui sont efficaces, qui donnent des résultats.
Deuxièmement, ce que j'ai retenu aussi et j'espère que ce n'est pas ça que je dois retenir vous semblez avoir un programme tous azimuts pour vous lancer dans tout ce qui est fraude fiscale, travail au noir, etc. J'ai l'impression que, si on s'en va dans tous les chelems à la fois, on risque de se buter à un mur à cause d'un manque de personnel. Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas toutes les regarder, mais il y a certaines choses... Comme, à un moment donné, le travail de la construction, tu sais, sous-entendu, il y a beaucoup de construction. Quand on parle de la construction au noir chez les particuliers, c'est discutable. Est-ce que c'est du travail au gris ou du travail au noir? C'est discutable. Je veux faire réparer mon perron, chez nous. Je fais venir mon voisin, qui le fait. Est-ce que c'est du travail au noir, de la manière qu'on le compte? Est-ce que c'est vraiment du travail au noir? Ça, tout dépend de nos ententes syndicales. On est rendu que, si je change moi-même une porte dans la maison, travaillerai-je pour moi au noir? Selon le syndicat, presque oui. Tu sais, il faut qu'on regarde ça.
C'est chez les contracteurs qui, eux, font travailler du monde sans carte de compétence, sans permis de travail, qui les paient sous la table. Il est là, le vrai travail au noir, le plus important dans la construction. Les affaires des particuliers, j'ai l'impression que ça viendrait en deuxième volet, quand on aura le personnel voulu pour y aller, et puis un éclaircissement, aussi, avec le gouvernement et les syndicats pour voir si vraiment il y a du travail au noir ou du travail au gris. Il faudrait qu'on le campe avant d'y aller à fond de train. Et, là, c'est vraiment une zone grise. Vous allez dire: Pas tout. Mais une grosse partie du travail qui se fait chez les particuliers, c'est la zone grise et non noire, puis on le compte tout au noir quand on fait nos calculs. Mais, chez les contracteurs, il y en a en masse, du travail au noir. Ça, on le sait. Il y a surtout des coins spécifiques qu'on sait, c'est connu. Tu sais, près de Blainville, là, il y a une ville complète qui est après se faire, une ville complète, sur base religieuse, et il y a une maison de 10 000 000 $ qui est après se faire là, puis ça travaille au noir. On sait tout ça. Comment ça se fait que les gens savent ça puis personne ne bouge? Puis il y en a d'autres, là c'est parce que c'est proche de chez nous, ça, que les gens me disent ça quand ils viennent dans mon bureau du côté contracteur.
Mais, où on devrait garrocher notre cible, et direct, et fort, et sans hésiter: il y a tout le système de l'hôtellerie. Le système de l'hôtellerie, ce n'est pas un ouvrier qui se promène, ça, c'est un centre captif de ses opérations, autant la restauration que les hôtels eux-mêmes, les motels et toutes les auberges. Bien, eux ne déclarent pas la moitié, sinon ils déclarent peut-être le tiers de leurs revenus. Et tout le monde le sait, y compris vous qui travaillez au ministère. On va dans n'importe quel restaurant, dans n'importe quel hôtel, vous regardez, c'est plein continuellement à Québec, les hôtels. C'est très rare, on a de la difficulté à avoir des chambres. Regardez les rapports, ça ressort entre 48 % et 54 %. Ils disaient qu'en ce temps-là leurs revenus, ces dernières années depuis deux ans, c'est différent ils disaient que leur point de saturation, le point d'occupation pour être rentable, c'était 60 %. Là, on est obligé de déclarer 58 %, 59 %, depuis quelques années, d'occupation à Québec. Là, ils disent que leur point est rendu à 70 %. Et s'ils poignent 70 %, parce qu'on les suit trop, ils vont dire que c'est 80 %.
L'association de la restauration et de l'hôtellerie au Québec, on les a reçus en commission parlementaire. J'ai demandé à leur président ceci: De la façon dont vous déclarez vos revenus, je crois que vous êtes la plus grande association de bénévoles organisée du Québec. Il y a juste 10 % des restaurants qui font un profit déclaré. Regardez dans vos chiffres, il y a 10 %. Incroyable! Il y en a 90 % qui arrivent à zéro puis 10 % qui perdent beaucoup. C'est la plus grande association de bénévoles du Québec. Comment voulez-vous qu'ils vivent? Alors, il y a une évidence, dans l'hôtellerie et dans la restauration, qui crève les yeux, et ce sont, en plus, des gens qui sont captifs. Et on dit qu'il y a à peu près 585 000 000 $; c'est les chiffres qui ont déjà été dits. Il y a peut-être plus.
J'ai l'impression que, ceux-là, si on s'y acharnait, en respectant ces gens-là comme d'autres gens dans la société, mais vu que c'est un point, depuis des années qu'on le sait, depuis des années, alors, au moins, ce point-là, on devrait y aller avec force, quitte à ce que, quand ils paieront bien leurs impôts, on les baisse. Parce qu'on disait: Les impôts seraient moitié moins forts... la taxe de vente et la taxe, etc., là, on pourrait la diviser de moitié si tout le monde la payait. Presque ça. On est presque rendu là. Et, dans l'hôtellerie, c'est ce qu'il y a de pire. Je m'excuse.
En conclusion, j'aimerais qu'on ne se garroche pas tous azimuts dans tous les domaines, mais qu'on y aille dans les points serrés et forts, qui sont évidents en eux-mêmes, d'une fraude réelle. Même le CN, comme exemple, qui avait le Reine Élizabeth, avait deux séries de livres connues, une pour le gouvernement puis une pour l'opération du CN. Il y a des mosus de limites! Et je le dis au micro, là, les gens m'entendent: c'est évident, et tout le monde le sait. Alors, il faut qu'on fasse quelque chose dans les endroits où c'est aussi évident que ça.
Voilà, puis je suis bien content d'avoir vu votre tableau, et je trouve que ça a été dur à partir, mais, mon Dieu qu'il a été bien présenté, et je vous en remercie.
Le Président (M. Lachance): M. le député de WestmountSaint-Louis.
M. Jacques Chagnon
M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je voudrais aussi réagir à tout le moins sur la perception des éléments qu'on nous a transmis ce matin par le biais des diapositives, mais aussi sur les documents qu'on nous a transmis. Personnellement, j'avoue que j'ai des sentiments un peu différents de ceux de mes collègues quant aux conclusions à tirer sur ce qu'on nous a apporté ce matin.
En ce qui concerne tout l'aspect de l'évaluation de la problématique du travail au noir, j'ai trouvé ça fort intéressant. Ça peut être discutable parce qu'on s'est évidemment basé sur des études qui, dans certains cas, datent un peu, entre autres celle de Fortin & Fréchette, 1985, et qu'on a en fait indexée pour être capable de pouvoir en suivre l'ampleur en 1995-1996. Sur tous les éléments qui touchent l'évaluation de la situation, le pourquoi de la chose, comment ça se fait, je n'ai pas grand-chose à dire. Je trouve un peu particulières les conclusions qui sont tirées. Lorsqu'on arrive à la stratégie d'intervention au ministère du Revenu puis à la volonté politique qui doit en découler, etc., là, j'avoue honnêtement que ça ne m'apparaît pas être le médicament pour la maladie dont on parle.
(11 h 40)
Évidemment, peut-être s'agit-il d'une perception strictement verticale d'un ministère qui regarde et qui a la responsabilité de faire les cotisations, de ramasser les cotisations, de ramasser cet argent-là et qui a une vision strictement du ministère du Revenu, mais il m'apparaît à peu près incroyable qu'on n'ait pas la division strictement économique qui, à partir des postulats que vous formulez... Je regarde, entre autres, la proportion des Canadiens qui évitent les taxes de vente; c'est un peu court de dire qu'au Québec on a la proportion la plus élevée parce que, au Québec, on est différents. Je veux bien qu'on soit une société distincte, mais on n'est pas nécessairement plus voleurs que les autres.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chagnon: Ne prenez pas mal ce que je viens de dire, ce n'est pas une critique qui se veut... L'argument est un peu court. Je vous suggère, comme argumentation... En reprenant vos tableaux, j'ai remarqué que la proportion de Canadiens qui évitent les taxes de vente est proportionnelle à la hauteur des taxes de vente de chacune des provinces. Prenez ça comme postulat de base pour faire l'analyse que vous faites, vous allez tirer la conclusion que, plus votre taxe de vente est élevée, plus le pourcentage de gens qui cherchent à l'éluder est grand. Et vous verrez, lorsqu'on passe, par exemple, à différents impacts de divers éléments sur la probabilité de travail au noir, où les dépenses annuelles des donneurs d'ouvrage au noir dans des secteurs comme, par exemple, la construction, correspondent à des décisions qui, elles, sont politiques et qui ont été prises dans le temps, dans le passé... Je pense, entre autres, à tout le volet des décrets dans la construction, où, comme vous le signalez quelque part, les peintres gagnent 36 $ l'heure, les menuisiers, 46 $, et il n'y a pas un chat qui a les moyens de... pas un chat... Un individu qui gagne 30 000 $ qui a les moyens de payer 46 $ l'heure pour faire faire de la menuiserie, ou 36 $ pour faire faire de la peinture, ça ne se peut pas, surtout avec les taux marginaux d'imposition que vous nous avez démontrés. Ce sont des faits que je ne conteste pas.
Alors, les conclusions que vous tirez parce que j'avais dit que je serais court qui concernent la stratégie d'intervention du ministère du Revenu, qui porte sur l'éducation, l'intervention sur le terrain puis c'est un peu écrit foncé, là le renforcement des outils est une vision, à mon avis, pro domo du ministère du Revenu, mais c'est une vision strictement bien, bien interne au ministère du Revenu. Je suggère que, sur le plan de la volonté politique, la diminution des taxes, la diminution des taxes de vente, la diminution des impôts sera toujours un outil économiquement beaucoup plus efficace que ceux que vous nous suggérez ici au nom du ministère du Revenu, pour la bonne et simple raison... Et on a vu, on a pu l'expérimenter sur le terrain. Souvenez-vous de la catastrophe fiscale qu'ont été les augmentations successives d'imposition de taxes de vente sur les cigarettes, par exemple. À partir du moment où un gouvernement a décidé de diminuer de façon aussi radicale le niveau de taxation sur ce produit-là, bien, vous avez vu mourir tous les réseaux, les filières de contrebande. Pourquoi? Parce qu'on s'est attaqué véritablement au problème de fond de cette question-là. Et le problème du travail au noir, que ce soit ici ou que ce soit ailleurs, est définitivement, à mon avis, d'abord et avant tout un problème d'ordre économique et de vision, sur le plan fiscal, de son comportement comme société.
Ceci étant dit, M. le Président, vous me permettrez peut-être de poser une question. Vous savez que je suis critique au Trésor et, parfois, je touche un peu aux finances. Le sous-ministre nous a appris qu'on avait 39 000 000 000 $ de revenus autonomes l'an dernier et qu'on en aura 41 000 000 000 $ cette année, c'est-à-dire, si ma mémoire est bonne, que ça fait presque 5 % d'augmentation de revenus. Au budget, on en avait anticipé, à ma mémoire en tout cas, 8,2 %, 8,3 % d'augmentation de revenus. S'il y a un différentiel de 3,2 %, 3,3 % de revenus je vois les experts, là, que je connais et que j'ai connus au Conseil du trésor, qui vont répondre à ça rapidement ce serait l'équivalent d'une annonce d'un trou de 1 200 000 000 $, 1 300 000 000 $. Ce serait beaucoup. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de WestmountSaint-Louis. Si vous avez une réponse, peut-être la retenir parce que nous sommes en période des remarques préliminaires. Je ne voudrais pas déroger trop. Est-ce qu'il y a d'autres députés membres... M. le député de Charlevoix qui veut intervenir.
M. Rosaire Bertrand
M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, un peu comme mes confrères, je ne voudrais quand même pas répéter ce qui a été dit, mais j'ai certaines préoccupations. Tout en acceptant et à peu près tout le monde le sait que je favoriserais une révision du système d'impôts et de taxes mais, ça, on sait que ce n'est pas facile à réaliser et à faire, mais en attendant il y a des lois qui nous gouvernent... Quand je regarde, particulièrement au niveau des conclusions, moi, je pense qu'actuellement il y a des lois qui existent, et j'ai des gros points d'interrogation, surtout quand on lit le rapport du Vérificateur, sur l'application réelle de ces lois-là. Et, ça, je pense qu'il n'y a pas beaucoup d'excuses dans les temps actuels de ne pas le faire.
On dit: La stratégie consiste d'abord à faire de l'éducation, informer certains groupes cibles. Parfait, je n'ai pas de problème trop, trop avec ça. Quand on parle de renforcement des outils ministériels, définir clairement nos besoins en information, réviser la pertinence des informations exigées, je pense qu'actuellement, dans le contexte actuel, on ne devrait pas avoir trop de problèmes non plus avec ça. Mais là où j'accroche, c'est qu'actuellement tout le monde parle de coupures, et s'il y a un ministère où, à mon sens, on devrait parler d'autre chose, c'est bien le ministère du Revenu. Quelqu'un l'a dit, je ne sais pas si c'est le député de Masson ou de Nelligan, mais quelqu'un l'a dit: Comment se fait-il... Je ne poserai pas la question, je vais faire l'affirmation. Vous aurez sûrement l'occasion de le commenter, mais on semble réaliser à peu près partout que les rapports d'impôts, les vérifications d'impôts, c'est une obligation, de toute façon, de faire nos rapports correctement, payer nos impôts correctement. Les rapports de taxes, taxes de vente dans les entreprises, on les collecte, c'est une obligation de les rapporter et de les payer. Et je serais curieux de savoir combien d'argent est sur la table, parce qu'on ne pousse pas assez sur la réalisation des rapports et la remise, en particulier, des impôts et en particulier aussi des taxes, de façon à ce qu'on réalise à un moment donné qu'une entreprise doit 100 000 $, 150 000 $, 200 000 $ en taxes non payées. Des fois, ça dure depuis un an, deux ans, trois ans. On se demande: Comment cela se fait-il?
Alors, au moment où on a des gens qui sont disponibles au niveau de la fonction publique je ne sais pas si c'est le cas de votre ministère, mais, en tout cas, il y en a ailleurs au moment où on pourrait, et le député de Masson y a fait allusion, augmenter sensiblement notre perception simplement en appliquant la loi, autant au niveau des impôts que des taxes, moi, je vous avoue bien franchement... Évidemment, il y a toute la question du noir. Moi aussi, quand je pense, exemple, que, sur la question des gîtes, on n'a pas encore réglementé, quand je pense à tout ce qui se passe dans ces différents domaines-là, quand je pense qu'on sait très bien que l'effet dissuasif est plus fort que le coût de l'information, si j'ai bien compris, et qu'on ne l'applique pas, ou en tout cas, qu'on ne l'applique pas suffisamment, moi, je vous avoue bien franchement que, l'an prochain, quand vous allez revenir parce que j'imagine que vous allez revenir l'an prochain les questions vont être certainement beaucoup plus critiques et beaucoup plus sévères, ou les attentes, en tout cas de notre côté, vont être beaucoup plus fortes sur les résultats. Moi, j'aimerais que vous nous garantissiez, M. le sous-ministre, que votre ministère, à très court terme... et ça va être connu dans le public, le monde va savoir que les coupures, c'est une chose, mais le ministère du Revenu entend aller chercher l'argent qui nous est dû, et de façon très rapide et efficace.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Charlevoix. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui veulent intervenir dans les remarques préliminaires? Sinon, je demanderais à M. le Vérificateur général de nous faire part de ses remarques et de ses commentaires.
Exposé du Vérificateur général M. Guy Breton
M. Breton (Guy): Je serai très bref, M. le Président. Je voulais rappeler qu'en plus des vérifications financières menées annuellement au ministère du Revenu et celles relatives à la taxe sur les produits et services, nous avons effectué au cours des six dernières années des interventions de vérification à caractère d'optimisation des ressources dans ce ministère. Les résultats de ces interventions ont été naturellement commentés dans les rapports annuels, et portaient sur les sujets suivants: l'évasion fiscale, qui constitue le chapitre 20 du rapport de cette année; les taxes sur les carburants, les boissons alcooliques et le tabac, soit le chapitre 6 de notre rapport de 1992-1993; les revenus de droits et permis, le chapitre 3 de notre rapport de 1990-1991.
(11 h 50)
Et je peux déjà conclure en vous rappelant ou en signalant que la Direction générale de la vérification interne du ministère du Revenu exerce un suivi régulier sur tous les constats que nous avons formulés au ministère depuis quelques années, en plus d'obtenir un plan d'action visant à corriger les problématiques soulevées. Selon leur dernier rapport produit, en janvier 1996, lequel couvrait les rapports antérieurs à celui sur l'évasion fiscale, il ne restait que quelques déficiences parmi toutes celles qu'on a soulevées depuis six ans. En terminant, je vous assure de mon entière collaboration pour répondre à vos questions, s'il y a lieu.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le Vérificateur.
Maintenant, c'est à vous, M. le sous-ministre, de nous faire part de vos commentaires ou de vos remarques.
Exposé du sous-ministre du Revenu M. Pierre-André Paré
M. Paré (Pierre-André): Bien, M. le Président. J'avais préparé un petit texte pour vous introduire un peu notre ministère cette année. Devant l'ampleur des questions soulevées et des questions qui nous sont posées par le député de Nelligan, ou le député de WestmountSaint-Louis, ou le député de Masson, ou le député de Charlevoix, je pense que je vais essayer d'incorporer certains éléments de réponse à mes remarques préliminaires, et on pourra aller plus dans le détail un petit peu plus tard, si vous le voulez bien.
Je vais juste rappeler en commençant que, notre responsabilité, c'est celle d'administrer les lois fiscales et de percevoir les impôts et les taxes au nom du gouvernement. Évidemment, ça ne nous empêche pas de faire certaines recommandations à l'occasion, mais ces recommandations qu'on fait, c'est des recommandations, souvent, sur l'administration, quelquefois sur le fond, et la politique fiscale... Je ne veux pas me cacher en arrière des rideaux pour ne pas répondre aux remarques du député de Westmount, mais la politique fiscale et les décisions concernant les diminutions de taxes ou l'amélioration des taxes et ces choses-là sont souvent discutées auprès du ministère des Finances. Et, dans cet esprit, ça ne me fait rien de tenter de donner quelques réponses à ce genre de questions là, mais il est certain que vous allez toujours rester sur votre appétit avec moi, puisque je ne peux faire qu'un seul bout ou une seule petite partie de l'ensemble.
Par ailleurs, je désire rassurer cette commission en disant que, le travail que nous avons fait sur l'établissement de la problématique du travail au noir, nous l'avons fait avec sept autres ministères. Donc, nous ne l'avons pas fait seuls, et l'ensemble des conclusions sont des conclusions auxquelles chacun des ministères a adhéré. Il est évident que, lorsqu'on parle de plan d'action pour contrer le travail au noir et lorsqu'on parle de méthodes afin d'y arriver, on peut diverger sur la façon d'approcher la situation. Ça peut aller d'une surveillance plus étroite, avec un individu à côté de chaque personne, jusqu'à l'abolition d'un grand nombre de taxes. Entre les deux, il faut trouver de quelle façon on peut y aller. Et, un peu comme le disait le député de Charlevoix, c'est sûr qu'on a des lois à faire respecter. Nous, notre responsabilité, c'est surtout de les faire respecter, quoiqu'on ait le droit aussi de faire des recommandations.
Je veux juste vous rappeler qu'au ministère on a 4 803 000 contribuables qui en font, des rapports d'impôt, 837 000 bénéficiaires de programmes sociaux, 286 000 corporations, 459 000 mandataires et 274 000 employeurs. Alors, cette ampleur de la clientèle vous démontre jusqu'à quel point on est en contact continuel avec la population, et les taux de plaintes que nous recevons, même s'ils paraissent élevés ou si, des fois, il paraît y avoir des augmentations dans le taux des plaintes, tel qu'on l'a mentionné tout à l'heure, ce n'est pas nécessairement dû au fait que le ministère ne donne pas les bonnes réponses; c'est souvent dû aussi au fait qu'il y a eu certaines complications, ou certaines divergences, ou certaines difficultés dans l'augmentation ou dans la présentation.
Un des exemples et je reviens à une des remarques du député de Nelligan, qui disait que, dans son comté, il y a souvent des plaintes. Tous les députés en ont, dans tous les comtés, des plaintes. Ils en ont beaucoup. Ce que je veux juste rappeler, et ça ne veut pas dire qu'on ne doit pas tenter de les régler: il y a deux choses qu'on met à la disposition des députés, c'est des lignes spéciales pour qu'ils puissent nous atteindre, et on fait le maximum pour leur répondre rapidement; deuxièmement, c'est que les gens qui vont se plaindre chez les députés, c'est ceux qui ne sont pas contents et généralement pas ceux qui ont des félicitations. Et nos plaintes sont très minimes, on aura l'occasion d'y revenir. Ça ne veut pas dire qu'on ne doit pas s'en occuper. Et on a pris les mesures pour améliorer les services aux citoyens suite à un rapport qui avait été fait en 1994, avec 43 recommandations, et on a également pris d'autres mesures dernièrement pour donner un meilleur service à la clientèle.
De plus, on a tenté de faire certaines modifications dans notre structure pour améliorer également notre performance: une qui fait qu'on s'adresse surtout aux contribuables et une autre partie du ministère qui s'adresse surtout aux mandataires, pour être capable de séparer les clientèles, pour ne pas avoir un peu toutes les clientèles trop mêlées. Par ailleurs, on a également créé le Centre de perception fiscale, qui est sur le modèle des unités autonomes de service, de façon à ce qu'on puisse travailler plus librement pour aller percevoir les comptes à recevoir et traiter de façon plus équitable les individus. On pourra peut-être aller, avec cette unité autonome de service là, un petit peu plus tard, M. le Président, à des questions plus précises, et avec son président, puisqu'il s'agit d'une nouvelle forme d'organisation que le gouvernement a mise en place cette année et qui fait qu'on passe un contrat avec un groupe de personnes qui sont situées à l'intérieur du ministère, et ce groupe de personnes devient presque autonome à l'intérieur du ministère. Et le rôle de la commission... elle est censée jouer le rôle, aussi, de faire entendre le directeur de cette unité-là concernant son imputabilité. Il me fera plaisir de lui céder quelques minutes de votre temps, puisque je crois que je parle sur votre temps, toujours, si j'ai bien compris, M. le Président, pour permettre à cette unité-là de lancer peut-être comme on est toujours à peu près en avant de la parade dans un certain nombre de cas la première reddition de comptes d'une unité autonome devant une commission de l'administration.
Les problèmes que vous avez mentionnés réfèrent à des problèmes de difficultés financières, problèmes de difficultés de perception, et, sommairement, il y a des orientations gouvernementales qui nous ont été données, et c'est ce sur quoi on s'articule pour faire nos plans. Il y en a quatre, grandes orientations gouvernementales qu'on a retenues et qu'on va retrouver tout le long de nos plans de développement. La première, c'est de rétablir le lien de confiance de la population envers le gouvernement. On peut différer sur la façon dont on veut s'y prendre, mais, partout où vous allez voir nos plans, dans chacune des directions générales, dans chacun de nos plans de travail, on a derrière la tête le rétablissement du lien de confiance entre la population et son gouvernement.
Deuxièmement, le rétablissement des finances publiques et de la fiscalité. Un point sur lequel on peut agir, c'est de simplifier la vie aux gens au maximum, dans les limites de ce qui nous est possible, et, deuxièmement, de percevoir le maximum des impôts qu'on peut percevoir de façon à ne pas avoir de déficit trop élevé.
Troisième point, c'est la modernisation de la gestion gouvernementale. Autrement dit, il est tout à fait inadmissible qu'en 1996 on soit encore en train de se promener avec des tonnes de papier puis des tonnes de camions qui promènent du papier alors que des liens électroniques existent, alors que la facilité de communiquer existe et qu'on est tout à fait incapable de créer des liens plus faciles. Je comprends qu'il y a des lieux juridiques sur lesquels on doit s'entendre, et le député de Masson a fait allusion à quelques points sur la partie juridique. Juste en passant, nos personnes qui plaident pour nous gagnent 73 % de leurs causes. Donc, dans notre cas, on n'a pas trop de problèmes à saisir nos causes, on fait une bonne évaluation des causes et on ne se retrouve pas, normalement, avec la perte du procès, en ayant fait la mauvaise accusation, etc.
(12 heures)
L'allègement du fardeau réglementaire et administratif, ce qui est imparti à chacun, et, enfin, la régionalisation des leviers. Dans chacune des distinctions qu'on va faire aujourd'hui, dans toutes les réponses qu'on va vous donner, on va toujours examiner ces quatre points-là pour être capable de travailler. Notre budget ministériel, puisqu'on y a fait allusion un peu, est un budget qui n'a pas été amputé, contrairement à d'autres ministères, et pour lequel, au dernier budget, il y a eu un certain montant d'additionné. Ce montant-là, qui nous a été additionné ou qui a été ajouté à notre budget, a permis, par exemple, en 1994 puisqu'il y a un certain montant qui avait été ajouté en 1994... pas nécessairement ajouté comme non gelé, comme d'autres ministères à l'époque d'inscrire des revenus additionnels de 126 000 000 $. Pour l'année 1995-1996, c'est-à-dire que les montants qui ont été ajoutés vont permettre d'inscrire des revenus additionnels dont les chiffres finaux vont vous être communiqués par le ministère des Finances, mais les cibles qui ont été fixées dans le budget de M. Campeau concernant les revenus sur ces programmes-là sont, à date, respectées, et nous sommes dans la cible et même en avant de la cible dans plusieurs cas.
M. Blais: Ça représente quoi?
M. Paré (Pierre-André): La cible était de 334 000 000 $, et ça va aller plus que ça.
Le point qui peut être divergent, c'est que, lorsqu'on fait des prévisions budgétaires, qu'on fait des prévisions de revenus puis qu'on prépare un budget, on le fait avec des indicateurs économiques, et lorsque, durant l'année, les revenus entrent, il y a des fois que l'économie va moins vite. Cette partie-là, nous, on ne la contrôle pas. Lorsque j'ai mentionné, tantôt, qu'on avait des recettes de 41 000 000 000 $ par rapport à 38 000 000 000 $, je disais: C'est de l'argent qu'on perçoit dans nos poches, et pas nécessairement l'équivalent des revenus, c'est-à-dire ce qui doit être payé. Alors, pour ne pas induire cette commission en erreur, les taux de revenus ou d'augmentation de revenus sont effectivement, je pense vous le verrez avec le ministère des Finances un petit peu plus faibles que ce qu'il avait prévu dans son budget, mais il y a eu des révisions qui ont été faites en novembre, et vous serez à même de discuter avec eux les révisions. Mais ce que je peux vous dire, c'est que le ministère du Revenu, avec les objectifs qui lui ont été fixés et les montants qu'il doit percevoir à raison des différentes révisions qui ont été prévues, ces objectifs-là seront respectés.
Enfin, lorsqu'on parle du degré de satisfaction des clients, on parlait d'un rapport qui a été préparé en 1994, dans lequel il y avait 43 recommandations. Je suis heureux d'indiquer à cette commission qu'il y a 38 de ces recommandations-là qui ont été mises en place et qui sont en vigueur actuellement et qui ont effectivement amélioré le service aux clients. Quant aux autres possibilités d'améliorer le service à la clientèle, on aura probablement l'occasion de discuter au cours de l'après-midi d'un certain nombre d'engagements qu'on a pris au ministère, de façon ministérielle et non publique, pour améliorer notre service aux clients.
Enfin, quelques-uns vont nous poser des questions sur l'harmonisation de la TVQ et de la TPS, d'autres vont probablement nous parler de plan triennal et de coûts de productivité. Il faut retenir que ça coûte au ministère du Revenu, si on prend strictement les coûts du ministère du Revenu, aux environs de 1,24 $ on peut dire 1,25 $ par 100 $ qu'on perçoit. Par ailleurs, si on ajoute à ça les différents coûts qui peuvent venir de l'extérieur, ça monte à 1,35 $. Quant à savoir s'il doit s'ajouter du personnel additionnel, c'est évident que tout le monde veut qu'on additionne du personnel et c'est évident qu'on est en train de travailler sur des programmes précis qui vont nous permettre d'aller attaquer les sites de travail au noir. On a, cette année, fait des travaux spéciaux avec les vidéopokers. On a des cotisations qui sont très raisonnables et un taux de satisfaction qui est très, très élevé de la part du ministère je ne veux pas dire qu'il l'est de la part de ceux qu'on cotise, par exemple, mais de la part du ministère avec ce qu'on fait. On a un travail spécial qu'on fait sur la construction et on a un grand nombre de cotisations; on pourra donner des détails sur ce qu'on fait dans ce domaine-là. On prévoit entreprendre des travaux plus pointus dans le domaine de l'hôtellerie. Le député de Masson sera sûrement heureux d'entendre qu'on veut travailler fort au cours de l'année qui s'en vient dans ce domaine-là. On a toujours hésité à y aller, parce qu'il faut bien cerner notre problème.
Quant à la remarque du député de Charlevoix pour le personnel qui est en disponibilité et qui pourrait venir nous donner un coup de main, on est actuellement en discussion avec les gens qui sont au Conseil du trésor pour être capable d'utiliser le maximum de personnes qui pourraient venir travailler avec nous et gonfler nos rangs pour faire la meilleure des vérifications.
Toutes ces choses étant dites, M. le Président, c'est évident que, de temps en temps, certaines commissions ou certains politiciens peuvent être un petit peu sur leur appétit, ou dire: Bon, ils parlent, mais ils «vont-u» finir par aboutir? Dans le fond, on a abouti. On a abouti de trois façons cette année. On a abouti, premièrement, en protégeant l'enveloppe de revenus qu'il nous avait été demandé d'aller chercher, et on peut vous dire qu'une bonne partie de la population du Québec paye ses taxes normalement. Deuxièmement, on a abouti dans nos programmes spéciaux qu'on avait mis en place et qu'on nous avait demandé de mettre en place, et on est arrivé à respecter les cibles qui nous étaient fixées. Troisièmement, on est à préparer un plan, qui n'est pas un plan flaillé dans les airs, qui va tenir compte de ce qu'on vous a montré ce matin à propos du travail au noir et qui va tenir compte de ces problématiques-là et qui va nous empêcher de travailler tous azimuts. On est parfaitement d'accord avec le député de Masson lorsqu'il dit qu'on ne doit peut-être pas s'étirer partout, sur tout en même temps.
Et il faut quand même préparer la table. Dans le fond, on peut inviter... Au ministère, vous savez, cette année, on va utiliser l'équivalent de 7 172 personnes pour travailler. Quand vous utilisez un grand nombre de personnes comme ça, vous pouvez inviter, si vous voulez, 16 000 personnes à souper, mais quand ils vont arriver, il va falloir que les repas soient prêts, il va falloir que des personnes soient là pour servir. Donc, on peut avoir du monde qui s'ajoute au ministère du Revenu, mais, de façon exponentielle, c'est un peu plus difficile parce que, lorsqu'ils arrivent, il faut les accueillir, il faut les former, il faut leur donner des outils pour travailler, il faut leur permettre d'être capables de rencontrer le contribuable. Et, comme le disait tout à l'heure le député de Nelligan, il ne faut pas non plus qu'on se retrouve devant une situation où la personne se sent accusée sans avoir le droit de nous répondre.
Pour l'ensemble des remarques préliminaires que j'avais à faire, M. le Président, c'est un petit peu ce que j'avais à vous dire. Je n'ai pas suivi mon texte du tout. D'ailleurs, la personne qui l'a préparé ne sera pas de bonne humeur après moi, mais c'est que c'est devenu une habitude chez moi de ne pas le suivre complètement.
Just to say a few words in English because Mr. Russell said some words, we are going to fight on the black market, you can be sure. Merci beaucoup.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Paré, M. le sous-ministre, de vos remarques préliminaires. Maintenant, cette étape étant terminée, nous allons passer aux discussions générales et, si les membres de la commission sont d'accord, puisqu'on n'a pas déterminé une façon de procéder particulière, pour vider un sujet, peut-être que je permettrai aux autres membres de la commission d'intervenir avant que le même intervenant revienne sur d'autres sujets, si vous êtes d'accord pour...
Une voix: ...
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, c'est parce que c'est un meilleur fonctionnement. Donc, je laisse la parole au député de Nelligan, la première question.
Discussion générale
Ligne d'autorité au ministère du Revenu
M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Comme j'ai dit dans mes remarques préliminaires, j'ai lu beaucoup de documents depuis le début de la semaine et j'ai vu un certain changement dans les fonctions du ministre du Revenu. Quand j'ai vu le rapport annuel du ministère du Revenu, avec la mission du ministère, effectivement, ils ont parlé beaucoup d'administrer la loi. Mais, quand j'ai reçu le document qui était envoyé par Michel Carpentier, secrétaire général du Conseil exécutif, dans la section, page 32, la présentation des fonctions, il a dit que les fonctions du ministre délégué au Revenu sont... «La poursuite de l'objectif d'une solidarité renouvelée au sein de la société exige impérativement que des mesures soient prises pour assurer que chacun et chacune des citoyens et citoyennes participent de façon juste et équitable à l'effort collectif, notamment en matière de respect des lois à portée fiscale adoptées par l'Assemblée nationale.» Avec ça, il y a tout un changement de philosophie que je trouve intéressant.
Je pense que ma première question va aller au début. Dans le même document, je trouve les listes des sous-ministres et je vois que, sous l'autorité du ministre d'État à l'Économie et aux Finances, il y a effectivement M. Pierre-André Paré. Juste un petit peu plus bas sur cette page, il est en soutien au ministre délégué au Revenu. Je voudrais savoir, M. Paré, c'est quoi, les lignes d'autorité au ministère.
M. Paré (Pierre-André): M. le Président, la question du député de Nelligan fait référence à un document qui a été distribué, je crois, à tous les membres de l'Assemblée nationale sur le fonctionnement du nouveau gouvernement, où on cite les différentes responsabilités du ministère ainsi que les différentes responsabilités des commissions. Il est effectivement dit à un certain moment donné que le ministre d'État à l'Économie et à l'Emploi est à la fois ministre du Revenu, ministre de l'Industrie et du Commerce et ministre des Finances. Alors, le ministre en titre tel qu'on le connaissait autrefois, avec les pouvoirs de signature et d'influencer, c'est le ministre d'État à l'Économie et à l'Emploi. A été ajouté à ça un ministre délégué qui doit prendre en compte l'assurance que le ministère du Revenu va faire le maximum pour aller chercher l'ensemble des revenus qui sont dus au gouvernement et, deuxièmement, l'ensemble des particularités et l'ensemble des travaux qu'il faut faire pour que les citoyens soient bien traités.
(12 h 10)
Ce qu'on en comprend, c'est que cette volonté de nommer un ministre délégué au ministère du Revenu, c'est la volonté que le gouvernement a de comprendre que le ministère du Revenu est un ministère important, et il veut signaler par cette présence-là d'un ministre délégué qu'il va suivre de façon très précise et de façon très particulière tous les efforts que le ministère va faire: a) pour la perception; et b) pour s'assurer que les clients sont bien servis; et c) que les lois sont bien transportées.
La méthode de fonctionnement dont nous avons convenu entre nous, au ministère du Revenu, avec le ministre délégué, c'est de travailler avec le ministre délégué un peu comme s'il était notre ministre responsable de façon à ce qu'il soit complètement informé de l'ensemble des dossiers, étant entendu qu'il est à la fois ministre délégué du Revenu, qu'il est membre du Conseil du trésor, membre du Conseil des ministres et membre d'un comité sur la santé et les services sociaux et qu'il est aussi membre du Comité de législation.
La deuxième chose dont on a convenu également, c'est que ce ministre peut faire des remarques au ministre d'État concernant l'administration, nous en parler ou ne pas nous en parler, et le ministre d'État peut me parler à moi directement. Moi, ce dont j'ai convenu avec le ministre délégué, c'est que j'informerais notre ministre délégué toutes les fois qu'on recevrait des informations, des indications ou des instructions de notre ministre d'État de façon à ne pas briser certains liens avec la machine. Donc, pour nous, au ministère du Revenu, en ce qui nous concerne, les champs d'action de chacune des personnes sont bien délimités, et on n'a pas vraiment de problème avec ça.
M. Blais: Le travail au noir, là-dessus, là, est-ce que... C'est quoi, la relation au travail au noir?
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Non, non, mais c'est des...
M. Blais: Tu sais, je veux dire: Les budgets ne balancent pas. Vous... Il y a trop de ministres? C'est quoi, là? On parle du travail au noir, là, puis des évasions fiscales.
M. Paré (Pierre-André): Non, non. On ne parle pas du travail au noir, là, je m'excuse!
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Non, non, monsieur. À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Masson, c'est des questions d'ordre général qu'on a entamées, là. On pourra revenir tout à l'heure.
M. Blais: Non, mais j'ai droit à mon opinion, hein.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Vous avez droit à votre opinion.
M. Blais: C'est la seule place où je peux parler sans recevoir un verre d'eau ou une critique, alors, j'espère que...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je ne veux surtout pas vous mouiller. Je ne veux surtout pas vous mouiller, mais c'était juste pour vous informer que le député de Nelligan était complètement dans l'ordre des choses, et s'il veut continuer...
M. Blais: Ah oui! Il est dans l'ordre.
M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Effectivement, c'est le mandat sur la loi 198, et nous sommes là, ici, pour explorer toutes les questions qui touchent le ministère du Revenu, incluant certainement le travail au noir, et je pense... Parce que, un des grands objectifs que le sous-ministre lui-même a proposé, c'est de simplifier les choses. Comme élu qui représente la population, j'essaie de comprendre, alors que je peux passer le message à mes commettants, c'est quoi, la ligne d'autorité. Avec ça, je redemande la question d'une autre façon: Qui signe les décrets? Qui signe les demandes au Conseil du trésor? C'est quoi, la ligne d'autorité, maintenant au Revenu?
M. Paré (Pierre-André): Le sous-ministre signe en tant que sous-ministre responsable, demande au ministre délégué son approbation et l'envoie au ministre d'État pour signature officielle.
M. Williams: Avec ça, sans avoir la dernière signature, ça ne peut pas aller plus loin?
M. Paré (Pierre-André): Le ministre du Revenu, qui a le droit de signer en vertu de la loi, c'est le ministre d'État à l'Économie et à l'Emploi.
M. Williams: O.K. Et ce n'est pas le ministre délégué?
M. Paré (Pierre-André): Ce n'est pas le ministre délégué.
M. Blais: Un autre travailleur au noir.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Williams: Avec ça, c'est le ministre du Revenu, de l'Économie et de tout ça, là, la longue liste des titres, là, qui va présenter les crédits, qui va défendre les engagements financiers?
M. Paré (Pierre-André): L'organisation parlementaire permet à un ministre délégué de venir en commission parlementaire à la place du ministre en titre, comme ministre délégué.
M. Williams: Parce qu'il me semble que, dans le contexte où on veut simplifier les choses, il me semble que nous les avons juste compliquées. Effectivement, si j'ai bien compris, la seule ligne d'autorité, c'est le ministre du Revenu, le ministre des Finances, et ce n'est pas le ministre délégué, dans cette ligne d'autorité. Votre ligne d'autorité, c'est entre vous et le ministre des Finances.
M. Paré (Pierre-André): C'est exact, M. le Président. La chose que je peux vous dire, c'est que je ne peux pas, moi, ici, comme sous-ministre, indiquer si c'est plus compliqué ou moins compliqué. Ce qu'on a fait, nous, comme travail, ce n'est pas compliqué. On peut travailler avec les deux ministres et on n'a aucun problème à se demander des permissions. Maintenant, la décision gouvernementale de nommer ou de ne pas nommer, la raison pour laquelle ils l'ont nommé, c'est pour marquer, bien marquer l'importance qu'ils accordent au ministère du Revenu et avoir quelqu'un qui est là. Vous comprendrez qu'un ministre qui est à la fois responsable des Finances et de l'Emploi et qui devrait venir se payer un quatre heures sur un projet technique en commission parlementaire ou un huit heures en commission parlementaire parce qu'il y a des modifications techniques au niveau de la loi, c'est intéressant qu'un ministre délégué puisse y aller.
Maintenant, je n'ai pas à juger des décisions gouvernementales sur la façon dont ils ont préparé leur organisation gouvernementale. Je dois travailler avec le gouvernement et, en ce qui me concerne, je dois vous dire que ça ne me cause pas de problème.
M. Williams: Merci, M. le sous-ministre. Je n'ai certainement pas demandé, particulièrement en ondes, de donner votre interprétation de la décision gouvernementale, j'ai juste demandé d'expliquer. Et, selon votre explication... Parce que je suis nouveau dans le dossier. Quand j'ai besoin de savoir qui est en charge, maintenant j'ai compris que ce n'est pas le ministre délégué, c'est le ministre des Finances. Et quand nous avons quelque chose à dire qui peut changer la politique gouvernementale, ce n'est pas au ministre délégué, c'est au ministre des Finances. Et je pense qu'avec votre réponse, qui est franche, honnête et claire, maintenant, j'ai la réponse à ma question. Je ne vous demande pas de faire les commentaires: Est-ce que, maintenant, nous avons un niveau gouvernemental qui n'est pas nécessaire? Je n'ai pas demandé votre commentaire sur ça. Selon votre réponse, j'ai compris que la ligne d'autorité, ce n'est pas une ligne directe au ministre délégué, c'est une ligne complètement juxtaposée à la vraie ligne d'autorité. Et c'est ça que j'ai voulu établir avec mes questions. Et, maintenant, je comprends ça, politiquement, d'une façon beaucoup plus claire. Est-ce qu'il y a d'autres questions sur ce sujet?
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Est-ce qu'il y a d'autres remarques ou d'autres questions sur ce sujet, au niveau du ministre, l'importance d'avoir un ministre du Revenu ou un ministre délégué au Revenu? Il n'y a pas d'autres commentaires? On peut passer à un autre sujet? Il y aurait le député de l'Acadie qui avait demandé la parole; après, le député de Viger.
Centre de perception fiscale
M. Bordeleau (Acadie): Oui. En fait, c'est juste un point sur ce que vous avez signalé tout à l'heure, et j'aimerais peut-être juste avoir un peu plus d'information. Vous avez parlé que le Centre de perception était maintenant une unité autonome de gestion. Alors, c'est une nouvelle organisation qui a été mise en place pour ce qui touche la perception. J'aimerais que vous nous expliquiez, disons, d'une façon un peu plus précise en quoi ça consiste, une unité de gestion autonome pour la perception, quels changements concrets ça a apporté, disons, dans le fonctionnement et quels sont les avantages connus et attendus de cette nouvelle structure d'une unité de gestion autonome.
M. Paré (Pierre-André): M. le Président, avec votre permission, je demanderais au directeur général de l'unité autonome de perception, M. Gabriel Cayer, de fournir les réponses à cette commission concernant l'unité autonome qui s'appelle le Centre de perception fiscale, et peut-être, de cette façon, commencer la reddition de comptes de son unité autonome. Je me déclare en support du directeur général, M. le Président, si, avec votre accord, c'est correct.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, monsieur le...
M. Cayer (Gabriel): Je trouvais que mon patron faisait bien ça.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Est-ce qu'on peut répéter votre nom, s'il vous plaît?
M. Cayer (Gabriel): Gabriel Cayer.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Cayer. À vous.
(12 h 20)
M. Cayer (Gabriel): Bon. Situons un petit peu, pour répondre à la question, ce nouveau mode de gestion que le gouvernement a appelé «unité autonome de service». On se situe dans le cadre de la réforme de l'administration publique, où on a, à un moment donné, entrepris une démarche gouvernementale de responsabilisation marquée de trois points: un nouveau processus d'allocation de ressources avec des enveloppes fermées; un allégement des contrôles centraux et des processus administratifs; et, finalement, l'implantation du mode de gestion axé sur les résultats, c'est-à-dire les unités autonomes de service; un mode de gestion qui faisait en sorte qu'on accordait beaucoup plus d'importance aux résultats qu'aux moyens, ce qui était la façon traditionnelle de fonctionner. L'unité autonome de service, ou l'agence, qui est d'inspiration britannique, exige trois documents: un document qui est une entente de gestion entre le sous-ministre du Revenu et le responsable du Centre, entente qui décrit le mandat de l'unité autonome qui s'appelle, dans notre cas, le Centre de perception fiscale les objectifs généraux, le cadre des relations avec les débiteurs, la gestion et la gestion du Centre; finalement, il y a un deuxième document, qui s'appelle le plan d'action, qui décrit les orientations à moyen terme, les objectifs triennaux, les objectifs annuels, qui fait état des problèmes et des solutions potentielles; et le troisième, évidemment, c'est le rapport annuel, qui fait la comparaison entre les planifications et les résultats. Ces documents-là sont publics. J'en ai apporté un exemplaire pour chacun de vous. Ça me fera plaisir de vous les remettre tout à l'heure pour y découvrir l'ensemble des réponses aux questions.
Les principales caractéristiques, c'est fondé sur des objectifs précis et mesurables. Dans le cas du Centre de perception fiscale, le produit fini est clair, c'est des dollars perçus. Alors, le plan d'action vient reprendre ce qu'on croit atteindre dans trois ans, ce qu'on pense faire en trois ans, et donne aussi des objectifs précis de récupération fiscale de l'année en cours. Cette année, il y avait un objectif de 650 000 000 $ de recettes à faire entrer. C'est l'objectif, et vous allez voir dans le document qui vous sera remis tantôt qu'on devrait atteindre ce résultat-là.
Ça permet une plus large autonomie des gestionnaires quant aux moyens. Ça permet une plus grande imputabilité des dirigeants. Ça permet aussi une transparence de l'organisation. Tous les documents, tout ce qu'on fait, c'est public. Donc, évidemment, on est sur la sellette constamment, d'une façon ou d'une autre. Et, même, on devait faire notre première reddition de comptes publique devant une commission comme celle-ci à la suite du premier exercice qui se termine en 1996. On a dû développer des indicateurs de performance pour s'assurer, tout au long du parcours, que les objectifs sont atteints ou en voie d'être atteints et que des correctifs sont utilisés. Et la reddition de comptes porte précisément sur les résultats.
Donc, en gros, c'est ça. Ça résume un petit peu ce que...
M. Bordeleau (Acadie): Juste une question de clarification. En quoi c'était nécessaire d'avoir une unité de gestion comme celle que vous avez décrite pour fixer des objectifs, des résultats et prendre les moyens pour les atteindre? Est-ce que ça n'aurait pas pu être fait, disons, dans le cadre de la structure qui existait avant? Parce qu'on attache beaucoup d'importance aux résultats et à l'atteinte de ces résultats-là, mais il me semble que ça ne demandait pas nécessairement d'avoir cette forme-là pour atteindre le même objectif.
M. Cayer (Gabriel): C'est vrai que ça aurait pu se faire probablement dans la structure actuelle du ministère où on était. C'est le mode de gestion qu'a choisi l'État pour faire en sorte qu'on rende compte d'une façon plus pertinente, plus précise dans chacun de nos secteurs respectifs. Le sous-ministre, pour des objectifs bien précis, a choisi la Direction générale de la perception pour devenir une première unité autonome de service parce que ça s'y prêtait probablement davantage, avec, par exemple, le produit fini, les engagements. Mais le fait de le détacher fait en sorte qu'on s'en vient, par exemple, avec un budget de fonctionnement particulier qui se détache de celui du ministère. Donc, on ne sera pas limité, en tout cas, moins limité que ce qu'on fait présentement à l'intérieur de l'enveloppe qui nous est dévolue dans le partage ministériel. On aura notre propre budget et on devra en rendre compte. Donc, ça permet de faire plus.
En gros, on pourrait dire, pour résumer une situation, là, d'une façon un peu brutale: On arrête de percevoir actuellement quand on n'a plus d'argent, mais, là, on va continuer parce qu'on va en avoir davantage pour aller percevoir toutes les catégories de créances dans tous les secteurs d'activité.
M. Bordeleau (Acadie): Quel est le changement que cette structure-là vous fournit au niveau de la marge de manoeuvre sur la gestion des ressources humaines?
M. Cayer (Gabriel): Bon. Les marges de manoeuvre n'ont pas été encore substantielles. Elles le sont surtout à l'interne et elles le sont et se traduisent surtout par les moyens financiers additionnels qu'on va avoir. En ce qui concerne le personnel, les conventions collectives actuelles s'appliquent. La Loi sur le vérificateur général et toutes les lois qui régissent le ministère continuent à s'appliquer.
M. Bordeleau (Acadie): Est-ce qu'il n'y a pas une différence, à ce moment-là, entre cette conception québécoise, au fond, des unités de gestion et celle à laquelle vous avez fait référence au niveau de la Grande-Bretagne? Est-ce que, en Grande-Bretagne, il n'y a pas une autonomie complète, beaucoup plus grande que celle qui existe ici avec les unités de gestion?
M. Cayer (Gabriel): Vous avez raison, il y a un peu plus d'autonomie dans le concept britannique. D'abord, les agences relèvent directement du ministre, c'est déjà une différence. Mais il reste quand même que, dans notre cas, ce qu'on voit, c'est que les marges qu'on aura, on devra les mériter. On devra atteindre ce qu'il nous faut comme crédibilité pour prouver que la démarche est solide. On a déjà fait notre premier pas. Ça nous a pris un an. On a eu notre reconnaissance le 20 juin 1995. Depuis ce temps-là qu'on discute avec le ministère des Finances pour avoir la marge de manoeuvre la plus significative, qui est celle qui est financière, et on vient de l'obtenir il y a une semaine.
Donc, on voit que les marges de manoeuvre... On en a eu d'autres qui sont à l'interne, qui nous sont accordées par le sous-ministre, qui nous dégagent de certaines...
M. Bordeleau (Acadie): Oui, mais, dans...
M. Cayer (Gabriel): ...caractéristiques.
M. Bordeleau (Acadie): ...l'état actuel des choses, si je comprends bien, là si ce n'est pas exact, vous me corrigerez au niveau, comme tel, de tout ce qui est ressources humaines, vous êtes lié par les conventions collectives, et ce n'est pas votre unité qui va négocier, évidemment, des conditions de travail ou des conditions salariales directement avec vos employés. Vous êtes contraint au même fonctionnement qui existe actuellement...
M. Cayer (Gabriel): C'est exact.
M. Bordeleau (Acadie): ...où la négociation se fait de façon centrale, et vous devez respecter les engagements qui sont pris à ce niveau-là et toutes les questions de sécurité d'emploi également.
M. Cayer (Gabriel): Vous avez raison. Toutes ces conditions-là s'appliquent.
M. Bordeleau (Acadie): Alors, l'autonomie que vous avez, ce n'est pas tellement sur la gestion... c'est-à-dire sur la gestion quotidienne, oui, des ressources humaines, mais pas nécessairement sur la détermination des effectifs ou un certain pouvoir d'aménager des effectifs directement dans votre unité.
M. Cayer (Gabriel): Non, on n'a pas de pouvoirs comme tels pour modifier ces conditions de travail. Il y en a quelques-uns, là, à la marge, à l'interne, qui sont accordés, mais pas comme tels. Le vrai, le plus significatif pour nous est celui qui est financier.
M. Bordeleau (Acadie): Financier.
M. Cayer (Gabriel): Celui qui va nous permettre de vraiment faire notre boulot, non pas à l'intérieur d'une enveloppe, là, restreinte comme celle qu'on a là, mais qui va pouvoir faire davantage, avec des moyens un peu plus significatifs pour faire toute la job qu'il y a à faire. Les comptes à recevoir sont actuellement à 2 500 000 000 $. Si ça restait comme c'est là, on s'en va, d'ici le 31 mars, à 3 000 000 000 $. Bien, il faut agir, puis c'est un des moyens qu'a choisi le gouvernement pour y arriver. On pense qu'on devrait arriver à des résultats positifs en implantant ce mode-là, avec évidemment, il y a d'autres marges qui vont s'ajouter notamment l'aspect financier.
État des comptes à recevoir
M. Bordeleau (Acadie): Vous mentionnez le niveau des comptes à percevoir, là. C'est quoi, l'évolution au cours, mettons, des cinq dernières années concernant les comptes à recevoir?
M. Cayer (Gabriel): Oui, je les ai...
(Consultation)
M. Cayer (Gabriel): Les documents que je vous remettrai tantôt contiennent ces renseignements-là.
(12 h 30)
M. Bordeleau (Acadie): O.K.
M. Cayer (Gabriel): De 1990 à 1995, et j'inclus, là, les faillites, en 1990, on était à 875 000 000 $; en 1991 c'est au 31 mars de chaque année on est à 1 075 000 000 $; en 1992, on atteignait 1 300 000 000 $; 1993, 1 500 000 000 $; 1994, 1 700 000 000 $; et, le 31 mars 1995, 1 900 000 000 $. Et ça, c'est en excluant la TPS.
M. Bordeleau (Acadie): Votre montant que vous avez mentionné tout à l'heure, de 2 700 000 000 $ quelque chose comme ça c'est quoi, ça, exactement, d'abord?
M. Cayer (Gabriel): Bon. Là, j'incluais... quand je vous parlais qu'on était rendus actuellement... là, je vous donnais des résultats au 31 mars de chaque année.
M. Bordeleau (Acadie): Oui.
M. Cayer (Gabriel): Si on prend le résultat le plus récent, au 31 janvier 1996, on est à 2 200 000 000 $.
M. Bordeleau (Acadie): Le 1 900 000 000 $, c'est en mars 1995?
M. Cayer (Gabriel): En mars 1995, 31 mars 1995.
M. Bordeleau (Acadie): Et puis, le 31 janvier...
M. Cayer (Gabriel): On est à 2 200 000 000 $, c'est-à-dire qu'on en reçoit plus qu'on en traite, qu'on en règle.
M. Bordeleau (Acadie): Vous en recevez plus que vous...
M. Cayer (Gabriel): Qu'on en perçoit.
Une voix: C'est un «backlog».
M. Bordeleau (Acadie): O.K.
M. Cayer (Gabriel): C'est-à-dire, les arrivages sont plus élevés que ce qu'on peut régler actuellement. Et c'est pour ça qu'on dit qu'à cette allure-là on devrait atteindre le 3 000 000 000 $ au 31 mars 1996 si on ne change pas certaines choses, comme on l'annonce. La création d'unités autonomes, vous nous donnez des moyens financiers de faire davantage pour pouvoir... Et on a un plan qui a été déposé pour être capables de ramener les comptes à un niveau qu'on considère comme étant acceptable, c'est-à-dire autour de 1 500 000 000 $. Il faut penser que les comptes à recevoir, il y en a dans le 1 500 000 000 $, ou dans les montants que vous avez là, il y a des comptes qui sont récents, qui viennent d'être créés, il y a des comptes qui sont contestés, avec des garanties, d'autres sans garanties, et vous avez, évidemment, une provision pour créances douteuses.
M. Bordeleau (Acadie): Quand vous dites que le niveau acceptable que vous avez en tête, c'est le 1 500 000 000 $, ça se compare de quelle façon, ça, aux autres provinces, en prenant quand même un barème de comparaison semblable?
M. Cayer (Gabriel): Les comptes à recevoir des autres provinces, c'est moins significatif, parce que les impôts sont perçus par Ottawa. Si on prend les comptes du gouvernement canadien, au 31 mars 1995, pour strictement l'impôt, ils sont à 8 900 000 000 $, l'impôt des particuliers et l'impôt des corporations.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Est-ce que ça complète, M. le député de l'Acadie?
M. Bordeleau (Acadie): Oui, ça va.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je ne sais pas si on me permettrait une question qui est bien précise. Dans le 3 000 000 000 $ vous prétentez avoir 3 000 000 000 $ de fonds à percevoir au 31 mars 1996 quelles sont vos prévisions de comment on dit ça, donc de perçu réel? Comment vous pensez d'aller chercher réellement, là, sur le 3 000 000 000 $? Est-ce que vous allez chercher le 3 000 000 000 $? Mais il y a sans doute des chiffres qui vous disent que, pour toutes sortes de raisons, vous n'êtes pas capables d'aller les chercher, ou vous ne pourrez pas.
M. Cayer (Gabriel): Oui. Bon, d'abord, le 3 000 000 000 $, c'est une projection...
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, la projection.
M. Cayer (Gabriel): ...ça serait au 31 mars 1997 qui serait le 3 000 000 000 $. L'actuel, on disait que c'était à 2 200 000 000 $, et la provision sur ce montant-là est de 900 000 000 $, quelque 900 000 000 $, la provision pour mauvaises créances.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ah, bon.
M. Cayer (Gabriel): Donc, ce qui veut dire que la moitié, pour nous, est récupérable. Mais, si on prend le 1 900 000 000 $ puis on le décortique, là, on dit: 1 900 000 000 $, la provision, 923 000 000 $, il reste 993 000 000 $. Il y a 51 000 000 $ de comptes à recevoir qui sont sous entente, 47 000 000 $ qui sont en opposition avec des sûretés, 28 000 000 $ en opposition sans sûretés, et il y a 155 000 000 $ de comptes à recevoir de moins 90 jours. Donc, il reste des comptes à recevoir nets, actuellement, de 711 000 000 $.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui. Merci. M. le député de Marguerite-D'Youville.
Suivi des dossiers acheminés par les députés
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Une des recommandations qui a souvent été adressée au ministère du Revenu puis à laquelle font face souvent les députés, c'est de rendre le ministère plus emphatique, c'est-à-dire que, tout en reconnaissant l'obligation et puis l'urgence, je dirais même, de collecter tous les revenus qui sont dus à l'État, la manière de le faire, parfois, peut laisser à désirer.
Vous avez mentionné tout à l'heure, suite à des commentaires qui avaient été faits par mes collègues, que le ministère recevait des plaintes de ceux qui sont mécontents et que les députés s'adressaient parfois à vous suite aux visites que l'on reçoit de nos concitoyens. Il y a, bien sûr, des gens qui sont mécontents, mais je dirais que enfin, si je prends ma propre expérience, et je suis sûr que ça reflète un peu ce que vivent mes collègues beaucoup de citoyens qui viennent nous voir concernant des problèmes avec le ministère du Revenu relèvent de décisions qui tombent dans des zones grises ou des interprétations des règlements fiscaux qui peuvent aller dans un sens ou l'autre. Alors, bien souvent, les députés font des représentations, vous écrivent ou écrivent au ministre responsable du Revenu pour voir si on peut apporter des correctifs à ces cas problèmes. Comme je vous dis, la plupart du temps, ce sont des cas qui tombent dans des zones grises.
Pouvez-vous nous dire, de façon assez directe, si les représentations que font les députés sont reçues attentivement, si elles donnent des résultats ou si, au fond, ça s'empile tout simplement dans des dossiers et les problèmes que l'on soulève sont traités comme ils le sont au préalable, c'est-à-dire selon les directives du ministère? En d'autres mots, est-ce que nos interventions donnent des résultats ou est-ce qu'elles n'en donnent pas?
M. Paré (Pierre-André): M. le Président, nous avons une organisation qui s'est toujours fait un devoir de donner des réponses ou d'aider les députés qui posent des questions ou qui demandent des questions spécifiques pour eux-mêmes ou pour leurs commettants. Il est évident qu'il y a certaines dispositions de la loi qui nous empêchent de donner des réponses peut-être précises concernant un commettant, à moins que ce dernier ait donné la permission à son député de recevoir la même réponse. À cause d'un article de confidentialité, je ne pourrais pas aller voir mon député puis dire: Voulez-vous, s'il vous plaît, M. le député, demander quel montant je dois et combien? Le ministère du Revenu ne pourrait pas donner la réponse au député. Il pourrait simplement dire au député: On lui a transmis son avis de cotisation et on est en train de discuter avec lui. Mais il ne pourrait pas donner de réponse précise à cause de la confidentialité.
Si c'est ce genre de difficultés là auquel fait référence le député, peut-être que ça peut arriver à l'occasion que les députés aient le sentiment qu'on ne s'occupe pas, ou qu'on donne des directives qui font que les députés ne reçoivent pas de réponse précise. Ce que l'on fait, chaque fois et à chacune des années ou à chaque élection, l'on fait des rencontres avec l'ensemble des députés pour les informer de la façon dont ça fonctionne au ministère du Revenu, quelles sont les obligations que les députés ont lorsqu'ils reçoivent leurs commettants s'ils veulent demander eux-mêmes des questions concernant un contribuable.
Ceci étant dit, et supposons qu'ils ont le droit de recevoir l'information et qu'ils se présentent ou qu'ils demandent des questions concernant leurs commettants directement chez nous, ils peuvent le faire selon une ligne directe, évidemment, ce que j'ai expliqué tout à l'heure. Ils ont des numéros de téléphone précis sur lesquels ils peuvent appeler pour obtenir de l'information eux-mêmes, que ce soit de l'information générale ou de l'information particulière.
Et toutes les fois, à ma connaissance, qu'un député s'est présenté chez nous avec un commettant ou avec une permission d'obtenir de l'information avec le commettant, on s'est toujours préoccupé de le recevoir et de regarder attentivement le dossier. Ce n'est pas nécessairement parce qu'un député se présente chez nous avec un commettant qu'on va regarder le dossier de façon différente. La loi va s'appliquer de la même façon. On va peut-être le regarder plus vite ou on va peut-être regarder plus attentivement, mais la loi est la même, que le député soit présent ou pas.
La troisième chose qu'on fait, aussi, c'est qu'à chaque fois qu'un député fait une recommandation il y a un groupe qui doit ramasser ces informations-là à un bureau qu'on appelle le bureau des plaintes. Parce qu'on a souvent beaucoup de suggestions qui nous viennent des députés, parce que c'est eux qui sont en contact avec la population continuellement, puis il dit: C'est quoi cette maudite folie-là de demander telle affaire? Alors, des fois, le député nous dit: C'est quoi cette maudite folie-là de demander telle affaire? Puis, chez nous, bien, on prend en note «c'est quoi cette maudite folie-là de demander telle affaire?» puis, des fois, à la faveur d'une révision d'une formule, on finit par enlever une ligne qui ne tenait pas debout dans le rapport d'impôts. On finit par changer une explication qui ne tenait pas debout.
(12 h 40)
Alors, dans ce sens-là, on espère que les députés vont continuer à nous informer de «c'est quoi les maudites affaires qui ne tiennent pas debout?» Ou encore, de ces choses-là. La fiscalité, vous savez, elle peut paraître un peu difficile ou un peu compliquée. Je comprends les députés qui ont à recevoir leurs commettants dans chacun de leur comté et qui ont à expliquer des choses que nous-mêmes, des fois, il faut s'installer à deux ou à trois pour les expliquer, parce qu'un seul ne connaît pas complètement tout l'ensemble de la réponse. Et je peux facilement comprendre la frustration d'une personne qui est élue, à dire: Je ne suis pas capable d'avoir la réponse. Et, en plus de ça, ils sont obligés de venir trois pour me l'expliquer.
Le contribuable, à l'autre bout, il doit devenir pas de bonne humeur. Mais il y a dans ça, et j'ai vécu moi-même l'expérience, donc je peux un peu savoir de quoi je parle, j'ai même reçu des téléphones de mes propres enfants qui me disaient: C'est fou comme la... je ne sais pas quoi... ton espèce de formule et, en plus de ça, c'est toi qui l'as prescrite, parce que c'est marqué «prescrit par le sous-ministre».
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paré (Pierre-André): Donc, si l'information s'est rendue directement sur mon bureau, inquiétez-vous pas. Ha, ha, ha! D'ailleurs, on a remarqué de quelle façon on peut faciliter ou améliorer ces formulaires-là. Ce que je peux vous dire, c'est que, toutes les fois que les formulaires se sont compliqués, c'est parce que les gouvernements ont eu des choix à faire entre l'équité et la simplicité.
Il n'y a pas de gouvernement qui a tenté de faire des lois compliquées, qui a tenté de faire de la fiscalité compliquée. Par contre, on a juste à se rappeler, il y a un certain nombre d'années, quand on faisait nos rapports d'impôts, on prenait, par exemple, les déductions pour les conjoints. Peu importe la date à laquelle on s'était unis et peu importe la méthode par laquelle on s'était unis, on avait droit à une exemption pour l'année au complet. À un certain moment donné, au nom de l'équité, ils ont dit: On va y aller sur le nombre de mois. Maintenant, ils y vont sur un prorata de jours. Aujourd'hui, quelqu'un qui regarde ça avec des yeux de... mettons, quelqu'un qui a 45 ans ou 50 ans en montant... dit: Ça n'a pas de sacrifice de bon sens, ils auraient bien pu laisser ça comme c'était. On s'était mariés cette année-là, et c'était simple, et c'est comme ça qu'on vivait. Au nom de l'équité, pour être certain que quelqu'un ne bénéficie pas d'une exemption plus longtemps qu'il ne devrait en bénéficier, parce qu'il n'a pas de lien qui l'unit avec une personne pour une partie de l'année, on est venu à des prorata hebdomadaires, quotidiens ou quoi que ce soit.
Et il y a une partie de la population qui travaille bien avec ça parce qu'elle a été habituée avec cette complication-là ou ces choses-là, parce qu'ils ont des outils informatiques où le prorata se fait tout seul et où le calcul se fait tout seul. Par contre, un autre groupe de la population a plus de difficultés parce que, là, lui, il a été habitué, la personne, à faire le calcul à la main et l'autre est habitué à ce que l'ordinateur le fasse. Alors, c'est sûr que ce genre de situation là, des fois, c'est difficile à réconcilier, mais le choix qui a été fait par les gouvernements, ça a toujours été d'utiliser plutôt la règle de l'équité.
Ce qui fait qu'on a une fiscalité un peu plus complexe à cause de l'équité, et, aussi, au Québec, on a un peu ajouté un certain nombre d'éléments d'information dans le formulaire d'impôts qui traitent des demandes concernant des programmes sociaux, qui sont des remboursements d'impôts fonciers, qui sont le programme Apport, qui sont des informations sur Logirente, etc. Et toutes ces informations-là, lorsque vous traitez pour des programmes sociaux, vous ajoutez de l'information ou vous en demandez plus.
On aurait des choix, demander des informations aux individus à tout bout de champ durant l'année, ou concentrer ces informations-là à un certain moment donné à un seul endroit. Mais, à toutes les fois que vous avez des informations ou des lignes ou des éléments qui vous apparaissent comme étant complètement farfelus ou que vous ne comprenez pas, on vous invite à nous le dire. Il y a des endroits chez nous où vous avez vos lignes, et le bureau des plaintes a la responsabilité de recueillir ces informations-là et de les donner aux différentes personnes qui modifient ou qui ajustent les rapports ou les formulaires.
M. Beaulne: Bon, ça, c'est une réponse à une partie de la question, mais ma question allait plus profondément que ça. Dans des cas de citoyens qui se plaignent de la manière dont la cotisation a été évaluée, ou qui ont des éléments d'information additionnels à apporter qui, selon eux, n'ont pas été pris en considération adéquatement par les analystes ou les vérificateurs du ministère du Revenu, est-ce que la présomption, au départ, lorsque un député, au nom de son commettant, soumet à votre attention des faits qui semblent nouveaux au dossier, est-ce que la présomption, chez vous, c'est de prendre pour acquis que vos gens ont fait un travail impeccable ou si vous présumez que, de toute façon, les nouveaux éléments d'information qu'apportent les citoyens via les députés ne méritent pas suffisamment d'attention pour reconsidérer votre décision?
M. Paré (Pierre-André): Toutes les fois qu'on a des informations additionnelles et que ces informations additionnelles là font qu'on devrait modifier notre... ...on les considère puis on modifie notre décision. S'il y a des cas où vous avez apporté des faits nouveaux et qu'ils n'ont pas été considérés ce que je dis souvent lorsqu'on rencontre les fiscalistes, et je dis la même chose lorsqu'on rencontre les gens des commissions montez dans l'échelle du ministère, et jusqu'à moi s'il le faut, mais, s'il y a des faits nouveaux, il faut que ce soit apprécié puis il faut qu'on les regarde pour être justes et équitables avec les citoyens. On l'a toujours fait, et, d'ailleurs, il n'y a personne à l'Assemblée nationale qui s'est gêné, à un moment donné ou l'autre, s'il n'avait pas eu satisfaction à l'intérieur du système, pour téléphoner direct à mon bureau, puis il n'y a pas eu de problème. On les a toujours examinés. Je ne dis pas que ça a toujours donné raison aux citoyens, par exemple.
M. Beaulne: Non, non. Ça, je suis d'accord. Mes interventions, ce n'est pas pour faire en sorte que ce soient toujours les citoyens, là, qui aient raison. D'ailleurs, je pense que la plupart des collègues ici, et surtout ceux qui sont à l'Assemblée nationale depuis un certain temps, savent un peu et peuvent expliquer aux citoyens qui viennent nous voir s'ils ont des chances ou non de faire rouvrir leur dossier à la lumière des informations nouvelles qu'ils nous apportent. Moi, je parle spécifiquement des dossiers où, sur la base de notre expérience, on a l'impression qu'il y aurait moyen de réviser une décision ou que l'interprétation qui a été donnée par les fonctionnaires du ministère du Revenu tombe dans une zone grise.
Sujets divers
Et l'autre question que j'avais à poser, c'est la suivante: Il y a des dossiers, surtout des dossiers d'entreprises, où il y a des retards de paiements d'impôts, que ce soit... Et je ne parle pas de retards délibérés ou de camouflage, je parle d'arrérages de remises d'impôts qui sont connus du ministère et qui sont acceptés par les entrepreneurs, sauf que, parfois, dans la situation économique actuelle, le ministère du Revenu, pour exiger ces redevances ce qui est tout à fait légitime, selon la loi qui vous régit a parfois tendance à agir de façon assez directive. Lorsque vous avez le choix entre poser des gestes qui peuvent avoir comme résultat de faire faire faillite à l'entreprise, avec des mises à pied qui en résultent, est-ce que vous considérez la dimension socioéconomique de la décision ou si vous appliquez strictement la loi à la lettre?
M. Paré (Pierre-André): Bon, c'est des questions qui sont un peu difficiles à répondre. C'est chaque cas qu'il faut apprécier.
M. Beaulne: Oui, mais c'est les problèmes que nous, on vit, dans le contexte actuel, comme députés.
M. Paré (Pierre-André): La situation est à peu près la suivante: si des entreprises doivent de l'argent au fisc ou si des individus doivent de l'argent au fisc et qu'on peut faire la démonstration de l'incapacité de payer c'est une nouvelle façon de travailler qu'on a maintenant, depuis à peu près un an, avec une modification à une loi qui permet maintenant de remettre certains intérêts, certaines pénalités dans certaines situations, etc. et qu'on peut faire la démonstration que cet individu-là, si on obligeait qu'il fasse la remise complète de sa dette aujourd'hui, ça le ferait faillir, on a la possibilité de dire: On ne demandera pas immédiatement la remise. On peut prendre des ententes, on peut demander qu'il y ait des sûretés de déposées, on peut travailler de façon différente. Mais, si on a nettement l'impression, après tout l'examen qu'on va faire, qu'on est en train de donner de l'oxygène à un cadavre, bien là, c'est comme faire par exprès pour perdre notre argent. On va prendre ce qu'il faut, puis on va faire comme les autres.
(12 h 50)
Mais, dans l'ensemble, depuis à peu près un an et demi, on a toutes les possibilités de traiter correctement l'ensemble des citoyens, et on m'a dit dernièrement que, dans un certain nombre de cas, on a commencé à utiliser les possibilités de ne pas demander immédiatement des remises lorsqu'on pouvait faire cette démonstration-là. Et c'est une démonstration qui est faite de façon purement comptable, donc ce n'est pas quelque chose, là... Et on prend en compte le fait qu'une entreprise est en train de faire faillite ou pas. On examine ces situations-là aussi. Je veux dire, on est pas complètement dénués du fait que si, par exemple, on laisse une entreprise faire faillite puis on perd tout, on n'est pas plus avancés que si on avait retardé d'une semaine. Il y a des ententes de paiement qui se font continuellement, tous les jours, avec tous les groupes de citoyens, là, au ministère. Et, avec chaque citoyen, ou chaque entreprise, ou chaque personne morale, ou chaque personne physique, il y a toute une gamme de possibilités, là.
M. Beaulne: Donc, on peut retenir de vos propos qu'il y a une certaine flexibilité en fonction du contexte de chaque cas.
M. Paré (Pierre-André): Oui. Il y a souvent... des fois je donne l'exemple du... deux exemples simples. Il y en a que leur comptable fait une crise de coeur à tous les mois, ils nous demandent toujours un délai, ce qui veut dire que, le troisième mois, on leur demande si le comptable est mort ou pas mort. Ou encore, il y a une débâcle et il y a de l'eau qui s'amasse dans le sous-sol et puis, là, les documents ont été détruits. Mais, quand c'est la quatrième fois que l'eau monte dans le sous-sol, on leur demande de mettre leurs documents ailleurs, tu sais! Mais, ce genre de situation là, il faut faire attention.
M. Beaulne: Ça va.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Viger, ou M. le député de Nelligan. Quelles sont vos ententes?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Williams: Une courte question, après ça, le député de Viger.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Allez, M. le député de Nelligan.
M. Williams: Je voudrais juste avoir vraiment compris. Est-ce que j'ai appris une autre chose aujourd'hui? Je vous ai questionnés sur la ligne d'autorité avant, mais, avec vos chiffres, vous avez parlé d'une différence entre le nombre d'employeurs, depuis mars 1994, quand vous vous êtes présentés devant la commission. Il y a une perte de 21 000 employeurs. Il y a 21 000 employeurs de moins dans vos dossiers. Avec ça, j'apprends, encore une fois, le prix à payer pour l'autre façon de gouverner. Est-ce qu'effectivement les chiffres sont bons? Il y a une différence de 21 000 employeurs de moins.
M. Paré (Pierre-André): Les employeurs qui sont signalés, là, ce ne sont pas nécessairement des employeurs qui... La différence entre les deux, ce n'est pas nécessairement parce que les employeurs sont disparus ou ont fait faillite. Vous êtes avec le rapport annuel, probablement 1993-1994, où on disait qu'il y avait, en 1993-1994, 294 841 employeurs, et, en 1994-1995, on dit qu'il y a 274 000 employeurs.
M. Williams: Oui, je vous cite... Oui, 274 000, c'est ça.
M. Paré (Pierre-André): Bon. Peut-être qu'il y en a qui ont failli, peut-être qu'il y a eu des fusions, peut-être qu'il y a eu...
M. Williams: Mais il y a une tablette de 21 000.
M. Paré (Pierre-André): C'est ça, c'est 21 000 de moins, mais je ne peux pas vous expliquer pourquoi.
M. Williams: Merci. Je passe la parole à M. le député de Viger.
M. Maciocia: Merci, M. le Président. Moi, j'avais quelques questions sur l'unité de gestion autonome, parce que je ne sais pas à qui poser la question sur le pourcentage de causes gagnées et de causes perdues.
M. Paré (Pierre-André): Alors, sur le pourcentage de causes gagnées, ce que j'ai mentionné tout à l'heure, c'est que, dans le cas de causes, on est allé en jugement.
M. Maciocia: Ah! c'est ça, oui, mais...
M. Paré (Pierre-André): En 1993-1994, on a gagné dans 70 % des cas. Vous voulez avoir sur le nombre?
M. Maciocia: Non, O.K. Non, non, ça va.
M. Paré (Pierre-André): On a le nombre en Cour d'appel de la Cour du Québec et en Cour supérieure.
M. Maciocia: Non. Parfait, mais j'aimerais savoir deux choses avant celle-là. C'est que, avant tout, de combien de personnes est formée l'unité de gestion autonome présidée, si je peux dire, par...
M. Paré (Pierre-André): Je veux juste faire une petite distinction devant la commission, ici. Votre première question, c'était une question sur les jugements lorsque les personnes se présentent devant la cour, pour savoir si on a gagné nos causes ou si on les a perdues, le nombre.
M. Maciocia: C'est ça.
M. Paré (Pierre-André): Ça peut survenir du fait que des gens qui n'ont pas été capables de payer, ou quoi que ce soit, ou qui sont allés en opposition, ils n'ont pas nécessairement passé par l'unité autonome de gestion, dans ce cas-là.
M. Maciocia: O.K. Je reviendrai avec cette question-là. Je reviendrai tout à l'heure. J'aimerais savoir de combien de personnes elle est composée? Deuxièmement, quel est, si je peux dire, le budget financier de cette unité? Et, troisièmement, vous avez parlé des 650 000 000 $ que vous avez perçus, probablement que j'ai mal saisi, dois-je comprendre que c'étaient des argents qui ne seraient pas rentrés si vous n'aviez pas été là? Ou c'étaient des argents qui seraient rentrés quand même, ces 650 000 000 $ dont vous avez parlé tout à l'heure?
M. Cayer (Gabriel): Vous avez trois questions. La première, le nombre d'employés, c'est 626 employés.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Allez, M. Cayer, c'était pour une identification.
M. Cayer (Gabriel): Gabriel Cayer. C'est 626 employés réguliers, des ETC, et 160 employés occasionnels, pour l'exercice 1995-1996, ce qui fait 786 employés.
M. Maciocia: Est-ce que c'étaient des employés qui étaient déjà au ministère du Revenu ou si c'étaient des employés qui étaient venus de l'extérieur?
Une voix: Les employés réguliers, les 626, sont tous des employés du ministère du Revenu et les autres sont des employés occasionnels qu'on a embauchés ou qui étaient déjà chez nous depuis un certain temps.
M. Maciocia: Qui ont déjà travaillé pour le ministère du Revenu?
M. Cayer (Gabriel): La majorité de nos occasionnels ont déjà travaillé chez nous.
M. Maciocia: Pas la totalité?
M. Cayer (Gabriel): Pas la totalité.
M. Maciocia: Quel pourcentage?
M. Cayer (Gabriel): Je dirais que 80 % sont des anciens, des gens qui ont déjà été formés au ministère. Il y a des occasionnels qui sont là depuis quatre, cinq ans.
M. Maciocia: Votre masse salariale?
M. Cayer (Gabriel): La masse salariale est autour de 26 000 000 $. Le budget total du Centre, le budget direct du Centre, est de 29 500 000 $, plus ce que vous avez dans le plan d'action, dans les dernières pages, 15 500 000 $ qui sont les coûts indirects des services des autres directions générales. Donc, ce qui nous fait un budget global actuel de 45 000 000 $.
M. Maciocia: O.K. Les 650 000 000 $ dont vous avez parlé, c'est quoi?
M. Cayer (Gabriel): Ça, c'est la dernière partie de la question. Dans le document qui vous a été distribué, on parle d'un objectif de recettes de 650 000 000 $, du 1er avril 1995 au 31 mars 1996. Il s'agit de comptes à recevoir en souffrance. Les citoyens, les contribuables reçoivent des avis de cotisation avec un délai pour payer de 45 jours; ensuite, ils reçoivent les avis de perception en nombre qui varie en fonction de l'importance de leur dette. Évidemment, plus une dette est élevée, moins ils en reçoivent avant d'être accaparés. Ensuite, quant à ceux qui n'ont pas payé d'une façon volontaire suite à l'envoi d'avis répétitifs d'états de compte, ils sont pris en charge par la perception. En principe, ce sont tous des comptes en souffrance.
Fonctionnement en unité autonome de gestion
M. Maciocia: Oui, mais... O.K. Je comprends. Ma question: Quelle est la différence qu'il y a avant et, avec vous, actuellement? C'était quoi le procédé? Est-ce que c'était le même procédé avant ou il y a un changement?
M. Cayer (Gabriel): Dans les modalités, dans le mode de perception, il est le même. Il y a eu ajout de ressources, mais le mode de perception est le même.
M. Maciocia: Mais ça change quoi, alors, avoir une unité de gestion autonome?
M. Cayer (Gabriel): Le processus est le même. Ce qui change, dans un premier... Un, on a parlé de transparence de tous les documents, de tous les renseignements. Il y a aussi les marges de manoeuvre. On a parlé tout à l'heure...
M. Maciocia: Il n'y avait pas de transparence avant?
M. Cayer (Gabriel): C'est-à-dire que les documents n'étaient pas publics. Tous les documents du Centre n'étaient pas publics. La planification annuelle, par exemple, les objectifs triennaux, etc., ce n'était pas publié, ça, dans des documents officiels. Et, finalement, on parlait de différences aussi. Il y a la notion d'enveloppe qui est différente de celle du ministère et qui sera plus substantielle pour l'année qui s'en vient. Donc, les moyens financiers seront plus...
M. Maciocia: Je comprends. Ce sont les moyens financiers. Mais la procédure, les procédés ou la chose, ça ne change absolument rien. Ça veut dire qu'il y a plus d'argent qui est donné pour, probablement, avoir plus d'employés, je ne le sais pas. Mais, en réalité, ça ne change rien dans la procédure.
M. Cayer (Gabriel): Il y a des choses de changées.
M. Maciocia: Vis-à-vis du client, vis-à-vis de la personne, vous venez de me dire que ça ne change absolument rien.
M. Cayer (Gabriel): Oui, ça change en ce qui a trait... Si on parle de la qualité des services, oui, on a instauré des modes pour être en mesure de s'assurer que les débiteurs étaient traités en fonction de la Charte des droits des contribuables et des mandataires, en fonction de la politique-cadre de perception. Donc, on se donne des moyens pour vérifier ça.
M. Maciocia: Oui, mais, M. Cayer, je pense que c'était la même chose avant. C'est toujours en prenant en considération la Charte des droits et libertés. Je pense que le ministère du Revenu ne faisait pas ça à l'encontre de la Charte des droits et libertés.
M. Cayer (Gabriel): Bon, disons que la Charte est récente, c'est vrai. Sauf qu'on se donne des moyens pour aller plus loin, pour faire davantage.
M. Maciocia: Est-ce que ça veut dire qu'il y a plus de harcèlement pour ça? Alors, allons-y directement, à la réponse. Est-ce qu'il y a un harcèlement vis-à-vis des clients? Parce que, si c'est la même procédure, le même procédé, je ne vois pas l'utilité d'une unité de gestion autonome. Vous venez de m'affirmer que c'est exactement la même chose. Si c'est ça, pourquoi avoir une unité de gestion autonome? C'est ça ma question, en réalité.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Cayer, si vous me permettez, à cause de l'heure, si vous voulez retenir votre réponse jusqu'à 15 heures cet après-midi. Je me dois de suspendre les travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 6)
Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! La commission du budget et de l'administration est réunie afin d'entendre le sous-ministre du Revenu en vertu de l'article 8 de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.
Lors de la suspension de nos travaux, c'était M. Cayer qui devait s'apprêter à répondre à une question du député de Viger. Je ne sais pas si M. Cayer a eu le temps de tout songer à sa réponse.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cayer (Gabriel): J'avais l'impression d'être sauvé par la cloche. Ha, ha, ha!
Le Président (M. Baril, Arthabaska): À vous, M. Cayer, de nous livrer le fruit de vos réflexions.
M. Cayer (Gabriel): Bon, disons que, pour répondre à la question qui m'avait été posée, en premier lieu, je dirais que c'est peut-être la première étape pour valider le concept dans un ministère, pour finalement peut-être faire tout le ministère comme étant une agence. Le ministère du Revenu, c'est gros; valider le concept avec une unité à l'intérieur du ministère, ce n'est pas évident. C'est une chaîne de production, un ministère: il encaisse, il cotise, il vérifie, il perçoit. Ce sont des activités qui se succèdent, et un petit peu d'isoler une partie pour la découper et faire, finalement, une agence, bien, ça méritait d'être évalué, d'être fait. Ça a été fait avec la Perception parce que c'était plus facilement mesurable. Donc, on peut dire que, comme premier motif, ça pourrait être ça, de valider pour finalement peut-être faire du ministère du Revenu une agence autonome.
C'est aussi une démarche, comme on le disait tout à l'heure, de responsabilisation et d'imputabilité que de gérer par résultat. Ça a déjà été essayé. C'est depuis 1987 qu'on parle de réforme de l'administration publique, puis on ne peut pas dire que les résultats étaient éclatants. Il semble que les unités autonomes donnent des résultats positifs, on le voit. Ça permet aussi une vision à plus long terme. Dans un ministère, ce qui se fait, ça se fait à l'année à l'intérieur d'un budget précis, alors que, dans une agence, avec un budget spécial, à même un fonds spécial, ça permet d'avoir une vision un peu plus lointaine de ce que pourraient être les activités; notamment, dans notre cas, en matière de perception. Ça permet peut-être aussi au sous-ministre de partager un peu les responsabilités. Ha, ha, ha! Il va se sentir moins seul peut-être. Ha, ha, ha! Ça permet... Un des points où je n'avais...
M. Maciocia: ...d'avoir un adjoint comme le ministre d'État. Il y en a un avec le ministre délégué.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cayer (Gabriel): Et ça permet, finalement, ce qu'on a dit un peu ce matin: la transparence. C'est peu souvent qu'on a vu, par exemple, une organisation comme celle du Centre de perception fiscale venir dire à l'avance et d'une façon publique ce qu'elle va faire et finalement venir en rendre compte d'une façon si publique. Nos documents le sont, notre planification annuelle est publique, plusieurs l'ont lue, plusieurs nous ont questionnés, puis on est appelés à rendre compte de ce qu'on fait et on calcule que c'est normal, pour une organisation publique, de rendre des comptes. Donc, en gros, pour moi, ce sont les éléments les plus importants.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Paré, vous avez de quoi à ajouter là-dessus? Vous semblez.
M. Paré (Pierre-André): Oui. Si vous le permettez, M. le Président, je voudrais peut-être ajouter quelques éléments additionnels. Le découpage du travail qu'il y a à faire au Centre de perception découper exactement ce qu'ils ont à faire ça a permis de trouver une série d'éléments qu'on faisait, ou qu'on ne devait pas faire, ou qu'on pourrait faire autrement. Ça nous a permis d'aller à une échelle plus petite pour retrouver et réviser des processus de travail qu'autrement on n'aurait jamais révisés. Ça, c'est un des premiers bénéfices qu'on a retenus de cette organisation-là.
(15 h 10)
Deuxièmement, le directeur de l'unité régionale me disait de temps en temps: Avant qu'on soit découpés en agences, on te racontait ce qu'on pensait qu'on faisait; maintenant, on est obligés de te raconter ce qui se fait. Ça fait un petit peu différent, parce qu'ils ont des objectifs très précis à rencontrer et, lorsqu'ils ont des objectifs précis à rencontrer, comme ils sont au bout de la chaîne c'est eux autres qui reçoivent les états de compte, c'est eux autres qui reçoivent tout ce qu'il y a à percevoir et qui cause de la difficulté ailleurs quand ça arrive là, que ce n'est pas tout à fait en ordre et qu'ils sont obligés de passer trois quarts d'heure à démêler un compte alors qu'ils auraient dû arriver puis qu'ils auraient dû le démêler en cinq minutes, ce n'est pas long que le Centre de perception fiscale se revire à l'envers dans le ministère puis qu'il dit au reste du ministère: Pouvez-vous travailler comme du monde, parce que, moi, je ne rencontrerai pas mes objectifs? Donc, ça a comme un effet de pousser sur les autres. Ça ne veut pas dire que les autres travaillent mal, mais ils sont un petit peu coincés, parce que eux autres sont à l'autre bout.
Le troisième effet, c'est que ça nous met dans une situation où on est obligés de se défendre pour rencontrer nos objectifs. Cette année, on a dit: On fait 650 000 000 $. Mais, si on était arrivés à 600 000 000 $, d'abord, on n'aurait probablement pas fixé d'objectif en partant, puis, si on était arrivés à 600 000 000 $, on aurait dit: Bien, c'est correct, puis on n'avait plus d'argent, puis ça s'est perdu dans la nuit des temps, puis le compte qui est arrivé, il n'était pas bon, il était bon, on va le passer, c'est ci, puis c'est ça.
Là, maintenant, ils sont tout seuls puis ils sont obligés d'expliquer ça, puis ils sont dans une cage de verre, et ça permet de redécouper auprès de chacun des petits groupes. Ils ont redécoupé les responsabilités auprès des petits groupes, petit groupe par petit groupe, des cibles. 650 000 000 $ pour une personne, c'est beaucoup. Divisé en trois directions générales, ça devient comme 200 et quelques millions; 218 000 000 $, si on veut. Redivisé par petits groupes, ils ont pu faire des cibles même à des échelles humaines. Et maintenant, c'est le personnel en dedans qui dit: C'est fou d'être obligé d'avoir une feuille de classée dans notre bureau, une autre feuille qu'on envoie à une autre place, une autre feuille qu'on envoie pour changer l'adresse puis une autre feuille pour faire de la cotisation, alors que, si on le faisait ici, on perdrait deux fois moins de temps, puis on le ferait deux fois plus vite, puis on ferait tout ça ici. Ça nous force à réviser un ensemble. Et, si on ne commence pas quelque part, on ne change rien.
Le fait d'avoir mis ça de l'avant, on s'est aperçus qu'une des principales marges qui nous manquait, c'était la façon de... Quand vous êtes dans le privé puis que vous n'êtes pas capable de collecter vos comptes, vous appelez une agence de collection puis vous vendez vos comptes à recevoir à 0,20 $ dans la piastre ou à 0,30 $ dans la piastre, puis ça finit là, puis ils vous ramènent 0,70 $, mais au moins vous en avez. Mais, nous autres, on n'avait même pas la possibilité d'être capables de faire des choses comme celles-là et d'aller chercher nos comptes à recevoir. Avec ça, ça nous a mis de la pression sur le dos: découper nos vrais bons comptes, regarder ce qui est plus mauvais, voir comment ça fonctionne, et on ne l'aurait jamais fait si on n'avait pas eu une unité autonome.
Et je suis convaincu qu'avec le temps à cette unité autonome là vont se greffer d'autres éléments de perception gouvernementaux. Je suis convaincu qu'il y a des montants qui sont dus dans d'autres endroits ou dans d'autres ministères, qu'ils vont trouver une bonne idée puis qu'ils vont dire: Ça «serait-u» une bonne idée, quand on commence à avoir de la misère, de les envoyer chez vous? Alors, ça va permettre une série d'éléments nouveaux qu'on n'aurait pu jamais avoir si on n'avait pas eu ça.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Viger.
M. Maciocia: Merci. M. le Président, deux petites questions. Vous m'avez dit tout à l'heure que vous avez 626 employés permanents du ministère et 160 occasionnels desquels 80 % à peu près sont des employés occasionnels qui travaillaient déjà au ministère du Revenu, si j'ai bien compris votre réponse, M. Cayer.
M. Cayer (Gabriel): Bien, il y a 626 réguliers. Eux, il n'y a pas de problème.
M. Maciocia: Ils sont du ministère.
M. Cayer (Gabriel): Des 100 et quelques employés...
M. Maciocia: 160.
M. Cayer (Gabriel): ...la majorité sont des occasionnels qui sont...
M. Maciocia: C'est ça. L'autre partie, 30 %, 40 % ou 20 %, est-ce que ce sont des gens qui travaillaient déjà dans la fonction publique ou ce sont des gens qui sont venus complètement de l'extérieur?
M. Cayer (Gabriel): Ce sont des gens qui sont venus de l'extérieur, mais après avoir fait le processus qui nous est imposé par l'Office des ressources humaines d'aller voir s'il n'y avait pas des techniciens qui auraient pu, à l'intérieur du gouvernement, faire ces travaux-là. On en a, au travers de ça, récupéré quelques-uns.
M. Maciocia: Dois-je comprendre qu'il n'y en avait pas assez et que vous êtes allés à l'extérieur?
M. Cayer (Gabriel): Vous avez raison, pas assez qui avaient ce qu'il fallait par exemple, des DEC avec option finances ou l'équivalent pour faire ce genre de travail.
Causes devant les tribunaux
M. Maciocia: O.K. Mon autre question, je ne sais pas si c'est au sous-ministre ou à vous, c'est la question du pourcentage de causes gagnées. Vous avez parlé tout à l'heure de 70 % des causes qui ont été gagnées. Ça veut dire qu'il y a 30 % des causes qui sont perdues, si je comprends bien. Je trouve ça un peu, si je peux dire, un peu assez beaucoup, si on peut dire, le 30 %. Ma question est celle-ci: Quelles sont les raisons des causes que vous perdez? Est-ce que c'est à cause, disons, de la vérification? Est-ce que c'est à cause, je ne sais pas trop, des personnes qui sont impliquées là-dedans? Et, deuxièmement, est-ce que ça concerne des particuliers, est-ce que ça concerne des grosses entreprises ou est-ce que ça concerne des petites et moyennes entreprises?
M. Paré (Pierre-André): Annuellement, depuis 1993-1994... Les jugements gagnés en 1993-1994, il y en a 316; en 1994-1995, 275; et, à venir jusqu'à date, 337. Ceux qu'on a perdus parce que c'est ceux qui vous intéressent on en a perdu 315, dont 23 à la Cour d'appel, à peu près 180 à la Cour du Québec et 180 à la Cour supérieure. Il se peut, sous réserve que les réponses puissent être encore plus claires, que d'une cour à l'autre on ait transporté des appels puis qu'on les ait reperdus, ou quoi que ce soit; il y a un certain nombre de ces cas-là.
Je demanderais peut-être, M. le Président, à notre sous-ministre à la législation de donner des détails plus précis sur le nombre de causes, s'il vous plaît.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Brochu.
M. Brochu (André): Oui. André Brochu. Je vais y aller avec la fin de la question, que j'ai saisie; peut-être que vous pourrez répéter quant à son début. À savoir s'il s'agit de corporations ou de contribuables, je n'ai pas les chiffres présentement sous les yeux. Tout ce que je peux dire, c'est qu'il y a des deux, mais je suis incapable de donner la proportion.
M. Maciocia: Si vous permettez, M. le Président, ça serait quand même important que la commission puisse savoir dans quel pourcentage c'est des cas particuliers, des individus, dans quel pourcentage des grosses corporations et dans quel pourcentage des petites et moyennes entreprises. Pour nous, c'est très important, je pense, de savoir plus ou moins dans quel pourcentage sont ces causes perdues là.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Paré.
M. Paré (Pierre-André): On prend la question et on s'engage à vous envoyer l'information d'ici une couple de semaines.
M. Brochu (André): Est-ce que c'est par rapport aux causes gagnées ou perdues ou les deux?
M. Maciocia: Perdues.
M. Brochu (André): Perdues.
M. Maciocia: Ou les deux. Les deux, ce serait mieux encore, ça nous donne un portrait plus complet de la situation.
M. Brochu (André): O.K.
M. Maciocia: Et le début de ma question, c'était: C'était à cause de quoi qu'on les perdait? Est-ce que c'était à cause que la vérification était faite d'une manière, je ne sais pas...
M. Brochu (André): Non, non. En fait, c'est souvent à cause de la preuve qui est portée devant le tribunal; souvent, des faits nouveaux sont introduits en preuve devant le tribunal. C'est souvent aussi à cause d'une appréciation des faits qui est faite différemment pas le tribunal qu'elle le fut par soit nos vérificateurs ou soit nos agents d'opposition. Et, finalement, aussi, c'est des problèmes d'interprétation où le tribunal tranche en faveur d'une interprétation qui n'était pas celle du ministère. Mais je dois dire que, majoritairement, c'est souvent de nouveaux faits qui sont introduits ou une appréciation des faits différente. C'est une question de preuve.
M. Maciocia: Merci.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Est-ce qu'on me permettrait une question dans le même sens?
M. Maciocia: Allez-y.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Est-ce que vous tenez des statistiques sur le nombre de causes perdues par le nombre d'agents ou de vérificateurs je ne sais pas le terme exact que vous utilisez. Est-ce qu'il y a des causes perdues qui sont, comment je dirais ça... Est-ce qu'il y a un agent qui perd plus de causes que d'autres?
M. Brochu (André): Non, on n'a pas ce genre de statistiques là.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vais vous dire pourquoi je vous pose la question. C'est parce qu'on a parlé avant midi...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Non, non, mais c'est important, vous savez. On a parlé avant midi que, les députés, on refère souvent... ou on communique souvent avec le ministère du Revenu et on voit je vais appeler ça des agents, je ne sais pas si c'est la bonne définition en discutant avec certains, qu'ils ont une ouverture puis qu'ils comprennent quelque chose, tandis qu'il y en a d'autres qui s'obstinent à dire: Nos chiffres, c'est nos chiffres, puis, s'il n'est pas content, il a juste à remplir un avis de contestation, puis ce n'est pas plus compliqué que ça. Donc, c'est pour ça que je vous disais que ç'aurait été important de savoir le portrait de vos agents, à savoir s'il y en a qui, vraiment, pour se donner raison, comprenez-vous, ont préparé une réclamation puis ont envoyé un avis de cotisation, s'ils ont vraiment pris le temps de tout évaluer les conséquences, toutes les possibilités, s'ils ont vraiment eu l'esprit ouvert à des ententes avec le client ou bien si c'est traité tout de la même façon. Parce que, vous savez, que ça soit chez vous, que ça soit ailleurs, la personne humaine étant ce qu'elle est, ça ne peut pas être uniforme partout. C'est pour ça que je vous dis que ç'aurait été intéressant de connaître les résultats par agent ou par vérificateur.
M. Brochu (André): En fait, j'aurais deux commentaires à votre questionnement. Le premier commentaire: D'abord, les causes qui se retrouvent devant les tribunaux n'originent pas toutes nécessairement d'une cotisation issue de la Direction de la vérification. Il peut y avoir des cotisations qu'on appelle cotisations «bureau» ou même des cotisations automatiques, et certaines sont aussi portées devant les tribunaux.
(15 h 20)
Le deuxième commentaire que je voudrais faire, c'est: Finalement, avant de se rendre devant le tribunal, évidemment, il y a, si vous me permettez l'expression, un oeil neuf qui s'est repenché sur le dossier et, pour vous suivre dans votre hypothèse, si c'est une cotisation issue de la vérification, il y a un oeil neuf qui l'a regardé à nouveau, soit la Direction des oppositions. La Direction des oppositions évalue un dossier, prend en considération, pas ce seul facteur-là, mais prend en considération la preuve. Si l'agent d'opposition, en évaluant la preuve, arrive à la conclusion que c'est un dossier qu'on n'a pas de chances de gagner par rapport à la preuve ou aux faits devant le tribunal, il va, à ce moment-là, traiter le dossier à son niveau et lui accorder un dénouement qui va faire en sorte qu'il ne se retrouvera pas devant le tribunal.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Paré.
M. Paré (Pierre-André): M. Brochu a indiqué ce qui se passe à l'autre bout complètement du «spectrum», c'est-à-dire lorsqu'on est rendu devant la cour et qu'on apprécie si on doit, oui ou non, se rendre à la cour ou se défendre. Mais, avant de se rendre là, il y a toutes sortes de démarches qui ont été entreprises entre le contribuable et le ministère et, à chacun des endroits, il y a des contrôles qui sont faits pour regarder la qualité des renseignements qui sont donnés, de quelle façon ça s'est passé, si les réponses ont été bonnes ou si elles ont été mauvaises, etc. Ça, c'est le premier point.
Le deuxième point. La personne peut soit faire opposition ou peut se plaindre à son député ou peut se plaindre à notre Bureau des plaintes; on a un bureau des plaintes. Depuis 1991 à aller jusqu'à 1994-1995, on a reçu, par exemple en 1991-1992, 203 plaintes au Bureau des plaintes, en 1992-1993, 346, 615 en 1993-1994 et 935 en 1995-1996. De ces plaintes qui étaient fondées et qui ont été réglées il y en a 935, c'est-à-dire, qui étaient fondées les raisons pour lesquelles elles ont été fondées... C'est pour ça qu'on sait pourquoi il y en a, puis on est capables de retracer c'est qui. On suit les gens. Et, du côté de la perception, avec M. Cayer tout à l'heure aussi, ils suivent les gens pour savoir de quelle façon ça fonctionne. Il y a 377 cas dont les plaintes ont été fondées parce que c'était une cause de lenteur administrative.
Abus de pouvoir, on n'en a pas, heureusement. Comportement du personnel: en 1994-1995, on en avait 21; les autres années, ça a été six, 15 et 17. Actes non conformes à la loi ou au règlement autrement dit, les gens ont mal interprété les actions de la législation ou du règlement il y en a entre 12 et 14 par année, sauf en 1993-1994 où on en a dénombré 32. Enfin, des actions qui ont été prises et qui sont non conformes à certaines directives administratives, il y en a 136 l'an passé et 211 cette année. Ça veut dire qu'à ce Bureau-là on dénombre par catégorie de plaintes celles qui sont fondées et pour quelle raison elles n'ont pas été réglées, surtout celles qui sont fondées. On peut facilement isoler, dans un grand nombre de cas, qui a travaillé avec quel client et ce qui s'est passé.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est bien. Merci. M. le député de Nelligan, sur le même sujet?
M. Williams: Même sujet, avant d'aborder les autres. Devant les tribunaux, comme je l'ai mentionné ce matin, il y a plusieurs contribuables qui sont déjà coupables devant le ministère du Revenu. Je voudrais savoir, comment un contribuable peut-il déposer la preuve? Est-ce que le témoignage de la personne est accepté comme preuve? Est-ce qu'il peut se défendre lui-même devant le tribunal?
M. Paré (Pierre-André): M. le Président, la question du député de Nelligan est vraiment intéressante, parce que ça me permet de diviser la question en deux. Il y a la première question qui est l'histoire, pourquoi le fisc considère la personne comme étant coupable avant qu'elle ait pu se défendre. Il y a un certain nombre de juristes qui pourraient vous expliquer un certain nombre de choses, mais on ne considère pas le contribuable comme étant en faute avant qu'il commence à se défendre, parce que la facture, elle est due et, lorsqu'elle est due, elle doit être payée. D'ailleurs, le fédéral, qui, lui, ne faisait pas ça depuis les six ou sept dernières années, revient à la même méthode que le Québec utilise.
Il faut comparer ça plutôt au fait que, lorsque vous allez, par exemple, dans un établissement commercial, vous achetez des marchandises, vous les payez. Vous vous en retournez chez vous et vous n'êtes pas satisfait de votre marchandise. Vous retournez puis vous dites que vous n'êtes pas satisfait. Jusqu'à temps que vous ayez fait la preuve de la non-satisfaction et de la raison pourquoi votre marchandise n'est pas correcte, vous avez payé votre compte. Et c'est plutôt ce raisonnement-là qui est appliqué. Prenons ça pour acquis, maintenant, ce raisonnement-là qu'on a et qui peut être contesté, évidemment. Je ne suis pas un juriste, mais c'est de cette façon-là qu'il faut voir ça. C'est pour ça qu'on ne considère pas le contribuable coupable, on le considère comme devant de l'argent, puis, s'il n'est pas content de la marchandise, il peut toujours se plaindre de la marchandise.
Deuxièmement, lorsque le contribuable n'est pas satisfait, il a un certain nombre de recours. Un premier recours, c'est d'aller au Bureau des plaintes ou d'aller directement à l'endroit où il a reçu son avis de cotisation, pour examen. Il n'est toujours pas satisfait; il s'en va devant les Oppositions. Aux Oppositions, là on entre du côté du domaine légal, et je laisserais la parole à mon collègue, M. Brochu, peut-être, pour continuer, parce que le reste de la réponse, c'est plutôt du domaine légal.
M. Brochu (André): Devant le tribunal, pour répondre spécifiquement à votre question, le genre de preuve que le contribuable a à faire, eh bien, ce sont les règles du Code de procédure civile qui s'appliquent devant la Cour du Québec; les règles et les règles du Code civil quant à la preuve. La règle première, évidemment, c'est la théorie de la meilleure preuve lorsqu'elle est disponible. Lorsqu'elle n'est pas disponible et que preuve en est faite, on soumet une preuve secondaire et le tout est laissé à l'appréciation de la Cour. Oui, on peut introduire en preuve un témoignage purement et simplement, on n'est pas obligé de toujours y aller par preuve documentaire.
M. Williams: Merci. Je peux...
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, oui, vous pouvez continuer, M. le député de Nelligan.
Moyens à privilégier pour combattre le travail au noir
M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais retourner dans votre document, ou votre présentation de ce matin sur le travail au noir. J'ai utilisé le temps entre les deux sessions pour le relire et j'ai eu des difficultés à manger après ça parce qu'il y a des chiffres assez choquants dans ça. Sans faire une relecture de votre présentation, il me semble qu'il y a une crise. Il y a une crise, dans mon opinion, quand on parle de chiffres de 2 000 000 000 $. Le Vérificateur général, dans son rapport, parle de 2 800 000 000 $, plus ou moins, si ma mémoire est bonne. Nous avons vu un chiffre selon lequel 45 % des Canadiens qui ne paient pas leur taxe de vente sont des Québécois. On peut trouver plusieurs chiffres. On peut voir aussi la répartition des transactions souterraines: les vêtements, coiffure, tabac, boissons alcoolisées, aliments, boissons non alcoolisées, pièces de véhicule, repas à l'extérieur, etc. Il me semble que, comme vous l'avez mentionné à la fin de vos recommandations, nous avons ici, dans cette salle, une responsabilité morale. Je pense qu'il y a une crise de confiance dans le système. Avec eux, même, nous sommes en train de couper les services essentiels dans l'éducation, la santé et les services sociaux et, dans un autre volet du même gouvernement, nous avons les chiffres qui disent que nous n'avons pas récupéré 2 000 000 000 $.
Il me semble que nous avons tous une responsabilité. C'est d'une façon non partisane que je mentionne ces chiffres-là. Et je voudrais continuer...
M. Blais: Point d'ordre, M. le Président.
M. Williams: J'ai la parole, monsieur...
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, mais il y a un point d'ordre, là. M. le député de Masson.
M. Blais: Oui, d'ordre. On n'est pas après couper dans les services essentiels dans l'éducation et la santé, on est ici pour discuter du travail au noir, et j'aimerais qu'on s'en tienne à ça. Et je vous remercie, M. le Président.
M. Williams: Merci beaucoup. Avec toutes les coupures dans ces deux ministères, c'est assez évident que c'est les services essentiels. Je voudrais savoir, M. le sous-ministre, et je lance ce défi. Mes remarques, ce n'était pas une façon de créer un débat.
M. Blais: C'est partisan. C'est partisan.
M. Williams: On essaie de trouver les solutions ensemble. Mais il me semble que nous avons la responsabilité, avant 18 heures aujourd'hui, avant que nous ayons terminé cet exercice avec le sous-ministre, de trouver les solutions ensemble. Il y a un chiffre. Je ne fais pas un débat à savoir si c'est 1 500 000 000 $, 2 000 000 000 $ ou 2 500 000 000 $. C'est des chiffres énormes, et, d'une façon ou d'une autre, on coupe. Est-ce que c'est les services essentiels, oui ou non? On ne fait pas de débat, on coupe.
(15 h 30)
Est-ce que vous pouvez utiliser ce temps, M. le sous-ministre, pour nous donner à nous, ou à moi au moins, les choses extra qu'on peut faire? Est-ce que ça va être de commencer à utiliser les personnes qui sont disponibles maintenant, qui sont déjà payées, comme nous en avons parlé un peu avant? Est-ce que ça va être maintenant le temps d'engager plus de personnel? Est-ce que ça prend d'autres décisions ministérielles? Parce que vous avez vu, dans le rapport du Vérificateur général, qu'il y a des difficultés d'avoir l'information entre les ministres. Est-ce que c'est le temps d'une façon non partisane de changer nos lois, de bonifier nos lois, de vous donner le pouvoir d'avoir plus d'informations? Ou est-ce que c'est le temps, M. le sous-ministre, de changer la façon dont on paie les personnes qui travaillent comme percepteurs, d'avoir un ratio de performance ou quelque chose comme ça?
Je vous lance la balle, M. le sous-ministre, parce que je pense qu'il y a une crise dans la communauté. Quand on voit qu'il y a une perte de 2 000 000 000 $, quand on voit le nombre de personnes qui ne paient pas leurs impôts, vous savez qui sont les victimes: c'est les Québécois et Québécoises honnêtes, c'est les compagnies honnêtes qui ont un fardeau injuste à cause de ça. Je lance la balle, M. le sous-ministre. Vvraiment, qu'est-ce que vous êtes en train de faire? Je ne mets aucun doute sur la bonne volonté et les programmes que vous avez commencés, mais, selon les chiffres qui sont devant nous, il nous semble qu'on doive faire plus. Je voudrais avoir votre «shopping list», les choses qu'on peut faire concrètement, pas juste les grandes lignes, s'il vous plaît, mais concrètement. Je suis un homme pratique, je voudrais savoir qu'est-ce qu'on peut faire pour s'assurer que ceux et celles qui doivent payer les taxes commencent à payer leurs taxes. Dans le monde de la construction, est-ce qu'on doit déréglementer ça? C'est quoi, les moyens d'arrêter cette crise et qu'on puisse recommencer à rebâtir la confiance dans notre système? Je vous donne la parole, M. le sous-ministre, et, s'il vous plaît, donnez les choses pratiques qu'on peut faire comme parlementaires.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Paré.
M. Paré (Pierre-André): Eh bien! Comme question de la commission, c'est une vraie bonne question. Je ne sais pas si je vais être capable de vous donner une réponse qui va être aussi satisfaisante que la question peut être bonne. Dans un premier temps, lorsqu'on a pris connaissance de l'ensemble ou de l'ampleur du problème du travail au noir, il n'y a personne, comme le député de Nelligan le dit, qui met en cause le fait qu'il y a de l'inobservance fiscale, qu'on a des problèmes à percevoir nos impôts, qu'il y a des gens qui font de l'évasion, qu'il y a des revenus qui sont non déclarés. Il n'y a personne qui met ça en cause. Il n'y a personne, non plus, qui met en cause qu'il faut faire des actions précises pour aller arrêter ces saignées d'argent là, pour être capable d'en récupérer le plus possible. Là où on commence à avoir un problème, c'est lorsqu'on met la table puis qu'on décide de choisir quelle vaisselle on va utiliser, quelles fourchettes on va prendre, qui va travailler, comment on va organiser nos plans d'action, quelles clientèles on va viser, etc. Nous, au ministère, on pense qu'il y a trois fronts sur lesquels on doit travailler.
Il y a un premier front qui doit être regardé, et c'est le front de ce que je peux appeler l'éducation des gens, l'éducation du public, l'éducation de la population, l'éducation des jeunes. Et ça, ça permet de façonner les gens, à savoir quel est le mal qu'ils se font en ne payant pas complètement leurs impôts. Moi, j'ai toujours pensé et je ne veux pas faire de politique ici ni dicter de ligne de conduite à qui que ce soit que, si les politiciens ainsi que les fonctionnaires qui peuvent expliquer les choses, demain matin, s'installaient et disaient: Écoutez, population du Québec, on est à la veille de dépenser 1 200 000 000 $ pour retrouver 1 200 000 000 $. Voyez-vous ce que ça vous coûte de ne pas le payer, votre impôt? Si les gens savaient tout le mal qu'ils se font eux-mêmes en ne payant pas leur impôt, ils arrêteraient de ne pas le payer. Si les gens savaient que, demain matin, ils coupent eux-mêmes leur propre régime de retraite, ils arrêteraient de ne pas payer. Si les gens savaient que, demain matin, ils ne sont pas couverts par la CSST quand ils travaillent au noir puis que, s'ils sont blessés, ils ne peuvent pas avoir de prestations, ils arrêteraient de travailler au noir. Si les gens savaient que, demain matin, lorsqu'ils donnent de l'ouvrage puis qu'ils n'ont pas de garantie quand ils ont donné cet ouvrage-là, ils arrêteraient de donner du travail au noir. Si les gens savaient que, demain matin, lorsqu'ils travaillent au noir, ils empêchent les générations futures d'être capables de construire un système honnête, solide, sur lequel on puisse travailler, ils arrêteraient de donner du travail au noir.
Si les gens savaient que la fiscalité, lorsqu'elle permet de donner des reçus pour des personnes qui font du gardiennage d'enfants, permet de donner des exemptions auxquelles elles n'ont pas droit et que ça diminue les montants d'impôt, et qu'autant d'autres personnes, à côté, qui, elles, n'ont pas la possibilité de faire ça ou ne veulent pas le faire, elles sont obligées de payer, ils arrêteraient de faire ça. Si les gens savaient qu'on dépense 46 000 000 $ par année au Centre de perception fiscale pour aller percevoir des taxes qui, autrement, auraient dû être payées, ça mériterait qu'on rajoute des honoraires pour les comptes qui sont impayés, parce que le monde qui le paie, son impôt, on ne leur charge rien pour les collecter, eux autres, puis ils paient des salaires à des fonctionnaires pour en prendre d'autres. Si le monde savait qu'on dépense de l'argent avec la Sûreté du Québec pour faire des opérations Carcajou, des opérations Barbotte, des opérations Excel, «whatever»... Si les gens savaient tout ça! Si les gens calculaient tout l'argent qui est dépensé dans des opérations d'alcool, des opérations de vidéopoker, dans toutes ces opérations-là pour retrouver les montants d'argent qui sont dus, à la fin, ils s'apercevraient que, pour trouver, ou pour arrêter, ou pour enrayer les montants qui sont perdus, on en dépense presque le double et, à la fin, on ne retrouve pas notre profit... Et, à la fin, on brise des programmes sociaux, on brise des programmes d'éducation, on discute si, oui ou non, le travail au noir est important ou pas important. Si les gens savaient tout ça...
Puis ça, ça s'explique puis ça se donne. Et les meilleures personnes pour expliquer ça, moi, j'ai toujours pensé que c'étaient les politiciens, parce que c'est eux autres qui sont les plus proches de la population et c'est eux autres qui sont à même de prendre les meilleurs exemples, le plus près d'eux autres, de chez eux. Ils disent: Regarde, là, Jos, à côté, tu as donné une job de peinture, là. Quand tu as donné une job de peinture, il y a 14 $ qui ne sont pas allés au ministère du Revenu, et les 14 $ que tu n'as pas envoyés plus les autres 14 $ du voisin, plus les autres 14 $ du voisin... Si les gens savaient, par exemple, qu'on a 75 000 000 000 $ de dette. Quand on parle de 75 000 000 000 $, tout le monde est apeuré. Prenons donc des méthodes où on utilise des mille. On dit qu'on doit 75 000 $. Connaissez-vous bien des banques qui prêteraient de l'argent à quelqu'un qui doit 75 000 $, qui en gagne 36 000 $ par année, qui en dépense 42 000 $ puis qui fait ça depuis 10 ans? Puis, là, s'il dit non, bien, tu dis: Rajoute six zéros, ça fait des milliards.
Moi, là, ce que je vous dis, c'est que je pense qu'il y a un gros travail d'éducation à faire dans tous les niveaux, et une fois que cette partie-là est touchée ou engagée, je dis que, parallèlement à ça... M. le Président, vous m'arrêterez, là, je me suis peut-être emporté un peu. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Parce que, avec les réponses que vous donnez là, on se prépare nos questions pour revenir.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Williams: Continuez de parler. Ha, ha, ha!
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Parce que c'est beau. Les députés sont capables d'en prendre un peu, mais on peut en partager aussi, vous savez.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paré (Pierre-André): C'est parfait, je n'ai rien contre le partage.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Vous savez, je suis supposé être neutre, comme président, mais il faut que je me retienne beaucoup, là.
M. Bertrand (Charlevoix): ...avec des sens uniques.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paré (Pierre-André): M. le Président, l'autre partie qu'on doit partir en parallèle, c'est une série de programmes spéciaux, des programmes spéciaux qui vont aller faire des vérifications pointues dans des domaines précis. On connaît les domaines qui sont à risque. Les domaines à risque, c'est le domaine de l'hôtellerie, le domaine de la construction, le domaine du gardiennage. Ces domaines-là sont des domaines à risque, et c'est des domaines où, si, demain matin, on réussissait à en enrayer les trois quarts, on viendrait récupérer à peu près la moitié du montant qui est au noir.
M. Williams: Où ça?
M. Paré (Pierre-André): Dans les trois domaines que je viens de vous mentionner.
M. Williams: O.K.
M. Paré (Pierre-André): Et on est à travailler des plans précis pour prévoir ça. Et l'autre domaine que je suggère très humblement à cette commission de regarder éventuellement et on devra faire nos devoirs, nous aussi c'est le domaine où le ministère du Revenu seul ne peut rien faire; tout seul, il va juste continuer. Parce que, si ça avait été juste ajouter du monde, on a de l'aide d'un peu partout, puis obtenir des gens qui sont en disponibilité d'un peu partout, c'est des questions techniques, bureaucratiques, il y a moyen de finir par régler ça. Si ça avait été juste d'ajouter du monde, d'ajouter de l'argent, d'ajouter ça, on aurait fini par régler le problème. On n'en serait pas là. Donc, il y a des choses qu'on n'a pas faites dans le passé, qu'on découvre qu'on n'a pas faites et que, là, il va falloir faire. Il va falloir faire plus de jonction entre la Société de l'assurance automobile du Québec et nous, avec les fichiers. Il va falloir regarder s'il y a des gens qui possèdent des automobiles de 50 000 $ puis qui font un rapport d'impôt de 5 000 $. Il falloir regarder ceux qui possèdent des maisons de 80 000 $, avec les rôles d'évaluation, puis voir s'ils font des rapports d'impôts de 20 000 $. Il va falloir examiner si les gens déclarent des taxes de vente pour 1 000 000 $ puis qu'ils font des rapports de production de revenus avec 1 000 $, puis il va falloir regarder et tout croiser un ensemble d'informations, que ce soit interne ou externe.
(15 h 40)
On n'a pas commencé à faire vraiment ça et, cette année, notre plan, c'est de commencer à faire ça. On ne veut pas tout faire en même temps parce que, si on court après tous nos lièvres à la fois, on va tous les perdre. Mais on est en train de se faire un plan qui va fixer qu'on peut obtenir l'information, qu'on peut la croiser et habituer notre personnel à travailler de façon horizontale, regarder un individu sur une base de cinq ans au lieu de le regarder durant l'année, regarder une entreprise sur une base de quatre ans au lieu de la regarder durant une année et faire de la compensation au niveau gouvernemental. Ça, c'est notre deuxième point.
Le troisième point, c'est un point qui interroge un peu toute la population, et particulièrement le gouvernement. À venir jusqu'à date, toutes les actions qui ont été prises pour enrayer le travail au noir ont été des actions qu'on peut dire traditionnelles: la police, des descentes, le ministère de l'impôt, le Revenu, les cotisations. Vous avez tout cet ensemble-là et ce tableau-là. Et il nous apparaît, à nous personnellement, qu'il existe un certain nombre de moyens additionnels qu'on n'a jamais utilisés et qu'il faudra, un jour ou l'autre, commencer à penser ou à faire voir aux gens qu'ils pourraient être utilisés, et c'est ce que j'appelle le domaine des privilèges.
Il existe au Québec une foule de privilèges qui sont donnés à la population: le privilège d'avoir un permis de conduire, le privilège d'avoir une auto, le privilège de posséder une maison, le privilège de pratiquer une profession, le privilège de faire un certain nombre de choses. Et il faudra possiblement examiner la possibilité de suspendre un certain nombre de privilèges si les gens ne veulent pas se soumettre aux lois qui existent. Il faudra aussi avoir la possibilité d'aller travailler avec les municipalités, avec les régions. Quand on arrive dans une municipalité, c'est très simple de trouver des gens qui travaillent au noir, tout le monde se connaît. Les deux plus gros problèmes de travail au noir, ils ne se situent pas dans les municipalités ou dans les petites municipalités si on pouvait travailler avec eux autres assez facilement, on mettrait la main dessus assez vite c'est quand on travaille dans les villes un peu plus grosses ou qu'on travaille dans les agglomérations qui sont plus grosses. Et là on arrive avec des problèmes de confidentialité.
Le problème de confidentialité, c'est un problème qui est, à mon point de vue, correct. On ne doit pas mettre sur la table les dossiers personnels des individus. Le ministère du Revenu a toujours été conscient de cette confidentialité-là, mais on a des articles de loi, dans nos lois, qui nous permettent d'aller chercher des renseignements à différents endroits, dans différents fichiers, de façon systématique. Et, à chaque fois qu'on demande ces renseignements-là, on nous répond que nos articles de loi n'ont pas préséance sur d'autres lois, et on doit attendre une décision de la Commission d'accès à l'information ou d'autres endroits. Je ne blâme pas ces organismes-là, ils font leur travail comme ils pensent qu'ils doivent le faire, sauf que, pendant qu'on attend que la Commission d'accès à l'information nous dise si, oui ou non, on a le droit de savoir si quelqu'un possède une auto qui vaut 70 000 $, durant ce temps-là, la personne fait des rapports d'impôt durant deux ans de temps, puis, après ça, il est trop tard pour revenir parce qu'elle est disparue. Et, techniquement, on sait que le Vérificateur a demandé un avis juridique indépendant et impartial et que notre loi est au-dessus des autres lois, et on doit s'en servir, et les autres doivent nous les donner. Sauf que les organismes, eux, on leur dit de façon légale. Et, comme on est dans une société de droit et qu'on doit permettre au droit de s'exercer malgré que, de temps en temps, c'est un petit peu tannant, il faut attendre de savoir qui a raison.
Nous, on prétend qu'on n'a besoin d'aller nulle part, à la Commission, puis le monde est obligé de nous les donner. Et la Commission dit... c'est la même chose, sauf qu'elle dit: Allez-y un par un. Mais, quand on y va un par un, là je dis: Bon, M. Untel, Mme Unetelle, M. Y, Mme Y, voici. Mais, si je dis: De façon systématique, vous allez m'envoyer tout le fichier de la Société de l'assurance automobile, vous allez m'envoyer tout le fichier de la CSST, tout le fichier de la RRQ. Y «a-t-u» quelque chose de plus ridicule que de ne pas être capable d'avoir le fichier de la Régie des rentes du Québec? On reçoit l'information, on reçoit les relevés 1, on les saisit, on leur donne l'information, ils construisent un registre de gains, mais ils n'ont pas le droit de nous le redonner. Puis, je veux dire, là, c'est truffé d'organisations, ou d'organismes, ou de choses qui existent de cette façon-là, et si on pouvait croiser ensemble des données qui existent actuellement... On s'est construit dernièrement un fichier des ménages. On trouve un certain nombre de choses. On s'aperçoit qu'un certain nombre ne se sont pas gênés pour réclamer, à la fois l'homme et la femme, une déduction pour personne mariée, des deux côtés. Ils sont mariés deux fois, mais avec la même personne. On en trouve, là, de toutes les sortes.
Mais, avant qu'on puisse mettre quelque chose qui, systématiquement, va faire peur aux gens... et on a vu ce matin que l'élément déclencheur, c'est la peur de se faire prendre ou la peur de perdre un privilège. Si on est capable de mettre ces morceaux-là ensemble, plus de l'éducation, selon moi, on va finir par y arriver. Alors, voilà ce que j'ai à dire à votre question, M. le député de Nelligan. Excusez-moi, M. le Président, si j'ai été un peu long dans ma réponse.
M. Williams: C'était excellent.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Vous êtes tout excusé. M. le Vérificateur aurait un commentaire ou une information à donner sur les données, je pense, reçues, par la RAMQ, au ministère; mais, en tout cas, c'est d'ordre général. Allez.
M. Breton (Guy): Je veux enrichir ou enchaîner sur ce que vient de dire le sous-ministre et vous dire que, si nous avons été en mesure de faire une partie des commentaires que nous avons dans le rapport annuel, dans notre chapitre cette année, c'est parce que nous nous sommes permis de croiser des fichiers pour aller voir ce qu'il y avait comme incongruités entre les fichiers. Exactement ce que le sous-ministre vient de décrire. S'il pouvait le faire comme opération régulière, ce qu'on a trouvé, nous, sur une petite base, il le trouverait régulièrement. Nous nous sommes permis d'aller le voir parce que, comme le disait le sous-ministre, on peut passer au-dessus de cette loi de l'accès à l'information compte tenu qu'on n'utilise pas l'information pour faire des opérations. Donc, on a fait la preuve que, quand on met des fichiers ensemble, on trouve des choses, comme des édifices très dispendieux pour des gens qui n'ont pas de revenus annuels, des voitures pour des gens qui sont au revenu garanti. Et tous ces croisements de fichiers permettraient de découvrir, malheureusement, les petits citoyens qui abusent du système sachant que le système ne se parle pas entre fichiers. Ils sont là, les abuseurs du système. On vient toujours protéger l'intérêt du citoyen; au fond, on protège l'intérêt des abuseurs, et les citoyens qui respectent, eux, paient des impôts pour ces abuseurs-là. Tout le concept est là. C'est une décision politique, évidemment, à prendre, mais on a fait la preuve que ça fonctionne. C'est ce qui nous a permis de vous préparer le chapitre sur le ministère du Revenu cette année; on est allé voir, nous. Je voulais vous signaler que c'est faisable et que ça donne du résultat.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Breton. M. le député de Nelligan.
M. Williams: J'ai suivi l'intervention du Vérificateur général et l'excellente réponse du sous-ministre et j'ai apprécié. Je n'ai pas trouvé ça long, j'étais complètement à l'aise à continuer de vous écouter, parce qu'on cherche les solutions ensemble. Je voudrais retourner un peu sur les suggestions concrètes.
Dans la section 20.3 du rapport du Vérificateur général, le Vérificateur général a parlé de... Vous n'avez pas l'accès à toutes les informations dans les autres ministères comme la Régie de l'assurance-maladie du Québec, comme la régie de la construction, toutes les questions de la Société de l'assurance automobile du Québec et aussi l'aide sociale. Je voudrait savoir, M. le sous-ministre, est-ce que c'est juste la question d'une loi qui cause le problème? Est-ce que c'est une question de confidentialité pure et simple de nos lois? Est-ce que c'est plus une question de culture, que les ministères ne sont pas habitués d'échanger de l'information? En arrière de ma question, il y a: Qu'est-ce que ça va prendre pour corriger cette situation? Il me semble que le gouvernement a le droit d'assurer que la main gauche sache ce qui se passe avec la main droite. Et je voudrais juste savoir... peut-être que tout le reste des membres ici savent déjà la réponse, mais je voudrais savoir c'est quoi, les barrières. Est-ce qu'elles sont 100 % légales ou est-ce que c'est aussi administratif, et comment on peut corriger ça?
M. Paré (Pierre-André): Bon. Je vais vous donner un bout de réponse, là, même s'il y a un petit bout qui ne regarde pas nécessairement le sous-ministre du Revenu. Avant qu'existe la loi sur la confidentialité de la Commission d'accès à l'information, il n'y avait pas de filet ou il n'y avait pas de difficulté à s'échanger de l'information parce qu'aucune loi n'empêchait que des échanges d'information se passent. Et la philosophie de la loi, lorsqu'elle a été commencée ou qu'elle a été préparée, avant qu'elle soit votée, c'était de protéger les renseignements individuels, pour les gens qui ont des fichiers, à l'intérieur du gouvernement. Mais, chemin faisant, c'est devenu une loi pour protéger les renseignements des individus à l'intérieur des organismes et de chacun des ministères, un par un. Or, c'est allé un peu plus loin que c'était prévu d'aller initialement, lorsque la loi a été préparée.
(15 h 50)
Aujourd'hui, la Commission d'accès à l'information, avec, probablement, raison, croit qu'elle doit faire respecter la confidentialité des renseignements qui sont possédés par chaque ministère ou par chaque organisme. Et, de ce fait, elle dit: Vous n'avez pas le droit de fournir des renseignements que vous possédez à qui que ce soit sans venir voir chez nous la raison pour laquelle vous devez fournir ces renseignements. Et nous, lorsqu'on va rencontrer la Commission, on doit faire la preuve qu'on a besoin de ces renseignements-là pour cotiser, même si notre article 71 nous permet de l'avoir sans leur permission. Les autres, qui sont à l'autre bout, eux, disent: On est soumis à la Commission d'accès et on est soumis à votre loi, et on ne sait pas laquelle des deux prime sur l'autre. Et, comme ils ne veulent pas prendre de chance et, comme, au niveau juridique, c'est un peu divisé, les idées... Parce qu'il y a le jugement de 1990, là, sur un cas où la Commission d'accès a gagné et qui n'est pas nécessairement relié à ce qu'on a, mais que les gens invoquent de temps en temps, et il y a les opinions juridiques qui disent que notre article prime sur les autres. Or, d'après moi, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas une indication claire, que ce soit une indication du niveau politique ou que ce soit une indication du niveau juridique, qui dit: La Loi sur le ministère du Revenu prime sur les autres lois et, en vertu de cette loi, vous êtes obligé, lorsqu'on vous le demande...
Actuellement, le raisonnement qui a été pris, c'est le suivant. La Commission d'accès n'a jamais refusé qu'on signe une entente avec une autre organisation, à la condition qu'on aille cas par cas. Donc, ça veut dire qu'il faut qu'on commence par détecter dans nos fichiers des raisons qui nous permettraient d'aller demander des renseignements additionnels, alors que, nous, ce dont on a besoin, c'est les renseignements d'ailleurs pour savoir si on peut déclencher quelque chose. Alors, on est un peu comme des gens qui tournent en rond puis qui courent après leur queue. Et ça, là, ça nous empêche de fonctionner. Et si on consacre le principe qu'on va faire ça, ça veut dire qu'on s'organise dans un «merry-go-round» dont on ne sortira pas, parce qu'on ne pourra jamais obtenir de façon systématique l'ensemble des fichiers, parce qu'il se trouve à y avoir comme une jurisprudence qui se consacre, à savoir que la Commission d'accès à l'information donne la permission, à condition que vous la demandiez, ou pas. On pourrait toujours travailler de façon un petit peu sournoise, en disant: Voici la liste des cas, prendre notre fichier, les 4 500 000 contribuables, puis l'envoyer partout, puis dire: Donnez-nous tout ça. Mais là ils diraient: C'est un peu étiré.
M. Williams: Mais, comme exemple, dans le cas de la construction, est-ce que la loi empêche un inspecteur de la Commission de la construction de parler avec un inspecteur du ministère du Revenu? Est-ce qu'elle empêche...
M. Paré (Pierre-André): On pensait que non...
M. Williams: On pensait que non.
M. Paré (Pierre-André): ...et, là, on a commencé à échanger de l'information avec la Commission de la construction, avec les régies, avec la régie de la construction également, un peu tout ça, et tout d'un coup est apparu encore le spectre de cette loi-là, pour d'autres raisons. Je pense que c'est un débat qu'il va falloir vider d'une façon quelconque, à un niveau quelconque. Et nous, on n'a pas, chez nous, de difficulté. On envoie des lettres... On a réussi à régler au ministère des Finances, entre nous.
M. Williams: Et on ne peut pas parler ensemble?
M. Paré (Pierre-André): Cas par cas, il n'y a pas de problème.
M. Williams: O.K.
M. Paré (Pierre-André): Cas par cas, il n'y a pas de problème.
M. Williams: C'est le même problème qu'avant.
M. Paré (Pierre-André): C'est les fichiers. Ce qui est intéressant, c'est d'obtenir le fichier complet de la Société de l'assurance automobile, tout le lire au complet puis dire: Sortons-nous toutes les Mercedes en tout cas, je ne veux faire d'annonce pour personne toutes les autos qui sont au-dessus de 45 000 $ ou 50 000 $. Sortir tout ça, à qui elles appartiennent, puis aller voir qu'est-ce qu'ils ont déclaré comme impôt. C'est ça qui est intéressant. Ce n'est pas prendre notre ficher, chez nous, puis, tout le monde qui n'a pas déclaré un revenu imposable plus haut que 15 000 $, dire: Est-ce qu'ils peuvent avoir une Mercedes? Ça, c'est presque impossible à trouver. C'est comme un...
Une voix: On n'a qu'à lire les journaux de la fin de semaine.
M. Paré (Pierre-André): Ha, ha, ha!
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Rousseau.
Perception de la taxe de vente
M. Brien: Merci, M. le Président. Je suis obligé de revenir un petit peu en arrière, question de... Tantôt, M. le sous-ministre, vous parliez, en tout cas, vous avez en quelque sorte brossé un tableau de la situation du contribuable québécois, dans le sens où on sentait certaines anomalies ou certains faits qui nous étaient révélés. Moi, je peux vous dire que, comme députés, ce qu'on voit souvent aussi dans nos bureaux de comté, c'est bien sûr qu'on voit une partie de la misère humaine, puis je me dis qu'il y a des choses qui ne sont pas acceptables mais qui demeurent compréhensibles. Je vais vous donner un plus bel exemple. Je ne sais pas, moi, le père de famille qui est sur l'aide sociale, et pour essayer, finalement, d'arrondir un peu les fins de mois, va faire des ménages. D'un point de vue strictement revenus, tous ses revenus devraient être déclarés et puis l'aide sociale devrait être avisée des revenus qu'il va chercher ailleurs. Par contre, quand on parle d'un point de vue plus humain, est-ce qu'on peut lui reprocher, par exemple, de vouloir mettre de la viande un peu plus souvent sur la table?
Tout ça pour vous dire que c'est difficile de tracer une ligne très droite, très profonde, où tout doit être déclaré. C'est sûr qu'idéalement il ne devrait pas en exister, du marché noir, mais, encore là, j'ai vu des gens, par exemple, qui posaient du gyproc au salaire minimum. Ils n'avaient pas leur carte, ils n'avaient pas le droit, mais si je parle humainement parlant, c'est des gens qui essayaient de se débrouiller avec ce qu'ils avaient, vous savez. Ça ne veut pas dire que c'est acceptable, mais, quand on voit que des recteurs d'université gagnent 190 000 $ plus 40 000 $ de compte de dépenses, moi, je comprends le particulier, le monsieur ou la Mme Tout-le-Monde, qui dit: Bien, si lui gagne ça, bien, moi, même si je sauve 30 $ là puis que je réussis à aller chercher 100 $ là, bien, même si ce n'est pas déclaré, bien, tu sais, lui, il fait bien ça, bien, moi, j'ai peut-être le droit. Vous le savez, il y a une question d'équité quelque part dans la société qui fait que, bon, bien, il y en a des mieux nantis, il y en a des moins bien nantis. Puis il y a une chose qui est sûre, c'est que, si on veut être équitable, il faut essayer d'aller chercher, sur une base égale, les sommes, ce que le système d'impôt essaie de faire.
Tout ça pour dire que, moi, ce que j'aimerais, puis je ne sais pas jusqu'à quel point vos énergies sont concentrées là-dessus... Un exemple. Pour moi, le commerce de détail devrait être examiné de plus près. Je ne sais pas combien de gens, chez vous, travaillent à la taxe de vente du Québec, mais je reste toujours surpris, comme consommateur... Un exemple: dans certains dépanneurs ou dans certains magasins, il faut presque se chicaner pour obtenir un coupon de caisse. Est-ce que, effectivement, ces établissements-là paient leur taxe de vente? J'en doute fort. Je me demande si le ministère du Revenu, avec ses effectifs, peut aller chercher davantage sur la taxe de vente du Québec. Moi, j'ai la drôle d'impression qu'il y a beaucoup de taxes qui échappent au fisc, à ce moment-là. Je sais que, autrement dit, la police et tout ce qui est timbres, par exemple, sur les alcools, je souhaite que ce soit amélioré, mais du côté taxe de vente, surtout avec l'avènement, vous le savez comme moi, des fameux marchés aux puces, bon, où il y a des gens qui ont des stands pendant quelques semaines, pendant quelques mois, puis ils disparaissent... Bon, il y a quand même des millions, sinon des milliards qui partent, où il n'y a pas de taxes de perçues sur ces choses-là.
Ça fait que c'est ça. Je vous ai écouté. J'aimerais connaître, M. le sous-ministre, vos effectifs en matière de perception de taxe de vente et puis de quelle façon, systématique ou non, on procède pour la taxe de vente au Québec. Un dernier exemple. Un restaurant Untel, je ne sais pas, moi, sur la rue Duluth, à Montréal, est-ce que ce restaurant-là est visité de façon régulière? Est-ce qu'on essaie de savoir si, à partir de 22 heures, le soir, bon, bien, là, tout ce qui entre dans la caisse, il n'y a pas de taxes qui sont versées au gouvernement? Est-ce qu'il y a des façons précises, puis je dirais, là... ce n'est pas le mot «rigides», là, mais avec le maximum de minutie pour aller chercher des sommes comme ça?
(16 heures)
M. Paré (Pierre-André): Bien, M. le Président, je commencerai un peu ma réponse, et probablement que je demanderai au sous-ministre à la vérification de compléter avec les différentes vérifications qu'on peut faire dans ce domaine-là. Comment ça fonctionne au niveau global? C'est évident que, quand quelqu'un veut partir un commerce ou faire de la vente au détail, il est obligé de nous demander des permis. Et là il y a une direction générale, qui s'appelle la Direction générale des mandataires, qui émet ces permis-là. Et aussitôt que le permis est émis, on lui envoie de façon régulière ce qu'il faut pour qu'il fasse ses remises de taxes de façon mensuelle ou bimensuelle, dépendamment de la hauteur de son chiffre d'affaires. En partant, il y en a une série qui est exemptée. Ceux qui sont en bas de 30 000 $ de chiffre d'affaires, ils n'ont pas besoin de s'inscrire, ou ils ne sont pas soumis. Déjà là, un premier point avait été soulevé par le Vérificateur général, en disant: Ceux qui sont en bas de 30 000 $, l'année suivante, ils seront peut-être en haut de 30 000 $, ceux qui étaient en haut de 30 000 $ qui sont tombés en bas de 30 000 $... C'est vrai qu'on ne fait pas un travail extraordinaire, c'est-à-dire qu'on examine, mais sur des bases ou des cas ad hoc, ces cas-là. On a formé une petite équipe dans une autre direction, qui n'est pas la Direction de la vérification, pour pouvoir faire des couplages de fichiers à l'intérieur du ministère. Parce que, même si on chiale qu'on n'a pas ceux de l'extérieur, on a au moins les nôtres, chez nous. Ceux-là, on a commencé à travailler sur ces fichiers-là pour faire des comparaisons entre ceux qui font des déclarations, par exemple, de revenus et ceux qui paient des taxes. Je dois dire que ça avance de façon satisfaisante, y compris, également, pour les remboursements sur intrants, où on avait un petit peu de difficulté de ce côté-là.
Quant à la couverture qu'on peut faire des commerces de détail, lorsqu'ils sont en bas de 3 000 000 $ de chiffre d'affaires, notre couverture est très minime sur des vérifications pointues sur place. Elle est à peu près de 1 %, si jamais elle est de 1 %. Ça s'explique de la façon suivante, c'est qu'on a 475 000 mandataires, ou quelque chose comme, à couvrir. Tous ceux qui sont au dessus de 60 000 000 $, M. Croteau corrigera si je me trompe, on les vérifie une fois par trois ans. Donc, ça veut dire que toutes les entreprises qui sont au-dessus de 60 000 000 $, on les fait à tous les trois ans. Donc, on les fait continuellement, on les vérifie toutes à 100 %. Ensuite, quand on arrive dans les strates entre 30 000 000 $ et 60 000 000 $, là on y va à peu près une fois par cinq ans ou une fois par quatre ans. En bas de 30 000 000 $ à aller jusqu'à 3 000 000 $, là on a une couverture qui est au maximum de 10 %. Et en bas de 3 000 000 $, on n'y va pas souvent ou on y va presque pas.
La raison pour laquelle on fait ça, c'est qu'on doit d'abord orienter... Vous me demandez combien il y a de monde qui travaille là-dessus, il y en a à peu près 700 ou 800 qui sont du côté des mandataires qui reçoivent les remises, les demandes et toutes ces choses-là et vous en avez à peu près 500 à 600 qui sont consacrés, du côté de la taxe de vente, à faire ces vérifications-là, ça peut être 700. Ça ne me ferait rien, Bertrand, que vous disiez que vous en avez 700 au lieu de 500. Alors, vous avez à peu près une affaire comme 1 200 personnes pour 474 000 mandataires. Mais, à la fois, aussi, il faut ajouter à ces gens-là des vérifications qu'ils doivent faire quand ils travaillent comme des employeurs. Il y a 275 000 employeurs. Quand on fait une vérification, puis qu'on veut intégrer à la fois la vérification sur la taxe de vente, sur la TPS, repasser l'impôt, regarder le carburant, regarder le tabac, c'est des vérifications qui sont plus longues à faire. Le risque de perdre beaucoup d'argent existe plus dans les entreprises avec 30 000 000 $ et plus de chiffre d'affaires ou entre 3 000 000 $ et 60 000 000 $ qu'avec les autres. Or, notre couverture est tout simplement plus basse pour ceux qui sont en bas de 3 000 000 $ parce que le risque de perdre de l'argent, même si on sait qu'on en perd, est moins grand et le montant qu'on perd est moins grand. En fait, on choisit nos problèmes. On ne les règle pas tous, on les choisit.
M. Brien: Bien, M. le sous-ministre, moi, ce qui me surprend un petit peu, c'est que... Je comprends que vous examiniez davantage, par exemple, les entreprises qui ont entre 30 000 000 $ et 60 000 000 $ de chiffre d'affaires ou 60 000 000 $ et plus, mais qui vous dit que l'argent à percevoir ne se trouve pas plus bas dans la pyramide? Parce que moi, à l'inverse... Quand on parle de finances publiques au gouvernement du Québec, on dit, par exemple: Si vous augmentez ce qu'on appelle la déduction de base de tant, mettons de 200 $, ça représente des centaines de millions. Ce que je veux dire par là, c'est: Est-ce que le commerce plus petit n'est pas, justement, l'endroit où on fraude le plus?
M. Paré (Pierre-André): Ça se peut, mais le commerce plus petit est aussi obligé de nous faire un rapport d'impôt particulier. Alors, on a une deuxième source d'information qui nous permet d'aller en chercher aussi, de l'information, et de faire un impôt sur le revenu. De cette façon-là, on en vérifie encore une partie. Je ne vous dis pas qu'à 16 heures il n'y a pas un certain nombre de commerces qui ne ferment pas leur «cash», qui le rouvrent puis qui ne mettent pas la date du lendemain seulement à 21 heures; il faudrait être un peu bête pour penser que ça ne se fait pas, je l'ai vu faire moi-même. Mais le montant qui est perdu n'est pas, somme toute... Si on a à choisir pour utiliser notre personnel, on va choisir les endroits où les ventes sont le plus élevées, où on n'a pas de rapport d'impôts individuel. Quand on est en bas de 3 000 000 $, on risque d'avoir un rapport d'impôts pour un individu qui va couvrir une bonne partie du commerce. Au-dessus de 3 000 000 $, on a une chance que ce soit un rapport d'impôts d'une société ou d'une corporation, puis là il y a des individus qui vont recevoir des montants. Alors, c'est pour ça qu'on travaille de cette façon-là. Mais c'est sûr qu'on en échappe.
M. Brien: Mais, M. le sous-ministre, puis je ne veux pas être mesquin dans mon approche, est-ce que ça veut dire que pour bon nombre d'entreprises, de petites entreprises, la chance de voir quelqu'un du Revenu chez eux, c'est à peu près inexistant?
M. Paré (Pierre-André): Non. La chance de voir quelqu'un chez eux, à partir de cette année, va augmenter peut-être de 60 % à 70 %. Lorsque les gens vont arriver chez nous, de l'extérieur, et qu'ils vont avoir, mettons, un petit peu moins de formation parce qu'ils vont être moins habitués à ce qui se fait au ministère du Revenu, parce que ça va être des gens qui ont été mis en disponibilité ou qui viennent d'ailleurs, les premiers travaux qu'on va leur demander de faire, ça va être des travaux de démarchage à partir de l'annuaire téléphonique ou à partir d'aller voir dans des entreprises ou aller voir dans des bars s'ils utilisent de la bière puis qu'elle est marquée. C'est des genres de vérification qui ne demandent pas une formation épouvantable, mais qui donnent de quoi. Alors, c'est pour ça que je vous dis qu'on va avoir un taux de couverture qui va être plus grand. Je ne peux pas vous affirmer aujourd'hui que le taux de couverture, dans ce monde-là, va drastiquement monter à 30 % comme il l'est dans les cas de 60 000 000 $, mais on va l'augmenter, sûrement.
M. Brien: C'est-à-dire que vous entendez augmenter les effectifs quant au contrôle de la taxe de vente, par exemple, ou autres vérifications, là, dans les commerces de détail?
M. Paré (Pierre-André): Oui.
M. Brien: Vous voulez les augmenter de combien?
M. Paré (Pierre-André): En tout cas, les discussions qu'on a actuellement font que ça serait à peu près comme jusqu'à 500 personnes qu'on pourrait accueillir, qui vont être mises en disponibilité et qui viendraient travailler chez nous.
M. Brien: Supplémentaires?
M. Paré (Pierre-André): Supplémentaires.
M. Brien: O.K. Est-ce que, selon vous... À ce moment-là, on parlerait jusqu'à 1 700 personnes dans la grandeur du Québec?
M. Paré (Pierre-André): À ce moment-là, on ajoute 500 personnes à ce que je vous ai dit tantôt, là.
M. Brien: Est-ce que, selon vous, c'est des effectifs suffisants pour aller chercher des sommes qui nous sont dues?
M. Paré (Pierre-André): Bien, je pense qu'à 1 700, là, on peut couvrir, surtout si on réussit à croiser les fichiers facilement par après puis qu'on fait un petit peu de travail à l'interne, là, on va en avoir couvert une bonne partie.
M. Brien: Ça devient une force de dissuasion suffisamment importante.
M. Paré (Pierre-André): Ça devient suffisamment important. Voyez-vous, ce qui arrivait avant, c'est qu'on envoyait un vérificateur dans un endroit, une petite paroisse. Là, tout le monde savait que quelqu'un de l'impôt était là.
M. Brien: Les nouvelles vont vite.
M. Paré (Pierre-André): En dedans d'une semaine, deux semaines ou un mois, on commençait à recevoir les remboursements de cette municipalité-là, il y avait comme une correction immédiate. Aujourd'hui, à cause du comportement individuel des gens, ils disent: Ça, c'est Jos; moi, je m'appelle Marcel, ils viendront me poigner! Donc, on n'a plus le même effet dissuasif qu'on avait lorsqu'on allait dans un endroit, tout seul. Avant ça, on entrait dans un endroit ou dans une rue ou dans une ville, une plus petite ville, prenons n'importe quelle ville en bas de 15 000 habitants ou 25 000 habitants, ça se savait tout de suite que les gens de l'impôt... Ils disaient: Les gars de l'impôt sont arrivés. Puis, automatiquement, comme par magie, il arrivait des cas.
C'est pour ça qu'on a modifié et qu'on va avoir... C'est pour ça que je vous dis... Je suis content de votre question, parce qu'on va sûrement avoir un effet qui va être encore plus grand cette année parce qu'on est en train d'organiser notre service en région. Il était créé, il existait en partie, mais là on est en train de l'organiser pour qu'il y ait plus d'effectifs qui s'occupent de vérification en région.
On s'est aperçu que, en travaillant en région et en travaillant de concert, aussi, avec les vérificateurs du gouvernement fédéral, ça nous a permis d'aller chercher beaucoup, beaucoup d'endroits, parce que les gens se connaissent puis ils savent exactement où ça se passe. On peut cibler facilement nos vérifications lorsqu'on est en région. Quand on est ici, assis à Québec, ou qu'on est assis à Montréal, il peut se passer n'importe quoi dans le reste de la province et on ne le sait pas trop, trop. Et, à ce moment-là, en les ayant, les personnes, en région, on peut facilement cibler et connaître les endroits où les «cashs» se ferment à 16 heures au lieu de se fermer à 18 heures ou de se fermer au commerce ou quoi que ce soit. Quand on sait, par exemple, qu'il y a un inspecteur d'impôt qui vient se chercher un paquet de cigarettes à tous les jours, à 17 heures, on ne sait pas s'il va s'en chercher un pour lui ou pour nous vérifier, on fait un peu plus attention. Alors que, aujourd'hui, on n'a pas ce genre de situation là, c'est ça qu'on est en train de mettre en place avec les régions, avec les groupes qui vont être en disponibilité qui vont venir travailler chez nous.
M. Brien: Ça «veut-u» dire, ça, M. le sous-ministre, que, d'ici, je ne sais pas, moi, un an, un an et demi, on verrait une nette amélioration de la perception de taxes de vente et de revenus supplémentaires?
M. Paré (Pierre-André): On est en train de préparer un projet pour déposer auprès de notre ministre pour avoir des revenus supplémentaires l'an prochain. Ce que je peux vous dire, c'est qu'il va y avoir des revenus supplémentaires.
(16 h 10)
M. Brien: O.K. Merci beaucoup. Moi, ça répond à ma question.
M. Paré (Pierre-André): Le chiffre restera... Je pense que je vais laisser quand même quelques annonces à notre ministre, si vous me permettez.
M. Brien: Merci.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui. M. le député de Bellechasse.
M. Lachance: Merci, M. le Président. Moi, je voudrais renchérir sur ce qui vient d'être dit à partir d'une conversation que j'ai eue il y a quelque temps avec un comptable de mes amis. Dans l'état actuel des finances publiques, je lui demandais s'il pouvait m'identifier, dans sa pratique, des façons pour le gouvernement du Québec ou bien de couper dans ses dépenses ou bien de percevoir ses revenus. Et ce comptable m'a dit, à la lumière de l'expérience quotidienne qu'il vit: Écoute, ce n'est pas compliqué, une très grande majorité des commerces qui perçoivent la TVQ ou ne la perçoivent pas, il y a quelque chose là à aller chercher. Pour lui, ça rentre dans la catégorie des moins de 3 000 000 $, 75 %, 80 % auraient quelque chose à se reprocher. C'est assez sérieux comme chiffres. C'est certain que ça n'arriverait pas, individuellement, à coups de centaines de milliers de dollars, mais, si on additionne tout ça, comme phénomène, moi, j'ai l'impression que, comme le disait le député de Rousseau, des gouttes d'eau qui finissent par devenir une rivière ou un fleuve.
Alors, il y a quelque chose là aussi, en ce sens qu'il y a une compétition déloyale qui s'exerce. Parce que, souvent, le commerçant, il est mal à l'aise avec ça. Il se dit: Si je me fais prendre, je vais être cuit. Il le sait. Son comptable, d'ailleurs, lui dit: Écoute, mon bonhomme, ça ne balance pas, ton affaire, ça ne marche pas. Si tu te fais pincer, je t'avertis que tu vas avoir des ennuis. Il dit: Je t'aurai prévenu. Alors, lui, comme comptable, bon, il avait fait sa job, il l'a dit au commerçant. Le commerçant, lui, il est mal à l'aise, mais il dit: Moi, si je ne le fais pas, mon voisin le fait et le client va aller chez le voisin. Et c'est souvent des commerces ou des entreprises où il y a la TVQ sur le temps. Avant l'arrivée de la taxe sur les services, cet aspect-là était moins fort que depuis l'arrivée de la TVQ ou de la TPS, où on calcule aussi le pourcentage sur le temps. Ça, c'est la première remarque que je ferais.
Une deuxième remarque que mon ami comptable m'a faite et j'aimerais ça, en tout cas, que vous me donniez votre perception de ceci là, ça s'adresse aux grosses entreprises. Il y en a quelques-unes... Ce qu'il me disait, c'est qu'il y a des grosses entreprises qui ont les moyens de se payer des firmes style Price Waterhouse. Et, quand ça aboutit chez vous, au ministère, ils sentent qu'il y a peut-être, dans vos services, des gens qui sont un peu obnubilés par la signature en bas et qui n'osent pas trop, trop... Quand ils voient ça, ils n'osent pas trop, trop, même si c'est douteux, ils laissent passer parce que c'est des gros noms. Alors, la question que, moi, je me pose, c'est: Est-ce que vous avez suffisamment de personnel capable de discuter ou de faire face aux spécialistes de grosses firmes comptables comme ça pour, justement, ne pas laisser passer les gros poissons alors qu'on attrape les petits?
M. Paré (Pierre-André): Je vous remercie de votre question. M. le Président, cette question, c'est une bonne question parce que, lorsqu'on rencontre les... Je vais commencer par la deuxième partie de votre exposé où vous nous parlez des grandes firmes comptables, peu importe le nom. Elles nous rencontrent ou on les rencontre à travers différents forums, que ce soit sur la fiscalité, avec l'association des planificateurs fiscalistes ou encore avec l'association des planificateurs fiscalistes dans des entreprises, la TEI qu'ils appellent. On les rencontre et ils nous disent que le ministère n'est pas parlable. Ha, ha, ha! Et, même, ils s'en vont nous dénoncer à la télévision. C'est un de nos problèmes, ces gens-là qui vont dénoncer le ministère en disant qu'il n'est pas flexible, qu'ils ne sont pas capables de parler avec nos vérificateurs, qu'ils ne sont pas capables de régler ou quoi que ce soit.
Alors, c'est un petit peu l'inverse de ce que vous nous mentionnez. Quand on nous rencontre, on nous dit que, avec d'autres gouvernements ou d'autres paliers de gouvernement, c'est beaucoup plus simple de se comprendre, qu'ils sont beaucoup moins rigoureux, que c'est beaucoup plus facile de «dealer» ou d'organiser ou de finir. Je ne veux pas dire qu'ailleurs ils font mal leur travail, ils ont des lois qui sont des fois différentes ou des pratiques qui sont différentes. Mais le grand reproche qu'on nous fait, lorsqu'on parle avec les grandes firmes, c'est toujours qu'on n'a pas de flexibilité. Par contre, on les a tous vus, d'une certaine façon, on les a consultés. Sur un échantillonnage très grand, ils nous ont tous dit que la compétence des gens chez nous était très grande pour pouvoir discuter avec eux, même s'ils ne s'entendaient pas avec nous. Alors là, je peux vous rassurer, du côté des grandes entreprises, ce n'est pas parce qu'elles ont un nom qu'on arrête de parler, qu'on ne s'entend pas avec elles beaucoup plus souvent qu'avec d'autres.
En ce qui concerne les entreprises de plus petite catégorie qui ne remettraient pas la taxe de TVQ, et surtout dans le cas des services, c'est un peu ce que je mentionnais tantôt dans ma réponse, c'est un peu difficile de s'assurer qu'on va aller toute la chercher à moins de travailler beaucoup plus fort. Mais, ce que je donnais tantôt comme information concernant les individus, peut-être que le sous-ministre à la vérification, M. Croteau, pourrait compléter cette partie-là peut-être en parlant des nouveaux programmes, les taxes de vente, etc.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Croteau.
M. Croteau (Bertrand): Bertrand Croteau, directeur à la vérification. Je pense qu'il faut voir le processus, et on va parler rigoureusement de taxe de vente, là. On a un certain nombre d'effectifs qui travaillent à ça, des équipes auxquelles on a ajouté des effectifs dans la dernière année. La façon de procéder. Il faut voir que la taxe de vente, quand on parle de TVQ, et maintenant on fait et TVQ et TPS au même moment, c'est relativement une nouvelle taxe qui a été initiée en 1992 et qui a changé la TVQ en 1993. Alors, on travaille avec des données historiques. Quand on vient dans une entreprise, on vient puis on fait une vérification rétroactive sur trois ans ou quatre. Alors, on commence à avoir des données suffisantes pour être capable d'identifier quels sont les gens qui ont des comportements un peu plus aberrants. Donc, on a déjà des grands fichiers, et nos fichiers historiques nous donnent des cibles. Ces cibles-là sont les entreprises vers lesquelles on va, dans les plus petites aussi. On couvre toute la gamme des entreprises. Alors, on essaie d'avoir un équilibre. Avec la force de frappe que l'on a, on essaie de couvrir les entreprises qui sont le plus à risque, mais on assortit ça aussi de la démarche de sensibilisation, c'est-à-dire d'identifier et d'intervenir dans chacun des milieux.
Alors, notre programmation se fait sur cette base-là. De façon générale, comme je vous disais, on a eu des comportements dans les deux dernières années. La dernière année, avec le plan de récupération, on a ajouté 240 effectifs à la vérification, dont environ les trois quarts, 180, doivent travailler en taxe. On a des rendements, dans l'année 1995-1996, où, après huit mois, on avait fait l'équivalent des deux années précédentes. Donc, il y a une intensification assez importante. On est à 200 000 000 $ maintenant, en huit mois, ce qu'on faisait dans une année dans les années passées. Alors, on commence à voir des résultats de l'ajout des effectifs l'année passée et, si on a des effectifs additionnels à y mettre, on sait qu'il y a encore de la place. Mais notre façon de procéder est généralisée comme ça et on cible les endroits. Et on commence à avoir de plus en plus de données pour frapper les plus délinquants, si ça ajoute...
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de l'Acadie.
État des comptes à recevoir (suite)
M. Bordeleau (Acadie): Merci, M. le Président. Je voudrais revenir peut-être sur le sujet des comptes à recevoir. Si on regarde dans le plan d'action du Centre, on voit la progression, depuis 1990, des comptes à recevoir et, aussi, des provisions pour créances douteuses. Je me souviens que, quand le gouvernement libéral était au pouvoir, on entendait souvent l'opposition nous dire que, au fond, le gouvernement devait prendre les moyens de faire payer, au fond, ce qui est dû et de ne pas laisser augmenter les comptes à recevoir comme c'est le cas. Alors, ça, on l'a entendu au moment de l'opposition, on l'a entendu de la part du ministre des Finances, le député de Crémazie à ce moment-là, qui, au début du mandat, a dit: Bien, nous, on va s'organiser, les gens qui doivent payer vont payer.
(16 h 20)
Alors, quand on regarde concrètement le graphique de la page 6 de votre plan d'action du Centre de perception fiscale, on s'aperçoit, si je lis bien, que, de fait, l'accroissement des comptes à recevoir continue avec la même tendance que, malheureusement, on avait pu observer dans les années précédentes. Alors, il n'y a pas eu grand amélioration de ce côté-là, en dépit du discours qu'on a entendu à maintes reprises, que l'autre façon de gouverner, ce serait d'aller chercher l'argent qui est dû au gouvernement. Alors, les comptes à recevoir continuent d'augmenter et les provisions pour créances douteuses de la même façon. Alors, on est rendu, actuellement, dans votre graphique, au 31 mars 1995, à 1 900 000 000 $, et vous nous disiez que, au 31 janvier 1996, on était rendu à 2 200 000 000 $. Alors, je pense que, entre le discours et les gestes que le gouvernement a pu poser pour régler ce problème-là, rien ne s'est réglé.
Alors, je voulais tout simplement signaler ce point-là, parce qu'on en a entendu parler souvent. Ça semblait être la solution. La solution pour équilibrer les finances publiques, comme on nous le disait à maintes reprises, ce n'était évidemment pas d'augmenter les taxes, mais c'était de faire payer ceux qui devaient payer. Alors, je note, là, M. le Président, que, malgré ces voeux pieux, on n'a rien réglé concrètement au niveau des comptes à recevoir. Au contraire, ça continue à augmenter et c'est rendu à un niveau, aussi, qui est très inquiétant. Voyez-vous, on est passé, de fin 1995, là, au cours de la dernière année, fin 1995 au 1er janvier, de 1 900 000 000 $ à 2 200 000 000 $, et vous nous dites que, si la tendance continuait, on se retrouverait, en mars 1997, si j'ai bien compris, à 3 000 000 000 $. Alors, j'aimerais que vous nous disiez, là... Il y a des moyens qui ont été mis en place et, malgré ça, on observe quand même cet accroissement-là. Est-ce qu'il y a des solutions que vous entrevoyez, là, pour freiner le problème? Parce que c'est un problème qui prend de l'ampleur d'une façon importante.
Vous nous avez aussi mentionné tout à l'heure et je vous pose cette deuxième question-là, vous pourrez réagir aux deux qu'un des objectifs que vous aviez, c'était de récupérer 650 000 000 $ au cours de l'année, et vous dites que vous allez probablement l'atteindre. Ça se compare comment, ça, à ce qui était récupéré, par exemple, dans l'année précédente, avant que, au fond, l'unité de gestion, là, existe comme telle? Bon, il s'est fait de la récupération. Alors, ça a été quoi, l'ampleur de la récupération qui s'est faite au cours de la dernière année versus, qu'on pourra comparer, là, aux 650 000 000 $ que vous prévoyez atteindre cette année?
M. Paré (Pierre-André): Avant de donner la parole à M. Cayer, M. le Président, il y a deux volets à la question du député de l'Acadie. Il y en a une qui concerne l'ensemble des revenus, que l'ex-député de Crémazie mentionnait. Alors, en ce qui concerne les revenus globaux de la province et la façon d'y arriver ou de mieux percevoir ces revenus-là, on en a discuté une bonne partie avec quelques députés des autres circonscriptions, je ne veux pas y revenir, M. le député de l'Acadie, sauf que ces réponses-là, bien, peuvent répondre au moins à la première partie, là, en ce qui concerne l'ensemble des revenus et des actions qu'on peut prendre.
En ce qui concerne les comptes à recevoir, je demanderais à M. Cayer, le directeur de l'unité autonome, peut-être de donner des réponses, et sur le 650 000 000 $ aussi.
M. Cayer (Gabriel): O.K. Le document auquel vous faites allusion, là, le plan d'action Gabriel Cayer, oui précise effectivement les symptômes, le problème, les causes et amorce les solutions de la majoration annuelle des comptes à recevoir. Le ministère, depuis une couple d'années, dans un contexte global, travaille à créer davantage de revenus. Ce faisant, évidemment, il contribue à augmenter lui-même les comptes à recevoir, les soldes impayés. Donc, ça explique, là. Il y a d'autres raisons, qui sont aussi énumérées dans le document, qui font état des causes, mais ça, c'en est vraiment un où il travaille sur deux plans.
Une voix: Explique-lui pourquoi.
M. Cayer (Gabriel): Parce que c'est un peu la différence entre les revenus et les recettes. Il crée des revenus. Comme cette année, si on prend l'exemple de cette année, on va percevoir 650 000 000 $, et il va en entrer au Centre 950 000 000 $ passé, 975 000 000 $. Donc, c'est l'augmentation de 250 000 000 $ à 300 000 000 $. Il en rentre plus qu'il en sort.
Il y a un problème, on l'a énoncé, on a donné les causes, on l'a mis sur la table, et on dit: On pense qu'on a une solution. C'est ce qu'on a tenté de vendre aux Finances. C'est ce qu'on pense avoir réussi, parce que, la semaine dernière, on a eu une confirmation qu'on aurait les moyens, notamment financiers, pour arriver à percevoir tous nos comptes et les ramener à ce qu'on disait ce matin, à un niveau qu'on qualifie d'acceptable, autour de 1 500 000 000 $, et ce, là, sans faire de programme accéléré de radiations qui nous ramènerait, là, dans une fausse piste. Mais c'est ça, on a... Dans nos solutions, ce n'est pas strictement des solutions d'ajout de personnel, c'est des développements de systèmes qu'on va entreprendre dès le 1er avril pour être en mesure de ramener les comptes à recevoir à un niveau acceptable.
M. Bordeleau (Acadie): Qui est de 1 500 000 000 $, un peu ce qui était la norme, ce que vous avez mentionné ce matin, je crois.
M. Cayer (Gabriel): Exact. Pour le 650 000 000 $, l'année précédente, c'était 550 000 000 $, à peu près avec les mêmes effectifs. Il y a eu une différence. Le 100 000 000 $ s'explique par un 62 400 000 $ de gain de productivité. Par exemple, on a rapproché la perception des créances de la TPS avec celle du ministère, on a exercé davantage de compensations sur les créances fiscales à même les fournisseurs des personnes morales, par exemple, les gens à qui le gouvernement doit de l'argent et qui sont redevables au fisc. Alors, on se paie pour les personnes morales. Alors, on a différentes mesures, qui sont énoncées aussi dans le document, qui contribuent à améliorer la productivité et à augmenter les recettes. Donc, c'est les résultats de cette année. Si on a, comme on le pense... Bien, on l'a. Le fonds, si on le met en place, on pense faire davantage. Et le premier objectif qu'on a... Évidemment que la solution n'est pas sur un an pour ramener les comptes à un niveau acceptable, c'est sur cinq ans. Si on a ça, on atteindra à un moment donné, d'ici une couple d'années, au moins à percevoir autant qu'on en reçoit. Donc, après ça, c'est la descente vers un objectif de le ramener à un seuil acceptable.
Mesures à l'égard des contrevenants récidivistes
M. Bordeleau (Acadie): O.K. J'aimerais peut-être... Juste une autre question sur... Dans le rapport du Vérificateur général, à la page 345 du rapport, on faisait référence au fait que... Je vais vous citer l'extrait. On dit: «Le ministère n'évalue pas non plus ses interventions pour lutter contre l'évasion fiscale en fonction du taux de récidive. Par exemple, il ne sait pas combien de non-déclarants pris en faute produisent volontairement leur déclaration de revenus par la suite. Il peut donc difficilement évaluer ses actions face au problème de la non-production. Il ne dispose pas non plus d'informations lui permettant de vérifier si le comportement de ceux qui ne produisent pas correctement change à la suite de ses interventions de vérification.»
À la suite de ce rapport-là, qui est de 1995, est-ce qu'il y a des moyens qui ont été pris? Parce que ça me semble quand même important de s'assurer que les gens qui ont créé un peu, là, des actes illégaux, de ce côté-là, si on veut, en ne produisant pas leur déclaration ne répètent pas. Je pense à des particuliers, mais je pense aussi à des entreprises. Vous savez, une entreprise qui part, qui doit au gouvernement, qui fait faillite; le gars repart à côté, repart une autre entreprise, refait faillite ou saute d'une place à l'autre comme ça. Est-ce que vous avez des moyens d'identifier ces personnes-là puis de les suivre de plus près, et quels moyens vous avez, à ce moment-là, pour les suivre de plus près, que ce soient des corporations ou des particuliers?
M. Cayer (Gabriel): Est-ce que vous pourriez me redonner la référence, s'il vous plaît?
M. Bordeleau (Acadie): Oui. À la page 345, le paragraphe 20.104.
M. Paré (Pierre-André): «Le ministère n'évalue pas non plus ses interventions pour lutter contre l'évasion fiscale en fonction du taux de récidive. Par exemple, on ne sait pas combien de non-déclarants pris en faute produisent volontairement leur déclaration de revenus par la suite. Il peut donc difficilement évaluer ses actions face au problème de la non-production. Il ne dispose pas non plus d'informations lui permettant de vérifier si le comportement de ceux qui ne produisent pas correctement change à la suite des interventions de vérification.»
(16 h 30)
Cette constatation-là du Vérificateur, elle est exacte jusqu'à un certain point, parce que, lorsqu'on fait un programme spécial de vérification ou lorsqu'on fait une vérification, on n'inscrit pas de façon automatique le produit de notre vérification dans les fichiers, si bien que l'année suivante, lorsqu'on recommence le même programme, on va recibler la même personne parce qu'on a oublié d'aller l'indiquer. Cependant, on est en train de corriger nos systèmes pour être capable d'avoir un fichier sur une longueur longitudinale. Autrement dit, ce qu'on va faire, c'est qu'on a créé un fichier ménage qui contient 10 années. Donc, on va être capable de savoir le comportement, sur 10 années, d'un individu, et là on va arrêter d'aller voir M. ou Mme Unetelle pour lui dire: Vous avez demandé une exemption de personne vivant seule cette année, voulez-vous nous le prouver? alors que l'année précédente, elle nous l'avait prouvé et l'année d'avant aussi. Alors, comme on va avoir 10 ans, on va connaître le comportement fiscal. On est en train de corriger mais, lorsque le Vérificateur a passé chez nous, c'était exact. Cette affirmation-là était correcte. On est en train de le corriger.
M. Bordeleau (Acadie): Est-ce que vous allez aussi mettre en place une approche particulière pour les cas qui récidivent, qui, d'année en année, là... ou des corporations?
M. Paré (Pierre-André): Le fichier qu'on a construit, sur 10 ans, c'est justement pour trouver les comportements déviants et pour faire des portraits de cas déviants ou des cas faciles. Je ne sais pas, moi, si vous prenez votre cas à vous, vous êtes normalement correct. Vous ne devriez pas avoir de cas déviant au cours des 10 dernières années. L'année suivante, ce ne sera pas un cas qu'on va examiner. On va avoir plus que juste une paramétrisation durant l'année.
Actuellement, on fait des paramétrisations qui sont annuelles. On dit: Bon, toutes les personnes qui sont au-dessus de «y» de salaire, toutes les personnes qui réclament tel genre d'exemption, toutes les personnes qui sont membres de l'Assemblée nationale, toutes... Ha, ha, ha! En tout cas, une série de critères. Puis on dit: Ça, ces cas-là, on va les examiner avant de les cotiser. Après ça, on dit: Une autre série de critères, on les cotise, mais on les examinera après dans des programmes spéciaux. Mais, lorsqu'on a obtenu toutes ces réponses-là, on n'écrit pas nécessairement toutes les réponses qu'on a obtenues dans nos fichiers. Si bien que, l'année suivante, on recommence une nouvelle «set» de critères, sans tenir compte de ce qui s'est passé l'année précédente, à cause du phénomène de silo, année par année, pour les individus. Or, ce qu'on a de construit, c'est un fichier global qui va nous permettre, sur 10 ans, de pouvoir faire cet ensemble-là.
Par contre, s'il y a récidive et qu'on constate qu'il y a récidive, il y a une pénalité qui est assez dissuasive. Combien, le pourcentage de récidives? Je ne me souviens plus par coeur, c'est quoi la récidive, mais il y a un pourcentage de pénalité de récidive qui est assez épouvantable. La première fois, on n'est pas trop sévère, mais, la deuxième fois, on est beaucoup moins gentil. Je pense que c'est à 15 %, puis qui se capitalise par année avec des intérêts là-dessus, ou quelque chose comme ça.
M. Bordeleau (Acadie): Ça va, merci.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Nelligan.
Moyens à privilégier pour combattre le travail au noir (suite)
M. Williams: Merci, M. le Président. Je voudrais retourner, M. le sous-ministre, à votre réponse à ma question. Vous avez ciblé trois grandes pièces de stratégie: une, c'est l'éducation populaire, l'autre, c'est les programmes spéciaux et, troisième direction, c'est les mesures coercitives qui touchent les privilèges.
Je voudrais retourner à la deuxième, les programmes spéciaux. Vous avez, je pense, mentionné les hôteliers... pas la constitution, je m'excuse, la construction, c'est un autre débat; et, aussi, les services de garde, comme trois grands projets. Je voudrais savoir, est-ce que maintenant, avant que vous commenciez ces trois programmes spéciaux, vous avez une comptabilité particulière dans ces questions? Est-ce qu'on peut vraiment chiffrer ce qui se passe? Et, si oui, comment vous faites ça?
M. Paré (Pierre-André): Bien, pour commencer, on a... on connaît le problème des secteurs et on sait à peu près à combien peut se chiffrer l'ensemble de l'évasion fiscale de chacun de ces secteurs-là. Une fois qu'on les a, il faut cibler les endroits où ça se trouve. Et, tout à l'heure, le sous-ministre à la vérification a expliqué un petit peu de quelle façon ils faisaient leur choix d'entreprises pour aller faire des vérifications. S'ils sont dans des secteurs ou dans des régions à risques, ils établissent la liste des entreprises qu'ils seraient mieux d'aller vérifier pour s'assurer que cette liste-là va être correcte, et que les vérifications vont se faire, et que ça va être les coins les plus payants.
Dans la construction, on en a un certain nombre de faites et qui ont été ciblées l'année passée. Et peut-être que je demanderais à M. Croteau, là, le sous-ministre à la vérification, de nous indiquer quelques-uns des programmes spéciaux, avec le nombre de vérifications qui ont été faites, par exemple, dans le domaine de la construction ou dans le domaine on avait ces chiffres-là peut-être des vidéopokers ou de l'alcool. On en a un certain nombre qu'on a vérifiées. Et ça nous permet d'aller cibler exactement, dans des endroits précis, ce qui se passe. C'est pour ça que, lorsqu'on fait nos choix, on a une façon d'approcher les corporations, avec un comportement corporatif qu'on a au cours des différentes dernières années, du côté de la vérification des entreprises.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Bertrand Croteau.
M. Croteau (Bertrand): Bertrand Croteau, oui, vérification.
Alors, on voyait que, dans la construction, par exemple, on avait identifié que les risques d'évasion étaient assez importants, c'était de l'ordre de 600 000 000 $, et on a divisé le travail selon les secteurs. La rénovation est un secteur particulier; l'autoconstruction, qu'on appelle, c'est-à-dire des gens qui s'identifient comme particuliers qui construisent une maison, mais qui le font à répétition; et, après ça, les grands ensembles.
Dans la dernière année, avec de l'information qu'on a eue auprès de la Commission de la construction et d'autres sources, on est à mettre en marche un peu toutes les sources nouvelles d'information qu'on peut déceler et bâtir aussi notre programme de vérification. Parce qu'il faut bien comprendre, comme on disait tout à l'heure, et on laissait supposer peut-être que de l'échange avec la Commission de la construction peut être intéressant, c'est vraiment intéressant, mais ça nous donne des cibles. Ça ne nous donne pas des états de fait. C'est-à-dire que prendre quelqu'un qui fait du travail au noir aujourd'hui, ou l'identifier, ne nous donne pas un montant à cotiser. Il faut comprendre que la vérification, on vient toujours un peu après le coup. On peut voir ce qu'il a fait de mauvais l'année passée, mais ce qu'il est en train de faire de mauvais, dans notre système d'autocotisation, on ne peut pas le présumer. Alors, on pose nos gestes après que les gens ont produit des rapports ou ont été actifs.
Dans la dernière année, on a fait 226 dossiers particuliers dans ces différents secteurs et on a ramassé des cotisations de l'ordre de 3 000 000 $. Alors, là aussi, on est dans une démarche qui s'intensifie de façon assez rapide actuellement dans la construction.
Quand M. Paré faisait référence à d'autres secteurs...
Une voix: Oui.
Appareils de vidéopoker
M. Croteau (Bertrand): ...par exemple, on sait que, l'année passée, on a oeuvré particulièrement dans les dossiers d'alcool et des vidéopokers, des dossiers qui nous ont été identifiés par les démarches policières, alors, là, on a eu des démarches très intensives qui ont fait que, par exemple, les vidéopokers, où il y a deux types d'intervention, auprès des propriétaires des appareils et auprès des tenanciers, là où se logent des appareils, on a fait des interventions auprès des propriétaires sur 450 cas, et c'est à peu près toute la population qui va avoir été couverte dans l'année 1995-1996. Au niveau des tenanciers, ça va être à peu près 25 % de la population qui sera faite en 1995-1996 et qui continuera d'être faite dans l'année qui vient.
Est-ce que c'est suffisant, ça?
M. Williams: Est-ce que je peux juste aller un peu dans le cas des vidéopokers, comme exemple? Voilà un bon exemple que j'appelais avant une tension dynamique. Je pense qu'il n'y a aucun doute qu'on veut régler les problèmes dans ce secteur, et nous avons changé les règles. Mais, avant que nous ayons changé ça, ces propriétaires ont eu le droit d'avoir des vidéopokers dans leur établissement. Maintenant, j'ai des appels qui disent: Il y a... le mot a été utilisé: «Acharnement». Acharnement?
Une voix: Acharnement.
M. Williams: Acharnement du ministère du Revenu contre ces personnes-là. Je sais qu'il y a certaines contradictions dans ce que je dis... Avec une main, je voudrais qu'on s'assure que tout le monde respecte nos règlements et ce que nous avons décidé. Mais, aussi, ils ont eu toute une expérience avant que nous ayons pris cette décision, et c'est la vie quotidienne de ces personnes-là. Est-ce que vous pouvez faire quelques commentaires sur ces contradictions-là?
M. Croteau (Bertrand): Oui, bien, peut-être ce qui peut paraître une contradiction ou qui a subi d'autres interprétations... Comme je disais, le vidéopoker, les règles du jeu ont changé, hein? Évidemment, c'est maintenant Loto-Québec qui administre la démarche, qui est propriétaire des appareils. Alors, quand on a, suite à une volonté très nette exprimée de corriger la situation, il nous est apparu important, pour les propriétaires de vidéopokers et je dis encore, là, ça, c'est les gens qui avaient les appareils et où il y avait des revenus assez importants il nous a semblé important de faire une démarche exhaustive. C'est-à-dire que c'est un phénomène qui va disparaître, les gens vont disparaître de ce business-là, et les argents aussi. Alors, on s'est senti un peu plus pressé et, effectivement, je n'utiliserai pas le même qualificatif que vous, mais on est allé très intensément.
M. Williams: J'ai répété les mots que j'ai entendus...
M. Croteau (Bertrand): Oui, oui. Ha, ha, ha!
M. Williams: C'est tout.
M. Croteau (Bertrand): Je n'aime pas la portée, moi.
M. Williams: C'est tout.
M. Croteau (Bertrand): Je n'appellerais pas ça de l'acharnement, dans le fond, mais, pour nous, ça a été une démarche qui devait se faire dans un temps moyen et raisonnable, et c'est depuis 15 à 18 mois, et on aura terminé l'opération qui, contrairement à d'autres aventures, n'aura pas de lendemain. C'est un type d'entreprise qui n'existera plus parce que l'État a pris en charge les propriétaires de vidéopokers.
(16 h 40)
M. Williams: Oui, et, jusqu'à un certain point, je suis à 100 % d'accord avec ça. Mais, dans plusieurs cas, comme vous l'avez mentionné, c'était le revenu substantiel pour ces familles, et 15 à 18 mois, ce n'est pas nécessairement beaucoup de temps pour eux pour faire tous ces changements. Avec ça, c'est pourquoi j'ai appelé ça une contradiction. Je ne blâme personne, mais c'est une situation assez difficile pour ces particuliers-là et c'est une raison pour laquelle peut-être le ministère du Revenu a la réputation que vous avez, parce que ça fait très mal à ces personnes-là. Elles vont respecter la loi, mais peut-être qu'elles ont besoin d'un peu plus de temps. C'est ça que j'ai entendu. Moi, je n'ai pas d'expérience directe dans ça, mais c'est juste les appels que j'ai reçus, et ça fait mal à ces personnes-là. Peut-être qu'on doit avoir un peu plus de souplesse quand nous sommes en train de mettre nos décisions en vigueur, en réalité.
M. Croteau (Bertrand): Ce que j'ajouterais à ça, c'est qu'effectivement il y a un montant assez important qui est cotisé et où on déclare aux gens qu'ils nous doivent des sommes plus importantes, mais le reste de la démarche, quant aux modalités de règlement, etc., c'est ce que vous a décrit tout à l'heure M. Cayer, puis tout ça. Il y a toujours une considération sur la situation réelle de l'individu ou de l'entreprise qui est en cause. Mais ça ne se situe pas au moment de la vérification, parce que la vérification se veut aussi factuelle que possible, mais il y a possibilité d'avoir des arrangements après ça avec la perception.
M. Williams: Non. J'ai les autres sujets, mais vous voulez faire... sur le même sujet?
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, sur le même sujet.
M. Williams: Allons-y.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Vous avez dit qu'actuellement... D'abord, au niveau des vidéopokers, il y a deux types de cas, celui des propriétaires, là, 450, ça, c'est réglé. Ça, c'est une affaire. L'autre, c'est les tenanciers. Vous dites, actuellement, là, qu'il y en a à peu près 25 % dont la vérification est faite, si je comprends bien.
M. Croteau (Bertrand): C'est ça.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bon. Sur les 25 % qui sont actuellement faits, comment avez-vous procédé? «C'est-u» par lettre alphabétique, par région? Comment ça marche, ça?
M. Croteau (Bertrand): Non. En fait, c'est à partir d'informations qui nous venaient des opérations policières qui ont été appelées Alko à un moment donné, Barbotte à un autre moment donné. Alors, la Sûreté du Québec est intervenue de façon intensive à un moment donné pour éliminer les appareils illégaux et il semblait qu'il y en avait beaucoup et c'est à partir des endroits qui nous ont été pointés par la Sûreté du Québec qu'on est intervenu.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Êtes-vous capables de me dire, dans les 25 %, là, ça serait localisé à peu près où au Québec? Un aperçu.
M. Croteau (Bertrand): Ah, c'est-à-dire qu'on est intervenu un peu tout partout sur le territoire. Encore là, étant donné que la somme de travail est beaucoup plus importante que ce que l'on peut faire, on le distribue à travers nos différents bureaux. On a trois grands bureaux: Québec, Montréal et ville de Laval, et, après ça, en région, on a six, sept bureaux en région. Alors, c'est notre capacité de réaction qui a fait qu'on est allé plus ou moins intensément dans chacune des régions. Évidemment, il y a une particularité à Montréal. À Montréal, il y a un dossier majeur qui n'a pas été couvert par cette démarche-là et qui est pris en charge par le fédéral. Le gouvernement fédéral fait une démarche assez intensive sur l'île de Montréal, et le résultat du travail du fédéral nous est fourni, et nous intervenons par la suite, et vice versa. On ne fait pas les mêmes opérations que le fédéral sur le territoire au même moment.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Pourquoi que Montréal, c'est le fédéral qui fait ça, puis ce n'est pas vous autres?
M. Croteau (Bertrand): Parce qu'ils étaient déjà au dossier avant qu'on parte notre affaire, et c'est un dossier très important, massif et qui prend quelques années. Ils étaient déjà au dossier depuis plus d'un an.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, c'est parce que les informations qu'on met, aussi, ce n'est pas le même type de propriétaires dans la région de Montréal que dans les autres régions, hein...
M. Croteau (Bertrand): C'est vrai.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): ...et les informations que j'ai, également, c'est que, justement, ce sont les régions qui sont affectées les premières ou qui sont visées les premières peut-être pas affectées, mais visées les premières par les avis de cotisation, et, moi, je vais vous dire, j'ai un petit peu de misère à vivre avec ça. Mais vous? Je suis pour une justice, oui, que tout le monde doit payer, mais, quand on reconnaît puis tout le monde reconnaît qu'il y a deux types de propriétaires, de tenanciers qu'on «s'acharne», je vais le dire entre guillemets, sur un type plus que l'autre, là, j'ai de la misère un peu avec ça, moi, hein.
M. Croteau (Bertrand): Alors, ce que je dirais à ça, c'est qu'on s'acharne sur les uns et sur les autres, peut-être pas au même moment ou aussi rapidement. La situation étant différente sur l'île de Montréal, elle peut sembler un peu plus lente, mais elle va être probablement beaucoup plus flamboyante quant aux résultats. Le dossier est plus difficile et plus gros, dans le fond.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bien, oui. On s'attaque à une grosse machine, à Montréal, hein. Sur quelle base faites-vous le calcul des cotisations?
M. Croteau (Bertrand): Oui, ça... Évidemment, là, on est dans une démarche où la comptabilité n'a pas été tenue de façon très rigoureuse. Et notre façon de faire est comme la démarche comptable habituelle, c'est-à-dire de prendre les livres lorsqu'ils existent. Mais c'est évident que, dans ce secteur-là, la comptabilité est beaucoup plus floue et on n'a pas pu... Lorsqu'il y avait une comptabilité, on procède de la façon habituelle. Lorsqu'il n'y a pas de comptabilité, on établit une cotisation à partir d'une moyenne reconnue et établie selon des études que nous avons faites en différents lieux: d'abord, à la commission qui a créé l'aventure de... ou l'aménagement à Loto-Québec; on a eu des cas particuliers que nous avons traités chez nous; on a des données du Nouveau-Brunswick. La somme de ces expériences-là et de ces statistiques-là nous a amenés à établir un revenu moyen par appareil de 2 000 $. Et c'est ce que nous appliquons tant qu'on ne nous fait pas une... 2 000 $ par mois de revenu, 2 000 $ par mois par appareil. Et c'est la moyenne qu'on utilise si les gens n'ont pas de démonstration à nous faire autre que ça. Après ça, bien, on va regarder les cas parce que, étant donné qu'on travaille avec une moyenne, il est évident que, certains cas, c'est peut-être un peu plus élevé que la réalité. Mais c'est au contribuable de faire ses revendications.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Quand vous dites 2 000 $ par mois par appareil, vous ne tenez pas compte si, dans un établissement, il passe 25 personnes par jour ou bien s'il en passe 200?
M. Croteau (Bertrand): On ne tient pas compte de ça à ce moment-ci, c'est vrai.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bon.
M. Croteau (Bertrand): C'est une cotisation qu'on appelle estimative. Mais la loi prévoit que les gens doivent avoir une comptabilité. Et, s'ils ont une comptabilité à nous montrer, on en tient compte. On regarde la comptabilité qu'ils ont et on cotise en fonction de la comptabilité qu'ils ont. Mais, s'ils n'ont pas de comptabilité, alors on cotise sur une base estimative.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Sur les 25 %, là, des tenanciers qui ont reçu des avis de cotisation, est-ce qu'il y en a qui ont réglé?
M. Croteau (Bertrand): Réglé, oui, oui. Il y en a quelques-uns, mais disons que ce n'est pas la grande proportion qui ont réglé à date. Mais il y en a quelques-uns qui ont réglé, oui.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mais vous n'avez pas le pourcentage?
M. Croteau (Bertrand): Non. Bien, quand on dit réglé, nous, c'est après perception, là, hein. Réglé, c'est lorsque notre cotisation est faite; elle va à la perception, il y a toujours un délai. Alors, non, je n'ai pas le pourcentage. Je ne sais pas si on l'a à la perception.
Une voix: ...mais il y a un faible pourcentage de...
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Vous dites qu'il y a un faible pourcentage de réglé.
Une voix: De payé.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): On sait que la plupart vont en opposition.
M. Croteau (Bertrand): Absolument.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bon. Du fait que la plupart vont en opposition, comment le ministère évalue, je vais dire, sa défense en opposition, par dossier? Y «a-tu» des chiffres là-dessus? Parce que quelqu'un qui reçoit un avis de cotisation, il va en opposition. Donc, c'est le client, votre client qui doit aller se défendre. Mais vous, vous avez une présentation à faire aussi à la cour. Moi, je ne suis pas avocat, je ne sais pas si c'est une défense que vous appelez ça, vous autres aussi, mais le Revenu a à expliquer ou à justifier son avis de cotisation. Donc, comment c'est évalué, chez vous, là, le fait que vous amenez quelqu'un à la cour qui conteste son avis de cotisation?
(16 h 50)
M. Brochu (André): André Brochu, direction générale de la législation. Effectivement, d'abord, je confirme qu'il y a... les dossiers commencent à arriver en opposition. Et on commence aussi à les traiter. Comment on évalue? On évalue sur la base, évidemment, de la preuve des faits qui sont apportés par le contribuable ou son représentant. On confronte cette position-là, ces faits-là, avec ceux dont s'est servi le vérificateur pour monter sa cotisation. Encore là, si le contribuable ou son représentant est incapable de nous apporter des faits précis ou est incapable de nous faire la démonstration que la façon qu'a expliquée M. Croteau la cotisation estimative est fausse, à ce moment-là, on a de la jurisprudence à l'effet que ces cotisations estimatives là sont valides et un courant jurisprudentiel les maintient. Ce que nous aurons à faire, comme ministère je pense que c'était aussi, là, votre question devant le tribunal, ce sera de le convaincre que le 2 000 $ pour prendre le chiffre qui était mentionné ce sera de le convaincre que c'est un 2 000 $ que le ministère a retenu après des études et après des statistiques sérieuses. Il devra démontrer à la cour que ce n'est pas un chiffre pris au hasard, que c'est un chiffre auquel il est arrivé après avoir consulté différents intervenants du milieu, différentes études. Il devra faire la démonstration s'il est arrivé à ce chiffre-là, par exemple, au moyen de statistiques. Souvent, on amènera en preuve un témoin qui viendra expliquer à la cour les statistiques retenues et leur logique pour arriver au chiffre de revenu estimé.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mais vous avez dit tout à l'heure, M. Croteau, je pense... Brochu? Non, mais, tout à l'heure, M. Croteau a dit que vous aviez estimé à 2 000 $ par mois le revenu de l'appareil, puis que c'est une moyenne que vous avez établie. Comment vous allez pouvoir, devant la cour, dire qu'un dépanneur qui vient de recevoir une cotisation parce qu'il avait une machine, que lui, là, il est dans la moyenne pareil, puis qu'il rentrait 2 000 $ par mois dans sa machine, même s'il passait quelques clients par semaine, ou par jour, je dois dire, pas par semaine si c'était quelques clients par semaine, ça serait triste mais quelques clients par jour qui viennent au dépanneur? Puis vous pensez être capable, devant la cour, de justifier que votre moyenne de 2 000 $, elle s'applique uniformément partout, tout le monde, que ce soit dans un bar où il passe je ne sais pas combien de monde, ou dans un restaurant, ou dans un dépanneur, ou dans un casse-croûte?
(Consultation)
M. Paré (Pierre-André): M. le Président, c'est que le 2 000 $ qu'il y a là, ce n'est pas... le 2 000 $ qui a été mentionné, c'est un 2 000 $ qui n'est pas un maximum, c'est un 2 000 $ qui est un minimum. On a fait des calculs, on a fait les moyennes, on a enlevé beaucoup de choses pour finir par arriver à 2 000 $. Si on avait pris le maximum, on serait probablement allé à 4 000 $.
Deuxièmement, un tenancier qui n'a pas tenu de livres, il est déjà en faute avec nous. S'il n'est pas capable de nous faire la preuve d'une façon quelconque avec ses documents que le trafic qui est passé chez lui pour l'utilisation de la machine, ce n'est pas bon, c'est à lui à faire la preuve. Nous, tout ce qu'on a à faire comme preuve au juge, c'est de démontrer que le 2 000 $ est vraiment un minimum. Puis, lui, il a à faire la preuve qu'il n'en a pas fait pour 2 000 $ par mois ou qu'il ne passait pas de personnes pour 2 000 $ par mois. Alors, c'est de cette façon-là qu'il faut voir le problème.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mais, moi... Remarquez, là, que je comprends ce que vous nous dites, mais j'essaie toujours d'avoir une certaine logique, un certain réalisme. Combien pensez-vous, ou comment évaluez-vous les montants que vous allez pouvoir récupérer, avec le 25 % des tenanciers qu'actuellement vous avez visés, là?
M. Paré (Pierre-André): C'est-à-dire qu'on ne peut pas l'évaluer actuellement, dans le sens que les cotisations ont été faites. Ce sont des entreprises qui, habituellement, ont des lendemains, ce n'est pas comme les propriétaires, où les choses se termineront, et il y a un «record» en termes du chiffre d'affaires et de l'importance qui peut être considéré au moment de la perception, mais on n'a pas fait une simulation, c'est trop tôt dans la démarche, là. On en est au moment de la perception pour être capable d'évaluer quels seront les bons comptes et les mauvais comptes.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Parce que, moi comme d'autres, là, c'est évident que des gens sont venus me voir. Quand on connaît toute la... vous connaissez autant que moi la problématique des fameux vidéopokers, hein! Bon. Je pense que tous les gens qu'il y a alentour de la table, ici, on comprend dans quel contexte ça a été établi, dans quel contexte ça a été, un bout de temps, légal, après ça, dans quel contexte ça a fonctionné après. Je ne dirai pas «légal», «illégal», parce que les tribunaux se prononcent là-dessus; puis, je l'ai dit tout à l'heure, je ne suis pas avocat, mais c'est... vis-à-vis des tribunaux, ça n'a pas l'air d'être clair non plus, hein?
Bon. Là, on arrive avec des cotisations, des avis de cotisation qui, en tout cas, celles que j'ai vues, il y en a de 70 000 $, il y en a de 135 000 $, il y en a de 145 000 $. Comment pensez-vous, hein, entre nous autres, là, qu'un propriétaire d'un casse-croûte ou d'un dépanneur qui reçoit un avis de cotisation de 145 000 $ peut se coucher là-dessus puis peut bien dormir puis dire: Moi, oui, je vais être capable. Comment pensez-vous être capable de récupérer ça? C'est ça que je vous dis. Il me semble qu'il y a un certain réalisme, une certaine logique quelque part, un certain bon sens qu'on dise: écoutez un peu, 145 000 $ pour un casse-croûte qui n'a jamais eu plus que deux machines dedans, à l'intérieur, puis il dit qu'il ne voulait même pas ces machines-là, mais elles sont là. En tout cas, je ne veux pas l'excuser, je ne veux pas le disculper, mais, en tant que percepteur des fonds publics, puis les argents que ça va coûter, comment pensez-vous que cette personne-là, ces propriétaires-là vont être capables de payer ça, 145 000 $?
Une voix: M. Cayer.
M. Cayer (Gabriel): Gabriel Cayer. Bon, on est conscient des difficultés qui entourent tous les dossiers de vidéopokers en matière de perception. On a rencontré d'ailleurs les représentants de l'association, parce qu'ils sont formés en association. Et je vous résume un petit peu la démarche qui décrit la façon dont on les traite. Ceux qui sont en mesure de payer ou de garantir la dette, on le fait, ce qui est une petite minorité. Ceux qui ne sont pas capables, on va essayer de conclure des ententes de paiement qui vont particulièrement ou notamment viser la partie intérêts pour empêcher que la dette se majore.
Mais on n'appliquera pas la loi avec toute sa rigueur pour faire en sorte, par exemple... qui pourrait amener des gens à faire cession de leurs biens parce qu'ils ont une dette qui est contestée.
Donc, on tient compte des circonstances. Dans certains cas, on va même jusqu'à suspendre la perception jusqu'au règlement final du litige parce qu'ils sont tous en opposition. Je ne sais pas comment ça va se terminer, s'ils vont interjeter appel pour plusieurs des décisions s'ils ne sont pas satisfaits. Donc, on va attendre le règlement du litige, sauf que, pour empêcher tout au moins les dettes de se majorer, on va tenir compte de la capacité de payer.
Donc, ça va de, un, le paiement, ceux qui peuvent; deux, la sûreté; trois, des ententes de paiement pour ceux aussi qui peuvent payer, des ententes de paiement qui peuvent ne viser que les intérêts et, dans certaines circonstances, la suspension des mesures de perception.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie des informations. Maintenant, M. le député de Nelligan.
Collaboration interministérielle
M. Williams: Merci, M. le Président. J'aurais une courte question. Vous avez parlé, et nous avons parlé avant, de volonté et de responsabilité politiques. Mais il me semble qu'il y a aussi une volonté et une responsabilité administratives. Et, effectivement, on peut aller changer nos lois. Mais il me semble qu'on peut faire beaucoup de choses, plus qu'on fait maintenant, sans changer les lois et sans entrer dans toutes les questions de confidentialité, est-ce qu'on donne les fichiers ou non, et tout ça.
L'exemple, dans le rapport du Vérificateur général, il a parlé des frais de garde d'enfants. Vous avez vous-même mentionné ça comme une de vos priorités. Il me semble qu'on peut corriger beaucoup le travail au noir dans cette chose sans entrer nécessairement dans un échange d'informations confidentielles. On peut aller peut-être dans la direction des crédits d'impôt, comme vous l'avez mentionné, ou les autres moyens.
Est-ce qu'il y a, dans votre opinion, beaucoup de potentiel, de possibilités que les ministères puissent travailler ensemble beaucoup plus que maintenant?
M. Paré (Pierre-André): Effectivement, il y a un nombre de cas, d'abord, qui peut se régler dans notre cour, chez nous. Comme dans le cas des frais de garde, on n'a pas d'affaire à demander à personne. C'est nous autres qui les avons, les renseignements. Là, ce qu'on fait, c'est une vérification auprès d'une vingtaine de garderies pour regarder, voir si les revenus qui ont été déclarés dans ces garderies-là par rapport aux exemptions qui nous sont demandées, si ça correspond, et puis, par la suite, être capable de faire les modifications qu'on doit faire sur les cotisations des individus.
Il y a des comparaisons de fichiers qui peuvent être faites également pour vérifier si les gens qui paient des montants, des impôts de corporation, si ça fonctionne avec celui des mandataires pour la TPS et la TVQ. Ça aussi, on peut faire ça. On peut examiner, sur trois ans, les revenus et les dépenses des entreprises pour regarder si les remboursements sur intrants qu'on a faits ne dépassent pas les ventes qui ont été faites. Ça aussi, on peut faire ça chez nous.
(17 heures)
Il y a un grand nombre d'ailleurs, le Vérificateur général en cite un certain nombre de travaux qu'on peut faire. Les travailleurs à pourboire, on peut aller les vérifier, on n'a pas besoin de demander à beaucoup de monde de le faire. Quoique, si on couple ça avec, par exemple, des fichiers de l'aide sociale, on peut peut-être se réveiller avec des gens qui ont à la fois de l'aide sociale, qui ont à la fois des pourboires puis qui ne font pas de déclaration. Ça peut aider, dans l'ensemble de l'économie, à diminuer un peu les factures. Et, d'ailleurs, on a une entente avec le ministère de la Sécurité du revenu, on a modifié notre loi pour pouvoir s'échanger des renseignements. Mais, encore là, il y a encore une base individuelle qu'il faut respecter, mais, de ce côté-là, je pense que c'est correct que ce ne soit pas tous azimuts. C'est eux autres qui viennent faire un tour chez nous, donc ils viennent dans des cas particuliers.
On peut travailler avec un certain nombre de ministères, comme, par exemple, dans le cas des intérêts qui sont payés sur les obligations d'épargne du Québec, c'est des fichiers qu'on a. On pourrait travailler peut-être, éventuellement on ne sait pas, on est en discussion avec eux avec la Régie de l'assurance-maladie. Dans le fond, pourquoi il n'y aurait pas des déductions à la source? Il y a un grand nombre de cas où on peut travailler sans avoir d'entente. Et ces cas-là, on est en train de les identifier pour être certain qu'on fait le maximum en partant. Mais le potentiel de ça est à peu près... Quand on a fini de faire le tour, ça nous donne 1/25... ou un tiers de ce qu'on pourrait faire globalement si on avait l'ensemble des fichiers.
Donc, c'est pour ça qu'on tente de travailler de façon plus globale, en disant: Si on les a tous, nos fichiers, on va pouvoir avoir 100 % des bénéfices au lieu d'avoir 30 % ou 40 % des bénéfices. Mais c'est évident qu'on n'attendra pas après tout le monde pour faire ce qu'on peut faire dans notre propre cour, chez nous, c'est clair. Et, cette année, on a un plan qui se divise en trois parties: ce qu'on peut faire dans notre cour, ce qu'on peut faire à la rigueur ou à la limite de l'utilisation de nos articles de loi et, après ça, ce qu'on pourra faire avec des ententes, en poussant plus sur les autorités pour qu'on ait des ententes d'échanges de renseignements qui seront plus grandes. C'est de cette façon-là qu'on travaille.
M. Williams: Merci, M. le sous-ministre, mais il me semble qu'un tiers d'entre 1 000 000 000 $ et 2 000 000 000 $, c'est un bon début, et j'espère qu'on peut commencer sur ces projets, tel que vous l'avez mentionné.
M. Paré (Pierre-André): Ce qui arrive, M. le Président, pour faire allusion au tiers avec le député de Nelligan, c'est les choses qu'on a faites l'année précédente. Donc, les programmes qu'on fait une année, quand on les refait l'année suivante, sont moins payants; il faut qu'on en trouve d'autres à l'intérieur. Et il y a une limite à épuiser ces 30 %. C'est pour ça qu'on a besoin d'un petit peu d'oxygène ailleurs.
Crédit d'impôt pour la recherche et développement
M. Williams: Merci, M. le sous-ministre. J'ai une question, un type de cas un peu plus précis, et je voudrais utiliser cette opportunité d'en discuter avec vous. Ça touche au-dessus, selon mon information, de 10 000 contribuables. Ce n'est pas un sujet qui est nouveau pour vous, je pense, M. le sous-ministre, et ce n'est pas surprenant que je demande la question non plus. Mais ça touche les personnes qui ont participé à la recherche et développement dans les PME et dans les plus grandes entreprises. Il y a certainement plusieurs manchettes dans ce dossier, et, maintenant, selon l'information que j'ai reçue, ils ont eu un changement d'interprétation pendant les années. Et maintenant, d'une façon ou d'une autre, il y a plusieurs personnes qui ont participé avec bonne volonté dans la recherche et développement qui sont maintenant en train de risquer tout l'argent qu'elles ont épargné pendant leur vie et risquent d'être en faillite. Je voudrais vous donner une chance de nous expliquer aujourd'hui votre opinion sur ça et votre bilan de situation et aussi ce que sont vos recommandations.
M. Paré (Pierre-André): Je vous remercie de poser la question, parce que ça concerne un grand nombre de contribuables. J'ai avec moi deux personnes, François Tremblay, qui est de la législation, et M. Croteau, qui est de la vérification, qui s'occupent de ces deux cas-là de ce cas-là en particulier, c'est-à-dire la recherche et développement. Ce problème-là a commencé lorsqu'on a commencé à faire des vérifications, surtout avec le gouvernement fédéral, dans les projets. Et, à un moment donné, bien, on a découvert à peu près toutes sortes de choses, des cas où la recherche n'avait pas lieu, des cas où l'associé n'avait pas la bonne définition, des cas où elle était indéterminée, en tout cas, on en avait de toutes les sortes. Et les abris fiscaux étaient utilisés de façon très, très marquée. Alors, ce qu'on a fait, c'est qu'on a fait une étude avec le gouvernement fédéral et on a examiné l'ensemble des cas, et les gens de notre bureau sont partis et puis ils sont allés faire un tour au gouvernement fédéral puisqu'il s'agissait d'une exemption qui est commune aux deux endroits, avec une réglementation qui se ressemble, sauf que c'est les pourcentages qui diffèrent pour aller voir le maximum qui pouvait être fait pour ces individus-là, compte tenu des circonstances, dans l'état actuel de la législation. Et je pense que le règlement qui a été mis sur la table, c'est un règlement qui est correct. Et, de façon à s'assurer que ce règlement-là soit correct, au mois d'octobre, le ministre des Finances, M. Campeau, a mis sur pied un comité pour examiner la raisonnabilité de cette offre par rapport aux lois qui existent. C'est un comité qui est présidé par le président des valeurs mobilières, M. Martel, qui est accompagné de deux fiscalistes, M. Gauthier et M. Fortin. Ils sont censés déposer leur rapport au ministre dans les jours qui viennent, soit peut-être même le 1er mars, avec des recommandations exactes. Deux personnes ont été invitées à lire le rapport et ont participé aux travaux, des gens de l'association des représentants du groupe qui avait fait des investissements dans la recherche et une autre personne de notre ministère.
Mais, avant d'aller plus loin dans ce dossier-là, je demanderais à Me Tremblay, qui est avec nous cet après-midi et qui a travaillé de long en large dans ce dossier-là, de nous expliquer un petit peu de quelle façon fonctionnait l'exemption et de quelle façon on a suggéré le règlement, en attendant de savoir si le comité va recommander que la solution qu'on a suggérée demeure ou qu'elle soit bonifiée ou pas.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Tremblay.
M. Tremblay (François T.): François Tremblay, Direction de la législation. Il faut dire d'abord, pour préciser ce qui est important, qu'il y a des abris fiscaux qui existent et qui sont conçus comme tels dans les lois fiscales. Le REER en est un, par exemple. Et il y en a d'autres qui ne sont pas prévus dans les lois fiscales. C'est-à-dire que des gens peuvent, en raison de la structure fiscale, grâce à des dispositions, trouver des moyens de planifier leur fiscalité ou mettre sur le marché des produits pour aider les autres à sauver de l'impôt. Les types d'abris fiscaux qui ont été mis sur le marché, dans lesquels 9 000 ou 10 000 investisseurs se sont impliqués, ne sont pas des abris fiscaux qui sont prévus dans les lois fiscales. C'est un amalgame de dispositions basées sur la fiscalité, qui touchent les sociétés en nom collectif, les pertes, le calcul du revenu et des pertes, essentiellement. Par exemple, à titre d'illustration, ce qui existe sur la R & D, par exemple, au niveau du Québec, la fiscalité du Québec, ce qui existe sur la R & D propre et qui est pertinent, disons, à ce dossier-là, c'est un crédit d'impôt sur une partie seulement des dépenses de R & D. Dans chacun des dossiers, le crédit d'impôt à la R & D qui s'applique, c'est à peu près 100 $, 150 $, ce qui est très marginal par rapport aux investissements de 10 000 $ que ces gens-là ont faits et aux déductions fiscales qu'ils ont cru pouvoir obtenir.
(17 h 10)
Ceci étant dit, la structure, si on veut, essentiellement, de la façon dont ça fonctionnait, les gens achetaient une part dans une société, devenaient membres de la société moyennant, par exemple, une somme de 10 000 $. Ces 10 000 $ là étaient destinés à payer pour une recherche à faire. Un tiers, une compagnie s'engageait à faire de la recherche. Le prix chargé par ce tiers-là, soit les 10 000 $, était très substantiellement supérieur au coût de ses travaux. En fin de compte, il s'en mettait 5 000 $ de côté de façon à pouvoir racheter la part de l'investisseur au moins à un prix convenu, et préalablement convenu, de 5 000 $. Il ne restait donc que 5 000 $ pour faire certains travaux. Et ces travaux-là il faut enlever de ça les frais de tous les intervenants dans ces chaînes: comptables, avocats, vendeurs, etc. ont été faits avec plus ou moins de sérieux. Dans certains cas, il n'y a pas de R & D du tout. Dans d'autres cas, l'argent n'a même pas été dépensé au Canada. Selon les informations que l'on a, on en retrouve des sommes dans les îles Turks et Caïcos. Dans d'autres cas, c'est un peu plus sérieux. Il n'y a pas eu de changement d'interprétation de la part du ministère du Revenu. Cette fiscalité-là a toujours été telle qu'elle est sur un certain nombre d'années. Je ne veux pas dire qu'il n'y a pas eu de modifications, mais c'est inexact de dire qu'ils pouvaient le faire, que le gouvernement a changé d'interprétation et que, maintenant, ils ne peuvent plus le faire. Les «schemes» ont été montés par des gens, des planificateurs financiers qui ont mis des produits fiscaux sur le marché sans s'en être assurés d'aucune manière auprès des autorités fiscales, parce qu'on parle de 500 ou 600 sociétés qui ont été mises sur le marché, de parts dans des sociétés qui ont été mises sur le marché. Et nous avons les mécanismes pour offrir au ministère du Revenu des lettres d'opinion et même des décisions anticipées, qui sont des lettres d'opinion dans lesquelles le ministère, après étude des cas, dit quelle est l'attitude qu'il va avoir et s'engage à respecter la lettre qu'il a donnée. Il n'y a eu aucune demande, dans aucun de ces cas-là, de lettre d'opinion ou de décision anticipée. Alors, quand ces cas-là ont finalement été vérifiés, nous avons eu, effectivement, des cotisations qui ont été émises, et puis on a été appelé à regarder et à déterminer quelle était, compte tenu des faits, la fiscalité qui s'appliquait à ça. Et cette fiscalité-là est telle que... Et je reviens sur la question du changement d'interprétation. Ce qui est exact, c'est les motifs pour refuser les déductions à un moment donné, au niveau du gouvernement fédéral. Ils ont dit: Nous les refusons pour telle raison. Et, aujourd'hui, il s'est ajouté d'autres raisons qui motivent également le refus. Mais c'était, de toute façon, refusable, quelle que soit la quantité ou les raisons. Ce n'est pas un changement d'interprétation qui amène un changement de conclusion. Quand ils ont été vérifiés, il est exact que le gouvernement fédéral, qui avait initié ces dossiers de vérification là, a avisé certains contribuables, c'est-à-dire des vérificateurs ont avisé des contribuables en leur disant: Voici, nous vous refusons les déductions réclamées pour un motif x. Il s'est avéré, à l'étude, que ce motif x là était bon dans certains cas, dans d'autres moins, mais, à tous égards, il y avait ou bien d'autres motifs, y, z, a, b, etc. Mais, de toute façon, autrement dit, ça ne change pas le résultat.
Ce changement, tout de même, de base de cotisation qui a été allégué et divulgué aux investisseurs a motivé, dans l'offre de règlement qui a été faite, l'abandon des intérêts sur les cotisations qui sont émises, pour le motif suivant: nous avons convenu, en faisant l'offre, que peut-être que, si la base réelle de cotisation définitive et l'ensemble des motifs de refus avaient été fournis aux investisseurs dès le début, peut-être, effectivement, qu'ils auraient été davantage convaincus du bien-fondé des cotisations, qu'ils n'auraient peut-être pas engagé des représentants, fait des représentations et, au fond, engagé un certain nombre d'efforts et de délais. Et, donc, ça, ça a pu causer un délai qui faisait en sorte, pendant ce temps-là, que les intérêts s'accumulaient sur les comptes. Et, en raison de cette lacune, par ailleurs, lorsqu'on connaît les systèmes compréhensibles, ça nous a permis de ne pas pénaliser ces gens-là, en disant: On va vous réclamer le capital, mais les intérêts, on les oublie, on les efface.
Au surplus, ce qu'on leur a donné comme déduction... parce qu'on voit, par rapport à l'explication que j'ai donnée, que les gens mettaient 10 000 $ et qu'ils étaient rachetés pour 5 000 $, laissant donc à risque, de leurs propres fonds, un montant de 5 000 $. Nous leur avons reconnu, et c'est dans l'offre, la déduction de ces 5 000 $. Alors, nous avons appliqué la loi de la manière la plus généreuse possible, dans le cadre des paramètres législatifs qui sont là, tant à l'égard de ce qui est déductible au niveau du calcul de l'impôt que des intérêts à l'égard desquels la loi prévoit un certain pouvoir discrétionnaire. Est-ce que ça répond à votre question?
M. Williams: Ça donne une certaine réponse à ma question, certainement. Est-ce que ça répond à ma question? Pas à 100 %. Je n'ai pas tous les chiffres devant moi, mais j'ai moi-même vu plusieurs exemples de la recherche et développement que ces compagnies ont faite au Québec, et je pense que de dire, de donner l'image que la grande majorité de ces projets n'étaient pas de la vraie recherche et développement, je pense que c'est une mauvaise image.
Quand je vous ai écouté... Légalement, vous êtes avocat. Peut-être légalement, sur la stricte, dure et sèche interprétation de la loi, peut-être que vous avez raison, mais il y a 10 000 personnes, M. et Mme Tout-le-Monde, qui ont compris quelque chose de complètement différent de ça. Je ne parle pas de dizaines ou de vingtaines, je parle, selon mon information, de 10 000 ou plus qui, maintenant qu'elles sont les victimes, les victimes d'un système, qui vont maintenant, selon mon information et corrigez-moi si je suis incorrect être doublement pénalisées. Et les pénalités qu'elles vont payer, c'est beaucoup plus cher que les gains qu'elles ont eus dans les abris fiscaux. Et, effectivement, là, ça a commencé pendant l'autre gouvernement, mais, comme on a l'a lu non partisan il me semble que c'est inacceptable de ne pas trouver au moins que l'État et je ne vous blâme pas personnellement, ni moi ni les autres n'a pas au moins une partie de responsabilité dans cette situation. Et il me semble qu'on doit trouver des solutions beaucoup plus humaines que ça. Selon mon information, encore, les contribuables... Et on parle de salaires moyens, là, ce n'est pas nécessairement les riches qui, maintenant, doivent signer maintenant, là, maintenant des chèques de 20 000 $, 30 000 $, 40 000 $. Et il me semble que c'est inacceptable. Et, encore une fois, c'est un exemple, un peu comme le président a parlé d'un autre niveau d'exemple, que, effectivement, on veut fermer les trous, mais on doit fermer ça d'une façon humaine.
Et je redemande au sous-ministre: Dans votre opinion, selon votre évaluation du dossier, est-ce qu'il y a au moins une certaine responsabilité de l'État dans ce cas? Et je voudrais souligner, m'assurer que mes mots soient clairs, une certaine responsabilité. Je n'ai pas dit «toute la responsabilité», mais est-ce qu'il y a au moins, avec 10 000 personnes qui ont compris exactement le contraire de ce que vous avez dit, une certaine responsabilité de l'État?
(17 h 20)
M. Paré (Pierre-André): Quand on a examiné ces cas-là et qu'on les a examinés à la lumière de la législation qui existe actuellement, et qu'on a vu aussi la distribution du revenu... Parce que, ce qu'on a fait, c'est qu'on a examiné la distribution du revenu des gens qui avaient investi dans ces abris fiscaux là. Il est vrai qu'il y a un certain nombre de personnes qui, par exemple, avaient des revenus inférieurs à 40 000 $, mais ça représente à peu près 10 % de la population qui a investi dans ça... Tous les autres ont des revenus supérieurs, si je me souviens bien, à 40 000 $, et même à 50 000 $ ou à 60 000 $. Et, assez souvent, le couple a investi sur une période de deux ans ou trois ans, et le couple a investi. Et, à ce moment-là, ça faisait des revenus familiaux combinés d'à peu près 120 000 $, 130 000 $, et pour investir pour deux ou trois ans. Nous, ce qu'on pense, c'est qu'ils étaient suffisamment bien informés de la façon dont fonctionnait la fiscalité pour se poser un certain nombre de questions. Et la question suivante est assez simple: Comment un investissement de 10 000 $ peut finir par provoquer un remboursement de 12 000 $ en période de l'année? C'est presque jouer à la loterie. Et on pense, nous, que les investisseurs étaient vraiment informés. Je ne dis pas qu'il n'y a pas un certain nombre d'investisseurs qui n'étaient pas informés ou qui n'ont pas pu se faire jouer, mais, dans l'ensemble, il y a un bon nombre d'investisseurs qui étaient en mesure de poser des questions. Parce que ce n'est quand même pas tous des gens qui étaient démunis qui ont investi dans ce genre d'abri fiscal là.
La réponse est que, ne sachant pas si les gens ont, oui ou non, volontairement, clairement été capables de comprendre ou de ne pas comprendre, il y en a un certain nombre qui ont compris, parce qu'ils ont payé. En partant, il y en a 20 % qui ont payé. Donc, c'était correct. Et on a pensé que la situation n'était peut-être pas aussi claire pour tout le monde, et on a dit: On va examiner l'état actuel de la loi. C'est quoi, le plus loin ou l'interprétation la plus large qu'on pourrait faire de notre législation pour que le règlement de ces cas puisse se faire? Et c'est cette offre-là qui a été déposée aux investisseurs. On sait que ça va causer des problèmes à un certain nombre de personnes, et on sait qu'il y a des personnes qui vont avoir beaucoup de difficultés à rembourser rapidement. Or, ce qu'on dit également dans l'offre, c'est: Vous devez un certain montant d'argent. Il y a des montants qui sont vraiment élevés, il y a d'autres montants qui sont plus bas. Et ce qu'on dit, c'est: Communiquez avec notre Centre de perception, qui est autorisé à prendre avec vous des ententes de paiement. Le Centre de perception n'est pas autorisé à faire exprès pour mettre le monde en faillite le lendemain matin. Alors, le Centre de perception est autorisé à prendre des ententes de paiement qui vont respecter les capacités de payer des individus et qui vont tenir compte également des cotisations qui ont été envoyées. Mais il serait difficile pour nous actuellement, dans l'état actuel du dossier, avec la connaissance qu'on en a, de présumer que les investisseurs n'avaient pas une connaissance suffisante de ce qu'ils faisaient au moment de l'investissement. On ne peut pas dire que 100 % des gens avaient une connaissance suffisante, mais on ne peut pas dire que 100 % des gens n'avaient pas une connaissance suffisante.
Et, ceci étant dit, il faut se rabattre sur ce qu'il y a dans cette loi, les intentions, comment ça fonctionne, et tenter d'être le plus correct possible envers les investisseurs. Et on peut vous assurer que les possibilités d'interprétation élargie de la loi ont toutes été prises et étirées au maximum de façon à ce que la facture soit la moins salée possible, pour être la plus correcte possible. Au-delà de ça, ce serait comme permettre aux gens de ne pas payer des droits ou ne pas payer d'impôt. Et, là, on se retrouverait dans une situation qui serait doublement différente et difficile à gérer. Demain matin, à peu près n'importe qui dans la province se réveille puis dit: Moi, là, votre loi, je la trouve un peu compliquée à comprendre, je ne sais pas trop, trop dans quoi je me suis embarqué. Veuillez donc me rembourser 500 $ parce que, cette affaire-là, j'avais mal compris ça. Puis là je vais me réveiller avec trois villages qui vont débarquer. Ils vont dire: Nous autres, chez nous, dans le Nord, vous nous aviez dit qu'au 47e parallèle il y avait une déduction. On ne l'a pas trouvée trop de notre goût, on ne l'a pas comprise, on ne savait pas qu'on avait le droit, vous ne nous l'avez pas donnée. On va se réveiller tantôt avec un groupe dans des films, on va se réveiller avec d'autres groupes qui ont fait des investissements dans d'autres domaines. Alors, il ne faut quand même pas non plus se servir de cet exemple-là puis finir par dire: À l'avenir, au ministère du Revenu, groupe par groupe, si vous n'êtes pas content de votre cotisation, tout ce que vous avez à faire, c'est de venir cogner à notre porte, on va mettre un groupe de travail puis on va diminuer votre compte de tant.
Ceci étant dit, ça n'exclut pas que... Et là c'est la deuxième partie du mandat que le gouvernement a confié au groupe de travail, à M. Martel, un président qui est président à la fois des valeurs mobilières. Dans la deuxième partie du mandat, il y a une partie qui dit que ce groupe-là devra fournir au gouvernement, après avoir donné son opinion sur la raisonnabilité de l'offre, des informations ou des pistes de solution pour qu'à l'avenir ce genre de situations là, peu importe qu'elles aient été bien ou mal comprises, ne se répète plus. Un des exemples flagrants de ça, c'est qu'en bas d'un certain nombre d'actionnaires ou en bas d'un certain nombre d'individus qui investissent vous n'avez pas besoin de faire approuver votre prospectus auprès de la Commission des valeurs mobilières. C'est en bas de cinq, si je me souviens bien. Donc, il y a un paquet de sociétés qui se sont créées, en bas de cinq personnes, puis qui n'ont pas été obligées d'aller faire un tour à la Commission des valeurs mobilières. Les gens qui ont fait ça le savaient et ils ont fait exprès pour arriver à cinq, en bas de cinq. Les gens qui ont investi aussi à l'intérieur de ça, on ne peut pas présumer qu'ils ne savaient pas qu'en bas de cinq...
Et, nous, on a fait une autre expérience de notre côté pour être certains qu'on était probablement assez corrects. On a pris une série d'individus et on leur a demandé... dans une moyenne de 30 000 $, par exemple, on a dit: Connaissez-vous ça, vous autres, la recherche et le développement? Ils nous ont dit: Non, on ne connaît pas ça beaucoup. Et on a fait un petit peu offre de vendeurs. On a dit: On va vous vendre ça. Et, à la fin, il y en a 1 % qui a accepté. Donc, je ne sais pas si on a vendu ça comme eux autres vendaient ça, là, mais il y a comme dans ça une raisonnabilité de l'offre qu'il faut quand même examiner, qu'il faut quand même comprendre. Et il y a une partie avec laquelle on ne peut pas jouer, c'est celle qui existe dans la loi. Et, aussi, il ne faut pas commencer à créer des précédents pour que l'administration fiscale, demain matin, ça devienne quelque chose où on a une série de bureaux d'ouverts puis on a juste les cotisations selon ce que les gens ont compris.
Mais, ceci étant dit, on fait notre possible, M. le député de Nelligan, là. M. le Président, c'est un dossier vraiment difficile.
M. Williams: Oui.
M. Paré (Pierre-André): Et je pense que c'est sage, là, les décisions qui ont été prises de vouloir faire examiner ça par un groupe indépendant, la raisonnabilité de l'offre, de demander des... Et on verra, là, ce que le groupe va recommander, mais je peux vous dire qu'il y a eu beaucoup, beaucoup de précautions de prises de la part du Québec et, avec les gens d'Ottawa, on a insisté pour que les mêmes précautions soient prises. Et, actuellement, du côté du gouvernement fédéral, il y a 93 % des gens qui ont accepté l'offre. C'est évident que vous allez me dire que peut-être qu'il y en a qui ont été forcés, là, mais il y en a quand même 93 % qui, actuellement, l'ont acceptée. Et on ne peut pas non plus commencer à penser à des modifications rétroactives de la loi. Ce serait comme ouvrir la porte à d'autres façons d'agir dans les comportements fiscaux à l'avenir. Je pense qu'une des grandes leçons qu'on peut retirer de ça, c'est que, avant de s'embarquer dans d'autres formes d'investissements maintenant, peut-être que le gouvernement devra lui-même indiquer la valeur ou les démarches que les investisseurs pourraient faire. Et soyez assuré aussi que la Commission des valeurs mobilières a peut-être plus de prise sur les gens qui partent des sociétés en bas de cinq personnes, du côté des investisseurs. Mais tout ça reste à voir, avec les recommandations du comité et ce qui va être fait.
M. Williams: Merci, M. le sous-ministre, pour la réponse à cette question. Et, effectivement, c'est un dossier assez difficile. J'ai apprécié beaucoup votre... au moins quelque chose que j'ai entendu, une certaine ouverture, une certaine sensibilité aux nuances dans cette question. Et, aussi, vous-même avez dit qu'on doit s'assurer que ça n'arrive pas encore, des situations comme ça. Avec ça, je garde encore espoir. J'espère que nous ne sommes pas en train de créer 10 000 victimes. J'attends le rapport, mais je tiens compte de ce que vous avez dit.
Mais ma dernière question, M. le sous-ministre, sur ça. Qu'est-ce que je peux dire... Mme Dagenais, de chez moi, qui dit que, d'une façon ou l'autre, si elle doit payer dans un an, trois ans, elle doit vendre sa maison si la décision n'est pas changée.
M. Paré (Pierre-André): Bien, c'est parce que, là, elle vous répond, Mme Dagenais, sans avoir communiqué avec nous pour savoir de quelle façon elle pourra nous payer, dépendamment des recommandations du comité et de ce que le gouvernement retiendra de ce comité-là. Ça, c'est la première réponse que je peux vous faire, parce que si cette Mme Dagenais là communique avec nous, et avec l'offre qui est sur la table, et qu'elle dit qu'elle doit vendre sa maison, ce n'est pas sûr que nos percepteurs, chez nous, ne regarderont pas avec elle de quelle façon ça peut se passer, là.
M. Williams: Vos lignes téléphoniques sont prêtes à prendre 10 000 appels?
M. Paré (Pierre-André): On est organisé pour travailler avec l'ensemble des cas le lendemain de la décision.
M. Williams: Merci, M. le sous-ministre.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Marguerite-D'Youville.
(17 h 30)
M. Beaulne: Oui, merci, M. le Président. J'aimerais, dans un premier temps, un peu enchaîner sur ce dossier-là, parce que j'ai eu, suite à de nombreux cas dans ma région... À l'automne dernier, j'ai rencontré un groupe d'une centaine de personnes qui étaient victimes de cette situation-là, en présence du vice-premier ministre, alors ministre des Affaires internationales et maintenant ministre des Finances. Nous nous étions engagés auprès de ces gens à trouver une solution équitable à cette situation.
Ce qui nous a le plus perturbés dans les présentations qui nous étaient faites, c'étaient certaines allégations à l'effet que des fonctionnaires du ministère du Revenu auraient répondu à des gens qui s'enquerraient justement de la légitimité de ce processus-là que c'était tout à fait légal et qu'ils ne devaient pas se méfier du genre d'approche et de vente qui était fait par certains promoteurs. Alors, ce qui nous a intrigués, nous, M. Landry et moi, c'est l'aspect responsabilité du gouvernement du Québec là-dedans via ces allégations d'affirmations qui auraient été faites à ces gens-là par des fonctionnaires du ministère du Revenu.
Alors, ma question est la suivante. Vous dites qu'il y a un comité qui se penche sur cette question-là. Ce qu'on voudrait établir, nous, entre autres, ce n'est pas simplement avoir des explications strictement techniques, comme celles qui nous ont été données. On voudrait avoir une idée claire et précise de qui a la responsabilité de quoi dans cette histoire-là. Parce que je pense que ce n'est pas tout à fait exact de présumer que la plupart des investisseurs savaient dans quoi ils s'embarquaient. Il y en a qui se sont fait embarquer, je dirais plutôt, et c'est même, je pense, la majorité des cas. Et, pour nous, ce qui est important pour la suite des événements, pour un peu donner suite aux questions que posait mon collègue: Qu'est-ce qui va arriver une fois que la politique du gouvernement va être établie là-dedans? Qui porte la responsabilité de quoi? Et j'espère que le comité en question auquel vous avez fait allusion va se pencher également sur cette séquence d'événements. Puis j'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.
M. Paré (Pierre-André): Je ne peux pas présumer des conclusions du comité. Je ne les ai pas vues moi-même. C'est la première chose.
La deuxième chose, c'est que ce comité-là avait la responsabilité, selon les termes qui avaient été définis par le ministre des Finances à l'époque, le député de Crémazie, d'examiner la raisonnabilité de l'offre par rapport aux lois existantes et de faire des recommandations pour ne plus que cette situation-là se représente. Je comprends que vous cherchez à savoir, si, par exemple, des individus étaient dans des mauvaises situations financières et devaient avoir des difficultés de façon un peu plus permanente, qui a cette responsabilité-là ou qu'est-ce qui arrive.
Nous, ce qu'on peut vous dire, c'est qu'on attend, d'abord, les résultats du rapport et, deuxièmement, on attend de voir c'est quoi les recommandations. Une fois qu'on les aura, on va s'asseoir avec le ministre responsable pour voir si le ministre va accepter les recommandations ou s'il va nous dire de les accepter et, par la suite, bien, on va procéder selon les instructions. Je ne peux pas vous dire aujourd'hui si... Tout ce qu'on peut vous dire, c'est que, lorsque les instructions nous auront été données puis s'il y a avis de cotisation à envoyer ou s'il y a perception à faire, les instructions qui sont données, c'est que la perception se fasse correctement et non pas comme si c'était un avis de cotisation normal, qu'il y ait des ententes pour éviter que les gens soient dans des mauvaises situations financières pour absolument rien.
D'un autre côté, c'est clair que, le lendemain matin, on ne mettra pas à zéro tous les avis de cotisation. Il y a toutes sortes de situations dans ces cas-là, et on va être obligé d'apprécier chacun des cas. Lorsqu'on va faire la perception, on va les apprécier un par un. On ne les appréciera pas collectivement. On ne dira pas: Parce que M. ou Mme Y a de la misère à payer, l'ensemble de la population a de la difficulté. On n'est pas dans un problème de syllogisme ou de sophisme. On est dans de l'administration fiscale. Et c'est de cette façon-là qu'on va travailler, puis c'est toujours comme ça qu'on travaille, d'ailleurs. Je veux dire, la loi, elle s'applique de façon égale à tout le monde. Mais, à la fin, s'il y a des gens qui ont de la difficulté à payer, on fait des ententes de paiement. On fera la même chose dans ce cas-là aussi.
M. Beaulne: Oui, sauf que ma question est un peu plus pointue que ça. Il y a des gens qui nous ont dit, lors de la rencontre qu'on a eue avec eux, qu'ils s'étaient enquis au ministère du Revenu, auprès de certaines personnes pour savoir si, effectivement, ce que leur présentaient les promoteurs était valable ou non et qu'ils se seraient fait répondre qu'ils pouvaient y aller en toute sécurité. Alors, moi, en tout cas, personnellement, comme député... puis je suis sûr que M. Landry va vouloir une réponse à cette question-là aussi: Jusqu'à quel point des gens du gouvernement du Québec, en particulier du ministère du Revenu, à qui on aurait posé la question... C'est une question de vérification, mais je vous dis: C'est une allégation qui a été faite par plusieurs personnes. Alors, nous, ce qu'on voudrait savoir là-dedans, c'est: Jusqu'à quel point, oui ou non, il y a des fonctionnaires du ministère du Revenu qui ont répondu à ces gens-là qui leur posaient des questions en toute bonne foi, puisque ce n'étaient pas des experts dans la matière... est-ce que, oui ou non, il y a des gens au ministère du Revenu qui leur ont répondu qu'ils pouvaient aller de l'avant et que ça ne posait pas problème? C'est ça, la question.
M. Paré (Pierre-André): Nous, ce qu'on a dit dans le règlement, c'est la réponse suivante: S'il y a des cas plus pointus et que les gens pensent que la façon dont la cotisation est envoyée n'est pas correcte, parce qu'ils ont reçu des informations différentes ou d'autres sortes d'informations de notre ministère, on est prêts à réexaminer un certain nombre de cas qui sont plus particuliers. Et, dans notre système de droit, les gens ont des recours additionnels. S'ils prétendent qu'on a donné des réponses, ils peuvent toujours essayer de faire valoir ce droit-là et, aussi, ils peuvent tous revenir contre les promoteurs si les promoteurs existent encore. Ça aussi, c'est un deuxième recours avec lequel ils peuvent travailler. Mais on sait qu'il y a un certain nombre de promoteurs qui sont disparus, donc il y a une certaine possibilité qui est disparue. La deuxième chose, c'est: Si quelqu'un nous arrive avec une lettre écrite par un de nos officiers qui dit de façon claire que c'est un bon investissement, puis que c'est correct, puis qu'on donne un avis légal, bien, là, on va la considérer, notre lettre.
M. Beaulne: Non, mais sans aller jusqu'à un avis légal... Moi, ce que j'ai cru comprendre de la part des gens qui disaient ça, c'est surtout des gens qui avaient téléphoné; ça s'était fait par téléphone, ça. Bon. S'il y en a qui allèguent ça, on a leur liste, c'est facile de leur demander, s'ils ont parlé à quelqu'un, à qui ils ont parlé, et ainsi de suite. Mais je vous dis tout simplement, puis je ne porte pas d'accusation, tout ce que je dis, c'est que c'est une allégation qui a été faite par ces gens-là, et ça nous a surpris. Et, avant de déterminer une politique ou de proposer un règlement définitif à ces gens-là, il faudrait examiner quelle est la part de responsabilité du gouvernement du Québec là-dedans en termes d'information qui a été donnée ou qui aurait, disons, été donnée à des investisseurs.
M. Paré (Pierre-André): Je pense qu'on va être obligés de penser différemment. On va être obligé de dire: Voici ce qu'est l'offre, à la fin, l'envoyer, et, s'il y a des gens qui ont des prétentions, ils vont nous les faire valoir. C'est toujours de cette façon-là qu'on procède. On ne procède jamais en disant: Pensez-vous que vous devriez recevoir un avis de cotisation? Oui, on va vous l'envoyer.
Bars et débits de boissons
M. Beaulne: Ma deuxième question, ça n'a rien à voir avec ça, c'est au niveau des bars. Ça rejoint encore les taxes non payées. On a parlé depuis le début de la journée, depuis le début de cet échange, on a parlé des méthodes qu'avait mises sur pied le ministère du Revenu au niveau du contrôle de la vente des boissons alcoolisées, les vérifications, et ainsi de suite. Mais il y a une question qui nous préoccupe énormément, c'est l'évasion fiscale qui provient des tenanciers de bars et des débits de boissons. Je l'ai vérifié moi-même dans trois régions métropolitaines autour de Montréal, à Laval, à Montréal et sur la rive sud, où vous avez souvent, pendant les 5 à 7, pendant ce genre d'activité là, les caisses enregistreuses des bars qui demeurent ouvertes. En d'autres mots, il n'y a aucun enregistrement de la transaction. Pourtant, ces gens-là, lorsqu'ils vendent la bière ou la boisson ou la consommation au consommateur, chargent la TPS et la TVQ. Moi, dans mon langage à moi, ça, c'est de la fraude et du vol. J'aimerais savoir s'il y a... Et, simplement par un petit calcul, une petite règle de trois, à l'oeil, en regardant le monde qu'il y a dans les établissements par rapport à ce qui est consommé, on peut s'imaginer le manque à gagner du gouvernement là-dedans.
(17 h 40)
Alors, est-ce que vous pensez qu'il y aurait lieu ou que ça serait faisable de brancher les caisses enregistreuses de ces gens-là sur un ordinateur au ministère du Revenu pour que les transactions soient directement enregistrées, comme ça se fait pour les terminaux de Loto-Québec et puis maintenant les vidéopokers, que, mensuellement ou trimestriellement, selon la période qui est prévue pour la remise de la TVQ, ils recevraient du ministère du Revenu un état de compte duquel ils pourraient déduire les intrants pour la remise finale et, également, exiger, comme ça se fait en Europe, que les gens, à chaque fois qu'ils commandent une consommation, reçoivent un ticket, une preuve de consommation, ce qui ferait en sorte que la caisse serait au moins obligée de se fermer pour émettre le reçu, en quelque sorte?
M. Paré (Pierre-André): Je vous remercie de votre question, parce que c'est une belle suggestion qui nous est faite depuis quelque temps: Pourquoi vous ne branchez pas directement toutes les caisses enregistreuses, comme Loto-Québec le fait, de façon à ce que la taxe se dépose automatiquement dans les comptes du gouvernement au fur et à mesure que les ventes se font? C'est possible de le faire. On me dit qu'au Nouveau-Brunswick il y a une entente qui est faite avec une couple de firmes de consultants pour examiner la possibilité que ce soit fait à la grandeur du Nouveau-Brunswick. Évidemment, le Nouveau-Brunswick, c'est un petit peu différent du Québec, mais ça reste quand même que c'est une possibilité qui existe.
De brancher toutes les caisses qui sont dans les bars, parce que, comme vous le dites, les caisses enregistreuses, le tiroir reste ouvert pendant qu'ils servent le client, c'est possible. Mais, nous, quand on fait nos vérifications, quand on va dans les bars, que les caisses soient demeurées ouvertes ou pas, on a des moyens alternatifs de vérification, puisqu'on reçoit de tous les gens qui font les ventes de boissons dans les bars... on reçoit l'information de la Société des alcools, on reçoit l'information des brasseurs, on reçoit l'information des micro-brasseurs, de tout ce qui s'est livré, on peut trouver un inventaire. Je ne vous dis pas qu'on ne se fait pas jouer sur une bouteille ou deux, mais on peut trouver un inventaire qui est assez exact de ce qui a été livré. Et, en ayant trouvé cet inventaire de ce qui est livré, on peut revenir à une méthode alternative de vérification s'ils n'ont pas de cahiers ou s'ils n'ont pas de livres ou s'ils n'ont pas de pièces justificatives, un peu comme on fait dans le cas des vidéopokers, décréter un montant ou un prix, trouver un achalandage et faire une cotisation, où ça devient... la même chose qu'on a parlé tantôt, c'est à eux à nous prouver le contraire.
On fait ce travail-là, et, actuellement, on en a fait plusieurs. Je pense qu'on a 1 036 vérifications, si mon information est exacte, on a 1 036 vérifications de faites dans le domaine des bars actuellement, du 1er novembre 1994 au 31 janvier 1996, pour des cotisations de 4 500 000 $ de droits. Lorsqu'on va dans les bars, maintenant, on fait tout, on fait la TVQ, on fait la TPS, on fait le tabac, on fait le carburant puis on fait l'impôt. Alors, on prend l'ensemble; ça nous permet de voir c'est quoi, les résultats financiers, si c'est correct, ce qu'ils nous ont déclaré comme ventes, si c'est correct, ce qu'ils nous ont déclaré comme taxes, si c'est correct, ces choses-là. On ne fait pas tous les bars en même temps, mais on en est rendu à 1 036 vérifications en dedans de deux ans, ça commence à être respectable.
Quant à votre suggestion d'avoir la caisse enregistreuse branchée directement sur les ordinateurs du ministère, c'est une excellente suggestion. Ça a été essayé dans deux endroits, à ma connaissance. Il y a un endroit, en Australie, si je me souviens bien, que j'ai vu dans la littérature, où ça avait été essayé. Ça a bien fonctionné jusqu'à temps qu'une couple de smattes trouvent de quelle façon ils pouvaient jouer dans le programme informatique pour en envoyer un petit peu moins. Alors, on va probablement, un jour, passer à un branchement presque automatique des caisses enregistreuses pour les dépôts de taxes et, après ça, ce qu'on aura à faire comme membres du personnel du ministère du Revenu, ce sera des vérifications sur la façon dont l'informatique est traitée. Je veux dire, à chaque fois qu'on avance, qu'on trouve un nouveau moyen, il faut trouver un nouveau moyen de vérification. Il y a toujours quelqu'un qui cherche un moyen de passer à côté.
M. Beaulne: Ça, de toute façon, ça fait partie de la vie...
M. Paré (Pierre-André): C'est ça.
M. Beaulne: ...puisque c'est un peu ce que doivent faire les institutions financières. Mais il me semble que, si on fait l'analyse coûts-bénéfices de toute l'opération, en bout de ligne, on sortirait... c'est peut-être plus facile d'essayer de déjouer les manipulateurs du système informatique que de perdre des millions de dollars ou d'avoir un système de vérification beaucoup plus lourd, comme celui qui existe présentement.
M. Paré (Pierre-André): M. le Président, personnellement, je suis complètement d'accord avec le député, avec sa suggestion. C'est le temps de l'implanter, la façon de le faire, comment on le fait, les paiements ou les déboursés que ça implique de les installer et, par la suite, si ça peut s'étendre à d'autres domaines, la vente au détail, etc. Je suis tout à fait d'accord avec ça. Il s'agit, là, de voir aussi si, politiquement, ce serait une solution qu'il serait facile de vendre... On a déjà essayé de travailler directement avec un certain nombre de fournisseurs. C'est facile avec un certain groupe, des groupes de grande surface ou ceux qui ont des gros chiffres d'affaires, qui sont bien équipés de façon informatique. Ordinairement, ça revient au même pour eux d'être branchés puis c'est moins compliqué puis on reçoit tout... puis c'est moins compliqué pour nous aussi, parce qu'on reçoit toute l'information et on reçoit tout l'argent. Mais c'est lorsqu'on arrive avec des entreprises qui sont de plus petite taille, qui sont moins informatisées, qui sont moins capables de travailler avec ces nouvelles technologies là; ceux-là, on a un petit peu plus de difficultés à les convaincre, et c'est souvent ceux-là, des fois, qui oublient le tiroir ouvert aussi. Là, il faut travailler avec cette situation-là. Peut-être pas l'imposer trop rapidement, mais démontrer plus les avantages de le faire, parce que la tendance va être de dire: Si vous voulez nous imposer une nouvelle méthode, envoyer ça directement... Dans le cas des vidéopokers, c'est assez simple, c'est le gouvernement qui installe sa machine. Est-ce que, là, ce serait nous qui installerions les caisses enregistreuses branchées directement? Il y a des coûts associés à ça. Il y a sûrement des bénéfices, mais je ne peux pas vous dire aujourd'hui si ça se paierait dans la première année ou dans la deuxième année, ou si ça prendrait cinq ans à se payer, ou quelle sorte d'investissement ça prendrait pour le faire, ou de quelle façon on pourrait le faire. On n'a jamais fait l'étude de ça, mais ça vaut la peine de le regarder, par exemple.
M. Beaulne: Je vous remercie.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Shefford.
Méthodes de perception
M. Brodeur: Merci, M. le Président. Il n'est pas rare pour plusieurs d'entre nous, pour tout le monde d'entre nous en tant que députés, de recevoir à nos bureaux des gens qui se sont plaints des méthodes utilisées par le ministère pour la collection de certains montants... Puis, souvent, comme lecture de chevet, peut-être comme plusieurs de mes confrères, je lis la jurisprudence. Tantôt, j'étais ici puis ça m'est revenu à l'esprit. J'ai une jurisprudence ici et j'aimerais avoir vos commentaires, voir si les méthodes qui existent chez vous sont toujours les mêmes. J'ai une jurisprudence qui date de 1992. Le sous-ministre du Revenu du Québec contre France Caron. Je peux nommer les noms parce que c'est un jugement qui a été rendu public, qui fait état de violence, de craintes raisonnables, d'abus de droits, de méthodes de collecter contraires à la Charte des droits et libertés de la personne. Puis je vais chercher quelques mots là-dedans sans faire état complet du jugement. On parle ici de harcèlement, de refuser à quelqu'un de consulter un avocat, d'user de chantage, de contraintes, même si légales, cependant... même si le moyen était légitime, le but ne l'était pas. On parle que c'est contraire à la Charte des droits et libertés de la personne, d'astuces un peu grossières, de harcèlement, de harassement, de violence, etc., pour collecter des sommes.
Donc, étant donné que ça a fait l'objet d'un jugement de la Cour supérieure, j'imagine que le sous-ministre du Revenu et ses acolytes ont pris normalement connaissance de ce jugement-là et ont sûrement donné des instructions pour remédier à ce genre de méthode pour collecter des impôts. J'aimerais les entendre là-dessus.
M. Paré (Pierre-André): M. le Président, vous parlez de 1992, si je comprends bien, là. C'est certain qu'on a des instructions qui ont été données et qui sont données continuellement à nos gens qui font de la perception pour que ce genre de situation là ne se produise pas. Là, je n'ai pas vu tout le jugement, je n'ai pas vu toutes les allégations, je n'ai pas tout l'ensemble du dossier. Mais le directeur de la perception est avec nous autres ici, c'est lui qui est responsable de l'unité, du Centre de perception fiscale. M. Cayer pourra peut-être vous donner un éclairage plus grand sur ce genre de harcèlement là, si jamais il existe encore, mais ça me surprendrait.
M. Cayer (Gabriel): D'abord, un jugement de même, vous devez en avoir rien qu'un.
M. Brodeur: J'en ai un au moins.
M. Cayer (Gabriel): Il y en a un...
M. Brodeur: J'en ai un, c'est déjà trop peut-être.
(17 h 50)
M. Cayer (Gabriel): ...et j'aimerais bien qu'il n'existe pas. Mais il y en a un. Dans n'importe quelle organisation, une chose de même peut arriver. En tout cas, on l'a découvert suite à ce jugement, on a évidemment agi, et vous allez retrouver dans la documentation qui a été remise ce matin toute la préoccupation qu'on apporte en ce qui a trait au comportement et à l'attitude des percepteurs. C'est dommage, c'est des choses qui sont inadmissibles, mais ça s'est fait, puis on l'a découvert. Quand il y a des comportements qui ne vont pas aussi loin que ça mais qui sont reprochables, il nous appartient de prendre les mesures nécessaires pour que ça s'élimine. Mais, dans une organisation avec 850 personnes, ça peut arriver, hélas!
M. Brodeur: Je comprends bien, M. le Président. De toute évidence, je vous donne le bénéfice du doute et le bénéfice du doute à chacune des personnes qui sont au service du ministère, sauf que c'est fréquent qu'on reçoive des gens, quand même, à nos bureaux de comté... C'est certain qu'il y a deux côtés à une médaille. Sauf que, souvent, on nous fait état de mots qui auraient peut-être été un peu déplacés ou de méthodes qui frisent la légalité, ou j'irais jusqu'à dire, entre parenthèses, peut-être le savoir-vivre, à l'occasion. Mais on sait qu'on est tous des êtres humains. Souvent, dans des discussions qui sont serrées, on peut avoir des écarts de langage. Mais est-ce que les mesures ont été prises? Est-ce que cette personne-là, par exemple, est encore à... J'imagine, vous semblez être au courant de l'arrêt de jurisprudence. Est-ce qu'il y a un moyen de contrôle sur ces gens-là? Est-ce que votre ministère a un département auquel on confie le soin de vérifier la façon de faire de chacun de vos employés qui sont chargés de collecter les contribuables?
M. Cayer (Gabriel): L'attitude des percepteurs est d'abord vérifiée par leurs gestionnaires immédiats. Il y a aussi les plaintes qui sont acheminées au ministère, qui sont, pour nous, des indicateurs de performance en matière de qualité. Ceux dont le comportement est répréhensible, évidemment qu'on les pointe puis on les suit de près. Certains, quand ils ne sont pas des permanents, on a réussi à ne pas les garder à notre service, évidemment. Mais, à tous les jours, ces gens-là font face à des situations de tension. Les bons contribuables, en général, on ne les voit pas. Ceux qui ne doivent pas d'argent, ceux qui n'ont pas de problème, on ne les voit pas. Ceux qu'on voit et ceux sur lesquels on exerce nos pressions pour être payé sont, évidemment, des mandataires ou des contribuables qui sont en difficulté d'une façon ou d'une autre. Ils ne veulent pas ou ils ne peuvent pas payer. Donc, souvent, les discussions ont lieu dans des moments difficiles. Maintenant, de savoir ce qui a été dit, on n'enregistre pas les conversations de ce qui a été dit. On enseigne à nos gens..
M. Brodeur: Est-ce que vous avez un moyen de contrôle, tout simplement, pour...
M. Cayer (Gabriel): On n'a pas de moyens de contrôle, on n'épie pas et on n'enregistre pas les discussions qui ont lieu entre un débiteur et notre percepteur et/ou son représentant au contribuable. On n'a pas ça. Sauf que les plaintes qui reviennent contre un même individu, bien, quand ça fait deux, trois, quatre reproches qu'on a, bien, ça commence à peser lourd, et c'est là qu'on exerce des moyens pour s'assurer que ce n'est pas ça. C'est difficile, mais ça fait partie... On est actuellement à faire un sondage auprès de la clientèle précisément pour vérifier le degré... je ne dirais pas le degré de satisfaction des percepteurs versus la population, mais le degré d'insatisfaction, jusqu'à quel point c'est perçu. Donc, on va le faire. Évidemment que ce ne sera pas nous-mêmes qui allons le faire, parce qu'on serait un petit peu juge et partie là-dedans. Mais on le fait faire et ça devrait être réalisé d'ici les trois prochains mois. Ça fait partie de notre plan d'action. On prend les moyens pour essayer d'améliorer ça, mais il y aura toujours de la place pour l'amélioration. Ça, c'est évident.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de l'Acadie, je vous laisse la parole. Je ne voudrais pas vous limiter, mais j'aimerais ça que vous puissiez laisser quelques minutes parce que j'aurais une recommandation à faire à la fin de nos travaux, avec les remarques finales aussi, les remerciements.
Perception des pensions alimentaires
M. Bordeleau (Acadie): Parfait. Alors, disons, je vais essayer de synthétiser un peu. C'est un sujet, je pense, qui n'a pas été abordé aujourd'hui, c'est la question de la perception des pensions alimentaires. On se rappelle que, le 11 octobre dernier, il y avait eu une annonce qui avait été faite par le gouvernement et qui visait à accélérer un peu la mise en place du processus de perception, du mois de mai au mois de décembre. Alors, on sait également qu'à ce moment-là, au moment où ça a été mis en place, les gens du ministère avaient eu une formation quand même assez sommaire. Il y avait un problème, à ce moment-là, de transfert des percepteurs du ministère de la Justice vers le ministère du Revenu pour mettre en place toute l'opération. Alors, j'aimerais, dans un premier temps, que vous nous disiez... Je vais vous poser quelques points puis, peut-être, vous pourriez faire une réponse globale. Si vous pouviez nous confirmer où on en est au niveau du transfert des percepteurs de la Justice vers le ministère du Revenu et, également, nous dire: Depuis le 1er décembre, les cas sur lesquels il y a eu des décisions, ça représente combien de dossiers qui ont été reçus depuis le 1er décembre au ministère? Combien de dossiers parmi ces dossiers-là ont été traités? Combien de chèques ont été émis? Qu'est-ce qui reste à traiter? Et, compte tenu du fait aussi puis c'est un troisième aspect que, à compter du mois de mai, maintenant tous les cas vous seront transférés, ça veut dire combien de cas, à ce moment-là, vous allez avoir à traiter? Est-ce que vous avez les effectifs en termes de ressources pour pouvoir répondre à ces besoins-là?
M. Paré (Pierre-André): M. le Président, c'est une belle question, puisqu'on a commencé à travailler avec les nouvelles ordonnances de pension alimentaire le 1er décembre au lieu du 1er mai, tel qu'il avait été convenu. Ça a donc obligé le ministère à travailler différemment de ce qu'il avait prévu, c'est-à-dire à utiliser les moyens alternatifs, à travailler avec des micro-ordinateurs et même, quelquefois, à travailler manuellement. Le rythme de croisière des ordonnances est normalement... des nouvelles ordonnances, c'est-à-dire, des personnes qui divorcent, c'est d'à peu près 1 000 par mois. Cependant, ce qui est arrivé, c'est que les juges qui rendent des jugements... ont commencé à rendre des jugements et, lorsqu'ils révisaient un jugement pour quelqu'un qui avait déjà eu un jugement, c'est-à-dire une personne, par exemple, qui a un enfant qui atteint 18 ans et qu'il faut réviser le montant parce que l'âge de l'enfant a changé, c'est devenu une nouvelle ordonnance. Alors, au lieu que le volume soit de 1 000, il est devenu de 2 000, de 3 000. C'est devenu un grand nombre de nouvelles ordonnances. Bon, ce n'était quand même pas le temps de commencer à se plaindre, c'est une loi qui a été votée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, on a dit: On va se débrouiller avec notre problème.
En période de croisière, on devrait avoir jusqu'à 130 000 ordonnances à administrer. Actuellement, au 31 janvier 1996, on a 3 659 ordonnances de reçues. De ces ordonnances-là, on en a 741 qui sont des modifications. Il y en a à peu près 2 000 qui sont des nouvelles ordonnances pour lesquelles on doit se préoccuper d'aller chercher l'argent auprès du débiteur pour payer, dans la plupart des cas, une créancière. Au 31 janvier, on émet actuellement pour 501 personnes des pensions alimentaires et on a actuellement de perçu 117 863 $ pour ces créances-là. C'est un processus qui va bien. Il y a eu quelques difficultés, si on peut appeler ça des difficultés, avec le ministère de la Justice... Je termine rapidement, M. le Président, pour vous permettre de faire votre recommandation finale. On a eu quelques difficultés mais pas des difficultés majeures. Tous ces dossiers-là de transfert de personnes, c'est fini, c'est réglé avec le ministère de la Justice.
Une des difficultés qu'on rencontre, par exemple, ce sont des difficultés administratives. Dans beaucoup de cas, on reçoit un jugement avec deux noms dessus. On ne connaît pas l'adresse, on ne connaît absolument rien, on ne sait pas les montants. Il faut faire beaucoup de recherches pour travailler. Ça, on n'avait pas estimé ces temps-là. Mais on ajoute les gens qu'il faut pour travailler et pour donner un service correct de façon à ce que... Cette loi-là est faite pour que les créanciers et les créancières reçoivent un montant d'argent de façon régulière pour leurs enfants, alors, on fait ce qu'il faut pour donner un service correct.
M. Bordeleau (Acadie): Combien de personnes sont passées du ministère de la Justice au ministère du Revenu, dans les percepteurs?
M. Paré (Pierre-André): Par coeur, je ne le sais pas. Je pourrais vous faire parvenir le chiffre, mais je pense que c'est une trentaine.
M. Bordeleau (Acadie): Est-ce que c'est complet, ça termine, ou s'il y en a d'autres qui vont...
M. Paré (Pierre-André): Je pense qu'il y en a encore quelques-uns qui doivent se joindre dans différents palais de justice à l'extérieur. Mais ce qui arrive, c'est que, dans certains palais de justice, il y avait des parties de personnes qui étaient consacrées à ça. Alors, pour transférer des parties de personnes, c'est un peu complexe.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bon, si vous me permettez, avant d'interrompre une conversation...
M. Bordeleau (Acadie): Oui, juste une dernière remarque puis...
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Non, non, c'est parce que, si on veut me permettre... si les membres sont d'accord, un consentement pour qu'on dépasse un peu, de cinq minutes, nos travaux, parce que je vais être obligé de vous couper pareil à 18 heures pour le demander, puis je n'aime pas ça, couper le monde. Voilà. Allez!
M. Bordeleau (Acadie): Je veux juste vérifier si je comprends bien. Les chiffres que vous avez donnés tout à l'heure, ça veut dire qu'il y a à peu près, au fond, 3 000 dossiers, depuis le 1er décembre, sur lesquels il n'y a pas eu de chèque d'émis et qui sont en processus.
M. Paré (Pierre-André): Non, il y en a...
M. Bordeleau (Acadie): Vous avez parlé de 3 600.
M. Paré (Pierre-André): Oui, 3 600.
M. Bordeleau (Acadie): Vous avez dit qu'il y avait 500 chèques qui étaient émis...
M. Paré (Pierre-André): 500 chèques, parce que les autres, c'est soit qu'on est en train de les étudier...
M. Bordeleau (Acadie): C'est ça.
M. Paré (Pierre-André): ...soit qu'on est en processus pour aller les chercher, soit qu'on est à... Et il y en a aussi que la pension continue à être payée par le débiteur normal parce que c'est une révision. Quand c'est juste une révision, on vérifie tout de suite avec le débiteur s'il peut continuer à payer pour un mois ou deux. Au lieu de l'embarquer dans notre système pour se donner de l'ouvrage, on l'embarque tout simplement au mois de mai. Mais, quand il ne peut pas, on l'embarque tout de suite. Ou quand une dame nous appelle puis elle dit: Regardez, j'ai un peu de problèmes avec mon mari, on l'embarque tout de suite aussi.
(18 heures)
M. Bordeleau (Acadie): O.K. Puis vous avez 500 chèques d'émis, que vous émettez, à peu près.
M. Paré (Pierre-André): On en émet 500, mais on pense qu'à la fin du mois de mars on va être rendu à peu près avec 1 500 personnes dans le système.
M. Bordeleau (Acadie): Ça va. Merci.
Motion proposant de recommander au gouvernement de statuer sur la prééminence de la Loi sur l'impôt afin de permettre au ministère du Revenu d'obtenir les informations incluses dans les fichiers des ministères et organismes gouvernementaux
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de l'Acadie. On s'excuse si on vous presse.
Suite aux remarques que le sous-ministre, M. Paré, nous a faites au cours de nos travaux sur les difficultés que le ministère a d'obtenir certaines informations d'organismes gouvernementaux, ce qui lui permettrait de diminuer substantiellement l'évasion fiscale et le travail au noir, je proposerais la recommandation suivante:
«Considérant que plus d'un milliard de revenus fiscaux échappent annuellement au gouvernement du Québec;
«Considérant que le ministère du Revenu doit avoir le maximum d'outils à sa disposition pour contrer ce fléau;
«Considérant que plusieurs ministères et organismes gouvernementaux, notamment la Régie de l'assurance-maladie du Québec, la Société de l'assurance automobile du Québec, la Commission de la construction du Québec et le ministère de l'Emploi et de la Solidarité (ex-ministère de la Sécurité du revenu) possèdent des fichiers de renseignements pouvant être utiles au ministère du Revenu afin d'assurer l'application des lois fiscales;
«La commission du budget et de l'administration recommande au gouvernement du Québec:
«de statuer sur la prééminence de la Loi sur l'impôt, afin de permettre au ministère du Revenu d'obtenir de façon globale les informations incluses dans les fichiers des organismes gouvernementaux et des ministères possédant de tels fichiers, pour faciliter l'identification des contribuables plus à risque.»
Et M. le député de Nelligan aurait un ajout.
Motion d'amendement
M. Williams: Oui, M. le Président. Dans l'esprit de collaboration que nous avons eu aujourd'hui, je voudrais suggérer l'ajout suivant, comme deuxième alinéa de votre résolution:
«de faire en sorte que tous les ministères et organismes gouvernementaux prennent leurs responsabilités et agissent en collaboration avec le ministère du Revenu pour éliminer l'évasion fiscale dans leurs secteurs d'activité.»
Mise aux voix
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Donc, est-ce que l'amendement du député de Nelligan est adopté?
Une voix: Oui, adopté.
M. Bertrand (Charlevoix): Juste une question d'information.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, M. le député de Charlevoix.
M. Bertrand (Charlevoix): Est-ce que quelqu'un rédige de façon... C'est l'expression «prennent leurs responsabilités» où j'ai...
M. Williams: «prennent leurs responsabilités et agissent».
M. Bertrand (Charlevoix): Oui, mais il y a une différence entre «prennent leurs responsabilités et agissent» et...
M. Williams: C'est les deux.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il y a les deux.
M. Williams: C'est les deux, là.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il y a les deux. On a attaché ça comme il faut.
M. Williams: Ensemble, là.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): On a attaché comme il faut.
M. Bertrand (Charlevoix): Parce que «prennent leurs responsabilités», ça signifie qu'actuellement ils n'ont seulement qu'à dire: On la prend puis on y va.
Une voix: Non, mais agissent...
Une voix: Il a dit «agissent» aussi.
M. Williams: Oui, j'ai dit «et agissent».
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bon. Est-ce que...
M. Bertrand (Charlevoix): Moi, en autant que le mot...
M. Williams: C'est l'esprit de mon intervention.
M. Bertrand (Charlevoix): Bon, en autant que l'esprit est respecté, je n'ai pas de problème.
Mise aux voix de la motion amendée
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Est-ce que la proposition, telle qu'amendée, est adoptée?
Une voix: Oui, oui.
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Sur ces mots, je remercie le sous-ministre du Revenu, M. Paré, et ses adjoints, ses collaborateurs, pour la masse d'informations qu'ils nous ont fournies cet après-midi. Je pense que tant les membres de la commission que chez vous, nous avons une seule volonté, c'est d'essayer de récupérer le plus possible les sommes qui sont dues au gouvernement et de faire payer les contrevenants pour que ceux qui paient habituellement paient moins. Je remercie également les membres de la commission. M. le Vérificateur général nous a accompagnés tout au long de la journée. Je remercie également le personnel de la commission.
Avant de terminer, je pense, M. le sous-ministre, que vous auriez quelques mots de la fin.
M. Paré (Pierre-André): Bien, simplement pour remercier mes collaborateurs et remercier la commission de nous avoir reçus et de nous avoir aidés à nous diriger correctement dans les questions qui nous ont été données. On espère avoir donné l'ensemble des réponses satisfaisantes. Celles qui manquent, on va vous les faire parvenir rapidement. C'est toujours un plaisir pour nous autres de venir à cette commission pour discuter d'imputabilité et des différents cas. Merci beaucoup.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): On vous en remercie. M. le député de Nelligan, pour le mot de la fin.
M. Williams: Très brièvement, M. le Président. Je voudrais aussi ajouter mon nom pour dire merci au sous-ministre et à tout son entourage, aux membres du côté ministériel. Et je voudrais dire exactement la même chose que vous, sauf que je voudrais aussi ajouter qu'on doit faire tout ça avec justice et humanité. Merci.
Le Président (M. Baril, Arthabaska): Donc, la commission du budget et de l'administration ayant complété son mandat, j'ajourne les travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 5)