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Version finale

37e législature, 2e session
(14 mars 2006 au 21 février 2007)

Le mercredi 29 mars 2006 - Vol. 39 N° 5

Consultations particulières sur le projet de loi n° 89 - Loi sur les activités cliniques et de recherche en matière de procréation assistée et modifiant d'autres dispositions législatives


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Table des matières

Auditions (suite)

Intervenants

 

M. Russell Copeman, président

M. Philippe Couillard

Mme Diane Legault

Mme Jocelyne Caron

Mme Denise Beaudoin

M. Pierre Reid

* Mme Annie Janvier, APQ

* Mme Diane Lavallée, CSF

* Mme Thérèse Mailloux, idem

* Mme Lucie Bélanger, idem

* Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Quinze heures neuf minutes)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare de nouveau ouverte cette séance de la Commission des affaires sociales. Je vous rappelle notre mandat: nous sommes réunis afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 89, Loi sur les activités cliniques et de recherche en matière de procréation assistée et modifiant d'autres dispositions législatives.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, Mme Caron (Terrebonne) va remplacer M. Bouchard (Vachon) et Mme Champagne (Champlain) va être remplacée par Mme Beaudoin (Mirabel).

n (15 h 10) n

Le Président (M. Copeman): Merci. Comme je le fais au début de chaque séance, je vous rappelle que l'utilisation des appareils téléphoniques et autres appareils semblables est défendue pendant les travaux de la commission, et je prierais tous ceux qui en font l'usage de bien vouloir les mettre hors tension.

Nous avons deux groupes de personnes ou personnes avec lesquels nous allons échanger cet après-midi. Nous allons débuter dans quelques instants avec la représentante de l'Association des pédiatres du Québec, et après terminer la journée les représentantes du Conseil du statut de la femme. L'ajournement des travaux est prévu pour quelque chose autour de 17 heures.

Auditions (suite)

Alors, sans plus tarder, au nom de mes collègues membres de la commission, je souhaite la bienvenue à Dre Janvier, qui représente la Société des néonatalogistes du Québec et l'Association des pédiatres du Québec. Dre Janvier, bonjour. La commission consacrera une heure de temps pour chaque audition, c'est-à-dire, vous avez 20 minutes pour votre présentation, et ce sera suivi par une période d'échange d'une durée maximale de 20 minutes avec les parlementaires des deux côtés de la table. Sans plus tarder... Je vais vous aviser quand il restera trois minutes, le cas échéant, pour mieux vous aider à conclure. Et, sans plus tarder, la parole est à vous.

Association des pédiatres du Québec (APQ)

Mme Janvier (Annie): Merci beaucoup. C'est un honneur pour moi d'être ici, aujourd'hui, et on m'a envoyée pour représenter les pédiatres du Québec mais aussi les néonatalogistes, qui s'occupent des nouveau-nés en difficulté. J'ai un baccalauréat en génétique. Ensuite, je suis allée faire ma médecine, ma pédiatrie, et ensuite ma néonatalogie, et je suis en train de terminer un Ph.D. en éthique biomédicale en ce moment. Donc, on m'a mandatée pour venir parler aujourd'hui.

Le mémoire, je ne sais pas si tout le monde l'a reçu, mais j'en ai donné 25 copies. Je vais passer un peu à travers le mémoire, mais je ne vais pas le lire ou m'attarder sur des points que vous pourrez lire vous-mêmes.

Essentiellement, c'est l'infertilité, un problème de santé qui augmente dans notre société, étant donné plusieurs facteurs, dont l'âge des femmes, qui augmente, qui décident de procréer. La dénatalité aussi augmente dans notre société. Et les techniques de procréation assistée, quand utilisées de manière responsable, ont leur place pour l'infertilité. Et, malheureusement, celles-ci en ce moment, à nos yeux, ne sont pas utilisées de façon responsable et ont engendré une épidémie de grossesses multiples évitables, qui sévit au Québec depuis 30 ans et plus.

Donc, juste pour survoler un peu les techniques qu'on peut faire: la stimulation ovarienne. On prend des médicaments pour avoir plus d'ovules. Si on a plus d'ovules, quand on a des relations sexuelles, on a plus de risques d'avoir des enfants. Par contre, avec ces médicaments, on peut avoir entre 7 % et 53 % ou plus de grossesses multiples. Les fertilisations in vitro: dans chaque clinique, il y a entre 25 % et 35 % de grossesses multiples. Fertilisation in vitro, donc on prend une ovule de la femme, on met un spermatozoïde en dehors du corps de la femme, et puis on met l'embryon à l'intérieur de la femme. On peut mettre un, deux, trois, quatre embryons. Donc, le plus on met d'embryons, bien entendu, le plus on est à risque d'avoir une grossesse multiple.

Juste pour illustrer ça, en cinq ans, au Canada, les jumeaux ont augmenté de 40 %, et les triplés, de 400 %, et la prématurité, par conséquent, a augmenté de 1,5 % au Québec. Encore pire que ça, c'est que les femmes des cliniques de fertilité sont plus âgées, et les femmes entre 35 et 40 ans, dans les dernières années, on a augmenté leur taux de jumeaux de 1 000 %. Et ces femmes sont déjà à risque si elles tombent enceintes normalement, sans aller dans une clinique de fertilité, d'accoucher d'enfants plus prématurés, sont plus à risque étant donné leur âge d'avoir des enfants prématurés. Donc, évidemment, quand on a des jumeaux, des triplets, on est encore plus à risque d'accoucher prématurément.

La prématurité, qui augmente au Québec, est un gros problème et est responsable de 70 % de la morbidité et de la mortalité néonatales. Il y a beaucoup de choses qu'on ne peut pas faire pour la prématurité: une femme de 37 ans qui veut avoir des enfants, on ne peut pas réduire 10 ans de sa vie; les malformations utérines, on ne peut pas toujours faire quelque chose pour, mais on peut très facilement réduire l'épidémie de grossesses multiples.

Ce que ça représente. J'ai regardé... Dans un des hôpitaux où je travaille, au Royal Victoria, j'ai regardé toutes les admissions en 2005: il y avait 375 admissions, 20 % de ces admissions étaient des bébés de grossesses multiples induites par la médecine, donc évitables. Donc, une admission sur cinq en néonatalogie... jusqu'à une admission sur cinq, et je suis certaine, dans certains centres, ça va être plus que ça, sont des admissions non nécessaires. À l'Hôpital Sainte-Justine ? j'ai parlé à ma collègue Francine Lefebvre ? les bébés de moins de 29 semaines qu'elle suit après qu'ils soient sortis, parce qu'ils sont à haut risque de séquelles, on est passé de 13 % à 26 % dans les derniers cinq ans. Et les bébés de moins de 29 semaines sont très à risque de séquelles à long terme.

Donc, cette épidémie de grossesses multiples évitables qui sévit depuis 30 ans a des complications maternelles. Je ne suis pas obstétricienne, mais on voit les mères qui sont alitées, qui ont plus de risque de thrombose, d'ostéoporose, de multiples problèmes, elles ont plus de risque d'avoir des césariennes, des saignements, des transfusions, des... la liste est très longue. Les complications foetales, il y a plus de risques de mort in utero, il y a plus de complications foetales, les bébés sont plus petits quand ils sont issus de grossesses multiples. Et il y a ce qu'on appelle la réduction foetale. Quand on met trois embryons dans le corps d'une femme, on s'attend, la plupart du temps, à ce qu'il en reste seulement deux. Quand, par contre, les trois sont encore là à 12 semaines, on peut en enlever un de ces trois-là, dans le sens qu'on peut injecter du KCl pour tuer cet embryon-là, pour le réduire à deux pour avoir des meilleures chances d'avoir une grossesse à terme.

Alors, ces parents qui paient déjà pour avoir la fertilisation in vitro, nous, on les voit en consultation pour essayer de les convaincre de réduire la grossesse de triplés à jumeaux, pour ne pas avoir plus de séquelles, plus de mortalité. Et c'est une épreuve épouvantable de devoir décider de passer à travers ça. Puis, la grossesse, il y a une chance sur... 25 % de chances que cette grossesse-là se déclenche juste au geste de terminer un des trois. Ça peut être quatre, aussi, on en termine deux, bon, il y a toutes sortes d'autres possibilités. Mais, les réductions foetales sont un problème dont on ne parle pas beaucoup et qui sont responsables de beaucoup de souffrance parentale.

Juste pour les chiffres, parce que je suis pédiatre avant d'être obstétricienne, les chiffres de prématurité, dans la population en général, pour une grossesse normale, c'est 7 % des enfants qui sont nés avant 37 semaines; les jumeaux, la moitié, 50 %; les triplés, 90 %. On regarde la paralysie cérébrale, par exemple, quatre fois plus de jumeaux ont la paralysie cérébrale que des singletons, des enfants seuls, et 40 fois plus les triplés. Ce qui amène beaucoup de coûts dans notre société, dans notre système public, et aussi beaucoup de coûts humains pour ces enfants-là et pour ces familles-là. Il faut noter aussi que, dans les familles avec des jumeaux et des triplés, ce n'est pas rare que les deux soient handicapés ou que deux des trois soient handicapés. Donc, juste avoir deux enfants, c'est l'enfer ? en même temps ? même un, c'est l'enfer!, mais, juste en avoir deux en même temps, et, quand les deux sont handicapés ou un des deux est handicapé, ce qui n'est pas rare dans les parents de jumeaux qui sont nés prématurément, c'est vraiment demander beaucoup à ces parents.

En termes de coûts, bon, quand on dit une admission sur cinq en néonatalogie, c'est énorme. Aussi, en termes de coûts maternels, j'ai révisé la littérature, pour des jumeaux, c'est deux fois plus; pour des triplés, 4,5 fois plus; et des quadruplés, quatre fois plus. Ça, c'est seulement la mère qui est à l'hôpital et qui accouche.

Ensuite, quand on regarde les enfants de moins que 2 500 grammes, si je regarde ici ? c'est 50 % des jumeaux et 90 % des triplés ? ...coûtent 17 fois plus cher à... 17 fois plus à la société que des enfants de plus que 2 500 grammes. M. Lambert a fait des calculs à ce sujet: il y a 564 grossesses multiples, en 2002, qui auraient pu être évitées, pour plus de 1 000 bébés, et on sait que c'est à peu près 17 millions, sans compter les frais néonataux, seulement la femme qui procrée et qui accouche, 17 millions pour notre société.

Un point très important aussi, c'est la vulnérabilité de ces parents-là, qui sont un peu pris en otage parce qu'ils paient pour leur procréation, ils paient seulement pour leur procréation, parce que notre système public paie pour toutes les complications qui s'ensuivent. Donc, ces parents, qu'il y en a qui réhypothèquent leur maison pour pouvoir avoir des enfants, ces parents-là sont vulnérables, bien entendu, et ils sont pris en otage par un système privé où le médecin est non seulement un médecin, mais devient aussi un vendeur.

n (15 h 20) n

Les taux de succès des cliniques de fertilité sont traduits en naissances vivantes. Donc, si vous regardez c'est quoi, les taux de succès aux États-Unis, fertilité US ou Canada, vous allez avoir: Naissances vivantes. Les naissances vivantes, on ne sait pas si le bébé va aux soins intensifs quatre mois, on ne sait pas s'il meurt après, on ne sait pas s'il va être handicapé, on n'a aucune idée, mais c'est les taux de naissances vivantes. Bien entendu, si on met trois bébés, puis il y en a trois qui sortent, on a plus de succès, comme clinique de fertilité, que si on en met un et un qui sort. Donc, si on dit à la femme: Votre risque d'avoir des bébés, x bébés au bout de deux ans est de tant, c'est évident ? ou votre chance; c'est évident ? qu'on va choisir où il y en aura plus. On aime mieux un deux pour un finalement pour le même prix que un pour un.

Il y a aussi bien entendu des conflits d'intérêts. Quand on est médecin et qu'on est vendeur, on a plus tendance à vouloir vendre notre Porsche que notre Mini, si je veux... pour m'exprimer de façon imagée. La plupart des médecins en fertilité, je pense qu'ils agissent de bonne foi, mais ils agissent aussi dans un désespoir parental qui pousse ces médecins-là et qui peut les pousser à implanter des jumeaux. Et vous allez voir la liste d'études dans mon mémoire, les parents veulent des jumeaux. Quand vous leur demandez, vous leur dites c'est quoi, les complications: Oui, oui, vous avez des risques, il y a un risque d'avoir des séquelles, les parents veulent tellement leur désir à court terme que, pour eux, avoir des jumeaux, c'est bien correct, parce qu'ils ne pensent pas que ça puisse leur arriver. Donc, 80 % des parents veulent des jumeaux, et, quand on regarde, 20 % des parents dans les pays où on ne transfère qu'un embryon, 20 % seulement accepteraient. Il y a 80 % qui refuseraient d'avoir seulement un embryon, ils en voudraient plus. Il faut dire que chaque cycle de fertilisation in vitro est de 5 000 $ environ, et il y a des spéciaux, en clinique de fertilité, donc la plupart des parents prennent trois cycles pour 11 000 $. Donc, c'est sûr qu'on veut que ça fonctionne, puis c'est probablement mieux d'avoir nos deux enfants maintenant qu'un à la suite de l'autre. Ça, c'est le raisonnement des parents.

Dans le code de déontologie des médecins du Québec, les médecins ont un devoir de bienfaisance, de non-malfaisance et d'avoir des bénéfices, le plus de bénéfices pour notre patient et le moins de risques, et on a la responsabilité de protéger la santé de la population et la santé de notre patient. L'Association médicale canadienne corrobore ça.

Donc, étant donné cette vulnérabilité, ces conflits d'intérêts, bien on voit l'épidémie de grossesses multiples qui perdure. Et on ne prétend pas qu'il n'y a pas de consentement éclairé, on croit que le consentement est probablement éclairé, dans ces cliniques de fertilité là, mais les parents veulent des jumeaux, et les cliniques de fertilité veulent des jumeaux parce que ça augmente leur taux de réussite, et ça engendre un cercle vicieux.

D'après nous, le but de traitement pour un problème de fertilité, pour nous, c'est un problème de santé. On va entendre que, pour certains, c'est un caprice de vouloir des enfants à tout prix. Pour nous, ce problème de santé là devrait être traité pour régler le problème. Normalement, quand quelqu'un tombe enceinte, il y a un bébé, pas deux bébés. Alors, pour nous, le but, c'est d'avoir un enfant le plus en santé possible, quand on essaie de traiter un problème de fertilité. On tombe, là... certains disent que l'infertilité... c'est un caprice de vouloir des enfants; à nos yeux, c'est un caprice de vouloir plus qu'un enfant. Puis, que le médecin n'est pas tenu à donner de risques supplémentaires à un patient parce que le patient le demande... Donc, moi, je donne juste un exemple, en néonatalogie, on peut prendre le sang des parents pour le donner aux enfants. Ça s'appelle un don dirigé, pour les transfusions, et les parents veulent souvent faire ça. Si les parents sont anémiques, on ne peut pas prendre leur sang, pour des raisons de risque-bénéfice, parce que le bénéfice d'une transfusion anonyme est aussi bon qu'une transfusion des parents, et le risque est plus élevé de prendre d'un parent anémique. Pour faire un peu cette corrélation, les risques sont si élevés pour les jumeaux et les triplés qu'on ne peut pas se permettre d'implanter plus qu'un embryon. Donc, qu'est-ce qu'on peut faire comme médecin devant cette situation? Nous, ça nous exhorte à agir avec prudence et de manière responsable et d'augmenter les bénéfices, de diminuer les risques et d'essayer d'être bienfaisant et non malfaisant.

Si on regarde d'autres pays, qu'est-ce qu'ils ont fait pour régler la situation... Il faut voir, d'une manière un peu bizarre, qu'on est beaucoup comme les États-Unis, ici, en termes de cliniques de fertilité, sauf qu'aux États-Unis ils ont des cliniques privées et ils ont un système de santé privé. Quand on regarde les autres systèmes qui sont plus publics, la Finlande, la Belgique, la Suède, la France, l'Angleterre ou le Royaume-Uni, la plupart des pays subventionnent la fertilisation in vitro totalement ou en partie et en fait ont moins de coûts à long terme parce qu'ils ne paient pas pour toutes les complications que ça engendre. Donc, en Finlande, les cliniques de fertilité se sont décidées, en 2002, de concert, elles-mêmes, d'arrêter d'implanter plus d'un embryon; ils ont diminué leurs grossesses multiples de 24 % à 8 %. En Belgique, où ils subventionnaient seulement 75 % des fertilisations in vitro, maintenant ils en subventionnent 100 %, de trois à six cycles, et ils ont passé leur taux de grossesses multiples de 20 % à 3 %. En Suède, il y a une législation, en 2003, en fait c'est illégal de mettre plus d'un embryon, sauf dans des circonstances exceptionnelles. Ils ont réduit leurs grosses multiples de 23 % à 6 %. Au Royaume-Uni, la même chose. Il y a une grande liste de pays qui ont fait ça. Ils l'ont tous fait dans un contexte public qui paie pour l'infertilité. Parce que sinon, c'est très facile, si on a de l'argent, on va aux États-Unis, on revient, puis on arrive avec nos quadruplés, puis c'est le système public qui les gère.

Donc, tous les pays qui ont réussi à diminuer la prématurité, diminuer les grossesses multiples, l'ont fait dans le cadre d'un traitement public de l'infertilité. En payant pour un IVF, un ICSI, ou quoi que ce soit ? ça ne coûte pas 5 000 $, parce que le système est public, ça coûte moins ? on ne paie pas pour l'énorme... l'argent qui vient après. En fait, on économise de l'argent et on économise des souffrances inutiles.

Donc, si je regarde mes recommandations, le système ? ou nos recommandations ? de santé québécois doit gérer le traitement de l'infertilité au même titre qu'un traitement d'autres problèmes de santé. Ça éviterait des conflits d'intérêts, ça permettrait de diminuer les souffrances humaines, de diminuer les coûts pour l'État, de diminuer les complications néonatales pédiatriques et la prématurité.

En fertilisation in vitro, ne transférer qu'un embryon. Et, exceptionnellement, transférer deux embryons serait possible, et il faudrait qu'un comité d'experts en la matière ? parce qu'il y a la qualité des embryons, la fragmentation, il y a toutes sortes de choses qui font qu'un embryon risque moins de rester que deux ? ...il faudrait que ce soit prédéfini: quand on aurait le droit de transférer deux embryons. Ne jamais transférer plus de deux embryons. Il y a de nombreux, maintenant, européens qui ont ça dans leur... pas nécessairement leur législation, mais leurs règles pour les cliniques de fertilité.

L'État doit encadrer rigoureusement la prescription des médicaments utilisés pour la stimulation ovarienne, parce que... pas n'importe qui, mais c'est facile de se procurer des médicaments pour la stimulation ovarienne. Donc, peut-être que le Conseil du médicament devrait être impliqué là-dedans, les ordres professionnels. En cas de stimulation ovarienne hors fertilisation in vitro, effectuer un suivi ovulatoire serré, ou aspirer les follicules quand il y en a trop, ou convertir en fertilisation in vitro et transférer seulement un embryon.

L'autre chose qui est très importante, c'est la publication des taux de succès réels, pas des naissances vivantes, des taux de succès réels des cliniques de fertilité. Et, moi, certains pays ont un registre d'enfants qui sont nés à l'aide de ces techniques, de voir qui naît à terme, qui naît prématurément, qui a la paralysie cérébrale ou comment vont ces enfants à long terme, pour nous permettre d'orienter notre tir.

Combien il me reste de temps? Comme ça, je vais voir combien...

Le Président (M. Copeman): Trois minutes et quelques secondes.

Mme Janvier (Annie): Trois minutes? Super. En néonatologie, on a déjà un suivi néonatal depuis 25, 30 ans, et on suit tous les enfants à haut risque d'avoir des séquelles, et ça nous permet de réorienter notre tir de traitement. Donc, on a constaté que trop d'oxygène, ça rendait aveugle, que les stéroïdes postnataux, ça donnait la paralysie cérébrale. On peut seulement constater ça à long terme, parce que, si on n'avait pas fait de suivi à long terme, on penserait toujours qu'on fait toujours de la bonne médecine.

Très important, et le dernier point: les nouvelles activités des techniques de fertilité, par exemple la maturation in vitro, l'ICSI et la biopsie de corps polaire pour le diagnostic préimplantatoire, ne devraient être implémentées qu'après avoir démontré leur sécurité et leur innocuité dans le cadre de protocoles de recherche. Celles-ci devraient respecter les normes éthiques de la recherche et obligatoirement comporter un suivi à long terme des enfants nés à l'aide de ces nouvelles méthodes. Il ne faudrait pas implémenter des nouvelles techniques comme il se fait en ce moment. Il n'y a pas vraiment de recherche sur l'IVM à long terme pour les enfants, sur l'ICSI, ni sur la biopsie de corps polaire. Il faut suivre ces enfants-là, il faut savoir ce qui se passe pour ne pas que, dans 25 ans, on se dise: Oups! On aurait dû suivre ces enfants-là. Et les patientes vont vouloir ces techniques-là. Et, même si on a le consentement éclairé des patientes, en dehors de la recherche comme innovations, comme nouvelles techniques, on n'a pas le droit, comme médecins, comme société, de prendre des femmes comme cobaye parce qu'elles le veulent. Obligatoirement, on devrait faire des projets de recherche.

L'autre petit point, on n'est pas ici pour discuter d'adoption, mais l'adoption est assez compliquée aussi, est assez dispendieuse, l'adoption internationale, et l'adoption des enfants québécois, sans être une famille d'accueil, aussi est difficile, donc les alternatives pour ces parents-là sont peu nombreuses.

Donc, en conclusion, la diminution de l'épidémie des grossesses multiples iatrogènes est possible et très envisageable dans notre société, comme elle a déjà été faite, et les coûts de la société seraient diminués de façon astronomique, ainsi que les prématurés, ainsi que les souffrances inutiles pour ces familles-là. Moi, je fais mon Ph.D. en bioéthique, puis les seules choses dont on parle, là, dans ce domaine-là, c'est les femmes de 70 ans qui veulent des enfants, c'est la possibilité de sélectionner pour les yeux, pour être bon aux échecs, pour sauter plus loin que le voisin. Il y a beaucoup de choses qui sont discutées qui ont leur légitimité, mais on ne discute pas de l'épidémie de grossesses multiples. Ça fait 30 ans que ça dure. On discute de la vache folle, des poulets, des virus du Nil, mais on ne discute pas de quelque chose qui est un énorme fardeau financier pour notre société, un énorme fardeau en souffrances pour nos enfants et nos parents. Je vous remercie.

n (15 h 30) n

Le Président (M. Copeman): Merci, docteur. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, Dre Janvier. Je vous félicite pour la qualité de votre présentation. Il y en a eu beaucoup, d'excellentes présentations, bien sûr, là, depuis le début de cette commission, mais je dirais que la vôtre est particulièrement bien faite et bien présentée.

Mme Janvier (Annie): ...trois jours qu'on a fait ça.

M. Couillard: Pardon? C'est tout à votre honneur.

Mme Janvier (Annie): On a su il y a trois jours qu'il fallait faire cette...

M. Couillard: C'est encore plus justifié de vous faire nos compliments, à ce moment-là.

Il y a plusieurs points intéressants que vous avez mentionnés. Je vais terminer avec celui, moi, qui m'intéresse le plus, c'est l'aspect de légiférer sur les normes de pratique médicale, et, en tant qu'éthicienne, vous allez certainement avoir des commentaires à faire là-dessus. Mais auparavant je veux faire quelques brefs commentaires tout d'abord quant au financement des services de procréation et de fertilisation in vitro. Il est clair qu'au Québec, tout étant imparfait par ailleurs, le régime de crédit d'impôt est une subvention en fait de la fertilisation in vitro qui est supérieure à ce qui existe dans le reste du Canada. Et je dirais qu'il faut être prudent lorsqu'on compare ce qui se fait dans les pays européens, parce que là, comme je le disais l'autre jour, il faut comparer société pour société et système de santé pour système de santé. Les systèmes de santé que vous décrivez, même dans les pays scandinaves, sont des systèmes de santé à copaiement, à ticket modérateur, à composantes privées parallèles, etc., donc c'est très difficile de faire des équivalences puis dire: Parce qu'un système de santé d'un autre pays le fait, il faudrait l'introduire dans notre système. Et je dirais que la raison probable pour laquelle ça n'a pas été fait d'un océan à l'autre, si vous me passez l'expression, au Canada, c'est à cause de la structure de financement de notre système de santé, qui n'est pas la même que dans ces pays-là.

Mais votre démonstration, par contre, quant aux effets de santé de ces techniques-là est assez bien étayée. Ce qui me frappe, c'est qu'il y a quand même un aspect d'économie pour le système de santé que vous démontrez bien, puis je me faisais la réflexion en vous écoutant, parce que je disais, dans une autre intervention, qu'il y a très peu de technologies qui vraiment économisent de l'argent au système de santé, parce qu'il y a toujours d'autres patients qui viennent pour avoir des soins. Cependant, dans le cas des naissances prématurées, il y a un réservoir déterminé de nombre de naissances prématurées ou de nombre de bébés à très faible viabilité, de sorte que l'argument de l'économie est peut-être un peu plus fort dans ce cas-là que dans d'autres cas.

La question de la légalisation... de la norme médicale. Et, la norme médicale, c'est finalement le nombre d'embryons qu'on implante. Alors, le médecin décide d'implanter un ou deux ou plus d'embryons. Ce que vous recommandez, j'ai cru comprendre, dans votre mémoire, c'est qu'on indique très spécifiquement une limite dans le nombre d'embryons qui peuvent être implantés. Et vous avez cité le cas de la Suède, je crois, qui a légiféré que c'était juste un embryon, mais dans le cadre d'un financement public, parce que vous voyez bien l'effet pervers: si on légifère que c'est juste un embryon, étant donné le taux de succès, le nombre de cycles nécessaires pour avoir du succès va augmenter considérablement de même que, donc, le coût pour les personnes va augmenter également potentiellement.

Mme Janvier (Annie): Je ne vous ai pas parlé de ça: il y a des études qui se sont faites dans ces pays-là où, à la place d'implanter deux embryons avec un cycle, ils ont implanté un embryon deux fois. Et c'était le même prix, parce qu'il y avait moins de complications pour la femme, bien entendu, quand il y a un embryon par fois, et le taux de grossesses était le même. Le taux d'enfants n'était pas le même, parce que, c'est sûr, quand on en met deux, on pense plus qu'il y en a deux qui vont sortir; on en met un, il n'y en a pas deux qui vont sortir, tu sais. Mais le taux de grossesses, donc, à nos yeux, c'est le but du traitement, c'est qu'une femme infertile, un couple infertile ait des enfants. Le taux de grossesses était identique, les coûts étaient moindres, même en faisant deux transferts d'embryon simple qu'un transfert de deux embryons, et la réussite était de 30 % à 40 % dans les deux cas, exactement la même chose, parce qu'ils ont pris... Ça, c'est le cas du Danemark, où ils ont réduit à deux, maximum, puis ils ont fait des comparaisons, il y a deux études randomisées à simple insu, les parents qui... les médecins. Donc, c'est très envisageable, j'ai l'impression, dans notre société de faire ça.

M. Couillard: Et, sur cette question de légiférer, bien sûr le Collège des médecins ne recommande pas qu'on légifère des normes de pratique médicale. Je dois dire que je suis un peu sympathique à leurs arguments, parce que je ferais des analogies. Par exemple, dans d'autres domaines de la médecine spécialisée, comme la chirurgie, on sait, par exemple, que, si un chirurgien n'a pas une expérience chirurgicale de tant de nombre de cas par année, son taux de complications va être beaucoup élevé qu'un autre chirurgien qui a un volume plus élevé. Alors, on ne légifère pas pour dire que, si on ne fait pas tant de chirurgies par année, on n'a pas le droit de faire la procédure. Même chose pour un service de chirurgie cardiaque. Il y a une différence, au Québec, entre les taux de résultats cliniques d'un service de chirurgie cardiaque à un autre, et l'«outcome» pour les patients n'est pas très bon non plus dans certains cas. Alors, on ne légifère pas non plus pour dire qu'un service doit être fermé parce que les taux de complications sont plus élevés.

Alors, qu'est-ce qui justifie selon vous le fait qu'on pourrait légiférer pour cette norme médicale là et qu'on ne le fait pas pour l'ensemble de la pratique médicale, qui dépend finalement du jugement puis de l'autorégulation de la pratique médicale par les ordres professionnels?

Mme Janvier (Annie): Quand on parle de chirurgie cardiaque, il y a aussi les taux d'hernies. Il y a beaucoup de neurochirurgiens... on parle d'un patient qui arrive, qui est à risque de décès, qu'on essaie de lui sauver la vie. En fait, le médecin, selon notre code de déontologie, il essaie de minimiser les risques puis d'être le plus bénéfique possible. C'est sûr que, les résidents, ils ont des moindres taux de succès pour les ponctions lombaires, pour toutes les choses, que les résidents seniors, que les médecins juniors, que... bon. Ici, on veut traiter un problème de santé, on ne veut pas l'empirer. Ce qu'on fait, c'est qu'on prend une femme qui est à risque d'avoir des enfants prématurés juste si elle tombe enceinte normalement puis on lui en met deux à la place d'en mettre un. Donc, le médecin, non seulement il ne traite pas le système de santé, il met cette femme-là à risque. Donc, pour moi, ça ne se compare pas en... Il y a le prix à payer. C'est sûr que, si on veut des neurochirurgiens, des chirurgiens, il faut qu'ils se forment, puis, au début, ils vont être moins bons qu'après, c'est le taux à payer pour une population en santé, le prix à payer. Mais, pour avoir des enfants en santé, le prix à payer, ce n'est pas de les rendre pas en santé, c'est de traiter le problème qu'est l'infertilité en implantant un embryon et non deux. Puis ce n'est pas vraiment le taux de... C'est facile d'en implanter un à la place de deux, hein, c'est juste le bon vouloir. C'est très facile puis ça économise beaucoup de coûts à long terme aussi pour notre système.

M. Couillard: Le registre des naissances me semble une bonne idée, là, qu'on puisse vérifier le nombre de naissances en relation avec la fertilisation in vitro par année, au Québec, puis surtout le devenir de ces enfants. Et bien sûr vous êtes consciente de fait qu'il faudrait absolument que ce soit un registre dénominalisé. Il n'est pas question de transmettre des informations personnelles là-dessus. Je pense que là-dessus on s'entend bien.

La question de la recherche. Parce que c'est un autre point de discussion qu'on a eu dans notre dernière intersession, ici, à la commission parlementaire. Ce que vous nous dites, c'est que vous pensez qu'il y a des cliniques de fertilisation in vitro qui font des essais de nouvelles techniques sans les encadrer dans des projets de recherche eux-mêmes encadrés par un comité d'éthique. Alors, vous nous invitez à faire une frontière claire entre ce qu'est la recherche et ce qu'est la pratique clinique établie. Comment est-ce qu'on fait ça? Comment est-ce qu'on légifère là-dessus, également? Est-ce que vous avez réfléchi à cette question-là? Où se situe la frontière entre une pratique... Ce n'est pas simple, hein? Qu'est-ce qui est une pratique en émergence, comme disait le Collège des médecins, où il y a toujours des ajustements qu'on peut faire, puis qu'on fait, en médecine, tous les jours dans plein de types de situations, puis une situation où c'est véritablement quelque chose de complètement nouveau, qui n'a jamais été vraiment testé ? et là effectivement il faut que ce soit encadré ? mais où se situe la limite? Ce n'est pas évident.

Mme Janvier (Annie): Mais ça, c'est un énorme débat, dans l'éthique, là, c'est: Où est-ce que c'est une innovation, où est-ce que c'est un traitement établi, où est-ce que... Ce n'est pas une question facile à répondre, surtout quand on a des patients qui sont prêts à essayer n'importe quoi puis qui sont prêts à quasiment réduire leur vie et leur longévité pour avoir des enfants, là. Je pense qu'il faut être prudent, il faut voir les techniques qui ont été établies, la fertilisation in vitro... Louise Brown, elle a 30 ans, là, presque. Donc, la fertilisation in vitro, on sait, on connaît les effets, surtout les effets, c'est la prématurité lorsqu'on en implante plus qu'un.

Par contre, il y a d'autres techniques maintenant qui, si on fait le suivi à court terme: Ah oui, les bébés sont un petit peu plus à risque de malformations, comme l'ICSI. On ne le sait pas, à long terme, quand on prend un petit morceau d'oeuf ou d'embryon puis, après ça, on le remet à l'intérieur. Bon, il naît peut-être avec un peu plus de malformations, mais est-ce qu'il y a plus de risques de cancers, de diabète, de tout ça à long terme? On a aucune idée. Puis, bon, les cliniques de la fertilité, ce n'est pas juste qu'ils n'ont aucune idée, ils ne veulent pas le savoir non plus. Ça fait que je pense que c'est important. Comment est-ce qu'on peut légiférer? C'est que les innovations en techniques de fertilité devraient être encadrées obligatoirement dans des projets de recherche. Il n'y a pas d'innovation avec des patientes, même si les patientes disent oui.

M. Couillard: Et quel organisme devrait définir ce qui constitue une innovation et ce qui constitue une évolution de pratique?

Mme Janvier (Annie): Ça, ce n'est pas évident, mais un comité d'experts, des obstétriciens; il faudrait qu'il y ait des avocats, pédiatres aussi, parce que c'est eux qui voient les bébés qui sortent après.

M. Couillard: Je vous remercie. Très intéressant.

n (15 h 40) n

Le Président (M. Copeman): Bien sûr, Mme la députée de Chambly.

Mme Legault: Oui, merci, M. le Président. Bonjour, Dre Janvier. J'ai été aussi impressionnée par la qualité de votre présentation. Dites-moi, j'aimerais savoir, est-ce qu'il y a des échanges entre l'Association des pédiatres, par exemple, puis les médecins qui oeuvrent en clinique d'infertilité, tout ça, justement pour évaluer, là... faire état de la rétroaction en fait. Comme vous disiez tantôt, quand les enfants accouchent maintenant... quand les enfants arrivent au monde, c'est vous qui en prenez soin. Est-ce qu'il y a des échanges d'information qui peuvent avoir des impacts sur les pratiques justement?

Mme Janvier (Annie): Limités. Même les médecins qui implantent plus qu'un embryon ne suivent souvent pas cette mère-là. Une fois que la mère est enceinte, c'est fini, leur contrat en quelque sorte, et c'est les médecins... Par exemple, au Royal Victoria, c'est Dre Morin qui s'occupe des cliniques de multipares, c'est elle qui fait les réductions foetales, c'est elle qui les voit naître prématurément, c'est nous qui les accueillons prématurément. Je pense que les spécialistes de l'infertilité sont à l'abri, ne voient pas toutes les complications qu'ils peuvent engendrer. Je ne pense pas qu'ils agissent nécessairement en mauvais joueurs ou de manière maligne, je pense qu'ils sont tous... ils veulent que cette femme-là tombe enceinte. Cette femme-là ou ce couple-là veut tomber enceinte. Donc, c'est...

Mais les échanges sont limités, et, les seules fois qu'on a essayé de soulever la problématique, bien on s'est fait dire que, bien entendu, la femme désirait avoir deux, trois, quatre, cinq embryons d'implantés, et elle comprenait, et c'est en connaissance de cause. Mais, non, les échanges sont là et sont cordiaux, mais je n'ai pas l'impression que la pratique serait changée si on allait démontrer... Parce que c'est démontré partout, c'est démontré dans toutes leurs revues, là, l'épidémie de grossesses multiples, mais ça continue.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Terrebonne et porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine et action communautaire.

Mme Caron: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, merci beaucoup, Dre Janvier, d'être parmi nous non seulement comme pédiatre néonatalogiste, mais aussi comme représentante de la Société des néonatalogistes du Québec et aussi de l'Association des pédiatres du Québec.

Votre mémoire est extrêmement précieux. Je pense que nous allons l'utiliser régulièrement pour la suite de nos travaux. Vos recommandations sont très précises. Vous apportez un éclairage très précieux, parce que finalement vous vivez avec les enfants, les mères et les parents qui subissent les conséquences finalement lorsqu'il y a des conséquences négatives suite aux grossesses multiples, aux bébés de petit poids et aux prématurés, là, à nos prématurés. Donc, vous les vivez vraiment. Et ça, c'est important, parce que, jusqu'à maintenant nous avons rencontré surtout des spécialistes de la fertilité et qui n'ont effectivement pas, comme vous le dites dans votre mémoire, à vivre, eux, après avec les bébés qui sont nés et avec les mères qui subissent certaines conséquences.

Vos recommandations m'apparaissent très réalistes, d'autant plus que je me dis: Le Québec ne peut pas faire exception. Nous arrivons avec une législation, nous pouvons bénéficier de l'expertise de ce qui s'est fait ailleurs. Il faut en profiter pour bénéficier de cette expertise-là. Et, s'il est effectivement reconnu qu'il y a des dangers importants, des conséquences, des enfants et des parents qui vivent les conséquences lorsqu'il y a un transfert de plus de deux embryons et qu'il est effectivement préférable qu'il y en ait un seul, je pense qu'on doit en tenir compte. On ne peut pas faire comme si on ne savait pas, que ça n'existait pas.

J'aimerais vous entendre sur votre quatrième recommandation, parce qu'on sait que, là aussi, du côté des stimulations ovariennes, il y a un pourcentage important, on se dit: peut-être même plus que dans la fertilisation in vitro. Vous dites qu'il faut... que «l'État doit encadrer rigoureusement la prescription des médicaments utilisés pour la stimulation ovarienne». Il faut l'encadrer comment? Qu'est-ce qu'il faut définir? Ce serait quoi, vos recommandations par rapport à ça?

Mme Janvier (Annie): Bien, premièrement, il faudrait qu'il y ait un comité d'experts. Moi, je suis une pédiatre, mais j'ai lu la littérature quand même, mais je suis pédiatre. Dans les grossesses multiples qu'on a eues, on a des femmes de 23 ans, après six mois d'infertilité, qui avaient leur Clomid. L'infertilité, c'est plus qu'un an, et on remarque, dans les cliniques de fertilité, en fait qu'il y a un succès, un taux de succès de grossesses qui est supérieur à la nature. Donc, une femme de 32 ans, ce n'est pas supposé lui prendre deux mois à concevoir. En général, c'est neuf à 10 mois. Une femme de 38 ans, ça va être un an et demi... Et d'essayer d'aller des fois rattraper la nature puis de se dépêcher d'arriver à un résultat, c'est là souvent qu'on va avoir des complications ou on va avoir un taux de grossesses multiples, jumeaux ou triplés.

Le comité d'experts qui serait responsable de ces règles-là, bon, il faudrait que le comité des médicaments, il faudrait voir selon l'âge, selon combien de temps ces couples-là ? mais c'est sûr qu'ils peuvent mentir ? ...mais combien de temps ce couple-là a essayé de concevoir, quel est l'âge de cette femme-là, quel est son problème de santé; parce qu'il y a des problèmes de santé où... on traite le diabète ou on traite les ovaires polykystiques, et on a des bons résultats. On n'est pas obligé, en plus, de donner des médicaments pour stimuler les ovaires. Il nous apparaît, mais bien entendu il n'y a pas d'étude sur le sujet, que les médicaments, c'est facile à prescrire, puis ça ne coûte pas cher, puis ça ne coûte pas 5 000 $ comme pour la fertilisation in vitro, donc c'est facile de l'avoir d'à peu près n'importe qui, d'aller remplir la prescription, n'importe qui, et d'avoir un taux de succès.

Est-ce qu'il faut restreindre les spécialistes qui peuvent prescrire ça? Est-ce qu'il faut avoir des critères rigides pour encadrer la prescription de ces médicaments-là? Je pense que ce serait probablement la meilleure solution.

Mme Caron: Merci. Je veux revenir aussi à votre première page, qui m'apparaît extrêmement importante, dans votre mémoire, où vous finalement reconnaissez, là, les principaux éléments qu'on retrouve au niveau des problèmes qui se présentent. Et je pense que la base de votre argumentation, autant au niveau desdits médicaments, vous venez de le démontrer, c'est que dans le fond il faudrait se coller beaucoup plus à la réalité de la nature. En fait, si on va d'un côté d'un traitement de fertilité, il faudrait... l'objectif premier, c'est de donner naissance à un enfant. Lorsqu'il y a fécondation naturelle, l'objectif est de donner naissance à un enfant. Donc, pourquoi, parce qu'on s'en va dans des traitements d'infertilité, il faudrait essayer de viser des performances autres, surtout qu'on connaît les conséquences?

Les conséquences, j'aimerais ça qu'on en parle un petit peu plus. Dans votre mémoire, nous, on a eu la chance de le lire et de voir des conséquences, mais, vous, les enfants que vous voyez, les enfants que vous traitez, parce que votre mémoire est extrêmement précis, au niveau des difficultés puis des handicaps que ces enfants-là vivent, j'aimerais vous entendre plus particulièrement là-dessus, sur les conséquences pour les enfants, et du côté des mères aussi.

Mme Janvier (Annie): Les conséquences de la prématurité, vous voulez dire?

Mme Caron: Tout à fait.

n (15 h 50) n

Mme Janvier (Annie): D'abord, ce n'est pas tous les prématurés qui ont des paralysies cérébrales. Vous avez sûrement vu le film Médecine sous influence, comme j'appelle, où on voit, bon, tous les enfants sont handicapés, tout le monde est spastique, ils ne savent pas manger, ils ne peuvent pas parler; on est loin de là. Donc, si on regarde un enfant de 24 semaines, par exemple, la survie est de 50 %, les enfants normaux sont de 50 %. Les enfants de moins de 29 semaines, ceux qui ont doublé à Sainte-Justine, issus de grossesses gémellaires, les enfants de moins de 29 semaines ont une survie qui est quand même assez bonne, de 85 %, mais 10 % de ces enfants-là ont une paralysie cérébrale et 35 % à 45 % ont des problèmes d'apprentissage, des problèmes d'hyperactivité, des problèmes de comportement, donc des problèmes qui sont significatifs en termes de parents et en termes de coûts pour la société.

L'hospitalisation, aussi: tous les enfants nés à moins que 35 semaines sont admis dans nos soins intensifs néonatals, ce qui est la plupart des admissions dans les maternités. Et ces enfants-là sont plus à risque de faire des entérocolites nécrosantes, des problèmes intestinaux, des infections, des problèmes visuels pour les enfants qui sont nés à plus petite gestation, de la surdité pour les enfants qui sont nés à plus petite gestation, de la paralysie cérébrale. Il y a une grande, grande liste de tout ce qu'on peut voir chez ces enfants-là.

Nous, ce qui nous choque, c'est que ces admissions-là ne sont mêmes pas nécessaires. C'est facile, comme pédiatres, comme médecins, de voir... ce n'est pas facile, mais de voir une admission parce que la mère a fait une appendicite, ils l'ont opérée, le bébé est sorti prématurément, la mère a un cancer du sein, ils ont sorti le bébé prématurément, mais, quand ce n'est pour aucune raison, parce qu'on en veut deux à la place d'un, c'est très difficile à vivre. Mais ce n'est pas juste pour les parents, c'est même pour les infirmières, ils ne comprennent pas. On n'est pas assez. Et, l'année passée, on a envoyé des enfants de Montréal à Québec, de Sherbrooke à Montréal ? ça a fait les manchettes plusieurs fois, où des femmes sont trimballées avec leurs enfants ? parce qu'il n'y pas de personnel, parce qu'il n'y a pas de néonatalogiste, il n'y a pas de lit, il n'y a pas de respirateur.

Puis on sait que 20 % de ces admissions-là sont fabriquées par la médecine en quelque sorte, c'est ce qui nous apparaît, en surplus de cette souffrance-là qu'on voit. Puis là on ne parle pas de la culpabilité des parents, de la maman qui accouche prématurément, qui vit toute sa vie avec, bon, le deuil de l'enfant normal, la culpabilité, que c'était peut-être de sa faute, même si on lui dit plusieurs fois que ce n'était pas de sa faute. Puis ça, ça amène des problèmes psychologiques, des dépressions, des difficultés d'adaptation, qui sont démontrés dans la littérature aussi.

Mme Caron: Merci. Oui, dans votre mémoire, je pense que vous reflétiez bien aussi, au niveau des professionnels de la santé qui avaient à travailler avec les enfants, à quel point les choix étaient déchirants, aussi.

Je voudrais que vous reveniez sur les techniques que vous utilisez lorsque vous avez à proposer des choix aux mamans, lorsque vous vous retrouvez avec plusieurs embryons et qu'à un moment donné vous devez agir, au niveau de la santé des mères, pour réduire le nombre, pour s'assurer que tout se passe bien.

Mme Janvier (Annie): Ça, ce n'est pas moi qui le fais. Nous, au Royal Victoria, on est demandés en consultation pour parler des effets secondaires des jumeaux, des triplés. Et, quand on voit que, bon, la paralysie cérébrale est 40 fois plus élevée chez les triplés par rapport à un singleton puis quatre fois plus chez les jumeaux, bon, on rencontre les parents, on leur dit ça: Vous êtes à 90 % à risque d'accoucher prématurément si les triplés restent, la mortalité aussi, bon, tout ça. Et les parents se sont déjà fait avertir: S'il en reste trois, ce qui exceptionnel, bien on va vous suggérer peut-être, ou s'il en reste quatre ou... bon, d'en terminer un des trois, des quatre. Et, bon, c'est une injection de potassium, de KCl dans le coeur d'un des bébés pour terminer un de ces trois foetus-là.

Et c'est sûr qu'on essaie d'encourager la maman à prendre cette décision-là... bien, les parents en fait, c'est le couple. Mais c'est très difficile pour... Là, je parle de la légitimité éthique du foetus. Le foetus n'est rien, aux termes législatifs, on peut faire ce qu'on veut avec dans notre société. Mais, au point de vue de la légitimité éthique de ce foetus-là en fait, que les parents, ils ont payé je ne sais pas combien de mille pour avoir là, puis, tout d'un coup, ça fonctionne, leur maison est hypothéquée, puis là on leur dit: Bien, ce serait mieux d'en enlever un, mais vous êtes 5 % à risque d'accoucher, mais sinon vous avez 90 %. Puis, nous, quand on parle aux parents, c'est, quand votre bébé, il est handicapé, c'est 100 % du bébé qui est handicapé, ce n'est pas juste le 5 % de l'oreille à droite puis un petit peu de l'orteil, c'est 100 % d'un bébé ou 0 %. Quand vous accouchez à 28 semaines, c'est 100 % des bébés qui sortent à 28 semaines, ce n'est pas 22 %, 12 %.

Ça fait que les pourcentages dans ce cas-là, on est devant une détresse épouvantable de ces parents-là qui ne savent pas quoi faire, qui ont tant de jours pour agir, qui ne savent plus... puis lequel qu'on va tuer, puis est-ce qu'on sait si c'est un garçon ou une fille. Bien, souvent, c'est le plus accessible, qui est le plus près, qui est le plus petit puis qui a l'air le plus chétif qui va être terminé. C'est très difficile, comme professionnels, d'avoir affaire avec ça.

Mais, nous, on voit aussi ? encore pire que ça ? on voit, nous, les terminaisons postnatales. Dans les triplés qui naissent, ce n'est pas rare qu'on débranche les triplés parce qu'ils ont des risques de séquelles énormes. Et je me souviens d'une maman qui m'a dit: Bon, moi, j'ai refusé la terminaison à 12 semaines, puis maintenant, bien je fais une terminaison postnatale, puis il ne me reste rien qu'un bébé sur trois. Ça fait que, nous, on est pris aussi à ça. Quand un bébé a des risques d'handicap épouvantables, qu'il a saigné dans sa tête, qui est infecté, qui est à 100 % d'oxygène... on est aussi là pour aider ces bébés-là à mourir et interagir avec ces parents-là qui ont des épouvantables décisions à prendre, en fait qu'on leur a données... La médecine, c'est elle qui a créé ces problèmes-là, hein, ce n'est pas des problèmes qui sont là. C'est que, nous, on les met dans cette situation-là, puis ils ont payé pour être dans cette situation-là. Ça fait que c'est d'autant plus difficile pour nous, les réductions aussi postnatales, peut-être plus que foetales. Mais, même à ça, c'est toutes des épreuves difficiles.

Mme Caron: Je vous remercie beaucoup. Je vais laisser du temps à ma collègue.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, Dre Janvier, merci de votre présence et de la présentation de votre mémoire. Inutile de dire que c'est un très bon mémoire, les autres l'ont dit également.

Ce qui vous démarque, c'est, disons, l'intérêt que vous portez sur la possibilité de conflit d'intérêts. Les autres mémoires, on en parle mais peu. Vous, vous en parlez quand même presque dans un chapitre au complet. J'aimerais vous entendre à ce sujet-là. Vous dites que le médecin devient presque un entrepreneur qui propose ses produits. Vous dites qu'il y a une possibilité d'être placé en conflit d'intérêts constant. Vous dites également: «Les médecins des cliniques de fertilité ne vivent pas avec les conséquences à long terme de grossesses multiples. Ils n'assument aucune conséquence financière liée aux grossesses multiples.» Alors, j'aimerais vous entendre à ce sujet.

Mme Janvier (Annie): Si j'ai dit aucune... En fait, ils paient des taxes, ça fait qu'ils assument un peu les coûts de santé, j'ai oublié d'écrire ça. Peut-être pas aucune, peut-être en minime partie.

Ici, il ne s'agit pas de blasphémer puis de faire des accusations blasphématoires contre mes collègues qui en fait, comme il est démontré dans la littérature, ces parents-là sont tellement désespérés d'avoir des enfants, ils se mettent tellement en situation... ils sont en otages financiers dans cette situation-là, donc ils veulent non seulement un taux de réussite pour la famille ? et ça, je le crois, qu'ils désirent ça de bon coeur ? mais c'est sûr qu'ils veulent aussi leur taux de réussite des cliniques de fertilité, taux de réussite qui est calculé en naissances vivantes, que ce soit une naissance de 500 g, une naissance d'un bébé qui va naître dans l'heure qui suit, c'est une naissance vivante quand même.

Donc, le cercle vicieux ? c'est là où le conflit d'intérêts est ? est que, quand on fait de l'argent et quand notre argent est augmenté quand on a plus de bébés, c'est sûr que ça ne nous aide pas à vouloir transférer seulement un embryon, surtout quand les parents veulent plus d'un embryon transféré. Et, quand on... Nous, c'est pour ça. C'est quoi, le but du traitement en fertilité? D'avoir un taux identique à la normale, et pas supérieur à la normale, et c'est pour ça, à notre avis, les conflits d'intérêts. Pourquoi est-ce qu'ils ont des taux de 40 % de fertilité, à la place de 30 % dans la nature? C'est parce que c'est ça qu'ils veulent, c'est leur business qui marche comme ça.

Donc, les conflits d'intérêts sont en fait dans n'importe quel professionnel, quand il tire de l'argent directement sur le produit qu'il vend, mais, ici, c'est encore plus ajouté par la vulnérabilité des parents, la vulnérabilité financière aussi et leur désir d'enfants.

Mme Beaudoin: Merci.

Le Président (M. Copeman): Dre Janvier, est-ce qu'il y a des études qui indiquent quel est le ratio entre le nombre d'embryons implantés et le nombre de grossesses multiples? Je ne sais pas si vous me suivez, là. Si on implante...

Mme Janvier (Annie): Oui, oui, je vous suis.

Le Président (M. Copeman): ...trois, quatre embryons, est-ce que ça donne... dans quel pourcentage est-ce que ça donne des jumeaux, des triplés?

Mme Janvier (Annie): Bien, regardez, c'est parce que je n'ai pas les chiffres. J'ai les études dans mon bureau, puis je les ai vues. Deux embryons, si je me souviens bien, là, c'est de l'ordre de 10 %, 15 %, ? là, l'affaire, si je ne suis pas correcte, il ne faut pas m'en tenir autre responsabilité ? les plus... mais, au-dessus de deux, c'est très grand, là, on s'attend à en avoir, ce n'est pas rare. Donc, je pense que l'implantation de deux, c'est de 7 % à 15 %, et de trois, c'est dans l'ordre de 50 %. Mais ce n'est pas ma spécialité, non plus.

Le Président (M. Copeman): Oui, mais je ne sais pas si vous avez des informations supplémentaires peut-être à nous envoyer ou... Je ne veux pas vous mettre un fardeau, là, sur vos épaules, là, mais...

Mme Janvier (Annie): Non, non, non, je peux... Regardez, ça, c'est le fardeau qui est sorti. Mais je peux... ça ne va pas être très long de trouver ça, là, pour vous l'envoyer.

Le Président (M. Copeman): Là, c'est plutôt le fruit qui est sorti. Ce n'est pas un fardeau, ça.

Mme Janvier (Annie): Non, non.

n (16 heures) n

Le Président (M. Copeman): Évidemment, j'en ai glissé un mot à mon collègue le ministre de la Santé, qui a une certaine formation scientifique, petite, hein... À la ligne... Mon épouse a déjà travaillé... elle est généticienne, elle aussi, de formation, et je trouve ça intéressant, à la ligne 604, vous indiquez que le taux de grossesses chez les femmes, «un transfert simple d'embryon à une grossesse avec transfert de deux embryons, le taux de grossesse chez ces femmes était identique: de 36 % versus 41 %, dans une étude, et 39 % versus 43 %».

Évidemment, pour les... moi, je me dis... je dirais que je suis un «layman» dans ça, quand je vois 36 et 41, ce n'est pas tout à fait identique. Je comprends que, dans le monde scientifique, «that's statistically insignificant», on dirait en anglais, mais, en tout cas, c'est simplement un réflexe... Si on avait des sondages qui disaient, un parti sur un autre, 36-41, étaient identiques, là, ce serait reçu de façon un peu sceptique. Mais c'est un peu la façon dans laquelle le monde scientifique...

Une voix: ...

Le Président (M. Copeman): C'est ça, ça dépend de la marge d'erreur, en effet.

Mme Janvier (Annie): Et c'était vraiment P 0.0002, là. C'était beaucoup de patients qui ont été... c'étaient des études justement en Belgique après qu'ils aient passé cette règle, qui n'est pas une législation, en Belgique, mais plus... on paie, à condition qu'on en mette seulement un.

Là, on parle de grossesses, on ne parle pas de bébés, parce que, si on parlait de bébés, il y en a plus quand on en met deux que quand on en met un. Ça, on n'a pas besoin d'un background scientifique pour réaliser ça. Mais il y avait tellement de patientes que le «all forever», la marge d'erreur pouvait être plus 7 % ou 8 % ou 10 %, là. Donc, ce n'était pas significatif, à cause du nombre des patientes randomisées.

Le Président (M. Copeman): Très bien. Ça va? Allez-y, Mme la députée, bien sûr.

Mme Caron: Au niveau des décisions qui ont été prises dans les autres pays, finalement ce que vous nous dites, c'est qu'en prenant cette décision-là de réduire le nombre de transferts d'embryons, ils ont diminué d'une manière extrêmement importante les grossesses multiples: on se parle de 24 % à 8 % en Finlande, de 19 % à 3 % en Belgique, de 23 % à 6 % en Suède, et que finalement ils ont fait une économie importante au niveau du système de santé parce qu'ils n'ont pas eu toutes les conséquences coûteuses à court terme et à long terme, et, ça, je pense que c'est un des éléments aussi extrêmement importants de votre mémoire que je ne voulais pas qu'on oublie.

Le Président (M. Copeman): Oui. J'aime ça, des réponses succinctes.

Mme Janvier (Annie): Mais il faut... une réponse succincte, il faut aussi toujours se souvenir que c'est tout dans des systèmes justement publics, où la fertilisation a été payée aux parents, ou en partie payée, parce que les parents, ils n'en veulent pas, d'un transfert d'embryon, ils en veulent deux, là.

Même, il y a une espèce de romantisme autour des grossesses multiples: C'est donc cute de voir des jumeaux dans la rue. C'est moins cute quand il y en a un qui a une bobonne d'oxygène en arrière, mais c'est cute, là, les jumeaux, puis les triplés, puis tout le monde est bien excité de ça, puis il y a des films là-dessus, puis c'est très sensationnalisé. Les prématurés, ce n'est vraiment pas cute, là, c'est l'opposé, il y a des films d'horreur, sensationnalistes, qui sont faits sur la prématurité, mais les jumeaux sont rarement mentionnés là-dedans. Donc, je pense, si on met une politique de transfert unique d'embryon, il faut payer pour le transfert d'embryons, sinon les femmes vont aller s'en faire mettre deux ailleurs.

Le Président (M. Copeman): Parce que clairement les coûts sont plus élevés avec le nombre de cycles qu'on utilise?

Mme Janvier (Annie): Ce n'est pas si élevé. C'est élevé parce qu'on paie pour ces techniques-là en clinique privée. Les cliniques privées, ça coûte plus cher pour tout. Pour faire un... Moi, j'ai tous les prix, ici, du menu des cliniques de fertilité. Si je veux que quelqu'un qui a un... par exemple, mon mari, les spermatozoïdes ne marchent pas, que quelqu'un vienne lire des petites revues puis donner son spécimen, c'est 300 $. Ça ne coûte pas 300 $ pour lire une revue puis faire la job, là, si je me permets l'expression. Donc, ce n'est pas...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Copeman): Il faut choisir les mots avec juste une prudence dans ce domaine-là, docteure.

Mme Janvier (Annie): Non, mais il faut regarder aussi que les... je pense qu'on pourrait diminuer les coûts des cliniques. Il ne faut pas prendre les coûts comme ils sont demandés en ce moment, mais, dans notre système public, c'est ce qui est... dans toutes les études de coût-bénéfice, ils étudient la fertilisation in vitro. Quand fait de manière publique, oui, on sauve de l'argent, mais c'est sûr qu'on peut demander autant qu'on veut en clinique privée.

Le Président (M. Copeman): Alors, le coût ne serait pas nécessairement plus élevé si on prenait trois, quatre cycles, c'est ça que vous me dites, là?

Mme Janvier (Annie): Bien, quatre, c'est plus qu'un, oui, plus tous les cycles additionnels qu'on recommande.

Le Président (M. Copeman): Mais oui.

Mme Janvier (Annie): Par contre, le coût, il ne faut pas faire l'erreur, si jamais il y a quelqu'un, un économiste, qui fait le travail de voir, bon, combien est-ce que ça coûterait ? parce que les couples en général veulent deux enfants, pas plus; combien est-ce que ça coûterait ? en termes d'argent, de prendre la petite liste que j'ai ici puis dire: Ah! une fertilisation in vitro, c'est 5 000 $. Ça va être sûrement moins si c'est le système public qui s'en occupe, là. C'est la même chose si on regarde la haute fréquence, l'oxyde nitrique, en néonatalogie, qui a d'ailleurs été breveté par les États-Unis dernièrement, nous, ça nous coûtait à peu près 3 $ de l'heure, puis, eux, c'est 100 $ US de l'heure. Donc maintenant, nous, on paie 100 $ US de l'heure parce qu'eux ont jugé que c'était 100 $ US de l'heure pour quelque chose de breveté. C'est un exemple concret qu'on a en néonatalogie en ce moment.

Le Président (M. Copeman): Dre Janvier, merci beaucoup pour votre contribution à cette commission parlementaire au nom de la Société des néonatalogistes du Québec et de l'Association des pédiatres du Québec.

J'invite immédiatement les représentantes du Conseil du statut de la femme à prendre place à la table. Je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 6)

 

(Reprise à 16 h 8)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! I guess we should get going in more ways than one, hey? O.K. Well, let's get going.

C'est avec plaisir que nous accueillons les représentantes du Conseil du statut de la femme. Mme la présidente Lavallée, bonjour. Vous connaissez nos façons de faire, nos règles de fonctionnement: vous avez 20 minutes pour faire votre présentation, et ce sera suivi par un échange d'une durée maximale de 20 minutes avec les parlementaires des deux côtés de la table. Je vais vous aviser quand il reste trois minutes pour mieux vous aider à conclure. Je vous prie de présenter vos collaboratrices et d'enchaîner avec votre présentation.

Conseil du statut de la femme (CSF)

Mme Lavallée (Diane): Oui. Je vous présente Lucie Bélanger, qui est professionnelle au conseil, qui a été l'auteure du mémoire, et Thérèse Mailloux, qui est secrétaire générale et la directrice des communications, qui est au conseil depuis une vingtaine d'années, donc qui a suivi toutes les étapes des réflexions du conseil à cet égard.

Donc, M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, ce moment, le Conseil du statut de la femme l'attendait depuis longtemps. Je suis donc particulièrement heureuse de vous présenter, aux membres de cette commission, nos réflexions sur un sujet qui est très important et percutant, je dirais, pour les femmes du Québec. En effet, ces dernières sont au premier rang concernées par les techniques de procréation médicalement assistée, puisque celles-ci se pratiquent majoritairement sur leurs corps, qu'elles en ont des effets sur leur santé et sur celle de leurs enfants, et qu'elles modifient en profondeur la conception même de la maternité et de la parentalité.

n (16 h 10) n

Depuis 20 ans, sans jamais baisser les bras, le conseil réclame des interventions gouvernementales à l'égard de ces techniques qui permettent à l'humain d'agir sur sa propre origine de façon délibérée. Un bref tour d'horizon permettra de mesurer l'ampleur de nos interventions en la matière. Entre 1986 et 1989, le Conseil du statut de la femme publie une dizaine d'études et d'avis, produit des documents audiovisuels, organise un forum international sur les nouvelles technologies de la reproduction et diffuse un avis synthèse traitant de l'infertilité, de l'insémination artificielle, du droit aux origines, de la fécondation in vitro, des contrats de grossesse, de diagnostics prénatals ainsi que de l'encadrement de pratiques et de la recherche.

En 1990-1991, il participe à la consultation du ministère de la Santé et des Services sociaux lors de la révision du Code civil. Cinq ans plus tard, il sonne à nouveau l'alarme en publiant un avis intitulé La procréation médicalement assistée: une pratique à encadrer où il met à jour ses positions sur l'évolution des pratiques, les percées scientifiques, les modifications au Code civil et les incontournables questions d'ordre médical, éthique et social.

En 2003, on consulte des juristes, des organismes consultatifs, des organismes intéressés à la santé des femmes, des chercheurs en sciences humaines, des scientifiques rattachés aux secteurs de la reproduction et du génie cellulaire et des chercheuses féministes. Enfin, on fait parvenir aussi à M. le ministre Couillard, en 2003, une lettre pour lui exposer aussi nos inquiétudes quant à la perpétuation du vide législatif existant au Québec. Au cours de cette longue démarche, les positions principales du conseil n'ont jamais varié. Le gouvernement doit adopter une loi-cadre sur la procréation médicalement assistée et confier à un organisme consultatif à forte teneur éthique le mandat de conseiller le gouvernement du Québec sur l'ensemble des questions liées à la procréatique.

Le projet de loi québécois qui nous est présenté aujourd'hui constitue selon nous plutôt une structure de réglementation qu'une véritable loi-cadre traitant du fond de la question. Évidemment, nous sommes en accord avec certains éléments qui encadrent administrativement ce projet-ci. En outre, nous approuvons le gouvernement de vouloir occuper rapidement le champ de compétence que le gouvernement fédéral s'est approprié par sa loi sur la procréation assistée, la C-13.

Un projet de loi aussi fondamental devrait comporter des valeurs, selon nous, et des principes, traiter des questions éthiques relatives aux pratiques de procréation médicalement assistée et à leurs conséquences notamment sur la santé des femmes et des enfants. Mais tout ceci aurait dû auparavant selon nous faire l'objet d'une plus longue réflexion, d'un large débat sociétal enclenché et soutenu par le gouvernement.

Je rappelle ici que le gouvernement fédéral s'intéresse à la question depuis presque 20 ans. Il a créé, en 1989, une commission royale d'enquête sur les nouvelles technologies de reproduction, a proposé un moratoire volontaire sur neuf pratiques jugées inacceptables à la suite du rapport Baird. Depuis 1996, il a présenté quatre versions de projets de loi, dont la première a reçu la sanction royale le 29 mars 2004. Donc, ça a été un long processus. Vous comprendrez, M. le Président, qu'à vouloir faire trop vite le Québec offre peu de substance, échappe d'importants morceaux législatifs et ne propose qu'un encadrement tronqué à la question de la procréation médicalement assistée.

Comment justifier qu'un projet de loi aussi important pour les femmes, pour notre société dans son entier passe sous silence les valeurs fondamentales sur lesquelles il repose? Même la Loi sur les forêts contient dans ses dispositions préliminaires certains principes pour en guider l'application, notamment en matière de reconnaissance du patrimoine forestier et d'aménagement durable. Pourquoi donc laisser à la réglementation le soin de répondre par doses homéopathiques à la majorité des questionnements susceptibles de faire l'objet de choix de société où s'opposent bien souvent les droits individuels et les droits collectifs? Comment pouvons-nous, sans orientations, sans principes directeurs consensuels bien campés, prendre des décisions éclairées sans tomber dans la dérive eugéniste, sans risquer d'augmenter notre intolérance aux handicaps ou sans mettre en péril l'avenir de la vie? Le Québec devra donc entreprendre selon nous une réflexion éthique sur ses valeurs par un dialogue sociétal et interprofessionnel transparent.

Quel type de consentement exigera-t-on d'une personne afin que son matériel reproductif puisse être utilisé pour créer un embryon? Devra-t-on autoriser la présélection d'un embryon en fonction de la compatibilité de ses tissus avec ceux d'un frère, d'une soeur ou d'un parent malade, ce qu'on appelle de façon fort imagée le bébé-médicament? Devra-t-on permettre qu'un enfant soit conçu à partir du sperme de son père décédé? Y aura-t-il lieu de donner aux enfants issus de la fécondation in vitro le même encadrement par rapport au droit à la connaissance de leurs origines que celui qui s'applique aux enfants adoptés?

Dans sa forme actuelle, le projet de loi ne permet pas de débattre en profondeur et de façon ouverte de toutes ces questions et de bien d'autres enjeux entourant la procréation médicalement assistée. En conséquence, on recommande au gouvernement d'enclencher un débat public afin de définir avec la population les valeurs, les principes qui devraient être à la base du projet de loi et de la réglementation subséquente.

Le Québec pourrait aussi tirer profit des principes qui ont guidé l'élaboration de la loi fédérale et son application, dont plusieurs rejoignent nos propres réflexions. Mentionnons ici deux principes dont nous traitons dans notre mémoire. Le premier concerne la nécessité d'agir sur la prévention et le traitement de l'infertilité, et le deuxième, la protection de la santé des femmes et de celle des enfants issus des techniques de procréation.

On constate à l'heure actuelle une tendance à résoudre les problèmes d'infertilité par le recours aux techniques de procréation diverses. Cette tendance risque de s'accroître, puisque ce phénomène va de pair avec la plus forte occurrence des causes qui la génèrent, notamment les infections transmises sexuellement, dont la chlamydia, l'âge plus élevé de la première maternité, la présence de polluants environnementaux. Nous estimons donc que le recours aux techniques de procréation médicalement assistée ne devrait en aucun cas se substituer à la nécessité de protéger les capacités reproductives normales des femmes et des hommes et de les rétablir, le cas échéant. Si le gouvernement enchassait de telles préoccupations dans la loi, il nous assurerait que la recherche sur les causes de l'infertilité ne sera pas reléguée aux oubliettes. Dans le même sens, nous espérons que le ministère de la Santé et des Services sociaux n'oublie pas d'inclure dans sa future politique de périnatalité des mesures visant la protection et le traitement de l'infertilité.

Malgré les succès des techniques de cette procréation assistée, nous devons également mettre en lumière les dangers et les incertitudes que représentent ces techniques pour les femmes qui y recourent et les enfants qui en sont issus ? je pense que l'intervenante précédente en a fait bien état. En effet, certaines techniques, comme la micro-injection intracystoplasmique, ne sont pas encore testées chez les animaux, bien qu'elles soient pratiquées chez l'humain. D'autres, comme la surstimulation ovarienne et la fécondation in vitro, présentent toujours des hauts taux de grossesses multiples, en dépit des moyens connus pour les éviter, et conséquemment des taux de prématurité plus élevés.

Par ailleurs, certaines recherches commencent à montrer les liens entre la procréation médicalement assistée et un risque plus élevé de cancers, de malformations congénitales et de problèmes génétiques chez les enfants. En ce sens, au conseil, on souhaite que la législation intègre un principe de précaution pour protéger la santé des femmes et des enfants, tout en se préoccupant des risques d'ordre physique découlant de la procréation médicalement assistée. Ce principe commande en tout temps d'adopter une attitude prudente, même si l'existence de risques ne fait pas l'objet de certitude scientifique. Ce principe de précaution est intégré dans une loi pour protéger l'environnement, raison de plus de la considérer dans cette loi-ci. En outre, pour permettre un suivi à long terme des personnes concernées par la procréation médicalement assistée et des problèmes de santé pouvant se manifester plusieurs années après les interventions, nous souhaitons que le ministère mette en place un registre des personnes ayant utilisé ces techniques et des enfants qui sont issus, pour assurer le suivi.

Plusieurs pays ont confié des mandats importants en matière de procréation médicalement assistée à un organisme central. À l'instar de ceux-ci et sans se prononcer sur le nombre et le type d'organismes qui devraient assumer les mandats confiés par le gouvernement, on souhaite une structure centrale à caractère permanent, public et indépendant par rapport à tout ordre professionnel, à l'abri des conflits d'intérêts. Outre d'effectuer un débat public sur les valeurs et les principes à la base du projet de loi, l'instance ou les instances mises en place par le gouvernement pourraient se voir confier la responsabilité de conseiller le ministre sur les questions suivantes: les pratiques pouvant être interdites ou autorisées dans les centres de reproduction, et sous quelles conditions, de façon à assurer la normalisation, l'éthique, la sécurité et la cohérence des services offerts dans les centres de procréation médicalement assistée; les principes directeurs destinés à encadrer la recherche; l'établissement et la mise à jour de la réglementation; les questions relatives aux défis posés par la procréation, notamment dans la couverture publique de ces techniques et leurs conséquences sociales, telles que les règles de filiation, les droits parentaux et ceux des enfants issus de ces techniques.

Cette structure centrale pourrait regrouper des médecins, des experts et expertes en droit, en éthique, en philosophie, en biologie, sociologie, génétique, des groupes concernés par la reproduction et des citoyennes et citoyens intéressés par la question. De plus, elle pourrait respecter la représentation paritaire entre les hommes et les femmes. Ce choix que nous privilégions ne remet pas en cause la compétence du Bureau de l'Ordre des médecins du Québec sur les questions d'ordre médical, mais on juge qu'une structure représentant des intérêts et des compétences variés serait davantage appropriée.

Bien que nous n'ayons pas traité de la question dans notre avis, nous aimerions attirer l'attention du gouvernement sur la question des mères porteuses. Depuis de nombreuses années, le Québec interdit, en vertu de son Code civil, les contrats de grossesse, ce que nous approuvons et avons toujours réclamé. Cette position diffère de celle adoptée par le gouvernement canadien, qui encadre et, lui, légitime cette pratique. À l'exemple du régime de l'assurance parentale, du réseau des centres de la petite enfance, de l'interdiction de l'arbitrage religieux en matière familiale, pour ne nommer que ceux-là, voilà un autre domaine où le Québec arrive à des conclusions différentes sur la base de ses valeurs sociétales. Cela illustre bien l'importance de poursuivre le débat afin d'en arriver à des consensus sociaux qui nous ressemblent.

Malgré les réserves que nous avons soumises, le conseil n'est pas a priori contre l'utilisation des techniques de procréation médicalement assistée, qui, comme les autres techniques médicales, peuvent apporter des réponses à des situations de grande détresse. Cependant, on estime que ce pouvoir que nous confère actuellement la science, celui de modifier la façon dont l'humanité peut transmettre la vie, doit être utilisé avec la plus grande prudence, en se posant à l'avance la question des conséquences des interventions sur les femmes, les enfants, les hommes et la société dans laquelle ils vivent.

Et je terminerai en vous rappelant qu'en 1987 on avait fait un colloque, et on parlait bien que les enjeux sociaux, juridiques et éthiques soulevés par l'utilisation croissante de ces technologies apparaissent trop importants pour les laisser aux seuls experts, qu'ils soient cliniciens ou chercheurs. Et, comme le soulignait à l'époque la ministre de la Condition féminine, Mme Monique Gagnon-Tremblay, lors d'un forum international, elle disait: «On a déjà dit que la guerre était une chose trop sérieuse pour la confier à des généraux. Les enjeux des nouvelles technologies sont trop cruciaux pour qu'on les laisse dans les seules mains des spécialistes.» Merci.

n (16 h 20) n

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme la présidente. Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, Mme Lavallée, Mme Bélanger, Mme Mailloux, pour votre visite aujourd'hui. J'aurais quelques remarques à faire pour votre intéressante communication. D'emblée, je dirais qu'il faut éviter de chercher, dans un projet de loi, la réponse à toutes les questions. Parce que plusieurs des questions que vous posez trouvent déjà leurs réponses dans d'autres parties du corpus législatif québécois ? vous l'avez vous-même souligné. Par exemple, le Code civil du Québec, vous avez mentionné la question de la nullité des contrats de mères porteuses, qui est là déjà depuis un certain temps; la filiation des enfants également est réglée, dans le cadre de procréation assistée, par le Code civil, il y a un article spécifique, qui est l'article 538, sur cette question-là; les renseignements concernant les enfants sont confidentiels, article 542; le projet parental passant par la procréation assistée existe également pour les personnes seules et les conjoints de même sexe. Donc, il y a plusieurs éléments que vous avez soulevés qui font déjà partie du code législatif. Il y a également, sur le plan administratif, la désignation d'établissements où on peut pratiquer l'insémination artificielle, la Loi sur les laboratoires médicaux qui a été modifiée pour les centres de conservation des gamètes, le plan d'action en éthique de la recherche et en intégrité scientifique, qui vise notamment la recherche sur les embryons.

Alors, bien sûr, tout n'est pas parfait, mais plusieurs des éléments que vous avez mentionnés, je ne pense pas qu'il faut les chercher dans le projet de loi ici, puisque, quand ils existent déjà dans le corpus législatif, on n'a pas nécessairement à répéter ces choses-là. Mais ce n'est pas une mauvaise chose de rappeler cependant que ces dispositions existent.

Vous avez parlé de la politique de périnatalité. Effectivement, cette politique est en élaboration actuellement au ministère, et on pense la terminer fin 2006, début 2007 au plus tard, et elle va effectivement comprendre toute la question de la prévention de l'infertilité. Et, vous savez, d'abord, on a discuté de cette question lors de la dernière session de la commission parlementaire et on indiquait qu'il y a des causes connues à l'infertilité, notamment la question de la prévalence élevée de certaines infections transmises sexuellement, comme la chlamydia et autres, sur lesquelles des actions préventives peuvent avoir certains... non pas certains, mais des impacts définis.

Par contre, l'autre élément qui semble prédominant dans le problème d'infertilité, c'est l'âge de plus en plus avancé auquel les couples maintenant arrivent avant de décider d'avoir des enfants. Et là il y a des enjeux de modification de comportements qui dépassent de beaucoup la sphère des services de santé. On parle de la disponibilité de services de garde, de la question des conditions de travail, de l'assurance parentale. Donc, on est dans un contexte beaucoup plus large que seulement la question du système de santé.

Quant à la forme du projet de loi lui-même, effectivement c'est un projet de loi qui volontairement laisse beaucoup de place à la réglementation compte tenu de l'évolution très rapide de la situation, des pratiques dans ce domaine-là. Cependant, on s'est déjà engagé à rendre disponibles, lorsqu'on viendra ici en étude détaillée, les principales orientations réglementaires. Donc, on aura à ce moment-là une bonne idée de ces orientations réglementaires, qui seront bien sûr soumises à une consultation, selon la pratique habituelle, lorsque les règlements seront prépubliés.

Maintenant, sur certains éléments plus spécifiques de vos recommandations, notamment les enjeux éthiques à examiner par un organisme indépendant. Vous savez, on l'a dit à plusieurs reprises, on n'est pas nécessairement soucieux d'ajouter des structures gouvernementales mais plutôt de trouver comment on peut tirer partie de celles qui existent. Et il y a deux structures, une nouvelle et une qui l'est moins, qui pourraient être mises à profit pour remplir exactement le rôle que vous mentionnez. Il y a, par exemple, la Commission de l'éthique de la science et de la technologie, qui est un exemple; alors, on pourrait donner le mandat à cette commission de faire ça. Et également le Commissaire à la santé, qui est en cours de nomination actuellement. Et vous savez que la Loi du Commissaire à la santé et au bien-être lui prescrit de façon très formelle d'avoir un commissaire adjoint à l'éthique. Et le ministre et le gouvernement peut demander un avis au Commissaire sur n'importe quelle question, de sorte qu'il est tout à fait... on peut tout à fait envisager de demander un avis sur ce que vous avez dit, la question de l'introduction de nouvelles technologies, etc., ou la façon d'encadrer les pratiques. Et le Commissaire à la santé, chose intéressante, parce que vous avez raison, que ce n'est pas des débats à laisser entièrement au domaine des spécialistes, s'entoure d'un forum de la population, donc de représentants de la population, avec lequel il doit dialogue pour établir ses recommandation. Donc, je pense que, là, il y a un organisme qui peut être intéressant, sur la question de la représentativité. Puis bien sûr il y a une parité hommes-femmes dans ce forum de la population là.

Est-ce que vous croyez donc... Quel serait... évidemment, vous allez peut-être me dire que vous voudriez qu'on crée un autre structure en plus, mais, entre ces deux, le Commissaire à la santé et son Forum de la population ou la Commission de l'éthique de la science de la technologie, lequel d'après vous est le plus apte à remplir ce rôle d'encadrement et de conseil sur le plan éthique et d'encadrement?

Mme Lavallée (Diane): Bien, écoutez, nous, on ne s'est pas prononcées sur le type de structure, puis notre objectif n'était pas de vous suggérer d'en créer davantage. On est très conscientes qu'il existe déjà des organismes qui peuvent avoir cette responsabilité-là. Il n'y a rien qui empêche de morceler certaines responsabilités, que la Commission de l'éthique soit responsable des débats éthiques et des recommandations à cet égard-là, que le Commissaire à la santé, vous vouliez lui confier d'autres responsabilités. Parce que, dans certains pays, il n'y a pas nécessairement qu'un organisme. Ce qui, pour nous, est rassurant, c'est qu'il y ait un organisme central, gouvernemental, qui puisse... un ou des, là, c'est pour ça que vous pouvez diviser, si vous voulez, les responsabilités à travers les mandats respectifs de chacun de ces organismes-là. Pour nous, ça répondrait à notre préoccupation de s'assurer que ces sujets-là sont traités et puissent faire l'objet de recommandations au ministre, au gouvernement, mais par des organismes centraux composés de représentants effectivement de la population, mais aussi de différents spécialistes en éthique, en biologie, et de tous secteurs, pour ne pas laisser... nous, on conçoit que les médecins sont très experts dans tout ce qui concerne les actes médicaux, la pratique, mais, sur une question aussi vaste que la question de la procréation médicalement assistée, dans laquelle il y a des enjeux éthiques importants, on pense qu'il faut élargir les personnes responsables, de regarder ce secteur-là pour proposer au gouvernement des encadrements, du moins suggérer des encadrements ou des orientations qui pourraient être appliqués dans des comités d'éthique, là où il y aurait des centres dûment accrédités. Là, on est tout à fait d'accord avec les propositions que vous faites, là, de contrôle, de reddition de comptes, des centres qui devront s'occuper des technologies de reproduction mais qui devront être encadrés.

M. Couillard: Je dois dire que j'ai un petit préjugé pour le Commissaire à la santé, à cause de son Forum de la population, justement pour cette raison-là.

Mme Lavallée (Diane): Bien oui, c'est bien.

M. Couillard: Parce qu'il doit consulter son Forum de la politique lorsqu'il donne des avis au gouvernement. Et là je pense qu'il y a une sorte de débat de société puis de participation des citoyens qui peut être intéressant.

Mme Lavallée (Diane): Il y a des choses qui peuvent se faire aussi conjointement avec la Commission de l'éthique.

M. Couillard: Certainement. Puis il y a également une autre structure qui existe déjà, qui est l'Agence d'évaluation des technologies et des modes d'intervention. Alors, par exemple, s'il y a une nouvelle technologie qui est introduite, évidemment c'est plus technique comme évaluation, et les aspects éthiques sont relativement peu abordés dans ces situations-là, ils sont soulignés en général, mais ils ne sont pas abordés de façon claire, mais voilà un autre organisme qui peut nous aider également dans ce...

Mme Lavallée (Diane): Chacun peut amener son regard et ses préoccupations, ce qui ne pourrait à mon avis qu'enrichir la réflexion.

M. Couillard: La question du registre. Évidemment, Dre Janvier, que vous avez entendue avant vous, y voit un grand intérêt de santé publique, notamment pour connaître la situation en termes de nombre des enfants issus des techniques et de leur devenir. Je pense qu'elle a fait une présentation assez brillante, là, sur le fait que c'est bien beau de savoir combien d'enfants sont nés de ces techniques-là, mais il faut qu'on sache également quel est leur devenir en termes de fonctions. Effectivement, mais est-ce que c'est le but que vous poursuivrez pour le registre que vous suggérez, ou vous y voyez d'autres finalités?

Mme Lavallée (Diane): Nous, c'est exactement le même but, c'est d'être capables de suivre la situation de santé de ces enfants-là, tout comme un registre des mères aussi qui ont utilisé les technologies de reproduction, pour voir aussi l'état de santé de ces personnes-là, l'état de santé physique et psychologique, mais aussi suivre les enfants issus de l'utilisation de ces nouvelles technologies, dans le même objectif que le médecin qui nous a précédées.

M. Couillard: Maintenant, ce registre-là, vous êtes consciente bien sûr qu'il doit être dénominalisé, parce que l'article du Code civil dont je vous parlais tantôt mentionne spécifiquement que «les renseignements qui sont relatifs à la procréation médicalement assistée d'un enfant sont confidentiels», je cite l'article. Alors, on ne pourra pas faire de registre, qui peut être potentiellement public, dans lequel il y aurait les noms des personnes qui ont eu recours à ces techniques-là, de même que les enfants. Il ne faut pas non plus les stigmatiser puis il faut respecter cette confidentialité. Donc, je comprends que le registre est dénominalisé, dans ce que vous envisagez?

n (16 h 30) n

Mme Mailloux (Thérèse): Bien, c'est-à-dire que, là-dessus, je pourrais compléter. Dans les recommandations que le conseil a faites au cours des années, on s'est attaché particulièrement à toute la question de la levée de l'anonymat pour ce qui est de l'insémination artificielle. Dans nos premiers avis, on voulait carrément que des informations nominatives soient transmises, à la majorité, aux enfants nés, issus de techniques de procréation assistée. Après ça, on a fait une réflexion pour moduler ça un peu et faire en sorte que les dispositions qui s'appliquent à l'adoption actuellement puissent s'appliquer de la même façon aux enfants nés de techniques de procréation assistée. Alors, ce qui est prévu dans le Code civil actuellement, c'est des informations non nominatives à 14 ans, à l'enfant de 14 ans ou à ses parents, c'est aussi une possibilité, si le donneur... si le parent y a consenti, d'avoir accès à des données nominatives, à 21 ans, à la majorité, je veux dire, de cet enfant-là.

M. Couillard: Je dois dire que là-dessus je suis assez craintif, je dois vous dire franchement, là. J'imagine mal quelqu'un qui vient faire un don de sperme, ou même dans une autre circonstance, se voir demander d'assumer des responsabilités paternelles quelques années plus tard, là. Ce n'est pas ce que vous...

Mme Mailloux (Thérèse): Ça fait partie, je pense, des débats que nous voulons proposer. On ne dit pas qu'on a la meilleure solution, mais, comme cette chose... dans cette chose comme dans d'autres, je pense que c'est difficile de faire... d'arriver à une conclusion rapidement et puis d'avoir considéré tous les angles de la situation.

Je pense en particulier qu'il faut voir quelles sont les chartes, par exemple, internationales et quels droits octroient-t-elles aux enfants, quelle est la réflexion qui est faite ailleurs, dans d'autres pays, là-dessus. Je pense qu'il y a certains documents internationaux qui commencent à reconnaître le droit à la connaissance des origines pour les enfants.

Alors, est-ce que, là aussi, est-ce qu'on va se réveiller dans 20, 25 ou 30 ans en disant: Ah! c'est un tort qu'on a fait finalement aux enfants de ne pas conserver en tout cas les noms des personnes pour pouvoir y avoir accès s'ils le veulent? Mais, en tout cas, la question des données non nominatives, en cas de santé, je pense que ça, c'est absolument majeur pour l'instant. Mais je pense que ce sont des questions dont il faut continuer à débattre.

M. Couillard: O.K. C'est bien. Merci.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Chambly.

Mme Legault: Merci. Bonjour, madame. À la recommandation 10 que vous nous formulez, vous nous suggérez d'identifier, c'est-à-dire de créer à un niveau central une ou plusieurs instances, mais vous nous portez à l'attention le fait de la nécessaire indépendance par rapport à tout ordre professionnel, qui devrait être prise en considération. Pouvez-vous commenter davantage?

Mme Lavallée (Diane): Oui, ce qu'on dit, c'est que l'instance qui devrait... l'instance ou les instances centrales qui devraient recommander au gouvernement des approches dans la réglementation, l'application, et tout ça, devraient être à l'abri, je dirais, de toute influence corporative ou autre ou d'intérêts corporatistes.

Et ce qu'on pense, c'est que cette instance-là devrait avoir des liens étroits entre la recherche, les pratiques cliniques dans le secteur de la procréation; aurait la nécessité d'éviter des situations de conflit d'intérêts, notamment ceux liés à des questions financières ou en lien avec l'industrie chez les membres ? c'est pour ça qu'on veut qu'elle soit d'instance gouvernementale ? de la nécessité d'un caractère permanent et public et d'un fonctionnement transparent; la nécessité d'une composition variée, qui permettrait des décisions éclairées, non pas qu'un groupe d'intérêts particuliers qui pourrait à la fois être bien sûr les médecins, mais aussi les propriétaires des cliniques; de la nécessité d'une indépendance par rapport à tout ordre professionnel; la nécessité d'une composition qui respecterait une parité entre les hommes et les femmes. On pense que c'est plus garant d'une certaine transparence, d'une plus grande neutralité, et plus de chances qu'il y ait moins d'intérêts particuliers qui prédominent dans les recommandations qui pourraient être acheminées au gouvernement.

Le Président (M. Copeman): Ça va? Alors, Mme la députée de Terrebonne et porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine et de l'action communautaire.

Mme Caron: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, merci beaucoup de votre présence, de votre mémoire, Mme Lavallée, présidente, Mme Mailloux, Mme Bélanger.

C'est intéressant, parce que vous ouvrez le plus large débat. Et, les éléments que vous avez présentés finalement viennent nous dire que, si nous avions eu un grand débat, un débat sociétal, c'est sûr qu'on aurait abordé des questions qui ne sont pas du tout abordées au niveau du projet de loi, dont celle dont le ministre vient de vous parler tantôt, de toute la question du droit aux origines.

Parce que c'est vrai, au niveau de l'adoption, de plus en plus les mentalités ont changé par rapport à l'adoption puis les gens sont rendus à considérer que c'est normal de connaître les origines, d'autant plus qu'il y a un besoin réel au niveau de la santé, hein, souvent, pour eux-mêmes et leur descendance. C'est évident que, du côté des enfants nés de la procréation médicament assistée, le problème va se poser aussi plus tard, au niveau de leurs questions de santé, par rapport à leurs origines, et ils n'auront pas de réponse, là, ils ne pourront pas même se protéger de certaines maladies quelconques qu'ils pourraient hériter finalement.

La question de la réglementation, vous l'avez soulevée. Je l'ai soulevée dans mes remarques d'ouverture. Le ministre nous a dit tantôt qu'il avait l'intention, au moment de l'étude article par article, de donner les orientations de la réglementation et que la réglementation, bien elle va être publiée, puis, quand c'est publié, bien les gens peuvent réagir. Moi, je souhaite plus que ça, je souhaite qu'au moment de l'étude article par article nous puissions... on me disait, dans un briefing technique, que la réglementation ne serait quand même pas lourde, qu'elle ne serait pas si élaborée que ça, donc je pense que... d'autant plus qu'on devrait pouvoir l'étudier, cette réglementation-là. Parce que c'est un projet de loi où 13 articles sur 50, c'est de la réglementation. Donc, si on ne sait pas ce qu'il va y avoir dans cette réglementation-là, si on ne peut pas faire le débat au moins ici, bien je pense que, pour un débat aussi sensible, avec des conséquences aussi importantes, je pense qu'on aura passé à côté.

Je veux... bon, concernant l'organisme indépendant, là, je pense que là on a une piste qui pourrait être intéressante, quelques pistes, même, où on pourrait retrouver directement dans la loi cet organisme indépendant qui pourrait assurer une garantie de protection. Ma question va être sur le principe de précaution. Vous l'avez abordé très, très, très brièvement, alors j'aimerais que vous nous en parliez plus longuement. Vous le souhaitez à l'intérieur de la loi. Les avantages... vous avez fait un comparatif avec la loi sur l'environnement, alors j'aimerais vraiment vous entendre sur le principe de précaution.

Mme Lavallée (Diane): Bon, ce qu'on dit, c'est que la loi devrait faire appel à la notion de principe de précaution. Il n'existe pas d'obligation quant à l'évaluation des techniques relatives à la procréation médicalement assistée, de leur impact sur la santé des femmes et des enfants. On pense que des inquiétudes ont été exprimées par rapport à cette protection-là et on pense que ça devrait en faire partie.... C'est ça: «Le principe de précaution commande, en cas de risque de dommage grave ou irréversible, d'adopter une attitude qui est prudente, même si l'existence de ce risque ne fait pas l'objet de certitude scientifique.» Et on a fait référence à la notion de précaution qui existait dans la Loi du ministère de l'Environnement, qui dit que «lorsqu'il y a risque de dommage grave ou irréversible ? pour l'environnement, bien sûr ? l'absence de certitude scientifique complète ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir une dégradation de l'environnement». Donc, si on dit que, dans une loi pour la protection de l'environnement, on a trouvé important de mettre une notion de précaution, on pense que, dans une loi pour la procréation médicalement assistée, pour la santé des femmes et des enfants issus de ces technologies-là, on devrait au moins retrouver cette même préoccupation.

Mme Caron: Je ne sais pas si vous avez réfléchi à... Vous la verriez à quel endroit, au niveau de la loi, là? Vous la souhaitez...

Mme Lavallée (Diane): C'est dans les principes...

Mme Caron: Dans les principes...

Mme Lavallée (Diane): Dans les principes...

Mme Caron: Au départ...

Mme Lavallée (Diane): Au départ, oui. Les principes directeurs d'une loi, faisant partie des grands principes. D'ailleurs, il y a eu quand même, dans la loi fédérale, des grands principes qui ont été adoptés, qu'on partage, desquels on pourrait facilement s'inspirer. Il y a une section sur les principes guidant la loi et son application. Le seul qu'il n'y a pas que, nous, on trouverait important d'ajouter, c'est le principe de la prévention de l'infertilité. Mais, dans la loi fédérale, on parle de principes: «La santé et le bien-être des enfants issus des techniques de procréation assistée doivent prévaloir dans les décisions concernant l'usage de celles-ci ? on est tout à fait d'accord. La prise de mesures visant la protection et la promotion de la santé et de la sécurité, de la dignité des droits des êtres humains constitue le moyen le plus efficace de garantir les avantages que représente pour les individus l'utilisation de ces techniques. Ces techniques concernent l'ensemble de notre société, elles visent davantage les femmes que les hommes. [Et] la santé et le bien-être des femmes doivent être protégés lors de l'application de ces techniques.»

Il y a, bon, une, deux, trois, quatre, cinq, six, sept principes qui guident l'application de la loi fédérale, qu'on a regardés comme ça puis qu'on trouve intéressants, duquel le Québec pourrait facilement s'inspirer pour ne pas qu'on échappe ces préoccupations-là, et auxquels pourrait s'ajouter le principe de la prévention de l'infertilité.

n(16 h 40)n

Mme Caron: Justement au niveau de la prévention de l'infertilité, dans votre mémoire, j'avais noté une partie intéressante à laquelle vous référez où finalement, au niveau des chirurgies pour les problèmes de fertilité, parcours ayant débuté en 1991, les chirurgies masculines touchent seulement 1 % des dossiers, alors que les chirurgies féminines s'élèvent à 44 % des dossiers. Et, dans les causes d'infertilité, tantôt on faisait référence aux maladies transmises sexuellement, on faisait référence aussi à l'âge où les femmes conçoivent leurs enfants, mais, ce matin, au briefing technique, on me disait qu'une des principales causes, c'était finalement le sperme qui était plus faible ? puis ça, c'est mondial, hein; qui était plus faible ? est-ce que c'est comme ça que je dois le dire?, parce que je regarde mes expertes qui sont là-bas... Effectivement, suite à toutes sorte de considérations que je vais vous épargner, autant au niveau de causes environnementales que de port de vêtements trop serrés, etc., et que finalement c'est une des principales causes, on ne la dit pas, celle-là, par exemple, hein... On a parlé des causes par rapport aux femmes, mais on n'a pas parlé de celles par rapport aux hommes, mais ce serait une des principales causes de l'infertilité. Alors, je pense que, dans une politique de périnatalité... alors nous allons suivre avec beaucoup d'attention les décisions du ministre dans sa politique, parce qu'il faut effectivement qu'on retrouve de la prévention.

Au niveau des chirurgies, j'aimerais ça vous entendre. Parce que là on nous a parlé au niveau des causes, le ministre a manqué la principale cause, mais, du côté des chirurgies, vos recherches, vous les avez... c'est Mme Bélanger?

Mme Bélanger (Lucie): Sans aller dans les détails, au niveau des chirurgies pour les femmes, les chirurgies qui visent à rétablir la fertilité, ça peut être des choses comme le déblocage des trompes de Fallope. On peut avoir l'équivalent chez les hommes, le déblocage du...

Une voix: ...

Mme Bélanger (Lucie): ...du canal déférent, c'est ça. Mais souvent un problème de fertilité masculine, c'est-à-dire quand il y a une azoospermie, mettons, là, qu'il n'y a pas de spermatozoïdes, les principales interventions vont être faites quand même sur le corps des femmes. Parce qu'aussitôt qu'on parle de fécondation in vitro ça nécessite plein d'interventions, dont les autres intervenants ont parlé beaucoup. Donc, une faible, sans que les spermatozoïdes soient absents, quand il y a une faible concentration, on va aller intervenir par une fécondation in vitro, qui nécessite une intervention sur les femmes pour les amener à faire une superovulation puis aller chercher les ovules.

Mme Caron: C'est exactement ce qu'on se disait ce matin: même si la cause de l'infertilité finalement était du côté masculin, l'intervention était sur le corps des femmes finalement.

Au niveau de la recherche, ça m'apparaît extrêmement important, je veux que vous reveniez sur votre recommandation au niveau de la recherche. Parce que trop souvent, je pense, ça peut être tentant pour obtenir des résultats d'utiliser le corps des femmes comme cobayes finalement.

Mme Lavallée (Diane): Effectivement, on conçoit que la femme ne doit pas être utilisée comme cobaye à l'égard de l'utilisation de ces nouvelles technologies là dans les recherches. Et effectivement on pense que plusieurs femmes sont prêtes à être utilisées comme cobayes, parce que le désir d'enfant est tellement important qu'elles sont prêtes à tout. Je pense que là il y a des questions d'éthique de la part des médecins et des chercheurs aussi pour ne pas abuser, je dirais, de cette volonté-là d'avoir un enfant à tout prix, quitte à être utilisées comme cobayes, avec les conséquences que ça peut amener sur leur santé et celle de leurs enfants donc effectivement.

Et, pour revenir sur la prévention de l'infertilité, nous, on pensait, sur ce que vous disiez tantôt, que la prévention de l'infertilité est tout aussi essentielle à être faite chez les hommes que chez les femmes, effectivement, qu'on identifiait bien les facteurs, qu'on fasse de la prévention autant chez les hommes que chez les femmes et qu'on soit bien conscients des facteurs environnementaux, qui ont un rôle aussi important, au-delà des habitudes de port de vêtements plus serrés qui sembleraient jouer un rôle dans la formation... la spermatogénèse, là, chez les hommes, mais il y a de la prévention à faire comme quoi la mode peut amener son lot de problèmes face à l'infertilité.

Mme Bélanger (Lucie): Comme, en termes de prévention, on peut aussi parler de diagnostic précoce. Il y a des choses simples qu'on peut mettre en place en termes de prévention. Si on rendait facilement... Si ça devenait comme une habitude chez les médecins de faire un diagnostic... de rechercher la chlamydia chez les adolescentes, entre autres, chez les jeunes femmes, déjà on pourrait baisser le taux d'infertilité avec ça, puis c'est une mesure extrêmement simple.

Mme Lavallée (Diane): Puis effectivement, pour ce qui est des grossesses qui arrivent plus tard dans la vie des femmes et des couples, ça milite en faveur de mesures de support, de conciliation famille-travail, pour justement permettre aux parents qui le désirent de pouvoir avoir des enfants plus tôt dans leur vie, même des mesures de conciliation, je dirais, études-familles, parce qu'on sait que les jeunes sont aux études plus longtemps, ils retardent d'autant leur désir d'être parents, et je pense que des mesures qui les soutiennent dans leur parcours aux études permettraient sûrement d'aider le fait d'avoir des enfants peut-être plus jeunes. Et je pense qu'il ne faut pas culpabiliser, par contre, les gens; on n'a pas à forcer les gens de faire des enfants quand ils ne sont pas prêts, quand ils ne se sentent pas en âge d'en avoir, mais il faudrait du moins, je pense, aviser davantage les femmes des risques aussi de retarder l'âge d'une première grossesse, les conséquences sur la question de la fertilité.

Mme Caron: Oui. Et, là-dessus, je pense qu'aussi souvent les jeunes vont nous dire que leur taux d'endettement est très élevé suite aux études, souvent aussi ils se retrouvent avec un travail précaire, un travail atypique, donc cette insécurité fait qu'ils recommencent moins facilement, ils s'installent moins vite au niveau d'une famille. Mais on aurait peut-être à les questionner directement aussi pour savoir les raisons et les causes.

Dernière question avant de passer la parole à ma collègue. Je veux revenir sur la question du registre. Au niveau des enfants, je pense que c'était assez clair, mais, vous, vous avez ajouté la question du registre par rapport aux mères. Et disons que, s'il n'y a pas de question nominale, là, à cause de la confidentialité, ce suivi-là, vous le souhaitez parce que... Est-ce qu'à votre connaissance, suite à de la procréation médicalement assistée, vous avez des données là-dessus, sur des femmes qui ont eu des problèmes médicaux par la suite?

Mme Lavallée (Diane): Parce qu'on sait qu'il y a des études qui démontrent que l'utilisation de certaines techniques ou particulièrement de certaines médications pour accroître le nombre d'ovulations, là, peuvent entraîner chez certaines des cancers ou des problèmes de santé chez la femme. Donc, on trouverait ça intéressant de pouvoir suivre de près l'état de santé des femmes qui ont utilisé différentes techniques, soit de stimulation ovarienne ou autre, pour voir l'impact sur la santé des femmes, qu'on soit capable de suivre dans le temps et être capable de comparer, aussi.

Mme Caron: On pourrait peut-être mettre ça dans la politique en condition féminine, dans notre axe sur la santé, hein? Ça pourrait peut-être être une façon aussi de le suivre. Je vais laisser à ma collègue.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Mmes Lavallée, Mailloux, Bélanger, merci de votre présence, merci pour la présentation de votre mémoire.

Moi, je voudrais rajouter que je suis complètement d'accord avec ma collègue de Terrebonne, qu'il aurait fallu un débat public sur toutes ces questions-là, surtout parce qu'il y a beaucoup de conséquences sociales. On a parlé tantôt des règles de filiation, droits parentaux et ceux des enfants issus de ces techniques, là ? on parle de procréation médicalement assistée. Il n'est pas question de dire si on est pour ou contre, il s'agit de dire que ça va tellement vite qu'il aurait fallu un débat. Malheureusement, on l'a refusé. Et, dans ce projet de loi, on suggère de procéder par réglementation puis en même temps, on dit: On veut procéder de cette façon-ci parce que ça va vite.

Puis tantôt M. le ministre, parlait du Code civil, et puis il parlait qu'il n'y avait pas problème, parce qu'il y a des articles qui concernent la procréation médicalement assistée, on parle de confidentialité. Mais on sait que le Code civil peut facilement être dépassé assez rapidement. D'ailleurs, c'est ce qu'ils nous disent comme argument. On veut procéder par règlement parce que ça va trop vite. Alors, je pense que la question de continuer à débattre... Je vous félicite, là, de soulever cette question.

Mon autre point de vue, étant donné que vous étiez présentes tantôt, lors de la présentation du mémoire du Dr Janvier, j'aimerais avoir vos commentaires concernant les conflits d'intérêts. Tantôt, Dre Janvier, dans son mémoire, disait que le médecin devenait un entrepreneur qui propose des produits. Elle disait également que souvent le médecin est placé en conflit d'intérêts constant. C'est marqué également dans le mémoire et elle l'a spécifié: les médecins des cliniques de fertilité ne vivent pas avec les conséquences à long terme des grossesses multiples et ils n'assument aucune conséquence financière liée aux grossesses multiples. J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet.

n(16 h 50)n

Mme Lavallée (Diane): Mais, nous, ce qu'on souhaite, c'est justement qu'il y ait plus de pouvoirs confiés ? pouvoir de recommandation puis d'encadrement; confiés ? à des instances centrales justement pour éviter ces conflits-là. Ça, on trouve ça, nous, beaucoup plus rassurant, ceci étant dit, avec tout le respect que j'ai face aux médecins et à l'éthique avec laquelle ils pratiquent quotidiennement dans l'ensemble des établissements, qu'ils soient privés ou publics. Mais je pense qu'effectivement, quand on est propriétaire d'une clinique et praticien en même temps, on est peut-être... quand on est juge et partie, ça peut amener des biais dans nos recommandations ou la vision de ce qui est bien pour le bien commun.

Donc, dans ce sens-là, on aurait, je pense, intérêt à retirer ça, bien qu'on pense que chaque clinique, qu'elle soit privée ou publique, devrait être constituée quand même de différents spécialistes pour regarder les questions éthiques de pratique dans son secteur; ça, on trouve ça important. On trouverait aussi important, je vous dirais, qu'un organisme central puisse aussi recommander au gouvernement ce qui pourrait faire partie des pratiques interdites, aussi, quand on parle de procréation médicalement assistée.

Et là je sais que ce n'est pas à moi à poser des questions, mais je vais vous exprimer qu'on considérerait qu'une législation devrait permettre des pratiques... devrait cibler ce que pourraient être des pratiques inacceptables. Et on se posait la question: Est-ce que c'est davantage dans la réglementation qu'on le verra? On aurait, nous, souhaité le voir dans un projet de loi.

Mme Beaudoin: Merci.

Mme Caron: Oui, bien, si on est sur les pratiques interdites...

Le Président (M. Copeman): Pendant deux minutes.

Mme Caron: Pratiques interdites, qu'est-ce que vous voyez qu'on devrait retrouver au niveau des pratiques interdites?

Mme Lavallée (Diane): Ce qu'on trouvait qui devrait faire partie, c'est notamment la recherche sur les embryons humains visant le clonage, l'ectogénèse, la création d'hybride animal humain, le transfert d'embryons à une espèce, la maturation, la fécondation et l'implantation d'ovules extraits de foetus humains, la vente d'ovules, de sperme, de zygotes, d'embryons, de foetus ou de tissus foetaux, le fait de payer une femme pour agir comme mère de substitution, ainsi que sexage de convenance à des fins autres que médicales, on pense que ça, ça devrait notamment faire partie là des pratiques interdites.

Mme Caron: Merci.

Le Président (M. Copeman): Alors, Mme Lavallée... M. le député d'Orford.

M. Reid: ...M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Allez-y.

M. Reid: S'il nous reste quelques minutes, j'aimerais poser une question aux représentantes. Je vous remercie d'être là. Une question qui va concerner les femmes. Mais, avant, je voulais peut-être mentionner, pour avoir eu des collègues de travail qui ont participé à des processus de fécondation... pour dire que, concernant les causes de type social, vestimentaire, etc., autant que je sache, c'est intégré et très bien intégré à toute démarche d'un couple, dans le contexte de la fertilité, et que je pense que c'est difficile de tirer quelque conclusion que ce soit à ce sujet-là, si on veut aller un peu plus loin.

Concernant les femmes, moi, je me pose la question et je voudrais avoir votre avis là-dessus, vous avez mentionné... on a beaucoup mentionné cette vulnérabilité des femmes qui est liée au fait qu'une pulsion extrêmement forte ? et j'ai des filles et une compagne ? d'avoir des enfants. Et c'est fondamental évidemment dans l'espèce humaine. Et cette vulnérabilité-là a pu amener un certain nombre d'éléments. Je pense que c'est pour ça que d'autres personnes et vous avez suggéré certains interdits et certains autres éléments qu'on pourrait qualifier plutôt de prévention ou de responsabilisation. Et je vais prendre une comparaison qui va clocher, comme beaucoup de comparaisons: les jeunes hommes, par exemple, ont une pulsion généralement très forte à la vitesse au volant. Et il y a un mixte d'interdits et d'actions de sensibilisation, de formation, de responsabilisation. Et donc on fait appel à des interdits, d'une part, mais à de l'autocontrôle, de l'autorégulation, aussi, personnels et de groupe, d'autre part. J'aimerais vous entendre sur ce que pourrait être effectivement cet équilibre entre les deux formes d'aide, en quelque sorte: un, c'est d'un interdit social, et l'autre... ou par la médecine, etc., l'autre étant une forme de formation, de promotion, d'aide face à cette vulnérabilité-là finalement qui existe. Et tout le monde qui connaît des femmes en âge d'avoir des enfants qui n'en ont pas la connaissent bien, cette vulnérabilité-là.

Mme Lavallée (Diane): Bien, c'est difficile, avoir la solution miracle, parce que je pense que la responsabilité des professionnels qui interviennent dans le cadre des procréations médicalement assistées passe avant tout par l'information la plus transparente possible des causes et des conséquences d'une utilisation des technologies de reproduction, que ce soit in vitro ou autre. Moi, je pense que... Mais ce qu'on constate et ce que le médecin avant nous témoignait, c'est qu'indépendamment des informations qui sont reçues le désir d'enfant prime tellement que je dirais qu'il faut presque les protéger malgré elles de certaines pratiques qui pourraient leur nuire, nuire à leur propre santé et nuire à la santé de leurs enfants. Et, moi, je pense que les professionnels de la santé, les éthiciens sont là pour ça aussi, pour préserver les gens. Même si on fait affaire à des adultes normalement vaccinés et consentants, je pense qu'il faut être très sensible à ce désir-là, et ce qu'on dit aussi, c'est que le désir d'enfant ne devrait pas se transformer en droit à l'enfant puis en droit à l'enfant parfait, aussi, là, qui pourrait se rapprocher de l'eugénisme. Et, avec la procréation médicalement assistée, on peut aller à ces dérives-là. Donc, ce n'est pas à la femme, même au couple, je dirais, de voir ça, mais je pense que c'est aux éthiciens, aux médecins, aux spécialistes de la question, qui doivent savoir que pour bien des femmes, bien des couples, le désir d'avoir l'enfant se transforme en droit à l'enfant puis en droit à l'enfant parfait, et je pense que, comme société, il faut en être conscient et mettre toutes les balises qu'il faut pour éviter qu'il y ait des dérives.

M. Reid: Je vais utiliser ma comparaison, qui, tout en étant dangereuse, peut aider, là. Le jeune homme qui est... Évidemment, on ne lui donne pas le droit à l'automobile à 160 km à l'heure, ce n'est pas ça qu'on lui donne, mais on lui donne néanmoins le droit de conduire, sachant qu'à chaque fin de semaine il y a des jeunes hommes qui vont se tuer et tuer du monde, parce que la vitesse, c'est une tentation extrêmement forte. Jusqu'où l'État va aller pour, disons, intervenir de façon directe dans un processus comme celui-là? Et est-ce que vous avez des éclairages à nous donner? Évidemment, c'est une question que je vous pose un peu à brûle-pourpoint.

Mme Bélanger (Lucie): J'aurais quelque chose à dire là-dessus, là. La façon dont les techniques de procréation médicalement assistée sont présentées dans la société puis dans les médias, c'est quelque chose de très alléchant. Ce qu'on entend toujours, c'est: Céline Dion, qui a eu son enfant avec une technique, ça a été parfait. Il est parfait, cet enfant-là. Puis il y a plein de... Ce sont ces cas-là, et pas les cas où il y a eu des problèmes, qui sont mis sur la place publique, O.K.? Donc, il y a des pressions sociales qui ne sont pas justes dues à une pulsion, mais on montre que c'est quelque chose de bien, de fascinant et de facile. Pour les gars qui conduisent, c'est la même affaire, vous regarderez les publicités. La publicité, c'est axé sur la vitesse, puis c'est valorisé. Donc, c'est un peu du même ordre, je trouve. La façon dont la société le présente, ça favorise, si on veut, l'émergence de ces pulsions-là.

M. Reid: Intéressant.

Le Président (M. Copeman): Alors, Mme Lavallée, Mme Bélanger, Mme Mailloux, merci beaucoup pour votre participation à cette commission parlementaire au nom du Conseil du statut de la femme. Et, sur ça, j'ajourne les travaux de la commission jusqu'à 9 h 30 demain matin, ici, en cette même salle. Merci.

(Fin de la séance à 16 h 58)


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