(Onze heures trente-deux minutes)
Le Président (M. Kelley): Alors, bonjour, les membres de la Commission des affaires sociales. Je constate quorum, donc je déclare la séance ouverte en rappelant le mandat de la commission.
La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi n° 34, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les centres médicaux spécialisés et les laboratoires d'imagerie médicale générale.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Drainville (Marie-Victorin) remplace Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve).
Remarques préliminaires
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. On va passer maintenant à la rubrique des remarques préliminaires. On a convenu une enveloppe totale de 15 minutes pour les remarques préliminaires, en commençant avec un droit de parole de 7 min 30 s pour le ministre ? et ça va dépendre des personnes, je pense ? six minutes pour l'opposition officielle et 1 min 30 s pour le deuxième parti de l'opposition, pour les remarques préliminaires. Alors, si tout va bien, on va commencer maintenant avec le ministre pour un droit de parole de 7 min 30 s. M. le ministre.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc: Merci, M. le Président. Je suis heureux de l'occasion qui nous est donnée d'entendre en commission parlementaire différentes interventions relatives au projet de loi n° 34. Je remercie les représentants de toutes les formations politiques qui vont participer à cette démarche et je rends hommage à tous les groupes que nous allons entendre ici pour une contribution très constructive à notre travail législatif.
Comme vous le savez, M. le Président, le projet de loi n° 34 vise à modifier différentes dispositions législatives concernant les centres médicaux spécialisés et les laboratoires d'imagerie médicale générale. L'un des principaux objectifs poursuivis par le projet de loi consiste à clarifier les types de services offerts par ces deux types d'organisation, les centres et les laboratoires. Il s'agit également d'adapter leur cadre juridique pour que les structures corporatives soient modelées vers un meilleur contrôle réel des médecins sur leurs cliniques.
Un objectif très important consiste à bien asseoir les responsabilités de chaque exploitant en matière de qualité et de sécurité des soins et à préciser les modalités de sélection du directeur médical qui se ferait parmi les médecins travaillant dans le centre médical spécialisé ou le laboratoire d'imagerie médicale, selon le cas.
Le projet de loi prévoit aussi que les services offerts dans le secteur privé se déploient sur tout le continuum de services et que le patient qui les utilise en soit averti. Le texte à l'étude précise également le nombre maximal de lits qu'il serait possible d'aménager dans un centre médical spécialisé.
Le projet de loi énonce en outre les motifs qui font en sorte que le ministre puisse suspendre, révoquer ou ne pas renouveler un permis. Nous allons également nous pencher sur les peines associées au fonctionnement sans permis, ce qui comprend, dans le cas des médecins participants au régime d'assurance maladie, l'arrêt des paiements par la RAMQ.
Enfin, une partie du projet de loi vise à revoir les modalités de l'ajout d'un traitement au règlement sur la liste des traitements médicaux spécialisés.
Le travail parlementaire est un travail de débat, d'échange et discussion. Je suis en mode écoute, un mode qui permettra sans doute d'atteindre de meilleurs résultats pour améliorer un système qui nous tient à coeur, le système de santé québécois. Je n'ai aucun doute que les députés ministériels et ceux de l'opposition sauront amener de nouvelles lumières au débat et nous permettre d'obtenir un meilleur encadrement des centres médicaux spécialisés. Je remercie d'avance l'ensemble des intervenants pour leur participation à cet exercice nécessaire. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le ministre. Je suis prêt maintenant à céder la parole au député de Marie-Victorin pour un droit de parole maximal de six minutes.
M. Bernard Drainville
M. Drainville: Merci, M. le Président. Bien, nous aussi, on est des gens de bonne volonté et on va faire notre travail d'opposition rigoureusement et sérieusement.
Cela étant, M. le Président, ce projet de loi n° 34 suscite chez nous énormément d'inquiétude, et ce, pour plusieurs raisons. On est très préoccupés par toute la question de la mixité. Nous, c'est un principe avec lequel nous sommes en désaccord, nous ne croyons pas à la mixité dans le système public de santé... enfin, dans le système de santé, nous ne croyons pas à la mixité public-privé, nous croyons à l'étanchéité entre le public et le privé. Et donc, quand on voit, dans le projet de loi, que le ministre veut reconnaître certains droits à des cliniques où il se fait actuellement une pratique mixte, ça nous inquiète, ça nous préoccupe, et le ministre aura fort à faire pour nous convaincre du bien-fondé de ces propositions.
Sur la question du nombre de lits d'hospitalisation qui seront permis en CMS avec médecins non participants, nous avons également des inquiétudes. Le ministre va sans doute nous dire que c'est une amélioration, on resserre, on reprécise le nombre maximal de lits, sauf que, nous, notre inquiétude, M. le Président, depuis le départ, avec 33 et en particulier avec le règlement de la loi n° 33, c'est le développement d'un réseau de cliniques privées au Québec. Et de limiter le nombre de lits d'hospitalisation qui seront offerts en CMS avec médecins non participants, ça ne règle pas notre problème. Notre problème fondamental, c'est que nous ne souhaitons pas le développement d'un réseau de cliniques privées au Québec parce que nous craignons que ce soit le développement, que ce soit l'embryon à partir duquel pourrait se faire, pourrait se développer un réseau privé de santé parallèle à notre système public de santé.
L'autre problématique que nous voyons avec ce projet de loi, et j'ai bien, bien hâte d'entendre le ministre là-dessus, c'est toute la question des centres de santé de femmes qui donnent des services d'interruption volontaire de grossesse. On entend dire entre les branches qu'il y aurait eu peut-être une sorte de compromis, mais, tant qu'on n'aura pas vu l'amendement au projet de loi, on sera dans l'attente, dans l'expectative.
Comme vous le savez peut-être, M. le Président, nous avons, ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve et moi-même, entrepris des démarches auprès du ministre et auprès de son cabinet pour que les centres de santé de femmes, pour que le statut de ces centres de santé de femmes qui donnent des services d'avortement puisse être précisé. Et on était très, très inquiets, là, que le ministre insiste pour que ces centres de santé soient couverts par le projet de loi n° 24. Apparemment, le ministre a des propositions à nous faire là-dessus, on a bien hâte de l'entendre.
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(11 h 40)
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Je lis, M. le Président, le projet de loi, j'en ai pris connaissance, j'ai rencontré un sous-ministre et, de façon générale, quelques membres du personnel du ministre. Il est évident que, bon, le ministre va tout faire pour nous convaincre, là, que ce projet de loi là, ce n'est pas si pire que ça, ce n'est pas si mal que ça, là, mais, nous, on doit vous dire, M. le Président, que, si le ministre veut nous rassurer sur ses intentions quant au projet de loi n° 34, il serait très possible pour lui de poser des gestes assez simples mais qui seraient lourds de sens et qui confirmeraient son engagement envers un système public de santé.
Par exemple, M. le Président, il pourrait très bien modifier l'article 15.1 de la Loi sur l'assurance maladie afin de garantir que l'élargissement de l'assurance privée duplicative se fasse par modification législative plutôt que par simple règlement. C'est une suggestion qu'on va entendre dans un instant de la part de la Confédération des syndicats nationaux. C'est une idée que nous trouvons excellente, et j'ai bien hâte d'entendre le ministre se prononcer là-dessus. Ça pourrait être une belle façon, ça, de démontrer qu'effectivement, dans le prolongement du jugement Chaoulli, le ministre n'a pas l'intention de continuer à perpétuer des conditions législatives qui permettraient l'élargissement de l'assurance privée duplicative en plus des trois chirurgies pour lesquelles c'est déjà prévu dans la loi n° 33. Ce serait très possible pour le ministre de déposer un amendement qui amenderait la loi n° 33 puis qui rassurerait pas mal de monde et qui nous assurerait surtout que le ministre n'a pas l'intention de permettre l'assurance privée duplicative au-delà des trois chirurgies qui sont couvertes par le jugement Chaoulli.
On est également d'accord, M. le Président, avec l'idée d'un grand débat public sur le type de services chirurgicaux qui pourront se faire en CMS privé à l'avenir. Nous, on avait demandé, M. le Président, lors de la dernière campagne électorale, on avait demandé l'abrogation du règlement de la loi n° 33 parce qu'on trouvait que c'était une espèce de cheval de Troie qui risquait de permettre le développement de cliniques privées dans toutes sortes de domaines. Et on a bien hâte d'entendre, encore une fois, le ministre là-dessus, j'ai bien hâte de voir comment il va nous rassurer parce que, quand on prend la peine de lire le règlement de la loi n° 33 qui doit être mis en vigueur le 1er septembre prochain, la liste est longue, la liste est longue de toutes ces chirurgies qui vont pouvoir se développer dorénavant dans des cliniques privées.
J'ai hâte, M. le Président, d'entendre les arguments du ministre, mais disons qu'à sa face même, là, ce projet de loi que nous avons devant nous suscite d'énormes inquiétudes et beaucoup, beaucoup de questionnement. Et on a hâte de voir si le ministre non seulement a des bonnes réponses, mais s'il est prêt à apporter des amendements pour nous rassurer. Merci.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. M. le député de La Peltrie, pour les courts commentaires.
M. Éric Caire
M. Caire: Oui. Je vais dire comme vous, M. le Président, ça va être court et touchant.
Bien, d'abord, je veux saluer la présence du ministre, de mes collègues du caucus ministériel, de mon collègue de l'opposition, de mes collègues de l'opposition officielle, les gens qui sont présents avec nous aujourd'hui, les remercier de leur présence, effectivement assurer le ministre de ma collaboration, évidemment dans la perspective d'un parti d'opposition.
M. le Président, je pense que mes positions, les positions que je défends en matière de santé sont assez connues, je ne reviendrai pas là-dessus, je pense que tout le monde les connaît, et j'ai l'intention d'être fidèle à mes convictions dans l'étude du projet de loi, et dans l'étude article par article, et dans les auditions qu'on se prépare à faire.
Simplement, peut-être, M. le Président, pour dire au ministre qu'il y a quand même effectivement des éléments là-dedans qui sont questionnables et qu'on va questionner parce que, en matière d'organisation des soins de santé, pas convaincu de la direction que le ministre veut prendre, pas convaincu exactement de l'objectif qu'il vise. Et ce serait sans doute plus facile si on pouvait connaître le parcours qu'il entend prendre et l'objectif qu'il vise à atteindre par le projet de loi qu'il dépose et par ceux qu'il déposera plus tard, parce que ce n'est pas clair, effectivement, le rôle qu'il entend faire jouer à chaque secteur, puis dans quelle proportion, et comment il souhaite organiser tout ça.
Nos propositions à nous sont claires en cette matière, le ministre, je pense, sait à quelle enseigne je loge là-dessus. S'il y a des éléments là-dedans qui l'intéressent, il va me trouver à ses côtés pour les mettre en place. Il semble vouloir ouvrir une porte, mais on n'est pas sûrs combien grande la porte est ouverte, et ça, c'est peut-être un peu dérangeant, mais on aura certainement l'occasion, M. le Président, d'en discuter avec le ministre.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. Également pour des très courts commentaires, M. le député de Mercier.
M. Amir Khadir
M. Khadir: Oui. Bon matin, bonjour, tout le monde. Merci, M. le Président. Il n'est de secret à personne que, pour Québec solidaire, l'intégrité du système de santé public est primordiale, même c'est une partie, en fait, de la genèse de notre parti. À titre personnel, comme médecin, M. le ministre est au courant, j'ai défendu bec et ongles, depuis bientôt une dizaine d'années, ce principe qu'on avait besoin d'un système de santé de qualité, public, universel, accessible à tous.
L'histoire du développement des dernières années de l'introduction de systèmes de santé privés ailleurs dans le monde, notamment en Grande-Bretagne qui a été un pionnier dans le domaine, montre que c'est un échec. D'ailleurs, un médecin britannique qui était en visite, la semaine dernière, au Québec disait: Si, pour les banques, pour les constructeurs automobiles, ça n'a pas marché, la gestion privée, cet entêtement à tout privatiser et à tout remettre entre les mains de gestionnaires privés, pourquoi ça devrait marcher pour le système de santé public?
Ce que je tiens à dire à M. le ministre aujourd'hui puis aux différents intervenants, c'est que nous constatons qu'effectivement il y a une amélioration dans les balises, à partir de ce projet de loi là, qui doivent encadrer les cliniques spécialisées associées. Cependant, ce qui est certain, c'est que la question de la radiologie, la question des laboratoires est encore une plaie béante.
L'exemple le plus patent est l'exemple de mon hôpital, construit à grands frais, en fait à frais raisonnables quand même mais avec de beaux équipements, il y a à peine cinq ans, c'est un exemple patent de ce phénomène. Des salles de radiologie, disons, parfaitement équipées, des équipes compétentes ne réussissent pas à travailler à plein régime faute de financement, dans la manière dont le budget de l'hôpital est accordé, qui entraîne certains de mes collègues radiologistes, des fois à leur corps défendant mais des fois parce qu'il en va de leur intérêt, c'est une question de simple reconnaissance des éléments qui sont en cause dans tout ce processus... ont ouvert une clinique de radiologie en face, en chargeant des frais à des patients, ce qui fait que, dès maintenant, il y a un accès inéquitable aux services et aux ressources en santé. Puis il faut le corriger, ce n'est pas digne de notre prétention et de la volonté des Québécois, qui veulent un système de santé public de qualité, accessible à tous et gratuit.
Auditions
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. Sur ça, je vais demander à nos premiers témoins de prendre place à la table des témoins. C'est les représentants de la Confédération des syndicats nationaux: Mme Denise Boucher, Mme Josée Roy, Mme Andrée Lapierre et Mme Anne Pineau. Alors, j'imagine, c'est Mme Boucher qui va prendre la parole. Alors, Mme Boucher, la parole est à vous.
Confédération des syndicats nationaux (CSN)
Mme Boucher (Denise): Merci, M. le Président. Alors, je vais excuser Mme Josée Roy, qui n'est pas avec nous, et vous présenter les personnes qui sont avec moi: alors, Andrée Lapierre, qui est du service de recherche à la CSN, et Anne Pineau, qui est du contentieux de la CSN.
Alors, M. le Président, M. le ministre, députés, alors le projet de loi n° 34 va trop vite en nous demandant d'avaliser une vaste gamme de services qui pourront être offerts par les centres médicaux spécialisés, alors que le réseau public manque de personnel. Nous demandons donc au gouvernement de ne pas adopter ce projet de loi et de prendre le temps de tenir un véritable débat public sur ce qui devrait être ou non être offert par les cliniques médicales privées.
En traitant, dans une seule et même législation, de l'ouverture à l'assurance maladie duplicative, l'établissement d'une garantie publique d'accès, les traitements médicaux spécialisés autorisés aux CMS et l'encadrement de la qualité et la sécurité de la pratique médicale à l'extérieur des établissements publics, le gouvernement a emmêlé les choses. Tant que la preuve que cet exercice de législation et de réglementation pour encadrer la pratique médicale dans les cliniques, cabinets et laboratoires privés ne mène pas à plus de privatisation, nous ne pourrons être en accord. Pour nous, le projet de loi n° 34 entretient le fouillis, tente de concilier l'inconciliable et constitue un cheval de Troie.
Nous convenons qu'un balisage s'impose en regard de la qualité et la sécurité des pratiques médicales qui prévalent à l'extérieur des établissements publics. Cependant, l'élaboration de cet encadrement doit se faire en toute transparence et dans une démarche indépendante, dédiée à cette seule finalité, en évitant absolument tout amalgame possible avec une velléité de privatisation qui viendrait la contaminer.
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(11 h 50)
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Pour ce faire, la CSN réclame la tenue d'un débat public en commission parlementaire sur les services médicaux spécialisés permis en CMS. À cet égard, un document de consultation s'avère indispensable pour faire le point sur les pratiques actuelles des cliniques, cabinets et laboratoires privés et préciser la nature et les volumes des actes médicaux, les divers effectifs mobilisés, la nature des ententes et liens établis avec les établissements publics, les conditions d'exercice de même que le coût des services offerts, etc. Sans cette information, il est impossible d'apprécier l'étendue et l'impact de la gamme de services médicaux spécialisés qu'on s'apprête à confier aux cliniques médicales spécialisées privées.
Bien qu'on ait éliminé l'article qui rendait la liste de traitements médicaux spécialisés infinie et indéterminée, on retrouve encore quelque 53 traitements identifiés sans qu'on sache trop sur quoi on s'est basé pour fixer ce nombre. Il est inquiétant de constater que le projet de règlement étend la liste des chirurgies extrahospitalières aux chirurgies de cancer, notamment le cancer du sein, et des chirurgies abdominales, pelviennes et bariatriques.
À l'instar des Médecins québécois pour le régime public, la CSN estime que seules des chirurgies mineures pour des patients à faible risque devraient être autorisées en cabinet et clinique médicale, comme le prescrit le guide d'exercice du Collège des médecins, faisant en sorte que ces chirurgies ne requièrent qu'une courte période d'observation postopératoire, et ce, seulement en s'assurant la disponibilité rapide de services additionnels en cas d'événements indésirables ou d'accidents.
D'autre part, la CSN s'oppose vigoureusement à la chasse gardée que confère l'article 3 du règlement aux CMS de médecins non participants en matière de chirurgie de la hanche et du genou ainsi que pour tout traitement médical spécialisé dont la durée d'hébergement excède 24 heures. Ce monopole contribue à accentuer le drainage des ressources du public vers le privé.
Avec des pénuries de main-d'oeuvre devenues alarmantes et des désaffiliations de médecins qui prennent une ampleur inédite et qui se font avec une facilité déconcertante, adopter des mesures venant accentuer le problème n'est vraiment pas une solution. Afin d'aider à corriger ces difficultés, la CSN croit que le gouvernement devrait fournir au réseau public tous les appuis et moyens pour que chaque personne soit traitée à l'intérieur du délai fixé, sans avoir à recourir à l'extérieur du système public. Le gouvernement ne doit tout simplement pas encourager la création de CMS de médecins non participants et la spirale de privatisation qu'elle induit. Nous ne voulons pas voir se développer un éventuel marché de l'assurance maladie privée duplicative en parallèle avec le réseau public.
La CSN demande plutôt au gouvernement de redoubler ses efforts pour freiner le désengagement des médecins et mettre en place des mesures d'attraction et de rétention pour favoriser la pratique médicale dans les structures des groupes de médecine familiale et des réseaux universitaires intégrés de services.
Compte tenu des risques considérables que représente tout élargissement de l'assurance maladie privée, la CSN réclame également la modification de l'article 15.1 de la Loi sur l'assurance maladie afin de garantir que tout élargissement de l'assurance privée duplicative se fasse par modification législative plutôt que par simple règlement.
Ajoutons que le projet de loi n° 34 a le mérite, sur certaines mesures d'encadrement de la qualité et de la sécurité de la pratique médicale dans les centres médicaux spécialisés et les laboratoires d'imagerie médicale générale... sont plus restrictives que ce que nous retrouvions dans la loi n° 33, entre autres, soit: le pouvoir réglementaire d'ajouter d'autres actes médicaux aux CMS, transféré au gouvernement au lieu du ministre, quoique cette décision devrait se faire par voie législative à l'Assemblée nationale; de préciser l'application du principe d'étanchéité ou de non-mixité entre médecins participants à la Régie de l'assurance maladie et non participants; la qualification pour l'obtention d'un permis de pratique; la limitation à cinq lits d'hébergement des CMS de médecins non participants; les traitements médicaux spécialisés autorisés seront désormais inscrits au permis du CMS; la responsabilité de l'information, de l'organisation et du paiement pour tout épisode de soins lié à un traitement acheté par un patient en CMS de médecins non participants.
Cependant et malgré ces quelques avancées, pour la CSN, le projet de loi n° 34 ne doit pas être adopté. Le gouvernement doit prendre le temps de bien faire les choses. Après des années sans encadrement, on peut bien prendre quelques mois de plus pour faire les vraies discussions. Enfin ? je termine là-dessus ? dans le cadre du projet de loi n° 34, la CSN et la FTQ ont travaillé de façon coordonnée sur l'analyse et les conclusions que nous vous partageons, qu'en ce qui concerne le recours juridique devant la Cour supérieure nous allons analyser les suites que nous entendrons y donner en fonction de ce qu'il adviendra de ce projet de loi. Alors, voilà, M. le Président, j'ai terminé.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme Boucher. Alors, on va passer maintenant à une période d'échange avec les membres de la commission. Nous avons un bloc de 50 minutes, alors: 25 minutes à ma droite, 16 minutes pour l'opposition officielle, quatre minutes pour le deuxième groupe d'opposition et quatre minutes pour le député de Mercier. Alors, c'est comme ça que la poire va être coupée. Sans plus tarder, M. le ministre, la parole est à vous.
M. Bolduc: Je vous remercie, parce que je pense que la position est claire. On a déjà eu l'occasion de discuter avec votre organisation sur le projet de loi n° 33 qu'on a voulu bonifier puis voir qu'est-ce qui pouvait être fait. J'aimerais ça vous entendre par rapport au projet de loi n° 34, les effets bénéfiques que vous voyez au niveau de la sécurité puis au niveau de la qualité, parce que vous semblez reconnaître que le fait de passer ce projet de loi là va quand même amener un meilleur encadrement puis probablement et sûrement on va améliorer les soins aux patients.
Mme Boucher (Denise): C'est vrai qu'on souligne cet élément-là et c'est vrai aussi que nous croyons qu'il fallait le faire et qu'il faut le faire. Cependant, quand vous lisez notre mémoire, ce qu'on y dit, c'est qu'on ne peut pas faire toutes les choses à part et de faire en sorte de créer ce que, nous, nous appelons une spirale des effets qui ferait en sorte qu'on sous-entend, par le fait qu'on encadre ce qui va se faire dans les CMS, un mirage de la privatisation. Et ça, pour nous, on ne peut pas faire en sorte, même si on trouve qu'il y a des éléments qui sont intéressants dans 34 sur ce volet-là, faire en sorte qu'on va accepter 34 tout en tenant compte de ce qu'il y a à l'intérieur de ce qu'il y avait dans 33 antérieurement, qui devient 34. Pour nous, ça, c'est clair.
Alors, c'est sûr que la question des encadrements tels qu'ils sont placés, tels que vous les avez mis sur la table, c'est très intéressant, on ne s'en cache pas. on vous l'avait d'ailleurs déjà dit, que, pour nous, on trouvait important que ça puisse se faire, mais pas sur cette façon-là. Et pourquoi encadrer d'une certaine façon près de 53... Je pense que c'est 55, le chiffre le plus précis d'actes qui seraient faits dans les CMS. Pourquoi 55? Pourquoi pas 25? Pourquoi 30? Pourquoi pas 45?
Donc, pour nous, si on détache l'élément de l'encadrement de tout ce qu'il y a autour, ça fait en sorte que, pour nous, on ne règle pas la question qui, pour nous, est essentielle, l'ouverture à une plus grande privatisation.
M. Bolduc: L'autre élément qui est important quand on parle... le pourquoi du 55, c'est que ce sont les chirurgies qui se font déjà dans les cliniques médicales. Il n'y a pas d'ajout de nouvelles chirurgies, c'est qu'on fait juste nommer chacune des chirurgies justement pour protéger, parce qu'au niveau du règlement de 33 ce qui était dit, c'était... il y avait une condition: comme toute autre chirurgie. Ça fait que ce qu'on a décidé, c'est de restreindre. Et cette restriction-là nous arrive avec un nombre, mais il faut mettre ça clair pour tout le monde ici, là, il n'y a pas d'augmentation, il ne s'en fera pas de nouvelles... type de chirurgies, ce sont les chirurgies qui se font déjà qu'on nomme. Parce qu'il y a eu comme à un moment donné où des gens commençaient à nous dire: Il se rajoute des chirurgies. Absolument pas. Si on ne passe pas ce projet de loi là, si on ne passe pas le projet de loi, les mêmes chirurgies vont se faire au cours des prochaines années mais sans encadrement, sans élément de sécurité puis sans élément de qualité. C'est pour ça que...
Puis, quand on dit qu'on peut attendre encore quelques mois, le débat public a été fait beaucoup, tout le monde en a parlé. On a entendu tantôt les trois groupes d'opposition se positionner. Leurs positions sont connues depuis des mois, des années. On connaît notre position. Maintenant, on est rendus à l'étape que c'est important de clarifier chacune des choses. Et on croit que ça prend une meilleure qualité, des meilleurs éléments de qualité, de sécurité, donc un meilleur encadrement.
On balise en nommant les types de chirurgies qui se font déjà depuis plusieurs années, donc on n'en a pas ajouté. Sauf que, si on veut en ajouter, il va falloir passer par justement une façon de faire qui fait que, si, demain matin, il existe un nouveau type de chirurgie qui apparaît, ils ne pourront pas le faire; pour le faire, il va falloir qu'on donne l'autorisation. Parce que la médecine, c'est évolutif. La médecine, c'est quelque chose qui va changer. S'il apparaît quelque chose de nouveau, on ne pourra pas le refuser aux Québécois. Là, on s'entendra sur la modalité, c'est quoi, la répartition publique versus privée. Ça, je pense que c'est important de le clarifier pour tout le monde parce que les gens nous ramènent tout le temps: On en ajoute. On n'en a pas ajouté une, on fait juste nommer ce qui se fait déjà.
Là-dessus, j'aimerais ça vous entendre, là, si vous êtes d'accord avec la position que je viens de vous dire, si vraiment ce que j'ai dit, si c'est vrai, c'est-à-dire que, si, aujourd'hui, on ne passe pas le projet de loi, les chirurgies qui sont dans le projet de loi, elles vont continuer à se faire, au Québec, comme elles se font actuellement.
Le Président (M. Kelley): Mme Boucher.
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(12 heures)
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Mme Boucher (Denise): Alors, il y aura Mme Pineau et Mme Lapierre qui interviendront. Mais juste sur un des éléments que vous avez dits, vous savez, un des problèmes que les Québécois et les Québécoises ont, c'est d'avoir perdu... la perte de confiance à l'égard du gouvernement, particulièrement sur tout ce qui a été déposé dans les dernières années à titre de projets de loi, 33 ou autres, ou règlements. Donc, quand vous dites qu'il ne pourra pas s'en ajouter... Bon, ce qui a été changé fait en sorte qu'au lieu que ce soit le ministre qui détermine c'est le gouvernement. Mais il s'est passé des choses dans le Conseil des ministres qui ne nous ont pas plus réjouis, qui nous ont aussi inquiétés. C'est pour ça que, dans cet égard-là, nous, on parle qu'il faut regarder une question de la législation pour faire en sorte de resserrer encore plus, parce que plus on va en mettre, des chirurgies, plus ils vont vouloir en faire et plus le privé va s'accaparer de ce qu'est le plus lucratif et va faire en sorte de drainer aussi du personnel qui va aller vers des CMS, plutôt dans le privé que la volonté du gouvernement d'investir dans le public à l'effet que ces chirurgies-là puissent être faites. Alors, Mme Pineau puis après Mme Lapierre.
Le Président (M. Kelley): Mme Pineau.
Mme Pineau (Anne): Merci. Notre position, en fait, c'est la suivante: tout accroissement de l'offre privée se fera au préjudice du système public et risque d'entraîner une baisse d'accès. Et ce n'est même pas nous qui le disons. En 2005, le comité interministériel qui avait été mis sur pied suite au jugement Chaoulli disait que l'accroissement de l'offre de services médicaux et hospitaliers à financement privé pourrait réduire l'équité dans l'accès aux services de santé en fonction des besoins des personnes. Dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre dans le système public, le développement de l'offre à financement privé risque de se faire en bonne partie en puisant à même les ressources du système public. Ce n'est même pas nous qui le disons, c'était votre... un comité interministériel.
Ce n'est pas sans conséquence d'ouvrir au privé. Et ce qu'on demande, c'est: Pourquoi et à quelles conditions? Et ce n'est pas simplement de dire: On vient encadrer, c'est beaucoup plus que ça, c'est une éventuelle offre de services dans le privé qui se fera au détriment du système public qui est en cause. Et cette liste-là que vous ouvrez, elle a une filiation directe avec la liste de 15.1, qui est la liste qui permettrait éventuellement d'ouvrir à l'assurance... C'est les mêmes traitements, hein? Évidemment, c'est deux règlements, mais c'est les mêmes traitements. Or, ce n'est pas sans conséquence. Et l'encadrement, on est pour, mais on ne le troquera pas contre une ouverture au système privé.
Le Président (M. Kelley): Mme Lapierre.
Mme Lapierre (Andrée): Oui. Bien, trois observations, là, sur la disposition qu'on voit apparaître. On dit: On essaie de resserrer les conditions de qualité, de sécurité. On a garanti que ça va être des médecins qui pratiquent qui sont dans la gestion, qui vont un peu contrôler l'exercice. Mais il reste qu'on persiste, on s'obstine à encore parler d'abord d'un hébergement en clinique médicale privée, alors qu'après une opération, le suivi, puis tout ça, on est plus en soins qui seraient d'ordre hospitalier. La caisse, en 2006, avait fait cette remarque-là, en disant: On utilise, on persiste à utiliser le nom d'hébergement alors qu'il s'agit bel et bien d'une hospitalisation, tout simplement pour ne pas se mettre en infraction avec la Loi canadienne de la santé, qui l'interdit. Alors, on n'est pas dupes de cette chose-là.
L'autre élément, quand vous dites: C'est ce qui se fait déjà. Oui, c'est ce qui se fait déjà. 101 cliniques de radiologie, 60 % sont au privé, et c'est le système public qui en fait les frais. On ne connaît pas les conditions des ententes, ce qui est remboursé. De temps en temps, on a des éléments qui viennent. Le Dr Barrette a dit aux journalistes, l'été dernier, qu'il reçoit une majoration quand il voit des patients en sa clinique privée. Est-ce que ça, c'est un incitatif à ce que les radiologistes reviennent travailler au public? Dr Bolduc, on se pose ce type de questions là.
Alors, on n'est pas du tout rassurés par la liste des actes. D'abord, ce qu'on demande, à la CSN, c'est de voir les volumes et c'est la clarté sur l'entente des frais afférents liés à cette chose-là. On est déjà en pénurie de main-d'oeuvre. L'Angleterre, avec un dispositif de privatisation, a sorti 25 % du personnel du réseau public pour aller dans les cliniques privées.
Alors, la situation actuelle ne nous satisfait pas. Ce n'est pas un point de départ acceptable. C'est déjà trop, ce qu'on a. Et, on le voit, ce matin, vous êtes dans les médias, avec les urgences des hôpitaux qui ne s'améliorent pas. Les pénuries sont là. Les médecins peuvent changer d'idée comme ils veulent. Ça prend 30 jours ici, huit jours pour revenir.
Nous, on dit: Ça, ce n'est pas des conditions acceptables. On demande au gouvernement de démontrer, quand il fait une intervention, qu'on est en train de consolider le système public. Ce n'est pas ça qu'on voit. On voit des choses qui vont dans le sens inverse, alors on n'est pas satisfaits.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Bolduc: La question: Dans les listes de chirurgies qu'on nomme dans le projet, y en a-tu une seule qui ne se fait pas actuellement dans le réseau des cliniques privées? Y en a-tu une seule? Est-ce qu'il y en a une seule qu'on a rajoutée? Je pense que c'est important pour clarifier à tout le monde, parce que c'est comme si on ouvrait... Est-ce qu'il y en a une seule que vous pouvez me nommer qu'on ne fait pas actuellement à l'intérieur des cliniques privées qu'on a rajoutée dans la loi? C'est oui ou c'est non.
Le Président (M. Kelley): Mme Lapierre.
Mme Lapierre (Andrée): Vraisemblablement pas. Je ne suis pas, moi, un médecin, donc on n'est pas capables de suivre tout ça, et ça fait partie du dispositif qui nous inquiète, c'est-à-dire qu'on a connu... La chose qui nous a inquiétés, tout le monde... Puis la population connaît bien le cas de Mme Charest, dans une clinique à des fins esthétiques, et évidemment qu'il y a eu des problèmes. Mais, ceci dit, moi, je ne le suis pas, c'est les prérogatives des instances médicales. Notre inquiétude, c'est... Les listes, c'est une chose. Les médecins pour le régime public avaient vraiment dit: Écoutez, le guide de pratique des médecins dit: L'extrahospitalier, ça devrait être des choses garanties, simples, etc. Alors, nous, c'est sûr que Mme Charest, ça a été un épisode qui nous a démontré qu'effectivement on n'avait pas des législations adéquates.
Ça, je suis d'accord avec vous. La CSN, on reconnaît qu'il faut qu'il y ait de l'encadrement. Depuis le virage ambulatoire qu'il faudrait que ça se fasse. Mais, depuis le virage ambulatoire, on n'a toujours pas vu apparaître la nomenclature de ce qui devrait se faire. Et le problème qu'on vous dit, c'est qu'on ne peut pas faire tout en même temps. C'est qu'à la fois on voudrait bien faire le débat juste sur la qualité puis la sécurité puis être sûrs qu'on n'est pas en train de préparer de la privatisation. Et c'est là-dessus qu'on est déjà un petit peu embourbés dans la privatisation, puis on trouve que ce n'est pas les deux pieds dans la privatisation qu'on peut faire le débat sur la qualité.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Bolduc: L'élément important: on ne peut pas tout faire en même temps. Le cas de Mme Charest, qui est décédée, a prouvé qu'il fallait agir pour avoir un encadrement qualité-sécurité. Je suis étonné que vous me dites que vous ne savez pas, parce que c'est le fond... une question de fond qu'il y a dans ce dossier-là, et là on va se le dire tous ensemble: Il n'y a aucune chirurgie nouvelle qui est ajoutée dans le projet de loi, on définit comme il faut, c'est... Chacune d'elles, elles se font déjà. Pas de projet de loi: pour les cliniques, ça ne changera pas. Puis ça, c'est important. Parce qu'on nous ramène ça tout le temps, qu'on élargit. Je veux que ce soit clair pour tout le monde. Et, s'il y a quelqu'un qui n'est pas capable de m'en nommer une, on nommera tantôt. Mais il faut qu'on s'entende là-dessus.
Et puis j'abonde dans votre sens, on aurait un problème si on ne passe pas cette loi-là puis si on ne passe les règlements. On n'a pas de volume actuellement dans aucune des cliniques. On ne l'a pas, le volume. J'ai demandé à ce que ce soit ajouté, qu'à chaque année on ait le volume de chacune des cliniques pour qu'on soit capables de mesurer l'impact de ces cliniques-là sur notre réseau de santé global et voir l'impact sur le réseau de santé public. Ça, c'est un avantage qu'on crée dans le système. Je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez. Puis ma question est directe là-dessus. Le fait de rajouter la notion de volume mesuré obligatoire qui va être donné par les cliniques, c'est un plus au niveau de la réglementation.
Le Président (M. Kelley): Mme Boucher.
Mme Boucher (Denise): Au risque de se répéter, comme vous l'avez fait en nous indiquant que vous n'en aviez pas ajouté, ce que l'on dit, c'est qu'en lien avec la question de la sécurité, en lien avec la question de la qualité, à notre avis, ça ne devrait pas être dans ce projet de loi là, ça devrait être quelque chose de complètement à part, de façon distincte. C'est pour ça qu'on rejette 34, parce que, nous, ce qu'on y voit, c'est qu'on est peut-être... Je ne suis pas docteure, là, comme vous, là, mais ce qu'on voit, c'est que c'est le lien que l'on peut faire entre ce qui va s'ouvrir dans les CMS, les 55, et le lien aussi avec 15.1 sur la question des assurances duplicatives. C'est ça, nous, et, ce qu'on y voit, c'est la spirale qui va faire en sorte de s'entraîner vers une plus grande privatisation.
On n'a jamais rejeté la question de la qualité. Si vous me dites que, 34, là, c'est ça, bien vous auriez dû le sortir puis en faire un projet de loi indépendant, non rattaché avec ce qu'il y avait à l'intérieur de l'autre projet. C'est ça que vous auriez dû faire. C'est ce que vous n'avez pas fait. C'est un autre choix que vous faites, ça vous appartient.
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(12 h 10)
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L'autre élément, en même temps, et c'est ça aussi qui nous inquiète, vous avez vous-même refusé qu'il y ait de l'ophtalmologie qui soit donnée à un CMS privé, mais heureusement qu'il y a eu des médias qui ont fait... qui ont quasiment... qui ont expliqué ce qui se passait, c'étaient des coûts de deux à trois fois supérieurs à ce qui pouvait se faire dans le public. Puis en même temps qu'on trouve qu'il manque d'argent, on est prêts à en donner pour les CMS dans le privé, leur en donner un petit peu plus, en pensant que ça va désengorger, quand, au contraire, ça fait en sorte que ça réengorge encore plus le système public. C'est ça que l'on dit.
Et c'est le mauvais choix que vous avez fait en l'intégrant à l'intérieur même de ça. C'est juste ça qu'on dit. Vous êtes après tout mêler, et là il n'y a plus personne qui se comprend. Mais, nous, ce qu'on comprend, c'est qu'il y a un objectif, et, malgré ce que vous avez dit tout à l'heure, parce que vous avez dit: Ce qui me tient... Dans votre intervention, vous m'avez dit: C'est un système qui me tient à coeur, je veux travailler... qu'on fasse un travail de débat et d'écoute. Un système qui me tient à coeur. Mais il faudrait dire lequel système qui vous tient à coeur. Privé-public, public ou privé? C'est ça, aussi, la question qu'on peut se poser, en dehors de vos 55 actes qui pourraient être faits. Alors, Mme Pineau puis Mme Lapierre.
Le Président (M. Kelley): Mme Pineau.
Mme Pineau (Anne): Oui, rapidement. Moi, je m'étonne un peu, M. le ministre, de ce que vous me dites, au fond: C'est parce qu'ils se font qu'ils sont dans la liste, alors que 333.1 nous dit que les traitements qu'on identifie, on doit tenir compte de critères pour les identifier. Il ne suffit pas qu'on constate qu'ils se font, on doit établir qu'il y a lieu de les mettre compte tenu des risques généralement associés au traitement, compte tenu de l'importance du personnel et de l'équipement nécessaire pour le fournir, compte tenu du type d'anesthésie, de la durée d'hébergement. Donc, c'est ces critères-là qui doivent servir à établir la liste qui ressort de 333.1. Donc, dire que ça se fait, ça ne me semble pas suffisant. On peut bien constater que des choses se font, mais: Devraient-elles se faire et aurait-on dû les laisser se faire?, c'est aussi une question qu'on devrait peut-être se poser.
Le Président (M. Kelley): Mme Lapierre, rapidement.
Mme Lapierre (Andrée): Oui. Bien, moi, je reviens à votre question, que vous dites ne pas être capable d'avoir les volumes d'activité que ce qui se fait en clinique présentement. Moi, ça, ça m'inquiète. Et le fait de l'inscrire... C'est sûr que la disposition a l'air encourageante en disant: Le ministre va demander des volumes puis tout autre chose. Mais encore une fois les exemples de l'Angleterre sont assez éloquents à cet effet-là. 20 ans après la politique, ils n'ont toujours pas de résultats, ils n'ont toujours pas... Quand le privé en donne, c'est, comme par hasard, jamais compilable, jamais robuste, jamais vérifiable, jamais vérifié.
Alors, moi, ce qui m'inquiète dans les dispositions des resserrements... À première vue, tu dis: Ah! c'est bien, c'est bien. Ah oui! combien ça va nous coûter de les avoir, les renseignements? Ils vont demander aussi qu'on leur fournisse les systèmes informatiques? Ils vont demander le personnel aussi pour le faire? Et comment on pourra valider? Parce qu'on sait très bien qu'on rentre dans la logique des affaires. Après ça, ils nous diront: Non, on ne pourra pas. Alors, c'est ce piège-là qu'on voit. On s'inquiète. Je veux dire, on aimerait bien être plus en confiance. Vous comprendrez qu'on ne l'est plus. En plus, c'est votre prédécesseur qui a attaché les derniers morceaux, alors, quand on sait que maintenant son métier est d'acheter des choses du privé pour rentabiliser. On ne peut pas être rassurés.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Bolduc: Pour vous rassurer, ce projet de loi, c'est moi qui l'ai attaché. Ça fait que ça, je peux vous le défendre sans aucune difficulté. Puis je vous remercie parce que vous m'avez fait un compliment quand vous avez dit qu'on a refusé deux cliniques d'ophtalmologie sur la base d'une analyse rigoureuse. Et j'ai toujours dit que chaque projet serait évalué à sa juste valeur, et ça vous prouve que je suis capable de les refuser. Ce n'est pas une ouverture large qu'on a, c'est qu'il faut que ça rentre dans le cadre d'un système public dans lequel on va aller chercher des avantages.
Pour ce qu'il s'agit des chirurgies, on peut regarder... je suis médecin, on a d'autres médecins ici, dans la salle, on peut regarder chacune des chirurgies qui est là, ça peut se faire en clinique privée. Et il y a des cliniques... il y a des chirurgies qu'à la limite on n'a pas mises, probablement, puis qui pourraient se faire aussi, mais qu'on n'a pas élargies. On a décidé d'y aller avec le cadre actuel. Et il y a eu une analyse rigoureuse de chacune des chirurgies. Et c'est normal qu'on retrouve la même liste. Si ça se faisait avant, ça aurait été inquiétant de savoir que ça se faisait, alors que présentement on devrait le refuser. Mais ça, je peux vous garantir, il y a eu une analyse rigoureuse, chacune des chirurgies est faisable en CMS, et c'est pour ça que la liste a été mise.
Un autre commentaire pour le système de l'Angleterre. L'Angleterre, je vais me positionner tout de suite. On nous arrive toujours avec des exemples de l'Angleterre. Puis, à un moment donné, tu parles à des gens qui disent que c'est le meilleur système au monde, puis on devrait faire pareil, puis ils te donnent des indicateurs; et, de l'autre côté, tu as tout un autre groupe qui dit que c'est le système le plus pourri au monde puis qu'il n'y a rien qui a fonctionné. Il n'y a pas grand monde qui ont vraiment évalué l'Angleterre dans tous ses aspects. Et l'Angleterre, c'est un grand pays dans lequel on n'a pas toujours les mêmes résultats dans chacune des régions. Donc, je suis très prudent quand on veut se comparer puis qu'on prend des exemples d'ailleurs. Moi, j'aime mieux parler du système québécois, c'est: où on en est rendus au Québec.
Au Québec, je rappelle le message, oui, le système public me tient à coeur, et je l'ai prouvé par la prise de décision dans plusieurs secteurs, où j'ai dit qu'il n'y aurait pas d'ouverture très large au privé. Il peut y avoir une collaboration. On favorise un système universel, gratuit et accessible, avec des indicateurs pour mesurer.
Dernier point. Pour ce qu'il s'agit du volume, vous avez raison, c'est inquiétant qu'on n'ait pas eu les volumes auparavant, mais justement le projet de loi puis les règlements qui vont avec, c'est pour se donner ces outils-là. Parce qu'actuellement il n'y a rien qui les oblige à les donner. Et vous pouvez être assurés qu'on ne paiera pas pour les avoir, ces données-là. Puis, quand c'est marqué dans la loi, ça va être aux CMS de se conformer et de nous fournir. Et ça va être à eux autres de s'acheter leur système informatique, ça va être à eux autres de nous fournir les chiffres. Nous autres, on va valider que ce sont les bons chiffres.
Là-dessus, je sais que ça ne remplit pas toutes vos inquiétudes, ça ne répond pas tout à ces inquiétudes-là, mais vous pouvez être assurés qu'on a fait, encore là, une approche rigoureuse. Pour moi, c'est important, le système public doit être bien géré. On essaie d'en garder le plus possible à l'intérieur du système public, ce qui ne veut pas dire qu'on ne peut pas avoir des collaborations avec le privé. Et, quand on fait des collaborations avec le privé puis ce n'est pas pour que ça nous coûte plus cher, c'est pour justement peut-être avoir une offre de services qui va être différente et puis qui va nous avantager. Et l'objectif qu'on doit tous avoir au même niveau, c'est la qualité des soins et l'accessibilité des soins. Je pense que c'est là-dessus qu'on se positionne. Moi, ça va être tout.
Le Président (M. Kelley): Un dernier commentaire, Mme Boucher, ou Mme Lapierre?
Mme Lapierre (Andrée): Bien, moi, le ministre n'a pas répondu à un volet en tout cas de la question. Je comprends la préoccupation, mais on a quand même actuellement déjà un problème d'équité. Qu'est-ce qu'il en est de la question de la radiologie? Comment se fait-il qu'il y a des incitatifs pour que les médecins soient plus rémunérés quand ils voient des gens en clinique... en cabinet plutôt que dans le système public? Et le fait que ça prend un an dans le réseau public pour accéder à un test diagnostique, est-ce que vous ne trouvez pas qu'il y a là un accroc à l'équité qui demande une intervention?
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Bolduc: Deux niveaux dans les questions. C'est que, quand on a un forfait au niveau des cliniques privées, c'est qu'il y a une composante qu'on appelle la composante technique, et cette composante-là, je la paierais à l'hôpital de toute façon, c'est le personnel plus les équipements. Puis je vous dirais que ce n'est pas nécessairement plus avantageux d'aller en clinique privée que d'aller dans une clinique publique, pour le radiologiste.
Pour ce qu'il s'agit de l'accessibilité ? puis je suis très conscient de ça, puis on travaille là-dessus actuellement ? la problématique qu'on a actuellement, c'est que, s'il y a des délais dans le système public, le patient peut avoir le même service dans le privé, mais il faut qu'il paie. Et c'est là qu'il y a peut-être une inéquité. Mais je peux vous garantir qu'on est en train de travailler là-dessus. Mais on ne pourra pas régler ça avec ce projet-là, c'est des travaux qui vont se faire autrement, en ayant des meilleures données au niveau de la radiologie, en planifiant notre offre en radiologie.
Et puis je pourrais même vous dire qu'il y a des gens de tous les partis, en tout cas du parti de l'opposition officielle, qui viennent me voir pour me demander d'avoir... au niveau de leurs cliniques privées, être certains que ça fonctionne parce qu'il y a des petites municipalités où il n'y aura pas d'hôpital... Puis on va prendre un exemple, Mont-Tremblant, où tu as une clinique de radiologie locale, il n'y aura pas d'hôpital qui va se construire là. Et, si des gens veulent donner une accessibilité de services, bien ça va se faire à l'intérieur d'une entente avec une clinique privée. Et puis ça, c'est le genre de dossiers qu'on travaille.
L'objectif aussi, c'est vraiment d'avoir un système public fort. Et, moi, je suis d'accord avec vous. Moi, ce que je veux, c'est diminuer les délais de l'accessibilité en radiologie, mais il faut le faire, là... ça va être un travail de fond qu'on va faire, mais on va le faire dans un autre cadre parce que, comme vous dites, de tout vouloir mélanger, c'est qu'on ne fera rien. Mais, pour moi, la principale chose, c'est: 34, qualité, sécurité, meilleur encadrement des cliniques. Il y a plus de restrictions... De toute façon, si le projet ne passait pas... Il va y avoir moins de restrictions que ce qu'on a actuellement.
Le Président (M. Kelley): Un dernier commentaire, ou sinon je vais passer la parole à M. le député de Marie-Victorin. M. le député de Marie-Victorin pour un bloc de 20 minutes.
M. Drainville: Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais remercier les représentantes de la CSN de leur présentation. Moi, je suis d'accord, M. le Président, et je l'ai déjà dit, avec l'une des prémisses de leur présentation, c'est-à-dire qu'on peut tout à fait assurer le cadre sécuritaire qui s'impose pour les cliniques privées, donc on est tout à fait d'accord avec le principe qu'il faut encadrer les cliniques privées, les cliniques de chirurgie notamment, et qu'on pourrait très, très bien le faire sans ouvrir pour autant la porte à un développement qui risque d'être extrêmement important dans la foulée de l'adoption de ce projet de loi là, sans parler de l'ouverture qui a été faite avec 33 et surtout le règlement de 33. Donc, on serait tout à fait capables d'encadrer les cliniques privées, de s'assurer qu'elles fonctionnent de manière sécuritaire sans avoir tout le reste, qui nous inquiète tant et pour lequel on a d'immenses inquiétudes.
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(12 h 20)
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Moi, je partage, M. le Président, l'un des passages du mémoire déposé par la CSN quand ils écrivent qu'on se retrouve... Je cite, là, à la page 8: «On se retrouve [...] avec quelque 53 traitements médicaux spécialisés identifiés sans qu'on sache trop sur quoi on s'est basé pour fixer ce nombre.» Fin de citation. Moi, M. le Président, ça fait deux ans, là, que je suis porte-parole en santé pour l'opposition, là, ça fait deux ans que j'entends les ministres de la Santé du gouvernement nous dire: Inquiétez-vous pas, là, le règlement, il fait juste reproduire ce qui se fait sur le terrain déjà. Et, à toutes les fois que je leur dis: Prouvez-moi-le, je n'ai jamais de réponse à cette question-là.
Il n'y a jamais aucun ministre qui m'a déposé la liste des fameuses cliniques privées où se font ces 53 chirurgies là. On nous demande de croire les yeux fermés à une affirmation qu'on ne prend pas la peine de nous démontrer et de nous prouver. Et, moi, j'ai bien hâte qu'on nous la dépose, cette liste-là des cliniques privées avec, à côté, la liste des chirurgies qui y sont effectuées. Et j'ai bien peur que la raison pour laquelle on ne la voit pas, cette liste-là, et la raison pour laquelle on ne la dépose pas, c'est qu'elle n'existe pas. Et, si elle existe, déposez-la, puis on va, à ce moment-là, pouvoir discuter. Mais tout ce qu'on a eu depuis deux ans, M. le Président, c'est: Fiez-vous sur nous, ça se fait déjà. Bien, ce n'est pas suffisant, ça, «fiez-vous sur nous, ça se fait déjà». Bon.
À cette heure, on nous dit aussi: Si on n'a pas le projet de loi, ça va être pire que ce qui se fait présentement, que la réalité. On n'est pas d'accord avec ça. On lui tend la perche, là, on lui ouvre la porte, là, sur l'article 15, là. Moi, je trouve ça inacceptable, M. le Président, qu'on puisse étendre, au-delà des trois chirurgies prévues dans Chaoulli, qu'on puisse étendre l'assurance privée duplicative avec une simple modification réglementaire. «Avec consultation en commission parlementaire», ça, c'est le gain que le Parti québécois a obtenu lors de la commission parlementaire sur 33, on a obtenu qu'avant de changer le règlement ils viennent consulter les élus du peuple. Mais ce n'est pas suffisant, une consultation sur un changement qui serait aussi important.
Et le ministre, je me répète, le ministre pourrait faire oeuvre, je dirais, de bonne foi s'il nous disait: Très bien, vous êtes inquiets?, on va effectivement proposer, en plus de 34, une modification législative qui dit que, si on veut étendre l'assurance privée duplicative au-delà des genoux, des hanches et de la cataracte, on va le faire par changement législatif. Ça, pour moi, ce serait une preuve tangible, là, au-delà des mots, là, une preuve tangible que ce gouvernement-là est sérieux quand ils disent qu'on veut vraiment freiner... ou en tout cas protéger le système public de santé et que notre objectif, avec 34, ce n'est pas d'ouvrir davantage au développement du secteur privé en matière de santé. Bon.
Moi, je veux vous entendre, mesdames, maintenant, sur... On a commencé à en parler, mais j'aimerais beaucoup que vous nous parliez de la radiologie et des services privés en radiologie parce que voilà, M. le Président, un secteur où il y a effectivement une forme de cohabitation entre le privé et le public. Quand c'est fait à l'hôpital, la radiologie est payée par le régime public; quand c'est fait hors établissement, c'est payé par le privé. Le ministre dit: Je veux régler ça; ça va prendre du temps; fiez-vous sur moi, je vais travailler fort pour améliorer les services. Moi, j'aimerais bien entendre les leçons que vous tirez justement sur ce type d'activité médicale où il y a effectivement une part du public qui cohabite avec une part du privé. Quelles sont les leçons que vous tirez du fonctionnement actuel?
Le Président (M. Kelley): Mme Lapierre.
Mme Lapierre (Andrée): Bien, le problème qu'on a... D'une part, là, je n'ai pas documenté tout ça de manière exhaustive pour aujourd'hui, mais ça a été un dada pendant un bout de temps, j'ai cassé les oreilles de mes collègues en disant: Il faut parler des cliniques et des laboratoires. Mais, pour aujourd'hui, j'ai simplement sorti l'article du Devoir du 12 novembre 2008 où est-ce qu'on confirme que la CSST est le premier acheteur de soins privés au Québec. Et pourquoi? Parce que les employeurs veulent que ça passe plus vite quand il s'agit de remettre des salariés au travail, des salariés accidentés. Et on constate que ça augmente. Alors, c'est, l'année dernière, en 2007, 345 millions que la CSST a donnés au privé, à des professionnels, puis les radiologistes sont souvent en bonne part là-dessus.
Et, dans la même enquête de la journaliste, elle avait le Dr Barrette qui disait: La CSST me verse des honoraires plus élevés quand je fais mon examen à la clinique privée qu'à l'hôpital. On est en présence, là, d'un organisme paragouvernemental. On est obligés de voir que la CSST, quand elle fait ça, là, c'est une politique publique, ça, là, là. Personne ne la rappelle à l'ordre. Et, pendant ce temps-là, bien, il y a des gens qui voient ces patients-là passer puis ils disent: Bien, c'est ça, la solution, allons au privé.
Et c'est ça qu'on dit. Le ministre, le gouvernement, pour être crédible, effectivement, un, il doit faire un peu la suggestion du député Drainville, un, d'abord nous garantir qu'on ne fera effectivement aucune extension d'assurance maladie privée sans passer par le Parlement. Mais, nous, on dit: Avant d'autoriser la liste de 53, on peut-u avoir le portrait, on peut-u avoir le portrait de comment ça marche? Parce qu'on sait très bien que, pour que ça marche, d'abord ça prend des appuis puis ça prend des liens avec les institutions publiques. Actuellement, tout ça, là, ça a été connecté par les docteurs, la population n'est pas au courant de ça, et on dit qu'on veut protéger le système public.
Moi, je dis: Je veux les efforts pour montrer où sont les cliniques ambulatoires publiques, où sont les cliniques spécialisées publiques. Comment ça se fait qu'il n'y a pas de gestionnaires publics qui viennent ici, à l'audition? Comment ça se fait que, là, on fait ça à la fine épouvante, juste avant de partir en vacances? Ça presse? Aïe! Moi, je dis: Faisons les choses correctement. On est dans le virage ambulatoire, on a besoin d'avoir, effectivement, connaître la nomenclature des choses ? jusque-là, ça peut se faire dans les cliniques ? puis à quel moment il faut être vraiment très bien organisés, très bien encadrés.
Il y a des bonnes intentions dans le projet de loi n° 34. C'est juste que, comme on n'a pas les garanties que ça ne servira pas à de la privatisation, on ne peut pas donner foi. Alors ça, c'est la difficulté. Puis les paradoxes qu'on connaît... puis ce n'est pas des paradoxes, je pense qu'il faut parler de problèmes, il y a une inéquité d'accès en ce moment parce que justement on a laissé ces développements-là se faire. Alors, actuellement, il y a des pénuries. Il y a des pénuries de médecins spécialistes. Les spécialistes, je pense, parlent de plus de 900 spécialistes manquants, 800 du côté des omnis. Bien, n'importe quel geste où est-ce qu'on a de l'air de juste dire: Voici, ce qui est modernisé, comme par hasard, c'est le côté privé de l'affaire. Ce n'est pas rassurant. On aimerait ça montrer la modernisation par le réseau public, les progrès dans le réseau public, les gains d'accès dans le réseau public. J'aimerais ça voir ça.
Le Président (M. Kelley): M. le député.
M. Drainville: Merci. Parlez-nous un peu de l'entente avec RocklandMD. Parce que je tiens à dire, M. le Président, que, nous, on était très sceptiques sur l'entente avec RocklandMD parce qu'on ne comprenait pas pourquoi est-ce que le gouvernement, le ministre de la Santé précédent tenait tant à transférer dans une clinique privée des chirurgies publiques, alors qu'il y avait des salles d'opération de l'Hôpital Sacré-Coeur qui n'étaient pas utilisées, qui étaient vides. Et ce qu'on m'explique encore aujourd'hui, c'est que c'est encore le cas, il y a encore des salles d'opération à Sacré-Coeur qui sont inutilisées.
Depuis cette entente-là, les syndicats, dont les syndicats de la CSN, ont dit: On est prêts à s'asseoir avec la direction de l'hôpital pour essayer de trouver des façons d'activer les salles d'opération pour éviter le transfert des chirurgies privées vers Rockland. Alors, le projet pilote, il est en cours, on nous dit que ça va plutôt bien, sauf qu'on apprend que l'entente avec RocklandMD est parvenue à échéance, le gouvernement a décidé d'aller en appel d'offres pour renouveler cette entente-là, pas nécessairement avec RocklandMD, ça pourrait être un autre CMS éventuellement, une autre clinique privée. Et là on a posé cette question-là aux crédits, il y a, quoi, à peu près un mois, et le ministre nous a dit: Écoutez, ce n'est pas sûr que ça va aller de l'avant, le renouvellement de l'entente, on va juger des conditions, on va voir le prix, etc.
Moi, je pose la question aux représentants de la CSN: Comment vous avez reçu ça, vous qui étiez prêts à travailler pour activer le bloc opératoire, enfin, activer les éléments qui dorment, si on peut dire, au sein du bloc opératoire de Sacré-Coeur, comment vous avez reçu ça, la décision du gouvernement d'aller en appel d'offres pour renouveler éventuellement l'entente avec RocklandMD ou avec une autre clinique privée?
Le Président (M. Kelley): Mme Boucher.
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(12 h 30)
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Mme Boucher (Denise): Alors, le choix que la CSN a fait et d'ailleurs avait fait conjointement avec la FTQ, je le rappelle, lors d'une conférence presse, c'était d'interpeller le gouvernement, à l'époque c'était M. Couillard, de l'interpeller à lui dire qu'il faut qu'on soit capables de renforcir le public. Et c'est là qu'est venue l'idée de faire des projets pilotes, dont, entre autres, celui de RocklandMD, et il y en a plusieurs autres, au Québec, dans différents secteurs.
Nous, on pense que notre gage de réussite de faire en sorte qu'on puisse avoir un accès à des soins, des accès aux blocs opératoires, c'est de passer par le réseau public. Actuellement, il y a des négociations qui se font entre les représentants syndicaux et la partie patronale de Rockland... pas de RocklandMD, mais de Sacré-Coeur, pour être capable de faire en sorte que ça... ? excusez le lapsus, hein, quand même, mais personne n'est à l'abri d'un lapsus, dans la vie, hein, je suis convaincue de ça, là, hein? ? pour que Sacré-Coeur effectivement puisse reprendre sa notoriété en regard de ce qu'elle est capable de se donner comme services dans le public.
L'appel d'offres, à mon avis, là... Il faut se rappeler que RocklandMD l'avait eu sans appel d'offres. Il faut se rappeler ça. Le gouvernement a donc décidé de se conformer et de faire un appel d'offres qui va probablement faire en sorte que ça va aller chez le voisin d'à côté, qui est RocklandMD, parce qu'en même temps on sait qu'il y a des ententes qui sont faites à l'effet que, s'il y a des urgences, il faut qu'ils soient directement capables de le déplacer au plus près. Donc, je ne pense pas qu'on va faire une clinique, une dans l'Est, une dans l'Ouest pour répondre aux besoins de Rockland.
L'appel d'offres, à mon avis, c'est une affaire. C'est plate parce que ce que ça fait dans le réseau, quand les gens mettent de l'énergie puis du temps à essayer de trouver des solutions, ça démobilise et ça fait en sorte qu'ils ont l'impression que tout ce qu'ils ont fait, ils l'ont fait pour rien, malgré qu'ils commencent à peine à travailler pour trouver la solution. Alors, dans le domaine des mauvais messages, on a été gâtés. Et c'est pour ça qu'on dit souvent que, nous, on a une appréhension de tout ce que peut mettre le gouvernement sur la table en ce qui touche la question du réseau de la santé et des services sociaux. Si on veut qu'il soit public, il faut faire en sorte qu'on mise sur le public et qu'on mette des énergies à faire en sorte qu'on soit capables de rehausser nos qualités, rehausser aussi notre personnel.
Et, tu sais, on est à l'aube d'une négociation de convention collective. Mais il me semble que, si le gouvernement voulait lancer un message à ses infirmières, lancer un message à ses employés de soutien, c'est de faire en sorte de les reconnaître et de faire en sorte qu'on leur attribue ce qui leur est dû. Ce n'est pas le débat d'aujourd'hui, mais ça aide, par exemple, à faire en sorte, le monde, de rester dans le réseau public puis à se dire: On va mettre des énergies puis on va travailler ensemble. On reçoit constamment, je dirais, des messages contradictoires.
Le Dr Bolduc, il nous parle de sa volonté à lui. Je n'en doute pas. Je ne doute pas de sa volonté, comme je ne doutais pas de celle de Couillard. Sauf qu'on a eu une démonstration qui a fait en sorte qu'on a ouvert encore bien plus la question de la privatisation, que le Conseil des ministres, avant de partir en vacances, a voté un règlement dans lequel il s'est senti complètement déstabilisé, qui a fait en sorte que la CSN et la FTQ ont dû faire un recours pour dire: Wo, wo! Aïe! arrêtez, là, c'est gros, ce qui se passe. Et puis là on a décidé de suspendre la question du recours pour nous amener jusqu'au mois de septembre puis voir comment on va appliquer... Alors, je trouve que, dans la gymnastique, on va loin.
Et c'est pour ça que, par rapport à 34, nous, ce qu'on dit... Ce n'est pas mauvais, la question de la qualité de l'encadrement, on le dit, je vais le redire encore. Mais c'est tout ce qui touche le reste, par exemple. Parce que vous savez très bien que, sur la question de l'assurance privée duplicative, là aussi il y a des... ? comment on appelle ça, donc? ? des marchands près du temple? Ils aimeraient bien ça en avoir de plus en plus, d'actes, en dehors des genoux, en dehors des hanches, en dehors des cataractes, pour être capables d'ouvrir le marché. Ça fait que, là, on est après ouvrir le marché pour les médecins dans le privé, on va ouvrir le marché des assureurs, puis, nous, pendant ce temps-là, on va se ramasser avec les gros cas, on va se ramasser avec les urgences pleines, on va se ramasser avec de moins en moins de personnel, puis on va crier au loup, puis on va interpeller le ministre, qui va chercher à trouver des solutions quand les solutions sont dans le public. Qu'on s'investisse puis qu'on mette les argents dans le public, c'est là qu'on va trouver les solutions. Puis qu'on reconnaisse aussi qu'il y a du monde qui travaille là-dedans, qui se donnent à 100 %, qui croient en ce qu'ils font. Mais en même temps il faut aussi être capables de les appuyer.
Le Président (M. Kelley): M. le député.
M. Drainville: Il me reste seulement quelques minutes. Peut-être que c'est une question pour Mme Lapierre, là. Je ne vous ai pas prévenue des questions que j'allais vous poser, même si c'est des questions qui dépassent le projet de loi, mais je vous sais capable de répondre à celle-là aussi, sur l'Ontario. L'Ontario a pris des mesures pour protéger son système public de santé. Est-ce que vous pouvez nous parler de quelques-unes des mesures qu'ils ont adoptées, en Ontario, et qui pourraient susciter la réflexion que vous souhaitez tant au Québec et à laquelle évidemment nous adhérons aussi?
Le Président (M. Kelley): Mme Lapierre.
Mme Lapierre (Andrée): ...et heureuse de la confiance que vous me témoignez. Malheureusement, la réponse à ça est: Non, je n'ai pas eu le temps de suivre récemment les encadrements. Je pense, par contre, de mémoire, qu'ils ont mis de côté leur politique de PPP, et ce serait déjà beaucoup. Et ils ont des mécanismes de suivi de la gestion de l'attente, qui est, en tout cas je pense, un motif d'intérêt de ma part, là, dans le sens de voir comment ça fonctionne. Mais ici, c'est ça, voici une piste qui était dans 33, sur la gestion de l'attente, et j'aimerais mieux entendre les états de situation puis les progrès sur la gestion de l'attente que de voir, encore une fois, des efforts consacrés à des choses qui sont à l'extérieur, comme tel, directement du réseau public.
Moi, ce que je voudrais voir, c'est qu'on arrête de penser qu'à la CSN on fait juste défendre nos salariés. On défend... on représente la moitié... La moitié de la centrale, c'est des gens qui sont dans la santé. Et évidemment ils tiennent à l'évolution du service public pour leurs familles, pour tout le monde. Et on a toujours l'air de nous peinturer comme si on ne faisait pas un travail sérieux. On cherche, nous autres, à montrer que, dans le réseau public, on est en train de consolider des choses, on est en train de chercher où est-ce qu'il est, le développement du réseau public, où est-ce qu'ils sont, nos partenaires, où est-ce qu'ils sont, nos partenaires, qu'ils nous montrent que les développements, ils vont vraiment, pour l'avenir, se faire là et que les conditions de travail ne vont pas être les choses qui vont en souffrir. Parce qu'on n'est pas arrivés où on arrive aujourd'hui sans qu'il n'y ait pas des décisions politiques qui ont été en cause. Alors, c'est ça, le vrai exemple.
Il y a des endroits où il y a des innovations. Alors, l'Ontario, c'est vraisemblablement le cas. Mais, eux autres, ils ont deux ministères déjà. Tout le longue durée est séparé de la santé. Alors, ça fait déjà une autre dynamique à gérer. Mais, moi, je pense que, pour nous, on a des bonnes bases au Québec, je pense que c'est intéressant. Les difficultés de faire la comparaison... C'est toujours, disons, exigeant de faire des comparaisons avec ce qui se passe ailleurs. Mais, moi, ce que je cherche, c'est les prises en compte, les admissions des difficultés sérieuses qu'il y a au Québec mais tout en démontrant qu'on a un gouvernement qui est sérieux puis qui effectivement est en train de rassurer les gens qui ont besoin du système de santé. Et c'est les personnes les plus vulnérables qui ont besoin du système public. Et actuellement, quand on fait ces développements-là du privé puis qu'on pense à de l'assurance maladie privée, c'est pour des gens qui ont des sous. Et ce n'est pas là-dessus qu'on est en train de travailler. On ne travaille pas sur les bonnes choses.
Le Président (M. Kelley): Une minute, M. le député.
M. Drainville: Je veux juste revenir, en terminant, sur Rockland. Est-ce que vous sentez que les travaux que vous êtes en train de mener présentement vont permettre d'apporter des changements au fonctionnement de l'hôpital qui permettraient effectivement à terme d'activer les salles d'opération qui sont inutilisées? Est-ce que vous sentez que vos travaux sont sur le point de donner des résultats concrets qui pourraient peut-être même servir d'exemple à d'autres hôpitaux et à d'autres syndicats ailleurs au Québec?
Mme Boucher (Denise): Alors, comme je ne suis pas au fait des derniers développements autour de ça... Mais je peux vous dire que notre objectif, c'est celui-là. Il y a des endroits que c'est allé beaucoup plus vite. Il y a quand même un projet pilote ? je tiens à le dire aussi ? à Sainte-Justine, qui est après se faire. Donc, l'objectif, c'est de faire en sorte de faire la preuve et la démonstration et de cesser de croire que c'est les conventions collectives qui freinent le tout, ce n'est pas vrai. Alors, on a une tendance lourde à vouloir dire que c'est souvent les conventions collectives qui font en sorte que c'est difficile.
On est après faire la démonstration qu'il y a des articles dans les conventions collectives où on peut parler d'organisation du travail, où il y a une volonté de pouvoir le faire. Mais, précisément et spécifiquement pour Rockland, je ne suis pas dans les dernières données. Mais c'est ça, notre objectif, et je suis convaincue qu'on est capables de l'atteindre. On a déjà réussi antérieurement en modifiant, dans différents types de cadres de travail autres, on a réussi à faire en sorte que ça reste public. On est convaincus qu'on peut le faire.
M. Drainville: ...
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Malheureusement, ça met fin au temps qu'on a pour ce bloc. Dernier bloc de cinq minutes avec M. le député de Mercier.
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(12 h 40)
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M. Khadir: Merci, M. le Président. Donc, merci, mesdames, pour votre témoignage. Je vais essayer de répondre à quelques-unes des interrogations puis aussi, bon, enfin, soutenir par des exemples les objets de préoccupation de la CSN qui ont été mentionnés ici. Comme le ministre actuel de la Santé, je suis nouveau en politique. Donc, nous avons tous, quand on est nouveaux, une plus grande inclinaison à faire preuve de naïveté. En tout cas, dans mon cas, c'est un élément. Maintenant, sur la question de la privatisation du système de santé, je suis peut-être un peu moins victime parce que je suis ce dossier-là depuis de nombreuses années.
J'aimerais vraiment que mes collègues et M. le ministre réalisent que l'intégrité du système de santé public est menacée parce qu'il y a des intérêts relativement importants, des intérêts puissants, dans le secteur privé, qui cherchent à en privatiser des secteurs d'activité en vue d'y investir des capitaux, en vue d'en tirer des profits. C'est tout à fait légitime, ils le font en fonction de leurs intérêts. Cependant, ces intérêts-là peuvent venir en contradiction avec l'intérêt public. Alors, j'offre ma collaboration pour qu'on puisse faire notre travail et que, nous, on agisse. Donc, ce n'est rien d'occulte, là, c'est des choses qui sont dans le domaine public. Il faut en parler, il faut les reconnaître, oser nommer des choses pour pouvoir bien, disons, défendre l'intérêt public là-dedans.
Alors, quelques exemples. Pour répondre, par exemple, à une première interrogation: Quel peut être l'incitatif, pour des radiologistes, ou des médecins, ou des cliniques privées, pour opérer dans le cadre de cliniques médicales spécialisées plutôt que dans le cadre hospitalier? Vous le savez, ça a été même alimenté malheureusement par la direction du CHUM, en 2008, dans les questionnements sur les cliniques, par exemple, d'endoscopie digestive. Pourquoi? Parce que les cliniques privées sont instituées souvent en corporations où les médecins sont actionnaires. Quand tu es actionnaire, sur les dividendes, tu ne paies que 20 % d'impôt, alors que, moi, si j'ai une rémunération à l'hôpital pour avoir fait le même acte, généré les mêmes... bon, enfin, la même rémunération, je suis imposé à tout près de 50 %. Vous le connaissez, vous le savez mieux que moi. Premier élément.
Deuxièmement, on sait que le jugement Chaoulli, par exemple, le jugement Chaoulli, en ouvrant la porte à la possibilité d'assurance duplicative, vient répondre à une pression extrême exercée par les milieux d'assurance. Un des plus grands assureurs au Canada, c'est Great-West, propriété de Power Corporation, à la tête de laquelle on trouve, au Québec, monsieur... l'ancien ministre Corbeil ? son prénom m'échappe ? ministre dans le gouvernement libéral ? d'accord? ? très proche, donc, du milieu du Parti libéral du Canada, avec Power Corporation, hein, comme propriétaire, donc avec des intérêts très proches du Parti libéral, du bureau du premier ministre actuel du Québec.
Deuxièmement, on voit, par exemple, avec M. Couillard, son passage au privé, Persistence Capital Partnership. C'est des intérêts énormes sur le plan des capitaux en investissement. Si la commission le permet, j'introduirais comme document une rencontre récente, le témoignage d'un entrepreneur au Québec, le témoignage d'un entrepreneur au Québec qui tout récemment a reçu la visite d'un ancien ministre de la Santé avec la demande suivante: Est-ce que tu peux me construire un hôpital privé au Québec?
Troisièmement ? je vous en amène d'autres ? actuellement, le schéma de liens entre l'Hôpital Sacré-Coeur et RocklandMD fait en sorte qu'il y a la garantie d'une clientèle captive parce qu'offerte par l'hôpital, financée par le gouvernement, par les deniers publics, sans aucun contrôle direct sur ce qui se passe là-bas. Or, ce qui se passe là-bas est sujet de beaucoup de préoccupations.
Une première chose qui pourrait nous aider, c'est que M. le ministre garantisse qu'on puisse avoir comme document ici le dernier rapport d'évaluation qui a été fait en début de cette année... Si ce n'est pas suffisant, j'offre à la commission... Si ça peut être introduit, ça, je ne sais pas, j'en parlerai à M. le président. Mais j'ai reçu plusieurs coups de fil d'un employé de RocklandMD, d'une employée ou d'un employé, d'une personne qui travaille là-bas, qui pourrait venir dire tout ce qui, du point de vue sanitaire, du point de vue des suites postopératoires, du point de vue de la préparation, du point de vue des complications qui sont arrivées, qui lui semblent tout à fait inadmissibles, qu'il a portées à l'attention des autorités et qui n'ont pas connu de suite... Si c'est possible, si le ministre garantit que cette personne-là n'aura pas de représailles étant donné qu'il y a une entente quand même entre RocklandMD et le secteur public, je pourrais l'inviter à venir témoigner ici pour dire les risques qui sont associés, même dans les meilleures des circonstances, même dans un projet pilote, à opérer, à donner à un établissement hors hospitalier des chirurgies importantes avec des risques importants.
Donc, j'en viens à dire, M. le ministre, qu'en écho à la demande formulée par la CSN ce matin ? j'ai hâte d'entendre aussi les autres intervenants ? il est temps non pas de dire, bien, qu'est-ce qui est fait, puis on va juste l'entériner, mais de dire que déjà ce qui est fait dans... qui peut être autorisé dans le domaine privé est bien trop et qu'on a intérêt, pour défendre l'intégrité du système de santé public, à les revoir à la baisse et à exercer surtout une limitation dans toute possibilité de double pratique, c'est-à-dire de lever la barrière d'étanchéité entre la pratique privée et la pratique publique.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. Il me reste à dire merci beaucoup aux représentants de la Confédération des syndicats nationaux, à Mme Boucher, Mme Lapierre, Mme Pineau.
Et, sur ça, je vais suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures, dans cette même salle. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 h 46)
(Reprise à 15 h 7)
Le Président (M. Kelley): À l'ordre, s'il vous plaît! On est prêts à reprendre nos travaux.
La Commission des affaires sociales est réunie aujourd'hui afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 34, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les centres médicaux spécialisés et les laboratoires d'imagerie médicale générale.
Notre prochain témoin, c'est les Médecins québécois pour un régime public, représentés par Dre Saïdeh Khadir, Dre Marie-Claude Goulet et M. Cory Verbauwhede, plus ou moins. Pas loin? O.K. Alors, sans plus tarder, vous avez un droit de présentation d'une dizaine de minutes, suivie par un échange avec les membres de la commission. Est-ce que c'est Dre Khadir qui va prendre la parole?
Médecins québécois pour
le régime public (MQRP)
Mme Khadir (Saïdeh): Non, c'est ma collègue...
Le Président (M. Kelley): Dre Goulet, la parole est à vous.
Mme Goulet (Marie-Claude): O.K. Donc, bonjour à tous et toutes, merci de nous inviter à cette commission parlementaire sur le projet de loi n° 34. Évidemment, nous parlons en tant que médecins, en tant que médecins qui représentent les Médecins québécois pour le régime public, en tant que médecins qui travaillent à tous les jours dans le système de santé québécois et nous croyons fermement à l'importance d'un système de santé public de qualité et accessible pour tous nos patients. En tant que médecins, nous travaillons à tous les jours avec des données probantes, une médecine qui est fondée sur les évidences, et ce, dans l'objectif de toujours mieux traiter nos patients, ce qui est notre rôle premier comme médecins.
Lorsqu'on se penche sur la littérature, les études, les faits quant à l'introduction du privé dans les systèmes de santé ici ou ailleurs dans le monde, on peut constater que le public offre d'excellents services, de grande qualité, à moindre risque et moindre coût que le privé.
Avec la loi n° 33 et la création des CMS, nous croyons qu'une brèche extrêmement dangereuse a été ouverte quant à l'implantation des marchés privés de soins de santé et l'ouverture à la prestation privée de soins. Nous croyons fermement que la logique de marché ne doit pas être introduite dans la prestation des soins et services de santé puisqu'elle met en péril le caractère démocratique qui sous-tend un régime public de santé.
Par ailleurs, les corrections proposées dans le projet de loi n° 34 constituent, à notre avis, des améliorations essentielles pour limiter le développement du privé et mieux encadrer la pratique spécialisée extrahospitalière.
Dans un premier temps, MQRP tient à préciser que nous reconnaissons la liberté des médecins d'adhérer ou non au régime public, mais nous nous objectons totalement à la pratique mixte préconisée par certaines associations médicales ou par les tenants du privé. Alors, nous appuyons le projet de loi pour ce qui est de l'étanchéité entre les CMS de médecins participants et les CMS de non-participants.
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(15 h 10)
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Pour ce qui est de la pratique spécialisée extrahospitalière, il ne s'agit pas complètement d'une nouveauté. Effectivement, depuis la mise en place du système public de santé au Québec, dans les années soixante, soixante-dix, il y a une certaine partie des services médicaux spécialisés qui est dispensée dans les cabinets privés de médecins participant à la RAMQ, dans des cliniques contrôlées par eux et aux conditions prévues dans les ententes avec le ministère de la Santé et des Services sociaux. D'ailleurs, les innovations technologiques ont permis que certaines interventions puissent se faire sans risque hors des hôpitaux.
Mais, depuis les années 2000, surtout depuis le jugement Chaoulli et la loi n° 33, on assiste à l'émergence de cliniques et de centres de chirurgie privés qui appartiennent à des actionnaires privés et qui offrent une gamme de plus en plus étendue de services couverts, ou non, ou en partie seulement par le régime public. Il y a encore peu de privé-privé, mais plutôt un mélange des genres dans lequel les patients ne peuvent plus y voir clair, alors qu'ils sont de plus en plus souvent appelés à payer de leurs poches en même temps que les honoraires du médecin sont chargés à la RAMQ.
Là où le marché a des chances de survie, surtout à Montréal et dans la périphérie, ces pratiques, qui sont à la limite de la loi, voire illégales... On pense à la surfacturation, aux frais accessoires, à la sollicitation des patients. Vous avez peut-être entendu comme moi, à certains postes de radio, on sollicite les patients qui ont peur d'avoir le cancer d'aller faire des PETscans dans les cliniques de radiologie privées dans la semaine qui suit. On parle d'offre de services non pertinents et qui provoquent une mauvaise pratique médicale. Et tout ça se développe sous l'oeil tolérant des autorités publiques. Et les restrictions budgétaires importantes dans les établissements publics contribuent à cette privatisation passive.
Nous estimons que le projet de loi, pour les CMS de non-participants, amorce un virage pour placer devant un choix responsable les rares médecins et quelques hommes d'affaires en train de se tailler un marché privé aux dépens du réseau publique qu'ils parasitent actuellement. Le projet de loi ne dispose pas cependant de la prestation privée financée par des fonds publics, comme c'est le cas avec RocklandMD. MQRP a fait connaître sa position sur le sujet à diverses reprises. Des décisions récentes du ministre Bolduc permettent d'espérer qu'il limitera leur expansion. Nous pensons aux projets de CMS d'ophtalmo du CHUM, qui ont été arrêtés parce qu'ils n'augmentaient pas l'accessibilité et qu'ils coûtaient plus cher. À cette fin, nous pensons qu'il faut investir davantage dans les centres ambulatoires de chirurgie rattachés aux hôpitaux et dans les cliniques publiques sans but lucratif. Le gouvernement pourrait aussi envisager l'achat de certaines cliniques par le secteur public, comme ça s'est fait dans d'autres provinces, par exemple au Manitoba, avec des cliniques de chirurgie, la Clinique Pan Am, et par exemple en Ontario, avec les cliniques de radiologie.
Enfin, le projet de loi ne corrige pas la pire mixité-iniquité historique en radiologie à laquelle nous sommes confrontés chaque jour comme médecins, comme cliniciens, avec l'accès illégal à certains services de radiologie, par exemple pour les échographies, les scans, les résonances magnétiques, pour nos patients. Ceux pouvant payer, ceux ayant des assurances peuvent avoir accès à ces tests-là très rapidement, alors que les autres vont attendre sur les listes d'attente des délais déraisonnables. Cette brèche importante dans la couverture gratuite des services médicalement nécessaires doit être colmatée dans les meilleurs délais, d'autant plus que le gouvernement peut corriger la situation par simple règlement. Nous pensons qu'il est de l'essence même du régime public de santé que tous les services médicalement requis soient couverts et qu'ils le soient dans des délais raisonnables.
Après un rapide examen des principales dispositions du projet de loi, nous inviterons le gouvernement à aller plus loin pour assurer l'équité et la gratuité en matière d'accès aux services.
M. Verbauwhede (Cory): Donc, je vais rapidement survoler les points, les commentaires qu'on a par rapport au projet de loi, en commençant par la fin. Je ne sais pas si vous avez tous reçu nos commentaires.
Le plus important commentaire qu'on a, qui diffère un peu, peut-être, des autres groupes que vous avez vus, c'est par rapport aux articles 10 et 11, surtout l'article 10 par rapport aux conditions de suspension, de révocation ou de refus de renouvellement d'un permis de CMS. Nous demandons à ce qu'une condition supplémentaire soit ajoutée. C'est-à-dire que la suspension, la révocation ou le refus de renouvellement d'un permis est possible dans le cas d'une contravention à la LSSS mais n'est pas encore possible dans le cas d'une contravention à la Loi sur l'assurance maladie, là où il y a les pires contraventions dans le système actuel, avec les surfacturations, les frais accessoires, etc. Donc, MQRP demande à ce que soit ajoutée une condition supplémentaire, à savoir: être déclaré coupable d'une infraction à la Loi sur l'assurance maladie ou à l'un de ses règlements. Comme vous pouvez le lire, cette loi n'est pas moins importante que la LSSS, car elle est la base d'une facturation équitable par la RAMQ.
Alors, je commence par les articles 1, 2 et 13. MQRP considère que c'est une bonne chose que ce soit le gouvernement et non seulement le ministre qui détermine quels traitements pourront être dispensés dans les CMS. Et par ailleurs nous sommes très contents de voir que la liste illimitée dans le règlement de juin de l'année dernière a été révoquée.
Articles 3, 4, 5 et 15 sur les conseils d'administration et l'actionnariat des CMS, nous sommes aussi contents de voir que le contrôle a été ramené dans les mains des médecins qui pratiquent dans les CMS à plus de 50 %. Évidemment, nous sommes contre les 49 % qui restent, mais ça, ce sera pour un autre projet de loi.
Article 6, les CMS de médecins non participants et l'imputation des coûts pré, péri et postopératoires, on a un petit point à rajouter. On veut simplement s'assurer que, quand le patient arrive dans le CMS, il ou elle sache exactement ce que le coût va être. De toute façon, la loi sur la protection des consommateurs imposerait cela.
Article 8, le rapport annuel, très important, la transparence. On a vu, en Grande-Bretagne, il y a un énorme manque de transparence dans les centres équivalents là-bas. Donc, rapport annuel, tous les rapports qui sont possibles et imaginables devraient être imposés, selon nous, pour avoir une bonne idée de combien de médecins y pratiquent, combien d'actes sont pratiqués en CMS, si c'est rentable, etc.
Alors, les permis avec possibilité d'hébergement, nous pensons que ça contrevient à l'idée même des CMS dans l'idée même du gouvernement, car les CMS, nous dit-on, ne sont là que pour les actes mineurs, les chirurgies mineures, donc nous ne comprenons pas pourquoi ils auraient besoin d'hébergement. Par ailleurs, de fait, sans le dire, on crée des hôpitaux privés. Les cinq lits, c'est bien, c'est mieux qu'illimité, c'est mieux que six, mais vous comprenez que juste mettre cinq, ça n'évitera pas que plusieurs cliniques s'affilient, par contrat ou autrement, pour rajouter des lits et contourner la loi. Donc, si vous voulez vraiment qu'il n'y ait que cinq lits, il faudrait mettre des mesures comme, par exemple, maximum un CMS dans un rayon de trois kilomètres, ou je ne sais pas quoi. Mais cinq lits, ça ne suffira pas.
Voilà les points. Dre Khadir va conclure.
Mme Khadir (Saïdeh): Merci. Donc, bonjour à tous. Donc, beaucoup d'efforts ont été déployés dans le sens de définir, puis appliquer, puis corriger les CMS depuis quelques années. En fait, la loi n° 34, pour nous, vient mettre des limites qui étaient nécessaires pour contrer ou, si on veut, limiter les dégâts, faire un... J'ai utilisé une expression qui nous venait souvent à la tête, c'était: faire du «damage control». Mais on est quand même 100 % d'accord avec ce «damage control».
Cependant, ce qu'il faut, je pense, c'est-à-dire, insister, c'est que les CMS, ce n'est vraiment pas une solution. Je veux dire, c'est probablement une solution chimère, inventée de toutes pièces parce qu'au départ on a vraiment négligé notre système de santé public, on n'a pas mis assez de ressources en son sein, des ressources matérielles mais aussi des ressources humaines et des ressources organisationnelles, puis on s'est retrouvés dans une situation de manque d'accessibilité grave, et on a inventé cette chimère de CMS.
Mais en réalité les vraies solutions sont connues, sont éprouvées, sont démontrées en étudiant la littérature probante. Il faut les appliquer. Ce qu'on fait plutôt en ce moment, c'est qu'on crée des conditions, les meilleures conditions pour que le secteur privé ou les marchés en santé se développent, notamment à travers les CMS. Qu'est-ce qu'on fait? On leur cueille les patients les plus faciles, les moindres risques, les patients sur lesquels on peut appliquer des technologies qui ont été développées les dernières années, donc faire des chirurgies à court séjour ou ambulatoires, et en plus on leur offre de leur donner des volumes de soins en faisant des contrats avec eux, là, de type RocklandMD et Sacré-Coeur. Donc, on met toutes nos ressources là-dessus plutôt que de mettre nos ressources dans le système public, qui, en fait, se trouve privé et même drainé de ses ressources par ces CMS là qui vont drainer les docteurs, les infirmières, les ressources matérielles et autres.
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(15 h 20)
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Donc, encore une fois, on est vraiment contents, très, très contents que le ministre Bolduc ait eu le discernement qu'il a eu pour arrêter les propositions qui avaient été faites de continuer les projets de CMS au CHUM et à Saint-Jérôme. Je pense que c'est un pas extraordinaire et un pas en avant. On l'encourage aussi à continuer dans ce sens-là et d'éviter de reconduire le contrat de Rockland. Ça n'a aucun... je dirais, aucune logique. Les soins sont plus chers, la qualité est difficile à assurer, c'est loin des lieux physiques, et en même temps on sait qu'on a les ressources pour le faire à l'intérieur de l'hôpital. Donc, il faut encourager les gens qui y travaillent à améliorer les conditions de leur travail et de leur traitement des patients.
Le Président (M. Kelley): ...de conclure parce qu'on est déjà à 14 minutes.
Mme Khadir (Saïdeh): Parfait. Donc, à notre avis, maintenant que... Juste deux phrases. Le gouvernement doit augmenter l'offre de services dans le réseau public, dans les hôpitaux, dans les cliniques de chirurgie ambulatoire, dans les CLSC. Il doit appliquer rigoureusement l'interdiction de surfacturation dans les cabinets privés, qui prolifèrent actuellement, et surtout les cabinets privés où les médecins participants travaillent. Le gouvernement doit éliminer les exclusions de la couverture publique de certains actes radiologiques. Ces examens doivent être couverts par l'assurance publique, qu'ils soient effectués à l'intérieur ou à l'extérieur de l'hôpital, ils sont essentiels au processus de traitement. Voilà.
Le Président (M. Kelley): Parfait. Merci beaucoup. On va passer maintenant à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vais commencer un bloc de 24 minutes avec le ministre de la Santé et des Services sociaux et député de Jean-Talon.
M. Bolduc: Sauf quelques éléments très mineurs, je pourrais être cosignataire de votre mémoire. Vous êtes en plein dans mes cordes. Je veux dire, tout ce que vous avez dit, là, vous avez exactement la même ligne de pensée que moi. Sauf que, sur certains points, je suis obligé d'être un peu plus pragmatique.
La radiologie et la chirurgie, c'est deux dynamiques complètement différentes. En chirurgie, on veut un système de santé public très fort, avec les éléments que vous dites, une plus grande accessibilité... Et toutes les chirurgies, dans un système qui irait bien, pourraient être faites dans le public. O.K.? Pour moi, j'adore cette idée-là.
Ça prend quand même des CMS parce que... Je vais vous donner un exemple. Les chirurgies plastiques, esthétiques non assurées, qu'on est d'accord comme société qu'on n'assurera pas, il faut qu'il y ait un endroit que ce soit fait, puis je ne veux pas que ce soit à l'intérieur des établissements de santé publics. Il faut que ce soit dans le privé. Donc, on a quand même une nécessité d'avoir des cliniques médicales spécialisées, des CMS, pour ce type de catégories.
L'autre élément, juste pour échanger, moi, je pense que le public peut tout faire, sauf qu'à un moment donné, dans le public, on va se le dire, on a eu des problèmes de performance. Et un des éléments qui a fait ? puis ça a été dit ce matin ? que des gens ont dit: On veut améliorer le système public, ça a été qu'il y avait une menace, du côté privé, qu'on transfère des chirurgies. C'est un élément extrêmement important. Ce qui fait que le public a dit: On est prêts à faire de la réorganisation du travail à certains niveaux parce qu'on sait que sinon on va les perdre puis on va s'en aller vers le privé, qui, pour moi, n'est pas plus performant que le public. La performance n'a rien à voir, à savoir si vous êtes public ou privé. La performance, c'est une question de processus, une question de mesures puis une question d'individus. Ça fait que, pour moi, je ne veux même pas faire ce débat-là. Que vous soyez dans le public ou le privé, vous pouvez être dans les deux cas très performant, mais je préfère le garder à l'intérieur du système public, et on est capables de le faire. Pour ça, là, vous êtes entièrement dans mes cordes.
Du côté de la chirurgie, pourquoi on a besoin des CMS également puis pourquoi on a besoin d'éléments encadrement avec la qualité et puis avec la sécurité? C'est justement parce qu'il faut qu'on soit capables de faire certains types de chirurgie ailleurs que dans le domaine du public. À la limite, si quelqu'un est non participant... Parce qu'on leur laisse le choix, puis ça, vous semblez d'accord. Si quelqu'un dit: Moi, je veux payer ma cataracte dans le privé, payer ça 2 000 $, puis je veux l'avoir demain matin, mais, moi, dans le public, je suis capable de lui offrir à l'intérieur d'un mois, mais c'est un choix que la personne fait, je peux respecter ça. Mais, je vous le dis, il n'y a pas beaucoup de volume là-dedans.
Quand on parle également des établissements de santé avec des lits, je pense que c'est un compromis qu'on doit faire parce que, suite au jugement Chaoulli, il fallait avoir des alternatives. Une des alternatives, c'est qu'il y a une clinique d'orthopédie au Québec qui fait des hanches et des genoux, c'est la clinique de Nicolas Duval, puis, dans notre évaluation, il n'y a pas de volume pour plus qu'une clinique, donc une seule personne qui peut le faire, qui est un excellent chirurgien, et on veut lui donner la possibilité de le faire. Mais, selon moi, on est capables de tout garder à l'intérieur du public.
La radiologie, c'est un autre domaine. Je sais qu'on le touche dans le projet de loi puis je suis très content de dire que c'est un beau premier pas. Et on doit faire ce projet de loi-là pour commencer, pour bâtir après ça... Après ça, on bâtira sur ce projet-là peut-être pour améliorer ailleurs. La radiologie, on a une caractéristique au Québec, c'est d'abord un grand système public, mais il y a du privé qui se fait, et, dans le privé, il y a un mélange entre des services qui sont assurés et des services qui sont non assurés. Et vous donnez l'exemple de l'échographie. Quand vous allez dans un hôpital, c'est payé et, si vous allez dans une clinique, c'est non payé. On a un problème, et je le reconnais. À Montréal, l'accessibilité est tellement difficile en échographie que les gens vont préférer payer 200 $ puis l'avoir dans le privé. Puis on a un vice de procédure à ce niveau-là. Mais ça, on ne réglera pas ça là-dedans. Je pense qu'il faut s'en garder un petit peu pour plus tard. Parce que, de vouloir tout régler, on finit par ne rien régler.
Moi, là-dessus, là, je dois vous avouer que ce que vous m'avez dit aujourd'hui, ça rentre absolument dans ce que, moi, je vois qu'on doit avoir comme système de santé. Au niveau de la radiologie, on fait déjà un bon arrangement parce qu'on va avoir une cohabitation. Mais par contre, par la suite, il va falloir travailler pour avoir une meilleure accessibilité en radiologie, voir si le fonctionnement actuel ne pourrait pas être bonifié. Mais, compte tenu de notre organisation du système, même si demain matin je voudrais tout ravoir dans le public, je ne serais pas capable de le faire. Et nationaliser les cliniques de radiologie, ce n'est pas dans nos plans. Au Parti libéral, ce n'est pas ça qu'on voit, pas pour dans une brève échéance. On pourra laisser ça à d'autres partis si un jour ils prennent le pouvoir, mais on va faire en sorte qu'ils ne le prendront pas. Si un jour! Gardez ça dans vos cartons, puis vous promettrez ça en campagne électorale. Mais je pense que là-dessus...
Si vous aviez un conseil à donner à un ministre comme moi, les trois principales choses que vous verriez pour améliorer le projet de loi, ce serait quoi?
Le Président (M. Kelley): La question est posée.
M. Verbauwhede (Cory): Bien, écoutez, évidemment, abolir les CMS, ce serait un bon premier pas. Mais à part ça...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Verbauwhede (Cory): À part ça, si on rentre dans votre logique, on aime bien l'idée que vous ayez fait en sorte que le médecin qui y pratique doit avoir le contrôle... les médecins qui y pratiquent doivent avoir le contrôle au niveau du conseil d'administration, du directeur médical, des actionnaires, etc. Sauf que je suis avocat et je sais comment ça marche. Le contrôle peut être indirect aussi, même si on n'a pas la majorité; ça peut être un contrôle qui est par influence. Et donc je sais qu'il y a aussi un article qui dit, bon: Il faut que le médecin soit celui qui soit locataire ou propriétaire et qu'il soit l'employeur, etc. Mais, si on vous suivait dans cette logique-là, il faudrait aller encore plus loin pour s'assurer absolument que la responsabilité professionnelle l'emporte sur... Il y a un conflit d'intérêts à la base, dans les CMS, c'est-à-dire qu'on a deux maîtres: on a le Collège des Médecins et on a les actionnaires. Puis on a beau avoir 50 % moins une voix d'actionnaires, c'est quand même des actionnaires qui vont avoir un effet, c'est inévitable. Donc, voilà. Donc ça, ce serait la première chose.
La deuxième chose, c'est les cinq lits. Encore une fois, si on vous suit dans votre logique, vous dites que... En tout cas, on interprète que cinq lits, c'est pour mettre une limite maximale. Mais, encore là, pour aller au fond de vos pensées, aller au fond de votre logique, il faudrait vraiment s'assurer que, de facto, il y ait cinq lits par CMS. Et là je parle bâtiment physique, même lieu physique, parce qu'on sait tous que c'est très possible d'avoir une compagnie par couloir ou... La cause fameuse, aux États-Unis, où c'était une compagnie par taxi, bon, c'est très facile à mettre en place puis... Donc, bon, le projet de loi laisse la porte ouverte à cette possibilité-là, donc ça ne sert à rien... Bien, ce n'est pas que ça sert à rien, c'est que c'est sûr que ça met des limites, c'est plus difficile, mais ça donne plus d'argent aux avocats, c'est tout. Ensuite...
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(15 h 30)
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Une voix: ...l'assurance maladie.
M. Verbauwhede (Cory): Oui, c'est vrai, la Loi sur l'assurance maladie, ça, je pense que c'est essentiel. C'est sûr que la surfacturation, les frais accessoires sont déjà interdits, mais il y a un laxisme que nous ne comprenons pas du tout, que nous trouvons complètement cynique de la part des autorités, et là je n'ai personne en tête, mais ces pratiques se font énormément, surtout sur l'île de Montréal et aux alentours, et c'est dans l'impunité totale, et donc... Bon, toutes les mesures que vous pourriez rajouter à ce projet de loi, notamment une condition pour garder le permis de CMS qui pourrait venir arrêter ces pratiques-là, seraient extrêmement importantes.
Donc, là, s'il y a une chose que, nous, on dirait qu'il faudrait prendre de ce qu'on vous demande, c'est vraiment la Loi sur l'assurance maladie parce qu'il y a un gros problème d'accès, avec des frais accessoires, des surfacturations, des abonnements, des je ne sais pas quoi qui vont au coeur de la logique du système de santé, qui l'atteignent à son coeur, parce que ça devrait être gratuit, accessible à tout le monde de la même façon, etc.
Mme Khadir (Saïdeh): Est-ce que c'est trois par personne ou trois par...
M. Bolduc: Non, trois pour... Je voudrais juste...
Mme Khadir (Saïdeh): Moi, j'en avais un, en tout cas.
M. Bolduc: Oui, allez-y.
Mme Khadir (Saïdeh): Moi, j'aimerais beaucoup qu'on s'assure d'appliquer cette loi-là, cette loi n° 34, pour des structures comme Rockland qui font beaucoup de contournement, où, dans une même structure, ils ont un couloir de médecins participants, un autre de non-participants, donc de voir à ce que ces pratiques de vouloir toujours ne pas respecter l'esprit de la loi et trouver les brèches et y pénétrer soient arrêtées, puis aussi d'éliminer les chirurgies... d'un point de vue plus médical, les chirurgies sous anesthésie générale dans les CMS. Pour moi, c'est quelque chose qui ne doit pas être.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Bolduc: Bien, je suis content de savoir parce que, pour ce qu'il s'agit de l'actionnariat, on a justement modifié pour s'assurer que les propriétaires, ce soient les médecins. Ça, c'est la première chose. C'est sûr qu'on peut toujours réarranger, mais il va y avoir quand même des vérifications. Pour la qualité, il va y avoir un directeur médical, donc on fait un peu le pendant de l'hôpital, où est-ce qu'on va avoir un médecin responsable. Et ce qu'on ne voulait pas surtout, c'est que les grandes compagnies de ce monde prennent possession de nos cliniques médicales. C'est pour ça qu'on a voulu avoir un actionnariat local par les médecins. Et le contrôle doit être par les médecins parce qu'on croit qu'il pourrait y avoir, à un moment donné, une concentration de quelques propriétaires, au Québec, de la majorité des cliniques et on ne veut pas ça dans notre système de santé. Ce sont d'abord des outils, des véhicules pour donner des soins, et on veut que ça reste beaucoup au niveau du domaine local.
Des frais accessoires, là, je suis tout à fait d'accord avec vous, ça va devoir être regardé, et là-dedans, là, c'est un petit peu tout mêlé. Mais ce n'est pas dans ce projet de loi qu'on doit le regarder, c'est dans une révision au niveau de la RAMQ, la Loi sur la RAMQ. Et, je vous le dis, je suis en train de regarder qu'est-ce qui se fait là-dedans parce qu'il se fait toutes sortes de choses, puis pas toujours des choses que... je dirais, à la limite de l'honnêteté, là. Ça fait que, moi, je pense que ça va devoir être revu. Mais vous comprenez que, si on essaie de tout faire, à un moment donné on retarde. Puis on est peut-être mieux d'aller chercher une consolidation, avec ce projet de loi là, pour la qualité et la sécurité, un bon encadrement, et puis, après ça, pour ce qu'il s'agit de la RAMQ, ça doit se faire dans un deuxième temps. Mais je suis tout à fait d'accord avec vous.
Pour les cinq lits, c'est un compromis. L'objectif, savez-vous pourquoi on a mis cinq lits? On ne veut pas d'hôpital privé au Québec, c'est aussi simple que ça. Et, si ça arrivait que les gens arriveraient puis se construisaient des petits campus que ça fait 30 lits mais avec des corridors, là, vous pouvez être sûrs qu'on va retourner... si l'opposition est d'accord, on légiférera sous une autre façon. Mais, pour moi, c'est clair, il ne faut pas qu'on commence à détourner puis faire par en arrière... la porte d'en arrière ce qu'on ne veut pas qui soit fait par la porte d'en avant. Pour ça, moi, c'est clair. Par contre, il fallait donner une chance à certaines cliniques de pouvoir faire des choses puis d'avoir une certaine observation. Et, à cinq lits, je vous jure, ils ne peuvent pas créer d'hôpital.
Ça fait que là-dessus, là, après mes explications, je pense qu'on est à peu près, encore là, au niveau de la même longueur d'onde, sur la même longueur d'onde. Et puis, moi, je suis très, très satisfait de vos interventions. Puis, avoir eu à rédiger un mémoire, avec quelques petites modifications, je l'aurais rédigé comme vous l'avez fait, mais je ne l'aurais pas aussi bien livré que vous autres. Je ne sais pas si, dans les députés, s'il y en a qui ont des questions.
Une voix: ...
M. Bolduc: Oui. Ils sont obligés d'être d'accord avec moi. Même l'opposition commence à être d'accord avec moi, ce que je leur ai dit. Tu n'es pas d'accord avec leurs propositions?
M. Drainville: On va voir lesquelles, là.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bolduc: Merci beaucoup.
Le Président (M. Kelley): Alors, est-ce qu'il y a d'autres commentaires pour le ministre?
Une voix: ...
Le Président (M. Kelley): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires pour le ministre? Mme la députée de Jeanne-Mance?Viger.
Mme Rotiroti: Merci beaucoup, M. le Président. La CSN, dans le mémoire de la CSN, qui ont fait leur présentation ce matin, ils parlaient beaucoup de... ils ont soulevé la préoccupation d'une assurance duplicative. Et, vous, dans votre présentation, vous n'en avez pas parlé du tout, et je voulais vous entendre là-dessus. Est-ce que vous êtes préoccupés? Est-ce que c'est quelque chose que vous pensez qui pourrait être une problématique dans l'avenir, si on adopte le projet de loi n° 34, ou pas?
M. Verbauwhede (Cory): Oui, on trouve ça très, très préoccupant, que vous l'adoptiez ou non, parce que... c'est-à-dire que les changements de loi par rapport à l'assurance duplicative privée ont déjà été faits, et notre analyse... et donc, ce n'était pas l'analyse pour aujourd'hui, mais notre analyse qu'on a faite d'autre part puis qu'on continuera à faire, c'est que...
Bon, commençons par le début. L'assurance duplicative privée pour la hanche, le genou et la cataracte est déjà possible. Il n'y a pas un assureur au Québec, à ce que je sache, qui l'offre. O.K.? Donc, si on veut développer le marché de l'assurance, il faut d'abord développer le réseau privé qui va pouvoir vendre ses services de façon... en bloc aux assureurs parce que les assureurs mettent ensemble les risques pour pouvoir appliquer un calcul de risques et donc il faut avoir plusieurs interventions, des interventions plus difficiles, plus faciles et des patients moins à risque, plus à risque pour pouvoir assurer.
Et donc, notre analyse, c'est que l'ouverture aux CMS, c'est le début dans une chaîne logique pour aboutir à une assurance duplicative privée élargie. Et donc, l'élargissement des actes permis dans les CMS, c'est juste la première étape, si vous voulez, pour élargir l'assurance duplicative privée à ces actes aussi. Et donc, là, petit à petit, surtout pour les assurances groupe offertes par l'employeur, ça va devenir plus rentable, et donc on a très peur de ça aussi. C'est pour ça qu'à la base on est contre les CMS et la logique de marché qui les sous-tend.
Mme Rotiroti: Mais vous êtes d'accord...
Le Président (M. Kelley): Mme la députée.
Mme Rotiroti: La façon que, moi, j'ai compris ça, c'est que les CMS existent déjà. Je pense qu'il y en a une cinquantaine, si on regarde ça comme il faut, surtout concentrés à Montréal...
M. Verbauwhede (Cory): Les permis ne sont pas encore accordés.
Mme Rotiroti: Parce que la loi vient encadrer. La loi n° 34 est là pour encadrer les CMS, si je comprends bien. Exact?
Mme Khadir (Saïdeh): Oui, il y a un décalage parce que des permis, pour différentes raisons techniques, même nous, hein... les gens du gouvernement vont dire, mais c'est que ça n'a pas été adopté. Moi aussi, j'ai dû me faire expliquer ça. Donc, il y a plein de cliniques privées...
Mme Rotiroti: Ça existe déjà.
Mme Khadir (Saïdeh): ...mais elles n'ont pas encore leur statut et leur permis.
Mme Rotiroti: Exact.
Mme Khadir (Saïdeh): Mais ça revient au même.
Mme Rotiroti: Alors, la loi viendrait encadrer ces cliniques-là.
Mme Khadir (Saïdeh): Voilà.
Mme Rotiroti: O.K. Et, quand vous parlez des chirurgies, exemple les cataractes, et tout ça, nous, comme gouvernement, on s'est assurés qu'on est capables d'offrir ces services-là, ces opérations-là en un délai raisonnable qui est de six mois. Exact?
M. Verbauwhede (Cory): Excusez-moi. Vous voulez répéter la question?
Mme Rotiroti: Nous, comme gouvernement, on a pris la décision que... Exemple, vous avez parlé de la chirurgie des cataractes, et tout ça; ça, ça se fait déjà dans le réseau public dans un délai raisonnable de six mois.
M. Verbauwhede (Cory): Bien, c'était l'objectif, oui.
Mme Rotiroti: C'est ça. Et les personnes, même aujourd'hui, qui décident qu'ils ne veulent pas attendre pour se faire opérer pour la cataracte en six mois... est capable d'aller dans une clinique et se faire opérer dans un mois. Exact?
M. Verbauwhede (Cory): Mais ce n'est pas dans un CMS, on s'entend bien.
Mme Rotiroti: Bien, c'est dans une clinique privée.
M. Verbauwhede (Cory): O.K.
Mme Rotiroti: O.K. Alors, vous n'êtes pas d'accord que la loi, en adoptant cette loi-là, ça nous permettrait d'avoir plus un oeil... on serait plus près de ces cliniques-là, savoir qu'est-ce qu'ils font, les encadrer mieux et... De toute façon, on limite, dans la loi même, c'est écrit qu'il y aurait juste cinq lits.
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(15 h 40)
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M. Verbauwhede (Cory): On n'a pas dit... L'idée de l'assurance duplicative privée, c'est une idée qui a été mise en place par le gouvernement du Québec avec la loi n° 33, entre autres, qui est déjà en place. Il n'y a pas de CMS en pratique... en fonctionnement maintenant. La loi n° 34 ne vient pas changer cette réalité-là, et donc notre analyse par rapport à cette réalité-là reste la même. On a déjà fait des représentations par rapport à ça, au niveau de la loi n° 33, il y a quelques années.
Mme Rotiroti: D'abord, il y a quelque chose que je ne comprends pas parce que peut-être que c'est la façon qu'on les appelle, un CMS, un ... mais les cliniques privées existent déjà. Alors, ce n'est pas...
M. Verbauwhede (Cory): Il faut comprendre la différence. Je ne sais pas ce que vous appelez une clinique privée, là. Il y a des cabinets qui sont la propriété à 100 % des médecins qui y travaillent, où il y a des participants à la RAMQ et des non-participants. D'accord. Les CMS viennent apporter une étanchéité pour dire qu'on doit soit être un CMS de non-participants soit être un CMS de participants. Par rapport à l'assurance duplicative privée, là où ça commence à jouer, c'est qu'on l'accorde pour certaines chirurgies pour des CMS de non-participants. Ça change la donne complètement. Les cliniques privées maintenant, ce n'est pas forcément des non-participants.
Le Président (M. Kelley): Peut-être un complément d'information, M. le ministre.
M. Bolduc: Juste pour clarifier. C'est qu'on a des cliniques privées qui fonctionnaient dans un système où ce n'était pas réglementé. On a passé la loi n° 33, puis c'est devenu des cliniques médicales spécialisées, CMS, dans lesquelles maintenant il y a une réglementation. Et toute clinique privée qui faisait de la chirurgie va devoir devenir un CMS, par la loi.
Dans un deuxième temps, on a les participants et les non-participants. L'assurance duplicative, il ne faut pas l'oublier, c'est qu'on a eu un jugement de la Cour suprême, qui est le jugement Chaoulli, qui disait tout simplement: C'est que vous êtes... au Québec, il faudra offrir une alternative aux gens qui ont des listes d'attente trop longues. Donc, à ce moment-là, on a fait la loi pour répondre à ce jugement-là. Notre interprétation, c'est que, si on améliore le système public pour qu'il y ait peu d'attente dans le système public, il y a peu de marché pour l'assurance duplicative, et, à ce moment-là, de facto, ça va faire que ce ne sera pas utilisé et ça va disparaître et devenir caduc, à moins que le système public se détériore tellement qu'à un moment donné on va être obligé de l'offrir.
Au Parti libéral, on a fait le pari, et on le gagne actuellement, qu'on est capables d'offrir une excellente accessibilité dans le système public. La preuve, 92 % des gens sont opérés à l'intérieur de six mois. La preuve également, c'est qu'il existe une seule clinique qui fait des prothèses de hanches et de genoux et quelques cliniques qui font de l'ophtalmologie, mais les cataractes, la chirurgie de la cataracte est en train de baisser au Québec, et on atteint assez facilement la chirurgie à l'intérieur de six mois également, ce qui fait qu'en pratique il n'y a pas de marché actuellement pour l'assurance duplicative.
Et, si on fait le pari ensemble d'améliorer notre système public encore plus puis de faire en sorte qu'il reste performant, les compagnies n'embarqueront pas là-dedans parce que ce n'est pas rentable. On va avoir répondu au jugement de la Cour suprême, on va avoir donné une alternative pour les gens qui disent que ça prenait ça. Mais, de facto, on fait le pari que c'est le système public qui l'emporte. Et je peux vous dire, pour regarder la liste de chirurgies presque à chaque jour et au moins une fois par semaine je regarde chacun des hôpitaux du Québec, on a gagné le pari par rapport à la liste d'attente en chirurgie. Et ce qu'on veut actuellement, c'est améliorer encore cette liste d'attente, mais, en plus de ça, on veut se donner un cadre réglementaire pour assurer la qualité et la sécurité. Parce qu'il y a eu une autre affaire qui s'est passée, c'est l'histoire de Mme Charest qui est décédée dans une clinique privée, qu'il n'y n'avait pas de règlement. C'est pour ça que ça, c'est important de le passer, c'est pour assurer de la sécurité et de la qualité à nos gens. Puis je pense que ça rentre... Ce que je viens de vous dire là, je suis certain qu'on est pratiquement en accord là-dessus...
Mme Khadir (Saïdeh): ...
Le Président (M. Kelley): Dre Khadir.
Mme Khadir (Saïdeh): ..ce qu'on anticipe, et je pense que ? je m'excuse ? ce que la CSN probablement... c'est que l'assurance duplicative, si elle veut s'étendre et être appliquée, a besoin d'un système de prestations bien en place, bien articulé, de qualité à la limite. Donc, il y a toujours comme une inquiétude à ce niveau-là, parce que, là, on sait que ça va vraiment influencer le... de notre système de santé public. C'est juste ça.
M. Bolduc: Juste pour compléter.
Le Président (M. Kelley): Juste pour compléter, il reste deux minutes.
M. Bolduc: Sur le projet de loi n° 33, je suis venu présenter en commission parlementaire avec l'Association des CMDP, et Philippe Couillard, à l'époque, m'avait demandé, il a dit: Pensez-vous qu'il va y avoir beaucoup de cliniques qui vont vouloir être dans ce modèle-là, c'est-à-dire d'offrir des services avec le public? J'avais dit: Il y a de la place pour deux ou trois cliniques à Montréal, peut-être une à Québec, puis aucune ailleurs dans la province. Allez revoir ce que j'ai dit, là, ça a été filmé, là, puis j'avais raison.
Il y a très, très peu de marché pour des ententes style Rockland, au Québec, avec public versus privé, très, très peu de marché. Et il va y en avoir encore de moins en moins parce qu'on améliore notre système public. L'objectif, c'est de garder à l'intérieur du public le plus possible de nos chirurgies, mais de laisser une alternative à quelqu'un qui voudrait payer lui-même de sa poche la possibilité de le faire. C'est tellement minime qu'il n'y en aura pratiquement pas.
Et l'assurance duplicative, la prédiction que je vous fais, il n'y en aura pas au Québec, il n'y en aura pas. Mais, dans la loi, c'est possible de le faire, et on répond au jugement de Chaoulli, ça fait qu'on ne repart pas en guerre à se payer des avocats, j'aime mieux investir l'argent dans le système de santé.
Le Président (M. Kelley): Un dernier commentaire.
M. Verbauwhede (Cory): Une dernière réponse à ça. Nous sommes formels là-dessus: Chaoulli, ça ne dit pas ça du tout. La juge Deschamps disait simplement que, si le public n'est pas capable de le fournir, alors il faut une alternative. Mais ça ne veut pas dire que, si vous investissez dans le public, vous ayez besoin d'avoir une assurance duplicative privée.
Depuis le début du système de santé, on essaie de limiter au maximum la pratique privée financée par le privé, c'est-à-dire pas d'assurance et la non-mixité des pratiques. Les non-participants ne peuvent pas être rémunérés par la RAMQ. Ça, c'est extrêmement important de le garder. Avec les CMS de participants, on est en train d'introduire un financement public des éléments privés. Donc, on n'est pas tout à fait d'accord, quand même. Par rapport... Bon, je vais arrêter là. Je vais arrêter là.
Le Président (M. Kelley): Parfait. Merci beaucoup. Je vais maintenant céder la parole au porte-parole de l'opposition officielle et député de Marie-Victorin.
M. Drainville: Merci, M. le Président. J'ai combien de temps, là?
Le Président (M. Kelley): 16, quatre, quatre.
M. Drainville: Merci. D'abord, félicitations pour votre mémoire. Je trouve qu'il y a plusieurs excellentes suggestions dans ce mémoire, en particulier l'article 10, là, l'idée d'ajouter une condition supplémentaire, là, pour la suspension, la révocation et le refus de renouvellement d'un permis... d'un permis, dis-je bien, là. Ajouter la Loi sur l'assurance maladie, moi, je pense que c'est une excellente suggestion. L'idée également d'informer, entre autres sur le site du ministère de la Santé, là, du nom des cliniques dont le permis a été suspendu, ou révoqué, ou non renouvelé, je pense que c'est excellente idée également.
J'aime bien également ce que vous suggérez, là, à propos de l'information qu'il faudrait remettre au patient désirant se faire traiter dans un CMS avec médecins non participants, information au sujet des frais préopératoires et postopératoires. Je pense que ça vaut la peine de regarder ça, voir comment ça pourrait s'appliquer. Mais ça donnerait certainement une idée beaucoup plus complète au patient qui veut s'adresser à une clinique privée avec médecins non participants des frais qu'il devra encourir.
J'ai par contre un certain nombre de questions. Quand vous parlez des cliniques de radiologie, est-ce que je dois comprendre que, dans votre esprit, l'ensemble de la radiologie, l'ensemble de l'imagerie médicale devrait être inclus dans le panier de services de la RAMQ?
Le Président (M. Kelley): Dre Khadir.
Mme Khadir (Saïdeh): Oui. Donc, tout à fait. En fait, actuellement, on a un grave problème d'accessibilité, le Dr Bolduc l'a mentionné. Les délais d'attente sont très longs. J'ai eu, hier, pour vous donner un exemple concret... À tous les jours, il n'y a pas un jour où on n'a pas plusieurs patients qui n'arrivent pas à obtenir leurs examens dans un délai raisonnable et qu'on doit carrément envoyer au privé.
J'ai une patiente de 29 ans qui avait une masse mammaire qui semblait bénigne à l'examen, mais néanmoins elle avait besoin d'un examen d'échographie. Or, elle se dirige ? on est au centre-ville de Montréal ? vers l'Hôtel-Dieu, parce que ce n'est pas partout qu'on fait ça dans le public, et l'Hôtel-Dieu lui donne un temps d'examen de deux ans. Je ne sais pas, mais il y a comme aucune cohérence. On s'est regardées un moment en essayant de chercher la raison ou comment faire pour faire différemment, mais c'était incompréhensible. Et, quand on sait que les mêmes docteurs qui sont dans la même institution ? parce que l'Hôtel-Dieu fait partie du CHUM, donc c'est les médecins du CHUM ? ont une clinique privée de radiologie à Varad, mais surtout, pour l'examen du sein, à Léger et Associés, sur la rue Sherbrooke, c'est les mêmes docteurs, et là-bas tu peux avoir ton examen le jour même ou la semaine même et tu paies ton 200 $, donc il y a quelque chose qui est intolérable là-dedans, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. C'est les mêmes médecins du public, ils ont certainement avantage à garder une liste longue au public pour avoir une clientèle au privé. Je veux dire, c'est comme... Puis en même temps de façon irresponsable, parce que deux ans... j'aurais dit peut-être six mois, mais deux ans, il n'y a aucune logique.
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(15 h 50)
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M. Drainville: Si vous permettez, j'ai posé cette question-là au ministre lors de l'étude des crédits, s'il était possible que des médecins gardent une liste plus longue au public afin d'encourager les intérêts de leurs propres cliniques, et il a refusé de confirmer que ça se passait comme ça. Vous êtes certaine...
Mme Khadir (Saïdeh): Bien sûr.
M. Drainville: ...de ce que vous avancez?
Mme Khadir (Saïdeh): Bien oui, puis il y a de nombreuses études que je pourrais... auxquelles je pourrais référer, des médecins qui étaient, je crois, au... également au Manitoba, où il y a eu un projet de recherche pour les médecins ophtalmologistes pour une pratique mixte, et on a vu que les délais d'attente ont augmenté. Dès que la pratique mixte a commencé, privé-public, c'est les délais d'attente publics qui ont augmenté. Donc, c'est des faits qui ont été répertoriés et c'est des données très disponibles.
Puis là, nous, on a vraiment la plus grande pratique mixte qui est interdite par notre loi, soit dit en passant, nos lois québécoises, bien elle se pratique en radiologie à tous les jours, puis ça, c'est quelque chose ? je reviens là-dessus ? d'intolérable, tout le monde s'en plaint, ça nous atteint au coeur tous les jours. Puis ce n'est pas... Elle, c'était un cas simple qui à la limite... bon, on peut attendre, puis s'organiser, puis trouver ça drôle un petit moment, mais j'ai des patients cancéreux qui ont des délais d'attente très longs et qui sont dirigés au privé, puis là leurs tests coûtent vraiment cher en accumulé. J'ai eu un cancéreux du poumon, un monsieur qui a 58 ans qui avait déjà un métastase. Donc, on devait faire plusieurs scans, plusieurs résonances magnétiques, des PETscans, ils les a tous faits au privé.
M. Drainville: Parce que l'attente était trop longue.
Mme Khadir (Saïdeh): Parce que l'attente était trop longue. Parce qu'il voulait savoir son diagnostic puis sauver sa vie.
M. Drainville: J'ai raconté cette anecdote-là lors de l'étude des crédits, mais, pendant la dernière campagne électorale, dans mon propre comté, à la Place Longueuil, il y avait une dame attablée, l'air un peu dépité. Je vais la voir, je lui dis: Ça va? Elle me dit: Pas vraiment. Je dis: Pourquoi? Elle me dit: Bien, parce que j'ai des bosses au ventre, le ministre... Le ministre! C'est un lapsus. Le médecin ? le médecin, on espère que ce ne sera pas le ministre ? le médecin qui m'a dit, dit la dame... Le médecin m'a dit: Ce n'est probablement pas cancéreux, ça fait que je ne vous ai pas mise sur la liste prioritaire pour la résonance magnétique. Alors, elle dit: J'attends ma résonance magnétique, je vais l'avoir probablement dans six mois, qu'il m'a dit, le médecin, il faudrait que j'aille au privé pour le savoir vraiment, si c'est un cancer ou pas, mais on n'a pas l'argent, on n'a pas les sous pour le faire.
Le Président (M. Kelley): Je pense que...
Mme Khadir (Saïdeh): Puis l'ironie de base, c'est que la personne qui va payer, bien, aura... va passer devant l'autre pour avoir son soin, la personne qui peut payer.
Le Président (M. Kelley): M. Verbauwhede, un complément de réponse.
M. Verbauwhede (Cory): Oui. Donc, à notre avis, ce qui se passe en radiologie qui est tout à fait historiquement étrange, bien il faudrait regarder historiquement pourquoi ça a été par règlement... Ce n'est pas couvert extra muros par règlement, la radiologie. C'est pour ça qu'ils ont une pratique de facto mixte, mais ce n'est pas une pratique mixte parce qu'ils ont le droit de faire des actes à l'extérieur des hôpitaux parce que ce n'est pas couvert par la RAMQ. Donc, ce n'est pas une pratique mixte.
M. Drainville: Non, mais vous connaissez les raisons pour ça, n'est-ce pas?
M. Verbauwhede (Cory): C'est-à-dire que...
M. Drainville: Vous savez qu'il y a eu une exception à l'origine.
M. Verbauwhede (Cory): Oui, oui. Oui, oui, tout à fait. Mais c'est-à-dire que la radiologie, c'est un parfait exemple de ce qui se passerait si on laisse aller une pratique mixte ou un financement hybride, c'est-à-dire qu'on donne les cas qui paient et qui sont, bon, en chirurgie, les moins lourds au privé qui les prend rapidement parce qu'ils font de l'argent avec, puis les listes s'allongent au public. La radiologie, c'est votre... si vous voulez, votre essai. On a déjà le résultat là, et donc...
Et par ailleurs il y aurait un argument juridique qui a déjà été testé pour les avortements et gagné par un recours collectif à la Cour supérieure, et le gouvernement n'est pas allé en appel, qui dit que... la loi dit que les services médicalement nécessaires sont gratuits, et un règlement vient changer ça parce qu'il y a des éléments du médicalement nécessaire qui sont payants parce qu'en dehors des murs de l'hôpital et aussi pour les frais afférents, ce qui est tout à fait illégal parce qu'un règlement ne peut pas aller au-delà de la loi, comme le gouvernement l'a appris récemment.
M. Drainville: Il me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Kelley): Il vous reste sept minutes.
M. Drainville: O.K. J'ai trois questions importantes, j'aimerais ça pouvoir obtenir une réponse dans les sept minutes qu'il me reste. D'abord, sur l'idée d'inclure dans le panier de services l'imagerie médicale, est-ce que vous avez fait une évaluation même sommaire, approximative, du coût que cela représenterait?
Mme Khadir (Saïdeh): Ce serait très approximatif. On a discuté avec des radiologues qui étaient au courant, qui avaient un certain leadership dans le domaine, on a évalué ça à à peu près 230 millions de dollars, mais ça, ces 230 millions, c'est un coût global, mais il faut tenir compte que les clients de ces cliniques ou... en tout cas, c'est souvent la SAAQ et la CSST, et, à ce moment-là, c'est en partie le public déjà qui va acheter ces services-là souvent un peu plus cher.
L'autre chose qu'on a faite, c'est qu'on a encouragé le développement, puis on continue de le faire, avec des mesures fiscales, des mesures de financement important. On peut déduire, hein, de l'impôt ces paiements-là. Donc, on peut finalement voir qu'il y a une... il y a des coûts, oui, il y a des coûts, mais il y a aussi ces facteurs-là à tenir en compte.
M. Drainville: Excellent. Merci beaucoup. Une question: Est-ce que vous seriez en faveur que l'on modifie l'article 15.1 de la Loi sur l'assurance maladie afin que désormais les chirurgies qui sont admissibles pour l'assurance privée duplicative soient déterminées par une législation et non pas seulement par un changement réglementaire, comme c'est le cas dans la loi actuellement? Vous seriez favorables à ça?
M. Verbauwhede (Cory): Tout à fait.
M. Drainville: Excellent. Merci. Troisième question, qui s'adresse spécifiquement à Mme Khadir. Parlez-nous un peu de l'Ontario et des mesures que l'Ontario a mises en place pour renforcer son système public de santé. J'attire votre attention en particulier sur la mesure qui est contenue dans the Commitment to the Future of Medicare Act, qui prévoit que les médecins, une fois engagés dans le système public, ne peuvent se désengager du système public.
Le Président (M. Kelley): Dre Khadir.
M. Drainville: Avec clause grand-père. Je dois préciser, M. le Président, il y avait une clause grand-père pour les médecins qui s'étaient déjà désengagés. Mais ils ont adopté, à ce qu'on me dit... et c'est pour ça que je veux que vous élaboriez là-dessus, ils ont adopté, il y a un certain temps, cette mesure ? je ne sais pas si... apparemment, c'est dans une loi ? qui prévoit donc qu'au sortir de l'université, si je comprends bien, les jeunes médecins doivent choisir: privé ou public. Une fois qu'ils sont engagés dans le public, ils doivent rester dans le public.
Mme Khadir (Saïdeh): Oui. C'est très intéressant. En fait, c'est quelque chose qu'on vient de découvrir nous-mêmes dans la dernière année, qu'est-ce que l'Ontario a fait, parce qu'on n'était pas sûrs exactement puis on pensait qu'ils allaient aussi un peu vers le privé, mais pas autant qu'ici, mais pour se rendre compte que, non, l'Ontario avait vraiment choisi une voie complètement différente. Ça veut dire, dans la même période, en 2005, l'après-Chaoulli, où, eux aussi, leur système commençait à s'essouffler au niveau des délais d'attente, ils avaient subi aussi des restrictions budgétaires comme nous, ils ont décidé d'adresser cette question-là, mais ils ont décidé de l'adresser publiquement. Et ça a été fait par le gouvernement libéral, d'ailleurs, et...
Une voix: ...
Mme Khadir (Saïdeh): ...par un ministre, Smitherman, qui avait un fort engagement vers le système de santé public. Et ce qu'il a mis en place, qui est une espèce d'effort magnanime, là, c'était de faire le... mettre en place le Ontario's Wait Time Management. C'est un projet qui a coûté plus de 1 milliard de dollars et qui finalement visait à centraliser les délais d'attente et faire en sorte que les chirurgies... pour certaines chirurgies qu'ils ont ciblées, de raccourcir les délais en mettant des moyens, en mettant des mesures, en s'assurant de la transparence de ces mesures-là, d'améliorer le processus, par exemple pour des chirurgies de cancer, des chirurgies cardiaques, genoux, hanches, cataractes et quelques-unes qui m'échappent, aussi pour l'accès à la résonance magnétique et au CATscan...
M. Drainville: Qu'est-ce qu'ils ont fait? Qu'est-ce qu'ils ont fait dans ce cas-là?
Mme Khadir (Saïdeh): Bien, ils ont essayé de voir, d'analyser le processus et d'améliorer le processus mais à l'intérieur du système de santé public, de mettre des méthodes de gestion éprouvées, modernes, qui fonctionnent, mais de façon systématique.
M. Bolduc: ...ça s'appelle le «lean management».
Mme Khadir (Saïdeh): Exactement. C'est ça.
M. Bolduc: Il faut lui dire. Il faut lui dire.
n
(16 heures)
n
M. Drainville: Est-ce qu'ils n'ont pas également... Mme Khadir, est-ce qu'ils n'ont pas également... Dre Khadir, je devrais dire, est-ce qu'ils n'ont pas également racheté de l'équipement d'imagerie médicale pour...
Mme Khadir (Saïdeh): Ils ont nationalisé. Ils étaient libéraux. En fait, ils ont rapatrié plusieurs machines radiologiques qu'ils s'étaient procurées au privé pour les mettre, les intégrer et faire finalement diminuer leur liste d'attente et améliorer leur efficience.M. Drainville: Donc, ils ont racheté des cliniques de radiologie? C'est ce que vous dites?
Mme Khadir (Saïdeh): Oui, et certaines cliniques de chirurgie, oui. L'autre chose qu'ils ont faite ? pour compléter ? c'est de renforcer le Ontario Health Act, avec le Commitment to the Future of Medicare, et ce qu'ils sont venus faire, c'est, en fait, de s'assurer, un, que des chirurgies qui étaient faites en dehors des hôpitaux étaient faites au même prix. C'est-à-dire, dans les cliniques médicales spécialisées, les gens n'avaient pas le droit de charger plus que ce qui était chargé dans le public.
L'autre chose, c'était de limiter le va-et-vient parmi les médecins participants et non participants. Donc, ils ont opté pour, des nouveaux médecins, de les faire choisir dès le départ s'ils voulaient faire partie du système, «opt in or opt out». Donc, ce n'est pas quelque chose qui peut être interchangeable, ce qui est très différent du Québec, mais le Québec... et assez, je veux dire, radical, si on peut dire, là, assez ferme, mais, du côté québécois, on est vraiment mous, hein, dans ce sens-là, c'est-à-dire qu'on donne un mois pour sortir de la participation...
M. Drainville: Un mois de préavis, dites-vous.
Mme Khadir (Saïdeh): ...de préavis, et huit jours pour rembarquer. Donc, ça donne un faux message comme quoi on peut embarquer et débarquer ou... Souvent, c'est comme ça. Nous, on connaît des exemples types de médecins entrepreneurs qui commençaient comme ça leur carrière, ils allaient au public réconforter un peu leur base et retournaient. Puis ils ont commencé leur pratique de cette façon-là.
Alors, c'est ce qu'on connaît, dans le fond, de l'Ontario, c'est qu'ils ont pris une voie complètement différente des nôtres, et avec beaucoup de satisfaction. Moi, quand je parle aux médecins là-bas, il n'y a vraiment pas... ce n'est plus le drame. Oui, il y a encore des délais d'attente, oui, il y a encore des choses à faire, mais ils ont accès dans des délais très, très raisonnables, puis on ne parle plus de deux ans pour une échographie, on parle d'un mois, puis la journée même si c'est urgent.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Ça met fin à cet échange. Maintenant, pour un court échange avec M. le député de La Peltrie.
M. Caire: Combien court, M. le Président?
Le Président (M. Kelley): Quatre minutes.
M. Caire: Eh, Seigneur! Un jour, je vais m'habituer.
Une voix: Un jour, nous nous vengerons.
M. Caire: Ha, ha, ha! Un jour, nous nous vengerons. Bien...
Le Président (M. Kelley): C'est hors du contrôle du président.
M. Caire: Bonjour. Merci de participer aujourd'hui. Étant donné qu'on a très peu de temps, je voudrais comprendre certains éléments de votre présentation que vous avez faite. Parce que vous dites que vous êtes contre la mixité de la pratique parce qu'elle met en danger le système public. Par contre, vous êtes d'accord avec le fait qu'un médecin puisse se désengager complètement, donc ne mettre aucune pratique au public. Je voudrais juste comprendre cette logique-là.
Mme Khadir (Saïdeh): C'est très différent. C'est très différent. Je vais commencer. Ensuite, si vous voulez... En fait, la situation au Québec, c'était qu'on était 18 000 médecins. Et, jusqu'aux années fin... en fait, jusqu'aux années 2000, il y avait 13 omnipraticiens et 20 spécialistes qui étaient désengagés. Donc, c'était vraiment un système où on peut dire qu'il y avait moins que 0,5 % des médecins qui n'étaient pas satisfaits et qui quittaient, c'est-à-dire qu'ils étaient satisfaits de pouvoir traiter leurs patients selon leurs besoins, sans interférence avec leur capacité de payer.
Sont arrivés, bon, des problèmes d'accessibilité, et il y a eu de plus en plus de médecins qui se sont désengagés. Mais ça, ça ne nuit pas au système, dans le sens où... Ce qui est problématique, c'est quand le médecin, si on veut, va chercher des pratiques intéressantes au privé, faciles, puis est à l'hôpital à faire des cas lourds, et en plus va à l'hôpital et s'autoréfère des patients vers la clinique privée.
Une voix: Ou en radiologie.
Mme Khadir (Saïdeh): Ou en radiologie. Donc, il y a comme... il y a une espèce aussi d'intérêt, hein, de conflit d'intérêts qui rentre en jeu, d'amener les patients de cette façon-là. Et ça a été vraiment prouvé. Il y a eu un projet, là, dans l'Ouest avec les ophtalmologistes.
Le Président (M. Kelley): M. le député.
M. Caire: Sur cette question-là, on pourrait avoir un désaccord, parce que, quand on fait des analyses de système de santé dans le monde... Je comprends que vous me parliez de l'Ouest, mais l'Ouest n'a pas de système mixte. Il n'y a aucun système mixte au Canada, actuellement. Il n'y a que des monopoles d'État au Canada.
Ceci étant dit, vous amenez un élément qui est intéressant. Vous dites que le fait qu'un médecin n'ait aucune pratique au public n'est pas un problème pour le système public. J'essaie de comprendre puis je vous avoue que... Ce que vous dites, c'est que, du fait que ça reste très marginal, ce n'est pas problématique. Mais, si ce phénomène-là va en augmentant, comme c'est le cas, comme on peut le constater dans les dernières années, et, pour paraphraser Bernard Derome, si la tendance se maintient, à terme vous ne pensez pas que, s'il y a 500, 1 000, 1 500 médecins qui quittaient le régime public complètement pour une pratique strictement privée, vous ne pensez pas que ça, ça pourrait menacer le système de santé public?
Le Président (M. Kelley): Peut-être M. Verbauwhede.
M. Verbauwhede (Cory): Ce qu'il faut comprendre, c'est que les ressources du public ne devraient jamais aller vers un système parallèle privé. Donc, naturellement...
M. Caire: Pourquoi?
M. Verbauwhede (Cory): Parce qu'on croit à l'égalité d'accès, on croit à l'équité, on croit à la gratuité.
M. Caire: En quoi ça menace l'égalité d'accès?
M. Verbauwhede (Cory): Donc, depuis le début, l'interdiction de l'assurance privée duplicative va dans cette logique-là, on dit: Ça n'a jamais été interdit de pratiquer au privé, mais on dit: Allez-y, assumer vos risques, pas de problème; de toute façon, il n'y a pas beaucoup de monde au Québec qui peut se payer un spécialiste de sa poche. Donc, on a interdit l'assurance privée duplicative parce que ça, dans d'autres juridictions, ça a été une des façons dont justement cette pratique privée à deux vitesses...
M. Caire: Mais en quoi ça menace l'égalité des chances? Je reviens sur ma question.
M. Verbauwhede (Cory): ...à deux vitesses, a été développée par les assurances privées. Parce que, là, vous créez des sous-groupes, vous créez des groupes d'assurés au privé et des assurés au public. Moi, en tant que...
M. Caire: Oui, mais, mettons, prenons un exemple français avec les mutuelles, par exemple.
Le Président (M. Kelley): En conclusion, s'il vous plaît, malheureusement.
M. Verbauwhede (Cory): En conclusion. En tant qu'employé dans un cabinet de 10 avocats, j'ai juste... parce qu'on était 10 et pas neuf, j'ai eu l'opportunité d'avoir une assurance groupe, et donc ça me donne des services plus rapides ou différents de la norme générale. Ça, c'est le gros problème si on finance un système privé parallèle.
M. Caire: La CSST, par exemple, n'a pas le droit de le faire, actuellement.
M. Verbauwhede (Cory): Comme la CSST, elle a...
M. Caire: Comme la CSST.
Le Président (M. Kelley): Malheureusement, le temps, notre quatre minutes est épuisé.
Mme Goulet (Marie-Claude): ...actuellement, les cliniques de radiologie, c'est l'exemple parfait qu'on a, dont on parle depuis tout à l'heure, là. Donc, si on élargit ça...
Une voix: ...
Le Président (M. Kelley): En tout cas, on va passer maintenant à un autre court bloc.
Mme Goulet (Marie-Claude): ...
Le Président (M. Kelley): Pardon, Dre Goulet, mais on va passer la parole maintenant au député de Mercier pour un autre court échange de quatre minutes.
M. Khadir: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais déclarer mes intérêts. Je suis en conflit d'intérêts...
Le Président (M. Kelley): ...
M. Khadir: Oui.
M. Caire: ...
M. Khadir: Je vais quand même féliciter ceux qui ont produit ce rapport, sauf ma soeur. D'ailleurs...
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: Elle est plus jolie que vous.
M. Khadir: Non, mais c'est surtout qu'elle est la plus virulente critique de mes propos habituellement. Puis je comprends qu'il faut être ministre libéral en Ontario ou au Québec pour bénéficier de ses félicitations. Mais bon, on réglera nos affaires de famille plus tard. Si le système mixte cause un vrai problème en Amérique du Nord, surtout au Québec, c'est qu'il y a un contrôle sur l'entrée en médecine. On a une pénurie...
Une voix: ...
M. Khadir: Non, mais justement la pratique mixte publique...
Une voix: Il n'y en pas. Ça n'existe pas au Québec.
M. Khadir: Ça n'existe pas. Mais justement, pourquoi il ne faut pas que ça existe dans ces circonstances-là?, c'est à cause d'une pénurie grave de main-d'oeuvre médicale, ce qui peut aussi être présent ailleurs. En France, il y a un tel surplus de main-d'oeuvre médicale que même historiquement les médecins français ou italiens vont beaucoup dans des missions internationales, etc. Pourquoi? Parce qu'il y a un surplus, il y a même du chômage, en Italie, chez les médecins. Donc, on ne peut pas importer le modèle sans régler le problème à la base, de pénurie médicale. On est actuellement, au Québec, là, parmi les provinces canadiennes, la province qui a le plus bas ratio médecins-population, et le profil médical en plus est mal taillé, c'est-à-dire taillé en fonction de nos intérêts, oui, quand on...
M. Drainville: C'est le plus élevé, mais le plus bas pour les médecins de famille, à part la Nouvelle-Écosse.
Le Président (M. Kelley): Peut-être un à la fois, et c'est le député de Mercier qui a la parole.
n(16 h 10)nM. Khadir: En fait, la question, c'est: plus le nombre d'heures disponibles. Quand on tient compte du nombre d'heures disponibles, il y a une difficulté.
L'autre problème qui a été mentionné, une des raisons pourquoi il n'est même pas nécessaire que le médecin radiologiste soit en conflit d'intérêts, qu'il s'autoréfère des patients, c'est que les conditions de financement de nos salles d'opération, de nos services de radiologie, pendant des années, ont été telles que nos salles de radiologie, notre équipement n'est pas utilisé de manière efficiente, de manière efficace. Un examen qui doit débuter à 3 h 10, mais qui dure une heure, bien ça vient de dépasser de 10 minutes le 4 heures à laquelle le service doit être fermé. Donc, on vient de perdre 50 minutes à cause de la manière dont... jusqu'à récemment. Là, j'espère que le ministre en exercice va faire en sorte qu'on va mettre à bon usage notre système de santé et l'équipement déjà disponible.
Mais j'invite quand même le ministre et les députés du Parti libéral présents ici à réfléchir sur le fait que, malheureusement, en dépit de toute notre bonne volonté, il y a d'énormes intérêts qui cherchent à mettre le grappin sur une partie du système de santé parce que ça rapporte beaucoup. Il n'y a qu'à regarder là où, aux États-Unis ou ailleurs, ils ont une plus grande place, c'est des dépenses majeures, c'est deux fois plus aux États-Unis que par tête d'habitant au Canada. Et cette différence va dans la poche de qui essentiellement? Des promoteurs privés.
Là où j'ai un problème, c'est que, quand vous dites que ça suffit de limiter... quoique, non, vous avez émis des réserves. Par exemple, regardons, prenons le cas de M. Couillard, où le Persistence Capital Management aurait 49 % des actions dans une clinique privée, avec toutes des possibilités... Là, cinq lits, c'est beau, mais, s'il y a cinq lits, mais, dans le même édifice, ils sont 10 à avoir des couloirs différents mais rattachés dans un même centre, on va rentrer dans un problème. Mais, si le Persistence Capital Management investit 49 % puis les 2 % qu'il lui manque pour avoir une majorité, c'est le Dr Couillard comme médecin exerçant qui les détient, ils viennent de très facilement contourner le principe, l'esprit de la loi tel que vous voulez le formuler. Donc, j'invite M. le ministre à de la prudence. Ceci, malheureusement, ne garantit pas contre la possibilité de la création d'un réseau privé parallèle qui va drainer les meilleures ressources, puisqu'il le fait déjà des ressources financières, mais aussi des ressources en personnel du système de santé public.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député de Mercier. Il me reste à dire merci beaucoup aux représentants de Médecins québécois pour un régime public, Dre khadir, Dre Goulet et M. Verbauwhede, pour votre présence ici, aujourd'hui.
Je vais suspendre quelques instants. Et j'invite les représentants du Secrétariat intersyndical des services publics de prendre place à la table des témoins.
(Suspension de la séance à 16 h 13)
(Reprise à 16 h 19)
Le Président (M. Kelley): Alors, si tout le monde peut prendre place, s'il vous plaît. Alors, on va poursuivre avec le deuxième témoin aujourd'hui... ou des témoins, parce que c'est le Secrétariat intersyndical des services publics, entre autres avec les représentants de la FIQ, de l'APTS et de la CSQ.
On a convenu pour une enveloppe de 90 minutes avec ce groupe, donc une présentation de 20 minutes, une période d'échange de 70 minutes avec les membres de la commission, qui va nous amener à un léger dépassement parce qu'on est un petit peu en retard. Alors, ça va nous amener à 17 h 50. Est-ce qu'il y a consentement pour poursuivre jusqu'à 17 h 50? Consentement.
Une voix: Oui.
Le Président (M. Kelley): Alors, sans plus tarder, je vais céder la parole à...
Secrétariat intersyndical
des services publics (SISP)
Mme Bonamie (Lina): Lina Bonamie.
Le Président (M. Kelley): ...une des personnes à la table des témoins. La parole est à vous, madame...
n(16 h 20)nMme Bonamie (Lina): Lina Bonamie, présidente de la FIQ. Alors, je vous présente les personnes qui vous accompagnent: à mon extrême gauche, Mme Lucie Mercier, au service de recherche à la FIQ; Mme Louise Chabot, vice-présidente de la CSQ; Mme Dominique Verreault, présidente de l'APTS; et M. Michael Quinn, à la recherche aussi, conseiller syndical à l'APTS.
Alors, M. le Président, merci. Bonjour. M. le ministre, MM. et Mmes les députés, merci de nous permettre en tant que SISP de venir débattre avec vous à propos du projet de loi n° 34. Brièvement, le SISP est constitué de cinq organisations syndicales, soit la CSQ, la FIQ, l'APTS, le SFPQ et le SPGQ. Donc, on représente 300 000 membres, dont tout près de 245 000 travaillent dans le réseau public, parapublic et péripulic, donc santé, éducation, fonction publique et même les sociétés d'État.
Je ne vous cacherai pas l'attachement de chacune de nos organisations au service de santé public québécois. Donc, nous nous sommes toujours portés et nous continuerons à nous porter à la défense de ce réseau public là par rapport à son développement ou encore à sa préservation. Malgré la faiblesse qu'il démontre par rapport à l'accessibilité, nous sommes convaincus que les solutions demeurent publiques et qu'elles seront, si on les applique, les plus équitables.
Brièvement, la loi n° 33 a mis sur pied les CMS... ou mettra sur pied les CMS. A suivi un règlement qui est venu ajouter... en tout cas, préciser 50 chirurgies, règlement juste par un ministre. Est-ce que le ministre d'aujourd'hui peut nous dire qu'il y avait des délais raisonnables dans chacun de ces 55 secteurs là? Pas certaine. Est-ce que ces chirurgies-là se conformaient aux standards de sécurité ou aux risques chirurgicaux reconnus? Là encore, pas certaine. Écoutez, c'était pourtant l'esprit de la loi n° 33.
Ce qu'on nous répond, c'est que le ministre ne fait qu'avaliser ce qui se fait sur le terrain. Oui, peut-être. La majorité des Québécois roulent plus vite que 100 kilomètres-heure sur l'autoroute. Est-ce que le ministre des Transports va avaliser l'augmentation de la limite permise sur l'autoroute? Non. Le ministre aurait pu faire le choix de limiter ces chirurgies-là et d'empêcher qu'elles se fassent extrahospitalières. C'est un choix que le gouvernement n'a pas pris.
Nous voilà maintenant aujourd'hui devant le projet de loi n° 34. Alors, notre analyse va passer devant... par l'exploitation et la propriété des CMS, les renforcements législatifs amenés par ce projet de loi au regard des services privés et finalement les laboratoires d'imagerie médicale et les dispositions transitoires.
Alors, la loi n° 33 traite d'exploitation de centres médicaux spécialisés par un médecin, une personne morale ou encore une société. Elle sera exploitée sous deux formes: médecins participants ou encore non participants. Deux ans après que ce soit établi autour de ces débats-là, la Fédération des médecins spécialistes du Québec sonne un cri d'alarme. Les cliniques radiologiques font l'objet d'un assaut des compagnies américaines; ici, au Québec, sept cliniques sont rachetées par des compagnies américaines. Le gouvernement adopte la loi n° 95 pour stopper l'hémorragie.
Donc, 33 et 95 établissent une distinction entre les propriétaires des lieux et les exploitants des lieux, et ça, c'est permis par une nouvelle introduction qui a été apportée dans le Code civil lors de sa réforme en 1990. Le projet de loi n° 34 du ministre ne vient pas changer ces dispositions-là. Par contre, le projet n° 34 vient baliser, quant à nous, l'exploitation de ces nouveaux lieux de services.
Le nouveau Code des professions ? parce qu'il y a eu aussi, quelque 10 ans plus tard, une modification au Code des professions ? il permet aux membres des ordres professionnels d'exercer au Québec leurs actes professionnels au sein d'une société d'actions professionnelle en vertu d'une loi autre qu'une loi québécoise; c'est permis maintenant. Il n'exige plus non plus qu'un professionnel réside au Québec pour faire partie de l'ordre de sa profession. Les récentes négociations France-Québec, là, vont venir justement donner tout un sens à ces nouvelles catégories de permis qu'on a mises en place, surtout le permis sur permis. Nous avons hâte de voir ça avec les permis émis par la Communauté européenne.
Alors, ces modifications au Code des professions viennent donc, quant à nous, faciliter la mise en place de cliniques médicales ou encore radiologistes possédées, exploitées totalement ou en partie par des médecins investisseurs éventuellement membres du Collège des médecins, mais qui ne résideront pas au Québec et qui ne pratiqueront pas même leur médecine au Québec. Alors, on ne croit pas que le projet de loi n° 34 empêche, malgré la modification apportée à 333.2, alinéa a, on ne pense pas que vous allez empêcher ça avec ce projet de loi là.
Par contre, les modifications que vous voulez apporter à 333.2, alinéa 2°, concernant la composition d'un conseil d'administration ou du conseil de gestion des futurs CMS, nous sommes d'accord avec ça. Et le fait que les actionnaires ne pourront pas, par une convention, diminuer le pouvoir des administrateurs, nous sommes d'accord avec le ministre. C'est des améliorations indispensables.
Par contre, chacune des juridictions américaines, et si on regarde celles de l'Ontario ou encore de l'Alberta, exige que toutes les actions d'une société par actions professionnelle soient détenues par les membres de cette profession. Pourquoi qu'au Québec on ne le fait pas? Pourquoi on n'a pas la même exigence que ce soient toutes actions détenues par les professionnels? Alors, plutôt que d'actualiser les centres ambulatoires de la réforme plus connue sous le nom de la réforme Rochon, le gouvernement s'oriente plus vers un système de santé au profit des entreprises privées, quant à nous.
En mars 2009, le Centre hospitalier Sacré-Coeur part en appel d'offres pour l'ensemble des chirurgies extrahospitalières inscrites au règlement ? donc, il y en a une cinquantaine ? d'une durée de cinq ans, d'une valeur approximative de 4,68 millions, à même le budget de Sacré-Coeur. Par ailleurs, les médecins participants qui vont opérer devront se faire assister par les résidents. En mots très simples, on vient transférer la chirurgie d'un jour chez Rockland avec l'enseignement aux résidents, et, pour nous, c'est inadmissible. Et on sait que le ministre avait des réserves sur envoyer l'enseignement au privé.
L'article 34 du projet de loi n° 34 propose la suppression du troisième paragraphe du règlement des traitements médicaux permis. Toutefois, l'article 13 du même projet de loi prévoit qu'un pouvoir réglementaire sera octroyé au gouvernement en lieu et place du ministre. Il s'agit, quant à nous, d'une simple modification purement administrative. Il n'y a vraiment aucun débat public dans ça. Ce n'est que maintenant on change ? excusez-moi l'expression bien québécoise ? quatre trente-sous pour une piastre.
L'article 6 du projet de loi n° 34, donc on vient viser les CMS avec médecins non participants... peuvent sous-traiter les soins préopératoires et postopératoires. Donc, on vient d'ouvrir une constellation possible de toutes sortes de services privés. Ça commence à ressembler à un système parallèle privé, ça, moi, hein, pré, postopératoire, plus l'opération en privé.
Les complications qui pourraient survenir dans les CMS seront prises en charge par le réseau public, et ça, M. le ministre, nous sommes d'accord. Nous ne pouvons pas laisser aucun citoyen dans une situation terrible. Donc, la prise en charge d'une... en tout cas, d'un malheur dans un CMS devra être pris par le réseau public qui a tout le professionnalisme pour sortir le patient de là. Nous sommes entièrement d'accord.
Par contre, en faisant ça, là, regardons ça d'un autre angle, le projet de loi n° 34 favorise les CMS privés parce qu'il transfère la chirurgie de volume, hein, le volume va se faire là, donc tout en déchargeant les CMS des risques lourds, parce que c'est le service maintenant public qui sera appelé à faire les chirurgies lourdes, à prendre les complications des autres.
Alors, en résumé, le privé va fonctionner avec les subventions, les paiements des patients, le paiement des assurances privées sans avoir à payer pour les complications. Alors, quant à nous, toutes complications qui seront reprises par le système public, il devra y avoir une facture envoyée au CMS pour tous les coûts que le public a engendrés pour sauver le patient. C'est une proposition, M. le ministre.
n(16 h 30)n Alors, bon, le projet de loi propose aussi de limiter à cinq lits aux permis des CMS de médecins non participants. Cette limite est une avance, quant à nous, une avancée, parce que présentement ce n'est pas balisé, donc ça pourrait être illimité. Mais, comme 33 et 95, comme lois, n'interdisent pas la propriété d'un CMS ou d'un laboratoire médical d'imagerie par des investisseurs nationaux ou internationaux, ils pourraient très bien construire un mégacomplexe de plusieurs CMS, non seulement de plusieurs CMS, mais de tous les services privés en pré et postopératoire, y compris la réadaptation. Si ça ne s'appelle pas un hôpital privé, M. le ministre, je ne sais pas comment on peut appeler ça.
Ah! un petit mot, je me dois de faire un petit mot à propos des avortements. J'ai entendu, ce matin, que, le ministre, vous aviez peut-être une proposition à faire, mais je tiens à souligner que le SISP est entièrement derrière la fédération pour le planning des naissances pour exclure justement les trois centres de santé des femmes. Depuis 30 ans que les femmes se sont organisées pour avoir une médecine santé reproductive qui réponde aux besoins des femmes, et là le projet de loi vient centrer qu'il n'y a qu'en établissement privé hospitalier ou en privé qu'on pourra obtenir des avortements, alors qu'une étude du Conseil du statut de la femme, en 2006, vient démontrer qu'en Mauricie, Coeur-du-Québec, 50 % des avortements, en région outaouaise, 98 % des avortements ont été faits en clinique de femmes. Alors, pour nous, je pense que le ministre doit se repencher sur cette partie du projet de loi.
Bon. On sait que le réseau présentement subit une grosse pression par le privé. On ne peut pas dire que les cliniques d'imagerie médicale en sont exemptes, elles ont aussi, elles subissent aussi la même pression. D'ailleurs, la loi n° 95, comme je disais plus tôt, a été adoptée dans ce but de les protéger. Le projet de loi du ministre Bolduc, n° 34, veut appliquer les mêmes conditions, les mêmes conditions que les CMS aux cliniques radiologiques privées, parce que le permis accordé devra indiquer quel examen, soit de radiologie ou de résonance, pourra y être effectué. Toutefois, le problème réglementaire pour déterminer la liste demeure au ministre, alors que, pour les CMS, il passe au gouvernement. Pourquoi, pourquoi deux façons différentes de déterminer les listes?
Maintenant, le 21 janvier dernier, le Dr Bureau exprimait qu'il comptait diminuer les listes d'attente en radiologie sur une période de 12 à 18 mois. Il voulait mettre en place... il veut mettre en place... l'objectif est de mettre en place un guichet unique, donc recueillir des informations que nous n'avons pas, parce que le ministère ne détient pas les informations des vraies listes d'attente sur les examens radiologiques... donc mettre un guichet unique et ainsi aussi pouvoir diriger le patient là où l'attente est la plus basse.
Le SISP est convaincu que le réseau public peut résorber ces listes d'attente là. Par contre, on constate que le ministère n'a probablement pas la même vision des choses, puisqu'il se retourne vers les cliniques radiologiques privées pour diminuer ses listes d'attente. En effet, d'ici septembre, les cliniques privées radiologiques auront le même statut équivalent d'un CMS.
Lors de l'étude des crédits de Santé, le Dr Bureau affirmait... ou en tout cas a répondu à une question que les cliniques d'imagerie médicale devront faire des ententes avec les GMF, les cliniques-réseaux, les centres hospitaliers, être ouvertes le samedi, le dimanche. Alors, c'est vraiment se retourner vers, encore là, le privé.
On ne croit pas que le maillage public-privé soit la meilleure solution pour diminuer les listes d'attente. Plusieurs études vont dans ce sens-là. Entre autres, en 1998, l'Université du Manitoba est venue suggérer, prouver que les délais d'attente ont augmenté lorsqu'il y a une pratique des médecins radiologistes ou médecins privé-public. Le médecin est attiré vers le public, bien naturellement, parce que c'est plus payant. Donc, dans une situation de pénurie comme on connaît, il ne faut pas procéder à ouvrir les robinets plus vers le privé, il faut tenter de diminuer cette pénurie-là. Quel intérêt a un médecin qui travaille de façon mixte dans le public et dans sa clinique privée en radiologie, quel intérêt a-t-il à baisser les listes d'attente sur le public? Bien, poser la question, c'est y répondre, je pense.
Alors, la mixité permise depuis 1970 ? parce qu'elle est permise depuis 1970 ? inquiète même la Protectrice du citoyen. Lors du dernier colloque interdisciplinaire, qui s'est tenu ici, dans la région de Québec, au 3 avril dernier, elle observait la prolifération des services d'imagerie médicale où les patients doivent commencer à débourser. Alors, je me permets de la citer: «En clair, si vous avez la capacité de payer, vous avez votre examen immédiatement. Au contraire, si vous ne pouvez pas payer, vous attendrez. La discrimination selon le revenu est flagrante dans ces cliniques privées de radiologie, maintenant à but lucratif. Cette discrimination est encore plus frappante quand les examens de tacographie ou par résonnance magnétique sont prescrits en situation d'urgence.»
Il est possible, quant à nous, de répondre aux attentes des usagers en matière d'accessibilité ou de qualité des services dans la mesure où, collectivement, on fait le choix de placer les investissements au bon endroit.
Expérience québécoise, expérience albertaine. Nous avons tous en mémoire les années 2000, où on a dû envoyer des patients aux États-Unis avoir des traitements de radio-onco parce qu'ici la liste d'attente était de 12 semaines. Nous avons fait le choix, tout de suite après, de réinvestir, et maintenant le délai d'attente est de quatre semaines pour 95 % de ces patients.
En Alberta. L'Alberta devenait, en 1993, la première province canadienne à permettre les cliniques privées d'imagerie médicale, et on a vu un nombre fulgurant de cliniques voir le jour, et le coût des examens est passé entièrement au patient. En 2000, suite à des pressions publiques et à un avertissement sévère du gouvernement canadien, parce que tout ce qui est médicalement requis ne doit pas être payé par le patient, le gouvernement albertain a changé de cap, il a remboursé les patients, il a acheté les appareils, il les a installés dans les centres publics, les centres hospitaliers publics. Qu'en est-il advenu? En 2005, du moment où l'examen était prescrit et le moment où l'examen était passé: 63 jours. En 2008, trois ans seulement plus tard, ce délai-là est descendu à 42 jours. Donc, là aussi, la preuve est faite que, dans le réseau public, on peut régler les listes d'attente. Donc, pour le SISP, il faut viser à mettre fin à la pratique mixte, il faut aussi restaurer la couverture publique de tous les examens médicalement requis.
La mesure transitoire. Le projet de loi n° 34 vient autoriser la pratique mixte pour certains médecins qui pratiquent déjà dans des cliniques de médecins non participants. Or, on sait très bien ici que ces médecins-là, aujourd'hui, pratiquent avec des bénéficiaires non résidents du Québec, alors que le projet de loi n° 34 vient dire qu'ils vont pouvoir soigner tout patient québécois qui veut bien payer à l'intérieur de cette clinique-là, et tous les traitements prévus au règlement sont visés par ça. Donc, quant à nous, c'est une porte qui vient de s'ouvrir sur la pratique mixte, et il s'agit là d'un précédent inacceptable.
Nous serons, en conclusion, toujours à la défense de ce système public, géré, financé publiquement, et c'est au coeur des préoccupations des organisations que nous représentons aujourd'hui. Malgré les imperfections de ce système de santé, les solutions publiques peuvent être appliquées. Nous nous sommes opposés dès le départ au projet de loi n° 33, à l'époque, parce que, pour nous, c'était la marchandisation de la santé, ce qui est toujours le cas. On s'est élevés contre le règlement, le premier, identifiant les 50 chirurgies parce que, pour nous, c'était le fond de commerce des CMS, parce que, la cataracte, le genou et la hanche, le volume n'est pas assez grand, ce n'est pas payant. Maintenant, avec un règlement de 55 chirurgies, ça devient payant, c'est intéressant, donc c'est rentable.
Le projet de loi n° 34 a des renforcements qu'on a soulignés et qu'on doit encore souligner, mais il procède à un maquillage, quant à nous. La direction vers la privatisation des soins de santé est indéniable, malgré ce projet de loi. Dans les années soixante, nos parents ont fait le choix d'un système de santé universel, accessible à tout le monde. Il est temps, je pense, aujourd'hui, de réaffirmer les choix de nos parents. Merci.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. On va passer maintenant à la période d'échange avec les membres de la commission. Peut-être deux blocs de 30 minutes, un de chaque côté de la table, en commençant avec le ministre de la Santé et Services sociaux et député de Jean-Talon. M. le ministre, la parole est à vous.
n(16 h 40)nM. Bolduc: Merci de votre présentation. Il y a beaucoup d'éléments qu'on a déjà discutés puis qu'on a déjà partagés à certaines tables de discussion, puis je pense qu'on est pas mal au niveau des mêmes valeurs. Mais je crois encore plus que vous autres dans le système public. Parce que, vous autres, vous pensez que le système privé peut, à un moment donné, venir mettre à risque le système public. Moi, je suis de ceux qui sont convaincus qu'à l'intérieur du système public on peut donner pratiquement tous les services. Donc, c'est pour ça que j'ai moins de craintes par rapport au privé. Et ma solution, c'est justement de renforcer le système public.
Puis déjà j'avais entendu vos commentaires à la radio à laquelle je passais à une émission après. 92 % des patients sont opérés à l'intérieur de six mois et 80 % sont opérés à l'intérieur de trois mois. En radio-oncologie, parfaitement raison, vous vous êtes trompée un peu dans le chiffre, ce n'est plus 95 %, c'est 97 % qui sont traités à l'intérieur de quatre semaines, et puis on a vraiment eu un succès incroyable à ce niveau-là. Au niveau de la cardiologie tertiaire, on n'a plus de liste d'attente des patients qui sont en attente d'angiographie, de dilatation ou de pontage. Les listes d'attente sont minimes. Ce qu'on veut dire, c'est que, quand on gère bien nos choses, on est capables d'avoir des excellents résultats dans le système public.
Donc, pour moi, le système privé, il peut y avoir un partage, une certaine collaboration avec le système privé, mais je crois qu'on demeure dans le public. Et, où il faut voir, il faut... C'est important de penser qu'il peut y avoir du système privé, il y a des chirurgies qu'on ne fera jamais dans le système public. La chirurgie esthétique, on ne fera pas ça dans le système public, et ça nous prend des cliniques pour être capables de le faire dans le privé avec des gens qui vont s'occuper de cette partie-là de la médecine, dans laquelle on respecte les gens par rapport à ça.
Le projet de loi n° 34, c'est d'abord un encadrement dans un but de qualité et de sécurité. Puis on se rappelle l'histoire, c'était lors du décès de Mme Charest, on s'est rendu compte que des cliniques pouvaient ouvrir... n'importe qui pouvait ouvrir une clinique pour à peu près n'importe quoi, il n'y avait aucun contrôle. Donc, on a décidé de mettre un encadrement. Donc, c'est déjà un plus par rapport à ce qu'il y avait auparavant.
Pour ce qu'il s'agit de la question de l'exploitation, on pense qu'on a pas mal fermé les portes à des grosses compagnies américaines, européennes qui viendraient, qui voudraient prendre le contrôle de nos cliniques médicales. La façon de le faire, puis je ne vous dis pas que c'est parfait, mais, à un moment donné, si on voyait qu'il y avait des choses qui se passeraient qui ne seraient pas correctes, on pourrait toujours remodifier la loi. Ce qui est plaisant lorsque tu es le législateur, c'est que, s'il y a quelque chose qui ne fait pas ton affaire ou tu penses que ça devrait être mieux, tu peux modifier la loi. Puis, ça, je suis un de ceux qui disent: Si on voyait, à un moment donné, qu'il y avait un contrôle qui ne serait pas correct, on devrait la modifier. Mais ce qu'on veut, c'est que la majorité des actions, au moins 51 %, soient possédées par les professionnels qui pratiquent, et après ça laissons à d'autres gens peut-être de pouvoir s'associer.
Quand on parlait des lits ? peut-être pour liquider ça ? inutile de vous dire que, si on voulait nous jouer une entourloupette de construire un genre de centre d'achats, puis mettre cinq lits, puis séparer ça par des petits corridors en disant que c'est tous des CMS différents, moi, je ne l'accepterais pas, puis on pourrait légiférer à ce moment-là puis changer les règles. C'est-à-dire que, si... Puis ça, c'est un avertissement qu'on donne aux gens du privé, là: si vous voulez passer à côté des règles qu'on s'est données de bonne foi, je pense qu'il faut que vous vous attendiez à ce qu'on puisse revenir à un moment donné et changer des choses.
Puis, moi, je suis d'accord avec vous autres, là, sur la question qu'il faut qu'on contrôle notre système nous autres mêmes. S'il y a du privé, il faut que ce soit contrôlé par les gens à l'interne, c'est-à-dire les professionnels eux autres mêmes. Ce qu'il ne faut pas oublier également, c'est qu'on s'est donné des règles, des règles de qualité. Il doit y avoir un directeur médical, donc quelqu'un qui est responsable de la qualité à l'intérieur de la clinique elle-même.
On va discuter immédiatement de la question des centres des femmes. Je suis le premier à ne pas vouloir limiter l'accessibilité des arrêts de grossesse au Québec, et on va trouver une façon de façon à ce qu'ils n'auront pas nécessairement besoin de répondre aux mêmes critères en termes de propriété puis on va s'organiser pour les rendre autonomes et garder la même chose.
Il y a un endroit que je ne ferai pas de compromis: ils vont être soumis aux mêmes règles de qualité et de sécurité. Hein, vous avez connu, vous avez tous entendu parler de l'époque que les arrêts de grossesse se faisaient dans des conditions peu acceptables. Et je trouverais inacceptable qu'on accepte, pour des arrêts de grossesse, des choses qu'on n'accepterait pas pour une chirurgie mineure. Ça fait que, pour moi, il y a l'élément qualité-sécurité auquel tout le monde va devoir répondre. Ce sera possible d'avoir... Ça va être exigé qu'il y ait un directeur médical également pour s'assurer que le contexte sécuritaire soit là.
Mais on va s'organiser pour ne pas qu'ils soient soumis aux mêmes règles, c'est-à-dire, la question de la possession, ça, je peux... ça, je vous en fais la... je donne ma parole qu'on ne veut pas limiter l'accès là-dessus. Et puis ce qu'on veut juste, c'est que ça se fasse dans un bon contexte et de permettre à ces organismes-là de continuer à faire le bon travail qu'ils font actuellement. Et, quant à moi, si on peut améliorer l'accessibilité des arrêts de grossesse au Québec... C'est un choix de la femme, c'est un choix qu'on veut respecter, et, à ce moment-là, on va s'organiser pour rendre le service accessible. Pour moi, ça, c'est un acquis. Qu'est-ce que vous en pensez de ce que je viens de vous dire là par rapport aux règles qu'on se donne?
Le Président (M. Kelley): Mme Bonamie.
Mme Bonamie (Lina): C'est parce que votre message, quant à moi, est ambigu, M. le ministre: un réseau public fort, contrôlé par les gens à l'interne, et puis vous envoyez 55 chirurgies en CMS. Une hystérectomie, là, je n'appelle plus ça une intervention mineure, moi, je regrette. Ce n'est peut-être pas aussi dramatique qu'il y a 75 ans, mais, quant à moi, ce n'est pas mineur. Une chirurgie bariatrique, ce n'est pas mineur. Et on envoie ça dans des cliniques médicales spécialisées.
C'est là-dessus, M. le ministre, quant à moi, que votre message, il est ambigu. Vous auriez pu, vous aussi, faire le choix de dire: La chirurgie esthétique qui comprend telle, telle, telle intervention sera en clinique privée, mais tout le restant demeure au réseau public, là où on a l'équipement nécessaire pour intervenir lorsqu'il y a des complications.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Bolduc: Là-dessus, un, je l'ai dit précédemment, puis je pense que vous étiez présents, il y a 55 chirurgies... 53 ou 55 chirurgies, ce sont des chirurgies qui se font déjà en clinique. On n'en a pas rajouté, c'est les mêmes chirurgies qui se font déjà, que maintenant on a balisées. Ce qu'on a fait, on a éliminé la clause pour dire, à un moment donné, «tout autre type de chirurgie», on l'a complètement enlevée, de façon à ce que, si quelqu'un voulait qu'on... si on voulait rajouter, il y a un processus qu'il faudrait faire puis il faudrait y aller au niveau de la réglementation ou par... au niveau de la réglementation. Ce ne sera pas au niveau du ministre, ça va être au niveau du Conseil des ministres, pour qu'il y ait une discussion qui soit tout à fait adéquate. Mais on n'a pas rajouté de chirurgie, c'est toujours... c'est le même type de chirurgie qu'on fait.
Un autre élément qu'on vient de me dire, c'est que l'hystérectomie n'est pas dans la liste. Ça fait que c'est déjà enlevé. Ça fait qu'on est chanceux.
Mme Bonamie (Lina): Oui, mais la chirurgie bariatrique?
M. Bolduc: La chirurgie bariatrique, il y a deux types de chirurgie bariatrique. Il y a la chirurgie bariatrique par dérivation, qui ne se fera pas dans des cliniques privées, à ma connaissance, parce que c'est une chirurgie majeure. La chirurgie via la bande, c'est une chirurgie qui peut facilement se faire en clinique privée, c'est une chirurgie qui est mineure et puis que le patient, il n'a pas de problème à l'avoir. De toute façon, ça se fait déjà dans des cliniques à Montréal. Donc, pour moi, c'est les deux types de chirurgie. Celle que je vois qui peut très bien se faire, c'est celle-là par la bande, et puis je pense que tout le monde peut reconnaître que ce n'est pas plus de risques que d'autres types de chirurgie mineure.
Puis, par ailleurs, pour l'hystérectomie, c'est la notion que j'avais aussi, c'est que ça ne fait pas partie de notre liste. Ça fait qu'on vous a satisfait au moins à une demande, ça va bien.
Mme Bonamie (Lina): Mon Dieu! Mais continuez, on est bien partis, là.
M. Drainville: M. le Président, c'est un rappel au règlement, là. Chirurgie gynécologique, le point 9.8: hystérectomie vaginale simple.
M. Bolduc: Ah! O.K.
Le Président (M. Kelley): Non, mais...
Une voix: ...
M. Bolduc: Ah! bien, c'est possible. Parce que la vaginale... Encore là, il y a deux types de chirurgie: il y a la vaginale et l'abdominale. Mais on va le regarder. Peut-être que je ne la retirerai pas si elle est déjà prévue là.
Mme Bonamie (Lina): Ah, mais vous avez dit qu'elle n'était plus là. Tout le monde... Il y a des témoins aujourd'hui, M. Bolduc, là.
M. Bolduc: L'abdominale totale ne sera plus là. La vaginale, on va le regarder.
L'autre élément que j'aimerais faire une mention, le projet de loi, il comprend les laboratoires d'imagerie médicale et la chirurgie, mais, pour moi, c'est deux niveaux différents. Parce qu'on a des notions pour la question des CMS qui sont mis en place, il y a des règles particulières. L'imagerie médicale, comme de fait, historiquement au Québec, on a une certaine mixité. Et puis ce que tous m'ont décrit comme problèmes, on le voit, et on va devoir résoudre des choses après l'adoption de ce projet de loi, puis on ne veut pas régler ça en même temps. Juste pour vous donner un exemple, demain matin, si on fermait les cliniques privées au Québec ou qu'on essayait même de les nationaliser, on partirait probablement une guerre et probablement qu'on s'embarquerait dans un dossier dans lequel on n'en finirait pas.
Ce qui est important, c'est d'abord d'avoir une cohabitation. Et je suis très sensible, très, très sensible à la notion que parfois les gens qui pratiquent dans le privé nous créent une pénurie dans le public, qui fait que les listes d'attente augmentent et on est obligés d'aller dans le privé. Ça, c'est un dossier qu'on regarde actuellement au niveau de la radiologie. Mais il faut d'abord avoir la liste exacte, c'est quoi, la liste d'attente, ce que nous sommes en train de créer. Et, comme vous avez dit, le Dr Bureau travaille là-dessus, on veut un plan d'intervention en radiologie pour rendre les examens disponibles dans des délais raisonnables et actuellement on a besoin d'avoir la collaboration des cliniques privées parce que le système public ne serait pas capable de tous les faire, parce que, même si on voulait mettre des appareils partout, on ne sera pas capables de le faire. Donc, il y a quand même une question de notion du besoin du patient à laquelle il faut qu'on réponde actuellement. Il faut qu'on ait une cohabitation.
Mais j'ai l'impression que, si on fait une meilleure mesure, on va peut-être être capables d'orienter les patients à la bonne place et diminuer nos listes d'attente. Le modèle qu'on veut suivre, c'est celui de la chirurgie, où on a atteint quand même un résultat quand même assez exceptionnel, que 92 % sont opérés à l'intérieur de six mois, et je suis à peu près sûr qu'on peut faire encore mieux que ça. Puis même, en termes de délai, nous autres, notre notion, c'est: l'idéal, ce serait à l'intérieur de trois mois que la majorité des gens soient opérés.
C'est juste pour vous dire qu'on a les mêmes intentions, mais, pour les moyens, avec le projet de loi, on ne peut pas procéder là-dessus parce que ça nous amènerait des problèmes. Et le projet de loi est important parce qu'il répond à une question d'encadrement des CMS puis un encadrement aussi au niveau des cliniques de radiologie. Puis, pour moi, ça, c'est important. Le principe du guichet unique en radiologie où on sache exactement où sont tous les examens, c'est quoi, les demandes, c'est quoi, la capacité de chacun des centres, ça, il faut qu'on le mette en place. Mais ça ne fait pas partie du projet de loi, c'est vraiment au niveau gestion interne du ministère, des agences et des établissements qu'on peut le faire.
n(16 h 50)n.Une voix: ...
M. Bolduc: Oui, allez-y.
Le Président (M. Kelley): Mme Bonamie.
Mme Bonamie (Lina): L'esprit de la loi n° 33, c'était d'intervenir là où les listes d'attente étaient déraisonnables. Nommez-moi une chirurgie, dans votre liste de 55, où le délai d'attente est déraisonnable. S'il vous plaît, indiquez-moi.
M. Bolduc: Bien, moi, ce que j'ai connu de 33 ? puis j'ai présenté en commission parlementaire sur 33 ? c'était de se donner des alternatives dans lesquelles on pouvait offrir certains types de chirurgie, et puis, dans 33, il fallait baliser des chirurgies qui se faisaient en clinique privée puis offrir la possibilité de le faire.
Où il faut faire une notion qui est différente, puis on va prendre un exemple: la cataracte. Il y a deux, trois affaires qui... Moi, je ne veux pas mélanger. La première chose, la cataracte fait partie de la liste, donc peut être faite en privé ou en public. Quand on dit qu'elle peut être faite en privé, la personne qui va l'avoir en privé... à moins d'avoir une entente avec un établissement que, moi, je certifierais correct, ce que je n'ai pas accepté, comme vous avez pu voir, et que je n'ai pas l'intention d'accepter sauf si on était dans un contexte particulier vraiment de grande pénurie puis je n'aurais pas le choix pour le service aux patients, c'est que le patient doit payer. Donc, son choix, c'est de payer de sa poche 1 000 $ et 2 000 $ pour avoir sa chirurgie parce qu'il veut l'avoir très rapidement.
Moi, ce que je me donne comme obligation, c'est de l'offrir dans le public à l'intérieur d'un délai raisonnable, qu'on estime à six mois. Et, si tout le monde est offert à l'intérieur de six mois, si quelqu'un décide, plutôt que d'aller dans un voyage à l'extérieur, de prendre de l'argent de sa poche pour se le payer dans le privé, ça devient son choix personnel. Et la notion du projet de loi n° 34, c'est également d'offrir aux Québécois la possibilité de faire un choix si eux autres ne veulent pas faire affaire avec le public, et ces 55 chirurgies là sont possibles.
Parce que l'autre élément, qui est le troisième élément, ce serait de dire, puis ça, c'est le principe de Rockland: Un établissement n'est pas capable d'offrir le service, et on pense qu'on va faire une entente avec une clinique privée où on va contracter des chirurgies avec la clinique privée mais payées par le public. Ça, on s'en est déjà parlé, je ne suis pas très chaud à ça. La condition dans laquelle, je pense, ça pourrait être acceptable, et il faut la garder, cette condition-là, pour le moment, c'est que, si le public n'est pas capable de faire le travail, il faudrait qu'on soit capables de contracter temporairement un certain nombre de chirurgies à l'intérieur des cliniques, pas pour les docteurs, pour que les patients soient opérés dans un délai raisonnable. Puis, pour moi, c'est ça, l'enjeu qu'on est en train de faire.
L'autre chose qui est intéressante, en sachant que cette possibilité-là existe, ça veut dire qu'au niveau du public, et je suis un des partisans de ça, en utilisant les meilleures techniques de management, et le groupe auparavant avait dit que le «lean» faisait partie des meilleures techniques de management, et je suis certain que vous allez être d'accord avec ça, comme étant des gestionnaires éprouvés, je l'ai expliqué aux députés de l'opposition que c'est absolument vrai... à ce moment-là, par les meilleures techniques de management, s'assurer que notre système public est capable de faire le travail. Et, moi, je suis convaincu que le public est capable de faire le travail. Comme je l'ai dit ce matin, la performance, ce n'est pas privé, ce n'est pas public, c'est une question de processus, de qualité des gens et puis d'organisation du travail. Puis ça, je pense qu'on partage le même avis. Est-ce que c'est vrai?
Le Président (M. Kelley): Mme Bonamie.
Mme Bonamie (Lina): Que le réseau public a les solutions?
M. Bolduc: Oui.
Mme Bonamie (Lina): Certainement. Ça, on partage ça.
M. Bolduc: Une meilleure pratique de gestion, y compris le «lean management», pour les appliquer.
Mme Bonamie (Lina): On peut les améliorer encore un peu, il y a de la place à amélioration, mais nous sommes d'accord que le réseau public a les solutions.
M. Bolduc: Excellent.
Mme Chabot (Louise): Oui, bien, je suis assez d'accord avec ma collègue que le discours est très ambigu quand on entend que le gouvernement croit en un système de santé et de services sociaux public fort puis, en même temps, qu'on s'évertue, par des projets de loi, des règlements, à venir consacrer le privé comme étant un modèle pour répondre à nos soins de santé.
Je vous rappellerais ? puis vous allez le retrouver dans le mémoire du SISP ? qu'autour des années quatre-vingt-dix, en tout cas, toutes les vertus pour les chirurgies moins lourdes, pour désengorger les lits de courte durée, il y avait des projets à l'époque, même qui étaient presque à terme, de centres ambulatoires publics. Puis la question a été posée même durant le projet de loi n° 33: Oui, il y a des vertus à alléger des fois nos hôpitaux, mais pourquoi pas des centres ambulatoires publics? Pourquoi faut-il absolument que ce soit privé?
Et, moi, la formule de dire «ceux qui ont les moyens de payer», bien ça, c'est du «fast track». Ça veut dire que tu développes un système ? puis ça, ça existe dans toutes sortes de domaines ? où ceux qui ont les moyens... il y a deux listes: il y a une liste pour ceux qui ne l'ont pas, puis... Puis ça, je pense que ça vient déroger fondamentalement au principe d'universalité. On est tellement convaincus de vos exemples qu'on peut faire bien dans le public, pourquoi ne pas se servir de ces exemples-là puis investir les sommes d'argent nécessaires pour, dans le fond, aller plus loin?
C'est vrai que votre projet de loi encadre mieux ce qui est privé, mais ce n'est pas parce qu'il l'encadre mieux que ça vient faire en sorte qu'on peut être en faveur que c'est légitime que ce soit dans le privé. On a fait un choix différent au Québec. Il me semble que les moyens qu'on doit poursuivre, c'est de le renforcer pour vrai en donnant des moyens au secteur public. Vous savez, la résonance magnétique, là, c'est inaccessible, en général, dans le secteur public, en tout cas à Montréal, là. Moi, mon fils, on lui a dit qu'il devrait passer ça pour diagnostiquer puis ils lui ont donné immédiatement la liste des cliniques privées, avec des coûts faramineux. Il n'a même pas d'assurance, ça fait qu'il a fait d'autres choix, là.
M. Bolduc: J'ai une expérience qui est différente, là, puis ça rentre dans le domaine personnel. Il y a quelqu'un que je connais très, très bien qu'on lui a offert la possibilité d'aller à une résonance magnétique, et puis, quand la personne a téléphoné, il a fallu qu'elle téléphone à plusieurs endroits, mais elle l'a eu à l'intérieur de trois semaines dans le réseau public de Québec.
Mais au début les gens ne sont pas capables de donner des délais. Je vous dirais qu'il y a une amélioration de la gestion à faire. Et puis notre offre au niveau des résonances magnétiques ? un exemple ? a beaucoup augmenté, et on pense qu'actuellement on va être capables de suffire à la demande dans un bref délai. Mais il a fallu installer des résonances magnétiques, comme il a fallu installer des TEP. Puis ça, en passant, c'est notre gouvernement qui a investi énormément dans ces technologies-là pour justement être capable, que le public soit capable d'offrir le service.
Pour ce qu'il s'agit de la philosophie, il y a deux notions, puis je pense que c'est important de se les dire: il y a ce qu'on appelle la prestation publique, paiement public; prestation privée, paiement privé. Et puis, à un moment donné, c'est intéressant, comme système de santé, qu'on puisse avoir des alternatives au niveau du paiement public. Je crois encore que la majorité devrait toute se faire dans le système public, mais, quand le système public parfois a de la difficulté à faire ou quand, à un moment donné, on pourrait avoir... puis à la limite ? je vous mets une hypothèse ? qu'on aura un problème de performance pour quelle que soit la raison, il faut qu'on soit capables d'avoir une alternative. Ce n'est pas un modèle, c'est une alternative dans laquelle je pourrais envoyer mes patients dans un autre endroit où c'est peut-être une prestation privée, mais c'est un paiement public. Et je sais que vous n'êtes pas d'accord avec ça. Mais, comme gestionnaire, il n'y a rien de pire que le monopole. Au même titre que, si vous aviez juste des entreprises privées qui ont le monopole, on n'aurait pas l'élément émulation ? je ne veux pas parler de compétition, d'émulation ? pour qu'à la fin notre système de santé soit le plus performant possible.
Juste un exemple. Rockland a eu un avantage ? puis je ne vous dis pas qu'il n'y avait pas eu des projets avant ? Rockland a réveillé des gens en disant: Il faut qu'on devienne performants et qu'on ait les meilleures pratiques dans nos institutions. Et on est capables, dans le public, d'avoir des aussi bonnes pratiques que dans le privé, et le privé d'avoir des aussi bonnes pratiques que dans le public. Après, là, c'est un choix de société à faire. Le choix qu'on a fait comme gouvernement, nous autres, c'est de favoriser notre système public mais de se garder des alternatives au cas où. Je voudrais juste vous... Oui, oui, oui.
Mme Verreault (Dominique): Si vous me permettez, Dr Bolduc, j'aimerais revenir sur la question des laboratoires d'imagerie médicale en lien avec votre propos sur les monopoles. Vous avez, tout à l'heure... Et on a fait l'exposé qu'en radio-oncologie, entre autres, c'est un succès ou que ça a été un succès, au Québec, la façon de diminuer les listes d'attente. Et vous avez abordé la question des chirurgies tertiaires en cardiologie, qui est un autre bel exemple d'un succès public où il n'y avait pas de monopole, justement.
Et notre prétention, nous autres, est justement à l'effet que le fait qu'il n'y ait pas de monopole, ça force toutes les parties à trouver des solutions publiques qui répondent à l'ensemble de la population, alors que, dès qu'on a le privé... Puis, dans le cas des laboratoires de radiologie, c'est un bel exemple, c'est le même radiologiste qui détient une clinique privée de l'autre côté de la rue. C'est quoi, l'intérêt qu'il a de rester dans le système public pour offrir une prestation de services plus large à la population pendant qu'il a une clinique privée où il doit payer du personnel, des locaux et de l'équipement et qu'il doit rentabiliser tout cela?
Alors, on a, je trouve, un bel exemple là de succès qui ont été faits dans le réseau public. La radio-oncologie, c'est un excellent exemple où les parties impliquées ont été mises à profit. Et je vous dirais que, du côté de l'imagerie médicale, oui, effectivement, ça fait longtemps malheureusement que cette mixité-là existe. Je vous dirais que, moi, quand j'ai commencé ma carrière, ça n'existait pas, c'est arrivé avec les superspécialités, avec les équipements très coûteux, et malheureusement ça fait en sorte que... Je pense que je répète ce que mes collègues ont dit, mais c'est important de le dire, ça fait en sorte qu'une certaine population ne peut pas se permettre d'aller dans le privé et doit attendre sur des listes d'attente.
Il y a des anecdotes. Nous, on a fait une petite enquête ? on les représente, les gens qui travaillent en radiologie au Québec, au sein du SISP ? et une enquête qui n'est pas un sondage CROP mais qui quand même donne des résultats, sur les examens payants dans les cliniques privées, échographie, mammographie dans certains cas, résonance magnétique, scan. Et, quand on parle de délais de sept à huit mois, quand on parle de plus de un an, ce n'est pas évident pour la population de faire ce choix-là quand il s'agit de notre santé et qu'on a des inquiétudes.
n(17 heures)n Et, en même temps, je vous dirais que le réseau n'est pas si simple à comprendre pour M. et Mme Tout-le-monde. Alors, quand on sort de chez le médecin et qu'on se fait dire: Bien, regarde, si tu veux le passer rapidement, appelle dans ces cliniques-là. Bien, c'est sûr que c'est la solution que les gens utilisent parce que commencer à faire des appels dans tous les CH publics autour de chez vous pour savoir lequel pourrait te prendre plus rapidement, ce n'est pas nécessairement ce que les gens connaissent et savent utiliser. Alors, je pense qu'il y a une question aussi d'informer le public de ce que le réseau public peut faire, mais également il faut qu'il y ait une volonté politique.
Puis, dans le cas des chirurgies cardiaques tertiaires, dans la radio-oncologie, il y a eu une volonté. Il n'y avait pas de compétition avec le privé. On a été forcés de s'asseoir et de les trouver, les solutions, et on les trouvées, on en a fait la preuve. Alors, je pense que, s'il y a une volonté et si on fait en sorte d'éliminer la compétition, une compétition qui est malsaine parce qu'elle est fondée sur une question de bénéfices financiers, bien je pense qu'on va réussir à faire en sorte que la population du Québec soit mieux traitée, mieux soignée, plus rapidement.
Puis on est conscients que le réseau public a aussi à s'améliorer. Puis je vous dirais que les organisations qui sont ici présentes sont prêtes à s'asseoir pour le faire. Mais il faut avoir un vis-à-vis pour le faire. Puis d'ailleurs j'attends toujours que vous m'invitiez à aller vous rencontrer. M. Drainville, le 22 avril, vous a posé la question. Vous avez dit oui. On est au 26 mai, et j'attends toujours une réponse positive de votre part. On pourra parler plus longuement, notamment des laboratoires de radiologie privés.
M. Bolduc: Dès que M. Drainville cesse d'accaparer mon temps, là, je vous assure qu'on va vous voir.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bolduc: Et puis, en passant, merci, là, au nom de notre gouvernement, parce que je pense que vous faites la reconnaissance des beaux succès qu'on a eus, là, dans différents secteurs. Moi, je pense que, la cardiologie tertiaire, la radio-oncologie, on a fait un travail strictement extraordinaire, avec des beaux résultats, reconnus par tout le monde. La chirurgie, quant à moi, est un succès également. Parce qu'il y a encore un peu d'amélioration à aller chercher. On est en train de le faire.
Et, le prochain grand chantier, on va le faire au niveau de justement l'imagerie médicale, mais peut-être que le modèle va être différent des autres. Ce qui est important à la fin, puis il faut le reconnaître, il faut une bonne collaboration des gens qui travaillent dans le public pour diminuer nos listes d'attente. Il y a une volonté politique à ce que les patients reçoivent le bon service. Peut-être que le modèle peut être un peu différent parce qu'il y a un historique, compte tenu des cliniques de radiologie, puis, même si demain matin je disais: On ne fait plus d'examen dans les cliniques de radiologie, on aurait un autre problème. Mais je pense qu'on peut trouver une voie de passage avec votre collaboration, puis, au nom de notre gouvernement, on vous invite également à cette collaboration-là.
Puis, dès que j'en ai fini avec M. Drainville, là, je vais m'occuper de vous, vous allez voir.
Une voix: ...
M. Bolduc: L'autre... Oui?
M. Drainville: Ce n'est pas demain la veille.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bolduc: Juste une remarque, là. Il a un feu sauvage. Je n'ai pas l'intention d'avoir de feu sauvage d'ici la fin de nos affaires.
L'autre élément qui est important, puis je veux juste vous expliquer le pourquoi ? je ne vous demande pas d'être d'accord, mais le pourquoi ? quand on est arrivés dans la question des clauses grand-père pour les anesthésistes dans les CMS... on a décidé d'accorder des clauses grand-père à des anesthésistes dans les CMS, la raison est très simple: s'ils font le choix, ils vont rester dans le système privé, et à ce moment-là, moi, j'en ai besoin également temporairement dans le système public. Ce sont tous des anesthésistes d'un certain âge qui on sait qu'au cours des prochaines années vont probablement être appelés à arrêter de pratiquer. Les nouveaux ne pourront pas l'avoir, mais pour eux autres on a décidé de le faire parce que tout simplement que ces gens-là auraient probablement fait le choix de rester dans le privé, et j'aurais eu une découverture dans mes institutions publiques, et c'était juste d'être très pragmatique.
Mais, si vous regardez à court terme ou à moyen terme, c'est une clause qui va disparaître parce que les gens vont finir par arrêter. C'est la logique qu'il y a en arrière de ça, et ça ne touche seulement que quelques personnes. Je pense qu'on ne les compte même pas sur les 10...
Une voix: ...moins de 10.
M. Bolduc: C'est moins de 10 personnes. Donc, c'est la raison pour laquelle on a fait ça. Et puis, dans la vie, vous savez, pour réussir à passer quelque chose qui a du bon sens, il faut parfois accepter quelques compromis, en autant qu'à court ou moyen terme on réussisse à atteindre nos objectifs. Puis je pense que c'est la raison là-dessus. Je ne sais pas si vous auriez d'autres commentaires?
Une voix: ...
Le Président (M. Kelley): Juste, pour les fins de l'enregistrement, de vous bien identifier, s'il vous plaît.
Mme Mercier (Lucie): Bonjour. Mon nom est Lucie Mercier. Je suis conseillère syndicale à la fédération, à la FIQ. Alors, j'aimerais revenir sur la question des alternatives, comme ça a été nommé. En fait, les alternatives, c'est de la concurrence, ça s'appelle de la concurrence dans un système de marché. Et, bon, on sait actuellement que l'Accord général sur le commerce des services prévoit une seule exception, c'est les services qui sont donnés dans l'exercice du pouvoir gouvernemental. Et il y a deux critères pour que ça tombe, en fait, pour que cette exception-là tombe, et entre autres c'est la présence de concurrence. Ça signifie concrètement qu'en développant des CMS de médecins non participants, c'est-à-dire des petits hôpitaux privés qui rentrent en concurrence avec les hôpitaux publics, la clause de l'exception du pouvoir gouvernemental saute, dans l'AGCS. On sait que les accords commerciaux, c'est des accords qui sont en négociation constante. Et, même si le Québec n'y est pas soumis actuellement, ça ne veut pas dire que dans le futur il ne sera pas soumis à cet accord-là. Et, si tel venait à être le cas, concrètement parlant, ça veut dire que le système public de santé ne serait plus protégé par cette clause-là d'exception. Merci.
M. Bolduc: Oui, c'est une notion qu'on m'a déjà expliquée. Je crois qu'avec notre projet de loi n° 34 on n'a pas trop à s'inquiéter parce que, un, les CMS, ce n'est pas des hôpitaux privés, ce sont des cliniques médicales spécialisées dans lesquelles on a une possibilité d'aller jusqu'à cinq lits. Puis, en mettant cette limite-là, je pense que ça va répondre également aux critères, là, des accords internationaux auxquels, je pense, nous sommes tous soumis actuellement.
Mme Mercier (Lucie): Me donnez-vous un droit de réplique?
M. Bolduc: Oui. Oui, oui, c'est la démocratie. Ici, c'est très démocratique.
Le Président (M. Kelley): Oui. Vous avez le droit de... Mme Mercier.
Mme Mercier (Lucie): Ça a beau s'appeler un CMS, mais, à partir du moment où il y a de l'hébergement, ça s'appelle aussi un hôpital, quant à moi.
Mme Bonamie (Lina): Ils sont hospitalisés. Hospitalisés... hébergement.
M. Bolduc: Je retiens votre commentaire.
Le Président (M. Kelley): Ça met fin à cet échange. Je suis prêt maintenant à céder la parole au député de Marie-Victorin, porte-parole de l'opposition officielle en matière de la santé.
M. Drainville: Merci, M. le Président. Alors, je retiens que le ministre a réitéré sa volonté de vous rencontrer, Mme Verreault. N'hésitez pas à me recontacter si jamais vous avez besoin d'aide. Ça me fait toujours plaisir d'aider les défenseurs du système public de santé contre un ministre qui parfois est dur de comprenure. Je dis ça en toute amitié, M. le Président.
Une voix: Est-ce que «comprenure» est français?
M. Drainville: Oui, et c'est très parlementaire en plus. D'abord, j'aimerais... Je vais poser cette question-là à chaque groupe qui va se présenter parce que je pense que ça pourrait être un amendement qui pourrait être fort intéressant, au projet de loi, et je ne désespère pas de convaincre le ministre de la santé de l'accepter. Est-ce que vous seriez en faveur pour qu'on modifie l'article 15.1 de la Loi sur l'assurance maladie pour que les chirurgies qui sont admissibles à l'assurance privée soient déterminées par un changement à la loi et non pas simplement par un changement réglementaire, comme c'est le cas actuellement? Seriez-vous favorables à un changement comme celui-là?
Parce que, comme vous le savez, en vertu de la loi n° 33, le ministre s'est donné le droit d'ajouter des chirurgies couvertes par l'assurance privée duplicative par simple proposition réglementaire. Tout ce qu'il a à faire, c'est le soumettre en commission parlementaire, on en discute ? bla, bla, bla ? puis il procède avec l'élargissement. Puis je pense que c'est une d'entre vous qui disiez que le projet de loi n° 34 pourrait ouvrir la voie à l'ajout d'autres chirurgies qui pourraient faire l'objet d'une assurance privée duplicative, étant offertes, bien entendu, dans les cabinets privés, comme le prévoit 34. Alors, je vous laisse répondre, Mme Bonamie. Et, s'il y en a d'autres qui veulent répondre, gênez-vous surtout pas.
Le Président (M. Kelley): Mme Bonamie.
Mme Bonamie (Lina): Oui, nous serions d'accord avec cette proposition-là. Ça permettrait d'avoir un vrai débat public sur ce qui doit être ajouté ou pas: Y a-t-il lieu d'avoir un ajout ou pas, contrairement à un simple règlement, que ce soit par le gouvernement ou que ce soit par le ministre seul? Parce que, vous savez, des fois, on peut faire confiance à un ministre, un peu moins à des conseils de ministres. Le ministre peut avoir un accident d'auto, des choses comme ça, peut ne pas être disponible pour convaincre ses collègues du conseil des ministres qu'il faut rajouter ou ne pas ajouter une chirurgie. Donc, en passant par la vraie loi législative, je pense que c'est préférable comme protection de notre système public et comme expression de citoyenne québécoise, bien sûr.
M. Drainville: Qu'est-ce que vous répondez au gouvernement? Parce que ça fait quelques fois que le ministre soulève cet argument-là. Je l'ai entendu de la part de Mme Verreault, je trouvais que c'était une très, très bonne réponse, mais j'aimerais vous entendre là-dessus, Mme Bonamie, et peut-être Mme Chabot pourrait y répondre également, quand il dit: L'avantage d'avoir RocklandMD ou un autre CMSA comme celui-là, à l'avenir, c'est, entre guillemets, de forcer les employés, ou obliger les employés du secteur public à se questionner, à se remettre en question, c'est une bonne façon d'amener une saine émulation ? c'est le mot qu'il utilise ? dans le secteur public, pour amener des améliorations, susciter des discussions sur la réorganisation des soins. Bref, le privé, c'est bon parce que ça crée une espèce de concurrence qui vous oblige à vous améliorer et à travailler plus fort pour améliorer le système public de santé.
n(17 h 10)nMme Bonamie (Lina): Bon, moi, j'ai des bémols par rapport à ça. Écoutez, l'exemple n'est pas parfait, mais on connaît, au Québec... je n'emploierai pas le mot «exode» parce que ce serait trop fort, mais on sent une grande tendance, du côté des soins infirmiers, infirmières, infirmières auxiliaires, à aller vers les agences privées. Ça ne fait pas en sorte que les infirmières du public sont plus ou moins bonnes. Il n'y en a pas là, ce n'est pas là-dessus.
Et ma deuxième réserve, c'est: moi, j'aimerais que quelqu'un un jour puisse m'expliquer, parce que je n'arrive pas à comprendre, quelle est la recette qui est utilisée au privé qu'on n'est vraiment pas en mesure de mettre dans le système public puis qu'on n'arrive pas... Expliquez-nous-la, la recette, on va la mettre dans le réseau public. Comment se fait-il que la survie du réseau passe par le privé? Il y a une recette, là? Dites-nous-la, on va l'appliquer dans notre réseau. Il n'y a personne qui est capable de m'établir cette recette-là, personne.
Alors, le réseau public a des défauts, oui, mais est capable de mettre des solutions publiques. On en a donné des exemples dans notre mémoire puis on en a des exemples dans d'autres pays du monde aussi. Je veux dire, ils ne sont pas tous privé-privé, là, partout ailleurs, hein, puis ça fonctionne aussi. Et, là où il y a du privé... plus il y a de privé, plus ça coûte cher, et c'est prouvé partout. Plus il y a une présence du privé dans le système de santé, plus c'est dispendieux per capita.
M. Drainville: Oui, puis, quand je l'entends utiliser cet argument-là, juste avant de vous laisser la parole, Mme Chabot... C'est bien Chabot? Oui, c'est ça? Merci. Évidemment, quand j'entends le ministre parler comme ça, je l'entends dire... d'un côté, il dit: Bon, on verra si on va effectivement reconduire l'entente avec RocklandMD ou avec une autre clinique privée parce qu'ils sont allés en appel d'offres, il dit: Écoutez, je ne suis pas sûr encore que je vais permettre la reconduction de l'entente avec Sacré-Coeur, le transfert au privé de certaines chirurgies, je vais voir le coût, les conditions, etc., et rajouter, quelques phrases plus tard: Mais c'est une bien bonne affaire d'avoir des cliniques privées parce que ça force le secteur public à s'améliorer, bien là j'ai l'impression de l'entendre dire un peu malgré lui que sa décision, elle est prise, qu'il a l'intention d'aller de l'avant avec ce genre d'entente là parce qu'il y voit des avantages dans ses relations avec le secteur public et les employés du secteur public. Mme Chabot.
Mme Chabot (Louise): Bien, moi, je trouve au contraire que ça décourage le secteur public parce qu'on laisse croire au secteur public que ses failles, seul le privé peut les combler. Puis on est en mesure d'observer, par rapport à la désertion, là, de certains... du personnel, que justement c'est en raison de mauvaises conditions dans le public qu'il y a des gens qui pensent à sortir. Ça fait qu'on crée tout à fait le contraire. Puis je pense qu'on ne vient pas dire aux acteurs publics...
Parce que, là, on parle du service de santé et de services sociaux au Québec au même titre qu'on pourrait parler de l'éducation. On parle de services publics, là, qui viennent enrichir la population québécoise en termes de démocratie, en termes de richesse au plan social, et je pense que, dans ces réseaux-là, il faut encourager justement les pratiques qui vont venir favoriser un système public fort. Puis je ne pense pas que le privé contribue à ça, au contraire. On leur dit: On peut faire mieux, et on prive en même temps qu'on investit. Parce qu'on investit, là, quand on décide que c'est le privé qui prend la charge. On décide qu'il y a des ressources humaines qui s'investissent là-dedans, on décide aussi, par des subventions ou d'autres paiements, que ce soit là-dedans. Ça fait qu'on n'y croit pas du tout.
M. Drainville: Mme Verreault.
Mme Verreault (Dominique): Bien oui, j'aimerais ça...
M. Drainville: Bien, vous avez répondu à ma question, mais on va aller plus loin, si vous le permettez. Moi, j'aimerais bien vous entendre sur les solutions publiques qui nous permettraient de diminuer les listes d'attente en radiologie, premièrement. Deuxièmement, je voudrais vous demander si vous avez évalué les coûts de cette idée qui a été évoquée précédemment aujourd'hui, de carrément mettre la radiologie, l'imagerie médicale dans le panier de services. Je ne sais pas si vous avez... Comme vous avez beaucoup de technologues qui sont membres de votre syndicat, peut-être est-ce une évaluation que vous avez faite. Je serais très curieux de l'entendre si vous vous êtes penchées là-dessus. Mais d'abord sur les solutions publiques.
Le Président (M. Kelley): Mme Verreault.
Mme Verreault (Dominique): Puis je vais commencer en répondant quand même à votre première question parce que ça me tente d'y répondre aussi, sur un élément que mes consoeurs n'ont pas dit. C'est que, quand on compare aussi la performance du privé avec celle du public, on ne compare pas les mêmes choses parce que la clientèle qui va dans le privé, souvent c'est une clientèle plus légère, plus ambulatoire, moins malade que celle qu'on traite dans le public. Alors, les gros cas, ils restent à l'hôpital, si on peut le dire de même, alors que les cas plus légers s'en vont en clinique privée, que ce soit en chirurgie, que ce soit en radiologie ou dans d'autres domaines. Donc, on ne compare pas les mêmes choses. Et c'est sûr que, quand on regarde la performance, c'est très démotivant pour nos gens qui travaillent dans le public que d'entendre toujours que le privé fait mieux, alors qu'ils reçoivent souvent... Ce qui a mal été dans le privé revient au public, puis c'est eux autres qui les accueillent, ces gens-là.
Je ferme la parenthèse et je tente de répondre à votre question sur la question de comment le public peut faire mieux les choses. Bien, quand je me fais poser cette question-là, je réponds toujours avec le même exemple, de la radio-oncologie, parce que c'est l'exemple qui est tellement probant pour nous, c'est-à-dire qu'il faut écouter ce que les gens du terrain ont à dire parce qu'ils les ont, ces gens-là, les solutions, qui travaillent au quotidien dans le public. Il faut revoir l'organisation du travail, prolonger les heures d'accessibilité à certains services.
Quand on parle de résonance, de scan, écoutez, c'est sûr qu'un scan, au prix où ça coûte, une résonance, quand on ferme les portes à 6 heures le soir ou à 4 heures le soir puis qu'après ça on va faire du privé de l'autre bord de la rue, bien le scan, il n'est pas rentable, entre guillemets, pour le public au Québec. Ça prend, dans certains cas, pour ces examens-là, la présence du radiologiste. Alors, c'est sûr que, s'il est dans sa clinique privée l'autre bord de la rue, bien il n'est pas dans l'établissement de santé, puis on ne peut pas continuer les examens le soir. Alors, ça prend une réorganisation du travail.
Il y a évidemment, là, des solutions à regarder, un peu plus pointues, dépendamment des régions où on est. Moi, je vous dirais que, dans la petite enquête qu'on a faite, très maison, ce qu'on réalise, c'est que, dans les endroits où il n'y a pas de clinique privée de radiologie, d'imagerie médicale, dans le réseau public on s'organise pour répondre plus rapidement à la population. Je pense à l'Abitibi, je pense à certains coins dans le Bas-Saint-Laurent ou en Gaspésie. Il n'y a pas de clinique privée parce que ce n'est pas payant pour un radiologiste d'avoir une clinique privée, il n'y a pas le volume pour rentabiliser sa clinique. Alors, à ce moment-là, le médecin, il reste à l'hôpital. On a aussi des systèmes, maintenant, numériques qui permettent à un médecin, même dans sa maison, dans son sous-sol à Montréal, de lire des examens faits à Gaspé. Alors, il y en a, des solutions dans le public, il y en a plein, puis je suis convaincue que le Dr Bolduc les connaît. Il était à Alma, il a vu des choses là-bas, et je suis convaincue qu'il y en a plein, de beaux exemples. Alors...
M. Drainville: Partez-le pas sur Alma, madame, s'il vous plaît! Partez-le pas sur Alma!
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Verreault (Dominique): Non! Sur la question de l'évaluation des coûts, écoutez, on n'a pas fait... il est très difficile de faire cette évaluation-là. Probablement que les mieux placés sont les gens du ministère ou de la RAMQ qui paie pour les radiologues parce que, comme ces cliniques privées là, elles sont privées, on n'a pas accès aux états financiers, on n'a pas accès aux chiffres, aux données. Alors, quand on essaie de faire des analyses plus en profondeur pour être capables justement d'argumenter et d'étayer, je dirais, notre position, bien c'est difficile. J'entendais les médecins, là, qui nous ont précédées parler d'autour de 200, 220 millions. Vous savez que...
M. Drainville: Est-ce que ça vous semble... Pardonnez-moi. Est-ce que c'est une évaluation qui vous semble raisonnable, ça, 200, 220 millions?
Mme Verreault (Dominique): Oui, je pense que oui. Je pense que c'est un ordre de grandeur qui serait probablement assez juste, là, compte tenu du nombre d'examens qui se font dans le privé actuellement et pour lesquels les patients doivent payer.
Une voix: Dans le panier de services.
Mme Verreault (Dominique): Dans le panier de services. Pour les remettre dans le panier de services, les échos, les scans, les résonances, je pense que ça peut être de cet ordre de grandeur là.
M. Drainville: Et est-ce que vous avez... Ça vous semble un chiffre qui est raisonnable ou vraisemblable pour quelle raison? Parce que vous avez regardé ça vous-mêmes ou...
Mme Verreault (Dominique): Bien non, mais, quand on regarde le nombre de cliniques privées qui offrent ce genre de services là, là, de résonance, de scan, de mammo et d'échographie, et le volume qu'il peut y avoir dans ces cliniques-là, là... Écoutez, c'est vraiment, là, un ordre de grandeur, hein, parce que, comme je vous dis, on ne peut... c'est très difficile de faire cette analyse-là, compte tenu qu'on n'a pas de données, là.
M. Drainville: Si jamais, en tout cas, vous vous livrez à un exercice comme celui-là, je serais très intéressé à voir les résultats parce que ça pourrait nous aider à faire avancer certaines idées. Évidemment, c'est 200 à 250 millions si le volume reste le même, si le nombre de patients qui ont recours à ces services-là reste le même une fois que la radiologie, au sens large, là, est dans le panier de services, on s'entend là-dessus, là, hein?
Mme Verreault (Dominique): Oui, on s'entend là-dessus.
n(17 h 20)nM. Drainville: O.K. Juste avant de terminer sur la radiologie, en attendant que ça devienne éventuellement une composante de notre panier de services assurés par la RAMQ, est-ce qu'à votre avis on devrait encadrer le transfert des patients vers les cliniques de radiologie? Parce que, vous l'avez entendu peut-être tout à l'heure, mais vous l'avez certainement entendu par le passé, on entend des anecdotes qui sont toujours un peu difficiles à démontrer, à prouver, mais on entend parler de cas de médecins radiologistes qui trouvent une façon de transférer dans leur clinique à eux des patients qui sont entrés par la porte du service public et qui, ayant été obligés d'attendre trop longtemps pour un scan, par exemple, ou une résonance, décident de traverser de l'autre côté, incités plus ou moins directement, plus ou moins fortement par le radiologiste de l'hôpital à aller de l'autre côté de la rue, dans une clinique dont il est propriétaire. Est-ce que c'est des anecdotes qui sont fondées, ça? Est-ce que vous avez pu, vous-mêmes, voir ça ou est-ce que vos membres peuvent témoigner de ça?
Mme Verreault (Dominique): Tout à fait. Tout à fait. Écoutez, dans l'enquête qu'on a faite, nous, en avril, pour vérifier les délais d'attente, ça nous a été rapporté par nos membres sur le terrain. Dans certains cas, c'est la réceptionniste au service de radiologie qui dit: Écoutez, on ne donne pas de rendez-vous pour la résonne magnétique actuellement, on a six mois, on a un an d'attente, donc on ne donne pas de rendez-vous, si vous voulez, vous pouvez aller à la clinique de radiologie Unetelle, à tel endroit.
Alors, d'entrée de jeu, je vous dirais, là, on est dans le système public, puis le personnel qui travaille dans le système public a comme mot d'ordre de diriger la clientèle vers la clinique privée parce qu'on ne fait pas ce type d'examen là au public ou parce que c'est la décision qui a été prise pas le chef du service de radiologie au public. Il y a des endroits où, quand on appelle pour passer une mammographie, on vous dit: On ne fait pas de mammographie en externe, vous allez à la clinique Unetelle. On vous dirige vers là. Alors, écoutez, ce n'est pas anecdotique, là, à notre sens.
M. Drainville: Non, mais ce n'est pas ça. Ça, je l'ai entendu, moi aussi...
Mme Verreault (Dominique): C'est vraiment, là...
M. Drainville: ...mais là je vais un peu plus loin, là, quand même. Ma question, très directement, c'est... Je vous parle de médecins qui pratiquent dans un hôpital et qui, d'une façon plus ou moins directe, plus ou moins implicite ou explicite, incitent des patients, leurs patients de l'hôpital, à aller passer une résonance ou une écographie dans la clinique qui leur appartient de l'autre côté de la rue.
Des voix: Oui.
M. Quinn (Michael): Sûrement. Sûrement. Mais, sans le faire directement. Le fait de l'existence des listes d'attente, puis tout ça, même si ce n'est pas directement le médecin... Bon, dans une autre vie, je travaillais dans une clinique externe en dermatologie qui a aussi un petit peu le même pattern, là, de, bon, la pratique en privé, et puis c'était ça qu'on disait aux rendez-vous, là. Ce n'était pas le médecin qui nous disait: Dites aux gens d'aller à ma clinique privée. Par contre, quand les gens nous appelaient et nous disaient: Ça n'a pas d'allure, un rendez-vous dans six mois, dans quatre, cinq, six mois, qu'est-ce que je peux faire?, bien, on leur disait: Bien, il y a d'autres solutions au privé. Puis ce n'était pas nécessairement directement demandé, mais le monde... Tu sais, la question nous est posée, puis je pense que c'est la même chose qui arrive, puis c'est ce qu'on nous a dit dans notre enquête, c'est qu'il y a comme tout un... même si ce n'est pas une directive claire, c'est comme... on redirige ces gens-là vers le privé.
M. Drainville: Sur les 55 chirurgies, là, qui sont prévues au règlement et qui vont pouvoir se développer au privé dorénavant si le règlement est mis en oeuvre au mois de septembre comme le gouvernement... comme le ministre l'a annoncé, le ministre l'a dit encore une fois ce matin, il dit: Écoutez, inquiétez-vous pas, c'est 55 chirurgies qui sont déjà offertes au privé.
Nous, ça fait un certain temps qu'on lui dit: Est-ce qu'on peut voir les cliniques en question? Nommez-les, dites-nous qui elles sont et qu'est-ce qu'elles offrent. Quelle est la clinique qui offre les chirurgies gynécologiques, là, entre autres l'hystérectomie? Puis quelles sont celles qui offrent les différentes chirurgies, dont certaines sont assez complexes, ce n'est pas des chirurgies mineures? Et jusqu'à maintenant on n'a pas été capables d'avoir la liste en question. Vous, est-ce que vous le croyez, le ministre, quand il vous dit que les 55 chirurgies sont déjà offertes dans les cliniques privées existantes?
Mme Bonamie (Lina): Honnêtement, M. Drainville, non, pas plus que je ne croyais le Dr Couillard, qui affirmait la même chose.
M. Drainville: Donc, vous seriez curieuse, comme, nous, nous le sommes, de voir...
Mme Bonamie (Lina): Je suis très curieuse de savoir dans quelle clinique on fait des hystérectomies; par voie vaginale, peut-être. Non. Il y en a peut-être un, deux qui vont le faire. À la marge, que ça a pu se faire. Des drames se sont procédés. Puis je comprends qu'il ne faut pas aller sur les drames, qu'il faut les arrêter, les drames, ça, je partage avec le ministre, là, il faut arrêter les drames, au Québec, qui peuvent se produire dans des cliniques, mais qu'on ne vienne pas me dire que c'était monnaie courante de faire les 55 chirurgies qu'on a présentement sur la liste, là. On dépasse la chirurgie esthétique, là, hein? On ne vient pas de m'enlever un petit kyste, là, qui dépassait sur le bord de ma joue, là, c'est autre chose.
Et le ministre ne m'a pas répondu, tout à l'heure. C'est dommage parce que ce n'est plus son temps, mais comment se fait-il qu'on ne demande pas au réseau privé de payer pour les complications? L'hébergement qui va se faire dans le réseau privé... du réseau privé au réseau public, là, qui a été créé par ce réseau privé là, pourquoi il ne paierait pas la facture puis il ne rembourserait pas le gouvernement là-dessus? Écoutez, quand on parle d'investissement bien mis aussi, là, quand je faisais mention, tout à l'heure, le projet Sacré-Coeur? Rockland, 4,68 millions, si on le mettait à Sacré-Coeur, bien les blocs de salles d'op, ils seraient ouverts, ce qui n'est pas le cas là.
M. Drainville: Pourquoi? Qu'est-ce qui vous rend si confiante qu'ils le seraient, ouverts? Parce que le gouvernement, par le passé en tout cas...
Mme Bonamie (Lina): Parce qu'on n'a pas l'argent.
M. Drainville: ...le gouvernement nous a dit, par le passé...
Mme Bonamie (Lina): On n'a pas l'argent pour le maintenir ouvert, le bloc opératoire.
M. Drainville: ...que ce n'était pas une question d'argent, il nous disait que c'était une question d'effectifs.
Mme Bonamie (Lina): Bien voyons! M. Drainville, à chaque fois qu'il y a une clinique privée qui s'ouvre, c'est des gens du réseau public qu'on est allé chercher. Une infirmière, un médecin, ça se forme dans le réseau public, au Québec. Si vous amenez une infirmière dans le privé, vous l'avez prise où? Vous l'avez prise dans le réseau public. Si vous allez chercher un médecin, vous l'avez pris où? Vous l'avez pris dans le réseau public.
M. Drainville: Je vous soumets l'argument...
Mme Bonamie (Lina): Alors, on draine les ressources humaines vers le privé.
M. Drainville: Mais ce que vous dites, c'est que, si on débloquait les budgets qui nous permettraient d'aller... qui nous permettaient d'aller chercher les infirmières, certaines infirmières, par exemple, de blocs opératoires qui sont passées aux agences privées, on pourrait les ramener dans les salles d'op de Sacré-Coeur et activer les salles d'op de Sacré-Coeur.
Mme Bonamie (Lina): Exactement. On a fait des choix d'investissement en cardio tertiaire, on l'a fait en radio-onco puis on a les preuves sur la table aujourd'hui. Bien, procédons dans le même choix. Au lieu de donner 4,68 millions à Rockland, laissons-le, ce 4,68 millions, à Sacré-Coeur.
M. Drainville: Soit dit en passant, je souligne qu'avant d'aller vers le privé la garantie d'accès, M. le ministre, prévoit que, si l'hôpital n'est pas capable de garantir la chirurgie à l'intérieur d'un certain temps médicalement requis, on doit demander à un établissement du public d'une autre région... enfin sur le même territoire d'abord, après ça sur une autre région... Je ne suis pas sûr...
Une voix: ...trois chirurgies.
M. Drainville: Pour les trois chirurgies, oui, voilà, hanche, genou, cataractes. Je ne suis pas sûr que dans le cas de Rockland ça a été fait. Vous allez me répondre qu'il s'agit, dans certains cas, de chirurgies mineures qui ne sont pas couvertes par la garantie d'accès. Mais il faudrait peut-être...
Une voix: ...
M. Drainville: Hein? Oui, hein? Mais il faudrait peut-être, à ce moment-là, songer à l'élargir, votre garantie d'accès, pour justement couvrir les chirurgies mineures qui ont été transférées au privé à Rockland.
Juste une curiosité, Mme Bonamie. Vous disiez tout à l'heure: Le projet de l'Hôpital Sacré-Coeur prévoit le transfert de la formation et des chirurgies prévues au règlement. On parle, là, du transfert de Sacré-Coeur à Rockland. Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi le projet Sacré-Coeur?Rockland prévoit le transfert de la formation au privé? Parce que je vous ai bien entendu dire que le ministre, selon vous, en tout cas, avait des réticences au sujet du transfert de la formation de Sacré-Coeur à Rockland. Je n'ai pas rêvé, hein?
Mme Bonamie (Lina): Non, vous n'avez pas rêvé. Les médecins qui opèrent à Rockland doivent être assistés des résidents en médecine, qui sont donc en formation pour devenir chirurgiens, pour devenir gynécologues, pour devenir... qu'importe la spécialité. Mais le chirurgien qui opère doit se faire assister par un résident en médecine. Mais il ne fait pas juste assister pour tenir les écarteurs lors de l'opération, là, on se comprend, il y a un transfert d'enseignement, il y a un transfert d'enseignement qui se fait là. Les résidents, c'est inscrit... Le ministre me fait signe que non, mais c'est inscrit que le médecin participant doit être assisté du résident.
M. Bolduc: À ma connaissance, il n'y en a pas qui... là, mais on peut le vérifier, là, on va essayer d'avoir la bonne information.
Mme Bonamie (Lina): C'est dans l'appel d'offres.
M. Bolduc: Oui, mais l'appel d'offres...
Mme Bonamie (Lina): Non, non, vous ne l'avez pas lu, vous non plus, hein? C'est tellement difficile de savoir ce qu'il y a dans cet appel d'offres là, M. Bolduc, tellement difficile!
Le Président (M. Kelley): J'encourage tout le monde de s'adresser à la présidence pour faciliter les bons travaux de la commission.
Mme Bonamie (Lina): Excusez-moi, M. le Président.
M. Bolduc: Mais, M. le Président, c'est juste pour dire que c'est une entente qui est possible. Le ministre décide à la fin s'il l'accepte ou pas. Ça fait qu'on n'est pas rendus à cette étape-là. Parce que je ne veux pas... Vous savez, je suis pour la gestion la plus près possible de la base, comme j'en fais la promotion, donc je les laisse faire les affaires, mais à la fin je me donne un droit de veto.
Mme Bonamie (Lina): Mais on voit par contre, on voit par contre l'intention des gens qui sont déjà là puisque ça fait partie de l'appel d'offres.
n(17 h 30)nM. Drainville: Il nous reste seulement deux minutes, mesdames. Parlez-nous, en terminant, des projets pilotes qui sont en cours actuellement, auxquels vos membres participent, dans certains établissements, du moins. Qu'est-ce que ça donne, jusqu'à maintenant? Est-ce qu'effectivement ces projets pilotes là sont en train de déboucher sur des solutions concrètes qui nous permettraient d'améliorer l'organisation du travail, de permettre à notre système public d'être encore plus efficace sans brûler davantage notre monde, évidemment?
Le Président (M. Kelley): Mme Bonamie.
Mme Bonamie (Lina): Nous croyons sincèrement qu'ils sont porteurs d'avenir, mais il est trop tôt pour qu'ils donnent des résultats, on commence à peine à travailler. Chez certains individus, il y a eu de la réticence, disant que ça demeurait encore dans le domaine de la gestion, donc les travailleurs n'avaient... en tout cas, la partie syndicale avait moins son mot à dire sur la gestion de l'organisation du travail. Mais ça, on est en train de transgresser cette résistance-là. Mais, oui, il y a de l'espace dans l'organisation du travail.
M. Drainville: Pouvez-nous dire... donnez-nous, pour les gens qui écoutent, là, à la maison, là, un exemple concret, là, de ce que ça veut dire. On parle tout le temps d'organisation du travail. Donnez-nous un exemple concret, là, de ce ça veut dire, là, quand on dit «réorganiser», dans votre cas à vous, les infirmières, par exemple.
Mme Bonamie (Lina): Dans notre cas à nous. On prend le fonctionnement, comment ça fonctionne sur ce qu'on appelle un centre d'activité ou un département. Vous êtes hospitalisé. Prenons à titre d'exemple des patients qui ont des problèmes avec leurs poumons, donc en pneumologie. Le patient, lorsqu'il arrive, on fait quoi auprès de lui? Quels sont les diagnostics les plus souvent établis? Qui va auprès du bénéficiaire pour faire telle chose? Qui fait le lit? Qui apporte les repas? On regarde tout ça, et on regarde tout ce qu'il y a à faire aussi auprès de ce malade, et là on dit: Est-ce qu'il y a une façon différente qu'on pourrait appliquer ça, qui améliorerait le temps, le temps auprès du bénéficiaire, qui améliorerait le temps pour le personnel en place, etc.? On décortique ces choses-là pour voir qu'est-ce qui influence.
Bon, à titre d'exemple bien banal, si, moi, on décide que les... pas on décide, mais qu'il est décidé quelque part dans l'hôpital que les médicaments, les pilules pour dormir sont distribués à tous les patients à 8 h 45, alors que l'inhalothérapeute va passer pour donner le traitement pour les poumons à 9 h 30, tu viens de passer à côté.
Bien, il y a des choses comme ça qui se font dans les établissements. On ne sait pas pourquoi elles se font, elles se sont toujours faits comme ça. Alors, on se pose la question: Pourquoi fait-on tel geste, et quel est le meilleur moyen... le meilleur moment pour le poser, et qui est la meilleure personne pour le faire?
M. Drainville: J'ai un petit peu plus de temps que je le pensais, là. Donc, est-ce que ça veut dire concrètement que, dans un département, par exemple, il va y avoir une représentante des infirmières, une représentante des inhalos, une représentante des infirmières-auxiliaires, des préposés également, etc., et on crée une espèce de... une table, et là les gens échangent puis ils essaient de trouver justement des solutions comme celles dont vous parlez, en présence, je l'espère bien, de gestionnaires, des gens, des cadres, qui vont devoir évidemment faire leur part? Est-ce que c'est comme ça que ça fonctionne? Parce qu'encore une fois on entend toujours parler de la nécessité de réorganiser, mais on ne sait jamais comment... enfin il n'y a jamais personne qui nous explique comment ça fonctionne concrètement sur le terrain. Alors, je vous invite à continuer, c'est fort intéressant.
Mme Bonamie (Lina): Alors, on ne met pas 15 personnes, là, parce que, bon, de toute façon, les représentations syndicales maintenant...
Une voix: ...pas le temps.
Mme Bonamie (Lina): ...puis on n'a pas le temps de mettre... puis on n'a pas le nombre de personnes pour en mettre 15 autour d'une table, là, donc c'est un petit peu plus réduit comme nombre de personnes...
M. Drainville: C'est ça, il y a quatre grands syndicats maintenant.
Mme Bonamie (Lina): Les quatre grands syndicats qui sont concernés par les employés qui sont là effectivement sont autour d'une table et avec le gestionnaire en place, bien sûr, le chef de département est là, et on regarde justement qu'est-ce qui se fait sur ce département-là. Donc, en termes plus techniques, on regarde tous les facteurs extrinsèques, c'est-à-dire à l'extérieur aussi: À quelle heure arrivent les cabarets pour les repas? Est-ce que ça arrive à une heure épouvantable où c'est le retour des patients qui reviennent de la salle d'op, puis là on est embêté par le chariot, puis ce n'est pas le temps de passer...
On regarde tout ça pour améliorer justement tout ce que l'on fait auprès du malade et maximiser le temps le plus possible auprès du malade, et non pas perdu dans... à remplir les requêtes, hein? L'exemple que je donnais: des fois, pour commander du matériel, on va demander à une infirmière de passer trois, quatre requêtes différentes pour commander des appareils ou du matériel. Ça ne doit pas relever d'une infirmière, ça. Bon. Alors, c'est toutes ces choses-là qu'on regarde comme fonctionnement.
M. Drainville: Donc, ça peut vouloir dire ? avant de laisser la parole à Mme Chabot ? ça peut vouloir dire que, par exemple, on rééquilibre les tâches au sein de l'unité de... au sein du département. On dit: Regarde, ça, ce n'est pas vraiment... ça ne devrait pas être ma job comme infirmière, qu'est-ce que tu en penses? Toi, la représentante des préposés aux bénéficiaires, ou, toi, la représentante des infirmières auxiliaires, es-tu d'accord avec ça? Comment est-ce qu'on pourrait s'entendre pour? Sans changer quoi que ce soit à la convention collective, là?
Mme Bonamie (Lina): Sans changer quoi que ce soit à la convention collective. Il a toujours été possible de faire ça. Ça fait des années, M. Drainville. On s'est battus... Il y a même eu une grève historique, à l'Hôpital Sainte-Justine, qui a duré 30 jours pour obtenir ce qu'on a appelé le comité de soins infirmiers. C'est un comité justement où on a les représentantes des infirmières, à l'époque ? parce que ça s'appelait juste Soins infirmiers ? et de l'employeur pour parler de toute question d'organisation du travail. Mais on se faisait dire que c'était dans la cour de la gestion et que, comme travailleuses, on n'avait pas un mot à dire là-dedans. C'était un droit de gérance. Ça commence à changer, il y a maintenant une vingtaine de projets en organisation du travail. Mais, avant de vous dire qu'ils vont être toutes et tous un succès, il est trop tôt, on débute les travaux.
M. Drainville: Juste avant de laisser la parole à Mme Chabot, je tiens à souligner que, Mme Bonamie, vous allez quitter bientôt, si je ne m'abuse, la présidence de la FIQ. C'est donc...
Mme Bonamie (Lina): ...vendredi.
M. Drainville: Vendredi?
Mme Bonamie (Lina): Oui.
M. Drainville: Donc, c'est donc probablement la dernière fois que nous vous voyons ici, en commission, en tout cas à titre de présidente de la FIQ. Je tiens, en mon nom personnel, et au nom de ma formation politique, et probablement également au nom de mes collègues ? le ministre opine du bonnet ? à vous remercier pour le travail que vous avez fait et le formidable engagement dont vous avez fait preuve tout au long de votre carrière, dirions-nous, à titre d'infirmière, mais par la suite à titre de représentante du syndicat des infirmières, votre engagement en faveur d'un système public de santé fort, accessible, gratuit. Merci. Très apprécié.
Mme Bonamie (Lina): Merci beaucoup.
M. Drainville: C'est le genre d'engagement citoyen dont nous avons besoin.
Mme Bonamie (Lina): Merci.
Le Président (M. Kelley): Adopté à l'unanimité.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Bonamie (Lina): Merci, M. le Président.
M. Drainville: Et finalement, Mme Chabot. Enfin.
Mme Chabot (Louise): Vous avez raison, on partage tout à fait vos propos, puis merci de le souligner. Je pense à Lina avant... C'est vrai qu'il y a des moments comme ça, j'imagine, c'est des dernières, là.
Une voix: ...
Mme Chabot (Louise): Bien, pour les projets, je pense que, là où ça peut être porteur, à mon avis, il y a comme trois conditions, c'est que les solutions n'arrivent pas d'en haut, que le personnel participe aux diagnostics, pas juste au... Tu sais, est-ce qu'on s'entend que les problématiques sur l'unité de soins, qu'on a, c'est elles, puis après ça je pense que vont émerger des solutions, puis qu'ils ne soient pas mur à mur. Une solution que tu peux trouver aux soins intensifs, dans les soins critiques ne sera pas la même, peut-être, en médecine ou en chirurgie d'un jour.
Puis, moi, à mon avis, là, il ne faut pas penser qu'on va réussir à... Ça se peut qu'il y ait des solutions sans coût, mais, un jour, il va falloir se dire qu'il va falloir mettre des sous, là. Tu sais, on a assez étiré l'élastique. Il y a un manque flagrant de personnel. On a fait une étude chez nous sur la détresse psychologique, là, puis on regardait du côté des inhalothérapeutes, c'est au CHRTR à Trois-Rivières, où c'était beaucoup moindre que dans d'autres unités, puis les femmes disaient: Bien, c'est parce qu'au moment où on a fait l'enquête il y a eu ajout du personnel, même si la charge de travail est lourde, il y a du personnel pour le faire.
Ça fait que, tu sais, à un moment donné, il va falloir se dire: On ne pourra pas toujours... Tu sais, il y a, oui, mettre les bonnes personnes aux bonnes places, mais il va falloir investir pour... puis essayer de regarder plus loin qu'à courte vue aussi: Ça me prend combien de personnes? C'est parce qu'une unité de soins, là, ça change, hein, puis il faut être capable d'envisager aussi que la journée un et sept ne sont pas toutes pareilles.
M. Drainville: Et je vous rappelle...
Le Président (M. Kelley): Dernier commentaire, très rapidement, s'il vous plaît.
M. Drainville: Je vous rappelle, Mme Chabot, qu'on met... qu'on investit actuellement, collectivement, 325 millions pour embaucher du personnel d'agence dans le réseau. C'est le chiffre le plus élevé, le montant d'argent le plus élevé de l'histoire, jusqu'à maintenant, en tout cas, de l'histoire récente, là. 325 millions, pas juste pour des infirmières, là, 325 millions pour des préposés aux bénéficiaires, des travailleurs sociaux, des technologues, des ergothérapeutes, des infirmières auxiliaires, des auxiliaires. C'est de l'argent, ça, qu'on pourrait investir pour donner des postes à nos infirmières, notamment, pour les garder dans le système public, ce qui nous permettrait de stabiliser nos équipes, qui réduirait sans aucun doute les burnouts puis leur donnerait le goût de rester parce qu'elles auraient, entre autres, un fonds de pension puis des avantages sociaux qui sont pas mal plus intéressants dans le public qu'ils ne le sont dans le privé.
Le Président (M. Kelley): Alors, il ne me reste qu'à dire merci beaucoup aux représentants du Secrétariat intersyndical des services publics. Mme Chabot, Mme Verreault, Mme Mercier, M. Quinn et Mme Bonamie, merci beaucoup encore pour votre contribution à la vie publique au Québec.
Sur ça, je vais suspendre nos travaux. À 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 40)
(Reprise à 20 h 4)
Le Président (M. Kelley): À l'ordre, s'il vous plaît! Je sais qu'à ma gauche il y a un petit partage des documents. Alors, je déclare la... La Commission des affaires sociales reprend ses travaux.
Je vous rappelle que la commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi n° 34, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les centres médicaux spécialisés et les laboratoires d'imagerie médicale générale.
On a un témoin, ce soir, qui est la Fédération des médecins spécialistes du Québec. Alors, ça va être une présentation d'une dizaine de minutes, suivie par un échange avec les membres de la commission. Alors, sans plus tarder, je vais céder la parole au président de la fédération, Dr Gaétan Barrette.
Fédération des médecins
spécialistes du Québec (FMSQ)
M. Barrette (Gaétan): Merci, M. le Président. MM. les parlementaires. Si je ne m'abuse, il n'y a pas de mesdames ce soir. Alors, au nom de la Fédération des médecins spécialistes, je tiens à vous remercier de nous donner l'occasion de nous faire entendre quant au projet de loi n° 34 et les critiques que nous avons à lui formuler.
Et, d'entrée de jeu, j'aimerais rappeler à tous les membres de la commission parlementaire la mission de la fédération, qui, comme vous le savez évidemment, est d'abord et entre autres de défendre les intérêts économiques ? vous vous en douterez ? de leurs membres, mais aussi leurs conditions d'exercice, et j'insiste là-dessus parce que c'est un élément qui n'est pas toujours bien connu et saisi et de la population et des élus, ainsi que de leur intégrité professionnelle et leur autonomie professionnelle, j'insiste là-dessus parce que ce sont les éléments qui seront le fondement de notre critique. On regroupe évidemment 8 000 spécialistes dans 34 spécialités... 34 associations, pardon, et 35 spécialités, et c'est en leur nom évidemment qu'on se présente ici, devant vous.
Le dossier de la loi n° 33 et de la loi n° 34 est une espèce de continuum pour lequel, je pense, il y a lieu, dans un premier temps, de faire le point parce que ? et encore à la lumière de ce qui a été présenté devant vous aujourd'hui, alors qu'on a évidemment suivi de façon attentive ? règnent les concepts les plus confus et les plus contradictoires depuis le jour un. Et j'aimerais faire un rappel de ces événements-là parce que ça sous-tend l'essence de notre propos ainsi que de nos critiques et ça nous apparaît essentiel de faire ce point-là.
Je tiens à vous rappeler le contexte, évidemment que vous connaissez tous, qui était le jugement Chaoulli, qui a fait en sorte que, devant une situation clinique à laquelle faisait face un patient, la cour a décidé qu'il était raisonnable et nécessaire pour l'État d'offrir une alternative aux citoyens. Notre critique sera basée sur l'aspect du patient d'abord et avant tout. Et, en réaction au jugement Chaoulli, le ministre de la Santé de l'époque, M. Couillard, a pris une direction qui était particulière et qui a engendré un interminable débat pour lequel à peu près tout a été dit et son contraire, et ça continue à être le cas aujourd'hui, et il est essentiel, encore une fois, pour nous, de faire le point là-dessus.
Alors, je rappelle l'essence de la portée des décisions du gouvernement précédent, à savoir la nécessité d'offrir un service clinique, thérapeutique éventuellement aux patients pris devant une situation qui était inacceptable sur le plan des listes d'attente. Alors, la réaction du gouvernement, on vous le rappelle, a été assez simple, a été de déterminer un mécanisme d'action de la gestion des listes d'attente en chirurgie, parce que le sujet en litige était d'ordre chirurgical, et, ce faisant, offrir une série de mesures qui permettaient d'augmenter l'accessibilité aux soins chirurgicaux aux patients dans un cadre public. Et c'est l'essence de ce qui a été proposé dans la loi n° 33.
La gestion des listes d'attente et de l'accès au geste chirurgical était telle que, si, pour un patient donné, le service n'était pas donné dans un délai raisonnable, à cette condition absolue, l'ouverture au privé se faisait. Et en aucune façon quiconque ne peut dire que la loi n° 33 ou la loi n° 34 est une mesure qui ouvre au privé parce que, oui, dans l'absolu, ça peut le faire, mais à la condition que le gouvernement faillisse à son devoir qui est d'offrir un service public selon une modalité quelconque, et la modalité quelconque ne l'est pas, puisqu'en réalité elle est exceptionnelle, et elle passe par les CMS.
Les CMS, et dans toutes les discussions que la Fédération des médecins spécialistes a eues avec le médecin... le ministre précédent, qui était médecin évidemment aussi... étaient faites dans cet ordre-là: donner des services nécessaires dans un cadre public, mais selon une formule innovante qui était celle des CMS. Je ne viens pas ici faire le procès des CMS, mais simplement mettre le point sur ces i-là, à savoir que le «tradeoff», l'échange qui avait été fait par le gouvernement d'alors était peut-être, dans certains cas, un coût légèrement supplémentaire au public, je ne le sais pas, je ne peux pas le démontrer, mais, de l'autre côté, il y avait une productivité et une efficacité accrues et un accès accru en mettant en application, en mettant à l'oeuvre, en se servant du réseau de cabinets qui existe actuellement. C'était l'essence, et ça demeure l'essence.
n(20 h 10)n Pourquoi c'est tombé ou pourquoi ça tombe actuellement? Pour des raisons politiques. Et la politique dans ce dossier-là vient essentiellement nuire aux patients parce qu'on nuit à l'accessibilité. On est dans l'arbitraire et on est dans le contradictoire. Je tiens à le rappeler, et j'insiste là-dessus, tout ce qui a été fait à date sur le plan politique, débattu et critiqué avait un fondement, un seul objectif qui était l'accessibilité des soins aux patients, et c'est toute cette activité-là, cette accessibilité-là qui est remise en cause aujourd'hui par tous les détracteurs pour des raisons qui sont non fondées.
Bien sûr, il y a la possibilité d'ouvrir au privé, mais, encore une fois, et j'insiste, à la condition que le gouvernement faillisse à sa tâche. Et nous avons démontré dans un passé récent notre enclin, si vous voulez, à aller de l'avant pour augmenter la performance du réseau public. Mais nous savons, par ce que l'on voit sur le terrain, qu'on n'y arrivera pas. Et on pourra y revenir tantôt dans la discussion.
Alors, face à cette problématique d'accès, que se passe-t-il? Il se passe une mise en place d'une structure démesurément lourde et inefficace qui, au bout de la ligne, va entraîner exactement le contraire. Et je vais prendre quelques minutes pour exposer les contradictions de la situation actuelle.
On vous a déposé un mémoire volumineux, il est volontairement volumineux pour mettre en perspective tout ce que je viens de dire, l'historique et les conséquences. Mais je tiens à vous amuser et à vous proposer de regarder les pages 14 à 25, qui représentent les 12 pages de procédures au travers desquelles les médecins en cabinet, en clinique médicale spécialisée doivent passer au travers de pour obtenir un permis. Alors, ici, on parle d'une situation où la complexité est telle qu'on peut se demander si l'État ne veut pas mettre en place une lourdeur tellement grande pour mettre en application ou en opération les CMS qu'on veut les décourager et faire en sorte que ça n'arrivera pas.
Alors, encore une fois, on est dans un débat d'accessibilité et on met en place une structure extrêmement lourde, telle qu'au moment où on se parle ? et je parle au nom des neuf spécialités chirurgicales qui sont membres de la FMSQ ? au moment où on se parle, une série d'examens, de procédures ne seront plus faits en cabinet parce que les gens ont déjà manifesté leur position, à savoir qu'ils ne prendront pas la direction des CMS à cause de complexité. C'est plus de trouble s'embarquer là-dedans que de continuer à faire les procédures que l'on fait actuellement, autant les laisser de côté. Pourquoi? Parce que, contrairement à ce que vous pouvez penser, vous les parlementaires, le corps médical n'a pas besoin de certaines choses pour vivre. Nous, comme vous le savez, nous n'avons qu'à nous présenter le matin au travail, la maladie vient à nous. C'est malheureux, mais c'est comme ça. Alors, on peut très bien laisser les activités et les retourner à l'hôpital, et que le réseau vive avec.
Je vous donne un exemple. Au moment où on se parle, je peux vous assurer que les gynécologues obstétriciens du Québec ne feront pas d'IVG, au Québec, parce qu'ils ne sont aucunement intéressés à passer au travers de toute cette procédure-là pour une procédure qui est dans la liste des 55. Alors, les IVG, là, automatiquement, ils s'en retournent à l'hôpital avec les listes d'attente, et c'est un problème. Même chose pour une série de tumorectomies qui se font en plastie, mammaires, autres, qui vont s'en aller à l'hôpital parce que les plasticiens vont aller travailler pour un vrai privé à quelque part, ils vont délaisser ces activités-là. Donc, il y a là une contradiction qui est essentielle.
Il y a la question de la délivrance d'un permis de la part du ministre. Nous, on considère que l'État abuse de son pouvoir dans la situation actuelle. Pourquoi? Nous sommes soumis à un ordre professionnel. L'ordre professionnel nous qualifie pour avoir le droit de pratiquer. En quoi la délivrance d'un permis va-t-elle augmenter de quelque manière que ce soit la qualité ou assurer une plus grande sécurité dans le réseau, alors que ce pouvoir-là, tant de délivrance d'un permis de pratique que de la surveillance, est déjà octroyé légalement par l'État à un ordre professionnel qui est le Collège des médecins? En quoi l'action du ministre de la Santé, quel qu'il soit, va-t-elle venir assurer une plus grande sécurité ou une plus grande qualité des services? En quoi le ministère de la Santé, le ministre a-t-il besoin de se substituer à un ordre professionnel ou à des organismes d'agrémentation qui font exactement ce travail-là? Et pourquoi faut-il dédoubler cette fonction-là et donc créer de nouveaux emplois dans la fonction publique pour refaire exactement le même travail qui se fait actuellement par ces organismes-là? Il n'y a pas là d'aucune manière possibilité d'améliorer la situation ou d'assurer quelque qualité supplémentaire que ce soit. Alors, le simple principe de mettre ça en place nous apparaît une contradiction à ce qui existe déjà dans la situation que l'on vit actuellement au Québec.
En plus, le ministre de la Santé s'octroie un pouvoir supplémentaire qui est d'avoir le pouvoir discrétionnaire d'octroyer un permis à qui bon lui semble. Au Québec, dans toutes les professions, un professionnel qui rencontre les exigences de son ordre et qui est qualifié par son ordre a l'autorisation de pratiquer, ce qui est le cas en médecine jusqu'à aujourd'hui, et on voudrait ajouter un palier supplémentaire de pouvoir qui serait celui du ministre de décider, après que l'ordre ait déterminé la compétence de l'individu, s'il peut ou non pratiquer sa spécialité. En quoi ce pouvoir discrétionnaire là peut-il augmenter la qualité et la sécurité, à partir du moment où les agréments sont rencontrés, les exigences sont rencontrées et les permissions sont données? Il n'y a rien là-dedans qui peut améliorer la situation d'aucune manière.
On vit dans un monde, depuis... Je vois que le temps passe et je vais aller un petit peu plus vite. On vit, depuis une année, dans une approche qui est celle de Toyota, et ça m'amuse justement parce que j'avais prévu d'en parler, et M. le ministre nous fait part du document qu'il a avec lui aujourd'hui. Mais je rappelle à tout le monde que la méthode Toyota est basée sur deux principes, le premier principe qui est celui de respecter les gens avec qui on a à avoir affaire et de laisser aller les nouvelles initiatives. Dans ce cas-là, on ne respecte pas les opinions des individus parce que ces éléments-là ont déjà été mis de l'avant préalablement depuis 2002-2003 et, d'autre part, les initiatives que l'on met sur la table sont balayées du revers de la main aujourd'hui, et on le voit dans tous les dossiers des CMS. Alors, quand, d'un côté, l'État met de l'avant la méthode Toyota avec ces principes-là et, de l'autre côté, on vient renverser ça en imposant des règles qui n'ont aucun objet et aucun effet, on s'interroge largement sur la cohérence de la position du ministère.
Alors, nous, en conclusion, et vous le verrez dans le document, dans le paragraphe VI de notre conclusion qui se trouve à la page 38, on demande certains éléments, à savoir que la liste des éléments ? et on y reviendra tantôt sûrement en discussion ? des 55 procédures qui sont mises de l'avant actuellement dans le projet de loi soit révisée, et on demande que soit abrogée la nécessité d'avoir un permis. Et, si jamais il devait être nécessaire d'avoir un permis, nous croyons que les conditions de délivrance du permis soient modifiées pour qu'il n'y ait aucune discrimination entre le médecin hospitalier et celui qui est en clinique, parce qu'actuellement ça pose un problème, sur lequel on reviendra tout à l'heure. Et on pense que le processus d'évaluation qui est en cours actuellement par le ministère est un dédoublement et actuellement ? et on y reviendra sûrement dans quelques instants ? est totalement aléatoire sur le terrain. Et on pense que l'octroi de ce permis devrait se faire de façon automatique à partir du moment où l'individu a fait preuve qu'il rencontrait les exigences de l'agrément. Et on pense que les délais qui sont octroyés actuellement sont beaucoup trop courts. Suivent quelques recommandations qui... qui suivent donc, et pour lesquelles je n'ai manifestement pas le temps d'arriver, mais on y reviendra dans la discussion.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Dr Barrette. Ça met fin à la présentation. Je propose deux blocs d'environ 25 minutes. Alors, il y aura un léger dépassement, on va terminer vers 21 h 10. Avec consentement?
Une voix: Consentement.
Le Président (M. Kelley): Alors, sans plus tarder, la parole est à vous, M. le ministre.
M. Bolduc: Merci, Dr Barrette. Je pense que la position est quand même assez claire. Puis ça fait longtemps que vous êtes dans ce dossier. Et puis, moi, j'apprécie beaucoup l'expérience que vous avez.
Au niveau de la délivrance du permis, c'est-à-dire ça prend l'autorisation du ministre, on en a déjà discuté. Je vais voir un peu comment l'opposition va se positionner là-dedans, parce qu'ils ont quand même des enjeux aussi à faire savoir.
n(20 h 20)n Aujourd'hui, je dois vous avouer, par rapport aux cliniques privées puis aux CMS, il y a eu des discussions. Mais j'amènerais peut-être sur un autre sujet, après ça revenir aux CMS. Mais j'ai été beaucoup, beaucoup questionné aujourd'hui par rapport aux laboratoires de radiologie. Toute la question de la radiologie est beaucoup revenue sur la table. Puis je vais vous dire un petit peu ce qu'on disait aujourd'hui. On disait que le fait d'avoir de la mixité en radiologie, ça amenait une grosse problématique où on avait des gens qui sortaient du réseau public, allaient dans le privé, et, à ce moment-là, on créait un phénomène où, quand les gens se présentaient à l'hôpital, la liste d'attente étant tellement longue, que nécessairement, pour plusieurs gens, d'avoir une certaine accessibilité pour certains examens, il fallait absolument qu'ils aillent dans le privé puis qu'ils étaient obligés de payer. Tous les groupes qui ont passé aujourd'hui, ils m'ont cuisiné là-dessus, ils m'ont fait leurs interventions. J'aimerais ça peut-être vous entendre là-dessus, là, comment vous voyez ça, parce que... Puis je dirais même que, dans ce qu'on entendait, j'ai eu plusieurs notions, en tout cas, qu'on allait jusqu'à la nationalisation de la radiologie, racheter complètement les cabinets et puis s'organiser pour que la radiologie n'ait plus de mixité du tout.
M. Barrette (Gaétan): Alors, on va mettre les choses en perspective. Depuis...
M. Bolduc: En passant, je vous fais part de ce qui s'est dit aujourd'hui.
M. Barrette (Gaétan): Non, mais c'est correct. Alors, pour le bénéfice des membres de la commission, lorsque j'étais président de l'Association des radiologistes, j'ai proposé au gouvernement précédent d'aller de l'avant avec ladite nationalisation de la radiologie, ce n'est pas la radiologie qui va s'opposer, et évidemment il n'y a aucun gouvernement qui n'a osé le faire parce que ça coûte des sous. Alors, si vous voulez le faire, M. le ministre, allez-y, ce n'est pas moi qui vais s'opposer. Ceci étant dit... Et d'ailleurs ça a toujours été le cas, puis je vous l'ai dit à plusieurs reprises. Alors, si vous voulez dépenser une centaine de millions supplémentaires, «be my guest», là, il n'y a pas de problème, là. Mais on aura une négociation à faire sur les tarifications, et ça, ce sera tout aussi amusant.
Maintenant, pour ce qui est de l'obtention de permis, je veux faire un parallèle avec, M. le ministre, votre pratique, vous-même, précédente. Il y a, au moment où on se parle, si je ne m'abuse, 193 GMS. Il y a actuellement, dans les textes de loi de la province de Québec, exactement zéro lettre, mot, syllabe ou phrase sur les GMS. Comment se fait-il... GMF, pardon. Comment se fait-il que, pour les GMF, on soit capables de s'entendre selon la méthode Toyota, c'est-à-dire qu'on se parle, et qu'on s'entend, et qu'on aille de l'avant avec les bonnes attitudes, et que, pour les médecins spécialistes, il faille passer par des lois essentiellement matraques avec amendes, et ainsi de suite?
Comment se fait-il que, d'un côté, ce soit nécessaire d'avoir un pouvoir discrétionnaire du ministre pour avoir un permis et, du côté de la médecine spécialisée... du côté de la médecine familiale, ce ne soit pas le cas? Là, il y a une incongruité. Ou bien les spécialistes sont des bandits en puissance qu'il faille absolument réglementer, ou bien, là, il y a un problème politique. Manifestement, il y a un problème politique, vous le savez, qui vient du fait de la confusion qui est entretenue sciemment par des groupes de pression face à la portée de la loi n° 33 et de la loi n° 34.
Encore une fois, pour ouvrir au privé, il faut que le gouvernement faillisse, et, en soi, toute la réglementation existe déjà pour s'assurer de la qualité et de la sécurité dans les cabinets. Nous avons dit et nous le disons ici, ce soir, comme nous l'écrivons dans le mémoire, nous sommes d'accord avec des aspects particuliers des projets de loi nos 34 et 33 qui visent à faire en sorte, par exemple, que le contrôle et la gouverne médicale soit entre les mains de médecins et non de commerçants, on est en faveur des mesures administratives qui garantissent ça, on est en faveur de l'agrément, mais, à partir de ce moment-là, qui est le moment où la sécurité et l'accessibilité sont garanties, quelle est la plus-value des autres mesures? Zéro. À moins qu'on veuille satisfaire un fantasme gouvernemental de contrôler un peu plus les médecins, qui, fantasme, semble s'exprimer plus au bord des spécialistes qu'à celui des omnipraticiens. Il y a une incongruité, une incohérence et une contradiction évidentes. J'aimerais qu'on s'y adresse.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Bolduc: Je vais clarifier parce que, par rapport aux spécialistes, il n'y a pas d'incohérence parce que, si vous ouvrez un cabinet de spécialistes pour faire de la consultation médicale, un exemple, un dermatologue, si vous voulez ouvrir un cabinet de spécialistes, des endocrinologues qui veulent aller faire de la clinique, des cardiologues, à ma connaissance, ils n'ont pas besoin d'un permis de CMS puis ils vont pouvoir aller faire de la pratique comme les médecins de famille peuvent le faire. Ça fait qu'à ce niveau-là les deux groupes sont équivalents.
Où il y a une différence, c'est quand on arrive dans un CMS, ce sont des actes chirurgicaux qui sont le pendant du bloc opératoire dans un hôpital, donc, à ce moment-là, vous comprendrez que le niveau de sécurité et de qualité, le fait d'avoir un agrément puis d'avoir un permis spécial est tout à fait justifié. Ça fait que, pour moi, on n'est pas du tout discriminatoire. Demain matin, un chirurgien qui veut aller faire de la consultation dans un bureau et qui n'opère pas, c'est le même principe qu'un omnipraticien. Mais, si vous voulez faire des actes chirurgicaux, vous n'aurez pas le choix.
Un autre exemple. Si vous avez un omnipraticien qui veut faire de la petite chirurgie esthétique dans son cabinet, à ma connaissance, également, il va devoir se soumettre au principe de la CMS. Donc, ce n'est pas discriminatoire spécialistes versus médecine de famille, c'est en fonction de l'activité, qui est de l'activité chirurgicale, qui est une activité qui est peut-être plus à risque que seulement faire de la consultation. Bon.
Une fois qu'on a dit ça, il y a différentes étapes à passer, on a essayé de les simplifier, mais c'est certain qu'à toutes les étapes on veut avoir un élément qualité. Et je vous rappellerais qu'on a fait ça dans le cadre du décès de Mme Charest, suite auquel on s'était rendu compte que c'était plus facile d'ouvrir une clinique médicale pour faire de la grosse chirurgie que d'ouvrir un dépanneur. Donc, ça a été le principe qui a été en arrière de ça.
Mais je pense que, pour le reste, je suis content de savoir que la majorité des choses qu'il y a dans le projet, vous êtes quand même en accord avec ça, l'encadrement, la qualité, la sécurité, la question de l'exploitation qu'on peut avoir avec... Puis ça, je dois vous avouer, c'est un gros gain, parce que ce qu'on ne voulait pas, c'est que des multinationales s'emparent du marché du Québec et puis qu'après ça nos professionnels soient soumis au contrôle de ces multinationales-là. Puis, avec ce qu'on a fait, si vous êtes d'accord, c'est quelque chose qui est peu probable qui se produise.
L'élément qu'il y avait, qui a été discuté aujourd'hui également, c'était qu'il y ait des gens qui disent, de façon indirecte: On pourrait peut-être prendre le contrôle, là. Puis, le principe, bien, quelqu'un possède 49 %, il y a un docteur qui en possède 2 %, puis, à ce moment-là, ils ont le contrôle. Je ne sais pas, vous, Dr Barrette, qu'est-ce que vous en pensez, par rapport aux structures, là, de possession des cliniques?
M. Barrette (Gaétan): Bien, c'est-à-dire que ce que vous relatez là évidemment est ce que nous avons présenté au ministère il y a plusieurs années maintenant, avant que vous arriviez en poste, parce que ceci à l'époque n'avait pas été pensé par le ministère.
Mais je reviens sur votre position, parce que les éléments, encore une fois, pour le bénéfice de toutes les parties, c'est nous qui avons mis ça sur la table. La possibilité pour des gens à l'étranger de venir prendre le contrôle de pratiques médicales au Québec, c'est nous qui l'avons mis sur la table, pas vous. Alors, c'est nous, avec le ministre précédent. Et c'est nous qui avons fait des représentations pour qu'il y ait au fil d'arrivée ces dispositions-là dans la loi.
Rappelez-vous le délire médiatique qu'il y a eu au départ du ministre Couillard, à l'effet qu'avant de partir il avait concédé aux médecins spécialistes des avantages. Non, il n'a pas concédé des avantages aux médecins spécialistes, il a convenu que nos représentations étaient fondées et qu'il y avait un risque, et ces aménagements-là, dans la loi, ont été mis. Ce n'est pas le gouvernement actuel qui a mis ça, c'est le précédent, sous nos représentations. Maintenant, je suis désolé, M. le ministre...
Une voix: ...de l'opposition officielle.
M. Barrette (Gaétan): Avec l'appui de l'opposition officielle, je suis d'accord. Les deux partis, d'ailleurs.
Une voix: ...
M. Barrette (Gaétan): Tout à fait. Tout à fait. C'est un fait.Une voix: ...
M. Barrette (Gaétan): Non. Non, non, non. Non, non, non. Ceci étant dit, M. le Président, je veux insister sur un point qui m'impressionne, là. Le ministre nous dit aujourd'hui, et on n'est pas d'accord avec ça, que la médecine spécialisée en cabinet, qui est quand même moins complexe que la médecine spécialisée à l'hôpital, est tellement complexe qu'elle ait besoin de permis. Alors, ce n'est pas compliqué, là, la nécessité d'avoir un pouvoir supplémentaire et en plus discrétionnaire du ministre vient de la complexité de l'acte du médecin spécialiste ici. Donc, le ministre nous dit qu'en médecine de famille ce n'est pas compliqué, parce que, eux autres, ils n'ont pas besoin de permis. Alors, là, à une époque où il ne faut pas dénigrer la médecine de famille, je suis un peu étonné, là, parce que ça veut dire qu'il faut un permis parce que c'est compliqué un peu en médecine spécialisée.
Nous avons dit, et nous le redisons maintenant, que nous n'avons aucun problème avec l'agrément. L'agrément sert à atteindre l'objectif qui est celui de garantir la qualité, pas le pouvoir discrétionnaire du ministre. Je vous donne un exemple. Qu'arriverait-il si, dans une ville quelconque de 100 000 habitants, il n'y a pas de plasticien ? on va prendre un exemple grossier ? il n'y a pas de plasticien, et, un jour, arrive, pendant 10 ans, un groupe de plasticiens qui ont une clinique, et le ministre, par exemple, vient de cette ville-là, et, 10 ans plus tard, un nouveau groupe de plasticiens veut arriver et veut s'ouvrir une clinique qui va être compétitrice à la première? Pensez-vous, chers parlementaires, qu'il n'y aura pas un trafic d'influence, des téléphones, des ceci et des cela, et que peut-être qu'il y aura en quelque part une influence?
n(20 h 30)n Évidemment que, là, vous allez me dire que je suis insultant parce que je présume de la possibilité de la chose. Mais, du même coup, la nécessité de mettre cette loi-là présume du contraire chez nous. On présume, chez nous, un libéralisme tellement sauvage qu'on pourrait être incompétents. On accepte la nécessité de l'agrément. Mais l'agrément permet d'obtenir, d'atteindre l'objectif que l'État se fixe. On y souscrit. Mais en quoi le pouvoir discrétionnaire du ministre d'octroyer un permis améliore la situation? Rien. Ça ne se démontre pas. Ça peut se démontrer dans certains secteurs d'activité publics, contrôlés, gérés par l'État, mais pas dans une situation où on vise l'accès et la compétitivité. Alors, en se donnant ce pouvoir-là, on ouvre la porte à toutes sortes de trafics d'influence qui ultimement vont nuire à l'accessibilité.
Je vous donne un autre exemple. Au moment où on se parle, il y a un projet de loi qui dit ? la loi n° 34 ? que les examens qui ne sont pas prévus à la liste des 55 ne pourront plus se faire en cabinet. Alors, s'ils ne sont pas prévus, là, et qu'une clinique devient une CMS, cette clinique-là va devoir arrêter de donner ces services-là, qui vont aller à l'hôpital. Est-ce qu'on améliore, par cette loi-là, l'accessibilité? Non. À sa face même, c'est une contradiction, et ce ne sont que des contradictions. Il y a des moyens d'arriver à destination, et on souscrit aux valeurs et aux principes qui sont sous-tendus par la loi, mais, pour y arriver, il n'est pas nécessaire d'avoir cette discrétion-là, ni le permis en soi, il n'est pas nécessaire, au gouvernement, de dédoubler les structures existantes.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Bolduc: Oui. Juste pour être très clair dans le sens de mes propos...
M. Barrette (Gaétan): ...certainement pas la médecine de famille.
M. Bolduc: Non. D'ailleurs, c'est l'argument que je vais vous dire, puis je l'ai faite, la preuve, tantôt. Si vous avez un médecin de famille qui décide de faire des procédures chirurgicales, comme il y en a qui peuvent en faire, et que ça fait partie des 55 qu'on a fait mention, il va être, lui aussi, obligé d'avoir un permis de CSM, il ne pourra pas faire ça dans son cabinet privé. Donc, à ce moment-là ? juste pour terminer ? à ce moment-là, ce qui est clair, ça n'a pas de relation avec savoir si c'est un spécialiste ou un médecin de famille. Ça a rapport avec la question: Est-ce que c'est la procédure qui fait partie de la liste ou pas? Donc, à ce moment-là, pour moi, les deux professions, un spécialiste et un médecin de famille, restent des professions nobles, comme les autres professions de la santé, d'ailleurs. Donc, ce n'est pas...
M. Barrette (Gaétan): Nous sommes tous d'accord, nous faisons partie de la confrérie médicale.
M. Bolduc: Donc, si vous êtes d'accord, on n'est pas discriminatoires l'un par rapport à l'autre, parce que ce n'est pas l'appartenance à une profession, c'est la procédure qui fait qu'on est obligé d'avoir un CMS. Est-ce qu'on est d'accord?
M. Barrette (Gaétan): Je suis désolé, vous n'avez démontré rien du tout, vous n'avez pas... Vous avez fait un constat de votre intention, vous avez exprimé votre intention, mais vous ne la justifiez pas. Vous n'expliquez pas en quoi votre pouvoir, par rapport à un agrément et au Collège des médecins, améliore quoi que ce soit. Et je vous donne un exemple...
M. Bolduc: ...chose qu'on parle.
M. Barrette (Gaétan): Non, non. Je vais vous donner un exemple. Je vous donne un exemple. Vous êtes là pour la sécurité et le geste médical, particulièrement sous anesthésie générale. Est-ce que, dans les CMS, les dentistes et les chirurgiens dentistes y sont? Non. Pourquoi? Il n'y a pas de discrimination ou c'est un simple oubli? Bien, ils ne sont pas là.
M. Bolduc: Bien, est-ce que les dentistes font de la... font ça en clinique privée?
M. Barrette (Gaétan): Bien, oui...
M. Bolduc: Bien, à ce moment-là, s'ils le font en clinique privée...
M. Barrette (Gaétan): Je veux dire, ça s'appelle un bureau de dentiste, là.
M. Bolduc: Mais, je veux dire, ils n'endorment pas le patient, anesthésie avec un tube...
M. Barrette (Gaétan): Bien, je suis désolé, il y en a un paquet d'anesthésistes qui font du temps chez les bureaux de dentistes, puis vous le savez.
M. Bolduc: Bon, ça va être quelque chose à regarder après.
M. Barrette (Gaétan): Mais vous le savez. C'est parce que ce que je viens démontrer ici ce soir est la confusion dans le genre. Il y a de bonnes intentions, et des contradictions, et de la confusion depuis le jour un, pas aujourd'hui, depuis le jour un, il y a plusieurs années maintenant. Ce que je viens tenter de démontrer, c'est l'absence de plus-value de l'intervention divine ministérielle, d'avoir ce pouvoir-là d'octroyer un permis. Et, je suis désolé, M. le ministre, vous ne faites pas de démonstration de quoi que ce soit, vous constatez, vous exposez votre intention, et, ce faisant, elle est, je suis désolé, discriminatoire.
M. Bolduc: On n'a pas la même opinion. Parce que, jusqu'à un certain moment donné, on établit à quel moment qu'on doit mettre le contrôle. Puis vous allez avoir la question tantôt des partis de l'opposition, juste la question de la liste de la chirurgie, c'est: Qu'est-ce qu'on devrait faire si, oui ou... Puis, si on veut rajouter une chirurgie, est-ce que le ministre ou le Conseil des ministres doit décider?
M. Barrette (Gaétan): Alors, je vous prends au mot. Ce que vous dites, c'est que vous voulez établir le niveau de contrôle. Alors, à ce moment-là, il faut avoir une rigueur intellectuelle, à ce moment-là, il faut déterminer d'abord quel est l'objectif. À partir du moment où on a déterminé l'objectif, on met le contrôle approprié. L'État québécois est encore une démocratie, et la Chambre que vous représentez doit éviter les abus. C'est encore comme ça que ça marche au Québec.
Alors, l'objectif et la sécurité, on y souscrit. L'objectif et l'accessibilité, on y souscrit. Dans une certaine mesure, M. le ministre, vous n'y souscrivez pas, parce que tous les projets de CMS sont morts pour des raisons politiques et non réellement pragmatiques, pour le bénéfice de la population. Mais ça, c'est un autre débat. À partir du moment où c'est la sécurité et l'accessibilité, mais surtout la sécurité, il y a des manières de le faire pour atteindre cet objectif-là sans exagérer en allant où je viens de dire depuis tantôt, jusqu'au pouvoir absolu du ministre. Notamment, le pouvoir discrétionnaire qu'il a, là, ça, c'est droit de vie ou de mort. Et c'est une réalité que j'ai vécue avec votre prédécesseur, je l'ai vécue avec votre prédécesseur. Le trafic d'influence existe, et, quand des décisions sont prises, elles peuvent se renverser. Et la seule chose qui est garante de l'objectivité en politique et dans une société est la règle que l'on applique plutôt que la discrétion que l'on observe.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Bolduc: Je pense que les gens vont être d'accord que, quand on vit dans une démocratie, il y a des règles qu'on peut se donner puis il y a des règles également d'organisation de services et d'autorisation, jusqu'où on va pour donner le service. Puis je vais vous donner un exemple. Si vous voulez ouvrir un dépanneur, il y a quelqu'un en quelque part qui peut dire non à certaines règles par rapport à ça, parce qu'il y a des normes à remplir.
L'autre élément, quand on est dans de l'organisation de services, la santé, ça demeure un bien public dans lequel on se doit également d'avoir une certaine organisation. Et juste un exemple pour vous montrer jusqu'où on peut être contradictoires ? puis ensuite on a la discussion, puis vous direz que ce n'est pas la même chose ? en radiologie, même si vous me dites que c'est négocié, vous avez accepté le principe qu'à la limite le ministre peut mettre des règles et mettre des restrictions par rapport à l'ouverture ou de donner des permis en radiologie. Donc, c'est à peu près... pour moi, même si vous dites que vous nous avez donné l'autorisation de le faire, moi, je pense que c'est le même principe qui s'applique: il faut qu'on ait un certain contrôle sur notre organisation.
Et je vais reprendre votre exemple de tantôt. Si, à un moment donné, on se rend compte que le fait d'ouvrir plein de cliniques ou plusieurs cliniques met en cause l'accessibilité du service dans nos établissements de santé, comme ministre, je peux... je pense que je devrais avoir le droit de dire que, non, je n'autoriserai pas ça parce que ça peut mettre en danger l'accessibilité des services à la population, au niveau du public, alors que, dans la règle que vous me dites, s'ils le demandent, je vais nécessairement leur donner. Donc, je mets un bémol là-dessus parce qu'il y a le droit individuel puis il y a également la protection du public, et le rôle du gouvernement, c'est justement de défendre le citoyen et de mettre en place un système qui va faire qu'il va y avoir des bons soins, une bonne accessibilité. Et ces règles-là, c'est de facto au niveau politique que ça se joue, puis on n'a pas le choix.
M. Barrette (Gaétan): Alors, bien, je suis content que vous montriez le mépris que vous pouvez avoir ? oui, bien là, je vais peser mon mot...
Une voix: ...
M. Barrette (Gaétan): ...oui, bien là, vous allez me laisser finir, par exemple ? envers la relation que doit entretenir, selon la loi actuelle de la santé et des services sociaux, la Fédération des médecins spécialistes avec le ministère de la Santé et des Services sociaux. Et je m'explique pour le bénéfice de tout le monde.
Il y a un sujet qui est toujours mis de l'avant, c'est le seul, qui est celui des cliniques de radiologie. Alors, les cliniques de radiologie, là, voyez ça comme étant l'approche Toyota. Les cliniques de radiologie, c'est quelque chose de simple: les deux parties, dans le cadre de la négociation qui lie l'État avec le ministère de la Santé, ont convenu ensemble, pour des raisons pragmatiques, de se donner des règles pour régir l'octroi de permis en radiologie, et ça a été demandé par les gens sur le terrain. Ça, c'est Toyota. Toyota va voir les individus qui sont sur le terrain: Avez-vous une bonne idée pour améliorer les choses? Les individus font des suggestions qui font ou non l'affaire du ministre, et on convient d'une entente.
Ce n'est pas ce qui est proposé. Ce qui est proposé, c'est une imposition sur une opinion. Alors, dans le cas de la radiologie, historiquement les parties se sont entendues pour gérer le territoire pour faire en sorte que justement les services soient donnés avec la plus grande accessibilité possible sur une répartition optimale territoriale du Québec de façon à éviter les travers territoriaux. Ça a été fait pour ça, parce que la radiologie est une spécialité où ça s'applique, c'est une spécialité de services. Et qui dit, aujourd'hui, que le fédération ne serait pas encline à faire de même dans un autre secteur ou tous les autres secteurs? Rien, puisque je suis ici pour vous dire exactement le contraire. Alors, en quoi est-ce que l'exemple de la radiologie peut-il justifier, de l'autre côté, cette loi-là? Aucunement, puisque nous avons fait la preuve que nous pouvions faire ce genre d'entente là dans le but recherché du gouvernement, de l'équilibre des services.
Quand M. le ministre et tous les gens qui vont venir s'asseoir sur cette chaise vont prendre le prétexte du délire de la radiologie pour justifier leur lobbyisme de groupes de pression, bien ça, c'est un abus de leur part, c'est une «misconception», c'est une erreur intellectuelle. Que les gens le prennent et qu'ils disent la vraie affaire. Que les gens disent qu'il faille, comme on l'a dit tantôt, nationaliser la radiologie, bien allez-y. Moi, regardez, là, on va négocier les tarifs, il n'y a rien là, là. Puis je ne vais pas me faire éjecter à cause de ça, le monde va être bien content, probablement. Alors, ce n'est pas ça, ce n'est pas un justificatif.
n(20 h 40)n Nous vous faisons la démonstration que nous sommes capables de faire cette négociation-là, et donc, l'ayant fait dans le passé, en quoi, encore une fois, ce pouvoir-là qui serait octroyé au ministre viendrait-il améliorer la sécurité et l'accessibilité? En rien. Vous n'avez pas fait la démonstration de rien, là, M. le ministre, là. Vous avez exposé une opinion, comme ceux qui viennent ici font la même affaire. Ils prennent le prétexte de la radiologie pour venir faire un lobby d'extrême gauche. Bien, tant mieux, il n'y a pas de problème, qu'ils fassent ce lobby-là, c'est leur job.
Moi, je viens ici exposer le plus rationnellement possible, avec les bons et les mauvais cotés, notre situation. Et, à preuve, je vous le dis à tout le monde, il y a des éléments dans la loi qui sont une maudite bonne idée, c'est clair. Mais il y en a un pas qui n'a pas de sens, qui est celui-là: le permis, ce n'est pas nécessaire, le pouvoir discrétionnaire du ministre, ce n'est pas nécessaire, la procédure actuelle, c'est du délire.
Vous lirez le document, là, et, dans le processus de réglementation ? «processus» qui est un mot que je déteste ? dans le processus de réglementation qui est en place, on va jusqu'à déterminer la tenue vestimentaire des employés de la clinique, là. Écoutez, là, il y a des règles là-dedans qui font en sorte qu'un individu pourrait, par ce qui est proposé dans la loi n° 34, ne pas avoir le droit de travailler en cabinet et avoir, au même moment, le droit de travailler à l'hôpital. Si ça, ce n'est pas de l'abus, je ne sais pas comment on appelle l'abus en termes légaux. Évidemment, là je fais de la pratique illégale du droit, là, on se comprend.
Mais il n'en reste pas moins que c'est un fait, vous avez des articles dans la loi qui peuvent interdire à un médecin de pratiquer en cabinet, et, au même moment, dans la même circonstance et pour les mêmes raisons, il va aller travailler à l'hôpital. Vous avez une réglementation, là, qui va dire à un médecin, un médecin dans son cabinet, qui fait une pratique de chirurgie mineure, d'avoir un pharmacien pour gérer sa pharmacie. Bien là, à un moment donné, là...
Écoutez, là, ce sont des mesures institutionnelles appliquées à des cabinets. Partout sur la planète, particulièrement aux États-Unis... Aux États-Unis, qui est le royaume des avocats, on le sait tous, aux États-Unis, le sport national, c'est de poursuivre. Alors, juste pour vous amuser, moi, quand j'ai fait mon «fellow», en Californie, il y avait un grand drame, en Californie, qui venait du fait que les candidats qui sortaient des écoles, de collèges allaient plus en droit qu'en médecine, ou en génie, ou ainsi de suite. Il y avait une crise qu'ils appelaient des cerveaux, les cerveaux allaient tous en droit. Je sais qu'il y a des parlementaires qui sont avocats, là, mais il n'en reste pas moins qu'aux États-Unis, s'il y a une place...
M. Drainville: ...cerveaux.
M. Barrette (Gaétan): Oui. S'il y a une place, dans le monde, où les règles sont strictes et servent à une chose, qui est de poursuivre son voisin, c'est bien aux États-Unis. Et, aux États-Unis, les règles de sécurité, et d'agrément, et d'accréditation en cabinet ne sont pas celles de l'hôpital. Ici, on propose de mettre en cabinet les règles de l'hôpital. Écoutez, là, il y a des médicaments pour ça, là. Vous le savez, M. le ministre, là, ça se traite. Alors, c'est du délire, là.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre, un dernier commentaire? Un dernier commentaire, M. le ministre? Il reste une minute.
M. Bolduc: Oui. Oui, je suis d'accord avec vous, là, à toutes les fois qu'il y a un délire, c'est des antipsychotiques qu'il faut donner, mais excepté qu'on n'a peut-être pas la même définition du délire. Mais ça, c'est tout à fait correct. Écoutez, pour conclure...
M. Barrette (Gaétan): C'est pour ça qu'il y a des spécialistes.
M. Bolduc: Pour conclure...
Des voix: ...
M. Bolduc: Moi, je suspecte qu'actuellement l'opposition et la FMSQ, ils font... ce sont des partenaires dans ce dossier-là. Non, ce n'est pas ça?
M. Barrette (Gaétan): Non, c'est parce que j'ai le sens de l'humour développé, manifestement, là.
M. Bolduc: O.K. Seulement pour vous dire en...
M. Barrette (Gaétan): ...aussi.
M. Bolduc: Oui. Seulement pour vous dire, en conclusion, que ce que je peux voir, là, c'est qu'en général vous êtes quand même en accord avec 34, sauf qu'il y a des éléments que viscéralement vous pensez que ça n'a pas de bon sens. Mais par contre le sens du projet de loi, l'encadrement, la qualité et la sécurité...
M. Barrette (Gaétan): C'est écrit noir sur blanc dans notre mémoire, il y a des éléments là-dedans avec lesquels on est en accord et il y a des éléments avec lesquels on pense qu'il y a une médication qui devrait... C'est comme ils disent dans la loi, hein: il y a un remède qui devrait être appliqué au problème.
M. Bolduc: Oui. Mais ce que j'ai vu...
M. Barrette (Gaétan): La loi emprunte beaucoup à la médecine.
M. Bolduc: Juste pour conclure, ce qui est encore plus fort que les médicaments, c'est le politique. C'est le politique parce que c'est eux autres qui ont le dernier mot dans des dossiers comme ça.
M. Barrette (Gaétan): Oui, ça... mais ça, c'est triste et c'est dangereux, parce que le rôle de la Chambre n'est pas de faire passer ses impressions ou les impressions de ses... Votre rôle est de trancher où c'est raisonnable. À moins que j'aie mal compris le système dans lequel je vis.
M. Bolduc: Moi, je vais vous dire, mon rôle, c'est d'être un peu l'avocat ? même si vous avez ri un peu du terme, là ? c'est d'être l'avocat des citoyens pour m'assurer qu'il y ait un système de santé qui est très bon.
M. Barrette (Gaétan): Oh! Alors là, je dis: Attention! Je dis attention parce que les gens qui viennent ici faire des représentations, auxquelles vous pouvez souscrire, ne sont pas nécessairement des champions de la rigueur, là. Je ne veux pas critiquer le bien-fondé des intentions des gens, qui sont toutes de bonnes intentions, mais il n'en reste pas moins que les gens qui viennent ici, dans ce dossier-là, disent des choses qui ne sont pas fondées. Elles ne sont pas fondées la plupart du temps. Alors, je les ai entendus aujourd'hui, là. Alors, ce sont toutes des personnes bien intentionnées qui viennent, toute la gang. Ils veulent tous le bien de tout le monde, de son frère, sa mère, ainsi de suite, particulièrement le leur. Mais est-ce que l'argument est rigoureux? Et est-ce que le chemin qu'ils prennent ne porte pas ouverture à abus? Moi, je pense que oui.
Comme je le dis souvent, ce n'est pas la gauche ou la droite qui compte, c'est le centre, pour une seule raison: la gauche, il y a toujours des... souvent des mesures exagérées qui nécessitent d'être gérées par la droite, et la droite aussi, qui... mesures évidemment d'être tempérées par la gauche. Le centre est important. Vous avez des gens qui se présentent ici en disant des énormités et qui ne sont pas factuelles et ne se vérifient pas, et vous avez à trancher pour ne pas faire d'abus législatif, et c'est vers là qu'on s'en va, en ce qui me concerne.
Le Président (M. Kelley): À ce moment, je dois mettre fin à cet échange. Je comprends pourquoi Me Bellavance est à vos côtés, pour vos commentaires sur le monde des avocats. M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville: Merci, monsieur...
Une voix: ...
Le Président (M. Kelley): Je suis certain.
M. Drainville: Merci, M. le Président. D'abord, sur le projet de loi n° 95, je tiens à apporter une précision, là. J'ai fait un commentaire tout à l'heure, là, mais, ça, je suis sérieux là-dessus, là, sur la protection de la propriété québécoise de nos cabinets de radiologie, la propriété québécoise par des radiologistes québécois... en fait, je devrais dire de nos cabinets d'imagerie médicale, je dois dire, au bénéfice surtout du ministre de la Santé actuel, M. le Président, que, ce projet de loi n° 95, son prédécesseur n'en voulait pas, n'était pas intéressé à le faire adopter. Et c'est parce que, oui, le président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec a ? comment dire? ? pris l'initiative de nous sensibiliser à cette réalité-là, au danger de la propriété étrangère et de l'acquisition par des intérêts étrangers de certains cabinets de radiologie, le fait qu'il ait pris cette initiative, le fait qu'il ait alerté également les médias, ça a certainement été le point de départ de tout ce processus-là.
Mais, à un moment donné, le prédécesseur du ministre de la Santé, nous l'avons approché, nous lui avons soumis qu'il fallait bouger rapidement pour protéger la propriété québécoise de nos cabinets de radiologie, et il nous a répondu: Ce n'est pas urgent de le faire. Et c'est à ce moment-là que nous l'avons poussé à bouger. Et finalement, avec aussi l'appui de l'ADQ, je dois le souligner, nous avons, ni plus ni moins, obligé le ministre de la Santé à déposer le projet de loi n° 95 et à protéger ainsi la propriété québécoise de nos cabinets de radiologie. Je pense, c'est important, M. le Président, pour le procès-verbal, de le noter.
Parce que, si ça avait été seulement du gouvernement actuel et du ministre libéral prédécesseur de celui qui occupe le poste actuellement, je ne suis pas sûr que nos cabinets de radiologie seraient protégés comme ils le sont actuellement par la loi n° 95, ou qu'ils l'ont été par la loi n° 95. C'est factuel, ce que je dis là, M. le président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec.
Maintenant, des questions. Dans votre mémoire, page 31, quatrième paragraphe, vous dites... vous parlez du projet de loi n° 33 et vous réitérez ou vous... Comment dire? Vous faites le lien, qui existait dans le projet de loi n° 33, entre la garantie d'accès pour trois chirurgies, genou, hanche, cataracte, garantie d'accès donc au sein du régime public, à défaut de laquelle garantie d'accès il serait possible, pour ces trois chirurgies, d'être faites dans un CMS, dans un cabinet privé, les trois chirurgies pour lesquelles d'ailleurs une assurance privée duplicative pourrait être contractée, toujours en vertu de 33. Et là vous posez la question, fort justement, me semble-t-il: Si on inclut, si on ajoute à ces trois chirurgies, genou, hanche, cataracte, pour lesquelles il y a une garantie d'accès, si on ajoute les 55 chirurgies qui sont prévues dans le règlement de 33, est-ce à dire ? je pense que c'est ça, la question que vous posez ? est-ce à dire que le gouvernement a l'intention d'offrir éventuellement, pour ces 55 chirurgies, une garantie d'accès? Et, si c'est le cas, et, si c'est le cas ? il me semble que c'est la question que vous posez ? est-ce que le gouvernement a l'intention, éventuellement, également, de permettre une assurance privée duplicative pour ces 55 chirurgies? Est-ce que je me trompe? Est-ce que j'ai bien compris le sens du propos du quatrième paragraphe?
n(20 h 50)nM. Barrette (Gaétan): Oui. Alors, vous avez parfaitement compris. Malheureusement, tantôt, j'ai été trop long, je n'ai pas eu le temps de me rendre à cet élément-là. Oui, c'est exactement le sens.
Je vous ai dit qu'on venait faire une présentation sur l'incohérence et les contradictions de la situation actuelle. On a, exactement comme vous le dites, la loi n° 33 qui s'étend à la loi n° 34 en augmentant de trois à 55 la liste des chirurgies. Mais l'esprit de la loi n° 33, initial, était précisément ça, d'augmenter l'accès, de passer par les CMS, si nécessaire, pour garantir l'accès, et, ce faisant, si on faillissait, d'offrir ça à... d'ouvrir ça à l'assurance privée. Donc, dans un souci de cohérence, on s'attend ? et ce n'est pas le cas actuellement ? à ce que le ministre détermine maintenant des délais raisonnables pour les 55 chirurgies. Alors, vous comprendrez que ça nécessite aussi un délai raisonnable pour se faire relever les paupières. Parce que relever les paupières, ça fait partie des 55 chirurgies.
Alors, il y a là, encore une fois, une incohérence. On prend l'esprit d'une loi qu'on extensionne dans une autre, et on prend... on enlève les bouts qui font notre affaire, puis on garde les bouts qui font... c'est-à-dire qui ne font pas notre affaire, et on garde les bouts qui font notre affaire, puis on en rajoute. Alors, si on est pour être cohérent, ces 55 chirurgies là doivent avoir un délai maximal et l'ouverture au privé. Et donc, c'est l'État, là, qui passe de trois vers le privé à 55 vers le privé, ce n'est pas nous, sur la base de l'accessibilité au patient. Alors, si on est pour être cohérent, il faut faire ça.
Comment se fait-il qu'actuellement ce n'est pas statué? Et c'est implicite. En ce qui nous concerne, c'est implicite. La 34 est l'extension de 33. Donc, ces 55 là vont donc être assujetties à un accès en dedans de tant de temps, incluant des chirurgies esthétiques, sinon ça va aller au public, sinon ça va aller au privé. Mais là, à un moment donné, il y a une incohérence, là.
M. Drainville: Vous comprenez, à ce moment-là, pourquoi des groupes, dont vous questionnez par ailleurs la cohérence, mais, dans ce cas-ci, dans ce cas-ci, vous pouvez comprendre pourquoi il y a des groupes qui s'inquiètent que cette longue liste de chirurgies puisse mener éventuellement à un élargissement de l'assurance privée duplicative, puisque vous-même posez la question, vous-même soulevez cette possibilité.
M. Barrette (Gaétan): Bien, voilà! Alors, nous, par contre, on laisse la chance au coureur, ce qu'on ne fait pas dans notre sens. Nous, on est les bandits à partir de la case départ puis... les permis. Mais on laisse la chance au coureur. On se dit que le gouvernement, dans sa grande sagesse, va mettre un délai raisonnable pour avoir la procédure, si ça ne marche pas en clinique ou à l'hôpital, il y aura une ouverture. Mais là on s'attend à ce que l'État ne faillisse pas. Parce que, pour aller au privé, il faut avoir manqué son coup dans le délai. Là, il y a une incohérence qui vient du fait qu'on passe de trois garanties à 55 qui sont dans les limbes. Et, par-dessus ça, on met... on met quoi? On met une réglementation supplémentaire pour contrôler les docteurs. Alors, on dit: Soyons cohérents, mettons des délais. Si ça ouvre la porte au privé, ce n'est pas notre responsabilité.
Vous avez raison de le critiquer. Je comprends les gens qui viennent ici pour le critiquer. Mais le vrai débat, c'est: L'État a-t-il vraiment les moyens? Et est-il même raisonnable, pour certaines chirurgies, de mettre des délais maximums? Est-ce que c'est même raisonnable? Est-ce que c'est raisonnable, là, de mettre des délais, d'extensionner 33 vers 34 pour des chirurgies de blépharoplastie, qui est une chirurgie pour remonter les paupières? Là, à un moment donné, il y a une incohérence. Et je reviens à ce que je disais à la case départ: Pour atteindre l'objectif de la sécurité, il y a le collège, il y a l'agrément, il y a des organismes, en quoi le pouvoir du ministre va changer quelque chose?
M. Drainville: Le ministre soutient que les 55 chirurgies qui s'ajoutent, là... Entre 53 et 55, dépendamment à qui vous parlez. Nous, on vient de calculer, on est à 54. Enfin, on va dire entre 53 et 55, plus les trois, plus les trois prévues dans 33, genou, hanche, cataracte. Le ministre soutient que ces 55 chirurgies ? on va utiliser ce chiffre-là pour les fins de la discussion ? se font déjà au privé, dans des cliniques privées. Est-ce que vous pouvez confirmer ça?
M. Barrette (Gaétan): Pas nécessairement. C'est-à-dire que la liste des 55 chirurgies qui vous est fournie sont des chirurgies qui se font à la fois à l'hôpital et en clinique. Dans certains cas, elles se font majoritairement en clinique ou de façon...
M. Drainville: Elles se font toutes en clinique.
M. Barrette (Gaétan): Elles se font toutes en...
M. Drainville: Même si elles ne se font pas exclusivement en clinique.
M. Barrette (Gaétan): Elles ne se font pas exclusivement en clinique. Elles se font en clinique. Elles se font toutes en clinique...
M. Drainville: Mais elles se font toutes en clinique, ça, vous le confirmez?
M. Barrette (Gaétan): Non, non, non. Il faudrait que je prenne ma liste, là. Attendez une minute, là. Alors, il y a des chirurgies ? bougez pas, là ? qui vont m'apparaître. Là, j'ai le projet de loi, mais je n'ai pas la liste. Je vous donne un exemple, là, qui me vient à l'esprit, parce que je les ai presque toutes par coeur. Je ne connais pas de clinique ? et là je le dis avec cette réserve-là ? qui fasse, par exemple, des hystérectomies, là. Alors, l'hystérectomie est dans la liste des 55. Je n'en connais pas, de cliniques qui font ça actuellement.
Est-ce que, dans le cadre qui est celui que l'on connaît, qui est encore en vigueur, là, jusqu'à nouvel ordre, des CMS, ça pourrait se faire? La réponse, c'est oui parce qu'évidemment la loi n° 33, elle a été faite pour ça. La loi n° 33 a été faite pour décharger l'hôpital de procédures plus lourdes mais pas nécessairement trop lourdes, dégager l'hôpital où se fait des chirurgies mineures, entre guillemets, là ? parce que, bon, on se comprend que mineur par rapport à enlever une tétine, c'est un peu plus, là ? mais dans une clinique qui était correcte, là, bien agrémentée, et ainsi de suite, pour libérer ces salles d'opérations là pour faire le lourd. Alors, l'hystérectomie fait partie de cette catégorie-là.
M. Drainville: Mais comment savoir, M. Barrette, comment... Dr Barrette, comment savoir si ces 55 chirurgies se font bel et bien dans les cliniques privées actuellement? Est-ce qu'il y a moyen...
M. Barrette (Gaétan): C'est le danger de la réglementation actuelle.
M. Drainville: Est-ce qu'il y a moyen de prouver ça? Est-ce qu'il y a moyen de démontrer ça? Est-ce que quelqu'un peut nous prouver ça quelque part ici, au Québec? Que ce soit vous, que ce soit le ministère, y a-tu quelqu'un...
M. Barrette (Gaétan): Je peux vous... Parce que, là, vous me demandez une démonstration absolue, là. Alors, je ne peux pas vous faire... Je peux vous faire une démonstration absolue de toutes les chirurgies qui se font au Québec, ce qui est probablement 54 sur 45... 54 sur 55, mais je ne peux pas vous prouver qu'il n'y a pas d'endroit où il ne se fait pas d'hystérectomie. Je pense qu'il n'y en a pas. Et peut-être qu'il y a eu une hystérectomie à date, là, à la clinique Rockland, parce que c'est la seule qui a une entente avec un hôpital, mais ce serait la seule, à ma connaissance.
M. Drainville: Et est-ce qu'on peut avoir le nom des cliniques privées où se font ces chirurgies avec les chirurgies par clinique pour qu'on puisse dire: Bien, voici...
M. Barrette (Gaétan): C'est-à-dire qu'on peut, nous, avoir un registre des cliniques où se font les chirurgies qui sont payées par le public, mais on ne peut pas avoir... on n'a pas de registre des chirurgies qui ne se font pas dans le public. Moi, je n'ai pas de registre de toutes les chirurgies plastiques, esthétiques qui se font au Québec, là. Bien, moi, je suis une...
M. Drainville: Comment est-ce qu'on a fait pour faire cette liste-là? Comment est-ce que le ministère a réussi à faire cette liste-là?
M. Barrette (Gaétan): Ah! bien, ça, c'est parce que, là, vous me posez une autre question. Ça, ça a été fait conjointement avec le ministère, à l'époque. C'est-à-dire que, nous, initialement, il y a eu les trois chirurgies, et le ministre à l'époque a manifesté sa volonté d'étendre ces trois chirurgies-là à d'autres et nous a demandé de faire un registre, auquel on s'est opposés, pas par principe mais par faisabilité, parce qu'il est impossible, il est impossible, à mon avis, de déterminer de façon absolue, aujourd'hui, la liste précise de tout ce qui se fait en cabinet. Ce n'est pas possible.
Alors, on a rencontré nos gens, nos chefs... nos présidents d'association chirurgicale et on leur a demandé de nous faire un listing de toutes ces procédures-là. Même nos présidents d'association pensent qu'il y en a qui sont oubliées là-dedans. Ils pensent être assez précis, là, mais probablement qu'il y en a qui sont oubliées. Alors, si elles sont oubliées le jour où la loi n° 34 est en application, bien ce service-là, il ne peut plus se donner, il s'en va à l'hôpital. Alors, perte d'accès pour ce service-là.
Alors, personne n'a ce registre-là. Je ne l'ai pas, vous ne l'avez pas. C'est empirique. L'État ne l'a pas. C'est par conversations, échanges d'information. Il y en a qu'on peut avoir de façon absolue, c'est-à-dire celles qui sont payées par la RAMQ,elles sont visibles. Celles qui ne sont pas visibles au paiement, bien là, on ne peut pas les mettre dans une liste, on ne les a pas.
M. Drainville: O.K. L'imagerie médicale, comment est-ce qu'on pourrait améliorer l'accès à l'imagerie médicale, Dr Barrette?
M. Barrette (Gaétan): L'accès à l'imagerie médicale, la première chose que vous devez faire, et c'est très simple, sachez que, dans l'immense majorité des cas... Parce qu'il n'y a jamais rien d'absolu dans la vie, malheureusement, et je l'admets, d'où la nécessité de ne pas avoir un pouvoir absolu. C'est comme ça, il n'y a rien d'absolu dans la vie. Alors, du moins, du temps où je dirigeais, jusqu'à il y a deux ans, cette organisation-là, la consigne était claire: le public doit marcher au maximum avant d'aller faire du privé. Et c'est encore la consigne de l'association.
M. Drainville: Ce n'est pas la pratique, ce n'est pas la réalité.
n(21 heures)nM. Barrette (Gaétan): C'est possible que, dans... Bien, laissez-moi finir, par exemple. Alors, l'État a un rôle à jouer, et je vous donne un exemple, O.K., un exemple pragmatique, là. Il y a eu une période de temps où, à l'Hôpital Charles-Le Moyne, l'appareil de résonance magnétique fonctionnait cinq jours par semaine, de 8 heures à 16 heures, alors que, dans un hôpital comme le mien, les appareils fonctionnent de 7 h 30 le matin à minuit le soir, sept jours sur sept. Alors, avant d'aller dans le privé chez, nous, là... parce qu'on en fait, je fais partie des pécheurs mais qui vous dit: Tarifez-le, puis ça ne me dérange pas. Mais chez nous, là, on va au cabinet quand on a fait marcher la machine au maximum. Alors, dans un hôpital comme Charles-Le Moyne, ce n'est que récemment qu'on a octroyé les budgets nécessaires pour que la machine fonctionne 16 heures par jour, sept jours sur sept. Et, pour ceux qui pensent à faire fonctionner les machines 24 heures par jour, bien on l'a déjà essayé et ça ne marche pas. Pourquoi? Parce que le public refuse de se présenter après 11 heures. Je vous donne un exemple. Mon hôpital, on a tenté de donner des rendez-vous jusqu'à 2 heures du matin, les gens ne sont pas venus.
M. Drainville: Précisez, s'il vous plaît: Maisonneuve-Rosemont.
M. Barrette (Gaétan): Maisonneuve-Rosemont. Et, dans mon hôpital, les examens qui sont faits au scan et en résonance entre 10 heures et minuit, les rendez-vous sont donnés à 10 heures, et tout le monde attend sans le savoir, parce qu'on les fait venir à 10 heures pour être certains d'être pris en otages, ils sont là, là, ils vont rester jusqu'à minuit pour avoir leur examen, sinon c'est des gens qui ne se présentent pas. Alors, comme notre mission à nous, comme spécialistes, est de donner des services, bien on donne des services puis on prend quelques petits détours pour s'assurer que les gens aient leurs services comme en les faisant venir tout le monde à 10 heures. Alors, un hôpital comme Charles-Le Moyne, pendant des années, n'a pas eu les budgets ? parce que, les budgets, là, ce n'est pas les médecins qui le décident, là ? pour faire marcher leurs machines le soir et la fin de semaine. Là, ils l'ont.
Alors, première condition pour donner plus de services, faites tourner les machines. Ah! c'est sûr que, quand ça demande du personnel, parfois on peut avoir des problèmes. Mais il commence à y avoir plus de personnel dans le réseau, là. Il y en a plus, là. Puis il y a du monde qui aime ça, travailler le soir et la fin de semaine, là, les gens gèrent leur horaire, et il y a de l'ouverture pour ça, et ça se fait bien, et les machines sont de plus en plus performantes. Le gouvernement, et ça, je félicite le gouvernement là-dessus, il y a eu, dans les dernières années, un rehaussement du parc d'équipements technologiques extraordinaire, bon, ça, il faut le reconnaître, et c'est encore le cas actuellement. Et le bénéfice du rehaussement est à l'effet que les machines sont plus performantes. Donc, la capacité de faire des examens dans le public est plus grande, mais elle n'est pas exploitée.
M. Drainville: Avez-vous déjà évalué le coût, vous, l'Association des radiologistes, présumément, ou peut-être la FMSQ, le coût d'ajouter l'imagerie médicale au panier de services?
M. Barrette (Gaétan): Vous voulez dire, ce qui est dans le privé le ramener au public. C'est ça que vous voulez dire?
M. Drainville: Oui, c'est-à-dire payer l'imagerie médicale hors établissement.
M. Barrette (Gaétan): Bien, hors établissement, il y en a une grande... l'immense majorité de l'imagerie médicale en cabinet est déjà payée par le public. C'est une autre conception erronée que la population a et véhicule à une table comme celle-ci: cabinet privé égale privé. Non. Cabinet privé égale, au Québec, conventionné avec des petits... des «speckles» sur l'écran radar qui sont des activités privées voulues par l'État.
Parce que la résonance magnétique, le scan et l'échographie ? parce que vous parlez d'imagerie ? c'est quand même l'État qui a décidé de ne pas assurer ça en cabinet pour des raisons de contrôle de coûts. C'est une raison de contrôle de coûts. Sachez ça, là. Historiquement, ça n'a pas été assuré, à la demande expresse du gouvernement qui voyait arriver une technologie pour laquelle on était au moins 15 ans en retard. Et, quand on est 15 ans en retard, on peut évaluer dans l'autre pays ce que ça coûte, ou dans les autres provinces canadiennes. Et, devant l'avalanche de coûts qui s'en venait, on a décidé à l'époque de ne l'offrir qu'en public à l'hôpital et de ne pas l'assurer en cabinet, en sachant bien qu'à un moment donné ça allait ouvrir la porte au développement du privé.
M. Drainville: Alors, est-ce que ça devrait être assuré en cabinet?
M. Barrette (Gaétan): Bien, c'est-à-dire, je vous l'ai dit tantôt, si vous voulez l'assurer, on va négocier des tarifs, puis ça va me faire plaisir.
M. Drainville: Et est-ce qu'on a déjà fait une évaluation des coûts? À votre connaissance, y a-tu quelqu'un qui...
M. Barrette (Gaétan): Non. Nous, à l'association, on a déjà regardé ça. C'est sûr que ça coûterait facilement entre 80 et 100 millions de dollars probablement, à mon avis, là, compte tenu du volume que j'estime, parce que, là, bien, il faut ramener le coût de la machine, les infrastructures. Parce que les gens pensent que c'est de la magie, là, en cabinet, là. Sachez qu'installer une machine de résonance magnétique, là, c'est, au bas mot, ici, dans le public ou dans le privé, au moins 3 millions de dollars, minimum, là. C'est des dollars. Après ça, c'est des centaines de milliers de dollars par appareil et par quart de travail de budget de fonctionnement. Alors, si vous voulez les ramener, il n'y a pas de problème, nous sommes une organisation négociante, nous négocierons. Mais, si vous voulez le faire, bien il y a un coût qui est au bout de la ligne.
Parce qu'il y a un problème, là, dans ce dossier-là, il y a un problème, loi n° 33 et tout ce qui s'est dit autour de ce sujet-là, l'État, que vous le voulez ou non, rationne les services à la hauteur qui va faire en sorte que le public pense que c'est des bons services. Mais ce n'est pas vrai que l'État donne des services à la quantité demandée et à la qualité demandée, à tout le monde, là. Si on voulait faire ça, ça fait longtemps que l'État aurait rapatrié le privé dans le public, ça fait longtemps qu'on aurait de l'embauche, ça fait longtemps que les salaires seraient meilleurs pour attirer du monde, et ainsi de suite. Ce n'est pas le cas.
M. Drainville: O.K.
M. Barrette (Gaétan): Alors, on le sait, et vous le savez, on vit avec, on négocie. Mais, à un moment donné, il faut prendre ça en considération, c'est la réalité des choses.
M. Drainville: O.K. Je veux parler des cliniques d'avortement. Si je vous ai bien compris, là...
M. Barrette (Gaétan): Vous m'avez bien compris.
M. Drainville: ...vous craignez qu'effectivement les...
M. Barrette (Gaétan): Non, non, je vous annonce que. Je ne crains pas. La position de l'association des gynécologues est formelle: les gynécologues vont arrêter, non pas pour faire un moyen de pression. Les gynécologues, pensez-y, là, vous avez 11 pages, dans le mémoire... 12 pages, dans le mémoire, de procédurite, 12 pages. Est-ce que les gynécologues, pour enlever un kyste périnéal ou faire une IVG, vont passer par ça pour faire quelques procédures dans le lot de leur pratique? Non. Ils vont dire: Bienvenue à l'hôpital. Et je les comprends, et je les encourage. Ce n'est pas un moyen de pression, c'est le bon sens. À un moment donné, on a... et je le répète, vous avez un objectif, comme parlementaires, qui est la sécurité. On y souscrit, on est d'accord. Vous prenez un chemin infernal. On n'est pas obligés de passer comme un fakir sur le tapis de clous, et de verre cassé, et de tisons ardents pour arriver à la sécurité. On peut le faire autrement. Mais vous prenez un chemin qui est exagéré.
M. Drainville: O.K. Alors, vous êtes en train de nous annoncer quoi, là? Que les...
M. Barrette (Gaétan): Non, ça, c'est une annonce.
M. Drainville: ...que les cliniques privées qui font actuellement... les cliniques médicales avec des médecins participants qui font actuellement des interruptions volontaires de grossesse vont cesser de les faire. C'est ça que vous dites?
M. Barrette (Gaétan): Alors, je vous annonce que les gynécologues qui le font vont arrêter. Demain... je ne sais pas quelle va être la position de la FMOQ, eux autres aussi en font. Mais je peux vous dire que, de notre côté, on n'en fera plus. Je peux vous dire que les plasticiens vont arrêter d'enlever des tumeurs, c'est sûr, sûr, sûr, des petites tumeurs qui s'enlèvent, là...
M. Drainville: ...des IVG qui sont faites par des membres de la FMSQ, qui sont des médecins spécialistes.
M. Barrette (Gaétan): Bien, écoutez, moi, comme vous le savez, je suis président de la FMSQ, là, je n'ai pas les statistiques de l'autre côté. Alors, c'est à vous de regarder ça, là.
M. Bolduc: ...les IVG, en majorité, c'est fait par des omnipraticiens. C'est ça, là, ce n'est pas...
M. Barrette (Gaétan): Peut-être que demain vous allez avoir une autre mauvaise nouvelle, je ne le sais pas. Mais c'est clair que, de notre côté, c'est ça. Et il y en a une autre série, là. Comme je vous disais, en plastie, il y a des extractions, des exérèses de tumeurs qui vont ne plus se faire pour des raisons techniques. Puis on n'a même pas abordé la question de la tarification. Parce que la loi ne prévoit pas corriger l'impair qui existe actuellement et est décrié de tout le monde. Puis on n'embarquera pas là-dedans à soir parce qu'on va passer encore une heure là-dessus, au moins.
M. Drainville: Il me reste trois questions, il nous reste cinq minutes. Je pose cette question-là. La question que je m'apprête à vous poser, je vais la poser à tout le monde: Est-ce que vous seriez en faveur qu'on modifie l'article 15.1 de la Loi sur l'assurance maladie afin que les chirurgies qui sont admissibles à l'assurance privée soient déterminées par la loi et non pas par un simple règlement, comme c'est le cas actuellement? Avez-vous un problème avec ça, vous?
M. Barrette (Gaétan): On a fait nos représentations là-dessus, là. Nous, ce qu'on veut, c'est quelque chose de raisonnable pour toutes les parties. Alors, que ce soit par l'Assemblée nationale ou par le ministre, là, regardez, moi, je n'ai pas de problème avec ça, là.
M. Drainville: Vous disiez tout à l'heure qu'il fallait être le plus démocratique possible.
M. Barrette (Gaétan): Tout à fait. Tout à fait.
M. Drainville: Si on veut l'être, il vaudrait mieux que ce soit l'Assemblée plutôt que simplement le ministre.
M. Barrette (Gaétan): Tout à fait. C'est-à-dire que, si vous le prenez sous l'angle du pouvoir discrétionnaire, je ne peux qu'abonder dans le sens de l'étendue de l'affaire.
M. Drainville: Voilà. Ça vous va?
M. Barrette (Gaétan): Oui, oui.
M. Drainville: On est d'accord? Ça nous amène justement... Il me reste deux questions. Ça nous amène à votre prétention ? et je le dis dans le sens juridique du terme ? à l'effet que c'est abusif, le pouvoir que se donne le ministre, c'est abusif. Vous parlez d'un projet de loi qui est discriminatoire envers les médecins spécialistes. Est-ce que vous entendez le contester devant les tribunaux?
M. Barrette (Gaétan): Sans aucun doute. Sans aucun doute.
M. Drainville: En vertu de quoi? La charte?
M. Barrette (Gaétan): Écoutez, là, l'autonomie professionnelle, je vous l'ai dit en introduction, ça a été ma deuxième phrase, on a différents intérêts à défendre, dont celui-là. Alors, écoutez, je vais enlever mon chapeau de fédération, là, je vais prendre mon chapeau de citoyen. Moi, je suis un professionnel, là. Je suis allé à l'école, on m'a sélectionné pas exactement parce que j'étais tarte, c'est parce que j'avais une certaine capacité. Je suis arrivé au bout, j'ai démontré ma compétence. Il y a un organisme qui a décrété que je pouvais le faire. Et là je vais avoir un ministre qui va avoir le pouvoir de me dire oui ou dire non sans mon consentement ou sans que mes propres instances y aient consenti? Je trouve que, là, c'est dépasser les bornes, là. Moi, je pense que c'est dépasser les bornes.
Je vais vous faire un parallèle, là, qui est simple, qui est à la portée de tout le monde, parce que des fois c'est compliqué, là, notre affaire. Mais prenez la RAMQ, là, au moment où on se parle, quand, moi, je finis mon cours de médecine, comme étudiant, là, je passe l'examen du collège, le collège me donne mon permis de pratique, la RAMQ n'a pas le pouvoir de m'empêcher de facturer. Le gouvernement peut me donner un menu de postes où je peux aller ou ne pas aller, des choses comme ça, mais, à partir du moment où je commence à pratiquer, là, j'ai le droit de facturer en quelque part.
Dans ce projet de loi là, un coup que le gouvernement va m'avoir... le Collège des médecins va m'avoir donné mon diplôme, c'est comme si la RAMQ avait le pouvoir de m'empêcher de facturer, selon son bon vouloir, sa discrétion. Il y a un problème. Ce n'est pas normal. Pourquoi les médecins et seulement les médecins... Je comprendrais, là, si on était en Union soviétique puis que tout le monde avait ça, là. Mais pourquoi, dans notre société, on en arrive à ça? Il y a un problème de rigueur intellectuelle ici ou bien d'intention non avouée.
n(21 h 10)nM. Drainville: Donc, vous prétendez, dans le fond, que le ministère de la Santé est en train de se substituer au Collège des médecins.
M. Barrette (Gaétan): Je ne le prétends pas, je le constate, c'est une certitude. Le Collège des médecins, c'est lui qui, dans la loi, s'occupe de l'accréditation, de la certification des médecins et du suivi en termes de qualité. Le ministre va dédoubler toutes ces fonctions-là. En quoi est-il nécessaire à l'État de dédoubler une activité qu'il a déjà déléguée à un ordre professionnel? Et pourquoi c'est seulement les médecins spécialistes? Et là je comprends que, nous autres, on fait quelque chose de gravissime, là, en cabinet. Alors, pourquoi c'est juste là? Pourquoi pas ailleurs? À un moment donné, si ça, ce n'est pas de la discrimination, là... Peut-être que c'est de la discrimination «soft», comme de la porno «soft», mais c'est de la porno pareil. Et là c'est indécent. En ce qui me concerne, c'est indécent.
M. Drainville: Alors, si 34 est adopté, vous filez directement vers le juge.
M. Barrette (Gaétan): Directement. Là, si je donnais la parole à mon avocat, il vous confirmerait que je lui ai déjà donné cette consigne-là. Et ce n'est pas une menace. C'est que, là, c'est une attaque dans la fibre essentielle d'une profession qui a toujours été autonome. Nous n'avons pas mérité cette attitude-là.
M. Drainville: Est-ce que le Collège des médecins est d'accord avec votre interprétation de cette loi?
M. Barrette (Gaétan): J'en suis convaincu.
Le Président (M. Kelley): Sur ça, malheureusement, je dois mettre fin à cet échange.
M. Barrette (Gaétan): ...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Kelley): Mais merci beaucoup à Dr Barrette et les représentants de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, Me Sylvain Bellavance, Mme Nicole Pelletier.
Sur ça, je vais ajourner nos travaux à demain, mercredi le 27 mai, après les affaires courantes, soit vers 11 heures, dans cette même salle, afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 34, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les centres médicaux spécialisés et les laboratoires d'imagerie médicale générale. Merci beaucoup. Bonsoir.
M. Barrette (Gaétan): M. le Président, merci, et MM. les parlementaires également.
(Fin de la séance à 21 h 13)