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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mercredi 16 juin 1993 - Vol. 32 N° 64

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi n° 90, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur le tabac, la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

(Onze heures quarante-deux minutes)

Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de l'administration reprend l'étude du projet de loi 90. Nous en étions à l'article 17. La parole était à M. le député de Montmorency.

Madame a des remplacements.

La Secrétaire: M. Audet (Beauce-Nord) est remplacé par M. Houde (Berthier); M. Chagnon (Saint-Louis) par M. Gobé (LaFontaine); M. Després (Limoilou) par M. Messier (Saint-Hyacinthe); M. Lazure (La Prairie) par M. Chevrette (Joliette).

Le Président (M. Lemieux): Merci, madame. La parole est maintenant à M. le député de Montmorency.

Loi concernant l'impôt sur le tabac Infractions et peines (suite)

M. Filion: Merci, M. le Président.

Nous étions à l'article 17 du projet de loi, où nous discutions du quantum de la pénalité qui, comme on le disait, va mettre plus de pression à des endroits où, à toutes fins pratiques, on va créer plus de mal que de bien.

Quand on a terminé la commission, M. le Président, je mentionnais que les dépanneurs ont, pour plusieurs, pour fins de survie financière, accepté de vendre du tabac de contrebande — pour fins de survie financière, j'ai bien dit, M. le ministre — parce qu'ils n'avaient pas le choix, ils n'en vendaient plus. À ce moment-ci, avec un projet de loi comme celui-là, ils vont se retrouver avec une pression indue, où on va, quelque part, les obliger... Bien, les obliger... c'est-à-dire qu'ils vont devoir se légaliser, s'ils ne veulent pas s'attirer les foudres du ministre du Revenu, foudres qui pourraient, à toutes fins pratiques, juste avec les pénalités, de toute façon, leur faire fermer leur commerce.

Alors, ils sont un peu dans un cul-de-sac avec ce projet de loi. Ils sont dans un cul-de-sac, parce que, en revenant dans un marché légal — comme le projet de loi ne fermera pas la porte à la contrebande — ils vont se retrouver encore une fois en concurrence avec les contrebandiers, en concurrence à un point tel qu'ils vont revenir au statu quo, c'est-à-dire qu'ils ne vendront plus de tabac. Alors, on les met dans une situation de difficultés financières inévitables. Peu importe la carte qu'ils vont choisir, ils seront face à une situation où, à toutes fins pratiques, leur principale source de revenus, qu'était le monde de la cigarette, ne leur est plus acquise. A ce moment-là, ils vont se retrouver dans une situation où ils vont devoir penser à fermer leurs portes, pour ceux qui ont essayé de survivre en utilisant ce moyen du bord qui leur était offert. Je pense que ces gens-là, les dépanneurs, seront probablement la cible parmi les commerçants, ceux qui vont être les plus touchés par le projet de loi.

Si le projet de loi avait effectivement eu pour conséquence de faire une pression telle qu'on aurait vraiment repris le marché et remis la situation à la normale dans l'économie au niveau du tabac, à ce moment-là, je pense qu'ils auraient pu tirer leur épingle du jeu en continuant à vendre du tabac dans un marché légal. Mais on sait pertinemment que ces gens-là ne seront pas capables de vendre du tabac dans un marché légal, compte tenu du fait que la contrebande ne sera pas enrayée.

C'est là, je pense, que nos lois fiscales sont rendues complètement déplacées. C'est nous, les législateurs, qui sommes en train de faire des lois pour créer des concurrences complètement démentielles. Quand vous êtes rendus à créer une loi fiscale où vous mettez un commerçant, qui veut opérer légalement, dans une situation de faillite, moi, je pense qu'on n'est plus du tout un législateur qui mérite le respect de la population, parce que, quelque part, on n'a pas, nous, comme législateurs, en matière fiscale, à imposer des pénalités qui compromettent la survie de ces dépanneurs.

M. le Président, j'insiste sur ça, parce que, moi, je crois profondément, pour avoir été présent au dossier depuis maintenant plusieurs mois... Plusieurs personnes m'ont appelé, surtout des petites entreprises, et elles disaient: M. Filion, écoutez, on ne veut pas prendre le marché de la contrebande, mais on n'a plus le choix de le prendre, sinon c'est nous qui allons disparaître. On va perdre nos emplois, on va perdre notre pain et on va perdre notre beurre.

C'était clair, et pas uniquement dans le monde du tabac. Regardez le monde du vidéopoker. Combien de commerces ont dit: Nous, ce qui nous a sauvés, c'est d'opérer de façon illégale les machines vidéopoker. Plusieurs commerces... Les députés, ici, autour de la table, vous l'avez entendu, j'en suis sûr, dans chacun de vos comtés respectifs.

Là, on veut redresser une situation, mais je pense qu'on piège des gens. On les piège carrément. On les piège de façon telle que ces gens-là vont se retrouver quelque part pris entre la légalité et la faillite. De toute façon, peu importe leur choix, ils vont se retrouver en faillite, M. le Président. Je pense que ce genre de situation... Le projet de loi ne prévoit pas une sortie et la possibilité que ces gens-là puissent gagner dignement leur vie, puissent gagner dignement leur vie. On n'a pas

le droit, nous, comme législateurs, de les mettre en culottes courtes et de les mettre dans une situation où ils sont foutus, foutus parce que, si, demain matin, un vendeur de cigarettes de contrebande était pris, il pourrait se retrouver avec des pénalités — 3 fois la taxe. Ce sont des petites entreprises très fragiles, des entreprises qui n'ont pas beaucoup de cash-flow, pas beaucoup de fonds de roulement. Ce sont des gens qui gagnent durement leur vie, à coups de cents de profit, dans les dépanneurs. Ce ne sont pas des entreprises très lucratives.

Là, on est en train de faire un projet de loi qui, à toutes fins pratiques, va les coincer, mais carrément les coincer. Ces gens-là, qui avaient réussi quelque part — parce qu'on considérait légitime, entre guillemets, la contrebande du tabac — à tirer leur épingle du jeu, parce qu'ils se disaient: On n'a pas le choix, si on ne vend pas de cigarettes de contrebande, on ne pourra pas survivre, bien, là, on vient simplement de les mettre dans un étau et de leur dire: C'est terminé, mon cher ami, tu aurais dû faire faillite il y a 3 mois, parce que, là, on va te faire faire faillite. C'est ça qu'on leur dit avec le projet de loi.

Moi, M. le Président, comme député qui doit légiférer et examiner un projet de loi comme ça, je ne peux pas concevoir qu'autour de cette table on ne puisse pas trouver une solution, une façon d'amener une législation qui permettrait, dans des situations aussi spéciales que celle-là, de pouvoir assurer à ces gens-là qu'ils vont pouvoir, quelque part, tirer un profit d'une opération avant qu'ils ne fassent faillite.

C'est là, je pense, qu'on doit réfléchir à... Je sais que le ministre est très pressé d'adopter son projet de loi, mais on devrait réfléchir à une modification, à une motion qui permettrait — je ne sais pas — quelque part une ristourne, une ristourne auprès des dépanneurs, qui, à toutes fins pratiques, pourraient recevoir de l'aide financière. On leur fait perdre le marché, on leur fait perdre leur marché. Ils ne pourront pas tirer un profit de la cigarette tant qu'est maintenue la contrebande, comme on va la maintenir avec ce projet de loi là. On ne l'éliminera pas, la contrebande. (11 h 50)

Comment voulez-vous qu'ils fassent un profit, ces gens-là? C'est là, je pense, qu'on fait fausse route. On fait fausse route, et je trouve ça dramatique qu'on soit rendu, au Québec, à faire des lois aussi inéquitables que celle-là, qui vont provoquer une concurrence, mais complètement déloyale, pour ces gens-là, une concurrence déloyale créée par des pénalités abusives. Ils ne sont pas responsables du fléau social, et je trouve ça désarmant. Je vous avoue...

Quand on s'est laissés, hier, en commission, j'avais commencé à aborder le sujet. Je pense que ça demeure, pour moi, les principaux arguments que je veux défendre à cette commission. Ce projet de loi doit tenir compte de particularités, de particularités économiques, de particularités d'emploi. Il y a des gens qui veulent gagner leur vie et il y a des gens qui gagnaient leur vie auparavant, avant l'avènement de ce fléau social. Je pense que ces gens-là ont le droit d'être traités équitablement, comme tout citoyen.

On est tous d'accord avec le but recherché par le projet de loi. On est tous d'accord avec ça, mais là on vient amener des mesures qui vont effectivement coincer de façon inacceptable des gens, des gens qui veulent gagner leur vie. Je ne sais pas quelle va être la réaction, tout à l'heure, sur le terrain, de ces gens-là qui vont se faire prendre, parce qu'ils n'ont pas le choix. Alors, s'ils se font prendre parce qu'ils n'ont pas le choix, M. le Président, est-ce qu'on aura, nous, comme législateurs, fait une loi correcte?

Moi, je pense qu'on aura vraiment manqué notre coup. Je pense que cette situation particulière devrait être réfléchie. Quand on sait qu'il y a des conséquences financières, la seule personne, ici, autour de cette table, qui peut apporter une motion ou un amendement à ce projet de loi, c'est le ministre. Inutile pour moi de perdre mon temps à trouver une idée ou quoi que ce soit, parce que le ministre doit être sensibilisé à ce problème, à cette politique de cul-de-sac pour les dépanneurs. Il doit en être conscient et il faut trouver des solutions, M. le Président, parce qu'on sera, à juste titre, jugés par les citoyens comme des gens qui n'ont aucune crédibilité, et ils auront raison. Ils ne pourront pas comprendre qu'on ait fait un projet de loi pour pirater nos règles économiques. Nos règles économiques veulent que la concurrence soit loyale, et elle n'a pas le droit d'être déloyale, la concurrence, surtout pas par des pénalités fiscales. Je pense que c'est là qu'on fait fausse route, comme législateurs.

Moi, je voulais faire ces commentaires-là comme introduction et, en même temps, pour le suivi de ce projet de loi, parce que je considère ça très important, très, très important. J'aimerais aussi entendre le ministre sur ce genre de philosophie, que je suis en train d'émettre à cette table pour sensibiliser les députés. Qu'il me dise, lui, qu'il ne voit pas de problème à ça... Si, sincèrement, il ne voit pas de problème à ça, M. le Président, j'aimerais qu'il me l'explique. Je ne vois pas comment les dépanneurs vont pouvoir réussir à générer des profits avec le tabac, qui était une partie importante de leur commerce.

Alors, M. le Président, j'aimerais entendre le ministre sur ce genre de situation là, dans laquelle les dépanneurs vont se retrouver. J'aimerais savoir de lui ce qu'il pense de ce cul-de-sac fiscal, qu'il est en train de nous proposer, à nous, les députés de l'Assemblée nationale?

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.

M. Savoie: Oui, M. le Président. Alors, tout d'abord, ce n'est pas un cul-de-sac. C'est une intervention dans un dossier particulièrement difficile, pour lequel, vous-même, vous avez reconnu qu'il n'y avait pas de solution. Ce qu'on cherche à faire, au lieu de baisser les bras et de permettre à la situation de dégénérer davantage, c'est à intervenir. Le tabac, nous l'avons

dit et nous l'avons répété... Hier, vous étiez d'accord sur le fait que la situation, au niveau des taxes, était peut-être peu souhaitable, mais qu'on devait vivre avec la situation telle qu'elle existait aujourd'hui. À partir de ce constat, on est obligés également de poser des gestes, c'est-à-dire qu'une personne qui a en sa possession un paquet de tabac commet un acte qui est susceptible de lui donner une amende en vertu de la Loi concernant la taxe sur le tabac.

Ensuite, un détaillant, un propriétaire de dépanneur, qui vend du tabac en détail, au Québec, est susceptible, lui aussi, de subir une amende. Il faut qu'il respecte la loi. S'il ne respecte pas la loi, il s'expose à se faire prendre et il s'expose également à subir les amendes et les frais qu'une telle infraction présume ou impose. C'est ça. Que voulez-vous? On n'est pas pour arriver et fermer les yeux parce que la situation est difficile. Quand une situation est difficile, les choix sont difficiles. Alors, les choix, ici, sont difficiles. Ce n'est pas du tout que je ne suis pas sensible; bien au contraire, on est très sensibles à la situation.

M. Filion: M. le ministre.

M. Savoie: On est très, très sensibles à la situation des dépanneurs et on sait qu'il y a des pertes de revenus provenant de la vente de cigarettes.

Je ne sais pas pour qui vous vous prenez, dans le sens que vous arrivez ici... Parce que vous avez eu 1 ou 2 téléphones sur le dossier, là, tout à coup, vous êtes en mesure de porter des commentaires, pareil comme si, nous, nous n'avions pas de téléphones; pareil comme si, nous, nous n'avions pas de gens de comté; pareil comme si, nous, nous n'avions pas des amis qui sont propriétaires de dépanneurs. On est très au courant de la situation. La situation est particulièrement difficile, vous l'avez reconnu. Vous avez reconnu également qu'il n'y avait pas de solution, il n'y en avait pas de solution, outre la baisse des taxes par le gouvernement fédéral et par le gouvernement provincial.

Face à ça, on fait 2 choses: on s'en va se coucher et on oublie tout ça, ou bien on intervient en disant: Non, c'est ça, Québec paie la taxe sur le tabac tant que la loi ne sera pas changée et ceux qui font fi de ça... Il ne faut pas penser qu'il y a 90 % du monde qui fument de la cigarette de contrebande. C'est 1 paquet sur 3, me dit-on? Il y en a quand même 2, là. À ce moment-là, on n'a pas le choix, on est obligés d'intervenir et de dire: On installe les amendes, on installe le processus et on déclare illégal, par exemple, le fait de fumer une cigarette de contrebande. On va le voir, à l'article — mon Dieu! — suivant, qu'un individu qui commet une infraction à l'article 9.2, qu'on a vu hier, est passible d'une amende d'au moins 200 $ et d'au plus 1000 $ pour fumer une cigarette de contrebande, se promener avec un paquet et se faire prendre.

Je comprends votre sortie, mais, tu sais, alléguer qu'on n'est pas sensibles, prétendre que vous êtes le seul que les gens appellent, ça n'a pas de bon sens, ça n'a pas de bon sens. On sait très bien ce qui se passe et on sait très bien ce qu'on est en train de faire. Ce n'est définitivement pas avec joie qu'on le fait. Il n'y a personne ici qui pète ses bretelles avec ça. C'est une situation difficile. On pose les gestes et on espère que ça va permettre à ceux et celles qui doivent appliquer la loi d'avoir les outils nécessaires pour le faire. D'ici ce temps-là, d'ici à ce que les taxes baissent sur le paquet de cigarettes ou que les taxes montent aux États-Unis, au moment où la situation changera, à ce moment-là, au moins, ceux et celles qui respectent la loi, on les aura encouragés à ce faire. Ceux et celles qui contreviennent à la loi, évidemment, c'est à leurs risques et périls. On donne les amendes nécessaires comme effet dissuasif. Alors, c'est ça.

On est à l'article 17. On en a parlé hier pendant 1 heure, une heure et demie, de 17. Ce n'est pas quelque chose de particulièrement nouveau.

M. Filion: M. le ministre...

M. Savoie: Je n'ai pas terminé, je n'ai pas terminé.

M. Filion: Vous n'avez pas terminé, M. le ministre? Alors, je vous écoute.

M. Savoie: Non, je n'ai pas terminé. Je vais te le dire quand je vais avoir terminé.

M. Filion: Écoutez, M. le ministre... D'abord, vous pourriez vous adresser à la présidence.

M. Savoie: Oui, oui. Bien oui! C'est ça que je fais, je m'adresse à la présidence.

M. Filion: Vous pourriez...

Le Président (M. Messier): Par ricochet. M. le député de Montmorency, s'il vous plaît!

M. Savoie: Arrêtez de m'interrompre. Ha, ha, ha! Je vous ai interrompu, pendant que vous avez fait votre laïus?

M. Filion: M. le Président.

Le Président (M. Messier): Est-ce que c'est une question de règlement ou une question de directive que vous voulez poser?

M. Filion: M. le Président, je pense que le ministre a repris son ton paternaliste. Je pense qu'il n'est pas vraiment à sa place.

Le Président (M. Messier): Non, je pense que vous êtes hors d'ordre, M. le député de Montmorency.

M. le député et ministre, on vous laisse continuer.

M. Savoie: Oui, mais, quand on est avec des enfants, M. le Président!

M. Filion: Attention!

M. Savoie: Alors, c'est ça. Évidemment, la situation est très difficile. Hier, vous l'avez reconnu que — finalement, oui — hausser les amendes, c'était valable. Vous avez vous-même constaté qu'il s'agit là d'une amende, qu'en plus de ça il faut payer les taxes, que c'est considérable. Je pense que tout le monde était d'accord là-dessus. (12 heures)

Alors, on recommence l'article 17, pareil comme si on recommençait l'article 17 d'hier soir, en nous demandant si on est sensibles à telle situation, parce que, le député, je ne sais pas, moi, il a un cousin qui l'a appelé, puis... Je veux bien, là. Nous aussi, on reçoit des téléphones. On vit dans un comté, puis on a à descendre la rue principale, puis on échange avec le monde. Les gens le constatent. On a des organisateurs qui sont propriétaires de dépanneurs, comme tout le monde qui fait de la politique au Québec. C'est sûr qu'ils trouvent la situation, au niveau du tabac, difficile. Maintenant, il y en a qui s'ajustent, qui respectent la loi. Il y en a d'autres qui ne la respectent pas, la loi, qui vendent du tabac en dessous du comptoir, qui se moquent de la loi et qui disent: Bon, bien, la loi, c'est pour les autres.

Alors, on dit: Parfait, c'est votre choix, mais vous vous exposez, à ce moment-là, à des amendes, vous vous exposez à des interventions et vous vous exposez à... Dans une situation où, aujourd'hui, c'est la Loi concernant l'impôt sur le tabac, puis, l'année prochaine, ça va être d'autre chose. Dans bien des cas, l'année passée, c'était d'autre chose. C'est un autre élément que j'ai pu discerner. Il y a une constante à ce niveau-là.

Alors, je comprends que le député de Montmorency est inquiet du fait qu'on hausse les amendes, à la demande de ceux et celles qui travaillent dans ce milieu-là. On l'a modifiée il y a 2 ans. On est obligés de revenir aujourd'hui la modifier. C'est sûr que ce n'est pas de gaieté de coeur. Ce n'est pas de gaieté de coeur, c'est par obligation que nous le faisons. C'est une situation qui est difficile, pour laquelle vous n'avez présenté aucune solution intéressante, aucune solution. Vous avez même reconnu, hier... Je pourrais faire sortir les galées, puis vous les lire, dans lesquelles vous, M. le député de Labelle, reconnaissez qu'il n'y a pas de solution. Il n'y a pas de solution compte tenu de l'intransigeance d'Ottawa sur la taxe sur le tabac. Donc, la situation est là. En attendant que ça change, cette situation-là, il faut gérer ça. Mais on peut gérer ça en allant se coucher ou en disant: On va s'organiser, pour ceux et celles qui respectent la loi, on va soutenir ces gens-là. Ceux et celles qui se foutent de cette situation-là, qui vendent et qui encouragent la contrebande, donc la criminalité, le développement de la pègre, on va chercher à les décourager. On va leur chauffer... on va les chauffer un petit peu. On va leur donner du fil à retordre. C'est ça qu'on fait.

Alors, on veut s'assurer que la loi est respectée. On veut s'assurer que les amendes sont en quelque sorte proportionnelles au niveau d'activité de la contrebande. Si on se pose la question vis-à-vis des dépanneurs, bien, moi, un dépanneur qui a des cigarettes avec taxes en haut et des cigarettes sans taxes en dessous du comptoir, puis qui fait ça dans son commerce, je me demande où il se place. Il se situe comment vis-à-vis, par exemple, des permis, maintenant: permis de chasse et pêche ou d'autres activités? Est-ce qu'il est impliqué dans le recel? Les t-shirts qu'il vend, est-ce que c'est des t-shirts volés ou des tee-shirts légaux? La question se pose. La minute que tu commences, quelque part... On ne peut pas encourager ça.

La loi c'est pour tout le monde. Dans les commerces... C'est Shakespeare qui disait: «There is a tide in the affairs of men»; un va-et-vient, une marée, des bonnes années, des moins bonnes années. Au niveau du tabac, on est dans une année difficile. Malgré qu'on soit dans des années difficiles, il faut respecter la loi. C'est ça. Alors, là, j'ai terminé.

Le Président (M. Messier): Le député de Vanier m'a demandé la parole. Je sais qu'il y a un principe d'alternance. Est-ce que vous... comme le député de Vanier doit quitter sous peu...

M. Filion: J'aimerais quand même répondre rapidement au ministre...

Le Président (M. Messier): Je vous laisse... Compte tenu de la...

M. Filion: ...parce qu'il a dit des choses, M. le Président. On va rectifier rapidement.

Le Président (M. Messier): D'ailleurs, il vous reste 3 minutes.

M. Filion: Je ne sais pas comment vous calculez votre temps, là?

Le Président (M. Messier): Excusez-moi?

M. Filion: Comment vous calculez votre temps? Vous avez 2 paragraphes dans ça.

Le Président (M. Messier): La secrétaire... On me disait qu'il restait 3 minutes?

M. Savoie: On a commencé hier. Il ne faut pas oublier, on a fait...

(Consultation)

Le Président (M. Messier): Parfait. Allez-y, M. le député.

M. Filion: C'est beau. Merci.

D'abord, je veux simplement dire au ministre que j'agis comme simple député, qui écoute la population. Je pense que, le ministre, il prend un ton arrogant qui est complètement déplacé, M. le Président. Je pense que c'est un sujet très sérieux, et des petites sorties comme il vient de faire, je pense que les gens peuvent vraiment s'en passer.

M. le Président, ce n'est pas 1, 2 ou 3 dépanneurs qui, actuellement, trouvent très sérieux le problème, c'est l'Association des détaillants en alimentation du Québec, M. Gadbois. Ce n'est pas 1, 2 ou 3 dépanneurs, c'est une industrie majeure au Québec. Ces gens-là ont même pensé mettre vos taxes dans un compte en fiducie, M. le Président, parce qu'ils trouvent que ça n'a pas de bon sens, votre affaire. Écoutez, ce n'est pas 2 personnes, ce n'est pas 3 personnes, ce n'est pas un ami dans un comté, ce sont des gens... La majorité de la population trouve ça complètement déplacé, M. le Président.

Ce projet de loi, quant à moi, il ne sert à strictement rien, si ce n'est à mettre de la pression sociale. Vous avez toléré, votre gouvernement libéral, l'illégalité dans le vidéopoker. Vous l'avez tolérée. Vous avez attendu. Vous avez attendu de faire une procédure, une législation qui soit correcte et efficace. Vous n'avez pas lancé n'importe quoi en l'air pour mettre de la pression sociale. Vous avez pris du recul, vous avez fait une espèce de moratoire. Là, vous avez présenté le projet de loi 84, qui semble avoir effectivement trouvé une orientation intéressante. Mais vous n'avez pas simplement poussé les pénalités pour pousser les pénalités, vous avez pris le temps de regarder, puis de trouver une solution viable, raisonnable et acceptable.

Vous-même, hier soir, vous l'avez dit: La seule façon efficace de réduire et de mettre fin à ce problème-là, c'est la réduction des taxes. Vous l'avez dit. Vous n'êtes pas prêt à le faire, vous croyez à une fédération qui vous plante, vous avez le droit. On n'est pas contre votre principe de gouvernement libéral. Vous vous faites planter aller-retour par une fédération, puis vous aimez ça, sauf que, nous, on n'aime pas ça. Ça, c'est votre choix politique, sauf qu'il demeure un fait: vous seriez peut-être bien mieux d'attendre, effectivement, que la fédération veuille bien régler le problème et de maintenir en place des mesures qui ne créeront pas davantage de tension sociale et qui ne mettront pas des gens dans des situations complètement folles, M. le Président.

C'est la population en général qui va dénoncer cette situation-là. C'est elle qui va rire de ce projet-là, parce que les gens ne sont pas dupes. Les gens, ils comprennent qu'un projet qui n'a pas de sens ne mérite pas d'être appliqué. Quand tout le monde dit non, votre pouvoir de législateur, ça ne vaut rien. Ça, vous devez le comprendre. Vous devez revenir et prendre le temps d'écouter ce que les gens pensent de ce qui se passe actuellement avec le tabac. Ce qu'on est en train de faire, actuellement, c'est de piéger davantage les gens qui sont victimes d'une situation. Ce n'est pas comme ça qu'on doit légiférer. Je m'excuse, ce n'est pas comme ça qu'on doit légiférer. Je pense qu'actuellement on devrait être plus sages et attendre 1, 2 ou 3 mois, s'il le faut, mais faire vraiment des mesures qui vont corriger le problème. Pas faire des mesures qui vont créer des tensions sociales, on n'en a pas besoin.

Alors, M. le Président, je revenais sur l'article 17 parce que c'est majeur, c'est majeur, et je pense qu'on est en train de faire une législation qui, à toutes fins pratiques, va faire peur aux gens. Elle va faire peur aux gens quand, en réalité, ce n'est pas de faire peur aux gens qui est le problème. Je comprends que vous êtes démuni, mais vous êtes démuni parce que vous vous placez dans une situation de démuni.

J'aimerais bien mieux vous voir crier sur la place publique que le fédéral nous plante, au Québec, que de venir dire: On va planter les dépanneurs. C'est ça, le vrai débat. Ils nous ont plantés parce qu'ils ne nous aident pas à régler le problème de la contrebande du tabac. C'est ça qu'on devrait dénoncer, pas faire une législation pour planter nos dépanneurs. Us n'ont pas demandé, eux autres, d'avoir une contrebande du tabac, ils n'ont rien demandé de ça. Ils sont les victimes d'une situation. Je pense que, quand le fédéral nous laisse tomber dans une situation comme celle-là, c'est ça qu'il faut dénoncer, puis c'est ça qu'il faut crier.

Je trouve décevant de voir que le ministre traite ça d'une façon... J'y reviens, parce que je ne trouve pas ça correct, de sa part, de penser que... Actuellement, on représente des citoyens qui nous demandent justement que ce projet de loi, qui n'a pas de bons sens, puisse être reporté pour une réflexion plus sérieuse, parce que, la vraie solution, ce n'est pas ça, pour régler la contrebande du tabac. C'est une espèce de «plaster» qu'on met sur la plaie, qui ne règle rien et qui, au contraire, peut provoquer davantage de microbes autour du problème, parce qu'on n'apporte absolument pas une solution qui permette... (12 h 10)

Je comprends que, l'illégalité, il faut la dénoncer, mais vous avez, vous autres mêmes, toléré l'illégalité dans le vidéopoker. Puis, on vous le disait: C'est illégal. Pourquoi vous tolérez les vidéopokers sur le territoire? C'est illégal. Vous avez pris du recul et vous êtes arrivés avec une solution durable. Pourquoi ne pas avoir la même réflexion sur le plan de la contrebande du tabac? Pourquoi? Parce que, pour la contrebande du tabac, Ottawa nous a laissés tomber et qu'il ne faut pas en parler? Voyons donc! Je pense que, quant à légiférer, il va falloir légiférer avec des bases plus sérieuses, des bases où on va, tout le monde, s'entendre et trouver une solution. Mais là on ne trouve pas de solution avec ça.

J'aimerais poser une question additionnelle: Comment le ministre va faire pour appliquer ces pénalités, ces pénalités qui, à toutes fins pratiques, vont demander des ressources humaines plus importantes, quand on sait que les crédits alloués au ministère du Revenu, en mars dernier, prévoyaient qu'on aurait une réduction des effectifs financiers de l'ordre de 1 400 000 $, sur le

plan de la vérification fiscale? Alors, est-ce que c'est un budget particulier? Est-ce que vous allez augmenter les vérificateurs fiscaux? Vos policiers, qui étaient 60, allez-vous les augmenter d'une façon importante? Comment vous prévoyez vraiment arriver à appliquer de façon sérieuse ces pénalités-là?

Le Président (M. Messier): La question étant posée, M. le ministre... Vous avez un nouvel adjoint parlementaire! Ha, ha, ha!

M. Blais: Voulez-vous que je parle? Qu'est-ce qui arrive?

Le Président (M. Messier): Non, non. M. le ministre a un droit de parole de 5 minutes. On va...

M. Savoie: Oui. Il n'y aura pas de modification au niveau des effectifs de la police sur le tabac. Il n'y aura pas, non plus, des mesures spécifiques. Tout ce qu'on fait, ici, c'est qu'on modifie le montant des amendes. On augmente le minimum, en le faisant passer à «2000 $ ou du triple de l'impôt qui aurait été payable». On augmente également le maximum, de 25 000 $ à 500 000 $. Alors, c'est tout ce qu'on fait dans l'article 14.2, rien d'autre.

Le Président (M. Messier): Parfait, M. le ministre.

Est-ce que l'article 17 est adopté? Est-ce que l'article 17 est adopté?

M. Filion: Non, non, M. le Président.

Le Président (M. Messier): Est-ce que vous avez des amendements? Un papillon, quelque chose du genre?

M. Filion: à ce moment-là, comment vous allez faire, si vous n'avez pas d'effectifs additionnels, pour réaliser l'application de cette loi-là, puisqu'en 1992, avec les mêmes effectifs, vous avez échoué, avec la police du tabac? comment vous allez faire pour que ce projet de loi trouve application, si vous n'avez pas des effectifs additionnels, des ressources humaines additionnelles, puisqu'en 1992, avec la même police, la contrebande a explosé à raison de 112 % d'augmentation par rapport à 1991? comment vous allez faire pour mettre en application votre projet de loi?

M. Savoie: Ça, on...

Le Président (M. Messier): M. le ministre.

M. Savoie: ...vous l'a expliqué. Tout ce qu'on fait ici, c'est qu'on hausse le montant minimal et le montant maximal. C'est tout.

M. Léonard: Vous grossissez.

M. Savoie: C'est ça. Bien, on grossit... On hausse, il y a une hausse.

M. Léonard: Vous haussez de combien à combien?

Le Président (M. Messier): Pour les fins du débat, c'était le député de Labelle qui posait une question.

M. Savoie: Elle passe de 25 000 $ à 500 000 $.

M. Léonard: Oui, c'est ça.

M. Savoie: Oui. Le...

M. Léonard: Puis, le minimum?

M. Savoie: ...montant minimal, c'est maintenant «le plus élevé du montant de 2000 $ ou du triple de l'impôt qui aurait été payable». Alors, c'est tout.

M. Filion: Ça, c'est comme le marché au noir. Si vous gardez les mêmes efffectifs de vérification et que vous n'avez pas plus de gens pour aller vraiment faire des vérifications exhaustives, faire des pistes, ou quoi que ce soit, ou émettre des pénalités, à toutes fins pratiques, la pression des visites sur le terrain ne sera pas existante. Elle ne l'était pas en 1992, alors elle ne le sera pas plus, avec le même nombre de personnes, en 1993. Comment vous allez faire pour vraiment mettre une pression? Juste dire: On va jusqu'à 500 000 $ de pénalités, c'est suffisant. On dit au monde d'arrêter de faire la contrebande, mais on ne vérifiera pas. C'est ça que vous dites?

M. Savoie: Ce n'est pas ça que j'ai dit, puis je ne sais pas ce que vous avez ce matin. L'application de ces lois ne relève pas uniquement du ministère du Revenu. Il peut y avoir, par exemple, une intervention de la Communauté urbaine de Montréal. Un policier de la Communauté urbaine de Montréal entre dans un dépanneur et il constate. À ce moment-là, il pourrait nous aviser, et on pourrait envoyer quelqu'un. Il y a tous ces éléments-là. On ne veut pas devenir un Etat policier avec cette histoire de tabac, mais on ne veut pas, non plus, lorsqu'on arrête quelqu'un, que la personne parte à rire, qu'elle nous donne 2000 $ et qu'elle continue à vendre du tabac. C'est tout.

M. Léonard: Oui, mais, si je comprends, là...

Le Président (M. Messier): Oui, M. le député de Labelle. Pour une intervention de 20 minutes, ou si c'est sous forme de question qui va englober les 20 minutes? Vous êtes intervenu aussi? On a des problèmes au niveau de la compilation du temps, mais ça devrait...

M. Léonard: Non, mais, moi, c'est la première

fois que j'interviens sur cet article-là. On ne l'avait pas commencé, hier. On le commençait, hier soir, quand j'ai quitté.

Le Président (M. Messier): Parfait, M. le député.

M. Léonard: La police municipale peut être chargée de l'application de cette loi, les policiers municipaux.

M. Savoie: C'est-à-dire qu'ils peuvent constater l'infraction et nous aviser.

M. Léonard: Par exemple, à la ville de Val-d'Or, ils constatent ces infractions-là et...

M. Savoie: Les policiers de la ville de Val-d'Or, par exemple, constatent l'infraction et avisent le ministère du Revenu. On pourrait envoyer un fonctionnaire ou un membre de la police du tabac.

M. Léonard: C'est le fonctionnaire qui constate l'infraction ou bien si c'est la police? Comment...

M. Savoie: Le fonctionnaire peut la constater, mais on peut également avoir de l'information qui nous amène à visiter, à faire des vérifications.

M. Léonard: Oui, mais disons une chose, juste en termes de mécanique. Vous avez un dépanneur, supposons à Val-d'Or ou à Saint-Jovite, mettez-le où vous voudrez. Le policier municipal circule et s'aperçoit qu'il y a des ventes de tabac, de cigarettes de contrebande, par exemple. Ce sont des choses qui arrivent. Les dépanneurs ne voulant pas faire faillite, certains sont obligés de se ranger. Il y en a d'autres qui tiennent le fort, mais... Alors, la police avise le fonctionnaire du ministère du Revenu. Ce n'est pas elle-même qui émet, ce n'est pas le policier lui-même qui émet la contravention, qui fait la constatation d'usage? Il faut que ce soit le fonctionnaire? L'arrimage entre la police municipale et le ministère du Revenu se fait comment, dans le cas où vous intervenez, où il y a intervention?

Le Président (M. Messier): Est-ce que vous allez prendre la parole?

M. Larivière (André): Oui.

Le Président (M. Messier): Juste à vous identifier, s'il vous plaît. Vous êtes monsieur?

M. Lariviève: André Larivière.

Le Président (M. Messier): André Larivière.

M. Larivière: C'est bien évident que le policier qui constate la présence de tabac de contrebande peut, comme tout citoyen, transmettre l'information au minis- tère du Revenu. À ce moment-là, c'est soit la police du tabac qui peut en prendre charge ou les enquêteurs en matière frauduleuse qui prennent le dossier. Ça dépend de la preuve qui aura été amassée à ce moment-là par les policiers. Ça peut être suffisant. Il peut y avoir des compléments d'enquête qui peuvent être effectués par la police du tabac. Ça dépend de l'état du dossier.

M. Léonard: Je sais qu'il y a eu des discussions avant que j'arrive, mais mon point, c'est sur le plan pratique. Vous avez, disons... on n'appellera pas ça une dénonciation, mais une constatation par un policier, qu'il y avait du tabac. La preuve est faite plus ou moins. Si la constatation se rend au ministère du Revenu trop tard, ou si le ministère du Revenu revient sur les lieux trop tard pour constituer une preuve, dans quelle mesure vous êtes efficaces, même si vous avez une loi qui augmente ces amendes? Je reviendrai sur un autre aspect de cette affaire.

M. Larivière: C'est sûr. Ce que je disais, c'est que ça dépend de l'état du dossier. Par exemple, un policier municipal fait une perquisition chez un individu pour des stupéfiants.

M. Léonard: Oui.

M. Larivière: Rendu sur les lieux, il constate qu'il y a 2 caisses de tabac de contrebande en même temps. Il est bien évident qu'à ce moment-là, même s'il appelait au ministère du Revenu, il peut être trop tard lorsque le fonctionnaire peut intervenir. Ça dépend de l'état dans lequel les éléments sont colligés par le policier. À ce moment-là, en vertu de la théorie, ce qu'on disait hier, la théorie du «plain view», le policier peut saisir.

M. Léonard: La théorie du?

M. Larivière: Du «plain view», de l'objet bien en vue. Le policier peut saisir le tabac qu'il voit sur les lieux, lors de sa perquisition en matière de stupéfiants. Il est bien évident que le fonctionnaire, par la suite... Il est trop tard, lorsqu'il va intervenir. Par contre, les éléments que le policier aura colligés serviront devant les tribunaux.

M. Léonard: Ah bon!

M. Larivière: Ça dépend de l'état du dossier.

M. Léonard: Oui.

M. Larivière: Ça dépend des circonstances de faits.

M. Léonard: Oui, je comprends.

M. Larivière: Par contre, un policier peut avoir

de l'information et la transmettre aux fonctionnaires du ministère du Revenu. À ce moment-là, ce sera le fonctionnaire qui fera l'enquête. Le policier peut avoir eu des dénonciations de citoyens, disant que telle personne fait de la contrebande de tabac. À ce moment-là, ce seront les fonctionnaires ou la police du tabac...

M. Léonard: Vous en avez eu beaucoup, de ces dénonciations-là?

IiL Larivière: Je ne le sais pas. (12 h 20)

M. Léonard: Mais, comme question de fait, depuis 2 ans, il y avait la loi qui était là, même si elle n'était peut-être pas suffisante. Est-ce que vous avez eu beaucoup de cas soulignés par les policiers, disons, les policiers eux-mêmes? Sur quelle base opérez-vous?

M. Savoie: II y en a, il y en a de la...

M. Léonard: II y en a... mais c'est combien de causes, combien de...

M. Savoie: Ah! je ne sais pas, puis je ne pense pas que c'est bien pertinent de savoir combien, à ce moment-ci, lorsqu'on modifie l'article en haussant les amendes. On a approuvé le principe, exactement, mot par mot, en 1991, ensemble!

M. Léonard: Mot à mot... Un instant, là! M. Savoie: Ah oui! Mot à mot.

M. Léonard: Mon point, là... Il me semble que c'est une question d'efficacité. Je veux bien qu'on dise: Oui, il y a une dénonciation, mais, si on ne sait pas combien on a eu de cas, jusqu'à quel point ils ont été efficaces... Hier, le ministre disait qu'il y avait eu des saisies pour une valeur d'à peu près 10 000 000 $. Or, quand les fabricants de tabac viennent nous dire qu'il y a pour 550 000 000 $, seulement, de taxes que le gouvernement perd, au Québec, ça porte finalement sur une marchandise dont la valeur de vente est probablement de 1 500 000 000 $. Bien, c'est 10 000 000 $ sur 1 500 000 000 $! Mettez-le à 1 000 000 000 $, si vous voulez, c'est au moins cela. En termes d'efficacité, ça ne vous intéresse pas? Ça n'intéresse pas le ministre de savoir combien il y a eu de cas de saisies? Combien ont abouti...

M. Savoie: Ah oui! On a tout...

M. Léonard: ...ont été vraiment efficaces?

M. Savoie: C'est parce que vous avez manqué, hier soir. On a eu l'occasion de donner l'ensemble des statistiques concernant le travail de la police du tabac. On les a lues. On a pris le temps souhaité ou souhaitable.

M. Léonard: Bon, bien, vous n'êtes pas obligé de tout reprendre le dossier, mais c'est combien?

M. Savoie: Non, non, sauf que... Combien résultent d'informations qui ont été transmises...

M. Léonard: C'est ça, ma question. M. Savoie: ...on ne le sait pas. M. Léonard: Vous ne le savez pas?

M. Savoie: On ne le sait pas. On n'a pas cette information, à ce moment-ci.

M. Léonard: Bien, vous avez parlé, hier, de 10 000 000 $ de valeur saisie.

M. Savoie: C'est ça. C'est exactement ça. M. Léonard: II y a 37 cas?

M. Savoie: C'est ça. Hier, on disait que, des poursuites finalisées — pas débutées, là, donc qui ont débuté au cours du printemps 1992 et qui se sont terminées au printemps 1993 — il y en avait 37. Alors, des saisies, on en avait pour 10 000 000 $ par 60 agents. Vous savez ce que ça veut dire, 60 agents: 30 qui travaillent, 30 qui travaillent par semaine. Donc, quoi, une douzaine de voitures.

M. Léonard: Au fond, un citoyen ordinaire se fie quand même à la police pour faire les constatations d'usage, dans des cas comme cela.

Il me semble que, même personnellement, j'hésiterais, en constatant qu'il y a du tabac de contrebande, à prendre moi-même le téléphone, puis à m'agiter pour dénoncer tel dépanneur ou telle personne que je connais, qui a du tabac de contrebande. Je le dis comme cela, puis je me réfère aussi à la conversation qu'on a eue avant 18 heures, hier. En réalité, je le décris comme cela, parce que ça doit être à peu près le comportement de tout citoyen de déplorer mais de ne pas agir et de se fier aux policiers, à la police locale ou à la Sûreté du Québec. S'il y a peu de renseignements qui émanent, s'il y a peu de constatations qui émanent, quand même qu'on augmenterait les amendes... Je dirais que ça peut jouer, même, en sens inverse.

Je reviens à Val-d'Or ou bien à Saint-Jovite, par exemple. Vous avez la police municipale et les dépanneurs du coin. Remarquez qu'il y a comme une espèce de... Les gens circulent, vont chez le dépanneur, donc ils se connaissent bien. Je ne dis pas qu'il y a de la familiarité, pas dans ce sens-là, mais ce sont des gens qui sont familiers entre eux, nécessairement, puisqu'ils vivent dans la même ville. Là, vous mettez une amende qui peut atteindre 500 000 $, mais à 50 000 $. Est-ce que le ministre pense qu'en montant les amendes il va vraiment accentuer l'efficacité? J'ai l'impression que le

réflexe psychologique, ça va être de dire: Aïe!, de faire un avertissement verbal, mais de ne pas faire une constatation en bonne et due forme. Il sait très bien que, si c'était le cas, il met, supposons, le dépanneur en question en faillite, à toutes fins pratiques. Ce ne sont pas des gens riches, en général, qui ont des centres de dépannage comme ça. Donc, il n'agit pas. Est-ce que ce n'est pas ça qui se passe aussi, déjà, avec la loi? Si vous renforcez les amendes encore plus ou les haussez beaucoup, ça risque, encore une fois, de s'accentuer comme phénomène, attitude, phénomène psychologique ou attitude, là... C'est très humain, je pense, ce que je veux expliquer là, mais c'est...

M. Savoie: D'abord, l'article 14.2 ne vise pas les dépanneurs. On avait utilisé ça comme exemple, quand les échanges ont commencé, tout à l'heure, là-dessus. Il vise, finalement, à arrêter n'importe qui qui est impliqué dans le commerce du tabac de contrebande. En conséquence, en vertu de l'ancienne loi, lorsqu'on arrêtait quelqu'un et que l'amende était de 2000 $ minimum, il se présentait en cour, le juge, normalement — première offense, et tout ça — n'accordait que l'amende minimale, 2000 $. Finalement, le type, il partait à rire. C'est tellement payant de faire la contrebande du tabac que l'amende n'était pas suffisamment élevée. C'est pour ça qu'on a changé. On a maintenu l'amende de 2000 $, comme un élément. Par contre, on a dit aussi que le montant doit être le plus élevé des 2 montants: soit 2000 $, soit 3 fois la taxe...

M. Léonard: La taxe payable.

M. Savoie: ...payable, en vertu de la loi sur le tabac. Vous comprenez que c'est rien que l'amende. Non seulement vous payez l'amende, mais, également, vous nous devez de l'argent, en termes de taxe non payée.

M. Léonard: Oui, ça...

M. Savoie: C'est sûr que, quelqu'un qui se fait prendre... Le truc, quand on arrête quelqu'un, c'est de s'assurer que ça a du mordant un peu et que la personne qui commet cette infraction-là ne peut développer une réaction d'impunité, dans le sens que le montant est tellement minime que: Tiens, je le paie, bonjour la visite! C'est de démontrer le sérieux. On ne cherche pas à créer une opération panquébécoise visant à augmenter le nombre de polices du tabac ou à augmenter le nombre d'interventions. On veut maintenir la pression actuelle. On veut s'assurer que, lorsqu'on prend quelqu'un, par contre, ce soit pris au sérieux.

M. Léonard: Au fond, votre objectif, c'est d'en poigner quelques-uns pour faire peur aux autres...

M. Savoie: C'est-à-dire que c'est...

M. Léonard: ...puis de leur faire très mal... M. Savoie: ...d'être efficace, lorsque...

M. Léonard: ...ou bien si, votre objectif, c'est d'enlever ou d'empêcher la contrebande, vraiment? À ce moment-là, vous pourriez engager, je ne sais pas, moi, 500 agents, qui feraient vraiment une opération «at large», comme vous dites, panquébécoise, et ça pourrait, en tout cas, cette fois-là, être très efficace.

M. Savoie: On a dit, hier, que la contrebande était et serait toujours avec nous. C'est ce qu'on a dit hier. Il n'y a pas moyen de l'éliminer à 100 %, c'est quelque chose avec laquelle il faut travailler.

M. Léonard: Mais si vous...

M. Savoie: normalement, c'est une situation de 5 %, 6 %. aujourd'hui, elle est beaucoup plus élevée. ce qu'on cherche à faire, c'est de contrôler, compte tenu que la solution n'est pas administrable à ce moment-ci, la solution étant une réduction des taxes, tant par le gouvernement fédéral que par le gouvernement du québec. étant donné qu'on ne peut pas livrer cette réduction-là, à ce moment-ci... la situation peut changer, avec une nouvelle orientation politique. je n'ai pas entendu la position de la nouvelle première ministre là-dessus, là. je n'ai pas, non plus... je ne connais pas la position du plc là-dessus. est-ce qu'ils vont être d'accord avec une réduction des taxes sur le tabac, pour, justement, alléger le niveau de la contrebande? je l'ignore. mais, d'ici ce temps-là, on gère, le mieux qu'on peut, une situation difficile. une des façons de la gérer, c'est lorsque les intervenants nous disent: écoutez, l'amende n'est pas assez élevée. lorsqu'on prend quelqu'un, il y a souvent une moquerie, qui se fait, des amendes, des montants qui sont impliqués. ces amendes étant tellement minimes et la contrebande étant tellement payante, il y a très peu de dommages causés à l'élément de contrebande.

M. Léonard: Oui, mais... (12 h 30)

M. Savoie: On change les montants, c'est tout ce qu'on fait. On augmente les montants, à l'article 17. Là, on ne conteste pas sur le fond, si je comprends bien. On ne conteste pas en disant que le montant de 500 000 $ est trop élevé ou que 500 000 $ n'est pas assez élevé. On ne dit pas, non plus, que, 2000 $ ou le triple de l'impôt, ce n'est pas assez comme amende ou que c'est trop. Là, on cherche à voir de quelle façon on va l'appliquer.

On vous a indiqué qu'on n'augmentera pas le nombre de policiers du tabac sur le territoire, premièrement. Deuxièmement, il y a quand même une grande partie de la population qui participe, d'une façon positive, contre la contrebande. Il y a les corps policiers sur le territoire. Il y a la GRC sur le territoire. Il y a les

douaniers sur le territoire. Il y a...

M. Léonard: Oui, mais si ça résulte en 37 causes, seulement, sur tout le territoire du Québec...

M. Savoie: Ce n'est pas ça qu'on a dit. On a dit...

M. Léonard: Bien, 37 qui se terminent avec jugement.

M. Savoie: ...37 finalisées. Pas le nombre débutées. Il y a une différence. Ça, c'est 37 finalisées.

M. Léonard: Oui, mais...

M. Savoie: Ça, c'est seulement par mon petit groupe de 60 intervenants. On ne parle pas des... Je ne sais pas combien ils sont. Ils sont 8000, la Sûreté du Québec, 9000, 6000? Il n'y en a pas plus.

M. Léonard: II y en a 3500, à peu près, je pense. M. Savoie: Ils sont 3500? O.K.

M. Léonard: À peu près. C'est le corps policier de la CUM, qui est le plus nombreux, au Québec. La Sûreté du Québec, à mon avis, à moins que je ne me trompe vraiment...

M. Savoie: Oui.

M. Léonard: ...c'est entre 3000, 3500, quelque part par là.

M. Savoie: Moi, je suis peut-être avec les effectifs du ministère. Je ne m'en rappelle plus. En tout cas, disons que c'est 3500. Disons que c'est acceptable, 3500. Ensuite, tu as les corps policiers municipaux. Tu as la GRC, qui est présente, de façon convenable, sur le territoire. Tu as les douaniers. Il y a eu une augmentation du nombre de douaniers. Je pense qu'ils ont augmenté ça, le nombre d'agents, du côté du Québec, de 40 ou 45 agents, si ma mémoire est fidèle. Alors, il y a plusieurs intervenants sur le territoire. Ce n'est pas une affaire que le ministère du Revenu ou le ministre du Revenu peut décider de partir en croisade et régler. C'est impossible. Il faut que le monde participe à ça.

Ensuite, tout ce qu'on se dit — c'est à l'article 14.2 de la Loi concernant l'impôt sur le tabac — c'est que, lorsqu'on va prendre quelqu'un, quand ça va être la troisième offense, la quatrième offense, le juge va être tenté de dire: Bon, bien, ton amende, chum, c'est 400 000 $ cette fois-ci. Ça commence à faire mal, là. Ça commence à être moins rentable de faire de la contrebande, quand tu te fais prendre.

Alors, c'est tout. On ne change pas notre approche, on ne change pas notre tactique, dans l'article 14.2. Tout ce qu'on fait, c'est qu'on joue avec les amendes.

M. Léonard: C'est parce que vous faites porter le poids de votre inefficacité sur les amendes...

M. Savoie: Non.

M. Léonard: ...sur les montants d'amende qui ne sont pas assez élevés, parce que, si c'est ça que vous modifiez et que vous ne modifiez...

M. Savoie: Bien, ce n'est pas la seule chose.

M. Léonard: ...aucune des autres composantes de la lutte...

M. Savoie: Ce n'est pas la seule chose qu'on modifie. Il faudrait continuer à faire les articles...

M. Léonard: Oui, mais...

M. Savoie: ...au lieu de faire un «filibuster» sur 17. Il faudrait voir 17, on pourrait aller voir 18.

M. Léonard: M. le Président, là-dessus, je voudrais juste demander au ministre de, quand même. ..Ha le droit d'employer les mots qu'il veut, mais un «filibuster» après... Ça fait une journée, sur un projet de loi que je pense important, nous sommes rendus à l'article 17.

M. Savoie: Ah oui!

M. Léonard: Ce n'est pas ce qu'on appelle un «filibuster». Toutes les remarques préliminaires... Il y a eu une motion préliminaire; les motions particulières, il y en a eu juste une. On ne peut quand même pas parler de «filibuster», on est rendu à l'article 17.

M. Savoie: C'est ça. M. Léonard: Jusque...

M. Savoie: Là, ça fait 1 heure qu'on est sur l'article... C'est à dire qu'on a fait 1 heure hier soir, à peu près...

M. Léonard: Oui, mais c'est...

M. Savoie: ...et on a fait 1 heure aujourd'hui. Il faut bien s'entendre, hein — je le qualifie — dans le sens que l'article 17 a pour but de modifier l'article 14.2. À l'article 14.2, on détermine le montant des amendes. Tout ce qu'on fait, c'est qu'on change le montant des amendes. Ce n'est pas la première fois qu'on intervient, au niveau...

Là, à l'article 18, c'est nouveau. À l'article 18, on dit: «14.3 Toute personne qui contrevient à l'article 9.2 commet une infraction et est passible d'une amende d'au moins 200 $ et d'au plus 1000 $.»

Attention à vous, là! C'est ça, là. Finalement, on n'a pas eu de discussion de fond sur les montants, hier. On n'a pas eu, non plus...

M. Léonard: Bien, là, on est en train de l'avoir. On a dit que, 500 000 $, ça va être contre-productif, dans le sens où le policier municipal, qui va constater une infraction chez quelqu'un qui vend du tabac de contrebande, n'agira pas parce que c'est quelqu'un qu'il connaît. Il ne voudra pas le mettre dans le trouble à ce point-là. C'est ce qui arrive lorsque l'amende a l'air disproportionnée par rapport à l'offense.

M. Savoie: C'est vrai.

M. Léonard: Ça, c'est un réflexe très humain qui se produit très régulièrement. Comme ça se produit régulièrement, ça peut être admissible. Je pense qu'il y a aussi des questions de jugement à exercer par un policier. Quand vous atteignez des montants comme ça, là, ça commence à être plus généralisé.

M. Savoie: C'est vrai.

M. Léonard: C'est ça le problème.

M. Savoie: On reconnaît ça. Il y a le phénomène psychologique en question.

M. Léonard: Vous dites que vous agissez sur ce plan-là, mais vous n'augmenterez pas les effectifs policiers, compte tenu que vous n'avez pas nécessairement le pouvoir de le faire. Si vous êtes en territoire municipal de ville, où il y a une police municipale, la Sûreté du Québec ne va pas là, n'intervient pas. Ça m'étonne-rait beaucoup, aussi, que la GRC intervienne de façon significative. La GRC s'intéresse à des points plus particuliers, genre la drogue, la cocaïne. Ça, elle va le faire occasionnellement — je dirais, de façon ancillaire, si on me passe le mot. Elle va peut-être saisir du tabac de contrebande, mais c'est tellement épisodique que ça ne constitue absolument pas une lutte à la contrebande. Là, c'est tout le...

M. Savoie: Je pense qu'ils ont une espèce de bureau de contrebande pour le tabac actif sur leur territoire. Ils font des descentes, ils font des interventions assez régulières sur le territoire. Vous avez peut-être raison de dire que c'est épisodique, dans le sens qu'il y a des descentes importantes. Je pense qu'il y a une pression constante, au niveau de la contrebande du tabac. C'est sûr que la lutte à la drogue est beaucoup plus importante. C'est une autre activité. Mais, compte tenu du fait que la pègre s'intéresse davantage à la contrebande du tabac, compte tenu que les activités et des éléments criminels se ramassent de plus en plus dans ce milieu-là...

M. Léonard: Est-ce que le gouvernement — ou le ministre des Finances — en discutant avec son collègue du fédéral, a convenu que la GRC s'en préoccuperait davantage? Ça aussi, ça peut faire partie des discussions.

M. Savoie: Effectivement, c'est la Sûreté du Québec. Donc, c'est le ministre, M. Ryan, qui a eu des échanges avec son homologue fédéral. On a demandé des efforts additionnels, pour nous aider à réduire...

M. Léonard: Oui, mais, au moment où le ministre des Finances demande au ministre des Finances fédéral de baisser sa taxe sur le tabac et qu'il dit non, est-ce qu'il y a eu une contrepartie demandée, à l'effet que la GRC soit plus active dans ce dossier-là?

M. Savoie: Oui, c'est ça. Il y a un effort concerté dans le milieu.

M. Léonard: Est-ce que vous le savez? Vous l'affirmez positivement?

M. Savoie: Je le sais, oui. Ah oui! Je suis bien au courant des rencontres. On a un comité ministériel là-dessus. On a eu des rencontres avec les gens d'Ottawa.

M. Léonard: Eux n'ont pas mis le ministre au courant du nombre de plaintes qui ont été portées, du nombre de causes qui ont été réglées au cours de l'année 1992 — ça fait 6 mois que c'est fini — parce que c'est là où la contrebande a particulièrement fleuri. La constatation, c'est que c'est inefficace, c'est ça qu'il faut dire, parce que ça explose actuellement. C'est ça.

M. Savoie: C'est ça. C'est pire, comme je vous l'ai mentionné... à Terre-Neuve, par exemple. À l'île-du-Prince-Édouard, c'est difficile. Chez nous, à cause de la population importante — 6 000 000 de personnes, 7 000 000 de personnes — la situation se développe. En Ontario, ça se développe très fort aussi.

M. Léonard: Actuellement, l'Ontario, elle aussi, connaît l'épidémie?

M. Savoie: Ils sont en train de nous rattraper.

M. Léonard: En termes de perception de taxes sur le tabac, est-ce que vous avez des renseignements précis disant que, là aussi, ça baisse comme au Québec?

M. Savoie: C'est-à-dire que, eux, étant donné qu'ils ont un autre système au niveau de l'impôt, c'est surtout le gouvernement fédéral qui détient l'information, mais on a des suivis. On a des statistiques qui sortent à tous les mois, qui nous donnent l'évolution de la situation.

M. Léonard: Bien, je trouve que ce n'est pas non plus très précis. Moi, je trouve ça disproportionné: 37

contrebandiers attrapés, 37 poignes, pour employer l'expression.

M. Savoie: C'est-à-dire que...

M. Léonard: Des cas réglés judiciairement, c'est allé au bout.

M. Savoie: C'est ça. Ce n'est pas la même chose que 37 poignes, ça. Ce n'est pas 37 poignes, c'est 37 dossiers terminés en cour; plus rien, le dossier est clos, fini.

M. Léonard: Est-ce que je peux savoir si le ministère en a gagné plusieurs ou s'ils les a toutes perdues? C'est quoi le taux de succès là-dedans, dans les causes devant le tribunal?

M. Savoie: On nous dit qu'on en a perdu 1 sur 37.

M. Léonard: Vous en avez gagné 36?

M. Savoie: Oui.

M. Léonard: C'est un bon taux.

M. Savoie: Ah oui! je comprends. C'est un bon taux.

M. Léonard: Ça veut dire que vous n'agissez que lorsque vous êtes sûr. Donc, ça prend du temps à être sûr!

M. Savoie: Oui, c'est le ministère du Revenu. On a tendance à faire attention, compte tenu des responsabilités énormes qu'a le ministère et pouvoirs. Il faut être modeste quant à nos interventions.

M. Léonard: Dans les autres, vous vous êtes désistés. Vous ne savez pas dans combien de causes vous vous êtes désistés en cours de route?

M. Savoie: Aucun désistement.

M. Léonard: Aucun? Quand vous embarquez, vous êtes sûr de gagner dans 36 cas sur 37. Des bouledogues, des pit bulls!

M. Savoie: Bien non, pas des pit bulls. M. Léonard: Bien, c'est pas mal.

M. Savoie: Ce n'est pas enragé, dans le sens... C'est modeste, hein...

M. Léonard: Non, je n'ai pas dit ça dans le sens qu'ils étaient enragés.

(12 h 40)

M. Savoie: Non, non, je sais. C'est le ministère du Revenu.

M. le Président, avec votre permission, M. le député de Labelle, j'aimerais mettre fin au travail de la commission, pour ce matin, quitte à reprendre à 15 heures avec...

M. Léonard: À 15 heures?

M. Savoie: Oui, parce que j'ai un contretemps. J'ai le Conseil des ministres qui a cours et je voudrais y assister, qui a débuté il y a...

M. Léonard: Ah oui! Ah oui, c'est mercredi! Ça va.

M. Savoie: Oui, et je sais que, vers...

M. Léonard: À quelle heure ça recommence cet après-midi?

M. Savoie: À 15 heures.

M. Léonard: C'est à 15 heures?

Le Président (M. Messier): Nous allons suspendre pour être de retour à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 42)

(Reprise à 15 h 11)

Le Président (M. Gobé): Mesdames et messieurs, bonjour. La commission du budget et de l'administration va maintenant reprendre ses travaux. Je vous rappellerai rapidement le mandat. Notre mandat, aujourd'hui, est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 90, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur le tabac, la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal.

Tout d'abord, je m'excuserai, au nom des membres de cette commission, pour mon léger retard, mais j'étais retenu en Chambre et il y avait la cloche qui sonnait. Me voici, donc je vous rejoins avec quelque retard et je m'en excuse.

Alors, nous étions donc à l'article 17. M. Filion, vous aviez la parole. Alors, vous l'avez encore, je vous la redonne. Il vous reste 14 min 35 s.

M. Filion: II reste 14 min 35 s pour l'article 17?

Le Président (M. Gobé): C'est ça.

M. Filion: C'est beau.

Le Président (M. Gobé): Allez-y.

M. Filion: Merci, M. le Président.

Alors, ce matin, lorsque j'ai commenté l'article 17, qui est un peu le noeud...

M. Savoie: Une seconde, s'il vous plaît!

Le Président (M. Gobé): M. le ministre. Oui, avez-vous...

M. Savoie: Avec votre autorisation, on peut enlever notre veste?

Le Président (M. Gobé): Certainement, M. le ministre, j'y consens avec plaisir, à condition que ce soient seulement les ministériels...

M. Savoie: Que ce soit seulement ma veste!

Le Président (M. Gobé): ...que les élus, pour le décorum.

M. Savoie: Je m'excuse, c'est parce que... M. Filion: M. le Président, on peut continuer.

Le Président (M. Gobé): C'est bon pour vous aussi, M. le député.

M. Filion: Non, je n'en sens pas le besoin, moi, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Mais vous ne pouvez pas la retourner tout de suite, par exemple.

M. Filion: Je n'en sens vraiment pas le besoin.

M. le Président, pour continuer l'étude de l'article 17... C'est le noeud de ce projet de loi, puisque c'est à cet article que l'on augmente la pénalité et qu'on la rend applicable jusqu'à un montant de 500 000 $, pour ceux qui vont contrevenir, qui vont être coupables d'infraction au niveau du transport et de la vente du tabac.

M. le Président, comme je l'ai expliqué ce matin, et aussi, en même temps, ce qui vient justifier que ce projet de loi n'a pas sa place, c'est qu'on est en train de forcer des gens — ils vont être obligés, à toutes fins pratiques — à abandonner ce secteur d'activité du tabac, puisque, dans un domaine légal... C'est-à-dire que le dépanneur ne pourra plus vendre, il ne pourra plus être compétitif dans le domaine légal de la vente du tabac, puisque la contrebande ne sera absolument pas réglée par ce projet de loi.

Le ministre a reconnu, effectivement, qu'il ne réglait rien avec ce projet de loi. Il a reconnu également que ce projet de loi allait entraîner encore des pertes importantes de deniers publics — jusqu'à 50 000 000 $ additionnels en taxes spécifiques sur le tabac — l'an prochain. On a perçu 410 000 000 $ en 1992-1993 et, l'an prochain, on prévoit en percevoir 360 000 000 $. Là, on augmente les pénalités, sans non plus augmenter... C'est un peu là où j'en suis, et je trouve qu'on a atteint le seuil de l'absurdité du projet. On n'augmente même pas les ressources humaines au ministère. On augmente les pénalités, mais on n'augmente pas les ressources humaines, c'est-à-dire les vérificateurs ou les policiers qui vont être chargés de l'application de ce projet de loi. Les 60 policiers de l'an dernier vont demeurer le même nombre en place pour l'application du projet de loi. Ces gens-là, M. le Président, ont eu un échec, l'an dernier, c'est-à-dire que la police du tabac n'a pas été capable de contrer le marché au noir, qui a augmenté, à toutes fins pratiques.

Là, on se retrouve avec une pénalité et on augmente... J'ai l'impression qu'on est ici pour augmenter une pénalité, sans vraiment chercher à solutionner un problème. Je pense qu'on légifère pour rien.

M. le Président, je pense que, le vrai problème, le ministre en a parlé hier en commission. On sait pertinemment que le projet de loi ne vise pas à régler non plus toute la problématique de saisies en réserves autochtones. On sait pertinemment que ce projet de loi n'augmentera pas les saisies en réserves autochtones, et on a vu avec le ministre hier qu'Akwesasne est un peu La Mecque, si on peut l'appeler ainsi, de la contrebande du tabac. Akwesasne, je pense que c'est la réserve, actuellement, où il y a environ 1000 autochtones sur 12 000 qui font le trafic actif de la contrebande du tabac.

Le projet de loi qu'on a devant nous, ici, ne vise absolument pas et ne touche pas le fond du problème. Il ne touche pas le fond du problème. C'est à ce niveau, d'abord, qu'on devrait penser à faire de l'intervention policière, qu'on devrait penser à mettre une pression au niveau de la contrebande du tabac. Akwesasne demeure toujours l'endroit où on doit axer nos énergies pour mettre fin à ce problème, à ce fléau social.

Au contraire, on vient ici augmenter simplement les pénalités pour venir encore rendre le système économique déloyal envers les dépanneurs, qui vont être obligés d'abandonner la vente de cigarettes et de perdre leurs profits. S'ils maintenaient la vente de cigarettes, M. le Président, ils seraient sujets à des pénalités jusqu'à 500 000 $, s'ils le font en contrebande. S'ils le font de façon légale, ils n'en vendront plus. Alors, de toute façon, ils sont voués à perdre ces profits-là. Ils sont voués à les perdre, les profits, et à se retrouver dans une situation financière beaucoup plus précaire.

C'est dans ce sens-là, M. le Président, que l'article 17, si je lui accorde une importance et que j'en parle abondamment, c'est que c'est à ce niveau-ci que l'article 17... Je pense que le projet de loi a tout son sens par rapport à l'objectif visé par le ministre, qui est un objectif qui ne donne absolument rien sur le plan pratique, celui de freiner la contrebande du tabac.

M. le Président, en début de commission, j'avais déposé une motion pour entendre la Sûreté du Québec. J'ai jugé important d'entendre ce corps policier qui, à toutes fins pratiques, est très sensibilisé à la contrebande du tabac sur notre territoire et de voir avec eux ce qu'ils pensent des mesures fiscales qu'on est en train de mettre

sur pied, ce sur quoi on est en train de légiférer pour régler le problème de la contrebande du tabac. Cette motion a été déposée. Bien sûr, on en a discuté. Les députés, en Assemblée, ont jugé inopportun d'entendre la Sûreté du Québec.

Pourtant, M. le Président, la Sûreté du Québec, elle a été convoquée au niveau du marché au noir, au niveau du vidéopoker. On l'a entendue, M. le Président. Si on assiste à un marché au noir, un marché d'illégaux, encore plus imposant — peut-être 3, 4 fois le marché du vidéopoker — je pense que la Sûreté du Québec, qui est le corps policier, au Québec, qui représente la sécurité publique et la protection des citoyens, on aurait aimé les entendre, mais la commission a refusé cette motion, pour qu'on puisse avoir plus d'informations de la part de nos corps policiers,

M. le Président, je sais qu'au moment où on se parle l'étape préliminaire, c'est-à-dire avant le début de l'étude du projet de loi... Si on avait d'autres motions, ça aurait dû être à ce niveau qu'on aurait dû présenter ces motions, sauf que, dans un but, simplement, d'exercice de démocratie et, en même temps, je pense, comme tout bon député doit le faire, lorsqu'on veut débattre des points, on présente des motions, j'aimerais, à nouveau, M. le Président, présenter une motion, qui pourrait se lire comme suit: «Que la commission du budget et de l'administration souhaite, dans le cadre de l'étude du projet de loi 90, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur le tabac, la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal, pouvoir entendre, de manière à faciliter l'exécution de ses travaux, le caporal Denis Constant, de la Gendarmerie royale du Canada. » (15 h 20)

M. le Président, cette motion, je la dépose. J'aimerais discuter et défendre la recevabilité d'une telle motion, et avoir l'opportunité d'expliquer l'importance d'entendre le caporal Denis Constant, qui pourrait apporter des informations additionnelles à la commission, puisque le noeud du problème demeure. On pense, M. le Président, qu'il s'agit toujours de tout ce qui se passe au niveau d'Akwesasne, de la réserve autochtone d'Akwesasne. Le caporal Denis Constant, qui est au service des renseignements, à la Gendarmerie royale, pourrait certainement apporter d'autres indications et informations à la commission, qui nous permettraient de penser à une action efficace, à une action où on pourrait légiférer sur une intervention sur le terrain, et penser véritablement à les saisir là où on doit saisir. Ne pas saisir des paquets de cigarettes qu'un consommateur se voit offrir dans une concurrence déloyale, une concurrence économique déloyale, ne pas saisir un dépanneur qui se voit couper ses vivres, son pain et son beurre, parce qu'il doit perdre et renoncer à ses profits, mais bien saisir le pain et le beurre des contrebandiers.

La commission pourrait peut-être, à ce moment-là, M. le Président, être informée, par les gens du milieu, vraiment, par les gens du milieu, de ce qu'ils pensent véritablement de ce problème qu'est la contrebande du tabac, selon eux, qu'est-ce qu'on devrait, nous, comme législateurs, entreprendre comme politique fiscale.

M. Forget: M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Oui, M. le député.

M. Forget: Voici, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Excusez-moi, M. le député, j'ai... Vous avez un problème?

M. Forget: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): En vertu de quoi, M. le député de Prévost? Une question de règlement? Une question de privilège?

M. Forget: Voici, l'article 242. Une voix: L'article 244.

M. Forget: L'article 244, excusez. Voici, puisque la commission a déjà étudié, à plusieurs reprises...

Le Président (M. Gobé): Donc, si je comprends bien, vous me faites une question de règlement.

M. Forget: Une question de règlement.

Le Président (M. Gobé): Sinon, je ne peux pas vous reconnaître, parce que la parole est actuellement au député.

M. Forget: Je pense que... Question de règlement, définitivement.

Le Président (M. Gobé): Bon. Alors, en vertu d'une question de règlement. Pouvez-vous m'expliquer, maintenant, me faire valoir la question que vous soulevez?

M. Forget: Oui, M. le Président. Puisque la commission a déjà étudié plusieurs articles du projet de loi, il n'est donc plus possible de proposer une motion visant à tenir une consultation particulière.

Le Président (M. Gobé): Quel article est-ce, M. le député?

M. Forget: L'article 244, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): L'article 244. Alors, j'en prends donc connaissance. Je vais donc suspendre les travaux 1 minute, le temps de vérifier l'article 244.

M. Forget: Merci, M. le Président. (Suspension de la séance à 15 h 22)

(Reprise à 15 h 23)

Le Président (M. Gobé): La commission reprend ses travaux.

Alors, lors de l'étude d'un projet de loi, il y a une période qui est prévue pour faire des motions, pour demander des consultations particulières ou entendre un certain nombre de personnes. Alors, malheureusement, je vois que nous sommes — je vais terminer et, après, je vous passerai la parole — à l'article 17, ce qui démontre que cette période est déjà largement passée, d'après ce que je peux voir. Je dois donc, malheureusement, ne pas accepter cette motion, la jugeant non pertinente à ce moment-ci de nos débats. Je suis désolé pour vous, M. le député. Je dois malheureusement donner raison au député de Prévost, qui a soulevé cette question de règlement.

M. Filion: M. le Président...

Le Président (M. Gobé): Oui, M. le député.

M. Filion: ...ce n'était pas une motion dans le cadre d'une motion préliminaire, à l'article 244. Il s'agissait simplement d'une motion dans l'exécution et le déroulement normal de nos travaux, c'est-à-dire...

M. Savoie: ...

Le Président (M. Gobé): S'il vous plaît, M. le ministre.

M. Filion: M. le Président... Mais, écoutez, M. le Président...

Le Président (M. Gobé): M. le député de Prévost. Je pense que M. le député a écouté ce que j'avais à dire. On vous a écouté lorsque vous avez fait votre question de règlement, et...

M. Filion: Alors...

Le Président (M. Gobé): ...qui est très pertinente, d'ailleurs. J'ai statué dessus. Maintenant, il a peut-être d'autres arguments à me faire valoir. Je pense que je me dois de l'écouter avant d'aller plus loin.

M. Savoie: Rapidement... M. Filion: Monsieur...

Le Président (M. Gobé): M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Savoie: Rapidement...

Le Président (M. Gobé): Lorsqu'un membre a la parole, c'est la présidence qui a à décider de la...

M. Savoie: Oui, mais il n'a pas 20 minutes, là.

Le Président (M. Gobé): Je vais écouter M. le député et je verrai...

M. Filion: Bon.

Le Président (M. Gobé): ...par la suite, M. le ministre.

M. Filion: M. le Président, merci.

Effectivement, à l'article 244, c'est dans le cadre d'une motion préliminaire, où on demande d'entendre des gens. M. le Président, on a étudié le projet de loi depuis... C'est maintenant la deuxième journée. On se rend compte, au fur et à mesure que les travaux avancent, qu'on reçoit des nouvelles informations, qu'il y a une problématique, à Akwesasne, qui est majeure. Nous, on veut simplement, en tant que députés voulant travailler en fonction des outils qu'on a, c'est-à-dire présenter des motions, au fur et à mesure qu'on le juge opportun, en fonction de l'information que l'on reçoit également... Et je pense qu'au moment où on se parle l'article 17, qui est le noeud du problème de ce projet... bien, le noeud, c'est-à-dire où tout passe par là, c'est-à-dire la pression sociale qu'on est en train de développer et l'agressivité qu'on va développer chez les gens passent par cet article de loi...

Nous, on veut simplement se prévaloir de l'article 158. L'article 158 de nos règlements, M. le Président — la section 6 — dit: «En commission, les motions ne requièrent pas de préavis.» Alors, nous, on dépose une motion. Une motion qui se veut une motion dans un cadre de travail d'un député qui veut s'exprimer et qui croit à la pertinence de ce genre de motion.

Avec cet article, il faut lire, simultanément ou ensemble, l'article 185, où on dit: «Le député qui désire proposer que l'Assemblée se prononce sur une question le fait par motion.» Alors, c'est ce que je fais. Je demande — c'est un souhait — que l'Assemblée puisse se prononcer sur une question. Cette question, M. le Président, elle est très simple. Je l'exprimais dans ma motion. C'est que j'aimerais que l'Assemblée se prononce sur la possibilité d'entendre un représentant de la Gendarmerie royale du Canada, qui est au coeur de la problématique que l'on vit à Akwesasne. Il pourrait fournir à cette commission des informations très pertinentes et essentielles pour un débat constructif, pour qu'on puisse légiférer d'une façon efficace, et non pas simplement de façon à créer des tensions sociales par des pénalités accrues. Ce genre de mesures risquent de créer tout simplement un cul-de-sac pour les dépanneurs qui vont abandonner carrément la vente du tabac, qui était majeure dans leur entreprise.

Le Président (M. Gobé): M. le député, je pense que votre argumentation, à ce stade-ci, apporte un élément nouveau à ma connaissance. Je me dois, avant d'aller plus profondément — je vois que M. le député

de Prévost me fait des signes — de l'écouter.

M. Forget: Voici, M. le Président. Si vous regardez l'article 158 — il y a déjà une décision qui a été rendue, dans un cas — il ne veut pas dire, à n'importe quel moment, de discuter du fond comme tel. Alors, je pense que le député de Montmorency... Naturellement, il faut qu'il s'en revienne au projet de loi, à l'article 17 qu'on étudie présentement. Je pense qu'il ne faut pas aller dans le fond du projet de loi comme tel. Alors, je pense que c'est irrecevable, de la façon qu'on fonctionne.

M. Filion: M. le Président, je suis directement au fond de l'article 17, puisque l'article 17, c'est à se demander la pertinence de cet article-là, compte tenu de ce qu'il a comme résultat au niveau de la contrebande du tabac à Akwesasne, qui est le coeur et La Mecque de cette problématique. À la limite, M. le Président, suite à l'intervention ou aux commentaires d'un agent de la Gendarmerie, on pourrait se rendre compte que l'article 17 devrait être tout simplement abrogé, qu'il n'a plus sa pertinence.

C'est dans cet esprit-là qu'on a besoin d'avoir de l'information additionnelle de la part d'une personne qui est au coeur du débat et qui représente, au fond, la Gendarmerie royale du Canada. Selon lui, il y a 1000 autochtones sur 12 000 qui participent actuellement à ce commerce lucratif, excessivement lucratif, qu'est la contrebande du tabac.

C'est au niveau de l'article 17, M. le Président, parce que recevoir une information pertinente de la part de la Gendarmerie royale pourrait nous permettre de dire: Bien oui, effectivement, l'article 17 n'a plus sa pertinence. Il devrait être abrogé, et non seulement abrogé, mais donner naissance à une nouvelle mesure fiscale, qui pourrait régler la problématique d'Akwesasne, qui est au coeur de la contrebande du tabac, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Vous comprendrez, M. le député, que, dans le souci de rendre une décision la plus juste et la plus éclairée possible, je dois respecter les droits des parlementaires. Ayant un doute raisonnable dans mon esprit, avant de rendre une décision, je vais donc suspendre les travaux — quelques minutes, cette fois-ci — afin de m'informer auprès de juristes ou de gens capables de me donner un éclairage un peu plus large que celui que je possède à ce stade-ci, et ceci, dans le but de respecter les droits et privilèges des parlementaires. Donc, je suspens les travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 29)

(Reprise à 15 h 33)

Le Président (M. Gobé): M. le ministre, s'il vous plaît! Je suis prêt à rendre une décision. Alors, la décision restera la suivante:

Nonobstant l'article 158, je ne peux accéder à la recevabilité de cette motion. Non pas parce qu'elle est déposée sans préavis, mais parce qu'elle n'est pas déposée à la bonne période de l'étude du projet de loi. Vous auriez pu la déposer sans préavis lorsque le projet de loi a été présenté et que, suite aux remarques préliminaires, il y a eu la période de dépôt des motions. Malheureusement, lorsque l'étude est commencée, dans l'ordre de fonctionnement de l'étude d'un projet de loi, qu'il y ait préavis ou pas n'y change rien. Ce n'est pas des arguments.

Par contre, je peux vous faire lecture de l'article 244, si vous voulez, qui confirme cette chose et qui dit, entre autres: «Avant d'entreprendre l'étude détaillée, la commission peut décider de tenir des consultations particulières dans le cadre de son mandat.» Ce qui explique qu'il indique explicitement qu'il est prévu, dans l'ordre de procédure d'une étude détaillée, une période pour entendre et décider, pour la commission, si elle entend, oui ou non, des personnes, des groupes ou des organismes.

M. Filion: Mais, d'un consentement unanime, M. le Président, est-ce qu'on pourrait déposer une telle motion?

Le Président (M. Gobé): Donc, elle est non recevable. Maintenant, s'il y a consentement...

Des voix: II n'y a pas de consentement.

Le Président (M. Gobé): Si M. le ministre ou les députés consentent, moi, personnellement, je n'aurai pas à m'objecter. Alors, y a-t-il consentement à ce que nous recevions le caporal Denis Constant de la Gendarmerie royale du Canada?

M. Savoie: II n'y a pas de consentement.

Le Président (M. Gobé): II n'y a pas de consentement. Alors, le caporal ne sera donc pas invité à cette commission par la commission.

Nous allons retourner à l'article 17. M. le député de Montmorency, vous aviez la parole.

M. Savoie: M. le Président, tout simplement, si vous me permettez un petit commentaire. Il faut bien comprendre que ce n'est pas personnel au caporal en question, que je connais de nom, ni à la Gendarmerie royale. Il faudrait que ce soit bien clair au dossier, comme tel. Nous avons refusé, au début de nos procédures, la Sûreté du Québec. Compte tenu du refus qu'on a eu pour la Sûreté du Québec, intervenir ici, à ce moment-ci, avec la Gendarmerie royale serait...

Le Président (M. Gobé): Très bien, M. le ministre.

M. Savoie: ...vraiment une injustice assez importante vis-à-vis de la Sûreté du Québec. Deuxièmement, je pense que la nature de la mesure, à ce moment-ci, on peut la considérer comme une mesure dilatoire de la part de l'Opposition. On constate que ça a été garroché...

Le Président (M. Gobé): O.K., M. le ministre. D'accord, merci. Je pense que, M. le député de Montmorency, vous aviez la parole. Il vous reste 8 minutes, et votre temps tourne.

M. Filion: M. le Président, j'aimerais demander au ministre pourquoi, vraiment, se couper d'une information additionnelle, qui pourrait être vraiment pertinente au débat de ce projet de loi là?

M. Savoie: Elle est très pertinente. Je possède cette information-là, M. le député. Alors, je n'en ai pas besoin en commission parlementaire.

M. Filion: Oui, je comprends. Vous, vous avez la science infuse, M. le ministre, mais on est ici, les parlementaires, pour adopter un projet de loi. Il y a d'autres personnes, à la commission, qui n'ont peut-être pas toute l'information que vous avez et qui seraient peut-être intéressées à ce que vous nous disiez ce que vous avez comme information, pour qu'on puisse, tout le monde, suivre le raisonnement de ce projet de loi. On a l'impression qu'il n'est pas fondé sur le plan de freiner tout simplement la contrebande et qu'on vise les mauvaises personnes. On matraque le consommateur, on matraque le vendeur, mais on ne matraque pas le contrebandier à sa source même, en réserves autochtones, à Akwesasne.

On veut essayer de savoir, avoir de l'information des services policiers, puisqu'on a tendance à vouloir légiférer la fiscalité comme dans un État policier, maintenant. On voudrait savoir, de leur part, ce qu'ils en pensent. Est-ce qu'on est sur la bonne route? Est-ce qu'on a franchi le bon cap, qu'on a pris comme objectif de législateurs, ou pas? Moi, je voudrais bien comprendre ça. Si le ministre pouvait m'expliquer ça, je pense que ce serait à la satisfaction des gens autour de cette table.

M. Savoie: D'abord, je pense qu'il faut que ce soit très clair que votre commentaire, en ce qui concerne la science infuse, c'est insultant. Ce que j'ai indiqué très clairement, c'est qu'en ce qui concerne Akwesasne, en relation avec le projet de loi, on n'a pas besoin de rencontres additionnelles ou de discussions additionnelles là-dessus. Akwesasne n'est qu'une partie du problème. C'est un élément du problème, mais ce n'est pas un élément de la solution. Nous sommes à la recherche, à ce moment-ci, de solutions. On comprend fort bien la problématique d'Akwesasne, sa structure et son historique au niveau de la contrebande du tabac au Québec depuis 2 ans. Je pense que ce ne sera pas nécessaire.

Finalement, recevoir le caporal de la GRC, bien que ce serait intéressant, bien que ce serait un avancement important pour la culture de la commission, au niveau de la contrebande du tabac, il faut bien comprendre qu'à ce moment-ci ça constitue une mesure dilatoire. Ça a été refusé par le président, ça n'a pas été accepté par les membres de la commission. Il faudrait passer à d'autres choses.

M. Filion: Pourquoi — c'est là que je veux bien comprendre aussi — c'est considéré comme une mesure dilatoire, au niveau du marché au noir qu'est la contrebande du tabac, et que ça n'a pas été considéré comme une mesure dilatoire au niveau du marché au noir avec les vidéopokers? Le ministre Ryan a accepté...

M. Savoie: Ça fait...

M. Filion: ...lui, d'entendre les policiers. Pourquoi, nous, on se refuse cet accès-là?

M. Savoie: On me signale qu'on est toujours à l'article 17 et que ça entre sur le temps de l'article 17.

Le Président (M. Gobé): Absolument. M. le député de Montmorency, vous avez la parole, et c'est sur l'article 17, actuellement, que nous sommes pour le temps, la motion ayant été déclarée non recevable.

M. Filion: Oui, mais si je pouvais comprendre ça, M. le Président.

M. Savoie: Mais est-ce que vous êtes suffisamment mal organisé que vous arrivez à mi-chemin dans le projet de loi, après avoir voté sur la moitié des articles, où on a quasiment fini le dossier du tabac, quasiment terminé l'ensemble des mesures concernant... Il en reste 5 ou 6. Alors, arriver à ce moment-ci et présenter une mesure sur le tabac...

Moi, je suis d'accord avec mon collègue que, finalement, ça n'a pas l'air bien, bien structuré. Ça a l'air broche à foin un peu, là. Vous arrivez, au début, avec la Sûreté du Québec; à mi-chemin, avec... Au lieu de présenter ça au début. Si on avait eu une présentation globale au début, on aurait pu la prendre en considération. Mais là, arriver comme ça, tirer sur tout ce qui bouge comme ça vous tente, un mercredi après-midi, alors que les travaux de l'Assemblée nationale pourraient se terminer vendredi... On sait que le rapport doit être déposé à l'Assemblée nationale demain.

M. Filion: Pourquoi vendredi?

M. Savoie: Parce qu'il y a de fortes chances que les travaux de l'Assemblée nationale soient terminés pour vendredi, de fortes chances.

M. Filion: Oui, mais, en principe...

M. Savoie: Alors, à ce moment-là, les articles concernant la loi sur le tabac se terminent à l'article 23. On est à l'article 17. Vous nous sortez ça du chapeau et vous voulez nous faire croire — je vois que la vérité transperce, parce que je vois un petit coin de sourire — que ce n'est pas une mesure dilatoire. Je comprends que vous avez un rôle à jouer; je suis prêt à le jouer, sauf que j'ai toujours pensé qu'on avait une relation cordiale, où on se dit: Bon, écoute, on a un travail à faire, chacun de notre côté. Vous, vous avez des mandats des gens qui dirigent les travaux de l'Assemblée nationale, disant de prendre du temps ici, de ne pas en prendre. Moi, j'ai également ces orientations-là. Ça ne donne rien de dire non, on conte des mensonges. (15 h 40)

M. Filion: Non, non.

M. Savoie: On pourrait tout simplement dire: On va le faire agréablement. On va discuter des projets de loi. On a des experts avec nous autres, qui peuvent nous entretenir amplement. On peut faire notre petit bonhomme de chemin et y aller doucement sans s'embarquer dans des mesures ou des procédures extraordinaires, qui démontrent, finalement, une certaine incohésion. Vaut mieux y aller article par article.

M. Filion: Bien sûr.

M. Savoie: Je pense que vos adjoints sont d'accord avec ça, y aller article par article, tranquillement. En les épluchant, on ne sait jamais, on peut tomber sur quelque chose qui n'est pas correct dans le projet de loi. Je suis d'accord avec vous. On va y aller de l'avant. Ça a été refusé, on va aller de l'avant.

M. Filion: M. le Président, c'est quoi l'urgence nationale de légiférer le projet de loi 90? Il n'y a pas d'urgence nationale. Pourquoi il faut que ce soit fini vendredi?

M. Savoie: Non, non. J'ai dit que les travaux de l'Assemblée nationale se terminent vendredi.

M. Filion: C'est le 23, en principe. Ce n'est pas vendredi, là.

M. Savoie: Oui. En principe, c'est le 23. Maintenant, vous allez me dire, le sourire au coin des lèvres, que ce n'est pas prévu que les travaux se terminent vendredi, que ça ne se discute pas, là? Ce n'est pas dans les airs que ça se peut que, vendredi, on cesse les travaux? C'est probable. Enfin, je sais que ça se travaille, hein, ça se travaille. Ça se parle, ça se discute. Alors, à ce moment-là, si on doit être ici lundi, ça ne me dérange pas, moi. De toute façon...

M. Filion: Mais ce n'est pas une mesure dilatoire. Puis, M. le Président...

M. Savoie: II n'a rien que ça à faire, dans la vie, lui.

M. Filion: ...quand j'entends le ministre nous dire qu'on n'était pas préparés... On a présenté la motion en début de commission, avant même de débuter nos travaux, pour entendre la Sûreté du Québec, sur une base parallèle au marché au noir, où le ministre Ryan, lui, avait accepté.

M. Savoie: II reste combien de temps sur...

M. Filion: Le ministre Ryan avait accepté, M. le Président, d'entendre la Sûreté du Québec. Sur cette motion, qui était recevable, M. le Président, on a voté contre. Alors, qu'on ne vienne pas me faire accroire qu'on est dans des mesures dilatoires. Au fur et à mesure qu'on avance dans le projet, on se rend bien compte que c'est un projet qui ne va nulle part. C'est un projet qui ne règle rien, sur le fond même de la contrebande. C'est un projet qui va simplement créer des tensions sociales additionnelles. Les gens, qui sont déjà traités injustement, vont se racheter ailleurs, d'une façon quelconque, dans le système fiscal. Écoutez, arrêtez d'être naïfs, ils le font déjà. Vous aviez un manque à gagner, l'an dernier, de 1 436 000 000 $ dans votre budget. Ça ne tombe pas des nuages.

M. Savoie: Ce n'est pas vrai, ça.

M. Filion: M. le ministre, vous regarderez votre budget, puis on en reparlera après. C'est parce que vous n'avez pas regardé. La somme de 1 436 000 000 $ de manque à gagner de recettes fiscales, au Québec, ce n'est pas des petits sous. Là, on est rendu à légiférer sur un plan où on accentue les pénalités, M. le Président, sans même augmenter les effectifs de vérification ou de la police.

Moi, je pense qu'on est en train de légiférer sur un projet de loi qui, à toutes fins pratiques, ne va pas au fond des problèmes. Je pense que, si on veut faire un travail consciencieux, vraiment faire le tour du dossier, pas parachuter un projet de loi ou le soumettre à la guillotine... C'est ce qu'est en train de nous annoncer le ministre. Il va mettre la guillotine sur un projet de loi qui, à toutes fins pratiques... La contrebande du tabac existe depuis 1988. Là, on a un projet de loi qu'on va être obligé d'étudier en 2 jours parce qu'il faut mettre la guillotine dessus si on ne passe pas au travers.

M. le Président, moi, je n'accepte pas ça. Comme parlementaire, on a beau parler de concept, on a beau dire qu'il faut que ça passe, qu'il faut qu'on règle ça, il y a des limites, M. le Président. Je pense qu'on est en train, justement, de traiter un dossier comme des enfants qui ne sont pas sérieux et qui ne veulent pas aller au fond des choses. Je pense que, si ce n'était pas un problème aussi majeur que celui de la prohibition — et même pire, à mon avis — qu'on a vécu dans les années

trente, M. le Président, on n'insisterait pas pour entendre des gens de l'extérieur pour nous donner plus d'information. Je l'ai demandé, en début de projet, en début de commission — on s'est conformé — on nous l'a refusé.

On avance dans le projet et on se rend compte qu'une grosse partie de la problématique du tabac transite par Akwesasne. M. le Président, même le ministre, hier, le reconnaissait qu'Akwesasne c'était le gros problème. Il l'a reconnu, hier, en commission. Il l'a reconnu. Là, on dit: Bien, si on pouvait entendre nos corps policiers, on pourrait se faire une meilleure idée et penser avec eux comment on pourrait intervenir. Est-ce que l'intervention, ce sont des pénalités fiscales? J'en doute. J'en doute fortement.

L'intervention qu'on devrait faire devrait être une intervention sur la réserve, de concert, s'il le faut, avec les États-Unis et le Canada. Si le Canada ne veut pas suivre une politique fiscale de réduction de taxes, le Canada pourra au moins avoir la décence d'intervenir de concert avec le Québec, sur un plan strictement de saisie de produits, et faire en sorte, comme on dit, de faire du ménage là où il faut faire le ménage. C'est ça qu'on veut savoir du corps policier, ce qu'ils en pensent, eux? Est-ce que c'est faisable? Comment on pourrait le faire? Jusqu'où on pourrait aller?

Pourquoi le ministre Ryan accepte, lui, d'entendre les policiers, puis que, nous, on ne peut pas? Pourquoi le ministre du Revenu refuse de nous fournir cette information-là, qu'un de ses collègues accepte de fournir à une commission, qui ressemble à la nôtre, d'ailleurs, qui travaille le marché au noir au niveau du vidéopoker? Je ne comprends pas encore.

Le Président (M. Gobé): M. le député de Montmorency, vous avez la parole.

M. Filion: Alors, il faut croire que le ministre ne veut plus répondre à ce genre de questionnement. Pour lui, c'est clair.

M. Savoie: Non, non, mais il n'y avait pas de question.

M. Filion: Bien oui, il y avait une question!

M. Savoie: Non, non, il n'y avait pas de question.

M. Filion: Je lui demandais comment il se fait que, lui, il répondait différemment de son collègue, le ministre Ryan, lui qui accepte d'entendre les policiers pour traiter et trouver une solution efficace au marché au noir. Comment se fait-il que cette commission-là ne peut pas avoir accès à ce genre d'information là? C'est quoi, la différence? Je voudrais le comprendre.

M. Savoie: Bon. Bien... Il reste combien de temps?

Le Président (M. Gobé): À qui? Pour vous? Vous avez vos 20 minutes, presque, M. le ministre.

M. Savoie: Non, non, sur la question de l'article 17. Est-ce qu'on...

Le Président (M. Gobé): Ah! il reste une couple de minutes à M. le député pour parler. Il a encore du temps.

M. Savoie: Puis, ensuite, c'est terminé? On va faire 18.

Le Président (M. Gobé): Par la suite, s'il n'y a pas d'autres intervenants, M. le député de Prévost, vous ou moi-même, je pourrai donc procéder.

Alors, M. le député de Montmorency, avez-vous d'autres questions à poser?

M. Filion: Mais j'ai posé une question. Je ne sais pas si le ministre veut répondre.

Le Président (M. Gobé): M. le ministre, avez-vous des réponses à...

M. Savoie: Oui. Ah oui! Bien, effectivement, il revient à sa mesure dilatoire du début des travaux de la commission, à savoir sa demande d'entendre la Sûreté du Québec, qui a été rejetée hier. Il veut savoir pourquoi, nous, on ne l'entend pas, puis que, dans une autre commission, ils l'entendent. Il y a plusieurs raisons qui militent en faveur d'entendre. J'ai, à plusieurs reprises, permis à une commission d'entendre des intervenants. Mais, dans ce cas-ci, ce n'est pas nécessaire, puisque tout ce qu'on fait, c'est qu'on apporte des modifications. On ne crée pas une nouvelle structure.

Avec le ministre Ryan, il y avait la création d'une nouvelle structure. On a fusionné la Régie avec les alcools et avec les loteries, et on va inclure les courses là-dedans. On va créer la structure qu'on a pondue l'année passée, dans cette société-là, pour régir les vidéopokers. Alors, ils ont décidé d'entendre la Sûreté du Québec. C'est très louable, et je suis certain que M. Ryan avait des motifs valables pour les entendre.

Toutefois, à ce moment-ci, étant donné qu'il n'y a pas de création d'une nouvelle structure, étant donné que tout ce qu'on fait, finalement, c'est qu'on aménage des amendes pour tenir compte de la situation telle qu'elle existe... On étend, en quelque sorte, certains pouvoirs, qui vont permettre de saisir des objets à vue ou bien d'être plus efficaces au moment de saisir des biens. Je ne pense pas que ce soit nécessaire d'entendre la Sûreté du Québec là-dessus.

Même si on doit refaire l'ensemble du processus qu'on a fait hier, je ne pense que ça avancerait véritablement le dossier, puisque le député est fort au courant. Hier, il a admis très clairement qu'il n'avait pas de solution. La seule solution, c'était la baisse des taxes. C'est une situation très complexe. Savoir que c'est en

partie des Indiens, des Mohawks; savoir que c'est en partie la Confédération des six nations iroquoises qui peut être impliquée au niveau du trafic le long de la frontière; savoir qu'il y a beaucoup plus de Blancs que de Mohawks; savoir que le gros de l'argent repose chez la majorité des Blancs et que l'organisation, finalement, se fait par des Blancs, je pense que ça ne règle le problème de personne. Le problème, c'est une baisse de taxes. En conséquence, tout ce qu'on fait ici, c'est qu'on modifie les amendes. C'est ce qu'on veut faire au niveau du ministère du Revenu. Le problème beaucoup plus global, évidemment, doit être traité dans une autre arène et pas ici.

M. Filion: M. le ministre, ça ne fait pas très sérieux parce qu'on n'a jamais reçu... Vous aviez un comité interministériel qui s'était penché sur le problème. Ça date de 1988. On veut entendre des intervenants extérieurs. Vous nous dites que c'est des Blancs qui sont pris dans le dossier. On semble avoir des noms, des indices. Jamais aucune perquisition ne se fait en réserves autochtones.

M. Savoie: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Excusez, M. le député de Montmorency.

M. le ministre, oui.

M. Savoie: Oui. Tout simplement une question de règlement. Je veux savoir si, une fois qu'on a statué sur quelque chose, on peut revenir puis continuer à picosser là-dessus, ou si on doit... (15 h 50)

Le Président (M. Gobé): Ah! il a le droit de parler, M. le député de Montmorency. Un député, dans une commission, peut parler du sujet qu'il veut, du moment qu'il est pertinent à l'article étudié. Il m'a fait une demande, une motion...

M. Savoie: Ah!

Le Président (M. Gobé): ...pour entendre...

M. Savoie: Ça a été refusé.

Le Président (M. Gobé): La motion a été rejetée, en disant que cette commission ne pouvait entendre...

M. Savoie: C'est ça.

Le Président (M. Gobé): Je ne puis empêcher, par contre, à l'intérieur de son temps de parole, M. le député de Montmorency de parler d'idées ou d'opinions qu'il a relativement à l'étude du projet de loi.

M. Savoie: À la motion.

Le Président (M. Gobé): Non, non. À l'étude du projet de loi.

M. Savoie: Non? Bien là, ce qu'il fait, c'est qu'il questionne votre autorité, en tant que président, de refuser une motion. Il revient constamment là-dessus.

Le Président (M. Gobé): Donc, c'est là, votre question de règlement, M. le ministre?

M. Savoie: Oui, c'est ça.

Le Président (M. Gobé): Très bien.

M. Savoie: Je me demande s'il a le droit de continuellement insister pour qu'on revienne et qu'on entende quelqu'un, nonobstant le fait que vous avez...

Le Président (M. Gobé): Alors...

M. Savoie: ...dans votre sagesse, décidé que, non, ça n'était pas possible.

Le Président (M. Gobé): C'est une bonne question, M. le ministre, en effet.

M. Savoie: Oui.

Le Président (M. Gobé): II y aurait lieu de voir à se pencher là-dessus si, en effet, le fait de vouloir insister...

M. Savoie: Picosser, picosser...

Le Président (M. Gobé): ...sur le fait d'entendre. ..

M. Savoie: ...picosser.

Le Président (M. Gobé): ...des agents de la force constabulaire ou policière...

M. Filion: M. le Président...

Le Président (M. Gobé): ...malgré que la présidence ait statué qu'on ne pouvait les recevoir à cette commission, si c'est manquer envers les privilèges de la présidence. Je pense que M. le député de Montmorency fait simplement allusion à la façon dont il aurait aimé procéder, ce qui ne met pas en cause la décision de la présidence. D'ailleurs, son temps se termine sur cet article. Il doit rester moins de 1 minute. Nous serons peut-être prêts à procéder.

M. Filion: M. le Président, écoutez, si j'avais eu une réponse, j'aurais arrêté de le questionner. C'est parce que le ministre n'a pas encore répondu.

M. Savoie: Bien oui! J'ai répondu tantôt. M. Filion: Non, pas du tout. M. Savoie: Le fait que... Je n'ai pas répondu? M. Filion: Non, pas du tout.

M. Savoie: Mon Dieu! on frise l'irrationnel. Ça me fait penser à des rêves, des fois, qu'on a le soir. Je vous ai expliqué que M. Ryan pouvait avoir ses décisions, que lui avait un problème beaucoup plus global, de réorientation. Il me semble que j'ai tout expliqué ça, M. le Président. Est-ce que j'ai expliqué ça, M. le Président, que M. Ryan avait ses propres orientations, qu'il avait une nouvelle structure, une nouvelle approche, donc qu'il a décidé d'entendre la Sûreté du Québec pour évaluer cette nouvelle orientation, la fusion de tout sous un chapeau, faire table rase des structures existantes, au niveau des vidéopokers, une nouvelle approche?

Dans notre cas, nous autres, ce n'est pas ça qu'on fait. Tout ce qu'on fait, c'est qu'on augmente les amendes. On s'assure, par exemple, que quelqu'un qui se promène avec un paquet de cigarettes de contrebande, il ne pourra pas dire: Vous ne pouvez rien faire. C'est illégal, il va le savoir. On pose des gestes sommaires, comme ça, justement dans le but de mieux contrôler, d'aider les gens qui ont à faire respecter la Loi concernant l'impôt sur le tabac, respecter un petit peu plus l'ordre établi que la situation qui existe actuellement.

J'avais tout expliqué ça. Là, je le répète pour la deuxième fois, à la grande satisfaction du député de Montmorency, qui doit se cacher pour ne pas sourire. Vous le voyez, M. le Président? Et l'entendre se moquer de l'autorité de la présidence.

Le Président (M. Gobé): Non, j'ai bien... M. Savoie: Oui, ouvertement, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): ...statué, M. le ministre. Le président n'a pas eu cette impression, ni cette perception.

M. Savoie: Ouvertement.

M. Filion: Pas du tout! Pas du tout, M. le Président.

M. Savoie: Le député est d'accord avec moi. M. Filion: Si le ministre était sérieux... M. Savoie: II est d'accord avec moi.

M. Filion: ...il ne me ferait pas rire, M. le Président.

M. Savoie: Alors, c'est une démocratie: on a raison et tu as tort.

Le Président (M. Gobé): Alors, voilà. M. le député de Montmorency, avez-vous d'autres commentaires ou arguments sur cet article 17?

M. Filion: M. le Président, écoutez, de toute façon, nous allons passer à un article qui ressemble à l'article 17, l'article 18. On pourra reprendre sur toute l'importance de la police du tabac, etc. Au fond, la fiscalité, c'est devenu une question de police. C'est pour ça qu'on veut entendre la Sûreté du Québec...

M. Savoie: Ah! Ah!

M. Filion: ...M. le Président, pour l'article 17, qui est quand même l'article où on prévoit la plus grosse pénalité pour les contrevenants, c'est-à-dire jusqu'à 500 000 $ de pénalité. Alors, M. le Président, inutile de vous dire qu'on aura l'occasion de revoir ensemble toute l'inefficacité de sa police, d'ailleurs qu'il a eue l'an dernier, ce vers quoi il s'en va à nouveau avec ce projet de loi là, sans toucher au coeur du problème, qui est Akwesasne. On aura l'occasion, M. le Président, sûrement.

Le Président (M. Gobé): D'accord.

M. Filion: Vous pouvez appeler le vote sur l'article 17.

Le Président (M. Gobé): J'appelle donc le vote, à la demande de M. le député de Montmorency, sur l'article 17.

M. Filion: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Le vote est donc pris. Sur division. L'article 17 est maintenant adopté.

Nous allons passer à l'article 18. Désirez-vous que j'en fasse lecture?

M. Savoie: S'il vous plaît, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Oui?

M. Savoie: C'est tellement agréable.

Le Président (M. Gobé): Pourquoi pas? Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 14.2, du suivant: «14.3 Toute personne qui contrevient à l'article 9.2 commet une infraction et est passible d'une amende d'au moins 200 $ et d'au plus 1000 $.»

M. Savoie: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): L'article 14.3 est donc...

M. Filion: M. le Président...

Le Président (M. Gobé): M. le député de Montmorency, vous avez la parole.

M. Filion: Oui. Hier, le ministre du Revenu, en cette commission, rerconnaissait... Ce n'est pas petit, ce que je vais dire, M. le Président, c'est même grave...

M. Savoie: Oui, fais attention. Va chercher les galées avant.

M. Filion: II reconnaissait — M. le Président, j'aimerais parler, s'il vous plaît — qu'un consommateur... Ici, c'est une amende de 200 $ pour le consommateur pris en infraction, celui qui fume de la cigarette de contrebande. Le ministre reconnaissait que, si les gens s'achetaient des porte-cigarettes, le fardeau de la preuve, à toutes fins pratiques, serait tellement difficile que ce ne serait pratiquement plus possible de pouvoir pénaliser et prendre un consommateur, au fond, en infraction.

Alors, je me pose toujours une question sur la pertinence de cet article-là, l'article 18, qui modifie 14.3 de la Loi concernant l'impôt sur le tabac, la fameuse pénalité d'au moins 200 $ et d'au plus 1000 $ pour ceux qui vont se faire prendre à fumer de la cigarette de contrebande. Le ministre reconnaissait hier, M. le Président, hier soir, que, si on établit une politique d'achat, par exemple, de porte-cigarettes, ça va devenir très difficile pour le ministère du Revenu de faire la preuve, puisque l'article 9.2 prévoit justement que consommer du tabac illégal est un geste jugé reprehensible par la société. Il faut avoir un paquet étiqueté, M. le Président, comme quoi c'est vendu aux États-Unis, mais, si le paquet étiqueté est remplacé par un porte-cigarettes, qui, actuellement, fait partie du marché normal de la contrebande — ça existe; il ne faut pas être déconnecté, il faut être sur le terrain pour voir ce qui se passe — alors, comment il va faire pour arriver à travailler l'application de cet article-là? Est-ce qu'il a prévu des scénarios? Comment il prévoit ça, lui, l'application de cet article-là? Si tout le monde s'achète des porte-cigarettes, il va se passer quoi? Expliquez-moi ça, M. le ministre.

Le Président (M. Gobé): Avez-vous des commentaires sur les porte-cigarettes, M. le ministre?

M. Savoie: Non, aucun commentaire sur les porte-cigarettes, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): J'irais peut-être dans le même sens que le député de Montmorency. Une question. On a le droit d'importer un certain nombre de paquets de cigarettes lors d'un voyage à l'étranger, à titre d'exemple, je pense que c'est 200 cigarettes ou quelque chose comme ça. Un individu — un citoyen, une citoyenne — importe légalement, par dérogation des douanes, une cartouche de cigarettes et en fait cadeau à son beau-frère, sa belle-soeur, sa belle-mère, qui, elle, se fait arrêter ou contrôler avec ce paquet de cigarettes...

M. Savoie: II faut que ce soit de la contrebande.

Le Président (M. Gobé): ...la preuve, le fardeau de la preuve appartient à qui?

M. Savoie: Évidemment, c'est à nous à démontrer que ce n'est pas du tabac apporté légalement au Québec, que c'est de la contrebande, parce qu'on dit «sauf si».

Le Président (M. Gobé): Est-ce qu'il y a une dérogation?

M. Savoie: À l'article 9.2, oui.

M. Brochu (André): À l'article 9.2, oui, «sauf si ce tabac a été apporté légalement au Québec». Donc, dans l'exemple que vous donnez, ce serait du tabac qui aurait été apporté légalement au Québec.

Le Président (M. Gobé): II est légalement apporté.

M. Savoie: D'ailleurs, votre intervention a beaucoup plus de profondeur que la simple allégation de dire que tout le monde va se promener avec des porte-cigarettes.

Le Président (M. Gobé): Oui, parce que c'est...

M. Savoie: Effectivement, on a la situation où, par exemple, un ami va aux États-Unis, revient avec des cigarettes et en fait cadeau aux membres de sa famille. À ce moment-là, par contre, il y a un étiquetage.

Le Président (M. Gobé): Non, ce n'est pas le même étiquetage.

M. Savoie: Oui, oui. Non, mais il y a un étiquetage.

Le Président (M. Gobé): Ah! O.K. M. Savoie: Ce n'est pas le même. M. Filion: Ce n'est pas le même.

Le Président (M. Gobé): II faut quand même que nos projets de loi soient dans la réalité. Quand on parle de porte-cigarettes, c'est évident qu'il ne se vendra pas des porte-cigarettes à la tonne, à la frontière, pour changer les paquets de cigarettes. Mais, quand même, on sait qu'il y a 600 000, 700 000 Québécois qui,

chaque année, vont en Floride. Il y en a 200 000, 300 000 qui vont en France. Il y en a qui vont un peu partout. Nous sommes des grands voyageurs. Donc, c'est important que le projet de loi s'applique à la réalité de la population, qu'il ne pénalise pas non plus d'honnêtes gens. C'est dans ce sens-là, ma question, M. le ministre.

M. Savoie: Non, non, elle est valable, mais ça me fait penser aux discussions qu'on a lorsqu'on commence à étudier le droit, dans le sens que, par exemple, dans la majorité des villes, il y a un règlement municipal qui empêche de cracher. Si vous crachez par terre, sur une voie publique ou sur un trottoir, vous êtes sujet à une amende de 200 $. Ça varie selon les municipalités, mais, en gros, disons 200 $. Si vous crachez par terre, il y a une amende de 200 $. C'est sûr que les villes ne vont pas créer un corps policier pour surveiller le monde qui crache par terre. Sauf que, effectivement, quelqu'un qui en abuse, quelqu'un qui se montre défiant ou qui utilise ce geste-là pour en importuner d'autres, on a un motif pour intervenir, l'arrêter et lui imposer une amende de 200 $. (16 heures)

C'est un peu la même chose avec l'article 14.3, c'est-à-dire que, quelqu'un qui fume, qui se promène avec de la cigarette de contrebande impunément, dans les endroits publics, un policier pourrait le souligner, le dénoncer. À ce moment-là, en plus des autres infractions que cette personne pourrait commettre, il y aurait une amende pour avoir fumé des cigarettes de contrebande sur la place publique. C'est sûr qu'on ne commencera pas à envoyer la police du tabac dans les bars le soir, faire le tour des tables. On a autre chose à faire dans la vie, sauf que...

M. Filion: Vous n'en avez pas 60... vous en avez juste 60.

M. Savoie: Alors, comme je vous le mentionnais, lorsqu'on étudie le droit, au début, il y a des mesures qui sont coercitives et qui sont incitatives, dans certains cas. Ici, il s'agit tout simplement de mesures pour s'assurer que, non seulement c'est illégal, mais, en plus de ça, si vous vous faites prendre — comment on dit ça? — si vous écoeurez le peuple, vous allez avoir, en plus de ça, une amende de 200 $.

M. Gautrin: Alors, si je comprends bien, c'est un peu le même principe que le recel. Quelqu'un qui est en possession d'une marchandise volée et qu'il l'utilise peut être aussi reconnu comme étant complice ou coupable, même si ce n'est pas lui qui l'a volée. C'est de loin le même principe. Quelqu'un qui a une marchandise illégalement importée...

M. Savoie: Excellente observation.

M. Gautrin: ...est lui aussi responsable, à un niveau moindre que celui qui l'importe, bien entendu... M. Savoie: C'est ça.

M. Gautrin: Donc, ce sont des choses qui se font déjà dans d'autres domaines.

M. Savoie: C'est ça. Excellente observation.

Le Président (M. Gobé): C'est assez clair. Je suis prêt à adopter ça. Je ne sais pas si le député...

M. Filion: Ah bien, pas moi, M. le Président. M. Savoie: Non?

M. Filion: Quand vous regardez là, il faut lire l'article 18 avec l'article 7 et l'article 8. L'article 7 vous dit, au fond, que la façon de juger si le tabac est arrivé en contrebande, la seule façon de le déterminer, c'est qu'il faut que votre paquet, le paquet de cigarettes, soit étiqueté comme étant un produit vendu à l'étranger.

Le Président (M. Gobé): Du moins pas vendu au Canada.

M. Filion: Pas vendu au Canada. Alors, quand ça sort de l'usine, vous avez un paquet qui est étiqueté, avec des marques spécifiques, de la manière prescrite par règlement, comme quoi ce produit-là est vendu pour consommation extérieure. Bien sûr, il n'a pas été taxé lorsqu'il est sorti de l'usine, etc. Alors, ce paquet-là, lorsqu'il revient, c'est ce paquet-là qui fait preuve d'une consommation de cigarettes en provenance du réseau de la contrebande, M. le Président. Alors, imaginez, si le paquet extérieur, c'est ça qui fait indice de preuve...

Le Président (M. Gobé): L'emballage.

M. Filion: ...l'emballage, si vous le substituez par un porte-cigarettes, M. le Président, comment vous allez faire pour établir la preuve que la personne fume une cigarette de contrebande? C'est là ma question. Est-il exact que, la seule façon de l'identifier, c'est par l'étiquetage du paquet de cigarettes? Est-il exact que, pour déterminer qu'un paquet ou que des cigarettes sont consommées ou proviennent du réseau de la contrebande, c'est une question de paquet de cigarettes? Est-ce que c'est exact? Oui, non, peut-être? M. le ministre...

M. Savoie: Excusez-moi.

M. Filion: ...est-ce que c'est exact?

M. Savoie: Est-ce qu'il serait exact que...

M. Filion: ...le paquet de cigarettes...

M. Savoie: Oui.

M. Filion: ...ou la cigarette de contrebande, qui est fumée...

M. Savoie: Oui.

M. Filion: ...la seule façon d'arriver à déterminer qu'il s'agit d'une cigarette de contrebande, c'est d'examiner le paquet de cigarettes qui est étiqueté?

M. Savoie: Là, vous tombez dans des considérations qui dépendent des circonstances. J'imagine que, normalement, oui, le paquet va être un élément important, mais il faut voir que les circonstances vont nous dire s'il s'agit de contrebande ou pas.

M. Filion: Oui, mais, quand vous lisez l'article 8 de votre projet de loi, M. le ministre, c'est très clair.

M. Savoie: Qu'est-ce qui est très clair?

M. Filion: «Tout paquet de tabac prescrit par règlement destiné à la vente en détail au Québec et qui s'y trouve doit être identifié par les personnes, de la manière et aux conditions prescrites par règlement.»

M. Savoie: C'est ça.

M. Filion: Alors, votre paquet de cigarettes, ça devient le document, l'enveloppe, et c'est le document de preuve...

M. Savoie: Oui, mais ça c'est... On parle d'un paquet «destiné à la vente en détail au Québec», c'est-à-dire à la vente au détail. On aurait dû corriger ça il y a longtemps...

Le Président (M. Gobé): Je pense, M. le ministre...

M. Savoie: ...marquer «vente au détail». Ici, on parle de contrebande. Un paquet de contrebande, ça peut être un paquet fait en Angleterre, par exemple, qui est amené en contrebande ici ou un paquet... Vous savez, ils ont commencé à fabriquer leur propre marque de commerce avec leur propre emballage. C'est de la contrebande. Alors, ça n'a pas besoin d'être marqué. Ça peut être un paquet au sens de l'article 1, aussi.

M. Filion: Non, non. M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Oui, on va juste laisser M. le ministre terminer.

M. Savoie: On a défini c'était quoi, un paquet, à l'article 1. On dit qu'un paquet, ça équivaut à «une cartouche et tout autre contenant de tabac ainsi qu'une manoque».

Le Président (M. Gobé): C'est quoi «une manoque»?

M. Filion: Oui, oui, je comprends.

M. Savoie: Alors, c'est une question de preuve. Je comprends que ça peut sembler particulièrement difficile à comprendre, que les choses peuvent varier...

M. Filion: Ce n'est pas difficile. Ce n'est pas difficile.

M. Savoie: ...selon les circonstances ou que la preuve peut être faite à la pièce.

M. Filion: M. le Président, ce n'est pas difficile. Quand vous lisez l'article 7, c'est-à-dire 9.2, on vous dit — c'est clair, c'est pourtant très clair — «le paquet n'est pas identifié conformément à l'article 13.1». Il s'agit d'un paquet de contrebande, M. le Président.

M. Savoie: Non, non, non.

M. Filion: Bien oui! M. le ministre, vous avez un problème de compréhension de votre projet de loi, certain.

M. Savoie: Non, non. Moi, je n'ai pas de difficultés de compréhension. Vous faites des sauts. «Tout paquet de tabac prescrit par règlement destiné à la vente en détail au Québec», «destiné à la vente». Alors, si, moi, je vais en Floride, par exemple, ou si je vais à une boutique hors taxes et que, légalement, j'achète, ce n'est pas un paquet destiné à la vente en détail au Québec. Ce n'est pas de la contrebande non plus.

M. Filion: Bon! M. Savoie: Bon! M. Filion: C'est ce que je dis. Si le paquet...

M. Savoie: Alors, ce qu'on est en train de vous dire, c'est que, pour contrevenir à l'article 18, c'est une question de fait.

M. Filion: Non.

M. Savoie: C'est une question de preuve.

M. Filion: Non.

M. Savoie: Oui. Ne dites pas non, M. le député, ce n'est pas gentil.

M. Filion: Écoutez, je comprends, mais, si...

M. Savoie: Cherchez à comprendre.

M. Filion: Je cherche à comprendre. C'est ce que

je dis. L'article 9.2 vous donne la situation de l'illégalité. Si ce n'est pas un paquet de cigarettes vendu sur le territoire ici...

M. Savoie: Ce n'est pas de la contrebande automatiquement, M. le député. Ça peut être un paquet que j'ai acheté en Ontario. Ça peut être un carton.

M. Filion: Je comprends, mais votre indice de vérification demeure le paquet de cigarettes vendu ici.

M. Savoie: Non.

M. Filion: Bien, écoutez, c'est comme ça que c'est écrit. On dit: «...dont le paquet n'est pas identifié conformément à l'article 13.1 pour le tabac destiné à la vente en détail au Québec». Alors, s'il n'est pas identifié comme étant un paquet qui se vend normalement sur le marché ici...

M. Savoie: C'est dit où, ça, que c'est de la contrebande?

M. Filion: À l'article 9.2, c'est l'article 7.

M. Savoie: Ce n'est pas ça que ça dit.

M. Filion: Ah non? Mais lisez-le. Lisez-moi ça.

M. Savoie: Je ne vous lirai absolument rien. Je vous dis: «...sauf si ce tabac a été apporté légalement au Québec». C'est bien clair, ça?

M. Filion: Oui.

M. Savoie: Bon, bien, si le tabac a été apporté légalement au Québec et qu'il n'est pas identifié pour vente au détail au Québec, ce n'est pas de la contrebande. C'est bien clair, ça. Ça ne prend pas la tête à Papineau.

M. Filion: Je comprends, mais votre seul indice de vérification, c'est la paquet de cigarettes. C'est écrit comme ça dans le projet de loi.

M. Savoie: Non, ce n'est pas ça. C'est ce que je vous répète pour la dernière fois. C'est une question de preuve. C'est une question d'appréciation et c'est une question d'évaluation par du monde intelligent. C'est ça.

M. Filion: Alors, expliquez-moi. Une personne a un porte-cigarettes. Pouvez-vous établir la preuve qu'elle fiime de la cigarette de contrebande?

M. Savoie: Peut-être, peut-être, si la personne...

M. Filion: Comment?

M. Savoie: La personne va peut-être nous l'avouer, qu'elle a effectivement acheté de la contrebande. M. Filion: Si elle ne l'avoue pas?

M. Savoie: Écoutez, M. le député, c'est parce que vos connaissances sont vraiment très limitées. Vous pensez toujours que, la cigarette de contrebande, c'est une Players Light, là. Ça peut être aussi un «Tee Light* ou ça peut être les autres marques, qui ne sont faites que pour fins de contrebande. Comprenez-vous? Ils ont des usines et on fabrique des cigarettes de contrebande. Ce n'est pas des Du Maurier, là. Alors, si quelqu'un, dans son porte-cigarettes, a des cigarettes... J'essaie de penser au nom d'une couple de paquets que j'ai vus il y a quelques semaines... Pardon?

Une voix: «Star Light».

M. Savoie: «Star Light», oui. Je pense à une autre, reliée au golf. Je ne me rappelle plus du nom, mais ce sont des cigarettes illégales, dans le sens qu'elles sont faites pour la contrebande. Les taxes ne sont pas payées aux États-Unis, elles ne sont pas payées chez nous. C'est de la contrebande, pure et simple. Même si tu les as dans un porte-cigarettes, on sait que c'est fabriqué uniquement par une compagnie, que c'est uniquement pour fins de contrebande. Personne n'est coupable... Comme je vous dis, cherchez à comprendre. Cherchez à voir plus large, un petit peu plus loin que vos connaissances limitées du dossier.

M. Filion: Oui, mais le tabac qui est vendu du Canada aux États-Unis et qui revient, c'est le même tabac, c'est la même cigarette.

M. Savoie: Oui, mais ça, c'est un cas. C'est seulement un cas parmi tant d'autres. C'est seulement...

M. Filion: Ça représente combien de pourcentage, la contrebande du tabac? Combien? (16 h 10)

M. Savoie: C'est un pourcentage... Écoutez, là, je commence à comprendre. Vous êtes comptable. Tout se mesure en petits chiffres et tout doit faire un total qui équivaut à 100 %. Ça varie énormément. Un mois, ça peut être très fort, les cigarettes canadiennes qui reviennent; d'autres mois, ça peut être des cigarettes de l'Angleterre, ça peut être des cigarettes de l'Asie. Cherchez à faire un petit peu plus honneur à votre profession, parce que, moi, les comptables, je les aime beaucoup. Je travaille souvent avec des comptables. Ce sont des gens qui, normalement, prennent un petit peu plus de... Mais, vous, on dirait que ça se mélange mal. Vous avez de la difficulté. Vous cherchez à faire des petits ajouts. Vous cherchez à avoir un esprit — comment je pourrais dire, donc? — à faire des opérations de synthèse à partir de l'information que vous possédez, que vos adjoints vous donnent.

Il n'arrête pas de travailler, ce petit jeune là. Il

vous bourre d'informations, mais on dirait que ça passe à côté. Il faut l'écouter. Il faut l'écouter. Il vous donne de la bonne information, je l'entends. Je l'entends, il vous donne de la bonne information. À ce moment-là, il faut comprendre que la situation de la contrebande est beaucoup plus complexe que vous ne semblez le laisser croire. Je vous inviterais à utiliser la formation qu'on vous a donnée en comptabilité, la formation d'analyse critique, d'avoir une attitude ouverte et critique vis-à-vis des faits, puis large, comprendre que c'est une situation humaine. Puis, je suis certain qu'à ce moment-là vous allez mieux saisir le dossier, et vous allez comprendre que, dans la loi, en vertu de ce qu'on a actuellement, on peut arrêter quelqu'un qui se promène avec un porte-cigarettes, parce que les cigarettes sont des cigarettes de contrebande.

Le Président (M. Gobé): M. le député de Prévost, vous avez demandé la parole?

M. Forget: Non, mais, voici...

Le Président (M. Gobé): Bien, oui ou non?

M. Forget: Je pense, M. le Président, que le député de Montmorency a compris, puis on va adopter l'article 18.

M. Savoie: Oui? Ah bon!

Le Président (M. Gobé): Alors, vous demandez l'adoption de l'article 18, M. le député de Prévost?

M. Forget: Oui.

M. Savoie: Ah! mais c'est intéressant, ça. Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): M. le député de Montmorency.

M. Filion: Je comprends mal, M. le Président. Le député, il n'a pas encore dit un mot, il est prêt à l'adopter, lui.

Le Président (M. Gobé): C'est ce que j'ai compris.

M. Filion: On est ici pour analyser un projet de loi, M. le Président. Alors, je pense qu'on va l'analyser.

M. le Président, pour revenir un peu sur... J'aimerais préciser et dire au ministre qu'effectivement j'ai une formation comptable. J'espère qu'il s'entend avec les comptables, parce qu'il va avoir des problèmes avec son ministère, premièrement.

Deuxièmement, également, j'ai une formation, M. le Président, de maîtrise en fiscalité. Je vous avoue que j'en ai vu, des projets de loi, dans ma carrière, mais un projet de loi fiscal...

M. Savoie: Des projets de loi, vous en avez vus beaucoup avant de venir à l'Assemblée nationale, vous? Dites-nous ça! Conte-nous ça!

M. Filion: M. le Président, quelques-uns.

M. Savoie: Combien vous en avez vu, de projets de loi, avant de venir à l'Assemblée nationale, vous?

M. Filion: M. le Président, ce n'est pas important, c'est non pertinent.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Filion: Le ministre veut faire dévier le débat. Mais, s'il avait fait la maîtrise en fiscalité, il aurait vu qu'on en étudie. On en voit, article par article, de la jurisprudence et tout ce que vous voulez. Ça manque à sa culture. C'est dommage, M. le Président.

M. Savoie: Oui, oui. Bien ça, vous savez que, hein, ça en impressionne certains, mais...

M. Filion: Mais, ceci étant dit, M. le Président, moi, je pense que le projet de loi... On le sait, et hier on l'a avoué en commission parlementaire. Le ministre ne veut pas l'avouer aujourd'hui, bon. De toute façon, les galées sont là, elles seront toujours transcrites. tout le monde est d'accord pour dire que, si tout le monde a des porte-cigarettes, la cigarette qui part d'ici, du québec, pour aller aux états-unis et pour revenir... peu importe le pourcentage, ça existe et en gros pourcentage. on parle même de 95 % du produit de la contrebande, je pense, qui revient sur le marché québécois. alors, c'est la même cigarette qui va se retrouver dans un porte-cigarettes. le seul indice qu'on a mis dans ce projet de loi, aux articles 7 et 8, l'indice de preuve majeur, c'est le paquet comme tel, qui est identifié d'une façon particulière lorsqu'il est vendu sur le territoire québécois.

Là, on est en train de légiférer un projet de loi pour mettre une amende au consommateur qui, lui, est victime d'un fléau social. Je reviens, M. le Président, à ce que je disais tout à l'heure sur la pertinence de cet article-là. C'est ça qui est malheureux, et le ministre ne veut pas comprendre. Une loi fiscale, M. le Président, ce n'est pas une loi policière. C'est là qu'on est en train de dévier. C'est qu'on est en train de vouloir utiliser notre loi fiscale comme une matraque. M. le Président, lorsqu'une loi demande une matraque pour être appliquée, c'est que la loi ne fonctionne pas. Je sais que le ministre va dire: Effectivement, on est d'accord que, si on y va seuls, on peut se planter au niveau d'une réduction fiscale. Je peux comprendre ça, mais il faut insister auprès d'Ottawa. Il faut le dénoncer, sur la place publique, qu'Ottawa nous laisse tomber. Il faut le dire si on ne veut pas rester seuls. C'est là que le gouvernement

en place, à mon avis, M. le Président, s'en remet sur le gagne-petit et fait une loi qui n'a pas sa place dans notre législation.

Moi, je demeure persuadé qu'une loi fiscale qui demande des pénalités aussi importantes et une pression sociale aussi importante, c'est que la loi doit être changée, doit être modifiée. Avec la taxation, on fait fausse route. L'écart de prix est trop grand et on a créé une concurrence déloyale. Je pense que c'est à ce niveau-là qu'on doit retravailler le projet de loi, et non seulement chercher à saisir le gagne-petit, comme, tout à l'heure, on va saisir le dépanneur qui veut gagner sa vie, on va aller le saisir avec une grosse pénalité, on va lui couper les vivres au niveau du fonctionnement de son commerce et on va lui faire perdre un profit, parce qu'on manque de courage politique, premièrement, de dénoncer Ottawa suffisamment sur la place publique — ils vont être en élection bientôt, d'ailleurs — et deuxièmement, M. le Président, parce qu'on ne veut pas non plus s'attaquer au fond du problème, qui est toute la question des réserves autochtones, particulièrement celle d'Akwesasne.

M. le Président, moi, je crois qu'on est en commission parlementaire, encore une fois, pour mettre des règles fiscales pour contrôler le marché au noir. À mon point de vue, on oublie complètement le coeur du problème, qui est celui de la saisie en réserves autochtones. Même si Ottawa ne voulait pas collaborer — je le répète, M. le Président — n'a pas voulu collaborer et s'est foutu du Québec au niveau de son budget, au niveau de ses politiques fiscales, car il dit: Le Québec, ce n'est pas important, c'est chez vous que ça se passe, nous, on n'est pas intéressés aux problèmes du Québec, M. le Président, moi, je pense qu'ils auraient pu, au moins, de concert, annoncer une intervention policière massive, directement au coeur du problème, et faire en sorte d'avoir l'aide américaine, si nécessaire. C'est une réserve qui touche plusieurs frontières: ça touche l'État de New York, ça touche l'Ontario, ça touche le Québec, cette réserve-là. On aurait pu faire une opération massive. Là, on aurait eu vraiment une situation d'intervention, qui aurait mérité qu'on s'y arrête et qu'on légifère.

Moi, je pense que c'est beaucoup plus de l'intervention policière, le problème de la contrebande du tabac, que de l'intervention fiscale. L'intervention fiscale n'a plus sa place. On a des mauvaises politiques fiscales. On a réussi à créer, au niveau de la consommation, une concurrence déloyale. Je m'excuse, M. le Président, mais on fait fausse route. On fait fausse route et, le coeur du problème, on ne veut pas le regarder. Le ministre nous empêche de voir et d'entendre le corps policier qui, lui, nous aurait donné le vrai score.

M. Savoie: II se moque de vous, M. le Président. Il se moque de vous.

Le Président (M. Gobé): M. le ministre, s'il vous plaît! M. le ministre, on va laisser terminer...

M. Savoie: II dit que c'est moi qui empêche, M. le Président. Il faut que ce soit bien clair que c'est le président, dans sa grande sagesse...

M. Filion: M. le Président, je voudrais... M. le Président, non, non, non... M. le Président, d'abord, la sécurité...

M. Savoie: Dans sa grande sagesse, le président a décidé que ça ne marchait pas.

M. Filion: Non, non, non! M. le Président, s'il vous plaît, j'avais la parole. M. le Président, j'avais la parole. Il m'a empêché. J'avais une motion, en bonne et due forme, de la Sûreté du Québec, ils l'ont refusée. Ça a été présenté selon les règles de l'art. Ça a été présenté correctement, planifié, parce que, effectivement, pour nous, c'était de vraiment faire le tour de cette problématique. Par la suite, on est revenu, parce qu'on se rend bien compte, au fur et à mesure du projet de loi, qu'il faut vraiment faire le tour de ce dossier-là et que le ministre commence à informer la population pourquoi il va les piéger, pourquoi le ministre manque de courage au niveau d'une intervention policière massive avec le Canada.

La population, M. le Président, c'est sur elle qu'on va mettre une pression indue. Le consommateur, ici, on va lui donner une infraction, s'il est passible d'une amende de 200 $ et d'au plus 1000 $. Encore une fois, on met cette pression morale. Ça devient une pression morale, parce que, le ministre, je me demande s'il a l'intention de l'appliquer. On se pose des questions. On a l'impression d'étudier un projet de loi... On se demande même si le ministre a l'intention de faire un geste quelconque additionnel pour mettre ses pénalités en application. On a l'impression qu'il n'en fera pas. Même, il le disait tout à l'heure, il ne pense pas commencer une opération sur le terrain pour faire cette vérification-là. Alors, on fait quoi, ici? On légifère avec un projet de loi bidon?

Le Président (M. Gobé): S'il vous plaît! Aucun projet de loi, qui est déposé, n'est bidon. Il est soumis à l'approbation ou à l'étude des parlementaires. Surtout qu'il a déjà franchi l'étape de l'adoption en première lecture, alors, je pense que, dire que c'est un projet de loi bidon, c'est insulter l'ensemble des parlementaires et présumer qu'ils votent sur des projets de loi farfelus, ridicules ou autres. Alors, je vous demanderais de bien vouloir rectifier votre appellation de ce projet de loi. Vous avez le droit de qualifier un projet de loi de la manière que vous voulez, mais en respectant l'intégrité des gens qui les votent, de ce Parlement aussi et de cette commission.

M. Filion: Je veux bien respecter les gens qui les votent, M. le Président...

Le Président (M. Gobé): Alors, je vous demanderais de retirer... Si vous voulez retirer le terme que

vous avez employé, qui est, d'après moi, non seulement antiparlementaire, mais disgracieux envers l'ensemble des députés de cette Chambre.

M. Filion: Je croyais, M. le Président...

Le Président (M. Gobé): Je vous demanderais de le faire avec insistance.

M. Filion: M. le Président, écoutez... Je suis un parlementaire qui ne demande pas mieux que de collaborer. Je vais retirer le terme, M. le Président. (16 h 20)

Le Président (M. Gobé): Alors, je vous remercie. Vous pouvez continuer.

M. Filion: J'aurais dû utiliser les termes... M. Savoie: Merci, M. le Président.

M. Filion: ...«un projet de loi vide d'objectifs», M. le Président, «vide d'objectifs»...

Le Président (M. Gobé): Ça, c'est votre prérogative, de pouvoir le qualifier de cette manière-là.

M. Filion: ...et sans vraiment toucher le fond du problème.

M. Savoie: Ce n'est pas gentil non plus, M. le Président, pour les gens qui ont préparé ce projet de loi, du ministère du Revenu, qui nous accompagnent dans nos travaux. On est une dizaine, M. le Président, ici.

M. Filion: M. le Président, les gens du ministère du Revenu...

M. Savoie: C'est insultant pour eux autres.

M. Filion: ...vont sûrement comprendre qu'ils étaient en service commandé.

M. Savoie: C'est terrible de dire ça à ce monde-là, M. le Président.

M. Filion: Ils vont comprendre que c'était sans atteindre, mais d'aucune façon, le...

M. Savoie: Ils ont travaillé fort, ce monde-là, sur ce projet de loi. Se moquer des fonctionnaires...

Le Président (M. Gobé): Suite à ce que vous disiez précédemment sur les paquets, moi, j'avais une question, M. le ministre.

M. Savoie: Oui, allez-y, M. le Président, ça va faire confiance.

Le Président (M. Gobé): Vous savez que, dans certains pays — je ne sais pas si ça ne se fait pas à Montréal aussi, qui devient de plus en plus cosmopolite — il y a des traditions et des habitudes de vente de cigarettes au détail. Il m'est arrivé de voir, à Tunis, à Paris ou à Alger, lors de certains voyages que je faisais, des gens dans la rue, dans le souk ou dans le bazar, qui vous vendent des cigarettes, 2, 3, 4 à la fois. Là, ce n'est pas dans des paquets, c'est dans de grandes caisses. Comment pourrait-on appliquer cet article de loi et lui dire: On te met 200 $ d'amende, parce que tu as acheté une cigarette illégale? Comment prouver qu'elle est illégale? Le monsieur qui la consomme, il n'y a plus rien qui indique. C'est un peu le porte-cigarettes de notre collègue. Ça se fait à Montréal, ça aussi. Il y a certains quartiers où les gens vont commencer, peut-être, à vendre des cigarettes au détail.

M. Savoie: Ça se peut, oui.

Le Président (M. Gobé): Est-ce que c'est prévu dans ce projet de loi?

M. Savoie: Non, ce qu'on cherche à faire, c'est d'établir que c'est illégal de fumer de la cigarette de contrebande. La consommation d'une cigarette de contrebande est illégale, et il y a une petite amende qui va avec ça.

Le Président (M. Gobé): Donc, on peut vendre au détail?

M. Savoie: C'est une question de preuve. Si on est capable de... Tu n'as pas le droit de vendre de la cigarette de contrebande, non plus. Si tu vends de la cigarette, tu remontes à l'article 17 et ça va te coûter plus cher. Alors, il faudrait s'abstenir de transiger au niveau de la cigarette.

Le Président (M. Gobé): Même d'acheter au détail.

M. Savoie: Je sais que vous ne fumez pas. Alors, évidemment...

Le Président (M. Gobé): Non, non, c'est parce que j'ai vu ça dernièrement, justement, dans un pays qui n'est pas loin de nous, qui est la France. Je passais dans un quartier un peu particulier, et je voyais des gens — j'étais très surpris — qui achetaient des cigarettes, 20 centimes la cigarette.

M. Savoie: C'est ça.

Le Président (M. Gobé): Là, il n'y a pas de provenance, à ce moment-là...

M. Savoie: Non.

Le Président (M. Gobé): ...prouvable?

M. Savoie: Non. Quand c'est difficile, c'est difficile, mais, quand ce sera faisable, évidemment, ce sera faisable.

Le Président (M. Gobé): Je ne sais pas, vos fonctionnaires ont peut-être prévu ça, la vente de cigarettes au détail, importées illégalement en grande quantité?

M. Brochu: Cigarette par cigarette, là?

Le Président (M. Gobé): Oui, ou par 2 ou par 3?

M. Brochu: Je n'ai pas entendu la réponse du ministre.

M. Savoie: Tu as raison de m'avoir posé la question.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Savoie: On ne sait jamais. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gobé): Parce que c'est une question de preuve.

M. Savoie: Oui, c'est ça.

Le Président (M. Gobé): Mais comment prouver qu'elle est illégale? Si j'ai un paquet de cigarettes légales dans ma poche, qui est vide, et que j'en ai une dans le bec, que j'ai achetée du député de Montmorency, qui, peut-être, se serait recyclé dans la vente de cigarettes au détail, mais qui serait illégale, comment pouvons-nous prouver que je l'ai acquise illégalement? Sortir mon paquet ou... C'est vrai, c'est un vide juridique.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Forget: II y a les polyvalentes, également, au niveau des commissions scolaires.

M. Savoie: Ça, c'est une réponse qui ne répond pas à la question.

Le Président (M. Gobé): Dans les polyvalentes — le député de Prévost a raison — ils peuvent te vendre des cigarettes au détail, en effet. Comment pouvons-nous...

M. Savoie: Oui, oui. On nous signale, pour notre culture générale... Vous savez que c'est illégal, de vendre des cigarettes à la pièce comme ça. C'est ce qu'on me dit, oui.

Le Président (M. Gobé): Même les cigarettes... M. Savoie: Une par une.

Le Président (M. Gobé): .. .c'est-à-dire un paquet de cigarettes légal.

M. Savoie: II faut prendre un minimum de 5, me dit-on.

Le Président (M. Gobé): II faut qu'elles soient empaquetées?

M. Savoie: Oui. C'est la loi actuelle.

Le Président (M. Gobé): Donc, quelqu'un qui vendrait au détail pourrait se faire attraper en vertu de cette loi-là et non pas en vertu de l'article 18?

M. Brochu: C'est une loi fédérale. Donc, il faut que ce soit empaqueté.

Le Président (M. Gobé): II faut qu'elles soient empaquetées. Eh bien, ça règle... Il n'y a plus de vide juridique.

M. Brochu: Et là on retombe...

Le Président (M. Gobé): Ça règle notre problème.

M. Brochu: Ça règle notre problème.

Le Président (M. Gobé): Vous avez raison, M. le député de Montmorency. Les fonctionnaires travaillent bien, ils connaissent bien les dossiers.

Je ne vois plus rien, je ne vois plus de détail là-dedans. Est-ce qu'on passe à l'article 19?

M. Filion: Non, non. Moi, j'en vois encore, M, le Président.

Le Président (M. Gobé): Ah! Vous en voyez encore?

M. Filion: Oui.

Le Président (M. Gobé): Allons-y.

M. Filion: Oui, parce que, là, M. le Président, c'est un article quand même très important. On s'en prend au consommateur, à cet article-là — il faut en être conscient, M. le Président — car c'est une pénalité qui n'existait pas. Ça n'existait pas, ça, de prendre en otage le consommateur dans notre système fiscal. On le prend en otage. C'est nouveau, de prendre un consommateur en otage. Au fond, on dit au consommateur: Tu vas te faire offrir des...

Le Président (M. Gobé): Du moins, il est censé respecter la loi.

M. Savoie: Oui, c'est ça.

M. Filion: Oui, je le comprends.

Le Président (M. Gobé): Je ne comprends pas. Ce n'est pas à titre de président mais de membre de la commission que j'aimerais pouvoir répliquer, si je le pouvais.

M. Filion: Non, mais...

Le Président (M. Gobé): C'est qu'on ne prend pas... La loi étant faite pour être respectée par tout le monde, la loi interdisant la consommation de tabac importé frauduleusement, je ne crois pas que, mettre une amende à quelqu'un qui ne respecte pas la loi, c'est le prendre en otage. Ce serait un peu comme — je ne sais pas, moi — dire: Tu es victime de quelque chose. Mais chaque personne étant autonome et censée, réputée être majeure, donc responsable de ses décisions, la décision d'acheter une cigarette ou des cigarettes illégalement doit être, dans la tête des gens, comme le signe qu'ils risquent une pénalité parce qu'ils ne respectent pas une loi. C'est un peu comme griller un stop, un feu rouge, ne pas payer son impôt ou faire une fausse déclaration.

M. Filion: M. le Président, dans ce sens-là, vous avez parfaitement raison.

Le Président (M. Gobé): Je pense, je ne sais pas. Donc, le mot otage ne serait peut-être pas bon. On ne peut pas dire qu'on prend le consommateur en otage.

M. Filion: Oui, dans le sens suivant: c'est qu'on lui demande, à lui, de régler un problème par manque de courage politique.

Le Président (M. Gobé): De respecter la loi.

M. Filion: Bien, écoutez, c'est que la loi... On sait que la loi, actuellement, tient en place une concurrence déloyale, et le peuple a dit que ça n'avait plus de sens. Vous savez, au fond, la vraie souveraineté, c'est le peuple, hein? C'est le peuple qui donne un pouvoir démocratique. C'est lui qui décide de tout. Je pense qu'il y a un consensus général pour dire que, dans le tabac, ça n'a pas de bon sens, M. le Président. On le dit, on le crie. On a même entretenu une contrebande qu'on appelait légitime. Je pense que, ces gens-là, c'est les consommateurs qui représentent, à toutes fins pratiques, le peuple, M. le Président. C'est de ces gens dont on parle, là.

Le Président (M. Gobé): Oui, mais peut-être que, si le peuple consommateur réprouvait cela, devrait-il faire preuve de civisme, parce que, le civisme, ça existe encore dans notre société. On n'a pas fait une société juste... Les gens ne sont pas présumés être encadrés par des lois et obéir seulement aux lois. Il faut un certain sens civique. Il faut comprendre que, si on ne respecte pas des règles par soi-même dans une société, la loi doit s'y substituer. Si les gens sont vraiment fatigués de cette contrebande, bien, il n'en tient qu'à eux d'arrêter d'acheter des cigarettes en fraude.

M. Filion: M. le Président, les gens, ce qu'ils vous demandent, c'est de l'arrêter.

Le Président (M. Gobé): À ce moment-là, qu'ils les achètent chez le dépanneur et les contrebandiers vont fermer leurs portes.

M. Filion: M. le Président, les gens, ce qu'ils vous demandent, c'est d'arrêter la contrebande et de rétablir une concurrence loyale. C'est tout ce qu'ils vous demandent.

Le Président (M. Gobé): Le meilleur moyen de l'arrêter, c'est eux, je pense.

M. Filion: Mais non, vous la maintenez la concurrence déloyale, vous maintenez une taxe démesurée. Vous maintenez une taxe démesurée, tout le monde le reconnaît, qui n'a plus sa place. Tout le monde le reconnaît, M. le Président. C'est là qu'on se retrouve dans une drôle de situation. Au fond, vous vous en prenez aux gens qui vous disent d'arrêter de taxer. On est surtaxé, c'est démesuré, ça n'a plus de sens. Vous créez une concurrence déloyale, et votre propre loi fiscale plante le système. On vous le dit, mais vous ne réglez pas le problème de la concurrence déloyale. Au contraire, vous le laissez pleinement et entièrement en place. Vous dites: Non, non, non, c'est correct; notre propre système fiscal vous plante, et c'est bien comme ça. Vivez dans ça, puis, si vous ne voulez pas vivre dans ça, on va vous pénaliser. Alors, c'est là, un peu, que je dis qu'on se retrouve dans une drôle de situation, parce que, ces gens-là, tout ce qu'ils souhaitent, c'est qu'on le règle, le problème.

Le Président (M. Gobé): Oui, mais est-ce que les gens qui se disent pénalisés puis qui fument, s'ils devaient assumer, à titre de fumeurs, les coûts très importants que l'action de fumer — eux fument, étant une minorité de la société — fait supporter à la majorité qui, elle, ne fume pas, qui est prise en otage par qui? Est-ce que ce ne sont pas plutôt les fumeurs qui prennent, par le risque qu'ils font encourir à cause de leur santé au système de santé québécois, qui est public et gratuit, et au reste de la population... Qui est pris en otage par qui? Moi, j'ai l'impression que c'est plutôt ceux qui fument qui prennent en otage ceux qui paient les cancers du poumon et toutes ces maladies qui viennent, alors qu'eux ne fument pas. C'est peut-être à ce titre-là qu'il faut faire attention et dire qu'on n'a pas toujours les otages qu'on pense. Le fait d'essayer de décourager les gens à fumer, c'est peut-être quelque chose de bon, dans le sens que, pour les autres qui ne fument pas, ils ne seront pas obligés de supporter ces coûts.

alors, qu'on baisse la taxation, mais qu'on dise: si tu fumes maintenant, tu paies 1000 $ de plus par année ou 2000 $ de plus par année de prime d'assurance-maladie. un peu comme l'automobile, lorsqu'un type a perdu ses points et qu'il est un risque plus important pour la compagnie d'assurances, donc on augmente sa prime plus, parce qu'on roule plus vite. ça m'est arrivé il y a quelque temps, donc je peux vous en parler en connaissance de cause. on devrait faire la même chose. à ce moment-là, baissons la taxation sur les cigarettes et chargeons le 1 500 000 000 $ ou les 2 000 000 000 $ que ça coûte de plus à l'état, le fait que des gens fument, en termes de tarifs de santé. à ces mêmes gens-là, dites: bon, bien voilà, ce que vous payez sur votre paquet de cigarettes, ce n'est pas une taxe pour faire des rues au québec, c'est une taxe pour payer... c'est une assurance pour la maladie que vous allez avoir un jour, parce qu'il est prouvé que 80 % d'entre vous avez un risque de cancer du poumon. (16 h 30)

Alors, c'est peut-être dans ce sens-là qu'il faudrait le prendre. Mettons-le positif. Il n'y a pas de raison que des gens, qui font encourir à la société une dépense supplémentaire n'aient pas à en supporter le coût, ou du moins une partie, .«lors, on peut renverser ça.

Maintenant, que ces gens-là essaient de s'en soustraire en disant: On va le prendre en fraude, O.K., mais ce n'est pas là un sens civique très important. Je pense qu'une loi, à ce moment-là, mérite de protéger les gens qui ne fument pas de l'abus de cette pratique par les autres. Je ne sais pas si je m'exprime bien, là. Je ne veux pas non plus mélanger, mais vous voyez le débat. Si vous voulez parler d'otages ou d'immoralité dans cette taxation, il faut faire attention de la remettre dans sa juste perspective. Je suis certain que, s'il n'y avait pas de fumeurs au Québec, on aurait peut-être 2 500 000 000 $ ou 3 000 000 000 $ — si je me trompe dans les chiffres, j'aimerais qu'on me reprenne — de frais de santé de moins. On aurait peut-être des hôpitaux en moins et on aurait peut-être des départements de cancer et de toutes sortes d'autres maladies qui n'existeraient pas. Alors...

M. Forget: M. le Président, remarquez bien, je m'éloigne peut-être du sujet, mais, quand même...

Le Président (M. Gobé): Oui, M. le député de Prévost.

M. Forget: Si on a eu des spécialistes américains pour traiter ceux qui étaient pris du coeur, ceux qui fumaient, et qu'ils voulaient les envoyer un peu plus loin... Vous savez, on se pose des questions, à un moment donné. Il faut quand même être prudent.

M. Filion: Oui, écoutez...

M. Forget: Vous savez, tout ça, des fois, ça nous permet de réfléchir.

Le Président (M. Gobé): C'est un bon questionnement que vous nous amenez. Ça nous amène à réfléchir sur notre société, puis je trouve ça très intéressant.

M. Filion: Bien, c'est très important. M. Forget: II faut faire attention.

Le Président (M. Gobé): C'est très moral, l'argumentation, mais il faut la remettre dans sa perspective.

M. Filion: Oui.

Le Président (M. Gobé): Est-ce qu'on doit encourager les gens à faire courir des risques à leur santé et faire payer ça par l'ensemble de la population? Oui ou non? Moi, je dis que non. Je dis que le monde doit prendre ses responsabilités. Et, si on décide de courir un risque personnel en fumant, on se doit aussi de penser que le coût qu'il va engendrer ne doit pas être payé par tout le monde mais par soi-même. Donc, que le paquet de cigarettes ait sa vraie valeur, non seulement le coût du tabac, mais le coût qu'il va apporter plus tard en termes de services de santé pour ces gens-là.

Maintenant, c'est peut-être une manière particulière de le voir, mais...

M. Filion: M. le Président, écoutez, le problème de la santé, il demeure entier, indépendamment de la contrebande ou pas. On se comprend? Je veux dire, le problème de la santé... Le consommateur du tabac est à peu près le même, en contrebande ou hors contrebande.

Le Président (M. Gobé): C'est pour ça qu'il faut arrêter la contrebande.

M. Filion: Bien oui! Il faut arrêter la contrebande. Mais le peuple vous a dit que votre taxe était déraisonnable, et il la contestait.

Le Président (M. Gobé): Oui, vous avez raison, mais elle correspond aux coûts supplémentaires que ces gens-là font supporter au système.

M. Filion: Non, M. le Président, vous avez perdu des données...

Le Président (M. Gobé): Bien, un fumeur coûte plus cher au système de santé qu'un non-fumeur.

M. Filion: ...financières importantes. Vous savez, en 1992-1993, on prévoyait percevoir 628 000 000 $ de taxes spécifiques.

Le Président (M. Gobé): Oui.

M. Filion: On n'en a perçu que 410 000 000 $.

Le Président (M. Gobé): Arrêtons la contrebande.

M. Filion: Oui, je suis bien d'accord avec vous.

Le Président (M. Gobé): C'est sur la manière qu'on parle. Vous, vous pensez que...

M. Filion: Oui, c'est dans la façon d'aborder le problème de fond.

Le Président (M. Gobé): On l'arrête, oui, mais...

M. Filion: C'est ce que je vous dis. Le projet de loi qu'on a devant nous, non seulement il ne règle rien, mais vous vous en prenez même aux gens qui n'y sont pour rien.

Le Président (M. Gobé): Oui, mais on pourrait ramener le même raisonnement... M. le député de Prévost, allez-y. C'est intéressant, ça vaut la peine de vous écouter.

M. Forget: L'association des antitabac, là, présentement, j'en ai chez moi et je vais vous dire bien franchement, eux, lorsqu'on parle d'enlever les taxes, ils sont loin d'être d'accord avec vous. Je regrette, là! Au contraire, pour eux, les amendes ne sont pas assez sévères. Il faut faire attention, vous savez. Il faut quand même reconnaître ces gens-là aussi, puis il y en a beaucoup plus qu'on peut penser, qui font partie de cette association-là. Alors, c'est important.

M. Filion: D'enlever les taxes. Je ne comprends pas votre...

M. Forget: Non, mais l'association des antitabac, là...

M. Filion: Oui.

M. Forget: Ces gens-là veulent à tout prix que les taxes restent. Bien au contraire, ils voudraient qu'on les augmente encore. Je pense que, pour eux, les amendes ne sont jamais assez élevées. Alors, je suis pour ça, moi. Il faut être prudent.

M. Filion: Oui, mais...

M. Forget: Je vous assure qu'il faut être prudent.

M. Filion: Pardon?

M. Savoie: Clôture.

M. Filion: Pas tout de suite. Je veux terminer l'argumentation du député, M. le Président.

M. Savoie: Pas tout de suite.

Le Président (M. Gobé): Alors, on termine... Excusez-moi, M. le ministre. Vous avez parlé de...

M. Savoie: Clôture.

Le Président (M. Gobé): Nous allons passer une clôture sur ce projet de loi?

M. Savoie: Oui, c'est ça.

Le Président (M. Gobé): Bon. Est-ce qu'on termine les argumentations de part et d'autre avant de...

M. Savoie: Oui. Ah oui!

Le Président (M. Gobé): ...suspendre nos travaux?

M. Savoie: Je pense que le député de Prévost... C'est important.

Le Président (M. Gobé): M. le député de Prévost, vous aviez la parole, vous aussi, puis, moi, j'ai peut-être un petit mot, une petite chose à vous dire avant. Je trouve importante cette discussion...

M. Filion: Bien oui! C'est important, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): ...parce qu'elle est fondamentale. C'est sur la manière que nous différons.

M. Filion: C'est majeur.

Le Président (M. Gobé): Mais vous êtes d'accord avec nous que les fumeurs font supporter à la population un fardeau supplémentaire en termes de santé?

M. Filion: Oui, je suis d'accord avec ça.

Le Président (M. Gobé): Bon, c'est correct. M. le député de Prévost.

M. Filion: Je suis d'accord avec ça, sauf que ce n'est pas une politique fiscale de surtaxation qui va régler votre problème. Et ça, vous devez le comprendre. Puis, vous n'arrêterez pas les gens de fumer par une politique fiscale. Les gens vont arrêter de fumer par de la sensibilisation publique. Les gens vont arrêter de fumer par une bonne campagne médiatique. Les gens vont arrêter de fumer si vous les informez davantage. Les gens, plus ils vont être sensibles aux conséquences néfastes de la cigarette, qui est une drogue... Il ne faut pas se le cacher, c'est des drogués, quelque part, à un degré différent, mais c'est une forme de drogue, la nicotine. Alors, ça devient le problème d'une maladie quelconque, qu'il faut traiter en fonction d'un programme bien structuré. Mais ne pensez pas régler le problème d'un drogué par une surtaxation. Ce n'est pas

vrai. C'est un faux débat. D'ailleurs, on en a la preuve. Présentement, on assiste à de la contrebande. Pourquoi? Parce que la personne qui veut fumer, qui a des moyens limités, elle va aller la chercher, sa «drogue», entre guillemets, à l'endroit où elle coûte le moins cher. C'est ce qu'elle fait, et c'est ce qu'elle vous dit: Arrêtez de surtaxer, vous n'avez pas la bonne voie. Combien le gouvernement du Québec a consacré, au niveau de la santé, pour, justement, sensibiliser l'opinion publique à ce fléau néfaste pour la santé, qu'est le tabac? On ne remet pas ça en question. Mais, arrêtez de penser que le coût social, actuellement, n'est pas aussi élevé qu'il ne le serait si les taxes étaient plus élevées! La consommation, elle se ressemble. Elle ne bouge pas.

M. Forget: Je ne suis pas tout à fait d'accord, M. le Président, avec le député de Montmorency, parce que vous avez, vous aussi, des amis, des gens que vous avez rencontrés, qui, lorsque les taxes ont commencé à augmenter, sur le tabac, ont cessé de fumer. Moi, j'en ai chez nous. Je suis convaincu que vous en avez. Mais, moi, je vais vous dire bien franchement que, concernant la pénalité, on n'a pas le choix. Il faut à tout prix. Vous-même, à un moment donné, vous prenez une contravention. Quand ce n'était pas élevé, on s'en foutait. Mais, à mesure que la contravention augmentait, on disait: Wo! On va faire attention. Vous êtes d'accord avec moi, là-dessus?

M. Filion: Vous faites face à une maladie qui est la drogue.

M. Forget: Oui, d'accord, non, non, mais on va... Juste au niveau de la pénalité, on va s'arrêter là-dessus.

M. Filion: Oui, oui, une question de pénalité.

M. Forget: Êtes-vous d'accord avec moi que, lorsqu'il y a une pénalité plus sévère, on arrête plus vite? Êtes-vous d'accord avec moi?

M. Filion: Mais ça ne résulte pas d'un besoin organique, la pénalité, pour arrêter plus vite ou pas, la vitesse. C'est un choix délibéré, ça. Mais, quand vous êtes intoxiqué, quand vous êtes... Comprenez le débat où il est.

M. Forget: Oui, oui.

M. Filion: Quand vous êtes intoxiqué... Écoutez, vous avez eu connaissance de gens intoxiqués. Ils ne sont pas capables d'arrêter de fumer, ou c'est très difficile pour eux. Il y a une masse, dans la population, qui est stagnante. Cette masse-là va se procurer le tabac où elle pense qu'elle se sent justement traitée, sur le plan de la fiscalité. Votre problème, votre problème de santé demeure entier parce que vous ne le regardez pas sur le plan, strictement, d'une maladie, où les gens, quelque part, se retrouvent dans une forme de drogue.

Le Président (M. Gobé): Mais, à partir de ce principe-là, on devrait aussi, à ce moment-là, légaliser la marihuana, la vente de marihuana.

Une voix: Voilà!

Le Président (M. Gobé): Parce qu'il y a des gens intoxiqués. Il y a des gens qui ont des habitudes, et on les oblige à l'acheter trop cher. En plus, on n'a pas de rentrées fiscales.

M. Filion: Alors, si vous voulez être cohérent, M. le Président, pourquoi vous ne considérez pas la vente du tabac illégal sur le territoire, puis on n'en parle plus?

Le Président (M. Gobé): En partant de votre principe, c'est ça.

M. Forget: Mais, elle serait taxée. On aurait des revenus.

M. Filion: Écoutez, là, arrêtez de prendre le tabac comme une source de revenus! Traitez-le comme une drogue, sur un territoire donné. Si c'est illégal, arrêtons d'en vendre, du tabac. On n'en parle plus. C'est fini. N'en parlons plus!

Le Président (M. Gobé): Mais, vous savez que...

M. Filion: Mais vous allez voir qu'il va s'en vendre encore, du tabac, sur le territoire, puis vous le savez. Bon, bien, écoutez, c'est un problème qui, à mon avis, est la source même d'une maladie d'intoxication d'une personne.

Le Président (M. Gobé): Vous savez que les plus grands fumeurs sont généralement les femmes, les jeunes.

M. Filion: Et les démunis.

Le Président (M. Gobé): Et les démunis, oui. Des fois, ça va de pair, d'ailleurs, ces catégories-là. Je crois que, baisser le prix du tabac, ce n'est pas régler leur problème. Je pense que c'est plutôt le rendre moins accessible, et par le prix, mais aussi par la disponibilité légale et illégale. Les jeunes, ils n'ont pas d'habitude et, quand ils commencent à fumer à 15, 16 ans, là, je veux dire, il me semble qu'on n'est pas trop intoxiqué, on peut encore se faire rattraper.

M. Filion: M. le Président, quand vous augmentez les taxes, il se met en place des réseaux pour qu'ils puissent l'avoir à un prix moindre. Je n'y peux rien.

Le Président (M. Gobé): Oui, mais, à nous,

donc, avec des réglementations et des lois de faire... M. Filioit: M. le Président.

Le Président (M. Gobé): ...comme pour toutes les choses qui sont interdites ou proscrites, de faire en sorte que ça ne se fasse pas.

M. Filion: M. le Président, faites en sorte qu'il n'y ait pas, sur le marché, une concurrence déloyale et vous n'aurez pas de contrebande. Je n'y peux rien.

Le Président (M. Gobé): C'est 2 visions. (16 h 40)

M. Filion: Ce n'est pas 2 visions, M. le Président. En 1952, on a subi la même situation économique. On a eu une augmentation de taxes, au niveau du tabac, et il n'existait qu'une solution: ramener nos politiques fiscales pour enlever la concurrence déloyale. Il n'y a pas d'autre solution. Arrêtez de mettre des pénalités, justement, sur des gens qui vous disent que ce n'est pas la bonne solution. Changez de cap. On est en train de légiférer sur un fondement même où on s'en prend aux consommateurs. M. le Président, la source n'est pas là. La source du mal n'est pas là.

Le Président (M. Gobé): Alors, il faut s'en prendre aussi aux importateurs.

M. Filion: Bien oui, mais...

Le Président (M. Gobé): Aux contrebandiers, en d'autres termes.

M. Filion: Oui, oui, c'est là, Akwesasne. De là l'importance d'avoir de l'information additionnelle, comment on peut travailler dans ce secteur-là. C'est là l'importance d'avoir des gens qui vont venir de la Sûreté du Québec pour informer la commission, pour voir comment on peut travailler à ce niveau-là. On n'a rien fait encore. Il me semble que c'est élémentaire de regarder comment on peut cerner le problème à sa source.

Le Président (M. Gobé): Mais il faut commencer à se donner des outils. Je pense que nous avons des bons outils là-dedans, mais, avant de commencer à envoyer la Gendarmerie, la douane ou la police du tabac, il faut au moins que nous ayons des projets de loi ou des lois qui permettent, justement, de sanctionner les gens qui vont se faire prendre — aussi bien le contrebandier que celui qui consomme. Celui qui consomme, ce n'est pas des grosses amendes, en plus. Quand on regarde, de 200 $ à 1000 $, ça va prendre quelques récidives devant un juge pour être condamné à 1000 $. C'est plus important pour les contrebandiers.

Maintenant, vous savez comme moi, un policier qui arrête des contrebandiers, qui est certain qu'ils vont s'en tirer avec 1000$ ou 2000$ d'amende, la fois d'après, il ne les arrêtera pas, hein. Il se dira: Moi, je n'irai pas me faire casser la tête, alors que la justice ou que le gouvernement ne les sanctionne pas. Donc, ça prend des dents. Ça en prend aussi, un peu plus loin, pour Ceux qui consomment, pour qu'ils sachent, eux aussi, qu'ils font un acte illégal. On ne peut pas laisser croire aux gens qu'après tout ça ne les concerne pas. Alors...

M. Filion: M. le Président, ces gens-là opèrent depuis maintenant plusieurs mois, entre guillemets, dans l'illégalité de la contrebande. Ça n'a jamais été légal. La contrebande, pour vous, c'était légal, ça?

Le Président (M. Gobé): Non, mais il y en a toujours eu, depuis le temps des temps. Les Grecs faisaient déjà de la contrebande. Carthage en faisait.

M. Filion: Bon.

Le Président (M. Gobé): On remonte très loin.

M. Filion: Bon.

Le Président (M. Gobé): Ça a toujours existé, mais il y a toujours eu des garde-côtes, des gabelous, des douaniers et des lois pour les arrêter. C'est depuis que le monde est monde. Je ne vois pas en quoi le fait que nous le fassions maintenant a quelque chose de si épouvantable, comme, à un moment donné, vous sem-blez le décrire.

M. Filion: Mais ce ne serait pas épouvantable si on avait vraiment...

Le Président (M. Gobé): Au contraire, je pense que c'est prendre nos responsabilités.

M. Filion: M. le Président, moi, le principe de pénaliser n'est pas en soi reprehensible — c'est acccep-table — mais pas dans une politique fiscale où on ne règle pas la source du problème.

Le Président (M. Gobé): Mais est-ce que c'est le rôle de la politique fiscale de le régler?

M. Filion: Oui.

Le Président (M. Gobé): De lui mettre des armes, de donner des...

M. Filion: Oui.

Le Président (M. Gobé): ...instruments à ceux qui vont décider, tout à l'heure, de le régler? Peut-être que cette argumentation-là pourrait se faire avec le ministre de la Sécurité publique, qui, lui, se dirait: Bien oui, en effet, et, pour que mes policiers puissent opérer, j'ai là un certain nombre d'armes, dans un projet de loi.

Sur le fond, je pense qu'on partage la même idée.

On ne peut pas supporter cette situation, on se doit de prendre des mesures. Maintenant, est-ce que c'est en baissant la taxation ou pas? Il semble que, pour l'instant, à court terme, ça ne soit pas faisable — ou pas facilement faisable — trouvons donc des moyens qui vont nous permettre d'agir très rapidement. Ce projet de loi, donc, il est très important de le passer rapidement.

L'autre côté, maintenant. Quelle action on prend? Est-ce qu'on va à Akwesasne ou je ne sais pas où, avec la police, faire des opérations de commandos pour saisir les choses?

M. Filion: C'est ça que je voulais savoir.

Le Président (M. Gobé): Oui? Mais ça, c'est au ministre de la Sécurité publique, je pense, à le regarder. Aussi, il faut tenir compte d'une chose. Quand même qu'on entre demain dans une réserve et qu'on saisit 10 camions ou 3 camions de cigarettes, à moins d'y laisser un corps de police en permanence, qui patrouillerait les rues un peu comme à Belfast dans certains quartiers, il y a d'autres camions qui vont entrer le lendemain. Alors, à moins de mettre des barbelés autour de la réserve...

Vous savez, M. le député... Vous le savez, vous. Vous savez très bien que, partout où il y a possibilité de gains, quels qu'ils soient, dans les jeux, dans la contrebande, dans la falsification, il y a toujours des gens qui trouvent — dans l'informatique — des moyens de contourner les lois pour s'enrichir rapidement. Il n'y a pas d'étanchéité parfaite dans rien. Même dans les corps de policiers, on voit qu'à l'occasion il y a des gens qui ont été accusés d'avoir fait preuve d'un peu — c'est le moins qu'on puisse dire — d'ouverture dans le trafic de la drogue, de fermer les yeux ou d'avoir collaboré. Alors, imaginons que, dans la société, en ce qui concerne le tabac, il doit y avoir, probablement, des gens qui font les mêmes choses. Ça ne peut pas être étanche complètement, mais il faut tendre à essayer, le plus rapidement possible, d'intervenir.

Puis, ce projet de loi, c'est une continuation de réactions. On s'est rendu compte que les premières actions que nous avons amenées depuis 1 an n'ont pas toujours donné les résultats nécessaires. Comme citoyens et comme députés — je ne parle pas du gouvernement — vous comme moi, notre responsabilité, c'est que nos lois soient respectées, qu'on soit de l'Opposition ou du gouvernement. Quand on est dans l'Opposition, on les change, si elles ne font pas notre affaire. Si on est le gouvernement, on décide de les passer et de les faire respecter. Or, ça, ça en est une. Ce n'est peut-être pas elle qui va régler à 100 % le problème du tabac, mais, d'après moi, elle va peut-être permettre à des gens de commencer ou de contribuer à le régler. J'aimerais ça, moi, qu'on ait une solution miracle pour tout régler ça, comme vous.

M. Filion: Non, ce n'est pas une solution miracle...

Le Président (M. Gobé): Mais, c'est...

M. Filion: ...c'est que j'ai l'impression qu'on ne veut pas, comme parlementaires, faire l'étude approfondie de la problématique, qu'on ne veut pas, ensemble, regarder le dossier, comme il doit être regardé, et voir ensemble si, vraiment, ce genre de gestes que l'on pose peut avoir un incitatif quelconque à désamorcer la contrebande. Il n'y en a aucun, aucun incitatif, pour la simple raison que, même le ministre des Finances, même le ministre des Finances, dans ses prévisions budgétaires... Écoutez, M. le Président, même le ministre des Finances, dans ses prévisions budgétaires, reconnaît que ça ne vaut rien ce projet-là. Il reconnaît que ça ne vaut rien, parce que la contrebande du tabac va faire perdre 50 000 000 $ additionnels l'an prochain par rapport à 1992-1993. M. le Président, écoutez, je veux bien m'asseoir ici pour légiférer, je veux bien qu'on commence à mettre des mesures d'oppression auprès de la population...

Le Président (M. Gobé): Pas d'oppression. Attention aux mots.

M. Filion: Mais en tout cas. Appelez-le...

Le Président (M. Gobé): De répression, ce n'est pas pareil.

M. Filion: De répression, quelqu'un qui se sent opprimé, de répression, en tout cas, mettons des pression indues. Même le ministre des Finances le reconnaît que sa contrebande va être encore sur le territoire de façon magistrale. On va perdre plus d'argent l'an prochain. Alors, comment voulez-vous, comme parlementaires, qu'on se sente à l'aise à étudier des pénalités qui visent des gens, au fond, qui ne sont pas la source du problème? Ils ne sont pas la source.

Le Président (M. Gobé): Vous savez, on voit ces réseaux de trafic du tabac, actuellement, qui sont en place, mais il n'y a pas seulement le tabac. On se rend compte que, si on n'a pas de mesures assez répressives en ce qui concerne la contrebande, ça va s'étendre. C'est déjà commencé dans d'autres domaines. On peut acheter du whisky maintenant, on peut acheter des appareils de télévision. Enfin, toutes sortes de choses...

M. Filion: Mais, de là l'urgence de désamorcer.

Le Président (M. Gobé): ...qui arrivent par contrebande et des fois par... Bien, ces arguments fiscaux, ces armes, c'est une partie de l'arsenal, probablement, qui va être mise en place au fur et à mesure. Cette partie de l'arsenal, si on peut employer ce terme, dans cette guerre contre la contrebande, va probablement contribuer à affaiblir grandement cette pratique-là.

M. Filion: Elle ne l'affaiblit pas du tout. J'ai

50 000 000 $ de pertes additionnelles.

Le Président (M. Gobé): Oui, mais on ne l'a pas votée encore. Votons-la, appliquons-la et, dans 6 mois, ou quand on fera les crédits du ministère, l'année prochaine, on regardera ça ensemble. Puis peut-être que vous serez vous-même, M. le député...

M. Filion: Mais non, M. le Président. Il faut que vous regardiez les dates où ça a été déposé. Le 23 avril, M. le Président, le ministre des Finances a déposé sa politique fiscale concernant le projet de loi qu'on étudie. Le 20 mai, 1 mois plus tard, il fait ses prévisions budgétaires après avoir déposé cette politique fiscale, 1 mois plus tard. Il nous dit que, même avec sa nouvelle politique, qu'il a déposée 1 mois avant, on va perdre 50 000 000 $ additionnels avec la contrebande du tabac, l'an prochain.

Le Président (M. Gobé): II n'a pas parlé de contrebande. N'oublions pas non plus qu'il y a une baisse de la consommation, et on peut en témoigner. Il y a un certain nombre de gens, depuis une quinzaine d'années, qui, au Québec et au Canada, cessent de fumer. Il suffit pour cela de voyager à l'étranger. J'ai été, il n'y a pas longtemps, en Europe, et je dois vous dire qu'on voit tout le monde...

M. Filion: Moi, je ne vous parle pas d'un comparable d'il y a 15 ans, M. le Président, je vous parle du comparable de l'année passée.

Le Président (M. Gobé): Oui, l'année passée. Mais, à chaque année, il y a des gens qui cessent. Il suffit de voir la cigarette au bec de tout le monde, les jeunes, les femmes, les vieux, les enfants, les hommes qu'on voit dans une ville comme Marseille ou Lyon. Pour nous, c'est la même différence entre un hiver québécois pour eux, on voit de la neige partout, et arriver là-bas puis il n'y a pas de neige, tellement on voit du monde qui fume. Je veux dire par là que ça en est ahurissant, dans les avions, partout.

Alors, au Québec, on a réussi, au fur et à mesure des années, à se désengager du tabac, du tabagisme. C'est évident que ça amène, là aussi, une baisse des revenus fiscaux. Alors, quand le ministre dit qu'il va perdre 50 000 000 $, je ne suis pas sûr qu'il ait dit que c'est parce que la contrabande va augmenter, mais peut-être a-t-il prévu que... Comme, à tous les ans, ça a baissé. J'aimerais ça, si vous aviez ça, M. le député, M. le ministre ou un fonctionnaire, la baisse des revenus fiscaux sur les cigarettes, sur le tabac, depuis 10 ans. Je suis certain qu'avant même qu'on ne parle de contrebande ça commençait déjà à baisser, parce que les gens... Moi, je fumais, il y a 15 ans et je ne fume plus. Mon frère, il y a 2 ans, il fumait et il ne fume plus. Mon amie, il y a 1 an, elle fumait et elle ne fume plus. Elle ne paie plus de taxes. (16 h 50)

M. Filion: Ce n'est pas une question de taxes, vous auriez pu vous en procurer à un prix moindre.

Le Président (M. Gobé): Elle ne fume plus. Donc, il y a une baisse fiscale, une baisse de fiscalité. Si on multiplie ça par le nombre de fumeurs, donc il va y avoir une baisse naturelle, qui n'est pas forcément due...

M. Filion: Aux taxes.

Le Président (M. Gobé): ...seulement à la contrebande. Une baisse naturelle.

M. Filion: Voilà!

Le Président (M. Gobé): Bon! Alors, disons que les 50 000 000 $, juste les 50 000 000 $, je ne suis pas prêt à dire que c'est seulement à cause de l'augmentation de la contrebande, donc de l'achat de cigarettes régulières...

M. Filion: Mais, M. le Président...

Le Président (M. Gobé): ...que ça va se faire. Il y a là aussi des gens qui cessent de fumer.

M. Filion: M. le Président, quand on est dans une concurrence économique loyale... Vous regarderez les budgets à travers les années. Vous allez vous rendre compte qu'il y a une augmentation normale de consommation, en fonction d'un marché qui se maintient.

Le Président (M. Gobé): II y a une baisse.

M. Filion: Non, toutes les études parlent d'une baisse très sensible, très peu, très, très, très minime. Je pense que c'est 3 % en 3 ans ou quelque chose du genre. C'est très peu, la consommation en... Au moment où on se parle, on a atteint une espèce de stagnation au niveau du marché, depuis 3 ou 4 ans. Tout ce qui se produit, c'est qu'on assiste à un déplacement de consommation vers une économie parallèle. L'économie parallèle est la contrebande du tabac, pour ce qui est du tabac. L'an prochain, une fois qu'on aura déposé cette politique fiscale, que l'on étudie actuellement, des pénalités...

Même le ministre des Finances — écoutez, là, c'est la personne au coeur des données financières de l'État — dit qu'il va perdre encore 50 000 000 $ l'an prochain, quand, normalement, si on avait réglé le problème, on aurait été en progression. On aurait récolté davantage de taxes spécifiques sur le tabac. Là, on va en récolter 50 000 000 $ de moins, avec des mesures qui ne vont pas au fond du problème, j'en parlais tout à l'heure, qui est la réserve d'Akwesasne, où se transite, à toutes fins pratiques, le produit du tabac. Alors, vous comprenez pourquoi j'arrive avec des mots aussi majeurs.

Est-ce que vous voulez faire une petite clôture de 5 minutes, M. le Président?

Le Président (M. Gobé): Comment? Excusez, M. le...

M. Filion: Le ministre l'a demandée tout à l'heure.

Le Président (M. Gobé): Oui?

M. Filion: Voulez-vous faire une petite clôture de 5 minutes? Le ministre l'a demandée tout à l'heure.

Le Président (M. Gobé): Une petite suspension de 5 minutes?

M. Savoie: C'est une bonne idée. Oui, parfait. Merci.

Le Président (M. Gobé): Oui, avec plaisir. Alors, la commission... Bien, vous avez terminé votre argumentation sur ça?

M. Filion: Pas vraiment, mais on peut suspendre quelques minutes.

Le Président (M. Gobé): Oui, on suspend. J'aurais préféré adopter et revenir sur l'autre article, non?

M. Filion: Non, non, non. On va revenir sur l'article, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): O.K. On suspend donc pour 5 minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 53)

(Reprise à 17 h 27)

Le Président (M. Gobé): Maintenant, tout ce que nous allons dire va être enregistré, car nous reprenons nos travaux. Ce ne l'était point auparavant.

Alors, nous étions à l'article 18 et la parole était à M. le député de Montmorency. Nous en étions à la baisse des niveaux de revenus taxables envisagée par le ministre des Finances pour l'année prochaine. C'était ça, la fin de notre discussion. Donc, vous avez la parole.

M. Filion: Oui, M. le Président. Je vous ai expliqué, effectivement, que le projet de loi était inutile, puisque, dans le temps et l'an prochain, on va avoir un manque à gagner de 50 000 000 $ de recettes additionnelles, ce qui fait que les pénalités prévues ne réaliseront pas l'objectif escompté, à savoir de mettre fin à la contrebande du tabac. Au contraire, le fléau va être plus grand. Et l'article 18, comme je le disais, M. le Président, c'est un article qui pénalise le consommateur d'un produit vendu illégalement chez nous. C'est sûr qu'on parlait de philosophie également. Est-ce que ça appartient... Ça me fait penser à «la recelle». Vous le disez vous-même, tout à l'heure. «La recelle», hein?

Le Président (M. Gobé): Oui, le recel.

M. Filion: «La recelle» est quand même un geste social, qui est réglementé et administré par le ministère de la Justice.

Le Président (M. Gobé): Oui, oui.

M. Filion: Là, on se retrouve avec des mesures fiscales qui ressemblent un peu à des mesures qui veulent attraper les gens qui conspirent à une forme de, quelque part, gestes qui ressemblent à «une recelle». Là, on l'administre au ministère du Revenu. C'est là aussi qu'on fait fausse route, au niveau du ministère du Revenu. C'est rendu une espèce de grosse machine qui sert à tout. Le ministère du Revenu, actuellement, M. le Président, c'est la machine où on épaissit la loi à chaque année. On gère des fonds, des subventions via le ministère de l'Industrie et du Commerce. On commence à l'utiliser à toutes sortes de sauces et on est rendu qu'on l'utilise pour pénaliser des comportements sociaux.

Le Président (M. Gobé): Ce n'est pas nouveau, ça.

M. Filion: Non?

Le Président (M. Gobé): Vous vous souvenez, dans le temps de la prohibition?

M. Filion: Oui.

Le Président (M. Gobé): C'était le fisc qui courait après les contrebandiers. Je vous rapellerai que... Si je me souviens bien, le caïd de la pègre, Al Capone...

M. Filion: Al Capone.

Le Président (M. Gobé): ...a été arrêté pour raison fiscale.

M. Filion: Emprisonné, d'ailleurs.

Le Président (M. Gobé): Emprisonné, d'ailleurs, ce qui a permis de mettre fin à tous les trafics qu'il faisait — la drogue, l'alcool, la prostitution et autres. Donc, ça revient à ce que vous dites. Le fisc a le bras long. Il a à voir à ce que tout ce qui doit être taxé et déclaré au Revenu le soit. Donc, si un consommateur tire des bénéfices indus en fumant une cigarette, sans acquitter les droits qu'il devrait acquitter, il me semble normal que le fisc y voit.

M. Filion: Mais, à l'époque, M. le Président...

Le Président (M. Gobé): Donc, on ne peut pas dire que c'est un débordement de son rôle.

M. Filion: ...nous n'avions pas légiféré au niveau du consommateur pour arrêter Al Capone.

Le Président (M. Gobé): Non, mais je pense que quelqu'un qui utilise — vous parlez du recel — je ne sais pas, moi, un avantage indu sans le déclarer au fisc, que ça soit une automobile ou que ça soit des billets d'avion qu'une compagnie paierait pour lui ou autre, s'il ne le déclare pas avec son revenu, il va être poursuivi par le fisc.

M. Filion: À l'époque, on avait vraiment touché la cible centrale, la source, qui était Al Capone, M. le Président. Je veux faire le parallèle parce que c'est intéressant. Ici, la source n'est pas le consommateur. Le Al Capone du tabac, c'est probablement les réserves autochtones, en bonne partie. C'est là, M. le Président. Et j'y reviens, parce que, si on n'avait pas ce territoire qui, à toutes fins pratiques, devient l'endroit où la plupart des transactions ou du commerce transite, via le stratagème fiscal qu'on a mis en place, alors, M. le Président, on ne serait pas en train de discuter d'une pénalité au consommateur.

Le Président (M. Gobé): Ce n'est pas une... Le mot «pénalité»... On ne peut pas mettre une pénalité à quelqu'un qui, lui-même, ne respecte pas la loi. Je veux dire, ce n'est pas parce qu'il est consommateur qu'on le taxe, c'est parce qu'il omet d'acquitter les droits. C'est comme quelqu'un qui va à la chasse, il me semble, ou à la pêche, sans permis de pêche. Quand il se fait arrêter, ce n'est pas parce qu'il est pêcheur. On ne pénalise pas...

M. Filion: M. le Président, dans les années...

Le Président (M. Gobé): ...le pêcheur. C'est parce qu'on a considéré, la société dans son ensemble, dans ses règles, que, pour pêcher dans les lacs du Québec, il fallait avoir un permis de pêche ou de chasse, qui permet, avec l'argent retiré, d'en assurer la gestion, pas le reboisement, mais le réensemencement pour la pêche et le «regiboyeusement» — je ne sais pas comment vous dites ça — pour le gibier, en tout cas... le repeuplement pour le gibier. Ça, c'est avec ces fonds-là. Bon.

C'est la même chose. On a considéré qu'on devait payer des taxes sur les cigarettes pour pouvoir défrayer un certain nombre de coûts. Tout à l'heure, on en a parlé. Vous étiez partiellement d'accord avec moi, mais, au moins, vous aviez un certain point d'accord, que les fumeurs...

M. Filion: Non, mais pas d'accord, parce que... (17 h 30)

Le Président (M. Gobé): ...devraient défrayer un coût qui correspond aux risques qu'ils ont au niveau de leur santé par rapport aux autres qui ne fument pas. Si le monsieur se soustrait de cette obligation, pas de son obligation, de son devoir de citoyen de payer des droits sur la cigarette qu'il fume, parce qu'il fait courir à la société un risque supplémentaire, en termes de coûts de santé, la société se doit, à ce moment-là, de prendre des mesures pour récupérer son dû, y mettre fin autant que possible et récupérer aussi son dû, si possible. Alors, dans ce cas-là, ce n'est pas de récupérer son dû, c'est d'y mettre fin. Le meilleur moyen d'y mettre fin — c'est comme toutes les amendes, c'est comme pour la vitesse, c'est comme pour l'abus de toute chose qui est prescrite par la loi — c'est l'amende. Alors, c'est comme pour le permis de pêche. Le type qui ne l'a pas, bien, il va avoir une amende.

C'est pareil pour celui qui omet de se conformer à cette loi. On ne pénalise pas le consommateur. On va faire en sorte de pénaliser un contrevenant, pas le consommateur. Si vous me dites qu'on pénalise le contrevenant, je vais être d'accord avec vous sur le terme, mais ce n'est pas le consommateur. On laisserait entendre qu'on pénalise les bonnes personnes, mais le fait d'acheter des cigarettes de contrebande, c'est de se montrer mauvais citoyen, qui ne respecte pas les lois. C'est interdit. Donc, ce n'est pas un consommateur qu'on pénalise. C'est un contrevenant.

M. Filion: Je le comprends, M. le Président, mais, à l'époque des années trente, on n'avait pas fait de législation fiscale, et ça se passait aux États-Unis. On n'avait pas fait de législation fiscale au niveau du consommateur.

Le Président (M. Gobé): Oh oui! La prohibition... Je ne crois pas que quelqu'un qui se faisait prendre avec des bouteilles de cognac ou de whisky — pardon — de contrebande recevait la bénédiction des autorités fédérales. Je ne penserais pas. On peut le vérifier. Je ne veux pas...

M. Filion: C'est qu'on détruisait...

Le Président (M. Gobé): ...parler pour parler, pour ne rien dire, mais j'aimerais ça si quelqu'un pouvait faire une petite recherche et vous la communiquer. On en a encore pour 2 jours à discuter de ce projet de loi, peut-être. Demain peut-être, ou ce soir, on pourrait avoir la réponse. Ce serait intéressant à savoir.

Mais je crois que, bien que, non seulement ils cherchaient la tête des réseaux, par des actions judiciaires, policières et en vertu des lois fiscales — parce que les gens n'acquittaient pas les droits fiscaux — mais le consommateur qui se faisait prendre avec une bouteille de cognac, pas de cognac, mais de whisky, importée illégalement, de fraude, non seulement il se faisait confisquer sa marchandise, mais il devait avoir une amende, lui aussi, même la saisie de biens, s'il n'avait

pas l'argent pour payer l'amende.

M. Filion: C'est une question de production et on est allé directement au problème: Qui était le producteur et qui provoquait toute cette problématique de contrebande? Au fond — moi, je reviens sur ça, parce qu'on s'éloigne toujours — je demeure foncièrement convaincu qu'on s'éloigne du problème de fond et qu'on s'en prend aux fausses personnes. Un permis de pêche, c'est quelque chose qui... on demande un droit pour pêcher. Mais là on est en train de rendre illégale une situation qu'on a nous-mêmes provoquée et mise en place, comme gouvernement.

Le Président (M. Gobé): Comme toutes les situations qui sont réglementées. On a créé la situation, nous aussi, de réglementer la pêche. Ce n'est pas arrivé tout seul, dans le monde, un jour, que ça prenait un permis de pêche au Québec.

M. Filion: Je le comprends.

Le Président (M. Gobé): Là, on a augmenté le prix des permis de pêche. On sait qu'ils ont doublé dernièrement. Esi-ce à dire, parce qu'ils ont doublé, que les gens ne devraient plus les payer?

M. Filion: Si on ne se conforme pas, effectivement, à un permis ou à un droit d'utiliser un bien, un service public, ça va. Mais là c'est une problématique économique que, nous-mêmes, on a créée, comme législateurs. Cette problématique économique, qu'on a rendue complètement intolérable, on la considère maintenant illégale. On est les créateurs, de toutes pièces, de cette problématique. On a mis en place des politiques fiscales qui ont créé ce qu'on vit présentement. Là, on est en train de légiférer pour pénaliser celui qui va utiliser ce qu'on a créé de toutes pièces, avec notre concurrence déloyale, au niveau de la fiscalité.

Le Président (M. Gobé): Mais, comment m'expliquez-vous, à ce moment-là... pas vous, mais comment peut-on s'expliquer qu'on retrouve plus de gens qui ne respectent pas cette loi, en faisant de la contrebande, sur le territoire du Québec, qu'on n'en retrouve dans le reste du Canada? Comment vous expliquez ça? Comment pouvons-nous nous expliquer ça, d'après vous?

M. Filion: Que?

Le Président (M. Gobé): Qu'il y a une plus forte concentration de cigarettes hors taxes, en particulier, donc de contrebande, que le trafic est plus fort au Québec? Je pense que c'est le double. On a la moitié du trafic, ici, par rapport au reste du Canada. J'ai vu ça dans un document, il y a quelque temps.

M. Filion: Oui.

Le Président (M. Gobé): Est-ce à dire que nous aurions l'esprit moins civique que nos autres compatriotes?

M. Filion: Non. C'est que, chez nous, on a ce qu'on appelle une réserve, qui s'appelle Akwesasne, qui est située, géographiquement, d'une façon stratégique pour bien pénétrer, dans un premier temps, le marché québécois et, par la suite, commencer à prendre son expansion ailleurs. C'est ce qui se produit, présentement. D'ailleurs, le ministre en parlait hier. Actuellement, on assiste à une augmentation de la croissance de la contrebande ailleurs dans les autres provinces. Mais la situation géographique de la réserve autochtone a favorisé, d'abord et avant tout, une pénétration de toutes pièces et massive du territoire québécois. De là l'importance de penser à encadrer une réglementation québécoise, une législation québécoise pour ce problème spécifique qui est, à toutes fins pratiques, la source. C'est pour ça, aujourd'hui, qu'on assiste ici à une espèce de débat de moralité. On est en train de faire une leçon de moralité, avec des pénalités, à une population. Le législateur est responsable, au premier plan, de cette créature de contrebande. Je trouve ça spécial, M. le Président, très spécial.

Le Président (M. Gobé): Oui. Il n'en reste pas moins que je pense que, lorsqu'on ne respecte pas un règlement ou une loi, on ne peut pas le faire impunément, sous peine d'ouvrir la porte à toutes sortes de comportements sociaux dans toutes sortes de domaines. La cigarette, la consommation illégale de produits, que ce soit la cigarette ou autres produits, se doit d'être réprimée ou réprimandée, si ce n'est pas en accord avec les lois régissant le pays.

À ce titre, on ne peut pas dire non plus que les pénalités prévues à l'article 18 sont vraiment — à 14.3, en tout cas — exorbitantes. Comme je le disais tout à l'heure, avant d'être condamné à 1000 $ d'amende, ça va prendre quelque temps de récidive, à moins que le type ait un policier derrière lui, à chaque demi-heure ou à chaque journée, pour voir s'il fume toujours les paquets de cigarettes. Mais je pense que c'est nécessaire aussi dans l'arsenal de l'administration pour pouvoir opérer. On ne peut pas seulement opérer en haut, on les prend en sandwich entre les deux. Le consommateur va être plus prudent. En étant plus prudent, il va obliger le contrebandier ou le trafiquant, peut-être, lui aussi, à la rendre plus compliquée, cette activité. Bon, ça commence là, aussi.

Maintenant, on disait, tout à l'heure, qu'il faut aller à la source. Je pense que le projet de loi a aussi des mesures assez musclées en ce qui concerne les amendes fiscales. Est-ce qu'on doit entrer, comme on me le disait précédemment, avant l'interruption, dans Akwesasne ou autre endroit, réserve indienne, avec une force constabulaire ou policière pour y mettre de l'ordre? Prenons pour acquis que nous le ferions. Comme je le disais, il faudrait quasiment tenir une

force d'occupation à plein temps dans ces endroits-là, parce que... (17 h 40)

M. Filion: À l'époque de la prohibition...

Le Président (M. Gobé): ...écoutez, quand le chat n'est pas là, les souris dansent. Et...

M. Filion: À l'époque de la prohibition, on a assisté à des forces policières particulières pour y mettre fin. Il faut se souvenir des interventions policières qui se faisaient à l'époque.

Le Président (M. Gobé): ...il y a beaucoup de Blancs, aussi, qui font ça. Il n'y a pas juste des Indiens.

M. Filion: Non, non. Mais la question...

Le Président (M. Gobé): II ne faut pas mettre non plus l'opprobre sur une catégorie de nos concitoyens et essayer de croire ou de penser que c'est une gang de trafiquants.

M. Filion: Moi, quand je parle du territoire de la réserve autochtone, je parle du territoire, je ne parle pas des contrebandiers. C'est l'endroit où ça se passe, c'est l'endroit d'où ça origine, c'est l'endroit où ça circule. Bon. Qui est derrière tout ça? Ça, je ne peux pas le présumer. Moi, ce que je crois, et ce qui nous apparaît hors de tout doute raisonnable, c'est que ça se passe à partir de là.

Le Président (M. Gobé): Alors, à ce moment-là, il y aurait peut-être une situation similaire à ce qu'on a connu après la guerre, en Europe, avec des principautés comme Andorre, par exemple, qui est située entre l'Espagne et la France, et qui était devenue le paradis des contrebandiers. Sauf qu'Andorre étant une principauté, il avait été facile, à ce moment-là, de mettre des postes de douane, qui existent encore, d'ailleurs. Si certains d'entre vous sont allés se promener là-bas... C'est assez surprenant de voir des postes de douane au milieu du territoire, entre 2 territoires, l'Espagne et la France.

Alors, est-ce que vous seriez en train de nous dire que nous devrions mettre des postes de douane à la sortie des réserves et donner, à ce titre-là, une autonomie aux Indiens, aux réserves indiennes, et en faire des territoires fiscalement étrangers, eux qui ne respectent pas les règles fiscales, et que, par contre, lorsqu'ils transitent sur le territoire canadien, québécois ou onta-rien, ils soient sujets à une taxation? Donc, tout véhicule qui passerait... Il y aurait nos gabelous, nos gars avec une casquette — et peut-être une feuille de tabac dessus, pour vous faire plaisir, au lieu de marquer «douane» — qui verraient à ouvrir les coffres des voitures, des camions, puis à charger une taxe en disant: Ça, c'est de la cigarette: une taxe. Là, tu peux entrer au Québec, maintenant, ou en Ontario.

M. Filion: C'est ça. Moi, je pense...

Le Président (M. Gobé): Alors, il y a peut-être là... Je ne sais pas, c'est peut-être intéressant, dans une perspective à plus long terme...

M. Filion: À court terme, parce que le problème, M. le Président, demeure toujours entier, même si on légifère comme on légifère là. Moi, je pense que c'est à ce niveau-là qu'on aurait dû mettre l'accent de la législation et penser à une stratégie à la fois avec la Sécurité publique, une stratégie d'intervention. Pas une police du tabac qui court après des camions. Ça, M. le Président, on ne s'en va nulle part avec ça.

Le Président (M. Gobé): Savez-vous, le problème avec ça, c'est que... Moi, je me souviens très bien, il y a à peu près 7, 8 mois, lors d'un référendum, on avait un type qui s'est mis devant la télévision, qui a montré une carte du Québec, puis il a dit: Ça, les Indiens, ils vont avoir les deux tiers. C'est à eux autres. Puis là tout le monde a dit: Non, non. Il faut voter contre cette entente-là. Mais là, si on commence à parler de politique fiscale différente, de douane ou de contrôle à la sortie de ces régions-là, on va reconnaître un statut bien différent de celui du reste du territoire québécois. On va reconnaître que nos lois fiscales s'appliquent seulement à la sortie de leur territoire. On reconnaît, dans le fait, quasiment leur... je n'oserai pas dire le mot en cette commission, mais on reconnaît une situation assez particulière en ce qui concerne l'intégrité des lois sur tout le territoire québécois. Moi, je dis que les lois doivent s'appliquer partout.

M. Forget: Mais, M. le Président, est-ce qu'on est en train de... Excusez-moi, M. le Président, mais je me pose une question: Est-ce qu'on est en train de dire, présentement, que le commerce des cigarettes illégales se fait dans les réserves? Je ne suis pas sûr de ça, moi, je suis loin d'être sûr de ça.

Le Président (M. Gobé): Expliquez-nous, M. le député.

M. Filion: Qu'est-ce qui vous fait dire ça, M. le député? Expliquez-nous ça.

Le Président (M. Gobé): Vous avez des arguments. On aimerait ça vous entendre.

M. Forget: Non, non. Non, mais je suis loin d'être sûr, parce que je vais vous dire bien franchement qu'il n'y a rien qui prouve qu'il vient des réserves. Alors, c'est pour ça que ça m'inquiète.

Le Président (M. Gobé): D'où viendrait-il? Il y a une partie, peut-être, qui vient de ces réserves. Le reste...

M. Filion: C'est parce qu'il y a certaines parutions. D'ailleurs...

M. Forget: Depuis tout à l'heure qu'on parle, puis on dit que ça semble venir des réserves. Moi, je suis loin de...

M. Filion: Vous savez, tout à l'heure, M. le Président, lorsque je demandais d'entendre le caporal de la Gendarmerie royale du Canada, c'est que, selon ce caporal, selon les informations et les renseignements qu'il détient, il y aurait 80 % du marché de la contrebande qui transite par ce territoire-là. Alors, ça commence à être de l'information intéressante. Si vous aviez accepté, M. le député, d'entendre le caporal, peut-être que votre idée aurait changé et que vous auriez une autre impression. C'est dans cet esprit-là, d'ailleurs, que j'avais demandé, tout à l'heure, qu'on puisse entendre les gens de la Sécurité publique, pour qu'on ait l'information, vraiment où se situe le vrai problème et comment on peut arriver à le régler, comme on a réglé l'histoire d'Al Capone, au fond. On a eu une pression policière intense aux endroits où, effectivement, on devait assurer une intervention. Mais là on se rend bien compte qu'on ne fait rien, qu'on ne fait pas un geste concret pour arriver... Je questionnais le ministre, hier, en cette commission, où je lui demandais: Avez-vous déjà saisi en réserves autochtones? Et le ministre, de me répondre: Non, à peu près rien. Il ne s'est rien fait dans la réserve autochtone. quand on regarde le genre d'information qu'on nous donne, de la part d'un caporal de la gendarmerie royale du canada, pour qui c'est clair que tout transite par là, 80 %, eh bien, écoutez, peut-être que c'est plus difficile, sur le plan de l'intervention policière, de cerner un problème en réserves autochtones que d'arrêter al capone, peut-être, mais le problème est là. il ne faut quand même pas l'oublier.

Alors, comment on peut résoudre un problème comme celui-là? Moi, je ne pense pas que c'est une question de législation fiscale sur le territoire québécois qui va régler ça. Bien voyons donc! Vous n'arrêterez pas la circulation, vous n'arrêterez pas la pénétration, vous n'arrêterez pas l'organisation de ce réseau-là en disant: Si les gens... D'ailleurs, le ministre confirmait une statistique intéressante, également, il disait que ce sont les démunis qui fument. Alors, les démunis, financièrement, ces gens-là, qu'est-ce que vous pensez qu'ils pensent de vos 200 $ d'amende? Ils s'en contrefoutent! Mais, vraiment, ils s'en contrefoutent de vos 200 $ d'amende, ils vont continuer d'acheter de la cigarette où il y en a.

M. Forget: M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Oui, allez-y, monsieur. La discussion est assez libre. C'est assez intéressant.

M. Forget: C'est juste pour répondre au député de Montmorency. Tout simplement, si vous regardez, au niveau de l'alcool, par exemple, les conducteurs. Lorsque les amendes ont été plus élevées, vous avez vu? Les bars, ils ne vendaient plus de boisson. Les gars avaient peur de se faire arrêter, ils n'en prenaient plus.

M. Filion: Non, non. Attention!

M. Forget: Regardez les résultats que ça a donnés.

M. Filion: Bien oui! Je suis conscient de ça.

M. Forget: Alors, si on a des amendes, les policiers vont le sentir, dans le champ, qu'ils ne travaillent pas pour rien.

M. Filion: Mais attention!

Le Président (M. Gobé): Ça revient à ce qu'on disait dans ces discussions.

M. Filion: Attention! Si vous aviez quelque chose qui allait, par exemple, jusqu'à l'arrestation et l'emprisonnement, ah bien là, je dirais que vous auriez peut-être des chances. Si, vraiment, vous mettiez en place une armée pour arrêter tout le monde et les mettre en prison, ah bien là, je commencerais à trouver que votre projet de loi a des dents. Là, je commencerais à penser que, peut-être, quelque part, les gens vont avoir très peur et que, peut-être, ça va avoir des résultats.

Le Président (M. Gobé): Oui, mais écoutez, quand même, il faut mettre cet article-là dans son contexte. On sait que l'article 18 est un des articles — il y en a 23 à peu près — qui traitent de ce problème de la contrebande de cigarettes. Ce n'est pas le seul article qui a la prétention, l'article 18, en mettant des amendes de 200 $ minimum et d'au plus 1000 $, d'arrêter la contrebande de cigarettes. On sait que c'est une mesure parmi un certain train de mesures qui sont à l'intérieur. On arrête sur celui-là. Moi, je trouve qu'il y a peut-être des articles qui nous permettraient de faire une discussion peut-être plus diversifiée, si on passait sur celui-là et qu'on allait plus loin.

Je pense que ce n'est pas l'article principal, c'est un complément de mesures. C'est ce qui va permettre de ne pas laisser des gens se promener avec une cartouche de cigarettes, une demi-cartouche, peut-être, ou 3 paquets, pour en faire la vente et dire: Moi, je suis consommateur, c'est juste pour moi, donc ne me donnez pas d'amende. Il faut tenir compte de ça, aussi. Il y a le petit trafic, le jeune élève à l'école, qui va avoir sa réserve quelque part et qui va se promener avec son paquet dans la poche. Si on l'arrête, il va dire: Ah bien non, c'est juste pour ma consommation.

Alors, cet article-là permet...

M. Filion: D'arrêter nos jeunes.

Le Président (M. Gobé): Non, non. Excusez-moi. Pardon, excusez, M. le député. Non pas d'arrêter nos jeunes, mais il permet... Qu'il soit jeune ou pas jeune, un trafiquant, c'est un trafiquant, là.

M. Filion: Non, mais un mineur, c'est un mineur.

Le Président (M. Gobé): II va falloir que la loi sur les jeunes se penche là-dessus aussi, parce qu'on ne peut pas laisser faire par des jeunes ce qu'on reproche à des adultes. Mais il n'en reste pas moins que cet article-là permet à quelqu'un qui argumenterait, qui arguerait et qui dirait: Moi, j'ai un paquet pour ma consommation seulement, donc je ne suis pas un trafiquant et tu ne peux pas me mettre d'amende, bien, de dire: O.K., mais tu peux aller de 200 $ à 1000 $. Et, quand il se sera fait arrêter plusieurs fois et que la preuve aura été faite devant le juge que c'est de la récidive constante, peut-être que le monsieur fera plus attention avant de se promener avec son paquet de cigarettes pour en faire le trafic.

Maintenant, je ne croirais pas qu'on va aller poursuivre systématiquement le vrai fumeur comme tel. J'ai l'impression que c'est pour éviter cette échappa-toire-là. Il y avait une échappatoire dans la loi sur les trafiquants. On arrêtait les trafiquants, mais le consommateur... C'est un peu comme pour la marihuana. Je pense qu'il y a la distinction entre possession pour consommation et possession pour trafic. D'accord? (17 h 50)

M. Filion: Oui.

Le Président (M. Gobé): La marihuana ou la cocaïne. Enfin, je ne sais pas, je ne suis pas trop familier avec les drogues, mais je sais que j'ai déjà vu ça quelque part. Alors, c'est probablement la même chose. Il y a moyen d'aller en chercher, peut-être, une poignée pour éviter que le petit trafiquant puisse s'en tirer impunément. C'est dans ce sens-là que je vois cet article, plus que dans te but d'aller chez Mme Tout-le-Monde, qui est sur l'aide sociale — on parlait des plus démunis — ou un chauffeur de taxi, puis dire: Toi, tu fumes, montre-moi ton paquet de cigarettes parce que tu fumes du tabac interdit. Je pense que c'est dans ce sens-là. C'est dans le sens de dire: On le sait que, lui, c'est un trafiquant, on le sait qu'il se promène avec des petites quantités pour ne pas se faire accuser et là on a une poigne.

M. Filion: Oui, je comprends. Mais, ici, ce n'est pas le petit trafiquant qu'on vise, c'est le consommateur.

Le Président (M. Gobé): Oui, celui qui est trafiquant mais qui se déclare consommateur parce qu'il a une petite quantité sur lui. Il se sert de ça pour ne pas être accusé, en termes de trafic.

M. Filion: Mais les jeunes, là, par exemple, on sait que les jeunes ont accès facilement à la contrebande, puis ils vont continuer à avoir accès facilement à la contrebande. Nos jeunes mineurs, qui vont continuer... Écoutez, là...

Le Président (M. Gobé): Est-ce que la loi s'applique? C'est une bonne question, peut-être, qu'on pourrait poser. Je vois les gens de la fonction publique, qui ont l'air de nous écouter avec grande attention depuis qu'on parle des mineurs. Peut-être, M. le député, qu'on pourrait poser la question. Si vous vouliez la poser?

M. Filion: Moi, je suis d'accord.

Le Président (M. Gobé): Pourriez-vous nous dire, dans le cas des mineurs, si les mêmes dispositions de ce projet de loi s'appliquent?

M. Brochu: On a répondu, hier, en disant que ce serait devant le tribunal de la jeunesse.

M. Larivière: Tous les mineurs de 14 ans et plus sont sujets à la loi. En bas de 14 ans, évidemment, ils ne sont pas sujets.

Le Président (M. Gobé): Alors, le petit cul qui se promène avec son paquet de cigarettes dans l'école... Pardon! Le jeune garçon de 10 ans, 12 ans — puis on sait qu'à cet âge-là, maintenant, ils sont pas mal avancés — qu'est-ce qu'on fait avec lui, là?

M. Larivière: Celui-là n'est pas visé. Le Code de procédure pénale fait en sorte que ce sont les jeunes de 14 ans et plus qui sont susceptibles d'être poursuivis. Alors, celui qui est en bas de 14 ans, évidemment...

M. Filion: Le jeune qui va recevoir une pénalité, bien sûr, il n'a pas les moyens de la payer. Alors, il va se passer quoi? Vous allez...

Le Président (M. Gobé): Les parents?

M. Filion: Ça va aller jusqu'où les procédures fiscales?

Le Président (M. Gobé): Est-ce que ce sont les parents qui sont responsables de l'amende de l'enfant?

M. Filion: Bien, j'essaie de voir, oui. Est-ce que le parent va devoir payer l'amende de l'enfant?

M. Brocha: Non, absolument pas. Il y a des mesures compensatoires pour ça.

Le Président (M. Gobé): Non? Ça devrait.

M. Brochu: Ça va être le Code de procédure pénale qui va répondre à nos questions, là.

Le Président (M. Gobé): C'est parce qu'ils ne le feraient pas 2 fois, moi.

M. Filion: Mais le Code de procédure pénale, est-ce qu'il va jusqu'à l'emprisonnement du jeune?

Le Président (M. Gobé): Est-ce que le parent ne devrait pas être tenu responsable de l'amende de l'enfant? Il est le tuteur légal de l'enfant.

M. Brochu: Je ne croirais pas. Non. Le Président (M. Gobé): Non?

M. Larivière: Absolument pas. Il y a des travaux compensatoires qui sont prévus, il y a des mesures compensatoires qui sont prévues. L'amende peut être transformée en travaux compensatoires, en mise sous garde, et ainsi de suite. Il y a des mesures qui sont prévues dans la loi.

M. Filion: La mise sous garde du jeune?

M. Larivière: S'il n'y a pas paiement. Il y a des mesures palliatives, il y a une escalade: il y a des mesures compensatoires, il y a des travaux compensatoires, et ainsi de suite. Ce n'est pas la mise sous garde automatique.

M. Filion: Mais, je veux dire, par principe, le jeune, dans les écoles secondaires, qui fume des cigarettes de contrebande et qui serait pris par inadvertance, on sait pertinemment que ce jeune-là n'aura pas les moyens de la payer. Alors, c'est quoi les procédures qui vont s'appliquer contre lui? C'est ça qu'on essaie de comprendre, pour au moins pouvoir informer la population de ce que les jeunes sont appelés à subir.

Le Président (M. Gobé): Surtout qu'on sait que... Je pense que c'est un bon point qu'on n'a peut-être pas abordé au moment de l'étude sur le... Malheureusement, je n'étais pas là lorsqu'on a parlé des amendes aux trafiquants. Mais ça rejoint le consommateur jeune, qui se dit consommateur mais qui peut être un trafiquant déguisé, comme ça peut être le trafiquant jeune. On sait qu'une grosse partie du trafic de cigarettes, selon les reportages que l'on a pu voir de Radio-Canada, de Télé-Métropole et d'articles de journaux, se fait par les écoles. Ce n'est pas, les jeunes, forcément pour fumer eux-mêmes. On pourrait croire que ce serait pour approvisionner les familles, à l'occasion.

À ce moment-là, il faut se poser la question: Comment réagit-on devant cette nouvelle déviation de la criminalité fiscale en utilisant les jeunes, premièrement? Deuxièmement, comment réagit-on devant la consommation par des jeunes de produits interdits — comme les cigarettes — par la loi, avec des lois fiscales, des lois d'amende? Parce que 200 $, un jeune gars de 14 ans et demi, là, ce n'est pas évident qu'il va les avoir.

Maintenant, la responsabilisation. Là, on va plus loin. Ça fait un débat de société assez important. Est-ce qu'on doit garder le jeune à vue ou responsabiliser le parent qui, lui, devrait régler l'amende, donc régler son problème d'éducation et de surveillance de son enfant? Est-ce qu'on n'enlève pas au parent son rôle de tuteur en disant: Ne t'inquiète pas, papa, je me suis fait prendre, mais ce n'est pas toi qui es responsable, c'est l'État? Est-ce que ce n'est pas dévaloriser le rôle d'autorité parentale de la famille?

M. Filion: C'est tout le concept de société. Quand je vous dis...

Le Président (M. Gobé): Non, je vais peut-être un peu loin, mais ça ouvre la porte à ce genre de débat. C'est sûr que ce n'est pas le point principal de ce projet de loi, mais on peut se le permettre, vu que M. le député va vouloir prendre le temps d'en discuter longuement. M. le ministre, aussi, tient à ce que les parlementaires fassent la lumière là-dessus. C'est intéressant de voir qu'on peut aller, en poussant un peu loin, dans des interprétations d'un projet de loi qui peuvent avoir des impacts beaucoup plus larges. Puis, je pense que, pour les parlementaires, c'est important. On vote souvent des projets de loi qui ont des effets secondaires, dirons-nous, un peu comme certains médicaments qu'on prend pour régler un problème: on règle un problème de dos ou de mal de tête et, par la suite, on se réveille avec des boutons sur le bout de nez. Est-ce que le bouton est moins grave que le mal de tête? Peut-être, chacun juge le lendemain. Mais, c'est un peu le cas. Il peut arriver que, dans des projets de loi, pour soigner un mal de tête, on se réveille avec un lumbago ou une crise de foie. Alors, ça ouvre la porte à ce genre de discussion, et je trouve ça intéressant que vous l'ayez amenée, M. le député.

M. Filion: M. le Président, moi, je crois vraiment que c'est une réalité du fléau social. Ils font partie intégrante de ce stratagème. Je pense que nos jeunes n'ont pas besoin de ce genre d'exemple de législation fiscale pour les amener dans une société. Que vont-ils penser, eux qui seraient pris au piège dans un système comme celui-là, de notre société à nous, qu'on est en train de développer et de légiférer?

Le Président (M. Gobé): On leur apprend... On leur envoie un message à ce niveau-là, à l'effet qu'il est possible de dévier des lois, très jeune.

M. Filion: Oui.

Le Président (M. Gobé): Ça fait qu'on amène des adultes à leur apprendre ça, pour l'intérêt des adultes. Alors, c'est...

M. Filion: Payés par des adultes...

Le Président (M. Gobé): C'est assez épeurant pareil.

M. Filion: ...stimulés par des adultes, et eux se font prendre, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Mais ça n'a rien à voir avec le projet de loi, par exemple. C'est le projet de loi...

M. Filion: Mais, la pénalité, M. le Président, va toucher le jeune.

Le Président (M. Gobé): Oui, mais le projet de loi est là pour corriger une situation qui existe et qui a des effets secondaires et multiples, dont cet effet chez les jeunes. Maintenant...

M. Filion: Parce que, vous savez, les gens, entre autres les fabricants de tabac et... D'ailleurs, ils ont fait une espèce de front commun et ils posaient la question: Comment va réagir le projet de loi s'ils mettent en place de l'embauche chez les jeunes? Alors, je pense que les questions se posent et sont véritablement discutables, à ce stade-ci, parce que cette pénalité-là va s'appliquer au consommateur. Le consommateur inclut toutes les couches de la société: le jeune, le moins jeune et, bien sûr, tous ceux qui vont vouloir toucher à la cigarette de contrebande. On sait que c'est une mesure difficilement applicable. C'est une mesure nouvelle, c'est quelque chose de nouveau. Je pense que cette nouveauté-là, M. le Président, n'a pas véritablement sa place dans nos lois fiscales, compte tenu que la source même du problème, on l'évite et qu'on ne légifère pas du tout dans ce sens-là. C'est, je pense, quelque chose de fondamental qu'il faut dénoncer de ce projet-là.

Le Président (M. Gobé): Malheureusement, le temps est passé. Si vous voulez, on a l'article 19, qui est intéressant aussi pour ce soir. Nous pourrions adopter l'article 18, maintenant, et refaire la même discussion, la continuer sur 19, puisqu'on retouche, là aussi, du fiscal.

M. Filion: M. le Président, j'aimerais savoir combien il me reste de temps sur l'aride 18.

Le Président (M. Gobé): Bien, je pense que c'est pas mal... 1 min 15 s, voyez-vous. Il est 18 heures, alors...

M. Filion: Alors, je serais d'accord pour qu'on adopte sur division...

Le Président (M. Gobé): Oui? D'accord.

M. Filion: ...l'article 18 et qu'on suspende les travaux.

Le Président (M. Gobé): Ça fait qu'on adopte donc l'article 18 sur division. On va suspendre et nous reprendrons à 19 heures. Il y a là le même genre de discussion qu'on peut continuer avec latitude, la présidence étant ouverte à ça, parce qu'on parle encore de mesures d'amendes fiscales pour contrer des comportements.

Donc, la commission suspend ses travaux à 20 heures. Bon appétit à tout le monde et rendez-vous à l'heure.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 20 h 16)

Le Président (M. Camden): Alors, la commission du budget et de l'administration reprend ses travaux.

Je vous rappelle que nous sommes à l'étude du projet de loi 90, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur le tabac, la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. Nous en sommes au début de l'article 19.

Est-ce que, M. le ministre, à l'égard de l'article 19, vous avez des commentaires ou des remarques à nous formuler?

M. Savoie: Adopé, M. le Président.

Le Président (M. Camden): Comprenez bien que le sens de mes propos était à l'effet de nous préciser la portée de l'article 19, M. le ministre.

M. Savoie: D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Camden): Je reconnais là votre sens de la discipline, de l'ordre et de l'efficacité.

M. Savoie: Je pensais que c'était adopté. Ça aurait été moins compliqué.

Le Président (M. Camden): Le temps que vous nous en exprimerez la portée, le député de Montmorency appréciera vos commentaires.

M. Savoie: II s'agit tout simplement d'une modification pour inclure les articles 14.2 et 14.3. Donc, c'est tout simplement une modification de concordance.

M. Filion: Une modification de... M. Savoie: Concordance.

M. Filion: Quels sont les exemples de cas visés par l'article 19? Quels sont les cas visés par cette pénalité-là?

(Consultation)

Le Président (M. Camden): M. Larivière.

M. Larivière: Alors, le genre d'infractions qui pourraient être prévues par l'article 15, c'est des infractions qui ne sont pas déjà prévues par 14.1, 14.2, 14.3. Ça pourrait être une infraction à un règlement, à un texte réglementaire, où toute personne qui ne respecterait pas une des obligations qui serait prévue dans un règlement pourrait être poursuivie par cet article-là, finalement.

M. Filion: Vous avez sûrement pensé, parce que c'est une espèce de clause fourre-tout, là... Mais, dans votre fourre-tout, vous deviez penser à des scénarios particuliers, ou bien si c'est vraiment au cas où vous n'auriez pas tout couvert?

M. Larivière: Par expérience, cet article «clause omnibus», ça existe dans à peu près toutes les lois du Québec. Alors, c'est un genre de clause qui existe depuis fort longtemps et qui existe dans plusieurs lois du Québec, sinon la majorité des lois qui prévoient des infractions. Alors, ça existe depuis fort longtemps. Cet article-là existait déjà dans l'ancien texte de loi. Vu les nouvelles dispositions 14.2, 14.3, ça ne fait que faire de la concordance avec les nouvelles dispositions.

M. Filion: Alors, il n'y a pas d'exemple pour cet article-là? C'est un article au cas où?

Le Président (M. Camden): M. Larivière.

M. Larivière: Écoutez, en 8 ans, on ne l'a pas utilisé, parce qu'il y a des infractions qui étaient constatées par les fonctionnaires du ministère du Revenu, elles étaient déjà prévues par les dispositions de 14 et 14.1, et maintenant de 14.2 et 14.3. Mais il pourrait arriver des situations où l'infraction ne serait pas déjà prévue dans ces dispositions-là, par exemple une infraction au texte réglementaire. À ce moment-là, elle pourrait être sanctionnée par l'article 15. Mais, en 8 ans...

M. Filion: Ça ne s'est jamais appliqué? (20 h 20)

M. Larivière: II n'y a jamais eu de poursuites en vertu de l'article 15, parce que les infractions constatées par les inspecteurs du ministère du Revenu ou par d'autres étaient déjà prévues. Mais cette disposition-là, qu'on appelle «clause omnibus», existe à peu près dans toutes les lois du Québec.

M. Filion: Quand on dit: «...contrevient aux dispositions de la présente loi ou des règlements, autrement que de la façon prévue», «contrevient», c'est quand même très large. «Contrevient», on n'est pas obligé de faire de la contrebande pour être pénalisable.

M. Larivière: Mais la contrebande est déjà prévue à l'article 14.2.

M. Filion: Je comprends, mais cet article-là, lui, quand il dit: «...contrevient aux dispositions», c'est qu'on pourrait être pénalisé de 200 $ à 5000 $ sans faire de la contrebande, uniquement parce qu'on manque à un règlement quelconque.

M. Larivière: Bien, il faut qu'il y ait une obligation prévue dans une loi ou dans un règlement. C'est la condition minimale. C'est: «Toute personne qui contrevient aux dispositions de la présente loi ou des règlements». Alors, il faut qu'il y ait une obligation dans la loi ou dans le règlement. La personne qui contreviendrait à cette obligation prévue dans la loi ou dans le règlement serait poursuivie, serait passible d'une condamnation d'au moins 200 $ et d'au plus 5000 $.

M. Filion: Mais, ce que je veux dire...

M. Larivière: Mais, encore là, l'autre condition, la deuxième condition, c'est qu'il ne faut pas que l'infraction soit déjà prévue à 14, 14.1, 14.2, 14.3.

M. Filion: Ça, c'est spécifique à de la contrebande, 14, 14.1, 14.2 et 14.3.

M. Larivière: Pas nécessairement. M. Filion: Ah non?

M. Larivière: II y a toutes les obligations de détenir des certificats, des permis qui sont déjà prévues à 14.1. Vous avez l'obligation de faire des rapports de remise, qui est déjà sanctionnée par l'article 14. Alors, 14, 14.1, 14.2, 14.3 visent pratiquement l'ensemble des dispositions mises en application par les inspecteurs et les fonctionnaires du ministère du Revenu. Mais il pourrait arriver une situation où ça ne pourrait pas être prévu, où ça ne serait pas prévu. À ce moment-là, c'est 15 qui s'applique.

M. Filion: Est-ce qu'on a augmenté le minimum de cet article-là ou bien si c'était déjà comme ça, avant?

M. Larivière: Ah! c'était déjà comme ça avant. Ça n'a pas changé.

M. Filion: Vous avez simplement reproduit l'article?

M. Larivière: Absolument. Ça existe depuis fort longtemps.

M. Filion: Alors, on n'a pas d'exemple mais on a une pénalité. C'est bon. Alors, là, vous êtes sûr, à tout coup, d'en appliquer au moins une!

M. Savoie: La disposition était déjà là.

M. Filion: Jusqu'où ça pourrait aller, ça, 200 $ à

5000 $? Supposons que vous avez un manque de preuve à 14.3, par exemple le gars a un porte-cigarettes, est-ce que vous ne pourriez pas aller le chercher avec le 15, au niveau d'une pénalité?

M. Larivière: Mais, c'est la même preuve. J'imagine que, si vous avez une faiblesse, au niveau de la preuve, pour une infraction prévue à 14.3, la même faiblesse, au niveau de la preuve, va se retrouver également en vertu d'une infraction prévue à l'article 15, si la preuve n'est pas suffisante pour 14.3. Comme je vous le disais tout à l'heure, il y a 2 conditions. Il faut que ce soit «autrement que de la façon prévue» par 14.3. Si la situation de la contrebande, que vous me faites valoir, était déjà prévue par 14.3, alors il faut poursuivre en vertu de 14.3, et on vivra, à ce moment-là, avec le problème de preuve. Si l'infraction est déjà sanctionnée par une de ces dispositions-là, on n'aura pas le choix. Il faut poursuivre en vertu d'une de ces dispositions-là.

M. Filion: Et non par défaut. Alors, M. le Président, je pense qu'on est face, à nouveau, à une nouvelle disposition où on fait simplement de la concordance. Je ne pense pas qu'on puisse élaborer bien longtemps sur l'article 15 de la loi et, par conséquent, du présent projet de loi et de l'article 19. Je ne sais pas si le ministre voulait ajouter quelque chose.

Le Président (M. Camden): M. le ministre. M. Savoie: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Camden): Je comprends que vous souhaitez l'adoption de l'article.

M. Filion: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Camden): Est-ce que, M. le député de Montmorency, vous êtes disposé à concourir à...

M. Filion: Sur division.

Le Président (M. Camden): Sur division? L'article 19 est donc adopté sur division.

J'appelle l'article 20. M. le ministre, si vous avez des commentaires à nous formuler concernant l'article 20?

M. Savoie: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Camden): À moins que vous souhaitiez nous en faire la lecture? Tout simplement, vous limiter à des commentaires?

M. Savoie: Peut-être faire la lecture, M. le Président.

M. Filion: Avant la lecture, M. le Président.

Est-ce que le ministre a l'intention de déposer bientôt ses amendements qui restent à déposer, ou bien s'il a toujours l'intention d'attendre, au fur et à mesure?

M. Savoie: Au fur et à mesure, M. le Président.

M. Filion: Au fur et à mesure? M. Savoie: Au fur et à mesure.

M. Filion: Alors, nous allons suivre, au fur et à mesure.

M. Savoie: Bien, c'est-à-dire que je vais probablement les déposer au complet ce soir, si je le juge opportun. Si vous êtes gentil, M. le député de Montmorency.

Le Président (M. Camden): Ah! mais là je vais vous dire que le député de Montmorency est toujours affable, gentil, accommodant. Je n'ai pas de raison de croire, M. le ministre, qu'il ne le sera pas ce soir.

M. Savoie: Venant de vous, M. le Président, c'est une garantie.

Le Président (M. Camden): Alors, je me réjouis, évidemment, de cette appréciation. Est-ce que vous avez des commentaires, M. le ministre, concernant l'article 20?

M. Savoie: Alors, M. le Président, on attend de vous entendre avec...

Le Président (M. Camden): Je dois vous indiquer que j'ai pris connaissance du projet. Le projet n'était pas présenté par moi-même.

M. Savoie: II est d'usage, M. le Président, pour les lois fiscales — comme vous le savez, il y a plusieurs exceptions dans les lois fiscales — que le président en fasse lecture, ou...

Le Président (M. Camden): Vous savez, la coutume, ici, au Québec, est moins respectée qu'à Ottawa.

M. Savoie: Ah non! On parle de Québec.

Le Président (M. Camden): C'est ce que je vous indiquais.

M. Savoie: Moi, je vais lire les notes explicatives, M. le Président.

Le Président (M. Camden): Alors, on va répondre à votre demande, considérant que nous aurons d'autres demandes à vous formuler éventuellement.

M. Savoie: Excellent, M. le Président.

Le Président (M. Camden): L'article 15.1 de cette loi, remplacé par l'article 15 du chapitre 16 des lois de 1991, est de nouveau remplacé par le suivant: «15.1 Le juge qui déclare le défendeur coupable d'une infraction à la présente loi peut, sur demande du ministre, ordonner au défendeur de payer le montant des frais fixés par règlement et reliés à la saisie et la conservation de toute chose saisie en vertu des articles 13.4 ou 13.4.2. «Toutefois, le juge peut réduire ce montant s'il est convaincu que le ministre a indûment tardé à intenter la poursuite ou a causé sans raison suffisante un délai pour qu'elle soit instruite. «Sur demande du ministre présentée dans les trente jours d'un jugement rendu sur la poursuite visant la sanction pénale d'une infraction à la présente loi ou, dans le cas où le défendeur est réputé avoir été déclaré coupable de l'infraction, dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent la signification du constat d'infraction, un juge peut également ordonner la confiscation des paquets de tabac saisis en vertu des articles 13.4 ou 13.4.2 lorsque l'illégalité de la possession de ces paquets de tabac en empêche la remise au saisi ou à une personne qui prétend y avoir droit et, dans le cas d'un jugement par lequel le défendeur est déclaré coupable d'une infraction à la présente loi ou dans le cas où ce défendeur est réputé avoir été déclaré coupable d'une telle infraction, en outre de toute peine prévue par ailleurs pour cette infraction, la confiscation de toute chose saisie en vertu des articles 13.4 ou 13.4.2, du dépôt visé à l'article 13.4.3 ou du produit visé à l'article 13.5. «Un préavis d'au moins un jour franc d'une demande prévue au présent article est signifié au défendeur, au saisi et aux personnes qui prétendent avoir droit à la chose saisie ou au produit visé à l'article 13.5, à moins qu'ils ne soient présents devant le juge. «Lorsque la confiscation de paquets de tabac est ordonnée, le juge peut autoriser le ministre à détruire ces paquets de tabac de la manière prescrite par règlement.»

Alors, voici la fin de l'article, M. le ministre. Nous sommes disposés à vous entendre d'une façon fort explicite sur cet article de large portée.

M. Savoie: Alors, je vais vous lire les notes explicatives, peut-être que ça va fournir quelques éclaircissements.

L'article 15.1 prévoit, à son premier alinéa, la possibilité pour le ministre de demander à un juge de la Cour du Québec la confiscation de toute chose saisie en vertu des articles 13.4, 13.4.2 ou du produit de la vente de paquets de tabac, lorsqu'une personne a été déclarée coupable d'une infraction à la présente loi.

Le deuxième alinéa précise que le juge peut ordonner la confiscation demandée, sauf si la personne déclarée coupable établit sa capacité de payer le montant de l'amende, de la cotisation et des frais de conservation et de saisie.

Le troisième alinéa prévoit la possibilité, pour toute personne autre que le contrevenant, de revendiquer la chose saisie et retenue et d'en obtenir la remise, en suivant la procédure prévue à cette fin. (20 h 30)

Les modifications apportées à cet article ont pour but d'ajouter à l'effet dissuasif des peines imposées en cas de condamnation et de renforcer les pouvoirs du ministre du Revenu en matière de confiscation des choses saisies. Ces modifications ont également pour but de préciser les pouvoirs du tribunal en matière de confiscation de choses saisies et en matière de frais reliés à la saisie et à la conservation de ces choses dans le cadre de poursuites pénales pour sanctionner des infractions à la loi.

Les modifications contenues aux 2 premiers alinéas de cet article prévoient que, lors d'une condamnation, le juge peut, en plus de l'amende et des frais judiciaires imposés, condamner la personne à payer l'ensemble des frais de saisie et de conservation des choses saisies, à moins que ces frais ne soient réduits par le juge en raison de délais indus attribuables au ministre du Revenu dans l'introduction et le déroulement de la poursuite.

La suppression des dispositions actuelles du troisième alinéa concernant la revendication de la chose saisie ou du produit de la vente par une personne autre que le contrevenant est une modification de concordance à l'introduction du nouvel article 13.7.1. La modification apportée par le remplacement du troisème alinéa a pour objet de prévoir la possibilité, pour le ministre, de demander à un juge, selon les délais prévus à cet alinéa, d'ordonner la confiscation des paquets de tabac saisis lorsque l'illégalité de la possession en empêche la remise au saisi, dans tous les cas de poursuite pénale, qu'une déclaration de culpabilité ait été prononcée ou non. Cette modification fait aussi en sorte que le juge peut ordonner, en outre de toute autre peine prévue par la loi pour l'infraction commise, la confiscation de toute autre chose saisie, du dépôt visé à l'article 13.4.3 ou du produit de la vente d'une telle chose selon l'article 13.5, lorsque le défendeur est déclaré coupable ou réputé avoir été déclaré coupable de l'infraction.

L'ajout du quatrième alinéa de cet article a pour but de prévoir l'obligation pour le ministre de signifier un préavis de la demande de paiement des frais de saisie et de conservation ou de la demande de confiscation au défendeur, au saisi ou à toute autre personne qui prétend avoir droit à la chose saisie ou au produit visé à l'article 13.5, à moins que ces personnes ne soient présentes devant le juge.

L'ajout du dernier alinéa a pour effet de permettre au juge d'autoriser la destruction des paquets de tabac saisis selon la manière prévue au règlement.

Je vous rappellerai qu'hier soir ça a fait l'objet d'une assez longue discussion. D'ailleurs, en commission, on a eu l'occasion d'échanger là-dessus, particulièrement en ce qui concerne la destruction des paquets de

cigarettes et des diverses restrictions qui pouvaient être imposées au ministre en termes de délais. Le fait que le tout est surveillé par la Cour du Québec assure une bonne exécution de la loi.

Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le ministre, de ces commentaires. M. le député de Montmorency.

M. Filion: Oui, M. le Président. Moi, j'aurais une couple de petites questions simplement dans le but d'obtenir des informations éclairantes. À la page 11 du projet de loi, premier paragraphe, on parle d'une situation «où ce défendeur est réputé avoir été déclaré coupable». Qu'est-ce que ça veut dire «est réputé avoir été déclaré coupable»? Une culpabilité réputée, c'est spécial, ça!

M. Larivière: C'est dans le cas...

Le Président (M. Camden): M. Larivière.

M. Larivière: Oui, André Larivière. Alors, il y aura une nouvelle procédure qui sera mise en application, probablement à l'automne 1993, qui s'appelle le constat d'infraction. C'est toute une nouvelle procédure pénale qui sera mise en vigueur au Québec.

M. Filion: Constat d'infraction?

M. Larivière: Constat d'infraction. C'est dans le but de déjudiciariser le processus pénal au Québec. Dans ce cas-là, il y aura l'émission d'un constat d'infraction, et suivant le Code de procédure pénale... C'est comme un billet de la route, finalement. Vous pouvez aller le payer dans une caisse populaire ou autre. C'est un peu le même principe. Il y a émission d'un constat d'infraction, il y a transmission de plaidoyer de culpabilité. Il faut comprendre qu'à ce moment-là le dossier n'est pas ouvert à la cour. Ça se fait dans un processus administratif. Le Code de procédure pénale prévoit, à ce moment-là, que la personne est réputée avoir été déclarée coupable, dans des situations semblables. Alors, ça, c'est pour prévoir la nouvelle procédure qui sera mise en application dès l'automne 1993, pour les poursuites pénales au Québec.

M. Filion: Mais cette nouvelle procédure là, face à la contrebande du tabac, comment ça va jouer par rapport à une culpabilité réputée?

M. Larivière: C'est pour toutes les infractions en matière pénale au Québec. Ça ne vise pas simplement les infractions en matière de tabac. Vous avez toutes les infractions prévues par une loi provinciale et...

M. Filion: Mais c'est nouveau?

M. Larivière: Oui, c'est nouveau. C'est la mise en application du Code de procédure pénale.

M. Filion: Mais j'essaie de comprendre ou de voir une situation pratique. Comment est-ce qu'on peut être déclaré réputé coupable dans le cas du tabac?

M. Larivière: C'est bien simple. L'individu qui est trouvé en possession de tabac de contrebande, par exemple, reçoit signification par le fonctionnaire du ministère du Revenu, qui doit être une personne autorisée à délivrer les constats d'infraction. Alors, cette personne aura le constat d'infraction entre les mains, elle a un certain nombre de jours — c'est prévu dans le Code de procédure — pour répondre, transmettre un plaidoyer de culpabilité ou transmettre un plaidoyer de non-culpabilité. Si elle transmet un plaidoyer de culpabilité, alors là la loi fait en sorte qu'elle est réputée déclarée coupable, lorsqu'elle aura transmis ce plaidoyer de culpabilité à celui qui a signifié le constat d'infraction. C'est un peu comme un billet d'infraction. Disons que vous avez un billet d'infraction pour stationnement et que vous payez l'amende qui vous est réclamée, alors vous êtes réputé coupable d'avoir commis l'infraction. C'est le même principe qui va être mis en application dès l'automne 1993, probablement.

M. Filion: C'est un principe où c'est le fonctionnaire qui juge.

M. Larivière: Absolument pas. M. Filion: Non?

M. Larivière: Absolument pas. La seule chose que le fonctionnaire fait, il délivre le constat d'infraction. Il constate l'infraction, délivre le constat d'infraction, comme un policier délivre un billet d'infraction lorsqu'il constate qu'il y a un stationnement...

M. Brochu: André Brochu. Une fois que vous avez votre constat d'infraction dans les mains, à ce moment-là, vous avez le choix entre fournir un plaidoyer de culpabilité avec l'amende, choix d'envoyer uniquement l'amende — à ce moment-là, vous êtes réputé coupable et ça ferme votre dossier — ou plaider non coupable — à ce moment-là, votre dossier sera judiciarisé, on procédera devant les tribunaux. Donc, le fonctionnaire qui remet ne juge pas. Il lui remet l'infraction.

Aujourd'hui, cette infraction, tout ce que l'on fait, on l'introduit directement devant le système judiciaire via une sommation. Tout dossier commence par une procédure judiciaire et est donc judiciarisé au départ. Là, on met une étape préalable pour, évidemment, essayer de déjudiciariser le système.

M. Filion: Le délai pour contester le constat d'infraction... Est-ce qu'il y a un délai?

M. Larivière: C'est prévu dans le Code.

M. Brochu: Ça, c'est prévu dans le Code. Nous, ici, on marque bien que, dans le cas d'un constat, on parle des 90 jours qui suivent la signification du constat d'infraction, mais le délai pour le contester, ça doit être dans les 30 jours.

M. Filion: S'il passe le délai, ce n'est plus contestable.

M. Brochu: S'il passe le délai...

M. Larivière: C'est un délai de 30 jours.

M. Brochu: 30 jours?

M. Larivière: Oui, c'est ça.

M. Brochu: S'il passe le délai, il est présumé...

M. Larivière: S'il passe le délai sans avoir transmis de plaidoyer, il est présumé non coupable. Il est présumé avoir transmis un plaidoyer de non-culpabilité. Alors, le dossier, à ce moment-là, est judiciarisé et va devant les tribunaux.

M. Filion: Si, dans le délai de 30 jours, il confirme sa culpabilité, il est reconnu coupable?

M. Brochu: Si, dans les 30 jours, il confirme, soit en envoyant son constat en disant: Je suis coupable, ou qu'il envoie l'amende — si l'amende est de 200 $, il envoie un chèque de 200 $ — il est présumé coupable. S'il garde le silence, puis qu'il ne fait rien, à ce moment-là, il est présumé non coupable. C'est là que le système...

M. Filion: S'enclenche. M. Brochu: ...s'enclenche. M. Larivière: C'est ça.

M. Brochu: Là, il va recevoir un avis pour comparaître devant la cour, pour être jugé.

M. Filion: Dans le dernier paragraphe de l'article, vous vous référez à nouveau à des règlements, «de la manière prescrite par règlement», concernant la destruction des paquets de cigarettes ou des paquets de tabac. Est-ce que ces règlements, vous en avez des copies ou si c'est à être fait?

M. Brochu: C'est à être fait.

M. Filion: Mais comment se fait-il qu'on étudie des projets de loi... Moi, ça, vraiment, pour moi, c'est quelque chose d'inacceptable. On étudie un projet de loi en fonction de règlements à être faits. Vous ne pensez pas que notre législation est un petit peu défaillante? J'étudie un projet de loi, et on me dit que les règlements ne sont pas faits encore, on me parle de règlements à venir. Puis là il faut que je vote, moi, si je suis d'accord sur ce paragraphe de l'article, sans avoir de règlements à regarder et à étudier pour avoir, en même temps, l'esprit du législateur. Là, moi, je ne le sais pas comment le législateur a l'intention de prévoir l'application de tel, tel article de loi. Comment se fait-il qu'on n'a pas ça, M. le ministre? (20 h 40)

M. Savoie: D'abord, parce que le projet de loi n'est pas encore adopté et pas encore déterminé. Il peut y avoir des modifications à apporter, qui vont avoir une incidence sur la réglementation, d'une part. D'autre part, la procédure réglementaire, c'est un autre processus. Dans les projets de loi d'ordre fiscal, il n'y a pas de prépublication, simplement une publication. Un pouvoir réglementaire, aussi, a beaucoup plus de contraintes qu'un pouvoir des lois...

(Consultation)

Le Président (M. Camden): M. le député de LaFontaine, vous aviez une question à poser?

M. Gobé: Oui. Je peux?

M. Savoie: Tu peux continuer.

M. Gobé: Oui, merci. De toute façon, je voulais aller... J'avais une question, mais le dernier paragraphe que notre collègue a mentionné, je trouve ça très intéressant. En effet, on peut prescrire par règlement la destruction de ces paquets de tabac. Mais je me demande s'il ne serait pas bon de prévoir, dans ce règlement, vu qu'ils ne sont pas écrits, la possibilité que — vu que le tabac n'est pas interdit de consommation au Québec, c'est simplement interdit de le vendre illégalement — le ministère dispose de ces paquets de tabac envers les compagnies de cigarettes ou autres pour les recycler. Il pourrait faire en sorte qu'ils soient revendus avec profit et que le ministère, le gouvernement engage, ramasse l'argent et s'en serve ou pour des causes humanitaires, comme dernier recours, ou autre chose comme ça, ou même pour financer ses services de recherche à la fraude. Je trouve ça déplorable qu'on puisse détruire une matière première comme le tabac, qui est une matière noble que des agriculteurs québécois cultivent et qui, comme chacun le sait, bien souvent, vient de chez nous et est exportée illégalement. C'est juste une remarque au passage que je voulais faire.

Mais ma question, moi, M. le ministre, était peut-être plus pointue que cela.

M. Savoie: Ah bon!

M. Gobé: Oui. C'est très important, je pense,

qu'on aille plus loin. Là, vous avez un projet de loi qui est un projet de loi de répression et d'amendes fiscales. Mais, il n'en reste pas moins que, lorsqu'on découvre...

M. Savoie: Non, non, non. Ce n'est pas un projet de loi...

M. Gobé: ...un réseau... M. Savoie: ...de répression.

M. Gobé: Bien, de répression de la contrebande, là.

Le Président (M. Camden): M. le ministre, vous permettez au député de LaFontaine de s'exprimer.

M. Savoie: Oui, allez-y, allez-y.

M. Chevrette: II a raison. Moi, je suis d'accord avec lui. D'ailleurs, si vous avez besoin d'aide, je vais vous aider.

M. Gobé: L'imposition de l'amende...

Le Président (M. Camden): Je vous remercie de votre appui.

M. Gobé: ...M. le ministre, n'est pas faite pour collecter de l'argent, mais pour décourager la contrebande. Donc, c'est une manière de réprimer — qui dit réprimer, dit répression — cette contrebande.

Une voix: Exact. C'est ça.

M. Gobé: Ce n'est pas pour avoir des revenus supplémentaires qu'on met ce projet de loi là, c'est pour empêcher la contrebande.

Je ne le vois pas, dans le projet de loi, mais je pense que cet article est très important, parce qu'on arrive vers la fin. Quand vous découvrez un réseau de contrebande, on met des amendes. Mais est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de chercher les montants d'argent illégaux qui ont été faits grâce à cette filière et à ce réseau depuis 1 mois, 2 ans, 3 ans ou 6 mois, et de saisir cet argent? Faire un peu comme aux États-Unis, dans le trafic de la drogue, où on saisit l'argent, on le ramasse et le ministère public ou l'État en prend possession pour aider à financer ses opérations. Je ne vois pas ça du tout là-dedans.

Je trouverais important d'y amener un amendement qui permettrait à votre ministère de dire qu'il pourrait non seulement mettre des amendes, mais saisir toute somme, revenu, bien, propriété qui appartiendrait, qui découlerait de ce trafic de cigarettes. Ce serait bien, parce qu'il y a des centaines de milliers, peut-être des millions de dollars de profits qui se font. Le type, il se ramasse avec 10 000 $, 20 000 $ d'amende, mais il ramassait 1 000 000 $, 2 000 000 $. Il est mort de rire, il se roule par terre! La semaine suivante, il...

M. Savoie: Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: M. le Président, moi, je suis ouvert!

M. Savoie: Tu es dans la business!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Camden): M. le député de Joliette...

M. Chevrette: On vous attendait, M. le député de Verdun, pour aller en sous-amendement au député de LaFontaine!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gobé: M. le ministre, je pense que nous pourrions faire un amendement qui verrait à faire en sorte que le ministère...

M. Savoie: Albert, attends-moi! Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gobé: ...puisse avoir les mécanismes nécessaires pour saisir et prendre possession de toute somme d'argent, comptes en banque ou autres biens d'un réseau de trafic de cigarettes de contrebande.

M. Savoie: Je regrette, mais... On a bien ricané, mais...

Le Président (M. Camden): M. le ministre, d'une façon brève, cette question pertinente du député de LaFontaine.

M. Gobé: Non, mais c'est sérieux. Vous savez que nous sourions...

M. Savoie: Oui, oui. Ça va, là. Je vais répondre, là.

M. Gobé: Je n'ai pas terminé.

Le Président (M. Camden): Ha, ha, ha! J'espère bien.

M. Savoie: Non, non, c'est correct...

M. Gobé: L'illégalité est une chose... Non, mais est-ce que vous permettez, M. le ministre, que je termine mon argumentation?

M. Savoie: Oui, mais laissez-moi répondre un peu. Après ça, ça va revenir... Oui.

Le Président (M. Camden): M. le ministre, est-ce que vous souhaitez répondre immédiatement?

M. Savoie: Oui. Très rapidement. Nous avons...

Le Président (M. Camden): M. le ministre, à la question du député de LaFontaine.

M. Savoie: Oui, je le sais. Je sais que tu es sérieux, puis moi aussi. D'abord, pour la première partie de ton exposé. Il y a un autre article, que nous avons étudié hier, qui prévoit justement que le tabac peut être vendu au lieu d'être...

M. Gobé: Pour que le tabac puisse être vendu au lieu d'être détruit.

M. Savoie: Oui.

M. Gobé: Mais, à ce moment-là, pourquoi est-il marqué détruit selon le règlement?

M. Savoie: Oui, bien, le règlement va prévoir...

M. Gobé: Y aurait-il moyen d'amender pour qu'il en soit disposé selon les...

M. Savoie: C'est-à-dire que le...

M. Gobé: On pourrait peut-être le changer, parce que «détruire», ça impose une destruction.

M. Savoie: Oui.

M. Gobé: Vous pourriez avoir une contestation.

M. Savoie: Mais ça dépend du type de tabac. Il y a un problème avec le tabac international et le tabac interprovincial. On a examiné cette question, hier soir, en grand détail. Il faut comprendre qu'il y a du tabac qu'on peut détruire, qu'on peut brûler et qu'il y en a d'autre qui peut faire l'objet...

M. Gobé: Quelle est la différence entre les deux?

M. Savoie: Ça dépend de sa provenance, dans le sens que, si les taxes sont déjà...

M. Gobé: Le tabac qui vient du Québec, on le garde?

M. Savoie: Si les taxes ont déjà été payées dessus ou non. Alors, la taxe fédérale, par exemple, a déjà été payée dessus. On ne peut pas vendre du tabac sans se soumettre nous-mêmes à notre propre loi, c'est-à-dire en allant chercher les taxes.

M. Gobé: Je ne comprends pas, M. le ministre. C'est parce que, quand vous saisissez, dans le port de Montréal, un container de tapis d'Iran illégaux...

M. Savoie: Oui.

M. Gobé: ...la douane le garde 1 an, 6 mois ou 3 mois. Après, c'est un encan. Elle vend ces tapis-là et récupère l'argent. Pourquoi détruire une marchandise, une matière première? Je ne crois pas que, dans le cas de la drogue, ça se fasse, c'est illégal de consommer, mais, dans le cas du tabac, ce n'est pas illégal de le consommer. Ce qui est illégal, c'est de le vendre sans payer la taxe québécoise. Alors, à partir de ce moment-là, vu qu'on a une matière première intéressante, pourquoi ne pas la vendre à l'encan, en tirer profit et donner cet argent-là peut-être pas forcément au fonds consolidé de la province, mais à Dernier Recours, à Montréal, ou pour l'éducation des classes défavorisées, ou même pour la recherche dans votre ministère.

M. Savoie: Oui, oui, c'est ça, mais il faut bien compendre que, lorsqu'il y a vente, il va falloir vendre avec la taxe.

M. Gobé: Oui. Ce n'est pas grave. Quitte à acquitter le droit de...

M. Savoie: Oui. Alors, ça peut se faire lorsque... Il peut y avoir vente dans certaines conditions. Mais, normalement, étant donné qu'on serait obligé, en vendant, de payer des taxes — par exemple, au gouvernement fédéral — de collecter la taxe pour le Québec et que le contenant soit conforme... À ce moment-là, il faut travailler avec un tabac qui circule... par exemple du tabac provenant de l'Ontario, du tabac interprovincial. Lorsque c'est du tabac provenant des États-Unis, les taxes n'ont pas été payées. Il n'y a aucune taxe. Donc, c'est un produit illégal. En conséquence, ce que nous faisons, étant donné qu'on ne peut pas le revendre, c'est qu'il faut procéder à la destruction du tabac.

M. Gobé: Est-ce qu'on ne pourrait pas le revendre, déduire les droits de taxes qu'il y a à payer au fédéral et garder la différence pour nous plutôt que de le détruire? C'est plate de détruire ça.

M. Savoie: II faut comprendre qu'il n'y aura pas de différence...

M. Gobé: II n'y aura pas de grande différence entre le prix de vente et...

M. Savoie: Non, non.

M. Gobé: Ça, c'est le premier point. J'apprécie beaucoup que vous ayez pensé à ça, puis je vois... Est-ce que ça va être mentionné dans le projet de loi ou...

M. Savoie: Oui, oui. Il y a un article spécifique là-dessus, qu'on a discuté hier ensemble.

M. Filion: Lequel?

M. Savoie: Alors, 13.5. C'est ça, l'article 13 du projet de loi. C'est marqué, à la fin: «Toutefois, le juge peut dispenser...» Attends une seconde. «Le produit de la vente, moins les frais, est conservé par une personne....» Non, ce n'est pas ça. «...le ministre peut demander à un juge de la Cour du Québec qu'il ordonne que ces paquets, ce véhicule ou ce distributeur automatique soient vendus aux conditions que ce dernier détermine.»

M. Gobé: O.K. Case...

M, Savoie: On a eu l'occasion, à ce moment-là, d'échanger là-dessus.

M. Gobé: Je suis content de voir que c'est quand même une préoccupation importante.

M. Savoie: Pour répondre à la deuxième partie de ta question, lorsqu'il y a une intervention et que des gens sont trouvés en possession, il y a une amende. L'amende, c'est une chose. Les taxes sont toujours dues pour le bien, les taxes sont toujours dues. Alors, la personne reçoit l'amende. Elle doit nous payer l'équivalent des taxes. Là, bien sûr, on a affaire à un réseau, comme vous l'avez mentionné — c'était dans votre cas. On a affaire, bien sûr, à beaucoup d'argent qui circule. Alors, j'imagine, les gens de vérification vont se pencher... (20 h 50)

M. Gobé: Voyez-vous, M. le ministre, ce n'est pas tellement... Quand je dis saisir l'argent, récupérer le fric, ce n'est pas récupérer l'argent comme tel, c'est l'exemplarité. Un contrebandier qui se fait prendre, tous les profits qu'il a accumulés face à ce trafic-là, se les faisant confisquer, je veux dire, ça va en décourager quelques-uns. Alors que, s'il s'en tire avec, je ne sais pas, 100 000 $ ou 50 000 $, 200 000 $ d'amende, s'il a ramassé 1 000 000 $ en dessous de la table, qu'il l'a nettoyé dans une banque ou je ne sais pas trop où — probablement qu'on assiste à un phénomène semblable à celui de la drogue, qui est le blanchissage d'argent...

M. Savoie: Oui, oui, mais on a pensé à ça aussi. M. Gobé: Cet argent sale...

M. Savoie: Normalement, quand on prend quelqu'un, j'imagine qu'il ne doit pas rester grand-chose à la fin.

M. Gobé: Bien, je ne suis pas sûr de ça, moi, M. le ministre.

M. Savoie: J'imagine que, quand on a fini avec, ça ne vaut pas cher la livre.

M. Gobé: Voyez-vous, cet argent-là peut servir aussi à financer d'autres trafics. On sait que l'argent de la drogue sert à financer d'autres trafics ailleurs. Il n'est pas impensable que l'argent du trafic de la contrebande serve à financer des activités interlopes, au Québec et au Canada.

M. Savoie: Oui, oui. On a pensé à ça aussi. Oui, oui, nous autres aussi.

M. Gobé: Disons que c'est le départ d'un réseau de — comment dirais-je? — fraude, ou de banditisme, ou de corruption, ou d'autre chose. C'est important que non seulement le fisc, en tant qu'amendes ou droits à percevoir, mais que toute somme, tout gain qui pourrait découler de ce trafic puisse être saisi.

M. Savoie: Mais vous comprendrez que c'est rien qu'un mécanisme parmi d'autres et qu'il y a plusieurs interventions...

M. Gobé: Je ne le voyais pas dans le projet, c'est pour ça que...

M. Savoie: Non, c'est ça, hein?

M. Gobé: Je me disais: Pourquoi, si, pour la drogue, c'est bon? Mais le principe est le même.

M. Savoie: Mais là non seulement il y a les taxes, il y a ensuite les revenus. On retourne sur son rapport d'impôt...

M. Gobé: Vous conviendrez avec nous que c'est intéressant de regarder ça.

M. Savoie: Oui.

M. Gobé: II y a peut-être là des millions à aller chercher.

M. Savoie: Ah bien, on va les chercher. M. Gobé: En plus de décourager... Une voix: ...19 minutes.

M. Gobé: Moi, j'ai fini, M. le député. Si le député de Joliette veut parler. M. le Président, pardon.

Le Président (M. Camden): Je vous rappellerais, M. le député de LaFontaine, que la présidence est au bout de la table, ici.

M. Gobé: Je m'excuse, M. le...

Le Président (M. Camden): Je vous remercie pour...

M. Gobé: Je pensais que c'était M. le député de Joliette.

Le Président (M. Camden): Alors, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Merci, M. le député de Lotbinière. Je voudrais donner suite aux propos du député de LaFontaine. Je pense que ce n'est pas si clair que ça dans le projet de loi, même si le ministre l'a dit, parce qu'on l'a questionné sur ça hier. Il se donne beaucoup de pouvoirs discrétionnaires, mais ce n'est pas clair.

Moi, je trouve que l'idée est merveilleuse, celle du député de LaFontaine. Donc, pour permettre de concrétiser cette idée-là, la rendre claire, sans équivoque, j'ajouterais au dernier alinéa de l'article 15.1, page 11: «Lorsque la confiscation de paquets de tabac est ordonnée, le juge peut autoriser le ministre à détruire ces paquets de tabac...» Là, j'aurais un amendement, après «paquets de tabac», le deuxième «paquets de tabac». Mon amendement se lit comme suit: «ou les vendre et en distribuer le produit de la vente à des organismes de santé ou de bienfaisance», et vous reprenez «de la manière prescrite par règlement».

M. Gobé: De charité.

M. Chevrette: «De charité». On pourrait mettre «charité», sans amendement. Je l'accepterais de même. On pourrait mettre «de santé et de charité». Mettez «charité» à la place de «bienfaisance», M. le Président. Il l'accepte. Corrigez-le: «charité» au lieu de «bienfaisance». Il l'accepte.

(Consultation)

Le Président (M. Camden): Est-ce que les membres souhaitent se faire entendre sur la recevabilité? Peut-être vous faire entendre, M. le ministre?

M. Savoie: Oui.

Le Président (M. Camden): On est disposé à vous entendre.

M. Savoie: Alors, je pense qu'il faudrait avoir l'amendement par écrit, M. le Président, pour qu'on puisse l'étudier.

M. Chevrette: On l'a.

Le Président (M. Camden): Nous l'avons. Nous pouvons le faire photocopier, M. le ministre.

M. Savoie: D'accord.

Le Président (M. Camden): Nous allons suspendre quelques instants, le temps de le faire photocopier. Même s'il est manuscrit, vous comprenez bien qu'on le reçoit quand même.

(Suspension de la séance à 20 h 54)

(Reprise à 21 h 4)

Le Président (M. Camden): La commission reprend ses travaux. Nous en sommes à la discussion sur la recevabilité d'un amendement déposé par le député de Joliette.

Est-ce que vous êtes disposé à vous faire entendre sur la recevabilité, M. le député de Joliette?

M. Chevrette: Oui, bien sûr.

Le Président (M. Camden): Je suis disposé à accueillir vos commentaires.

M. Chevrette: M. le Président, moi, je trouve que c'est un amendement qui cadre bien avec les desiderata exprimés même par le député de LaFontaine dans son exposé. Je pense que la saisie... Vu que ce n'est pas une loi répressive, qui ne vise pas à remplir les coffres du gouvernement, aux dires mêmes du ministre, je ne vois pas pourquoi, à ce moment-là, on ne ferait pas profiter des organismes qui — antitabac, par exemple — luttent ou bien encore des organismes de charité, effectivement, la société du cancer, la société québécoise du cancer, par exemple, qui n'est pas subventionnée. On sait qu'il y a des gens de l'Abitibi, entre autres, qui vont suivre, par exemple, des traitements de chimiothérapie ou de radiothérapie, qui doivent payer de l'hébergement à Montréal. Ça doit être quelque chose comme... Ce n'est pas tellement dispendieux, mais ceux, par exemple, qui sont sur l'aide sociale, ils ne peuvent pas suivre ces traitements-là si on ne paie pas leur hébergement. Ce n'est que tout dernièrement qu'on a réussi à aller chercher, je pense, quelques dollars de l'État, en disant: le tiers de l'État, le tiers de la personne et le tiers d'organismes quelconques, qui donnent des dons. À ce moment-là, ça pourrait être une excellente occasion de venir en aide à des gens, parce qu'il n'y a pas nécessairement de programme spécifique pour venir en aide à ce genre de personnes.

Moi, j'ai trouvé l'idée très bonne. Je me suis dit: Comment un ministre, qui est un tantinet humain, peut refuser un amendement qui vise précisément à alléger la misère, à faire en sorte qu'on puisse rendre service avec un fruit légal? Ça, je n'en disconviens pas, parce que je sais qu'hier soir on a eu une assez longue discussion, assez intéressante, d'ailleurs, puisque ça nous a épuisés — à 23 h 30, on était très fatigués tout le monde — mais une discussion intéressante qui a fait en sorte qu'on a découvert... Même moi, j'ai appris là-dessus, par exemple le tabac illégal, qui vient d'outre-frontière,

par rapport au tabac légal, mais qui peut circuler de façon un peu illégale, à l'intérieur du Québec, mais qui n'est pas illégal en termes de vente par rapport à d'autres provinces, que ce soit le Nouveau-Brunswick ou l'Ontario.

Je me suis dit: Pourquoi détruire quelque chose qui pourrait, à ce moment-là, effectivement, créer un fonds, d'autant plus que le ministre s'est donné un pouvoir de portée générale là-dessus: le pouvoir de garder les biens. Suite à une demande devant un juge, s'il fait la preuve qu'il peut le vendre et que ça pourrait même être avantageux, disait-il, pour celui... par exemple, certains biens pourraient être de nature à aider même celui qu'on a saisi, de sorte que, quand c'est clair que l'État doit garder ce fruit usurpé, moi, je pense que ça va de soi, à ce moment-là, qu'on donne le pouvoir, au lieu de les détruire. Ça ne dispose pas de la légalité ou de l'illégalité, tout comme le pouvoir que s'est donné le ministre antérieurement, si ma mémoire est fidèle, aux articles 11 ou 10, là, ou 15, hier, dans ce bout-là. Je sais que le ministre, hier, s'est donné le pouvoir de vendre, après autorisation d'un juge. Donc, s'il en vend pour une certaine quantité, ça peut être intéressant.

J'apprenais, en lisant le Globe and Mail de la semaine dernière, le Globe and Mail, cahier B, page 1, où il y avait des personnes identifiées; le lieutenant Robitaille, je pense, de la GRC en territoire québécois, qui faisait les perquisitions au niveau de la drogue, de la cigarette de contrebande, identifiait même des personnes nommément — à Kahnawake, par exemple — qui ont transigé pour 20 000 000 $ en cigarettes. Ce n'est pas des pinottes, 20 000 000 $! Si jamais il y en avait une couple de millions dans ça, qui pouvaient être revendues au profit de la société, ça pourrait payer une partie de votre police, d'abord. Mais là, nous autres, on dit: Non, ce n'est pas ça. Il faut que ça serve à payer des organismes de charité ou encore des organismes de santé. À mon point de vue, on fait oeuvre utile tout en légiférant. Avec l'ouverture d'esprit qu'on connaît du ministre du Revenu, je serais très surpris qu'il s'objecte à un tel amendement. Au contraire, je pense qu'il va essayer d'en finir rapidement avec cet amendement. Il va nous demander le vote au plus vite, et on va pouvoir passer à un autre article ou à un autre amendement.

M. Gobé: M. le Président, peut-être ajouter...

Le Président (M. Camden): Oui, M. le député de LaFontaine. Je vous rappelle que c'est sur la recevabilité.

M. Gobé: Oui. En effet, je pense que M. le ministre devrait recevoir cet amendement-là de manière favorable, tout d'abord parce qu'il est...

M. Savoie: Le président, c'est le président qui reçoit.

M. Gobé: Oui. M. le Président, vous devriez recevoir...

Le Président (M. Camden): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: ...cet amendement, cette motion d'amendement favorablement, d'abord parce qu'elle va dans le sens du projet de loi, qui est de disposer du tabac saisi. Là, une fois qu'on a décidé qu'il fallait en disposer — on ne peut pas le garder ad vitam aeternam dans un entrepôt — une proposition avait été faite, qui serait de le brûler, de le détruire; probablement de le brûler, de l'enterrer ou des choses comme ça.

Une autre manière d'en disposer, toujours en suivant la volonté du projet de loi, de l'article, qui est de ne pas le conserver, serait, en effet, de le vendre et d'en mettre les profits pour des organismes reliés au tabac, reliés aux maladies du tabac. On sait que notre société est affligée par certaines maladies importantes, certains maux, et le tabagisme en est un. Le cancer du poumon, très important au Québec, nécessite chaque année des déboursés extrêmement importants.

Le Président (M. Camden): Mais, M. le député de LaFontaine, comme président, j'aimerais vous entendre sur la forme et non sur le fond.

M. Gobé: Oui, oui. Mais nous allons...

Le Président (M. Camden): Sur les raisons qui devraient motiver le président à l'accepter sur la forme.

M. Gobé: ...effleurer le fond, M. le Président, sans jamais y aller complètement, si vous le permettez. Le fait de me laisser y aller permettra peut-être de prendre le vote rapidement, sans revenir plus tard, lorsque vous aurez jugé l'amendement recevable sur le fond. Même, si vous désirez le juger recevable maintenant — là, nous allons sur le fond, M. le député de Joliette et moi-même — sur la forme, je pense qu'il est recevable parce qu'il correspond au projet de loi. Il correspond à une volonté de disposer de ce stock de tabac saisi.

Maintenant, sur le fond, vous pourrez m'entendre, par la suite, quand vous aurez statué s'il est recevable ou pas, à ce moment-là.

Le Président (M. Camden): Alors, M. le ministre, sur la recevabilité, avez vous des commentaires à nous formuler? (21 h 10)

M. Savoie: Bien, M. le Président, j'aurais des commentaires sur la recevabilité de même que sur le fond. Puisque ça a été abordé, on peut, finalement, là, compte tenu du fait...

Le Président (M. Camden): Moi, je préférerais vous entendre sur la forme...

M. Savoie: Oui, je sais.

Le Président (M. Camden): ...considérant que j'aurai à me prononcer sur la recevabilité...

M. Savoie: D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Camden): ...et non sur l'appréciation du fond.

M. Savoie: C'est pour ça, M. le Président, que je vais me permettre quelques commentaires sur le fond, parce que je sais que, sur la recevabilité, vous allez clore cette situation dret-là.

Le Président (M. Camden): Je vous rappelle, M. le ministre, que vous ne pouvez présumer de la décision du président.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Savoie: Jamais, M. le Président, je n'oserais présumer de votre sagesse dans ces...

Le Président (M. Camden): Le président est un peu comme les gens du ministère du Revenu. C'est sur la forme qu'il apprécie, pour le moment; par la suite, sur le fond.

M. Chevrette: Si vous n'avez rien à dire sur la forme, vous n'êtes pas obligé, M. le ministre.

M. Savoie: Alors, sur la question du fond, d'abord, parce qu'il faut en parler rapidement, pour qu'on puisse savoir...

M. Chevrette: Pas le fond. Il faut plaider la recevabilité.

M. Savoie: Oui, oui, je sais. Mais, avant, vous allez me permettre quelques commentaires sur le fond, parce que je...

M. Chevrette: Non, vous n'avez pas le droit, vous êtes...

M. Savoie: Bien, vous, vous avez parlé sur le fond, là.

M. Chevrette: C'est parce qu'il ne m'a pas arrêté. Ce n'est pas parce que...

M. Savoie: Alors, j'ai quelques commentaires, ici, à ce moment-là, d'une façon générale.

M. Chevrette: M. le Président... M. Filion: M. le Président.

Le Président (M. Camden): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: ...le ministre doit plaider sur la forme. Vous l'avez bien dit?

Le Président (M. Camden): Absolument!

M. Chevrette: Bon. Voulez-vous faire respecter par le ministre exactement ce que sont vos ordres.

Le Président (M. Camden): Je vous remercie de vos commentaires, M. le député de Joliette, mais je pense que, si j'ai été aussi tolérant à votre égard, je veux bien...

M. Chevrette: Oui, mais vous avez arrêté le député de LaFontaine.

Le Président (M. Camden): C'est parce que j'avais permis au député de LaFontaine d'y aller de quelques phrases sur le fond. Par la suite, évidemment, voulant bénéficier de son expertise, puisqu'il assume occasionnellement la présidence de séances...

M. Chevrette: Oui, mais on ne peut pas avoir deux, trois poids, trois mesures, ici, là.

Le Président (M. Camden): ...je voulais profiter de ses connaissances.

M. Gobé: Ah bien là, écoutez, il y a manquement à mon privilège.

M. Filion: M. le Président.

Le Président (M. Camden): Alors, M. le ministre, sur la forme. Je sais que, pour plaider sur le fond, vous êtes en mesure de le faire fort bien.

M. Savoie: Alors, quelques commentaires avant d'y aller sur la recevabilité, M. le Président, pour être certain que tout le monde a bien compris la problématique. C'est qu'un paquet doit contenir des indications et l'affichage «Pour vente au Québec». Il doit être conforme. Alors, étant donné qu'on parle de cigarettes de contrebande, les paquets ne contiennent pas les avis requis au Canada en vertu des lois canadiennes et québécoises, donc ils ne peuvent pas être mis en circulation.

Ces paquets-là ont donc besoin obligatoirement d'un repaquetage, c'est-à-dire qu'ils doivent être de nouveau emballés et présentés pour vente au Québec, ce qui est un coût considérable. Lorsqu'on pense à ce coût-là, de manutention additionnelle, plus les taxes, il s'agit d'un produit dont le coût va être particulièrement élevé.

Troisièmement — je pense que c'est aussi significatif — c'est que, compte tenu du fait qu'on parle de produits qui, souvent, peuvent être avariés, compte tenu que c'est pour consommation personnelle, ça risque de présenter un risque, et l'intérêt pour ce genre de produit

là risque d'être peu élevé.

Toutefois, M. le Président, je pense que, l'idée, étant donné qu'elle vient de l'intervention du député de Verdun, présente un certain intérêt. Ce que je me suis dit, c'est qu'on est...

M. Gautrin: Le député de Verdun n'est pas intervenu là-dessus. Il parle déjà trop! C'est le député de LaFontaine.

M. Savoie: LaFontaine. Excusez-moi. Le député de LaFontaine. Je pense que l'idée était intéressante, et nous allons examiner cette option-là au niveau du règlement que nous allons préparer.

Quant à la recevabilité de la motion, M. le Président, étant donné qu'on parle de biens qui sont confisqués, qui sont donc la propriété de l'État, étant donné que ce sont des biens qui appartiennent à l'État, la motion d'amendement, sur le plan strictement technique, ne peut pas être reçue en vertu de l'article 192, alinéa 4°, où on prévoit spécifiquement ce qui suit: «192. Seul un ministre peut présenter une motion visant: «4° l'aliénation de biens appartenant à l'État.»

Alors, malgré le fait que la motion n'est pas recevable, je vais quand même m'entretenir et procéder à l'examen de l'intégration de ce processus-là, au niveau de notre réglementation, prévu à l'article même que nous avons actuellement sous étude.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président (M. Camden): Est-ce qu'il y a d'autres...

M. Chevrette: Oui, je vais revenir. J'ai droit à 20 minutes, si vous voulez.

M. Savoie: Non, attendez une seconde.

Le Président (M. Camden): M. le ministre, vous n'aviez pas complété?

M. Chevrette: Ah! vous pouvez mettre 7 sur 10 pour vous. Oui, mais, si Mme Whittom n'avait pas souligné ça, ça me fait plaisir de revenir, je l'avais compris, imaginez-vous donc! J'ai une oreille très fine. L'argument ne vaut pas sur le plan juridique: Seul un ministre peut engager des finances publiques. Mais, M. le Président, ici, il ne s'agit pas d'argent perçu des citoyens et dispensé à même un budget, il s'agit du fruit d'une saisie, M. le Président. À mon humble point de vue, M. le Président, l'argent perçu, vous pourriez tout le brûler. Nous, on dit que, plutôt que de tout le brûler. .. Ça ne vous donnera pas une cent, ça. C'est juste ça que vous vous donnez comme article. Ça ne vous donnerait pas une cent. Donc, ne venez pas me dire que l'argument qu'on vient de donner enlève de l'argent au gouvernement, de quelque nature que ce soit, puisque vous n'en avez pas, vous n'avez pas le pouvoir en vertu de l'article 15.1, alinéa dernier: «Lorsque la confiscation...»

Est-ce que je pourrais continuer, M. le Président? Oui, mais, là, je m'excuse, mais, quand je parle, vous ne parlez pas, puis, quand vous parlez, je ne parle pas.

M. Savoie: Non, non, c'est parce que je me parlais.

M. Chevrette: Oui, mais parlez-vous moins fort!

Le Président (M. Camden): Alors, M. le député de Joliette, poursuivez vos propos.

M. Chevrette: II m'a fait perdre le fil, je vais me choquer.

Le Président (M. Camden): Ah! gardez votre état d'âme, je le trouve excellent. C'est excellent pour votre santé.

Une voix: Ce n'est pas une question de règlement?

M. Gautrin: Non, non, non, mais je laisse aller le député de Joliette, ça m'intéresse.

M. Chevrette: Oui, oui, je ne suis pas avancé. Je vais vous montrer ce qu'on fait, là. Le ministre, en vertu de la loi, on dit: «Lorsque la confiscation de paquets de tabac est ordonnée — une confiscation ordonnée — le juge peut autoriser le ministre à détruire ces paquets de tabac». C'est tout ce qu'il y a dans l'article. Plutôt que de faire oeuvre futile et de ne faire que de la fumée, nous autres, on dit: On vous donne, de par la loi et de par règlement, la façon d'aller faire de l'argent pour des sociétés. Ne venez pas me dire que c'est irrecevable, puisque vous n'aviez aucun pouvoir d'aller en chercher de l'argent. Vous les brûliez, vous faisiez de la fumée, de la boucane, si vous comprenez mieux ça chez vous. À partir de là, on ajoute, nous: Plutôt que de le faire flamber, faites quelques cents, puis donnez-les à des organismes. Voyons, ne venez pas me dire que ce n'est pas recevable, ça. C'est tellement recevable qu'on vous donne de l'imagination, alors que vous n'en aviez pas dans votre projet de loi, pour l'utilisation.

M. Savoie: Oui, mais, lorsqu'on parle de la recevabilité de la motion...

Le Président (M. Camden): M. le ministre, c'est sur la forme.

M. Savoie: La recevabilité, là.

Le Président (M. Camden): ...sur la recevabilité quant à la forme.

M. Savoie: La recevabilité. Alors, je suis d'accord avec vous sur l'utilisation, sauf qu'ici on parle d'une motion. Je l'ai reçue dans le sens qu'on est prêt à examiner ça au niveau de notre réglementation, pour donner suite à la recommandation du député de LaFontaine, sauf que, sur la recevabilité en tant que telle: «Seul un ministre peut présenter une motion visant l'aliénation de biens appartenant à l'État.»

M. Gautrin: M. le Président.

Le Président (M. Camden): Je reconnais le député de Verdun, qui avait sollicité la parole.

M. Gautrin: M. le Président, je pense que vous avez à trancher une question qui est relativement délicate, à savoir: Est-ce qu'un bien saisi est un bien qui appartient au gouvernement? Je pense que c'est la question que vous avez à trancher. Si vous décidez qu'un bien saisi n'appartient pas au gouvernement, à ce moment-là, il n'y a aucun problème. On peut l'aliéner, le vendre, etc. Si le bien saisi appartient au gouvernement, à ce moment-là, l'article 17, je pense... C'est lequel? 17.4?

M. Filion: ^'article 192, 4°.

M. Gautrin: L'article 192, 4°. Vous avez le règlement avec vous. Merci, M. le député.

M. Filion: Bien non, j'avais des notes. J'avais pris des notes.

M. Gautrin: Je savais, vous êtes toujours efficace. Alors, la question qui reste, M. le Président, au coeur de votre décision... M. le Président... M. le Président... M. le Président, allô! Oui, merci.

Le Président (M. Camden): M. le député de Verdun, nous vous écoutons avec intérêt.

M. Chevrette: Oui, nous écoutons avec beaucoup d'intérêt.

M. Gautrin: Alors, la question qui est au coeur de votre décision, et je pense qu'elle est importante: Est-ce qu'un bien saisi est un bien qui appartient au gouvernement?

M. Chevrette: Voilà! (21 h 20)

M. Gautrin: Je pense que c'est une question intéressante à trancher. D'aucuns peuvent plaider, bien sûr, que le bien saisi appartient au gouvernement, mais on pourrait aussi considérer que le bien saisi n'appartient pas en propre au gouvernement, que c'est un bien dont il a... le terme, c'est «la garde». Merci!

M. Chevrette: D'ailleurs, ça a toujours été le mot «garde» hier.

M. Gautrin: A la garde. Donc, le choix que vous avez à dire, dans votre décision, c'est que, si le bien saisi, d'après votre sagesse, appartient au gouvernement, vous devez décider que l'amendement est non recevable. Si vous considérez qu'un bien saisi est un bien qui est en garde par le gouvernement, à mon sens, l'amendement est recevable.

La décision vous appartient, M. le Président, je vous laisse, dans votre grande sagesse, trancher, mais c'est là qu'est le noeud gordien de la question.

M. Filion: Voilà!

Le Président (M. Camden): M. le député de Montmorency.

M. Filion: M. le Président, pour abonder dans le même sens que le député...

M. Gautrin: De Verdun, Verdun.

Le Président (M. Camden): Sur la forme.

M. Filion: ...de Verdun, M. le Président... D'ailleurs, je demanderais même au ministre de donner des articles de loi de ce propre projet de loi, M. le Président, celui qu'on étudie actuellement. On en discutait hier, la confiscation d'un bien ne donne pas automatiquement la priopriété du bien au gouvernement. On peut confisquer un bien qui appartient à un tiers et être reconnu par un tribunal propriétaire d'un bien suite à un jugement quelconque, ça va. Mais, dans le présent cas, un bien confisqué ne donne pas la propriété automatique à l'État. Absolument pas! Au contraire, la propriété du bien, M. le Président, est une notion...

M. Savoie: Ça peut venir d'un article de loi aussi...

Le Président (M. Camden): M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Filion: ...est une notion. La propriété, c'est quoi? Dans des moments de transaction, le Code civil est très clair, et confisquer un bien ne veut pas dire en être propriétaire. Ce n'est pas un automatisme. Non! Parce que vous avez même, dans le projet de loi, des endroits, des articles où on saisit des biens, le ministère saisit des biens, comme, par exemple, le véhicule dont on parlait hier; on peut saisir un véhicule, M. le Président, mais, même si on saisit le véhicule, on n'en est pas le propriétaire. Le véhicule appartient toujours au propriétaire du véhicule.

M. Savoie: On ne parle pas de saisie, on parle de confiscation, première chose. Si vous lisez l'article: «Lorsque...»

M. Chevrette: C'est un dialogue ici, ou bien non

si on peut s'exprimer?

M. Savoie: Oui, c'est comme ça, là. M. Chevrette: Oui? Parfait. M. Filion: M. le Président.

Le Président (M. Camden): M. le ministre, s'il vous plaît! Pour...

M. Filion: M. le Président, le ministre veut parler.

M. Chevrette: Si c'est ça, c'est correct. Oui, on va le faire des 2 bords. Je suis d'accord.

M. Savoie: «Lorsque la confiscation...»

Le Président (M. Camden): S'il vous plaît! M. le ministre, là, je vous invite à attendre. Un instant!

M. Gautrin: Je pense qu'il y un minimum de décorum. Vous devez instaurer le décorum.

Le Président (M. Camden): Je suis à entendre le député de Montmorency, lequel, au moment où d'autres membres se sont exprimés, a écouté avec intérêt les propos des autres membres. Là, au moment où on se parle, je suis à entendre le député de Montmorency et je vous invite à écouter ses propos. D'ailleurs, c'est pour mon information, de façon à ce que je puisse rendre une décision.

M. Filion: Merci, M. le Président.

Je continue. Effectivement, vous allez lire l'article 6, où on amène vraiment la notion de saisir un bien d'une personne, où le ministère en a la garde, l'entretien. Qu'on confisque le bien, qu'on le saisisse ne donne pas la propriété d'un bien automatiquement à l'État.

C'est dans ce sens que le paragraphe 192, 4° du règlement fait intervenir la notion de propriété du ministre, l'État propriétaire d'un bien. L'État propriétaire d'un bien, M. le Président, ce n'est pas l'État qui confisque un bien. C'est une nuance très importante. À mon point de vue à moi, la notion de propriété n'est absolument pas mise en cause dans une confiscation. On doit tout simplement rejeter l'argumentation du ministre à l'effet que le paragraphe 192, 4° ne s'applique pas, et la motion de mon collègue...

M. Chevrette: De Joliette.

M. Filion: ...de Joliette est pleinement recevable, M. le Président.

Le Président (M. Camden): M. le député de LaFontaine, brièvement, sur la forme.

M. Gobé: Bien, brièvement, M. le Président... Je pense que tous les députés ayant les mêmes droits ici, je pourrais intervenir, à la limite, 20 minutes. Alors, si, pour vous, 20 minutes, c'est bref, en effet, mais je n'irai pas jusqu'à 20 minutes.

Probablement que vous allez devoir statuer, M. le Président, que ces biens n'appartiennent pas à l'État, mais qu'ils sont en dépôt, en consignation à l'État pour la somme qui représente les droits non acquittés. S'ils ont été saisis, c'est parce que les droits qui auraient dû être acquittés au niveau fiscal ne l'ont pas été, car, s'ils l'avaient été, l'État n'avait aucune raison de les saisir. Donc, la partie qui appartient à l'État, c'est la partie taxable. C'est les taxes. Le reste du tabac n'appartient pas à l'État. Alors, on ne peut pas dire que la totalité du lot appartient à l'État. Peut-être que la partie taxable lui appartient, tant que la taxe n'a pas été payée.

M. Chevrette: M. le Président. Je peux vous aider?

Le Président (M. Camden): Est-ce que vous avez terminé? Oui. Moi, écoutez, après le député de LaFontaine, je suis disposé, je suis prêt à rendre une décision.

M. Chevrette: On pourrait faire une affaire. On pourrait en appeler à l'Assemblée: Quels sont ceux qui sont d'accord avec la recevabilité? Et puis on va trancher.

Le Président (M. Camden): Écoutez, M. le député, je pense que la présidence va rendre une décision. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? C'est terminé?

M. Chevrette: Bon, bien, dans ce cas-là, on va le laisser plaider, d'abord.

M. Gobé: En terminant, M. le Président, je pense que, dès le moment où l'État peut en disposer d'une manière ou d'une autre, il n'y a rien qui interdit la recevabilité d'une motion, qui dit: Brûle-le, enterre-le ou vends-le. Il n'y a pas d'incidence financière négative, selon moi, parce que brûler du tabac ou faire un trou, c'est dépenser de l'argent pour le faire. Le vendre, c'est récupérer de l'argent. Donc, à ce moment-là, il y a une incidence financière positive.

Une voix: Les effets sur la santé...

M. Gobé: Oui, c'est sur le fond, ça. J'aimerais ça, M. le Président, que vous le rendiez recevable, pour que nous puissions débattre sur le fond et que nous le jugions, après ça, sur le fond. N'oublions pas qu'un projet de loi avec des amendements, c'est fait pour servir une population, correspondre à des réalités et faire preuve d'imagination. Il ne faut pas seulement s'en tenir tout le temps à une rigueur juridique. Alors, je fais appel à votre grande ouverture d'esprit, qui est proverbialement

connue dans ce parlement, M. le Président. Je souhaiterais que cet amendement soit déclaré recevable, quitte à ce que, si les membres de la commission le jugent, après ça, sur le fond, non admissible ou non intégrable au projet de loi, nous le rejetions. Je pense qu'il serait intéressant que nous puissions en débattre, sur le fond.

Le Président (M. Camden): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. À la lumière des commentaires que vous m'avez adressés, moi, je suis disposé à rendre ma décision.

Alors, on doit formuler un certain nombre de questions, à savoir si l'amendement est recevable. La jurisprudence qui est établie à cet égard nous indique que, pour savoir si une motion implique des engagements de fonds publics, 4 critères doivent être pris en considération, toujours, évidemment, en relation avec l'application de l'article 192 de notre règlement, qui a été invoqué, entre autres, par le ministre, plus particulièrement à l'égard de l'alinéa 4° concernant l'aliénation des biens appartenant à l'État. À cet égard, on doit se formuler les questions suivantes.

Est-ce exécutoire? À mon sens, ça ne l'est pas. La raison qui me pousse à formuler ce commentaire est la suivante. C'est que l'amendement est un ajout au dernier alinéa de l'article 20 du projet et s'inscrit dans la poursuite. À cet égard, on indique que «le juge peut autoriser le ministre à détruire ces paquets de tabac», alors le pouvoir du ministre n'est pas exécutoire et direct à cet égard, mais, plutôt, s'inscrit dans la suite d'une décision du juge. Or, il se pourrait très bien que le juge puisse en décider autrement, moyennant qu'on lui donne la possibilité d'en décider autrement.

J'ai compris, des commentaires du ministre, que vos propos, par voie de conséquence et d'association, joints à ceux du député de Joliette, il y avait ouverture du ministre par voie réglementaire aux propos du député de LaFontaine, a-t-il dit, et à ceux du député de Joliette. À cet égard, on doit se poser aussi la question: Y a-t-il implication directe sur des dépenses d'argent? Il n'y a pas de dépense d'argent de la part de l'État à cet égard, mais c'est plutôt le fruit de dispositions.

Est-ce exprimé en termes généraux? Le libellé m'apparaît à sa face même être exprimé d'une façon générale. Il ne précise pas les organismes visés d'une façon bien précise.

Est-ce que la motion comporte des chiffres? La motion du député de Joliette ne comporte aucun chiffre mais remet plutôt cette responsabilité d'autoriser la disposition de ces biens au ministre ou au juge. Ça donne évidemment la faculté au ministre d'appliquer d'une façon assez large sa décision.

J'avais constaté que l'état d'esprit du ministre à cet égard, à l'égard du fond de la motion, c'est qu'il y avait une ouverture, par voie réglementaire, à tout le moins, nous a-t-il indiqué. Alors la décision: Je considère donc la motion comme étant recevable.

M. Chevrette: M. le Président, je ne sais pas si vout êtes avocat, mais je trouve votre jugement d'une logique implacable. Je tiens à vous le dire.

Le Président (M. Camden): Je vous remercie, M. le député de Joliette, j'en suis heureux, puisqu'il s'agit de 2 fois dans la même journée! Alors, nous allons suspendre nos travaux pendant quelques instants, de façon qu'on puisse exercer nos responsabilités.

(Suspension de la séance à 21 h 30)

(Reprise à 22 h 13)

Le Président (M. Camden): La commission reprend ses travaux sur le projet de loi 90, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur le tabac, la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que vous me permettez de demander à nos collègues de la commission d'inclure comme membre celui qui l'a été hier, une partie de la journée, puis qu'on a omis ce matin d'ajouter à notre liste, mais qui l'a été hier, c'est M. Blais, député de Masson? Sur consentement unanime, on peut ajouter un nom.

Le Président (M. Camden): Ça nécessite, M. le député de Joliette, le consentement des membres, unanime, de la commission.

M. Blais: C'est ce qu'on vous demande.

Le Président (M. Camden): Est-ce qu'il y a consentement ou non?

M. Filion: Oui, oui. Il y a consentement, M. le Président.

Des voix: Non, pas consentement.

Le Président (M. Camden): Alors, je constate qu'il n'y a pas consentement.

M. Chevrette: Tiens, P.-A. est venu faire les basses oeuvres ici. Il n'était même pas ici tout à l'heure.

M. Blais: Je veux savoir qui a dit non. Je n'ai entendu aucun non. Qui a dit non? C'est vous?

Une voix: ...

M. Chevrette: II n'était pas ici tout à l'heure, je te dis.

M. Blais: O.K.

Une voix: Toi non plus?

M. Chevrette: Bien oui, j'étais ici!

Le Président (M. Camden): Alors, j'ai constaté... S'il vous plaît, à l'ordre! J'ai constaté qu'il n'y a pas consentement. Il n'y a donc pas consentement. Alors, application du règlement.

M. Chevrette: Donc, M. le ministre et M. le député de Prévost ont dit non.

M. Blais: Le député de Prévost, je vais lui parler de sa subvention qui n'était pas méritée, à Saint-Sauveur, pour 1 000 000 $, il va s'en rappeler.

Le Président (M. Camden): S'il vous plaît! On peut se dispenser de ces commentaires désobligeants à l'égard d'un membre de la commission et du Parlement.

M. Chevrette: Donc, M. le Président, vous avez reconnu la recevabilité de la motion. Étant le parrain de cet amendement, M. le Président, appuyé, sachant pertinemment, d'autre part, que votre jugement fut contesté non officiellement en cette commission, ici, mais dans les couloirs de ce parlement, et sachant qu'on a fait un mini-caucus pour essayer d'obvier à la recevabilité, mais qu'on ne peut rien faire au moment où on se parle, je vais, pour permettre à ceux qui ont été ébranlés par les caucus de corridor... plaider sur le fond de ma motion. Je commence donc. Ça va?

Une voix: Question.

Le Président (M. Camden): Question d'ordre ou de directive?

M. Chevrette: Qu'est-ce qu'il y a?

M. Savoie: Est-ce que c'est nécessaire, M. le Président?

M. Chevrette: J'ai le droit de plaider sur ma motion, nécessaire ou pas.

Des voix: Oui.

Le Président (M. Camden): II peut effectivement exercer son droit de parole...

M. Chevrette: De 20 minutes.

Le Président (M. Camden): ...sur l'amendement qui a été jugé recevable en vertu de nos règlements, de l'article 245.

M. Blais: Vous pouvez contester même...

Le Président (M. Camden): Est-ce que vous avez d'autres commentaires à nous formuler, M. le ministre, avant, peut-être, de...

M. Chevrette: Mais plus sur la recevabilité, certain?

Le Président (M. Camden): Non, pas sur la recevabilité. Brièvement, est-ce que vous avez des commentaires ou non?

M. Savoie: 20 minutes de temps, M. le Président? M. Chevrette: Bien sûr.

Le Président (M. Camden): M. le député a droit à, effectivement, 20 minutes.

M. Filion: Moi, j'ai également droit...

M. Chevrette: En quoi vous pouvez m'empêcher de parler sur ma motion?

M. Filion: J'ai également droit à 20 minutes, M. le Président.

M. Savoie: Pardon?

Le Président (M. Camden): Est-ce que je comprends que vous souhaitez une suspension à nouveau?

M. Filion: Une suspension à nouveau. Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Bien, si vous voulez faire des caucus, pas de problème. Nous autres, on peut vous permettre tout. Nous autres, on ne s'objectera pas à rien.

M. Blais: On est très démocrates, ici. M. Gautrin: Ici.

M. Blais: Oui, ici. Ailleurs, pas toujours. M. Gautrin: Ailleurs, vous l'êtes moins.

Le Président (M. Camden): M. le député de Masson, je vous rappelle qu'il n'y a pas eu consentement, et je sais fort bien que vous êtes respectueux de l'institution et de l'application de ses règles, vous connaissant depuis déjà de nombreuses années.

M. Blais: Mais, si je ne les respectais pas, vous ne pouvez pas m'expulser, je ne suis pas membre.

Le Président (M. Camden): Je vous invite à être respectueux à l'égard de la présidence, puisque la présidence a respecté les règles. La présidence a également permis à l'Opposition de s'exprimer sur la recevabilité, et je pense qu'il n'y aucun commentaire à faire à cet égard.

M. Chevrette: C'est vrai. (Consultation)

M. Filion: M. le Président. M. Chevrette: M. le Président. M. Filion: Voulez-vous suspendre?

M. Chevrette: Non, non, mais il y a une affaire qui est sûre, M. le Président, quand même on assurerait... Le règlement est clair, la décision est rendue, il n'y a rien d'illégal. Je «peux-tu» parler sur ma motion?

Le Président (M. Camden): Je vous écoute.

M. Chevrette: Oui, mais il va falloir que vous arrêtiez de placoter avec lui.

Le Président (M. Camden): Non, non, je m'informais simplement, vous savez, de la qualité des cigarettes.

M. Chevrette: Ah! Comme ça, vous aviez peut-être le droit. Donc, je peux vous parler...

Le Président (M. Camden): Vous savez que je suis respectueux des droits des parlementaires, alors j'ai pensé...

M. Chevrette: Je vais vous parler de la qualité de la mienne.

Le Président (M. Camden): Très bien. Alors, sur la recevabilité de votre amendement et la qualité de vos cigarettes.

M. Chevrette: Non, la recevabilité, vous l'avez tranchée, M. le Président.

Le Président (M. Camden): Pas la recevabilité, c'est-à-dire sur le fond.

M. Chevrette: Sur le fond. Bon. Merci, M. le Président.

M. le Président, pour permettre à tous nos nouveaux auditeurs ici de bien comprendre ce qui se passe à cette commission, je vais d'abord décrire, dans un premier temps, ce qui s'est passé pour bien situer le débat et permettre peut-être au whip du gouvernement, entre autres, et au député de Prévost, ainsi qu'à mes 3 collègues qui se sont ajoutés, le député de Masson, le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques et la députée de Marie-Victorin... Je voudrais expliquer que, après un exposé intéressant de la part du député de LaFontaine, qui trouvait tout à fait aberrant qu'on puisse donner un droit à un juge de permettre à un ministre de brûler du tabac, alors que du tabac légal pourrait être revendu légalement et servir au bénéfice de différentes oeuvres, j'ai cru bon, comme député respectueux des parlementaires, qui ont un rôle à jouer dans ce Parlement, de convertir cette expression d'opinion, que je trouvais juste, correcte, valable, en un amendement, amendement qui se lit comme suit. C'est: ajouter, après les mots «paquets de tabac», «ou de les vendre et en distribuer le produit de la vente à des organismes de santé et de charité». Donc, on en est là.

Le président de l'assemblée, le député de Lotbinière, a savamment rendu un jugement, je crois, en 4 points, démontrant hors de tout doute que c'était irréfutable quant à la recevabilité de l'amendement. Alors, M. le Président, on en est donc à plaider sur le fond. (22 h 20)

Pourquoi ai-je d'abord présenté cet amendement? M. le Président, je trouvais aberrant que, dans un article de loi, on aille devant un juge et qu'on demande de détruire un produit qui ne rapporte rien et qui coûte des coûts. C'est des coûts, détruire des choses, c'est des sous, et c'est des gros sous même, dans certains cas, que de garder, d'entreposer et de détruire. Donc, si le juge, dans une demande faite par le ministre lui-même à part ça, donnait l'autorisation de les vendre, ces paquets de tabac, bien, ce produit-là pourrait servir à la collectivité, servir soit à des organismes qui font la promotion, par exemple, de la santé, soit à des organismes en toxicomanie, par exemple, soit à des organismes de charité. Je donnais comme exemple, au niveau de la recevabilité tantôt, entre autres, je pensais...

Des voix: ...

M. Boulerice: M. le Président, question de règlement. Même si je n'ai pas le droit, comme député, je peux assister. Si je peux assister, je peux écouter. Ça fait que faites taire ceux qui doivent écouter celui qui parle.

Le Président (M. Camden): Très bien, M. le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques, vous nous donnez l'exemple en partant, et tout le monde va écouter religieusement le député de Joliette.

M. Chevrette: Donc, je disais qu'au niveau de la recevabilité j'avais parlé, entre autres, de la société québécoise du cancer, parce que j'ai eu à vivre un événement, mon épouse a été hospitalisée, elle a dû être hébergée précisément à la société du cancer durant ses traitements en radiothérapie. Il y avait là de nombreuses personnes, dont plusieurs de l'Abitibi. Il y en avait de Val-d'Or, précisément. Il y en avait de la Côte-Nord. C'est des gens qui, quotidiennement, avaient à débourser une somme assez importante et dont les revenus étaient très faibles. Je suis intervenu personnellement auprès du ministre de la Santé pour dire au ministre de la Santé: L'État ne subventionne pas la société québécoise du cancer, et il y a des gens qui... Et on n'a pas le

choix, la radiothérapie, ça ne se donne pas dans toutes les régions du Québec; la chimiothérapie ne se donne pas dans toutes les régions du Québec. Donc, je me disais: II serait intéressant que le gouvernement subventionne une partie de l'hébergement de ces personnes, parce que c'est relié à leurs soins de santé.

Je vois le ministre qui vient du Témiscamingue, Pontiac-Témiscamingue, Pontiac. Il y avait également des gens de sa région, qui étaient à Montréal, à l'hôpital Notre-Dame, entre autres, puis qui avaient à subir ou bien 10 traitements, ou 15 traitements, ou 25 traitements en radiothérapie à raison de 5 jours-semaine. Donc, c'était sur 5 semaines. Mettez 5 semaines. Us ne peuvent pas nécessairement retourner chez eux en fin de semaine, quand ils viennent de Pontiac, avec le transport à payer, puis tout. Et c'était 15 $ par jour. Vous allez me dire que ce n'était pas faramineux, mais, pour quelqu'un qui est sur l'aide sociale, ou quelqu'un qui est au salaire minimum, ou quelqu'un qui a peu ou pas de revenus, c'est très difficile à ce moment-là de pouvoir payer cela. Bien souvent, c'était un parent, c'était un ami, ou encore des organismes du milieu, il y avait quelques ententes avec les CLSC, mais c'était un recours directement à la personne. Donc, le ministre de la Santé était très sensible à cela, et je sais qu'il est en train, si ce n'est déjà fait, je pense que c'est fait, même... La société québécoise du cancer sera subventionnée pour l'individu, pour ce qui est de ses frais de séjour durant les traitements.

C'est pour ça que, quand le député de LaFontaine parlait, je me suis dit: Mais pourquoi ne pas faire bénéficier la population ou des organismes spécifiques du genre d'un produit qui, de toute façon, serait brûlé, sans aucun revenu; au contraire, avec des charges: tu le brûles. Je me suis dit: C'est une excellente idée, une excellente idée que j'ai transformée en amendement, M. le Président. Je suis surpris qu'on cherche, même actuellement, des moyens de s'y soustraire. Personnellement, je suis surpris, parce que ça donnait quoi à l'État, ça? Ça ne lui donnait rien. Ça lui en coûtait de faire brûler ça, d'entreposer ça et de détruire ça, alors que ces revenus-là ne sont pas des revenus automatiques à l'État. L'État confisque des choses, les entrepôts se paient souvent et, bien souvent, parmi ces individus, ils ne sont même pas solvables pour payer la facture des frais d'entreposage. Donc, je me disais: Pourquoi ne pas en faire bénéficier la communauté ou les individus?

Et, M. le Président, ça n'enlève aucune prérogative au ministre, ça. Au contraire, c'est lui qui s'adresse au juge. Il se présente devant le juge et il dit: M. le juge, me donnez-vous l'autorisation de détruire les paquets de tabac ou bien de les vendre, pour ceux qui sont vendables légalement? Parce que j'ai bien spécifié cela tantôt, pour être cohérent avec le discours qu'on a tenu hier soir. Je me suis dit: Pourquoi le ministre ne demanderait pas au juge l'autorisation de le vendre, quand c'est du tabac qui, légalement, peut être revendu? Pourquoi? Purement et simplement parce qu'il peut constituer un fonds en vertu du règlement, parce que c'était «de la manière prescrite dans le règlement». Donc, il peut même se créer dans son règlement un petit comité chargé de distribuer ces choses-là à des organismes qui appliquent, qui en font la demande.

Moi, je me suis dit: Le ministre du Revenu, qui, bien sûr, est habitué dans les lois techniques... Bien sûr qu'il n'y a pas des lois plus inhumaines que les lois du ministère du Revenu. Au niveau de l'application de la législation, on peut avoir des comportements humains, il peut avoir certains pouvoirs discrétionnaires, mais des lois techniques comme celles du Revenu, tu pitonnes, tu reçois un avis, puis c'est standard, c'est automatique et ça ne tient pas compte du statut des gens. Ça, le ministre en conviendra avec moi, toutes les lois fiscales sont des lois à caractère plutôt inhumain, entre guillemets. Et tout le jnonde s'entend pour dire ça. Donc, je me suis dit: Pour une fois qu'on a l'occasion dans une loi dite répressive — parce que l'objectif de la loi, c'est bien d'empêcher la vente du tabac de façon illégale, c'est de confisquer au besoin les cargaisons d'un vendeur qui agit illégalement... Je me suis dit: Pour une fois qu'on peut faire une loi fiscale avec une connotation humaine, pourquoi ne pas le faire? J'ose espérer que le ministre va laisser de côté ses ressentiments de technocrate appli-cateur de lois techniques et qu'il va voir dans cela, dans cet amendement-là, une loi à caractère humain, au moins un article, au moins un amendement à une loi, au moins 2 lignes dans un projet de loi dont le souci ne sera pas d'appliquer bebêtement une législation technocratique, mais qui aura une dimension humaine. Et, ça, ça ne nuira pas au Parlement d'avoir dans nos lois une dimension humaine de temps en temps, puis il n'y a personne au Québec qui va s'offusquer. Je ne connais pas un groupe de la société qui pourrait s'offusquer du fait qu'on donne un mandat à un juge de nous autoriser à vendre quelque chose au profit d'organismes.

Moi, je ne me verrais pas ministre du Revenu demain matin et avoir à m'expliquer: J'avais une cargaison — je ne sais pas, moi — de 400 boîtes de cartons de cigarettes, vendables légalement, et je m'en vais devant le juge et je dis: J'ai 2 possibilités, M. le juge, je peux les brûler et je peux les vendre au profit de la société québécoise du cancer, ou des fumeurs anonymes, ou des oeuvres de charité, ou des maladies du coeur... Le juge, s'il est un tant soit peu brillant, il va dire: Bien, M. le ministre, si vous avez la possibilité de les vendre au profit de notre collectivité, vendez-les au lieu de les brûler, puisque, si vous les brûlez, ça va vous coûter de l'argent; vous allez aller à quelque part, vous allez payer un camion pour transporter ça, vous allez faire ci, vous allez faire ça, alors que l'acheteur va probablement venir les chercher où elles sont; ça ne vous coûtera rien de transport, ça ne vous coûtera rien pour les faire brûler, etc.

M. le Président, moi, je suis heureux qu'on puisse avoir déposé cet amendement-là, parce que c'est un test de la sensibilité du ministre en même temps. On va voir si le ministre a une sensibilité à la compréhension

humaine, à la misère humaine à part de ça. Et ça ne va pas à rencontre du principe de la loi, ça ne va pas à Pencontre du tout de l'esprit de nos règlements. Parce qu'on a essayé de se servir de l'article 192, 4° tantôt pour essayer de nous faire croire que le ministre, là, c'était de l'argent qu'il allait chercher, comme un impôt ou une taxe. Ce n'est pas ça du tout. C'est un bien dont il a la garde en vertu de la loi parce qu'il a été saisi par la Sûreté du Québec, et c'est un bien qu'il peut mettre, comme il a le pouvoir d'en disposer, mais avec autorisation d'un juge, comme vous l'avez si bien dit, M. le Président...

Ce n'est même pas lui qui peut en disposer, c'est le juge qui va lui dire: Brûle-les ou vends-les. On a juste ajouté une possibilité pour le juge, c'est un mandat à un juge que l'on donne en vertu d'une loi. Le juge va prendre l'article de loi, il va l'analyser et il va dire au ministre: Bien, j'ai 2 pouvoirs, M. le ministre; j'ai le pouvoir de vous les faire brûler, puis j'ai le pouvoir de vous les faire vendre. Je suppose que le ministre — un petit jugement politique, puis je lui mettrais une note sur 10, comme il fait après chacune de nos interventions — un ministre, un tant soit peu humain, qui a la possibilité ou de brûler un bien ou d'en faire bénéficier un certain groupe de notre collectivité, le ministre va faire preuve de jugement, puis il va dire: Écoutez, on a tellement de demandes dans notre société, l'État n'est plus capable de satisfaire aux besoins de la communauté dans plusieurs secteurs, donc je vais procéder devant le juge à la demande de procéder à une vente dont le produit de cette vente-là sera distribué à des organismes qui en feront bénéficier notre collectivité. (22 h 30)

C'est ça, le sens de l'amendement. Ce n'est pas plus, ce n'est pas moins. Ça n'enlève rien aux législateurs. Tout ce que ça fait, c'est que ça donne aux législateurs la possibilité de transformer une dépense. Ça donne aux législateurs, M. le Président, et au ministre en particulier — à qui je m'adresse parce que j'aimerais qu'il comprenne — cet amendement-là, la possibilité de faire de l'argent et non pas d'en dépenser. Mais on dit: Au lieu de le mettre au fonds consolidé du Québec, faites-en bénéficier des organismes du milieu. Je ne peux pas croire, je ne comprends pas la lutte qu'il aurait contre ça. J'aime bien ça, quand on discute, que ce soit rationnel. Quand une chose est irrationnelle... Je me demande pourquoi on enlèverait la possibilité à du monde de bénéficier de quelques sous, alors que ça pourrait nous en coûter, nous autres mêmes, comme collectivité, en l'occurrence, parce que je vous avoue que c'est incompréhensible.

Et, moi, M. le Président, je suis prêt à tendre une perche au ministre. Au lieu de chercher le moyen de se dérober à cet amendement-là ou d'en arriver à prolonger le débat indûment sur cet amendement, parce que j'ai l'intention de me battre pas mal fort pour qu'il passe, s'il veut raccourcir le temps de discussion, s'il y a un mot qu'il aimerait changer, ou des craintes, ça ne me dérange pas, mais pas d'entourloupette de règlement, pas prendre 2 heures pour essayer d'obvier à ce principe. Parce que c'est un principe qu'on défend et c'est des valeurs de société qu'on défend. Et c'est ça, le rôle des parlementaires. De quelque côté de la Chambre qu'on soit, c'est le rôle du parlementaire, quand on a l'occasion, l'opportunité de faire un geste qui a de l'allure, de le poser correctement, M. le Président, et de faire en sorte qu'on puisse véritablement peut-être innover dans nos législations. C'est le «fun», ça, innover dans des législations.

M. Gautrin: ...

M. Chevrette: Ça dépendait, ça, monsieur... C'est parce qu'on n'est pas toujours naïf, M. le député de Verdun. Mais je dois vous dire que, moi, personnellement, j'ai trouvé l'idée intéressante et, quand je trouve une idée intéressante et qu'elle ne contrevient en rien à des principes légaux, qu'elle est recevable en vertu de nos règlements, qu'elle est débattable correctement, je ne peux qu'inciter mes collègues des 2 côtés de la Chambre, des 2 côtés de cette table, ici, à voter en faveur de ça, M. le Président. Parce qu'on n'enlève rien aux prérogatives d'un ministre, on n'enlève rien aux prérogatives d'un gouvernement. Au contraire, on lui donne la possibilité de sauver des sous, de sauver des sous tout en en faisant, pour aider d'autres gens... Et ceux qui seraient portés à voter contre ça, j'aimerais qu'ils y pensent, M. le Président, parce que ce serait peut-être démontrer une très courte vue par rapport aux capacités de faire du Parlement.

M. Gobé: ...

Le Président (M. Camden): Excusez. Je pense que le ministre avait indiqué son intention...

M. Savoie: Non.

Le Président (M. Camden): Non? Vous ne souhaitez pas parler.

Alors, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Merci, M. le Président.

Je suis content d'avoir entendu la plaidoirie de notre collègue de Joliette qui a su faire ressortir les préoccupations humaines et pratiques des parlementaires. En effet, trop souvent, nos projets de loi sont faits par des gens qui ont une commande de répondre à une certaine problématique ou de créer un certain cadre à l'intérieur duquel les activités de la société doivent se dérouler, et il arrive que ces règlements, ou ces projets de loi, ou ces articles de loi génèrent des effets secondaires, un peu comme certains médicaments que l'on prescrit pour soigner une maladie ou un mal de tête; on se retrouve avec certains effets secondaires qu'on n'avait pas prévus ou qui, quelquefois même, sont bénéfiques. On a vu à l'occasion que, pour soigner certaines maladies, on faisait aussi avancer d'autres déficiences qu'un

individu pouvait avoir où on lui permettait d'être en meilleure santé, en meilleure forme physique pour d'autres activités.

Or, c'est un peu le cas qui nous arrive. On voit là un article de loi qui a pour but de confisquer des marchandises qui seraient entrées illégalement sur notre territoire, des marchandises pour lesquelles le droit fiscal n'aurait pas été payé. M. le Président, je trouve important que vous puissiez tout entendre parce que c'est là certainement l'un des moments où un parlementaire peut faire valoir peut-être le côté représentatif de ses citoyens. Et, M. le Président, ce tabac n'est pas interdit de vente... il n'est pas interdit de consommation, pardon, sur notre territoire, il est simplement interdit de vente parce que les personnes qui l'importent n'ont pas acquitté les droits. Il arrive dans certains cas, et on le voit pour les drogues en particulier, que, lorsqu'une marchandise est saisie et qu'elle n'a pas le droit d'être vendue sur notre territoire, qu'elle est proscrite à la consommation, elle soit détruite, et c'est normal. Le juge ordonne, à ce moment-là, une destruction. On peut voir, à l'occasion, devant les caméras, des juges qui font brûler des ballots de marihuana, ou de cocaïne, ou autre chose. On voit aussi, à l'occasion, des contrefaçons, des montres de copies...

Une voix: Des radars.

M. Gobé: ...des radars qui sont détruits parce qu'ils n'ont pas le droit d'être distribués dans le public, et c'est la raison pour laquelle ils ont été saisis et détruits. Mais, là, ce n'est pas le cas. Là, le tabac est saisi parce que les droits fiscaux ne sont pas payés. Si les droits fiscaux étaient payés à la frontière, au passage, il aurait le droit d'être vendu au Québec, il serait en légalité, parce que ce n'est pas la fabrication qu'on interdit, ce n'est pas la qualité du tabac qu'on interdit, c'est le non-paiement d'une taxe fiscale.

Ceci, c'est pour vous démontrer, M. le Président, qu'il n'est donc pas interdit ou impensable de penser que cette marchandise puisse être, sous une forme ou une autre qui reste à prescrire et à déterminer, remise sur le marché, qu'elle soit remise sous forme de cigarettes réempaquetées, de tabac en vrac, qu'elle soit vendue à des pays du tiers monde, à l'étranger, sous une autre forme, à des acheteurs qui viendraient profiter d'une aubaine. C'est une possibilité, ce n'est pas interdit. Donc, il est permis de croire qu'au lieu de détruire cette marchandise, la voir partir en fumée, pouf! dans l'atmosphère — on sait la pollution que ça fait d'ailleurs — un juge puisse autoriser le ministre, dans des conditions particulières qui restent à prescrire, à disposer de cette marchandise.

Je pense que ce serait là certainement une possibilité à donner au ministre, qui correspond à la bonne administration des fonds publics. Car, n'oublions pas, ces cigarettes, pour être saisies, pour être entreposées, comme le disait le député de Joliette, coûtent de l'argent. Donc, l'État dépense de l'argent, incidence financière négative sur le budget gouvernemental du ministère, alors que, si nous les vendions, si nous pouvions en disposer, il y aurait une incidence positive; non seulement l'État pourrait récupérer les sommes d'argent que lui a coûté l'entreposage et que lui coûte toute la procédure engagée pour statuer sur ce chargement ou sur ces stocks, mais, en plus de ça, les surplus pourraient être distribués à des organismes humanitaires reliés au tabagisme.

Alors, on parle de la société pour le cancer. On sait les sommes importantes, exorbitantes qui sont, chaque année, dépensées par les contribuables pour soigner, pour venir en aide aux gens qui souffrent du cancer du poumon dû à la cigarette. On sait que les maladies cardio-vasculaires sont un des fléaux de notre société et que le tabagisme a une influence très forte sur ces maladies cardio-vasculaires. On sait, M. le Président, que non seulement le cardio-vasculaire a des problèmes sur l'incidence financière du ministère de la Santé et des Services sociaux, mais aussi sur les familles. Lorsque quelqu'un est victime d'une maladie cardio-vasculaire, certainement il abandonne son travail, et la famille s'en trouve affectée. On sait aussi qu'il y a de la recherche. La recherche...

M. Boulerice: Sur la grossesse.

M. Gobé: Et je vais y venir, M. le député, vous avez raison. M. le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques, à juste titre, fait valoir les dangers du tabagisme sur la grossesse. Alors, on pourrait donc utiliser une partie de ces sommes pour faire de la prévention, pour expliquer aux gens des raisons de ne pas fumer, des raisons de ne pas consommer ces cigarettes-là, ce qui serait un juste retour, malgré tout, de l'argent de la fraude, car ça permettrait de l'utiliser pour des raisons humanitaires.

Il y a aussi la recherche. Le cardio-vasculaire demande de la recherche. Je vois le whip du gouvernement, qui est ici, qui en sait quelque chose, car il a pu, dans les dernières semaines ou dans les derniers mois, être partie d'un processus ou d'un procédé dans lequel il a découvert qu'en effet on manquait d'argent et qu'on avait besoin de toujours plus de fonds pour la recherche cardio-vasculaire. Et quand même on vendrait un stock de cigarettes qui rapporterait 1 000 000 $ et que ça sauverait 10 vies, M. le Président, c'est 10 vies de sauvées, alors que, si on les brûle, c'est de la pollution et c'est une mauvaise image, un mauvais message qu'on envoie à la population. (22 h 40)

Alors, moi, M. le Président, je suis d'accord à ce que nous puissions nous prononcer sur les dispositions autres que la destruction de ces stocks de cigarettes dans le projet de loi. J'ai apprécié l'ouverture de M. le député de Joliette. Il a dit: S'il y a des mots, ou 1 mot, qui ne font pas votre affaire, mais qu'on ait au moins 1 phrase ou 2 qui mentionne cette chose-là.

Moi, je suggérerais qu'à ce moment-ci nous

puissions peut-être suspendre, se réunir et regarder avec le député de Joliette, parce que son amendement part d'un bon principe et non pas... M. le ministre, vous en avez parlé cet après-midi, et on a pu constater qu'à l'occasion il pouvait y avoir un peu d'obstruction ou des mesures que vous appelez dilatoires, mais ce n'est pas le cas maintenant. Maintenant, tout le monde part d'un bon principe, et on a découvert en travaillant... et on a mentionné cet après-midi, le député de Montmorency, que c'est dans ces débats, peut-être, que la vérité sort ou que l'étincelle fait qu'entre parlementaires on accomplit notre devoir de parlementaires, notre job de parlementaires, de faire en sorte de maximiser au positif les interventions de l'État dans la vie courante de tous les citoyens. Et je pense que procéder à un amendement qui reste peut-être à réécrire, qui reste peut-être à préciser en tenant compte de la réglementation du ministère... On sait qu'on a, dans la loi des finances... du ministère du Revenu, l'article 16.3 qui, déjà, parle de ça. On sait qu'on peut donc s'y référer. On peut donc commencer à travailler avec ça.

Je souhaiterais qu'avec le consentement des autres membres de cette commission nous suspendions quelques minutes afin de nous réunir en petite séance de travail, avec le député de Joliette, le député de Montmorency, le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques et M. le ministre...

Une voix: ...

M. Gobé: ...et que nous essayions de trouver un compromis ou un consensus pour écrire un amendement qui conviendrait à tout le monde.

Le Président (M. Camden); Je comprends très bien, M. le député de LaFontaine, et je crois constater qu'il y a consentement pour qu'il y ait suspension pendant quelques instants. Il y a donc suspension de nos débats.

(Suspension de la séance à 22 h 42)

(Reprise à 22 h 51)

Le Président (M. Camden): La commission reprend ses travaux. Est-ce qu'on pourrait peut-être inviter les gens à entrer à l'intérieur et qu'on ferme la porte, s'il vous plaît?

Est-ce que, M. le député de LaFontaine, vous aviez mis un point final à vos commentaires?

M. Gobé: Oui. Bien, j'avais suggéré humblement, M. le Président, que nous puissions regarder, à la demande du député de Joliette, le texte de l'amendement qu'il avait présenté, ayant moi-même peut-être quelques changements à y faire. Je souhaiterais que nous puissions nous entendre, car ça permettrait à tout le monde de se mettre d'accord. Il y a peut-être compromis quel- que part ou entente.

M. Chevrette: J'ai lu le texte...

Le Président (M. Camden): Seulement, avant, M. le député de Joliette...

M. Gobé: Alors, à ce moment-là...

Le Président (M. Camden): C'est ce que vous nous aviez indiqué au moment de la suspension.

M. Gobé: Oui.

Le Président (M. Camden): Est-ce que vous avez du nouveau depuis la suspension?

M. Gobé: Non, parce que j'attends maintenant... J'ai fait distribuer à votre... Vous avez fait distribuer, pardon, M. le Président, par votre personnel, la copie de la proposition que j'avais, et, là, M. le député de Joliette a dû en prendre connaissance.

Le Président (M. Camden): Vous comprendrez bien, M. le député...

M. Cusano: M. le Président, vous me permettez...

Le Président (M. Camden): Non, juste un instant. Vous comprendrez bien, M. le député de LaFontaine, vous pouvez bien me faire distribuer un dépliant touristique, n'importe quoi, ça n'a pas égard, ça n'a aucun caractère officiel.

M. Gobé: C'est cela.

Le Président (M. Camden): Alors, si vous avez des choses, faites-les d'une façon officielle et formelle. Mais, moi, je ne peux pas en tenir compte si elles n'ont pas un caractère officiel et formel.

M. Cusano: M. le Président, il y a eu une suggestion de suspension à ce moment-là...

M. Gobé: C'est cela. C'est ce que j'ai cru comprendre.

M. Cusano: ...pour permettre au député de LaFontaine et au député de Joliette de s'entendre sur une formulation pour l'amendement. Alors, en ce qui me concerne, il n'est pas question, à ce moment-ci, qu'il y ait dépôt de quoi que ce soit. J'aimerais entendre du député de Joliette s'il était d'accord. Est-ce que lui et le député de LaFontaine sont arrivés à un accord avec une formulation?

M. Chevrette: Non, c'est parce que, M. le Président...

Le Président (M. Camden): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Je trouve la question intéressante. C'est parce que le ministre m'a fait lire l'article 16.3 de la Loi sur le ministère du Revenu, et je l'en remercie grandement, parce que, tel que libellé, l'article 16.3 de la Loi sur le ministère du Revenu n'autorise aucune vente, c'est-à-dire pour en dispenser par la suite au niveau de l'argent ou du produit. L'article 16.3 — et j'aimerais que le ministre nous le lise s'il veut bien, ou me le passer pour que je le lise — dit ceci: C'est que le ministre procède à la vente aux enchères après qu'il ait obtenu l'autorisation de vendre, mais c'est le produit non vendu qu'il peut donner à des organismes de bienfaisance. Alors que, nous, le principe qu'on donne ici, dans la loi, avec l'amendement que j'ai présenté, c'est de vendre et d'en utiliser les produits de vente pour les fins d'organismes. C'est très différent. Ce n'est pas le résidu des produits qui n'ont pas pris acheteur, qui n'ont pas pris preneur. Ce serait une contre-proposition à ma proposition. On n'aurait aucun besoin d'amendement à ce moment-là. Ce serait, à toutes fins pratiques, de retirer le mien, puisque, en vertu de l'article 16.3 de la Loi sur le ministère du Revenu, il y a ce pouvoir de portée générale, dans l'article 16.3, de vendre des produits confisqués. Mais, s'il n'y a pas preneur... C'est-à-dire que, quand il les vend, le produit de ces ventes s'en va au fonds consolidé. Quand il n'y a pas preneur, là, il a le droit de donner ces biens-là à des organismes de bienfaisance.

Ce n'est pas ça qu'on dit, nous. Nous, on dit: Ce tabac-là, au lieu de le brûler — parce que tu avais seulement la notion de brûler, puis ça coûtait des sous à l'État — puis que ça t'en coûte pour le faire brûler, vends-le puis donne-le à des organismes de charité ou de santé, à des organismes de santé. C'est nettement différent par rapport à l'article 16.3 de la Loi sur le ministère du Revenu, vous en conviendrez. Donc, à mon point de vue, je ne comprends pas que le ministre s'objecte à avoir un pouvoir. Il va bâtir son règlement. Je ne comprends pas les réticences, c'est lui qui va faire le règlement, c'est lui qui va publier son règlement, c'est lui qui va définir les modalités. C'est le gouvernement qui va définir toute la procédure. C'est donc bien épeurant et c'est donc bien affolant que de disposer de biens en fonction de la communauté! Je ne comprends pas. À moins qu'on ait le désir caché de vouloir accepter la notion de vente, mais en fonction de l'article 13, ça, ça veut dire non pas en fonction des objectifs dont on parlait, mais en fonction du fonds consolidé.

Il ne faut pas nous prendre pour des matelots en goguette, hein. Moi, à cette heure-là, même à cette heure-là, je suis encore assez lucide pour être capable de comprendre un article de loi.

M. Savoie: Ha, ha, ha! Ça ne paraît pas. Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Bien, ça ne paraît pas... Prouvez-moi donc le contraire. Je vous mets au défi, moi.

M. Savoie: Est-ce qu'on...

Le Président (M. Camden): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, je pense que, dans le débat, à l'heure actuelle, on est arrivé de la manière suivante. Initialement, on était en train de brûler les cigarettes. Est arrivée une idée supplémentaire qui était celle de la vente en profit et au profit des oeuvres de bienséance...

Des voix: De bienfaisance. M. Gautrin: ...de bienfaisance.

M. Boulerice: La bienséance, c'est ce qui manque au ministre.

Le Président (M. Camden): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Gautrin: Non. Là, M. le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques, ça, je ne pense pas ça.

Le Président (M. Camden): Un instant! Là, M. le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques, je pense que ça outrepasse largement les règlements et l'application de l'article 35.

M. Boulerice: Appelez les constables!

Le Président (M. Camden): Ce sont des commentaires qui...

M. Gautrin: Mais je voudrais quand même poursuivre, M. le Président.

Le Président (M. Camden): L'article 35, et vous n'avez pas à formuler de commentaires péjoratifs à l'égard de quiconque est membre de la commission. D'ailleurs, vous n'avez pas la parole, puisque vous n'êtes pas membre de la commission. Alors, je vous prie, s'il vous plaît, de garder vos commentaires pour vous-même.

M. Gautrin: M. le Président, je pense que le député de Joliette et le député de LaFontaine avaient, dans leurs remarques, soulevé une autre manière de disposer de ces biens saisis. On pourrait facilement imaginer le troisième et le quatrième. Je me demande si on va prévoir ici, dans la loi, toutes les possibilités par lesquelles le ministre pourrait disposer des cigarettes saisies.

Si j'ai bien compris, le papier qui a été déposé, mais pas vraiment déposé, parce qu'il ne pouvait pas le

déposer, il ne l'a pas déposé encore, mais qui a circulé parmi nous, venant du député de LaFontaine, c'était de dire que le juge peut autoriser le ministre à disposer de ces paquets de tabac de la manière prescrite par règlement. Donc, à ce moment-là, les règlements qui vont être édictés par le ministre pourront voir les différentes manières dont on pourra disposer des paquets de tabac saisis. Je pense qu'il y a là une extension potentielle de l'amendement qui a été proposé par le député de Joliette, mais correspondant aux remarques du député de LaFontaine.

Je comprends que le député de Joliette peut s'objecter, si j'ai bien compris. Dans la période de suspension, est-ce que vous vous êtes mis d'accord ou pas? Il n'y a pas eu accord. Bon. Alors, l'objection du député de Joliette, c'est de dire: Attention, les règlements, on peut mettre n'importe quoi dans les règlements et on ne le sait pas ce qu'il y a dans les règlements. Je crois qu'ici, de ce côté-ci, on a quand même un engagement, bien sûr, verbal, devant la commission, mais qui est quand même important, de la part du ministre; dans les règlements qu'il va édicter, la possibilité, qui a été émise par le député de Joliette, à savoir que la vente puisse se faire au profit des oeuvres de bienfaisance, va être incluse dans les règlements, mais d'autres possibilités pourraient être incluses dans les règlements. M. le Président, je ne sais pas, je voudrais avoir une directive.

Pour avoir cette vision plus large qui a été lue tout à l'heure par le député de LaFontaine, qu'est-ce que nous devons faire? S'il n'y a pas eu accord, il faudrait donc qu'on batte la proposition du député de Joliette pour pouvoir ramener, à ce moment-là, l'amendement que le député de LaFontaine veut faire. C'est bien la directive que vous nous suggérez?

Le Président (M. Camden): C'est bien une des avenues que vous pouvez emprunter, M. le député.

M. Gautrin: Bon. Alors, M. le Président, je comprends, c'est une possibilité, puisqu'il n'y a pas eu accord entre les 2 parties. C'est bien ce que vous nous suggérez comme voie actuellement?

Le Président (M. Camden): Moi, je ne vous suggère rien, je vous indique seulement que c'est une des avenues que vous pouvez emprunter.

M. Gautrin: Bon. Je vous remercie, M. le Président, de cette réponse qui me guide quant au vote que je vais avoir à exprimer tout à l'heure.

Une voix: ...

M. Gobé: On n'a pas entendu le député de Joliette sur ça. Peut-être qu'il a des choses à nous dire. Je pense qu'on devrait vider le point avant de passer à des décisions. Je pense que tout le monde est de bonne foi autour de cette table.

Une voix: On n'a pas entendu le ministre, non plus.

M. Gobé: Et le ministre aussi. Au niveau des règlements...

M. Chevrette: II est contre tout ce qui bouge... (23 heures)

M. Gobé: ...qu'est-ce qui serait dedans et... En tout cas, je pense qu'il y aurait peut-être moyen de dialoguer un peu. Une commission parlementaire, c'est pour parlementer, alors, parlementons.

M. Gautrin: Dans les limites du règlement.

M. Gobé: Oui, oui, toujours en tenant compte du règlement et de l'efficacité. Après ça, ça permet d'aller peut-être plus vite dans le projet de loi, puis de rattraper le temps perdu.

Le Président (M. Camden): M. le député de LaFontaine, je comprends, là, que le ministre souhaite, je pense, s'adresser aux membres de la commission. M. le ministre.

M. Savoie: Moi, je pense qu'il faudrait rattraper, un peu, le temps qu'on a perdu.

Une voix: Comment, qu'on a perdu?

M. Savoie: On a beaucoup discuté sur ce point-là, et il y a beaucoup d'interventions qui, finalement, là, n'étaient pas nécessaires. Ce qu'on peut faire, c'est voter sur la proposition du député de Joliette, et, si jamais l'amendement est battu, on pourrait arriver avec la proposition que vous semblez présenter, M. le député de LaFontaine, et voter là-dessus.

Le Président (M. Camden): Est-ce que ça met fin à vos commentaires, M. le ministre?

M. Savoie: Oui.

Le Président (M. Camden): Est-ce que je dois comprendre que les membres sont prêts à voter sur cet amendement?

M. Chevrette: Non.

Le Président (M. Camden): Non? Alors...

M. Chevrette: II me reste 2 minutes, moi, puis, lui, il lui reste 20 minutes.

Le Président (M. Camden): Alors, très bien. Est-ce que, M. le député de Joliette, vous souhaitez vous faire entendre immédiatement ou...

M. Chevrette: Vas-y.

Le Président (M. Camden): Non? M. le député de Montmorency.

M. Filion: Je vais y aller, M. le Président. D'abord, je pense, M. le Président, que le débat actuellement est très constructif, et tout ce débat-là amène une nouvelle vision au projet de loi, qui est à la fois...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Filion: Oui, une nouvelle vision, c'est vrai, une nouvelle vision rafraîchissante, d'ailleurs. Et l'idée est venue même du député de LaFontaine, M. le Président, où il mentionnait effectivement qu'on pourrait chercher à capitaliser des fonds dans toutes ces mesures répressives que l'on va imposer à une population pour l'application d'une loi pour mettre fin à la contrebande et réutiliser ces fonds-là justement pour sensibiliser et aider le domaine de la santé.

M. le Président, moi, je trouve ça très rafraîchissant, rafraîchissant parce que tout le débat de la contrebande actuellement a été dénoncé largement par tous ceux qui font partie d'une association, M. le Président, de non-fumeurs, qui demandent effectivement à ce qu'on sensibilise la population, que l'on aide le monde de la santé qui est drôlement perturbé par toute cette consommation, le tabagisme. Et on sait pertinemment qu'actuellement on perçoit des taxes au Québec, on en perçoit des taxes largement, on a perçu beaucoup, on a surtaxé et on n'a jamais vraiment réutilisé ces fonds-là d'aucune façon pour sensibiliser le monde aux conséquences néfastes qu'occasionne le tabac.

Là, M. le Président, on cherche à amener une vision nouvelle, une vision nouvelle à travers la législation qui nous permet effectivement de laisser entrevoir une façon de voir et de traiter le monde de la santé via une perception fiscale, via effectivement même une confiscation de produits du tabac. Et je pense que, comme législateur, il devient... Moi, quand j'écoute le ministre du Revenu me dire qu'on perd notre temps, M. le Président, là, je vous avoue que je me sens vraiment agressé, parce que, s'il y a quelque chose d'intéressant qui a été amené par le député de LaFontaine, c'est bien cette vision-là où on cherche à récupérer des deniers publics, M. le Président, pour justement enfin commencer à aider le monde de la santé et à sensibiliser une population aux conséquences néfastes qu'a le tabac au niveau de la santé.

La santé a un coût astronomique. La santé actuellement coûte une fortune, et tout le monde est d'accord pour dire que la problématique du tabac occasionne un coût social incroyable. Il ne s'agit pas là d'une mesure dilatoire. Au contraire, il s'agit là justement de rajouter la possibilité de récupérer au lieu de brûler un produit, de récupérer un produit et de le monayer, ce produit-là, à travers une transaction bona fide, une transaction de bonne foi, une transaction qui va permettre de récupérer des deniers publics enfin pour servir au monde de la santé.

Jusqu'à maintenant, on perçoit des taxes pour payer des toits de stade, M. le Président, et j'ai l'impression qu'on taxe d'une façon inéquitable le monde du tabac à des fins autres que les coûts réellement encourus et reliés au tabagisme. Et je pense qu'à ce moment-là...

Une voix: ...

M. Filion: Oui, mais il faut les faire les débats aussi. Et c'est là que ça devient intéressant de discuter, et le député de LaFontaine a toutes les raisons de soulever actuellement un débat où on ouvre une porte. On ouvre une porte à percevoir des deniers publics qui vont servir à d'autres fins que celle d'aider le monde qui est touché par le tabagisme, qui est le monde de la santé.

Moi, je pense qu'on est en train d'ouvrir, effectivement, une philosophie à l'intérieur du projet de loi, ce qu'on avait jusqu'à maintenant vraiment omis de faire. Et, moi, j'ai l'impression que, actuellement, si on est d'accord... Et c'est là, d'ailleurs, que je trouve, un peu, le discours du ministre incohérent, sur le fond. Il est d'accord à l'intégrer au règlement, sur le fond, alors pourquoi s'objecte-t-il à ce que, dans la loi...

Une voix: ...

M. Filion: Non, non, mais soyons honnêtes quelque peu sur le plan intellectuel.

M. Gautrin: Ha, ha, ha!

M. Filion: Non, mais, écoutez, soyons transparents, soyons clairs avec une vision aussi humaine que celle de la santé au niveau du tabagisme. Alors, qu'est-ce qui peut, comme parlementaires, nous empêcher d'être clairs, transparents et vraiment de donner une nouvelle vision? Non, mais c'est vrai! C'est un amendement qui a l'air anodin, mais un amendement qui est plein de sens, et surtout avec une visée humanitaire, une visée humanitaire que, jusqu'à maintenant, la taxation du monde du tabac n'a jamaie eue, M. le Président. Le tabac a toujours été une taxe qui a servi à une multitude de fins autres que de financer réellement les coûts sociaux entraînés par le tabagisme.

M. le Président, je pense que l'amendement, qui a été d'ailleurs amené par mon collègue de Joliette, est un amendement qui a toute sa place dans le présent débat et je ne pense surtout pas, comme le fait le ministre actuellement, je suis loin de penser que ce débat n'a pas sa place. Au contraire, il a toute sa place, et je suis un peu surpris de voir qu'on cherche encore une fois à se camoufler derrière une espèce de réglementation que l'on ne connaît même pas, des règlements qui ne sont même pas prêts, des règlements qui sont à venir, des règlements où, à toutes fins pratiques, on n'est même pas capables de mettre le jalon de l'objectif visé.

Un règlement, généralement, est conçu en fonction d'une idée de législateur, en fonction d'un objectif de législateur, mais faut-il le mettre, l'obiectif du

législateur. Et l'objectif du législateur — je pense à l'ouverture faite par le député de LaFontaine — c'est vraiment de commencer à penser à capitaliser et à monnayer ces produits-là pour servir au monde de la santé. Mais il faut l'indiquer dans le projet de loi, si on veut qu'une réglementation soit faite en fonction de l'objectif poursuivi par le législateur. Si on ne l'indique pas, qu'on veut récupérer des deniers publics pour le monde de la santé dans le texte de loi, comment voulez-vous que les règlements puissent être faits en fonction de l'objectif du législateur? Mais faut-il le mettre d'abord, l'objectif du législateur, et, par la suite, les règlements suivront dans la mécanique, dans la cuisine légale.

Moi, je pense que, actuellement, on fait une espèce de faux débat. On veut dévier le débat. L'idée lancée par... Et, d'ailleurs, on l'a immédiatement appuyée sans réserve parce que l'idée est très intéressante, et il y a une ouverture traditionnelle et une collaboration toujours constructive de l'Opposition. On a immédiatement abondé dans le sens du député de LaFontaine parce que je crois, effectivement, qu'il y a une ouverture que l'on doit exploiter et qu'on est justement en train de légiférer des mesures, des pénalités répressives, dans le monde, la population. Mais au moins donnons-y un angle humanitaire, donnons-y un angle où, effectivement, ce que l'on recherche, au fond, c'est de récupérer le maximum de ces opérations répressives, de les monnayer et de réutiliser les fonds publics justement pour soulager et aider au soulagement des problèmes sociaux que l'on retrouve dans le monde de la santé. (23 h 10)

Je pense que, M. le Président, le temps que l'on passe actuellement, ce sont des minutes intéressantes et précieuses et que chaque parlementaire doit comprendre de l'opération qu'il faut d'abord écrire l'objectif dans le texte de loi. Si c'est vrai qu'on veut récupérer les deniers publics pour le monde de la santé, il faut le dire dans le texte de loi. Les règlements ne sont jamais faits autrement que par l'objectif visé dans un texte de loi. Et, si on spécifie que les sommes doivent être récupérées pour le monde de la santé, il faut l'écrire dans le texte de loi. Si on ne l'écrit pas dans le texte de loi, les règlements ne pourront jamais être faits en fonction de ce qui n'est pas écrit, ils seront faits en fonction de ce qui est écrit.

Alors, moi, je pense, M. le Président, que l'espèce de consensus qui n'en était pas un de ramener le débat au niveau uniquement d'une législation sous forme de règlement n'est vraiment pas pertinent, parce qu'il faut d'abord mettre la base dans le texte de loi, c'est-à-dire l'orientation que l'on veut donner véritablement, un nouvel angle humanitaire, un nouvel angle où ce qu'on cherche à faire, c'est de récupérer les deniers publics, enfin. Je dis bien enfin, M. le Président, parce que, jusqu'à maintenant, ça n'a jamais été le cas. On n'a toujours récupéré les deniers publics avec le tabac que pour servir à d'autres fins que de financer vraiment les coûts de la santé. Et là, à travers le redressement de cette cacophonie qu'est devenue la contrebande du tabac, enfin un député se lève et dit: Oui, mais là il faudrait peut-être commencer à mettre de l'ordre aussi au niveau des concepts que l'on devrait rechercher avec ces taxes au niveau du tabac et commencer à aider le monde de la santé, quelque chose qui... Au fond, qui peut être contre la vertu? C'est quelque chose qui est très louable et très défendable, M. le Président, et, moi, je pense que le député de LaFontaine a tout notre appui dans cette démarche.

Je trouve que le ministre devrait examiner de plus près... Tout à l'heure, il a parlé d'abord très peu. On a vu que le ministre du Revenu a parlé très peu. En tout cas, pour lui, le monde de la santé, ce n'est pas important. Ce sont des mesures répressives qui comptent. M. le Président, je pense qu'il va de soi que les deux vont de pair. Quand on veut taxer et surtaxer le monde du tabac, comme on le fait présentement, je pense qu'il faut en même temps être conscient qu'il y a des dangers à la consommation du tabac et que le monde de la santé est très touché.

Alors, que l'on me parle d'intégrer tout cela à des règlements, M. le Président, c'est un peu une espèce de forme de foutaise. Les règlements sont toujours faits en fonction d'un article, et d'un objectif, et d'une pensée législative.

Une voix: Êtes-vous sûr de ça?

M. Filion: Ah! ils doivent être faits en fonction de ça. Et, si vous ne mettez pas, à travers l'article de loi, vraiment l'orientation que vous voulez donner aux fonds publics, c'est-à-dire la récupération de deniers publics et non pas, comme disait mon collègue de Joliette, qu'ils soient utilisés à consolider ou être dans le fonds consolidé des finances publiques, bien, il faut le dire. Mais, si vous croyez qu'on doive fermer la porte à nouveau... Parce que je pense que l'idée de commencer à penser à aider le monde de la santé, il faudrait vraiment à quelque part qu'il y ait un premier jalon de posé. Et on a la chance de le faire à travers les règles répressives qui, je pense, seraient beaucoup plus intéressantes sur le plan humanitaire. Parce que, de la répression, en soi, ce n'est rien d'intéressant pour une société, mais, à travers des règles répressives, si on pouvait au moins montrer qu'il y a une espèce d'humanisme au niveau d'aider le monde de la santé, je pense que ça permettrait de mieux digérer toutes ces mesures difficilement acceptables actuellement pour la population en général.

Alors, M. le Président, moi, je pense que la proposition, d'ailleurs, qui a été acceptée et que l'on débat, l'amendement sur le fond est recevable, et non seulement il est recevable, mais il devrait également avoir l'assentiment, autour de cette table, des députés, l'assentiment pour que l'on puisse enfin donner un nouvel angle à notre législation fiscale qui, au moment où on se parle, n'a qu'un angle répressif. Et, M. le Président, je pense qu'on ne le dira jamais assez, si tous les parlementaires veulent vraiment discuter de cette nouvelle philosophie, je pense qu'il faut les entendre.

C'est le député de Prévost, je crois, qui n'a pas encore donné sa version, mais je pense qu'il devrait, M. le Président, parce qu'il va avoir à voter. Et, quand même, de vouloir commencer à discuter d'une ouverture...

Le Président (M. Camden): M. le député de Montmorency, je vous indique que ça frise le dépassement. En vertu de l'article 35, vous ne pouvez pas attaquer la conduite du député s'il juge...

M. Filion: Non, M. le Président, surtout pas sa conduite.

Le Président (M. Camden): II ne lui est pas nécessaire de s'exprimer sur le sujet.

M. Filion: C'est que je souhaite qu'il participe au débat, M. le Président. C'est un souhait parce que je pense que c'est un débat important, un débat de fond, un débat qui donne une nouvelle vision et un débat qui, je pense, plus on en discute, plus on échange, plus on parlemente, comme disait le député de LaFontaine, plus on est en mesure de se faire un jugement de valeur qui puisse nous permettre enfin de donner une nouvelle vision à la taxation du tabac.

M. le Président, vous savez, toutes les mesures qu'on a vues jusqu'à maintenant, ce sont des mesures qui, à toutes fins pratiques, vont donner des pénalités de 200 $ à 1000 $ pour le consommateur qui se fait prendre, qui vont donner des pénalités de 2000 $ jusqu'à 500 000 $ pour le transporteur et le vendeur de tabac. Et là on arrive à une mesure où on dit oui, si le juge pouvait autoriser la vente du tabac confisqué, de tabac qui, à toutes fins pratiques, n'est pas considéré comme illégal sur le plan de la législation que l'on étudie et que ça donnerait des deniers publics, M. le Président, avec tous les déficits qu'on a actuellement, pourquoi se prive-t-on de ces nouvelles recettes? C'est quoi qui justifie que l'on brûle des recettes que l'on pourrait réaliser? M. le Président, écoutez, il faut être sérieux, aussi, quelque part. Il faut avoir un discours cohérent du côté... Il n'y a pas juste le gel de la fonction publique qui peut procurer des économies, hein? Il y a également la récupération de tabac. Au lieu de le brûler, on pourrait effectivement transiger et récupérer, et les deniers publics serviraient également à équilibrer quelque part.

Une voix: II parle une fois par semaine du gel de la fonction publique.

M. Filion: Non. J'étais au niveau de la politique, M. le Président, de ce gouvernement, au niveau de leur cohérence des équilibres budgétaires, tout simplement. Il y a plusieurs moyens d'arriver à réduire des dépenses ou à augmenter des revenus. On vient de trouver une façon d'augmenter des revenus, dans une cause humanitaire. Est-ce que c'est parce que c'est la cause humanitaire qui vous chicote? Voyons donc, M. le Président! La cause humanitaire a toute sa place, mais pleinement sa place, M. le Président. Justement, ça devient une nouvelle vision et une nouvelle orientation que l'on ne doit pas rejeter de cette façon-là. Au contraire, on doit l'appuyer. Et je pense qu'on a tous une responsabilité, quelque part, d'appuyer ce genre d'orientation là. Il faut laisser aller les conditions, M. le Président... Alors, je vais quand même... Est-ce qu'il me reste plusieurs minutes, M. le Président? Je voudrais juste m'en assurer parce que...

Le Président (M. Camden): Près de 4 minutes.

M. Filion: C'est qu'on trouve important le temps alloué à chaque député pour discuter de cette orientation-là. Et je pense qu'on n'en aura jamais assez de temps pour vous convaincre. Tout ce qu'on souhaite, au fond, c'est que l'on puisse procéder enfin, enfin parce qu'on est rendus au 20e article, et, pour une fois qu'on peut adopter un amendement qui a une vision humanitaire dans ce projet de loi là, je pense qu'on ne peut pas laisser passer la chance, on ne peut pas la laisser passer, et on se doit, tous ensemble, de reconnaître qu'une vision comme celle-là a sa place dans notre société et que, enfin, on va pouvoir commencer à bâtir autour de ce concept-là, si minime soit-il, parce que ça devient une question de principe, tout cela. Ce n'est quand même pas des milliards qu'on va récupérer, il ne faut pas non plus se leurrer. La police du tabac, on en a seulement 60 polices. Je ne pense pas que, demain matin, on va commencer à confisquer un tabac en quantités industrielles, là n'est pas le débat. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Filion: Mais quand même...

M. Gautrin: II faut croire que c'est la base de la relance économique du Québec.

M. Filion: C'est une base de principe qui nous permet...

M. Chevrette: Quand il s'agit de l'ouverture des commerces, c'est vous, ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

(23 h 20)

M. Filion: ...enfin d'espérer quelque chose de meilleur.

Alors, je pense que, effectivement, M. le Président — c'est très sérieux à travers tout ça — c'est un principe de capitaliser et d'aller chercher des recettes additionnelles à travers un processus dont on n'a pas le moyen de se priver pour mettre en place un nouveau concept. Et peut-être que ce nouveau concept qu'on est en train de discuter et que l'on peut adopter sera le départ de quelque chose de nouveau. Et je souhaite que ce soit le départ de quelque chose de nouveau à travers une nouvelle philosophie de gestion des deniers publics

où, lorsque l'on a un fléau social comme le tabagisme, qui nuit considérablement à la santé et qui coûte une fortune, qui dépasse le milliard, on commence à penser à allier santé et tabagisme ensemble quand on parle de taxation, et on a une chance de le faire. Mais faut-il l'indiquer dans le projet de loi, si on veut commencer quelque part à mettre des vrais principes puis des vrais jalons intéressants qui vont provoquer une équité fiscale et une dimension humaine enfin, M. le Président. C'étaient les principaux commentaires que j'avais sur cet amendement, M. le Président.

Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le député de Montmorency. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Moi, je trouve ça de valeur parce que les députés de bonne foi qui ont amené la discussion sur ce thème-là vont s'en faire passer une petite vite. Je vais le démontrer très longuement lorsque, malheureusement, ils auront voté contre, parce que c'est ce qui se dessine à la demande du ministre, à la demande du whip, à la demande de M. Lemieux du cabinet du premier ministre, à la demande d'à peu près tout le monde. J'ai bien senti qu'on «s'effervesçait» autour de cette table pour tordre les bras et inviter les députés à voter contre. Bien, vous allez vous en faire passer une vite, puis je vais vous le démontrer, et je vais vous donner l'occasion de prouver que c'est une vite que vous vous faites passer, à part ça.

Parce que, quand le ministre a eu, je pense, l'honnêteté intellectuelle de dire qu'il voulait en disposer conformément à 16.3 de la loi du ministère du Revenu, le ministre aurait pu vous l'expliquer. L'article 16.3 du ministère du Revenu dit très clairement que ce n'est pas une vente pour redistribuer. Ce n'est que le produit non vendu ou pas pris aux enchères, justement, qui lui est donné. Est-ce que vous allez donner des paquets de cigarettes aux oeuvres de bienfaisance? Ce n'est pas ça qu'on dit, nous autres, depuis le début de la soirée, puis c'est à ça qu'il veut en arriver. L'amendement qu'on vous a fricoté, là, je vais vous le prouvez et je vais donner l'occasion, à part ça, au ministre de démontrer clairement que c'est ce qu'il veut, 16.3. Mais soyez sans crainte, l'amendement est même prévu, le sous-amendement est même prévu à votre amendement pour démasquer le ministre dans ses volontés. Elle est «typée» à part de ça.

Le Président (M. Camden): M. le député de Montmorency.

M. Filion: Rapidement, M. le Président, il me reste 1 minute. Je pense que, juste avant qu'on procède, effectivement, à un vote sur cet amendement, je veux simplement, effectivement, souligner à nouveau l'importance de ce vote-là qui va permettre, effectivement, de commencer à entrevoir une nouvelle vision à travers la fiscalité du tabac. Je pense que, même si ça apparaît anodin ce qu'on est en train de discuter, M. le Président, c'a toute son importance, et je souhaite que les députés autour de cette table puissent adopter cet amendement, qui va donner une nouvelle vision à notre société.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Camden): Est-ce que les députés sont maintenant prêts...

M. Chevrette: Vote nominal.

Le Président (M. Camden): Vote nominal. Alors, Mme la secrétaire, si vous voulez appeler les députés.

La Secrétaire: M. Chevrette (Joliette)?

M. Chevrette: Vous savez toujours bien que je suis pour, c'est moi qui l'ai proposé.

La Secrétaire: M. Filion (Montmorency)?

M. Filion: Pour.

La Secrétaire: M. Savoie (Abitibi-Est)?

M. Savoie: Contre.

La Secrétaire: M. Gautrin (Verdun)?

M. Gautrin: Contre.

La Secrétaire: M. Gobé (LaFontaine)?

M. Gobé: Abstention.

La Secrétaire: M. Forget (Prévost)?

M. Forget: Contre.

La Secrétaire: M. Camden (Lotbinière)?

Le Président (M. Camden): Abstention, comme président.

Alors, 2 pour, 3 contre, 2 abstentions. L'amendement est rejeté. Alors, nous revenons donc à l'étude de l'article 20.

M. Gobé: M. le Président, est-ce que je pourrais avoir la parole, s'il vous plaît?

Le Président (M. Camden): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Suite au débat qui vient d'avoir lieu et partageant pour un certain point, au moins sur le fond, peut-être pas sur la manière, la pensée du député de Joliette, j'aimerais proposer à mon tour un amendement,

que j'aimerais vous soumettre, et j'aimerais que vous statuiez sur sa recevabilité.

Alors, il se lirait de la façon suivante: Modifier le sixième alinéa de l'article 15.1 édicté par l'article 20 de la façon suivante: «Lorsque la confiscation de paquets de tabac est ordonnée, le juge peut autoriser le ministre à disposer de ces paquets de tabac de la manière prescrite par règlement.» «Par le règlement», ou «par règlement», ou «édictée par le ministre»? Je ne sais pas quelle est la formule juridique exacte qui est en cause, là.

M. Savoie: «Prescrite par règlement». M. Gobé: «Prescrite par règlement», point. M. Gautrin: Point.

M. Gobé: C'est, à ce stade-ci, l'amendement que je présente. J'aimerais savoir maintenant s'il est receva-ble, M. le Président.

Le Président (M. Camden): Je comprends bien, M. le député de LaFontaine, ce que vous apportez de modification au dernier alinéa de l'article 20. C'est que vous changez le mot «détruire» par «disposer» et vous ajoutez «de» après «disposer». C'est la seule modification que vous apportez, c'est ça? Si je comprends, c'est la nature de votre amendement? C'est bien cela?

M. Gobé: Oui.

Le Président (M. Camden): Très bien. Est-ce qu'il y a quelques commentaires à faire, brièvement, sur la recevabilité?

M. Gobé: Alors, je pense qu'il est recevable parce qu'il est dans l'ordre logique de cet article. On parle, dans l'article original, de «détruire». Le mot «disposer» permet non seulement de confirmer cette possibilité, mais aussi élargit la notion de disposition et permet une interprétation plus large, donc, par la suite, correspond à la volonté qui est de se débarrasser du stock, de la marchandise saisie. Donc, ça ne va pas à rencontre de l'article, il n'y a pas d'incidence financière négative. De toute façon, on dispose, alors, que l'on vende ou que l'on fasse brûler... Il n'y a pas non plus de contre-indication qui changerait le sens de l'article sur le fond pour dire que l'article serait dénaturé. Alors, je ne vois pas de problème à ce niveau-là pour le rendre irrecevable sur sa forme.

Le Président (M. Camden): M. le ministre, sur la recevabilité.

M. Savoie: Oui, M. le Président. Alors, je veux que ça soit très clair que la motion, officiellement, n'est pas recevable à mes yeux, dans le sens qu'il y a une erreur, parce qu'il est très clair que ça va à rencontre de l'article 192, 4°, de façon formelle. On a des dispo- sitions très claires qui disent qu'un bien confisqué est un bien qui appartient à l'État, alors, en conséquence, c'est une motion qui doit être présentée par le ministre. Compte tenu, M. le Président, que ça provient du député de LaFontaine, je la fais mienne, sa motion, et, en conséquence, je renonce à l'opposition de recevabilité sur cette motion et je déclare que je suis satisfait de l'orientation de recevoir cette motion.

Le Président (M. Camden): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires?

M. Chevrette: C'est quoi, ça? Qu'est-ce que ça veut dire, ça? Vous dites qu'elle est irrecevable...

M. Filion: On n'a rien compris.

M. Chevrette: ...et vous dites que vous la faites vôtre.

M. Savoie: C'est ça. Je dis que...

M. Chevrette: Ça mange quoi en hiver, ça, dire que tu es contre après qu'une proposition est inscrite?

Une voix: Je peux l'expliquer.

M. Savoie: Non, c'est correct, je vais l'expliquer, là. C'est beau, là, merci.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Savoie: C'est que 192, 4° dit qu'une motion portant sur la vente des biens appartenant à l'État c'est une motion qui ne peut être présentée que par un ministre.

M. Chevrette: Qu'est-ce que je t'avais dit? On en a une preuve, là.

M. Savoie: Je vais terminer, là. On a des dispositions très claires dans la loi, par exemple, l'article 308 dans le Code de procédure pénal, qui dit qu'un bien confisqué est un bien qui appartient à l'État. Mais, compte tenu du fait que c'est une proposition du député de LaFontaine, et que je comprends bien le sens de son intervention, et que, évidemment, on est intéressé par son orientation, on va renoncer à la non-recevabilité de la motion et...

M. Chevrette: En soi.

M. Savoie: Pardon?

M. Chevrette: Tu dis qu'elle est recevable.

M. Savoie: Oui, je dis qu'elle est recevable et, en conséquence, je l'accepte, mais je ne voudrais pas laisser entendre que je suis d'accord avec la motion. La

motion en tant que telle, per se, est recevable.

M. Chevrette: Écoutez, de deux choses l'une, M. le Président. Je m'excuse là, mais, écoutez, vous ne me passerez pas un petit Québec ni un petit sapin, j'ai vu neiger un petit peu, là. Et, si tout ça est «gamiqué», là, il va se passer du poil dans la cabane, et tu vas mettre un bâillon, et tu vas mettre tout ce que tu voudras, mais ce n'est pas vrai que, à cette heure-ci, le ministre...

M. Savoie: Va faire quoi, là?

M. Chevrette: ...par un beau petit paquetage avant de cette propre Assemblée, va venir décréter ici que c'est irrecevable et qu'il la fasse sienne, et là il va renoncer à la non-recevabilité, laissant l'entière responsabilité au président de la rejeter.

M. Savoie: C'est ça.

M. Chevrette: J'ai vu neiger avant ce soir.

M. Savoie: Non, non, non! On est d'accord à ce que ce soit recevable, et je la laisse présenter. Là, vous sautez à des conclusions qui sont totalement erronées.

M. Chevrette: Non, non, je ne tire pas des conclusions.

M. Gobé: Si je comprends bien, vous seriez d'accord avec ce que je disais sur le fond.

M. Savoie: C'est ça.

M. Gobé: Donc, elle est recevable.

M. Savoie: Elle est recevable. Il n'y a pas de problème avec ça. Vous sautez à des conclusions qui sont totalement erronées.

M. Chevrette: Bien, c'est parce que tu commences ton argument en disant qu'elle est irrecevable.

M. Savoie: Tout ce que je ne voulais pas, c'est que ce soit enregistré comme disant que l'article 192, 4° a été jugé recevable par le président, que j'étais d'accord et, en conséquence, que j'acceptais de créer un précédent dont je ne suis pas sûr. Alors, pour que ça soit bien clair, c'est que, dans le but, justement, qu'il n'y ait pas d'irrégularité, je dis que j'accepte la recevabilité de la motion du député de LaFontaine sans renoncer au principe qu'il pourrait y avoir un problème avec 192, 4°, parce que je la fais mienne, sa motion, en même temps. Dans ce sens-là, je pense que le président va être d'accord...

Le Président (M. Camden): Ne présumez pas. (23 h 30)

M. Savoie: ...que la motion est pleinement recevable et qu'on va procéder avec un débat sur le fond, maintenant. C'est tout.

Le Président (M. Camden): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le député, tel que j'ai compris ce qui se passe, le député de LaFontaine propose une motion à l'heure actuelle. Le ministre dit, d'après lui, que la motion n'est pas recevable en fonction de l'article 192, 4° parce qu'elle est présentée par un député, c'est-à-dire parce que, à ce moment-là, ça serait présumer qu'elle puisse aliéner un bien qui est un bien du gouvernement. Mais, pour pouvoir la récupérer, le ministre se fait lui-même aussi le proposeur de la motion, et, à ce moment-là, comme l'article 192, 4° permet à un membre du gouvernement de pouvoir aliéner un bien gouvernemental, l'objection qu'il pourrait y avoir sur la base de 192, 4e tombe automatiquement, et, à ce moment-là, toutes les objections sur la recevabilité de la motion tombent d'elles-mêmes. C'est bien ce que j'ai compris?

M. Savoie: C'est ça. C'est ça. M. Gautrin: Merci.

Le Président (M. Camden): Alors, il n'y a pas d'autres commentaires?

M. Savoie: C'est beau...

Le Président (M. Camden): Alors...

M. Savoie: ...sur le fond.

M. Gobé: Alors, merci...

Le Président (M. Camden): Un instant. Je n'ai pas rendu ma décision encore, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Excusez-moi, j'ai cru entendre... Le Président (M. Camden): Des voix.

M. Gobé: C'est ça. Ce n'est pas le 8 mai, la fête de Jeanne d'Arc, pourtant, mais...

Le Président (M. Camden): Alors, je vous indique que je juge la motion recevable, et pour les mêmes motifs que la précédente.

M. Savoie: Bon. C'est bien.

M. Chevrette: M. le Président, j'aimerais déposer une proposition d'un sous-amendement, qui se lit comme suit: Ajouter, après le mot «tabac», «au profit

d'organismes communautaires oeuvrant dans le secteur de la santé et des services sociaux».

M. Gobé: Je pense que, avant de tenter un sous-amendement, il faut peut-être débattre de l'amendement que...

M. Chevrette: Non.

M. Gobé: Ce n'est pas obligatoire? Je pensais qu'on devait d'abord disposer...

M. Savoie: Non, c'est... On peut le débattre, là.

M. Gobé: O.K., je comprends.

M. Filion: Alors, c'est recevable, M. le Président?

M. Savoie: Je vais demander au président. Excusez, c'est le président qui...

M. Gautrin: Est-ce qu'on pourrait avoir le texte de l'amendement pour qu'on puisse voir?

Le Président (M. Camden): En fait, je fais distribuer le sous-amendement par ma secrétaire. Nous allons également vous entendre sur le sous-amendement proposé par le député de Joliette, afin que nous puissions juger et apprécier de la recevabilité de ce sous-amendement.

M. Gautrin: M. le Président, est-ce qu'on pourrait avoir une suspension de quelques minutes?

M. Filion: Non, non.

Le Président (M. Camden): Est-ce qu'il y a consentement pour une suspension?

M. Filion: Non, M. le Président. Écoutez, la recevabilité est là.

M. Savoie: Ça finit à minuit.

M. Gautrin: Non, attendez un instant. M. le Président, est-ce qu'on peut suspendre pour qu'on regarde? On nous dépose un sous-amendement...

M. Chevrette: Bien, écoute, on vient d'accepter la tienne.

M. Gautrin: Un instant, là. Là, on va savoir si on peut plaider sur la recevabilité du sous-amendement ou non.

M. Filion: Ça a été accepté, la recevabilité.

M. Gautrin: Non, je m'excuse. Ce qui a été accepté, c'est l'amendement.

M. Chevrette: Oui, mais, M. le Président, je peux plaider tout de suite sur la recevabilité.

Le Président (M. Camden): Écoutez, si j'ai bien compris, il n'y a pas de consentement pour suspendre.

M. Gautrin: Mais, d'habitude, le président peut, d'autorité, suspendre.

Le Président (M. Camden): Bien là, écoutez, moi, je suis disposé à entendre sur la recevabilité du sous-amendement qui est sur la table et, si besoin est, je suspendrai pour prendre ma décision.

M. Chevrette: Oui. M. le Président, je vais plaider sur la recevabilité.

Le Président (M. Camden): M. le député de Joliette, sur votre motion.

M. Chevrette: Tout d'abord, M. le Président, vous avez accepté tantôt comme motion recevable que le produit de la vente aille à des organismes de santé et de charité. Vous allez, là, exactement dans la continuité de ce qui a été fait, où ça doit déboucher. Si c'était acceptable dans la motion d'amendement tantôt, comme sous-amendement à la motion présente, on ne peut pas être incohérent à ce point de l'accepter dans un amendement préalable sur lequel vous avez permis un débat de fond... Il ne fait que dire où ça va. Ça ne change en rien la teneur du principe lui-même de l'amendement qui en dispose selon des règlements, mais, nous, on dit: Oui, par règlement, il n'y a pas de problème, mais au profit des organismes communautaires oeuvrant dans le secteur de la santé et des services sociaux. C'est tout à fait dans la même lignée que l'amendement antérieur sur lequel on a eu une discussion.

Et plus que ça, M. le Président, l'intention du député de LaFontaine — et je voudrais bien qu'il m'écoute — dans son exposé et même dans sa plaidoirie sur le fond de mon amendement, la finalité de son amendement, c'est que ça aille aux organismes communautaires puis des services de santé et des services sociaux. Donc, le ministre — et je veux attirer l'attention précisément du député de LaFontaine — ne voulant pas mettre la finalité de la disposition des biens, s'en remet donc à son pouvoir en vertu de 16.3 de l'article de la loi du ministère du Revenu, qui, lui, dit que ce ne sont que les produits non réclamés aux enchères ou les biens non réclamés aux enchères qui vont aux organismes. Il a introduit la notion d'une disposition qui permet donc ou la vente ou de brûler, mais, en mettant «au profit...», M. le Président, là, je pense que le ministre qui devra en disposer devra le faire en fonction des organismes communautaires et des services de santé et services sociaux.

M. Gautrin: M. le Président.

Le Président (M. Camden): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je vais plaider contre la recevabilité.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Je vais vous expliquer pourquoi.

M. Chevrette: II n'en est pas à une contradiction près, lui.

M. Gautrin: Non, non, mais c'est vous qui n'êtes pas à une contradiction près. Alors, vous allez écouter 2 minutes. M. le Président, comment peut-on disposer par règlement au profit d'organismes communautaires oeuvrant dans le secteur de la santé et des services sociaux, alors qu'un des moyens de disposer — et je pense que vous ne l'avez jamais refusé — est de brûler ou de détruire? Donc, on ne peut pas détruire au profit d'organismes communautaires oeuvrant dans le secteur de la santé et des services sociaux. Ça ne voudrait rien dire, M. le Président, de dire: Je détruis au profit...

M. Chevrette: Bien, tu le vendras.

M. Gautrin: Non, non, mais attendez un instant. On a bien dit que la manière d'en disposer, c'était soit de détruire, soit de vendre, soit de faire autre chose. Je vois mal comment, M. le Président — et je vous demande de réfléchir réellement à la logique du texte — on peut détruire au profit d'organismes communautaires oeuvrant dans le secteur de la santé et des services sociaux. Je pense que ça ne veut rien dire.

M. Filion: C'est très bon.

M. Chevrette: C'est la première fois que tu le trouves bon.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Filion: Non, non, c'est très bon, très bon.

M. Gautrin: Donc, M. le Président, je pense que c'est non recevable parce que ça ne tient pas debout.

M. Filion: M. le Président...

Le Président (M. Camden): M. le député de Montmorency.

M. Filion: ...je pense qu'il faut voir au sous-amendement quelque chose de très simple. C'est de remettre dans le texte le sens que le député de LaFontaine voulait donner...

M. Gautrin: Par le mot «détruire».

M. Filion: On ne l'a pas mis, le mot «détruire». C'est vous qui avez changé «détruire» pour «disposer». Ce n'est pas nous. C'est vous qui l'avez changé le mot «détruire» pour «disposer». Écoutez, là, ce n'est pas nous qui l'avons fait, c'est vous. Nous, on fait un sous-amendement pour remettre l'angle de réutilisation.

Le Président (M. Camden): Alors, s'il vous plaît, veuillez vous adresser à la présidence.

M. Filion: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Camden): Je rappelle aux membres de la commission que le député de Montmorency a actuellement la parole.

M. Filion: Merci, M. le Président. M. le Président, moi, je retiens des mots clés que vous avez donnés lorsque vous avez accepté ce nouvel amendement. Vous avez dit: Je le juge recevable sur les mêmes bases que le premier jugement que j'ai rendu de recevabilité. Alors, à toutes fins pratiques, vous avez accepté sur la même base la recevabilité de ce deuxième amendement, comme vous l'avez fait au niveau du premier amendement, M. le Président. Et le premier amendement avait un sens qui était très simple, un sens de récupérer les sommes au profit du monde de la santé. Et, là, tout ce qu'on fait, c'est qu'on remet l'angle. On remet simplement l'angle. On a changé le mot «détruire» pour «disposer». Nous, on veut l'angle de récupérer les fonds pour le monde de la santé, et c'est tout, M. le Président. C'est sur les mêmes bases, comme vous l'avez dit tout à l'heure, de recevabilité. Alors, pour nous, on replace le débat où il était.

M. Gautrin: Vous ne pouvez pas détruire au profit de quelqu'un.

M. Chevrette: Bien, détruire, c'est ça. (23 h 40)

M. Filion: On peut disposer...

M. Chevrette: Tu dis: Disposer au profit de. Tu fais tout pour qu'il y ait des profits en faveur de. C'est tout.

(Consultation)

Le Président (M. Camden): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires à formuler sur la recevabilité? Alors, je suspends pour quelques instants nos travaux pour que je puisse prendre une décision et rendre ma décision.

(Suspension de la séance à 23 h 41)

(Reprise à 23 h 48)

Le Président (M. Camden): La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux. J'indique aux membres que, actuellement, les députés sont appelés à un vote à l'Assemblée, dans la salle de l'Assemblée. Alors, si le vote est terminé avant minuit, nous reprendrons nos travaux et, s'il advenait que le vote ne soit pas terminé à minuit, nos travaux, à moins qu'il y ait un consentement pour dépasser l'heure, seront ajournés sine die. Ça va?

M. Gobé: C'est bien.

Le Président (M. Camden): Là-dessus, je suspends nos travaux en fonction des... Il y a consentement à cet effet?

Des voix: Consentement.

Le Président (M. Camden): Très bien, consentement. La décision sera rendue ultérieurement.

Des voix: ...

Le Président (M. Camden): Alors, considérant qu'il est 23 h 49, est-ce qu'il y a consentement pour que la commission du budget et de l'administration ajourne ses travaux sine die?

Une voix: Consentement.

Le Président (M. Camden): Consentement. Alors, les travaux sont ajournés sine die.

(Fin de la séance à 23 h 49)

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