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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le vendredi 14 mai 1999 - Vol. 36 N° 7

Interpellation : La fiscalité municipale


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Table des matières

Journal des débats


(Dix heures sept minutes)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la commission de l'aménagement du territoire ouverte. Le mandat de la commission pour cette séance est de procéder à l'interpellation adressée à la ministre des Affaires municipales et de la Métropole par le député de Laurier-Dorion sur le sujet suivant, soit: La fiscalité municipale.

Alors, M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements d'annoncés?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gagnon (Saguenay) est remplacé par M. Lachance (Bellechasse) et M. Whissell (Argenteuil) est remplacé par M. Sirros (Laurier-Dorion).

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, je constate qu'on a déjà commencé avec une douzaine de minutes de retard, alors on pourrait convenir d'emblée que nous allons dépasser d'une douzaine de minutes nos travaux.

Une voix: ...M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Ah, sept minutes? Très bien. De sept minutes.

Alors, ceci étant dit, avec le consentement des membres, je me permets de rappeler brièvement le déroulement d'une séance d'interpellation. Dans un premier temps, le député de Laurier-Dorion, qui a demandé l'interpellation, aura un temps de parole de 10 minutes, suivies de la ministre pour également 10 minutes. Par la suite, des périodes de cinq minutes seront allouées selon l'ordre suivant: un député de l'opposition suivi de la ministre, suivie d'un député du groupe ministériel. Vingt minutes avant la fin de la séance, j'accorderai une période de 10 minutes de conclusion à la ministre et un temps équivalent au député de Laurier-Dorion. Alors, sur ça, sans plus de préambule, je laisse la parole au député de Laurier-Dorion pour une première période de 10 minutes.


Exposé du sujet


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Je constate que la ministre compte les minutes. J'espère qu'elle n'envisage pas que ça sera tellement torturant pour elle qu'elle va vouloir sortir le plus vite possible. Je suis sûr qu'on va pouvoir aujourd'hui échanger amicalement, comprendre mieux un peu les orientations qu'elle veut entreprendre dans un dossier qui, effectivement, se fait beaucoup parler par beaucoup de monde, et non seulement depuis tout récemment, parce que la question de la fiscalité municipale, qui est le sujet de l'interpellation, ça occupe l'avant-scène du dossier municipal depuis bon nombre d'années, finalement... Des gouvernements successifs ont joué dans cette question-là.

Plus récemment et de façon plus intense, peut-être, on a vu, il y a deux ans à peu près, ce que j'ai qualifié de soi-disant entente qui avait été conclue entre le gouvernement puis les municipalités pour transférer un montant de 375 000 000 $ aux municipalités afin de libérer une marge de manoeuvre fiscale pour le gouvernement du Québec et la faire assumer par les municipalités, avec toutes sortes d'arrangements prévus à cette entente-là, et une des conditions essentielles de cette entente était que, par la suite, on pourrait négocier – et je souligne le mot «négocier» – un nouveau pacte fiscal entre le gouvernement du Québec et les municipalités afin de pouvoir remettre sur des bases nouvelles toute la question de l'organisation fiscale et les conséquences, donc, sur les contribuables de l'organisation de nos municipalités.

(10 h 10)

Cette entente a donné naissance à la commission Bédard, commission mise sur pied justement pour examiner et voir comment est-ce qu'on pourrait procéder à cette nouvelle organisation. D'ailleurs, je salue la secrétaire de la commission qui est à côté de la ministre, ici. Je pense d'ailleurs que les deux se connaissent depuis fort longtemps, si ma mémoire est bonne, parce que la secrétaire de la commission Bédard a également été sous-ministre ou sous-ministre adjointe au ministère antérieur que la ministre occupait. Il y a une succession qui se fait, donc on peut imaginer qu'il y a une certaine complicité entre les deux, n'est-ce pas?

Une voix: ...

M. Sirros: Pardon? Alors, en saluant la présence, ici... Pour qu'on puisse mieux comprendre où la ministre se situe également par rapport à la commission Bédard puis à ses recommandations, je disais que finalement ce rapport a tenu aussi l'avant-scène des discussions avec les municipalités pendant presque un an, a tenu des audiences publiques, a donné naissance à un rapport qui a été déposé tout récemment. Entre-temps, on a une nouvelle ministre qui est arrivée sur la scène, et elle a cumulé des fonctions qu'antérieurement deux de ses collègues occupaient, faisant la fusion, si je peux utiliser ce mot, entre Montréal et le monde municipal, la métropole. Alors, là, comme elle disait, elle avait le bénéfice d'avoir deux de ses collègues qui avaient déjà essayé de faire des choses, avaient cassé un peu leur nez sur un certain nombre de choses – je ne sais pas s'ils ont défoncé un peu le mur – avec le résultat qu'on a vu, parce qu'on a vu tout récemment aussi – hier, je pense – la ministre déposer le projet de loi qui abolissait ce qui avait été créé il y a quelques années. Donc, on est revenu à la case départ, de ce point de vue de Montréal.

Mais tout ça pour dire qu'on parle beaucoup de fiscalité municipale, qu'on a investi beaucoup d'énergie, beaucoup d'argent, beaucoup d'efforts, de la part de beaucoup de personnes, à discuter puis à voir comment est-ce qu'on pourrait réorganiser toute cette question de la fiscalité municipale. Mais, de plus en plus, depuis le dépôt du rapport Bédard, depuis même la nomination de la ministre, on essaie de saisir ce sur quoi la ministre, elle, veut orienter ses actions, et il devient de plus en plus évident, quand on regarde les déclarations de la ministre, les interventions qu'elle fait, que ce n'est pas très clair. Elle évite de nous indiquer vers où elle veut s'en aller et elle n'a même pas pris la peine d'entériner le rapport Bédard. Elle a fait quelques louanges de nature générale sur l'intégrité intellectuelle du rapport, la densité intellectuelle du rapport, et je dois dire, pour ma part, M. le Président, qu'effectivement j'en conviens, c'est très intellectuellement dense et correct. Un peu plate, à la lecture, mais, quand même, ce n'est pas un sujet des plus passionnants, ce n'est pas un roman, c'est un rapport complexe et assez substantiel. Mais la ministre, elle, s'est bien gardée de l'entériner comme tel. Elle ne nous a pas dit c'est quoi, pour elle, le rapport Bédard.

Mais, bien avant ça – et c'est un peu le sens de l'intervention qu'on fait aujourd'hui – il y a trois ou quatre questions sur lesquelles on aimerait avoir une indication de la ministre pour mieux saisir vers où on s'en va et pourquoi, et surtout pourquoi. Donc, en premier lieu, la première question qu'on aimerait échanger durant les deux heures que nous avons avec la ministre, ça serait justement de saisir pourquoi la ministre veut réorganiser l'environnement municipal, quel est le résultat escompté, ça va être pour le bénéfice de qui. Ce n'est sûrement pas pour tenir occupés des fonctionnaires qu'on parle de fusions, qu'on parle de réorganisation. De toute façon, la sécurité d'emploi existe, ils n'ont pas besoin d'avoir tout ça à faire juste pour se tenir occupés. Donc, la ministre doit avoir dans sa tête une raison qui la motive à réorganiser la fiscalité municipale.

Elle parle de réorganiser le territoire, elle parle de réorganiser les lois du travail, en tout cas elle parle de lancer un chantier assez important qui va justement changer le visage du Québec pour longtemps au niveau de son organisation territoriale, mais elle ne nous a pas encore dit pourquoi elle veut faire ça. Elle nous a certes donné quelques généralités style, oh, la compétitivité dans un monde de globalisation, les États doivent avoir des cités et villes qui sont de nature à être capables de compétitionner sur la scène mondiale – ça, ça peut peut-être s'appliquer pour Montréal – mais reste à voir pourquoi et comment. Mais, au-delà de ces généralités, elle ne nous a pas dit que ça va être pour le bénéfice, par exemple, du contribuable. Même, elle a dit, à un moment donné, lors du congrès de l'UMQ, qu'elle ne fait pas ça pour baisser le compte de taxes de qui que ce soit. Alors, moi, je me dis: Quand on veut entreprendre quelque chose d'une envergure aussi importante, il faut savoir quel est le résultat escompté, et le résultat escompté, il faut être capable de le mesurer en termes de bénéfice pour le citoyen. Le bénéfice pour le citoyen, faut que ce soit mesurable par une façon concrète, et, généralement, la façon concrète, c'est: on le mesure soit au niveau des taxes qu'on paie soit au niveau de la qualité des services qu'on reçoit. Ce sont les deux éléments qu'on peut mesurer pour voir l'effet positif ou négatif des actions que les gouvernements prennent.

Alors, la ministre ne nous a pas encore dit pourquoi elle veut faire toute cette question-là. Elle nous parle des fois du trop grand nombre de municipalités que nous avons, mais, en soi, je lui fais remarquer qu'un grand nombre de municipalités n'est pas un tort nécessairement. Il y a la France qui a à peu près six ou sept fois plus de municipalités que nous, toutes proportions gardées de population. Ça semble fonctionner. Ils ont des structures qui permettent de tenir compte de certains enjeux régionaux et de les mener à bien sans nécessairement réduire le nombre de municipalités, qui permettent aux citoyens d'avoir une identification immédiate et réelle avec leur localité et d'avoir une emprise aussi sur leurs élus municipaux afin de garder leur niveau de taxes à un niveau acceptable. Alors, première chose, on fait ça pour qui et pour quoi?

La deuxième chose qu'on aimerait comprendre mieux de la ministre, c'est l'échéancier dont elle parle. On va faire ça dans quel laps de temps? La ministre nous dit souvent que c'est pour l'automne, qu'on va faire ça pour le mois de décembre ou pour l'automne. Les maires nous parlent du 20 octobre comme date limite nécessaire pour préparer leur budget, par exemple, mais les maires, quand ils disent ça, ils parlent du volet fiscalité, point. La ministre, quand elle parle, elle dit: C'est un tout. Il y a là-dedans la fiscalité, la réorganisation des lois du travail et la réorganisation territoriale, et le tout se fait ensemble, on ne peut pas détacher l'un par rapport à l'autre. Donc, on veut l'entendre parler un peu sur ça aussi, l'échéancier. C'est-u réaliste de penser qu'on va réorganiser les lois du travail avant de réorganiser le territoire des municipalités, si besoin est de le réorganiser, et de changer la fiscalité municipale, le tout pour le 20 octobre ou fin décembre, qui est la fin de la session, ici, parlementaire, ou est-ce qu'on va plutôt se rabattre sur ce que l'entente prévoyait déjà, c'est-à-dire que, s'il n'y a pas d'entente fiscale, de nouveau pacte fiscal d'ici, je pense, le mois de décembre ou octobre, l'entente se poursuit pour un certain temps dans l'an 2000, ce qui donnerait tout l'an 2000 à la ministre pour mener à terme ces opérations-là? Alors, quel est l'échéancier? C'est-u réaliste pour la ministre d'envisager... Déjà, M. le Président?

Le Président (M. Vallières): Oui, déjà 10 minutes d'écoulées.

M. Sirros: Mon Dieu! c'est passionnant comme sujet, parce que j'avais au moins deux autres questions au niveau de l'approche que la ministre veut entreprendre et de la relation qu'elle a avec le rapport Bédard.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors...

M. Sirros: Juste une dernière – 20 secondes, M. le Président – c'est si elle peut nous dire, le rapport Bédard, c'est quoi pour elle. C'est-u le «blueprint» que disent les Anglais, c'est-u le plan de l'ingénieur pour la construction de la maison, qu'on va donc suivre d'assez près, ou est-ce que c'est simplement un rapport qu'on met sur l'étagère avec les autres rapports, dans lequel on va piquer ici et là des idées comme on peut aller en chercher ailleurs? C'est quoi pour elle, ce rapport?

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, merci, M. le député de Laurier-Dorion. La parole est maintenant, pour cette séquence de 10 minutes, à Mme la ministre.


Réponse de la ministre


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier le porte-parole de l'opposition pour le ton d'échange, de dialogue avec lequel il a débuté nos travaux ce matin. Je voudrais rappeler le mandat de la Commission nationale sur la fiscalité et les finances locales. Dans le décret constituant la Commission, le gouvernement lui demandait d'examiner les sources de financement des instances locales, d'identifier les correctifs nécessaires et de proposer des mesures susceptibles d'améliorer l'équité et l'efficacité du régime fiscal municipal ainsi que la situation financière des municipalités. Conformément à l'entente conclue avec l'Union des municipalités du Québec en octobre 1997, la Commission devait aussi aborder des questions comme la diversification des sources de revenus, la fiscalité d'agglomération – c'était dans le mandat de la Commission – et la décentralisation des responsabilités gouvernementales. Alors, c'est un mandat qui soulevait des questions de fond touchant non seulement le financement du secteur municipal au sens restreint du terme, mais aussi la question de ses responsabilités, de son organisation et de ses structures.

(10 h 20)

Alors, l'amélioration de l'équité de la fiscalité municipale amène à examiner des solutions comme la régionalisation de la gestion et du financement de certains services, qui supposent presque nécessairement des modifications aux structures municipales actuelles. D'ailleurs, je crois bien qu'à la question posée par le député de Laurier-Dorion, pourquoi – je pense que c'est la première question qu'il a posée – la réponse immédiate que je peux donner, c'est, dans le fond, pour mieux se développer. Comment doit-on s'organiser pour mieux se développer? Peut-on rester organisés comme nous le sommes présentement? Et cette organisation qui est la nôtre présentement est à peu près équivalente à celle qui était en place déjà il y a 30 ans, avant la Révolution tranquille.

À dire vrai, l'organisation municipale au Québec n'a pas substantiellement été modifiée par la Révolution tranquille, comme si l'essentiel de tous les efforts, de toutes les énergies qui ont été exprimées au moment du déclenchement de la Révolution tranquille et depuis lors l'avaient été dans d'autres secteurs – entre autres, bien évidemment, l'éducation en priorité mais aussi l'économie et d'autres secteurs – alors qu'au même moment, je vous rappelle, déjà, par exemple, notre voisin ontarien mettait en place, en 1967, la commission Smith, appelée The Ontario Committee on Taxation, qui avait aussi pour mandat d'examiner les finances et la fiscalité des municipalités et des commissions scolaires. Et, dans ce rapport, qui fut publié il y a déjà 32 ans en Ontario, cette commission Smith concluait à l'impossibilité d'instaurer une fiscalité simple, efficace, efficiente, pouvant contribuer au développement économique sans modifier les structures des gouvernements locaux. Quelques raisons étaient bien expliquées dans ce rapport; elles valent aussi maintenant. En d'autres termes, elles valent encore plus, dois-je dire, parce que, en cette époque de mondialisation, d'abolition des frontières économiques, la réussite internationale passe de plus en plus par l'efficacité du pouvoir local.

On a, dans bien des secteurs de notre vie en société, à réconcilier ce qui nous apparaissait étranger jusqu'à maintenant, l'économique et le social, la compétitivité et la solidarité, mais aussi il faut réconcilier le local et le mondial. Ce n'est pas tant que notre organisation municipale n'était pas la bonne, c'est que le monde autour de nous a tellement changé qu'il faut se poser la question: Sommes-nous organisés pour faire face à la compétitivité qui, de plus en plus, met en place des relations entre agglomérations, pas seulement de grandes agglomérations, mais des agglomérations de taille moyenne? Sommes-nous organisés, au Québec? Je pense que, la question, il faut absolument se la poser, entre autres pour être conscient que la concurrence municipale qui sévit maintenant paralyse très souvent et que, dans le contexte de la concurrence internationale, qui est une concurrence rude, ce qui met en présence des rivalités municipales n'est plus d'époque, si vous me permettez cette explication.

Alors, je crois que, dans les travaux qui ont été menés lors des assises de l'Union des municipalités du Québec la semaine passée, il y a cette compréhension d'une évidence, là – j'imagine, je le souhaite – partagée par l'opposition. J'aimerais les entendre là-dessus ce matin, M. le Président, bien évidemment. C'est que le statu quo n'est plus acceptable. Le statu quo au niveau de nos institutions municipales et locales n'est plus acceptable, compte tenu de tous ces défis qu'on a à relever sur le plan non seulement de l'économie, mais de tous ces autres défis sociaux et culturels aussi. Et donc, nos villes, elles le sont déjà, préparées, parce que les maires ne sont plus seulement des administrateurs, ils sont devenus, les maires et les mairesses du Québec, de plus en plus des développeurs et des entrepreneurs en plus d'être des administrateurs. C'est ça qui leur est demandé maintenant parce que les villes sont devenues des partenaires à part entière du développement économique, social et culturel. La question à se poser, c'est: Sont-elles équipées pour jouer ce rôle correctement, convenablement? Ont-elles les outils pour le jouer avec des chances d'être gagnantes?

Alors, je rappelle que, lors de ces assises qui se sont tenues la semaine passée, les membres de l'Union des municipalités du Québec ont unanimement reconnu que le statu quo n'était plus acceptable et ont proposé une démarche à la fois de discussion sur la fiscalité, comprenant la fiscalité locale, la fiscalité Québec-municipalités, notamment les paiements tenant lieu de taxes, et l'ouverture de nouvelles sources de revenus. L'ouverture faite par mon collègue le ministre d'État aux Finances et au développement économique, lors de l'ouverture des assises de l'UMQ, en faveur de la discussion de nouvelles sources de revenus reconnaît justement un rôle accru, dans le développement économique aux municipalités, qui exige de mettre de côté le dogme du financement par le foncier seulement. En plus, donc, de ces discussions sur la fiscalité, l'UMQ propose également une démarche comprenant des discussions devant porter sur les questions de relations de travail et également sur la réorganisation municipale. Alors, je comprends qu'il y a, dans le monde municipal lui-même, d'abord cet acquis-là, à savoir que le statu quo, c'était dépassé et qu'il fallait se mettre en mouvement.

Je comprends que l'opposition est encore à réfléchir sur ces questions. Si tant est qu'il soit nécessaire peut-être d'alimenter sa réflexion, je voudrais déposer, M. le Président, une étude réalisée par l'INRS-Urbanisation à la demande de mon prédécesseur et qui m'a été transmise il y a quelques semaines à peine. Alors, cette étude porte sur la politique de renforcement des agglomérations au Québec. En fait, c'est un bilan et une réflexion sur une stratégie d'intervention, y compris aussi des comparaisons, des pistes d'intervention à la lumière d'expériences vécues aux États-Unis, en Europe et ailleurs au Canada, et je crois que cette réflexion qui est faite dans ce document est de nature à nous faire comprendre l'importance d'avoir des agglomérations qui deviennent des pôles d'attraction économique dans cette période de compétitivité mondiale que nous connaissons. Je vous remercie.


Document déposé

Le Président (M. Vallières): Merci, Mme la ministre. Vous avez terminé pile vos 10 minutes. Le document que vous nous avez présenté est considéré par la présidence comme étant déposé. Il pourra circuler auprès des membres de la commission.


Argumentation

À ce moment-ci, je passe à nouveau la parole, pour un bloc cette fois-là de cinq minutes, au député de Laurier-Dorion.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Si je comprends bien, la ministre nous répond finalement: On va faire tout ça pour mieux se développer. Donc, on peut escompter qu'à terme, quelque part – mais la ministre s'est bien gardée de se donner des balises concrètes de mesure de réussite – on pourrait supposer que ça va avoir des résultats, et des résultats économiques, finalement, soit au niveau du développement économique soit au niveau d'un accroissement de la qualité des services ou d'une réduction du fardeau fiscal. Mais, comme dans toute course – parce qu'elle nous a placés aussi dans un contexte mondial de compétitivité – un peu comme les coureurs qui doivent courir, il y en a qui partent désavantagés par rapport à d'autres. Par exemple, s'ils ont trop de gras autour d'eux ou de poids plutôt que de gras, ils courent moins vite, d'autres, plus efficaces, arrivent premiers à la ligne d'arrivée, et, généralement, le poids qu'on mesure est représenté par le fardeau fiscal que les gens ont.

(10 h 30)

Une des choses qui nous inquiètent énormément, c'est cette fausse prémisse – et je le dis très clairement – avec laquelle le rapport Bédard commence, et, si je peux présumer que ce rapport va alimenter pas mal, beaucoup la réflexion de la ministre par rapport aux objectifs qu'elle vise à atteindre, il est inquiétant de voir qu'il y a eu cette présentation pas très honnête intellectuellement au niveau de la comparaison qui est faite entre Québec et Ontario par rapport au fardeau que les gens assument, et je m'explique. Je sais que la ministre a eu l'occasion d'en discuter avec une de mes collègues brièvement la semaine passée en période de questions, mais je pense que ça vaut la peine de revenir, dans les quelques minutes que nous avons, juste parce que c'est la prémisse même du rapport. Quand on parle de fiscalité, quand on parle de compétitivité, il faut bien regarder les fardeaux avec lesquels nos coureurs sur la scène internationale vont courir pour voir qui va arriver premier.

Alors, le rapport Bédard nous dit: Dans cette réorganisation de la fiscalité municipale, il y a de la place, parce qu'on regarde Québec et Ontario à la page 55 du rapport, les taxes provinciales et les taxes locales, et on nous dit que, quand on fait cette comparaison-là, on a ici un écart de 1 200 000 000 $ de moins que ce qu'on paie en Ontario. Mais, quand on se réfère à un document de consultation de son collègue qui est, elle l'a mentionné tantôt, le ministre de Finances, on retrouve exactement le même tableau, mais présenté avec des rubriques différentes, plus honnête, je dirais, plus, en tout cas, explicatif parce qu'on retrouve les mêmes chiffres au niveau des taxes locales mais que, oh! quelle surprise! il y a deux catégories: les taxes municipales et les taxes scolaires.

Comme on parle de fiscalité municipale, il faut bien pouvoir comparer les pommes avec les pommes puis les oranges avec les oranges, parce que le Québec et l'Ontario ont choisi deux voies différentes par rapport au financement du système d'éducation. Si on était vraiment pour faire une comparaison honnête de cet aspect-là, il faudrait comparer le reste de ce qui est mis là-dedans. Donc, quand on regarde ce document, on trouve – et, je répète, quelle surprise! – que le fardeau, le poids écrasant finalement de nos municipalités que la ministre veut rendre plus compétitives, il est de 900 000 000 $ de plus qu'en Ontario. 900 000 000 $ de plus qu'en Ontario, à la page 14 du document de consultation de son collègue le ministre des Finances. Donc, si on veut faire une comparaison correcte, on ne prend pas le rapport Bédard parce que ce n'est pas correct. Il faut comparer les taxes municipales avec les taxes municipales au niveau local. Si on voulait vraiment comparer l'ensemble, il faudrait prendre le tout dans un autre contexte, et, là encore, on se trouve désavantagé, au Québec.

Donc, la première question: Si la ministre veut vraiment rendre les municipalités plus capables de se développer mieux, est-ce qu'elle va reconnaître qu'un de ses objectifs doit être également de réduire le fardeau fiscal des contribuables municipaux et que le tout n'est pas tout simplement un jeu qui va permettre au gouvernement de refiler des factures aux municipalités afin de libérer une marge pour le ministre des Finances en vue des prochaines élections ou quoi que ce soit, pour baisser supposément les impôts, mais que, pour le contribuable, c'est somme totale zéro sinon plus lourde parce qu'au municipal il va payer plus?

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la ministre, pour un bloc de cinq minutes.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, d'abord, convenons que la rentabilité d'une réforme comme celle dans laquelle s'engage le gouvernement ne peut pas se calculer – je l'ai dit et je le répète ici, là – à la valeur du compte de taxes de certains contribuables seulement, n'est-ce pas? La réussite d'une réforme est liée à l'accroissement de la richesse collective, à la capacité d'affronter la compétitivité mondiale et à l'allégement du fardeau fiscal des citoyens.

Concernant justement le fardeau fiscal, ce qui est une évidence, c'est qu'il y a des disparités fiscales inéquitables entre les différentes municipalités qui composent les agglomérations urbaines. Je ne parle pas que de la région métropolitaine de Montréal, nous comptons au Québec 30 agglomérations urbaines, au sens de la définition qu'en donne Statistique Canada. Ces 30 agglomérations urbaines regroupent 295 municipalités. Sur le territoire de ces 30 agglomérations urbaines se concentrent 85 % de l'emploi, 78 % de la population et la richesse de la nation, et donc les villes qui ont des fonctions de centralité dans chacune de ces agglomérations urbaines sont les grandes perdantes parce qu'elles ont à offrir des services alors que l'accentuation de l'étalement urbain ne permet pas de répartir équitablement. Si on parle d'équité, c'est de cette réalité-là aussi qu'il faut parler, première chose étant acquise.

D'autre part, je préfère que le député de Laurier-Dorion utilise le mot «explicatif», parce que, là, il ne faudrait pas prêter des intentions malhonnêtes aux commissaires, n'est-ce pas, représentant divers secteurs de notre société – je pense qu'il n'y avait pas d'intention, d'aucune façon – parce que le propos du rapport de la commission consiste justement à nous amener à une réflexion sur un fardeau fiscal global. Je voudrais juste le rappeler, le fardeau fiscal provincial est supérieur de 26 % au Québec par rapport à l'Ontario, alors qu'il est inférieur de 12 % au niveau local. Un contribuable, ça ne met pas dans sa poche de gauche les taxes qu'il reçoit de l'un puis dans sa poche de droite les taxes qu'il reçoit de l'autre; le contribuable, il a globalement un coût pour les services qu'il reçoit et les services aussi qui sont donnés à des concitoyens avec qui il partage un même sentiment d'appartenance. C'est ça, finalement, une société.

Alors, on comprend qu'il y a un écart important qui est bien décrit dans les chiffres suivants que je vous transmets. Le fardeau fiscal du Québec, le fardeau fiscal local – ça, le local, ça comprend tous les comptes de taxes qu'un contribuable reçoit – alors ce compte de taxes local a été constamment inférieur au Québec en comparaison de celui de l'Ontario. En 1989, il était inférieur de 17,6 %, en 1993, de 17,9 %. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion, dans la Gazette officielle , de relire les déclarations faites par un prédécesseur aux Affaires municipales, M. Claude Ryan, qui longuement, dans cette Chambre et en commission parlementaire, expliquait cet écart qui se faisait au bénéfice des contribuables québécois en matière de fardeau fiscal local. C'est donc un écart de 17,2 % en 1997.

(10 h 40)

De plus, là, dans le budget qui a été déposé par le premier ministre ontarien pour 1999-2000, il y a une très légère amélioration, puis je la chiffrerai; j'y reviendrai. Donc, globalement, quand on met l'un dans l'autre le fardeau fiscal provincial et le fardeau fiscal local, ce dont on se rend compte, c'est que, oui, les Québécois supportent un fardeau fiscal global qui est supérieur de 15,5 % à celui de contribuables ontariens. Alors, ça s'explique, me dit-on, par un fort écart au niveau de l'impôt des particuliers, qui est de 54 % de plus, et de l'impôt des sociétés, qui est de 28 % de plus également.

Le Président (M. Vallières): Alors, Mme la ministre, en concluant. On a déjà dépassé d'une demi-minute le temps qui vous était alloué. Vous pouvez conclure en quelques...

Mme Harel: Ah! excusez-moi, je pensais que vous me disiez de cesser immédiatement.

Le Président (M. Vallières): Non, non, allez-y, concluez.

Mme Harel: Alors, j'y vais très vite, là. Les différences, évidemment, s'observent du fait que, au niveau municipal, le député de Laurier-Dorion comprendra, il y a effectivement 900 000 000 $ de plus de taxes en Ontario qu'au Québec, mais que, au niveau scolaire, il y a 2 000 000 000 $ de plus. Alors, l'un dans l'autre, c'est 1 200 000 000 $ que...

C'est toujours sur le foncier. La grande question, c'est: impôt sur le revenu, impôt foncier. Là, je veux bien que, à l'intérieur de ça, on fasse toutes sortes de catégorisations, mais, sur l'impôt foncier, quand on a du bien, combien paie-t-on? Bien, au Québec, on paie moins qu'en Ontario. Et on pourra y revenir, M. le Président...

Le Président (M. Vallières): Oui, Mme la ministre. Il faut vraiment terminer.

Mme Harel: ...mais je pense que c'est là un élément important: sur le foncier, on paie moins; sur l'impôt sur le revenu, on paie plus. Alors, il y a une évidence, et elle est d'autant plus...

Le Président (M. Vallières): Mme la ministre, c'est difficile, mais il faut y aller avec des cinq minutes, autrement on n'en terminera pas...

Mme Harel: D'accord.

Le Président (M. Vallières): ...quitte à ce que, tantôt... On a déjà pris environ une minute et quelques, on va peut-être vous retirer une minute sur votre prochaine intervention. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: M. le Président, je vois que la ministre n'a pas compris. Elle persiste à confondre le local en comparant le local au local, mais elle ne peut pas faire ça, parce que, en Ontario, le scolaire est assumé par le local à un pourcentage beaucoup plus grand.

Mme Harel: M. le Président, je pense qu'en vertu de notre règlement la parole est maintenant à un député ministériel.

Le Président (M. Vallières): Bon, très bien. Alors, j'ai remarqué que...

M. Sirros: Est-ce qu'il va pouvoir expliquer comment vous n'avez pas compris? Non, hein?

Le Président (M. Vallières): Merci. Alors, je vais laisser la parole au député de Bertrand et on va retrancher une minute à son intervention pour compenser.

M. Sirros: Bien, je lui saurais gré, si, lui, il a compris, qu'il essaie de l'expliquer à la ministre, ça serait bien.

Le Président (M. Vallières): M. le député de Bertrand, la parole est à vous.


M. Claude Cousineau

M. Cousineau: Ce n'est pas l'objet de mon intervention. Alors, M. le Président, Mme la ministre et puis chers collègues députés, j'aimerais revenir sur l'entente de 1997 concernant l'UMQ et le gouvernement. Les municipalités du Québec ont largement participé, fait leur part au niveau de l'assainissement des finances publiques du Québec, les élus municipaux ont répondu positivement, non sans manifester leurs craintes, mais ils ont compris l'importance de participer à cet effort collectif pour le bien des générations à venir pour laisser à nos enfants une administration saine et compétitive. Ils ont compris que, suite au Sommet économique tenu il y a trois ans, lequel était une initiative formidable, réfléchie du gouvernement du Parti québécois, ils devaient faire leur part au même titre que le monde de l'éducation, le monde de la santé, le monde du patronat, de l'industrie ainsi que les syndicats représentant des milliers de travailleurs et de travailleuses au Québec afin d'atteindre le plus rapidement possible le déficit zéro. Tous savaient que cette opération serait extrêmement difficile, qu'il y aurait des grincements de dents et des coupures nécessaires ici et là. Imaginez, un budget équilibré, le premier depuis 40 ans au Québec. Les élus municipaux, à cet égard, peuvent être cités en exemple, puisqu'ils sont tenus de présenter un budget équilibré, eux, à chaque année.

Certains, pour envenimer la situation, ont qualifié la participation de 375 000 000 $ des municipalités du Québec de ponction non justifiée, d'ingérence de l'État dans les affaires municipales, de facture injuste, de pelletage éhonté du déficit du gouvernement dans la cour des municipalités. Ces mêmes individus oublient de dire que, avec l'administration libérale, c'est plus de 500 000 000 $ de transfert que les municipalités ont eu à absorber en 1992. Souvenons-nous du transfert de la voirie locale, secondaire et tertiaire, de la facture récurrente de la Sûreté du Québec.

Notre gouvernement s'est donné comme objectif de remplacer la contribution de 375 000 000 $ des municipalités par un nouveau pacte fiscal avant l'automne 1999. Une table Québec-municipalités a été mise en place pour faire en sorte que tous les intervenants du monde municipal y soient représentés: l'UMQ, l'Union des municipalités du Québec, l'UMRCQ, l'Union des municipalités régionales de comté, et le MAM. Les élus seront partie prenante à l'élaboration de ce travail ambitieux mais indispensable pour assurer aux municipalités du Québec une plus grande autonomie et une équité fiscale tant recherchée pour le bien de leurs citoyens.

Lorsque l'entente a été signée, en 1997, avec l'UMQ, le premier ministre du Québec, M. Bouchard, a affirmé en cette Chambre, le 23 octobre 1997, et je cite: «L'UMRCQ, tout comme l'UMQ, ferait partie bien sûr des discussions conduisant au pacte fiscal, puisqu'elle représente des municipalités très importantes. Il y a près de 1 300 municipalités qui en font partie. Mais il est entendu qu'un pacte fiscal n'a de sens que s'il règle l'équité fiscale, et l'équité, c'est tout le monde.» La ministre des Affaires municipales a réitéré cette position dernièrement devant l'UMRCQ et l'UMQ en précisant aux représentants des deux Unions qu'elle les considérait comme des partenaires à part entière dans les négociations qui s'amorceront bientôt sur le pacte fiscal et qu'elle convoquerait prochainement les deux Unions à la Table Québec-municipalités. Voilà, M. le Président, une position claire et transparente dont le but est la réussite du processus conduisant à la mise en place d'un pacte fiscal avant l'an 2000.

Le Président (M. Vallières): Bien, M. le député de Bertrand. On a déjà dépassé nos quatre minutes qui étaient allouées pour récupérer un petit peu sur ce qui était le temps de la ministre tout à l'heure. M. le député de Laurier-Dorion.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Oui, M. le Président. J'aimerais revenir sur cette question que j'avais commencée avec la ministre parce que je trouve que c'est fondamental. Manifestement, la ministre n'a pas le bon tableau, n'a pas la bonne façon de l'expliquer parce qu'elle ne comprend pas ce que je lui dis. J'aimerais qu'elle prenne deux minutes pour comprendre parce que, quand on compare les pommes avec les pommes, ça va, quand on compare les oranges avec les oranges, ça va, mais, si on veut comparer les pommes avec les oranges, il faut comparer tout le panier de fruits avec tout le panier de fruits. Alors, quand on compare le fardeau fiscal au niveau municipal ici et en Ontario, ça va parce que c'est juste des taxes municipales qu'on compare et que c'est ça qui va pour le financement des municipalités, des services municipaux.

Quand on compare aussi, au niveau des taxes locales, ce qui va au scolaire, ça ne va pas parce que, de part et d'autre, il y a un plus grand pourcentage, des pourcentages différents qui viennent entrer dans le financement des services éducatifs par le niveau provincial parce que c'est un service provincial, finalement. Donc, si on veut vraiment faire la comparaison de tous les impôts, effectivement, ça va, et là on est désavantagés pour tous les impôts et taxes, tout le panier de fruits. Mais, à partir du moment où on parle de fiscalité municipale, vous ne pouvez pas venir entrer dans le jeu pour dégager une soi-disant marge de manoeuvre, une partie des taxes scolaires que vous ajoutez aux taxes locales en ne parlant plus de taxes municipales mais en parlant de taxes locales, c'est du sophisme. Alors, soyons clairs, là, au niveau municipal, les municipalités, les contribuables municipaux dans leur ensemble, sans parler du compte de taxes d'un individu ou d'un autre, paient 900 000 000 $ de plus.

Si vous voulez qu'on regarde aussi la question du financement de l'éducation dans les deux provinces, ça, c'est autre chose. Il faut tenir compte du fait qu'il y a une année de plus en Ontario, etc. De toute façon, je pense que le point est fait que, au niveau de la comparaison, généralement, on compare les pommes avec les pommes. Si vous voulez regarder tout le panier de fruits, c'est au niveau de l'ensemble qu'il faut regarder, l'ensemble des impôts et des taxes. Mais vous ne pouvez pas faire les deux, ce n'est pas correct.

Alors, si le rapport Bédard commence avec cette prémisse en disant au gouvernement: Vous avez une marge de manoeuvre parce que, au niveau local, il y a de la place, je comprends que les gens dans les municipalités puis dans les milieux locaux réagissent en disant: Attention, c'est une astuce, c'est une astuce qui va faire en sorte qu'on va se voir transférer d'autres responsabilités. La société bénéficie, à ce moment-ci, d'une possibilité de regarder ensemble, dans le calme, correctement, comment, effectivement, on peut mieux s'organiser afin de mieux se développer. Mais, en bout de ligne, je ne suis pas d'accord avec la ministre quand elle dit: Ça ne se mesure pas de façon immédiate au niveau des baisses d'impôts.

(10 h 50)

Oui, ça se mesure, parce que, quand on fait quelque chose, il faut quand même se donner des façons de mesurer le résultat, la réussite de nos actions, sinon on passe à travers un ministère, on fait une réforme, on la laisse, on part puis on retrouve les problèmes plus tard. C'est peut-être quelque chose que la ministre connaît déjà de ses passages antérieurs dans ces ministères où on a fait des réformes qui n'ont pas été menées jusqu'au bout, et là on voit aujourd'hui les problèmes. On les voit au niveau de la main-d'oeuvre, par exemple. De toute façon, ça, c'est une autre question.

Mais là on bénéficie d'une possibilité où il y a une volonté qui est assez clairement exprimée, même de la part des maires puis d'autres, de changer les choses. Personne ne dit que le statu quo de A à Z, tel quel, est réclamé par qui que ce soit. D'ailleurs, des changements à la fiscalité municipale puis un nouveau pacte fiscal sont réclamés par tout le monde. Donc, ce n'est pas le statu quo. Mais il s'agit de savoir, comme je l'ai dit au début, quels sont les objectifs de la ministre, quel est son plan maître. Est-ce qu'elle nous dit aujourd'hui que c'est le rapport Bédard ou est-ce que ce n'est pas le rapport Bédard? Ou est-ce qu'elle nous dit qu'elle ne sait pas? Elle va voir au fur et à mesure. Est-ce qu'elle peut nous parler un peu de son échéancier? Est-ce qu'elle peut nous parler surtout, si elle veut parler, des trois choses qu'elle a identifiées, fiscalité municipale, relations de travail, réorganisation territoriale? Est-ce qu'elle va traiter ça comme un tout ou est-ce que plutôt ça peut être divisé, en termes de fiscalité municipale, et que les deux autres, effectivement, comme le dit le rapport Bédard, sont un tout parce que l'un est un préalable à l'autre? Relations de travail, préalables; changements dans le Code du travail, préalables aux changements sur l'organisation territoriale.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Bon, écoutez, M. le Président, je pense bien qu'il n'y a pas matière, disons, à poursuivre une controverse sur la question fiscale. Je crois qu'il y a une situation fiscale comparative Québec-Ontario à l'intérieur de laquelle il y a, comme dans la théorie des ensembles, deux grands sous-ensembles: l'impôt sur le revenu, l'impôt foncier. L'impôt sur le revenu est beaucoup plus élevé au Québec qu'en Ontario, l'impôt foncier est moins élevé au Québec qu'en Ontario. Dans l'impôt foncier, il y a deux grands secteurs: le municipal, le scolaire. Au Québec, l'impôt foncier va chercher pas tout à fait 1 000 000 000 $ – je crois que c'est 915 000 000 $ – l'impôt scolaire va chercher 915 000 000 $ sur le foncier. En Ontario, c'est 6 500 000 000 $ sur le foncier. Au municipal, l'impôt foncier est de 900 000 000 $ plus élevé qu'en Ontario, mais, l'un dans l'autre, sur le foncier, quand on fait un portrait global – donc, on ne regarde plus les sous-ensembles mais l'ensemble – le foncier coût moins cher au Québec qu'en Ontario.

Ceci étant dit, si on veut vraiment comparer, comme le souhaite le député, des pommes avec des pommes, alors il faut tout simplement prendre les dépenses des administrations municipales, puis reporter ça sur le produit intérieur brut au Québec, et reporter ça sur le produit intérieur brut en Ontario. De quoi est-ce qu'on se rend compte? On se rend compte, pour 1996, que le comparatif Québec-Ontario des dépenses des administrations municipales sur leurs produits intérieurs bruts respectifs fait que, au Québec, c'est 4,9 % des dépenses et, en Ontario, 4,4 %. C'est donc dire qu'en termes d'administration municipale ça coûte plus cher. C'est l'explication du 900 000 000 $.

Mais là il faut continuer puis voir de près d'où ça vient. Santé et services sociaux en Ontario, c'est 30 % des dépenses des administrations municipales, 30 % en 1996, et la tendance serait, nous dit-on, compte tenu de toutes les déclarations qui ont été faites, d'amener les dépenses de première ligne en santé sur la facturation des municipalités. Actuellement, c'est 60 %. Excusez-moi, c'est 60 % des dépenses en santé première ligne, comme si, au Québec, on faisait payer le CLSC par les villes. Alors, il y a des différences de responsabilités.

Pourquoi est-ce qu'au Québec ça coûte 900 000 000 $? Je rappelle une donnée incontournable qui est l'écart de rémunération décrit notamment par les travaux de l'Institut de recherche sur la rémunération, donc un écart de 29 % entre la rémunération des employés municipaux et ceux du secteur public, employés de municipalité de plus de 25 000 habitants, hein? La comparaison se fait à partir, donc, de cette donnée prélevée dans les municipalités de plus de 25 000. Cet écart de rémunération équivaut environ à 800 000 000 $. Il y a environ 800 000 000 $ qui correspond à une rémunération qui est supérieure à 29 % – elle était de 28 %, elle est à 29 % – mais en même temps on comprend que la situation financière des municipalités au Québec... En fait, en moyenne, je ne vous dis pas qu'il n'y en a pas qui ne connaissent pas des difficultés, mais elles sont l'exception. J'ai la statistique la plus récente, qui est assez importante, qui va sûrement intéresser les membres de cette interpellation, sur les surplus et réserves des municipalités en 1997-1998, donc avant l'entente sur le 375 000 000 $ et après, et on se rend compte que les surplus et réserves, qui étaient de 501 000 000 $ en 1997, sont passés à 521 000 000 $ en 1998. Il y a donc une augmentation de 4,1 % des surplus et réserves du monde municipal, si vous voulez, au Québec entre 1997 et 1998 malgré l'application de la ponction du 375 000 000 $.

Le Président (M. Vallières): Merci, Mme la ministre. Là-dessus, on va passer la parole à votre collègue le député de Bellechasse.


M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci, M. le Président. C'est bien intéressant, la discussion que nous avons aujourd'hui, parce que ça a des conséquences qui sont considérables sur nos concitoyens de toutes les régions du Québec. Mais il m'apparaît non seulement un peu, mais beaucoup pertinent de revenir au régime dans lequel nous sommes présentement, et, comme j'ai eu l'occasion moi-même de vivre ces événements en 1978, 1979 et 1980, alors que j'occupais des fonctions municipales comme maire et aussi même comme préfet d'un ex-conseil de comté, peut-être quelques instants pour se repositionner par rapport à ce que c'était et où nous en sommes rendus maintenant, après plus de 20 ans à expérimenter ce nouveau système.

En 1978, il y avait eu la conférence Québec-municipalités ici, à Québec, en présence du ministre des Affaires municipales – à l'époque, M. Tardif, que vous avez bien connu, M. le Président – du ministre des Finances, M. Parizeau, ainsi que de M. Jacques Léonard que nous avons encore comme collègue ici. Comme ministre d'État à l'Aménagement, il avait participé à toutes ces discussions pendant des semaines, pendant même des mois, qui avaient finalement résulté dans un rapport qui avait fait, je dirais, consensus avec les représentants de l'Union des conseils de comté du Québec et l'Union des municipalités du Québec.

La question qu'on se posait, c'est: Est-ce qu'il est possible d'avoir une meilleure autonomie municipale et une plus grande équité entre les différentes municipalités? On se souviendra qu'à l'époque – et c'est intéressant parce qu'on en parle un petit peu aujourd'hui – il y avait une distorsion importante qui découlait du fait qu'une portion de la taxe de vente du Québec était redistribuée aux municipalités, et ça, ça se faisait depuis plusieurs années, à des degrés qui étaient divers, sauf qu'on s'était rendu compte, à l'expérimentation, que certaines municipalités étaient pénalisées par cette situation. L'exemple que j'avais à l'esprit, dans un comté voisin du mien, c'était, à l'époque, ce qui s'appelle aujourd'hui Lévis, le Grand Lévis, mais c'était Lévis et Lauzon, Lauzon qui était un secteur résidentiel, donc qui ne pouvait pas retrouver beaucoup de produits de la taxe de vente, et Lévis qui comprenait des centres commerciaux ainsi que plusieurs vendeurs d'autos, qui voyait ses coffres se remplir de façon intéressante par cette arrivée d'argent de la taxe de vente.

(11 heures)

Alors, l'entente qui a été conclue, encore une fois après beaucoup de discussion mais qui s'est faite dans l'harmonie, a résulté finalement dans un projet de loi, la loi 57 sur la fiscalité municipale, qui nous dirige encore aujourd'hui, et ce qui a été intéressant aussi, c'est que ça a été une période où on a constaté la fin du quémandage à Québec, parce qu'il faut savoir qu'avant ça – à l'époque des ministres Tessier et Goldbloom en particulier, on avait connu ça – les maires venaient faire des pèlerinages à Québec, puis il fallait faire des courbettes devant le ministre des Affaires municipales pour être capable d'obtenir des choses intéressantes, alors que maintenant l'autonomie des municipalités est plus grande et on a des programmes normés. On a vu arriver aussi des «en lieu» de taxes sur les édifices gouvernementaux, les édifices du réseau de la santé et de l'éducation.

Une chose qui a été extrêmement intéressante et puis malheureusement qui s'est détériorée depuis cette période-là, c'est l'évacuation presque totale du champ de taxation foncière par les commissions scolaires. Alors, juste à titre d'exemple, en 1979, avant l'entrée en vigueur de cette nouvelle loi, les commissions scolaires allaient chercher 691 000 000 $ de l'argent de l'époque auprès des contribuables fonciers du Québec, alors que, après la réforme, en 1980, c'était tombé à 159 000 000 $ et qu'aujourd'hui ça dépasse le 1 000 000 000 $. Donc, il y a quelque chose, je pense, à réfléchir là-dessus.

Sans être parfait, je pense que finalement on en était arrivé à un système intéressant qui avait débouché sur un consensus avec lequel on pouvait vivre et qui faisait en sorte aussi que les recettes des municipalités, de source locale, en 1979, elles étaient de 73 %, elles sont passées, après la réforme, à 88 % en 1980 et, en 1997, elles étaient de 91 %. Donc, un des objectifs fondamentaux avait été atteint, et je pense qu'il apparaît maintenant qu'il faut regarder ça pour continuer dans le même sens, pour établir la possibilité encore davantage pour les élus municipaux de ne pas revenir en arrière et d'avoir un système qui est adapté aux besoins de l'an 2000. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Bellechasse. Vous serez suivi du député de Montmagny-L'Islet.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Je pense que, Mme la ministre, c'est d'actualité, le débat qu'on fait ici aujourd'hui. Évidemment, les municipalités comme on les connaît, les structures municipales et leurs élus comme on les connaît depuis des années ont le sens des responsabilités. Ils ont compris qu'ils devaient déjà se préparer à échanger avec le gouvernement du Québec, la ministre des Affaires municipales, pour préparer un pacte fiscal. Le but de l'exercice aujourd'hui est d'essayer de voir où en est la ministre des Affaires municipales pour supporter l'initiative des municipalités qui déjà annoncent qu'elles vont s'asseoir ensemble et regarder quel genre de propositions ou quelles structures elles peuvent mettre en place pour mieux desservir leur région et préparer un pacte fiscal pour les prochains mois, qu'est-ce que la ministre apporte comme soutien à tous ceux et celles qui déjà acceptent qu'ils doivent dans les meilleurs délais faire une proposition gouvernementale, ou échanger, du moins, avec le gouvernement du Québec pour préparer ce nouveau pacte fiscal.

Il faut tenir compte dans tous ces échanges, Mme la ministre, du fait que la fiscalité municipale, telle qu'on la connaît aujourd'hui, elle est, on pourrait appeler ça un peu échevelée, c'est-à-dire qu'ils vont chercher leurs sources de revenus dans des situations considérées temporaires. C'est des moyens que leur a donnés le gouvernement dans les dernières années. Qu'on pense au transfert de la responsabilité des routes et d'autres responsabilités comme celle du 375 000 000 $ pour lequel le ministre, votre prédécesseur, leur disait: Vous allez remplir ma caisse avec ce 375 000 000 $ là et, moi, je vais, sous ma responsabilité, réalimenter financièrement des projets locaux limités aux infrastructures, en fait, c'est une assez belle initiative de sa part. Ça lui permettait d'avoir l'air du personnage ou du responsable d'un ministère qui faisait la redistribution de l'argent des autres, d'une part.

Mais vous avez fait, il y a quelques minutes, allusion justement au fait que les municipalités avaient des réserves identifiées, clairement identifiées, d'au-delà de 500 000 000 $. Donc, ce qu'on peut comprendre, c'est, à partir de cette analyse, que le gouvernement du Québec, il y a deux ans et un peu plus, a choisi... Et je me rappelle toujours des réponses du premier ministre, dans cette Chambre, qui disait: Les municipalités dans leur ensemble ont au-delà de 500 000 000 $ dans leur caisse. Donc, c'était comme dire: Nous allons aller chercher une très grande partie de cette caisse-là pour nous aider à atteindre le déficit zéro, et, quand il sera atteint, c'est moi qui l'annoncerai.

Aujourd'hui, la ministre nous dit: Les municipalités ont réagi de telle façon que, même après avoir payé deux années consécutives cette facture de 375 000 000 $, elles ont encore 500 000 000 $ et quelques, même davantage qu'il y a deux ou trois ans, en réserve. Est-ce que c'est un crime? Les municipalités, de par leur culture, comme on les connaît – et je pense que je vois les collègues des deux côtés de la Chambre, ici, qui ont une expérience municipale – ça fait partie de la façon de gouverner du monde municipal, se garder des réserves pour sécuriser les citoyens, pour être capable de faire face à des situations d'urgence. Donc, ce que je comprends, c'est que Mme la ministre leur dit: Oui, mais, moi, ce que j'en comprends, c'est que vous n'avez pas besoin de ces réserves-là, nous sommes là, nous. Quand vous avez de l'argent de trop, on vous la facture, puis, si jamais vous en manquez, je présume que vous viendrez nous voir – c'est un peu l'approche – ou augmentez vos taxes, parce que vous avez une marge de manoeuvre.

Mme la ministre, avant de terminer, je vous demande: Qu'est-ce que vous avez comme agenda pour supporter les municipalités de bonne foi qui se préparent à négocier avec vous un nouveau pacte fiscal dans le respect et pour être en mesure de leur démontrer tout de suite que vous reconnaissez que ces municipalités veulent conserver leur autonomie et leur sécurité financières, leur capacité financière pour faire du développement, ce que souhaite l'ensemble de la population?

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, disons-le tout simplement, là, le député de Montmagny-L'Islet a fait un exercice qui est déplaisant parce qu'il a fait dire à mes propos autre chose que ce que j'avais dit. Ce que j'ai dit, c'est ceci: les surplus et réserves accumulés dans les municipalités du Québec entre 1997 et 1998 ont augmenté de 4,4 %. Ça ne signifie pas qu'il faille faire main basse sur ça; ça signifie simplement que la situation financière globale du monde municipal s'est même améliorée malgré cette ponction dont on vient de parler.

D'autre part, je rappelle que, malgré tout ça, le gouvernement continue encore cette année à transférer l'équivalent de 1 172 000 000 $ au monde municipal, 1 172 000 000 $ en transfert conditionnel et inconditionnel et en péréquation qu'on est à revoir d'ailleurs pour s'assurer que ce transfert ne vient pas donner la respiration artificielle à des municipalités qui, autrement, souhaiteraient pouvoir se fusionner volontairement avec des municipalités voisines, n'eût été de ce transfert d'argent qui vient d'en haut seulement. Je pense, entre autres, à celui qui permettra de réaliser des travaux de collecte et d'assainissement d'eaux usées à Saint-Just-de-Bretenières. Vous voyez, c'est presque 1 000 000 $ que le gouvernement du Québec va octroyer à cette municipalité du beau comté de Montmagny-L'Islet pour lui permettre de réaliser des travaux dans le cadre d'infrastructures pour des services d'eau potable et d'eaux usées.

(11 h 10)

Il y en a comme ça et comme d'autres, en fait, puisque, dans ce transfert conditionnel et inconditionnel, dans la péréquation, il y en a pour 1 172 000 000 $. C'est donc dire, d'abord, que la situation des municipalités est saine, leur situation financière, c'est aussi dire que le resserrement dans les dépenses du gouvernement a été beaucoup plus important dans les dépenses du gouvernement du Québec que dans les dépenses des municipalités. J'ai des chiffres, ici, en dollars constants per capita depuis 1982. Alors, les dépenses représentent maintenant 94 %, pour le gouvernement, de celles qu'elles étaient en 1982, alors que les dépenses des municipalités représentent maintenant 117 % de ce qu'elles étaient en 1982. Donc, les municipalités ont continué à dépenser, alors que le gouvernement a dû rétracter ses dépenses et particulièrement dans le domaine scolaire.

Je crois que le domaine scolaire est celui qui a été obligé de diminuer très substantiellement les dépenses courantes totales par élève. Pensez que, en dollars constants, entre 1982 et 1997-1998, c'est substantiel, là, cette diminution. C'était 3 940 $ par élève en 1982, et puis, en 1997-1998, on est à 3 581 $ par élève. Alors, vous voyez qu'il y a eu des diminutions, des contractions de dépenses importantes dans bien des secteurs considérés comme prioritaires: santé, éducation. Globalement, c'est donc une diminution qui chiffre les dépenses totales à 94 % de celles qu'elles étaient en 1982, alors que, pour les municipalités, les dépenses totales, ont augmenté à 117 %. Alors, je pense bien que ça indique seulement une chose simple, c'est que la situation financière des municipalités, malgré qu'il y ait des cas d'exception – j'en ai parlé tantôt – notamment les villes qui ont des fonctions de centralité pour lesquelles il y a une inéquité à sa face même, là, dans la répartition des charges... J'aimerais également introduire...

Le Président (M. Vallières): Mme la ministre, notre bloc de cinq minutes est...

Mme Harel: Très bien.

Le Président (M. Vallières): Je m'en excuse. La parole sera maintenant au député de Bertrand.


M. Claude Cousineau

M. Cousineau: Merci, M. le Président. J'aimerais terminer mon premier exposé concernant l'entente signée avec l'UMQ en 1997, laquelle chiffrait la participation des municipalités à 375 000 000 $. Il était très clair, à ce moment-là, et l'entente précisait que les municipalités cesseraient de payer cette somme si et seulement si un pacte fiscal voyait le jour avant l'an 2000. Il n'a jamais été question d'associer directement l'abolition de la participation des municipalités à l'assainissement des finances publiques à l'atteinte du déficit zéro. Il est heureux et formidable que, grâce à sa saine gestion, le gouvernement du Québec ait atteint le déficit zéro un an avant la date prévue, mais il est important de rappeler que l'entente signée vise la mise en place de cet indispensable outil qu'est le pacte fiscal. Je voulais apporter la précision parce que, le jeudi 18 mars, il y a eu petit débat ici, en Chambre, où on disait que, parce qu'on avait atteint le déficit zéro, ça serait logique que l'entente tombe. Mais ce n'était pas ça, l'objet de l'entente. L'objectif de l'entente, c'était d'en arriver à un pacte fiscal avant l'an 2000.

Ceci dit, j'aimerais dire quelques mots concernant les structures parce que ce qu'il est intéressant de voir, c'est que le rapport Smith, en Ontario, en 1967 ainsi que le rapport Bédard arrivent au moins à une conclusion similaire concernant les structures. On mentionne que, bon, la réforme de la fiscalité, ça doit se faire parallèlement avec les structures. La mise en place d'un nouveau pacte fiscal avec les municipalités doit se faire en symbiose avec l'élaboration d'une politique globale qui devra tenir compte de la révision des structures actuelles. Il est clair et évident que les prémisses qui existaient à la fin du siècle dernier et au début de notre siècle ont changé ou ont évolué rapidement dans les dernières années, dans la dernière décennie. Aujourd'hui, les moyens de communication avancés, l'ouverture au monde, la mondialisation légitiment l'idée de revoir les structures parallèlement à l'élaboration d'un pacte fiscal.

Sur le plan de la promotion régionale et du développement économique, il est évident qu'il est beaucoup plus facile de vendre, de parler d'une agglomération, d'une région que de ne parler que d'une municipalité isolée. Il en est de même pour les services en commun, les ententes régionales, tels les services de police, d'incendie, de transport, de voirie, de transport adapté, de gestion collective de déchets, les services des sports, des loisirs, de la culture. Une rationalisation, une localisation judicieuse et optimale de ces services et de ces équipements collectifs démontre clairement la nécessité de procéder à une révision de nos structures locales.

Il est important de mettre en place un processus qui favorisera l'utilisation rationnelle des services. Le renforcement des MRC, par exemple, peut être, dans certaines régions, une solution intéressante qui mérite qu'on s'y arrête. Le rapport de la Commission sur la fiscalité précise à cet égard, et je cite: «L'absence de vision commune de développement est source de concurrence stérile entre les municipalités d'une même agglomération ou d'une même région.» Nous devons questionner le manque de vision de certaines municipalités qui, par exemple, multiplient les zones industrielles dans une même région. Jusqu'ici, au Québec, dans le débat sur la consolidation des agglomérations des villages-paroisses, les avenues d'intervention de nature fiscale n'ont été qu'à peine effleurées. C'est évident que les pratiques de mise en commun de services ou la valorisation des instances supramunicipales ont des incidences financières, voire fiscales. La fiscalité peut servir et doit servir de levier au renforcement des agglomérations. La révision de la structure locale devient évidente, dans un tel contexte, et la nécessité d'une politique québécoise de renforcement des agglomérations est nécessaire.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Merci, M. le député Bertrand. Je passe, à ce moment-ci, la parole au député de Laurier-Dorion.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Brièvement, sur la question des surplus que la ministre a touchée, la ministre nous a dit que les municipalités sont en bonne santé; c'est la conclusion qu'elle en tirait. J'aimerais juste revenir sur ce que mon collègue disait et peut-être utiliser un exemple pour l'illustrer, parce que la différence n'est pas nécessairement que les municipalités sont en bonne santé parce qu'elle ont des surplus – ce n'est pas ça nécessairement la conclusion qu'on peut en tirer – c'est parce que c'est un peu comme un bon père de famille, on me faisait remarquer, qui garde une réserve dans son portefeuille au cas où la famille verrait des jours difficiles imprévus, et, quand il a à faire face à quelque chose de supplémentaire, il décide soit d'aller travailler plus pour gagner plus d'argent pour ses comptes courants – donc, dans le cas des municipalités, de taxer plus, ce que plusieurs municipalités ont fait pour faire face aux 375 000 000 $ – ou de couper dans ses dépenses courantes, ce que d'autres municipalités ont fait. Elles n'ont pas investi dans l'infrastructure, elles ont coupé un certain nombre de services pour financer le 375 000 000 $. Mais elles ont gardé leur réserve comme elles l'avaient avant parce qu'elle savent très bien que, le jour où elles n'auront pas de réserve et le jour où il va y avoir un imprévu d'arrivé, si elles vont voir le gouvernement, le gouvernement ne va pas leur dire: Tiens, je te dépanne. Il va leur dire: Taxez vos contribuables. Donc, dans la vie, dans la tête des municipalités puis des contribuables, d'ailleurs, c'est une mesure de protection des contribuables, cette réserve-là. Alors, c'est une mauvaise conclusion que la ministre tire.

Mais, ça étant dit, parlons donc du coût des municipalités. La ministre elle-même a dit, pour expliquer l'écart de 900 000 000 $, qu'une grande partie de cet écart-là provient du fait que les municipalités ont des salaires puis des dépenses salariales beaucoup plus élevés que, une comparaison, par exemple, la fonction publique québécoise. Donc, il devient évident qu'un préalable à toute réforme de la fiscalité doit nécessairement examiner cette question-là.

(11 h 20)

Donc, ça nous amène à parler un peu de la nécessaire réforme du Code du travail par rapport à ce qu'on veut faire ici. Le rapport Bédard, je lui donne entièrement raison quand il fait le lien immédiat entre le préalable que doit être la réforme du Code du travail, en particulier afin de permettre la sous-traitance en modifiant les articles 45 et 46, et aussi la nécessité de revoir le niveau des salaires au niveau des conventions collectives, etc. La ministre elle-même semble dire qu'elle est d'accord avec cet objectif. Alors, faut comprendre, à ce moment-là, si la ministre, elle, fait sien ce lien qui est fait entre la nécessaire réforme du Code du travail et le réaménagement des salaires des employés municipaux et la fiscalité municipale, qu'on ne peut pas à la fois demander aux municipalités d'assumer d'autres responsabilités parce qu'on estime qu'elles sont capables de le faire ou qu'elles sont en bonne santé financière et à la fois leur lier les mains. Alors, soit il faut leur donner les moyens pour pouvoir dégager une marge de manoeuvre qui les mettrait sur un pied d'égalité, par exemple, avec leurs compétiteurs – parce que ça, c'est un thème qui nous revient souvent – ou on ne procède pas.

La ministre a dit tout récemment qu'elle invitait les syndicats à suggérer des moyens de modifier le Code du travail, et je trouvais ça assez cocasse quand même parce que ça serait difficile à imaginer, par exemple, un syndicat comme les cols bleus de Montréal suggérer à la ministre comment est-ce qu'il pourrait permettre à la ville de Montréal de faire de la sous-traitance ou comment est-ce qu'on pourrait réduire leurs propres salaires. D'ailleurs, quand la ministre a parlé tantôt des dépenses des municipalités par rapport aux dépenses du gouvernement du Québec, elle a omis de dire qu'ici, en cette Chambre, on a fait une ponction de 6 % au niveau des conventions collectives ou de l'ensemble de la masse salariale des employés de l'État afin de contrôler les dépenses, comme elle disait, ce qu'on n'a pas fait pour les municipalités. On n'a même pas donné le droit aux municipalités de le faire. Alors, on leur a lié les mains, puis là, aujourd'hui, on les critique parce que leurs dépenses continuent d'augmenter, tandis que le gouvernement du Québec a baissé ses dépenses. Ce n'est pas tout à fait correct d'agir comme ça.

Donc, est-ce que la ministre accepte que la réforme du Code du travail, en particulier l'amendement aux articles 45 et 46 pour permettre la sous-traitance aux municipalités, est nécessaire pour pouvoir justement envisager une fiscalité municipale réelle, valable? Et est-ce qu'elle se donne ça comme objectif lors de ce qui va venir durant l'automne au niveau du changement au Code du travail? Et la même question se pose pour ce qui est du niveau salarial.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Bon. Alors, M. le Président, d'abord rassurer l'opposition, si tant est qu'elle ait besoin de l'être. Le monde municipal l'est déjà, étant donné que j'ai pu échanger avec ses porte-parole sur cette question. Il y a des surplus de réserve, ça dénote une saine gestion et une saine situation financière. Il n'y a aucune prétention de la part du gouvernement de faire main basse sur ces surplus de réserve, ça signifie simplement que la situation a continué d'évoluer très positivement pour les municipalités, d'une part.

D'autre part, je mets tout de suite en garde le député de Laurier-Dorion. Dans la comparaison qu'il fait entre le Québec et l'Ontario au niveau du champ foncier municipal qu'il dit être pour 900 000 000 $ à l'avantage de l'Ontario, je le mets tout de suite en garde sur le fait que, contrairement à la situation qui prévaut au Québec, les immobilisations lors de travaux importants dans les infrastructures en Ontario, depuis longtemps, sont prises en charge par les promoteurs qui doivent obligatoirement payer des redevances de développement, et les promoteurs immobiliers ont à payer des redevances à la municipalité, plus seulement, là, dans des infrastructures, par exemple, d'aqueduc et d'égout, mais de plus en plus dans des infrastructures collectives comme des parcs, des bibliothèques, des arénas, etc. Alors, il y a une étude qui démontre qu'en Ontario le coût des maisons est finalement 10 000 $ de plus que le promoteur charge à l'acheteur parce qu'il y a des redevances de développement à payer à la municipalité. Donc, l'acheteur, c'est dans son hypothèque qu'il paie ça.

Vous savez, il y a une vérité, à un moment donné, sur le coût, hein? Il y a quelqu'un qui paie. Est-ce qu'il le paie dans son compte de taxes comme contribuable parce que c'est sa municipalité qui défraie ou est-ce qu'il le paie dans son compte d'hypothèque comme client d'une institution financière parce que c'est son promoteur qui l'a défrayé puis qui lui a refilé le coût? Ça, c'est extrêmement important parce que, de plus en plus, au Québec – mais c'est tout à fait récent, là – les municipalités commencent à charger aux promoteurs immobiliers le coût des infrastructures, mais ça reste circonscrit aux infrastructures des projets réalisés seulement, alors qu'en Ontario et aussi en Colombie-Britannique le coût des infrastructures comprend également le coût des infrastructures collectives, si vous voulez, autres qu'assainissement des eaux ou trottoirs, mais, comme je l'ai mentionné, bibliothèques, parcs, arénas, etc., d'une part.

D'autre part, la question des relations de travail est extrêmement importante. Je rappelle que le gouvernement de l'Ontario, au moment de la restructuration qu'il a réalisée il y a deux ans, a adopté une approche intégrée par laquelle il apportait des modifications afin de favoriser le regroupement de municipalités et le transfert de responsabilités au niveau local. Je peux citer, par exemple, l'adoption de la loi 136 en Ontario qui prévoyait le règlement rapide de différends lors de négociations collectives à la suite de la restructuration dans le secteur public, qui a apporté aussi des modifications à la Loi sur les normes d'emploi ontarienne et à la Loi sur l'équité salariale ontarienne. Alors, ça a donné des pouvoirs accrus à la Commission des relations de travail de l'Ontario pour permettre la constitution rapide de nouvelles unités de négociation, la négociation de nouvelles conventions collectives si les conventions précédentes ne convenaient pas et la préférence pour des règlements négociés plutôt que l'arbitrage dans le cas des policiers et pompiers, donc tout un dispositif mis en place.

Cette question de la rémunération est importante. Elle vaut, comme je le mentionnais tantôt, pour les employés municipaux de municipalités de plus de 25 000 de population dont l'écart a été chiffré, par rapport aux employés du secteur public, à 29 %. Elle vaut aussi, cette rémunération, en comparaison des élus. J'ai eu copie d'une étude réalisée sur la rémunération des élus municipaux au Canada et en comparaison de la rémunération au Québec, et ce sont les élus québécois qui sont globalement les mieux rémunérés. Il en va aussi des corps policiers...

Le Président (M. Vallières): Mme la ministre, on a à nouveau dépassé notre cinq minutes. C'est court, n'est-ce pas? C'est le député de Bellechasse qui a demandé la parole. M. le député de Bellechasse.


M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci. Toujours avec un retour sur ce que nous avons vécu dans le monde municipal au cours des dernières années, ou des deux dernières décennies, je ferai un bref retour sur ce qui a eu l'effet d'une bombe le 14 décembre 1990 alors qu'un des collègues du député de Laurier-Dorion, M. Ryan pour ne pas le nommer, ministre des Affaires municipales, annonçait son intention de faire une réforme de la fiscalité municipale dans un document qui avait l'air inoffensif mais qui ne l'était pas. Ce document, je l'ai ici, c'était Partage des responsabilités Québec-municipalités: vers un nouvel équilibre . Vous avez certainement dû passer des heures à parcourir ce document, vous aussi, M. le Président, comme député de Richmond, et les élus municipaux s'en souviennent encore. Alors, dans ça, qu'est-ce qu'il y avait de particulier? Bien, ça faisait suite aux 320 000 000 $ de champ de taxation foncière qui avaient été finalement cédés aux commissions scolaires. Ce n'est pas rien! Il y avait également un montant de 30 $ par plaque d'immatriculation des véhicules de promenade pour les municipalités membres des régions métropolitaines de recensement, et une de mes municipalités, qui s'appelle Beaumont, a hérité de cette chose-là même si elle ne possède pas de transport en commun sur son territoire.

Je faisais une petite recherche dernièrement, et on disait qu'actuellement au Québec il y a 105 municipalités dont les automobilistes doivent payer le 30 $ sur leur plaque d'immatriculation en surplus pour le transport en commun, ce qui totalise 14 300 000 $ par année. Mais le pire, c'est qu'elles n'ont pas accès au service de transport en commun, chose qu'on va essayer de corriger en convainquant notre ministre des Finances et notre ministre des Transports. Il y avait également une surtaxe sur les immeubles non résidentiels et la taxe d'affaires. Il y avait surtout la voirie locale pour laquelle on pensait à 0,14 $ du 100 $ d'évaluation comme effort des citoyens de nos municipalités, et, encore une fois, si vous me permettez de prendre l'exemple de la circonscription que je représente, il y a eu 950 km de chemin qu'on a garrochés aux municipalités, bien sûr avec une petite compensation, mais les routes étaient loin d'être en bon état.

(11 h 30)

En ce qui concerne les services policiers, bien, c'était nouveau. On a demandé aux municipalités de contribuer aux services policiers à la hauteur de 0,10 $ pour 100 $ d'évaluation pour les municipalités avec 3 000 habitants et moins. On a réduit la compensation tenant lieu de taxes sur les immeubles du réseau de l'éducation, écoles primaires et secondaires. Alors qu'auparavant c'était 50 %, on a réduit ça à 25 %. On a permis aussi – non seulement on a permis, mais on a obligé – les municipalités à percevoir la taxe de Bienvenue. Donc, drôle de façon de souhaiter la bienvenue à quelqu'un qui s'achète une propriété!

J'entendais tantôt le député de Montmagny-L'Islet, mon collègue voisin, parler de sommes d'argent, mais, pendant ce temps-là, il y a une chose qui se passait au Québec, c'est qu'on s'endettait à un rythme fulgurant. Je n'ai jamais entendu parler que c'était pour avoir un déficit zéro, moi, là, qu'on introduisait cette réforme Ryan. Mais, durant ce temps-là, on voyait des déficits annuels considérables et puis, sous les deux administrations, pendant neuf ans, du Parti libéral, de 1985 à 1994, on a vu la dette s'accroître de 43 000 000 000 $ et simultanément on a vu le pompage de 2 000 000 000 $ à la Société de l'assurance automobile. Alors, c'est sûr que, aujourd'hui, je n'entends pas nos amis d'en face parler de ces choses-là parce que ce n'est pas très, très agréable, mais, je pense que c'est important de le rappeler, on part de loin. Et, dans la région Chaudière-Appalaches où j'habite, eh bien, c'est un impact, simplement la réforme Ryan, de 16 000 000 $. Je pense, par exemple, à la MRC de L'Islet, c'est quelque chose comme 1 002 000 $; et, pour la MRC de Montmagny, c'était 823 000 $. Ce n'est pas rien, M. le Président. C'est pour ça qu'aujourd'hui ça me fait un petit peu sourire quand je vois l'attitude de certaines personnes par rapport à l'actuel gouvernement et à la ministre des Affaires municipales.

J'ai ici une coupure de presse – parce que vous savez que je suis un ramasseux, ayant une formation en histoire – du Devoir du 2 juillet 1991: Ryan menace de couper les vivres aux municipalités récalcitrantes . Ce n'était pas rien! On voyait que l'harmonie ne régnait pas nécessairement. Ici, Le Soleil du 27 novembre 1991. Alors, on dit: Si les municipalités tardent, Ryan menace de forcer les fusions . Ah bon! Alors, peut-être que nos amis d'en face pourront se rappeler ces propos-là lorsqu'ils voudront s'attaquer à l'actuelle ministre. Et, finalement, je vous ferai grâce, M. le Président, de toutes les caricatures suaves qu'on a pu voir dans les journaux de l'époque. Merci.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Bellechasse. M. le député de Laurier-Dorion.


M. Christos Sirros

M. Sirros: M. le Président, je ne répondrai pas à ces choses-là, mais je constate que la ministre manque toujours de temps. Alors, pour l'aider, je vais lui donner la grande partie de mon temps. J'ai quatre questions précises, j'aimerais avoir des réponses, si possible: Un, est-ce que la ministre entend permettre la sous-traitance en modifiant les articles 45 et 46 pour les municipalités? Deux, est-ce que la ministre entend revoir la moyenne salariale municipale afin de réduire l'écart avec la fonction publique québécoise? Trois, quel est son échéancier pour les réaménagements dont on parle? Et, quatrièmement, le rapport Bédard, est-ce votre plan directeur? Il vous reste quatre minutes et demie des miennes, ajoutez-les aux cinq qui sont les vôtres, vous avez neuf minutes pour nous donner, j'espère, des réponses à des questions précises, en espérant que ce soient des réponses précises.

Le Président (M. Vallières): Bien. Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Aux deux premières questions, M. le Président, soit celles portant sur la sous-traitance et la rémunération moyenne, je dirai que j'entends y répondre en mettant en place avec le monde municipal ce Groupe de travail sur les questions de relations de travail, à la fois Code du travail, Loi sur l'organisation territoriale municipale, et Loi de police que nous allons examiner au sein de ce Groupe de travail sur les relations de travail. Quant à l'échéancier, la date butoir convenue entre le monde municipal et le gouvernement du Québec est celle du 1er janvier 2000 pour la mise en place d'une fiscalité renouvelée, et je comprends que notre échéancier doit nous amener au plus tard le 20 octobre prochain à convenir de cette fiscalité à mettre en place au 1er janvier. C'est donc le compte à rebours qui est commencé.

Et j'aurai, le 4 juin, aux assises biannuelles de l'UMRCQ, l'occasion de faire le point sur les échanges qui se poursuivent présentement, des échanges nombreux. Je vous dirai que, depuis à peine deux semaines, j'ai pu avoir des échanges à la fois avec les porte-parole de l'Union des municipalités du Québec, les porte-parole des maires des villes-centres, les porte-parole des maires des villes de banlieue de l'île de Montréal, les maires et préfets de la Rive-Nord, les maires et préfets de la Montérégie, ceux de l'UMRCQ et bien d'autres évidemment qui sont intéressés par tous les travaux; je pense, entre autres, aux conseils régionaux de développement, tant celui de l'île de Montréal que l'ensemble des conseils régionaux, aux chambres de commerce – j'étais, encore hier soir, à Montréal, à une rencontre de la Chambre de commerce du Grand Montréal – et à bien d'autres. Alors, c'est très intensif, présentement, et je comprends que nous mettons en place les conditions qui vont permettre de débuter les discussions certainement avant la fin de nos travaux parlementaires.

D'autre part, M. le Président, je profiterais du temps qui m'est permis pour faire connaître l'état de la situation du palier supramunicipal, particulièrement dans la région métropolitaine de Montréal. Il en est beaucoup question. Le sentiment, souvent, que l'opinion publique en a eu, compte tenu des déclarations qui ont été faites, c'est que les recommandations du rapport Bédard ajoutaient un palier de plus à ce qui existait déjà, comme si le supralocal n'existait pas, alors que ce que je comprends des recommandations contenues dans le rapport de la Commission sur la fiscalité et les finances locales, c'est de faire du ménage dans ce qui existe déjà. Et qu'est-ce qui existe déjà sur la région métropolitaine de Montréal en termes de supralocal? Il existe 54 organismes qui oeuvrent actuellement au palier supramunicipal, donc au palier supralocal, dans la région métropolitaine de Montréal: une communauté urbaine, 15 MRC, trois sociétés de transport, neuf conseils intermunicipaux de transport, une agence métropolitaine de transport et 25 régies intermunicipales. Ce supramunicipal coûte actuellement, en dépenses d'administration, presque 200 000 000 $ – 197 000 000 $, plus précisément.

Donc, il y a vraiment un supramunicipal, sur un territoire comme celui de la région métropolitaine de Montréal, qui se superpose, qui administre l'équivalent d'un budget de 2 000 000 000 $ principalement affecté au transport en commun – 733 000 000 $ – et à la sécurité publique – 400 000 000 $ – mais qui, en fait, intervient dans des champs de responsabilités comme le transport en commun, le service de police et la sécurité publique mais aussi dans le domaine de l'aménagement du territoire, du développement économique, de la gestion des matières résiduelles, de l'environnement, des loisirs, de la culture, des parcs régionaux. Alors, il ne faut pas imaginer qu'il y a les niveaux fédéral, provincial, municipal et que les recommandations contenues dans le rapport Bédard en ajouteraient un autre. Il existe, cet autre niveau, je le rappelle: 54 organismes juste sur le territoire métropolitain de Montréal. Ils oeuvrent, ces 54 organismes, souvent, compte tenu de la fragmentation des pouvoirs, des services et des centres de décision, sans qu'il puisse y avoir une vision métropolitaine commune. Alors, voilà.

(11 h 40)

Et peut-être un élément qui intéressera sûrement les membres de cette commission, les quote-parts qui sont versées pour le financement de ces organismes supramunicipaux, les quote-parts qui sont prélevées dans les budgets municipaux, totalisent, sur les budgets des municipalités de l'île de Montréal, 27 % et totalisent, sur les budgets des autres municipalités de la région métropolitaine de Montréal, 8 %. Alors, on voit qu'il y a un total de 200 000 000 $ de dépenses d'administration, soit le fonctionnement même de tous ces 54 organismes supramunicipaux, le financement des greffes, des archives, des services d'évaluation foncière, de gestion du personnel, de contentieux, d'entretien, de réparation, etc., d'administration générale, et que ce supramunicipal est financé par des quote-parts, prélevées dans les municipalités, qui totalisent 835 000 000 $ quant aux 29 municipalités de l'île de Montréal et qui totalisent 8 % du budget des autres municipalités de la région métropolitaine.

Le Président (M. Vallières): Bien. Merci, Mme la ministre. La parole appartient maintenant au député de Bellechasse.


M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci. Alors, pour cette dernière intervention de l'interpellation d'aujourd'hui dans le monde municipal, je me serais aussi attendu à ce qu'on parle un peu de la problématique des regroupements des municipalités parce qu'il y a une incidence assez forte avec la fiscalité. Moi, ce que j'en déduis, pour avoir observé encore une fois ce qui s'est passé dans le monde municipal depuis maintenant 25 ans, c'est qu'il existe actuellement un climat qui est propice à des changements qui sont positifs, et je prendrai pour exemple ce que nous rapportait justement un journal de votre coin, de votre région, M. le Président et député de Richmond, La Tribune de lundi dernier, le 10 mai. On faisait allusion aux réactions de deux élus importants de la région de l'Estrie, le maire de Sherbrooke, M. Jean Perrault, qui disait, et je cite: «Je ne suis jamais reparti d'un congrès de l'UMQ avec une conviction aussi ferme que les dossiers vont bouger vite et dans le bon sens.» Évidemment, il faisait référence à l'atmosphère qui régnait là-bas suite au passage de la ministre des Affaires municipales ainsi que du ministre des Finances. Son collègue qui est le maire de Bromptonville et préfet de la MRC de Sherbrooke, M. Nault, disait, lui aussi, que ce qui était important, ce qu'il avait retenu, c'est deux phrases prononcées par les ministres Harel et Landry, et je cite: «Le statu quo n'est plus acceptable. Il n'y aura pas de réforme mur à mur.»

Alors, ceci étant dit, il me semble qu'on doive s'orienter, on doive évoluer vers quelque chose qui va être intéressant pour tout le monde. Et ce qui est important également – j'aime bien les comparaisons avec l'Ontario, mais il faut comparer tout ce qui est comparable – c'est de regarder finalement qu'est-ce qui reste dans les poches des citoyens, des contribuables, une fois que le niveau scolaire est passé, que le niveau fédéral est passé, que le niveau du Québec est passé et que le niveau municipal est passé. Encore une fois, je me réfère à un papier d'un journaliste du Devoir du 6 mai dernier, Robert Dutrisac, qui disait: Il vaut mieux vivre à Montréal . J'imagine qu'il vaut peut-être mieux vivre aussi à Richmond, qu'il vaut mieux vivre à Bellechasse qu'à Toronto, par exemple. J'en suis persuadé. Alors, il disait: «Pour une famille de la classe moyenne ou pour les plus démunis, il vaut mieux vivre à Montréal. Demandez aux nouveaux sans-abri de la "révolution du bon sens".» Et il parlait du coût du logement à Toronto.

Évidemment, Toronto, c'est une chose. Il n'y a pas seulement Toronto, en Ontario, mais le gouvernement Harris, à qui on se compare souvent au niveau des impôts, ne construit plus de logements sociaux depuis belle lurette, alors qu'on continue ici, au Québec, à pouvoir le faire pour donner une chance à ceux qui sont plus démunis. Et, quand on regarde ça plus globalement aussi, on constate que, par exemple, pour les familles, en ce qui concerne l'aide aux garderies, bien, ce n'est pas négligeable, l'aide qui est accordée pour les garderies à 5 $ par jour.

Il citait également les coûts pour l'assurance automobile; on pourrait ajouter bien d'autres choses, et en particulier les tarifs d'électricité plus avantageux ici, au Québec. Alors, bref, M. le Président, je pense qu'on est dans une période où il y a beaucoup d'espoir. Moi, ce que je souhaite comme parlementaire, comme membre de cette Assemblée, c'est que les discussions se déroulent le plus possible dans l'harmonie. Ce n'est pas facile, parce que, si ça avait été facile, ça ferait longtemps que ça serait réglé. Mais, avec la bonne volonté de part et d'autre dans les discussions, dans les échanges qui peuvent avoir lieu, c'est d'en arriver finalement à ce que nos concitoyens se sentent bien au Québec, peu importe où on se trouve sur le territoire, dans des organisations municipales qui sont adaptées encore une fois aux besoins des gens de l'an 2000, pour le IIIe millénaire. Merci.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Bellechasse. M. le député de Montmagny-L'Islet.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: M. le Président, je pense que je vais en partie reprendre où j'ai laissé tantôt. Mme la ministre, d'abord, vous nous avez posé des questions à savoir si l'opposition était en accord avec les changements qui s'imposent à ce moment-ci. Oui, c'est une volonté de la majorité des élus municipaux, ceux et celles qui ont eu à intervenir dans le passé. Nous sommes dus, le temps est arrivé pour un nouveau pacte fiscal, et ça, ça se débat déjà depuis quelques années. Donc, sur ce point-là, tout le monde s'entend, les deux Unions et l'ensemble des municipalités sont en accord, nous sommes déjà probablement en retard, d'une part.

Ma question, Mme la ministre, c'est l'impact que ça peut avoir en région, ce nouveau pacte fiscal qui est en train de se définir dans certaines régions plus vite que dans d'autres, et le député de Bellechasse y a fait allusion. Évidemment, les maires d'agglomération sont déjà partis. Ils sont déjà partis et ça se comprend, parce que, eux autres, ils ont la responsabilité, auprès de leur structure municipale, de renforcir cette région-là, et ça, c'est tout à fait légitime. Donc, ces gens-là sont déjà partis, et, si on reprend le texte qu'a cité le député de Bellechasse, ils se disent, et à juste titre: Nous allons d'abord parler entre nous; si on s'entend puis si on a une proposition qui pourrait être acceptable, nous allons déborder – et c'est de là mon allusion – pour se renforcir, avec les municipalités environnantes.

Les fusions, Mme la ministre, j'aimerais vous entendre. En région, ça chemine depuis plusieurs années. Notre collègue de Bellechasse a cité une réaction dans les journaux d'une déclaration de l'ancien ministre des Affaires municipales, M. Ryan. Il nous a rendu service, à ce moment-là, quand il a déjà sensibilisé le monde municipal à ce qui devait s'en venir dans le futur. Évidemment, nous avons aussi nos découpures de journaux des trois, quatre dernières années que je n'ai pas l'intention de vous citer ici ce matin.

Mme la ministre, permettre aux régions de se regrouper dans l'harmonie, comme on le souhaite tous, d'une part, pour se renforcir et se structurer davantage pour être en mesure de développer des services auxquels la population est en mesure de s'attendre et de garder une santé financière acceptable pour être capable de continuer à donner les services et à faire du développement régional, les structures municipales, depuis plusieurs années, depuis toujours, ont compris que c'était leur rôle, elles l'ont reconnu, et le gouvernement du Québec se réfère aux municipalités locales et aux MRC depuis plusieurs années pour faire du développement et leur a donné passablement d'autonomie et d'outils pour faire du développement régional. Est-ce que, à l'occasion de la mise en place, vous avez fait allusion aux structures supramunicipales dans les grands centres, ce sur quoi vous venez d'échanger avec mon collègue de Laurier-Dorion? Est-ce qu'en région vous préconisez le renforcement de la MRC, le fait de reconnaître la MRC comme possible structure supramunicipale, si c'est le cas, si c'est souhaité par le gouvernement du Québec, d'une part? Et de quelle façon vous allez préconiser la sensibilité aux fusions? Est-ce que c'est par des lois déposées par des députés à l'Assemblée nationale, de préférence? Est-ce que c'est ça, la stratégie qui est en train de se développer, ou si c'est selon la bonne volonté du milieu ou l'initiative de chacune de nos régions?

Mme la ministre, j'aimerais savoir si votre ministère, vous-même et le gouvernement du Québec êtes aujourd'hui et dans les prochaines semaines en mesure de supporter les initiatives régionales pour déjà débattre ou préparer la réforme fiscale. Êtes-vous en mesure de les supporter? Avez-vous déjà, à votre ministère, des éléments qui puissent les guider pour ne pas arriver au 20 octobre avec des propositions qui nous viennent du milieu mais qui ne soient pas acceptables pour votre ministère ou le gouvernement du Québec?


Conclusions

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Mme la ministre, pour les prochaines 10 minutes.

(11 h 50)

Mme Harel: Alors, je comprends, M. le Président, que ce sera là ma dernière intervention, hein? C'est bien le cas?

Le Président (M. Vallières): Exactement.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, je remercie le député de Montmagny-L'Islet pour l'ouverture que traduit la question qui vient d'être posée. Je crois qu'il existe effectivement un momentum, présentement, un climat propice à des changements positifs, et j'apprécie que ces changements ne se fassent pas sur la base des clivages habituels, les clivages politiques que l'on connaît dans notre société. J'ai été à même de le constater lors de ces rencontres, que je mentionnais tantôt, avec le monde municipal, il n'y a pas, d'un côté, des péquistes ou des libéraux, ou les fédéralistes et les souverainistes, il y a finalement à dégager une vision commune à la fois de la démarche qu'on doit entreprendre mais aussi du résultat qu'on veut atteindre dans ces changements qui ne sont pas d'abord des changements de structures, mais qui sont d'abord des changements dans le rôle que les municipalités ont à jouer dorénavant, je dirais, dans la nouvelle économie. Vous y avez fait allusion par rapport au développement régional.

J'assistais hier au congrès, qui se déroule encore aujourd'hui, des conseils régionaux de développement du Québec, à l'occasion duquel une entente était signée entre le CLD Robert-Cliche, le Centre local de développement Robert-Cliche, donc de la Beauce, et le Centre local de développement de Pointe-aux-Trembles–Rivière-des-Prairies, et cette entente faisait en sorte qu'une stratégie commune de développement d'entreprises manufacturières et d'aide réciproque était convenue entre le territoire de la Beauce et celui de Rivière-des-Prairies et Pointe-aux-Trembles. Je pense qu'on va de plus en plus assister à ce genre d'entente stratégique entre des agglomérations de taille moyenne ici, au Québec, et à l'extérieur également.

Bon, ceci étant dit, vous posez toute la question de la fiscalité d'agglomération. Dans le fond, ce que vous posez comme question, c'est celle du financement d'une fiscalité d'agglomération qui s'impose d'autant plus que l'effort fiscal des villes centrales, ou des villes à fonction de centralité, comme on dit maintenant, est en moyenne de 25 % supérieur à l'effort des villes voisines, des villes périphériques qui ont pourtant besoin des services qui sont rendus par ces villes centrales. Alors, la discussion qui est enclenchée repose sur ça, justement, sur la nécessité de donner un élan à la fiscalité d'agglomération. Je ne peux pas vous dire ce matin ce qu'il en résultera.

Il y a des propositions qui sont contenues dans le rapport de la Commission et qui servent à alimenter les échanges, bien évidemment. Ce sont là des propositions en faveur d'une fiscalité d'agglomération basée notamment sur le concept souvent utilisé aux États-Unis de Tax Base Sharing, c'est-à-dire une capacité de distribuer à l'intérieur d'une agglomération pour que cesse toute concurrence, étant donné que le bénéfice peut en être réparti, donc une distribution de l'amélioration de la situation, hein, pour le résumer ainsi. Alors donc, il y a différents outils qui sont proposés, des redevances qui seraient versées, des redevances au niveau des richesses naturelles, des redevances également au niveau des nuitées d'hébergement pour développer le tourisme et des redevances au niveau de la taxe d'amusement, il y a diverses sources de revenus qui sont ainsi proposées, et je comprends que la discussion qui s'enclenche maintenant va justement porter sur les moyens les plus appropriés pour assurer un financement d'agglomération.

Je vous le dis en toute simplicité, il y a sans doute des territoires où des fusions sont essentielles, mais il y en a d'autres où des fusions seraient dommageables. Et, s'il n'y a plus de statu quo acceptable, le mur-à-mur ne l'est pas non plus. C'est donc en respectant la diversité et les particularités propres au milieu que nous entendons mener ces discussions qui vont nous amener à la conclusion de nouvelles ententes.

Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, Mme la ministre, vous disposiez de 10 minutes. Là, vous n'utilisez que 5 m 24 s. Elles ne sont pas transférables, O.K.? Ça va?

M. Sirros: Est-ce qu'elle nous redonne les cinq minutes comme je le faisais tantôt? Non? Ha, ha, ha!

Le Président (M. Vallières): S'il y avait consentement. On a 10 minutes pour vous, M. le député de Laurier-Dorion. La parole est à vous.


M. Christos Sirros

M. Sirros: D'accord, M. le Président. Je comprends qu'on est au point de résumer puis de tirer des conclusions. Je constate trois choses et je le ferai comme les trois choses que je constate qu'il manque. Il y a des choses qui sont peut-être sur une bonne voie, mais il y a au moins trois choses que je constate qu'il manque. Il y a un manque de volonté, que je constate, de travailler véritablement pour le contribuable et le citoyen. La ministre prend beaucoup plus de temps pour parler de la nécessité de changer les structures, de l'organisation, du mode d'organisation, etc., puis jamais, dans toutes ses interventions, on n'a vu la ministre parler du résultat concret pour le citoyen.

Je persiste à dire qu'il faut absolument, dans tout ce qu'on entreprend de faire, qu'on puisse être capables de mesurer nos résultats, et la mesure de nos résultats quand il s'agit d'un gouvernement puis quand il s'agit de parlementaires, c'est le bénéfice qui en résulte au citoyen. Ça ne suffit pas de dire qu'on fait ça pour mieux se développer puis qu'on verra dans l'avenir parce qu'on craint que, ce faisant, on occupe le terrain politique. On parle, on parle, on parle, on fait des choses des fois, mais on ne s'est jamais donné d'instruments pour mesurer le résultat de nos actions et on voit le fruit finalement un peu trop tard.

Je disais tantôt, au début, que la ministre a aussi passé par d'autres ministères où elle a entrepris des réformes, et la deuxième constatation que je fais, c'est que ce qu'il semble manquer aussi, c'est un échéancier réaliste, dans ce cas-ci, parce que je ne crois pas pour deux secondes que la ministre va faire les changements nécessaires au Code du travail, à la rémunération salariale des employés municipaux d'ici le 20 octobre pour permettre d'avoir une fiscalité complète et correcte pour le 1er janvier. Et, si elle ne fait pas ça, si elle ne prend pas l'engagement de faire ça clairement, ce qu'elle a évité de faire – et ça, c'est la troisième constatation en termes de manque de volonté, un manque de volonté assez évident aujourd'hui de dire clairement qu'on va s'attaquer avec toute la volonté du gouvernement à ce problème central que sont les relations de travail...

Elle nous a parlé – et ça fait à peu près le même nombre d'années que nous sommes en cette Chambre – comme le font beaucoup de politiciens quand ils sont pris. Ils disent: Je vais créer un comité. C'est ce que la ministre nous a dit. Elle a dit: Je vais mettre sur pied un comité pour regarder cette question. Et pourtant c'est la question la plus centrale de toutes. Et, si je le lis avec l'échéancier que la ministre se donne, j'arrive à la conclusion qu'elle va faire le travail à moitié, qu'elle va laisser pour plus tard le reste, sauf qu'on sait très bien que, quand on entreprend des réformes de cette envergure et de cette nature et quand on laisse pour plus tard le reste, le reste ne se fait jamais, puis on reste, pour ainsi dire, avec la moitié de quelque chose, et la moitié de quelque chose est souvent pire que rien du tout. Donc, si la ministre nous dit: Pas le statu quo, j'en conviens, mais il faut que la ministre nous place l'ensemble dans un contexte réaliste, dans un contexte où la volonté de s'attaquer aux vrais problèmes transpire et un contexte où le résultat doit être une résultat pour le citoyen.

(12 heures)

Alors, sur ces trois fronts, aujourd'hui, dans les deux heures que nous avons passées, la ministre n'a pas réussi à passer la barre du succès, dans mon estime tout au moins. Je parlerai à un moment donné d'autres choses sur lesquelles on pourrait se mettre d'accord et sur lesquelles la barre est trop haute, dit la ministre. Mais tant mieux pour le citoyen puis le contribuable, parce que justement il faut qu'on mette la barre haute pour son égard, pour son bénéfice, et c'est ce que je voudrais entendre un peu la ministre aujourd'hui nous dire: Vous savez, je me suis donné des moyens aussi de mesurer mon efficacité; je me donne l'objectif, par exemple, que, d'ici deux ans, les municipalités puissent réduire leur fardeau fiscal au contribuable de tant, qu'on soit à tel écart global, que je puisse contribuer, comme ministre des Affaires municipales, à réduire l'écart global avec l'Ontario de tel pourcentage. Donnez-nous quelques indices de mesure. Vous me donnez beaucoup de paroles, mais on veut des choses concrètes. Parce qu'on joue souvent sur deux tableaux, ici, et la ministre l'a fait tout le long de ces deux heures. Elle a joué sur le tableau de la comparaison locale, où elle mêle, comme je le disais tantôt, le scolaire et le municipal, et celui de la comparaison globale. Mais, ultimement, globalement, nous sommes désavantagés et il faut qu'on puisse se rattraper.

Alors, j'aurais aimé voir la ministre se donner quelques objectifs concrets de contribution par cette structure au rattrapage; elle ne l'a pas fait. J'aurais aimé voir de la ministre une indication de quel est le bénéfice net qui va résulter dans un an, dans deux ans, dans trois ans au citoyen, qu'elle se donne des façons pour qu'on puisse mesurer l'atteinte de nos objectifs, sinon on reste dans le flou puis dans le vague puis, comme dans d'autres dossiers, on finit quelque chose sans l'avoir fini, ce qui m'amène à parler de l'échéancier un peu plus longuement.

Relations de travail. On sait que ça fait des années que c'est un problème réel, la question de la sous-traitance, par exemple. Si on ne donne pas aux municipalités la possibilité de faire de la sous-traitance, donc de pouvoir libérer une marge de manoeuvre, de réduire leurs coûts pour qu'ils puissent justement bénéficier à leurs citoyens, chose que le rapport Bédard fait ressortir assez clairement, si on ne réduit pas l'écart salarial afin de le mettre comparable avec le reste, comment est-ce que vous voulez vraiment parler de nouveau pacte fiscal? On va simplement se contenter, à ce moment-là, de faire ce qui est probablement fait depuis longtemps, des réaménagements au niveau de certaines responsabilités, et c'est ça qui est inquiétant, quand j'entends la ministre insister sur la base locale des taxes et sur la santé financière des municipalités.

Elle a beau dire qu'elle ne veut pas avoir mainmise ou aller chercher les surplus, etc., on dégage assez clairement ses paroles quand elle compare et constate la santé financière qui est bonne, dit-elle, au niveau des municipalités, tandis que, quand on la regarde vraiment de près, ce n'est pas parce qu'il y a un surplus au niveau de certaines municipalités qu'elle est bonne, parce que l'autre volet, le volet des opérations courantes, en quelque sorte, s'est empiré depuis l'entente du 375 000 000 $ parce que justement ils ont soit augmenté les taxes, soit coupé les services dans certaines municipalités, soit retardé des travaux d'infrastructure. Alors, s'ils ont gardé les mêmes, plus ou moins, surplus, ça n'a rien changé. Donc, ce n'est pas mieux, pas vraiment, hein? Et, dans le reste, c'est pire.

Donc, quand la ministre nous met ces choses en relief, on peut supposer – parce que, bon, après un certain nombre d'années, on comprend comment ça marche – que, quelque part, que ce soit au niveau du ministère des Finances ou au Conseil du trésor, il y a des pressions qui se font pour que finalement on puisse shifter et transférer des responsabilités aux municipalités et que ça nous prend un discours politique pour le couvrir. La ministre est en train de développer ce discours politique, mais elle fait fausse route. Si on prend le tout dans son ensemble, je ne peux que souhaiter que la ministre profite de l'ouverture qui est faite au niveau des municipalités à l'heure actuelle pour vraiment revoir la question de la fiscalité, qu'elle se dégage un certain temps pour le faire correctement au niveau des relations de travail, mais qu'elle commence en affirmant sa volonté de véritablement s'attaquer à ce problème fondamental, sans quoi il ne peut pas y avoir de véritable réforme.

Sur ces bonnes paroles, je vais laisser les dernières minutes à nos agendas respectifs, M. le Président, pour essayer de rattraper un peu le temps qu'on a perdu en remerciant la ministre et les autres collègues de leur présence ici aujourd'hui, et vous aussi pour votre excellent doigté en présidant nos délibérations. Merci beaucoup.

Le Président (M. Vallières): Je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion. Alors, évidemment, la commission a complété, rempli son mandat. Vous me permettrez aussi de remercier ceux et celles qui ont contribué à nos travaux de ce matin. Et, la commission ayant complété son mandat, elle ajourne conséquemment ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 5)


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