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(Dix heures huit minutes)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a aucun
remplacement pour cette séance.
Le Président (M. Lemieux): Merci. La commission du budget
et de l'administration entreprend ce matin une consultation
générale et des auditions publiques sur le Rapport quinquennal
sur l'application de la Loi sur les assurances du Québec et en
particulier sur le chapitre traitant des liens commerciaux des assureurs.
Permettez-moi de vous faire lecture de l'ordre du jour. L'ordre du jour,
tel qu'établi après entente entre les groupes parlementaires, se
lit comme suit. Nous procéderons, dans un premier temps, aux
déclarations d'ouverture de la ministre déléguée
aux Finances, pour une période de 20 minutes, à la
déclaration du porte-parole de l'Opposition officielle, pour une
période de 20 minutes, et nous entendrons à 10 h 40 l'Association
canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc.
Par la suite, à 14 heures, nous reprendrons nos travaux pour
entendre le Bureau d'assurance du Canada; à 15 heures, nous entendrons
la Corporation du Groupe La Laurentienne; à 16 heures, la Mutuelle des
fonctionnaires du Québec; à 17 heures, la Société
financière des caisses Desjardins inc.; à 18 heures, le Groupe
Solidarité-Unique; et, à 19 heures, London Insurance Group
Inc.
J'aimerais faire remarquer aux députés des deux groupes
parlementaires qu'il n'y aura pas de suspension entre 14 heures et 20 heures.
Alors, nous allons siéger de façon continue à compter de
14 heures, immédiatement après la période de questions qui
doit débuter à 13 heures. Est-ce que l'ordre du jour est
adopté?
M. Léonard: Juste une question.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Labelle.
M. Léonard: II n'y a pas de suspension, disons, d'une
période d'une heure et demie, deux heures ou quelque chose comme
ça.
Le Président (M. Lemieux): Effectivement. À la
demande d'un des deux...
M. Léonard: O. K.
Le Président (M. Lemieux): Ça va?
M. Léonard: Oui. Si jamais il s'avérait...
Le Président (M. Lemieux): Oui. Deux ou trois minutes, il
n'y a pas de problème, M. le député de Labelle,
là-dessus.
M. Léonard: Merci. D'accord.
Le Président (M. Lemieux): Je vous rappelle les
règles de l'audition, telles que convenues entre les groupes
parlementaires. La période des déclarations d'ouverture durera 40
minutres, soit 20 minutes pour Mme la ministre et 20 minutes pour le
porte-parole de l'Opposition.
La durée totale de l'audition de tous les organismes entendus
aujourd'hui sera d'une heure, soit 20 minutes pour l'exposé du
mémoire et 40 minutes pour les échanges avec les parlementaires,
dont 20 minutes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, et 20
minutes pour l'Opposition. Le temps de parole des députés sera de
10 minutes, en respectant la règle de l'alternance dans les
interventions.
J'aimerais maintenant inviter Mme la ministre
déléguée aux Finances à bien vouloir prendre la
parole pour sa déclaration d'ouverture pour une période de 20
minutes. Mme la ministre déléguée aux Finances.
Déclarations d'ouverture Mme Louise
Robic
Mme Robic: Merci, M. le Président. M. le Président,
avant de débuter, j'aimerais vous présenter les gens qui
m'accompagnent. À ma gauche, M. Mario Lebrun, mon directeur de cabinet
et, à ma droite, M. Jean Martel, le sous-ministre au ministère
des Finances.
J'aurai également, derrière moi, un conseiller
spécial qui se joindra à nous dans quelques minutes, soit M.
Gérald Lacoste.
M. le Président, le 14 juin dernier, je déposais à
l'Assemblée nationale le premier Rapport quinquennal sur l'application
de la Loi sur les assurances. La parution de ce document tant attendu par
l'industrie de l'assurance faisait suite à des consultations soutenues
menées auprès du milieu. Les recommandations que ce rapport
contient reflètent la volonté du gouvernement que je
représente de maintenir un cadre législatif qui assure la
souplesse, le pouvoir d'innovation et la capacité pour nos assureurs
de
répondre aux forces du marché. Ces derniers doivent, en
effet, pouvoir opérer dans un contexte de flexibilité et de saine
concurrence pour ainsi mieux se positionner sur l'échiquier des
marchés nationaux et internationaux.
Ce que je propose de faire ce matin, M. le Président, c'est de
mettre brièvement en perspective les orientations énoncées
dans le rapport quinquennal et d'exposer sommairement les modifications que
j'entends proposer à la Loi sur les assurances.
Je n'insisterai pas sur les modalités mais, bien sûr, sur
les orientations, car je m'attends à ce que les intervenants qui se
présenteront devant cette commission formuleront à notre
intention des commentaires concrets sur les modalités de changement
suggérées.
M. le Président, la structure de l'industrie de l'assurance au
Québec est bien différente de celle qui prévaut dans les
autres provinces canadiennes. La présence d'un nombre important
d'assureurs issus du milieu a en effet favorisé, au cours des
dernières décennies, l'émergence et le
développement d'une véritable industrie de l'assurance
particulière au Québec.
Le gouvernement du Québec a toujours eu comme
préoccupation de suivre l'évolution du marché des
assurances au Québec en adaptant, lorsque requis, sa législation
aux nouvelles réalités du secteur financier et aux besoins
changeants de la population en matière de protection, tout en favorisant
la concurrence, l'efficacité et la confiance dans le secteur
financier.
Dans ce contexte, le Québec s'est distingué en 1984 par
l'adoption du projet de loi 75, et, à ce titre, la démarche
québécoise s'est avérée novatrice au plan canadien,
puisqu'elle a été le fer de lance du décloisonnement des
institutions financières. Les modifications législatives alors
apportées permettaient, en outre, aux assureurs québécois
de prendre une avance considérable sur leurs concurrents en
élargissant de façon significative leur champ d'activités
et leurs pouvoirs de placements, tout en octroyant de meilleurs moyens de
contrôle et de surveillance des compagnies d'assurances exerçant
au Québec.
Cette loi 75 a également fait école dans les milieux
financiers canadiens, principalement en raison des réformes introduites
au chapitre de la responsabilité des administrateurs et du principe de
prudence que l'on retrouve maintenant dans toutes les législations
récentes en matière d'institutions financières au Canada.
Ce principe a notamment permis une marge de manoeuvre plus grande aux
administrateurs et dirigeants des assureurs dans leurs opérations de
prêts et de placements, en laissant tomber bon nombre de contraintes qui
leur étaient appliquées auparavant.
Ces avantages comparatifs du cadre légal québécois
ont été, au cours des dernières années, la pierre
angulaire d'acquisitions ou de fusions qui ont modifié les
paramètres établis et donné naissance à des
corporations ou groupes financiers importants.
La création de ces nouveaux intervenants financiers a permis aux
assureurs sous juridiction québécoise d'accroître leur
champ d'activités au Québec et à l'extérieur par
voie de filiales.
Dans le but de consolider cette avance des assureurs sous juridiction
québécoise, d'harmoniser le cadre légal
québécois avec les autres lois tant québécoises que
canadiennes régissant les institutions financières, d'adapter le
régime de contrôle et de surveillance des assureurs
exerçant au Québec aux nouvelles réalités
économiques et financières, de même que pour apporter les
correctifs appropriés à certaines lacunes décelées
lors de l'application de la Loi sur les assurances, le Rapport quinquennal
propose de poursuivre dans la foulée de la réforme amorcée
en 1984 en effectuant certaines modifications législatives à la
Loi sur les assurances. Il ne saurait être question de briser une
combinaison qui s'est avérée profitable jusqu'ici.
Mais nous savons la rapidité avec laquelle évolue le
secteur financier. En 1984, on venait tout juste de sortir d'une
récession et la formule REA connaissait de bonnes années. Le
capital était abondant, et il suffisait de saisir les occasions les plus
rentables pour l'utiliser de façon profitable. Nos assureurs ont saisi
ces occasions avec l'heureux résultat que l'on connaît. Mais
aujourd'hui, la situation est bien différente. Le minimum de capital
exigé des institutions financières est devenu de plus en plus
l'objet d'une évaluation méthodique et réglementée.
Un peu partout dans le monde industrialisé, des normes de capital furent
adoptées à l'intention des institutions financières. Ces
normes de capital sont devenues une réponse à la
volatilité de la conjoncture économique et financière et
à la montée des risques dans l'économie. Elles sont aussi
un sous-produit de la déréglementation effectuée à
l'égard des institutions financières. Le minimum de capital
exigé des institutions joue maintenant un rôle primordial dans le
maintien de leur solvabilité
Les marchés financiers ont de plus été le
théâtre d'un mouvement d'internationalisation, puis de
mondialisation. La signature de l'entente du libre-échange entre le
Canada et les États-Unis, les discussions actuelles de l'Uruguay Round,
l'Europe 1992, la présence grandissante des institutions
financières japonaises partout dans le monde et le
décloisonnement des institutions financières dans les autres
juridictions canadiennes permettent de prévoir une concur rence accrue
dans le milieu des assurances Tout cela démontre la
nécessité de tenir compte de ce que font les autres juridictions
et d'entreprendre avec elles des discussions pour éviter de balka-niser
le marché canadien des assurances, ce qui pénaliserait lourdement
nos assureurs
M. le Président, l'analyse des phénomènes
que je viens d'évoquer me porte aujourd'hui à conclure
qu'on ne peut plus, dans le contexte actuel, favoriser la croissance et
l'expansion sans chercher, en même temps, à atteindre
l'équilibre à l'égard de la sécurité de
l'épargne de nos concitoyens, tout en tenant compte du contexte
international. C'est dans cette perspective que l'on doit interpréter
les modifications que suggère le Rapport quinquennal. Dans le domaine
des institutions financières comme dans plusieurs autres, il faut savoir
contourner les obstacles si l'on veut continuer à progresser, ce qui est
essentiellement l'objectif que nous poursuivons.
Vous me permettrez maintenant d'aborder, M. le Président, les
différents thèmes traités par le Rapport quinquennal. Je
ne crois pas devoir insister sur le rôle du capital pour un assureur
comme pour toute autre institution financière. Le capital est utile pour
protéger les créanciers et en particulier les assurés en
cas de liquidation d'une institution, mais il l'est surtout dans le cours de
son activité, afin de lui permettre de réagir sans
difficulté aux fluctuations que connaissent ses revenus et
dépenses. Avec la déréglementation et la disparition
graduelle de certaines balises et contraintes législatives à
l'égard des prêts et placements de l'institution
financière, (e capital joue de plus en plus un rôle
névralgique dans la protection des assurés.
Mais il n'y a pas que la déréglementation qui rende encore
plus nécessaire la surveillance attentive du niveau de capital de nos
assureurs. Il y a aussi les fortes variations de la conjoncture
économique et financière que nous connaissons depuis la fin des
années soixante-dix et l'intensification de la concurrence à
laquelle ils sont exposés. c'est pourquoi le rapport quinquennal propose
la mise en place de normes de capital à l'intention des assureurs. ces
derniers ont mis sur pied la société d'indemnisation en
assurances de personnes, la siap, pour protéger les clients des
compagnies d'assurances de personnes. tout en soulignant le travail auquel
s'est attaquée l'industrie canadienne de l'assurance de personnes au
cours des derniers mois dans l'établissement de normes, je crois
cependant que la protection de l'assuré et les moyens de l'accorder
doivent d'abord demeurer des préoccupations du gouvernement. la future
réglementation devra par ailleurs être d'une efficacité
comparable à celle des autres juridictions canadiennes.
fondamentalement, le québec n'a rien à gagner en mettant en place
des normes qui procurent au public une protection inférieure à
celle qui est accordée par les autres juridictions. en effet, les
assureurs du québec sont en compétition avec les assureurs
originant d'autres juridictions.
Dans ce contexte, je suis convaincue qu'en réduisant ses
exigences, le gouvernement servirait très mal les intérêts
des compagnies du Québec. Par ailleurs, notre réglementation
devra tenir compte des caractéristiques propres à notre
industrie, même si c'est dans une perspective d'harmonisation que nous
désirons implanter nos politiques. quant au contenu de la norme de
capital elle-même, le point le plus délicat est la question des
sommes investies dans le capital de filiales. on sait que contrairement aux
assureurs des autres juridictions, les assureurs québécois les
plus importants ont une proportion non négligeable de leur actif qui est
investi dans des filiales. c'est la raison pour laquelle les exigences que nous
étudions à cet égard ne leur sont pas
indifférentes. à ces assureurs, je dis que nous avons l'intention
de nous coller le plus possible à la réalité de leur
marché afin d'éviter de leur imposer des ajustements
coûteux pour des raisons artificielles. c'est ce qu'énonce
d'ailleurs le rapport quinquennal en mentionnant que la réglementation
devra tenir compte de la spécificité des assureurs.
Nous avons récemment assisté, au Canada, à un
important débat concernant l'affiliation d'intérêts
financiers à des intérêts commerciaux. Ce débat
s'est cristallisé autour d'une définition avancée en 1987
par l'avant-projet de loi fédéral sur les sociétés
de fiducie et les sociétés de prêts. Le débat a
d'abord porté sur le rôle des entreprises commerciales dans la
propriété des institutions financières et ensuite sur le
rôle des institutions financières dans le contrôle
d'entreprises commerciales ou industrielles en introduisant une
séparation nette entre le secteur financier et le secteur non financier.
Le Rapport quinquennal résume très succinctement les arguments
avancés par les participants et les opposants aux liens commerciaux.
Notre loi ne contient aucune disposition limitant l'acquisition
d'actions d'assureurs par des entreprises commerciales, sauf approbation du
ministre. Elle limite à 30 % des actions d'une même corporation le
maximum des investissements qu'un assureur peut faire dans une entreprise
commerciale. Au Québec, on permet à un assureur, s'il fait d'une
entreprise commerciale sa filiale, d'y investir jusqu'à 4 % de son actif
pourvu que les investissements dans de telles filiales ne prennent pas trop
d'importance en relation avec son actif, c'est-à-dire qu'elles n'en
excèdent pas 15 % pour l'ensemble des filiales. C'est la règle du
4 %-15 % à laquelle se réfère le Rapport quinquennal.
Le Rapport propose aujourd'hui de continuer à permettre les liens
commerciaux en amont. En aval de l'institution financière, il
préconise le maintien à 30 % des actions d'une même
corporation le maximum des investissements qu'un assureur peut réaliser
dans une entreprise commerciale. Ce plafond convient toujours au monde de
l'assurance et permet aux assureurs de continuer à participer activement
à l'essor économique du Québec.
Pour les cas des filiales commerciales, il
m'apparaît que ces liens comportent des risques, mais d'autres
facteurs sont à considérer. Il faut, par exemple, tenir compte du
fait que tes filiales sont à la source de tensions sur le capital
posées par l'introduction de normes dans un contexte où les
mutuelles, surtout, disposent présentement de peu de moyens pour
réunir tout le capital nécessaire à leur expansion. Une
autre considération Importante est le besoin d'harmonisation avec tes
lots des juridictions environnantes.
C'est pourquoi le Rapport propose de dresser une liste des filiales
financières qu'un assureur peut détenir, et de limiter les
filiales non financières autorisées à celtes dont les
activités sont accessoires ou connexes au commerce d'assurance.
La liste des filiales financières permises doit maintenir le
principe du décloisonnement par des filiales et être suffisamment
large pour inclure tous les services financiers qu'il est posssible d'offrir.
Quant aux droits acquis à la détention de filiales devenues
inadmissibles par suite des modifications que je viens de décrire, ils
devront évidemment être reconnus. M. le Président,
j'aimerais ici vous dire que malgré qu'il soit permis depuis 1984
d'avoir des filiales commerciales, seulement deux compagnies se sont
prévalues de ce privilège et ont fait des investissements minimes
dans des filiales commerciales.
L'actuelle Loi sur les assurances demande des ajustements puisqu'elle
n'a pas subi de modifications au sujet des transactions
intéressées et des conflits d'intérêts depuis 1984,
alors que les législations québécoises récentes
régissent ce sujet beaucoup plus systématiquement. La Loi sur les
assurances contient déjà plusieurs interdictions de prêts
ou de placements, notamment auprès des actionnaires et des
administrateurs ou des entreprises qui leur sont liés. Ces interdictions
seront modernisées et un régime plus permissif, au sens propre du
terme, sera préconisé.
Le régime suggéré pour les transactions
intéressées et les conflits d'intérêts en est un de
contrôle, fondé sur l'action efficace d'une structure de
révision interne à la compagnie d'assurances, et qui regroupera
des administrateurs indépendants. Il est suggéré que les
transactions permises se réalisent selon des modalités et
à des conditions comparables à celles qui s'établissent
généralement sur le marché des transactions
similaires.
Le besoin d'harmonisation des lois canadien nés sur les
assurances découle notamment de la nécessité, sur le plan
national, de prévenir les difficultés associées à
une évolution divergente des politiques préconisées par
les différentes juridictions canadiennes, et de faciliter les
opérations des assureurs dans plusieurs, voire même la
totalité de ces juridictions
Ce processus d'harmonisation est déjà en cours dans le
secteur des sociétés de fiducie et des sociétés
d'épargne et devrait donner sous peu des résultats -très
positifs. dans le domaine des valeurs mobilières, l'harmonisation est
déjà une tradition. forts de ces expériences, il serait
opportun maintenant d'étendre ce processus aux compagnies
d'assurances.
M. le Président, la propriété de nos assureurs
m'apparaît être un sujet clé parmi ceux qu'aborde le Rapport
quinquennal. On sait que la loi actuelle limite à 10 % des actions
ordinaires la participation qu'un non-résident et les personnes qui lui
sont liées peuvent acquérir dans le capital-actions ordinaire
d'un assureur du Québec. Les non-résidents, pris collectivement,
ne peuvent en détenir plus de 25%.
Ces plafonds privent inutilement nos assureurs de capital et de
l'expertise provenant d'assureurs étrangers. Puisque ta concurrence ira
en s'accrorssant dans les années qui viennent, notamment en raison de la
globalisation des marchés, et que l'on observe déjà entre
les assureurs de divers pays occidentaux des mouvements de fusion ou de
participation au capital de compagnies étrangères, il devient
impératif de libéraliser les règles actuelles.
Le Rapport quinquennal propose donc d'abolir les plafonds des 10% et 25%
pour les remplacer par une seule règle qui interdira aux administrateurs
d'une compagnie d'assurances ou d'une entité constituée au Canada
qui la contrôle, à moins d'y être autorisée par le
ministre, de procéder à une attribution ou à un transfert
d'actions, si cette attribution ou transfert a pour but de porter à plus
de 30% les droits de vote qui peuvent être exercés par des
non-résidents collectivement. (10 h 30)
On passera ainsi d'une interdiction à la nécessité
d'une approbation. De plus, le seuil de propriété où cette
approbation devient nécessaire en sus du régime
général d'approbation des transferts et attributions d'actions a
été fixé à un niveau suffisamment bas,
c'est-à-dire 30%, pour permettre au ministre de superviser toutes les
situations et de s'assurer que les Québécois conservent le
contrôle de leurs institutions financières sans se priver
inutilement d'un apport étranger.
Le Rapport quinquennal traite d'autres modifications apportées
aux articles de la loi qui restreignent les transferts et attributions
d'actions. En règle générale, ces modifications ont pour
but d'aligner les restrictions sur les dispositions correspondantes de la Loi
sur les sociétés de fiducie et les sociétés
d'épargne. Dorénavant, le transfert d'éléments
d'actif ou de passif par les assureurs fera l'objet d'un contrôle
gouvernemental, à l'exception, cela va de soi, des transferts
effectués dans le cours normal des opérations.
Un des faits saillants du Rapport quinquennal est la proposition
relative au niveau dos placements en actions de corporations admissibles
comme filiales. Le rapport propose désormais l'ouverture de ce
qu'on appelle le "no man's land", c'est-à-dire la détention entre
30% et 50% des actions de telles corporations. Il est important que les
assureurs du Québec aient dorénavant les moyens de s'associer
avec d'autres partenaires dans la formation d'entreprises sans devoir
obligatoirement être titulaires du contrôle. C'est là une
mesure tout à fait essentielle à l'internationalisation de leurs
activités.
Une autre modification importante à ce chapitre porte sur le
pouvoir d'investir dans des filiales dont la limite sera ramenée d'un
plafond théorique de 50 % à 25 % de l'actif. Il apparaît en
effet impossible présentement pour un assureur d'investir autant que 50
% de son actif uniquement dans des filiales, compte tenu des règles de
prudence édictées à l'intention de ses administrateurs et
du capital existant. Tous les assureurs se trouvent d'ailleurs
présentement à un niveau qui n'excède pas la nouvelle
limite proposée à l'égard des investissements en filiales.
Comme les normes de capital que le gouvernement entend adopter sont toujours
à l'étude et que je ne suis pas réfractaire à
l'idée d'y prévoir un traitement relativement souple pour les
filiales, il m'apparaît opportun d'ajuster à la
réalité du secteur le niveau maximum d'actif pouvant être
ainsi investi.
Le rapport quinquennal propose en outre d'édicter un pouvoir
réglementaire permettant au gouvernement de prescrire certaines normes
régissant les accords de réseaux, dont certaines viseront
à protéger la confidentialité des renseignements
personnels détenus sur les clients.
Voilà donc, M. le Président, ce qui résume
sommairement les principales modifications à la Loi sur les assurances
proposées au Rapport, qui feront aujourd'hui et demain l'objet des
travaux de cette commission.
Il m'apparaît que les modifications suggérées
permettront à nos assureurs d'être bien outillés pour faire
face aux défis du XXIe siècle. Qu'on songe aux nouvelles
règles de placements, à l'ouverture du régime de
propriété, aux liens commerciaux en amont qui favoriseront une
meilleure capitalisation et une solidité financière accrue.
Elles s'inscrivent judicieusement avec les orientations d'ordre
économique et financier privilégiées par le gouvernement.
Une facette importante de la stratégie énoncée
jusqu'à présent en cette matière repose sur la
reconnaissance des compagnies d'assurances comme acteur important dans notre
développement économique. Je vous remercie.
Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la ministre. M. le
secrétaire, Mme la ministre a pris combien de temps? De combien de
minutes a-t-elle excédé le temps permis?
Le Secrétaire: Deux minutes de plus.
Le Président (M. Lemieux): Deux minutes. Alors, M. le
critique de l'Opposition officielle, vous bénéficiez de deux
minutes de plus.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, je voudrais, à
mon tour, saluer tous les gens qui sont ici aujourd'hui, qui participent
à nos débats et que nous aurons l'occasion d'entendre, chacun,
lorsqu'ils présenteront leur mémoire.
Je voudrais faire quelques remarques préliminaires. Au mois de
juin dernier, la ministre déléguée aux Finances rendait
public le Rapport quinquennal sur l'application de la Loi sur les assurances,
tel que le prévoyait la Loi sur les assurances, de faire un rapport
quinquennal. Je voudrais simplement rappeler qu'en 1984, le gouvernement du
Parti québécois avait fait adopter cette loi avec l'appui de
l'Opposition. Cette loi a d'ailleurs marqué le début du
décloisonnement des institutions financières au Canada, ce qu'on
voit d'ailleurs, ce qui a été noté par la ministre tout
à l'heure, dans son exposé.
Rappelons, au départ, qu'il ne faut pas confondre,
évidemment, décloisonnement et déréglementation. Je
le dis à ce stade-ci. C'est d'ailleurs pourquoi le gouvernement du Parti
québécois avait fait adopter une loi créant le poste
d'Inspecteur général des institutions financières,
à l'époque. L'objectif alors avoué par le parrain de cette
loi, qui est aujourd'hui le chef de l'Opposition officielle, était
d'inspirer la crainte aux compagnies. On voulait ainsi protéger
l'épargne des consommateurs et on se rappellera qu'il a
créé ce poste d'Inspecteur général, avant
même de faire adopter la loi à l'époque. Donc,
c'était toute une démarche qui nous amenait au
décloisonnement et à la déréglementation, mais les
deux choses étant évidemment très différentes.
Le gouvernement du Parti libéral a poursuivi dans la voie
tracée par le gouvernement précédent. En fait, on peut
dire qu'en matière d'institutions financières, il existe un
consensus entre les partis politiques, actuellement. Il faut le souligner parce
que ce n'est pas tellement fréquent. Mais disons que, dans ce domaine,
de 1984 à aujourd'hui, il y a eu un consensus qui a été
bénéfique, je pense, au Canada de même qu'en
Amérique du Nord. Je crois qu'on peut affirmer que le Québec est
un leader actuellement, qu'il dispose d'une certaine avance dans le contexte du
décloisonnement. L'Opposition officielle est d'accord avec les grands
objectifs du Rapport quinquennal, à savoir de favoriser le
développement de nos institutions, l'efficacité du système
financier et la protection de l'épargne des Québécois.
Ça a été rappelé par la ministre tout à
l'heure. En tout cas nous sommes parfaitement d'accord avec ces bons
voeux-là, pourvu qu'on aille un peu plus loin, qu'on dise ce que
ça veut dire, et qu'on explique là où on veut aller.
L'Opposition regrette, cependant, le flou de certains
énoncés ainsi que certaines orientations indiquées par la
ministre déléguée aux Finances et qui apparaissent dans le
Rapport quinquennal et qu'on va voir exposés dans les mémoires de
ceux qui viennent ici aujourd'hui. C'est une chose qui est soulignée
à de multiples reprises. En fait, on a l'impression que la ministre
déléguée aux Finances est quelque peu craintive devant
l'évolution de la situation. On a l'impression qu'if y a des choses qui
se passent qu'elle ne dit pas très clairement. Je pense, par exemple,
à la page 6 de l'exposé qu'elle vient de nous lire. On a
l'impression qu'il y a des menaces quelque part, des menaces de balkanisation.
Je ne vois pas pourquoi les autres voudraient nous menacer de quelque chose.
Et, au fond, on a peur de se retrouver tout seul dans ce contexte. Bref, je
pense qu'il y a des choses non dites dans ce Rapport et c'est
particulièrement apparent au niveau des liens commerciaux où j'ai
vraiment l'Impression que nous faisons machine arrière par rapport aux
gestes qui avaient été posés en 1984 et depuis ce
temps-là.
En ce qui concerne ces liens commerciaux, en 1984, l'adoption de la loi
75 permettait l'établissement de liens commerciaux en aval. Et
c'était là un des principaux changements apportés par la
loi qui a permis d'ailleurs à nos entreprises d'aller de l'avant. Le
gouvernement alors autorisait les compagnies d'assurances à sortir du
seul produit des assurances et il avait alors choisi le décloisonnement
par filiales. Un modèle qui, à mon sens, a fait ses preuves.
Jusqu'ici, je ne vois pas qu'il y ait eu des exagérations importantes en
tout cas. J'aimerais qu'on nous éclaire là-dessus. Tout en
concevant ce modèle, la ministre nous indique qu'aujourd'hui, elle veut
restreindre le pouvoir de placement des compagnies d'assurances dans les
filiales. Donc, c'est à cause de cela que je parle d'un certain recul;
peut-être que nous aurons l'occasion d'en discuter avec les intervenants
au cours de la journée, et nous verrons un peu, demain, si c'est
fondé. Probablement que les motifs sont valables. Je voudrais cependant
les voir exposés.
On parle aussi de conflits d'intérêts, de la santé
financière des compagnies d'assurances. Les gens se sont
positionnés sur cette question, les conflits d'intérêts qui
existeraient en aval, mais on a aussi souligné dans les mémoires
qu'ils pouvaient aussi exister en amont. Donc, je ne sais pas pourquoi on
solutionne un cas alors qu'on ne solutionne pas l'autre ou bien si on a
vraiment raison de le traiter sous cet angle-là. En fait, je pense que
nous faisons face à deux philosophies: d'un côté, on permet
un certain décloisonnement, mais en s'assurant de règles
tellement précises qu'on veut prévoir à l'avance toute une
série de cas. Au fond, on veut faire un contrôle a priori, qui
essaie d'aller jusqu'au bout de toutes les situations. Je pense que ça,
c'en est une, philosophie. On accepte donc un certain décloisonnement
afin de donner quelques dents aux compagnies pour se défendre dans des
situations de concurrence, mais sans aller très loin, en ayant, je
pense, peur de tout ce qui peut se passer, et c'est là où je
qualifie l'attitude de la ministre de craintive par rapport à des
situations et par rapport à la vie des affaires. Et la hantise des
problèmes, des faillites est tellement grande qu'on ne veut pas aller
trop loin. Enfin, ça nous apparaît cela. On regarde alors ce qui
se fait ailleurs et on parle d'harmonisation. Mais, jusqu'à un certain
point, quand on lit tout cela, on a l'impression qu'on veut plus qu'harmoniser,
on veut uniformiser. Et c'est la position qui me semble retenue actuellement
par la ministre, où tout est centré sur l'institution
financière, sa santé et ses pouvoirs, où l'on ne
considère que l'entreprise d'assurance sans plus.
L'autre approche est plus globale. C'était celle, à mon
sens, qui avait présidé à l'adoption de la loi 75 à
l'époque. Il faut comprendre que les institutions financières
détiennent l'épargne des Québécois, et la question
qu'on se pose, c'est comment on peut le mieux possible diriger cette
épargne pour développer le Québec. C'est l'un des grand
piliers de nos institutions financières que celle de l'assurance, alors
on laisse aux assureurs, dans un tel contexte, la possibilité de faire
fonctionner leur imagination dans un grand cadre. On leur dit de faire ce
qu'ils veulent - en fait, c'est le régime de la liberté des
affaires - mais qu'il y a cependant quelqu'un qui veille au grain, qui est
l'Inspecteur général. C'était la philosophie de 1984, et
je pense qu'elle a été maintenue jusqu'ici, sauf que j'ai
l'impression qu'on est en train d'y faire des corrections très
sérieuses, pour ne pas dire des changements importants.
C'a été notre approche à l'époque et
ça été l'approche qui a été suivie
jusqu'ici. Pourquoi en changer? Tout à l'heure, la ministre nous a
cité quelques chiffres, et j'ai l'impression que ce que ça
soulignait, c'est que les assureurs, par eux-mêmes, n'avaient pas
débordé considérablement la situation et qu'il n'y avait
pas de problème plus que ça. Donc, si l'Inspecteur
général pouvait jouer son rôle, ou s'il le jouait, il
pourrait, à un moment donné, faire des remarques aux compagnies
d'assurances et les corrections pourraient se faire très bien Je lie
cette question un peu au fait que l'Inspecteur général, lors de
l'étude des crédits, avait souli gné le fait qu'il avait
peu de ressources, peu de moyens, et donc, j'en suis venu à lire le
Rapport quinquennal et à me poser la question de savoir si, finalement,
on n'était pas en train de corriger une situation presque purement
administrative où l'Inspecteur général manquait de moyens
pour faire son travail et que, là, on imposait des normes à toute
l'industrie de l'assurance pour une simple question qui se retrouve au niveau
des moyens de l'Inspecteur général.
Il me semble que c'est quand même une
question à se poser. D'ailleurs, des assureurs ont posé la
question et on a l'impression qu'on est en train de regarder des solutions qui
cherchent un problème, alors qu'au fond, il suffit simplement que
l'Inspecteur général joue son rôle complètement,
avec toute la liberté et les moyens dont il devrait disposer.
Nous ne nions évidemment pas l'existence potentielle de certains
problèmes tels que ceux qui ont été illustrés dans
le Rapport quinquennal. Mais ce que nous voulons dire, c'est qu'on doit dire
aux entreprises de gérer comme elles le veulent leurs affaires et que
l'État s'en tient, quant à lui, à un rôle de
surveillance étroite, qu'il a l'oeil ouvert. Je pense que c'est dans ce
contexte de liberté d'affaires des entreprises, avec le rôle de
surveillance de l'État, que nous avions conçu la loi 75 et que
nous devrions continuer. (10 h 45)
La ministre fait aussi, et souvent, allusion à des efforts en vue
d'harmoniser toutes les législations canadiennes. Certains des groupes
que nous entendrons sont d'accord, d'autres non. Nous ne croyons pas, pour
nous, à l'uniformisation des lois à travers toutes les
législations. Nous croyons à un modèle
québécois pour nous développer, pour répondre aux
intérêts particuliers des Québécois et nous voulons
que le Québec continue à affirmer sa compétence et non pas
à se laisser dicter ses politiques. Nous voulons qu'il garde son avance
dans le domaine de l'assurance en Amérique, dans le domaine du
décloisonnement des institutions financières, ce qui a
été très bénéfique au cours des six
dernières années où il y a eu des miracles, à mon
sens, qui ont été faits à partir des capitaux des
entreprises et nous regretterions que, pour imposer ou même, pourrait-on
dire peut-être, pour pallier la carence des moyens de l'Inspecteur
général, on touche à cette approche qui avait
été mise de l'avant.
Nous sommes davantage d'accord avec ceux qui nous parlent de l'Europe
1992 où la reconnaissance des juridictions est préférable
à l'harmonisation pure et simple, parce qu'en Europe, on reconnaît
l'existence des différences, on reconnaît le droit à la
différence, et, quant .à nous, nous adhérons beaucoup plus
à une telle approche.
Sur un autre plan, le processus qui nous mène à l'adoption
de la loi, nous approuvons évidemment le processus démocratique
de consultations qui a été mis en place par la ministre
déléguée aux Finances. Nous espérons que ce sont
avec des objectifs louables, mais nous ne pouvons pas ne pas simplement
souligner que l'ex-ministre responsable des institutions financières
avait déjà indiqué qu'il était prêt à
légiférer à l'époque. Alors, la question que nous
nous posons, c'est: pourquoi recommencer tout ce processus?
J'ai souligné tout à l'heure que, sur de nombreux points,
le Rapport quinquennal était flou entre certaines propositions avec
lesquelles nous pouvons être d'accord à ce stade-ci, et
l'orientation que cela peut prendre dans le contexte législatif. Il y a
des marges que nous verrons au cours du débat, au cours de la
consultation. Je pense que c'est notre droit de le mentionner à chaque
étape. Certains groupes vont le souligner à bon droit. On va
comprendre que ces groupes vont vouloir s'exprimer sur le contenu des mesures
elles-mêmes et nous allons appuyer leurs démarches. Donc, en
termes de consultation, je pense qu'il y a matière à
débat, actuellement.
Le problème dans tout cela, c'est que cela peut être
là. Nous avons un rapport quinquennal. C'est un rapport quinquennal,
point. Il va donner lieu à de la consultation. Ensuite, à un
dépôt de projet de loi. Encore de la consultation, je suppose
bien, qui va s'avérer nécessaire, parce que le Rapport
quinquennal n'étant pas très précis actuellement, les
véritables intentions du gouvernement vont se révéler
lorsque le projet de loi sera déposé. Je pense que c'est
ça qui va se produire. Alors, il y aura donc étude du projet de
loi et d'adoption.
Tout cela va prendre du temps et doit prendre le temps qu'il faut. Nous
allons offrir notre pleine collaboration à la ministre pour que tout
cela se fasse rapidement, à la condition que cela se fasse aussi dans le
respect des règlements de l'Assemblée nationale.
À ce stade-ci, j'ignore s'il sera possible d'adopter la loi avant
la fin de l'année. C'aurait été, sans doute, plus facile
si la ministre avait présenté elle-même un avant-projet de
loi en même temps que son Rapport quinquennal. Les groupes auraient alors
été en mesure de se prononcer sur des propositions
concrètes. Nous aurions, à ce moment-là, gagné
beaucoup de temps et, surtout, encore une fois, que le ministre
précédent avait indiqué qu'il était prêt
à légiférer. Alors, il me semble qu'il doit y avoir dans
les tiroirs quelques projets de loi prêts ou pratiquement prêts
depuis longtemps, étant donné la déclaration de
l'ex-ministre.
Alors, voilà les points que je voulais toucher jusqu'ici. Nous
aurons l'occasion de discuter avec ceux qui vont venir. Je n'ai
évidemment qu'effleuré le sujet de notre consultation. Encore une
fois, je vais offrir toute notre collaboration à la ministre
déléguée aux Finances, afin que le tout se déroule
dans un esprit d'ouverture et dans un esprit où nous voulons, nous
entendons faciliter le progrès de nos institutions financières,
particulièrement, en l'occurrence, de nos institutions d'assurances. Et
je souhaite qu'on puisse adopter les modifications nécessaires à
la Loi sur les assurances dans l'intérêt de toutes les
entreprises, des consommateurs et du Québec dans son ensemble.
Merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Labelle, porte-parole officiel de
l'Opposition.
Auditions
Nous allons maintenant entendre l'Association canadienne des compagnies
d'assurances de personnes inc. Je demande aux représentants de cet
organisme de bien vouloir prendre place, ici, à la table des
témoins juste en avant de moi, en face de moi, dans un premier
temps.
Dans un deuxième temps, est-ce que le porte-parole de cet
organisme aurait la gentillesse de s'identifier et de présenter aux
membres de cette commission les gens qui l'accompagnent, s'il vous
plaît?
Association canadienne des compagnies d'assurances de
personnes inc.
M. Millette (Yves): Bonjour. Je suis Yves Millette, le
vice-président principal de l'Association canadienne des compagnies
d'assurances de personnes pour les affaires québécoises. Et je
suis accompagné aujourd'hui de M. Robert Bégin, qui est
président et chef de la direction de l'Industrielle-Alliance, Compagnie
d'assurance sur la vie...
Le Président (M. Lemieux): À votre gauche? M.
Millette: À ma gauche, bien sûr. Le Président (M.
Lemieux): Ça va.
M. Millette: Et à ma droite, M. Claude Garcia, qui est
vice-président exécutif - exploitation, à la Standard Life
du Canada.
Le Président (M. Lemieux): Merci Je vais vous rappeler
brièvement les règles de l'audition: 20 minutes sont
consacrées, dans un premier temps, à l'exposé de votre
mémoire et suivra une période de 40 minutes d'échanges
avec les membres de cette commission. Sans plus tarder, M. Millette, nous vous
écoutons.
M. Millette: Merci. L'Association canadienne des compagnies
d'assurances de personnes est favorable à la réforme de la
législation sur les institutions financières et veut prêter
son concours, là où c'est possible, afin
d'accélérer l'adoption des mesures législatives visant le
secteur des assurances de personnes. Notre position, telle que décrite
dans le document que nous vous présentons aujourd'hui, constitue une
position commune de l'industrie canadienne des assurances de personnes. Nous
espérons que ce document vous aidera à élaborer une
structure réglementaire adéquate pour le secteur des assurances
de personnes.
La nécessité du décloisonnement des institutions
financières est maintenant générale- ment admise.
L'objectif du processus de docloi sonnement au Québec, aussi bien qu'au
Canada en général, est d'accorder aux corporations oeuvrant dans
le domaine des services financiers les mêmes droits et pouvoirs qu'aux
personnes physiques, de limiter l'exercice de tels pouvoirs aux services
financiers et d'exiger la formation de filiales spécialisées pour
pratiquer les assurances, les valeurs mobilières et les fiducies
En ce qui concerne les pouvoirs corporatifs, dans le cas particulier du
Québec, les pouvoirs corporatifs des compagnies d'assurances sont encore
trop limités par rapport à ce que le gouvernement
fédéral s'apprête à consentir aux institutions
financières sous sa juridiction. Les compagnies d'assurances à
charte québécoise devraient être régies par la
partie IA de la Loi sur les compagnies plutôt que par la partie I! ou la
partie I, comme c'est le cas actuellement.
Comme vous le savez, la partie IA de la Loi sur les compagnies est le
nouveau droit corporatif qui s'applique et qui donne des droits plus
étendus, les droits de personnes physiques à des corporations,
et, pour qu'il y ait une bonne adéquation entre les législations
fédérales et la Loi sur les assurances du Québec, il
serait nécessaire que la partie IA soit appliquée, plutôt
que la partie I ou la partie II, comme c'est le cas actuellement
En ce qui concerne la diversification par l'intermédiaire de
filiales, nous continuons de favoriser une attitude ouverte. Idéalemeot.
la législation devrait permettre la constitution de filiales pour
exercer n'importe quelle activité, avec l'approbation préalable
des autorités dans certains cas, sous réserve de normes
quantitatives exprimées en pourcentage de l'actif. De cette
façon, les compagnies d'assurances de personnes ne seraient pas
enfermées dans une liste restreinte qui deviendra rapidement
inadaptée à la nouvelle technologie reliée au domaine
financier ainsi qu'à la compétition internationale
croissante.
Le Québec avait pris cette position dans les amendements à
la Loi sur les assurances en 1984 - bill 75 - et devrait continuer de le faire.
Le gouvernement du Québec devrait continuer à permettre les liens
commerciaux en aval.
Toutefois, si le gouvernement ne maintient pas son approche d'ouverture
à l'égard des liens commerciaux en aval, la liste des filiales
autorisées doit être suffisamment large pour com prendre toute
filiale engagée dans des activités raisonnablement proches des
activités d'une institution financière et pas seulement d'une
compagnie d'assurances de personnes.
Nous recommandons aussi que la législation n'exige pas la
création de filiales séparées pour chaque opération
complémentaire, et que la loi reconnaisse que les filiales
d'opérations complémentaires puissent être la
propriété conjointe d'un groupe d'institutions
financières, qu'elles soient liées ou non. ou conjointement
avec
d'autres compagnies affiliées plutôt que par une compagnie
d'assurances uniquement. De plus, le pourcentage de détention par chacun
des partenaires ne devrait pas être réglementé.
Quant aux normes quantitatives, nous préférons que les
investissements en filiales continuent d'être limités sous forme
de pourcentage de l'actif. Il appartient aux administrateurs et dirigeants de
la compagnie de décider de l'investissement des avoirs des fonds
participants aussi bien que des fonds généraux de la
compagnie.
Le concept de l'administrateur prudent pour les placements laisse
supposer que la compagnie d'assurances se dotera d'une politique de placement
basée non seulement sur l'appariement des placements avec ses
obligations, mais qu'elle sera également basée sur une
diversification prudente de ces placements. Aussi, nous ne sommes pas
opposés à l'introduction d'un tel principe dans la
législation ni à l'introduction d'un pourcentage maximal de
l'actif pouvant être investi en filiales. nous sommes aussi d'accord avec
la proposition du rapport quinquennal concernant l'autorisation pour une
compagnie d'assurances de détenir, à titre de partenaire
silencieux, jusqu'à 30 % des actions de toute compagnie autre qu'une
filiale autorisée. il s'agit là d'un financement accessible aux
pme, qui, nous le croyons, devrait continuer à être offert.
Enfin, nous approuvons la position du Rapport quinquennal visant
à permettre à une compagnie d'assurances de détenir entre
30 % et 50 % des actions d'une compagnie, permettant ainsi à la
compagnie d'assurances de s'affilier à d'autres compagnies ou
institutions financières pour son développement.
Les normes de capital. Les gouvernements et les institutions
financières apportent une attention plus grande à la suffisance
du capital pour le développement de leurs affaires de façon
à ne pas mettre en danger l'épargne des consommateurs. Cette
prise de conscience a fait suite à la faillite de certaines institutions
financières. Toutefois, il s'agit d'un nouveau champ de
réglementation, et les précédents ailleurs dans le monde
sont peu nombreux, spécialement en ce qui concerne les compagnies
d'assurance-vie. Il faudra trouver un juste équilibre entre la
protection des consommateurs et la capacité de développement des
institutions.
Il n'est pas question pour les compagnies d'assurances de personnes de
demander au gouvernement du Québec un traitement de faveur pour les
compagnies québécoises, mais les normes de capital qui sont
développées par les autorités réglementaires, tant
québécoises que canadiennes, doivent être raisonnables.
L'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes a
développé un test de solvabilité pour le Fonds
d'indemnisation en assurances de personnes, lequel fut mis en place au
début de 1990. Ce test de solvabilité, qui a reçu
l'assentiment de tous les membres de l'ACCAP, incluant les compagnies à
chartes du Québec, est une alternative aux normes de capital
présentement élaborées par les autorités
réglementaires.
Comme la participation à ce Fonds est un prérequis pour
détenir un permis d'opération au Québec, ce test de
solvabilité devrait être utilisé comme base pour
établir la suffisance du capital d'une compagnie d'assurances de
personnes qui demande un permis. Ce test devrait aussi servir de base pour
l'harmonisation des règles au Canada. Comme il est le premier du genre
dans le monde - toujours pour les compagnies d'assurance-vie - il devrait
être mis en application sur une base administrative pour assurer son
rodage avant de l'introduire dans la législation. (11 heures)
Abordons, maintenant, le chapitre des restrictions à la
propriété. Dans le projet de loi sur les fiducies, en 1987, le
gouvernement canadien proposait de restreindre le droit à la
propriété des institutions financières non bancaires de la
même façon que dans la Loi sur les banques canadiennes. On
invoquait que cette mesure avait pour objectif de favoriser la détention
large des institutions financières pour éviter la mainmise sur
l'épargne des consommateurs par des intérêts
commerciaux.
À leur origine, les restrictions non discriminatoires
décrites dans la Loi sur les banques reflétaient plutôt une
sérieuse préoccupation d'Ottawa concernant la
propriété d'institutions financières canadiennes par des
non-résidents et plus particulièrement par des Américains.
Ayant déclaré qu'aucun non-résident ne serait
autorisé à détenir plus de 10 % des actions d'une banque
à charte, le gouvernement du Canada a tout simplement
généralisé en appliquant la même restriction aux
résidents canadiens.
Au sein de l'industrie des assurances de personnes, le concept de
mutualisation a servi les mêmes fins, c'est-à-dire de
protéger la propriété canadienne des compagnies. Et on se
souviendra qu'au début des années soixante, à
l'époque où les règles ont été introduites
dans la Loi sur les banques, il y avait eu une vague de mutualisa-tions de
compagnies d'assurances au Canada. Pour les compagnies d'assurances à
capital-actions, on a introduit la règle du 10 %-25 % de
propriété des actions par des non-résidents.
L'ACCAP est préoccupée par les divers volets des
restrictions à la propriété qui sont un des principaux
freins au développement des compagnies d'assurances de personnes. Dans
les prochaines pages, nous développons notre position à
l'égard des divers volets.
Les liens commerciaux. L'industrie des assurances de personnes s'oppose
aux restrictions relatives aux liens commerciaux qui sont inutiles autant
qu'indésirables. Nous suggérons plutôt la mise en place de
règles raisonnables concernant
les transactions entre parties liées, l'approbation par le
ministre de tout transfert d'actions important, l'amélioration des
règles de gestion des entreprises, le resserrement de la
responsabilité des administrateurs et des vérificateurs, ainsi
que l'élargissement des règles de surveillance et de
contrôle sur l'industrie. Ces moyens sont plus que suffisants pour
contrer les abus que l'on prétend réprimer par l'imposition de
restrictions sur les liens commerciaux.
Nous accueillons donc favorablement la position du gouvernement du
Québec sur les liens commerciaux. Il ne faudrait pas toutefois que cette
position favorable soit au prix d'une réglementation trop
sévère et irréaliste des transactions entre parties
liées.
Comme nous l'avons fait ressortir plus haut, le secteur des services
financiers est une industrie en croissance et en constante évolution. De
ce fait, les compagnies d'assurances de personnes auront à investir des
sommes importantes si elles veulent compétitionner efficacement, que ce
soit au niveau national ou international. À elle seule, l'innovation
technologique demandera l'investissement de capitaux considérables. Il
importe peu que la source du capital soit financière ou commerciale. Les
capitaux de sources commerciales ont été et continuent
d'être une source de financement significative pour maintes institutions
financières tant sur le plan provincial que national. Il est
nécessaire que cette source de capitalisation soit maintenue si nous
voulons développer un secteur financier fort, compétitif et
viable.
Permettre aux institutions non bancaires, dont bon nombre ont
déjà des liens commerciaux, de compétitionner avec les
grandes banques canadiennes aura pour effet d'augmenter la concurrence et, par
là même, de favoriser le consommateur.
La démutualisation. Les besoins de financement des compagnies
d'assurances de personnes justifient également l'introduction d'une
législation sur la démutualisation, qui autorise
spécifiquement une compagnie mutuelle d'assurance-vie à se
transformer en compagnie d'assurance-vie à capital-actions, que ce soit
avec ou sans société de gestion mutuelle pour la chapeauter. De
plus, la législation devrait permettre la cohabitation d'actionnaires et
d'assurés participants dans une compagnie mutuelle comme elle le permet
dans une compagnie à capital-actions. D'ailleurs, la loi 75 a
déjà fait un pas dans cette direction-là en permettant aux
compagnies mutuelles d'assurances d'émettre des actions
privilégiées.
Acquisitions et fusions. Notre industrie s'inquiète des
propositions du gouvernement fédéral concernant les fusions et
les acquisitions qui voudraient que les grandes compagnies d'assurances n'aient
généralement pas le droit d'acquérir d'autres grandes
institutions financières et que, en règle générale,
les grandes compagnies d'assurances n'aient la possibilité de se
développer dans des secteurs non traditionnels qu'en créant de
nouvelles filiales au lieu d'ac quérir des sociétés
existantes.
Il ne fait aucun doute que la taille et la force qu'ont atteint les cinq
grandes banques aient été favorisées par l'adoption d'une
politique permissive du Bureau de l'Inspecteur général des
banques qui a autorisé les grandes banques à acquérir ou
fusionner avec d'autres grandes institutions bancaires. Au contraire,
jusqu'à très récemment, le Surintendant des assurances du
Canada s'est opposé à l'application d'une telle politique aux
compagnies d'assurances de personnes et aux sociétés de fiducie.
Ce qui a été un facteur significatif de croissance des banques
serait maintenant, avec les propositions du fédéral, interdit aux
institutions financières non bancaires.
Le gouvernement du Québec n'a heureusement pas suivi cette voie
et nous sommes d'accord avec la proposition du Rapport quinquennal à
l'effet que les acquisitions et les fusions seraient approuvées par le
ministre et que les approbations seraient basées sur des critères
clairs et objectifs énoncés dans la loi Nous sommes d'accord
à condition que ces critères n'aient pas pour objet
d'empêcher la croissance des compagnies d'assurances.
De même, l'ACCAP se prononce en faveur de l'abolition de la
règle du 10 %-25 % sur la détention d'actions d'une compagnie
d'assurances par des non-résidents. La participation de
non-résidents à des ententes avec des résidents pour
acquérir des compagnies d'assurances de person nés ou pour
fusionner des entreprises existantes est aussi de nature à assurer la
présence de nos entreprises sur la scène internationale. De plus,
une telle politique est conforme à l'entente sur le libre-échange
entre le Canada et les États-Unis et placerait les compagnies
d'assurances de personnes américaines et étrangères sur un
pied d'égalité.
La propriété des compagnies d'assurance-vie par des
banques. Au sens large, la politique du gouvernement fédéral
permettrait à toute institution financière effectuant des
opérations de dépôts d'acquérir une compagnie
d'assurance-vie. De façon générale, l'ACCAP ne s'oppose
pas à la propriété croisée au sein même de
l'industrie des services financiers. Nous sommes toutefois
préoccupés par la concentration du pouvoir dans le secteur
financier si les banques de l'annexe A sont autorisées à
posséder des compagnies d'assurance-vie au Canada
Nous pensons que le gouvernement a complètement
sous-estimé le pouvoir des banques à charte,
particulièrement les plus grandes. À la fin de 1988, ces banques
avaient plus de 545 000 000 000 $ d'actifs. La Banque Royale à elle
seule a plus d'actifs que les sept plus grosses compagnies d'assurance-vie
réunies. Leur habileté à gagner une part de marché
toujours plus grande et à écarter la compétition est
prodigieuse. En 1966, les banques détenaient 32 % du
marché du crédit à la consommation; elles en
détiennent maintenant 63 %. Comme conséquence, les compagnies de
prêts et de finances ont disparu du marché comme joueurs
importants dans l'industrie des services financiers.
Bien que nous reconnaissions la désapprobation du secteur
bancaire face à cette vision des choses, il n'en reste pas moins qu'il
faudrait déterminer jusqu'où pourrait mener une telle
concentration du pouvoir des banques possédant des compagnies
d'assurance-vie. Il ne fait aucun doute que la réponse à cette
interrogation n'est pas facile. Jusqu'à quel point cet avantage
oligopolistique serait-il au détriment de l'intérêt public?
La difficulté à résoudre cette question épineuse
vient du fait qu'il n'existe aucun organisme indépendant ni aucune
étude sérieuse qui aient évalué la situation.
Une chose est certaine. Les erreurs qui seraient commises à cause
de changements législatifs ou réglementaires seraient
irréversibles et la structure des services financiers en serait
irrémédiablement affectée dans le futur. Il est donc
impérieux que les autorités législatives aient une vision
très précise des conséquences du droit à la
propriété des compagnies d'assurance-vie par les grandes
banques.
Cet aspect important de la concentration des services financiers entre
les mains des cinq grandes banques de l'annexe A mérite la plus grande
attention de la part des provinces et en particulier de la part du gouvernement
du Québec qui pourrait voir la disparition des institutions
financières à charte provinciale comme une menace à son
pouvoir constitutionnel.
Je dois ajouter ici que la plupart des compagnies d'assurance-vie
canadiennes s'opposent aussi à ce que les grandes banques soient
autorisées à distribuer de l'assurance par leur réseau de
succursales.
Concernant, justement, la distribution en réseaux, depuis le
début des débats sur le décloisonnement des institutions
financières, l'ACCAP a toujours suggéré que les compagnies
d'assurances de personnes devraient être autorisées à
signer des ententes afin de vendre les produits ou offrir les services d'autres
institutions, qu'elles soient affiliées ou non. C'est ce que nous
appelons la distribution en réseaux. la distribution en réseaux a
été approuvée par tous ceux ayant eu à
débattre la question.
Notre industrie maintient sa position favorable à la distribution
en réseaux. Nous croyons qu'il est tout à fait légitime
pour une compagnie d'assurance-vie de proposer à sa clientèle des
services complémentaires à la sécurité du revenu,
tels l'administration des biens, le prêt hypothécaire
résidentiel ou les prêts personnels. La division des compagnies
d'assurance-vie en agences favorise la distribution en réseaux tout en
rencontrant les objectifs gouvernementaux qui visent à améliorer
la qualité des services offerts aux consommateurs et à
élargir les sources de crédit disponibles aux particuliers et aux
entreprises.
Nous partageons la préoccupation du gouvernement face aux
situations ouvrant la porte aux ventes liées. Par contre, nous craignons
que les ventes liées ne soient réglementées plus que
nécessaire, ou encore tout simplement interdites. Le cas
échéant, il pourrait devenir impossible de combiner des
protections d'assurance et d'autres services financiers. Nous sommes convaincus
qu'une solution équitable est possible en prenant les précautions
nécessaires pour que les options disponibles au moment de la vente
soient clairement énoncées. d'ailleurs, la législation sur
la compétition, qui est une loi fédérale d'application
générale, déclare qu'il est illicite pour toute
institution, sous juridiction fédérale ou provinciale, d'exiger
comme condition implicite ou explicite à l'achat d'un service financier
d'un consommateur qu'il achète un autre service ou produit. nous croyons
que cette disposition offre une protection adéquate aux consommateurs
sans qu'il soit nécessaire d'adopter des dispositions
supplémentaires par des législations particulières
concernant les différents types d'institutions financières.
Maintenant, le contrôle des transactions.
Le Président (M. Lemieux): II vous reste encore une
minute, M. Millette. De consentement?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Lemieux): De consentement. Allez, vous
pouvez continuer.
M. Millette: Merci.
Le Président (M. Lemieux): j'ai vu que, parfois, vous
faites quelques sauts pour aller un petit peu plus rapidement. vous pouvez
continuer.
M. Millette: L'industrie des assurances partage le désir
des autorités législatives d'établir un mode efficace de
contrôle des transactions entre une institution financière et ses
actionnaires, ses administrateurs, ses dirigeants, ses compagnies
affiliées et les autres parties liées.
Par contre, nous nous opposons fermement à la position prise par
les autorités législatives qui interdisent toute transaction
liée dans les législations des sociétés de fiducie,
sauf pour celles qui seraient spécifiquement autorisées et aux
conditions stipulées.
La réglementation des transactions entre parties liées,
telle que décrite dans le projet de loi fédéral sur les
fiducies de 1987, propose l'interdiction catégorique comme modèle
pour
toutes les institutions financières
réglementées par le fédéral. Cette proposition du
gouvernement fédéral confirme une tendance qui s'était
concrétisée dans la Loi sur les fiducies de l'Ontario et du
Québec. Il s'agit d'une des seules mesures qui a réussi à
faire l'unanimité de toutes les institutions financières, que ce
soit les banques, les compagnies de fiducie ou les compagnies d'assurances qui
ont décrié ces dispositions. Les associations représentant
ces institutions ont d'ailleurs adressé une lettre conjointe aux
autorités fédérales pour dénoncer les règles
proposées sur les transactions intéressées. Cette
unanimité s'est répétée au colloque sur les
conflits d'intérêts organisé par la Commission des valeurs
mobilières du Québec en juin 1990.
Avec la réforme de la législation, les
institutions financières bénéficieront d'une marge de
manoeuvre accrue pour les fusions, les nouvelles acquisitions et la
diversification de leurs activités. Malheureusement, les dispositions
relatives aux transactions entre parties liées seraient si restrictives
qu'elles empêcheraient les compagnies de bénéficier
pleinement de ces avantages.
Le principal inconvénient pour les institutions
financières avec le décloisonnement est l'impossibilité de
prévoir quels types de services seront requis par les consommateurs dans
les prochaines années, ainsi que de prévoir comment les services
financiers actuels s'intégreront. Avec une liste de transactions
limitée par la législation et figée dans des textes de loi
adoptés par divers Parlements, il deviendra à peu près
impossible aux institutions financières de s'adapter. Au lieu
d'identifier les activités et les transactions
intéressées, nous croyons que les législateurs doivent
d'abord autoriser les transactions entre parties liées et identifier
ensuite les activités ou transactions interdites, comme c'est
présentement le cas dans la Loi sur les assurances du Québec.
Nous recommandons également que tous les documents pertinents aux
transactions entre les parties liées soient vérifiés par
un comité de vérification formé par le conseil
d'administration des compagnies et comprenant des administrateurs
indépendants. Cette approche permettrait de contrôler les abus
tout en encourageant le développement et le dynamisme des institutions
financières québécoises. (11 h 15)
Nous croyons que les compagnies affiliées devraient
également avoir le droit d'effectuer des transactions avec les
institutions financières et les autres compagnies qui lui sont
affiliées. De plus, la liste des transactions autorisées entre
des institutions financières affiliées devrait comprendre les
prêts, les investissements et les transactions de capitaux incluant les
hypothèques, les placements privés ou les valeurs
mobilières. La vente ou l'achat d'actifs importants ne devrait
être complétée que si les autorités
réglementaires en sont préalablement avisées.
En réponse à la complexité grandissante du secteur
des services financiers, la faillite d'un certain nombre d'institutions
financières au cours des dernières années et la tendance
vers le resserrement des liens entre différentes institu tions, le
gouvernement a dû apporter quelques changements à son
système de supervision.
Notre industrie appuie l'élargissement des pouvoirs des
autorités réglementaires et de la responsabilité de
l'Inspecteur général des institutions financières pour
faire respecter l'application des règles relatives aux transactions
entre parties liées et le pouvoir de corriger les abus pouvant
soi-disant être commis.
Nous sommes toutefois préoccupés par le nombre sans cesse
grandissant de règlements et de lois auxquels doivent se conformer les
compagnies. En effet, les compagnies d'assurance-vie opèrent aujourd'hui
dans un environnement hautement réglementé aux deux paliers de
gouvernement; et, avec la réforme sur les institutions
financières, on sera bientôt envahis par toute une série de
nouvelles législations parfois contradictoires.
Notre préoccupation quant à la tendance des pouvoirs
discrétionnaires accordés aux autorités
réglementaires se concentre principalement sur les points suivants: les
règles non écrites et la lourdeur du système de
contrôle.
Comme pour toute autre entreprise, les institutions financières
doivent connaître toutes les règles qui sont appliquées
à l'ensemble des institutions financières. Autrement, le manque
de précision de la réglementation risque de favoriser les
institutions qui auraient le plus d'audace.
Par ailleurs, les règles doivent être connues aussi pour
éviter que les autorités réglementaires ne supplantent les
décisions préalablement prises de bonne foi par les
administrateurs et dirigeants de compagnies. Donner préséance aux
jugements des autorités réglementaires sur les décisions
prises antérieurement par le conseil de direction affaiblirait plus
qu'il ne renforcerait les compagnies. Agir ainsi équivaut à
rejeter l'intention de donner plus de responsabilités aux
administrateurs et aux directeurs de compagnies sous la nouvelle
législation. Je vous remercie.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M Millette, de votre
exposé. Mme la ministre déléguée aux Finances, la
parole est à vous.
Mme Robic: Merci, M. le Président. Je pense que je ne me
trompe pas, M. Millette, si je dis que l'Association est d'accord en gros avec
le Rapport quinquennal. Vous faites mention à la page 5, si je ne me
tompe pas, qu'il doit y avoir... "Il faudra trouver un juste équilibre
entre la protection des consommateurs et la capacité du
développement des institutions" Je suis tout à fait d'accord avec
ce principe. D'ailleurs, le
Rapport quinquennal a été conçu pour
reconnaître l'importance d'atteindre cet équilibre. Et je serais
tentée de dire cependant que si on devait primer l'un sur l'autre, il
faudrait que ce soit au niveau de la protection du consommateur. Je crois que
ça, ça doit passer avant tout, bien sûr.
Vous parlez des normes de placement. Vous êtes d'accord avec notre
ouverture au niveau des normes de placement et de propriétés
étrangères. Eh bien, je crois qu'en permettant cette ouverture,
il faut également améliorer le régime de surveillance.
C'est une conséquence du décloisonnement. Il faut s'assurer qu'on
puisse exercer une surveillance toujours, non pas dans la crainte de ce qui
peut arriver, mais bien dans la prudence. Je pense que la prudence doit guider
les actions et du gouvernement et des institutions financières dans
leurs transactions.
Vous parlez de transactions intéressées. Vous semblez
comprendre que nous voulons restreindre. Je pense qu'on a dû mal
s'exprimer. Bien au contraire, on veut avoir un régime d'ouverture avec
exceptions, bien sûr, mais c'est un régime d'ouverture que l'on
veut instaurer et non pas la "banned transaction" comme vous voyez dans
certaines autres législations. Et vous nous dites que vous êtes
hautement réglementés par divers paliers gouvernementaux. Eh
bien, c'est là la nécessité d'une harmonisation pour
faciliter votre entrée sur les marchés nationaux et
internationaux. Et c'est assez intéressant... Le député de
Labelle nous disait tout à l'heure qu'il faudrait peut-être
prendre le modèle de l'Europe 1992. Il y a une compagnie qui nous dit
qu'on le prend, le modèle de l'Europe 1992, et je voudrais rappeler
à tout le monde qu'avant de s'entendre sur ces marchés, il y a eu
de longues discussions pendant plusieurs années et on a établi
des normes minimales. Ce n'était pas un "free-for-all". C'est ce qu'on
tente de faire chez nous en s'harmonisant. Si vous avez lu le document au
complet, vous savez qu'on mentionne à plusieurs reprises que
l'harmonisation ne veut pas dire uniformisation.
Vous semblez savoir des choses qu'on ne sait pas. Vous nous dites que
nos pouvoirs corporatifs sont trop limités par rapport à ce que
le gouvernement fédéral s'apprête à consentir.
J'aimerais savoir ce que le gouvernement fédéral cache dans son
document. Nous, nous ne sommes pas au courant.
M. Millette: Je faisais référence à
l'avant-projet de loi sur les fiducies qui avait été
déposé en 1987 et dans lequel le gouvernement, comme il l'a fait
déjà dans la Loi sur les banques, accorde les pouvoirs de la
personne physique aux corporations dans les domaines qui sont de la juridiction
de l'institution financière. C'est à ça qu'on se
réfère, Mme la ministre. Chez nous, l'équivalent au
Québec serait d'accorder des pouvoirs de la partie IA de la Loi sur les
compagnies.
Mme Robic: Encore, le député de Labelle dit que les
ministres se suivent mais ne prennent pas nécessairement les projets des
autres ministres, ils veulent faire leur propre travail. Alors, ce serait
intéressant de voir, si jamais le projet de loi est
déposé, ce qu'il contient. Mais en ce moment, je pense qu'il faut
aller de l'avant, nous, au Québec. On ne peut pas présumer de ce
qu'on verra dans ce projet de loi là. Mais vous avez raison, il faudra
examiner ce qu'il y a là pour pouvoir s'ajuster si on devait...
Peut-être que c'est eux qui auront à s'ajuster sur nous, une fois
que nos projets, nous, étant à l'avant-garde et allant de l'avant
dans ce domaine-là.
Vous nous dites que vous n'êtes pas d'accord avec nous au niveau
de ne pas permettre les liens commerciaux en aval. Qu'est-ce qu'on restreint en
obligeant les compagnies à avoir des liens commerciaux en amont? Je n'ai
pas l'impression que je recule. Encore là, je n'ai pas l'impression que
j'ai peur, j'ai l'impression que je mets juste un élément de
prudence dans ma politique, en disant: Vous pouvez avoir des liens en aval,
dans des entreprises connexes, donc vous pouvez développer vos services
d'assurances, compléter vos services d'assurances, mais vous allez aller
en amont pour le commercial. Quelles restrictions voyez-vous? Moi, je comprends
mal. D'après moi, je ne recule pas, je mets juste un
élément de prudence, j'ajoute un élément de
prudence.
M. Millette: Je pense que, premièrement, on doit dire
qu'en interdisant les liens commerciaux en aval, vous restreignez les
compagnies mutuelles à ne pas avoir de liens commerciaux, puisqu'elles
ne peuvent théoriquement avoir de liens commerciaux en amont, à
moins de forcer les compagnies mutuelles à entrer dans un processus de
démutualisation. Nous sommes tout à fait d'accord que la loi doit
prévoir un processus de démutualisation, mais il ne faudrait pas
non plus que la loi en vienne à inciter des institutions à se
démutualiser uniquement pour les fins d'avoir des liens commerciaux. Et,
comme vous le savez déjà, Mme la ministre, le financement des
compagnies mutuelles est une grande préoccupation. On cherche
différentes façons de capitaliser les mutuelles. Les liens
commerciaux en aval pourraient demeurer une façon, pour les compagnies
mutuelles, d'avoir des ententes commerciales avec d'autres groupes
financiers.
C'est dans ce sens-là qu'on est réticents à
l'abolition des liens commerciaux. On n'a pas de projet précis en
tête, mais comme vous l'avez dit vous-même tantôt, la Loi sur
les assurances, telle qu'appliquée depuis cinq ans, n'a pas conduit
à des abus dans ce domaine-là, et on se demandait s'il devrait y
avoir ou non une fermeture, quant aux liens commerciaux en aval. S'il devait y
avoir une fermeture sur les liens
commerciaux, nous souhaitons qu'on se contente d'énoncer qu'il
s'agit d'opérations complémentaires aux activités des
institutions financières, sans dresser une liste complète de
toutes les institutions, de façon à laisser le plus de marge
possible aux institutions financières.
Mme Robic: Vous avez raison. D'ailleurs, à ce
niveau-là, je pense qu'il faut réaliser qu'il y a
énormément de nouveaux produits qui arrivent sur le
marché. Il faut être flexibles, il faut permettre d'élargir
quand le besoin s'en fera sentir. Et je pense que ça, on a bien
l'intention de le faire. Oui, on me fait remarquer qu'il n'est pas
nécessaire de se démutualiser complètement avant de
pouvoir créer des liens en amont. On a une compagnie qui l'a fait, une
mutuelle qui s'est partiellement démutualisée pour le faire. Je
n'ai pas voulu couler un modèle de démutualisation dans la loi
pour la simple raison que je me dis: II faut laisser aller l'innovation.
D'ailleurs, on a formé un comité qui recherche des moyens d'aider
nos compagnies mutuelles à se capitaliser. L'industrie est très
dynamique et peut trouver de nouvelles façons de le faire. Je pense
qu'il faut laisser une ouverture à ce niveau-là; il ne faut pas
adopter un seul modèle et dire: Tout le monde va se couler dans ce
modèle-là. Je pense que ce serait une erreur. Ce serait de se
priver d'initiatives qui peuvent être très
bénéfiques. Vous dites, à la page 3: Qu'on n'exige pas la
création de filiales séparées pour chaque opération
complémentaire. J'aimerais ça que vous élaboriez un peu
là-dessus. Quel est votre point de vue, exactement?
Le Président (M. Lemieux): M. Millette et Mme la ministre
il vous reste 30 secondes. Alors, M. Millette à la réponse.
M. Millette: La raison pour laquelle...
Le Président (M. Lemieux): À la question de Mme la
ministre.
M. Millette: ...on met ça, c'est qu'on ne voudrait pas
amener à la prolifération de filiales. S'il y a
possibilité d'avoir des opérations complémentaires de plus
d'un type, mais de types apparentés, évidemment là, au
sein d'une même filiale, on préférerait que ce soit fait.
Alors, disons qu'on n'en faisait pas un point très important, mais on ne
voudrait pas que ce soit segmenté au point où on devrait
créer 90 filiales pour réussir à exercer des
opérations complémentaires.
Mme Robic: On est d'accord avec ça.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Oui, M. le Président. D'abord, merci de
votre mémoire. Mais, à sa lecture, je comprends qu'il y a quand
même, comme vous dites, peut-être un accord qui est
énoncé, mais beaucoup de réserve tout le long du
mémoire. Lorsqu'on le lit, je pense qu'il faut le lire comme cela.
Vous dites, à la page 2, notamment, que les pouvoirs corporatifs
des compagnies d'assurances sont encore trop limités et vous parlez des
avantages de la partie I, de la partie IA de la Loi sur les compagnies.
J'aimerais ça que vous nous expliquiez exactement quel est l'avantage ou
quel serait l'avantage d'être régi par 1A plutôt quel?
M. Millette: Bon, là il s'agit d'un problème plus
technique qu'autrement. Il y a plusieurs années, le gouvernement
fédéral a changé tout son droit corporatif en adoptant une
nouvelle législation sur les compagnies, sur les corpora tions
canadiennes. La base de cette nouvelle législation était
d'accorder aux compagnies les pouvoirs de la personne humaine, de la personne
physique, pour permettre à une compagnie d'atteindre ses fins
corporatives. Alors, dans la limite des objectifs et des pouvoirs de la
compagnie, elle pouvait exercer toutes les activités qu'une personne
humaine peut exercer sans qu'il soit nécessaire décrire dans la
loi chacun des pouvoirs que la personne peut exercer: trouver des moyens de
financement, avoir des représentations, etc., tous les pouvoirs qu'une
compagnie peut exercer Au Québec, cette réforme du droit des
compagnies a été partielle dans le sens où on a
adopté la partie IA de la Loi sur les compagnies qui donne à peu
près des pouvoirs semblables à ce que la loi
fédérale donnait, mais on a conservé aussi la partie I et
la partie II, la partie I étant pour les compagnies formées en
vertu de la loi, et la partie II étant des compagnies formées par
lois spéciales. Et. pour les compagnies d'assurances plus
spécifiquement, le législateur a jugé
préférable jusqu'à maintenant de s'en tenir à la
partie I ou à la partie II, dépendant du mode de formation de la
compagnie et ne pas donner accès à la partie IA. Nous croyons
que, pour compléter la réforme des institutions
financières, on devrait accorder aux compagnies d'assurances
québécoises les pouvoirs de la partie IA, c'est-à-dire les
pouvoirs de personne physique, dans la limite où une compagnie
d'assurances peut exercer ses activités, évidemment. (11 h
30)
M. Léonard: Je..
M. Millette: Si vous me permettez d'ajouter...
M. Léonard: Oui.
M. Millette: Un des endroits ou un des domaines où les
pouvoirs de la partie IA seraient
très utiles aux compagnies d'assurances, c'est au niveau de la
souplesse de financement, de la souplesse d'accès à
différents outils de financement. À ce moment-là,
ça permet, par exemple, à des compagnies d'émettre du
capital illimité, d'émettre des actions sans valeur nominale,
etc., ce qui est interdit aux compagnies d'assurances, actuellement.
M. Léonard: Oui.
M. Millette: II y a toutes sortes de moyens techniques qui
faciliteraient la vie corporative des institutions financières si on
leur permettait d'avoir accès aux pouvoirs de la partie IA. Il y a des
choses qui sont aussi simples que la possibilité de tenir des
réunions du conseil d'administration par téléphone, par
exemple. C'est tous des outils comme ça qui seraient permis aux
compagnies d'assurances et qui ne sont pas accessibles à l'heure
actuelle. C'est toute une modernisation de la structure corporative.
M. Léonard: En fait, votre demande pourrait s'appliquer
aussi à n'importe quelle compagnie régie actuellement par la
partie I...
M. Millette: Oui, sauf qu'à l'heure actuelle... M.
Léonard: ...pour vous.
M. Millette: ...les compagnies qui ne sont pas des institutions
financières ont le choix d'opter pour la partie I ou pour la partie II,
alors que les institutions financières, les compagnies d'assurances,
plus spécifiquement...
M. Léonard: Elles n'ont pas le choix.
M. Millette: ...n'ont pas le droit d'opter pour la partie IA
parce que la Loi sur les assurances du Québec l'interdit.
M. Léonard: O.K. À la page 2, vous dites: "...la
législation devrait permettre la constitution de filiales pour exercer
n'importe quelle activité, avec l'approbation préalable des
autorités dans certains cas, sous réserve de normes quantitatives
exprimées en pourcentage de l'actif." Au fond, je lis là une des
principales réserves par rapport à l'énoncé du
Rapport quinquennal, parce qu'on entend limiter le développement en
aval.
Est-ce que vous diriez que la proposition gouvernementale ou, en tout
cas, l'énoncé - parce qu'il ne s'agit pas d'un texte de loi -
constitue une modification importante à la pratique actuelle? J'ai
entendu tout à l'heure qu'au fond, vous n'étiez pas d'accord avec
la proposition gouvernementale. Est-ce que vous considérez que c'est un
recul? Où est-ce que ça nous mène?
M. Millette: C'est un changement par rapport à la
politique actuelle, puisque la politique actuelle ne prévoit aucune
limite. Nous partageons, jusqu'à un certain point, les
préoccupations de Mme la ministre et du gouvernement de façon
générale parce qu'il est toujours possible, si c'est mal
exercé, que les liens commerciaux en aval, peut-être plus
spécialement qu'en amont, mènent à des abus. Il ne
faudrait pas qu'on en vienne, par exemple, à utiliser les fonds des
assurés pour permettre à certains dirigeants de s'enrichir. Je
donne de façon très grosse le problème, mais il est
nécessaire de faire attention. Mais nous ne croyons pas, comme pour les
liens commerciaux en amont, qu'une interdiction pure et simple ou une
restriction très grande aurait pour effet de régler ce genre de
problème-là.
Je pense qu'à l'heure actuelle, les compagnies
québécoises qui ont ce pouvoir-là depuis cinq ans n'en ont
pas abusé, et, comme je vous le disais, il y aurait peut-être des
désavantages particuliers éventuellement - notamment au niveau
des ententes pour le financement des compagnies mutuelles, des ententes avec
d'autres groupes financiers - pour les compagnies, mais, comme je vous le dis,
ce sont plus des désavantages potentiels que des problèmes
actuels parce qu'on n'en a pas vécu de problèmes jusqu'à
maintenant.
M. Léonard: Bien, il me semble que c'est ça qu'il
faut constater, et c'est ce que la ministre a dit d'ailleurs, dans son
exposé du début, qu'il n'y avait pas eu de problème depuis
ce temps, et c'est au cas où il y en aurait, qu'on limite. Alors, est-ce
que vous pensez qu'il y a des inconvients importants à ce qu'on limite
en aval? C'est toute la liberté d'entreprise, finalement, qui est en
cause.
M. Millette: Bien, les principaux...
M. Léonard: Quels sont les inconvénients,
finalement, de ne pas aller en aval?
M. Millette: le principal inconvénient est celui que j'ai
énoncé tantôt et qui a trait aux possibilités pour
les compagnies mutuelles d'assurance-vie d'avoir des liens commerciaux sans
être obligées de se démutualiser parce qu'on peut choisir
une forme de démutualisation complète ou partielle, selon
certains modèles qui sont déjà utilisés. mais il
peut aussi arriver qu'une institution financière désire, pour
toutes sortes de raisons, demeurer mutuelle et conclure des ententes avec
d'autres mutuelles, soit des mutuelles canadiennes ou des mutuelles
étrangères pour leur développement. c'est une
préoccupation à l'heure actuelle. je sais notamment qu'en europe,
c'est une des grandes préoccupations des compagnies mutuelles
européennes ou françaises d'essayer de trouver des façons
de prendre le virage du décloisonnement sans perdre
leur identité qui est celle de mutuelle.
C'est un problème à l'heure actuelle partout dans le
monde. Ce n'est pas unique au Québec. Le problème des liens
commerciaux est un problème effectivement. Il faut que ce soit
encadré, nous le reconnaissons, mais il ne faudrait pas empêcher
non plus ou couper certaines avenues d'entente aux grandes mutuelles.
M. Léonard: Quelles sont les dispositions que vous
mettriez dans un projet de loi? Est-ce que vous appliqueriez le 4-15 % pour
empêcher que des investissements dans des filiales commerciales mettent
en péril la sécurité des assurés?
M. Millette: Je pense qu'au départ, les mêmes
règles s'appliquant en amont ou en aval ne poseraient pas de
problème. Dans la mesure où on n'a pas une interdiction des
transactions liées, mais un encadrement des transactions liées,
je ne pense pas que ça pose problème à ce
niveau-là.
M. Garcia (Claude): Si vous permettez, M. le Président. Je
pense qu'un élément important aussi de changement par rapport
à 1984, c'est l'apparition de la préoccupation des
"réglemen-teurs", si on veut, d'introduire des normes de capitalisation.
Et, évidemment, dans la mesure où on veut créer des
filiales, il va falloir que les entreprises aient le capital nécessaire
pour investir dans ces filiales-là. Ça, je pense que c'est une
dimension nouvelle. Le projet de la ministre joue des deux côtés
du bilan, si on veut. D'une part, au niveau de l'actif, on veut limiter un peu
et, au niveau du passif, on veut exiger que les entreprises aient un capital
suffisant pour faire face à toutes leurs obligations. Je pense qu'en
répondant à ce genre de question-là il faut tenir compte
des deux éléments. Je pense que c'est très important.
M. Léonard: Mais, pour vous, ce que ça veut dire,
c'est que vous procéderiez plutôt... Votre recommandation serait
de procéder beaucoup plus par des normes de capitalisation que de faire
des interdictions comme celle-là.
M. Garcia. Oui. C'est qu'avec les normes de capitalisation on a
confiance qu'on peut permettre une plus grande marge de manoeuvre aux
entreprises, mais, évidemment, ce sont celles qui sont
capitalisées qui vont pouvoir se permettre cette marge de manoeuvre.
Ça rejoint la préoccupation de M. Millette à l'effet de ne
pas utiliser les dépôts des assurés pour se lancer dans des
aventures commerciales à droite et à gauche.
M. Léonard: Ce qui fait que les mutuelles, ayant elles
aussi peu de capital, ne pourraient pas se développer elles-mêmes
en aval?
M. Garcia: Je ne dis pas qu'elles ne pour ront pas, mais il est
certain que, pour se développer, ça prend du capital. Alors, le
problème de capitalisation revient posé, mais, si on n'a pas de
capital, on ne peut pas rien faire.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Merci, M. le
député de Labelle. Votre temps est déjà
terminé L'ordre des leaders est que je puisse ajourner à midi
moins vingt. En vertu du règlement, les 10 minutes qui ont
été accordées à Mme la ministre, au point de vue
juridique, en droit, ne sont pas divisible, mais je dois respecter la
règle de l'alternance. C'est donc dire, Mme la ministre, que si je vous
donne la parole jusqu'à moins vingt, ça vous fait environ deux
minutes et demie. Par équité, comme, de part et d'autre, et c'est
vraiment exceptionnel, vous avez pris un temps qui est égal, vous allez
me permettre de vous donner une minute et quelque chose, et, après, je
vais permettre au député de Labelle de prendre une minute. C'est
vraiment exceptionnel. Alors, Mme la ministre.
Mme Robic: Ce n'est pas la fin, là? Le Président
(M. Lemieux):...
Mme Robic: Je voudrais tout simplement peut-être...
À la page 9, vous dites que les compagnies d'assurances de personnes
devraient être autorisées, sans discrimination, à
acquérir des entreprises existantes, peu importe leur taille, et ce,
dans tous les domaines de services financiers au Canada, si elles ont fait
leurs preuves et si elles ont une clientèle établie.
J'aurais aimé que vous explicitiez un peu là-dessus.
M. Millette: Le "sans discrimination" étant qu'on n'impose
pas de limites à la fusion de compagnies d'assurances parce qu'elles
sont de telle ou de telle autre taille, plus grandes ou plus petites ou trop
grandes ou trop petites Face a la compétition des banques, qui sont
très grandes, comme je l'ai mentionné dans mon rapport, il faut
permettre aux compagnies d'assurances de rechercher, par toutes les formes
possibles, les regroupements pour pouvoir concurrencer adéquatement les
banques sur le marché canadien et les entreprises
étrangères qui sont aussi de plus en plus grosses. Donc, dans ce
sens-là, on ne croit pas qu'il y ait lieu de préserver ou
d'interdire à des compagnies d'assurances de faire discrimination aux
compagnies d'assurances sur la taille des fusions des compagnies qu'elles
peuvent fusionner
Mme Robic: là, ce que vous nous dites, c'est que, quand il
sagit de compagnies d'assurances "big shall not buy big" ne devrait pas
s'appliquer
M. Millette: C'est ça.
Le Président (M. Lemieux): merci, mme la ministre. vous
avez une minute, m. le député de labelle, et, après, ce
sera le mot de la fin de vous-même et, après, de mme la
ministre.
M. Léonard: Oui. Juste une dernière question. Vous
avez l'air de craindre un peu les pouvoirs de l'Inspecteur
général à la page 16. Est-ce que vous pourriez être
plus précis là-dessus, quand vous parlez de
surréglementation?
M. Millette: Je dois avouer que ce n'est pas propre au
Québec C'est une question qui est pancanadienne et qui va
nécessiter aussi de l'harmonisation. C'est qu'on a tendance, les
législateurs ont tendance à édicter beaucoup de normes,
et, dans certains cas, ces normes-là sont administratives, donc peu
connues des gens qui ont à les appliquer, et aussi, très souvent,
ces normes-là amènent les autorités de
réglementation à prendre des décisions qui relèvent
habituellement des conseils d'administration.
Donc, on enlève une liberté, et, à certaines
occasions, ça va très loin. On a peu parlé des
transactions intéressées, mais au niveau des transactions
intéressées, les Américains sont allés beaucoup
plus loin que nous et ils ont exactement suivi le modèle des compagnies
de fiducie, modèle de l'Ontario et du Québec. Et ils en sont
venus à la conclusion... Depuis quelques années, ils ont
commencé à reculer dans ce domaine-là, parce qu'ils en
sont venus à la conclusion que les autorités
réglementantes avaient tellement de pouvoir que c'étaient elles
qui, à toutes fins pratiques, prenaient des décisions, qu'elles
soient bonnes ou mauvaises.
Donc, ça allait très loin et les législations
deviennent très difficilement applicables à ce moment-là.
On souhaiterait qu'au Québec - au Canada, de façon
générale, mais spécialement au Québec - on n'aille
pas aussi loin que ça.
Le Président (M. Lemieux): Le mot de la fin, m. le
député de labelle.
M. Léonard: Non, ça va. Merci beaucoup, c'est un
excellent mémoire.
Le Président (M. Lemieux): Mme la ministre, comme mol de
la fin.
Mme Robic: Oui. Merci infiniment, messieurs. Vous avez raison, M.
le député de Labelle, c'est un excellent mémoire. Et on
n'a pas dû le lire de la même façon, parce que j'ai cru
déceler que vous étiez largement favorables à nos
propositions. Je pense que nous allons en tenir compte dans l'écriture
de notre loi et de nos règlements qui suivront. Encore une fois, je veux
vous rassurer qu'en ce qui concerne les liens commerciaux, je n'ai pas du tout
l'intention de les restreindre, mais bien de les réorienter. alors, on
vous remercie de votre présence ce matin, et, encore une fois, soyez
assurés qu'on tiendra compte de vos suggestions.
Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la ministre. Nous
vous remercions de votre participation aux travaux de cette commission et nous
suspendons nos travaux jusqu'à 14 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 43)
(Reprise à 14 h 40)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission du budget et de l'administration est réunie afin
d'entreprendre une consultation générale et des auditions
publiques sur le Rapport quinquennal sur l'application de la Loi sur les
assurances du Québec et en particulier sur le chapitre traitant des
liens commerciaux des assureurs.
Je m'excuse du retard. Vous n'êtes pas sans savoir que nous avions
une période des questions à l'Assemblée nationale à
13 heures. Il y a eu aussi la période des affaires courantes, ce qui
explique notre retard actuel. Par contre, nous allons quand même
procéder selon l'ordre du jour établi, quitte à
décaler peut-être d'une demi-heure à 45 minutes ce qui a
été fixé relativement à l'entente entre les
leaders. Ça vous va, M. le porte-parole de l'Opposition? Mme la
ministre, ça vous va?
Alors, immédiatement, j'appelle le Bureau d'assurance du Canada.
Je demande aux gens - c'est déjà fait - de bien vouloir prendre
place et que le responsable du groupe ait la gentillesse de bien vouloir
s'identifier et nous présenter s'il vous plaît les gens qui
l'accompagnent.
Bureau d'assurance du Canada
M. Bouchard (Jean): Merci, M. le Président. Mon nom est
Jean Bouchard. Je suis le président du comité du Québec
pour le Bureau d'assurance du Canada. Je suis accompagné par deux autres
membres du comité du Québec du Bureau d'assurance du Canada. Il
s'agit de M. Jean Denis Talon, qui est président-directeur
général des Provinces unies, et de M. Jean Tardif, qui est
président de la Saint-Maurice compagnie d'assurance. Je suis
également accompagné de Me Hélène Gagner qui est
avocate-conseil pour le Bureau d'assurance du Canada et de M. Raymond Medza qui
est le directeur général pour le Québec.
Le Président (M. Lemieux): Je vous rappelle
brièvement les règles de l'audition. Il s'agit de
20 minutes qui sont consacrées à l'exposé de votre
mémoire. suivra une période de 40 minutes d'échanges entre
les membres de la commission. ça va?
M. Bouchard: Très bien.
Le Président (M. Lemieux): Alors, nous sommes prêts
maintenant à vous écouter attentivement.
M. Bouchard: Merci. Alors, M. le Président, te BAC, Bureau
d'assurance du Canada, est l'association nationale qui représente la
presque totalité des assureurs qui opèrent au Canada. Le BAC
comprend plus de 100 groupes d'assureurs et de réassureurs qui
réunissent environ 180 sociétés.
Dans notre mémoire, que nous avons fait parvenir à Mme la
ministre sur son Rapport quinquennal sur l'application de la Loi sur les
assurances, nous avons d'ailleurs proposé certaines orientations. Nous
croyons que ces orientations-là sont susceptibles de favoriser la
position concurrentielle et le développement des assureurs sous
juridiction québécoise, tant à l'échelle du
Québec que nationale ou internationale, surtout dans un contexte de
décloisonne ment, de développement technologique,
d'internationalisation et de globalisation des marchés. Nous remercions
donc les membres de la commission de nous donner la possibilité de
discuter de nos commentaires sur les différents aspects du rapport et,
comme le souhaite la commission, également en ce qui touche les liens
commerciaux.
D'entrée de jeu, nous tenons à vous dire que nous
souscrivons à la grande majorité des énoncés de
politique contenus au rapport quin quennal en tant que principes sous-jacents
à une prochaine législation. Nous aimerions faire des
commentaires toutefois sur un certain nombre d'éléments. En ce
qui touche la capitalisation des assureurs, d'abord, le Rapport quinquennal
soulève divers aspects de la capitalisation, l'un étant la
composition et la structure du capital. Les règles actuelles
prévoient que le capital-actions d'une compagnie d'assurances est
composé d'actions ordinaires et d'actions privilégiées.
Les actions ordinaires constituent du capital permanent. Toutefois, les
privilégiées comportent également une certaine permanence,
puisque, en pratique, elles ne peuvent être rachetées sans l'aval
des autorités d'assurance.
Les compagnies d'assurances n'émettent pas de debentures. Les
obligations et autres titres de créance ne peuvent être
émis que pour satisfaire des emprunts à court terne, en vue de
combler des besoins de liquidité, ou s'ils sont non garantis et
complètement subordonnés
Les prêts en sous-ordre ne peuvent être émis que
s'ils sont consentis par les actionnaires et complètement
subordonnés. Bien qu'ils puissent rencontrer certains critères de
permanence, ces emprunts ne sont pas considérés comme du capital.
Ceci, à notre avis, a pour effet de limiter indûment la
capacité des assureurs de dommages de lever du capital. D'autre types
d'institutions financières, nommément les banques,
bénéficient de certaines règles qui leur accordent un peu
de flexibilité de financement. En matière de capitalisation, les
assureurs de dommages souhaitent qu'une aussi grande flexibilité que
celle donnée aux banques, en termes de titres admissibles et
d'échéances, leur soit accordée.
L'admissibilité des éléments d'actifs dans le
capital fait aussi l'objet de certaines préoccupations. Les
règles actuelles nous semblent satisfaisantes en ce qu'elles ont permis
aux asssu-reurs du Québec, depuis leur implantation, de prendre un
essort remarquable. Avec ces règles de placements, les groupes
financiers importants ont pu se positionner dans le marché
québécois, canadien, et international. Ceci pose, dans un certain
sens, le problème des placements dans les filiales. Nous sommes d'accord
qu'après cinq ans, la question particulière des placements dans
les filiales et le calcul de l'achalandage ainsi créé pourraient
être revus. Il faut noter que la structure des filiales en est une qui
est courante dans différents secteurs du monde des affaires. Et ceci
peut constituer une saine pratique de gestion.
Les investissements dans les filiales résultent en une meilleure
répartition des risques, soit géographiquement ou par secteur
d'activité, en plus de permettre une meilleure gestion
financière, comptable et fiscale des actifs. L'avantage, du point de vue
marketing, de créer des filiales qui ont leur siège social sur
place est appréciable également. Les filiales ont leur valeur
propre, en plus de constituer des actifs liquida-bles pour la compagnie
mère.
Nous sommes d'accord que la création de filiales, aux seules fins
de pyramider le capital, devrait être limitée. Mais lorsque la
filiale est créée dans un but d'affaires, avec ses propres actifs
et sa propre valeur, il n'y a pas lieu de désallouer cet actif. Nous
croyons à cet égard que nous devrions peut-être utiliser
des exemples pris dans d'autres juridictions et que la création de
filiales ou les actifs dans les filiales puissent être
considérés comme admis, mais à l'intérieur de
certaines balises qui pourraient être analysées D'ailleurs, comme
organisme, nous serions certainement prêts à travailler avec le
gouvernement pour essayer de baliser la capitalisation ou les normes de
placements dans les filiales.
Les institutions financières et les liens commerciaux. D'abord,
les liens commerciaux en amont. Les assureurs de dommages du Québec sont
heureux de constater que, dans son rapport quinquennal, la ministre
déléguée aux Finances confirme l'intention du gouvernement
de continuer de permettre les liens commerciaux en
amont. Ceci, en plus de favoriser la concurrence, contribuera
certainement à la stabilité des assureurs en leur fournissant une
source de capital importante dans un contexte de décloisonnement,
d'internationalisation et de globalisation.
Nous sommes toujours d'avis cependant que de saines pratiques de
gestion, combinées à des contrôles appropriés,
notamment au niveau de l'utilisation du capital et au niveau des transactions
entre compagnies liées, permettent de gérer les risques que
peuvent présenter les liens commerciaux en amont. Nous croyons
également que, par la responsabilisation des administrateurs et
l'utilisation de comités de transactions entre parties liées,
nous avons des outils qui permettent de gérer les risques
inhérents à de telles pratiques.
Je crois que, jusqu'à un certain point, il y a eu
exagération des dangers des liens commerciaux. Les dangers qui menacent
les assurés et les épargnants, dans les cas où une
institution financière a des liens commerciaux, que ce soit en amont ou
en aval, ont été, à notre avis, exagérés. Il
y a très peu d'exemples où le lien de cause à effet de
l'insolvabilité d'une institution financière ait
été vérifié ou même constaté. Il y a
de nombreux groupes financiers qui ont des liens commerciaux, soit ici au
Canada, soit aux États-Unis ou ailleurs au monde; qu'on me permette de
nommer, par exemple, des groupes comme American Express, comme le Montreal
Trust, la Great West, Power Corporation et le Groupe La Laurentienne. Et nous
ne croyons pas que la stabilité, la solvabilité de ces
institutions financières soient menacées par la présence
de tels liens, au contraire. Il y a eu d'ailleurs certaines analyses qui ont
été faites et certains rapports ont clairement indiqué
que, par exemple, au niveau des sociétés fédérales,
celles qui ont connu des problèmes financiers, disons sur 11 cas, il n'y
en n'avait qu'une où on pouvait dire qu'il y avait eu certaines
tractations, qui avaient été faites par des actionnaires, qui
avaient pu causer préjudice à leurs filiales. La même chose
dans les sociétés soit à charte provinciale ou
fédérale. Dans le cas d'un autre groupe, d'une autre analyse qui
a été faite, il a été trouvé qu'aucun de
ceux qui avaient participé ou avaient eu des problèmes financiers
n'avaient été affectés par le fait qu'ils aient eu des
liens commerciaux.
On peut dire que les cas de faillite, d'insolvabilité se sont
autant retrouvés chez les compagnies avec ou sans liens commerciaux,
sans qu'il n'y ait absolument aucun rapport entre le fait que les liens
commerciaux aient causé ces difficultés. Au contraire, on peut
dénoter les avantages de tels liens. En fait, la présence d'un
actionnaire fort qui voit a ses intérêts, qui sont en fin de
compte les mêmes que ceux de l'assuré ou de l'épargnant,
peut être bénéfique pour l'institution financière en
question. De plus, la présence d'un actionnaire fort constitue un
incitatif de plus pour le management à assurer une saine gestion. Et on
l'a vu dans plusieurs cas de difficultés financières, il y a eu
beaucoup plus de cas où les difficultés provenaient d'une
mauvaise gestion que du fait qu'il y ait eu des liens avec une
société commerciale. Non seulement les liens commerciaux
constituent une source de capital pour les institutions financières, et
par conséquent une source de santé et de viabilité
financière, spécialement dans un contexte de développement
technologique où on a besoin d'investissements importants pour
simplement se maintenir dans un marché compétitif ou de
réagir au développement de la concurrence nationale ou
internationale, ces liens peuvent aussi être une source de
stabilité dans une industrie cyclique comme celle dans laquelle nous
oeuvrons.
Il faut réaliser et évaluer la situation qui
prévaut au Canada et au Québec actuellement. Si des institutions
financières importantes sont passées aux mains
d'étrangers, et si des étrangers viennent s'installer au Canada,
c'est qu'il y a encore des marchés intéressants au Canada et au
Québec, mais les institutions financières canadiennes et
québécoises n'ont pas les leviers économiques
nécessaires pour développer ces marchés ou faire
l'acquisition de ces institutions financières. Il vaut mieux permettre
les liens commerciaux et les gérer de façon adéquate que
de les défendre et empêcher ainsi les institutions
financières de continuer l'expansion qu'elles viennent à peine de
commencer, qui plus est lorsque les juridictions étrangères
n'accordent pas la même importance aux dangers de tels liens.
Compte tenu de la tendance marquée vers une plus grande taille
économique, soit par des regroupements, des acquisitions ou fusions, il
est souhaitable que les assureurs de dommages puissent se rattacher à
des groupes financiers importants s'ils veulent maintenir leur position
concurrentielle. Il est donc naturel que les assureurs de dommages
désirent faire partie de groupes forts et puissants, favoriser leur
innovation technologique et leur expansion et appuyer leur santé
financière, tout en reconnaissant, par ailleurs, qu'une saine gestion
doit être assurée par les composantes de ce même groupe.
En ce sens, les assureurs de dommages sont favorables à la
création de liens commerciaux, que ce soit en amont ou en aval. Pour les
liens commerciaux en aval, nous sommes surpris que de tels liens commerciaux ne
soient pas retenus. La diversification des portefeuilles de placements est un
principe reconnu et généralement mis en application par les
gestionnaires financiers. Une bonne diversification permettra à une
industrie particulièrement cyclique comme la nôtre d'atteindre une
plus grande stabilité et devrait être laissée au bon
jugement des dirigeants et administrateurs des compagnies d'assurances.
Le texte du Rapport quinquennal suggère qu'une institution
financière, telle qu'une société de portefeuille, pourra
agir exclusivement à titre d'investisseur passif dans une
société commerciale, soit qu'elle ne pourra détenir plus
de 30 % des actions d'une même corporation. En ce qui concerne les
placements des assureurs dans de telles sociétés commerciales, on
comprend du texte que le gouvernement du Québec a l'intention
d'harmoniser sa législation sur celles d'autres juridictions
canadiennes. Nous croyons que cette limitation, combinée au pouvoir
limité de n'investir que dans des filiales d'assurance ou de services
connexes sera préjudiciable aux intérêts de
l'industrie.
Nous sommes d'avis qu'un concept large de placements devrait être
retenu dans le contexte actuel de décloisonnement que nous vivons et que
la limitation de 30 % n'est pas justifiée dans un tel contexte.
Il y a eu, en 1989 et 1990, énormément de mouvements de
capitaux dans les domaines financiers et commerciaux. Il ne faudrait pas qu'au
moment où ces mouvements s'accentuent, la flexibilité des
assureurs soit restreinte en matière de placements. Au contraire, en vue
d'assurer la viabilité et la stabilité des assureurs, il y a lieu
de leur donner toute la latitude pour gérer leurs affaires. La loi
actuelle est déjà limitative. Il n'y a pas lieu de la limiter
davantage.
Au niveau des placements dans les filiales, l'énoncé de
politique contenu au rapport quinquennal indique qu'une liste des filiales
financières admissibles sera établie. L'établissement
d'une liste exhaustive nous paraît beaucoup moins flexible que ce qui est
prescrit actuellement.
Dans le cadre de décloisonnement et de concurrence nationale et
internationale, les placements dans les filiales devraient plutôt
être élargis. Nous croyons que la gestion de ces
placements-là devrait se faire à l'intérieur des limites
ou des balises déjà imposées aux sociétés
d'assurance quant au pourcentage des actifs qu'elles peuvent placer dans
certains domaines et non pas gérer les placements de façon active
à la place des gestionnaires.
Les transactions intéressées et les conflits
d'intérêts. Nous sommes d'accord avec le principe selon lequel on
ne tente pas d'empêcher tous les conflits d'intérêts puisque
c'est impossible et qu'en pratique, ils existent dans toutes les structures
corporatives intégrées, le but de ces structures étant
justement de bénéficier d'économies par des relations
entre les parties liées. On devrait plutôt choisir de gérer
les conflits eux-mêmes.
En ce qui concerne les transactions entre parties liées, nous
sommes d'accord que la juste valeur marchande est un critère
généralement reconnu pour les transactions à distance ou
les transactions présumées à distance. Par ailleurs, la
juste valeur marchande devrait demeurer un critère de base et non pas
uniquement le seul critère.
Tel que nous l'avons indiqué à plusieurs reprises, un
ensemble de critères justes et raisonnables serait approprié pour
les transac-tions intercompagnies. Comme ces transactions seront
révisées par un comité de déontologie, la
flexibilité devrait être laissée aux administrateurs
d'exercer leur bon jugement et d'exercer pleinement leurs
responsabilités.
J'aimerais dire un mot également de l'harmonisation des lois
canadiennes sur l'assurance. Il nous apparaît que l'harmonisation des
lois canadiennes sur l'assurance constitue un but très difficile
à atteindre. Plutôt que de parler d'har monisation - parce que
harmonisation veut dire, de façon générale, pour certaines
juridictions, uniformisation selon leurs propres règles - nous voudrions
insister plutôt sur la nécessité d'avoir une reconnaissance
des différentes juridictions selon leur niveau de compétence Nous
préférerions en arriver à une recommandation comme
celle-là, bien que pour les sociétés qui opèrent
dans différentes juridictions, il serait parfois plus simple s'il n'y
avait qu'une juridiction. Comme nous avons un pays à différents
niveaux de juridiction, la reconnaissance des compétences par niveau
nous apparaît préférable et plus accessible.
L'Europe 1992, d'ailleurs, prévoit que chaque pays de la
communauté reconnaîtra la juridiction de l'autre, et, en autant
qu'une compagnie détienne un permis ou une licence dans son pays
d'origine, elle pourra faire affaire dans tous les pays membres. Cette
compagnie continuera d'être régie au niveau corporatif et
réglementaire par son pays d'origine. Elle se soumettra, par ailleurs,
aux règles contractuelles du secteur d'activité concerné,
lesquelles régiront ses relations avec ses clients. Je crois que cette
formule mériterait d'être...
Le Président (M. Lemieux): II vous reste environ une
minute. Nous allons vous laisser continuer afin de vous permettre, quand
même, de conclure, même s'il s'agit peut-être de quatre, cinq
ou six minutes, quitte à raccourcir la période des questions au
niveau des groupes parlementaires. Alors, on vous laisse continuer. Vous pouvez
peut-être hâter les choses bien modérément, en
prenant tout le soin possible d'aller à l'essentiel, s'il vous
plaît.
M. Bouchard: D'accord. Merci. Pour accélérer,
enfin, pour ce qui touche les liens com merciaux, je crois que ça
complétait quand même l'exposé. Nous avons quand même
certaines remarques que nous voulions faire et que nous avons
déjà faites d'ailleurs lors du mémoire que nous avons
présenté suite au Rapport quinquennal. Certains des points
touchent des aspects plutôt corporatifs et opérationnels, tels que
le transfert, et attribuent des actions sur lesquelles
notre mémoire est suffisamment clair et sur lesquelles je ne
reviendrai pas.
Il y aurait également une question qui nous préoccupe,
c'est tout ce qui touche l'amélioration du régime de
surveillance. Nous sommes d'accord qu'il y ait un régime de surveillance
vigilant qui soit implanté en ce qui touche l'assurance de dommages. Par
ailleurs, nous tenons à faire remarquer qu'aux États-Unis, par
exemple - et depuis quelques années le phénomène s'est
étendu au Canada - il est de plus en plus difficile d'attirer des
administrateurs au conseil d'administration dans un cadre où
l'obligation de moyens évolue vers une obligation de résultats.
Or, nous voulons quand même vous mettre en garde contre l'augmentation de
responsabilités des administrateurs, qui semblent être
sous-jacente au principe du Rapport quinquennal.
Les administrateurs ont déjà une responsabilité
générale de soin et de diligence, en plus d'une
responsabilité particulière en tant que mandataire ou fiduciaire
de l'entreprise, compte tenu de leur expertise, bien sûr, et en plus de
responsabilités particulières dans certaines situations, telles
que paiements de commissions, etc.
Nous croyons que les responsabilités des administrateurs doivent
demeurer raisonnables si on veut qu'ils continuent de jouer un rôle de
supervision et de conseil. Il ne faudrait pas que la législation les
place dans l'obligation de s'impliquer dans le détail et, à
toutes fins pratiques, de jouer le rôle des gestionnaires. Il en est de
même pour les vérificateurs. Ceux-ci doivent se rapporter aux
actionnaires et non pas jouer un rôle policier pour le compte des
autorités. Enfin, le droit de se faire entendre par l'assureur, le droit
à la justice naturelle et le droit à révocation doivent
être présents dans tout le régime de surveillance. (15
heures)
Je conclus ici en vous disant que, dans l'ensemble, les
énoncés de politique sont satisfaisants. Et nous
félicitons la ministre qui réaffirme la volonté du
Québec de demeurer à l'avant-garde dans la législation
relative aux institutions financières. Il nous est très difficile
de faire des commentaires plus précis pour l'instant que ceux que nous
avons déjà inclus dans notre mémoire, puisqu'il s'agit
d'énoncés de principe. Nous demandons à la ministre de
nous permettre de participer à l'élaboration de nouvelles
règles en matière d'assurance et d'encadrement de l'industrie,
notamment en matière de capitalisation et également de nous
donner la possibilité de faire d'autres commentaires lorsque les textes
de législation et de réglementation seront disponibles.
Pour reprendre le mot de la ministre elle-même dans son Rapport,
nous devons, ensemble, viser à atteindre un point d'équilibre
entre les objectifs de développement des assureurs et la protection des
intérêts des assurés. Nous remer- cions la ministre
déléguée aux Finances ainsi que les membres de la
commission de nous avoir donné la possibilité de faire valoir
notre point de vue à nouveau sur le contenu de son Rapport quinquennal.
Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie. Mme la
ministre, la parole est à vous.
Mme Robîc: Merci, M. le Président. Merci infiniment
de votre exposé. Je prends note que vous appuyez les principes de notre
Rapport quinquennal. Nous allons tenter de traduire ces principes-là
dans une loi qui répondra aux besoins de l'industrie, et vous pouvez
être assurés... Je pense que vous avez réalisé
maintenant que je suis un ministre qui consulte, et j'ai bien l'intention de
continuer de le faire.
Vous parlez de liens commerciaux et vous vous surprenez que nous ayons
choisi la voie de liens commerciaux en amont plutôt qu'en aval. Je
voudrais vous dire que je ne vois pas là où il y a un réel
recul. Il y a un réaménagement qui, je crois, était
nécessaire pour la solidité financière de nos
institutions. En aval, il est évident que la raison de ce genre de
liens, c'est beaucoup plus pour bonifier l'opération d'assurance. En
amont, je mets certainement un élément de prudence en allant
à des liens commerciaux en amont, mais c'est par là qu'on va
développer nos institutions financières, leur donner un
accès à un capital important et permettre à des groupes
financiers de se créer et éviter des pressions indues sur la
mère qui est une financière. Je vois mal où... Vous voyez
là un recul. Prudence, oui, mais je ne vous empêche pas, je
n'empêche pas les institutions financières d'avoir des liens.
Alors, je ne vois pas le problème, en réalité.
M. Bouchard: C'est-à-dire, Mme la ministre, que la
limitation qui existe est la limitation de 30 %. Déjà, par les
pouvoirs de placements que détiennent les assureurs ou par les
contrôles sur les placements, on a déjà quand même un
maximum de 4 % de nos actifs qu'on peut placer dans une même filiale et
15 % en agrégat sur l'ensemble des filiales.
Mme Robic: Oui.
M. Bouchard: Je crois que l'objectif de cette
limitation-là remplissait déjà le rôle, disons
l'objectif que vous vous étiez fixé de voir à ce qu'on
n'expose pas trop, que les sociétés d'assurances de dommages
n'exposent pas trop les actifs qui doivent servir à couvrir les
engagements qu'ils ont pris envers leurs assurés. Et je pense que cette
règle de prudence existait déjà sans avoir la limitation
de 30 % dans une filiale donnée. C'est tout simplement... C'est la seule
chose que nous avons remarquée, ces 30 % là qui
n'existaient pas auparavant. Dans ce sens-là, nous disons:
Même si on devait dépasser les 30 %, ce n'est pas tellement
ça qui est grave si nous appliquons des principes de gestionnaires de
placements avec une saine prudence tant et aussi longtemps que l'envergure de
ces placements-là ne dépasse pas les limitations
déjà préconisées par la loi.
Mme Robic: mais c'est bien sûr que, là, les 30 % ne
s'appliquent pas s'il s'agit de filiales connexes ou commerciales, connexes ou
accessoires.
M. Bouchard: C'est ça, dans d'autres..
Mme Robic: II n'y a pas de limite à ce niveau-là.
Tout le restant, vous devez le faire en amont, mais je vois mal où on
voit un problème en le faisant en amont. C'est tout simplement une
protection de plus, une prudence de plus qui s'exerce là, mais ça
ne vous lie pas les mains, ça vous permet de faire les mêmes
placements que vous auriez voulu faire, mais vous les feriez en amont
plutôt qu'en aval.
M. Bouchard: C'est-à-dire que je ne peux pas faire un
placement...
Mme Robic: Non pas faire un placement, mais en filiale au niveau
des. .
M. Bouchard: C'est-à-dire que je peux avoir...
Mme Robic: Oui.
M. Bouchard: ...une société commerciale en amont,
mais je ne peux pas faire un placement comme je le fais présentement ou
comme je pourrais le faire présentement, du moins théoriquement,
de plus de 30 %. Je pourrais avoir un lien commercial en amont, d'accord. Je
suis entièrement d'accord avec vous là-dessus. Ça, vous le
permettez. Nous sommes parfaitement à l'aise avec les liens commerciaux
en amont. Mais nous disons, lorsque vous le restreignez par les 30 % en aval,
c'est un recul par rapport à ce que nous avons déjà. Je ne
peux pas dire que c'est une chose qui a été surutilisée.
Mais compte tenu du fait que vous avez déjà cette
précaution-là à l'intérieur de la loi, de voir
à ce que nous n'ayons pas trop de nos actifs gelés dans le
capital d'une autre filiale ou d'une filiale autre qu'une filiale d'assurance
ou de services connexes, à ce moment-là, nous croyons que c'est
une limitation.
Mme Robic: Vous parlez également d'harmonisation et vous
me parlez tous de l'Europe 1992. Je suis tout à fait d'accord, mais je
voudrais vous rappeler qu'avant d'arriver à ces ententes, il y a eu des
discussions qui ont duré plusieurs années et qu'il y a eu un
établissement de normes minimales. Je pense que nous... D'ailleurs, j'ai
un mémoire ici qui me dit que je cadre très bien dans la
politique de l'Europe 1992 et de l'entente du libre-échange
également. Alors, là aussi, je pense qu'on s'entend très
bien au niveau de l'harmonisation. C'est vers ça que nous, on tend.
M. Bouchard: Je peux faire un commentaire là-dessus, M. le
Président, sur la question d'harmonisation? Vous donnez un exemple ici.
La raison pour laquelle nous le soulevons, c'est que, présentement, les
sociétés qui ont une charte provinciale du Québec ou
probablement d'autres chartes provinciales également ne peuvent pas
nécessairement faire des affaires dans toutes les provinces. Il y a
certaines provinces qui exigent que vous ayez une charte fédérale
pour faire affaire sur leur propre territoire. Alors, ce qui oblige une
société à charte provinciale à avoir une filiale
à charte fédérale pour opérer dans ces
territoires-là. Nous ne sommes pas en désaccord que vous
atteigniez une certaine harmonisation, mais nous croyons également
d'autant plus urgent à l'intérieur, disons, de la
fédération canadienne comme elle existe présentement,
qu'il y ait une reconnaissance des juridictions selon les niveaux de
compétence des différents gouvernements Et nous croyons que
ça aussi sera un objectif excessivement important à atteindre
Mme Robic: Mais avant même qu'on accepte les
compétences des diverses juridictions, est-ce qu'il ne faut pas
s'entendre sur un certain nombre de...
M. Bouchard: Peut-être, oui.
Mme Robic: Alors, c'est ce que l'on tente de faire au niveau des
fiducies présentement, c'est ce qu'on a fait depuis des années au
niveau des valeurs mobilières, et c'est bien sûr qu'on a bien
l'intention de faire la même chose au niveau des assurances. Mais ce ne
sont pas des procès sus qui sont nécessairement rapides. Mais
vous avez tout à fait raison.
À la page 7 de votre rapport, que vous nous avez fait parvenir,
vous dites: Je suis d'accord pour dire que la création de filiales pour
"duplicater" le capital devrait être limitée. Mais lorsque la
filiale est créée pour un but d'affaires avec ses propres 'actifs
et sa propre valeur, il n'y a pas lieu de "désallouer" cet actif. Moi,
j'aimerais ça vous entendre un peu là-dessus. J'ai de la
difficulté à voir votre position sur...
M. Bouchard: C'est que... Ce que nous...
Mme Robic: C'est sur le double comptage, ça.
M. Bouchard: Oui, sur le double comptage. Ce que nous disons
d'abord, notre position de principe est à l'effet qu'il ne serait pas
juste que de "désallouer" totalement le capital ou les actifs investis
dans des filiales, disons, surtout si ce sont des filiales qui opèrent
dans le même domaine que nous pour des fins autres que strictement pour
faire du "pyramidage". Par exemple, si des sociétés
désirent se créer des filiales qui opèrent dans des
domaines spécialisés, disons, qu'ils contrôlent très
bien, etc., ça ne serait pas normal de dire que ce capital-là
deviendrait du capital non liquide ou qu'il ne devrait pas être
considéré comme étant du capital permis dans
l'établissement de solvabilité de l'entreprise. Et ce que nous
voulons faire, ce n'est pas nécessairement d'en arriver à ce
qu'on "pyramide". Disons qu'à partir d'un très petit capital, on
pourrait créer un volume d'affaires beaucoup plus considérable;
ce n'est pas ce que nous cherchons. Nous disons que, dans certains cas, il y a
lieu de reconnaître ce capital-là lorsqu'il est investi ou que ce
sont des investissements qui sont faits pour des tins d'affaires très
justifiables. C'est un principe qui, encore là d'ailleurs, est reconnu
par d'autres juridictions, que ce soit celle de l'État de New York ou
que ce soit la juridiction, par exemple, de certains pays européens. Ils
le font, bien sûr, en établissant certaines balises, comme quoi
si, par exemple, vous aviez une filiale qui investissait, disons, dans des
opérations non acceptables ou non permises, selon le régime de la
compagnie mère, il faudrait la soustraire, évidemment, de la
valeur de cette compagnie-là dans le but de la replacer dans sa juste
valeur. Mais ce que nous disons, c'est qu'autant il n'est peut-être pas
juste de reconnaître tout ça à 100 %, autant il faudrait
être capable de reconnaître les cas qui sont des cas
justifiables.
Si je reprends l'exemple, disons, d'une société à
charte provinciale qui a besoin d'une société à charte
fédérale pour opérer, par exemple, dans la province de la
Nouvelle-Ecosse, lorsqu'on a besoin d'une charte fédérale pour
opérer en Nouvelle-Ecosse, je me demande pourquoi le capital de cette
société-là ne devrait pas être reconnu, par exemple,
comme un actif admis pour sa compagnie mère. Ça m'apparaît
être un exemple, du moins, où ...
Mme Robic: ce n'est pas chose facile à faire, de pouvoir
évaluer ce qui devrait être inclus et exclu du double comptage. on
fait une appréciation.
M. Bouchard: Non, mais je pense qu'il y a des modèles qui
existent, je crois, qu'il y aurait lieu peut-être de regarder.
Mme Robic: Oui.
M. Bouchard: C'est ce que nous suggérons, tout simplement.
On ne dit pas qu'on a toutes les réponses.
Mme Robic: Oui.
M. Bouchard: Mais on est prêts à collaborer avec
vous pour en arriver à un meilleur équilibre,
peut-être.
Mme Robic: Oui. C'est déjà fini?
Le Président (M. Lemieux): Votre temps de parole est
déjà fini, Mme la ministre. Votre temps de parole est
écoulé.
M. le député de Labelle, s'il vous plaît.
M. Léonard: M. le Président, je voudrais saluer les
gens du Bureau d'assurance du Canada, le BAC, comme on dit, institution bien
connue dans les milieux financiers, pour leur présence ici. J'ai lu le
mémoire. J'essaie d'interpréter ce que vous nous dites ici. Je
pense que, de façon générale, comme tout le monde, nous
sommes d'accord sur les principes énoncés par la ministre, qui
m'a l'air de la vertu en soi. En tout cas, personne ne peut être en
désaccord avec tout cela. Mais quand on creuse un peu, lorsque nous
regardons chacun de vos commentaires, je commence à y trouver pas mal de
réserves, l'une après l'autre. Si la ministre conclut de votre
exposé que vous êtes d'accord, j'ai l'impression que c'est
plutôt d'une pêche aux compliments qu'il s'agit que la
réalité, en fait. Moi, j'aurais une question à vous poser.
Vous êtes du Bureau d'assurance du Canada, quel est le problème
des compagnies d'assurances par les temps qui courent? C'est quoi le
problème?
M. Bouchard: Ceci, M. le Président, sort un peu du domaine
du Rapport quinquennal...
M. Léonard: Peut-être qu'il peut y en avoir une
couple.
M. Bouchard: ...si vous me demandez quel est le problème
courant de l'industrie de l'assurance du Canada. Il y a d'autres
problèmes, disons, que ceux qui sont soulevés par la Loi sur les
assurances du Québec.
M. Léonard: Bien, revenons à ma question, alors. Je
comprends que vous soyez prudent en y répondant, mais il faudrait savoir
si on s'attaque à de petits ou de gros problèmes. Lesquels sont
importants pour vous?
M. Bouchard: II m'apparaît que ce que nous essayons de
faire, enfin, ce à quoi le Rapport quinquennal essaie de s'adresser,
à ce moment-ci - et je pense que, quand même, c'est exprimé
à l'intérieur du rapport lui-même - c'est qu'on regarde la
modification à la Loi sur les assurances qui avait été
effectuée, je crois que c'est en
1984, et on regarde cène loi-là, cinq ans plus tard, et on
se dit: Quels sont tes amendements qui devraient être faits? Comment
t'avons-nous vécue, et quels seraient les changements qu'on devrait y
apporter, s'il y avait lieu d'effectuer certains changements. Je pense que
c'est ce à quoi s'adresse essentiellement fe rapport. Ce à quoi
nous réagissons, présentement, c'est sur les positions de
principes qui ont été prises à l'intérieur de ce
rapport quinquennat.
Et, bien sûr, il y a beaucoup de choses, au niveau des principes,
sur lesquelles nous nous entendons. Quand nous disons, par exempte, que nous
voulons préserver une industrie saine qui présente à son
public un niveau de solvabilité qui puisse garantir à ses
assurés le montant des indemnités auxquelles elle s'engage, etc.,
je pense que ce sont des principes sur lesquels nous nous entendons. Ce que
nous discutons présentement, à l'intérieur de ça,
c'est qu'il y a un certain nombre de modalités d'application ou, enfin,
de modalités... On n'a pas vu encore de textes de loi. C'est seulement
des prises de position et des énoncés de politique qui sont
sous-jacents au Rapport quinquennal qui nous est présenté. C'est
là-dessus que nous réagissons, beaucoup plus que sur les
problèmes précis que nous vivons présentement.
Si je regarde la situation actuelle de l'industrie de l'assurance au
Canada ou au Québec, je pense qu'il n'y a pas de problème de
carence de marché, à ce moment-ci. Je ne crois pas qu'aucun parmi
vous ait noté qu'il y ait une carence de marché. Si vous voulez
assurer votre véhicule, il n'y a aucun problème, etc. Mais c'est
plus sur un projet d'amendement ou de modification de certains articles de la
loi. (15 h 15)
M. Léonard: Moi, j'avais compris qu'en 1984 les
modifications sur lesquelles tout le monde s'était entendu, l'Opposition
y compris dans le temps, ça avait permis aux sociétés
d'assurances de connaître une expansion intéressante, importante.
Alors, on se retrouve cinq ou six ans après et, avant de toucher
à cet édifice qui avait été mis en place, il me
semble qu'il faut d'abord faire un constat qu'il y a des problèmes. Or,
ce que j'entends depuis ce matin, finalement, c'est qu'il n'y a pratiquement
pas de problèmes. On a peur de problèmes qui arrivent, et puis il
n'y en a pas sur la table, de vrais problèmes. Je n'ai pas eu
connaissance qu'il y ait eu de faillites depuis ce temps-là. Ce n'est
donc pas, et vous l'avez dit vous-même, les conflits
d'intérêts, ce n'est pas les investissements en aval qui ont
amené des problèmes majeurs. Alors, de quoi parle-t-on?
M. Bouchard: Enfin, je pense qu'une opinion que je peux vous
donner là-dessus c'est que, lorsqu'on regarde, par exemple, le
problème de capitalisation des sociétés d'assurances,
lorsque nous opérons sous différentes juridiction, à ce
moment-là, il y a certains problèmes, du moins d'harmoniser les
exigences entre les différents niveaux de gouvernement sur le niveau de
capitalisation. Il y a également besoin d'avoir reconnus ou pas reconnus
certains éléments d'actifs lorsqu'on regarde la capitalisation
des entreprises. Ça, ce sont des choses qui peuvent être
corrigées en cours de route, et c'est un peu le type de problème
auquel on s'adresse présentement d'une façon plus
spécifique. Ce ne sont pas des problèmes de fonctionnement ou de
mécanisme de marché auxquels on s'adresse présentement,
c'est plutôt...
M. Léonard: c'est correct. il reste, m. le
président, qu'on touche à une question, par exemple, de principe,
quand on dit qu'on veut vraiment restreindre beaucoup tes investissements en
aval. au fond, ça va limiter drôlement la capacité des
compagnies d'assurances à élargir leur action, à devenir
des groupes importants à côté de banques qui sont, de toute
façon, beaucoup plus importantes. donc, i me semble qu'à terme,
si on limite la capacité ou la possibilité d'investir en aval,
finalement, on va pénaliser drôlement tout le secteur des
assurances au détriment des autres secteurs de la société
dans le monde de la finance. moi, je trouve que vos réserves sur
l'énoncé de principe, à l'effet qu'on ne permettrait plus
à des sociétés d'assurance d'investir en aval, ça a
du bon sens. qu'est-ce que ça vous empêche de faire
concrètement, actuellement, cette limitation d'inves-tir en aval?
M. Bouchard: Actuellement, c'est qu'on aurait... On a toujours le
pouvoir d'investir dans des sociétés en aval, dans des
sociétés d'assurances ou des sociétés de services
connexes. Ce que nous défend ou ce que nous défendrait, selon la
proposition du Rapport quinquennal, l'énoncé de politique, c'est
que les sociétés d'assurances ne pourraient pas investir plus de
30 % des actions d'une société qui n'est pas membre ou qui ne
fait pas partie de leur propre industrie ou n'est pas connexe à leur
propre industrie. Ce que nous disons, nous, c'est qu'on ne voit pas le
bien-fondé de cette restriction-là, parce qu'on a
déjà - disons, si ce qu'on vise est la protection du capital et
la protection du capital de nos assurés - dans les restrictions
générales de placements, une limitation de 4 % de l'actif pour
une société ou 15 % en agrégat, qui vient
déjà nous empêcher, si vous voulez, de trop investir dans
un secteur donné.
Alors, nous, ce que nous disons, c'est que ce n'est pas
nécessaire. Est-ce qu'il y a énormément de
sociétés qui, demain matin, vont acheter 50 % d'une
société commerciale en aval? Je ne le sais pas. Mais je me dis:
Comme ceci devrait relever d'une décision, si vous voulez, d'une
politique de placements interne de dire si c'est un bon placement ou si
ça n'en est pas un, si ça
ne dépasse pas 4 % de mes actifs, pourquoi est-ce que je devrais
être empêché d'avoir cette filiale en aval?
M. Léonard: Au fond, votre raisonnement, c'en est un
d'assurer la diversification de capitaux à l'intérieur d'un
groupe?
M. Bouchard: C'est un pouvoir, être capable, c'est
ça, de diversifier soit mes capitaux ou mes placements de telle
façon que je sois en mesure de maximiser soit la rentabilité de
mes placements ou encore de maximiser les retombées sur mes propres
opérations.
M. Léonard: Au sujet des normes de capital, vous proposez
de créer un comité d'étude. Au fond, est-ce que vous ne
voudriez pas changer les normes actuelles? Parce que si vous proposez de
créer un comité d'étude, c'est que vous jugez que vous
pouvez vivre avec la situation actuelle et puis que, dans le temps, un
comité d'étude pourra peut-être amener des
améliorations, mais celles qui sont apportées là ne sont
pas évidentes par elles-mêmes. Ce n'est pas évident
qu'elles soient adaptées.
M. Bouchard: Ce que nous cherchons, c'est à éviter
qu'on rejette du revers de la main le double comptage du capital, ou qu'on dise
que le double comptage du capital, disons, n'est pas permis pour fins de
solvabilité ou pour fins de liquidité dans les différents
textes ou dans les différentes normes qu'on a à respecter. C'est
ce que nous recherchons. Et nous disons là-dessus qu'il est loin
d'être clair que le double comptage soit intrinsèquement mauvais,
et il est loin d'être clair que ce soit toujours bon non plus. Ce que
nous voudrions, quand je dis... Pour l'instant, disons que dans les normes de
capitalisation du provincial, il y a possibilité d'utiliser le capital
investi dans les filiales, il n'est pas retranché. Mais il est
retranché pour fins de tests de liquidité. Dans les normes
fédérales, on n'accepte pas... Parce qu'on considère qu'un
placement dans une filiale n'est pas un placement aussi liquide, par exemple,
que si j'ai des obligations du Québec - c'est simplement pour faire un
parallèle - alors que les normes fédérales, elles, ne
comptent pas les investissements dans les filiales dans le test de
solvabilité des entreprises. Alors, c'est un peu ça qu'est le
type de problèmes.
Ce que nous disons, nous, c'est que, d'accord, peut-être que les
investissements que nous faisons dans des filiales ne sont pas totalement
justifiables parce qu'il peut y avoir un danger de "pyramidage", qui deviendra
un échafaudage, disons, d'un gros chiffre d'affaires sur un capital qui
est beaucoup trop restreint. Nous disons: Ce n'est pas ça que nous
recherchons. Mais nous disons: Quand même il y a des situations où
il est admissible que nous créions des filiales pour opérer soit
dans des territoires donnés ou dans des juridictions données qui
ne reconnaissent pas notre propre juridiction d'origine. Alors je pense que ce
serait normal, et que ce n'est pas, à ce moment-là, du
"pyramidage". Nous n'avons pas pour l'instant soumis l'ensemble des balises que
nous croirions acceptables ou devoir être acceptées, mais nous ne
voudrions pas passer d'une situation où, pour les fins de
solvabilité, pour les fins des tests de solvabilité du
Québec, une filiale est admise à la situation contraire,
où au niveau fédéral, dans leur test 103, que nous
appelons, où c'est totalement enlevé. Ce que nous disons, c'est
qu'on ne voudrait pas passer d'un extrême à l'autre, et qu'il y a
des endroits où c'est justifiable, et nous voudrions - c'est ce que nous
soumettons - disons qu'il devrait y avoir des analyses additionnelles pour
permettre d'atteindre peut-être un meilleur équilibre.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député de Labelle. Déjà. Mme la ministre, pour le
deuxième dix minutes.
Mme Robic: Oui, M. le Président, merci. M. le
Président, je vous avoue que je suis un peu surprise de certaines
remarques, pour la simple raison que je trouve que je fais des ouvertures
importantes dans ce Rapport quinquennal. Cependant, je le répète
encore une fois, je tente avec le Rapport quinquennal d'arriver à un
sain équilibre entre le développement économique et la
protection de l'épargnant. Ça, la protection de
l'épargnant, je ne peux pas l'oublier, elle est primordiale. Cependant,
quand je permets des pouvoirs de placements dans des filiales connexes et
accessoires, j'ouvre le "no man's land" du 30 % et 50 %, je pense que ça
c'est important. La liste n'est pas exhaustive, elle pourra être
réajustée à mesure où se développent de
nouveaux produits, de nouvelles entreprises. On le sait, vous êtes en
pleine mutation, donc, il n'y a rien qui peut être coulé dans le
ciment, parce qu'on sait qu'il y a une évolution qui est là, on
la prévoit.
La propriété étrangère, c'est un pas
important que l'on fait là. Ça va vous permettre, permettre
à nos compagnies d'aller chercher des capitaux dont elles ont besoin, et
également aller chercher une expertise, créer des synergies qui
sont fort importantes. Donc, je pense que c'est un pas très important.
Mais au même moment où on fait ça, et on peut parler
d'harmonisation... Je pense que vous avez parlé longtemps de double
comptage, je vous avoue que c'est quelque chose qu'on regarde de très
près, mais on sait également que l'avenir n'est pas au double
comptage, que partout, dans toutes les juridictions, on est à faire
disparaître le double comptage. Donc, il va falloir regarder cela de
près. Il y a un danger dans le double comptage, certainement, vous
l'avez dit vous-même, et c'est plutôt de voir disparaître le
double comptage que l'on
recherche. Nous, oh n'a pas fait notre lit là, on se dit: II y a
peut-être une partie qui pourrait être conservée, mais... Et
là, quant aux liens commerciaux, encore là, j'ai des
problèmes à voir le problème. Vous pouve2 faire vos
investissements en aval. Vous pouvez avoir des liens avec dès
entreprises connexes et accessoires, et si vous voulez avoir des liens
commerciaux, vous allez en amont. Ce n'est pas compliqué créer un
holding et ça soulage le bras financier Ça ne met pas de tension
sur la mère et on pense que c'est important quand on veut jouer notre
rôle de prudence.
M. Ôouehard: M. le Président, je ne voudrais pas non
plus qu'on saisisse nos propos comme étant une critique à
l'endroit du Rapport lui-même. Je pensé qu'on a des discussions
qui sont engagées depuis un certain temps. Et ce que nous faisons valoir
présentement, ce sont bien plus des modalités d'application
qu'une critique. Enfin, je pense qu'on l'a noté, d'ailleurs. Les
ouvertures que vous mentionnez sont réelles. Et, notre but, le but que
nous recherchons, c'est d'essayer d'avoir un meilleur fonctionnement, nous
aussi. Et loin de blâmer la ministre pour le Rapport qu'elle a produit,
je pense que nous trouvons qu'il y a également beaucoup d'ouverture au
niveau des principes qui sont énoncés. Je pense que ce n'est pas
là où se situe notre débat.
Par contre, nous continuons de dire... Quand vous dites que, par
exemple, la liste des entreprises dans lesquelles on pourrait investir... Ce
qui se produit, c'est que nous... Je ne suis pas nécessairement dans la
responsabilité ministérielle, mais je partage quand même,
et je vois un peu où se situe la préoccupation de
l'autorité politique face aux engagements que les sociétés
d'assurances prennent, face à leurs assurés et face aux
épargnants, etc.
Et, au Québec, on a quand même un régime qui
fonctionne bien. Ce que je veux éviter, ce que nous voulons
éviter comme industrie, c'est de se donner un encadrement administratif
qui devienne excessivement complexe, tout en ayant, avec la meilleure
volonté du monde, des listes de choses qu'on peut faire et des listes de
choses qu'on ne peut pas faire. Nous autres, en tant qu'assureurs, c'est un
langage qu'on connaît un peu, parce qu'on a toujours des polices
d'assurance, comme vous savez, avec des choses couvertes et des choses exclues.
Et ce n'est pas un domaine simple, comme vous pourrez... Si jamais vous avez eu
l'occasion de regarder les polices d'assurance ou d'avoir à
réclamer de temps à autre.
On voudrait éviter de se faire placer dans une situation comme
celle-là autant que possible. Ce qu'on voudrait, c'est que le
régime adminis tratif ou le régime de contrôle n'en soit
pas un qui vienne paralyser nos agissements. Et c'est un peu, à un
moment donné, ce qui peut arriver.
Alors, nous, on dit: S'il n'y a pas de danger imminent, enfin... Et on
est des sociétés d'assurances de dommages. Disons que les actifs
que nous gérons par rapport à nos revenus ne sont pas
nécessairement au même niveau que ce qui est géré
par les sociétés d'assurance-vie, par les banques ou par les
sociétés de fiducie.
Alors, il y a quand même une certaine différence à
faire par rapport à la structure financière que nous avons par
rapport à celle d'autres intervenants dans le domaine financier. Alors,
c'est un peu dans cette perspective-là que nous faisons la remarque.
Mme Robic: D'ailleurs, je pense bien que dans le Rapport
quinquennal, c'est assez évident qu'on peut aller vers un régime
ouvert avec des restrictions. On fait bien la différence entre ce qui
existe au niveau des fiducies.
Le Président (M. Lemieux): M le député de
Labelle.
M. Léonard: M. le Président, je suis un peu
perplexe. Je trouve que, par rapport à la question que j'ai
posée, la réponse aussi m'indique que tout le monde ici, nous
sommes à la recherche des problèmes. On a plein de solutions et
on ne sait pas lesquelles choisir, parce qu'on ne sait pas au juste quels sont
les problèmes qui sont soulevés. Je trouve que c'est vrai, les
principes d'ouverture, les principes de flexibilité; tout le monde en
est, tout le monde veut ça. Main tenant, c'est quoi, le problème?
Le problème, est-ce que c'est un problème de conflit
d'intérêts où les épargnants risquent
d'écoper durement? Si c'est ça, qu'on le dise clairement. Et
là, on peut décider s'il faut légiférer, s'il faut
réglementer, s'il faut se donner des codes de déontologie et des
comités de déontologie. C'est une proposition, mais je pense
qu'il faut aller au fond des choses tout de suite. Il me semble qu'on
papillonne un peu partout. (15 h 30)
J'ai l'impression que les gens de l'assurance ont l'air contents, en
général, de la structure législative qu'il y a et qu'ils
s'accommodent de ça. Je pense que je n'interprète pas. J'ai bien
entendu leurs représentants, tout à l'heure, dire qu'ils
craignent énormément que l'on complexifie la
réglementation et la législation. Au contraire, ils disent: C'est
déjà tellement compliqué qu'il faut faire attention, il
faut aller plus loin, il ne faut pas se paralyser compte tenu du contexte
international. Je comprends ça. Alors, où est le problème?
C'est ça la question. Je pense qu on est en train d'utiliser tout un
appareil de consultation sur des choses qui sont d'abord imprécises
parce qu'on les laisse simplement au niveau d'énoncés et qu'on
n'a pas encore déposé l'avant-projet de loi. Si on avait un
avant-projet de loi sur la table, on pourrait dire: Oui, on est d'accord ou
non, on n'est pas d'accord. Les
gens de l'assurance pourraient le dire aussi. Donc, c'est là
où nous en sommes.
Par ailleurs, je trouve que les remarques qui sont amenées par
les gens, ici, nous éclairent passablement sur tout ce qui se passe dans
le domaine de l'assurance parce qu'on voit très bien qu'ils ont des
questions plutôt opérationnelles que des questions existentielles.
Il faut qu'ils s'administrent correctement et ils veulent le faire le plus
possible dans la simplicité, dans une situation où c'est
déjà assez compliqué.
Moi, je poserais une question à la ministre: Est-ce que le
problème de fond, c'est un problème de conflit
d'intérêts?
Mme Robic: D'abord, je voudrais vous dire qu'étant dans
l'assurance, on aime mieux prévenir que d'éteindre les feux,
n'est-ce pas? Alors, c'est ce qu'on tente de faire aujourd'hui avec l'ouverture
que l'on propose, et on propose une ouverture dans ce document-là. On
propose également des balises pour éviter les feux, pour
éviter les conflits d'intérêts. Il y en a; il y en aura
toujours, mais on tente, avec un modèle d'ouverture, d'avoir certaines
restrictions et de faciliter justement. Je pense que les liens commerciaux en
amont vont faciliter, justement, la surveillance, vont faciliter le fait qu'il
n'y ait pas de conflit d'intérêts. Ça va être
beaucoup plus facile à gérer de cette façon-là.
Également, on enlève peut-être certaines tentations
à une institution financière qui verrait une de ses filiales
commerciales en danger de vouloir investir de l'argent dans cette filiale qui
pourrait mettre toute la structure en danger.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: M. le Président, on dit: Nous faisons
preuve d'ouverture. Très bien, mais quand on vient restreindre les
opérations en aval, c'est une fermeture. Il faudrait s'entendre sur le
sens des mots.
Mme Robic: On ouvre la porte par en haut.
M. Léonard: Et par en bas, vous fermez tout? Vous n'ouvrez
pas par en haut, c'est déjà ouvert.
Mme Robic: Pas du tout, je ne ferme pas la porte par en bas. Je
circonscris et je dis: Vous pourrez faire toutes vos opérations en
amont.
M. Léonard: Pourquoi ne voulez-vous plus en aval? Parce
que, ça, c'est une fermeture au moins sur ce plan-là.
Mme Robic: Parce que je pense qu'il peut y avoir un danger de
pressions indues au niveau de la mère.
M. Leonard: Bien la, ce sont les conflits
d'intérêts. O.K. On est en conflit d'intérêts.
Mme Robic: C'est une question de capital.
M. Léonard: Bien, quant aux conflits
d'intérêts, ce qui a été mis en lumière, tout
à l'heure, par le représentant du BAC, c'est que, finalement, il
n'y avait pas de cas où on avait mis en preuve que les assurés
avaient été pénalisés pour des questions de conflit
d'intérêts et qu'il y avait bien des moyens de corriger ça
autrement.
Le Président (M. Lemieux): Je ne voudrais pas vous ramener
à l'ordre de part et d'autre, mais, vous savez, nous ne sommes pas dans
le cadre d'un débat, mais bel et bien pour entendre... Je pense que vous
me comprenez, M. le député de Labelle, Mme la ministre.
M. Léonard: Très bien.
Le Président (M. Lemieux): Moi, je n'ai pas d'objection,
vous savez. Avant tout, nous sommes ici pour entendre les groupes.
M. Léonard: O.K.
Le Président (M. Lemieux): II vous reste cinq minutes, M.
le député de Labelle. Ça va? On continue.
M. Léonard: Ça va.
Le Président (M. Lemieux): Ah! Vous avez terminé?
Il vous reste encore cinq minutes en termes de temps.
M. Léonard: Ah bon! O.K.
Le Président (M. Lemieux): Vous pouvez l'utiliser.
M. Léonard: Très bien. Alors, sur la question de
l'harmonisation, vous nous parlez de l'Europe 1992 et vous nous dites qu'il y a
des critères minimaux. Est-ce que vous pourriez être plus
explicite là-dessus? Vous avez sûrement beaucoup analysé la
situation en Europe. De toute façon, les compagnies d'assurances voient
leurs capitaux transiter d'un côté à l'autre de
l'Atlantique. Alors, quel rapport feriez-vous entre ce qu'il y a ici dans les
provinces canadiennes et la situation en Europe? Vous dites: Si ça a
été possible de le faire, d'harmoniser en Europe, ici, il y a
juste 10 provinces, on pourrait le faire.
M. Bouchard: Ce qu'on a voulu refléter par notre
commentaire, c'est qu'il existe au Canada des sociétés qui ont,
soit des chartes fédérales ou des chartes provinciales, et
chacune de ces deux juridictions a le pouvoir de créer ou
d'émettre des chartes de sociétés d'assurances de
dommages. Ce que nous déplorons, c'est qu'un certain nombre de
juridictions, soit provinciales ou même fédérales, ne
reconnaissent pas l'autorité des autres juridictions, comme, par
exemple, j'ai nommé tout à l'heure une province, mais, enfin, il
y en a d'autres Et c'est également vrai au niveau du
fédéral. Lorsque j'ai une société à charte
provinciale, elle ne peut réassurer une société à
charte fédérale sans rencontrer tous les tests qui sont les tests
prescrits par le fédéral lui-même au niveau de la
solvabilité, etc., ou de déposer, comme si c'était une
société purement étrangère, chez un fidu ciaire des
actifs en fiducie pour rencontrer 115 % des passifs qu'elle doit
réassurer. Alors, c'est un peu des normes. Enfin, on est traités,
à l'intérieur de la confédération, lorsqu'on n'est
pas dans la bonne... Particulièrement, lorsque vous avez une
société à charte provinciale, on est traités comme
des étrangers.
Alors, quand je dis: parler d'harmonisation...
M. Léonard: Êtes-vous en train de dire qu'on serait
mieux dans une espèce de communauté que dans la
Confédération canadienne?
M. Bouchard: Je ne prends pas de position politique, je prends
des positions d'affaires et je me dis: Si j'ai à opérer à
l'intérieur d'un territoire qui a cet ensemble de
juridictions-là, je veux bien qu'on harmonise On peut bien harmoniser
jusqu'à un certain point, mais au moins qu'on reconnaisse quand
même les autorités juridictionnelles où on opère,
à plus forte raison si, à l'intérieur d'un continent comme
l'Europe, on est capable de prendre des juridictions qui sont quand même
assez disparates. Je comprends qu'on ait pu quand même en arriver
à établir certaines normes de base, mais ce ne sont pas les
mêmes normes partout. Mais il y a certaines normes. Ce qu'on
reconnaît, du moins, c'est que chacun de ces pays-là a un service:
le département des assurances ou un service des assurances qui va
émettre des permis, qui va reconnaître la validité de
l'opération, la validité corporative, la solvabilité de
ces entreprises-là. Ce que nous voulons, c'est que cet aspect-là
soit reconnu. Je ne dis pas qu'il n'y a aucun effort de fait dans ce
sens-là, je dis que ça m'apparaît aussi comme une chose
essentielle, parce que, en même temps qu'on n'a pas ça, en
même temps, on ne reconnaîtra pas mes investissements dans des
sociétés en aval, je m'excuse, sur le plan de la capitalisation.
Alors, il y a quelque chose qui n'est pas correct dans cette
approche-là.
Le Président (M. Lemieux): Merci. En conclusion, M. le
député de Labelle.
M. Léonard: Ça va. Merci.
Le Président (M. Lemieux): Alors, merci
Mme la ministre, en conclusion, rapidement.
Mme Robic: Oui, M. le Président. Je crois que les
modifications proposées dans notre document sont faites dans une
perspective de développement et d'avenir. Si vous regardez notre table
des matières autant au niveau des normes gouvernementales, je pense que
le développement passe par une source de capital et je pense qu'on y
touche très bien avec les liens commerciaux en amont qui permettent de
créer des conglomérats. Également, la
propriété des institutions financières par des
étrangers, cette ouverture est fort importante. Et, M. le
Président, je suis convaincue qu'on équipe notre industrie de
l'assurance pour faire face au siècle prochain.
Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la ministre.
Mme Robic: Je m'excuse, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, en con elusion.
Mme Robic: J'aimerais remercier le BAC de sa présence. Je
pense que vous nous avez présenté un très bon
mémoire. On retient vos commentaires et encore une fois, il y aura
certainement d'autres consultations à faire. On apprécie beaucoup
votre présence d'ailleurs, et je dois vous dire qu'on a bien l'intention
d'implanter des changements pour des raisons valables, pas seulement pour le
plaisir de faire des changements. Au contraire, on est en pleine
évolution. Vous avez eu en 1984 une loi qui vous a permis de vous
établir, de faire des choses. Aujourd'hui, on tente de vous outiller en
reconnaissant les besoins d'aujourd'hui et de demain. On espère que
notre loi traduira nos principes de ce document et on aura certainement la
chance de s'en reparler. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remer cie, Mme la
ministre. Je vous remercie, madame et messieurs, de votre participation
à cette commission parlementaire.
J'inviterais la Corporation du Groupe La Laurentienne à bien
vouloir prendre place à la table des témoins, s'il vous
plaît.
À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît, la
commission du budget et de l'administration reprend ses travaux et nous allons
maintenant entendre, dans le cadre de notre mandat, la Corporation du Groupe La
Laurentienne. Je demanderais au porte-parole de l'organisme de bien vouloir
s'identifier et de nous présenter la personne qui l'accompagne, s'il
vous plaît.
Corporation du Groupe La Laurentienne
M. Drouin (Jacques A.): Mon nom est
Jacques Drouin. Je suis président et chef de la direction de la
Corporation du Groupe La Lau-rentienne. Je suis accompagné de M. Claude
Forget qui est vice-président principal aux affaires corporatives de la
Corporation.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie. Les
règles de l'audition sont les suivantes. Vous avez 20 minutes pour
l'exposé de votre mémoire. Suivra un échange entre les
deux groupes parlementaires d'une durée de 40 minutes. La parole est
maintenant à vous et nous vous écoutons attentivement.
M. Drouin: Merci, M. le Président. Mme la ministre,
messieurs, j'aimerais faire une brève introduction. Je devrai m'excuser
un peu tôt dans le débat, malheureusement, à cause du
changement d'horaire. J'avais déjà un autre engagement que je ne
pouvais pas déplacer. Alors, je vais faire mon exposé et
participer à la présentation du mémoire et vous devrez
m'excuser en cours de débat. J'en suis bien désolé, mais
c'est vraiment des circonstances tout à fait incontrôlables qui
m'y forcent.
Alors, j'aimerais d'abord remercier votre commission de nous recevoir et
d'avoir pris connaissance de notre mémoire et de nous entendre cet
après-midi. Notre commentaire général, comme en fait foi
notre mémoire, est favorable, très favorable même, à
l'analyse qui a été faite de l'application de la loi et,
particulièrement, au rôle favorable que le Québec a
joué au Canada dans la modernisation de sa loi en 1984 et dans
l'influence qu'il a eue sur le contexte financier canadien, et dans cet effort
de mise à jour périodique de ses lois financières. Ceci
est très encourageant. On sait que ce n'est pas toujours le cas que les
lois financières soient tenues à jour de façon aussi
appropriée.
Les initiatives du Québec ont eu un impact déterminant sur
la constitution de groupes financiers québécois d'une certaine
envergure au cours des dernières années. J'aimerais
peut-être rappeler certains faits qui pourraient être
d'intérêt pour cette commission quant à la naissance et
à l'émergence du Groupe La Lau-rentienne dans un laps de temps
relativement court. (15 h 45)
Je vous rappelle que le Groupe La Lauren-tienne a connu son essor sur
une période d'à peu près 10 ou 12 ans, entre 1975 et 1987.
L'actif consolidé du Groupe était de moins de 800 000 000 $ en
1975 et il a dépassé les 16 000 000 000 $ aujourd'hui. Nous
sommes passés d'une entreprise qui avait une présence purement
locale à une présence canadienne dans toutes les parties du pays
et internationale aux États-Unis et au Royaume-Uni. Et nous avons
réussi à faire ceci, et j'en donne le crédit à mes
prédécesseurs, sans aucune dette au niveau de la Corporation et
tout en respectant toutes les normes de capitalisation et de solvabilité
qui nous ont été imposées au cours des années.
C'est un développement qui aurait été impossible sans la
modernisation de nos lois financières. Et nous nous réjouissons
encore une fois de la volonté politique de poursuivre l'effort de
modernisation.
Dans le débat sur les lois relatives aux institutions
financières, on retrouve toujours un équilibre souhaité
entre des forces qui sont en opposition. Il y a, d'une part, la volonté
de protéger le consommateur qui est en opposition avec le
développement de nos institutions financières. Il y a, d'une
part, le développement économique qui est en opposition avec des
normes de placement et de capitalisation rigoureuses. Il y a, d'une part, la
liberté d'action souhaitée pour encourager le dynamisme des
institutions et, d'autre part, une réglementation qu'on veut
sévère et parfois tatillonne que nous trouvons de notre
côté. Et il y a un équilibre qu'on essaie de maintenir
entre la liberté et la réglementation.
Tout en étant d'accord avec l'orientation générale
proposée par l'analyse, notre groupe s'inquiète de certaines
dispositions qui vont, à notre avis, trop loin dans cet équilibre
entre les forces en opposition et qui pourraient avoir pour conséquence
d'affaiblir la position des institutions financières du Québec.
Ceci est d'autant plus préoccupant à ce moment-ci quand on fait
face au mouvement d'internationalisation accru du secteur financier et à
l'importance pour nos institutions du Québec de créer des
ensembles plus forts, de plus grande taille et qui peuvent se tailler une
présence sur la scène internationale.
Évidemment, sans vouloir relever tous les points positifs - je
répète que notre réflexion, notre analyse, notre
réaction est positive - il y a quand même quatre points sur
lesquels j'aimerais attirer votre attention et qui nous préoccupent de
façon plus particulière. Le premier point concerne les nouvelles
normes de capitalisation qui sont encore inconnues et qui nous
inquiètent tant au niveau provincial que fédéral.
Ça nous inquiète parce qu'évidemment, ça va
demander des injections de capital importantes dépendant des normes qui
seront un jour développées. Et nous nous demandons pourquoi
veut-on adopter à ce moment-ci des normes qui iraient aussi loin que
certaines hypothèses qui ont parfois été
évoquées, puisque nous ne voyons pas le consommateur
menacé à ce moment-ci? Il n'y a jamais eu de faillite au
Québec dans notre secteur d'activité, et un nouveau plan de
garantie vient d'être mis en oeuvre par l'industrie qui se porte garante
d'indemniser tout assuré qui se trouverait privé de son droit de
réclamation suite à l'insolvabilité d'un assureur. Donc,
cet équilibre entre les droits du consommateur ou les
préoccupations relatives au consommateur et la capitalisation de nos
entreprises nous inquiètent, et il y a une question de dosage
approprié à trouver
entre ces forces en opposition.
Le deuxième point de préoccupation est relatif aux
pouvoirs de placements. En vertu de la loi de 1984, notre pouvoir de placements
était établi à 50 % qui va être maintenant
ramené à 25 %. C'est une disposition qui nous affecte directement
comme Groupe La Laurentienne puisque nous nous sommes développés
en vertu des règles et des normes prévues dans la loi de 1984 et
que nous nous retrouverions soudainement assujettis à une norme beaucoup
plus restrictive, alors que nous avons respecté la loi de 1984 dans le
développement de notre Groupe. Bien sûr, cette question sera plus
ou moins pertinente ou aura plus ou moins d'effet sur nous dépendant des
règles de transition ou des clauses grands-pères qui seront
accordées pour permettre aux sociétés qui se sont
développées en vertu de la loi de 1984 de s'adapter à un
nouveau contexte.
Le troisième point que nous avons relevé est la question
de limiter les pouvoirs de placement dans les entreprises commerciales ou
industrielles, alors que l'ensemble des placements d'un assureur-vie est
limité à une enveloppe relativement modeste de son portefeuille
total. C'est certainement, cette limitation du pouvoir de placements, contraire
à la tendance mondiale dans le secteur financier, et c'est certainement
contraire à la protection de l'intérêt de l'investisseur
qui, parfois, non pas parce qu'il le souhaite nécessairement, se
retrouve à prendre des positions plus importantes dans une
société ou l'autre, pour protéger son placement. En fait,
on s'inquiète que cette disposition pourrait même avoir effet
d'annihiler toute capacité, pour nos entreprises, d'investir dans le
secteur commercial et industriel, selon notre compréhension des
dispositions proposées.
Le quatrième point, qui n'est pas un point négatif, qui
est plutôt un commentaire, a trait à l'assouplissement des
règles concernant les alliances stratégiques avec des groupes
étrangers. Nous pensons que cette question sera certainement la tendance
dominante des années mil neuf cent quatre-vingt-dix, face à la
mondialisation très rapide du secteur financier. Nous constatons toutes
sortes d'alliances qui vont outre-frontières, un peu partout au monde.
Notre Groupe vient d'ailleurs de resserrer ses liens avec la grande famille du
groupe Suez, qui est un groupe mondial très connu, et nous misons
énormément d'espoir sur cette nouvelle alliance pour prolonger
notre développement et notre présence en dehors des
frontières canadiennes.
Voilà donc quatre questions sur lesquelles nous aimerions attirer
votre attention, et j'inviterais maintenant Claude Forget, à vous faire
une présentation plus complète du mémoire, en insistant
plus particulièrement sur ces quatre points précis. Merci.
Le Président (M. Lemieux): M Forget, la parole est
à vous.
M. Forget (Claude E.): Merci. Alors, M le Président, Mme
la ministre, MM les membres de la commission, nous avons, depuis le
début de l'année, au Groupe La Laurentienne, effectué
passablement de travail dans le contexte de la révision en perspective
de la Loi sur les assurances du Québec. En janvier dernier, nous
faisions tenir à la ministre, dans le cadre de ses consultations en
préparation de la rédaction du Rapport quinquennal, un
mémoire qui a été d'ailleurs fourni aux membres de la
commission, où, à ce moment-là, sans le
bénéfice, pour ainsi dire, des positions gouvernementales, nous
nous sommes livrés à l'exercice d'imaginer, si l'on veut, ce que
pourrait être, à ce moment-ci, les révisions souhaitables
dans le cadre législatif et réglemen taire. Les conclusions
principales auxquelles nous en étions arrivés dans ce
mémoire sont d'ailleurs contenues dans les premières pages du
commentaire que nous avons rédigé en préparation de cette
commission parlementaire. Et j'en fais un bref rappel, ici.
D'une part, nous avions suggéré la reconnaissance
réciproque de la compétence de la juridiction d'incorporation
d'une institution financière et l'octroi automatique d'un droit
d'établissement à l'exercice des affaires aux
sociétés incorporées par l'une des juridictions
reconnaissant sur une base de réciprocité la compétence de
la juridiction québécoise. C'est la question, je le dis entre
parenthèses, de l'harmonisation, mais dans un cadre différent de
celui selon lequel cette question a été envisagée
jusqu'ici, qui était plutôt un effort pour faire se rencontrer les
lois, ou les faire évoluer de façon parallèle.
Deuxièmement, nous sollicitions l'appui du gouvernement du
Québec à l'acquisition par les mutuelles d'assurances, y compris
celles d'incorporation provinciales, du droit de se porter acquéreur
sans limite des actions d'une institution bancaire. C'est évidemment ici
un plaidoyer pro domo, puisque tout le monde sait, je pense, que la Corporation
du Groupe est l'actionnaire principal de la Banque Laurentienne, une situation
qui, certainement, demande à être clarifiée dans la
nouvelle loi sur les banques qui sera un jour adoptée par le Parlement
fédéral. Et je crois qu'il y a un très grand
intérêt à ce que nous obtenions, à cet égard,
l'appui du gouvernement québécois. D'ailleurs, toute cette
question de Interrelation entre les législations fédérales
et provinciales est pertinent à la question de savoir comment
évoluera le secteur de l'assurance à charte
québécoise, puisque, même s'il n'y a pas de
législation fédérale, comme ça semble
désormais être le cas, du moins pour la période courante,
on s'attend, de la part des banques, à des offensives dans le domaine de
l'assurance; et il serait dommage que tout ceci se fasse à sens unique.
D'ailleurs, cette recommandation est
suivie de deux autres qui n'ont peut-être plus autant d'objet
qu'elles n'en avaient à l'époque, invitant le gouvernement du
québec à s'inspirer d'un certain modèle idéal de
configuration du secteur financier. mais puisqu'il semble bien que nous ne
verrons pas de législation fédérale pour un avenir
prévisible, je pense un peu plus loin.
Affirmation du rôle des institutions financières dans la
propriété, voire le contrôle d'une entreprise industrielle
et commerciale via des liens financiers. Donc, c'est une question sur laquelle
nous nous étions prononcés et sur laquelle, comme Jacques Drouin
vient de l'indiquer, nous avons également encore des
préoccupations.
Adoption par le législateur d'une approche permissive
plutôt que prohibitive. Nous sommes contents de constater, dans le
Rapport quinquennal, qu'une telle approche semble être celle qui a
été retenue par le gouvernement du Québec.
Modernisation de la loi pour tenir compte de l'émergence de
groupes financiers intégrés relativement à la constitution
de filiales, à la nomination d'administrateurs, aux règles pour
déterminer quelles sont les transactions qui doivent être
considérées comme transactions intéressées. C'est
une question qui demeure d'actualité, où le Rapport quinquennal
énonce certains principes qui vont dans le sens de nos voeux, mais
également où on laisse encore beaucoup à l'imagination,
puisqu'il faudra voir le texte de la loi pour vraiment mesurer le chemin
parcouru.
Conservation des régimes relatifs aux normes de placement
actuellement inscrites sur la loi. Comme on le sait, le gouvernement semble
vouloir aller dans une autre direction, un rétrécissement des
pouvoirs de placements en dehors des domaines connexes aux métiers
d'assurances, par opposition à la situation actuelle où ces
pouvoirs de placements sont sans restriction, sauf à la limite de 4 %
des actifs qu'un investissement particulier ne doit pas dépasser.
Ratification par les autorités de normes adoptées par
l'industrie quant aux marges de solvabilité. Encore là, c'est un
voeu qui semble sur le point d'être déçu. Le gouvernement
semble vouloir aller dans le sens de normes qui s'ajouteraient aux normes qu'a
retenues l'industrie dans l'implantation de son régime de compensation,
en janvier dernier. Nous avons, à ce sujet, un certain nombre
d'observations à faire.
Adoption par le gouvernement d'une politique favorisant le regroupement
des institutions financières à charte québécoise et
leur diversification géographique. Je pense que toute cette question de
capitalisation, l'évolution de la structure des institutions
financières pose ce problème, et nous n'avons pas, à ce
jour, une vision très claire des intentions gouvernementales à ce
sujet.
Finalement, inscription dans la Loi sur les assurances, d'une
disposition générale donnant ouverture à la scission des
compagnies mutuelles et reconnaissance de cette avenue de modernisation comme
la solution par excellence pour favoriser une meilleure capitalisation des
sociétés d'assurances. Cette question semble mise de
côté par le Rapport quinquennal au profit de législations
ad hoc dans chacun des cas. Comme on sait, c'est une voie que nous avons
nous-mêmes empruntée dans le passé. Et nous aurions cru,
même si ce n'est pas strictement conforme à nos
intérêts immédiats, que cette expérience a eu
suffisamment de leçons pour qu'on puisse la traduire sous la forme d'une
règle d'application générale.
Alors, voici brièvement, en résumé, un certain
nombre de propositions que nous formulions en janvier. Et compte tenu de tout
cela, nous nous sommes penchés sur le Rapport quinquennal. Et comme
l'indiquait Jacques Drouin tout à l'heure, il ressort de ça, en
outre des questions qui sont absentes et que le gouvernement, pour l'instant,
semble avoir choisi de mettre de côté, un certain nombre de
préoccupations où les intentions gouvernementales semblent aller
dans un sens légèrement différent de nos souhaits. (16
heures)
Le premier, et sans aucun doute le plus important, c'est toute cette
question de la protection du consommateur et l'étude de nouvelles normes
de capitalisation. J'ai entendu la ministre, plus tôt aujourd'hui et
à certaines reprises dans le passé, dire et insister qu'il s'agit
de normes minimales. Il est évident que les normes de capital retenues
dans les plans de compensation, puisqu'il y en a un pour l'assurance
générale et qu'il y en a un autre pour l'assurance-vie, sont
effectivement des normes minimales. Je m'interroge un peu sur ce que pourraient
être des normes si ce n'était pas des normes minimales?
Certainement pas des normes maximales, puisque tout le monde est bienvenu,
j'imagine, à capitaliser au maximum. Mais lorsqu'on parle de normes,
c'est-à-dire d'exigences, on va évidemment parler d'un seuil.
Alors, il reste que sur la base d'un jugement collectif de l'industrie, le
seuil qui est retenu comme élément de la solidarité que se
reconnaît l'industrie vis-à-vis de chacun de ses membres, ce sont
des normes qui, nous semble-t-il, devraient paraître suffisantes,
puisqu'elles sont suivies d'effets; elles sont suivies d'une
responsabilité financière conjointe et solidaire de l'ensemble
des compagnies qui opèrent dans chacun des deux secteurs
d'assurance.
Malgré tout, le gouvernement semble vouloir aller au-delà
de ça, et je comprends qu'il veuille probablement ainsi disposer d'un
moyen pour anticiper les problèmes, les voir venir d'avance. Et dans la
mesure où ce souci est justifié, nous ne souhaitons pas vraiment,
en commission parlementaire, commencer à débattre de façon
détaillée si le double comptage à 0 %, à 100 %,
à
50 %, ou à 30 % est approprié, comment doivent être
traitées les filiales, comment doivent être traités
différents éléments de capital, quel est le facteur de
risque approprié pour te) et tel élément d'actif. On se
rend compte rapidement que nous débordons là dans un domaine
extrêmement technique, et c'est la raison pour laquelle nous croyons
qu'il sera utile pour toutes les parties en cause, dans le secteur de
l'assurance comme du côté gouvernemental, de se pencher sur le
problème de façon très concrète. Évidemment,
en disposant des données de chacune des sociétés et de
différents modèles d'interprétation, 9 serait possible
d'évaluer de quoi on parle, finalement. Il est très difficile de
le faire de façon abstraite. Un des objectifs, c'est d'éviter que
les compagnies d'assurances québécoises soient
pénalisées par l'adoption de normes faites au Canada ou faites au
Québec et qui seraient en décalage par rapport aux normes dont on
observe l'existence dans d'autres pays, que ce soit aux États-Unis ou
encore en Europe. Et de ce côté-là, nous n'avons pas, je
pense, collectivement encore l'expertise nécessaire pour porter des
jugements qui soient véritablement satisfaisants. Un effort collectif
d'auto-éducation de la part de l'industrie et du gouvernement est seul
en mesure de nous apporter des réponses suffisamment précises.
C'est le sens de cette recommandation-là. Si cette recommandation
était mise de côté et qu'on adoptait des normes sans bien
en connaître les implications, comme ce serait nécessairement le
cas, je crois que c'est un grand risque que l'on prend, puisqu'il sera
très difficile de faire machine arrière une fois engagé
dans cette voie-là. Ceci pour le premier point, un point que M. Drouin a
soulevé avant moi. Je crois que c'est probablement le problème
principal auquel s'adressera le gouvernement durant la prochaine année
et un sujet autour duquel i! n'est pas permis de faire des erreurs.
Deuxième élément, la relation entre les
institutions financières et les activités économiques. Le
rôle des institutions financières dans le financement des
activités économiques va croissant. Au Canada, et en
général dans tous les pays occidentaux, les investisseurs, les
particuliers qui épargnent, les individus, les ménages confient
de plus en plus leurs épargnes à des gestionnaires
professionnels, qu'il s'agisse de fonds mutuels, de fiducies, de compagnies
d'assurances. Et ce sont ces institutions qui, en retour, financent le
développement économique II est important de bien tenir compte de
cette relation, parce qu'elle correspond au rôle économique et
social des entreprises financières. Au-delà de simplement la
relation contractuelle qui les lie à chacun de leur client, elles jouent
un rôle fondamental dans le fonctionnement de l'économie. Il nous
semble à cet égard que le raisonnement qui est trop souvent
adopté au Canada et dont on trouve bien des échos dans le Rapport
quinquennal est une conception qui est essentiellement anglo-saxonne et
même américaine, à l'effet qu'il faut donner au
marché public, au marché de capital public, le rôle
déterminant, le rôle essentiel dans le financement des
entreprises. C'est un modèle qui peut convenir aux États-Unis,
mais c'est un modèle qui est bien différent dans d'autres pays,
qu'il s'agisse des pays européens ou du Japon où la relation
entre les institutions financières et le secteur réel de
l'économie est reconnue beaucoup plus volon tiers.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M Forget. Alors il
a été convenu entre les deux groupes parlementaires que vous
disposiez d'un certain temps, mais les deux groupes parlementaires ont
accepté de restreindre leur période de questions afin de vous
permettre de terminer votre exposé. Ça va? Très bien,
alors vous pouvez continuer.
M. Forget (Claude E.): M le Président, je vous remercie de
votre rappel, et je vais ter miner dans quelques secondes.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez tout le temps. Les
deux groupes parlementaires ont accepté de vous écouter
jusqu'à la fin, trouvant votre témoignage très
intéressant.
M. Forget (Claude E.): Je leur en sais gré. J'essaierai de
ne pas abuser de leur patience, malgré tout. Alors cette question, M. le
Président, des rôles entre les institutions financières et
le secteur réel de l'économie est capitale, et un certain nombre
des propositions qui se retrouvent dans le Rapport quinquennal sont
inspirées d'une autre conception dont les implications nous
inquiètent. Au niveau des pouvoirs de placements, en particulier, au
niveau des liens commerciaux, d'autre part.
Finalement, une troisième catégorie de recommandations que
l'on trouve à différents chapitres du Rapport quinquennal traite
des modalités de contrôle par le Québec des institutions
financières. De ce côté-là, nous avons des
dispositions véritablement remarquables au titre de la prise en compte
du caractère croissant d'internationalisation qui prévaut dans
les marchés financiers et qui a déjà manifesté ses
effets au Québec. Il n'y a véritablement pas d'alternative
à une libéralisation des règles à cet égard,
puisque les juridictions qui prendraient une autre voie n'auront pour fruit de
leurs efforts qu'une marginalisation croissante de leurs institutions
financières et de leurs marchés financiers. Donc, nous
applaudissons à cette ouverture qu'a manifestée la ministre
relativement à cette libéralisation des règles quant
à la propriété des compagnies d'assurances
québécoises. Par contre, et je le mentionne seulement au passage,
puisque j'ai déjà indiqué quel est le sens de notre
réflexion là-dessus, l'objectif
d'harmonisation tel qu'esquissé dans le rapport quinquennal
semble encore inspiré par le désir de voir les lois des
différentes provinces, d'une part, et du gouvernement
fédéral, d'autre part, s'harmoniser dans le sens d'être de
plus en plus semblables. nous ne croyons pas, après des années
d'expérience, qu'il faille finalement tourner le dos - pour employer une
expression qui semble déjà surannée, ce qui nous indique
combien le temps passe rapidement - à la société distincte
dans le domaine des institutions financières. je crois que l'indication
que nous fournit la rumeur publique en provenance d'ottawa relativement
à la législation financière fédérale indique
que tout est remis aux calendes grecques de ce côté-là.
simplement en termes de calendrier, on se rend compte que québec et
ottawa fonctionnent selon des règles très différentes, et
la notion d'un parallélisme ne pourra jamais s'accréditer,
à moins que l'on n'indique par harmonisation le souci de se gagner une
reconnaissance véritable de la juridiction québécoise et
des pouvoirs des institutions à charte québécoise, non
seulement au québec, bien sûr, mais dans l'ensemble du canada. et
d'ailleurs, c'est dans ce contexte, je pense, qu'il faudrait situer
l'harmonisation des normes de solvabilité ou des normes de
capitalisation, c'est essentiellement la même réalité que
recouvrent ces deux expressions. si nous avions le sentiment que
l'uniformisation que l'on décèle dans certains propos du rapport
quinquennal relativement aux normes de capitalisation était le prix
à payer pour une reconnaissance de la juridiction
québécoise dans le plein sens du mot, alors on pourrait plus
facilement l'admettre. mais il n'est pas évident que les deux concepts
sont reliés à ce moment-ci, et c'est une raison de plus pour
être prudent dans l'élaboration des normes de capital.
Pour ce qui est des autres règles auxquelles on fait allusion,
toute la question des pouvoirs de l'Inspecteur général...
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'on pourrait vous
entendre là-dessus une fraction de seconde?
M. Forget (Claude E.): Bien, nos préoccupations quant aux
pouvoirs de l'Inspecteur général, c'est que si... Il faudra bien
sûr, disposer du texte d'un projet de loi à cet égard pour
vraiment faire des commentaires informés, mais si des pouvoirs
contraignants additionnels sont nécessaires, quitte à en faire la
démonstration, mais ce n'est pas absolument certain, il faudrait
cependant qu'ils soient entourés des précautions normales que
l'on trouve en fonction des règles du droit administratif. Le pouvoir
d'émettre des injonctions appartient normalement aux tribunaux et non
pas à des organismes administratifs. Je pense que c'est probablement ce
que l'on veut dire dans le Rapport quinquennal, mais c'est une
précaution qui nous apparaît essentielle.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il devrait y avoir la
création d'un tribunal d'appel des décisions de l'Inspecteur
général, selon vous?
M. Forget (Claude E.): je crois que toute instance administrative
qui commettrait un abus ou qui agirait au-delà de son pouvoir serait, si
les principes généraux de droit administratif tiennent toujours,
serait sujette à une évocation devant la cour supérieure.
donc, de ce côté-là, je pense que, normalement, il y aurait
un appel, quelle que soit d'ailleurs la manière dont le
législateur essaierait de limiter ce pouvoir. on sait que la
jurisprudence a toujours fait en sorte de restreindre au strict minimum les
prohibitions à cet égard-là. donc, de ce
côté-là, je pense que les pouvoirs d'appel sont
propablement garantis de façon générale, mais les pouvoirs
d'initiative, c'est autre chose. finalement, un dernier point - je termine
là-dessus, m. le président - le législateur ou la ministre
à ce moment-ci, du moins - et je l'indiquais au tout début -
semble avoir décidé de mettre de côté la
possibilité que des articles dans la loi sur les assurances
prévoient la scission des mutuelles d'assurances selon le mode qui a
été utilisé, mais par loi spéciale, par la
laurentienne vie. nous pourrions nous satisfaire d'une position comme
celle-là, puisque dans la mesure où nos concurrents voudraient
emprunter le même chemin, ils auront à faire face aux mêmes
obstacles, aux mêmes délais et aux mêmes coûts que
ceux auxquels nous avons dû nous-mêmes faire face. cependant, je
crois qu'il serait normal que des dispositions générales puissent
être introduites dans la loi sur les assurances. après tout, dans
le droit commercial français, il y a une procédure qui existe de
plein droit pour toute société de faire des scissions, les deux
sociétés succédant à une seule et succédant
à l'ensemble des obligations et des droits de la
précédente. il existe en droit américain, dans plusieurs
états, pour ce qui est des mutuelles de banques, des dispositions tout
à fait analogues qui permettent à des mutuelles de gestion et
à des sociétés de banques par actions de succéder
à des mutuelles de banques. c'est donc une formule qui a des
applications à l'échelle internationale, et je ne vois pas
pourquoi on ne l'adopterait pas dans la loi sur les assurances. c'est un point
qui ne nous concerne plus puisque nous avons franchi ce pont, mais il nous
semble que le régime en quelque sorte d'exception qui nous a
été fait par le législateur comporte des avantages et des
opportunités dont l'ensemble de l'industrie pourrait vouloir se
prévaloir. je vous remercie de votre attention et de la patience des
membres de la commission. (16 h 15)
Le Président (M. Lemieux): Merci. Mme la ministre, la
parole est à vous.
Mme Robic: Merci, M. le Président. Merci
beaucoup de votre exposé. Vous semblez me dire que, dans le
chapitre sur les normes de capital, les transactions intéressées,
les accords de réseaux et les régimes de surveillance proposent
des solutions à des problèmes qui demeurent à
établir. Est-ce que vous êtes tous en train de me dire qu'on
devrait attendre que les problèmes se produisent avant d'agir? Je trouve
ça un peu drôle qu'on me dise ça. Je pense bien que le
législateur aimerait bien, aujourd'hui, avec la débâcle des
"savings and loans" aux États-Unis, avoir pu prévenir
plutôt que d'avoir à guérir. C'est un petit épisode
que, nous, on ne veut certainement pas avoir à vivre ici. Et en ouvrant
sur les normes de capital, sur les liens commerciaux, sur la
propriété étrangère, sur la pos-sibilfté de
créer des conglomérats, c'est sûr qu'on s'ouvre
également à beaucoup de possibilités de transactions
intéressées, de décisions qui pourraient, avec la
meilleure volonté et la plus grande honnêteté, créer
certains problèmes aux entreprises. Donc, je pense que dans un projet
comme celui que l'on a sur la table, il est important, oui, de préparer
nos entreprises à fafre face à l'avenir, mais également
d'inclure un élément de prudence. Et un bon législateur
n'attend pas les problèmes et tente d'éviter certains
problèmes.
Le Président (M. Lemieux): M. Forget.
M. Forget (Claude E.): Je répondrais par une analogie, si
vous me permettez, M. le Président. Au Canada, nous avons eu,
grâce au ciel, peu de faillites d'institutions financières,
contrairement à nos voisins américains qui ont une malheureuse
habitude de ce côté-là et qui ont, de toute façon,
une industrie qui est très différemment structurée. Mais
dans la mesure où il y a eu des faillites financières au Canada,
on pourrait dire, si on voulait faire une généralisation rapide
de la situation, que le pire facteur pour la faillite d'une institution
financière, c'est d'être établie en Alberta. Et la mesure
préventive, au niveau fédéral, ce serait d'interdire
à des sociétés financières de s'établir en
Alberta C'est une analogie et puis ce n'est pas une réponse
nécessairement. Mais ça indique ceci: c'est que si on veut faire
de la prévention, encore faut-il avoir une cause qui soit
déterminante et significative. Et personne n'a jamais fait la preuve que
des conflits d'intérêts entre parties liées, par exemple,
étaient à la source des difficultés des institutions
financières, à l'exception d'autres facteurs contributoires. Et
les facteurs contributoires, ce sont, par exemple, la petite taille ou le
caractère régional des institutions que tout le monde
reconnaîtrait comme étant certainement plus importants que les
conflits intéressés, puisqu'il est évident que la loi des
grands nombres joue dans le domaine financier, autant ou plus que dans
n'importe quel autre domaine. L'histoire démontre - les "savings and
loans" aux États-Unis aussi - que les institutions régionales
sont toujours plus fragiles que les institutions de plus grande envergure parce
que les malheurs arrivent souvent de façon concentrée. Ça,
c'est une dimension qui devrait peut-être nous encourager à
réfléchir sur la diversification géographique et
l'internationalisation de nos sociétés financières, au
moins autant que de parler de conflits d'intérêts puisque la
relation de cause à effet, encore une fois, n'est pas évidente,
certainement pas au Canada et certainement pas pour des sociétés
d'assurance au Québec, puisque, comme on sait, l'histoire dans ce
domaine-là est une histoire relativement heureuse. C'est vrai que
gouverner, c'est prévoir, mais, précisément, il faut
prévoir toutes les implications de l'adoption de nouvelles normes, parce
qu'elles aussi, elles auront des conséquen ces, et c'est ce pourquoi
nous attirons l'attention de la ministre sur l'opportunité de
créer un comité d'étude qui nous permettrait de voir
d'avance quelles sont les conséquences possibles de nouvelles
normes.
Le Président (M. Lemieux): Ça va, Mme la ministre? M. le
député de Labelle.
M. Léonard: Alors, justement, je pense que gouverver,
c'est prévoir peut-être, mais ce n'est pas de paralyser non plus.
Dans le Rapport quinquennal, on propose de limiter les pouvoirs
d'investissements en aval. Je suppose que vous avez eu une bonne
expérience au cours des quatre ou cinq dernières années
dans ce domaine. Si cela se concrétisait dans une législation
actuelle, est-ce que... Ça va vous paralyser drôlement dans votre
institution.
M. Forget (Claude E.): Bien, il y a deux sortes d'investissements
en aval. Il y a les investissements dans des filiales financières...
M. Léonard: O.K.
M. Forget (Claude E.): où le Rapport quinquennal
suggère un nouveau type de limitation.
M. Léonard: À 30 %
M. Forget (Claude E.): Actuellement, c'est 50 %...
M. Léonard: C'est 50 % qui baisse à 30 %.
M. Forget (Claude E.): des filiales plus un certain nombre
d'autres catégories d'inveslisse ments, et on baissait ça
à 25 %.
M. Léonard: À 25 %, oui
M. Forget (Claude E.): Il est clair qu'ac-tuellement, si on parle
de la situation au
4 septembre 1990, nous pourrions nous conformer aux 25 %, puisque nous
n'avons pas d'investissements qui dépasse ce pourcentage-là dans
une compagnie d'assurance-vie ou dans d'autres compagnies, je pense du moins.
Cependant, les choses évoluent. Et si l'on fait des projections sur un
certain nombre d'années, dans certaines situations, on peut anticiper
des difficultés. Là, on trouve dans le Rapport quinquennal une
disposition vis-à-vis de laquelle on a de la difficulté à
se faire une idée. On nous dit, je ne sais pas si c'est dans le Rapport
quinquennal ou dans certaines explications verbales que j'ai entendues, que des
dispositions transitoires ou des dispositions seraient prises de manière
à ne pas pénaliser les situations déjà acquises.
Comment est-ce que ça serait formulé dans la loi? Est-ce que
ça serait assorti d'un délai, etc. ? Je n'en sais rien. Donc, je
ne peux pas répondre à votre question sur ce point-là.
Pour ce qui est des autres types d'investissements en aval dans des
sociétés qui ne sont pas dans un domaine connexe ou accessoire
à l'assurance, des investissements ordinaires, là, on propose
d'abolir le droit qui existe actuellement d'avoir plus de 50 % du
capital-actions d'une telle société pourvu toutefois que cet
investissement-là ne dépasse pas 4 % de l'actif total de la
compagnie d'assurances. Je ne sais pas quel problème on veut
résoudre en abolissant ce pouvoir de placement. Je peux facilement
imaginer cependant que si ça devait passer dans la loi, les
assureurs-vie dans leur placement devraient tenir compte du fait que si un
investissement qu'ils feraient jusqu'à la limite de 30 % dans une petite
et moyenne entreprise de caractère régional, dont les actions ne
sont pas nécessairement transigées en bourse, ou si elles le
sont, en vertu d'un REA, de façon très marginale, les
assureurs-vie devraient se poser la question: Est-ce qu'on peut valablement
faire des investissements de cette nature-là? Parce que si ça
tourne mal, ce n'est pas liquide, ce n'est pas vendable à court terme,
et on ne peut rien faire d'autre que d'être assis sur la bande en quelque
sorte et de voir la situation tourner de mal en pis. Je crois que ce serait une
"désincita-tion" croissante à une période où on
n'est plus dans la période euphorique des REA. Et la question qui se
pose, c'est: Les petites et moyennes entreprises, les entreprises
régionales, qui n'espèrent plus faire une émission
publique, comment vont-elles se financer? Bon, elles peuvent se financer par
des placements privés. Mais ce recours-là est limité aussi
si les institutions financières en sont exclues. Donc, je crois qu'il y
a une question. Les assureurs peuvent se retourner de côté et
investir ailleurs. Et, à ce titre-là, c'est ce débat que
Jacques Drouin mentionnait entre la protection conservatrice des
intérêts des détenteurs de police vis-à-vis des
intérêts économiques plus larges.
M. Léonard: Juste une autre question: Est-ce que, sur la
question des pouvoirs de l'Inspecteur général, vous trouvez
qu'actuellement, il en a trop, il n'en a pas assez? Vous avez abordé la
question tout à l'heure. Est-ce que vous trouvez que ce rôle de
l'Inspecteur général doit être renforcé par rapport
à 1984, ou bien si c'est plutôt par des dispositions juridiques,
dans un projet de loi, qu'on doit intervenir? Toujours en supposant qu'il y ait
des problèmes, là.
M. Forget (Claude E.): ce n'est pas clair. c'est vraiment
l'inspecteur général qui sait s'il a assez de pouvoirs ou pas. ce
que nous en voyons...
M. Léonard: Bien, vous les subissez.
M. Forget (Claude E. ):... c'est qu'il semble en avoir assez,
mais peut-être a-t-il valablement un autre point de vue à
défendre sur le sujet. D'autant plus qu'il a pu être
frustré dans son exercice et son pouvoir de surveillance, à cause
d'un manque de pouvoir. Mais, évidemment, ça n'a pas
été publié dans les journaux. Nous n'en savons rien,
officiellement du moins, et, certainement, nous n'en savons rien
vis-à-vis de nous. Mais admettant qu'il n'a pas assez de pouvoirs, c'est
peut-être une cause qui peut se plaider. On retrouve, dans plusieurs
discussions théoriques, sur les pouvoirs de surveillance des
institutions financières, des préoccupations de ce
genre-là.
Malgré tout, je ne peux pas faire autrement que de croire que
tout ceci constitue une des retombées des faillites spectaculaires de
certaines institutions financières canadiennes au cours des
années quatre-vingt. Et ça a donné lieu à toutes
sortes de commissions d'enquête et à toutes sortes de "post
mortem", et le renforcement des pouvoirs des autorités de surveillance
faisait partie d'un certain nombre de recommandations de tous ces organismes.
Mais, là aussi, il y a plusieurs causes contributoires. Et quand on se
remémore un certain nombre des difficultés qui se sont produites
dans un passé récent, on peut se poser la question: Est-ce que
c'était la force des pouvoirs où le moment de leur utilisation,
qui a fait défaut? Et est-ce que c'était... Dans le cas de
certaines provinces, on le sait comme un fait certain, puisqu'il y a eu des
enquêtes, c'est la réticence des ministres vis-à-vis des
conséquences politiques de certaines remises en ordre qui auraient pu se
faire en temps utile. On sait que dans le cas des "savings and loans" aux
États-Unis, ce n'est pas nécessairement que les pouvoirs
manquaient, mais c'est qu'il y a eu des pressions concertées pour que
les autorités regardent dans une autre direction au moment où
elles auraient dû regarder le problème en face. Alors est-ce que
plus de pouvoirs formels dans la loi seraient vraiment important, compte tenu
des autres facteurs? Je suis porté à penser que non,
mais, encore une fois, on a l'esprit ouvert là-dessus, pourvu que
ça se fasse selon des normes acceptables au point de vue du droit
public
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Forget. Mme la
ministre, il vous reste cinq minutes, et du côté de l'Opposition
officielle, deux minutes.
Mime Roblc: Merci, M. le Président. Vous déplorez
le fait qu'on n'inclue pas votre modèle de "démutualisation" dans
la loi. Moi, je voudrais savoir pourquoi il faudrait qu'il y ait un seul
modèle de "démutualisation". Est-ce qu'il ne se pourrait pas que
d'autres mutuelles trouvent d'autres modèles et qu'on doive laisser, au
contraire, l'initiative à ce niveau-là?
M. Forget (Claude E.): Le but n'est pas de restreindre qui que ce
soit, de quelque façon que ce soit. Il est toujours possible
d'abandonner sa charte, il est toujours possible de faire bien des choses, mais
il reste que la scission de mutuelles, ça semble être une
espèce de droit courant dans plusieurs législations, qui ne
s'applique pas nécessairement, d'ailleurs, seulement à des mu
tuelles, mais qui s'applique à n'importe quelle société en
droit français, qui s'applique aux mutuelles de banques aux
États-Unis. Donc, il semble que ce soit là aussi monnaie courante
que bien d'autres procédures qui sont accessibles à
différentes formes de société. Et comme nous sommes
passés par là - on a quand même une expérience
vécue à la fois du côté secteur privé et
gouvernemental - il me semble que c'était une avenue qui pourrait
être facilitée. Le seul intérêt qu'on y voit, c'est
de banaliser en quelque sorte l'opération à laquelle on s'est
livré, c'est-à-dire de la rendre aussi accessible et ordinaire
qu'elle devrait l'être, selon nous.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Est ce que ça va,
Mme la ministre? Ça va. Alors, M. le député de
Bertrand.
M. Beaulne: Oui, merci, M. le Président. Vous avez
soulevé deux questions de fond intéressantes à mon avis,
qui touchent finalement tout le débat. Puisqu'on n'est pas en train de
discuter des technicalités d'un projet de loi, j'aimerais
peut-être vous interroger davantage sur ces deux aspects. Le premier,
c'est, au fond, tout le débat concernant ce qu'on a appelé
communément le décloisonnement des institutions
financières et la déréglementation. Les gens ont
utilisé les deux termes de façon interchangeable, alors qu'il y a
quand même une marge entre les deux approches. (16 h 30)
Sur le fond de cette question-là, vous l'avez très bien
souligné, au Québec, on a procédé de façon
originale par rapport à ce qui s'est fait au niveau gouvernemental
canadien et au niveau des États-Unis Par contre, je comprends
également les préoccupations de ceux qui, dans un contexte
d'incertitude économique veulent avoir une protection pour les
consommateurs et les actionnaires. Jusqu'à quel point - et je vous pose
la question de façon tout à fait spontanée - dans votre
industrie êtes-vous prêts à absorber une part de
réglementation pour compenser un décloisonnement plus large de
vos activités? Il me semble que si on permet un décloisonnement
beaucoup plus vaste des activités des institutions financières,
entre autres des compagnies d'assurances, ça peut s'accompagner d'une
réglementation plus intense. C'est du moins une possibilité.
Alors, ma première question consiste à savoir quelle part de
dosage vous jugez appropriée entre les deux. Et la deuxième
question, c'est une question plutôt de rappel historique. Il y a quelques
années, il y a trois, quatre ou cinq ans, au cours des cinq
dernières années, un nombre important de grandes institutions
financières québécoises ont rapatrié leur charte
d'une charte fédérale à une charte
québécoise, parce que, à ce moment-là, la
législation québécoise leur paraissait plus avanta geuse
Êtes vous en train de nous dire, au fond, par vos commentaires que,
finalement, ce qui se dégage du Rapport quinquennal irait à
(encontre de ce mouvement qui avait été amorcé il y a
quelques années?
Le Président (M. Lemieux): M. Forget, êtes-vous en
mesure de nous répondre à tout ça en trois minutes?
M. Forget (Claude E.): Je vais essayer, mais ça va
être très sommaire comme réponse. Ma première
réponse à la question de l'équilibre entre
déréglementation et décloisonnement, je voudrais tout
simplement rappeler que nous ne faisons aucun plaidoyer en faveur de
l'abolition de la réglementation financière; bien au contraire,
nous sommes conscients de la nécessité qu'il y ait une
réglementation. Mais il faut se rendre compte que la
réglementation est abondante déjà, et on discute non pas
de son abolition ou de sa confirmation mais de changements marginaux à
une réglementation déjà abondante et qui vient d'ailleurs
de plus d'une source. Il y a non seulement l'Inspecteur général,
mais il y a également la Commission des valeurs mobilières,
puisque les sociétés publiques sont astreintes à une
réglementation détaillée. D'ailleurs, notre souci est
parfois de s'assurer que les deux réglementations sont compatibles, ce
qui n'est pas toujours évident du premier coup. Donc, c'est clair qu'il
faut une réglementation Mais jusqu'à quel point? D'un autre
côté, le décloisonnement accroît les
problèmes. C'est une question théorique à laquelle je vous
avoue franchement que je n'ai pas beaucoup réfléchi. Ce n'est pas
évident que le décloisonnement accroît les risques. Pour ce
qui est du mouvement inverse, dans le
rapatriement au québec de chartes d'institutions
financières, écoutez, je comprends très bien comment,
historiquement, le problème s'est posé et se pose encore
d'ailleurs pour les sociétés de fiducie. il va probablement se
poser de façon croissante durant la prochaine année, compte tenu
de l'absence de législation fédérale. mais il y a une
limite à ce processus. il est évident que nous avons, par
exemple, une filiale qui est une banque, en vertu de la loi
fédérale des banques; quel que soit notre désir d'y
changer quoi que ce soit, nous n'avons pas le choix en la matière. et
dans le domaine de l'assurance, il faut se rendre compte également que
les sociétés à charte québécoise n'ont pas
l'autorisation de faire des affaires dans certaines provinces. donc, si on veut
y faire affaire, on n'a pas le choix que d'avoir une charte
fédérale, au moins pour cette partie-là de nos affaires.
et il n'y a pas beaucoup de changements à cette situation-là qui
soient prévisibles, malheureusement.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Forget. En
conclusion, M. le député de Labelle, rapidement.
M. Léonard: Non. M. le Président, je voudrais
remercier les gens du Groupe La Laurentienne de leur mémoire, de leurs
commentaires, je pense qu'ils ont été très
intéressants, très percutants aussi. Je pense qu'eux-mêmes
parlent d'expérience parce que, depuis la loi de 1984, eux-mêmes
ont progressé considérablement par rapport à leur
situation antérieure. Ils ont pu se développer, et je pense que
tous les Québécois sont contents de leur développement.
C'est aujourd'hui un groupe financier très imposant qui continue
d'ailleurs sur sa lancée. Je suppose bien que loin de nous l'intention
de les paralyser dans leur développement. Au contraire, on va leur
donner des moyens, comme on veut en donner à tous les assureurs ici, au
Québec. Merci bien.
Le Président (M. Chagnon): Merci, M. le
député de Labelle. Mme la ministre, en conclusion.
Mme Robic: M. le Président, vous avez changé de
visage. Je vous remercie beaucoup, M. Forget, d'avoir participé à
ce processus. Pour vous, le problème des liens commerciaux ne se pose
pas. Vous avez une structure qui vous permet très bien d'avoir des liens
commerciaux en amont, de vous développer en aval, pour des entreprises
connexes, et en amont, pour faire du développement économique. Et
pour nous, c'est un modèle qui va être certainement regardé
de près par plusieurs autres compagnies. Donc, vous pouvez être
assuré également que nous allons tenir compte de vos remarques.
Vous avez des remarques fort pertinentes. Et, encore une fois, nous n'avons pas
du tout l'intention de paralyser l'industrie. Bien au contraire, nous tentons
de l'outiller, mais, encore une fois, avec prudence. Merci.
Le Président (M. Chagnon): Merci, M. Forget.
Au nom des membres de cette commission parlementaire, j'inviterais
maintenant la Mutuelle des fonctionnaires du Québec à nous
présenter son mémoire.
Alors, sans plus tarder, messieurs, je demanderais à M. Simoneau,
je pense, de nous présenter les membres de son conseil qui
l'accompagnent. Comme vous le savez, nous procéderons de la façon
suivante: vous aurez 20 minutes pour faire part aux membres de la commission de
l'essentiel de votre mémoire et, par la suite, nous procéderons,
pendant 40 minutes, à un échange entre les différents
membres de cette commission et vous-mêmes. Merci.
Mutuelle des fonctionnaires du Québec
M. Simoneau (J.-Claude): Merci, M. le Président, de nous
avoir invités à présenter le mémoire de la Mutuelle
des fonctionnaires, de La Personnelle Vie et de la corporation d'assurance La
Capitale à votre commission. J'ai avec moi, mesdames, messieurs:
à ma gauche immédiate, M. Gérald Duguay, président
et chef de la direction de la Mutuelle et de la Corporation financière
MFQ; à sa gauche, le vice-président aux affaires juridiques, Me
Alain Roch; à ma droite immédiate, M. Jacques Labrecque,
président-directeur général de la Mutuelle des
fonctionnaires et de La Personnelle Vie; et, à l'extrême droite,
M. André Roy, président du conseil de La Capitale et
vice-président du conseil de la Mutuelle des fonctionnaires.
La Mutuelle des fonctionnaires du Québec, La Capitale, compagnie
d'assurance générale et La Personnelle Vie, corporation
d'assurance, sont les trois assureurs à charte québécoise
qui font partie du groupe Mutuelle des Fonctionnaires du Québec, lequel
regroupe 15 entreprises oeuvrant dans divers secteurs financiers et
commerciaux. Je demanderais à notre vice-président aux affaires
juridiques, Me Alain Roch, de faire la lecture de notre mémoire,
après quoi mes collègues et moi serons à votre disposition
pour les questions. Me Roch.
Le Président (M. Lemieux): M. Roch.
M. Roch (Alain): Nous opérons principalement au
Québec, quoique nous soyons présents à l'échelle
nationale par le biais de deux de nos entreprises, dont La Personnelle,
compagnie d'assurance du Canada, une entreprise d'assurance
générale à charte fédérale avec siège
social à Toronto, et dont les opérations sont pancanadiennes.
Nous desservons près de 500 000 clients et nous comptons quelque
1200
employés. Les actifs consolidés du groupe excède 1
000 000 000 $. La Mutuelle est la compagnie mère du groupe MFQ. Elle est
la propriété exclusive de ses assurés, soit les
employés des secteurs public et parapublic du Québec. Par le
biais de ses filiales, ta Mutuelle est également présente dans le
secteur privé, ce qui lui permet d'appuyer son développement sur
une base plus large. Il y a une quinzaine d'années, soit lors de la
création de La Capitale, les dirigeants de la Mutuelle ont alors
résolument opté pour la diversification des activités et
des services offerts pour répondre à la demande de ses membres.
C'est ainsi que les services énumérés ci-dessus se sont
ajoutés à l'assurance générale au fil des
années, et ce, en aval de fa Mutuelle et de La Capitale.
Comme aperçu général, nous nous estimons satisfaits
de l'évolution législative qu'a connue le Québec dans le
secteur des assurances depuis 1984, date où une réforme majeure
est survenue, laquelle a propulsé le Québec au niveau des
juridictions les plus avant-gardistes en Amérique. Cette réforme
a permis au dynamisme et au nouvel esprit d'"entrepreneurship" alors
présents dans la communauté de se réaliser. C'est ainsi
que, pour un, notre groupe de même que d'autres groupes financiers du
Québec ont pris une certaine ampleur, tant au plan financier qu'au plan
de la gamme des services offerts. Cette croissance doit se poursuivre et
être stimulée par les autorités gouvernementales, car
l'environnement des années 1990 sera caractérisé par une
concurrence très vive entre des joueurs de plus en plus gros sur un
territoire mondial sans frontières. Pour continuer à se
développer, un groupe comme le nôtre devra non seulement maintenir
une haute qualité de gestion, mais il devra aussi rentabiliser les
réseaux de distribution, innover dans les services offerts, jouir de
sources de financement efficaces et bénéficier de règles
du jeu équitables par rapport à celles de ses
compétiteurs. À notre avis, ce sont là les grandes lignes
directrices dont la législation à venir devrait s'inspirer si on
veut continuer l'élan donné aux groupes financiers du
Québec depuis 1984. Dans les pages suivantes, nous vous livrons nos
réflexions sur nos préoccupations propres de même que sur
les grandes questions de l'heure, et nos recommandations législatives
sur l'orientation à être donnée aux modifications qui
suivront à brève échéance, principalement en ce qui
a trait à la question des liens commerciaux, selon le souhait
exprimé par la commission.
En regard des liens commerciaux, le Rapport quinquennal nous propose une
politique différente selon que les liens commerciaux sont en amont ou en
aval. En amont, ils continueraient d'être permis, alors qu'en aval, ils
seraient abolis ou très restreints. Une liste de filiales
financières autorisées serait établie, et, quant aux
filiales non financières, seules celles con- sidérées
comme accessoires ou connexes au commerce d'assurance seraient
autorisées. Nous n'avons aucune définition de "filiale
financière" ou de "filiale accessoire ou connexe au commerce
d'assurance" II nous est donc très difficile de cerner la nature de ce
concept par rapport aux activités de nos filiales. Toutefois, ce concept
ressemble étrangement à celui que nous retrouvions dans la Loi
sur les assurances de 1976, à savoir qu'une compagnie d'assurance-vie
pouvait investir une portion déterminée de son actif pour
acquérir le contrôle d'une autre compagnie d'assurance-vie, d'une
compagnie d'assurance générale, d'un courtier en fonds mutuels,
d'une compagnie d'immeubles et, finalement, de toute corporation
constituée en vue de faire des opérations complémentaires
aux opérations d'assurance déterminées par les
règlements. En 1976, les règlements prescrivaient deux
activités complémentaires aux opérations d'assurance, soit
une corporation constituée pour pratiquer l'informatique et une
corporation de prêt et de placement. En 1979, une troisième
activité complémentaire s'ajoutait, soit la fiducie En 1984, le
législateur changeait son approche en permettant à l'assureur
d'acquérir des filiales financières, à savoir compagnies
d'assurance-vie ou générale, fiducies, institutions de
dépôt et courtiers en valeurs mobilières, dans lesquelles
il pouvait investir jusqu'à 15 % de son actif pour chacune. Quant aux
filiales non financières, sans aucune contrainte quant à la
nature de leurs activités, l'assureur pouvait y investir jusqu'à
4 % de son actif pour chacune Cette approche souple, ouverte et permissive a
bénéficié aux assureurs du Québec en leur laissant
la latitude nécessaire pour orienter leur développement selon
leur stratégie propre. (16 h 45)
Les résultats sont-ils si mauvais qu'il faille retourner à
un concept vieux de 14 ans? L'approche de 1976 était une amorce de
changement et nous comprenons que le législateur ait voulu se garder un
filet de sécurité. Mais en 1990, nous avons un vécu de 14
années très positives pour les assureurs du Québec et leur
situation présente ne requiert pas, à notre avis, des changements
aussi drastiques que ceux qui sont proposés.
L'autorisation d'entretenir des liens commerciaux en amont n'est d'aucun
secours dans le cadre d'un groupe financier chapeauté par une mutuelle
comme la nôtre Le groupe est en effet la propriété de tous
les membres de la Mutuelle. Par contre, nos filiales, qui ne sont pas, à
proprement parler, des institutions financières, constituent des rouages
très importants de notre organisation et font partie intégrante
de l'approche marketing que nous avons développée pour percer le
marché Ces filiales ont été mises sur pied à la
suite d'études de marché qui ont démontré qu'elles
répondaient à des besoins de nos membres et qu'elles permettaient
à moyen et
long terme un excellent rendement sur l'investissement. Pour nous, ces
filiales nous procurent un éfément de diversification des
revenus, assurant ainsi une certaine stabilisation des profits au niveau du
groupe, et elles offrent des produits qui répondent à des besoins
de nos clientèles. Ce dernier aspect est très important dans le
cadre du concept de "guichet unique". Si, aujourd'hui, un groupe n'est pas en
mesure d'offrir l'ensemble des produits recherchés par ses
clientèles, il sera incapable de les fidéliser, et
l'érosion de celles-ci en faveur d'autres groupes financiers fera son
oeuvre et la base de clientèle se rétrécira
constamment.
Avec la mondialisation des marchés, nos compétiteurs sont
et seront des conglomérats industriels, commerciaux et financiers. Nous
devons lutter à armes égales. Pour ce faire, il faut permettre
les liens commerciaux en aval, tels qu'ils existent présentement. Nous
considérons que la proposition du Rapport quinquennal aura pour effet de
figer notre développement dans un cadre réglementaire rigide et
de nous empêcher de réaliser des initiatives qui, jusqu'à
maintenant, se sont avérées fort heureuses. À notre avis,
cette proposition, si elle était retenue, constituerait un pas en
arrière important par rapport à la situation actuelle. Nous
croyons qu'il existe des moyens moins drastiques pour contrôler les
conflits d'intérêts que pourraient engendrer des liens commerciaux
en aval. Nous recommandons donc, à cet égard, que le gouvernement
maintienne le statu quo concernant les règles de placement dans des
entreprises financières et non financières. outre cet
exposé sur les liens commerciaux, nous voulons ajouter quelques brefs
commentaires sur d'autres thèmes abordés par le rapport
quinquennal. concernant les normes de capital, nous souscrivons
entièrement à l'un des énoncés du rapport à
l'effet qu'il y aurait lieu de ne pas éliminer en totalité le
double comptage du capital. cette position très raisonnable est
justifiée par le fait que, généralement, la compagnie
mère et sa filiale opèrent dans des secteurs d'activité
différents ou des marchés différents, procurant ainsi une
sécurité relative au capital. il faut également
reconnaître que le capital investi par l'assureur dans sa filiale peut
être rendu disponible par la vente des actions qu'il détient dans
sa filiale. quant à l'achalandage, nous sommes d'avis que de ne pas le
reconnaître relève d'un conservatisme excessif. on se doit
d'admettre que l'achalandage a une valeur, car des gens traitant à
distance en paient le prix. toutefois, sa durée de vie est moins
évidente, et, pour cette raison, l'énoncé du rapport
à l'effet de l'amortir sur une courte période, entre cinq et dix
ans, nous agrée. enfin, il nous apparaît que la loi sur les
assurances et ses règlements devraient être amendés afin de
permettre à l'assureur de refléter dans ses livres la valeur de
ses filiales et de ses immeubles à leur juste valeur marchande, aux fins
de l'évaluation du surplus. En effet, il faut permettre à
l'assureur de refléter dans ses livres une valeur de ses filiales et de
ses immeubles qui se rapproche davantage de leur valeur réelle
plutôt que de la traditionnelle valeur aux livres. Il s'agit là
d'une mesure indiquée, raisonnable et équitable face au
resserrement éventuel des normes de capitalisation. Nous sommes
d'ailleurs disposés à fournir à vos services techniques
plus de détails sur les modalités d'application de la formule que
nous mettons ici de l'avant. Nous recommandons donc à cet égard
que le gouvernement adopte une position médiane dans le sens
décrit ci-dessus et qu'il en fasse une application progressive et
échelonnée dans le temps. Il y aurait lieu également de
reconnaître les placements en filiales et en immeubles à leur
juste valeur marchande aux fins de l'évaluation du surplus.
Concernant les placements, maintenant. Sans que le pouvoir de placement
en immeubles n'ait été modifié, l'introduction des
principes comptables généralement reconnus pour les compagnies
d'assurance générale a eu pour effet de diminuer
considérablement leur pouvoir de placement en immeubles. En effet,
l'investissement en immeubles est mesuré sur le coût brut de
l'immeuble plutôt que sur son coût net du financement
hypothécaire, et ceci, sans que les limitations de 4 % et de 15 %
prévues dans la Loi sur les assurances n'aient été
ajustées en conséquence. On a donc amputé par la bande les
pouvoirs de placement en immeubles des compagnies d'assurance
générale. Cette anomalie devra être corrigée dans
les prochains amendements à la Loi sur les assurances de façon
à rétablir, dans les faits, les limites de placement en immeubles
au niveau où elles étaient avant l'introduction des principes
comptables. Le même exercice devra être fait à
l'égard des compagnies d'assurance de personnes lorsque les principes
comptables généralement reconnus leur seront appliqués.
par ailleurs, il nous apparaît que les limites de placement en filiales
devraient être établies et calculées en fonction du surplus
d'un assureur plutôt que de ses actifs, car les surplus constituent un
meilleur indice de la situation financière que les actifs et
présentent une règle de prudence plus indiquée. le rapport
propose de limiter à 25 % de son actif l'investissement d'un assureur
dans son holding. appliquée à la capitale, cette limite ne lui
donne même pas la possibilité d'y investir tout son surplus car
celui-ci représente 35 % de son actif. ainsi, l'investissement d'un
assureur dans son holding en aval devrait, contrairement à ce que
propose le rapport, être limité, à titre d'exemple,
à un maximum de 150 % de son surplus. il devrait en être ainsi
pour tous les placements en filiales d'un assureur.
Enfin, dans un souci d'amélioration de l'appariement, il y aurait
lieu également de réviser les limites quantitatives
allouées aux
assureurs, selon le type de placement, en fonction de la nouvelle
composition des actifs d'un assureur. Aujourd'hui, les actifs des assureurs
proviennent d'une plus grande part d'épargne court terme qu'autrefois.
L'appariement doit s'adapter à ce changement de même que les
normes de placement pour permettre un appa riement adéquat. Ainsi, par
exemple, la limite applicable aux prêts autres qu'hypothécaires ne
devrait pas être limitée à 15 %, car ce type de placement
s'apparie particulièrement bien à l'épargne court terme.
Nous vous recommandons donc que les modifications suivantes soient
apportées à la Loi sur les assurances: d'abord, prévoir
des dispositions qui auront pour effet que les principes comptables
généralement reconnus ne limitent pas davantage les pouvoirs de
placement des assureurs en immeubles; introduire le surplus d'un assureur comme
critère unique de contrôle du pouvoir de placement en filiales;
augmenter la limite de placement d'un assureur dans les prêts autres
qu'hypothécaires afin de permettre un appartement plus adéquat
aux activités présentes et à venir des assureurs dans un
contexte de décloisonnement.
Transactions intéressées et conflits
d'intérêts. Nous sommes conscients de la nécessité
de mesures pour encadrer, baliser ou bannir, selon le cas, les transactions
intéressées ou les situa tions démontrant des conflits
d'intérêts poten tiels. Toutefois, à notre avis, il ne faut
pas bannir toutes les transactions du seul fait qu'elles ont lieu entre deux
compagnies apparentées, sinon tous les avantages recherchés par
l'action concertée de compagnies membres d'un même groupe
financier seraient perdus. Ces mesures de contrôle doivent être
introduites dans la loi de façon très judicieuse, car, de nature,
elles sont lourdes, peuvent être paralysantes et entraînent des
coûts élevés pour les entreprises. Elles ne devraient pas
empêcher une transaction bénéfique aux
intérêts des deux parties au motif qu'elles sont
apparentées. On semble préconiser un régime analogue
à celui prévu pour les sociétés de fiducie.
À ce propos, nous vous signalons que la Loi sur les
sociétés de fiducie et les sociétés
d'épargne est très contraignante et qu'elle peut nous mener
parfois à des situations sans issue, comme ce fut le cas d'ailleurs chez
notre filiale, Société nationale de fiducie, en matière de
crédit-bail. La loi empêche en effet Société
nationale de fiducie de financer son affiliée, Location Lutex,
spécialisée dans le crédit-bail, car celle-ci est
considérée comme une personne intéressée par
rapport à Société nationale de fiducie. D'autres avenues
sont également bloquées par cette loi, au point où nous
pouvons affirmer que les règles anti-conflits d'intérêts
ont placé l'opération crédit-bail au sein de notre groupe
dans un véritable cul-de-sac. Tout en reconnaissant la
nécessité d'introduire des règles en cette matière,
nous vous recommandons de laisser guider votre action par le critère de
la souplesse de façon à permettre les transactions entre
apparentées, mais aux conditions du marché, plutôt qu'un
bannissement aveugle de toutes telles transactions.
Quelques autres aspects. Notre groupe accueille avec satisfaction les
mesures suivantes proposées par le Rapport: premièrement permet
tre à des non résidents de détenir jusqu à 30 % des
droits de vote d'un assureur, avec la pos sibilité d'excéder
cette limite avec l'autorisation du ministre, ce qui s'avère être
une mesure favorisant le financement de nos institutions; deuxièmement,
permettre à un assureur de détenir entre 30 % et 50 % des actions
votantes d'une corporation, qui pourraient autrement être détenues
en filliale. Cette disposition serait susceptible de favoriser le "partnership"
entre institutions financières.
Nous vous remercions de l'occasion que vous nous avez fournie de faire
le point avec vous sur l'état de la législation du Québec
relative aux assurances. Notre appréciation globale est plutôt
positive et notre critique se veut constructive. Nous vous incitons à
pour suivre la réforme amorcée et vous offrons notre
collaboration entière à parfaire cette réforme au cours
des prochaines étapes.
Le Président (M. Chagnon): Merci, M Roch On dirait que
vous avez pratiqué quelques fois, vous êtes arrivé juste
dans les 20 minutes prévues J'inviterais maintenant Mme la ministre
à répondre au mémoire que vous nous avez fourni, pour les
10 prochaines minutes. Ensuite, M. le représentant de l'Opposition fera
de même.
Mme Robic: Merci, M. le Président. Vous mentionnez qu'au
niveau des liens commerciaux, notre politique fait en sorte que vous êtes
désavantagés, puisque nous allons vers des liens commerciaux en
amont plutôt qu'on aval. Est ce que vous êtes opposés
à toute restructuration, même celle qui vous permettrait de rester
des mutuelles et qui vous permettrait d'avoir des liens commerciaux en
amont?
M. Duguay (Gérald): Non, nous ne sommes pas
opposés, Mme la ministre, à une restructuration qui pourrait
aller dans le sens de faciliter. .
Le Président (M. Chagnon): Je vous inviterais, avant de
répondre, à vous nommer pour qu'on puisse bien vous
identifier
M. Duguay: M. le Président, excusez-moi. Je me rappelais
que mon président du conseil, tout à l'heure, avait dit qui
j'étais. Je m'appelle Gérald Duguay, je remplis la
fonction...
Le Président (M. Chagnon): Sauf que lorsqu'on vient pour
faire le "verbatim", on ne peut pas se rappeler où vous étiez,
lorsqu'on travaille dans des bureaux ailleurs.
M. Duguay:alors, gérald duguay, président et chef
de la direction de la mutuelle des fonctionnaires du québec. nous ne
nous opposons pas, comme je le disais tout à l'heure, m. le
président et mme la ministre, à une restructuration qui irait
dans le sens de faciliter le développement de notre groupe et de
favoriser ses intérêts commerciaux, dans le sens où cette
restructuration, évidemment, mettrait des limites qui nous permettraient
quand même d'opérer à l'intérieur d'un cadre qui...
mais il n'y a pas, de notre part... il ne faudrait pas voir notre
mémoire comme étant indicatif d'une opposition quelconque
à des mesures qui nous sembleraient raisonnables dans le cadre de nos
opérations commerciales.
Mme Robic: Le groupe qui a passé juste avant vous - vous
étiez là - nous suggérait qu'on aurait dû inclure
dans notre projet, qu'on devrait inclure dans notre projet de loi le
modèle que La Laurentienne a retenu. Est-ce que vous êtes d'accord
avec cela ou si vous croyez que la décision que j'ai prise de dire: Je
laisse à l'initiative de chacun de trouver peut-être un
modèle qui convient mieux à elles et à eux et d'y aller
par bill privé?
M. Duguay: Je suis plutôt d'accord, Mme la ministre, avec
votre approche qui veut que les mutuelles, dans la mesure où on
reconnaît que les mutuelles auront un besoin au Québec, les
mutuelles surtout qui se sont développées en fonction d'un
modèle de groupe diversifié à la faveur du
décloisonnement, je suis plutôt d'avis que ces
mutuelles-là, quand on reconnaît leur besoin de capitalisation, et
on le reconnaîtra de plus en plus je pense, soient en mesure de choisir
un mode de capitalisation basé sur des normes qui seraient acceptables
aux plans administratif, commercial et législatif. Et je suis
plutôt de votre avis qu'il ne faille pas couler dans le ciment une
formule qui obligerait toutes les mutuelles d'aller de ce
côté-là. Vous savez, il n'est pas interdit de penser que
les mutuelles étant la propriété de leurs assurés,
de leurs membres participants, que ces gens-là puissent côte
à côte vivre avec des gens qui auraient des intérêts
comme actionnaires; on voit ça dans les compagnies d'assurances à
capital-actions. Les compagnies d'assurances à capital-actions sont
possédées ou contrôlées par des actionnaires, leur
capital social est contrôlé par des actionnaires, puis, par
ailleurs, à côté, il y a là aussi des assurés
qui détiennent des polices participantes et qui ont des droits en vertu
de ces contrats là qu'ils détiennent. Alors, il n'est pas
interdit de penser à des formules imaginatives qui iraient dans des
voies un petit peu plus nuancées ou peut-être différentes
un peu de celle qui a été préconisée jusqu'à
maintenant et qu'on connaît. (17 heures)
Mme Robic: Je voulais vous dire que, dans nos livres à
nous, vous n'avez aucune filiale commerciale chez vous.
M. Duguay:c'est-à-dire que, nous, on a des filiales, on a
des filiales commerciales, oui.
Mme Robic: oui, mais non qui répondent aux critères
accessoires ou connexes. et notre liste n'est pas exhaustive, elle va
être très large, elle va permettre qu'on rajoute certaines
filiales quand de nouveaux produits seront développés, etc.
alors, je voulais vous dire que, nous, quand on regarde votre structure, vous
n'avez pas, dans nos livres à nous, de filiale commerciale qui pourrait
poser problème avec notre nouvelle politique.
M. Duguay: Je souris, Mme la ministre, parce que je ne suis pas
sûr que je peux vous répondre oui à cette
question-là.
Mme Robic: Ah bon!
M. Duguay: Je devrai plutôt, je pense, vous
référer à la première page de notre mémoire
où il est indiqué que nous avons une opération de
carrossier. Et je ne sais pas si un carrossier ça deviendra, à un
moment donné, une entreprise connexe au commerce de l'assurance ou si
ça deviendra une entreprise permise comme filiale.
Mme Robic: Alors, vous avez des secrets, messieurs. Je ne le vois
pas là.
M. Duguay: Oh non! C'est écrit, Mme la ministre, c'est
écrit. Mais je dois vous dire que cette opération-là, pour
nous, est une opération que nous considérons comme étant
apparentée et connexe aux opérations d'une compagnie d'assurance
générale. Vous savez que La Capitale, chez nous, fait
réparer des automobiles pour plusieurs plusieurs millions de dollars par
année, et il est important que, dans une certaine mesure, on puisse
contrôler d'abord la qualité des réparations que nous
faisons pour notre clientèle, parce que La Capitale est reconnue, c'est
ce qu'on vend d'ailleurs dans notre marketing, on vend le service, le service
excellent ou l'excellence dans le service que La Capitale offre à sa
clientèle. Et, pour pouvoir contrôler, dans une certaine mesure,
l'excellence de ce service, nous avons cru devoir nous intéresser aux
opérations qui consistent à remettre en ordre les voitures que
nous avons. Mais il faut vous dire que notre carrossier ne répare pas
toutes les voitures de La Capitale, il en répare une très petite
partie.
Mme Robic: Alors, je n'étais pas au courant que vous aviez
ce genre de garage. Je savais que vous faisiez des estimations, mais je ne
pensais pas que vous faisiez des réparations. Alors, vous avez la clause
grand-père; vous êtes encore
couverts.
M. Duguay: Voilà, madame. Je vous remercie.
Mme Robic: Vous vous inquiétiez également de notre
politique de transaction intéressée. Vous avez une crainte qu'on
adopte le modèle des fiducies. Alors, je veux vous rassurer, ce n'est
pas le modèle que l'on a retenu, et je pense que dans le Rapport
quinquennal, on est assez clairs là-dessus, c'est un modèle qu'on
appelle permissif plutôt que le "banned transaction". Il y aura
certainement des exceptions, mais ces transactions sont permises avec
exception, et non pas le contraire. M. le Président, vous pouvez
aller...
Le Président (M. Chagnon): Merci, Mme la ministre. M. le
député de Bertrand.
M. Beaulne: Merci, M. le Président. D'abord, je tiens
à féliciter la Mutuelle des fonctionnaires du Québec de
son rapport; j'ai trouvé que c'était un rapport original. J'ai
quand même noté que, parmi les groupes qui se sont prévalus
de la prérogative de venir nous rencontrer aujourd'hui, vous êtes
le quatrième groupe qui exprime, en termes plus ou moins voilés,
une préférence pour le statu quo amélioré. Dans ce
sens, je dois quand même souligner un élément
intéressant que vous avez apporté, mais j'aimerais
peut-être que vous en parliez davantage. Vous avez évoqué
la possibilité d'utiliser les surplus comme barème
d'évaluation des transactions permissibles. Jusqu'ici, on utilisait
surtout les actifs, parce que le surplus est beaucoup plus vulnérable
aux changements. Alors, j'aimerais savoir, comme on n'est pas, quand
même, dans le contexte d'un débat technique, mais que, des groupes
qui se sont présentés jusqu'ici, vous êtes celui qui a
soulevé ce point qui, sur le plan technique, à moi,
m'apparaît intéressant, comment dans votre esprit vous envisagez
l'utilisation du surplus comme critère de base et d'évaluation
des transactions permissibles, quand on connaît les fluctuations
auxquelles sont vulnérables les surplus? Alors, dans ce
contexte-là, comment, dans votre idée, pouvez-vous envisager de
nous proposer une méthode d'évaluation qui ait une certaine
continuité à travers le temps et qui ne soit pas sujette à
tous les aléas des fluctuations économiques?
M. Duguay: Vous savez, je voudrais, pour ma part -
peut-être que mes confrères ou collègues ici auront des
choses à ajouter - faire une distinction entre les opérations en
assurance générale et les opérations en assurance-vie en
ce qui concerne les critères de limite qu'on doive appliquer aux
investissements en filiales. En ce qui concerne les compagnies d'assurance
générale, les surplus sont, en règle
générale, plus imposants, en termes relatifs, par rapport aux
actifs de l'entreprise. En ce qui concerne les compagnies d'assurance-vie,
c'est le contraire: les surplus sont un peu plus faibles en termes relatifs,
par rapport aux actifs de la compagnie; les actifs sont plus importants. Alors,
quand on parle d'investir dans les filiales ce qui dépasse, quand on
parle d'investir les surplus, on a déjà une norme, je pense,
importante. Si tous les surplus d'une entreprise d'assurances sont investis
dans des filiales, c'est déjà beaucoup. Si on dépasse 100
% des surplus et qu'on se rende, mettons, à 150 %, 150 % des surplus,
dans une compagnie d'assurance générale, peuvent ne pas avoir le
même impact que 150 % des surplus dans une compagnie d'assurance-vie.
Parce que quand vous dépassez les surplus, dans une compagnie
d'assurance-vie, et que vous investissez en filiales, vous investissez des
actifs à passif; vous investissez des actifs qui sont là pour
garantir des contrats d'assurance, et, dans la mesure où il pourrait
arriver que vos investissements en filiales aient un caractère plus ou
moins spéculatif ou volatil, il pourrait arriver que ces actifs que vous
avez investis dans des surplus soient mis dans des valeurs qui,
peut-être, comme vous le dites, fluctueront dans le temps. Et vous savez
qu'on a l'exemple ici, quand on parle des normes de capitalisation dans les
compagnies dassuran ces et qu'on dit: On va éviter, on n'acceptera pas
le double comptage du capital. Je pense que vous savez fort bien ce que
ça veut dire pour les compagnies qui ont investi considérablement
dans des filiales. Ça veut dire qu'il faut être prudent. C'est
ça. Alors, on dit, nous: La norme qui nous apparaîtrait être
la plus acceptable, équitable ou qui pourrait satisfaire à la
fois les autorités de surveillance et laisser une marge suffisante aux
compagnies d'assurances devrait, à notre point de vue - du moins a mon
point de vue - être basée sur un facteur du surplus.
M. Simoneau: Je demanderais à M. Jacques Labrecque,
président-directeur général de la Mutuelle, de
compléter.
Le Président (M. Chagnon): Merci. M. Labrecque.
M. Labrecque (Jacques): Jacques Labrecque. On parlait de
fluctuation des surplus En fait, je pense qu'il est important, au point de
départ, de bien comprendre l'idée de surplus. Il s'agit du
capital et des surplus développés avec le temps Donc, le niveau
de fluctuation des surplus, qui sont le complément des passifs pour
équivaloir à l'actif, le niveau de variation ou de fluctuation
n'est pas à ce point élevé. Lorsqu'on établit les
règles et qu'elles sont les mêmes pour les compagnies d'assurance
générale et les compagnies d'assurance-vie, on se retrouve avec
des situations du type de ce qu'on vit chez nous où La Capitale, on l'a
écrit dans le rapport, a un surplus qui est équivalent à
35 % de l'actif, alors
que du côté de la compagnie d'assurance-vie la mutuelle, on
est, à toutes fins pratiques, à 10 %. dans le monde de
l'assurance-vie, il y a des normes très serrées et importantes
sur ce qu'on appelle l'appariement, c'est-à-dire que les sommes
détenues au nom des assurés doivent être réinvesties
de façon à bien couvrir les engagements. quand on en vient
à établir des normes d'investissement en filiales qui sont en
fonction des actifs, on vient reconnaître qu'une partie plus ou moins
importante de ces fonds-là peut être investie en filiales, ce
qu'on peut considérer comme étant un petit peu plus risqué
ou, tout au moins, un peu plus volatile en termes de résultat. alors,
c'est peut-être un point qui nous incite à proposer la norme
basée sur les surplus.
J'aimerais peut-être ajouter un dernier point. C'est qu'on
pourrait avoir deux compagnies de taille comparable: une qui possède un
surplus équivalent à 20 % de son actif, l'autre à 5 %, et
on permettrait à ces deux compagnies-là, selon les normes
actuelles, d'investir de la même façon dans des entreprises
filiales. Merci.
Le Président (M. Chagnon): Merci. M. le
député de Bertrand.
M. Beaulne: Non. Moi, ça va.
Le Président (M. Chagnon): Ça va? Mme la
ministre.
Mme Robic: Je vous remercie, M le Président. À la
page 12, vous dites: Face au resserrement éventuel des normes de
capitalisation, on estime qu'il y aurait lieu de permettre à l'assureur
de comptabiliser ses placements dans les filiales et les immeubles à
leur juste valeur marchande. N'y a-t-il pas un danger dans cela? Qu'est-ce qui
arrive, par exemple, dans un marché à la baisse? Comment
voyez-vous ça, là?
Le Président (M. Chagnon): M. Duguay.
M. Duguay:mme la ministre, il faudrait... nous croyons qu'il
n'est pas bien d'obliger des compagnies d'assurances à comptabiliser
leurs actifs, que ce soit la valeur de leurs filiales ou la valeur de leurs
immeubles, au coût, amorti surtout en ce qui concerne les immeubles,
parce que ce qui arrive, à ce moment-là, c'est que les normes de
capitalisation peuvent très facilement devenir insuffisantes si on a
investi en filiales ou en immeubles. et on sait que les immeubles, de tout
temps, ont été des placements stables et de bons placements qui,
éventuellement, même s'il y a quelques fluctuations dans le temps,
reprennent leur valeur. quand on parle de comptabiliser nos immeubles à
leur valeur marchande, peut-être qu'il y a là une mesure qu'on
pourrait adopter. 100 % de la valeur marchande, c'est peut-être trop.
peut-être qu'on pourrait y aller progressivement et peut-être qu'on
pourrait aussi comptabiliser nos immeubles ou l'achalandage ou la valeur
marchande de nos filiales à hauteur de, je ne sais trop, 90 % de leur
valeur marchande, et en obligeant par expertise à déterminer la
valeur des immeubles avec une périodicité suffisante pour
permettre de contrôler, parce que je pense que ça vous
inquiète un petit peu, autant la baisse que la hausse. Alors, il faut
trouver un moyen terme à ça, je crois. C'est plus ce qu'on
viserait. Et de comptabiliser au coût amorti, je peux vous dire que c'est
très très très contraignant pour des entreprises qui
veulent se développer, parce que, finalement, nos actifs ne sont pas
reconnus. C'est ça, le problème. (17 h 15)
M. Léonard: mme la ministre, est-ce que je pourrais poser
une question?
Mme Robic: Oui, certainement.
M. Léonard: Je m'excuse d'avoir été absent
quelques minutes. Est-ce que vous accepteriez fa valeur de l'évaluation
municipale ou, en tout cas, un pourcentage de l'évaluation municipale,
mais, disons, le principe de base de l'évaluation municipale?
M. Simoneau: M. Labrecque, je vous demanderais de donner suite
à la question.
M. Labrecque: Je voulais ajouter sur le point
précédent. Je m'excuse. Alors, je vais juste compléter sur
le point précédent, au niveau des filiales d'abord et immeubles.
Un point qui est plutôt préoccupant, c'est que, d'un
côté, ce sont les investissements qu'on semble vouloir traiter de
la façon la plus exigeante au niveau des normes de capitalisation
minimales et, de l'autre, on nous demande en parallèle de maintenir ces
actifs-là à une valeur qui ne reflète même pas leur
valeur réelle. Alors, ce qui signifie que le fait d'ignorer la
plus-value dans les livres, déjà c'est une marque de prudence
très grande, puis, d'un autre côté, on va nous exiger pour
les mêmes investissements, parce qu'il sont supposé-ment plus
risqués, des réserves plus grandes ou des capitaux minimums plus
élevés. On trouve qu'il y a peut-être un petit peu de
redondance entre les deux approches, mais si on veut revenir au...
M. Simoneau:quant à la question du député
relativement à l'acceptabilité de l'évaluation municipale,
m. le président, je pense que nous pouvons facilement nous rallier
à pareille suggestion, sachant très bien que l'évaluation
municipale est régie par une loi qui a été bien
rodée, qui répond bien aux exigences du québec, qui a
donné grandement satisfaction et a bien fait ses preuves. ce serait
là une formule qui, il me semble, serait facile de contrôle, ou
quelque chose d'équivalent.
Le Président (M. Chagnon): Merci, M. le
député de Labelle. Mme la ministre, est-ce que vous avez d'autres
questions?
Mme Robic: Oui. À la page 15, vous dites qu'il y aurait
lieu d'augmenter la limite de placement dans les prêts autres
qu'hypothécaires. Est-ce que vous pourriez élaborer, s'il vous
plaît?
M. Simoneau: Oui. M. Ouguay.
M. Duguay: Vous savez que, de plus en plus, les compagnies
d'assurances vendent des produits qui sont axés sur l'épargne
à court terme. Par exemple, les compagnies d'assurance-vie vendent des
rentes à prime unique d'un an, deux ans, trois ans, quatre ans, cinq
ans; ce sont là des certificats de dépôt. Au fond, ce sont
des certificats de dépôt, de placement garantis qui, à
l'échéance, ont une option de rente. On ne peut pas les appeler
des certificats de placement garantis, parce qu'une compagnie d'assurances n'a
pas le droit d'en vendre, alors on appelle ça des rentes à prime
unique, mais il faut apparier ces sommes d'argent là de plus en plus
avec des placements à court terme. Alors, quand on pense, par exemple,
aux activités de prêts personnels que les banques peuvent faire,
que les fiducies peuvent faire, etc., si les compagnies d'assurances
étaient en mesure de faire des prêts... C'est parce que les
prêts hypothécaires, généralement, ce sont des
prêts à plus long terme Si on était capables d'investir ou
d'offrir de faire des placements dans des véhicules à plus court
terme, ça aiderait très certainement à l'appariement de
nos passifs et de nos actifs. C'est ce qu'on veut dire.
Mme Robic: Merci
M. Duguay: Je donne comme exemple les prêts personnels.
Le Président (M. Chagnon): Est-ce que ça va, Mme la
ministre?
Mme Robic: Ça va. Merci.
Le Président (M. Chagnon): M. le député de
Bertrand.
M. Beaulne: Oui. Merci On a fait état, dans le Rapport
quinquennal ainsi que dans la plupart des présentations qui ont
été faites, du besoin de laisser la place libre à nos
industries financières pour concurrencer les compagnies
étrangères et puis bénéficier du lancer vers la
globalisation des marchés. Ceci étant dit, d'après vous,
est-ce que les normes actuelles qui régissent l'assurance-vie au
Québec sont plus restrictives que celles qui existent aux
États-Unis? Et advenant que certaines - je pose ça sur une base
tout à fait hypothétique - grandes lignes directrices du Rapport
quinquennal voient la suite sous forme de législation ou sous une autre,
dans quelle position, par rapport particulièrement à l'industrie
de l'assurance américaine, ça vous placerait?
M. Simoneau: M. Duguay.
M. Duguay: J'ai un peu de difficulté à vraiment
faire le tour, dans ma réponse, de la question que vous posez. Vous
savez que, pour notre part, nous ne sommes pas encore actifs aux
États-Unis. La première partie de votre question, est-ce qu'on
croit que la législation québécoise est plus restrictive
que la législation américaine, je vous dirais, pour ma part, non.
Je pense que la législation québécoise en matière
d'assurance est suffisamment large pour nous permettre de nous
développer, dans la mesure où, comme je le disais tout à
l'heure, on n'ait pas de contraintes qui nous limitent davantage et que
ça devienne trop contraignant. Il faut quand même travailler dans
un cadre où il est possible de développer nos entreprises.
Peut-être que quelqu'un d'autre voudrait ajouter...
M. Labrecque: J'aurais une chose. Les lois qui régissent
les assurances aux États-Unis nous viennent des États. Il y a
beaucoup de lois différentes. La réponse, c'est non, mais c'est
peut-être oui aussi. Il faudrait connaître les 50 États
américains pour... Il y en a qui sont certainement plus contraignants
que d'autres.
Maintenant, si on regarde...
M. Beaulne: Disons dans les grands marchés, les
États principaux, l'État de New York, de Californie...
M. Labrecque:... très restrictif. Si on va, par exemple,
au-delà un peu des États-Unis et qu'on parle d'investissements,
par exemple, dans les entreprises commerciales, on connaît très
bien les entreprises européennes qui possèdent des filiales
commerciales en aval. Ce n'est pas contrôlé par des holdings en
amont ou des sociétés en amont. Le commentaire en termes de
concurrence, c'est qu'il existe des avantages à pouvoir être
associé à un groupe très diversifié au niveau de
ses opérations. À ce moment là, si on regarde dans le
cadre du Québec, où la plupart des groupes qui se sont
développés ont à leur tête des mutuelles
d'assurances, on se retrouve - parce que la loi, c'est pour nous qu'elle est
faite - dans un contexte où on se voit un peu contraint par rapport
à nos concurrents en termes de possibilité. C'est uniquement le
message qu'il y avait dans le Rapport.
M. Beaulne: Mais j'ai de la misère à comprendre de
quelle façon.. Je sais que c'est
dans le Rapport et, d'ailleurs, vous n'êtes pas les seuls à
faire allusion à ce phénomène-là, mais je dois vous
avouer bien sincèrement que j'ai de la misère à comprendre
de quelle façon, puisque, d'une part, vous venez de dire que,
certainement, dans certains des États qui représentent le
marché le plus populeux, les normes sont plus restrictives que ce qu'on
semble avoir au Québec. Si c'est ça qu'est la
réalité, j'ai de la misère à saisir exactement de
quelle façon on vous pénalise, finalement, en allant vers
certaines modalités qui sont présentées ici, dans le
Rapport quinquennal.
M. Simoneau: M. Labrecque.
M. Labrecque: Enfin, si on ne regarde que les États-Unis
et qu'on les voit comme les grands concurrents potentiels des compagnies du
Québec, je serais peut-être enclin à vous donner raison.
Mais ce n'est pas tellement du côté américain qu'on
regarde, parce que ça fait très longtemps qu'on vit en harmonie
avec eux. Il y a beaucoup de compagnies américaines qui font affaire
chez nous et des compagnies canadiennes qui sont très fortes aux
États-Unis. On pense plutôt à ce qui est susceptible de
survenir de l'Europe et, éventuellement, du Japon où ces liens
existent. Il y a des noyaux d'entreprises qui regroupent à la fois des
institutions financières et des entreprises commerciales et
industrielles.
Le Président (M. Chagnon): Merci. Peut-être que vous
auriez des conclusions, M. le député de Bertrand?
M. Beaulne: en fait, ma conclusion... je trouve la discussion
fort intéressante, et il est regrettable qu'on ne puisse pas la
poursuivre davantage parce qu'à mesure qu'on avance, il y a des
éléments intéressants qui sortent. jusqu'ici, lorsqu'on a
parlé du besoin de muscler nos entreprises pour faire face à la
globalisation des marchés, on a toujours à l'esprit le
marché américain, la présence des états-unis, le
libre-échange avec les états-unis. c'est la raison pour laquelle
je vous posais la question principalement concernant les états-unis.
Effectivement, je pense que si vous apportez la possibilité de
concurrence japonaise ou européenne, vous avez un excellent point parce
qu'au fond... Et je pense que M. Forget, dans la présentation
antérieure, a également souligné cette distinction
fondamentale d'approche qui existe en Europe continentale et au Japon par
rapport à l'intégration des groupes financiers et celle du monde
anglo-saxon des États-Unis et d'Angleterre qui a primé
jusqu'à présent dans la législation
fédérale, en tout cas, en ce qui concerne les institutions
financières.
Ceci m'amène simplement à conclure que ce serait
peut-être intéressant - et je fais ça comme suggestion -
dans le contexte des discussions sur ce Rapport quinquennal qu'on puisse
identifier de quelle source la plus forte concurrence de nos entreprises
pourrait venir. Ce que je semble déceler, c'est que, selon que la
concurrence dans le domaine de l'industrie de l'assurance vienne d'Europe, du
Japon, par rapport aux États-Unis, la problématique se
présente de façon différente. Et quand on parle en termes
concurrentiels, ce serait peut-être intéressant de distinguer de
façon un peu plus particulière, plutôt que d'essayer de
mettre tout le monde sur le même pied et de parler de l'aspect
concurrentiel en termes généraux.
Le Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup. Mme
la ministre, vos conclusions.
Mme Robic: Oui, M. le Président. Je voudrais rassurer le
député de Bertrand, en lui disant que, dans notre Rapport
quinquennal, nous avons tenu compte de l'Europe 1992, du traité de
libre-échange et du marché japonais, et nous avons tenté
justement, avec les ouvertures que nous avons faites, de permettre à nos
institutions financières de jouer sur les différents tableaux en
leur permettant des alliances importantes. Quand on permet la
propriété étrangère, ça permet de
créer des alliances fort importantes et de jouir d'une expertise qui
existe ailleurs. Et c'est ce que l'on a tenté de faire.
Encore une fois, nous avons ouvert, tout en réalisant qu'il
fallait y aller prudemment, puisque nous gérons les épargnes de
nos concitoyens. C'est certain - messieurs, on vous remercie beaucoup de votre
mémoire - que, pour vous, il y a contrainte: les liens commerciaux en
amont. Mais vous savez qu'il y a certaines solutions à cela. Et, pour
nos institutions financières et pour nos épargnants, il y a
certainement là des mesures qui tendent à protéger nos
institutions, en ne créant pas, sur notre institution financière,
des tensions sur leurs capitaux.
Je vous remercie infiniment. Nous allons tenir compte de vos remarques,
elles sont fort pertinentes. Nous allons tenir compte de vos remarques, et
certainement qu'au moment du projet de loi, nous serions
intéressés à connaître vos pensées sur ce
projet de loi là. Merci beaucoup.
Le Président (M. Chagnon): merci, mme la ministre. au nom
de tous les membres de cette commission, je tiens à vous remercier de la
présentation de votre mémoire et des réponses que vous
avez fournies aux questions que nous avions posées. merci beaucoup.
J'inviterais maintenant la Société financière des
caisses Desjardins à venir témoigner près de nous. Dans un
premier temps, j'inviterais le porte-parole de l'organisme à
s'identifier et à nous présenter les gens qui l'accompagnent.
Société financière des caisses
Desjardins inc.
M. Fortier (Pierre-C.): Oui, M. le Président. Merci de
votre accueil. À ma gauche, M. Claude Gravel, le nouveau
président d'Assurance-vie Desjardins inc.; à ma droite, M. Yves
Morency, vice-président à la planification de la
Confédération des caisses populaires et d'économie Desjar
dins du Québec; et, à mon extrême gauche, M. Raymond
Gagné, président de la Société d'investissement
Desjardins, puisqu'on a cru que si on voulait parier de liens commerciaux, il
était aussi bien d'amener ici une personne qui connaisse
également le sujet. (17 h 30)
Je vous remercie beaucoup. J'aimerais remercier la commission et Mme la
ministre de nous permettre d'exprimer notre point de vue. Je dirais tout de go
que nous sommes en accord avec la plupart des énoncés que la
ministre a mis de l'avant dans son Rapport quinquennal. Si nous venons, c'est
pour, d'une part, témoigner notre appui à certaines
démarches et, d'autre part, pour faire part de certains points de vue
qui peuvent peut-être alimenter la discussion. Je sais que, lorsqu'on
prépare de nouvelles politiques, on tient bien à connaître
le point de vue de ceux qui auront éventuellement à vivre avec
ces politiques. Je remercie Mme la ministre et la commission de nous permettre
de donner ce point de vue.
Bien sûr, je crois qu'on doit se féliciter qu'au
Québec, nous ayons, dans la Loi sur les assurances et dans les autres
lois, une disposition qui fait en sorte que, tous les cinq ans, le public et
les premiers intéressés puissent donner leur point de vue en
organisant une commission parlementaire, puisqu'on avait prévu en 1984 -
et c'était une très bonne disposition - que la ministre
responsable devait faire rapport à l'Assemblée nationale et qu'on
suggérait bien sûr, en même temps, qu'il puisse y avoir une
commission parlementaire. La même disposition a été reprise
en 1985, je crois, dans la Loi sur les valeurs mobilières et elle a
été reprise par la suite dans la Loi sur les fiducies, dans la
loi sur les caisses d'épargne et de crédit. Je crois qu'en ce
faisant, nous sommes à l'avant-garde au Canada, puisque, comme vous le
savez, il y a seulement dans la Loi sur les banques qui fait que, tous les 10
ans, les banques puissent... Le gouvernement fédéral a
l'obligation de revoir la Loi sur les banques, et c'est la raison pour laquelle
les banques ont toujours bénéficié de mesures
progressistes, ce qui a fait qu'elles ont pu progresser si rapidement au cours
des ans, quand on sait que la loi sur les fiducies au fédéral
date de 1913 et que la Loi fédérale sur les assurances date de
1932. Alors, je crois que cet exercice-là, les Québécois
ne le savent pas, mais c'est une chose, c'est une denrée très
rare à Ottawa.
J'aimerais, au départ, faire part de certains points
généraux. Bien sûr, Desjardins renouvelle sa confiance
envers l'Assemblée nationale et envers le gouvernement du Québec.
C'est la raison pour laquelle nous avons rapatrié la charte de La
Sauvegarde, il y a un an, et que vous avez autorisé le 1er juillet
dernier le rapatriement de la charte d'Assurance-vie Desjardins, qui est une
mutuelle, et nous bénéficions maintenant d'une compagnie
appréciable, une très grosse compagnie d'assurance-vie dont M.
Claude Grave! est le président depuis le 1er juillet dernier, qui
constitue, en tout cas, la compagnie d'assurance-vfe qui a la plus grande part
du marché au Québec, avec des actifs de 1 500 000 000 $ et des
fonds sous gestion d'environ 900 000 000 $. C'est donc une entité
extrêmement importante
Nous croyons que le Parlement et que le gouvernement du Québec
sont le plus près des Québécois, qu'ils connaissent le
mieux leurs aspirations et qu'ils connaissent mieux leurs problèmes. Je
crois que la manifestation de cette commission parlementaire que nous vivons
aujourd'hui est un indice déterminant du fait que le gouvernement et que
l'Assemblée nationale, en ce qui concerne les institutions
financières du Québec, sont beaucoup plus près des
Québécois que peut l'être un autre niveau de
gouvernement.
J'aimerais préciser que même si le mémoire a
été présenté sous le nom de la
Société financière des caisses Desjardins, qui est une
entité, comme vous le savez, qui représente 5 000 000 000 $
d'actif sur un total d'environ 44 000 000 000 $ d'actif, le mémoire ou
les discussions que nous allons vous présenter aujourd'hui ont
reçu l'aval du mouvement Desjardins. Donc, je parle au nom du mouvement
Desjardins. C'est la raison pour laquelle, en particulier, M. Yves Morency
m'accompagne ici et que M. Raymond Gagné, de la Société
d'investissement, m'accompagne également.
Il y a un deuxième point, je pense, qui est d'importance quand on
vient de dire que le gouvernement du Québec est le plus près des
intérêts, est le plus capable de comprendre les désirs des
Québécois dans le secteur des institutions financières,
qui est un moteur du développement économique. Je crois qu'une
fois qu'on a dit ça, on est obligé d'avoir un corollaire, c'est
que le Québec, dans le passé, a fait preuve d'innovation dans le
secteur des institutions financières et que ça a
bénéficié beaucoup aux institutions financières
elles-mêmes Ça a bénéficié beaucoup aux
Québécois et ça a bénéficié beaucoup
au développement économique du Québec. Je sais que la
ministre en est fort consciente, mais j'aimerais tout simplement le rappeler.
Je crois que lorsqu'on fait ce genre de réforme - et la commission que
nous vivons aujourd'hui est le préambule à la préparation
d'un projet de loi qui sera déposé et adopté
éventuellement - je crois que malgré certaines oppositions, le
Parlement et le gouvernement
doivent continuer à innover et je sais que le gouvernement et le
Parlement ont l'intention d'innover. Pensons à des initiatives qui, dans
le passé, ont suscité beaucoup de critiques. Je pense à la
Caisse de dépôt lorsqu'elle fut créée, je pense
à certaines interventions de la Caisse de dépôt lorsqu'il y
a eu des montages financiers qui ont été fort critiqués.
Il s'agit maintenant de lire le Globe & Mail pour s'apercevoir qu'il
y a trois ou quatre provinces canadiennes... Je crois que c'est dans une
interview que M. Jean Campeau disait: Plusieurs provinces canadiennes
maintenant désireraient, après quelque 30 ans, copier ce que nous
avons fait il y a 30 ans. Nous avons été chef de file dans le
secteur du décloisonnement et d'autres provinces... Je regarde la
législation qui a été déposée en
Colombie-Britannique, au Nouveau-Brunswick et même en Ontario ou
ailleurs: ils s'inspirent de ce que nous faisons ici. Je pense, entre autres,
aux dispositions qui ont été mises dans les différentes
lois sur la responsabilisation des conseils d'administration, la
création des comités de déontologie, la responsabilisation
des comptables agréés et d'autres professionnels, bien sûr,
tout ça de façon à assurer le développement
économique du Québec et des institutions financières. Le
Québec se doit donc de rester innovateur, même si, à
certains moments, certaines propositions peuvent surprendre.
Bien sûr, quand on a dit ça, il y a un autre volet qui est
important, c'est l'harmonisation avec les autres provinces. Le gouvernement du
Québec a pris une initiative de ce côté-là et, de
fait, il y a un comité qui regroupe les ministres des institutions
financières des différentes provinces, et je sais que le
gouvernement du Québec continue d'être actif dans cette
conférence des institutions financières des provinces. Donc,
à un certain moment donné, on a mis de l'avant ce qu'on appelle
l'harmonisation avec les autres provinces. Je crois que l'objectif, dans le
fond, était de s'assurer pour les Québécois que nos
institutions financières puissent aller dans les autres provinces
canadiennes et travailler aussi bien que certaines institutions
financières de l'Ontario et d'autres provinces venant au Québec,
et le faire assez facilement. On ne visait pas, je crois, l'harmonisation en
soi, on visait a s'assurer que nos institutions financières puissent
aller dans les autres provinces et travailler assez librement.
Je viens de faire état d'un objectif qui me semble
évident: lorsqu'on fait une réforme des institutions
financières, il faut non seulement favoriser le développement de
l'institution financière, mais assurer le développement
économique du Québec. L'harmonisation est un autre objectif, mais
si on a à choisir entre les deux, j'oserais penser que l'innovation dont
on doit faire preuve doit peut-être prédominer sur un désir
d'harmonisation, parce que cette harmonisation qu'on vise... Et je sais que,
lorsqu'on est au gouvernement, on rencontre nos collègues et ceux-ci
trouvent très souvent que le Québec apporte des innovations un
peu trop audacieuses. On a un certain désir de s'harmoniser, et je crois
qu'il faut tenter d'y arriver.
En définitive, je crois qu'il faudra retenir la formule du
marché commun européen qui, après cinq ou six ans de
tentatives d'harmonisation, a reconnu l'État d'origine comme
étant l'État qui contrôlait et qui décidait des lois
et des prérogatives des différentes institutions
financières. Je le dis parce que, lorsqu'on arrive sur certains sujets,
si on poussait le désir d'harmonisation à outrance, on en
viendrait à aseptiser la législation québécoise en
termes d'institution financière, et je crois qu'il faut continuer
à innover même si, à certains moments, cela peut
choquer.
Ceci dit, j'aimerais passer brièvement sur certains dossiers. En
ce qui concerne les normes gouvernementales de capital et l'intention des
assureurs, nous ne faisons que souligner la différence qui existe avec
raison entre les assurances de personnes et les assurances de dommages. Je
crois que nous sommes en accord avec ce qui est dit dans le Rapport
quinquennal, quoique nous n'ayons pas encore entre les mains le détail
de ces normes-là. Donc, on réserve notre jugement
là-dessus. en ce qui concerne les liens commerciaux, comme vous le
savez, m. le président, le mouvement desjardins est une institution
assez spéciale parce que c'est à la demande du gouvernement du
québec ou à la demande d'un premier ministre du québec si,
à un certain moment, notre institution financière a
développé un lien commercial. il faut remonter en 1969, je crois,
alors que les gâteaux vachon étaient pour être vendus
à des américains et qu'un premier ministre du temps, m. bertrand,
avait demandé au mouvement desjardins d'acquérir les
gâteaux vachon. c'est donc une situation assez cocasse alors qu'on se
pose la question si on devrait développer des liens commerciaux, qu'en
1969, c'était le premier ministre du temps qui avait demandé au
président du mouvement desjardins de les développer. mais ce que
j'aimerais tout simplement faire à ce sujet, je demanderai tout à
l'heure, avec votre permission, à m. raymond gagné, qui est le
président et chef des opérations de la société
d'investissement desjardins, de vous dire que ça s'est fait dans
desjardins sans risquer les dépôts des membres des caisses.
ça s'est fait en favorisant le développement économique du
québec et, ça s'est fait à un tel rythme que, maintenant,
on a plus de 1 600 000 000 $ d'actif et avec un rendement, quand on le regarde
sur une longue échelle, qui est tout de même très
acceptable. bien sûr, nous, on le regarde à longue échelle.
on est un peu comme les japonais, on ne vise pas des rendements
immédiats sur les placements qu'on peut faire dans le secteur commercial
et industriel. on le fait sur une longue portée de
temps et nous crayons que... comme nous le disons dans le texte, nous
sommes en complet accord avec la ministre lorsqu'elle dit qu'on devrait
maintenir, pour les assureurs d'abord, des liens commerciaux en amont, ce qui
veut dire qu'une entreprise commerciale et industrielle pourra acquérir
une institution financière ou une société d'assurance.
mais, je le dis en toute gentillesse, c'est que notre expérience nous
amène à dire que l'expérience du mouvement desjardins, qui
s'est développé au début par les fédérations
avec les gâteaux vachon et, à partir de 1974-1975, avec la
société d'investissement desjardins dont m. gagné est le
président, favorise le développement économique du
québec sans nuire aux déposants des caisses desjardins. on
aimerait prétendre, je crois, dire que la même chose pourrait
être le cas pour une compagnie d'assurance-vie ou pour les compagnies
d'assurance-vie, puisque les compagnies d'assurance-vie doivent investir
à long terme. bien sûr, on pourrait peut-être, dans ce cas,
favoriser qu'il y ait une filiale regroupant les investissements dans le
secteur commercial et industriel.
Un mot sur les transactions intéressées et les conflits
d'intérêts. Je crois que l'objectif qui est recherché par
le gouvernement du Québec, qui a toujours été
recherché, était de favoriser la création de grands
ensembles commerciaux et financiers québécois et que cet objectif
doit être nécessairement appuyé par le jeu d'une synergie
à l'intérieur de ces mêmes groupes Alors, si on favorise la
création d'un groupe comme le mouvement Desjardins, où se
retrouvent des institutions financières et une société
commerciale et industrielle, on doit accepter qu'il y ait une certaine synergie
qui joue, quoiqu'on ait toujours, chez Desjardins, favorisé une certaine
prudence - et peut-être que M Gagné pourrait nous éclairer
là-dessus - parce qu'on n'accepte pas d'être le banquier à
100 % des institutions commerciales comme chez Culinar; nous ne sommes pas le
banquier à 100 % de Culinar. Mais je crois qu'il y a un principe clair.
C'est que si on favorise de grands ensembles comme ça, c'est que les
transactions intéressées doivent être permises, à
l'exception de celles qui sont défendues, et là, il y a
certainement certaines transactions intéressées qui doivent
être défendues de par la loi, mais, par ailleurs, elles doivent
être permises et je crois que c'est cette disposition-là qui se
retrouve dans la loi sur les caisses. A posteriori, je m'aperçois que la
disposition qu'on a mise, en 1988, dans la loi sur les fiducies est à
l'inverse. Dans la loi sur les fiducies, on dit: Les transactions
intéressées sont défendues à moins qu'elles soient
permises. Mais maintenant, je me rallierais davantage avec un principe
où les transactions intéressées devraient être
permises, à l'exception de celles qui sont défendues, et je crois
qu'on devrait le dire. Mais je crois que dans le Rapport quin- quennal, c'est
un peu l'esprit qui s'y retrouve.
L'harmonisation avec les lois canadiennes, j'en ai dit quelques mots
tout à l'heure. Je constate, après x années, que l'Ontario
n'a pas encore abdiqué sa disposition dans sa loi sur les fiducies qui
fait que c'est sa législation qui s'applique, malgré les
revendications et les demandes qui ont été faites par le
gouvernement du Québec à plusieurs reprises C'est la raison pour
laquelle je me dis: Mon Dieu, cherchons à nous harmoniser, mais pas au
point de nous aseptiser.
Finalement, la propriété des institutions
québécoises. Nous, nous croyons qu'il reste très peu
d'institutions financières québécoises qui pourraient
être vendues, quand on fait la liste, à part les mutuelles. Bien
sûr, nous croyons que la disposition devrait empêcher - comme c'est
le cas dans le moment - le contrôle par des intérêts
étrangers des quelques institutions financières qui restent au
Québec (17 h 45)
Dans le projet du Rapport quinquennal, je crois que l'intention est de
mettre dans la loi 30 % et de permettre que ça aille à plus que
30 %, avec autorité de la ministre. Je crois que c'est une disposition
qui peut être dangereuse à l'occasion, parce qu'il faut bien
savoir.. Prenons l'exemple du Groupe Commerce qui est allé chercher des
millions et des millions de dollars en Hollande. Il n'est pas sûr que si
on avait eu à ce moment-là, d'une part... En ce qui concerne la
compagnie d'assurances, à l'exception de Bé-lair - il y avait
juste Bélair qui était à charte québécoise -
si le Groupe Commerce avait été à charte
québécoise, mais avec une disposition dans la loi qui permet de
contrôler les sociétés de portefeuille et non pas seulement
la compagnie d'assurances, à ce moment-là, ils auraient
été obligés de rechercher un acheteur
québécois. Si la loi dit qu'en faisant des pressions
auprès du gouvernement, on peut vendre des institutions
financières à des intérêts étrangers, quant
à moi, je trouve que ce serait préférable de monter les 30
% jusqu'à 49 %, mais de dire: Là, il y a une limite qui
s'arrête et c'est la limite du contrôle absolu. Le contrôle
absolu, c'est 51 %, mais, à la limite, on pourrait se rallier à
la norme de 30 % Tout ce qui nous inquiète un peu, c'est le fait que la
ministre - et je sais jusqu'à quel point elle peut subir des pressions,
pour avoir été là - je crois que ce serait plus facile
d'application si la loi disait clairement que les étrangers ne peuvent
pas acquérir les quelques institutions financières au
Québec qui nous restent. Il n'y en a pas beaucoup quand on fait la
liste, à l'exclusion des compagnies mutuelles.
En résumé, M. le Président, voilà quelques
dispositions. Avec votre permission, j'aimerais que M. Gagné nous dise
quelques mots sur la société qu'il dirige pour qu'on puisse
également comprendre l'ampleur de la Société
d'investissement Desjardins en deux mots.
Le Président (M. Chagnon): En deux minutes, puisque c'est
le temps qui nous reste. M. Gagné.
M. Gagné (Raymond): En deux mots, avec votre permission,
M. le Président et Mme la ministre, j'essaierai donc de vous dire ce
qu'est la Société d'investissement Desjardins qui a
été créée en 1974 et qui, déjà, avait
un investissement à son acquis, soit Culinar et anciennement les petits
gâteaux Vachon.
Comme vous le savez, la mission de la Société
d'investissement Desjardins est de faire de l'investissement minoritaire,
majoritaire, dans des entreprises industrielles et commerciales au
Québec, et ainsi, bien sûr, favoriser le développement
économique. Nous avons l'obligation d'investir dans des sièges
sociaux au Québec. Aujourd'hui, la Société
d'investissement Desjardins est une compagnie de gestion, une des quatre
sociétés de portefeuille du mouvement Desjardins, et la loi lui
réserve, bien sûr, cette activité d'investissement dans le
domaine commercial et industriel.
La Société d'investissement Desjardins est détenue
à 86 % par le mouvement Desjardins et 14 % par la Caisse de
dépôt et placement du Québec. On a un avoir des
actionnaires de 170 000 000 $. Nous avons présentement deux filiales en
outre de Culinar, soit Société d'investissement Tremplin 2000 qui
investit dans de plus petites entreprises et nous venons de mettre en place
Gestion d'investissement Desjardins qui prendra des participations plus
importantes dans des entreprises québécoises pour, bien
sûr, en assurer la pérennité québécoise.
très brièvement, nos réalisations. on a plus de 30
compagnies en portefeuille, généralement des participations
minoritaires. ces entreprises cumulent près de 2 000 000 000 $ de
chiffre d'affaires et emploient plus de 20 000 employés. cette
société dans desjardins nous a permis d'assurer la croissance de
certaines compagnies québécoises, d'en conserver le
contrôle aussi. m. fortier y faisait allusion tout à l'heure au
niveau de culinar. on peut aussi mentionner sico et, à la limite, on
pourrait aussi mentionner le groupe canam-manac. je pourrais mentionner aussi
beaucoup d'autres interventions que nous avons en portefeuille. nous vous
facilitons aussi à l'occasion la venue d'entreprises qui, autrement, ne
viendraient pas si facilement. on pense à glaverbec ici, dans le parc
saint-augustin où, pour une fois au québec, nous avons une
société qui fabrique du verre plutôt que de l'acheter en
ontario.
On pourrait dire que notre rendement sur l'avoir des actionnaires est
aussi avantageux que l'ensemble des compagnies de portefeuille opérant
dans notre milieu. On se mesure annuellement, et je peux vous dire que le
rendement affiché est dans la bonne moyenne et même
supérieur à nos concurrents. Notre modèle de vie, c'est,
bien sûr, comme le disait M. Fortier tout à l'heure, une approche
de partenariat et une approche à long terme. Nous ne faisons pas de
"deals" financiers pour en faire. Nous voulons assurer la continuité des
entreprises au Québec.
Le Président (M. Chagnon): Vous pouvez continuer, M.
Gagné. Je comprends que le temps qui nous permet de dépasser les
20 minutes prises normalement sera prise sur les enveloppes de chacune des
parties qui vous entendent.
M. Gagné: J'avais compris que M. Fortier m'autorisait
à continuer encore deux minutes, M. le Président, si vous me
permettez.
M. Fortier:...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gagné: C'est sur son temps.
Le Président (M. Chagnon): Sachez ici que M. Fortier peut
vous dire ce qu'il voudra, je serai à même de vous juger. Ha, ha,
ha!
M. Gagné: Mais ce que je voulais dire, M. le
Président, c'est que c'est sur son temps.
M. Fortier: Ha, ha, ha! C'est sur le temps des
parlementaires.
Le Président (M. Chagnon): Ça va être sur le
temps des parlementaires.
M. Fortier: Excusez-le... Il n'a jamais...
Le Président (M. Chagnon): Ça arrive, ça.
Et, pour une fois, vous pouvez escompter ce que M. Fortier peut vous dire.
M. Gagné: Oui, merci. Alors, je peux continuer, M. le
Président?
Le Président (M. Chagnon): C'est possible.
M. Gagné: Parfait. Donc, au niveau de nos investissements,
nous avons des entreprises comme Culinar et, M. Fortier le mentionnait tout
à l'heure, nous n'exigeons pas que Culinar ait son compte de banque au
niveau de Desjardins, à tel point que le banquier de Culinar est la
Banque Nationale du Canada. Bien sûr, la caisse centrale est aussi un des
banquiers, mais le banquier prédominant est la Banque Nationale.
Je pourrais aussi vous mentionner une foule d'autres exemples où
nous n'exigeons pas que Desjardins soit automatiquement
privilégié. Nous encourageons, bien sûr, le mariage, la
synergie dans la liberté et aussi l'éthique.
Donc, en conclusion, je dirais que notre expérience prouve,
à mon sens, que nous n'avons pas mis, à date, et nous ne pensons
pas non
plus, dans le futur, mettre en danger l'épargne des
Québécois, compte tenu de l'équipe que nous avons et des
résultats affichés. Nous avons contribué, bien sûr,
de façon majeure, au développement économique des
entreprises au Québec, et il me reste à souhaiter que nous ayons
encore de l'argent et beaucoup d'argent pour continuer à exécuter
ou à faire ce rôle. Merci.
Le Président (M. Chagnon): merci beaucoup, m.
gagné. j'inviterais maintenant mme la ministre à commenter le
mémoire que vous nous avez soumis. ce sera suivi des propos et
commentaires des membres de l'opposition.
Mme Robic: Merci, M. le Président. Vous dites que vous
êtes défavorable à notre position sur les liens commerciaux
en aval, surtout parce que votre statut corporatif vous empêche d'avoir
des liens commerciaux en amont. Je voudrais vous demander, comme groupe, si
vous êtes désappointé, parce que ce serait votre intention
de compétionner justement votre confrère qui est là et la
SID.
M. Fortier: Au moment où on se parle, le mouvement
Desjardins, sa structure, a l'intention de continuer à oeuvrer par le
biais de la Société d'investissement Desjardins. Je pense bien,
au moment où on se parle, qu'Assurance-vie Desjardins n'a pas
l'intention de créer une autre société d'investissement.
Mais il reste qu'on parle de questions de principe, parce que, s'il fallait
conclure qu'une compagnie d'assurance-vie ne peut établir de lien
commercial, je suis sûr que tout à l'heure et avec raison,
quelqu'un qui raisonne, quelqu'un qui veut aller jusqu'au bout de son
raisonnement, pourrait dire: Mais, mon Dieu, si on ne le permet pas pour une
compagnie d'assurance-vie, pourquoi le permettrait-on au mouvement Desjardins?
alors, à l'inverse, nous disons: si on le permet au mouvement
desjardins, pourquoi ne le permettrait-on pas... si on le permet à la
confédération, pourquoi cela serait-il défendu à
une compagnie d'assurance-vie? mais, dans les faits, à part,
peut-être, des participations... c'est pour ça que, pour nous, ce
n'est pas une question éminente, c'est plutôt une question de
principe. mais on ne voudrait pas, étant donné qu'on discute d'un
principe très important, que la nouvelle législation apporte des
entraves qui pourraient nous empêcher de faire des choses qui nous sont
permises dans le moment. il n'y a pas de "deal" sur la table, il n'y a pas
d'investissement qu'on va faire demain matin, là. nous, on parle des
questions de principe, parce que, comme ça a été
évoqué par d'autres, je crois, c'est que la loi sur les
assurances, au moment où on se parle, permet les liens commerciaux. ce
n'est pas écrit comme ça, mais ça permet jusqu'à 50
% de l'actif dans toutes sortes de filiales, et les filiales ne sont pas
définies. donc, au moment où on se parle, il y a une
liberté a peu près totale, si je comprends bien le texte de loi
Donc, il s'agit d'un moment historique Alors, on pose la question. Il y a eu un
certain débat, à un moment donné, mais c'est la raison de
notre intervention, ici Ce n'est pas parce que le mouvement Desjardins veut,
à ce moment-ci, changer sa structure. C'est tout simplement pour pouvoir
compter sur tous les moyens dont il dispose pour remplir sa mission qui est,
d'une part, d'avantager ses 4 300 000 membres, des Québécois, et,
par ailleurs, d'assurer une saine administration financière, d'assurer
le respect de l'argent des déposants, mais, en même temps,
d'assurer le développement économique du Québec. Pour
nous, ça fait partie d'un de nos objectifs et c'est en ce sens-là
qu'on fait notre intervention, Mme la ministre.
Le Président (M. Chagnon): Mme la ministre.
Mme Robic: Mais quelles sont les restrictions que vous voyez
à ne pas permettre des liens commerciaux en aval, mais en les permettant
en amont? Je comprends que les mutuelles ont un problème, mais il y a
même une solution au problème, puisqu'on l'a vu dans une de nos
mutuelles. Encore une fois, il peut y avoir d'autres modèles qui se
développent. Mais où est le problème que d'exiger qu'il y
ait des liens en amont plutôt qu'en aval?
M. Fortier: écoutez, pour le mouvement desjardins,
ça dépend de ce qu'on appelle "en amont". des liens en amont, ce
n'est pas possible, ce sont les membres en amont. alors, nous sommes comme une
mutuelle. nous sommes une coopérative. alors, pour nous, les seuls liens
commerciaux que nous pouvons avoir, c'est en aval; on ne peut pas en avoir en
amont. à ce moment-là, on se retrouve dans le même bateau
que la mutuelle elle-même. c'est pour ça que si on parle de
principe, pour nous, une coopérative est une mutuelle; ça
appartient à ses membres. donc, ça appartient à un grande
nombre de personnes. alors, dans le cas du mouvement desjardins, c'est vrai que
ça se fait par la confédération, mais la
confédération, selon la loi, est une fédération de
fédérations et la fédération de
fédérations de caisses, et, finalement, on retombe aux membres.
à la base, ce sont les membres, par le biais de différentes
instances intermédiaires donc, ça dépend où on met
l'amont et l'aval.
Mme Robic: Oui.
M. Fortier: Pour nous, l'amont, ce sont les membres. Ce sont les
membres qui possèdent le mouvement Desjardins. Donc, ce sont les
membres, tout comme dans une mutuelle, qui contrôlent la mutuelle.
Mme Robic: Alors, il y a eu une solution pour vous, il y a eu une
solution pour La Laurentienne. il y a certainement des solutions pour d'autres.
La solution est là pour d'autres. Donc, quel est le problème
à restreindre les liens commerciaux en aval, si on les permet en
amont?
M. Fortier: Vous permettrez à M. Morency de dire un
mot.
M. Morency (Yves): je pense ici que ce qui nous préoccupe
jusqu'à un certain point, c'est que justement dans la loi sur les
caisses, on reconnaît que la seule possibilité pour desjardins
d'avoir des liens commerciaux, ce sont des liens en aval. dans le fond, comme
on le disait, le mouvement desjardins, dans son ensemble, c'est 4 300 000
membres, de sorte que la propriété est largement répartie.
aucun groupe commercial ne peut détenir 4 300 000 membres, de sorte que,
dans notre situation, nous reconnaissons que la seule façon d'avoir des
liens, ce sont des liens en aval. ce qui nous préoccupe
également, c'est le fait qu'en termes d'harmonisation, le rapport
quinquennal parle beaucoup d'harmonisation. quand on parle d'harmonisation, il
y aurait peut-être lieu aussi de regarder l'harmonisation non seulement
entre les provinces, mais à l'intérieur des lois
financières québécoises. dans un premier regard sur la
législation des institutions financières
québécoises, on a permis, entre autres, et on reconnaît au
mouvement desjardins d'avoir des liens commerciaux en aval par la
création de sociétés de portefeuille. ce qui nous
préoccupe justement, c'est que, dans un deuxième tour de roue, il
y ait certaines formes d'harmonisation qui pourraient faire en sorte qu'on se
retrouve dans trois, quatre ou cinq ans avec des restrictions qui feraient en
sorte que ça pourrait mettre un terme à ou mettre au neutre
certaines de nos réalisations et notre développement. alors,
c'est en ce sens-là, pour nous, qu'il y a une certaine forme de
préoccupation à l'égard des restrictions qu'on veut
accorder aux liens commerciaux en aval.
Le Président (M. Chagnon): Mme la ministre.
Mme Robic: Je vois mal votre problème parce que ce que le
projet prescrit, c'est des liens commerciaux en aval de votre compagnie
d'assurances. Pour nous, vous avez des liens en amont, votre compagnie
d'assurances, en ce moment. (18 heures)
M. Morency: Quand on parle d'harmonisation, ce qui nous
préoccupe, c'est qu'on harmonise l'ensemble des législations
provinciales, de sorte qu'on bannisse, dans toutes les législations
quelles qu'elles soient, les liens commerciaux en aval. Et là, on
viendrait quand même pénaliser le mouvement Desjardins.
Le Président (M. Chagnon): Merci. Est-ce qu'il y a
d'autres commentaires?
Mme Robic: Oui. Vous dites, dans les transactions
intéressées et les conflits d'intérêts, à la
page 4, que vous êtes favorables à l'approche proposée.
Toutefois, les institutions à capital fermé devraient être
soumises à des mesures plus restrictives. Moi, j'aimerais savoir
pourquoi ces compagnies-là devraient avoir un régime plus
restrictif.
M. Fortier: "toutefois, l'évolution des moeurs
économiques rend souhaitable l'institution, à l'intérieur
(...) d'un comité chargé d'appliquer un code de
déontologie..."?
Mme Robic: Non.
M. Fortier: Vous n'avez pas...
Mme Robic: Juste avant ça, vous dites: Les institutions
à capital fermé devraient être soumises à des
mesures plus restrictives.
M. Fortier: ce que nous croyons, bien sûr, c'est que, dans
une institution comme le mouvement desjardins, le pouvoir est largement diffus.
vous savez, je pense que claude béland l'a dit à plusieurs
reprises, certaines personnes peuvent croire qu'il a une autorité
très grande, et il est vrai qu'il a une autorité très
grande dans le mouvement, mais lorsque vient le temps de faire des
transactions, il se fait poser des questions par plusieurs personnes. vous
savez, au conseil d'administration de la confédération, il y a 33
personnes, il y a plusieurs instances. dans une coopérative ou dans une
mutuelle qui est très active, le pouvoir est extrêmement diffus.
dans ce sens-là, je pense qu'on peut dire que les compagnies
fermées dont le pouvoir personnel est très grand sont plus
à même de vivre des embûches et de vivre des questions de
conflit d'intérêts qui sont moins contrôlées par un
très grand nombre de personnes.
Mme Robic: Mais dans les opérations de tous les jours aux
4000 membres, il ne s'implique pas.
M. Fortier: Vous seriez surpris. Chaque fois qu'on fait une
déclaration, je vous garantis qu'il y a beaucoup de gens qui appellent
au siège social.
Mme Robic: j'aimerais que vous nous parliez un peu de votre
comité de déontologie, justement, comment vous le voyez. vous
dites que les critères d'indépendance des administrateurs
devraient être adaptés au mode de fonctionnement de votre
mouvement. j'aimerais ça que vous élaboriez un peu
là-dessus.
M. Portier: Mme la ministre, normalement, il y a une disposition
qu'on retrouve dans les lois comme celles qui ont été mises dans
la loi sur les fiducies et que, j'imagine, on retrouverait dans la Loi sur les
assurances, qui disent que, lorsque le conseil d'administration est
formé, le comité de déontologie, un peu comme le
comité de vérification, doit être formé de membres
du conseil qui ne sont pas associés à la compagnie. Autrement
dit, pour prendre l'exemple de Power Corporation, j'imagine que certains de ses
employés ou dirigeants siègent au conseil d'administration, mais
il y a des membres du conseil qui sont de l'extérieur de Power. Donc,
à ce moment-là, si on prenait Power Financial comme un exemple,
on dirait: Écoutez, il faudrait que le comité de
déontologie soit formé de gens qui sont de l'extérieur de
Power, tout comme le comité de vérification.
Chez nous, chez Desjardins, ce qui arrive, c'est que les gens qui se
retrouvent au conseil d'administration sont soit ce qu'on appelle des
dirigeants Desjardins, c'est-à-dire des gens qui ont des fonctions de
dirigeants, soit des directeurs de caisse ou dirigeants d'une
fédération, qui ont des postes comme ceux-là ou soit des
gens qui sont élus, autrement dit qui accèdent à des
postes supérieurs par le fait d'une élection annuelle. Il faut
venir à la réunion annuelle pour savoir qu'il y a des proposeurs,
des secondeurs et qu'il y a une dynamique qui joue. S'il fallait mettre dans la
loi que le comité de déontologie doit être composé
de gens qui n'ont aucune affinité avec Desjardins, on ne pourra pas les
constituer, tout simplement parce que ça n'existe pas. Les gens qui se
retrouvent au conseil d'administration sont soit des dirigeants dans le sens
que ce sont des directeurs de caisse ou des directeurs de
fédération ou des gens qui ont des postes salariés, ou
soit des gens qui sont élus, c'est-à-dire des gens qui oeuvrent
dans le mouvement coopératif, ça peut être des notaires,
des avocats qui sont actifs dans la caisse ou actifs dans la
fédération et qui se retrouvent, à un certain moment
donné, sur le conseil d'administration d'Assurance-vie Desjardins ou de
l'assurance générale des caisses Desjardins. À ce
moment-là, si la disposition juridique est telle qu'on parle de
personnes qui n'ont aucune affinité avec le mouvement, on ne sera pas
capable de les consulter.
Alors, tout simplement, ce qu'on dit, c'est qu'on devrait
reconnaître, à ce moment-là, le caractère
coopératif de Desjardins, puisque les gens qui se retrouvent sur le
conseil d'administration, à part quelques exceptions... Je crois que
chez Trustco Desjardins, il y a deux personnes, oui, qui sont vraiment de
l'extérieur de Desjardins. Quand je dis de l'extérieur... M.
Hervé Pomerleau de la Beauce, quoique lui-même, ses parents ont
été très actifs dans les caisses, et l'autre, c'est Ronald
Corey, du club de hockey Canadien. Mais, d'une façon
générale, tous tes membres des conseils sont des gens qui sont
actifs dans le mouvement à quelque titre que ce soit. Alors, c'est la
difficulté qu'on voulait simplement souligner.
Le Président (M. Chagnon): Je vous remer cie. Je
demanderais maintenant aux membres de l'Opposition de continuer.
M. Léonard: M. le Président, je voudrais saluer les
gens du mouvement Desjardins qui sont venus ici. J'ai écouté
attentivement le représentant, et je dois dire que je me pose encore la
question de savoir quel est le problème, finalement? Parce que quand je
regarde tout cela et que j'écoutais, par exemple, M. Gagné qui
parlait de la Société d'investissement Desjardins, qui nous
démontrait le développement qu'ils ont connu depuis 15 ans, 20
ans - disons 15 ans, 1974 - et les succès qu'ils ont obtenus en termes
de rendement et les plaintes qui se seraient accumulées au cours des
années, je ne vois pas de problème.
Et puis, la ministre veut légiférer, veut limiter et/ou
même pratiquement empêcher les liens commerciaux en aval. Alors, ce
que vous nous dites, c'est que, finalement, si c'était passé dans
la loi, vous n'auriez pas pu faire ce que vous avez fait avec la
Société d'investissement Desjardins. Est-ce que ma conclusion est
correcte? Je ne vous pose pas la question, mais je pense que...
M. Fortier: Je ne veux pas conclure pour vous, M. le
député de Labelle. Je vais laisser les gens en politique faire de
la politique. Tout simplement, on a voulu faire état de notre...
M. Léonard: Vous dites en particulier qu'étant une
coopérative, finalement, les liens commerciaux que vous pouvez avoir ne
peuvent être qu'en aval. Donc, à ce moment-là, si vous
limitez les transactions en aval, c'est terminé.
M. Fortier: On a voulu faire état de notre
expérience, M. le député, parce que, bien sûr. .
J'ai été dans la position de Mme la ministre et je comprends
sa... Je pense qu'il y a une hantise, quand on est ministre des institutions
financières. La dernière chose qu'on veut, c'est qu'il y ait une
institution financière qui saute. Ça. moi, en tout cas...
Sûrement, qu'on ne désire pas qu'il y ait des problèmes et,
au Québec... Là-dessus, moi, j'ai souvent dit à plusieurs
gens des autres provinces canadiennes que le Québec n'avait rien
à se reprocher parce qu'on est peut-être... Depuis 25 ans, il n'y
a eu aucune faillite d'institution financière au Québec. Alors,
il ne faudrait pas que les autres provinces canadiennes charrient quand elles
nous disent: Ne faites pas ci, ne faites pas ça parce que si vous faites
ça. vos institutions financières vont être en
difficulté.
Ecoutez, en Ontario, ils ont eu des faillites, ils en ont eu en Alberta,
ils en ont eu en Colombie-Britannique. Nous, ça fait 25 ans que nous
n'en avons pas eu. On a eu un problème qui s'est réglé
dans les caisses d'entraide économique, mais il n'y a pas eu de
faillites au Québec depuis 25 ans. alors, tout simplement... c'est parce
qu'il y a une grosse... quand on parle de liens commerciaux, les gens se posent
des questions, pour savoir si c'est vraiment dangereux. tout simplement, nous,
on a voulu faire état de l'expérience de desjardins.
peut-être qu'on a été prudent; on a agi en bon père
de famille. bon. d'ailleurs, dans la loi sur les assurances, on dit que les
placements doivent être faits en bon père de famille. on a voulu
simplement faire état de notre expérience, et pour dire qu'il
faudrait y penser à deux fois avant de se priver d'un moyen de profiter
de l'économie des québécois. vous savez, quand je dis
qu'assurance-vie desjardins a 1 500 000 000 $ d'actif à l'exclusion des
fonds distincts... les fonds distincts sont des fonds surtout du fonds de
pension du mouvement desjardins. on en a une partie pour 900 000 000 $. alors,
ça fait 2 500 000 000 $ d'actif. si on met des entraves trop
poussées, les québécois se privent d'un moyen de
développement. on ne prétend pas avoir la réponse
universelle à tous les problèmes. tout simplement, ce qu'on dit,
c'est qu'on comprend ceux des autres provinces surtout, qui appréhendent
une législation qui serait trop permissive. c'est pour ça que
j'évoquais au début de mon allocution que lorsque la caisse de
dépôt a été créée, ça a
été le même tollé. on a dit: mon dieu, ça va
créer toutes sortes de problèmes. et lorsque la caisse de
dépôt a commencé à prendre des participations et
quand on a fait le bilan, quand jean campeau est parti, on a dit: mon dieu,
n'est-ce pas extraordinaire! avec tous les placements dangereux qui ont
été décrits par le globe & mail, on a eu une
performance extraordinaire à la caisse de dépôt, alors que
tout le monde nous disait que le québec était pour...
M. Léonard: Sr casser la gueule.
M. Fortier: ...faire face à une situation
extrêmement difficile. Alors, tout simplement, nous, on ne prétend
pas avoir la réponse universelle, mais on voulait quand même
souligner que l'expérience de la SID, et d'ailleurs que les
premières interventions du mouvement Desjardins, comme je l'ai dit,
c'était à la demande du premier ministre Bertrand, en 1969. Mais
après coup, comme Québécois, on peut regarder notre
expérience. L'expérience est là et on se dit: Mon Dieu,
ça n'a pas été si pénible; peut-être qu'on a
été chanceux, mais ça n'a pas été
pénible.
M. Léonard: Alors, M. le Président, je pense qu'il
faut apprécier, avec la taille du mouvement
Desjardins, la modestie qu il manifeste. Je pense que je voudrais poser
une autre question...
Mme Robic: Me permettez-vous, sur ça?
Le Président (M. Lemieux): II reste du temps à M.
Léonard, Mme la ministre, et c'est sur son droit de parole. À
moins que M. Léonard, de consentement...
Mme Robic: Ah bon! Je reviendrai.
M. Léonard: Si vous voulez, allez-y. Allez-y, je n'ai pas
de problème de consentement sur son temps.
Le Président (M. Lemieux): alors, de consentement, m. le
député... pardon, m. le député de labelle et non
pas m. léonard, je m'excuse. mme la ministre.
Mme Robic: Juste un mot, sur une question très
précise qui vous a été posée. Est-ce qu'avec le
projet ici vous auriez pu faire les placements que vous avez faits? Et c'est
là où je dis que, oui, parce qu'on parle bien d'association, de
liens commerciaux en amont d'une compagnie d'assurances, et votre lien
commercial est en amont d'une compagnie d'assurances. Dites-moi si je me
trompe, mais le capital de la SID n'est pas réglementé, et vous
pouvez investir dans toutes sortes d'entreprises commerciales et industrielles,
et vous êtes en amont de votre compagnie d'assurances.
Le Président (M. Lemieux): M. Fortier. M. Fortier:
Pas de commentaire.
Le Président (M. Lemieux): Pas de commentaire?
M. Fortier: La discussion, c'est: Qu'est-ce qui est l'amont,
qu'est-ce qui est l'aval? Nous, la façon dont on le vit chez Desjardins,
nous croyons que les... Quand vous regardez l'organigramme, je pourrais
distribuer l'organigramme du mouvement Desjardins, c'est bien évident
que, nous, dans une coopérative, les membres sont la base, et nous
croyons, en définitive, que le lien commercial que nous avons est en
aval, mais là, c'est une question...
M. Léonard: On verra . au projet de loi. En fait, on verra
au projet de loi aussi. D'autre rjart, j'aimerais poser une question à
M. Gagné. Évidemment, on parle de restreindre des participations
et d'être très très prudents. Vous avez jugé,
à certains moments, qu'il fallait prendre des participations
majoritaires dans certaines entreprises; ça a été un
succès. Pourquoi jugiez-vous, à l'époque, qu'il fallait
prendre des participations majoritaires et quel est l'impact sur le
développement ultérieur?
M. Fortier: Je demanderais à M. Gagné de
répondre, s'il vous plaît, M. le Président.
M. Gagné: Oui, M. le Président. Il faut dire que
nous ne nous sommes pas donné comme ligne de conduite de faire des
investissements majoritaires. Nous avons accidentellement, et c'est
arrivé à quelques reprises comme dans toute exception, pris des
participations majoritaires, j'entends Culinar, j'entends Sico, j'entends
Crédit industriel Desjardins, bon, des participations comme ça.
Mais, en général, nous sommes des investisseurs minoritaires dans
des entreprises québécoises. Ce qu'on pourrait dire, c'est que
nous avons comme modèle de vie de favoriser le développement
économique, et nous le favorisons aussi bien en étant
minoritaires que majoritaires, suivant les circonstances.
M. Léonard: O. K Donc, flexibilité.
M. Gagné: Quand nous sommes minoritaires, nous nous
associons avec un entrepreneur ou une équipe des actionnaires
majoritaires et nous essayons d'apporter notre épaule à la roue
pour développer cette entreprise. Lorsque nous sommes majoritaires, le
plus souvent, il se présente des situations où nous faisons
affaire avec du management professionnel Là encore, nous épaulons
ce management professionnel au développement de l'entreprise et,
partant, du développement économique québécois.
Alors, je ne sais pas si je réponds à votre question, M. le
député.
M. Léonard: Oui. Je pense que la constatation qu'on peut
faire, c'est que, dans la vie des affaires, il y a des moments parfois
où on est amené à être majoritaire, quitte à
s'en défaire, si on le veut, par la suite, mais ce n'est pas
indifférent. Si on ne peut pas le faire, on peut échapper des
choses importantes. C'est ça, simplement, que révèle votre
expérience là-dessus.
Sur un autre point, un des premiers que vous avez touchés, et je
pense que vous avez eu la même attitude ultérieurement... Si je
comprends, vous avez lu le Rapport quinquennal. La ministre a annoncé
qu'il y aurait éventuellement un avant-projet de loi. (18 h 15)
Vous voulez absolument être consultés avant que le
gouvernement aille de l'avant. J'en prends à témoin les trois
dernières lignes de la page 2: "Nous souhaiterions vivement que le
gouvernement soumette ses intentions à une consultation publique
après avoir fait connaître les amendements qu'il entend apporter
à la législation actuelle. " Je suppose que ceci est pratiquement
un avertissement qu'il ne faudrait pas que ça soit passé à
la sauvette en fin de session ou, comme le fait un peu le ministre des
Finances, en été, derrière la crise des Warriors, pour
déposer, pratiquement un budget supplémentaire. Je suppose que
c'est ça que vous voulez dire, que vous voulez être entendus en
commission ou, en tout cas, avoir l'occasion de faire valoir votre point de vue
lorsque le projet de loi sera déposé.
M. Fortier: Le problème est un problème technique.
C'est qu'on parle de normes de capitalisation. Je sais que c'est un
problème difficile et le Rapport quinquennal n'en fait pas état
d'une façon détaillée. Par ailleurs, on parle de
réduire les normes de placement de 50 % à 25 % de l'actif. Mais
comme on n'a pas en détail les normes de placement, on a de la
misère parce qu'il pourrait bien arriver qu'on pourrait dire que tel ou
tel placement doit être déduit de la capitalisation. Autrement
dit, on pourrait arriver avec des normes de placement qui auraient un impact
sur le capital. Alors, tant qu'on n'a pas l'information, il nous est difficile,
et là, on touche à des... D'ailleurs, nous, je dois vous dire
qu'à l'Assurance-vie Desjardins, on est extrêmement bien
capitalisés. Je me sens très à l'aise, M. Gravel, avec 170
000 000 $ de capital alors que la norme de la SIAP, Société
d'indemnisation en assurances de personnes, est d'environ 100 000 000 $. Nous
sommes surcapitalisés par rapport aux normes que l'industrie s'est
données. Alors, pour nous, ce n'est pas un problème
immédiat, mais, tout simplement, quand on touche aux normes de
capitalisation, aux normes de placement, pour une compagnie d'assurance-vie on
touche à deux pôles qui sont très importants. Tout
simplement, ce que nous disons, c'est que nous croyons qu'à un moment
donné, en tout cas, on aimerait avoir l'occasion de faire des
commentaires sur l'un et l'autre parce que l'un peut avoir un contact sur
l'autre et vice versa. Veux-tu dire un mot?
M. Gravel (Claude): Oui
M. Fortier: M. le Président, pouvez-vous donner la parole
à M. Gravel, s'il vous plaît?
Le Président (M. Lemieux): Oui
M. Gravel: Je pense que dit de façon très simple,
et je pense que le discours a été tenu par ceux qui nous ont
précédés, le surplus étant la différence
entre les actifs et les passifs. Quand on demande à l'industrie son avis
sur les surplus, il serait sage qu'on sache bien ce qu'on entend par les actifs
et les passifs. Alors A moins B égalant C, si on veut avoir notre avis
sur C, qu'on nous dise avant ce qu'est A et B ou, mieux encore, lorsqu'on
révisera les normes d'évaluation de A et de B, qu'on soit
invités. C'est tout simplement ce qu'on disait. Autrement, je pense
qu'on porte un avis non réfléchi. Je dirais en termes plus
québécois: C'est un genre
de piège à ours, où notre avis ne serait
sûrement pas éclairé.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M.
Léonard. Mme la ministre, s'il vous plaît. Il vous reste six
minutes, Mme la ministre.
Mme Robic: Merci. Vous faites état de certaines
réserves sur la politique proposée, entre autres, que l'ouverture
proposée devrait être limitée. Quand on parle de
propriété des institutions financières,
propriété étrangère des institutions
financières, vous nous dites que l'ouverture proposée devrait
être limitée à 49 % du capital-actions afin de conserver au
Québec le contrôle des institutions. Alors, vous comprendrez que
je souscris à l'objectif de conserver au Québec le contrôle
des institutions financières, mais n'est-il pas vrai également de
dire qu'à un moment donné, il se pourrait que la ministre ait
malheureusement laissé partir une institution financière? Et
est-ce qu'on devrait se contraindre à une obligation de ne jamais
laisser partir une Institution financière?
M. Fortier: mme la ministre, je crois qu'on s'entend sur le
principe. nous sommes tout à fait d'accord avec vous sur le principe
qu'il faut maintenir les quelques... si vous faites la liste des quelques
institutions financières à capital-actions qui restent au
québec, il n'y en a pas beaucoup. je crois que si, à un moment
donné, une mutuelle est en difficulté et qu'elle trouve acheteur,
il faudrait passer par un bill privé. alors le gouvernement a le
contrôle là-dessus. mais si on parle de quelques institutions
financières à capital-actions, la liste n'est pas très
longue. je ne veux pas donner de noms ici. mais il est certain que s'il y a une
disposition dans la loi qui dit qu'avec la permission de la ministre ou du
ministre, quelle que soit la personne... quand on légifère, c'est
pour l'avenir. c'est que ça va permettre à des gens de faire de
la surenchère. et je donnais l'exemple du groupe commerce. il est bien
certain que certaines personnes autour du groupe commerce ont cherché
à trouver des acheteurs. mais lorsqu'ils se sont vu offrir plus de 300
000 000 $, je vous garantis que les pressions sur la famille étaient
fortes d'accepter ça. et s'il y avait eu à ce moment-là
une disposition comme celle-ci, les pressions auraient été
très fortes pour accepter une telle disposition. tout simplement ce que
nous disons, c'est qu'il y aura toujours la possibilité, à mon
avis, de trouver un acheteur québécois, excepté que
peut-être le prix ne sera pas aussi considérable que s'il y a une
disposition qui permet à la ministre d'approuver une transaction.
autrement dit, si une compagnie est à vendre et qu'il y a une
institution québécoise qui offre 70 000 000 $, mais qu'en
permettant à des acheteurs étrangers qui offrent le double,
là, on va trouver toutes sortes de bonnes raisons pour dire au
gouvernement: Bon, vous devriez permettre la transaction. Dans tous les cas,
mot, je trouve, quand je regarde la liste des quelques institutions
financières qui restent, qu'on ferait mieux de rendre ça
plutôt difficile, pour ne pas dire impossible, pour qu'elles passent sous
contrôle étranger. C'est pour ça qu'on est tout à
fait d'accord avec... La règle 10 % et 25 %, dans le fond, c'est une
vieille disposition qu'on pourrait changer. Et je suis tout à fait
d'accord avec la ministre pour dire qu'on devrait l'augmenter, 30 %, 35 %. Tout
simplement, ce qu'on dit, c'est qu'à la limite, on peut se rendre
à 49 %. Alors, est-ce que c'est 30 % ou 49 %. On n'a aucun
problème avec ça. Tout simplement, nous, on croit que... Que ce
soit chez Desjardins ou ailleurs, je crois qu'il va y avoir des institutions
financières québécoises qui vont être
intéressées à acheter les quelques plus petites
institutions financières à capital-actions qui restent au
Québec. Je ne vois pas pourquoi on devrait, à ce moment-ci,
mettre une disposition dans la loi qui ouvrirait la possibilité qu'elles
soient achetées par des étrangers. J'ai de la misère
à le croire. Oui, j'ai de la misère à trouver où
est l'intérêt public.
Mme Robic: Oui. Cependant, notre ouverture... Je vous comprends.
Et certainement qu'il faut tout faire en notre possible pour garder nos
institutions québécoises. D'ailleurs, entre 30 % et 49 %, bien
sûr qu'on s'assure et on vient d'approuver deux transferts, Unindal, et
l'autre, c'est La Laurentienne où chacun a 50 % des actions votantes,
mais le contrôle demeure québécois à travers le
conseil d'administration. Et bien sûr qu'après 50 %, là, il
faut réellement examiner le bien-fondé de laisser partir une de
nos institutions, mais on peut garder le contrôle jusqu'à 50 %ou49
%.
M. Fortier: Je ne veux pas entrer dans des cas particuliers, mais
on nous a expliqué que, semble-t-il, la disposition de la loi est telle
qu'on pouvait l'interpréter de cette façon-là. Moi, je
crois que la disposition devrait être très claire, non pas
à 50 %, à 51 % québécois pour celles qui restent.
Parce que là, 50-50, avec un conseil d'administration qui
supposément est sous le contrôle des Québécois, vous
savez... Dans les compagnies à capital-actions, ce qu'on comprend, nous
autres, c'est que 51 %, c'est celui qui gouverne. C'est drôle comme c'est
une loi qui... Quand on a le contrôle d'un conseil, on l'a sur le vote et
on l'a sur le conseil d'administration. Ça, c'est une règle
universelle. Par ailleurs, je crois que dans le Rapport quinquennal, il y a une
disposition où c'était l'intention du gouvernement d'avoir une
disposition qui permettrait à des étrangers de venir incorporer
une compagnie et de la partir à zéro. Alors là, c'est leur
capital, c'est leur argent. Je crois qu'on devrait le permettre. S'il y a une
disposition qui avait été
mise dans la loi sur les fiducies qui fait que si... D'ailleurs, je
crois que Standard Life a incorporé une société de fiducie
à charte du Québec en partant de zéro avec leur propre
capital. Alors là, il n'y a aucune limite de ce
côté-là. Mais, nous, on parie de laisser partir sous
contrôle étranger les quelques institutions financières. Il
y en a même dans la ville de Québec. Il y a un groupe ici. Il y en
a quelques-unes. Moi, je crois qu'on devrait rendre ça impossible pour
les compagnies étrangères. En tout cas, il y aura toujours
quelques institutions financières québécoises
intéressées à en faire l'acquisition. Si ce n'est pas
nous, ce sera d'autres. Et à ce moment-là, ça rend la
transaction plus facHe pour nous, il ne faut pas se le cacher. Vous savez,
c'est ce que les Japonais font. On appelle ça du nationalisme
économique.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Je comprends, et ce n'est pas le seul pays qui
le fait d'ailleurs.
M. Fortier: Non.
M. Léonard: Je pense qu'il y a un grand nombre de pays qui
ont une telle législation. Si je comprends, ce serait de limiter la
participation étrangère à 30 % ou quelque part par
là, et au-delà de ça, être très prudent et
surtout de limiter en bas de 50 %, 49,9 %.
M. Fortier: Autrement dit, ça peut être 30 % ou 40
%, mais s'assurer que le contrôle absolu demeure
québécois.
M. Léonard: Je comprends que ce serait un cas où la
ministre pourrait s'"autoréglementer" dans son projet de loi. Si elle
l'impose à l'industrie, peut-être pourrait-elle s'en mettre
quelques-unes, des balises comme celle-là. Alors, est-ce que, par
ailleurs, c'est une norme que vous verriez élargir à d'autres
sociétés que les compagnie d'assurances?
M. Fortier: Ah oui! Je crois que, avec le recul... Je dois vous
avouer que, lorsqu'on a adopté la loi sur les sociétés de
fiducie - c'était en quelle année? en 1988 - on s'était
posé la question, mais c'était dans le débat sur le
libre-échange et on se demandait de quelle façon c'était
pour atterrir. Maintenant, on sait qu'une fois que l'accord de
libre-échange a été passé, l'Accord de
libre-échange s'applique aux compagnies d'assurances, aux institutions
financières, que ce soit compagnies d'assurances ou compagnies de
fiducie à charte fédérale, mais ça ne s'applique
pas aux compagnies d'assurances ou aux institutions financières à
charte provinciale. Donc, môme la règle du 10 % - 25 % qui est
dans la loi dans le moment, loi des fiducies, loi des assurances, ça
prévaut, même en dépit de l'accord de
libre-échange.
Les compagnies d'assurances à charte fédérale,
elles, ont une clause 10 % - 25 %, mais elles ne peuvent pas l'appliquer dans
te cas des Américains, mais dans le cas des quelques... Encore
là, je vous dis: Faites la liste des institutions financières
qu'on a au Québec, on n'en a pas beaucoup. Alors, la clause 10 % - 25 %
continue à s'appliquer pour les compagnies de fiducie, et je crois que
c'est la même disposition pour les compagnies d'assurances. C'est pour
ça que je crois que la ministre a raison de dire: 10 % - 25 %. Pourquoi
pas 30 %? Pourquoi pas 35 %? Bon, je pense bien qu'on doit favoriser, et la
ministre l'a dit clairement et on est tout à fait d'accord avec elle,
qu'il y a des cas... D'ailleurs, c'est le cas à l'assurance
générale Desjardins, nous avons le Crédit mutuel de France
qui possède dans le moment 10 % de l'assurance générale
des caisses, la filiale de la société de portefeuille de
l'assurance générale. Le Crédit mutuel de France a pris
une participation de 10 %. C'est intéressant sur le plan financier, mais
c'est intéressant aussi sur le plan de l'alliance, parce que le
Crédit mutuel de France, en France, vend en direct de l'assurance
générale. Alors, on est allés chercher aussi un peu de
leur expertise.
Alors, mon Dieu, c'est sûr que dans l'avenir, nous aussi, on
serait intéressés peut-être d'augmenter leur actionnariat,
20 %, 30 %, mais très certainement qu'on voudrait rester majoritaires.
Peut-être que M. Gravel, dans l'avenir, serait intéressé,
lui aussi, à faire des alliances avec des Européens. C'est
certainement des alliances utiles au plan des échanges et utiles sur le
plan financier. Alors, je crois que la ministre a tout à fait raison de
vouloir augmenter le pourcentage. Mais, tout simplement, ce que nous disons: II
faudrait, à un moment donné, tracer la ligne clairement dans la
loi et dire: On s'arrête là. Que ce soit 30 %, 35 % ou 40 %. Le
pourcentage n'a pas tellement d'importance, mais, à mon avis, il
faudrait que la ligne de démarcation soit très claire et ne pas
être sujette à interprétation.
Le Président (M. Lemieux): Merci M. le
député de Labelle, en conclusion.
M. Léonard: En conclusion. M. le Président,
d'abord, je voudrais remercier le mouvement Desjardins et ses
représentants pour leur mémoire et la clarté du
mémoire. Quand on lit le Rapport quinquennal avec les intentions qui
sont exprimées et les recommandations qui sont faites Ici, je pense que
la ministre déléguée aux Finances va avoir quelques
problèmes à les réconcilier, parce que, en
définitive, là où on touche aux normes gouvernementales de
capital, on attend le projet de loi avant de se prononcer. Par la suite, sur
les liens commerciaux, ce qui
est affirmé là, c'est que si on légifère ou
qu'on limite en aval, finalement, c'est comme si on avait dit au mouvement
Desjardins de ne pas se développer en aval. Peut-être qu'on peut
encore interpréter ou faire certaines interprétations, mais
ça me paraît très clair que c'est au texte que ça
toucherait considérablement le mouvement Desjardins dans son
passé et, donc, dans son avenir.
En ce qui concerne les transactions intéressées, je pense
que, tout en étant d'accord, il reste que ce que vous dites sur ce
sujet, c'est que le développement dans un groupe comme celui-là,
dans un mouvement comme celui-là, doit être fait à base de
synergies, donc de contacts à l'intérieur même entre les
différentes institutions du groupe qui fassent que le
développement se fasse et se réalise. Et ça ne peut se
faire que si tout le monde est bien au courant de la situation, si les gens
travaillent ensemble, ce qui est le sens même du mot "synergie". Je pense
que c'est l'envers du conflit d'intérêts que nous avons. Il y a
des aspects positifs à ce qu'il y ait d'excellentes communications entre
les membres. (18 h 30) je termine simplement sur un point: harmonisation. au
fond, ce que vous dites, c'est: harmonisation dans la mesure du possible mais
sûrement pas uniformisation, compte tenu du régime juridique qu'il
y a actuellement au canada.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Labelle. Mme la ministre, conclusion, s'il vous
plaît.
Mme Robic: alors, m. le président, je crois qu'on s'entend
assez bien et je remercie le mouvement desjardins de nous avoir fait
connaître leurs réactions à ce rapport quinquennal. nous
avons trouvé vos remarques fort intéressantes. je veux vous
rassurer quant aux normes de solvabilité. c'est par règlement que
nous allons les établir, et, donc, vous aurez toute la
possibilité de nous faire connaître vos remarques. quant aux
transactions intéressées, si vous avez lu notre rapport
quinquennal, nous avons un régime d'ouverture avec exception, bien
sûr, mais je pense que maintenant que vous êtes assis de l'autre
côté de la table, vous réalisez que c'est peut-être
la voie à suivre. quant à l'harmonisation, je pense qu'on a
toujours été très clair là-dessus. il n'est pas
question pour nous de reculer, bien au contraire. on pense qu'au contraire, on
a pris une longueur d'avance. on n'a pas du tout l'intention de l'abandonner,
cette longueur d'avance là. nous allons de l'avant et on espère
que, dans le domaine des assurances, nous pourrons accomplir ce que nous sommes
à accomplir dans le domaine des fiducies. encore une fois, ce qui nous
guide, c'est l'europe 1992, et si l'europe 1992 s'est entendue
présentement sur une façon de travailler, ça a pris
plusieurs années de discussions pour établir des normes
minimales. Alors, on espère que nous, ça ne prendra pas plusieurs
années, mais que ça se fera dans un avenir proche. Et le
Québec a bien l'intention de jouer son rôle dans
l'établissement de ces normes-là pour garder notre avance et
permettre à nos compagnies de continuer à progresser. Merci
infiniment.
Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme fa ministre. Alors,
je remercie les membres de la Société financière des
caisses Desjardins inc. pour leur participation aux travaux de cette commission
et j'inviterais maintenant le prochain groupe, Groupe Solidarité-Unique,
à bien vouloir prendre place à la table des témoins.
À l'ordre, s'il vous plaît! Mme la ministre, où
est-elle? Elle est partie. On va attendre quelques minutes.
Alors, la commission du budget et de l'administration poursuit ses
travaux avec le Groupe Solidarité-Unique. Alors, je demanderais au
porte-parole de ce groupe de bien vouloir s'identifier et de présenter
aux membres de cette commission les gens qui l'accompagne, s'il vous
plaît.
Groupe Solidarité-Unique
M. Latulippe (Andréa): M. le Président,
Andréa Latulippe, président du Goupe Solidarité-Unique.
À ma droite, Me Daniel Larrivée, notre avocat.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'ils sont toujours
à droite vos avocats? Ça n'arrive pas qu'ils sont à votre
gauche? Non?
M. Latulippe: Je ne sais pas, M. le Président, c'est la
première fois.
Le Président (M. Lemieux): Ce sont des gens de droite,
n'est-ce pas?
M. Latulippe: À mon extrême gauche, Jean-Guy
Lapointe, notre vice-président, actuaire, et Denis Martel, notre
vice-président - administration, qui est aussi un actuaire.
Le Président (M. Lemieux): Alors, les règles de
procédure sont que vous avez 20 minutes pour l'exposé de votre
mémoire, suit un échange entre parlementaires d'une durée
de 40 minutes: 20 minutes pour le groupe ministériel et 20 minutes pour
le groupe de l'Opposition officielle. C'est donc dire que pour exposer votre
point de vue, vous disposez d'une période de temps de 20 minutes. Alors,
la parole est maintenant à vous, et nous vous écoutons avec
plaisir.
M. Latulippe: M. le Président, ça va aller
très bien. Je vous remercie beaucoup. Alors, le Groupe
Solidarité-Unique, M. le prési-
dent, MM. les commissaires, Mme la ministre remercie vivement cette
commission parlementaire pour l'invitation à venir formuler ses
commentaires concernant les énoncés de politique concernant le
Rapport quinquennal sur I'application de la Loi sur les assurances.
Dans un premier temps, Je me permets de vous faire une brève
présentation de notre groupe financier. Celui-ci est composé de
quatre compagnies dont la compagnie mère est La Solidarité,
compagnie d'assurance sur la vie. Celle-ci, qui est une mutuelle,
détient 100 % du capital-actions des compagnies suivantes: L'Unique,
compagnie d'assurances générales, Unicour inc, un courtier en
valeurs mobilières qui se spécialise dans la mise en
marché de plans de bourses d'études émis par la Fondation
universitaire du Canada, et Solicour inc, un courtier d'assurance-vie. Toutes
ces compagnies sont de juridiction québécoise.
De plus, La Solidarité est associée au groupe Verbois dans
la société en commandite Solidarité-Verbois, qui a pour
objet l'achat et la vente de terrains. Bien que La Solidarité ait
été fondée en 1942, notre Groupe a son visage actuel
depuis la fin de 1981, soit au moment où La Solidarité a acquis
le groupe Unique.
À la fin de la présente année, les actifs de notre
Groupe atteindront approximativement 200 000 000 $. Notre mission est simple,
à la mesure de notre taille: Nous sommes un agent de
développement économique pour le Québec. Cette mission est
la même que celle qui prévalait en 1942, lors de la fondation de
La Solidarité. Comment menons-nous à bien cette mission? C'est en
commercialisant des produits d'épargne et des produits d'assurance de
qualité. Il s'agit là d'une question de respect à
l'égard de nos clients. Nous assumons aussi notre mission en
réinvestissant nos profits au Québec et plus
particulièrement en région. Nous croyons en la vocation
régionale. D'ailleurs, c'est en région que La Solidarité
est née et s'est développée. Une telle mission peut
sembler modeste lorsqu'elle est comparée à celles mises de
l'avant par d'autres groupes financiers.
Non, nous n'avons pas l'intention de conquérir le monde. Nous
préférons nous en tenir à notre mission fondamentale,
celle qui fait en sorte que nous sommes près des Québécois
depuis 50 ans. Nous ne pouvons que s'inscrire aux objectifs mentionnés
dans le rapport quinquennal. En ce sens, croissance économique,
protection des épargnants et des investisseurs sont des objectifs
fondamentaux qui doivent soutenir toute législation. Cependant, nous
croyons que certains des mécanismes suggérés pour
l'atteinte de ces objectifs sont incompatibles ave - ceux-ci. D'ailleurs, je
reviendrai sur ce sujet ur peu plus tard. Pour l'instant, j'aimerais vous fairt
part de quelques commentaires et de mon expérience personnelle quant
à la réglementation de nos sociétés.
Dès 1984, les compagnies d'assurances canadiennes, autres que
québécoises, avaient les yeux tournés vers le
Québec. Tous se demandaient si l'ouverture démontrée par
les législateurs pour les compagnies d'assurances serait un
succès. Eh bien, après six ans de ce nouveau régime, je
crois qu'on peut dire que les amendements à la Loi sur les assurances
ont été plus que concluants. Au Groupe Solidarité-Unique,
nous pensons que l'essor des sociétés d'assurances est le
résultat de deux facteurs combinés, soit une bonne et saine
gestion et un environne-ment législatif propice au développement
de l'"enttepreneurship". Cet environnement législatif a
véritablement été créé en 1984. Les pouvoirs
de placement ont été élargis par l'abolition des tests
qualitatifs et de la liste des filiales autorisées. Les pouvoirs
corporatifs ont été révisés, et ainsi de suite.
À certains égards les énoncés de politique,
notamment en matière de pouvoirs de placement, constituent un recul par
rapport à la législation de 1984. Ce recul est-il justifié
par la solvabilité actuelle ou prévisible de nos
sociétés? Pourquoi doit-on, par exemple, revenir aux placements
dans des filiales autorisées? La situation de nos sociétés
est-elle si mauvaise que l'on doive faire un retour en arrière? Je
m'interroge toujours sur la place de l'"entrepreneurship" dans nos
sociétés, qui, malgré l'ouverture de 1984, demeure
fortement réglementée. À notre avis, M. le
Président, un juste équilibre doit exister entre, d'une part, la
réglementation de nos sociétés afin de protéger le
public et, d'autre part, la mise en place de règles favorisant
l'émergence de ces mêmes sociétés.
Malgré les nouvelles règles introduites en 1984 et qui, je
le mentionne, conviennent à notre groupe, il est troublant de constater
le temps qu'une compagnie d'assurances doit passer à répondre aux
exigences administratives des divers organismes auxquels elle est tenue de
répondre. En vertu des obligations imposées par la Loi sur les
assurances, La Solidarité et l'Unique ont chacune un conseil
d'administration, un comité exécutif, un comité de
placement, un comité de vérification et un comité
formé en vertu de la nouvelle Loi sur les régimes
complémentaires de retraite. À cela, les énoncés de
politique contenus dans le Rapport prévoient la formation d'un
comité de déontologie. Cela fait donc un total de 12 forums pour
deux compagnies. Avec une moyenne de cinq réunions annuelles par
comité, cela fait un total de 60 réunions statutaires pour
environ 200 jours ouvrables. En plus, nos sociétés doivent
consacrer encore beaucoup de temps et de ressources pour s'assurer de la
conformité de leurs placements et réserves ainsi que des normes
fiscales applicables. Il y a certains jours où je me demande si nos
principaux clients ne sont pas les divers organismes de réglementation
qui nous gouvernent plutôt que le consommateur lui-même.
Malgré cette réglementation déjà lourde et
coûteuse, la législation actuelle laisse quand même place
à Pentrepreneurship". À notre avis, l'avènement de mesures
qui constituent un recul par rapport à la législation de 1984
auront pour effet de diminuer considérablement cet "entrepre-neurship"
dont les compagnies québécoises ont fait preuve dans le
passé. Nous comprenons fort bien que le législateur s'interroge
sur la pertinence des liens commerciaux, des règles concernant les
transactions intéressées et les pouvoirs de placement. Toutefois,
M. le Président, le Québec a fait des choix en 1984 qui, à
notre avis, se sont avérés assez judicieux. Doit-on modifier une
formule éprouvée, une formule dite gagnante jusqu'à date?
(18 h 45)
Je me suis permis ces quelques commentaires sur la notion de
réglementation, car ils nous apparaissent importants, compte tenu de
l'impact de chaque nouvelle norme sur nos sociétés et plus
particulièrement sur des groupes comme le nôtre qui n'ont pas
nécessairement accès aux ressources humaines et techniques des
grandes corporations.
J'aimerais terminer sur ce sujet, en mentionnant qu'il y a des
préoccupations sérieuses quant à la protection du public
qui sont peu discutées, telle la concentration des entreprises dans le
secteur financier. Tous et chacun d'entre nous voient poindre à
l'horizon des géants financiers qui, avec l'assentiment du
législateur, sont devenus ce qu'on appelle des mammouths de
l'industrie.
Il nous apparaît que la concentration de l'épargne des
Québécois entre quelques institutions de nature bancaire,
fiduciaire, coopérative et d'assurances est sûrement aussi
préoccupante que l'absence, par exemple, d'une liste de filiales
financières autorisées ou accessoires au commerce de l'assurance,
de règles concernant les transactions intéressées et des
liens commerciaux en aval.
Parlant de la concentration favorisée par le législateur,
il me vient souvent cette question à l'esprit: Y a-t-il encore une place
sous le soleil pour les compagnies d'assurances ou groupes financiers de notre
taille ou doit-on comprendre que, d'ici quelques années, il n'y aura
d'espace que pour les grands conglomérats financiers au Québec?
Ces considérations sur le bien-fondé de la réglementation
et la place d'institutions financières de taille modeste au
Québec ayant été exprimées, je me permets de
traiter maintenant de quelques aspects contenus au Rapport quinquennal qui nous
tiennent particulièrement à coeur.
Nous sommes prêts, sous certaines réserves, à ce que
le législateur adopte une position médiane concernant le double
comptage, tel qu'exprimé dans ce Rapport quinquennal. Cette position
médiane constituant une élimination partielle du double comptage.
Les notions de liens commerciaux, de pouvoirs de placements et de transactions
intéressées doivent être analysées globablement.
D'une part, le rapport mentionne que les assureurs pourront détenir
entre 30 % et 50 % du capital-actions d'une corporation, ce qui est
actuellement interdit.
Par contre, le législateur envisage qu'une telle
détention, de même que celle dans unte filiale soit soumise
à une liste de filiales financières admissibles ou accessoires au
commerce de l'assurance. Nous pensons que ces listes de filiales n'ont pas leur
raison d'être, en vertu du principe de placement, en hommes prudents et
raisonnables, introduit en 1984.
Nous comprenons l'impact des liens commerciaux en aval et les dangers
des transactions intéressées et des conflits
d'intérêts qui en découlent. C'est pourquoi nous sommes
favorables à l'introduction de certaines prohibitions concernant les
transactions intéressées si les placements au-delà de 30 %
sont permis dans des entreprises commerciales et que la liste de filiales
financières admissibles ou accessoires au commerce de l'assurance est
laissée à l'état de simple projet.
La Solidarité est partenaire à 50,1 % avec le groupe
Verbois dans une société en commandite. Celle-ci sera-t-elle
considérée comme une société autre que celle
prévue dans la liste de filiales envisagées par le
législateur? À ce jour, ce partenariat a été
très rentable pour notre groupe. Bien que des droits acquis seront
accordés aux compagnies dont les placements sont non conformes, selon
les énoncés de principe contenus dans le Rapport, nous pensons
qu'une telle activité ne devrait pas faire l'objet d'un interdit.
En conclusion, je pense pouvoir affirmer que notre Groupe est en accord
avec de nombreux énoncés de politique contenus dans le Rapport
quinquennal. Toutefois, certains aspects que je viens particulièrement
de décrire nous apparaissent difficilement acceptables, puisqu'ils
constituent des changements majeurs à une législation qui,
à ce jour, a bien servi les consommateurs et nos
sociétés.
Nous réitérons aux législateurs notre
entière collaboration dans la mise en place de modifications à
l'actuelle loi. Je terminerai en mentionnant que le législateur doit
s'assurer, avant de modifier la présente législation, que la
protection du public en sera mieux assurée et que C'entre-preneurship"
de nos sociétés n'en souffrira pas.
Mes acolytes et moi sommes à votre disposition pour
répondre à vos questions sur les commentaires que nous avons
déjà soumis par écrit. M. le Président, merci
beaucoup.
Le Président (M. Lemieux): Mme la ministre
déléguée aux Institutions financières.
Mme Robic: Merci, M. le Président. Je regarde mon Rapport
quinquennal, je regarde mes têtes de chapitre et je me dis: Où
est-ce que je
recule? Au contraire, je crois que je vous équipe très
bien pour faire face à la compétition. Je permets à nos
compagnies d'assurances d'avoir... J'élargis la propriété
étrangère. Ça vous donne la possibilité de signer
des ententes, d'avoir des fonds dont vous avez tellement besoin pour vous
capitaliser, d'établir une synergie avec ces compagnies
étrangères, de profiter de leurs expériences, de produits
qu'elles ont pu développer. J'ouvre également au niveau des
pouvoirs de placement. Vous me dites: Oui, mais dans certains domaines connexes
ou accessoires. Je pense que, dans le Rapport quinquennal, c'est évident
qu'elle est très large cette liste, qu'elle peut être
ajustée, qu'elle n'est pas exhaustive. Je vous permets d'avoir des liens
commerciaux en amont. Je comprends que, pour une mutuelle, c'est
peut-être un problème. On a vu une autre mutuelle qui a
trouvé une solution à ce problème. Êtes-vous
opposé à une restructuration qui vous permettrait d'avoir des
liens en amont?
Le Président (M. Lemieux): M. Latulippe.
M. Latulippe: Pour moi, non, Mme la ministre, mais j'aimerais que
ce ne soit pas jusqu'à aller obligatoirement à la
"démutualisa-tion". Étant donné qu'il y a quelque chose,
qu'il y a un comité sur le financement, Mme Robic, j'aimerais garder mes
commentaires pour ce comité, s'il vous plaît.
Mme Robic: D'accord. J'attends beaucoup de ce comité
d'ailleurs.
M. Latulippe: Oui, on a beaucoup de réunions de faites
jusqu'à ce jour.
Mme Robic: Vous avez parlé de concentration, tout à
l'heure, de votre inquiétude à savoir qu'il n'y a pas de place
pour des petits et des moyens. Vous m'intriguez parce que je ne sais pas
où, dans le Rapport, je vous donne cette impression-là. Ce n'est
certainement pas l'impression que j'ai voulu vous donner. Bien au contraire,
j'ai voulu vous donner des sources de capital pour que vous puissiez continuer
à grandir, a prendre de l'expansion et j'espère qu'il y aura
toujours de la place pour les plus petits.
M. Latulippe: Mme la ministre, je vais laisser la parole à
M. Larrivée.
M. Larrivée (Daniel): Je pense que c'est une constatation
qui a été faite par notre groupe à la suite des
dernières années, aux cinq, six ou sept dernières
années où il est clair, à quelque part, que le
législateur québécois... D'ailleurs, c'est l'un des
objectifs qui est prévu dans le Rapport quinquennal, à savoir
l'internationalisation ou la capacité de nos entreprises ou
conglomérats financiers québécois à aller sur ces
marchés. Le discours gouvernemental a souvent été
axé vers les conglomérats financiers, vers les grands groupes
financiers au Québec. Pour notre part, on croit qu'il y a toujours une
place pour les institutions comme le groupe Solidarité-Unique.
Ça, il n'y a pas de problème à ça. Maintenant, le
discours que l'on a entendu régulièrement nous laisse parfois
songeurs et ce n'était qu'une constatation que nous mentionnions ou que
M. Latulippe, tantôt, mentionnait dans son allocution.
Mme Robic: Ce n'est certainement pas, en tout cas, parce que la
ministre, ici, croit qu'il n'y a pas de place pour les moyens et les petits.
Bien au contraire, je pense que je tente, par ce Rapport, de vous donner les
moyens de vous capitaliser si vous en sentiez le besoin. C'est important. Vous
nous avez dit en consultation: On est rendus à un point, dans notre
évolution, où on a besoin de grandir. Alors, j'espère que
je vous donne ces possibilités à travers mon Rapport.
Le Président (M. Lemieux): M. Lapointe.
M. Lapointe (Jean-Guy): Oui, je pourrais compléter un
petit peu la réponse de Me Larrivée concernant la concentration
des pouvoirs des institutions financières en ce sens que, nous, on a mis
en parallèle, tout simplement, le risque que peut représenter la
concentration des institutions financières par rapport au risque aussi
que peuvent représenter les transactions intéressées, les
conflits d'intérêts. On se demande jusqu'à quel point le
risque de la concentration n'est pas plus grand que les autres risques que le
Rapport quinquennal semble souligner. En ce sens-là, le Rapport
quinquennal est peut-être un peu muet sur le risque que représente
la concentration des institutions financières.
Le Président (M. Lemieux): Mme la ministre
Mme Robic: Alors, je présume que vous ne seriez pas tout
à fait d'accord avec l'intervenant précédent qui disait:
Toutes les compagnies doivent demeurer québécoises sous un
même chapeau, et, finalement, il y aurait deux ou trois compagnies
québécoises, et ce serait tout.
M. Latulippe: Deux ou trois, Mme la ministre, je dirais
plusieurs, oui.
Mme Robic: Vous seriez d'accord avec ça?
M. Lapointe: Ce ne serait pas nécessairement dans
l'intérêt des consommateurs qu'il n'y ait que deux ou trois
institutions québécoises, et le risque est accru à ce
moment-là en ce qui concerne la solvabilité, par exemple,
advenant des difficultés.
Mme Robic: À la page 4 de votre mémoire
vous préconisez l'emploi de normes différentes selon le
type de propriétés et la présence de liens commerciaux.
Pourquoi des règles différentes selon la taille? Les risques
présumés ne sont-ils pas les mêmes?
M. Latulippe: M. Daniel Larrivée.
M. Larrivée: ii faut comprendre que chaque norme, comme le
disait tantôt m. latulippe, représente un coût pour une
entreprise. quand on a une entreprise ou un groupe financier de très
grande taille, ce coût peut facilement s'absorber. lorsqu'on arrive dans
des entreprises comme la nôtre de taille modeste, le coût est un
peu plus évident et quand on parle, par exemple, de la formation d'un
comité de déontologie, c'est un peu plus difficile pour une
entreprise de la taille de la solidarité ou de l'unique d'avoir un
comité de déontologie à part avec tous les autres
comités qu'on a énumérés tantôt. c'est aussi
une question de rentabilité et de difficultés de mise en place de
ce genre de comité. nous pensons que toutes ces normes touchant les
transactions intéressées, et je pense qu'on le mentionne dans le
rapport, nous ne sommes pas contre certaines prohibitions, telles que le
rapport quinquennat le mentionne, et je pense que ça doit être
analysé dans un ensemble. les liens commerciaux en aval nous tiennent
à coeur et nous disons tout simplement: voici, si on nous permet les
liens commerciaux tels qu'ils sont permis présentement en aval, nous
serions prêts, évidemment, parce qu'à certains
égards, il est vrai que les liens commerciaux représentent des
dangers, et je pense qu'on ne doit pas se le cacher. alors, nous serions
prêts à avoir certaines prohibitions concernant les transactions
intéressées et les conflits d'intérêts, à ce
moment-là, justement pour s'assurer que les compagnies d'assurances
n'aient pas de problème à ce chapitre.
Mme Robic: Vous vous opposez à la prescription d'un
pouvoir réglementaire et vous dites que vous préconisez
plutôt d'assujettir des assureurs à une loi d'application
générale similaire à la loi sur la protection des
renseignements personnels. Pourriez-vous expliciter davantage votre position en
matière de consentement à la divulgation de renseignements?
M. Larrivée: Bien sûr. Le but de ces mesures est de
protéger le public. Or, je pense que, quand on légifère
par cas d'exception, il y a toujours un danger que le public ne sache
même pas que ces règles existent. Je vous donne l'exemple suivant:
Dans le règlement d'application sur la loi des assurances, il y a une
section complète sur les remplacements de contrôle et les
substitutions de polices. Je doute qu'il y ait un Québécois sur
100 qui connaisse ces règles. Qu'on parle de protection du consommateur,
je pense que 99 Québécois sur 100 connaissent qu'il y a une loi
sur la protection du consommateur. et quand on légifère par cas
d'exception, ça crée toujours des disparités. pourquoi une
compagnie d'assurances serait-elle tenue à de telles rèlges,
alors que d'autres entreprises privées et même des entreprises qui
oeuvrent dans le secteur financier ne le seraient pas? comme je vous le disais
tantôt, la meilleure protection du public, c'est qu'il soit au courant
des mesures qui s'appliquent. plusieurs pays notamment ont des lois de
portée générale qui visent la confidentialité et
l'utilisation des renseignements personnels: la france, les pays scandinaves,
quelques états américains et même te québec a une
telle législation pour les organismes publics et parapublics. alors,
plutôt que de légiférer par cas d'espèce, il nous
apparaît qu'une législation globale serait plus appropriée,
dans un premier temps. dans un deuxième temps, il faut se rendre compte
qu'à l'heure actuelle il existe des normes dans la législation
qui protègent le public à ce chapitre. on n'a qu'à penser
à la charte des droits et libertés de la personne qui
prévoit des dispositions à cet effet, qu'au vieux code civil de
1867 qui a un chapitre sur le respect au droit à la vie privée et
dans les amendements au nouveau code civil, il y a un chapitre complet
où on va même jusqu'à dire que toute personne a le droit de
faire rectifier son dossier auprès d'une entreprise quelle qu'elle soit.
(19 heures)
Nous avons donc des règles de droit général qui
s'appliquent. Pourquoi procéder encore par exception dans un
règlement alors que la plupart des consommateurs ne sauront même
pas qu'ils sont protégés de cette façon?
Mme Robic: Vous nous dites que les institutions
financières agissant dans une situation de réseau devraient avoir
le droit de transférer le nom et l'adresse d'une personne sans son
consentement. Un tel renseignement ne préjudicie en rien des droits
d'une personne, dites-vous. "D'autre part, nous soumettons que, pour tout autre
renseignement, une compagnie d'assurances devrait obtenir le consentement de la
personne concernée."
Il y a des bureaux de crédit qui possèdent toute
l'information, n'importe qui ici autour de la table peut faire un appel
téléphonique, on peut avoir notre vie étalée devant
eux. Comment réconciliez-vous ça?
M. Larrivée: dans un premier temps, je pense qu'il faut
réconcilier ça avec la situation actuelle où toutes les
institutions financières et à peu près toutes les
compagnies privées, les corporations professionnelles vendent leur
liste. la situation est là, c'est une situation de fait. nous, ce que
nous vous disons par rapport au pouvoir de réglementation qui sera
adopté et peut-être mis en vigueur, c'est que, si on est les
seuls à faire les frais de la réglementation, quelque
part, je trouve que c'est un peu désavantageux. Pourquoi, par exemple,
une caisse populaire pourrait-elle vendre sa liste de clients ou de membres
à une compagnie affiliée ou la passer tout simplement, alors
qu'une compagnie d'assurances ne pourrait pas le faire? Je pense qu'il ne faut
pas qu'il y ait de disparité dans la législation, d'une part.
D'autre part, il est évident que, pour empêcher d'avoir des
règles lourdes, si le législateur croit qu'il est
nécessaire qu'aucune information ou même l'adresse ou le nom ne
soit transféré, je pense qu'on peut vivre assez facilement avec
ça. Cependant, plutôt que de mettre en place des règles
lourdes, on pourrait tout simplement penser au consentement du client, le
client consent à ce que son nom, son adresse ou d'autres informations
puissent être divulgués, par exemple, à une autre compagnie
membre du Groupe Solidarité-Unique. En quelque sorte, vous savez, je
pense que les compagnies d'assurances, au cours des dernières
années, et même depuis plusieurs années, sont en possession
de dossiers très confidentiels. Vous savez, quand vous prenez une
assurance auprès d'une compagnie, vous avez, excusez-moi l'expression,
à vous "déculotter" devant l'assureur. On a des informations de
nature médicale. Je pense qu'au Québec, et même partout au
Canada, les assureurs ont toujours eu un grand souci de la conservation des
informations qui leur étaient données par les clients. Si on en
arrive à des règles, je pense que ça devrait être
des règles d'application générale, ça devrait
être aussi des règles simples telle l'autorisation d'un client
à permettre à une compagnie de transférer de l'information
à une autre compagnie. C'est aussi une question pour un groupe financier
de synergie. Sans cette possibilité-là, la synergie devient assez
difficile. D'ailleurs, présentement, tout le monde le sait, il ne faut
pas se le cacher, je pense.
Le Président (M. Lemieux): Merci, monsieur. Vous avez
terminé, Mme la ministre?
Mme Robic: Oui, merci.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Labelle, la parole est à vous.
M. Léonard: M. le Président, merci. Merci aux gens
du Groupe Solidarité-Unique de leur mémoire. Je pense que j'ai
appris beaucoup de choses. Notamment, ils font une constatation que, dans le
Rapport quinquennal, lorsqu'on lit les intentions exprimées par la
ministre, tout le monde, comme beaucoup de groupes cet après-midi, ont
conclu qu'il s'agissait d'un recul. J'ai l'impression que, pour beaucoup, la
loi de 1984 adoptée à l'unanimité, pas juste le
gouvernement d'alors, mais avec la collaboration de l'Opposition aussi, qui
était l'Opposition libérale, tout le monde a l'air content de
cette loi, mais j'ai l'impression que c'était le vent du large, alors
qu'aujourd'hui, on adopte une attitude frileuse par rapport à des
dangers qu'on craint sans trop les connaître.
J'aimerais peut-être nous arrêter là-dessus. C'est
quoi, le problème? Quel est le problème qui vous amène
ici? On dit qu'on veut protéger le consommateur, c'est un peu la
réponse de la ministre tout à l'heure. Est-ce que vous, dans
votre gestion, vous avez accumulé des plaintes de vos clients, de
consommateurs en particulier? Est-ce que vous en avez un certain nombre? Est-ce
qu'il y en a qui se sont retrouvés, par exemple, chez le Protecteur du
citoyen ou devant la Commission des droits de la personne? À un moment
donné, il y a quelqu'un qui se plaint quelque part. Ou bien si on parie
d'un être de raison?
M. Latulippe: Pour nous, pour vous répondre, M. le
député, nous n'avons eu aucune plainte dans ce sens
jusqu'à date dans le Groupe Solidarité-Unique. Je pense que ce
serait assez difficile de dire, mettons, que l'ombudsman veut régir chez
nous.
M. Léonard: Alors, les consommateurs ne se plaignent
pas?
M. Latulippe: Si jamais ils se plaignent, on se met à leur
disposition pour régler le problème, mais je ne peux pas vous
dire que... Je crois que je n'ai pas eu une plainte sur mon bureau de
président du Groupe à date. On les règle avant.
M. Léonard: II n'y en a pas qui se sont retrouvées
non plus chez les Protecteur du citoyen? Nulle part?
M. Latulippe: Pas à ma connaissance, monsieur.
M. Léonard: En justice? M. Latulippe: Mon
aviseur...
M. Léonard: II n'y a pas de procès en cours
présentement, des différends avec vos clients, vos
consommateurs?
M. Latulippe: M. Larrivée.
M. Larrivée: Écoutez, dans nos opérations
quotidiennes, il arrive que nous ayons des poursuites, je pense que c'est tout
à fait normal. Cependant, il y a déjà une
réglementation qui existe, je pense qu'on parle beaucoup du Rapport
quiquennal aujourd'hui, mais il ne faut pas oublier qu'il y a
déjà une réglementation qui existe, qu'il y a un
département des assurances qui existe. Il y a même, au sein de ce
département des assurances, un service qui répond aux
plaintes du consommateur, qui vérifie et qui s'enquiert
auprès des compagnies d'assurances quel est le problème. Alors,
ça, ça existe. Il y a d'autres associations, telle l'ACCAP ou le
BAC, qui sont là également pour venir en aide au consommateur.
Alors, à votre question, je sais, pour avoir été ici
depuis ce matin, que vous l'avez posée fréquemment, et, sans
faire de politique, je ne voudrais pas qu'on s'embarque sur ce terrain, je
pense qu'à votre question, la réponse est: Tout va très
bien, merci, à l'heure actuelle.
M. Léonard: Je comprends que vous ayez des
réticences, parce que je comprends bien que tout le monde est d'accord
avec les énoncés généreux qu'il y a là, mais
sur les moyens, finalement, les gens concluent depuis le matin que c'est un
recul, qu'on revient sur une loi qui a déjà été
adoptée et qui a permis à bon nombre d'assureurs au Québec
de voler. C'était ce que disait le mouvement Desjardins tout à
l'heure, c'est ce que disent les gens de Solidarité-Unique, c'est ce que
disait aussi La Laurentienne, etc.; tout le monde est venu dire la même
chose. Je cherche le problème. Alors, votre principal problème
à vous, c'est quoi? C'est un problème de croissance, c'est un
problème de vous défendre contre des grands groupes, donc, vous
avez besoin de toute la flexibilité nécessaire pour le faire.
M. Latulippe: c'est un problème de capita) pour nous,
mais, tout à l'heure, j'ai dit à mme robic, étant
donné que j'étais sur le comité de financement, que
j'aimerais retenir cette question, s'il vous plaît.
Le Président (M. Lemieux): Mme la ministre. Non? Ça
va?
M. Léonard: Si je comprends, aujourd'hui, ce qui nous
réunit, votre problème, c'est le Rapport quinquennal,
finalement?
Le Président (M. Lemieux): Mme la ministre, en
conclusion.
Mme Robic: Alors, M. )e Président, j'aimerais rappeler au
député de Labelle - ça fait longtemps qu'il n'a pas
été au pouvoir - qu'un gouvernement ça gère
l'avenir et non pas le passé. J'ai des félicitations à
offrir a nos compagnies d'assurances qui ont bien géré leurs
boîtes et qui ont fait progresser leurs boîtes, grâce
à la loi 84, certainement. Mais nous sommes rendus en 1990, les choses
ont évolué. En 1984, on commençait à peine à
parler de mondialisation; aujourd'hui, nous sommes en plein
développement international. Oui, il y a une contrainte dans le Rapport
quinquennal sur les liens commerciaux en aval. Cependant, de dire que le
document est un recul sur la loi de 1984, permettez-moi d'être surprise.
j'ai là-dedans plusieurs nouveautés, ouvertures, qui vont vous
permettre d'atteindre vos objectifs, de vous développer, d'avoir
accès à un capital, de créer des groupes financiers si
vous le désirez, d'établir une synergie avec d'autres entreprises
étrangères ou canadiennes. nous avons ouvert au niveau des
transactions intéressées nous créons, avec le rapport
quinquennal, un régime d'ouverture, avec exception bien sûr, mais
c'est un régime d'ouverture. et quant aux pouvoirs de placement, eh
bien, oui, on vous restreint à des entreprises connexes ou accessoires
très larges. on n'a pas l'intention de vous donner une liste très
restreinte de ces entreprises commerciales, mais bien d'être large, de
garder un esprit ouvert disant qu'on peut éventuellement rajouter
certaines entreprises, avec le développement de nouveaux produits. donc,
pour ceux qui se sont prévalus, parce qu'il y a très peu de
compagnies qui se sont prévalues du pouvoir d'avoir des liens
commerciaux en aval... jusqu'à présent, vous en voulez, mais
ça fait depuis 1984 que vous avez cette possibilité-là.
très peu de compagnies se sont prévalues de ce
privifège-là. plusieurs nous ont même dit que si elles
n'étaient pas intéressées, c'est qu'elles voyaient
là certaines possibilités de créer des pressions indues
sur le capital de la financière qui est la mère. et pour vous qui
avez pensé que c'était profitable pour votre entreprise, bien,
vous avez, bien sûr, une clause grand-père qui fait que vous allez
garder vos acquis. et si vous voulez réellement faire la
diversification, vous vous en allez dans du commercial, de l'industriel, vous
avez la possibilité d'y aller en amont en vous démutualisant tout
en restant mutuel avec une structure que l'on a vu une autre compagnie adopter.
alors, je vois mal un recul. je vois de grandes possibilités avec ce
rapport quinquennal, mais, encore une fois, avec un élément de
prudence.
Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la ministre. En
conclusion, M. le député de Labelle.
M. Léonard: M. le Président, je trouve que la
ministre reçoit des groupes. Elle les entend. Si ces groupes-là
presque à l'unanimité disent que c'est un recul, c'est leur
jugement. Je pense qu'il ne faut pas leur en vouloir pour venir dire ce qu'ils
pensent ici. Donc, on en est là. Je me demande quel est le sens de
l'exercice. On cherche le problème depuis tout à l'heure. Les
gens disent qu'ils sont contents de la loi actuelle adoptée à
l'unanimité, encore une fois, des partis à l'Assemblée
nationale. Et vous leur dites que les acquis que vous avez acquis avec l'ancien
projet de loi, vous allez les garder, mais les autres, vous n'aurez pas
accès à ça. Si le régime était bon à
l'époque en 1984 pour permettre le développement des
sociétés d'assurance, il devrait être bon encore maintenant
et notamment, dans le contexte qui s'en vient. Vous pariez de la
mondialisation des échanges 1992, etc. À mon sens,
justement, il faut permettre à nos groupes financiers de se
développer et, donc, il ne faut pas leur barrer les roues
présentement. Il faut les laisser aller. Ils sont dans le vent du large.
Laissons-les aller. Je remercie les gens de Solidarité-Unique. C'est
très bien. C'est un excellent témoignage.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Labelle. En conclusion, les remerciements, Mme la
ministre.
Mme Robic: Oui. Bien, je vous remercie infiniment de votre
présentation. Ça nous amène un éclairage important
dans la préparation de notre projet de loi. Et j'espère que, dans
ce projet de loi, vous trouverez que le gouvernement vous accorde tous les
outils nécessaires à faire face à votre compétition
et que le gouvernement s'assure qu'il y a toujours de la place pour les moyens
et les petits dans l'ensemble de nos institutions financières. Merci
infiniment.
Le Président (M. Lemieux): Merci, madame. Alors, je tiens
à remercier le Groupe Solidarité-Unique pour leur participation
aux travaux de cette commission. Et une remarque qui ne concerne pas la
commission, c'est que j'ai remarqué, madame, depuis le début que
nous entendons les groupes parlementaires, qu'à chacune des tables, les
gens qui se sont présentés à la table des témoins,
il y avait des anciens fonctionnaires qui se sont recyclés. Alors, je
remarque M. Lapointe avec son sourire, ça nous prouve qu'il y a beaucoup
de compétence au sein de la fonction publique du Québec. Et je
suspends là-dessus pour environ deux minutes.
(Suspension de la séance à 19 h 14) (Reprise à 19 h
21)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Auriez-vous la
gentillesse et l'amabilité de bien vouloir prendre place, s'il vous
plaît? Nous allons maintenant procéder à l'audition du
groupe, London Insurance Group Inc. Vous aurez une période de 20 minutes
pour la présentation de votre mémoire. Suivra un échange
entre les deux groupes parlementaires d'une durée de 40 minutes. On me
faisait état que la présentation du mémoire sera
probablement en français et il est possible que M. Orser puisse vouloir
répondre en anglais aux questions qui lui seront posées à
la fois par Mme la ministre et M. le député de Labelle. On n'a
effectivement aucune objection à cette façon de procéder.
Ça nous fait plaisir même. Et comme je le soulignais tout à
l'heure et comme je le remarque, c'est toujours un ancien fonctionnaire,
encore, qui est derrière vous. J'ai reconnu M. Bujold. Alors,
décidément, je me rends compte que les politiciens ont
peut-être plus de problèmes de recyclage que les
fonctionnaires.
Sur ce, nous vous cédons la parole. Non? M. le
député de Labelle. Vous êtes passé par là, M.
le député de Labelle.
M. Léonard: C'est parce que je me posais la question. Vous
êtes un politicien ou un fonctionnaire là?
Le Président (M. Lemieux): Un ex-fonctionnaire qui est
devenu politicien. Ha, ha, ha!
M, Léonard: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Lemieux): Alors, nous vous cédons
la parole pour une période de 20 minutes.
London Insurance Group Inc.
M. Orser (Earl): m. le président, je suis eari orser,
président du conseil d'administration du london insurance group et de la
london life. je suis accompagné de gerry chénier,
vice-président régional pour le québec, de maurice
bousquet, aussi vice-président régional pour le québec et
de jim etherington, vice-président aux affaires générales
de nos compagnies. le london insurance group et la london life tiennent d'abord
à vous remercier de l'occasion que vous leur offrez de vous
rencontrer.
Je commencerai d'abord par passer en revue le mémoire que nous
avons déposé devant la commission concernant le Rapport
quinquennal sur l'application de la Loi sur les assurances du Québec.
MM. Chénier et Bousquet aborderont ensuite certains aspects
spécifiques, quant à nous, dans notre réponse à
votre document de travail. Nous serons heureux ensuite d'ouvrir la discussion
et de répondre à vos questions. MM. Chénier et Bousquet
participeront également à ces discussions. Ils sont les deux
cadres dirigeants les plus importants de la London Life au Québec et
sont responsables de nos opérations d'assurance-vie dans cette province.
Tous deux ont leur bureau à Montréal.
Je tiens, premièrement, à féliciter Mme Robic et le
gouvernement du Québec pour le leadership dont vous faites preuve dans
la révision de la législation sur les institutions
financières. Vous démontrez une grande prévoyance et une
excellente planification. Nous admirons le travail que vous accomplissez dans
ce domaine, spécialement lorsque l'on considère le besoin de
révision de la législation sur les institutions
financières dans le reste du Canada. Le leadership du Québec dans
ce domaine a été bénéfique pour les autres
industries.
J'aimerais aussi profiter de l'occasion pour vous rappeler la position
que nous occupons au sein de l'industrie de l'assurance au Québec. Le
London Insurance Group est une société d'as-
surances ouverte, inscrite à la Bourse de Montréal et de
Toronto. Nous faisons des affaires au Québec depuis 1924. Nous y
distribuons, par l'entremise de la London Life, de l'assurance-vie et toute une
gamme d'autres produits d'assurances, de programmes de retraite,
d'assurance-maladie, d'assurance-invalidité et des régimes de
rente. Nous avons également des produits d'assurance
générale par l'entremise de l'Optimum Société
financière limitée, et de la compagnie d'assurances
Wellington.
London Insurance Group emploie 800 Québécois et est un
important investisseur dans cette province puisque la London Life a un actif de
1 400 000 000 $ investi au Québec. Le London Insurance Group
opère par l'entremise de ses compagnies d'assurances dans toutes les
provinces du Canada et certaines réglons des États-Unis. La
London Life est d'ailleurs le premier fournisseur d'assurance-vie individuelle
au Canada. Plus de 250 000 personnes au Québec détiennent une
police d'assurance-vie de la London Life. De plus, nous fournissons de
l'assurance collective à environ 1200 compagnies
québécoises. Nous sommes donc, en fait, une puissance majeure
dans l'industrie de l'assurance de cette province et portons un
intérêt marqué à toute loi pouvant affecter nos
compagnies.
Nous tenons également à souligner l'intention de la London
Life de poursuivre l'expansion de ses opérations dans la province. Nous
avons, au cours des cinq dernières années, enregistré une
croissance importante de nos affaires et ouvert plusieurs nouveaux bureaux
régionaux. Nous avons présentement trois bureaux de la London
Life dans la province, dont notre nouveau bureau ici, dans la ville de
Québec, qui connaît beaucoup de succès. Nous avons comme
projet immédiat la création d'un centre administratif pour nos
opérations de la London Life au Québec. Nous augmenterons
également l'autorité et les responsabilités de nos cadres
dirigeants de Québec, afin qu'ils puissent tenir un rôle de
premier plan dans la gestion des affaires de la province. En plus, le London
Insurance Group a fait une demande auprès du gouvernement du
Québec pour une nouvelle compagnie d'assurances qui portera le nom de La
Protectrice. Cette compagnie aura son siège social à
Montréal. vous nous connaissez désormais un peu mieux et pouvez
constater l'importance que nous accordons à l'expansion de nos affaires
dans cette province. nous oeuvrons au sein de la société
québécoise depuis plus de 65 ans et avons bien l'intention de
demeurer un citoyen corporatif prédominant dans cette province. la
révision de la loi dont traite ce rapport quinquennal et les autres
initiatives mises de l'avant par votre gouvernement devraient nous aider
à offrir un meilleur service à la population du québec.
nous considérons finalement que le rapport demeure dans son ensemble un
document acceptable. Mes collègues traiteront, pour leur part, d'aspects
plus spécifiques tels que les liens commerciaux de
propriété ainsi que des transactions Intéressées et
conflits d'intérêts. Il y a cependant deux points qui me tiennent
particulièrement à coeur, et ils ont un rôle important
à jouer dans toute modification législative affectant les
institutions financières. Je veux évidemment parler de la
nécessité d'harmonisation des législations provinciale et
fédérale et de la stimulation de la concurrence entre les
diverses institutions financières. (19 h 30) je sais que vous tenez
également à ce qu'il existe une certaine entente entre les
provinces et le gouvernement fédéral de même qu'entre les
diverses provinces concernant les législations financières. nous
espérons tous que le gouvernement fédéral fera preuve de
leadership dans ce domaine, mais tel n'est pas le cas présentement. je
vous demande donc de faire l'impossible pour assurer un certain degré
d'harmonisation entre les législations sur les institutions
financières. sans une telle harmonisation, les coûts seront plus
élevés. le consommateur souffrira des inconvénients qui en
découleront et la confusion régnera parmi les fournisseurs de
services. le deuxième point est plus sérieux. la plupart des
nouvelles législations financières recommandent des changements
appelés à accroître la concurrence entre les institutions
financières. nous convenons qu'une concurrence accrue devra profiter aux
consommateurs, mais il est de plus en plus évident que nous ne
maîtrisons pas parfaitement tous les facteurs de concurrence entre les
diverses institutions financières. il suffit de voir comment les grandes
banques à charte ont pris le contrôle de l'industrie du courtage
des valeurs mobilières et détiennent présentement
jusqu'à 60 % de cette industrie, pour se demander si nous avons vraiment
réussi à générer une plus grande concurrence ou, au
contraire, la réduire. nous craignons que la même chose se
produise si nous accordons aux banques le droit de vendre des produits
d'assurance.
Nous conseillons donc d'étudier plus à fond toutes les
implications qu'amèneraient la domination dans l'industrie des services
financiers par les grandes banques. Nous n'arriverons tout simplement pas
à saisir toutes conséquences que pourrait avoir une telle
concentration dans notre industrie.
Je vous demande donc d'analyser très attentivement toute
pénétration généralisée du marché des
assurances par les banques.
M. le Président, je laisse la parole maintenant à Maurice
Bousquet. Maurice.
M. Bousquet (Maurice): Merci beaucoup, M. Orser. M. le
Président, Mme la ministre, distingués membres de la commission,
permettez-moi
tout d'abord de me présenter. Je suis Maurice Bousquet et
j'occupe la position de vice-président régional pour la London
Life au Québec. Je me présente devant vous avec 25 années
d'expérience dans le domaine des assurances de personnes, ayant
oeuvré dans deux compagnies québécoises et deux compagnies
nationales. J'ai également travaillé pendant trois ans à
l'ACCAP à titre de directeur des communications.
Comme vient de le mentionner M. Orser, je voudrais maintenant aborder
deux points spécifiques présentés dans le Rapport
quinquennal. Ces deux points ont été soulevés dans le
dossier que nous vous avons présenté.
Tout d'abord, la question des liens commerciaux. De nombreuses
discussions ont eu lieu, au cours des dernières années, en ce qui
concerne l'abolition ou la restriction des liens commerciaux de
propriété. Il s'agit là d'un problème important au
niveau fédéral.
De notre point de vue, votre rapport aborde le problème avec
maturité et circonspection. Vous attirez notre attention sur les dangers
qui peuvent survenir à la suite de conflits d'intérêts et
de transactions intéressées en raison de l'influence excessive
que pourrait tenter d'exercer un actionnaire majoritaire qui est à la
fois une compagnie commerciale.
Vous concluez que les liens commerciaux en amont sont
bénéfiques pour une compagnie financière, et nous sommes
d'accord avec vous sur ce point. Le London Insurance Group est détenu
majoritairement par la Corporation financière Trilon. Cette
dernière détient 60 % des actions émises du London
Insurance Group, les autres étant détenues par le public et
cotées en bourse. De son côté, la Corporation
financière Trilon est détenue à 50 % par Brascan Ltd., une
compagnie qui a des placements importants dans diverses entreprises
commerciales. Par conséquent, nous sommes une compagnie détenant
un lien commercial et des liens commerciaux en amont.
Au fil des années, le personnel de la corporation
financière Trilon et de Brascan Ltd. nous a toujours apporté une
aide en nous fournissant conseils et leadership. Et, au cours de ces
années, nous avons constaté que nos propriétaires
majoritaires évitent soigneusement toute influence qui pourrait mener
à une situation conflictuelle. Nous croyons qu'il y a de la place au
sein de notre industrie pour des institutions financières et des
compagnies ayant une formule de propriété largement diffuse et
d'autres telles que la nôtre, détenues par un proprié-taire
majoritaire qui leur fournit son soutien. Nous croyons toutefois qu'au moins 35
% des actions d'une institution financière devraient être
détenues par le public. Nous croyons également que l'acquisition
d'une compagnie de services financiers devrait être assujettie à
l'approbation du gouvernement. Toutes ces garanties sont nécessaires
pour que notre industrie puisse conserver la confiance des consommateurs. La
propriété d'une institution financière comporte des
obligations particulières. Nous sommes d'accord avec le fait que la
propriété d'une compagnie financière est un
privilège et non un droit.
Votre Rapport fait également mention des compagnies
financières qui détiennent des liens commerciaux en aval. Nous
présumons que vous parlez ici d'une compagnie d'assurances
possédant des actions dans une filiale ayant un vaste champ
d'activités. Vous suggérez qu'il devrait exister certaines
restrictions à ce niveau afin que toutes filiales ayant des liens
commerciaux en aval possèdent des champs d'activités connexes au
commerce de l'assurance. Nous sommes en partie d'accord avec cette approche,
mais nous exprimons une certaine inquiétude, car la liste de ces
filiales financières admissibles n'est guère exhaustive. Par
ailleurs, j'ai entendu aujourd'hui, avec beaucoup de plaisir, la ministre
indiquer qu'effectivement, la liste n'était pas exhaustive et qu'il
pourrait s'ajouter, au fil des changements dans l'industrie, d'autres
circonstances qui feraient que la liste pourrait être
rallongée.
Nous croyons que n'importe quelle liste de filiales financières
admissibles possédant des champs d'activités connexes au domaine
de l'assurance devrait comporter une certaine part de flexibilité face
aux conditions changeantes du marché. Nous serions d'accord pour que ces
filiales soient reliées d'une certaine manière aux services
financiers que nous y offrons, y compris les services d'assurance et
d'accident-maladie évidemment, plutôt que d'être
reliées seulement aux produits d'assurance.
Nous sommes d'accord qu'une compagnie d'assurances ne doit pas
détenir plus de 30 % des actions d'une société
donnée. Nous maintenons ce point de vue dans le contexte où la
compagnie peut continuer à effectuer des placements à titre de
partenaire silencieux, sans être considérée comme une
filiale admissible. Il est particulièrement important que les compagnies
possédant des liens commerciaux en aval non conformes aux normes
puissent conserver ces droits acquis et profiter du statu quo
Pour ce qui est de l'approche générale prise dans le
Rapport relativement à la propriété des institutions
financières du Québec, nous appuyons la position qui a
été adoptée. Il est important de ne pas faire preuve de
trop de protectionnisme dans ce domaine à un moment où le
marché global est devenu une réalité.
Finalement, laissez-moi vous dire que nous sommes encouragés par
vos vues sur les accords de réseaux. Il s'agit là d'un facteur
important parmi les compagnies financières affiliées
détenues par un même propriétaire comme c'est le cas pour
le London Insurance Group. Nous avons accumulé une bonne somme
d'expérience en essayant de trouver des manières de
capitaliser
sur les forces de nos réseaux de distribution. Laissez-moi vous
dire que ce n'est pas nécessairement facile, particulièrement
lorsque vous travaillez avec des représentants de vente hautement
compétents qui travaillent à commission. Les représentants
de vente entretiennent des liens étroits avec leurs clients et
protègent scrupuleusement leur clientèle. Le client
bénéficie de plusieurs façons de l'interaction des
réseaux de distribution. Nous nous assurons évidemment que les
renseignements financiers confidentiels sur les clients de l'une de nos
compagnies affiliées ne soient jamais divulgués à une
compagnie sans l'autorisation du client. Par ailleurs, nous sommes d'avis que
les ventes liées devraient être interdites et nous jugeons
nécessaire que des restrictions soient imposées à ces
dernières. Maintenant, je vais demander à mon collègue, M.
Chénier, de vous parler et, par la suite, nous pourrons répondre
à vos questions avec plaisir.
M. Chénier (Gerry): M. le Président, Mme la
ministre, membres distingués de la commission, c'est un plaisir pour moi
d'être avec vous aujourd'hui et surtout après 36 ans de service au
sein de la London Life, tant après 10 ans de service sur le terrain dans
différentes positions, en tant que représentant, directeur,
directeur régional, tant dans le domaine de l'assurance collective que
dans l'assurance individuelle, trois stages au siège social et, enfin,
directeur administratif de notre compagnie depuis près de 20 ans.
J'aimerais aborder le sujet des transactions intéressées
et des conflits d'intérêts dont traite le Rapport. Le London
Insurance Group admet que les gestionnaires et les propriétaires
d'institutions financières ont une énorme responsabilité
envers le public que celle-ci dessert, et nous sommes donc d'accord sur la
nécessité d'imposer certaines restrictions interdisant les
transactions intéressées ou pouvant porter des conflits
d'intérêts.
C'est uniquement à cette condition que nous pourrons nous
assurer, en fait, de conserver le haut niveau de confiance que les
investisseurs et les consommateurs ont en nos compagnies. Il nous tarde de voir
la formulation de toute modification apportée aux lois touchant aux
transactions intéressées et aux conflits d'intérêts
et, plus particulièrement, au rôle tenu par les directeurs
indépendants siégeant aux conseils d'administration de compagnies
financières.
Le rapport entrevoit la création d'un comité de
déontologie - ou d'une structure similaire - lequel verrait à
fixer les responsabilités des directeurs, afin de s'assurer que leurs
compagnies gèrent adéquatement les affaires de leurs clients.
Nous accordons, depuis de nombreuses années, beaucoup d'importance
à cet aspect dans nos compagnies. Le London Insurance Group
possède, par exemple, son propre comité de déontologie
commerciale. Et le conseil d'administration de la
London Life est également pourvu d'un comité similaire.
Les membres de ces comités ne sont affiliés en aucune
façon à l'actionnaire majoritaire.
En ce qui a trait à la London Life, ses directeurs
représentent les intérêts des détenteurs de polices
et portent le nom de directeurs des détenteurs de polices. Nos
comités de déontologie commerciale ont la responsabilité
de faire respecter notre code de déontologie commerciale et de voir
à ce que nos employés, nos directeurs et les actionnaires de
notre compagnie ne se placent pas en situation de conflit
d'intérêts.
Tout investissement ou prêt substantiel ou toute activité
commerciale significative impliquant la compagnie doivent être
approuvés par le comité de déontologie commerciale, et
c'est là une pratique que nous avons depuis le début de 1986,
depuis quatre ans. Nous l'avons adoptée, et ce projet, cette
chose-là, le comité a été approuvé par les
actionnaires à ce moment-là.
Le rapport annuel de 1989 de la Corporation Lonvest, le nom que portait
anciennement le London Insurance Group et la London Life, contenait des
rapports indépendants de ces comités. On pouvait, d'ailleurs,
lire dans ce rapport, et je cite: "Le moyen le plus efficace de régler
les conflits d'intérêts de toute sorte est de compter sur l'effet
conjugué d'un cadre réglementaire à la fois strict mais
pratique, d'une part, et d'un mécanisme approprié de
contrôle interne, d'autre part."
Nous poursuivions en disant: "II revient à l'État
d'élaborer ce cadre réglementaire exhaustif. Quant aux
institutions financières canadiennes, elles ont chacune la
responsabilité d'adopter les mécanismes de contrôle
internes qui renforcent ce cadre réglementaire." En d'autres termes,
nous appuyons entièrement votre projet de créer des
mécanismes à la fois stricts mais pratiques de contrôle des
conflits d'intérêts. Nous vous offrons de partager avec vous les
expériences de notre comité de déontologie commerciale et
d'organiser une rencontre entre notre contentieux et les concepteurs de votre
projet de loi.
J'aimerais aussi profiter de l'occasion pour souligner à quel
point nous sommes heureux des intentions du gouvernement d'éviter ce que
certains appellent le double comptage du capital et de fixer de nouvelles
normes pour s'assurer de la réelle valeur du capital des compagnies
d'assurances au Québec. Cette approche permettra d'accroître la
confiance des investisseurs et d'harmoniser les normes réglementaires de
capital qui existent au Québec avec celles d'autres juridictions.
Merci de votre attention. Maintenant, M. Orser. Il y aura des
questions?
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie. Mme la
ministre, la parole est à vous.
Mme Robic: Oui, M. le Président, je vous remercie. Je vous
remercie, messieurs, de votre présentation. Je voudrais vous
féliciter de la création de cette nouvelle compagnie
québécoise et je veux lui souhaiter longue vie. La Protectrice,
c'est un beau nom. (19 h 45)
Je ne vous ai pas consultés quand j'ai tenu mes consultations
privées sur mon Rapport quinquennal, mais on voit qu'on a
été élevés dans la même famille puisque mon
Rapport quinquennal semble faire consensus chez vous. Vous avez entendu
d'autres intervenants qui m'ont reproché de reculer en ne permettant
plus des liens commerciaux en aval, mais plutôt leur disant que s'ils
voulaient avoir des activités commerciales et industrielles, qu'ils
devraient les avoir en amont. Vous, vous êtes d'accord avec ce principe.
J'aimerais savoir quelles sont les raisons pour lesquelles vous appuyez ce
principe? Où sont les dangers?
M. Bousquet: II s'agit essentiellement, Mme la ministre, de
s'assurer qu'il existe des balises. J'assume, Mme la ministre, que je peux
répondre à la question ou est-ce que votre question s'adressait
à M. Orser?
Mme Robic: Certainement. À celui qui veut répondre.
Il n'y a pas de problème.
M. Bousquet: Comme j'ai traité de la question dans mes
remarques, si vous me permettez d'y répondre, il s'agit essentiellement,
je pense, de la nécessité d'établir des balises pour la
protection du consommateur afin d'éviter, si vous me permettez
l'expression, que par accident ou autrement une compagnie fasse l'acquisition
d'un canard boiteux qui pourrait mettre en danger l'existence même
peut-être de la compagnie d'assurances. Étant donné que
notre compagnie fait partie de la structure dont nous avons discuté il y
a quelques minutes, bien, c'est facile pour nous d'arriver aux mêmes fins
en utilisant le holding auquel nous appartenons. Si je peux donner un exemple
bien concret, nous sommes à l'heure actuelle en voie de mettre en place
une agence de voyages pour servir les besoins de tous les partenaires du groupe
Trilon, puisqu'il y a sûrement des économies d'échelle
à réaliser de ce côté-là. Il n'y a pas de
difficulté à arriver à nos fins en créant cette
filiale qui relèvera de Trilon. Donc, il y a pour nous cette
facilité d'exploiter, de créer des filiales ou de faire
l'acquisition par l'entremise de notre réseau.
M. Orser: Mr. Chairman, may I comment in English on the
questions. I have had some experience and exposure to the question of the
downstream investment for many years, because it has been a controversial
matter in the industry ever since the industry association, the
CLHIA, of which I was chairman two years ago, began in 1984 to put
together its proposals for the Federal Government. And the question of the
constraint on downstream investing by insurance companies was a matter of
considerable debate at that time. But the industry found a position and put
that position to the Federal Government. Now, I should say that, at that time
and since, we have concerned ourselves with downstream investing in related
businesses and other financial institutions, and our discussions largely
surrounded the proportion of assets or capital which could be committed to that
downstream position. We view that as, of course, a question related to the
adequacy of capital and surplus, and very closely related. The concern that we
have if one allows too broad a definition of this and, certainly, and I would
say emphatically, if one were considering investment in downstream industrial
or commercial enterprises, is that one would be faced with the question of the
liquidity or the marketability of that investment, particularly if there were a
dominant or a control position, and hence be concerned about the effect of that
on the solvency of the institution. This is clearly an important matter of
principle, and if one thinks about failures in financial institutions in North
America in the last three, four or five years, a great deal of this has
resulted from usually poorly advised investment in real estate or in other
nonfinancial institutions, whereupon attempting to realize on investments it
was discovered that these could not be liquidated, could not be marketed. And
one step led to another, and that was the case in principle and certainly was
the case in the two western banks. Then if one goes back even further, you will
find in the early trust company failure in the 1980s a very important question
for you and a very important question to us in the insurance industry.
As you know, Mr. Chairman, the Canadian industry has now established a
consumer protection corporation which, as I understand, will be linked in
legislation in Québec if there is agreement on the standards of capital
and surplus. That too is quite important. The first meeting in fact of the
board of directors of the Compcorp, as it is called, is now in business and a
principal meeting of its directors takes place in Toronto tomorrow. And the
criteria or rules which will be used by Compcord to evaluate the acceptability
of capital and surplus position will be very important to us all. Of course, in
the industry, we hope that we can harmonize and have a uniform set of rules in
all Provinces, including Québec and my understanding is that we are
moving in that direction. Mr. Chairman, I hope that that is helpful.
Le Président (M. Lemieux): Mme la ministre. Mme Robic:
Thank you, because I think
your remarks are very important. You support the elimination of the
double-counting of capital. Could you elaborate on that?
M. Orser: It is difficult to elaborate on it without getting into
a long, complicated... Our concern about the double-counting of capital is the
same thing. It can result from a mechanical positioning of the elements in the
business and a pyramid-type structure in what appears to be an adequate capital
and surplus position as the result of double-counting when, in fact, that is
not the case. That is a great oversimplification, but I might say that it is a
great concern of the expert technical committees of our association and has
been for sometime.
Mme Robic: Could we keep part of that capital counted... Is there
a possibility that there is a part of it that could be counted with another
company?
M. Orser: Mr. Chairman and Madam Minister, I am not an expert on
this. I understand that there have been discussions in Ottawa where some
acceptable proportion of the second counting might be considered, but I really
cannot tell about that. I should say that I am sure that our industry would be
pleased to provide technical people to assist in this, because there has been a
great deal of work done on it in the last couple of years. As you know, it was
an issue which separated some of the Quebec-based companies from the consensus
of the other companies federal and from other Provinces.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, Mme la ministre,
on m'informe que votre temps est terminé. M. le député de
Labelle, et nous reviendrons par après si c'est nécessaire.
Mme Robic: D'accord.
M. Léonard: M. le Président, bienvenue aux gens du
London Insurance Group. Je comprends que Mme la ministre entend un son de
cloche différent de ceux qu'elle a entendus cet après-midi et
elle en est tout sourire actuellement. Ça fait du bien après une
journée comme celle que nous avons connue, n'est-ce pas? Je voudrais
poser la question: Votre siège social est-il bien à London,
Ontario?
M. Chénier: En fait, London Life est situé à
London, Ontario. La compagnie a été établie en 1874, et,
comme il a été mentionné par M. Orser, nous sommes au
Québec depuis 1925 et en assurances collectives depuis 1929.
M. Léonard: Je vois. C'est pour ça qu'on peut
souhaiter la bienvenue à une compagnie dont le siège social n'est
pas au Québec, actuellement, et qui vient participer à nos
travaux.
Je voudrais savoir, puisque vous dites qu'il y a des problèmes
qui se posent, quels sont les problèmes que vous avez
détectés ici au Québec au cours des dernières
années? En particulier, peut-on savoir quelles ont été les
faillites des compagnies d'assurances au Québec depuis au moins 25
ans?
M. Chénier: j'aimerais peut-être mentionner que
notre approche est plutôt une approche préventive que corrective.
nous croyons qu'il est toujours plus sage de prévoir que d'avoir
à corriger des situations qui sont très difficiles à
corriger une fois qu'elles sont en place. c'est donc dire que
l'expérience de certains qui est vécue soit au canada ou dans
d'autres pays, qui sont des expériences malheureuses en raison du manque
de contrôle, semble justifier, peut-être pas en 1984 ou en 1990, la
prise de position. évidemment, si on retourne en arrière, on est
peut-être porté à croire que c'est une approche non
nécessaire, mais on juge qu'actuellement, plus les années
passent, plus dans un monde moderne il est important de réviser et de
moderniser les lois. c'est une mesure préventive beaucoup plus que
corrective.
M. Léonard: Donc, vous admettez qu'au cours de ces 25
années, if n'y a pas eu de problème au Québec et qu'il n'y
a pas d'administrateurs de nos compagnies d'assurances qui ont fait des
placements qui ont conduit leur compagnie d'assurances à la
faillite.
M. Chénier: II s'agit d'aller plus loin que le
Québec et de voir ce qui se passe dans les autres provinces, aux
États-Unis et sur la scène mondiale. Peut-être que
j'aimerais demander à mes confrères, s'ils ont des remarques? Is
there any need for us to feel that it is not only a corrective measure, but
what I am saying is that it is a preventive measure more than corrective. Any
comment?
M. Orser: I guess, Mr. Chairman, M. le Président, that our
industry or we at least feel that we would like to preserve the unblemished
record that the life insurance industry in Canada has and, in that way,
distinguish ourselves from the banks and from the trust companies of whom a
number have failed. That is an enviable record and we are very jealous of
it.
M. Léonard: je comprends bien, mais, quand même,
avant de dire qu'ici il y a des problèmes, il faudrait quand même
faire l'historique. vous prévoyez que, peut-être, il y aurait des
problèmes. disons que vous avez acquis une charte
québécoise. qu'est-ce qui vous a motivés à
acquérir une charte québécoise plutôt que de faire
des affaires dans l'assurance purement et simplement, étant donné
que la loi vous permet de venir faire des assurances au québec et
que
vous n'êtes pas obligés d'avoir une charte
québécoise?
M. Bousquet: II n'y a pas d'erreur, M. le Président, que
les législations québécoises des dernières
années ont rendu, comme ça a été
démontré plus tôt par d'autres intervenants, la
présence au Québec, par l'entremise d'une charte
québécoise, très attrayante. C'est simplement pour se
positionner dans le but de mieux tirer avantage de toute possibilité que
nous pourrions avoir de cette charte québécoise. C'est en
prévision d'un déploiement stratégique au Québec,
que notre charte québécoise pourra nous permettre et que notre
charte fédérale ne pourra peut-être pas nous permettre.
C'est un mouvement stratégique de la part de la compagnie.
M. Léonard: Si je comprends bien, quand même, la
charte québécoise et la loi québécoise permettent
aux entreprises d'assurances de faire des affaires et c'est une loi assez
attrayante pour vous incorporer ici au Québec plutôt que de rester
là-bas.
M. Bousquet: C'est ça.
M. Léonard: Donc, la loi a des avantages, elle n'a pas que
des problèmes.
M. Chénier: Absolument.
M. Bousquet: Sans aucun doute.
M. Léonard: Merci bien.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député de Labelle? Mme la ministre, avez-vous d'autres questions
ou si vous avez terminé?
Mme Robic: Oui, M. le Président....
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que je peux avoir
consentement, eu égard à l'ordre de la Chambre de terminer nos
travaux à 20 heures, pour poursuivre au-delà de 20 heures?
M. Léonard: Oui, on peut...
Le Président (M. Lemieux): Ça va, consentement,
alors consentement, Mme la ministre.
M. Léonard: On va terminer ce mémoire.
Mme Robic: Merci, M. le Président. Le député
de Labelle vous posait la question à savoir pourquoi vous recherchez une
charte provinciale. Il y a certainement des avantages de venir s'établir
au Québec, on le reconnaît facilement. Malgré mon Rapport
quinquennal, vous voyez encore des avantages à venir vous établir
au Québec. Le Rapport quinquennal ne vous a pas fait peur. Vous
êtes d'accord que je ne vous restreint pas, mais que j'incorpore un
élément de prudence dans le décloisonnement, tout en vous
permettant d'agir sur plusieurs fronts et de vous développer comme
société québécoise.
Je voudrais rappeler au député de Labelle qu'on
opère ici depuis 25 ans, mais qu'il y a eu des piliers, jusqu'à
1984, qui faisaient que nos institutions étaient très
limitées dans leurs possibilités d'investissement et que, depuis
1984, il y a eu une ouverture. Encore une fois, on l'a dit, on est tous
d'accord à dire que ça a été une très bonne
ouverture pour nos compagnies d'assurances. Il faut continuer, il faut
moderniser cette loi-là après six ans; il faut préparer
nos compagnies d'assurances pour faire face aux défis de l'avenir. Nous
croyons que notre Rapport quinquennal tient compte de cela. Encore une fois, on
gère l'avenir, on ne gère pas le passé. On veut
éviter d'avoir à subir certains sorts qu'ont connus d'autres
législations. On veut donc bien équiper nos compagnies
d'assurances, mais, encore une fois, on ne peut pas ignorer que l'on doit
protéger l'épargne de nos concitoyens. Donc il faut être
prudent également. C'est ce qu'on tente de faire avec le Rapport
quinquennal. On vous remercie infiniment de votre présence ici
aujourd'hui, et vous pouvez être sûrs que vos remarques, pour nous,
sont très importantes. Merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la ministre. M. le
député de Labelle.
M. Léonard: Elle en était aux conclusions?
Ça va.
Le Président (M. Lemieux): Alors, con elusions et je
reviendrai pour terminer la conclusion de Mme la ministre.
Mme Robic: Moi, j'ai conclu, là.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé?
Ça va.
M. Léonard: Je remercie les gens du London Insurance Group
d'être venus ici aujourd'hui, quand même, mais je pense qu'à
la place de la ministre je serais quand même un peu inquiet, parce que,
finalement, le seul écho positif qu'elle a eu pratiquement,
après-midi, c'était de gens dont le siège social est en
dehors du Québec. Je pense que, sur ce plan-là, j'apprécie
qu'ils utilisent la loi du Québec présentement pour s'incorporer.
Donc, sur ce plan, il y a des avantages à utiliser la loi du
Québec, et je ne vois pas pourquoi on la changerait maintenant.
Quant aux problèmes futurs, il y a quand même une
expérience considérable qui a été acquise ici, au
Québec, en termes de gestion de l'assurance, et ce n'est pas non plus
d'hier que
nos gens sont dans l'assurance, et nous n'avons pas connu de faillite.
Je veux bien qu'on nous parie de problèmes éventuels, je pense
aussi qu'il faut avoir toute la prudence qu'il faut, comme législateurs,
en terme d'assurances et de gestion des capitaux des gens, mais, quand
même, il ne faudrait pas charrier non plus et dire qu'il faut reculer sur
tout ce qui a été fait depuis 1984, qui a permis le
développement du Québec, de compagnies d'assurances,
l'utilisation des capitaux au développement du Québec en
général. Je pense qu'avant de toucher à ça il
faudrait y faire bien attention, et c'est l'ensemble des témoignages qui
en sont à ce stade, après-midi.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Labelle. Est-ce que vous avez terminé, Mme la
ministre? Conclusion?
Mme Robic: Terminé.
Le Président (M. Lemieux): Alors, nous vous remercions de
votre participation à cette commission parlementaire et nous devons
maintenant suspendre nos travaux. Nous ajournons nos travaux, je m'excuse,
jusqu'à demain matin, 10 heures. Maintenant, nous devons nous rendre en
Chambre, je crois qu'il y a probablement un vote en Chambre. Merci de votre
collaboration.
(Fin de la séance à 20 h 4)