(Neuf heures quarante et une minutes)
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, mesdames et messieurs, la commission des affaires sociales va donc reprendre ses travaux.
Je vous rappelle que la commission est réunie afin de procéder à une consultation générale et pour tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 155, Loi modifiant la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées et d'autres dispositions législatives.
Alors, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. Mme Rochefort (Mercier) va être remplacée par M. Williams (Nelligan).
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je vous remercie. Alors, nous allons donc commencer immédiatement nos travaux. Nous accueillons donc ce matin la Commission...
Une voix: ...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Pardon?
(Consultation)
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Excusez, là. Oui, c'est vrai que nous avons la ministre déléguée à l'Emploi ici, ce matin, qui est avec nous parce que, à cause de force majeure, on sait que le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux ne peut pas être des nôtres ce matin, précisément. Il y avait entente, je pense. Le porte-parole de l'opposition avait été avisé. Alors, dans ces conditions, je considère qu'il y a consentement pour que M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux soit remplacé présentement par Mme la ministre déléguée à l'Emploi.
M. Williams: ...mon consentement.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de Nelligan.
M. Williams: Je fais mon consentement que le ministre délégué est remplacé par la ministre déléguée à l'Emploi.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bon. Alors, tout le monde s'entend. C'est beau. Nous allons donc poursuivre avec la Commission...
Des voix: ...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): S'il vous plaît! S'il vous plaît, nous avons déjà un petit peu de retard. Alors, j'aimerais qu'on puisse entendre nos invités correctement, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.
Alors, M. Marois, j'imagine que vous êtes le porte-parole. Bonjour. Bienvenue à cette commission. Vous connaissez les règles. Alors, vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Avant de le faire, j'aimerais que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent.
Je voudrais aussi vous mentionner, et pour les groupes qui vont suivre, que nous avons une interprète en langage gestuel. Alors, j'apprécierais que le débit, au niveau du langage, soit un petit peu ralenti pour qu'on puisse vous traduire correctement. Voilà.
Auditions (suite)
Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse (CDPDJ)
M. Marois (Pierre): Merci infiniment, Mme la Présidente. Alors, je suis accompagné, à ma droite, par Me Pierre Bosset, qui est le directeur du Service de la recherche chez nous, à la Commission, et, à ma gauche, par Mme Muriel Garon, du même service, qui est coordonnatrice.
Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre, en vous priant, en passant, compte tenu des circonstances, de transmettre nos salutations et nos meilleurs voeux au ministre responsable du projet et en saluant les membres de la présente commission parlementaire.
Un bref rappel, mais important au début, quand la Commission intervient, il ne faut jamais oublier qu'elle a pour mission de veiller au respect des principes qui sont énoncés dans la Charte des droits et libertés de la personne, qui est notre loi, au Québec, de nature quasi constitutionnelle. Et, dans ce but, le législateur a confié à la Commission la responsabilité de procéder à l'analyse des textes législatifs et de faire, au besoin, les recommandations qui s'imposent. C'est à ce titre, donc, que la Commission présente aux membres de la présente commission ses remarques, commentaires et observations concernant le projet de loi n° 155.
Ce projet de loi propose une importante révision, et cette révision comporte de nombreuses améliorations et ajustements qui, dans certains cas, étaient souhaités, on le sait, depuis fort longtemps. Aussi, d'entrée de jeu, la Commission tient à dire qu'elle accueille favorablement la présentation de ce projet de loi. Elle vous formulera des commentaires, des remarques et des recommandations, certaines avec particulièrement une certaine insistance.
Parce que, au fond, ce dont il s'agit et ce que les personnes concernées demandent, ce n'est pas autre chose, mais c'est aussi globalement une demande que soit pleinement respecté leur droit à l'égalité prévu à l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne avec les accommodements raisonnables qui découlent obligatoirement de l'interprétation... par interprétation jurisprudentielle et par des dossiers de tout récents jugements que nous venons de gagner devant, entre autres, le Tribunal des droits de la personne, avec, donc, je dis, les accommodements raisonnables qui découlent obligatoirement de l'article 10 pour éliminer les obstacles que, comme société, par inconscience, par ignorance, par préjugé, nous avons érigés et, dans certains cas, nous continuons à ériger, ce qui constitue une discrimination systémique à l'égard de certaines personnes. Donc, ce qu'ils réclament, c'est le droit de vivre, tout simplement, pleinement leur citoyenneté et en pouvant avoir une pleine participation sociale.
Nous allons donc tout de suite amorcer nos commentaires, d'abord, sur les modifications proposées à la définition du concept de handicapé et les fonctions de l'Office, et c'est Mme Muriel Garon qui va vous présenter mon commentaire à cet effet.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Garon.
Mme Garon (Muriel): La modification d'une définition de base au sein d'une loi pose toujours des difficultés. Dans son mémoire, la Commission a voulu souligner le résultat satisfaisant de la proposition qui est présentée par le projet de loi. La Commission a examiné cette définition de trois points de vue.
D'abord, du point de vue de la nécessité de mettre à jour la définition en regard de l'évolution qu'a connue la terminologie au cours des dernières années. En effet, cette évolution a permis l'intégration des connaissances sur la production du handicap et a permis également une meilleure harmonisation des termes sur le plan international. Cette mise à jour paraissait d'autant plus appropriée que l'Office a lui-même joué un rôle de leadership à ce propos sur la scène internationale. Donc, la définition proposée rejoint cet objectif.
Deuxième point de vue, celui qui est plus central à l'exercice du mandat de la Commission, c'est, pour la Commission, le souci premier... Son souci premier dans la recherche d'une définition satisfaisante de la notion de personne handicapée a toujours été de s'assurer que soit évitée la confusion dans la définition des termes qu'on trouve dans la Charte, d'une part, et dans la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées. L'historique des définitions qui ont été utilisées et qui ont été proposées et inscrites dans les documents, dans les deux lois, témoigne du danger de restriction qu'une telle confusion peut entraîner dans l'étendue de la protection offerte dans la Charte des droits et libertés de la personne. La Charte a, en effet, été modifiée en 1979 de façon à y inclure les personnes handicapées parmi les groupes visés par l'interdiction de discrimination. Cette modification faisait suite à l'adoption de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées.
Or, l'utilisation de l'expression «personne handicapée» dans les deux textes orientait les interprétations dans le sens de la définition qui était proposée par la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées. Il est apparu rapidement que cette notion, qui restreint le terme aux personnes atteintes de façon significative et persistante par une déficience, ne permettait pas d'apporter une réponse à l'ensemble des plaintes relatives à l'accès à l'égalité qui sont soumises à la Commission sous ce motif. Les personnes qui s'adressent à la Commission peuvent effectivement être limitées dans leurs activités de façon significative, mais parfois les déficiences qu'on leur attribue ou qu'elles ont sont mineures ou sont simplement perçues et elles n'affectent pas leur capacité d'exercer des activités dont elles sont exclues. Il paraissait inacceptable à la Commission que ces personnes n'aient pas de recours en vertu de la Charte.
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(9 h 50)
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Une voie de solution a été ouverte à ce problème par le remplacement du terme de «personne handicapée» dans la Charte par celui, en 1982... par celui de «handicap ou l'utilisation de moyens pour pallier ce handicap». À la suite de cette modification, les tribunaux, non sans recul et hésitation, ont fini par reconnaître qu'une déficience qui est perçue à tort et qui est utilisée comme raison pour exclure, pour traiter différemment une personne peut également constituer de la discrimination fondée sur un handicap. Cette interprétation a été confirmée par la Cour suprême en l'an 2000. De la même façon, la possibilité qu'une personne soit exclue parce qu'elle peut développer un handicap dans l'avenir est également couverte par le motif handicap dans la Charte.
Bon, la troisième préoccupation de la Commission ? je le passe rapidement ? c'est la nécessité que la définition puisse s'appliquer à la définition de «personne handicapée» qui... les personnes devant être couvertes par le projet de Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics. La modification nous paraissait... à ce sujet-là aussi.
Rapidement, puisque le temps file, la Commission a voulu souligner, d'autre part, certaines fonctions de l'OPHQ qui sont formulées explicitement dans le projet de loi et qui lui paraissent extrêmement intéressantes. D'une part, la Commission salue la reconnaissance explicite de deux fonctions dont l'Office s'est acquitté avec beaucoup de professionnalisme au cours des dernières années: alors, d'une part, les bilans de situation qu'elle a produits, l'état de l'action gouvernementale et les propositions d'orientation et de voies de solution pour l'avenir à partir de ces états de situation; d'autre part, sa fonction de concertation interorganismes.
La Commission, par rapport aux fonctions de l'Office, est préoccupée particulièrement par le pouvoir de l'Office face à l'atteinte des résultats. La Commission croit percevoir la possibilité d'exercice de pouvoirs dans la mission intersectorielle de l'Office. La Commission formule le souhait que la fonction de s'assurer au niveau local, régional et national de la mise en oeuvre des actions intersectorielles nécessaires à l'intégration de même que la collaboration que doivent y apporter les municipalités, commissions scolaires et autres organismes confèrent à l'Office le pouvoir d'infléchir significativement l'atteinte des résultats attendus de ces actions. Voilà pour la définition des fonctions.
Les points suivants que nous aborderons ont trait aux articles du projet de loi qui traitent des politiques et pratiques qui affectent l'accès des personnes handicapées à divers domaines de la vie en société. Nous commencerons par le travail. Nous poursuivrons par l'accès aux documents et services publics, les transports publics et, finalement, les édifices publics.
M. Marois (Pierre): Alors, Mme la Présidente, avec votre permission, je vais aborder l'intégration, comme on dit, professionnelle sur le marché du travail des personnes handicapées. Je vais donc commenter les pages, pour qu'on puisse s'y retrouver, 8 à 13 de notre mémoire et les recommandations 6, si ma mémoire m'est fidèle, 4... pardon, 3, je m'excuse, 3 à 8 inclusivement.
Rapidement, le projet de loi n° 155 prévoit et nous propose deux mesures qui visent l'intégration en emploi, l'intégration professionnelle. La première, c'est la stratégie gouvernementale d'intégration et de maintien en emploi. La loi... l'article 63, dis-je, prévoit que le ministre responsable du chapitre III de la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité et qui institue la Commission des partenaires du marché du travail, et je cite, «doit favoriser l'intégration au marché du travail des personnes handicapées par l'élaboration, la coordination, le suivi et l'évaluation d'une stratégie d'intégration et de maintien en emploi de ces personnes». Dans les cinq ans de la sanction de la présente loi, ce ministre devra, et je cite, «présenter au gouvernement un rapport sur les actions mises en oeuvre découlant de la stratégie et sur ses effets et proposer des recommandations en matière d'intégration et de maintien en emploi des personnes handicapées». Entre parenthèses, peut-être ? mais ce n'est pas dans notre mémoire ? peut-être devrait être examinée l'opportunité, la possibilité même que ça puisse être déposé, le cas échéant, à l'Assemblée nationale pour information générale.
Nous ne pouvons qu'approuver ces objectifs, mais nous tenons à reprendre les mises en garde que nous avons déjà formulées antérieurement que nous inspirent des constats récurrents relatifs à l'implantation d'initiatives semblables. D'abord, une stratégie d'intégration en emploi pour les personnes handicapées ne devra pas miser sur le seul volontariat. Deuxièmement, les mesures proposées devront être clairement encadrées, des objectifs et des échéanciers précis être fixés. Troisièmement, des mécanismes de surveillance devront être institués et des sanctions liées au défaut de se conformer aux exigences devront être précisées.
Les PAE, la loi sur les programmes d'accès à l'égalité en emploi que nous administrons, ce qui fait que le volontariat est stimulé alors que tous les plans d'embauche, les programmes avant, on le sait, résultats, hein, plus que discutables. Bon. Donc, il a fallu en changer, et c'est pour ça qu'il y a eu la loi n° 143. Pourquoi nous n'avons jamais eu, comme Commission, à utiliser, à date, dans l'application de la loi n° 143, nos pouvoirs quasi judiciaires? Parce que nous les avons. Alors, les gens ont le choix de travailler en concertation avec nous ou alors d'opter pour la voie judiciaire. Et, à date, les gens coopèrent.
Dans cette perspective, nous considérons que le premier élément de cette stratégie devrait être l'inclusion des personnes handicapées comme groupe cible des programmes d'accès à l'égalité élaborés dans le cadre de l'obligation contractuelle, parce qu'il y a divers programmes. On a déjà présenté cette recommandation lors de notre bilan 1998. Ces programmes, qui doivent mettre en place certains contractants du gouvernement et des entreprises, associations ou organismes qui reçoivent des subventions, sont obligatoires. Il faut qu'il y ait des objectifs, etc., mais, bien que la cible atteinte ne serait pas négligeable dans ce cas-là, l'action ne saurait absolument pas s'y limiter. Ainsi, de façon plus large, cette stratégie devrait explorer diverses autres pistes d'action ciblant un ensemble plus large d'entreprises. Pourquoi? Compte tenu des échecs rencontrés dans le passé, la mise en oeuvre, une fois une stratégie nouvelle établie, devrait être l'objet d'une vigilance soutenue, et le rapport faisant état des actions privilégiées et de leurs effets et les recommandations en découlant devraient être aussi étroitement collés aux objectifs fixés au départ.
Deuxième bloc, la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi et, enfin, Dieu merci, l'ajout du groupe des personnes handicapées, qu'elles ont demandé depuis longtemps avec raison, que la Commission a demandé dans son bilan, sur lequel nous sommes revenus lors de l'examen du projet de loi n° 143 parce que nous avions insisté pour rappeler le constat de discrimination en emploi qui est incontestable, il est là... Soit inclus parmi les groupes cibles. Et nous l'avons réitéré dans le cadre de l'examen du projet de loi n° 112, la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Donc, par cette intégration que propose le projet de loi ? et nous l'approuvons bien sûr ? plus de 600 quelques organismes publics vont devoir... Particulièrement, les établissements santé, services sociaux, éducation, municipalités, Sûreté du Québec, etc., devront établir des véritables mesures favorisant l'embauche.
Il y a une chose qu'on tient à souligner, c'est que le gouvernement, lui, ne s'est pas toujours pas engagé à élaborer dans la fonction publique du Québec un programme d'accès à l'égalité en emploi pour les personnes handicapées. Et, compte tenu que les plans d'embauche pour les personnes handicapées dans les ministères et organismes visés par la Loi sur la fonction publique n'existeraient plus suite à l'adoption du présent projet de loi, nous réitérons avec insistance notre recommandation qu'un tel programme soit établi dans les ministères et organismes dont le personnel est nommé suivant cette loi.
Deux derniers mots à cet égard-là. Un, nous demandons, déjà cette année, 800 000 $ de plus dans nos crédits pour réussir à rendre les services auxquels nous sommes tenus pour notamment la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi. Si cela devait passer, on supplie le gouvernement, cette fois-là, de ne pas mettre la Commission dans l'obligation de quémander les fonds pendant deux, trois ans pour qu'on puisse rapidement donner suite à l'application de cette mesure. On pourra chiffrer les besoins, mais on insiste à cet égard-là. C'est aussi une question d'indépendance financière de la Commission. Je pense que c'est important pour la crédibilité.
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(10 heures)
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Dernier point, date d'entrée en vigueur. Concernant cet article touchant l'accès à l'égalité en emploi, vous verrez, en lisant le texte de loi, qu'alors que la loi entre en vigueur sur sanction, les articles concernés, 33 à 35, eux n'entrent en vigueur que sur décret. Nous, ça nous inquiète. Ça nous inquiète parce qu'on vous dit: Écoutez, déjà est en marche tout le Programme d'accès à l'égalité en emploi dans 618 organismes au gouvernement, alors il ne faudrait pas retarder l'entrée en vigueur de la portion touchant les handicapés. Il va nous falloir reprendre complètement tout à zéro avec tous les organismes. Il faut donc le faire dès la sanction de la loi, sanctionner en même temps ces articles-là pour que ça puisse être mis en application rapidement. Alors, un dernier bloc concernant les autres éléments d'intégration. Me Pierre Bosset.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, il vous reste deux minutes, Me Bosset.
M. Bosset (Pierre): Oui, merci.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est à vous la parole.
M. Bosset (Pierre): Nous aurions aimé vous parler de l'accès aux documents et aux services publics. Je vais simplement vous référer sur ce point aux pages 5 à 7 de notre mémoire ainsi qu'à la recommandation 9 ? pardon ? aux recommandations 1 et 2. Je m'excuse.
Je vais aborder, donc, dans les deux minutes qu'il me reste, la question de transport public et, si j'ai le temps, celle des édifices publics.
Pour ce qui est du transport public, la loi actuelle comporte, comme vous le savez, des clauses nonobstant qui ont pour effet d'écarter l'application de la Charte dans ce domaine dès qu'un organisme public de transport se conforme à son propre plan de développement du transport en commun pour les personnes handicapées. Cet article est un obstacle à l'exercice de la compétence d'enquête de la Commission dans ces domaines. Et, depuis 1991 ? donc depuis 12 ans ? la Commission recommande l'abrogation de cette disposition-là. Évidemment, nous sommes heureux de voir que le projet de loi propose l'abrogation de cette disposition qui est l'article 72 de loi actuelle.
Cependant, il demeure que nous constatons, dans les milieux concernés, un certains manque de sensibilité aux besoins des personnes handicapées, manque de sensibilité qui se traduit dans la conception des infrastructures et dans la rénovation des infrastructures, dans celle du métro de Montréal, par exemple, qu'on est en train de rénover de façon cyclique mais qui ne comprend jamais de mesures d'adaptation visant à faciliter l'accès des personnes handicapées au métro. Ce que nous... Or, il existe des mesures. Il existe déjà des mesures sur le plan technique. La technologie nous permet de tenir compte des besoins des personnes handicapées. Par exemple, quand on remplace les préposés par des machines qui vont dorénavant donner les billets pour voyager à bord du transport en commun, on ne tient pas compte des besoins des personnes handicapées qui, parfois, ont de la difficulté à utiliser ces machines. Pourtant, il y a déjà des technologies qui existent et qui permettraient d'adapter ces machines aux besoins des personnes handicapées et d'autres types de personnes d'ailleurs.
Donc, les moyens sont là, ce qui manque, c'est la sensibilité, et notre recommandation est que toute modification aux infrastructures de transport en commun dorénavant se fasse à la suite d'une étude d'impact de ces modifications sur les personnes handicapées.
Pour ce qui est de l'accès aux édifices publics, comme vous le savez, la loi actuelle prévoit que, pour les anciens édifices, ceux qui ont été construits avant 1976, le gouvernement peut faire un règlement. Il ne l'a jamais fait. Et ça démontre bien les limites du volontariat aussi dans ce domaine.
Ce que le projet de loi nous propose, c'est que le ministre devra faire un rapport au gouvernement sur, entre autres, la pertinence de réglementer cette question. Pour nous, c'est insuffisant. La pertinence, elle existe déjà. Il faudrait que le projet de loi oblige la rédaction de ce règlement dans un délai qui serait fixé par la loi elle-même. Nous suggérons deux ans. Ça pourrait être un autre délai. Mais, le principe, c'est qu'il devrait y avoir une obligation de faire un règlement sur l'adaptation des édifices publics et dans un délai qui serait fixé par la loi. Merci.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, ça complète? D'accord. Nous allons donc passer immédiatement à la période d'échange, et je cède donc la parole à la ministre déléguée à l'Emploi. Mme la ministre.
Mme Maltais: Merci, Mme la Présidente. D'abord, je vous transmets de la part de mon collègue, le ministre Roger Bertrand, mes salutations. Évidemment, pour qu'il soit absent ce matin, vous vous rendez compte que c'est pour une raison de force majeure. Cette raison est personnelle, elle lui appartient, mais elle est majeure, puisque, pour lui, c'est un projet de loi important en lequel il croit et il trouvait extrêmement important d'être ici ce matin. Il m'a demandé de le remplacer parce qu'il sait que j'ai travaillé sur ce dossier. Alors, je lui passerai évidemment mes commentaires sur les mémoires qui ont été déposés et sur les échanges que nous avons eus. Alors, il salue tous les groupes.
Je remercie la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse de son mémoire. C'est un mémoire extrêmement intéressant. Vous parlez de nombreuses améliorations, d'ajustements dans ce projet de loi. Oui, effectivement, il était temps de revoir de fond en comble cette loi et la façon dont travaille l'Office des personnes handicapées, et de se permettre un moment où on va examiner où on en est rendu dans l'intégration des personnes handicapées dans tous les volets de notre développement comme société.
Vous parlez de l'emploi, évidemment je suis ministre déléguée à l'Emploi. Mon oreille s'est tout à coup penchée vers vous pour entendre très bien. Vous avez des recommandations qui, pour moi, sont intéressantes et même qui vont tout à fait dans le sens dans lequel nous voulons aller. Je suis aussi membre du Conseil du trésor, donc très attachée à l'intégration des personnes handicapées dans la fonction publique. Je peux vous dire que j'ai vu de près à la rédaction de ces articles du projet de loi sur la stratégie de maintien en emploi. Nous allons... Comme gouvernement, je pense que je peux vous dire que nous allons voir à ce que des résultats soient atteints. Je parle bien de résultats et de suivi de l'atteinte de ces résultats. Je n'ai pas à me mettre à la place de mon collègue, le président du Conseil du trésor, mais sachez bien que nous avons travaillé de concert en élaborant ce projet de loi. On a vu à ne pas échapper de pan dans l'intégration à l'emploi qui est la véritable intégration, l'intégration économique. L'intégration à l'emploi, c'est peut-être l'intégration la plus difficile à atteindre pour les personnes handicapées. Donc, le gouvernement va agir.
Au niveau de la Commission des partenaires du marché du travail, je les ai rencontrés. Vous savez que, quand on travaille en intégration à l'emploi, en maintien à l'emploi, on travaille avec les partenaires. Ils adhèrent à des stratégies et ensuite les portent à l'intérieur de leur association. L'intérêt de cet article, c'est que la Commission des partenaires du marché du travail est tout à fait d'accord avec cet article. Elle dit: Oui. Nous allons élaborer une stratégie. Nous allons voir nous-mêmes, nous, les membres du marché du travail, à ce qu'il y ait intégration des personnes handicapées. C'est un signal que nous avons là que la société elle-même dit: Oui. Ça devient notre entreprise, cette intégration à l'emploi. Donc, ce signal, je vous dis: Il y a adhésion des partenaires du marché du travail dedans, et ce sont des gens qui travaillent avec des cibles de résultat à l'interne. Il y avait un suivi très près des dossiers. Annuellement, il y a des groupes de travail qui amènent des résultats, qui amènent des cibles. Ils se fixent des cibles et voient eux-mêmes à ce qu'elles soient atteintes. Une question, donc, sur l'emploi. Je vous dis... je vais en plus prendre ce que vous avez dit et voir à ce qu'il y ait un résultat.
Vous avez abordé d'autres choses. Vous avez dit à propos de la définition de personnes handicapées: Il faut éviter la confusion tout en évitant l'autre danger à l'autre extrême qui est le danger de restriction. Pouvez-vous, M. le président, nous parler un peu de cette définition des personnes handicapées? Il y a des mémoires qui nous proposent d'intégrer les gens qui vivent la santé mentale. Il y a des mémoires qui nous disent qu'il faudrait aller voir le handicap, même dans le passé, qu'il y ait une accessibilité à des programmes quand quelqu'un a vécu un handicap dans le passé. J'aimerais avoir vos commentaires sur cette définition.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Marois.
M. Marois (Pierre): Bien, merci. Si vous permettez, tout d'abord, un petit... un simple ajout au complément lorsque vous évoquez la concertation des partenaires du marché du travail. Concernant, entre autres, les obligations contractuelles, nous proposons d'en élargir la liste des entreprises concernées. Et un des ? si vous regardez, vous le verrez au bas de la page 10 ? un des moyens privilégiés justement que nous suggérons, pour éviter le piège du strict volontariat dans ces programmes-là, est de resserrer les objectifs fixés puis d'établir des mécanismes de surveillance. Parmi les pistes possibles, celle qui est relative à des ententes négociées par secteur sur les résultats à atteindre pourrait être prometteuse, parce qu'elle permet des discussions larges, également ciblées, mais ciblées entre l'ensemble des partenaires concernés, c'est-à-dire les employeurs, les syndicats, les comités sectoriels. Évidemment, ceux et celles qui sont les porte-parole des premières personnes concernées. Donc, ça, pour nous, c'est clair.
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(10 h 10)
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Je vais faire un premier commentaire et après Me Bosset va enchaîner, parce que c'est une question importante que vous posez. Il y a effectivement... On comprend les objectifs, hein, j'ai pris la peine de les rappeler et de dire que nous les partageons, les objectifs fondamentaux qui sont recherchés à la fois par le gouvernement, par le législateur ? je n'en doute pas ? par les groupes concernés dans les échanges et les débats. Au fond, les gens demandent que leur soit reconnu dans les faits, en levant des obstacles que nous érigeons nous-mêmes comme société, que nous avons érigés et que nous continuons à ériger sans s'en rendre compte... On pourrait parler du transport en commun, on pourrait parler du train de banlieue, des gens qui disent: Bien non, on ne va pas commencer à faire quelque chose d'adapté sur la nouvelle branche du train de banlieue, parce que, quand tu vas arriver à la gare, ce n'est pas ajusté à la gare. Mais, si on ne commence jamais quelque part, on ne commencera jamais, ça veut dire qu'on ne le fera jamais. En d'autres termes, il y a des mentalités, des sensibilités, il y a aussi des préjugés et de l'ignorance, il faut dire les choses telles qu'elles sont.
Et, au fond, ce que les gens demandent, c'est le respect de leur droit fondamental à l'égalité prévu à l'article 10 de la Charte. Nous concluons toujours qu'il y a une discrimination systémique à l'égard des personnes handicapées. Cela nous amène justement aux notions. Il y a une... Comment je dirais? Dans le langage courant, quand on parle... On est porté, et on peut comprendre, sur le plan humain, sur le plan social, on est porté à mettre à peu près ensemble des mots comme «personne handicapée» ou «handicap», en vertu de la loi visant à assurer des droits aux personnes handicapées, à mettre ça dans le même chapeau que l'expression «handicap» utilisée à l'article 10 de la Charte. Or, cependant, quand on le transpose en termes juridiques, ce qui veut dire quand on veut exercer ses droits, il y a des nuances extrêmement importantes et il y a une confusion des concepts juridiques. D'abord, on le sait, certaines personnes demandent que, dans le cas de la Charte, que le handicap, en plus qu'on y ajoute ce qu'on appelle l'accommodement raisonnable, qu'on le précise dans la loi.
Nous comprenons l'objectif, mais nous disons attention, sur le plan juridique, il y a un danger épouvantable d'être en train de se tirer dans le pied. Ça nous a pris 15, 20 ans auprès des tribunaux pour faire reconnaître qu'était inhérent à l'article 10, quand il y a, par exemple, discrimination fondée sur le handicap, que le tribunal peut ordonner de prendre...
Le plus beau jugement, il vient d'être rendu au mois de janvier: une personne handicapée, avec un problème lombaire qui existait depuis déjà un certain temps ? je vous résume de façon carrée le jugement, il mériterait des nuances ? qui a été refusée à l'embauche sous prétexte de son handicap de problème lombaire. La Commission a pris fait et cause pour la personne, a plaidé devant le Tribunal des droits de la personne ? soit dit en passant, ça va prouver l'importance d'un tribunal aussi pointu et articulé que celui-là, qui est souvent discutée, est-ce qu'on le maintient ou pas, je ferme la parenthèse ? nous avons pris fait et cause. Le résultat net, c'est que, un, il a été décidé que la personne avait fait l'objet, avait été victime de discrimination fondée sur l'article 10, donc notamment le handicap. Il y a eu ordonnance ? ça, c'est une première, une sorte de première ? ordonnance de réintégrer la personne au travail et, comme c'est public, de lui verser les dommages matériels et moraux qu'elle a subis à la hauteur de 101 000 $ plus les intérêts au taux du ministère du Revenu sur la période depuis qu'on avait transmis nos mesures de redressement.
Alors, l'accommodement raisonnable, là, il est inhérent maintenant à l'article 10. Si on commence à tenter de définir l'«accommodement raisonnable», le danger quand on définit, c'est de limiter. Or, plus on évolue, plus il faut s'ajuster, plus l'accommodement raisonnable va prendre autant de formes que de natures de problèmes qui se présentent. Comment une définition va-t-elle pouvoir couvrir ça alors que maintenant c'est large?
Est-ce qu'on aurait pu prévoir, comme on vient de le gagner également, que le complexe Desjardins allait devoir installer des portes automatiques, semi-automatiques sur les quatre façades de l'immeuble, plus un ascenseur ? comment est-ce qu'on dit ça? ? ouvert, panoramique pour permettre aux personnes d'accéder aux différents basilaires? Imaginez un peu ce que ça a pu coûter. Mais ça a été fait. C'était un accommodement raisonnable. C'est inhérent, donc. Ça, pour nous, c'est clair en droit. Donc, on n'a pas touché à ça.
Enchaînant à nouveau pour peut-être mieux encore faire comprendre la différence entre la notion de handicap ou de personne handicapée dans la Loi sur les personnes handicapées et le handicap dans la Charte, Me Pierre Bosset, mais c'est vraiment une question de retour, au coeur d'une question fondamentale.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Me Bosset, je pense que vous vouliez compléter la réponse.
M. Bosset (Pierre): Oui. Pour comprendre justement tout ça, il faut faire un petit peu d'histoire. Il faut comprendre qu'en 1975, quand on a adopté la Charte, il n'y avait pas le motif «handicap», il n'y avait pas non plus le motif «personne handicapée». Il n'y avait rien sur ce plan-là. C'est quand on a adopté la Loi sur l'exercice des droits des personnes handicapées, en 1978, 1979, qu'on en a profité pour inclure dans la Charte les mêmes termes que dans la loi n° 9, c'est-à-dire les termes «personne handicapée». Ça se comprenait dans le contexte de la loi n° 9.
Ça a posé des problèmes à la Commission et aux personnes handicapées elles-mêmes pendant plusieurs années parce que l'interprétation que les tribunaux donnaient aux mots «personne handicapée» dans la Charte était à peu près la même que celle qu'on trouvait dans la loi. La définition qu'on trouvait dans la loi n° 9 était appliquée à la Charte, ce qui faisait que des personnes qui avaient des déficiences ou des incapacités relativement mineures n'étaient pas considérées ? passez-moi l'expression ? comme suffisamment handicapées pour invoquer la Charte. Bon.
Par la suite, nous, on a soulevé ces questions-là ici, en commission parlementaire, et de nombreux groupes l'ont fait aussi. Le législateur a fini par remplacer les termes «personne handicapée» dans la Charte par le terme «handicap». À partir de ce moment-là, nous, à la Commission, on a défendu une interprétation beaucoup plus large du motif handicap. Il nous a fallu 17 ans pour que, finalement, cette interprétation large soit reconnue par les tribunaux ? et quand je parle des tribunaux, je parle de la Cour suprême, donc le plus haut tribunal ? de sorte que maintenant le motif handicap dans la Charte comprend, par exemple, dans certains cas évidemment, l'obésité, le diabète, l'épilepsie, la vision monoculaire et même des anomalies à la colonne vertébrale, des maux de dos par exemple. Une large proportion de nos cas de handicap, nous, à la Commission, sont des cas qui sont reliés à des maux de dos qui ne sont pas nécessairement... qui ne donnent pas à une personne le statut de personne handicapée au sens de la loi n° 9 mais qui sont des handicaps au sens de la Charte, parce que c'est deux choses différentes depuis qu'on a modifié la Charte.
Je vous explique tout ça pour vous montrer que ça nous a pris 17 ans à peu près avant de réussir à faire valoir cette interprétation-là. Ce serait dommage que, par une modification à la loi, que ce soit la loi n° 9 ou la Charte, on compromette tous ces gains qui ont été acquis de haute lutte auprès des tribunaux par la Commission. Je pense que ceux qui y perdraient au change seraient les personnes handicapées et les autres personnes qui ne sont pas handicapées au sens de la loi n° 9 mais qui ont des handicaps au sens de la Charte, et ça, c'est beaucoup de monde. Il y a beaucoup de monde qui ont des maux de dos au Québec.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci. Mme la ministre, il vous resterait le temps d'un commentaire. Il reste une minute.
Mme Maltais: Je ne sais pas s'il y a des collègues qui voudraient introduire un commentaire.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non, ça va aller. C'est parce qu'un commentaire souvent en attire un autre. Allez-y, il reste une minute.
Mme Maltais: Alors, simplement vous remercier de votre dédication aux personnes handicapées et aux batailles que vous menez régulièrement pour faire avancer la situation des personnes vivant avec un handicap. J'ai écouté avec beaucoup d'attention, tant au niveau de l'intégration en emploi que de cette attention à non pas exclure mais inclure, ce qui est vraiment un des débats qui... Je pense que c'est au coeur de ce projet de loi actuellement. Merci.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je cède donc immédiatement la parole au député de Nelligan. M. le député.
M. Williams: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, M. Marois, Mme Garon et M. Carpentier, pour votre présentation. M. Marois, M. le président, nous avons eu, dans le passé, quelques discussions sur la clarté des tâches et des responsabilités et nous avons trouvé des compromis ensemble. Je voudrais vous entendre sur le projet de loi n° 155, sur cette question-là, la clarté du pouvoir d'agir. Et, selon vous, comme président de la Commission des droits de la personne, si on accepte le projet de loi tel quel, n° 155, est-ce que vous pensez que l'OPHQ est assez indépendant ? parce que vous avez parlé d'indépendance ? et est-ce qu'il a assez de pouvoir pour vraiment gérer ses responsabilités et insister pour que la loi soit respectée?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Marois.
n
(10 h 20)
n
M. Marois (Pierre): Sur les pouvoirs de l'Office, je vais, de notre point de vue, laisser Mme Garon répondre à votre question.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Garon.
Mme Garon (Muriel): Ce qui importe, pour la Commission, c'est que l'ensemble des objectifs qui sont fixés dans le projet de loi soient atteints. Le rôle de l'Office des personnes handicapées est extrêmement important puisqu'il s'agit d'un organisme de surveillance. La définition de structures qui permettront effectivement de réaliser chacun des mandats qui sont proposés par le projet de loi échappe bien sûr au domaine d'intervention de la Commission. La Commission souhaite que ces structures soient les plus efficaces possibles. Elle souhaite que l'Office des personnes handicapées soit le plus efficace possible, que les personnes handicapées y soient représentées de la façon la plus efficace pour transmettre leur message.
Maintenant, quant au choix des définitions précises de la répartition des responsabilités, c'est un terrain qui est plus de l'ordre du politique et sur lequel il serait peut-être un peu dangereux de s'aventurer plus avant.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Marois, vouliez-vous... Non, ça va?
M. Marois (Pierre): Non, c'est correct.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Nelligan.
M. Williams: Comme experts québécois sur la protection des droits, je voudrais vous entendre sur peut-être une suggestion politique mais légale que j'ai proposée hier. Moi, je pense, avec une loi aussi importante qu'on discute aujourd'hui pour les personnes handicapées, qu'on doit avoir une obligation de révision chaque cinq ans, de vérifier... comme nous avons dans quelques autres lois. Je sais que c'est une question quasi politique mais aussi légale. Je ne demande pas que toutes les lois aient une clause comme ça. Est-ce que la Commission a une opinion sur cette recommandation?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Marois.
M. Marois (Pierre): Oui. Non, la Commission a formellement... Vous savez que la Commission, lorsqu'elle vous présente des recommandations, des constats, des suggestions et même des demandes ? par exemple, celle qui s'adresse bien au Conseil du trésor, de l'indépendance financière de la Commission ? chaque fois, cela est décidé par les membres de la Commission, les commissaires que vous avez élus, les membres de l'Assemblée nationale. Bon. Donc, je vais me fonder sur les principes parce que, concernant le texte qui est là, non, il n'en a pas été fait mention comme tel.
Mais, dans d'autres lois, et c'est toujours la même approche de la Commission, si vous vous souvenez, par exemple, nos commentaires et remarques sur la Loi visant à lutter contre la pauvreté, sur celle concernant l'accès à l'information et d'autres de ce type-là, toujours nous croyons que lorsque ? et c'est pour ça qu'on a fait tantôt une recommandation qui n'était pas dans le mémoire concernant les rapports d'évaluation, de progression, d'état de situation ? ...que soit sérieusement regardée non seulement la possibilité... non seulement le pouvoir qui est prévu que le ministre remette des évaluations au gouvernement, mais que ça puisse être déposé à l'Assemblée nationale, donc toujours dans le but de faire circuler au maximum, le mieux possible, l'information qui peut l'être.
Deuxièmement, nous croyons que, dans ce type de loi... Mais, comme vous le dites, pas comme principe généralisé pour toutes les lois, mais dans des lois de nature fondamentale qui touchent des droits des citoyens, c'est une excellente pratique que celle qui peut prendre différentes formes, hein, certains l'appellent une clause crépusculaire; dans la loi sur l'accès à l'information, je ne suis pas certain qu'on puisse appeler ça un article crépusculaire.
Prenez le cas de l'équité salariale. Si ma mémoire m'est fidèle, il y a, de toute façon, une clause qui prévoit généralement aux cinq ans qu'un rapport très complet est déposé aux parlementaires et donc devient public et que les parlementaires, voire même des groupes, peuvent venir et commenter. Donc, dans ce sens-là, pour nous, plus l'information va circuler concernant les droits, plus les gens vont en être informés et plus nous allons ? ce n'est pas juste une question de gouvernement ou pas, c'est vraiment une problématique de société ? ...et plus l'ensemble de la société va mieux comprendre puis pouvoir progresser. En ce sens-là, la réponse est oui.
M. Williams: ...pour le oui.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Williams: Dans votre... Deux politiciens, hein, on peut prendre beaucoup de temps ensemble. Dans votre rapport annuel 2001, M. Marois, vous avez mentionné que «le système scolaire demeure largement fermé à l'intégration aux classes ordinaires des élèves qui présentent une déficience intellectuelle». Vous continuez: «Le système judiciaire est, à maints égards, mal adapté aux besoins des personnes handicapées. Enfin, elles demeurent particulièrement vulnérables à l'exploitation.»Une voix: ...
M. Williams: Et j'ai lu votre rapport complètement, comme chaque année. Mais sauf, dans le projet de loi n° 155, nous n'avons absolument rien sur ces questions-là. Est-ce que la Commission a quelque chose à dire? Et est-ce que vous avez des recommandations, comment on peut améliorer le projet de loi n° 155 pour compléter ces lacunes?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Marois, en quelques minutes.
M. Marois (Pierre): Mme la Présidente, M. le député, chose certaine, nous maintenons le constat que nous avons fait et l'affirmation qui est faite dans notre rapport. C'est une situation de faits. Et dès lors, j'irais jusqu'à dire que ça constitue une sorte de... une des formes de discrimination à l'égard d'un groupe de citoyens et citoyennes chez nous. Donc, des mesures doivent être prises. Est-ce que ça doit être dans la loi qui est devant nous, est-ce que ça doit être par la loi concernant l'instruction publique? C'est à voir. Est-ce que ça entrerait dans les fonctions de l'Office ou dans les politiques du ministère de l'Éducation? J'avoue qu'on n'a pas regardé...
M. le député, pour être très franc avec vous, là, au moment où nous nous parlons, nous n'avons pas regardé... on a des échanges assez régulièrement avec l'Office, par exemple, mais nous n'avons pas, à date, regardé où devrait se situer une obligation de mise en place de programmes ciblés mais avec toujours la même préoccupation, une obligation de résultat dans le temps. Mais on maintient que, oui, ça doit être fait. Est-ce que ça doit être fait là? Je ne sais pas si le président de l'Office a eu l'opportunité de regarder cette question-là, s'ils ont eu l'opportunité d'en discuter avec le ministère de l'Éducation aussi. Nous, à date, à ma connaissance, non.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, il reste une minute, M. le député.
M. Marois (Pierre): Si vous permettez, Mme Garon ajouterait juste une chose.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme Garon.
Mme Garon (Muriel): Une des difficultés qui est observée à ce sujet, c'est celle de l'utilisation effective des budgets qui sont censés être alloués à l'adaptation. Alors, dans le cas de l'intégration des enfants handicapés aux classes ordinaires donc par les commissions scolaires mais aussi par d'autres ministères, bon, la Commission ne s'est pas prononcée effectivement dans ce dossier-ci, mais elle a observé de façon récurrente qu'une transparence devrait être exigée pour que les budgets soient effectivement utilisés aux fins qui sont prévus par la loi et que, d'autre part, les politiques qui sont prévues par le gouvernement soient effectivement suivies de sorte qu'on n'ait pas des pratiques, comme on a avec les commissions scolaires, qui varient d'un milieu à l'autre où on laisse la latitude aux gens.
M. Williams: ...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Très, très rapidement, parce que votre temps est presque terminé.
M. Williams: Oui. Mais la loi n° 155 touche cette loi. Avec ça, on peut ajouter d'autres lois, là, ce n'est pas juste une loi ici, le gouvernement a voulu faire ça. Et, si l'OPHQ a voulu faire des commentaires, ils ont eu le droit, là, comme vous, de présenter un mémoire. Et pour une raison ou l'autre, il n'a pas présenté un mémoire. On peut aller plus loin sur ça plus tard.
Dernière question. Recommandation 10 sur l'accès à un édifice public. Moi, j'ai vu tout un changement depuis l'avant-projet de loi en octobre 1998, qui était, quelle coïncidence, juste déposé avant l'élection, le même timing de 155. Je ne veux pas nécessairement dire les commentaires sur les motifs de ça, là, mais j'ai vu un glissement, un glissement sévère, très, très dangereusement sur la question de clarté de droit entre les articles dans la loi, dans l'avant-projet de loi n° 155. Est-ce que la Commission a fait une comparaison entre les droits protégés dans l'avant-projet de loi, tel que proposé en 1998, et 155, tel que proposé aujourd'hui?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Marois, très rapidement. Le temps de l'opposition est déjà terminé...
n(10 h 30)nM. Marois (Pierre): Nous n'avons pas fait un examen, honnêtement, systématique de comparaison. Mais il y a une chose, par exemple, si vous revenez à notre recommandation 10, à partir des constats que nous avons faits, c'est pour ça que nous disons que, dans le cas de l'accès aux édifices publics et aux lieux de travail qui n'étaient pas assujettis au Code du bâtiment en 1976, la Commission recommande ? on ne peut pas dire plus que ça, là ? que le pouvoir réglementaire conféré au ministre du Travail soit transformé en obligation de faire un tel règlement et dans un délai... Nous, on pense deux ans pour donner une chance de le sortir, mais que ce soit, ça, mis dans la loi.
M. Williams: ...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non. Alors, Mme la députée de Joliette...
M. Marois (Pierre): Pour ceux et celles qui seront là, selon le choix des citoyens, dans le respect de leurs droits fondamentaux.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): S'il vous plaît. Mme la députée, il vous reste deux minutes et demie, à peu près. Très rapidement.
Mme Lespérance: Alors, je vais faire rapidement. Merci.
M. Marois (Pierre): Je vous en prie.
Mme Lespérance: Ça a été très intéressant de pouvoir vous entendre. Je profiterais, pendant que j'ai un collègue devant moi... J'en profiterais pour faire une remarque concernant l'intégration à l'emploi des personnes handicapées. Alors, on a de plus en plus de petites et moyennes entreprises qui ont la volonté de faire de l'intégration en emploi de personnes handicapées, et ce qu'on me dit, c'est que ce serait intéressant de pouvoir simplifier les structures pour que ce soit plus facile d'engager ces gens-là et, une fois qu'on les a engagés, il faudrait simplifier aussi la paperasse que ces employeurs-là doivent compléter pour être capable de garder ces employés-là qui, on le sait, souvent, ont un handicap de non-productivité aussi, donc ils ont souvent une subvention rattachée. C'est une petite remarque que, dans les chambres de commerce, on entend très, très, très souvent.
Ma deuxième remarque est concernant l'arrimage. On a une population qui est de plus en plus vieillissante, et je ne sais pas si vous êtes de mon avis, mais, au niveau fiscal, ces gens-là qui ont des handicaps, qui sont des personnes handicapées et puis qui ont droit à des déductions fiscales importantes ont énormément de misère, avec la définition actuelle, à se faire reconnaître des handicaps pour avoir droit à leurs déductions fiscales. Est-ce que vous êtes confrontés ou concernés avec ce problème-là?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Marois.
M. Marois (Pierre): Merci, Mme la Présidente. La Commission comme telle, à ma connaissance, nous n'avons pas eu de cas de cette nature, de ce type-là qui nous a été présenté. Je comprends que vous essayez de confronter puis regarder les définitions de «personne handicapée» même dans le nouveau projet de loi par rapport, souvent, à d'autres définitions qu'on retrouve dans les complexes lois, réglementations de nature fiscale. On n'a pas fait l'examen de cette question-là, mais c'est une question qui est tout à fait pertinente, on l'enregistre. Et puis, si ça ne s'est pas fait, ce n'est pas une raison pour ne pas le faire. Et, pour rajouter, alors, ça, on prend note. Nous aussi, hein, des fois, il y a des choses qu'il faut qu'on améliore, alors on prend note, on va regarder ça.
Et il y a une chose que... Un simple commentaire, à titre de président, de ce qu'on voit à la Commission en général, dans la mesure où les papiers, les chars de papiers peuvent être ramassés, dans la mesure où on peut coordonner, dans la mesure où recoupant ce que vous dites avec ce que M. le député dont j'oublie toujours le... de Nelligan, le recoupant avec ce que M. le député a dit, il faut qu'il y ait une solide concertation entre les différents ministères qui vont être impliqués dans toute cette opération-là, et je me demande à la réflexion, mais je n'ai pas consulté les commissaires, je n'ai même pas consulté mes collègues, réflexion, pure réflexion, point d'interrogation, je vais m'en tirer comme ça... Mais, comme ça vient, je pense qu'il faut le dire, je me demande s'il n'y aurait pas lieu de regarder l'opportunité de mettre dans la loi ou dans un règlement découlant de la loi que tous les ministres et organismes qui touchent à ça aient l'obligation de soumettre chacun leur bout de rapport à l'Office pour que quelqu'un ait constamment comme une sorte d'observatoire, qu'il voie ce qui se passe réellement sur le terrain, une sorte d'agent de cueillette de l'information et puis, le cas échéant, qu'il nous suggère des voies et des pistes d'amélioration. Excusez-moi, madame, si j'ai pris un petit peu trop de temps.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): On a débordé un peu, mais...
M. Marois (Pierre): Vos questions sont tellement intéressantes.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...c'est toujours difficile de régler le temps ici, parce que souvent les conversations sont vraiment intéressantes effectivement. M. Marois, Mme Garon, M. Bosset, merci pour votre participation aux travaux de cette commission. Je vais suspendre quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 10 h 36)
(Reprise à 10 h 40)
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, s'il vous plaît, la commission va donc poursuivre. Nous accueillons donc maintenant la Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec.
Je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire. Comme au groupe précédent, je vous demanderais de parler doucement compte tenu que nous avons une interprète en langage gestuel ici, et il faut qu'elle puisse suivre les travaux.
Avant que vous commenciez à présenter votre mémoire, je demanderais à tous ceux qui ont des appareils, des téléphones cellulaires de bien vouloir les fermer, s'il vous plaît, pour ne pas qu'on soit incommodé par les sonneries qui pourraient se faire entendre. Alors, je demanderais à la personne, au porte-parole de bien vouloir se présenter et de nous présenter les gens qui l'accompagnent.
Confédération des organismes de personnes
handicapées du Québec (COPHAN)
M. Lavigne (Richard): Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Mon nom, c'est Richard Lavigne. Je suis le président de la Confédération des organismes de personnes handicapées, pour les fins des discussions, nommée la COPHAN. Immédiatement, à ma gauche, je vous présente Mme Mercédes Benegbi, qui est vice-présidente aux affaires externes de la COPHAN; à l'extrême droite, M. Grenier, Jean-Marie, qui est vice-président aux affaires internes; et, immédiatement, à ma droite, Mme Chloé Serradori, qui est notre directrice générale.
On s'est séparé un peu la job, histoire de ne pas trop vous ennuyer si c'est toujours sur le même ton. Alors, je demanderais à Mercédes de commencer. Ensuite, ce sera M. Grenier, Mme Serradori et, s'il reste du temps, ce sera mon tour en dernier.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Benegbi.
Mme Benegbi (Mercédes): Alors, je vais vous présenter ce qu'est la COPHAN. La COPHAN, pour et par ses membres, est un organisme à but non lucratif, incorporé depuis 1985, qui milite pour la défense des droits et la promotion des intérêts des personnes ayant des limitations fonctionnelles, de tous âges, et de leurs proches. Elle regroupe 34 organismes nationaux de personnes ayant des limitations fonctionnelles ayant eux-mêmes des membres dans la majorité des régions du Québec. Elle rejoint toutes les limitations fonctionnelles: motrices, organiques, neurologiques, troubles d'apprentissage, intellectuelles, visuelles, auditives, parole et langage et santé mentale.
Le mandat de la COPHAN est de favoriser la concertation entre ses membres, d'établir une collaboration avec le milieu associatif et les partenaires, de représenter et de défendre les revendications du mouvement associatif des personnes ayant des limitations fonctionnelles auprès des instances décisionnelles. Grâce à la collaboration, à la consultation et à la concertation de ses membres, la COPHAN s'implique et intervient aux niveaux fédéral et provincial dans le vaste domaine des politiques sociales: la santé et les services sociaux, l'éducation, le transport, le travail, le développement de la main-d'oeuvre, la justice, la sécurité du revenu, l'aide juridique, la fiscalité, la culture, les loisirs, etc. La COPHAN offre du soutien technique, de l'information et de la formation à ses membres. Les personnes qui vivent quotidiennement les difficultés sont les véritables experts. Leurs compétences, leurs expériences et leurs recommandations doivent influencer les décisions politiques. La COPHAN n'existe que par ses membres, et les actions à privilégier touchent tous les aspects de la vie.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. M. Grenier.
M. Grenier (Jean-Marie): Merci, Mme la Présidente. Donc, moi, comme vous pouvez voir, j'ai une limitation au niveau de la parole. Mais vous me comprenez quand même? Ça va?
Des voix: Oui.
M. Grenier (Jean-Marie): Donc, d'entrée de jeu, j'aimerais dire quand même que, comme Mme Benegbi vient de vous expliquer, la COPHAN a quand même plusieurs associations membres qui, eux autres mêmes, ont plusieurs membres qui sont... plusieurs personnes handicapées. Donc, on a tenu plusieurs assemblées générales depuis un an... plus d'un an, sur le sujet qui nous concerne ce matin, puis ce qui nous a frappés d'emblée, parce que ça revient souvent sur le sujet, ça, c'est qu'on se dit: Comment ça se fait qu'il faut, pour les personnes handicapées, qu'il y ait une loi spécifique qui assure l'exercice des droits des personnes handicapées, alors qu'il n'y a pas de loi pour les personnes non handicapées? Il n'y a pas de loi nécessairement pour les femmes ou les communautés ethnoculturelles. Donc, on se demandait: Pourquoi il faut absolument faire une loi vraiment sur le sujet?
Puis, en même temps, ce qu'on se demandait... Ce qu'on trouvait un peu particulier, c'est qu'on se disait: Comment ça se fait que le gouvernement a donné le mandat à l'OPHQ de réviser lui-même sa propre loi qui le concerne? Sans présumer quoi que ce soit, ça peut ressembler un peu peut-être à un conflit en quelque part, donc... Non, je présume pas nécessairement, là.
Par la suite, donc, vous avez dans le mémoire des statistiques. Je vais quand même vous faire grâce de toutes les lire, mais, quand même, ce que je veux porter à votre attention, c'est qu'il y a quand même une donnée que... Beaucoup de personnes ne sont pas au courant qu'il y a tant de personnes handicapées. ...on se demandait comment faire pour devenir... pour être vraiment reconnu comme personne handicapée. Je peux vous dire, lorsqu'on l'est, on n'a pas besoin de le faire... nécessairement revendiquer, mais je peux comprendre, là.
Et on dit que, selon l'Enquête québécoise sur les limitations d'activités de 1998, il y a environ... plus de 1 086 000 personnes handicapées. Je me souviens, il y a quelques années, on demandait aux gens de la rue: Comment de personnes handicapées vous pensez qu'il y a au Québec? Il y en a qui disaient 4 000, 2 000. Vous voyez quand même, là, on est plus. On regarde, près de 15 % de la population vivant en ménage privé qui ont des limitations fonctionnelles. Ça met un certain pouvoir en quelque part.
Puis, par la suite, donc, je vais vous parler un peu du contexte historique. Donc la loi, là, elle est... Le gouvernement a adopté la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées en 1978, donc il y a plus de 25 ans, ce qui m'amène à vous rappeler ? un petit rappel rapide, là ? que depuis 1997, donc depuis plus de cinq ans, il y a eu le projet de loi, en 1997, qui a été mis en veilleuse, et l'avant-projet de loi, en 2000, qui a été tabletté, et le livre blanc, en 2001, qui a été également tabletté. Il y a eu la tournée d'écoute qui a essayé de s'amorcer l'an passé et que vous savez qu'on a boycotté le mouvement associatif.
Donc, par rapport à tout ça, on peut dire qu'il y a une certaine ligne directrice... directive, plutôt, qui se dégage, c'est qu'on a vraiment l'impression qu'on vit, depuis plusieurs années, un certain recul. Au lieu d'avancer, on a vraiment l'impression de reculer complètement, puis ça, malgré les chartes ? on en a parlé tantôt, M. Marois en a parlé ? malgré les chartes canadienne et québécoise, malgré des décisions de la Cour suprême du Canada, les outils internationaux et malgré les politiques, les lois, les règlements adoptés... souvent adoptés par l'État. Puis ça, c'est sûr, là.
Puis là il y a plusieurs exemples. On en a un peu parlé tantôt, un exemple, peut-être, qui nous concerne un peu tout le monde, le fameux virage à droite sur feu rouge, vous savez vraiment notre position. Et, même, on dit: La sécurité de la personne passe même après la fausse idée de la fluidité de la circulation. Remarquez, ça, il y a bien du monde qui peut penser le contraire, là. Mais, seulement parler de l'accessibilité du métro, ça fait des années qu'on parle qu'il faudrait le rendre accessible. Ça fait un an qu'on en parle, on attend toujours l'annonce de l'adaptation du métro, le rendre accessible.
Par après, je veux donc vous parler plus... On a parlé beaucoup tantôt de l'intégration. Nous, on est rendu maintenant qu'on parle plus d'inclusion. Il y a une nuance, qui est assez intéressante, que je pense qu'il vaut la peine de faire. Vous savez, l'intégration, ça consiste à introduire un nouvel individu ou un nouveau groupe à une collectivité. Puis la collectivité, habituellement, elle est déjà formée. Donc, on s'intègre à la collectivité, alors que l'inclusion, donc, tu fais partie déjà de la collectivité. Il y a vraiment une différence entre les deux. C'est pour ça, maintenant, on parle plus d'inclusion que d'intégration.
Puis, par rapport maintenant au chapitre I, donc aux objets de la loi, donc nous, on... On dit dans la loi que ça vise à assurer l'exercice des droits, mais nous... C'est contrairement à notre nom... On aime mieux dire des personnes ayant des limitations fonctionnelles ? je sais bien que c'est bien plus long, là, mais on l'aime mieux que «personne handicapée» ? et favoriser leur inclusion pleine et entière plutôt que leur intégration à la société, au même titre que tous les citoyens, en prévoyant diverses mesures visant les personnes, donc, ayant des limitations fonctionnelles, leurs familles et leur milieu de vie ainsi que le développement et l'organisation de ressources à leur égard.
Toutefois, ce qu'on rajoute, c'est... On aimerait que cette loi, que ça soit une loi-cadre qui soit, premièrement, sous la responsabilité politique du premier ministre du Québec qui... Cela, ça mettrait en oeuvre, donc, une véritable stratégie gouvernementale à l'égard des personnes ayant des limitations fonctionnelles et de leurs familles, leurs proches, basée, entre autres, sur les principes suivants, c'est-à-dire, donc, l'inclusion pleine et entière, la participation sociale, le droit à l'égalité, le droit à l'accommodement ? tout le monde parle de privilèges, là, c'est plus un droit; comme bien du monde, c'est des droits qu'on demande ? le droit à l'accommodement ? pas nécessairement raisonnable, l'accommodement ? et à son application ainsi que la reconnaissance et la pleine compensation des coûts liés aux incapacités. C'est drôle, mais ça coûte beaucoup plus cher d'être handicapé à cause des limitations qu'on peut avoir. C'est sûr, là.
n(10 h 50)n Deuxièmement, de s'assurer que les 15 orientations qu'on trouve déjà dans la loi... À part... égale en 1985, donc que ces 15 orientations là soient actualisées dans la loi. C'est toujours encore valable ce qui a été dit en 1985, là. Je vous ferai grâce de toutes les lire, bien sûr.
Troisièmement... Puis ça, c'est important, puis je suis sûr que je ne vous apprends rien en disant que c'est très important qu'une loi ait une clause d'impact. Ça fait toute la différence du monde quand une loi a une clause d'impact, parce que, dans ce sens-là, c'est que toute politique, toute loi ou tout règlement adoptés par le gouvernement et par toute instance, qu'il soit régional, municipal ou local, ainsi que tout service public offert, tout programme, tout guide, toute directive appliqués par le gouvernement et ces mêmes instances, doivent être examinés à la lumière de leur effet sur l'inclusion pleine et entière et le droit à l'égalité des personnes ayant des limitations fonctionnelles et sur les écarts. Donc, cette clause doit permettre de contrer toute forme d'exclusion systémique et faire en sorte que les décisions de l'État ne puissent aller à l'encontre des fins poursuivies par cette dite loi-là.
Maintenant, tous les autres items qui suivent, donc qu'on appelle d'entreprises adaptées, tout l'OPHQ ou l'instance que, nous, on va vous parler tantôt, ainsi que les organismes de promotion seront abordés un petit peu plus tard... Bien, un peu plus tard, dans les quelques minutes qui suivent, dans la présentation quand même.
Donc, maintenant, je laisse la parole à notre directrice générale qui va un peu plus défricher la définition de «personne handicapée». Ce n'est pas une mince affaire, mais ça a de l'allure, ce qu'on vous propose.
Le Président (M. Labbé): Merci, M. Grenier. Alors, je cède maintenant la parole à Mme Serradori.
Mme Serradori (Chloé): Merci. On va essayer de vous expliquer très, très, très brièvement notre position sur la définition concernant les personnes qui ont des limitations fonctionnelles. Tout d'abord, on vous a demandé à qui va servir cette définition. Est-ce qu'on pense aux personnes qui vont être assujetties par la loi? Est-ce qu'on pense à réduire l'accès des services, des programmes ou c'est vraiment... ça va servir aux personnes qui ont des limitations fonctionnelles?
Alors, nous, vous savez, Mme Benegbi vous a dit qu'on représentait toutes les limitations fonctionnelles, et on a passé à peu près 10 heures, toutes les associations ensemble, à essayer de faire une définition inclusive. Je vous rappelle qu'il fallait que cette définition corresponde aux personnes qui ont des limitations fonctionnelles motrices, organiques, visuelles, auditives, des limitations au niveau de la parole et du langage, des troubles d'apprentissage aussi, des personnes qui vivent ou qui ont vécu un problème de santé mentale. Alors, on a eu beaucoup de plaisir à discuter et à essayer d'avoir une définition inclusive.
Par rapport à la définition qui avait été proposée par l'Office des personnes handicapées dans ce projet de loi, la première chose qu'on remarque, c'est que d'abord «personne handicapée»... Si on veut correspondre au processus de production du handicap, déjà appeler «personne handicapée», ça ne marche pas parce que le handicap naît de l'interaction entre la déficience de la personne, et ses limitations fonctionnelles, et l'environnement, donc... Aussi, tout à l'heure, Me Marois parlait des difficultés qu'il y avait par rapport à la Charte et à la définition du handicap. Donc, nous, la proposition qu'on fait depuis longtemps, c'est de parler de personne ayant des limitations fonctionnelles.
Au niveau de la déficience, là aussi ça a été problématique, parce qu'il y a certaines personnes qui se reconnaissent ayant une déficience, mais il y a une majorité aussi des personnes qu'on représente qui sont les personnes qui vivent ou qui ont vécu avec un problème de santé mentale pour qui c'est complètement inadapté, et cette définition les exclut. Donc, c'est pour ça que... Vous savez que les diagnostics sont basés sur des études de comportement et non pas sur, vraiment, la physiologie. Donc, on voulait respecter aussi les personnes qui ont des limitations fonctionnelles et les personnes qui vivent ou qui ont vécu un problème de santé mentale.
L'autre problème qui a été soulevé, c'était au niveau des adjectifs «significative» et «persistante». Toute une population de personnes qui ont des limitations cycliques ? et on pense, par exemple, à des personnes qui vivent avec la sclérose en plaques ou à d'autres personnes qui vivent avec la dystrophie musculaire ? il y a vraiment des périodes de rémission, et donc ça ne correspondait pas.
L'autre chose aussi, on pensait «personne ayant des incapacités», mais «incapacités», pour M. et Mme Tout-le-monde, ça veut dire incapable. Donc, on ne souhaitait pas non plus employer ce terme-là.
Alors, finalement, on s'est dit: Ça fait des années, et des années, et des années qu'il y a un groupe qui s'appelle RIPPH et qui travaille sur le processus de production du handicap et qui a défini tous les concepts. Nous, on a essayé de proposer une définition inclusive qui se lit comme suit, non pas «personne handicapée», mais «personne ayant une limitation fonctionnelle»: Toute personne ayant une déficience qui entraîne ou risque d'entraîner une incapacité sévère et persistante, incluant cyclique ? ça, ça correspond pour toutes les personnes qui vivent avec une déficience ? ou toute personne ayant vécu ou vivant avec des problèmes de santé mentale, qui vit ou est susceptible de vivre des situations de handicap, ayant pour effet de réduire leur pleine participation sociale et citoyenne.
Alors, l'autre défi, c'est qu'on nous a expliqué, parce qu'on n'est pas forcément des experts et des avocats... C'est qu'on ne pouvait pas utiliser les mots qui étaient dans d'autres lois ou etc. Mais nous, nous pensons que le Québec est assez proactif et qu'il y a déjà eu des changements qui ont été faits pour d'autres composantes de la société et qu'il serait temps que ce soit fait pour les personnes qui ont des limitations fonctionnelles.
Le Président (M. Labbé): Alors, merci, madame. Je cède maintenant la parole à M. Lavigne. M. Lavigne.
M. Lavigne (Richard): Oui, M. le Président. Ce qu'on constate de plus en plus, c'est que je pense qu'on doit quand même saluer les efforts qui se font pour soutenir les personnes handicapées ou les personnes qui ont des limitations fonctionnelles ainsi que leurs familles et leurs proches dans leur processus de participation citoyenne. Ce dont on se rend compte de plus en plus, malheureusement, c'est que l'appareil gouvernemental étant tellement complexe, souvent la main droite ne comprend pas ce que la main gauche tente de faire. Par exemple ? et je le souligne ? notre grande appréciation que le ministère de l'Emploi se responsabilise lui-même à la question de l'emploi et de la formation des personnes qui ont des limitations fonctionnelles. C'est un grand pas. On ne confie plus aux autres notre job, on la fait nous-mêmes.
Cependant, pour l'emploi, on aura beau avoir les meilleurs programmes d'emploi, de subvention, d'accommodement, d'adaptation, mais, si la personne n'a pas de transport, si elle n'a pas de maintien à domicile, ça ne donnera rien. Nous, ce qu'on suggère, c'est que le gouvernement se dote d'une instance directement reliée... Bon, on parle soit au premier ministre, au Conseil des ministres, à l'Assemblée nationale ou encore à un ministère à vocation plurisectorielle, si on peut dire, multisectorielle, que cette instance-là, donc, soit... que le gouvernement, donc, et cette instance-là travaillent ensemble pour développer une réelle stratégie qui implique tout le monde.
Que ce soit clair, là, on n'a rien contre l'Office, là. J'entends déjà des gens le dire, on se l'est fait dire... On n'a rien contre l'Office, sauf qu'on se rend compte qu'un Office qui relève d'un ministère x, la Santé, souvent cet Office ne peut, pour toutes sortes de raisons... ne peut influencer. Ce n'est pas qu'ils ne veulent pas, ils ne peuvent pas. Nous, ce qu'on veut, c'est quelque chose qui est capable de rayonner sur l'ensemble de l'appareil, quelque chose qui est représentatif des personnes handicapées. Je crois que le gouvernement du Québec, lorsqu'il consulte les autochtones, bien il parle aux autochtones, hein, je pense? Il ne parle pas aux intervenants des autochtones, il parle aux autochtones d'abord. Je ne dis pas qu'il ne parle pas aux autres, mais des représentants des autochtones, ce ne sont pas nous, mais ce sont eux-mêmes.
n(11 heures)n Alors, je pense que les personnes handicapées sont très bien placées non pas pour identifier seulement des problèmes, mais pour identifier des solutions. Un des exemples, c'est ce que la Commission des partenaires du marché du travail a fait en 1999 lorsqu'ils ont adopté leur politique. Bien, cette politique-là a été adoptée à la suite de travaux sur lesquels on a été impliqué directement, le milieu associatif, et je pense qu'on a été capable de contribuer comme des gens responsables.
Alors, ça, c'est très important qu'on comprenne le sens de notre réclamation. Ce n'est pas diminuer ce qui existe, c'est de se donner, je pense, après 25 ans, une étape de plus vers l'inclusion. Comme ça, le gouvernement et l'ensemble de nos élus seraient tenus responsables, chacun de leur côté, sans nécessairement dire: Ah, nous, on envoie ça à l'Office, on va demander à l'Office; bien, que l'Office s'arrange avec ça. On se le fait dire. Mais l'Office ne peut pas tout régler, parce que lui-même ne peut pas influencer le ministre des Transports. Il peut toujours lui parler, mais ce n'est pas lui... C'est loin d'être le patron du ministre des Transports, je ne pense pas en tout cas, à moins que je ne comprenne pas comment ça fonctionne à l'Office.
Le Président (M. Labbé): Alors, M. Lavigne, si vous permettez, malheureusement... le temps est malheureusement écoulé. Alors, je ne sais pas s'il y avait une petite phrase supplémentaire qu'on peut vous accorder, rapidement.
M. Lavigne (Richard): Avant les questions, ce qu'on aimerait dire, c'est qu'il est très important que l'État considère que les 15 % de ses citoyens qui présentent des limitations fonctionnelles aspirent à autre chose qu'un statut de bénéficiaire, d'assisté. On veut, dans la mesure de nos capacités, avec le support de l'État, comme l'État le fait pour d'autres groupes de citoyens, participer, au même titre que tout le monde, et on veut que le gouvernement du Québec se donne un outil pour lui-même rendre des comptes aux citoyens, pour être imputable lui-même, et non pas de confier à un organisme qui ne peut pas toujours avoir les leviers. On veut que le gouvernement prenne ses responsabilités comme il le fait pour d'autres citoyens.
Le Président (M. Labbé): Merci, M. Lavigne, de votre présentation, ainsi qu'à votre équipe. Alors, sans plus tarder, je cède maintenant la parole à la ministre déléguée à l'Emploi. Mme la ministre.
Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors, M. Lavigne, j'espère que vous n'êtes pas trop étonné d'entendre ma présence ce matin...
M. Lavigne (Richard): Je suis très heureux.
Mme Maltais: Je suis très heureuse, moi aussi, très heureuse de vous revoir, vous le savez. Et je vous fais les salutations de mon collègue Roger Bertrand, qui a eu vraiment un problème de force majeure ce matin, il est désolé de ne pas être là, mais il vous assure de sa disponibilité et de son écoute. Je lui transmettrai d'ailleurs le résultat des échanges que nous avons ce matin.
Je salue la façon dont vous... Évidemment, comme ministre déléguée à l'Emploi, je salue la façon dont vous avez bien compris, je pense, le sens de notre intervention à l'emploi qui est: Nous voulons nous prendre en main et nous voulons que le milieu du travail, le marché du travail, les partenaires eux-mêmes prennent en main l'intégration des personnes vivant avec des limitations fonctionnelles.
Vous savez, vous nous parlez du rôle de l'Office. Bien sûr, il y a une différence entre l'Office et les ministères, mais ça permet parfois la complémentarité. Si on était pareil, on ne ferait pas le même travail. Et je vous dirais là-dessus que l'Office sensibilise et force l'action et que nous avons eu un long dialogue pour arriver à cette prise en charge, prise en main de l'emploi, par le ministère de l'Emploi, de l'intégration à l'emploi. Ce dialogue existe à d'autres niveaux aussi. Je sais qu'au Conseil du trésor on va faire des actions dont, je pense, vous allez être satisfait. Vous allez voir que les ministères ont envie de voir à l'intégration des personnes handicapées, parce que je pense qu'on croit profondément à l'importance de la pleine participation sociale de chaque individu. Pour qu'une société soit intéressante, elle doit permettre la participation de chaque individu.
Vous parlez du transport aussi. Vous savez, à peu près tous les Québécois et toutes les Québécoises actuellement, sur tout le territoire, nous parlent du problème du transport lié à l'emploi. Je comprends bien qu'il y a une couche d'obstacles supplémentaires quand on est une personne vivant avec une limitation fonctionnelle, effectivement, et, de ce côté-là, on va aussi... On entreprend des dialogues avec le ministère des Transports, dont le dialogue sur le transport adapté dans toutes les régions du Québec, actuellement, à travers nos journées régionales de la main-d'oeuvre. Donc, oui, il faut que les ministères forcent l'action en intégration, vous avez raison.
Vous avez entendu probablement que je dis «personne avec des limitations fonctionnelles». J'ai déjà eu une conversation fort intéressante avec vous, M. Lavigne, où vous m'expliquiez votre vision de la différence entre la personne vivant un handicap et votre vision qui est que c'est l'environnement finalement qui est un handicap à la personne. Je m'en souviens très bien. J'ai souvent fait référence à cela. Ce que vous proposez comme définition de «personne handicapée» dans le texte du projet de loi est beaucoup plus large. Entre autres, vous dites, et j'ai noté la phrase «personnes qui vivent ou qui ont vécu avec un handicap». Il y a des gens qui nous disent... bon, qui sont contre le fait d'introduire les gens qui vivent avec une déficience intellectuelle légère, la santé mentale est aussi un débat. J'aimerais vous entendre sur la définition. Pourquoi voulez-vous embrasser si large?
Le Président (M. Labbé): Alors, M. Lavigne.
M. Lavigne (Richard): Je vais commencer, peut-être Mme Serradori pourra continuer, parce que c'est elle l'experte, en tout cas. Nous, ce qu'on dit, c'est que l'objectif d'une loi, c'est de répondre à des attentes et aspirations de ceux qui en ont besoin. Ça dépend de quel sens on le prend. Et, nous, on dit que quelqu'un qui a eu des problèmes qui ont causé des incapacités, qui ont suscité l'apparition de situation de handicap, peut-être qu'il a besoin d'une intervention, qui ne sont pas les mêmes, parce que toutes les personnes handicapées ? vous m'excuserez le terme ? n'ont pas accès nécessairement à tous les mêmes programmes et services, c'est selon leurs besoins. Il n'y a personne qui parle ici d'un gros kit, là, pour tout le monde. Je pense qu'il faut qu'on réfère à une personne qui a un besoin lié à ses... avec des limitations fonctionnelles présentes, ou potentielles, ou passées qui ont encore des incidences. Moi, je pense que c'est ça, on va répondre aux besoins de tout le monde.
Maintenant, si on veut faire une définition pour resserrer l'accès à des programmes, moi, je pense qu'on passe à côté de la population dite handicapée. Sur les 15 % du Québec, il y en aura peut-être, si on exclut les déficiences légères, comme on dit, là... Mais une déficience intellectuelle légère, si on ne s'en occupe pas là, ça va se traduire comment, ça, plus tard? Ça va se traduire par une dépendance accrue à l'État, statut de bénéficiaire, d'assisté, si on ne lui permet pas d'accéder à des programmes réservés aux personnes handicapées à la mesure de ses besoins, attentes, et de sa famille et de ses proches. Moi, je pense que c'est ça.
Il faut arrêter de voir cette espèce de vision unique de ce que c'est qu'une personne handicapée. Il y en a presque autant de sortes qu'il y a de personnes. Chacun compose avec ses limitations comme il peut et il a besoin d'assistance ou d'accommodement pour se réaliser. Et je pense que ce n'est pas la définition qui va faire en sorte que la personne va ou ne pourra pas avoir des services, c'est ce qui va venir avec l'accès à des programmes et des services. On aura beau avoir la meilleure définition la plus large possible, si on ne fait pas ensuite une réelle stratégie globale gouvernementale pour soutenir tout ce beau monde, bien, dans 25 ans, on va encore reparler de tout ça. C'est un petit peu ce que j'aurais à dire à ce moment-ci.
Le Président (M. Labbé): D'accord. Peut-être en complément, Mme Serradori.
Mme Serradori (Chloé): Bien, il y a deux choses. La première chose, c'est qu'on suit la définition du processus de production du handicap et aussi on a essayé d'intégrer les différents concepts qui sont sortis de la Cour suprême. Tout à l'heure, Me Marois vous parlait de la cause Troilo-Mercier avec le handicap présumé. Donc, il faut aussi qu'on suive cette actualité-là.
Et l'autre chose aussi, c'est que, dans notre définition, on parle de situation de handicap. Ce n'est pas parce que demain je me casse le petit doigt que je vais avoir accès à tous les services. Il faut que les personnes aient une limitation fonctionnelle ou il faut que les personnes vivent, pour la portion de phrase «vivant ou ayant vécu un problème de santé mentale»... C'est la définition gouvernementale qui est dans la politique de santé mentale, donc c'est vraiment celle qui a été choisie. Et il faut que la personne rencontre des situations de handicap. Et on définit aussi ce que sont les situations de handicap.
Donc, nous, ce qu'on veut, c'est vraiment l'inclusion. Et on ne veut pas, parmi nous, être capables de dire: Ah! bien, toi, tu es assez handicapé, puis, toi, tu n'es pas assez handicapé, puis, toi, tu as assez de limitations, puis, toi, non. Toutes les personnes qui ont des limitations fonctionnelles ont des besoins quand elles vivent des situations de handicap. Et c'est la responsabilité gouvernementale de donner à ces personnes-là les moyens nécessaires pour réaliser leur pleine participation. On est passé vite sur l'accommodement, mais, si on a des questions, ça va nous faire plaisir. Parce qu'on ne veut pas parler d'accommodement raisonnable. Le raisonnable, c'est un des critères de l'accommodement.
Le Président (M. Labbé): Merci, madame. Alors, Mme la ministre.
Mme Maltais: Peut-être mes collègues ont-ils des questions. J'invite mes collègues à intervenir. Non?
Le Président (M. Labbé): Est-ce qu'il y a des questions du côté des collègues?
Mme Maltais: On va passer peut-être à une question de l'opposition et on reviendra.
Le Président (M. Labbé): Oui, on peut aller avec l'opposition. Sans plus tarder, je vais céder maintenant la parole...
Mme Maltais: On reviendra, ne vous inquiétez pas...
Le Président (M. Labbé): Oui. Alors, sans plus tarder, je cède la parole maintenant au porte-parole officiel de l'opposition, le député de Nelligan. M. le député.
M. Williams: Quelle collaboration entre les deux partis!
Le Président (M. Labbé): Merveilleux!
n(11 h 10)nM. Williams: Merci, M. le Président. Merci beaucoup, M. Lavigne, Mme Benegbi, Mme Serradori et M. Grenier, pour votre présentation pour COPHAN. Comme d'habitude, c'est fort intéressant, on apprend des choses ensemble.
Je voudrais vous entendre un peu plus sur la notion, que je trouve très intéressante, de changer le concept intégration à inclusion. Si on met tout le reste des changements recommandés à côté, je voudrais juste mieux comprendre l'impact, selon vous, de ce changement de mot. Parce qu'il me semble, quand j'ai lu votre mémoire et quand j'ai écouté, il me semble que c'est tout à fait une bonne recommandation, ça représente plus un sens que je voudrais avoir dans la loi. Mais je voudrais, parce que vous êtes les acteurs, je voudrais vous entendre un peu: C'est quoi, l'impact légal sur la vie pratique si on change cette notion dans la loi?
Le Président (M. Labbé): Alors, Mme Serradori.
Mme Serradori (Chloé): Alors, comme M. Grenier vous l'a expliqué tout à l'heure, l'intégration, c'est qu'il faut qu'on corresponde à la norme. La norme actuelle, elle est faite pour des personnes en bonne santé, en principe des hommes, en principe Blancs et, on va dire, en principe francophones et puis catholiques. O.K.? Il y a eu beaucoup...
Une voix: ...
Mme Serradori (Chloé): J'ai dit «en principe». J'ai dit «en principe».
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Williams: ... vous avez les deux Russell ici, là.
Mme Serradori (Chloé): Oui, on pourrait rajouter... J'ai dit «en principe». Mais, justement, justement, le bon exemple, c'est que la norme est celle-là. Ça veut dire que, pour l'intégration, il va falloir qu'on prenne la personne et qu'on fasse le maximum pour qu'elle se rapproche de cette définition-là. Ça, c'est la première chose.
La deuxième chose, c'est qu'on est fatigué, pour ne pas dire autre chose, que l'adaptation puis l'accommodement se fassent toujours après. Ce serait tellement simple d'avoir une société où les trottoirs sont plus larges, où les transports sont adaptés, accessibles, où on n'a pas des portes ? on ne vous racontera pas ce qui nous est arrivé ce matin ici, mais en tout cas ? où on n'aura pas des portes qui se disent accessibles et qu'on doit ouvrir dans l'autre sens, etc. Donc, ce qui est important pour nous quand on parle d'inclusion, créons une société qui déjà... au départ, tout ce qui devrait se créer actuellement, on devrait penser: personnes qui ont des limitations fonctionnelles, personnes âgées, familles avec les landaus. Et c'est faux de penser que ça coûterait très cher. Parce que, ce qui coûte très cher, c'est d'essayer d'adapter le métro 20 ans plus tard. Si on l'avait adapté au tout début, et, actuellement, il y a d'autres pays qui font ça, puis il y a d'autres pays qui ont compris que tout ce qui est nouveau...
Quand on parlait tout à l'heure de clause d'impact, bon, pensons inclusion. On ne va pas faire quelque chose puis, 15 ans après, penser aux personnes qui ont des limitations fonctionnelles. Et le meilleur exemple que j'ai à vous donner, c'est que, n'oubliez pas, les championnes de l'accommodement, ce sont les femmes. Actuellement, il n'y en a plus, de problèmes pour les congés parentaux, et puis il n'y en a plus, de problèmes pour les métiers non traditionnels, etc., les femmes se sont battues. Et n'importe qui actuellement qui trouverait à redire à ça et qui trouverait à redire au Programme d'accès à l'égalité, etc., serait jugé comme quelqu'un de complètement amoral et scandaleux, et c'est la même chose.
Le Président (M. Labbé): C'est bien de vous entendre dire ça, madame. M. le député de Nelligan, s'il vous plaît.
M. Williams: Merci, M. le Président. Avec votre réponse, la chose que vous cherchez, c'est une définition claire, une explication des droits claire, qu'on peut discuter vraiment, on peut savoir exactement qu'est-ce qu'on discute, le pouvoir d'agir, mais aussi une approche interministérielle multidisciplinaire. Et la chose que j'ai vue entre 1998 et 2002, entre l'avant-projet de loi et 155, que le gouvernement, pour une raison ou l'autre, a évacué presque tout ça. Il n'y a pas vraiment de définition qui réponde à vos besoins. Il n'y a pas une liste dressée dans la loi assez claire des droits. Le pouvoir est vraiment questionnable, parce que, dans mon opinion, on perd le pouvoir. Et, de plus, l'approche qui, je pense, est tellement importante: qu'il y ait une obligation que chaque ministère, sur chaque loi, de vérifier son impact avant de la passer. Là, c'était dans l'avant-projet de loi, ce n'est pas dans le projet de loi maintenant.
Avec ça, je voudrais juste vous entendre sur les glissements de ça et est-ce que j'ai bien capté qu'est-ce que vous avez besoin si on veut passer une loi. Et j'arrive avec ma question que je demande à chaque groupe ? je fais mon propre lobbying aussi. Je pense que ça va être sage de ne pas avoir un avant-projet de loi déposé avant chaque élection, comme nous avons vu en 1998 et maintenant. Je voudrais avoir une révision obligatoire de la loi chaque cinq ans. Est-ce que vous êtes, comme association, d'accord avec ça?
Le Président (M. Labbé): Alors, M. Lavigne, s'il vous plaît.
M. Lavigne (Richard): Oui. Je pense que vous avez... pour répondre à votre dernière partie de la question, je pense que, effectivement, de faire le point aux cinq ans, ce ne serait pas un luxe. On a, malheureusement, là, en pleine course... on sent les élections s'en venir, effectivement, puis on nous propose un projet de loi qui, effectivement, est assez loin de ce qui avait déjà été vu ou touché, pour moi, sur mon papier.
Je vais vous dire bien franchement, on s'est posé la question, c'était quoi, l'objectif de la loi qu'on voulait faire adopter. Est-ce que c'était vraiment faire le point sur l'action gouvernementale globale pour favoriser une participation ou une inclusion des personnes handicapées ou si on n'avait pas à faire une espèce d'exercice de consolidation de l'Office? On n'a rien contre l'Office, mais ce n'est pas ça, le but. Le but de l'Office, si vous vous souvenez bien, en 1978, ceux qui étaient là, je l'ai déjà dit, sans faire de farce, le but ultime de l'Office, c'est de disparaître, lorsque les personnes qui ont des limitations fonctionnelles participeront à part entière à toutes les activités humaines, on n'aura plus besoin d'un office.
Au moment où on se parle, 25 ans après, je crois qu'il faut qu'on passe à la deuxième étape, arrêter de toujours envoyer la balle à l'Office, et aussi et surtout de consulter uniquement l'Office. L'Office, ce n'est pas nos tuteurs, ça. On est capables de s'exprimer nous-mêmes. Et on est un petit peu tannés de se faire dire par le gouvernement et les ministères: On a consulté l'Office, et se faire dire par l'Office: On n'est pas obligé de vous consulter; c'est nous autres qui consultent, ce n'est pas vous autres. Ça fait que, nous, comment on fait? On se dit: Donnez-vous une instance qui va inclure les personnes handicapées représentatives du milieu associatif et de d'autre monde, une instance pas trop lourde, qui va directement donner avis ou recommander des choses à l'ensemble du gouvernement. On est capable de travailler ensemble, on n'a plus besoin de tuteur. C'est ça qu'on veut dire. Et on est un peu déçu dans ce sens-là.
Mais on pense vous convaincre que le projet de loi est modifiable avant d'être adopté, qu'on espère qu'on va être capable de faire avancer l'État. Le Québec est capable de faire preuve d'initiative, on l'a vu dans plusieurs secteurs. Des personnes qui ont des limitations fonctionnelles attendent de leur gouvernement le même genre d'initiative, et je crois que ce serait gagnant pour tout le monde. Si c'est pour rester de même, le projet de loi, Mme la... M. le Président, là je ne sais plus si c'est monsieur ou madame que je dois dire là...
Le Président (M. Labbé): Alors, c'est monsieur, puis il n'y a pas de doute possible.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lavigne (Richard): Ah! Bien, voyez-vous? Savez-vous, si j'avais l'accommodement, je ne me serais pas trompé.
Le Président (M. Labbé): Exactement. C'est ça.
M. Lavigne (Richard): Alors, nous, un projet de loi comme ça, on considère qu'on n'avancera pas. Ce sera à recommencer. On va continuer à se battre. Mais on voudrait qu'on profite de l'occasion pour que l'État dise aux personnes handicapées et à leurs proches et à leurs familles ? ça commence à faire bien du monde: Nous prenons nous-mêmes nos responsabilités. On arrête de donner ça à quelqu'un, on le fait nous-mêmes. On a besoin d'aide, mais on va prendre nous-mêmes nos actions.
Le Président (M. Labbé): Alors, M. Lavigne, je vous remercie. Je vais céder maintenant la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce pour deux minutes.
M. Copeman: Merci, M. le Président. M. Lavigne, en parlant de cette instance que vous souhaitez, vous avez dans votre mémoire une série d'options qui est intéressante, sauf que ça permet à l'Assemblée législative ou à un gouvernement de faire le choix des options en votre nom. Je vais vous demander peut-être de préciser. Je comprends, chacune des options a leurs avantages et inconvénients. Vous parlez du cabinet du premier ministre, qui est hautement politique mais avec une certaine influence, l'Assemblée nationale qui est indépendante de toute action... de l'Exécutif, le Secrétariat associé au Conseil exécutif. Et, si je vous demandais, dans un monde idéal, quel est votre premier choix, ce serait quoi?
Le Président (M. Labbé): M. Lavigne.
M. Lavigne (Richard): Bien, je vais vous dire bien franchement, là, vous me posez une question, je vais répondre en mon propre nom, personnel. Parce que, nous, à la COPHAN, on n'a pas fait ce choix-là parce qu'on n'a pas eu vraiment le temps d'étudier à fond tout ça. Mais je pense que, lorsqu'on dit que l'affaire des personnes handicapées ça concerne tous les ministères, je pense que ça répond en partie à votre question. Et que l'Assemblée nationale soit saisie de l'avancement de la question, moi, je pense que c'est très important aussi. Mais de qui relèverait le dossier de l'inclusion des personnes handicapées? Moi, je pense que ça relève de tous les ministres québécois. Alors, c'est le patron des ministres québécois qui pourrait s'assurer que tout le monde fait sa job et qui fait rapport à l'Assemblée nationale.
Mais, ceci dit, nous, on a volontairement mis cette liste-là parce que, nous, on se dit, on n'est pas des spécialistes en organisation de ce genre de chose là. Nous, ce qu'on veut, que le message passe, c'est que tout le monde se sente impliqué et obligé à quelque part de faire quelque chose. C'est un choix... La participation des personnes handicapées, c'est un choix de société, M. Rodrigue nous l'a dit très souvent. Alors, si c'est un choix de société, bien, que la société fasse ses choix, et non pas de demander à un organisme sans trop, trop de levier de tout régler. On ne peut pas demander à un office, comme on a aujourd'hui, de tout régler. C'est de tout faire pour mettre l'Office toujours entre l'arbre et l'écorce et, nous, on ne veut plus ça.
n(11 h 20)nLe Président (M. Labbé): Merci, M. Lavigne. Alors, sans plus tarder, je cède maintenant la parole à la députée de Joliette.
Mme Lespérance: Merci beaucoup. Ça a été très intéressant d'entendre votre point de vue, et j'aime beaucoup quand j'entends le mot «responsabilisation» à tous les niveaux. Dans votre demande, vous indiquez effectivement que vous voulez être considérés comme des gens immédiatement responsables et que, dans le fond, ce que vous dites, c'est que vous n'avez plus besoin nécessairement de la structure qu'on avait mise de l'Office des personnes handicapées. Mais est-ce que, si, demain, on adoptait le projet de loi effectivement, sincèrement vous pensez qu'on serait capable d'atteindre rapidement vos objectifs ou ça prendrait une période de transition?
M. Lavigne (Richard): Je ne comprends pas la question. Si on adoptait la loi telle que, nous, on la veut ou telle qu'elle est là?
Mme Lespérance: Telle que vos propositions, là, à savoir...
M. Lavigne (Richard): C'est sûr que ça prendrait... Dans notre mémoire, on parle aussi de se donner du temps pour faire une stratégie, des plans d'action. Ce qu'on nous a dit, l'année passée, c'est qu'il fallait faire vite. O.K.? Je pense qu'il faut faire bien les choses. Ça fait 25 ans qu'on évolue d'une certaine façon, on peut se donner un petit peu de temps pour revoir les choses, que les gens aussi, que les ministères acceptent ou accueillent leurs responsabilités. Là, on ne peut plus... on ne pourrait plus se dire: Ah, bien, on va demander à l'Office, tu sais.
Là, ils seraient obligés de bouger. Ça ne bougerait peut-être pas tout de suite, mais, quand ça bougerait, ça bougerait. Les ministères, là, ils seraient obligés de se parler pour l'organisation des services scolaires, réadaptation, toute l'affaire, ils seraient obligés de se parler ensemble sans nécessairement être obligés de demander à quelqu'un d'autre de faire la job. Ça se développerait lentement mais sûrement. Mais, plus on attend, plus on demande à un intermédiaire de tout régler sans lui donner les moyens... Si vous nous dites: On va donner les pouvoirs à l'Office d'obliger les ministères, ah, bien là on va en parler. Mais ce n'est pas ça dont il est question là.
Alors, c'est sûr que ça se ferait lentement, peut-être, mais sûrement. Et, dans 10 ans, peut-être qu'on aurait au moins du monde plus sensibilisé, et plus informé, et plus intéressé. Parce qu'on en rencontre, des gens de toutes sortes de ministères qui, malheureusement, veulent bien, mais ils n'ont pas l'expertise parce que l'expertise est comme pognée, entre parenthèses, dans une organisation et elle a de la misère un petit peu à se promener ou à se partager. Et la COPHAN ne blâme personne. La COPHAN dit: Il est temps de passer à une autre étape. Ça, c'est bien important que ce soit compris, là. Parce qu'on s'est fait déjà accuser d'être des anti-Office. Ce n'est pas ça. On est des pour les personnes et leurs proches et on veut que le gouvernement se donne les outils.
Le Président (M. Labbé): Merci, M. Lavigne. Mme la députée de Joliette.
Mme Lespérance: Alors, en terminant, j'aimerais vous remercier pour l'honnêteté de vos propos, et de vos positions, et de la défense de vos positions. Merci beaucoup.
Le Président (M. Labbé): Alors, merci, Mme la députée. Sans plus tarder, je cède maintenant la parole à la ministre déléguée à l'Emploi, s'il vous plaît, pour 7 min 30 s.
Mme Maltais: Je vais, bien sûr, M. le Président, user parcimonieusement de ces minutes et laisser la parole quand même aux gens de la COPHAN dans ce sept minutes parce que je pense qu'ils ont des propos intéressants. Ce sont des gens qui aiment brasser la cage parce qu'il ont à coeur la défense des droits des personnes handicapées, puis c'est intéressant de les rencontrer ce matin puis de les écouter.
Je suis heureuse d'arriver après la députée de Joliette, qui disait tout à l'heure ? peut-être n'avez-vous pas entendu ? qu'il y avait trop de paperasse dans les PME pour les personnes qui veulent s'intégrer à l'emploi. Or, le programme qui donne des contrats d'intégration au travail connaît un très grand succès depuis son transfert au ministère de l'Emploi, à Emploi-Québec. C'est exponentiel actuellement. Vous le savez, il est en très grande demande. Juste en Montérégie, par exemple, pour cette année, non seulement on n'a pas diminué les budgets, mais il y a comme une demande d'engagement de 1 million de dollars de plus, là. Alors, il est très populaire.
Et ce que je dirais, c'est que la paperasse, elle est plus du côté des SEMO, les Services externes de main-d'oeuvre, qui doivent remplir de la paperasse, que de la PME. Mais enfin, s'il y a de la paperasse à enlever, on va en enlever; pas besoin d'enlever des fonctionnaires nécessairement pour ça, on peut travailler sur la paperasse de son bord, parce qu'on a besoin de gens pour travailler à l'intégration des personnes handicapées. C'est un exemple, là. Et, là je veux vraiment aller fouiller cette chose-là qui me paraît légèrement en contradiction dans ce que vous dites. Mais c'est pour ça que je veux en parler. Tu sais, c'est un des noeuds du débat.
Vous voulez une instance pas trop lourde, vous ne voulez plus de l'Office peut-être, mais vous voulez quelque chose. Alors, on remplacerait quelque chose par quelque chose. Une grande stratégie d'action gouvernementale globale, c'est comme ça que vous la nommez, mais, ça, c'est lourd. Et vous voulez quelque chose de pas lourd. Alors, vous voulez quelque chose qui a du pouvoir, mais, en même temps, vous le savez, c'est quand c'est rendu dans le ministère et que le ministère prend vraiment à coeur l'intégration des personnes ayant une limitation fonctionnelle que, tout à coup, ça devient opérationnel. Et je pense que le transfert des CIT et le transfert prochain des CTA donnent ce signal-là, que, quand c'est rendu dans le ministère et qu'il y a vraiment... les gens ont à coeur d'intégrer, ça marche. Alors, pour moi, il y a danger de contradiction dans ce que j'entends. Mais je sais que vous allez répondre, mais c'est important.
L'autre chose que je voulais vous dire. Vous me parlez, à la page 28 de votre mémoire, du transfert du programme Entreprises de travail adapté, CTA, qui doit se réaliser avant le 1er janvier 2005. Vous voulez qu'il arrive plus tôt. Je vous dis ceci ? je comprends la demande, là ? je vous dis ceci. C'est par respect des personnes handicapées pour ne pas en échapper dans le programme qu'on le met à cette date-là. Si on pouvait le faire avant sans danger pour l'intégration des personnes handicapées, pour ne pas en échapper, on le ferait avant, mais c'est par respect pour les personnes handicapées qu'on le propose à cette date-là. Alors, n'y voyez pas une intention de retard, voyez-y plutôt une intention de respect pour ne pas en échapper. Alors, sur ce que je trouve... sur le noeud dont je parle.
Le Président (M. Labbé): Alors, M. Lavigne.
M. Lavigne (Richard): Mme la ministre, je pense qu'on ne se comprend pas bien. Je pense que la COPHAN ne dit pas qu'il faut se dépêcher à transférer le programme CTA, je pense qu'il faut être prudent... non, je pense que... à moins que je n'aie pas compris mon propre mémoire. Nous, ce qu'on dit, c'est que ça va se faire, et, justement, il faut que ça se fasse dans le bon ordre, et je pense que là-dessus... on s'entend bien là-dessus.
Maintenant, pour ce genre de... juste une petite remarque pour les CIT, Mme la ministre. Oui, il y a une demande qui va en s'accroissant, je pense que personne n'avait prévu à quel rythme ça se développerait, un CIT. Mais ce que je peux vous dire, Mme la ministre, c'est que, depuis que le CIT est géré par Emploi-Québec, les personnes handicapées ont de la misère à avoir accès aux autres mesures. Je vais fermer la page. On a dit: Handicapé égale CIT. Auparavant, on avait droit à toutes les mesures et au CIT. On en reparlera, si vous voulez, un autre jour, là, mais c'est peut-être une explication de la soi-disant augmentation, et la paperasse, et tout ça.
Pour ce qui est de notre vision, nous, on considère que ce n'est pas lourd que le gouvernement, dans son ensemble, prenne ses responsabilités et qu'il se donne le mot d'ordre de travailler ensemble pour développer des plans d'action. C'est sûr que ça prend de la volonté. Ça, c'est clair, là. Je veux dire, s'il y a une volonté de tout le monde de dire: Là, on met l'épaule à la roue puis on développe un plan d'action concerté, moi, je pense que ce n'est pas si lourd que ça. Ce qui est lourd, M. le Président et Mme la ministre, c'est de travailler avec un, avec l'autre, puis avec l'autre, puis avec l'autre, puis toujours recommencer tout le temps à réexpliquer tout, toujours aussi défoncer des portes pour être entendus, parce qu'on a du monde qui parle à notre place. C'est ça qui devient lourd.
Et, vous autres les premiers, vous avez des sons de cloche qui vous sont envoyés et, quand vous parlez aux personnes handicapées, vous êtes surpris d'entendre un autre son de cloche. Bien là, c'est là, je pense, que ça devient lourd. C'est qu'à un moment donné vous dites: Qu'est-ce qu'ils veulent, au juste? Bien, si vous voulez le savoir, ce qu'on veut, au juste, c'est de venir directement nous voir, comme vous le faites pour d'autres groupes de citoyens. C'est ça qui devient lourd pour tout le monde, de recommencer, de refaire les discussions, de réécrire des mémoires, de refaire des projets de loi, des règlements, puis tout ça, puis toujours s'ostiner. Ça, c'est bien plus lourd que de prendre le temps de bien faire les choses, lentement mais sûrement, comme je disais tantôt à madame de Joliette. Je ne vois pas de contradiction là-dedans du tout.
Le Président (M. Labbé): Merci, M. Lavigne. Mme la ministre.
Mme Maltais: M. le Président, simplement pour voir si la COPHAN a remarqué l'article 41 du projet de loi qui dit que l'OPHQ «doit, d'ici le ? on parle de trois ans ? et en concertation avec l'ensemble des partenaires concernés par l'intégration scolaire, professionnelle et sociale des personnes handicapées, réviser la Politique d'ensemble intitulée "À part... égale"». Ça donne trois ans, parce qu'on veut revoir tous les plans d'action. Êtes-vous d'accord avec cet article du projet de loi?
n(11 h 30)nM. Lavigne (Richard): Bien là vous venez de soulever... justement, on l'a soulevé à la COPHAN. L'article est bon, sauf que c'est le gouvernement qui l'a adoptée, cette politique-là, ce n'est pas l'Office. Ça en est un exemple frappant de ce que vous venez de me dire: l'Office doit réviser la politique. Ce n'est pas l'Office qui révise les politiques au Québec, c'est le gouvernement. C'est le gouvernement qui l'a adoptée, À part... égale, en 1985. L'Office l'a préparée avec nous autres, mais c'est qui qui l'a adoptée? C'est qui qui est redevable? C'est qui qui est imputable aux citoyens? Ce n'est pas l'Office, c'est le gouvernement. Alors, l'article 41 confirme justement que le gouvernement dit à l'Office: Regarde, revise-moi donc ça. Et, c'est ça qu'on dit, ça n'a pas de bon sens, on va encore avoir... Parce que, entre l'Office puis le milieu, là, ça ne marche pas toujours, mais ça marche pas si pire pareil. C'est après que ça se gâte. Alors, pourquoi qu'on ne fait pas tout de suite ensemble? On pense que... Vous l'avez donné l'exemple...
Mme Maltais: Un bref commentaire.
Le Président (M. Labbé): Un bref commentaire.
Mme Maltais: Un bref commentaire, c'était le plan... C'était l'idée que l'Office doit faire le travail en concertation avec les partenaires, mais c'est évident qu'ensuite ça doit être pris en charge... Enfin, je ne sais pas exactement quel est le processus partout au gouvernement, mais l'intention était de travailler en concertation avec vous là-dessus.
M. Lavigne (Richard): Mais permettez-moi de penser, quand on lit ça, nous, hein, on n'est pas dans le... Nous, on lit ce qu'on lit: L'Office doit revoir à la politique. On dit: Bien, là, ce n'est pas à l'Office...
Mme Maltais: O.K.
Le Président (M. Labbé): Alors, parfait. Alors, sans plus tarder, M. Lavigne, Mme Benegbi, Mme Serradori, ainsi que M. Grenier, je vous remercie pour la qualité de votre présentation et votre implication.
M. Lavigne (Richard): Juste une dernière minute, monsieur, si vous permettez.
Le Président (M. Labbé): Trente secondes.
M. Lavigne (Richard): On voudrait déposer, ça va prendre deux secondes...
Le Président (M. Labbé): Oui, allez-y.
M. Lavigne (Richard): On voudrait déposer une déclaration commune concernant la révision de la loi qui est basée en grande partie sur le mémoire dont on vient de vous parler. Et c'est une déclaration commune qui a été appuyée par une trentaine d'organismes, de nos groupes communautaires d'autres secteurs. Il n'y a pas juste les personnes handicapées là-dedans, il y a toutes sortes de monde. Alors, on aimerait que les membres de la commission puissent prendre connaissance de notre déclaration commune ainsi que des appuis. Et, en guise d'explication de ce que peut être un handicap, ou une déficience, ou une situation de handicap, on s'est permis de vous mettre, à la dernière page, je crois, nos Canadiens de Montréal qui jouent au hockey sur du sable, comme quoi que des situations handicapantes, des fois ce n'est pas dépendant juste de ceux qui sont sur la glace...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Labbé): De toute façon, M. Lavigne, je ne sais pas si c'est le sable qui est le handicap ou les Canadiens, mais il reste qu'on prend bonne note.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lavigne (Richard): Ah, ça, je vous laisse y répondre.
Le Président (M. Labbé): Alors, on accepte le dépôt. Alors, si vous voulez nous le laisser, on va faire des copies pour les membres de la commission. Alors, on vous remercie pour votre présentation. Alors, je suspends quelques minutes, le temps de voir le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 11 h 32)
(Reprise à 11 h 33)
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! La commission va poursuivre ses travaux. Alors, je demanderais aux gens qui veulent continuer à échanger de le faire peut-être à l'extérieur. Je demanderais au prochain groupe, l'Association des groupes d'intervention en défense de droits en santé mentale du Québec, de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.
Alors, mesdames, monsieur, bonjour. Bienvenue à cette commission. Je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Je vous rappelle aussi que nous avons une interprète en langage gestuel, alors, s'il vous plaît, de ralentir un peu le débit au niveau du langage, c'est plus facile pour elle de faire la traduction.
Alors, j'aimerais que la personne, en fait, le porte-parole ou la porte-parole puisse se présenter et nous présenter les personnes qui l'accompagnent.
Association des groupes d'intervention
en défense de droits en santé mentale
du Québec (AGIDD-SMQ)
Mme Foisy (Constance): Bonjour. Moi, c'est Constance Foisy, présidente de l'Association provinciale des groupes d'intervention en défense de droits en santé mentale du Québec. On va nommer l'AGIDD pour que ce soit plus facile. En même temps, je voulais remercier la présentation de la COPHAN par rapport à l'inclusion des personnes, j'ai trouvé que c'était bien.
Vous avez, à ma gauche, ici, qui est M. Mario Bousquet, qui est impliqué au niveau de l'AGIDD depuis de nombreuses années; vous avez Mme Carole Panneton, à ma droite, qui est membre du conseil d'administration; et vous avez, à côté de M. Bousquet, Mme Doris Provencher, coordonnatrice intérimaire au niveau de l'AGIDD.
Ça fait que, pour commencer, ça va être Mme Provencher qui va présenter l'Association.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Provencher.
Mme Provencher (Doris): Oui. Bonjour. Alors, comme l'indique notre mémoire ? je vais vous faire une très courte présentation de notre Association, vous l'avez sous les yeux, quelques réalisations, tout ça ? donc, l'AGIDD regroupe plus de 35 organismes communautaires qui travaillent, qui oeuvrent dans le domaine de la défense de droits pour des gens qui vivent ou qui ont vécu un problème de santé mentale. L'organisme existe depuis plus d'une dizaine d'années. Évidemment, l'AGIDD travaille plus au niveau systémique, donc élabore des formations aussi et diffuse ces formations-là auprès des personnes qui vivent ou qui ont vécu un problème de santé mentale et les organismes communautaires. Également, l'AGIDD, dans les dernières années, a organisé deux colloques principalement, donc deux événements majeurs au Québec: un qui portait sur l'isolement et la contention et, l'année dernière, un colloque qui portait sur l'appropriation du pouvoir des personnes vivant ou ayant vécu un problème de santé mentale. Alors, je me limiterais à ça pour la présentation, vous avez le reste dans le document.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, d'accord. Alors, Mme Foisy.
Mme Foisy (Constance): Non, ça va être Mme Panneton.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Parfait. Alors, Mme Panneton.
Mme Panneton (Carole): Bonjour. Les personnes membres des organismes de défense de défense de droits en santé mentale ne se sont jamais tout à fait identifiées comme étant des personnes handicapées et ont rarement revendiqué leurs droits rattachés à la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées. Malgré cette difficulté d'identification, la réalité quotidienne des personnes qui vivent des problèmes de santé mentale est touchée quand même par cette loi. Qui plus est, la loi a plutôt contribué à présenter le problème de santé mentale des personnes comme une maladie ou une déficience reliée à un problème organique, biologique ou héréditaire. La loi a donc évacué toute la dimension sociale d'un problème de santé mentale.
Plusieurs facteurs font aussi en sorte que les personnes qui vivent des problèmes de santé mentale se retrouvent dans des situations dites handicapantes pour elles, et ces facteurs limitent considérablement leur autonomie. En effet, un des éléments difficiles à gérer pour les personnes vivant un problème de santé mentale est le stress, comme aujourd'hui. Elles deviennent particulièrement vulnérables lors de situations qui engendrent le stress. Alors, quand elles craquent sous la pression, elles vivent des échecs qui deviennent de plus en plus difficiles à surmonter au fil des ans.
Mme Foisy (Constance): Et, moi, je vais continuer en disant...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Foisy.
Mme Foisy (Constance): C'est ça. L'un des éléments majeurs qui touchent la vie des personnes vivant un problème de santé mentale est la prise de médication psychiatrique ou, comme nous l'appelons dans le mouvement alternatif, la médication de l'âme. Les psychotropes prescrits, en général, ont des effets secondaires très importants qui empêchent la personne de fonctionner. Par exemple, la personne peut avoir des tremblements, des contractions dans certaines parties du corps, des tics, des problèmes de mémoire importants, la vision brouillée, de l'incontinence urinaire, sécheresse de la bouche, des difficultés psychologiques et émotionnelles difficiles. Donc, ces effets limitent considérablement pour ces personnes les contacts avec leur environnement.
Le problème de pauvreté. Les personnes vivant un problème de santé mentale se retrouvent en grande majorité parmi les plus pauvres de la société, avec toutes les difficultés que cela entraîne pour elles. Elles sont souvent moins scolarisées, elles développent des problèmes de santé physique, elles vivent beaucoup de solitude parce qu'elles sont rejetées par leur famille ou par la société. Elles sont peu en contact avec leur environnement social. Bref, elles vivent des situations qui limitent leur pouvoir d'agir.
Des problèmes de plus en plus complexes. Les organismes de promotion et de défense des droits en santé mentale ont réalisé que la situation des personnes vivant un problème de santé mentale se complexifie et se détériore depuis les cinq dernières années, bien sûr pour toutes les raisons nommées précédemment, mais également de par la lourdeur des diagnostics et la chronicité qui en découle. Malgré tous les efforts réalisés dans le domaine de la santé mentale, tant du côté de la réinsertion sociale que de la volonté d'offrir de nouveaux services dans la communauté, les personnes vivant un problème de santé mentale se retrouvent aux prises dans un engrenage qui les mène inexorablement vers des situations de grande vulnérabilité.
Je vais passer la parole à M. Bousquet, et il va nous parler un peu de l'histoire.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Bousquet.
n(11 h 40)nM. Bousquet (Mario): Compte tenu que ça fait longtemps que je suis là, alors on m'a référé à l'histoire. Alors donc, depuis 1989, le gouvernement du Québec s'est doté d'une politique de santé mentale. Cette politique consacrait le rôle accru des personnes vivant un problème de santé mentale dans l'organisation des services et dans les décisions concernant leurs traitements. La primauté de la personne est un chapitre important de la politique. Cette politique fixait des priorités en matière de promotion, de protection et de défense des droits en santé mentale. C'est d'ailleurs cette politique qui a permis de développer des organismes régionaux de défense des droits en santé mentale, et ce, à travers tout le Québec.
Au-delà de la reconnaissance de la participation des personnes, la politique de santé mentale privilégiait une approche bio-psycho-sociale des problèmes de santé mentale. Les problèmes sociaux sont souvent à la base de la désorganisation psychologique. La pauvreté, la violence, le chômage ne sont pas des maladies, et on ne traite pas ça avec des pilules.
Le bilan de la politique de santé mentale, en 1997, confirmait d'ailleurs à nouveau le principe de primauté de la personne mais déplorait du même coup la timidité des actions entreprises en ce sens. Ainsi, seul le déploiement des organismes de promotion, de protection et de défense des droits avait concrètement été réalisé. La pratique psychiatrique institutionnelle et traditionnelle résistait aux changements pourtant si nécessaires.
La vague de désinstitutionnalisation créait un besoin urgent de mettre les ressources nécessaires dans la communauté pour répondre aux besoins des personnes vivant un problème de santé mentale. Hélas, les ressources financières sont demeurées dans les établissements de santé. Pourtant, les besoins sont grands dans la communauté. La biopsychiatrie ainsi que la psychiatrisation des problèmes sociaux ont pris tout le plancher.
Malgré tout, le plan d'action pour la transformation des services de santé mentale continue à clamer l'importance de la participation des personnes dans l'organisation des services de santé mentale et l'appropriation du pouvoir des personnes devient, dans cette transformation, la pierre angulaire de la transformation des services en santé mentale. On est un peu délinquant, on va demander à Carole de continuer.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Panneton.
Mme Panneton (Carole): Oui. Alors, pendant que le ministère de la Santé et des Services sociaux travaillait sur une réelle politique de santé mentale au Québec en impliquant les personnes directement concernées et en démystifiant la folie, la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées continuait à pagayer, selon nous, dans le sens contraire de la politique de santé mentale et de la transformation des services.
Effectivement, l'expression «handicap du psychisme» était utilisée pour présenter les personnes utilisant un problème de santé mentale. Cette façon de nommer les personnes aux prises avec un problème de santé mentale encourageait les préjugés dont la politique tentait de se défaire. Je répète l'expression déjà utilisée, la main droite défaisait ce que la main gauche tentait de bâtir.
Alors, à plusieurs reprises, l'AGIDD a tenté de sensibiliser les différents acteurs, dont l'OPHQ qui perpétuait l'utilisation de cette expression. Non seulement cette façon de parler des personnes vivant un problème de santé mentale causait des préjudices à ces dernières, mais également elle contredisait le contenu de la politique de santé mentale. Aucune recherche, aucun test biologique ne peut prouver un handicap quelconque pour les personnes souffrant d'un problème de santé mentale. «Je suis une personne, pas une maladie», c'est ce que le Dr Gaston Harnois, psychiatre reconnu sur la scène internationale, proposait plutôt par cette phrase historique, cette approche qui donnait sens aux efforts mis de l'avant dans la politique de santé mentale en 1989.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Foisy.
Mme Foisy (Constance): Je donnerais la parole à Mme Provencher pour continuer.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ah, d'accord. Alors, Mme Provencher.
Mme Provencher (Doris): ...vous mélanger un peu plus. Alors, nous, donc, pour correspondre aux attentes des personnes concernées et pour être cohérent avec la politique et les travaux dans le cadre de la transformation des services de santé mentale, la loi devrait intégrer l'expression «personne vivant un problème de santé mentale» autant dans le titre que dans la définition qui est proposée. Par rapport à la définition, on s'associe d'ailleurs tout à fait avec nos collègues qui nous ont précédés, nos collègues de la COPHAN, donc on adopte la même définition. Personne ayant une limitation fonctionnelle ou vivant un problème de santé mentale: toute personne ayant une déficience qui entraîne ou risque d'entraîner une incapacité sévère et persistante, incluant cyclique, ou toute personne ayant vécu ou vivant un problème de santé mentale, qui vit ou est susceptible de vivre des situations de handicap, ayant pour effet de réduire leur pleine participation sociale et citoyenne.
L'AGIDD-SMQ s'associe tout à fait, donc, aux revendications qui ont été mises de l'avant par le milieu associatif, qui s'est déjà exprimé sur cette question. On dénonce le fait que ce projet de loi ne modifie pas en profondeur la loi actuelle. D'ailleurs, ce projet de loi, comme l'ancienne loi, nous semble beaucoup plus la loi de l'Office des personnes handicapées du Québec que celle des personnes à qui elle est censée s'adresser. Encore une fois, comme nos collègues, on n'est pas anti-Office des personnes handicapées, hein? C'est qu'on constate que la loi, finalement, parle plus de l'Office des personnes handicapées, selon nous, que des personnes.
Donc, tout d'abord, comme je disais, les personnes vivant un problème de santé mentale ne se reconnaissent pas du tout dans la définition proposée dans le projet de loi et, par le fait même, elles sont en désaccord avec le titre. Les personnes ont dû et doivent encore se battre contre la méconnaissance de la société en ce qui touche les problèmes de santé mentale, la déficience intellectuelle et les distinctions à faire entre les deux. Il arrive encore souvent que l'on confonde ces deux concepts. Il n'existe encore à ce jour aucune preuve scientifique démontrant l'origine biologique des troubles de santé mentale. Plusieurs hypothèses circulent à cet effet, mais aucune, à notre connaissance, ne l'a démontré hors de tout doute. Donc, la loi devrait intégrer l'expression «personne vivant un problème de santé mentale» pour que ces personnes s'y reconnaissent. À la limite, elles seraient plus à l'aise avec l'expression «personne ayant une limitation fonctionnelle», ce qui correspond plus à leur réalité que l'expression «personne handicapée».
Également, les mots «significative» et «persistante» dans le projet de loi nous rappellent les termes «troubles sévères et persistants», termes contre lesquels s'est toujours opposé le milieu communautaire et alternatif en santé mentale. Pour nous, ça fait référence à une réalité qui est chronicisante pour les personnes, cela ne fait que nourrir des préjugés tenaces de notre société et, en plus, cela enlève tout espoir de changement et d'amélioration pour les personnes aux prises avec un tel diagnostic.
Comment interpréter le terme «activités courantes»? Et surtout qui va définir ce terme? Les groupes oeuvrant dans le domaine de la santé mentale s'inquiètent à ce sujet. Bref, à l'instar de nos collègues du milieu associatif, nous demandons que la définition en soit une inclusive pour toute personne ayant des limitations fonctionnelles.
Concernant l'instance, également, le projet de loi n° 155 ne révise pas, selon nous, en profondeur le mandat et le rôle de l'OPHQ, et nous sommes en désaccord avec cela. Donc, nous réclamons la création d'une instance représentative du mouvement associatif des personnes ayant des limitations fonctionnelles, de leur famille et de leurs proches, qu'elle soit directement liée au cabinet du premier ministre, ou à l'Assemblée nationale, ou à un ministère intersectoriel ayant une réelle influence sur l'ensemble du gouvernement. Cette instance, qui aurait un rôle transversal efficient, aurait pour mission d'assurer la mise en oeuvre des stratégies gouvernementales et des politiques particulières aux personnes vivant avec un handicap ou avec un problème de santé mentale.
Donc, on considère qu'étant donné que l'instance s'adressera aux personnes ayant des limitations fonctionnelles cela va de soi, pour nous, que la présidence soit assumée par une personne directement concernée par la problématique. Donc, on demande qu'une majorité de personnes ayant des limitations fonctionnelles ou vivant un problème de santé mentale composent l'instance désignée et que la présidence soit occupée par un représentant de ces dernières. L'instance qui sera mise en place doit pouvoir agir afin que les droits des personnes vivant ou ayant vécu un problème de santé mentale soient véritablement respectés. Je repasse la parole à Mme Foisy.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Foisy.
Mme Foisy (Constance): Donc, l'Association a fait quelques recommandations. Donc, l'AGIDD recommande, de concert avec le milieu associatif, que, sous l'égide du ministre du Québec, soit mise en oeuvre une véritable stratégie gouvernementale à l'égard des personnes ayant des limitations fonctionnelles ou vivant un problème de santé mentale basée, entre autres, sur les principes suivants: l'inclusion pleine et entière; la participation sociale; le droit à l'égalité; le droit à l'accommodement et à son application; la reconnaissance et la pleine compensation des coûts liés aux incapacités.
L'AGIDD recommande que la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées devienne une loi-cadre qui s'assure, d'une part, de l'actualisation des 15 orientations de la politique d'ensemble À part... égale, adoptée par le gouvernement du Québec en 1985, comme objectifs fondamentaux de l'action gouvernementale envers les personnes ayant des limitations fonctionnelles; s'assure d'introduire, d'autre part, une clause d'impact dans l'article 1 de la loi spécifiant que toute politique, toute loi ou tout règlement adoptés par le gouvernement et par toute instance régionale, municipale et locale, ainsi que tout service public, tout programme et tout guide offerts par le gouvernement et ces mêmes instances doivent être examinés à la lumière de leurs effets sur l'inclusion pleine et entière et le droit à l'égalité des personnes ayant des limitations fonctionnelles et sur les écarts. Cette clause va permettre de contrer toute forme d'exclusion systémique et faire en sorte que les décisions de l'État ne puissent aller à l'encontre des fins poursuivies par la loi.
n(11 h 50)n Une reconnaissance du droit à l'accommodement. L'AGIDD recommande que soit inclus le droit à l'accommodement dans la Charte des droits et libertés de la personne de la même façon qu'il a été inclus dans la Loi canadienne des droits de la personne.
L'AGIDD recommande que le droit à la compensation des coûts liés aux incapacités soit spécifié et prévu dans la loi.
L'AGIDD veut que l'instance qui découlera de cette loi ait de réels pouvoirs afin de bien représenter les besoins et les demandes des personnes ayant des limitations fonctionnelles, et ce, tant auprès de l'appareil gouvernemental que de la société québécoise en général. Quand on parle de réels pouvoirs, aussi on parle d'un pouvoir décisionnel. Je vais laisser Mario... M. Bousquet terminer avec le reste...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, c'est en conclusion. Vous savez qu'il reste trois minutes...
M. Bousquet (Mario): O.K. Je vais conclure.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Bousquet.
M. Bousquet (Mario): Donc, les organismes de promotion de... L'AGIDD a été étonnée de constater que l'OPHQ conservait, dans le projet de loi n° 155, le pouvoir d'accorder des subventions aux organismes de promotion malgré la mise en application de la politique gouvernementale L'Action communautaire, une contribution essentielle à l'exercice de la citoyenneté et au développement social.
Une voix: ...
M. Bousquet (Mario): Oui. Cette politique...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): On vous fait signe qu'on doit ralentir un peu, s'il vous plaît.
M. Bousquet (Mario): O.K. Cette politique entrant en vigueur en avril 2003, nous voyons mal comment actualiser cet article du projet de loi.
Donc, en lien avec la politique de l'action communautaire, le milieu associatif, nous demandons que... transférer le financement des organismes locaux, régionaux, nationaux et de concertation nationale issu du Programme de soutien aux organismes de promotion, aux ministères vis-à-vis ou au Fonds d'aide de l'action communautaire autonome selon l'évaluation de la mission majeure des organismes et des regroupements d'organismes, et ce, sans perte d'acquis et en négociant avec les ministères vis-à-vis le respect du financement du volet de défense des droits des personnes ayant des limitations fonctionnelles et de leurs proches, ainsi que des personnes vivant ou ayant vécu un problème de santé mentale.
L'AGIDD, dans le passé, a été privée de subventions de l'OPHQ pendant trois ans parce que, de façon arbitraire, l'Office a adopté de nouveaux critères. Donc, on a eu un manque à gagner de 154 000 $ pendant trois ans... sur trois ans parce qu'il y a eu une décision administrative et arbitraire ? donc, on ne veut plus cette situation-là ? et pourtant l'AGIDD était un des principaux organismes de promotion et de respect des droits au Québec.
Abolir également tout programme de financement aux organismes;
Informer le milieu associatif des différentes démarches entreprises par l'instance dans le cadre de la mise en oeuvre de la politique;
Et se retirer de toute instance de consultation concernant la mise en oeuvre de la politique d'action communautaire afin de ne pas dédoubler le rôle du mouvement associatif au Comité aviseur de l'action communautaire autonome.
En conclusion, depuis plusieurs années, l'AGIDD a fait plusieurs représentations à l'intérieur des différents travaux et à différents niveaux. Il est impératif que les revendications du milieu associatif soient enfin entendues. Nous avons plutôt besoin d'une loi qui favorise la participation des personnes et qui prône une stratégie gouvernementale globale et nationale afin d'assurer un réel exercice des droits des personnes ayant une limitation fonctionnelle.
Nous remercions la commission des affaires sociales de nous avoir permis de faire entendre la voix des personnes qui ont un problème de santé mentale. Il ne reste maintenant qu'à modifier la présente loi dans le sens de nos revendications afin que nous puissions enfin dire que ces personnes sont des citoyens et des citoyennes à part entière.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci de votre présentation. Mme la ministre, pour la période d'échange, je vous cède donc immédiatement la parole.
Mme Maltais: Merci, Mme la Présidente. D'abord, je vous transmets les salutations et les regrets de mon collègue Roger Bertrand qui, pour un cas de force majeure, personnelle, ne peut pas être ici, ce matin. Il aurait vraiment aimé vous entendre, j'en suis sûre. Comptez sur le fait que je lui transmettrai la qualité sûrement, parce que je vous connais, et la teneur de nos échanges personnellement. Je vais voir à le faire personnellement.
J'ai écouté attentivement votre mémoire qui ? je l'ai lu aussi ? est proche un peu du mémoire de la COPHAN. Je pense que vous vous retrouvez sur certains éléments, entre autres, à ce que je comprends, sur l'idée d'une stratégie gouvernementale. Et, comme j'avais laissé notre échange avec la COPHAN sur l'article 41, qui parlait de la révision de la politique gouvernementale À part... égale, je vais un peu reprendre là-dessus en disant que ce qu'on comprend, vous voulez une stratégie gouvernementale, c'est très clair, on comprend bien l'intention. On peut comprendre pourquoi d'ailleurs. Mais À part... égale est une politique gouvernementale. Donc, si on révise une politique gouvernementale, je tiens à spécifier, pour le processus administratif, que ça veut dire qu'elle doit... Si on l'appelle politique gouvernementale ? et c'est le cas actuellement ? elle va revenir devant le Conseil des ministres. Et, étant approuvée par le Conseil des ministres, ça veut dire qu'elle est prise en main et implique tout le gouvernement du Québec.
Donc, l'idée d'une politique gouvernementale, ce qui est normalement plus lourd qu'une stratégie, a plus de poids et est adopté par le Conseil des ministres, et donc devient une politique de tout le monde même s'il y a quand même un organisme ? et c'est là-dessus, toutefois, que vous avez encore, je pense, un débat ? un organisme qui est chargé de veiller à son application, et c'est l'OPHQ. Je comprends que, là-dessus, vous avez un débat, mais c'est pour clarifier que ce que contient l'article 41, c'est quelque chose qui doit être adopté par le Conseil des ministres, donc qui doit être pris en charge par tous les ministères.
L'autre chose, ça m'interpelle vraiment. Je veux vraiment vous entendre là-dessus, parce qu'on sait qu'un très grand nombre de personnes vivent, à un moment donné dans leur vie, peuvent vivre... vivent ou peuvent vivre un épisode de santé mentale. Il y a des gens qui vivent avec ça toute leur vie, il y a des gens qui le vivent de façon épisodique. Et, chez certaines personnes, ça n'entraîne pas nécessairement de conséquences permanentes. Est-ce que leur inclusion dans la définition n'aurait pas pour effet qu'elles se sentent étiquetées? Est-ce que leur inclusion dans la définition n'aurait pas pour effet de diviser l'application de la loi aussi? C'est vraiment là-dessus que je veux vous entendre, parce que, quand on pose des gestes comme ça, il faut être vraiment sûr que les effets pervers n'aient pas plus d'impact que l'effet positif qu'on veut amener, que le changement qu'on veut amener. Alors, est-ce que je peux vous entendre là-dessus?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Foisy.
Mme Foisy (Constance): Mme Foisy. Mme Maltais, excusez, j'aurais un exemple que je pourrais donner. Mettons qu'on parle d'une femme monoparentale qui a des enfants et qui s'occupe très bien de sa tâche de mère, qui a des capacités parentales et, à un moment donné, vit une dépression dans sa vie. La mesure d'accommodement et qui ferait qu'elle serait incluse quelque part, c'est qu'elle aurait de l'aide à domicile afin, justement, de continuer à mener à bien son travail de mère. Entre autres, dans une dépression, on peut avoir des difficultés au niveau de l'énergie, donc plus de fatigue, plus de difficultés à faire soit du ménage, des repas ou des choses comme ça qui, en ayant de l'aide, peut donc laisser l'énergie à la mère pour s'occuper de ses enfants au lieu de prendre les enfants de cette femme-là, de les placer en famille d'accueil, et là qu'il y a tout un processus judiciaire qui embarque avec la DPJ et que la personne est visée par des préjugés parce que, là, elle a un diagnostic psychiatrique, et là qu'il y ait d'autres problèmes qui viennent. Donc, au lieu d'aider la mère dans ses fonctions de mère qui, jusqu'à date, elle était correcte, en la laissant seule avec son problème, en ne donnant pas d'aide, ce qui fait que, tout en retirant les enfants, que ça augmente le problème de santé mentale, parce que ça fait partie des personnes qu'elle a autour d'elle, ça défait la famille, le lien d'attachement et ça amplifie au lieu d'aider. Donc, c'est un exemple que je pourrais amener d'aider une personne qui vit un problème de santé mentale qui est ponctuel.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Bousquet.
n(12 heures)nM. Bousquet (Mario): Pour compléter, en fait, effectivement, si on associe, dans une définition, le mot de «handicap» à l'expression «problème de santé mentale», on contribue à perpétuer les préjugés. Ce qu'on veut surtout, c'est un changement de définition, qui va être plutôt inclusive du monde de la santé mentale. Jusqu'à maintenant, dans le passé, effectivement, ce que créait la politique de santé mentale était un peu détruit par la loi qui était en place actuellement par l'expression de «handicap du psychisme». On veut casser ça.
Mais on sait que de plus en plus également, bon, la multiplication des diagnostics, la complexité aussi des problèmes de santé mentale reliés aussi avec un problème de santé physique ou même avec une limitation fonctionnelle... De plus en plus, la double problématique existe, les triples problématiques existent. Alors, on veut s'assurer que la loi, actuellement, ne soit pas justement handicapante pour les problèmes en santé mentale, et c'est pour ça qu'on demande de revoir la définition et le titre de la loi pour être inclusive de ces personnes-là parce qu'une personne qui vit des limitations fonctionnelles vit également... peut vivre également des problèmes de santé mentale.
L'autre chose par rapport à l'article 41, je vois bien l'intention, mais il faudrait éclairer... éclaircir cet article 41 là en disant qu'il y a un engagement d'une stratégie nationale. Mais, nous, il n'en demeure pas moins qu'il faut qu'il y ait une instance, hein, qui soit avec des pouvoirs, qui puisse intervenir ou influencer tous les ministères quand ils adoptent de nouvelles lois pour inclure et penser aux personnes qui ont des problèmes de santé mentale et des personnes vivant des limitations fonctionnelles également.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci. Mme la ministre.
Mme Maltais: Oui, M. le Président, je...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la Présidente.
Mme Maltais: Mme la Présidente, excusez-moi, j'ai erré quelques secondes. Alors, je vais réfléchir un peu, passer la parole à...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Alors, je sais que Mme la députée de Crémazie m'a demandé la parole. Alors, Mme la députée.
Mme Blanchet: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mmes Foisy, Panneton et Provencher, bonjour, M. Bousquet également. Merci de votre présentation. Effectivement, dans vos recommandations, vous insistez particulièrement sur la question de la définition, comme vous venez de le faire avec ma collègue. Mais, mis à part la définition, la nouvelle formule de la définition, quelles actions vous voudriez voir le gouvernement privilégier pour mieux répondre ou des actions, des programmes ? je ne le sais pas, peu importe le terme que l'on prend ? pour pouvoir mieux répondre justement aux besoins des gens que vous représentez et dont vous venez nous faire part de leurs besoins aujourd'hui? Qu'est-ce qui n'est peut-être pas dans la loi que vous voudriez voir inscrire dans la loi pour justement mieux répondre aux besoins de ceux et celles que vous représentez?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Bousquet.
M. Bousquet (Mario): Bien, on l'a dit et maintes fois repris lors de la politique de santé mentale, lors de la transformation des services en santé mentale plus précisément. On les a mises, les actions. Il faut que ça se passe dans la communauté. Il faut que les gens aient du support et du soutien dans la communauté. Il faut aussi considérer les personnes vivant un problème de santé mentale comme des citoyens à part entière. Et toute action qui vise justement, pas l'intégration, mais l'inclusion des personnes et non pas de les regarder avec un regard de personnes malades, mais comme des gens qui sont capables de s'impliquer et de participer aux changements dans la société.
Il y a plein d'initiatives qui peuvent être menées par les personnes elles-mêmes dans la communauté, qui sont malheureusement mal encouragées au profit d'une approche strictement psychiatrique, une approche biopsychiatrique traditionnelle, une approche qui dit, bon, que les personnes qui vivent un problème de santé mentale, ce sont des personnes qui sont malades, donc qui doivent prendre des pilules pour le reste de leur vie, alors que cette façon de considérer... En santé mentale, on l'a dit souvent, et c'est reconnu dans la politique et dans la transformation des services en santé mentale ? Mme la ministre a déjà touché ces dossiers-là ? c'est d'encourager les actions qui sont elles-mêmes prises en charge par les personnes elles-mêmes, et malheureusement, peu de... bon, au-delà de la politique, peu de plans d'action vont encourager ou vont favoriser ou faciliter cette prise en charge des personnes elles-mêmes de leurs besoins pour justement combler les situations qui limitent leurs mouvements.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée.
Mme Blanchet: Merci. Quand vous parlez de support de la communauté, donc, j'imagine que vous parlez évidemment de certains organismes communautaires oeuvrant dans le milieu. Mais est-ce que vous pensez aussi aux différentes municipalités ou aux villes qui pourraient être appelées à intervenir?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Bousquet.
M. Bousquet (Mario): Évidemment, il faut influencer l'ensemble de la population et tous ceux qui sont en prise de position pour prendre des décisions. Effectivement, la politique, ce sont des intentions fort louables puis fort intéressantes, puis c'est ce que le milieu associatif voulait. Mais, au-delà de ça, il faut aussi sensibiliser, hein, autant les différents dirigeants au niveau des villes, au niveau du provincial, au niveau des régions pour que, justement, on puisse trouver ensemble des solutions pour justement inclure les personnes vivant avec un problème de santé mentale et qu'ils puissent réaliser des changements nécessaires dans l'approche même de voir les problèmes de santé mentale.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ça va. Oui, madame...
Mme Provencher (Doris): Provencher.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je m'excuse, Mme Provencher.
Mme Provencher (Doris): Oui. Bien, un peu pour voir... Oui, comme disait mon collègue, oui, il faut sensibiliser, mais il faut faire attention aussi parce que, quand on sensibilise... Et souvent ce qu'on voit, par rapport aux gens qui ont un problème de santé mentale ? vous savez, l'expression, là, ça va être un peu: Je veux ton bien et je vais l'avoir ? alors il y a beaucoup de gens qui travaillent pour le bien de ces personnes-là, et, à un moment donné, ça peut amener des débordements au niveau de la confidentialité, par exemple, où tout le monde autour... Et d'ailleurs, c'est ce qui commence un petit peu à s'installer présentement avec les réseaux locaux de services intégrés. Nous, notre crainte là-dedans, c'est qu'au niveau du respect des droits des personnes, par bonne volonté, dans le but d'aider ces personnes-là, bien, à un moment donné, les gens vont dépasser un peu les bornes et vont faire à la place de.
Nous, à l'AGIDD et dans les groupes de promotion et de défense de droits et dans le mouvement communautaire et alternatif, nous, on pense qu'il faut que ce soient les personnes qui soient impliquées. Donc, il faut effectivement que, de plus en plus, ce soient elles qui soient interpellées et qu'on les écoute, qu'on enlève le: Bon, ah! cette personne-là, ah! elle est maniaco-dépressive, elle est schizophrène, elle est ci, elle est ça. C'est une personne. Le Dr Harnois l'a bien dit: C'est une personne, pas une maladie. Donc, parler, prendre contact avec les personnes, pas avec un diagnostic. Alors, c'est un peu dans ce sens-là.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, madame. Alors, Mme la ministre, il vous reste quatre minutes.
Mme Maltais: Ah! c'est bon. Merci, Mme la Présidente. Le temps est une chose précieuse.
Vous parlez beaucoup de sensibilisation, changement d'approche. Je sais comment le fait de combattre les préjugés dans le domaine de la santé mentale, c'est extrêmement important. C'est quelque chose de majeur. C'est un combat social, de toute façon, qu'on a entrepris là-dessus. Pour vraiment bien dégager le portrait... Vous savez, dans l'article 41, on veut revoir la politique gouvernementale À part... égale. Vous proposez un changement de définition dans la loi ou un ajout en fait. Avec la COPHAN, on échangeait, et M. Lavigne nous disait: Il n'y a pas une loi qui va être efficace s'il n'y a pas une volonté et gouvernementale et sociétale d'appliquer vraiment cette loi-là et qu'elle devienne un outil majeur. Est-ce qu'on a vraiment besoin ? mais c'est vraiment juste pour avoir votre avis là-dessus, ne croyez pas que j'aie d'idée préconçue là, votre avis ? est-ce qu'on a vraiment besoin d'un changement dans la définition de la loi ou si on a besoin d'un meilleur arrimage des services et d'un meilleur travail sur la sensibilisation de ce qu'est une problématique de santé mentale pour une personne?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Panneton.
Mme Panneton (Carole): Je pense qu'avec ce qui s'est passé dans les dernières années au niveau de la loi exerçant... Quand on disait au début qu'on ne se sentait pas partie prenante du débat... Actuellement, la loi s'adresse aux personnes qui vivent des problèmes de santé mentale, et, sur le terrain, l'accessibilité aux mesures d'accommodement ou d'accès aux services est tellement ambiguë concernant les gens qui vivent des problèmes de santé mentale qu'il y a une iniquité dans l'accès aux services. Il y a plusieurs gens qui, pour eux, ne voulant pas s'identifier à une personne handicapée parce que c'est temporaire, c'est cyclique et autre, ne font pas la demande. Donc, les personnes concernées ne se sentent pas dans la loi. Les intervenants communautaires et du réseau ne se sentent pas non plus concernés. Alors, je crois que les préjudices d'accès aux services ou des mesures qui sont déjà accessibles, nous, ce n'est pas sur la quantité, c'est sur l'ambiguïté. Alors, je pense que le débat sur la problématique de santé mentale... nous, on s'est dit: Bien, tant qu'à avoir des limitations fonctionnelles et avoir des services qui s'adressent aux personnes qui vivent des limitations fonctionnelles... L'exemple de tout à l'heure, il est très concret, et on croit que les personnes qui vivent des problèmes de santé mentale ont le droit d'avoir accès à ça. Alors, c'est un besoin important.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci. Oui, Mme Foisy.
Mme Foisy (Constance): Je voulais rajouter aussi que c'est important d'informer de plus en plus les personnes sur leurs droits et recours concernant l'accessibilité aux services, la confidentialité, parce que justement, en santé mentale, ce qui arrive, c'est qu'il y a beaucoup de prise en charge, il y a beaucoup d'abus de pouvoir, et les personnes... c'est de donner la possibilité aux groupes et aux associations de faire connaître les droits de ces personnes-là, et que les personnes puissent connaître leurs droits de plus en plus pour les faire valoir, et de donner les moyens aussi de les faire valoir.
n(12 h 10)n Si je peux donner juste un exemple, ne serait-ce qu'une personne qui tombe en invalidité par suite d'un problème de santé mentale et qui a le droit à une assurance invalidité, mais que l'employeur décide ou l'assureur... l'assureur décide que non, et la personne se retrouve sur l'aide sociale et elle n'a même pas droit à l'aide juridique pour faire valoir son droit à l'assurance invalidité qu'elle a payée pendant des années. Ça fait que ce serait important que la personne puisse avoir le droit au moins à un avocat pour se défendre contre une machine qui ont les médecins et les avocats. Ça coûte une fortune d'avocats puis d'expertises, et les personnes restent le reste de leur vie sur l'aide sociale, puis pourtant elles avaient droit à une assurance invalidité. Ils réussissent à s'en sortir s'ils réussissent à trouver un avocat qui a l'âme charitable d'accepter une cause, un pourcentage, sans qu'il demande une cenne en partant, mais, encore là, il y a tout le côté expertise, que là il ne veut pas débourser. Ça fait que c'en est, des exemples au niveau de la diffusion de la formation, l'autre côté de la pilule; elle a des coûts, et les gens n'ont pas les moyens de se l'approprier. C'est important de connaître c'est quoi, ce que les personnes prennent.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, écoutez, c'est tout le temps qu'on avait pour la partie ministérielle. Je vais donc poursuivre avec le député de Nelligan. M. le député.
M. Williams: Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme Foisy, Mme Panneton, Mme Provencher et M. Bousquet, pour votre présentation aujourd'hui. Encore sur la définition, et je ne vais pas prendre tout le temps sur ça parce que nous avons passé beaucoup de temps, mais c'est assez important. Nous avons entendu la COPHAN, ils ont parlé d'une personne ayant une limitation fonctionnelle. J'ai trouvé ça intéressant.
Habituellement, je prône pour les articles de loi qui sont plus clairs, plus spécifiques, mais, quand je regarde votre proposition d'une personne vivant un problème de santé mentale, il me semble qu'on ouvre... en essayant de corriger un problème, que j'accepte, de santé mentale, souvent oublié, mis à côté ? je ne mets pas ça en doute ? mais cette solution peut causer d'autres problèmes et oblige aussi... Une fois qu'on cible un secteur, il me semble qu'on doit dresser la liste de tous les secteurs. Est-ce que vous pouvez faire une autre discussion sur la définition? Et j'ai d'autres questions, mais je voudrais juste vous entendre: Pourquoi est-ce que je suis contre l'idée de mieux cibler les problèmes de santé mentale? Mais est-ce que, selon vous, c'est vraiment la meilleure façon de faire?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Bousquet.
M. Bousquet (Mario): Compte tenu que la loi inclut les personnes vivant des problèmes de santé mentale, on dit: Si on inclut ces personnes-là, on doit les appeler comme ça, on doit d'abord reconnaître que ce sont des personnes vivant ou ayant vécu un problème de santé mentale, et ça, en conformité avec la politique de santé mentale au Québec, une cohérence doit être créée.
Je suis d'accord avec les propos en disant: On n'a pas besoin d'une loi pour assurer les droits des personnes ou conscientiser les gens. Pourquoi avoir une loi spécifique? M. Lavigne le disait: Pourquoi avoir une loi spécifique aux personnes vivant une limitation? À la limite, on n'en a pas besoin. Il s'agirait tout simplement que notre société inclut ces personnes-là, qu'on travaille justement, chacun des ministères, à reconnaître ces personnes-là comme des citoyens à part entière, et le problème serait réglé. Mais, malheureusement, notre société n'est pas comme ça, elle n'est pas rendue là, hein. Un jour peut-être, mais, pour l'instant, ce n'est pas rendu là. On a besoin encore d'une loi, d'une loi pour justement assurer l'exercice des droits des personnes. Et toute loi qui va dans ce sens-là pour des personnes vulnérables ou qui vivent des situations de handicap, et c'est le cas des personnes vivant des problèmes de santé mentale, ces gens-là vivent des situations de handicap, temporaires souvent, et surtout... rarement chroniques. C'est parce que là, la définition, on parle souvent de la chronicité des problèmes de santé mentale; c'est 1 % de la population, des problèmes de santé mentale au Québec, alors que la majorité, c'est des problèmes souvent temporaires, des problèmes... Pardon?
M. Williams: Quel pourcentage?
M. Bousquet (Mario): 1 %, 1 %. Il y a des chiffres qui disent de 1 à 2 %, bien, c'est 1 % à peu près. On a essayé toujours de définir dans la politique de santé mentale c'était qui les sévères et persistants. On n'a jamais pu avoir de critères pour le savoir. Mais sauf qu'on dit que, si on se résume que c'est ceux qui souffrent de schizophrénie ou qui sont hospitalisés plusieurs fois par année, ça représente environ 1 %, hein, 1 % de la population, dont 85 % des budgets leur sont consacrés. Et, pour nous, évidemment, il s'agit de... si tous les préjugés étaient abolis, si on avait une façon justement de regarder les personnes comme étant des citoyens à part entière, on n'aurait pas besoin d'une loi.
Cependant, compte tenu que la loi actuelle inclut ces personnes-là, on dit: Dans la définition, si on veut les inclure, il faut les inclure en cohérence avec les politiques et les plans d'action de la transformation des services en santé mentale pour qu'il y ait justement cette fameuse cohérence dans les actions terrains. Alors, c'est ce qu'on dit actuellement. Et, pour ce faire, il faut absolument adapter la définition pour justement inclure la totalité des personnes vivant avec un problème de santé mentale.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Nelligan.
M. Williams: Merci. Merci pour la réponse. Dans votre mémoire, page 13, vous avez recommandé un changement de devoirs et pouvoirs de l'instance. Spécifiquement pour assurer que les droits des personnes vivant ou ayant vécu un problème de santé mentale soient protégés, est-ce qu'il y a des pouvoirs spécifiques que vous cherchez, qui sont différents du pouvoir général, que, je pense, tout le monde a réclamés, spécifiquement pour les personnes de santé mentale?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Bousquet.
M. Bousquet (Mario): Non. Les seuls pouvoirs, c'est le pouvoir d'autodétermination des personnes, de la participation de la société, le pouvoir... C'est dans le domaine de toutes les personnes vivant... les droits sociaux qui leur sont reconnus autant pour les personnes vivant une limitation physique ou une limitation psychologique.
M. Williams: Peut-être que vous avez vu dans le projet de loi n° 155, l'OPHQ ne peut pas jouer ce rôle?
M. Bousquet (Mario): C'est-à-dire qu'elle...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Bousquet.
M. Bousquet (Mario): Ses pouvoirs sont restreints, donc évidemment elle ne fait... elle ne peut pas parler au nom des personnes. Les personnes qui sont capables de parler en leur nom et de proposer des solutions... Donc, un peu à l'instar de ce que disait tantôt la COPHAN, on n'est toujours pas en désaccord, on n'est pas en chicane avec l'OPHQ. Ce qu'on dit, c'est que ça nous prend une politique, une stratégie gouvernementale d'ensemble, globale, dans laquelle on va reconnaître l'ensemble des personnes, l'ensemble de leurs droits, de leur participation à cette société. C'est ce qu'on dit actuellement. Et on dit que, pour mieux représenter, il faut que l'ensemble des problématiques, l'ensemble des personnes à qui s'adresse la loi doivent avoir accès, doivent être représentées dans cette instance.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Nelligan.
M. Williams: Merci. Nous avons eu un avant-projet de loi déposé en octobre 1998, juste avant les élections, et nous avons le projet de loi n° 155 déposé ici, à l'Assemblée nationale, juste avant les élections. Avez-vous étudié les différences et est-ce que vous avez vu, comme plusieurs autres groupes ont vu, un glissement et qu'il y a moins de choses claires dans le projet de loi n° 155 que nous avons vues dans l'avant-projet de loi? Et est-ce que vous pouvez expliquer votre opinion sur ça? Je sais que le temps passe vite, je voudrais vous entendre spécifiquement: Comment on peut introduire le concept d'accommodement et de la compensation, tel que vous avez recommandé à la page 15 de votre mémoire?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Bousquet.
M. Bousquet (Mario): La première partie de la question...
M. Williams: Le projet de loi no 155...
M. Bousquet (Mario): O.K. Nettement, ce projet de loi, on l'a dit, est insatisfaisant, n'est pas en profondeur. On souhaite un changement en profondeur de la loi. Je vais utiliser le mot «cosmétique» pour dire que ce projet de loi est assez timide par rapport aux revendications du milieu associatif et des changements qu'on s'attendait de voir se réaliser enfin.
Pour ce qui est de l'accommodement, les personnes vivant un problème de santé mentale ont besoin également de mesures d'accommodement telles que la Cour suprême l'a déjà décrété auparavant. Et, si ce n'est que pour l'intégration au marché du travail, il faut reconnaître les besoins des personnes qui veulent réintégrer le marché du travail et qui ont une problématique de santé mentale. Je prends l'exemple que souvent les personnes nous disaient: Si j'avais des pauses plus régulières, plus souvent dans la journée, je pourrais surmonter mon problème de santé mentale et mieux réaliser ma tâche. Mais ça, il faut adapter le milieu, et ça, ce n'est pas des mesures qui coûtent excessivement cher. Mais c'est ce droit à l'accommodement; surtout quand on revient d'un épisode de problème de santé mentale, on a besoin soit d'adapter l'horaire de travail ou tout simplement des besoins spécifiques aux personnes en tenant compte de la réalité et de leurs besoins. Alors, ces mesures d'accommodement ne sont pas des mesures exagérées, ce sont des mesures tout à fait accessibles, qui pourraient être accessibles pour les personnes surtout dans le milieu du travail mais aussi au niveau du logement, au niveau du maintien à domicile ou à d'autres niveaux.
M. Williams: Merci.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Copeman: Merci, Mme la Présidente. M. Bousquet, vous avez parlé de cet aspect épisodique de santé mentale. Il y a très peu de monde qui sont touchés par une façon chronique de santé mentale. La loi, et, j'imagine, la politique sur la santé mentale, la Loi sur l'exercice des droits des personnes handicapées, Québec, prévoit une série de mesures, d'aide gouvernementale, mais également de protection de droits pour les gens qui sont considérés avec une limitation fonctionnelle. Quel est le défi pour un gouvernement de tenter d'appliquer ce genre de politique à des personnes qui sont ou qui vivent avec une limitation fonctionnelle ponctuelle? Parce que ça m'apparaît difficile dans le quotidien d'appliquer une telle politique à des gens qui, selon vous, ne vivent que des épisodes de limitation fonctionnelle dans leur vie quotidienne. Alors, comment est-ce qu'on fait l'arrimage de ces notions qui m'apparaissent très différentes, selon l'application?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Panneton.
Mme Panneton (Carole): On peut imaginer une période où une personne aurait un problème de transport pour... ? bon, quand on pense aux différentes MRC, bon, moi, je viens de la région de l'Estrie, alors il y a Sherbrooke où il y a du transport ? et qu'il y a un seul centre hospitalier à Sherbrooke, il peut y avoir un besoin de transport pour un suivi ou pour la fréquentation à une ressource communautaire qui est un milieu de vie quotidien. Les milieux de transport... La personne peut avoir besoin de fréquenter des ressources d'aide peut-être un six mois, un an, suite à une dépression. On peut appeler ça épisodique parce que ce n'est pas... contrairement à quelque chose de permanent qui va être pour les 10, 15, 20 prochaines années. Alors, avec une définition claire, inclusive santé mentale, que ce soit au niveau du transport, au niveau du suivi ou du support, de répit dépannage dans les CLSC, il y a peut-être une... qui va favoriser l'accès, la rapidité.
n(12 h 20)n On parlait de lourdeur administrative. En santé mentale, la difficulté, c'est la reconnaissance du besoin, malgré que c'est à court terme. Souvent, ces personnes-là, si le diagnostic n'égale pas un diagnostic reconnu, sévère et persistant, bon, s'il n'est pas dans la liste, le besoin est difficilement reconnu. Alors, si on reconnaît que l'épisodique avec... la reconnaissance de la limitation fonctionnelle... J'ai entendu tantôt: C'est une situation de handicap. Alors, pour moi, la clarification de ça pour tous les ministères, avec une instance qui va donner des directives claires, va faciliter l'accès à des services concrets.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Foisy, très rapidement, s'il vous plaît, parce que j'ai une autre personne qui veut poser des questions, et puis le temps court.
Mme Foisy (Constance): Je voulais juste rajouter que, quand on parle d'épisodique ou d'un problème de santé mentale ponctuel, ça ne veut pas dire que ça dure une semaine. Ça peut être un épisode qui peut durer un an, deux ans, trois ans. Mais ce n'est pas quelque chose de permanent dans la vie. Mais, pendant cette période-là, si la personne, elle n'a pas l'aide nécessaire selon son besoin et non selon une liste de besoins qui a été établie d'avance, bien, la chronicité du problème, elle va s'installer, et le problème va s'aggraver. Et c'est là que ça vient, que ça amène...
Comme je disais tantôt dans mon exemple de mère qui a besoin d'aide avec son enfant, c'est que, si on ne l'aide pas là, le temps qu'elle en a besoin, ça finit par un problème plus grave, que là c'est rendu judiciarisé avec la DPJ, les problèmes d'adoption. Et puis, là, c'est rendu une mère incompétente. Puis, pourtant, au départ, elle aurait juste eu besoin d'aide à domicile pendant un an, deux ans. On l'aurait fait là au lieu de placer ses enfants, et elle ne se serait pas ramassée avec des enfants en famille d'accueil, une famille toute désorganisée, éclatée. Quand on parle d'épisode, de problème ponctuel, ça en est. Ça peut durer trois ans. Ce n'est pas nécessairement permanent, mais ça ne veut pas dire que c'est une semaine non plus.
M. Copeman: C'est de faire de la prévention.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je suis désolée, mais j'ai vraiment... on dépasse.
Mme Foisy (Constance): C'est de la prévention.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de Joliette, il vous reste trois minutes.
Mme Lespérance: Merci, Mme la Présidente. M. Bousquet, Mme Provencher, Mme Panneton, monsieur... j'ai apprécié énormément vos propos. Pour avoir, dans ma vie antérieure, travaillé pendant 15 ans comme infirmière-chef avec les gens aux prises avec des problèmes de santé mentale, j'ai aimé ce que j'ai entendu aujourd'hui. J'aime votre préoccupation. Par contre, la question que je me pose, c'est: En quoi la définition amènerait une simplification des difficultés que vivent les gens qui sont aux prises avec la santé mentale?
Ce qu'on a toujours eu comme difficulté, comme intervenants dans le milieu, c'est lorsqu'on vient pour aider ces gens-là à se retrouver un emploi, à ce moment-là, ils ne sont pas admissibles nulle part parce qu'ils sont, de façon épisodique, diminués ou incapables de supporter la cadence d'un travail normal. Alors, ce qu'on fait comme société, c'est qu'on les exclut effectivement, on se prive d'une richesse humaine qu'on pourrait retourner au travail, très grande. Comme gouvernement, quelles seraient les actions qu'on devrait poser ou comment on devrait mettre ça dans une loi pour s'assurer que ces gens-là qui éprouvent une difficulté pendant un an, pendant deux ans, effectivement... mais qui, s'ils étaient dans un environnement adapté, avec effectivement un support à l'employeur au niveau monétaire, pourraient retrouver un sens à leur vie et une dignité par le travail?
Mme Provencher (Doris): Alors, je peux répondre, s'il vous plaît, à une partie...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Provencher.
Mme Provencher (Doris): Oui, une partie en termes de... C'est sûr, écoutez, on ne s'attend pas qu'il y ait de loi miracle et que, avec l'adoption d'une loi, il y ait des changements profonds dans notre société. Sauf que, si on se ramène en 1989, lors de l'adoption de la politique de santé mentale, un des buts de cette politique, c'était de changer la vision des gens, bon, entre autres, qui travaillaient auprès des personnes vivant un problème de santé mentale. On entend de moins en moins dans notre société parler de malades mentaux, ou de fous, ou de... Donc, ça a une incidence.
Moi, je pense qu'il faut que le mot d'ordre, ou si ça vient du gouvernement, si ça vient de... ça va aider à ce qu'il y ait des changements qui se passent au niveau de la société. On sait que ça peut être long, ça va être très long, et ce n'est pas que l'action du gouvernement qui va faire en sorte que ça change. Mais, si le mot d'ordre part du gouvernement, en disant: Bon, de un, de les nommer, les personnes qui vivent un problème de santé mentale, dans le cadre de la loi assurant les droits des personnes ayant des limitations fonctionnelles, mettons ? on l'appellerait comme ça ? bien, pour nous, ça envoie un message au niveau social: ils sont vraiment inclus, et voici, on les nomme. Parce que, de toute façon, les personnes qui vivent un problème de santé mentale sont incluses dans ce projet de loi là, alors pourquoi ne pas les nommer et envoyer un message au niveau de la société?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, voilà, merci, c'est malheureusement tout le temps dont nous disposons. S'il vous plaît, je demanderais aux collègues de bien vouloir rester à leur place pour quelques minutes, nous avons une petite technicalité à régler. Alors, monsieur, mesdames, merci de votre participation à cette commission.
Comme vous le savez, nous avons eu des échanges ce matin et, effectivement, il y a eu plusieurs échanges de part et d'autre, on aurait un changement à l'horaire. Donc, à ce moment-ci de nos travaux, j'aurais besoin d'un consentement pour que nous puissions reprendre nos travaux à compter de 13 heures.
Des voix: Consentement.
Une voix: Il y a consentement.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Il y a consentement?
Une voix: Oui.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je comprends donc que je suspends les travaux jusqu'à 13 heures pour qu'on puisse rencontrer le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 12 h 28)
(Reprise à 13 h 4)
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, mesdames et messieurs, s'il vous plaît, la commission va reprendre ses travaux.
Alors, nous rencontrons donc, tel que prévu, l'Alliance québécoise des regroupements régionaux pour l'intégration des personnes handicapées. Alors, je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire, que par la suite il y aura la période d'échange. Je vous demanderais, s'il vous plaît, de parler assez lentement pour qu'on puisse faciliter les choses pour l'interprète en langage gestuel.
Alors, vous êtes M. Lévesque?
Alliance québécoise des regroupements
régionaux pour l'intégration
des personnes handicapées (AQRIPH)
M. Lévesque (Pierre-Yves): Oui.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, bonjour M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves): Bonjour, madame.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Lévesque, vous êtes le porte-parole?
M. Lévesque (Pierre-Yves): Oui.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Si vous voulez nous présenter les gens qui vous accompagnent.
M. Lévesque (Pierre-Yves): Bonjour, tout le monde... Pour faciliter la tâche, je vais demander à Isabelle de répéter pour moi.
Mme Tremblay (Isabelle): Alors, bonjour, mon nom est Pierre-Yves Lévesque. Je suis président de l'Alliance québécoise des regroupements régionaux pour l'intégration des personnes handicapées. Et je vais demander, pour vous faciliter la tâche, à Isabelle de répéter pour moi. Isabelle, c'est moi.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Donc, vous êtes Isabelle Tremblay.
Mme Tremblay (Isabelle): Je suis Isabelle Tremblay, la coordonnatrice de l'AQRIPH.
M. Lévesque (Pierre-Yves): Je vais demander aux autres personnes de se présenter.
Mme Lamirande (Cyd): Bonjour. Mon nom est Cyd Lamirande. Je suis coordonnatrice du Regroupement des organismes de personnes handicapées des MRC de Kamouraska, Rivière-du-Loup, Témiscouata et Basques et vice-présidente de l'AQRIPH.
M. de Massy (Philippe Robert): Moi, je suis Philippe Robert de Massy. Je suis avocat et j'ai été consultant pour la préparation du mémoire pour l'AQRIPH. Bonjour.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci. Vous pouvez procéder.
M. Lévesque (Pierre-Yves): Avant d'aller plus loin, je veux mentionner deux points importants. Dans les propositions du mémoire, on parle... Avez-vous compris? On va répéter.
Mme Tremblay (Isabelle): Alors, avant d'aller plus loin, je veux mentionner deux points importants. Dans les propositions du mémoire, on parle du principe d'accommodement. Et je voudrais qu'on applique déjà ce principe en vous demandant un peu plus de temps. On sait qu'on a 20 minutes mais, comme j'ai des problèmes d'élocution et qu'Isabelle doit répéter pour moi, je vais vous demander plus de temps, ça va nous donner l'occasion de déjà appliquer ce principe d'accommodement.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, écoutez, je vais donc demander s'il y a consentement, parce que le temps que vous allez prendre en plus sera enlevé bien sûr du temps des parlementaires pour l'échange, parce qu'on n'a pas le choix de respecter un certain horaire. Je comprends donc qu'il y a consentement. Il n'y a pas de problème.
M. Lévesque (Pierre-Yves): Deuxième point. On parle d'une loi des personnes handicapées. Les personnes handicapées sont plus d'un million au Québec. Les personnes handicapées manquent de visibilité au niveau de la population. Habituellement, toutes les commissions parlementaires sont diffusées à la télévision. On est conscients que la commission parlementaire n'est pas diffusée au public. Donc, on peut, encore une fois, se poser des questions... des personnes handicapées. Pourquoi est-ce que toutes les commissions sont diffusées et pourquoi cette commission-là n'est pas diffusée...
n(13 h 10)nMme Tremblay (Isabelle): Alors, le deuxième point, on parle d'une loi des personnes handicapées. Les personnes handicapées sont plus qu'un million au Québec, et on sait qu'il y a un manque de visibilité auprès de la population des personnes handicapées. Actuellement, toutes les commissions parlementaires sont télédiffusées, on est conscients que la commission parlementaire sur le projet de loi n° 155 n'est pas diffusée. On peut se poser des questions sur la place des personnes handicapées au sein de la société: toutes les commission sont télédiffusées et celle-ci ne l'est pas. Quand on sait que le projet de loi n° 155 est un débat de société, on est déçus que celui-ci ne soit pas télédiffusé. C'était un petit message.
M. Lévesque (Pierre-Yves): ...
Mme Tremblay (Isabelle): Ce n'est peut-être pas toutes les commissions, mais la plupart sont télédiffusées.
M. Lévesque (Pierre-Yves): On va commencer, si on veut finir.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lévesque (Pierre-Yves): Il ne faut pas profiter des bonnes choses. Donc, je vais demander à Cyd... pour vous expliquer l'AQRIPH... de vous expliquer ça.
Mme Tremblay (Isabelle): Alors, on va commencer, il ne faut pas profiter des bonnes choses si on veut finir. C'est Mme Cyd Lamirande qui va vous présenter en quelques minutes l'AQRIPH. On sait que vous nous connaissez, mais elle va faire une brève présentation.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Alors, Mme Lamirande.
Mme Lamirande (Cyd): Merci. M. de Massy va passer un résumé du mémoire qui vous a déjà été déposé. Alors, ça va être plus facile pour la consultation.
Alors, je ne m'éterniserai pas au niveau de l'Alliance des regroupements régionaux, simplement pour vous dire qu'on regroupe 19 regroupements régionaux qui sont présents dans toutes les régions du Québec, dans toutes les MRC du Québec et regroupent plus de 350 organismes de base qui défendent les droits et les intérêts des personnes handicapées sur une base quotidienne. Les buts de l'AQRIPH, c'est vraiment de rassembler les regroupements régionaux, de prendre des positions ensemble et de faire des revendications auprès des instances décisionnelles. Donc, c'est une instance qui est vraiment... Nous, on se plaît à l'appeler l'instance nationale de concertation des régions. Vous aurez plus de détails dans le mémoire.
Je passerais immédiatement à l'introduction de ce mémoire. Alors, bon, vous savez que je n'apprendrai rien à personne en disant qu'il y a eu de nombreuses tentatives de réforme de la loi n° 9 qui assure l'exercice des droits des personnes handicapées. Cette loi-là date de 1979. Au cours des dernières années, oui, il y a eu plusieurs tentatives mais, surtout du fait de la finalisation du transfert des programmes d'aide matérielle de l'Office, il y avait une nécessité de revoir les mandats de l'Office quant à la promotion des droits et à la défense des intérêts des personnes handicapées.
Le transfert des programmes, selon nous, a rendu plus mou ? et je le mets entre guillemets ? la mission de l'Office parce que, au cours des années, les parents, les personnes qui avaient des limitations voyaient un peu l'Office comme le défenseur de leurs droits, par aussi le fait qu'il y avait des programmes d'aide matérielle et c'étaient vraiment des gestes concrets pour eux. Alors, le fait que ces programmes-là aient été transférés à la volonté du milieu associatif, tout de même, là, dans les années 1986, 1987, a fait en sorte qu'on a constaté des lacunes majeures et qu'il y avait nécessité de réformer la loi.
Alors, sans plus attendre, je pense qu'on va passer davantage aux recommandations. C'est un petit peu pour ça que vous voulez nous entendre aujourd'hui. Alors, je vais demander à Pierre-Yves, peut-être, de présenter la recommandation générale au niveau du mémoire.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves): ...
Mme Tremblay (Isabelle): Vous la trouverez à la page 5 du résumé.
M. Lévesque (Pierre-Yves): ...
Mme Tremblay (Isabelle): Alors, pour commencer, c'est important que la loi que l'on veut modifier ait des dents. Et Pierre-Yves propose que je vous lise l'encadré qui est très important dans les circonstances. Alors, vous l'avez à la page du résumé. La redéfinition de la mission de l'Office ou de la définition de la mission de l'instance doivent passer par un texte de loi musclé, articulé, explicite, qui reconnaisse enfin sans ambiguïté des droits aux personnes vivant avec des limitations fonctionnelles, et crée des obligations envers ces ,personnes et donne de véritables pouvoirs à un Office réformé ou à une instance clairement chargée d'assurer la défense et le respect de leurs droits à l'égard de tous les secteurs et éléments de la société.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves): ...ce n'était pas long.
Mme Tremblay (Isabelle): Alors, c'est important, pour nous, que vous compreniez le message. De plus en plus, on manque de services. La loi doit avoir des dents et obliger des partenaires à jouer leur rôle pour qu'il y ait une véritable inclusion des personnes handicapées à la société.
M. Lévesque (Pierre-Yves): ...
Mme Tremblay (Isabelle): Alors, on trouve que le projet de loi parle beaucoup du rôle de l'Office. On voulait mentionner aux parlementaires ce qu'on trouve bien et qu'est-ce qui va moins bien avec l'Office des personnes handicapées. À l'AQRIPH, on a fait une consultation auprès des regroupements régionaux et ce qui est ressorti de cette consultation-là, c'est qu'au niveau régional ça allait quand même assez bien avec les organismes et les bureaux régionaux de l'Office. Les gens semblaient satisfaits. Il y avait une bonne écoute et des bonnes relations. Le problème, c'est plus au niveau national. On reproche, entre autres, à l'Office le manque de visibilité, le fait qu'il ne peut faire modifier des lois et qu'il y a un travail qui est fait, mais en vase clos.
Alors, on voit qu'au niveau régional les gens sont plus satisfaits qu'au niveau national, et vous allez voir tout à l'heure, dans nos recommandations, qu'est-ce qu'on attend, nous, de l'Office.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves): ...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. de Massy.
M. de Massy (Philippe Robert): Cyd et moi, allons, à tour de rôle, vous lire les recommandations, les lire rapidement, ce qui permettra de les assimiler et ce qui alimentera les questions par la suite.
n(13 h 20)n La recommandation 2. Ajouter un article 1.2 reconnaissant un certain nombre de droits. Et on vous propose une formulation ici: Toute personne handicapée est titulaire de tous les droits reconnus à toutes les autres personnes dans la société par la Charte des droits et libertés de la personne et l'ensemble de la législation québécoise. Afin de pouvoir assurer pleinement son inclusion dans tous les domaines de la vie sociale, elle doit se faire reconnaître en outre les droits particuliers suivants: le droit à l'inclusion sociale, scolaire et professionnelle; le droit à des services favorisant l'inclusion sociale, scolaire et professionnelle, ainsi que les services d'adaptation et de réadaptation adaptés à ses besoins ? et il n'y a pas de redondance ici; le droit à la compensation équitable de ses déficiences par les services requis et par le remboursement des coûts liés à la compensation des déficiences par des allocations non imposables ? c'est une question cruciale, ça fait des années que l'Office le réclame et c'est toujours une réalité qui n'est pas respectée; le droit à l'accommodement raisonnable dans tous les domaines de la vie; le droit à un plan de service individualisé et à des plans d'intervention le cas échéant; le droit de recevoir un diagnostic, dans tous les cas où le diagnostic est nécessaire à la reconnaissance du fait d'être une personne handicapée, pour donner accès à des adaptations ou à des services ? et, dans le mémoire, vous verrez qu'on fait allusion à la difficulté qu'ont les parents de jeunes enfants d'obtenir des diagnostics pour avoir des services, et on comprend très bien que parfois les professionnels sont prudents, ne veulent pas étiqueter un enfant trop tôt dans la vie; mais, par ailleurs, ça veut dire que les parents... parce que l'enfant n'est pas considéré handicapé, il n'a pas accès à des services; le droit à des mesures de protection contre les atteintes à ses droits et contre l'exploitation, que lui reconnaît l'article 48 de la Charte des droits et libertés de la personne; le droit à l'assistance et à l'aide de la personne de son choix.
La loi reconnaît le droit à l'assistance et à l'accompagnement d'une personne de l'Office, que la partie adverse ou le répondant est obligé de reconnaître, mais ne reconnaît pas le droit à la personne de son choix, comme le fait la Loi sur les services de santé et les services sociaux.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Lamirande.
Mme Lamirande (Cyd): Alors, le deuxième élément, la recommandation 3. On dit que le projet de loi n'impose aucune obligation financière. Ce que, nous, on recommande, c'est qu'on impose à l'instance ? et on précise l'instance, que ce soit l'Office réformé ou une nouvelle instance ? l'obligation d'évaluer ses besoins financiers pour atteindre les objectifs de la loi, mais aussi une obligation pour le gouvernement d'investir les fonds correspondant aux besoins. Il faut que la loi oblige le gouvernement à fournir à l'instance les ressources nécessaires à l'accomplissement de sa mission. Il faut également obliger le gouvernement à fournir à tous les ministères et organismes gouvernementaux les ressources financières requises par l'application de la loi en vue de permettre une inclusion réelle des personnes ayant des limitations fonctionnelles.
M. de Massy (Philippe Robert): La recommandation 4. Imposer à l'instance l'obligation, à partir des objectifs fixés pour les 15 orientations développées dans À part... égale ? il faut absolument retourner à ce document pour prendre des décisions ? de réaliser un état de situation et, de là, établir des mesures coercitives pour atteindre les objectifs visés.
Vous savez, c'est toujours très étonnant de voir, presque 20 ans après, ce document, de voir que chacune des expressions qui sont utilisées dans le document sont encore absolument à jour et s'appliquent intégralement.
Accorder au gouvernement un pouvoir de réglementer pour rendre obligatoire le respect d'un plan de redressement d'une situation dressé par l'instance. Il y a une amorce de reconnaissance de ce besoin dans le nouvel article 26.2. Il paraît essentiel en effet que l'instance ait plus qu'un pouvoir d'indignation. Il faut rechercher des moyens d'imposer la recherche et l'atteinte de résultats.
Imposer à l'instance l'obligation, dans la loi, de faire la revue de l'année, comme l'OPHQ l'a fait dans la revue de l'année 2001-2002, qui a vraiment été reconnue dans le milieu comme quelque chose de tout à fait louable, et de provoquer la convocation d'une commission parlementaire pour faire définir les mesures coercitives si les résultats escomptés ne sont pas rencontrés.
Imposer à l'ensemble des ministères, organismes et instances gouvernementales et paragouvernementales l'obligation de prévoir l'impact de tout nouveau programme, de toute nouvelle loi, de tout nouveau règlement sur la condition des personnes vivant avec une limitation fonctionnelle ? c'est ce qu'on appelle la clause d'impact; il y a d'autres intervenants, probablement, qui vous ont parlé d'une clause d'impact.
Accorder à l'instance, enfin, le pouvoir d'ester en justice contre les personnes ou organismes récalcitrants.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): À ce moment-ci, j'aurais besoin d'une précision. Est-ce que ces recommandations-là étaient déjà incluses dans votre premier mémoire, celui qui est parvenu à tous les membres de la commission?
Une voix: Oui.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Écoutez ? une question d'information ? je me rends compte que vous avez 23 recommandations. Si vous prenez la peine de toutes les lire, et tout ça, ça veut dire qu'on est à 19 minutes, et il n'y aura pas de possibilité d'échanges à ce moment-là, parce que ça va prendre tout le temps. Est-ce qu'il y a moyen de cibler? Parce que les membres de la commission ont déjà en main la majorité des recommandations que vous êtes à nous lire présentement.
M. de Massy (Philippe Robert): Un instant, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, je vous en prie.
Mme Lamirande (Cyd): Moi, je pensais juste qu'on avait convenu, dans le principe d'accommodement à Pierre-Yves, tantôt, qu'on dépasserait le 20 minutes et qu'il y aurait une réduction des temps avec les parlementaires.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, je suis tout à fait d'accord.
M. de Massy (Philippe Robert): ...sur le plan du temps parce que, moi, sur mon chronomètre, j'ai 11 minutes, 12 minutes à peu près, là.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): 19 m 57.
M. de Massy (Philippe Robert): Alors, je l'ai fait partir trop tard, hein! On est rendu à 19 minutes. Bon.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Là, on aurait à... C'est parce que je me rends compte qu'il n'y aura pas possibilité d'échange si on les lit.
M. de Massy (Philippe Robert): Tout à fait.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je serais tout à fait d'accord pour accommoder, je pense que les membres aussi, mais peut-être que... sur la lecture comme telle, il y a peut-être moyen d'organiser ça autrement.
M. de Massy (Philippe Robert): On va les passer l'une après l'autre, simplement en les expliquant brièvement.
Mme Lamirande (Cyd): En les expliquant brièvement, oui, oui, tout à fait. Alors, à la recommandation 5 qui touche la question de la vérification de l'utilisation des sommes, je vous donnerai simplement un exemple. À l'heure actuelle, il n'y a rien qui oblige à ce qu'on fasse état de l'utilisation des sommes, au niveau des services, pour les personnes handicapées. L'exemple le plus flagrant, c'est au niveau des commissions scolaires. Elles sont tenues de dire combien elles ont dépensé pour les personnes handicapées, mais elles ne sont pas tenues de dire combien elles ont reçu, parce que c'est dans l'ensemble de leur budget global. Donc, il y a impossibilité de faire une adéquation entre les sommes reçues et les sommes dépensées.
Donc, nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut qu'il y ait des moyens de vérifier ce qui entre et ce qui sort pour les personnes handicapées.
M. de Massy (Philippe Robert): C'est ça. Alors, dans la recommandation 6, vous avez dans le mémoire une discussion de la question du rattachement...
Une voix: ...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ça va être difficile, ça, hein! Alors, écoutez, il me semble qu'il faut ralentir le débit. Alors...
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Écoutez, on fera ce qu'on peut puis on prendra le temps qu'il nous reste de discussion, tout simplement.
M. de Massy (Philippe Robert): Vous me faites un signe, s'il vous plaît, si je vais trop vite, parce que je ne vois pas l'interprète.
Alors, il y a trois possibilités au niveau du rattachement de l'Office, l'intention ici étant d'assurer, comme interlocuteur au gouvernement, un ministère qui ne risque pas d'être en conflit d'intérêts. Donc, le choix principal, c'est l'Assemblée nationale ? comme d'ailleurs la Commission d'accès à l'information vous l'a demandé et peut-être d'autres organismes qui recherchent l'impartialité. Rattaché au bureau du premier ministre, comme d'autres conseils le sont, ou rattaché à un ministère qui ne rend pas des services, qui ne fournit pas des services comme le fait actuellement le ministère de la Santé. Et ce qui est le plus gros problème avec le ministère de la Santé, c'est que les personnes handicapées disent: On n'est pas des malades, on ne veut pas être associés à la question qui touche à la santé automatiquement dès qu'on parle de handicap.
Mme Lamirande (Cyd): Alors, à la recommandation 7, c'est vraiment qu'on ne parle plus de réduction des obstacles ou des limitations au niveau des personnes mais plutôt d'éliminer ces obstacles-là. Et on parle de reconnaître aussi le décret de 1988 qui disait que les personnes n'avaient pas à payer pour compenser leurs limitations fonctionnelles. Ce qu'on s'aperçoit, c'est que, avec la non-application de ce décret-là, les personnes s'appauvrissent parce que les gens ont des dépenses que la majorité des personnes ici au Québec n'ont pas. Donc, ces gens-là doivent s'appauvrir pour obtenir les services qu'ils ont besoin.
Alors, il faut vraiment, comme ça a été mentionné dans l'énoncé de droit de M. de Massy tout à l'heure, que l'allocation doive compenser les coûts mais que ce soit non imposable.
M. de Massy (Philippe Robert): Recommandation 8, très brièvement. C'est que l'Office ou l'instance qu'on définira ait l'obligation de voir à ce que le financement des organismes associatifs soit suffisant.
Mme Lamirande (Cyd): À la recommandation 9, c'est vraiment au niveau de la définition des personnes handicapées. Qu'est-ce que c'est? Alors, ce qu'on disait, c'était de reformuler l'article 1 g pour qu'il se lise comme suit: «Toute personne ayant une déficience entraînant une incapacité persistante et qui est sujette à rencontrer des obstacles dans l'accomplissement d'activités courantes.» Une définition qui se rapproche de celle proposée dans le projet de loi.
Alors, il faut vraiment, que, lorsqu'on parle de qualité ou de statut de personnes handicapées, que ce soit déterminé, qu'il y ait une instance, et ça, ce qu'on dit, c'est que ça se détermine à un endroit et que ce soit applicable par la suite de façon transversale dans l'ensemble de l'appareil gouvernemental et que les personnes n'aient plus à vivre une définition en fonction du service dont elles ont besoin ou du ministère auquel elles s'adressent.
M. de Massy (Philippe Robert): Alors, définition de l'objet de la loi. Ici, il y a un article qui définit... un nouvel article dans la loi qui définit l'objet de la loi. Nous aimerions qu'il soit reformulé, et je pense que le mieux que je puisse faire, c'est tout simplement de le relire avec vous. Je crois que c'est important de sentir l'intention qui est derrière ça: «La présente loi vise à assurer la reconnaissance et l'exercice des droits des personnes handicapées en procurant à celles-ci une véritable insertion dans la société par l'adaptation de leur milieu de vie à leurs besoins et par la compensation équitable de leur déficience ou limitation fonctionnelle, et en leur procurant, ainsi qu'à leur famille, les ressources qui assurent leur épanouissement, le développement de toutes leurs capacités et leur pleine participation à la société dans la dignité. C'est ça, la vocation... La mission de l'Office, c'est de faire ça. Alors, évidemment, on rappelle les orientations de À part... égale et puis cette question de la clause d'impact qui était définie comme un droit.
n(13 h 30)nMme Lamirande (Cyd): Alors, à la recommandation 11, c'est vraiment au niveau de la représentativité des personnes handicapées. On dit que les personnes handicapées doivent former la majorité du bureau de l'instance, que la présidence soit occupée par une personne particulièrement sensibilisée à la condition des personnes handicapées et, à compétences égales, une personne handicapée ou un parent d'une personne handicapée pourrait occuper cette fonction-là. On parle de la parité hommes-femmes et on parle aussi de la nécessaire collaboration du milieu associatif dans le choix de ces représentants au sein du bureau de l'instance.
M. de Massy (Philippe Robert): La recommandation 12, simplement, dit qu'il est inutile que les ministères et autres organismes siègent au conseil de... que ça nuit et que ça empêche l'OPHQ ou l'instance de prendre ses décisions de façon vraiment indépendante du gouvernement et de faire face ensuite aux différents ministères. Mais, par contre, il est très important qu'il y ait des répondants dans chaque ministère qui aient une certaine autorité pour recevoir les communications avec l'Office.
Mme Lamirande (Cyd): Alors, écoutez, au niveau des mandats, je ne m'attarderai pas nécessairement davantage, sauf qu'il y a eu consensus au niveau du milieu associatif sur la nécessité d'assurer une continuité et de faire en sorte que les gens qui vont siéger au bureau de l'instance puissent avoir le temps de faire des choses, mais aussi qu'ils soient imputables de ce choix-là et que, si ça ne marche pas, bien on ira avec d'autres personnes.
M. de Massy (Philippe Robert): La recommandation 14, elle est à propos de l'article 25 qui définit les devoirs, et il est important qu'on voie le rôle de l'Office comme étant celui d'un ombudsman, d'un véritable ombudsman pour les personnes handicapées, qu'il se considère et qu'il soit vu comme ayant une véritable indépendance à l'égard du gouvernement, et puis définir les obligations en termes beaucoup plus forts. Et puis le reste, je n'ai pas besoin de le relire, mais, en dernière analyse, imposer à l'instance l'obligation de développer une vision d'inclusion des personnes handicapées dans tous les aspects de la vie.
Mme Lamirande (Cyd): Alors, très simplement, la recommandation 15, ce qu'on veut, c'est que l'instance ait de réels pouvoirs, qu'on arrête de parler de devoirs et de pouvoirs, mais qu'on puisse peut-être, à la limite, fusionner les articles 25 et 26 et faire en sorte que cette instance-là puisse agir concrètement et efficacement pour faire respecter les droits des personnes handicapées et de leurs familles.
M. de Massy (Philippe Robert): Et, la recommandation 16, obliger les ministères et organismes qui sont interpellés à collaborer, ce n'est pas... Un exemple, en milieu scolaire, c'est extrêmement difficile d'assurer cette coordination, voire parfois impossible. Les centres de réadaptation ne sont jamais, jamais sollicités par les milieux scolaires et, en fait, veulent peu ou pas leur parler. Et, c'est incompréhensible, ça, c'est les organismes qui planifient pour les personnes handicapées.
M. Lévesque (Pierre-Yves): ...
Mme Tremblay (Isabelle): Alors, écoutez, on va arrêter ici les recommandations, vous les avez dans votre dossier, vous en avez pris connaissance, on a attiré votre attention, là, sur quand même les plus importantes. Mais étant donné le temps... Vous avez respecté notre demande au niveau des difficultés d'élocution de Pierre-Yves, mais on voudrait quand même entendre les parlementaires aussi. Donc, on passerait aux échanges avec vous.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Alors, je comprends qu'on est prêt à passer aux échanges. C'est vrai que les parlementaires ont sûrement des questions à poser, alors je cède immédiatement la parole à Mme la ministre pour le début des échanges.
Mme Maltais: Merci beaucoup. Je salue les gens de l'AQRIPH, que je suis heureuse de retrouver aujourd'hui. C'est vraiment un plaisir. Je vous transmets aussi les salutations du ministre Roger Bertrand qui, malheureusement, a eu... Vraiment, une raison de force majeure l'empêche d'être ici, mais il tenait à ce que je vous transmette ses salutations.
Je vous remercie pour le travail qui transparaît dans ce mémoire. Il est évidemment que, s'il y a tant de recommandations, c'est que vous avez fouillé de façon très pointue le projet de loi et vous voulez vraiment une amélioration des personnes handicapées. Vous êtes attachés à cet outil qu'est le projet de loi, je vois que vous avez travaillé très fort à le bonifier.
Avant d'aller dans des recommandations plus spécifiques, parce qu'il y en a beaucoup, hein... C'est très, très intéressant, ce que vous amenez. Vous allez vraiment article par article quasiment. Vous pourriez être assis ici, à la table, quand on va faire l'étude article par article, mais c'est là un devoir de parlementaire, une responsabilité de parlementaire.
Il y a quand même deux grandes recommandations, enfin deux choses qui interpellent l'esprit de la loi: un, la définition de «personne handicapée»; et, deux, la définition de ce que devrait être l'Office ou une instance. Alors, j'irai d'abord sur la première, sur la définition de la personne handicapée.
Vous dites... Vous allez, vous, spécifiquement que les personnes handicapées sont des personnes qui vivent avec quelque chose de... un phénomène persistant. Le mot «persistant» est important pour vous, alors qu'on vient d'entendre d'autres mémoires, d'autres groupes qui sont venus nous dire que, par exemple, dans le domaine de la santé mentale, il fallait agir pas nécessairement seulement quand il y avait quelque chose de persistant, parce qu'on pouvait empêcher quelque chose de s'aggraver, une incapacité de s'aggraver ou une incapacité temporaire de devenir une incapacité permanente, si je peux mieux m'exprimer. J'aimerais vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. de Massy.
M. de Massy (Philippe Robert): Oui. On a beaucoup de problèmes avec cette question-là. Ce qu'on a voulu vraiment enlever de la définition qui était proposée, c'était le terme «significative» pour éviter que certaines formes de handicaps qui ont des conséquences sociales absolument... parfois terrifiantes soient exclues. Et, donc, on a essayé d'avoir une approche légère et de prendre les termes qui étaient proposés.
Sur la question du «persistant», moi, je pense que la plupart des affections psychiatriques seront considérées comme des phénomènes qui sont persistants. Ce n'est pas une grippe. Au fond, «persistant» veut dire quelque chose qui n'est pas simplement une fièvre qui dure trois jours. C'est quelque chose qui ou est récurrent ou bien qui est de façon... Et, il faut lire le «persistant» avec ce qui suit, il faut que ça affecte la personne dans sa capacité d'exercer ses fonctions de citoyen, au fond. C'est ça, le lien. Alors, dès le moment où on a une personne qui est affectée dans sa capacité de faire son quotidien, ce qui est le cas de la maladie mentale, bien il n'y a pas... Bien, à mon avis, pas de problème, on est devant quelque chose qui n'est pas une grippe.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre.
Mme Maltais: Donc, si on enlève le mot «significative», ce que vous désirez, ça n'exclut pas, par exemple, des déficiences légères, comme la déficience intellectuelle ou des choses comme ça.
M. de Massy (Philippe Robert): Voilà. C'est ça. C'est pour ne pas que... pour éviter que, un jour, on dise: Oui, mais la loi dit «significative», donc «légère», ce n'est pas significatif.
Mme Maltais: Non, non. Vous enlevez...
M. de Massy (Philippe Robert): Je vous fais remarquer une chose...
Mme Maltais: C'est ça, pour inclure... Oui. O.K.
M. de Massy (Philippe Robert): C'est pour l'inclure, parce que vous savez que, actuellement, dans la liste des incapacités au ministère de l'Éducation, la déficience légère, elle a disparu. On n'a plus de chiffres du tout sur la déficience légère en milieu scolaire alors que ce sont des élèves qui ont besoin de soins et de services.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Lamirande, vous vouliez ajouter?
Mme Lamirande (Cyd): Oui. C'est, bien, un petit peu en complément de M. de Massy, c'est qu'on sait pertinemment que plusieurs parents ont de la difficulté à faire reconnaître les services pour leurs enfants qui ont, exemple, une déficience intellectuelle légère, parce qu'on leur dit que ce n'est pas assez significatif. Moi, je pense que les parents sont très bien placés pour savoir si c'est significatif ou non. Et, bien souvent, il va y avoir une connotation ou une comparaison avec des troubles d'apprentissage, ce qui fait en sorte que les parents ? et passez-moi l'expression ? sont barouettés d'un bord et de l'autre pour pouvoir obtenir des services pour leur enfant. Alors, le terme «significatif» peut pénaliser certains types de clientèles, et c'est ce qu'on voulait éviter.
Quant au terme «persistant», je ne voudrais pas que le terme «persistant» soit associé nécessairement à une période de temps. On ne peut pas dire: Telle période signifie que c'est persistant ou une autre période, ce n'est pas persistant. Je pense qu'il faut avoir une souplesse dans l'interprétation de la loi qui va faire en sorte que personne ne va être lésé et que tous vont avoir les services auxquels ils ont droit.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre.
Mme Maltais: D'accord. Merci beaucoup de cette clarification. Il y en a une autre. Sur ce que pourrait être une instance, je veux bien clarifier quelle est votre priorité. Si on veut que ladite instance soit associée au bureau du premier ministre, par exemple, parce que c'est une des propositions que vous faites, dans l'ordre, là, c'est Assemblée nationale, premier ministre ou un ministère. Automatiquement, c'est pour qu'elle ait des pouvoirs et qu'elle ait le pouvoir de mobiliser et d'actualiser, de faire bouger les choses, entrer en action.
n(13 h 40)n Toutefois, du même souffle, vous voulez qu'elle soit un ombudsman. Or, le principe d'un ombudsman, c'est d'être détaché et de pouvoir commenter. D'ailleurs, une des choses que vous reprochez à l'Office... Et vous avez des choses que vous dites: Bon, ça, c'est bien fait, mais une des choses qu'on ne comprend pas au niveau national, c'est que l'Office ne soit pas assez, mettons, agressif, ait plus de... soit meilleur dans la défense, dans la promotion des droits, dans la défense des droits. C'est ce que peut faire effectivement un ombudsman, mais pas quelque chose qui est rattaché au premier ministre. Alors, si vous aviez une priorisation des... Parce qu'il y a un choix à faire, là, à un moment donné, si vous aviez une priorisation, quelle est votre vision, véritablement, du rôle de l'Office?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Lamirande.
Mme Lamirande (Cyd): Écoutez, nous, je pense que c'est vraiment, si on avait un choix à faire... Quoique... En tout cas, je ne voudrais pas me prononcer, là, pour l'ensemble du milieu associatif, je pense qu'on parle plus d'un ombudsman. On veut une instance indépendante et vraiment efficace. C'est ce qu'on souhaite. Qu'on la rattache à l'Assemblée nationale, exemple, comme le Protecteur du citoyen, à ce moment-là, nous... Je pense que ce n'est pas nécessairement dans la nature de l'instance, mais dans ce qu'elle est capable de faire. Ce qu'on a constaté au cours des 20 dernières années, c'est qu'il y avait des lacunes majeures et que l'Office n'avait pas nécessairement les pouvoirs nécessaires. Alors, nous, notre souhait, je pense que... Et, moi, mon intention n'est pas de débattre cet après-midi du lien ou du nom de l'instance, mais c'est vraiment que ce soit une instance qui puisse faire des choses, qui ait de réels pouvoirs. C'est ce que les personnes handicapées souhaitent.
Mme Maltais: ...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Un instant, Mme la ministre. M. Lévesque, vous vouliez ajouter.
M. Lévesque (Pierre-Yves): ...c'est très important qu'on comprenne ce message-là.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme Tremblay.
Mme Tremblay (Isabelle): Alors, l'important, pour nous, on pense que c'est à vous, les parlementaires... Vous êtes les mieux placés pour savoir de qui l'instance pourrait relever. L'important, c'est d'avoir une instance qui va avoir des dents puis qui va obliger les ministères et les organismes à jouer leur rôle auprès des personnes handicapées. Présentement, le secteur relève du ministère de la Santé. Le ministre, il est bien correct, là, mais on n'est pas des malades. Et, quand on parle de santé, on a encore à l'esprit que les personnes handicapées sont des personnes malades. Alors, c'est important que ce message-là soit compris.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ça va. Alors, Mme la ministre, est-ce que vous avez un autre...
Une voix: ...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. D'accord. Alors, M. le député de Nelligan.
M. Williams: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Et, certainement, merci, M. Lévesque, Mme Tremblay, Mme Lamirande et Me de Massy. Et félicitations, M. Lévesque, pour votre présentation et votre travail quotidien pour les personnes handicapées.
Je voudrais continuer un peu sur la question de l'instance, de vraiment bien comprendre qu'est-ce que le milieu veut, parce que, comme aujourd'hui et hier, l'Office, pendant le débat sur la loi n° 155, a pris une décision. L'Office n'a pas présenté de mémoire, l'Office a décidé d'être le conseiller du ministre. Ils ont joué ce rôle, et c'est un rôle important. Je ne mets pas que le ministre, particulièrement ce gouvernement, a besoin de bons conseils, mais il me semble que la balance est vraiment hors contrôle.
Vous avez proposé une liste des droits dans le premier article. Je voudrais vous entendre jusqu'à quel point vous voulez avoir comme pouvoirs pour cette instance. Est-ce que vous voulez qu'il puisse faire une évaluation si les lois sont respectées, les droits sont respectés, même aller faire les amendes? Est-ce qu'il peut pénaliser quelqu'un? Parce qu'on parle des dents, je suis d'accord, j'ai dit la même chose que vous, là, je voudrais avoir un office avec des dents, mais jusqu'à quel point? Quelles conséquences du non-respect de la loi est-ce que vous voulez avoir?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme Lamirande.
Mme Lamirande (Cyd): Si je peux me permettre de répondre, M. Williams, c'est que nous, on veut une obligation de résultat. Au cours des 20 dernières années, avec le transfert de ses programmes, l'Office a perdu, je ne dirais pas, sa raison d'être, mais les éléments qui la raccrochaient vraiment au niveau des personnes. Ce qu'on se rend compte à l'heure actuelle, c'est qu'il y a des lacunes majeures dans les résultats qui sont atteints dans les services au niveau des personnes handicapées. Nous, on veut qu'il y ait des changements concrets. Et, quand on parle, dans le mémoire, d'obligations de résultat, de mesures coercitives au besoin et, quand on parle, à un moment donné, de pouvoir d'ester en justice, s'il faut que ça aille jusque-là, ça devra aller jusque-là. Il faut que l'instance ait de réels pouvoirs pour faire en sorte que les droits soient vraiment respectés. On a beau faire un énoncé de droits dans une loi, si on n'associe pas à cet énoncé-là les pouvoirs pour faire respecter les droits, c'est comme si on ne les avait pas inscrits dans la loi. Donc, à notre sens, il faut vraiment qu'il y ait des mesures, des obligations de résultat et, au besoin, des mesures coercitives.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. de Massy.
M. de Massy (Philippe Robert): Oui. Alors, moi, je voudrais simplement signaler, là, parce que j'ai été présent tout ce temps-là devant les tribunaux, pendant les 20 années d'existence à peu près, là, pendant une bonne partie des 20 années d'existence de l'Office, et ce que je pense qui ressort du mémoire, l'intention, c'est que l'Office ait la possibilité... Non pas de pouvoirs coercitifs comme tels, là, il ne peut pas forcer à quoi que ce soit, mais il a le pouvoir de faire constater des violations à des lois. Il peut aller en cour pour un jugement déclaratoire, par exemple, ne serait-ce que pour faire constater que la directive du Conseil des ministres de 1988, je crois, sur la question de la compensation n'est pas appliquée. Alors qu'il puisse faire quelque chose, qu'il puisse intervenir dans des débats judiciaires, etc.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ça va, M. le député de Nelligan?
M. Williams: Merci, Mme la Présidente. Vous avez recommandé que, chaque année, nous allons avoir une évaluation devant la Commission des affaires sociales sur la question d'imputabilité. Je suis d'accord avec ça et je voudrais... Avec ça, j'appuie votre suggestion. Est-ce que vous, vous appuyez ma recommandation d'avoir une révision... Et nous ne sommes pas tant en train de négocier, là, mais est-ce que vous appuyez une obligation d'une révision de la loi chaque cinq ans?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves): ...avez-vous compris?
Mme Tremblay (Isabelle): Non. Je vais répéter...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme Tremblay. On veut être sûr d'avoir bien entendu, alors allez-y.
Mme Tremblay (Isabelle): Moi, je l'ai ri avant vous autres.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est ça. Ça fait que...
Une voix: ...pas l'autre...
M. Williams: Pas l'autre, vous avez raison.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Tremblay, pour monsieur...
Mme Tremblay (Isabelle): Alors, il n'y a pas de problème pour nous, M. Williams. Écoutez, il ne faut pas attendre 20 ans avant de réévaluer le travail de l'instance. C'est une bonne idée qu'à tous les cinq ans il y ait une telle évaluation. Et, ça ne veut pas dire qu'on doit attendre cinq ans, il peut y avoir des petites évaluations à chaque année.
M. Williams: Parfait. Mais, au moins, il y a une obligation, je suis d'accord. Et je ne veux pas attendre juste pour les dépôts des brefs d'avoir les projets de loi.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...
M. Williams: Mais, ça s'en vient, j'ai entendu, là...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...alors, allez-y, M. le député de Nelligan.
M. Williams: ...particulièrement avec...
M. Copeman: Dans la Constitution aussi...
M. Williams: Et particulièrement avec les commentaires de votre chef aujourd'hui. En tout cas, on ne commence pas ça aujourd'hui.
Je voudrais vous citer, M. Lévesque, dans votre excellente revue que je lis attentivement chaque fois que j'ai reçu ça à mon bureau: «Le projet de loi proposé par le rapport de la loi actuelle changera quatre trente-sous pour une piastre et, dans certains cas, il démontre un recul en ce qui a trait aux droits des personnes handicapées, et ce qui, pour moi, est inacceptable.»n(13 h 50)n Vous avez aussi, dans votre mémoire, parlé d'une évaluation des besoins financiers pour mettre en place les objectifs. Dans la note présentée par M. le ministre devant ses collègues au Conseil des ministres, et je cite: «Le renforcement et l'octroi de nouveaux pouvoirs à l'Office, tel que proposé dans le projet de loi, n'a aucune implication financière significative sur les budgets déjà consentis.» Voilà, il n'y a pas vraiment un changement.
Je voudrais savoir, selon vous, est-ce que la loi n° 155 doit être tablettée? Est-ce qu'on peut faire un vrai changement? Est-ce qu'on peut améliorer le projet de loi ou est-ce que il y a les problèmes assez graves que vous préférez de passer le message au gouvernement de refaire leurs devoirs? Je ne veux pas mettre les mots dans votre bouche, parce que, moi, j'ai travaillé d'essayer de... comment on peut améliorer le projet de loi, mais je voudrais vous entendre. Quand j'ai lu votre commentaire, je ne veux pas avoir quelque chose... Il y a une évaluation qui dit: Bon, c'est timide et ce n'est pas vraiment progressif. Mais, quand je vois les groupes aussi importants comme AQRIPH dire qu'il y a un recul, ça m'inquiète beaucoup. Je voudrais vous entendre sur ça.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves): ...je ne sais pas si j'ai répondu à votre question, là, mais j'ai essayé.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Tremblay, pour M. Lévesque.
Mme Tremblay (Isabelle): Quand j'ai fait mon commentaire dans le journal d'Ex aequo, c'est vrai que, pour moi, en tant que personne handicapée, le projet de loi, ça représentait quatre trente-sous pour une piastre. Si on sort une nouvelle loi comme est le projet de loi n° 155 actuellement, ça ne changera pas grand-chose. Ça prend des bonnes modifications. Je ne sais pas s'il faut mettre le projet de loi sur la tablette s'il reste comme ça, mais ça fait 25 ans qu'on demande des modifications, il ne faudrait pas se retrouver à faire la même chose pendant les 20 prochaines années avec une loi qui ne correspondrait pas à nos demandes, parce qu'on va se poser les mêmes questions pendant ces 20 années là. Si on veut que la société évolue, il faut qu'il y ait des obligations dans le projet de loi. Ça prend par contre une volonté politique, et ça, c'est vous qui l'avez, cette volonté politique là. Alors, ça prend des bonnes modifications, car la loi actuelle, je pense encore que c'est quatre trente-sous pour une piastre, le projet de loi. C'est ma lecture à moi, et j'espère que ça répond à votre question.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, le temps est terminé pour le député de l'opposition. Mme la députée de Joliette.
Mme Lespérance: Je vous remercie, vous avez fait un travail remarquable. Et, je n'ai pas de question, j'aimerais ça, continuer d'entendre la réponse de votre collègue qui avait besoin, lui aussi, de parler.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, M. de Massy.
M. de Massy (Philippe Robert): Si vous me permettez juste une petite remarque à la suite de l'intervention de Pierre-Yves, c'est que moi, j'ai travaillé à toutes les étapes de l'élaboration de ce mémoire, et ce qui me frappe d'abord, et je pense que... Et, c'est important que vous le sachiez, c'est le mémoire qui est le résultat d'un travail profondément démocratique, et il a été... Chaque mot a été pesé littéralement par l'ensemble de ce milieu que représente l'AQRIPH, ses 365 associations, d'une part.
D'autre part, le soin qui a été mis à commenter, comme on a dit, article par article, c'est justement parce que l'AQRIPH croit qu'il y a moyen d'améliorer le projet de loi et d'en faire... Mais il faut... Ça prend véritablement une volonté politique, et là vous remarquerez que le mémoire et la conclusion du résumé se terminent tous les deux sur le même thème: Il faut en faire une priorité, il faut considérer ça comme une priorité nationale.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, Mme Lamirande, sur la question de la députée de Joliette. Oui.
Mme Lamirande (Cyd): Je pense que ce que le milieu associatif de l'AQRIPH désire... ou ne désire pas, plutôt, c'est le statu quo. On ne veut pas avoir à revivre, comme l'a dit Pierre-Yves, pendant les 20 prochaines années la même situation, à se dire: On n'a pas vraiment d'instance qui va permettre que les droits soient réellement assurés.
Ce qu'on a constaté au cours des 20 dernières années, c'est que les gains les plus appréciables qui ont été faits en matière de droits l'ont été fait par la jurisprudence, par des décisions de la Cour suprême. Ce que les personnes handicapées ne veulent plus, c'est d'être obligées d'aller en Cour suprême pour obtenir le respect de leurs droits. Ce qu'on veut, c'est qu'au Québec on ait une loi qui permette que ces droits-là soient respectés sans nécessairement être obligé de passer par les tribunaux, que ce soit une loi applicable de façon transversale au niveau de l'appareil gouvernemental, que tous soient obligés de s'y conformer et que les personnes handicapées et les parents, beaucoup aussi, n'aient plus à se battre continuellement pour obtenir réponse à leurs besoins.
On sait... Tout le monde a des enfants, on se bat pour que nos enfants aient les meilleurs services possible. Mais imaginez des parents d'enfants et des personnes handicapées qui doivent se battre pour des choses qui nous semblent acquises, à nous, au quotidien, ne serait-ce que de rentrer dans un édifice ou de pouvoir accéder à une boîte de céréales dans l'étage du haut de l'épicerie. Il y a des gens qui doivent encore se battre pour réussir à obtenir ça. Tant que ce débat de société ne sera pas fait au Québec et qu'on n'aura pas qu'on n'aura pas une loi qui va rendre vraiment l'appareil gouvernemental imputable des décisions et des services au niveau des personnes, on n'aura rien acquis, on sera encore dans un état de statu quo, et c'est ça qu'on ne veut pas avoir. On veut vraiment que ça bouge et que ça change.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, Mme Lamirande. Alors, ça va, Mme la députée de Joliette. Mme la ministre, vous avez un commentaire. Il vous reste à peine quelques minutes, mais il restait quelques minutes au parti ministériel.
Mme Maltais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je pense que je vais faire un plaidoyer, un plaidoyer pour qu'on avance avec ce projet de loi là et qu'on ne le laisse pas sur une tablette. Un plaidoyer pour qu'il soit véritablement examiné, peu importent les soubresauts de la vie politique que nous pouvons voir bientôt. Mais, évidemment, dans un esprit de continuité, ça nous fera plaisir de continuer les travaux. Si jamais les soubresauts font qu'il y a un instant où on attendra, qu'on devra attendre un nouveau gouvernement, ça nous fera plaisir de continuer dans l'esprit de faire avancer la cause des personnes handicapées.
Je comprends qu'il y a débat sur quelle devrait être l'instance, comment donner un maximum de dents à une loi sur les personnes handicapées ou peu importe comment on l'appelle. Il y a quand même des avancées dans cette loi, ne serait-ce que dans mon domaine où on a travaillé très fort sur la stratégie d'intégration à l'emploi et en mouillant les partenaires du marché du travail. Il y a des avancées en transport. Il y a l'accommodement raisonnable.
Mais à l'intérieur actuellement de... Comme actualisation à l'intérieur de la façon dont est organisé l'Office dans le gouvernement, je pense qu'il y a une actualisation pour le rendre opérationnalisable, pour lui donner, là, à l'intérieur du gouvernement comme il est installé, un maximum de pouvoirs. Ce que vous amenez, c'est: Est-ce qu'on devrait aller plus loin, avoir un ombudsman peut-être? Peut-être, mais je pense que jusqu'ici les débat qu'il y a eu à l'intérieur des associations de personnes handicapées n'ont pas permis de se rendre jusque-là, à ce que j'ai compris. Et j'en ai été, vous le savez, de ces débats-là.
n(14 heures)n Donc, nous en sommes avec l'avancée... Je dirais, dans l'état du non-consensus actuel, c'est une avancée qui fait qu'il y a un dépôt et il y a enfin le débat. Il y a l'article 41 qui dit: Il faut revoir À part... égale et il faut absolument que... Il y a un délai, c'est trois ans, ça veut dire toute révision de tous les plans d'action, ça veut dire que, là, on va pouvoir discuter des objectifs et des résultats. Je peux vous dire qu'il y a une volonté, autrement dit, dans ce projet de loi, il y a une intention. Peut-être que, et je vous dis, le débat n'est pas fini entre associations et l'OPHQ et entre associations et le gouvernement, mais l'intention est d'avancer, là, alors c'est un plaidoyer.
Toutefois, je remarque que dans votre mémoire vous allez beaucoup vers la coercition et la judiciarisation. Comme organisme de défense des droits, trouvez-vous qu'on en est vraiment rendu là ou il n'y a pas encore du travail de promotion, de sensibilisation à faire?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Lamirande puis M. Lévesque, vous allez avoir le mot de la fin, parce que ça va être terminé après.
Mme Lamirande (Cyd): Je vais y aller rapidement, Mme la ministre, pour répondre. Ce qu'on dit justement dans notre mémoire, c'est qu'on ne veut pas avoir à passer devant les tribunaux pour que les droits soient respectés. On dit que les plus grandes avancées ont été faites via la jurisprudence; par contre, il ne faut pas nécessairement ne voir que ce moyen-là, et je pense qu'il faut vraiment se doter d'une façon de faire qui va nous éviter d'avoir recours systématiquement aux tribunaux pour avoir un respect des droits. Je pense que c'est ça qu'on veut.
Quant à l'instance, on n'a pas voulu se prononcer sur une nouvelle instance, un office réformé, c'est pour ça qu'on a parlé d'instance. Nous, ce n'est pas la nature de l'instance, c'est les résultats et les pouvoirs que cette instance-là aurait sur lesquels nous avons insisté, c'est plus dans ce sens-là que, nous, on a bâti notre mémoire.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Lévesque, pour le mot de la fin.
M. Lévesque (Pierre-Yves): J'ai toujours voulu avoir le mot de la fin. Pour répondre à Mme la ministre, peut-être que, oui, on est rendu à demander des obligations... Et je veux terminer... pour vous remercier d'avoir accepté de remplacer M. Bertrand... Merci, tout le monde, de votre attention.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme Tremblay pour M. Lévesque.
Mme Tremblay (Isabelle): C'est moi qui vais avoir le mot de la fin.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est vous pour M. Lévesque.
Mme Tremblay (Isabelle): Parce que Pierre-Yves disait: J'aime ça avoir le mot de la fin. Alors, c'est pour répondre à Mme la ministre. On est rendu à demander des obligations, ça fait 20 ans qu'on répète, qu'on fait de la promotion et de la défense des droits, mais il faut maintenant qu'il y ait des obligations.
Et je veux terminer en remerciant Mme Maltais d'avoir remplacé M. le ministre Bertrand. Et merci à tous de votre attention.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Lévesque, Mme Tremblay, M. de Massy, Mme Lamirande, je vous remercie infiniment pour votre participation aux travaux de cette commission. Je vais suspendre quelques instants pour permettre au prochain groupe de venir prendre place.
(Suspension de la séance à 14 h 3)
(Reprise à 14 h 6)
Le Président (M. Labbé): Alors, si vous permettez, j'inviterais maintenant l'Association du Québec pour l'intégration sociale à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. Nous allons poursuivre les audiences dans les secondes qui suivent. Merci.
Alors, si vous permettez, je demanderais votre attention. Je demanderais aux invités de bien vouloir prendre place. Merci. Alors, pour ne pas qu'il y ait de doute entre le fait que je sois un homme ou une femme, je vais sortir ma voix et vous demander de bien vouloir prendre place. Excellent!
Alors, sans plus tarder, nous avons le plaisir d'accueillir comme il se doit l'Association du Québec pour l'intégration sociale. Alors, j'ai compris à ce stade-ci que nous avons le plaisir de recevoir Mme Simoneau, je pense, qui va parler au nom du groupe. C'est ça? Mme Simoneau, vous allez avoir 20 minutes pour présenter votre mémoire. Ensuite, on aura aussi 20 minutes de chaque côté pour pouvoir échanger avec vous. Je vous inviterais donc à prendre la parole et à présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.
Association du Québec
pour l'intégration sociale (AQIS)
Mme Simoneau (Yolaine): Oui. Merci. À ma droite, Lucie Cholette, vice-présidente de l'AQIS; à ma gauche, Diane Milliard, directrice générale de l'Association; et Lise Cloutier, de l'Association du Québec. Je vais faire la présentation en deux parties. Mme Cholette va continuer, elle va...
Alors, l'Association du Québec pour l'intégration sociale est un organisme provincial voué à la cause des personnes ayant une déficience intellectuelle et de leurs familles. L'AQIS regroupe 75 associations à travers le Québec. Ses membres sont principalement des associations de parents, mais elle compte également des membres affiliés dont des comités d'usagers, des centres de réadaptation et divers regroupements de personnes handicapées.
Depuis sa fondation, en 1951, l'AQIS a été au coeur des changements sociaux, notamment le grand courant de la désins. Actuellement, l'AQIS se consacre essentiellement à la défense des droits et à la promotion des intérêts des personnes ayant une déficience intellectuelle et de leurs familles. L'objectif ultime est de favoriser l'intégration et la participation sociale de la personne dans la communauté.
L'AQIS considère essentiel de faire connaître sa position sur le projet de loi n° 155, Loi modifiant la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées et d'autres dispositions législatives. La révision en cours nous apparaît en effet comme une opportunité majeure d'améliorer les conditions de vie des personnes handicapées. Nos commentaires s'inscrivent par ailleurs dans la mission fondamentale de notre organisme à l'égard des personnes ayant une déficience intellectuelle et de leurs familles.
Avant d'aborder le projet de loi lui-même, nous trouvons important de situer de manière brève le contexte qui entoure la présente démarche. Notre expérience le démontre, au Québec, le développement des services de soutien à l'intégration sociale s'est en bonne partie effectué de manière décousue et en fonction des pressions sociales, politiques et économiques. Selon le contexte, la question des personnes handicapées est donc sujette à demeurer au second plan ou à éveiller de façon ponctuelle un surcroît d'intérêt.
Par ailleurs, en 1971, la Commission d'enquête sur la santé et le bien-être social, la commission Castonguay-Nepveu, semblait découvrir les personnes handicapées et le fait que celles-ci n'étaient pas reconnues comme des citoyens à part entière.
Par la suite, en 1977, le gouvernement du Québec publiait un livre blanc dont la préface, cosignée par René Lévesque, révélait à son tour l'ampleur de la situation et déplorait les conditions de vie intolérables des personnes handicapées. C'est dans cette foulée qu'a été adoptée, en 1978, la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées, créant l'Office des personnes handicapées et ses services d'aide matérielle.
n(14 h 10)n Quelques années plus tard, de nombreux partenaires sociaux s'unissent pour dénoncer l'urgence de la situation face aux grandes iniquités qui persistent. De cette mobilisation naît la politique d'ensemble À part... égale dont les grandes orientations sont adoptées en 1996 par le gouvernement du Québec. C'est dans le sillage de cette politique que le programme d'aide matérielle de l'Office est transféré aux instances concernées et, jusqu'à la fin des années 1980 et durant les années 1990, plusieurs mesures publiques de soutien à l'intégration se déploient graduellement sur des voies parallèles.
Où en sommes-nous maintenant? Bien sûr, le tableau a changé. Les personnes handicapées se chiffrent désormais à plus de 1 million, soit 13 % de la population du Québec. Elles vivent en majorité dans la communauté. Au-delà de 150 programmes gérés par 16 ministères et organismes leur sont destinés. Mais cette évolution s'est-elle concrétisée par une réelle amélioration de leurs conditions de vie et de leur participation sociale?
Plus de 24 ans après l'adoption de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées, force est de constater que les personnes handicapées se butent encore à de nombreux obstacles qui restreignent de manière durable leur participation à la communauté. La plus récente enquête québécoise sur les limitations d'activités le confirme encore aujourd'hui, la présence d'une incapacité se conjugue non seulement à de faibles revenus, mais à une scolarisation moins élevée, de l'isolement social et de l'exclusion du marché du travail.
Quant aux personnes ayant une déficience intellectuelle, le bilan réalisé en 2001 dans le cadre du lancement de la politique de l'intégration sociale à la participation sociale nous montre tout le chemin qui reste à parcourir. Leur intégration est davantage une intégration physique qu'une réelle participation sociale. Pour les jeunes, l'accès à l'école régulière demeure l'exception plutôt que la norme. La plupart des adultes ont des revenus inférieurs au seuil de la pauvreté et provenant des prestations de l'assurance emploi. Le marché du travail leur demeure en bonne partie inaccessible et un bon nombre sont confrontés à l'isolement social.
À ce portrait s'ajoute le fait que les personnes handicapées font sûrement partie des groupes les plus touchés par les décisions prises ces dernières années en matière de finances publiques telles que l'engagement à l'égard du déficit zéro et les réductions budgétaires. Ces coupures se traduisent dans plusieurs secteurs par l'allongement des listes d'attente ou une réponse à la pièce aux besoins, par l'ajout des sommes accordées de manière ponctuelle. Ainsi, les conditions d'accès du programme de maintien à domicile n'ont cessé de se détériorer. Dans un domaine qui touche le coeur même de la dignité humaine, les personnes se voient fréquemment obligées d'assumer elles-mêmes les frais pour obtenir des services essentiels ou carrément en être privées.
Dans un tel contexte, on le comprend, l'adaptation des familles est lourdement hypothéquée par l'obligation qu'elles ont de composer avec un système fragmenté et qui leur semble souvent impuissant à les soutenir dans leur rôle. La subvention du programme de soutien aux familles ne couvre qu'une mince partie des besoins et, jointe à l'insuffisance des services, la surcharge financière encourue amplifie grandement la pression des parents.
Ce survol n'a pas pour objet de se livrer à une surenchère des difficultés rencontrées. Il vise à questionner la cohérence entre les principes d'équité admis par la société québécoise et les actions posées à cet égard. Comment se fait-il qu'encore aujourd'hui la question des personnes handicapées soit si facilement écartée des priorités? Pourquoi les personnes handicapées sont-elles habituellement peu présentes comme groupe cible dans les grands chantiers d'intervention gouvernementale? Comment expliquer que, dans leur déclaration de services aux citoyens, seulement 15 % des ministères et des organismes ont porté une attention à l'adaptation de leurs services aux personnes handicapées?
Dans son bilan de l'action gouvernementale pour 2001-2002, l'Office des personnes handicapées conclut ainsi cette revue annuelle: Comment se fait-il que, 20 ans après l'Année internationale des personnes handicapées et la mobilisation qu'elle a engendrée, il faille encore rappeler constamment l'importance d'adapter les politiques, les programmes et les façons de faire pour éviter l'exclusion et la mise à l'écart d'une forte proportion de la population québécoise?
Du point de vue de l'AQIS, à l'heure où la reconnaissance des droits et des besoins des personnes handicapées dépend encore largement du bon vouloir de chacun, la révision de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées prend tout son sens.
Un des aspects importants du projet de loi est la proposition d'une nouvelle définition de la personne handicapée. On le sait, en plus d'établir qui sont les personnes visées par la loi, cette définition sert aussi de référence pour les ministères et organismes publics quand il s'agit de fixer l'admissibilité des usagers aux programmes et services. Pour l'AQIS, la définition proposée dans le projet de loi représente une nette amélioration par rapport à la définition actuelle. Elle a d'abord le mérite de se rapprocher des travaux de la communauté scientifique internationale, travaux auxquels le Québec a étroitement participé. En ce sens, elle introduit une distinction entre la notion de déficience, celle d'incapacité, et, bien que de manière trop vague, celle de situation d'un handicap.
Autre point fondamental à nos yeux, cette définition inclut les personnes qui présentent une déficience intellectuelle légère. En effet, même lorsqu'elle est catégorisée légère, la déficience intellectuelle n'entraîne pas moins, par définition, une incapacité significative et persistante au plan du fonctionnement intellectuel et adaptatif et des difficultés à faire face aux défis de la vie quotidienne.
Nous tenons cependant à souligner ce qui nous apparaît une lacune de la version proposée. Nous croyons que les termes «activités courantes» devraient être précisés et complétés par une référence à la possibilité pour les personnes d'accomplir leur rôle dans la collectivité. Il importe de reconnaître clairement l'influence des facteurs sociaux ou liés à l'environnement sur l'exercice de ces rôles sociaux. En n'exprimant pas clairement ce concept, on minimise les facteurs collectifs d'apparition du handicap et on passe sous silence la responsabilité de l'ensemble de la société face à l'organisation des milieux et des ressources.
L'AQIS trouve également important que le gouvernement du Québec s'engage à promouvoir la définition légale de la personne handicapée de façon à ce que l'ensemble des acteurs et intervenants des différents réseaux l'interprètent et l'appliquent de manière uniforme et de façon aussi à ce qu'ils l'interprètent comme incluant les personnes qui présentent une déficience intellectuelle légère.
Le projet de loi propose l'insertion de l'article 1.1 qui établit l'objet de la loi. Tel que formulé, le texte suggéré nous apparaît fort peu contraignant. Est-il vraiment possible d'assurer l'exercice des droits des personnes handicapées alors qu'on se limite à favoriser leur intégration sociale?
Par ailleurs, notre Association se réjouit d'entrée de jeu que les familles soient prises en compte. Reconnaître que des besoins particuliers découlent de l'exercice de leur rôle représente un point de départ appréciable et qui mérite d'être renforcé. Aussi, l'AQIS recommande que l'objet de la loi précise le fait que la contribution des familles commande la mise en place de toutes les mesures de support qui sont requises à l'exercice de leur rôle.
Les personnes handicapées et leurs familles sont actuellement confrontées à des difficultés dont on a souvent peine à imaginer l'ampleur et la complexité. Leur situation réclame une loi sur laquelle elles peuvent vraiment compter. Elle réclame un contrat social qui établit leur participation sociale comme un impératif humain, social et politique.
Je vais passer la parole à ma collègue.
Le Président (M. Labbé): Alors, si vous permettez... Mme Simoneau, merci pour votre présentation. Je vais demander à votre collègue, Mme Cholette, de peut-être aller un petit peu moins vite pour donner une chance à notre interprète de suivre...
Mme Simoneau (Yolaine): Ah, excusez.
Le Président (M. Labbé): ...parce que je le sens pas mal... C'est excellent. Alors, je vous cède la parole, madame.
Mme Cholette (Lucie): Ce contrat social doit se fonder sur un engagement collectif. Les personnes handicapées ont à évoluer dans toutes les sphères d'activité. Les décisions prises à tous les niveaux peuvent avoir un impact sur leurs conditions de vie. Une loi qui entend assurer leurs droits doit donc viser un décloisonnement entre les structures et les niveaux de décision. Elle doit être une loi- parapluie qui fait en sorte que d'autres lois ou dispositions n'entrent pas en conflit avec les droits consentis ou qu'elles ne les réduisent pas.
Pour que cette loi ait un réel impact, l'AQIS recommande que l'article 1 de la loi établisse comme un impératif national la participation sociale des personnes handicapées et la reconnaissance de leur droit d'exercer en toute égalité leur citoyenneté pleine et entière.
Notre Association recommande également que l'article 1 de la loi établisse que le gouvernement, les organismes publics et les instances régionales, municipales et locales associent leurs interventions pour mettre en oeuvre cet impératif national et qu'en ce sens toute politique, toute loi ou tout règlement adopté doit faire en sorte de ne pas entrer en conflit avec les droits consentis par cette loi-cadre ou de ne pas les réduire. Une telle loi-cadre doit donner une orientation globale mais elle doit également affirmer des principes, établir des objectifs et inclure des mesures pour garantir l'exercice des droits des personnes handicapées.
L'AQIS reconnaît les efforts déployés jusqu'à ce jour pour améliorer les conditions de vie des personnes handicapées, mais elle constate également que les interventions en ce domaine n'ont pas eu tous les résultats escomptés. L'une des principales causes de cette situation est l'absence d'une vision d'ensemble pouvant mener à une action coordonnée de toutes les instances impliquées. À défaut d'une stratégie de référence, la poursuite des actions mises en oeuvre ne pourra que continuer à se heurter à de nombreuses remises en question.
n(14 h 20)n Élaborer cette stratégie ne commande pas de réinventer la roue. En 1985, la politique d'ensemble À part... égale était proposée à tous comme un instrument collectif devant façonner les nouvelles règles du jeu. Encore aujourd'hui, les principes fondamentaux contenus dans cette politique devraient guider les interventions, et la stratégie gouvernementale devrait s'articuler autour de ces orientations.
Pour viser des améliorations durables, l'AQIS recommande:
Que la loi institue une stratégie gouvernementale à l'égard des personnes handicapées et de leur famille et qu'elle spécifie que cette stratégie est sous la responsabilité du premier ministre du Québec;
Que la loi spécifie que cette stratégie vise à assurer l'actualisation des orientations de la politique d'ensemble À part... égale;
Que la loi spécifie que la stratégie gouvernementale instituée commande des actions visant notamment la pleine participation sociale des personnes handicapées, la reconnaissance du principe de la compensation équitable; la reconnaissance du droit à l'accommodement et l'inclusion de ce droit dans la Charte québécoise des droits et libertés, la reconnaissance de la contribution des familles et la révision des mesures de soutien à leur égard.
Enfin, dans le but de mieux inscrire dans l'action la stratégie proposée, la loi devrait inclure des instructions pour élaborer un plan d'action triennal pouvant baliser et préciser les actions à réaliser dans le cadre de la stratégie gouvernementale, et ces instructions devraient inclure un échéancier de réalisation, des indicateurs de réussite et des modalités d'évaluation.
Le projet de loi propose plusieurs amendements concernant la composition et les fonctions de l'Office des personnes handicapées du Québec. L'AQIS tient d'abord à préciser qu'elle trouve essentiel le maintien d'une instance dont le mandat spécifique est de veiller aux intérêts de l'ensemble des personnes handicapées et, à cet égard, elle reconnaît l'apport significatif de l'Office des personnes handicapées du Québec. Depuis sa mise en place, l'Office s'est investi dans des actions de concertation et de sensibilisation ainsi que dans la mise sur pied de nombre d'instruments visant une meilleure participation sociale des personnes handicapées et de leur famille.
L'AQIS estime par contre qu'une révision importante du statut et des fonctions de l'Office s'impose aujourd'hui pour lui permettre de jouer un rôle plus percutant et plus ajusté aux besoins actuels. Notre Association approuve les modifications portant sur la composition du conseil de l'Office. Nous ne pouvons qu'être en accord avec le fait d'accroître la représentativité du milieu associatif, celle des diverses régions ainsi que celle des personnes handicapées et de leur famille.
On le sait, plusieurs changements ont progressivement amené une transformation du rôle de l'Office. Les divers volets de son programme d'aide matérielle ont peu à peu été transférés vers les organismes concernés. Le plan d'embauche est, quant à lui, inopérant depuis 1996. Par ailleurs, en 1993, le Conseil des ministres a assigné à l'Office de nouveaux devoirs, il est donc pertinent que la loi fasse mention de ces changements. De plus, le projet de loi propose de nouveaux éléments que nous percevons comme une avancée intéressante.
Le projet de loi prévoit de nouvelles modalités liées aux devoirs de l'Office. Certains ajouts amènent une reconnaissance formelle du rôle-conseil de l'Office, ce qui nous apparaît une évolution dans le sens souhaité par notre organisme. Il est clair par ailleurs que certains amendements tendent à renforcer les pouvoirs de l'Office tant vis-à-vis de la défense des droits et intérêts que de la mise en oeuvre des actions intersectorielles. Dans une certaine mesure, ils garantissent aussi la collaboration des partenaires du réseau public. Notre association s'interroge cependant sur les changements réels qu'il est possible d'attendre de ces dispositions. Auront-elles pour effet d'octroyer à l'Office une marge de manoeuvre suffisante? Doit-on considérer les pouvoirs conférés comme étant impératifs ou facultatifs? Sur quels pouvoirs politiques l'Office pourra-t-il s'appuyer?
Du point de vue de l'AQIS, l'Office doit avoir pour mission de s'assurer que l'ensemble des actions qui ont une incidence sur les personnes handicapées sont suffisantes, orchestrées et harmonisées à la loi. Il doit, par conséquent, détenir toute l'influence nécessaire pour s'assurer de la mise en oeuvre, de l'application et du suivi de la stratégie gouvernementale que nous jugeons nécessaire d'instaurer. À cette fin, l'AQIS recommande que l'Office relève directement du cabinet du premier ministre ou de l'Assemblée nationale ou d'un ministère intersectoriel.
En ce qui regarde le chapitre touchant l'intégration sociale, nos commentaires seront brefs. En matière d'intégration professionnelle, le projet de loi propose surtout des modalités concernant la mise en oeuvre de la stratégie d'intégration des personnes handicapées à la politique active du marché du travail adoptée en 1999 par la Commission des partenaires du marché du travail. Pour l'AQIS, cette stratégie, dont la mise en oeuvre a débuté en avril 2001, constitue assurément un tremplin vers une meilleure intégration professionnelle des personnes handicapées et, en ce sens, il convient tout à fait de l'incorporer aux modifications législatives proposées dans la loi.
Le Président (M. Labbé): Mme Cholette, je voudrais juste vous demander de conclure compte tenu qu'il nous reste à peu près une minute, alors je vais vous laisser le temps de conclure tout en n'allant pas trop vite.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Labbé): Une minute.
Mme Cholette (Lucie): Notre conclusion, en fait, c'est que la révision de la loi actuelle représente une opportunité de faire en sorte que les personnes handicapées et leurs familles puissent compter sur un cadre légal, une stratégie gouvernementale d'ensemble et sur tous les leviers politiques nécessaires à l'édification d'une société accessible dans le sens le plus étendu et le plus intégral du terme. La législation prévue peut constituer le coeur de tout un ensemble de réponses aux besoins des personnes handicapées et de leurs familles. Elle doit, pour cela, dépasser le stade des intentions pour s'inscrire dans un agenda national de réalisation. Merci.
Le Président (M. Labbé): Merci beaucoup de votre collaboration. Alors, sans plus tarder, nous allons maintenant céder, comme il se doit, la parole à Mme la ministre déléguée à l'Emploi. Mme la ministre.
Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors, d'abord quelques mots pour vous transporter les salutations de mon collègue, le ministre Roger Bertrand, qui, malheureusement, vraiment un cas de force majeure, a été obligé de s'absenter, de ne pas être là pour recevoir vos travaux, alors qu'il trouvait ça très important. Je vous transmets ses salutations de la même façon que je lui transmettrai la teneur et la qualité des échanges que nous aurons aujourd'hui.
Permettez-moi de vous féliciter de la compréhension fine que vous avez, particulièrement, de la participation sociale et de l'intégration sociale des personnes vivant avec un handicap. Ça fait des années que vous travaillez sur ce sujet. Ça fait des années que vous y mettez le coeur à l'ouvrage, que vous y mettez tout votre coeur. Bravo! Je vois que vous avez travaillé de façon très fine. Vos recommandations ciblent vraiment les différentes stratégies, les différents objets du projet de loi. Sur la stratégie en emploi, on aura sûrement l'occasion, je vais revenir avec des questions, si vous le désirez, si mes collègues me laissent un peu de temps, mais je sais qu'eux aussi veulent parfois poser des questions.
Je vais vous dire, M. le Président, à 14 h 50, je vais devoir quitter, parce que j'ai annulé ma journée, mais j'avais quelque chose que je ne pouvais pas annuler. C'est à Dolbeau, alors je vais disparaître tout à l'heure. Je m'en excuse. Donc, ne m'en veuillez pas si je quitte pendant les débats.
Vous parlez particulièrement de la place des familles, et ça, ça m'interpelle, et je trouve que c'est vraiment un apport qualitatif de votre mémoire très particulier. Vous appuyez l'ajout d'un objet dans la loi et le fait qu'il prenne en compte les besoins des familles de personnes handicapées et vous dites, plus loin, que la loi devrait leur accorder, aux familles, une place prépondérante dans les stratégies gouvernementales. Comme c'est, pour moi, dans tous les mémoires, c'est un peu plus particulier, c'est neuf, pourriez-vous... Est-ce que vous avez une idée des types de mesures, des types de choses qu'on pourrait faire pour les familles?
Le Président (M. Labbé): Alors, Mme Cholette.
Mme Cholette (Lucie): Je pense que le soutien, dès le départ... Je regarde, juste au départ, l'annonce du diagnostic. On connaît tous les listes d'attente qu'il y a dans les CRDI. Alors, les familles se font annoncer qu'elles ont un enfant différent et elles sont trois mois, six mois, des fois un an sans aucun service, sans aucun soutien. Il n'y a jamais personne qui est là pour les aider. Déjà, au départ, c'est une lacune. Quand on a une très mauvaise nouvelle et que la terre arrête de tourner, on aime bien avoir quelqu'un à qui en parler, quelqu'un pour nous tenir la main pour commencer à se comprendre dans le dédale des choses.
n(14 h 30)n Le soutien aux familles aussi, c'est beaucoup, je pense... en rendant la loi, je vous dirais, peut-être plus opérante en donnant ? on en a parlé un petit peu avant ? en donnant des dents... en obligeant les gens à faire de l'intégration, on va empêcher l'essoufflement des familles. Les familles sont très, très essoufflées. La vie de tous les jours, c'est un combat. Ce n'est pas un combat avec son enfant, c'est un combat pour avoir des services pour son enfant et c'est un combat qui ne finit pas. On parle des gens qui vieillissent, et plusieurs disent: Mon Dieu! J'espère que mes enfants pourront me soutenir quand je serai âgé. Moi, quand je serai âgée puis que j'aurai 75 et 80 ans, je serai encore obligée de soutenir mon fils et j'espère que je n'aurai pas encore à me battre pour qu'il ait des services, parce qu'il n'a que 15 ans et je commence déjà à m'essouffler. Je pense que c'est important, là, de... C'est dans ce sens-là, je pense, qu'il faut soutenir les familles, les aider un peu dans leur vie de tous les jours.
Le Président (M. Labbé): Merci, Mme Cholette, Alors, je céderais la parole à Mme Milliard. C'est ça?
Mme Milliard (Diane): Oui. Je rajouterais peut-être aussi, là, pour appuyer ce que dit Mme Cholette, le soutien aux familles, c'est aussi relié... Bon, il y a le fait que la Loi sur les normes du travail... On ne sait pas, elle n'est pas encore sortie actuellement, mais ce serait important que les parents d'enfants handicapés puissent avoir, eux aussi, des congés parentaux non pas nécessairement d'une... Je sais qu'actuellement il y a 104 semaines de prévues pour les parents d'enfants gravement malades, mais, quand on est handicapé, on n'est pas nécessairement malade. Mais les parents d'enfants handicapés, surtout avec un handicap multiple, doivent souvent se déplacer vers l'ergothérapie, la physiothérapie, l'orthophonie, donc il faudrait que ça leur soit permis de quitter le milieu de travail. On sait que ce n'est pas rémunéré, mais il y a des employeurs qui ne permettent même pas que les parents aient ce droit-là. Donc, je pense qu'il faudrait élargir la loi à ce niveau-là. Et, quand on parle d'enfants, on ne parle pas nécessairement, en déficience intellectuelle, de zéro à 18 ans. Oui, mais ça peut être 40 ans aussi.
L'autre aspect aussi, le soutien aux familles sur le plan financier, et là je vais vous l'imager concrètement. À l'intérieur de notre organisme, on a fait un sondage. Il n'est pas scientifique, mais il a été très facile à analyser, les questions étaient très simples, on voulait voir l'écart du soutien aux familles qui est alloué par les CLSC dans toutes les régions du Québec versus l'offre qu'on fait et la demande. Et la moyenne provinciale, je vous dirais, on répond à 46 % des besoins. 46 %, vous allez me dire peut-être que ce n'est pas si pire que ça, mais 46 %, c'est terrible, là, parce que c'est la moyenne provinciale. Il y a des régions où ça correspond à 12 % de leurs demandes, et il y en a d'autres peut-être à 55 %, et ça se promène comme ça. Donc, entre l'offre et la demande, il y a un très gros écart. Et les services sont offerts mais ne correspondent pas nécessairement aux réels besoins. Donc, le soutien aux familles, il serait essentiel de l'augmenter.
Le Président (M. Labbé): Merci, madame. Mme la ministre.
Mme Maltais: Une autre question sur l'article 41 qui est À part... égale, qui dit: D'ici trois ans, il faut revoir À part... égale... Et, donc, tous les plans d'action... Il faudrait revoir tous les plans d'action qui concernent les ministères qui sont attachés à la politique. C'est une politique gouvernementale. Cette politique étant gouvernementale, c'est beaucoup plus fort qu'une stratégie, hein, une politique, c'est vraiment une grande orientation d'ensemble et c'est transversal. Une politique gouvernementale, ça traverse tous les ministères. On veut la revoir, et il y a obligation dans la loi de déposer, d'ici trois ans, cette révision. Il y a une obligation que ça se fasse en concertation avec le milieu associatif, avec nos partenaires, dont les associations. Et une politique gouvernementale, c'est adopté par le Conseil des ministres. C'est vu dans les différents comités ministériels, donc les ministères, les ministres en prennent connaissance, et ensuite ça s'en va au Conseil des ministres. Donc, ça devient gouvernemental. Est-ce que ça vous rassure quant à votre idée d'avoir une grande stratégie gouvernementale, ce processus qu'on s'est donné à travers ce projet de loi ou s'il y a des choses à bonifier?
Le Président (M. Labbé): Alors, peut-être, on y va avec Mme Cloutier. Mme Cloutier, s'il vous plaît.
Mme Cloutier (Lise): Je pense qu'on est tout à fait d'accord avec l'inclusion de cet article-là, c'est simplement comment le situer dans le temps. Si on veut que la loi, tel qu'on le souhaite, affirme des orientations, des objectifs, des moyens, on se demande comment on peut faire ça et ensuite, dans trois ans, d'ici trois ans, réviser la politique À part... égale. Là, ça nous paraît... Mais, effectivement, je pense qu'on approuve le fait, cette intention-là de réviser la politique. Mais, à quel moment ça devrait se situer, je pense qu'il y a lieu de se questionner, par contre.
Le Président (M. Labbé): Merci. Mme la ministre.
Mme Maltais: M. le Président, si vous permettez, voici un exemple, peut-être, du fait que la poule n'attend pas l'oeuf et l'oeuf n'attend pas la poule. Parfois, on fait travailler à la fois l'oeuf et la poule. La stratégie en emploi, par exemple, qu'on propose est une stratégie qui est sous l'égide du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, du ministre et de la Commission des partenaires du marché du travail. C'est une nouvelle... On veut ajouter une stratégie plus efficace. Et, dès l'adoption de la loi, le ministère de l'Emploi va se mettre au travail, et il y a dépôt d'un rapport à l'Assemblée nationale ensuite. Donc, c'est déjà là. Je sais que vous faites la recommandation qu'il y ait présentation à l'Assemblée nationale, c'est déjà dans nos intentions dans le projet de loi actuellement.
Le Président (M. Labbé): Ça va? Alors, si vous permettez, maintenant, je céderais la parole, comme il se doit, à Mme la députée de Crémazie.
Mme Blanchet: Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames. J'avais juste une petite question. À la page 7 de votre mémoire, vous donnez comme exemple certains pays que vous qualifiez de progressistes qui, eux, ont reconnu que c'était du devoir de l'État de garantir aux personnes handicapées la pleine possibilité de bien exercer leur citoyenneté, et tout ça. J'aimerais vous entendre quelques minutes là-dessus.
Le Président (M. Labbé): Alors, Mme Cloutier.
Mme Cloutier (Lise): Les pays qu'on cite, on sait que c'est beaucoup, là, dans leur culture d'avoir intégré à part entière les droits des personnes handicapées et c'est dans toutes leurs législations. Et c'est pour ça qu'on enchaîne avec le paragraphe suivant en disant: On souhaiterait bien qu'un jour, nous aussi, on n'ait même plus besoin d'une loi et que les droits des personnes handicapées soient à ce point respectés qu'il n'y ait plus de législation spécifique qui est nécessaire. Ce serait vraiment le signe d'une réelle intégration. Sauf que l'état de situation actuel nous démontre qu'il est vraiment temps de passer à une autre étape. La situation des personnes handicapées est d'une telle complexité et d'une telle difficulté, on est fermement convaincu qu'il faut resserrer les mesures, il faut essayer autre chose. Quand on a essayé certains moyens et que ça ne fonctionne pas, bon, on se dit: Il faut peut-être envisager d'autres mesures, hein? Et je pense qu'on en est là.
Le Président (M. Labbé): Mme la députée de Crémazie.
Mme Blanchet: Oui. Bien, seulement un commentaire, mais en même temps une question, il ne devrait pas aussi y avoir... Ceux que maintenant on appelle, je dirais, la société civile, vous ne pensez pas qu'il ne faudrait pas que la société civile soit aussi impliquée? Parce que, oui, il y a beaucoup de choses qui doivent relever du gouvernement, mais il faut aussi trouver... Il me semble qu'il faut trouver une façon d'impliquer aussi la société civile, parce que non seulement le gouvernement doit faire en sorte que des personnes handicapées ou avec des limitations soient engagées dans la fonction publique, dans les différents ministères et organismes, mais je pense qu'elles doivent aussi, à un moment donné, avoir leur place dans l'entreprise privée. Donc, il faut aussi trouver un moyen. Alors, est-ce que vous auriez des suggestions à nous faire? Comment créer ces partenariats qui ne sont effectivement peut-être pas toujours évidents, mais qu'il faut mettre en branle? Parce que le gouvernement ne peut pas tout faire, et ce n'est pas nécessairement tout à lui à tout faire, je pense.
Le Président (M. Labbé): Alors, je perçois que Mme Milliard avait peut-être le goût de répondre.
Mme Milliard (Diane): Oui, mais là, rassurez-vous, je n'aurai sûrement pas la réponse qui va répondre à tous les problèmes. En fait, je pense que, effectivement, la société... Quand vous parlez de société civile, vous parlez de M. et Mme Tout-le-monde. Je pense que, illustré tel quel, si on parle, par exemple, de l'Office des personnes handicapées du Québec, ils ont un rôle à jouer énorme auprès de la population. Et ce qu'on a constaté au cours des dernières années, c'est que la population, il n'y a plus vraiment d'information non pas seulement quand il y a des scandales ou des situations, là, difficiles qui se produisent, mais il n'y a plus d'information régulière qui vient pour parler de la personne handicapée puis parler de ses réussites, parler de ses difficultés. On ne voit plus à la une... Peut-être pas à la une, il ne faut pas... Surtout à la presse, là, mais je pense qu'il y aurait un plan de communication à bâtir pour sensibiliser la population aux réalités des personnes handicapées. Ça, c'est une première chose.
n(14 h 40)n Il y a aussi le fait que, quand on parle d'une loi-parapluie, quand on parle d'une loi qui va avoir un impact sur l'ensemble des autres ministères et que ça sorte du ministère de la Santé et des Services sociaux, bien, les gens qui travaillent dans les autres ministères font partie de M. et Mme Tout-le-monde aussi. Donc, là, en incluant une responsabilité pour les autres ministères, je pense qu'on peut agrandir la sensibilisation et la responsabilisation de tous. Et, il y a un très bel exemple qu'on peut vous donner, à l'intérieur même du ministère, il y a la politique en déficience intellectuelle De l'intégration à la participation sociale qui a été élaborée avec tous les partenaires, mais qui implique également de nombreux ministères, dont celui de la Justice, dont celui de l'Éducation, dont celui du Travail, ce qui fait que les gens des autres ministères n'ont pas l'impression que ce n'est pas leur affaire, les personnes handicapées. Il faut les sortir aussi du ministère, parce que ce ne sont pas nécessairement des gens malades. Ce sont des gens qui ont besoin de services sociaux, et certains ont une problématique médicale, mais je pense qu'il faut élargir la vision.
Le Président (M. Labbé): Alors, merci, madame, pour votre réponse. Alors, s'il n'y a pas d'autres questions, je vais céder maintenant la parole, comme il se doit, au porte-parole officiel de l'opposition, le député de Nelligan, s'il vous plaît.
M. Williams: Merci, M. le Président. Et merci beaucoup pour votre présentation. Et, un bref message à la ministre déléguée avant qu'elle parte, que oui on essaie d'avancer le débat et on attend encore que la commission est convoquée pour entendre les autres groupes qui ont déposé les mémoires. Ça reste à peu près trois jours, et, malheureusement, jusqu'à maintenant, nous n'avons pas eu une autre convocation. Avec ceci, vous pouvez encourager votre collègue de se dépêcher un peu, ça va faire notre affaire.
Une première question. Vous avez parlé des enfants, de la famille, et merci beaucoup de cibler beaucoup de votre mémoire sur la famille. Je sais que mon collègue le critique famille va vous questionner aussi. Une des choses que j'ai reçues, les plaintes dans mon bureau de comté, c'est effectivement les enfants qui ne sont pas légalement enfants, maintenant qui ont 18 ans, 21 ans et plus, et vous avez touché cette problématique un peu. Je voudrais vous entendre, est-ce que ça prend juste un peu plus de souplesse dans la programmation et dans le financement des programmes ou est-ce que, selon vous, ça change... Nous sommes en train de faire un débat sur un projet de loi. Est-ce que ça prend quelques articles de loi qui peuvent changer la définition de l'admissibilité pour les programmes, particulièrement pour les personnes de 18 ans ou plus, 21 ans et plus, parce que, souvent, avec une date assez fixée avec aucune rédaction des besoins, les programmes arrêtent? Est-ce que vous pensez que ça va être, un, utile et, deux, faisable d'explorer un peu plus de souplesse dans la définition de l'admissibilité pour ces personnes?
Le Président (M. Labbé): Mme Milliard, c'est à vous.
Mme Milliard (Diane): En fait, ce qu'on dit au niveau du mémoire, on reconnaît que la définition qui est allouée s'est améliorée comparativement à celle qui était précédente. Mais le problème qu'on vit au sein du gouvernement, c'est que chaque ministère a comme une définition pour donner des services aux personnes. Donc, la définition ne correspond pas nécessairement à celle qui est prônée par l'Office des personnes handicapées, parce qu'on dit que, pour donner un service, ce ministère-là a une définition. Et, à ce moment-là, si...
Je vais vous donner un exemple très concret. Au niveau du ministère de l'Éducation, depuis deux ans, la déficience intellectuelle légère est comme mise de côté en disant: Bon, ce ne sont pas vraiment des personnes handicapées, on va les mettre avec les troubles d'apprentissage. Sauf que les troubles d'apprentissage et la déficience intellectuelle légère, c'est complètement différent, là, les stratégies d'intervention ne sont pas les mêmes du tout, la stimulation à faire n'est pas du tout la même. Nos gens... Et là je ne porte pas du tout préjudice aux troubles d'apprentissage, mais nos gens n'ont pas nécessairement des problèmes de comportement. Donc, de les mettre ensemble, on sait que les enfants apprennent par imitation, c'est souvent ne pas rendre service ni à l'un ni à l'autre.
Et les âges... Bon, vous dites, les âges... Je pense que, quand on parle de déficience intellectuelle ? en tout cas, je suis naïve peut-être, mais j'espère le rester ? je pense que les programmes qui leur sont alloués, surtout dans les centres de réadaptation en déficience intellectuelle, les âges ne sont pas vraiment des facteurs qui font qu'un enfant n'a plus de services. On l'a, par exemple, au niveau de l'éducation à partir de 21 ans, mais, dans un centre de réadaptation qui donne des services à un enfant de 40 ans, j'imagine qu'il va donner les services en fonction de l'âge de l'enfant.
Le Président (M. Labbé): Alors, M. le député de Nelligan.
M. Williams: Merci. Vous avez aussi, dans votre mémoire, parlé de l'objet de revoir le chaînon manquant dans le projet de loi, un engagement collectif, et beaucoup de groupes ont parlé de plus de pouvoirs, pouvoirs accrus pour l'Office des personnes handicapées du Québec. Je vois en arrière de vous l'Association des établissements de réadaptation en déficience physique qui vont présenter bientôt, et, pendant mes discussions avec eux, pendant des années, nous avons vu qu'il y a vraiment une inéquité régionale. Et, dans quelques places, quand on discute des listes d'attentes, il n'y a même pas les listes d'attente, parce qu'il n'y a pas de services pour avoir une liste d'attente.
Est-ce que vous pensez que ça va être utile d'avoir dans la loi une obligation, qu'on parle de pouvoirs de l'OPHQ ou une instance qui peut avoir un pouvoir d'assurer qu'il y a une équité régionale? Parce que, au moment qu'on parle, il semble que tout le monde dise que c'est un problème, et on tourne en rond, mais ça va être difficile. Est-ce qu'on doit donner cette obligation légalement à une instance gouvernementale?
Le Président (M. Labbé): Alors, Mme Cloutier, d'accord. Merci, Mme Cloutier.
Mme Cloutier (Lise): Oui. Je pense que notre préoccupation est plus large que ça. Je pense qu'il est un peu prématuré pour répondre à des questions peut-être aussi pointues que ça, parce que ce qui nous amène ici finalement, c'est l'état de situation de nos enfants, de nos gens, et on se dit que, pour donner la chance au coureur, il est vraiment temps de faire un virage. Ce qu'on veut, c'est une loi plus convaincante, plus implicante qui va provoquer des changements, c'est une loi qui dit: Le sort des personnes handicapées, c'est important. Tous les acteurs vont dans ce sens-là, on veut une loi qui affirme des principes, qui propose des actions puis une loi qui va faire en sorte qu'il n'y ait pas de loi, de règlement ou de politique qui va annuler cette loi-là. Notre vision est assez globale. Alors, dire: Est-ce que l'OPHQ devrait avoir le pouvoir légal d'agir dans les régions? Je pense qu'on pourra voir ça en temps et lieu, là.
Le Président (M. Labbé): Merci, madame. Alors, je cède maintenant la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.
M. Copeman: Merci, M. le Président. J'aimerais renchérir un peu sur les commentaires de la ministre déléguée à l'Emploi et mon collègue le député de Nelligan en ce qui concerne tout l'aspect de la famille. C'est un aspect qui est nouveau en termes des mémoires à date, et il m'apparaît un aspect tout à fait pertinent et plus que pertinent, mais fondamental. La difficulté qu'on a comme législateurs, c'est qu'un législateur va voter une loi, et, par la suite, cette loi-là est mise en exécution par l'exécutif, hein, par un ministre, ou des ministres, ou un ministère, ou un office, ou une instance, ou, en tout cas, appelez-le comme vous voulez. Il y a deux difficultés. Dans un premier temps, vous dites dans votre mémoire qu'il faut, dans les objets, faire référence exprès à l'apport des familles. Une question un peu pointue, peut-être trop pointue: À l'article 3 du projet de loi, avec l'ajout d'objets ? ce serait le nouvel article 1.1 de la loi ? on parle de la famille. Est-ce que c'est suffisant? Avez-vous regardé vraiment le texte proposé dans le nouvel article 1.1 qui dit: «La présente loi vise à assurer l'exercice des droits des personnes handicapées et à favoriser leur intégration à la société au même titre que tous les citoyens en prévoyant diverses mesures visant les personnes handicapées et leurs familles.»? Alors, il y a déjà une petite référence. Est-ce que c'est suffisant pour vous?
Plus loin, par contre, vous dites que ça va prendre des moyens, et c'est là où ça devient difficile pour un législateur, surtout de ce côté de la table, parce qu'on n'a pas de contrôle sur les moyens. L'autre côté, ils ont un peu plus de contrôle sur les moyens. Et déjà mon collègue a indiqué que, dans le mémoire présenté au Conseil des ministres, on indique très clairement, noir sur blanc: «Le renforcement ou l'octroi de nouveaux pouvoirs à l'Office, tel que proposé dans le projet de loi, n'a aucune implication financière significative sur les budgets déjà consentis.» Ça, ça m'inquiète beaucoup, parce que ça semble dire que tout ce qu'on fait, il y a très peu d'impact sur l'aide que l'État va consentir aux personnes. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Labbé): Alors, Mme Milliard, s'il vous plaît.
n(14 h 50)nMme Milliard (Diane): Question embêtante. En fait, ce que je comprends de ce que vous me dites, c'est que, oui, on veut bien changer la loi, mais en même temps on ne veut pas mettre plus d'argent. Bon, c'est ça que vous dites?
M. Copeman: Ce n'est pas moi qui l'ai dit, là, c'est le mémoire du Conseil des ministres.
Mme Milliard (Diane): Non, non, mais c'est ce qui est dit. Mais là je pense que c'est utopique de cette façon, parce que ne serait-ce que pas seulement pour les familles, mais pour les personnes handicapées elles-mêmes, il y a certaines mesures qui vont nécessiter des sous. Quand on parle, par exemple, des moyens, bien les moyens, nous, dans le milieu associatif, je vous dirais qu'on est très, très, très imaginatif et on peut en trouver à condition qu'on soit associé à des démarches. Et, quand on parle, par exemple, de se rallier, le milieu associatif, ne serait-ce que pour actualiser À part... égale, c'est à ce moment-là que les moyens pourront être proposés pour répondre aux besoins des familles. Mais c'est sûr que... À votre question, ce n'est pas suffisant d'avoir des intentions de changer la loi et de ne pas penser mettre un sou noir. C'est tout à fait irréaliste.
Le Président (M. Labbé): Alors, très rapidement, M. le député.
M. Copeman: Oui. Il y a la question pointue sur la formulation du nouvel article qui fait référence aux familles. Est-ce que ça vous paraît... Avez-vous fait l'analyse de ça? Est-ce que ça vous paraît suffisant ou il faut renforcir davantage cette référence aux familles?
Le Président (M. Labbé): Alors, Mme Cloutier, s'il vous plaît.
Mme Cloutier (Lise): Bien, moi, je pense qu'on n'insistera jamais assez sur les mesures à mettre en place pour les familles, mais je tiens à préciser qu'on se réjouit du fait que les familles soient mentionnées. De un, qu'il y ait un objet de loi et, de deux, que les familles soient incluses. Mais, en lien avec notre préoccupation fondamentale à l'AQIS, il n'y aura jamais assez de préoccupation, à notre goût, pour les familles.
Le Président (M. Labbé): Merci, madame. Alors, sans plus tarder, je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Joliette. Mme la députée.
Mme Lespérance: Merci, M. le Président. Bonjour. Ça a été très enrichissant de pouvoir vous entendre. L'objet qui m'a le plus fascinée, c'est vraiment la place puis que le temps que vous prenez par rapport au soutien aux familles.
Moi, j'aimerais vous entendre sur des réalités que vivent au quotidien mes collègues qui sont dans l'enseignement, mes enfants qui sont dans l'enseignement par rapport à l'intégration de gens vivant des handicaps. Et c'est toujours le droit versus la responsabilité de la société. On sait qu'actuellement la très grande mode est qu'il faut intégrer ces enfants-là dans les classes régulières, et, d'un autre côté, les profs nous disent que, compte tenu qu'il n'y a pas de ressources, on nuit à ces gens-là. J'aimerais ça vous entendre là-dessus. Je le sais que ça ne fait pas partie nécessairement de votre mémoire, mais c'est une information qui me semble importante.
Le Président (M. Labbé): Alors, Mme Cholette. Mme Cholette, à vous la parole.
Mme Cholette (Lucie): Je peux vous donner un exemple concret. Moi, mon fils est intégré partiellement. Il est en classe spéciale, intégré partiellement en classe régulière. Ce que ça signifie pour une famille, c'est qu'il faut le renégocier tous les ans. Ce que ça signifie, c'est qu'à tous les mois d'août je me demande: Est-ce qu'il y a un professeur qui va vouloir de mon fils? Je ne me suis jamais posé cette question-là pour mes autres enfants, est-ce que quelqu'un va vouloir de lui dans sa classe?
Les enfants qui ont une déficience intellectuelle, de façon très générale, n'ont pas droit à leur école de quartier. Ils doivent prendre l'autobus et se rendre dans une autre école, ou une école spéciale ou une école désignée pour les classes spécialisées. Déjà qu'il peuvent avoir des difficultés à entrer en relation avec les autres, ils ne sont même pas à l'école avec leurs voisins. Il y en a même qui font de très grands trajets. Je sais que, chez moi ? moi, je reste sur la Rive-Sud de Montréal ? des enfants se rendent tous les matins, dans le gros trafic, à Montréal, et ça leur prend à peu près 1 h 30 min, quand ça va bien sur le pont, pour se rendre jusqu'à leur école. 1 h 30 min le matin, 1 h 30 min le soir. On sait le stress que ça cause. Là, on parle d'enfants, on parle d'enfants qui ont des déficiences intellectuelles, qui ont des problèmes physiques associés.
Au niveau de la classe, je pense que c'est important, oui. Je ne le nie pas, ça demande plus de la part du professeur. Je ne le nierai pas. Par contre, les enfants qui ont des troubles d'apprentissage, ça leur demande plus. Eux autres, ils ont droit à la classe régulière. Les enfants qui sont turbulents, ça demande plus aussi. Eux autres, ils ont droit à la classe régulière pareil. Je trouve que ça devient facile d'écarter nos enfants de la classe régulière de quartier. Et, une fois qu'ils sont rentrés, les quelques places où ils font de l'intégration, la plupart du temps, les professeurs disent: Bien, il n'y a pas de problème.
Moi, je peux vous dire qu'il y a même un professeur qui a changé d'année pour ravoir encore mon garçon l'année d'après. Puis elle disait: Ah, j'aimerais mieux en avoir 10 comme ça que d'en avoir 10 d'une autre manière. Oui, ça prend... Mais je pense qu'avec les manières de faire... avec des manières de faire, avec... Ce n'est pas nécessairement un coût d'argent, c'est une nouvelle façon de voir les choses, une nouvelle façon d'intégrer. Je pense qu'il y a moyen de les mettre dans la classe régulière, à leur école de quartier, sans épuiser tous les professeurs qu'on peut avoir.
Le Président (M. Labbé): Alors, je vais permettre un complément de pensée à Mme Milliard, s'il vous plaît, pour terminer le temps.
Mme Milliard (Diane): Oui. Je voudrais juste revenir sur le début de votre intervention quand vous avez dit: L'intégration, ça semble une mode. C'est ça, le problème, ce n'est pas être à la mode ou pas être à la mode, c'est que c'est une vision de société qu'il faut avoir. Et, comme ça, on s'assurera d'être toujours «in».
Le Président (M. Labbé): Alors, sur ces bonnes paroles, madame, nous allons compléter. Alors, Mme Simoneau, Mme Cholette, Mme Milliard, Mme Cloutier, merci beaucoup, au nom de l'Association du Québec pour l'intégration sociale, de votre présentation. J'invite sans plus tarder les gens qui représenteront l'Association des établissements de réadaptation en déficience physique du Québec de bien vouloir prendre place et je suspends quelques minutes, le temps que les gens prennent leur place.
(Suspension de la séance à 14 h 57)
(Reprise à 14 h 59)
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): S'il vous plaît! La commission va donc reprendre ses travaux. Il nous fait plaisir d'accueillir à ce moment-ci de nos travaux l'Association des établissements de réadaptation en déficience physique du Québec. Alors, madame, messieurs, bonjour. Bienvenue à cette commission. Je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire, que par la suite il y aura, bien sûr, les périodes d'échange habituelles. Et je vous demanderais aussi, si possible, de parler plus doucement compte tenu que nous avons une interprète en traduction gestuelle ici, à l'arrière, et que c'est plus facile, n'est-ce pas... Enfin, pour l'accommoder, ce serait plus intéressant de parler moins vite. Alors, j'apprécierais aussi...
Une voix: ...
n(15 heures)nLa Présidente (Mme Carrier-Perreault): ... ? un instant, je vais vous donner la... ? avant de commencer votre mémoire, que le porte-parole principal se présente et nous présente les gens qui l'accompagnent. Avant de vous donner la parole, je vais vous demander... Oui, M. le député de Nelligan.
M. Williams: Oui, merci. Juste un point de clarification, Mme la Présidente. Je vois que nous avons un changement de porte-parole du gouvernement. Je suis prêt à donner mon consentement pour... il peut adresser pendant les derniers deux groupes. Mais il faut que je souligne que je suis déçu. Je ne mets pas en doute le problème, la question que le ministre a été obligé d'être remplacé. Mais c'est le troisième ministre qui... C'est un peu difficile de faire des consultations comme ça. C'est une obligation gouvernementale d'assurer qu'il y a un bon suivi de nos discussions, et je voudrais juste dire que je suis déçu.
Si c'était juste un ministre qui a remplacé le ministre et dans un cas exceptionnel, je peux accepter. Mais, maintenant, c'est le deuxième, et je voudrais souligner que ça va rendre les choses un peu plus difficiles. Rien de personnel, M. le ministre. J'ai voulu juste souligner que c'est compliqué pour ceux et celles qui se sont déplacés, que, maintenant, vous avez le troisième ministre devant vous.
M. Simard (Montmorency): Madame...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors... Oui. Sauf qu'on a donné...
M. Simard (Montmorency): Si vous me permettez, peut-être en réplique...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Un instant!
M. Simard (Montmorency): Oui?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Puisqu'on a donné le consentement, effectivement j'apprécie que le député de l'opposition ait donné un consentement pour que vous puissiez, M. le ministre, participer à cette consultation. Effectivement, avant de vous donner la parole, j'aimerais quand même mentionner qu'il y a des gens ici qui ont suivi nos travaux toute la journée, qui suivent d'ailleurs de très près cette commission-là. C'est vrai qu'on est dans une situation qui est tout à fait exceptionnelle. Il y a des choses dans la vie qu'on ne contrôle pas, et, pour des raisons humanitaires, je pense qu'il y avait eu des échanges avec le porte-parole de l'opposition hier et son collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux pour ne pas, n'est-ce pas, stopper inutilement les travaux. On s'est entendu pour pouvoir les poursuivre. Bien sûr qu'à pied levé ce n'est pas toujours évident de remplacer un collègue ministériel. On sait que les ministres ont des horaires qui sont très chargés. Alors, il n'en reste pas moins que je constate, moi aussi, qu'on a un autre membre du Conseil des ministres qui va quand même entendre les débats.
Par ailleurs, je souligne aussi que, en tant que Présidente, selon les règles, selon notre règlement, il n'y a pas d'obligation, il n'y a aucun article de notre règlement qui oblige un ministre à être présent ou non, à assister en direct... directement aux travaux d'une commission parlementaire. Vous savez que tous nos travaux sont transcrits. Il y a toujours une équipe du ministère, importante, qui retransmet aussi au ministre. Alors, on a souligné à quelques reprises l'absence. Généralement, c'est quelque chose qui va aussi à l'encontre du règlement. Je voyais que ce n'était pas méchant ou que c'était tout simplement par empathie, compte tenu de la situation qui n'est réellement pas habituelle. Et, d'ailleurs, on va souhaiter bonne chance à notre collègue, M. Bertrand, pour ce qui se passe présentement. Oui?
M. Williams: Juste pour...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, tout simplement pour dire que j'apprécie par ailleurs qu'on ait un consentement pour que le ministre délégué à l'Environnement puisse remplacer à pied levé et puisse participer aux travaux de notre commission.
M. Williams: Mon seul point, je n'ai pas questionné l'obligation d'avoir le ministre devant la commission, sauf que nous avons invité la population à faire des consultations générales. J'ai effectivement, pour des raisons personnelles, accepté, et on souhaite la meilleure chance à M. le ministre délégué de la Santé et des Services sociaux. Mais il me semble qu'il y a une responsabilité gouvernementale que, dans un contexte exceptionnel, il doit trouver un remplacement, pas une porte tournante, comme je vois devant moi.
Je ne prolonge pas le débat, j'ai voulu juste souligner que ça complique les consultations parce que j'espère que le gouvernement est en train d'écouter toute la longue liste des amendements proposés par les groupes. Et je souhaite bonne chance au nouveau représentant du gouvernement de tenir, de prendre les bonnes notes et passer ça au ministre, et je suis prêt à commencer le travaux. Je n'ai pas voulu commencer un débat, Mme la Présidente, mais j'ai pensé que c'est assez important dans un dossier aussi important que ça. Je souligne que le gouvernement, par le comportement aujourd'hui ? pour une bonne raison au début, et je ne mets pas ça en doute ? complique les choses un peu.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, ça va?
M. Simard (Montmorency): Alors, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le ministre délégué à l'Environnement.
M. Simard (Montmorency): ...peut-être très, très brièvement, je n'ai pas à ajouter sur les propos que vous avez tenus ici, qui me semblent fort judicieux quant à la capacité, puisque, dans notre système parlementaire britannique, l'Exécutif ne fait qu'un, quant à ma capacité en vertu de nos conventions constitutionnelles de remplacer mon collègue et ami le député de Portneuf et ministre délégué à la Santé.
Alors, comme nous avons de belles choses à entendre, moi, je suis venu ici pour écouter ce qu'on a à nous dire. Et, contrairement aux prétentions du député de Nelligan, je vais reprendre ici la balle au bond. Ma présence ne va pas compliquer les choses. Au contraire, elle va les faciliter, puisque nous serons plus d'un au Conseil des ministres à faire valoir les bonnes recommandations que nous aurons entendues ici.
Une voix: ...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, c'est ce qu'on va voir. Sur ces bonnes paroles, alors, je vous cède donc la parole.
Une voix: ...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je vous avise tout de suite que ça n'a pas été pris sur votre temps, que je commence à compter maintenant.
Des voix: Ha, ha, ha!
Association des établissements de réadaptation
en déficience physique du Québec (AERDPQ)
M. Paillé (Errol): Merci, Mme la Présidente. Je suis Errol Paillé, président de l'Association. Je suis accompagné de Mme Anne Lauzon, notre directrice générale, et M. Luc Malo qui est administrateur au sein de notre conseil d'administration et aussi président du conseil d'administration de l'Institut de réadaptation en déficience physique de Québec. L'Association des établissements de réadaptation en déficience physique du Québec remercie la commission des affaires sociales de l'avoir invitée à participer aux audiences publiques relatives à la révision de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées.
Rappelons d'abord que le mandat principal de l'Association consiste à favoriser et à promouvoir l'accès aux services spécialisés de réadaptation. Les personnes qui ont une déficience physique doivent pouvoir recevoir les services dont elles ont besoin pour optimiser leur autonomie et leur potentiel de participation sociale. Aussi, compte tenu de son mandat, l'Association se sent directement interpellée et, même, préoccupée par les enjeux que la révision actuelle soulève.
Nous tenons à saluer l'initiative qui a mené à la révision de cette loi qui a été instituée en 1978 et qui n'avait jamais fait, jusqu'à présent, l'objet de modifications en profondeur. Cette démarche de révision s'avère donc pertinente et judicieuse. Nous reconnaissons que le projet de loi déposé en décembre 2002 propose des modifications qui semblent prometteuses pour améliorer l'exercice des droits des personnes handicapées et donc pour optimiser leur participation sociale.
Nous avons cependant relevé des lacunes qui nous apparaissent fondamentales et aussi des reculs importants entre l'avant-projet de loi et le projet de loi qui a été déposé. Nous sommes, en fin de compte, après analyse méticuleuse du projet de loi, assez déçus que la révision proposée ne soit pas plus vigoureuse et que la reddition de comptes ne soit pas mieux encadrée. Dans les circonstances, nous comprenons que le milieu associatif puisse être, lui aussi, déçu et peut-être même un peu amer.
L'Association vient donc aujourd'hui vous présenter ses réflexions sur le projet de loi révisant l'exercice des droits des personnes handicapées, et souhaite que la commission prenne en compte ses recommandations dans le but de bonifier les dispositions et les mesures proposées dans le projet de loi avant son adoption.
Concernant la participation sociale, nous affirmons et réitérons que la participation sociale des personnes handicapées, c'est l'affaire de tous. Comme pour tout citoyen et citoyenne, la participation sociale des personnes handicapées touche toutes les dimensions de l'individu, les dimensions personnelles, familiales, professionnelles, communautaires et sociales.
Nous réaffirmons également que les personnes handicapées, comme tous autres individus, ne sont pas en soi des personnes malades mais des personnes qui vivent des incapacités persistantes. Voilà pourquoi les conditions facilitant la participation sociale des personnes handicapées doivent être la responsabilité de tous les ministères, incluant celui de la Santé, bien sûr, et des Services sociaux. C'est, de fait, tout un ensemble d'acteurs sociaux qui doivent se sentir concernés par cette question fondamentale et y apporter leur contribution.
À titre d'exemple, je dirais que dans nos centres de réadaptation le plan de service comporte un volet médical et un volet réadaptation qui fait appel à une équipe multidisciplinaire. On retrouve des physiothérapeutes, des ergothérapeutes, des psychologues, des travailleurs sociaux et bien d'autres. Mais il y a aussi également un volet d'intégration sociale qui fait en sorte que nos intervenants travaillent en collaboration étroite avec les professeurs, les employeurs, les services de loisirs, de transport, d'habitation. Sans une telle collaboration, sans la synergie de tous ces milieux, la personne handicapée pourrait être plus autonome, bien sûr, sans pour autant être plus active dans la société.
n(15 h 10)n La démarche actuelle de révision recentre l'Office des personnes handicapées du Québec dans sa mission et son rôle de promotion et de conseil, nous en sommes heureux. Elle doit, par contre, également donner à l'Office le pouvoir d'exercer véritablement un rôle de coordination interministérielle. Une telle coordination est essentielle et même incontournable si l'on veut s'assurer de l'implication et de la contribution, qui est indispensable, de chacun des acteurs sociaux. C'est pourquoi l'Association recommande que l'Office des personnes handicapées du Québec relève d'une instance qui lui accorde un tel pouvoir et lui permette donc d'exercer, de fait et avec efficacité, de la coordination interministérielle. Ce pourrait être, par exemple, le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, avec un statut particulier au président de l'Office dans les instances de coordination interministérielle. Comme exemple, il doit y avoir une responsabilité à l'échelle nationale à l'image de celle qu'il y a dans les établissements pour les personnes handicapées dans leur cadre de Plan de services individualisé, leur fameux PSI.
Parlons maintenant de l'accès au marché du travail. Pour les personnes handicapées, l'accès au marché du travail représente encore de nos jours une problématique de taille. D'ailleurs, les mesures antérieures pour favoriser leur intégration socioprofessionnelle n'ont pas produit les résultats escomptés. Bien sûr, les établissements de réadaptation en déficience physique y contribuent, entre autres par leur programme permettant l'évaluation des capacité de travail et d'adaptation de poste de travail.
Cependant, la question de l'intégration socioprofessionnelle des personnes handicapées repose à notre avis sur une mobilisation concrète d'un ensemble de ministères et d'acteurs sociaux. C'est à cette condition qu'elle pourrait être véritablement optimisée. L'Association s'attend donc à une véritable stratégie gouvernementale mobilisatrice en matière d'accès à l'emploi fondée sur un plan d'action visant des résultats significatifs et dans les meilleurs délais.
Or, le projet de loi a complètement évacué de la stratégie le volet des objectifs de résultat en matière d'intégration et de maintien en emploi des personnes handicapées. Le gouvernement doit, à notre avis, absolument se fixer des objectifs de résultat, sans quoi il sera dans l'impossibilité d'évaluer l'écart entre les résultats obtenus et les résultats attendus. Il ne pourra, en somme, que constater l'état de la situation de l'embauche des personnes handicapées à une période donnée.
Nous croyons en fin de compte que les mesures proposées dans le projet de loi ne permettront pas de réduire concrètement et efficacement les obstacles à la participation sociale des personnes handicapées si elles ne sont pas associées à des actions réelles et à une mobilisation solide de l'ensemble des partenaires. L'Association recommande donc que la stratégie gouvernementale intègre des objectifs de résultat concrets, mesurables et significatifs dans les meilleurs délais.
Nous fondons également beaucoup d'espoir sur la mise à jour de la politique intitulée À part... égale qui serait effectuée par l'Office des personnes handicapées du Québec en concertation avec l'ensemble des partenaires concernés. Cette politique a le mérite de proposer non seulement des orientations et des recommandations, mais également des plans d'action. Nous insistons sur ce point fondamental, les mesures proposées en matière d'intégration et de maintien en emploi des personnes handicapées doivent être accompagnées d'objectifs de résultat significatifs et d'actions concrètes dans les meilleurs délais.
L'égalité en emploi dans le secteur public. L'avant-projet de loi propose que les personnes handicapées fassent dorénavant partie intégrante de la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics. Nous nous réjouissons de cette mesure concrète mais, somme toute, élémentaire qui devrait favoriser l'intégration socioprofessionnelle des personnes handicapées.
Malheureusement, l'entrée en vigueur des articles du projet de loi à ce sujet est reportée à une date indéterminée qui sera fixée par le gouvernement. À notre avis, retarder l'application de ces amendements signifie maintenir l'importante problématique actuelle de l'intégration socioprofessionnelle des personnes handicapées, et, en quelque sorte, faire obstacle à leur pleine participation sociale. Dans un tel contexte, si le gouvernement est vraiment sérieux dans sa volonté de favoriser l'intégration au travail des personnes handicapées, l'Association est d'avis qu'il doit absolument rendre ces amendements en vigueur dès l'adoption du projet de loi.
La valorisation par le travail a une très grande importance dans notre société. Les personnes handicapées ont elles aussi un potentiel de productivité et représentent de fait un capital humain trop souvent sous-estimé qu'on doit exploiter au sens noble du terme. Elles pourraient être plus nombreuses à payer des taxes et des impôts et elles en seraient très fières.
Parlons de communication. Nous vivons de nos jours dans une société où la communication est primordiale. Comme tout autre individu, les personnes handicapées doivent avoir accès non seulement aux édifices et aux lieux publics, mais également à la communication et à l'information, et, donc, à la connaissance. Cet accès nous apparaît aussi fondamental que l'accès au marché du travail.
L'Association considère que la notion d'accessibilité doit être élargie pour englober à présent la question plus holistique de l'environnement. L'environnement doit donc, le plus possible, être adapté aux besoins des personnes handicapées, afin de leur faciliter l'accès à la communication et à l'information.
J'ai ici quelques exemples. On souhaite bien fort que la construction de la Grande Bibliothèque du Québec soit accessible à tous sans exclusion, autant sur le plan physique que sur le plan du contenu, de l'information et de la communication. On parle ici de l'accès au braille, au LSQ et les télévisionneuses, il y a plein de choses.
On souhaite également que le nouveau CHUM et le Centre McGill soient accessibles à tous, y compris aux personnes ayant une déficience visuelle qui doivent elles aussi accéder à l'information. Il y a lieu également de penser à améliorer les services d'interprétariat pour les personnes sourdes quand elles ont affaire aux organismes publics autres que ceux de la santé et des services sociaux.
Concernant le transport. Le transport adapté représente une solution incontournable à l'objectif d'intégration et de participation sociales des personnes handicapées. Actuellement, les municipalités dont le territoire n'est pas desservi par une société de transport en commun ou par un autre organisme public de transport en commun qui assure un service de transport adapté ne sont pas obligées de contracter avec une personne afin d'assurer une liaison avec des points situés à l'extérieur de leur territoire. Nous sommes d'avis que les personnes handicapées, comme tout autre individu, doivent pouvoir se déplacer non seulement dans leur région, mais également en dehors. C'est là une condition fondamentale qui favorise une réelle participation sociale. L'Association recommande donc, comme l'indiquait l'avant-projet de loi, que les municipalités répondant à cette définition soient obligées de contracter avec une personne afin d'assurer une liaison en dehors de leur territoire.
Nous avons un exemple bien concret. Il est encore aujourd'hui bien difficile pour les personnes handicapées d'avoir accès au transport adapté pour recevoir leurs services spécialisés de réadaptation. Et on ne doit pas limiter à 35 heures par semaine l'accès au transport adapté dans les municipalités où il existe un service de transport en commun. Une telle restriction entre en contradiction avec notre objectif de participation sociale. D'ailleurs, plusieurs activités se tiennent en dehors du 9 à 5, si on parle des loisirs, des visites, des restaurants et bien d'autres raisons.
Nous aimerions conclure en rappelant les éléments qui nous apparaissent essentiels, si l'on souhaite que la révision actuelle de la loi atteigne véritablement ses objectifs. La participation sociale des personnes handicapées, c'est l'affaire de tous. Un ensemble de ministères, d'organismes et d'acteurs sociaux doivent donc se sentir concernés et apporter leur contribution.
L'Office des personnes handicapées du Québec doit avoir le pouvoir d'exercer effectivement de la coordination interministérielle en relevant par exemple du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. La stratégie gouvernementale en matière d'intégration et de maintien en emploi des personnes handicapées doit contenir des actions concrètes et même des objectifs de résultat mesurables et significatifs dans les meilleurs délais.
Les amendements proposés dans le projet de loi concernant l'accès des personnes handicapées à l'égalité en emploi dans des organismes publics doivent entrer en vigueur dès l'adoption du projet de loi.
n(15 h 20)n Le transport adapté doit être accessible sur l'ensemble du territoire québécois afin de permettre aux personnes handicapées de se déplacer dans leur région et ailleurs, pour l'ensemble de leurs activités. Merci beaucoup, et nous sommes prêts à accueillir vos questions.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, vous savez, vous êtes entrés... plus qu'entrés dans votre temps. Alors, je vais donc quand même passer immédiatement à la période d'échange. Je vous cède donc la parole, puisqu'on vous y a autorisé, M. le ministre délégué à l'Environnement et à l'Eau.
M. Simard (Montmorency): Entre parenthèses, Mme la Présidente, je n'avais pas à recevoir d'autorisation, puisque les règlements me le permettent. Mais je sentais un beau sentiment de bienvenue.
M. Williams: Du porte-parole.
M. Simard (Montmorency): ...le porte-parole. Alors, ceci étant dit, M. Paillé, M. Malo, Mme Lauzon, soyez les bienvenus parmi nous. Merci beaucoup du travail de qualité que vous avez fait. Merci du message que vous nous livrez. Et, je dois vous avouer, j'étais particulièrement sensible au titre de votre mémoire, Les personnes handicapées, un capital humain à mieux faire valoir, et je pense que ce titre reflète l'ensemble du message que vous avez voulu nous faire partager. Un message qui, dans le fond, nous rappelle un courant très fort dans les sciences humaines, plus particulièrement en sociologie, qu'on appelle le personnalisme, où on dit qu'on doit voir la personne humaine et la voir dans sa globalité pour mieux la comprendre, dans une perspective presque holistique, en définitive. Donc, cette idée transcende un peu tous vos propos, et nous en sommes fortement solidaires.
Vous nous avez rappelé que vous vous réjouissez fortement de l'action et de l'effort du gouvernement de revisiter une loi qui remonte à 1978. Et vous nous avez partagé certaines réserves, vous nous avez fait partager certaines suggestions, sur lesquelles j'aimerais revenir. Vous avez été assez catégoriques lorsque vous avez parlé, entre autres, d'objectifs de résultat. Je pense que c'est une idée très forte, là, qui revient. C'est peut-être une déformation de sociologue, mais, si tant est, là, qu'on s'entende sur des résultats et des objectifs, comment, après, fait-on pour mesurer notre avancement vers l'atteinte de ces objectifs ou de ces résultats? Autrement dit, quels seraient les indicateurs sociaux nous permettant d'évaluer l'atteinte de ces objectifs de résultat?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Paillé.
M. Paillé (Errol): Mme Lauzon va...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Mme Lauzon.
Mme Lauzon (Anne): Oui. Bien, dans le fond, c'est que, si on prend l'exemple de la stratégie gouvernementale pour l'accès à l'emploi, de dire qu'il faut qu'il y ait une stratégie puis qu'il faut qu'il y ait des choses qui soient faites, c'est une façon de voir les choses.
Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faudrait qu'on ait des cibles concrètes, puis, peut-être, en fonction des grands champs d'activité ou des types d'emplois qui existent dans la société, bien, qu'on se donne des objectifs de résultat. Par exemple, il faudrait qu'on atteigne que 2 % des personnes handicapées soient employées dans tel secteur, ou, à l'inverse, dire: Il faut que dans trois ans, ou dans quatre ans, ou dans je ne sais pas combien d'années, dans un délai x, il y ait, je ne sais pas, moi, 50 % des personnes handicapées qui aient un travail rémunéré. Bien, pour ça, ça prend quelques autres éléments.
La question des cibles et des objectifs de résultat, il faut que ce soit accompagné de stratégies pour que ça fonctionne, parce qu'il y a déjà eu une espèce de quota qui n'a pas donné grand résultat. Je pense que, ce qu'il faut, c'est beaucoup travailler sur les préjugés des personnes, il faut travailler sur l'adaptation des postes de travail, sur la souplesse dans les horaires de travail. Il faut vraiment que ce soit une volonté de l'ensemble des acteurs, pour que ça fonctionne. Mais on pense qu'il faut un peu plus qu'un souhait ou quelque chose de théorique.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Malo.
M. Malo (Luc M.): Je pourrais ajouter deux exemples puis je pourrais en ajouter beaucoup d'autres. Prenons l'alphabétisation des personnes sourdes, hein? Tant que la langue d'enseignement ne sera pas reconnue au Québec, la langue des signes ? québécoise ? qui est adoptée par le gouvernement ontarien, ne sera pas reconnue par le gouvernement du Québec au niveau du ministère de l'Éducation, je pense qu'on a un problème et les personnes sourdes ont un problème. Et l'indicateur de résultat serait le taux d'alphabétisation qui diminuerait significativement pour les personnes sourdes du Québec. C'est un exemple, je pense, d'un objectif de résultat.
On a un problème dans la fluidité du continuum de services à cause des problèmes de logement. Les personnes hébergent trop longtemps dans les centres d'accueil, d'hébergement parce que l'adaptation à domicile ne se fait pas ou parce que l'accès à un logement adapté à leurs capacités n'existe pas ou est plus ou moins accessible. Ceci fait que, si les gens ne sortent pas d'un centre de réadaptation, il y en a d'autres qui restent à l'hôpital, qui ne peuvent pas rentrer chez nous.
Donc, dans la fluidité du continuum de services, il y a des problèmes. Comprenez-vous que, si on se donnait des objectifs de résultat, qu'il n'y ait personne qui soit en attente d'un logement adapté lorsqu'il sort d'un programme de réadaptation, on améliorerait significativement non seulement le sort des personnes, mais également de toute la société, et ça, ça se mesure.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le ministre.
M. Simard (Montmorency): Merci, Mme la Présidente. Ce sont des réponses fort intéressantes. Mme Lauzon faisait référence, entre autres dans sa partie de réponse, à la dimension de la mobilisation. Est-ce que, pour vous, on pourrait en fait arriver à cette mobilisation en faisant un exercice de mise à jour de la politique d'ensemble À part... égale?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Lauzon.
Mme Lauzon (Anne): C'est une voie d'action possible. C'est parce qu'effectivement la politique À part... égale comprenait des plans d'action par orientation qui arrivent à des résultats concrets. Mais, si ça, c'est fait vraiment avec le sérieux, dans le délai indiqué, avec l'ensemble des partenaires aussi comme c'est indiqué, c'est certainement porteur de résultats positifs.
Mais on sait aussi que se donner un objectif de réviser une politique, on est encore un petit peu loin du résultat concret, là. Je pense que réviser la politique, c'est une très bonne chose, parce que le fait de réviser la politique et les plans d'action vont amener à des résultats. Mais on pense qu'en parallèle de ça il y a des choses à faire peut-être sur le plan de la société et une sensibilisation de l'ensemble des acteurs.
Quand on dit que la participation sociale, c'est l'affaire de tous, c'est que, si, à la base, à chaque fois qu'un règlement, une politique, une loi est pensée en fonction de l'impact potentiel sur les personnes qui ont des limitations ou des incapacités, bien, on éviterait... on enlèverait à la base les obstacles à leur participation sociale, puis, après ça, ce serait moins compliqué de réviser tout le reste ou de se faire des plans d'action pour toutes les choses qu'il faut réviser.
Quand on construit une maison en pensant tout de suite aux normes d'accessibilité, bien, ça ne coûte pas plus cher que de la construire sans y penser. Mais, rajouter des rampes, des ascenseurs puis défaire le béton pour refaire les choses, ça, ça coûte plus cher. Ça fait que c'est pour ça que nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut être à la fois proactifs dans tout ce qu'on développe comme société, dans toutes les orientations qu'on prend comme société, mais aussi se donner des plans d'action plus spécifiques pour des choses plus spécifiques.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Paillé, vous vouliez compléter.
M. Paillé (Errol): Un complément. Avant de songer à des indicateurs et des résultats, il faut faire un petit peu... comme Mme Lauzon disait, il faut faire le constat de notre passé et un peu des échecs et des tentatives qu'on a essayé de mener à terme et qui n'ont pas nécessairement apporté tous les résultats qu'on souhaitait. Et, moi, pour avoir travaillé dans un centre d'emploi pour soutenir les personnes handicapées dans leur démarche d'intégration professionnelle, ce que l'on constatait, c'était qu'on retrouvait encore dans notre société, et surtout auprès de nos employeurs qui vont embaucher nos gens, beaucoup encore... c'est de l'ignorance puis il y a beaucoup de préjugés.
Dans notre stratégie, si on ne commence pas par le début... on peut même penser à notre appareil gouvernemental. Notre appareil gouvernemental n'est pas tout à fait prêt à laisser la place aux personnes handicapées. Et, si, dans notre stratégie, on ne pense pas vraiment à informer les gens comme il faut et leur démontrer tout le potentiel, toute l'adaptation qui peut être faite pour rendre le marché du travail accessible à une personne handicapée, on n'atteindra jamais de résultat.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je vous remercie.
M. Simard (Montmorency): Me reste-t-il un peu de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. J'ai aussi le député de Maskinongé qui m'a demandé la parole. Alors, M. le ministre, il vous reste encore du temps. Oui?
M. Simard (Montmorency): À tout seigneur, tout honneur, j'aimerais laisser la parole à mon collègue le député de Maskinongé.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est-à-dire que c'est moi qui vais donner la parole...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Simard (Montmorency): Ah! si vous souhaitez... Ha, ha, ha! Si vous le souhaitez, Mme la Présidente, bien sûr.
n(15 h 30)nLa Présidente (Mme Carrier-Perreault): Laissez-moi faire mon travail, M. le ministre. Alors, M. le député de Maskinongé.
M. Simard (Montmorency): Que vous faites très bien d'ailleurs.
Une voix: ...
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Tant que ça va rester comme ça, ce n'est pas si pire. Alors, M. le député de Maskinongé.
M. Désilets: Merci, Mme la présidente. Bien, bonjour puis merci de votre présentation. Moi, j'aimerais savoir... Chez vous, vous avez parlé d'emploi, vous avez parlé de communication, d'information, d'accessibilité. Comment est-ce qu'on pourrait, là, préparer la vigilance que vous parlez? Comment est-ce qu'on pourrait, là, prévoir un petit peu le déroulement de tout ça? Comment est-ce qu'on peut emboîter le pas pour en arriver à nos fins ou à vos fins, dans l'ordre?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Paillé.
M. Paillé (Errol): Bien, ce qu'on pense qu'on identifie comme première problématique, c'est, en ce moment, qu'il y a peu ou pas assez de coordination interministérielle. Les gens, entre ministères, n'ont pas l'opportunité de s'asseoir et développer ensemble une stratégie qui va permettre d'atteindre des résultats. Et le rôle qu'on attribue à l'Office des personnes handicapées pourrait être beaucoup plus grand dans cette coordination-là, et ça, je pense que, déjà là, ça pourrait permettre d'atteindre des résultats plus tangibles.
On le vit, nous, de façon très concrète. M. Malo en parlait tantôt, on apporte un soutien à l'intégration à nos personnes dans le continuum de services, mais on fait face toujours à la sortie de notre clientèle pour retourner dans la société... souvent à des impasses par manque de coordination. L'aménagement du domicile n'est pas fait. L'accès au transport n'est pas possible parce que la liste d'attente est trop longue. Les services de maintien à domicile, en ce moment, dans le continuum de services, pour les personnes blessées médullaires de l'ouest du Québec, il y a six personnes quadraplégiques qui ont un appartement. Ils paient leur appartement à tous les mois, et il y en a un, ça fait sept mois qu'il occupe un lit en réadaptation et il ne voit pas le jour quand il va recevoir... Puis là le CLSC dit: Mais tous nos budgets ont été dépensés, nous, là, il faut attendre le prochain budget. C'est une roue qui ne fonctionne vraiment pas bien, et tout ça fait que c'est la personne, en soi, qui vit toutes ces incohérences dans notre système, là, qui fait qu'il faut recentrer les choses et donner un pouvoir à un organisme quelconque pour faire une coordination de tous ces services-là qui sont offerts dans la population.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Maskinongé.
M. Désilets: Je comprends ce que vous me dites, que l'OPHQ ou l'Office de protection des... l'Office des handicapés pourrait assurer ça, un certain leadership.
M. Paillé (Errol): Un certain leadership dans cette coordination-là, permettre à tous les ministères d'avoir des opportunités d'échanger sur... Si un ministère décide d'adopter un tel règlement, telle loi, mais quel impact ça a sur l'autre, et vice versa, là? Puis l'Office a cette capacité-là d'avoir une vision qui est globale des besoins. C'est souvent ce qui manque. C'est une vision très centrée sur un ministère, sur un service qu'on peut offrir, mais l'impact sur l'autre et l'impact sur l'individu, on croit que l'Office des personnes handicapées a un rôle bien important et une place, parce qu'il a développé, au cours des années, une vision et l'expertise nécessaire pour offrir les meilleurs conseils.
M. Désilets: Vous nous revenez avec la clause d'impact dont plusieurs organismes sont venus nous parler ici, là. C'est-u... On parle-tu de la même clause d'impact que vous parlez ou c'est la clause d'impact dans n'importe quel projet de loi qui est adopté à l'Assemblée nationale qu'il y a un lien en fonction, là, des personnes handicapées?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Lauzon.
Mme Lauzon (Anne): Oui. Bien, en fait, ça, c'est une chose, mais il y a aussi autre chose, c'est que l'Office pourrait faire ça en autant qu'elle ait le pouvoir, puis actuellement, bien, c'est un petit peu compliqué, hein? Je pense, elle pourrait parler à ses collègues, mais, quand tu n'as pas vraiment un mandat officiel, je pense que ce n'est pas très facilitant.
Mais, par ailleurs, il y a des petites choses qu'on peut faire aussi, là, en parallèle. Je pense qu'il ne faut pas juste attendre des grandes choses comme la révision de la politique puis... Par exemple, là, tantôt vous avez amorcé le volet de la communication ou l'accès à l'information, bien, un exemple très simple, si tous les sites Web gouvernementaux étaient accessibles pour les personnes qui ont une déficience visuelle, bon, si... l'accessibilité aux lieux physiques aussi... Bon, il y a toutes sortes de choses qui sont assez concrètes qui ne nécessitent pas nécessairement des millions de dollars d'investissements mais qui nécessitent des ajustements pour que... C'est l'accès à la connaissance, c'est beaucoup, hein? Donc, ça, c'est un exemple concret de petites choses qui peuvent être faites aussi au-delà des stratégies plus gouvernementales. Mais je pense qu'il faut en faire à tous les niveaux.
M. Désilets: Moi, je retiens ce que vous dites, surtout, entre autres, coordination et leadership.
Mme Lauzon (Anne): Il faut qu'il y ait quelqu'un qui ait ça en tête tout le temps.
M. Désilets: Oui. Puis l'argent pourrait venir aussi, là, mais, en premier, il y a un rôle, il y a bien des choses qu'on pourrait déjà améliorer si on aurait de la coordination et un leadership, là.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ça va? Alors...
M. Désilets: O.K. Merci.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est beau. M. le ministre, il vous reste environ cinq minutes, alors, questions, réponses incluses.
M. Simard (Montmorency): Bon. Bien, je vous remercie. J'aurais peut-être eu le goût de vous poser très franchement la question. Vous avez fait des suggestions concernant la composition éventuelle du conseil d'administration de l'Office, pourriez-vous élaborer là-dessus, s'il vous plaît?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Paillé.
M. Paillé (Errol): Bien sûr qu'on voit une large place aux personnes handicapées ou les gens qui les représentent. On voit une place aussi aux partenaires, aux représentants de nos ministères. Et on voyait aussi l'ajout, là, de représentants de certains ministères qu'on voit, là, de soi, membres de l'Office comme le ministère du Travail et...
Une voix: Communications.
M. Paillé (Errol): ...Communications, entre autres.
M. Simard (Montmorency): Qui n'y sont pas présentement.
M. Paillé (Errol): Effectivement.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, ça va, M. le ministre?
M. Simard (Montmorency): Oui, ça m'irait, Mme la Présidente. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien. Alors, M. le député de Nelligan et porte-parole de l'opposition officielle en ces matières, c'est à vous la parole.
M. Williams: Merci beaucoup. Et merci beaucoup pour votre présentation, l'Association des établissements de réadaptation en déficience physique du Québec. J'ai eu une chance, pendant quelques années, de profiter de votre expérience, votre expertise et j'ai toujours appris beaucoup de choses, et je voudrais vous encourager de faire votre excellent travail comme représentants de regroupement des établissements.
Un petit commentaire pour mon ami le député de Maskinongé, que, avec le document déposé devant le Conseil des ministres, là, pas un sou de plus, oublie l'argent. Avec ça, si vous pensez, avec le projet de loi n° 155, vous allez avoir plus d'argent, oubliez ça.
Première question sur... Ah, peut-être sur le pouvoir de l'OPHQ, et nous avons une expertise incroyable devant nous. De la façon que le gouvernement marche, selon vous, qu'est-ce que ça va prendre d'avoir... Parce que ce n'est pas la première fois qu'on essaie d'avoir une instance qui peut bouger un dossier soit des personnes handicapées, comme on parle aujourd'hui, ou les dossiers des femmes, ou d'autres dossiers dans... C'est quoi, la structure la plus efficace, selon vous, de bouger un dossier? Et, je m'excuse de dire un dossier comme ça, mais un secteur aussi important, multidisciplinaire, multisectoriel, c'est quoi, selon vous... Et, oubliez tous les débats, OPHQ, instance, secrétariat, attaché au premier ministre, nommé par le l'Assemblée nationale, etc., selon vous, là, ça prend quoi de bouger l'instance gouvernementale ou l'apparatus gouvernemental? Et j'ai vu qu'il y a certainement quelqu'un très expérimenté dans ça, là, mais je vous attends.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Malo.
M. Malo (Luc M.): J'ai le goût de dire en boutade que, idéalement, pour faire bouger le gouvernement, c'est quand l'opposition et le parti au pouvoir partagent la même philosophie, les mêmes buts. Dans ce temps-là, généralement, ça avance.
M. Williams: ...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Malo (Luc M.): Et, dans ce contexte-là, je vous dirais que ce qui m'apparaît de plus fondamental, c'est que vous partagiez trois convictions, tout le monde autour de la table. Toute personne ayant une déficience physique doit pouvoir vivre dans sa communauté et y exercer pleinement ses rôles. On veut d'abord que vous croyiez à ça. Deuxièmement, toute personne ayant une déficience ? puis je pourrais ajouter déficience intellectuelle aussi ? doit avoir accès aux services, donc, requis par son état. Troisièmement, toute personne ayant une déficience physique doit avoir un accès facile, rapide aux services de réadaptation dans sa région.
n(15 h 40)n Ça, ça m'apparaît trois convictions fondamentales que vous devriez partager. Si vous les partagez, après on pourrait dire que l'Office... Puis là, nous, on propose qu'il soit au ministère des Citoyens. On aurait pu dire premier ministre, comme ça a été dit tantôt. Ce n'est pas bête aussi, sauf que, nous, on a pensé que le premier ministre, de la coordination, à un moment donné, il en fait tellement qu'il risque d'être oublié aussi. Donc, on propose que ce soit un ministre dédié à ça qui ne serait pas le ministre de la Santé. Pas parce qu'on lui en veut puis on a quoi que ce soit contre la personne, mais on ne veut pas être considéré comme des malades. Je suis dans une chaise roulante, mais je ne me considère pas comme malade. O.K.? Entre les deux oreilles, ça a de l'air à filer encore, à moins que vous me disiez le contraire tantôt.
Alors donc, ce qu'on voudrait, c'est que l'Office soit le défenseur proactif, traduit dans des plans d'action concrets de ces trois grands principes et donc qu'il puisse agir au niveau de chacun des ministères, et ça, ça veut dire ? puis pour répondre à votre question également ? toutes sortes de volets de la société. Vous savez, un jour, quand on se retrouve pas loin de la soixantaine, du jour au lendemain, dans une chaise roulante, paralysé, notre vie bascule, et là ça suppose que, avant même de sortir... D'abord, il faut rentrer au centre de réadaptation, il y a des délais. Ça, ça se comprend. Mais, après ça, quand on veut sortir, parce que là ils nous disent qu'il faudrait qu'on te suive en externe... Ah, bien, là, il faut que je change mon véhicule, il faut que je le fasse adapter. Tu es obligé de changer de maison, parce que tu restes dans un deuxième étage, puis ça ne marche pas. O.K.? Puis là j'ai la chance d'avoir les moyens de pouvoir le faire, mais, si tu n'as pas les moyens, tu peux attendre bien longtemps. O.K.?
Puis, même quand tu es rendu dans ton logement puis que tu as ton véhicule adapté, la maudite porte en avant, elle est lourde, puis je ne suis pas capable de l'ouvrir. Parce que, si ça avait été fait d'abord quand la construction s'est faite ? puis c'est un gros condo, là ? si ça avait été fait, ça n'aurait rien coûté. Le contracteur, ça lui aurait peut-être coûté, disons, 500 $ de plus. Soixante-trois appartements pour payer ça, pensez-vous que ça représente une grosse perte pour lui? Mais, comme ça n'a pas été fait avant, là le faire, c'est 2 000 $, puis il faut avoir l'accord du syndicat de copropriété qui refuse. Il refuse parce qu'il ne veut pas payer l'électricité puis il ne veut pas payer les réparations si ça ne se fait pas. Puis peut-être aussi, entre guillemets, il ne veut pas avoir de personnes handicapées dans son centre pour ne pas que ça ait l'air d'un centre pour vieux.
C'est ça qu'on vit, et ça, ça suppose qu'il y a quelqu'un qui maîtrise bien les dossiers en quelque part puis qui soit capable de parler à l'Office de la construction, qui soit capable de parler au ministère de la Santé, à tous les ministères puis dire: Aïe! Vous bloquez le processus en quelque part, parce que le transport n'est pas correct, parce que le logement n'est pas correct, parce que l'accès aux loisirs n'est pas correct, parce que ci, parce que ça, parce que ça. On pourrait vous en donner plein, et là je pourrais également pour tenir le même discours pour les personnes sourdes puis je pourrais vous tenir le même discours pour les personnes aveugles. Est-ce que ça répond à votre question?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Nelligan.
M. Williams: C'est un début. Merci. L'Association a souvent défendu la cause des personnes handicapées et leurs établissements en sortant les listes d'attente souvent près de Noël. Vous avez parlé aussi que vous cherchez une stratégie d'objectifs de résultat. Est-ce que vous pouvez nous informer plus ou moins où sont les listes d'attente? Ce n'est pas une vérification aujourd'hui sur ça, mais on... Parce que la première étape de bien cibler nos objectifs, c'est d'avoir la bonne information, est-ce que vous pouvez nous informer plus ou moins sur l'actualité? Et aussi est-ce que vous pensez que ça va être utile dans un projet de loi tel que 155 d'avoir un article de loi qui oblige la publication des listes d'attente, qu'on peut voir qu'il y a une amélioration? Et pas juste les listes d'attente, mais les listes d'attente sont un des indicateurs. Vous avez parlé avant de l'adaptation à domicile, là. J'ai entendu, les listes d'attente, maintenant, c'est trois ans ou plus. J'ai entendu l'accès aux aides auditives, souvent c'est 18 mois, 24 mois. Et je ne commence pas de débat avec le ministre délégué de l'Environnement aujourd'hui sur ça, mais juste je crois beaucoup... J'ai utilisé ça avec les familles d'accueil, la protection à la jeunesse, le temps de réponse des ambulances, si on peut commencer à sortir ça, la population va être au courant. Pensez-vous que ça va être une bonne idée d'avoir une obligation de publier les listes d'attente?
Et, deuxième question, est-ce que nous avons besoin plus, dans le projet de loi n° 155, une stratégie de répondre au problème de pénurie des professionnels dans votre réseau? Parce que, selon ma lecture de 155, je n'ai pas trouvé ça, une stratégie qui réponde au problème de professionnels dans les établissements de réadaptation. Voilà quelques questions très simples. Est-ce que vous pouvez répondre à ces deux...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Lauzon.
Mme Lauzon (Anne): Oui. Bien, alors, juste pour faire le point sur c'est quoi, notre situation, présentement, on a encore aux alentours de 8 600 personnes qui attendent pour des services au Québec, qui attendent entre trois mois et trois ans. Puis ça, ils attendent pour l'accès à un premier service, on ne compte pas les gens, là, deux fois ou qui attendent pour d'autres services une fois qu'ils ont eu le premier. C'est certain que ça, ça compromet beaucoup de choses dans la vie des personnes qui sont touchées par ces délais d'attente là. Un des principes de base de la réadaptation, c'est évidemment l'intervention précoce, dès que requis, puis ça, bien, malheureusement, dans l'état actuel des choses, on n'est pas capable de le faire tout le temps. Puis, comme vous disiez tantôt, ça ne compte pas les gens qui ne sont pas en liste d'attente parce que le programme n'existe pas encore. C'est malheureusement encore le cas dans certaines régions. Puis un programme qui n'est pas présent dans toutes les régions, c'est justement le programme de soutien en emploi pour favoriser l'intégration au travail des personnes. Donc, si on fait le lien avec le projet de loi n° 155, il y a là certainement matière à trouver des solutions plus concrètes.
Je vais faire deux, trois petits points. Par rapport à la pénurie de professionnels, c'est quelque chose qui, effectivement, est une réalité, mais il y a eu une démarche de planification de main-d'oeuvre dans le secteur de la réadaptation au cours des dernières années qui a conduit à un plan d'action dans lequel il y a plusieurs actions prévues, et il y a, entre autres, des contingentements universitaires, il y a l'organisation du travail aussi à revoir dans certains cas, ce qui fait que, sur la pénurie de professionnels, pour nous, présentement, ce n'est pas quelque chose qui ferait en sorte que... qui nous empêche réellement d'avancer. C'est plus les ressources financières pour pouvoir engager le monde puis, après ça, s'organiser, parce que, de toute façon, sur une période de trois à cinq ans, la situation devrait se rétablir.
La question de l'équité, c'est sûr que la régionalisation des services, c'est une décision... une orientation ministérielle qui date de 1995. Et, présentement, il y a des travaux qui sont en cours pour se doter d'un plan d'action en déficience physique pour justement s'assurer d'actualiser ces orientations ministérielles là de 1995, et je vous dirais qu'on fonde beaucoup d'espoir là-dessus parce que c'est par là... Puis je pense qu'on va se donner un plan d'action avec une structure et justement des résultats attendus, mesurables, avec des moyens, on espère, qui vont nous permettre de le faire. Est-ce que c'est le projet de loi n° 155? Je ne suis pas certaine. Je pense que les services spécialisés de réadaptation contribuent à ce que les personnes jouent davantage leurs rôles sociaux et soient plus autonomes et plus actives dans la société. Certainement qu'il y a un lien. Maintenant, je ne suis pas la spécialiste des lois pour savoir à quel endroit c'est mieux de... puis si c'est mieux de l'inscrire ou pas. Mais, dans notre préoccupation d'avoir toujours des choses le plus mesurables possible, une chose, par exemple, qu'on veut faire avec nos partenaires, c'est de s'entendre sur des délais d'attente acceptables ou maximums pour que justement on ne se retrouve pas avec 8 500 personnes qui attendent jusqu'à trois ans sans mesurer comme il faut l'impact de ces délais d'attente là, au-delà de savoir que ça n'a pas de bon sens.
Ça fait que je ne sais pas si...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, rapidement, M. le député de Nelligan.
M. Williams: Merci, Mme la Présidente. Vous êtes le seul groupe qui a mentionné la question des adaptations dans la loi électorale, et j'ai entendu que peut-être bientôt nous allons faire une élection. Je n'ai pas entendu l'annonce, jusqu'à maintenant, officielle, mais jusqu'à date... Mais peut-être nous allons avoir le temps de corriger les lacunes comme, exemple, le vote itinérant, juste dans les établissements publics et pas dans les établissements privés.
C'est vous qui avez mentionné ça dans votre mémoire. Est-ce qu'il y a quelques suggestions concrètes que peut-être, avec l'unanimité que vous avez mentionnée, M. Malo, qu'on peut peut-être avancer? Peut-être, c'est trop tard, mais je voudrais profiter de votre présence aujourd'hui ? et c'est vous qui avez mentionné ça ? c'est quoi, les lacunes, selon vous, qu'on peut corriger? Parce qu'il me semble qu'assurer que le système électoral est bel et bien adapté pour les personnes handicapées, c'est assez important, avez-vous quelques suggestions précises?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Paillé.
M. Paillé (Errol): Bien, la suggestion première que l'on pense, c'est vraiment de rendre accessible le jour même du scrutin à tous les citoyens, y compris les personnes handicapées, le droit d'accès d'aller voter. En ce moment, on donne accès aux personnes handicapées, mais c'est dans le processus qui est par anticipation, une semaine ou deux semaines avant. Et, comme vous le savez, dans une campagne électorale, la dernière semaine ou les deux dernières semaines d'une campagne sont souvent déterminantes pour un individu qui est incertain, qui n'est pas... Il y a trois partis en jeu, et on ne sait pas trop... Dans la dernière semaine, ça peut être la semaine déterminante, et c'est pour cela qu'on pense que, comme tout citoyen, c'est important d'avoir accès à toute l'information de la part de nos partis politiques avant d'aller faire notre choix.
n(15 h 50)nM. Williams: Et, si vous avez quelques suggestions avant ou après la prochaine élection, ça m'intéresse beaucoup. Et si on peut adapter... Pouvez-vous déposer à la commission, un peu plus tard, les choses concrètes? Ça va être assez intéressant de mieux comprendre comment on peut améliorer l'accès.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, si vous avez des recommandations, je vous suggère de les faire au secrétariat de la commission
M. Williams: Oui, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Malo, vous vouliez ajouter quelque chose?
M. Malo (Luc M.): Bien, j'allais dire qu'il y a eu des représentations de faites. Excusez-moi, Mme la Présidente, il y a eu des représentations de faites au président des élections la dernière fois, par exemple, que les bureaux nous soient accessibles, et pas nécessairement rentrer par la porte des bagages, ce qui a été le cas pour moi quand je suis allé voter; et, deuxièmement, avec le nouveau mode de scrutin électronique, que l'écriture soit beaucoup plus grosse, parce que ce n'est pas juste... Il y a beaucoup de personnes âgées qui étaient handicapées la dernière fois lorsqu'on a dû voter avec les systèmes électroniques parce que ce n'était pas lisible. Il faudrait ajouter une loupe dans chacun des bureaux de scrutin.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Joliette.
Mme Lespérance: Merci, Mme la Présidente. C'est déjà la deuxième fois que j'ai le privilège de vous rencontrer, c'est toujours un plaisir renouvelé. J'ai remarqué que des discussions qu'on a eues antérieurement concernant la réadaptation se retrouvent à l'intérieur de vos discussions, donc je trouve ça intéressant.
Vous avez mentionné, M. Malo, qu'il y a un arrimage qui, actuellement, n'est pas fait et qu'il y a comme une non-volonté politique de vouloir bouger les choses. Je trouve ça intéressant qu'il n'y ait pas juste moi qui se rende compte de ça et que M. Tout-le-monde, monsieur de la population s'en rende compte, parce que j'aimerais ça faire réaliser à l'ensemble de mes collègues d'ici puis à l'ensemble de la population qui vont peut-être lire nos choses que, pendant qu'un client demeure dans un lit de réadaptation, alors que tout ce qu'on avait à faire, c'était d'adapter sa résidence pour qu'il puisse sortir puis s'en retourner chez lui, ça coûte 7 000 $ par mois minimum, et ça, c'est quand il n'a pas besoin de soins un petit peu plus spécialisés. Ce qui veut dire que l'argent, il est là, il est mal distribué actuellement. Donc, quand vos clients attendent pendant sept mois avant qu'on puisse adapter leur logement, c'est toute une chaîne qui ne se fait pas. Pendant ce temps-là, on n'a pas donné suite aux besoins d'un autre client qui avait besoin rapidement d'être pris en charge par l'État pour qu'on puisse corriger rapidement ses lacunes et faire en sorte qu'il puisse se réadapter et vivre dans la dignité, et retrouver son logement, retrouver son... Donc, je vous rejoins énormément.
Maintenant, ma question, ce serait: Est-ce qu'une des solutions, ce ne serait pas que l'argent suive toujours le client ou d'autres solutions? Parce que vous apportez un problème majeur, un problème de gestion importante de fonds publics, et, avec les problèmes, nécessairement il faut qu'il y ait des solutions. Donc, M. Malo.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Paillé.
M. Paillé (Errol): Mme Lauzon va répondre.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ah, Mme Lauzon? Alors, Mme Lauzon.
Mme Lauzon (Anne): Bien, c'est que sur le plan du financement, dans le fond, nous autres, notre réflexion, là, et notre expérience nous disent que ce qui est important, c'est que la personne ait accès aux services dès que les services sont requis et non avec un délai, parce que là il y a des risques de chronicité, il y a des risques que ça prenne plus de temps pour récupérer moins d'autonomie. Donc, ça, c'est effectivement non souhaitable.
Alors, la solution, en termes de financement, que l'argent suive le client, c'en est peut-être une, mais on a une expérience avec, par exemple, la Société de l'assurance automobile du Québec qui fonctionne à contrat avec les établissements et qui paie pour les services rendus dès qu'ils sont nécessaires, et qui regarde aussi les résultats. Et, dans ce sens-là, nous, on miserait peut-être plus sur l'exploration de ce qui est aussi un peu dans l'air, là, pour qu'il y ait plutôt une caisse incapacité sur un système assurantiel qui ferait que la personne a besoin de services, elle y a accès, puis là ça veut dire dans l'ensemble du continuum. La modalité est peut-être à voir concrètement puis comment ça s'arrime avec les autres budgets qui existent présentement dans le réseau de la santé et des services sociaux, mais certainement que le principe qu'il faut retenir, c'est que la personne puisse avoir accès à ces services dès qu'ils sont requis. Et ça coûterait moins cher.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, ça va? Merci. Mme Lauzon, M. Paillé, M. Malo, merci de votre participation aux travaux de cette commission. Je vais suspendre quelques instants nos travaux pour permettre aux prochains intervenants de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 56)
(Reprise à 16 h 1)
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, s'il vous plaît, la commission va reprendre ses travaux. Nous rencontrons maintenant...
Des voix: ...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): S'il vous plaît! Nous allons rencontrer M. Patrick Fougeyrollas du Réseau international sur le processus de production du handicap. Alors, M. Fougeyrollas, bienvenue à cette commission. Je vous rappelle que vous avez un maximum de 20 minutes pour nous présenter votre mémoire et que, par la suite, on va avoir une période d'échange avec les membres de chaque côté de la table ici. Alors, monsieur, vous pouvez procéder.
Réseau international sur le processus
de production du handicap (RIPPH)
M. Fougeyrollas (Patrick): Merci, Mme la Présidente. Alors, je vais vous présenter... en fait, je vais me concentrer, moi, assez spécifiquement sur toutes les questions de définition, d'harmonisation des terminologies. Je viens ici en tant que président du Réseau international sur le processus de production du handicap. Vous allez me dire: C'est un bien grand nom. Qu'est-ce que c'est exactement? Bien, c'est une organisation qui vise, en fait, à mettre l'accent sur la clarification des définitions.
Ce qu'on pense, dans notre organisation, c'est que le fait qu'on comprenne mieux ce qui amène une personne à vivre ou non des situations de handicap dans la vie, des situations d'exclusion sociale, nous permet à ce moment-là de mieux harmoniser l'organisation des services, nos politiques, et donc, cette difficulté à bien savoir de qui on parle vient jouer beaucoup sur la manière d'organiser nos interventions. Donc, une clarification conceptuelle, une clarification des définitions, ça va vraiment être un apport majeur pour réaliser, en fait, l'exercice des droits du groupe de population dont on parle. Et ce que je vais peut-être aussi amener, c'est que ce n'est pas toujours si clair de savoir de qui on parle vraiment quand on parle de personnes handicapées. Alors, nous sommes une organisation sans but lucratif. Ça fait au-delà de 15 ans que... avec un ensemble de partenaires, c'est une organisation qui est à majorité représentée par des personnes qui ont des incapacités, mais qui est aussi composée de partenaires, d'organismes parapublics, ministériels. Depuis au-delà de 15 ans, on a mis de l'avant cette question de clarification des définitions en suivant tout le débat aussi qui s'est fait au niveau international sur l'évolution des modèles de référence pour comprendre la question du handicap.
Si on se resitue à l'époque de 1978 et les années avant, on a eu un changement très, très important qui a amené la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées, c'est le passage de la protection à l'exercice des droits qui était un changement extrêmement important pour se tourner vers l'ensemble de la société et comprendre que la loi était là pour éliminer les obstacles à l'intégration sociale en tant que telle. Ces éléments-là étaient relativement nouveaux à cette époque-là et, pendant toute la période d'application de la loi, de développement du mouvement de défense des droits, développement de À part... égale, l'ensemble de la conscientisation que la société québécoise a fait pendant ces années-là, on a fait beaucoup de chemin. Et le Québec, finalement, en est arrivé à être reconnu au niveau international pour sa perspective d'ensemble et sur sa manière de prendre en compte non pas une problématique de santé simplement ou une perspective médicale, mais beaucoup plus d'interroger l'ensemble de la société et d'avoir une perspective d'assurance de l'exercice des droits et d'élimination des obstacles à l'intégration sociale.
Donc, quand on parle de définition, c'est essentiellement ce mouvement-là qu'il faut maintenant, au moment où on révise les définitions, remettre à jour dans la définition de «personne handicapée». Essentiellement, ce que ça dit, c'est que le handicap n'est pas une caractéristique de la personne. Donc, quand on va parler de définition de «personne handicapée», un très grand danger, c'est de voir cette définition-là comme un statut et quelque chose de figé. Dans la définition, on doit comprendre qu'on parle de personnes qui ont des caractéristiques particulières, qui est celle d'avoir des différences ? j'aime bien ce mot-là, moi ? mais qui se traduisent en fait dans des termes de déficiences, ou déficiences dans leur corps ou d'incapacité dans un ensemble de fonctions comme voir, entendre, marcher, comprendre, et ce sont les caractéristiques des personnes.
Dans une approche biomédicale, on a tendance à penser que le fait d'avoir ces déficiences-là ? et là je ne suis pas remonté à la multitude des diagnostics qui peuvent les provoquer ? ...c'est qu'on a l'impression qu'on sait déjà, parce qu'une personne a tel diagnostic, a telle déficience ou a telle incapacité, ce qu'elle va être en mesure de faire dans sa vie, et, en fait, on va tout de suite lui donner un statut d'être quelqu'un qui va être limité dans son intégration sociale. Ça, c'est une approche qu'on appelle biomédicale, qui fait d'une relation de cause à effet le fait d'avoir une différence dans son corps, une différence pour faire les choses et qu'on serait obligatoirement handicapé, handicapé dans le sens qu'on aurait de la difficulté à aller travailler, on serait moins scolarisé, on aurait finalement un destin de personne qui serait exclue.
Et ce danger-là d'associer la notion de handicap au fait d'avoir des déficiences et des incapacités, c'est justement ce qu'il faut clarifier au niveau conceptuel. En fait, le leitmotiv du mouvement de défense des droits, c'est de dire: Ce n'est pas parce que j'ai une différence, ce n'est pas parce que j'ai une déficience ou une incapacité que je vis obligatoirement une situation de handicap. Et ça, en quelques mots, ça vous donne toute l'évolution du passage d'un modèle biomédical à un modèle social où, à ce moment-là, on comprend que les personnes ont des caractéristiques particulières, mais le fait qu'elles aient de la difficulté à trouver leur place dans leur société vient d'une organisation sociale, d'une réaction à cette différence-là, donc vient de notre contexte, de toute l'organisation de notre société, de nos attitudes, des programmes et de l'organisation des services que l'on met en place, donc de facteurs environnementaux, et l'élément qui est le plus important, c'est que c'est quelque chose qui est situationnel, quelque chose qui est relatif.
Le handicap en soi n'est pas quelque chose qui est attaché à la personne. Ce n'est pas une caractéristique de la personne, c'est ce que la personne va rencontrer quand elle est mise en contexte pour faire ses activités courantes, sa vie quotidienne, et qu'elle va rencontrer soit des obstacles, soit aussi des facilitateurs.
Cette notion de dire qu'il y a aussi des facilitateurs, c'est la raison d'être de la loi et c'est la raison de toute l'action de la société québécoise, de l'appareil gouvernemental pour faire en sorte d'adapter son organisation aux caractéristiques d'un groupe de population différente. Alors, le fait que, par exemple, si on rencontre des facilitateurs qui nous permettent d'adapter un poste de travail, d'avoir un employeur qui a une attitude qui est ouverte et qui peut donner des conditions adéquates de travail à une personne qui a une différence, la personne n'est plus handicapée en tant que telle; elle a toujours ses déficiences, ses incapacités, mais on a éliminé des obstacles à la réalisation de ses activités.
Alors, fondamentalement, la définition, et j'insiste beaucoup là-dessus, elle doit être le reflet de cette compréhension d'un changement de modèle, du modèle biomédical à un modèle social, écologique, environnemental. Et tout le travail qui s'est fait au Québec a été de mettre l'accent. On est vraiment reconnus pour avoir introduit cette dimension-là, environnementale, dans l'exercice des droits des personnes handicapées. Donc, ça, c'est un point majeur au niveau de la définition et qui nous amène, quand on regarde la définition actuelle... Comme je le disais dans mon mémoire, là, je suis très pragmatique, hein? Parce qu'on peut aller très loin dans les questions de définition, même on pourrait remettre en question la notion même de personne handicapée. Mais, telle qu'elle se présente actuellement, la définition, telle qu'elle est proposée, pour moi, elle est en deux parties qui sont majeures. Et je crois qu'il y a une cohérence avec le modèle conceptuel dans le sens où, actuellement, on dit qu'une personne handicapée... Je ne commente pas plus là-dessus, c'est déjà très bien de ne pas dire handicapée simplement, hein, qui est une réduction de l'individu à son handicap, mais on ne reviendra pas à ça. Donc, la notion de personne handicapée est déjà excellente mais elle se caractérise par le fait d'avoir des déficiences et des incapacités significatives et persistantes qui sont ses caractéristiques personnelles.
n(16 h 10)n Ensuite, on dit: «sujette à rencontrer des obstacles dans ses activités courantes», c'est la deuxième partie. La force de cette proposition-là, c'est de ne pas dire que, parce qu'on a des déficiences, des incapacités et des situations de handicaps ? ce n'est pas un «et», c'est «sujette à» ? le fait d'avoir cette différence-là va la mettre en situation de vulnérabilité où... pour rencontrer un ensemble d'obstacles si son environnement n'est pas adapté à ces caractéristiques. C'est vrai pour l'individu, c'est vrai pour la population.
Donc, la définition, pour moi, répond à l'évolution conceptuelle internationale actuelle parce qu'elle permet d'avoir ces deux éléments. La population qui est visée par la loi, c'est l'ensemble des personnes qui ont des déficiences et des incapacités significatives et persistantes. Et l'objet même de la réussite, la mesure de résultats de l'atteinte des objectifs de la loi, c'est de faire en sorte que les personnes ne rencontrent plus d'obstacles à la réalisation de leurs activités courantes. C'est ça, la citoyenneté. La participation sociale, c'est l'exercice des droits ? des droits de la personne, en réalité ? pour pouvoir réaliser leurs activités.
Alors, est-ce que «activités courantes» est un terme qui va être suffisamment bien compris pour qu'il intègre l'ensemble des rôles sociaux des personnes? Ça, c'est quelque chose qu'il faut peut-être regarder, en tout cas qui nécessite définition, hein, parce que le terme «activités courantes», il est correct, mais il faut le considérer. Ce n'est pas simplement s'habiller, là, prendre ses repas, hein, c'est le travail, c'est toute la citoyenneté en tant que telle, et donc, c'est l'ensemble des rôles sociaux. Donc, c'est très important que la notion d'activités courantes aille dans ce sens-là.
Alors, je pense que, pour la définition, il faut respecter ces deux volets-là et bien comprendre que la population est beaucoup plus large, si vous voulez, en termes de déficience et d'incapacité, mais que le fait d'avoir un handicap n'est pas une caractéristique de la personne et l'effet même de l'application de la loi. Ça, c'est un volet majeur.
Peut-être en allant un petit peu plus dans le détail, on dit: «déficience entraînant une incapacité». On peut avoir des problèmes avec cette notion-là parce qu'elle amène une relation de cause à effet. Dans des propositions antérieures, on disait «déficience ou incapacité significative et persistante» parce que, en fait, une déficience, qui est une anomalie organique ? on pense, par exemple, à un diabète ou à une insuffisance rénale ? peut être par elle-même significative et persistante sans entraîner, en soi, des incapacités, mais que la personnes puisse, à cause de sa condition de maladie chronique, rencontrer des obstacles à la réalisation de ses activités courantes pour aller, par exemple, obtenir une dialyse ou des éléments comme ça, et très souvent ces notions-là ne sont pas liées à la notion de personnes handicapées.
Alors, la définition qui est là, elle peut être très large, mais je voudrais attirer l'attention de la commission sur la tour de Babel qui existe actuellement. On est en face d'une diversité de clientèles... ? de clientèles, c'est déjà ma déformation, ha, ha, ha! ? de groupes de population qui, en fait, ont reçu des services dans l'histoire à partir d'une approche qui est soit essentiellement biomédicale, soit qui est reliée à des approches éducatives, par exemple pour les personnes qui ont une surdité ou les personnes avec une déficience visuelle, qui sont plus du côté de l'éducation.
Et on a une nécessité... Ça, c'est le deuxième volet du mémoire, c'est la nécessité de l'harmonisation conceptuelle. Tout à l'heure, j'entendais beaucoup parler de coordination. Mais la coordination n'est possible qu'avec une harmonisation des définitions des concepts. On a actuellement une approche qui a tendance... c'est ce qu'on appelle, bon, l'approche silo, si vous voulez, où, dans chaque secteur, on peut avoir des services de très bonne qualité et de façon... dans tous le continuum de services. Mais il y a, par le manque d'harmonisation des concepts... Par exemple, quand on parle de déficience physique, quand on parle de déficience intellectuelle, quand on parle de santé mentale, quand on parle de personnes âgées en perte d'autonomie, quand on parle de victimes de la route, quand on parle de CSST, quand on parle de victimes du sida, toutes ces personnes-là sont incluses dans ce qu'on appelle le processus de production du handicap, et actuellement l'organisation des services entraîne des batailles de territoire et, en fait, une espèce de compétition interclientèles à cause d'une confusion d'approches et d'un manque d'harmonisation conceptuelle.
Et ça, ça a beaucoup, beaucoup d'impact, je dirais, dans l'ensemble de l'atteinte des résultats dont on parlait tout à l'heure parce que, selon l'angle que l'on prend... Je prends, par exemple, l'exemple des personnes en perte d'autonomie, des personnes âgées en perte d'autonomie. Actuellement, la notion de personnes âgées en perte d'autonomie, c'est comme si c'était quelque chose d'autre que des personnes handicapées. Donc, le vieillissement de la population actuellement est en train de mettre un accent très important, un poids politique tout à fait adéquat pour répondre aux besoins grandissants des déficiences et incapacités des personnes âgées, par le phénomène de la perte d'autonomie. Mais, en mettant l'accent sur les personnes âgées en perte d'autonomie, eh bien, on vient recréer des nouveaux obstacles aux adultes qui ont déjà des incapacités acquises et on amène des compétitions interclientèles sans avoir une harmonisation de tous ces groupes-là. On est vraiment dans une situation où des personnes qui ont exactement les mêmes caractéristiques, les mêmes incapacités, selon la cause qui a créé ce problème-là, vont suivre des filières particulières qui les amènent à des situations où leurs besoins ne seront pas répondus de façon équitable.
Donc, à cause des problèmes fondamentalement de terminologie et d'historique, si vous voulez, de développement des services, on a beaucoup de difficultés à avoir cette harmonisation, la fameuse coordination intersectorielle dont on parlait, et aussi on laisse de côté une grande économie systémique, si vous voulez, où on a une organisation de services cloisonnée, alors que, quand on parle d'exercice des droits des personnes handicapées, c'est des transformations qui répondent à un grand nombre de personnes avec des différences. Alors, il y a là, dans tout le processus d'amélioration de la qualité de la réponse aux besoins des personnes, une nécessité et beaucoup ? comment dire? ? d'économies à faire dans une meilleure utilisation des ressources mais avec un ébranlement des territoires où chacun essaie, là, de garder ses acquis.
n(16 h 20)n Et, dans ce sens-là, selon notre organisation, l'Office des personnes handicapées est la meilleure organisation pour jouer ce rôle, tel qu'il est proposé dans le projet de loi, en fait, de promouvoir l'harmonisation d'une classification uniforme de «déficience», «incapacité» et «situation de handicap». Et là on dit bien «situation de handicap». Donc, au niveau de l'organisation, nous, on pense que l'Office est certainement la meilleure organisation pour jouer ce rôle-là. Et c'est notre partenaire, de toute façon, depuis les 20 dernières années.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, ça fait le tour de votre présentation, M. Fougeyrollas. Merci. Alors, je cède immédiatement la parole à M. le ministre pour débuter la période d'échange.
M. Simard (Montmorency): Alors, merci à vous, Mme la Présidente. Tout d'abord, M. Fougeyrollas, vous me permettrez de vous transmettre les salutations de mon collègue et ami le député de Portneuf, ministre délégué à la Santé, qui, pour des raisons de force majeure, ne peut être parmi nous cet après-midi. Alors, M. le ministre me prie de vous saluer et de vous remercier très sincèrement d'avoir apporté une aussi belle contribution intellectuelle à une réflexion qui est fort essentielle dans le cadre du projet de loi n° 155.
On dit beaucoup de bien de vous. On m'a dit que vous étiez une des personnes qui était sans doute l'une des grandes références en matière de réflexion sur le sujet qui nous concerne aujourd'hui non seulement au Québec, mais également à travers l'Amérique et le monde, et on me dit également que vous avez participé de manière très, très active à l'élaboration de la politique québécoise. Donc, pour toutes ces raisons, nous sommes heureux de vous savoir parmi nous.
Je serai assez direct dans la question que j'aimerais vous adresser. Vos propos ont largement repris des réflexions et des points de vue que nous adressait et nous faisait partager l'Association des établissements de réadaptation en déficience physique du Québec. Ils nous parlaient tout juste avant vous. Ils nous disaient: Il faut voir la personne dans sa globalité et il faut surtout que l'action gouvernementale puisse être le reflet de cette globalité, et il faut éviter l'approche en silo. Ils ne l'ont pas dit comme ça mais, vous, vous l'avez dit exactement comme ça. Et donc, vous plaidez pour le renforcement d'une action intersectorielle, ce faisant. J'aimerais vous entendre davantage là-dessus, si vous permettez.
M. Fougeyrollas (Patrick): Oui, ça m'apparaît essentiel, en fait. Je vous réponds dans la continuité de l'approche d'harmonisation: c'est que, effectivement, si vous avez au ministère de l'Éducation des définitions de déficience fonctionnelle majeure, par exemple, pour avoir accès aux programmes adaptés et d'aide à la scolarisation et que ces définitions-là sont encore très, très empreintes d'approches biomédicales et qu'on les met en confrontation avec d'autres définitions par rapport à l'accès au travail adapté qui vont avoir une autre perspective, toute la coordination dont on parlait pour pouvoir faire en sorte qu'une personne, par exemple, puisse être reconnue à la fois dans un programme d'éducation et avoir les aides techniques ? je pense aux personnes avec des incapacités visuelles, par exemple, qui vont se retrouver dans des situations où le passage de l'éducation au travail va les mettre dans un trou parfois de six mois pour récupérer leur télévisionneuse qui ne vient pas du même programme parce qu'on n'applique pas les mêmes critères, il y a un manque de continuité.
Alors, c'est vraiment... c'est une harmonisation des programmes mais qui, fondamentalement, est liée au fait qu'on n'a pas les mêmes bases de définition des besoins des clientèles et, fondamentalement, c'est des questions de terminologie, d'évaluation et de concept. L'outil, l'effort d'harmonisation de l'évaluation globale des besoins d'une personne, toute la notion de plan de services individualisés, toute l'articulation de tous les programmes intersectoriels pour répondre au plan de services individualisés est l'évidence même qu'on ne peut pas avoir une participation optimale sans la coordination d'une diversité d'interventions.
Alors, ce qui est vrai au niveau individuel doit être vrai au niveau collectif par la coordination interministérielle mais pas simplement interministérielle, là, de tous les partenaires aussi au niveau municipal, au niveau de l'ensemble des décideurs. C'est fondamental puis ce n'est pas nouveau, c'est à la base de la politique À part... égale. Mais, en fait, il faut l'appliquer, là.
M. Simard (Montmorency): Si vous me permettez.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le ministre.
M. Simard (Montmorency): Merci, Mme la Présidente. Si vous me permettez, docteur, j'aimerais avec vous parler un peu davantage de cette politique d'ensemble, À part... égale, dont vous êtes l'un des penseurs. Certains suggèrent de la revoir, cette politique, de la revisiter, de la repenser. Que pensez-vous de cela, dans un premier temps? Et, deuxième temps, si tant est qu'il faille le faire, comment le faire, et quel rôle l'OPHQ pourrait jouer dans cette démarche?
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Fougeyrollas.
M. Fougeyrollas (Patrick): Oui. Fondamentalement, les principes d'À part... égale sont, à mon avis, tout à fait contemporains. Et je crois qu'à l'intérieur du mouvement de promotion des droits et puis... on a un assez grand consensus sur les principes d'À part... égale. Alors, revoir À part... égale, dans ma perspective, ce ne serait certainement pas de se reposer toutes les questions au niveau des orientations et des principes. À part... égale, par définition, peut être remis à jour plus sur le volet du plan d'action et des recommandations qui doivent être remis à jour, parce qu'on a plusieurs années puis il y a eu beaucoup de travail qui s'est fait, parce que À part... égale a été aussi suivi de bilans, de remises à jour de stratégies. Donc, sur cet aspect-là, il y a certainement une nécessité de réviser un plan d'action, une planification pour la mise en oeuvre sectorielle de l'ensemble de ces principes. Mais ce n'est certainement pas de reprendre en soi la politique dans son ensemble.
Ça nécessite, dans une perspective d'action concrète... Le plan d'action concrète, tout de suite j'ai en tête que le mouvement va vous dire: On en a fait tellement, de ça, de faire des recommandations, il faut aussi qu'elles soient suivies, appliquées, évaluées, avec des indicateurs de résultat. Ça s'est fait, mais ça doit se faire de manière plus suivie, plus structurée, et c'est un des rôles, je pense, de l'OPHQ d'assurer le suivi de l'application de ces plans d'action là. Et il faut certainement les remettre à jour.
Donc, la seule organisation, au niveau du gouvernement du Québec, qui peut jouer ce rôle de coordination interministérielle et de leadership pour la mise en oeuvre de ces plans d'action et aussi de pouvoir informer chaque ministère du mouvement de son voisin et des autres partenaires, effectivement, je pense que c'est un rôle qui est celui de l'OPHQ et qui doit être renforcé dans le pouvoir qu'il doit avoir pour s'assurer de cette mise en oeuvre au niveau des plus hautes instances.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le ministre, ça va?
M. Simard (Montmorency): Je vous remercie.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Nelligan.
M. Williams: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup, M. Fougeyrollas, pour votre présentation et votre mémoire. Peut-être que c'est une question trop simple, là, pour commencer. Vous avez dit, et je vous cite: «Il est clair, à notre avis, que la définition proposée est une bonification minimale.» Après ça, vous avez expliqué. Je suis un législateur, mais je ne suis pas un juriste. Avez-vous fait un libellé d'un article que vous voulez proposer? Et vous n'avez pas besoin de donner ça aujourd'hui, parce que nous n'avons pas fini les audiences. Mais j'essaie de vous suivre, et il y a une certaine logique, et je suis d'accord avec beaucoup de choses que vous avez mentionnées. Mais avez-vous fait l'exercice de, actuellement, proposer un article, comme définition? Ce n'est pas facile.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Fougeyrollas.
M. Fougeyrollas (Patrick): Oui, on a fait ces exercices-là, il y a eu... Je veux dire, le projet de loi est attendu depuis longtemps. Ha, ha, ha! Alors, il y a eu énormément de temps.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Fougeyrollas (Patrick): Je veux dire, cette réflexion-là sur la notion de personne handicapée est quelque chose qui a coulé beaucoup d'encre, et la manière dont je l'ai apporté dans mon mémoire, enfin dans le mémoire de l'organisation, c'était plus une prise en compte d'un ensemble de contraintes qu'on a rencontrées dans des rencontres préparatoires à la préparation du projet de loi. J'en ai soulevé au moins deux qui sont importantes, c'est le fait de l'impossibilité d'utiliser cette notion de situation de handicap. Je crois que je peux affirmer qu'il y a un consensus québécois sur l'approche situationnelle, dont je vous ai parlé tout à l'heure, et que justement on doit lutter pour faire en sorte que la notion de handicap ne soit pas synonyme de déficience ou d'incapacité.
n(16 h 30)n Et le problème qui se pose au niveau législatif, c'est la Charte des droits et libertés, qui donne comme motif de non-discrimination le handicap. Et ce mot, «handicap», en fait, est pris à ce moment-là dans le sens de déficience et d'incapacité, et, dans la jurisprudence, il est utilisé comme ça.
Alors, disons, moi, je pense et tout le monde pense que dans les organisations, comment ça se fait que, d'abord, il y a une incohérence au niveau législatif dans la Charte des droits et libertés et qui est compréhensible au moment où elle s'est fait, là, mais qui n'est plus adéquate avec la compréhension contemporaine des concepts, et comment ça se fait que, si on rénove l'approche de la compréhension de ce qui est en jeu dans la notion de situation de handicap, on ne puisse même pas utiliser ce terme-là? Donc, ça, c'est une remarque, un commentaire que je fais et qui... Il n'y a pas de raison véritablement solide, si ce n'est des contraintes juridiques.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Nelligan.
M. Williams: Oui. Dans la même logique que vous avez proposée sur la définition, je voudrais vous entendre sur où nous avons situé l'Office dans les instances gouvernementales. L'article 114 de la loi qui a créé l'Office dit que le ministère de la Santé et des Services sociaux est responsable, mais, dans la logique que vous avez proposée... Et je suis complètement d'accord, la définition est tellement importante, et on ne veut pas avoir juste une définition silo.
Il me semble ? et je ne veux pas mettre les recommandations dans votre bouche ? qu'une certaine logique, si on suit une logique, qu'on doit attacher l'instance qu'on appelle l'Office des personnes handicapées ailleurs que juste au ministre de la Santé et des Services sociaux. Est-ce que j'interprète bien votre logique?
M. Fougeyrollas (Patrick): C'est très clair. Je ne vais pas reprendre mon chapeau de vieux militant, mais une partie importante de la lutte qui a amené l'adoption de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées, c'était que l'Office ne soit pas sous l'égide du ministère de la Santé, hein, et pour diverses raisons, et ça avait été accepté dans le sens où, à l'époque, c'était M. Denis Lazure, qui était en fait un superministre social, je dirais, dans tout le secteur social... Ce n'est peut-être pas le bon terme, excusez mon langage, mais, fondamentalement, vous avez entièrement raison.
Peu importe l'explication qu'on va donner à la place de l'Office dans la structure, on laisse toujours sous-entendre que le problème du handicap est relié à une problématique de santé et services sociaux, alors que l'ensemble de la démonstration et la raison d'être de la loi nous montrent que c'est une perspective intersectorielle. Donc, évidemment, il faudrait que ce soit à une instance qui permette la dimension intersectorielle.
M. Williams: Mais pas nécessairement au ministère de l'Environnement, comme exemple. Il me semble qu'on doit être un peu plus large que ça, là.
M. Fougeyrollas (Patrick): Non, certainement pas.
M. Williams: Merci beaucoup pour votre...
M. Fougeyrollas (Patrick): Mais, par contre, en faisant ça, il faut laisser plus de pouvoirs et que ça ne devienne pas un organisme consultatif.
M. Williams: Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de Joliette.
Mme Lespérance: Rapidement. Ça a été très agréable de pouvoir vous entendre, merci beaucoup. La seule question que j'ai à vous poser, c'est... Vous avez parlé quand même beaucoup de définitions qui semblent être suffisamment larges. Il y a plusieurs autres groupes qui sont venus nous voir avant vous pour nous dire que la définition n'était pas assez large, elle devrait être beaucoup plus explicite et inclure une notion de santé mentale. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.
M. Fougeyrollas (Patrick): Alors, je vais essayer de vous répondre...
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Fougeyrollas.
M. Fougeyrollas (Patrick): ...de façon diplomatique. C'est-à-dire, je parlais tout à l'heure d'une certaine approche silo, si vous voulez, ou... La base de terminologie de «déficience» et «incapacité» recouvre toutes les anomalies organiques et fonctionnelles, incluant les problématiques qui amènent des problèmes de santé mentale.
La sensibilité de la notion de santé mentale en tant que telle est plus reliée, de la part des personnes qui vivent ces situations-là, à sortir d'une approche biomédicale et où elles sont stigmatisées par cette perspective-là. Donc, ils se reconnaissent plus difficilement dans le langage de «déficience», «incapacité», mais qui demeure le langage international et harmonisé, si vous voulez. Et c'est relativement facile de montrer comment les problématiques de santé mentale s'intègrent dans ce langage-là. Mais je respecte la perception des personnes qui les vivent. Mais «déficience» et «incapacité» recouvrent aussi «santé mentale».
Mme Lespérance: Merci.
La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Fougeyrollas, merci pour votre excellente participation aux travaux de notre commission. Alors, vous avez eu le mot de la fin, aujourd'hui.
J'ajourne donc les travaux sine die, compte tenu qu'on sait qu'on va se revoir, mais on attend la date. Alors, voilà.
(Fin de la séance à 16 h 36)