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(Dix heures six minutes)
Le Président (M. Camden): La commission du budget et de
l'administration débute ses travaux. La commission est réunie se
matin afin de procéder à l'interpellation du député
de Montmorency au ministre du Revenu sur le sujet suivant: la contrebande et le
commerce illégal du tabac. M. le secrétaire est-ce qu'il y a des
remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président, M. Chagnon
(Saint-Louis) est remplacé par M. Bergeron (Deux-Montagnes), et M.
Després (Limoilou) est remplacé par M. Benoit (Orford).
Le Président (M. Camden): Merci, M. le secrétaire.
Je vous rappelle brièvement les règles de l'interpellation. Le
débat dure, au plus, deux heures, soit jusque... On devra donc en
principe excéder la période de midi. La discussion est
répartie en 3 étapes. Un premier débat de 20 minutes
commence par l'intervention du député qui a donné l'avis
d'interpellation, soit le député de Montmorency; il exercera un
premier droit de parole de 10 minutes. Le ministre interpellé, soit le
ministre du Revenu, aura ensuite un droit de réplique de 10 minutes.
Après ces 2 interventions, nous procéderons à
l'interpellation proprement dite au cours de laquelle chaque intervenant pourra
s'exprimer pendant 5 minutes. Il y aura alternance dans les interventions selon
la séquence suivante: un député de l'Opposition, le
ministre, un député ministériel, et ainsi de suite selon
la même séquence. Si un membre utilise moins de 5 minutes, le
temps non utilisé est perdu et la parole sera donnée à
l'intervenant qui suit selon la séquence que j'ai indiquée. Vingt
minutes avant la fin de la séance, le ministre aura droit à un
dernier temps de parole de 10 minutes, et le député de
Montmorency aura ensuite un droit de réplique de 10 minutes, ce qui
mettra fin au débat. M. le député de Montmorency, vous
avez la parole.
Exposé du sujet M. Jean Filion
M. Filion: Merci, M. le Président. J'aimerais, bien
sûr, parler de beaucoup de choses, mais au départ je veux
simplement situer que le débat de la contrebande du tabac est toujours
très actuel. Du côté de l'Opposition, ça fait
maintenant depuis novembre, précisément le 17 novembre 1992, que
nous avons commencé à mettre une pression auprès de nos
gouvernements pour les sensibiliser à ce fléau social majeur,
puisqu'ils ne semblaient pas vouloir réagir sur la place publique. On
sait que les gouvernements sont au courant du problème depuis au moins
janvier 1988, puisque le ministre du Revenu lui-même avait mis en place
une équipe spéciale de vérificateurs pour commencer
à mettre fin à l'évasion fiscale qui était
déjà sur le territoire. Il était déjà sur le
territoire, le problème de l'évasion fiscale en janvier 1988, le
ministre avait injecté à l'époque 3 000 000 $ dans une
équipe spéciale pour, effectivement, contrecarrer ce
phénomène-là. Mais j'ai l'impression, M. le
Président, que c'était une espèce de politique qui,
véritablement, n'avait pas d'intentions sérieuses, puisque le
phénomène s'est amplifié et les gouvernements, dans une
politique fiscale d'autruche, ont continué à taxer, année
après année, le produit, le tabac, et en même temps se
disaient: Bien, on va taxer et on va mettre, on va développer un
État policier chez nous. C'est bizarre comme philosophie d'un ministre
du Revenu puisque, en principe, la police ça n'a rien à voir avec
le ministère du Revenu. (10 h 10)
La police, c'est au niveau de la sécurité publique. Le
ministère du Revenu, lui, doit mettre en place un système qui,
à toutes fins pratiques, doit s'opérer avec la confiance
économique du public et de la population. Alors, on continue à
surtaxer qui était la cause, parce qu'on le reconnaissait
à l'époque, M. le Président en janvier 1988, on
reconnaissait qu'on avait taxé depuis 1985, fédéral et
Québec, à chaque année, une augmentation au niveau de la
taxe sur le tabac et le phénomène a créé, bien
sûr, des distortions économiques, une concurrence déloyale,
les gens ont commencé à vouloir faire leur propre justice
fiscale. Mais ça remonte à 1988, ce n'est pas d'hier.
Alors, de 1988 au 17 novembre 1992, M. le Président, il n'y avait
rien qui se passait vraiment pour sentir que le gouvernement
fédéral et le gouvernement du Québec avaient bien le
dossier en main et on contrôlait l'opération ou on pensait
à des mesures concrètes pour mettre fin à ce qu'on appelle
maintenant le fléau social de la contrebande du tabac.
Malgré, M. le Président, qu'on soit intervenus,
l'Opposition, depuis maintenant plusieurs mois, on ne sent pas encore de
solution à l'horizon. Le phénomène est très
présent. La concurrence n'est plus une concurrence économique, M.
le Président, c'est devenu une concurrence entre les contrebandiers du
tabac. Il y en a qui vendent à 20 $, d'autres vendent à 22 $,
d'autres vendent à 23 $. C'est rendu que c'est entre eux-mêmes
qu'ils se font une concurrence économique pour nuire à ceux qui,
à toutes fins pratiques, veulent suivre les règles, veulent
être conformes à notre société, c'est-à-dire
ceux qui vendent dans un circuit légal. Les petits dépanneurs,
tous les commerçants qui, à toutes fins pratiques, eux,
respectent nos lois, M. le Président, se
retrouvent aujourd'hui avec des pertes de profits incroyables. Des
pertes de profits où, à toutes fins pratiques, parce qu'on veut
respecter nos lois, on se retrouve à être obligés de faire
faillite, on se retrouve avec des pertes d'emplois. Plusieurs, des milliers de
pertes d'emplois 3500 au moment où on se parle parce que
les gens respectent nos lois et qu'on n'a pas de gouvernement en place qui
mette fin à ce fléau-là. Ces gens-là, les
entreprises qui veulent être conformes se retrouvent avec des pertes
d'emplois importantes et, en même temps, des pertes de profits et des
déséquilibres financiers au niveau des familles. Écoutez,
des petites entreprises, c'est fragile et, souvent, c'est à ce
niveau-là que la contrebande du tabac vient frapper des jeunes ou des
petites entreprises qui veulent bien gagner leur vie, dignement, en fonction de
nos lois parce qu'on a un gouvernement qui se traîne les pieds ou des
gouvernements qui se traînent les pieds depuis au moins 1988, janvier
1988.
M. le Président, on se retrouve encore aujourd'hui, à
cette période d'interpellation là, pour essayer à nouveau
de mettre une pression ou informer davantage la population de la
problématique qui est devenue très, très, très
sérieuse, et on ne voit pas encore de solution à l'horizon. Tout
ce qu'on se fait dire par ce gouvernement-là, c'est: Vous savez, on
pensait qu'on aurait un manque à gagner de 75 000 000 $ cette
année c'est ce qu'on nous disait à l'automne dernier. Or,
on va avoir un manque à gagner de seulement 75 000 000 $ au niveau du
tabac pour réviser leur chiffre, à la fin décembre,
à 150 000 000 $, M. le Président.
Ah! Tout d'un coup, on se rend compte que la problématique a
changé, qu'on commence à donner une information plus juste et
transparente pour la population. Et quand on était en commission
parlementaire, il n'y a pas si longtemps, M. le Président, là, le
ministre du Revenu, qui refusait toujours de nous répondre, bien
sûr, et n'osait pas donner les vrais chiffres pourtant c'est lui
qui les contrôle les vrais chiffres, M. le Président. C'est lui le
ministre du Revenu qui fait et dépose ses chèques de taxes. C'est
lui qui voit les entrées de fonds. C'est lui qui est le premier
avisé de l'information financière, M. le Président. Ce
n'est pas le ministre des Finances, c'est lui, et lui a toujours refusé
de donner l'information, comme ministre, cette information-là qui,
à toutes fins pratiques, est de l'information publique puisque c'est un
manque à gagner.
Le ministre des Finances, en commission parlementaire lors du
débat sur les finances publiques, lui, reconnaissait: Je reconnais qu'on
est rendus dans un manque à gagner de 325 000 000 $. Et ça
c'était en février, M. le Président. Alors, aujourd'hui,
au moment où on se parle, je ne sais pas si le ministre va avoir le
courage, tout à l'heure, quand il va prendre la parole, de dire à
combien en est rendu le manque à gagner. Le manque à gagner en
taxes au Québec, parce que bientôt on va sabrer dans nos
dépenses publiques. On va commencer à compromettre nos programmes
sociaux. On va commencer, peut-être, à rediscuter ou
réfléchir à nou- veau si on est capables de se payer
l'universalité des soins de santé au Québec, M. le
Président. C'est grave. Parce qu'on a un gouvernement, à toutes
fins pratiques, qui ne semble pas vouloir assumer ses responsabilités et
de faire respecter nos lois sur le territoire. Si c'était juste
ça, M. le Président, vous savez, on a le vidéopo-ker
actuellement sur le territoire, on tolère l'illégalité
d'opération. On la tolère l'illégalité
d'opération, M. le Président. Puis là on est en train de
vouloir légiférer sur les casinos. Pourquoi
légiférer sur les casinos? Pour blanchir l'argent du
marché au noir, M. le Président.
Imaginez-vous, comme philosophie de gouvernement, ce vers quoi on s'en
va. On tolère le marché au noir, la contrebande du tabac, on
tolère l'opération illégale du vidéopoker qui
crée du marché au noir non taxable, puis là on a le culot,
entre guillemets, M. le Président, d'aller légiférer sur
des institutions pour blanchir l'argent, entre guillemets, qui n'est pas
déclaré dans le système qu'on tolère
actuellement.
M. le Président, je pense que le gouvernement va devoir, quelque
part dans le temps parce que, nous, on n'arrêtera pas, parce que
c'est quand même des dossiers majeurs. Ça devient des dossiers
où on donne l'exemple que respecter nos lois, on ne peut pas vivre dans
un système économique comme le nôtre. Le petit
dépanneur ou le petit épicier du coin qui respecte nos lois, lui,
se retrouve dans une situation où il doit fermer ses portes parce
que, vous savez, perdre du profit sur le tabagisme, c'est quand même un
profit important. Vous êtes rendus qu'il y a des hôteliers qui vous
disent: Si vous m'enlevez ma machine vidéopoker, je vais être
obligé de fermer mon hôtel. Il y a quelque chose, quelque part
dans le temps, où le ministre du Revenu qui, lui, a la
responsabilité d'application de nos lois fiscales, quelque part, il va
falloir qu'il nous amène des solutions concrètes. Ça fait
depuis novembre qu'on attend des gestes. Je comprends qu'il y a la police du
tabac. La police du tabac a prouvé qu'elle ne pouvait pas mettre fin au
fléau. La police du tabac, M. le Président, ce n'est pas quelque
chose qui va mettre fin à ce phénomène-là, puis on
le savait tout le monde, et là, tout ce qu'on a encore sur la table
comme solution de rechange, c'est la police du tabac.
M. le Président, les gens attendent autre chose; les gens ont
besoin de sentir que le gouvernement a bel et bien le dossier en main, que le
gouvernement, actuellement, au moment où on se parle, va nous amener des
solutions intéressantes et des solutions où les gens vont pouvoir
penser qu'on va mettre fin à ce problème-là à
très court terme. Parce que, vous savez, M. le Président, quand
les gens sont rendus à accréditer dans la population que faire la
contrebande du tabac c'est devenu quelque chose de pratiquement
légitime, les gens ont tendance à vouloir se faire leur propre
justice fiscale et quand vous regardez le dernier état financier
révisé parce que le gouvernement se trompe, hein? le
gouvernement libéral c'est un gouvernement qui se trompe royalement. Il
s'est trompé dans ses prévisions l'an dernier et au mois de
décembre, neuf mois plus tard, il est venu nous dire: Écoutez, on
s'est trompés
juste de 460 000 000 $ au niveau de l'impôt des
sociétés, ce n'est pas beaucoup, hein? On va rentrer moins
d'argent, 460 000 000 $, pourquoi? parce qu'on s'est trompés dans nos
prévisions. Ce n'est pas ça, c'est toute l'économie
parallèle que vous laissez développer, M. le ministre, sans
réagir, qui vous crée, en bonne partie, un manque
d'entrées de fonds. Arrêtez de dire aux gens que l'économie
va mal, c'est que l'économie ne se comptabilise plus, elle se fait en
parallèle et les gens ne versent plus leurs deniers publics. C'est
ça, le problème. Il va falloir, quelque part, qu'il y ait
quelqu'un qui le comprenne et qui pense à mettre des idées de
l'avant. J'en ai soumis, des idées.
Le Président (M. Camden): En conclusion, M. le
député.
M. Filion: J'aurai l'occasion, M. le Président, de revenir
sur des idées que j'ai soumises dans le passé pour essayer de
donner une tendance d'orientation...
Le Président (M. Camden): On vous remercie...
M. Filion: ...intéressante pour contrôler
l'opération...
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
député...
M. Filion: ...de la contrebande du tabac.
Le Président (M. Camden): ...de Montmorency.
M. Filion: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Camden): Maintenant, je cède la
parole au ministre du Revenu pour une période de 10 minutes.
Réponse du ministre M. Raymond Savoie
M. Savoie: Oui, merci, M. le Président. Il est sûr
que' le commerce illégal du tabac est très préoccupant
pour le gouvernement du Québec. Depuis 1988, alors qu'il y a eu le
début d'une légère augmentation de la contrebande,
puisqu'il y en a toujours eu, en partie, le gouvernement du Québec est
intervenu à plusieurs reprises, à plusieurs reprises; on aura
l'occasion d'énumérer chacune de ces instances et chacun des
gestes posés.
Toutefois, M. le Président, vous me permettrez de commenter, tout
d'abord, la nature de cette interpellation. Le député de
Montmorency, depuis le début de son intervention, finalement, revient
sur du remâché. Il nous sert une argumentation incohérente,
non productive et certainement une critique dévalorisante pour son parti
politique. (10 h 20)
Ses idées, dont il va nous faire part dans quelques instants,
d'intervention ont déjà fait l'objet de critiques. Je voudrais
citer quelques-uns des commentaires qu'on a faits au sujet de ses idées.
D'une part, M. le Président, lors de la commission parlementaire sur les
finances publiques, il a déjà eu l'occasion d'avancer
quelques-uns de ses bijoux, bijoux qui ont reçu de la part du
président de l'Association nationale des distributeurs de tabac et de la
confiserie... qui lui a dit, en commission parlementaire, en salle pleine: J'ai
eu le plaisir de lire ce que vous avez présenté au point de vue
de la taxation sur le tabac. Humblement, je dois vous dire que vous ne
connaissez absolument rien à l'industrie du tabac.
Un autre commentaire, M. le Président, et j'en ai plusieurs, on
va les passer, on a deux heures de temps; on a deux heures pour en passer! En
conférence de presse, où il présente un autre de ses
bijoux, de ses solutions miracles, un journaliste de la presse, de la galerie,
ici à Québec, lui répond, à une de ses
interventions: Vous êtes en parlant de notre député
de Montmorency vraiment naïf ou vous n'avez pas de solution. Alors,
c'est lequel, M. le député de Montmorency? Est-ce que vous
êtes naïf ou vous n'avez pas de solution à la situation
actuelle?
M. le Président, je vais m'en réserver parce qu'il y en a
encore de plus succulentes! Il faut bien comprendre que le député
de Montmorency est alarmiste dans ses propos, nous offre des solutions à
Pemporte-pièce, nous propose des solutions qui ne peuvent être
retenues par ce gouvernement parce que ce gouvernement est un gouvernement
responsable. Nous reconnaissons volontiers qu'il y a un problème au
niveau de la contrebande. Nous l'avons reconnu bien avant l'arrivée du
député de Montmorency à l'Assemblée nationale et
nous avons posé des gestes. ce qu'il faut comprendre toutefois, c'est
que le problème fondamental se situe au niveau de l'augmentation d'un
prix de cartouche de cigarettes entre 1988-1989 et 1992-1993. en 1988-1989, le
prix d'une cartouche de cigarettes, de 200 cigarettes, était de 23 $. en
1993, le prix d'une cartouche de 200 cigarettes, m. le président, est
rendu à tout près de 49 $. la responsabilité dans
l'augmentation du prix revient en premier lieu au gouvernement
fédéral qui a fait en sorte qu'ils ont haussé les taxes
sur un paquet de cigarettes de 47 % sur le prix de 1988-1989 et le
québec, 36 %, parce qu'on a suivi. de plus, le secteur privé, m.
le président, compte également pour une part non
négligeable de l'augmentation. on parle de 9 %. par ailleurs et
il faut le souligner encore et je vais demander au député de
montmorency de bien comprendre ce fait par ailleurs, le québec
est une des provinces qui taxent le moins. le québec est une des
provinces qui taxent le moins le tabac, soit 9 % de la moyenne des autres
provinces canadiennes. est-ce qu'on peut comprendre ces chiffres et
démontrer un petit peu plus la clairvoyance dans sa réflexion au
lieu de se promener dans un brouillard constant qui donne naissance, à
partir de ce brouillard, à un «bruyart»?
M. le Président, sur le plan du commerce illégal,
Revenu Québec a posé tous les gestes, mais alors tous les
gestes qui étaient à sa disposition. A partir, comme l'a
mentionné le député de Montmorency, de 1988, un
comité a été formé, et on a
privilégié, on a développé une collaboration
étroite avec les juridictions voisines, que ce soit Revenu Canada, le
gouvernement de l'Ontario, les gouvernements des États de New York, du
Maine ou du Vermont, ainsi que les négociations avec les manufacturiers
et les grossistes de tabac afin d'améliorer les contrôles
existants.
Jusqu'à maintenant, ces activités ont permis d'identifier
des récupérations de droits représentant plus de 140 000
000 $ et d'obtenir plus de 600 condamnations et des amendes totales d'environ 6
000 000 $. Les travaux du comité ont aussi permis d'apporter
d'importantes modifications à la Loi concernant l'impôt sur le
tabac. Ces nouvelles mesures ont été sanctionnées par
l'Assemblée nationale en juin 1991. Il faudrait se rappeler, M. le
Président, que l'Opposition a voté contre ces mesures. On a
introduit l'emprisonnement de deux ans pour des activités
illégales de transport, d'entreposage et de vente de cigarettes. On a
institué des mesures de permis pour exercer ces activités
reliées à la fabrication et au commerce du tabac et on doit
dresser, par exemple, un manifeste lors du transport du tabac destiné
à la vente. Nous avons resserré l'ensemble de la
législation et de la réglementation concernant le commerce du
tabac justement dans le but d'aller recueillir nos impôts, et ça
fonctionne.
On se rappellera, M. le Président, des déclarations du
député de Montmorency lorsqu'on faisait part de ces modifications
à la loi. Il s'est opposé j'allais dire avec
véhémence, mais surtout avec naïveté à
l'ensemble de ces mesures. Ses commentaires ont été finalement
peu constructifs dans ce débat. En janvier 1992, le ministère a
jugé opportun d'intensifier sa présence en créant un
groupe spécial de 60 enquêteurs afin d'assurer la surveillance des
voies d'accès avec les États-Unis les moins
contrôlées par le gouvernement fédéral.
Ce groupe spécial de surveillance est devenu pleinement
opérationnel à la fin de février 1992. En collaboration
avec les corps policiers, ces fonctionnaires procèdent à des
activités de surveillance, de filature, de perquisition et de saisie
auprès de contrebandiers. Les 345 immobilisations et les perquisitions
du groupe ont permis de saisir, jusqu'ici, plus de 153 000 cartouches de
cigarettes, plus de 42 800 boîtes de tabac et plus de 3300 autres
contenants de tabac et plusieurs autres produits tels que 3800 bouteilles de
spiritueux. Le tout avec une valeur qui dépasse facilement les 9 200 000
$ et sans compter, évidemment, les amendes et les condamnations qui ont
suivi.
Les vérificateurs ont fait un travail considérable et leur
but était tout simplement de deux ordres: d'une part, c'est de dire que
nous allons faire tout ce qui est humainement possible pour réduire la
contrebande, donc la création de cette escouade spéciale
aujourd'hui qui s'appelle la police du tabac, et, deuxièmement,
c'était d'indiquer que le gouvernement du Québec allait poser une
opposition ferme au développement de la contreban- de. C'est ce que nous
avons fait. Nous avons été aux limites. Il faut bien comprendre
que les routes entre le Québec et les États-Unis sont de
juridiction fédérale. Le fleuve est de juridiction
fédérale. Les réserves autochtones sont des
réserves fédérales. Toutes les interventions qu'on a pu
faire avec la Sûreté du Québec, la Gendarmerie royale, les
officiers qui travaillent pour Douanes Canada, tout ça avait un but,
finalement, de prêter un support à même le budget de
fonctionnement du ministère du Revenu. Nous avons posé tous les
gestes possibles.
Tout dernièrement, un comité spécial composé
du ministre de la Sécurité publique, composé
également du ministre de la Santé et des Services sociaux, de la
vice-première ministre Mme Lise Bacon et de moi-même de
même, et, bien sûr, du ministre des Finances, je ne voulais pas
l'oublier, a été créé justement dans le but
d'intervenir davantage, de trouver des solutions rapides avec Ottawa en vue,
justement, de contrôler cette contrebande. Le député se
lève et déchire sa chemise sur la place publique. Des
propositions inacceptables, en grande partie, et pas de solution, on veut bien,
mais ce qu'on voudrait de lui, par exemple, c'est un petit peu plus de
collaboration et des suggestions positives s'il en a. À date, il n'en a
démontré aucune et, M. le Président, je peux vous dire
qu'aujourd'hui ce qu'il va nous présenter...
Le Président (M. Camden): En conclusion.
M. Savoie: ...n'a rien de nouveau. Ça va être du
remâché.
Le Président (M. Camden): Je vous remercie, M. le ministre
du Revenu. Maintenant, je cède la parole au député de
Montmorency pour une période de cinq minutes.
Argumentation M. Jean Filion
M. Filion: Merci, M. le Président. Le ministre est
toujours égal à lui-même. Il n'apporte rien de nouveau.
Tout ce qu'il dit, c'est que c'est la faute d'Ottawa et il dit: Ottawa, au
fond, c'est lui qui devrait régler le dossier. Mais j'aimerais lui dire
que j'ai un article, ici, du 30 janvier 1993: «La contrebande accrue des
cigarettes laisse Ottawa indifférent», M. le ministre. Alors, il y
a une constatation publique qui est faite dans ce sens-là. (10 h 30)
L'autre chose où je veux revenir, M. le Président, et
c'est important, le ministre a cité, tout à l'heure, des phrases
hors contexte dans des discussions de commissions parlementaires. Je vais vous
dire, M. le Président, la première qui vient de l'Association des
détaillants, je peux comprendre qu'ils aient dit ça. Il faut
comprendre que ces gens-là, quand on leur parle que la façon de
contrecarrer la contrebande du tabac c'est de réduire les taxes,
accompagnée d'une nouvelle dynamique fiscale,
ça dérange, surtout une nouvelle dynamique fiscale, M. le
Président, qui pourrait identifier des réseaux de contrebande,
ça dérange. Moi, je peux très bien comprendre. Je n'ai pas
exploité d'entreprise de tabac. Ma carrière, moi, c'est
d'être fiscaliste et d'avoir travaillé depuis maintenant 17 ans
dans le monde de la fiscalité. Je peux comprendre qu'une dynamique
fiscale, ça se change, puis qu'une dynamique fiscale, M. le
Président, qui va identifier un réseau de contrebande d'une
façon documentaire et qui pourrait même permettre au ministre du
Revenu d'émettre des cotisations, s'il le faisait, pour dire: Bien
voici, nous, on pense qu'effectivement, avec une nouvelle dynamique fiscale, on
pourrait identifier le réseau, parce qu'ils vont devoir s'identifier,
ces gens-là, pour avoir leur remboursement de taxes, ils vont devoir
s'identifier auprès du ministère du Revenu pour dire: Moi, j'ai
droit à un remboursement de taxes, parce que j'ai acheté du
tabac...
Et si le ministre veut vraiment prendre des vérificateurs fiscaux
pour aller faire des inspections et non pas des polices qui courent
après des camions, il va pouvoir aller chercher une information.
Ça dérange le monde du milieu, c'est évident! Le milieu
est pris dans un système de contrebande. Ils ne peuvent pas dire:
Écoutez, changez votre dynamique fiscale, puis venez nous identifier.
Ils n'aimeront pas ça. C'est normal, ça, cette
réaction-là, puis je les comprends. Mais quand le ministre, il
dit qu'on est naïfs de penser à une réduction de taxes pour
réduire la contrebande du tabac ou l'éliminer, je pense que le
ministre n'est pas sérieux. Le ministre, quelque part, il est en train
de nous dire que c'est normal qu'on ait créé une concurrence
déloyale où le prix du tabac un paquet de cigarettes
représente 70 % en taxes quand nos voisins ne l'ont pas, cette charge
fiscale là. Ils nous font une concurrence déloyale pour amener le
produit sur le territoire.
Je pense que le ministre, quelque part, il doit comprendre que la
dynamique fiscale qu'il faut changer... C'est évident que si vous posez
la question à la personne: Écoutez, si je change la dynamique
fiscale, êtes-vous d'accord? elle va dire: Non, je ne suis pas d'accord,
puis ne changez pas la dynamique fiscale, vous allez m'identifier et vous allez
pouvoir effectivement procéder, par la suite, à des cotisations
sur les années passées, à part ça, M. le
Président. Parce que si le ministre se levait et disait: Voici,
dorénavant, vous allez devoir produire une formule au ministère
pour avoir votre remboursement de taxes peu importent les
problèmes techniques d'application pour changer la dynamique, ça,
c'est une autre question.
Mais la philosophie de perception de taxes, on perçoit chez le
fabricant et on dit: Maintenant, dorénavant, les autochtones et les
entreprises étangères détaillantes, vous demanderez un
remboursement de taxes, et on vous le donnera pour la consommation
étrangère et la consommation personnelle dans les
réserves. Et si on faisait ça, automatiquement, on
arrêterait de donner un cadeau gratuit, c'est-à-dire on donnerait
des réductions fiscales sans faire des vérifications. On
demandait aux gens de s'identifier, de dire pourquoi ils ont droit au
remboursement de taxes, autant les autochtones que les entreprises
étrangères. À ce moment-là, on identifierait un
réseau avec la documentation.
Moi, je vous dis, M. le Président, c'est évident que c'est
un changement de dynamique fiscale, ça, on le comprend. Ça, on le
comprend très bien, sauf que le ministre doit reconnaître quelque
part que l'idée ne doit pas être si mauvaise, parce que,
actuellement, les députés à Ottawa l'ont
récupérée, l'idée du remboursement de taxes pour
dire que, dorénavant, tous les autochtones au Québec, c'est fini,
ils vont payer leurs taxes, puis ils vont demander un remboursement de taxes
pour leur consommation personnelle. Et là, à ce moment-là,
on pourra vérifier que c'est uniquement pour leur consommation
personnelle, puis arrêter de penser qu'ils achètent des produits
pour les revendre sur le territoire du Québec, pour faire de la fausse
concurrence ou de la concurrence déloyale à ceux qui veulent
respecter nos règles. Et là le ministre, M. le Président,
je ne comprends pas qu'il dise que, et je ne comprends pas qu'il cite des
journalistes parce que, lui-même, il trouve qu'au fond... en commission
et d'ailleurs, le 17 mars, je le questionnais en Chambre et je citais ceci:
Oui, oui, oui, ça a bien sorti effectivement on parlait de sa
police du tabac il n'y a eu que deux ou trois éditorialistes qui
n'avaient rien d'autre à faire que de ne pas comprendre ce qu'on
faisait. N'importe quel bouffon peut dire ce qu'il veut. Ce n'est pas comme
ça que ça fonctionne.
Et lui-même, aujourd'hui, me ramène une citation de gens
qu'au fond il ne respecte même pas, M. le Président, quand il
parle de journalistes qui me trouvent naïf. Alors, M. le Président,
je pense que le ministre, là, dans sa démagogie de citer des
phrases hors contexte devrait comprendre et approfondir le problème et
comprendre vraiment que ça doit être changé en profondeur
et non pas juste de lancer des phrases qui ne veulent rien dire, M. le
Président.
Le Président (M. Camden): Je vous remercie, M. le
député. M. le ministre du Revenu, pour une période de 5
minutes.
M. Raymond Savoie
M. Savoie: Merci, M. le Président. Vous voyez ce que je
vous disais, il va revenir avec des solutions qui démontrent une
profonde, une profonde méconnaissance, d'une part, du fonctionnement des
milieux autochtones, des réserves et, deuxièmement, du rôle
de la police du tabac et, troisièmement, des échanges que nous
avons eus avec les fabricants et, quatrièmement, de la contrebande. Vous
ne connaissez rien là-dedans. J'ai été ministre des
Affaires autochtones quatre ans de temps. Vous allez me dire que je ne connais
pas le tabac dans une réserve autochtone et comment ça
fonctionne, et comment est-ce qu'on peut aller chercher l'argent, vous allez me
dire ça, M. le député de Montmorency? Vous allez me dire
que ça ne fonctionne pas déjà ce système-là
de charges et de remboursement pour le
tabac alors qu'on a déjà un système en place pour
ce faire? vous allez me dire qu'au niveau de la... que les commerçants,
lorsque vous avez fait cette proposition-là, ils vous ont
répondu, humblement, virgule, je dois vous dire que vous ne connaissez
absolument rien à l'industrie du tabac. et c'est vrai, vous
répétez toujours la même erreur. progressez donc un peu.
acceptez donc, baissez votre orgueil, démontrez un peu
d'humilité, c'est ce qu'on est en train de vous dire, et constatez qu'il
y a seulement deux centres de fabrication au québec et qu'il y en a un
troisième en ontario, et qu'en conséquence l'ontario va
être obligé de participer à ce processus, de même que
le gouvernement fédéral puisqu'on parle d'exportation. alors,
pourquoi vous en prendre au ministère du revenu du québec? on a
fait ces démarches-là, et on attend des réponses de la
part du gouvernement fédéral. pouvez-vous le comprendre qu'au
niveau des exportations il y a déjà eu une taxe de 8 % sur les
exportations et, à ce moment-là, il a été
obligé de l'abolir pour des raisons propres à l'industrie du
tabac? pour des raisons propres à l'industrie du tabac. il faudrait
comprendre, aujourd'hui, que, lorsque vous achetez un paquet de contrebande, ce
paquet-là peut aussi bien être fait en allemagne, qu'à
taiwan, qu'à hong kong, qu'aux états-unis; n'importe qui peut
fabriquer des cigarettes et les transporter. et c'est ce qui se produit
actuellement, des copies exactes d'un paquet de cigarettes qui provient
d'ailleurs. comment allez-vous faire pour taxer ces gens-là qui, par
exemple, travaillent au niveau de taiwan à fabriquer des cigarettes, ou
de hong kong ou de singapour, et qu'elles rentrent ici par bateau en
contrebande? en contrebande. comment allez-vous faire pour contrôler avec
votre taxe? la réponse n'est pas dans cette orientation. c'est ça
le problème, c'est que vous ne comprenez pas, parce que vous refusez de
comprendre, vous refusez de comprendre le vrai problème. et tout ce que
vous cherchez à faire, c'est faire une interpellation pour
m'empêcher d'être dans mon comté un vendredi pour faire mon
travail de député. c'est ça votre but, c'est ça que
vous avez visé. vous saviez que j'avais des activités importantes
dans mon comté ce matin et vous avez décidé de nous
interpeller sur un dossier important, sur un dossier important comme la
contrebande, en arrivant de nouveau avec votre
«remâché». vous vous moquez de l'assemblée
nationale. vous vous moquez de l'assemblée nationale en utilisant
l'interpellation un vendredi matin, tout simplement pour empêcher le vrai
travail de s'effectuer. c'est ça que vous êtes en train de
faire.
Vous comprendrez que s'il y avait une solution, bien, M. le
Président, vous le savez fort bien, s'il y avait une solution
concrète, constructive de la part du député, il me ferait
plaisir de la mettre de l'avant. Il me ferait plaisir. Tous ceux et celles qui
ont eu à travailler avec moi savent que je suis toujours ouvert, savent
que je ne regarde ni la provenance, ni la source de l'information d'une
critique constructive et que je vais utiliser tous, absolument tous les moyens
à ma disposition pour aider à réduire la contrebande de
cigarettes au Québec, et je vais faire tout en mon possible, mais il
faudrait que ce soit bien clair.
Le député de Montmorency, M. le Président, ne m'a
jamais rencontré. Il n'a jamais demandé une rencontre, il ne m'a
jamais envoyé de note, il ne m'a jamais présenté un apport
quelconque au niveau de la contrebande, sauf sur la place publique où il
se gargarise devant du monde qui a de la misère à juger du
dossier, en se présentant avec sa toge romaine, en pensant avoir une
solution parfaite. Lui, il va régler ça parce que, lui, il
connaît ça!
Je peux vous dire, je vais vous lire encore ce que les gens de
l'industrie ont eu à dire de lui. Ils ont souligné, monsieur, que
ses propositions face à des gens ignorants ou peu connaissants du
dossier pouvaient susciter certains applaudissements, mais lorsqu'on
connaît le dossier, on réalise comment c'est vide, son discours.
Comment, finalement, pour citer Shakespeare, «it is full of sound, and
fury, and signifying nothing». C'est ça le problème, M. le
Président. C'est exactement ça le problème, et s'il veut
me rencontrer, s'il veut échanger avec des solutions...
Le Président (M. Camden): En conclusion, M. le ministre,
s'il vous plaît.
M. Savoie: ...il me fera plaisir, n'importe quand.
Le Président (M. Camden): Merci, M. le ministre, et je
cède maintenant la parole au député d'Orford.
M. Robert Benoit
M. Benoit: Merci, M. le Président. Je voudrais reprendre
ce que le ministre vient tout juste d'offrir à l'Opposition. C'est un
dialogue sérieux sur les grands enjeux des problèmes de la
cigarette et de tout ce qui entoure la situation de la cigarette. Nous en
sommes drôlement conscients, et ce n'est pas la première fois que
le ministre, d'ailleurs, ouvre la porte et dit à l'Opposition:
Écoutez, arrivez-nous avec des propositions sérieuses, on va les
regarder, on va travailler ensemble, c'est un problème qui est
important, on le reconnaît. Mais non. Ces gens-là viennent le
vendredi matin et, finalement, ne veulent pas faire avancer le débat du
tout, veulent se faire je pense et je reviendrai plus tard
là-dessus plutôt un peu de capital politique et c'est
malheureux parce que c'est un problème qui est important. (10 h 40)
M. le Président, les gens d'en face n'aimeront pas ça. Je
vais leur citer quelques statistiques du gouvernement canadien qui sont
très crédibles. Je veux leur rappeler que le cancer du poumon
tuera plus de femmes cette année que le cancer du sein. C'est des
chiffres qui font penser, qui font songer. On sait que l'augmentation de la
mortalité est reliée directement à la lenteur à
laquelle les fumeurs renoncent à leur habitude, et nous avons tous des
voisins, des amis qui, pour la dixième fois, nous disent qu'ils vont
arrêter de fumer et n'ont
pas arrêté de fumer. On a aussi le cancer du poumon qui
demeure le plus répandu chez les hommes qu'à peu près
toutes les maladies que nous pouvons trouver. Le nombre de cas et le taux de
mortalité se sont stabilisés on doit en être heureux
au cours des 30 dernières années en ce qui a trait
à la cigarette, mais il y a, de toute façon, même en se
stabilisant, un très grand nombre de décès qui sont dus,
malheureusement, à cause de la cigarette. Je pense que nous voulons
cesser l'épidémie des maladies causées par le tabagisme.
Je pense ici au cancer, les maladies cardiaques, les voies respiratoires, etc.
Et nous connaissons tous plein de gens qui sont pris de ces maladies et je
pense que, comme gouvernement, chez nous, on a commencé en 1991,
Clifford Lincoln est arrivé avec un règlement, entre autres, pour
bannir l'usage de la cigarette dans les lieux publics. Alors, on a fait des
efforts et on continue à en faire. je voudrais maintenant parler un peu
plus en profondeur responsable des dossiers des jeunes au bureau du
premier ministre je voudrais parler un peu de l'effet de la cigarette
chez les jeunes, m. le président. le new york times, il y a
quelques semaines, disait: «90 % of all smokers begin smoking as they are
teenagers.» ce sont les adolescents qui sont en ce moment les plus
affectés comme nouveaux consommateurs de la cigarette. alors, je pense,
m. le président, qu'il nous faut éduquer nos adolescents sur les
méfaits de la cigarette. en 1986, une enquête parmi des jeunes
âgés de 12 à 17 ans révélait que 50 % des
élèves commencent à fumer vers l'âge de 12 ans. vous
qui êtes pères et mères de famille avez probablement eu
l'occasion un bon soir de fouiller dans le «pacsac» de votre jeune
adolescente ou de votre jeune garçon qui revenait de l'école et
d'y trouver le paquet de cigarettes et l'enquête au souper, on a tous
vécu ça chacun à notre tour. il y a quelque chose
là d'assez profond, finalement, où les jeunes commencent
très jeune à fumer, à l'âge de 12 ans; 90 % des
élèves qui fument quotidiennement quatre cigarettes et plus
deviendront des fumeurs réguliers. ce n'est pas beaucoup quatre
cigarettes sur 24 heures et ces gens-là auront une habitude qui va faire
qu'ils deviendront des fumeurs réguliers.
On commence à fumer, M. le Président, pour toutes sortes
de bonnes raisons. On veut faire comme les amis quand on est adolescent pour le
«thrill» de se sentir important ou peut-être même pour
perdre du poids. M. le Président, ayant moi-même deux belles
adolescentes de 14 et de 16 ans, combien de fois ai-je pu
réfléchir sur le phénomène des jeunes qui fument.
Et je vous dirai franchement que j'ai l'impression d'avoir besoin d'aide comme
société. D'abord, comme parent, j'ai besoin d'aide et je ne peux
pas faire autrement quand j'ai une plate-forme comme celle qui m'est offerte
aujourd'hui, une tribune, de dire aux influenceurs dans notre
société et aux gens de l'Opposition, de façon
particulière, qu'ils sont importants dans la société,
qu'ils représentent un bon nombre de comtés ici, que nous avons
une job d'éducation à faire. Moi je vous dirai que je suis
toujours surpris quand je vais dans une pharma- cie, par exemple, et au
même moment où on nous vend des pilules contre la toux, on nous
vend aussi des cigarettes au comptoir en sortant. M. le Président, j'y
reviendrai dans un autre cinq minutes que j'aurai dans quelques minutes,
comment nous avons un ouvrage d'éducation à faire dans la
société en ce qui a trait à la cigarette.
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
député. Je reconnais maintenant le député de
Montmorency, pour une période de cinq minutes.
M. Jean Filion
M. Filion: Merci, M. le Président. Toujours dans un
débat constructif, même si le ministre, au fond, ne veut pas
s'occuper de sa fonction de ministre, il aimerait mieux être ailleurs, et
je pense que c'est important qu'il soit ici aujourd'hui, M. le
Président. Un ministre, ça doit répondre à des
questions, surtout quand il y a un fléau social aussi important que la
contrebande du tabac. Je pense qu'il a des responsabilités et je pense
que ça démontre en même temps qu'il a l'impression
d'être triste d'être ici ce matin, bon, parce qu'il aurait
aimé faire autre chose ailleurs. Mais c'est plus important d'être
ici ce matin, M. le Président. C'est important d'être ici; la
population veut comprendre où on s'en va avec ça. Il faut faire
le débat sur la place publique, même si ça lui fait mal au
fond.
M. le Président, la proposition que j'ai soulevée en
novembre, c'est simple, il faut penser à une réduction de taxes.
Il trouve ça naïf, le ministre, une réduction de taxes,
c'est son problème, mais tout le monde le décrie et les propres
associations que lui-même a citées tout à l'heure sont
venues en commission parlementaire, puis elles ont dit: Oui, vous n'avez pas le
choix, il faut réduire les taxes si vous voulez mettre fin à la
concurrence déloyale et arrêter qu'on vienne nous domper des
cigarettes qui viennent de l'extérieur parce que eux n'ont pas de taxes.
Vous n'avez pas le choix, il faut que vous réduisiez les taxes. Je pense
que ça, si vous trouvez ça naïf, vous direz à toute
la population du Québec que c'est naïf que de penser réduire
les taxes. M. le ministre, soyez sérieux, ce matin. Je comprends que
vous n'êtes pas en forme, vous n'avez pas envie d'être ici, mais il
faut tenir un discours sérieux, c'est important pour la population.
Alors, le phénomène de réduction de taxes, oui, je
pense qu'il faut l'envisager; oui, il faut le regarder si vous voulez retrouver
un prix concurrentiel normal parce que, nous, on charge trop de taxes, 70 % de
taxes qu'on charge. Imaginez-vous, un paquet qu'on vend 6,43 $, vous vous
retrouvez avec 4,59 $ de taxes sur 6,43 $, un paquet de 25 cigarettes. Les gens
en ont ras le bol des taxes. Et quand ils ont la chance d'acheter un paquet
sans taxe, bien, ils l'achètent sans taxe; c'est normal, c'est humain.
Alors, le phénomène, c'est le problème des taxes. Quand on
lance l'idée de réduire les taxes, accompagnée d'une
nouvelle dynamique fiscale, il ne faut pas quand même tomber sur la
nouvelle dynami-
que fiscale pour dire qu'il ne faut pas réduire les taxes. Je
pense que, M. le ministre, il faut que vous gardiez votre
crédibilité dans le débat aussi.
Le phénomène, c'est qu'il faut réduire les taxes,
vous n'avez pas le choix. Alors, il faut réduire les taxes, mais
arrêtez de penser que ce que vous appliquez depuis tant d'années
comme dynamique fiscale, c'est la bonne, il faut la changer, même si
ça fait mal à l'industrie du tabac. Il faut penser à la
changer. Ne vous attendez pas à ce qu'ils vous disent qu'ils sont
d'accord avec ça, c'est évident. Mais vous avez une
responsabilité de ministre du Revenu et je pense qu'il faut que vous
mettiez, en quelque part, en avant votre positionnement et dire: Bien oui! Et
s'il faut identifier un réseau pour les cotiser, qu'on le fasse, parce
qu'on manque d'argent, actuellement. On en manque grassement d'argent dans le
trésor public; vous le savez, vous êtes en train de couper
partout. Les gens vont crier parce que vous n'assumez pas votre
responsabilité d'aller chercher les deniers publics. Vous avez des
moyens qui existent au ministère du Revenu, des cotisations arbitraires,
quitte à mettre le fardeau et dire: Venez faire votre preuve. Vous
pouvez faire des gestes comme ministre que vous ne faites pas. Je peux
comprendre que c'est un débat compliqué, oui, c'est vrai; mais
arrêtez de penser que de changer la dynamique fiscale, ça n'a pas
sa place. Oui, réduisons les taxes pour retrouver un marché
économique concurrentiel, mais changeons la dynamique fiscale. Si mon
idée de remboursement, vous voulez l'ajuster, ajustez-la, ce n'est pas
grave, mais arrêtez de dire aux gens que ce n'est pas une solution et
qu'il ne faut pas l'envisager. C'est compliqué, j'admets, mais il faut
l'envisager parce que le problème est sérieux, un.
Deux, M. le Président, pour vous montrer jusqu'à quel
point le gouvernement du Québec est inconscient du problème,
j'aimerais que le ministre de la Santé bien, il n'est pas ici
là mais que le ministre du Revenu, qui lui contrôle les
deniers publics du Québec, nous dise combien d'argent il consacre,
chaque année, pour sensibiliser la population aux conséquences
dévastatrices au niveau de la santé. On le reconnaît, M. le
Président; on le reconnaît. Mais combien ils injectent d'argent
pour sensibiliser la population à arrêter les gens de fumer?
Comment est-ce qu'on les informe? Vous savez, on a fait une campagne de
publicité sur: L'alcool, c'est criminel! Mais qu'est-ce qu'on a fait
pour la santé avec le tabac au Québec? C'est quoi, ce
gouvernement-là, qui ne collecte pas son argent, ses deniers publics et
qui, en plus, ne fait rien pour sensibiliser la population au problème
que l'on vit, qui est majeur? Alors, comment se fait-il que le ministre du
Revenu, qui lui tient un discours encore et on ne sait pas trop
où il s'en va... Il cite des phrases, il n'amène rien de concret
mais qu'est-ce qu'ils ont fait comme deniers publics... Même
l'Association des non-fumeurs défiait le ministre de la Santé de
lui dire combien d'argent ils avaient injecté. Ils lancent des images
aux gens, M. le Président, mais, dans le concret, il ne se passe rien,
strictement rien. Le ministre du Revenu, peut-être qu'il va oser nous
dire, lui, à son niveau, parce qu'il contrôle les chiffres, il les
voit, lui, il perçoit l'argent, alors, à son niveau, peut-il nous
dire, dans son geste de sensibilisation de la population au problème de
la santé, combien il consacre d'argent chaque année de son
gouvernement pour dire aux gens: Écoutez, c'est dangereux pour la
santé de fumer? Combien est-ce qu'il en consacre, comme on l'a fait, par
exemple...
Le Président (M. Camden): En conclusion, s'il vous
plaît, M. le député.
M. Filion: ...pour l'alcool au volant, M. le Président?
J'aimerais entendre le ministre là-dessus.
Le Président (M. Camden): M. le ministre du Revenu, pour
une période de cinq minutes.
M. Raymond Savoie
M. Savoie: On les a entendues, ses solutions, M. le
Président. Première solution: Le ministère du Revenu du
Québec, celui qui est responsable pour aller chercher 24 000 000 000 $,
25 000 000 000 $ à travers les taxes et les impôts, le
ministère du Revenu doit diriger une campagne de financement pour
démontrer à la population que, fumer, ce n'est pas bon pour la
santé! Nous autres, le ministère du Revenu, à même
notre budget de fonctionnement, on va s'embarquer dans une campagne pour
démontrer à la population que, fumer, c'est néfaste pour
la santé! Ça, c'est une solution, ça, c'est brillant!
Franchement, je vous donne un «cinq étoiles»
là-dessus, vous allez aller loin, vous! Vous ne serez jamais ministre du
Revenu, je veux dissiper tout doute dans votre esprit. Je sais que vous laissez
croire ça aux gens de Montmorency, mais je voudrais mettre les cartes
claires sur la table à tout le monde. Arrêtez de rire du monde.
Arrêtez de rire du monde. Voir si c'est crédible que le
ministère du Revenu du Québec va commencer une campagne pour
démontrer aux gens que ce n'est pas bon de fumer! (10 h 50)
M. Filion: ...le ministère de la Santé.
M. Savoie: Tu as dit: Le ministère du Revenu.
C'était ça, ton intervention. Là, si tu dis: Bon non,
là ce n'est pas le ministère du Revenu, c'est le ministère
de la Santé et des Services sociaux du Québec, bien, mon Dieu!
pourquoi est-ce que vous ne vous adressez pas au ministre de la Santé et
des Services sociaux du Québec? Pourquoi est-ce que vous m'appelez en
interpellation ici ce matin pour me parler d'une campagne que le ministre de la
Santé... Moi, je ne peux pas parler pour le ministre de la Santé
et des Services sociaux, malgré le fait que je sais que,
personnellement, il appuie très favorablement une réduction
importante de la consommation de tabac au Québec. Et je sais que le
ministère de la Santé et des Services sociaux, depuis plusieurs
années, pour ne pas parler de deux générations,
mène une campagne au Québec pour démontrer l'impact
négatif sur la santé. Et j'ai des documents là-dessus
qu'il me fera
plaisir de déposer, M. le Président, et qui ont
été rendus publics par le ministère de la Santé et
des Services sociaux sur le coût pour la cigarette pour l'ensemble des
Québécois et des Québécoises qui dépasse les
2 000 000 000 $. J'ai souligné à plusieurs reprises que les
rumeurs au Québec nous coûtent, en soins directs,
c'est-à-dire en rayons X, en médecins, la
«castonguette», quand le citoyen se présente devant... Il y
en a pour 900 000 000 $, M. le Président, deux fois plus que ce que nous
rapportent les taxes dans le tabac.
Alors, première solution, le ministère du Revenu doit
diriger une campagne de financement. Franchement, on va parler de ça
ailleurs. Baisser les taxes. Ça ne relève pas du ministre du
Revenu de baisser ou de hausser les taxes au Québec. Le ministre du
Revenu, sa politique consiste à aller chercher l'argent de la
façon la plus équitable possible, donc, en quelque sorte, de
passer le chapeau et que les gens paient leur dû. C'est ça, le
rôle du ministère du Revenu et c'est ce que nous faisons... des
mécanismes aujourd'hui très complexes au niveau du revenu pour
les taxes, les impôts. On sait que c'est particulièrement complexe
aujourd'hui à cause de la finesse et... les mesures qui sont
utilisées par les différents ministres des Finances pour assurer
justement un bon rendement au niveau du développement fiscal. Mais
certainement pas arriver puis réduire les taxes de 1 $ le paquet, comme
souhaiterait... Voir si c'est la fonction du ministre du Revenu!
Je vous ai expliqué qu'il y actuellement une table et, autour de
cette table, se réunissent cinq ministres et, ensemble, nous cherchons
un ensemble de mesures. Si vous voulez que, par exemple, le gouvernement du
Québec intervienne, il faudrait qu'il parle avec le député
de Labelle et que le député de Labelle qui est le critique en
matière de finances entretienne le ministre des Finances du
Québec et non pas le député de Montmorency qui en parle
avec le ministre du Revenu. Ça n'a pas de bon sens. Ça ne
relève pas de nous autres, une politique fiscale au niveau de la hausse
ou la baisse des taxes. Nous, notre tâche, c'est d'appliquer la loi de la
façon la plus équitable possible ici au Québec. c'est quoi
ses solutions, m. le président? c'est quoi ses solutions? il va nous
parler d'une politique qui concerne les indiens. je vais lui citer en exemple
terre-neuve, l'île de terre-neuve sur laquelle il n'y a aucune
réserve autochtone, aucune, et dont la contrebande est de l'ordre de 50
% sur l'île. est-ce que c'est ça la solution? est-ce que c'est
ça l'approche? est-ce que c'est ça qui va empêcher les gens
de taiwan d'importer, d'exporter du tabac rothmans en paquet, par exemple, ici
quelque part au québec, à vancouver, un cargo de cigarettes?
Je vous le dis, et je réitère mon offre... Je sais qu'il
ne me reste plus rien que 30 secondes et je vais résumer
là-dessus. Je réitère mon offre, et de bonne foi, au
député de Montmorency. S'il veut qu'on examine une proposition
après l'autre qu'il nous fait avec des gens du ministère, il me
fera plaisir de le faire. Il me fera plaisir de le faire. On est prêts
à s'asseoir avec et à examiner pour qu'il comprenne davantage le
dossier pour que sa critique soit un petit peu plus constructive.
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
ministre. Maintenant, nous allons entendre le député de
Deux-Montagnes pour une période de cinq minutes.
M. Jean-Guy Bergeron
M. Bergeron: Merci, M. le Président. Moi, je désire
continuer dans le sens de l'intervention de mon confrère d'Orford tout
à l'heure qui a parlé des effets néfastes du tabac sur la
santé.
J'aimerais vous soumettre une perspective particulière sur ce
sujet de l'heure qu'est le tabagisme. Je pense qu'on est tous au courant de
ça, M. le député de Montmorency. Ce n'est rien de nouveau,
hein? J'ai oeuvré plusieurs années dans le domaine médical
grâce à ma pratique de dentiste. Mieux que quiconque, j'ai pu
apprécier les désavantages reliés à cette
habitude.
Qu'on me permette d'abord de situer ce problème au niveau
«interventionnel». Le 23 mai 1992, l'Organisation mondiale de la
santé, l'American Cancer Society et l'Impérial Cancer Research
Fund du Royaume-Uni publiaient les résultats d'une étude
continue, réalisée sur six ans, qui est la plus complète
jamais réalisée sur les décès dus au tabagisme.
À partir de recherches, portant sur plus de 1 000 000
d'Américains, terminées récemment, et de données
précises recueillies dans tous les autres pays industriels, elles
évaluent le nombre total des morts imputables au tabac dans l'ensemble
des pays développés. On estime, M. le Président, que le
nombre de décès annuel causés par le tabagisme dans ces
pays sera de 2 100 000 personnes en 1995. Quarante pour cent des fumeurs seront
en définitive victimes de leur dépendance vis-à-vis du
tabac.
Au Québec, ce qui nous intéresse tout
particulièrement, le problème se pose avec autant
d'acuité. Les chiffres sont révélateurs et parlent
d'eux-mêmes. Ainsi, le tabagisme est la cause principale de
mortalité évitable au Québec. Cette année,
malheureusement, 25 000 enfants québécois deviendront des
fumeurs. Pour la plupart d'entre eux, c'est le début d'une consommation
régulière qui entraînera malheureusement la
dépendance. Beaucoup deviennent dépendants avant d'être en
âge de prendre leur propre décision et avant même d'avoir
atteint l'âge idéal pour acheter du tabac.
Selon des chercheurs du département de la Santé et du
Bien-être social, Canada, une enquête qui a été faite
en 1989, le Québec, malheureusement, comptait 9952 décès
prématurés attribuables au tabac. Cette donnée se compare
à 4818 décès attribuables à l'alcool et 55
décès attribuables à l'abus des drogues. Le Québec,
M. le Président, détient toujours la plus grande proportion de
fumeurs réguliers au Canada et, cela, quel que soit le groupe
d'âge étudié. Il s'agit d'un grave problème de
santé publique que le gouvernement, que mon gouvernement, tente de
combattre de manière efficace.
M. le Président, le deuxième point de mon inter-
vention a trait aux conséquences du tabagisme sur la
santé. deux éléments en découlent: l'inhalation
directe et l'exposition involontaire à la fumée. d'abord,
l'inhalation directe. alors que d'autres produits peuvent être dangereux
s'ils sont mal utilisés ou si on en abuse, le tabac est le seul produit
de consommation légal qui tue. il n'y a aucun seuil de toxicité
sécuritaire quand il s'agit de consommation de tabac. son usage cause 30
% des décès dus au cancer, 30 % des décès dus aux
maladies du coeur et 90 % de tous les décès dus aux maladies
chroniques du poumon.
On me fait signe, M. le Président, que mon temps achève.
Alors, je voudrais passer à la conclusion. Il est évident qu'une
stratégie globale de lutte contre le tabagisme diminue les risques pour
la santé des Québécois et des Québécoises.
En 1986, mon gouvernement libéral a d'ailleurs reconnu officiellement
ces dangers associés à la fumée indirecte par l'entremise
de la loi 84 portant sur la fumée dans les milieux de travail. En
conclusion, M. le Président, le Québec vit actuellement de
réels problèmes. Je conclus aussi sur la remarque suivante: Le
problème de la contrebande menace les gains en matière de
santé et il est temps et j'espère que ma brève
intervention sera entendue par notre jeunesse et par la population en
général dans l'intérêt de leur santé. Merci,
M. le Président. (11 heures)
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
député de Deux-Montagnes. Croyez bien que j'ai entendu vos propos
et votre préoccupation à l'égard de la santé. Je
cède maintenant la parole au député de Montmorency.
M. Jean Filion
M. Filion: Merci, M. le Président. Par chance que le
ministre est accompagné de deux députés qui comprennent le
débat, M. le Président. Eux, ont parlé de santé
tout à l'heure. Et le ministre, lui je pense que la santé
ce n'est pas important pour lui il n'a pas compris les questions que je
lui posais tout à l'heure, mais ces deux députés, Orford
et Deux-Montagnes, M. le Président, comprennent le débat sur la
santé. Ils sont ici pour en discuter et j'apprécie leurs
commentaires, M. le Président.
Effectivement, ce qu'ils soulèvent, c'est exact, mais j'aimerais
aussi leur dire en même temps que le fléau social actuel est pire
sur les conséquences de la santé, M. le Président, parce
que, là, on a de la contrebande. La consommation est demeurée la
même. La consommation se fait de façon illégale. Les jeunes
ont plus de facilité d'accès. Pourquoi? Ça coûte
moins cher sur la contrebande. Alors, M. le Président, ils l'ont
soulevé le débat de la santé, mais il est loin
d'être résorbé avec le problème qu'on a là.
Il est pire. Pourquoi? Parce que les jeunes ont accès d'une façon
plus simple et plus facile. Ça coûte moins cher. Ils vont dans le
réseau de la contrebande. Ils achètent des cigarettes. Ils en
consomment tant qu'ils peuvent. Ce que vous soulevez au fond, comme
problématique, c'est pire. Pour- quoi? Parce qu'on a un ministre du
Revenu qui tolère. Il ne trouve pas de solutions. Il voudrait que je
fasse son travail. Je suis dans l'Opposition, M. le ministre. Moi, je vous
donne des idées. Si vous ne les comprenez pas, c'est un autre
problème. Si vous n'êtes pas capable de les appliquer, si vous me
dites: Viens m'expliquer par la main comment le faire, M. le Président,
je ne peux quand même pas faire son travail. C'est lui le ministre.
M. le Président, je vais également vous citer, et c'est
important, le 18 février, la présidente de l'Association
québécoise des non-fumeurs, ce qu'elle disait: «J'aimerais
ici dénoncer une illusion souvent rapportée dans les
médias. Plusieurs s'imaginent qu'une portion significative des taxes
perçues sur les cigarettes est investie dans la lutte au tabagisme. Rien
n'est plus faux c'est la présidente qui dit ça
surtout au Québec.» Je mets au défi Marc-Yvan
Côté de démontrer que le ministère de la
Santé a dépensé dans la lutte au tabagisme 0,1 % des taxes
récoltées par son gouvernement sur les cigarettes, M. le
Président. On dirait que ce gouvernement-là, M. le
Président, il aime ça aller chercher des taxes sur les cigarettes
et il s'en fout de la santé, au fond. Ce n'est pas important pour lui,
la santé. Il prend des taxes sur les cigarettes. Si, au moins, il les
collectait. Il ne les collecte même pas, le ministre. Il ne les collecte
pas, M. le Président. Il ne les collecte pas depuis 1988. en 1988-1989,
il a augmenté les taxes sur le tabac. la taxe spécifique sur le
tabac, il l'a augmentée de 52 %. ce n'est pas de la rigolade. de 52 %
qu'il a augmenté la taxe sur le tabac, une taxe spécifique. m. le
président, c'est quoi le résultat de tout ça?
écoutez bien ça. il augmente sa taxe spécifique qui passe
de 4,52 $ par 100 cigarettes à 6,88 $ par 100 cigarettes. il l'augmente
de 52 % en trois ans. on se serait attendu à des augmentations de
rentrées fiscales. c'est normal, on augmente les taxes. si le ministre
faisait sa job, les taxes seraient rentrées. non, m. le
président, ce n'est pas ça qui se passe. le ministre augmente la
taxe ou, du moins, disons le ministre des finances parce que le ministre du
revenu va dire: moi, je suis chargé de la collecter, mais je ne la
collecte pas. alors, le ministre des finances augmente la taxe de 4,52 $
à 6,88 $, 52 % d'augmentation.
Alors, au moment où elle était à 4,52 $, M. le
Président, en 1988-1989, le trésor public récoltait 554
000 000$. C'était bon, 554 000 000$ de taxes, mais, ce n'est pas grave,
la santé, on prend des taxes. La santé, ce n'est pas important,
on ne mettra rien pour sensibiliser la population. Qu'ils crèvent! Ce
n'est pas plus important, en autant qu'on ramasse nos taxes. Mais ce n'est pas
ça qui se passe, M. le Président. Le montant de 554 000 000 $
qu'on percevait avant l'augmentation, maintenant il est réduit à
478 000 000 $. Ça n'a pas de bon sens et, ça, c'est dans les
chiffres du gouvernement. J'espère que le ministre n'aura pas le culot
de venir dire que, là, je lance des chiffres en l'air, parce que,
l'autre jour, il m'a dit que les 4 110 000 000 $, il ne savait pas d'où
ça venait. Ça venait des propres chiffres de son gouvernement, M.
le Président. Il ne savait même pas lui-même d'où
ça venait.
M. le Président, il augmente de 52 % et il perçoit moins
d'argent qu'il en percevait avant et le ministre dit qu'il fait son boulot.
Écoutez, là, s'il a augmenté ses taxes, qu'il aille les
chercher. Et il me demande de lui expliquer comment faire pour aller les
chercher, M. le Président. Là, il y a des limites. Je vais lui
donner des idées, mais s'il ne les comprend pas, là, je ne peux
pas aller plus loin que ça. Moi, je fais mon travail de critique. La
santé, on soumet, ce matin, qu'elle est en péril, et le bill
C-111 du gouvernement fédéral qu'il a mis en place pour que les
gens qui vendent des cigarettes dans le réseau légal aux moins de
18 ans ce soit défendu, c'est ridicule. Vous savez très bien
qu'il ne s'en vend plus dans le réseau légal. Tout se vend d'une
façon illégale. C'est de dire aux jeunes: Vous voulez consommer,
allez en acheter dans le réseau de la contrebande. C'est là que
vous allez en avoir. C'est facile. On a fait une loi, mais une loi
inapplicable.
Le Président (M. Camden): En conclusion, M. le
député.
M. Filion: C'est ça que vous partagez comme orientation.
Voyons donc, M. le Président, il faut qu'il y ait plus de sérieux
ici ce matin. Je comprends que le ministre veuille être dans son
comté, mais, écoutez, il y a un problème au
Québec....
Le Président (M. Camden): En conclusion, s'il vous
plaît.
M. Filion: ...la contrebande du tabac, M. le ministre. Alors, la
santé fait partie du débat et, si vous ne comprenez pas pourquoi
ça fait partie du débat, parlez à vos voisins en
arrière. Ils viennent d'en parler dans leur intervention.
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
député de Montmorency. Je reconnais maintenant le ministre du
Revenu pour une période de cinq minutes.
M. Raymond Savoie
M. Savoie: Merci, M. le Président. Avec un discours, M. le
Président, on est vraiment dans le désert. Ça n'a pas de
bon sens. C'est d'une pauvreté intellectuelle désarmante,
désarmante. Ça n'a ni queue ni tête, un discours de pauvre,
M. le Président, de pauvre au plan intellectuel. Ça n'a pas
d'allure! Ça n'a pas d'allure! Je venais juste de citer les chiffres que
ça coûte, en termes de santé, le tabagisme au
Québec, et il me dit que je n'en parle pas.
Il vient nous dire que c'est moi qui hausse les taxes, je devrais au
moins les collecter. C'est le ministre des Finances, dans son budget, qui
établit les taxes, d'une part, et on devrait commencer avec le ministre
des Finances à Ottawa qui, lui, sur un paquet de cigarettes j'ai
eu l'occasion de le mentionner au début de mon discours va
chercher sur un paquet de cigarettes 47 % contre 36 % pour le québec.
c'est ottawa qui, d'un coup, a haussé ses taxes sur un paquet de
cigarettes de 0,75 $, qui a déclenché le processus. c'est
ça qui a déclenché le processus. après quatre
hausses successives, il s'est permis d'imposer une taxe de 0,75 $ sur un paquet
de cigarettes. et c'est ça qui a déclenché le processus,
le québec, avec 36 % des taxes. et on a souligné que le
québec était la province où on taxait le moins au canada,
à l'exclusion seulement de deux autres provinces. alors, à qui
parlez-vous et de quoi parlez-vous? à qui parlez-vous et de quoi
parlez-vous?
Arrivez-nous avec des propositions. Arrivez-nous puis dites-nous: Telle
affaire qui se passe actuellement au ministère du Revenu ne fonctionne
pas ou bien taisez-vous, un des deux. Arrivez avec une critique constructive ou
bien taisez-vous. Arrivez avec des propositions qui sont, tout au moins,
examinables sur le plan public, et on va les examiner ensemble, ou bien
taisez-vous. Mais arrêtez de dire n'importe quoi. On en a ras le bol et
vous n'êtes pas drôle et vous n'augmentez pas du tout votre
crédibilité. C'est ce que je suis en train de vous dire.
Et je vais citer encore un intervenant qui a dit au député
devant tout le monde... Il a dit au député, au niveau de sa
proposition: Elle est non applicable. Elle peut être moralement belle et,
dans un discours devant des personnes qui ne connaissent rien dans le tabac,
elle peut peut-être attirer des applaudissements. Mais je peux vous dire
que c'est nul, ça ne vaut rien. C'est ça qu'il se fait dire par
un intervenant qui vient parler à une commission parlementaire au salon
rouge.
C'est ça le problème, et je le répète au
député de Montmorency avec qui, en dehors du dossier de
contrebande, on a quand même, de temps à autre, des
échanges que je suis prêt à collaborer. Il me
connaît, il sait que je suis de cette nature-là. Je suis ouvert
à tout ce qui est constructif. Je suis ouvert à n'importe quel
apport qui peut nous aider dans notre dossier. Je suis même prêt
à travailler avec lui sur des solutions, ensemble, regarder d'une
façon serrée chacune... mais il n'en parle que sur la place
publique et que pour se gargariser. Il tire sur tout ce qui bouge, la
santé, les importations, les exportations. Arrivez avec une taxe de
préperception, non, une taxe à l'exportation, non, non, non!
Ça n'a pas de bons sens! J'invite le député
à un peu plus de calme, d'une part. Deuxièmement, j'invite le
député à un petit peu plus de réflexion avant de
parler et, troisièmement, s'il a encore des idées sur ce qu'on
pourrait faire, bien, je l'invite, et on va s'asseoir, puis on va examiner
ça ensemble, et on va échanger là-dessus. Et là, au
moins, il pourra jouer son rôle de député de l'Opposition
avec un petit peu plus de stabilité. Il va arrêter de dire
n'importe quoi sur n'importe qui. Il va commencer à
réfléchir un petit peu plus davantage et apporter quelque chose
à ce salon, apporter quelque chose à nos
délibérations au lieu de dire, finalement, et de
révéler à tout le monde qu'il est d'une pauvreté
intellectuelle incroyable en ce qui concerne le dossier du tabac.
C'est ça qu'on est en train de lui dire. C'est ça qu'on
est en train de lui dire. Arrivez-nous avec quelque chose. Arrivez-nous avec
quelque chose. Je vous garantis, je vous garantis qu'on va y donner suite. Je
vous garantis ça. Arrivez-nous avec une proposition, aussi minime
soit-elle. On va la mettre en exécution. On est ouverts. La porte est
grande ouverte, chez nous, comme elle l'est depuis toujours et depuis qu'on
échange parce qu'il sait que, sur demande, on peut se rencontrer, pour
échanger sur des problèmes qui, effectivement, sont des
problèmes importants, non seulement pour le Québec, mais pour
l'ensemble du Canada. (11 h 10)
Le Président (M. Camden): Je vous remercie, M. le
ministre, et je...
M. Savoie: Un peu plus d'humilité, M. le
député.
Le Président (M. Camden): ...cède maintenant la
parole au député d'Orford.
M. Robert Benoit
M. Benoit: M. le Président, encore une fois, le ministre a
une approche libérale des choses où il dit à l'Opposition:
Écoutez, nous, on est prêts, faites-en, des propositions
sérieuses, on va les regarder. C'est une approche libérale,
ça. On n'est pas fermés dans notre vérité, on est
prêts à ouvrir, à regarder autour de nous et dialoguer avec
tous les intervenants de la société. Moi, j'aime ça, cette
approche-là.
Ceci dit, M. le Président, j'aimerais... Hier soir, quand j'ai su
que je devais prendre la parole ici, aujourd'hui, et le sujet qui
m'intéressait, je me suis posé la question suivante: Est-ce que
c'est nous autres qui vendons trop cher ou est-ce que c'est les
États-Unis qui ne vendent pas assez cher? Parce que c'est ça que
les gens nous disent dans la société et j'ai décidé
de prendre le deuxième argument et de regarder qu'est-ce qui se passait
chez nos voisins du Sud.
On sait tous que M. Clinton, qui fut élu il y a quelques mois, a
décidé de prendre en main la responsabilité de la
santé, ce que, nous, on a fait depuis très longtemps, depuis les
annés soixante au Québec, et on sait le coût
extraordinaire, 13 000 000 000 $ par année, ici, au Québec, pour
la santé. Alors, M. Clinton est en train de réaliser, en ce
moment, que la santé va lui coûter très cher. Et une des
façons dont il devra financer sa santé il ne pourra pas
passer à côté c'est avec la cause même d'une
des grandes problématiques de la santé, la cigarette.
Jimmy Carter, l'ancien président des États-Unis, lui
écrit, et c'était, encore une fois, dans les journaux
américains, le 16 février. Jimmy Carter a été un
des présidents américains avec la plus grande conscience sociale
qu'on a eu dans les dernières 20, 30 années, dans les politiques
contemporaines. Et Jimmy Carter lui dit: Écoutez, M. le
président, vous êtes arrivé là, vous avez
été élu, le peuple américain veut qu'on s'occupe de
la santé, bien, la sohition, il n'y en a pas plusieurs, il y en a entre
autres une, elle est importante, c'est de charger 2$ j'ai le texte devant
moi du paquet, par année, par paquet de cigarettes. Et il lui
dit: Écoutez, ça rapporterait 30 000 000 000 $ aux
États-Unis. Il y a un demi-million d'Américains qui meurent
à cause de la cigarette et c'est là la solution. alors, je me
dis: coudon, il y a peut-être quelque chose qui bouge chez nos voisins du
sud et ça peut peut-être aller plus vite qu'on pense, m. le
président. après ça, on doit avouer aussi que les
états-unis sont à peu près les gens qui mettent la plus
basse taxe sur la cigarette au monde, m. le président. alors, quand on
regarde ce qui se passe en europe, quand on regarde ce qui se passe ailleurs,
au monde, on s'aperçoit que les américains, qui ne payaient pas
pour la santé, n'ont jamais vraiment taxé la cigarette. mais les
européens qui, eux, avaient des programmes partagés ou allaient
à 100 % pour la santé, de tout temps, ont eu des taxations
équivalentes à ce qu'a le québec en ce moment.
Et, finalement, on doit arriver à la conclusion, c'est malheureux
à dire, mais c'est peut-être nous autres qui avons le pas et c'est
peut-être les Américains qui ne l'ont pas, le pas. C'est un peu
extraordinaire de dire ça, nous, 6 000 000, on a 360 000 000 de gens
à côté de nous autres, mais quand je regarde l'Europe, avec
ses 360 000 000 de personnes, je dois avouer que c'est probablement nous autres
qui avons raison et les Américains devront, à plus ou moins long
terme, s'ajuster parce que, maintenant, ils vont payer pour la
santé.
Il y a eu des démarches qui furent faites, M. le
Président, les Américains sont en train de le prendre, le pas.
D'abord, Jimmy Carter qui écrit à M. Clinton, le président
des États-Unis. Il y a eu, depuis 1992, une démarche de tous les
pays du monde en ce qui a trait à ce qu'on appelle l'Organisation de
l'aviation internationale. On sait que ces pays-là, ces compagnies
d'aviation voulaient cesser la cigarette sur les vols internationaux. On sait
que les États-Unis se sont opposés de 1992 jusqu'à il y a
quelques mois, à cause du lobbying de la cigarette, qui est très
fort aux États-Unis. Mais, finalement, dans les dernières
semaines, ils ont concédé et ont accepté qu'à
partir de 1996 il n'y aura plus de cigarettes sur les vols internationaux. Or,
les Américains donnent des signaux qu'ils sont prêts maintenant
à aller dans ces directions-là.
Je vous rappellerai qu'en Europe, l'Europe des Douze, dont on parle
maintenant, ils sont arrivés à faire une législation
égale pour tous les 12 pays, au sujet d'harmoniser la taxation sur la
cigarette. Alors, là aussi, il y a une démarche, où nos
voisins d'Europe ont été capables de s'entendre. M. le
Président, est-ce qu'il est pensable, pour un instant, qu'au moment
où on est en train de négocier avec le Mexique et on
renégociera avec les États-Unis, est-ce qu'il est pensable,
à plus long terme, avec l'aide de l'Opposition, qu'on harmonise nos
politiques de taxation avec le gouvernement fédéral, avec nos
voisins des autres provinces? On sait qu'hier il y avait une réunion
avec le ministre de l'Industrie et du Commerce pour ce qui est d'harmoniser un
certain nombre de relations entre les autres provinces. Pour-
rions-nous y ajouter la taxation sur les cigarettes?
Et je finirai en vous disant, M. le Président, qu'aux
États-Unis il meurt, par semaine, 8300 Américains qui meurent de
la cigarette. Ça, c'est plus de monde qui meurent dans une semaine pour
cause d'alcool, les accidents d'auto, le sida, le suicide, les homicides, le
feu et le crack. Les Américains, ils sont probablement prêts
aussi, eux qui vont maintenant prendre la responsabilité de la
santé, à regarder une augmentation de la taxation chez leurs
payeurs de taxes. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Camden): Je vous remercie, M. le
député. Je cède maintenant la parole au
député de Montmorency.
M. Jean Filion
M. Filion: Merci, M. le Président. Ça commence
à être intéressant, le débat. Plus les
députés qui aident le ministre parlent, plus le débat
devient plus intéressant. C'est plus sérieux, M. le
Président. Je pense que le ministre a un problème de
compétence quelque part au niveau de son ministère et de son
fonctionnement. Je pense qu'il ne comprend pas tout ce qui se passe à
l'intérieur.
M. le Président, il y a un fait qui est clair. 25 cigarettes, au
Québec, ça coûte... Et ça, ce n'est pas moi qui le
dit, c'est la même association dont on parlait tout à l'heure. Il
fait sa démagogie avec sa petite phrase. M. le Président, la
coalition québécoise pour la justice en taxation du tabac, nous a
donné, à la commission parlementaire, il y a un mois, de
l'information quantitative intéressante où on dit: Le
Québec... M. le Président qu'il me laisse tranquille avec
ses provinces au Québec, ça coûte 4,53 $ de taxes
par paquet de cigarettes. C'est de la taxe, ça, M. le Président,
quand on vend environ 6,50 $ le paquet. M. le Président, ça
coûte, sur 6,50 $ le paquet de 25 cigarettes c'est simple à
comprendre 4,53 $ de taxes. Et aux États-Unis, M. le
Président, ceux qui nous font de la concurrence déloyale au
Vermont, 0,80 $ de taxes, que ça coûte au Vermont pas 4,53
$ de taxes par paquet, 0,80 $ 1,14 $ de taxes à New York par
paquet; 0,79 $ de taxes au New Hampshire, par paquet; au Maine, 1,15 $ de taxes
par paquet. Chez nous, 4,53 $ de taxes sur 6,50 $, le prix de détail, M.
le Président. Imaginez-vous! Et il est surpris d'avoir de la contrebande
sur son territoire. M. le Président, c'est d'être insouciant. Et
surtout, M. le Président, je pense que le ministre doit comprendre que
tout ce fléau-là se traduit actuellement par de l'incitation
à la désobéissance civile. Son propre document
budgétaire où les gens commencent à ne même pas
envoyer leur impôt de société. 460 000 000 $ de manque
à gagner. M. le Président, ce sont des chiffres, c'est clair,
c'est net, c'est précis. Le ministre, son rôle, c'est de collecter
les impôts, et il ne le fait pas. Je ne peux pas vous dire d'autre chose,
il ne le fait pas. On sait qu'à son ministère il a même
amnistié des fonctionnaires de leur im- pôt. On sait ça
aussi. Il n'a même pas pu me donner l'article de loi en vertu duquel il
l'avait fait, quand je l'avais questionné.
Le ministre, actuellement, il est dépassé par les
événements. Je peux comprendre ça. C'est un dossier
complexe. Mais c'est un dossier tellement sérieux. Il a une
responsabilité. Il semble vouloir se laver les mains de toute cette
décision-là. M. le Président, le ministre du Revenu doit
comprendre qu'on doit mettre en place une solution rapidement. Je comprends
qu'aux États-Unis il y a une tendance à la hausse au niveau de la
taxe. C'est vrai. C'est intéressant comme phénomène, parce
que ça va réduire les prix et on va pouvoir arriver à un
équilibre. Sauf que le problème, entre-temps, il faut le
régler chez nous. On peut penser à une solution transitoire aussi
et se réajuster au fur et à mesure qu'il y aura une
évolution mondiale au niveau des prix. Mais, là, il y a
fléau. Il faut prendre des décisions. Il faut en prendre des
décisions quelque part. Il y a des gens qui sont venus vous dire... La
même association dont vous me parliez vous a dit: II faut réduire
les taxes, c'est la seule façon. Ce n'est pas moi qui le disais, c'est
la coalition, M. le Président. C'est sûr que j'ai
été... Je l'ai dit au mois de novembre, qu'il fallait passer une
réduction de taxe pour rétablir une concurrence loyale. Mais
c'est la coalition québécoise pour la justice en taxation du
tabac qui l'a dit. Eux, ils vont même plus loin. Ils disent que le
gouvernement perd plus de 500 000 000 $ en taxes, par année, parce
qu'ils ont réussi à laisser aller sur le territoire, qui est
incontrôlable, à toutes fins pratiques, un réseau de
contrebande. M. le Président, ces chiffres-là, de 500 000 000 $
de manque de taxe pour le Québec... Plus de 500 000 000 $. Et quand vous
regardez les taxes que le fédéral perd aussi, c'est plus de 1 000
000 000 $. Alors, le problème, il est sérieux. Il est
très, très, très sérieux. Et ça a des
conséquences secondaires au niveau de la santé, au niveau de
l'accessibilité des jeunes qui, eux, peuvent arriver à consommer
plus facilement. Et, quand on parle d'augmenter les taxes pour arrêter
les fumeurs, ce n'est pas nécessairement uniquement l'augmentation des
taxes qui va arrêter les gens de fumer. Parce que vous remarquerez qu'au
Québec, même si on avait des taxes élevées, M. le
Président, les gens, ils n'ont pas arrêté de fumer pour
ça. Ils se font plus mal dans leur budget personnel de la famille, puis
ils dépensent plus d'argent pour fumer. Parce que c'est une forme, en
quelque sorte, de drogue, ça, la cigarette. On n'arrête pas les
gens de fumer comme ça, M. le Président, parce qu'il y a une
taxe. C'est un besoin organique qu'on a légalisé au niveau de la
consommation. Les gens se sentent le besoin de se priver ailleurs pour acheter
des cigarettes, mais il faut ajouter à ça la campagne de
sensibilisation à la population. C'est ça que vous ne faites pas,
comme gouvernement. Vous faites partie d'un gouvernement, arrêtez de vous
isoler comme un petit ministre du Revenu qui n'a rien à voir avec le
reste, M. le Président. (11 h 20)
Le Président (M. Camden): En conclusion, M.
le député, s'il vous plaît.
M. Filion: C'est tout ce que j'avais à dire.
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
député de Montmorency et je cède maintenant la parole au
ministre du Revenu.
M. Raymond Savoie
M. Savoie: Oui, merci, M. le Président. Alors, vous voyez
le genre de commentaires auxquels on a droit: des déclarations fausses,
des affaires, là, cousues de fil blanc, des déclarations à
l'emporte-pièce, des recommandations absurdes, je veux dire, qui me font
rire puisque je sais qu'il sait mieux, d'ailleurs...
D'ailleurs, vous n'avez qu'à lui regarder le sourire, M. le
Président, vous voyez tout de suite qu'il sait ce qu'il est en train de
faire ici, c'est qu'il est en train de faire une interpellation un vendredi
matin. C'est ça qu'il est en train de faire et c'est tout, rien d'autre.
Il utilise la structure parlementaire pour s'amuser un vendredi matin, M. le
Président. C'est ça qu'il est en train de faire. Ça n'a
pas de bon sens.
Si j'étais capable de... Mon Dieu! démontrer au
député de Montmorency, encore une fois, tout le travail qui a
été fait, je le ferais. Ça prendrait, M. le
Président, une grosse journée, tout simplement à examiner
toutes les étapes, tout ce qui a été fait en termes de
législation, de réglementation, de démarches. Et ce n'est
pas nouveau. Ça fait plusieurs fois qu'on lui explique. Il faut qu'il
pense à ce qu'il est en train de dire. lorsqu'il nous dit qu'il y a 4,57
$ de taxes sur un paquet de cigarettes, je veux bien dire que c'est vrai. 11
n'y a personne qui nie ça. mais ce qu'il faut qu'il comprenne, c'est
que, sur le 4,57 $, la grosse majorité des taxes vient d'ottawa. est-ce
qu'il est capable de comprendre ce fait-là? est-ce qu'il est capable de
comprendre que ça ne dépend pas uniquement du québec,
qu'au québec on va chercher, sur un paquet de cigarettes, seulement 36 %
des taxes? est-ce qu'il est capable de comprendre que 36 % des taxes sur un
paquet de cigarettes proviennent uniquement du québec et qu'à ce
compte-là on est une des provinces qui taxent le moins un paquet de
cigarettes au canada?
Qu'est-ce qu'il nous apporte comme solution? Que le ministère du
Revenu s'embarque dans une campagne de publicité pour la santé.
Ça n'a pas de bon sens. Il le sait. Il le reconnaît, maintenant.
Je pense qu'on a fait un petit peu de progrès dans une heure et demie
d'échanges et il s'imagine: ah oui! c'est vrai, il faudrait que ce soit
le ministère de la Santé et des Services sociaux.
Je lui ai expliqué qu'il y a un comité ministériel
conjoint, créé depuis quelques mois, et que ce
comité-là échange d'une façon constante avec
Ottawa. Il va falloir qu'il comprenne que la solution vient
nécessairement d'une coopération entre le Québec et le
Canada et, même, non seulement les États du Nord-Est des
États-Unis avec lesquels nous avons des échanges
fréquents, mais également de la part du gouvernement
fédéral.
Il va falloir qu'il réalise que ça ne vient pas par un
geste basé sur une autonomie quelconque et, là, je ne sais pas
s'il est en train de faire l'indépendance du Québec sur un paquet
de cigarettes, mais sortir un petit peu de son dogmatisme, comprendre qu'il
faut absolument qu'Ottawa constate l'importance du dossier, constate
également l'importance des baisses des revenus pour les deux paliers de
gouvernement et qu'on travaille conjointement à une solution. Il va
falloir qu'il commence à réaliser que nous en sommes là
et, en conséquence, diriger ses efforts dans ce sens-là,
c'est-à-dire, au lieu de tirer sur tout ce qui bouge, au lieu de dire
n'importe quoi à n'importe qui, il va falloir qu'il commence à
comprendre ce que nous avons présenté à l'Assemblée
nationale à plusieurs reprises: les données de base du dossier.
les données de base du dossier d'un paquet de cigarettes sont, d'une
part, qu'ottawa taxe 47 % sur ie prix d'un paquet de cigarettes, le
québec, 36 %; deuxièmement, ces taxes existent
particulièrement depuis l'année 1989 où le gouvernement
fédéral est intervenu à plusieurs reprises;
troisièmement, que le québec n'a pas haussé d'une
façon aussi substantielle que les autres provinces au canada les taxes
sur les cigarettes et, quatrièmement, et je pense que c'est ce qui est
le plus significatif, c'est que toute solution, toute solution, doit être
une solution négociée avec les autres gouvernements. si
washington intervient avec une taxe importante sur le tabac, ça ne
réglera pas le dossier. ça va certainement le réduire
d'une façon importante, mais ça ne réglera pas en soi le
dossier puisque, comme je vous l'ai mentionné, les cigarettes qui sont
sur le marché actuellement proviennent, bien sûr, des
états-unis, mais également de l'angleterre, également de
l'est asiatique.
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
ministre. Je cède maintenant la parole au député de
Deux-Montagnes.
M. Jean-Guy Bergeron
M. Bergeron: Merci beaucoup, M. le Président. Dans ma
première intervention, j'ai parlé de l'effet nocif du tabac sur
la santé. Dans ma deuxième intervention, je voudrais faire appel
à la conscience des Québécois et des
Québécoises. La bataille que nous avons à livrer n'est pas
facile. On le constate, c'est un combat, on a de la misère, on cherche
les solutions. Mais il faut bien réaliser qu'il est bien connu que
certains intervenants rendent les gouvernements responsables de la contrebande
et soutiennent qu'à eux seuls ils devraient diminuer le prix d'une
cartouche de cigarettes à 19 $, comme on l'entend souvent. Pour cela, il
faudrait donc réduire les taxes fédérales, et le ministre
vient d'en parler, et provinciales d'environ 29 $ par cartouche, sur des taxes
d'environ 36 $, soit une diminution de 80 %. Comme on peut le comprendre, et le
ministre vient de le dire, le Québec ne peut à lui seul absorber
ce manque à gagner qui découlerait d'une telle mesure puisque
cela signifierait, à toutes fins pratiques, l'élimination de
la
taxe sur les tabacs. Cependant, et c'est important aussi, les
gouvernements ne sont pas les seuls à avoir contribué à la
hausse des prix des produits du tabac. Dans cette optique, les manufacturiers,
les grossistes, les détaillants et les gouvernements devraient
participer à la baisse de prix dans la même proportion qu'ils ont
contribué à la hausse. L'élimination de la contrebande de
cigarettes au moyen d'une baisse de taxes ne serait possible que dans la mesure
où le profit de la revente illégale de cigarettes sur le
territoire canadien deviendrait insuffisant pour que les fraudeurs assument les
risques que ce commerce représente. M. le Président, l'ampleur de
la baisse nécessaire dépend donc de l'attachement des
consommateurs au réseau actuel de contrebande, ce qui est
particulièrement difficile à évaluer. Pour illustrer cette
problématique, mentionnons, M. le Président, que le Québec
possède l'un des taux les plus bas de taxation sur le tabac au pays. De
fait, il se situe au huitième rang avec une taxe effective de 0,088 $ la
cigarette, juste devant l'Ontario avec 0,084 $.
Le ministère du Revenu du Québec a mis de l'avant
plusieurs mesures administratives et législatives pour lutter contre la
contrebande. Ainsi, pour contrer les trafics interprovincial et international,
Revenu Québec a intensifié ses moyens d'intervention
traditionnels, entrepris une collaboration avec les juridictions fiscales
voisines et, plus récemment, créé un groupe de
surveillance aux frontières. En plus, sur le plan législatif, des
modifications ont été apportées à la Loi concernant
l'impôt sur le tabac, et le ministre et mon confrère en ont
parlé tout à l'heure dans leur intervention. Le
phénomène, M. le Président, que je viens de décrire
interpelle donc l'ensemble de la société québécoise
et c'est dans ce sens-là que je fais mon intervention. En effet, le
danger qui nous guette est la banalisation des gestes ou attitudes qui
conduisent à de l'évasion fiscale. Certains se font même
une fierté et se vantent de profiter de la contrebande. Or, il
appartient à tous, M. le Président, à tous et à
toutes, individus ou groupes socio-économiques, gouvernements,
entreprises, de prendre conscience du danger d'une telle banalisation pour la
société dans laquelle nous vivons. La fiscalité, au
même titre que d'autres réglementations, fait partie du contrat
social que nous nous donnons. Elle confère des droits, mais elle
confère aussi des obligations que le gouvernement doit faire appliquer
dans la mesure des moyens disponibles et acceptables et que le citoyen doit
respecter dans le respect de l'ordre établi et de la paix sociale. Je
vous remercie, M. le Président. (11 h 30)
Le Président (M. Camden): Je vous remercie, M. le
député. Je reconnais maintenant le député de
Montmorency.
M. Jean Filion
M. Filion: Merci, M. le Président. Alors, le débat
s'oriente et on commence à voir un peu comment le ministre, au fond, au
coeur du débat, transfère le ballon aux autres. Il ne veut pas
s'en occuper, au fond, du problème. C'est ce qu'on semble comprendre de
toutes ses réflexions, ce matin, M. le Président. Là, il
est en train de nous expliquer que c'est Ottawa le grand responsable, que c'est
Ottawa qui... Et je trouve ça intéressant de voir un ministre du
gouvernement libéral commencer à reconnaître qu'Ottawa est
responsable. Je trouve ça intéressant, M. le Président.
Eux qui aiment tellement le système fédéraliste, je trouve
ça intéressant parce que ça m'ouvre une porte et j'essaie
de voir, au fond, comment le ministre peut se sentir à l'aise, lui, ce
matin, en cette Chambre, de décrier haut et fort le système
fédéraliste quand on ne l'entend jamais sur la place publique
autrement que dans un débat à l'Assemblée nationale, quand
on le force à parler, M. le Président. Parce que là, il
n'a pas le choix de se défiler. Il faut bien qu'il trouve des raisons
quelque part, à un moment donné; depuis le début qu'il ne
disait pas grand-chose. Mais, là, il vient de dire un
élément intéressant.
Alors, si Ottawa est responsable dans le débat, pourquoi vous
n'en parlez pas plus sur la place publique? Expliquez donc à la
population comment ça qu'Ottawa se traîne les pieds dans le
dossier. Pourquoi Ottawa ne le règle pas, le dossier, si c'est le grand
responsable? Hein! Vous dites: On ne peut pas réduire tout seul les
taxes, Ottawa ne veut pas nous suivre. Bien, écoutez, là. Vous
êtes le ministre du Revenu qui représente le Québec. On est
une province parmi dix. Alors, il faudrait peut-être que vous vous leviez
debout un peu, que vous vous teniez, et que vous disiez: Bien, écoutez,
Ottawa, là j'en ai assez. Moi, j'ai un problème sérieux
comme ministre au Québec. On perd plus de 500 000 000 $ par année
en taxes parce que, là, vous ne comprenez pas notre problème.
Vous ne voulez pas, au fond, collaborer comme un associé d'une
fédération pour aider à régler notre
problème. Est-ce que c'est parce que, au fond, M. le ministre, il y a
trois usines sur quatre qui produisent au Québec? Deux ou trois.
M. Savoie: Deux sur trois.
M. Filion: Autrement dit, l'opération comme telle de
l'entreprise se fait au Québec et, au fond, Ottawa... On sait
très bien que le Québec, après le
référendum, c'est plus ou moins important peut-être. Hein!
Est-ce que les problèmes qu'on vit chez nous, pour eux, ce n'est pas des
problèmes qui font partie du Canada? Mais ça fait partie du
Canada. Écoutez, là. Le référendum sur la
souveraineté n'est pas encore arrivé. Alors, là, on va
vivre la Fédération. Mais, la Fédération, il va
falloir qu'elle respecte les règles du jeu et qu'elle comprenne que,
chez nous, on vit des problèmes catastrophiques sur le plan
économique. Des entreprises, des petites entreprises, M. le
Président, qui souffrent de ce fléau social là, elles ont
de la difficulté à être rentables, elles perdent des
emplois, on ferme des entreprises, M. le Président. Et là le
ministre vient de reconnaître qu'Ottawa, au fond, est en train de se
traîner les pieds.
J'aimerais ça qu'il me dise ce qu'il pense de son bill C-111. Si
c'était vrai, on pourrait le croire, au fond,
si, au moins, il allait jusqu'à dire que le bill C-111, au fond,
ça ne réglera rien. Mais il ne juge même pas le bill C-111
qui limite l'accès aux jeunes pour la cigarette, M. le Président.
Si le ministre nous disait que ça va régler son problème
de perception...
C'est tout ce qu'on nous a donné à Ottawa, M. le
Président, depuis qu'on en parle sur la place publique, un beau bill qui
dit, au fond: Écoutez, là, on va empêcher la vente des
cigarettes aux jeunes; c'est là qu'on va régler notre
problème. Puis il dit que le responsable c'est Ottawa. Alors, comment se
fait-il qu'il ne critique même pas ce bill-là ou qu'il ne dit
rien? Alors, est-ce qu'il est en train de me dire que son problème est
réglé parce que le bill C-l 11 qu'Ottawa a mis sur la table va
régler le problème de la contrebande du tabac? Est-ce que c'est
ça qu'il veut nous dire ce matin?
J'aimerais ça l'entendre, M. le Président. Qu'il
arrête de faire de la démagogie sur des phrases hors contexte.
C'est sérieux, là. Il y a un bill qui a été
déposé par Ottawa. Vous dites qu'Ottawa est responsable dans le
débat, un grand responsable, et qu'au fond vous êtes un peu pris
avec lui. Hein! C'est ça que vous nous dites ce matin. Mais j'aimerais
ça que vous disiez à la population si c'est ça le
problème. Est-ce qu'Ottawa en a, des idées? Est-ce qu'Ottawa,
avec son bill C-111, vous pensez qu'il va régler le problème de
la contrebande? Au fond, c'est rigolo! Est-ce que vous avez le courage
politique? Parce que là vous semblez vraiment mettre le fardeau à
la bonne place. Mais il faudrait le mettre aussi sur la place publique et
mettre l'opinion publique au fait du débat. Pas leur faire accroire que
le débat n'existe pas et qu'au fond le problème n'est pas
là et qu'il est résorbé. S'il n'est pas
résorbé là, est-ce que vous pensez que le bill C-111 qui
limite uniquement l'accès aux jeunes à la contrebande du tabac,
c'est ça qui est la solution du problème chez nous ou bien s'il y
a autre chose? Puis, comme ministre du Revenu, est-ce que vous allez prendre
les intérêts du Québec, ou vous ne les prendrez pas, les
intérêts du Québec face à ce débat-là
qui, à toutes fins pratiques... Effectivement qu'Ottawa a son mot
à dire, je le reconnais, et tout le monde le reconnaît. La
coalition du tabac le reconnaît, mais ce qu'elle reconnaît aussi,
c'est qu'au fond vous écoutez, mais vous ne faites pas grand-chose. Vous
restez là, pénard, tranquille, laissant passer le train,
regardant le problème. Mais on veut que vous réagissiez, M. le
ministre, on veut que vous perceviez vos taxes, que vous trouviez des solutions
pour les percevoir, puis on veut aussi, en même temps, que vous nous
disiez autre chose que de dire: Bien, c'est Ottawa, puis le bill C-111, c'est
la solution miracle. Est-ce que c'est ça que vous voulez nous dire?
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
député de Montmorency. Je reconnais maintenant le ministre du
Revenu.
M. Raymond Savoie M. Savoie: Merci, M. le Président.
Après une heure et quarante minutes, le député de
Montmorency a un éclair. Soudain, hein, un nouveau discours est en train
de prendre naissance: C'est la faute d'Ottawa. Moi, ce que je vous ai
souligné à plusieurs reprises, c'est qu'au Québec nous
avons posé tous les gestes possibles, à ce moment, pour le
gouvernement. Avant d'aller plus loin dans un autre geste, il fallait faire
concorder ce geste avec des interventions de la part du gouvernement
fédéral, et je vous ai souligné que, maintenant, nous
attendons après Ottawa. Pas attendre assis, non. Il y a eu et il va
continuer à y avoir des échanges entre plusieurs ministres du
côté fédéral, avec, évidemment, les
intervenants du côté du Québec. Les démarches ont eu
lieu ou sont en train d'avoir lieu.
Alors, à ce moment-là, ces déplacements vont donner
lieu à une intervention. Ils vont donner lieu à une intervention
qui sera annoncée lorsque les choses y seront rendues, à ce
point-là. Ce que je peux vous dire, c'est que, de notre
côté, nous avons déterminé l'ensemble des
interventions qu'il était possible de faire, et ils ont
été posés, ces gestes. Ces gestes ont donné lieu
à des actions concrètes.
Maintenant que vous avez ciblé en partie un élément
du problème, en partie, un élément, il ne faudrait pas y
voir comme la solution ultime de crier sur les toits que c'est la faute
d'Ottawa, il ne faudrait pas se mettre à dire: Si Ottawa ne fait rien...
Ce n'est pas ça. C'est un élément du problème pour
trouver, évidemment, une partie de la solution. C'est sûr, et
c'est ce que nous disons depuis le début. C'est ce que nous avons dit il
y a trois mois lorsque nous avons fait une entrevue à Radio-Canada en
disant que ça demandait une participation du gouvernement
fédéral. Et le gouvernement fédéral, je crois,
constate de plus en plus l'ampleur du dossier et constate de plus en plus
l'importance de bouger, malgré les réserves qu'a Ottawa, tel que
prononcé par Benoît Bouchard, au niveau de l'impact sur la
santé. Alors, c'est ça.
J'imagine que le ministre des Finances, de même que d'autres
ministres qui pourront être habilités pour le faire, pourront
faire les annonces lorsqu'ils jugeront le moment opportun, mais que, pour le
moment, nous n'y sommes pas. C'est pourquoi j'invite le député
à maintenir un petit peu plus de sérieux dans son intervention.
Le dernier cinq minutes, au moins, on a constaté qu'il a eu un
éclair, une illumination, qu'il a eu finalement une reconnaissance
qu'effectivement Ottawa fait partie du problème, dans le sens que, si
Ottawa n'intervient pas avec nous, ne participe pas avec nous, on n'en trouvera
pas de solution à ce problème. C'est ça l'affaire. Et ils
vont intervenir. Oui, ils vont intervenir, vous allez voir.
La différence entre nous, M. le député, c'est que
vous croyez que le système fédéral est condamné.
Moi, je crois que le système fédéral est obligatoire au
Canada et au Québec. Obligatoire. On ne peut pas ne pas y voir une
solution, on ne peut pas ne pas y voir des zones de cohabitation, c'est
impossible. Alors, c'est là-dessus, et là on constate donc,
après tout ce temps, que là le député, demain
matin, va prendre le micro et il va dire: C'est la faute d'Ottawa. Il va
joindre le rang de tous ses
collègues de l'autre côté de la Chambre pour dire
justement que c'est la faute d'Ottawa, et ce n'est pas ce que j'ai dit. Ce que
j'ai dit, c'est qu'ils font partie de la solution, une partie importante, bien
sûr, je veux bien, mais seulement il faut les voir, les choses, parce que
vous allez encore fausser le débat. Vous allez encore fausser le
débat!
Alors, félicitations, M. le député de Montmorency.
(11 h 40)
Le Président (M. Camden): En conclusion, M. le ministre,
s'il vous plaît!
M. Savoie: Félicitations!
En conclusion, M. le Président, ce que je peux vous dire, c'est
que là on est parti d'un chemin aussi loin que, bon, une taxe sur les
exportations de la part du gouvernement du Québec, ce qui est absolument
loufoque, et là il va embarquer sur l'autre extrême: II faut
qu'Ottawa bouge seul. Ce n'est pas ça, l'affaire.
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
ministre. Je reconnais maintenant le député d'Or-ford.
M. Robert Benoit
M. Benoit: Merci, M. le Président. On me dit qu'il me
reste trois minutes, je vais faire ça plutôt vite. Ecoutez, on est
ici depuis 10 heures, ce matin. Je m'attendais à entendre des choses de
l'Opposition, des propositions. Je suis conscient que le problème est
compliqué; il est multidisciplinaire, il est multigéographique.
Je m'attendais à ce que ces gens-là collaborent avec la
société québécoise qui est préoccupée
par le problème. Ce n'est pas ça qu'on a eu ce matin, là.
On a eu des gens qui ont fait de la basse politicaillerie, de l'autre bord de
la Chambre, et ça me déçoit. Ça me
déçoit parce que j'aurais voulu que, ensemble, on arrive à
trouver des solutions et qu'on essaie de voir des pistes de travail que nous
pourrions prendre. Ce n'est pas ça que j'ai vécu,
malheureusement. Notre ministre a été très ouvert tout au
long du débat, mais ces gens-là sont barricadés dans une
logique, ils ne sont pas capables d'en sortir.
M. le Président, il y a eu des mesures de prises, il y en a eu un
bon nombre, et, même si les gens de l'Opposition n'aiment pas ça,
je devrai les citer. D'abord, Revenu Québec a posé tous les
gestes qui furent nécessaires dans les derniers mois et les
dernières années, autant auprès de nos voisins
américains, les États frontaliers, autant avec les manufacturiers
canadiens, le gouvernement fédéral, les corps policiers. Alors,
il y a eu des efforts de faits et on va continuer à les faire, ces
efforts-là.
Notre deputation libérale s'est réunie mes deux
confrères étaient là le 11 et le 12, il y a eu un
caucus de deux jours, M. le Président, on a fait une réflexion.
Les ministres dans leur ensemble étaient là, le premier ministre
était là et on a fait une réflexion pendant deux jours sur
toute la problématique, autant dans les régions que dans les
grands centres, autant chez les jeunes, chez les gens âgés, chez
les gens malades. Je les mets au défi: Combien de temps ils en ont
parlé à leur caucus, du problème de la cigarette? Ils nous
convoquent ici, ce matin, sans solution, sans orientation, sans avenue de
solution. Nous, on s'est réunis, l'ensemble de la deputation, pendant
deux jours dans un hôtel de Montréal et on a essayé de
trouver des solutions.
Il y a 60 enquêteurs que le ministre a mis en place, à la
grandeur du Québec. Vous allez me dire que ce n'est pas beaucoup, c'est
un fait. On part de Bona-venture jusqu'à Hull, on a de grandes
frontières au Québec; on a de plus grandes frontières que
la plus grande partie des pays européens. Mais il y a eu un effort de
fait pour essayer de trouver les contrebandiers, les gens pour lesquels on n'a
pas beaucoup d'admiration ou d'estime. Je vais vous dire, M. le
Président, j'ai été déçu de voir que ces
gens-là, de l'autre côté, ont eu peu de conscience sociale
dans le débat de ce matin. Et je repensais à ce que le
député a dit, à un moment donné, quand un de nos
ministres a été obligé de coucher à l'hôpital
deux ou trois jours, il a dit: Ce n'est pas correct qu'un ministre couche
à l'hôpital! Bien, c'est ça, la logique, la conscience
sociale de ces gens-là, monsieur. Alors qu'on a un problème
sérieux, ces gens-là ne veulent pas y faire face, ne veulent pas
nous aider à trouver les solutions. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
député d'Orford. Je reconnais, maintenant, le
député de Montmorency.
M. Jean Filion
M. Filion: Merci, M. le Président. Le député
lisait son texte, c'était déjà prévu d'avance, sa
sortie! Alors, c'est malheureux, mais qu'est-ce que vous voulez que je vous
dise? C'était déjà écrit d'avance, son
scénario!
J'ai seulement trois minutes. M. le Président, je retiens quand
même du député d'Orford, qui lisait son texte, ce que je
retiens, au fond, c'est qu'ils étaient tous les députés,
pendant deux jours, à réfléchir. Ils n'ont pas
réfléchi fort parce qu'ils n'ont pas encore de solutions. Tous
les députés du gouvernement libéral qui ont
réfléchi pendant deux jours pour trouver des solutions, ils
arrivent pour nous dire: C'est Ottawa qui nous empêche de régler
notre problème. C'est spécial! C'est spécial! Le
gouvernement libéral tout entier qui reconnaît que c'est Ottawa
qui empêche de régler le problème du Québec; c'est
spécial! On perd plus de 500 000 000 $ de taxes par année. Ils
ont passé deux jours à constater qu'on perdait plus de 500 000
000 $ de taxes par année. Parce que le ministre du Revenu
reconnaît un peu son impuissance dans tout ça; il n'est pas
capable de les collecter et il dit: Moi, je suis pris, c'est Ottawa qui
m'empêche de trouver ma solution parce que, s'il ne me suit pas dans ma
réflexion, je ne peux rien faire.
M. le Président, Ottawa, on lui demande de nous
suivre dans une réflexion au niveau de la main-d'oeuvre. Depuis
combien de temps? Ils ne font rien, M. le Président, au niveau de la
main-d'oeuvre. Hein! Les barrières intergouvernementales à
Ottawa, on leur demande de réfléchir avec nous au niveau de ces
problèmes-là. Ils ne font rien à Ottawa, M. le
Président. Et là on vient de nous admettre encore à
nouveau que c'est Ottawa qui ne nous suit pas au niveau de notre solution
où on perd 500 000 000 $. Écoutez, c'est le Québec qui
perd 500 000 000 $. Ce n'est pas les autres provinces. Et là ils ont
passé deux jours à réfléchir tout le monde
ensemble.
M. le Président, écoutez, là, c'est eux qui sont au
gouvernement. C'est eux qui dirigent le Québec. Qu'ils arrêtent
d'attendre des solutions de l'Opposition. Nous, on est là pour
surveiller. Qu'ils présentent des solutions acceptables et des solutions
où on va pouvoir endosser l'orientation. Mais on ne peut pas endosser
une solution où on nous dit: Ottawa nous empêche d'avoir une
solution pour régler la contrebande du tabac au Québec parce que
nous ne sommes pas sûrs s'il va nous suivre dans une réduction de
taxes parce que, au fond, tout le monde le reconnaît au Québec,
que, sans une réduction de taxes, on ne peut pas arriver à
créer un équilibre au niveau d'une concurrence loyale au niveau
économique, M. le Président.
Alors, là, je pense que... J'ai bien l'impression que, de ce que
je viens de voir comme commentaire, c'est pauvre. C'est très pauvre. Sur
le plan de la réflexion intellectuelle, je peux vous dire que ça
résonne comme un tambour. C'est vide. C'est vide. Mais c'est vous autres
qui dirigez. Allez-vous enfin trouver une solution acceptable ou proposer
à la population une orientation où on va arriver à trouver
ou à récupérer nos deniers publics? 500 000 000 $,
là, c'est de l'argent, par année, M. le Président. Plus de
500 000 000 $. Et c'est l'association, la coalition du tabac qui est venue en
commission parlementaire pour nous dire: Ça se passe au Québec,
là. Alors Ottawa, s'il vous plaît, commencez à crier un peu
après lui, parce que c'est lui, au fond, qui nous fait perdre tous ces
beaux dollars-là, M. le Président.
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
député de Montmorency. Nous en sommes maintenant à la
dernière étape de l'interpellation, soit une période de 10
minutes consacrée au ministre qui sera suivie, évidemment, par le
député interpellant pour les 10 dernières minutes. M. le
ministre, pour 10 minutes.
Conclusions M. Raymond Savoie
M. Savoie: Merci, M. le Président. On a
débuté cette interpellation en disant que le problème du
commerce illégal du tabac est très préoccupant pour le
gouvernement du Québec. On lui a dit que, depuis 1988, il y a toujours
eu une attention particulière et des efforts substantiels posés
sur le dossier de la contrebande. Ce n'est pas quelque chose qui nous prend par
surprise. La contrebande de tabac a toujours, toujours existé au Canada
depuis qu'il y a des taxes. Elle a pris un développement important dans
les années cinquante. Elle s'est résorbée rapidement et a
pris une autre envolée au début de 1989, suite à une
hausse des taxes de la part du gouvernement fédéral.
On a expliqué qu'on a modifié la Loi concernant
l'impôt sur le tabac. On a introduit des peines pénales,
pénales, pour la première fois: deux ans d'emprisonnement pour le
transport, l'entreposage ou la vente de tabac. C'est une mesure substantielle,
importante, majeure, très critiquée par l'Opposition qui a
voté contre. On a, dans certains cas, décuplé les amendes
sur le tabac. On a établi une collaboration étroite avec les
juridictions voisines, que ce soient les États qui sont frontaliers avec
le Québec, que ce soit le gouvernement de l'Ontario, du
Nouveau-Brunswick ou le gouvernement fédéral, un ensemble de
mécanismes de collaboration et d'échange d'informations a
été créé. La Sûreté du Québec a
été sensibilisée au dossier, a posé plusieurs
gestes, et, j'en suis confiant, va continuer à maintenir cette pression,
même à l'augmenter au niveau de la contrebande du tabac. Pour
assurer la surveillance des frontières, pour faciliter les dossiers et
les échanges de dossiers avec les divers corps policiers oeuvrant sur le
territoire du Québec et pour faire de la filature, nous avons
créé la police du tabac dans le but d'aider et d'assister et de
démontrer que le gouvernement du Québec ne peut pas être
indifférent à cette contrebande qui se développe sur notre
territoire. Avec le gouvernement fédéral, en plus de demander une
intervention rapide et une bonne collaboration que nous sommes certains
d'obtenir, nous avons constaté que le gouvernement
fédéral, tout dernièrement, a annoncé un montant
additionnel de 39 000 000 $ pour contrer la contrebande, intervenir avec ses
forces policières d'une façon particulièrement plus
active. (11 h 50)
Sous la direction de la vice-première ministre, Mme Bacon, un
comité ministériel a été formé. On a eu nos
rencontres, nos échanges. On a déterminé un plan
d'intervention, un plan d'action, et je vous ai indiqué que des annonces
et des solutions résultant du travail de ce comité
interministériel vous seront présentées aussi rapidement
que possible. J'ai expliqué aujourd'hui au député de
Montmorency que, en plus de tous ces gestes, il fallait également
compter sur une participation d'Ottawa.
J'invite le député de Montmorency à nuancer son
discours. La situation de contrebande qui existe aujourd'hui à travers
tout le Canada, où on a quasiment un paquet sur deux à
Terre-Neuve, un paquet sur trois en Ontario et un paquet sur trois en
Colombie-Britannique qui sont vendus en termes de contrebande, ne
résulte pas uniquement, uniquement de la part du gouvernement
fédéral, bien que, évidemment, il en soit un agent
important. Ils doivent participer avec nous à trouver des solutions, et
c'est ce qu'ils font. Je suis confiant que, sous peu, nous serons en mesure
d'annoncer des solu-
tions pour enrayer d'une façon définitive la contrebande.
Parce que la réduction des taxes, si elle est retenue, n'est qu'un
élément parmi d'autres. Il y a deux autres... au moins trois
autres gestes à poser, concurremment avec une intervention de cette
nature, si ce geste est retenu.
Nous faisons tout en notre possible. J'invite le député de
Montmorency à une réflexion un petit peu plus poussée. Je
l'invite à modérer son discours pour tenir compte d'une certaine
réalité. Parce que, lorsqu'il fait des déclarations disant
qu'il a des solutions simples, disant qu'il y a un coupable tout
identifié, ce qui ferait bien plaisir à son parti politique et
à son programme politique également, ça n'aide en rien la
population du Québec. Ça n'aide en rien les gens qui,
évidemment, respectent la loi et continuent d'acheter des cigarettes en
payant les taxes comme il se doit. Ça n'aide en rien les marchands qui
vivent une situation difficile. On ne règle pas une solution en
créant, finalement, une brume épaisse sur un dossier. On va
régler le dossier en tenant un discours réel, fondé sur
des réalités et fondé sur des solutions qui sont
nécessairement envisageables.
J'invite le député de Montmorency, avec qui, malgré
les mots que nous avons échangés ce matin, je m'entends quand
même relativement bien, à modifier son approche du dossier,
à tenir compte de ce que nous sommes en train de faire et à
réaliser que les 6000 fonctionnaires au ministère du Revenu
savent ce qu'ils font. Ils connaissent le dossier et ils connaissent les
solutions. S'il y avait eu une solution simple à ce dossier qui relevait
de la responsabilité du ministère du Revenu, il y a
déjà fort longtemps que cette démarche aurait
été effectuée.
J'invite également le député de Montmorency
à de la modération quant à ses attaques contre Ottawa. Des
attaques irresponsables et un discours qui ne tient compte que de la
responsabilité d'Ottawa vont tout simplement fausser, encore une fois,
le dossier et vont lui attirer la foudre des journalistes, vont lui attirer la
foudre du grand public. Ça ne résout rien! Un peu plus de
modération dans ton discours, un petit peu plus d'orientation dans ta
réflexion et, en jouant pleinement le rôle de député
de l'Opposition que tu dois jouer, le système va mieux fonctionner.
Maintenant, ça présume de la bonne foi de votre part. Moi,
je prétends que vous êtes capable de nous le démontrer. Je
pense que vous êtes capable également de bien circonscrire le
problème et d'y trouver des solutions appropriées. Nous avons
répété, à plusieurs reprises, que, si le
député de Montmorency a des solutions, la porte est toute grande
ouverte. Il est toujours bienvenu à venir nous rencontrer et à
échanger, et on va lui fournir de l'information. Je sais qu'il va
l'utiliser et qu'il pourra utiliser cette information en période de
questions ou à d'autres moments, lors de conférences de presse.
On a toujours été ouverts à échanger de
l'information avec le député et ça va être maintenu.
Mon Dieu! Est-ce qu'il va finir par comprendre un jour? Est-ce qu'il va finir
par comprendre qu'effectivement ses solutions qu'il a charriées sur la
place publique deux ans de temps, deux ans de temps, finalement, n'ont rien
apporté, sauf une perte importante de crédibilité de la
part des intervenants parce qu'il a manqué de rechercher ses dossiers
comme il se doit!
Je l'invite, à compter d'aujourd'hui, à reconnaître
qu'il y a eu des gestes importants de posés par le ministère du
Revenu, par moi-même, qu'on a fait tout en notre possible pour enrayer la
contrebande. Il faut le reconnaître. S'il y a un geste qui nous a
échappé, faites-nous-le savoir. Si c'est, évidemment, de
faire la publicité pour le ministère de la Santé et des
Services sociaux, on s'en abstiendra pour des raisons que vous comprenez. On
invite donc le député, également, à
reconnaître on l'a toujours mentionné qu'Ottawa
faisait partie de la solution et partie du problème. Les deux sont
reconnus, et je suis confiant qu'à très court terme on sera en
mesure d'annoncer des gestes positifs et qu'on va enrayer ce fléau
qu'est la contrebande et comprendre, d'une façon très
marquée, qu'on n'a jamais pris ce dossier-là à la
légère, ni le ministère du Revenu ni le ministre du
Revenu, ni le gouvernement du Québec. Je suis confiant qu'avec les
mécanismes qui sont en place le comité ministériel, sous
la direction de Mme Bacon, va trouver des solutions, va nous présenter
des alternatives viables pour enrayer la contrebande du tabac. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
ministre. Je reconnais maintenant le député de Montmorency, pour
une période de 10 minutes.
M. Jean Filion
M. Filion: Merci, M. le Président. Je vais terminer cette
interpellation, M. le Président, sur le même ton que je l'ai
débutée, c'est-à-dire dans un esprit constructif.
Vous savez, même si le ministre, dans son ton très doux, se
voulait un peu paternaliste, écoutez, je pense qu'il devrait se
contenter beaucoup plus de son rôle de ministre du Revenu, de percevoir
ses taxes, de percevoir ses impôts, de s'assurer que ses lois sont
appliquées de façon équitable sur tout le territoire, M.
le Président. C'est ça, son rôle. Je pense qu'à
l'Assemblée nationale le débat est un débat qui est devenu
un débat très urgent. C'est un débat qui ne doit... On
aurait dû le régler pour hier, M. le Président, ce
débat-là de la contrebande du tabac, mais on est encore pris
avec. Ça me laisse un peu perplexe de voir le ministre dire: Attendez
les résultats du comité ministériel.
M. le Président, le 1er janvier 1988 ce n'est pas d'hier!
on avait formé un comité ministériel, aussi, pour
prévoir des solutions à l'évasion fiscale sur notre
territoire. Ce n'est pas d'hier! Et là on nous dit: Attendez encore! On
en a formé un autre comité ministériel. M. le
Président, le débat est urgent et le deuxième
comité ministériel, il faut l'attendre encore. On perd plus de
500 000 000 $ de taxes par année parce que, ce matin, le ministre a
osé commencer à vouloir expliquer à la population qu'au
fond il ne peut rien
faire. Le responsable, c'est Ottawa. M. le Président, c'est
grave. C'est très grave. C'est très, très, très
grave parce que, chez nous, le problème, c'est nous qui le vivons. Allez
expliquer aux gens qui ont des petites entreprises, des dépanneurs, des
gens qui disent: Moi, parce que je respecte les lois, je perds mes profits, je
perds mon pain et mon beurre parce que, pour certains, c'est la faillite; pour
d'autres, c'est de perdre complètement leur commerce, M. le
Président. Je veux bien comprendre le ministre de dire: Écoutez,
là, il faut tenir un discours pour n'alarmer personne, mais, M. le
Président, c'est grave ce qui se passe. Je ne veux pas alarmer, moi, je
veux simplement expliquer qu'il va falloir mettre de la pression sur Ottawa. Il
serait grand temps de dire à Ottawa: Écoutez, là, c'est
très, très, très sérieux, ce qu'on vit chez nous et
vous devez faire partie de la solution. Et on se rend compte qu'à
Ottawa... Quand on lit, M. le Président... Écoutez, c'est
inquiétant. Mettez-vous à notre place, nous qui sommes là
pour représenter la population sur ce qui se passe au niveau
législatif. (12 heures)
Le 30 janvier 1993 ce n'est pas il y a deux ans, c'est il y a
à peine un mois et demi on nous disait: La contrebande accrue des
cigarettes laisse Ottawa indifférent. Puis, ce matin, le ministre nous
dit: Écoutez... C'est dans La Presse, Montréal, le samedi
30 janvier. Ce matin, le ministre nous dit: Écoutez, patientez, restons
calmes. Ce n'est pas grave ce qui se passe. C'est un état d'urgence ce
qui se passe, M. le Président, parce que, là, il est en train de
nous expliquer ce matin que celui qui peut l'aider à régler son
problème, c'est Ottawa. Puis, Ottawa, il ne s'en soucie pas de son
problème.
M. le Président, écoutez, là, comment est-ce qu'on
va faire pour expliquer à la population comment ça va se
régler? Ce n'est quand même pas la réflexion de deux jours
du gouvernement libéral où on n'a rien sorti comme solution. Les
gens veulent savoir dans le temps et dans l'espace comment va se régler
ce problème-là qui est catastrophique, M. le Président. Je
ne veux pas alarmer les gens. Je veux simplement leur donner la situation
claire, nette et précise. Oui, c'est vrai que j'ai lancé une
idée pour permettre au gouvernement en place de réfléchir
à des solutions.
Écoutez, j'ai lancé l'idée d'une réduction
de taxes accompagnée d'une nouvelle dynamique fiscale. Bon! Puis si
ça ne fait pas votre bonheur, la nouvelle dynamique fiscale, trouvez-en
une autre. C'est vous qui êtes au gouvernement. Trouvez-en une. Moi, je
vous en ai suggéré une, puis pas une prise dans les nuages, un
mécanisme de taxe en main remboursable au titre du tabac. M. le
Président, dans la loi de l'impôt sur le revenu
peut-être que le ministre ne le sait pas, peut-être que je le lui
apprends au niveau des corporations, il existe un mécanisme qui
s'appelle un mécanisme de taxe en main remboursable au titre de
dividende qui fonctionne très bien au niveau des corporations,
c'est-à-dire qu'on redonne un remboursement de taxe quand on est certain
que c'est l'actionnaire qui met la main sur l'argent, l'individu.
Alors, là, on va donner un remboursement de taxe quand on va
être sûr que la cigarette a bel et bien été vendue
aux États-Unis. C'est évident qu'on ne peut pas appliquer un
mécanisme comme ça sans l'associer à une réduction
de taxe. Je peux comprendre que, dans l'industrie du tabac, ce serait
compliqué. Mais c'est une idée que j'ai lancée pour forcer
le gouvernement à réagir, parce que l'état de la
contrebande du tabac, c'est devenu une espèce de situation d'urgence
où on veut à la fois récupérer nos impôts
mais aussi protéger l'évolution sociale au niveau de la
santé.
Puis je pense que la contrebande est devenue plus nuisible, plus
nuisible au niveau de la santé, parce que les gens y ont accès
d'une façon plus facile et sans rigueur, sans régularité.
Et on est en train d'inciter nos jeunes à utiliser des concepts de
société qui doivent disparaître. Une contrebande,
là, ça ne peut pas être accrédité sur la
place publique dans une société qui demande des règles de
base de fonctionnement. On est en train de dire qu'une contrebande c'est
légitime, entre guillemets. Écoutez, là, c'est grave!
C'est grave parce que les gens se demandent: Maintenant, c'est quoi qui est
légal? Est-ce que c'est tout ce qui se passe qui est légal? Je
comprends que vous avez une réflexion actuellement, votre gouvernement,
de rendre même la prostitution légale. Bon, ça, c'est votre
débat à vous. Mais écoutez, là, c'est quoi qui est
légal pour vous autres, le gouvernement libéral? La contrebande?
La prostitution? Les casinos, parce qu'il faut blanchir l'argent?
Écoutez, là, il y a des concepts de société,
actuellement, qui sont sur la place publique et les gens se posent des
questions. Ils se posent de sérieuses questions. Ils veulent comprendre
où on s'en va. Ils attendent une solution concrète à un
problème où on perd des deniers publics que vous n'êtes
plus capable de percevoir comme ministre du Revenu, impuissant à
percevoir.
Je ne veux pas dire que je ne comprends pas votre problématique,
je la comprends. Mais n'allez pas me dire que ce n'est pas urgent, c'est
très urgent. Et, quand vous me dites que c'est à cause d'Ottawa
que ça ne se règle pas et que je lis dans le journal La Presse du
30 janvier qu'Ottawa, au fond, se contrefout de ce qui se passe ici, bien,
écoutez, nous, comme critiques de l'Opposition, c'est
élémentaire qu'on puisse au moins aviser la population qu'on est
dans une espèce de dossier où on se demande comment ça va
se régler, puisque vous ne dites rien aux gens. Vous ne donnez aucune
information, même quand on vous la sollicite par des idées de
discussion, par des idées de réflexion. Ce qu'on sait, de par vos
publications à vous autres, le gouvernement, c'est que, même si
vous avez augmenté de 52 % la taxe spécifique sur les cigarettes,
vous percevez moins d'argent que vous en perceviez avant lorsqu'elle
était moins élevée. En 1988-1989, vous perceviez plus
d'argent avec la taxe qui était moins élevée de 52 % que
vous en percevez aujourd'hui. Écoutez, là, c'est sérieux.
Les gens n'ont pas arrêté de fumer; ils ont continué de
fumer. Vous n'avez rien réglé au problème de la
santé.
Le problème de la cigarette, vous le savez, c'est
un problème, évidemment... c'est une forme de drogue
où les gens deviennent dépendants, et ce n'est pas facile de se
déshabituer de fumer. Mais, écoutez, le problème est grave
quand même. Il ne faut pas le laisser à la légère.
Parce qu'on est en train d'accréditer une espèce d'État
policier au niveau de l'impôt sur le revenu. On est rendus que la seule
solution qu'on voit à notre niveau, c'est d'augmenter nos polices pour
percevoir nos taxes. Écoutez, là, ça ne fonctionne pas de
même dans une économie où on veut créer une
confiance économique, où on veut que les gens s'acquittent de
leur rôle social et de leur contribution de deniers publics selon leur
quote-part, parce qu'on a des services sociaux à payer, et des
programmes sociaux où tout le monde est d'accord qu'on puisse les payer
ensemble. Mais là c'est...
Et, moi, je pense que, même si je veux garder un discours de
modérateur, ne pas être alarmiste, c'est très, très,
très, très, très urgent que là, à quelque
part dans le temps, il se prenne des décisions et qu'on corrige une
situation qui entraîne des conséquences secondaires sur le plan de
la santé, des conséquences secondaires où les gens se
disent: Bien, écoutez, tout est possible. On va se faire notre propre
justice fiscale. Et c'est là, je pense, que, oui, l'Opposition prend
à coeur son rôle, non, l'Opposition, ce n'est pas du capital
politique qu'on veut se faire, pas du tout. Quand j'ai lancé
l'idée, c'est que je voulais qu'il y ait une réflexion quelque
part qui se fasse sur la place publique. Dommage, elle ne se fait pas. Vous la
gardez, même en commission parlementaire. Ce que vous avez dit tout
à l'heure, vous ne l'avez pas dit quand vous avez dit en commission
parlementaire... Les gens sont venus témoigner pour le dire,
réduisez les taxes. Je ne vous ai pas entendu dire en commission
parlementaire: Écoutez, on est coincés, Ottawa ne veut pas nous
suivre. Vous n'avez pas dit ça en commission parlementaire. Là,
ce matin, vous l'avez avoué. Vous devez attendre après Ottawa.
Bien, écoutez, là, c'est grave, et c'est très grave. Ce
n'est pas du capital politique que je veux me faire.
Les entreprises, les emplois qui se perdent dans un marché
normal, régulier, de concurrence loyale où les gens observent nos
lois, eux sont pénalisés. C'est eux les otages, et c'est eux,
actuellement, qui se demandent comment ils vont faire pour faire leur argent
autrement que d'embarquer dans un circuit qui est de la contrebande.
Écoutez, là, c'est dangereux comme objectif de
société, et c'est là que, comme gouvernement et comme
ministre, vous avez des responsabilités. Je ne veux pas prendre un ton
alarmiste. Je veux prendre un ton de réalisme et vous dire:
Écoutez, votre réflexion de deux jours, là, je pense que
ce n'est pas suffisant. Il va falloir qu'il y ait une réflexion
où, là, vous allez ensemble dire: Est-ce qu'on agit ou on n'agit
pas? La décision, elle est là parce que même le
résultat... Écoutez, l'Association nationale des distributeurs de
tabac et de la confiserie disait: Le résultat de l'inaction du
gouvernement ce n'est pas moi qui le dis, c'est eux dans leur
mémoire...
Le Président (M. Camden): En conclusion, M. le
député, s'il vous plaît.
M. Filion: Oui, je termine, M. le Président, et ils
disaient: Notre appréciation de ces rencontres se résume à
peu de mots: un gouvernement, c'est deux grandes oreilles pour écouter
et aucun membre pour agir. M. le ministre, j'espère que l'interpellation
de ce matin va pouvoir, au moins, vous aider à agir dans le dossier qui
est devenu très urgent au Québec. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Camden): Je vous remercie.
Alors, considérant que la périodre dévolue à
cette interpellation d'une durée de deux heures a pris fin et que, par
le fait même, la commission du budget et de l'administration, via cette
interpellation, a complété son mandat, j'ajourne donc nos travaux
à cet égard.
(Fin de la séance à 12 h 9)