(Quinze heures trente-deux minutes)
Le Président (M. Copeman): Alors, chers collègues, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la commission des affaires sociales ouverte. Je vous rappelle le mandat. La commission des affaires sociales est réunie afin de procéder à l'étude détaillée... poursuivre, je devrais dire, l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, Bill 7, An Act to amend the Act respecting health services and social services.
Je vous rappelle, pour le bon fonctionnement de la commission, de vouloir éteindre vos téléphones cellulaires.
Et, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Non, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Pas de remplacement.
Motion proposant d'entendre
le ministre du Travail (suite)
Alors, nous étions, au moment que nous nous sommes quittés, il y a quelques jours, sur une motion préliminaire proposée par le député de...
Une voix: Joliette.
Le Président (M. Copeman): ...de Joliette, pardon. La motion préliminaire se lit comme suit:
«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende le ministre du Travail, selon l'article 164 de nos règles.» M. le député de Joliette avait épuisé son temps de parole sur la motion. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles, en tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière, avait épuisé son temps de parole. M. le député des Îles-de-la-Madeleine, en remplaçant M. le député de Vachon, avait épuisé son temps de parole. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions à ce moment-ci, mes chers collègues? M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: Très brièvement, M. le Président, afin de ne pas gaspiller le temps précieux de cette commission et nous donner le temps nécessaire pour procéder à l'étude article par article du projet de loi, je voudrais rassurer le public et nos collègues qu'effectivement le ministre du Travail a été très étroitement impliqué dans la préparation de ce projet-là. On n'a pas pris la procédure de l'ancien projet de loi n° 151. Je lisais encore aujourd'hui avec intérêt les déclarations de notre collègue le député de Borduas lors de la dernière séance et je le cite tel que ça apparaît au feuilleton: «Jamais vraiment discuté au Conseil des ministres [...] jamais discuté au niveau des caucus surtout, surtout jamais vraiment discuté. Discuté, mais pas discuté à fond comme on aurait dû le faire.» Alors, nous, on a discuté comme on aurait dû le faire. On a discuté au niveau du caucus, au niveau du Comité ministériel, au niveau du Conseil des ministres, en étroite collaboration avec le ministre du Travail qui se déclare satisfait de la façon dont le projet de loi a été préparé. Il a apporté sa plus grande collaboration. Et nous ne voyons donc pas l'utilité de le convoquer à la présente commission, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Très bien. Est-ce qu'il y a d'autres interventions à ce moment-ci? Alors, je mets aux voix la motion du député de Joliette. M. le député, oui.
M. Valois: Oui. Comme c'est ma motion, j'aimerais qu'elle soit votée par vote par appel nominal, s'il vous plaît, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Bon. Alors, on a une demande de vote par appel nominal. Mme la secrétaire.
La Secrétaire: Alors, M. Valois (Joliette)?
M. Valois: Je suis pour.
La Secrétaire: Mme Léger (Pointe-aux-Trembles)?
Mme Léger: Pour.
La Secrétaire: M. Bouchard (Vachon)?
M. Bouchard (Vachon): Pour.
La Secrétaire: M. Couillard (Mont-Royal)?
M. Couillard: Contre.
La Secrétaire: Mme Charlebois (Soulanges)?
Mme Charlebois: Contre.
La Secrétaire: Mme L'Écuyer (Pontiac)?
Mme L'Écuyer: Contre.
La Secrétaire: M. Bernard (Rouyn-Noranda? Témiscamingue)?
M. Bernard: Contre.
La Secrétaire: M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Contre. La motion est rejetée.
Est-ce que nous sommes prêts à procéder à l'étude détaillée, l'article 1? M. le député de Vachon, oui.
Motion proposant d'entendre M. Jean Bernier,
professeur au Département des relations
industrielles de l'Université Laval
M. Bouchard (Vachon): M. le Président, en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, il est proposé «que la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende M. Jean Bernier ? qui est ? professeur titulaire en relations industrielles à l'Université Laval».
Le Président (M. Copeman): Est-ce que je peux avoir copie de votre motion, M. le député?
Merci. Votre motion est clairement recevable. Je vous remercie d'avoir fourni des copies pour tous les membres de la commission. Nous allons faire distribuer ladite motion qui m'apparaît très claire. Alors, comme auteur de la motion, M. le député de Vachon, vous avez un temps maximal de 30 minutes à plaider en faveur de votre motion. Alors, la parole est à vous.
M. Camil Bouchard
M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Je m'étonne, quelque part, que l'argument invoqué par le ministre de la Santé et des Services sociaux pour ne pas entendre le ministre du Travail, que cet argument tienne sur le fait que lui l'aurait entendu. Or, la commission des affaires sociales, me semble-t-il, est un lieu ouvert à tous les parlementaires de quelque parti qu'ils soient et qui peut, ce lieu, accueillir, pour fins d'une meilleure compréhension de ce dont on est saisi par le gouvernement, qui peut inviter des personnes sur des consultations particulières. C'est le droit le plus strict, me semble-t-il, M. le Président, de cette commission et des membres de cette commission que de procéder de la sorte.
Il me semble que l'argument à l'effet que le ministre, dans des consultations particulières, ou dans son cabinet, ou dans des comités restreints, ait pu consulter le ministre du Travail n'est pas un argument extrêmement fort et extrêmement intéressant. De fait, c'est un argument qui se suffit à lui-même, quoi, qui dit quelque part: Puisque, moi, en tant que ministre, j'ai consulté et que je prétends tout comprendre clairement de ce que je suis en train de faire, ce n'est pas nécessaire que les autres membres de la commission puissent être informés à un même niveau et avec la même qualité.
Alors, vous permettrez, M. le Président, de faire remarquer au ministre que nous sommes dans une enceinte démocratique, que, dans cette enceinte, il n'y a pas, comme dans d'autres lieux, des structures de décision qui seraient hiérarchiques. Nous sommes dans une commission où on peut discuter sur le fond des questions, et ce fond des questions a à être informé, éclairé, enrichi des connaissances des acteurs-clés dans l'aménagement de la loi.
Or, cette loi que nous présente le ministre de la Santé et des Services sociaux touche directement un droit fondamental à la liberté syndicale. Et, à ce qu'il me semble, le ministère de la Santé et des Services sociaux n'a pas comme mission de protéger ces droits, de les étudier, de les encadrer, et il est donc d'une double, d'une triple prudence nécessaire que de convoquer devant nous des gens qui sont bien affûtés en ce qui concerne les implications, les impacts des projets que l'on présente en matière de réglementation dans le monde du travail.
n(15 h 40)n Ma proposition, M. le Président, vise à inviter un professeur titulaire en relations industrielles à l'Université Laval qui est bien connu, qui a déposé, il y a quelque temps, un rapport fort important sur toute cette question des relations de travail et de l'aménagement, de l'organisation et des contextes du travail, notamment en fonction de toute la question que posent le travail atypique et le travail autonome.
Et ce professeur, Jean Bernier, a publié ? vous vous en souviendrez sans doute, M. le Président, puisque nous avons eu l'occasion d'en discuter ensemble précédemment ? dans Le Devoir du 22 octobre 2003, un article qui nous indique que, selon lui et selon plusieurs de ses collègues, des gens qui sont professeurs dans le Département des sciences juridiques, professeurs à la Faculté de droit, un professeur à l'École des relations industrielles, M. Jean Charest ? de fait, ça rappellera peut-être quelque chose à nos collègues, un homonyme ? Michel Coutu, professeur à l'École de relations industrielles, alors de différentes universités, Mme Sylvie Morel, qui est professeure au Département des relations industrielles de l'Université Laval et qui s'est longuement penchée sur ces questions, alors une longue liste de chercheurs, d'analystes du monde de la réglementation du travail qui s'associent... Et je pense qu'à lui seul... ou, à elle seule, cette opération de s'associer pour signer une même analyse et la publier dans un quotidien québécois, à elle seule, cette procédure devrait nous interpeller, devrait nous intriguer, devrait certainement nous appeler à la plus grande attention, à la plus grande prudence.
Alors, M. Bernier, avec ses collègues, publient un article qui s'appelle Un dangereux précédent ? Les projets de loi 7 et 8 visent essentiellement à retirer le statut de salarié aux ressources intermédiaires. Alors, ce que nous dit ce document... Et c'est pour ça, je pense, qu'il serait important de recevoir M. Bernier, parce qu'on pourrait l'interpeller, l'interroger, confronter nos points de vue. Et je suis persuadé, M. le Président, que le point de vue du ministre est différent de celui de M. Bernier et qu'il voudrait, à ce titre, rencontrer ce professeur qui en connaît un bon bout sur le sujet. C'est comme si, pour prendre une analogie, quelqu'un qui aurait un problème neurologique voulait rencontrer le ministre. Il aurait affaire à un expert puis il serait content de le rencontrer. Bien, je pense que, dans le domaine des relations du travail, le ministre serait heureux de rencontrer quelqu'un qui s'y connaît dans un domaine qu'il ne connaît pas tout à fait.
Alors, l'objectif premier, selon M. Bernier, selon le Pr Bernier, du projet de loi, c'est de nier, de fait, carrément aux personnes qui sont concernées le droit de se prévaloir du recours à la représentation syndicale et à la négociation collective telles que définies au Code du travail comme moyen de participer à la détermination de leurs conditions de travail. Alors, cette première remarque du Pr Bernier, venant d'un observateur neutre de la scène de la réglementation du monde du travail et de la protection des conditions de travail des ressources, cette première remarque a de quoi nous inquiéter.
Si c'était que la CSN, ou si c'était que la FTQ, ou si... «exclusivement» et non pas «que»... ou si c'était exclusivement la CSQ qui, devant nous, protestait du fait que l'on retire un droit fondamental à la syndicalisation, on pourrait toujours, M. le Président, invoquer un prétexte, une excuse à la protection d'un certain corporatisme comme le premier ministre l'a fait dans une lettre ouverte aux Québécois. On pourrait toujours invoquer cette raison-là. Mais M. Bernier, manifestement, ne fait pas partie du leadership de ces organisations et, de son point de vue objectif de personne qui observe l'ensemble des dimensions du phénomène ou de la situation, il nous dit: L'objectif premier de ce projet de loi est de nier aux personnes concernées le droit de se prévaloir à un recours à la représentation syndicale.
Et plusieurs des intervenants qui sont venus devant cette commission ont affirmé que c'était là brimer un droit fondamental, que c'était là brimer une capacité que s'est donnée la société québécoise de protéger des démarches légitimes de personnes qui voulaient se prévaloir du Code du travail comme outil de protection ou d'amélioration de leurs conditions de travail.
Et là, M. le Président, j'aimerais faire une petite parenthèse. Nous avons souvent entendu, surtout à la Chambre, à l'Assemblée nationale, des remarques à l'effet que le gouvernement devait choisir entre les syndiqués et la classe moyenne. Alors, pour qui est le moindrement au courant du développement de la classe moyenne dans nos sociétés contemporaines et occidentales, on se rendra compte que cette classe moyenne a été littéralement créée grâce à l'impulsion, au soutien, au support et aux actions menées par les grandes centrales syndicales. Le grand compromis, M. le Président, sociodémocrate entre le capitalisme effréné et le socialisme à tous crins, ça a été la social-démocratie. Et cette social-démocratie, qui a été bâtie dans plusieurs de nos juridictions occidentales, s'est bâtie autour de cette capacité des travailleurs ou des travailleuses, des ouvriers et des ouvrières, à se donner des outils de développement économique et de développement social qui faisaient en sorte qu'ils n'étaient plus confinés à la seule classe des prolétaires et qu'ils pouvaient donc rejoindre une classe mieux nantie, bourgeoise, capable de profiter des richesses et de partager les richesses produites par leur société, produites par leur communauté.
Et j'ouvre cette parenthèse parce qu'il est très important, me semble-t-il, M. le Président, que M. Bernier soit interrogé sur au-delà de son affirmation à savoir que l'objectif premier de ce projet de loi n° 7 est de fermer la porte à la syndicalisation et de nier le droit fondamental à la liberté de syndicalisation, d'interroger M. Bernier sur les effets que peut avoir une telle brèche dans ce droit fondamental sur la capacité de la classe moyenne de continuer à améliorer son sort, parce que, voyez-vous, M. le Président, la distinction que l'on voudrait faire et qui est malheureuse, malencontreuse et fausse entre la classe moyenne et les syndiqués, cette distinction est... n'existe pas.
Alors, si on se met à fermer la porte à la syndicalisation pour la première raison venue, si parce que, quelque part, on calcule ce que ça pourrait nous coûter, 850 millions de plus, si, quelque part, on commence à fermer la porte parce qu'on pense qu'on ne pourra pas envisager éventuellement que la syndicalisation puisse avoir des effets tels que notre budget en soit menacé, si c'est ça, M. le Président, la raison et si on crée une brèche dans notre capacité démocratique et dans notre capacité d'application et d'usage des droits fondamentaux à travers le projet de loi n° 7 ? et, moi, j'aimerais bien entendre le Pr Bernier là-dessus ? si on crée cette brèche, que va-t-il se passer ensuite?
Et là le Pr Bernier nous dit... Il nous en révèle un bout sur sa pensée là-dessus, mais il insiste très lourdement sur le fait que le projet de loi est un détournement de sens et que ça va littéralement, dit-il, «à l'encontre des principes qui régissent l'exercice de la liberté syndicale dans notre société, au mépris de la jurisprudence québécoise et canadienne ainsi que du droit international en la matière». Autrement dit, il nous annonce de sérieuses bagarres devant les tribunaux internationaux, devant les tribunaux canadiens sur cette mesure qu'entend prendre le gouvernement avec sa loi n° 7.
n(15 h 50)n Mais, au-delà de cet avertissement puis au-delà de ce constat, le Pr Bernier pourrait nous informer des impacts pervers que peut avoir une telle loi sur, notamment, les conduites éthiques, les conduites éthiques et morales que s'apprête à adopter le gouvernement en la matière. Et je ne qualifie pas les conduites; je dis que ce sont des conduites qui sont dans le domaine de l'éthique et de la morale. Il pourrait nous informer sur la nature de ces conduites en regard des effets que ça peut avoir sur d'autres offreurs... d'autres personnes qui offrent de l'emploi, d'autres employeurs qui pourraient être tentés, M. le Président, à la faveur d'une argumentation comme, par exemple: Si un syndicat s'installe dans ma boutique, si un syndicat s'installe dans mon entreprise, je suis littéralement acculé à la faillite, mon entreprise sera moins profitable... Donc, ce serait, dès lors, M. le Président, par mimétisme et par avantages anticipés qu'ils auraient pu voir le gouvernement s'approprier. Ces employeurs, nous dit le Pr Bernier, pourraient être tentés d'emprunter la même voie et de déclarer autonomes ou faux indépendants, dit-il ? ce n'est pas moi qui le dis ? des employés de son organisation de telle sorte à éviter un accroissement du fardeau sur son budget de fonctionnement, comme le fait le gouvernement présentement avec son projet de loi.
Cette procédure d'évitement, parce qu'il s'agit bien là, M. le Président, d'une procédure d'évitement syndical, aurait donc, selon le Pr Bernier, des impacts... pourrait avoir des impacts extrêmement malheureux sur notre moralité civile, sur nos conduites éthiques en matière de respect des droits fondamentaux lorsqu'un gouvernement, peu importe qui il soit, décrète malgré les faits, au-delà des faits, à partir de ses besoins très ponctuels...
Parce que, là, on parle des besoins du gouvernement actuel, mais on pourrait anticiper que, dans plusieurs années, la situation soit très différente, mais qu'on aura refusé à une génération ou à deux générations le droit de se syndicaliser et donc, par conséquent, d'utiliser les outils que la démocratie québécoise a développés pour protéger et améliorer les conditions de travail, notamment le Code du travail.
On rentrerait, M. le Président, selon le Pr Bernier, dans un couloir extrêmement dangereux où, sur le plan des apparences, sur le plan des perceptions, sur le plan des désirs, sur le plan des souhaits, on pourrait, on pourrait, en tant qu'employeur ? et le gouvernement en est un ? décréter que les gens qui sont à l'emploi de l'organisation sont des travailleurs autonomes, puisque ça fait l'affaire du gestionnaire, puisque, quelque part, ça lui permet de boucler son budget. Or, M. le Président, c'est faire bien peu de cas des droits fondamentaux.
Et c'est faire bien peu de cas aussi à l'intelligence de la classe moyenne que de penser que les syndicats pourraient profiter d'un droit à la syndicalisation pour amener le gouvernement à se déclarer en faillite technique, M. le Président. Ça n'a comme pas de bon sens. D'abord, il y a deux problèmes avec ce raisonnement. Le droit à la syndicalisation, ça ne veut pas dire la syndicalisation automatiquement; ça veut dire que des personnes peuvent envisager se syndiquer. Ces personnes peuvent envisager se prévaloir de leurs droits pour se protéger et améliorer leurs conditions de travail en utilisant le Code du travail et les leviers du Code du travail. Ça veut dire qu'ils peuvent l'envisager.
Alors, ce que le projet de loi fait, c'est d'interdire à des milliers de travailleuses et de travailleurs... d'interdire qu'ils ne puissent envisager se syndiquer. C'est comme si on disait que désormais ces milliers de personnes n'ont plus le droit de penser à se protéger adéquatement avec le Code du travail et qu'on avalise, qu'on légitimise, qu'on valide une telle conduite auprès d'autres employeurs qui n'auraient qu'à argumenter devant le gouvernement, dans ses lobbys ou éventuellement devant les cours, invoquer le précédent que le gouvernement aura créé pour éventuellement emprunter un même couloir de l'évitement syndical. Alors, M. le Président, le Pr Bernier soulève là un problème d'éthique sociale extrêmement important, et j'aimerais bien, moi, que le ministre de la Santé et des Services sociaux, qui est confronté dans son travail quotidiennement par des problèmes d'éthique, puisse ajouter celui-là à sa réflexion.
Et ce n'est pas un petit problème d'éthique; c'est un problème extrêmement important. Il met en cause, M. le Président, la capacité de payer de l'État, d'un côté, et l'exercice d'un droit fondamental de syndicalisation, de l'autre. Et, quand on est face à un problème d'éthique, il me semble que ça vaut la peine... Et on ne nie pas que c'en est un; on pense que c'en est un vrai. Le ministre est coincé entre deux nécessités et il doit réfléchir dans des modes de moralité et dans des modes d'éthique seulement que dans des... et pas seulement dans des modes de gestion. Et je pense qu'à ce titre-là n'importe quel ministre de la Santé et des Services sociaux pourrait être, je pense, légitimement accueilli à ouvrir la discussion à des personnes qui viendront, avec lui et avec les membres de cette commission, discuter de cette dimension éthique.
Il y a un autre aspect, M. le Président, qu'on devrait, je pense, envisager discuter avec le Pr Bernier. Le Pr Bernier, comme d'autres observateurs, dit, et je cite, M. le Président... M. le Président, je ne sais pas si c'est conforme aux règles...
Une voix: ...
M. Bouchard (Vachon): C'est conforme aux règles. Oui, très bien. Dans le fond, M. le Président, le ministre de la Santé, qui est assis en face de moi et qui n'est pas à la caméra, est en train de m'offrir des bonbons, sans doute pour me faire taire. Et il veut, en plus, chanter une chanson de Jacques Brel qu'on serait prêts à écouter à condition que ça ne compte pas sur mon temps, M. le Président, et qu'il n'ait la chanson pas trop fausse. Mais je suis persuadé qu'il est plein de talents puis qu'il pourrait nous la faire.
Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon, si le ministre désire intervenir, il va avoir le loisir de le faire après.
M. Bouchard (Vachon): Bien, il m'a offert un bonbon, il est intervenu, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Je comprends, je comprends, mais nous connaissons les règles. Alors, à ce moment-ci, je souhaite qu'on écoute attentivement...
M. Bouchard (Vachon): Vous ne voulez pas entendre:
«Je vous ai apporté des bonbons;
«Parce que les fleurs sont périssables;
«Et que les bonbons, c'est tellement bon...» Non?
Le Président (M. Copeman): À ce moment-ci, chers collègues, on n'est pas encore rendu à la session intensive. Alors, je souhaite qu'on écoute attentivement le député de Vachon. Et, si jamais il y a d'autres députés qui désireraient intervenir sur le sujet, ils vont avoir le temps de le faire. Allez-y, M. le député.
M. Bouchard (Vachon): M. le Président, je suis persuadé que c'est une autre chanson de Brel que le ministre avait en tête comme, par exemple, Ce plat pays, mais on pourrait peut-être en reparler.
Alors, M. le Président, le Pr Bernier ne serait pas ici pour chanter une chanson au ministre. Et voici ce qu'il lui dirait. Il lui dirait: Vous déguisez une relation de travail en lui donnant une apparence différente de la réalité afin d'annuler ou de dissimuler la protection offerte par la loi. Ça, c'est à peu près le couplet que le ministre entendrait. Et on est prêts à le répéter souvent, ce couplet-là, M. le Président, mais ce que j'aimerais entendre de M. Bernier, c'est son explication concernant ce couplet: «Déguiser une relation de travail consiste à lui donner une apparence différente de la réalité afin d'annuler ou de dissimuler la protection offerte par la loi.» J'aimerais beaucoup entendre M. Bernier là-dessus, parce que, pour affirmer cela dans son texte, il cite des décisions des tribunaux internationaux sur les relations de travail et il se réfère directement aux projets de loi nos 7 et 8 qui sont devant cette commission.
Je rappelle, pour fins de mémoire, M. le Président, que nous sommes devant une situation où le gouvernement dit: Oui, nous avons bien lu, nous avons bien lu les résultats des délibérations des tribunaux, et nous savons très bien, et nous convenons très bien que les décisions des tribunaux sont directement assises sur les faits, que ces décisions découlent d'observations des faits, mais les faits, là, ça ne nous intéresse pas. Ce qui nous intéresse, c'est soit les souhaits apparents d'une population à se voir reconnaître autonome ou non, soit nos propres besoins en tant que gestionnaires. Et, puisque nous détenons l'autorité suprême d'édicter des lois, eh bien, on va s'en servir pour transformer nos vessies en lanternes. Et c'est exactement ce que le gouvernement est en train de faire.
Moi, ce que j'aimerais entendre du Pr Bernier, c'est: Qu'est-ce qui arrive dans une société où on commence à nier les faits? Qu'est-ce qui arrive dans un monde de relations de travail où on commence à renier, à nier les faits? Sur quelles bases, sur quelles bases on va négocier et sur quelles bases on va entretenir des interactions de bonne foi si, au point de départ, l'employeur dit: Les faits ne m'intéressent pas. Amenez-moi pas des données, amenez-moi pas des observations, amenez-moi pas des situations qui sont concrètes et des démonstrations qui ont été validées et approuvées; ça ne m'intéresse pas. Ce qui m'intéresse, c'est de boucler mon budget, et ce qui m'intéresse, c'est d'interdire la syndicalisation. Alors, ne venez pas me parler de ça.
Moi, j'aimerais bien que le Pr Bernier, qui est un expert dans le domaine, puisse nous dire qu'est-ce qui arrive dans une société et dans les organisations qui nient les faits? Quelle sorte de climat de travail ça crée? Quelles sortes de relations ça crée entre les citoyens qui se trouvent lésés de leurs droits? M. le Président, on confond ici non simplement les faits avec les perceptions et les désirs, mais on confond aussi très nettement les périodes dans lesquelles on introduit les modifications. On se croirait au XVIIIe siècle. Ça n'a comme pas de bon sens. On est en 2003. Et jamais je n'aurais pensé que notre ministre actuel ni moi-même...
n(16 heures)nUne voix: ...
M. Bouchard (Vachon): ...jamais je n'aurais pensé que notre ministre actuel ni moi-même serions, en vis-à-vis, en train de discuter un projet de loi qui interdit, en 2003, à des milliers de personnes, et très majoritairement des femmes, le droit de choisir d'être... son type d'association en matière de protection de relations de travail. Je n'aurais jamais pensé ça.
On est devant un gouvernement qui gère les relations de travail d'abord en refusant d'écouter le ministre du Travail ? ça, c'est le bout ? et, deuxièmement, qui utilise son pouvoir discrétionnaire pour instituer une loi qui va non simplement refuser à des personnes le choix, mais qui va nier ? ce qui est encore pire ? qui va nier le choix que certaines personnes ont déjà fait dans leur procédure de demande d'accréditation ou dans leur statut acquis de salariés syndiqués dans le système. Alors, ça, c'est le bout, M. le Président, et j'aimerais ça, moi, entendre M. Bernier sur cet élément-là qui fait que, bientôt, bientôt, des milliers de personnes qui ont acquis le droit, des milliers de personnes qui ont exercé le droit vont se voir refuser ce droit-là.
Et ce pourquoi il me semble que c'est encore plus important de recevoir le Pr Bernier dans cette enceinte, c'est que...
Une voix: ...
M. Bouchard (Vachon): ...c'est que, M. le Président, ce projet de loi arrive en même temps qu'une panoplie d'autres projets de loi, où on voit que, quelque part, il y a là-dedans une certaine planification puis une certaine orchestration qui va faire en sorte que le monde du travail au Québec va se voir lourdement modifier par un ministère dont ce n'est pas la fonction que de réfléchir, d'analyser, de gérer et de protéger les travailleurs.
C'est très clair que, si on avait un ministre du Travail en face de nous, il ne pourrait pas se comporter comme un ministre de la Santé indifférent au sort des travailleuses et des travailleurs et au sort surtout qu'on fait aux éléments de leur protection, puisqu'il serait lui-même en porte-à-faux avec sa mission qui est de protéger les travailleuses et les travailleurs et d'améliorer les contextes et les conditions de travail dans lesquels on les retrouve.
Alors, il me semble que le ministre de la Santé et des Services sociaux, à qui je ne nie aucunement la bonne foi, à qui je prête les meilleures intentions du monde, devrait se protéger contre un excès de candeur et devrait se protéger contre un excès de pouvoir qu'il pourrait exercer à un moment donné de l'histoire du Québec, le protéger contre le fait qu'il va marquer d'une pierre noire la qualité du traitement que la société québécoise donne au respect, et le plus grand respect des droits fondamentaux, de choisir sa liberté et la nature de sa liberté d'association.
Alors, à ce titre-là, M. le Président, j'invite très cordialement, très chaleureusement, très sincèrement le ministre de la Santé et des Services sociaux, par votre intermédiaire bien sûr, M. le Président, à considérer rencontrer dans cette enceinte le Pr Jean Bernier. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent intervenir sur la motion du député de Vachon? Mme la députée de Pointe-aux-Trembles et porte-parole de l'opposition officielle en matière des services sociaux, la parole est à vous.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Merci, M. le Président. Alors, évidemment, je m'inscris dans cette motion que mon collègue député de Vachon nous a indiquée et nous présente ici et que je souhaite ardemment que le ministre et ses collègues ministériels pourront donner suite et voter en sa faveur parce qu'elle est fort intéressante et même très importante.
Je rappelle la motion telle quelle: «Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin ? et là est la motion principalement ? elle entende M. Jean Bernier, professeur titulaire en relations industrielles à l'Université[...] ? de ? Laval.» Alors, M. le Président, c'est une motion que nous apportons ici, en commission parlementaire. Donc, nous avons déjà, en commission, lors des consultations particulières et des audiences publiques, entendu, le 16 septembre dernier, plusieurs groupes qui sont venus ici durant une journée nous donner... nous présenter leurs mémoires et nous donner leurs perceptions de ce projet de loi n° 7.
Il est évident qu'en une journée on n'a pas eu l'occasion nécessairement de voir tout le monde intéressé ou qui a des intérêts par rapport... par rapport au projet de loi n° 7. Et, évidemment aussi, il faut donner le temps aux gens aussi de regarder le projet de loi et de susciter parfois, pas directement chez les gens directement concernés, je veux dire, mais solliciter parfois des intérêts des personnes environnantes au projet de loi et même, dans la population, des gens qui nous écoutent et qui sont intéressés par ce qui se passe en santé et services sociaux, d'une part, mais particulièrement toutes les questions touchant les relations industrielles et les relations de travail, les relations d'emploi et évidemment aussi tout l'apport syndical du Québec et toutes les luttes syndicales que nous avons eues au Québec et qui se poursuivent encore plus... plus ici.
Alors, évidemment, on n'a pas... on n'a pas non plus eu assez de consultations encore. J'espère qu'on en aura pour... qu'on en aura autant dans les projets de loi qui viendront, les projets de loi nos 25 et 30 qui ont été mis sur la table aussi par le ministre de la Santé et des Services sociaux, qui... aussi des points importants dans ces projets de loi là qui viennent affecter... qui viennent affecter directement les services de santé et les services sociaux du Québec.
Or, M. le Président, Jean Bernier est un professeur au Département des relations industrielles de l'Université Laval. Alors, c'est intéressant de venir l'entendre, parce qu'il a écrit beaucoup, M. Bernier, au fil des derniers mois, au mois de septembre... au mois de juillet, au mois de septembre, au... Alors, j'ai plusieurs articles ici de M. Bernier. Évidemment, c'est un expert en relations de travail, relations industrielles, mais donc il donne son opinion sur les relations de travail.
Je ne comprends pas, M. le Président, comment il se fait qu'on n'entende pas M. Bernier, d'une part. C'est la motion qu'on veut l'entendre aujourd'hui. Mais, si je me réfère, avec sa collègue, la collègue... la collègue du ministre de la Santé et des Services sociaux, la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, le projet de loi semblable qui était le projet de loi n° 8... Parce que, quand on va dans les articles et quand on voit le goût du gouvernement du Québec actuellement, du Parti libéral, ces deux projets de loi sont directement, je pourrais dire, assez, assez liés, autant par sa forme que son contenu tel quel. Et on avait... On a demandé... C'est mon collègue le député, à côté de moi, qui est le député de Joliette et qui est le porte-parole au niveau de la famille. Donc, le projet de loi touche particulièrement les responsables en services de garde en milieu familial, les RSG qu'on appelle. Et, la même chose, on a demandé... On a fait cette motion-là d'écouter Jean Bernier. Et le gouvernement n'a pas cru bon voter en cette faveur et a refusé d'entendre M. Bernier.
n(16 h 10)n Alors, c'est beau écrire des articles, M. Bernier, mais je pense qu'il aurait des choses à nous dire. Alors, nous revenons encore une autre fois pour entendre M. Bernier. Alors, j'espère... Je vois les députés en face de moi. J'espère qu'ils auront cette fois-ci le goût d'écouter M. Bernier et qu'ils auront... C'est la même commission, M. le Président. Vous êtes le président de la commission des affaires sociales. Alors, c'est la même commission où nous voyons des projets de loi en famille, en solidarité sociale, en santé et services sociaux. Évidemment, c'est toute la vision sociale du Québec qui est ici, que nous étudions, que nous regardons pendant les projets de loi, et cette vision-là est importante de voir comment le gouvernement est heureux de vouloir entendre d'autres personnes qui ont des choses à dire.
Et, nous, l'opposition officielle, M. le Président, on parle pour ceux que... pour ceux que vous ne voulez pas entendre parce que M. Bernier serait... je pense qu'il serait un interlocuteur important, un expert important à venir nous parler des relations de travail, particulièrement des relations entre l'employeur et l'employé, le statut de salarié, les faux indépendants, les travailleurs autonomes. Bon, en tout cas, ce sont toutes des appellations qu'il serait peut-être intéressant qu'on puisse entendre ici, en commission parlementaire. Alors, j'imagine que... J'imagine que, cette fois-ci...
J'espère que le parti ministériel aura le goût d'entendre M. Bernier, parce que c'est sur ça que nous faisons une motion ici, à l'opposition officielle. Nous essayons une autre fois à vouloir vous amener M. Bernier ici, en commission parlementaire. On a refusé, il faut quand même le dire, on a refusé le ministre du Travail deux fois. On refuse M. Bernier une fois. J'espère qu'on ne refusera pas cette fois-ci. On m'indique que peut-être qu'on refuserait une deuxième fois, mais, M. le Président, je leur laisse la chance. La motion est là. Mon collègue le député de Vachon l'a apportée, et je viens... je viens moi aussi dire à l'opposition... de l'opposition officielle, que nous aimerions entendre M. Bernier.
Évidemment, M. Bernier, on se rappelle aussi, il faut se rappeler qu'il est l'auteur du rapport qui porte son nom, le rapport Bernier, qui s'est penché sur les besoins de protection sociale des personnes vivant en situation de travail non traditionnelle. Alors, ça a été important, nous, à l'époque comme gouvernement aussi, en même temps que le rapport Bernier, de faire des modifications aux normes du travail et qui, tout ça en même temps mis ensemble avec les décisions des tribunaux, peut nous... il est difficilement acceptable de voir un projet de loi comme celui-là être devant nous aujourd'hui.
Je vois les notes explicatives du projet de loi dans la première partie qui nous concerne particulièrement, et c'est pour ça que l'universitaire, M. Bernier, serait intéressant à écouter. Si on rappelle... Si on se rappelle entre nous puis on rappelle aussi à ceux qui nous écoutent qu'est-ce que c'est, ce projet de loi là qui modifie la Loi de la santé et services sociaux, le projet de loi n° 7, ce projet de loi modifie la Loi sur les services de santé et les services sociaux afin de préciser, de façon déclaratoire, qu'une ressource intermédiaire ou une ressource de type familial est réputée ne pas être à l'emploi ni être une salariée de l'établissement public qui recourt à ces services et que toute entente conclue entre eux pour déterminer leurs règles de fonctionnement est réputée ne pas constituer un contrat de travail.
C'est ce qu'on voit dans la première partie, le premier paragraphe des notes explicatives du projet de loi qui est devant nous aujourd'hui. Alors, évidemment, jumelé avec celui du projet de loi n° 8, on voit, c'est très clairement indiqué que le gouvernement entend mener de front ces deux projets de loi là, et je crois qu'on n'a pas terminé d'étudier la question par rapport vraiment aux relations de travail au Québec. Je vois, au mois de juillet dernier, dans Le Soleil du 12 juillet, M. Bernier nous disait ? puis c'est tout là, je pourrais dire, la complexité, l'ambiguïté qui nous amène, aujourd'hui particulièrement et les dernières semaines, à se poser des questions particulièrement sur la relation d'emploi ? M. Bernier citait... je le cite ? une certaine partie ? qu'«une relation ? d'emploi ? soit objectivement ambiguë, soit à cause de l'autonomie dont jouit le travailleur dans l'exécution de ses fonctions ? ou ? soit à cause de la situation de dépendance économique dans laquelle il est placé face à ses clients, voire face à un seul». Ça, c'est dans Le Soleil du 12 juillet, 12 juillet dernier.
Si je regarde tous les articles de journaux qu'on a eus depuis le temps, je regarde particulièrement, bon, le nombre de personnes concernées, il faut quand même rappeler, nous rappeler ça concerne qui. Nous avons, au niveau de nos données statistiques, dans les ressources d'hébergement publiques non institutionnelles... ce qui veut dire des familles d'accueil, ce qui veut dire des résidences d'accueil, ce qui veut dire des ressources intermédiaires. Donc, ce sont des personnes qui hébergent des aînés en perte d'autonomie ou des bénéficiaires... ou des déficients intellectuels entre autres. Parce que, si je regarde les familles d'accueil, les derniers chiffres qu'on a, Tommy Chouinard, du Devoir, lui, nous rappelle à peu près 11 250 familles d'accueil. Bon, nous, on a à peu près 10 000 ici. C'est les dernières statistiques là. Le ministre pourra nous clarifier le nombre de ressources vraiment, vraiment qu'il y a dans les ressources d'hébergement publiques non institutionnelles.
Dans les familles d'accueil, nous avons ici à peu près 5 500 ressources, donc lieux, ce qui veut dire qui touchent les enfants directement dans les familles d'accueil. C'est 9 693 enfants qui sont hébergés dans ces 5 500 familles d'accueil. Les ressources en résidences d'accueil, donc c'est particulièrement pour les personnes âgées, celles-là, c'est 2 700 ressources que nous aurions au Québec, et ce qui touche 8 600 adultes et personnes âgées. Et, au niveau des ressources intermédiaires, telles quelles, dans les ressources intermédiaires ? souvent les ressources intermédiaires, elles ont davantage besoin de soins, plus d'aide ? dans ces ressources intermédiaires là, il y a 1 300 ressources au Québec dont 9 000 personnes de tout âge et de toute problématique, ce qui fait à peu près, comme ressources, 9 500. Donc, c'est près de 10 000... 10 000 ressources qui sont touchées par le projet de loi que nous avons ici devant nous aujourd'hui. Et, au niveau des personnes, c'est près de 28 000 personnes qui sont touchées dans le nombre de personnes hébergées. Alors, j'imagine que le ministre pourra nous dire si ces chiffres sont exacts.
Si je regarde particulièrement dans l'article du Devoir du 20 septembre dernier, Les projets de loi n° 7... on nous dit qu'«ils assimilent 15 000 éducatrices en milieu familial ? donc, pour le projet de loi n° 8, ça, particulièrement ? et 11 250 familles d'accueil et ressources intermédiaires[...] ? qui sont particulièrement des personnes qui hébergent des aînés en perte d'autonomie ou des déficients intellectuels entre autres ? à des travailleurs autonomes et leur refusent le droit de se syndiquer. Ils stipulent que ces travailleurs ne sont pas des salariés au sens du Code du travail et qu'aucun lien d'emploi n'existe entre eux et les établissements de santé ou les centres de la petite enfance qui leur accordent des contrats de travail.» C'est ce sur quoi... C'est ce dont nous parlons aujourd'hui dans ce projet de loi n° 7.
Alors, j'imagine que tout ça, mis aussi avec toute la volonté du gouvernement libéral qui est devant nous aujourd'hui, si je vois tout ce qui est sur la table aussi, il faut quand même rappeler, quand on parle de syndicalisation aussi ou de nier le droit à la syndicalisation, ce n'est pas tout de déclarer les gens qui seront des travailleurs autonomes, qui auraient quelques peut-être exemples à apporter par rapport à ça, mais il reste quand même qu'il y a d'autres, je pense, d'autres projets de loi qui sont sur la table, qui ont été déposés la semaine dernière, celui d'abolir l'article 45 d'une part, celui, dans la santé et les services sociaux, de tout réduire les accréditations syndicales. Le ministre devant nous, de Santé et Services sociaux, il est à même, comme il est lui-même le dépositaire de ces projets de loi là. qu'il y ait beaucoup de projets de loi qui nient la syndicalisation ou beaucoup de projets de loi, si on ne nie pas la syndicalisation par rapport aux autres projets de loi, mais c'est d'attaquer de front la syndicalisation au Québec.
Alors, c'est peut-être intéressant d'entendre pourquoi le ministre a ça en tête. Qu'est-ce qu'il a derrière lui? Et, si ce n'est pas une question du grand brassage qu'il est en train de faire, le Parti libéral, M. le Président, de celui de vouloir, au printemps prochain, baisser les impôts du Québec et réduire les services, réduire les services pour le public, le grand public du Québec, ceux qui paient les impôts et les taxes au Québec, alors, j'espère qu'on aura les explications du ministre à ce niveau-là. Pourquoi d'attaquer de front, comme ça, avec le projet de loi n° 7 et les autres projets de loi, le n° 30 particulièrement, le milieu syndical? Qu'est-ce qu'il a contre le milieu syndical? Je lui avais posé cette question-là la dernière fois. S'il peut nous dire vraiment si ce n'est pas vraiment l'idée de vouloir vraiment baisser les impôts qui est son objectif majeur ou, en tout cas, l'objectif majeur de ses collègues qui oeuvrent avec lui au Conseil des ministres...
Alors, si je rappelle les articles, certains articles que nous avons eus devant nous, dans Le Devoir, particulièrement le 20 septembre, on parle de «mauvais exemple»: Les projets de loi nos 7 et 8 créent un dangereux précédent. Ce qu'on énumère ici... Ça, c'est de Tommy Chouinard du Devoir: «L'État confirme que les employeurs qui ont recours à des statuts de faux indépendant pour des raisons d'ordre économique ont bien raison de le faire. Les projets de loi constituent non seulement un précédent qui pourrait plus tard être invoqué par le gouvernement lui-même pour retirer le statut de salarié à d'autres groupes ou personnes mais en même temps et indirectement une sorte d'encouragement à certains employeurs de recourir à des statuts de travailleur atypique ou à des statuts de faux indépendant comme moyen d'évitement syndical.» Alors, ce n'est pas moi qui dis ça, là, c'est Jean Bernier qui est un spécialiste des relations industrielles. Et il y a eu plusieurs autres écrits comme ça.
n(16 h 20)n J'aimerais bien entendre le ministre: qu'est-ce qu'il entend? qu'est-ce que, lui, voit, quand il lit ce genre d'article là, quand on parle de «moyen d'évitement syndical»?
Ensuite, on dit qu'il y a une négation aussi de la jurisprudence. «Jean Bernier estime que ces projets de loi comportent de sérieuses carences en ne définissant pas suffisamment les nouvelles relations de travail qu'ils prévoient créer.» J'imagine que c'est intéressant pour un ministre de la Santé et des Services sociaux et une équipe libérale d'entendre Jean Bernier venir nous expliquer ? c'est gros, ce qu'il dit, là ? que ces projets de loi comportent de sérieuses carences en ne définissant pas suffisamment les nouvelles relations de travail qu'ils prévoient créer. «Non seulement on leur enlève le statut de salarié, les privant ainsi de toute la protection sociale reliée au statut de salarié[...], on ne propose rien en contrepartie. Dire qu'ils auront le droit d'association, que l'État pourra conclure des ententes avec des associations représentatives, ce n'est pas suffisant. On ne leur reconnaît aucun droit de négocier leurs conditions collectives de travail. On ne définit ? d'aucune manière ? d'aucune façon les critères de représentativité des associations. On ne définit pas le mode de consultation. On ne leur reconnaît d'aucune façon le droit de recourir à des moyens de pression économiques.
«Qui plus[...] ? il fait valoir que ? Québec nie un droit fondamental protégé par la Constitution, par[...] ? des ? chartes des droits et libertés ainsi que par la convention 87 de l'Organisation internationale du travail.» Ce n'est pas rien ça, M. le Président, là, l'Organisation internationale du travail. Québec n'a pas tout inventé non plus, puis le Québec fait partie d'un monde qui, aussi, étudie les questions de relations de travail, les questions du droit au travail, les questions du droit à la syndicalisation. Les questions qui sont devant nous, celles de travailleur atypique, travailleur autonome, de faux indépendant, faux occasionnel sont toutes dans notre quotidien aujourd'hui.
Je vois des gens qui sont là, qui peuvent nous écouter aujourd'hui, qui travaillent à temps partiel, qui travaillent à des heures aussi différentes. On a des gens qui travaillent de jour, de soir, de nuit. Dans la société qu'on vit maintenant, c'est évident que toute cette relation... toute cette relation d'emploi mais aussi tous les types de relation, les types de travail que nous avons au Québec, je pense que c'est des questions qui sont fondamentales pour un gouvernement qui décide de légiférer et d'avoir et de présenter, sur cette table-ci, présenter en commission parlementaire et présenter à l'Assemblée nationale un projet de loi qui touche les contrats de travail, les protections sociales, qui touchent le travailleur, le travailleur en lui-même.
Alors, évidemment, quand je lis, bon, Bernier aussi, Jean Bernier dans Le Soleil du 28 octobre Des salariés déguisés en travailleurs autonomes: «Ils visent à retirer à ces personnes, lorsqu'il existe réellement, le statut de salarié reconnu antérieurement par les tribunaux.» Parce que ça a été reconnu antérieurement par les tribunaux. Il y a eu des jugements au niveau des tribunaux qui ont confirmé le statut de salarié à ces personnes-là. Et on dit: «...reconnu antérieurement par les tribunaux pour leur conférer, de manière déclaratoire, donc avec effet rétroactif...» Parce que, quand on arrivera dans la loi, M. le Président, il y a aussi cette partie-là de rétroactivité qui veut dire, qui enlève, si on veut bien comprendre, qui enlève toute les accréditations syndicales qui ont déjà été données auparavant. Donc, ce n'est pas tout de parler d'aujourd'hui, pour les semaines et les mois à venir, mais c'est aussi d'enlever des mois précédents et des années précédentes tout le statut, dans le fond, de syndiqués que les travailleurs ont dans le réseau de santé et de services sociaux, particulièrement des réseaux de toutes les ressources intermédiaires et nos ressources d'hébergement publiques non institutionnelles.
Alors, évidemment ces projets de loi là, les deux, autant le n° 8 que le n° 7 ? nous sommes sur le n° 7 aujourd'hui ? «reposent sur une double confusion». Ça, c'est important de le dire. Jean Bernier l'a dit, mais il aurait été intéressant de l'interroger sur ça, pourquoi qu'il dit: «Double confusion». D'abord, il dit: «Celle de qualifier la nature de la relation qui lie une personne à un employeur ou à un donneur d'ouvrage. En effet, on a fait souvent état du fait qu'une majorité des personnes concernées n'auraient pas manifesté le désir d'adhérer à une organisation syndicale mais préféreraient, conclut-on, être considérées comme des "autonomes". Faut-il rappeler ? c'est important de le dire parce que quelques-uns étaient contents de statuer qu'ils sont des travailleurs autonomes, mais il faut rappeler ? qu'il ne revient pas aux parties de qualifier la nature du lien d'emploi, c'est une question d'ordre public.» Alors, ce n'est pas parce que tu as le goût d'être un travailleur autonome qu'il suffit... que tu es... tu sois un travailleur autonome. Dans le projet de loi qui est devant nous... qui est devant nous, c'est qu'on dit que tous les gens maintenant qui sont dans les ressources d'hébergement public non institutionnelles seront des travailleurs autonomes. Alors, c'est une question d'ordre public, M. le Président. «Ce n'est pas parce que certains préféreraient être considérés comme des autonomes qu'ils cessent pour autant d'être des salariés. Les tribunaux se sont prononcés clairement sur le sujet. Quant à l'adhésion à une association syndicale, c'est là une question distincte, et chacun conserve la liberté d'adhérer ou non.» Alors, ce n'est pas parce que tu veux nier le droit à la syndicalisation, ce qu'on fait dans le projet de loi... Les gens qui peuvent être des travailleurs autonomes, s'ils ont le goût d'être travailleurs autonomes, c'est une chose, mais de là à leur enlever le droit à se syndiquer, c'est une autre paire de manches.
On dit aussi que, «ensuite, on semble confondre la négation de l'exercice d'un droit fondamental et les craintes que peut inspirer, au plan financier, le résultat d'une éventuelle négociation». Est-ce que ce n'est pas ça qu'il y a derrière tout ce projet de loi là, de ces craintes-là sur le plan financier, plan budgétaire du gouvernement, de l'immense facture qu'il y aura à ne pas les... à ce qu'ils soient peut-être syndiqués? Mais, entre vous et moi, M. le Président, puis à tous ceux qui nous écoutent, puis au Parti libéral devant nous, puis au ministre, ce n'est pas parce que ce sont des travailleurs autonomes qui décident d'être travailleurs autonomes, ça n'enlève pas que, si on a décidé ça, on n'est pas obligés de leur enlever le droit à la syndicalisation, parce que ça ne veut pas dire non plus qu'ils se syndicaliseraient, que les gens seraient syndiqués. Ça ne veut pas nécessairement dire ça. Alors, ça a enlevé cet exercice-là, et il est important à nos yeux de pouvoir protester contre ça. L'opposition officielle s'inscrit en faux sur ce projet de loi là, particulièrement dans cet objectif-là.
Et on dit aussi que la tendance des employeurs... «Ils laissent entrevoir que le gouvernement pourrait, de nouveau, avoir recours à des mesures analogues au besoin.» Alors, adopter ça, ça veut dire que peut-être il y aura peut-être sur la table d'autres projets de loi semblables. Peut-être que la ministre de la Santé et des Services sociaux a... Dans son éminent travail qu'il va faire dans les prochains mois, est-ce qu'il y aura d'autres projets de loi semblables? Est-ce qu'il y a d'autres projets de loi qui sont là, dans sa poche, et puis qu'il va nous sortir pour que... Parce qu'il a été adopté, le projet de loi n° 7, on aura d'autres projets de loi, analogues à celui-là, qui auront les mêmes conséquences et... Alors, on est en train de créer ce précédent-là en adoptant ce projet de loi là.
Alors, c'est sûr qu'il faut quand même dire que, nous, en s'inscrivant contre le projet de loi, c'est évident que la majorité ministérielle va faire que le projet de loi sera adopté à un moment donné. J'espère, M. le Président, qu'il ne sera pas adopté dans un bâillon. On a eu une interpellation ce matin, et il a été... et nous avons voté... et nous avons... et le Parti libéral n'a pas cru bon de voter cette motion d'interpellation ce matin pour s'assurer que tous les projets de loi ne se retrouvent pas en fin de session, ce qui veut dire juste avant Noël, en bâillon, c'est-à-dire tout mettre ces projets de loi là ensemble puis qu'on se retrouve...
Le Président (M. Copeman): ...motion de mercredi, Mme la députée, et non pas l'interpellation.
Mme Léger: Oui, la motion de ? excusez-moi ? motion de mercredi, effectivement, motion de mercredi. Ça, c'est le vendredi, une motion d'interpellation. J'imagine que c'est tout clair dans la tête de tout le monde, mais c'est une motion du mercredi effectivement. Et qui nous amenait, parce que nous avions convenu l'année dernière de faire, s'il y avait bâillon, mais de le faire projet de loi par projet de loi. Et le gouvernement libéral a voté contre ce matin pour... tout à l'heure, cet après-midi, je veux dire. Ils ont voté contre, et pour se retrouver à ce que peut-être on aura tous les projets de loi du ministre de la Santé et des Services sociaux dans un bâillon, ce qui veut dire pour nous et ce qui veut dire pour la population qu'on n'a pas le temps de... qu'on n'a pas le temps de faire beaucoup de consultations particulières. C'est déjà un indice de ne pas écouter... de ne pas écouter M. Bernier.
Et, déjà, le ministre du Travail qui... Ils nous ont refusé la semaine dernière d'écouter le ministre du Travail. Mais d'autres qui seront devant nous, que nous demanderons de venir, de pouvoir... qu'ils soient consultés ici, ça nous donne juste une indication que ce que la population veut entendre, ce que les gens auraient le goût de venir dire ici, en commission parlementaire, et de dire aux autres partis, et de nous dire à nous, à l'opposition officielle: Bien, écoutez, nos projets de loi, c'est comme ça. On ne veut pas en entendre plus, puis c'est... On y va d'une façon directive, et le projet de loi s'en va dans le bâillon, et c'est tout. Le bâillon... Tous les projets de loi, là, que ce soit le projet de loi n° 9 sur les fusions municipales, la défusion, on va tout mettre ça ensemble. Et là j'ai le ministre de la Santé devant moi, ici. Alors, ça veut dire que tous ces projets de loi aussi...
n(16 h 30)nM. Couillard: ...
Mme Léger: De Santé et des Services sociaux, évidemment. Ah! j'apprécie que le ministre me dise ça parce que j'entends surtout «ministre de la Santé» de ce temps-ci. Je suis contente de l'entendre, qu'il me dise «Santé et Services sociaux». Comme porte-parole des services sociaux, c'est une fleur d'entendre, d'entendre ça, mais on va y aller, on va attendre d'avoir les actes et des actions qui vont nous préciser son rôle aussi dans les services sociaux, d'une part.
Mais, si je reviens, M. le Président, dans l'article du Soleil, du 28 octobre particulièrement, on définit aussi ce que c'est, ce que c'est d'être des faux autonomes et ce que ça peut amener d'être des faux autonomes ou faux indépendants. Ça peut réduire les coûts de la main-d'oeuvre, évitant ainsi de payer certaines charges sociales ou comme mesure d'évitement syndical que je rappelais tout à l'heure.
«...de "faux travailleurs indépendants" a pour effet d'exclure ? évidemment des ? [...]personnes du champ d'application de la relation de travail et les prive des droits qui en découlent normalement.» Donc, ce qui veut dire... Ça, là, ça veut dire que c'est des droits à des conditions minimales de travail décentes. Elle les prive de ça, là: «droit à la représentation et à la négociation collectives». C'est ce qu'on les prive, là. On dit aussi: «Accès à des mesures de protection sociale», donc comme des congés pour responsabilités parentales, la santé et la sécurité du travail, l'indemnisation des accidents du travail ou des maladies professionnelles. C'est ça qu'on les prive, là, aujourd'hui. «Elle les prive aussi des contributions des employeurs aux caisses de retraite publiques et privées ainsi qu'aux autres régimes d'avantages sociaux des entreprises.» C'est tout ça qui est en cause ici, devant nous, M. le Président, quand on nie le droit à la syndicalisation et quand on parle de situation de faux travailleurs indépendants et/ou de faux autonomes.
Comme vous voyez, ces termes-là, il serait intéressant d'entendre l'universitaire M. Bernier venir nous clarifier, nous clarifier tout ça. Je pense que ce serait intéressant pour le ministre de la Santé d'entendre, d'entendre le Dr Bernier pour cette vision des choses du travail. Alors, ce n'est pas peu dire, là, c'est toutes les protections sociales. Est-ce qu'on va nous dire aujourd'hui qu'avec le projet de loi comme ça, parce qu'on reconnaît qu'ils sont des travailleurs autonomes, que ce sont toutes...les conditions de travail vont toutes être acceptées comme ça, là: il va y des meilleures protections sociales, meilleures conditions de travail, meilleure accessibilité de congés pour responsabilités parentales? C'est ça qu'on vient de nous dire.
Mais, en tout cas, c'est ça qu'on fait rêver aux gens qui sont venus en commission parlementaire et qui auront un lien avec le ministre et qui disent avec une association, un droit d'association, bien, on va régler des meilleures, des meilleures conditions de travail. Mais, la loi, déjà, le Code du travail, les normes du travail, les lois que nous avons au Québec... Et, en plus, si les gens décident de se syndiquer, c'est sûr que tout ça qui est devant nous, ce sont des protections qui font avancer le travailleur puis les meilleures conditions, conditions au travailleur.
Alors, c'est évident, M. le Président, qu'il serait absolument important d'entendre M. Bernier, je rappelle, qui est professeur titulaire en relations industrielles à l'Université Laval. Et il nous a écrit, M. Bernier, avec... c'est-à-dire écrit dans les articles de journaux. Et puis il y a plein d'autres personnes qui ont écrit avec lui cet article-là dans Le Soleil du 28 octobre. Je rappelle les professeurs: Stéphanie Berstein, Marie-France Bich, Jean Charest ? pas notre... pas le premier ministre, là, l'autre, le professeur de l'École de relations industrielles ? Michel Coutu, Jean-Jacques Gislain, Carol Jobin, Paul-André Lapointe, Katherine Lippel, Sylvie Morel, Renaud Paquet, Gilles Trudeau, Guylaine Vallée, Pierre Verge, qui sont tous des professeurs émérites des écoles... de l'Université du Québec, Université Laval et Université de Montréal, à l'Université de l'UQAM, qui ont écrit cet article-là qui est fort intéressant. Je ne sais pas si le ministre l'a lu... mais nous permettraient évidemment et permettraient au ministre de mieux approfondir la notion de «salariés» et la notion du «travailleur autonome» reconduits en «faux indépendants». Je pense que ce serait intéressant de l'entendre, à ce niveau-là.
Alors, M. le Président, ce projet de loi évidemment a un dangereux précédent. Le gouvernement pourrait de nouveau avoir recours à ces pratiques dans d'autres projets de loi. Il y aurait la tendance des employeurs à recourir à de faux autonomes pour éviter de payer ces charges sociales là. C'est ça, le dangereux précédent: refus de la part du gouvernement d'adapter seulement ses lois sociales et du travail à ce phénomène.
C'est important parce que c'est toute la vision sociale du Québec. Et est-ce que ça veut nous dire aujourd'hui, avec ce projet de loi n° 7, que le ministre de la Santé et des Services sociaux, c'est sa vision sociale du Québec de réduire les travailleurs à un statut de travailleurs autonomes mais dans le sens de leur nier la syndicalisation et dans le sens de faire miroiter chez eux qu'ils auront de meilleures conditions de travail? C'est ce qui est sur la table présentement. Et je suis complètement, je pourrais dire, offusquée de ne pas entendre le ministre sur cette question. Et est-ce qu'ils vont accepter, je veux dire, oui, les collègues du ministre, vont accepter d'écouter Jean Bernier, ce qui serait important pour nous dans la commission parlementaire?
Le Président (M. Copeman): Merci, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent intervenir, à ce stade-ci? M. le député de Joliette, pour un maximum de 10 minutes.
M. Valois: Oui. 10 minutes, M. le Président?
Le Président (M. Copeman): Oui. Oui, malheureusement.
Des voix: Ah!
M. Bouchard (Vachon): ...pas long, hein?
M. Jonathan Valois
M. Valois: Je dois avouer que je manque d'habitude, de ce côté-là. J'ai été habitué à une autre commission où le privilège de ma fonction de porte-parole officiel, Mme la Présidente, me donnait plus que simplement 10 minutes. Maintenant, je vais faire avec. Je vais...
M. Bouchard (Vachon): Parle vite...
M. Valois: En démocrate, je vais me plier à ces règles pour appuyer la motion déposée par mon collègue le député de Vachon à l'effet de recevoir M. Bernier. J'aimerais bien, moi, entendre celui qui tout le long, depuis que le projet de loi est déposé, écrit avec des collègues dans les médias, dans les journaux, différents articles: Des salariés déguisés en travailleurs autonomes. Alors, on nous parle... un article ici écrit par M. Bernier. Évidemment, il l'a cosigné avec d'autres personnes, on en a déjà parlé.
J'aimerais rencontrer aussi le coauteur d'un autre papier, essentiellement... bien, essentiellement, qui reprend essentiellement les mêmes arguments, là, mais qui est... plutôt que d'être dans Le Soleil, se retrouve dans Le Devoir, où, ce coup-là, on titre Un dangereux précédent ? Les projets de loi 7 et 8 visent essentiellement à retirer le statut de salarié aux ressources intermédiaires. Je crois que de rencontrer une personne aussi compétente qui voit aussi clairement dans ce qui est en train de se passer ici... mérite d'être rencontrée.
D'ailleurs, lorsque Tommy Chouinard, journaliste ici, là, sur la tribune, a à suivre nos débats, les projets de loi, lui-même consulte énormément M. Bernier pour un peu l'aiguillonner sur les intentions réelles bien souvent qui sont derrière des projets de loi qui sont déposés. C'est important d'avoir ce type de personnes qui constituent des professionnels, qui ont des idées qui ne sont pas soit propatronales ou prosyndicales. Ils ne sont là que pour le droit, les relations de travail et puis ce qu'on pourrait appeler le bien commun. Ils ne sont pas là pour des intérêts particuliers ou parti pris, je pourrais dire, d'intérêts particuliers d'employeurs. Ils ne sont pas là non plus pour des intérêts collectifs de travailleurs; ils sont là pour ce qu'on appelle le bien commun, ces gens-là. Ce sont des chercheurs, ce sont des professeurs. Et je pense qu'on peut toujours, nous, comme parlementaires, là, recevoir les propos de ces gens-là. Et je pense que c'est très bien. On ne peut pas être contre le fait d'avoir un éclairage toujours accentué sur les décisions qu'on prend. Et, lorsque ces personnes-là le font par le biais des médias, les journaux, je ne verrais pas pourquoi on leur empêcherait de venir ici nous rencontrer pour apporter cet éclairage-là qui est spécifique.
Maintenant, Mme la Présidente, moi, j'aurais plein de questions à poser à M. Bernier. Moi, je suis pas mal convaincu que les sociétés ou les organisations du travail affectent l'organisation de nos vies. Je suis convaincu de ça, moi, Mme la Présidente. J'aimerais en discuter avec M. Bernier. J'aimerais voir, lui, là, lorsqu'il défend les droits du travail, l'organisation du travail, lorsqu'il dépose un mémoire très important sur les besoins de protection sociale des personnes en situation de travail non traditionnelle ? ce qu'on appelle le rapport Bernier, O.K. ? il nous envoie non seulement une idée de relations de travail ou de monde du travail, il nous envoie aussi une idée de comment organiser nos vies, comment nos vies devraient s'organiser.
Regardez, Mme la Présidente. À l'époque de l'ère industrielle, là, que je n'ai pas connue...
Des voix: Ha, ha, ha!
n(16 h 40)nM. Valois: Non, mais écoutez, que je n'ai pas connue, mais sur laquelle je me suis beaucoup penchée, parce que c'est une époque importante notamment pour le Québec, ce n'étaient pas les grandes valeurs. Bien, c'étaient les valeurs de fidélité, de stabilité puis de propriété. Ça, c'étaient les grandes valeurs.
Alors, nos employés, on les avait pendant 25 ans, on leur donnait une montre en or, là, s'ils faisaient 25 ans. C'étaient des grandes valeurs qui étaient là, autour du marché du travail, je vous dis bien, là, des valeurs où les horaires étaient stables, les employés avaient des heures stables, les vacances étaient stables. Tout, tout, tout... L'ensemble de la stabilité était quelque chose de très, très valorisé.
Et, ensuite, lorsque je vous parle de la propriété qui... c'était quoi, la grande valeur sociale, à cette époque-là? C'était d'être propriétaire de son entreprise. Mais ça a eu un impact, ça, sur nos vies, Mme la Présidente. Ça a fait en sorte que ces valeurs-là ? fidélité, stabilité et propriété ? bien, on les a eues dans nos vies aussi.
Regardez, c'était du 25 ans de mariage régulier à cette époque-là, O.K., et stabilité. Le noyau familial très stable. Et la réussite familiale était autour de quoi? bien, était autour de justement... bien, l'achat d'une maison puis d'une auto. Nous autres aussi, il fallait être propriétaires, à cette époque-là. Alors là, là, comprenez très, très bien que, dans cette société industrielle là qui avait des valeurs, bien, ces valeurs-là puis la façon dont on organisait notre milieu industriel avaient un impact direct sur comment on organisait nos vies sociales.
Aujourd'hui, le monde a changé, c'est ce qu'on me dit, et force est d'admettre qu'on est dans une société où les valeurs ne sont plus les mêmes. Alors, les valeurs, c'est quoi? C'est des valeurs... bien, on les entend. On les entend, puis j'aimerais ça en discuter avec M. Bernier, moi.
Est-ce que... Est-ce que le fait de déposer un rapport Bernier, est-ce que ce n'est pas une réponse à ces nouvelles valeurs là de flexibilité, de mobilité, O.K., et de propriété qui ne sont plus des valeurs de propriété d'entreprise mais bien d'être propriétaire d'actions?
M. Bouchard (Vachon): Oui.
M. Valois: Plus personne ne veut être propriétaire d'entreprise si ce n'est que d'être propriétaire d'actions, parce qu'on se débarrasse pas mal plus rapidement d'actions qu'on peut se débarrasser d'infrastructures aussi imposantes qu'une entreprise. Alors, regardez ça, cette façon-là de vivre, qu'est-ce que ça amène? Bien, ça amène que, dans le milieu du travail, c'est... bien, on le voit très bien: il faut être flexible, il faut être adaptable, il faut être mobile.
Moi, Mme la Présidente, j'ai rarement eu plus de six mois le même employeur. Est-ce que j'ai eu le même emploi pendant deux ans, trois ans?
M. Auclair: ...
M. Valois: Oui. J'ai eu pendant plusieurs temps... Moi, je préfère quand il dort, le député de Vimont, je vais vous dire.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: ...
M. Valois: D'accord. Bien non, ça me rappelle le cégep, là, quand il y en avait, des bouffons, là. Au cégep, je ne dis pas ici. Alors, en ce sens-là, la...
Une voix: ...
M. Valois: On va arrêter les insultes ici, là, j'imagine, ou on veut continuer?
M. Auclair: C'est toi qui parles.
La Présidente (Mme L'Écuyer): Je demanderais au député de Vimont un peu de discipline, s'il vous plaît. Merci.
M. Valois: Merci, Mme la Présidente. Et, en ce sens-là, de six mois en six mois, est-ce que j'avais le même emploi? Oui, et c'est là qu'est vraiment l'importance. J'étais toujours professeur; je n'avais pas le même employeur. Alors, est-ce que j'avais un emploi instable? Non, j'avais un emploi stable. C'est mon employeur qui était instable. Comprenez-vous? Tout a changé, là. L'ensemble des choses ont changé par rapport à ces nouvelles valeurs là.
Bien, force nous est d'admettre, lorsqu'on regarde la société, que ça a un impact. Ça a un impact réel et direct sur comment nous organisons nos vies sociales. Les couples sont de plus en plus fragiles. Les 25 ans de mariage vont se faire de plus en plus rares. Les familles sont quelque chose qui est aussi de plus en plus fragile: pas simplement les couples, mais l'ensemble du noyau familial devient quelque chose de très fragile. Et, d'ailleurs, on pourrait... Et, même, certains vont voir l'instauration ou le début ou le lancement d'une vie familiale comme étant un frein à la mobilité et la flexibilité exigées par le milieu du travail. Alors, on va remettre ça à plus tard. Alors, ça a un impact direct. Alors, ça, il faut vraiment le prendre en considération.
Et est-ce que ces nouveaux... est-ce que ces nouveaux travailleurs là vont se lancer très rapidement dans cette idée de fonder une famille ou d'avoir des enfants? Non, parce qu'ils doivent être flexibles. C'est pas mal plus difficile de déménager avec une famille que de déménager lorsqu'on est seul. Et, lorsque je vous parle de déménagement, je pense qu'on en revient à la même chose: c'est beaucoup plus facile d'être en appartement et de louer à l'année que de s'attacher avec une maison qu'on devra vendre et revendre. Alors là on devient dans un monde de location où ce n'est plus l'achat et la propriété directs.
Comprenez-vous à quel point, à chaque fois qu'il y a des modifications du marché du travail, du marché économique, on a des impacts très réels sur nos vies sociales? Alors, à ce moment-ci, lorsqu'on est en train de discuter à cette commission des affaires sociales là, lorsque nous sommes en train de discuter aussi de conciliation famille-travail, nous devons discuter de ce qui est à la source de ça, c'est-à-dire des valeurs du marché du travail que nous devrons respecter. Et est-ce que ce projet de loi là va faire en sorte que des gens vont vivre plus de stabilité dans leur emploi? J'en doute. Et j'aimerais en discuter avec M. Bernier qui, lui-même, nous a dit que, lorsqu'on veut retirer des gens du Code du travail, bien, il faudrait peut-être avant ça regarder aux protections... de voir à vraiment se donner un filet de protection sociale des personnes en situation de travail non traditionnelle. On ne fait pas ça, ici. On les envoie d'abord dans un champ vague, et, par la suite, on regardera peut-être si on fait des suites au rapport Bernier. Encore une fois ? encore une fois ? rien n'est dit de ce côté-là du ministre du Travail.
Pour ce qui est du néant, on a une garantie; c'est le projet de loi qui est là. Pour ce qui est des suites du rapport Bernier, bien, ça, le néant...
La Présidente (Mme L'Écuyer): En conclusion, M. le député, en conclusion.
M. Valois: ...est pas mal plus au ministère du Travail. Alors, de rencontrer M. Bernier dans ce sens-là est quelque chose de très pertinent.
La Présidente (Mme L'Écuyer): Merci. D'autres interventions? Pas d'autres interventions. On passe au niveau de la motion préliminaire. On passe au vote.
«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende M. Jean Bernier, professeur titulaire en relations industrielles à l'Université Laval.» On passe au vote? Pour?
M. Bouchard (Vachon): Vote nominal.
La Présidente (Mme L'Écuyer): Vote nominal. Madame la députée... Non, excusez. O.K.
La Secrétaire: Alors, M. Bouchard (Vachon)?
M. Bouchard (Vachon): Pour.
La Secrétaire: Mme Léger (Pointe-aux-Trembles).
Mme Léger: Pour.
La Secrétaire: M. Valois (Joliette).
M. Valois: Pour.
La Secrétaire: M. Couillard (Mont-Royal)?
M. Couillard: Contre.
La Secrétaire: Mme Charlebois (Soulanges).
Mme Charlebois: Contre.
La Secrétaire: M. Auclair (Vimont).
M. Auclair: Contre.
La Secrétaire: M. Bernard (Rouyn-Noranda).
M. Bernard: Contre.
La Secrétaire: M. Bachand (Arthabaska).
M. Bachand: Contre.
La Secrétaire: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme L'Écuyer): Contre. La motion est rejetée.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Monsieur...
Motion proposant d'entendre
la Commission des relations du travail
M. Valois: ...Mme la Présidente, j'aimerais proposer, en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure:
«Que la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, la Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Commission des relations du travail.»La Présidente (Mme L'Écuyer): La motion est recevable.
M. Valois: Vous en aurez des copies?
La Présidente (Mme L'Écuyer): Il y a des copies pour tout le monde? Oui. Ça va? M. le député de Vimont. Non. M. le député de Joliette, je m'excuse.
M. Valois: Non, il n'y a pas de problème.
La Présidente (Mme L'Écuyer): Vous êtes prêt? Combien?
M. Bouchard (Vachon): Il a failli faire une crise cardiaque...
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme L'Écuyer): Vous avez 30 minutes pour intervenir.
M. Jonathan Valois
M. Valois: Alors, Mme la Présidente, je dépose cette motion-là pour que ? et c'est très bien écrit et c'est très clair ? pour que, avant qu'on commence à regarder le projet de loi article par article, on ait un éclairage spécifique d'un organisme qui est spécialiste là-dedans, c'est-à-dire la Commission des relations du travail.
Mme la Présidente, il est très important de rencontrer ce type d'organisme parce que ça fait maintenant deux motions que nous déposons et que l'opposition, par sa majorité, défait. Alors, nous ne pouvons pas avancer nos travaux. De façon systématique, il y a un vote d'opposition, là, qui est fait par rapport à l'avancement de nos travaux. Et, à ce moment-ci, je dépose cette motion-là qui va exactement un peu dans le même sens de ce que nous voulons prendre en considération ici, c'est-à-dire le fait d'écouter la Commission des relations du travail.
n(16 h 50)n Maintenant, vous comprendrez que, lorsque la première motion était d'écouter le ministre du Travail, lorsque la deuxième proposition était d'entendre M. Bernier qui est un spécialiste des relations de travail, vous comprenez très bien que cette position-là, qui est d'entendre la Commission des relations du travail, va exactement dans le même sens. Et de comprendre que ce qu'on essaie de faire ici, nous, du côté de l'opposition, c'est de faire prendre conscience aux gens qui vont voter sur ce projet de loi là, à terme, que c'est un projet de loi qui, oui, modifie la Loi sur la santé et les services sociaux, mais que c'est d'abord et avant tout une loi qui vient s'inscrire à l'intérieur des relations de travail, qui vient donner un sens aux relations de travail et que c'est pour ça que nous étions tout à fait disposés à rencontrer autant le ministre du Travail que M. Bernier. Alors, en ce sens-là, on trouvait plus qu'important de rencontrer ces deux-là, et c'est dans le même sens que nous aurons la chance de peut-être entendre la Commission des relations du travail.
Et, à ce moment-ci, je peux juste souhaiter que nos travaux... lorsque nous serons article par article, nous pourrons poser des réponses... des questions, je veux dire, au ministre et qui sera plus que présentement disposé à y répondre. Parce que, même si, mettons, là, on voulait tous mettre fin à ça tout de suite, est-ce que le ministre serait disposé à ce moment ici à aller à l'article 1 pour qu'on en débatte? Évidemment, cette question reste en plan présentement. Si nous étions, nous, de notre côté, là, disposés à aller à l'article 1 pour discuter avec le ministre, est-ce que ce serait quelque chose qui serait possible, de procéder tout de suite?
Visiblement, ces difficultés-là, que nous avons à faire procéder nos travaux, à faire avancer nos travaux, fait en sorte que, de notre côté, nous proposons des motions, des motions pour écouter, pour être sûrs que nous soyons bien outillés, lorsque nous arriverons article par article, à pouvoir en discuter.
Maintenant, pour l'ensemble des personnes qui suivent nos travaux, la Commission des relations du travail, bien, c'est un organisme indépendant, Mme la Présidente, qui est spécialisé en relations de travail. Ce sont vraiment, là, les spécialistes, là, de ce type de choses là, c'est-à-dire les relations de travail. Et là l'idée et le mandat de cette Commission-là, O.K., c'est d'entendre puis de disposer de tout un éventail de recours reliés à l'emploi et aux relations du travail au Québec.
M. Bouchard (Vachon): C'est ça.
M. Valois: Je pense qu'il est très important...
M. Bouchard (Vachon): ...l'étude commence.
M. Valois: ...de les écouter parce que c'est cette Commission-là qui, au-delà du désir de respect d'une cohérence en silo du ministre, pourra nous dire qu'au-delà du silo du ministère de la Santé et des Services sociaux il existe une réalité horizontale qui est celle du marché du travail, et cette réalité horizontale du marché du travail, elle est très réelle, là.
Qu'on soit dans un ministère ou dans un autre, qu'on relève comme travailleur d'un ministère ou d'un autre, nous sommes tous sur quelque chose qui est, de fait, quelque chose qui est réel, qui s'appelle le marché du travail. Et, en ce sens-là, la Commission pourrait être très, très, très importante à écouter avant d'aller de l'avant.
Je comprends très bien le ministre, Mme la Présidente, de vouloir respecter son silo, de vouloir respecter son ministère et la cohérence interne de son ministère. Je comprends très bien le ministre, là, de vouloir être dans son bureau puis de s'assurer que ses structures sont cohérentes. Mais, au-delà des structures, il y a des gens. Au-delà des structures cohérentes, là, puis des règles de procédure cohérentes à l'intérieur d'un ministère, Mme la Présidente, il y a des gens. Il y a des gens qui reçoivent des services, O.K., il y a des gens qui prescrivent des services, O.K., qui rendent service, qui sont des employés. Et, en ce sens-là, c'est important de comprendre que ces personnes-là, bien qu'elles oeuvrent dans un ensemble global de prestation de services relevant d'un ministère, vivent aussi une réalité très concrète qui est celle du marché du travail. Et, de débattre de ça avec la Commission des relations du travail, de discuter de ça, elle pourrait peut-être justement, comme je m'évertue à le dire, nous amener, nous emporter un éclairage plus que pertinent avant que nous puissions procéder article par article.
Parce que, là, si les réponses qu'on nous donne sont toujours en vertu de la logique interne du ministère de la Santé et des Services sociaux, bien, on s'éloigne tout le temps, à chaque fois, d'une autre logique qui est celle qu'on voulait débattre avec le ministre du Travail, qui est celle qu'on voulait aussi regarder avec M. Jean Bernier et qui est celle qui, à mon sens, pourrait être importante pour la Commission des relations du travail. En ce sens-là, il me semble qu'on ne peut pas être contre une telle proposition dans le but, là, vraiment, là, d'éclairer, là, l'ensemble des membres de cette commission.
Bien... Oh! En plus de ça, la Commission est chargée d'assurer une application diligente et efficace du Code du travail, O.K., et, évidemment, là, d'exercer les autres fonctions prévues au même Code, O.K., puis à la Loi des normes du travail. Et, en ce sens-là, ce qu'il faut bien comprendre, là, puis qui est l'importance de cette Commission des relations du travail là, c'est que les entreprises dont les relations de travail sont régies par les lois du Parlement fédéral ne sont pas soumises à la compétence de la Commission mais plutôt à celle du Conseil canadien des relations industrielles.
Alors, ce qu'il faut bien comprendre, Mme la Présidente, et ça, je pense que, du côté du gouvernement, on le comprend très bien et on... non seulement on le comprend bien, mais on vit très bien avec, c'est que le Québec est une province, O.K., et son statut provincial fait en sorte que ce n'est pas toutes les règles du travail qui sont gérées par la Commission des relations du travail. Là, à ce moment-ci, ce qu'il faut comprendre, c'est que les lois comme la loi antibriseurs de grève, lorsqu'on est...
Une voix: En France...
M. Valois: Bien, la loi antibriseurs de grève, lorsque nous sommes... lorsque nous sommes sur une charte fédérale, bien, elle ne s'applique pas. La loi contre les clauses orphelin, qu'on a votée ici, lorsqu'on est sous une charte fédérale, que notre convention collective est régie par le Conseil canadien des relations industrielles, bien, ça ne s'applique pas. Comprenez-vous, là, qu'il y a beaucoup... il y a différents secteurs. Tous les employés fédéraux d'ailleurs ne sont pas couverts par cette Commission-là mais bien par une autre règle. Mais ça, c'est important de se le dire aussi, O.K., parce qu'il y a des limites, là. On ne peut pas... on ne peut pas penser que ce qu'on est en train de décider ici pourrait s'appliquer à tout le monde. Et, à la limite, peut-être que les gens qui sont présentement ... qui seront exclus du Code du travail ici et donc de la compétence de la Commission pourraient peut-être demander d'avoir une charte fédérale pour se sauver de ce qui est en train de se passer ici.
M. Williams: Est-ce que je peux...
M. Bouchard (Vachon): La présidente...
M. Valois: Oui?
M. Williams: Si je peux?
M. Valois: Oui.
La Présidente (Mme L'Écuyer): M. le député de Nelligan.
M. Williams: Mme la Présidente, et sans changer le droit de parole de mon collègue, est-ce que je peux suggérer une courte suspension pour donner la chance aux membres de la commission des affaires sociales de participer, avec l'environnement, pour M. Duchesne, notre ancien secrétaire général, qui a déjà commencé... Et, moi, je recommande la suspension. Ça va être assez court, et ça ne change pas votre droit de parole. S'il y a consentement des deux côtés.
La Présidente (Mme L'Écuyer): Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. On suspend les travaux jusqu'à 17 h 15.
M. Williams: Merci beaucoup.
La Présidente (Mme L'Écuyer): Vous aurez, M. le député de Joliette, votre temps de parole au retour. Ça va? Tout le monde est d'accord? Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 58)
(Reprise à 17 h 19)
La Présidente (Mme L'Écuyer): On reprend les travaux. M. le député de Joliette, il vous reste 20 min 45 s. Si vous voulez commencer.
M. Valois: Oui, c'est ça. J'étais sur une motion, là, à l'effet d'entendre la Commission des relations du travail avant de procéder à l'étude du projet de loi article par article. Et, à l'intérieur de ce début de plaidoirie pour que nous puissions aller de l'avant avec le projet de loi et avec les propositions que nous apportons, j'avais parlé notamment, là, de l'importance d'écouter un organisme qui, au-delà de la logique verticale du ministère, aura aussi une logique qui comprend l'ensemble des gens sur le marché du travail.
J'avais parlé aussi de cette Commission-là comme chargée d'assurer l'application des... bon, rapide et efficace, là, du Code du travail, mais encore faut-il comprendre que c'est vraiment, là, dans toute la partie qui était plus... qui était de juridiction québécoise et qu'en ce sens-là il faut faire vraiment bien attention, parce qu'on peut se donner, des fois, des règles, des règles au Québec par l'Assemblée nationale comme la loi antibriseurs de grève ou même une loi sur les clauses orphelin et bien comprendre que, par la suite, ces règles-là ne s'appliquent peu ou pas à plusieurs employés qui sont des Québécois, mais régis sur un code fédéral. Alors, en ce sens-là, c'est important, mais, ici, ça ne nous regarde pas directement. Mais c'est important quand même de voir, là, que c'est limité, là, comme intervention de la Commission. Mais, quand même, ici, là, elle serait quand même pertinente parce que, dans ce que nous parlons, c'est vraiment à l'intérieur, là, de nos règles et de notre Code à nous.
n(17 h 20)n Parler aussi de la Commission parce que c'est elle qui est responsable du régime d'accréditation syndicale en ce qui comprend les requêtes en accréditation déposées par les associations de salariés, les plaintes de congédiement ou les représailles en raison d'activité syndicale, les requêtes survenant à la suite de la vente d'une entreprise ou d'une concession partielle de ces activités et les demandes de révocation d'accréditation. Alors, c'est l'ensemble, là, de la logique de l'article 45 qui est là notamment, que nous parlons, et la Commission est habilitée à réfléchir là-dessus. Et peut-être que, si la Commission venait, là, nous entretenir, peut-être qu'on pourrait regarder avec cette Commission-là: Bien, écoutez, là, là, présentement, sur la table, il y a un projet de loi, ici, là, qui vise essentiellement à ne pas reconnaître le statut de salarié à des personnes, sauf qu'on pourrait peut-être ? et je pense que l'opposition, là, serait d'accord à regarder ça ? étendre un peu, étant donné qu'on va les avoir, sur, bon, la fusion des accréditations syndicales pendant qu'on les a.
Tu sais, s'ils viennent, on pourrait discuter de plein d'autres choses aussi, là. Nous, on serait très, très disposés, là, à faire une dérogation là-dessus pour peut-être regarder ça sur, oui, fusion, là, mais c'est plus... fusion d'accréditations syndicales dans certains cas, mais constitution de cinq accréditations différentes. Et, dans certains cas, là, où il y a deux ou trois syndicats dans une institution, il y en aura cinq, accréditations pareilles, et de regarder le lien avec ça et la vente ou une concession partielle d'activités qu'un gouvernement pourrait faire à partir du moment où est-ce qu'il y aura une seule accréditation syndicale pour un type d'activité. Est-ce que ce n'est pas là un paquet-cadeau qu'on est en train de faire pour une sous-traitance possible? Réflexion qu'on pourrait avoir avec cette Commission-là.
J'admets, là, que ça ne touche pas directement le projet de loi qui est devant nous, mais, à partir du moment où est-ce que la Commission viendrait, je pense que le ministre du Travail nous a donné plein d'autres indications qu'il y avait... que ce dernier était mais vraiment décidé à aller, là, sur le terrain, là, des relations de travail. Or, en ce sens-là, il me semble qu'on ferait une pierre deux coups, et ça nous éviterait de peut-être, là, redemander une autre fois, lors de l'étude d'un autre projet de loi, encore une fois que la Commission des relations du travail vienne. Nous, on serait d'accord avec, là, vraiment qu'elle vienne une fois et qu'elle nous explique, là, les deux logiques des projets de loi. Je comprends qu'il y en a un qui n'est pas encore à l'étude ici, là, mais qui viendra certainement à l'étude étant donné qu'il a été déposé et que nous en avons la teneur. Maintenant, à partir du moment où est-ce qu'on est encore sur le champ des relations de travail avec l'autre projet de loi...
M. Bouchard (Vachon): C'est une bonne idée.
M. Valois: ...avec la fusion des accréditations, il y aurait moyen, là, de regarder quelque chose. Et je pense que ça sauverait un temps énorme à nos travaux, et je pense que c'est là-dessus, là, qu'on veut vraiment aller, tout le monde ici, là, de faire en sorte qu'on utilise le temps de façon la plus efficace possible et, en ce sens-là, d'inviter des organismes. Autant le ministre du Travail, autant la Commission des relations du travail, bien ils pourraient venir nous entretenir aussi sur les autres sections. Et je pense qu'ici, la commission, étant donné qu'on peut tout faire par consentement, M. le Président, moi, je serais tout à fait d'accord avec le fait qu'on discute de deux projets de loi, ce qui serait beaucoup plus efficace, puisqu'on pourrait mener les deux de front. Alors, ça, on serait tout à fait d'accord avec ça ici. Étant donné que la commission a ces compétences-là, il est important, là, d'utiliser toutes les compétences de la commission.
Vous savez, le Code du travail attribue de larges pouvoirs d'ordonnance et de réparation que la Commission peut utiliser dans un grand nombre de circonstances. C'est notamment le cas lorsque le Code du travail est enfreint, par exemple, par une grève ou un lock-out illégal, d'ingérence ou d'entrave dans les activités d'une association, de négociation de mauvaise foi de la part d'un syndicat ou d'un employeur ou encore s'il y a violation des dispositions antibriseurs de grève. Alors, vous comprenez que ? et ça, il faut vraiment bien le comprendre ? le Code du travail attribue de larges pouvoirs d'ordonnance et de réparation. O.K.? Et ça, je crois qu'il est important d'en discuter avec la Commission étant donné que c'est la Commission qui regarde, voir si l'ensemble du Code du travail est vraiment respecté.
À l'intérieur du Code du travail, il est compris qu'on a un droit de grève. À l'intérieur du droit de grève, bien il y a des règles au droit de grève. Et la Commission regarde, voir si ce droit-là est fait dans les normes. Même chose pour ce qui est des lois antibriseurs de grève. Jusqu'où, là, les dispositions s'étendent? Bien, la Commission est habilitée à regarder, voir si on n'a pas, encore là, des briseurs de grève déguisés en employeurs qui... tu sais, là, des faux employeurs qui, oups! se retrouvent employeurs, mais que ce sont essentiellement des salariés, mais qui se retrouvent employeurs puis, dans les faits, ce sont des... bien, ils se transforment de fait même en briseurs de grève. La Commission est habilitée à faire ça.
Alors là peut-être que la Commission pourrait venir et nous expliquer, oui, les larges pouvoirs du Code du travail, qui sont référés par le Code du travail, mais peut-être expliquer aussi au ministre que le Code du travail, ce n'est pas quelque chose de dangereux. Le Code du travail, somme toute, c'est quelque chose duquel on ne doit pas avoir peur. Le Code du travail est notre ami. On ne doit pas en avoir peur, pas même une petite minute. Alors, ça, je pense que c'est important. Et peut-être qu'on pourrait démystifier ça avec la Commission des relations du travail, parce que ce qu'on est en train de faire avec le projet de loi, c'est essentiellement de sortir de l'application du Code du travail des milliers de travailleuses. Et ça, quelqu'un qui vient nous dire: Écoutez, là, il y a moyen de travailler, là, à l'intérieur du Code du travail, oui, ça donne de nombreux pouvoirs... Peut-être que la Commission, M. le Président, pourrait venir nous dire que...
Bien, dans les faits, là, vous regardez, là, le Code du travail, il a évolué avec les années, O.K.? Et les gens qui sont en dedans... Puis il a évolué, là, on pourrait dire, même dans un sens qu'on pourrait dire dans le bon sens, où les gens qui sont reconnus dans le Code du travail, même les normes du travail, sont, somme toute, assez bien protégés. Et je pense qu'on améliore le Code, là... En tout cas, nous, au moment où on était au gouvernement, on a amélioré sensiblement, mais on a quand même amélioré le Code du travail.
Et, en ce sens-là, est-ce que, en améliorant sans cesse le Code du travail, on ne fait pas une disparité entre ceux qui sont à l'intérieur du Code du travail et ceux qui sont à l'extérieur du Code du travail, qui ne peuvent pas y avoir accès, et que c'est peut-être dans le fait que les gens sont en train d'avoir beaucoup de protection et beaucoup de recours à l'intérieur du Code du travail que certains employeurs ont décidé de les envoyer à l'extérieur? De ça, M. le Président, deux réflexes que nous pouvons avoir: un, diminuer la portée du Code du travail, des normes du travail ou, l'autre ? et je pense que c'est celle que nous avions prise avec le rapport Bernier ? commencer à bâtir ce qu'on appelait des protections sociales des personnes en situation de travail non traditionnel, donc des personnes qui, dans une proportion quand même assez importante, se retrouvent même exclues du champ d'application du droit du travail. En ce sens-là, là, je pense qu'il est important de regarder ça et je pense que la Commission pourrait nous dire, là, au-delà du Code du travail, qu'est-ce qu'il serait bien de penser pour les travailleuses, les travailleurs autonomes qui sont exclus de ce Code du travail là.
Parce que là d'aller dans un Code du travail duquel on a visiblement peur parce qu'il donne le droit notamment à la syndicalisation en déposant un projet de loi pour exclure les gens du champ d'application du Code du travail, c'est une chose, sauf que, de l'autre côté, comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a... on les envoie sur mais vraiment un terrain vague, là, où il n'y a absolument rien, là, il n'y a absolument rien en termes de défense de ces personnes-là ou de recours possibles. L'employeur ne sera pas obligé de négocier de bonne foi. Les capacités de grève des travailleurs ou de ces pressions économiques, qu'on pourrait appeler, n'existeront pas.
Et là, en ce sens-là, je comprends, là, lorsque le Code du travail attribue de larges pouvoirs, et, on les nomme ici, O.K., le droit de grève, l'ingérence ou l'entrave aux activités d'une association, la négociation de mauvaise foi ou encore là... et la disposition, bon, de ce que je vous ai dit tantôt, là, de la loi antibriseurs de grève, maintenant, ce qu'on doit comprendre, c'est que, ça, la Commission s'en occupe parce qu'elle s'occupe du Code du travail. Mais, à partir du moment où est-ce qu'on exclut les gens du champ d'application du Code du travail, on exclut les gens de façon automatique de leur capacité d'avoir justement des droits de recours à des pressions économiques et on les enlève aussi la capacité... ou on enlève aussi l'obligation de négociation de bonne foi à l'employeur.
Et, dans le projet de loi, c'est dit, là, qu'il y aura des négociations ou des consultations, que le ministre rencontrera les associations, sauf que les associations n'auront aucun pouvoir de pression économique parce qu'ils sont exclus du champ d'application du droit du travail et, de l'autre côté, jamais, au grand jamais, l'employeur n'aura l'obligation de négocier, on se le garde, mais du moins de négocier de bonne foi.
n(17 h 30)n Alors là je crois qu'on doit, là... Et quels sont les impacts, au Québec, de gens qui se sont prévalus du droit d'association, mais de droit d'association qui était sous forme syndicale? Quels ont été les impacts de ces choses-là, de notre loi antibriseurs de grève, de l'obligation de négocier de bonne foi et d'une capacité du droit de grève? Je pense que la Commission peut nous parler. Je pense que la Commission peut nous entretenir énormément sur les impacts que ça a eu. Peut-être pour rassurer le ministre. Parce que, essentiellement, ici, lorsqu'on le voit, très rapidement, la loi antibriseurs de grève a humanisé jusqu'à un certain point nos conflits de travail. On pourrait juste regarder avant et après. Je pense que c'est quand même quelque chose qui est important. Je n'ai pas encore entendu de projets de loi visant à la modifier.
Par rapport au droit d'association, je crois que le droit d'association par les syndicats... je pense que c'est quelque chose qui est très important aussi. Et là on a présentement deux lois qui visent à limiter l'accréditation syndicale, voire même à retirer l'accréditation syndicale à des personnes qui l'ont obtenue. Alors là on joue sur un terrain qui me semble... En tout cas, moi, je ne pensais pas que, comme député, en 2003, une des premières commissions que j'aurais à faire, là, c'est pour faire valoir que les gens qui se sont fait reconnaître une accréditation syndicale puissent la conserver. Maintenant, on en est là.
Et peut-être que la Commission, là, doit aussi nous parler de ce qui est en train de se passer, où de plus en plus de gens sont retirés du champ d'application du Code du travail. La Commission doit nous parler de ça. Regardez, M. le Président, les travailleurs atypiques, il y en avait 16 % en 1976, il y en avait 29 % en 1995 et 37 % en 2001. Alors, c'est quelque chose qui, vraiment, là... c'est quelque chose qui grossit, hein! C'est une réalité.
Dans le travail atypique, il faut bien comprendre, il y a des syndiqués dans le travail atypique. O.K. Ça, là, il faut vraiment bien le comprendre. Il y a des travailleurs à temps partiel, il y a des travailleurs occasionnels qui sont régis aussi sur des règles de convention collective. Ça, il y en a. Mais il y a une bonne proportion de ces travailleurs atypiques là qui est exclue du champ d'application du droit du travail, donc exclue du champ d'application de ce que la Commission des relations du travail se penche. Et je pense que la Commission des relations du travail doit vraiment venir rassurer les gens que d'avoir recours au droit du travail, ce n'est pas quelque chose qui peut être néfaste pour la société québécoise, ce n'est pas quelque chose qui, vraiment, là, nous met dans une situation très, très délicate puis qui fait en sorte qu'on va s'en aller vers le chaos social.
Je veux dire, tout le monde, là, pourrait avoir le droit aux protections sociales qui sont là. Et puis, de plus en plus, ce qu'on voit, c'est qu'il y a des organisations qui décident de détourner cette règle-là, ce Code du travail là. Il me semble que... Et, quand les employeurs le font, je pense qu'il faut intervenir. Mais, quand le gouvernement le fait et qu'on a la chance, là, qu'il y ait quelque chose qui ressemble à la démocratie qui est en train de se passer ici, bien, au moins aller écouter la Commission des relations du travail pour qu'ils viennent nous dire, les gens qui y travaillent, qu'ils viennent nous dire: Bien, écoutez, là, on va démystifier c'est quoi, le Code du travail, là, puis on va essayer de rassurer le ministre sur le fait que l'employeur ne perd pas tous ses droits, là, jusqu'à un certain point. Il y a quelque chose d'assez important. La question, il me semble, mérite d'être posée.
Là, la Commission traite aussi des demandes qui sont soumises selon les règles prévues au Code du travail et celles prévues au Règlement sur l'exercice du droit d'association. Avant de statuer dans une affaire, elle peut assister les parties dans la recherche d'un règlement négocié en offrant ses services de conciliation prédécisionnelle. Puis je pense que c'est un peu ça. Je pense que c'est un peu dans ce sens-là qu'on aimerait qu'elle vienne ici, la Commission, qu'elle vienne vraiment dans un sens, là, d'essayer de dire: Il me semble qu'un compromis, là, entre retirer les gens du Code du travail comme on est en train de faire là en les réputant travailleurs autonomes et... pour aller dans le sens des jugements des tribunaux et la logique, là, qui semble être celle du ministre, je veux dire, de la Santé et des Services sociaux, qui est celle de respecter, là, les grandes valeurs, les grands principes de son ministère. Je pense que l'un peut aller avec l'autre. Et les gens de la Commission des relations du travail pourraient venir justement essayer d'apporter un éclairage très important sur une certaine forme de conciliation avant la décision pour vraiment venir nous dire: Écoutez, là, il y a moyen de respecter l'horizontalité puis le silo que le ministre veut absolument garder étanche et, en même temps, de respecter les jugements des tribunaux du travail, du Tribunal du travail qui a l'effet de répondre à certains faits. Et, en ce sens-là, je pense, moi, honnêtement, qu'on ne peut pas voter contre une telle proposition qui amènerait essentiellement la commission à regarder et à réfléchir une deuxième fois sur le dangereux précédent qu'on est en train de faire.
Moi, je comprends relativement, là, pour ne pas dire totalement, là, je comprends relativement le ministre qui veut absolument préserver ses structures, son silo, toutes ces choses-là, la cohérence interne de son ministère, sauf que ce que je lui demande, moi, c'est de dire... Bien, la cohérence interne de son ministère, ses structures dont il aime en faire les réformes et jouer dedans, encore faut-il que ça se fasse en pensant aux gens qui reçoivent ces services-là mais aussi aux gens qui, d'un autre côté, en sont les premiers artisans, c'est-à-dire les travailleuses et les travailleurs. Alors, il me semble qu'ici la Commission pourrait venir un peu supporter le ministre dans ses fonctions lorsqu'il a à entretenir des relations de travail. On a dit non au ministre du Travail tantôt, peut-être que... Bon, je ne sais pas, là, peut-être qu'on fonctionne en termes de chasse gardée où est-ce qu'un ministre ne peut pas intervenir sur le dossier d'un autre, là. Bon, on a voté contre.
Maintenant, peut-être que la Commission, elle, pourrait nous amener un éclairage que le ministre nous aurait peut-être apporté, qui est important, mais qui irait dans le même sens, qui est à dire de supporter le ministre de la Santé et des Services sociaux dans les fonctions qui l'amènent à être un employeur de plusieurs personnes. Or, dans ce sens-là, il me semble qu'on a à réfléchir à ça.
Les grands principes, M. le Président, qui doivent être à la base des réflexions qu'on a sur ceux qui sont maintenant sur le marché du travail, M. Bernier en parlait, puis je pense que ce serait peut-être bon d'en parler aussi à la Commission des relations du travail. M. Bernier nous disait: Il y a trois grands principes, trois grands principes qui doivent guider un peu nos réflexions par rapport à ceux qui sont en travail atypique, ceux qu'on mettra travailleurs autonomes ou ceux qui sont des salariés au sens, là, au sens actuel mais qui sont menacés de se faire affliger l'étiquette de «faux occasionnels».
Le premier principe, c'est celui de la qualification, la relation d'emploi, et de reconnaître que cette qualification-là est d'ordre public et ne relève pas de la volonté des parties. M. Bernier est très, très, très, là-dessus, là, très strict, en disant: Écoutez, là, ce n'est pas ni à l'employeur ni à l'employé de décider de son statut mais bien aux tribunaux et à ceux qui en sont les experts. Première chose. Alors ça, ici, déjà, là, on va à l'encontre de ce premier grand principe là.
Deuxième: les régimes de protection sociale doivent être accessibles au plus grand nombre. Encore là, on comprend qu'il y a des régimes de protection sociale rattachés au Code du travail, mais il n'y en a pas présentement, il n'y a rien, là. Là, ce qu'on va faire, c'est qu'on va retirer du monde des champs d'application du Code du travail puis ils s'en vont où est-ce qu'il n'y a aucune protection sociale. Donc, la deuxième volonté ou le grand principe qui doit guider nos réflexions lorsqu'on décide de jouer avec le statut des gens ou avec leur vie sur le marché du travail, il n'est pas respecté.
Et le troisième, la disparité de traitement fondée sur le statut d'emploi, est socialement inacceptable. Ça, là, on ne devrait, nous autres, jamais, jamais, jamais regarder qu'il y a une disparité de traitement sur le statut. Et pourquoi c'est important? Parce qu'on va voir qu'il y a des gens qui partent, qui travaillent en installation et qui font un travail exceptionnel, vont être protégés par un Code du travail et que d'autres, parce qu'ils travaillent en milieu familial, qui font un travail tout aussi exceptionnel, vont avoir une disparité de traitement juste à cause de leur statut. Pourtant, ils font le même métier.
Et, en ce sens-là, les trois grands principes qui devraient guider notre réflexion ne sont pas respectés présentement. Et peut-être que la Commission des relations du travail pourrait nous donner une espèce de conciliation entre ces principes-là et ce qu'on essaie de faire et de préserver au niveau du ministre de la Santé et des Services sociaux.
Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député de Joliette. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent intervenir à ce stade-ci? M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: Très brièvement, M. le Président. Je trouve que l'intervention du député était fort intéressante, soulevait des questions de fond absolument passionnantes. J'ai très hâte de commencer l'étude article par article véritablement pour qu'on puisse en débattre.
Le Président (M. Copeman): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent intervenir à ce stade-ci? Mme la députée de Pointe-aux-Trembles, la parole est à vous.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Merci, M. le Président. Évidemment, on peut être pressé, le ministre et le parti ministériel peuvent être pressés de se rendre à l'article 1, mais, à ce que je sache, on est en commission parlementaire pour mieux étudier le projet de loi. Évidemment, on est entre les audiences, entre les consultations particulières et le fait de commencer l'étude détaillée, et nous considérons qu'il y a des gens qui sont importants qu'on puisse entendre ici.
n(17 h 40)n Alors, mon collègue a apporté qu'on puisse entendre la Commission des relations du travail. Je pense que c'est important qu'on puisse l'entendre. Alors, j'espère que le ministre est conscient que, quand il nous dit qu'il veut commencer par l'article 1, j'imagine que c'est parce qu'il veut qu'on l'adopte, puis c'est tout. Je pense que c'est important d'entendre l'opposition officielle. On parle pour des gens qu'on ne veut pas entendre. C'est important que l'opposition officielle se fasse entendre puis qu'on puisse parler pour les gens qui ne peuvent pas être ici et qu'on leur demande, par nos motions... ils ne peuvent pas être ici, parce que, en plus, il nous refuse qu'ils soient ici. Alors, j'imagine que je parle parce que j'ai mon droit de parole sur la motion de mon collègue sur la Commission des relations du travail. Je ne comprends pas à ce moment-ci pourquoi le ministre, M. le Président, veut qu'on aille à l'article 1 et qu'il ne veut pas nous entendre sur le pourquoi qu'il est intéressant et absolument pertinent que la Commission des relations du travail soit là.
Je répète la motion préliminaire de mon collègue:
«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Commission des relations du travail.» La Commission des relations du travail, M. le Président, est un organisme indépendant puis spécialisé en relations de travail. Il aurait été intéressant de les entendre. Donc, notre motion est sur ça. J'espère qu'on va accepter qu'on puisse les entendre. Et son mandat particulier est d'entendre et de disposer de tout un éventail de recours reliés à l'emploi et aux relations de travail du Québec. Donc, il aurait été fort pertinent de les entendre. C'est ce qu'on demande ici, en commission: d'entendre la Commission des relations du travail.
La Commission est chargée évidemment de l'application diligente et efficace du Code du travail, d'exercer les autres fonctions prévues au même Code, donc la Loi sur les normes du travail, ainsi que dans quelque 23 autres lois qui lui accordent compétence. C'est aussi la Commission qui est responsable du régime d'accréditation syndicale, ce qui comprend les requêtes en accréditation déposées par les associations de salariés, les plaintes de congédiement ou de représailles en raison des activités syndicales, les requêtes survenant à la suite de la vente d'une entreprise ou d'une concession partielle de ses activités et les demandes de révocation d'accréditation, ce qui est très, très... plus que pertinent de les entendre, encore plus pour cette raison-là, puisqu'ils entendent les requêtes d'accréditation syndicale. Et, à ce que je vois, dans le projet de loi du ministre de la Santé et des Services sociaux, il y a des requêtes actuellement en accréditation syndicale. Et là on va leur enlever cette possibilité-là. Et, en plus, on va aller rétroactivement, c'est-à-dire que ceux qui sont déjà accrédités ne pourront plus être accrédités. Donc, ce serait intéressant d'entendre la Commission des relations du travail à cet effet.
Le Code du travail aussi attribue de larges pouvoirs d'ordonnance et de réparation que la Commission peut utiliser dans un grand nombre de circonstances. Alors, c'est notamment le cas lorsque le Code du travail est enfreint, par exemple, lors de grève ou de lock-out illégal, d'ingérence ou d'entrave dans les activités d'une association, de négociation de mauvaise foi de la part d'un syndicat ou d'un employeur ou encore s'il y a violation des dispositions antibriseurs de grève. Donc, c'est tout le mandat, là, d'une Commission des relations du travail, ce que je trouve important dans le cas qui nous touche ici dans le projet de loi n° 7. Et puis, quand on regarde comment se comporte le gouvernement, je trouve que ce serait intéressant d'entendre la Commission des relations du travail pour l'ensemble des chantiers qu'ouvre actuellement le gouvernement libéral et que la Commission des relations du travail, ce serait fort pertinent de les entendre.
La Commission des relations du travail aussi traite les demandes qui lui sont soumises selon les règles prévues par le Code du travail et celles prévues au Règlement sur l'exercice du droit d'association conformément au Code du travail. Donc, on parle ici, dans le projet de loi, de droit d'association plus particulièrement, parce que, si on regarde dans les notes explicatives: Ce projet de loi attribue, en outre, au ministre de la Santé et des Services sociaux le pouvoir de conclure avec un ou plusieurs organismes représentatifs ? on aura l'occasion d'en reparler ? des ressources intermédiaires ou des ressources de type familial une entente pour, notamment, déterminer les conditions générales de l'exercice des activités de ces ressources et prévoir diverses mesures relatives à la rétribution de leurs services. Donc, vous voyez, en lisant, là, que ce n'est pas tout à fait clair, là. Ça veut dire quoi? C'est une entente. Quels sont les organismes, ces organismes représentatifs? Qui est représentatif? Quelles sont les diverses mesures relatives? Donc, déjà, juste dans quatre lignes, cinq lignes, là, on a énormément de questionnements juste à cet effet-là.
Et, si je revois, je regarde les derniers articles aussi que nous avons eus, que je n'ai pas eu le temps de reparler tout à l'heure, entre autres... c'est absolument intéressant pour la Commission des relations du travail de les entendre, parce qu'il y a quand même eu plusieurs articles qui parlent vraiment et du Code du travail mais aussi de toute la relation, les relations de travail au Québec.
«La CSN ? on nous disait, dans Le Journal de Québec, le 17 septembre ? promet de se battre jusqu'en Cour suprême pour invalider le projet de loi n° 7, qui enlève aux familles d'accueil et autres ressources intermédiaires du réseau de la santé le droit à la syndicalisation[...]
«Le projet de loi statue que les personnes oeuvrant à titre de famille d'accueil pour les enfants en difficulté ou encore pour les personnes handicapées ne sont pas des salariés au sens du Code du travail et, par conséquent, n'ont pas le droit de se syndiquer.
«Qui plus est, le projet de loi a une portée rétroactive qui aura pour effet d'invalider l'accréditation syndicale qu'ont déjà obtenue plus de 1 200 personnes oeuvrant dans le réseau.» Donc, on dit à ces 1 250 personnes, là: Écoutez, avec le projet de loi n° 7, quand il sera adopté, là, vous n'êtes plus des syndiqués. Donc... «"Le droit de se syndiquer dans ce pays-là ? comme dit M. Valois de la CSN ? je croyais que mon grand-père avait réglé ça", a lancé M. Valois.» Je vois aussi M. Alain Barré, qui est ici devant moi ? son mémoire ? M. Alain Barré, qui est professeur à l'Université de Laval et en relations industrielles particulièrement, qui nous a fait dans son mémoire des commentaires sur l'affirmation de la liberté d'association, parce que c'est ce qu'on retrouve dans le projet de loi n° 7. Puis il y aura un ou plusieurs organismes représentatifs. Donc, on nous dit qu'il y aura des droits d'association avec ce projet de loi là. Donc, il est clair que ce qu'on voit dans les propos de M. Barré, c'est qu'un organisme représentatif peut peut-être être aussi un syndicat.
Alors, si je regarde un peu ce qu'il nous apporte, il nous parle que «la Charte canadienne des droits et libertés garantit à chacun la liberté d'association». C'est ce que M. Barré dit. «L'exclusion des responsables de garde en milieu familial et des ressources intermédiaires ? ce qui nous touche, là, parce que la garde en milieu familial, c'était le projet de loi n° 8 ? d'un régime particulier de relations du travail ? celui établi par le Code du travail ? n'est pas en soi inconstitutionnelle. Ces groupes de travailleurs n'ont pas droit à un "régime législatif particulier". La garantie constitutionnelle de la liberté d'association n'assure pas aux travailleurs leur inclusion "dans un régime complet de négociation collective".» Il nous dit aussi que «toutefois, l'exclusion d'un groupe de travailleurs d'un régime législatif particulier n'a pas pour effet d'interdire la formation d'une association indépendante de travailleurs dont la mission serait la défense des intérêts professionnels de ses membres». Donc, «la liberté d'association existe bien "en dehors de tout cadre législatif"». Il nous donne... C'est de l'arrêt Delisle, à la page 1006. Il nous donne, dans le mémoire, là, où on peut retrouver les éléments de son analyse et de la présentation de son mémoire devant nous en commission, dernièrement.
«Une telle association peut choisir de se désigner sous le vocable "syndicat", "union", "organisme", "association", etc. Cela n'a aucune importance, qu'il nous dit. La Constitution du Canada leur reconnaît cette liberté fondamentale. Les travailleurs visés par les projets de loi nos 7 et 8 pourraient l'invoquer directement. En fait, ces projets de loi reconnaissent bien la liberté d'association des travailleurs visés, puisqu'ils envisagent explicitement qu'il puisse y avoir "plusieurs organismes" et "plusieurs associations". Il y a toutefois méprise sur la portée véritable de ces projets de loi lorsqu'on affirme que l'"on ferme la porte à la syndicalisation" ou lorsque l'on souhaite que le droit à la représentation puisse "s'exercer en dehors du cadre syndical". En fait, il est constitutionnellement impossible d'atteindre ce résultat.» Il nous dit par la suite que «les centrales syndicales québécoises peuvent donc mettre sur pied des syndicats dits "de branche" ayant vocation à regrouper, selon le cas, toutes les ressources intermédiaires ou tous les responsables de garde en milieu familial. Il n'y a donc pas d'obstacle juridique ? dans la Constitution du Canada ou dans la loi ordinaire ? à ce que les travailleurs visés ? par le projet de loi qui est devant nous ? puissent adhérer à un syndicat. Il s'agit indéniablement de l'exercice d'une liberté constitutionnelle.» Alors, c'est peut-être intéressant de voir, si les groupes se retrouvent, se donnent ce droit-là, comment va répondre le ministre à ça.
n(17 h 50)n On voit aussi... Dans l'affirmation de liberté syndicale que M. Barré nous apporte, il nous dit aussi que «l'expression "sans distinction d'aucune sorte" signifie que la convention n° 87 ? c'est une convention qui est entrée en vigueur chez nous le 23 mars 1973, qui a été ratifiée, là, par le Canada en 1972 et est entrée en vigueur en 1973 ? s'applique aussi bien aux travailleurs salariés qu'aux travailleurs indépendants». Il nous dit aussi que, «selon la jurisprudence du Comité de la liberté syndicale, l'existence d'une relation d'emploi n'a aucune incidence sur la portée du droit syndical».
Donc, c'est important que le ministre ait en tête le mémoire. Je l'inviterais à relire le mémoire de M. Barré, ce qui lui permettra aussi de voir qu'il se pourrait fort bien que les groupes décident de se retrouver, dans le fond... d'être un syndicat. Il n'y a rien qui empêche qu'un syndicat puisse être un regroupement ou une association aux fins du projet de loi que nous avons ici, ici devant nous.
Mais il y a deux choses qui sont pour moi importantes, M. le Président, en écoutant la Commission, la Commission que nous demandons qu'elle soit ici devant nous... la motion de mon collègue. Il n'y a rien qui nous indique dans le projet de loi présentement non plus qu'il y a une garantie et qu'il y a vraiment des incidences, là, pour la suite des choses dans les relations collectives du travail, dans le fond, au Québec.
Si je regarde un petit peu ce qu'on peut apporter ici, en commission parlementaire... et le but de l'opposition officielle est de faire avancer quand même le débat, M. le Président, et de faire réfléchir le ministre à ce qu'il nous propose ici comme projet de loi n° 7. Alors, c'est important, l'écoute du ministre, pour voir la suite des choses. Quand on arrivera, je pourrais dire, un peu plus dans le détail des articles de loi, il y a des termes, il y a des mots, il y a des phrases... la façon qu'elle est libellée porte à confusion, porte à ambiguïté ou, encore plus, porte aussi, je pourrais dire, à des situations qui vont amener des incidences assez importantes dans l'ensemble de la vision sociale du Québec. Alors, je crois que c'est important que le ministre ait toute l'attention pour écouter l'opposition officielle à ce niveau-là.
Et le projet de loi ne donne aucune garantie qu'il y aura des meilleures conditions de travail. Il n'oblige pas le ministre nécessairement à s'entendre... Parce que, quand on voit, dans le projet de loi, «le ministre peut, avec l'approbation du gouvernement, conclure...», «peut», ce n'est pas «doit», là, c'est «peut». Alors, «peut», ça ne veut pas dire... On ne va se fier qu'à la bonne foi du ministre qui pourra peut-être conclure une entente.
Dans Le Devoir du 20 septembre, Jean Bernier nous disait que c'est un «mode de détermination unilatéral des conditions de travail[...], un projet de loi [...] purement négatif, qui retire des droits et ne propose rien en échange». Alors, il ne définit pas non plus les modalités qui guideront les négociations. Comment vont se faire les négociations? Il existe, dans le Code du travail, des instruments qui guident les négociations. Là, dans le projet de loi, on ne voit rien qui va nous dire quelle forme de négociation ça va prendre. Ça va être au bon vouloir, à la bonne volonté du ministre qui va peut-être, bon, conclure ce qu'il voudra bien conclure avec les organismes représentatifs, d'une part.
Le ministre compte signer une seule entente, c'est bien clairement dit. Peut-être qu'il va nous apporter des amendements, je le souhaite, parce que... «Le ministre peut, avec l'approbation du gouvernement, conclure avec un ou plusieurs organismes représentatifs des ressources intermédiaires une entente...» Je me souviens des familles d'accueil qui disaient: J'espère que le ministre va nous entendre. Nous, on veut être représentées. Alors, je ne sais pas comment est-ce qu'il va faire, le ministre, pour avoir une entente avec les familles d'accueil, avec les ressources intermédiaires telles quelles, avec les ressources de type familial. Ils ont tous leur milieu de vie, ils ont tous leur façon de faire les choses, leur façon de vivre avec les gens pour lesquels ils ont, je pourrais dire, la responsabilité. Alors, évidemment, «une entente», ça ne nous amène pas à grand-chose. On ne sait pas comment est-ce qu'il va pouvoir faire cette entente-là avec une seule entente nécessairement.
Et l'autre aspect qui est important pour l'opposition, c'est, dans le projet de loi n° 7, toutes les incidences qu'il y aura sur le régime des relations collectives du travail, ce que je vous disais tout à l'heure. L'État lui-même s'est donné des lois pour encadrer les relations de travail: le Code du travail, entre autres, les normes du travail. On a aussi, si on regarde tout l'ensemble des lois au Québec puis aussi les lois à travers... la Charte canadienne des droits et libertés, la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, les conventions internationales et la protection du droit international au travail, bon, ce sont tous des éléments qui sont importants de se référer et de pouvoir s'y référer, dans le sens: avant de déposer un projet de loi, là, est-ce que tout ça est concordant? est-ce que tout ça est harmonisé? J'en doute, M. le Président.
Alors, l'État s'est donné ces lois-là pour les relations de travail, et le ministre est responsable de ces lois-là et est responsable de la loi de la santé et des services sociaux, mais le ministre du Travail est responsable, quant à lui, des ministres... des lois en ce qui concerne le travail tel quel. C'est pour ça que, avec le ministre du Travail, avec le Pr Bernier, avec, ici, la commission du travail, il aurait été intéressant de les entendre pour faire harmoniser tout ça.
On sait aussi, comme incidence qu'il peut y avoir, qu'on nie le droit à la syndicalisation. Alors, il n'y a rien qui nous indique que la relation que le ministre de la Santé nous dit, devant nous... Il nous a dit, là, au début de la commission parlementaire, qu'il a bien parlé à son collègue le ministre du Travail, mais il n'y a rien qui nous dit que, le ministre du Travail, il va nous offrir des garanties quant à la protection sociale des travailleurs. Il n'y a rien qui nous indique ça.
On fait le lien aussi avec la réforme de l'article 45. J'avais déjà parlé de la réforme de la loi n° 90, le 1 %. Il y a des liens. Tout ça, là... Il serait intéressant d'entendre le ministre de la Santé, mais aussi son collègue du Travail et la Commission des relations du travail, intéressant aussi d'avoir leur opinion sur cette vision-là des prochaines relations de travail au Québec. On pourrait aussi entendre les Relations de travail par rapport à tout ce que c'est, le travailleur autonome. Alors, j'imagine qu'il y a énormément... on aurait sur la table beaucoup de choses à pouvoir discuter avec la Commission des relations du travail du Québec.
Et j'espère que nous pourrons voter cette motion-là, M. le Président, parce que ce projet de loi là, devant nous, apporte beaucoup d'ambiguïtés quant aux termes et quant à ce que c'est vraiment au niveau du contenu de ce projet de loi là, autant l'entente, autant les organismes représentatifs, autant le fait que ce ne sera pas un contrat de travail. Et il y a tout l'aspect, là, de la détermination des taux de l'échelle, des taux d'attribution applicables aux services des ressources intermédiaires.
Alors, il y a beaucoup d'éléments, parce que, quand même, les ressources intermédiaires travaillent avec ce qu'on appelle les guides d'orientation mais aussi les cadres de référence. Et j'ai eu la peine de rencontrer les groupes et de partager avec eux les cadres de référence. Notre conseillère politique, ici, pour la commission, qui est Mélanie Malenfant, qui est avec nous, qui a fait beaucoup de travail de recherche pour sortir beaucoup d'éléments qu'on a besoin pour la commission, a rencontré avec moi les ressources aussi de type familial, les ressources intermédiaires. On a rencontré les CRDI. On a eu l'occasion de rencontrer beaucoup de monde. Il y a beaucoup d'inquiétude. Ils ont beaucoup d'attentes par rapport à leurs conditions de travail, mais ils ont aussi beaucoup d'inquiétudes quant à comment vont se faire les choses. Et je crois important, M. le Président, que ce qu'on apporte sur la table...
J'entends le gouvernement libéral nous dire non, qu'on puisse écouter le ministre du Travail, non, qu'on puisse écouter la Commission des relations du travail, non, qu'on puisse écouter M. Bernier, et j'imagine que, si on a d'autres personnes, ils vont nous dire: Non, mais allons à l'article 1 puis faisons ça vite et... Ça vient d'être déposé, là, cet automne, ces projets de loi là. On a eu le temps d'entendre quelques personnes. Alors, c'est difficilement acceptable de voir que le ministre... Moi, j'aurais aimé entendre le ministre davantage. D'ailleurs, M. le Président, le ministre nous écoute, mais je n'ai pas de retour du ministre ici, devant nous. Mes collègues ont intervenu, tous ceux de la commission, de l'opposition officielle, du Parti québécois, qui aimeraient entendre le ministre davantage. Et je sais bien que, M. le Président, on ne peut pas parler au ministre directement dans notre commission parlementaire, mais j'aimerais bien que le ministre puisse nous parler davantage du projet de loi et pourquoi il nous refuserait d'entendre le ministre du Travail, pourquoi il nous refuserait d'entendre M. Bernier, pourquoi il nous refuserait d'entendre la Commission des relations du travail, pourquoi il nous refuserait d'entendre d'autres personnes et pourquoi il nous dit ici aujourd'hui...
Des voix: ...
Mme Léger: M. le Président?
Le Président (M. Copeman): Oui. Oui, Mme la députée, on vous écoute pendant six secondes.
Mme Léger: Pourquoi il ne nous dit pas aujourd'hui qu'il veut entendre les groupes qu'on apporte ici en motion aujourd'hui? Et pourquoi on n'entend pas le ministre de la Santé et des Services sociaux par rapport au projet de loi n° 7?
Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup. Chers collègues, avant de quitter, nous avons déjà entendu des citations de Lamartine. Je vous en propose une autre d'un autre poète. Celui-ci, un poète américain: «Let us go then, you and I, when the evening is spread out against the sky, like a patient etherized upon a table...» T. S. Eliot.
Alors, compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux de la commission sine die.
(Fin de la séance à 18 heures)