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(Quatorze heures sept minutes)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission du budget et de l'administration poursuit cet
après-midi une consultation générale et des auditions
publiques sur le financement des services publics au Québec.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui. M. Lazure (La Prairie) est
remplacé par M. Beaulne (Bertrand).
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
secrétaire.
Est-ce que les membres... Oui, M. le député de
Labelle.
Motion proposant que la commission présente un
rapport intérimaire à l'Assemblée
M. Léonard: Je voudrais présenter une motion,
très rapidement, M. le Président. Je voudrais le faire tout de
suite. Je pense que ça va emporter d'emblée l'adhésion, et
je voudrais le faire en vertu de l'article 175.
Je ne sais pas si c'est bien, le moment où je la présente,
M. le Président, c'est que nous avons entendu beaucoup de
témoignages, et nous voulons entendre ceux qui sont là cet
après-midi. Mais nous pensons qu'au terme de l'audition de ces
mémoires il faut qu'il y ait quelques séances de discussion entre
le gouvernement et l'Opposition, pour différents motifs que je peux vous
exposer, et qui sont dans le cadre de ma motion, ici. Je vous la lis, M. le
Président.
La motion que je voudrais déposer est la suivante: «Que,
suite aux deux premières auditions de consultation, et qu'en vertu de
l'article 175 de notre règlement, la commission du budget et de
l'administration adopte et dépose un rapport intérimaire à
l'Assemblée nationale, dont les recommandations sont les suivantes:
«il y a lieu que la commission siège une séance
supplémentaire afin d'entendre les différents experts qui ont
étudié spécifiquement, dans le cadre de la commission
Bélanger-Campeau et des deux commissions d'étude
créées en vertu de la loi 150, l'impact du
déséquilibre des finances du gouvernement fédéral
sur celles du Québec, ainsi que la question des chevauchements et des
dédoublements administratifs; «il y a lieu que la commission
siège une autre séance supplémentaire afin que les membres
puissent interroger des représentants du Conseil exécutif au sein
de la commission, et ainsi débattre les solutions qu'ils
préconisent à court, moyen et long terme; «et, finalement,
il y a lieu, dans le but de favoriser la meilleure exécution possible du
mandat par les parlementaires, que le président du Conseil du
trésor mette à la disposition des membres de la commission une
copie des études, documents et analyses préparés par les
divers ministères et traitant des dédoublements et chevauchements
administratifs entre le gouvernement du Québec et le gouvernement
fédéral.»
Est-ce que je peux déposer cette motion, M. le Président,
et en fournir copie aux membres de la commission? (14 h 10)
Le Président (M. Lemieux): Je vous écoute, M. le
député de Labelle.
Débat sur la recevabilité M. Jacques
Léonard
M. Léonard: M. le Président, je pense que nous
entendons différents groupes venir nous dire comment ils voient
l'état des finances publiques et des priorités gouvernementales,
ainsi que les problèmes auxquels ces groupes eux-mêmes ont
à faire face. Je pense que leur témoignage est très riche,
mais, en même temps, je voudrais simplement qu'il y ait l'assurance qu'il
y ait deux autres séances, au cours desquelles nous entendrions, par
exemple, les experts qui ont déjà travaillé dans le cadre
de la commission Bélanger-Campeau, qu'ensuite on débatte du
contenu des documents qui ont été déposés par le
gouvernement, le 19 janvier dernier, ainsi que la synthèse des
opérations financières, le 1er février.
Je dois vous rappeler, M. le Président, qu'à deux reprises
je vous avais écrit pour que l'on convoque la commission du budget et de
l'administration pour étudier les synthèses des opérations
financières antérieures, ce qui n'a pas été fait,
mais qui serait drôlement pertinent dans le cadre des travaux de cette
commission.
Enfin, il y a toujours des études qui ont été
faites par le gouvernement sur les dédoublements administratifs dans le
passé.
Là, je pense que ce que nous voulons... Nous ne voulons pas
prolonger indûment les travaux de cette commission, mais nous voudrions
avoir l'assurance de quelques séances additionnelles, lorsque les
témoignages des différents groupes seront terminés - cela
se termine, comme il est prévu, jeudi soir. Donc, les jours suivants ou
ultérieurement, la commission du budget et de l'administration pourrait
siéger.
Le Président (M. Lemieux): Lorsque j'ai fait
état, M. le député de Labelle, que j'aimerais bien
vous entendre, vous savez qu'au niveau d'une motion, il y a deux étapes
principales. La première étape est celle de la
recevabilité; j'aimerais bien vous entendre sur la recevabilité
de cette motion-là.
M. Léonard: Bien, nous pensons qu'elle est recevable en
vertu de l'article 175 du règlement, parce qu'elle ne consiste pas
à modifier... Bien, je vous le lis, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Je l'ai, oui.
M. Léonard: «Toute commission peut déposer un
rapport intérimaire à l'Assemblée. Il ne peut être
présenté à cette fin qu'une seule motion par
séance.»
Donc, la commission pourrait déposer un rapport
intérimaire à l'Assemblée. C'est la motion que je fais,
que la commission accepte de le faire, et c'est avec les recommandations que
nous avons déposées dans le coeur ou dans le cadre de cette
motion.
Le Président (M. Lemieux): Ça va. Est-ce qu'il y a
des interventions? Ça va? Pas d'intervention du côté
ministériel.
M. Léonard: M. le Président, si on ne peut le faire
qu'une fois par séance, ça veut dire qu'on peut le faire à
ce stade-ci, dans le sens qu'elle est recevable sur ce plan-là,
techniquement.
Le Président (M. Lemieux): Ce qui me fatigue un peu, c'est
que...
M. Johnson: M. le Président... Le Président (M.
Lemieux): Oui. M. Johnson: ...pour éclairer votre lanterne
Le Président (M. Lemieux): Oui. M. Daniel Johnson
M. Johnson: Moi, M. le Président, ce que j'indiquerais,
c'est que, dans la mesure où on pourrait penser que la troisième
recommandation qui serait suggérée aurait pour objet de procurer
des moyens additionnels à la commission, ce qui, à sa face
même, pourrait quelquefois, cependant, être acceptable, je,
personnellement, ne vois rien d'autre que des mesures dilatoires dans les deux
premières recommandations, la première visant à
littéralement faire changer le mandat de la commission par
l'Assemblée nationale.
Il y a là un mandat que l'Assemblée nous a donné.
On voudrait le faire changer, peut-être par nostalgie de la commission
Bélanger-Campeau et, deuxièmement, on voudrait que cette commis-
sion devienne une séance d'interrogation des membres de
l'Exécutif afin qu'ils débattent des solutions que nous
préconisons à court, moyen et long terme, alors que, ce que j'ai
toujours indiqué, c'est que la commission vise justement à
apporter l'éclairage nécessaire pour qu'éventuellement
nous prenions les décisions qui s'imposent.
Le Président (m. lemieux): est-ce qu'il y a d'autres
commentaires...
M. Johnson: Alors, ça pourrait être une mesure
dilatoire, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): ...relativement à la
recevabilité, parce que j'ai, de facto, de fait, après avoir pris
connaissance de la motion de Mme la députée de Taillon, j'ai
peut-être quelques réserves sur la recevabilité.
Mme Marois: Bien, nous croyons, nous, qu'en vertu de l'article
175 qui est là - nous ne pouvons le faire qu'une fois par séance;
nous le faisons maintenant - nous croyons qu'il est loisible aux membres de la
commission, sans retarder l'audience des groupes, d'ailleurs nous voulons le
faire rapidement, sans retarder l'audience des groupes qui sont venus nous
présenter leur point de vue, nous croyons qu'il est possible que l'on
décide ensemble de prendre quelques séances de plus, une, deux ou
trois, pour nous permettre de terminer dans le fond, de compléter,
d'ajouter, d'assurer un complément au mandat qui nous est imparti, qui
concerne les finances publiques. le président (m. lemieux):
ça va, mme la députée de taillon. écoutez, eu
égard à l'importance de cette motion-ià... oui, m. le
président du conseil du trésor.
M. Johnson: m. !e président, j'ajouterais qu'on pourrait
également lire dans les deux premières recommandations, dont le
rapport intérimaire pourrait faire état à
l'assemblée nationale, qu'il s'agit là pratiquement de mesures
que la commission peut prendre à sa propre initiative, en séance
de travail - évidemment, pas ici -mais qu'en séance de travail de
la commission nous pourrions, comme membres de la commission - enfin je parle
pour ceux qui en sont membres tout le temps - demander d'entendre des experts,
etc., ou demander que nous siégions afin d'interroger des ministres,
etc. ça ne relève pas, à proprement parler, de
l'assemblée, mais bien des pouvoirs d'initiative que la commission peut
avoir, auquel cas ce n'est pas le forum pour parler de ces choses-là.
c'est en séance de travail que ça se discute.
Le Président (M. Lemieux): Je dois vous avouer que je dois
m'interroger sur la nature de
la motion, M. le président du Conseil du trésor. Afin de
faire en sorte que les travaux puissent continuer, je prends cette
motion-là, au niveau de sa recevabilité, on s'entend bien, sous
réserve. Je m'engage, dans le courant de la journée, à
vous rendre une décision à cet effet-là. J'ai une
idée, globalement. Ce qui me fatigue, c'est le fond de la motion.
Effectivement, on peut présenter une motion de cette nature-là,
mais c'est sur le fond comme tel de la motion.
Alors, je prends ça sous réserve, et nous
commençons immédiatement. Oui.
M. Léonard: M. le Président, en souhaitant que ce
soit avant 18 heures...
Le Président (M. Lemieux): Oui, ça va. M.
Léonard: ...s'il y a moyen.
Le Président (M. Lemieux): Oui, oui, M. le
député de Labelle.
M. Léonard: Moi, je suis tout à fait d'accord. Je
ne veux pas retarder l'audition des groupes, cet après-midi, plus qu'il
ne le faut. Nous avons pris 15 minutes maintenant. Alors, nous sommes
prêts à procéder, étant donné que vous prenez
cette motion en délibéré.
Le Président (M. Lemieux): Je la prends en
délibéré sous réserve, effectivement.
Alors, est-ce que les parlementaires ont pris connaissance de l'ordre du
jour?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Lemieux): L'ordre du jour est donc
adopté.
Nous allons maintenant entendre la Fédération des CLSC.
Les représentants ont déjà pris place à la table
des témoins.
J'aimerais demander au porte-parole de l'organisme s'il veut bien
vouloir s'identifier et présenter les gens qui l'accompagnent, s'il vous
plaît, dans un premier temps.
Auditions (suite) Fédération des CLSC du
Québec (FCLSCQ)
M. Payette (Maurice): M. le Président, madame et MM. les
membres de la commission, mon nom est Maurice Payette. Je suis président
de la Fédération des CLSC. À ma droite, Mme Jeanne D'Arc
Vaillant, qui est la directrice générale; Mme Carole Lalonde, qui
est conseillère cadre à la Fédération; et M. Michel
Bissonnette, directeur des communications.
J'aimerais d'abord, M. le Président, vous remercier d'avoir
accepté, même si on n'a pas tout à fait respecté les
délais, que nous nous présentions devant votre commission. Comme
la plupart des personnes ou des groupes qui se sont présentés
devant cette commission, nous nous proposons de prêcher pour notre
paroisse.
Le Président (M. Lemieux): Alors, permettez-moi de vous
dire, avant que vous ne prêchiez pour votre paroisse...
M. Payette: Oui.
Le Président (M. Lemieux): ...que vous disposez, pour le
faire, d'une période de 20 minutes pour l'exposé de votre
mémoire. Suivra un échange entre les deux groupes parlementaires
d'une durée globale de 40 minutes: 20 minutes pour le parti
ministériel et 20 minutes pour l'Opposition. Ça vous va?
M. Payette: C'est ce que nous avions prévu.
Le Président (M. Lemieux): Alors, vous pouvez commencer
à prêcher.
M. Payette: On prêche pour notre paroisse.
Le Président (M. Lemieux): Oui, Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: excusez-moi! nous avons en main une version
préliminaire. est-ce qu'il y a une version finale de votre
mémoire qui a été déposée?
M. Payette: Je pense que oui.
Mme Marois: Oui.
M. Payette: M y a une version finale...
Mme Marois: On ne l'avait pas, là.
M. Payette: ...avec un préambule. D'accord.
Mme Marois: D'accord.
Le Président (M. Lemieux): Alors, nous vous
écoutons.
M. Payette: Oui, prêcher pour notre paroisse, mais
j'aimerais préciser que notre paroisse, ce n'est pas seulement les 161
CLSC du Québec, c'est surtout les 3 000 000 de citoyens qui utilisent
les services de ce réseau, qui fait l'admiration et l'envie de nombreux
observateurs étrangers.
Je suis moi-même l'un de ces utilisateurs, et je suis un
utilisateur engagé. En mars dernier, j'ai accepté de me soumettre
au nouveau processus électoral, afin d'obtenir de mes concitoyens de ma
MRC le mandat de les représenter et de défendre leurs
intérêts dans un conseil d'administration. Citoyen
décideur, je suis aussi, comme tout le monde, un citoyen payeur qui
désire en
avoir pour son argent, et qui se pose beaucoup de questions sur
l'utilisation que l'on fait des taxes qu'il paie.
Comme citoyen engagé bénévolement depuis huit ans
dans l'administration des CLSC, j'aimerais vous transmettre, au nom des 1100
citoyens qui siègent sur les conseils d'administration des CLSC, un
message très simple: Face au défi collectif du financement des
services publics, vous avez entre vos mains une carte gagnante, une carte qui
pourrait faire la différence entre un cul-de-sac désastreux et
une porte de sortie créatrice et rentable. (14 h 20)
Cette carte gagnante, c'est le réseau des CLSC que la population
du Québec s'est donné et a construit au cours des 20
dernières années. Si nous prétendons que c'est une carte
gagnante, ce n'est pas d'abord pour des raisons idéologiques ou
philosophiques, mais strictement pour des raisons de rentabilité
économique. Notre contribution devant votre commission se situera
davantage au niveau des dépenses publiques plutôt qu'au niveau de
la fiscalité.
Je laisserai d'abord à Mme Vaillant le soin de vous transmettre
notre diagnostic de la situation et quelques hypothèses de solution. Je
reviendrai pour faire la synthèse de nos propos.
Mme Vaillant (Jeanne D'Arc): Donc, il nous apparaît
important de regarder d'abord le diagnostic. Globalement, nous partageons celui
qui est posé dans le document «Vivre selon nos moyens», sur
les dépenses publiques. Ce malaise perdure, d'ailleurs, depuis un
certain nombre d'années, et nous comprenons fort bien l'urgence
d'agir.
Par ailleurs, à cause de l'expérience-terrain que nous
avons, nous ne pouvons pas dissocier cette crise des finances publiques d'une
autre situation, celle-là qui relève... qui est sociétale,
et qui nous confronte. Il suffit de vivre tout simplement au quotidien, et de
regarder autour de soi pour savoir et constater un chômage
élevé, de la violence sous toutes ses formes dans les
communautés, l'itinérance, le décrochage scolaire, la
désintégration des communautés, les disparités
régionales, l'augmentation de la pauvreté, et j'en passe, jeunes
en difficulté, fermetures d'usines et le reste.
Donc, au-delà des dépenses publiques, il y a des
problèmes de société importants que nous voyons sur le
terrain et auxquels nous sommes confrontés. Nous ne voulons pas
être pessimistes. Nous pensons et nous avons la certitude que, comme
Québécois et Québécoises, nous pouvons traverser
cette crise et nous pouvons faire face. Collectivement, nous avons cette
énergie. Ce que nous soutenons avec d'autres, c'est qu'on ne peut pas
apporter de solution véritable à la situation des dépenses
publiques sans prendre en compte les grandes problématiques sociales.
C'est, chez nous, une conviction très profonde.
Le risque est trop grand. Nous n'avons pas les moyens tout simplement
d'adopter ou de risquer certaines solutions à court terme, qui
mettraient en péril ou qui accentueraient les problèmes que nous
connaissons.
Une certaine dérive de notre société ne peut donc
pas être accentuée. Il y a trop de désarroi actuellement
pour qu'on envisage des solutions trop technocratiques à un
problème de finances publiques. Donc, face à une telle situation,
quant à nous, i! faut revenir à l'essence même de !a vie
démocratique, et faire un appel à tous et à toutes. Il
nous faut d'abord, comme citoyens et citoyennes, un projet mobilisateur. On
peut parler de contrat social. Il nous faut des orientations dans lesquelles
tous les groupes, tous les citoyens vont s'engager. Je suis certaine, nous
sommes certains qu'un grand nombre de groupes et de citoyens sont prêts
à faire leur part si nous avons des orientations et un projet
mobilisateur.
Regardons maintenant quelques pistes de solution. Nous venons de parler
d'un projet mobilisateur, d'un partage d'orientation. Il est sûr que les
débats auxquels nous assistons ici mettent en cause très
profondément la relation existante entre les citoyens et l'État.
Les questions qui sont soulevées requièrent donc un débat
plus large pour porter sur les orientations de notre développement comme
société. On peut constater que le contrat social autour duquel
s'est fait le consensus de la révolution tranquille n'existe plus, et
que nous n'avons pas encore de projet de rechange. Tout au plus, des projets de
compressions budgétaires et des indications comme quoi on n'a plus les
moyens.
Pour faire face à tout ce qui nous confronte comme
société, il nous faut donc revenir à un projet
mobilisateur, à des orientations pour commencer à rebâtir
tous ensemble - patrons, travailleurs, aînés, jeunes, groupes
ethniques. Il faut chercher une unité au milieu de notre
diversité, au milieu de nos différences. Nous n'avons pas les
moyens de faire autrement comme collectivité. Les choix à faire
en matière de financement doivent être, quant à nous,
conséquents avec des orientations claires de développement et de
dispensation de services centrés même autour de la mission de
l'État.
Donc, nous croyons fermement que tous les groupes, les citoyens et les
citoyennes pourraient tous ensemble se mobiliser, trouver des solutions, et les
mettre en oeuvre pour faire face à la crise actuelle. Dans le document
«Vivre selon nos moyens», il y a un certain nombre de lignes de
force qui sont mises de l'avant, qui touchent la décentralisation. Nous
sommes d'accord avec la décentralisation. L'État est dans
l'incapacité, actuellement, d'assumer centralement toutes les
fonctions.
Mais il faut discuter des conditions d'une décentralisation et
des moyens financiers qui doivent l'accompagner. Il faut également
regarder
du côté de l'intersectorialité. Nous sommes
également d'accord sur une gestion de l'appareil public et des fonds
publics axée sur les résultats et l'imputabilité. Nous
partageons également la nécessaire recherche de la façon
la plus rentable de dispenser des services, et nous allons y revenir
tantôt avec des exemples concrets.
Au niveau de la tarification, nous y sommes opposés. Dans le
domaine de la santé et des services sociaux, pour nous, on ne peut pas
remettre en question tout de go l'universalité, l'accessibilité,
la gratuité - pour nous, le terme gratuité est un peu
inapproprié, puisqu'on parle plus de non-tarification. Les citoyens
paient des services, ils paient des impôts pour avoir des services. Donc,
les services ne sont pas gratuits. Ils sont actuellement non
tarifés.
La santé étant un bien collectif très
précieux, la santé et le bien-être sont également
une des conditions sine qua non d'une prospérité
économique et d'une santé économique. Maintenant, si nous
revenons à la recherche ou à un des objectifs, qui est la
recherche de la façon la plus rentable de dispenser les services, nous
le faisons à l'intérieur du système de santé et de
services sociaux. Donc, nous allons vous parler de la façon la plus
rentable de dispenser des services en santé et en services sociaux.
Déjà, plusieurs éléments sont en place. Il y a des
pas qui sont faits dans la bonne voie. Il y a une politique de santé et
de bien-être, avec 19 objectifs, qui décrit très bien les
grandes problématiques sociales, et qui fixe au réseau de la
santé et des services sociaux des objectifs vers lesquels l'ensemble des
établissements devraient converger.
Le cadre juridique de la loi 120, démocratisation du
système, régionalisation, mission des établissements
resserrée, le fait que les CLSC soient consacrés comme
première ligne de services, une régionalisation avec la mise en
place des régies régionales nous semblent des
éléments qui vont dans le sens d'un système qui serait
plus rentable. Qu'est-ce qui manque? Des orientations encore plus claires, une
volonté ferme, un consensus. (14 h 30)
Rappelons le diagnostic qui a été posé par la
commission Rochon, à l'effet que le système de santé
était pris en otage par des luttes corporatistes. Les luttes
corporatistes ne sont pas finies. Il suffit de parler de la loi qui existe au
niveau des sages-femmes, qui a été adoptée il y a deux ans
et demi, et les projets ne fonctionnent pas encore. Donc, on a, encore
là, des exemples de corporatisme. Également, Rochon
décriait l'hospitalo-centrisme, le fait que le système, la porte
d'entrée, était le centre hospitalier, et ce fait-là
continue encore. Donc, à partir de multiples exemples qui ont
été mesurés, d'études qui ont été
évaluées sur le terrain, et que vous avez dans le mémoire,
qu'on parle du projet O.LO.(oeuf, lait, orange) pour les bébés,
les femmes de milieu défavorisé qui sont enceintes et qui
accouchent de bébés de petit poids, de programmes visant à
corriger une sous-alimentation, on sait fort bien que 1 $ investi en
prévention en épargne 3 $ au niveau du cu-ratif. Il faut donc
inverser les tendances lourdes de notre système. Actuellement, le
médico-hospitalier et l'institutionnel coûtent plus de 10 000 000
000 $.
Il nous faut opter, à l'instar d'autres pays comme la
Norvège... La Norvège a fait le virage en 1984 vers des
ressources légères. Ça a un impact sur son financement.
Ils ont pris carrément... Ils ont adopté une loi
privilégiant des services de première ligne et orientant tout
leur système de santé vers une base, et le fait que les citoyens
aillent d'abord consommer des services en première ligne, le centre
hospitalier et les ressources plus lourdes n'étant utilisées que
par ceux qui en ont vraiment besoin. Soulignons, au niveau du taux
d'institutionnalisation, qu'on institutionnalise, au niveau des personnes
âgées, 50 % de plus qu'ailleurs. Notre taux est à 7,2 %,
alors qu'ailleurs c'est, règle générale, 5 %. Donc, il
nous faut absolument prendre un virage vers des ressources
légères. Il faut regarder... Au lieu de couper indistinctement un
peu partout de façon aveugle, il faut revoir la cohérence interne
du système de santé. On pense que, dans les 12 000 000 000 $, il
y en a assez, mais on est convaincu qu'en réorientant la consommation
là où elle doit être, il y a des économies à
y faire pour répondre à de nouveaux besoins.
Pour donner des exemples encore plus concrets, je demanderais à
M. Payette...
M. Payette: Pour résumer, avant de passer aux questions,
je dirais qu'il est rentable d'abord de privilégier, d'accroître
et de consolider l'accessibilité aux services de base. Pourquoi? Parce
que ce sont des services généraux, des services légers,
intégrés et peu coûteux et parce que cette
accessibilité évite les nombreux recours inutiles aux services
spécialisés et aux urgences hospitalières. Il est moins
coûteux de livrer des pizzas en voiture compacte qu'en limousine. Il est
rentable aussi d'accentuer les activités de prévention, d'agir
sur les déterminants de la santé, d'intervenir en amont,
d'empêcher que les problèmes se produisent ou ne s'aggravent, en
intervenant tôt et rapidement. Les activités de prévention
planifiées et exécutées de façon rigoureuse,
supportées par une recherche evaluative, peuvent représenter des
économies considérables, aussi bien en matière de
santé et de services sociaux qu'en accidents de la route, en incendies,
en catastrophes écologiques ou en conflits sociaux.
Le sauvetage d'un bébé de petit poids coûte
infiniment plus cher que le surplus alimentaire aux femmes enceintes des
milieux défavorisés. Il est rentable aussi d'investir massivement
dans les services à domicile qui sont des services peu
coûteux, pour permettre à toutes les catégories de
personnes en difficulté ou en perte d'autonomie de vivre chez elles,
dans leur demeure, dans leur communauté locale. Si on compare le per
capita du Québec à celui de l'Ontario en matière de
maintien à domicile, on constate que le Québec investit 30 % de
moins en soins à domicile et 15 % de plus en hébergement et en
réadaptation.
Il est rentable de décentraliser la gestion des services jusqu'au
niveau local et de donner aux administrations locales les marges de manoeuvre
requises pour se sentir imputables et devenir créatrices et efficientes
dans la gestion financière. On économisera ainsi les coûts
souvent honteux de l'inutile lourdeur bureaucratique. Le citoyen
décideur d'un conseil local se demande parfois si la permission de
dépenser 100 $ ne coûte pas moins de 1000 $ de bureaucratie.
Il est rentable de miser sur la responsabilisation des citoyens et des
communautés locales, sur leur capacité de prendre en main leur
santé et leur bien-être. Si chaque citoyen devenait maître
de sa santé, on ne poserait plus le problème de la
dépendance aux services ou de l'usage abusif des médicaments. Ce
sont les services de première ligne qui sont les mieux placés
pour favoriser et supporter cette apprentissage de la responsabilisation en
matière de santé. Il est rentable aussi de faire du CLSC un lieu
privilégié de concertation locale et d'éviter les
coûts inutiles de la compétition, de l'éparpil-lement, du
cloisonnement, des chevauchements et des incohérences. Les concertations
locales que l'on observe actuellement dans le processus de vaccination contre
la méningite démontrent l'efficacité du réseau des
CLSC.
Tout ce que je viens de dire sur la rentabilité des services de
base et de la prévention, on le retrouve en noir sur blanc dans les
différents documents de la réforme de la santé et des
services sociaux: Le document d'orientation intitulé «Une
réforme axée sur le citoyen», le document de
réflexion sur le financement du système de santé et de
services sociaux intitulé «Un financement équitable
à la mesure de nos moyens» sur lequel nous sommes
déjà intervenus, l'an passé, en commission parlementaire
et, surtout, dans la politique de santé et de bien-être. Ce
document aborde, par exemple, les coûts. Le titre du chapitre est
particulièrement évocateur: «Orienter le système de
santé et de services sociaux vers les solutions les plus efficaces et
les moins coûteuses». Que retrouve-t-on parmi les principales
solutions? Accentuer les activités de prévention et même y
consacrer 20 % du budget, accroître et consolider l'accessibilité
aux services de base, consolider le CLSC comme établissement de
première ligne, accroître la disponibilité des services qui
y sont offerts et en faire un lieu privilégié de concertation
locale.
On se souviendra qu'en 1985 un comité de sages avait
proposé, entre autres mesures, de faire une petite économie de
500 000 000 $ en supprimant le réseau des CLSC. En 1990, le gouvernement
du Québec décide d'appuyer sa réforme de la santé
et des services sociaux sur le réseau des CLSC qui couvre maintenant
tout le territoire québécois. Le ministre Marc-Yvan
Côté déclarait publiquement: Si les CLSC n'existaient pas,
il faudrait les inventer. Dire que le CLSC représente une carte
gagnante, ce n'est pas nous seuls qui le prétendons, ce sont tous les
documents de la réforme de la santé et des services sociaux qui
prônent le virage vers des objectifs de résultats, le virage vers
la prévention, le virage vers les services de première ligne, ie
virage du maintien à domicile et le virage de la
décentralisation.
La question qui se pose maintenant pour nous est la suivante: Y a-t-il
une volonté politique d'actualiser cette décision en acceptant,
même en période d'austérité, de faire des
investissements qui deviendront des économies? Merci.
Le Président (M. Camden): Nous vous remercions, M.
Payette.
Alors, M. le président du Conseil du trésor.
M. Johnson: Oui, en remerciant nos invités d'aujourd'hui
à qui j'avais prédit quelques tracasseries
procédurières avant qu'ils ne prennent la parole; comme vous
voyez, ça s'est déroulé, non pas dans le but de retarder
quoi que ce soit, mais présumément pour éclairer la
lanterne d'un peu tout le monde.
Votre document est extrêmement intéressant. Il reprend
à son compte le discours de la prévention, de l'intervention de
première ligne comme étant susceptible de mener à des
interventions plus efficaces, plus économiques au sens
budgétaire. J'aurais peut-être une question tout de suite,
d'entrée de jeu, à l'égard des activités où
vous voyez un potentiel de rationalisation, encore une fois, ou
d'économie. Vous en parlez à la toute fin.
Vous dites que le document que nous avons présenté en
janvier pointe du doigt des situations qui engendrent des coûts
importants, comme la surconsommation de médicaments chez les personnes
âgées ou les profils de pratique professionnelle. Là aussi,
dites-vous, vous croyez qu'il y a des économies à
réaliser. Pouvez-vous nous indiquer comment vous envisagez la
réalisation d'économies dans les problèmes comme
ceux-là, la surconsommation de médicaments ou les profils de
pratique? (14 h 40)
M. Payette: Je répéterai d'abord que tout le
problème de la prévention et de la promotion de la santé -
prenons, par exemple, dans le cas de la surconsommation des médicaments
- est un problème, je pense, dans lequel les intervenants de
première ligne peuvent apporter une contribution importante. Il s'agit,
très souvent, de faire
l'éducation, il s'agit d'aider des citoyens, de les orienter vers
d'autres solutions que les médicaments, de contrôler. Je pense que
le type d'interventions que font les CLSC sont toujours centrées sur, je
dirais, la responsabilisation des citoyens. Et ça, je pense que c'est
vraiment tant essayer de rendre le citoyen responsable et, même, de ne
plus avoir besoin de services pour pouvoir lui-même être en mesure
de s'occuper de sa santé.
Je vais laisser Mme Vaillant ajouter quelques informations
là-dessus, sur la contribution qu'on peut apporter.
Mme Vaillant: Je vais vous donner un exemple, M. le ministre.
L'an dernier, on a fait une opération dans les CLSC avec les pharmacies
Jean Coutu, une campagne pour rejoindre toutes les personnes
âgées. Les CLSC ont fait, avec les personnes âgées
qu'ils desservaient, le ménage dans les pharmacies des personnes
âgées. Donc, il y a eu là une opération de
sensibilisation, premièrement, et d'éducation auprès des
personnes âgées. Ça, c'est un exemple.
L'autre volet de votre question qui est extrêmement
intéressante, c'est les profils de pratique. Comme disait Mme Yvette
Brunet que vous connaissez sûrement, qui est présidente de l'AQDR,
à un moment donné, dans un colloque: Ce n'est pas les personnes
âgées qui se prescrivent les médicaments. Il y a quelqu'un
qui les prescrit, ces médicaments-là. Donc, il y aurait à
ce niveau-là, au niveau des profils de pratique, je pense, du travail
à faire entre les CLSC, les cabinets privés. On a
déjà des mécanismes de collaboration. Il y a des
médecins de cabinet privé qui travaillent, par exemple, au niveau
des services à domicile.
Mais il y a une sensibilisation à faire à ce
niveau-là pour développer de nouvelles approches et éviter
cette surconsommation de médicaments.
M. Payette: J'aimerais ajouter un autre exemple, si vous le
permettez, M. le ministre. Ce qu'on est en train d'instaurer suite à la
réforme, ce qu'on appelle le service téléphonique
Info-Santé qui est un service ouvert dans chaque CLSC, qui va
l'être, ça l'est déjà dans l'Outaouais et une autre
région, où, 24 heures par jour, 7 jours par semaine, un citoyen
qui a des problèmes de santé ou des problèmes sociaux peut
appeler et avoir une réponse, non pas un répondeur, mais une
vraie réponse, de la part d'une infirmière
spécialisée qui est en mesure de recevoir cet appel-là, de
faire une préévaluation et de fournir un conseil ou une
référence soit en urgence hospitalière, soit dans un
cabinet privé et ainsi de suite. Là où le système a
été implanté, dans la région de l'Outaouais
particulièrement, depuis quatre ans, je pense, l'évaluation a
démontré qu'une partie très importante des gens qui ont
utilisé ce système-là qui est très simple et
très peu coûteux seraient allés à l'urgence s'ils
n'avaient pas eu ce simple contact avec une personne spécialisée;
non pas un médecin, une infirmière qui est en mesure de donner
des avis et, très souvent, de rassurer les personnes. Ça,
évidemment, c'est un service qui devrait, je dirais, s'étendre
sur tout le territoire québécois. C'est inscrit dans la
réforme et même dans le plan d'implantation. Là encore,
évidemment, c'est un investissement, mais c'est, de toute
évidence, un investissement qui, rapidement, peut faire des
économies très considérables et diminuer la consommation
inutile de services.
Le Président (M. Csmden): Une autre question? Oui,
ça va.
Alors, Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président.
Ça me fait plaisir, à mon tour, de vous souhaiter la
bienvenue. Nous nous excusons pour nos débats qu'il était
nécessaire, pour nous, de tenir au début de cette commission.
Ceci n'empiète en rien sur le temps qui vous sera imparti, mais nous
croyons que, pour les fins de nos travaux, il était utile que nous
puissions en débattre à ce moment-ci avec nos collègues,
membres de cette commission. Cela étant dit, je veux vous souhaiter la
bienvenue et vous remercier de l'excellent mémoire que vous nous
présentez aujourd'hui.
En fait, ce qui est intéressant quand on le lit - j'ai lu la
version préliminaire, mais je me suis rendu compte, en vous
écoutant, que ça recouvrait essentiellement votre version finale,
ce qui était au contenu de la version préliminaire - ce qui est
intéressant dans votre document, c'est que vous élaborez une
série de pistes d'action très précises. Je pense que le
président du Conseil du trésor et les membres de son gouvernement
devraient s'en inspirer pour dire: Voilà où nous pourrions faire
des économies sans que le citoyen soit pénalisé. Au
contraire, il sera mieux servi si nous modifions nos attitudes, notre
façon de rendre disponibles des services ou des orientations que nous
pourrions privilégier et qui pourraient répondre davantage
à ces besoins. Je pense que c'est intéressant que ce soit, entre
autres, sur la prévention des bébés de petit poids, sur la
prévention de la violence dans les familles, sur la prévention du
placement.
Vous mentionnez une expérience tout à fait pertinente avec
des familles où on a évité que des placements en
institution, avec ce qu'on sait que cela coûte par jour versus le fait
que le jeune soit gardé dans son milieu, mais surtout ce qu'il peut en
retirer aux plans humain et personnel comme un citoyen qui va devenir un
meilleur citoyen parce qu'il sera mieux dans sa peau. Ça, je pense que
c'est incalculable, dans un sens, mais c'est intéressant, les pistes que
vous soulevez.
Moi, j'aimerais revenir sur le fond, peut-être, des propositions
que vous faites, ici, dans
le sens où votre prétention, c'est qu'on devrait
intensifier l'approche de prévention et de première ligne et
mettre moins d'importance sur l'approche plus lourde, institutionnelle. Dans
des mots plus simples, c'est l'hospitalisation et les services très
spécialisés dans les hôpitaux et dans les centres
d'accueil, d'ailleurs, parce que je pense que ça couvre cela, si je le
comprends bien.
D'abord, moi, j'aimerais que vous m'identifiiez ce qui vous
apparaîtrait absolument essentiel qui soit fait et qui n'est pas fait,
actuellement, pour prendre ce vrai virage, parce que vous semblez dire que ce
n'est pas évident qu'il soit vraiment pris.
Deuxièmement, dans votre document, à la page 9, vous
faites référence à la politique de santé et de
bien-être, parce que vous avez l'habitude de fréquenter les
commissions. Il y a eu la commission des affaires sociales qui a longuement
débattu, depuis déjà quelques années, de la
réorganisation des services de santé et des services sociaux. Une
des craintes qu'avaient les organismes oeuvrant en santé et dans les
services sociaux, c'était de dire: On n'a pas de politique de
blen-ôtre, on n'a pas d'objectif. Or, le ministre a déposé
un document. Vous êtes assez durs, jusqu'à un certain point, quand
vous dites: «D'ailleurs, le gouvernement du Québec devrait faire
sienne cette politique ministérielle.» Avez-vous l'impression ou
avez-vous des données vous permettant d'affirmer cela dans le sens
où vous croyez que c'est une politique ministérielle, mais que ce
n'est pas encore devenu une véritable politique gouvernementale dans le
sens où vous ne sentez pas l'appui soit d'autres ministères ou
à l'intérieur d'autres programmes à cette
politique-là? Parce que c'est l'affirmation que vous faites au document,
à la page 9, évidemment, sur le fond et sur cet
élément qui est une stratégie majeure si on veut mieux
agir. (14 h 50)
M. Payetle: J'aimerais apporter un exemple concret. Il y a eu, il
y a environ 18 mois, un ensemble d'organismes qui ont fait ce qu'on a
appelé le forum «Vivre chez soi», des gens,
évidemment, qui représentaient des personnes âgées,
des personnes handicapées, des familles et ainsi de suite; 350
organismes ont fait une déclaration qui demande explicitement au premier
ministre d'avoir une politique de maintien à domicile qui soit
interministérielle, et nous l'avons déposée
récemment à M. Bourassa. Pourquoi? On a beau dépenser
beaucoup d'argent dans des soins à domicile, mais s'il n'y a pas de
politique de transport, s'il n'y a pas de politique sur le revenu des personnes
âgées ou des personnes handicapées, s'il n'y a pas de
politique sur la sécurité et s'il n'y a pas de politique sur le
logement, les sommes dépensées en soins de santé risquent
d'être annulées parce que la personne âgée qui est
seule, isolée, qui n'a pas le minimum vital pour vivre, qui ne peut pas
se transporter et qui a très peur pour sa sécurité,
tôt ou tard, elle va demander d'aller en centre d'accueil, parce qu'il
n'y a pas de politique intergouvernementale. Je pense que, ça, c'est un
exemple où tant qu'il n'y aura pas une véritable politique
gouvernementale concernant le maintien à domicile, on va continuer
à travailler - c'est bien sûr - avec des soins de santé et
avec des services à domicile, puis on va supporter les organismes
communautaires, la Popote roulante, etc. Mais il est nécessaire que ce
soit l'ensemble du gouvernement qui décide que le maintien à
domicile, dans la société québécoise, il est temps
qu'on le fasse parce qu'on a un retard terrible.
Mme Marois: Est-ce que vous me permettez, avant d'aborder l'autre
question... Je trouve ça intéressant que vous nous fassiez cette
démonstration-là aujourd'hui parce que c'est évident qu'il
y a une certaine inquiétude, dans le sens où on dit: On investit
de plus en plus dans les services à domicile, et on a l'impression qu'il
n'y a plus de fin à cela et que ce n'est pas aussi efficace qu'on
semblait le dire. Or, ce que vous nous démontrez avec les gens qui ont
réfléchi à ces questions-là, c'est que, dans le
fond, tant qu'on aura une vision très sectorielle et très
limitée de ce que l'on doit faire, c'est évident qu'on mettra
sans fin des sous qui ne donneront pas tout l'effet qu'ils pourraient donner
s'il y avait une vision un petit peu intégrée.
C'est très intéressant, je trouve, comme analyse.
Le Président (M. Camden): Mme Vaillant. Mme Marois:
Oui, Mme Vaillant.
Mme Vaillant: Sur votre premier point, il est sûr - et
ça a été vécu dans d'autres pays - que ce n'est pas
facile de faire un virage vers la première ligne, tout comme ce n'est
pas facile, dans notre vie quotidienne, de se préoccuper de
l'environnement, par exemple. On est portés à ne pas recycler nos
affaires, c'est un peu fatigant. Le système de santé doit
s'adapter. Il est sur la même trajectoire depuis 1970. Il faut rappeler
juste un petit exemple parce que, des fois, ça fait du bien de regarder
l'histoire.
Dans les années soixante-dix, il fallait être bien portant
pour entrer, pour être admis dans un centre d'accueil et
d'hébergement. Au début des années soixante-dix,
c'était comme une condition, d'où la vétusté d'un
certain nombre de centres d'accueil et d'hébergement. Donc, on a des
façons de faire qui doivent changer. Ça, pour vivre dans ce
réseau-là depuis un bon nombre d'années et à
différents niveaux, je vais vous dire que ce n'est pas tout de go que le
réseau hospitalier, à l'instar, par exemple, de ce que certains
centres hospitaliers ont fait en Colombie-Britannique, va dire: Écoutez,
au niveau régional, on va accepter de prendre 1 % de notre
budget. On va travailler avec la première ligne pour essayer de
réduire l'hospitalisation, pour faire des ententes posthospitalisation
pour qu'au niveau des services à domicile pour les aînés,
pour que les références puissent se faire
adéquatement.
Moi, je vais vous dire personnellement, je suis une technocrate du
système de santé. Moi, j'ai la conviction profonde que c'est
possible et faisable et qu'il va falloir, tant au niveau des centres d'accueil
et d'hébergement qu'au niveau des centres hospitaliers... et on va
amorcer ça avec les CPEJ. Avec Mme Denis, on avait discuté
certaines hypothèses.
Mme Marois: Les centres de protection de l'enfance et de la
jeunesse?
Mme Vaillant: Oui. Je m'excuse. Notre jargon: les centres de
protection de l'enfance et de la jeunesse. Donc, quand vous dites: Comment
ça peut s'articuler? Qu'est-ce qu'il faut faire? Il y a un pas en avant
à faire au niveau de l'ensemble du réseau, il faut que ce
réseau-là adhère aux 19 objectifs et il faut qu'on soit
capables, avec les centres hospitaliers qui ont 6 000 000 000 $... C'est 6 000
000 000 $, le budget des centres hospitaliers; 2 800 000 000 $, la RAMQ. Il
faut qu'on soit capables de regarder au niveau des territoires, parce que c'est
là que ça se passe, comment on peut mieux articuler des services
de première ligne avec des services hospitaliers, s'entendant que c'est
comme...
Le réseau, c'est comme un corps humain. Chaque cellule a son
rôle. Je vous dirai que ce pas-là n'est pas encore franchi et que
nous devrions tous le faire. La Fédération doit également
mettre l'épaule à la roue dans ce sens-là.
Le Président (M. Camden): M. Payette.
M. Payette: Oui. Je voudrais ajouter... C'est un problème
qui existe en prévention. Souvent, la prévention peut faire des
économies énormes. On a calculé, par exemple, que les 15
000 femmes du Québec qui vivent en milieu défavorisé, qui
sont enceintes et qui risquent de donner naissance à des
bébés de petit poids, si elles étaient toutes suffisamment
alimentées par des programmes comme le programme que nous mettons sur
pied, là, «Oeufs, lait, orange», ce serait une
économie pour le Québec de 42 000 000 $. Cependant, rien ne nous
assure que les 42 000 000 $ qu'on pourrait économiser dans les
hôpitaux seraient retournés en première ligne et qu'ils ne
serviraient pas à développer de nouveaux services de
deuxième ligne. C'est ça qui est important, c'est que si on veut
que la prévention puisse vraiment avoir de l'impact, puisse vraiment
être efficace, il faut que les sommes qui auront été
économisées, au moins partiellement, puissent permettre de
continuer.
C'est la même chose au niveau de l'institutionnalisation. Si on
essaie de maintenir les deux, de mettre autant d'importance à
l'institutionnalisation qu'au maintien à domicile, on va être dans
un cercle vicieux, le même que le transport en commun, le transport
privé et ainsi de suite. Il faut briser, et c'est ça qui est le
problème.
Mme Marois: Je vous remercie. C'est très porteur, je
pense, d'avenir, comme perspective.
Le Président (M. Camden): M. le député de
Saint-Louis.
M. Chagnon: Merci, M. le Président.
Il me fait toujours plaisir de retrouver M. Payette; toutes les fois
qu'on se voit, on se parle de problèmes de coûts dans les
différents réseaux, que ce soit celui de la santé et des
services sociaux ou d'autres. Toutefois, on s'est vu habituellement dans des
circonstances toujours heureuses d'agrandissement de CLSC, de centres locaux de
services communautaires dans le centre-ville de Montréal. Vous avez
participé à plusieurs ouvertures. Il y a eu déjà
beaucoup de changements qui ont favorisé non seulement
l'émergence et la planification, mais aussi l'élargissement du
rôle des CLSC dans notre vie quotidienne, même en milieu
urbain.
Évidemment, votre mémoire parle beaucoup de gains qui
pourraient être obtenus par le biais de la prévention. Je pense
que vous avez tout à fait raison, mais il n'y a personne qui
mésestime l'effet que la prévention peut avoir sur des
coûts potentiels que le curatif pourrait avoir à corriger. Vous
avez aussi parlé de la décentralisation. Vous êtes
allé plus loin. Vous avez dit: Non seulement il faut prévenir,
mais il faut décentraliser. Il faut se rendre plus près des gens.
Est-ce que vous y voyez des gains de productivité, par hasard?
Le Président (M. Camden): M. Payette.
M. Payette: Écoutez, moi, je suis, comme citoyen, membre
d'un conseil d'administration local. Je dois dire qu'on a des décisions
à prendre sur un budget, sur l'organisation des services et ainsi de
suite. Je sens très bien, comme un profane qui est là-dedans, que
la lourdeur administrative, les différents échelons qui nous
encadrent d'une façon extrêmement serrée, les
différentes bureaucraties qui contrôlent, qui lisent les rapports,
qui les relisent et qui nous les retournent et ainsi de suite, ça me
paraît des choses qui sont inutiles et qu'il y a là-dedans...
d'énormes gains de productivité. C'est une échelle locale.
Ce n'est pas énorme, mais multipliez ça par les 600
établissements de la santé et des services sociaux, et je pense
que, là, on est toujours à se demander: Mais qu'est-ce qu'il font
là, en haut? Alors qu'on souhaiterait
qu'ils se penchent plus pour donner des politiques, élaborer des
politiques, on sent que ce qui est fait, c'est beaucoup plus un travail
bureaucratique. Alors, à ce point de vue là, ça, c'est une
première chose.
Une deuxième chose, moi, je pense que c'est difficile de se
sentir imputable et d'être créatif au niveau de l'utilisation du
budget qu'on a quand toutes les règles de l'utilisation sont toutes,
toutes serrées. C'est à peine si on peut bouger et ainsi de
suite. Donnez-nous une chance sur le plan local. Je ne dis pas qu'on veut
n'avoir aucun contrôle, mais on veut avoir une chance, et je pense que
les citoyens qui sont sur les conseils sont assez responsables pour faire des
gains de productivité, pour juger de la pertinence et de
l'efficacité des services et pour décider que les services ne
sont plus pertinents.
M. Chagnon: Alors, vous faites un lien entre
décentralisation et gains de productivité?
M. Payette: Tout à fait, tout à fait. (15
heures)
M. Chagnon: C'est ce que je comprends. Vous êtes
vous-même un représentant du monde élu, du secteur local,
dans votre MRC. Vous nous l'avez dit précédemment. Nous avons
rencontré, la semaine dernière... Nous avons reçu,
plutôt, ici, la semaine dernière, la Chambre de commerce du
Québec, qui, dans son mémoire, soutenait que l'avenir des CLSC
devrait passer d'abord par un regroupement et, deuxièmement, devrait
être administré par les MRC, ce qui...
M. Payette: Municipalité. Municipaliser les CLSC.
M. Chagnon: Vous êtes d'accord avec ça, vous? Quelle
est votre opinion là-dessus?
M. Payette: C'est une idée qui a déjà
été brassée, ici, au Québec. Il y a des
modèles européens comme, par exemple, en France, je pense, aussi
bien, je dirais, l'école primaire que les cliniques et les services
sociaux sont municipalises. Donc, le conseil municipal est aussi le conseil de
ces choses-là. Je me souviens qu'à l'occasion de la commission
sur les affaires municpales, ça avait été examiné,
mais je pense que les Québécois n'avaient pas mordu beaucoup
à cette idée-là.
Je ne la rejette pas, cette idée-là, mais je pense qu'il
faudrait prendre le temps de bien examiner les impacts. Moi, j'y verrais
certainement un certain nombre d'avantages, mais il faudrait que les
règles du jeu soient claires, que ce soit clair qu'il y a des politiques
quand même concernant la santé et le bien-être, qui viennent
du gouvernement central et qui doivent être respectées. Il
pourrait y avoir des gains... Bon, je veux dire... Une administration locale
pour la MRC Memphrémagog, qui a 33 000 habitants, pourrait faire, sans
doute, beaucoup de choses, et on pourrait éviter, je dirais, beaucoup de
- Comment je dirais? - frais administratifs.
Ce que je dis, sans être contre ni pour, je pense que c'est une
avenue qu'il faudrait explorer. Elle l'a déjà été,
mais moi, comme citoyen membre d'un conseil d'administration, je n'aurais pas
d'objection qu'on explore cette possibilité.
M. Chagnon: Auriez-vous préféré cette
formule-là plutôt qu'une autre formule qu'on aurait pu retrouver,
si elle avait été choisie dans la réforme de la
santé, au moment où on regroupait les structures? On les
regroupait, si j'ai bien compris, par...
M. Payette: Par MRC et par concentration, une fusion de tous les
établissements d'une même MRC.
M. Chagnon: On les regroupait aussi par genre. Les
hôpitaux...
M. Payette: Oui.
M. Chagnon: ...avec les hôpitaux, les centres d'accueil
avec les centres d'accueil, des CLSC avec des CLSC, etc. Est-ce qu'il n'y
aurait pas lieu de penser que ce serait encore plus cohérent comme
système si on avait un hôpital, deux CLSC, un centre d'accueil,
etc., regroupés ensemble, sous un même chapeau?
M. Payette: Apparemment, oui. La logique nous amènerait
à ça, mais, moi, je pense que, même au niveau local, le
poids actuel de tout le système médico-hospitalier serait tel
qu'on ne serait plus en mesure dans le moment de faire le virage vers des
services légers et des services de première ligne. C'est vraiment
ça qui est notre crainte. Jeanne D'Arc?
Mme Vaillant: Là-dessus, là où il y a eu des
fusions d'établissements, ce qui se passe, et on l'a encore dans
quelques centres de santé en région éloignée, c'est
que le poids du curatif est tel, l'hospitalisation est telle que tout ce qui
touche les programmes de prévention et plus léger, le maintien
à domicile, risque d'y passer.
Puis, il y a un autre élément aussi quand on regarde les
grands ensembles. Il y a, en première ligne, une logique d'intervention
qui n'est pas la même qu'au niveau des services
spécialisés.
Et pour avoir géré un peu les transferts d'à peu
près 3000 personnes du réseau hospitalier des CSS en CLSC, une
des difficultés que nous avons eue, c'est de changer les modes de
pratique. En CLSC, il n'y a pas d'interventions qui doivent être
spécialisées. C'est une approche qui doit viser une prise en
charge, qui doit viser la prévention, qui est plus légère,
et si on n'a pas des garanties au niveau d'un conseil d'adminis-
tration, si on n'a pas des équipes relativement restreintes,
souples, on manque le bateau.
On ne peut pas faire ça avec des ensembles de 500, 1000, 2000
personnes. Le personnel moyen en CLSC, c'est autour... La moyenne nationale est
autour de 62. C'est insuffisant pour faire toutes les tâches,
actuellement. Il faudrait augmenter encore d'au moins 40 personnes pour avoir
des équipes minimales autour de 90, pour être capables de faire
face à tous les mandats.
Mais si on a de grands ensembles, avec le poids du
médico-hospitalier, moi, je vous le dis, c'est comme dans n'importe
quoi, la prévention, les approches communautaires, tout ça va
prendre le bord et va être, en quelque sorte, balayé par ce qui
est lourd et spécialisé. C'est comme une loi de la nature.
M. Chagnon: Vous avez un verdict et un diagnostic plutôt
noir, Mme Vaillant. Peut-être est-il réaliste? Toutefois, on ne
peut pas oublier le fait que, par exemple, des politiques comme celles du
maintien à domicile, quoi qu'on en ait dit précédemment,
ont fait l'objet d'augmentations substantielles de crédits depuis les
récentes années. Non sans besoin, parce que, sauf erreur, je
pense qu'au Québec nous sommes l'État où le nombre de lits
par personne âgée en centre d'accueil est un des plus
élevés de la planète. Malgré cela, il aurait
probablement fallu davantage, il y a 10, 15 ans, commencer par financer du
maintien à domicile. Il nous faut faire aujourd'hui du rattrapage, j'en
conviens bien. Mais ce rattrapage-là est amorcé, et le
ministère de la Santé et des Services sociaux a 1 % de son
budget, à tous les ans, un budget de 12 000 000 000 $, soit 120 000 000
$ par année, qui va strictement à l'ensemble de la
problématique du vieillissement de notre société, compte
tenu du fait que ce vieillissement prend des proportions, évidemment,
que nous connaissons, qui sont de plus en plus grandes - tous les
démographes sont capables de nous l'estimer - à près de 17
% à 18 % de la population de 65 ans et plus dans une dizaine
d'années.
Mais dans le réseau des CLSC, on a quand même eu des
augmentations de budget intéressantes depuis 1986-1987, qui ont
oscillé entre 9,6 % en 1986-1987; 1987-1988, 6 %; 1988-1989, 9,5 %;
1989-1990, 10,6 %; 1990-1991, 9,6 % et, finalement, en 1991-1992, 7,1 %.
Lorsque vous concluez dans votre document que la détérioration
socio-économique de notre société ne doit pas être
le prétexte à hypothéquer les chances d'une vie meilleure
pour les prochaines générations, est-ce qu'on ne peut pas faire
allusion au fait qu'année après année les gouvernements,
depuis presque 17 ans, ont emprunté de plus en plus pour financer les
opérations courantes? Vous qui êtes une technocrate du secteur de
la santé, vous savez ce que c'est. Alors, on a investi dans plusieurs
champs, avec de l'argent emprunté, pour financer des opérations
courantes, pour financer l'épicerie, ce qui fait qu'effectivement les
générations prochaines sont handicapées, seront
hypothéquées. Mais pour financer nos opérations,
aujourd'hui, est-ce qu'il n'y a pas moyen, aujourd'hui, de faire davantage, ou
de recourir, d'avoir des revenus supplémentaires, ou de trouver le moyen
de diminuer nos coûts, malgré les suggestions que vous nous faites
de faire plus de prévention, d'ajouter 40 employés par CLSC?
C'est là la dynamique dans laquelle on se trouve sur le plan financier,
et c'est celle-là qui nous entraîne vers des problèmes
majeurs, plus on avance, et qui feront en sorte d'empêcher des
gouvernements à venir de pouvoir investir davantage, par exemple, dans
la prévention. (15 h 10)
Mme Vaillant: Là-dessus, je vous dirais que le
réseau CLSC dans le secteur de la santé est le seul qui a
vécu ça. Il a été fait à partir de
transferts de ressources; transfert, au début, des unités
sanitaires. Dans les années quatre-vingt, il a été
parachevé exclusivement par des transferts de ressources. Il y a 3500
personnes, 2000 venant du réseau hospitalier, 1500 qui venaient des
centres de services sociaux, et ça ne s'est pas fait sans
difficulté, là. Je vous le dis, il y en a eu, des luttes de tout
acabit. Le réseau CLSC a été mis sur pied de cette
façon-là en période de récession, avec un budget de
100 000 $ pour l'infrastructure minimale qui avait été
ponctionnée à l'intérieur de l'enveloppe des CLSC. Bon.
C'est comme ça que les ajouts d'argent se sont faits dans le
réseau de première ligne, de façon substantielle. Ce qui a
été ajouté - et là-dessus vous avez raison - c'est
qu'il y a eu des budgets au niveau du SIMAD qui ont été
ajoutés pour le désengorgement des urgences par Mme Lavoie-Roux.
Il y avait 40 000 000 $ qui avaient été promis dans le livre
blanc, pour les services à domicile, mais, vous voyez, le poids est tel
qu'au niveau des 40 000 000 $ il y a eu 20 000 000 $ qui sont allés pour
le service à domicile et 20 000 000 $ qui sont allés au niveau de
l'hébergement. C'est donc dire que...
Et quand vous parlez des services à domicile, on est, grosso
modo, actuellement, à 200 000 000 $. Si vous regardez les 75 ans et
plus, il y en a 300 000 au Québec, actuellement, 300 060 personnes qui
ont 75 ans et plus, et qui requièrent beaucoup de services. Si ces
personnes-là n'ont pas des services à domicile, elles vont
s'inscrire sur les listes d'attente pour les centres d'accueil et
d'hébergement, elles vont aller dans les urgences, et vous allez les
retrouver dans les lits des centres hospitaliers. C'est ce pourquoi il faut
qu'il y ait un virage, et nous, ce qu'on dit... Ce n'est pas
d'hypothéquer l'avenir des générations futures, ce que
nous disons - et on le sait, que ce n'est pas facile - mais il faut
réallouer à l'intérieur du système de santé.
C'est ce que nous disons, fondamentalement.
Le Président (M. Camden): On vous remercie, madame.
Nous allons maintenant entendre le député de Labelle, qui
souhaite nous adresser des questions.
M. Léonard: Merci, M. le Président.
Bienvenue. Merci pour votre mémoire et, je pense, la
qualité des discussions que nous avons actuellement.
Évidemment, je viens d'écouter cette discussion sur le
rôle des CLSC, des MRC, et ça me rappelle des souvenirs. Je ne
veux pas avoir l'air trop grand-père non plus, mais c'était au
coeur de nos préoccupations. Je dois dire que les CLSC ont adopté
tout de suite les découpages des MRC, et j'avais eu, dans ce
débat, l'appui du réseau des CLSC et de mon collègue,
à l'époque, Denis Lazure.
Je pense toujours que c'est une des grandes voies de solution aux
coûts de la santé, qui sont très lourds, mais qui ne sont
pas, non plus... Quand on les compare à ce qu'il y a aux
États-Unis, il ne faut pas exagérer. On est encore mieux que ce
qu'il y a aux États-Unis. Donc, il faut quand même
apprécier ce que nous avons, tout en se disant que tous les
problèmes ne sont pas réglés. Alors, nous partons de ces
prémisses.
Je vous entendais, tout à l'heure, dire, en parlant de
décentralisation des politiques interministérielles qui devaient
s'ajuster. J'ai toujours eu un peu de difficulté à penser que les
fonctionnaires pourraient s'entendre sur des milieux aussi petits que celui des
territoires des MRC ou des CLSC, maintenant, parce que, là, on fait
appel à tout l'appareil gouvernemental: les transports d'une part, le
ministère de la Santé et des Services sociaux, le
ministère des Affaires municipales, puis mettez-les tous. On retrouve
finalement toutes les implications ministérielles sur chacun de ces
territoires de CLSC.
Plus loin, vous avez dit que, si on mettait à côté,
les uns des autres, les services de prévention et les services
spécialisés ou curatifs, vous seriez mangés à la
casserole. C'est un peu ce que j'ai retenu. J'emploie cette expression. Est-ce
que ce n'est pas là la véritable bataille? Une bataille en termes
de pouvoirs décisionnels au plan local qui ferait qu'on
rééquilibrerait les choses? Et, sur ce plan-là, est-ce que
l'expérience que vous avez vécue dans la redéfinition d'un
conseil régional vous a satisfait au cours de la dernière
année ou maintenant, parce que c'est en train de se faire, ou est-ce
qu'on peut penser encore qu'il faudrait aller encore plus proche des services,
donc que l'unité territoriale de base serait celle des CLSC plutôt
que des grandes régions administratives où, là, on se
démarquerait de façon définitive des appareils
gouvernementaux, pour reprendre une autre structure?
Et je vais ajouter un peu plus. J'ai toujours pensé que,
finalement, un jour ou l'autre, on devrait arriver au Québec à
faire des élections le même jour pour les commissions scolaires,
les municipalités, les conseils de CLSC, les conseils d'hôpitaux,
des conseils des bibliothèques - mettez-les tous - à partir de la
même liste électorale, de sorte que le citoyen serait
conscientisé sur les équilibres budgétaires qu'il aurait
à faire et, donc, en termes décisionnels, de les prendre, les
décisions, par ses élus, direct.
J'aimerais ça vous entendre, parce que je trouve que, quand vous
avez dit «dans la bataille, nous serons toujours perdants», je ne
suis pas sûr, parce que, au fond, la grande logique, c'est que vous
dites: les services de prévention seront toujours moins coûteux
que les services curatifs. C'est ça, votre point d'appui. J'aimerais
vous entendre.
Le Président (M. Camden): M. Payette.
M. Payette: Sur votre dernière suggestion, des
élections locales, on a toujours été très
favorables que ce soit tout le monde ensemble, et on ne demanderait pas mieux.
On l'a d'ailleurs suggéré, et on espère que ça va
arriver.
Un autre point que vous avez signalé, c'est la question des
conseils régionaux, maintenant. Je suis moi-même membre de
l'assemblée régionale de ma région. Ce que je vous dirais,
c'est qu'il est encore trop tôt pour conclure. Moi, je pense qu'il y a
là un endroit extraordinaire pour pouvoir établir de la
concertation, et pouvoir vraiment faire en sorte qu'on évite des choses
qui sont inutiles et coûteuses, via cette concertation-là,
à un niveau régional, mais ça pourrait être variable
d'une région à l'autre.
Le troisième point, je dirais, le dilemme
curatif-préventif, médico-hospitalier, services légers,
ainsi de suite, je pense qu'il faut distinguer le fait que des situations,
comme, par exemple, de grands centres urbains et des centres
éloignés. Ça, je pense que c'est très important. On
n'a aucun problème avec un centre de santé en
Abitibi-Témiscamingue ou sur la Côte-Nord, c'est une formule qui
fonctionne très bien. Il s'agit d'un centre qui a en même temps
une vocation de CLSC et une vocation hospitalière. L'évaluation
de ces centres-là, c'est vraiment très positif. Mais dans une...
Prenons la ville de Sherbrooke, où il y a cinq grands hôpitaux. Je
ne suis pas sûr si le CLSC qui est là va pouvoir vraiment assumer
complètement, en tout cas, pas dans le moment, sa fonction. Je pense
qu'il y a des situations où ça va être difficile de
rétablir l'équlibre, dans ces centres-là.
M. Léonard: À ce moment-là, est-ce que c'est
le cadre budgétaire qui devrait être assez rigide, parce que, lui,
il pourrait être dicté par le gouvernement, et imposer les
coûts de prévention ou que les services de prévention
soient assurés dans ces endroits.
M. Payette: Des budgets protégés. Mais il y
a plus que la question du budget.
M. Léonard: II y a plus que la question de budget, je suis
d'accord.
M. Payette: Là-dessus, Jeanne D'Arc.
Mme Vaillant: II y aurait comme, je vous dirais, une
adhésion de toutes les composantes du système de santé, y
compris les médecins; on n'en a pas beaucoup parlé, mais y
compris les médecins. Là où ils ont réussi, je vais
vous citer la Norvège, ils ont réussi parce que les associations
médicales et l'ensemble des composantes de leur système de
santé ont adhéré aux valeurs. Là, il y a un bout
que le gouvernement peut faire, mais je suis très consciente qu'il y a
un bout que, au niveau du réseau, nous devons faire. Il faut que les
centres hospitaliers acceptent la mission des CLSC. Il faut que les cliniques
privées acceptent la mission des CLSC. Il faut que les centres d'accueil
et d'hébergement aussi...
Nous avons un travail de consensus à faire qui, quant à
moi, devrait se faire dans le cadre de la politique de santé et de
bien-être. Il faudrait continuer dans ce sens-là. Il y a des
indications claires qu'un gouvernement, que le gouvernement peut donner. Il y a
des bouts qui ont été faits dans le cadre de la loi 120. Il y a
également les objectifs de la politique de santé et
bien-être, mais il faut continuellement maintenir le cap, sinon le
dérapage est très facile.
Je vais vous citer encore le cas des sages-femmes. Il y a une loi - elle
est adoptée depuis deux ans et demi - et il y a une détermination
du ministre - il n'y a aucun doute là-dessus. Mais vous avez là
une situation de blocage. Il y a eu des rencontres innombrables. Je ne veux
pas... Je le donne comme exemple, et, moi, je pense qu'en quelque part il y a
comme des messages clairs qu'il faut qu'ils soient livrés et, nous, au
niveau du réseau, nous avons, également, nos
responsabilités de concertation, sinon on va être tous
responsables. Notre système de santé, il ne pourra pas durer, il
risque d'éclater.
Le Président (M. Camden): En conclusion, s'il vous
plaît...
M. Léonard: Je pourrais simplement dire, en
conclusion...
Le Président (M. Camden): ...30 secondes. (15 h 20)
M. Léonard: J'ai 30 secondes? En conclusion, c'est que,
quand vous citez le cas des sages-femmes, et que j'étais à
l'Université de Montréal, à la faculté de
l'éducation permanente, nous nous préparions à donner un
cours de formation. Merci.
Le Président (M. Camden): Alors, nous remercions les gens
représentant la Fédération des CLSC pour leur
présentation, et évidemment, de s'être prêtés
à des commentaires et d'avoir répondu également aux
questions des parlementaires. Je vous remercie.
Nous allons suspendre deux minutes pour permettre aux gens du Front
d'action populaire en réaménagement urbain de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 21)
(Reprise à 15 h 23)
Le Président (M. Camden): S'il vous plaît, je vous
demanderais de prendre place. J'invite donc le Front d'action populaire en
réaménagement urbain à prendre place.
Dans un premier temps, est-ce que le porte-parole de l'organisme
pourrait s'identifier et présenter également les gens qui
l'accompagnent à la table des témoins?
Front d'action populaire en
réaménagement urbain (FRAPRU)
M. Saillant (François): Oui. Mon nom est François
Saillant. Je suis coordonnateur du FRAPRU. À ma gauche, il y a Denyse
Lacelle, qui est la présidente de notre organisme; Carlos Borges, du
Comité de logement social de Châ-teauguay; à ma droite,
Jean-Pierre Wilsey, du POPIR-Comité logement de
Saint-Henri-Petite-Bourgogne; et, finalement, Walter Zelaya, du Comité
des citoyens et citoyennes du quartier Saint-Sauveur à
Québec.
Le Président (M. Camden): Je vous rappelle maintenant les
règles de l'audition. Alors, 20 minutes sont d'abord consacrées
à l'exposé de votre mémoire; suivra une période de
40 minutes d'échanges avec les membres de la commission, ou un partage
à temps égal entre le parti ministériel et l'Opposition.
Sans plus tarder, nous sommes disposés à vous écouter.
M. Saillant: Bonjour. Le Front d'action populaire en
réaménagement urbain est un regroupement national de 40 groupes
de citoyens et citoyennes à faibles revenus. Le FRAPRU a l'honneur de
représenter les mal-logés, ceux et celles qu'on appelle les
sans-abri fiscaux, ceux et celles pour qui le logement n'est pas une question
de gros sous, de rentabilité, d'investissement, mais un droit. Un droit,
par contre, qu'on s'acharne à leur refuser, et pour lequel ces
gens-là doivent se battre quotidiennement.
C'est sans illusion aucune que le FRAPRU se présente devant cette
commission, parce qu'à notre avis elle n'a rien de la vaste consultation
sur la fiscalité qui a été promise au sortir des
dernières négociations du secteur public. Nous avons acquis la
conviction profonde que la
présente commission ne sert qu'à préparer le
terrain pour une attaque sans précédent contre les programmes
sociaux. Qu'il soit bien clair que nous n'entendons pas nous associer d'aucune
façon à cette démarche.
Nous sommes ici dans un but, qui est celui de nous adresser à la
population du Québec, et de lui faire entendre un autre discours que
celui dont on tente de la gaver depuis la publication du document
gouvernemental «Vivre selon nos moyens».
À notre avis, la démarche gouvernementale est
incomplète. Elle est démagogique et elle est malhonnête. Le
gouvernement libéral a délibérément choisi
d'occulter un pan complet de la réalité des finances publiques,
qui est celui des revenus de l'État, et plus particulièrement des
revenus dont cet État-là se prive en n'imposant pas certains
gains réalisés par des particuliers à hauts revenus, et
même à très hauts revenus, ou des compagnies. Non seulement
le parti au pouvoir ne propose aucune modification à ses dépenses
fiscales, mais il n'a même pas la transparence et, à notre avis,
l'honnêteté d'en publier le coût total pour l'État,
ni de révéler à qui ça sert, à quelle couche
de la population ça sert, ces dépenses fiscales.
Il y a à peine quelques pages dans le document quand même
assez volumineux, «Vivre selon nos moyens», qui sont
consacrées à la question des dépenses fiscales. Il y a
à peine quelques chiffres épars qui sont cités, et c'est
vraiment des chiffres épars. C'est carrément pour écarter,
sans grande démonstration, du revers de la main, toute
possibilité de réforme un tant soit peu substantielle de la
fiscalité. Comment le gouvernement peut-il avoir le front de brandir le
spectre du déficit et de proposer de couper à nouveau dans la
santé, dans l'éducation, dans la sécurité du
revenu, tout en laissant les privilèges fiscaux intacts.
M. Zelaya (Walter): Permettez-nous de nous attarder au domaine
que nous connaissons le mieux, celui de l'habitation. Le FRAPRU évalue
que l'état québécois se prive d'au moins 2 000 000 000 $
de revenus en n'imposant pas certains gains réalisés en ce
domaine, et ce, alors que les gouvernements fédéral et provincial
ne prévoyaient, au total, dépenser que 508 000 000 $ en
subventions directes à l'habitation au Québec, ça dans
l'année 1992-1993. le chiffre de 2 000 000 000 $ peut sembler
énorme, mais avant de le repousser trop facilement, on devrait se
souvenir que le livre vert sur l'habitation, «se loger au
québec», publié par le gouvernement précédent
évaluait à 825 000 000 $ le coût des dépenses
fiscales dans le domaine de l'habitation, et les chiffres sur lesquels il s'est
basé alors dataient de 1981, avant que ne débute
véritablement la flamblée spéculative sur les prix des
maisons.
Nous aurions aimé avoir des chiffres plus clairs sur les
dépenses fiscales du gouvernement québécois dans le
domaine du logement, chiffres que nous avons demandés dès le 6
novembre dernier au ministre responsable de l'habitation, M. Claude Ryan, qui
s'était alors engagé à les dévoiler. M. Ryan a
renouvelé cet engagement, le 12 janvier, dans une lettre adressée
au FRAPRU. Nous devons aujourd'hui constater que le ministre était
incapable de respecter son engagement. Serait-il possible que son gouvernement
ne se soit même pas donné la peine d'évaluer un manque
à gagner d'une telle ampleur? Et, s'il l'a fait, se pourrait-il qu'il
trouve ces chiffres trop embarrassants pour les rendre publics? A-t-il donc
peur que ses beaux discours sur la dette soient pris moins au
sérieux?
Dans notre mémoire, nous faisons part de propositions très
concrètes concernant les dépenses fiscales en habitation. Ces
propositions sont les suivantes.
M. Saillant: II y en a trois. L'exemption des gains de capital
réalisés par les propriétaires au moment de la vente de
leur résidence principale devrait être limitée, par
exemple, à un montant de 50 000 S à vie. Cette exemption permet
au propriétaire de vendre la résidence où il demeure sans
payer un seul sou d'impôt sur le gain de capital ainsi
réalisé, et ce, peu importe son revenu ou le nombre de fois
où il a profité de ce privilège.
En 1989, cette exemption fiscale a coûté pas moins de 4 600
000 000 $ au gouvernement fédéral, ce qui donne une bonne
idée de son coût pour le gouvernement québécois - le
quart probablement. Pour le FRAPRU, il ne s'agit pas de proposer au
gouvernement d'abolir indistinctement cet avantage fiscal, et ce, même
s'il pose en soi un problème d'équité, puisque seuls les
propriétaires peuvent en profiter. (15 h 30)
II y a, pour nous, toute une différence entre des ménages
qui, au moment de leur retraite, vendent la maison qu'ils ont occupée
toute leur vie et réalisent ainsi un gain qui leur permet une
sécurité financière et d'autres qui s'en servent comme
d'un véhicule spéculatif. Il y a toute une différence
entre le ménage à revenus moyens ou modestes qui réalise,
par exemple, un gain de 50 000 $ une fois dans sa vie et un John Turner qui, en
1984, a fait un gain de capital de 635 000 $ sur la vente de sa
résidence de Toronto, sans payer un sou d'impôt, ni en Ontario ni
au fédéral. On n'a malheureusement pas d'exemple de ce
genre-là au Québec, mais peut-être que certains
députés ici présents pourraient nous amener des exemples
tout aussi intéressants.
Deuxième proposition. Le gouvernement devrait mettre fin au
double avantage tiré par les propriétaires de logements locatifs
dont les dépenses comme les réparations majeures, l'entretien,
les taxes, les assurances ou la
gestion sont déductibles d'impôt en plus de pouvoir
justifier des augmentations de loyer à la Régie du logement.
Donc, une dépense et deux avantages. Est-il nécessaire de
rappeler que ce privilège, évidemment, n'est
réservé qu'aux propriétaires, les locataires n'ayant
aucune aide quand il s'agit d'entretenir le logement, d'y effectuer des
réparations ou tout simplement de payer le loyer.
Troisième proposition. Le gouvernement québécois
devrait abolir immédiatement, et ce, dans tous les domaines, l'exemption
de 100 000 $ à vie sur les gains en capital et faire pression
sérieusement sur le gouvernement fédéral pour qu'il en
fasse autant. De plus, les gains de capital devraient être imposés
à 100 % comme n'importe quel revenu de travail et non aux trois quarts
comme c'est présentement le cas. Au total, ces exonérations ont
privé l'État québécois de 421 000 000 $ en
1990.
Lors de leur budget de 1992, les ministres fédéral et
provincial des Finances ont dû avouer que l'exemption de 100 000 $ sur la
vente de résidences autres que la résidence principale
était improductive, et ils ont aboli cette possibilité. Cette
mesure n'en a pas moins coûté pendant six ans des centaines et des
centaines de millions au gouvernement, tout en contribuant à la
flambée spéculative des années quatre-vingt. Les
locataires en ont été les grands perdants. Le stock de logements
à bas loyer en a souffert de façon irréparable et
même l'accès à la propriété, si cher au
gouvernement, s'en trouva compromis à cause du prix des maisons qui
devenaient carrément hors de prix. Et le pire, c'est que les
gouvernements, tant fédéral que provincial, ont
décidé de procéder à l'abolition de cette
exemption, mais uniquement de façon graduelle, laissant encore ainsi
s'envoler d'autres millions.
M. Borges (Carlos): Si elles étaient retenues, certaines
propositions permettraient à l'État de récupérer
des centaines de millions de dollars, dont une partie pourrait être
investie dans la réalisation de 5000 nouveaux logements sociaux d'ici
l'an 2000, comme le revendique le FRAPRU et de nombreux organismes communau
taires, syndicaux, féministes et religieux à travers le
Québec. La réalisation de 5000 nouveaux logements sociaux en sept
ans représenterait certes des déboursés importants, mais
elle aurait aussi et surtout des impacts sociaux et économiques non
négligeables. Pensons aux emplois qu'elle permettrait de créer.
Pensons à sa contribution à la revitalisation des quartiers
anciens. Pensons à la diminution de problèmes sociaux importants
et à la réduction qui s'ensuivrait dans des domaines comme la
santé, les services sociaux ou la lutte à la
criminalité.
Le gouvernement n'a peut-être jamais pris conscience que le
problème du logement lui coûte cher, et là, nous ne parlons
pas du prix des logements sociaux. Quand, de 5000 ménages locataires, 1
ménage locataire sur 5 consacre plus de 50 % de leurs revenus au
logement, ça a des conséquences. Ça a des
conséquences sur leur possibilité de s'alimenter convenablement
et d'alimenter leurs enfants, ce qui oblige, par la suite, le gouvernement
à distribuer des déjeuners gratuits dans les écoles.
Ça a des conséquences sur leur condition physique et mentale et,
du même coup, sur les soins de santé dont ils ont besoin.
Ça a des conséquences sur leur capacité de chercher un
travail ou de le garder. Tout ça, ça coûte de l'argent,
beaucoup d'argent au même gouvernement. Même si le gouvernement ne
veut voir ces problèmes qu'en termes économiques, il devrait au
moins constater que son laisser-aller actuel dans le domaine de l'habitation a
lui aussi un prix. Celui de 100 000 nouveaux logements sociaux lui semblerait
sûrement beaucoup moins élevé.
M. Wilsey (Jean-Pierre): Vouloir s'attaquer au problème de
la dette sans considération pour les Impacts sociaux et
économiques à long terme dont nous venons de parler et en faisant
totalement fi des dépenses fiscales des gouvernements, c'est purement et
simplement criminel. Le FRAPRU propose, quant à lui, une révision
en profondeur de l'ensemble de la fiscalité pour la rendre plus
équitable et progressive. Le système fiscal actuel est
coûteux. Il ne favorise pas la production de biens et de services, mais
la spéculation. Il ne favorise pas la répartition de la richesse,
mais sa concentration. Il ne favorise pas la justice, mais
l'iniquité.
Afin de permettre un tel débat de société, le
FRAPRU s'associe aux centrales syndicales et à de nombreux autres
organismes pour revendiquer la mise sur pied d'une véritable commission
d'enquête publique sur la fiscalité. Et nous réclamons une
fois de plus que le gouvernement ait la décence de publier le coût
total de ses dépenses fiscales. En attendant, nous pouvons d'ores et
déjà vous annoncer très clairement notre intention de
combattre toute nouvelle coupure dans les programmes sociaux, tout
contrôle supplémentaire exercé contre les plus mal pris de
la société, toute nouvelle tarification pour l'utilisation de
services essentiels. Le problème des pauvres et des mal logés, ce
n'est pas de vivre selon leurs moyens, comme le demande le gouvernement, mais
simplement d'avoir les moyens de vivre.
M. Saillant: Au début de la présentation, nous
disions refuser de nous associer aux travaux de cette commission parce que nous
avions la ferme conviction que les dés étaient pipés et
que la seule raison pour laquelle on nous consultait était pour savoir
si nous aimions mieux nous faire couper les jambes, les bras ou la tête.
Cette conviction a été renforcée dans les derniers jours
lorsque nous avons pris connaissance des propos de la ministre de
l'Éducation et
du ministre de la Sécurité du revenu - je devrais
plutôt dire de l'appauvrissement - qui sont déjà en train
d'annoncer la réalisation de mesures contenues dans le document,
normalement de consultation, «Vivre selon nos moyens».
Nous voulions livrer un message à la population. C'est fait.
Aller plus loin et accepter de répondre à vos questions, si vous
daignez même en poser, et d'ouvrir le dialogue avec vous serait, à
notre avis, inconséquent. Vous nous permettrez donc de nous retirer. Si
vous voulez continuer votre show, faites-le sans nous.
Le Président (M. Camden): Alors, nous suspendons les
travaux immédiatement.
(Suspension de la séance à 15 h 38) (Reprise à 15 h
40)
Le Président (M. Camden): Alors, nous allons suspendre
jusqu'à...
M. Johnson: Ça l'est, là. C'est suspendu.
Le Président (m. camden): nous avons repris, m. le
président, pour indiquer... alors, nos travaux ayant été
suspendus, nous allons reprendre nos travaux à 16 heures, si les gens,
évidemment, de l'archidiocèse de québec...
Une voix: Non, la Fédération nationale... Le
Président (M. Camden): 17 heures? Une voix: La
Fédération...
Le Président (M. Camden): La Fédération
nationale des...
M. Chagnon: M. le Président, ils sont ici, nos
invités prochains. Pourquoi ne pas commencer tout de suite?
Le Président (M. Camden): Ah! je suis fort disposé.
Est-ce qu'on peut nous indiquer si les représentants de la
Fédération nationale...
M. Léonard: M. le Président, il y a peut-être
des gens qui attendent, à la télévision, pour regarder,
à 16 heures.
Une voix:...
M. Léonard: Effectivement, il y a des gens qui suivent
cette commission à la télévision, et s'il y en a
qui...
M. Chagnon: Ils vont les voir parce qu'on n'aura pas fini
à 16 heures.
M. Léonard: Oui. Ils veulent entendre ce que les
représentants vont dire devant la com- mission, et c'est à 16
heures.
M. Chagnon: Ils le savent. Ils sont délégués
pour venir nous rencontrer.
M. Léonard: M. le député de Saint-Louis, M.
le Président pourrait peut-être considérer que j'ai quelque
raison tout à fait démocratique de penser que, l'horaire les
ayant prévus à 16 heures, c'est à 16 heures qu'on va les
entendre. C'est comme un...
M. Johnson: Alors, on peut leur imposer des retards, mais pas
des...
M. Léonard: Je vais utiliser un exemple. Un autobus qui
doit partir à 16 heures et qui part à 15 h 45, il va manquer
quelques-uns de ses passagers.
Le Président (M. Camden): Je comprends fort bien, M. le
député.
M. Johnson: À condition que tout le monde ait un billet,
oui.
Le Président (M. Camden): On vous remercie, M. le
député de Labelle.
M. le député de Limoilou, oui?
M. Després: Puis je vous proposer, M. le Président,
que le secrétaire puisse demander à l'organisme qui devait passer
à 16 heures s'il veut, s'il est prêt à passer devant la
commission. Et s'il est consentant, nous le faisons, sinon nous attendons
à 16 heures. Je pense que... Est-ce que, M. le Président, cette
proposition...
Le Président (M. Camden): Alors, nous allons... Je suis
bien prêt... Je suis disposé à considérer cette
possibilité. Est-ce que les gens de la Fédération
nationale des associations de consommateurs sont disposés à se
faire entendre immédiatement?
M. Beaudoin (Roger): Oui, comme ça peut être
à 16 heures aussi, si vous le désirez.
Le Président (M. Camden): Très bien. Alors,
à la lumière de vos propos et malgré les propos du
député de Labelle, qui se faisait le répartiteur de
travaux... Je comprends fort bien que dans un...
M. Léonard: M. le Président, je m'excuse, l'ordre
du jour...
Le Président (M. Camden): Un instant, je suis
après...
M. Léonard: ...a été adopté et il est
prévu qu'à 16 heures la Fédération nationale des
associations de consommateurs du Québec vienne.
Mais l'ordre du jour, il a été adopté, et vous
l'avez adopté. Je ne vois pas pourquoi, maintenant, on ne le respecte
plus.
Le Président (M. Camden): M. le député de
Labelle, est-ce que vous en faites une question de consensus?
M. Léonard: Oui.
Le Président (M. Camden): De consentement?
M. Léonard: Oui.
Le Président (M. Camden): Alors, vous refusez. Alors, II
n'y a pas de consentement. Nous procéderons donc à l'audition
à 16 heures, considérant qu'il n'y a pas de consentement.
Oui, M. le député de Limoilou.
M. Després: Je pense que la proposition que j'ai faite
n'était pas d'imposer ni au député de Labelle, mais tout
simplement de faire la proposition que si l'organisme était prêt
à se faire entendre. Il a fait valoir qu'il était consentant. Je
n'étais pas...
Le Président (M. Camden): Écoutez, M. le
député de Limoilou...
M. Després: J'ai l'impression que c'est plutôt le
député de Labelle qui est en train d'imposer.
Le Président (M. Camden): M. le député de
Limoilou, nous avons très bien compris le sens de vos propos. Le
député de Labelle a indiqué qu'il refusait son
consentement à cet effet, et le règlement veut qu'il y ait
égard au consentement. Alors, nous entendrons donc, à 16 heures,
les gens de la Fédération nationale des associations de
consommateurs.
Nous suspendons nos travaux jusqu'à 16 heures.
(Suspension de la séance à 15 h 44) (Reprise à 16 h
1)
Le Président (M. Camden): Nous allons maintenant reprendre
nos travaux. Je demande aux représentants de la Fédération
nationale des associations de consommateurs du Québec, qui ont pris
place à la table des témoins, de s'identifier.
Fédération nationale des associations de
consommateurs du Québec (FNACQ)
M. Beaudoin (Roger): M. le Président, j'allais distribuer
de ce fait une espèce d'annexé, si vous voulez, à notre
mémoire, quelques docu- ments. J'allais le faire. Est-ce que quelqu'un
viendrait les chercher pour vous les donner ou bien est-ce que je dois
circuler?
Le Président (M. Camden): De fait, M. Beaudoin, quelqu'un
va prendre les documents et les distribuera aux membres de la commission.
Alors, M. Beaudoin, est-ce que ce serait possible, puisqu'on vous a
identifié... M. Roger Beaudoin, est-ce que vous pourriez nous
présenter également les deux personnes qui vous accompagnent?
M. Beaudoin (Roger): Oui. Alors, personnellement, je suis Roger
Beaudoin. Je suis coordon-nateur de l'ACEF de Québec, qui est un des
groupes membres de notre Fédération; je suis aussi coordonnateur
du comité fiscalité et budgets gouvernementaux de notre
Fédération. À ma gauche, Mme Lise Pilon, qui est
présidente de la FNACQ; à sa gauche, M. Richard Dagenais, qui est
un membre militant ou bénévole de l'ACEF de Québec et qui
est également, tout dépendant des possibilités,
recherchiste pour notre Fédération. Malheureusement, Mme
Ghislaine Beaulieu, qui est coordonnatrice de l'ACEF-Estrie, n'a pas pu se
présenter. Elle a dû s'occuper d'un dossier très important
concernant les coupures d'électricité, l'hiver, faites par
Hydro-Sherbrooke dans sa localité, et c'était aujourd'hui qu'il y
avait une rencontre très importante avec les autorités
municipales à ce sujet-là. Alors, elle a vraiment
considéré que c'était très important pour les
consommateurs et les consommatrices de cette région de s'occuper de ce
dossier majeur et urgent.
Le Président (M. Camden): Je vous remercie, M. Beaudoin.
Nous considérons fort bien les motifs que vous apportez à
l'égard de l'absence de Mme Beaulieu.
Je vous rappelle qu'en vertu des règles d'audition de la
commission, 20 minutes sont consacrées à l'exposé de votre
mémoire; suivra également une période de 40 minutes
d'échanges avec les membres de la commission, répartie
équitalement entre l'aile ministérielle et les membres de
l'Opposition. Alors, sans plus tarder, nous sommes disposés à
vous écouter.
M. Beaudoin (Roger): Mme Pilon.
Mme Pilon (Lise): Alors, la Fédération nationale
des associations de consommateurs du Québec, c'est une
fédération d'associations de consommateurs qui se consacrent
à la défense des intérêts des consommateurs à
moyens et à faibles revenus. Elle regroupe actuellement cinq
associations de consommateurs.
Nous avons travaillé dans le domaine de la fiscalité
depuis plusieurs années, notamment au niveau des budgets gouvernementaux
ou des décisions relatives aux budgets gouvernementaux.
Nous avons aussi beaucoup travaillé sur le projet
fédéral de TPS et provincial de TVQ. Nous avons aussi
participé aux débats qui entourent le financement des soins de
santé. En 1990, nous avons demandé une commission d'enquête
publique sur la fiscalité québécoise, et nous avons
réitéré cette demande en 1991.
Alors, notre exposé va commencer par parler de l'importance des
responsabilités et des dépenses de l'État
québécois. On n'a pas l'intention ici d'analyser de façon
détaillée l'ensemble des dépenses actuelles du
fonctionnement et des programmes de l'État. Nous allons présenter
un certain nombre d'éléments que nous proposons à la
réflexion et qui nous semblent les plus importants en tant
qu'association de consommateurs. Alors, quand on pose la question du niveau
d'importance et du type de dépenses de l'État, on pose en
même temps la question du rôle de l'État, de sa place
à l'intérieur de la société. Ce qu'on observe,
c'est que, depuis quelques années, il y a des tendances, au
Québec mais aussi dans ce qu'on appelle le monde occidental,
c'est-à-dire en Europe et aux États-Unis, à des
privatisations de sociétés d'État, à un
désengagement de l'État et à une diminution des budgets
pour l'aide des personnes démunies. La fiscalité aussi a
été complètement remaniée, de façon que le
fardeau fiscal des gens à revenus élevés et très
élevés a diminué, particulièrement aux
États-Unis, pour permettre, justement, en principe, à cette
catégorie socio-économique d'investir davantage dans
l'économie.
D'autre part, ces tendances ont entraîné, dans plusieurs
pays, l'appauvrissement d'une grande partie de la population et une
concentration de la richesse au sein des catégories les plus riches de
la société. Au Canada et au Québec, on constate à
peu près les mêmes phénomènes, quoique moins
accentués qu'aux États-Unis, et cela est dû, en partie,
à des décisions, au niveau de politiques fiscales, qui ont
avantagé les personnes et les familles à revenus
élevés aux dépens des personnes et familles à
revenus faibles, moyens et modestes. Une forme de laisser-aller au niveau des
politiques économiques et industrielles a également amené
des modifications bouleversantes dans plusieurs pays et la montée du
chômage.
Alors, tout ça a amené, finalement, une vision qu'on a
appelée néo-conservatrice ou néolibérale, qui
considère que l'État est comme, si vous voulez, un boulet dans
une société et que, pour... C'est l'idéologie de
l'État minimal et qu'il faut toujours moins d'État. On peut se
poser la question: Est-ce que le secteur privé gère mieux
l'économie et gère mieux la société que le secteur
public? Est-ce qu'il gaspille moins? On ne pourrait pas établir comme
une vérité fondamentale que le secteur privé gère
mieux que le secteur public parce que la vérité n'est pas aussi
simple, et on ne peut pas dire automatiquement que, parce que c'est
privé, c'est mieux géré. Par exemple, on a les cas de
faillites actuelles de grandes compagnies et, disons, d'un certain nombre
d'empires financiers qui sont en train de s'écrouler. On a aussi comme
exemple les coûts exorbitants des services de santé aux
États-Unis, où c'est le seul pays qui, justement, a
privatisé et a refusé, disons, de rendre le service public. On
peut dire la même chose du côté des gouvernements, qu'il y a
aussi mauvaise gestion, manque de contrôle, il y a aussi gaspillage. Mais
l'avantage relatif du système public, c'est qu'on peut lui demander des
comptes par l'entremise des élus, par l'entremise de l'opinion publique
ou des médias.
On pourrait se poser la question: Est-ce que, justement, entre le fait
que la gestion privée génère probablement autant de
gaspillage que la gestion publique... Ce qu'on constate, c'est que, dans les
deux cas, ce qui est commun, c'est que c'est toujours soit le travailleur, soit
le contribuable, soit le consommateur qui finit par payer au bout du compte, de
sorte qu'on constate qu'il peut exister des abus autant du côté
des entreprises privées. En tant qu'associations de consommateurs, on
sait que les entreprises privées, dans plusieurs cas, abusent des
consommateurs dans leur pratique commerciale, de sorte que s'enligner
uniquement sur une privatisation de l'ensemble de l'économie, disons que
ce serait peut-être une erreur. On réaffirme la
nécessité d'un rôle important de l'État, un
rôle important au niveau des services publics, au niveau de la mise en
place de politiques fiscales justes, au niveau surtout d'une politique de plein
emploi et au niveau de l'accès à la justice de la protection des
consommateurs. Disons que l'idéal, ce serait une société
mixte où le privé et le public ont des fonctions
complémentaires.
Pour traquer les gaspillages, la mauvaise gestion dans le secteur
public, il y a l'institution, actuellement, du Vérificateur
général. Nous serions favorables à un renforcement du
rôle, à un renforcement aussi des capacités de sanctions du
Vérificateur général et peut-être,
éventuellement, à l'introduction de l'imputabilité des
fonctionnaires de l'État face aux dépenses qui sont accomplies
dans les différents ministères, ce qui pourrait être une
mesure, en fait, qui permettrait justement de traquer les gaspillages. D'autre
part, nous considérons que, dans certains domaines, i'État
québécois joue insuffisamment son rôle, actuellement. Nous
préconisons, justement, une augmentation de la contribution de
l'État dans certains domaines, ce qui ne veut pas dire que, dans ces
domaines, des économies ne sont pas possibles (16 h 10)
M. Beaudoin (Roger): Alors, comme on est une association de
consommateurs, bien sûr, on fait attention à la question: Combien
coûtent les services, ies produits, etc.? Ce qu'on constate, grosso modo,
pour prendre un exemple important, c'est que quand i'État se
désengage partiellement
d'un secteur qui, auparavant, était assumé davantage par
lui-même, bien, ça ne veut pas nécessairement dire que,
pour l'ensemble de la société, il y a diminution de coûts.
L'exemple récent, c'est dans le domaine de la santé,
c'est-à-dire que quand on désassure, de façon partielle,
certains services complémentaires ou de façon même
complète, comme par exemple les services dentaires à certains
âges d'enfants, ou quand on introduit un ticket modérateur pour
les personnes âgées au niveau de l'assurance-médicaments,
bien, ça a des impacts, et ces impacts-là... Par exemple, si on
parle du service au niveau dentaire pour les enfants, bien, c'est bien
évident que quand il n'y a pas de programme public gratuit,
évidemment, soit qu'il y a des gens qui, à faibles revenus, sont
couverts; les gens, ensuite de ça, ne sont pas couverts autrement que
par le paiement de leur poche ou, encore, les assurances privées.
Bien sûr, ces assurances privées là coûtent
cher. Elles coûtent cher aux entrepreneurs, aux entreprises, aux
consommateurs et aux consommatrices. De plus, il y a toujours une partie de la
population qui n'est pas assez pauvre pour avoir accès à la
gratuité et pas assez riche pour avoir accès, avec leur
portefeuille ou encore avec les assurances privées, aux mêmes
services, un peu comme aux États-Unis.
Aux États-Unis, évidemment, il y a des programmes pour les
gens à revenus faibles, mais dès le moment où on est
à revenus modestes, on n'a pas les moyens de se payer ces
services-là, qui sont pourtant des services essentiels à la
population. Nous, on pense que, bien souvent, le désengagement de l'Etat
dans certaines responsabilités conduit, au niveau social, au contraire
d'économies pour l'ensemble de la population.
Comme on a peu de temps, on a indiqué dans notre mémoire
d'autres exemples, comme l'état des routes, évidemment. Quand les
routes sont en mauvaise condition, bien, ça coûte cher aux
consommateurs. Le Club automobile du Québec a évalué que
c'était à peu près 600 000 000 $ de plus par année,
l'état actuel des routes dans certaines régions du Québec,
à cause des frais de réparation et d'entretien.
D'autre part, quand l'État se désengage, comme par exemple
au niveau du régime d'aide juridique qui est un régime
intéressant, qui a été en place en 1973 mais qui, depuis
plusieurs années, stagne en termes de financement et en termes
d'accessibilité de la population pourtant à faibles revenus...
Quand on pense que des gens qui gagnent le salaire minimum n'ont pas
accès à ce régime-là, bien, à notre avis,
quand l'État se désengage de cette façon-là,
à ce moment-là, il y a des droits sociaux, il y a des droits
humains qui sont, à toutes fins pratiques, abolis parce que les gens
n'ont pas les moyens de les assumer.
On pense aussi au programme Lait-école qui est un programme
intéressant, en ce qui nous concerne, en termes d'éducation
à la nutrition et qui a été aboli à moitié
au cours des derniers mois et, bien sûr, à des programmes qui
aident la population à se prendre en charge dans différents
domaines, comme par exemple au niveau du financement des associations de
consommateurs ou encore au niveau des programmes d'éducation populaire
autonome.
Là, on a l'air de prêcher pour notre paroisse, comme
association, mais on pense que la population apprécie à sa juste
valeur l'effort que les associations de notre genre font.
Énormément de personnes bénévoles qui s'impliquent
chez nous font beaucoup, beaucoup de travail et, la plupart du temps, ne sont
pas rémunérées pour ça.
Donc, il peut y avoir des changements dans le rôle de
l'État, mais un État qui irait en se désengageant de ses
responsabilités, à notre avis, ce serait faire fausse route. Au
contraire, on pense qu'il faut que le gouvernement s'engage avec ses
partenaires sociaux et économiques dans une politique de plein emploi et
de lutte à la pauvreté et à l'appauvrissement de la
population du Québec.
Maintenant, Richard Dagenais va nous parler un peu de taxe à la
consommation.
M. Dagenais (Richard): Alors, le gouvernement libéral a
introduit la taxe à la consommation calquée sur la TPS, en 1991,
en nous disant que ça favoriserait finalement la production, que
ça diminuerait les coûts des entreprises et, à long terme,
que ça profiterait à tout le monde.
D'une part, on néglige le fait que les effets distribuas ont des
impacts quand même sur les consommateurs. Le déplacement de la
charge fiscale, par exemple, est de l'ordre de 1 500 000 000 $ en 1991. On n'a
pas les données exactes, mais c'est de cet ordre-là,
c'est-à-dire que les consommateurs supportent un plus grand fardeau et
les entreprises en supportent un moins grand. Le gouvernement a augmenté
les taxes aux entreprises pour déplacer un petit peu aussi et replacer
les choses.
Le gouvernement soutient que l'utilisation d'un crédit à
la taxe à la consommation élimine la régressivité,
ce qui, pour nous, est inexact. Vous avez, par exemple, dans les feuilles qu'on
vous a remises, en page 5, un graphique qui a été
constitué par une professeure de l'Université du Québec
à Montréal. Il indique que la TPS québécoise a des
effets régressifs qui partent, par exemple, de l'ordre de 7 % et qui
diminuent à 4,1 % pour les plus riches. S'ajoute aussi à
ça la régressivité de la TPS. Je pense qu'il ne s'agit pas
juste de dire qu'on abolit la régressivité pour les plus bas
revenus, mais la régressivité joue aussi pour les moyens et les
revenus un peu plus modestes. Alors, je pense qu'il doit y avoir ici une
transparence. Le gouvernement ne doit pas juste faire croire qu'il rend la taxe
plus équitable, mais il doit aussi être honnête et
reconnaître ce qu'il en est en termes de
réalité.
L'autre aspect, c'est que le gouvernement dit que ça va diminuer
les coûts des entreprises. Je pense que, ça, ça sous-estime
le rôle des travailleurs qui vont demander une récupération
de leur pouvoir d'achat lorsque la taxe à la consommation va augmenter.
Si, dans notre économie, les travailleurs demandent, justement, des
augmentations de salaire pour récupérer cette perte par la hausse
de la taxe à la consommation, les coûts des entreprises vont
augmenter et, en soi, les entreprises ne seront pas mieux. Je pense que ce qui
compte essentiellement ici, c'est la charge totale, finalement, la charge
fiscale totale dans l'économie pour rétablir le niveau de
compétitivité par rapport à l'extérieur. Les effets
distributes jouent, à mon sens, parce que les consommateurs et les
citoyens y perçoivent un élément d'équité.
Si les entreprises bénéficient des ressources publiques, je pense
qu'on s'attend à ce que les entreprises contribuent aussi au paiement
des charges publiques.
L'impact de la TPS, quant à nous, a été important.
En 1991, par exemple, le taux d'inflation a dépassé de 1,7 %, au
Québec, celui du Canada. Le revenu disponible des
Québécois a diminué de l'ordre de 4,5 %, en 1991,
étant donné l'inflation de l'ordre de 17,4 % au Québec.
Alors, il y a un effet, finalement, sur le revenu disponible. On taxe les
consommateurs et on dit: Dépensez plus pour relancer l'économie.
Or, il y a une espèce d'incohérence, d'une part. Il s'agit de
voir si l'aspect équité n'est pas perturbé dans notre
système fiscal. Si on regarde en termes d'impôt sur le revenu,
vous avez, à la deuxième page des feuilles qu'on vous a remises,
par exemple, l'évolution du taux d'imposition moyen. C'est la
dernière colonne. Alors, vous avez pour 1980, 1985 et 1990. Ce qu'on
observe, c'est que le taux moyen a diminué pour l'ensemble des
catégories de revenus. Les 100 000 $ et plus, par exemple, en 1990,
étaient taxés, en moyenne, de 16 % alors qu'ils étaient
taxés de 21 % en 1980. Ça, c'est pour le revenu courant.
Si vous regardez à la page suivante, vous avez le revenu de 1990
qui est ramené en dollars de 1980. Ce qu'on observe dans le graphique du
haut - je ne sais pas si tout le monde suit, si ça va - c'est que, pour
1990, les taux d'imposition pour les faibles et moyens revenus étaient
plus élevés que ce qu'on avait en 1980 alors que, passé un
certain niveau de revenus qui est de l'ordre de 37 500 $, les niveaux
d'imposition moyens sont plus faibles en 1990, et ça résulte,
finalement, de la baisse des taux marginaux d'imposition. En termes
d'équité, on voit que les plus hauts revenus sont taxés
à un taux qui devient à peu près de l'ordre de 16 % ou 17
% des revenus disponibles pour l'impôt du Québec. En termes
d'équité, il y a eu, donc, des effets. On a augmente le taux
d'imposition moyen pour les moyens et faibles revenus alors qu'on a
baissé celui des plus hauts revenus.
Pour terminer, je pense que le gouvernement fait valoir, dans son
document, les éléments d'efficacité économique pour
dire: II faut s'ajuster, finalement, par rapport aux économies de nos
voisins, sinon notre compétitivité va en souffrir et il y aura
plus de chômage. À notre sens, la distribution de la charge
fiscale est importante aussi parce qu'il y a une perception
d'équité et de justice qui est essentielle dans nos
économies, qu'il ne faut pas négliger, qui est aussi importante,
à notre sens, que la question d'efficacité. Si on néglige
ça, il va y avoir plus d'insatisfaction, plus de grèves et ainsi
de suite; donc, une économie qui va être moins performante
aussi.
Je vais céder la parole... (16 h 20)
Mme Pilon: En terminant, je vais donner quelques recommandations,
mais on n'aura pas le temps de donner toutes les recommandations. Donc, vous
pourrez les retrouver aux pages 20, 21 et 22 du document.
Alors, une des recommandations qu'on trouve très importante,
c'est le fait de geler la taxe à la consommation et, en particulier, de
retourner à l'exemption de la taxe de vente québécoise sur
les vêtements, les meubles et les chaussures, ce qui serait une mesure
qui profiterait, en particulier, aux gens à modestes et à faibles
revenus. On indique dans notre document que, par exemple, on pourrait
considérer que les chaussures au-delà de 200 $ et les meubles
au-delà d'un certain prix pourraient être considérés
comme des produits de luxe et, à ce moment-là, pourraient
être taxés. Ensuite, on demande qu'on gèle le taux actuel
de la TVQ sur les services à 4 % pour la prochaine année et que
le gouvernement fasse tout en son pouvoir pour, d'une certaine manière,
essayer de convaincre le gouvernement fédéral de diminuer son
financement par l'entremise de la TPS.
On demande aussi qu'il y ait peut-être une enquête sur les
marges de profit des compagnies de tabac pour vérifier si ces compagnies
de tabac n'ont pas profité du fait qu'il y avait des taxes
élevées pour se prendre des marges de profit
élevées.
Alors, nous vous remercions de votre attention, et on attend les
questions.
Le Président (M. Camden): Je vous remercie, madame.
M. le président du Conseil du trésor, pour vos questions
et commentaires.
M. Johnson: Oui, M. le Président.
D'abord, je remercie madame et messieurs d'avoir été ici
cet après-midi et d'avoir patienté quelques minutes avant de nous
adresser la parole. Je vous remercie.
J'aimerais apporter quelques correctifs à ce que vous venez de
présenter. Il est entendu - et je le comprends - que c'est
extrêmement visible,
les taxes à la consommation, et ça a, par
définition, à revenus égaux, l'apparence d'une
régres-sivité, c'est-à-dire que le fardeau semblerait
porter davantage sur les gens à revenus plus modestes.
Cependant, j'aimerais rappeler quelques notions qui font en sorte qu'on
doit regarder les taxes à la consommation dans l'économie
générale de notre fiscalité. Regardez ce qui a
été fait au fil des années pour en arriver à ce
qu'on croit être un équilibre qu'on a atteint, quitte à -
et c'est pour ça qu'on peut en discuter - ce qu'on y apporte certains
ajustements, mais juste pour qu'on comprenne bien. Qu'on comprenne, par
exemple... et je reprends dans l'ordre inverse où vous avez soumis vos
suggestions, qu'il y ait, à nouveau, une exemption sur les
vêtements et les appareils ménagers, profitant ainsi, dites-vous,
aux familles à revenus modestes. Je suis obligé de vous dire que
c'est le contraire qui se passe dans ce temps-là. Comme la page 44 du
document que nous avons publié l'indique, c'est majoritairement, et
alors là très majoritairement des gens à hauts revenus
qui, en raison de leurs habitudes de consommation, portent le plus gros fardeau
de taxe à la consommation sur les vêtements, les chaussures, les
appareils ménagers. C'est comme ça que ça arrive,
simplement. Mais là, je ne tiens même pas compte des
crédits aux taxes à la consommation. C'est une
réalité, ça, qu'on a observée. C'est en haut de 64
450 $ que les gens paient à peu près... Ils représentent
20 % des ménages. C'est eux qui paient 40 % de cette taxe-là sur
les vêtements et les appareils ménagers. Sur les services de
loisir, c'est encore une plus grosse portion.
Alors, c'est très progressif, dans le sens que la propension
à consommer, évidemment, augmente avec les revenus. Vous me direz
que le tableau que vous avez distribué indique, cependant, celui que la
professeure, Mme Rose, de l'UQAM, a adressé, sous toutes
réserves, les sources de ces documents. Vous dites que ça
démontre la régressivité en raison du fait que si
quelqu'un qui gagne 111 000 $ paie presque 5000 $, ma foi, de taxes à la
consommation, c'est un moins gros problème pour cette personne-là
que pour quelqu'un qui gagne 36 400 $ et qui paie à peu près 3000
$ de taxes à la consommation.
Il faut ' redresser les choses d'abord avec les crédits,
évidemment, à la consommation, ce que le tableau indique,
incidemment. Les trois premières classes de revenus qui sont
exposées ici montrent une très nette progressivité, en
raison des crédits au titre de la taxe sur la consommation.
Deuxièmement, ça me semble faire complètement abstraction
de l'évolution des taux d'imposition nuls que nous avons
instaurés depuis cinq ans, où une famille avec deux enfants
payait de l'impôt à partir de 10 000 $ ou à peu
près, il y a cinq ou six ans, et, aujourd'hui, ne commence à
payer de l'impôt sur le revenu des par- ticuliers qu'à partir de
26 000 $ de revenus. Alors, il y a littéralement 16 000 $ d'exemptions
additionnelles qu'on donne à ces familles-là de revenus qu'elles
conservent et dont elles retournent une partie sous forme de taxes à la
consommation, mais à l'égard desquelles elles
bénéficient d'un crédit.
Moi, ce que je dis, c'est qu'il faut mettre ça en perspective,
ces différents tarifs là, ces différentes ponctions
fiscales là. Je reconnais avec vous qu'il faut être
extrêmement prudents pour assurer, de façon
générale, un système fiscal progressif. Vous avez pris
quelques éléments qui sont régressifs. Ce que je viens
compléter, évidemment, c'est à même les
interventions que nous avons faites au titre de la fiscalité, c'est de
venir corriger cette régressivité par des mesures qui, elles,
sont très nettement progressives. Les gens qui, dites-vous,
bénéficient du fait qu'ils ne paient que 4,1 % des taxes de vente
au Québec alors qu'elles... 4 % de leurs revenus, des gens qui font plus
de 111 000 $, vont aux taxes à la consommation, ça, c'est une
donnée. Il ne faut pas oublier que ces gens-là constituent moins
de 1 % des contribuables, gagnent 6 % du revenu taxable et paient 10 % des
impôts sur le revenu des particuliers. Ils paient 10 fois plus en
impôts que la part de la population qu'ils représentent, 65 % de
plus que la part du revenu national que ces gens-là représentent.
Alors, c'est très, très progressif. Il y a déjà
cinq échelles, cinq paliers d'impôt, de 16 % à 24 %. C'est
vraiment nettement progressif.
Cependant, vous admettez en filigrane qu'il peut y avoir des
difficultés du côté des finances publiques. Compte tenu de
ce que vous avez soutenu et compte tenu des correctifs que je peux avoir
apportés, quels sont les correctifs que vous suggérez pour
assurer une meilleure équité fiscale, selon vous? Nous, on
prétend avoir atteint un équilibre, mais je pense que le
débat doit s'enclencher autour de ça aussi. Est-ce qu'il y a des
mesures précises, compte tenu des correctifs que j'ai apportés,
qui demeureraient intéressantes, selon vous?
M. Beaudoin (Roger): Bien, je vais commencer et, ensuite, si
Richard...
Premièrement, à notre avis, justement, il y a un
problème d'équité avec les diminutions d'impôt sur
le revenu qui ont été faites depuis quelques années au
niveau des gens à revenus élevés et très
élevés. Il y a eu possiblement un maintien de la
progressivité, mais une diminution de la progressivité par
rapport aux années antérieures, entre autres dû à la
diminution du taux marginal d'imposition maximum. Il y a eu effectivement une
diminution importante, tout en maintenant aussi un certain niveau d'abri fiscal
important, comme par exemple l'exemption de gains en capital, qui profite
surtout aux gens à revenus élevés. Donc, oui,
jusqu'à un certain point, il y a encore une forme de
progressivité
dans le système actuel, mais il y a eu une diminution de la
progressivité aux dépens des gens à revenus modestes et
moyens, principalement. Aussi, il y a eu une forme de transfert du fardeau
fiscal des entreprises vers les consommateurs, entre autres par la mise en
place de la taxe de vente du Québec, mais aussi...
Il faut dire qu'on n'est pas les seuls à le dire. Dans les pages
qu'on vous a distribuées tout à l'heure - en passant, on les a
distribuées tout à l'heure simplement parce qu'on a
été pris beaucoup dans des très courts termes et on ne
voulait pas vous priver d'information; c'est de l'information publique. La
première page 8 1/2 x 14, vous avez des commentaires de Georges Angers,
du Soleil, qui indique «Les entreprises restent
chouchoutées au Québec». Ça, ça date d'avril
1990. Il refaisait le même genre de déclaration, il y a de cela
deux ans ou un an, en disant que la situation pour les entreprises est bonne au
niveau des charges fiscales et même meilleure qu'elle ne l'était
auparavant. Alors, ce qu'on dit, c'est que le gouvernement est allé trop
loin. Il est allé trop loin du côté des taxes à la
consommation. (16 h 30)
Vous disiez tout à l'heure que les gens qui ont des revenus de
110 000 $, bien sûr, disons que c'est une bonne évaluation, 4 100
$; ça leur coûte cher en taxes à la consommation, mais,
nous, on dit: C'est une question de proportionnalité du revenu,
c'est-à-dire que les gens qui ont 100 000 $, eux autres, après
avoir payé 4000 $ en taxes de vente, il leur reste 96 000 $. O.K., il y
a de l'impôt. O.K., il y a d'autres dépenses, mais la taxe de
vente en tant que telle, elle affecte surtout les gens à revenus
modestes et moyens. Les correctifs sont là pour les gens à
revenus faibles. Donc, on ne veut pas se sentir enfermés dans les propos
du document de consultation, c'est-à-dire qu'à notre avis il y a
possibilité, il y a une marge de manoeuvre pour l'État
québécois d'aller légèrement un peu plus vers les
entreprises, d'aller légèrement un peu plus vers les gens
à revenus élevés et très élevés et
d'assouplir quelque peu la charge fiscale des gens à revenus modestes et
moyens. Et on fait certaines propositions.
Si vous nous dites: L'exemption sur les chaussures, par exemple, les
vêtements et les meubles, ça profite surtout aux gens à
revenus élevés, on est d'accord en termes de chiffres, en termes
absolus. On dit: Bien oui, d'accord. Alors, à ce moment-là,
augmentons légèrement l'impôt sur le revenu des gens
à revenus élevés et très élevés, vu
qu'on va leur faire profiter de l'exemption davantage. Et c'est des mesures
comme ça. Et, d'ailleurs, dans les pages qu'on vous a distribuées
tout à l'heure, à la quatrième page on vous indique
certaines possibilités de financement de la mesure de l'exemption qui
coûteraient à peu près 835 000 000 $ mais qui
respecteraient ce qu'on vous dit, c'est-à-dire un peu plus de charge
pour les gens à revenus élevés et très
élevés qui ont eu des diminutions de charges, un peu plus de
charges du côté des entreprises qui ont eu des diminutions de
charges. Et, comme ça, on va arriver à une situation plus
favorable aux consommateurs et aux consommatrices; et aussi, ces consommateurs
et consommatrices-là vont même aider à la relance
économique.
Je ne sais pas si Richard a un complément.
Le Président (M. Camden): M. Dagenais.
M. Dagenais: Oui. Le complément que je veux apporter,
c'est concernant le concept de progressivité et de
régressivité. C'est un concept qui est défini en
économique en rapport avec révolution du taux moyen et du taux
d'imposition en fonction du revenu, des classes de revenu.
Je pense qu'il faut appeler une orange ce qui est une orange. Si le taux
moyen diminue avec l'évolution du revenu, on s'entend pour dire que
c'est régressif. Ce que vous dites dans votre document, c'est que ce
crédit-là rend la taxe progressive, ce qui est faux. Ce qui est
mal défini. Je pense qu'on est d'accord sur le fait de dire que les plus
riches vont payer plus en absolu, et c'est une évidence. Mais, en termes
de proportion des consommations, les riches paient un pourcentage qui est du
même ordre ou plus faible, finalement, parce que leur taux
d'épargne est plus élevé. Et quand vous dites: La
propension à consommer des riches est plus élevée,
normalement, ce n'est pas exact.
Un autre aspect. Je pense qu'on a, au sud, un président qui s'est
fait élire en disant aux Américains: Je vais proposer des
nouvelles mesures pour augmenter la base, finalement, de taxation en
créant de l'emploi, en générant plus d'activité
économique. Il nous apparaît, nous, que c'est une première
mesure à faire. Au lieu de dire qu'on est pris dans un
phénomène chronique où on a un taux de chômage,
qu'il faut diminuer les dépenses et qu'il faut diminuer, finalement, les
charges d'intérêts, je pense qu'une première façon
c'est d'éviter le gaspillage dans nos économies, c'est de faire
travailler nos ressources humaines...
Je m'excuse de vous déranger, M. Johnson.
M. Johnson: Écoutez, un instant, monsieur, s'il vous
plaît! Avec toute la politesse, enfin, qu'ici on a manifestée
à l'endroit d'absolument tout le monde, on ne peut pas, malgré
tout, s'empêcher de demander combien de temps il reste. Si vous
répondez longuement aux questions, je n'aurai plus le temps de demander
des questions. Ça me préoccupait, avec la présidence, de
voir depuis combien de temps vous parliez suite à ma question.
M. Dagenais: D'accord. Alors, moi, je pense qu'une façon
aussi de réduire...
Le Président (M. Camden): Est-ce que je peux vous rappeler
simplement une chose? Lorsque vous avez à adresser des commentaires,
adressez-les à la présidence. Dans l'intérêt du
débat et pour la qualité du débat, ce serait
préférable.
M. Dagenais: D'accord. Alors, je pense que ce doit être un
projet à long terme que de réduire le déficit et, une
mesure, ça doit être de relancer l'économie et de la
remettre sur pied en investissant, je pense, en termes de recherche et
développement, de formation, et ainsi de suite.
Le Président (M. Camden): M. le président du
Conseil du trésor.
M. Johnson: Justement, à ce sujet-là, la
fiscalité est un des outils qu'on a pour aider la recherche et le
développement. Et la plupart des groupes comme le vôtre viennent
nous dire: Resserrez les dépenses fiscales, abolissez-les; il y en a
pour des centaines de millions.
La question que j'ai est très précise: Comment
pouvons-nous améliorer notre position économique avec ce levier
qu'est la fiscalité si on abolit, justement, les leviers qui nous
servent à attirer des gens ici, à attirer des entreprises ici,
à attirer des emplois ici, à faire en sorte qu'on ait encore un
taux combiné d'imposition qui est de 60 % plus élevé que
notre voisin américain? C'est ça qui est en cause à ce
moment-ci.
On peut répondre, du côté des dépenses: Oui,
la santé est privée du côté américain et la
santé est publique Ici. C'est correct, mais ça n'explique pas 60
% d'écart des taux marginaux d'imposition sur les gens que vous dites
«à hauts revenus», que vous définissez, si je regarde
les papiers, comme étant les gens qui font des salaires de professeurs,
à peu près, et plus. C'est à peu près ça.
Moi, je connais ça, les conventions collectives du secteur public. C'est
les ordres de grandeur. Vous dites que les gens sont à hauts revenus
rendus en haut d'une échelle de 19 ans de scolarité dans une
école secondaire.
Ce n'est pas évident que, dans le monde industrialisé, ce
sont eux, les gens à hauts revenus, qu'il faut aller taxer davantage ou
à partir de cette classe-là. Ça m'apparaît
être la classe moyenne, ces gens-là, pour tout vous dire. Mais ce
sont des gens qui paient 51 % en haut; 1 $ sur 2 $ est payé sous forme
d'impôt sur le revenu. Et ailleurs, c'est 0,30 $, c'est 0,40 $; c'est
0,50 $ au Japon, mais on n'est pas en concurrence immédiate avec le
Japon. Il me semble qu'il faut regarder quel est le niveau de fiscalité,
compte tenu de l'endroit géographique où on se trouve, et on
essaie de s'aligner.
Alors, ce que je vous demande - vous me dites qu'il y a une lutte au
déficit qui est nécessaire - de quel côté
devons-nous faire porter nos efforts, sinon du côté des
dépenses? Parce qu'à moins que vous me démontriez qu'il y
a de la place encore pour monter les impôts - c'est ça que vous me
semblez vouloir démontrer, là - il n'y a pas d'alternative
vraiment viable, à part de monter les impôts, que celle de
diminuer les dépenses.
Le Président (M. Camden): M. Beaudoin.
M. Beaudoin (Roger): Bien, écoutez, c'est sûr
qu'à chaque fois qu'on parle de diminuer des abris fiscaux qui sont
utilisés plus par des gens à revenus élevés, disons
- par exemple, l'exemption sur le gain en capital - ou encore quand on parle
des charges fiscales des entreprises, ça serait important qu'elles ne
soient pas trop lourdes, parce que c'est nécessaire que les entreprises
viennent s'installer ici, bien, on est comme face à une espèce de
mur. C'est comme si on ne pouvait pas le faire, sauf que... En fait, ce qui a
été fait, c'est qu'il y a eu un allégement des charges
fiscales des entreprises depuis quelques années au Québec. Il y a
eu un allégement des charges fiscales des gens à revenus
élevés et très élevés. C'est possible que ce
soit en partie dû indirectement au fait qu'aux États-Unis, pendant
un certain nombre d'années - les années Reagan - il y a eu des
diminutions importantes d'impôt sur le revenu des gens à revenus
élevés, surtout, mais, justement, ce n'est pas une raison pour,
ici, faire exactement la même chose. On l'a fait jusqu'à un
certain point - pas complètement, heureusement - mais, là,
maintenant, on est allé trop loin. À notre avis, il faut revenir
en arrière.
Revenir en arrière, ça ne veut pas dire de multiplier par
deux la charge fiscale des entreprises ou des gens à revenus
élevés et très élevés, ça veut dire:
là, maintenant, constatons qu'ils ont eu des améliorations, des
allégements, constatons que les gens à revenus faibles, modestes
et moyens... Les gens à revenus faibles ont été, en
partie, préservés, sauf que le chômage est encore plus
élevé. Constatons ça et, maintenant, revenons un peu en
arrière. Ça ne veut pas dire de faire tout un gros changement,
une grosse réforme.
Et, nous, quand on propose des choses, on essaie de proposer comment
l'État pourrait aller chercher le même montant, ou à peu
près. Pour le reste, les États-Unis, effectivement, c'est un
voisin qui est bien gros, sauf que quand on regarde les autres pays
industrialisés, souvent, on est dans la bonne moyenne sur bien des
plans.
M. Dagenais: Je pense que, dans votre document, vous nous
comparez avec les États-Unis en ce qui regarde les charges fiscales et,
à un moment donné, vous dites: Du côté des
dépenses de la santé, il ne faut pas regarder les
États-Unis parce que ce n'est pas un bon cas; on va aller plutôt
voir du côté de l'Europe.
M. Johnson: Je n'ai pas dit ça.
M. Dagenais: Mais, moi, j'ai lu ça dans votre document.
J'ai compris ça comme ça.
M. Johnson: Non, non. Vous êtes la seule personne -
ça me permet de le dire - qui, depuis le 19 janvier, ait dit qu'il y
avait des choses fausses là-dedans. Tout le monde, depuis un mois, a
trouvé qu'il n'avait rien, rien, rien ramassé de fausseté.
C'est un des inventaires de chiffres et de séries historiques de
chiffres absolument neutres, sans partisanerie aucune, et vous en tirez des
conclusions, là...
Bien, j'aimerais que vous me disiez où vous l'avez vu, tout
simplement. Si vous êtes pour affirmer des choses comme ça,
j'aimerais que vous me l'affirmiez.
M. Dagenais: Je vais prendre une minute. Une voix: On peut
attendre jusqu'à la fin.
Le Président (M. Camden): Alors, M. le
député de Labelle. (16 h 40)
M. Léonard: Bien, M. le Président.
Alors, je vais remercier... Tout d'abord, je vais souhaiter la bienvenue
au groupe qui nous a présenté ce mémoire, qui est
d'excellente qualité, en passant, parce qu'il touche un aspect en
profondeur que nous n'avons pas abordé jusqu'ici, et je voudrais les
remercier. Je voudrais aussi excuser la commission pour la réception
assez acide que fait le président du Conseil du trésor à
vos remarques, mais vous avez raison de les faire. D'ailleurs, je vois que le
ministre des Finances est réapparu ici. Ça fait au moins deux
jours qu'il n'était pas venu ici, deux jours complets de séances
de commission.
M. Levesque: M. le Président...
M. Johnson: La mesquinerie habituelle du député de
Labelle.
Le Président (M. Camden): M. le député de
Labelle, en vertu de notre règlement, on ne peut indiquer effectivement
qu'un député a été absent pendant une courte
période.
M. Léonard: Très bien, O.K.
Le Président (M. Camden): Non, non, permettez-moi. On ne
peut indiquer...
M. Levesque: Ça, c'est «cheap».
M. Johnson: II ne connaît pas d'autre chose.
Le Président (M. Camden): ...qu'un député ou
qu'un membre de la commission a été absent pendant une certaine
période. Il est fort évident qu'il n'y était pas depuis
les derniers jours, fort probablement, puisqu'on était samedi et
dimanche.
M. Léonard: Non, non, je parle des jours de séances
de commission. Mais j'ai déjà mentionné, de toute
façon, que lorsqu'il était là il se comportait comme une
plante verte. Alors, j'ai hâte de l'entendre tout à l'heure.
Le Président (M. Camden): Un instant! un instant! M. le
député, vos propos sont plutôt discordants avec la nature
des interventions.
M. le député de Beauce, vous avez...
M. Léonard: Très bien. Alors, on va passer au
sujet.
M. Audet: Question de règlement.
Le Président (M. Camden): Une question de
règlement.
M. Audet: M. le député de Labelle, effectivement,
le ministre des Finances n'est pas venu les deux derniers jours parce qu'on ne
siège pas le samedi puis le dimanche.
Le Président (M. Camden): C'est ce que j'avais
indiqué, M. le député de Beauce-Nord.
M. Léonard: Je pensais à mardi et mercredi de la
semaine dernière.
M. Levesque: J'étais ici, mardi.
M. Léonard: Bon! M. le Président, je voudrais
d'abord remercier le groupe qu'il y a là pour la qualité de son
mémoire, parce qu'il a mis le doigt sur un des problèmes majeurs
auxquels sont confrontées ies finances du Québec, un
problème que le parti gouvernemental essaie de nier. Je regrette, il y a
un problème de fiscalité au Québec, et le tableau que vous
avez déposé devant cette commission parle par lui-même. On
voit très bien la régressivité qui s'est faite dans la
fiscalité, l'impôt sur le revenu de 1980. Moi, je pense que c'est
particulièrement important.
L'autre point que vous avez fait valoir, c'est que la réforme de
la fiscalité a été faite dans un mauvais moment, en termes
d'économie et de comportement de l'économie. J'ai eu l'occasion
de le dire mais, au fond, il faut y revenir. Ils ont rendu l'impôt plus
régressif avant les élections, on le voit très bien. Avant
les élections de 1989, ils ont baissé les courbes d'impôt
en disant. Nous avons baissé l'impôt sur le revenu. Là,
vous démasquez ce fait-là ici. Puis, l'aspect négatif de
la réforme ou plus négatif de la réforme: ils l'ont
reporté au 1er janvier 1991, huit mois après que la
récession ait été commencée. Et, ça,
ça a été particulièrement dommageable à
l'économie du Québec. Moi, je pense que c'est une question que
vous avez eu
raison de soulever.
Et un des problèmes importants des finances publiques au
Québec, c'est celui de la répartition de la fiscalité. Je
pense qu'il y en a d'autres, des problèmes dont on n'a pas
discuté ici, à cette commission, et qu'on verra bien, parce que
nous avons déposé une motion cet après-midi à
l'effet qu'il faut discuter de l'impact du déséquilibre des
finances publiques fédérales sur le budget du Québec.
Ça, c'est important aussi. C'est majeur parce que ça affecte le
budget du Québec sur les transferts fédéraux, mais
ça affecte le budget du Québec aussi dans son service de la dette
puisque les taux réels d'intérêt sont de 7 % Ici, au
Canada, depuis le début des années quatre-vingt, sans compter le
frein que ça comporte pour l'économie d'avoir des taux
d'intérêt aussi élevés.
Mais ces problèmes-là, non, on ne veut pas les regarder,
on ne veut que des recettes pour équilibrer le budget, que des recettes
qui touchent les dépenses. On ne veut pas examiner l'impact de la
fiscalité. Or, il y en a. Et, moi, je pense que la courbe que vous avez
déposée sur le taux d'impôt moyen selon les revenus de 1980
m'apparaît particulièrement importante. De la même
façon, le rendement de la taxe de vente, compte tenu de la
répartition des revenus, de 9000 $ à 111 000 $, lui aussi est
très clair.
Donc, sur les deux plans, on a facilité la vie à des gens
qui avaient des revenus supérieurs à la moyenne puis, plus
ça allait, plus on leur facilitait la vie. Je pense que ce qui ressort
de votre tableau... Vous n'avez pas paginé, mais le tableau sur la
courbe de la progressivité de l'impôt, je pense que lui indique
très nettement que c'est la classe moyenne qui vient d'en prendre un
coup. Et cela, je pense, nous amène à discuter des rendements de
l'impôt sur le revenu.
Est-ce que vous pourriez, en quelques mots, nous expliquer davantage ce
que cela comporte pour le citoyen ordinaire que d'avoir une courbe
d'impôt comme celle-là?
Le Président (M. Camden): M. Dagenais.
M. Dagenais: Je pense qu'il est clair que ça affecte le
pouvoir d'achat et le revenu disponible, surtout des familles, je pense bien,
et même des individus. Les familles, effectivement, ont été
allégées dans leur fardeau fiscal ces dernières
années. Je pense qu'il y a eu des efforts dans ce sens-là, mais,
à mon sens, il faut que le fardeau fiscal se déplace plus vers
les hauts revenus qui ont une plus grande disponibilité, finalement,
pour assumer ces coûts fiscaux là.
Ce qui se produit, à mon sens, c'est qu'on affecte, à ce
moment-là, le pouvoir d'achat et les besoins essentiels, même, de
certains individus, de certaines familles, et ça crée donc des
contraintes de plus en plus importantes.
M. Léonard: Donc, ça freine la consommation?
M. Dagenais: À mon sens, oui, ça peut freiner.
Ça freine la consommation dans le sens que... Si on dit, par exemple,
que c'est les moyens et les bas revenus qui ont une propension à
consommer plus grande...
M. Léonard: C'est ça.
M. Dagenais: ...effectivement, ça affecte. Et si on impose
une taxe à la consommation, on l'a vu, je pense, l'effet, en 1991. Je
pense qu'il ne faut pas négliger le fait que c'est dû en partie
à l'introduction de la TVQ et de la TPS. Je pense qu'il ne faut pas se
le cacher, c'est une réalité. Il faut voir s'il y a lieu, dans
l'avenir, d'ajuster les choses, peut-être pour provoquer moins de
perturbations dans l'économie.
M. Léonard: Donc, sur les besoins essentiels, genre
vêtements, chaussures, appareils ménagers, il faudrait revenir sur
cette décision pour stimuler la consommation.
M. Dagenais: C'est une chose qu'on préconise. Oui, je
pense qu'il y aurait lieu, par exemple, d'avoir une taxation qui tienne compte,
peut-être, du fait qu'il y a certains produits qui sont plus de luxe et
donc plus consommés par les catégories de revenus
élevés; ça peut être une autre façon aussi de
le faire, mais je pense que vu la régressivité, on ne peut pas
l'abolir, la régressivité, avec une taxe à la
consommation. Je pense qu'elle est là. Essentiellement, c'est un
système qui comporte cette difficulté-là.
M. Léonard: O.K. Dans la comparaison que vous avez pu
établir avec la courbe de l'impôt d'autres pays, vous avez bien
dit que le président du Conseil du trésor choisissait ses
modèles là où ça faisait son affaire, et non pas
que ses documents étaient faux. Je pense qu'il faut rectifier.
M. Dagenais: Absolument.
M. Léonard: Mais je voudrais, au-delà de cela...
Effectivement, lorsque vous avez fait des comparaisons, est-ce que vous avez
tenu compte du fait qu'aux États-Unis, lorsqu'on compare les taux
d'impôt, les dépenses en santé ne sont pas incluses et que,
si l'on veut vraiment faire des comparaisons, il faut inclure les
dépenses de santé dans le fardeau fiscal pour que ce soit
comparable? Parce que, même si ce n'est pas assumé par le secteur
public, pour l'ensemble des citoyens c'est une charge inévitable,
inexorable, malheureuse, mais c'est comme ça. Je pense que, qu'ils
l'assument par des assurances privées ou par le secteur public, en
quelque sorte, cela revient au même dans le fardeau de la
société
américaine.
Est-ce que vous pouvez expliciter ou épiloguer
là-dessus?
M. Dagenais: Je n'ai pas les chiffres exacts en tête, mais,
si on regarde...
M. Léonard: Bien, le fardeau de la santé aux
États-Unis...
M. Dagenais: C'est rendu à peu près à 14
%...
M. Léonard: ...dépendant de la façon dont on
le calcule, en tout cas, est de 10 %, 10,1 %, 11,6 %, alors qu'au Québec
et au Canada c'est en bas de 10 %.
M. Dagenais: Oui. À mon sens, ce qui compte pour les
citoyens, c'est la charge globale, peu importe...
M. Léonard: C'est ça.
M. Dagenais: ...de prime abord, de quelle façon elle est
redistribuée dans l'économie. Je pense que le secteur public peut
avoir des avantages pour contrôler l'évolution des coûts,
parce qu'il est une organisation qui a une expertise et qui peut
contrôler l'ensemble du système. Ça, ça peut
être un avantage; on peut l'utiliser à notre avantage.
L'autre aspect, c'est de dire: Est-ce que, vu que c'est fourni par une
entreprise publique, les consommateurs vont être moins bien servis, les
besoins vont être moins bien ciblés? À mon sens, il existe
des mécanismes pour améliorer, finalement, la coordination entre
les besoins et l'offre de service, et on n'a peut-être pas
travaillé suffisamment dans ce sens-là.
M. Léonard: O.K.
M. Beaudoin (Roger): Un commentaire bref. Il me semble que les
derniers chiffres au niveau des États-Unis, c'était 14 % du PNB.
Il me semble aussi que les augmentations de coûts annuelles sont vraiment
très importantes et même en complet non-contrôle. Quand vous
entendez parler, par exemple, que le président de Chrysler des
États-Unis, qui fait une déclaration publique... Il parlait pour
les trois grands de l'automobile américaine, il disait... En page 6 de
notre mémoire, on l'indique: il disait qu'il donnait vraiment son aval
à une intervention du président des États-Unis, Bill
Clinton, sur cette question-là, parce que ça n'avait plus de
sens. Elles sont rendues, ces trois compagnies-là, à payer 6 000
000 000 $ par année pour les soins de santé, et ça
représente des coûts très importants.
Évidemment, ici, les entreprises vont dire qu'elles paient
toujours trop cher pour un peu de tout, mais, par rapport à nos voisins,
bien, les entreprises, ici, paient moins, tout dépendant,
évidemment, de la grosseur de l'entreprise par rapport au niveau de son
importance économique, mais, je veux dire, globalement, elles paient
moins qu'aux États-Unis. (16 h 50)
M. Léonard: Alors, je vous remercie, et continuez
d'essayer d'éclairer la lanterne du parti gouvernemental.
Le Président (M. Camden): M. Levesque, M. le
président du Conseil du trésor, M. le ministre des Finances?
M. le ministre des Finances.
M. Levesque: Alors, M. le Président, comme je ne voudrais
pas décevoir mon ami le député de Labelle, qui semble
s'ennuyer de moi chaque fois que je suis pris ailleurs dans mes fonctions, je
vais m'empresser, à ce moment-ci, M. le Président, dans les
quelques minutes qu'il me reste, non pas tellement de poser des questions,
parce que je ne pense pas qu'on aurait le temps, d'après ce que le
président m'a indiqué, mais peut-être d'attirer l'attention
de la commission et de nos visiteurs - que je salue fraternellement - sur
certains points qui ont été soulevés par le
député de Labelle lorsqu'il a parlé de certains aspects de
la fiscalité. Il aura peut-être oublié de mentionner que
nous n'avons jamais failli à l'indexation, année après
année, depuis 1985.
Le député de Labelle, qui veut faire de la partisanerie -
qu'on a essayé d'éviter autant que possible jusqu'à
maintenant - semble oublier qu'alors qu'il était ministre dans le
gouvernement précédent on oubliait de temps à autre
l'indexation. Ce serait peut-être bon de le rappeler. C'est important,
ça, pour les consommateurs et les gens, particulièrement de la
classe moyenne et à faibles revenus. L'impôt sur le revenu, depuis
1985, jamais il n'a été augmenté. Au contraire, nous
l'avons réduit.
Il est important aussi de rappeler ce qu'il y a d'important, je pense,
au point de vue des consommateurs que vous représentez aussi aujourd'hui
d'une façon pour laquelle je vous félicite, parce que vous faites
le tour des questions, mais est-ce qu'il y a quelque chose de plus important
que la famille au Québec? Les consommateurs se retrouvent en grande
partie dans les familles. Quel est le soutien à la famille qu'on avait
en 1985? 800 000 000 $. Quel est aujourd'hui le soutien à la famille? 2
300 000 000 $.
Et je pourrais continuer, mais, là, on m'indique que mon temps
est déjà expiré. J'aurais aimé vous parler des
crédits à la TVQ. J'aurais aimé vous parler
également de l'inflation - parce que vous en parlez dans votre
mémoire - l'inflation à 0,4 dans la première phase et
à 0,2 dans la deuxième phase. Je pense qu'il était
important
de rappeler ces chiffres. J'aurai probablement l'occasion d'y
revenir.
Le Président (M. Camden): Alors, brièvement, parce
que le temps imparti est...
M. Beaudoin (Roger): Brièvement, d'accord. Écoutez,
M. Levesque, on n'est pas venus vous dire que tout ce que vous avez fait depuis
un certain nombre d'années n'est pas bon.
M. Levesque: Parfait.
M. Beaudoin: II y a certaines choses qui nous semblent assez
intéressantes en termes de soutien aux familles. Il y a des choses, par
contre, qu'il ne faut pas oublier. Quand on parle de soutien direct aux
familles au niveau, possiblement, de l'impôt sur le revenu, du programme
APPORT ou d'autres choses comme ça, il ne faut pas oublier non plus que
la taxe de vente du Québec, que ces augmentations de taxes là ont
aussi été difficiles pour un grand nombre des familles et que le
net, II faudra l'évaluer, le net.
Autrement dit, oui, sur certains plans le gouvernement libérai a
fait certains bons coups. Il a fait mieux que le gouvernement
fédéral, souvent, sur la question de l'appui aux familles. Mais
il y a des choses qui, à notre avis, sont à corriger, et on est
ici pour vous le dire.
Et, d'autre part, une chose à corriger, M. le ministre...
Excusez-moi, il faut que je m'adresse à M. le Président. Nous
souhaiterions que le ministre des Finances soit plus clair et plus
précis et plus transparent dans les annonces qu'il aura à faire
prochainement au niveau du budget parce que, malheureusement, il y a des gens
qui ont dû, dans les dernières années - soit des
journalistes, soit des commentateurs - chercher des chiffres, chercher des
mesures, les trouver quelques jours plus tard, les annoncer à la
population par l'entremise des médias. Et, à notre avis,
ça devrait être beaucoup plus clair et transparent, le processus
d'annonce des mesures par le ministre des Finances. En tout cas, ça,
c'est un voeu, selon nous, très important, parce qu'il y a aussi le
rapport des citoyens et des citoyennes avec l'État qui est en jeu
là-dedans. Ceci n'implique pas du tout, M. le Président, que nous
n'aimons pas le personnage du ministre des Finances, mais, par contre, nous
souhaitons vraiment plus de transparence et de précision à
l'avenir.
Le Président (M. Camden): Mme la députée de
Taillon.
Mme Marois: Je vous remercie, M. le Président.
Je pense que c'est intéressant, les dernières remarques
que vous venez de faire, parce que nous avons été
nous-mêmes, ici, et vous-même comme organisme qui vient
témoigner, victimes de cela, puisqu'on nous a rendu public le document
sur lequel, d'abord, on débat depuis qu'on a commencé cette
commission, quelques jours à peine avant qu'elle n'ouvre. Et on nous a
donné des explications sur des manques à gagner pour
l'État, de l'ordre de 2 500 000 000 $, le matin où on a ouvert
cette commission. Alors, si ça ne manque pas de transparence, ça,
je me demande ce qui en manque. Donc, dans ce sens-là, j'espère
que vos propositions et vos conseils ne tomberont pas dans l'oreille de sourds,
pour que cela soit plus évident à l'avenir et que les citoyens et
citoyennes soient davantage informés. Je suis tout à fait
d'accord avec vous.
Je voudrais revenir sur votre mémoire, que je trouve
particulièrement intéressant. Je pense que mon collègue,
le député de Labelle, a fait état d'un certain nombre
d'éléments qui sont tout à fait justes. Dans le fond, ce
qu'on aurait souhaité, compte tenu que cette commission était
d'abord convoquée sous prétexte de discuter de fiscalité,
c'est que les comparaisons que vous faites sur un certain nombre
d'années, sur un certain nombre de périodes nous soient faites
dans le document. On préfère, effectivement, se comparer soit aux
États-Unis ou ailleurs, choisissant les systèmes selon ce qui
nous convient, et ça met de côté, à mon point de
vue, le véritable débat qui devrait porter sur la
fiscalité.
Cela étant dit, il est évident que la façon de
résoudre le problème auquel est confronté l'ensemble de
notre société en termes de finances publiques - parce qu'il y en
a un, cependant, un problème réel - et peut-être aussi la
façon de résoudre le problème auquel sont
confrontés surtout nos concitoyens et nos concitoyennes, c'est qu'on
augmente le niveau de richesse. On sait fort bien, actuellement, qu'il y a
probablement une seule avenue à travers laquelle on peut passer pour
faire en sorte que ça ait un impact global et que ça rejoigne en
même temps chacun des citoyens et des citoyennes, et c'est par les
politiques de l'emploi.
Une des préoccupations que nous avons, de ce
côté-ci, à tout le moins, c'est que, pour réaliser
une politique de l'emploi, nous croyons qu'il doit y avoir une unité
d'action dans le secteur des politiques de main-d'oeuvre et des politiques
actives du marché du travail. On voit actuellement une décision
qu'est en train de prendre le gouvernement fédéral, le Parlement,
si la loi devait être adoptée, qui aura des effets
désastreux sur les chômeurs du Québec mais aussi sur les
finances publiques du Québec parce que, si on modifie la Loi sur
l'assurance-chômage, on transférera ainsi des consommateurs et des
consommatrices, des travailleurs et des travailleuses vers les régimes
de sécurité sociale, vers les régimes d'aide sociale, et
on amplifiera la pression, évidemment, sur les finances publiques du
Québec.
Moi, j'aimerais que vous me parliez un petit peu de l'état de vos
réflexions quant à l'impor-
tance d'implanter une politique d'emploi - et vous pariez
vous-même de plein emploi - quant à des gestes qui devraient
être posés par le gouvernement et par les partenaires. Parce que
je ne pense pas que ce soit la responsabilité du seul État, mais
c'est la responsabilité d'une collectivité, d'une
société qui s'incarne - cette société - dans des
organismes, dans des institutions, qui se concrétise par des
décideurs dans notre société. Alors, moi, j'aimerais que
vous me parliez un petit peu de cet angle-là et, évidemment, sous
l'angle aussi des dédoublements auxquels on est confrontés, qui
ont un impact sur les finances publiques et qui empêchent, en plus, que
les politiques d'emploi soient réellement efficaces. (17 heures)
M. Dagenais: Je pense qu'il faut concevoir le problème de
la dette de deux façons, et d'abord le concevoir dans sa situation
conjoncturelle. Je pense qu'il est normal, pour une administration publique,
d'assumer, certaines années où il y a récession, des
déficits pour compenser. Là où c'est plus
problématique, effectivement, c'est qu'il y a, au Québec, un
déficit structurel et, à ce moment-là, je pense qu'il faut
agir sur la structure de l'économie. Il y a des composantes qu'on peut
essayer de modifier, qui ne requièrent pas, en soi, des investissements
importants, mais plutôt des investissements en termes de gestion,
d'amélioration, finalement, des relations entre les divers intervenants
de l'économie. Et, à mon sens, ça passe par la
concertation. Les économies qui fonctionnent le mieux, à mon
sens, c'est les économies où il y a concertation. Et mon
impression, c'est que le gouvernement laisse trop de place encore au libre
marché, au fonctionnement des entreprises privées, et ne veut pas
suffisamment intervenir pour assurer une coordination d'ensemble qui, à
mon sens, améliorerait la situation.
M. Beaudoin (Roger): Peut-être un dernier
élément ou deux autres. C'est qu'un des problèmes qui
vient souvent quand on parle de plein emploi, c'est deux choses.
Premièrement, est-ce que c'est utopique? Nous, on pense que, que
ce soit le plein emploi ou le développement de l'emploi, il faut
vraiment une volonté politique d'aller dans ce sens-là avec les
partenaires socio-économiques parce que, sans ça, on va avoir des
relances à tous les cinq ou sept ans. Mais le chômage structurel
va rester comme ça et, ensuite, il va y avoir une autre
récession. Et là, on va revenir comme ça, et les finances
publiques, finalement, vont toujours être dans le trou, si vous me
permettez l'expression. Et donc, une véritable relance doit passer par
une relance de l'emploi.
D'autre part, le contrôle de l'inflation. Le plein emploi, dans
bien des circonstances, peut entraîner une augmentation de l'inflation,
entre autres, au niveau des désirs des travailleurs et des
travailleuses, une plus grande mobilité, etc. Mais il faut agir
là-dessus pas par des politiques de type seulement monétaire,
mais, encore là, par une forme de concertation socio-économique.
Quant au dédoublement qu'il peut y avoir au niveau
fédéral-provincial, je vous dirai que, malheureusement...
Malheureusement, dans un sens, simplement qu'on ne peut pas vraiment
répondre à la question. On n'a pas beaucoup analysé cette
chose-là. On n'est pas convaincu qu'à chaque fois que le Parti
québécois parle qu'il y a dédoublement c'en est
nécessairement. On n'est pas non plus convaincu que ça n'en est
pas. Par contre, sur la question de la main-d'oeuvre, je vous dirai qu'on avait
tendance, sans trop en avoir discuté, à dire qu'il pouvait y
avoir une forme de dédoublement, mais on manquait un peu d'expertise
dans ce domaine-là.
Mme Marois: C'est intéressant, je pense, la porte qui
s'ouvre là et, de plus en plus, autour de cette perspective de politique
d'emploi à laquelle adhèrent, d'ailleurs, un bon nombre
d'organisations et de groupes qui sont venus présenter ici des
mémoires. Et, sur la base, entre autres, de cette concertation utile et
nécessaire, je pense qu'il va falloir poser des gestes très
concrets dans ce sens-là, sinon, on ne réglera pas le
problème structurel auquel on est confronté comme
société et qui est déjà en train de miner notre
économie, mais qui est en train de miner notre organisation sociale
aussi. C'est là où ça nous mène.
Moi, juste peut-être pour un peu appuyer sur la question des
dédoublements, je comprends que ce n'est pas nécessairement,
vous, comme association, comme fédération, votre
préoccupation, et vous n'avez pas nécessairement tous les outils
pour en faire l'analyse. Mais ce que je peux vous dire, c'est que d'autres
avant nous l'ont fait. Et, soit dans les commissions comme celle de
Bélanger-Campeau ou des études de l'École nationale
d'administration publique, il y a effectivement des dédoublements en
nombre important. On parle de plus de 250, certains qui sont essentiellement
d'ordre de gestion, si on veut, d'autres sont de l'ordre des services, mais il
y a sûrement un travail à faire de ce côté-là.
Et, au niveau de l'emploi, ça, on sait très clairement, c'est
bien établi, qu'il y en a. Mais c'est établi aussi dans un
certain nombre d'autres secteurs par des études qui méritent
d'être remises à jour, mais qui existent déjà.
Je vous remercie, M. le Président. Je pense qu'il reste quelque
temps pour mon collègue?
Le Président (M. Camden): Oui, M. le député
de Montmorency.
M. Filion: Est-ce qu'il y a alternance ou...
Mme Marois: Ils ont terminé, eux.
M. Filion: Ah! ils ont terminé.
Le Président (M. Camden): Le temps de l'aile
ministérielle étant épuisé...
M. Filion: II reste combien de temps?
Le Président (M. Camden): Deux minutes.
M. Filion: Doux minutes.
Le Président (M. Camden): Votre question et la
réponse.
M. Filion: Merci, M. le Président.
J'aimerais d'abord dire que votre mémoire est très
intéressant. Vous soulevez beaucoup d'aspects pratiques, d'aspects qui
touchent vraiment la fiscalité sur le terrain, comme on dit. Et il y a
un point que vous soulevez sur lequel j'aimerais avoir un peu plus de
commentaires et qui nous donne des pistes en même temps. Vous dites: Le
gouvernement, en sixième recommandation, ne doit pas piger dans les
revenus des sociétés d!État - SAAQ et
HydroQuébec - qui ont des fonctions bien précises pour la
population québécoise.
Pour vous, est-ce que ça représente des institutions qui
deviennent des espèces de taxes cachées où vous avez
l'impression qu'au fond on prélève chez Hydro-Québec des
frais, entre autres, de garantie pour les emprunts? 147 000 000 $, c'est peu
dire. C'est une façon de financer le gouvernement. Est-ce que, pour
vous, ça vous apparaît une espèce de taxe cachée, le
fait que vous le souleviez de cette façon-là?
M. Beaudoin (Roger): En fait, effectivement, c'est une forme de
taxe cachée dans le sens que, par exemple, quand le gouvernement prend
des montants au niveau de la Société de l'assurance automobile du
Québec, ce que ça fait, concrètement, c'est que si, pour
tout de suite, ça n'a aucune conséquence sur les tarifs de
services de la SAAQ, dans deux ans, il y a des bonnes chances qu'il y ait des
augmentations qui soient dues au fait que le gouvernement est allé
chercher de l'argent dans ce pot-là.
Alors, pour Hydro-Québec, remarquez que c'est peut-être un
peu différent. Le rationnel, c'est de dire que le gouvernement assume
une forme de garantie d'emprunt sur le marché international, etc. On
peut toujours en discuter, mais, au bout du compte, ce que ça fait,
c'est que ça fait effectivement une dépense de plus au niveau
d'Hydro-Québec et, donc, une pression sur l'augmentation des tarifs,
évidemment. Alors, ça a toujours un impact.
M. le Président...
Le Président (M. Camden): Très brièvement,
M. Beaudoin, pour terminer.
M. Beaudoin (Roger): Oui, d'accord.
Le Président (M. Camden): Très brièvement,
30 secondes.
M. Beaudoin (Roger): C'est que si, effectivement, on n'augmente
pas l'impôt sur le revenu, mais qu'on augmente beaucoup, beaucoup les
taxes à la consommation ou toutes les formes de tarification ou de taxes
cachées, au bout du compte, c'est quand même des charges fiscales
très importantes de plus qui sont assumées par la population.
Le Président (M. Camden): M. Beaudoin, Mme Pilon, M.
Dagenais, de la Fédération nationale des associations de
consommateurs du Québec, nous vous remercions de votre participation
à la commission.
Nous allons suspendre nos travaux pour deux minutes afin de permettre
aux représentants de l'Archidiocèse de Québec de prendre
place à la table.
(Suspension de la séance à 17 h 7)
(Reprise à 17 h 8)
Le Président (M. Camden): Je prierais nos invités
de bien vouloir prendre place. Veuillez, s'il vous plaît, prendre place
afin que la commission puisse reprendre ses travaux.
Nous allons maintenant entendre les représentants de
l'Archidiocèse de Québec. Dans un premier temps, est-ce que le
porte-parole de l'organisme pourrait s'identifier et présenter les gens
qui l'accompagnent?
Office diocésain des milieux -
diocèse de Québec
M. Théberge (René): Bonjour, bonsoir. Mon nom est
René Théberge de l'office de pastorale, l'Office diocésain
des milieux, c'est le titre, qui est le service, au diocèse de
Québec, qui porte la préoccupation des questions de justice et
des questions socio-économiques. Les membres de la
délégation: Christiane Lagueux, qui est au diocèse de
Québec aussi, membre de cet Office diocésain des milieux, avec la
préoccupation sociale, et Pierre-André Fournier, qui est
curé de Saint-Roch, qui est un collaborateur précieux pour nous
et qui porte ces préoccupations-là quotidiennement dans son
milieu.
Le Président (M. Camden): M. Théberge,
évidemment, ça me fait plaisir de vous accueillir. Je vous
rappelle brièvement que vous avez 20 minutes pour présenter votre
mémoire, et que 40 minutes seront partagées en temps égal
entre les membres de l'aile ministérielle et de l'Opposition afin de
vous formuler des commentaires ou des questions auxquels vous serez
invités à répondre.
Vous pouvez débuter la présentation de votre
mémoire.
(17 h 10)
M. Théberge: Merci. J'ai conscience qu'on arrive
après beaucoup d'autres prises de parole. Ce sera la nôtre plus
simplement, avec nos convictions, avec ce que nous sommes.
L'Office diocésain des milieux au diocèse de Québec
a comme mission de promouvoir les valeurs chrétiennes, les valeurs de
justice et de solidarité. Ce sont nos assises. Et une des
conséquences, c'est de rendre autonomes le plus possible les individus
et les groupes laissés pour compte, en particulier dans le
développement de notre société.
Donc, prendre la parole ici aujourd'hui, c'est en vue, toujours, de
l'humanisation, la dignité des personnes à travers nos
systèmes sociaux, à travers des éléments importants
de la dignité des personnes actuellement, les systèmes sociaux
qui entourent la vie des personnes. Notre présentation va suivre
l'évolution du libellé, va suivre le libellé de la
consultation: l'évolution des dépenses gouvernementales, dans un
premier temps, la fiscalité, le déficit et les besoins
financiers.
Bien sûr, on n'a pas de réponses techniques à vous
donner ou de statistiques sophistiquées. Vous espériez
peut-être ça, mais ce n'est pas d'abord de ce
côté-là qu'on peut exceller, mais, nous faire les
porte-parole d'un certain nombre de valeurs et d'impératifs
importants.
Notre niveau de connaissance, je dirais, c'est celui de citoyens et de
citoyennes moyens qui écoutent les médias, qui, aussi, utilisent
les services d'éducation, de santé, les régimes
d'assurance sociaux de toutes sortes, et qui profitent aussi des
différents programmes de développement offerts par le
gouvernement, les gouvernements, et, avec le souci d'une gérance dans
nos organismes, dans nos budgets, d'avoir la meilleure gérance et la
meilleure utilisation des ressources.
Et je dirais que, comme valeur de fond, nous refusons de croire que,
fatalement, les forces économiques soient incontrôlables -
ça, pour nous, c'est fondamental, ce n'est pas magique, mais je crois
que vous en êtes convaincus aussi - et que les décisions du
gouvernement en cette matière ne puissent qu'être à la
remorque de décisions canadiennes ou de décisions des grandes
tendances mondiales. Ça, pour nous, c'est fondamental, un gouvernement
reçoit de la population l'importante responsabilité d'assujettir
ses forces au service de toute la population, de toutes les personnes. C'est
des grands principes, mais nous y croyons fermement.
Des critères de choix. Notre première recommandation
concerne les principes qui doivent soutenir tous les choix
socio-économiques. Le premier: des choix qui tiennent compte
prioritairement des personnes les plus démunies: les jeunes, les
sans-emploi, les femmes, les personnes immigrantes, les réfugiés,
les familles à faibles revenus. Et le deuxième choix de fond, des
choix qui favorisent le développement durable des différentes
régions du Québec. Et ça, je crois que vous avez eu
l'occasion souvent de voir les implications dans des régions comme.. On
peut penser à Rimouski, Gaspé, des implications des
églises des diocèses pour savoir que c'est une option qui a des
enracinements très concrets.
Des choix qui sont souvent exprimés, mais l'écart entre
riches et pauvres ne cesse de grandir. On parle d'une société
«à deux vitesses», «cassée en deux». Ce
sont des expressions imagées, mais des expressions, je crois, qu'on ne
peut pas ne pas retenir. Et éviter de sacrifier, au niveau d'une
génération. Je pense ici à la génération des
plus jeunes. Il y a quelque chose là, pour moi, qui est vraiment... Les
jeunes., actuellement, on leur offre peu d'espoir, et ça, c'est crucial,
pour moi, de ne pas pouvoir nourrir un minimum d'espoir chez cette
génération-là.
Donc, les principes qui ont motivé jusqu'à maintenant les
choix économiques et financiers de nos gouvernements ont
été du côté de la croissance de notre richesse et de
la lutte contre les dépenses. Les résultats ne sont pas venus, je
crois que vous le savez mieux que nous, il faut corriger la trajectoire, mais
l'État ne doit pas simplement faire le jeu des grands monopoles: mise
à pied, fermeture, abandon de services, etc.
Il y a ici peut-être un point que j'ajouterais. Notre
société, elle est socialisée dans le bon sens du mot. Nous
sommes imbriqués dans des systèmes multiples et aussi, dans les
périodes de crise, on ne doit pas redonner toute la
responsabilité à l'individu. Dans le fond, la socialisation fait
partie de notre culture. Ça, c'est, pour nous autres, une donnée
importante. C'est vrai, dans les périodes de croissance, que la
socialisation fait partie de... qu'on appartient à des systèmes,
mais c'est vrai aussi dans les périodes de décroissance. Donc,
ceci pour dire de ne pas faire reposer sur l'individu les difficultés
d'une décroissance. Il y a là une responsabilisation - je crois
que c'est un mot important - à la fois chez les entreprises et chez les
patrons, dans la gérance d'Etat et chez les individus aussi.
Les conséquences sur les dépenses gouvernementales. La
première, c'est l'emploi. Pour nous, l'emploi est l'objectif premier de
toute politique, de tout programme socio-économique. Ça nous
paraît, encore une fois, fondamental de le redire: travailler sur
l'emploi. On ne cesse de dire que, pour nos pays industrialisés, la
redistribution de la richesse collective se fait d'abord et avant tout par les
revenus d'emplois et la sécurité qui s'y rattache.
La situation se dégrade avec les fermetures d'usines:
précarisation, pauvreté, marché noir. Alors, encore
là, parler de plein emploi, c'est
peut-être utopique, mais, quand on le dit, c'est pour dire
l'importance de travailler vraiment à l'emploi. Pourquoi ne pas faire
servir les grands traites du libre-échange à la poursuite de cet
objectif en proposant, en négociant des normes qui servent cet objectif
et responsabiliser aussi encore davantage les entreprises elles-mêmes,
les entrepreneurs, à l'idée d'être créateurs
d'emplois? Il faudrait, il me semble, qu'il y ait comme un lien
nécessaire entre toute aide à l'investissement de la part de
l'État, en particulier, et la création d'emplois. Trop souvent,
actuellement, on va aider une entreprise à se moderniser parce qu'il y a
une production supplémentaire à faire, parce qu'il y a des
contrats, et l'État aide à la modernisation et au bout de la
course souvent, il y a des mises à pied parce qu'on peut produire plus
avec moins de monde. Donc, il me semble qu'il y aurait un lien à faire
entre aide à l'investissement et création d'emplois.
Au point B, réviser la loi de la sécurité sociale
et faire de cette protection un droit plutôt qu'un privilège.
Là, il s'agit de la dignité, encore une fois, des personnes.
Même le Protecteur du citoyen lance des appels dans ce sens-là. On
agit parfois, on a l'impression, c'est comme si la pauvreté était
une question de choix personnel, sans tenir compte de ses conséquences
désastreuses pour la personne elle-même, pour la famille et son
milieu.
Les lois de sécurité sociale, comme
l'as-surance-chômage et le bien-être social, étaient
prévues comme des filets pour protéger le citoyen temporairement
- je crois que c'est le mot important: temporairement - en difficultés
financières entre deux situations stables. Maintenant, on se rend compte
que de plus en plus de gens doivent compter sur ces sources de revenus d'une
façon permanente, et c'est tout le déséquilibre que
ça provoque. (17 h 20)
La pauvreté et le fait d'être longtemps sur la
sécurité du revenu, en chômage, ça a des effets qui
sont déstabilisants, démobilisants pour les personnes et sur leur
capacité de travailler. Et il ne faut pas se surprendre que, dans les
reprises économiques, les gens ne retournent pas aussi facilement sur le
marché du travail qu'ils en sont sortis, parce qu'il y a les structures
de personnes qui sont brisées. Ici, encore une fois, je pense aux
jeunes. Il y a toute une génération chez qui... On leur donne peu
de rêves de produire, leur capacité de produire, de travailler
à l'âge où on est en pleine puissance, je dirais,
d'actualisation de soi.
Au point C, favoriser une politique industrielle à deux volets,
un volet haute technologie qui nous place et nous maintient sur le
marché international. Chaque région du Québec pourrait
recevoir sa part de responsabilités à cet égard, en
prenant en charge au moins un des grands secteurs industriels. L'idée
des grappes industrielles nous paraît intéressante, il faudrait
peut- être la penser en termes des réglons, que les régions
puissent vraiment en bénéficier.
Le deuxième volet, qu'on appelle un volet
«artisanal», qui permet la production et la distribution de
services à haute échelle. Par exemple, «Achetons chez
nous». Les résultats d'une telle politique artisanale
créent des emplois, mais ils soutiennent aussi les personnes. On pense,
ici, dans cette ligne-là de volet artisanal, à toutes les petites
coopératives de production qui seraient à soutenir; ça
s'est déjà fait beaucoup, il y a peut-être eu un
relâchement de ce côté-là, une coopérative de
production, que ce soit en habitation, en artisanat et différentes
choses.
Au point D, en bas, augmenter les crédits à
l'éducation et, plus particulièrement, à
l'éducation aux adultes et à l'éducation populaire
autonome. L'éducation populaire nous paraît une façon de
resocialiser des personnes et une manière de lutter contre la
marginalisation. Il se fait beaucoup... Je dirais qu'avec peu de moyens, c'est
un domaine où il y a beaucoup de choses qui se font. Il nous semble
essentiel de continuer à lutter contre la volonté du gouvernement
fédéral de créer un système parallèle de
formation de la main-d'oeuvre; c'est un point sur lequel on sait que vous
travaillez.
Au point E, maintenir l'universalité des services, comme ceux de
la santé et de l'éducation. L'universalité des services,
c'est un principe fondamental à notre société,
actuellement. Et refuser d'introduire les contrôles coûteux. Et
c'est ici qu'arrive, entre autres, le ticket modérateur. Pour nous,
ça ne nous paraît pas un premier moyen à utiliser.
L'universalité des programmes devrait devenir une des formes
essentielles de la solidarité sociale, de devenir fiers, je dirais
collectivement, de ces programmes sociaux, de ces mesures. Les
Américains nous envient à ce niveau-là et, soi-même,
en tout cas, comme société, on a à en devenir fier. Bien
sûr, ça implique à la fois les usagers et les distributeurs
de services. Ça, ça ne revient pas souvent dans le cahier que
vous avez présenté, des finances publiques, «Vivre selon
nos moyens», la responsabilité des distributeurs de services.
Parmi les professionnels de la santé, pourquoi les professionnels de la
santé ne seraient pas des salariés de l'institution qui les
emploie? C'est une question, ça se passe dans les CLSC. Quand des
contrôles efficaces auront été mis en place auprès
des distributeurs de services, il me semble que les gens accepteraient qu'il y
ait d'autres contrôles qui s'ajoutent, chez les usagers en
particulier.
Un autre point important, mieux utiliser - bon, je vais aller rapidement
- les fonctionnaires provinciaux, simplifier, ajouter, je dirais deux mots
clés, la cohérence et la continuité dans
l'élaboration des politiques. On a souvent l'impression... On se fait
dire qu'une politique est mise en place et, rapidement, il y a
un changement de personnel et... La cohérence et la
continuité nous semblent un lieu d'économie important. Les
nouvelles régies régionales sont un bon pas dans le sens de la
décentralisation et de la responsabilisation, mais il faut éviter
que les mesures administratives viennent paralyser ces gestionnaires.
Mieux gérer les dépenses d'opération courantes du
gouvernement. Le Vérificateur général, dans son rapport,
dénonce chaque année des dépenses inutiles et somptueuses.
Bon, ça nous paraît un lieu d'économies. Peut-être
une suggestion: Pourquoi il n'y aurait pas un genre de conseil de sages qui
pourrait s'adjoindre au Vérificateur général pour
accroître le poids de ses recommandations? Pas faire le travail à
sa place, mais accroître le poids de ses recommandations.
Voilà. Je laisse la parole à Christiane Lagueux.
Mme Lagueux (Christiane): Alors, pour poursuivre, si on regarde
les conséquences sur la fiscalité, en tout cas les
conséquences des deux grands principes qu'on a énoncés au
début sur la fiscalité, on a essentiellement deux
éléments à apporter ici à ce point-là.
Il y en a un premier, c'est concernant la question des systèmes
fiscaux qui sont dits progressifs dans le document «Vivre selon nos
moyens». Nous disons oui, il y en a une certaine partie qui est
progressive, mais quand on ajoute à ça la perception des taxes,
la taxation, quand on ajoute à ça l'accessibilité des
abris fiscaux qui sont, finalement, avantageux pour ceux qui ont des hauts
revenus, alors là, on s'aperçoit qu'il y a de la
régressivité à l'intérieur de ça.
Alors, ce qu'on propose, c'est de réviser des systèmes de
perception d'impôt pour éviter les abris fiscaux, entre autres,
les abris fiscaux au niveau des entreprises. On parle que c'est important d'en
avoir pour inciter à la formation et inciter aussi à
l'investissement. Pourquoi ne pas éliminer ces genres d'abris là
pour les remplacer par des abris qui récompensent, je dirais, le
maintien et la création d'emplois durables et intéressants?
Ça pourrait avoir un certain impact sur la question des emplois.
On parle aussi de la grande mobilité à la fois des
capitaux et des gens qui ont plus de revenus que d'autres. Je ne sais pas s'il
y a possibilité de parler d'imposition sur la mobilité,
justement. Est-ce qu'il n'y a pas moyen de créer certaines formes de
taxe de départ ou de séparation quand les capitaux se
déplacent d'un endroit à l'autre?
La deuxième dimension qui nous apparaît importante, c'est,
s'il y a lieu d'augmenter les revenus du gouvernement malgré tout, de
privilégier la perception des revenus par les impôts plutôt
que par l'imposition de nouvelles taxes à la consommation. Dans ce
sens-là, on se dit que ce qui est important à l'intérieur
de ça, c'est toute la question de l'éducation de la population.
C'est clair qu'il est frustrant pour M. Tout-le-Monde d'avoir l'impression
qu'il met la main dans sa poche et que, finalement, il est le seul à
payer. Bon, II est important, je pense, d'avoir une information large sur ce
qu'on fait, quel genre de services on obtient avec nos impôts, d'avoir
l'impression aussi que le fardeau fiscal est partage également par
l'ensemble de la population. Quand on a l'impression effectivement que c'est
nous autres qui subissons et que les seuls qui voient leur pouvoir d'achat
diminuer, dans le fond, c'est les gens qui se considèrent comme plus
faibles ou moins nantis, bien là, ça pose question. Je pense
qu'il y a quelque chose à faire de ce côté-là. C'est
pour ça qu'on parle finalement de l'urgence de la transparence à
l'intérieur de ça au niveau... Les gens sont capables de
comprendre quelque chose à la condition qu'on leur explique pourquoi et
qu'ils en comprennent aussi l'équité à l'intérieur
de ça.
Je pense qu'il est important, au niveau de l'éducation populaire
justement, de développer la fierté des Québécois et
des Québécoises de se doter de leviers socio-économiques
qui ne créent ni perdants ni gagnants. Je pense que là-dessus on
peut miser. On a fait des grandes campagnes sur la participation ou sur
«Buvez du lait». Pourquoi on n'en ferait pas sur la qualité
de vie dans laquelle on est inséré dans cette
société qui est Sa nôtre?
Le paragraphe suivant parle également des conséquences des
deux grands principes qu'on a émis au début, c'est-à-dire
se préoccuper des plus faibles et se préoccuper des
régions. Bon, les conséquences de ça sur le
déficit, les besoins financiers et la dette. Alors, à
l'intérieur de ça, ce qui nous apparaît important...
Le Président (M. Camden): Mme Lagueux, est-ce que je peux
vous inviter à conclure peut-être, si c'est possible?
Mme Lagueux: Oui, bien c'est correct d'abord.
Fondamentalement...
M. Léonard: II y avait des choses intéressantes
aussi qui venaient.
Le Président (M. Camden): Écoutez, je dois vous
indiquer...
Mme Lagueux: Vous nous poserez les bonnes questions pour qu'on
puisse continuer. le président (m. camden): ...que les membres de la
commission ont pris connaissance du mémoire et certains s'en sont
même fait des résumés. d'autres ont des
résumés entre les mains. je pense qu'ils sont à même
de vous formuler un certain nombre de questions et de commentaires suite
à vos propos. (17 h 30)
Mme Lagueux: Très bien. Alors, si on veut conclure
à l'intérieur de ça, ce qu'on croit, et je me
réfère à la conclusion que nous avons donnée, je
pense que ce qui est important comme rôle du gouvernement par rapport
à l'économie, par rapport aux finances, c'est de se
préoccuper du développement des personnes et
particulièrement des plus faibles, des collectivités aussi, des
régions, plutôt qu'essentiellement de l'économie
elle-même à tout prix. Ce n'est qu'un moyen, finalement, pour
bienvenir et sur la richesse en termes de recherche du profit à tout
prix.
Alors, c'est ça qu'on calcule important, et je pense qu'il y a
moyen de se donner des façons de faire et de se convaincre
collectivement par une éducation populaire et une sensibilisation
toujours renouvelée. C'est un défi important, mais qui nous
apparaît faisable.
Le Président (M. Camden): Je vous remercie, Mme
Lagueux.
M. le ministre des Finances, pour vos questions et commentaires.
M. Levesque: Très brièvement, M. le
Président, afin de donner à certains de mes collègues
l'occasion aussi de poser quelques questions.
Je me permettrai tout d'abord de vous féliciter pour votre
mémoire, vous remercier de votre présence et de votre
participation à ce forum.
Il y a chez vous, sûrement, un désir d'aider la
société. Vous dites vous-même que vous n'avez pas
l'expertise dans tous les domaines, et c'est clair. Nous ne l'avons pas non
plus. Nous sommes à la recherche, justement, de solutions dans des
moments difficiles. Même si vous dites que vous ne voulez pas mettre
l'accent sur le déficit ou l'endettement, ce sont des choses que nous ne
pouvons pas éviter. L'endettement est très sérieux, au
Québec. Je n'ai pas à vous l'apprendre, vous le savez. Les
déficits sont difficilement contrôlables. Nous réussissons,
cette année encore, à maintenir le cap sur les dépenses du
gouvernement, mais après des tours de force assez extraordinaires, tout
en tenant compte de préoccupations que vous avez
véhiculées dans votre mémoire, mais nous ne pouvons pas
tirer sur les revenus lorsqu'ils ne sont pas là. Et ils ne sont pas
là, non pas parce que nous n'avons pas fait notre possible pour les
obtenir, mais parce que, simplement, nous sommes dans une période de
grave ralentissement économique, et cela dure depuis quelque temps
déjà. Nous ne sommes pas les seuls dans cette situation, vous me
direz sûrement. On n'a qu'à regarder nos voisins et on
s'aperçoit que la situation est loin d'être meilleure. Au
contraire, les difficultés sont là également, et elles
sont là souvent d'une façon encore plus évidente.
Mais n'empêche que nous devons regarder vers l'avenir et prendre
les moyens nécessaires pour faire face à la situation. Ce que
nous recherchons, évidemment, c'est une série de solutions. Il
n'y a pas qu'une solution. Nous devrons faire des arbitrages, à un
moment donné, en tenant compte évidemment, encore une fois, des
préoccupations que vous avez avancées sur le sort des
démunis en particulier.
À ce propos, je n'ai pas à vous rappeler la
préoccupation qui est la nôtre de nous pencher sur ces
questions-là. Nous avons posé des gestes très concrets,
que ce soit dans les mesures fiscales pour l'aide aux familles, par exemple. On
sait qu'en 1985 il y avait 800 000 000 $ pour le soutien à la famille.
Nous sommes rendus à 2 300 000 000 $. Donc, il y a là une
volonté très ferme d'encourager la famille, de soutenir la
famille, qui est la base encore, même s'il y a des questions qui se
posent là-dessus. Chez moi, dans mon esprit, du moins, c'est la base de
la société. C'est une cellule extrêmement importante, et,
souvent, son éclatement cause beaucoup de problèmes de toutes
sortes, sociaux et même financiers.
Nous avons des crédits pour taxes de vente, des remboursements
d'impôts fonciers, des reconnaissances des besoins essentiels à
l'impôt sur le revenu, l'harmonisation avec l'aide de dernier recours,
des hausses des seuils d'imposition, l'indexation des besoins essentiels
reconnus, la réduction des impôts pour les familles, l'aide de
dernier recours, le programme APTE pour aider les moins favorisés, le
programme APPORT, l'aide au logement, l'allocation-logement, Logi-rente, HLM,
l'aide juridique.
Autrement dit, il y a une foule de mesures qui sont là pour,
justement, répondre à plusieurs de vos préoccupations.
Mais il reste un fait, c'est qu'il y a du chômage, il y a du sous-emploi.
Et vous savez la préoccupation que notre premier ministre a pour
l'emploi. C'a été son «motto». C'a été
son credo, son mot d'ordre depuis que je le connais. Et chaque fois que nous
avons des réunions du Conseil des ministres, chaque fois que nous avons
des réunions du caucus, chaque fois que nous avons des réunions
de comité, M. Bourassa revient toujours avec la question de la
création d'emplois.
Alors, c'est important, je pense, de le dire, parce que nous sommes
très préoccupés par la création d'emplois. Mais il
n'y a pas de solution magique au Québec qui n'existe qu'ici et qui
n'existerait pas ailleurs. Le problème est mondial, planétaire,
mais nous devons cependant prendre toutes les mesures imaginables pour essayer
de ramener les choses. Nous avons des signes encourageants présentement.
Nous espérons que cela va se traduire en emplois. Mais vous avez raison
de dire que, quelquefois, on investit et ça modernise, mais ça ne
crée pas d'emplois. Nous sommes dans un monde en pleine
évolution, vous le savez. Il y a la robotique et la bureautique, tout ce
qui n'existait pas il y a quelques années. Il y a les échanges
qui se font à l'échelle pla-
nétaire. Il y a toutes sortes de conditions qui changent, et tout
cela, évidemment, se fait souvent en contradiction même avec le
besoin que nous avons de l'emploi. Et je suis d'accord avec vous lorsque vous
rappelez qu'une personne sans emploi est une personne qui se cherche. Ce n'est
pas normal qu'une personne en santé ne puisse avoir d'emploi. Et
à ce propos-là, je suis sûr que nous sommes sur la
même longueur d'onde.
Vous parlez, évidemment, dans votre mémoire, de
sécurité sociale, de politique industrielle, d'éducation,
de formation, d'universalité, d'universalité des services en
santé, en éducation, etc. Ça, ça veut dire que
quelle que soit, si je comprends bien, la fortune des personnes
concernées, vous voulez toujours qu'elles aient accès, sans
contribution particulière, aux services d'éducation, de
santé, etc. Si je comprends bien, c'est l'universalité.
Vous parlez également d'une certaine mobilité que vous
voudriez contrôler. Ça, je crois que c'est un désir que je
respecte chez vous, mais je ne vois pas de quelle façon on pourrait
faire ça sans avoir recours à des méthodes qui ne sont pas
encore acceptables dans nos régimes. Enfin. Cependant, je suis
prêt à vous écouter, si vous voulez élaborer
là-dessus ou sur d'autres sujets que j'ai abordés.
Le Président (M. Camden): M. l'abbé
Théberge.
M. Théberge: Oui. Peut-être juste sur
l'universalité, M. le ministre.
Nous croyons que c'est pour éviter l'arbitraire que nous disons:
L'importance de l'universalité, il nous parait que c'est vraiment le
choix de société qui a été fait puis qui se
défend vraiment. Maintenant, il y a d'autres façons, d'autres
formes d'imposition où les personnes peuvent apporter leur contribution.
Mais ce n'est pas l'usager du service au moment où il se
présente. Ce n'est pas là que j'ai à le juger. Toi, tu
peux; toi, tu ne peux pas. Mais...
M. Levesque: Vous ne seriez pas contre l'impôt-services,
comme ça. (17 h 40)
M. Théberge: L'impôt-services introduirait, je
crois... C'est un frein dans l'universalité. Mais, d'autre part, par les
taxes, par les impôts sur les revenus, je crois que c'est là
qu'est votre ligne de départ, et c'est éviter les évasions
fiscales le plus possible. Ça, ça nous parait important.
Responsabiliser les distributeurs de services. La personne qui vient demander
un service chez un médecin ou ailleurs, elle est en situation de
fragilité par opposition aux distributeurs de services, qui sont en
situation de pouvoir. Ils ont un service à rendre. De quelle
manière pourrait-on davantage responsabiliser les distributeurs de
services? Il me semble qu'il y aurait quelque chose. Il y aurait des
économies, II y aurait quelque chose à faire de ce
côté-là. En tout cas, ce sont mes observations ici.
Le Président (M. Camden): M. le député de
Labelle, vos commentaires et questions.
M. Léonard: Merci, M. le Président.
D'abord, je voudrais vous souhaiter la bienvenue au nom de l'Opposition
officielle et vous féliciter pour la qualité de votre
mémoire. Il y a des éléments neufs dans votre
mémoire que je voudrais souligner, et vous dire que je partage un peu
vos préoccupations.
Le premier élément qui m'a frappé à travers
d'autres, mais particulièrement celui-là, c'est ce que vous dites
à la page 6, où vous dites: Favoriser une politique industrielle
à deux volets: un volet haute technologie et un volet artisanal. Je
pense qu'au-delà de la volonté du gouvernement d'avoir des
recettes pour essayer de couper les dépenses et puis augmenter ses
Impôts, il y a une préoccupation que nous devons tous avoir pour
l'économie du Québec. C'est que, à un moment donné,
il faut que l'appareil de production soit meilleur et qu'il amène de la
richesse additionnelle aux Québécois, aux personnes, comme vous
dites. Donc, c'est l'appareil économique au service des personnes et des
citoyens.
Mais l'élément neuf que je vois, c'est la haute
technologie en même temps que vous en appelez un autre secteur artisanal,
c'est-à-dire que, effectivement, il faut de la technologie de pointe. I!
faut des emplois industriels à haute valeur ajoutée - c'est le
jargon du moment, là - mais au-delà de ça, il y a aussi
des emplois qu'on peut créer dans des secteurs plus traditionnels qui
vont être plus productifs à l'aide de la technologie, qui peut
être une technologie courante, mais qu'on n'utilise pas parce qu'on en
est encore à des techniques de production très
éloignées. Moi, je crois beaucoup à cela, et, en
particulier pour le développement régional, il peut y avoir un
mélange des deux. Je pense qu'il ne faut pas être pour l'un ou
pour l'autre. Il faut être pour les deux. Il faut être pour les
deux et le plus possible aller dans cette direction. Je trouve que c'est la
première fois que cela est soulevé.
On me dit que le secteur primaire au Québec représente 3,5
% des emplois, mais ce qu'on a lu dans une littérature récente,
c'est que, au Japon, c'est deux fois, trois fois plus dans le secteur primaire.
Pourtant, ils n'ont pas les richesses naturelles que nous avons, ni en
forêt, ni en espace pour faire de l'agriculture. Il y a les
pêcheries qu'ils ont, et les richesses minières, moins encore.
Alors, ça, là, je crois qu'il y a une source d'emplois
considérable dans ce secteur et je pense que tout dépend de la
productivité qu'on va pouvoir y attacher. Je voulais souligner ce point
pour vous dire que je suis très content, puis, en plus, vous y
introduisez la dimension régionale.
Deuxièmement, je voudrais aborder la question de la
fiscalité. Ma collègue vous interrogera sur d'autres
éléments en ce qui concerne les politiques gouvernementales dans
les dépenses. Sur la fiscalité, le groupe qui vous a
précédés a bien indiqué la
régressivité des courbes de l'impôt qui a été
accentuée au cours des dernières années. Ce groupe a aussi
mentionné que la taxation est lourde pour les gens à faibles
revenus et les personnes, les citoyens de la classe moyenne. Le ministre des
Finances a augmenté ses taxes de 4 000 000 000 $ sur une base annuelle
au cours des dernières années, depuis 1989.
Alors, je comprends que la suggestion que vous faites. En tout cas,
votre proposition, c'est de dire: Les abris fiscaux, le moins possible, parce
que, en définitive, cela va retourner chez les mieux nantis. Tout pris,
sur une période de temps, c'est eux qui vont en profiter, donc aux
dépens de l'État. Deuxièmement, vous dites: Ralentissez
l'orientation qui a été prise d'augmenter la taxation, la
tarification pour revenir plutôt à l'impôt sur le revenu, ce
qui est conforme aux recommandations du groupe qui vous a
précédé. Cela implique, donc, que l'on revienne en
arrière sur les propositions qui ont été faites.
Et enfin, un élément que j'ai bien remarqué, c'est
que, en ce qui concerne les dépenses ou ce que vous appelez la
croissance effrénée des besoins, vous dites que là-dedans
il y a des décisions qui sont prises par opportunisme politique et des
décisions qui satisfont les intérêts privés. Vous
notez, au passage, un élément qui commence à ressortir
dans l'opinion publique. La loi sur l'ouverture des magasins le dimanche nous
apparaît un exemple en ce sens. Et si vous avez lu le dernier journal
Les Affaires, vous aurez pu y constater que maintenant la large
majorité des Québécois est contre l'ouverture des
commerces le dimanche. Donc, une évolution très sensible de
l'opinion publique qui va dans votre sens de ce que vous dites actuellement. Et
je pense qu'il faut le noter.
Je voudrais vous dire que, sur cette question, donc, en me
résumant, de la politique industrielle à deux plans - et je
suppose que vous n'en excluez pas d'autres, mais vous mettez le doigt sur deux
volets que je trouve particulièrement importants - appliquée au
plan régional aussi, je trouve ça très intéressant.
J'aimerais ça que vous explicitiez davantage, puis on reviendra sur la
fiscalité, par la suite, s'il reste quelques minutes.
M. Fournier (Pierre-André): M. le député, je
vous remercie d'avoir l'oeil sur le travail. Je viens d'un coin à la
basse-ville, Saint-Roch, où, lorsqu'on parle de sans-abri, ce n'est pas
sans abri fiscal, c'est sans-abri tout court. On s'aperçoit qu'on est
vraiment dans un autre monde. Et, moi, je suis heureux qu'on m'ait
demandé pour représenter les pauvres, les petits, ceux qui crient
à chaque jour, et j'en ai eu plusieurs encore aujourd'hui. C'est
vraiment un cri qui vient d'en bas et qui est difficile à entendre.
Entre autres, vous avez souligné, pour nous autres, l'aspect
artisanal. On a fermé les usines de chaussures, dans Saint-Roch,
beaucoup d'autres usines de gens qui peuvent, qui ont une très grande
intelligence et qui se manifestent manuellement. Je pense qu'il y a beaucoup de
gens qui veulent travailler et qui peuvent travailler, et ça devrait
être la priorité des priorités. Actuellement, ce que je
remarque, c'est que non seulement on a une pauvreté horizontale qui
s'agrandit, ça veut dire de plus en plus de gens qui sont sans emploi,
qui sont pauvres - chez nous, c'est la majorité de gens qui ont un
revenu en bas de 10 000 $ par année - mais en même temps ce que
j'appellerais une pauvreté verticale. C'est qu'on retrouve, dans un
même ménage, plusieurs phénomènes de
pauvreté: drogue, violence, décrochage scolaire. Tout cela va
demander aussi de l'aide à ces personnes.
Au niveau de l'emploi, je pense qu'il faut se dire qu'il y en a, de
l'argent. Nous avons au Québec les moyens de donner de l'argent, de
donner de l'emploi, dis-je, aux gens. Je pense que ça, ça
devrait... On devrait se dire: On a ce qu'il faut. Quand je regarde les
milliards qui sont dépensés ces mois-ci... Je respecte les gens.
Je pense que tout le monde a besoin de repos, mais il y a des milliards qui
sont dépensés dans le Sud. C'est ainsi. Je vais souvent au palais
de justice et j'ai participé à un procès où
ça nous coûtait, nous, à la fabrique, 1000 $ par jour.
Lorsqu'on pense aux frais, au niveau juridique... Je pense, entre autres,
à un procès qu'il y a eu avec la juge Ruffo où le
gouvernement était quasiment en procès avec lui-même. On en
arrive à des frais énormes. On a l'argent. On l'a. Comment faire
pour convaincre nos amis qu'ils ont le même estomac que les autres,
qu'ils ont besoin de dormir sur un lit comme les autres, qu'ils ont besoin d'un
peu de loisirs comme les autres, mais qu'ils n'ont pas besoin de gagner 20 fois
ce qu'un autre gagne?
Il y a des gens chez nous qui ont 600 $ par mois. La plupart des gens
chez nous ont 600 $ par mois. Or, beaucoup de gens chez nous, dans la province,
un grand nombre, ils ont ça par demi-journée. Ils
reçoivent 500 $, 600 $ par demi-journée ou en quelques heures.
Alors, je pense que ce n'est pas facile pour vous autres, je le sais, et on a
notre grande responsabilité au niveau de l'Église aussi. C'est
peut-être parce qu'on ne réussit pas toujours qu'on vient vous
voir pour dire: Bien, aidez-nous à convaincre nos gens qu'il faut
partager, sinon on se nuit tout le monde. Je pense qu'il y a un grand effort
à faire, mais au niveau de l'emploi d'abord, et au niveau artisanal. (17
h 50)
Le Président (M. Lemieux): M. le président
du Conseil du trésor.
M. Johnson: Oui, M. le Président.
J'ai remarqué, aux pages 10 et 11 de votre présentation,
que vous souhaitiez beaucoup plus de décentralisation des
activités gouvernementales et même, je dirais, une
rationalisation. Vous trouvez que le système lui-même crée
des pressions financières par la multiplicité des programmes, et
vous concluez presque que c'est la multiplicité des contrôles qui
vient augmenter les coûts.
Vous donnez un exemple très pertinent d'un organisme
communautaire qui est habitué dans son milieu, à cause de la
façon dont il est implanté, de faire affaire globalement avec les
problèmes des gens. Or, les normes gouvernementales, en
général, des programmes de subventions ciblent un projet ou une
activité. Ça demande, je présume - si vous voulez vous
exprimer là-dessus - un contrôle additionnel de la part d'un
groupe communautaire. Est-ce que ça distrait les énergies des
gens de s'impliquer directement avec la personne ou, enfin, avec les organismes
ou entreprises dans leur milieu avec lesquels ils veulent agir? Qu'est-ce que
vous reprochez le plus aux programmes gouvernementaux, à l'attitude, je
dirais, gouvernementale dans ces programmes de subventions qui viendrait
alourdir le fonctionnement d'un groupe communautaire? Ça, ça
m'intrigue beaucoup. Je suis convaincu qu'il y a beaucoup à faire de ce
côté-là, en laissant un peu plus la bride sur le cou, je
dirais, mais, en même temps, ce sont des fonds publics. Ce sont des fonds
publics, alors il y a une responsabilité de notre part de pouvoir
défendre chaque sou qui est dépensé. Est-ce que vous avez
des suggestions à faire pour assurer ce contrôle-là, qui
est minimal, en vous libérant un petit peu pour que vous fassiez votre
travail?
Mme Lagueux: Oui. Ce n'est pas le contrôle minimal qui nous
fatigue à l'intérieur de ça, c'est plutôt la
possibilité ou la manière d'avoir accès à ces
genres de programmes là. Bon. Par exemple, vous avez soulevé
l'exemple qui était proposé ici.
Je regarde par rapport à la santé mentale. Bon. Il y a eu
des cas en santé mentale, et, en particulier, à un moment
donné, dans une région, entre autres, on en était
arrivés à dire que ce qui était important, c'était
le répit pour les familles qui devaient supporter des personnes. Alors,
ce que ça a donné, c'est que, dans le fond, il y avait... Les
organismes qui existent, c'est souvent des organismes qui sont à petit
budget: 50 000 $, 60 000 $, 70 000 $ par année pour fonctionner avec une
ou deux permanentes, sauf que, finalement, ce que ça produisait, c'est
que, sans avoir la possibilité d'avoir plus, d'agrandir plus la
permanence, ça obligeait, dans le fond, pour accéder à ce
genre de programme là ou pour, dans le fond, participer à
l'effort collectif du répit dépannage, qu'une des deux
permanentes, par exemple, soit entièrement consacrée à la
gestion de ce programme-là sans que ça ne rajoute rien à
l'organisme, finaiement. C'est comme si ça déviait le principal
partenaire qu'on a pointé de sa fonction originale qui est, dans le
fond, de parfois donner du répit dépannage, parfois avoir
d'autres styles de support à d'autres genres de familles. Alors, c'est
un peu ça qui est dénoncé dans ça.
Je donnerais aussi un autre exemple au niveau de l'éducation
populaire, entre autres. Ça fait à peu près un an, un an
et demi qu'on dénonce un peu ou qu'on essaie de couper les budgets
d'éducation populaire autonome. Alors, en même temps qu'on dit
ça au ministère de l'Éducation, bien, on apprend que, par
exemple, le ministère de !a Justice, lui, de son côté,
annonce un programme d'éducation ou de sensibilisation de la population
à tel ou tel ou tel aspect et débloque des fonds pour ça.
Alors, là, on ne comprend pas très bien la logique qu'il y a en
arrière de ça, parce que... Finalement, ça veut dire quoi?
Ça veut dire qu'on va perdre à partir du ministère de
l'Éducation pour être obligés de se retourner ailleurs pour
aller justifier, dans le fond, pour un peu ia même chose. Alors, il y a
de ça aussi dans les remarques que nous formulons ici.
M. Johnson: là-dessus, je dirais que, dans le fond, vous
venez de prouver qu'il y en a une multiplicité de programmes de toutes
sortes qui existent dans tous les secteurs...
Mme Lagueux: Oui
M. Johnson: ...d'activité du gouvernement. Mme Lagueux:
Bien, c'est ça.
M. Johnson: Tout simplement, dans le cas qui nous
préoccupe, moi, j'ai toujours été frappé de voir
l'ampleur qu'avait prise l'idée originale d'éducation populaire
qui visait surtout l'alphabétisation des gens, afin qu'ils soient
minimale-ment formés pour se former davantage et avoir un emploi, etc.,
pour pouvoir fonctionner au moins dans la société. Ça a
été élargi à un point où... J'avais
soulevé ça. Ça avait fait un petit peu scandale
auprès du groupe communautaire en cause, mais on avait même
subventionné un voyage dans un pays d'Amérique latine pour que
quelqu'un aille prendre connaissance de la façon dont les soupes
populaires là-bas étaient organisées. Au point de vue
communautaire, ce n'est pas à négliger, mais ce que je dis, c'est
qu'à un moment donné il faut des priorités là
aussi. Et si on multiplie le genre de projets, on perd de vue les
priorités orginales.
Alors, dans ce sens-là, peut-être que vous pouvez
témoigner si vous trouvez que l'ordre de priorité des
différents programmes gouvernementaux est suffisamment clair. J'en ai
déduit que
non peut-être.
À l'égard des groupes communautaires, vous dites: On en a
besoin davantage auprès de notre organisme habituel qu'est le
ministère de l'Éducation. Là, il y a une rationalisation
pour concentrer sur l'alphabétisation incidemment, et vous dites:
Pendant ce temps-là, il y a d'autres ministères qui ont
peut-être d'autres vocations, qui ont également des sommes pour
les groupes communautaires. Mais un groupe communautaire a besoin de quoi, dans
le fond? Pour vous, si on vous demandait, si on devait rationaliser les
programmes d'aide aux groupes communautaires? Il y a le Soutien aux organismes
communautaires du ministère de la Santé, le SOC. Ça, c'est
vraiment au titre de la santé et du soutien social, je dirais
carrément, y compris le travail social, bénévole et tout.
À l'Éducation, on sait ce qu'il y a; à la Justice, il y a
autre chose, la sensibilisation à nos droits, etc. Si vous aviez des
choix à faire, par ordre de priorité, qu'est-ce que vous
choisiriez, vous?
Mme Lagueux: Je ne dirais pas ça dans ce sens-là,
je dirais ça autrement un peu.
M. Johnson: Oui.
Mme Lagueux: On cherche la collaboration des organismes
communautaires; c'est clair au niveau de la nouvelle loi sur la santé et
les services sociaux. Je ne sais pas si c'est aussi clairement exprimé
dans d'autres ministères, mais c'est clair à ce niveau-là.
Alors, je pense que ce qui est important, c'est le respect de l'approche
communautaire qu'on loue dans les discours, mais qui doit aussi être
respecté au niveau des programmes. Je ne pense pas que la part du budget
qui est utilisée pour soutenir l'ensemble des organismes communautaires
soit si grand, je dirais, dans la masse monétaire globale. Sur les 40
000 000 000 $ du budget gouvernemental, ce n'est pas très, très,
très, très énorme. Alors, je pense que ce qui est
important de respecter à l'intérieur, entre autres, c'est, je
dirais, l'approche, qui est souvent globale par rapport à un groupe, que
l'organisme communautaire fait dans l'exercice de sa mission ou de sa
fonction.
Je pense aussi que, au niveau de l'éducation populaire, c'est
entendu qu'il y a peut-être certaines activités qui sont
farfelues, mais quand on regarde l'ensemble des activités qui sont
proposées dans l'éducation populaire autonome, il y a les
activités d'alphabétisation, mais il y a aussi nombre
d'activités qui aident les personnes les plus marginalisées
d'abord et avant tout à, au minimum, se regrouper, se reconnaître
et être capables d'apprendre à s'informer sur leurs droits, pour
être capables de commencer une certaine forme de prise en charge. Avant
d'alphabétiser quelqu'un, il faut d'abord lui donner les moyens de se
rendre compte qu'il a besoin d'être alphabétisé, et
ça, l'éducation populaire autonome joue un grand rôle
à l'intérieur de ça. Elle n'a pas réussi à
100 %, mais je pense qu'il faut lui donner les moyens de poursuivre, parce que
je pense que c'est des groupes qui ont bien réussi.
M. Johnson: Oui, oui. Vous voyez, explicitement, vous avez
exprimé les priorités. Avant d'apprendre à quelqu'un
à lire et à écrire, il faut qu'il s'en rende compte. Donc,
un autre genre d'intervention.
Mme Lagueux: Bien, il faut aussi lui apprendre à
écrire.
M. Johnson: Oui. Il y a donc un autre genre d'intervention, y
compris... Puis ce n'est pas farfelu pour autant. C'est juste quand les
ressources sont limitées, on essaie de voir avec un programme ce qu'on
peut faire de mieux. L'organisation d'une soupe populaire dans une cuisine
communautaire, ça demeure important. C'est même primordial dans
certains quartiers, on le sait pertinemment. C'est une question de savoir dans
quel ordre - on a 40 000 000 000 $, et il y a 60 000 000 $ d'aide aux groupes
communautaires au ministère de la Santé - on alloue toutes ces
ressources-là, qui ne sont évidemment pas suffisantes, tout le
monde l'a dit, là. Mais, en attendant, c'est les seules qu'il y a. On ne
peut pas en inventer d'autres.
Alors, je vous remercie de votre témoignage.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Taillon. (18 heures)
Mme Marois: Oui. Merci, M. le Président.
J'ai le goût de réagir à l'exemple que donnait le
président du Conseil du trésor. On pourrait aussi prendre
l'exemple d'une entreprise qui envoie ses employés en congrès
quelque part dans un endroit de villégiature dans le Sud et qui va le
déduire complètement de son revenu comme une dépense, ce
qui sera vrai aussi, mais toute proportion gardée, probablement que
ça aura coûté pas mal plus cher à l'État.
Ça ne justifie pas nécessairement certaines choses, mais je pense
que tout est relatif dans notre société.
Merci, M. le Président, et je vous souhaite la bienvenue à
mon tour. Ça me fait plaisir de vous saluer. Je trouve votre
mémoire très rafraîchissant dans le sens où il remet
en lumière les valeurs fondamentales d'une société.
Je pense que ce qu'il faut se dire, c'est que le fondement même de
nos sociétés modernes, c'est que nous puissions nous donner les
moyens pour assurer une solidarité minimale qui va faire que quelqu'un
va se nourrir, se loger, s'habiller décemment et, dans nos
sociétés modernes, être capable d'être formé,
informé et de vivre en santé. Je pense que si on passe à
côté de cette base, surtout dans des pays comme les
nôtres,
qui sont quand même, et malgré les difficultés
auxquelles on est confrontés, des pays riches, je pense qu'on doit
être blâmé pour cela si on ne réussit pas à
atteindre ces objectifs-là. Donc, dans ce sens-là, ça
ramène très clairement à la base les valeurs sur
lesquelles ont doit s'appuyer et qui devraient justifier nos investissements,
justifier nos choix politiques ou nos choix économiques.
Juste sur la question de la fiscalité et des abris fiscaux, c'est
intéressant, vous dites: II faudrait pouvoir regarder ce que ça a
comme impact. Est-ce que je peux vous dire que, nous, comme membres de la
commission, à l'intérieur des documents qui nous ont
été présentés et des documents que nous
possédons par le ministère des Finances, nous n'avons pas une
comparaison, nous n'avons pas de données en ce qui a trait à
l'effet de tel ou tel ou tel abri fiscal quant à l'impact sur le budget
de l'État dans le sens où c'est un manque à gagner. C'est
de l'argent qu'il ne reçoit pas. Donc, quand on parle de transparence,
et vous en parlez, ça aurait pu commencer là aussi: que l'on
puisse avoir, d'une façon systématique, une connaissance de cela,
de telle sorte qu'on fasse les vraies discussions et qu'on propose les vrais
choix. Je pense que là on regarde les choix plutôt du
côté des dépenses.
Sur l'éducation populaire autonome, je veux revenir
là-dessus. J'ai longuement oeuvre dans ces milieux-là,
travaillé au niveau de l'action sociale, de l'animation sociale et de
l'action populaire, et ça dépasse l'alphabétisation.
Ça peut vouloir dire apprendre à faire un budget, ça peut
vouloir dire apprendre à écrire un petit curriculum minimal pour
savoir comment se présenter chez un employeur. Je suis certaine que,
quand je dis ça, je ne me trompe pas pour avoir longtemps
travaillé dans ce type d'organisation là. Quand on se dit que
l'éducation et la formation pour que des politiques d'emploi soient
efficaces, ça passe par là, bien on va regarder en quoi le
discours du gouvernement correspond à son action. quand on regarde du
côté de l'éducation populaire, et j'ai pris la peine de
faire relever les budgets de 1992-1993 et de 1991-1992, les dépenses,
les budgets de dépenses, on a diminué de 3 900 000 $
l'éducation populaire autonome en 1992-1993, et, en 1991-1992, on
parlait d'une baisse de 7,9 %. alors, l'éducation et les politiques de
formation, c'est à un niveau de cégep, d'université, c'est
au niveau de l'obtention d'un diplôme au niveau secondaire, mais c'est la
base qui va faire en sorte que les gens puissent même y aller chercher
leur diplôme de niveau secondaire. or, elle n'est même pas
là, parce que, effectivement, on coupe là où on a l'effet
de levier le plus important au moindre coût, en termes
d'investissements.
Cela étant dit, je veux revenir sur vos propositions et sur les
remarques que vous faites, parce que je crains un petit peu qu'on arrive
à une oeuvre de désolidarisation entre les groupes, entre les
générations par l'opération qui est menée ici.
J'aimerais que vous me parliez un petit peu des expériences que vous
vivez, justement, avec les groupes populaires, les groupes d'action
communautaire, qui, soit dit en passant, ont à peu près droit
à quatre millièmes du budget du gouvernement du Québec.
Parce que j'ai essayé de trouver une proportion qui pouvait nous dire un
peu ce que ça pouvait signifier, et j'inclus les organismes
bénévoles qui reçoivent de l'aide de la part du
ministère de la Santé et des Services sociaux et
l'éducation populaire. J'aimerais que vous me parliez un petit peu de ce
qui se fait dans ces groupes et de l'impact de l'action des
collectivités, de l'action communautaire dans une perspective,
justement, de resituer les personnes dans des filières qui vont leur
permettre d'être des citoyens actifs dans nos sociétés en
termes de pouvoir accéder à des emplois. Parce qu'une politique
d'emploi, ça s'appuie d'abord - et les pays qui réussissent ont
tous compris ça - sur une politique de formation qui investit
énormément tant dans l'éducation populaire que dans les
autres niveaux.
Alors, j'aimerais ça que vous m'en parliez un petit peu de par
l'expérience que vous vivez. Vous parliez de votre quartier dans
Saint-Roch; vous êtes sûrement en contact avec des organismes
communautaires qui travaillent à ce niveau-là.
M. Fournier: Dans les groupes populaires, une chose qu'on peut
remarquer, c'est que, en général, si je regarde chez nous, je
pense aux comités de citoyens, par exemple, ces gens-là, il va y
avoir un ou deux permanents qui sont entourés d'une foule de
bénévoles. Et ça, ça ne sort dans aucun livre,
ça ne sort nulle part. Ils vont aider des centaines de personnes
régulièrement, mais ça ne sort nulle part. Dans plusieurs
autres groupes également, c'est la même chose. Je pense que, comme
vous le disiez aussi, c'est des sommes minimales. Combien de groupes
fonctionnent avec des budgets de 50 000 $, même pas parfois.
Moi, je fais partie d'un groupe qui reçoit de l'aide. On a un
demi permanent, mais on est une vingtaine qui nous réunissons à
chaque mois. En plus, on est en contact avec beaucoup d'autres personnes, mais
ça nous suffit, pour nous autres, alors que d'autres groupes aussi ont
70 000 $, mais ce n'est même pas le salaire de bien des gens qui
travaillent actuellement. On a vu encore dans les journaux dernièrement
des gens qui protestent parce que, avec 80 000 $, ils n'arrivent pas dans leur
salaire, eux autres. Évidemment, chez nous, ça fait grincer des
dents à bien du monde, quand ils ont 10 000 $ par année et que
l'autre fait des manifestations parce que, hum! 85 000 S, s'il avait 100 000 $,
il me semble que là il arriverait, mais là il n'arrive pas. C'est
ce qu'on vit dans notre société.
Les groupes populaires, je pense qu'il s'agit de vérifier un
petit peu si ces gens-là ont une base qu'on appelle, mais c'est vraiment
de quoi à sauvegarder, c'est une richesse, et ça aussi, ça
fait partie de notre culture de chez nous. On a parlé tout à
l'heure de l'aide au niveau social, services de santé, mais les groupes
populaires font partie de notre culture et ils font énormément.
La basse-ville ne serait pas ce qu'elle est aujourd'hui sans les groupes
populaires.
Mme Marois: Oui...
M. Théberge: J'ajouterais un mot. Toutes les mesures
sociales... Le bien-être social en particulier, c'est un filet,
l'assurance-chômage, c'est un filet de sécurité
économique, c'est un filet pour la survie économique de la
personne. Beaucoup de groupes populaires jouent le rôle, je dirais, d'un
filet de sécurité humain, social, de solidarité, pour
éviter que la personne se retrouve toute seule dans son coin avec ses
quelque 600 $ ou 800 $, selon...
C'est une donnée, je crois, qui coûte relativement peu cher
à l'Etat pour procurer ce filet de sécurité, de
solidarité humaine qui se retrouve dans toutes sortes de petits noyaux,
qui joue un rôle important. On espère actuellement pouvoir faire
faire une étude par l'Institut québécois de recherche sur
la culture concernant un centre de bénévolat sur la rive sud,
ici, en face, à Lévis, qui est installé depuis 20 ans
cette année. C'est de mesurer ce que ça peut vouloir dire, un
groupe de bénévoles comme celui-là, avec tous les autres
petits groupes qu'ils ont engendrés depuis 20 ans, au niveau de la
solidarité sociale, de la sécurité de la personne qui
vient s'ajouter, encore une fois, aux filets de sécurité
financiers, qui sont, bien sûr, fondamentaux. C'est l'observation que
j'ajouterais.
Mme Marois: Merci.
Le Président (M. Lemieux): Alors, merci, Mme la
députée de Taillon.
Est-ce que vous avez d'autres... Non? Alors, merci, M. le
président du Conseil du trésor.
Nous allons suspendre nos travaux à 20 heures pour entendre
l'Association de l'amusement du Québec.
Alors, je vous remercie de votre participation à cette commission
parlementaire, et, dès 20 heures, je rendrai la décision
relativement à la motion qu'a déposée le
député de Labelle. Remarquez, M. le député de
Labelle, que la décision est prête. Je l'ai rédigée.
Mais, eu égard au fait que nous avons déjà 10 minutes de
retard, en arrivant ce soir à 20 heures je pourrai rendre cette
décision.
Alors, nous suspendons nos travaux à ce soir, 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 10)
(Reprise à 20 h 2)
Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de
l'administration reprend ses travaux pour entendre ce soir, à 20 heures,
l'Association de l'amusement du Québec.
Décision du président sur la
recevabilité de la motion
Mais permettez-moi préalablement de rendre une décision
relativement à la motion du député de Labelle, qui se lit
comme suit: «Notre mandat est une consultation générale qui
nous oblige à une démarche particulière, en vertu des
articles 167 et suivants du règlement, à un processus qui est
défini dans le cadre d'un mandat de l'Assemblée nationale du 2
décembre 1992 qui dit que la commission du budget et de l'administration
procède à une consultation générale sur le
financement des services publics au Québec et tienne des auditions
publiques à compter du 2 février 1993 afin d'examiner les
orientations à privilégier à court terme et à moyen
terme, tant en ce qui a trait au niveau et à l'évolution des
dépenses gouvernementales, de la fiscalité, du déficit et
des besoins financiers et de la dette. «Les articles 167 et 168 nous
donnent aussi la façon dont cette consultation générale
doit s'effectuer: la prise de connaissance des mémoires en séance
de travail, le choix de tenir des auditions publiques, le choix de qui elle
entendra, la durée totale de l'audition, de l'exposé et des
échanges avec la commission. L'article 175 de notre règlement
permet effectivement l'utilisation de la motion pour dépôt d'un
rapport intérimaire; quel doit être l'objet de cette motion pour
dépôt d'un rapport intérimaire? «En date du 8
novembre 1988, une décision a été rendue par le
président de la commission de l'époque, M. Marcel Parent, qui
nous disait que "la motion doit avoir pour objet d'obtenir de
l'Assemblée, soit des moyens supplémentaires pour accomplir le
mandat confié à la commission, soit des précisions
supplémentaires sur ce mandat". «L'article 175 se doit
d'être interprété restrictivement; il ne doit pas
élargir le débat ni modifier l'orientation des travaux tels que
définis par le mandat de l'Assemblée. L'article 175 ne doit pas
être utilisé comme moyen d'instaurer, d'initier un mandat
similaire ou de même nature que le mandat initial. Il doit être un
moyen permanent de réaliser d'une façon exceptionnelle le mandat
qui nous a été confié par l'Assemblée nationale.
«Cette motion permet-elle de réaliser d'une façon
exceptionnelle le mandat confié? Quel en est le contenu? Elle
prévoit, à la lecture de la motion qui a été
déposée par le député de Labelle, deux
séances supplémentaires. Dans un point a, d'entendre les experts
sur l'impact du
déséquilibre des finances publiques du gouvernement
fédéral, sur celles du Québec, ainsi que la question des
chevauchements et dédoublements administratifs; dans un point 2,
d'interroger les membres de l'Exécutif. En second point, b, un
dépôt de document traitant du déroulement et du
chevauchement administratif. «L'application de l'article 175 est-il le
seul moyen prévu au règlement pour obtenir les moyens
supplémentaires ou précisions supplémentaires
nécessaires au bon cheminement de ce mandat? Je ne le crois pas. La
commission peut obtenir ici, dans le cadre de l'article 149,
c'est-à-dire de sa propre initiative, l'autorité utile, si elle
le juge nécessaire, d'entendre les experts sur l'impact du
déséquilibre des finances du gouvernement fédéral
et sur celles du Québec. Il en est de même pour entendre des
membres de l'Exécutif, où une procédure bien
particulière est instaurée et instituée par l'article 164
et suivants du Code. Pour ce qui est du dépôt du document, encore
là, la commission a d'autres moyens; que l'on songe aux articles 51 et
53 du règlement, et même une motion permet ici le
dépôt d'un document. «Donc, la commission dispose de moyens
autres que supplémentaires pour réaliser le mandat que
l'Assemblée nationale lui a confié. Si la commission a
déjà ces moyens qu'elle peut faire, elle n'a donc pas besoin de
l'article 175 qui prévoit par motion le dépôt d'un rapport
intérimaire. L'article 175 se doit, comme je le disais tout à
l'heure, d'être interprété très restrictivement et
se veut une mesure exceptionnelle non prévue aux règlements.
«Subsidiairement, selon Geoffrion, (note à l'article 438 du tome
de Geoffrion), la présentation par la commission d'un rapport
intérimaire vise à obtenir des instructions additionnelles de
l'Assemblée permettant à la commission de poursuivre son travail.
L'adoption d'une telle motion implique que la commission cesse ses travaux et
entende la réponse de la Chambre. Il n'est pas possible de faire rapport
à l'Assemblée avant la reprise de la session, tandis que la
commission a prévu un calendrier des auditions, tel qu'en fait foi ce
mandat de l'Assemblée, la conduisant jusqu'au jeudi 18 février
1993. «De plus, pour la réalisation des faits visés, il ne
semble pas utile de faire une rapport intérimaire. Comme je le
mentionnais tout à l'heure, en effet, la motion vise deux cas: la tenue
de deux séances additionnelles demande la production de documents. Ni
l'un ni l'autre ne requiert la production d'un rapport intérimaire et,
de ce fait, l'interruption prématurée de nos travaux. Le premier
objet peut être accompli en vertu des articles 167 ou 76 selon le cas,
alors que la demande de production de documents peut être faite
également aux fins de l'organisation même des travaux de cette
commission. «Pour toutes ces raisons, considérant qu'il n'est pas
nécessaire de mettre fin à nos travaux pour accomplir ces choses
et que l'article 175 doit recevoir une interprétation qui est
restrictive, je déclare la motion irrecevable.»
Merci. Maintenant, je demanderais, s'il vous plaît, aux
responsables du groupe Association de l'amusement du Québec...
M. Léonard: M. le Président... Le
Président (M. Lemieux): Oui.
M. Léonard: Si je comprends, votre réponse est
enregistrée au Journal des débats. Donc, nous pourrons en
prendre connaissance et nous pourrons en revenir au terme d'autres articles
pour présenter une motion à l'effet de continuer nos travaux. Je
veux simplement souligner que notre intention n'était pas
d'arrêter les auditions, mais, à la suite de la fin des auditions,
de demander deux ou trois séances additionnelles pour les objets qui
sont mentionnés à la motion.
Le Président (M. Lemieux): J'en suis conscient, M. le
député de Labelle, mais, dans le texte de cette argumentation,
vous êtes bien conscient que j'emploie l'expression, dans un
deuxième temps, «subsidiairement au premier
énoncé», relativement au jugement que j'ai rendu. Alors, je
me dois maintenant... Comme vous venez si bien de le mentionner, le tout est
enregistré sur les galées. Par la suite, ça ne nous
empêche pas de revenir avec d'autres motions, effectivement; on verra
quelle en sera la nature.
M. Léonard: Très bien. Nous reviendrons.
Le Président (M. Lemieux): Maintenant, je demanderais aux
membres de l'Association de l'amusement du Québec... Je vous remercie
d'avoir pris place à la table des témoins. Dans un premier temps,
je demanderais au porte-parole de ce groupe de bien vouloir s'identifier,
d'identifier les gens qui l'accompagnent, et permettez-moi de vous faire
état de la procédure parlementaire.
Vous disposez d'une heure pour la présentation de votre
mémoire, dont 20 minutes pour votre exposé. Suivra un
échange entre les deux formations politiques pour une durée
globale de 40 minutes: 20 minutes pour le parti ministériel et 20
minutes pour le groupe de l'Opposition. Alors, je vous écoute.
Auditions (suite) Association de l'amusement du
Québec
M. Song (Henley): Je suis Henley Song, vice-président de
l'Association de l'amusement du Québec. À ma gauche, M.
Jacques-André Fortin, administrateur de l'Association de l'amusement du
Québec, et, à ma droite, M. Luc Marcoux,
administrateur de l'Association de l'amusement du Québec.
En tant que représentant de l'Association de l'amusement du
Québec, nous sommes très heureux d'être reçus par
cette commission parlementaire portant sur le financement des services publics.
Nous tenons à féliciter le gouvernement pour cette initiative et
pour son ouverture d'esprit indispensable dans son écoute sur les points
de vue les plus diversifiés qui se retrouvent énoncés ici.
En voulant cerner le problème financier du gouvernement, les
intervenants viennent discuter de leurs propres préoccupations. Notre
objectif est d'apporter une proposition de solution tant pour notre industrie
que pour le gouvernement. Nous voilà donc assis autour de cette table
pour discuter de la façon la plus ouverte possible du secteur
précis de l'amusement, qui connaît ses limites et ses
aléas. (20 h 10)
L'Association de l'amusement du Québec est un organisme à
but non lucratif qui a été constitué le 14 avril 1986.
Elle a aussi regroupé des gens d'une industrie fonctionnant depuis plus
de 50 ans. L'Association réunit actuellement plus de 200 membres,
exploitants et commerçants répartis à travers le
Québec.
L'Association de l'amusement du Québec s'est donné pour
but, d'une part, de défendre et de promouvoir les intérêts
de chacun de ses membres et, d'autre part, d'établir et de faire
respecter des règles de conduite en vue d'assurer à l'industrie
un environnement sain et un développement harmonieux.
L'Association est entièrement financée par ses membres qui
lui versent chaque année une cotisation votée lors de son
assemblée générale annuelle. La Régie des loteries
du Québec a décidé de ne plus émettre de permis
pour les appareils de vidéo-loterie suite à la décision de
la Cour suprême en octobre 1991. En n'émettant plus de permis, la
Régie a secoué encore une fois l'industrie. La
vidéo-loterie représente une source majeure de revenus pour les
exploitants dans l'industrie de l'amusement, et cette décision nous a
amenés à opérer notre gagne-pain dans un vide juridique.
Nous sommes ainsi forcés à gérer nos entreprises dans
l'insécurité totale.
Les effets négatifs de cette décision se sont
multipliés, car le gouvernement n'a pas instauré de nouvel
encadrement du secteur pour remplacer celui qu'il venait d'abolir. Un des
effets directs a été de réduire les revenus de la
Régie des loteries. Effectivement, cette situation a occasionné
un manque à gagner important pour le gouvernement du Québec. En
décidant de ne plus émettre de permis, la Régie
renonçait par le fait même à quelque 14 000 000 $ de
revenus, et ce, seulement pour cette année financière.
Le défi majeur que doit relever l'industrie de l'amusement est
des plus orthodoxes: parvenir à opérer la vidéo-loterie
dans la légalité en payant les redevances qui sont dues au
gouver- nement. Les décisions politiques et juridiques qui ont
été prises au cours des dernières années ont
placé beaucoup d'intervenants dans l'embarras, puisqu'elles ont
occasionné une perte de contrôle pour le gouvernement, le milieu
policier et l'Association elle-même. La situation est telle que de
nombreux membres se demandent s'ils pourront continuer à gagner
décemment leur vie dans le domaine de l'amusement. Ils sentent leur
avenir menacé.
Le fait que nous soyons obligés de défendre la gestion de
la vidéo-loterie revêt quelque chose d'illogique. Au moment
où ces appareils ont fait leur percée au Québec, à
la fin des années 1970, les exploitants ne voulaient pas de
vidéo-loteries. Alerté par tous les effets négatifs que ce
genre d'activité était en mesure d'entraîner, le
gouvernement a décidé quand même d'ouvrir la porte à
la vidéo-loterie en la réglementant en 1979; la catégorie
A, vidéo-loterie, était instituée par la Régie des
loteries du Québec. cette réglementation a profondément
modifié les enjeux de notre industrie. après de nombreuses pertes
et hésitations dans l'industrie de l'amusement du québec, le
milieu existant n'a pas eu d'autre choix que d'investir des millions pour
l'implantation de la vidéo-loterie au détriment des appareils
d'amusement déjà en fonction au québec. la
vidéo-loterie représente maintenant plus de 75 % de son chiffre
d'affaires.
Aujourd'hui, le gouvernement se demande si l'argent
récolté par la vidéo-loterie est digne d'enrichir les
fonds publics. La récession qui sévit au Québec comme
ailleurs, avec un taux de chômage qui côtoie les 14 %, oblige le
gouvernement à considérer la portée de chacune de ses
décisions qui impliquent des pertes d'emploi. Le gouvernement ne peut
pas détruire un secteur privé de l'économie alors qu'il
lui est possible de contribuer à lui redonner toute sa
vitalité.
Nous trouvons, au Québec, une industrie de l'amusement qui compte
une dizaine de manufacturiers, près de 30 commerçants et des
centaines d'exploitants qui desservent des milliers d'établissements
à travers la province. Considérée dans son ensemble,
l'industrie de l'amusement regroupe près de 10 000 emplois directs qui
sont générés tant dans le secteur manufacturier que celui
des exploitants. Puisque le gouvernement a cautionné l'industrie de
l'amusement pendant une douzaine d'années, certaines entreprises
comptent maintenant plus de 100 employés et quelques-unes ont fait
preuve de suffisamment de dynamisme pour exporter et même pour
s'implanter dans d'autres pays.
Nous pouvons faire valoir aisément les effets pécuniaires
positifs de la vidéo-loterie, mais nous savons que nous sommes devant un
gouvernement qui doit considérer tous les aspects sociologiques du
milieu.
Les problèmes sociologiques des citoyens représentent des
coûts importants pour un gouvernement, et c'est de cette façon
ouverte
que l'association entend aborder cet aspect. Deux chercheurs en
économie, Gabrielle A. Brenner, de l'École des hautes
études commerciales, et Reu-ven Brenner, associé au CRDE de
l'Université de Montréal et au McGill's School of Management, ont
publié un livre intitulé «Gambling and Speculation»
dans lequel ils infirment la perception négative qui s'est
développée concernant le jeu et les joueurs.
Tout d'abord, selon eux, il n'est pas possible de faire un lien direct
entre le crime organisé et l'amusement. Lorsque ce Nen existe, il est
imputable à une réglementation inappropriée du secteur. En
outre, des objections sociales se posent concernant les pauvres gens qui
dépensent beaucoup d'argent dans l'amusement sans obtenir de biens en
retour. Toujours selon les Brenner, ces gens sont avant tout des payeurs de
taxes indirectes volontaires. La proportion de gens qui dépensent
presque tout leur argent dans la loterie ou dans l'amusement est marginale.
D'autre part, la presse fait grandement état des cas
pathologiques de personnes qui sont victimes de l'amusement. Les joueurs
compulsifs ou maladifs existent; ils constituent toutefois une minorité.
Nous nous entendons pour dire, nous aussi, que chaque cas est un cas de trop.
Il est toutefois plus intéressant pour la presse de présenter les
cas les plus pathétiques plutôt que de parler des milliers de gens
qui se divertissent avec tous les jeux qui sont mis à leur disposition.
N'oublions pas, les gens aiment jouer et beaucoup en ont besoin pour conserver
leur équilibre mental.
Par ses décisions concernant la loterie et les casinos, le
gouvernement a admis que l'amusement n'est pas aussi néfaste pour la
société que certains sont tentés de le croire.
L'Association de l'amusement exprime le besoin d'une réglementation
assurant un contrôle efficace pour contrer au maximum les
éléments sociologiques négatifs de l'amusement.
Le 15 décembre 1992, le gouvernement faisait l'annonce officielle
de l'implantation de deux uasinos au Québec. Il est maintenant connu que
1200 appareils de vidéo-loterie seront mis en place dans le casino de
Montréal. La décision du gouvernement sur la
réglementation des appareils de vidéo-loterie dans les casinos
devra trouver son pendant pour les appareils fonctionnant dans d'autres sites.
Nous retenons deux points majeurs de cette annonce qui supporte le
scénario de la gestion par le partenaire État-privé.
Premièrement, les retombées économiques majeures
des activités d'amusement des Québécois devant
bénéficier à la collectivité
québécoise plutôt qu'aux États ou aux provinces
environnantes. Nous sommes persuadés qu'une bonne implantation des
appareils de vidéo-loterie gérée par les partenaires
État-privé est en mesure de bonifier également cet aspect
économique, l'argent des Québécois et des touristes
contri- buant à faire fructifier une industrie et des emplois au
Québec.
Le deuxième point qui a attiré notre attention est le
souci du gouvernement de contrôler adéquatement les impacts
sociaux et d'assurer une sécurité publique sur les
activités d'amusement. Du moment que le gouvernement concède
qu'il est possible de créer un cadre réglementaire
sécuritaire pour la vidéo-loterie dans les casinos, nous
concluons que ce même cadre peut être aussi efficace pour la
vidéo-loterie gérée par les partenaires
État-privé.
La vidéo-loterie gérée par le secteur privé
qui fonctionne dans un vide juridique depuis si longtemps devra connaître
son sort dans les mois qui viennent. Le gouvernement considère trois
scénarios sur lesquels nous exposons notre point de vue. Le premier,
c'est la saisie et l'abolition complète de la vidéo-loîerie
privée. Ce scénario vise à saisir tous les appareils de
vidéo-loterie qui fonctionnent au Québec et à interdire
toute exploitation de cette forme d'amusement.
En plus de constituer une opération fort onéreuse pour les
forces policières, cette option ne représente pas une
façon efficace de contrôler rapidement la vidéo-loterie
à !a grandeur du territoire québécois. La saisie et
l'interdiction de la vidéo-loterie occasionnerait
systématiquement la création d'une zone noire qui est non
souhaitable, tant pour les contrôleurs de la Régie des loteries,
les corps policiers, que le milieu de l'amusement. Les coûts
socio-économiques risquent d'être très élevés
pour les exploitants actuels et pour le gouvernement. (20 h 20)
Deuxièmement, nationalisation de la vidéo-loterie par
Loto-Québec. Par cette option, le gouvernement contrôlerait tous
les terminaux et tous les appareils de vidéo-loterie au Québec,
en ne laissant aucune place au secteur privé. Nous sommes devant un
scénario où l'État devient un compétiteur du
domaine privé en voulant exploiter lui-même les forces d'un
marché.
Un élément important de ce scénario est
l'engagement de dépenses pour le gouvernement. En plus d'impliquer des
dépenses pour l'implantation d'un système de vidéo-loterie
national, le gouvernement devra prévoir un engagement financier
considérable de plusieurs millions pour la formation de techniciens et
pour le fonctionnement et l'entretien de ce système: réparation,
transport, nettoyage, etc.
Les exploitants actuels des appareils de vidéo-loterie
connaissent très bien les détails de ce métier et sont les
mieux placés pour gérer le personnel et régler les
problèmes inhérents à ce secteur d'activité,
d'autant plus que nous assistons présentement à une tendance
internationale de privatisation plutôt que de nationalisation.
Le troisième, ce serait la gestion des appareils de
vidéo-loterie par les partenaires État-privé. Par cette
option, le gouvernement gère de façon centrale les terminaux pour
les
appareils d'amusement et le secteur privé assure l'exploitation
des appareils. Cette situation devient tout à fait plausible dans la
perspective où le secteur privé est contrôlé de
façon aussi stricte que le seront les casinos. Tout le domaine de la
vidéo-loterie étant géré dans une loi-cadre; c'est
ce troisième scénario qui, à tous points de vue,
représente la solution idéale pour les deux parties, le
gouvernement et l'industrie.
Nous croyons que le rôle de l'Association de l'amusement du
Québec est primordial dans ce scénario. Nous sommes en mesure
d'édicter des règles d'éthique qui devront être
suivies par nos membres. Nous serions, nous aussi, des brigadiers efficaces du
système supportant le travail des contrôleurs gouvernementaux. En
attribuant une responsabilité financière et pénale
à l'exploitant, le gouvernement assure un autocontrôle dans le
milieu qui est le plus efficace que bien des mesures coercitives. Ce
scénario demande très peu d'engagements financiers venant du
gouvernement; il s'agit de réaménager les ressources humaines
à la Régie des loteries et à investir pour l'implantation
des terminaux centraux.
L'industrie de l'amusement, qui a développé au cours des
années le secteur de la vidéo-loterie, a acquis une expertise de
toute première valeur, fruit de bien des essais et de bien des erreurs.
Les exploitants ont su créer d'excellents réseaux de distribution
et de collection depuis fort longtemps dans le Québec, tout en
développant des relations d'affaires fructueuses et de confiance avec
les établissements qu'ils desservent.
N'oublions pas également que la majorité des exploitants
sont propriétaires de leurs appareils de vidéo-loterie, ainsi que
de tout l'équipement d'entretien requis pour les faire fonctionner. Ce
sont là des investissements importants qui pourraient être mis
à la disposition du partenaire, en l'occurrence, le gouvernement.
Monsieur...
M. Fortin (Jacques-André): Oui. L'Association de
l'amusement du Québec recommande au gouvernement du Québec
d'implanter le scénario partenaires État-privé. Nous
réitérons les avantages de ce choix: élargissement de
l'assiette fiscale pour le gouvernement; Investissements mineurs pour le
gouvernement; utilisation d'une expertise du secteur privé;
vitalité d'une industrie déjà en place; contrôle du
gouvernement sur le secteur avec l'aide du privé; développement
d'un nouveau secteur manufacturier; maintien de milliers d'emplois.
Les problèmes sociologiques appréhendés par la
légalisation de l'amusement sont moindres lorsque le gouvernement assure
un bon contrôle du secteur. La pire situation pour le gouvernement est
celle qui prévaut actuellement. L'option partenaires
État-privé est en mesure de concilier les objectifs moraux et
financiers du gouverne- ment.
Chaque personne qui est le moindrement concernée par la
vidéo-loterie fait naturellement référence au
modèle du Nouveau-Brunswick, qui favorise la gestion partenaires
État-privé. L'Association de l'amusement du Québec fait
confiance à ce modèle d'implantation qui a su conserver la
vitalité du secteur privé et rapporte encore aujourd'hui des
fonds importants au gouvernement. De plus, faire référence
à un modèle existant, qui est près de nous, nous permet de
le bonifier et d'éviter les problèmes qu'ils ont dû
régler en cours de route.
D'autres expériences d'implantation de vidéo-loterie par
les partenaires État-privé se sont avérées
également très positives. Susan Walker, directrice executive de
la loterie au Dakota du Sud, affirmait que l'implantation de la
vidéo-loterie a été un réel succès
financier. Après un an d'opération, les revenus réels
dépassaient les prévisions de 2 000 000$. «The reason why
it is successful is that we have invited private sector participation in the
ownership, marketing and servicing of this product, and it has worked extremely
well.»
Le gouvernement du Québec pourrait établir sa
réglementation selon les principes qu'a appliqués le
Nouveau-Brunswick. Premièrement, le gouvernement développe les
terminaux et établit toute la réglementation pour leur
application; deuxièmement, le gouvernement fait les investigations pour
approuver les commerçants, les exploitants et les établissements.
Le gouvernement accrédite les exploitants, le gouvernement
accrédite les commerçants, le gouvernement approuve les
établissements, le gouvernement approuve les appareils de
vidéo-loterie. Troisièmement, le gouvernement approuve tout le
mouvement ou les changements concernant la vidéo-loterie.
C'est donc dire que le gouvernement peut compter sur l'appui du milieu
pour l'implantation de ce scénario. C'est une expérience que
l'Association est prête à vivre et un défi qu'elle a le
goût de relever.
Le coût d'implantation de ce système nécessite une
mise de fonds gouvernementale. Mais encore, il ne s'agit pas vraiment
d'implantation puisqu'il suffit au gouvernement d'établir une formule
adéquate pour une industrie qui fonctionne déjà.
Toujours en se fiant à certains modèles déjà
établis au Canada et en tenant compte des taxes qui se sont
ajoutées depuis ces implantations, c'est-à-dire TPS et TVQ, les
revenus directs provenant de ces machines pourraient être divisés
ainsi: 25 % au gouvernement, 45 % à l'exploitant, 30 % à
l'établissement.
En gardant les mêmes proportions par rapport à la politique
pour le nombre d'appareils au Québec que dans les Maritimes, là
où le nombre a été limité pour assurer un bon
contrôle, le Québec a un potentiel de revenus de
100 000 000 $ par année. À ce montant s'ajoutent l'argent
versé pour la TPS, l'argent versé pour la TVQ, l'impôt
provincial sur le revenu, l'impôt fédéral.
Le gouvernement doit nécessairement considérer l'impact
économique d'une nouvelle implantation ainsi que toutes les
retombées indirectes: construction, embauche, etc. Les exploitants
devront injecter des millions de dollars dans l'économie
québécoise. Seulement pour l'acquisition d'un nouveau
système, il faut calculer a peu près 175 000 000$.
Le gouvernement a-t-il les moyens de ne pas considérer ces sommes
d'argent injectées par le privé, surtout lorsqu'il est
assuré de contrôler la situation? Les exploitants qui investiront
plusieurs centaines de milliers de dollars, sinon des millions, dans l'achat
d'appareils ne sauraient sous aucune considération tolérer
l'existence d'un marché parallèle, car ils ont à
protéger leurs investissements et leurs revenus. Jamais le gouvernement
ne saura égaler l'effacité de cette brigade pour la surveillance
et l'élimination optimale de la zone grise.
Le Québec ne fait pas cavalier seul dans les décisions
qu'il doit prendre sur la vidéo-loterie; des États
américains et des provinces canadiennes sont pris avec les mêmes
questions. Pour ceux qui ont déjà légalisé la
vidéo-loterie, des études ont démontré que le fait
de conserver une place aux exploitants privés protège des emplois
existants tout en en créant de nouveaux, procure plus de revenus par une
pénétration rapide du marché, établit ou conserve
de bonnes relations avec les établissements, assure un meilleur
rendement des équipements, garantit au gouvernement le succès de
l'implantation du système. Le Québec est donc dans une
très bonne position pour tirer bénéfice des
expériences qui l'entourent.
Par sa politique d'achat chez nous, le gouvernement est devant un choix
où il peut encourager le développement d'un secteur manufacturier
québécois. Le secteur de l'amusement a un potentiel de
carrière intéressant pour les finissants universitaires du
Québec en génie électronique, en design, en
administration.
L'Association de l'amusement est prête à s'engager
concrètement pour promouvoir le développement manufacturier de
l'amusement en collaboration avec le gouvernement du Québec, car nous
représentons une industrie en pleine effervescence qui laisse une grande
place à l'initiative et à la créativité. Avant
longtemps, l'industrie serait prête à exporter ses produits.
Conclusion. L'objectif de notre mémoire était double:
démontrer l'importance du secteur de l'amusement en tant qu'acteur
économique et proposer au gouvernement d'élargir son assiette
fiscale dans cette industrie qui offre toute sa collaboration. Le
déficit du gouvernement du Québec ne lui permet pas de ne pas
considérer sérieusement cet argent qui est à sa
portée. Il est avant tout question de milliers d'emplois au
Québec et de centaines de millions de revenus pour le gouvernement.
L'expertise qui s'est développée dans le milieu de
l'amusement offre de nombreux avantages, et la contribution du milieu pour
pallier aux problèmes sociologiques de l'amusement est en mesure
d'assurer une efficacité des lignes maîtresses
déterminées par le gouvernement.
Le gouvernement a une bonne occasion de faire confiance à
l'industrie et aux Québécois qui la dirigent. Cessons de relever
les aspects négatifs du domaine de l'amusement pour enfin valoriser ses
aspects positifs qui sont réels. L'option État-privé est
une formule efficace pour la gestion de l'amusement.
Alors que les nouvelles règles mondiales du commerce sont
établies et que la majorité des provinces canadiennes et des
États américains vont de l'avant concernant la
légalisation de la vidéo-loterie, et que nous assistons à
une vague de privatisation, comment le gouvernement du Québec
pourrait-il mettre en péril au-delà de 10 000 emplois directs et
refuser des revenus tandis qu'il accuse un déficit sans
précédent?
Le Président (M. Lemieux): Merci.
M. le ministre des Finances, la parole est à vous. (20 h 30)
M. Levesque: Je vous remercie, M. le Président.
Alors, nous voulons souhaiter la plus cordiale bienvenue à
l'Assocation de l'amusement du Québec. Je crois que vous abordez
là un sujet qui fait sûrement l'objet de réflexion de part
et d'autre. Ma première question serait: Comment vous situez-vous
présentement depuis le jugement de la Cour suprême?
M. Song: Vous voulez savoir comment on se situe
présentement?
M. Levesque: Oui
M. Song: On se sent dans une situation excessivement difficile
à vivre. Tous nos membres sont dans une situation presque intenable.
L'Association reçoit régulièrement des appels et des
lettres pour savoir où en sont rendues les décisions du
gouvernement.
N'oubliez pas que ça fait au-delà de 50 ans que des gens
vivent de ce domaine-là, de l'industrie; c'est presque de
génération en génération. Alors, quand on est dans
une situation pareille où on a vécu pendant plusieurs
années et que le gouvernement nous a presque cautionnés pendant
plusieurs années en nous émettant des permis, les gens se sont
sentis comme en sécurité avec le gouvernement. Mais avec les
développements qui sont arrivés dernièrement, c'est
l'insécurité totale. C'est pour ça qu'on est ici
présents ce soir, pour justement demander au
gouvernement de vraiment nous dire où il s'en va avec ce
dossier-là, pour savoir vraiment à quoi s'en tenir pour
l'avenir.
Si on regarde ça de notre côté à nous, on
prend ça beaucoup émotivement parce qu'on a beaucoup de familles
qui vivent de cette industrie et qui trouvent que cette industrie-là les
fait bien vivre, fait bien vivre leur famille, fait bien vivre les
employés. On dit: Pourquoi le gouvernement ne voit-il pas ça d'un
côté positif alors que d'autres États, d'autres provinces,
aux États-Unis même ou ailleurs, l'ont légalisé et
qu'on puisse, autrement dit, vivre notre vie pas dans cette
insécurité-là et pas en ayant toujours une
épée de Damoclès au-dessus de notre tête en se
disant: Où on s'en va demain? C'est pourquoi on est ici ce soir.
M. Levesque: Vous donnez l'exemple du Nouveau-Brunswick où
le secteur privé a été appelé à se joindre
au secteur public. Est-ce que, dans les autres provinces de l'Atlantique, on
n'a pas eu une expérience différente où c'est
l'État qui a pris charge de ces instruments?
M. Song: Oui, je peux vous répondre sur cette question.
Dans les provinces de l'Atlantique, il y a la province de Nouvelle-Ecosse
où c'est le gouvernement qui a étatisé. Mais je crois que
vous devez aussi être au courant que la situation ne s'est pas
avérée aussi efficace qu'au Nouveau-Brunswick et que,
présentement, le Parti libéral qui est dans l'Opposition en
Nouvelle-Ecosse a déclaré publiquement que, s'il était au
pouvoir, il reviendrait avec partenaires État-privé.
M. Levesque: II faut bien mentionner que, à ce sujet, le
Code criminel canadien réserve aux gouvernements provinciaux et à
leurs agences de même qu'aux organismes bénévoles le
secteur des loteries, bingos, tirages, etc. Vous, vous voudriez, pour faire
face à cette situation, pour vous légaliser, autrement dit, si je
comprends bien votre proposition, vous associer à l'État.
M. Song: Comme c'est fait au Nouveau-Brunswick ou dans d'autres
États américains.
M. Levesque: Ce n'est pas parce que l'État ne pourrait pas
le faire seul?
M. Song: Si on se fie aux exemples qui ont été
vécus les dernières années... Autrement dit, le
Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Ecosse ont légalisé à peu
près à la même période, et les résultats,
après quelques années, se sont avérés
négatifs quand l'État a étatisé. Autrement dit,
quand le Nouveau-Brunswick a été avec partenaires
État-privé, la situation a été différente,
beaucoup plus positive.
M. Levesque: Quand je pense à Loto-
Québec, par exemple, qui aurait pu fonctionner autrement, mais
qui fonctionne comme vous le savez alors que toutes les provinces canadiennes,
d'ailleurs, interviennent directement dans le secteur des loteries
conventionnelles, Loto-Québec possède le deuxième meilleur
niveau de vente per capita en Amérique du Nord après le
Massachusetts. Alors, vous ne pensez pas que Loto-Québec pourrait
continuer dans la même veine? Là, je ne veux pas dire que je mets
de côté ce que vous suggérez, mais je veux voir comment
l'État ne pourrait pas arriver à des fins convenables autrement
qu'en passant par le secteur privé.
M. Song: Je vais passer la parole à M. Marcoux.
M. Marcoux (Luc): II est certain que si on prend un exemple comme
la Nouvelle-Ecosse, la province a sanctionné sans se servir du secteur
privé, mais il faut comprendre deux choses. La première, c'est
qu'il n'y avait pas d'association qui était capable de
représenter ses membres et en même temps, par le fait même,
pouvoir faire valoir les aspects positifs du secteur État-privé.
La deuxième chose, c'est qu'au Québec, contrairement à ce
qui se passe dans d'autres provinces canadiennes ou dans d'autres États
américains, la province de Québec est la seule province qui a
cautionné cette industrie au-delà de 12 ans, ce qui fait que
ça a créé des entreprises qui ont développé
à partir de cette légifération-là, qu'on explique
dans le mémoire, depuis 1979, qui confère un cas particulier
à la province de Québec, ce qui n'était pas le cas en
Nouvelle-Ecosse, ce qui n'est pas le cas en Ontario, ce qui n'est pas le cas
des autres provinces canadiennes et, même, ce qui n'est pas le cas de
plusieurs États américains.
Alors, quand on regarde la situation au Québec, il faut
considérer qu'on est dans une situation qui est difficile à
comparer à d'autres provinces, étant donné le
cautionnement de l'État via la Régie des loteries envers notre
industrie depuis 12 ans. Mais cet aspect, aujourd'hui, quand on parle de
quelques dizaines de milliers d'emplois, ne peut pas être mis de
côté parce que ce serait un chaos total dans notre industrie si on
était évincé complètement de cette industrie.
M. Levesque: Cependant, vous êtes d'accord que, pendant les
années où vous avez opéré, vous l'avez fait, vous
me dites, avec les permis de la Régie, mais depuis le jugement de la
Cour suprême, très récent d'ailleurs, vous ne pouvez plus
opérer. N'est-ce pas?
M. Marcoux: Exactement. C'est une situation dans laquelle on est
dans une «inconfortabilité» évidente, et ce n'est pas
ce qu'on veut. On veut plutôt suggérer au gouvernement, à
travers cette commission, de pouvoir réglementer une industrie
qui fonctionne depuis 10 à 12 ans, qui est implantée
là et qui existe. C'est sûr que, dans un vide juridique comme on
vit présentement, ce n'est pas de tout repos pour des investissements
futurs ou pour une situation qu'on est les premiers à vouloir
corriger.
M. Levesque: Vous appelez ça un vide juridique... Enfin.
Dans ce que vous proposez, quels sont les types d'établissements
où on prévoit que de tels appareils pourraient être
installés?
M. Marcoux: Naturellement, on n'a pas élaboré pour
ce soir sur les types d'établissements, mais il serait facile d'en
arriver à un consensus, à savoir qu'on pourrait peut-être
trouver un terrain d'entente où il y aurait des établissements
qui seraient adéquats pour contrer les effets négatifs soit
sociologiques, soit autres afin d'avoir un contrôle le plus parfait
possible.
M. Levesque: Merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des
Finances.
M. le député de Montmorency.
M. Filion: Merci, M. le Président.
J'aimerais, à mon tour, au nom de ma formation politique,
souhaiter la bienvenue aux représentants de l'Association de l'amusement
du Québec. Je dois dire que le mémoire en soi est un bon
résumé de la problématique que vous vivez depuis
maintenant... particulièrement depuis un an et demi, compte tenu du
jugement de la Cour suprême, le jugement qui a refusé d'entendre,
à toutes fins pratiques, le jugement de la Cour d'appel. Vous êtes
effectivement dans une problématique d'opération qui vous rend
illégal, bien sûr, mais je pense que cette
illégalité-là d'opération est à la fois
maintenue et suscitée par le gouvernement en place qui n'arrive pas non
plus lui-même à prendre position face à l'orientation que
doit prendre cette industrie-là. (20 h 40)
Au moment où on se parle, je pense que ça devait
être pris il y a au moins un an, à ce que je me souvienne
personnellement. Je sais qu'en février 1992, on devait avoir un
positionnement face à l'orientation de l'industrie, et on n'en a pas eu.
Aujourd'hui, on se retrouve encore, un an plus tard, à plus d'un an
après, sans savoir non plus où vous allez. Je peux très
bien comprendre qu'un mémoire comme celui-là est un peu une
espèce de cri d'alarme où vous dites au gouvernement en place:
Écoutez, là, arrêtez de nous entendre, arrêtez de
regarder, posez des gestes et dites-nous où vous voulez aller, et que,
dans ce sens-là, bien sûr que je pense que tout le monde, au fond,
souhaite savoir ce qui va arriver de cette industrio-là qui,
actuellement, est opérée illégalement et qui
génère des fonds qui ne sont pas versés au trésor
public.
Vous parlez de 100 000 000 $ par année que le gouvernement
pourrait aller chercher en revenus de toutes sortes. C'est beaucoup d'argent
quand, actuellement, on est en train de vouloir couper un peu partout dans les
dépenses publiques parce qu'il y a des manques à gagner
importants. C'est sûr qu'il y a toute une réflexion sociale autour
de ça, mais indépendamment de tout ie débat social, je
pense que vous êtes en droit d'exiger du gouvernement qu'il dise
où il veut aller.
J'aimerais, bien sûr, vous poser une question ou quelques
questions, également, face à l'opération que vous vivez
présentement. Est-ce qu'actuellement !e gouvernement a donné
signe de vie? Est-ce que vous vous attendez bientôt... On nous avait dit,
nous, du côté de l'Opposition, bien sûr, qu'on allait
même prendre une décision au mois de janvier. Est-ce qu'il y a eu
des développements dans ce sens-là? Est-ce que vous avez plus
d'information qui peut vous laisser croire que vous allez arriver à un
règlement dans ce dossier-là bientôt?
M. Song: Malheureusement, nous sommes obligés de vous dire
qu'on n'a vraiment pas eu de nouvelles, d'approches du gouvernement. Nous avons
tenté plusieurs fois de lui envoyer... On lui a envoyé beaucoup
de documentation. Même, depuis au moins un an et demi ou deux ans, nous
avons envoyé un des premiers... Par exemple, on a envoyé,
autrement dit, un premier document, un deuxième document. Celui de ce
soir, c'est le troisième document. On se demande ce que le
gouvernement... qu'est-ce qu'il fait pour ne pas nous contacter, parce qu'il me
semble qu'on est de bonne foi. On veut vraiment bien faire, on veut être
d'honnêtes citoyens, comme tous les autres, payer les impôts, payer
les taxes. Alors, on ne peut pas dire qu'on a eu une réponse affirmative
ou une approche. Mais on espère, ce soir, que cette chose-là se
produira.
M. Filion: Dites-moi, on sait qu'actuellement le gouvernement a
légiféré le domaine des loteries Vidéoway, je
crois, avec Vidéotron, où on peut jouer à la loterie
à la télévision. Selon vous, est-ce que c'est normal qu'on
ait légiféré actuellement dans le domaine des
vidéo-loteries à la télévision et qu'on n'ait pas
encore légiféré dans le domaine d'opération, comme
vous le vivez présentement? Est-ce qu'il y a des choses qui sont
différentes ou qui sont explicables, selon votre connaissance?
M. Song: Nous, on a trouvé ça vraiment une
situation qui était, on peut dire, dans nos termes à nous,
peut-être un petit peu drôle. On s'est dit: II me semble que
l'importance de l'industrie de l'amusement, c'est plus important que
Vidéoway, d'après nous Alors, on s'est posé la
question; si c'est une question, autrement dit, de morale, je crois que
les télévisions sont à la portée de tous les
citoyens à travers la province et même, aussi, des plus jeunes.
C'est pourquoi on s'est dit: Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas pensé
à passer notre dossier avant Video-way? C'est officiel qu'on s'est
posé la question.
M. Filion: Dites-moi également, tout à l'heure, il
y a eu une question qui semblait vouloir dire... Si jamais le gouvernement
prenait la décision de prendre le contrôle total de
l'opération sans vraiment solliciter le partenariat de l'entreprise
privée, selon vous, est-ce que vous vous trouveriez dans des pertes
incroyables d'entreprises? Parce que vous soulevez en même temps le
débat que le gouvernement a lui-même suscité, le
développement d'entreprises, et que, du jour au lendemain, suite
à une décision gouvernementale, il renverrait du revers de la
main des entreprises qui se sont développées et qui ne vaudraient
plus rien demain matin. Alors, dans ce genre d'approche, est-ce que vous avez
l'intention de demander une compensation pour les entreprises perdues ou...
Comment vous voyez ça?
M. Song: M. Marcoux va vous répondre.
M. Marcoux: II est certain que l'absence de réglementation
qui débouche sur cette commission, finalement, sur notre mémoire,
fait en sorte que, au niveau de l'option que Loto-Québec puisse le
prendre au complet, ce seraient des pertes d'emplois qui seraient assez
dramatiques pour des entreprises qui sont en existence depuis au-delà de
10 ans. Naturellement, on a fait état un peu des possibilités qui
peuvent arriver, mais c'est tout à fait impensable de penser, de
légiférer ou de nationaliser une industrie qui est
déjà au secteur privé quand on sait que, dans les
discussions qui se passent à travers cette commission ou les discussions
qui se passent à l'Assemblée nationale, on fait état de
privatisation potentielle de joyaux mêmes du gouvernement du
Québec.
Alors, dans une situation où l'entreprise privée
possède la mainmise sur une industrie depuis déjà 10
à 12 ans, il serait à peu près impensable de penser
à ce qui arriverait au lendemain d'une étatisation
complète. J'explique.
C'est sûr que l'Association de l'amusement va prôner les
négociations vraiment de bonne foi, tel qu'on l'explique ici ce soir,
mais mettons-nous à la place de centaines de petites entreprises en
région un peu partout au Québec qui, demain matin, n'ont plus
aucun gagne-pain. Je pense qu'avec la situation de l'emploi ou de la
récession qu'on vit actuellement, ce serait vraiment un état
difficile à vivre pour certaines PME et certains individus. Alors, si on
était dans un contexte favorable à la création d'emplois
ou dans une économie qui est en pleine croissance, la situation serait
peut-être différente, mais les solutions de rechange, à
l'heure actuelle, pour les emplois qui sont directement reliés au
domaine de cette industrie, sont inexistantes.
M. Fortin: J'aimerais ajouter un point, s'il vous plaît.
Votre question était principalement: Qu'est-ce que ça ferait
à l'industrie? Comme on le mentionne dans notre mémoire,
présentement, l'industrie de la vidéo-loterie représente
environ 75 % de toute l'industrie de l'amusement. Le point que je veux faire,
c'est qu'au début, à la fin des années soixante-dix, comme
on l'a mentionné, on n'était pas intéressé à
investir là-dedans, mais vu que la demande s'est créée, on
n'a pas eu le choix, il a fallu suivre la demande. Ce chiffre de 75 % vient des
nombreuses années, une douzaine d'années, d'année en
année qu'il a fallu continuer à suivre la vague, si je peux me
permettre l'expression. Si le gouvernement s'empare au complet de cette
activité-là, ce serait catastrophique pour notre industrie.
M. Filion: Est-ce que vous croyez que le gouvernement peut, du
revers de la main, tasser toute l'industrie et prendre la place sans
créer vraiment de problématique de terrain majeure? Et est-ce que
vous croyez que les gens vont accepter ça sans rien dire ou si ça
peut susciter vraiment des réactions particulières?
M. Fortin: C'est évident que, dans le cas où
ça arriverait, sans trop élaborer, l'industrie résisterait
un peu. Il ne faudrait pas penser que, demain matin, les 25 000 ou 30 000
appareils qui sont présentement sur le territoire
québécois disparaîtraient en claquant des doigts. Il ne
faudrait pas penser ça, et je pense que vous en êtes conscient.
Qu'est-ce qui se passerait? Je ne peux pas vous le dire
précisément. C'est certain qu'il y aurait une réticence de
l'industrie. Les opérateurs et exploitants qui verraient du jour au
lendemain leurs revenus diminuer de 75 %, je ne pense pas qu'ils seraient
heureux et qu'ils laisseraient aller ça comme ça.
M. Filion: Écoutez, on pourra revenir plus tard. On peut
transférer maintenant la règle de l'alternance, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Montmorency.
M. le président du Conseil du trésor.
M. Johnson: Oui. Les questions du député de
Montmorency m'intriguaient. Est-ce qu'il est en train de plaider qu'il est en
faveur de la proposition telle que libellée par l'Association?
M. Filion: Posez vos questions, M. le président...
M. Johnson: Non, mais je pose la question
au député de Montmorency. Est-ce qu'il est en faveur?
M. Filion: Non, non, mais...
M. Johnson: Est-ce que... Je vais m'adresser à ces
messieurs...
M. Filion: Mais non, écoutez! M. le
président...
M. Johnson: ...dans les mêmes termes que le
député de Montmorency. Est-ce que le député de
Montmorency vous a fait comprendre qu'il était parfaitement en faveur de
la proposition que vous avez mise de l'avant, un partenariat
État-entreprise privée afin de légaliser une situation,
évidemment, que vous appelez inconfortable à l'égard de 25
000 à 30 000 machines vidéopokers au Québec?
M. Song: Je crois qu'il nous a plutôt
démontré qu'il avait une oreille attentive, qu'il avait...
M. Johnson: Est-ce que vous cherchez une oreille ou vous cherchez
une solution, à ce moment-ci? (20 h 50)
M. Song: D'abord, si on veut trouver une solution, je crois qu'il
faut commencer par le début. Il faut d'abord se faire entendre si on
veut avoir une réponse. Mais de votre part à vous,
malheureusement, on n'a pas eu cet appel de se faire entendre. Alors, c'est
officiel que, si on ne peut pas se faire entendre, on ne peut pas avoir une
réponse.
M. Johnson: Excusez-moi...
Le Président (M. Lemieux): Pouvez-vous vous adresser au
président?
M. Song: Je m'excuse, M. le Président, mais des fois on
est un peu émotif parce que ça fait tellement longtemps qu'on vit
cette situation.
Le Président (M. Lemieux): Vous êtes chez vous, ici,
mon cher monsieur. Doucement.
M. Song: Merci.
M. Johnson: II y a probablement confusion dans les termes.
M. Song: Oui.
M. Johnson: Personnellement, comme député, c'est
vrai pour tous mes collègues, on a constamment été
inondé de représentations de vos membres. J'en ai
rencontré, mes collègues en ont rencontré, tout le monde a
rencontré vos membres ou l'exécutif de votre Association,
à un moment donné ou un autre depuis un an et demi, sinon
ça fait deux ans et demi ou trois ans.
Je crois comprendre que vous attendez une réponse. Je ne suis pas
sûr que ce soit exact que vous attendiez qu'on vous écoute. Vous
attendez une réponse qui va dans le sens de vos intérêts et
de votre demande. Je vois les gens derrière vous qui font signe que oui.
Alors là, on se comprend. Il y a eu écoute amplement. Il n'y a
pas eu de réponse, évidemment, de nos amis d'en face. Quant
à nous, vous le soupçonnez, nous sommes en train d'examiner...
Dans le nouveau contexte où, notamment, c'est le moins qu'on puisse
dire, il y a une expérience-pilote avec des centaines d'appareils
d'État dans un casino éventuel, nous sommes en train
d'évaluer ce que ça représente, ça. Une situation
qui parle de ce que vous appelez l'inconfort. Le Code criminel appelle
ça l'illégalité. L'inconfort qui va nous mener vers, je
dirais, un redressement de la situation.
Il y a des options, si je comprends bien, comme vous l'avez
expliqué à de nombreuses reprises, qui visent à faire en
sorte que le secteur privé, avec l'État, avec la formule du
Nouveau-Brunswick peut être impliqué, mais il existe
également en Amérique du Nord d'autres solutions purement
étatiques, où l'État n'a pas dédommagé
l'industrie qui avait décidé de s'implanter.
Je comprends que nos amis d'en face vous ont émis un permis en
1980, mais que la Cour suprême, éventuellement, a dit, en refusant
d'écouter, évidemment, le pourvoi en appel, que c'était
illégal, ce qui nous met dans une drôle de situation. Quatorze
mois plus tard, compte tenu des enjeux, il ne m'apparaît pas exorbitant
que vous n'ayez pas encore la réponse que vous souhaitez. Il peut y
avoir une réponse, également, que vous ne souhaitez pas. On va
avoir écouté tout le monde, y compris les gens qui trouvent que
ça doit être contrôlé par l'État quand il
s'agit de loteries et de jeux. C'est pour ça, d'ailleurs, que c'est un
casino d'État et non pas un casino privé ou un casino
d'État privé qui est envisagé. Il est fort possible qu'en
bout de ligne on décide, pour des considérations de
sécurité publique, d'équilibre, de finances publiques ou
de quoi que ce soit d'apporter une réponse qui n'est pas parfaitement
celle que vous recherchez. Mais vous ne pourrez pas dire qu'on ne vous a pas
écoutés. Je pense que, ça, c'est un petit peu injuste. On
a toujours été disponible pour tout le monde à ce
sujet-là.
Ce qui m'amène à vous demander, parce que vous voyez nos
préoccupations: Comment le partenariat État-secteur privé
peut-il être le meilleur garant du contrôle du comportement
excessif qu'on peut trouver, évidemment, chez les joueurs compulsifs?
Comment nous assurer que ce sont véritablement les jeunes de plus de 18
ans et pas ceux de 18 ans et moins qui peuvent être appelés
à jouer à ces machines-là? Comment nous
assurer que ça se déroule dans des conditions optimales
qui font en sorte qu'on peut, au moins, résister aux critiques qui ne
tarderont pas à venir si ça devient un phénomène un
peu trop répandu sous la coupe de l'État?
M. Marcoux: Pour répondre à votre question, il est
sûr que les règles qui seraient édictées, advenant
une étatisation complète, pour contrer les effets
négatifs, tels que les joueurs en bas de 18 ans ou les joueurs
compulsifs, ces mêmes règles s'appliqueraient tout aussi bien dans
un partenariat État-privé. Qu'est-ce qui fait l'aspect
sécuritaire de cette nouvelle industrie qu'on appelle la
vidéo-loterie terminale, reliée par lignes
téléphoniques au même titre que les terminaux
Loto-Québec? C'est les appareils eux-mêmes avec les
contrôles qu'il y a autour de ces appareils-là et non les gens de
l'industrie ou l'État qui font que le système est
sécuritaire. C'est bien l'appareil. On sait qu'avec l'avènement
de l'électronique et tout ce qu'il y a aujourd'hui, ce sont ces
systèmes qui sont sécuritaires. Que ce soit l'État, que ce
soit l'entreprise privée, on dit que l'entreprise privée - et on
l'entend souvent à travers les médias - ne saurait assurer un
contrôle, ayant des infiltrations quelconques. Mais le problème
n'est pas dans les gens qui représenteraient cette industrie. Le
contrôle est assuré par la forme des équipements et le
contrôle est total, à cet égard-là, au même
titre que les terminaux de Loto-Québec.
M. Johnson: À propos de l'équipement, c'est
justement une des questions, je présume, que vous... Si on parle de
partenariat avec l'État, on parle d'un contrôle centralisé
de ces terminaux-là, d'une façon ou d'une autre. Est-ce que ce
sont les mêmes machines que les 25 000 qui sont sur le marché qui
seraient modifiées ou si ce seraient des machines nouvelles? Vous parlez
de 25 000 nouvelles machines à 175 000 000 $, etc.
M. Marcoux: C'est sûr que ce n'est pas...
M. Johnson: Ce n'est pas l'équipement que vous avez en
main aujourd'hui qui est en cause.
M. Marcoux: II est sûr que ce n'est pas les mêmes
équipements.
M. Johnson: C'est ça.
M. Marcoux: Les équipements qui existent aujourd'hui au
Québec ne répondent pas aux besoins d'un contrôle total,
tel qu'aujourd'hui les entreprises existent. On sait qu'il y a eu des
représentations, au mois de juin l'an passé, de la part de
grosses compagnies vis-à-vis des ministères du Revenu, de la
Sécurité publique ainsi que de Loto-Québec; ils ont
reçu des représentants de manufacturiers majeurs,
américains et européens. Quand on parle des systèmes,
c'est de ces systèmes-là qu'on parle.
M. Johnson: Oui. Le lendemain du jour où il y aurait un
partenariat État-secteur privé avec 25 000 nouvelles machines,
qu'est-ce qui arrive avec les 25 000 machines qui sont sur le marché,
là?
M. Marcoux: Naturellement, c'est sûr qu'il y aurait
peut-être, à ce moment-là, des lois qui pourraient
être émises ou une nouvelle réglementation qui
légaliserait les appareils dans les casinos. Cette même
réglementation pourrait être appliquée pour
légaliser les nouveaux appareils. Il suffirait de créer des
règles ou un cadre bien spécifique, à l'effet que
ça prend des appareils qui sont accrédités par
Loto-Québec pour que ce soit légal...
M. Johnson: Oui.
M. Marcoux: ...et non les appareils existants.
M. Johnson: Mais qu'est-ce qu'on fait avec les appareils
existants, vous me dites?
M. Marcoux: On a juste à comparer ce qui s'est produit
dans d'autres provinces...
M. Johnson: Oui.
M. Marcoux: ...ils ont tous quitté la province pour
atterrir dans des provinces où il n'y avait pas de
réglementation. Entre autres, certains appareils du Nouveau-Brunswick,
lorsqu'ils ont légalité, il y a deux ans, sont apparus sur le
territoire québécois parce qu'il n'y avait pas cette
réglementation-là. Naturellement, aujourd'hui, avec l'ouverture
des marchés mondiaux dans différents pays, il serait facile pour
les entreprises d'ici d'exporter ces mêmes produits sur un marché
d'appareils de seconde main.
M. Johnson: II ne doit pas y avoir de grosses hypothèques,
là-dessus.
M. Fortin: On ne peut pas répondre pour tous les
opérateurs.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Marcoux: Je pourrais dire qu'il y en a qui ont encore des
hypothèques sur leur route d'amusement.
M. Johnson: Sur leur?
M. Marcoux: Sur leur route d'appareils d'amusement, il y en a qui
ont encore des hypothèques.
M. Johnson: Merci.
Le Président (M. Lemieux): Ça va, M. le
président du Conseil du trésor?
M. le député de Labelle, vous avez demandé la
parole.
M. Léonard: Oui. Merci, M. le Président.
D'abord, je voudrais souhaiter la bienvenue aux représentants de
l'Association de l'amusement et les féliciter de venir devant
l'Assemblée nationale pour exposer leur problème. Même si
le président du Conseil du trésor souligne, assez lourdement,
qu'il y a illégalité en la matière, il reste que vous
faites face à un problème, suite à la décision de
la Cour suprême. Là-dessus, vous avez le courage de venir devant
l'Assemblée nationale, au salon rouge, pour l'exposer, la question.
En même temps, quand on parle de jeu, on parle, évidemment,
de la question du contrôle. J'ai toujours un peu une image en tête,
mais je ne voudrais pas que vous la preniez mal. Quand vous nous proposez,
quand vous proposez de garder bien solidement, de contrôler toutes les
opérations et que vous seriez une brigade, j'ai un peu toujours l'image
que c'est comme le renard qui garderait les poules, mais en même temps je
me dis que le plus gros renard, qui est en même temps un loup, c'est
l'État. Alors, lui aussi est dans le terrain de jeu, si je
comprends.
Donc, finalement, il faut reprendre la question comme elle est. Je pense
que c'est un problème important que celui qu'on constate, cette
illégalité, où l'État perd des sommes importantes
devant une situation de fait. Même après 14 mois, ça a
l'air que ce n'est pas long, 14 mois, pour préparer une
réglementation, comme si on n'avait pas vu venir la décision de
la Cour suprême. Il me semble qu'un gouvernement le moindrement
prévoyant aurait pu la voir venir. Le ministre des Finances va tout de
suite me dire que je fais de la partisanerie; je fais une constatation, parce
que, en même temps, quand il a besoin de sous, il taxe. Les 4 000 000 000
$ qu'il a garrochés aux contribuables depuis trois ans, ils les ont
sentis passer, les contribuables. Alors, je pense qu'il faudrait, de toute
urgence, régler cette question, la légaliser. (21 heures)
Mol, j'ai eu une interrogation, en lisant votre mémoire. Quand
vous dites qu'il a 25 000 emplois dans cette industrie, ça m'est apparu
un peu gros. Ou bien les 100 000 000 $ sont un peu faibles comme revenus du
gouvernement, ou bien... Un des deux. Parce que j'essaie de faire la relation
entre 25 000 emplois et 100 000 000 $; il y a comme une absence
d'équation, parce que 100 000 000 $, vous dites que ça
représente 25 %, donc, 25... Si on fait la relation, l'ensemble de
l'industrie, c'est 400 000 000 $ de chiffre d'affaires; 100 000 000 $ pour le
gouvernement, il en reste 300 000 000 $ pour 25 000 emplois. Donc, on en est
à des emplois à 12 000 $ par année. Sur quelle base
avez-vous fait vos calculs des 25 000 emplois?
M. Song: M. Marcoux va vous répondre.
M. Marcoux: Quand on parle des emplois directs, on parle de 10
000 emplois, dans un premier temps. Je vais expliquer les 10 000 emplois; on
viendra aux 25 000 par la suite.
Le 31 octobre 1991, a la Régie des loteries et courses du
Québec, il y avait 1400 sociétés qui étaient
enregistrées dans leur fichier central d'exploitants d'appareils
d'amusement. En prenant comme moyenne que la plupart des entreprises ont entre
5 et 10 employés - je dis bien en moyenne; il y en a qui en ont
peut-être seulement 1 ou 2, comme il y en a qui en ont 100, 130, 140 - on
en arrive à un total de 10 000 emplois assez facilement. Il faut
considérer aussi, dans ces emplois, les secteurs comme les petites
salles d'amusement ou des choses comme ça. C'est quand même des
emplois qui sont là en permanence. Ce n'est pas seulement des
techniciens. Je parle de l'ensemble des emplois directs.
Quand on parle des 25 000 emplois indirects, on sait, via la
Régie des loteries et courses, on sait, via un document qui a
déjà été déposé ou qui a
déjà été discuté par votre parti, qu'il y a
quelque chose comme 8000 établissements au Québec qui
possèdent ou qui ont le potentiel de posséder ces
appareils-là. Si on parle de 8000 emplois potentiels, on peut parler de
différents secteurs. On parle quand même de peut-être une
possibilité de 15 000, 20 000 ou 25 000 emplois indirects.
M. Léonard: O.K. Ma deuxième question, c'est en
relation avec les arcades, les pouvoirs de réglementation des
municipalités et les jeunes qu'il y a là-dedans dès un
âge, disons, en bas de 18 ans, et largement.
Comment vous voyez qu'on peut régler cette question alors que,
dans les faits, il y en a quand même beaucoup, de jeunes, qui ont
accès à ces machines à l'heure actuelle? Je sais que vous
allez me dire: Bien, en réglementant, on va les empêcher de jouer.
Mais si, aujourd'hui, l'industrie elle-même est dans le contexte que vous
savez, comment, après, même s'il y a une réglementation,
vous allez être capables de la faire respecter?
M. Marcoux: Nous croyons que nous pouvons accepter la même
réglementation que Loto-Québec pourrait suggérer pour
contrôler ces effets négatifs là. Naturellement, on
pourrait sûrement édicter des règles plus précises,
des endroits spécifiques. Ce pourrait être, comme exemple - je dis
bien «comme exemple», parce
que ce n'est pas ce soir que ça va se décider - les
secteurs hôteliers, où il y a déjà une
réglementation des 18 ans et plus, qui pourraient recevoir ces
équipements; ça pourrait être des endroits
désignés spécifiquement à travers d'autres
secteurs. Mais il est facile d'en arriver à une réglementation,
du moment que ça fait l'objet d'une concertation entre les
différents intervenants. Et il serait facile d'en arriver à
édicter des règles pour que ces règles soient suivies par
l'ensemble du secteur.
M. Léonard: Oui. Bien.Ça va. Merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Labelle.
Il n'y a pas de questions du côté ministériel?
Alors, est-ce que M. le député de Montmorency veut
poursuivre?
M. Filion: Oui.
Une voix: Le gouvernement?
Le Président (M. Lemieux): Je ne sais pas si le
gouvernement a fini, mais il n'y a pas... À partir du moment où
je reconnais et je demande à un membre du côté
ministériel s'il veut bien prendre la parole et que je n'ai pas de
réponse, en soi, la règle de l'alternance a été
respectée, et je me dois de revenir du côté de l'Opposition
officielle.
Alors, M. le député de Montmorency, est-ce que...
Parce que je ne peux pas obliger un membre du parti ministériel,
vous le comprendrez, à bien vouloir prendre la parole.
M. Léonard: Mais, là, ils le perdent
définitivement.
Une voix: ...ils ne parleront plus, là.
Le Président (M. Lemieux): Non. Pour parler, il faut
absolument... Si quelqu'un ne demande pas la parole, comment, moi, puis-je,
comme président, lui donner la parole?
M. Léonard: Obliger. Obliger.
Le Président (M. Lemieux): Et je ne peux pas l'obliger, de
par le règlement, à bien vouloir poser une question.
M. Léonard: Bien oui, mais, là...
Mme Marois: Mais l'alternance, ça existe ou ça
n'existe pas, hein.
Le Président (M. Lemieux): Oui. Mais, c'est ça, Mme
la députée de Taillon. Je fais...
M. Léonard: Alors, c'est fini là, hein?
M. Johnson: Justement, c'est ça. M. Léonard:
Le débat est terminé.
M. Johnson: Donc, on remercie ces messieurs et...
Le Président (M. Lemieux): Bon. Alors, ça va.
Alors, comme il n'y a pas de questions du côté de l'Opposition
officielle ni du côté ministériel...
M. Filion: II y en a des deux côtés.
Mme Marois: Oui, il y en a.
M. Léonard: Oui, oui.
Mme Marois: II y en a. On en a.
M. Johnson: Ah boni Bien, allez-y.
Mme Marois: II y en a, mais c'est l'alternance.
M. Johnson: On a le droit de penser à une question plus
tard. Allez-y.
Le Président (M. Lemieux): Ah! Il y en a. Alors, M. le
député de Montmorency.
M. Johnson: Allez-y. C'est à vous à parler.
Le Président (M. Lemieux): Attention, là! Je veux
bien qu'on me comprenne. Du fait que le parti ministériel, au moment
où je me suis retourné, que je leur ai demandé
«Est-ce que vous avez une question à poser?» et que le parti
ministériel m'a fait savoir qu'il n'avait pas de question à me
poser, il faut qu'il le demande. Non, ils n'ont pas terminé. À
partir du moment où leur temps n'est pas expire, l'alternance... Il faut
absolument, pour que je puisse faire respecter ce principe, qu'on me le
demande. SI on ne me le demande pas...
M. Johnson: M. le Président. Tout le monde est de bonne
foi, ici, et depuis le lundi 2 février que l'alternance est
respectée, ou peut-être depuis mercredi le 3...
Mme Marois: Oui, à peu près.
M. Johnson: ...je dirais. Bon. L'Opposition s'est aperçue
de ce qui se passait. On va lui donner crédit pour ça. Mais il
n'en reste pas moins que si, à ce moment-ci, personne de notre
côté... On se trouve suffisamment informés, compte tenu des
questions et réponses qui ont fusé de part et d'autre.
Maintenant, si l'Opposition a des questions additionnelles, ça ne veut
pas dire que ça n'éveillera pas chez nous des questions
complémentaires pour avoir des éclair-
cissements. C'est juste ça qui est en cause.
Le Président (M. Lemieux): Ce que je veux bien vous faire
comprendre, M. le député de Labelle, c'est que le temps qui est
octroyé aux ministériels ne disparait pas de facto; il n'existe
pas du fait que, lorsque je le leur ai demandé, ils n'avaient pas droit
de parole.
M. Léonard: M. le Président, je vais vous poser une
question.
M. Johnson: Contrairement à l'Assemblée.
M. Léonard: Comment pouvez-vous faire respecter
l'alternance si, systématiquement - parce que, parfois, c'est ce qu'ils
font; on s'est aperçu de ça la semaine dernière - ils
refusent de parler pour se réserver toujours le droit de conclure?
M. Johnson: M. le Président, je peux vous éclairer
davantage?
M. Léonard: Comment vous faites? Expliquez-moi
ça.
Le Président (M. Lemieux): Oui, allez-y, M. le
président du Conseil du trésor.
M. Johnson: À l'Assemblée, pour des débats
restreints, on sait que si le temps non utilisé par une formation
politique n'est pas utilisé par elle, il accroît celui de l'autre
partie.
Mme Marois: Parfait.
M. Johnson: Autrement, dans les débats de nature
générale, il y a l'alternance, par principe. Mais si, à un
moment donné, personne ne se lève, ça signifie qu'on met
fin au débat.
M. Léonard: On s'entend. Mme Marois: Parfait.
M. Léonard: Mais si vous n'utilisez pas...
M. Johnson: Si personne... Bon, alors, là, de ce
côté-ci, nous ne demandons pas la parole à ce moment-ci, M.
le Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui. Mme Marois: Parfait.
M. Johnson: Et il n'est pas question que notre temps accroisse,
par ailleurs, celui de nos collègues d'en face.
Le Président (M. Lemieux): Ah oui! C'est ça. Mais
c'est ça.
Mme Marois: Bien oui, mais c'est ça.
M. Léonard: À l'Assemblée nationale, c'est
ça, la règle.
Le Président (M. Lemieux): Écoutez...
M. Johnson: Dans les débats restreints, ce qui n'est pas
le cas ici.
Le Président (M. Lemieux): Écoutez, là, M.
le député de Montmorency, vous allez prendre la parole, et je
vais éclaircir cette notion-là d'alternance le plus rapidement
possible. Je vais l'éclaircir dès demain matin. Je vais
éclaircir cette règle de l'alternance. Alors, M. le
député de Montmorency, vous avez la parole.
M. Filion: Merci, M. le Président.
J'aimerais revenir un peu sur la remarque du député de
Vaudreuil, tout à l'heure. Je pense qu'on est en commission
parlementaire pour questionner, justement, les dossiers et les mémoires.
Et le but de l'exercice, c'est d'essayer de comprendre en détail la
situation que peut vivre l'industrie de la vidéo-loterie. Et, moi,
j'aurais envie de vous demander: Comment se fait-il, selon vous, qu'on art
légiféré, jusqu'à maintenant, sur les casinos? Ou
on légifère, on réglemente, on encadre ce monde-là,
ou on veut donner un élan au monde du jeu. On légifère
également la vidéo-loterie à travers la
télévision. Et là on a une industrie qui est en place,
où il y a un paquet de personnes - on parle de 15 000 à 20 000
personnes actuellement sur le territoire québécois - et là
on laisse pourrir une situation.
Moi, là, comme parlementaire, j'aimerais essayer de comprendre,
du milieu, comment on peut arriver à se traîner les pieds. Parce
que, vous savez, le problème, là... En janvier 1988, il y a eu un
comité ministériel qui a été formé au
gouvernement. Le ministère du Revenu a formé un comité
ministériel sur, entre autres, bien sûr, toute la question du
tabac mais également la question de l'amusement, où on avait
commencé à faire des recherches et commencé à
regarder les dossiers. Et, quand même, ça fait plus de cinq ans.
J'essaie de comprendre. Comment se fait-il, encore, qu'il n'y ait pas de...
Puis, c'est ça qui demeure... Puis, d'ailleurs, tous les gens se posent
des questions parce que, actuellement, on opère des machines un peu
partout au Québec. C'est l'illégalité totale, on le sait.
Plus de permis. Et on ne légifère pas, on ne dit rien, il ne se
passe rien. Il doit sûrement y avoir quelque chose, quelque part, qui ne
fonctionne pas. Mais c'est ça que je veux essayer de comprendre, parce
qu'il faut légiférer, il faut faire quelque chose. (21 h 10)
M. Marcoux: Pour répondre à votre question, je
pense que l'explication est peut-être logique. Si on prend le
gouvernement actuel, par
l'entremise de M. Ryan, il a répondu à des questions de
l'Opposition pas plus tard qu'au mois de décembre, à l'effet que
les considérations d'ordre juridique et légal étaient
très complexes avant qu'il ne prenne une décision. Je peux
peut-être comprendre un peu le gouvernement actuel qui a retardé
de prendre des décisions dans ce domaine très chaud, probablement
parce qu'il y a des consultations plus profondes à faire, comme entre
autres, celles-ci, et aussi du point de vue juridique.
Naturellement, je pense que - pour donner une réponse au
gouvernement actuel - s'il sanctionnait cette industrie avec l'état
privé, comme exemple, Loto-Québec qui ferait cavalier avec les
exploitants actuels - ce qu'on voit d'un très bon oeil - ça
ferait en sorte que les questions d'ordre juridique et légal, qui sont
les interrogations majeures du gouvernement au moment où on parle,
seraient probablement, par le fait même, éliminées.
M. Filion: Complètement? Dans quel sens dites-vous
«éliminées»?
M. Marcoux: Naturellement, il se pose des questions au niveau des
possibilités d'ordre légal et juridique. On sait qu'il y a des
procès qui sont intentés dans tous les secteurs de la province de
Québec; à chaque fois qu'il y a des saisies, il y a des
procès qui sont intentés. Finalement, c'est une espèce de
roue qui tourne, où II y a un imbroglio qui continue constamment. Si le
secteur privé qui, à l'heure actuelle, donne quand même une
résistance à sa survie... Il est certain que si ce même
secteur privé ou un secteur privé de remplacement pouvait faire
partie de la solution, bien, à ce moment-là, je pense que
ça éliminerait un paquet de problèmes d'ordre juridique
qui peuvent se produire.
M. Filion: Est-ce que vous sentez....
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency, votre temps est expiré.
Il n'y a pas de question du côté ministériel? Alors,
comme il n'y a pas...
M. Audet: II restait du temps.
Mme Marois: Ça n'a pas été minuté, le
temps, M. le Président. Je m'excuse, là, mais...
Le Président (M. Lemieux): Écoutez,
là...
M. Audet: Non, non. Regardez le règlement, il n'y a rien
qui m'empêche de parler. Je peux parler s'il reste trois minutes.
L'enveloppe de temps n'est pas terminée.
Mme Marols: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): Non. Alors, écoutez, M.
le député de Labelle, vous allez m'expliquer quel article du
règlement vous invoquez à l'effet que je ne peux pas céder
la parole au député de Beauce-Nord. Si vous invoquez l'article
169 du règlement, je vous invite à le lire attentivement. Je vais
vous écouter sur l'article 169 du règlement,
particulièrement le paragraphe 2.
M. Léonard: M. le Président, on avait convenu que
nous procéderions par alternance, c'est-à-dire que le
gouvernement prend son temps de parole après que les intervenants soient
venus ici, devant nous; il prend 10 minutes - parce que c'était
ça - et, après, nous avions 10 minutes, et eux revenaient par la
suite.
Si on part du principe qu'il y a alternance, M. le Président, il
faut qu'ils parlent. S'ils ne parlent pas, ça veut dire qu'ils ont
terminé avec les intervenants qui viennent devant nous. Parce que,
autrement, le mot «alternance» n'a plus de sens. Alors, ça
veut dire qu'on ne procède pas par alternance. On va procéder
autrement, mais pas par alternance.
M. Audet: M. le Président, sur le règlement.
Le Président (M. Lemieux): Oui, sur le
règlement.
M. Audet: Je veux juste ajouter quelque chose. Si on regarde
l'article 33, notre règle de procédure dit que: «Le
député qui désire faire une intervention doit se lever et
demander la parole au président.» «Qui désire»,
elle n'oblige pas le député à parler. Le règlement
n'oblige pas, à cet égard-là, il permet.
Si on se réfère ensuite - je vais terminer, Mme la
députée de Taillon - à l'article 173, il dit que:
«Le président partage entre les députés de la
majorité et ceux de l'Opposition le temps que la commission consacre
à chaque personne ou organisme.» C'est ce qui a été
fait: 20 minutes d'un côté et 20 minutes de l'autre
côté. «Sous réserve de l'alternance - alors, s'il n'y
a pas de député, d'une part ou d'autre part, qui a
décidé de poser des questions; c'est ce que je comprends ici -
chaque député peut parler aussi souvent qu'il le désire,
sans excéder 10 minutes consécutives.» Alors, le
règlement à cet égard-là est très clair.
Je vous demanderais de me reconnaître, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Lorsque vous faites
référence à 173, je pense que vous voulez faire
référence à 169 parce que, à 173, nous sommes dans
les consultations particulières.
M. Audet: C'est la même chose.
Le Président (M. Lemieux): C'est la même chose, mais
je voulais seulement vous le souli-
gner.
Vous avez des commentaires relatifs à ça?
M. Johnson: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Taillon.
Mme Marois: M. le Président, j'ai demandé la
parole, s'il vous plaît.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Taillon.
M. Johnson: Excusez-moi... Franchement!
Le Président (M. Lemieux): Oui, c'est vrai, vous avez
raison. Mme la députée de Taillon, s'il vous plaît.
Là, c'est l'alternance, c'est vrai.
Mme Marois: Ça a l'air d'être un peu ridicule, ce
qu'on fait, mais ça ne l'est pas.
M. Johnson: Oui. Ha, ha, ha! Oui.
Mme Marois: Ça ne l'est pas. On s'était entendus,
au début de la commission, sur le fait que nous alternerions nos
interventions. Et on s'est entendus de bonne foi sur ça. Peu importe
l'article sur lequel on s'appuie pour le faire, on s'est entendus de bonne foi
pour le faire. À partir du moment où l'une des parties
décide de ne pas exercer son droit de parole, j'imagine qu'elle le perd,
en conséquence, sinon ça ne vaut pas la peine de s'entendre. On
va faire ce qu'on veut, et comme on le veut.
M. Audet: Je veux juste ajouter une dernière chose, M. le
Président, là-dessus, pour essayer d'apporter un éclairage
nouveau pour qu'on en finisse. Lorsqu'on Chambre 11 y a un débat, par
exemple, il y a entente entre les leaders pour consacrer un temps de parole, de
part et d'autre. Il arrive assez souvent, en Chambre, par exemple, que deux
personnes de l'Opposition interviennent consécutivement puisque, de
notre côté, il n'y a pas eu de députés qui ont eu
l'intention d'intervenir dans le débat. À ce moment-là,
c'est un député de l'Opposition qui intervient.
Il va arriver aussi, dans d'autres circonstances, que deux
députés de la formation ministérielle interviennent
consécutivement. La règle de l'alternance s'applique en Chambre,
et notre règlement, en commission, est basé sur le
règlement de la Chambre. Alors, à ce moment-là, je ne
comprends pas pourquoi on soulève ça ici parce que, là, je
vous le rappelle, le règlement est très clair à cet
égard-là.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Beauce-Nord.
M. le député de Montmorency et, après, M. le
président du Conseil du trésor.
M. Filion: Très simplement, M. le Président, si on
a une règle d'alternance, il faut alterner, et les gens doivent parler
à tour de rôle, en principe. SI les gens passent leur tour pour
garder leur temps pour venir terminer la séance, à ce
moment-là, il n'y en aura plus, de séance, parce qu'il n'y aura
plus personne qui va parler. Alors, on ne sera pas plus avancé.
Le but d'une commission parlementaire, M. le Président, c'est
d'échanger, de bonne foi, à tour de rôle. Alors, lorsque
les gens ont à parler, ils parlent. Et s'ils ne veulent plus parler,
bien, à ce moment-là, l'alternance revient, et on termine la
commission. C'est dans le but d'en arriver à des échanges de
bonne foi et selon des règles très claires, ce n'est pas pour
commencer à jouer au chat et à la souris. On a bien d'autres
débats et, quand on a un débat comme celui-là, aussi
important, je pense que les gens ne trouvent pas ça drôle qu'on
commence à jouer au chat et à la souris en commission
parlementaire, M. le Président.
M. Audet: Une dernière petite chose.
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, M. le
député de Beauce-Nord.
M. Audet: Juste une dernière petite chose.
Le Président (M. Lemieux): Oui, s'il vous plaît.
M. Audet: Je veux juste vous inviter, M. le Président, si
vous rendez une décision là-dessus, à tenir compte de la
tradition qui existe en commission parlementaire, lorsqu'il y a des
consultations générales, à l'effet qu'il y a toujours eu,
ou presque - dans les commissions auxquelles j'ai siégé - entente
entre les deux formations. C'était le ministre responsable qui ouvrait
les débats et qui en faisait la conclusion pour remercier les
invités. Je vous inviterais à tenir compte de ça.
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor, sur la question de règlement.
M. Johnson: C'est précisément... Oui, M. le
Président...
Mme Marois: On en a eu une, entente, à cette
commission-ci.
M. Léonard: II y avait une entente, là.
M. Johnson: c'est la troisième semaine que nous
siégons. on a écouté des douzaines de personnes, il y en a
d'autres à venir, et c'est la première fois que le
problème se soulève avec
cette acuité-là.
M. Léonard: Non, ce n'est pas la première fois.
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor, s'il vous plaît, allez-y, sur la question de
règlement.
M. Johnson: Le député de Labelle voudrait
instaurer, avec un formalisme que je dirais de mauvais aloi, une succession
dans les échanges, que la réalité ne reconnaît pas.
Il faudrait qu'on commence, à chaque fois qu'on a 10 minutes, qu'il
continue ses 10 minutes, qu'on revienne pour nos deuxièmes 10 minutes et
qu'on conclue à chaque fois, comme s'il était impératif et
avantageux, je devrais dire, que quelqu'un termine, comptant un but dans une
apothéose absolument extraordinaire. Ce n'est pas ça qui est en
cause.
Comment je ferais, moi, à ce moment-ci? Il me reste deux ou trois
minutes que je n'ai pas prises tout à l'heure; je pensais que j'avais
réponse à toutes mes questions. Le député a
demandé des explications sur les 25 000 emplois directs et indirects. Je
n'avais pas songé à cette question-là. Si d'aventure je
voulais plus d'explications que celles qui ont satisfait le ministre ou le
député, qu'est-ce que je ferais pour demander une question? Je
n'ai plus le droit de demander de question parce que, quand c'était mon
tour, je n'avais rien de spécial à demander. Et là il m'en
reste encore, du temps, dans mon enveloppe; je demande une question
intéressante, et il y a des réponses intéressantes, mais
je pense qu'il y aurait une autre question qu'il faudrait demander
là-dessus. Je n'ai pas le droit. C'est de l'enfantillage! Vous voulez le
savoir, c'est de l'enfantillage pur et simple!
M. Léonard: Comme question de fait...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Labelle, vous avez... Oui, M. le député Labelle.
M. Léonard: Comme question de fait, c'est moi qui ai
posé la question sur les 25 000 emplois et, après que j'aie
terminé de parler, le président du Conseil du trésor a dit
qu'il n'avait pas de question...
M. Johnson: Je donnais un exemple. M. Léonard:
...et il en a eu la possibilité. M. Johnson: Je donnais un
exemple.
M. Léonard: Moi, M. le Président, je pense...
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît! Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Oui, je vais vous laisser
terminer, M. le député de Labelle.
M. Léonard: Je pense simplement qu'il y avait eu une
entente. Le gouvernement a choisi de commencer lorsque les intervenants
venaient, nous terminions, et il n'y a pas eu d'altercation majeure
jusque-là...
M. Johnson: C'est ça.
M. Léonard: ...mais on remarque, cependant, qu'on tient
à l'alternance.
M. Johnson: C'est la première fois que ça
arrive.
M. Léonard: Non, c'est la deuxième fois que cette
question revient.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Taillon. S'il vous plaît! Tant que la question de règlement ne
sera pas décidée. Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Alors, contrairement à ce que disait le
président du Conseil du trésor, il y a déjà eu,
devant la commission parlementaire de l'économie et du travail, un tel
débat, et c'était à la demande d'un membre du gouvernement
qu'il y avait eu alternance. Et chacun devait, obligatoirement
même...
M. Johnson: Puis?
Mme Marois: ...puisque c'était l'entente que nous avions
faite...
M. Johnson: II n'y en a pas, d'entente. (21 h 20)
Mme Marois: ...utiliser le temps qui était imparti
à chacune des formations politiques en alternant, dix minutes chacun. Et
si ce temps n'était pas utilisé, il n'était plus
disponible. Quand le président du Conseil du trésor, M. le
Président, nous dit qu'il n'y a pas eu entente, je m'excuse...
M. Johnson: II n'y en a pas eu.
Mme Marois: ...nous allons remonter aux galées. Il y a eu
entente à cette commission au début de nos travaux. Alors...
M. Johnson: Bien, voyons donc!
Mme Marois: ...vous-même, vous vérifierez...
M. Johnson: Pas du tout!
Mme Marois: ...ce sur quoi...
M. Johnson: Pas du tout! Mme Marois: ...il y a eu
entente... M. Johnson: Pas du tout!
Mme Marois: ...à l'effet qu'il y avait, effectivement,
alternance.
Le Président (M. Lemieux): Oui. Alors, écoutez, Mme
la...
M. Johnson: C'est un principe qui est dans le règlement,
l'alternance.
Le Président (m. lemieux): ...députée de
taillon, à ce que je sache - et je viens d'en référer
à m. le secrétaire - il n'y aurait pas eu d'entente.
M. Johnson: Absolument pas!
Le Président (M. Lemieux): II y a eu, au niveau des
remarques préliminaires, un modus vi-vendi qu'on a essayé,
tenté de...
Mme Marois: Ah bon! Modus vivendi et entente sur lequel on a...
Pas grave...
Le Président (M. Lemieux): Mais, moi, je me dois, en vertu
des règles...
Mme Marois: ...on s'en souviendra!
Le Président (M. Lemieux): ...quitte à prendre
ça sous réserve, puisqu'il y a un autre groupe qui doit se faire
entendre, là...
M. Johnson: Oui.
Le Président (M. Lemieux): ...je me dois d'appliquer le
règlement. Et j'ai un article qui, à mes yeux, est clair, il est
sans ambiguïté, d'une limpidité extraordinaire,
là...
Une voix: Ah oui?
Le Président (M. Lemieux): ...c'est l'article 169...
Mme Marois: Bien, c'est drôle que vous vous en souveniez
maintenant.
Le Président (M. Lemieux): ...concilié avec
l'article 33.
Écoutez, je prends quand même ça sous
réserve. Et, ça, je le fais dans le but de protéger chacun
des droits des témoins, chacun des droits des parlementaires qui sont
ici. Alors, présentement, je prends cette question-là sous
réserve, M. le député de Beauce-Nord. Vous me permettrez,
en toute équité, là, s'il vous plaît, pour ce soir,
de faire en sorte que vous ayez oublié votre question, si vous le voulez
bien, sans... M. Audet: Par respect pour nos invités. Le
Président (M. Lemieux): Par... M. Johnson: Autrement, il va
pleurer. Le Président (M. Lemieux): Par respect... M.
Léonard: Ça, c'est de l'arrogance. Le Président (M.
Lemieux): Je pense que...
M. Johnson: Non, non. Non, non. «Autrement, vous allez
pleurer», c'est de la sympathie.
Le Président (M. Lemieux): ...vous comprenez, M. le
député de Beauce-Nord.
M. Léonard: Non, pas du tout.
M. Audet: Par respect pour nos invités.
M. Léonard: Non, non, non.
M. Johnson: De la sympathie à votre endroit.
Le Président (M. Lemieux): Alors, comme il n'y a plus de
questions...
Mme Marois: Vous avez l'air ridicule.
M. Filion: Est-ce qu'on peut, M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): ...de la part des
députés, à la fois de l'Opposition et
ministériels... C'est terminé, M. le député de
Montmorency.
Je vous remercie pour votre participation à cette commission
parlementaire, et j'invite maintenant l'Association...
Une voix: Les associations.
Le Président (M. Lemieux): ...les Associations... Un
instant... Les Associations touristiques régionales associées du
Québec à bien vouloir prendre place à la table des
témoins, et je suspends environ deux minutes.
(Suspension de la séance à 21 h 22)
(Reprise à 21 h 24)
Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de
l'administration reprend ses travaux pour entendre les Associations
touristiques régionales associées du Québec.
Je demanderais, dans un premier temps, au
porte-parole de cette association de bien vouloir s'identifier et de
nous présenter les membres qui l'accompagnent. Le débat est d'une
durée d'une heure, dont 20 minutes pour la présentation de votre
mémoire. Suivra un échange avec les deux formations politiques,
d'une durée totale de 40 minutes: 20 minutes pour le parti
ministériel et 20 minutes pour le groupe de l'Opposition officielle.
Alors, nous sommes prêts à entendre la représentante.
Associations touristiques régionales
associées du Québec
Mme Gallant (Linda): Bonsoir, M. le Président. Linda
Gallant, présidente des Associations touristiques régionales
associées du Québec; Mme Cécile Dupont-Chamard, qui est
présidente de l'Association touristique de Chaudière-Appa-laches;
M. Claude Pinault, qui est vice-président de CAA et président de
l'Office du tourisme et des congrès de Québec; M. Réjean
Beaudoin, directeur général des Associations touristiques
régionales associées du Québec; M. Daniel Gosselin, de
Raymond, Chabot, Martin, Paré; et M. Belzile, de Raymond, Chabot,
Martin, Paré.
Le Président (M. Lemieux): Nous vous écoutons,
madame.
Mme Gallant: Merci.
Le Président (M. Lemieux): Oui. Vous avez 20 minutes.
Ça va?
Mme Gallant: Oui. La simplification de notre fiscalité a
toujours été une préoccupation de nos gouvernements.
Cependant, bien que leurs préoccupations et leurs efforts peuvent, pour
une période de temps, la simplifier, l'évolution de la
fiscalité ainsi que la duplication ne permettent pas de la simplifier
comme on se le propose. Le propriétaire d'une petite entreprise est
préoccupé quotidiennement par la complexité
d'observation... En effet, ce dernier doit tenir les livres de l'entreprise et
produire de nombreuses déclarations gouvernementales, tout en
choisissant les bons formulaires. Or, ceux-ci sont modifiés
fréquemment, compte tenu des nombreux changements dans nos lois. Il en
résulte une complexité accrue et des coûts d'observation
plus grands pour les contribuables.
À cet effet, nous suggérons l'instauration d'un guichet
unique où l'ensemble des services gouvernementaux couramment
utilisés par les petites et les moyennes entreprises seraient
regroupés afin qu'on puisse y trouver l'assistance technique
nécessaire. Le Canada a subi trois réformes fiscales importantes.
De plus, l'entrée en vigueur de la TPS et de la TVQ a créé
de nouvelles taxes à administrer par les entreprises touristiques.
Plusieurs modifications aux lois fiscales ont été
apportées, et les raisons invo- quées pour justifier ces
modifications démontrent que l'entrée en vigueur de ces deux
taxes a eu une influence néfaste et, surtout, qu'elles sont très
difficiles à administrer pour les intervenants de l'industrie
touristique.
Afin de simplifier l'administration des taxes à la consommation
pour les petites et les moyennes entreprises, le système
québécois TVQ devrait être harmonisé par
l'utilisation d'un taux combiné TPS-TVQ et par une abolition des
nombreuses différences entre l'admissibilité aux crédits
de taxes pour intrants et le remboursement de taxes sur intrants.
Considérant la lourdeur accrue occasionnée par la gestion
administrative imposée par les gouvernements aux petites et aux moyennes
entreprises, ceux-ci devraient davantage reconnaître cette situation de
fait et faire preuve d'une plus grande indulgence envers les contribuables qui,
du jour au lendemain, deviennent sujets à des responsabilités
auxquelles ils n'étaient pas adéquatement
préparés.
L'importance économique du tourisme est particulièrement
sensible au Québec. En 1990, cela représentait les valeurs
suivantes: des recettes touristiques totales de 4 000 000 000 $, 2,5 % du
produit intérieur brut du Québec, 4,4 % de la valeur des
exportations du Québec, 78 000 personnes-années en emplois
directs et indirects et, très important, des rentrées fiscales de
657 000 000 $ pour le gouvernement du Québec. Néanmoins,
plusieurs indicateurs économiques portent à croire que le
Québec est loin de sa performance méritée.
Pourtant, en tant qu'activité économique, le tourisme
contribue de nombreuses façons à la prospérité
d'une région. Pour plusieurs régions du Québec,
l'industrie touristique agit à titre d'outil majeur de
développement économique. L'État tire également
profit de l'industrie touristique, car cette dernière est à
l'origine de nombreuses recettes directes et indirectes. En fait, l'État
retire 16,30 $ pour chaque montant de 100 $ de recettes touristiques.
Le développement de l'économie québécoise
nécessite l'appui de l'État sous diverses formes afin de
contribuer à son essor et à une meilleure position
concurrentielle. Le gouvernement québécois, conscient de cette
responsabilité, a développé diverses mesures fiscales dans
le but de stimuler le développement de certaines industries en
créant pour celles-ci des mesures particulières. Ainsi,
l'industrie agricole constitue depuis longtemps un secteur
particulièrement choyé par la fiscalité
québécoise. En effet, les autorités fiscales ont
jugé bon, au fil des années, de relâcher leur
étreinte sur les contribuables exploitant une entreprise agricole. Or,
la majorité des entreprises touristiques ont de nombreuses similitudes
avec l'entreprise agricole familiale que le fisc désirait
privilégier en instaurant différentes mesures fiscales
particulières. Pourtant, l'industrie touristique ne jouit aucunement
d'un
traitement fiscal équivalent.
Pour sa part, l'industrie minière bénéficie d'un
avantage comparatif par rapport aux autres secteurs de l'économie,
notamment le tourisme. La présence d'incitatifs fiscaux a
contribué à encourager la poursuite des activités
d'exploration minière. Cependant, cet impact ne se répercute pas
également à l'ensemble des régions du Québec. Que
penser d'une telle mesure pour le tourisme, qui avantagerait toutes les
régions du Québec?
Les encouragements fiscaux dont bénéficient les industries
cinématographique et télévisuelle ont permis à ce
secteur de se renforcer et de favoriser l'expansion de son marché. Or,
l'industrie touristique nécessite des investissements pour combler ces
deux besoins. Elle n'a pourtant jamais été avantagée
d'incitatifs fiscaux de cette sorte.
Le tourisme est un secteur en pleine croissance sur le plan
international. Les déplacements à l'extérieur des
frontières font partie des moeurs dans les pays industrialisés.
Chaque touriste étranger dépense «touristiquement»
trois fois plus que le Québécois au Québec. Malgré
l'importance économique du tourisme international, ce secteur ne
bénéficie pas d'avantages fiscaux comparables à ceux dont
jouissent les centres financiers internationaux. L'industrie touristique est
telle que le seul motif financier du secteur privé ne peut suffire
à assurer son développement sans que des encouragements publics
à l'investissement ne soient nécessaires. Le gouvernement
québécois n'a cependant pas établi de mesures fiscales
spécifiques à l'industrie touristique, tout comme il a
été fait pour les secteurs économiques mentionnés
précédemment. Toutefois, l'entreprise touristique
bénéficie de certaines dispositions fiscales, au même titre
que l'ensemble de l'économie. Et, malgré ces dernières,
les PME de l'industrie touristique peuvent plus difficilement que les autres
bénéficier des mesures fiscales actuelles d'aide à la
capitalisation. (21 h 30)
Différents programmes d'aide ont été mis en place
par le gouvernement du Québec dans le but de stimuler les
investissements dans l'industrie touristique. Cependant, ces programmes ne
couvrent pas tous les besoins. Il faudrait créer de nouvelles
possibilités de financement par l'apport de certaines mesures d'aide
afin de permettre au secteur touristique de disposer de leviers financiers
visant le soutien aux projets prônés et leur amélioration;
exemple: promotion, restauration d'attraits, services touristiques et formation
de la main-d'oeuvre. De plus, l'accès au capital dans les PME, afin de
répondre aux besoins de l'industrie touristique, doit être
amélioré afin d'accélérer le rythme de
développement. L'ampleur des investissements à réaliser
pour accroître leur compétitivité requiert des sources de
financement largement supérieures aux disponibilités fournies par
l'accroissement de leurs fonds propres et leur possibilité
d'emprunt.
Il s'agit, en somme, de placer un individu dans une attitude favorable
à l'investissement dans l'industrie touristique. À cet effet,
nous proposons que l'acquisition des biens mobiliers, équipements,
ameublements, etc., donne droit à un amortissement de 100 %. De plus,
nous suggérons la mise en place d'un crédit d'impôt
à l'investissement de 5 % sur l'acquisition d'un Immeuble ou sur les
restaurations capitalisées au coût de celui-ci. Afin d'encourager
les dépenses en promotion touristique, un crédit d'impôt de
10 % devrait être implanté pour toute dépense en
publicité destinée à attirer les touristes
québécois et étrangers au Québec.
L'appui du gouvernement à l'égard de l'industrie
touristique passerait donc d'abord par la fiscalité, tout en
reconnaissant également la nécessité de favoriser par
d'autres moyens la réalisation de projets touristiques. Cette approche
devrait ainsi contribuer à accroître la capacité
concurrentielle de l'industrie touristique québécoise, car les
dépenses attribuées au développement touristique par le
gouvernement du Québec sont largement inférieures à
l'effort consenti par le Nouveau-Brunswick et l'Ontario. Cette situation a un
effet négatif sur la fréquentation de la clientèle au
Québec, qui s'est encore détériorée au cours de la
première moitié de 1992.
Finalement, certaines mesures particulières à
l'agriculture, telles que l'exonération de 300 000 $ dans le calcul du
capital versé et le roulement sans incidence fiscale d'entreprises
familiales entre les générations, devraient être
accordées à l'industrie touristique, car elles profitent
indûment au secteur agricole.
L'ensemble de ces recommandations visent la relance de l'industrie
touristique québécoise, qui est essentielle au
développement économique des régions du Québec. Ces
mesures priveront, dans un premier temps, le fisc de certains fonds.
Néanmoins, l'effet multiplicateur généré par les
nouvelles recettes touristiques permettra au gouvernement
québécois de recouvrer amplement et même davantage les
deniers publics qu'il aura investis dans l'industrie touristique. En somme, ces
recommandations permettront d'accentuer les moyens et les ressources pour
promouvoir et mettre en place les infrastructures touristiques dans chacune des
régions du Québec. C'est à cette condition que l'industrie
touristique peut demeurer le fleuron de l'orgueil des Québécois
et l'envie des visiteurs étrangers.
Alors, pour résumer: 1) afin d'inciter les entreprises
touristiques à promouvoir le tourisme au québec, nous proposons
l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable au taux de 10 %
sur toute dépense de promotion engagée par l'entreprise
touristique. 2) afin d'inciter les entreprises touristiques à restaurer
les actifs de leurs entreprises, nous
proposons l'instauration d'un crédit d'impôt à
l'investissement, remboursable au taux de 5 %, sur tout investissement afin de
restaurer des biens mobiliers et immeubles. De même, ce crédit
s'appliquerait à l'acquisition de biens mobiliers ou à une
déduction accélérée, au taux de 100 %, pour
l'acquisition de biens mobiliers et la restauration de biens immeubles. 3) afin
de promouvoir la formation de la main-d'oeuvre, nous proposons
l'élargissement du crédit d'impôt à la formation, au
taux de 40 %, à l'entreprise non incorporée. 4) afin
d'alléger le fardeau administratif, pour toutes les entreprises du
québec, nous proposons la création d'un guichet unique pour
chaque entreprise. ce guichet unique consisterait à regrouper en un seul
numéro tous les comptes de remise au gouvernement du québec.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, madame. M. le
président du Conseil du trésor.
M. Johnson: Je vous remercie, M. le Président, et je
remercie mon collègue, le ministre des Finances, qui m'a demandé
si je voulais souhaiter la bienvenue à Mme Gallant, de mon comté.
Je suis heureux de la voir ici. On connaît l'enthousiasme à la
défense de l'industrie touristique. C'est également vrai de Mme
Dupont-Chamard et de M. Beaudoin, évidemment, de longue date, et de ceux
qui les accompagnent.
C'est une grosse commande, évidemment, là, que vous nous
avez encore décrite quant aux gestes ou programmes que le gouvernement
pourrait mettre sur pied, des gestes qu'on pourrait poser afin de faciliter le
développement de l'industrie touristique. Il n'en reste pas moins qu'il
y a eu, depuis de nombreuses années, un certain nombre de programmes
d'aide financière, le crédit touristique, par exemple, qui a
largement permis la modernisation de certaines infrastructures, des
interventions en région de l'OPDQ et, je présume, bientôt,
du Secrétariat aux affaires régionales, seront également
au su, et seront «renippés» - je pense que le terme est
connu - des attraits régionaux afin d'améliorer l'offre
touristique. De façon indirecte, il y a un tas de ministères, par
des interventions, je pense, dans le domaine culturel, qui viennent
également améliorer certaines de nos infrastructures afin que les
gens prolongent leur séjour dans l'une ou l'autre des régions du
Québec.
Mais si vous aviez à faire une suggestion du côté de
la fiscalité - vous en faites plusieurs, c'est pour ça que je
vous le demande - si vous aviez a en faire une plutôt que de nombreuses,
comme c'est le cas, quelle est celle que vous privilégiez? On pourrait
peut-être engager la discussion là-dessus.
Mme Gallant: Toutes. C'est difficile. Je crois qu'en
résumant à quatre demandes, on vous apportait les quatre qu'on
croyait que vous auriez pu appliquer dans le prochain budget même. Je
pense que vous savez, M. le Président... Vous ne le savez pas, je
m'excuse, M. le Président, mais j'aimerais que vous réalisiez que
l'industrie touristique a pour but de vous aider à solutionner le
problème fiscal que nous vivons en ce moment, tout le monde. Alors,
comme vous voyez, ce n'est pas des subventions, mais plutôt des
crédits. Juste au niveau de la promotion, en demandant un crédit
d'impôt, c'est que c'est encore l'entreprise qui va investir les sous, et
on a largement besoin d'une image pour le Québec, pour vendre le
Québec. Et ça, ça ne peut pas être le gouvernement
à lui seul qui peut le faire, mais ça doit se faire en
concertation avec l'industrie. Alors, il faut leur donner un petit incitatif en
ce moment. Vous savez que les dernières années ont
été très difficiles pour nous. On doit, on espère,
on prie que, cette année, ça puisse être le changement, que
nous allons commencer à revoir des années comme on en a
déjà connu.
Je ne peux pas vous dire qu'il y en a une plus particulièrement
qu'une autre qui est plus importante. Elles le sont toutes. Alors...
M. Johnson: Je peux comprendre votre hésitation à
larguer deux ou trois de vos demandes, mais ce que je veux dire, je veux juste
illustrer les dimensions critiques de l'industrie, selon vous. Par exemple,
vous pouvez dire que c'est la taxe sur la restauration, l'hébergement,
je devrais plutôt dire, le 4 % qui fait problème. Mais si on met
ça en perspective, évidemment, c'est le plus bas taux qui existe
parmi toutes les régions du nord-est de l'Amérique du Nord. Il
n'y en a pas moins. L'Ontario, c'est 5 %; le Nouveau-Brunswlck, c'est 11 % ou
je ne sais pas quoi; dans le Vermont, à New York, c'est entre 5 % et 8
%, plus 10 $ la chambre ou à peu près pour les chambres de 100 $
et plus. Ça peut être la taxe sur l'essence, sachant, encore une
fois, que, dans les régions périphériques qui sont
susceptibles d'attirer du trafic automobile, on a un régime,
évidemment, de détaxe à la pompe qui fait une
différence. On ne paie pas... Autrement dit, l'essence est moins
chère en région périphérique touristique,
dirions-nous, que dans nos grands centres urbains.
Autrement dit, est-ce que vous privilégiez des mesures à
caractère régional qui encouragent les gens à se
déplacer au Québec ou une mesure d'intérêt
général qui amène les gens au Québec? Ça,
c'est parce que c'est deux approches, ça, au point de vue
touristique...
Mme Gallant: Oui...
M. Johnson: ...c'est le marché intérieur et le
marché extérieur.
Mme Gallant: Oui.
M. Johnson: Lequel voulez-vous qu'on cultive davantage?
Mme Gallant: O.K. Premièrement, le tourisme
québécois, il est très, très, très important
pour notre industrie: un, c'est 70 % de notre chiffre d'affaires en ce moment;
deux, aussi longtemps que les Québécois ne connaissent pas leur
province, ils ne pourront jamais être les porte-parole efficaces pour
vendre le Québec aux autres. Nous, on considère que c'est un
principe très, très, très important pour le
développement futur de l'industrie touristique. Mais si on veut arriver
à ne plus être en déficit, on ne doit pas seulement
conserver le Québécois au Québec, mais on doit aussi
inciter des touristes extérieurs.
Alors, oui on... Nous, ce qu'on demande, c'est bien simplement que vous
nous reconnaissiez comme étant une industrie particulièrement
importante au niveau du développement futur pour la province de
Québec, et qu'on ne soit pas le ministère le moins important
à l'intérieur. Ça veut dire, peut-être nous
reconnaître avec un petit peu plus de soutien financier, un peu plus de
promotion et ça, pour les années qui s'en viennent, parce que
l'année 2000, c'est vraiment... Au tournant du siècle, ça
sera le produit d'exportation numéro un au niveau du Québec, au
niveau du monde entier.
Réjean voudrait peut-être... (21 h 40)
Le Président (M. Lemieux): Si j'ai bien compris, vous
voulez compléter?
M. Beaudoin (Réjean): Oui, M. le Président.
C'est une question de défi. Et comme nous avons devant nous des
gens de défi, M. le Président, je vais vous donner l'image de ce
défi-là. Prenons l'Ontario, par exemple. Ils attirent quatre fois
plus d'Américains que le Québec. Ce n'est pas parce que l'Ontario
est quatre fois mieux située géographiquement, ce n'est pas parce
que l'Ontario a quatre fois plus d'attraits que nous, ce n'est pas parce que
l'Ontario est quatre fois plus hospitalière que le Québec, mais
son cheminement de mise en marché, depuis les dernières
années, a démontré qu'ils attirent 6 500 000
Américains et, au Québec, nous en avons 1 500 000. Donc, nous
avons un énorme rattrapage à faire sur ce plan-là.
Donc, si, demain matin, le nombre d'Américains doublait au
Québec, M. le Président, ça veut dire qu'on crée
déjà 13 000 emplois personnes-année au Québec, si
on doublait le nombre d'Américains chez nous. Un autre
élément qui entre en ligne de compte aussi, c'est les recettes
annuelles per capita, si on compare l'Ontario et le Québec. En Ontario,
les recettes touristiques annuelles per capita sont de 930 $; au Québec,
630 $. Donc, une différence de 300 $ en moins pour le Québec. SI,
avec notre dynamisme, ensemble, on atteint le même niveau que l'Ontario,
en termes de recettes annuelles per capita, ça veut dire 2 000 000 000 $
par année de recettes touristiques pour le Québec, 40 000 emplois
de plus et, M. le Président, environ 400 000 000 $ de plus par
année en recettes fiscales pour le gouvernement du Québec, ce qui
n'est quand même pas à négliger.
Ce qui s'est passé au cours des années? On n'a pas
été assez progressifs et continus dans notre mise en
marché. Si on compare les budgets du gouvernement de l'Ontario et les
budgets du gouvernement du Québec en matière de marketing
touristique, au cours de la dernière décennie, l'Ontario a
dépensé 90 000 000 $ de plus que nous en mise en marché
touristique, plus particulièrement aux États-Unis. Alors, c'est
pour ça, M. le Président, qu'on a un rattrapage à faire,
un énorme rattrapage, et c'est pour ça les mesures que nous
posons aujourd'hui, que nous soumettons aux membres de la commission. Nous
sommes profondément convaincus que ce sont là des voies à
court terme pour aider à combler ce rattrapage touristique que nous
avons avec notre compétiteur qui s'appelle l'Ontario.
Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le
député de Labelle.
M. Léonard: Merci, M. le Président.
Alors, bienvenue et félicitations pour votre mémoire.
Je voudrais quand même attirer l'attention sur un fait qui a
été rendu public avant Noël, et j'aimerais que vous me le
confirmiez, que le déficit touristique au Québec atteignait
maintenant 1 000 000 000 $ par année. C'est exact?
Mme Gallant: Oui.
M. Léonard: C'est exact, oui. Alors, je pense que,
là, nous avons effectivement un problème parce que, au fond, il
faut se poser la question, si les décisions fiscales qui ont
été prises par le gouvernement ont été la cause de
ce qui s'est passé.
Lorsqu'on parle de tourisme, on parle de toutes sortes de gens,
évidemment. Et vous avez distingué, je pense, deux
classifications majeures: le marché intérieur et le marché
extérieur. Le problème que nous avons, c'est, je pense, sur le
marché extérieur. Vous venez de le signaler, nous n'avons pas
manifesté le dynamisme qu'il faudrait, et qu'il aurait fallu manifester
depuis un certain nombre d'années, ce qui fait que nous avons
stagné, même reculé sur ce plan-là. Et, en toute
dernière analyse, les dernières années - depuis 1991 - les
formalités à remplir pour récupérer la taxe pour
les touristes font que, finalement, ils ne remplissent pas les formulaires
Puis, Dieu sait si on touche là, encore une fois, du doigt, la
complexité de l'administration TPS et TVQ. On l'a encore, là.
Les touristes viennent ici, puis trouvent les prix assez chers, merci,
d'autant plus que ce n'est pas constant. Parfois, la taxe est incluse; d'autres
fois, elle ne l'est pas; d'autres fois, il y en a une ou l'autre, mais
ça pose ce problème-là.
Deuxièmement, quand on parle du marché intérieur,
il s'est affaibli. C'est indubitable. En réalité, les
Québécois comparent de plus en plus la facture qu'ils paient
lorsqu'ils voyagent et qu'ils font du tourisme ici, à l'intérieur
du Québec, et la facture qu'ils paient lorsqu'ils sont à
l'étranger. La comparaison, c'est que, finalement, ça ne
coûte pas plus cher d'aller passer 15 jours au Mexique, un peu partout
dans les îles, et même dans le sud des États-Unis, que de
rester au Québec. Parfois, même, on m'a dit que ça
coûtait plus cher de rester ici que d'aller là. Alors, je pense
que là, on vient de toucher du doigt un facteur majeur. Il faut se
reposer la question de l'opportunité d'avoir taxé, d'avoir
introduit cette taxe de façon générale dans
l'économie, mais plus particulièrement dans le domaine du
tourisme.
Quand on parle du marché intérieur, il faut aussi ajouter
un autre facteur. Dans le tourisme, on emploie beaucoup de main-d'oeuvre, et
les taxes sur la masse salariale sont importantes au Québec parce que,
dans notre façon d'aller chercher des sous dans l'entreprise, nous avons
choisi cette voie, mais en exemptant le secteur touristique, l'hôtellerie
en particulier, de la taxe de vente. Ça avait été une des
discussions importantes quant à ce secteur, à l'époque.
Maintenant, on taxe les deux de la même façon.
Alors, je voulais en venir à ce que vous disiez sur les
crédits d'impôt. Vous savez, beaucoup d'organismes sont venus ici
pour nous dire: plus d'abris fiscaux. Ce que vous nous demandez, c'est d'en
créer un. Est-ce que, entre les deux, l'abolition de la taxe de vente ou
des crédits d'impôt sur différents investisssements que
vous faites, entre les deux, lequel préfére-riez-vous? Les deux,
que vous allez me répondre, mais au-delà de ça?
M. Beaudoin (Réjean): C'est ce qu'on pensait, M. le
Président.
Nous avons analysé la situation, et nous vous présentons
les conclusions de ce qu'on voit, M. le Président. C'est qu'il est
sûr et certain qu'en principe moins il y a de taxes, moins il y a
d'irritants pour le consommateur; c'est sûr et certain. Mais,
après avoir envisagé différentes facettes, à un
moment donné, nous avons conclu à des recommandations que nous
avons énumérées tout à l'heure: crédit
d'impôt pour l'entreprise qui fera de la publicité, pour
l'entreprise qui va restaurer ses installations; allégement
administratif fiscal pour les entreprises. Également, dans l'analyse que
nous avons faite, nous avons comparé le secteur tourisme avec les
secteurs des mines, de l'agriculture, cinématographique et
télévisuel. On s'aperçoit que nous sommes un secteur
nettement défavorisé par rapport aux secteurs que je viens de
souligner, M. le Président. Alors, c'est sûr et certain que, si
nous voulons, comme je le mentionnais tout à l'heure, relever tous
ensemble le défi de remettre le Québec vraiment dans la
compétition touristique, à court terme, nous, pour l'instant, on
préconise les recommandations que nous vous soumettons le plus
respectueusement.
Mme Gallant: J'aimerais juste rajouter là-dessus... C'est
que, avec le crédit d'impôt, nous allons créer. C'est pour
promouvoir l'investissement, les rénovations. Alors, je considère
que ça va créer aussi des emplois, ce dont nous avons grandement
besoin.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des Finances,
s'il vous plaît.
M. Levesque: Alors, je me joins à ceux et celles qui vous
souhaitent la plus cordiale bienvenue. Je vous félicite pour la tenue de
votre mémoire, fort intéressant. Vous couvrez beaucoup de sujets,
des sujets qui nous tiennent à coeur, même si nous ne pouvons pas
toujours répondre d'une façon qui vous plaise entièrement,
vu la quantité de demandes. Vous ne vous imaginiez pas que je ferais mon
budget ce soir, non plus.
Une voix: Demain. (21 h 50)
M. Levesque: Ha, ha, ha! Tout de même, vous avez
sûrement raison de souligner l'importance de l'industrie touristique au
Québec. Nous savons que cette industrie est... peut-être que je
n'exagère pas en disant que c'est la clef de l'avenir pour notre
économie, particulièrement dans des régions comme celle
que je représente ici, à l'Assemblée nationale, où
l'industrie touristique est celle vers laquelle on se tourne davantage
lorsqu'on regarde les possibilités de développement. je tiendrais
cependant, vu qu'on a souligné les aspects moins positifs de la
fiscalité, qu'on me permette simplement de rappeler que, du
côté de la restauration, la taxe sur les repas...
évidemment, lorsque vous ajoutez la tps, les gens disent: ii y a eu une
augmentation. mais pour le québec, la tvq était à 10 %, et
elle a été réduite à 8 %. je le dis simplement par
respect de la vérité. lorsque nos amis d'en face se plaisent
à parler toujours de l'augmentation des taxes ici et là, ils
oublient de dire que, lorsque nous avons introduit les changements, nous avons
également baissé la taxe de 9 % à 8 %. la taxe qu'ils
avaient prise à 8 %, et qu'ils avaient montée à 9 %, nous
l'avons prise à 9 %, et nous l'avons baissée à 8 %. c'est
rarement répété, ces choses-là. c'est simplement
par respect de la vérité.
Du côté des chambres d'hôtel, mon
collègue,
votre député - à deux d'entre vous, au moins...
un... Ah! Seulement une... d'accord - rappelait que le taux de 4 % constitue
l'un des taux les plus bas par rapport aux régions avoisinantes. Alors,
je pense que c'est important de le souligner.
Il y a une chose, aussi. Lorsque l'on parle de la TVQ et qu'on parle du
4 % du 1er juillet dernier, il est bon aussi d'ajouter toujours quelque chose
que l'Opposition oublie d'ajouter souvent, c'est que l'industrie de
l'hôtellerie bénéficie elle-même de remboursements
sur la taxe payée à l'égard de plusieurs fournitures. Et
ça, il faut en tenir compte, parce que ça touche les immeubles,
les matériaux de construction, les meubles, les articles de
décoration, les articles de bureau. Tout ce que vous achetez, que vous
payez non pas 9 %, mais 8 %, c'est remboursé maintenant, depuis le 1er
juillet dernier. Alors, je pense que ça aussi, ça doit entrer en
ligne de compte.
Il y a plusieurs autres avantages du côté des transports,
du côté des congrès. Nous avons fait attention à
votre industrie dans plusieurs aspects de la mise en oeuvre de cette taxe de
vente. Je dois vous dire que lorsque l'on parle... que l'on suggère des
mesures d'amortissement accéléré, là, il faudrait y
penser sérieusement, parce qu'il y a beaucoup d'autres industries qui
nous regardent présentement, et qui suggèrent la même
chose. Mais, tout de même, j'ai pris note de toutes vos suggestions.
Il y en a une, cependant, que j'attends, c'est comment est-ce qu'on va
faire pour financer ça? On est en réunion, en forum, et c'est
surtout pour trouver une façon de lutter contre l'endettement, contre le
déficit. Je pense que c'est très mauvais pour l'Industrie
touristique aussi, pour l'économie du Québec. Il faut que le
gouvernement du Québec cesse d'emprunter pour payer les dépenses
courantes, emprunter à 10, 15, 20, 30 ans pour payer les dépenses
courantes. Il faut cesser de faire ça. Il faut également savoir
que, du côté de l'impôt ou des taxes, vous le dites
vous-mêmes, c'est assez. Autant que possible, c'est assez. Alors, c'est
du côté des dépenses qu'il faut faire attention. Or, votre
mémoire, encore une fois, qui est très bien fait, suggère
d'autres dépenses. Lorsque vous parlez, par exemple, de ce que l'Ontario
consacre à la publicité... nous avons fait des progrès de
ce côté-là, mais il y en a encore à faire. Mais,
encore une fois, c'est du côté des dépenses qu'on se
tourne. Lorsque l'on parle de certains abris fiscaux, comme on le mentionnait,
il y en a plusieurs qui sont venus ici nous dire: Mettez fin à tous ces
abris fiscaux-là, c'est assez. Et vous, vous nous suggérez
d'autres abris fiscaux, des dépenses fiscales, si vous voulez. Alors, je
ne dis pas que ce n'est pas justifié, je ne dis pas que ce n'est pas
désirable, je ne dis pas que nous ne regarderons pas tout cela de
très près, mais si vous aviez une suggestion, avant de partir,
sur ce qu'on pourrait faire pour dégager des sommes pour répondre
à vos besoins.
Mme Gallant: M. le Président, il faut cesser de voir les
dépenses touristiques comme une dépense, mais plutôt comme
un investissement. Ça ne coûte que 49 000 $ à l'industrie
touristique pour créer un emploi. Si on peut augmenter le taux
d'occupation de 1 % dans nos hôtels à travers la province de
Québec, ça représente 1310 emplois directs et indirects.
Je considère que ça peut être une partie de votre solution,
M. le ministre. Comme vous l'avez dit vous-même - M. le Président,
pardon - c'est l'industrie de l'an 2000. Si nous voulons vraiment empocher
notre part de cette industrie-là, on doit investir. On n'a pas investi
dans le passé, c'était loin d'être une priorité. Je
pense que nous devons maintenant faire le pas et investir. C'est des petites
recommandations que nous vous faisons.
Le Président (M. Lemieux): Oui, vous pouvez
compléter.
M. Beaudoin (Réjean): En fait, M. le Président, au
cours des dernières années, nous avons souvent fait parvenir aux
membres de l'Assemblée nationale différentes missives expliquant
l'importance du tourisme et de l'avenir. On avait une expression, M. le
Président, qui disait que le ministère du Tourisme est un
ministère de type offensif: il crée l'enrichissement. Donc, comme
le disait Mme la présidente, si bien, on investit pour créer un
nouveau carrousel économique, qui va entraîner de nouveaux revenus
fiscaux, et ces revenus-là pourront être répartis dans
d'autres ministères essentiels du gouvernement du Québec. C'est
pour ça que, nous, on croit que le ministère de l'Industrie, du
Commerce et de la Technologie, le ministère du Tourisme, les
ministères de type offensif, qui font progresser
socio-économiquement le Québec... À ce moment-là,
lorsqu'on demande des choses, qu'on propose, qu'on suggère, c'est
investir pour vraiment mieux préparer l'avenir.
C'est ça, notre philosophie, que nous avons toujours
véhiculée au cours des dernières années.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président.
Ça me fait plaisir de vous saluer à mon tour.
Évidemment, saluer particulièrement la présidente, qui
vient de la Montérégie, qui oeuvre dans la
Montérégie, qui est une belle région touristique
aussi.
Peut-être, d'abord, quelques commentaires pour dire comment je
crois qu'il est important que nous valorisions effectivement le secteur
touristique, et que nous ne fassions pas comme on l'a fait à
l'égard de certaines avenues qu'on a mises de côté dans
d'autres champs. Je pense à
des comparaisons... Je pense, entre autres... Ça a l'air
drôle, mais je pense entre autres a la formation professionnelle,
où on a un peu dévalorisé la formation de type technique,
et, maintenant, on le regrette amèrement. On sent qu'il y a un virage
important à faire, parce qu'on se dit que nos entreprises ont besoin de
ce type de travailleurs et de travailleuses. Partout, dans le monde, on se
promène pour aller voir ce qu'il y a ailleurs, et on ne serait pas
content de montrer ce qu'on a ici?
Alors, dans ce sens-là, je pense qu'on a à consolider ce
secteur-là, à le développer, à le valoriser, et
à le présenter au monde entier, parce qu'en plus, on est... On
occupe une place spéciale en Amérique du Nord, et on a, de par
notre différence au plan culture, au plan culturel, au plan de la
langue, à offrir quelque chose au monde entier, pas seulement à
l'Amérique, mais au monde entier. Je pense qu'il serait criminel de ne
pas utiliser ce potentiel-là qui est chez nous. (22 heures)
Dans ce sens-là, je suis un peu inquiète quand j'entends
le ministre des Finances dire que c'est la clé de l'avenir, et que je
regarde les chiffres que vous nous présentez, en termes, justement,
d'investissements. En ce qui a trait au budget du tourisme, qu'on compare le
Nouveau-Brunswick, qui mettait 55 $ per capita, pour l'année 1991,
à Québec, qui mettait 13.20 $; c'est absolument, à mon
point de vue, inadmissible à tous égards, bon, quand on sait, en
plus, que la question fondamentale à laquelle est confrontée
cette commission, c'est la question de la hausse du niveau d'emplois, de la
hausse de notre richesse collective... Vous venez de nous dire combien
coûte la création d'un emploi dans le secteur touristique, en
termes d'investissement... Quand on se tourne vers les secteurs comme
l'aluminerie, par exemple, on parle de 300 000 $ à 500 000 $, de
demi-millions de dollars; alors, je pense que ça vaut la peine qu'on
regarde de près votre secteur.
Vous faites un certain nombre de recommandations. Je veux avoir vos
commentaires sur deux. L'une concerne la formation de la main-d'oeuvre - vous
faites référence, là, à des besoins qui concernent
l'industrie touristique à cet égard - j'aimerais ça que
vous m'en parliez un petit peu. L'autre élément, qui concerne
très largement les travaux de notre commission, c'est que vous parlez de
la création d'un fonds de relance pour la promotion touristique, qui
serait géré par les partenaires de l'industrie, si je comprends
bien, par la proposition qui est là. Est-ce que vous suggéreriez
qu'une partie, par exemple, de la taxe qui s'applique aux produits touristiques
puisse être dirigée vers ce fonds-là, dans une perspective
où il y aurait promotion, soit intérieure, pour consolider le
tourisme québécois soit, évidemment, vers
l'extérieur, pour attirer le tourisme étranger, le touriste
étranger.
Mme Gallant: On n'est pas très, très gourmands,
mais une partie de l'argent des casinos nous conviendrait absolument
très bien, surtout si c'est pour faire la promotion à
l'extérieur du Québec. On considère que l'industrie va
avoir quand même à mettre sa part, mais il y a des moyens. Nous,
on avait justement mentionné que, possiblement, une partie, soit les
frais d'entrée du casino, soient utilisés pour créer un
fonds spécial pour la promotion du tourisme.
Pour la première question, au niveau, voyons de...
Mme Marois: La formation. Une voix: De la
main-d'oeuvre.
Mme Gallant: ...c'est que nous avons demandé que ce soit
applicable à toutes les compagnies, car dans l'industrie touristique, il
y en a beaucoup qui sont seulement enregistrées et non pas
incorporées. Alors, ils n'ont pas accès aux crédits
d'impôt...
Mme Marois: Ah oui!
Mme Gallant: ...et vu, en tout cas, l'importance sérieuse,
mais l'importance sérieuse de pouvoir former notre personnel
adéquatement, que ça soit en accueil - et c'est vraiment un
besoin essentiel - je pense que ça devrait être disponible pour
tout le monde.
Mme Marois: D'accord. Merci. Mme Gallant: Bienvenue.
Le Président (M. Lemieux): Merci, madame.
Un instant! Il n'y a pas d'interventions du côté
ministériel, pour le moment? Il reste deux minutes du côté
ministériel.
M. le député de Montmorency.
M. Filion: Est-ce qu'ils veulent parler, M. le Président?
C'est parce qu'il y a la règle de l'alternance...
Le Président (M. Lemieux): ii n'y a pas d'intervention
ministérielle. il n'y a pas d'intervention ministérielle. m. le
député de montmorency.
Mme Marois: Parfait! On a compris ça. On respecte
ça. Il n'y a pas d'intervention.
M. Filion: Merci, M. le Président.
J'aimerais saluer, moi, également, les représentants des
Associations touristiques et leur dire qu'effectivement l'industrie du
tourisme, c'est très important au Québec. Je pense qu'on a
beaucoup de choses à vendre et à exporter. Actuellement, c'est
une industrie qui a beaucoup
de difficultés à concurrencer les prix, et à
pouvoir vraiment attirer le client chez nous. Pourtant, le gouvernement en
place a implanté des casinos qui étaient, à toutes fins
pratiques, pour eux, la solution miracle au relancement de l'économie et
probablement du tourisme, mais, moi, je crois qu'il faut faire plus que
ça.
Effectivement, on a eu beaucoup de personnes qui sont venues ici, et qui
ont présenté des mémoires où ils disaient: Les
abris fiscaux, il faut passer à autre chose. Mais, moi, je crois qu'au
niveau de l'investissement immobilier c'est quand même intéressant
comme formule, sauf que, moi, où j'accroche un petit peu, c'est que
quand on veut stimuler une entreprise ou une industrie comme la vôtre, on
est pris avec deux paliers de gouvernement. Si on veut vraiment donner un bon
coup de barre ou aider vraiment l'entreprise, on a pratiquement besoin des deux
paliers.
Quand vous vous adressez à la commission, est-ce que vous pensez
uniquement au palier du gouvernement du Québec, quand vous demandez vos
crédits d'impôt, ou si vous pensez vraiment aux deux paliers de
gouvernement?
Mme Gallant: Ce soir, on intervient auprès de vous, mais,
définitivement, nous faisons aussi des pressions avec le
fédéral. Là, ce soir, c'est avec vous.
M. Filion: J'espère que vous allez faire de bonnes
pressions au niveau fédéral, parce que, vraiment...
Mme Gallant: Je demeure juste à côté
d'Ottawa, oui.
M. Filion: Oui? Continuez, c'est important. Il faut
récupérer notre dû, comme on dit. Notre butin, comme on
disait au début des années cinquante. Mais, moi, j'aurais envie
de vous poser des questions parce que vous ne soulevez quand même pas le
débat de la surtaxation au niveau des prix et de la concurrence. Vous
soulevez simplement l'investissement, mais vous n'avez pas d'idée,
également, comment est-ce qu'on pourrait arriver à alléger
ou à rendre plus concurrentiel le produit qu'on doit exporter, parce que
plusieurs sont venus nous dire qu'il fallait réduire les taxes à
certains niveaux, au niveau de l'essence, etc., pour qu'on puisse vraiment
pouvoir vendre notre produit à l'étranger.
Les gens ont l'impression que, venir au Québec, ça
coûte une fortune. Les gens ne sont pas habitués de payer 15,56 %
de taxes sur une facture. Dans ce sens-là, je pense quand même
qu'on peut difficilement travailler un stimulant d'investissement sans aussi
penser à la concurrence des prix sur le marché. Dans ce
sens-là, ce n'était pas une préoccupation pour vous?
Mme Gallant: C'est une préoccupation majeure, mais comme
vous le savez, nous avons... M. le Président, nous sommes en
difficulté financière, tout le monde. Il faut trouver des moyens
d'aller chercher de l'argent. Alors, cet argent, nous, on dit qu'il va nous
arriver beaucoup plus rapidement si on investit justement dans la promotion, si
on repart l'industrie, et si on crée des emplois. Là,
peut-être, qu'on va vous revenir, sûrement, pour vous dire:
Maintenant que nous avons solutionné votre problème financier,
nous aimerions avoir une réduction de taxes, s'il vous plaît.
Je pense que c'est très sérieux, et on voulait vous
apporter vraiment des solutions qui étaient faisables et
immédiates pour le budget qui s'en vient.
M. Filion: 5 % de crédit... Vous demandez 5 % de
crédit au niveau de l'immobilier, vous trouvez ça suffisant?
Mme Gallant: Non, ce serait encore mieux si on avait plus.
M. Filion: Vraiment, pour inciter, parce que c'est des mesures
incitatives, là. Quand on parle d'investir 1 000 000 $, est-ce que vous
croyez que c'est suffisant, un crédit d'impôt de 5 %, pour qu'un
investisseur...
Mme Gallant: Quand on parle de l'industrie touristique, il y a
beaucoup de petites entreprises touristiques qui ne sont même pas
incorporées, qui sont enregistrées. Alors, les investissements
que nous allons voir, d'ici quelques années, ne sont pas des
investissements majeurs parce qu'ils ont plus d'argent vraiment à
investir. Ce qu'on veut faire, c'est améliorer ce que nous avons
déjà en place, les infrastructures qui ont vraiment besoin
d'être retouchées.
Durant cette récession, il y a beaucoup... Ça a
été négligé un peu parce que... bon, faute de
fonds. Alors là, c'est le temps de profiter un peu de la situation. On
est moins occupé. Ça serait une façon de le faire. Je
pense que c'est plus réaliste, que c'est plus réel, plus
réalisable comme ça. Si on voulait nous en accorder plus, on
serait tout à fait heureux, mais je pense qu'on voulait plutôt
arriver avec quelque chose qui pouvait se faire, et comme je vous dis, à
court terme.
M. Beaudoin (Réjean): Ça va, M. le
Président.
Je voulais intervenir, mais Mme la présidente a dit le mot,
à court terme. C'est vraiment l'optique, M. le Président,
où on n'a pas voulu amener toutes sortes de propositions sur toutes les
facettes de l'industrie touristique, mais nous avons voulu vraiment
répondre aux objectifs de la commission, qui étaient ceux
d'amener des suggestions en fonction du prochain budget.
M. Filion: Votre approche, c'est...
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse. Vous voulez
compléter, je crois?
M. Pinault (Claude): Je fais juste un commentaire, M. le
Président. Vous vous préoccupiez tout à l'heure du volet
consommateur, je dirais, de la compétitivité du Québec en
matière touristique, du point de vue des consommateurs
québécois. J'ai encore à l'esprit les
délibérations dans le cadre des discussions que nous avons eues,
l'industrie touristique avec le ministère du Tourisme, dans leur plan
triennal de développement stratégique. On constate qu'un des
produits à privilégier au Québec - parmi les multiples
produits, on connaît le circuit grande ville, pourvoiries et le reste -
c'est les circuits. On s'est mis dans la tête que la meilleure
façon de promouvoir le Québec, c'est de vendre le Québec
en circuits, histoire de se promener un peu partout, sauf que la composante
essentielle pour ça, si on vise le marché intraQuébec...
parce qu'il faut comprendre que, tout à l'heure, il y a une question qui
avait été soulevée... Le marché intraQuébec
- les Québécois, les Américains et les autres - il y a
trois niveaux de marché, on visé les trois.
Quand c'est la saison, ça va. Quand c'est un creux de vague, on
est bien content sur le marché québécois qu'ils viennent
combler la différence. Quand c'est la haute saison, où ça
va assez bien, bien là, on aime bien la clientèle
extérieure. Donc, comme on dit en milieu, on balance le portefeuille,
sauf que - et là, vous allez me voir venir de loin parce que je suis
très préoccupé par les consommateurs, par
déformation professionnelle, peut-être - pour qu'on puisse faire
du circuit au Québec, puisqu'on n'est pas très
développé en autocarisme, c'est l'automobile.
On vient de partout en automobile, et si on veut que les
Québécois voyagent au Québec en automobile, ça
prend du carburant. C'est un élément de l'équation. Je ne
vous dis pas que c'est le seul. Je pense qu'il faut que le produit soit
attrayant, et l'industrie a des besoins pour qu'elle soit attrayante. Mais
celui qui achète, celui qui couche dans ces hôtels, celui qui
mange dans ces restaurants, celui qui visite les attraits touristiques... parce
qu'il n'y a pas que les hôteliers, il n'y a pas que les restaurateurs.
C'est vrai que c'est deux piliers, mais, souvent, on oublie les autres qui sont
les petits, très petits même. C'est qu'il faut que les
Québécois aient l'impression...
On a un problème de perception. Les Québécois sont
convaincus, quand bien même qu'on ferait un exercice rationnel, de dire
que ça ne coûte pas plus cher qu'ailleurs, etc., etc., ils sont
convaincus que ça coûte cher, de voyager au Québec. (22 h
10)
Un agent de voyages me disait, la semaine passée, que le client
avait le choix, qu'il avait décidé - déjà,
ça, c'est fabuleux - qu'il avait décidé d'aller aux
îies-de-la-Madeleine. On lui a dit qu'il y avait 150 $ de taxes.
Ça tombe mal parce que, quelques jours auparavant, on venait juste
d'annoncer que ceux qui voulaient se rendre en Floride, c'était 149 $.
Imaginez donc!
M. Filion: Oui!
M. Pinault: Je comprends que les sièges étaient
limités, mais, ça, on ne le disait pas.
Il y a cette espèce de déchirement. Alors, il y a une
réalité du fonctionnement des consommateurs au Québec,
c'est qu'ils ont l'impression que ce n'est pas achetable. Alors, qu'on veuille
vendre le Québec sur le plan touristique par les circuits, on a un
problème. Les Québécois, quand ils prennent leur voiture,
ils trouvent que c'est cher; les Américains, aussi. Tourisme Canada
avait fait, en 1991, un rapport sur la perception du prix et du produit en
demandant aux Américains, aux Québécois et aux gens de
l'extérieur, les Européens, etc., avant même
l'arrivée de la TPS: Pensez-vous que c'est cher? Ceux qui voyagent en
automobile, les Américains et les Québécois,
c'était le groupe qui ressortait le plus, et qui disait: Oui, ça
coûte cher de voyager - avant même la TPS! Imaginez, aujourd'hui,
avec la TPS et la TVQ.
Alors, il y a un problème de perception, et avant qu'on puisse
parler de compétitivité, il va falloir qu'on rentre dans la
tête des Québécois... Ce n'est pas évident, parce
que, moi, je dis toujours que c'est un peu comme le syndrome de la boîte
de céréales. On a beau marquer sur la boîte que, dans le
voyagement, dans le transport, il y a eu tassement de la marchandise, bien,
quand je l'ouvre, je trouve qu'il y a à peu près ça d'air,
et il m'en manque. J'ai l'impression de ne pas en avoir pour mon argent.
Alors, je pense que, tout ce que je veux, c'est que, dans cette
équation, qui est la partie A, l'industrie, il y a la partie B,
c'est-à-dire le consommateur québécois, qui n'est
même pas foutu de voyager au Québec parce que, pour lui, dans sa
tête, c'est clair que c'est trop cher. Je pense qu'il faut travailler sur
des avenues pour lui faire prendre conscience que... Il faut faire des efforts
en ce sens.
Le Président (M. Lemieux): Alors, malheureusement, le
temps est écoulé, M. le député de Bertrand, de part
et d'autre. Un bonjour, et je vais permettre la même chose du
côté de l'Opposition officielle.
M. Johnson: Simplement pour remercier nos visiteurs, leur dire
qu'on a été sensibles à leurs revendications, que nos
moyens ne sont pas illimités, même si leurs demandes le sont, et
qu'on en tiendra compte dans tous les cas.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Merci pour votre mémoire et les
explications que vous nous avez données. Je pense que vous avez
attiré l'attention sur un fait, c'est qu'il faut faire de la promotion
si on veut attirer le touriste, et spécialement l'étranger.
Le Président (M. Lemieux): alors, nous vous remercions de
votre participation à cette commission parlementaire. nous ajournons nos
travaux à demain, 9 h 30 - j'ai bien dit: demain, à 9 h 30 - pour
entendre la fédération des commissions scolaires. alors,
merci.
(Fin de la séance à 22 h 13)