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(Dix heures quatre minutes)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission du budget et de l'administration poursuit ce matin une
consultation générale et des auditions publiques sur le
financement des services publics au Québec.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui. M. Boisclair (Gouin) est
remplacé par Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière) et M.
Lazure (La Prairie) est remplacé par M. Beaulne (Bertrand).
M. Chagnon: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): Oui, un instant, s'il vous
plaît, M. le député de Saint-Louis. M. le
député de Saint-Louis.
M. Chagnon: Oui. Je voudrais qu'on remplace le
député de Bonaventure par le député de Dorion, s'il
vous plaît.
Le Président (M. Lemieux): Alors, voulez-vous en prendre
note, M. le secrétaire?
Est-ce que les membres de cette commission ont pris connaissance de
l'ordre du jour?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Lemieux): L'ordre du jour est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
M. Léonard: II y a M. Sansfaçon qui s'est
retiré.
Le Président (M. Lemieux): M. Sansfaçon,
effectivement, s'est retiré. C'est la raison pour laquelle, M. le
député de Labelle, nous avons commencé à 10 heures,
ce matin. Avis a été donné au secrétaire de la
commission.
Alors, je demanderais maintenant à M. Jean-Jacques Bérard
de bien vouloir prendre place à la table des témoins.
Permettez-moi, M. Bérard, de vous expliquer les règles de
procédure. Nous disposons d'une demi-heure, globalement: 10 minutes pour
l'exposé de votre mémoire; suivra un échange avec les deux
formations politiques, le parti ministériel pour une durée de 10
minutes et le parti de l'Opposition officielle pour une durée de 10
minutes.
Nous sommes prêts à vous écouter
immédiatement, M. Bérard.
M. Jean-Jacques Bérard
M. Bérard (Jean-Jacques): Merci. D'abord, je tiens
à remercier la commission de me permettre d'exercer mon droit de
citoyen. Je me représente moi-même. Je crois que, dans un
système démocratique, l'option que vous donnez de permettre aux
contribuables de venir exprimer leur point de vue est très
appréciée. Je ne suis pas fiscaliste, je ne suis pas
économiste. Je suis un simple citoyen. Je veux tout simplement apporter
ma contribution pour solutionner le problème que nous tous
partageons.
Avant d'exprimer mon opinion sur les moyens à prendre, je
voudrais vous faire partager mes réflexions sur le parlementarisme
actuel au Québec. À mon avis, il est inutile, sinon futile, de
s'engager dans des mesures d'économie si les élus, vous autres,
vous ne changez pas d'attitude et de comportement face à une nouvelle
société en mutation qui s'installe lentement dans cette fin du
millénaire. Certains récents sondages ont démontré
que le peuple ne croit plus en ses politiciens. Serait-ce que la politique
folklorique et bas de gamme est révolue? On se pose la question.
Comment accepter aujourd'hui que des adultes, des personnes
sensées et matures se comportent comme des clowns au cirque de
l'Assemblée nationale? Nos élus, qui représentent le
peuple québécois, se moquent des citoyens entre les
périodes électorales et demeurent insensibles à leurs
préoccupations quotidiennes. À cet effet, d'après le
sondage qui a été demandé par le Conseil du patronat il y
a déjà quelques mois, sur 615 répondants, il y en avait 50
% qui n'avaient pas confiance du tout au chef, 37 % avaient un peu confiance au
chef et 11 % assez peu. Alors, ça reste des statistiques, mais
seulement, je pense que ça reflète exactement les
préoccupations du peuple. Je souhaite que les ministres et les
députés se sentent plus responsables et assument avec
sérieux et efficacité leur rôle de défenseurs des
intérêts supérieurs du Québec. À cet effet,
il faudrait que les membres de l'Assemblée nationale puissent voter
selon leur conscience et non selon le mot d'ordre du parti. Il faut retrouver
à l'Assemblée nationale les valeurs humaines que notre
société semble avoir perdues. Bref, je souhaite l'arrivée
d'un politicien intègre, fiable, respectable, fidèle à des
valeurs fondamentales et qui aura assez de courage pour dire aux citoyens
qu'ils doivent penser à la collectivité plutôt qu'à
leurs intérêts personnels et aussi qu'ils doivent se prendre en
main.
Dans le domaine de la fonction publique, il est reconnu que le
fonctionnarisme donne une
image peu reluisante auprès des contribuables. Pourtant, le
public s'attend à ce que son gouvernement lui rende des services
efficaces, par du personnel compétent. Redoutés par des ministres
et des députés, critiqués par le public, les
fonctionnaires occupent une place démesurée dans notre
système parlementaire. Favoritisme, mauvaise gestion,
irresponsabilité des technocrates, voilà quelques-unes des
accusations portées contre la fonction publique. De plus, je constate
que le gouvernement a perdu le contrôle au profit des mandarins et hauts
fonctionnaires.
Une enquête menée par l'École d'administration
publique révèle que, bien que la compétence se situe au
premier rang des préoccupations, la performance et le service à
la clientèle sont d'importance secondaire. Le gaspillage occupe le 12e
rang sur les 14 critères de gestion, et la connaissance de la gestion
représente 8,1 %. Avec une telle philosophie de gestion, il est
compréhensible que notre fonction publique manque de dynamisme et
d'efficacité. (10 h 10)
Afin de corriger la situation et d'améliorer l'appareil
gouvernemental, je recommande que le principe de l'imputabilité - je
répète, l'imputabi-lité - pour les hauts fonctionnaires
soit appliqué et que ces derniers soient remplacés par une
nouvelle équipe lors de l'avènement d'un nouveau gouvernement.
Cette pratique éviterait de faire obstacle, par les technocrates,
à toute nouvelle réforme qu'un gouvernement nouvellement
élu voudrait amorcer suite aux promesses électorales.
Je ne voudrais pas m'étendre davantage sur la mauvaise gestion,
le gaspillage et certaines pratiques douteuses des gestionnaires. Heureusement,
le Vérificateur général y voit. Malheureusement, les
élus et les mandarins de la fonction publique s'en tirent bien, parce
que le bon peuple, après s'être scandalisé pendant une
semaine ou deux à la suite de la parution du rapport du
Vérificateur général, oublie jusqu'à la prochaine
fois. Je demande donc que le président du Conseil du trésor
prenne ses responsabilités et mette fin au laxisme de notre fonction
publique.
À titre de suggestion, je lui dirai qu'il peut réduire les
dépenses gouvernementales en diminuant la masse salariale de la fonction
publique, qui est de 3 200 000 000 $, selon les derniers chiffres, en
regroupant et en abolissant des ministères et, enfin, en privatisant
quelques-unes des 92 entreprises gouvernementales.
Une autre mesure qui réduirait la charge des impôts et des
taxes qui accablent les contribuables serait de rationaliser les
ministères provinciaux qui font double emploi avec ceux du
fédéral. Je suis persuadé qu'une révision du
mandat, des politiques et des programmes de ces ministères permettrait
des économies substantielles aux contribuables.
Au niveau des subventions, je dois vous dire que je suis contre les
subventions à l'entre- prise privée, que je qualifie
d'assistée sociale de luxe. Je m'indigne que mes impôts et mes
taxes servent à compenser l'incompétence de soi-disant hommes
d'affaires. Je suis contre les subventions aux producteurs de tout acabit qui
persistent à produire des biens qu'on retrouve en abondance sur le
marché saturé, forçant ainsi le gouvernement à
soutenir des récoltes invendues. Je suis contre les subventions ou
compensations financières qui sont ni plus ni moins que de
l'assu-rance-chômage et/ou des dons. Il est grandement temps que le
gouvernement adopte le principe reconnu dans le monde du marché libre,
c'est-à-dire produire selon l'offre et la demande.
Au chapitre de la dette, je dois dire que le monstre de la dette me
semble indomptable. Malgré les voeux pieux des gouvernements
fédéral et provincial, aucun n'a été capable de
contenir les déficits prévus parce que les contribuables font
face à un manque de courage de nos élus qui devraient sabrer dans
les dépenses de l'État et ne tolérer aucun gaspillage. Par
son manque de gestion de la dette, le gouvernement du Québec fait
reposer sur les épaules de chaque Québécois un fardeau
financier de 14 302 $ et, depuis, nous devons assumer le service de la dette en
versant aux emprunteurs 1364 $ annuellement, ce qui représente 0,50 $
pour chaque dollard de la dette. Je recommande que le gouvernement refasse ses
devoirs en rationalisant sa gestion, en commençant par
l'élimination du gaspillage, en se fixant des objectifs
d'investissements dans des secteurs productifs et en se retirant le plus vite
possible de tous les champs d'activité où l'entreprise
privée pourrait faire mieux et à moindre coût.
Au niveau du déficit, ma recommandation est de faire adopter une
loi interdisant les déficits, comme cela existe dans l'État de
Californie et aussi chez les municipalités du Québec, comme
l'exige la loi québécoise proclamée et imposée,
croyez-le ou non, par notre propre gouvernement du Québec.
Une autre mesure que le gouvernement devrait instaurer est la
sensibilisation du public aux coûts d'utilisation des services
gouvernementaux.
Le Président (M. Chagnon): II vous reste une minute, M.
Bérard.
M. Bérard: II faut dire au contribuable que rien n'est
gratuit et que tout se paye. À titre d'exemple, dans le domaine de la
santé, on pourrait demander au bénéficiaire d'apposer sa
signature sur une copie de facture pour services rendus.
Voici aussi une liste de suggestions qui pourraient aider à
réduire le déficit: une carte d'identité avec photo;
imposition d'un ticket modérateur mais crédit d'impôt pour
les personnes sous le seuil de la pauvreté. Une autre formule qui
pourrait satisfaire les bénéficiaires et
rendre les services plus efficaces est celle où le gouvernement
pourrait donner des bons d'achats aux citoyens pour des achats de services. Si
ces derniers sont bons, les clients se feront nombreux et, s'ils sont
médiocres, la pénurie de bénéficiaires les forcera
à fermer leurs portes. Une autre façon de réduire les
dépenses est de rationaliser les comités, commissions
consultatives ou autres organismes.
Un désir de réforme fiscale est perçu partout au
Canada. Au Québec, plusieurs voix se sont fait entendre pour
réclamer l'abolition de l'impôt sur le revenu et l'instauration
d'une taxe générale à la consommation. En 1991, les
Québécois étaient les plus taxés au monde: 53,5 %
du revenu sont consacrés en impôt, TPS, TVQ, en taxes indirectes,
taxes municipales et scolaires. Cette taxe proposée me semble
équitable, facile d'administration puisqu'elle réduirait le
nombre de fonctionnaires chargés de la perception, de la
comptabilité et du contrôle de l'impôt.
Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M. Chagnon): C'est nous qui vous remercions,
M. Bérard.
Je passerai immédiatement la parole au ministre du Revenu, qui
vous posera les premières questions. Il y aura deux planches de temps
séparées pour le parti ministériel et le parti de
l'Opposition, de dix minutes chacune. Vos temps de réponse,
évidemment, font partie du temps du groupe politique qui vous pose les
questions. Ça va?
Alors, M. le ministre du Revenu.
M. Savoie: Oui, merci beaucoup, M. le Président.
M. Bérard, je vous remercie beaucoup d'avoir pris le temps de
rédiger un mémoire et de venir vous présenter devant cette
commission.
Évidemment, le mémoire souligne des éléments
qui font l'objet, chez nous, d'une étude attentive. On parle, par
exemple, des mécanismes de contrôle du déficit, de
l'augmentation, évidemment, de la qualité au niveau de la
fonction publique, ce qui est partagé de part et d'autre par l'ensemble
des intervenants. Vous soulignez, je pense - et, si ma mémoire est
fidèle, je ne sais pas si c'est la première fois que c'est
présenté devant cette commission - un projet de loi pour
contrôler le déficit, c'est-à-dire qu'à ce
moment-là on impliquerait un mécanisme comme il en existe, par
exemple, dans certains États aux États-Unis ou dans certaines
autres provinces ou aux départements en Europe. Les obstacles à
ce genre de mécanisme, évidemment, sont assez nombreux. On
souligne, par exemple, des cas d'urgence. Est-ce que vous préconiseriez,
par exemple, la dissolution de la Chambre advenant un dépassement
budgétaire important ou...?
M. Bérard: Oui, parce qu'en fin de compte les lois sont
telles qu'on peut les contourner, et je pense que, dans les
municipalités, à l'heure actuelle, il n'est pas permis de faire
des déficits. Il y a des mécanismes également dans la loi
qui permettent de contourner un peu cette loi-là en faisant approuver,
disons, des crédits spéciaux. Mais l'idée, c'est qu'il
faut arriver à un moment donné où le gouvernement
équilibre ses dépenses et ses revenus. Si, par exemple, il y
avait intention d'aller au-delà, disons, des dépenses, il
faudrait que le peuple se prononce et qu'on lui explique exactement en quoi
consiste le dépassement. Est-ce qu'on est capable de se payer, disons,
ce dépassement? Est-ce que ça va apporter quelque chose aux
citoyens? Et il me semble que la formule référendaire est la plus
appropriée à l'heure actuelle.
M. Savoie: Merci.
Le Président (M. Chagnon): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Bienvenue et merci pour votre mémoire,
de la part de l'Opposition officielle. Comme vous, ça me
préoccupe de voir l'image des décideurs politiques se ternir. Que
ce soit pour une raison ou pour une autre, je pense que c'est malheureux pour
la société parce que, à partir du moment où le
cynisme se développe chez les citoyens, cela va nous faire glisser vers
des formes de démocratie anémiée, pour ne pas dire plus,
dans le temps. (10 h 20)
Donc, tous les facteurs qui contribuent à ce que cela se
produise, à mon sens, doivent être examinés. Je ne veux pas
disculper les politiciens, mais je ne veux pas non plus passer sous silence
d'autres éléments qui font que les débats ne percent pas
dans le public avec l'acuité qu'ils devraient avoir, qu'ils ne se font
pas. Et, là-dessus, évidemment, les médias ont leur part,
mais aussi les citoyens ont leur part, parce qu'il faut qu'ils comprennent que
nous sommes élus par eux. Et, la démocratie, c'est encore le
moins pire des systèmes, il ne faut pas l'oublier.
Ceci étant dit, on s'attaque beaucoup à la fonction
publique. Aussi, des fois, il y a des mythes là-dedans, parce que j'en
ai connu, d'excellents fonctionnaires. Comme ministre, il y en avait
d'excellents. Il y en a des moins bons, comme ailleurs, et je pense que la
fonction publique va être aussi le reflet de la société. En
d'autres termes, je pense qu'il y a un coup de barre à donner de la part
de tous, le citoyen lui-même aussi, pour s'en sortir. La situation est
difficile. Quand vous voulez rationaliser les ministères, par exemple -
et là on parle de la fonction publique, donc du problème
très précis du gouvernement - j'en suis. Il y en a une possible,
et on en voit un certain nombre... Et nous allons, à mon sens, encore
plus loin que ce que vous dites, là-dedans, parce que, pour nous, comme
formation politique, nous disons aux
Québécois: il y a un gouvernement de trop. Parce que nous
prenons globalement ce qui se passe au fédéral, quant à
nous, et ce qui se passe au Québec, et, effectivement, il y a une
rationalisation considérable à faire là-dessus.
Je pense, d'ailleurs, que cela améliorerait de façon
significative le comportement et le sens des responsabilités de la haute
fonction publique du Québec, qui serait, avec les élus,
responsable de domaines entiers de l'administration publique. Je ne sais pas
comment vous réagissez à cette proposition. Il y a un
gouvernement de trop, pour nous, parce que dans le contexte du
libre-échange l'appareil gouvernemental doit être, disons,
amaigri, mais rendu beaucoup plus flexible, plus rapide dans ses
décisions par rapport à des situations où on ne peut pas
se permettre d'attendre trois ans de placotage entre deux niveaux de
gouvernement pour aboutir aux solutions. Ça, c'est notre thèse
fondamentale. Il y a beaucoup de choses qui peuvent en découler, mais
c'est ça, la proposition que nous faisons aux Québécois.
Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Bérard: Tout d'abord, je vais revenir sur la question
de la démocratie. Je pense que la démocratie, ce n'est pas
uniquement l'apanage des élus, c'est aussi tous les citoyens qui doivent
s'impliquer dans la démocratie et, ça, ça s'apprend
très tôt. Il faudrait que le gouvernement et aussi les commissions
scolaires et aussi les parents initient déjà les jeunes à
la démocratie. Ça commence dans la famille, ça va à
l'école et ça va aussi dans les organisations.
Pour revenir à la question des fonctionnaires, j'ai parlé
beaucoup des fonctionnaires parce que je trouve qu'ils prennent une place
énorme, et il n'y a pas de stimulation à l'heure actuelle pour
avoir une fonction publique qui fonctionne efficacement. Je suis pour une forme
de compensation pour les fonctionnaires qui travaillent bien. Il y en a qui...
J'ai généralisé tout à l'heure, c'est sûr
qu'il y a d'excellents fonctionnaires, seulement il faudrait qu'on se penche un
peu sur les besoins du public et il faudrait que le gouvernement trouve un
moyen pour motiver les fonctionnaires, parce que je pense qu'ils ont perdu
cette motivation nécessaire au travail. Quant à la
rationalisation des ministères, je ne veux pas ouvrir le débat
sur la Constitution, on en a déjà parlé beaucoup.
M. Léonard: Monsieur, ce n'est pas un débat sur la
Constitution, je parle d'un débat très pratique sur
l'administration publique.
M. Bérard: Oui
M. Léonard: Je ne parle pas de Constitution, je
parle...
M. Bérard: Mais quand on parle de dédoublement des
ministères, quand on dit, par exemple, qu'à Formation et
Main-d'oeuvre il y a un chevauchement, un dédoublement, c'est de 250 000
000 $ dont on parle, à ce moment-là.
M. Léonard: Oui.
M. Bérard: et si on multiplie ça par le nombre de
ministères qu'on retrouve autant au fédéral qu'au
provincial, on va chercher dans les milliards.
M. Léonard: Ah oui, au moins.
M. Bérard: Alors, je ferme la parenthèse
là-dessus.
M. Léonard: Ce à quoi je voudrais vous
sensibiliser, c'est que le point fondamental, c'est que la question nationale
n'est pas réglée. On a dit: On met en veilleuse les aspects
constitutionnels, parce que certains ne veulent plus en parler; ils ont perdu,
puis ils voient très bien que c'est insoluble. Mais, tout le reste, les
aspects économiques, financiers, budgétaires, administratifs,
ça reste. Et la question nationale est aussi aiguë là-dedans
que sur le plan constitutionnel. Je pense que, quand on a deux
ministères pour s'occuper des mêmes choses, à Ottawa et
à Québec, ça n'a pas de sens; vous le soulignez
vous-même. Mais, quant à moi, je pense qu'il y a une
décision à prendre par les Québécois, au
départ: Quel gouvernement choisissent-ils? S'ils choisissent Ottawa,
qu'ils sachent que l'appareil administratif du gouvernement du Québec va
devoir se couper par deux, par trois, par quatre, parce qu'il va devoir rester
un gouvernement. S'ils choisissent le Québec, il faut qu'ils tirent les
conclusions du choix. Ce choix fondamental n'est pas fait, et c'est là
où le bât blesse le plus, je crois. Ce n'est pas une question
constitutionnelle, c'est un des aspects, l'aspect constitutionnel. Tout le
reste...
Aujourd'hui, vous savez, le service de la dette - vous en parlez
à la fin, dans un de vos paragraphes - est considérable. Mais
où est-il le plus grand? À Ottawa, ce qui a entraîné
des taux d'intérêt réel de 7 % comparativement à
d'autres pays où c'est 2 % ou 3 %, ou même, traditionnellement,
auparavant, c'était entre 2 % et 4 %, le maximum; 7 % depuis 10 ans
à cause de ça. Ça, ça fait monter le service de la
dette du Québec et ça explique en grande partie le
déséquilibre des finances publiques du Québec. Ce n'est
pas une question constitutionnelle, c'est une question de fait financier,
budgétaire. Vous l'admettez, ou pas? Vous ne voulez pas l'admet tre,
mais vous commencez, là, justement, à faiblir par rapport a votre
argumentation! Vous faites partie du problème.
M. Bérard: Non, je n'ai pas voulu, disons, m'embarquer
dans la question de l'aspect constitutionnel...
M. Léonard: Ça va.
M. Bérard: ...parce qu'on pourrait dépasser
favorablement le temps.
M. Léonard: alors, it va falloir, à un moment
donné, que vous appuyiez vos politiciens qui vont vous proposer des
solutions, soit l'une soit l'autre.
M. Bérard: Ah, sûrement!
M. Léonard: C'est ça. Soit l'une, soit l'autre.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: M. le Président, avant de vous poser une
question, je vais être obligé de réfuter ici
l'argumentation du député de Labelle, comme d'habitude.
C'est scandaleux! C'est vraiment scandaleux d'entendre des positions
aussi simplistes que de faire croire, à ce moment-là, qu'on
devrait supprimer un gouvernement et qu'on économiserait d'autant. Je
pense qu'il a été démontré... Je suis hors d'ordre,
je le sais, mais je veux quand même lui répondre parce...
Le Président (M. Lemieux): Vous le savez, que vous
êtes hors d'ordre? C'est bien, M. le député de Verdun.
M. Léonard: Oui, allez-y.
Le Président (M. Lemieux): Vous pouvez continuer hors
d'ordre.
M. Gautrin: Oui, mais il faut quand même répondre.
D'entendre des inepties de cette manière-là...
M. Léonard: II est hors d'ordre, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): II est hors d'ordre.
M. Gautrin: ...c'est quand même scandaleux...
Le Président (M. Lemieux): Alors, question de
règlement. On me dit que vous êtes hors d'ordre.
M. Gautrin: ...alors que ça serait beaucoup plus efficace
pour les finances publiques... On l'a démontré, que, justement,
le fédéralisme permet d'avoir une structure beaucoup plus
efficace que d'avoir à négocier de gouvernement à
gouvernement.
M. Filion: Déposez des études. Déposez des
études.
M. Léonard: Déposez vos études.
M. Gautrin: Absolument!
M. Filion: Déposez les études.
M. Gautrin: Mon cher ami, tout ce qu'on a fait dans la loi 150 a
démontré ça clairement...
M. Filion: Déposez...
M. Gautrin: ...et je soumets que vous devriez les lire, à
ce moment-là.
M. Filion: Déposez les études.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Verdun, nous sommes...
M. Filion: Déposez les études.
M. Gautrin: Vous les avez eues, les études, mon cher
ami.
M. Filion: Non, non, non...
Le Président (M. Lemieux): Nous sommes dans le
cadre...
M. Filion: ...on ne les a pas eues.
M. Gautrin: Vous les avez eues, voyons donc!
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency...
M. Filion: Vous les cachez!
Le Président (M. Lemieux): ...s'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Gautrin: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, ce
matin!
M. Gautrin: ...pour revenir sur l'ordre... Le Président
(M. Lemieux): S'il vous plaît!
M. Gautrin: M. le Président, je ne pouvais pas, quand
même, laisser passer cette ineptie que disait le député de
Labelle. Je vais quand même revenir au...
Le Président (M. Lemieux): Alors, c'est bien. Vous
êtes plus sage, M. le député de Verdun.
M. Gautrin: ...au document de...
M. Bérard: J'espère que je ne vous dérange
pas?
M. Gautrin: Non, non. Des voix: Ha, ha, ha! M.
Bérard: Merci!
M. Savoie: Bien, vous en êtes la cause, M.
Bérard.
M. Gautrin: Mais, honnêtement, pour revenir à
là question de fond, je pense qu'on a été, ici,
favorable... Moi, j'ai été favorablement impressionné par
votre document. Vous soulevez des questions, tant sur les politiciens que sur
l'imputabilité, que sur le déficit, qui sont des
préoccupations qu'on a ici, de ce côté-ci. Je vous
rappellerai qu'on débat actuellement... On a voulu déjà
déposer une loi qui limiterait, tel que vous l'avez dît, le
déficit; l'Opposition n'a pas accepté de donner son consentement
pour qu'on puisse la déposer, donc elle n'a pas été
déposée. On a une loi, qui est la loi 198, qui est en
deuxième lecture, qui doit toucher des questions d'impu-tabilité
et de réduction de la fonction publique. Donc, on est sur les
mêmes voies que vous.
Je voudrais vous poser une question bien particulière: Comment
vous voyez l'imputabilité des fonctionnaires? Parce que vous êtes
sur un principe très général. Est-ce que, pour vous...
Vous savez qu'il y a deux types d'imputabilité. Il y a ce qu'on appelle
l'imputabilité interne, c'est-à-dire qu'à
l'intérieur chacun est imputable devant son supérieur
immédiat, et il y a un concept d'imputabilité externe,
c'est-à-dire devant le Parlement ou les commissions parlementaires.
Alors, qui est imputable à qui, suivant votre esprit? Ça nous
aiderait peut-être à avancer un peu dans ce débat qui est
absolument présent parmi nous, sur l'imputabilité de la haute
fonction publique - ce qui ne remet pas en cause la qualité de la haute
fonction publique, bien sûr. (10 h 30)
M. Bérard: Non, non. C'est que, moi, je pense que les
hauts fonctionnaires, les très hauts fonctionnaires devraient se
présenter soit en commission parlementaire lorsqu'on discute d'un
budget, disons, d'un ministère, ou ainsi de suite, pour dire exactement
pourquoi on a dépensé un montant x, pourquoi on l'a
dépassé, justifier, à ce moment-là, les
dépenses pour qu'on puisse juger également de la valeur de la
gestion de ces hauts fonctionnaires. Parce qu'on sait fort bien que ce n'est
pas souvent les ministres qui ont le haut du pavé; ils sont
entourés de hauts fonctionnaires qui les conseillent. Mais, là,
ça va bien. C'est qu'ils ne sont pas touchés par qui que ce soit.
Ils peuvent faire ce qu'ils veulent, et sans rendre vraiment compte à la
population de la façon dont les budgets sont administrés.
M. Gautrin: Donc, de votre point de vue, c'est bien le haut
fonctionnaire, c'est-à-dire le sous-ministre ou l'équivalent, qui
serait responsable devant le parlementaire, et ça ne passerait plus,
comme c'est le cas actuellement, à travers le ministre ou
l'Exécutif.
M. Bérard: Exact.
M. Gautrin: Je pense qu'on est tout à fait sur la
même longueur d'onde sur cette question-là.
Vous revenez aussi sur la question de... Quand vous parliez des
parlementaires, vous souhaitiez que les gens soient un peu plus libres,
c'est-à-dire que la discipline de parti soit un peu plus souple. Mais
jusqu'où vous iriez dans ce cadre-là? Vous savez que les
règles du parlementarisme britannique font que chaque parti,
malgré tout, est obligé d'être solidaire sur les lois et
que, lorsqu'un projet de loi est défait en Chambre, ça remet en
question, disons, la légitimité du gouvernement. Comment vous
appliqueriez ce principe de l'autonomie du parlementaire - sur lequel,
probablement, tout le monde, de part et d'autre, nous en serions, mais,
à cause de la contrainte de la stabilité gouvernementale, on
l'applique beaucoup moins?
M. Bérard: Bien, écoutez, si l'ensemble d'un parti
voit aux intérêts des citoyens, je pense qu'il y aurait un
consensus. Mais, là, c'est que la ligne du parti est assez... Dans un
sens, on doit donner dans le sens d'une direction. Le meilleur exemple que je
peux donner, c'est votre collègue, mon député de
Laval-des-Rapides, M. Bélanger, qui s'est plaint justement de ce manque
d'initiative personnelle. Parce que, souvent, il y a des mesures qui sont
dictées par le parti, mais seulement, ça ne fait pas l'affaire
nécessairement de certains députés ou de certains
ministres. Il faut revenir toujours aux citoyens, à l'électorat.
Ce sont eux qui doivent décider, via les élus.
M. Gautrin: Je vous remercie, M. Bérard.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Verdun.
M. le député de Montmorency.
M. Filion: Merci, M. le Président.
M. Bérard, je vous remercie de votre mémoire. Je pense que
c'est un document qui nous aide à continuer la réflexion qu'on a
commencée depuis bientôt trois semaines. Je pense que vous
soulevez des points avec lesquels... Je partage votre opinion, entre autres
quand vous parlez de renouveau parlementaire. Je pense que c'est très
clair. Juste à voir le député de Verdun, avec cette
envolée qu'il vient de nous faire, je pense qu'il y a une dynamique
à changer, et je suis d'accord avec vous, mais nous, également,
on est prêts à recevoir la critique. Je pense que c'est
bien.
Vous avez le courage de venir devant cette commission et de dire:
Ecoutez, là, les parlementaires, vous avez une bien petite image dans
l'opinion publique et vous devriez vous efforcer à améliorer
beaucoup de choses pour redonner confiance à la population. Mais aussi,
en même temps, vous dites: La fonction publique, l'impu-tabilité,
il faut diminuer des ministères, et on en est tous conscients. Mais moi,
dans cette réflexion-là, et c'est là que j'aimerais quand
même...
Ce n'est pas de dire qu'on est fédéraliste ou qu'on est
souverainiste, mais il y a une réalité quelque part, et ça
prend aussi un courage politique quelque part pour dire: Écoutez,
là, la structure telle qu'on la vit, telle qu'elle est
administrée, il faut aussi changer les bases d'orientation. Vous avez
beau vouloir changer à la petite cuillère, des petites mesures ou
à la petite semaine, mais il faut que vous changiez aussi l'épine
dorsale. Sinon, vous allez avoir une structure qui va être toute croche
quand même. Il y a des réflexions fondamentales qu'on doit avoir
à travers tout ça et aussi, en même temps, avoir ce courage
de dire que les politiciens, au fond, ont perdu la crédibilité,
mais il faut qu'ils aillent plus loin dans la réflexion et qu'on les
règle, les problèmes.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député de Montmorency?
M. Filion: C'est dans ce sens-là qu'était ma
question, pour vous dire: Bien, vous, là, est-ce que vous êtes
d'accord à ce qu'on prenne une fois pour toutes une décision
importante aussi majeure que celle-là et qu'effectivement, si on doit
être souverain, bien, qu'on le soit, souverain?
M. Bérard: La décision aurait dû être
prise il y a très longtemps.
M. Filion: Oui, hein! Alors, il y a du monde qui est en
retard.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saint-Louis.
M. Chagnon: M. le Président, je vous remercie.
M. Bérard, votre exposé en plusieurs de ses
éléments relève du gros bon sens. Effectivement, je suis
certain que, dans le couple ou la vie familiale que vous vivez chez vous, vous
ne pouvez pas vivre éternellement avec des déficits, et c'est
entendu que l'État ne peut pas non plus vivre éternellement avec
des déficits. C'est ce que vous démontrez là-dedans.
Vous avez parlé d'imputabilité, mais vous avez
parlé beaucoup de coupure de dépenses. Est oo qu'il n'y a pas
aussi d'autres moyens qui viennent ralentir le rythme de dépenses des
citoyens? je pense, entre autres, à des frais d'utilisation. vous n'en
avez pas fait part dans votre document.
M. Bérard: oui, j'ai parié d'un ticket
modérateur, tout à l'heure. je dis que le gouvernement a aussi
une responsabilité vis-à-vis de ses citoyens en leur disant que
tout se paie. il n'y a rien de gratuit.
M. Chagnon: D'accord. Partons de cette piste-là: rien
n'est gratuit, et vous avez tout à fait raison. À quel endroit
vous verriez, vous, l'utilisation de frais d'utilisation? Ne parlons pas de
ticket modérateur. Personne ne veut modérer l'opportunité
d'avoir un recours à des services de santé si on est malade ou
quelque chose comme ça, mais des frais d'utilisation, une visite chez le
médecin ou n'importe quoi? Y a-t-il des endroits, pour vous, ou y a-t-il
des pistes où vous seriez à l'aise de voir vos collègues,
concitoyennes, concitoyens, faire participer ces derniers à
l'utilisation de certains services?
M. Bérard: si je dis oui, c'est que, là, je
m'embarque dans une autre taxe déguisée, parce qu'un ticket
modérateur, c'est une autre taxe déguisée.
M. Chagnon: On a des services. On a des services, il faut les
payer. On peut en couper, mais...
M. Bérard: C'est qu'on paie de plus en plus et on a de
moins en moins de services.
M. Chagnon: Évidemment, parce que le service de la dette
fait en sorte que l'argent qui va rembourser la dette sans rembourser le
capital, vous le payez quand même. Il y a des revenus, par le biais de
vos impôts ou des taxes, qui vont servir à couvrir le service de
la dette. Toutefois, vous n'avez pas de services, évidemment, comme
citoyens, pour l'argent que vous remboursez à vos emprunteurs,
c'est-à-dire à vos prêteurs.
M. Bérard: C'est qu'on a l'impression que, même si
le gouvernement, disons, fait des efforts pour essayer de réduire le
déficit, on ne s'aperçoit pas qu'on améliore la
qualité des services dans l'ensemble au niveau de l'éducation, au
niveau de la santé, au niveau des services sociaux. C'est que, au
contraire, on en a moins, on entend palier de coupures un peu partout, et c'est
ça que les citoyens se posent comme question. On peut parler, disons, de
ticket modérateur, on peut parler de n'importe quelle autre forme, mais
ça devient encore une taxe déguisée.
M. Chagnon: Mais vous êtes d'accord avec ça.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saint-Louis, malheureusement, l'échange est terminé.
Nous vous remercions, M. Bérard, pour votre participation
à cette commission parlementaire.
J'inviterais immédiatement M. Falardeau à bien vouloir
prendre place à la table des témoins, s'il vous plaît.
Nous ne suspendons que 30 secondes et nous reprenons tout de suite.
(Suspension de la séance à 10 h 38)
(Reprisée 10 h 39)
Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de
l'administration reprend ses travaux.
Bienvenue, M. Falardeau. Permettez-moi de vous expliquer
brièvement les règles de la procédure. Alors, on a
globalement une période de 30 minutes, dont 10 minutes pour
l'exposé de votre mémoire, 10 minutes d'échange avec le
groupe ministériel et 10 minutes d'échange avec le groupe de
l'Opposition officielle. Nous sommes prêts, M. Falardeau, à vous
entendre immédiatement.
M. Michel Falardeau
M. Falardeau (Michel): M. le Président, je tiens d'abord
à remercier les membres de cette commission de me permettre d'exposer
devant eux, ne serait-ce que pendant ce court laps de 10 minutes, ma vision des
finances publiques et, par la suite, d'en discuter avec eux.
Un simple coup d'oeil rapide, M. le Président, sur
révolution du budget du gouvernement de 1982 à 1991 permet de
constater que le Québec a été soumis à deux fortes
pressions financières. D'abord, les coupures
répétées du gouvernement fédéral dans ses
paiements de transfert aux provinces ont amputé la base du budget du
Québec de revenus de l'ordre de 2 600 000 000 $. Ensuite, les
dépenses dites non salariales se sont accrues, par manque de
contrôle efficace, beaucoup plus rapidement que la richesse collective
des Québécois, et ce dépassement a ajouté
près de 2 300 000 000 $ à la base des dépenses de ce
même budget.
Pour compenser l'impact de ces facteurs de déséquilibre
budgétaire, le gouvernement du Québec a eu recours à une
stratégie comportant deux volets: premier volet, il a alourdi le fardeau
fiscal de l'ensemble des contribuables québécois de près
de 1 900 000 000 $ par année; deuxième volet, il a surtout
coupé, dans la base annuelle de la rémunération de ses
employés des secteurs public et parapublic, une somme fabuleuse que l'on
peut évaluer à 3 300 000 000 $. (10 h 40)
Ainsi, contrairement à l'image habituellement
véhiculée par le gouvernement en temps de négociations, ce
n'est pas nous qui sommes partis avec la caisse de l'État, mais
plutôt le gouvernement qui a renfloué sa propre caisse en puisant
à même nos salaires. Loin de constituer sa cause majeure de
déséquilibre financier, nous avons été, bien au
contraire, de très loin, M. le Président, sa principale source
d'équilibre budgétaire depuis 1983, assumant à nous seuls
65 % des mesures de redressement des finances publiques.
Je tiens à ce moment-ci à vous aviser, M. le
Président, que je dépose devant cette commission un addendum
à mon mémoire qui me permet de réagir au document
gouvernemental. Je pense qu'il est actuellement distribué.
Que nous réserve l'avenir, M. le Président? Je me suis
permis de faire mon propre exercice de projections budgétaires
jusqu'à l'an 2000. Je pourrai, sur votre demande, vous mentionner les
fondements méthodologiques qui les distinguent de celles du document
gouvernemental. Voici les conclusions maîtresses qui se dégagent
d'un tel exercice.
Les coupures du gouvernement fédéral dans ses paiements de
transfert priveront en moyenne le Québec de 600 000 000 $ additionnels
par année. En l'an 2000, elles auront ainsi amputé la base
récurrente des revenus budgétaires du Québec de plus de 7
000 000 000 $. Par ailleurs, les dépenses, si elles sont laissées
à elles-mêmes, croîtront plus rapidement que la richesse
collective des Québécois, ce qui représente en moyenne un
déséquilibre budgétaire additionnel de 400 000 000 $ par
année.
En somme, pour en arriver simplement à ne pas
détériorer davantage notre situation financière actuelle,
le gouvernement se devra, bon an, mal an, de procéder à des
mesures de redressement budgétaire équivalentes à 2,5 % de
son budget, totalisant, pour la première année 1993-1994, 1 000
000 000 $. S'il applique ces mesures année après année,
son budget affichera un surplus budgétaire entre 1996-1997 et 1998-1999,
avant de plonger à nouveau, en raison de la récession
prévisible autour de l'an 2000, dans un déficit annuel de
près de 5 000 000 000 $. Vous avez le détail de ces calculs
à l'annexe 2, page 10, de l'addendum.
Le gouvernement sera fortement tenté, dans la période
d'abondance et de surplus, de réduire ses mesures de redressement et
même d'offrir des allégements à ses électeurs. Mais,
s'il le fait, et c'est malheureusement ce qu'il a fait entre 1987 et 1990, il
alourdira d'autant le déficit prévisible pour les années
de récession qui suivront. Mais où trouver, année
après année, au-delà de 1 000 000 000 $ en mesures de
redressement budgétaire?
Voici sommairement quelques pistes que je livre à votre
réflexion. Ce trou structurel de 1 000 000 000 $ dans les finances
publiques
origine, nous l'avons vu, à 60 % des coupures du gouvernement
fédérai. Je recommande donc, en conformité avec le
programme politique de l'actuel parti au pouvoir, le rapatriement
immédiat au Québec des points d'impôt servant à
assurer le financement fédéral des programmes provinciaux de
santé et d'éducation postsecondaire, deux domaines de juridiction
strictement provinciale. En évitant ainsi l'érosion graduelle de
ces transferts, nous récupérerions annuellement près de
400 000 000 $ en revenus additionnels. C'est déjà un bon
départ.
En cas de refus du gouvernement fédéral de procéder
à ce rapatriement dans un très court délai, je propose de
convertir une partie de l'actuelle TVQ en TCCF, taxe compensatoire pour les
coupures fédérales, taxe dont le taux serait annuellement
ajusté à l'évolution des coupures du gouvernement
fédéral. Ainsi, les Québécois garderaient
constamment à l'esprit, achat après achat, la cause majeure de
déséquilibre financier de leur gouvernement provincial. Les
autres provinces pourraient par la suite être invitées à
emboîter te pas de façon à accroître les pressions
sur le gouvernement fédéral. une autre avenue très
intéressante et prometteuse réside dans la correction du
traitement privilégié actuellement consenti aux mieux nantis de
notre société. présentement, le différentiel de 1 %
d'imposition des revenus imposables des mieux nantis, au-delà de 50 000
$, ne rapporte, selon mes propres estimations, que 50 000 000 $ au
trésor de la province. en contrepartie, notre gouvernement consent
à leur égard des rabais fiscaux s'élevant
déjà à 500 000 000 $ en période de
récession. le coût de ces abris fiscaux pourrait aisément
dépasser le 1 000 000 000 $ au cours de la période de reprise qui
s'amorce.
En outre, cette classe déjà bien nantie de notre
société s'est déjà dotée dans le
passé d'avantages sociaux importants en comparaison de nos voisins.
C'est ainsi que nous consacrons annuellement quelque 400 000 000 $ aux
écoles et collèges privés davantage utilisés, vous
le savez bien, par les familles mieux nanties de notre société.
Ailleurs, en Ontario ou aux États-Unis, ces institutions privées
ne reçoivent que très peu d'argent de l'État.
De même, il en coûte 100 000 000 $ au gouvernement du
Québec pour maintenir les droits de scolarité universitaires
inférieurs de 800 $ à la moyenne canadienne. Ce privilège
ne bénéficie, en fait, qu'aux familles plus aisées de
notre société, puisque notre régime d'aide
financière aux étudiants, par sa dynamique même, compensait
pour la majorité d'entre eux, les moins fortunés, toute hausse de
ces droits. Ainsi, dans la situation actuelle, le régime fiscal et
social du Québec permet aux mieux nantis de notre société
de pêcher des deux - que dis-je, M. le Président - des trois
côtés de la chaloupe à la fois, et ce, en toute et parfaite
légalité: à droite, en bénéficiant d'une
très faible progressivité de leur impôt ne rapportant que
50 000 000 $ dans les coffres de l'état; à gauche, en profitant
de rabais fiscaux fluctuant entre 500 000 000 $ et plus de 1 000 000 000 $
selon la période du cycle économique; et même par
derrière, j'imagine, par-dessus le moteur de la chaloupe, en jouissant
d'avantages sociaux comparatifs dont la facture s'élève, pour
l'ensemble des contribuables, à près de 500 000 000 $.
Il s'agit là, à mon humble avis, M. le Président,
d'un véritable scandale fiscal et social dont on ne retrouve aucun
écho dans le document gouvernemental. Me serais-je trompé, M. le
Président, si, en le lisant, j'en ai retiré l'impression
très nette qu'il tente de justifier le maintien de ce régime
fiscal et social qui reporte sur le dos des contribuables moins fortunés
près de 1 000 000 000 $ du fardeau fiscal qui devrait être
assumé par les mieux nantis de notre société.
Je recommande donc que les subventions aux écoles et
collèges privés soient graduellement abolies sur un horizon de
cinq ans et que les droits de scolarité universitaire soient rendus
comparables à très court terme à la moyenne canadienne. Je
recommande aussi que les taux marginaux d'imposition des revenus imposables
supérieurs à 40 000 $ ainsi que la structure des rabais
d'impôt consentis aux mieux nantis soient harmonisés, de telle
sorte que le différentiel des revenus fiscaux provenant de la
progressivité accrue de ces taux compense entièrement les
coûts des rabais fiscaux qui seraient retenus. Ainsi serait globalement
rétablie non pas une progressivité, M. le Président, mais
une simple neutralité fiscale. On peut évaluer à
près de 1 000 000 000 $ l'impact de ces mesures de redressement
budgétaire.
Est-ce que je peux savoir le nombre de minutes qu'il me reste, M. le
Président?
Le Président (M. Lemieux): II vous reste une minute.
M. Falardeau: Une minute? Dans le mémoire et l'addendum
déposés, vous retrouvez aussi une foule d'autres recommandations
sur les sujets suivants: d'autres moyens de pression sur le gouvernement
fédéral, d'autres mesures fiscales, la publication annuelle du
coût des déductions, exemptions et abris fiscaux de toute nature,
la tenue d'une commission indépendante d'enquête sur la
fiscalité, le contrôle des honoraires versés aux
médecins, le ticket modérateur en santé,
l'impôt-services en santé et en éducation
postsecondaire.
M. le Président, je termine mon intervention sur ces mots que je
laisse à votre réflexion ainsi qu'à celle des membres de
cette commission. 51 le gouvernement du québec poursuit sa politique
d'impuissance face au gouvernement
fédéral, s'il ne réussit pas, en période
d'abondance, à s'astreindre à la discipline requise pour se
garder la capacité d'absorber la récession qui suit
inévitablement, s'il entend maintenir les privilèges sociaux et
fiscaux injustement consentis aux mieux nantis de notre société,
s'il refuse de contrôler de façon efficace les honoraires qu'il
verse aux médecins, ce n'est pas spécialement à nous, ses
400 000 employés des secteurs public et parapublic, plus qu'aux autres
qu'il revient de payer le prix de ces décisions politiques, mais bien
à l'ensemble des 3 000 000 de travailleurs qui l'ont élu, dont
nous faisons partie et qui, tout comme nous, ont conservé un emploi
malgré la dernière récession.
Lé Président (M. Lemieux): M. Falardeau, est-ce que
vous avez presque terminé?
M. Falardeau: Oui, il me reste un paragraphe.
Le Président (M. Lemieux): II ne vous reste plus de temps,
là.
M. Falardeau: Un paragraphe, monsieur?
Le Président (M. Lemieux): Un paragraphe? Allez-y, M.
Falardeau.
M. Falardeau: Oui. Par ailleurs, la population du Québec,
tout autant que ceux qui oeuvrent à son service, n'accepteront
guère de déposer gracieusement leur contribution dans
l'écuelle et chercheront plutôt, par tous les moyens disponibles,
à s'en esquiver, et ce, tant et aussi longtemps que les ministres de
notre gouvernement ne les auront pas convaincus, par des mesures
concrètes plus que par de beaux discours, que la quote-part qu'il exige
d'eux ne sert pas, a tout le moins, à engraisser le festin des
loups.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Falardeau.
M. le président du Conseil du trésor.
M. Johnson: Oui. Je vous remercie, M. le Président.
Je remercie M. Falardeau qui se présente, j'aime le dire, comme
un de mes employés de la fonction publique, M. Falardeau. (10 h 50)
M. Falardeau: ...à titre personnel, mais je suis
employé de la fonction publique.
M. Johnson: Je comprends, mais ça me fait plaisir de voir
l'intérêt extrêmement concret que vous apportez et que vous
démontrez pour cette commission, évidemment. Vos qualifications
professionnelles vous ont permis de faire un survol rapide, mais en certains
cas en profondeur de la problématique des finances publiques, de
l'évolu- tion de certaines croissances, de l'évolution de
certains postes de dépenses, etc., de mettre en regard les uns des
autres ce que vous appelez les facteurs d'équilibre et de
déséquilibre dans les finances publiques. Une présentation
fort originale pour laquelle je vous remercie, mais qui ne réussit pas,
à mon sens, et je me permettrai de l'évoquer, à centrer
autant que vous auriez pu le faire sur certains des aspects qui m'apparaissent
fondamentaux.
Vous avez parlé de la fiscalité, des services et de la
composante salariale dans les finances publiques. Vous avez
évoqué, évidemment, le contentieux
fédéral-provincial qui n'explique pas les 7 200 000 000 $ de
compressions de dépenses auxquelles nous serons astreints si on veut
équilibrer le budget d'ici cinq ans, mais qui en est une composante.
Ça, on l'a toujours indiqué.
Au point de vue de la fiscalité, vous êtes de
l'école qui trouve que les abris fiscaux, ça n'a pas de bon sens,
que notre fiscalité n'est pas suffisamment progressive et qu'en
conséquence on devrait faire porter notre effort de ce
côté-là. Je vous réfère simplement à
la page 112 du document que nous avons présenté, le 19 janvier
dernier, où vous verrez que, depuis sept ans, le poids de ce qu'on
appelle les dépenses fiscales a radicalement changé en faveur des
individus probablement les mieux nantis, qui en bénéficiaient,
vers les entreprises, notamment et largement au titre de la recherche et du
développement.
C'est une décision stratégique de développement
économique qui a été prise à ce titre-là, et
j'aimerais au moins que, si on prétend que les abris fiscaux profitent
aux individus, qu'on nous indique jusqu'à quel point, mais surtout par
quoi on va remplacer évidemment ces dépenses fiscales au point de
vue stratégique, si on veut continuer à soutenir la recherche et
le développement.
Deuxièmement, sur la progressivité, je vous
réfère aux pages 42 et 43, de même qu'en vue de leur
comparabiltté, à la page 39 de nos documents, qui démontre
la courbe nettement progressive, d'une part, des impôts.
Deuxièmement, elle vous indique que si les mieux nantis, comme on les
appelle, faute de mieux ou de pire - je ne sais pas, ça dépend
qui parle - représentent 1 % des citoyens qui gagnent 6 % des revenus et
paient 10 % des impôts, il n'y a pas, en termes comparatifs, beaucoup de
place de toute façon pour aller chercher des impôts là. Et,
deuxièmement, il faudrait augmenter de 89 % le taux marginal de ceux qui
font plus que 55 000 $. Il faudrait quasiment doubler... il faudrait doubler,
ce n'est pas mêlant, le taux marginal d'imposition des gens qui font plus
de 55 000 $, si on veut aller chercher 1 000 000 000 $. On a un problème
de 1 600 000 000 $. Alors, on se rend compte du caractère totalement
irréaliste de vouloir faire peser le poids de la fiscalité ou de
la progressivité additionnelle du côté de ces
gens-là.
Du cote des services, je partage entièrement votre avis. Je
trouve qu'on s'illusionne à sous-estimer, comment dirais-je, à
faire croire aux gens... on s'illusionne comme société à
persister à faire croire aux gens que ça ne coûte rien
à l'université et que c'est un avantage que la
société en retire un jour que de permettre à quelqu'un
d'avoir accès à l'enseignement supérieur, alors que la
plupart des études, sinon toutes, démontrent clairement
qu'au-delà du primaire et du secondaire, quand on commence à
toucher à l'enseignement supérieur, c'est très nettement
à l'avantage, d'abord et avant tout, du bénéficiaire et
ensuite de la société que de poursuivre des études
supérieures. Je suis entièrement d'accord avec vous, là,
quant aux frais de scolarité universitaire et à l'enseignement
supérieur on général.
Il est évident, d'après toutes les études, que ce
sont les classes moyennes et mieux nanties qui bénéficient
largement de subventions implicites que le système de financement des
universités détermine. Ce sont ces gens-là qui en
bénéficient. Ce sont les gens qui ont les moyens qui
bénéficient des largesses de l'État au titre de
l'enseignement supérieur. Je suis entièrement d'accord avec vous,
et il faut que ça cesse.
Troisièmement, sur les salaires de nos employés. Il ne
faut pas confondre le rythme de croissance des différents postes de
dépenses avec leur ampleur en chiffres absolus. Ce qu'il faut savoir, ce
que vous n'avez pas évoqué là, ce que tous les chiffres,
toutes les études, toutes sources universitaires, l'Institut de
recherche et d'information sur la rémunération nous indiquent,
c'est que, globalement, les employés du secteur public, au titre de leur
rémunération, salaire et avantages sociaux, sont en avance de 7 %
à 10 % sur le secteur privé. Les 3 000 000 de personnes qui ont
encore leur emploi, de même que les 400 000 qui en ont dans le secteur
public, sont ceux dont les impôts viennent rémunérer les
400 000 en cause qui gagnent 7 % à 10 % de plus que les 3 000 000.
Alors, ce n'est pas du côté, en cas de basse conjoncture de nos
employés, qu'on fait porter l'effort pour les «victimiser».
C'est simplement une réalité à long terme avec laquelle on
devra composer, c'est-à-dire qu'il est impératif pour
l'État de réduire l'écart de rémunération
qu'il y a entre ses employés, qui font une tâche x, y ou z, et
ceux du secteur privé, qui font des tâches identiques et qui
gagnent moins.
Alors, il y a un problème d'équité sociale qu'il
faut régler tranquillement et dans la continuité des gestes
gouvernementaux. C'est parce que ça a été
négocié, ça. Quand ça a été
négocié, ça veut dire que les deux parties ont
signé. Je ne me souviens pas qu'il y ait eu des décrets
unilatéraux pour imposer des augmentations supérieures à
ce qui était demandé. Je n'ai jamais entendu parler de ça.
J'ai entendu parler du contraire. Mais la règle, évidemment,
c'est que ça a ete conventionné et entendu, ces niveaux salariaux
là. C'est pour ça que, depuis quelques années, on a
convenu de geler, de prolonger, afin de rétablir tranquillement. Je
pense qu'il y a un programme d'équité que nos syndicats du
secteur public comprennent pour rétablir l'équilibre entre le
public et le privé.
Je vous remercie beaucoup de votre présentation. Elle a
levé plusieurs lièvres, et je ne sais pas si le temps imparti est
injustement trop court pour discuter de toutes ces choses-là. S'il me
restait quelques minutes sur mon enveloppe, évidemment, monsieur
pourrait faire quelques commentaires.
Le Président (M. Després): ..trois minutes.
M. Johnson: Trois minutes. Alors, si M. Falardeau a quelques
commentaires à cet égard-là, on lui souhaite la bienvenue
à l'avance. Je suis sûr que ça sera extrêmement
intéressant.
Le Président (M. Després): M. Falardeau, est-ce que
vous avez des commentaires?
M. Falardeau: Oui. Je vais me concentrer uniquement sur le
dernier aspect abordé par M. le ministre concernant les études
sur l'IRIR.
L'IRIR a été créée à la demande du
Conseil du trésor, suite au manque de crédibilité des
études du bureau de la rémunération, à
l'époque, du Conseil du trésor. Lors de la négociation de
1982, le public lui reprochait d'être à la fois juge et partie
dans les études qu'il mettait sur la place publique. Or, pour assurer
plus de crédibilité aux comparaisons salariales, on a
demandé de créer l'IRIR. C'est d'ailleurs le président
d'alors du Conseil du trésor qui a parrainé le projet de loi qui
a créé l'IRIR.
Le président, de même que les deux vice-présidents,
sont nommés par l'Assemblée nationale, mais sur motion du premier
ministre. Donc, c'est un choix gouvernemental encore. Le niveau de leur
rémunération est fixé par le gouvernement lui-même,
probablement le Conseil du trésor. Les autres membres du conseil
d'administration sont aussi nommés par le gouvernement. Le budget est
fourni à 99 % par le gouvernement dans le cas de l'IRIR, probablement
par le Conseil du trésor. Alors, M. le Président, ne soyez pas
surpris si, derrière le masque de l'IRIR, je ne peux m'empêcher de
voir se profiler les traits du Conseil du trésor.
M. Johnson: M. le Président...
M. Falardeau: Et, à titre d'expérience, je peux
vous dire que, dans le cas des professionnels du gouvernement, notre syndicat a
fait maintes représentations pour corriger un biais systématique
qu'il y avait dans la comparaison salariale entre les professionnels du
secteur
public et les professionnels du secteur privé, et L'IRIR a
toujours refusé de vouloir corriger ce biais, mais comme de raison,
ça faisait drôlement l'affaire du Conseil du trésor.
Alors, la crédibilité des études salariales
comparatives, secteurs privé et public, leur crédibilité,
à mes yeux, n'est pas très élevée.
M. Johnson: M. le Président, je suis oblige-Le
Président (M. Després): M. Johnson, une courte... (11
heures)
M. Johnson: Je suis obligé de constater que M. Falardeau a
quitté rapidement la voie scientifique qu'il avait empruntée,
avec quelques incursions dans la poésie dans son mémoire, pour
nous livrer une théorie de la conspiration à laquelle je ne
souscris aucunement. Tous les éléments qu'il a soulevés
à rencontre de la crédibilité de l'IRIR valent
également pour l'om-budsman, te Protecteur du citoyen, nommé sur
la proposition du premier ministre à l'Assemblée nationale, dont
les budgets viennent du gouvernement. Ça vaut pour la Commission des
droits de la personne, ça vaut pour la Commission de la fonction
publique, et il est en train de nous dire que le Vérificateur
général, nommé à l'Assemblée nationale sur
proposition du premier ministre, donc du gouvernement, que ce sont tous des
gens non crédibles parce qu'ils sont nommés à
l'unanimité de l'Assemblée nationale. C'est l'affaire la plus
incroyable que j'ai entendue depuis longtemps de quelqu'un qui se dit
professionnel! J'espère qu'à l'avenir vous aurez de la même
farine que ce qu'il y avait dans votre mémoire, des arguments un peu
plus percutants que des théories de conspiration sur la provenance des
fonds.
Je vous annonce que si ça fait partie du secteur public, les
fonds vont venir des impôts. Et, si ça vient des impôts,
ça va effectivement être visé par le Conseil du
trésor; c'est comme ça depuis 25 ans que ça marche et
ça ne changera pas. Ce n'est pas une conspiration, ça, ça
s'appelle contrôler les dépenses publiques pour que même
l'IRIR ne se dote pas d'une structure salariale qui va au-delà de la
capacité de payer des Québécois. C'est pour ça
qu'on fait ça.
Le Président (M. Després): Merci, M le
président du Conseil du trésor.
M. le député de Labelle, la parole est à vous.
M. Léonard: Merci. Alors, je vous souhaite la bienvenue.
Je vous dis merci pour la qualité de votre mémoire, sa concision
en même temps que le fait qu'il soit complet quant à plusieurs
sujets.
Je viens d'entendre le président du Conseil du trésor. Je
vois le ton qu'il prend dès qu'on n'est pas tout à fait en accord
avec ce qu'il dit, mais il faut quand même admettre qu'il y a quelques
problèmes, il y en a, des problèmes.
Effectivement, sur le plan des finances publiques, elles sont en
déséquilibre. Il faut le constater et il faut poser des gestes,
mais il faut aussi faire une bonne analyse, une analyse complète. Vous
avez touché un bon nombre des sujets qui en font partie.
Je voudrais partir de l'idée que, depuis 1980 en particulier, les
déficits fédéraux ont drôlement grevé les
finances publiques, mais ça a été pire que cela parce que,
comme ils ont été en déficit de façon
systématique, la confiance des investisseurs a baissé et les taux
d'intérêt réels ont atteint 7 % depuis 10 ans. Ça,
c'est le point majeur. Malgré tous les plans de relance, il n'y a rien
qui s'est rétabli, de sorte que, au départ, l'économie
canadienne a été pénalisée et, évidemment,
l'économie québécoise. Donc, si l'économie
connaît moins d'investissements, ça ralentit; il y a moins de
rentrées de fonds et le déséquilibre des finances
fédérales s'est creusé de plus en plus.
L'une des manifestations pour nous, ça a été la
coupure des transferts fédéraux. J'ai vu que vous aviez dit 2 600
000 000 $. Je crois que ça dépend des périodes, mais les
calculs que nous avons sur, je pense, des chiffres peut-être un peu
différents, c'est 3 600 000 000 $: 1 800 000 000 $ sur la
péréquation, et 1 800 000 000 $ sur les FPE, les programmes
à frais partagés. Mais c'est 3 600 000 000 $ jusqu'ici dans le
budget de 1992-1993. Quoi qu'il en soit, 1 000 000 000 $, c'est gros, mais
disons que le budget 1992-1993, le document lui-même le dit, 3 600 000
000 $ et il y aura 2 000 000 000 $ qui vont s'ajouter d'ici cinq ans, sur une
base annuelle toujours. Ça, vous l'avez très bien
souligné, 400 000 000 $; donc, c'est des strates qui s'ajoutent à
chaque année.
Problème majeur pour les finances du Québec qui vient du
manque de volonté politique et, |e dirais, de la faiblesse du
gouvernement fédéral, je le dis comme cela, face à toutes
sortes de revendications de tous les coins du Canada, auxquelles il se plie. Le
premier point, ça a été la coupure des transferts
fédéraux, mais ça a été aussi la
montée du service de dette du gouvernement du Québec où
les taux réels de 7 % font mal sur un service de dette de 4000 000 000
$, 4 500 000 000 $, bientôt 5 000 000 000 $; des taux réels
d'intérêt de 7 % plutôt que de 3 %, c'est
considérable! ça aussi, c'est encore 2 000 000 000 $ qu'il ne
faut pas oublier, sans compter les effets économiques du taux
réel d'intérêt sur l'économie
québécoise. ça, c'est majeur!
Ceci étant dit, effectivement, il y aura des rationalisations
à faire au gouvernement fédéral, au gouvernement du
Québec. Je pense qu'il faut l'admettre, mais il faut avoir, je pense, le
courage de faire la bonne analyse, de poser le bon diagnostic parce que,
après, au lieu de
courir un peu partout sur des assistés sociaux ici et là
et de couper à l'aveuglette, sans savoir si, dans le bain qui est
à deux trous, il y en a un qui ne sera pas bouché et que
là, on ne fera rien de bien avec tout cela. Moi, je pense que c'est le
point majeur, le point de départ.
Autre point que vous soulignez, effectivement: les dépenses
autres que les salaires au gouvernement du Québec ont augmenté
bien au-delà de l'inflation et beaucoup plus que les salaires. J'ai eu
l'occasion de le souligner à l'occasion d'au moins deux ou trois
dépôts du livre des crédits - au moins deux - et la
tendance n'a pas diminué, et ce ne sont pas juste les dépenses
d'assistance sociale qui expliquent ces augmentations.
Je comprends, quand vous venez comme ici au nom des professionnels ou
des employés gouvernementaux, que vous parlez en votre nom personnel,
mais vous dites qu'il y en a 400 000 qui pensent comme vous, que le
gouvernement, au fond, fait faire en double ce qu'il a à faire. Il
demande à des firmes privées de faire des choses que ses
fonctionnaires pourraient faire parce qu'il n'a pas confiance ou, enfin, il y a
plein, plein de ces éléments-là qui se font.
Je ne suis pas tout mêlé. J'entends grogner le
président du Conseil du trésor.
M. Johnson: C'est tout mêlé, ça. Ça
s'appelle de la sous-traitance.
M. Léonard: Mais les points que je soulève ont
été établis très clairement en commission
parlementaire et autrement. Je comprends que ça ne lui fasse pas
plaisir, qu'il n'aime pas qu'on lui dise ses vérités...
M. Johnson: Non, c'est bon.
M. Léonard: ...mais il y a des problèmes à
l'intérieur même et puis je pense qu'il faut poser le bon
diagnostic au départ.
Moi, j'aime bien votre exposé. Vous dites ce que vous voulez
dire. Je pense que vous avez parfaitement le droit de venir le faire. Et puis,
si on arrive autrement sur le dernier sujet, l'ensemble des questions que vous
avez traitées sur l'impôt, le fardeau fiscal, effectivement, la
pioijrcssivitô dos courbos do l'impôt a diminue, les gens qui
gagnent plus paient moins relativement qu'il y a 10 ans. Ça, c'est clair
et net; ça a été établi au cours de la commission
cette semaine. Il y a eu des mémoires qui l'ont établi. Vous avez
raison. Continuez à le dire. Nous sommes d'accord avec vous
là-dessus. Et puis, l'autre élément majeur, c'est que la
réforme fiscale qui a été introduite l'a été
à contretemps et à contre-courant.
L'orientation vers la taxation, la tarification se fait à un
moment où on entre dans le libre-échange, moment où on
doit conformer nos politiques tarifaires, de tarification, de taxation avec
celles des partenaires et l'on a fait le contraire en introduisant la TPS, TVQ
en 1991, en baissant aussi l'impôt. On a fait le contraire de ce qu'il
aurait fallu faire, comme il se fait d'ailleurs dans le marché commun.
Le marché commun, les politiques de tarification, de taxation ont
été uniformisées et tendent à se rapprocher, je ne
dis pas parfaitement, mais tendent à se rapprocher alors que c'est par
l'impôt sur le revenu qu'on se distingue. On est allé dans le sens
inverse, à contre-courant, et on a fait ça à contretemps
parce qu'on l'a fait au moment où on entrait en récession
économique. On est entré en récession en avril 1990, et
ils ont appliqué leur réforme en janvier 1991. Ça, c'est
majeur, mais, comme ils ont nié l'existence de la récession
jusqu'en novembre 1991, vous voyez que le réalisme ce n'était pas
ce qui les égorgeait. Je voudrais avoir vos commentaires.
Le Président (M. Després): M. Falardeau.
M. Falardeau: II est certain que quand on voit un premier
ministre déchirer sur la scène internationale un pacte qui
représentait le Canada et que, deux semaines après, on voit les
taux d'intérêt monter de 2 % et qu'on a toutes les misères
du monde à retrouver les taux d'intérêt qu'on avait
auparavant, même si on demeurait en récession par la suite, il est
certain en tout cas que, pour moi, sur mes hypothèques, ça fait
une grosse différence. Ça fait aussi une grosse différence
sur le service de la dette des gouvernements, et fédéral et
provincial. En faisant ça, notre premier ministre nous a tous
tirés dans le pied, quoi.
J'aimerais revenir aussi sur... Je dispose d'un peu de temps ou si... M.
le Président?
Le Président (M. Després): Vous disposez d'environ
deux minutes. (11 h 10)
M. Falardeau: D'accord. J'aimerais revenir aussi sur une autre
chose. Dans le document qui est ici, on dit que les deux récentes
ententes de prolongation des conventions collectives de six mois et d'un an se
sont avérées favorables aux salariés du secteur public.
C'est une affirmation quand même assez massive dans le document
goiivomemental. Moi, mes calculs me disent que les salariés des secteurs
public et parapublic ont contribué 670 000 000 $ en salaire. Si on leur
avait donné l'inflation, tel que le modèle des conventions
collectives le prévoit, c'est-à-dire du décembre
précédent à décembre d'il y a un an, donc de
l'année précédente, ça aurait coûté
à l'État 670 000 000 $ de plus en salaire pour ces 18 mois. Moi,
personnellement, je l'ai appliqué sur mon propre salaire. C'est 2000 $,
M. le Président, que j'ai laissés au gouvernement et à
l'ensemble de la population pour les aider à se sortir du creux de la
récession. Ça me fait mal au coeur aujourd'hui et même
très mal quand je
vois ce même gouvernement se retourner contre moi et affirmer
devant toute la population, dur comme fer...
Le Président (M. Després): En conclusion, excusez,
M. Falardeau.
M. Falardeau: Pardon?
Le Président (M. Després): Le temps est
déjà terminé. Je vais vous laisser une courte
conclusion.
M. Falardeau: Que le gouvernement, dans notre cas, affirme que je
m'en suis mis plein les poches pendant ce temps-là. Ça me
rappelle un vieux dicton, M. le Président, et c'est ma conclusion:
Donnez à manger à un cochon, et il viendra chier sur votre
perron.
M. Johnson: Comme en 1982.
Le Président (M. Després): Merci, M. Falardeau, de
votre présentation.
J'inviterais maintenant M. Paul-Émile Fortin à venir
à la table des témoins. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 12)
(Reprise à 11 h 13)
Le Président (M. Després): Bonjour, M. Fortin. Je
voudrais, au nom des membres de cette commission, vous souhaiter la
bienvenue.
Nous avons 30 minutes à notre disposition, c'est-à-dire
que vous avez une période maximum de 10 minutes pour présenter
votre mémoire. Après quoi, le temps sera partagé entre les
députés ministériels et de l'Opposition pour une
période de 10 minutes pour un échange avec vous. Donc, je vous
laisse la parole, M. Fortin.
M. Paul-Émile Fortin
M. Fortin (Paul-Émile): Merci, M. le Président.
J'espère que les députés ici en Chambre... Je peux
apporter un commentaire avant de débuter? Qu'on laisse les politiques de
côté, puis qu'on parle du budget. Que ce soit de l'Opposition ou
de ceux qui sont au gouvernement, on est ici pour discuter sérieusement
de politique et des problèmes que, nous, les citoyens on peut amener.
Même si, des fois, ça affecte certains députés ou
ça affecte le gouvernement, c'est dans nos droits de venir expliquer
notre situation. Et on en voit assez des débats en Chambre, des
«tirements» de cheveux puis de ceci de ça, qu'on pourrait
les laisser de côté dans une commission. Merci.
Je suis Paul-Émile Fortin. Je demeure à Thetford-Mines. Je
suis membre de l'association des ingénieurs mécaniques du Canada.
J'ai travaillé dans 13 compagnies, comme le département de
génie mécanique. Donc, je vais présenter mon
mémoire. Il me fait plaisir de pouvoir exprimer mes opinions sur le
sujet mentionné. J'ai déjà fait parvenir des commentaires
au ministre des Finances et au premier ministre concernant ce sujet. J'ai
reçu un accusé réception du premier ministre, mais rien de
plus après, et une réponse incomplète du ministre des
Finances. Je ne vois pas comment ce mémoire, comme beaucoup d'autres,
même venant de personnes plus qualifiées que moi pour les
présenter, va changer les choses. On voit les résultats qu'a
donnés la commission Bélanger-Campeau, le résultat du
référendum, ce qui va ressortir de la commission sur l'avenir des
cégeps.
Ce que je pense, et beaucoup d'autres pensent comme moi même s'ils
sont membres du parti, c'est que le présent gouvernement se fiche du
peuple travailleur et agit à sa guise, aidant les riches au
détriment des plus démunis, se disant: Vous n'êtes pas
satisfaits, changez-nous à la prochaine élection. Vous nous avez
élus. Donc, on agit en conséquence, comme ça nous
plaît, vous n'avez rien à dire. Il y a consultation après
consultation, commission après commission. Quels en sont les
résultats? Voyons-nous la situation changer? Je ne crois pas. Vous ne
faites pas des ministres du jour au lendemain avec des personnes qui se disent
capables, n'ayant pas de connaissances mais beaucoup d'extravagance, prenant
les décisions de bureaucrates qui, eux, n'ont aucune connaissance de ce
qui se passe dans le milieu du monde ordinaire, penchant du côté
du lobbying le plus amical, et ceci mémo au détriment du public
en général.
Eux, les bureaucrates, doivent présenter des beaux rapports qui
prennent beaucoup de temps à compléter et coûtent cher.
Aussi, à cause de ces énormes quantités de rapports,
d'énoncés, etc.. le nombre de personnes affectées à
cet ouvrage augmente de jour en jour, grandissant avec les caprices des
ministres et ce que les bureaucrates veulent présenter. Je dirais que 95
% de ces rapports et autres, le public n'en connaît pas l'existence.
Donc, à qui servent-ils?
Il y a ici une note que j'ai mise à côté
là-dessus que je vais lire en passant. On dirait que le gouvernement est
une compagnie d'imprimerie. Les écoles manquent de livres, mais eux en
impriment beaucoup. Je crois que même si quelqu'un présentait des
recommandations qui amèneraient une réduction concrète des
dépenses gouvernementales sans réduire les services aux citoyens,
je parle de dépenses qui ne rapportent rien, mais seulement des
dépenses, comme les suivantes: les subventions de tout genre qui
achètent des votes aux agriculteurs qui ont des valeurs que n'importe
quel travailleur n'aura jamais, aux industries qui n'utilisent pas les
subventions a 100 % pour les raisons pour
lesquelles elles ont été données, à toutes
sortes d'organismes qui n'apportent pas toujours les résultats
escomptés, aux clubs privés, comme le golf, le ski et autres, qui
sont utilisés par une classe, laissant la moyenne et les démunis
de côté, le prix devient trop élevé; permettre
à Hyrlrn Quobor: do mcltiiro ses taux pour accom moder des industries
étrangères, ce qui fait que nous achetons des emplois; Conseil du
trésor qui augmente son personnel, ceci donnant plus de pouvoirs aux
ministres; Culture et Immigration qui dépensent plus en proportion pour
éduquer les immigrants en français qu'ils ne le font pour les
purs Québécois francophones. Ils ne seront jamais de vrais
Québécois, même avec la nouvelle politique. Il y a depuis
longtemps des sections bien définies pour presque chaque groupe
d'immigrants Un Chinois restera toujours un Chinois. On devrait dépenser
cet argent sur les programmes de M. Bourassa «Famille en
tête» et aussi aider les filles-mères à garder leur
enfant au lieu de se faire avorter comme c'est le cas présentement. Ceci
donnerait des enfants québécois pour adoption. L'administration
de la Chambre. Les industries de la couronne, incluant Hydro-Québec,
devraient être privatisées à plus qu'une compagnie.
Il y a encore bien d'autres endroits où des coupures pourraient
être faites sans problème, mais il faut la volonté du
gouvernement et la personne responsable du gouvernement est le premier
ministre. Il devrait avoir un rapport complet des activités et
dépenses de ses ministères. Après tout, il a nommé
les ministres. Ce rapport devrait être publié une fois par mois
dans un journal reconnu. Assumant que tous les départements admettent
qu'ils ne sont pas capables de contrôler comme ils le veulent, mais
qu'ils vont établir une méthode de travail pour leur donner le
pouvoir voulu, je suis certain, comme plusieurs citoyens, que l'effort qui sera
exercé rapportera des dividendes tels que les prochains budgets seront
positifs et même permettront des réductions d'impôt ou de
taxe et même des réductions de la dette.
Le gouvernement ne prendra pas un rapport comme celui-là au
sérieux parce que personne ne doit en connaître plus qu'eux, ceci
incluant la bureaucratie. Pourtant, chaque famille arrive dans ses
dépenses, sinon elle sera saisie ou mise en faillite. Ceci s'applique
pour les municipalités, les industries, mais jamais le gouvernement ne
se présente en cour pour ses erreurs. Si nous, citoyens, voyons ces
choses, comment eux ne peuvent-ils pas les voir? Une chose est certaine, eux
qui se disent ministres, financiers et autres grands noms semblables auront de
la difficulté à se trouver une position si jamais ils sont
défaits aux prochaines élections. Moi, comme manufacturier, je ne
prendrais pas de chance. Même ayant une compagnie-conseil, jamais je
n'engagerais de telles personnes, députés ou ministres. Aussi,
même en bureau privé, je ne donnerais pas ma clientèle de
peur de faire faillite ou d'être obligé de vendre. (11 h 20)
Ils sont chanceux, ils ont une bonne pension quand ils sortent. Le
pouvoir est une chose, mais savoir s'en servir en est une autre. Ceux qui
voulaient ne pas perdre leur réputation dans ce gouvernement ont
décidé do résigner. Est-ce ceci que nous appelons une
démocratie où l'expression est une nouvelle revendication et
sujette au renvoi? Pourquoi résignent-ils? Il y a trop de poteaux et de
suiveux comme députés. Pourtant, ils ont été
élus par le peuple pour protéger les droits des citoyens et, en
même temps, aider à développer la province, ne pas laisser
seulement les ministres prendre des décisions. Je fais ce grand
détour parce que je veux démontrer comment nous sommes
administrés, ceci ayant une emprise directe sur les dépenses
gouvernementales.
Maintenant, je vais faire une tournée dans les opérations
gouvernementales pour supporter mes avances ci-haut mentionnées.
Entre 1981 et 1989, le salaire familial a augmenté de 4 %, la
population a augmenté de 5,1 %, les dépenses gouvernementales ont
augmenté de 235 %, les revenus ont augmenté de 228 %, laissant
une différence de 7 % moins de revenus contre les dépenses. Note
à retenir: entre 1970 et 1979, le déficit était presque
nul.
Le revenu gouvernemental, entre 1987 et 1992: les impôts sur le
revenu par emploi ont augmenté de 24,3 %; les taxes à la
consommation ont augmenté de 24,3 %; le taux de chômage a
augmenté de 205 %; les revenus des compagnies d'État ont
rapporté seulement 3 % au gouvernement; les revenus des compagnies
privées ont rapporté 32,3 %; les droits et permis, 61 %. Entre
1986 et 1991, les dépenses gouvernementales en investissement ont
augmenté de 87,6 %; les revenus du gouvernement, de 22,8 %. Il y a
à remarquer deux choses qui frappent: la contribution des compagnies
d'État contre celle des compagnies: 3 % pour les compagnies
d'État, de revenus, contre 42,3 % des compagnies privées. Ceci
démontre à quel point les compagnies d'État ne sont pas
efficaces.
Comment les revenus gouvernementaux ont augmenté de 22,8 %,
à comparer avec les revenus familiaux qui ont augmenté seulement
de 4 % pour une famille? Comment pensez-vous que nous puissions nous sortir du
gouffre? Ceci prouve que le citoyen perd du terrain aux dépens du
gouvernement, où il a...
Le Président (M. Després): En conclusion. Sans vous
bousculer, M. Fortin, étant donné que le temps est
déjà dépassé, et pour permettre justement
l'échange, peut-être vous laisser encore un petit peu de temps,
mais tout simplement en conclusion, étant donné que le temps est
déjà dépassé.
M. Fortin: O.K. Je termine par le commentaire.
Il y a, dans le budget, 18 départements qui ne contribuent
d'aucune façon au développement de la province, mais leur budget
augmente tous les ans. Ces départements représentent seulement
1,5 % du budget total, mais on parle de milliards d'augmentation par
année. Je termine, parce que, en continuant, je démontrerais du
pareil au même.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Després): C'est moi qui vous
remercie, M. Godin...
M. Fortin: Fortin.
Le Président (M. Després): ...pour votre
présentation.
Je vais maintenant passer la parole au président du Conseil du
trésor.
M. Johnson: Oui, je vous remercie, M. Fortin, de votre
présence. Je vois que vous avez envoyé une copie de votre
mémoire à votre député, M. Lefebvre...
M. Fortin: C'est ça.
M. Johnson: ...qui est le vice-président, ici, de
l'Assemblée. Je sais, en tout cas, qu'il suit ça de proche, ces
choses-là, ces débats-là.
Je ne voudrais pas m'attarder sur vos chiffres trop longuement.
J'étais juste curieux de savoir, sans qu'on fasse des
démonstrations, là, d'où vous tenez les chiffres que vous
donnez à l'avant-dernière page - une, deux, trois - à la
troisième page de votre mémoire, là. Vous dites que les
dépenses ont augmenté de 235 %, donc, c'est quasiment trois fois
plus gros en 1989 qu'en 1981 ; que les revenus, 228 %... Je ne veux pas...
M. Fortin: J'ai vu ça dans statistique Québec, et
puis dans le discours du budget provincial.
M. Johnson: oui? les dépenses publiques, cost onrroct bon.
on en reparlera tout à l'heure, parce que mes chiffres, moi, c'est
plutôt que les dépenses ont augmenté de 64 %, pas de 235 %
de 1981 à 1989, c'est passé de 13 000 000 000 $ à ?a 000
000 000 $; ça n'a pas doublé, et vous, vous dites que c'est 235
%, là, ou 228 %.
M. Fortin: Oui, mais moi, je mets tous les argents,
là.
M. Johnson: Oui, mais moi aussi, j'essaie de ne pas en oublier,
certain. En tout cas...
M. Fortin: Ha, ha, ha!
M. Johnson: ...je ne voudrais pas faire de... De toute
façon, ce n'est pas ça, l'objet de la question, là. Il
s'agit juste de voir vos sources.
D'expérience, là, qu'est-ce que vous trouvez qui est la
meilleure façon pour un gouvernement ou des services publics de
réduire les dépenses?
M. Fortin: Bien, pour moi, là, parler pour parler,
là...
M. Johnson: Oui, oui.
M. Fortin: ...la manière que je vois ça, comme
citoyen, moi, un ministre, s'il ne dépense pas beaucoup d'argent, ce
n'est pas un ministre.
M. Johnson: Ha, ha, ha!
M. Fortin: Que la province soit dans le déficit ou non, il
faut qu'il dépense de l'argent. Regardez, vouloir changer
l'Hôtel-Dieu du centre de Montréal pour l'envoyer dans l'est de
Montréal, 250 000 000 $. Vous regardez la ministre de la Culture qui
veut dépenser 50 000 000 $ pour favoriser la culture, ouvrir un nouveau
département. Elle veut dépenser ça pour la culture. Vous
regardez aujourd'hui, on veut dépenser des millions pour construire des
écoles en dehors de Ille de Montréal. Le monde a laissé
l'île de Montréal où il avait des écoles, il est
allé en banlieue avec tous les services. Là, le gouvernement a
dépensé des millions pour bâtir des écoles
nouvelles, ainsi de suite, ainsi de suite et ainsi de suite.
M. Johnson: Si on prend l'exemple des écoles, ça,
c'est intéressant. Vous me dites, dans le fond: Les gens ont
déménagé. C'est vrai dans la région de
Québec comme dans la région de Montréal, dans les grands
centres urbains, là. Les gens, à un moment donné, disent:
Je ne veux pas habiter dans le centre-ville avec les jeunes familles. Alors,
ils partent et s'en vont dans un endroit, dans un village, disons, et il n'y a
même pas d'école. Tout à coup, il y a 3000 personnes qui
sont rendues là, il y a 500 enfants et, là, elles crient pour
avoir une école. C'est ça qui arrive, dans le fond C'est
ça que vous me dites
M. Fortin: C'est ça
M. Johnson: Qui est-ce qui devrait payer pour l'école?
M. Fortin: Ça devrait être le contracteur ou la
municipalité qui accepte ces personnes-là. Le monde s'en va
là tranquillement, un à un, maison par maison, et la
première chose qu'on sait, nous autres, c'est qu'on est pris à
construire une école de quelque 20 000 000 $ et on en ferme d'autres sur
l'île. Ça ne tient pas debout, l'affaire. En fin de compte, c'est
nous autres, les contribuables, qui payons pour ça.
M. Johnson: OK
M. Fortin: Prenez la réforme Ryan, pour parler, 400 000
000 $ ou quelque chose de même transférés aux
municipalités. Il n'y a personne qui nous a demandé, nous, les
municipalités: Voulez-vous l'avoir, cette affaire-là? Il n'y a
pas de commission qui a été faite comme aujourd'hui. Comme je le
dis ici, des commissions, il y en a des piles. Je pense que la voûte en
bas doit être pleine de ça, et c'est du pareil au même.
Ça se répète. Puis, là, il arrive, lui,
aujourd'hui, il dit aux municipalités de Victoriaville qui veulent
s'unifier pour couper les dépenses... Une municipalité a
accepté; l'autre a fait une pétition, 800 personnes ont
signé la pétition. Il a barré l'Union des
municipalités pour se regrouper ensemble. Il y a eu des pétitions
de faites contre la réforme Ryan; il n'a pas barré son projet. Il
a continué à le faire. Ça, c'est des choses semblables
à ça que nous, les citoyens, on n'est plus capables d'accepter.
On en a par-dessus la tête! Vous faites ce que vous voulez ici, à
Québec, en riant bien proche de nous autres. C'est vrai, dans le
fond.
M. Johnson: C'est ça que vous pensez.
Le Président (M. Després): M. le président
du Conseil du trésor
M. Johnson: Ce que vous faites ressortir, là, c'est que,
évidemment, si ça prend des services publics, certaines
écoles, il va falloir que ce soit payé localement, dites vous,
par les gens qui sont dans ce coin-là plutôt que par tout le
monde. Dans le fond, vous êtes en train de me dire qu'il y a des genres
d'impôt que vous aimez mieux payer que d'autres. Il y a des impôts
logiques à payer. Si on veut une école, il va falloir payer pour.
Ce ne sera pas gratuit. Si on veut aller à l'université, il va
falloir...
M. Fortin: La réforme Ryan a été
gagnée pourquoi? Le transport en commun, parce que le transport en
commun à Québec, Montréal, Sherbrooke ou
Trois-Rivières, ça coûte cher. Toute la pesanteur a
été mise là-dessus pour passer la réforme Ryan.
Comme notre député l'a dit: Moi, je ne suis pas
intéressé à payer pour le transport en commun à
Montréal. Tout le monde a dit: Moi non plus. Mais par en arrière,
par exemple, il y a des taxes qui s'en viennent. Qu'est ce qui se passe? Vous
autres, ça paraît bien dans vos livres, mais nous autres, les
citoyens, ça ne paraît pas si bien dans nos livres. Nous autres,
on n'en a plus, là. C'est pareil comme en Angleterre, dans le temps
où il y avait des ducs et des rois qui avaient leurs châteaux, et
les paysans étaient à côté et faisaient vivre le roi
et la reine. Quand ils ont vu qu'ils n'avaient plus rien à manger, ils
sont allés faire la guerre pour gagner d'autres châ- teaux, pour
avoir plus de citoyens. On est rendu de même dans la province de
Québec. On n'a pas assez d'industries pour rapporter des revenus que le
gouvernement veut avoir. On n'a pas assez d'industries capables de fournir les
emplois que le gouvernement veut avoir de revenus.
C'est dit, ça, ici. Je vais lire une note, si je peux, du conseil
de l'alphabétisme du Canada. L'alphabétisme et, par extension,
l'alphabet sont souvent considérés comme étant
responsables du chômage, des accidents industriels, du faible niveau de
production et du fait que le Canada est peu compétitif sur le plan de
l'économie internationale. On pourrait dire aussi assistés
sociaux. Or, ces problèmes sont bien complexes. (11 h 30)
L'augmentation du taux de chômage est causé par les pertes
d'emplois et le changement dans la nature des emplois et non par
l'alphabétisation. Les accidents et les maladies industrielles, pour
leur part, sont dus à des conditions de travail dangereuses et à
l'utilisation de substances toxiques. Quant aux faiblesses du Canada, pour ce
qui est de sa compétitivité sur le marché international,
elles sont bien plus liées aux intérêts étrangers,
aux changements dûs à la technologie, au modeste budget
consacré à la recherche et au développement, au taux
d'intérêt élevé du passé et à un
dollar coûteux qu'à la sous-scolnrisatinn
Notre population, au Québec, elle va comme ça. Celle en
Ontario, elle va de même. Où est-ce que l'Ontario prend sa
population pour aller de même? Elle la retire du Québec. On prend
les immigrés, on les éduque, on paie des fortunes pour
éduquer les immigrés. Encore sur le journal La Presse
hier, un jeune qui a fait 96 heures en bateau dans un container pour
arriver ici. On lui donne 345 $ par mois, on lui fait ci, on le loge, on le
nourrit. On a des mères monoparentales qui se font couper leur budget
parce qu'elles gagnent 840 $ par mois. On leur coupe leur budget, avec trois
enfants, mais les immigrés: Rentrez ici à pleine porte! On va
vous nourrir, on va vous scolariser, on va dépenser des millions pour
vous faire apprendre le français et des ci et des ça! Voyons
donc! Ça ne tient plus debout! Il va falloir se réveiller et
devenir quelqu'un ici, ensemble, travailler ensemble. C'est pour ça que
j'ai dit au début: II va falloir laisser la politique de
côté.
M. Johnson: Je reviendrai tout à l'heure. Merci, M
Fortin
Le Président (M. Després): M. Fortin, je vous
remercie.
Je vais maintenant passer la parole à la députée de
Taillon.
Mme Marois: Bonjour, M. Fortin.
Je vous souhaite la bienvenue à mon tour.
Je pense que je comprends ce qui sous-tend
un petit peu vos commentaires dans le sens où ce que vous
exprimez, c'est un petit peu un sentiment qu'il y a dans la population que,
moi, je mets entre guillemets, on a une espèce de ras-le-bol, là.
On a l'impression qu'on est pressé un petit peu comme un citron et qu'on
n'en a pas, dans le fond, pour l'argent que l'on met. C'est un petit peu
ça que vous nous dites, et je comprends cela. Je comprends cela, parce
que je pense que vous avez raison d'attendre de l'État et de ceux que
vous avez élu pour assumer les charges de l'État qu'ils prennent
les bonnes décisions vous permettant d'avoir accès à des
services de qualité, mais pour les sous que vous investissez. Alors,
jusque-là, je vous suis assez bien.
Je ne suis pas tout à fait en accord avec un certain nombre de
commentaires que vous faites sur la question, entre autres, des immigrants.
D'abord, un certain nombre sont des réfugiés qui vivent des
conditions, je dirais, plus que difficiles dans leur pays, et je crois que nous
qui vivons des conditions quand même acceptables, sinon nettement
supérieures à bien des égards, si on se compare à
ce qui se passe dans le monde entier...
M. Fortin: Excusez-moi, mais on en a qui sont dans des conditions
aussi pires qu'eux autres...
Mme Marois: Oui, c'est vrai que nous avons
M. Fortin: ...et qui vivent au Québec, ici.
Mme Marois: C'est vrai que nous avons, chez nous, des gens qui
vivent des difficultés...
M. Fortin: Ils se font couper l'électricité, et on
ne la coupe pas aux Mohawks.
Mme Marois: C'est vrai que nous avons chez nous des gens qui
vivent des difficultés majeures, et, dans ce sens-là, je vous
suis que nous devrions pouvoir soutenir davantage ces gens-là et,
surtout, les soutenir dans le sens de les aider à redevenir autonomes,
à se retrouver un emploi. Mais encore faut-il qu'il y en ait, des
emplois, on va convenir de ça.
À mon point de vue, une des responsabilités qu'a
l'État, c'est de s'assurer d'un climat qui va faire en sorte que les
gens vont avoir le goût d'investir, de remonter ce niveau d'emploi. Or,
même si vous dites, dans votre document, qu'on ne doit pas
nécessairement se tourner toujours vers le fédéral pour
dire qu'il est la cause de tous nos troubles, moi, je pense qu'il n'est pas
nécessairement la cause de tous nos troubles; il est la cause de pas mal
de nos troubles, par exemple.
Et là, vous parliez des questions d'emploi. Je suis d'accord avec
vous. Vous savez, notre société pourrait être encore plus
accueillante à bien des égards à l'endroit de gens qui
choisissent de venir vivre chez nous et qui sont d'autres pays si nous avions
des emplois en nombre plus grand. Nous pourrions même faire davantage que
ce que nous faisons maintenant. Mais regardons actuellement les taux
d'intérêt, là, où ils se sont maintenus, et
ça, je veux bien qu'on blâme le gouvernement du Québec,
mais il faudrait regarder qui établit la base. C'est à Ottawa que
ça se passe.
M. Fortin: Oui, mais il faut toujours regarder ce qu'on fait,
nous autres aussi. On ne peut pas toujours dire à l'autre: Tu sautes
dans le feu, je vais sauter par derrière.
Mme Marois: Je suis d'accord avec vous qu'on doit regarder chez
nous, et je vais vous donner un exemple dans ce que vous dites qui sont des
mauvais choix et auxquels faisait référence celui qui vous a
précédé. D'ailleurs, je me sers de son mémoire
parce que je n'avais pas les données avec moi. Ce qu'on constate, par
exemple, c'est que toutes les dépenses administratives autres que les
dépenses salariales, par exemple, au gouvernement, entre les
années 1982 à 1991, ce qui fait, quoi, une période de 10
ans, 9 ans, ont augmenté de 105 %, alors que la croissance de la
richesse, parce qu'il faut regarder comment ça s'améliore, notre
économie, pour faire de véritables comparaisons, ça a
été 81 % Alors, il y a une différence importante de
l'ordre de 24 %, finalement, plus que ça... C'est ça, 24 %. Ce
qui fait que c'est énorme, et je pense que là on a à
blâmer le gouvernement qui n'a pas fait, je dirais sinon les
rationalisations du moins l'organisation, qui n'a pas pris les décisions
souhaitables pour éviter que ces dépenses-là augmentent
davantage. Et là, on ne parle pas des salaires, on ne parle pas
nécessairement de couper les salaires, mais on parle de couper dans des
dépenses qui croissaient a un rythme qui n'était pas
acceptable.
Alors, dans ce sens-là, je vous suis, et je pense qu'on peut
faire le ménage dans notre propre maison. Le président du Conseil
du trésor a une lourde tâche sur les épaules, et j'ai
l'impression qu'il remet plutôt le poids sur autre chose que sur ce qu'il
a à faire comme travail. Alors, on va s'entendre là-dessus.
M. Fortin: Oui, mais... Excusez moi, Mme Harel, mais c'est pareil
comme autre chose...
Mme Marois: Mme Marois.
M. Fortin: Mme Marois...
Mme Marois: On me confond souvent.
M. Fortin: ...c'est pareil comme mettre le fardeau sur le dos du
fédéral Au lieu de laver
notre maison, nous autres, ici, on veut laver celle du
fédéral. Qu'on commence à mettre la nôtre en ordre
et, après ça, bien, on ira voir de l'autre bord, là-bas.
On sera dans une position plus forte pour aller les voir et leur dire.
Mme Marois: Oui, mais je vais aller plus loin maintenant, dans ce
sens-là, et je vais vous redonner l'exemple que je donnais, je pense,
à des gens qui étaient là hier.
Si on regarde d'abord la façon dont s'est comporté le
gouvernement du Québec sur une période allant des années
1980 à 1989, on a réussi à contrôler la croissance
des dépenses. On l'a contrôlée à ce point qu'elle
n'a jamais été en moyenne, incluant une phase de
récession, au début des années quatre-vingt, à 1 %
au-dessus de l'inflation, ce qui est quand même très bon. Je pense
qu'on ne peut pas dire qu'on a été malhabile à faire cela.
Mais pendant ce temps-là, le gouvernement fédéral, lui,
dépassait largement ce niveau-là. Et qu'est-ce que ça l'a
amené à faire? À réduire l'argent qu'il devait nous
transférer, et qu'il vient prélever ici de toute façon, et
ça crée un problème majeur sur les finances publiques du
Québec. Et ça, on ne peut pas blâmer le gouvernement du
Québec, il faut blâmer quand même le gouvernement
fédéral. Alors, je vais vous donner...
M. Fortin: Oui, mais écoutez, Mme Marois... Mme Marois:
Attendez un peu. M. Fortin: Écoutez, là...
Mme Marois: M. le Président, s'il vous plaît. Je
veux vous donner mon petit exemple et après ça...
M. Fortin: Oui, oui, mais écoutez, là, vous prenez
tout le temps et moi, je n'ai pas droit à des remarques
là-dessus, là.
Le Président (M. Després): Ha, ha, ha!
M. Fortin: Ce que je veux vous dire là-dessus, le
fédéral, là, c'est que pendant 3 ans de suite, à
aller jusqu'en 1991-1992, là, les transferts du fédéral au
Québec ont augmenté d'année en année.
Mme Marois: Oui, mais attention...
M. Fortin: À cette heure, si nous autres on progresse plus
vite que lui nous transfère l'argent, on est dans le trou. On dit
toujours que c'est le fédéral qui est le problème, puis ce
n'est pas vrai.
Le Président (M. Després): Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: C'est-à-dire que, attention, il faut bien voir
qu'il y a des niveaux qui avaient été préétablis,
des ententes qui avaient été établies entre le
gouvernement de Québec et le gouvernement d'Ottawa. Ce qu'a fait le
gouvernement d'Ottawa, c'est qu'il a modifié ces ententes-là
unilatéralement. Quand on fait une planification... Vous connaissez
ça, la planification?
M. Fortin: Oui.
Mme Marois: Quand on fait de la planification et qu'on s'attend,
parce qu'on a signé un contrat, qu'on va être payé 100 $,
par exemple, par semaine pour ce contrat-là, on fait notre budget en
conséquence pour ça. Et là, un bon matin, notre ami d'en
face se lève et dit: Non, ce n'est plus 100 $ que je t'envoie,
là, je vais t'en envoyer 60 $. Même si, moi, j'avais pris un
engagement pour 6 mois, je ne l'enverrai pas. Ça, c'est grave, et c'est
ce qu'a fait le gouvernement fédéral. Donnez-moi mon petit
exemple, puis je vous laisse aller. Je veux dire laissez-moi vous donner mon
petit exemple. On peut bien nettoyer notre perron...
M. Fortin: Oui, mais, Mme Marois...
Mme Marois: ...mais si, en haut, il y a quelqu'un qui est sur son
perron et qui le nettoie et qui envoie la saleté en bas...
M. Fortin: Oui, mais, Mme Marois, vous avez essayé de
nettoyer le perron quand vous avez coupé les salaires du parapublic de
20 %. Qu'est-ce que vous avez fait avec ça dans le temps où vous
étiez au pouvoir? Vous n'avez rien fait. Le budget a encore
été dans le trou, dans le trou, dans le trou, dans le trou. Le
gouvernement libéral rentre au pouvoir, il nous promet la lune. Il
était tellement assoiffé de pouvoir qu'il nous promettait la
lune. Ça fait que, là, on a deux gouvernements, un gouvernement
sur un bord et un gouvernement sur l'autre, et on n'est pas satisfait ni de
l'un ni de l'autre. Qu'est-ce qu'on va faire, nous autres, citoyens? On va s'en
aller dans le milieu? Où dans le milieu? On n'a personne. Il va falloir
commencer à faire confiance à quelqu'un
éventuellement.
Mme Marois: Je vous dirai qu'à...
M. Fortin: On ne peut pas toujours dire que c'est papa qui a
tort. Les enfants de temps en temps ont raison. (11 h 40)
Mme Marois: Je voudrais vous dire rapidement, parce que je pense
que tout notre temps est écoulé, que cette compression qui a
été faite au niveau des dépenses de l'État au
début des années quatre-vingt a fait en sorte que, juste-
ment, on a, sur une longue période de neuf ans, réussi
à contrôler l'expansion des dépenses de l'État, et
ça, les chiffres sont là pour le prouver. Donc, il y a eu des
gestes concrets qui ont été posés suite à des
décisions qui n'étaient pas peut-être les plus faciles
à prendre, mais il y a eu un contrôle des dépenses. C'est
depuis les dernières années que la débandade a repris sous
le gouvernement actuel, et malgré une période de croissance.
M. Fortin: Oui, mais est-ce que je peux répliquer
là-dessus, là?
Le Président (M. Després): Oui, M. Fortin.
M. Fortin: Vous avez arrangé vos budgets comme il faut. Le
ministre des Finances a arrangé ses budgets comme il faut, mais il a
fait comme le fédéral. Il a sacré ça sur le dos des
municipalités et des commissions scolaires. Arrangez-vous avec vos
problèmes, nos budgets balancent bien, nous autres. Est-ce que c'est une
manière de gouverner, ça?
Mme Marois: Vous avez raison...
M. Fortin: II reproche à un ce que lui fait à
l'autre. Ça ne marche pas, ça!
Mme Marois: Parlez au président du Conseil du
trésor. Il sait très bien de quoi vous parlez, puisque c'est son
gouvernement qui l'a fait.
M. Fortin: Ça fait que nous autres, comme citoyens,
là... Nous autres, on ne se promène pas en grosse limousine avec
un chauffeur. On se promène avec des petits quatre cylindres.
Le Président (M. Després): En conclusion,
monsieur... O. K. Merci, M. Fortin.
Je passerai maintenant la parole... Il vous reste deux minutes, M. le
président du Conseil du trésor.
M. Johnson: Oui. Je vous remercie, M Fortin.
Moi, j'ai trouvé ça intéressant, parce que, dans le
fond, vous nous dites du point de vue du payeur de taxes. Vous ne
prétendez pas représenter 500 000 travailleurs ou toutes les
entreprises du Québec ou tous ceux qui sont dans les soins de
santé ou tous les profs de cégep. Vous dites: Moi, là,
Fortin, je suis un payeur de taxes, et voici ce que j'observe. Ce que vous
m'avez dit, là, ce que j'ai retenu - et vous me corrigerez - c'est que
vous aimez mieux que les taxes servent à des choses concrètes,
c'est-à-dire que, quand tu paies pour quelque chose, là, que tu
paies pour un service directement, tu ne paies pas... Vous dites le transport
en commun à Montréal quand vous êtes à
Thetford-Mines ou dans ce coin-là, mais que, s'il y a une école
qui se construit dans le coin où il n'y en a pas, d'école,
là, c'est pour les enfants qui habitent dans ce coin-là, c'est
ces gens-là qui devraient payer. Ça, c'est plus clair. Ça,
c'est la décentralisation. En partie, là...
Je veux juste vous dire que, quand on a envoyé des factures aux
municipalités et au scolaire, c'est justement pour la gestion et le
financement des équipements scolaires. C'est pour ça, là.
C'est le monde de la place.
M. Fortin: Oui, mais elles étaient déjà
bâties, ces écoles-là. Elles étaient
déjà...
M. Johnson: C'est le monde de la place qui a commencé
à payer pour ses écoles. C'est ça qu'on a fait.
M. Fortin: Oui, mais elles étaient déjà
bâties, celles là.
M. Johnson: Oui, oui, il y avait du vieux bâti.
M. Fortin: Celles qui étaient déjà
bâties, il aurait dû y avoir compensation pour.
M. Johnson: II y avait du vieux bâti et du nouveau
bâti. Mais je veux juste vous dire qu'en même temps, de la
même façon que lorsqu'on reçoit vos commentaires,
là, les municipalités... Il y en a dans mon comté, dans ma
région, qui, lorsqu'elles ont vu la réforme, ont regardé
un petit peu plus proche leurs dépenses. Et il y en a aujourd'hui pour
qui le compte de taxes est plus bas qu'autrefois, parce qu'elles ont dit: Wo!
On va faire le ménage nous autres aussi sur notre perron à nous
autres aussi. Quand on envoie la facture plus proche du citoyen, parce qu'au
niveau local vous êtes plus proche que quand c'est une taxe
fédérale ou du Québec, là. en
général, les gens regardent plus attentivement et ils font faire
le ménage. Ils font faire le ménage. Alors, c'est comme ça
que j'ai compris certains de vos messages. Il faut juste être sûr
que le genre de taxes qu'on impose, je dirais, va vous inciter à nous
dire de faire le ménage à nous autres aussi.
M. Fortin: Oui.
M. Johnson: Alors, plus les taxes sont visibles, là, plus
le monde comme vous vient nous dire de faire le ménage. Ils
s'aperçoivent qu'ils paient de l'impôt. Au lieu de payer tous les
deux jeudis, déduction à la source, quand c'est une taxe de vente
et des choses comme ça, ça paraît beaucoup, et je vous dis
que les gens nous en parlent plus.
M. Fortin: Mais dites-moi, M. Johnson, comment ça se fait,
d'abord, que, quand les municipalités ou les commissions scolaires
font
lour ménage, vous autres, ici, au lieu de regarder ce que vous
avez sauvé, là, que vous n'envoyez pas aux municipalités,
vous le dépensez ailleurs, au lieu de réduire votre
déficit? Ça vous donne de l'argent pour jouer avec. Vous
n'êtes pas mieux. Vous la dépensez ailleurs.
Le Président (M. Després): En conclusion, M.
Fortin.
M. Fortin: Vous n'êtes pas égal, même. Vous
porde/.
M. Johnson: C'est parce qu'il y a une des choses qu'on ne peut
pas arrêter de payer, et c'est l'intérêt sur la dette.
M. Fortin: Oui, mais les nouveaux développements, vous
pouvez les contrôler. Vous pouvez arriver...
M. Johnson: Oui, je vous remercie.
M. Fortin: 250 000 000 $ pour changer l'Hôtel-Dieu,
qu'est-ce qu'on a besoin de ça?
M. Johnson: Je vous invite au Conseil du trésor tous les
mardis pour rappeler ça à mes collègues. Je vous
remercie.
Le Président (M. Després): Merci, M. le
président du Conseil du trésor.
Il vous reste, pour respecter la période de temps, M. le
député de Montmorency, une courte période - je n'ose pas
dire le temps... C'est dix secondes, M. le député de
Montmorency.
M. Filion: Oui, M. le Président, rapidement.
C'est parce que je relevais, dans votre conférence, le sens
commun, je pense, qui est juste sur plusieurs points. J'aurais aimé
avoir un peu votre feeling rapidement. Vous savez, actuellement, on cherche des
simplifications de notre système. On. a actuellement des ententes avec
le fédéral pour ramener des guichets uniques et ramener une
simplification fiscale. Vous savez, la TVQ, on administre ça au
Québec, à un seul ministère à Québec, et on
essaie d'éliminer et faire des économies d'échelle.
Seriez-vous d'accord, vous, avec une déclaration d'impôt sur le
même principe administré à Québec, pour que les
gens, on leur simplifie la vie aussi et qu'on fasse des économies
d'échelle? C'est simple. Les gens ont un chèque à faire.
Pour eux autres, ce n'est pas compliqué. Qu'est-ce que vous pensez d'une
approche comme ça?
Le Président (M. Després): Une courte
réponse, M. Fortin.
M. Fortin: Ce qui appartient à Pierre appartient à
Pierre, ce qui est à Paul appartient à Paul. Moi, je verrais mal
demander à mon voisin d'administrer mes affaires. J'aime admi nistrer
mes affaires, et l'autre aime administrer ses affaires.
M. Filion: Mais on le fait là, actuellement, avec la TPS
et la TVQ.
M. Fortin: Bien, si c'est un système qui a vraiment du bon
sens, qui a été évalué et que ça fait
l'affaire de tout le monde, pas l'affaire de quelques personnes. S'il y a
quelqu'un qui sort gagnant au bout, d'accord.
M. Filion: Le citoyen.
M. Fortin: Mais si on est obligé d'engager du monde pour
faire ça, là, je dis que je ne suis pas d'accord.
M. Filion: Non, c'est le citoyen qui va être gagnant. C'est
bien sûr.
M. Fortin: Comme on fait avec les assistés sociaux. On
engage...
Le Président (M. Després): En conclusion. Le temps
est déjà dépassé.
M. Fortin: Bon. On engage 1400 policiers pour surveiller les
assistés sociaux, qui vont peut-être gagner 10 $ par semaine de
plus. Ça nous coûte des millions pour aller chercher 10 $.
Le Président (M. Després): M. Fortin, je vous
remercie beaucoup de votre présentation.
M. Fortin: J'en aurais bien d'autre à dire.
Le Président (M. Després): II aurait
été agréable de vous accorder encore plus de temps, mais
malheureusement il faut pouvoir entendre tout le monde. M. Fortin, au nom des
membres de cette commission, on vous remercie beaucoup.
M. Fortin: C'est moi qui vous remercie de m'avoir
accepté.
Le Président (M. Després): J'invite M. Godin
à la table des invités de cette commission. M. Godin, vous avez
juste à remettre le document au secrétaire de la commission, qui
va s'occuper de le remettre. Bonjour, M. Godin.
M. Godin (Gabriel): Oui, bonjour.
Le Président (M. Després): Au nom des membres de la
commission du budget et de l'administration, il me fait plaisir de vous
recevoir ici, aujourd'hui, dans le cadre d'une consultation sur les finances
publiques.
Nous avons 30 minutes ensemble: une période maximum de 10 minutes
pour garder un
autre 10 minutes de chaque côté, du côté
ministériel et de l'Opposition, pour pouvoir échanger et se
questionner entre nous.
M. Godin, la parole est à vous.
M. Gabriel Godin
M. Godin (Gabriel): Je veux vous dire un beau bonjour.
Maintenant, j'apprécie beaucoup votre présence ici parce que
ça montre que vous êtes prêts à être à
l'écoute des citoyens, qui est la première fonction et la
première obligation d'un élu, écouter les citoyens. Si un
élu n'a pas ça comme philosophie, il est mieux de
démis-sioner, quel qu'il soit.
À qui de droit: Mémoire pour révision fiscale,
provinciale ou fédérale - les points peuvent s'appliquer sur les
deux plans. Vers une économie intelligente, pour une démocratie
économique effective. Mesures urgentes pour arrêter le
harcèlement et l'hémorragie économique de tous les
consommateurs dont le pouvoir d'achat est amputé de plus en plus par des
surtaxes injustifiées qu'on pourrait qualifier de crimes
économiques. (11 h 50)
Plus spécialement, pour les personnes âgées,
retraitées, il devrait y avoir des protecteurs du citoyen - parce que je
n'aime pas le mot anglais ici, là - à tous les paliers de
gouvernement pour surveiller les élus, parce qu'il y a certains
élus qui croient quo, quand ils sont là, ils peuvent faire
n'importe quoi, n'importe quand, à n'importe qui.
Révision et réforme en profondeur du système de
taxation municipale. Ça me touche depuis 20 ans. Je suis
évaluateur agréé retraité, puis je faisais le
nivellement de la commission scolaire protestante. Alors, j'ai travaillé
sur ça. Il y a deux décennies que je souhaite le changement de la
taxation municipale - ça fait 20 ans - parce que j'allais justement
avoir des cas. et je suis dans ce cas-là présentement. On
était très prudent dans nos évaluations, mais, cependant,
dans une évaluation globale, c'est très difficile d'être
juste et équitable. Alors, on arrivait avec des gens qui avaient
travaillé pendant 40 ans pour gagner un toit sur la tête, du CPR,
par exemple, dans Montréal-Ouest, puis on était obligé...
Comme évaluateurs, ça ne nous plaisait pas, mais on était
obligé de leur dire: Le marché, c'est le marché, puis ce
n'est pas les évaluateurs qui le font. Alors, c'est ça.
Aujourd'hui, c'est moi qui vis ça, là.
Exiger un ministre des Affaires municipales à plein temps. 1500
municipalités, ça prend même... Celui qui est là
présentement est plein de bonne volonté, mais il est
débordé, puis ce n'est pas une expression de fonctionnaire. Il
est débordé, cet homme là. Alors, mettez-en un à
plein temps. Pour 1500 municipalités puis tous les problèmes que
les municipalités peuvent avoir, ça en prendrait peut-être
deux, même. Un à plein temps qui sait compter et non pelleter les
problèmes dans la cour des municipalités. C'est très
mauvais, très malsain.
Les dépenses paramunicipales sont des dépenses
régionales qui doivent être absorbées par différents
ministères provinciaux ou fédéraux, principalement pour
les régions métropolitaines qui rapportent beaucoup aux
gouvernements. Ces régions sont des centres névralgiques de notre
économie. Il est donc logique de réinvestir dans ces
régions stratégiques. La taxe municipale est justifiée
pour les services à la propriété, point.
Révision et réforme en profondeur de la TPS et de la TVQ,
qui sont des orgies pour tout le monde. Et le Sénat était plus
que justifié pour la discuter. Toutefois, on a bâillonné le
Sénat sur cette question.
Les taxes à abolir immédiatement: sur la nourriture,
salée ou sucrée, enveloppée ou non. C'est rendu que le
type est obligé de goûter au beurre de «peanuts» pour
voir si c'est sucré puis s'il va te charger de la taxe. Au restaurant,
comme c'était avant, l'excédent de 5 $ devrait être
taxable. On pourrait prendre une tasse de café sans être
pénalisé. C'est rendu qu'on n'est même plus capable de
prendre une tasse de café sans être pénalisé; sur
tous les médicaments et les accessoires correctifs pour la santé.
On va acheter des remèdes non prescrits. Bien, ils nous chargent de la
taxe sur ça. Des aspirines ou des Entrophen, tu es obligé de
prendre ça pour tenir ta circulation en forme. Eh bien, tu paies la taxe
sur des remèdes. Ça se «peut-u».
ça7
Continuons. La taxe sur l'électricité est un hold-up
légal. C'est une honte pour une société
évoluée, en l'an 2000, de croire que l'électricité
est un luxe. C'est une nécessité primaire absolue comme l'eau. En
expropriation, quand on voulait donner l'eau ou l'électricité
à un exproprié, peu importe le prix, on lui donnait l'eau et
l'électricité. C'est primordial, d'autant plus que c'est notre
ressource naturelle principale. À quand la taxation sur le soleil?
Vous autres, élus, vous avez dépassé la
frontière du bon sens. Le pouvoir politique vous aveugle. L'abus de
pouvoir a toujours créé des monstres tels que le nazisme ou le
communisme. Là où il y a de l'abus, il y a une réaction.
Est-ce là votre brillant désir? Assez, c'est assez! Une
société qui n'a pas de considération pour sa jeunesse et
sa vieillesse s'en va vers la faillite totale. Les indices frappants ne
manquent pas de ce temps-ci.
Abolir la taxe scolaire pour les proprios de 65 ans et plus, qu'ils
demeurent autonomes et non, qu'ils tombent à la charge du gouvenement ou
autrement.
Révision des exemptions d'impôt en fonction du minimum
vital réaliste. Le minimum vital aujourd'hui, ce n'est pas ce que
c'était il y a 10 ans.
Déduction de toutes les taxes payées à d'autres
administrations, éviter les surtaxes.
Quand je paie des taxes municipales, puis qu ils me montent ma taxe
municipale de 700 S, bien, je devrais au moins pouvoir déduire ça
sur le fédéral comme sur le provincial.
Privilèges de déductions d'impôt pour les
retraités âgés: sur les REER et leurs miniplacements Bien,
ça, vous l'aviez fait avant. C'était une bonne idée, mais
c'était trop bon. Vous avez tout lâché ça, le
fédéral et le provincial. C'était très bien,
ça, d'avoir une exemption sur les mini-placements, surtout maintenant...
Avant, on faisait 1200 $ par 10 000 $, et là, on n'en fait plus que 800
$, et ces 800 $ là, il faut que tu les donnes en taxes municipales.
Quest-ce qu'il te reste? Alors, les mini-placements... Ceci leur permettrait de
vivre en paix économique alors qu'ils sont souvent obligés de
piger dans le REER pour payer leurs taxes. C'est ce que j'ai fait l'an dernier,
mais ça m'a coûté deux fois plus d'impôts. Enfin,
tous les spécialistes taxeux devraient avoir plus d'imagination et
comprendre qu'on va chercher le pouvoir d'achat là où il est, pas
quand le gars est au minimum vital ou que ses revenus descendent, sont fixes.
Non seulement ils sont fixes, mais ils descendent. Alors, je suis toujours
prêt à défendre mes droits et même ceux des autres,
et je suis toujours disponible.
Du point de vue de l'évaluation, il y aurait la page 8-A.
Concernant le système de taxation municipale: constatations et
recommandations. La formation professionnelle reçue d'un
évaluateur et le code de déontologie exigent les quatre
qualités absolues suivantes: être concis, précis, juste et
équitable. Toute évaluation se doit d'avoir ces qualités.
Que ce soit municipale, scolaire ou autres, incluant un rôle, alors une
évaluation rapide, globale, en vrac, en volume d'un rôle ne
rencontre aucune de ces qualités-là. C'est demander l'impossible
aux évaluateurs d'arriver à un résultat juste et
équitable C'est impossible, ça ne se litil pus, d'autant plus quo
le système est faux à sa base, parce que l'évaluation,
ça devrait sortir de là carrément, et ça fait 20
ans que j'y pense.
La relation évaluation et taxation n'a aucun rapport et aucun
sens. Cela fait des décennies que ça dure. Il est plus que temps
d'évoluer dans ce domaine et d'améliorer en profondeur le
système. C'est urgent, ça presse. Nous, évaluateurs,
constatons souvent que les acheteurs non avertis achètent n'importe
quoi, n'importe quand, aveuglément. Ça crée un
marché et c'est toi qui paies pour.
Le Président (M. Després): Je vous demanderais,
pour permettre un échange, sans trop vous bousculer...
M. Godin (Gabriel): Non, mais j'ai fini, là.
Le Président (M. Després): ..peut-être une
conclusion, étant donné que le temps est déjà
presque termine...
M. Godin (Gabriel): S'il vous plaît, oui.
Le Président (M. Després): ...si vous voulez
échanger avec les parlementaires. Mais vous pouvez prendre encore
quelques secondes. Je ne voulais pas tellement vous couper. Si vous avez une
conclusion, je peux vous permettre une conclusion, M. Godin.
M. Godin (Gabriel): J'achève ma feuille, là. alors,
la norme uniforme d'occupation est souhaitable. il n'y a rien de plus stable et
de plus semblable qu'un pied de front ou un pied carré. j'espère
que vous allez tenir compte de ces recommandations. toujours à votre
service et disponible, g. godin.
Le Président (M. Després): Merci beaucoup, M.
Godin, pour votre présentation.
Je vais maintenant passer la parole au président du Conseil du
trésor.
M. Johnson: Oui, M. Godin, en vous souhaitant la bienvenue et en
vous félicitant pour votre intérêt pour les finances
publiques.
Vous êtes un des contribuables, un des nombreux contribuables du
Québec. Vous êtes à même, dans votre
présentation, de dénoncer certaines dépenses publiques. Je
trouve que vous passez passablement de temps sur la taxation municipale,
évidemment.
M. Godin (Gabriel): Oui, c'est ça qui me touche, oui.
M. Johnson: C'est ça qui vous touche le plus.
M. Godin (Gabriel): Le plus, oui.
M. Johnson: Parce que vous dites que le système de
taxation sur l'évaluation foncière, donc la valeur des immeubles,
ça ne tient pas compte de la capacité de payer...
M. Godin (Gabriel): Ça n'a aucun lien.
M. Johnson: ...des gens. Correct, ça. Je crois comprendre
et j'ai vu dans votre présentation que M. le maire de Saint-Laurent, le
Dr Paquet, était assez de votre avis.
M. Godin (Gabriel): Oui, oui.
M. Johnson: Alors, on va présumer...
M. Godin (Gabriel): Et la mairesse de ville Mont-Royal.
M. Johnson: C'est ça. On va présumer qu'il va nous
envoyer une demande pour...
M. Godin (Gabriel): Bien, j'espère!
M. Johnson:... faire amender la loi sur les cités et
villes, pour lui permettre de faire de grandes et belles choses qu'il
prétend qu'il veut faire.
M. Godin (Gabriel): Ça fait un an que je le lui demande.
Ha, ha, ha!
M. Johnson: Ça fait un an? Bon, c'est correct, ça.
Alors, on va voir ça en temps utile si ville Saint-Laurent a les moyens
de donner des rabais fiscaux. Ça, c'est tant mieux pour ceux qui vont en
bénéficier, évidemment.
Mais il n'en reste pas moins que la taxation municipale, ça va
toujours demeurer une fonction de la valeur des immeubles, vous ne pensez pas?
Ou avez-vous une suggestion, avez-vous une autre suggestion à faire?
M. Godin (Gabriel): Oui, le facteur d'occupation. Ça,
c'est stable, c'est permanent. Il n'y a rien de plus semblable qu'un pied
carré et qu'un pied de front, voyons donc! Ça, au moins, tu
sais... Mais ils ne regardent pas si tu as les yeux bleus ou bien si tu es
blond.
M. Johnson: Mais il faut l'évaluer, ça. Comment
vous voyez ça et comment ça fonctionnerait?
M. Godin (Gabriel): Mais vous taxez sur le... Si vous avez 50
pieds de front, supposons...
M. Johnson: Oui.
M. Godin (Gabriel): J'ai un exemple, dans la copie que je vous ai
donnée.
M. Johnson: Dans votre lettre, là.
M. Godin (Gabriel): Alors, vous chargez 10 $, par exemple.
Ça fait 500 $ pour le terrain. Puis, après ça, l'espace
d'occupation du bâtiment à 7, 50 $. J'ai fait le calcul, puis je
l'ai mis dans mon deuxième folio, à la page... Un instant, je
vais vous le dire. Vous avez un beau petit exemple, et c'est facile à
comprendre, ça. Vous n'avez pas besoin d'avoir été
à la Sorbonne ou à Oxford. Vous n'avez pas besoin d'être un
C. A. non plus. Bon, à la page 8b.
M. Johnson: D'accord. Alors, 50 pieds de front à 10 $,
ça fait 500 $.
M. Godin (Gabriel): C'est ça.
M. Johnson: Puis, 1620 pieds carrés à 7, 50 $.
M. Godin (Gabriel): Ça donne 12, 15 $ (1? heures)
M. Johnson: O. K.
M. Godin (Gabriel): Ça donne exactement le même
montant de taxes que je payais en 1991.
M. Johnson: D'accord. Mais qu'est-ce que ça veut dire,
ça, pour votre voisin qui a la même grandeur de maison, mais
qui...
M. Godin (Gabriel): Ça veut dire qu'on va être
beaucoup plus uniforme parce que la norme va être uniforme.
M. Johnson: Est-ce que ça veut dire... Oui, c'est correct,
ça. C'est sur l'occupation.
M. Godin (Gabriel): Oui. Je pourrais vous donner un autre
exemple...
M. Johnson: Puis la valeur... Une maison peut valoir deux fois
plus que l'autre. On peut avoir une maison de 1600 pieds d'occupation...
M. Godin (Gabriel): Bien oui, mais ça n'a aucun rapport
que mon toit soit fini en or. Quel rapport ça a ça pour payer
pour les services reçus? Vous allez à Place Ville-Marie pour du
stationnement. Vous prenez trois espaces de stationnement. Bien, vous allez
payer pour trois espaces de stationnement. Ils ne regarderont pas si vous avez
une Mercédès ou une BMW.
M. Johnson: Ça, c'est ce qu'on... Ah bon! Là, je
commence à...
M. Godin (Gabriel): Bon.
M. Johnson: Évidemment, ça me rappelle que
ça a été essayé en Angleterre. C'est le «poll
tax»
M. Godin (Gabriel): Bien oui. Bien oui, puis ça n'a pas
dû porter des fruits fameux. . M. Johnson: Le gouvernement s'est
presque fait battre d'avoir pensé à ça.
M. Godin (Gabriel): C'est de la discrimination..
M. Johnson: Mais justement, c'est ça. M. Godin
(Gabriel):... économique.
M. Johnson: Alors, vous êtes en train de me dire que si
votre voisin est millionnaire, puis vous, vous êtes un retraité
à moyens modestes...
M. Godin (Gabriel): Oui, c'est ça, fixes.
M. Johnson:... et que vous occupez tous les deux une maison de
1600 pieds, vous allez payer les mêmes taxes municipales
M. Godin (Gabriel): Bien, c'est ça. Là
actuellement, il n'y a pas deux personnes, pas deux résidents, pas deux
citoyens qui paient le même montant de taxes. «C'est-u»
absurde? Et on reçoit les mêmes services. Puis là, nous
autres, qu'est-ce qu'ils nous ont fait, Saint-Laurent, puis c'est ce qui m'a
parti, moi, au mois de janvier, l'an dernier, là. Ils arrivaient avec 35
% à 40 % d'augmentation sur l'unifamilial, la plupart des
retraités et des personnes âgées, puis ils ont
réduit les factures de 12 revenus, les maisons à 12 revenus.
Aïe! Là, je suis venu bleu. Le maire, il ne comprend pas que
j'avais des réactions.
M. Johnson: Mais vous ne pensez pas que la valeur d'une maison,
ça ne reflète pas un petit peu la capacité de payer de la
personne qui l'occupe?
M. Godin (Gabriel): Pas du tout. J'ai travaillé pendant 40
ans pour gagner un toit sur la tête, puis là, vous arrivez
à l'âge de la retraite, vos revenus sont fixes et ils descendent
même. Tu sais...
M. Johnson: Oui. C'est pour ça qu'il y a des programmes...
Je veux juste le souligner en passant, évidemment. C'est pour ça
qu'au point de vue fiscal, les exemptions pour les personnes plus
âgées sont supérieures, évidemment, que pour les
personnes moins âgées.
M. Godin (Gabriel): Oui, puis, à Saint-Laurent, on avait
ça.
M. Johnson: II y a des remboursements d'impôt foncier, il y
a des programmes, enfin, temporaires ou permanents de remboursement
d'impôt. Dans certains cas, il y a des crédits qui peuvent
être disponibles pour certaines choses. Il y a l'aide au logement, un
supplément au loyer. Il y a un tas de choses, évidemment, mais
vous, vous aimeriez mieux quelque chose de simple, là, une fois pour
toutes.
M. Godin (Gabriel): Réglez la question. Ça fait 20
ans que le problème est là.
M. Johnson: Alors, s'il y avait trois personnes ou plutôt
s'il n'y avait qu'une personne dans la maison de 1600 pieds, ce serait la
même taxe?
M. Godin (Gabriel): Bien oui. Mais pourquoi pas? On reçoit
les mêmes services, quoi! On reçoit tous les mêmes services.
C'est la même rue. On a tous les mêmes services. Alors, pourquoi ce
«zigzagage-là» et prendre le marché? C'est comme
jouer au «stock market» avec nos taxes. C'est ça.
M. Johnson: En tout cas, ce serait différent d'ailleurs,
ça.
M. Godin (Gabriel): Mais oui. Ça serait uniforme,
ça serait stable puis... Aïe! Ça ferait l'affaire de tout le
monde, de l'administration et des citoyens. Là, c'est le bordel,
là, cette affaire-là. À chaque fois qu'ils arrivent avec
des évaluations, les municipalités sont prises avec ça,
puis elles ont des problèmes, puis 40 000 à 50 000 plaintes, puis
envoyé donc!
M. Johnson: O.K. J'essaie juste de voir s'il n'y a pas une
façon d'établier un lien, même, il peut être
lointain, entre la capacité de payer et la grandeur de la maison, parce
que c'est évident que, si une famille a 1600 pieds, il y a bien des
endroits... ça loge trois familles, ça, chacune, avec une couple
d'enfants. Ça fait des petits logis de 500, 600 pieds carrés,
là.
M. Godin (Gabriel): Bien oui.
M. Johnson: Ça, ça existe, on n'invente pas
ça, vous le savez, dans toutes les municipalités du
Québec, puis, à l'autre bout, bien, il peut y avoir un couple
retraité, chacun a sa rente, etc., sans prétendre qu'elle est
grosse, là...
M. Godin (Gabriel): Bien oui, mais...
M. Johnson: ...qui habite assez confortablement dans la
même grandeur. Alors, ce n'est pas évident que ça doive
toujours être toujours le même, même prix, juste à
cause des pieds carrés, vous comprenez. Il faut peut-être juste
les aménager. Si ce n'est pas avec la fiscalité, comme je le
disais, il devrait y avoir d'autres méthodes.
M. Godin (Gabriel): Ça serait sûrement plus stable
et plus uniforme.
M. Johnson: O.K.
M. Godin (Gabriel): Bien, coudon! À part de ça,
vous parlez des exemptions, là. Bien, on avait le privilège,
à Saint-Laurent, de l'avoir, cette exemption-là, puis le
gouvernement a défendu à Saint-Laurent de nous donner une
ristourne. Elle nous donnait une ristourne avant.
M. Johnson: Ah oui!
M. Godin (Gabriel): Bien oui! Ça fait deux ans que c'est
tombé, et là, non seulement elle nous enlève la ristourne,
mais elle m'augmente mes taxes de 700 $. Voyons donc! C'est rien qu'à
cause du marché, à part de ça. C'est ça. Les gens,
ils disent: Bon, bien, allez voir les évalua-teurs. Bien, les
évaluateurs, ils ne peuvent pas faire de miracles. Le marché, ce
n'est pas nous autres qui le faisons.
M. Johnson: Oui, c'est parce que là, si...
Évidemment, si une municipalité commence à donner une
ristourne en raison de l'âge ou du sexe...
M. Godin (Gabriel): Non, non, non.
M. Johnson: Non, non, mais c'est vrai. Elle peut décider
qu'une famille monoparentale, où c'est la femme qui est chef de foyer,
elle aussi, elle va être comme une personne de 65 ans, ou comme quelqu'un
qui est sur le bien-être, il ne sera pas obligé de payer une
partie de l'impôt foncier. Là, ce n'est plus de la taxation
municipale. Elle tombe dans l'impôt sur le revenu et les transferts aux
particuliers. Là, la question est de savoir si les municipalités
veulent vraiment se lancer dans la fiscalité des particuliers
plutôt que dans la fiscalité foncière.
Alors, pour l'instant, les lois, effectivement, ne le permettent pas.
Les municipalités sont dans le foncier et dans les services, dans les
facturations de services. Elles ne sont pas dans la redistribution de la
richesse au Québec. Elles ne sont pas encore habilitées à
faire ça, mais je comprends que le maire Paquet aimerait faire ça
à la ville de Saint-Laurent. Alors, on va voir exactement les demandes
qu'ils vont nous faire.
M. Godin (Gabriel): Je crois que les 1500 municipalités
apprécieraient le changement de système.
M. Johnson: Oui? En tout cas, on va voir. L'Union des
municipalités va venir nous parler demain.
M. Godin (Gabriel): Ah, demain, oui?
M. Johnson: On va en profiter pour le lui demander.
M. Godin (Gabriel): Oui, vous pouvez. M. Johnson: Merci
beaucoup, M. Godin. M. Godin (Gabriel): Merci bien.
Le Président (M. Després): Merci beaucoup, M.
Godin.
Je passerai la parole au député de Montmorency.
M. Filion: M. Godin, je vous souhaite la bienvenue au nom de la
formation politique que je représente.
Votre mémoire est un mémoire intéressant, toujours
au niveau de la réflexion, et il y a beaucoup de points que vous
soulevez qui se recoupent. À toutes fins pratiques, plusieurs personnes
sont venues témoigner à la commission du ras-le-bol fiscal, ou
tout le monde a limpres sion d'être traité injustement,
d'être traité de façon inéquitable, d'être
traité différemment de son voisin. Je pense que vous amenez des
éléments de réflexion au niveau de la taxation municipale.
Comme c'est un peu votre domaine... vous êtes, de profession,
évaluateur agréé...
M. Godin (Gabriel): C'est ça, oui.
M. Filion: J'aimerais peut-être, effectivement, qu'on
discute de ce domaine-là qui va pouvoir nous amener sûrement des
remarques qui vont nous permettre, par la suite, de songer à
réfléchir à tout ça. Moi, j'aurais envie de vous
demander...
Tout à l'heure, vous avez soulevé quand même un
point important. Vous avez dit: Ce n'est pas normal, dans une
société comme la nôtre, qu'on n'ait pas un ministre
à temps plein...
M. Godin (Gabriel): Bien oui.
M. Filion: ...qui s'occupe des affaires municipales.
M. Godin (Gabriel): C'est sûr.
M. Filion: Alors, pour vous, ça veut dire quoi? Ça
veut dire qu'au fond, il n'y aurait pas de ministre, puis ce serait pareil.
M. Godin (Gabriel): Bien non. Ça veut dire qu'il est
débordé. Celui qui est là, actuellement, il faut qu'il
s'occupe des Indiens, de la langue et de toutes sortes de maudites affaires,
puis il n'a pas le temps de s'occuper des municipalités.
M. Filion: Exact.
M. Godin (Gabriel): Ça en prendrait un à temps
plein, puis un jeune qui est en forme.
M. Filion: Un dynamique. M. Godin (Gabriel): Oui M.
Filion: Un vrai, là, un ministre. Une voix: C'est ça,
votre collègue! M. Godin (Gabriel): Bien, coudon! M. Filion:
Vous aimeriez avoir un jeune. M. Godin (Gabriel): Peut-être
vous. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Filion: II n'y a pas à dire, ce n'est pas parce qu'ils
n'ont pas le choix, hein?
M. Godin (Gabriel): Blon non Ils vont le faire mourir, le
pauvre.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Filion: Alors, je pense que vous avez une remarque quand
même qui est juste, et je voulais un peu avoir votre
«feeling» sur ça. Un autre point. Vous semblez amener un
nouveau concept, à savoir de faire des évaluations municipales en
fonction d'un pied linéaire, mais, en même temps, vous n'avez pas
l'impression qu'on va avoir des problématiques aussi d'application et
que la profession d'évaluateur agréé va être
touchée par ce genre de réglementation là? Parce que,
actuellement, c'est quand même un marché qui est...
M. Godin (Gabriel): Oui, bien moi, je ne suis pas comme les
avocats, de faire des lois pour créer de la «business», tu
sais.
M. Filion: Oui. Alors, vous seriez d'accord...
M. Godin (Gabriel): Je ne suis pas pour ça, moi. Ha, ha,
ha! (12 h 10)
M. Filion: Alors, écoutez, moi, je suis comptable
agréé, alors...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Filion: ...et je suis un comptable agréable. Alors,
vous comprendrez, M. Godin, je ne me sens pas visé. Ha, ha, ha!
Mais j'aimerais aussi que vous me parliez de la réforme Ryan au
niveau... et, venant d'une personne comme vous, qui avez quand même une
expérience de plusieurs années dans le monde municipal et dans le
monde de l'évaluation, est-ce que vous croyez que la réforme
Ryan, à toutes fins pratiques, est juste et équitable en fonction
de la capacité ou de la possibilité qu'ont les
municipalités de percevoir leurs revenus? Comment vous voyez la
réforme Ryan? Est-ce que vous avez l'impression que c'est une
réforme qui est juste et équitable?
M. Godin (Gabriel): Eh bien, que ce soit le fédéral
ou le provincial, pelleter ses problèmes et ses troubles dans la cour
des autres, c'est très malsain. C'est ne pas prendre ses
responsabilités. C'est simple.
M. Filion: Alors, vous, vous avez l'impression que cette
réforme-là n'a pas été du tout
étudiée de façon équitable. Elle l'a
envoyée, bon, bien...
M. Godin (Gabriel): Bien, coudon! Eh bien, qui est-ce qui serait
pour ça?
M. Filion: Non, je le comprends, mais vu à votre niveau...
Je voulais voir de votre côté si, vraiment, vous aviez
perçu quand même certains principes justes à travers tout
ça ou bien si, pour vous, ça représente uniquement une
espèce de: Ramassez mes problèmes, moi, je ne veux pas m'en
occuper, puis arrangez-vous pour que ça se règle.
M. Godin (Gabriel): C'est un manque de courage.
M. Filion: C'est un manque de courage ou un manque de temps parce
que, comme vous disiez, c'est un ministre qui est à temps partiel.
M. Godin (Gabriel): bien, c'est ça. oui, justement, il
n'a pas le temps de s'asseoir et dire: bon, là, on va étudier le
problème et on va y faire face.
M. Filion: Est-ce que vous trouvez ça normal qu'il y ait
encore beaucoup de municipalités au Québec qui n'aient pas de
compteur d'eau pour qu'on puisse, en fin de compte, envoyer une facture de taxe
d'eau en fonction d'un compteur d'eau, en fonction de l'utilisation? Est-ce
que, pour vous, ça serait normal qu'on puisse avoir de façon
générale, partout au Québec, des compteurs d'eau?
M. Godin (Gabriel): Oui, mais on l'a chez nous, à
Saint-Laurent...
M. Filion: À Montréal, ils ne l'ont pas, je
crois.
M. Godin (Gabriel): ...mais ils ont triplé la taxe d'eau,
l'an dernier. Ils ont réduit la quantité qu'on peut avoir pour
plus cher. Avant, on avait droit a 100 000 gallons, puis là, on a droit
plus rien qu'à 50 000 gallons, et ils ont monté le prix à
75 $ au lieu de 25 $. Alors, c'a fait tripler la taxe d'eau. Maintenant,
ça, c'est bon parce que c'est selon l'usage. C'est très bien,
mais ils devraient donner un minimum vital pareil qui serait inclus dans la
taxe municipale.
Il est venu une femme, justement, à l'assemblée du
conseil, le mois dernier, puis ça faisait vraiment pitié. Tu
sais, la femme est sur le BS, elle n'a pas un sous et elle disait: Je ne peux
pas payer ma taxe d'eau. Tout ce que le conseiller a pu lui dire: Ah bien,
c'est merveilleux, on a triplé la taxe d'eau. C'était loin
d'être une réponse. C'était la première fois que
j'avais honte, dans 23 ans, d'ôtre un citoyen de Saint-Laurent.
M. Filion: Vous abordez également d'autres sujets en
matière de fiscalité. Vous abordez, bien sûr, la TPS et la
TVQ. Vous soulevez le problème d'une espèce d'orgie pour tout le
monde...
M. Godin (Gabriel): Bien, je comprends!
M. Filion: ...c'est compliqué, où les gens... De ce
que vous percevez, actuellement, de cette
taxe-là, j'aimerais ça que vous nous expliquiez dans vos
mots comment elle peut nuire à notre économie.
M. Godin (Gabriel): Moi, je suis d'accord sur les taxes, je
comprends la nécessité des taxes. Il n'y a rien là, mais
des taxes sauvages, je suis contre ça. Alors, la TPS, c'est une taxe
sauvage.
M. Filion: Autrement dit...
M. Godin (Gabriel): Dans ce sens que moi, la TPS, je l'aurais
acceptée sur tous les produits manufacturés neufs, point, pas sur
l'usagé. Puis, quand tu prends une tasse de café, puis tu vas
acheter ton journal, puis acheter un timbre, aïe! c'est le restant des
écus!
M. Filion: Oui. Vous avez l'impression... M. Godin (Gabriel):
C'est un non-sens.
M. Filion: Vous avez l'impression que la taxe vous suit jusque
dans vos besoins...
M. Godin (Gabriel): Bien oui.
M. Filion: ...jusque dans vos besoins essentiels de vie.
M. Godin (Gabriel): La salade aux fruits, parce qu'elle est dans
un bocal, ils nous chargent de la taxe, mais celle qui est dans la
«can», pas de taxe. L'autre jour, j'achète des
«peanuts», et la personne, bien, elle dit: C'est salé, c'est
taxable. J'achète du beurre de «peanuts», c'est
sucré, c'est taxable. Et la fille, il faut quasiment qu'elle y
goûte pour savoir si c'est taxable.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Godin (Gabriel): C'est un non-sens, ça. C'est le
bordel.
M. Filion: C'est dommage que le ministre du Revenu soit parti.
Ça aurait été intéressant qu'il... Il était
là, tout à l'heure, mais...
M. Godin (Gabriel): C'est de valeur. Bien, vous lui direz.
M. Filion: On va lui transmettre.
M. Godin (Gabriel): Vous lui ferez le message.
M. Filion: On va lui transmettre le message. Écoutez, M.
Godin, moi, une dernière petite question parce que j'aime poser cette
question-là clans le débat de la commission.
Dans un but de simplification du régime fiscal et d'arriver
à des économies d'échelle, est- ce que, pour vous,
ça vous apparaît une formule intéressante que de chercher
à unir et à regrouper des ministères pour que le citoyen
puisse s'adresser à un seul ministère pour avoir un service
public? Comme l'impôt sur le revenu, il pourrait s'adresser au
ministère du Revenu du Québec avec un seul formulaire, où
on pourrait mettre les spécificités fédérales et du
Québec Mais qu'on arrête de compliquer la vie aux gens, de
produire deux formules, d'envoyer deux chèques, d'aller voir deux
ministères, se tromper de ministère parce que ce n'était
pas celui-là que je devais aller voir, mais c'était l'autre, et
d'arriver à rendre l'accessibilité du service public beaucoup
plus simple aux citoyens. Dans cet esprit-là, j'aurais aimé que
vous me parliez... est-ce que vous verriez ça d'un bon oeil qu'on puisse
penser avec le fédéral... dire au fédéral:
Écoutez, laissez-nous gérer le territoire, et on va collecter les
impôts, et on vous donnera votre dû. Qu'est-ce que vous pensez
d'une approche aussi simpliste pour le citoyen?
M. Godin (Gabriel): Mais j'aimerais un protecteur du citoyen
à tous les niveaux. Même sur le plan municipal, une ville de 50
000 habitants en montant devrait avoir un protecteur du citoyen, que le type,
il peut aller voir cette personne-là, puis lui dire: Bien là,
voici, ça ne marche pas. Il y a quelque chose qui ne marche pas, alors,
que ce soit au niveau fédéral, provincial et même
municipal, et enlever les partis politiques des municipalités.
Ça, c'est la pire affaire qu'il peut y avoir, là. Ils s'obstinent
et ils s'engueulent, et c'est tout ce qu'ils font, puis ils pensent rien
qu'à leur maudit parti. Et toi, le citoyen, tu regardes ça, tu
vas aux assemblées, et c'est une vraie comédie, tu sais.
Ça fait que tu aimes mieux ne pas y aller. Ils font... c'est un vrai
show. Bien, vous le savez.
M. Filion: Ah oui!
M. Godin (Gabriel): C'est ça.
M. Filion: Effectivement, on en entend...
M. Godin (Gabriel): Bien, c'est ça, enlever la politique
de là, ça aiderait énormément.
M. Filion: Mais, par rapport à un formulaire
d'impôt, comme démarche, est-ce que vous trouveriez ça
intéressant qu'on simplifie la vie au niveau d'un seul formulaire
d'impôt?
M. Godin (Gabriel): Moi, les formulaires, ça ne me
dérange pas tellement. C'est le prix qu'il y a au bout.
M. Filion: C'est ce que vous devez faire, c'ost !o
chèque
M. Godin (Gabriel): Oui C'est ça, oui.
M. Filion: C'est le chèque...
M. Godin (Gabriel): C'est ça Ha. ha. ha!
M. Filion: ...c'est le chèque qui vous dérange,
mais au moins, si vous en faites juste un, c'est ça de sauvé.
M. Godin (Gabriel): Des formules et des rapports, j'en ai fait
toute ma vie...
M. Filion: Oui.
M. Godin (Gabriel): ...ça ne me dérange pas, mais
le montant, ça, ça me dérange.
M. Filion: Ha, ha, ha! Je comprends. Un autre point que vous avez
soulevé, et j'aimerais avoir une réflexion...
Le Président (M. Després): II vous reste une
minute, M. le député de Montmorency.
M. Filion: Une seule minute? Le Président (M.
Després): Oui.
M. Filion: m. godin, vous avez soulevé un point dans votre
mémoire, abolir la taxe scolaire pour les proprios de 65 ans et
plus...
M. Godin (Gabriel): Oui, bien, ça serait une
façon.
M. Filion: ...qui demeurent autonomes. J'aimerais ça que
vous m'expliquiez la philosophie derrière cette
recommandation-là.
M. Godin (Gabriel: Bien, ça serait une façon de les
aider s'ils ne veulent pas changer le système globalement. Bien,
ça, au moins, ça serait une façon d'aider les personnes
âgées. J'ai beaucoup de mesures pour aider les personnes
âgées, ici. J'en donne des suggestions, ça ne manque pas.
Mais j'espère que ça va être suivi, qu'il va y avoir un
suivi là-dedans.
M. Filion: Mais vous, dans votre esprit à vous, est-ce que
c'était dans un esprit uniquement d'aider les personnes
âgées ou si c'était également dans un but de dire:
Bien, écoutez, nous, on n'a plus d'enfants à la maison, les
services scolaires, on n'en a plus vraiment, on est devenus des gens... Mais
est-ce que c'est uniquement au niveau des personnes retraitées ou si
c'est une philosophie?
M. Godin (Gabriel): Je suis venu dans le but, d'abord, d'aider
1500 municipalités, puis ça représente 1 000 000 de
proprios, et je suis venu avec le deuxième chapeau, c'est pour aider les
gens de l'âge d'or.
Le Président (M. Després): Merci beaucoup.
M. Filion: Alors, merci do votre présentation.
M. Godin (Gabriel): Merci.
Le Président (M. Després): M. Godin, oui, il vous
reste encore un peu de temps. Le temps de la formation de l'Opposition est
terminé. Il reste deux minutes de disponibles pour la formation
ministérielle, et le député de Verdun m'a demandé
la parole.
M. Gautrin: Merci. M. Godin...
Le Président (M. Després): M. le
député de Verdun.
M. Gautrin: ...j'aurais une question bien simple à vous
poser. Si j'ai compris, un des problèmes que vous soulevez, c'est celui
de la taxation foncière...
M. Godin (Gabriel): C'est ça.
M. Gautrin: ...et, bien souvent, le problème des personnes
qui, arrivées à un certain âge, ont une maison qui a pris
de la valeur, mais n'ont plus les revenus parce que, maintenant, elles
deviennent pensionnées...
M. Godin (Gabriel): C'est ça.
M. Gautrin: ...pour pouvoir payer les taxes qui sont de leur
maison.
M. Godin (Gabriel): Exactement. C'est ça. Bien oui.
M. Gautrin: Elles ne veulent pas déménager parce
qu'elles ont toujours vécu dans cette maison-là.
M. Godin (Gabriel): C'est ça. Exactement.
M. Gautrin: Ce n'est pas de leur faute si la maison a
augmenté de valeur pendant longtemps, et puis elles se trouvent dans une
situation dans laquelle elles n'ont plus les moyens de payer les taxes
foncières, ce qui est un réel problème, je suis d'accord
avec vous.
M. Godin (Gabriel): Absolument, oui.
M. Gautrin: Comment vous verriez une possibilité de ce
qu'on pourrait appeler... que les taxes foncières soient, disons,
comptabilisés sur l'héritage ou sur la succession, ou lorsqu'on
réalisera la maison... ou c'est-à-dire lorsque la personne
arriverait à décéder. Une forme d'hypothèque
négative qui serait, à ce moment-là, comptabilisée.
On pourrait penser à toutes sortes
d'approches pour essayer de régler le problème, et je le
rappelle, qui est réel pour les personnes âgées qui ont
accumulé un petit bien et qui n'ont plus de revenus, souvent, pour payer
leurs taxes.
M. Godin (Gabriel): Oui, mais qu'ils me «hold-uppent»
quand je serai mort, ça va moins me déranger, mais ça va
déranger mes enfants. (12 h 20)
M. Gautrin: Mais ils seraient peut-être plus en mesure de
payer, parce qu'ils auront quand même un capital qui leur sera
important.
M. Godin (Gabriel): Moi, je souhaiterais vraiment qu'ils changent
la norme parce que cette norme-là, c'est impossible. Ça n'a pas
de bon sens de jouer là-dessus. Ils jouent au yo-yo avec ça. Ce
n'est pas possible. L'évaluation n'a pas d'affaire là d'aucune
façon. Puis je suis évaluateur. Il doit être capable de
dire ça, hein?
M. Gautrin: Je vous remercie, M. Godin.
Le Président (M. Després): Merci beaucoup, M.
Godin. C'était un plaisir...
M. Godin (Gabriel): Merci beaucoup. Bien aimables.
Le Président (M. Després): ...d'être venu de
ville Saint-Laurent pour vous faire entendre à la commission des
finances publiques.
Je suspends les travaux jusqu'à 15 heures, cet
après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 21)
(Reprise à 15 h 6)
Le Président (M. Lemieux): Le commission du budget et de
l'administration reprend ses travaux pour une consultation
générale et des auditions publiques sur le financement des
services publics au Québec. Je demanderais à l'organisme suivant
de bien vouloir prendre place ici, en avant de moi, à la table des
témoins. Le Conseil du statut de la femme, s'il vous plaît.
Mme Marols: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Si vous permettez, pendant que nos invitées se
préparent à nous présenter leur mémoire, je
voudrais vous présenter une motion, à ce moment-ci de nos
travaux, qui, je crois, est recevable, mais je vous laisserai en juger; je vais
vous expliquer pourquoi je crois qu'elle est recevable. Je voudrais d'abord
vous la présenter en m'excusant auprès do nos invitées,
mais en sachant que celles-ci auront tout le temps qui est prévu
à l'audition de leur mémoire de même qu'aux discussions et
aux échanges qu'on peut avoir avec le Conseil, puisque l'heure qui est
réservée reste leur heure.
Motion proposant le dépôt des
études et
des analyses du gouvernement au sujet
des dédoublements et des chevauchements
administratifs entre le gouvernement
du Québec et le gouvernement
fédéral
Alors, M le Président, je fais la motion suivante: «Que la
commission du budget et de l'administration souhaite, dans le cadre de son
mandat sur le financement des services publics au Québec, que le
président du Conseil du trésor mette à la disposition des
membres une copie des études, documents ou analyses
préparés par les divers ministères et traitant des
dédoublements et chevauchements administratifs entre le gouvernement du
Québec et le gouvernement fédéral.»
Le Président (M. Lemieux): Auriez-vous l'amabilité,
Mme la...
Mme Marois: Alors, si le secrétaire veut recevoir la...
Voilà. Vous avez des copies, M. le Président. Bon. On comprendra
que, suite à votre décision... Vous comprendrez, M. le
Président, que j'ai été fouiller un petit peu dans des
décisions préalables sur le même type de proposition, et je
voudrais vous présenter ce pourquoi je crois cette motion recevable.
Débat sur la recevabilité Mme Pauline
Marois
D'abord parce qu'elle ne vise pas à empêcher
l'exécution d'un ordre de l'Assemblée, qui est de procéder
à l'audition de groupes sur un sujet précis qui concerne le
financement des services publics. Mais, par contre, elle vise, cette motion -
et, ça, dans son essence même - à faire en sorte que le
ministre nous fournisse un outil de travail qui est essentiel, dans le fond,
à l'exécution par les membres de la commission du mandat que nous
avons reçu de l'Assemblée nationale.
D'autre part, la motion n'est pas contraignante pour le ministre. Il
s'agit, en fait, d'une demande de la commission, et même pas d'une
demande, d'un souhait.
Si je me réfère, même, à la décision
que vous avez rendue au début de la semaine sur une motion
présentée par mon collègue, le député de
Labelle, vous vous êtes référé, dans votre
décision, aux articles 51 et 53, en parlant du dépôt de
document, en disant que la commission avait d'autres moyens et, même, et
je vous cite
«Même une motion permet ici le dépôt d'un
document.» Alors, je suis à la lettre la décision que vous
avez rendue au début de la semaine pour présenter la motion qui
est devant vous. J'ai un certain nombre d'autres arguments, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): ...Mme la députée
de Taillon.
Mme Marois: D'accord. Ceci réfère à la
jurisprudence à ce moment-ci. Effectivement, le président, M. Guy
Bélanger, concernant des projets de règlement sur le projet de
loi sur la sécurité du revenu, en novembre 1988, avait
été d'accord avec la recevabilité d'une motion semblable.
Et une, entre autres, était présentée par mon
collègue, le député de Lac-Saint-Jean, M. Brassard;
ça, c'était dans le cadre de la commission parlementaire
spéciale sur l'étude de l'impact de la souveraineté. Et,
dans le cadre de cette étude, c'était essentiellement la
même motion que je présente aujourd'hui. Et le président,
à ce moment-là, avait jugé qu'effectivement cela
était recevable. J'ai même une copie de cette décision, je
peux vous la lire. (15 h 10)
Le Président (M. Lemieux): Puis-je en avoir une copie, de
cette décision?
Mme Marois: Oui, certainement, elle arrive.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Ça va. Je vous
écoute, Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Alors, essentiellement, ce que dit le
président, dans le cas, M. Bélanger - et je crois qu'il y avait
une autre décision concernant le vice-président, M. Saintonge,
aussi - on croyait qu'une telle motion venant non pas empêcher la bonne
poursuite des travaux mais pouvant éclairer les membres de la
commission, n'étant pas, je le répète, un ordre mais un
souhait, qu'elle s'avérait recevable.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que c'est tout, Mme la
députée de Taillon?
Mme Marois: Oui. C'est terminé pour l'instant, M. le
Président, si vous...
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a quelqu'un du
côté ministériel qui veut intervenir sur la
recevabilité de la motion? M. le député de Limoilou?
(Consultation)
Mme Marois: Peut-être qu'il y a un autre
élément, M. le Président, si ça peut vous
être utile.
Le Président (M. Lemieux): Oui, madame.
Mme Marois: II y a aussi une décision du président
sur une motion du leader parlementaire de l'Opposition - et ça, c'est
tout récent, c'était le 14 décembre 1992 - qui avait
proposé la mise à la disposition immédiate des
députés des règlements relatifs à un projet de loi
qui était...
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que c'était dans
le cadre d'une consultation particulière ou générale?
Mme Marois: Non. C'était dans le cadre d'une commission
plénière...
Le Président (M. Lemieux): Dans le cadre d'une commission
plénière.
Mme Marois: ...cependant.
Le Président (M. Lemieux): Donc, avant le début de
l'étude détaillée.
Mme Marois:...
Le Président (M. Lemieux): Oui?
Mme Marois: C'était... Attendez un petit peu... Non,
attention! Lors de l'étude détaillée du projet de
loi...
Le Président (M. Lemieux): L'article 1, sans doute,
n'était-il pas encore amené.
Mme Marois: Non, non, non.
Le Président (M. Lemieux): Ça devait être
avant. Vérifiez, vous allez voir, parce que c'est important pour moi. Je
m'excuse...
Mme Marois: Oui, c'est ça.
Le Président (M. Lemieux): ...c'est la
démocratie.
Mme Marois: M. le Président, sur cette
question-là...
Le Président (M. Lemieux): Oui, madame.
Mme Marois: ...je vous rappelle qu'à l'article 158 on dit,
et je cite l'article: «En commission, les motions ne requièrent
pas de préavis.» Alors, à tout moment, qu'on soit en train
d'étudier un article de loi ou qu'on soit à vouloir entendre des
groupes dans le cadre de l'exercice du mandat qui nous a été
confié, à tout moment, je peux présenter une motion et,
ça, le règlement le prévoit.
Le Président (M. Lemieux): Je vais vous avouer que c'est
une des premières questions que je vais me poser, eu égard
à l'opportunité, à ce
moment-ci, d'avoir à faire le dépôt de cette motion.
C'est la première question que je vais me poser puisque - et je vais
vous dire pourquoi - sans rendre la décision... Parce qu'il y a eu un
ordre du jour qui a été adopté ce matin. Ce que je me
demande, la première question que je me pose, en droit: Cette
motion-là, aurait-elle dû être, justement,
présentée au début des travaux? Et, dû au fait qu'on
a adopté un ordre du jour, ne sommes-nous pas liés par cet ordre
du jour là et ne devons-nous pas procéder selon l'ordre du jour?
Remarquez que c'est une interrogation que je me fais.
Mme Marois: Je vous dirai que j'y ai pensé...
Le Président (M. Lemieux): Oui?
Mme Marois: ...à cela aussi, parce que je savais que nous
avions adopté l'ordre du jour ce matin. Mais, à ce
moment-là, on ne pourrait plus, une fois un ordre du jour adopté,
d'aucune espèce de façon, faire quelque motion que ce soit dans
le cadre d'une commission comme celle que nous tenons. Or, l'article 158, et
j'y reviens, prévoit qu'«en commission, les motions ne
requièrent pas de préavis.» D'accord? Alors, ça
deviendrait, à mon point de vue, très restrictif comme
interprétation si ça devait être le cas, mais je suis
persuadée que ça ne sera pas le cas.
Le Président (M. Lemieux): Alors, vous m'avez cité
158...
Mme Marois: C'est ça.
Le Président (M. Lemieux): ...et quel autre article du
règlement avez-vous invoqué, s'il vous plaît?
Mme Marois: Non, c'est 158... Le Président (M.
Lemieux): 158. Mme Marois: ...essentiellement... Le
Président (M. Lemieux): D'accord. Mme Marois: ...que j'ai
invoqué.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Limoilou, vous avez des commentaires relativement...
M. Michel Després M. Després: Oui.
Le Président (M. Lemieux): ...à cette motion?
M. Després: Oui. Tout d'abord, M. le Président, sur
la recevabilité, vous semblez nous dire que vous vous posez...
Le Président (M. Lemieux): Je n'ai rien dit, j'ai fait une
réflexion, tout simplement. Alors, je vous laisse aller, monsieur.
M. Després: Mais est-ce qu'elle est, pour la
présidence, recevable, cette motion-ci?
Une voix: Vous faites des réflexions sans rien dire?
Le Président (M. Lemieux): J'ai fait une réflexion
sans rien dire, effectivement. M. le député de Limoilou, je vous
écoute.
M. Després: Mais je vous demande tout simplement, M. le
Président, avant de débattre, si, au niveau, de toute
façon, de la recevabilité...
Le Président (M. Lemieux): C'est sur la
recevabilité que j'aimerais vous entendre.
M. Després: Écoutez, d'une façon ou d'une
autre, je comprends que c'est un souhait, sauf qu'on a la chance d'avoir, de
toute façon, le président du Conseil du trésor qui est
membre, normalement, de cette commission. Vous comprendrez que, depuis le
début de nos travaux, il est normalement toujours ici mais qu'il y a un
Conseil des ministres le mercredi, à 15 heures. Nous sommes le mercredi,
à 15 h 15, et je me demande, M. le Président, étant
donné qu'on a déjà les gens du Conseil du statut de la
femme qui sont ici, si on ne peut pas remettre le débat. Et je ne sais
pas si, à un moment donné aussi, le ministre n'y a pas fait
allusion - on pourra lui poser la question - à ces
études-là. Est-ce que ces études-là ont
été effectuées dans chacun des ministères?
Mme Marois: Là, on est sur le fond, M. le
Président, de la motion.
Le Président (M. Lemieux): Écoutez,
effectivement...
Mme Marois: Je pense qu'il faut venir sur la recevabilité
d'abord.
Le Président (M. Lemieux): Écoutez, il y a deux
étapes. Il y a une question de recevabilité. Ce que je vais
faire, Mme la députée de Taillon, considérant que nous
avons parmi nous des invitées et qu'elles me semblent impatientes
d'avoir à faire l'exposé de leur mémoire, je vais prendre
sous réserve cette motion, et je m'engage, d'ici 18 heures... Et, vous
le savez, je vais prendre le temps de fouiller à la fois au niveau du
règlement et de la jurisprudence pour savoir si, effectivement, elle est
recevable. Si elle est recevable, on en débattra sur le fond.
Alors, préalablement, nous allons entendre le Conseil du statut
de la femme et, d'ici 18 heures, je rendrai une décision relativement
à cette motion. De facto, elle me semble recevable. La seule question
que je me posais, c'était au niveau de l'opportunité. Ça
me fatigue encore, et je veux aller voir dans la doctrine si, effectivement,
elle peut être présentée à ce stade-ci. Alors...
Mme Marois: Merci, M. le Président. Je n'ai pas
d'objection à ce qu'il en soit ainsi. Je vous réfère
cependant à tous les documents que j'ai cités et aux
décisions préalables prises par vos collègues à la
présidence, soit de commission, ou même parle président, M.
Saintonge lui-même.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous auriez la
gentillesse, tout à l'heure... J'ai pris la décision citée
par M. Guy Bélanger. Il y a M. Saintonge. Est-ce que ce sont les deux
seuls?
Mme Marois: Je crois que, moi, à ce moment-ci, ce sont les
deux seuls auxquels je peux faire référence. Oh pardon! Il y en a
une autre, celle du... Non. Ça, c'est le 14 décembre. Ça,
je l'ai noté. Non. Ça va. C'est vraiment celle-là.
Le Président (M. Lemieux): Ça va. Alors, je vous
remercie, Mme la députée de Taillon.
M. Gautrin: Sur la recevabilité, monsieur...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Verdun, sur la recevabilité de la motion.
M. Henri-François Gautrin
M. Gautrin: Sur la recevabilité, M. le Président.
Je lis rapidement la motion, et je la trouve tout à fait floue, et je ne
comprends pas comment une telle motion peut être recevable quand elle ne
précise pas... Et même, on ne sait pas s'il en existe, de telles
études. Alors, à l'heure actuelle, on a donc fait une motion
purement hypothétique, sur des études hypothétiques.
Mme Marois: Je m'objecte, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Verdun, voulez-vous terminer, s'il vous plaît?
M. Gautrin: Bien, je termine si vous me le permettez, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, je vous le permets,
mais... Ça va.
M. Gautrin: Donc, j'ai de la difficulté qu'il y ait une
motion, même sous la forme dans laquelle elle est écrite, alors
qu'elle ne précise pas ce sur quoi on aurait à voter. J'aurais de
la difficulté à voir comment elle pourrait être recevable
puisqu'on ne dit pas de quoi on va débattre.
Le Président (M. Lemieux): Oui, Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président.
Je crois que nous discutons du fond de la motion lorsque le
député de Verdun intervint. Je n'ai pas de problème
à discuter du fond. Ce sera dans un second temps, et ça me fera
plaisir d'en débattre.
Le Président (M. Lemieux): C'est ça.
M. Gautrin: Je m'excuse, M. le Président, je ne discute
pas du fond. Je discute de l'opportunité de la recevabilité d'une
motion qui ne précise pas de quoi on parle et ce qu'on veut faire
déposer. Donc, une motion doit être, pour être recevable,
précise et parler de documents précis. Donc, à ce
moment-là, une motion qui est purement hypothétique m'a l'air non
recevable.
Le Président (M. Lemieux): Oui, Mme la
députée.
Mme Marois: M. le Président, je reviens toujours à
la recevabilité. Je débattrai du fond plus tard, parce que je
crois qu'elle a un contenu, mais cela n'est pas l'objet de notre propos. Cette
même motion, dans les mêmes termes, à quelques
éléments près, a été jugée recevable,
déjà, par des collègues avant vous dans le cadre de
débats sur des projets de loi ou de débats et d'auditions de
groupes. Donc, il me semble que si on se fie à la jurisprudence - et
c'était la même forme de rédaction, pour ne pas dire
presque le même contenu - donc, dans ce sens-là, je crois qu'elle
devrait être recevable. (15 h 20)
M. Gautrin: Mais les erreurs des uns ne justifient pas les
décisions des autres.
Le Président (M. Lemieux): Écoutez, M. le
député de Verdun, je suis bien conscient que la rorjla du stare
decisis n'existe pas en commission parlementaire, mais vous allez quand
même me permettre de vérifier, dans un premier temps, la
recevabilité de cette motion-là. Par la suite, le fond, on en
débattra. Ce qu'il est important de savoir: Est-ce qu'elle est
opportune? Et si elle est opportune, est-ce qu'elle est recevable dans son
ensemble? Je prends cette motion sous réserve et, immédiatement,
nous allons entendre le Conseil du statut de la femme.
Dans un premier temps, je demanderai à la porte-parole de
l'organisme de bien vouloir s'identifier et d'avoir l'amabilité de nous
présenter les gens qui l'accompagnent. Dans un deuxième temps, le
débat va se poursuivre de la façon
suivante. Nous disposons d'une heure globalement, de 20 minutes pour la
présentation de l'exposé de votre mémoire; suivra un
échange d'une durée totale de 40 minutes, 20 minutes pour le
parti ministériel et 20 minutes pour le groupe de l'Opposition. Alors
nous sommes prêts à vous entendre.
Auditions (suite) Conseil du statut de la femme
(CSF)
Mme Lavigne (Marie): Merci, M. le Président.
Je me présente, Marie Lavigne, présidente du Conseil du
statut de la femme. À ma gauche, Mme Hélène Tremblay,
membre du Conseil du statut de la femme et vice-rectrice à
l'enseignement et à la recherche à l'Université du
Québec à Rimouski. À sa gauche, au bout, Mme Monique
Desrivières, qui est directrice de la recherche au Conseil du statut de
la femme et, à ma droite, Mme Francine Lepage, qui est économiste
au Conseil du statut de la femme.
M. le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. les membres de la
commission, dans un premier temps, nous remercions la commission de recevoir le
Conseil du statut de la femme. Bien sûr, le gouvernement du Québec
convie ces temps-ci différents groupes à traiter du financement
des services publics au moment où les élus s'apprêtent
à poser des choix au regard des problèmes budgétaires
auxquels l'État est confronté, et aussi à dégager
des perspectives pour l'avenir. Au Conseil du statut de la femme, nous sommes
conscientes que la situation actuelle appelle une réflexion et des
actions si nous voulons préserver les acquis sociaux et aussi relever
les défis qui s'annoncent. La persistance des déficits et
l'évolution de la dette publique, tant à Québec
qu'à Ottawa, donne l'image d'une société qui ne semble
plus en mesure de vivre à la hauteur de ses aspirations. En même
temps, cependant, la constance du chômage rappelle que, comme
société, nous nous privons d'une partie de la population, car
nous n'arrivons pas à mettre pleinement en valeur toutes les forces
vives du Québec.
La commission du budget et de l'administration ne s'attend probablement
pas à ce qu'un organisme comme le Conseil du statut de la femme vienne
lui dire où il faudrait sabrer dans les dépenses gouvernementales
ou encore à quel endroit pourraient être opérées de
nouvelles ponctions fiscales. D'ailleurs, telle n'est pas notre intention.
Cependant, le Conseil voudrait vous faire valoir ses préoccupations afin
que la présente démarche entreprise par le gouvernement respecte
les droits des femmes et s'adapte à la situation que les femmes vivent.
Notre intervention va donc se limiter, dans un premier temps, à
énoncer les principes qui devraient être présents lorsque
seront effectués les arbitrages entre les différents
intérêts et les différents projets en présence. Par
la suite, nous émettrons certaines considérations sur les choix
budgétaires et fiscaux.
D'abord, les principes. Un premier principe qui nous semble essentiel
à retenir, c'est que le développement économique est plus
que jamais indissociable du développement humain et social. La
mondialisation des échanges exige de plus en plus une main-d'oeuvre
productive, qualifiée, apte à s'adapter et ouverte sur
l'extérieur. Il faudra donc consacrer à ce domaine toutes les
énergies requises. Cependant, le souci d'assainir les finances publiques
ne doit pas amener les dirigeants et les dirigeantes à ne miser que sur
les dépenses qui apparaissent économiquement rentables à
court terme. L'être humain forme un tout. Il est nécessaire
également d'investir dans les domaines qui nourrissent plus
fondamentalement la personne, l'aident à vivre et renforcent le tissu
social; on pense à la culture, à l'éducation, à
l'organisation sociosanitaire et à la sécurité
sociale.
Nous croyons, en second lieu, que le Québec doit s'appuyer sur un
État moderne et développé. L'industrialisation et tous les
phénomènes qui l'ont accompagnée, c'est-à-dire
l'essor du salariat, l'urbanisation, la diminution de la taille des familles,
la plus grande fragilité des liens conjugaux, la présence accrue
des femmes sur le marché du travail, l'élévation des
standards en éducation et en santé ont tous, à leur
façon, entraîné le transfert d'activités de la
famille ou de la sphère privée vers la sphère publique. Il
serait donc tout à fait illusoire de penser qu'aujourd'hui ou demain on
puisse revenir à une époque où les familles, les
communautés religieuses et les proches assumaient dans notre
société presque intégralement le support et le soin
dédiés aux enfants, aux travailleurs en emploi, aux personnes
malades ou aux personnes handicapées ou âgées. De
même, on ne peut prétendre que l'entreprise privée est
partout et toujours la mieux placée pour produire les biens et services
nécessaires ou pour réaliser une allocation optimale de
l'ensemble des ressources humaines. Il faudra donc continuer à compter
sur une présence active des secteurs public, communautaire et
coopératif.
Comme troisième principe, il importe aussi de miser sur
l'autonomie des personnes. Lorsque l'on pense plus spécifiquement
à la population féminine, l'implication des gouvernements dans
plusieurs domaines - santé, éducation, services sociaux,
sécurité du revenu, défense des droits et promotion de
l'égalité - s'est menée parallèlement à
l'entrée des femmes dans la sphère publique, leur a permis
d'acquérir par l'emploi une certaine automonie économique et les
a assurées d'une protection sociale de base. Les mesures plus
directement dirigées vers les parents, telles que les services de garde,
les congés parentaux, les allocations et dispositions fiscales les ont
soutenues dans la réalisation de ces responsabilités,
essentielles pour les parents
mais fondamentales et vitales pour toute la société.
Si les femmes contribuent davantage qu'autrefois sous une forme de
salaire plutôt qu'en activités gratuites et non
rémunérées à la sécurité
matérielle de la famille, les statistiques nous démontrent
toutefois qu'elles ont encore de très grands progrès à
accomplir sur le chemin de l'égalité et que la pauvreté
frappe durement un nombre important d'entre elles. La société ne
s'est pas encore ajustée à la transformation des rôles des
femmes, ce qui leur laisse une charge souvent lourde à assumer. En
outre, la fragilité des unions, des mariages rend nécessaire,
aujourd'hui plus que jamais, le développement de la capacité des
gains des femmes, et ce, à un moment où les exigences du
marché du travail en termes de formation de base, de continuité
en emploi et de ressourcement augmentent sans cesse. Les difficultés
d'intégration au travail qu'éprouvent certaines femmes adultes,
les faibles salaires touchés par un bon nombre de travailleuses, la
pauvreté vécue par une importante proportion des responsables de
familles monoparentales et celle qui affecte aussi les femmes
âgées seules ne sont bien souvent que le reflet de l'inadaptation
de nos anciens modèles sociaux aux nouvelles réalités que
vivent les femmes.
Nous croyons donc que les femmes, au même titre que les hommes,
doivent être encouragées à réaliser leur
potentialité d'être humain dans leurs activités
professionnelles comme dans leur vie hors travail. Il y va donc de
l'intérêt des femmes, mais aussi de l'ensemble de la
collectivité. Elles forment déjà près de la
moitié de la main-d'oeuvre, et l'investissement qui a été
fait depuis trois décennies dans leur formation ne doit pas être
annulé par des politiques qui considéreraient les femmes comme
une main-d'oeuvre secondaire. En outre, lorsque le Québec
connaîtra une diminution des proportions des personnes en âge
actif, les femmes, on le sait, formeront une composante numérique encore
plus importante de la main-d'oeuvre et qu'on ne pourra fragiliser au risque de
mettre l'économie québécoise elle-même en
péril. Ainsi, au moment où l'on cherche des façons de
réduire les dépenses publiques, il faut se méfier des
politiques qui, directement ou indirectement, pourraient avoir pour effet de
réserver aux femmes un statut de travailleuses d'appoint ou de les
confiner à la dépendance d'un conjoint. Compte tenu des
réalités actuelles, les économies envisagées
à court terme pourraient bien se muer en coûts humains, sociaux et
économiques beaucoup plus importants à long terme. (15 h 30)
Enfin, - et c'est là notre quatrième principe - une vision
globale et intégrée doit prévaloir dans les choix
budgétaires et fiscaux de l'État. Le gouvernement doit viser la
cohérence de l'ensemble de ses actions, qu'il s'agisse de
prélèvements, de transfert de revenus ou de dépenses en
biens et services. Selon nous, il faut juger les interventions selon leur
impact global et éviter que le cumul des différentes mesures ait
pour effet de faire dévier des objectifs fondamentaux. Une plus grande
transparence dans les actions de l'État en résultera, et elle
sera propice à la réalisation du consensus social
souhaité.
En second lieu, je vous entretiendrai de certaines considérations
sur les choix fiscaux et budgétaires. L'État doit d'abord se
baser sur une fiscalité équilibrée et progressive selon le
revenu. On doit se soucier que les entreprises comme les particuliers fassent
leur part et que le poids des taxes et des impôts soit réparti
entre les particuliers selon une structure globalement progressive selon le
revenu. Comme la plupart des pays développés, II Importe
absolument de reconnaître la responsabilité financière
qu'entraînent les enfants. Le Québec doit continuer de poursuivre
des objectifs d'équité horizontale, c'est-à-dire qu'il
doit aider toutes les familles, et d'équité verticale,
c'est-à-dire qu'il doit soutenir davantage les familles qui ont moins de
ressources.
En clair, cela signifie que, pour un même revenu, l'effort fiscal
requis de la part d'une famille ayant des enfants doit être moins
élevé que celui d'un ménage sans enfant à charge.
Cela veut dire également que, dans les cas où deux familles ayant
la même taille mais ayant des revenus différents, la famille plus
fortunée doit contribuer davantage que la famille moins
fortunée.
Québec apporte son soutien financier aux familles par
l'intermédiaire d'allocations et de dégrèvements fiscaux.
Une simplification des mesures pourrait être envisagée si elle
respecte les critères d'équité horizontale et verticale.
La décision de mettre un enfant au monde engage l'avenir, et les parents
doivent être de plus assurés de la continuité du soutien
gouvernemental et du maintien de sa valeur réelle.
Il est donc nécessaire que soient pleinement indexés
à l'inflation les montants d'aide consentis et les seuils de revenus qui
y donnent droit. Les parents profitent également des services
dispensés ou subventionnés par l'État. Une tarification
des services publics dans des domaines aussi essentiels que la santé,
l'éducation et les services sociaux est susceptible d'accroître,
si l'on y prend garde, la charge financière des familles.
Quant aux taxes à la consommation, elles pèsent lourdement
sur la majorité des familles qui, nécessité oblige,
affectent la plus grande part de leurs revenus à la consommation, sans
tirer vraiment parti des crédits de taxes offerts, ceux-ci étant
réservés aux familles à faibles revenus ou à
revenus modestes. En ces matières, la préoccupation
d'équité à l'égard des familles doit toujours
rester vive. Enfin, une attention particulière doit être
apportée à la situation des femmes responsables de familles
monoparentales.
Nul n'ignore les défis quotidiens qu'elles
doivent relever, ni les conditions précaires dans lesquelles
elles vivent. On doit s'interroger sur l'équité du système
fiscal à leur égard et voir à ce que le parent qui n'a pas
la garde des enfants assume pleinement les obligations que lui confère
le Code civil. On doit s'assurer que ces femmes aient un revenu décent,
et les soutenir sur la voie de l'autonomie financière.
Par ailleurs, la sélectivité des mesures et des programmes
dont on parle très souvent n'est pas en soi une solution magique, et
elle comporte aussi des écueils. Par souci d'économie, certaines
personnes suggèrent que la sélectivité remplace
désormais l'universalité des transferts, et dans les transferts
et dans les services. Mais a-t-on bien mesuré les effets pervers que
pourrait entraîner un système de sécurité sociale
orienté avant tout vers les plus pauvres?
En augmentant le nombre de mesures sélectives, tout en
réduisant les protections de base offertes à tous, est-ce qu'on
ne risque pas d'enfermer à jamais les ménages à faibles
revenus dans le piège de la pauvreté? On irait, par là,
à l'encontre des récents efforts de rationalisation des mesures
des dernières années dans le but d'encourager l'autonomie
économique des prestataires de l'aide sociale, ainsi que l'autonomie des
travailleurs et travailleuses à bas salaires.
Québec et Ottawa prévoient déjà un ensemble
de mesures sélectives selon le revenu familial, que ce soit
crédit de taxes à la consommation, remboursement d'impôt
foncier, remboursement d'impôt à l'égard de la famille,
majoration des prestations de dernier recours, en fonction des enfants, APPORT,
aide juridique, prestation fiscale pour les enfants.
Est-ce qu'on peut ajouter de ces mesures sans risquer de soumettre les
gains d'emploi des personnes à bas salaire ou en processus de
réintégration au marché du travail à un taux
marginal de taxation «confiscatoire»?
La perte des avantages sélectifs, conjuguée à
l'impôt qu'on aura à payer, n'annulerait-elle pas tout le profit
de chaque dollar supplémentaire gagné? L'Impact que pourrait
avoir une telle orientation sur la participation au marché du travail
des conjointes dans les familles pourrait aussi avoir des impacts lourds sur
les femmes conjointes dans les familles biparentales, et ceci nous
inquiète également. Ainsi, une étude sur la
fiscalité réalisée pour le compte de l'OCDE faisait
état de la sensibilité particulière de l'emploi des femmes
à cet égard. Il faut donc se préoccuper de la
cohérence globale du système et éviter que le cumul des
mesures sélectives qui, une à une, paraissent toutes
raisonnables, aient ensemble un impact global non souhaité.
Par ailleurs, en ce qui concerne les assurances sociales, on assiste
aussi à une certaine remise en question de régimes fondés
avant tout sur des droits individuels. Parce qu'ils sont un moyen efficace de
mettre en commun les risques, nous croyons qu'ils doivent être
préservés. Dans cette perspective, nous avons mal compris qu'on
ait ajouté au programme PRALMA un critère portant sur le revenu
familial. On a ainsi privé les travailleuses de la classe moyenne de
leur allocation de maternité. Il s'agit d'une entorse inadmissible
à un régime de remplacement d'un revenu de travail.
Les statistiques indiquent que le revenu de deux gagne-pain est devenu
nécessaire pour assurer la satisfaction et les besoins des
ménages, et que l'existence d'un seul revenu augmente de beaucoup les
risques de pauvreté. De plus, la vie familiale a changé.
L'entité stable qu'on se plaisait à voir autrement s'est
transformée en une réalité mouvante. Ne faut-il pas se
rappeler qu'un mariage sur deux se termine par un divorce? Il importe donc que
les politiques gouvernementales soient bien adaptées à ce
phénomène, et on ne peut impunément renvoyer tous les
individus à la seule solidarité familiale.
Enfin, il faut remarquer que certaines mesures qui, en soi, sont
formellement non discriminatoires lorsqu'on les examine dans leur
résultat, peuvent avoir des effets discriminatoires. Songeons, par
exemple, au crédit d'impôt pour personnes mariées, qui vise
officiellement indistinctement hommes et femmes, mais il était
réclamé par 93 % de contribuables masculins en 1990. Donc, un
crédit destiné au conjoint a des effets différents, alors,
qu'il paraît dans les faits. Donc, une révision de la
fiscalité devra en tenir compte.
Enfin, dans la conclusion du document sur les finances publiques, on
indique qu'on doit réévaluer le rôle de l'État. Il
ne faut pas oublier que le rôle de l'État évolue avec la
société, et comme nous l'avons déjà
souligné, nous ne pouvons pas revenir au temps où
c'étaient les familles et les communautés religieuses qui se
chargeaient d'une grande partie des soins et de l'éducation.
La société. En devenant plus complexe, l'État s'est
donné un pouvoir régulateur dans l'économie et le
marché du travail, et s'est préoccupé de Ia protection des
droits, rôle qu'il ne peut abandonner. En outre, certains
problèmes ont pris (Je l'ampleur, et do nouveaux besoins sont apparus,
obligeant l'État à élargir son champ d'action dans le
domaine du social, qu'il s'agisse des services de garde, de la médiation
familiale, de la perception des pensions alimentaires, de la violence, des
agressions sexuelles, du support aux familles, de la protection des enfants, du
soutien aux personnes âgées ou du retour aux études ou au
marché du travail.
Une fois déterminées les responsabilités que
l'État doit assumer, il n'est pas dit que l'État doive toujours
être le principal maître-d'oeuvre. Selon les circonstances, il
faudra chercher le lieu et l'intervenant le plus propice, et miser sur la
diversité. Mais quels que soient les choix qui seront retenus par
l'État, il ne faut pas oublier
que l'État doit exercer un rôle majeur au chapitre des
orientations, qu'il doit exercer un rôle majeur au chapitre de la
redistribution, et garantir, dans notre société,
l'établissement de la justice et de l'équité.
Je vous remercie. (15 h 40)
Le Président (M. Després): Mme Lavigne, merci pour
cette présentation.
Nous allons maintenant commencer l'échange avec les
parlementaires ministériels et de l'Opposition. Je vais d'abord passer
la parole à la ministre déléguée à la
Condition féminine.
Mme Trépanier: Merci, M. le Président.
Alors, j'aimerais souhaiter la plus cordiale des bienvenues au Conseil
du statut de la femme, un organisme qui a rendu des services inestimables au
gouvernement et à la société en général. Je
sais que, cette année, vous fêtez votre 20e anniversaire de
fondation. Alors, vous êtes les bienvenues à notre commission.
Je voudrais souligner la qualité de votre mémoire et la
rigueur intellectuelle de votre mémoire. Alors, je pense que tous les
membres de la commission seront unanimes à dire que c'est un travail de
très grande qualité.
Je remarque, d'entrée de jeu, que le Conseil est conscient et
soucieux des facteurs qui affectent les finances publiques, soit l'actuelle
récession, les dettes provinciales et fédérales, le
chômage qui persiste, le vieillissement de la population
également. Je remarque aussi que votre mémoire, et vous en
faisiez mention au début de votre présentation, que le Conseil ne
formulerait aucune recommandation directe au gouvernement quant aux
orientations qu'il doit privilégier à court et à moyen
terme sur l'évolution des dépenses publiques. Je reconnais bien
là votre sagesse proverbiale.
Vous vous attachez surtout, dans votre mémoire, à faire
valoir les préoccupations des femmes, et vous rappelez certains
principes d'orientation de société qui doivent animer les membres
de cette commission lors de leurs travaux. Entre autres, vous nous dites que le
développement économique est indissociable du
développement humain et social, ce à quoi je souscris
entièrement. Vous avez, comme deuxième principe, que le
Québec ne peut faire l'économie d'un État moderne et
développé, c'est-à-dire qui ne remet pas en question ses
objectifs de développement social, et ne confie pas au seul secteur
privé la responsabilité de créer tous les emplois
nécessaires. Vous nous donnez, en troisième principe, que les
femmes ont besoin de l'État pour aspirer à la pleine
réalisation de leur potentialité d'être humain, et je suis
totalement d'accord avec ça.
Vous identifiez trois considérations fondamentales devant guider
notre gouvernement dans les choix qu'il doit faire en matière
budgétaire et fiscale. Parmi ceux-ci, il y a la recon- naissance de la
responsabilité financière qu'entraînent les enfants. Je
vous dirai, à ce sujet, que, depuis 1986, un coup de barre important a
été donné dans ce domaine par notre gouvernement et dans
le domaine du soutien financier aux familles, et que cette aide versée
aux familles québécoises est passée, de 1985 à
1991, de 1 094 000 000 $ à 2 561 000 000 $, donc une augmentation de 130
%. Alors, en période budgé-taire difficile. Je pense qu'il faut
souligner, et c'est important de le souligner, l'effort considérable. Je
peux dire que c'est une preuve tangible que le gouvernement fait de la
politique familiale une de ses priorités, y fait une place
extrêmement importante.
Alors, si on revient plus spécifiquement à votre
mémoire, vous soulignez les missions importantes de l'État, soit
l'éducation et la formation, la sécurité sociale, la
culture et l'organisation sociosanitaire. La situation budgétaire
actuelle et prévisible amène le gouvernement à effectuer
des choix extrêmement difficiles, et nous ne voulons pas alourdir, de
façon irresponsable, le fardeau des générations qui vont
nous suivre et, comme ministre de la Famille, vous comprendrez que, pour moi,
c'est tout à fait primordial.
Alors, selon vous... J'aimerais vous poser la question suivante, une
question déchirante, vous me direz: Quels sont les domaines ou les
activités que l'État devrait confier, redonner au secteur public,
au secteur privé, je m'excuse, ou carrément abandonner? Est-ce
que vous pouvez donner des orientations un peu plus précises à ce
sujet-là?
Le Président (M. Després): Mme Lavigne.
Mme Lavigne: Oui, M. le Président.
Je vais amorcer une réponse, et je laisserai mes collègues
poursuivre. Si vous me permettez, Mme la ministre, je répondrais, dans
un premier temps, ce qui est de l'ordre de l'incontournable en matière
de mission de l'État... Il y a des éléments qui sont
incontournables, qui reposent sur l'ensemble de la sécurité des
individus: la santé, les services sociaux, l'éducation et la
sécurité sociale. Il s'agit d'éléments
incontournables et, là-dessus, l'État a des
responsabilités, de même que tout ce qui concerne
l'établissement de la justice et, aussi, de la protection des droits des
individus.
Alors, à cet égard, nous semble-t-il, il n'y a pas de
possibilité que l'État se déleste de ses
responsabilités. Il nous semblerait, par ailleurs, qu'il est
vraisemblablement, compte tenu du type de société dans laquelle
nous sommes, il est peu vraisemblable que nous puissions, comme
société, envisager que le secteur public se rapetisse, de
là à devenir un État minimal. C'est peu vraisemblable,
d'autant plus que nous sommes une société qui a une tradition
très poussée à cet égard, une société
qui est basée sur une très
forte solidarité sociale, une société qui,
historiquement, l'a toujours fait. alors, dans ce sens, il y a, bien sûr,
des choix à faire, de façon à répondre à de
nouveaux besoins, et la réflexion doit se faire dans la mesure où
on souhaite répondre à de nouveaux besoins. l'état ne doit
pas réduire pour réduire. il doit répondre do façon
à s'juster aux besoins changeants de la population. je pense que c'est
l'esprit dans lequel le conseil a travaillé.
Donc, pour ce qui est de réaménager - pour répondre
plus précisément à votre question - on irait davantage
dans le sens d'un secteur à privilégier, à
préserver. Par ailleurs, il y a des éléments, nous
semble-t-il, dans lesquels l'État devrait investir
particulièrement. C'est dans le sens de toute forme de politique
favorisant l'emploi, et c'est ce qui nous permettra, comme
société, nous semble-t-il, de sortir du type de problèmes
financiers dans lequel on se retrouve.
Je pourrais laisser, peut-être, Mme Tremblay poursuivre sur cette
question.
Mme Tremblay (Hélène): Je voudrais d'abord... On
s'était un petit peu préparées, on anticipait cette
question-là. Alors, un premier réflexe ou réflexion qui me
vient très naturellement, et que je ne peux pas éviter.
Je pense que, dans le moment, peut-être seulement une
équipe de fiscalistes au Conseil ou au ministère seraient
capables de répondre à votre question, parce qu'on vous a dit, au
début, que ce qui nous semble fondamental, de notre point de vue, de
l'extérieur, ce qui nous semble fondamental, c'est qu'une
révision va absolument devoir être parfaitement cohérente,
résulter d'une vision globale en fonction des priorités qu'on va
se donner et, ensuite, être appliquée de façon à ce
qu'il y ait une garantie d'équité horizontale et
d'équité verticale. Et on a tendance, entre nous, à
traduire ces deux termes d'équité là de façon
très simple pour qu'on les comprenne.
Deux couples qui gagnent tous les deux 70 000 $, on comprend très
bien - ou 60 000 $, peu importe - celui qui a des enfants devrait contribuer
moins que celui qui n'en a pas. Il me semble que ça, c'est un principe
qu'on veut absolument voir respecter. Par contre, les familles, lorsqu'elles
ont besoin de soutien, devraient être supportées de façon
claire aussi.
Donc, ça prend une vision cohérente. Quand on regarde
l'ensemble des mesures, c'est vrai qu'une mesure prise en soi peut avoir l'air
parfaitement justifiée, mais je ne pourrai pas me prononcer dessus, de
l'extérieur, comme néophyte, sans avoir une vision globale de
l'ensemble des mesures qui concourent aux mêmes objectifs et qui, parfois
même, ne semblent pas très logiques, mais poursuivent un objectif
à travers la fiscalité qui est louable, mais qui ne peut pas
être poursuivi simultanément
Ce que je veux dire, par exemple, c'est quand on pense, quand on vise la
redistribution des revenus, et qu'en même temps on cherche à
susciter l'emploi, ce n'est pas évident que les mesures vont toujours
être cohérentes les unes par rapport aux autres. Ces deux
objectifs-là ne sont pas toujours cohérents, conformes. Il va
falloir faire des compromis, bien souvent, dans les mesures
Donc, c'est très difficile de l'extérieur d'avoir une
réponse catégorique aux questions que vous posez. Mais ce que je
peux dire, l'impression que ça nous donne, c'est que, pour que la
réponse se fasse, et si on veut qu'elle soit cohérente, on
pourrait penser, naïvement, mais ça s'est déjà fait
à d'autres commissions, que la commission pourrait inviter, par exemple,
des experts qui viennent de tous les horizons, un certain nombre d'experts,
réfléchir pendant un certain nombre de jours sur un
renouvellement ou une révision de l'ensemble de la fiscalité du
gouvernement. Et, à partir de là, peut-être proposer des
scénarios qui, eux, pourraient être soumis. (15 h 50)
Moi, je pense aux grands acteurs du développement
économique et social du Québec, c'est-à-dire que la
solution, vu que le système est extrêmement complexe, on ne pense
pas qu'elle va venir de réglementations ou de macropositions, mais
qu'elle va venir davantage de micropositions, c'est-à-dire à
l'échelle plus locale, plus au niveau de l'entreprise et avec les trois
acteurs présents. C'est vrai que c'est un discours qui est courant, mais
la commission parlementaire, naturellement, la tendance a été de
venir, remarquez, depuis le début... Le patronat est venu. Le syndicat
est venu. C'est un modèle qu'on ne trouve peut-être pas
très porteur pour trouver les solutions que vous souhaitez quasiment
miraculeuses.
Quand je dis que ça prend des microsolutions, je vais juste vous
donner un petit exemple. C'est qu'un centre hospitalier de soins
prolongés, que je connais, a réussi, avec la pharmacie du centre,
à réduire ses coûts de médicaments de moitié,
mais ça ne se serait jamais fait par une réglementation. C'est
l'équipe à la pharmacie qui a décidé d'en faire une
priorité, et qui a vraiment géré la distribution des
médicaments, mais on ne pourra pas le faire, ni par une mesure
générale, ni par un règlement.
Par contre, Mme Lavigne abordait la question de la politique pour
favoriser l'emploi. Je pense que, vous-même, dans votre document, vous
ouvrez quelques pistes quand vous posez votre question, quelques pistes de
solution. Entre autres, vous nous montrez que la contribution des entreprises
du secteur privé à la formation et au perfectionnement de leur
main-d'oeuvre, on est loin du compte quand on se compare aux autres pays. Donc,
ça fait allusion à un partage des coûts d'un certain nombre
de services publics je poux parler de l'éducation qui
sont, effectivement, souhaitables. Je pense qu'on va en venir, avec le
secteur privé, à les associer directement à la formation
et au perfectionnement de leur personnel, et on peut penser que ça va
avoir plusieurs retombées positives au-delà du coût que
l'entreprise aura à supporter.
Ensuite, on avait aussi pensé à des mesures auxquelles
vous avez sûrement pensé, ou que vous avez entendues depuis le
début, mais c'est partiel. Ça ne relève pas d'une vision
globale. Il y a, par exemple, la décentralisation des programmes,
lorsqu'on pense à faire offrir les programmes par l'organisme,
l'organisation ou le palier de gouvernement le plus près de la
population concernée par le programme, et en même temps lui
confier les bases fiscales nécessaires. C'est une loi, je pense,
économique assez courante, que les programmes vont être beaucoup
mieux gérés s'ils sont gérés près de la
population qui est desservie.
Aussi, on avait suggéré, au moment de notre
réflexion, toute la question qui a déjà été
abordée et, en partie, acceptée, de ce qu'on appelle les guichets
uniques, pour éviter ce qui nous semble être assez
régulièrement, de notre point de vue, des dédoublements ou
des chevauchements, pas juste entre paliers de gouvernement, mais aussi entre
ministères ou entre établissements. Je peux penser, dans mon
secteur personnel, que, dans le système d'éducation,
effectivement, il y a des programmes de formation qui se donnent au
cégep et même parfois au secondaire et à
l'université. Ce n'est pas toujours une concurrence qui est saine, utile
ou nécessaire pour la qualité des programmes de formation
donnés, mais je pourrais donner plusieurs autres exemples qui montrent
qu'il n'est pas évident, par exemple, qu'entre établissements ou
entre ministères, on va vraiment se concerter pour éviter des
dédoublements inutiles. Permettez-moi un petit exemple cocasse:
ça a été celui des photos sur les cartes
d'assurance-maladie et les permis de conduire.
Alors, pour moi, ça va.
Mme Trépanier: On peut peut-être s'entendre sur le
fait que d'atteindre un parfait équilibre entre la responsabilité
sociale, gouvernementale et l'équilibre des finances publiques, ce n'est
pas une mince tâche, et que nous aurons des choix à faire, qui ne
seront pas faciles à faire.
Alors, M. le Président, je vais céder la parole pour
revenir un peu plus tard.
Le Président (M. Després): Oui, Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président.
Ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue au nom de notre
groupe parlementaire. Je voulais vous remercier aussi pour la qualité de
votre mémoire et pour un certain nombre de réflexions que vous y
faites, et qui sont bien importantes, à mon point de vue, parce que
c'est le coeur du débat en ce qui concerne les politiques sociales.
C'est celui de la solidarité sociale entre les jeunes et les personnes
âgées, entre les couples qui ont des familles et ceux qui n'en ont
pas. Je pense que vous le campez bien, et je voudrais vous amener un petit peu
sur ça.
Dans un premier temps, au chapitre 2, à la page 7 de votre
document, vous rappelez que «nos gouvernants doivent [...] s'attacher
à ce que le poids des taxes et impôts soit réparti entre
les particuliers selon une structure globalement progressive selon le
revenu». On s'entend que cela veut dire que plus on a des ressources,
donc plus on a un revenu élevé, plus on devrait contribuer
proportionnellement et un peu plus aux services collectifs que l'on se donne et
inversement, si on a moins de ressources, évidemment, on devrait moins
contribuer.
Ce qu'on a constaté en écoutant des présentations
qui nous ont été faites, particulièrement cette semaine,
c'est que les changements dans les taux marginaux maximum comme dans la
nomenclature des taux, c'est-à-dire qu'auparavant on avait cinq ou six
échelons, on a ramené ça à trois échelons de
taux. On a constaté qu'on avait diminué la progressivité
de l'imposition sur le revenu, c'est-à-dire que les hauts revenus paient
moins, toute proportion gardée, qu'ils ne payaient par le passé
dans notre système fiscal actuel. Alors, je trouvais ça heureux
que vous le rementionniez ici. On n'en a pas beaucoup débattu à
la commission, mais ce que vous craignez est déjà un fait par
rapport aux derniers budgets - quand je dis aux derniers, là, je ne dis
pas à «le» dernier, mais «aux» - aux quelques
derniers budgets qui ont été prononcés par le ministre des
Finances.
Alors, ça, c'est inquiétant parce qu'on sait qu'une fois
que c'est imprégné dans un système, que c'est
intégré dans un système, ça risque de s'amplifier.
Je suis heureuse que vous souligniez cet aspect-là pour que l'on reste
vigilant, et j'espère même qu'on remodifie cette courbe qui
pourrait devenir encore plus, c'est-à-dire créer, poser un poids
encore plus grand sur les bas revenus et un poids moins grand sur les hauts
revenus.
Maintenant, moi, je veux revenir à la page 9. Ce que vous nous
dites, c'est qu'il y a eu une réforme au fédéral, qui va
à rencontre d'un certain nombre de principes d'équité,
soit l'équité, entre autres, horizontale. Et là, vous
expliquez bien qu'il y a une redistribution qui doit se faire entre les
familles, c'est-à-dire entre les familles, mais entre les gens qui sont
sans enfants, mais qui doivent participer aussi de par leur contribution aux
impôts, qui doivent participer à l'espèce de redistribution
qu'on fait auprès des gens qui ont des enfants. Je cite la
dernière phrase, et j'aimerais vous entendre un petit peu
là-dessus, parce que je crois - et je
reviens à ce que je disais tout à l'heure - que c'est le
coeur de nos débats. Le risque qu'il y a à vouloir confronter les
uns aux autres, c'est-à-dire - et je reviens à ce que je disais:
Regardez, personnes âgées, vous accaparez une trop grande partie
du budget ou des prestations sociales. Vous entachez l'avenir, les jeunes
seront donc mal pris et devront éventuellement supporter un fardeau trop
lourd. De la même façon, aux familles, on risque de faire subir la
même chose, et vous dites: «En effet, la classe moyenne
conti-nuera-t-elle de soutenir volontiers des programmes destinés
à la famille si leurs enfants en sont totalement exclus?»
Là, j'aimerais ça que vous me parliez un petit peu de
cette réflexion-là que vous avez faite au Conseil et qui
réfère à l'équité verticale et horizontale
aussi.
Le Président (M. Després): Mme Lavigne.
Mme Lavigne: Oui, je vais laisser la parole à Mme Lepage
sur cette question.
Mme Lepage (Francine): Dans notre document, justement, on faisait
état des nouvelles orientations données à la politique
familiale par le gouvernement fédéral, et on souhaitait que le
Québec ne suive pas la même orientation. Heureusement, dans le
dernier discours sur le budget, le ministre des Finances nous a assurées
qu'il continuerait à garder le cap sur un soutien universel,
c'est-à-dire un soutien horizontal aux familles et un soutien vertical
aux familles qui en ont le plus besoin.
Alors, on pense que cet équilibre-là, il est important
d'être conservé, parce que, comme on l'a dit, c'est important
qu'on reconnaisse la responsabilité financière que supporte
chacune des familles. On est conscient aussi qu'il faut aider davantage les
familles à faibles revenus. Donc, notre prise de position, c'est pour
souhaiter qu'à la faveur des prises de décisions qui devront
être faites on ne revienne pas sur ces principes-là, parce que,
comme on l'a souligné, il y a des écueils aussi... il y aurait
des écueils à faire une protection sociale qui serait seulement
destinée aux bas revenus.
Mme Marois: Parlez-m'en, de ces écueils-là, parce
que je pense que c'est ça qui est en jeu, actuellement. (16 heures)
Mme Lepage: Alors, bon, ça irait contre le principe
d'équité horizontale, on l'a dit, mais, plus que ça,
ça risquerait d'avoir des effets par rapport aux faibles revenus
eux-mêmes, et par rapport aux femmes dans les familles à deux
conjoints.
Par rapport aux familles à faibles revenus, on sait qu'il y a eu
des efforts qui ont été entrepris dernièrement pour qu'on
garde une certaine incitation à l'autonomie économique.
Donc, on a réaménagé les mesures pour que, d'aller
gagner un revenu soi-même sur le marché du travail, ça
reste avantageux. Si jamais on enlevait toutes les protections universelles,
c'est-à-dire qui vont à tous, pour simplement faire des mesures
qui soient sélectives selon le revenu familial, alors là, on
risquerait de garder ces gens-là, de les emprisonner dans ce qu'on
appelle le piège de la pauvreté. Dès qu'on irait chercher
1 $ de plus, on perdrait tous les avantages qui sont sélectifs selon le
revenu, et, donc, il n'y aurait aucun avantage à aller chercher
soi-même son revenu, et on nuirait à l'autonomie de ces
personnes-là. Je pense que ce n'est pas le principe, l'orientation qu'on
doit prendre.
Deuxièmement, le même effet peut aussi se produire pour les
femmes dans les familles à deux gagne-pain, parce que là encore
la famille à deux gagne-pain pourrait ne pas avoir droit à ces
mesures-là, et c'est seulement les familles à plus faibles
revenus qui auraient accès aux mesures sélectives. Donc,
ça désinciterait les femmes au marché du travail et
ça n'inciterait pas celles qui sont dans la famille à aller se
chercher un revenu par l'emploi parce que, quand il y aurait augmentation du
revenu de la femme, il y aurait perte d'avantages importants pour la famille,
donc pas de gains nets en vue
Je pense qu'il est important d'avoir une vue à long terme par
rapport à ça. On sait qu'en 1990 l'indice nous indiquait qu'il y
avait un mariage sur deux qui finissait par un divorce. Je pense qu'au nom de
l'autonomie des personnes et au nom aussi de l'ensemble de la
société, on ne peut pas se permettre de désinciter les
personnes au marché du travail. C'est une perte et pour l'individu et
pour toute la société qui devra soutenir ces personnes-là
après, en cas de divorce ou une fois que ces personnes-là seront
âgées.
Mme Marois: Oui. Je trouve ça très
intéressant, mais j'aimerais que vous me parliez un petit peu de cette
désolidarisation. Je ne sais pas si la présidente veut aborder
cette question-là, à laquelle on risque d'être
confronté si, effectivement, on devient très sélectif et
que certaines familles de revenus moyens - parce que c'est ça qui arrive
au fédéral actuellement, on s'entend, c'est devenu très
sélectif comme mesures -sentent qu'elles sont pressurisées pour
contribuer, mais jamais elles ne sont reconnues, même si elles sont de
classe moyenne, pour le fait qu'elles aient à assumer des enfants et
qu'elles jouent par là... Non seulement elles assument leur rôle
parental, mais elles jouent un rôle social, et ça a un effet, je
dirais, de faire en sorte que les familles s'opposent les unes aux autres, et
qu'on ne soit plus d'accord avec le contrat social qu'on a passé depuis
un bon nombre d'années. J'aimerais que vous m'apportiez quelques
réflexions sur ce volet-là.
Mme Lavigne: C'est ça. Si vous me permettez, dans un
premier temps, je pense qu'il y a des choses qu'il faut replacer, notamment
l'idée d'un État-providence qui nous aurait tout donné
sans qu'on l'ait mérité. Et là-dessus, je pense que, comme
société, on les paie, ces services, on les a payés,
ça ne vient pas d'en haut sans que des citoyens les aient payés.
À cet égard-là, c'est à la suite d'un contrat
social qui s'est bâti au cours des 30 derniers années, mais qui
venait d'un ancien contrat social qu'on avait, parce que chacun on avait, dans
nos familles, ou une tante ou un grand-mère ou une cousine qui
s'occupait des enfants, ou quelqu'un qui était dans une
communauté religieuse qui s'en occupait, et ça se faisait
gratuitement. On a voulu continuer à se donner ces services-là,
et il a fallu les payer, parce que la société avait
changé. Donc, on est dans un continuum de solidarité, et ces
choses-là, ces services, on se les donne comme société et,
bien sûr, ils ne sont pas gratuits.
Là, on se retrouve dans une situation où on oublie
parfois, me semble-t-il, que nous sommes tous des êtres humains à
risque, éventuellement. On est tous des populations à risque.
Lorsqu'on est enfant, on ne contribue pas à l'impôt. On ne
contribue pas non plus tant qu'on n'est pas entré sur le marché
du travail. On est à risque si on a un accident de travail, on est
à risque lorsqu'on a une maladie, lorsqu'on a un accident de voiture,
lorsqu'on vieillit, lorsqu'on se retrouve en chômage temporaire. Nous
avons tous besoin, un jour ou l'autre, du soutien du voisin ou de la voisine.
Et, à cet égard-là, de développer un discours comme
on dit aujourd'hui, à savoir qu'on paie trop, c'est oublier que, dans
les faits, cet argent et ces transferts de l'État nous servent tous l'un
et l'autre d'une certaine façon. Quand on roule sur une autoroute,
ça nous sert tous d'une façon, et l'autoroute ne pousse pas toute
seule. Dans ce sens-là, un discours qui dit: On paie trop, c'est oublier
qu'effectivement nous avons des services que nous payons.
Par ailleurs, il faut faire attention qu'il y ait toujours effectivement
une visibilité et qu'on ne brise pas ce type de solidarité en
excluant, dans les faits, presque toute la population et en rompant une
espèce d'équilibre, l'équilibre horizontal. Quand on parle
des familles, quand on dit que la dernière mesure du gouvernement
fédéral portant sur la prestation fiscale est une mesure qui a
complètement rompu la solidarité, on sait qu'en 1990 le revenu
moyen d'une famille où les deux conjoints travaillent et où il y
a deux enfants est un revenu moyen de 62 800 $. Or, au Québec, cette
année, si on a un revenu qui dépasse 63 000 $, on ne touche plus
de montant. Donc, on n'a plus aucun soutien. Ce qui veut dire que la famille
voisine où il n'y a pas d'enfants, qui touche le même revenu, elle
a, finalement, davantage de revenus disponibles et aussi de revenus disponibles
pour l'épargne, etc. Et ce type de situation fait en sorte qu'on n'est
même plus face à une mesure qui soutient uniquement les personnes
les plus pauvres, mais une mesure qui brise la solidarité des classes
moyennes qui sont, finalement, le plus grand bassin de payeurs de taxes.
Donc, je pense que ce qui est important, quand on s'enligne dans une
réflexion, je pense que le message qu'on veut passer, c'est que la
réflexion qu'on doit faire actuellement sur l'ensemble des finances
publiques ne peut pas faire l'économie d'une réflexion sur la
fiscalité. Ce n'est pas parce qu'on a établi des principes, il y
a 10 ans, que ces principes n'ont pas besoin d'être
réévalués, d'être révisés. La
population change, les besoins changent, les profils de population changent.
Des fois, il y a des expériences qu'on fait, il y a des mesures qu'on
pense qui vont être productives en termes d'emploi qui ne donnent pas les
résultats escomptés et il faut à mesure
réévaluer le poids relatif de chacun.
Alors, ce qu'on dit, c'est qu'un exercice sur les finances publiques qui
négligerait un regard sur la fiscalité et négligerait une
approche qui viserait à maintenir des principes d'équité
horizontale et verticale ferait en sorte qu'on ne recréerait pas la
confiance absolument nécessaire que doivent avoir les citoyens et les
citoyennes face à un système. Il y a des principes qui peuvent
être énoncés clairement, qui doivent être
énoncés clairement.
Si chacun des Québécois et chacune des
Québécoises est conscient qu'on doit effectivement faire
attention, vivre selon nos moyens, il faut savoir pour qui et être
sûr que tout le monde fasse sa part et être sûr qu'un jour,
si on est dans le besoin, on va se retrouver avec effectivement un support.
Sauf que là, dans le moment, on est dans une période de
règles qui changent, qui changent très fréquemment, que ce
soit à un niveau ou l'autre de gouvernement, et qui font en sorte que la
confiance dans les règles est en train de s'effriter. Et, dans ce
sens-là, c'est extrêmement important qu'on recrée, en ayant
une réflexion plus large, un consensus social parce que, d'une
façon ou d'une autre, on a tous besoin d'une solidarité
collective qui, que voulez-vous, se traduit via les finances de l'État,
mais c'est la façon qu'on a dans nos sociétés de traduire
cette solidarité collective.
Mme Marois: Je vous remercie beaucoup de vos remarques, parce que
je pense que c'est vraiment le fond du débat auquel on est
confronté, et je soulignerai, pour les membres de la commission, que,
malheureusement, je crois que les outils que le gouvernement nous a fournis ne
nous permettent pas de faire des évaluations fines de ce que
soulève la présidente du Conseil du statut de la femme,
particulièrement en matière fiscale.
J'ai terminé. Ma collègue reviendra plus tard.
Le Président (M. Despres): Merci. Mme la ministre de la
Condition féminine.
Mme Trépanier: Alors, j'ai remarqué avec beaucoup
de plaisir que vous vous êtes attardées, dans votre
mémoire, de façon assez importante, à la
problématique des femmes responsables de famille monoparentale. Vous lui
avez accordé beaucoup d'attention, et je pense que c'est absolument
capital qu'on le fasse. (16 h 10)
Dans le deuxième plan d'action famille, le gouvernement s'est
engagé à présenter un plan d'action pour les familles
monoparentales recevant des prestations de sécurité de revenu et,
à mon avis, la finalité d'un tel plan d'action doit être,
avant tout, l'autonomie financière de ces femmes-là et la rupture
de leur lien de dépendance, d'une part, avec l'État et, d'autre
part, avec un hypothétique conjoint, sans toutefois nier la
responsabilité d'un conjoint absent à l'égard de ses
enfants. J'aurais aimé que, dans votre mémoire, vous soyez
allées un peu plus loin.
Est-ce que vous pourriez nous dire quel type d'intervention
l'État doit privilégier afin de permettre à ces femmes
d'atteindre cet objectif d'autonomie et d'indépendance?
Mme Lavigne: II s'agit de...
Le Président (M. Després): Mme Lavigne.
Mme Lavigne: Mes collègues compléteront
probablement, là. Il s'agit, je pense, d'un problème à
multiples ramifications. La situation est claire et bien documentée. Il
s'agit d'une situation, on le sait, absolument tragique. Dans le moment, 18 %
des familles québécoises sont des familles monoparentales, des
familles québécoises avec enfant, et, là-dessus, 52 % de
ces familles-là, c'est-à-dire une sur deux, se retrouvent
à l'aide sociale, et ceci à cause de multiples raisons. Il y a
des raisons qui peuvent être liées à une série
d'éléments fiscaux qui font en sorte que les femmes, touchant
toujours en moyenne 65 % du salaire des hommes, se retrouvent finalement avec
des revenus qui ne leur permettent pas de soutenir des enfants. Donc,
évidemment, si on ne veut pas qu'une partie importante des enfants du
Québec vivent dans la pauvreté, ces enfants-là qui doivent
être élevés par des mères, ils doivent compter sur
des mères qui ont des revenus décents et, à cet
égard-là, les politiques liées à une
restructuration du marché du travail par rapport à la condition
économique des femmes font partie des éléments de la
solution.
Il y a d'autres éléments qui sont davantage liés
à toute l'obligation de faire en sorte que les parents respectent les
obligations liées par In Code civil Or, on sait qu'il y a un très
grave problème de perception des pensions alimentaires dans le moment au
Québec. Ce problème-là est là et, jusqu'à un
certain point, il y avait moyen de le régler en partie, mais nous
attendons toujours un certain nombre de modifications qui sont prévues
depuis 1988 à cet égard pour améliorer la perception des
pensions alimentaires. Il s'agit d'un élément important.
Par ailleurs, en matière fiscale, les derniers
réaménagements fiscaux font en sorte que la fiscalité
apparaît très peu généreuse par rapport aux femmes
chef de famille monoparentale ou à l'homme chef de famille, mais,
lorsqu'on est dans une situation de monoparentalité, la fiscalité
est mai adaptée à cette situation et aux responsabilités.
Mais il n'en demeure pas moins qu'il sera toujours difficile, quelles que
soient les mesures que l'État va prendre...
Il y a un calcul économique simple et bébête: deux
salaires c'est plus qu'un salaire. Bon. En ce sens-là, il est sûr
qu'on assiste toujours à une certaine diminution du revenu d'une
famille, mais, ce qui est par ailleurs important, c'est de faire en sorte que
le soutien aux enfants et les responsabilités restent, et d'avoir des
mesures qui n'incitent pas les femmes à se retrouver dans une situation
de dépendance, mais de l'aide sociale cette fois-ci.
Je pourrais peut-être laisser Mme Lepage aller plus dans le
détail.
Le Président (M. Després): Oui. Mme Lepage.
Mme Lepage: Oui. Peut-être qu'on peut distinguer aussi
entre celles qui sont sur l'aide sociale et celles qui sont sur le
marché du travail.
Alors, c'est sûr que, sur l'aide sociale, les femmes responsables
de famille monoparentale doivent être encouragées, dans la mesure
du possible, à recouvrer leur autonomie économique. Donc, il ne
faut pas ménager toutes les mesures de soutien dans ce
sens-là.
Par rapport aux jeunes, on sait, à l'heure actuelle, qu'on a
donné un statut de non disponibles aux femmes responsables de famille
qui avaient des jeunes enfants de moins de six ans. Alors, est-ce que ces
femmes-là devraient quand même être incitées à
suivre des cours de formation tout en gardant leurs prestations un peu plus
élevées parce qu'elles soignent des jeunes enfants? Ce serait
à penser. Peut-être qu'il peut y avoir un tort de les couper d'une
formation et il peut être difficile pour elles d'attendre que leurs
enfants aient six ans pour reprendre des cours de formation, par exemple.
Ensuite, à l'heure actuelle, on sait que toute pension
alimentaire versée aux femmes responsables de famille monoparentale est
réduite de 100 %, l'aide sociale reçue est réduite de 100
% de la pension Alors, est-ce qu'on ne pourrait pas inciter, au versement des
pensions alimentaires, en taisant que la femme conserve
une partie de sa pension alimentaire?
La règle du partage du logement aussi. On s'interroge un peu par
rapport à ça. Quand il y a des jeunes enfants en présence,
est-ce qu'il n'y a pas une espèce de partage des responsabilités
d'entraide qui vient quand on vit, par exemple, à deux familles
monoparentales? Est-ce qu'on ne devrait pas penser à ne pas imposer
à ces familles la règle du partage du logement? C'est des
questions qu'on se pose.
Par rapport aux femmes au travail, comme l'a dit Mme Lavigne, lors de la
réforme fiscale qui date de quelques années, on a changé
l'exemption équivalente de personne mariée dont
bénéficiait un chef de famille monoparentale pour le premier
enfant. On a changé ça en deux crédits d'impôt qui
sont plus faibles, en fait: crédit pour personnes habitant seules et
crédit pour familles monoparentales. Ces deux crédits-là
totalisont 470 $ Donc, c'est faible comme ré duction d'impôt qu'on
peut donner à ces familles-là comme reconnaissance qu'elles ont
des coûts peut-être plus lourds à assumer. Ça, c'est
au niveau de la fiscalité.
Sur le plan de la fiscalité, on s'interroge aussi sur le
caractère imposable de la pension alimentaire. Est-ce que la femme
devrait être imposée sur la pension alimentaire qu'elle
reçoit? Est-ce que la fixation des pensions alimentaires tient bien
compte du fait que le mari - c'est-à-dire que, ordinairement, c'est le
conjoint, le payeur de pension alimentaire - peut déduire sa pension
alimentaire versée de ses revenus alors que c'est imposable pour l'autre
personne?
Alors, c'est tout un ensemble de questions comme ça qu'il
faudrait considérer.
Mme Trépanier: II ne nous reste malheureusement plus de
temps. Alors, je voudrais vous remercier pour cette brillante
présentation, vous remercier pour ces suggestions également et
vous souhaiter un bon anniversaire.
Le Président (M. Després): Merci, Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine.
Je voudrais passer la parole à Mme la députée des
Chutes-de-la-Chaudière.
Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie, M. le
Président.
Effectivement, je pense que c'est un bon mémoire. C'est un
mémoire qui est à l'image des mémoires qui sont
habituellement présentés par le Conseil du statut de la femme. On
y retrouve une certaine rigueur, effectivement, compte tenu des dossiers que
vous défendez. Il y a une constance, en tout cas: la défense des
services, le maintien des acquis, un vibrant plaidoyer en faveur du maintien de
l'universalité. Je pense que c'est des positions connues et qu'on
apprécie beaucoup de la part du Conseil du statut de la femme.
En début d'exposé, vous nous disiez que vous n'aviez pas
l'intention de nous dire où sabrer dans les services. Et
là-dessus, effectivement, je pense que vous avez tout à fait
raison. Comme la ministre, je peux dire que, oui, on reconnaît votre
sagesse proverbiale. Par ailleurs, je m'attendais à retrouver
peut-être un petit peu plus de choses concrètes, de moyens
concrets: Où couper dans les dépenses publiques? Il n'y a pas
seulement au niveau des services. Il y a un éventail de
possibilités. Il y a eu des mesures. On vient d'en
énumérer quelque-unes un petit peu plus concrètes.
Le Conseil du statut de la femme a déjà fait des choix et
s'est déjà prononcé quand même de façon assez
précise. Je fais référence, ici, aux travaux de la
commission Bélanger-Campeau, entre autres, où, très
clairement - je me permets de vous citer, parce que j'avais trouvé
ça très bien et je trouvais ça important que ce soit
répété - vous aviez dit. à ce moment là:
« dans un contexte de réduction du déficit et de
rationalisation des dépenses, le Conseil croit qu'il vaudrait mieux
réduire les coûts inhérents à des interventions
concurrentes plutôt que de diminuer les services aux citoyennes et aux
citoyens.»
Et là, c'est dans le chapitre où vous parliez longuement
des chevauchements et des dédoublements. C'en est un, moyen. Et,
franchement, je dois dire que je m'attendais à retrouver des
éléments de ce genre-là dans votre mémoire.
J'aimerais que vous m'expliquiez comment ça se fait qu'on ne retrouve
pas les choix, ces choix-là qui ont déjà été
effectués par le Conseil? (16 h 20)
Mme Lavigne: Vous comprendrez que notre mémoire a
été écrit au moment où le document - comme tout le
monde d'ailleurs - du gouvernement n'avait pas été publié,
ce qui fait que ce qui était annoncé comme commission ne
s'enlignait pas sur des éléments aussi concrets.
Néanmoins, en ce qui concerne toute la question, vous avez tout à
fait raison, et c'est une position que le Conseil a prise, et, je pense, qu'il
peut réitérer sans aucun problème dans la mesure où
une des façons de réduire les dépenses est effectivement
de travailler à éliminer tout ce qui est chevauchements et
dédoublements. Et les chevauchements et dédoublements, on les
connaît, qu'il s'agisse de soutien aux familles ou de formation
professionnelle, mais ils existent aussi, au Québec, à
l'intérieur de l'appareil gouvernemental lui-même, et aussi
à l'intérieur des réseaux.
Tout à l'heure, Mme Tremblay faisait allusion à des
chevauchements possibles à l'intérieur du réseau de
l'éducation, à l'intérieur des différents niveaux,
où il est extrêmement important que, comme société,
on se donne des objectifs de rationalité. Avec la dévolution d'un
certain nombre de pouvoirs aux municipalités, il va aussi être
important, en région, de faire en sorte qu'on n'ait pas de
dédoublements entre municipalités,
municipalités-gouvernement du Québec.
Alors, cette question de dédoublements qu'on soulignait il y a
quelque temps lors de cette commission-là se vit aussi à
différents niveaux, autant à l'intérieur de l'appareil
qu'ailleurs. Et il va de soi que la reconnaissance que nous faisons: il y a de
la place à une rationalisation et à une réflexion, et,
dans ce sens-là, si nous nous enlignons, comme Mme Tremblay le
mentionnait tout à l'heure, sur un rapprochement des lieux
décisionnels du lieu où le service est rendu, on pourra, tout en
maintenant de façon très claire des objectifs
d'équité à l'échelle du Québec, être
capables de réaliser les rationalisations. Mais il y a effectivement une
place à une rationalisation, et ça fait partie, nous semble-t-il,
du processus plus large de rationalisation de l'ensemble de la prestation de
services qu'on a au Québec dans le moment.
Est-ce que vous voulez rajouter à ça?
Mme Tremblay: Pas là-dessus directement, mais puisque
ça achève, je pense qu'il est important, pour chacun des acteurs,
d'être convaincu qu'on a confiance dans nos partenaires, si j'ai
peut-être un petit message à laisser. Quand Mme Marois,
tantôt, présentait la situation des familles à hauts
revenus ou des personnes seules à hauts revenus, je le sais qu'on a
réduit la progressivité de la tarification des tables
d'imposition parce qu'on voulait rester compétitifs, on voulait
éviter que les Québécois quittent le Québec et s'en
aillent dans une autre province ou un autre pays, avec la concurrence, la
mondialisation. Ensuite, on sait aussi que c'est les gens riches qui
contribuent à l'investissement pour le développement
économique.
Voyez, tantôt, quand je parlais de cohérence de nos
objectifs ou de compromis à faire, c'est un peu à ça aussi
à quoi je faisais référence. Mais je voudrais quand
même dire que ce n'est pas vrai. Je pense que tous, on est prêts
à faire des efforts, et je dirais même des sacrifices. Je pense
qu'un couple riche, au Québec, serait prêt à payer un peu
plus que dans une autre province sans partir. Il va falloir faire attention,
évidemment. Il y a des limites à cette loi-là, et elle
n'est pas parfaitement incontournable. Mais on va être prêt
à faire un effort si on est convaincu que le projet de
société ou le contrat social est perçu comme
équitable.
C'est aussi à ça que ça me faisait penser
tantôt, les familles dans la classe des revenus moyens. Ce n'est pas
évident qu'on est prêt à contribuer quand on a l'impression
que nos vis-à-vis ne sont pas fiables, ne vont pas utiliser notre effort
aux meilleures fins possible. Permettez-moi de le dire, on n'a pas envie
d'être les premiers à sacrifier, quand on n'est pas sûr que
le revenu supplémentaire qu'on va donner à qui que ce soit va
être utilisé aux meilleures fins possible, pour les gens, par
exemple, qui en ont l(% plus besoin, pour l'ensemble dos principes
qu'on...
Le Président (M. Després): En conclusion... Mme
Tremblay: ...respecte ensemble.
Le Président (M. Després): Merci beaucoup, Mme
Tremblay.
Malheureusement, Mme la députée, il ne reste plus de temps
disponible.
J'aimerais remercier, au nom des membres de cette commission, les gens
du Conseil du statut de la femme.
Nous allons suspendre deux minutes, pour recevoir maintenant
l'Association féminine d'éducation et d'action sociale.
(Suspension de la séance à 16 h 24)
(Reprise à 16 h 27)
Le Président (M. Després): Je voudrais, au nom des
membres de la commission, vous souhaiter la bienvenue et vous dire,
d'entrée de jeu, que nous avons une heure à notre disposition.
Vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire. Et
une période maximum de 20 minutes qui sera partagée de part et
d'autre entre les députés ministériels et ceux de
l'Opposition pour pouvoir échanger avec vous.
Donc, je demanderais à la responsable de se présenter et
de présenter les gens qui l'accompagnent, après quoi je vous
laisse la parole pour débuter la présentation de votre
mémoire.
Association féminine d'éducation et
d'action sociale (AFEAS)
Mme Nadeau-Martin (Jacqueline): M. le Président, Mme la
ministre déléguée à la Condition féminine et
responsable de la Famille, les membres de la commission, bonjour.
Alors, je vais vous présenter à mon extrême gauche,
Mme Cécile Therrien, qui a été membre d'un comité
spécial à l'Association féminine d'éducation et
d'action sociale, pour étudier le financement public; Mme Huguette
Marcoux, qui est conseillère aussi à l'Association
féminine d'éducation et d'action sociale, qui était aussi
sur le comité spécial; et Jacqueline Nadeau-Martin,
présidente de l'AFEAS.
Alors, fondée en 1966, l'Association féminine
d'éducation et d'action sociale - l'AFEAS -regroupe 25 000 membres
répartis en 550 groupes locaux à travers le Québec. Depuis
sa fondation, l'AFEAS est fidèle à sa mission d'améliorer
la condition de vie des femmes. L'AFEAS poursuit sans relâche son action
de sensibilisation et d'éducation et fournit à ses membres les
ressources nécessaires à leur engagement dans leurs milieux
respectifs. De plus, l'Association pilote de grands dossiers, reflets des
réalités sociales québécoises Elle intervient
régulièrement auprès des autres partenaires sociaux et
participe aux
consultations publiques présentant des enjeux pour les
femmes.
Il va sans dire que nous nous sentons grandement concernées par
la présente consultation sur le financement des services publics au
Québec, et ce, même si nous ne sommes pas des spécialistes
en économie ni en fiscalité. L'expression «gérer en
bon père de famille» nous vient spontanément à
l'esprit. Peut-être désuète aujourd'hui, elle évoque
pourtant le gros bon sens que nous souhaiterions pour la gestion des services
publics.
Si les membres de notre Association, en large majorité
mères de famille, géraient leur budget familial à l'image
de leurs dirigeants politiques, il y a fort à parier que le taux de
faillite personnelle serait encore plus élevé qu'il ne l'est
actuellement au Québec. Notre Association souhaite, au nom de ses 25 000
membres, qu'une volonté réelle de répondre aux besoins de
la population québécoise motive la présente consultation.
Alors, nous espérons que les commentaires et recommandations que nous
formulons seront écoutés et tenus en compte dans les
décisions qui découleront des présentes audiences.
Malgré la complexité des sujets traités, les
dépenses gouvernementales, la fiscalité, le déficit, les
besoins financiers et la dette, l'Association féminine
d'éducation et d'action sociale tient à exprimer son point de vue
sur certains aspects de ces questions. Notre réflexion s'appuie sur les
prises de position de l'ensemble de nos 25 000 membres. Elles reflètent
leurs préoccupations, celles de femmes impliquées dans leurs
milieux respectifs, attentives et sensibles aux problèmes sociaux. Nos
recommandations sont formulées pour améliorer les conditions de
vie des femmes, de la famille et de la société. (16 h 30)
Nos membres acceptent mal le désengagement réel et
progressif de l'État vis-à-vis sa population. Elles admettent de
plus en plus difficilement de ne pas obtenir de réponse à leurs
demandes. Les crises économiques ont bon dos pour expliquer l'inertie de
nos gouvernants. Les périodes fastes n'apportaient pas non plus les
mesures souhaitées. Les rapports annuels du Vérificateur nous
font frémir et nous convainquent surtout que si les dépenses
doivent être réduites, les cibles pour le faire sont souvent mal
choisies.
Alors, le présent mémoire déposé aux membres
de la commission porte sur des choix politiques, la condition féminine
et la politique familiale. Amnistie fiscale pour des employés de
délégations du Québec à l'étranger,
coûts exorbitants de programmes de formation à l'intention des
fonctionnaires - Formacadre - favoritisme dans l'embauche, dépenses de
voyages à prix forts, etc. Cette année, le Vérificateur,
suite à son examen de l'administration des fonds publics, a encore
dénoncé certains programmes.
Année après année, de tels rappels à l'ordre
adressés à nos dirigeants ont de quoi désoler le simple
contribuable.
On ne peut que partager l'indignation d'un éditorialiste de La
Presse qui dit: Le pire, c'est qu'on parle de milliards de dollars de
gaspillage, et les gouvernements édictent des politiques, des
règlements et des directives pour tenter de contrôler les
données fiscales des entreprises et les impôts des contribuables,
mais il oublie aussi de s'autodiscipliner.
Alors, la classe moyenne. Nous, ce qu'on fait comme constat, c'est
qu'elle s'appauvrit, mais, heureusement, le gouvernement du Québec a
fait un effort qui est apprécié pour réduire l'impôt
des particuliers, les plus faibles économiquement. Cependant, les
Québécoises et les Québécois à revenus
moyens n'ont tout simplement plus les moyens de financer leurs gouvernements.
Une étude du Conseil national du bien-être social, «Le
régime caché d'assistance sociale», affirmait que les
exemptions fiscales pour les hauts revenus représentaient cinq fois
l'ensemble des coûts des programmes sociaux au Canada. Dans les
conditions actuelles, ce sont les classes moyennes qui paient la grosse part du
gâteau, ce qui a pour conséquence une paupérisation des
classes moyennes et une faible taxation des grandes corporations et des hauts
revenus. Pourtant, pour diminuer ses dépenses et réduire son
déficit, le gouvernement se dit contraint de sabrer dans les programmes
sociaux. Ainsi, on a vu le gouvernement actuel restreindre le
développement du réseau de garderies, faire disparaître
l'allocation de disponibilité et l'allocation de maternité pour
un groupe de la population. Il a imposé aux personnes âgées
un ticket modérateur sur les médicaments, il a coupé dans
les soins dentaires, il a opté pour une politique familiale plus
nataliste, et créé des allocations de naissance significatives
pour un nombre de plus en plus restreint de parents.
Progressivement, des programmes sélectifs remplacent les
programmes sociaux universels: allocations de maternité, aide
financière pour frais de garde, etc. Le fédéral a fait une
brèche importante dans l'universalité, en remplaçant
récemment les allocations familiales et d'autres mesures de soutien aux
enfants par une prestation qui tient compte du revenu des parents.
L'universalité permet un accès équitable de la
population à des services aussi essentiels que l'éducation et les
services de santé. L'universalité propose aussi une forme de
reconnaissance pour certaines responsabilités ou situations: le
rôle parental, en raison de l'âge et autres. Les mesures
universelles contribuent à l'autonomie des personnes, et évitent
une plus grande pauvreté de la classe moyenne.
Quand on remplace des programmes universels par des programmes
sélectifs d'assistance, on porte atteinte a la base des revenus des
personnes à revenus moyens, et on accroît la probabi-
lité que ces personnes tombent dans la catégorie des
pauvres. L'argument que le but des coupures dans les programmes universels est
d'arrêter de donner de l'aide inutile aux riches est purement hypocrite.
Il y a d'énormes concessions fiscales pour les riches dans l'exemption
de l'impôt des gains de capital et des limites pour les REER, pour n'en
nommer que deux. En réalité, les coupures ont pour effet
d'alourdir le fardeau fiscal de la classe moyenne et, en même temps,
visent à s'attaquer à la solidarité sociale entre les
pauvres et la vaste majorité de la population à revenus
moyens.
Donc, ce que nous recommandons, c'est le maintien des programmes sociaux
universels, et nous souhaitons que le gouvernement tienne compte et
reflète les besoins de sa population quand il fait des choix et adopte
des mesures.
Le taux de chômage au Québec est élevé. Il
appartient, dans un tel contexte, à l'État de protéger les
assistés sociaux, les jeunes femmes pauvres, les enfants, les
mères de familles monoparentales, les sans-travail, en un mot, les
groupes les plus faibles de la société. Alors, l'AFEAS souhaite
donc l'expression d'une volonté politique franche, un parti pris
affiché à leur égard.
C'est pourtant le contraire qui se passe. Sous prétexte de fraude
et de rationalisation des dépenses publiques, quelque 200
enquêteurs font - à quel coût? - la chasse aux fraudeurs.
Pourtant, de nombreux groupes sociaux préoccupés par la
pauvreté ont démontré que les fraudeurs ne constituaient
qu'un infime pourcentage - soit entre 2 % et 5 % - cette proportion
étant comparable à d'autres régimes et bien
inférieure à celle des fraudeurs de l'impôt, pour ne citer
qu'un exemple.
Alors, il y a l'ACEF de Lanaudière qui a réalisé
une recherche-action sur la pauvreté des femmes et a analysé les
diverses mesures de l'aide sociale. Elle conclut dans son analyse que les
programmes actuels coûtent cher, sont peu efficaces et augmentent
l'anxiété des prestataires, sans apporter de solution durable.
Nous croyons que les centaines de millions affectés à la loi 37
sont mal utilisés, parce que cette loi, qui calcule pourtant cluiquo
dossier à la cou! près, de façon individualisée, ne
permet pas de soutenir efficacement les efforts déployés par les
prestataires les plus dynamiques. Alors, les programmes mis en place ne doivent
pas ressembler à du rapiéçage ou du colmatage, mais
doivent miser sur une aide réelle qui permette aux personnes
d'améliorer leur situation et de s'en sortir.
Aussi, on demande qu'il y ait un minimum de cohérence entre le
discours qui est véhiculé et les mesures mises en place par les
divers ministères. Comment concilie-t-on un engagement vis-à-vis
des familles avec des coupures dans les allocations de maternité, avec
l'imposition de la TPS sur les vêtements pour les enfants? C'est dans les
applications pratiques et dans les mesures mises en place que nos membres
peuvent évaluer la réelle volonté d'intervenir de leurs
dirigeants. L'excuse du manque de ressources perd de sa
crédibilité devant le maintien d'une lourde fonction publique,
d'un nombre exagéré de cadres supérieurs et devant le
confortable régime de pension de ses députés.
Les préoccupations envers la condition féminine et la
famille n'appartiennent pas exclusivement à la ministre responsable;
elles doivent transparaître à travers toutes les politiques et sur
toutes les réalisations des divers ministères. Elles doivent
être intégrées à tous les niveaux de décision
et ne pas être portées uniquement par leurs répondants
attitrés.
Qu'en est-il de la sensibilité du ministre de la Main-d'oeuvre
à la cause des femmes - coupures dans les allocations de
maternité ou propositions désanvatageuses pour les conjointes
ayant charge d'enfants dans le projet de loi 43 - ? Alors, les plans d'action
en matière de condition féminine ou de politique familiale
doivent ne pas se limiter à des études, des projets, etc., mais
à des engagements qui permettent justement qu'il y ait une
volonté de passer à l'action.
En plus de la cohérence entre le discours officiel et la
réalisation gouvernementale, l'AFEAS souhaite une cohérence dans
les applications des divers programmes, ainsi que l'uniformité de
certains concepts, tel le concept de conjoints de fait. Alors, il nous
apparaît que les couples vivant en union de fait, reconnus comme tels au
niveau de la fiscalité, devraient avoir accès à tous les
avantages fiscaux et aux autres mesures sociales accordées aux couples
mariés, mais qu'ils soient par ailleurs liés par les mêmes
responsabilités, tels le partage du patrimoine familial, les pensions
alimentaires, etc.
Le gouvernement fédéral a modifié récemment
l'accès à certains avantages fiscaux dont pouvaient se
prévaloir les couples en union de fait. Le ministre des Finances du
Québec a annoncé, dans son discours sur le budget d'avril 1992,
son intention d'harmoniser les politiques québécoises dans le
même sens. Alors, l'AFEAS approuve cette intention, mais il
s'avérerait, en olfol. injuste quo les lumillos traditionnelles paient
plus d'impôt que les couples avec enfants, vivant en union de fait.
L'autre définition qu'on voudrait voir uniforme, c'est que les
parents qui sont tenus de soutenir un enfant de 18 ans et plus, s'il n'est pas
reconnu indépendant au niveau des programmes de sécurité
du revenu et de l'aide financière aux étudiants, on demanderait,
dans le projet de loi 43 modifiant la Loi sur le Régime de rentes du
Québec, que le ministre responsable propose que ces enfants ne soient
plus considérés comme à charge pour les personnes
conjointes survivantes. Donc, on demande que la définition des enfants
à charge soit la même dans les différents programmes
gouvernementaux.
Alors, je laisse la parole à une de mes compagnes.
Mme Therrien (Cécile): Alors, on va parler maintenant plus
particulièrement de condition féminine et, d'abord, de la
pauvreté des femmes.
C'est un signal d'alarme sur la pauvreté des femmes que l'AFEAS
lance au gouvernement. La situation est déplorable. Les femmes sont
pauvres: celles qui sont responsables de familles monoparentales, celles qui
sont seules et âgées, les jeunes femmes, les femmes
mariées.
Quelques statistiques. En 1987, au Canada, plus de 1 500 000 femmes
étaient économiquement faibles. Entre 1971 et 1986, le nombre de
femmes pauvres s'est accru de 100 %, comparativement à 24 % chez les
hommes. 85 % des familles monoparentales ont à leur tête une
femme, et près de 60 % d'entre elles vivent sous le seuil de la
pauvreté. La pauvreté chez les mères seules est la plus
importante cause de la pauvreté de 1 000 000 d'enfants au pays; un
enfant sur cinq est pauvre au Canada. Une femme ne touche que 0,659 $ pour
chaque dollar gagné par un homme, et le salariat économiquement
faible s'accroît cinq fois plus rapidement chez les femmes que chez les
hommes. Même si elles occupent des emplois à plein temps, à
temps partiel ou saisonnier, 600 000 femmes vivent sous le seuil de la
pauvreté.
Divers facteurs contribuent à la pauvreté des femmes, mais
la constatation la plus scandaleuse est le fait que ce sont les
responsabilités familiales qu'elles assument qui les dirigent droit vers
la pauvreté. Durant leur vie, 99 % des femmes âgées de plus
de 18 ans auront à dispenser des soins à leurs enfants, à
leurs parents ou aux deux. Près de quatre femmes sur dix, soit 37 %,
prendront soin d'une personne adulte handicapée, tandis que 83 % d'entre
elles s'occuperont d'enfants. Les responsabilités parentales et
familiales ont des conséquences lourdes pour les femmes. Elles
expliquent leur mauvaise intégration au marché du travail -
absence totale de ce marché, interruption de carrière, emploi
à temps partiel. La prestation de soins pèse directement sur les
salaires moins élevés des femmes, leurs minces prestations de
retraite, leurs avantages sociaux inférieurs et les coûts
élevés des soins de santé. Les femmes demeurent sans
emploi, en moyenne, pendant 11,5 ans pour cause de responsabilités
familiales, contre 1,3 an pour les hommes. Même si les femmes ne quittent
pas complètement le marché du travail, elles acceptent des
emplois moins exigeants et moins payants, afin de pouvoir fournir des soins.
(16 h 40)
Le revenu moyen des travailleuses qui donnent naissance diminue de 3000
$ la première année, et de 5000 $ à 6000 $ par an, au
cours des deux années suivantes. L'écart salarial entre les
femmes et les hommes est plus grand entre 45 et 64 ans, période
où ces derniers, qui travaillent à temps plein, font de gros
salaires tandis que les femmes gagnent généralement les
mêmes salaires que pendant leur jeune âge.
L'État doit intervenir parce qu'il entretient lui-même et
perpétue cette situation. Il désinsti-tutionnalise, retourne dans
leurs foyers, aux soins des femmes, les personnes âgées, les
malades chroniques, les malades mentaux. Il néglige la mise sur pied de
ressources pour le maintien à domicile. Il refuse d'accorder des mesures
qui compenseraient le rôle social effectué par les femmes au
foyer. Pourtant, la pauvreté des femmes et de leurs enfants coûte
cher en deniers publics. Elle laisse pour compte la productivité des
femmes et elle handicape gravement l'avenir de leurs enfants. Il est urgent que
le gouvernement reconnaisse l'apport des femmes à la
société et investisse pour compenser cet apport.
Au sujet des pensions alimentaires. Le problème de la perception
des pensions alimentaires contribue aussi a la pauvreté des femmes. Une
étude effectuée en 1986, portant sur tous les
Québécois ayant divorcé ou ayant demandé une
séparation légale entre 1981 et 1983, a trouvé que, parmi
les mères ayant des enfants à charge, 58 % seulement ont obtenu
une ordonnance de soutien alimentaire à leur égard. De ce nombre,
seulement 63 % ont touché leur pension intégralement, 14 %
partiellement, et 23 % jamais. Ceci veut dire que 37 % des femmes seules ayant
un enfant à charge recevaient le plein montant d'une pension alimentaire
pour leur enfant, et ceci dans les deux à quatre ans suivant la
séparation ou le divorce. Parmi les exconjoints qui n'ont pas
payé intégralement la pension pour leurs enfants, 83 % avaient un
emploi. Près de la moitié des femmes bénéficiaires
d'une pension alimentaire avaient un revenu total inférieure 10 000
$.
Depuis 1975, les membres de notre association réclament la mise
sur pied d'un système de perception des pensions alimentaires. Les
femmes en ont assez d'assumer seules les charges financières
liées aux enfants. Elles en ont assez de courir après leur
pension quand elles ne renoncent tout simplement pas à le faire. Combien
coûte à l'État la non-responsabilisation des pères
vis-à-vis de leurs enfants? Il est plus que temps que les pères
soient contraints d'assumer leurs responsabilités.
Alors, l'AFEAS recommande que le gouvernement mette sur pied un
système de perception automatique des pensions alimentaires, qu'il
émette les versements de pension alimentaire à l'ex-conjoint qui
a la charge des enfants, dès le prononcé du jugement, pour
ensuite percevoir ce montant du débiteur.
Les travailleuses au foyer. Des mesures concrètes doivent
reconnaître les responsabilités assumées par les femmes
auprès des enfants et des autres personnes à charge. Par ses
choix, le gouvernement peut diminuer la dépendance des
femmes vis-à-vis de l'État et favoriser leur
autonomie.
Bine que le système d'imposition du Québec soit
basé sur l'individu, il contient des dispositions qui tiennent compte
des conjoints. Ainsi, un particulier marié peut réclamer un
crédit de personne mariée lorsque son conjoint ne se
prévaut pas de son exemption personnelle, faute de revenus suffisants.
Il peut également utiliser à son profit des déductions et
des crédits qui sont attribués au départ à son
conjoint, mais dont eu dernier ne fait pas usage.
Le Conseil du statut de la femme, plusieurs groupements féminins,
de même que certaines auteures ont remis en question, au nom de
l'autonomie économique des femmes, le concept de dépendance
à l'égard du conjoint pourvoyeur sur lequel s'appuient ces
mesures. L'ensemble des dispositions profite directement aux contribuables qui
ont un revenu déclaré, sans rien apporter à celui qui est
sans ressources financières. Dans la pratique, les contribuables
masculins en tirent profit. Bien souvent, l'épouse est sans revenu parce
qu'elle se rend disponible à sa famille. Elle est donc une personne
productive et non une personne à charge.
Par ailleurs, on juge que ces dispositions ont un impact dissuasif sur
les épouses. En effet, devant la perspective de perdre des
crédits et des déductions, plusieurs préfèrent que
leur épouse effectue un travail non déclaré ou qu'elle
s'abstienne d'exercer un emploi.
L'établissement d'un crédit d'impôt universel
remboursable permettrait à chaque adulte de recevoir ses propres
déductions gouvernemen-talales octroyées afin de compenser les
besoins essentiels à satisfaire. D'une manière plus
générale, l'AFEAS préconise la transformation de toutes
les exemptions fiscales par des crédits d'impôt plus
équitables et souhaite que ces crédits soient remboursés
aux personnes qui assument les responsabilités pour lesquelles ce
crédit a été établi.
L'AFEAS réclame actuellement un crédit d'impôt
remboursable pour le parent au foyer qui garde son ou ses enfants à la
maison. Nous présentons et explicitons cette recommandation au chapitre
consacré à la politique familiale.
Même si notre association déplore le fait que le
gouvernement retourne aux familles le soutien aux personnes âgées,
nous apprécions le nouveau crédit d'impôt remboursable
annoncé dans le budget 1992 du ministre des Finances. Cependant, il nous
faudra s'assurer que ce crédit soit versé à la personne
qui aura mis de côté sa disponibilité, ses ambitions
professionnelles, et qui aura consacré son énergie et sa
compétence pour dispenser ses soins.
En résumé, l'AFEAS demande que le gouvernement
québécois accorde un crédit d'impôt remboursable et
universel à toute personne de 18 ans et plus en guise de remplacement
des exemptions personnelles et de personne mariée. et que le
gouvernement québécois révise son système fiscal de
façon à remplacer le principe des exemptions d'impôt par
des crédits d'impôt uniformisés et remboursables, s'il y a
lieu, à la personne concernée.
Maintenant, on parle du régime de rentes du Québec. Depuis
plus de 10 ans, les membres de l'AFEAS réclament l'intégration
des travailleuses et travailleurs au foyer au régime de rentes du
Québec. Cette mesure a d'ailleurs fait l'objet d'uiH! promosso
rtloctornlo do lu part du Parti libéral, qui ne l'a malheureusement
jamais remplie. Il est plus que temps que le gouvernement reconnaisse la valeur
sociale du travail qui est accompli au foyer. Combien en coûterait-il de
plus en garderies, centres d'accueil, institutions de tout genre si
l'État ne comptait sur le travail des femmes au foyer? Combien de
millions sont ainsi économisés à leurs dépens? Le
gouvernement doit au moins manifester sa bonne volonté en permettant,
dans un premier temps, à toutes les personnes au foyer de contribuer
d'une façon volontaire au régime de rentes du Québec, et
leur accorder, comme aux femmes sur le marché du travail, les
crédits pour les périodes consacrées aux enfants en bas
âge et aux personnes non autonomes - l'équivalent de la
période d'exclusion.
L'AFEAS aurait souhaité une participation obligatoire des
personnes au foyer aux rentes publiques ainsi qu'une contribution plus
significative de l'État. Tenant compte de la présente situation,
elle réclame au moins que les travailleuses et les travailleurs au foyer
aient la possibilité de contribuer volontairement au régime de
rentes du Québec, jusqu'à une contribution maximale
équivalant au salaire industriel moyen canadien; qu'on accorde aux
travailleuses et aux travailleurs au foyer des crédits de rentes
équivalents à la période d'exclusion accordée aux
travailleuses sur le marché de l'emploi.
L'AFEAS a réagi à certaines propositions formulées
dans le projet de loi 43 modifiant la Loi sur le régime de rentes du
Québec. Ainsi, nous avons recommandé de considérer comme
enfants à charge les étudiants de 18 à 25 ans, comme il
est admis dans d'autres programmes sociaux québécois. Nous nous
sommes objectées aux prestations proposées, qui ont l'effet
désastreux de désavantager les femmes ayant charge d'enfants
ainsi que les femmes les plus âgées. De plus, au moment de la
retraite, nous favorisons le partage des crédits de rentes plutôt
qu'un partage du montant des rentes, tel que proposé par le projet de
loi. Cette recommandation permet un partage plus équitable des rentes
accumulées pendant la vie commune. Elle correspond d'ailleurs à
un principe pourtant accepté par la Régie des rentes, soit que
les crédits de rentes acquis durant la vie commune sont des avoirs
familiaux appartenant aux deux conjoints. Un tel partage est
réclamé par nos membres depuis 1982
Les programmes de formation. Nous constatons et regrettons l'absence de
programmes de réintégration au marché du travail pour les
personnes sans chèque, c'est-à-dire ni
bénéficiaires de l'aide sociale ni de l'assurance-chômage.
Plusieurs membres de l'AFEAS se retrouvent dans cette catégorie. Pour
les adultes, l'accès au financement des études constitue un
facteur déterminant pour accéder à la formation. Les
règles d'attribution des prêts et bourses, qui tiennent compte du
revenu familial et qui ne s'appliquent pas aux études à temps
partiel, limitent l'accès des personnes au foyer à la
formation.
Depuis plusieurs années déjà, notre association
revendique l'accès à des programmes qui mènent plus
rapidement au marché du travail que les formations professionnelles
dispensées le jour aux jeunes. Les femmes sans chèque sont
nombreuses, soit celles dont le revenu familial ne suffit pas à
défrayer le coût d'un retour aux études, celles dont le
conjoint est chômeur, celles qui, divorcées, ne retirent qu'un
revenu minimal d'une pension alimentaire ou celles qui sont au foyer, leurs
prestations de chômage épuisées.
Le Président (M. Després): Mme Therrien, sans vous
bousculer, je pourrais vous permettre encore une courte conclusion. Le temps
est déjà terminé depuis quelques minutes. Si on veut
permettre d'avoir un échange avec les parlementaires, je vais vous
laisser conclure.
Mme Therrien: D'accord. Alors, je vais peut-être donner les
principales recommandations et permettre à Mme Marcoux de parler un
petit peu de la politique familiale.
Alors, on demande, évidemment, un accès élargi
à l'enseignement professionnel pour les adultes, l'accès aux
mêmes droits pour les prêts et bourses pour toutes les personnes,
et pouvoir participer aux stages organisés par la Commission de
formation professionnelle. On demande aussi l'accès aux mêmes
mesures sociales que pour tous les autres salariés, soit RRQ,
allocations de maternité, accidents du travail, etc.
Le Président (M. Després): Excusez. Juste pour vous
préciser qu'il vient d'y avoir entente entre les deux formations
politiques pour vous permettre de terminer votre exposé.
Mme Labrecque-Marcoux (Huguette): Merci. Alors, les femmes au
travail. La présence des femmes sur le marché du travail s'est
accrue considérablement au cours des dernières décennies.
Elles constituent désormais 41,6 % de la main-d'oeuvre
québécoise, proportion qui pourrait atteindre plus de 45 %
dès 1993. Cette croissance continue de la présence des femmes va
de pair avec un déclin du taux d'activité masculin, ce qui tend
à rapprocher davantage les profils d'activité masculin et
féminin.
La similitude s'arrête toutefois à ce plan quantitatif. Sur
le plan qualitatif, les femmes se retrouvent toujours cantonnées dans un
nombre limité d'occupations malgré quelques progrès. Elles
gagnent toujours des revenus d'emploi largement inférieurs à ceux
des hommes. Elles connaissent des taux de chômage et un niveau de
sous-emploi supérieurs à ceux des hommes dans la multitude
d'emplois précaires que produisent de plus en plus les
sociétés occidentales. (16 h 50)
Le gouvernement doit endosser ses responsabilités. Il doit
maintenir et poursuivre ses engagements pour favoriser l'intégration des
femmes à un marché du travail adapté aux
réalités familiales. Il doit être conséquent avec
ses convictions. La conciliation des activités professionnelles et
familiales est un facteur déterminant de la situation des femmes sur le
marché du travail. Les femmes paient un lourd tribut sur le plan
professionnel, parce qu'elles ont à naviguer entre les exigences d'un
marché du travail encore orienté en fonction d'une main-d'oeuvre
masculine totalement disponible et les impératifs de l'univers
domestique et familial que les mentalités traditionnelles
réservent encore aux femmes. Des améliorations sont imperatives
pour favoriser la conciliation des responsabilités familiales et
professionnelles.
L'AFEAS recommande une législation en vue de favoriser
l'équité salariale pour les femmes, des congés de
maternité payés et des congés payés pour
responsabilité parentale, les mêmes droits et avantages sociaux
pour les personnes travaillant à temps partiel comme pour les
travailleurs à temps plein.
Le gouvernement a reconnu, dans l'exercice de son mandat, l'importance
qu'il accorde à la famille. Il a nommé une ministre responsable
de la Famille, a créé un Conseil de la famille, et s'est
doté d'une politique avec un plan d'action dans ce domaine. Le
gouvernement, dans sa politique, s'est d'ailleurs engagé à
soutenir les familles québécoises. Tout n'est pas parfait pour
autant. Une étude du Conseil national du bien-être social
révélait en novembre dernier que le Québec compte le plus
haut pourcentage de familles pauvres, soit 15,5 %, la moyenne canadienne
s'établissant à 12 %. Les familles monoparentales dirigées
par une femme sont particulièrement touchées par la
pauvreté; 40 % d'entre elles sont pauvres.
Là encore, nous devons faire la part entre le discours politique
et les choix qui ont été réalisés. Le gouvernement
a opté pour une politique nataliste. C'est ainsi que les mesures de
soutien économique aux familles ont été orientées
vers les familles nombreuses et avec de jeunes enfants. De plus, l'aide a
été concentrée surtout au moment de la naissance, et lors
des dernières années de la vie des enfants, principalement au
troisième enfant.
Enfin, il convient de souligner que des efforts ont été
faits pour maintenir la valeur réelle des mesures de soutien direct aux
familles, telles que les allocations familiales et les crédits
d'impôt. Parallèlement à ces actions, le gouvernement s'est
fait très discret dans les mesures les plus demandées par les
parents. En effet, bien qu'il ait intégré dans la Loi sur les
normes du travail des mesures visant à élargir les droits
d'absence et la protection de l'emploi dans le cadre des congés de
maternité ou parentaux, ces mesures s'inscrivent toujours sous le signe
du sans-solde. De plus, il n'a pas amélioré de manière
sensible l'accessibilité, notamment financière, aux services de
garde.
Enfin, alors même que les familles réclament un meilleur
soutien de l'État pour leurs membres handicapés et pour les
aînés, le gouvernement a introduit dans son plan d'action sur la
politique familiale le concept de responsabilité parentale et l'a
lié à sa volonté d'opérer un certain
désengagement à l'égard de la famille. L'AFEAS partage
entièrement ces commentaires émis par le Conseil du statut de la
femme.
Le soutien aux enfants. Une enquête réalisée pour le
compte du Secrétariat de la famille, rendue publique en mai 1991,
révélait que le nombre d'enfants souhaité par les
Québécoises et Québécois interrogés tourne
autour de 2,4 en moyenne, nombre supérieur au nombre moyen réel
d'enfants par femme qui, d'après les dernières statistiques, se
situe à 1,6. Ce n'est donc pas le désir d'enfants qui fait
défaut, mais un ensemble de conditions sociales et économiques
pour que les femmes et les hommes réalisent ce désir. Des mesures
de soutien significatives favoriseraient ainsi la décision de mettre des
enfants au monde.
Le crédit d'impôt pour frais de garde. La politique
québécoise des services de garde est conçue à
l'intention des parents qui travaillent: contribution rjouvernomentale pour les
locaux et équipements, subventions et autre aide financière aux
parents. Les mères qui gardent leurs enfants à la maison n'on
aucune reconnaissance pour ce rôle. Combien en coûterait-il au
gouvernement si les mères avaient recours aux services de garde?
Récemment, le gouvernement introduisait un crédit d'impôt
pour le soutien aux personnes âgées, reconnaissant ici les
responsabilités assumées auprès de ces personnes. La garde
des enfants a-t-elle moins de valeur que le soutien aux personnes
âgées? L'AFEAS réclame un crédit d'impôt
remboursable à la personne qui effectue la garde des enfants, d'une
valeur équivalente à l'exemption pour frais de garde actuellement
accordée aux parents qui travaillent - de 4 600 $ pour un enfant de
moins de 7 ans, et de 2 300 $ pour un enfant de 7 à 13 ans. Cette
mesure, prioritaire pour les 25 000 membres de notre association, est une
mesure qui reconnaît les responsabilités parentales
assumées par les personnes au foyer. L'AFEAS réclame en leur nom
que le gouvernement du Québec élargisse
l'éligibilité à l'exemption pour frais de garde à
la mère ou au père qui garde son ou ses enfants à la
maison, qu'il transforme cette exemption en un crédit d'impôt
remboursable à cette personne.
Pour les parents qui travaillent, le développement des services
de garde est un besoin des plus essentiels. De manière à
répondre plus adéquatement à ces besoins, l'AFEAS
réclame l'augmentation du nombre de places en garderie à travers
la province, le développement des services de garde en milieu familial
et scolaire.
Nous avons exprimé déjà notre point de vue quant au
choix du gouvernement de privilégier une politique nataliste et un
soutien vraiment significatif pour les parents, à compter du
troisième enfant et pendant leur bas âge. L'AFEAS a
signifié son désaccord au moment de rétablissement des
allocations de naissance. Nous aurions souhaité des allocations
familiales universelles plus significatives. Suite au
réaménagement réalisé par le gouvernement
fédéral dans les prestations pour les enfants, notre association
tient à réaffirmer l'importance qu'elle accorde au
caractère universel des mesures sociales. Les mesures allouées
aux parents jouent un rôle vis-à-vis une fonction précise
et, à ce titre, elles doivent être maintenues.
Concernant les allocations familiales, l'AFEAS recommande: que le
gouvernement québécois reconnaisse le soutien aux enfants par le
versement d'allocations familiales universelles; que le gouvernement
québécois exempte d'impôt les allocations familiales; que
les allocations familiales soient attribuées spécifiquement
à chaque enfant - lorsqu'il n'est plus eligible à cause de son
âge, que ce soit le montant de cette allocation spécifique qui
soit retranché; que le gouvernement maintienne la non-réclamation
des allocations versées pour les enfants dans la déclaration
d'impôt, quel que soit le revenu familial et le nombre d'enfants.
Au niveau do la taxe de vonte du Québec L'addition de la TVQ,
ajoutée à la TPS sur les produits et services, rend la vie
difficile aux jeunes couples avec enfants, et particulièrement aux
mères seules. Là où il y a enfant, les besoins sont
nombreux - allant des couches, vêtements, chaussures jusqu'au
matériel didactique à l'âge scolaire. La croissance rapide
des enfants et notre climat rigoureux exigent un renouvellement constant des
vêtements et chaussures. Le coût élevé de la vie
ainsi que le manque d'emploi rendent cette exigence difficile à combler
pour un grand nombre de familles. Ces nouvelles taxes alourdissent encore le
tableau économique des parents. La TVQ n'est certes pas un cadeau du
gouvernement pour les parents. On se demande comment il peut arriver à
concilier cette mesure avec son engagement de soutien aux familles quand,
traditionnellement, les vêtements d'enfants étaient exempts de
taxes. À ce sujet l'AFEAS recommande que le gouvernement
québécois annule toute taxe sur les vêtements.
chaussures d'enfants, couches, matériel scolaire et transport
scolaire.
Mme Nadeau-Martin: Alors, en guise de conclusion.
Les responsabilités familiales demeurent prioritaires pour les
femmes malgré les graves inconvénients qui en découlent
pour elles. L'AFEAS profite de la présente consultation pour rappeler au
gouvernement le rôle primordial qui est le sien, sa capacité
d'apporter des correctifs à cette situation. Des coûts sont
liés au manque d'autonomie des femmes ainsi qu'à leur situation
déficiente sur le marché du travail. L'AFEAS s'est
attardée à faire valoir les besoins des personnes qui demeurent
au foyer pour prendre soin des enfants et des personnes non autonomes, parce
que peu d'autres associations s'en font les porte-parole, ce qui n'est pas le
cas pour la défense des droits des femmes au travail.
L'AFEAS ne peut que répéter ce qu'elle réclame au
nom de ses 25 000 membres depuis des années. Elle fait le voeu que le
gouvernement réponde aux besoins exprimés par des mesures
appropriées, qui permettront l'atteinte d'une véritable
égalité pour les femmes, et ce, aussi bien dans leur vie
professionnelle qu'en accomplissant leur rôle au sein de la famille.
Merci.
Le Président (M. Després): Merci beaucoup, madame,
pour cette présentation.
Je vais maintenant passer la parole à la ministre
déléguée à la Condition féminine.
Mme Trépanier: Merci, M. le Président.
Alors, je souhaite la bienvenue à l'AFEAS, groupe
représentatif, s'il en est un, avec vos nombreuses membres
situées dans toutes les régions du Québec, des femmes de
tous les milieux, de tous les âges. Alors, bienvenue.
J'ai lu avec! très grand intérêt votre
mémoire. Je pense que je l'ai apprécié pour votre
franchise, pour votre honnêteté. Vous avez su reconnaître
certains bons coups, mais vous avez posé un regard critique quant
à des mesures qui vous semblent pénalisantes pour les femmes que
vous représentez. Alors, on sent dans votre mémoire l'interaction
toujours présente entre la condition féminine et la politique
familiale, et je pense qu'elles sont intimement liées. Vous l'avez fait
fort justement, je pense.
Vous nous présentez, dans vos recommandations, des attentes
relatives à la condition féminine et à la famille; alors,
vous touchez les deux volets. Par ailleurs, les suggestions que vous faites en
termes de rationalisation des dépenses sont plus présentes dans
le texte que dans les recommandations. Alors, connaissant votre organisme et la
démocratie qui y existe, j'imagine que vous n'avez pas eu de
recommandations formelles à cet effet-là de votre organisme.
Cependant, étant des dirigeantes de l'AFEAS, j'aimerais
peut-être, dans un deuxième temps, vous entendre là-dessus.
Vous avez sûrement des perceptions qui sont bonnes, mais nous y
reviendrons un peu plus tard. (17 heures)
Je voudrais, dans un premier temps - et en premier lieu, je pense que
c'est la question qui vous touche de plus près - j'aimerais vous
entendre sur une prise de position de l'AFEAS qui est relativement nouvelle,
mais dont nous avions eu l'occasion de nous entretenir, lors d'un colloque, au
printemps dernier, que vous avez tenu ici, à Québec, sur la
reconnaissance du travail invisible des femmes. Alors, la recommandation qui
vise à élargir l'éligibilité à l'exemption
pour frais de garde à la mère ou au père qui garde un de
ses enfants en crédit d'impôt, il s'agit, à mon avis, d'une
recommandation qui est dans la même foulée que celle de la
participation du régime des rentes du Québec, mais elle est plus
pointue parce qu'elle vise une catégorie bien spécifique, les
femmes qui ont de jeunes enfants.
Vous réclamez toujours, cependant, la participation à la
Régie des rentes du Québec pour la femme au foyer. Vous ajoutez
maintenant ce crédit d'impôt là. Je suis évidemment
convaincue comme vous de l'importance de la reconnaissance du travail au foyer
pour les femmes, et je pense que le gouvernement a fait des efforts en ce sens,
entre autres avec la loi sur le patrimoine familial - et vous l'avez
souligné - et le dépôt du projet de loi 43 aussi.
Ceci étant dit, si on se replace dans le contexte de cette
commission qui examine les finances publiques, vous réalisez donc, je
pense, que l'inclusion des travailleuses au foyer présente des
difficultés de tous ordres, et on en a discuté abondamment
à plusieurs reprises. Vous êtes également consciente des
impacts financiers que représente cette question-là, et la mesure
qui vise à élargir l'éligibilité et l'exemption
pour frais de garde de la mère ou du père et de la transformer en
crédit d'impôt. C'est une question financière
importante.
Alors, ma question a trois volets. Premièrement, j'aimerais
entendre vos commentaires sur la multiplicité des formes de
reconnaissance du travail au foyer, dans un premier temps. Deuxième
question, suivant la première: Est-ce que vous priorisez des mesures
plutôt que d'autres ou si vous les placez toutes sur le même pied?
Et, enfin, j'aimerais savoir si vous estimez qu'un crédit d'impôt
pour frais de garde devrait également être accordé aux
personnes qui ont une rémunération à l'extérieur du
foyer; alors, transformer l'exemption en crédit pour les personnes qui
ont une rémunération également. Alors, ce serait ma
première question en trois volets.
Mme Nadeau-Martin: Bon, vous demandez la multiplicité des
formes de reconnaissance du travail au foyer. Il est bien évident que
la
fonction de travail au foyer, nous, quand on a fait l'étude, on
regardait qu'il y avait l'aspect privé qui regardait tout l'aspect des
tâches domestiques, etc., et des services qui étaient rendus entre
deux personnes autonomes, disons, le conjoint et sa conjointe, conjoints de
fait, etc., ou même des grands enfants, et ça, ça regardait
le domaine privé. On ne demande pas au gouvernement là-dessus
d'intervenir et de mettre des programmes, etc., de mettre des subventions ou
des programmes, etc. Ce qu'on demande... là-dessus, on trouve que le
patrimoine familial vient reconnaître cette partie-là de l'aspect
privé du travail qui se fait au foyer, tâches domestiques, etc.,
bon, entre deux personnes autonomes, c'est-à-dire comme une
espèce de contrat entre le conjoint homme et femme. Là-dessus, on
ne demande rien.
Ce qu'on demande, c'est de reconnaître la valeur sociale du
travail au foyer, c'est-à-dire... Vous allez dire: II y a la question du
rôle parental qu'a une famille. Dès qu'ils ont des enfants, il y a
un rôle parental qui doit s'exercer, des responsabilités
parentales, mais il reste que la valeur sociale de mettre des enfants au monde,
c'est important, parce que la culture de la famille, je pense qu'au
Québec, on l'a. On a toujours eu des grosses familles, il y a un temps.
Maintenant, on en a moins. On a de la misère à se
générer, là, comme population. Donc, on se dit: La
reconnaissance de ce rôle, cette valeur sociale du travail au foyer,
c'est l'aspect social qu'on veut qui soit reconnu, c'est-à-dire
l'éducation des enfants, tous les services que je dois rendre aux
enfants et, en même temps, l'aspect aussi qui touche les prestateurs et
prestatrices de soins, ce qu'on appelle les personnes qui donnent des services
aux personnes âgées ou aux personnes handicapées. Ces
personnes-là, souvent, quand...
On le sait, actuellement, sur le marché du travail, si votre
père ou votre mère, à un moment donné, pour une
raison ou pour une autre, on n'a pas le foyer d'accueil, on ne peut pas placer
la personne dans un foyer d'accueil, qui se ramasse avec la
responsabilité? C'est la femme qui, à un moment donné, est
obligée de quitter, parce que c'est rarement l'homme qui assume cette
fonction-là. Donc, il y a un rôle social qu'on exerce, qui
évite des coûts sociaux. Ensuite, mettre sur pied des centres
d'accueil ou de., bon. Alors, les personnes qui font ce travail-là, nous
autres, on... L'aspect social, c'est la forme qu'on veut qui soit reconnue, que
ce soit en termes de reconnaître la personne qui s'occupe de jeunes
enfants au foyer ou que ce soit en termes de personnes qui s'occupent de
personnes handicapées ou de personnes âgées, pour nous
autres, c'est les trois points, en tout cas, de reconnaissance du travail, sur
lesquels on veut qu'il y ait une reconnaissance du travail au foyer.
Vous me dites: Est-ce qu'on doit prioriser des mesures? Bien, vous
savez, comme l'AFEAS a été tenace avec sa demande d'être
participante au RRQ. On était même allé jusqu'à
dire: De zéro à six ans, c'est le gouvernement qui devrait
parvenir à donner les montants pour permettre à la femme qui est
au foyer d'accéder au RRQ. Alors, là-dessus, on a quand
même fait une réflexion et on s'est rendu compte que,
peut-être, dans la conjoncture actuelle, demander l'intégration
avec participation du gouvernement au RRQ, ce n'était pas
réaliste.
Alors, vous vous rende/ compte qu'on demande une intégration au
RRQ, mais de façon volontaire, comme ça existe dans une autre
province, dans une province de l'Ouest. Ce qu'on priorise avec notre
cheminement, c'est qu'on a vraiment priorise la mesure du crédit
d'impôt pour frais de garde. Parce que la personne qui est au foyer, qui
doit s'occuper de jeunes enfants, c'est impensable... Surtout avec la mesure
nataliste, on sait qu'il y a de plus en plus de femmes qui ont comme un
troisième enfant. Alors, comment voulez-vous qu'une femme qui a un
troisième enfant puisse réintégrer le marché du
travail? En tout cas, moi, je lui lève mon chapeau. C'est presque
impensable.
Donc, ce qu'on se dit, on ne veut pas - il faut faire attention -
retourner les femmes qui sont sur le marché du travail à la
maison parce qu'elles vont avoir un crédit d'impôt de garde pour
les enfants. Ce n'est pas du tout la question. Mais celles qui veulent le faire
par choix, qui veulent remplir ce rôle social par choix, bien, à
ce moment-là on leur dit: Donnons-leur le soutien et donnons-leur ce
crédit d'impôt pour frais de garde, exactement comme les personnes
qui ont actuellement... celles qui sont sur le marché du travail ont une
exemption pour les frais de garde. Donc, on prioriserait cette mesure de
crédit d'impôt.
Ensuite, on demande: Est-ce qu'on doit l'accorder aux personnes qui ont
une rémunération? Pour nous, le cheminement qu'on a fait dans
cette proposition-là, la mesure s'adressait vraiment aux femmes qui
gardaient leurs enfants au foyer. Non pas celles qui sont sur le marché
du travail, parce que celles qui sont sur le marché du travail ont
accès à l'exemption de frais de garde. Alors, celles qui sont au
foyer n'ont absolument rien de ce côté-là et n'ont pas
accès non plus aux services de garde. Donc, automatiquement, on voulait
que ce crédit d'impôt là soit une reconnaissance.
Donc, celles qui sont sur le marché du travail, elles ont
l'exemption. Ce n'est pas pour celles-là qu'on demandait. C'est pour
celles qui sont à temps partiel. On dira: Elle aura droit à une
exemption comme à temps partiel. Mais pour celle qui est à temps
plein au foyer, bon, on demande qu'il y ait une exemption de crédit
d'impôt pour cette personne-là, en donnant justement un
crédit remboursable à la personne, parce que ce qu'on regarde par
rapport à la
personne âgée, ce n'est pas clair que ça va
être donné à la personne.
On dit: que ce soit versé à la personne qui donne les
services et non pas que ce soit déduit du rapport d'impôt, parce
que là, c'est le conjoint qui en profite et, habituellement, ce n'est
pas lui qui donne le service.
Mme Trépanier: Merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci.
Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.
Mme Carrier-Perreault: Oui, alors, je vous remercie, M. le
Président.
Au nom de ma formation politique, ça me fait plaisir d'accueillir
et de remercier les membres de l'AFEAS qui nous ont présenté ce
mémoire.
C'est un mémoire très dense, très touffu, une liste
de recommandations. Je pense à la liste sur laquelle on est
habitué de voir travailler votre organisme, parce qu'on reçoit
régulièrement de l'information concernant les demandes que vous
nous faites.
C'est un mémoire qui nous donne une bonne image aussi du
vécu des femmes et des familles dans la société
québécoise, des besoins qu'on a. Et je pense que ce n'est pas du
tout des besoins capricieux. Je pense que ce sont des besoins qui sont
fondés, et vous le démontrez très bien.
Vous faites aussi état, et d'autres nous l'ont mentionné,
du manque de cohérence à certains niveaux. Ici, à
l'Assemblée nationale ou au gouvernement, on se donne des politiques...
on se donne une politique. Chaque ministre arrive avec son dossier et chaque
ministre sectoriel vient prendre des décisions qui, très souvent,
vont à rencontre de la politique familiale, parce que c'est
particulièrement vrai dans le cas de la politique familiale. (17 h
10)
C'est un dossier où le moindre geste de la part des autres
ministres sectoriels peut venir faire changer beaucoup de choses. Alors, quand
on a une politique familiale, c'est évident qu'il faudrait avoir une
volonté politique globale, une vision globale, une vision d'ensemble, et
que ce soit appliqué dans l'ensemble des ministères.
Vous soulevez le problème du MMSR, par exemple, avec la coupure
qui a été effectuée dans l'allocation du congé de
maternité. On a d'autres exemples aussi qui nous viennent à
l'esprit. Je pense, entre autres, au projet de service de médiation
familiale qui nous est proposé présentement par le
ministère de la Justice et qui ne va pas dans le même sens que
celui qui est préconisé dans la politique familiale et par le
biais du plan d'action.
On a vu aussi le problème avec les heures d'affaires. C'est
arrivé de façon encore plus claire où, d'un
côté, dans le plan d'action, on dit qu'il faut concilier les
conditions de travail avec les obligations familiales et, pourtant, le
ministre, dans un secteur particulier... On parle du ministre de l'Industrie et
du Commerce. Il arrive et dit: Bon, à l'avenir, on va ouvrir le
dimanche, alors que tout le monde le sait, au Québec, les familles
généralement sont en congé le dimanche, et c'est là
qu'on peut profiter de nos activités familiales. Enfin, c'est un paquet
d'exemples comme ça et, dans ce sens-là, vous avez raison de
soulever le problème de l'incohérence. Comme je le disais,
d'autres groupes sont venus le soulever aussi, des groupes qui militent au
niveau de la famille.
Vous avez, comme je vous le mentionnais, plusieurs résolutions.
Plusieurs propositions, plusieurs demandes, dans un contexte comme celui
où nous nous trouvons, je suis d'accord, la majorité, l'ensemble
de ces propositions-là sont très importantes. Mais, si on avait
à prioriser, si vous aviez à prioriser, y aller par ordre
d'importance, par où vous commenceriez?
Mme Nadeau-Martin: Bon, je vais tenter une réponse, parce
que vous savez qu'on est un organisme terrain, un organisme qui travaille avec
des femmes qui vivent les difficultés. Si on regarde la conjoncture
économique actuelle, on sait bien que demander ça pour demain
matin, c'est impensable. Ce qu'on a mis là, c'est notre réflexion
des orientations pour le futur.
Bon. Si on avait à prioriser, moi, je me dis: Actuellement, le
gouvernement essaie que des personnes s'en sortent en mettant des programmes,
qu'on les envoie dans de la formation plus spécifique, que ça
soit de la formation professionnelle, etc.
Moi, je pense qu'au niveau actuel, étant donné qu'il n'y a
pas d'emplois pour tout le monde, il faudrait qu'on profite de faire de la
formation, qu'on donne la possibilité, en tout cas, pour notre groupe
à nous, qui est des travailleuses au foyer, qui n'est ni des
assistées sociales... On en a, ni sur l'assurance-chômage, en tout
cas, qui ne rentrent pas dans les critères qui sont actuellement...
où la formation est plus facile. Alors, nous autres, on se dit: II
faudrait que cette formation-là soit accessible aux personnes pour
qu'elles puissent réintégrer le marché du travail.
Mais il y a actuellement une priorité qui serait importante,
c'est que la reconnaissance des acquis expérimentés... La femme
qui est à la maison, quand elle arrive pour entrer sur le marché
du travail, on la regarde comme quelqu'un qui a perdu. Si elle a
été quelque 11 ans au foyer pour s'occuper d'enfants, on la
regarde comme quelqu'un qui n'a fait absolument rien; elle n'existe que comme
un gros zéro. On lui dit: Tu n'as pas subi le stress, tu n'as pas
été compétitive, tu n'as pas été sur une
chaîne de montage, tu n'as pas été capable de travailler en
équipe. Elle le fait dans le bénévolat, mais si on la
regarde comme travailleuse au foyer, ça égale
zéro. Donc, je pense que, du côté de la formation,
il faudrait qu'on donne la chance à des personnes de s'en sortir, donc
à des personnes de se former. Et, du côté de la formation,
il faut absolument qu'on mise là-dessus, parce qu'on sait que les femmes
vont faire partie de la main-d'oeuvre de plus en plus dans le futur et, pour
faire partie de la main-d'oeuvre, être compétitive et
compétente, comme disait si bien l'autre document, il faut qu'on ait de
la formation là-dessus.
Il y a des femmes qui sont formées à date, mais celles qui
veulent entrer sur le marché du travail ont besoin qu'il y ait des
incitatifs ou, en tout cas, qu'on leur permette d'entrer dans des programmes de
formation. Là-dessus, je trouve ça important, ce serait à
prioriser, et qu'on mette ce qu'on appelle un guichet unique pour savoir
où aller, être capable de faire évaluer ce qu'on a fait
dans n'importe quel autre domaine, même les travailleuses au foyer, et
que ce soit facile d'avoir accès à de la formation, parce que
sans formation, bon, dans le futur, tu ne peux pas aller sur le marché
du travail tellement. Donc, il y a aussi les mesures qui vont permettre
d'accéder au marché du travail le plus facilement.
Donc, il y a des programmes, sauf qu'actuellement ce qu'on constate avec
les assistées sociales ou les femmes qui ont de jeunes enfants, qui sont
inaptes, dans le fond, au travail pour x temps, parce que les enfants ont de
zéro à six ans, il devrait y avoir des possibilités pour
ces femmes-là aussi de se former, même si elles ont des enfants,
qu'il y ait des garderies, qu'il y ait des cours où ce serait
accessible, dans le temps qu'elles sont en attente, puis, quand il sera temps
d'entrer sur le marché du travail, elles auront cette possibilité
d'y aller plus facilement parce qu'elles auront la formation.
Donc, je pense qu'au niveau de la formation c'est important qu'on ait un
guichet qui lui permette d'intégrer rapidement... d'avoir la
connaissance, de faire évaluer son projet de formation ou autre et que
le milieu du travail reconnaisse qu'il y a des acquis
«expérientiels» qui sont faits. Même si tu es
travailleuse au foyer ou si tu es dans le bénévolat, ça
peut te servir drôlement. En tout cas, qu'ils viennent évaluer ce
qu'on fait à l'AFEAS comme bénévolat, ils vont savoir
qu'on a des acquis pour être capable d'entrer sur le marché du
travail.
Donc, là-dessus, c'est important, c'était priorisé,
mais il y a aussi... Ce qui était priorisé, c'est les familles.
Il va falloir qu'on priorisé les familles dans le sens que... parce que
les enfants, c'est notre avenir dans le futur. On n'a pas le choix, il faut
absolument... C'est la main-d'oeuvre future. Cette main-d'oeuvre, on veut
qu'elle soit productive. À quelque part, il va falloir qu'on donne un
soutien aux familles pour être capable d'en arriver à exercer leur
rôle de plus en plus parce que ça devient de plus en plus
difficile. On sait que c'est peut-être ces enfants-là qui vont
payer notre pension dans le futur ou notre assurance-maladie. On commence
à se poser des questions, mais, en tout cas, les enfants sont
importants.
On sait aussi que, pour des raisons d'équité
horizontale... On l'a dit, je pense que le Conseil du statut l'a dit
tantôt, mais nous, on dit: Une famille avec des enfants, elle a des
besoins essentiels, et le gouvernement doit voir à soutenir cette
famille-là. Celles qui sont sans enfant, bien, je pense que, pour des
raisons de solidarité, les gens sont prêts à accepter de
s'entraider et de donner à même leur revenu, que le gouvernement
perçoive... les revenus que le gouvernement perçoit, à ce
moment-là, qu'on puisse en prendre une partie pour s'occuper des
familles qui sont les plus démunies. Donc, je pense qu'au niveau des
familles... Et le Vérificateur, lui, a dit à quelque part: II y a
des endroits où on devrait couper. Donc, dans cette partie-là, il
serait important aussi que le gouvernement en tienne compte.
Mme Carrier-Perreault: Alors, parmi les mesures que vous nous
proposez, c'est sûr qu'il y en a qui coûtent beaucoup de sous au
gouvernement, mais il y a des mesures qui sont aussi intéressantes par
le fait qu'elles pourraient permettre au gouvernement de
récupérer des montants, de sauver des sous, à toutes fins
pratiques.
Vous nous parlez de la perception automatique de pensions alimentaires.
D'accord, on sait très bien que c'est l'État, à toutes
fins pratiques, qui assume une bonne partie de la responsabilité quand
les gens ne paient pas leur pension alimentaire. Quand on regarde les chiffres
que vous nous donnez, 83 % des gens qui ont un emploi, de ces gens-là
qui, normalement, devraient assumer, payer, oui, je pense que c'est des mesures
qui pourraient... Ce n'est pas juste des demandes. Autrement dit, vous faites
des propositions qui pourraient éclairer le gouvernement et lui
permettre de sauver des montants.
On pense à l'équité salariale. Vous nous parlez de
la loi sur l'équité salariale. Bien sûr, quand on pense
à l'appareil de l'État, à la fonction publique, d'une
part, ça coûte des sous au gouvernement, mais, dans l'ensemble, et
ça, il y a des études là-dessus... Le comité
consultatif canadien avait fait une étude là-dessus. Il disait
très clairement qu'il y a des avantages économiques
énormes à avoir l'équité salariale. Parce qu'on le
sait très bien, les femmes récupérant le salaire qu'elles
devraient gagner, en fait, gagnant plus cher, ça leur donne un pouvoir
d'achat plus important qui retourne à l'économie. En même
temps, par rapport à l'assiette fiscale, il y a des retombées
aussi plus importantes. Autrement dit, il y a une façon aussi rentable.
C'est rentable pour l'État aussi d'en arriver à des mesures comme
celle-là.
Écoutez, je sais qu'on n'a pas beaucoup de temps. Mon
collègue de Montmorency avait quelques petites questions. Alors, je vous
remercie encore pour la présentation du mémoire.
Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la
députée.
Mme Carrier-Perreault: Oui, il reste deux minutes.
Le Président (M. Lemieux): Je vais permettre à M.
le député de Beauce-Nord de prendre la parole, eu égard
à la règle de l'alternance, et je vais revenir avec M. le
député de Montmorency.
M. Audet: Merci, M. le Président.
Alors, à mon tour de vous souhaiter la plus cordiale bienvenue.
Ayant l'occasion de rencontrer souvent les AFEAS dans un comté rural
où on a beaucoup d'organismes, c'est avec beaucoup de plaisir que je
m'entretiens avec vous aujourd'hui. Je vous remercie aussi pour votre
mémoire. Vous touchez des points, je pense, très
intéressants.
Maintenant, je veux juste apporter, peut-être, certains petits
éclaircissements. Vous parlez, évidemment, du rapport annuel du
Vérificateur général, par exemple. Vous dites qu'il
nous fait frémir. On est conscients de ça, au gouvernement aussi,
qu'il y a des lacunes, qu'il y a des choses à corriger,
évidemment. À cet égard-là, c'est pour ça
qu'à chaque année, on se fait un devoir d'entendre le
Vérificateur général en commission parlementaire. Et si,
aujourd'hui, je crois, le rapport du Vérificateur général
est plus connu, c'est parce que le gouvernement, d'ailleurs, accepte et
même se fait un devoir de l'entendre en commission parlementaire,
où les députés peuvent poser des questions. Ce n'est pas
ce qui se faisait dans le temps des gens de l'Opposition où ils
refusaient d'entendre le Vérificateur général, un petit
aparté, en passant. (17 h 20)
Quand vous parlez aussi des périodes fastes où il n'y a
pas eu de mesures souhaitées; il y a eu des mesures de redressement qui
ont été faites de sorte qu'en 1989-1990, si on regarde dans les
états du gouvernement, nous étions presque en équilibre
financier. Depuis de nombreuses années, ça ne s'était pas
vu beaucoup. Au niveau, par exemple, de ce qu'on appelle... pas des revenus
autonomes, mais du solde des opérations courantes, nous étions
presque en équilibre.
À cet égard-là d'ailleurs, nous avons
décidé, dans ce temps-là, de rétrécir
l'écart fiscal qui existait au point de vue de l'impôt des
particuliers. D'ailleurs, vous le mentionnez, qu'on a fait un effort à
cet égard-là pour réduire l'impôt des particuliers,
surtout les plus faibles, et les familles, entre autres, qui nous
préoccupent beaucoup. Cet écart-là, qui était de 10
% en 1985, a été rabaissé à environ 3 % et quelque.
Il y a eu aussi d'autres mesures qui ont été ajoutées, par
exemple, comme l'accessibilité à la résidence, qui
n'existait pas.
J'ai deux questions. Vous savez, pour avoir participé à la
commission presqu'à tous les jours depuis trois semaines, on parle
beaucoup d'appauvrissement de la société, de nos familles, par
exemple, d'appauvrissement davantage des plus démunis. Il y a une
question que je me pose pour être député d'un comté
rural. C'est que lorsqu'on regarde, par exemple, la répartition des
dépenses du gouvernement, quand on dit que la santé, parce que
vous dites dans votre mémoire, à la page 4 en haut, qu'il faut
être prudent, par exemple, au niveau de ces outils de
développement sociaux qu'on s'est donnés, il y a quelques
années, et vous dites, par exemple... si on regarde, par exemple, au
niveau de la santé, qui prend 31,4 % des dépenses, la
sécurité du revenu, l'aide sociale, 9,1 %, l'éducation,
25,2 %, mais quand on regarde la dette du gouvernement, parce que, dans le
passé, on a décidé de dépenser peut-être un
peu plus qu'on en avait les moyens, c'est un choix qu'on a fait, on vit avec
ça aujourd'hui, mais il en reste juste 22,2 %, à ce
moment-là, pour faire de la voirie, pour s'occuper de la condition de la
femme, pour s'occuper des garderies, pour s'occuper de nos forêts,
s'occuper de notre agriculture. pensons à tout ce qui reste après
la santé, l'éducation et tout ça. il n'en reste plus
beaucoup. ces 22 % là, assez souvent, c'est la partie presque
majoritairement qui est dépensée dans les régions.
Quand on parle développement régional... Pardon?
Le Président (M. Lemieux): En conclusion. Il vous reste
seulement une minute, M. le député de Beauce-Nord.
M. Audet: Alors, quand on parle de développement
régional, je pense, vous parliez, madame, tantôt, de nos jeunes,
de notre avenir et tout ça... Je pense qu'aujourd'hui, si on continue
comme ça, si on ne rediscute pas de ces acquis-là, plus tard, nos
jeunes n'auront plus les moyens de les avoir et de se les payer, parce qu'on
est en train de vivre aujourd'hui sur des choses qu'eux auront à payer
demain.
Une dernière question que je veux ajouter. Vous parlez aussi dans
votre mémoire qu'il y a d'énormes concessions fiscales pour les
riches, par exemple, dans l'exemption de l'impôt. Est-ce que vous avez
identifié certains abris fiscaux? Est-ce qu'on doit, par exemple,
enlever l'exemption de gain de capital pour un couple, par exemple, un couple
âgé, par exemple, qui décide de vendre sa maison? On sait
que c'est exclu; ça, ça fait partie du gain de capital. Il n'y a
pas d'imposition là-dessus. Souvent, ça fait partie du fonds de
pension d'un couple, hein? Alors, c'est
un abri fiscal, ça, qui touche tous les individus. On pense
aussi, par exemple, au Fonds de solidarité de la FTQ qui, on
annonçait récemment, a créé 6000 emplois.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Beauce-Nord, votre question, s'il vous plaît. Au fait, au fait.
M. Audet: Si vous pouvez répondre à ces deux
questions-là, j'aimerais ça. J'en aurais eu beaucoup d'autres
à vous demander, mais...
Mme Therrien: Je peux peut-être me permettre de
répondre sur les abris fiscaux. J'ai peut-être mal compris votre
exemple sur...
M. Audet: Si vous avez pensé à certains abris, en
particulier.
Mme Therrien: Oui. On a pensé, entre autres... Bon, vous
avez parlé des exemptions sur les gains de capitaux. Vous parlez des
personnes âgées qui vendent leur maison. À mon avis, ce
n'est pas un gain de capital. La résidence familiale, quand on la vend,
il n'y a pas de gain de capital dessus. C'est les maisons à revenus
seulement qui font un gain de capital, pas la résidence familiale. En
tout cas, chez nous, c'est comme ça que ça marche. Je ne sais pas
si je me trompe. Mais je pense que c'est un point qu'on a souligné dans
notre mémoire, l'exemption sur les gains de capitaux qui est quand
même assez élevée et qui profite évidemment aux
revenus. Je pense qu'il y aurait peut-être moyen de se pencher
là-dessus.
Évidemment, on parle aussi du plafond des RÉER qui,
actuellement, augmente d'année en année pour aller jusqu'à
quelque 12 000 $ dans les prochaines années. Je pense qu'encore
là ce sont des mesures qui profitent toujours aux personnes aux plus
hauts revenus. Je ne pense pas que les familles moyennes en
général puissent se prévaloir de la totalité de ces
exemptions-là. Je pense à une famille avec un revenu familial de
50 000 $ et trois enfants. C'est très difficile de mettre 5000 $ dans un
RÉER à chaque année, alors qu'en principe ils auraient
peut-être droit même à plus que ça, mais ils ne
peuvent pas le faire.
Alors, je pense que c'est des mesures qui profitent aux mieux nantis,
aux plus hauts revenus, et il y aurait peut-être lieu de réviser
ça, en particulier les gains de capitaux, je pense, l'exemption sur les
gains de capitaux.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Filion: Merci, M. le Président.
J'aimerais à mon tour, bien sûr, saluer les
représentantes de l'Association féminine d'éducation et
d'action sociale, l'AFEAS, pour leur travail, leur mémoire, leurs
idées et ce qu'elles suscitent également comme réflexion
pour la société.
C'est vrai qu'on a besoin chez nous au Québec de revoir la
politique familiale dans son ensemble, parce que je pense qu'elle est
très défaillante. On a l'impression que d'avoir des enfants, chez
nous, ça coûte plus cher et que l'État aide à ce que
ça coûte plus cher aussi. Il y a beaucoup de concepts à
revoir au niveau de la tarification, au niveau, par exemple... Plus vous avez
d'enfants, plus ça coûte cher, mais on ne pense pas à
alléger, pour la famille qui a plusieurs enfants, l'accès
à toutes sortes de services dans la société. Je pense
qu'il y a une réflexion en profondeur à faire dans ce
sens-là. Oui, vous avez raison de venir à cette commission et
d'apporter de nouveaux éléments pour qu'on puisse tout le monde
ensemble ici, à l'Assemblée nationale, réfléchir et
revoir les paramètres pour aider, bien sûr, la famille
québécoise à évoluer en fonction d'une nouvelle
qualité de vie et de nouveaux besoins dans la société.
Moi, j'aurais quelques questions, bien sûr, en matière de
fiscalité. C'est quand même une mesure qui a l'air anodine, qui
n'a pas l'air vraiment sans conséquence, mais je pense qu'elle a
beaucoup de conséquences. Vous dites: Que le gouvernement
québécois annule toutes taxes sur les vêtements, chaussures
d'enfants, couches, matériel scolaire et transport scolaire. Je pense
que ce genre de mesure là que vous demandez va dans le sens d'une
politique familiale. On veut avoir des enfants, on veut les éduquer, on
veut satisfaire leurs besoins essentiels, qu'ils aient une qualité de
vie, et je pense que ce genre de mesure là entre vraiment dans cet
esprit-là.
J'aimerais que vous m'expliquiez comment c'est perçu parce que,
comme vous dites, vous êtes une association de terrain. Pour avoir
moi-même participé à plusieurs séminaires avec des
groupes pour essayer de donner de la formation, j'aimerais que vous nous
expliquiez comment c'est perçu, actuellement, sur le terrain ce genre
d'irritant fiscal là, parce que tous les mémoires qu'on a
entendus venaient exprimer un peu à leur façon comment on
percevait la fiscalité au Québec, actuellement. J'aimerais vous
entendre sur le comment on perçoit cette mesure et cet irritant fiscal,
actuellement.
Mme Labrecque-Marcoux: C'est une mesure, en tout cas, au niveau
de la famille... C'est sûr que c'est avec beaucoup de déception
que les familles, au Québec, ont été touchées par
cette mesure-là. Parfois, on a le sentiment que, même si le
gouvernement du Québec, présentement, a fait des efforts au
niveau d'apporter un certain soutien à la famille, ce qu'il donne d'une
main, il le retire de l'autre.
Ce qu'on peut constater, il y a des familles, présentement, qui
reçoivent une forme d'aide,
mais il y a toute la classe moyenne qui s'appauvrit de jour en jour. Ce
que nos membres nous disent, présentement, c'est que ce n'est plus
possible, ça, là, de penser qu'il y a juste eux autres, parce que
vous êtes capable d'aller chercher à la source les impôts et
ils n'ont pas les moyens et la force, à ce moment-là, de pouvoir
réagir. Ils n'ont pas aussi, je dirais, le soutien nécessaire,
parce qu'une famille, c'est quelqu'un d'isolé, à quelque part, si
elle ne se retrouve pas dans des groupes de soutien. Alors, à partir de
ce moment-là, cette taxe-là est venue les toucher.
Moi, je sais, je vois des familles, je vois des hommes et des femmes
qui, à l'heure actuelle, au niveau des vêtements des enfants, au
niveau des biens essentiels au niveau de la famille, sont privés. Et
ça, je pense qu'on a une responsabilité sociale. On aura beau
penser avoir... Je nous entends parler depuis tout à l'heure qu'il faut,
effectivement, au niveau financier, bon, ne pas laisser de dettes à nos
enfants. Les membres AFEAS sur le terrain sont bien en accord avec ça,
mais ce qu'ils trouvent le plus difficile, et je vous le redis, c'est que c'est
aux mêmes personnes que, souvent, on le demande.
Au niveau de la fiscalité, il faudrait peut-être s'assurer
que, quand on parle de soutien aux familles, une mesure comme celle-ci n'a pas
été un soutien pour la famille. Ça a été
l'inverse, et on trouve regrettable, et ça, je vous le redis. D'un
côté, on semble vouloir aider la famille et, de l'autre
côté, on a des mesures qui font qu'elle se sent de plus en plus
pressurée de tous bords et de tous côtés. Ça, je
pense que ça a des impacts au niveau de la famille comme telle et au
niveau de la société. (17 h 30)
Vous savez, le père de famille et la mère de famille,
à l'heure actuelle, qui voient à tous les jours qu'ils
s'appauvrissent et qu'ils s'endettent, au Québec, qui sont dans la
classe moyenne, ils se disent: Quand est-ce que, nous autres, on va faire
partie de ceux qu'on a marginalisés et qu'on appelle les gens sur le
bien-être social et les gens sur le chômage?
Le Président (M. Lemieux): Madame, je m'excuse. Je vous
remercie. Malheureusement, nous avons déjà dépassé
largement notre temps. Alors, nous vous remercions de votre participation
à cette commission parlementaire.
J'inviterais le prochain groupe, il s'agit du Réseau d'action et
d'information pour les femmes, à bien vouloir prendre place à la
table des témoins.
Oui, M. le député de Verdun.
M. Gautrin: M. le Président, je vois que vous êtes
revenu... Ah! Vous avez suspendu?
Le Président (M. Lemieux): Nous allons suspendre quelques
instants et nous allons reprendre dans deux minutes.
(Suspension de la séance à 17 h 31)
(Reprise à 17 h 32)
Le Président (M. Lemieux): Nous reprenons nos travaux pour
entendre le Réseau d'action et d'information pour les femmes.
M. le député de Verdun.
M. Gautrin: M. le Président, je vois que vous êtes
revenu à la présidence et j'imagine que vous êtes
maintenant en mesure de rendre votre décision sur la motion qui avait
été déposée par la députée de
Taillon.
Le Président (M. Lemieux): Effectivement...
M. Gautrin: Alors, M. le Président, je brûle
d'impatience de connaître votre décision, est-ce que vous pourriez
nous la rendre?
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Verdun. Effectivement, je suis prêt à
rendre cette décision et la voici immédiatement.
Décision du président sur la
recevabilité de la motion
Mme la députée de Taillon a invoqué tout
particulièrement l'article 158 de nos règles de procédure
qui stipule qu'«en commission les motions ne requièrent pas de
préavis.» L'expression «sans préavis» indique
qu'il n'y a pas de délai ou de forme prescrite pour présenter une
motion. Le «Petit Robert», dans son sens littéral, nous
donne une définition de l'expression «sans préavis»,
et il la définit ainsi: «Avertissement préalable».
À titre d'exemple: «...la partie qui prend l'initiative d'une
rupture du contrat de travail est tenue de donner à l'autre partie, dans
un délai et des conditions déterminées», un
avertissement.
La question qu'il est important de se poser est de déterminer si
une telle motion, dans un premier temps, peut être
présentée, comme l'a laissé entendre Mme la
députée de Taillon, à n'importe quel moment. Le fait qu'il
n'y ait pas de forme prescrite pour présenter une motion en commission
ne veut pas dire qu'à tout moment il peut être opportun de la
présenter. Il faut s'attacher à la nature même de la
motion. C'est la nature même de la motion qui détermine le moment
qui la rend recevable ou pas. L'expression «ne requièrent pas de
préavis», à l'article 158, signifie qu'il n'y a pas
d'inscription, à titre d'exemple au feuilleton, pas de procédure
formelle de préavis, de présentation d'une motion comme l'indique
notre règlement et comme c'est
le cas en Chambre pour plusieurs dispositions du règlement qui
nous indiquent qu'on ne peut pas présenter n'importe quelle motion
à n'importe quel moment. À titre d'exemple, pour la
présentation de cette motion, Mme la députée de Taillon
n'avait pas à me signifier à moi ou au secrétaire qu'il
était de son intention de présenter cette motion ou de l'indiquer
à l'ordre du jour.
Sans juger de la recevabilité de cette motion, la question que je
me dois de me poser en est une d'opportunité: Cette motion peut-elle
être présentée à ce stade de nos travaux? Va-t-elle
à rencontre de notre règlement? Est-ce qu'elle constitue un
empêchement à l'ordre du jour que nous avons adopté et dont
l'objet est que nous ayons à tenir une consultation
générale?
Dans le présent cas, notre mandat est prioritaire en vertu de
l'article 146; il s'agit d'entendre des organismes en vertu des articles 166 et
167. L'ordre de la Chambre est impératif de tenir cette consultation, et
nous nous devons de la faire.
La jurisprudence, et de manière constante en vertu de l'article
170, nous Indique que dans ce cadre-là une telle motion, de par sa
nature, vise à obtenir des documents sans que j'aie à juger comme
tel de sa recevabilité et qu'elle peut être
présentée en début de séance, à moins que le
règlement le permette ou que la nature même de la motion
l'indique. La débattre à ce moment irait à rencontre du
règlement de l'ordre du jour adopté ce matin et constituerait une
entrave au bon déroulement des travaux. Le moment approprié
pourrait être de faire référence à l'article 176 de
notre code où, au début d'une séance, cette façon
de procéder est reconnue par l'ensemble de nos projets, lorsqu'il s'agit
de projets de loi publics, et il ne constitue pas une entrave à nos
travaux. Ici, le déroulement d'une telle requête empêcherait
que nous menions à bien le mandat qui nous a été
confié.
Pour ce qui est de la jurisprudence citée par Mme la
députée de Taillon, j'en ai pris connaissance, et toutes,
à l'exception d'une seule, ont été
présentées dans le cadre de l'étude
détaillée d'un projet de loi à l'étape des motions
préliminaires, donc, au moment opportun, sauf une seule jurisprudence,
sauf celle de la commission spéciale où ici, à l'article
12. le président avait un cadre bien défini et n'avait pas
à faire adopter l'ordre du jour, et avis avait été
donné à la commission spéciale qu'elle ne pouvait y
déroger que du consentement unanime de ses membres. L'encadrement
procédural était totalement différent, et j'ai pris la
peine de vérifier l'article 12 du projet de loi 150, Loi sur le
processus de détermination de l'avenir politique et constitutionnel du
Québec, de même que l'autre article pertinent, qui est l'article
22. L'article 12 conférait au président une très grande
discrétion en ce qui a trait à l'organisation des travaux.
Par contre, le plan de travail devait tenir compte de motions qui
pouvaient être présentées et adoptées en vertu de
l'article 22, soit des motions commandant des études ou proposant qu'on
mène des consultations afin d'entendre les personnes ou organismes
intéressés. Dans ce cadre-là, il était tout
à fait normal que la motion qui avait été
présentée par le député de Lac-Saint-Jean soit
adoptée.
En conséquence, considérant que le moment opportun pour
présenter cette motion n'était pas le moment approprié,
cette requête, cette motion présentée par Mme la
députée de Taillon est jugée irrecevable pour le
moment.
M. le député de Montmorency.
M. Filion: M. le Président, une commission s'exprime par
le dépôt de motions pour débattre de sujets ou de
changements législatifs. C'est le moyen que l'on a, les parlementaires,
de s'exprimer. Lorsque l'on adopte un ordre du jour, il n'est jamais
mentionné d'aucune façon à la commission qu'il va y avoir
une motion à débattre. Alors, comment un parlementaire peut-il
arriver, à l'intérieur d'une commission comme la nôtre,
à s'exprimer via son droit fondamental qui est la motion?
Le Président (M. Lemieux): Très simplement.
Très simplement, M. le député de Montmorency, comme je
vous l'ai indiqué dans ce jugement. Demain matin, au début de la
séance, avant l'adoption de l'ordre du jour, rien ne vous empêche
de présenter cette motion, vous pouvez très bien le faire. Et en
plus, non seulement nous avons adopté cet ordre du jour, ce qui
n'était pas le cas dans la décision Brassard.
Dans la décision Brassard - et j'ai pris le temps de la lire - ce
qui s'est passé en vertu de l'article 12 et des articles 21 et 22 de la
loi 150, c'est que l'Assemblée n'avait pas à adopter cet ordre du
jour; elle n'était pas liée par l'ordre du jour comme c'est le
cas ici présent, et on ne pouvait y déroger que du consentement,
que du consentement unanime de la commission. Or, ce n'est pas le cas ici.
C'est donc dire que vous pouvez vous exprimer par motion en autant que le
moment est opportun; et là, si le moment est opportun, j'aurai à
juger sur le fond, à savoir, dans un premier temps, si elle est
recevable ou pas. Vous pouvez le faire ici, vous n'avez pas
d'empêchement.
En plus, on a un mandat prioritaire de l'Assemblée et, ça,
je dois en tenir compte. Le mandat prioritaire de l'Assemblée, l'ordre
qu'on me donne à moi, c'est de me dire: M. le Président, vous
avez une responsabilité au niveau de l'organisation des travaux et votre
première responsabilité, c'est d'exécuter le mandat qu'on
vous a donné, et il ne doit pas y avoir d'empêchement à
faire en sorte que ce mandat puisse être exécuté dans le
délai imparti. Et, en ce sens-là, on n'empêche pas un
parlementaire de
s'exprimer, comme c'est son cas, par voie de motion, mais il s'agit
qu'il choisisse le bon moment.
M. Filion: M. le Président, vous avez bien indiqué
dans votre jugement que vous avez rendu une décision sur
l'opportunité.
Le Président (M. Lemieux): L'opportunité, oui.
M. Filion: Vous n'avez pas regardé la possibilité
de la recevabilité. (17 h 40)
Le Président (M. Lemieux): Non, non. À partir du
moment... Vous le savez, vous êtes avocat comme moi, vous avez pris des
injonctions. À partir du moment où une des premières
étapes n'est pas remplie, je n'ai pas à m'inter-roger sur la
seconde étape. Pourquoi est-ce que je m'interrogerais sur la seconde
étape du processus puisque j'en arrive à la conclusion qu'au
niveau de l'opportunité la requête n'est pas acceptable? Je n'ai
pas à me prononcer sur le fond de la requête.
M. Filion: M. le Président, ce que je comprends de votre
décision...
Le Président (M. Lemieux): J'aurais envie de vous citer
l'article 42. Vous savez, ma décision est rendue, mais je vais
être un petit peu plus libéral.
M. Filion: M. le Président, c'est une question de
directive. Écoutez, on essaie de comprendre; depuis le début de
la commission qu'on essaie d'apporter plus de transparence au débat des
finances publiques. On essaie d'amener le plus d'information possible. On a
même télévisé les débats pour que les gens
comprennent mieux ce qui se passe dans notre société sur le plan
de l'économie, ce pourquoi on leur demande de payer beaucoup
d'impôts. Et là on en arrive à essayer d'amener le plus
d'information, la plus pertinente, à travers des motions pour qu'on
débatte vraiment de chiffres qui existent, d'information
financière qui existe, et on n'arrive pas à cette transparence,
M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency, je reconnais votre habileté d'avocat. Vous êtes bien
conscient...
M. Filion: Fiscaliste, M. le Président. Je suis comptable
agréable, moi.
Le Président (M. Lemieux): ...que vous êtes sur le
fond comme tel de la requête, et je vois que vous me faites un signe.
Oui? Alors, je n'ai pas à discuter du fond de la requête. C'est
très habile de votre part, mais je ne m'embarquerai pas
là-dessus. J'ai rendu cette décision au niveau de
l'opportunité, on va s'arrêter là. M. le
député de Beauce-Nord.
M. Audet: simplement, m. le président, dans la mesure
où la motion exprime un souhait qui est assez imprécis, je pense
qu'il peut comporter certains dangers.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Beauce-Nord, vous n'êtes pas sur l'opportunité, vous êtes
directement sur le fond de la requête.
M. Audet: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Et je ne veux pas vous entendre
là-dessus, je n'ai pas eu à décider du fond de la
requête.
M. Audet: Non, je sais, mais je veux juste ajouter...
Le Président (M. Lemieux): Vous savez. Alors, qu'est-ce
que vous voulez me dire?
M. Audet: Je veux juste ajouter à la décision que
vous avez rendue. Vous en ferez ce que vous voudrez. Mais l'article 162 dit
qu'«un document ne peut être déposé en commission
qu'avec la permission de son président». D'accord. Vous avez
discuté de l'opportunité. Puisqu'on ne connaît pas ces
documents-là, est-ce que ça ne confirme pas ce que vous venez de
dire, que c'est inopportun de présenter une telle motion dans la mesure
où ça peut mettre en danger l'intérêt public,
puisqu'on ne connaît pas ces documents?
Le Président (M. Lemieux): Non. M. le
député de Beauce-Nord, vous vaguez dans les hypothèses,
c'est là une question qui est purement hypothétique, et nous
arrêtons le débat immédiatement. La décision a
été rendue, elle est finale, et j'ai bien indiqué à
l'Opposition officielle que c'était strictement une question
d'opportunité, que je n'ai pas statué sur le fond de la
requête.
Et nous sommes prêts, mesdames, à vous entendre
immédiatement. Voici le déroulement de la procédure.
J'aimerais demander au porte-parole de votre organisme de bien vouloir
s'identifier, de présenter la personne qui l'accompagne. Le
déroulement est de la façon suivante: Nous disposons globalement
d'une heure, 20 minutes pour la présentation de votre mémoire.
Suivra une période de 40 minutes d'échanges entre les deux
formations politiques: 20 minutes pour le parti ministériel et 20
minutes pour le groupe de l'Opposition.
Nous sommes prêts à vous entendre. On s'excuse, madame, de
ce retard, mais vous devez comprendre que nous sommes en démocratie, et
c'est avec raison que l'Opposition officielle peut se prévaloir des
règles qui sont les siennes, qui
est le Code de procédure, de même que les
ministériels. Nous vous écoutons.
Auditions (suite)
Réseau d'action et d'information pour les
femmes (RAIF)
Mme Dolment (Marcelle): Je vous présente Lili Audet, du
Réseau d'action et d'information pour les femmes. Moi, je suis Marcelle
Dolment. Malheureusement, nos deux autres membres sont au travail et n'ont pas
pu se présenter comme elles le devaient, mais il y en a d'autres dans la
salle qui nous appuient. Lili, si tu veux commencer.
Mme Audet (Lili): Avis général. Bien que tous les
gouvernements se plaignent du manque de fonds pour financer les services que
nos taxes et nos impôts sont censés payer, le Réseau
d'action et d'information pour les femmes (RAIF), et sans doute plusieurs
autres organismes ainsi qu'une bonne partie de la population, estime qu'il y a
suffisamment d'argent pour donner à la population le niveau et la
qualité de services qu'elle est en droit d'attendre, compte tenu du
niveau de prélèvement qu'on lui impose.
Si nous sommes dans une telle impasse actuellement, c'est que l'argent
de nos taxes a été mal géré, à commencer par
le ministère du Revenu, dont les carences sont énormes et fort
inquiétantes, puisqu'on ne s'y préoccupe même pas d'envoyer
des reçus, comme on le fait au fédéral lors de paiements.
Avec le résultat que la comptabilité se fait au petit bonheur,
avec les erreurs graves que l'on devine. C'est que la fiscalité est
profondément injuste, réservant ses avantages les plus
intéressants aux investissements, REER, gains de capitaux et autres,
dont seuls peuvent profiter les gens bien nantis, qui comptent
proportionnellement plus de célibataires que de parents, car avoir des
enfants appauvrit. On taxe outrageusement les vêtements et chaussures
d'enfants et la garde-robe des mères qui doivent la renouveler à
chaque enfant.
C'est aussi que l'argent recueilli par le gouvernement, notre argent, a
été jeté par les fenêtres, dans des initiatives sans
avenir comme: la papeterie de Matane, l'amiante, Tricofil, le Stade olympique
et son fameux toit. Et là, maintenant, en pleine débandade
économique et contexte criminel, un casino de 80 000 000 $
destiné à la faillite commerciale ou à la magouille de la
pègre, s'il veut survivre, pendant qu'il laisse nos équipements
collectifs, hôpitaux, routes et autres se détériorer au
point de devenir dangereux.
Sans crédibilité, le gouvernement ne pourra rien. Comment
le gouvernement veut-il que la population le prenne au sérieux, se serre
la ceinture et cesse de travailler au noir quand il donne lui-même un si
mauvais exemple? À commencer par les dépenses non
contrôlées des députés, les primes au rendement
princières accordées aux hauts fonctionnaires, les subventions au
stationnement des employés de l'État. Plusieurs témoins
à cette commission vous l'ont dit: Si vous n'obtenez pas la
collaboration de la population en la convainquant par l'exemple, les
compressions proposées n'auront aucun succès, car elles seront
contournées.
La plupart des mémoires ont mis l'accent sur l'emploi, en soi, et
pour renflouer les coffres de l'État. Mais à quoi sert-il de les
renflouer si c'est pour voir notre argent dilapidé auprès
d'aventuriers de la finance en qui le gouvernement met sa confiance, on ne sait
trop pourquoi, sinon qu'ils sont du Québec? Plusieurs
préfèrent alors garder l'argent pour eux, par le travail au noir
ou la fraude fiscale, plutôt que de le voir servir à
démembrer et mettre en faillite nos industries par l'incurie
gouvernementale. L'assainissement de nos finances commence donc par un examen
de conscience du Conseil des ministres sur ses récentes politiques
d'entrepreneur et de courtier d'entreprises.
La cause de la récession. Quant aux emplois
réclamés, nous ne croyons pas que ce soit le gouvernement qui
puisse les fournir, sauf par ses travaux publics, ce n'est pas son rôle,
mais les institutions prêteuses peuvent aider à les créer.
Malheureusement, les banques, fiducies, caisses diverses ont au contraire
frileusement et dangereusement resserré le crédit aux gens
ordinaires solvables et aux petites entreprises sérieuses avec une
rigidité catastrophique, alors qu'ils ont ouvert leurs portes toutes
grandes à des développeurs imprudents et mégalomanes, dont
les châteaux de cartes se sont effondrés, entraînant des
faillites en série dans les petites entreprises et un chômage
désastreux. Et si la récession est mondiale, c'est que ce
comportement des banquiers s'est retrouvé dans tous les pays
industrialisés.
Il s'agit donc pour le gouvernement, s'il veut relever le niveau des
emplois, de convaincre les institutions financières de modifier leur
évaluation de crédit surtout envers les femmes qui sont, ne
l'oublions pas, celles qui ont mis sur pied le plus de petites entreprises ces
dernières années. Or, tous les économistes le savent, ce
sont les petites entreprises qui créent le plus d'emplois et qui
constituent le tissu économique le plus solide. Ce sont aussi les femmes
qui sont les responsables de la consommation sur le marché
domestique.
Mieux distribuer l'argent entre les hommes et les femmes, une source de
prospérité. Pour faire rouler l'économie, il saute donc
aux yeux qu'il faut mettre le plus d'argent possible dans les mains des femmes.
Or, qu'a fait le gouvernement? Le contraire du bon sens économique et de
l'équité. Il a attendu 15 ans après toutes les autres
provinces pour accorder aux femmes le droit naturel d'avoir la moitié
des biens familiaux, les vouant ainsi trop souvent à l'aide
sociale au moment du divorce. Qu'on ne s'étonne donc pas que le
Québec soit l'avant-demière province au Canada quant à la
pauvreté, d'autant plus que le gouvernement s'est refusé et se
refuse encore à faire du service de saisie existant un véritable
service de perception des pensions alimentaires, c'est-à-dire un service
universel couvrant donc les bons et les mauvais payeurs, obligatoire afin
d'éliminer les pressions indues entre conjoints, menaçant
même et automatique, avec déduction à la source dès
le jugement prononcé et pour toute la durée de l'ordonnance,
évitant ainsi les coûteux va-et-vient actuels. (17 h 50)
L'Ontario, plus préoccupée de son économie et plus
sensible au sort des femmes que le Québec, a vite réalisé,
elle, comme l'avait fait le Manitoba et comme le font de plus en plus
d'États américains, qu'il est très onéreux et
injuste pour les contribuables de devoir se substituer aux parents
délinquants. On dit vouloir responsabiliser la population, mais
responsabilise-t-on les pères quand on les laisse semer sur leur chemin
une, deux ou trois familles qu'il reviendra aux autres Québécois
et Québécoises de faire vivre en leur lieu et place? Et qu'est-ce
à dire des conséquences immédiates, encore plus
coûteuses à moyen terme socialement et économiquement:
révolte, dépression, démobilisation de la mère qui
se voit appauvrie ou réduite à l'aide sociale, attitude qui
risque de se transmettre aux enfants, décrochage scolaire ou
désintérêt et absentéisme des enfants qui doivent
travailler pour se payer le nécessaire.
Donc, il est urgent, il est prioritaire d'avoir un service de perception
des pensions alimentaires automatique, universel, obligatoire et efficace. Il
faudrait aussi que les juges se recyclent afin d'accorder des pensions
alimentaires et des mesures compensatoires réalistes si on ne veut pas
que la misère s'accroisse encore plus au Québec.
Il y a aussi d'autres avenues pour répartir plus
équitablement, et surtout plus également, l'argent entre les
hommes et les femmes: 1° l'équité salariale,
évidemment; 2° le partage de la maison familiale entre les conjoints
de fait quand il y a des enfants et droit aussi à des mesures
compensatoires pour la mère dans ce cas, car il ne doit y avoir aucune
distinction pour l'essentiel entre parents mariés et parents non
mariés, pas plus qu'il n'y en a entre enfants de parents mariés
et enfants de parents non mariés; 3° le partage automatique des
prestations d'aide sociale entre les conjoints et non plus au choix, ce choix
n'étant pas vraiment libre quand le rapport de force est inégal;
4° le partage automatique des rentes à 65 ans entre les conjoints au
prorata des années de mariage, comme on le fait pour le divorce; 5°
l'assurance obligatoire de la part du débiteur de la pension alimentaire
en cas de décès, un décès qui risque de plonger la
mère dans les problèmes financiers depuis que l'assu- rance-vie
prise durant le mariage tombe automatiquement en cas de divorce; 6e
le transfert du crédit d'impôt de la personne mariée
à la personne qui en est la source, généralement la femme,
crédit qui deviendra alors remboursable; enfin, la cessation de la
criante discrimination envers les prestataires d'aide sociale
hétérosexuels qui vivent avec un conjoint qui a des revenus, ou
hétérosexuel; le sort des hommes n'a rien de comparable à
celui des femmes dans cette situation, car le rapport des forces est toujours
en faveur de l'homme, même lorsque c'est lui qui est sans revenu.
À noter qu'on ne refuse pas l'assurance-chômage, une autre forme
de soutien du revenu, aux conjointes dans cette situation. On ne refuse pas non
plus la pension de vieillesse à une femme dont le conjoint a des
revenus.
Les programmes fédéraux bâtis sur l'unité
individuelle respectent, eux, l'autonomie des conjoints, donc la dignité
de l'être humain et sa sécurité, contrairement aux
programmes provinciaux, encore imbus des anciennes conceptions du couple
où on rend la femme dépendante de l'homme, malgré une
égalité factice dans leur application. Encore une fois, il faut
souligner les conséquences économiques graves, à moyen
terme, de cette révoltante réglementation de l'aide sociale,
assortie de ces honteux boubous macoutes où on refuse la dignité
et la protection d'un revenu autonome aux femmes, au point de les emprisonner
si elles ont osé contrevenir à cet édit inhumain; on se
croirait presque en Iran.
L'autre conséquence à moyen terme, leur élimination
de la carte sociale prive ces conjointes de programmes de formation, de
recyclage. On les conditionne donc, et leurs filles, par l'exemple, à se
faire vivre par un homme. Voilà le message qu'on leur transmet. Entre
deux relations hétérosexuelles, elles se tournent vers l'aide
sociale. On déplore, au gouvernement, le coût du programme du
soutien du revenu, alors qu'on l'augmente consciemment en maintenant dans la
dépendance et le risque de la violence la partie la plus
vulnérable de la population, les conjointes sans revenu. C'est difficile
à comprendre.
Les programmes sociaux. Le document «Vivre selon nos moyens»
du gouvernement estime que nos programmes sociaux sont trop dispendieux. Le
gouvernement a raison, ces programmes auraient besoin d'une cure
d'amaigrissement, mais le gouvernement lui-même, avec ses multiples
ministères et organismes... Avant d'opérer, il faut distinguer ce
qui est essentiel de ce qui est supplémentaire, et ce qui est
équitable de ce qui ne se justifie pas. De toute évidence, il n'y
a rien de plus essentiel qu'un revenu minimum, car il faut bien, dès la
naissance, se nourrir, se vêtir, se loger. De là les multiples
formes de revenu minimum déjà garanti par l'État sous
diverses formes: actives, comme les allocations familiales, l'aide sociale,
les
pensions de vieillesse, les prêts et bourses; négatives,
comme les crédits d'impôt personnels de base et les crédits
de personne mariée.
On ne peut donc toucher à ces dépenses, même si le
fédéral l'a fait, en éliminant les allocations familiales
et les crédits d'impôt pour enfants, ce qui prive les enfants des
classes moyennes de leur revenu garanti et de leur filet de
sécurité quand le père alcoolique, violent ou mesquin
refuse le nécessaire à ses enfants malgré ses revenus.
Le gouvernement du Québec ne doit absolument pas suivre ce
dangereux exemple. Qu'on coupe le crédit de personne de base, forme de
revenu minimum, de celui qui a des revenus avant de toucher au mince revenu
minimum de l'enfant.
Cependant, le gouvernement doit administrer équitabfernent et
économiquement ses programmes de revenu minimum garanti
déjà existants, comme nous le soulignions, en les
intégrant sous une seule dénomination afin de rationaliser le
tout, d'éviter les dédoublements, tes injustices et les frais
d'administration astronomiques.
Certaines personnes ont, sans qu'il n'y paraisse, à cause de noms
différents, de ce soutien jusqu'à trois unités de revenu
minimum garanti. On y verrait plus clair avec une véritable formule de
revenu minimum garanti adaptée à nos moyens, évidemment.
Des centaines de millions de dollars pourraient être
économisés avec un programme de revenu minimum garanti
intégré.
Le fait qu'actuellement les conjointes sans revenu voient leur portion
de revenu minimum garanti profiter à leur mari qui a déjà
le sien pourtant fait en sorte qu'il serait inacceptable et dangereux d'exiger
un ticket modérateur pour avoir accès aux soins de santé,
car, sans aucun revenu, que fait une femme malade à qui son mari refuse
le montant du ticket modérateur?
Aucun des mémoires, et encore moins le gouvernement, n'ont
mentionné l'existence de ce «quart monde» des femmes sans
revenu qui sont pourtant les plus démunies et les plus
vulnérables de toutes. Par contre, il y a des programmes sociaux dont la
générosité et l'accessibilité sont si
exagérées et non avenues qu'ils risquent de faire s'effondrer
tout le système d'aide si on n'y met pas un bon ordre en révisant
la pertinence de chacun de leurs éléments.
Sans entrer dans les détails, disons tout de suite qu'il n'y a
aucune raison pour qu'en ces temps de libre contraception, où les
couples n'ont plus nécessairement des enfants comme avant, les individus
d'un couple soient plus favorisés et plus protégés que les
autres individus. Seuls les parents, maries ou non, devraient désormais
avoir accès aux bénéfices sociaux et aux dépenses
fiscales actuellement consentis aux couples sans enfant, sans aucune raison
valable, l'amour et le sexe étant du domaine privé, alors que la
parentalité, elle, est sociale et éminem- ment productive pour
l'État. En plus, elle défavorise économiquement les
parents par rapport aux non-parents, ce qui appelle compensation si on veut
être équitables, mais une compensation réaliste et non
politique ou nataliste, comme le fait le gouvernement du Québec avec ses
allocations familiales qui font un bond au troisième enfant, au lieu
d'aider pour les dépenses du premier, celui-ci coûtant tellement
plus cher. Encore une fois, le gouvernement se tire dans le pied, car les
femmes qui tombent dans le panneau du troisième enfant pour toucher les
primes devront souvent laisser leur travail. S'il y a divorce, elles risquent
de se retrouver à l'aide sociale encore une fois, les garderies
étant souvent inaccessibles.
Les programmes qui accordent des avantages aux conjoints mariés
ou de fait étant multiples (CSST, assurance auto, rentes, allocations de
conjoint survivant et autres), en plus de l'impôt qui leur accorde toutes
sortes de privilèges (REER, transferts des crédits
inutilisés), les montants récupérés iront chercher
dans les centaines de millions, sinon les milliards de dollars, même si
on tient compte des dépenses accrues d'aide sociale pour les conjointes
quand elles vivent avec un conjoint désormais non discriminé,
nous l'espérons, donc traité sur le même pied que les
homosexuels et les lesbiennes. Et, économie supplémentaire
à long terme si les femmes se recyclent, réduction des effectifs
de boubous macoutes, en plus d'assainir le système et l'air.
Donc, nous recommandons que seuls les conjoints et les conjointes avec
enfants aient accès aux avantages actuellement consentis aux conjoints
en général, peu importe leur statut légal, exception faite
des conjointes sans enfants qui se sont mariées avant 1981, car alors la
loi obligeait l'homme à faire vivre la femme et celle-ci était
obligée de, bloquée sur le marché du travail. (18
heures)
Mme Dolment: Programme d'assurance. Quant aux programmes
d'assurance, ils doivent être clairement désignés quand on
les finance par l'impôt afin qu'on ne soit pas tenté de les faire
payer deux fois, comme on tente de le faire actuellement avec
l'impôt-services. Ainsi, le ticket modérateur, qui est
l'équivalent d'un déductible en assurance, est inacceptable parce
qu'il bloquerait les femmes sans revenus et qu'il serait, selon l'Association
des hôpitaux, incontrôlable et trop coûteux à
administrer. Il vaut mieux, si on veut récupérer de l'argent en
santé, réduire considérablement le programme
complémentaire de médicaments et contrôler ces abus encore
plus qu'avec le timide 2 $ requis depuis peu pour chaque prescription, avec un
plafond de 100 $.
Le RAIF recommande donc qu'une somme de 3 $ soit demandée pour
chaque prescription et que le plafond soit haussé à 150 $ ou
même 200 $, indexé annuellement pour les revenus de
moins de 35 000 $, mais qu'à partir de 35 000 $ les
médicaments ne soient plus couverts. Par contre, les médicaments
pour les enfants de 12 ans et moins seraient gratuits. Bien des parents
préfèrent retourner à l'aide sociale pour avoir
accès à cette aide. Cette modification au programme
complémentaire de médicaments va, malgré tout,
opérer des économies importantes qui pourront aider à
couvrir les soins de plus en plus nombreux et exigeants
nécessités par les personnes âgées. En
définissant ainsi où va l'argent des coupures, celles-ci seront
mieux acceptées par la population visée. Il faudrait aussi
expliquer que ce programme de médicaments ne faisait pas partie de
l'assurance-maladie initiale. C'est une extension mal avisée qui
n'aurait jamais dû être ajoutée, car elle n'était pas
justifiée. Elle a fait monter les prix des médicaments de
façon vertigineuse en plus d'avoir entraîné l'abus des
médicaments, prescriptions et consommation ainsi que la
dégradation des consultations médicales où la prescription
de médicaments remplace souvent le diagnostic ou l'échange
fructueux entre médecin et consultant ou consultante.
Les contrôles. Sans la signature du formulaire de prestation de
services de santé, les abus continueront. Elle devrait être
exigée pour chaque prestation de services. Deuxièmement, envoyer
à chacun et à chacune un bilan annuel des soins de santé
reçus sensibilisera la population à ces coûts. D'ailleurs,
plusieurs mémoires ont demandé ce contrôle. La carte
d'assurance-maladie avec photo est un début de contrôle longtemps
dû, mais elle devrait s'étendre aux enfants de 6 ans à 14
ans, car de nombreux enfants étrangers de cet âge se font soigner
gratuitement dans nos hôpitaux, selon ce que nous disent les
infirmières. Pour les enfants de moins de 6 ans, la carte avec photo
d'un des parents ou une autre modalité devra identifier l'enfant. Une
réorganisation de l'accès aux services exige, actuellement, de
passer par les mains de deux et même trois médecins et de deux ou
trois infirmières avant d'arriver à la personne qui nous donnera,
effectivement, le soin. Une meilleure efficience couperait les coûts du
tiers.
On pourrait économiser au budget de l'éducation en
éliminant l'enseignement religieux, qui n'a pas sa place dans les
écoles, surtout dans le contexte pluraliste actuel, et l'État ne
doit plus subventionner les écoles privées confessionnelles. Pour
mieux assurer l'avenir de nos jeunes et contrer le climat de violence et
d'indiscipline dans les écoles, il serait urgent d'instaurer des mesures
spéciales pour les fauteurs de troubles permanents afin que, dans les
classes régulières, les autres étudiants puissent suivre
leur cours et que les professeurs voient diminuer le stress qui les obligent
souvent à prendre des congés de maladie fort coûteux.
Par contre, certains luxes pourraient être une source
intéressante de revenus, par exemple des plâtres colorés et
le reste, mais non pas les frais de nourriture servie en chambre, non plus que
des frais d'hôtellerie de base, car le loyer continue de devoir
être payé. Le maintien des services d'animateurs sociaux...
Excusez, ça, ça allait avec les coûts de
santé. Alors, là, je reviens à l'éducation.
Le maintien des services d'animateurs sociaux et de professionnels non
enseignants serait en outre non pas une dépense mais un investissement
précieux pour faire de l'école un milieu de vie stimulant.
Et autres recommandations: Imputabilité; suivi du rapport du
Vérificateur général; commission parlementaire publique
quand il y a déficit d'organismes gouvernementaux; obligation pour les
compagnies d'investir ici et de remettre leurs subventions si elles quittent
avant 10 ans de l'obtention de la subvention.
Fiscalité. En fiscalité, transfert du crédit
d'impôt de la personne mariée à la personne qui en est la
source; déduction pour frais de garde lors de cours universitaires ou
collégiaux; déduction des frais légaux lors de l'obtention
d'un divorce assorti de pension alimentaire; réduction du plafond du
REER, qui coûte très, très cher, le REER; abolition des
avantages pour les conjoints sans enfants, sauf si mariés avant 1981;
abolition de la déduction de 100 000 $ pour les gains en capitaux;
abolition des exemptions pour les religieux et les religieuses; production de
reçus de caisse enregistreuse pour réclamer les frais de
restaurant sur un compte de dépenses déductibles; pas de TVQ, de
taxe de vente du Québec, sur les vêtements et chaussures d'enfants
non plus que sur les vêtements et chaussures d'adultes à prix
moyen et sur les vêtements de maternité, évidemment;
pension alimentaire déductible.
Conclusion. Le RAIF a tenté de toucher aux principaux points de
la consultation sur le financement des services publics au Québec qui
englobait, finalement, toute l'administration gouvernementale, puisqu'on
s'interrogeait sur le niveau et l'évolution des dépenses, sur la
dette, sur le déficit, sur la fiscalité. Certaines de nos
recommandations répondent directement à ces interrogations,
d'autres le font indirectement, car tout est interrelié.
Plusieurs des propositions du RAIF coupent dans le vif pour tenter de
rendre plus saines nos finances et de pouvoir maintenir la qualité et
l'accessibilité aux services. Cependant, le RAIF craint que certains
comportements se répètent lorsqu'il fait des propositions de ce
genre. Le gouvernement a tendance à ne prendre que le volet qui lui
rapporte, comme les coupures, sans agir sur celui qui tente de rétablir
l'équité et de corriger les injustices, même lorsqu'on fait
valoir que cette correction serait rentable quand on l'évalue dans sa
globalité. Nous espérons que les mesures qu'adoptera le
gouvernement seront
équilibrées et justes.
Le gouvernement ne doit pas oublier que, s'il a eu le droit de taxer,
c'était pour fournir des services et pour redistribuer le revenu de
manière à ce que personne ne soit privé du
nécessaire. Il n'a pas le droit de continuer à taxer au
même niveau tout en exigeant que les gens paient leurs services à
la pièce. Ce serait alors la double taxation. Le gouvernement ne peut
jouer sur les deux tableaux.
Le Président (M. Audet): Merci beaucoup, madame.
Je vais maintenant reconnaître la ministre
déléguée à la Condition féminine et
responsable de la Famille.
Mme Trépanier: Merci, M. le Président.
Alors, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue à cette
commission, au Réseau d'action et d'information pour les femmes, qu'on
connaît mieux sous le nom du RAIF, et peut-être plus encore, plus
particulièrement à Mme Dolment, qui est une femme très
engagée et très préoccupée par l'activité
gouvernementale, et que nous voyons de façon très
régulière lors de nos commissions.
Je dirais que, en lisant l'avant-propos de votre mémoire, j'ai de
la sympathie avec vos propos lorsque vous nous dites que vous avez eu un
très court délai pour présenter et pour préparer
votre mémoire, étant donné la complexité et
l'étendue de cette question-là. Alors, malgré cette
contrainte, vous avez produit un document, je pense, qui fait ressortir
plusieurs volets d'importance dans la gestion des dépenses publiques et
de la fiscalité.
Honnêtement, je dois avouer que la lecture de votre document m'a
laissée un peu perplexe. Plusieurs recommandations font
référence au gros bon sens, à mon avis, et
reflètent la pensée de plusieurs citoyens et citoyennes.
Cependant, certaines autres m'ont paru verser plutôt, je dirais, dans
l'idéalisme, peut-être. Somme toute, je reconnais que la
présentation d'un mémoire sur un tel sujet n'est pas une mince
tâche et que ce n'était pas facile à réaliser.
Cependant, il est un point que vous n'avez pas relevé, je pense,
dans votre résumé, cet après-midi, mais que vous avez dans
votre mémoire et sur lequel je suis en profond désaccord. Et je
me dois de vous le dire au début de cette intervention. Votre vision de
l'immigration, dans votre texte, m'apparaît - et je pense que le terme
n'est pas trop fort, c'est ce que je pense - inacceptable. La situation
démographique du Québec, qui est du taux de natalité qui
descend, de la baisse des naissances mêlée au vieillissement, je
pense, exige qu'on ait une politique d'immigration énergique. C'est ce
qu'on s'est donné au Québec. Et certains propos de votre
mémoire laissent croire que les immigrants sélectionnés
par le Québec ne sont pas une classe de gens appréciables. Je
pense que ça constitue une richesse et un apport important pour notre
économie. (18 h 10)
Alors, je reviens à des questions. Je vous demanderais, en
première question, qui portera sur les dépenses publiques:
Lorsque vous stipulez, dans votre mémoire, que les revenus actuels du
gouvernement sont suffisants, vu le niveau du fardeau fiscal - ça, c'est
à la page 6 de votre mémoire - mais qu'il y a
prolifération de programmes, et une mauvaise gestion de ceux-ci, vous
avez quels programmes en tête, spécifiquement? Et dans quels
secteurs d'activité y a-t-il prolifération de programmes?
J'aimerais vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Audet): Mme Dolment.
Mme Dolment: Oui, je vous réponds tout de suite. D'abord,
je voudrais vous faire remarquer que dans notre résumé, que nous
présentons ici à la commission parlementaire, nous n'avons pas
repris la proposition sur l'immigration, non pas parce que nous la
désavouons mais simplement parce que, évidemment, c'était
tellement vaste, le sujet de la commission parlementaire, que nous avons mis un
peu, en dedans de 10 jours... C'était un «brainstorming»;
alors, tout est venu.
Mme Trépanier: Oui.
Mme Dolment: Ensuite, là, nous avons restructuré
notre mémoire avec ce que nous présentons pour nous en tenir
à 20 minutes, bon. Maintenant, d'abord, je ne vois pas pourquoi vous
parlez d'idéalisme alors qu'au contraire vous avez réclamé
tout le long de la commission parlementaire des propositions concrètes.
Et on arrive avec des propositions concrètes. Et si M. Johnson veut bien
faire l'addition des millions qu'on a réussi à lui sauver, eh
bien, il sera peut-être surpris et très heureux.
Maintenant, la question de l'idéalisme. Ça fait 20 ans que
nous sommes dans le concret, et il n'y a rien d'idéaliste. Je vous mets
au défi de nous trouver quelque chose d'idéaliste dans ce que
nous avons proposé. Je ne vois vraiment pas où vous voulez en
venir avec ça...
Mme Trépanier: J'aurais peut-être...
Mme Dolment: ...surtout que, chaque fois, vous avez
demandé des choses très concrètes. Et même quand M.
Levesque était ici, il demandait des propositions pointues, bon, en tout
cas Par contre, M. Johnson...
Mme Trépanier: J'aurais peut-être dû dire
moins réaliste, mais...
Mme Dolment: Oui, mais je veux juste quand même dire que M.
Johnson demandait des
modifications structurelles. Alors, nous nous sommes attachés
à trouver les modifications structurelles.
Ce qui nous amène à votre deuxième question, qui
est la question de la prolifération des programmes. Mais la
prolifération des programmes, nous l'avons dit, justement, dans ce que
nous venons de présenter. Nous avons donné des exemples. C'est
que le revenu minimum garanti, il existe déjà sous divers noms.
On sait qu'en 1971 les gouvernements fédéral et provinciaux se
sont réunis pour essayer de mettre en place un système de revenu
minimum garanti, qui est revenu d'ailleurs avec la commission Macdo-nald, parce
que tous ceux qui sont au gouvernement, qui sont économistes ou qui
pensent un peu à sauver des coûts aux économies se disent:
Ça va être beaucoup plus économique d'avoir un
système unifié intégré. Alors, nous avons
donné la prolifération des programmes.
Prenons juste - je vous donne juste un exemple - l'allocation de
conjoint survivant qui est venue se greffer sur le Régime des rentes.
Maintenant ça s'étend, depuis l'égalité des hommes
et des femmes, aussi aux hommes, alors qu'en fait, au tout début,
c'était simplement pour les veuves, qui n'avaient absolument pas, dans
ce temps-là, la protection qu'elles ont maintenant. Alors, on l'a
greffée sur le Régime des rentes. Une allocation de conjoint
survivant qui arrive, mettons, pour quelqu'un qui est un médecin et
qu'il a perdu sa femme à 55 ans, je ne vois pas pourquoi il aurait droit
à une allocation de conjoint survivant. Est-ce qu'on pense aux
dépenses absolument aberrantes qui s'accumulent au cours des ans? Il y a
des abus de ce côté-là.
La même affaire avec l'assurance automobile. Je ne vois pas
pourquoi quelqu'un qui n'a pas d'enfant - parce que là, on revient
maintenant au conjoint avec enfant et conjoint sans enfant - qui est un simple
individu aurait droit à toutes sortes d'avantages qui coûtent
encore des centaines de millions de dollars. Alors, la
prolifération...
Maintenant, le revenu garanti, pour simplifier. Prenons, dans la
fiscalité, quand vous faites votre rapport d'impôt. Une personne
âgée qui fait son rapport d'impôt a trois revenus garantis.
Trouvez-vous que c'est normal? Elle a d'abord son crédit personnel de
base, qui est déjà... Elle a la pension de vieillesse, même
si elle en remet une partie, et ensuite elle a le crédit pour personne
âgée, qui est de 2200 $ ou quelque chose comme ça. Alors,
trois revenus garantis pour une seule personne. Mais, par contre, comme
ça porte des noms différents, on ne voit pas qu'il y a,
justement, dédoublement même envers les contribuables.
Alors, c'est sûr qu'il y a un coulage épouvantable d'argent
alors que, par contre, quand on va dans les hôpitaux où,
là... En sortant d'ici, un jeudi soir, je me suis fait attaquer et voler
mon sac à main et même toutes les notes que j'avais prises au
cours des commissions parlementaires et j'ai abouti à l'urgence, toute
la nuit et le lendemain. Et l'urgence était pleine aux trois quarts de
personnes âgées. Quand on est allé pour prendre les
radiographies, il a fallu qu'il donne des coups de poing en haut parce que
ça ne marchait pas, parce que c'était trop vétusté.
Puis quand on était en chaise roulante, on ne pouvait pas la prendre non
plus. Elle a dit: Servez-vous en pas parce qu'elle ne fonctionne pas
très bien pour les pieds. Puis, quand on regardait en l'air, on voyait
qu'il y avait toutes sortes de choses... En tout cas, c'est devenu... Les
équipements s'en viennent dans un vieillissement épouvantable.
Par contre, on va donner de l'argent, comme ça, à gogo, parce
qu'il n'y a pas, justement, de simplification et de rationalisation et que ce
n'est pas Intégré sous un seul nom: le programme de revenu
minimum garanti. Il n'y a rien d'idéaliste. Là, je ne rencontre
pas la présentation qui a été faite par un monsieur qui
est venu ici recommander un programme de revenu minimum garanti qui
éliminerait en même temps l'impôt. Ce n'est pas à
ça du tout, du tout. Il existe déjà, d'ailleurs, un
programme de revenu minimum garanti, mais il n'est pas simplifié, il
n'est pas intégré. Alors, on n'y voit pas clair.
Le Président (M. Audet): Merci. Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière.
Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie, M. le
Président.
Ça me fait plaisir de saluer les membres du Réseau
d'action et d'information pour les femmes. Effectivement, Mme Dolment, on sait
que vous suivez avec beaucoup d'intérêt tout ce qui se passe ici.
Comme le disait la ministre, on voit que vous êtes présente, et
souvent, on peut dire que vous êtes plus au courant que certaines
personnes qui, normalement, devraient peut-être l'être aussi.
J'ai pris connaissance, moi aussi, de votre mémoire.
Effectivement, vous avez une longue liste de recommandations. On peut partager
plus ou moins certaines d'entre elles, mais il reste que, quand vous dites que
vous avez des propositions concrètes, on ne peut pas vous taxer de ne
pas être concrète. J'aimerais avoir quelques précisions
concernant certaines de ces recommandations-là.
Tantôt, vous faisiez allusion au fait qu'on peut sauver bien des
millions au Conseil du trésor. Il y a, effectivement, je pense, des
mesures que vous proposez qui permettraient, oui, de récupérer
certains montants. On pense aux perceptions de pensions alimentaires. On y
faisait allusion. Je pense que vous étiez présente tout à
l'heure quand l'AFEAS est venue. On en a discuté, et c'est un fait que
la perception automatique de pensions alimentaires, même s'il faut
créer un service, il faut un déboursé de
départ, on sait très bien que ça permet à
l'État de récupérer des sommes qui sont
présentement assumées par le gouvernement, par l'État, par
le Conseil du trésor, par le biais de l'assistance sociale, entre
autres. C'est des gens qui, normalement, devraient assumer leurs
responsabilités à la place de conjoints qui n'assument pas leurs
responsabilités. Cet aspect-là, effectivement, ça nous
permettrait d'aller chercher des sous.
On a parlé d'équité salariale tout à
l'heure. Disons que j'aimerais ça le répéter, compte tenu
qu'il y a des personnes présentes présentement qui, je pense,
auraient intérêt à comprendre que l'équité
salariale, ce n'est pas juste quelque chose qui coûte des sous. Par le
biais de l'équité salariale, le gouvernement aussi peut
récupérer beaucoup d'argent, on le sait, le biais de l'assiette
fiscale, au niveau de l'impôt comme tel, le fait que cet
argent-là, de toute façon, retourne à l'économie,
augmentant le pouvoir d'achat des gens qui en bénéficient. Donc,
économiquement, ça serait rentable d'en arriver à avoir
l'équité salariale. Moi, c'est des précisions que je
voudrais avoir. Quand vous parlez d'implanter l'équité salariale,
parce que c'est une de vos mesures, comment vous y arriveriez? Est-ce que c'est
par le biais d'une loi que vous voyez ça ou... Enfin, j'aimerais que
vous me donniez quelques explications là-dessus.
Mme Dolment: Écoutez, on a mentionné
l'équité salariale, mais on ne l'a pas développée,
parce que les syndicats, et surtout le Syndicat des fonctionnaires, mettons,
ont tellement travaillé là-dessus que ce sont des
spécialistes. Alors, si ça ne vous fait rien... Je m'excuse de
vous demander ça, de plutôt élaborer sur d'autres sujets
qui ne sont pas abordés par beaucoup, beaucoup de monde qui abordent
l'équité salariale. Alors nous, nous ne sommes pas
spécialisées là-dedans, parce que ce qu'on essaie de faire
au RAIF, c'est de ne pas faire de dédoublements, justement. Quand c'est
tellement bien défendu, un dossier - et celui de l'équité
salariale est très, très bien défendu par la plupart des
syndicats - on leur laisse ça. Nous, vous voyez un peu où est
notre accent.
Maintenant, j'aimerais peut-être... Ce n'est pas votre question,
mais par rapport à l'immigration, je sais que quand même au PQ on
est très intéressé par l'immigration aussi. Je voulais
dire qu'on a toujours trouvé que c'était un enrichissement,
l'immigration. Ce n'est pas ça, c'est que, dans le contexte où il
y a un chômage, on a simplement dit de la geler temporairement
jusqu'à temps.. pour ne pas qu'on ait des immigrants qui arrivent ici et
qu'on les laisse dans la misère comme ça arrive à
Montréal. Alors, je pense que, même pour eux, il s'agit de les
aider de cette façon-là.
Jamais on n'a dit qu'on était contre l'immigration. Au contraire.
On trouve que c'est un enrichissement, parce que les immigrants qui viennent
ici sont souvent les gens qui ont le plus d'initiative et qui sont les plus
débrouillards. Alors, ce n'est pas du tout... Il ne faut pas le prendre
dans ce sens-là. Alors, si vous voulez me poser une autre question. (18
h 20)
Je voudrais peut-être répondre, par contre, au service des
perceptions de pensions alimentaires, parce qu'on l'a abordé, je pense,
justement, cet après-midi. C'est que, vous savez, la loi qui a
été proposée en 1988 et qui n'est pas encore en
application et qui attend, là, sur la tablette, ce n'est pas du tout une
bonne loi. D'abord, c'est une loi qui ne fait que répéter la
même loi qu'on a actuellement, où ça va être une
récupération seulement pour un an. Il n'y a absolument rien de
différent avec ce qui existe actuellement, sauf d'avoir un peu plus de
bureaux ou un peu plus de personnel. Mais ce n'est pas ça qu'il nous
faut. Ce qu'il nous faut, c'est ce qu'il y a en Ontario, où ça va
être automatique, obligatoire, dès qu'il y a un prononcé de
jugement de divorce, que ça va être déduit à la
source pour les gens qui ont un salaire, et pour les autres, bien, il va
falloir qu'ils le versent. Mais ce n'est pas du tout, du tout la même
chose, parce que, actuellement, dans la loi qui est en attente et la loi
actuelle, c'est limité uniquement, d'abord, à ceux qui font
défaut. Ce n'est pas pour tout le monde, ce n'est pas universel, c'est
juste les mauvais payeurs. Ensuite, ça ne va durer qu'un an, la
récupération. Dès que l'année va être finie,
ils retombent dans le «no-man's-land», si on peut dire. Alors, la
loi qui attend, là, c'est pour ça qu'ils ne la mettent pas en
application, c'est la même chose qu'actuellement. Ça ne change
rien du tout.
Alors, il nous faut un service comme l'Ontario, et là, on
récupérerait énormément d'argent,
énormément d'argent. D'ailleurs, la plupart des provinces s'en
viennent vers ça, aussi. Pourquoi est-ce que nous, on attend toujours
que tout le monde l'ait, comme pour le partage des biens familiaux? Nous, au
Québec, on attend toujours que les autres nous montrent le chemin.
Mme Carrier-Perreault: Bien, ça, là-dessus, je
pense que vous m'avez devancée J'arrivais justement à cet autre
moyen. Je trouve important pour l'État d'aller chercher aussi, d'aller
récupérer des montants. Vous m'avez un petit peu devancée.
Mais il reste que, là-dessus, je pense exactement la même chose.
On en a discuté dernièrement, en tout cas, sur la place publique,
un certain moment donné. La loi qu'on a présentement, qui n'est
pas encore en application, à mon sens, est dépassée aussi
Puisqu'on a ce genre de possibilité, je pense qu'il faudrait
effectivement en arriver là, et avant longtemps. Il ne faut pas que
ça prenne quatre ans, cette fois ci.
Mme Dolment, vous avez parlé aussi des
chevauchements, vous avez parlé de plusieurs mesures. Par rapport
au ticket modérateur, vous y avez fait allusion. Vous dites qu'il
faudrait que les gens sachent combien ça coûte, mais j'ai cru
comprendre que vous ne vouliez pas de ticket modérateur. Un ticket
modérateur du genre qu'on charge des frais, et tout ça?
Mme Dolment: Oui. Mais c'est-à-dire que le ticket
modérateur, il y a deux choses. Combien ça coûte,
ça, c'est le bilan annuel, c'est une chose différente du ticket
modérateur. Le bilan annuel - on avait été à la
commission parlementaire sur la santé, et, d'ailleurs, plusieurs
mémoires l'ont demandé - c'est que, une fois par année, on
envoie à chaque personne qui a reçu des services de santé,
pour dire: Bien, écoutez, c'a coûté tant, tant, tant, tant.
Alors, elle va savoir combien ses services de santé ont
coûté, soit pour les apprécier, soit, si c'a
été fait inutilement - parce qu'il y en a, il faut bien le dire -
de dire: Bien, je vais peut-être aller moins souvent à
l'hôpital quand ce n'est pas nécessaire, quand je peux simplement
appeler Info Santé ou quelque chose comme ça, bon.
Maintenant, le ticket modérateur, je suis contente que vous
posiez la question, parce qu'il y a un élément très
important qui n'a pas été souligné par personne, par
personne, dans aucun mémoire, là, que j'ai entendu, en tout cas,
c'est que le fait d'avoir un ticket modérateur. On s'imagine que les
gens peuvent tous payer le 2 $ ou le 3 $ ou le 5 $ ou le 10 $, je ne sais pas.
Mais on semble oublier qu'il y a le «quart du monde» des femmes,
une catégorie de femmes qui n'ont jamais, jamais un sou à elles.
Si le mari est généreux, oui. Le malheur, c'est que bien des
députés sont corrects avec leurs femmes, alors ils ne voient pas
du tout cette situation-là, parce que leur femme a suffisamment
d'argent; ils sont même très généreux. Mais
seulement, par contre, il y a bien des femmes qui n'ont accès à
absolument aucun revenu. Alors, ces femmes, qui vivent des fois avec un homme
violent, un homme mesquin, un homme qui lui en veut pour x raisons, on le sait
que ça existe...
Nous, on a une ligne téléphonique, et c'est
épouvantable encore, ça n'a pas changé. La situation des
femmes est encore la même, quasiment, qu'il y a 20 ans. C'est absolument
désastreux. Alors, ces femmes-là, des fois, il y en a qui nous
ont raconté que leur mari ne leur permettait même pas de s'acheter
des chaussures, des choses comme ça, bon, et c'est des hommes qui ont de
l'argent, un bon salaire. Si le mari dit non, comment va-t-elle pouvoir avoir
accès aux services de santé, même si c'est juste 5 $, s'il
ne lui a pas donné 1 $? Il y a des femmes qui ont dit: Mon mari rit de
moi, il dit: Comment tu vas le faire, tu n'as pas un sou?
Alors, ces femmes-là n'y auront pas accès. Le gouvernement
ne semble pas tenir compte que - parce que, dans leurs livres, le revenu
familial est marqué 75 000 $ - la femme, si elle est à la maison
sans aucun revenu, elle n'aura pas accès à ça, et ce n'est
pas toutes les femmes qui peuvent divorcer du jour au lendemain. Il y en a qui
sont complètement démolies moralement, ou d'autres qui ne peuvent
pas parce qu'elles ont peur de la violence. On sait ce que c'est. Alors, le
ticket modérateur est tout simplement inhumain. Ça ne peut pas
être appliqué, c'est certain.
Mme Carrier-Perreault: D'accord. Vous êtes d'accord pour
que les gens sachent combien ça coûte, là...
Mme Dolment: Oui.
Mme Carrier-Perreault: ...avoir le relevé, mais pas qu'on
charge...
Mme Dolment: Je pense que l'éducation des gens, ça
se fait très bien. On l'a vu avec «Attachez-vous», la
campagne pour s'attacher. On l'a vu avec... pour avoir la nutrition, et on voit
M. Clinton, hier, qui a eu un succès, là, en tout cas, avec sa
campagne pour dire: Bon, responsabilisez-vous. Je pense que le gouvernement
n'emploie pas assez les campagnes publicitaires.
Le Président (M. Audet): Merci.
Je vais maintenant reconnaître M. le président du Conseil
du trésor.
Je vous demanderais, excusez, pour le bon déroulement de nos
travaux, de vous adresser à la présidence, madame, s'il vous
plaît.
Mme Dolment: Oui, merci.
Le Président (M. Audet): Allez-y, M. le
président.
M. Johnson: En vous remerciant, M. le Président, et en
m'excusant auprès de vous, mesdames, de mon retard.
J'ai été frappé, comme vous l'avez vous-mêmes
souligné, par la variété des recommandations que vous
apportez ici dont certaines, comme vous le dites, sont ou bien pointues ou
alors, dans d'autres cas, visent à mieux structurer l'approche de
contrôle des dépenses publiques, etc. Si j'avais à choisir
une recommandation qui vient résumer tous vos propos en matière
de contrôle des dépenses, c'est celle qui apparaît au
numéro 51: Établir une hiérarchie des dépenses
publiques avec un accent assez fort, ma foi, sur l'assurance d'un revenu
minimum garanti pour les gens, pour couvrir les besoins de base. Alors, il y a
un haut contenu social, avec raison, c'est notre préoccupation à
tous. Mais je me demandais, au-delà de ça, si vous aviez à
établir une hiérarchie des dépenses - parce qu'on en est
rendus là avec des moyens limités - est-ce qu'il y aurait
quelques
critères que vous aimeriez soumettre à notre attention
sans que ça soit absolu? Parce que je comprends que ce sont des
jugements de valeurs, ces avancés-là, de toute façon.
Quels sont les critères qui, selon vous, devraient retenir notre
attention lorsqu'on aura à se pencher encore une fois - c'est ce qu'on
fait presque quotidiennement - sur l'ordre dans lequel on doit débourser
l'argent des impôts qui est confié au gouvernement par les
contribuables.
Mme Dolment: Oui, si c'est pour débourser... Parce que si
vous remarquez, la plupart de nos recommandations, ce sont des transferts qui
ne coûteraient pas un sou. Comme le transfert du crédit
d'impôt de personnes mariées, ça ne coûterait pas un
sou au gouvernement. Malheureusement, quand on avait soumis cette
chose-là à M. Levesque, le ministre des Finances, il disait:
Ça va coûter tant de centaines de millions. Mais lui, c'est parce
qu'il calculait que ça l'enlevait aux maris. C'est comme dans le temps
que le salaire de la femme appartenait à l'homme. On ne dit pas que
ça coûte tant parce que la femme a eu droit à son salaire.
Alors, le transfert du crédit d'impôt de personnes mariées,
je pense que tous les groupes de femmes le demandent depuis des années
et, justement, ça éviterait de laisser une femme sans aucun...
même pas un dollar. Ça lui ferait à peu près 200 $
par mois qu'on a calculé et ça ne coûterait pas un sou au
gouvernement, puisque le gouvernement prendrait le même montant qui est
actuellement donné, bien, donné, enfin, consenti pour le
crédit d'impôt pour personnes mariées. Mettons que c'est 1
000 000 000 $ - parce que ça va chercher très haut - et 93 % des
personnes qui le réclament, ce sont des hommes. Alors, ce montant de
crédit de personnes mariées irait aux femmes, crédit
d'impôt remboursable. Lui, il ne perdrait pas son propre crédit
d'impôt personnel de base, qui est une forme de revenu garanti, comme on
dit. Ça, c'est un transfert. Ça ne coûterait rien du tout
au gouvernement.
Par contre, si vous parlez de déboursés, je pense que tous
les groupes de femmes, à peu près tout le monde demande
d'investir dans un véritable service de perception des pensions
alimentaires. Celui qu'on a actuellement, c'est un service de saisie. C'est
uniquement pour les mauvais payeurs. Ce n'est pas ça du tout. D'abord,
les femmes attendent tellement longtemps ou ne le demandent pas du tout parce
qu'elles ont peur de la réaction. Même, il y en a qui sont sur
l'aide sociale et s'arrangent avec leurs maris parce qu'elles sont
menacées aussi. Tandis que si c'était obligatoire, tu n'as pas le
choix. Dès qu'il y a jugement, il y a prononcé de divorce, comme
en Ontario, comme dans certains états américains et au
Manitoba... Automatiquement, au début, ça va demander un
investissement de quelques millions de dollars pour mettre un véritable
service de perception, mais, au bout de deux ans - d'ailleurs ça a
été prouvé en Ontario - vous allez avoir
récupéré votre argent, votre mise et même beaucoup
plus. Alors, ça, c'est un investissement temporaire qui va rapporter de
l'argent.
C'est un peu comme quand ils ont mis le TPS. Ça leur a
coûté très cher pour la mettre en place, mais après,
cela a rapporté de l'argent. Je crois qu'au point de vue des
dépenses - et tous les groupes de femmes le demandent - le
première dépense à faire, c'est un service de perception.
Ça, c'est extrêmement important.
Ensuite, il y aurait peut-être, pour notre avenir, une
recommandation qui est assez importante. Parce qu'on entend des reportages un
peu partout et, parfois, on s'inquiète énormément. C'est
dans les écoles. Le problème de violence dans les écoles,
on le voit à Montréal. Ça va peut-être venir
à Québec aussi, la même chose. Nos jeunes ne peuvent pas
même étudier parce qu'il y a des jeunes qui font du trouble. (18 h
30)
Je pense que Lili Audet, qui est une enseignante, pourra peut-être
vous donner un peu comment on voit la chose et que cette dépense d'avoir
le nécessaire, soit des classes spéciales ou... Enfin,
peut-être que tu peux élaborer, Lili, sur ça.
Mme Audet: Peut-être un petit peu. Au niveau de
l'éducation.
Je pense que, comme on l'a dit, ce n'est pas une dépense,
l'éducation, c'est un investissement. Alors, je pense qu'il faut aller
un petit peu dans ce sens-là. Il faut peut-être essayer de
rationaliser au niveau des ressources humaines et des ressources
pédagogiques et voir ce qui peut être fait. Il y a des secteurs
aussi, si on pense à Montréal, qui ont des problèmes de
violence, et, de toute façon, on en a vécu ici aussi qui
étaient assez graves. Il y a peut-être des façons
d'encadrer qui permettraient d'éviter des coûts sociaux, parce
qu'il faut penser aussi que ces jeunes-là peut-être vont aller en
centres d'accueil, donc encore des dépenses. Peut-être que
dès le départ, dans les écoles, il y a moyen de faire
quelque chose. En tout cas, je pense qu'on s'est aperçu
déjà que, avec les programmes pour contrer le décrochage,
il y a une différence dans les écoles où il y a eu des
programmes instaurés, que ce soit des classes spéciales ou du
personnel additionnel.
M. Johnson: Je vous remercie.
Le Président (M. Audet): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.
Mme Carrier-Perreault: à la mesure 46, vous nous proposez
une simplification des divers formulaires à remplir diminuant la
productivité. vous faites référence à ceux de la
tvq et de la
TPS, entre autres. Il y a d'autres groupes qui sont venus ici, en
commission, qui nous ont parlé de la possibilité d'avoir une
seule formule pour l'impôt sur le revenu, un seul formulaire, par
exemple.
Est-ce que vous auriez quelque chose à nous dire
là-dessus? Est-ce que vous seriez favorables à ce genre
d'idée là? Est-ce que vous croyez que ça simplifierait
aussi, jusqu'à un certain point, la vie des gens et que ça
enlèverait une partie des coûts?
Mme Dolment: Oui. Est-ce que vous voulez parler uniquement du
formulaire ou d'un seul ministère du Revenu? Parce qu'il a
été discuté aussi le fait d'en avoir... Le
député Filion, d'ailleurs, le député de, je ne sais
pas...
Une voix: Montmorency.
Mme Dolment: ...Montmorency...
Mme Carrier-Perreault: Moi, je veux juste dire que...
Mme Dolment: ...posait la question à à peu
près tous les groupes. Est-ce que c'était... Vous, c'est juste le
formulaire?
Mme Carrier-Perreault: bien, qu'il y ait une seule formule et que
l'impôt soit récupéré par un seul gouvernement qui,
après... comme on fait pour la tvq, la tps.
Mme Dolment: Oui, bon. Pour un seul formulaire, oui, ça
pourrait être intéressant de ne pas avoir à remplir deux
formulaires, mais il faudrait, évidemment, qu'il y ait une harmonisation
complète entre les deux, parce qu'il n'y a pas une harmonisation
complète entre les deux. Le fisc québécois et le fisc
fédéral sont différents. Maintenant, pour le
ministère du Revenu, oui, avoir un ministère du Revenu unique,
mais il faudrait qu'il soit au fédéral et non pas au
provincial
Mme Carrier-Perreault: Ah!
Mme Dolment: Là, je sais que vous allez sauter. Ha, ha,
ha!
Mme Carrier-Perreault: Contez-moi ça. Expliquez-moi
ça, madame.
Mme Dolment: Bien, d'ailleurs, au début de notre
présentation, on l'a dit. C'est parce que, actuellement, les
expériences dont on a entendu parler sont un petit peu
désolantes. D'abord, tous les gens qui remplissent des formulaires, qui
font des paiements d'avance, des paiements trimestriels ou d'autres sortes de
paiements, enfin, peu importe, ou de perception, ils ne sont pas traités
comme on devrait être traité, même dans le commerce, ou
comme le fédéral le traite, c'est-à-dire qu'il n'y a pas
de reçus qui sont accordés. Aucun reçu n'est
envoyé, ou, de temps en temps, il va y avoir un reçu. Alors, la
personne qui paie ne sait jamais combien il reste à payer, si,
effectivement, le ministère l'a bien enregistré, avec le
résultat qu'il y a des gens qui se sont retrouvés avec des
demandes de remboursement absolument époustouflantes, qui n'avaient
aucun sens, que leur propre dossier prouvait que ce n'était pas vrai.
Mais comme le ministère du Revenu peut exiger... Contrairement à
la justice habituelle où on est innocent tant qu'on n'a pas
prouvé qu'on est coupable, au ministère du Revenu, vous savez que
c'est l'inverse. Vous êtes coupable, peu importe si vous vous sentez
innoncent ou que, plus tard, vous prouvez que vous êtes innocent. Donc,
il faut payer immédiatement, ce qui a entraîné des
faillites chez les gens, des drames épouvantables.
Alors, pourquoi? Parce que le ministère du Revenu ne fonctionne
pas bien, et ça, on n'est pas les seuls à le dire. Il y a
plusieurs spécialistes, des avocats, des comptables, des
ingénieurs en informatique, qui disent: Ça n'a aucun sens. Au
ministère du Revenu, ils ne comprennent même pas leurs
ordinateurs, parfois. Alors, c'est rentré au petit bonheur, c'est fait
un peu n'importe comment. Et qu'est-ce qu'ils font? Très souvent - il y
a des articles de journaux qui sont sortis là-dessus - ils vont
s'acharner sur les petits parce que les gros ont des comptables pour les
défendre. Alors, ils s'acharnent sur les petits. C'est sorti dans les
journaux. Alors, dans le moment, je pense qu'il faudrait, si vous voulez que ce
soit fait au Québec, il va falloir vraiment mettre de l'ordre dans le
ministère.
Mme Carrier-Perreault: De toute façon, d'après ce
que vous êtes en train de me raconter par rapport aux problèmes de
fonctionnement, il faudrait, de toute façon, je pense, mettre de
l'ordre, si ça fonctionne comme vous le dites.
Mme Dolment: Ah oui, oui.
Mme Carrier-Perreault: En tout cas, disons que...
Mme Dolment: Juste le simple fait... Quand vous payez votre
compte dans un... n'importe où, un commerce, c'est obligatoire d'envoyer
un reçu ou d'en tenir compte. Le ministère du Revenu ne le
fait... Ils vont le faire à l'occasion, mais ce n'est pas... Tandis
qu'au fédéral, si vous payez quelque chose, automatiquement, vous
recevez un reçu qu'il vous reste tant à payer. Et c'est
très motivant pour les personnes, parce qu'elles savent où elles
en sont. Elles peuvent suivre leur dossier. Avec l'autre, elles ne savent plus
où elles en sont.
Mme Carrier-Perreault: Je pensais qu'on
recevait automatiquement un avis et que c'était
réglé après...
Mme Dolment: Non.
Mme Carrier-Perreault: Ah! Parce que moi... Disons que je n'ai
jamais eu de problème, moi, personnellement. Alors, moi, je vous
remercie, madame...
Mme Dolment: Non, non, mais il y a plusieurs... Parlez-en
à des comptables, parlez-en à des gens - nous, on s'occupe
beaucoup de fiscalité - qui sont dans le domaine et même à
des syndics, en tout cas, et ils vont tous vous le dire, que le
ministère du Revenu n'est pas fiable. C'est dommage à dire.
Mme Carrier-Perreault: Disons que, une seule formule
d'impôt, ça pourrait être simplifié.
Mme Dolment: Bien sûr!
Mme Carrier-Perreault: Ça pourrait s'harmoniser
peut-être plus facilement à ce moment-là, mais il resterait
des corrections à faire si on veut que ça se fasse ici.
Mme Dolment: Oui, exactement, oui.
Mme Carrier-Perreault: Alors, je vous remercie, madame.
Le Président (M. Audet): Merci, Mme la
députée.
Je vais maintenant reconnaître M. le député de
Saint-Louis. Vous avez deux minutes.
M. Chagnon: Fort brièvement, M. le Président,
puisque le temps nous manque et que la présentation a été
intéressante. J'irai directement.
J'ai cru comprendre que vous étiez d'accord avec le timide 2 $ de
frais d'utilisation pour les médicaments. Vous êtes aussi d'accord
avec un formulaire de prestation de services de santé qui pourrait
être remis aux gens lorsqu'ils utilisent ou consomment des soins de
santé, mais j'ai été étonné un peu de votre
dernière suggestion ici, que la carte d'assurance-maladie avec photo,
qui est déjà entrée, là, en cours, qui est
déjà appliquée, c'est un début de contrôle.
Vous dites: II faudrait l'étendre aux enfants de 6 à 14 ans, car
de nombreux enfants étrangers de cet âge se font soigner
gratuitement dans nos hôpitaux. J'ai cru comprendre que vous étiez
de Québec. Peut-être que je me trompe, mais est-ce que vous en
connaissez beaucoup, vous, des enfants, de 6 à 14 ans qui sont
étrangers et qui se font soigner avec des cartes d'assurance-maladie
ici?
Mme Dolment: À Québec, moins, mais c'est des
infirmières qui nous ont dit ça à Montréal.
Elles ont dit: On le sait, on le voit que ces enfants-là ne sont
pas d'ici. Bon. De toute façon, il n'y a aucune façon
d'identifier. On sait que Montréal est beaucoup plus multiethnique,
évidemment, et on sait qu'aux États-Unis ils n'ont pas de
services de santé. Alors...
M. Chagnon: Je suis un peu surpris d'entendre ça, parce
que je suis de Montréal. Je représente le centre-ville de
Montréal...
Mme Dolment: Êtes-vous infirmière? Ha, ha, ha!
M. Chagnon: C'est là... Je ne suis pas vraiment une
infirmière, mais j'ai 15 hôpitaux dans mon comté. Ça
me donne une certaine part d'expertise. En plus, chez nous, il y a beaucoup
d'immigrants, et, ensuite, on retrouve les hôpitaux pour enfants:
Sainte-Justine et...
Mme Dolment: C'est justement Sainte-Justine dont on a entendu
parler.
M. Chagnon: ...l'Hôpital de Montréal pour enfants.
L'Hôpital de Montréal pour enfants est peut-être l'endroit
où il y a le plus d'immigrants qui y vont, et jamais je n'ai entendu
cette remarque-là.
Mme Dolment: Non, peut-être pas à vous, mais
ça existe.
M. Chagnon: Avez-vous beaucoup de membres à
Montréal?
Mme Dolment: Pardon?
M. Chagnon: Avez-vous beaucoup de membres à
Montréal pour...
Mme Dolment: Oui, mais ce n'est pas nécessairement par les
membres. C'est que, si on lit les journaux, si on parle avec les gens, si on
entend les programmes à la radio, les lignes ouvertes et tout, parce que
c'est un peu notre métier de suivre tout ça, et d'ailleurs, la
simple logique vous le dira... Écoutez, si vous aviez, vous, je ne sais
pas, moi, votre soeur qui est à New York, que son enfant est malade et
quelle ne peut pas se faire soigner, vous l'invitez. Il n'y a aucun
contrôle. Vous l'invitez et vous la faites soigner ici.
M. Chagnon: Ça, on a entendu ça beaucoup, mais il
n'y a pas eu beaucoup de preuve. Je cherche les preuves.
Mme Dolment: Ah oui! Mais c'est vrai, c'est vrai. Oui, oui. Vous
pouvez le contester, mais, oiitin, nous, on vous dit
M. Chagnon: Je ne conteste pas. Je vous
demande juste de..
Mme Dolment: Non, non, mais on vous dit ce qu'on a entendu...
M. Chagnon: ...faire la démonstration de cette...
Mme Dolment: ...et la logique est un peu là. Mais ce qui
nous étonne, c'est: Pourquoi est-ce qu'on ne demande pas... Parce que
des cartes d'étudiant, même pour les enfants de 10 ans, il va y
avoir une carte pour les identifier. Pourquoi est-ce qu'il n'y a pas de carte
pour identifier les enfants?
M. Chagnon: Pour la bonne et simple raison que les
étudiants changent de carte à tous les ans et que cette
carte-là vaudra pendant au moins quatre ans.
Mme Dolment: Oui, mais, pour les enfants, parce qu'on sait que
ça change, le visage, on a juste à le faire plus souvent.
Écoutez, pour les soins qu'on reçoit... Il va falloir qu'on
réalise, à un moment donné, qu'on reçoit des soins
qui coûtent une fortune aux États-Unis. Je connais des gens qui
vivent aux États-Unis et qui nous disent: Si vous saviez, là,
combien ça vous coûterait, vous, aux États-Unis, si vous
aviez juste telle affaire ou telle affaire, les cheveux vous dresseraient sur
la tête. Quand même que les gens seraient obligés de faire
prendre leur photo une fois par année pour leurs enfants pour avoir des
soins gratuits... Demandez combien ils ont dépensé en loterie.
Demandez combien ils ont dépensé au bingo. Demandez combien ils
ont dépensé pour telle affaire.
Écoutez, je pense que si on n'est pas capable de dépenser
un peu pour une photo... De toute façon, nous l'avions
suggéré, nous, avant même que ça soit mis en place,
le 2 $. On l'a toujours suggéré. Non seulement ça, mais
ça favorise les personnes âgées, parce qu'il y a trop de
médicaments... On connaît des gens qui ont été
tellement bourrés de médicaments qu'ils ont perdu leur
qualité de vie, parce qu'ils perdent l'équilibre et puis ils se
retrouvent dans des centres d'accueil.
Alors, je pense qu'il va falloir... Moi, je ne comprends pas qu'il y ait
des gens, là, dès qu'on parle un peu de payer quelque chose...
Bon! Ils prennent le mors aux dents, alors qu'on vit dans une
société extraordinaire. D'ailleurs, les pharmaciens vous le
diront. On a interrogé les pharmaciens, et les pharmaciens nous ont dit
que, le 2 $, au début, les gens rouspétaient, mais que,
maintenant, ils sont habitués et ils ne disent plus rien.
Le Président (M. Audet): Merci, Mme Dolment.
Alors, ça termine nos échanges. Je veux vous remercier de
votre présentation et surtout, plus particulièrement, Mme Dolment
pour son assiduité à nos travaux. Elle est avec nous, je crois,
depuis le tout premier jour. Alors, merci beaucoup.
Ça termine nos travaux pour aujourd'hui. Demain matin, nous
reprendrons à 9 h 30 avec l'Union des municipalités du
Québec. J'ajourne les travaux de la commission jusqu'à demain
matin, 9 h 30. Bonsoir.
(Fin de la séance à 18 h 40)