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(Dix heures onze minutes)
Le Président (M. Lemieux): Le commission du budget et de
l'administration reprend ses travaux relativement à la consultation
générale et auditions publiques: financement des services publics
au Québec.
Moment de recueillement à la mémoire de
M. Marcel Léger
Nous allons entendre, dans un premier temps, la Fédération
canadienne de l'entreprise indépendante, mais, préalablement,
j'aimerais demander peut-être 30 secondes de silence pour le
décès d'un ex-collègue ici, à l'Assemblée
nationale, ce matin. Il s'agit de M. Marcel Léger. Merci.
Alors, à la barre des témoins figure maintenant la
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.
Est-ce que les parlementaires ont pris connaissance de l'ordre du jour?
L'ordre du jour est adopté?
M. Léonard: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Adopté. Merci, M. le
député de Labelle.
Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire, ce
matin?
Le Secrétaire: Oui. M. Lazure (La Prairie) est
remplacé par M. Beaulne (Bertrand).
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
secrétaire.
Alors, MM. de la Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante, les règles de fonctionnement sont les suivantes:
Nous disposons d'une heure globalement. Dans cette heure, vous disposez de 20
minutes pour la présentation de votre mémoire; suivra un
échange entre les deux groupes parlementaires d'une durée de 40
minutes: 20 minutes pour le parti ministériel, 20 minutes pour le groupe
de l'Opposition officielle.
Je demanderais à la personne qui nous livrera l'exposé de
ce matin pour la Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante de bien vouloir s'identifier et identifier son
collègue, s'il vous plaît. Merci.
Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante (FCEI)
M. Décary (Michel): Merci, M. le Président. Mon nom
est Michel Décary. Je suis vice-président, pour le Québec,
de la Fédération et je suis accompagné de Pierre
Cléroux, économiste principal à notre
Fédération.
J'aimerais tout d'abord féliciter les parlementaires qui
siègent à cette commission du courage dont ils font preuve en
acceptant d'entendre plus de 70 groupes sur une période d'environ 2
semaines, des groupes qui vont essentiellement parler de deux choses seulement,
soit les dépenses et les revenus du gouvernement du Québec, en
nous montrant comment on peut réduire l'un ou augmenter l'autre.
J'imagine que plusieurs des commentaires se répéteront d'un jour
à l'autre durant toute la durée des audiences. Je présume
également que les observateurs établiront rapidement des
catégories polarisées de participants. Si ce n'est pas les
syndicats contre le patronat, ce sera les groupes populaires contre les groupes
établis, ou Dieu sait quel autre contraste. D'ailleurs, dès la
première journée des audiences, certains journaux qualifiaient
ces travaux de «dialogue de sourds». Je ne pense pas que cette
étiquette soit justifiée. De toute façon, notre
Fédération prend les travaux de cette commission très au
sérieux. Nous y voyons un espoir, une réelle possibilité
que les choses vont s'améliorer grâce à vos travaux.
Dans le but d'être le plus constructif possible, nous avons
préparé un mémoire qui traite essentiellement des
résultats de consultations faites auprès de notre
«membership» sur les sujets qui intéressent cette
commission. Nous vous rappelons que la Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante au Québec est formée de 17 000
entreprises membres qui sont exclusivement des PME. Ces entreprises couvrent
l'ensemble des secteurs d'activité économique, ainsi que
l'ensemble du territoire québécois.
La première constatation qui doit être faite, c'est que le
déficit annuel du gouvernement du Québec, qui est maintenant de 4
600 000 000 $, ainsi que sa dette accumulée de presque 50 000 000 000 $
sont tout à fait inacceptables. Pour les braves personnes qui nous
écoutent à la maison, pour vous donner une image de ce que
ça représente, ces gros chiffres-là, ça
représente une personne qui gagne 36 000 $ par année, qui en
dépense 40 600 $ et qui fait ça depuis un bon bout de temps, puis
aujourd'hui elle a une dette de 50 000 $. C'est très difficile de
dégager les 5000 $ qu'il est nécessaire de remettre au banquier
durant l'année quand on a un revenu de 36 000 $ par année. C'est
ça, l'image du problème auquel fait face le gouvernement du
Québec aujourd'hui, et c'est un problème, évidemment, qui
doit être réglé.
La situation financière de la province est précaire parce
que nos gouvernements successifs, quelle que soit leur couleur, ont eu
très souvent
la tendance d'augmenter les taxes, plutôt que de contrôler
les dépenses pour tenter de limiter leur déficit. Nos PME ont vu
leurs taxes augmenter considérablement au cours de la dernière
décennie. Ce n'était donc pas surprenant pour nous de voir que,
selon un sondage que la FCEI a effectué à la fin de 1992, 72 %
des membres interrogés considéraient leur fardeau fiscal comme un
obstacle important au fonctionnement de leur entreprise, alors qu'une question
identique posée dans un des sondages de notre Fédération
en 1989 avait donné un résultat de 47 %.
En dépit des nombreuses augmentations de taxes que les
entreprises québécoises ont connues durant la dernière
décennie, le déficit n'a pas été
contrôlé et surtout pas réduit, tout simplement parce que
les dépenses gouvernementales ont continué d'augmenter à
un rythme incroyable, une augmentation plus rapide que l'inflation.
Nous croyons que la majorité des gens réalisent que
ça ne peut plus continuer comme ça. D'ailleurs, le fait que
l'Assemblée nationale vous a mandatés d'étudier cette
question confirme l'étendue du problème. Il faut bouger et,
à notre avis, tout indique que les Québécois ont vraiment
atteint leur seuil de tolérance face à toute augmentation des
taxes actuelles ou à toute apparition de nouvelles taxes. La solution au
déficit systématique du gouvernement du Québec doit donc
passer par une nouvelle formule et, pour nous, cette nouvelle formule, c'est un
plus grand contrôle des dépenses. Nous savons fort bien que
l'opération sera difficile et nécessitera beaucoup de courage
politique, mais cette opération de coupure des dépenses est
absolument indispensable.
Alors, comment réduire les dépenses gouvernementales de
façon intelligente sans blesser les plus démunis de notre
société? Nous reconnaissons que l'État a une
responsabilité face aux gens dans le besoin. Cette responsabilité
a été acceptée il y a fort longtemps. À ceux qui
pensent que nos programmes sociaux ont commencé seulement après
la dernière guerre mondiale ou bien durant la Révolution
tranquille, je soulignerais que le premier bureau d'aide sociale, chez nous, a
été ouvert en 1685. Selon le professeur d'histoire, David
Mulhall, de l'Université McGill, ce bureau s'appelait le Bureau des
pauvres. Il était indirectement financé par le gouvernement,
puisque celui-ci a donné des terres à l'Église, et les
profits provenant de l'exploitation de ces terres servaient à payer les
dépenses du Bureau des pauvres.
La responsabilité sociale n'est donc pas un concept nouveau. Ce
Bureau, dont je viens de parler, a été créé
seulement 17 ans après la création de la première
entreprise au Canada, soit la Compagnie de la Baie d'Hudson, fondée en
1668. Nos ancêtres avaient raison de se préoccuper du sort des
plus démunis, et nous avons le devoir de continuer d'accepter nos
responsabilités collectives envers eux. Ceci dit, nous croyons qu'il est
possible de rationaliser les dépenses publiques sans nuire au
développement du Québec ou aux gens dans le besoin. (10 h 20)
Pour revenir à la question de «comment réduire les
dépenses gouvernementales», notre Fédération a
consulté plus de 850 PME québécoises sur ce sujet, et leur
premier choix, celui favorisé par 75 % des répondants,
était de voir le gouvernement du Québec introduire certains frais
aux usagers des services de santé. Le coût de ces services
augmente très rapidement et constitue 43 % de l'augmentation totale des
dépenses gouvernementales québécoises au cours des 10
dernières années.
Parmi les autres façons privilégiées par les PME
pour réduire les dépenses gouvernementales, il y a la diminution
des subventions aux entreprises ainsi que la réduction du nombre des
services offerts aux individus et aux entreprises. C'est donc dire que les PME
sont prêtes à faire leur part pour aider le gouvernement à
traverser cette période difficile. Tout le monde devra faire sa part
pour que les finances du Québec soient rétablies sur une base
solide. Et quand on dit tout le monde, cela inclut également la fonction
publique. Il est absolument impossible d'améliorer les finances
publiques du Québec si on ne contrôle pas l'évolution des
salaires de nos fonctionnaires. Ces salaires, à eux seuls, constituent
environ la moitié du budget du gouvernement du Québec.
Il serait facile de faire des affirmations négatives sur cette
catégorie de travailleurs. Ils sont la cible
préférée de bien des gens, mais la réalité,
c'est que nous avons une fonction publique qui, en termes de compétence,
se compare bien avec celle des autres provinces ou pays. Notre problème
n'est pas avec les individus qui ont choisi de faire carrière au sein du
gouvernement du Québec; notre problème, c'est que, pour des
raisons qui nous échappent, le gouvernement du Québec a plus de
fonctionnaires que certains gouvernements voisins, comme celui de l'Ontario,
qui a 13,5 fonctionnaires par 1000 habitants comparativement à 16,1 pour
le Québec.
Non seulement avons-nous plus de fonctionnaires, mais, en plus, on se
paie le luxe, comme société, de leur offrir des salaires qui sont
en moyenne 10 % plus élevés que ceux donnés à des
travailleurs du secteur privé oeuvrant dans des emplois comparables.
Cette réalité constitue une des raisons pour lesquelles les
banquiers surveillent nos finances publiques de très près. Les
fonctionnaires devront donc faire leur part au même titre que les autres
catégories de citoyens, y compris les propriétaires de PME.
J'aimerais vous remercier de votre attention et vous rappeler l'urgence
d'agir pour relancer le Québec dans la bonne voie, la voie de la
prospérité. Nous serons là pour vous aider dans cette
tâche difficile.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Décary.
M. le ministre des Finances, la parole est à vous.
M. Levesque: Très brièvement, M. le
Président, parce que j'ai vu plusieurs mains se lever indiquant
l'intérêt de chacun de pouvoir participer à cet
échange. Évidemment, mes premiers mots seront pour remercier M.
Décary et son groupe pour leur participation à cet exercice, et
également pour féliciter la Fédération pour la
qualité du mémoire présenté, ainsi que la
façon que ceci a été fait ce matin verbalement,
très brièvement et très succinte-ment. Vous avez
été immédiatement à l'essentiel. Je vous
félicite de votre préoccupation pour les gens démunis. Je
pense que ça a été votre première
préoccupation de faire en sorte que quelles que soient les mesures que
nous prenions, nous soyons très sensibles à ceux et celles qui
sont moins favorisés dans notre société.
Vous avez également eu une démonstration qui nous a
frappés lorsque vous avez descendu les milliards et que vous êtes
arrivés dans les mille dollars. Je pense que cette démonstration
vulgarise d'une certaine façon le problème et le rend très
accessible dans le sens de la compréhension du problème
très sérieux auquel on doit faire face. Si un gouvernement a des
problèmes de la nature que nous connaissons, on les comprend encore
mieux lorsqu'on les transpose dans des problèmes similaires, dans des
familles, dans la vie quotidienne. Lorsque vous dites que si quelqu'un gagne 36
000 $ par année et qu'il en dépense 40 000 $, qu'il a une dette
accumulée de 50 000 $, vous avez raison de dire qu'il y a un
problème. Ce problème à l'échelle du Québec
est autant important et autant difficilement... Est-ce qu'on peut le
résoudre facilement? Il y a là évidemment un grand
défi. Votre participation ce matin nous aide au moins à voir ce
que nous pouvons faire.
Vous avez vous-mêmes, et ça, je vous en félicite,
commencé par dire ce que vous, vous êtes capables de faire, ce que
vous voulez faire avant de demander aux autres ce qu'ils doivent faire. Nous
avons été, dans certains cas, habitués à entendre
les gens dire: Voici ce que nous avons, n'y touchez pas, mais vous pouvez aller
ailleurs. Alors, tout le monde veut couper les dépenses mais pas trop
dans sa cour. Je pense que vous méritez au moins d'avoir cette
reconnaissance que vous avez mentionnée, par exemple: une diminution des
subventions aux entreprises.
À ce sujet, évidemment, la première question que je
vais vous poser c'est: À quel endroit est-ce que vous nous
suggérez de couper? Ce serait une bonne façon d'être encore
plus précis, à moins que vous disiez: Choisissez la place, et on
sera d'accord.
Il y a aussi les abris fiscaux qui font partie, j'imagine, de ce que
vous proposez. Du côté des abris fiscaux, vous savez que nous
avons mis l'accent sur la recherche et le développement. Les REA,
évidemment, coûtent beaucoup moins cher étant donné
qu'on utilise moins qu'auparavant cet instrument. Il y a la formation de la
main-d'oeuvre sur laquelle on a mis beaucoup d'accent. Il y a, du
côté des subventions, différentes avenues qui pourraient
être examinées, peut-être plus du côté du
président du Conseil du trésor, qui aura sans doute à
aborder cette question un peu plus tard.
Alors, je vous laisse avec ça, tout en vous remerciant de votre
contribution. J'ai pris note de plusieurs autres sujets que vous avez
abordés. Vous avez, évidemment, parlé d'un contrôle
des dépenses, mais fait d'une façon intelligente et responsable.
Vous avez dit que 75 % des 850 PME qui ont répondu à votre
sondage mettaient comme première façon de contrôler les
dépenses l'établissement de frais modérateurs, si j'ai
bien compris votre présentation. Alors, tout cela, nous en tenons
compte. Évidemment, il y a divers points de vue qui sont donnés
ici. Nous aurons ensuite à faire une sorte d'analyse de tout ce qui
s'est dit au cours de ces semaines, mais soyez assurés que votre
approche aura l'attention qu'elle mérite.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des
Finances.
M. Décary, est-ce que vous avez des commentaires?
M. Décary: Bien, disons, pour répondre à la
question où couper, en ce qui concerne les subventions, on
suggère de couper l'ensemble des subventions aux entreprises. On vous
laisse une porte ouverte si le Québec a encore des besoins pour aider
à l'exportation ou à la recherche et au développement,
mais tout le reste, on vous suggère de laisser tomber, de sacrifier
cette partie-là.
En termes d'abris fiscaux, encore là, ce qui aiderait le plus les
petites entreprises du Québec, et certainement celles que je
représente, ce serait un régime où il y a le moins de
bonbons possible donnés à peu de gens, mais que tout le monde
soit traité sur un pied égal. Ça, ça veut dire de
mettre moins l'accent sur des taxes comme les taxes en masse salariale; pour
les maintenir à un niveau tolerable, on est prêts, encore
là, à sacrifier aussi des abris fiscaux qui ne
bénéficient pas nécessairement à tout le monde.
M. Levesque: Merci.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saint-Louis.
M. Levesque: L'alternance, M. le Président? On a
insisté là-dessus.
Le Président (M. Lemieux): Oui, oui, d'accord. Alors,
l'alternance. M. le député de Labelle.
M. Léonard: Ça va.
Le Président (M. Lemieux): Oui, ça va. M.
Levesque: Excusez, mais c'est ça. M. Léonard: Merci, M. le
Président.
M. Chagnon: Merci quand même, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Ce sera pour la prochaine fois,
ainsi que M. le député de Prévost.
Alors, dans le respect de règle, M. le député de
Labelle, s'il vous plaît. (10 h 30)
M. Léonard: Ça va. Je voudrais remercier la
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante et ses
représentants de la qualité de son mémoire parce que, ce
qu'ils nous ont dit, ça va directement au but. Vous avez eu des bons
mots, en particulier, à l'endroit des démunis et aussi à
l'endroit des fonctionnaires qui sont trop souvent la cible de sarcasmes,
à mon sens, en disant que ce n'était pas la qualité de ce
qu'ils faisaient, loin de là! Donc, je pense que vous le reconnaissez
et, ça, c'est à votre mérite.
Maintenant, sur les mesures que vous proposez, je pense qu'il y a deux
grands volets qu'on doit analyser là-dedans: il y a le budget du
gouvernement lui-même, et puis ce qu'il y a autour, l'économie
québécoise elle-même. Dans le budget du gouvernement, au
Québec, je suis un peu préoccupé, quant à moi, du
fait que c'est une baignoire ayant deux trous, parce qu'il y en a un aussi au
fédéral. Et si, au Québec, on en bouche un et que l'autre
reste ouvert, on n'aura rien réglé. C'est le Québec qui en
fera les frais, d'ailleurs. C'est à peu près ce qui se passe
à l'heure actuelle. Donc, ça, c'est une toute autre question,
mais qui est quand même là très préoccupante.
En ce qui concerne l'action du Québec, je prends bien note que
vous proposez de ne garder que les programmes d'aide à l'exportation et
les programmes qui aident le développement de la haute technologie.
Ça, ça me parait une suggestion majeure, parce que ça veut
dire que tout le reste vient de sauter. Et la question demeure donc de savoir
comment on va stimuler l'environnement économique ou la production
économique au Québec. Moi, j'ai parfois en tête l'exemple
de deux pays complètement ruinés qui s'en sont sortis très
bien, l'Allemagne et le Japon, après la guerre. Il n'en restait rien et
pourtant, aujourd'hui, 40 ans après ou 50 ans après, ce sont les
premiers pays du monde sur le plan économique. Je pense qu'on n'en est
pas rendu là, mais il y a des enseignements à tirer de là
sur la façon dont ils s'en sont tirés, eux. Et c'est un peu la
question que je vous pose parce que, si on examine juste les budgets du
gouvernement, effectivement, vous avez raison, c'est la spirale vers le bas; il
faut couper ici, il faut augmenter les taxes là, et vous proposez de ne
pas les augmenter, Dieu merci! Avec le niveau qu'elles ont atteint sous ce
gouvernement, ce n'est pas le temps de le faire.
Mais, l'autre volet, c'est d'augmenter la production économique.
Qu'est-ce que vous proposez? C'est vous, l'entreprise, qui le faites.
M. Décary: M. Cléroux va...
M. Cléroux (Pierre): Oui, je pense que notre message est
très clair dans ce sens-là. Il y a 65 % de nos entreprises, des
850 entreprises, qui ont répondu à notre sondage, qui disent
qu'elles veulent voir l'élimination des subventions, sauf à la
recherche, au développement et à l'exportation. Ça, ce
n'est pas nous qui disons ça, mais les entreprises, les
propriétaires d'entreprise mêmes. Ce dont on s'est aperçu,
au cours des années, c'est que les subventions aux entreprises nuisent
à la concurrence sur les marchés. C'est-à-dire que si vous
êtes une entreprise et que votre voisin d'en face ou une entreprise dans
le même marché reçoit une subvention, c'est vous qui
êtes désavantagée. Donc, les propriétaires
d'entreprise aimeraient beaucoup mieux voir une réduction, par exemple,
de la fiscalité ou de la tarification à l'ensemble des
entreprises que de voir...
M. Léonard: ...des programmes.
M. Cléroux: ...des programmes qui donnent des gagnants,
finalement, qui identifient des gagnants. Je reviens un peu à la fin de
votre question: Comment développer l'économie du Québec?
Nous, on pense que le rôle du gouvernement, c'est dans les
infrastructures, des routes qui permettent aux entreprises de livrer la
marchandise, un système d'éducation efficace qui produit des gens
qui savent lire, écrire, qui produit des gens qui sont capables de
travailler en haute technologie. C'est des ressources humaines dont on a besoin
beaucoup plus que des subventions aux entreprises, et c'est comme ça
qu'on va développer le Québec.
En terminant, il y a beaucoup d'études qui sont faites pour
comparer des pays ou des régions d'un même pays qui ont
été fortement subventionnées parce que ces
régions-là avaient été identifiées comme des
régions démunies. Et, ce dont on s'aperçoit, c'est que le
développement économique ou la création d'emplois faits
par les entreprises dans ces deux régions-là sont identiques,
même si une région a reçu beaucoup de programmes d'aide aux
entreprises et l'autre pas. Ce n'est pas les subventions qui créent
des
emplois, c'est l'entrepreneurship. C'est l'entre-preneurship
québécois qui va développer le Québec.
M. Léonard: O.K.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saint-Louis.
M. Chagnon: Merci beaucoup, M. le Président.
M. le Président, j'entendais le député de Labelle
nous parler du Japon et de l'Allemagne d'après-guerre. Peut-être
a-t-il oublié que l'Allemagne a connu le plan Marshall, le Japon a
réussi grâce, entre autres, aux efforts de Mac-Arthur, à
voir une grande partie de l'épargne américain financer une grande
partie de la remontée japonaise.
M. le Président, le groupe que nous entendons est
spécialisé dans le regroupement de petites entreprises. Il est en
grande partie en accord avec le diagnostic du gouvernement à l'effet
qu'il faut vivre selon ses moyens. Vivre selon ses moyens, c'est d'une
importance capitale pour ces entreprises, étant donné que, si
elles ne le font pas, elles crèvent, elles disparaissent. Et la
capacité du gouvernement de s'endetter et d'emprunter est rendue au
stade où à peu près pris comme une petite entreprise qui
aurait vécue au-delà de ses moyens pendant trop d'années,
il n'a plus la capacité, s'il ne modifie pas son approche, de faire en
sorte de conserver la qualité des services qui sont donnés aux
citoyens.
Dans vos conclusions et recommandations, et j'aurai deux questions, vous
nous apportez la suggestion à l'effet de couper les dépenses
fiscales du gouvernement, sauf en ce qui concerne la recherche et le
développement et l'exportation.
Ma première question est la suivante: II y a des dépenses
fiscales qui sont faites dans le but de créer de l'emploi localement,
que ce soit dans le domaine des industries culturelles, que ce soit dans le
domaine de la construction ou en association avec, par exemple, le Fonds de
solidarité, des exemples comme ceux-là, et qui servent à
créer de l'emploi. Est-ce que vous estimez qu'il faudrait
automatiquement faire en sorte de les couper?
Quant à ma deuxième question, je dois aussi saluer le fait
que vous avez été correct sur le plan de la compréhension
de la qualité des services publics par nos fonctionnaires. On ne peut
pas en dire autant de nos amis d'en face qui, en à peine 10 ans, en ont
donné aux fonctionnaires, et aux enseignants, et aux infirmières,
et à tout le monde dans le secteur public comme jamais ils n'en ont eu.
Et on voit ensuite la nouvelle vague, la nouvelle génération des
candidats péquistes qui s'amorce. Le docteur Laurin qui annonçait
aux enseignants qu'ils étaient trop vieux pour enseigner, qu'ils
n'enseignaient pas assez, qu'ils ne travaillaient pas assez. Ça,
c'était ce que l'Opposition officielle nous disait, il y a dix ans.
Vous suggérez un gel des employés de l'État, vous
suggérez aussi un gel de la rémunération globale des
employés de l'État et, semble-t-il, une diminution de ce que vous
concevez comme étant la rémunération, les «fringe
benefits», c'est-à-dire fonds de pension, etc., qui sont les
avantages marginaux associés au salaire dans notre fonction publique. Y
a-t-il d'autres espaces que vous prévoyez dans lesquels on pourrait
couper?
M. Décary: Bien, ça serait déjà un
bon début. Je pense que ça serait déjà accomplir
une grande partie de la tâche. Dans notre milieu, on a tendance à
tomber vite dans le terre-à-terre et on sait fort bien que les travaux
de cette commission indiquent le début d'une nouvelle approche, une
nouvelle approche qui va prendre forme et se développer petit à
petit. Ce n'est pas demain matin que toutes les mentalités vont changer.
Et le message très simple et, je l'espère, clair qu'on a
essayé de livrer aujourd'hui, c'est qu'on reconnaît que le
Québec a d'énormes difficultés dans ses finances et que
ça doit être corrigé. Et, pour que ça soit fait,
ça prend la collaboration de tout le monde dans la
société. Et ça serait hypocrite de notre part, en tant que
représentants d'entrepreneurs, de dire: Bien, on veut que les
fonctionnaires fassent leur part, on veut que les syndicats, que tout le monde
dans la société fasse sa part, mais pas nous. Alors, c'est pour
ça qu'on a indiqué certaines pistes qui nous touchent
directement. (10 h 40)
C'est un début de réflexion, et on essaie de ne pas
être trop dogmatique. C'est vrai qu'en disant qu'il faut éliminer
les subventions, sauf pour recherche et développement, c'est sûr
qu'il va y avoir des cas où le gouvernement devra jongler, puis
étudier, puis faire du cas par cas. Est-ce qu'une entreprise du secteur
privé, qui n'est pas un organisme à but non lucratif, mais une
entreprise à but lucratif qui est dans le domaine culturel, ne peut pas
continuer de recevoir des subventions? Je ne suis pas sûr qu'on soit
prêt à abandonner notre domaine culturel. C'est sûr qu'il va
y avoir des nuances et que le gouvernement devra étudier cas par cas,
mais ce qu'on suggère et le message qu'on livre bien simplement, c'est
qu'il y a de la place dans ce domaine-là, et la douleur que vous pensez
qu'on aurait en nous coupant n'est pas nécessairement là. En tout
cas, on est équipé pour y faire face.
Le Président (M. Lemieux): Merci.
M. le député de Montmorency... Mme la
députée de Taillon, c'est ce qu'on m'avait dit tout à
l'heure, à moins que...
Mme Marois: O.K. Comme je suis sur les employés, je vais
continuer sur ça? Oui, je vais...
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président. Comme c'est dans la
foulée de ce que le député de Saint-Louis a posé
comme questions, je vais y aller maintenant.
Ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue.
M. Décary commence à avoir l'habitude de la
fréquentation de nos commissions parlementaires, et nous
apprécions toujours son point de vue. Le député de
Saint-Louis faisait référence à un passé un peu
plus éloigné; vous faites référence à un
passé un peu plus récent de ce gouvernement où vous
rappelez que, malgré les discours, ce gouvernement a 7 % de plus de
fonctionnaires qu'en 1988. Alors, ce qui nous amène, entre autres,
à être là aujourd'hui.
Cela étant dit, c'est intéressant, et j'ai lu l'annexe qui
accompagne votre document concernant l'étude que vous faites sur la
comparaison entre la rémunération dans le secteur public, le
secteur privé, etc., et les mesures que vous proposez. J'aimerais
peut-être que vous nous expliquiez un peu ce qui vous justifie
d'utiliser, dans le fond, des normes un peu différentes pour faire les
comparaisons, dans le sens où l'État, à cause de son
ampleur et de l'importance de sa tâche, choisit comme normes de
comparaison des entreprises qui ont 200 employés et plus. Vous, vous
dites: On devrait ramener ça à ce que l'on connaît dans
notre secteur, des entreprises de peut-être 50 employés et plus,
si j'ai bien compris les données de votre étude auxquelles vous
faites référence. Alors, j'aimerais vous entendre sur cet
aspect-là.
Le deuxième volet, puis ça va compléter toutes mes
questions, c'est pour permettre de se rappeler que oui, effectivement, au
début des années quatre-vingt, notre gouvernement avait pris une
décision qui était très difficile à prendre, qui a
eu cependant des impacts sur le budget du gouvernement du Québec, et on
l'a vu pendant la décennie des années quatre-vingt, où on
s'est maintenu dans des balises acceptables, compte tenu des critères
avec lesquels on se comparaît, entre autres le taux d'inflation. C'est
évident cependant que le geste qui avait été posé
à ce moment-là avait été assez brutal et avait
entraîné une réaction négative compréhensible
de la part des fonctionnaires et des gens qui travaillent dans les services
publics, dans le parapublic.
Vous suggérez un peu une piste semblable, à savoir le gel
des salaires. Est-ce que vous croyez qu'au niveau des modalités il y
aurait des façons de faire en sorte que votre propo^ sition soit
assumée ou acceptée par cette fonc-\ tion publique qui,
justement, est, à mon point de ^ vue, compétente, comme vous le
mentionniez, et efficace même si, comme dans n'importe quelle
organisation, elfe pourrait sans doute l'être plus c'est le cas dans les
grandes entreprises, de toute façon aussi. voilà le sens des
questions que je voulais soulever avec vous et sur lesquelles j'aimerais avoir
des commentaires.
M. Cléroux: La première partie, de la question, la
raison pour laquelle on inclut non seulement les grandes entreprises mais aussi
les entreprises ayant moins d'employés, dans notre étude, c'est
qu'on croit fermement que la rémunération dans le secteur public
doit être comparée non seulement avec de grandes entreprises, mais
avec l'ensemble du secteur privé. Comme vous le savez, depuis les 10
dernières années, la totalité des emplois
créés au Québec l'a été par des entreprises
qui emploient moins de 50 employés.
Mme Marois: Oui, la petite et la moyenne.
M. Cléroux: Donc, pour nous, c'est important pour deux
raisons: Parce que si on a une fonction publique qui a des salaires plus
élevés que l'ensemble du secteur privé, non seulement
ça augmente les taxes de l'ensemble des travailleurs et des entreprises,
donc, ça nous rend moins compétitifs, mais aussi, étant
donné que le secteur privé compétitionne pour aller
chercher des travailleurs avec le secteur public, si vous avez des emplois dans
le secteur public qui sont rémunérés, d'une façon
globale, d'une façon plus élevée, ça crée
des pénuries de main-d'oeuvre dans certains secteurs pour le secteur
privé. Donc, pour nous, c'est pour ça que c'est vraiment
important d'inclure tout le secteur privé.
Pour ce qui a trait à des mesures à prendre pour en
arriver à un équilibre, on pense que ce qui doit être
comparé, c'est la rémunération globale. Aujourd'hui, nos
études à nous, pas seulement à nous, mais celles de
l'institut de la rémunération arrivent aux mêmes
conclusions: il y aurait un écart de 10 % entre les secteurs public et
privé. Nous, on pense qu'on devrait geler les salaires et les
compensations, donc, toute la rémunération globale du secteur
public, jusqu'à temps qu'on ait un équilibre entre le
privé et le public. Nous, on pense que ça devrait être le
secteur privé qui dirige l'évolution des salaires au
Québec, parce que c'est le secteur privé qui fait face à
la concurrence et à ses limites, à la limite de
l'évolution de l'économie du Québec, et non le secteur
public. Donc, la rémunération du secteur public devrait
être comparable et devrait suivre, en fait, l'évolution de la
rémunération globale dans le secteur privé.
Mme Marois: Ça pourrait être aussi une comparaison
inter-États. Par exemple, le Québec \par rapport à ce qui
se passe dans les autres
provinces, par rapport à ce qui se passe aux
États-Unis.
M. Cléroux: Exactement. Et on voit que, dans la plupart
des provinces...
Mme Marois: De fonction publique à fonction publique, on
s'entend, parce qu'à ce moment-là ça n'a pas d'effet sur
la compétitivité des entreprises si la charge est la même
partout.
M. Cléroux: C'est ça. Mme Marois: On s'entend?
M. Cléroux: Oui. Mme Marois: D'accord.
Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la
députée de Taillon.
M. le député de Bertrand.
M. Beaulne: Oui, moi aussi, je tiens à vous
féliciter pour la qualité de votre rapport.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse. J'ai voulu,
peut-être, aller au-delà de mes prérogatives, M. le
ministre des Finances, mais je vois que vous me surveillez. Vous me surveillez,
M. le ministre des Finances!
Alors, M. le député de Prévost.
M. Forget: Merci, M. le Président. Voici, je voudrais vous
féliciter pour votre document qui m'amène à
réflexion. Vous avez mentionné qu'il faudrait quand même
penser à couper au niveau de l'État. Dans le domaine de
l'agro-alimentaire, le domaine de l'agriculture, est-ce qu'on devrait
plutôt essayer de couper là-dedans ou si on devrait plutôt
faire de la recherche additionnelle et essayer de créer de l'emploi au
niveau de l'agriculture?
M. Décary: Je pense que tous les groupes au Québec
seront appelés à faire des sacrifices. Je pense que du
côté agricole, vous savez que c'est probablement le secteur qui a
le plus été subventionné dans le passé. Ces
réalités-là sont appelées à changer pour
toutes sortes de facteurs, dont l'existence du GATT qui met d'énormes
pressions sur les pays pour changer leur politique de subventions. Alors, nous
croyons que, de toute façon, quelles que soient nos
délibérations, quelle qu'en soit leur qualité, les forces
internationales vont faire en sorte qu'il va y avoir des changements radicaux
qui vont être apportés du côté agricole. Alors, c'est
peut-être le temps de s'ajuster et non pas de faire un lobby contre des
choses inévitables, mais plutôt de constater la
réalité et essayer de s'adapter le plus rapidement possible. Je
pense qu'il y a d'énormes économies qui peuvent être faites
du côté agricole pour le plus grand bien non seulement du
gouvernement du Québec, mais pour l'ensemble des consommateurs.
M. Forget: Une autre petite question: Au niveau des travailleurs
agricoles, vous savez qu'à toutes les années nous sommes
obligés d'aller chercher quand même des travailleurs à
l'extérieur. Est-ce qu'il y aurait un effort à faire pour pouvoir
encourager notre main-d'oeuvre du Québec pour travailler à
l'intérieur de la province? (10 h 50)
M. Décary: Oui. Ça, c'est une excellente question
et ça dépasse un peu le cadre strict des finances publiques du
Québec. Ça implique aussi les agissements du gouvernement
fédéral.
Une des choses dont on devrait s'apercevoir, en tant que
société, c'est qu'on ne peut pas continuer à
dépenser, à vivre au-delà de nos moyens. Quand on a des
emplois qui sont disponibles au Québec - et j'admets que les emplois
dans le secteur agricole ne sont pas faciles, j'en sais quelque chose, j'ai
fait ça dans ma jeunesse et c'est très difficile - mais c'est des
emplois qui peuvent être rémunérateurs, et on devrait
encourager nos jeunes qui, présentement, sont sans emploi à
accepter le défi de travailler dans nos entreprises, même celles
où on exige un effort constant, un effort physique.
Et, de ce côté-là, je pense que les gouvernements
devraient être encouragés à prendre des mesures comme
celles qui ont été prises par le gouvernement
fédéral où, très modestement, on a dit: Bon, il
faut arrêter de lancer toutes sortes de nouvelles choses dans notre
programme d'assurance-chômage. Et nous, on a appuyé fortement la
décision du gouvernement fédéral de ne pas accorder de
bénéfices à ceux qui quittent volontairement un emploi
sans raison valable. Là-dessus, je pense que des mesures comme
celle-là, prises de plus en plus souvent par des gouvernements, vont
faire en sorte que les Québécois seront peut-être
encouragés à accepter des bons emplois qui sont disponibles
dès maintenant chez nous.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Beaulne: Merci, M. le Président.
Comme j'avais commencé à le dire tout à l'heure, je
vous félicite de votre mémoire. Il y a une recommandation que
vous faites concernant l'aide à l'exportation pour les petites et
moyennes entreprises comme un des programmes de subvention qui devraient
être maintenus.
Comme vous le savez peut-être, le ministère des Affaires
internationales jongle présentement avec l'idée de couper
certains volets du programme APEX, Aide à la promotion des exportations
pour les entreprises qui visent les marchés européens et
américains, ce qui m'apparaît un
peu étrange, mais, enfin, c'est une idée qui circule au
ministère des Affaires internationales. J'aimerais que vous nous fassiez
part de vos commentaires à ce sujet-là et, d'autre part, que vous
nous parliez un peu de la façon dont vous concevez ces programmes
à l'exportation, les lacunes actuelles ou ce que vous voudriez y voir
amélioré pour rendre le programme plus efficace.
M. Cléroux: Ce dont on s'est aperçu, au cours des
dernières années, c'est que le problème des PME à
l'exportation, les propriétaires d'entreprise ont un produit qu'ils
vendent bien souvent sur le marché québécois, sur le
marché canadien. Ils sont très familiers avec toute la
technologie qui englobe leur produit. Le problème qu'ils ont, c'est
d'être capables de comprendre dans quelle niche ils pourraient vendre
leur produit sur le marché américain, par exemple. Ce dont on
s'est aperçu, c'est qu'ils n'ont pas besoin de subventions pour faire
ça. Ce dont ils ont besoin, c'est de l'aide technique, bien souvent, qui
est disponible présentement dans certains bureaux du Québec
à l'extérieur. Et on s'est aperçu que c'est cette forme
d'aide là, d'identifier un marché précis, qui est vraiment
importante.
Une autre forme d'aide, c'est qu'il y a des cours présentement
disponibles par le gouvernement du Québec qui aident les
propriétaires d'entreprise à identifier une stratégie,
comment trouver un agent pour vous représenter aux États-Unis. Ce
n'est pas évident d'en trouver un, particulièrement quand vous
êtes un propriétaire de petite entreprise qui n'a pas
d'idée globale du commerce international.
Donc, on s'est aperçu que c'est l'aide technique, l'aide sur les
marchés à travers les bureaux du Québec qui doit
être encouragée, gardée et développée
plutôt que des subventions directes à l'entreprise.
M. Beaulne: À ce niveau-là, sous le gouvernement du
Parti québécois, un des volets du programme APEX consistait
justement à partager avec les entreprises les frais afférents
à l'embauche d'un intermédiaire, si vous voulez, ou d'un
démarcheur ou d'un représentant sur les marchés
étrangers. Ce volet a été éliminé dans les
programmes actuels. Alors, si je vous comprends bien, vous trouvez que ce
serait là un élément important à
réintroduire dans les programmes?
M. Cléroux: Oui. Encore une fois, je reviens toujours
à la même notion, mais je vais vous donner un exemple très
concret. Trois petites entreprises manufacturières du Bas-Saint-Laurent
se sont mises ensemble et ont décidé d'avoir un agent commun
à Boston pour travailler à trouver des marchés
adéquats pour leurs produits qui sont très différents.
Sauf que ces gens-là ont fait une collaboration parce que,
évidemment, chaque firme n'avait pas les moyens de se payer un agent aux
États-Unis, mais, en étant trois, ils ont réussi à
le faire. Donc, l'argent n'est pas tout le temps le problème crucial
pour faire de l'exportation. C'est plutôt une aide d'identifier les
marchés, c'est plutôt une aide de se rendre aux foires
d'entreprises aux États-Unis ou encore d'identifier comment trouver un
agent, se faire un plan de marketing. C'est vraiment de ça que les
entreprises ont besoin plutôt que de l'aide financière.
M. Beaulne: Une dernière petite question. Pour une
population comme le Québec dont l'économie dépend presque
à 40 % du secteur de l'exportation, on constate que, malheureusement,
à peine environ 13 % des petites et moyennes entreprises se consacrent
à l'exportation alors que, dans des économies de taille
semblable, en Hollande, par exemple, c'est jusqu'à 45 % des petites et
moyennes entreprises qui sont orientées du côté de
l'exportation. Comment expliquez-vous que ce soit un pourcentage si faible des
PME qui s'intéressent à l'exportation?
M. Cléroux: Je pense qu'il y a deux raisons.
La première, les coûts de production au Québec et au
Canada - le Québec n'est pas unique dans ce sens-là, mais en
partie au Québec - sont très élevés. Donc, pour
réussir à vendre ses produits aux États-Unis, une firme
doit vraiment avoir un produit différent. C'est impossible
présentement pour une firme manufacturière au Québec de
vendre son produit sur le marché américain si ce produit est
produit là-bas, parce que, avec nos coûts de main-d'oeuvre, avec
le fardeau fiscal, les coûts de production sont plus
élevés. Ça, c'est la première raison.
La deuxième raison, c'est qu'il y a toute une culture à
encourager les petites entreprises à développer les
marchés extérieurs. Ça se fait de plus en plus depuis les
dernières années, mais, encore là, il y a du travail
à faire et, pour ça, il faut absolument l'aide, comme je le
disais tantôt, de bureaux à l'extérieur du Québec
pour aider les entreprises à aller chercher d'autres marchés.
Une voix: Alternance, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): C'est bien, M. le
députe.
M. le président du Conseil du trésor.
M. Johnson: Merci. Je veux souhaiter la bienvenue moi aussi
à M. Décary et M. Cléroux.
Si on parle de services de qualité, et c'est ce qu'on essaie de
maintenir par le contrôle des dépenses, parce que c'est ça,
l'objectif, on essaie de maintenir les services publics, on essaie de baisser
les impôts, on essaie de créer des emplois, la seule voie qu'on a
identifiée pour le moment, c'est de contrôler les dépenses
publiques. Je pense que vous l'avez fait ressortir.
C'est comme ça que ça se lit: fiscalité, emploi,
dépenses publiques.
Un des gros postes de dépenses, vous l'avez souligné,
c'est la rémunération. Vous dites que nos fonctionnaires sont en
avance. Bon! Vous dites qu'on devrait réduire l'écart qui existe
entre le privé et le public. C'est la politique qu'on suit quand
même depuis une dizaine d'années au Québec, d'essayer
d'aligner la rémunération du secteur public globalement prise de
20 000 000 000 $ sur ce que ça coûterait pour faire faire
ça avec les prix du privé. On n'a pas la même pyramide,
là. Je pense qu'on se rend compte que ce serait difficile dans le
privé de trouver quelqu'un qui va mener une entreprise qui a un
siège social, deux centres administratifs, des dizaines de points de
services sur le territoire, des milliers d'employés et des centaines de
véhicules pour 112 500 $. Ça, je suis sûr que, chez vos
membres, ça n'existe pas, quelqu'un qui va accepter ça. (11
heures)
Par ailleurs, le salaire minimum dans le secteur public est autour de 11
$, il n'est pas à 5,85 $. On a écrasé la pyramide. On en a
convenu, pendant 25 ans, que c'était comme ça qu'on construisait
la pyramide des emplois. Il n'en reste pas moins qu'au global toutes les
mesures nous permettent de dire qu'il y a une avance du public sur le
privé. Ce qu'on dit là - vous parlez du gel de la
rémunération - moi, j'essaie de maintenir une main-d'oeuvre de
qualité et, pour qu'elle le soit, il faut qu'elle soit
motivée.
Ce qu'on fait, évidemment, à ce moment-ci, c'est de dire
qu'on va stabiliser, sur cinq ans, la facture de rémunération
dans le secteur public. Il faut que les gens comprennent que ça n'exclut
pas. Au contraire, ça nous amène à dire quelle sorte de
gain de productivité on peut faire, comment réorganiser le
travail pour davantage responsabiliser et motiver les gens, enfin, de
distribuer les gains de productivité à nos travailleurs à
l'intérieur des 20 000 000 000 $ qu'est la facture globale. Mais encore
faut-il toujours ne pas perdre de vue... Si on réussit à geler,
sur cinq ans, la rémunération globale, on devrait normalement
écraser l'écart global pour la facture des services.
Vous avez, par ailleurs - c'est le point que je voulais soulever - dit
que si on doit assurer la comparaison entre le privé et le public, on
devrait, a dit la députée de Taillon, nous assurer de la
comparabilité entre États. Donc, nos travailleurs du secteur
public devraient se comparer avec les travailleurs d'autres endroits, et M.
Cléroux semble dire que c'est une excellente idée.
Il y a juste un problème avec ça. C'est une excellente
idée en soi à condition que les États puissent être
comparables en termes de richesse et de capacité de payer. On ne peut
pas prétendre avoir les mêmes services au même prix par nos
gens dans une économie qui est 30 % moins riche ou moins prospère
que celle de son voisin. L'inverse est vrai, et je pense qu'il faut faire
attention, dans les comparabilités, de toujours demeurer à
l'intérieur de notre capacité de payer, de nos moyens, pas ceux
de l'Ontario, pas ceux de l'État de New York, pas ceux de la France, de
l'Autriche ou de qui que ce soit.
L'idée, là, c'est de vivre à l'intérieur de
nos moyens, pas de ceux des autres. Dans ce sens-là, je voulais corriger
le tir. Je pense que j'ai senti que ça avait peut-être
dérapé un petit peu - je le dis sans méchanceté -
dans les échanges. Je ne voulais pas qu'on conclue qu'on doive
nécessairement avoir la même facture que l'Ontario au titre des
services publics. C'est d'ailleurs ça, le problème.
Le Président (M. Lemieux): M. Décary.
M. Décary: Bien, je peux tout de suite clarifier. Quand on
parle de comparabilité, ce n'est pas nécessairement prendre les
mêmes dollars payés en Ontario ou à New York pour les
accorder à nos fonctionnaires ici. Comparabilité, pour nous,
ça veut dire, avec les ressources qu'on a, de donner un traitement
analogue, semblable, comparable à nos fonctionnaires. C'est dans la
façon que l'État traite ses fonctionnaires, que leur partie de la
richesse soit comparable à celle des autres, mais pas
nécessairement que le chèque de paie soit identique.
M. Johnson: Je vous remercie des précisions. Vous avez
bien raison.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor.
M. le député de Montmorency.
M. Filion: Merci, M. le Président.
J'aimerais saluer les représentants de la
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, les
remercier pour leur participation et la qualité de leur
mémoire.
Moi, j'aimerais peut-être préciser davantage ou essayer de
comprendre un peu mieux, parce que c'est quand même gros quand on dit...
et une de vos recommandations: Les subventions aux entreprises doivent
être éliminées. Jusqu'où on va avec ça?
Est-ce qu'on prend les abris fiscaux, en général, à la
capitalisation et on dit: II n'y en a plus, plus de SPEQ, plus de REA, plus
aucun incitatif de cette nature. Quelle est votre pensée à ce
niveau-là?
M. Décary: Notre pensée, puis c'est le message
général qu'on livre aujourd'hui, c'est qu'on est, en tant que
société, dans la misère quand notre gouvernement a un si
important déficit. Donc, il faut faire quelque chose, et on ne se veut
surtout pas dogmatique. On n'est pas
ici pour prêcher qu'on a le monopole de la vérité.
Ça, ce n'est certainement pas vrai. On sait que tout le monde devra
faire sa part.
C'est pour ça qu'on dit, en tout premier lieu: Nous, on est
prêts à faire notre part. Mais, en même temps, on
réalise aussi qu'un État a besoin d'un gouvernement qui a une
certaine marge de manoeuvre. Si, pour des besoins spécifiques,
l'État...
Et là-dessus, je suggérerais une chose importante qui
pourrait être faite, c'est d'améliorer ou de donner un plus grand
rôle aux parlementaires. Je pense que ça serait important que le
gouvernement ait une marge de manoeuvre, qu'il réduise les subventions,
oui, si l'ensemble des parlementaires jugent qu'il est nécessaire d'en
garder comme pour la recherche et le développement, pour l'aide à
l'exportation ou d'autres secteurs qui peuvent se dessiner bientôt, on
est ouverts à ça. Le mot «éliminées»,
je serais prêt... Parce qu'il faut toujours, quand on est dans le trouble
comme on l'est aujourd'hui, être prêt à dialoguer,
être prêt à faire des compromis, et j'en fais un tout de
suite: de changer et modifier le mot «éliminées» par
le mot «réduites». Je pense que c'est une concession et je
pense que beaucoup de gens dans notre société vont être
obligés d'en faire, des concessions. J'en fais une, puis je suis
prêt à en faire d'autres pour aider à améliorer
notre situation.
M. Filion: Toujours...
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie. Je m'excuse,
M. le député de Montmorency. Malheureusement, le temps est...
M. Filion: J'avais deux minutes, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Non, regardez, j'ai
vérifié. Est-ce qu'il reste encore du temps?
M. Filion: J'avais deux minutes pour poser...
Le Président (M. Lemieux): Non, c'est terminé.
M. Filion: C'est terminé?
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député de Montmorency, mais je me dois de faire respecter les
règles de procédure.
Alors, je vous remercie de votre participation à cette commission
parlementaire.
Nous allons suspendre pas plus qu'une minute ou une minute et demie,
pour permettre à l'Association des diplômés de
l'École des hautes études commerciales de bien vouloir prendre
place à la table des témoins, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 11 h 6)
(Reprise à 11 h 7)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît, parce que nous allons terminer nos travaux à midi,
exactement. Alors, voulez-vous, s'il vous plaît, prendre place? Nous
commençons dans 10 secondes.
Alors, la commission du budget et de l'administration reprend ses
travaux. Nous allons maintenant entendre l'Association des
diplômés de l'École des hautes études
commerciales.
Permettez-moi de vous rappeler très brièvement les
règles de procédure. Vous disposez de 20 minutes pour
l'exposé de votre mémoire. Suivra un échange entre les
deux formations politiques à temps égal.
Alors, j'inviterais la personne qui doit nous présenter le
mémoire à bien vouloir, s'il vous plaît, s'identifier, nous
présenter ses collègues et nous faire part de son
exposé.
Association des diplômés de
l'École des hautes études commerciales
M. Huberdeau (André): Merci beaucoup, M. le
Président.
Madame, messieurs, bonjour. Mon nom est André Huberdeau. Je suis
président du conseil d'administration de l'Association des
diplômés HEC et vice-président du groupe Desseau. C'est
¦* avec plaisir que je vais vous présenter mes collègues
pour la présentation de ce matin.
Immédiatement à ma droite, j'ai M. Benoît Cyr,
président de l'Association des diplômés HEC et
associé du Groupe Mallette, Maheu. En continuant vers la droite, M.
Daniel Zizian, vice-président exécutif de notre Association et,
à la droite, M. François Leroux, professeur de l'Institut
d'économie appliquée de l'École des hautes études
commerciales. À ma gauche, j'ai aussi M. Claude Désy, membre de
notre conseil d'administration et associé chez Martineau, Walkers, et M.
Renaud Lachance, professeur au Département des sciences comptables de
l'École des hautes études commerciales de Montréal. Alors,
merci beaucoup pour le temps qui nous est alloué et pour nous donner la
chance de faire notre présentation, ce matin.
J'aimerais juste vous rappeler qui on est et rapidement quels sont nos
grands objectifs de présentation de ce matin.
L'Association a été créée en 1920 et elle
représente plus de 22 000 diplômés à travers le
monde. Elle constitue donc un des plus importants réseaux de
gestionnaires du Québec, et nous sommes tournés toujours vers
l'action et l'efficacité. Nos membres sont présents dans tous les
secteurs de l'activité économique. 32 % oeuvrent dans les petites
et moyennes entreprises du Québec, 20 % dans les entreprises nationales,
12 % au sein d'entreprises multinationales et 17 % au sein d'organismes publics
et parapublics. (11 h 10)
Nous sommes tous issus de la plus vieille et de la plus importante
école de gestion du Québec et du Canada. L'École des
hautes études commerciales est de loin la plus importante au Canada. Nos
membres oeuvrent au moins sur cinq continents et ils travaillent activement
dans les entreprises en tant que gestionnaires. L'École des hautes
études commerciales à chaque année reçoit plus de
10 000 étudiants, soit de jour ou de soir. Nous sommes très
concernés par cette commission parlementaire et par la démarche
que le gouvernement a entreprise pour améliorer la gestion de
l'État et la gestion des finances publiques.
Notre présentation, donc, se divise en deux parties. Tout
d'abord, nous vous donnons nos dispositions de principe pour guider votre
réflexion pour la réforme a amorcer. Par la suite, nous vous
donnerons sept recommandations précises dans le but, justement,
d'améliorer la gestion de l'État et la gestion des finances
publiques. Immédiatement, M. le Président, je passerai la parole
à M. Daniel Zizian, vice-président de l'Association des
diplômés HEC.
M. Zizian (Daniel): Mesdames, messieurs, les débats sur le
financement des services publics et, plus encore, la présentation des
budgets gouvernementaux montrent toujours combien les partis politiques et les
groupes de pression peuvent laisser croire que les politiques des gouvernements
peuvent influencer significativement la conjoncture économique du Canada
et du Québec. La population, influencée par les commentateurs et
les analystes, partage largement ce point de vue.
L'Association des diplômés HEC ne partage pas, cependant,
cette opinion. Au contraire, elle pense que les responsables des finances
publiques ont une emprise limitée sur la conjoncture économique
québécoise. Devant cette constatation, nous soutenons les
responsables des finances publiques lorsqu'ils rappellent les limites de leur
action. Nous pensons que pour démontrer l'effet exact de leur action,
les responsables des finances publiques doivent assurer la transparence des
données statistiques, des résultats obtenus par les programmes
gouvernementaux et aussi de la gestion des affaires publiques. Nous croyons
aussi que les responsables des finances publiques ne sont pas suffisamment
soutenus lorsqu'ils prennent de bonnes décisions ou lorsqu'ils font
preuve de courage. C'est dans cette optique que nous vous présentons dix
positions de principe qui, nous croyons, devraient sous-tendre l'action
gouvernementale et également sept recommandations.
La première position de principe est la suivante. Le gouvernement
québécois ne peut relancer à lui seul l'activité
économique. Pour y parvenir, il doit s'assurer la collaboration des
autres provinces, du gouvernement fédéral et du secteur
privé. Les responsables des finances publiques ont raison lorsqu'ils
soulignent que leur capacité de stimuler la conjoncture
économique est limitée. Il est, par exemple, évident que,
malgré les nombreuses mesures parfois coûteuses prises pour
relancer l'économie, le taux de chômage est resté
préoccupant.
Le rôle de l'État est d'assurer une gestion efficace des
finances du pays et d'instaurer des conditions favorables à son
développement plutôt que de tenter de modifier les lois du
marché. La situation économique du Québec dépend
largement de la conjoncture aux États-Unis. Cette réalité
va se renforcer, notamment à cause de la globalisation des
marchés et suite à l'Accord de libre-échange
nord-américain. Dans ces conditions, l'action du gouvernement
québécois doit atténuer les effets d'une récession
ou accentuer les avantages d'une période de croissance
économique. Pour y parvenir, cependant, il doit s'assurer la
collaboration du gouvernement fédéral, des autres provinces et du
secteur privé.
Deuxième position de principe. Le gouvernement doit profiter des
périodes de conjoncture économique favorables pour assainir les
finances publiques. Si les gouvernements ont peu d'emprise sur les cycles
économiques, ils peuvent cependant profiter des périodes de haute
conjoncture pour réduire leur endettement et préparer les
inévitables périodes plus difficiles. Le gouvernement du
Québec et celui du Canada sont entrés dans une période de
récession sans marge de manoeuvre. L'incapacité de réduire
les déficits ne peut s'expliquer par le seul manque de volonté
politique des gouvernements.
En effet, les commentateurs économiques et politiques ainsi que
de nombreux groupes de pression portent une part de responsabilité en
refusant de soutenir, voire en combattant les politiques réalistes qui
tiennent compte des ressources effectives de l'État. Bien sûr,
l'endettement a permis pendant un certain temps de pallier à
l'incapacité de présenter des budgets mieux
équilibrés en période de haute conjoncture. Mais ce type
de gestion a des limites que nous semblons avoir atteintes.
La crise de l'endettement que nous traversons actuellement et qui
paralyse l'action gouvernementale pourrait toutefois se montrer salutaire si
elle aidait les décideurs et les commentateurs à comprendre la
nécessité de revenir à une gestion plus réaliste
des finances publiques. Nous devrions en tirer des conclusions pour l'avenir,
nous rendre compte qu'il est irresponsable de demander et de décider des
mesures de stimulation de l'économie au moment où
l'économie se porte bien par elle-même. Ce faisant, au lieu de
réduire l'effet des cycles économiques, nous les
renforçons.
Si nous voulons que le gouvernement assure une certaine stabilité
de l'économie, nous devons lui demander de se montrer raisonnable en
période de croissance. Sinon, nos gouvernements se trouveront sans marge
de manoeuvre dès la
prochaine période de ralentissement économique. Autrement
dit, si l'on tire les feux d'artifice en plein jour, il ne faut pas
s'étonner que les caisses soient vides quand arrive la noirceur.
Troisième position de principe. L'endettement a ses limites. Tout
en réduisant son endettement relatif, le gouvernement
québécois doit obtenir que le gouvernement fédéral
s'engage également dans cette voie sans transférer son
déficit. L'Association des diplômés HEC est convaincue que
le gouvernement du Québec doit garder le contrôle de son
endettement. Toutefois, l'histoire a montré que, lorsque le
Québec fait preuve de sagesse dans ce domaine, le gouvernement
fédéral s'empresse de lui refiler de nouvelles charges
financières.
Tant que cette attitude, appelée communément pelletage,
sera appliquée par le gouvernement fédéral à
l'égard des provinces et par le Québec à l'égard
des municipalités, tout effort d'assainir les finances publiques au
Canada restera vain et, par conséquent, les efforts du Québec
auront un effet limité. Il faudra donc que tous les niveaux de
gouvernement au Canada consentent un effort concerté d'assainissement
des finances publiques avant qu'une politique québécoise puisse
se montrer vraiment efficace.
Quatrière position de principe. La taxation a ses limites. Le
gouvernement ne peut plus accroître le niveau de taxation. Nous estimons
que tout nouvel accroissement du niveau de taxation actuel serait
contre-productif, notamment parce qu'il encouragerait encore le travail au
noir. De plus, à cause de la mobilité des personnes, du capital
et du travail, tout nouvel accroissement de la fiscalité
pénaliserait immédiatement l'économie
québécoise, diminuant la compétitivité de nos
entreprises et décourageant les multinationales étrangères
à investir au Québec. Le gouvernement pourrait être
tenté de surtaxer les plus gros salaires. Ce genre de mesure a toujours
été très populaire. Pourtant, il est illusoire
d'espérer augmenter les rentrées fiscales de cette
manière. En effet, la proportion des personnes qui gagnent un salaire
très élevé est trop faible pour augmenter sensiblement les
rentrées fiscales. Par contre, cette politique découragerait
l'esprit d'entreprise.
La cinquième position de principe est la suivante: Les sommes
allouées aux programmes sociaux ne peuvent pas dépasser la
richesse que l'économie québécoise peut créer. Nous
sommes particulièrement préoccupés par le fait qu'on ne
puisse pas s'attendre à ce que la richesse du Québec s'accroisse
au même rythme que les besoins exprimés par la population. Cela
signifie que les possibilités de financement des programmes sociaux ne
croîtront pas aussi vite que les besoins. Malgré la multitude des
besoins sociaux, on ne peut offrir plus de services que ce que l'État
peut réellement payer. Le financement des services publics est
forcément limité par la richesse collective et par la croissance
de celle- ci.
Sixième position de principe. Tout effort de contrôle du
déficit doit s'orienter du côté des dépenses.
L'endettement et les rentrées fiscales étant limitées, la
lutte contre les déficits actuels passe obligatoirement par une
réduction des dépenses. Nous reconnaissons les efforts entrepris
au cours des années passées pour contrôler la croissance
des dépenses de l'État. Ces efforts ont permis d'ailleurs de
réduire certains gaspillages. Cependant, la réduction des
dépenses nous mène vers des choix plus difficiles. Il va falloir
supprimer ou modifier des services offerts à la population.
Septième position de principe. Il est normal que les responsables
des finances publiques cherchent à diminuer l'utilisation abusive de
programmes gouvernementaux. La limitation des dépenses gouvernementales
doit également éviter que des personnes abusent des programmes
sociaux. Le gouvernement doit aider avec détermination les personnes
aptes au travail à retrouver un emploi, notamment en améliorant
les programmes de formation des chômeurs et des
bénéficiaires des programmes de sécurité du revenu.
Quelques groupes de pression très actifs semblent refuser de comprendre
que chaque somme détournée en abusant des programmes sociaux est
en fait retirée à d'autres citoyens qui y ont droit. Il est donc
normal qu'en plus de mesures d'intégration au marché du travail,
le gouvernement cherche à réduire le nombre d'abus, notamment en
s'efforçant de distinguer les personnes aptes au travail de celles qui
ne le sont pas. Il doit cependant le faire en respectant le droit des citoyens
à la vie privée.
Huitième position de principe. Le gouvernement doit poursuivre
ses initiatives pour instaurer la vérité des prix et sensibiliser
la population au coût des services publics. Le gouvernement devrait faire
connaître le coût exact de certaines prestations, par exemple dans
le domaine des soins de santé. La population prendrait alors conscience
des coûts et de l'intérêt de prévenir les abus. Le
fait de connaître le coût exact des services peut engendrer des
choix différents qui tiennent mieux compte de la capacité
financière de la société. Les citoyens doivent
connaître le coût des programmes sociaux, des allégements
fiscaux et des mesures incitatives de toutes sortes. Nous soutenons donc le
gouvernement lorsqu'il recherche une réelle transparence des prix. (11 h
20)
Neuvième position de principe. Le rôle des
municipalités est de fournir des services à la population et non
de redistribuer la richesse. La réforme de la fiscalité
municipale de 1979 proposait que les services municipaux soient tarifés
afin d'établir une meilleure équité fiscale. En effet,
nous pensons que les contribuables doivent payer les services municipaux en
fonction de l'utilisation qu'ils en font plutôt qu'en
fonction de leur capacité de payer. Nous pensons que la
tâche de redistribuer la richesse est du ressort exclusif des
gouvernements dits supérieurs et que les municipalités qui s'y
aventurent outrepassent leur rôle.
Dixième position de principe. La population accepte plus
facilement la taxation d'un gouvernement qui explique exactement où vont
les fonds publics et qui montre qu'il les utilise de façon efficace. Le
rôle du Vérificateur général est de favoriser le
contrôle par les élus des fonds et des biens publics. Son
rôle est essentiel dans un système démocratique dans la
mesure où les rapports du Vérificateur général sont
publics, car ils permettent aux citoyens de savoir comment le gouvernement
utilise ses fonds publics. Nous pensons que ce rôle de contrôle et
de vérification devrait être élargi afin qu'il puisse
donner une vision plus précise de l'origine et de la destination de
toutes les sommes prélevées auprès de la population.
Il est fréquent de voir des ministères et autres
organismes gouvernementaux établir le bilan de politiques ou de
programmes qu'ils ont mis sur pied. Étant donné que ces
programmes ou ces politiques impliquent l'utilisation de fonds publics, le
Vérificateur général devrait sanctionner les rapports
publiés, assurant ainsi la population de l'objectivité des
données fournies et lui permettant d'évaluer la gestion des fonds
publics. Par ailleurs, lorsque tous les contribuables auront la conviction que
leurs impôts servent à soutenir des personnes qui en ont
réellement besoin, leur ouverture et leur
générosité à l'égard des plus démunis
ne pourra que croître.
Je cède maintenant la parole au président de
l'Association, M. Benoît Cyr, qui, à la lumière des 10
positions de principe énoncées, vous fera part de sept
recommandations de notre Association.
M. Cyr (Benoît): Premièrement, les programmes
gouvernementaux doivent être remis en question automatiquement et
régulièrement. Lors de leur mise en place, les programmes
gouvernementaux devraient être le plus souvent possible assortis d'une
clause prévoyant leur extinction automatique après une
durée limitée. Avant qu'ils ne soient reconduits, leur
efficacité et leur pertinence devraient être clairement
démontrées. Cette clause dite clause «sunset» oblige
une gestion très efficace, provoque l'abandon sans acte administratif ou
législatif des programmes inutiles et inefficaces et, enfin, encourage
l'action rapide et la justification de la prolongation des programmes.
Deuxièmement, l'efficacité des programmes gouvernementaux
doit être connue du public. Les différents rapports du
Vérificateur général ainsi que tous les autres rapports
portant sur l'efficacité des programmes, des gestes et des actions du
gouvernement et de ses constituants devraient être rendus publics au fur
et à mesure où ils sont connus. Actuellement, tous les rapports
du Vérificateur général sont publiés en même
temps, une fois l'an, et passent, somme toute, inaperçus, à
l'exception bien sûr de quelques anecdotes croustillantes, souvent
banales et laissant dans l'ombre les recommandations importantes et
pertinentes. De même, tout rapport portant sur l'efficacité de
programmes gouvernementaux et politiques, préparé par les
ministères et organismes du gouvernement, devrait être
sanctionné par le Vérificateur général et rendu
public.
Troisièmement, les chevauchements administratifs doivent
être éliminés. Tant dans ses relations avec le gouvernement
fédéral qu'avec les municipalités et les commissions
scolaires, le gouvernement du Québec doit poursuivre ses efforts pour
éliminer les chevauchements administratifs qui sont coûteux pour
les contribuables et qui augmentent les tracasseries administratives. En
donnant l'exemple, vous devrez également encourager vos partenaires
à éliminer les dédoublements entre eux, par exemple, la
double taxation municipale et scolaire. Bien sûr, certains chevauchements
peuvent se justifier par les outils d'intervention économique qu'ils
procurent. Mais un avantage n'est réel que si le bénéfice
engendré est supérieur au coût supporté par
l'ensemble de la population.
Les contribuables québécois n'ont plus les moyens de
supporter plusieurs structures administratives qui se chevauchent. Ces
chevauchements doivent disparaître, et c'est au palier gouvernemental le
plus efficace dans le domaine de gérer la juridiction. Les
entités administratives où existent des chevauchements devront
justifier leur distinction pour continuer d'exister et non tenter de se
distinguer pour justifier leur existence.
Quatrièmement, la TPS et la TVQ doivent être
harmonisées. Preuve qu'on se soucie parfois d'efficacité et qu'il
y a possibilité de s'entendre avec le fédéral, le
gouvernement du Québec annonçait, il y a environ deux ans, qu'il
harmoniserait la taxe de vente du Québec avec la TPS et qu'il en
deviendrait le collecteur. Va pour la collection, mais pour l'harmonisation,
quel beau dérapage! Nous souhaitons que les promesses de
simplicité et d'efficacité du ministre des Finances se
réalisent en harmonisant la TPS à la TVQ par une assiette fiscale
unique et un taux unique répartis équitablement entre les deux
gouvernements.
Cinquièmement, le Québec doit accroître son attrait
pour les entreprises et les capitaux étrangers. Le Québec doit
convaincre les entreprises étrangères qu'elles peuvent
bénéficier en s'installant ici d'un contexte économique,
politique et social plus avantageux. Dans ce cadre, société
distincte signifie être clairement meilleur. L'entreprise
européenne qui cherche une porte d'entrée sur le marché
nord-américain doit trouver au Québec des avantages
économiques
très marqués pour compenser ce qui semble être
devenu les inconvénients de notre culture distincte tel que le
démontre, du moins pour les grandes entreprises françaises, une
étude réalisée par M. Leroux, qui nous accompagne
aujourd'hui, professeur à l'Institut d'économie appliquée
de l'École des HEC.
Sixièmement, le gouvernement doit évaluer les
conséquences de la permanence d'emploi sur l'efficacité de
l'appareil gouvernemental. Nous sommes d'avis que la permanence des emplois
peut nuire à la productivité et à l'efficacité de
l'appareil gouvernemental. Au même titre que les entreprises ont dû
améliorer leur compétitivité pour assurer leur survie et
les travailleurs améliorer leur productivité pour garder leur
emploi, les employés du secteur public doivent accepter que soient remis
en question et réévalués les avantages sociaux et
conditions de travail qui peuvent, dans une certaine mesure, nuire à la
compétitivité de l'appareil gouvernemental et, donc, à sa
productivité.
Septièmement, il faut renforcer la transparence des coûts
et la tarification des services. Le citoyen ne connaît pas le coût
des services publics qu'il utilise ou qui sont à sa disposition. La
tentation est forte, lorsqu'on n'a pas à se préoccuper des
coûts, de demander toujours plus de services. Nous croyons que la
transparence des coûts permettrait au citoyen de mieux évaluer les
actions gouvernementales, responsabiliserait le citoyen et provoquerait des
changements d'habitudes de consommation. De la même façon,
l'abolition de certains services ou programmes risque d'être mieux
reçue par le citoyen si la relation coûts-bénéfices
est clairement établie. De plus, la communication des coûts de
santé au patient qui les a reçus entraînera une prise de
conscience et assurera un contrôle sur la pertinence des services
facturés.
Enfin, nous nous prononçons en faveur d'une politique de
participation des usagers au paiement d'une partie des coûts d'un service
tout en préservant l'accessibilité pour les plus démunis.
Une telle politique a pour triple avantage de: un, faire prendre conscience que
le service rendu comporte un coût, donc que rien n'est gratuit; deux,
favorise l'équité entre les utilisateurs et non-utilisateurs de
services; et, trois, diminue la demande de services.
Mais il y a également trois prérequis à une
participation des usagers aux coûts. Premièrement, le citoyen doit
connaître les coûts véritables des services.
Deuxièmement, le citoyen doit être assuré et convaincu que
la tarification permettra réellement à l'État de
réduire le déficit, diminuer ou tout au moins ne pas augmenter
les impôts. Enfin, troisièmement, la tarification ne doit pas
avoir pour effet d'empêcher les plus démunis d'avoir accès
à ces services.
En conclusion, le présent mémoire n'avait pas l'intention
de se substituer aux travaux savants ni aux longues réflexions faites
dans le domaine de la fiscalité et des finances publiques. Sans vouloir
être exhaustive, l'Association des diplômés de
l'École des HEC a voulu montrer que, si les responsables des finances
publiques ont raison de souligner les limites de leur action sur la conjoncture
économique, ils doivent cependant prendre des mesures pour
améliorer le contexte économique du Québec.
Nous sommes conscients que les solutions efficaces impliqueront des
sacrifices importants pour l'État, ses employés et la population
en général. Ces mesures seront sûrement impopulaires. Nous
le savons tous, il n'est pas dans la nature des gouvernements de prendre des
mesures impopulaires. Souhaitons que le gouvernement actuel sache agir contre
nature.
Madame, messieurs, merci.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie. Vous avez
dépassé un peu votre limite de temps. Alors, je vous ai quand
même laissé aller, mais je veux quand même attirer votre
attention sur une chose: les parlementaires ont pris connaissance du
mémoire, dans l'ensemble. Je voulais que vous le sachiez parce que j'ai
remarqué que, dans les débuts, c'était presque du mot
à mot avec le mémoire.
Alors, M. le ministre des Finances.
M. Levesque: Je vous remercie, M. le Président, et le
léger reproche que vous avez fait...
Le Président (M. Lemieux): C'est une remarque, M. le
ministre des Finances. (11 h 30)
M. Levesque: ...ou la remarque, disons, gentille que vous avez
faite à l'endroit de nos visiteurs, j'ai une nuance à
ajouter.
C'est que j'étais très heureux qu'on insiste sur plusieurs
des points qui ont été soulevés, parce que je crois que
nous avons devant nous, et je le dis tout en souhaitant la plus cordiale
bienvenue à ceux qui viennent nous rencontrer... je dois dire que cette
présentation, ce matin... le mémoire est réellement
quelque chose qui vaut la peine d'être relu et même redit. Ne vous
contentez pas seulement de venir nous voir, mais continuez à faire part
de ce que vous croyez, vous, être les 10 positions de principe auxquelles
on doit s'attacher. Quant à nous, les 7 recommandations que vous nous
faites vont recevoir une attention très claire de la part des membres de
la commission, j'en suis convaincu.
Vous avez fait un tour d'horizon clair. Vos prises de position
pourraient ne pas être acceptées partout, dans tous les milieux,
mais je pense qu'il y a beaucoup d'éléments dans vos
propositions, dans les positions de principe, dans les recommandations, qui
seraient sûrement acceptés par une bonne proportion de la
population. Parce que, enfin, ce que vous dites, c'est
quoi? Arrêtez d'augmenter les déficits, c'est assez. Vous
dites, et je vois ça dans la troisième position de principe:
L'endettement a ses limites. C'est ça que vous dites, et nous sommes
pleinement d'accord. Si notre société s'est permise, depuis
plusieurs années maintenant, d'ajouter déficit sur
déficit, surtout dans des circonstances où ces déficits
sont plus reliés à un dépassement dans les dépenses
courantes que par des emprunts à long terme, là-dessus, nous
avons, évidemment, à rappeler qu'une grande partie de notre
endettement est constituée, justement, de cette sorte de dépenses
qu'on appelle les dépenses d'épicerie.
Vous nous dites également que la taxation a ses limites, et
ça veut dire aussi que vous ne croyez pas que l'on puisse continuer
à augmenter le fardeau fiscal sans mettre en danger l'économie et
la création d'emplois, si je comprends bien votre message.
Vous parlez ensuite des programmes gouvernementaux où vous voulez
qu'il y ait des contrôles, qu'il n'y ait pas d'abus, etc. Autrement dit,
si je comprends votre message, c'est du côté du contrôle des
dépenses du gouvernement que vous mettez l'accent.
Une question, simplement pour vous permettre de faire des commentaires.
Vous soulignez tout cela dans votre mémoire, mais, d'un autre
côté, mardi, les chefs des grandes centrales syndicales sont venus
nous dire le contraire. C'est qu'il n'est pas question de... Il n'y avait rien
dans l'endettement; on n'était pas plus endettés qu'il faut,
qu'on n'avait pas, non plus, à s'inquiéter du fardeau fiscal,
parce qu'il y avait encore de la marge de ce côté-là et
qu'on devait plutôt parler d'emplois, de création d'emplois qui
réglerait ça.
Comment pouvez-vous, vous qui êtes si bien situés pour
répondre à ces choses-là à cause d'une expertise
qui est la vôtre... Vous êtes le fleuron, évidemment, dans
ce domaine-là. Alors, sans vouloir trop abuser de vos bons conseils, si
vous avez des remarques à faire, des commentaires à faire, afin
qu'on puisse essayer de concilier ces points de vue là.
Le Président (M. Lemieux): Nous vous écoutons.
M. Leroux (François): Je crois que vous évoquez ce
qui est un des grands mystères, personnellement, je pense, un des grands
mystères de notre société actuellement, c'est que la
déconnexion qui existe entre un document remarquable - et je le dis en
tant que professeur qui est très jaloux de la qualité du document
qui a été présenté sur l'état des finances
publiques... Donc, la déconnexion qui existe entre la qualité de
ce document et le discours que j'appellerais le discours dominant au
Québec en matière d'emplois, en matière de finances
publiques. Je pense qu'il y a dans le document des données qui sont
neutres, irréfutables...
M. Levesque: Vous parlez de quel document, à ce
moment-là?
Le Président (M. Lemieux): Sur les finances publiques.
M. Leroux: «Vivre selon nos moyens». M. Levesque:
Merci. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Leroux: J'en donne tout le crédit aux fonctionnaires du
ministère.
M. Levesque: Oui, sûrement.
M. Leroux: Et je le dis très sincèrement. C'est
extrêmement intéressant de voir comment un document, qui pourrait
être aussi utile pour avancer dans la réflexion, est, en fait,
grosso modo, oublié par ce que j'appellerais les faiseurs d'opinions
publiques. Et c'est très étonnant de voir qu'un certain nombre de
messages de la nature de ceux qui sont ici et que je crois être neutres
ne passent pas, alors que d'autres messages, d'autres idées dominantes
font continuellement la manchette des journaux et les délices des
éditoriaux.
M. Levesque: Merci.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Merci, M. le Président.
À mon tour de saluer l'Association des diplômés des
HEC, de vous souhaiter la bienvenue au nom de l'Opposition officielle.
Je voudrais simplement dire des choses... Quant au document
lui-même «Vivre selon nos moyens», moi, je pense
qu'effectivement il y a de bonnes données là-dedans, mais je
reprendrais le titre. Son titre devrait être «L'urgence d'un
redressement, version 2» parce que, après sept ans ou six ans
qu'il avait écrit son document, il a été obligé
d'en écrire un autre, six, sept ans après, avec le même
gouvernement. C'est l'urgence d'un redressement, mais ça aurait
très bien pu porter ce titre-là.
Je suis heureux par rapport à la quatrième recommandation
que vous soulignez au ministre, que la TPS et la TVQ doivent être
harmonisées. Parce que, encore hier, il disait qu'il avait réussi
à harmoniser les deux taxes. Il avait réussi. Alors, le ministre
nous entend encore, il en a entendu, d'autres groupes, mais, là, je
pense qu'il faut qu'il admette qu'il n'a pas réussi à harmoniser
les deux taxes. L'exemple que vous donnez est absolument probant.
L'autre chose que vous soulignez - et, à
mon sens, ça n'a pas été assez dit, peut-être
qu'il y a eu un groupe qui l'a souligné - c'est votre deuxième
position de principe: Le gouvernement doit profiter des périodes de
conjoncture économique favorable pour assainir les finances publiques.
Cela veut dire que, lorsqu'on est en période de croissance
économique, il doit se dégager des surplus, même au titre
des dépenses courantes, pour permettre de faire des déficits au
titre des dépenses courantes dans les périodes de
dépression. Cette mission n'a pas été accomplie au cours
des années 1985-1990, loin de là. Et ça, ça a
contribué à l'enfoncement du déficit.
Une voix:...
M. Léonard: Oui, mais vous aviez fait la même chose
de 1970 à 1976. Il reste que l'expérience n'a rien
enseigné au ministre des Finances, et c'est ce qu'on doit
déduire, mais vous venez de le rappeler aujourd'hui et c'est très
important. Je pense qu'effectivement vous avez raison de souhaiter que cela
perce dans le discours public de façon générale, de sorte
que les gens s'attendent à dégager des surplus en période
de croissance.
Enfin, sur une troisième position de principe que vous
dégagez, c'est que tous doivent contribuer à non seulement
réduire les déficits, mais à les ramener et à
ramener le déficit accumulé à un niveau, disons,
acceptable. Ça, je suis convaincu que ce n'est pas facile à court
terme, parce que, au fond, le déficit, même si on a un
équilibre dans les dépenses courantes, en réalité,
le seul rachat que l'on fait pratiquement, c'est de dire que l'inflation, qui
peut être de 2 % ou 3 %, contribue, en quelque sorte, à
éroder le déficit accumulé, de sorte qu'effectivement il
diminue graduellement en valeur absolue... en valeur relative plutôt.
Mais ma question, c'est, finalement: Est-ce que vous croyez vraiment
qu'on va pouvoir convaincre le fédéral, en restant dans ce
système, à diminuer ses déficits, alors qu'en pleine
période où nous sommes il vient d'annoncer 34 000 000 000 $, et
les rumeurs qui courent dans les corridors présentement, c'est que le
déficit pourrait atteindre 38 000 000 000 $, 40 000 000 000 $ cette
année? Donc, juste la part du Québec là-dedans, c'est 8
000 000 000 $ à 9 000 000 000 $. Si on se situe dans ce sillage,
finalement, c'est comme si on se situe très fédéraliste
sans aucune possibilité vraiment d'influencer le fédéral,
comme s'évertue à le faire le ministre des Finances depuis cinq,
six ans, sans aucun succès. C'est comme demander à la queue de
branler le chien. Il n'y a rien qui va se passer. J'aimerais avoir vos
commentaires là-dessus. (11 h 40)
M. Cyr: Écoutez, sur la participation du
fédéral, ce que vous souleviez, je pense que tout le monde doit
faire sa part actuellement dans la réduction du déficit: le
gouvernement fédéral, le gouvernement provincial, les
municipalités, les commissions scolaires, tous les intervenants publics.
L'élément qu'on soulève, c'est de dire au gouvernement du
Québec: Faites attention de ne pas trop réduire le vôtre et
de se retrouver, le lendemain matin, que le fédéral vienne dire:
Bon, la situation économique du Québec est très saine, on
va vous en pelleter un peu plus. Je pense que ça doit se faire de
façon concertée, dans la même direction. Alors, le signal,
on le donne à Québec. On a des problèmes de finances
publiques ici, j'espère que le fédéral est conscient qu'il
a, lui aussi, des problèmes, et que l'effort doit être
concerté de part et d'autre, tant du côté
fédéral que du côté de Québec, et les
municipalités également.
Le Président (M. Lemieux): Ça va. Merci, M. le
député de Labelle.
M. le président du Conseil du trésor.
M. Johnson: Oui. Merci, M. le Président.
Je veux souhaiter la bienvenue aux représentants de l'association
des anciens de l'École des HEC qui nous plonge en pleine ironie. C'est
assez drôle de voir que, là, le député de Labelle
est plutôt de votre avis; j'ai senti qu'il était plutôt de
votre avis pour la plupart de ce que vous soutenez, par exemple, sur le
déficit dont il dénonçait la hausse en 1990...
Une voix:...
M. Johnson: Évidemment, toujours dénoncé,
oui. Mais ce que je veux dire, c'est que c'est, contrairement à un
ancien professeur des HEC, qui est aujourd'hui chef de l'Opposition et son
chef, qui, lui, prêche la hausse du déficit comme solution aux
problèmes économiques qu'on traverse... C'était vrai en
avril 1990, en avril 1991, ça devait être vrai l'an dernier;
enfin, on connaît... Alors, je suis heureux de voir que vous n'avez pas
suivi les traces du maître, nécessairement.
Une voix:...
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît!
M. Johnson: Ce qui me préoccupe dans tout ça, c'est
la place qu'occupe - parce que c'est la moitié du budget - la gestion de
la main-d'oeuvre. Vous n'en avez pas beaucoup parlé. Si vous aviez une
chance peut-être de vous exprimer là-dessus, c'est pour ça
que je vous demande une question.
Vous y allez en parlant de la permanence de l'emploi. Ça peut
être vu comme un phénomène dans les conventions
collectives, comme un contrat à l'endroit de chacun de nos
employés, ou alors comme un contrat, je dirais, entre l'État et
les citoyens, en disant: On va avoir au moins
du monde qui va rendre les services; donc, il y a une permanence, dans
ce sens-là, collective.
Je n'ai jamais tracé, quant à moi, ce lien entre
productivité ou manque de productivité et permanence de l'emploi.
Il y a du service public; il y a des services publics qui sont permanents. Il y
a des missions de base qui devront toujours être rendues. On essaie,
évidemment, d'assurer des plans de carrière et des perspectives
de permanence, dans ce même sens-là, à nos gens, à
charge pour nous de les motiver, d'assurer leur plan de carrière,
d'assurer une progression qui a du sens, de la formation permanente si on peut
y arriver, et c'est ce qu'on vise. Alors, dans ce sens-là, je n'attache
pas beaucoup d'importance au coût, soi-disant, que pourrait
représenter la permanence comme telle. Alors, c'était une nuance
que je voulais exprimer à cet endroit-là.
Mais j'aurais aimé vous entendre quand même sur le lien que
vous voyez entre la capacité de payer de l'économie et les
salaires qu'on doit verser. Parce qu'une tâche, c'est une tâche.
Faire tel ou tel travail, c'est faire tel ou tel travail. Il y a bien des gens
qui disent: Bien, c'est un peu injuste d'être un travailleur du secteur
public; l'économie va moins bien, je fais toujours le même
travail, et on nous dit que l'économie n'est pas capable de supporter
mon salaire, donc, on me coupe. C'est difficile à réconcilier,
toutes ces choses-là.
Alors, ce qu'on a fait, nous, ce qu'on envisage de faire,
évidemment, c'est de stabiliser la part, le montant, plutôt, de
rémunération globale d'ici cinq ans, évidemment par des
activités de réorganisation et de productivité, de
maintenir une qualité de service et de distribuer des gains de
productivité à nos travailleurs. Est-ce que vous trouvez que
c'est une bonne approche, ça aussi, plutôt que de remettre en
cause et geler individuellement les gens, quoique, évidemment, ça
peut être inévitable, ça l'a déjà
été? Alors, ça, ce n'est pas le genre de chose qu'il faut
exclure. Mais, sur une longue période, avez-vous des méthodes de
motivation de notre personnel ou de formation que vous suggérez pour
nous donner un coup de main? Je suis ouvert à tous vos conseils par les
temps qui courent.
M. Cyr: La charge financière du gouvernement pour ses
employés, c'est de l'ordre d'à peu près 50 %?
Effectivement, c'est le gros morceau. Je ne pense pas qu'il faille sabrer
là-dedans; je pense qu'il faut viser, justement, un gel de cette masse
globale des salaires dans un laps de temps le plus court possible, mais
donnons-nous le temps qu'il faut.
Quand on parlait de permanence des emplois, je pense que dans le secteur
privé les bons coups sont largement récompensés, mais les
mauvais coups sont largement punis. On n'a pas l'impression que c'est tout
à fait la même chose dans la fonction publique. Je pense qu'il
faudrait des fois que le gouvernement ait les moyens de bien récompenser
les bons coups de ses employés et parfois avoir la possibilité de
serrer la vis auprès de ses employés quand des mauvaises
décisions, des mauvais gestes ou des mauvaises actions sont faites.
Je ne sais pas si mes confrères veulent rajouter
là-dessus. Oui, M. Désy.
M. Désy (Claude): Je veux juste rajouter quelque chose.
Vous avez parlé de la main-d'oeuvre. On sait que vous faites des efforts
importants pour recycler notre main-d'oeuvre et pour s'assurer d'une grande
productivité de celle-ci. Mais je pense qu'il faut regarder aussi le
phénomène...
On parlait tout à l'heure du phénomène du
pelletage. Dans l'exercice qu'on fait présentement, il faudrait faire
attention de ne pas passer la dette... du bilan du fédéral au
bilan de la province, peut-être au bilan des municipalités, et ne
pas passer ça dans le bilan de nos étudiants qui sortent des
écoles. Il faut faire bien attention, dans l'exercice que vous
êtes après faire, de ne pas passer ça dans le bilan de nos
étudiants. Il y a un phénomène ici, on est plusieurs des
anciens qui ont quelques années d'expérience. Quand on est sortis
de l'école, il y avait six emplois qui nous attendaient. Maintenant, il
y a six étudiants pour un emploi. Donc, il faut faire attention quand on
dit qu'on va passer à la génération future.
Vous êtes peut-être après faire des coupures qui font
en sorte qu'on diminue considérablement les emplois du secteur public et
peut-être aussi, par l'effet multiplicateur, les emplois du secteur
privé. Ça peut juste être compensé, et on est
d'accord avec une rationalisation, mais ça peut simplement être
compensé par une augmentation rapide et drastique de la
productivité. Donc, il faut que quelqu'un les crée, ces
emplois-là. Si vous coupez de votre côté, il faut que ce
soit le secteur privé. Il faut en créer, des emplois. Donc, il
faut stimuler le secteur privé et, parmi vos programmes, les programmes
de main-d'oeuvre, il faut vraiment mettre le maximum de ce
côté-là.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Je vous remercie, M. le Président.
Je vais souhaiter la bienvenue, à mon tour, à nos
invités.
C'est la première fois que je fais la remarque, mais j'imagine
que qui aime bien châtie bien. J'imagine que la prochaine fois que vous
allez venir il va y avoir quelques femmes qui vont vous accompagner, parce
qu'il y en a un bon nombre qui sont membres de l'Association des
diplômés HEC, et je pense, si je ne m'abuse, qu'elles sont,
d'ailleurs, plus nombreuses à
l'École des HEC actuellement; du moins au niveau du bac, elles
sont majoritaires. Ce n'est pas inutile de se le rappeler à l'occasion,
n'est-ce pas?
Je voudrais, M. le Président, avant de m'adresser directement
à nos invités, faire remarquer au président du Conseil du
trésor, par votre intermédiaire, que, lorsque je pose des
questions, je ne fais pas nécessairement d'affirmations, et je ne
voudrais pas qu'il me prête des propos que je ne tiens pas, comme ce
qu'il a fait tout à l'heure en présumant que, parce que j'avais
posé une question, j'appuyais ou j'étais d'accord avec la
proposition qui était présentée. Il peut commenter ce que
je dis, mais il n'a pas à me prêter des propos que je ne tiens
pas.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Je ne veux pas servir
d'intermédiaire, mais j'ose espérer que ce n'étaient pas
ses intentions.
Mme Marois: Non, mais je m'adresse au Président.
Le Président (M. Lemieux): J'ose espérer, madame.
J'ose espérer.
Mme Marois: Non, j'imagine, mais il sera plus prudent la
prochaine fois. C'est tout simplement ça.
Le Président (M. Lemieux): Ça va. Je ne voudrais
pas prêter d'intentions à quiconque de cette table.
Allez-y, Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Alors, je trouve le mémoire très
intéressant. Il y a des avenues que vous nous proposez d'explorer qui,
je pense, méritent toute l'attention voulue; entre autres, la
connaissance réelle des coûts. C'est toujours - et je le dis
souvent depuis le début de la commission, parce qu'on a eu d'autres
groupes qui sont venus - la connaissance réelle des coûts par la
population, et peut-être pas d'une façon trop globale comme on a
l'habitude peut-être de le faire depuis toujours, finalement, mais de le
faire de façon peut-être un petit peu plus précise, un
petit peu plus ciblée pour les gens qui consomment, utilisent des
services. Je pense que, déjà, ça amène, d'abord,
à une connaissance qui est nécessaire et utile et, ensuite,
à une responsabilisation. (11 h 50)
Je veux revenir sur une des positions de principe, en fait, deux
positions de principe que vous abordez et qui, évidemment,
débordent ensuite par des recommandations. C'est, entre autres, la
septième et la cinquième position, où vous faites
référence, évidemment, aux dépenses et aux
programmes sociaux et programmes nouvernemontaux. Il y a un
élément que vous soulignez qui est très
intéressant. À la page 9 du mémoire, vous dites: Les
mesures relativement à la sécurité du revenu. Et
là, on pense aux gens qui doivent dépendre de l'État pour
répondre à leurs besoins essentiels, particulièrement les
gens qui sont actuellement à l'aide sociale. On sait très bien
que, lorsque les gens sortent de l'aide sociale, immédiatement on
leur... il n'y a pas de passerelle, si on veut, entre le moment où ils
sortent de l'aide sociale et le moment où ils commencent à gagner
des revenus, à partir d'un certain seuil, parce que le ministre des
Finances nous dirait: On a rabaissé les niveaux d'impôt, etc..
mais qui fait en sorte que tout ce qu'ils gagnent est autant de moins,
évidemment, sur leur revenu à l'aide sociale. Vous parlez des
profits marginaux qui pourraient être retirés d'un emploi de
substitution. Vous parlez aussi de mesures actives d'insertion en emploi qui
devraient être intensifiées.
D'abord, j'aimerais vous entendre un petit peu sur ça, mais vous
dire aussi que les mesures pour permettre de réinsérer en emploi,
d'éviter donc les abus aussi, etc., c'est tout ça qui est
derrière ce que vous présentez. Ce qu'il faut bien voir, c'est
que le Québec n'a que la moitié des outils pour pouvoir faire
ça. Moi qui ai eu la responsabilité de ce
ministère-là, qui ai mis en oeuvre un certain nombre de moyens,
je pense, qui étaient assez novateurs, que ce soient les stages en
milieu de travail, que ce soit le retour à l'école, etc., on
s'est vite rendu compte que ça avait des limites parce qu'on ne
s'était pas harmonisé avec, entre autres, les politiques de
sécurité du revenu par l'assurance-chômage, par exemple,
qui sont gérées par le fédéral.
Alors, moi, je pense qu'il y a une concertation nécessaire, mais
je pense qu'il y a une unité de gestion aussi nécessaire. Dans ce
sens-là, il m'apparaît évidemment que ça doit
être le Québec qui doit avoir toute la responsabilité de
ces matières-là, un peu comme l'ont dit un bon nombre de
partenaires sociaux. Mais j'aimerais vous entendre sur ces
questions-là.
M. Zizian: Mme la députée, dans un premier temps,
je retiens votre première remarque et je dois vous dire que les membres
de l'Association des diplômés HEC sont heureux de voir que l'une
des diplômées siège à cette commission et peut
représenter adéquatement la gent féminine.
Mme Marois: Oui, mais il ne faut pas trop se
déculpabiliser trop facilement, là. Ha, ha, ha!
M. Zizian: Le deuxième point, avant d arriver à
votre dernière intervention concernant la connaissance des coûts.
Je pense qu'il est important de souligner que la seule carte de crédit
qu'un citoyen peut utiliser actuellement sans signer aucun document, c'est la
carte d'assurance-maladie. Et ça, ça nous apparaît un peu
contradictoire, avec une politique de contrôle
des dépenses et de contrôle des coûts pour
l'État, d'avoir une telle carte de crédit mise à la
disposition de tous et chacun sans avoir à la signer.
Par rapport aux mesures d'employabilité, c'est bien sûr que
l'on souhaite que, dans toute la mesure du possible, les actes, les actions
soient coordonnées et harmonisées de façon à
obtenir une efficacité maximale dans ce domaine, et il doit y avoir un
effort important entre le gouvernement fédéral et le gouvernement
du Québec pour s'assurer que les mesures vont dans le même sens et
qu'elles sont mises en application par le palier de gouvernement qui peut
rendre ce service-là de la façon la plus efficace possible.
M. Désy: Si je peux rajouter. Vous avez parlé de la
transparence. Je crois que l'exercice qu'on fait ici collectivement s'en va
dans le sens de la transparence. Je crois, l'Association croit que cette
transparence, les gouvernements ont tendance - et je pense que tous les
gouvernements sont fautifs un peu sur ça - c'est qu'on a tendance
à penser que le citoyen ne peut pas comprendre la complexité des
débats sur les finances publiques, et je pense que c'est une erreur. On
devrait favoriser... Et pour ceux qui ont des formations en administration et
pour ceux qui sont dans l'administration en général, on sait que,
souvent, la façon de donner l'information est toute la différence
au monde. Pour ceux qui ont une formation en administration, on sait,
après l'avoir fait, ce fameux cours-là en administration, que
ça fait partie du gros bon sens, l'administration, et qu'il n'y a pas de
raison pourquoi cette information-là... il n'y a pas une diffusion plus
grande d'information.
Dans notre mémoire, on parle du rôle du Vérificateur
général. Peut-être qu'il y a une autre solution qui est
peut-être plus à la portée du gouvernement. On sait que,
présentement, on a un contrôleur général qui a
peut-être plus le rôle d'un comptable général pour la
province. Peut-être que si on élargissait le rôle du
contrôleur général et en faire un spécialiste de
l'efficacité administrative à l'intérieur de vos
systèmes - on sait que ça se fait - mais qu'il y ait une
diffusion plus grande de ses travaux, et que ceux des gestionnaires aussi - on
parle de nos 20 000 membres qui ont une formation en gestion; il y en a
d'autres, écoles de gestion - que cette information soit
diffusée.
On remarque une chose. Vous avez une loi qui est similaire à
celle d'autres provinces et celle du fédéral, la loi sur
l'accès à l'information. Chaque fois qu'on parle de la loi sur
l'accès à l'information à un politicien, les cheveux lui
viennent droit sur la tête. Mais je vous comprends. Par ailleurs, c'est
un outil qui devrait être plus démocratisé, autant de la
part de tous les gouvernements. Aussi, on devrait diffuser toute l'information
qui est à l'intérieur de nos gouvernements. Vous n'avez pas,
contrairement au fédéral, de registre de la loi sur
l'accès. Vous avez une loi sur l'accès qui donne accès aux
documents gouvernementaux, mais c'est une grosse boîte noire qu'on a
devant nous. Le citoyen ne sait pas ce que vous avez. Donc, il y a un correctif
à faire, le registre de la loi sur l'accès. On parle du
contrôleur général.
Aussi, la troisième mesure, le fonds consolidé. C'est
encore un autre gros trou noir. On met tout notre argent là et ce qui en
sort, c'est vous autres qui le savez. Je pense que la notion de fonds
spéciaux devrait être de plus en plus employée, et on
devrait avoir un apparie-ment pour vérifier l'appariement des efforts
collectifs qui sont faits et du résultat, qui ait une plus grande
transparence, qui permet de voir les résultats.
Tout à l'heure, on parlait de la clause «sunset». La
règle devrait être que les lois en matière de finances
publiques, il y ait une clause «sunset». Trois ans, cinq ans,
ça, c'est discutable, mais automatiquement une remise en question et,
quand ces programmes viennent à terme, une réévaluation
systématique de ces programmes-là. C'est tout dans le contexte de
la transparence dont on parle.
Mme Marois: Merci.
Le Président (M. Lemieux): Tout simplement pour vous poser
la question suivante. D'abord, pour vous dire que le Vérificateur
général joue un rôle qui est bien particulier. Cette
commission parlementaire aussi s'est donné comme objectif de faire en
sorte qu'il y ait un suivi des observations du rapport du Vérificateur
général et, actuellement, le Vérificateur
général a quand même certains pouvoirs et il les exerce,
dont vérifier l'optimisation des ressources humaines au niveau de
certains organismes. Alors, son mandat devient de plus en plus large.
La commission veut même faire en sorte que le Vérificateur
général du Québec, dans le cadre d'un exercice
d'imputabilité externe, assiste aussi cette commission, ce qui est quand
même une certaine révolution au point de vue administratif. Du
moins, c'est un des mandats qu'à l'unanimité, ici, on s'est
donnés au sein de cette commission.
J'aimerais vous reporter à la page 8 de votre mémoire,
à la sixième position de principe. Vous dites: «Tout effort
de contrôle du déficit doit s'orienter du côté des
dépenses». Et vous dites ceci: «...la lutte contre les
déficits actuels passe obligatoirement par une réduction des
dépenses»; et c'est le deuxième paragraphe qui
m'intéresse: «Cependant, la réduction des dépenses
nous mène vers des choix plus difficiles: il va falloir supprimer des
services offerts à la population.» Est-ce que vous avez des
orientations à nous indiquer, des exemples à nous donner?
Avez-vous songé à des types de ser-
vices? Qu'est-ce qui vous apparaît acceptable?
M. Huberdeau: Juste peut-être pour vous répondre
à ça. Cette recommandation-là se situe dans l'ensemble des
positions de principe qui vous sont présentées ce matin. Quand on
dit qu'il faut supprimer des services offerts à la population, c'est en
fonction des services qui sont offerts dans le cadre de programmes très
spécifiques. Quand on dit de réviser les programmes, je pense
qu'à ce moment-là on peut réviser, effectivement, la
pertinence d'offrir tel ou tel service à la population. C'est dans le
cadre de cette révision globale des programmes.
Je pense qu'il y a des services qui sont offerts depuis des
années et il y a lieu de voir, effectivement, s'ils sont encore
pertinents en fonction de l'évolution des besoins et des attentes de la
population. Tout ce qu'on fait présentement - c'est l'opinion
générale qu'on en a, je pense que c'est un peu l'opinion
générale de la population - c'est qu'on garde des programmes, on
garde des services, et on en rajoute, et on en rajoute et on en rajoute. Je
pense qu'il faut, à un moment donné, réviser globalement
ces services-là et, effectivement, peut-être les adapter, pas les
supprimer, les adapter; dans certains cas, les supprimer, effectivement, parce
qu'ils ne sont plus pertinents en fonction des besoins.
Le Président (M. Lemieux): Votre opinion face à
l'universalité des programmes, à la gratuité, je pense
à l'éducation, je pense aux services de santé et aux
services sociaux?
M. Huberdeau: Je pense que, dans le rapport, on a indiqué
des choses très précises quant à ces différents
programmes.
Le Président (M. Lemieux): Ça va M. Désy:
Est-ce que je peux...
Le Président (M. Lemieux): Oui, vous pouvez
compléter.
M. Désy: ...simplement revenir sur le rôle du
Vérificateur général?
Le Président (M. Lemieux): Oui. (12 heures)
M. Désy: Je lisais le dernier rapport du
Vérificateur général; il mentionnait clairement ses
limites et ses limites financières dans son travail. Je ne crois pas, si
je compare le rôle du Vérificateur général au
rôle du comptable agréé ou du vérificateur dans le
secteur privé ou dans le secteur public, lorsque les C.G.A.
interviennent également... C'est plutôt une fonction historique,
c'est plutôt de vérifier les états financiers, mais c'est
de l'histoire qu'on fait, on donne une attestation sur des choses
passées. On parle plutôt d'un rôle plus proactif d'un
contrôleur général, et c'est dans ce sens-là qu'on
parle.
Le Président (M. Lemieux): C'est ce qui se passe
actuellement avec le Vérificateur général du
Québec. Il a maintenant et, effectivement, il effectue actuellement des
mandats dans ce cadre-là. Je pense, entre autres, à un organisme
qui s'appelle la Commission de la santé et de la sécurité
du travail où il est en train, effectivement, d'effectuer un mandat
d'optimisation des ressources. Alors, il est de plus en plus proactif. Il est
de plus en plus proactif.
M. Désy: Oui, mais s'il est plus proactif, peut-être
que, justement, on devrait scinder son rôle en deux et vraiment lui en
donner un très proactif du côté de la gestion.
Le Président (M. Lemieux): Ça va. M le
député...
Une voix: L'alternance.
Le Président (M. Lemieux): C'est ça, l'alternance.
Alors, comme président, c'est moi, l'alternance.
M. Filion: C'est à moi, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
Une voix: Vous ne faites pas partie du groupe parlementaire?
Le Président (M. Lemieux): Non, pas que je sache.
M. Filion: J'aimerais saluer, bien sûr, les
représentants des Hautes études commerciales de Montréal
et les féliciter pour leur qualité de travail, bien sûr.
Leur mémoire est très intéressant.
Vous avez attiré mon attention sur la troisième
recommandation, au niveau des chevauchements administratifs qui doivent
être éliminés, et vous suggérez quand même des
éléments concrets, entre autres: «Cette approche
coûts-bénéfices peut conduire - c'est-à-dire, on
réduit les coûts de la société, les finances
publiques - à l'utilisation de formulaires et dépliants fiscaux
communs.» Moi, à ce niveau-là, depuis le début de la
commission, je pose toujours cette question-là: Êtes-vous d'accord
qu'on puisse avoir un formulaire d'impôt au Québec, section
particularité fédérale, particularité
Québec, géré sur la même base administrative que
l'on a avec la TPS et la TVQ? Question très simple.
M. Lachance (Renaud): Écoutez. Ce qu'il faut comprendre,
c'est que, présentement, il y a des règles fiscales
différentes entre le fédéral et
le Québec. Il y a eu des efforts fort louables de faits pour
harmoniser ces règles. Est-ce qu'on peut avoir un seul formulaire
fédéral-Québec aujourd'hui? Je crois qu'il y aurait des
complications administratives assez longues. La seule chose, c'est qu'à
force d'harmoniser les règles le contribuable ne peut pas
s'empêcher, en regardant sa déclaration d'impôt
fédérale et sa déclaration d'impôt du Québec,
de constater qu'il y a des formules qui sont à peu près les
mêmes. La seule chose, c'est que, dans une formule, on dit: Prenez la
ligne 514, et, dans l'autre, on dit: La ligne 418. Donc, ce qu'on dit, c'est:
Aller discuter avec le fédéral pour voir s'il n'y aurait pas
possibilité de négocier certains formulaires communs. Et
ça, ça s'est fait au niveau de la TPS-TVQ; c'est un coup,
d'ailleurs, fort brillant que le Québec a réussi. On s'est dit:
Allez-y donc! Présentement, les autres provinces sont en discussion avec
le fédéral. On est en train de renégocier les accords de
perception. Donc, j'ai l'impression qu'au fédéral ils sont
ouverts à des négociations. Donc, allons donc négocier
avec eux.
M. Filion: Alors, vous êtes d'accord qu'on enclenche un
processus dans ce sens-là, rapidement?
M. Lachance: Déjà, je pense que ça se fait
dans certaines discussions avec le ministère des Finances du
Québec et celui d'Ottawa, sauf que le contribuable voit ces
irritants-là et dit: Allez continuer vos efforts.
M. Filion: J'aurais une autre question également sur le
plan de la fiscalité, parce que les politiques fiscales, c'est
important.
On sait qu'on peut stimuler une économie comme on peut
créer ce qu'on a actuellement, c'est-à-dire des rendements
décroissants. Les abris fiscaux en général - je pense,
entre autres, on le sait, aux abris fiscaux qui aident en principe les mieux
nantis de notre société - est-ce que les politiques fiscales en
place permettent vraiment de stimuler l'économie ou bien si on devrait
repenser ces abris fiscaux?
M. Lachance: Si vous parlez des abris fiscaux, dans le document
qui a été publié par le gouvernement, à la page
112, vous les avez identifiés. Donc, on appelle ça les mesures
structurantes. Regardez quels sont les abris fiscaux. Bien, les abris fiscaux,
ça a coûté 427 000 000 $ en 1991. Plus de 70 % de ces abris
fiscaux, c'est, finalement, la recherche scientifique, et on retrouve dans
ça les investissements au Québec. Donc, je crois que ces abris
fiscaux ont une logique en soi. Je ne pense pas qu'autour de la table il y ait
des gens qui soient contre la recherche scientifique et le développement
expérimental. On essaie, bien sûr, de faire des choses avec des
entreprises, mais, comme on disait, comme position de principe, il est certain
que le Québec, dans ses possibilités, est limité un peu
à la conjoncture économique. Cependant, on encourage le
Québec à axer ses efforts vers les domaines les plus performants
au niveau de l'économie.
M. Filion: Je vais vous poser une question un petit peu plus
précise, pour essayer de bien cerner comment vous percevez l'action ou
les effets bénéfiques de ces abris fiscaux.
L'Association des manufacturiers, qui a présenté ici un
mémoire, eux auraient tendance à vouloir les éliminer
carrément et à remplacer ça par une formule très
simple, simplement un dégrèvement sur dividendes plus
accentué et ciblé par rapport aux entreprises
particulières qu'on veut aider. Qu'est-ce que vous pensez de cette
formule-là, qui, à mon avis, à moi, m'ap-paraît
intéressante? Mais de votre côté à vous? On remplace
vraiment toutes les mécaniques, les structures, payer les avocats, les
comptables, les grosses structures pour déjouer le système
où tout le monde est compliqué...
Même, vous savez, les REA, ça a eu des effets
intéressants jusqu'à ce qu'on se rende compte dans la
société qu'on évaluait les actions d'une façon
incroyable parce qu'on avait une déduction fiscale. Et tout le monde au
Québec, beaucoup de gens se sont fait avoir avec ça. Tandis que
la solution de l'Association des manufacturiers est simple, au fond. Elle dit:
Éliminons ça et remplaçons ça par un
dégrèvement fiscal. Je sais qu'il y a le principe
d'intégrité qui s'applique, ou la neutralité, mais peu
importe, c'est simple et l'actionnaire investit et a un retour automatiquement
avec le dégrèvement fiscal. Et c'est simple, c'est
déjà dans la structure comme telle.
Moi, je trouve l'idée intéressante, mais je voudrais avoir
votre opinion sur ça.
M. Lachance: Nous, on pense que les abris fiscaux, au cours des
années antérieures, si vous regardez ça... j'ai
l'impression que le ministère des Finances a changé un peu sa
politique.
Dans les abris fiscaux, on visait, il y a quelques années, le
particulier. Donc, on disait aux gens: Canalisez votre épargne vers un
domaine précis, et on va vous réduire vos impôts. Et
ça a amené, effectivement, un peu de manipulation, des montages
financiers très originaux, difficiles à contrôler. Mais,
là, on a changé cette politique-là. Si vous regardez
toujours le document du gouvernement à la page 112, on voit très
bien que, maintenant, les abris fiscaux, on les axe plutôt vers les
entreprises, ils sont dirigés vers les entreprises.
Vous me parliez de la position de l'Association des manufacturiers du
Québec. Dans d'autres mémoires - parce que j'ai eu le plaisir
d'assister à vos délibérations au cours des deux
dernières journées - on montre bien que cer-
taines entreprises préfèrent beaucoup cette
formule-là. Donc, avant de conclure positivement à la position de
l'Association des manufacturiers du Québec, j'irais voir probablement
d'autres entreprises pour voir s'il n'y a pas... si ce
mécanisme-là n'est pas déjà adéquat.
M. Filion: Mais c'est dans un but de simplicité, hein?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency, malheureusement, c'est terminé. M. le député
de Saint-Louis.
M. Chagnon: Merci, M. le Président.
Dans votre document, en page 10, vous mentionnez le rôle des
municipalités et vous dites, position de principe: Les
municipalités, leur rôle, c'est de fournir des services à
la population et non de redistribuer la richesse. Vous dites ceci: «Nous
pensons, par exemple, que le recours à un impôt foncier
différent selon certaines caractéristiques des
contribuables...» Il me semble que l'impôt foncier n'est pas fait
en fonction des caractéristiques des contribuables, mais plutôt en
fonction de la caractéristique des immeubles qu'ils occupent, dont ils
sont propriétaires. Je ne comprends pas. Est-ce qu'il y a des exemples
auxquels vous faites référence?
M. Zizian: Ce dont on parle en particulier, il s'agit de la
surtaxe sur les immeubles non résidentiels qui, dans les faits, est une
taxe foncière qui remplace une autre taxe et qui...
M. Chagnon: O.K. J'ai compris. Mais vous ne faites pas allusion,
non plus, au fait que les municipalités ont déjà
demandé au gouvernement d'avoir le droit de pouvoir avoir d'autres
moyens que l'arbitrage, par exemple, pour des règlements avec leurs
employés.
M. Zizian: Non, ce n'était pas ce qui était
abordé.
M. Chagnon: Vous ne touchez pas à ça.
M. Désy: si vous me permettez, m. le président,
j'aimerais répondre au député de montmorency relativement
aux abris fiscaux. je pense que son chef actuel...
Le Président (M. Lemieux): C'est un problème
délicat que vous me posez, mais répondez-lui.
M. Désy: Vous êtes bien gentil. Je vous
remercie.
Le Président (M. Lemieux): Oui, parce qu'il faut que je
transfère le temps. Mais allez-y.
Des voix: Ha, ha, ha!
(12 h 10)
Le Président (M. Lemieux): Mais répondez au
député de Saint-Louis à la question du
député de Montmorency.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Désy: Est-ce que tu veux revenir, Daniel? Non? Je
m'excuse. Benoît?
Le Président (M. Lemieux): Parce que, là, vous
allez me placer dans une situation délicate. Allez-y, nous vous
écoutons.
M. Désy: Ah bon! Est-ce qu'il y a unanimité?
Le Président (M. Lemieux): Ça va. Oui, oui.
M. Désy: Bon. Écoutez, c'est simplement pour
répondre au député de Montmorency. Le connaissant comme
fiscaliste, j'ai compris un peu les entre-lignes de certaines de ses
questions.
Je crois qu'on a fait des expériences en matière d'abris
fiscaux. Si on pense à l'expérience du fédéral en
recherche et développement qui a coûté 3 000 000 000 $ en
l'espace de huit mois, on a drôlement appris. Je pense maintenant aux
mesures qui sont imprégnées dans le système ou, lorsqu'il
y a des abris fiscaux comme la recherche et développement, d'avoir des
décisions anticipées avant le fait. Je pense qu'on a fait nos
classes, autant le fédéral que le provincial, dans le domaine des
abris fiscaux, et le système se protège assez bien et
réagit assez vite maintenant. Donc, je pense que, de ce
côté-là, les abus... Les mécanismes sont en place,
on va en inventer d'autres pour protéger l'assiette ou la richesse
gouvernementale. Je pense que c'est important.
Par ailleurs, la réévaluation constante de ces
programmes-là est importante. On a mentionné dans notre
mémoire que «société distincte» imposait aussi
d'être plus performant et, pour être plus performant, on a un
rattrapage à faire au niveau des entreprises, au niveau de la formation.
Et le secteur privé est capable de prendre la relève, mais il va
falloir l'aider. Il n'y a pas d'autre mécanisme d'allocation efficace
que je connaisse que... Un de ceux qui sont les plus efficaces, c'est encore
les abris fiscaux.
Le Président (M. Lemieux): Non, mais, M. le
député de Montmorency...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Lemieux): ...par un artifice de la
procédure parlementaire, monsieur nous a... Alors, M. le
député de Saint-Louis.
M. Chagnon: Une question, M. le Président. Vous remettez
la permanence de la sécurité d'emploi en question dans votre
rapport. Vous
êtes les seuls, d'ailleurs, qui l'avez fait à date,
jusqu'ici. Peut-être que certains l'ont pensé, mais vous
êtes les premiers qui l'affirmez. Est-ce que vous n'avez pas des craintes
à l'effet que certaines parts d'arbitraire puissent se constituer s'il
n'y avait plus de permanence, de sécurité d'emploi dans la
fonction publique?
M. Zizian: Ce qu'on dit dans le fond, et le président du
Conseil du trésor a élargi effectivement notre recommandation
à cet effet, c'est d'évaluer si la permanence d'emploi a un
impact sur l'efficacité de l'appareil gouvernemental et sur les
négociations, entre autres, dans le secteur public. Dans le
privé, il n'y a pas souvent de sécurité d'emploi ou
à peu près pas de sécurité d'emploi, ce qui fait
que l'attitude n'est pas la même lorsque vient le temps de
négocier et de discuter de l'ensemble des conditions de travail.
Dans le fond, le message qu'on veut livrer, c'est que le secteur public
ne peut pas vivre en marge de l'activité économique
québécoise. Ce qui se passe dans le secteur privé doit se
refléter aussi dans le secteur public en termes d'avantages qu'en
retirent les employés.
M. Chagnon: Ça nous apparaît évident.
Maintenant, évident, nous pensons que ça s'évalue ou
ça peut s'évaluer dans la rémunération globale des
employés, cette sécurité d'emploi. Ça a une valeur.
Ça vaut plus que ce qu'on retrouve dans le secteur privé, puisque
ça n'existe pas dans le secteur privé.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Il reste 30
secondes...
M. le président du Conseil du trésor, il reste une minute
de notre côté.
M. Johnson: Oui, pour remercier ces gens d'avoir, par leur
témoignage, complété cette première semaine des
travaux de notre commission. Je me permets de dire que ça ne pouvait pas
mieux tomber. Vous nous avez dit qu'on empruntait assez. Assez, c'était
assez! C'est ça qu'on dit depuis quelques années. Assez, les
impôts! Ça aussi, on souscrit à ça. Donc, si on veut
ramener un contrôle des dépenses publiques à un niveau qui
correspond à nos moyens afin de créer des emplois, afin de
baisser les impôts, pour maintenir des services de qualité de
façon permanente, je dirais, il va falloir être un peu imaginatif
et continuer cette rigueur que nous plaidons.
Alors, évidemment, ça s'est très bien
terminé quant à moi. Ça nous permet de continuer dans les
deux prochaines semaines avec d'autres témoignages. On va s'alimenter
à vos réflexions; elles étaient extrêmement
percutantes, très précises, très rigoureuses, et on vous
en remercie.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor.
Nous vous remercions pour votre participation à cette commission
parlementaire.
Nous ajournons maintenant nos travaux à lundi, 15 heures, pour
entendre la Chambre de commerce du Québec. Merci.
M. Levesque: Merci, M. le Président. (Fin de la
séance à 12 h 14)