(Dix heures cinq minutes)
Le Président (M. Beaumier): Alors, la commission des affaires sociales se réunit dans le cadre de l'interpellation du ministre d'État au Travail, à l'Emploi et à la Solidarité sociale par le député de Laurier-Dorion sur le sujet suivant: La lutte contre la pauvreté.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y aurait des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, Mme Blanchet (Crémazie) va être remplacée par Mme Barbeau (Vanier) et Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François) par M. Sirros (Laurier-Dorion).
Le Président (M. Beaumier): Alors, je vous rappelle que, selon nos règles, la séance d'interpellation est de deux heures, donc nous terminerions, sur consentement, à 12 h 7, à ce niveau-là.
M. Sirros: Et avant de commencer, M. le Président, je voudrais soulever une question de règlement. Je n'ai pas de problème, bien au contraire, que la ministre déléguée à la Lutte contre la pauvreté et l'exclusion soit avec nous, mais vous l'avez bien signalé, vous aussi, que l'interpellation s'adressait au ministre d'État au Travail, à l'Emploi et à la Solidarité sociale. Et on sait que les décisions précédentes de la présidence font en sorte que le Parlement doit être la priorité des ministres, et, quand il y a des travaux parlementaires, on s'organise nos agendas en conséquence. Alors, j'aimerais savoir comment il se fait que le ministre d'État au Travail et à la Solidarité sociale n'est pas ici aujourd'hui.
Le Président (M. Beaumier): En fait, dans le cadre de l'interpellation, c'est le gouvernement qui décide quel est le ministre ou la ministre qui va être à l'interpellation. C'est aussi simple que ça. Mme la ministre.
Mme Léger: Oui. Bien, vous savez pertinemment qu'un ministre peut appeler un autre ministre pour être ici, à l'interpellation, d'une part. Et la thématique que vous avez soulevée, c'est bien la lutte à la pauvreté, alors, si c'est la lutte à la pauvreté, je suis ministre déléguée à la Lutte à la pauvreté.
Exposé du sujet
M. Christos Sirros
M. Sirros: ...ministre de la pauvreté, mais on a toujours cru, dans toutes nos interpellations et questions en Chambre, effectivement, que le ministre d'État avait la responsabilité ultime de la lutte à la pauvreté, et c'est pour ça qu'on a adressé l'interpellation au ministre d'État. On ne nous a pas signalé que c'était la mauvaise personne. Alors, comme je le disais, ça me fait plaisir d'avoir la ministre déléguée à la Lutte à la pauvreté ici, c'est toujours un plaisir de parler avec elle, mais l'un n'empêche pas l'autre. Comme il y a d'autres collègues qui l'accompagnent, j'aurais souhaité que le ministre en titre et responsable de la politique sur la lutte à la pauvreté soit avec nous.
Mais cela étant dit, M. le Président, je n'y peux rien. Finalement, c'est la démonstration de à quelle échelle ce gouvernement place véritablement le Parlement, d'une part, ne le prend pas très au sérieux, d'après ce que je peux voir. Sans diminuer la présence de la ministre ici, je répète que la responsabilité ultime revient au ministre d'État au Travail et à la Solidarité sociale, et ça aurait été souhaitable de l'avoir ici.
Maintenant, j'embarquerais dans mon premier bloc de 10 minutes, M. le Président, en vous disant qu'effectivement nous sommes devant une situation où... Nous avons l'opportunité de se reparler lors de cette interpellation et de faire un peu le point, où nous en sommes sur cette question de lutte à la pauvreté, huit mois après la nomination du ministre d'État au Travail et à la Solidarité sociale, et le fait qu'il s'est fait adjoindre quelqu'un également qui était ministre délégué à la Lutte contre la pauvreté et l'exclusion, et qu'il avait pris l'engagement de préparer une politique globale sur la lutte à la pauvreté.
Alors, nous sommes huit mois plus tard. On avait, vous vous rappellerez, des soupçons réels à l'effet que ce gouvernement ne prenait pas au sérieux ce mandat-là, qu'il ne faisait que préparer une opération de relations publiques, M. le Président, qui peut-être permettrait à certaines personnes de l'autre côté de la Chambre de se donner bonne conscience, de se rappeler des vieux moments, de se refaire un genre de discours social-démocrate, M. le Président. Mais on avait constaté que, chaque fois qu'ils avaient l'opportunité de véritablement faire en sorte que cette lutte à la pauvreté deviendrait un enjeu social, sociétal même, où on pourrait mobiliser l'ensemble des forces vives de la société, et plus particulièrement tous ceux qui avaient déjà mobilisé beaucoup, beaucoup d'énergie autour d'une réflexion, autour d'une mobilisation sociale, on aurait pu les impliquer également. On a choisi de les exclure, M. le Président, pour mettre sur pied un processus truqué, dirigé, contrôlé, bidon finalement, M. le Président, qui exclut et qui laisse beaucoup de personnes de côté.
n
(10 h 10)
n
Et c'est ironique que le titre du document qui avait été soumis pour la consultation, c'était: Ne laisser personne de côté! C'est une belle illustration du fait qu'on dit une chose puis on fait autre chose. On met sur papier un document qui s'intitule Ne laisser personne de côté! puis on a choisi délibérément de laisser de côté des milliers et des milliers de personnes qui, bien avant nous finalement ? et je dis «nous» dans le sens collectif des parlementaires ? et de façon beaucoup plus impliquée, se sont mobilisées autour de la question de la lutte à la pauvreté à partir de connaissances de la situation vécue. On a eu d'ailleurs un témoignage extrêmement touchant et éloquent il y a à peine deux, trois semaines, ici, en Chambre, au salon rouge, quand, à l'initiative de la présidence et du Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté, on a pu, pendant deux, trois heures, recevoir les témoignages directs, humains, touchants effectivement, précisément des gens qui sont exclus de ce processus de consultation ou de validation. Parce que ce n'est même pas un processus de consultation qui est mené, c'est un processus de validation d'un document intitulé Ne laisser personne de côté! qui laisse de côté tous ces gens qui sont venus nous dire, ici, quelle est leur situation réelle.
On a refusé, de l'autre côté, M. le Président, de prendre au vol une offre qui leur a été faite il y a un an de, effectivement, engager le Québec sur une voie nouvelle, sur la possibilité d'avoir un encadrement législatif de lutte à la pauvreté à partir d'un travail déjà amorcé par le Collectif, en particulier, qui avait soumis ici, à l'Assemblée nationale, avec une pétition de 215 000 noms, un projet de loi. Ça ne voulait pas dire qu'on accepterait de part et d'autre d'accepter tout ce qui était proposé dans le projet de loi, mais il y avait là un geste qui était posé par des personnes impliquées, qui était de dire: Nous voulons influencer l'avenir de nos vies par le biais de l'institution parlementaire. On reconnaît que vous êtes des gens qui, ultimement, devaient prendre les décisions. Nous vous apportons notre réflexion et nous vous demandons de continuer notre travail à partir de vos responsabilités, à partir de vos perspectives, à partir des instruments que vous avez en termes de gestionnaires de l'État, mais impliquez-nous en tant que citoyens dans la démarche.
La réponse de votre côté a été de balayer ça du revers de la main, dire finalement: Merci, vous êtes bien gentils d'avoir fait ça. Faire des bons mots pour leur dire combien on a été fier du travail qu'ils ont fait, combien on a apprécié le temps qu'ils avaient investi dans ces démarches-là, mais que, quand venait le moment de traduire ça dans les gestes concrets, on disait: Merci, maintenant allez-y, nous, on va s'organiser maintenant, voici ce qu'on va faire, on va maintenant consulter sur quelque chose que nous avons déjà préparé quelque part dans nos officines, sans vous, et on va non seulement consulter sans vous, mais on va aussi mettre sur pied un processus de consultation qui va nous assurer d'avoir ce qu'on veut au bout de la ligne, un processus de validation qui n'est pas ouvert et public, qui est totalement partisan. Parce que, même si on fait, de l'autre côté, les discours sur... Il faut aborder ça comme une approche de société. C'est très simple, M. le Président, la société, elle est représentée au Parlement. Au Parlement, vous avez deux partis, majoritairement, un d'ailleurs qui a eu plus de votes que l'autre et qui forme le gouvernement, et ce parti est complètement exclu de ces consultations.
Par contre, on met sur pied un comité national de consultation composé de députés ministériels. Et, chaque fois que la ministre se promène ? parce qu'elle se promène beaucoup de ce temps-ci ? chaque fois qu'elle émet un petit communiqué ? puis elle émet beaucoup de communiqués de ce temps-ci ? elle s'adjoint quelqu'un de ministériel. Alors, quelqu'un du Parti québécois, et strictement le Parti québécois, consulte ou valide des documents conçus par le Parti québécois pour arriver à une politique décidée par le Parti québécois pendant qu'on dit qu'il faut faire de cet enjeu de la lutte à la pauvreté un enjeu social où on mobilise toute la société.
À moins que nos esprits sont tellement tordus que «la société» veut dire «le Parti québécois», il me semble que c'est dans cette Chambre qu'on devrait retrouver l'ensemble des personnes qui participeraient à l'élaboration d'une véritable démarche de lutte à la pauvreté qui mobiliserait toute la société puis qu'on essaierait de faire les arbitrages nécessaires quant aux mesures à privilégier ensemble. C'est d'ailleurs pour cette raison, M. le Président, qu'on avait proposé de mettre sur pied une démarche non partisane, une démarche à partir d'une commission parlementaire spéciale qui irait chercher également l'expertise et le vécu réel des personnes qui avaient effectivement fait tout ce travail mobilisateur dans les milieux. Les 1 600 organismes qui en font partie, du Collectif, auraient pu être impliqués également avec des parlementaires, citoyens ordinaires, à partir du vécu qu'ils ont. Avec des parlementaires et pourquoi pas d'autres personnes issues d'autres milieux dans une démarche parlementaire mais non partisane? Ça a été refusé, M. le Président, pour effectivement revenir sur l'approche partisane, avec strictement les députés ministériels.
C'est intéressant de remarquer ? j'ouvre une parenthèse ? que, depuis que la consultation a commencé, jamais, mais jamais, l'opposition officielle n'a été invitée à participer. Jamais la ministre ne nous a envoyé un calendrier des consultations. Jamais une note qui disait, bien: Aujourd'hui, on va être ici, on va être là, vous êtes les bienvenus, et d'ailleurs c'est ouvert à tout le monde. Remarquez que, même si vous l'envoyez maintenant, je n'accepterais plus et, même si je trouvais au départ que c'était truqué, je trouvais que le minimum de la décence ou quasi-transparence aurait été de faire ça. Ça n'a pas été le cas. Alors, les soupçons qu'on avait au mois de juin, quant aux intentions réelles de ce gouvernement, M. le Président, dans cette démarche, ont été confirmés. C'est une démarche inutile, bidon, qui ne vise qu'à contrôler une opération de relations publiques.
Et la dernière confirmation quant à la volonté sérieuse du gouvernement de s'embarquer dans une lutte à la pauvreté avec les instruments réels, ça nous est arrivé il y a à peine trois jours. Je ne sais pas si c'est une des raisons qui fait en sorte que le ministre n'a pas voulu se présenter, mais le ministre responsable de la lutte à la pauvreté vient de perdre la moitié, à peu près, de son ministère, et la moitié... sinon la moitié, le tiers des instruments pour lutter efficacement contre la pauvreté. On vient de lui enlever le coffre à outils que constitue Emploi-Québec pour l'insertion à l'emploi des personnes qui sont sans emploi. Et, quand on sait que le ministre, depuis huit mois qu'on se parle, a toujours fait de l'emploi la pierre angulaire de la lutte à la pauvreté ? avec raison dois-je dire ? là, il voit disparaître devant lui, au profit du ministre de l'Éducation, le coffre à outils qui lui permettrait de travailler efficacement. Là, on est passé, M. le Président, d'un ministère bicéphale, avant l'arrivée du ministre, à un monstre tricéphale.
M. le Président, je vois qu'il ne nous reste que 10 minutes dans cette première intervention, mais fondamentalement ? 10 secondes, dois-je dire, quatre ? nous sommes arrivés à la conclusion que la démarche du gouvernement, c'est une démarche vide de sens, M. le Président.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la ministre, vous avez également 10 minutes.
Réponse de la ministre
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Merci, M. le Président. Évidemment, je ne relèverai pas tout de suite les allégations du député de Laurier-Dorion, parce que, quand il parle d'une stratégie vide de sens... D'abord, nous en avons une ici, de ce côté de la Chambre, une stratégie, d'une part. Et on va élever un peu plus le débat pour expliquer un petit peu ce que c'est vraiment, la stratégie nationale de lutte à la pauvreté, et d'où elle vient, parce qu'elle fait partie, quand même, d'un ensemble, d'un courant national, et je vous donnerai un peu plus de détails dans quelques instants.
D'abord, il faut quand même se dire que ce n'est pas d'hier que nous luttons contre la pauvreté. Toutes les nations du monde sont aux prises avec cette problématique qu'est la pauvreté, et, dans ce contexte-là, le Québec n'y échappe pas lui non plus. Et, si on regarde l'ensemble de nos politiques et de nos mesures qu'on met pour lutter contre la pauvreté, alors, si je regarde d'une façon sectorielle, il y a quand même beaucoup de choses qui se font. Mais on réalise, c'est que, évidemment, il y a beaucoup de travail intersectoriel qui doit se faire pour avoir encore davantage de cohérence et de cohésion dans une stratégie de lutte contre la pauvreté et l'exclusion. Et évidemment ça a été une priorité du premier ministre, Bernard Landry. Le gouvernement du Québec veut intensifier cette lutte-là et, au printemps dernier, il a quand même nommé une ministre déléguée à la Lutte contre la pauvreté; donc, il y a quand même le mandat qui a été dédié à deux ministres. Alors, quand j'entends l'opposition dire que je ne sais pas ce que fait le gouvernement dans la lutte à la pauvreté, bien, alors je ne sais pas s'il a entendu le discours inaugural du premier ministre, puis je ne sais s'il sait ce qui se passe actuellement, et il est toujours bien invité actuellement dans cette stratégie-là. Il dit qu'il est trop tard. Il a été invité depuis très longtemps, depuis le début de nos rencontres et notre validation du document, mais je reviendrai tout à l'heure dans cette perspective-là.
n
(10 h 20)
n
Alors, je veux revenir dans l'objectif de la lutte contre la pauvreté, qui s'inscrit quand même dans un courant mondial actuel, qui reconnaît la lutte contre la pauvreté comme un enjeu majeur pour le développement durable des nations et comme une priorité que toutes les nations doivent se donner. Évidemment, dans tout le contexte de la mondialisation, il y a beaucoup de réflexions qui sont amenées dans cette perspective-là, d'un développement durable, d'une part, et la lutte à la pauvreté prend tout son sens dans cet enjeu majeur là. Au-delà de toutes les mesures sectorielles que nous avons au Québec, des politiques sociales et économiques et des réformes majeures des dernières années pour améliorer le sort de la population, et particulièrement des plus démunis, le projet de stratégie nationale en voie d'élaboration repose sur une perspective ? puis ça, il faut se le dire ? globale, intégrée et intersectorielle. Quand on intensifie la lutte contre la pauvreté, il faut penser à ce qu'elle soit globale, intégrée et intersectorielle. Ce projet, d'ailleurs, mise sur les principaux leviers qui sont l'emploi, l'éducation, la santé, la famille, le logement, le développement local et régional, et il vise à adapter le filet de sécurité sociale au niveau du contexte économique et social. Il reconnaît le potentiel des personnes et des collectivités et l'importance de la prévention. On ne pourra jamais autant dire que la prévention, évidemment, c'est beaucoup mieux que de faire du curatif, mais, dans le contexte où nous sommes, il est important de travailler sur les deux aspects.
Au niveau de la prévention, je ne vous amènerai pas à dire tout ce qui s'est passé ou tout ce qu'on a développé au niveau de la politique familiale du Québec. Et je pense aux garderies à 5 $ qui est, pour moi, très important pour les 0 à 5 ans, où on agit directement chez les tout-petits du Québec; donc, c'est de la prévention, et où il y a dans les centres de la petite enfance du Québec... Le gouvernement est fier de cette politique-là, est fier de ces garderies à 5 $. On est en train de développer tout un réseau. Dans ce réseau-là, les petits enfants se retrouvent avec des éducateurs, éducatrices formés, avec un programme pédagogique qui est là, qui intervient directement dans la petite enfance. Quand on voit toutes les études sur le développement de l'enfant et comment il est absolument important, dès la petite enfance, qu'on peut agir tôt, alors, dans la lutte à la pauvreté, il ne faut pas négliger cet aspect-là de la politique familiale du Québec.
Ce projet de stratégie de lutte à la pauvreté mise sur le développement des complicités entre tous les secteurs: public, privé, communautaire, syndicaux, religieux, tant au niveau local que régional et national. Des complicités naturelles et des ententes formelles existent, mais, il faut le reconnaître, d'autres sont à construire et il faut prendre le temps. La volonté est là. Même si, on aura le temps d'en discuter, sur le Collectif pour une loi de l'élimination de la pauvreté... a fait un travail admirable pour mobiliser les forces vives du milieu; il présente un projet audacieux qui inspire nos travaux. J'aurai le temps d'y revenir un petit peu plus tard, tout à l'heure. C'est parce que, vous savez, le député de Laurier-Dorion a l'air très intéressé par les travaux du Collectif, ce que je trouve très bien aussi, mais on pourra aller un petit peu plus en profondeur parce que j'aimerais qu'il m'explique davantage les fondements de la loi du Collectif.
Il faut par ailleurs souligner que le Québec est traversé par des courants forts qui affectent l'économie, qui fait partie de l'ensemble de cette lutte contre la pauvreté. Donc, la mondialisation, le vieillissement de la population, le développement technologique, les nouvelles configurations du marché du travail, ce sont tous des facteurs qui affectent l'économie et dont on doit en tenir compte. Alors, ce n'est pas suffisant de juste dire: Je ne sais pas ce que le gouvernement fait, que le gouvernement ne fait rien à la lutte à la pauvreté. Ça, c'est des belles paroles, M. le Président, mais il reste qu'il faut, quand on fait une stratégie de lutte et quand on a un esprit de leadership au gouvernement du Québec, il faut aussi s'assurer que ça fait partie de ces ensembles d'enjeux majeurs que le Québec vit à l'heure de la mondialisation présentement. Tout ça se fait en même temps de garder le cap sur l'équilibre budgétaire. Parce que, si j'écoutais les libéraux d'en face, on retomberait facilement dans le déficit et on dépenserait ad vitam aeternam sur n'importe quel projet ou n'importe quelle façon... n'importe quel programme ou n'importe quelle idée qui arriverait comme ça.
Alors, je pense qu'on n'a pas de leçons à recevoir des libéraux à ce niveau-là. Alors, pour garder le cap aussi sur l'équilibre budgétaire, nous devons ajuster notre système de protection sociale et mieux positionner le rôle de régulation de l'État pour réduire les inégalités sociales et économiques, inégalités qui affectent la santé et le bien-être des populations démunies, particulièrement des enfants et des jeunes, inégalités qui compromettent aussi la réussite éducative et qui perpétuent le cycle de la pauvreté.
Quand on regarde la pauvreté, c'est important de voir la pauvreté... que ce n'est pas nécessairement une pauvreté que nous vivons, économique ou financière, c'est aussi une pauvreté qui peut être affective, qui peut être émotive, qui peut être une pauvreté humaine. Donc, quand on s'attaque à la pauvreté, c'est multifactoriel; il y a plusieurs facteurs pour être capable d'agir sur la pauvreté et aider nos gens qui vivent des situations les plus difficiles au Québec, et ailleurs dans le monde évidemment. Mais particulièrement ici, au Québec, il faut agir à différents paliers, je pourrais dire, et à différents facteurs qui affectent nos gens qui sont dans des situations un peu difficiles.
Alors, quand on regarde cette intersectorialité-là, je pense qu'il est important d'avoir des approches qui sont aussi intégrées et non des approches qui sont, peut-être nécessairement, juste ciblées. Donc, il y a un mélange entre le ciblé et aussi de regarder la lutte à la pauvreté d'une façon, aussi, globale. Depuis le printemps dernier, nous avons franchi des étapes importantes pour construire collectivement ce projet de stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, et je rappelle au député de Laurier-Dorion que le document que nous avons ici, qu'on a déposé avec le premier ministre, qui s'intitule Ne laisser personne de côté!, c'est un document pour faire valider. Donc, ce n'est pas nécessairement un document de consultation, comme il prétend qu'il dit à l'avant... C'est un document pour valider. On ne réinventera pas la roue nécessairement, mais, par contre, il faut consolider nos choses. Il faut intégrer nos choses et il faut intensifier cette lutte contre la pauvreté.
Donc, des mesures immédiates annoncées lors des derniers budgets: des chantiers intersectoriels, la mobilisation des partenaires. J'y reviendrai un petit peu plus tard, tout à l'heure, pour expliquer toute cette démarche-là de mobilisation et pour peut-être éclaircir le député de Laurier-Dorion de cette... de notre démarche que nous faisons depuis les dernières semaines. Il faut quand même dire: d'autres étapes marquantes sont à venir. Il faudra poursuivre nos efforts et s'élever au-dessus du tumulte quotidien pour faire en sorte que tous et toutes pourront bénéficier des progrès économiques, sociaux, culturels, technologiques. Une condition qu'on dit sine qua non pour un Québec fort et prospère, avec une égalité des chances pour tous.
Vous savez qu'au niveau de notre historique du gouvernement le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale a mis en place plusieurs mesures destinées à contrer la pauvreté. Les principales... je vais vous en nommer quelques-unes. Pour le temps qu'il me reste ? il me reste environ une minute ? je vais essayer de faire rapidement pour qu'on puisse avoir un peu le portrait de ce qui s'est fait dernièrement. Parce que, dans toute cette stratégie-là, il est important de faire, je pourrais dire, deux aspects de la stratégie de lutte à la pauvreté: celle où on est en train de bâtir une stratégie nationale; celle où on poursuit déjà des politiques ou des programmes qui sont là vraiment pour lutter contre la pauvreté. Je pense entre autres à la santé et services sociaux, qui a des programmes très particuliers. Je pense à l'entente que nous avons faite dernièrement avec les CLSC et certaines mères qui vivaient des difficultés prénatales et périnatales, où on aide aussi davantage à les soutenir. Je pense au niveau du scolaire, à l'éducation, où il y a vraiment des programmes de lutte au décrochage scolaire. Donc, toutes ces choses-là sont, je pourrais dire, dans toutes les politiques que nous avons comme gouvernement, devront davantage s'intégrer pour faire vraiment de la lutte contre la pauvreté une action intégrée et cohérente.
Alors, si je regarde un petit peu les mesures, dernièrement, que nous avons: celle de ne pas comptabiliser le premier 100 $...
Le Président (M. Beaumier): Madame, nous devrions peut-être...
Mme Léger: Déjà? Donc, je reviendrai.
Le Président (M. Beaumier): Oui. D'accord. On aura d'autres occasions. Alors, merci, Mme la ministre. M. le député de Laurier-Dorion.
Argumentation
M. Christos Sirros
M. Sirros: Oui, M. le Président. J'aimerais reprendre là où la ministre nous accusait de vouloir tout faire et de retomber dans les déficits et lui rappeler que gouverner, c'est choisir, et choisir démontre quelles sont leurs priorités. Alors, M. le Président, j'aimerais comprendre, de la part de la ministre responsable de la Lutte à la pauvreté et à l'exclusion, comment elle se sent par rapport au choix que son gouvernement a fait d'investir 300 millions de dollars cette année ? 258, pour être exact, l'année prochaine ? 200 millions cette année, 258 millions l'année prochaine, dans l'assistance sociale aux entreprises plutôt que l'aide aux plus démunis, plutôt qu'à la lutte à la pauvreté. Ce sont des choix.
n
(10 h 30)
n
Et non seulement c'est de l'argent que vous avez décidé d'investir au niveau... Et je vous donne des chiffres sur les programmes de la nouvelle économie, en fonction d'une création d'emplois, soi-disant, qui ne sont pas des programmes de création d'emplois, parce que les emplois existants sont admissibles à des subventions par crédits d'impôt. Et, chaque année jusqu'en 2013, vous allez dépenser un montant grandissant d'argent du public pour financer des entreprises multinationales, riches, à devenir encore plus riches, à faire plus de profits, sans créer de l'emploi nécessairement. Parce que, c'est bien prouvé, ce n'est pas les gouvernements puis leurs programmes de subventions qui créent les emplois, la ministre l'a effleuré un petit peu. C'est en fait de se donner un environnement économique qui permet d'être concurrentiels avec nos voisins qui nous permet d'être attrayants au niveau de l'environnement, et ici, réglementaires, etc. Donc, oui, baisser les impôts, etc., mais pas des programmes de subventions comme ça.
Vous avez choisi de dépenser, en 2001, 199 $ en crédits d'impôt pour les entreprises; en 2002, ça va monter à 258 $; en 2003, ça va être plus. Et ça va continuer de façon récurrente. Donc, vous avez fait des choix. Vous avez pris l'argent du public et vous l'avez engagé de façon récurrente à aller vers des entreprises pendant que vous avez mis sur pied une tournée de consultations sur la pauvreté et que vous faites des bonnes paroles, des belles paroles sur la lutte à la pauvreté, la globalité de l'approche intersectorielle, etc. Mais, dans les faits, vous avez mis les sous derrière les entreprises pour pouvoir dire: Nous n'avons pas de sous, et les libéraux veulent dépenser. Non, les libéraux veulent choisir différemment. Nous ne croyons pas que nous devons subventionner des entreprises pour leur permettre de faire des profits. S'il y a profits à faire, ils vont les faire dans le marché capitaliste, en autant que l'encadrement dans lequel ils opèrent est compétitif. S'il y a une opportunité d'affaires, ils vont la trouver. Ils n'ont pas besoin du gouvernement et de l'argent du public pour se soutenir.
Alors, la ministre responsable de la Lutte à la pauvreté et à l'exclusion, qu'elle m'explique pourquoi son gouvernement a choisi d'investir 258 millions l'année prochaine, en grandissant de façon récurrente jusqu'en 2013. Savez-vous combien de milliards ça va faire en 2013 quand vous allez additionner tout ce que vous aurez choisi délibérément d'investir auprès de ces entreprises-là, en excluant les choix que vous auriez pu faire de véritablement mettre des sous pour faire une lutte à la pauvreté?
Alors, ça vous permet de dire qu'on réclame des choses qu'on ne peut pas se payer, mais c'est parce que vous avez décidé de payer autre chose que la lutte à la pauvreté. Alors, je vous répète que le choix des libéraux serait de faire les choses différemment, et ce ne serait pas ce genre de programme qu'on y intégrerait. Alors, ce serait beaucoup plus d'investir au niveau de notre système de santé, notre système d'éducation et à la lutte à la pauvreté. Il y a une marge de manoeuvre? Oui, il y en a, dépendant des choix qu'on fait.
Alors, quand on voit que vous n'avez même pas fait le choix l'année passée, au budget, d'investir le même montant, sinon plus, que ce que vous avez épargné par le nombre à la baisse des assistés sociaux quand l'économie montait, on comprend que c'est bon pour le discours mais pas très bon pour le moral, de vous avoir là. C'est bon pour le discours, de vous entendre parler de cette lutte à la pauvreté, etc. Mais, quand vient le temps de choisir, vous avez choisi délibérément de dépenser 258 millions de dollars l'année prochaine, vis-à-vis de quelque chose qui n'aurait pas dû être le cas.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le député. Mme la ministre.
Mme Léger: Je laisse la parole à ma collègue...
Une voix: Non, c'est à vous.
Le Président (M. Beaumier): Selon l'alternance, ce serait...
Mme Léger: Non? Ah bien! je suis prête.
Le Président (M. Beaumier): Oui, vous pouvez intervenir après chaque intervention.
Mme Léger: Ça me fait plaisir.
Le Président (M. Beaumier): Merci.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Alors, M. le Président, je suis très surprise d'entendre le député de Laurier-Dorion me dire qu'il ne comprend pas comment le gouvernement peut aider les entreprises. Et il met ça ? pour moi, c'est toujours de la démagogie quand on dit des choses comme ça ? il met ça en contrepartie à la lutte à la pauvreté et aux personnes plus démunies.
Je ne sais pas s'il était là lors du dernier budget, là, je ne sais pas ce qu'il a entendu au dernier budget. D'ailleurs, s'il se réfère au Collectif, le Collectif lui-même a comme apprécié cette diminution entre l'écart entre les riches et les pauvres dans ce dernier budget-là, parce que le dernier budget était particulièrement aidant pour nos plus faibles revenus.
Alors, je vous rappelle un peu le budget, parce que je pense que vous avez oublié d'écouter la ministre des Finances, au dernier budget. Et la partie concernant particulièrement les entreprises, je pense qu'il ne faut pas l'oublier, cette partie-là, parce que l'attraction des entreprises est importante aussi parce que les entreprises, il ne faut quand même pas oublier qu'elles créent de l'emploi. Alors, il faut aussi aider les entreprises, tout en aidant à la lutte contre la pauvreté, nos personnes les plus démunies.
Alors, je vous rappelle le budget de 2002-2003. Je vais vous rappeler même avant le dernier budget. On va aller à l'année d'avant, je dirais, au printemps dernier, parce qu'au printemps dernier il y a eu vraiment des mesures bien particulières. Il y a eu 300 millions d'argent neuf ? je ne vous ai pas entendu le dire, qu'il y avait 300 millions d'argent neuf ? dont 102 millions sur trois ans pour hausser les prestations d'aide sociale ? 250 000 ménages que ça touche ? sans contrainte à l'emploi ? donc, une hausse de 2,5 %. Il y avait aussi 86 millions au programme Action emploi.
Je vous ai entendu parler du programme Action emploi, que vous n'étiez pas en accord du programme Action emploi. Mais j'aimerais bien, à travers tout ça, connaître le programme du Parti libéral face à la pauvreté. Parce que vous pouvez bien critiquer ce que le gouvernement peut faire, mais je n'entends pas ce que le Parti libéral fait et sa stratégie elle-même sur la pauvreté et quelles sont les actions concrètes pour contrer la pauvreté. Alors, peut-être que le député de Laurier-Dorion pourra nous en reparler, tout à l'heure. Je ne sais pas s'il va être capable de faire son cinq minutes sur ça.
86 millions pour le programme d'Action emploi, donc les gens qui sont plus de trois ans à l'aide sociale. Parce qu'on découvre aussi au niveau de l'aide sociale, les prestataires de la sécurité du revenu, plusieurs d'entre eux sont là depuis un peu plus longtemps, et il ne faut jamais oublier que l'objectif est de les sortir de l'aide sociale. Alors, il faut trouver des mesures et des actions pour les sortir de l'aide sociale.
On a un 100 millions aussi d'initiatives de solidarité sociale dont on a annoncé, dans le dernier budget, pour le logement social particulièrement, mais je vous reviendrai avec... plus précis sur cette partie du 100 millions de dollars.
Il y a aussi dans le dernier budget ? pas le dernier cet automne mais celui du printemps dernier: 100 millions pour le nouvel élan de l'économie sociale; 45 millions pour des services à la jeunesse et à la famille démunie, particulièrement avec les CLSC; 141 millions pour le décrochage scolaire en milieu défavorisé; 33 millions pour soutenir les initiatives locales dans les milieux ruraux fragilisés; 150 millions, c'est bien de la baisse d'impôts, plus ce qu'on donne pour les régions-ressources, réduction d'impôts, vous en avez parlé, qui étaient là.
Mais, cet automne, je pourrais dire: dernièrement, notre ministre des Finances a annoncé plus particulièrement 75 millions pour les personnes à faibles revenus en indexation des prestations d'aide sociale, au 1er janvier 2002. Ça, ça veut dire 29 millions pour les personnes ayant des contraintes sévères à l'emploi, et 46 millions pour les personnes aptes au travail. Donc, même s'il y a déjà eu des annonces qui se sont faites au 1er juillet dernier, les prestataires d'aide sociale ont aussi, six mois plus tard, une aide ponctuelle qui vient davantage les soutenir.
Majoration du crédit d'impôt pour la TVQ de 100 $ pour un adulte et de 200 $ pour un couple, versée en décembre 2001. Donc, dans quelques semaines, les gens pourront avoir une liquidité de 100 $. Ceci représente 250 millions pour les personnes à revenus modestes, et cette mesure touche 2,5 millions de personnes, au Québec. Alors, selon le Collectif, qui vous inspire beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion, un dollar vital est un dollar local. Alors, c'est ce qu'on fait.
L'investissement aussi dans le logement social: près de 500 millions pour construire ou rénover 40 000 logements. Donc, ça, dans le niveau du programme des logements, nous avons logements abordables, logements sociaux, RénovationVillage, revitalisation des vieux quartiers, la reconduction d'AccèsLogis, une reconduction de cinq ans du programme d'AccèsLogis qui est très en attente et très demandée, ce qui veut dire concrètement une construction de 13 000 nouveaux logements au cours des cinq prochaines années et la rénovation de 27 000 logements pour les ménages à revenus modestes.
Vous vous souvenez que cet été on a eu ce qu'on a appelé la «crise du logement». Il y a eu des régions qui ont été davantage affectées par la crise du logement. Alors là on répond aux logements avec cette initiative budgétaire.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Vanier.
Mme Barbeau: Merci, M. le Président.
M. Sirros: Il semble que je vous ai coupé la parole tantôt quand on a demandé les remplacements, puis je ne suis pas certain qu'elle est membre. Si elle n'est pas membre, je consentirais à ce que la députée devienne membre.
Une voix: ...
M. Sirros: Oui, ça a été fait, mais on m'a dit que je vous avais coupé la parole. Je m'excuse.
Le Président (M. Beaumier): C'est bien. Alors, tout est en ordre. Tout est en ordre. Mme la députée de Vanier. Merci de votre attention.
Mme Diane Barbeau
Mme Barbeau: Ha, ha, ha! Moi, j'aimerais parler un petit peu des visites locales, ce que les gens appellent la «consultation», mais ce n'est pas exactement ça. Je pense que le gouvernement a un rôle important dans une stratégie de lutte à la pauvreté, mais il faut quand même aller voir ce qui se passe dans le milieu. Et, moi, je pense qu'il faut aider les plus démunis, il faut essayer de donner les conditions de vie les mieux possible. Mais la meilleure façon de les aider, c'est, je pense, de les aider à en sortir, de la pauvreté. Et les visites locales, l'objectif, c'était d'identifier des projets novateurs qui mobilisent aussi plusieurs partenaires dans le milieu pour lutter contre la pauvreté.
n
(10 h 40)
n
Dans ces projets, il y a plusieurs de ces projets qui ont été financés par le Fonds de lutte. Tous les gens se souviendront du premier volet du Fonds de lutte qui était un impôt spécial sur le rapport d'impôts, une contribution spéciale qui a été ensuite reconduite à même le fonds consolidé. Alors, il y a des choses qui se sont faites avec cet argent-là dans le milieu, sur le terrain.
Alors, il y a 14 régions qui ont été visitées jusqu'à maintenant sur 17; 38 organismes ont reçu la visite des ministres et de quelques députés. Il y avait plusieurs types d'entreprises: entreprises d'économie sociale, organismes d'intégration ou de réintégration à l'emploi, des cuisines collectives, des centres de femmes, des projets de réinsertion pour les jeunes en difficulté, la revitalisation de quartiers et cercles d'emprunt.
Les caractéristiques de ces formules qui fonctionnent très bien. Bon, il y en a qui, en plus de donner un service de base issu d'un besoin bien ciblé dans le milieu, l'organisme offre des services complémentaires. Il y a aussi la qualité du réseautage des organismes avec les autres ressources dans le milieu, afin de permettre une référence rapide et une complémentarité. Il y a des organismes, aussi, qui invitent les personnes qui reçoivent les services à s'impliquer progressivement dans l'organisme, dans le projet. Il y a aussi des organismes dont la provenance des membres du conseil d'administration est diversifiée et complémentaire, puis il y a une grande qualité des intervenants.
Il faut aussi dire que la souplesse des organismes communautaires dans le milieu, la proximité, la souplesse quand des gens vont faire un stage ou une période, qu'on a essayé de mettre la plus longue possible, pour se redonner les moyens de réintégrer le marché du travail... Des fois, vous savez, les gens sont longtemps sans travailler. Alors, on perd un peu des habitudes de travail, on perd la confiance en soi, et tout ça. Alors, c'est important d'avoir une gradation dans le retour. Et je pense que passer par des organismes communautaires où il n'y a pas une finalité de profits mais plutôt une finalité de vie communautaire, dans le milieu, ça aide les gens. Les gens sont plus prêts, ils sont à l'écoute des besoins de ces personnes-là qui doivent réapprendre, et réapprendre à se faire confiance, aussi.
Alors, je pense qu'il y a des beaux projets, en particulier dans la région de Québec. On est allé visiter JeunEssor Portneuf, qui est une entreprise d'insertion de jeunes décrocheurs en milieu rural. Il y a une ferme, une serre, un atelier de menuiserie. Alors, on permet aux jeunes de vivre une belle qualité de vie, en fait, en milieu rural, près de la nature et des animaux, mais tout en reprenant confiance en eux et en leurs moyens, ce qui les emmènera éventuellement à aller sur le marché du travail traditionnel. On sait que le marché du travail est très exigeant. Alors, ces gens-là ont besoin d'étapes.
On est aussi allé à Sainte-Foy ? il y a des pauvres à Sainte-Foy, vous savez ? à un organisme qui s'appelle La Baratte, qui fait la transformation d'aliments. Alors, ils ont beaucoup de travail; ils font de la transformation d'aliments frais. Ils ont des ententes avec des supermarchés, et c'est très intéressant.
Aussi, un autre projet qu'on est allé voir sur le terrain, c'est Motivaction Jeunesse qui s'occupe des jeunes marginaux. On se rappellera probablement tous du projet des jeunes itinérants en vélo ? jusqu'en Gaspésie, je crois ? mais il y a beaucoup d'autres choses qu'ils font. Par le sport et le loisir et le plein air, ils parlent avec ces gens-là, ils les amènent à embarquer dans des projets.
Il y a aussi le microcrédit, le CREECQ. Vous savez, il y a des personnes qui ont vécu la pauvreté et qui ont des bonnes idées. Ils ont des talents, et des fois, ils n'ont pas besoin de beaucoup d'argent pour se partir une microentreprise. Alors, ce projet, ce fonds, fait des petits prêts, des microprêts pour aider les gens à créer leur propre entreprise, et ça fonctionne très bien. Les conditions, c'est qu'ils ne soient pas acceptés dans les institutions traditionnelles. Et, moi... On en a vu plusieurs, il y a des bons résultats. Il y en a qui commencent à être très, très, très populaires. Alors, je reviendrai plus tard. Merci.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la députée de Vanier. M. le député de Laurier-Dorion.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, M. le Président. J'aimerais revenir, M. le Président, sur ce que la ministre disait, parce que ça me paraissait vraiment... Tu sais, quand on ne sait plus quoi dire, on radote. Elle est revenue sur le budget ? pas ce budget-ci, le budget qu'on vient de décider qu'il était périmé puis qu'on a remplacé par un autre budget ? puis elle nous rappelait les choses dans le budget, dans le budget, dans le budget.
Mais, M. le Président... et elle demandait: Quelle est donc la politique du Parti libéral? Quelles sont les actions que le Parti libéral entreprendrait? C'est assez intéressant. Voilà une ministre d'un gouvernement, avec tout l'appareil de l'État à sa disposition, qui n'est pas capable, au moment où on se parle, de mettre sur la table quelles sont les mesures de cette politique-là ? ils sont en train d'élaborer une politique ? qui demande à l'opposition de lui dire quels sont les éléments de cette politique-là que, nous, on mettrait sur la table. C'est assez cute, quand même.
Mais laissez-moi lui rappeler, M. le Président, que nous avons déjà, effectivement... Je veux vous donner une approche, je veux vous donner deux éléments de notre approche. Un, une action sur les mesures urgentes, tout de suite, immédiatement, par rapport à la nécessaire protection des personnes les plus démunies.
Nous lui avons proposé trois mesures concrètes. Indexation automatique annuelle au coût de la vie des prestations d'aide sociale. Jusqu'à maintenant, ils ont décidé d'indexer cette fois-ci, pas nécessairement au coût de la vie, pour l'avenir, et pas nécessairement automatiquement, chaque année. Donc, ils se réservent le droit de revenir et jouer avec cet élément-là, M. le Président. Nous, on s'engagerait à le faire automatiquement, annuellement, au coût de la vie.
Deuxièmement, gratuité des médicaments pour les personnes assistées sociales puis les personnes âgées vivant de la sécurité du revenu, M. le Président, ou supplément du revenu. Le gouvernement refuse ? refuse ? de remettre la gratuité des médicaments pour ces personnes-là, quand on sait qu'ils n'ont pas augmenté les prestations, quand ils ont demandé à ces gens-là d'assumer le coût, une partie des coûts de l'assurance médicaments, tandis que c'était gratuit pour ces personnes-là, avant. Alors, on a fait reculer les plus pauvres pour aller chercher de l'aide, donner de l'aide à d'autres personnes, qui, en soi, n'est pas une mauvaise chose, mais les choix que ce gouvernement a faits sont des mauvais choix. Alors, nous, on s'est engagés à remettre ça.
Troisième élément: barème plancher à partir des prestations actuelles. Abolissez les pénalités dans la prestation actuelle. On s'est engagé à le faire. Voilà trois choses concrètes, dans une approche de mesures immédiates, qu'il faut prendre.
Deuxième chose, M. le Président, dans une approche d'inclusion, la ministre semble ironiser le fait que le Collectif m'inspire. Elle semble d'ailleurs, sur le terrain, essayer de décrédibiliser le Collectif en véhiculant des histoires sur les coûts d'un programme de revenu minimum garanti que le Collectif voudrait peut-être voir.
Oui, le Collectif m'inspire, pas nécessairement dans toutes les mesures qu'il propose, M. le Président. Le Collectif m'inspire au niveau du travail de mobilisation qu'ils ont fait, au niveau de la volonté qu'ils affichent de travailler de concert avec les parlementaires. Et je trouve ça effectivement dommage que le gouvernement ait raté une occasion de vraiment faire de la lutte à la pauvreté un enjeu social, sans abdiquer la responsabilité que nous avons, comme parlementaires, de décider, en fonction de nos capacités financières, d'adopter les mesures.
Et c'est là où je vous donnerai un autre élément de notre programme. Je l'ai dit tantôt, nous re-regarderons ces programmes de subvention aux entreprises avec un oeil à se dégager une marge de manoeuvre. Parce que vous avez engagé des fonds publics vis-à-vis de la création d'emplois, vous dites? Mon oeil! Vous avez engagé des fonds publics pour subventionner ni plus ni moins des entreprises qui n'ont créé aucun emploi. Exemple: CGI. Quand ils ont acheté la division comparable du Mouvement Desjardins, ils sont devenus du jour au lendemain des employés de CGI. Ils existaient, ces emplois, mais ils sont maintenant éligibles à recevoir des subventions jusqu'à 10 000 $ par année par emploi, jusqu'en 2013. Dites-moi comment vous avez créé des emplois, et de quelle façon vous avez choisi de dépenser cet argent-là, de cette façon-là. Cet argent aurait dû aller à des programmes dans la mission sociale du gouvernement. Alors, ça, c'est des choix concrets.
Mais vous avez parlé aussi de la nécessité de sortir les personnes de l'aide sociale, les insérer à l'emploi. Expliquez-moi donc la logique de la décision du gouvernement d'abandonner, de transférer les instruments, dont Emploi-Québec, sous le contrôle du ministre de la Solidarité sociale, au ministre de l'Éducation. On vient de lui enlever l'accès direct aux instruments, justement, pour insérer les personnes à l'emploi, et ils viennent de les perdre au profit de quelqu'un d'autre. Donc, ils devraient maintenant travailler indirectement pour aboutir à quelque chose que vous dites être important. Il n'y a pas de logique là-dedans.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la ministre.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: M. le Président, quand j'entends le député de Laurier-Dorion dire «Mon oeil!» pour la création d'emplois du gouvernement du Parti québécois, je ne sais pas s'il est sur la même planète que moi. Je ne sais pas s'il est sur la même planète que nous. S'il y a bien un gouvernement qui a fait du développement économique et de la création d'emplois un de ses chevaux de bataille... Je me souviens de... complètement... Je me souviens de ce que le premier ministre dit régulièrement... qu'il a dit régulièrement par rapport à... même aller chercher un emploi, que c'était important pour lui.
n
(10 h 50)
n
Alors, je vais revenir sur notre débat sur la lutte contre la pauvreté et l'exclusion. Le député de Laurier-Dorion me parlait particulièrement de mesures urgentes. Oui, il y en a eu, des mesures urgentes, et oui, on continuera à en faire, des mesures urgentes. On s'est dit que, quand on fait une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, ce n'est pas nécessairement dans toute cette démarche-là que nous ne ferions pas en même temps des mesures urgentes.
Je vous rappelle des mesures qui sont de cette année, que nous avons dévoilées: celle du 21 millions sur trois ans pour le soutien alimentaire pour les élèves du secondaire des écoles les plus défavorisées; c'est 3,8 millions sur deux ans au Club des petits déjeuners, afin d'étendre son action dans 100 nouvelles écoles primaires; le 10 millions octroyé pour la mise en oeuvre d'un programme de sécurité alimentaire. Ça, c'est des mesures urgentes, M. le Président. Ça, c'est des mesures concrètes qui parlent, qui touchent nos enfants, qui touchent nos femmes, qui touchent nos familles qui sont directement affligées par la lutte contre la pauvreté et l'exclusion.
Quand j'entends le député de Laurier-Dorion me parler de barèmes plancher, bon, il peut bien être en accord avec le barème plancher. C'est 100 millions, le barème plancher. Je ne sais pas s'il l'a évalué. Et, si on continue, quand il me parle du travail de mobilisation du Collectif, oui, soit, j'embarque avec lui dans le travail du Collectif; je lui dis que j'ai trouvé que c'est un travail remarquable. Mais je peux quand même dire que, dans le travail du Collectif, il y a, je pourrais dire, une loi-programme et dans cette loi-programme-là, il y a des mesures qui sont dedans qui peuvent nous ramener à... du temps du gouvernement du Parti libéral, c'est-à-dire à des déficits énormes, dont celui du barème plancher, dont celui du revenu minimum garanti. Est-ce que ça veut dire que le député de Laurier-Dorion est d'accord avec le revenu minimum garanti, un revenu de citoyenneté? Ça, un revenu de citoyenneté pour tous les Québécoises et Québécois, c'est 30 milliards de dollars. Alors, je ne sais pas si c'est ce qu'il avance quand il dit des choses comme celle-là, mais c'est 30 milliards de dollars. 30 milliards de dollars pour un gouvernement, quand le budget du Québec est près de 45 milliards, bien, je pense que c'est absolument, absolument frivole.
Alors, j'aimerais revenir un petit peu... des déclarations de son chef d'ailleurs qui disait, dans un article que j'ai du journaliste Michel Venne qui écrivait dans un article, en parlant du nouveau chef du Parti libéral, en 1998: «Il proposera aux Québécois de mettre en oeuvre, s'il est élu, une politique qui s'articulera autour d'une idée inscrite au programme du Parti conservateur en 1997, celle d'obliger les jeunes prestataires de l'aide sociale ou de l'assurance emploi à travailler ou à étudier pour obtenir le plein montant des prestations de base.» Le 12 septembre 1998, le chef du Parti libéral, Jean Charest, titrait, dans Le Devoir: Les jeunes assistés sociaux: Au travail et aux études. Et je pourrais vous en énumérer encore plusieurs de ce que pense le Parti libéral des assistés sociaux, d'une part.
J'aimerais vous dire aussi, quand je regarde les chiffres du temps du Parti libéral... parce que c'est ça. J'attends qu'il me dise, qu'il me dise ce qu'il propose, là. De 1989 à 1994, le nombre de bénéficiaires de l'aide sociale a crû de 45,4 %. De décembre 1989 à 1994, 250 000 prestataires de plus à l'aide sociale. C'est ça, le gouvernement d'un Parti libéral. Si le Parti libéral met en branle sa stratégie de lutte à la pauvreté...
Alors, je vais revenir, M. le Président, si vous permettez, à l'ensemble de nos étapes, que nous avons franchies pour une stratégie nationale de lutte à la pauvreté. D'abord, nous avons convenu ensemble de tout... un bilan des politiques dans le contexte actuel de nos interventions en pauvreté, alors donc, durant les deux dernières années, pour identifier vraiment les problématiques et les enjeux prioritaires.
Nous avons mis en place des chantiers intersectoriels, donc qui sont en branle, présentement. Alors, le député de Laurier-Dorion se demande ce qui se fait au gouvernement du Québec. Je vais en dire, des choses que, nécessairement... et peut-être qui peuvent être intéressantes au député de Laurier-Dorion. Donc, des chantiers sur les jeunes de moins de 25 ans, sous-scolarisés, ça fait partie, dans notre lutte à la pauvreté, que nos jeunes sous-scolarisés... d'être capables de les aider; familles à faibles revenus; nouveaux arrivants et minorités visibles; personnes vivant des contraintes importantes, des territoires à forte concentration de pauvreté; l'amélioration aux dispositifs de sécurité du revenu et les mesures de la pauvreté et indicateurs de résultats. C'est ce que nous sommes en train de mettre en chantier, que j'élaborerai un petit peu plus tard, après que mon cinq minutes est terminé.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Alors, M. le député de Masson.
M. Gilles Labbé
M. Labbé: Alors, merci, M. le Président. Alors, si vous permettez, M. le Président, je vais réagir à quelques assertions, en fait, que mon collègue de Laurier-Dorion a mentionnées tout à l'heure, au début de son discours; ça m'a fait sursauter. Alors, vous comprendrez que, me faire sursauter au poids que j'ai, ça en prend des bonnes.
Alors, quand le député de Laurier-Dorion mentionnait que mettre les organismes dans la consultation... Ce qui se passe actuellement au niveau de chacune des régions et même des localités du Québec, comme tel... Quand il mentionne que mettre les organismes de côté, les personnes, qu'on ne s'occupe pas d'eux autres, quand, en plus, il parle de notre démarche comme une démarche vide de sens, qu'on est bons pour les discours mais non pour l'action, bien, justement, M. le Président. Si vous permettez, je vais quand même ramener certains éléments qui, à mon point de vue, sont excessivement importants de ce qui se passe au Québec actuellement sur la lutte à la pauvreté.
J'ai eu le plaisir d'ailleurs de participer à cette démarche-là. J'étais disponible, et à partir de ça, à un moment donné, il y a eu beaucoup de choses qui se sont faites. Si on parle de la région de Lanaudière, qui est un petit peu sur la rive nord de Montréal, alors je vais en mentionner quelques exemples, si vous me permettez, M. le Président.
Dans un premier temps, je vais vous donner un exemple de la démarche, comment elle se passe, comment elle se produit. D'abord, il y a toute une question de mobilisation, puis quand on veut vérifier sur le terrain si une démarche est valable, si les gens y participent, si les gens sont intéressés, on a juste à regarder le nombre de... la mobilisation qui se passe, le nombre de personnes qui y participent. Et je peux vous dire que, dans notre cas, il y a plusieurs démarches qui se sont faites dans Lanaudière, et on avait d'emblée, à la majorité sinon presque à l'unanimité, des organismes qui se battent contre la lutte à la pauvreté, justement, qui ont été présents dans ces différentes rencontres.
Il y avait d'abord, avant de faire les rencontres comme telles, toute une mobilisation qui s'était organisée au niveau des différents organismes où chacun a fait un examen de conscience, un petit peu pour voir c'était quoi, les problèmes, qu'est-ce qui nous touchait particulièrement, puis chacun dans leurs créneaux différents, pour ensuite en arriver à mettre ça ensemble et dire à un moment donné: Qu'est-ce qu'on pourrait prioriser, comme région?
Je vais vous donner, M. le Président, un exemple bien concret dans la MRC des Moulins. Souvent, on peut penser que la MRC des Moulins, c'est une MRC effectivement qui peut paraître riche, mais la pauvreté, vous le savez, c'est caché, ce n'est pas toujours évident. Quand on regarde les maisons, quand on regarde les portes, on dit: Ah! c'est sûrement quelqu'un qui est en moyens. Mais, quand on ouvre la porte, on s'aperçoit souvent qu'il se passe des choses à l'intérieur de chacune des maisons de nos comtés, et c'est là qu'on voit que la pauvreté est présente et qu'elle est même présente à presque... On serait surpris de voir à quel niveau elle est présente.
Je vous donne un exemple concret: le Comité de développement social des Moulins qui nous a envoyé une lettre, aux députés du secteur, du coin, en nous mentionnant un petit peu son exercice... que lui avait fait avant d'arriver à la grande réunion du CRD, comme tel... donc, ça vous démontre comment les gens sont impliqués. Et ils nous mentionnaient effectivement un petit peu les priorités, qu'eux autres trouvaient ça excessivement important qu'on puisse s'en occuper avant d'en arriver à la grande rencontre.
Et je vous donne certains éléments, puis ça va permettre aux gens de voir que c'est concret, ces rencontres-là; il se passe des choses fort importantes. D'abord, plus récemment, et je lis telle quelle la lettre qui a été adressée, en fait, aux députés, le 1er novembre 2001 ? ça ne date pas d'il y a 20 ans, c'est tout récent: «Alors, plus récemment, en septembre, le Comité a ciblé des problématiques particulières, afin de planifier ses activités de l'année. Ces priorités rejoignent les orientations et les perspectives d'action, en matière de lutte contre la pauvreté.» Donc, c'est quand même très concret. «En effet, le taux de diplomation figure parmi les priorités identifiées. Nous constatons en effet que la MRC se retrouve au 81e rang parmi l'ensemble des MRC.» En plus, ils ont ciblé certains projets qui, pour eux autres, pouvaient évidemment nous aider à combattre de façon efficiente la pauvreté dans notre MRC comme telle. Et j'en cite quelques-uns à titre d'exemple. Le Chez-nous du communautaire, qui constitue un projet structurant pour notre territoire et pour les organismes communautaires. Je peux vous dire que c'est en voie de réalisation, grâce à l'aide du gouvernement, actuellement. Accès psychologique Lanaudière est un projet visant le développement du capital social des individus. Entre autres, la ressourcerie multiservices La Petite Ourse est une entreprise d'insertion à l'emploi à vocation environnementale; la Table de la pauvreté; Solidarité des Moulins, des gens qui se rencontrent tous les mois régulièrement pour parler de la pauvreté, qui se sont structurés puis qui sont très heureux d'avoir enfin un forum pour pouvoir exprimer toutes les priorités de la région des Moulins.
On parle aussi évidemment du transport en commun. Combien de gens ne pensent pas que le transport en commun est un outil excessivement indispensable pour les gens qui vivent la pauvreté tous les jours? Parce que ce n'est pas tout le monde qui a les moyens, même en région, de se payer une voiture, comme tel. Et, en conclusion, les priorités fixées par le Comité de développement social des Moulins illustre les situations concrètes qui s'inscrivent dans l'esprit du document, en matière de lutte contre la pauvreté.
Je vous donne un exemple de ce qui a été envoyé avant la rencontre du CRD, où au CRD effectivement, le 2 novembre dernier, on s'est rencontré tout le monde. Il y avait au-delà de 30 participants, M. le Président, et ces gens-là s'étaient préparés. Ils nous ont fait un tableau concret, très présent, de toutes les problématiques sur la pauvreté pour l'ensemble de la région Lanaudière. Je peux vous nommer quelques organismes qui étaient présents. Quand on nous dit que les gens ne sont pas là, ne participent pas, c'est bidon, c'est tout arrangé, cette consultation-là, on peut s'apercevoir que les gens sont drôlement présents, et puis ils y croient, ils sont très heureux.
D'ailleurs, il y en a plusieurs qui ont remercié la ministre pour cette démarche parce qu'elle se voulait très concrète et très à l'écoute des gens qui étaient présents. Je vous donne le nom de certains organismes qui y ont participé: la Table de concertation des groupes de femmes de Lanaudière; le Centre de femmes Marie-Dupuis; la Table des partenaires de développement social; l'Association coopérative, etc. Et je pourrais le mentionner longtemps, M. le Président.
Donc, ce que j'ai le goût de vous mentionner: Oui, la démarche que la ministre fait actuellement, oui la démarche que le gouvernement fait avec les partenaires, avec les gens, avec le monde, le peuple, comme on pourrait dire, c'est une démarche concrète, qui va porter sur des actions.
n(11 heures)nLe Président (M. Beaumier): Merci, M. le député de Masson. M. le député de Laurier-Dorion.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, M. le Président. J'aimerais revenir sur ce que la ministre disait tantôt, lui demander d'arrêter de colporter des faussetés en essayant d'associer les éléments contenus dans le projet de loi du Collectif à l'opposition et en décrédibilisant, par le fait même, le Collectif, parce qu'elle choisit d'aller chercher des mesures qui manifestement, coûteront cher. Disons donc que, si on appuie le Collectif, on appuie toutes les mesures. Quand elle sait que ce que je lui dis, c'est que nous appuyons la démarche, nous aimerons discuter autour de la table, avec tous ces gens-là, pourquoi la ministre choisit de décrédibiliser le Collectif et le projet de loi du Collectif seulement quand le Collectif n'est pas présent. Pourquoi elle refuse d'avoir une commission parlementaire qui aurait pu permettre effectivement d'examiner ces éléments-là? Nous croyons que ça revient aux parlementaires de décider des mesures qu'on va mettre dans une approche de lutte à la pauvreté et que nous devons le faire en fonction des priorités budgétaires que nous avons. Nous estimons, de ce côté-ci, que la priorité budgétaire, quand on regarde, par exemple, les argents qui sont dépensés non pas pour créer des emplois, mais pour transférer des emplois d'une entreprise à une autre, d'un secteur de la ville à un autre ? et je lui ai donné des exemples concrets qu'elle choisit d'ignorer ? il faudrait dégager une marge de manoeuvre financière pour remettre dans la mission sociale du gouvernement.
M. le Président, la ministre ? pourtant, ça fait trois fois que je lui parle ? ne mentionne nullement le transfert récent d'Emploi-Québec qui passe du contrôle du ministre de la Solidarité sociale... Et, étant donné que c'est un élément extrêmement important de lutte à la pauvreté, l'insertion à l'emploi des plus démunis, quelle est l'explication? Pourquoi son ministre en titre perd des plumes comme ça? Pourquoi, là où on était... Il y a un an, il y avait un ministère bicéphale, il y avait deux ministres: le ministre de la Solidarité sociale puis le ministre du Travail et de l'Emploi. Tout un branle-bas... On sait qu'il s'agissait tout simplement d'être émetteur de chèques, d'avoir juste les mesures passives quand on est ministre de la Solidarité sociale. C'est tout ce qu'on peut faire. On émet les chèques. Le ministre de l'Emploi, lui, a les mesures actives d'emploi, donc de pouvoir arrimer les mesures passives avec des mesures actives afin d'insérer les gens sur le marché du travail.
Là, on l'a corrigé, il y a huit mois, puis on était content de ce côté-ci parce qu'on trouvait que ça avait un certain sens. Ça avait un sens. Donc, on est passé d'un ministère bicéphale à un ministère unicéphale. Et je disais dans mon introduction que, là, on a créé un monstre tricéphale. Là, on a un ministre du Travail et de la Solidarité sociale responsable, comme ministre d'État d'ailleurs, de l'élaboration de la politique de lutte à la pauvreté, on a une ministre déléguée à la Lutte contre la pauvreté et l'exclusion qui tourne en rond, généralement, hein, elle tourne dans toutes les régions. D'ailleurs, elle émet communiqué après communiqué après communiqué. Elle prend les mêmes communiqués, elle remplace les mots. Aujourd'hui, c'est Laval. Demain, c'est Lanaudière. Aujourd'hui, c'est Lanaudière. Demain, c'est la Gaspésie. Même communiqué, on change Lanaudière pour Laval, Laval pour Gaspé. Aujourd'hui, c'est tel député qui l'accompagne; demain, c'est un autre. Bien, on change le nom. C'est exactement les mêmes communiqués, je vous le jure, je peux vous les lire. Mais, bon, alors elle tourne. Ça, c'est le deuxième ministre. Et là on a un troisième ministre qui est responsable, lui, des mesures actives d'emploi et qui se retrouve à l'Éducation. Alors là on a un monstre tricéphale.
Quelle est l'explication? Pourquoi est-ce que ça va être plus efficace, pour lutter contre la pauvreté, de perdre le contrôle sur les mesures actives? Comment il se fait que ce qui était bon il y a huit mois n'est plus bon aujourd'hui? C'est-u parce qu'on s'est trompé la première fois? C'est-u parce qu'à l'Éducation il y a des raisons comptables de vouloir avoir accès plus directement aux sommes d'argent qui sont dans Emploi-Québec? C'est-u... Quelle est la raison? Et le ministre du Travail et de la Solidarité sociale maintenant, qui n'est plus ministre de l'Emploi, qui a toujours fait de l'emploi et de l'insertion à l'emploi la pierre angulaire de la lutte à la pauvreté, comment est-ce qu'on peut le prendre au sérieux maintenant quand il va nous parler de l'emploi, quand il va nous parler de la volonté gouvernementale d'arrimer, tu sais, de sortir... La ministre le reprenait d'ailleurs, elle disait: Il faut se rappeler que l'objectif, c'est de sortir les gens de l'aide sociale puis de les insérer sur le marché du travail.
Soit. Nous y sommes. C'est d'ailleurs pour cette raison-là qu'on a beaucoup de misère à comprendre comment est-ce qu'on pourra continuer à croire le moindrement le sérieux de ce gouvernement quand il vient de poser un geste concret qui va dans l'autre sens, qui va dans le sens de dire: Les mesures actives d'emploi, ce n'est pas nécessaire d'avoir une autorité directe sur ces mesures-là; c'est quelqu'un d'autre qui va maintenant décider des critères d'admissibilité, des budgets qui seront affectés. Il va falloir qu'on aille se battre pour savoir ce qui se passe de l'autre côté. Quelle est la logique?
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la ministre.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Oui, M. le Président. Alors, vous savez, je préfère nettement être, comme dit le député de Laurier-Dorion, en région que d'être ici, ce matin, à l'interpellation, et d'être nécessairement dans cette situation de venir débattre avec vous de la lutte contre la pauvreté. Je préfère nettement être avec les citoyennes, les citoyens, les gens qui sont dans la pauvreté et être, comme vous dites, en tournée. Parce qu'on fait actuellement, dans la stratégie nationale... Nous avons lancé, en juin dernier, avec le premier ministre, le document Ne laisser personne de côté! et nous avons annoncé nos grandes orientations, d'une part, et invité à la mobilisation des partenaires, par ces visites-là, locales, des rencontres régionales et nationales, et à se donner des moyens, je pourrais dire, appropriés, immédiats pour une mise en oeuvre de la stratégie.
C'est comme ça que nous avons, avec mes collègues ici présents et plusieurs autres de mes collègues, été faire des visites, nécessairement, que j'appelle plutôt locales: donc, aller rencontrer des organismes, des gens qui vivent de très près avec les personnes qui sont en situation de pauvreté, des gens qui vivent la situation de pauvreté. Et ça m'a permis, cet automne, de vraiment échanger, d'avoir des échanges, je pourrais dire, très fructueux avec les gens qui vivent dans cette situation que, je pourrais dire, personne ne voudrait vivre.
En même temps, j'ai des rencontres régionales, et nous avons donné... j'ai donné le mandat particulièrement aux CRD, les CRD qui possèdent déjà le mandat de regrouper et de concerter l'ensemble des partenaires et acteurs provenant de tous les secteurs ? social, économique, communautaire, syndical, santé, éducation, culturel, loisir, etc. ? autour de plans de développement et de priorités régionales. Alors, c'est comme ça que je fais les rencontres régionales. Le député de Laurier-Dorion me dit que je ne sais pas pourquoi je tourne, pourquoi je vais voir les régions. Je ne le sais pas, je pense que c'est une stratégie qui tient compte des régions, et ce n'est pas vous, comme Parti libéral, qui dites tout le temps que... qui copiez ce que le gouvernement du Québec fait en se donnant une priorité des régions et que vous envoyez votre chef en région pour faire exactement ce que le gouvernement du Parti québécois fait présentement.
Et, je pourrais dire, le mandat particulier des CRD, c'est d'établir ces rencontres régionales là. Et les députés sont tous interpellés et invités à ces rencontres de CRD. Vous l'êtes, M. le député de Laurier-Dorion, vous allez être invité par le CRD de Montréal aussi, vous pouvez y assister, vous pouvez être présent. J'ai interpellé certains de vos collègues aussi d'être présents dans les régions que j'ai faites. J'ai fait 11 régions sur 17, maintenant, et les deux, trois prochaines semaines, j'aurai vu toutes les régions du Québec et échangé avec tous les partenaires et tous les gens qui ont fait des propositions ou des commentaires, particulièrement sur le document Ne laisser personne de côté! Cette mobilisation se concrétise par des échanges avec des représentantes et des représentants d'organismes qui travaillent auprès des personnes démunies et par des rencontres dans toutes les régions du Québec afin de recueillir, comme je vous dis, les propositions particulièrement du document Ne laisser personne de côté! Nous souhaitons que ces rencontres régionales sur la validation des orientations gouvernementales en matière de lutte contre la pauvreté s'inscrivent en continuité du travail déjà entrepris et réalisé par chacun des CRD dans le cadre d'ententes spécifiques, d'une part, portant sur le développement social, et d'ententes-cadres entre le gouvernement et les régions.
Nous avons, voilà quelques années... En 1996-1997, il y a eu ce qu'on appelle les forums de développement social, qui ont été très... Il y a eu des réflexions très approfondies et des actions très concrètes qui se sont faites dans les régions du Québec, et, suite à ces forums-là, les CRD ont fait... ils se sont donné certaines priorités. Et, avec ce nouveau document là, ils ont intégré l'ensemble des orientations gouvernementales pour voir la suite des choses, pour avoir encore davantage d'actions, encore plus concrètes, et des priorités qui sont régionales pour développer différents projets qui peuvent être très significatifs dans les régions du Québec. Alors, je vous invite encore une fois, M. le député de Laurier-Dorion, à vous y investir, si cela vous tente, dans les rencontres régionales, à inviter vos collègues, si le coeur vous en dit aussi et si la pauvreté fait partie de vos priorités.
n(11 h 10)n Les résultats de ces rencontres avec les CRD nous permettent de bâtir une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté qui va tenir compte de toutes les régions du Québec. Donc, ce n'est pas une stratégie qui sera nécessairement de mur-à-mur, c'est une stratégie qui va tenir compte des priorités des régions du Québec. Et il y a des choses extraordinaires qui sortent de ces rencontres régionales là. Je pourrais dire... Je pourrais vous en énumérer plusieurs, mais j'aurai le temps encore tout à l'heure de vous en énumérer.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Vanier.
Mme Diane Barbeau
Mme Barbeau: Moi, j'aimerais parler du document d'orientation Ne laisser personne de côté!, en particulier les chantiers interministériels. Il y a eu des commentaires, quand ce document a été lancé, qui disaient: Ce n'est pas ce qu'il y a dedans, c'est ce qu'il n'y a pas dedans, dans le... Mais je pense qu'il faut prendre en considération que c'est un document d'orientation; c'est un début, c'est ouvert. Il y a des orientations définies. Pour bien connaître la loi du Collectif, pour l'avoir déposée conjointement avec le député de Laurier-Dorion et le député de l'ADQ, toutes les mesures pointues de la loi du Collectif peuvent aller sous l'une ou l'autre de ces orientations. Mais, nous, on n'a pas... Ce n'était pas une fin, mais un début. On étudie tout ce qu'il y a dans la loi.
Alors, dans ces orientations-là, il y avait les familles à faibles revenus, les jeunes sous-scolarisés, les immigrants récents et les membres des minorités visibles vivant des difficultés particulières et d'intégration au marché du travail, les personnes vivant des contraintes importantes dont les personnes handicapées, les territoires à concentration de pauvreté, l'amélioration du dispositif de sécurité du revenu, et la mesure de la pauvreté et les indicateurs de résultat.
Alors, l'approche des chantiers interministériels, en fait, c'est de permettre de sortir des silos, parce que, vous savez, il y a beaucoup de mesures qui touchent plein de gens démunis dans plein de ministères et organismes, mais il n'y a pas... Ce qu'on essaie de faire, c'est de travailler ensemble à adapter, harmoniser et intégrer les approches qui touchent les mêmes personnes. Alors, ça, c'est quand même important comme chantier, là, pour s'assurer que ce qu'un ministère fait et un autre, c'est coordonné, c'est harmonisé quand ça arrive sur le terrain, quand ça touche les personnes dans le milieu.
Alors, pour ce qui touche un des sept chantiers, les familles à faibles revenus... D'ailleurs, c'est en bonne partie des familles monoparentales. 30 % de ces familles ont des revenus sous la mesure du faible revenu. Ça touche les services d'intégration socioprofessionnelle, la persévérance scolaire des parents adolescents, les services pour favoriser l'égalité des chances et le développement des enfants.
Il y a aussi les jeunes sous-scolarisés. Il faut savoir que 70 % des jeunes admis à l'aide sociale n'ont pas leur secondaire et que 50 % de ceux de moins de 21 ans y sont encore 18 mois plus tard. On sait que plus jeunes ils rentrent à l'aide sociale, plus longtemps ils restent. Alors, c'est dans cette idée de prendre ce problème à la base que Solidarité jeunesse est né. Je n'en parlerai pas dans le détail parce que mon collègue va en parler, peut-être, tout à l'heure, mais on prévient avant qu'il soit trop tard. Quand les jeunes arrivent, on s'en occupe tout de suite. Ça fait qu'on fait des actions en prévention de décrochage pour favoriser l'intégration des jeunes à risque avec le Plan d'action jeunesse.
Les immigrants aussi, récents, et les membres des minorités visibles. Il faut savoir que 18 % recourent à l'aide sociale. Le taux de chômage des minorités visibles est le double de la population en général. L'accès à des mesures d'intégration, la connaissance des acquis, la lutte contre la discrimination systémique. C'est important de s'occuper de ces gens-là.
Les personnes vivant des contraintes importantes, dont les personnes handicapées. On sait que leur nombre a augmenté de façon absolue à l'aide sociale et, en proportion, ils représentent maintenant 27,2 % des prestataires, et près de 30 % des personnes handicapées vivent sous le seuil de faibles revenus. Alors, il faut regarder l'offre de service d'aide à l'emploi et d'insertion sociale, le développement du capital social d'intervention auprès de ces personnes.
Les territoires à concentration de pauvreté. Les régions-ressources comptent une plus grande proportion des prestataires qui ont une présence à l'aide sociale. C'est la même situation dans les quartiers sensibles des grandes villes, on le sait, dans les quartiers centraux de Québec, de Montréal ou d'autres grandes villes.
Il faut aussi améliorer le système d'aide sociale ? il change de nom souvent, là ? de sécurité du revenu. Alors, on sait qu'il y a beaucoup, beaucoup de règles. Il y a beaucoup de gens à s'occuper, alors il y a des règles, c'est bien sûr, mais des fois il y a des règles pointues qui font en sorte que, dans le milieu, ça peut causer certains problèmes. Alors, on va regarder ça de près, tous les irritants. Des fois, il y a des choses qui font de la rétention à l'aide sociale; quand les gens veulent en sortir, il y a des petits coups de pouce qui manquent à quelques occasions.
Alors, j'ai fait un tour rapide des sept chantiers. Merci.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la députée de Vanier. M. le député de Laurier-Dorion.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, M. le Président. M. le Président, c'est la quatrième fois que la ministre esquive la question. Elle refuse d'aborder même la question: Emploi-Québec, Mme la ministre, la logique du transfert? Quand vous voulez faire de l'emploi la pierre angulaire de la lutte à la pauvreté et quand on sait que l'insertion à l'emploi des plus démunis et des gens sans emploi, qui sont sur l'aide sociale à court terme, à moyen terme ou depuis plus longtemps, est un élément important de l'emploi et de la lutte à la pauvreté, comment il se fait que vous vous êtes enlevé des instruments importants de lutte à la pauvreté sous la responsabilité directe? Comment est-ce que ça va être plus efficace de ne pas avoir un accès direct à tous les instruments que détient Emploi-Québec au niveau des mesures actives d'insertion à l'emploi pour les personnes sans emploi, les assistés sociaux en particulier, et que ça va être plus efficace de donner ça à quelqu'un d'autre, quand, il y a à peine huit mois, sur la base d'études et d'analyses du rapport Bernard en particulier, on avait pris la décision de jumeler ça? C'est-u un jeu de coulisse, de pouvoir qui s'est fait au niveau du Conseil des ministres et votre ministre a perdu? C'est quoi, le jeu? Comment est-ce qu'on va pouvoir donner quelque crédibilité que ce soit au discours voulant que l'emploi est au centre de la lutte contre la pauvreté quand celui qui est responsable de la lutte à la pauvreté n'a plus accès direct aux instruments de lutte à la pauvreté que constituent les mesures actives d'emploi?
Ça fait quatre fois que je vous pose la question, ça fait quatre fois que vous l'ignorez totalement. Vous préférez dire que vous aimeriez ça être ailleurs, je comprends que vous aimeriez ça être ailleurs, ça serait beaucoup moins embêtant d'être avec des gens qui ne vous poseront pas ces questions-là. Mais je vous rappelle que vous avez décidé de devenir députée, députée avec des responsabilités ministérielles, et je vous rappelle que le Parlement est encore un élément central de notre démocratie, où on a l'opportunité de se questionner. Et ce n'est pas parce qu'on vous pose des questions sur lesquelles vous décidez de ne pas répondre que ça justifierait votre absence ici, pas plus d'ailleurs de celui qui avait le loisir de décider d'organiser son agenda en fonction des priorités parlementaires. Alors, je reviens à ce que j'ai dit en introduction, c'est une indication de combien au sérieux vous prenez le Parlement, de l'autre côté. Je prends le travail au sérieux, pas moi-même, mais le travail.
Alors, une réponse. Si vous ne pouvez pas répondre, je comprendrai que vous êtes liée par la solidarité ministérielle, j'y ai déjà été, et je me permettrais donc de devenir votre haut-parleur et de dénoncer cette façon de faire, parce que ça n'a pas de sens. Ce n'est pas logique, ce n'est pas compréhensible très facilement de se voir enlever, à peine huit mois plus tard, un instrument, un coffre à outils important dans la lutte à la pauvreté et de le transférer à quelqu'un d'autre. Je comprends que vous avez choisi jusqu'à maintenant de ne pas l'expliquer, mais j'attends toujours une explication.
Sur la consultation, encore une fois ? d'ailleurs, les collègues de la ministre, qui l'accompagnent, sont revenus sur cette question-là en faisant l'éloge de la validation ? utilisons les bons termes, vous avez raison, ce n'est pas une consultation, c'est une validation du document que vous avez rendu public. Et vous avez convoqué aussi des rencontres nationales. Alors, moi, j'aimerais ça que vous m'expliquiez comment il se fait, par exemple, que les gens les plus directement concernés par le dossier décident tranquillement de se désister de participer. Vous savez probablement à quoi je me réfère. Le 14 novembre, il y a à peine deux jours, le Front commun des assistés sociaux déclinait votre invitation à se rendre à la rencontre nationale sur votre validation, sur le document.
Et permettez-moi tout simplement de vous lire quelques paragraphes pour vous rafraîchir, replacer le contexte: «Je tiens à vous informer que l'exécutif du Front commun a décidé de ne pas participer à cette rencontre. Une fois de plus, en tant que citoyens, nous nous sommes sentis exclus et méprisés.»n(11 h 20)n Et je veux vous lire le paragraphe qui parle de la consultation: «En ce qui concerne le processus de consultation mis de l'avant, nous refusons d'y être associés parce que, pour nous, celui-ci manque totalement de transparence et d'indépendance. Comment se fait-il qu'un mandat n'ait pas été confié à une commission parlementaire non partisane relevant de l'Assemblée nationale? Comment se fait-il que les consultations régionales n'aient pas été ouvertes à l'ensemble de la population? Comment se fait-il que les consultations nationales ne soient faites que sur invitation et sur une approche thématique, ce qui évite toute interaction et tout débat? Nous n'avons plus confiance dans votre processus qui nous apparaît de plus en plus comme une vaste opération de relations publiques visant à légitimer vos orientations préétablies. Nous vous invitons donc, Mme la ministre ? ou M. le ministre, plutôt ? à mettre un terme à ce simulacre de consultation.» Voilà ce que les gens pensent véritablement de la validation en processus.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la ministre.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Oui, M. le Président. D'abord, ça fait quatre fois que le député de Laurier-Dorion dit qu'il m'interpelle. Je vais peut-être lui préciser davantage la lutte contre la pauvreté, dans quelle optique elle s'inscrit à travers toute une démarche gouvernementale, d'une part. Vous savez, une démarche gouvernementale de lutte contre la pauvreté... La pauvreté, c'est horizontal, c'est transversal, c'est intersectoriel. Elle va bien au-delà d'Emploi-Québec et elle sollicite d'ailleurs, je pourrais dire, tous les secteurs, parce que la lutte à la pauvreté, c'est autant santé et services sociaux qu'éducation, qu'affaires municipales, et d'autres de mes collègues qui dirigent ces secteurs-là. Le fait qu'un autre ministère soit associé encore plus étroitement vient quand même renforcer l'action gouvernementale. Ce n'est pas nécessairement, comme vous dites, une perte de contrôle, mais bien un resserrement de l'action des ministères par rapport à la lutte contre la pauvreté. Alors, il ne faut quand même pas oublier que la lutte contre la pauvreté, c'est transversal, c'est horizontal, ça fait appel à tous mes collègues et ça fait appel à tous les ministères au niveau de la lutte contre la pauvreté.
J'aimerais revenir sur les CRD, les rencontres avec les CRD. Là, vous mentionnez ? je vais revenir aux rencontres nationales ? une vaste opération de relations publiques, de ce que vous avez l'air à mentionner. Je regrette ce que vous mentionnez dans le communiqué que vous avez entre les mains et que vous-même vous utilisez la parole ici en Chambre, parce que... Vous savez, comme députée, moi, je suis bien fière d'être une députée, je suis bien fière de représenter mon comté. Un député, ça a peut-être ? en tout cas, en ce qui me concerne ? quatre mandats: celui de représenter son comté, qui m'est absolument important; représenter ses citoyennes et ses citoyens; être législateur, donc participer aux travaux parlementaires activement; être militant, militante dans l'action politique dans laquelle nous sommes; et comme ministre, aussi, alors le mandant ministériel à travers tout ça. Alors, si je suis ici avec vous ce matin, c'est parce que ça fait partie de l'ensemble du mandat d'un député qui est celui de travaux parlementaires.
Si je reviens aux CRD, j'aimerais vous dire: Au niveau des régions, je ne vois pas d'opération de relations publiques à rencontrer les régions, M. le député, pas du tout. Les régions font du travail extraordinaire. Il y a des actions, des priorités qui se font dans les régions actuellement. Il y en a qui ont déjà des plans d'action de lutte contre la pauvreté. Ils étaient contents d'échanger avec moi. Et je n'ai pas terminé, j'ai encore d'autres régions à rencontrer dans les prochaines semaines. Ils ont à échanger avec moi, et c'est absolument fructueux, je pourrais dire, riche, riche d'inspiration, riche de ce que la collectivité locale peut faire, de ce que la collectivité locale entend faire, parce qu'il y en a qui sont à leurs débuts de leurs travaux de lutte contre la pauvreté, il y en a qui ont des plans d'action depuis plusieurs années.
Hier et avant-hier, bon, j'étais encore dans les régions pour voir, pour échanger avec les gens des régions qui ont été invités par les CRD. Et je tiens à vous dire que, dans la lutte contre la pauvreté, nous sommes à l'écoute de tout le monde, M. le député de Laurier-Dorion, parce que c'est une stratégie qui est nationale, d'une part, et qui touche toutes les citoyennes et tous les citoyens du Québec. Je les interpelle dans cette mobilisation-là, ils sont invités, ils sont... À n'importe quel moment, je suis prête à rencontrer les gens et je suis prête à échanger avec les gens. Ils le font avec mes collègues, et mes collègues aussi sont impliqués dans la lutte contre la pauvreté.
J'aimerais revenir aux rencontres nationales telles quelles. Les rencontres nationales que nous avons commencées sont des rencontres de travail avec les partenaires socioéconomiques et les organisations, lesquelles sont regroupées par familles de préoccupations liées à la pauvreté, afin d'obtenir leur avis sur le document Ne laisser personne de côté! Nous avons identifié des thèmes qui les interpellent, les priorités qu'ils proposent ainsi que les engagements qu'ils envisagent prendre en matière de lutte contre la pauvreté. Donc, il y a des tables rondes qui sont animées par mon collègue le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Les thèmes de ces rencontres sont ? je vous les nomme: la jeunesse et la formation, l'insertion au travail, le maintien en emploi et l'insertion sociale, la sécurité économique, les familles à faibles revenus et la condition féminine, les nouveaux arrivants et les minorités visibles, le logement et le milieu de vie, et la promotion des droits.
Je vous rappelle, au niveau du logement... Je ne sais pas si le député a salué, malgré tout, tout à l'heure, les mesures budgétaires qu'on a faites au niveau du logement; je serais contente de l'entendre saluer les investissements de plus d'un demi-milliard dans le logement, dont particulièrement le logement social.
Donc, en même temps de ces rencontres, de ces visites locales que j'ai faites, les rencontres régionales et les rencontres nationales, il y a aussi des travaux de recherche qui se poursuivent et qui sont là: le groupe de recherche de Bouchard-Raynault qui continue, je pourrais dire, à travailler avec des travaux relatifs à la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, donc l'intégration des rapports, des avis, des résultats de la consultation, le rapport des chantiers. C'est le mandat du groupe de recherche.
Alors, si je regarde l'ensemble de la démarche de la stratégie nationale de lutte à la pauvreté...
Le Président (M. Beaumier): Non. Je me dois d'intervenir, madame...
Mme Léger: Ça va vite. Ha, ha, ha!
Le Président (M. Beaumier): Nous aurons encore du temps. Mais j'inviterais tout le monde à être le plus près possible du cinq minutes.
M. le député de Masson.
M. Gilles Labbé
M. Labbé: Alors, merci, M. le Président. Mme la ministre, je vous donnerais bien de mon temps, c'est tellement intéressant, ce que vous nous dites, et tellement concret surtout, c'est ça qui est important. Alors, justement, on parlait de... Pendant qu'il y a une démarche gouvernementale, il est important de mentionner, M. le Président, qu'il y a quand même des choses concrètes qui se font, actuellement, pour la lutte à la pauvreté comme telle, et je veux en mentionner, si vous me permettez, quelques-unes.
Alors, dans un premier temps, il y a des choses qui ont été annoncées qui sont en train de se faire, actuellement, dans le dernier budget 2001, et on parle à ce moment-ci, entre autres... Je vais en énumérer seulement quelques-unes, j'en ai au moins pour trois pages. Alors donc, ça démontre clairement notre intérêt à lutter, justement, contre la pauvreté et pour les gens aussi qui ont des difficultés, actuellement, là, quand on parle de récession, etc.
D'abord, j'annonce que... En fait, il y a des choses qui ont été annoncées dans le dernier budget 2001: la baisse du seuil d'imposition faisant en sorte que plus de 160 000 personnes à faibles revenus ne payaient plus d'impôts; une augmentation, entre autres, de 2,5 % des prestations d'aide sociale, soit 238 000 ménages aptes à l'emploi, qui va nous coûter, en fait, 36 millions, comme tel.
On parle de la création d'une réserve de 34,8 millions consacrée à des mesures de sécurité alimentaire, M. le Président. Des mesures destinées, aussi, à donner un nouvel élan à l'économie sociale, comme le financement permanent des services à domicile. On sait qui ça touche, les services à domicile; c'est des personnes qui sont dans le besoin, des personnes âgées, entre autres. Alors, c'est 96 millions qui ont été accordés à ce volet-là. Le soutien, aussi, au Réseau d'investissement social du Québec et au fonds pour l'investissement local, un autre 4,1 millions. La consolidation des services de prévention destinés à l'enfance, à la jeunesse et à soutenir les familles pauvres. Ça, c'est clair, c'est pour eux autres: 45 millions ont été dévolus à ce poste-là.
Des investissements supplémentaires, entre autres, dans le programme Agir tôt pour réussir. Ça, c'est un programme qu'on connaît très bien dans nos régions et qui apporte des fruits à une vitesse énorme, et c'est excessivement important. C'est 141 millions qui ont été dévolus à ce programme-là.
Des fonds, aussi, pour soutenir les initiatives locales dans le milieu rural fragilisé; alors, on parle de 33 millions, sans parler de tout ce qui a été annoncé dans le budget 2002. Entre autres, pour janvier prochain, l'indexation de 2,7 %, encore, pour les quelque 360 000 ménages prestataires de l'aide sociale. On parle d'une majoration de 100 $ par adulte et de 200 $ par couple du crédit d'impôt pour la TVQ, dont les bénéficiaires sont principalement les ménages à faibles revenus. On parle aussi de devancement d'investissements de près de 500 millions ? ce n'est pas que des petits sous, ça, M. le Président, c'est quand même beaucoup d'argent ? 500 millions de dollars additionnels en habitation, pour la construction de 13 000 nouveaux logements à loyer modique et la rénovation de plus de 27 000 logements occupés principalement par les ménages à faibles revenus.
Je pourrais continuer, M. le Président, pendant presque une heure sur toutes les bonnes choses qui ont été faites dans le dernier budget, mais je vais plutôt, à ce moment-ci, vous donner quelques commentaires qui sont parus, justement, et des réactions dans les différents médias sur le dernier budget. Ce n'est pas moi qui les ai écrits; donc, c'est des journalistes qui nous mentionnent un petit peu comment ils ont réagi, aussi les organismes qui sont directement concernés par la pauvreté. On parlait, tout à l'heure, du Collectif sur l'élimination de la pauvreté. Alors, dans Le Soleil de vendredi le 2 novembre ? c'est quand même récent ? leur réaction était la suivante: «Les mesures visant à stimuler la consommation sont dirigées vers des gens placés au bas de l'échelle, a signalé Mme Vivian Labrie, porte-parole de la coalition. De plus, Mme Labrie s'est réjouie de l'investissement massif réalisé dans le développement de logement social, de l'indexation des prestations d'aide sociale et du bon de 100 $ à la consommation remis aux personnes recevant un crédit d'impôt.»n(11 h 30)n Alors, c'est Mme Labrie qui nous parlait, mais, sans plus tarder, je vais vous parler aussi du FRAPRU, un organisme qui fait un excellent travail au niveau des personnes qui sont en difficulté financière. Alors, la réaction entre autres du FRAPRU: «Pour sa part, le Front d'action populaire en réaménagement urbain se réjouit, lui aussi, des investissements dans le logement social.» Je pourrais citer aussi, encore une fois, le FRAPRU, mais cette fois-ci dans Le Journal de Montréal du 2 novembre: «Au cours d'un entretien, François Saillant du FRAPRU s'est dit soulagé des annonces de Mme Marois: "Le gouvernement fait preuve d'ouverture, on avance, on ne recule pas. C'est encourageant, déclare M. Saillant. Nous sommes particulièrement contents de la reconduction et de l'amélioration des programmes actuels de logement coopératif sans but lucratif", a-t-il ajouté.» Vous remarquerez aussi un autre titre, comme tel, qui a été dans le journal Le Devoir, cette fois-ci, du 2 novembre, où on parle de priorité donnée aux démunis. Je pourrais continuer comme ça pendant beaucoup de temps, M. le Président. Et c'est drôle, quand je regarde par contre les réactions des journalistes, les mêmes, sur les politiques du gouvernement libéral, je vais vous en citer quelques-unes. On parle du mois de mai 2001, c'est quand même... ça ne fait pas si longtemps. C'est Michel Auger, entre autres, dans Le Journal de Montréal: «Quand le Parti libéral du Québec annonce un virage à gauche, c'est parce que des élections s'en viennent. C'est un signe aussi indubitable que le retour des outardes qui annonce le printemps.» M. Auger aussi de citer: «Il est difficile de ne pas être un peu sceptique et de ne pas y voir purement et simplement de l'électoralisme.» Quand je regarde aussi d'autres éléments qui sont sortis à peu près dans les mêmes périodes, c'est M. Michel Venne, cette fois-ci, dans Le Devoir. Dans son éditorial, M. Venne parle du dernier congrès du Parti libéral du Québec. Il écrit, et je cite: «Jean Charest s'était opposé à la maigre hausse de 0,10 $ du salaire minimum annoncée l'an dernier. Le Québec ne pouvait pas se permettre, disait-il, une telle augmentation si l'Ontario n'y consentait pas aussi.» Alors, on voit l'ouverture d'esprit par rapport à cette mention. J'ajoute aussi...
Le Président (M. Beaumier): Alors, merci, M. le député de Masson.
M. Labbé: Je m'excuse. Merci. J'en aurais beaucoup.
Le Président (M. Beaumier): Oui, on le voit. Merci beaucoup. M. le député de Laurier-Dorion.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Oui. Merci, M. le Président. Je reviens à la ministre, M. le Président, et je traiterai tantôt des commentaires du député. Mais la ministre, en parlant encore une fois d'Emploi-Québec, ne répond pas à la question que je lui pose. Je vais revenir une dernière fois. Moi, je veux comprendre. Et je comprends bien que, tu sais, on peut collaborer avec tous les ministères, et tous les ministères doivent collaborer ensemble, et que la solidarité ministérielle fait en sorte qu'on est tous solidaires des décisions qu'on prend ensemble, etc., mais la question fondamentale, c'est: Comment est-ce que c'est plus efficace dans un domaine qui est la pierre angulaire de la lutte à la pauvreté? Je ne vous parle pas de santé ou d'éducation, qui ont certainement une influence sur la lutte à la pauvreté, mais ils ne sont pas la pierre angulaire de la lutte à la pauvreté. Et c'est le ministre et la ministre qui ont toujours dit que c'est l'emploi qui est la pierre angulaire. Et ça, c'est évident: créer de l'emploi, ça va absorber la pauvreté. Et, corollaire donc, pouvoir insérer les personnes à l'emploi qui sont présentement sur l'aide sociale diminue la pauvreté, ça va de soi.
Alors, je veux comprendre comment est-ce que ça va être plus efficace d'abandonner, comme vous l'avez fait, la responsabilité et l'autorité sur les instruments que constituent les mesures actives d'emploi qui se trouvent à l'intérieur des budgets d'Emploi-Québec au profit d'un autre ministère, l'Éducation, par rapport à la situation actuelle. Pourquoi maintenant il va y avoir trois ministres qui vont avoir à jouer avec les instruments d'insertion à l'emploi: le ministre du Travail et de la Solidarité sociale, la ministre déléguée à la pauvreté et à la Lutte à l'exclusion et le ministre de l'Éducation, tandis qu'avant il y en avait un qui pouvait recevoir les commentaires de ses collègues, mais qui pouvait décider en fonction des objectifs clairs de lutte à la pauvreté en allant chercher dans le coffre à outils que constituent les mesures actives? Alors, la ministre esquive bien rapidement la question en le remettant à la collaboration entre les ministères, la transversalité, l'intégralité, l'horizontalité, la verticalité d'une stratégie de lutte à la pauvreté. J'en suis, mais l'emploi, élément central, avant on avait un contrôle direct sur les instruments qui jouaient sur l'emploi et l'insertion en emploi. Là, on ne l'a plus, ce n'est pas logique. Alors, je laisse la ministre avec cette réflexion-là. Si elle veut me corriger, elle aura l'occasion tantôt de me corriger.
Quant à... Un autre élément que j'aimerais soumettre à son attention: la politique. Elle nous annonce ça pour le début de 2002. Le budget qu'on vient d'avoir est un budget de 18 mois. Donc, début de 2002, c'est, disons, quatre mois, hein? Donnons janvier et février, ça nous amène au mois de mars. D'ici quatre mois, à peu près, on devrait avoir une stratégie de lutte à la pauvreté selon les dires des ministres. Le budget, lui, va aller jusqu'à 18 mois. Il n'y a pas d'autre budget avant 18 mois. Dans le budget, il n'y a pas de réserve pour la lutte à la pauvreté. Alors, dans quatre mois, on va avoir une politique, puis, avant qu'on puisse savoir quels autres argents le gouvernement va décider d'investir au niveau de la lutte à la pauvreté, il va y avoir 14 mois de quoi? De discours? Pas d'argent, à moins que je me trompe. À moins que la ministre peut me dire aujourd'hui: Non, non, dans le budget, il y a effectivement autre chose qui va nous permettre d'aller chercher de l'argent pour opérationnaliser notre stratégie. S'il n'y en a pas, ça veut dire que tout ce qu'il va y avoir dans la stratégie, ce sont des choses qui existent déjà, qu'on va peut-être rebrasser autrement, qu'on va peut-être «repackager», pour prendre un mot français, autrement et qu'on va mettre sur... devant les yeux, ici, à l'Assemblée nationale, pour dire que c'est ça, notre lutte à la pauvreté.
Mais, en fait, ça viendrait confirmer ce que les gens disent sur le terrain, qu'il n'y a rien de nouveau dans ce que le gouvernement propose de faire, et c'est pour ça que j'avais commencé en disant que je déplore le fait que le gouvernement a choisi... a raté une occasion de faire quelque chose de nouveau et de différent, de véritablement mobiliser l'ensemble de la société et les forces vives du milieu, entre autres en prenant au vol le travail déjà fait par le Collectif au niveau de la mobilisation au lieu de décrédibiliser cette démarche, comme vous tentez de le faire en associant des coûts à des mesures spécifiques dont personne, pour l'instant, a réclamé directement, autre que le Collectif dans sa loi. On réclame le débat, la discussion, et là vous avez un processus de consultation qui vient tranquillement de tomber, morceau par morceau. Quand le Front commun des personnes assistées sociales décrit, comme ils l'ont fait, le processus: Vous êtes en panne... Qu'allez-vous faire, Mme la ministre, pour l'argent et pour redonner de la crédibilité au processus?
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la ministre.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Alors, M. le Président, quand j'entends le député de Laurier-Dorion parler de crédibilité du processus, il faudrait peut-être qu'il participe, qu'il vienne aux rencontres régionales, d'une part, et qu'il vienne à celui de Montréal. Je l'invite. Il est un député de Montréal, je pense qu'il est intéressé par la lutte à la pauvreté à Montréal. On va y voir un portrait de la situation de pauvreté à Montréal, on va y voir les priorités du CRDIM qui a fait un excellent travail, à ce moment-ci, pour se dégager des orientations particulières sur la lutte contre la pauvreté. C'est intéressant de voir les régions du Québec. Dans toutes les régions, en tout cas celles que j'ai visitées à date et j'ai rencontré... qui m'a permis de faire plusieurs échanges, de voir à quel point les gens, c'est une de leurs priorités, dans les régions du Québec, la lutte à la pauvreté. Alors, ce serait intéressant de voir le député de Laurier-Dorion venir entendre ces gens-là.
Quand il me dit qu'on met de côté le débat et les discussions, il faudrait qu'il vienne voir, dans les rencontres des CRD, les discussions qu'il y a, qui sont des discussions très régionalisées, intéressantes, avec vraiment des actions concrètes qui se font sur le terrain. Il y a une mobilisation qui est là, qui est agréable et qui est, je pourrais dire, intéressante et inspirante. Alors, j'invite le député de Laurier-Dorion à être encore mieux inspiré et à venir dans les régions du Québec pour venir rencontrer les gens qui ont des choses à dire sur la pauvreté et qui la vivent, la pauvreté.
J'aimerais revenir sur notre document d'orientation, Ne laisser personne de côté! ? et, c'est de ça dont il s'agit présentement, ne laisser personne de côté ? il fait appel à une mobilisation. Et, quand on parle de validation du document, parce qu'on a mis dans ce document-là... On n'a pas inventé la roue, là, mais on a mis dans ce document-là, je pense, un document de travail qui permet aux citoyens et citoyennes du Québec et, par l'intermédiaire des CRD, de pouvoir valider les chantiers et les orientations que le gouvernement met de l'avant pour une stratégie nationale de lutte à la pauvreté. On a une volonté d'inclusion et de permettre la contribution de toutes et tous au mieux-être des Québécois et Québécoises, et ainsi d'un meilleur partage de la richesse collective qui constitue vraiment notre trame de fond, qui inspire nos perspectives que nous avons à l'intérieur de ça.
Je vais vous parler des sept grandes orientations qui sont proposées. D'abord, créer la richesse, la partager et développer l'emploi constituent les premiers outils pour lutter contre la pauvreté. C'est la première des grandes orientations. Donc, ce qui veut dire... améliorer la compétitivité de notre économie et créer les conditions du développement de l'emploi pour toutes et tous dans toutes les régions favoriseront un Québec plus solidaire.
Deuxième orientation: miser sur la valorisation du travail ainsi que sur le potentiel des personnes et des collectivités. Donc, c'est plusieurs réformes entreprises par le gouvernement: viser à rendre le travail plus payant et à favoriser le développement local. Une stratégie de lutte contre la pauvreté doit s'inscrire dans ce fil conducteur.
n(11 h 40)n Troisième grande orientation: favoriser une prise en charge locale et mobiliser la société civile autour de la lutte contre la pauvreté. C'est d'abord au plan local que peuvent s'élaborer les solutions les plus prometteuses, et l'État doit créer un environnement favorable à une mobilisation en faveur des plus pauvres.
La quatrième orientation: agir sur toutes les dimensions de la pauvreté de manière intersectorielle. Je pense que c'est quelque chose qui intéresse le député de Laurier-Dorion, «intersectorielle». La pauvreté, ce n'est pas qu'une question financière, c'est une privation de choix et d'occasions. Il faut donc agir sur plusieurs leviers: accès à l'emploi, l'éducation, le logement, la réduction des inégalités de santé et de bien-être, amélioration du filet de sécurité sociale, etc.
Cinquième orientation: prévenir la pauvreté par une intervention précoce auprès des enfants. C'est la stratégie la plus susceptible d'avoir des effets plus structurants à long terme. Les jeunes sont l'avenir du Québec, il faut renouveler le défi de l'égalité des chances.
Sixième orientation: améliorer et adapter le filet de sécurité sociale. Une priorité sera accordée à l'aide aux familles et aux personnes les plus démunies, à la protection des travailleurs précaires et au soutien des travailleurs à faibles revenus.
Septième orientation: cibler et adapter les actions aux individus, aux groupes et aux territoires les plus pauvres. Le gouvernement a mis en place des chantiers visant à adapter, à harmoniser et intégrer les approches visant les groupes davantage touchés par la pauvreté.
Alors, c'est vers une approche globale que nous croyons lutter contre la pauvreté et l'exclusion: une approche intersectorielle intégrant développement social et le développement économique ? tout un défi ? une approche décentralisée et appuyant le développement local et une approche associant les individus et les groupes concernés.
Voilà les sept grandes orientations du document Ne laisser personne de côté!.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. M. le député de Masson.
M. Gilles Labbé
M. Labbé: Alors, merci, M. le Président. Justement, suite à ce que la ministre vient de mentionner, on va donner un exemple d'un projet, entre autres, un parmi tant d'autres, un des excellents projets qui a été mis sur pied suite au Sommet du Québec et de la jeunesse. On dit souvent qu'il n'y a pas grand-chose qui se fait, mais, au contraire, il y a beaucoup de choses qui se font suite au Sommet du Québec et de la jeunesse, et ça s'appelle le projet de Solidarité jeunesse.
Alors, c'est avec joie que je vous en parle. Je vais vous dire un petit peu ce qui se passe et où on en est rendu. Alors, c'est un projet qui vise, entre autres, à venir en aide aux jeunes âgés de moins de 21 ans admissibles à l'assistance emploi, afin d'éviter qu'ils aient recours à l'aide sociale de façon passive. Et je peux vous en parler en connaissance de cause, M. le Président, puisque j'ai eu le plaisir de travailler pendant 29 ans à la sécurité du revenu. Alors, je peux vous dire un petit peu comment un jeune qui arrive à l'aide sociale pour la première fois, qui a 18 ans et qui pensait que la vie était facile, qui a étudié pendant un bon bout de temps et qui s'aperçoit qu'à un moment donné c'est son premier échec, puisqu'il n'a pas d'emploi, il vient de perdre son emploi ou il n'en trouve pas pour toutes sortes de raisons et qui se retrouve à l'aide sociale... Je peux vous dire qu'il est excessivement démoli, alors que c'est là où on en a le plus... on a des projets plein la tête, on veut faire des choses, on veut avancer, on veut être capable de devenir autonome le plus vite possible, on veut pouvoir quitter les parents, la maison familiale, pour avoir notre propre vie et là on se retrouve du jour au lendemain à l'aide sociale; ce n'est pas évident.
Et, avec ce programme-là, justement, au lieu de donner juste un chèque et de dire: Bien, tu vas rester sur l'aide sociale... Et surtout que ça été prouvé qu'un jeune qui est sur l'aide sociale, comme tel, s'il dépasse plus de six mois, ça va être beaucoup plus difficile de l'aider à sortir de l'aide sociale. Donc, c'est un programme qui a été conçu pour les jeunes, justement pour leur permettre, oui, de recevoir leur chèque d'aide sociale, mais d'abord de les parrainer, de s'en occuper. Alors, c'est un programme qui rejoindra, à terme, plus de 10 000 jeunes demandeurs de la sécurité du revenu au cours de l'année 2000-2001 et 2001-2002. Alors, la nature du projet comme tel, je l'ai mentionné un petit peu, c'est de mettre tout en oeuvre pour que les jeunes puissent trouver rapidement une solution de rechange à l'assistance emploi. Alors, le chèque, oui, mais pas juste le chèque, il y a tout un suivi qui va se faire.
Alors, le projet Solidarité jeunesse donne l'opportunité aux jeunes les plus démunis du Québec de recevoir un accompagnement intensif et un suivi durant une période de 12 mois afin de les aider à se définir un projet de vie et de cheminer vers l'emploi. Pour cela, le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale s'est associé à des organismes qualifiés dans l'aide à la jeunesse, principalement des carrefours jeunesse-emploi et d'autres organismes jeunesse du milieu. On l'a eu chez nous, et je peux vous dire que ça fonctionne très bien. Ils se sentent très bien au niveau des carrefours jeunesse-emploi, ils sentent que c'est un accueil qui est adapté, justement, à leurs besoins et à leur âge. Surtout, ce qui est important, ils se sentent heureux et ils se sentent accueillis dans ces centres-là.
L'an dernier, plus de 139 ententes tripartites ont été ainsi signées entre la sécurité du revenu, Emploi-Québec et les organismes jeunesse, couvrant ainsi la majorité des régions du Québec. Plus de 1 877 partenaires, M. le Président, à travers le Québec ont signé aussi un engagement de solidarité, signifiant ainsi clairement leur appui et leur engagement dans ce projet. J'ai eu l'occasion, comme député, de signer cet engagement-là, et, j'étais présent, il y avait plusieurs organismes; on parle ici d'entreprises, des municipalités, les maires, des conseils de ville, des chambres de commerce, des carrefours jeunesse-emploi, Emploi-Québec. Alors, tous les organismes du milieu se sont mobilisés justement pour aider ces jeunes-là, et ensemble on a signé justement ce protocole, cet engagement pour aider les jeunes à s'en sortir. Et ça, c'est excessivement important de voir toute la mobilisation qui s'est faite au niveau des différentes régions du Québec.
Alors, évidemment, ce projet repose sur le pari que, si nous évitons qu'un jeune ait recours de façon passive à la sécurité du revenu ? donc, juste avoir son chèque et sans faire de démarches supplémentaires ? alors, lorsqu'il entre dans la vie d'adulte, nous augmentons considérablement les chances qu'il s'intègre socialement et professionnellement dans son milieu. Donc, M. le Président, oui, il se fait des choses au gouvernement du Québec, oui, notre gouvernement est un gouvernement social-démocrate, oui, la lutte à la pauvreté, pour nous, est une de nos priorités. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le député de Masson. M. le député de Laurier-Dorion.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, M. le Président. Merci aussi au député qui me donne un peu plus de temps pour compléter un peu mes réponses.
M. le Président, la ministre... Je vais revenir sur un point, sur la réserve budgétaire, le budget de 18 mois, la politique dans quatre mois. Encore une fois, la ministre n'a pas répondu à cette question que je lui posais: Où est-ce qu'on va trouver l'argent pour les mesures de lutte à la pauvreté qui seraient contenues dans une stratégie de lutte à la pauvreté qui sera dévoilée au mois de mars? On doit donc conclure que ce n'est qu'à l'intérieur de tous les programmes qui existent déjà. Alors, de deux choses l'une: ou on va les garder puis on va leur donner de nouvelles étiquettes et les mettre sous la responsabilité du ministre ou on va en abolir certains et les changer autrement... et les faire autrement.
Par exemple, on pourrait envisager d'abolir le programme Action emploi, que vous voulez mettre en place à partir du mois de janvier. Je vous encourage à le faire, c'est un programme qui n'a pas de sens. Ça n'a pas de sens de créer deux catégories de travailleurs, de donner un incitatif à quelqu'un d'aller travailler en voyant son salaire diminuer chaque année. Vous êtes sur la mauvaise piste. Attendez la campagne électorale, vous allez trouver une bonne piste qu'on va vous proposer, mais ce n'est pas celle-là. Ce n'est pas celle-là, c'est une mauvaise piste. Première suggestion concrète: Abolissez ce programme, vous n'allez pas trouver de gens qui vont demander le maintien. C'est une erreur, vous êtes en train de faire une erreur, comme l'erreur des crédits d'impôt aux entreprises qui ne créent pas d'emplois.
Il y avait là de l'argent à mettre dans la mission sociale. Il y aurait eu là de l'argent à mettre dans votre stratégie de lutte à la pauvreté. Il y aurait eu là de l'argent à créer une véritable réserve. Je vous répète, il n'y a pas de réserve à l'heure actuelle, dans le budget qui a été déposé, pour faire face aux programmes que vous voudriez mettre en place pour une lutte à la pauvreté par le biais d'une stratégie globale, transversale, intégrale, horizontale, verticale, pour reprendre un peu vos mots. Il n'y a pas d'argent. Et, vous ne m'avez pas corrigé, donc je dois conclure que j'ai raison de dire que la réserve n'est plus là. La réserve n'étant pas là, on peut se poser la question: Pendant les 14 mois de différence entre le dépôt de la stratégie et le dépôt du prochain budget, on va faire quoi? Donc, ça, ça reste sans réponse.
Le processus de validation... J'aimerais ça vous donner l'opportunité de vous reprendre et de crédibiliser le processus. Ce n'est jamais trop tard pour bien faire. Là, vous allez avoir des rapports qui vont vous être acheminés par chacun des CRD sur le processus de validation. Vous allez finir vos rencontres nationales avec de moins en moins de participants, d'ailleurs, issus du milieu de défense des droits sociaux, de défense des droits des assistés sociaux, etc. On voit partout les coupures de presse qui commencent à sortir, tu sais, qui disent: La lutte à la pauvreté nous laisse sur notre faim; Pauvreté: La stratégie du gouvernement ne passe pas; Pas de vrai débat sur la pauvreté. La lettre que je vous citais tantôt, qui sort du processus le Front commun des personnes assistées sociales et qui dit: On ne vient pas à votre consultation ou validation.
Moi, je vous suggère ceci, Mme la ministre: prenez les rapports que chacun des CRD va vous faire, rendez-les publics et acceptez de tenir une commission parlementaire non partisane en incluant aussi les personnes de différents milieux, une commission parlementaire spéciale. Parce que, vous dites que je devrais venir écouter les gens dans les régions... Moi, je vous suggère plus que ça, Mme la ministre: que le Parlement aille écouter les gens dans les régions. Il n'y a rien qui nous empêche d'aller nous promener dans les régions, on l'a déjà fait à travers les commissions parlementaires. Moi, je ne veux pas accepter une invitation de votre part que d'autres refusent. Des gens qui sont plus concernés refusent.
Ce que je trouve d'ailleurs très critiquable au niveau du processus que vous avez mis sur pied, vous avez choisi les CRD. Ils sont financés à 100 % par le gouvernement, hein? Vous avez choisi le véhicule des CRD, financés complètement par le gouvernement, donc non sans intérêt à être en bons termes, disons. Et, je vous suggère ? vous avez refusé un processus non partisan, indépendant qu'est la commission parlementaire non partisane des parlementaires ? qu'on aille écouter le monde. Alors, au lieu de me dire de venir chez vous, moi, je vous suggère qu'on aille, nous, chez eux, ensemble, parlementaires, en région, avec la participation des gens. Ce n'est jamais trop tard pour bien faire. Alors, prenez les rapports qu'ils vont vous faire, les CRD, c'est un élément de plus, tant mieux, et soumettez-les à une consultation par le biais d'une commission parlementaire spéciale, tel que je le proposais il y a quelques mois. On pourrait s'entendre sur les détails.
n(11 h 50)n Finalement...
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le député.
M. Sirros: Il me semble que j'ai encore une minute, M. le Président, parce que le député précédent n'a pas pris son temps.
Le Président (M. Beaumier): Non. Non, le temps n'est pas échangeable ni d'un côté à l'autre... Même pour le même comté.
M. Sirros: Moi, ce que j'ai ici, ils me disent, M. le Président...
Le Président (M. Beaumier): C'est des temps de cinq minutes.
M. Sirros: ...que si un des... d'un groupe désigné n'utilise pas totalement à l'intérieur des cinq minutes qui lui sont allouées... cela ne réduit pas pour autant la durée de l'interpellation.
Le Président (M. Beaumier): Non. Là, on est... Le temps de parole...
M. Sirros: Article 132.
Le Président (M. Beaumier): Le temps de parole: «Les membres de la commission ont ensuite un temps de parole de cinq minutes par intervention», ce que je vous ai accordé.
M. Sirros: Et qu'est-ce qui arrive...
Le Président (M. Beaumier): Bien, c'est-à-dire qu'on sera moins en retard, qu'on sera...
M. Sirros: En tout cas, étant donné que le temps est très limité, je ne ferai pas de chicane de procédure...
Le Président (M. Beaumier): Ce n'est pas une chicane.
M. Sirros: ...mais on va se reprendre à un autre moment, parce que ce n'est pas les informations que j'ai.
Le Président (M. Beaumier): Ce n'est pas une chicane, c'est le règlement qui est comme ça. Alors, on arrive à la fin de la séance. Alors, j'accorderai un dernier temps de parole de 10 minutes à la ministre, suivi d'un temps de parole équivalent au député de Laurier-Dorion. Mme la ministre.
Conclusion
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Alors, M. le Président, quand j'entends le député de Laurier-Dorion parler que les CRD, c'est futile, puis je ne sais pas pourquoi que ça existe, les CRD... Encore une fois, des organisations et des structures qui font du travail extraordinaire... Et il vient d'être dénaturé et dénoncé par le Parti libéral, comme ils ont fait d'ailleurs avec les garderies à 5 $, qu'ils ont dénoncées, puis, après, ils en voulaient, ils en voulaient, des places. Alors, on est habitué à ce renversement-là d'opinion et d'idée du Parti libéral.
On parle du programme Action emploi, je veux préciser, au programme Action emploi... Je veux rappeler que les mesures de supplémentation du revenu sont considérées par l'OCDE comme les mesures les plus prometteuses en matière de lutte contre la pauvreté parce qu'elles agissent à la fois pour augmenter le taux d'emploi, et augmenter les revenus des chômeurs de longue durée, et contribuer ainsi à permettre à ces personnes d'échapper à la pauvreté.
Mais, si vous voulez bien, comme je suis en conclusion présentement, alors vous allez me permettre de vous dire comment s'inscrit la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et comment le gouvernement entend favoriser une meilleure harmonisation et intégration des interventions gouvernementales, afin d'agir de manière cohérente sur toutes les dimensions de la pauvreté. Et, dans ce sens, un comité interministériel chapeaute l'ensemble de la démarche, entre autres. De plus, comme le gouvernement ne peut agir seul, il faut créer des conditions d'une mobilisation de tous les acteurs de la société en faveur des plus pauvres. Et, pour s'attaquer à la pauvreté, le gouvernement ne peut agir seul; il doit s'appuyer sur les efforts déployés dans les régions, compter sur la collaboration des entreprises et des syndicats et établir une collaboration étroite avec les organismes communautaires et la société civile.
Depuis le lancement des orientations et des perspectives d'action, le gouvernement s'est donné une diversité de moyens pour valider, auprès des différents acteurs, les perspectives proposées: des visites locales de projets novateurs en matière de lutte contre la pauvreté; des rencontres sur les enjeux régionaux et les moyens à mettre en oeuvre pour soutenir l'action des régions ? on y croit de ce côté-ci, M. le Président, aux régions du Québec ? rencontres thématiques avec les organismes nationaux; rencontres avec le Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté.
J'aimerais rappeler, à cet effet, que le Collectif a fait un important travail de sensibilisation, de mobilisation et de réflexion et consent un effort digne de mention afin d'améliorer le sort des plus démunis de notre société. De nombreuses signatures recueillies en faveur de leur projet de loi témoignent sans contredit de l'intérêt d'une lutte sans merci contre la pauvreté, et c'est cette lutte que le gouvernement intensifie par sa démarche. Le gouvernement entend jouer un rôle de leadership tout en s'inspirant des travaux et du Forum de développement social et des travaux du Collectif. Par ailleurs, nous pouvons indiquer que le gouvernement, le premier ministre, mon collègue Jean Rochon, on a tenu plusieurs rencontres déjà avec le Collectif et que ces rencontres se poursuivent. Je veux quand même mentionner, M. le Président, parce que le Parti libéral disait le contraire récemment, que nous sommes ouverts à un processus législatif, nous sommes ouverts à une loi pour l'élimination de la pauvreté.
Dans le cadre des propositions qui seront mises de l'avant, il faudra prévoir des moyens de poursuivre ce dialogue social. Déjà, dans le document Ne laisser personne de côté!, le gouvernement a annoncé son intention d'associer les personnes en situation de pauvreté et les organismes qui les représentent à l'élaboration, et à la mise en oeuvre, et à l'évaluation des actions qui seront proposées. De même, il a annoncé son intention de mettre en place des moyens de suivre les progrès réalisés et d'associer la population à cette reddition de comptes. Le gouvernement a indiqué clairement que toutes les options étaient ouvertes quant aux véhicules à retenir pour marquer la priorité accordée à la lutte contre la pauvreté, y compris le recours éventuel à des instruments de nature législative et quant aux structures à mettre en place pour associer les groupes intéressés.
Cette démarche nous permettra d'identifier quelles actions pourront être entreprises et d'évaluer les outils nécessaires et le niveau de ressources requis afin d'intensifier la lutte contre la pauvreté. Le gouvernement du Québec s'est engagé à assurer la sécurité économique et sociale de toutes les Québécoises et de tous les Québécois. Beaucoup d'efforts sont déjà consentis par le gouvernement du Québec pour attaquer les causes de la pauvreté.
J'aimerais rappeler des actions du gouvernement: celui d'un Fonds de lutte contre la pauvreté par l'insertion au travail, cette reconduction-là pour trois ans, 2000-2003; l'entrée en vigueur de Solidarité jeunesse, l'an dernier; l'entrée en vigueur de Destination emploi, en mai dernier; l'abolition graduelle de la réduction pour le partage du logement au 1er juin. Le partage du logement, on se le rappelle, c'est le gouvernement du Parti libéral qui a fait cette pénalité-là du logement. Nous, comme gouvernement du Parti québécois, nous avons annoncé que nous l'abolirions, et déjà 50 $ du 100 $ a été aboli. Et on se dit que, dans notre enjeu électoral, comme mandat, d'ici la fin de notre mandat, le prochain 50 $ aussi sera aboli.
J'aimerais rappeler les mesures ? parce qu'on me dit qu'il n'y a pas de mesures, nécessairement, qui sont prises ? budgétaires par rapport à la lutte contre la pauvreté. J'aimerais rappeler, au printemps dernier, le 300 millions d'argent neuf; celui de 102 millions de la hausse des prestations d'aide sociale; celui de 86 millions pour le programme Action emploi; celui de 100 millions d'initiatives de solidarité sociale, donc particulièrement du logement social.
J'aimerais rappeler que dernièrement, dans le budget de ma collègue, il y a eu 500 millions de mis, 471 millions mis pour le logement, particulièrement pour aider à rénover ou créer des logements, dans quatre aspects particulièrement: logements abordables; rénovation, RénoVillage; revitalisation des vieux quartiers; et, particulièrement, le programme d'AccèsLogis qui est reconduit pour les cinq prochaines années.
Il y a eu 100 millions aussi pour le nouvel élan à l'économie sociale. Nous sommes un gouvernement qui croit à l'économie sociale. Je pense que l'économie sociale est une façon de faire pour aider les gens dans les situations plus démunies, pour la réinsertion au travail. C'est souvent un pont entre, je pourrais dire, l'aide sociale particulièrement... et, dans les situations plus démunies, pour aller sur le marché de l'emploi. Donc, ce pont-là, c'est souvent par l'économie sociale où on peut accompagner nos gens qui sont dans des situations de pauvreté, qu'on peut les accompagner à travers leurs habitudes de vie, leurs habitudes de comportement et les soutenir pour réintégrer le marché de l'emploi. Et c'est par l'économie sociale qui est un nouvel élan que je pourrais dire qu'on donne, avec ce 100 millions là, pour l'économie sociale.
45 millions pour les services à la jeunesse et les familles démunies, et ça, c'est en collaboration avec le réseau de la santé et services sociaux.
141 millions au décrochage scolaire dans les milieux défavorisés. En faisant les rencontres régionales, nous découvrons, tout le long de ces rencontres-là, que c'est un enjeu absolument important, l'abandon scolaire, le décrochage scolaire, le taux de diplomation chez nos jeunes qui, souvent, arrêtent en secondaire III, en secondaire IV et qui ne finissent pas leur secondaire V. Et il y a des mesures absolument intéressantes dans les régions du Québec pour faire cette lutte au décrochage scolaire. Alors, j'invite le député de Laurier-Dorion à vraiment repenser à ces visites régionales, parce qu'il y a des choses extraordinaires et inspirantes qui se font dans les régions du Québec et qui font vraiment de la lutte à la pauvreté, pas des discours, mais des actions très concrètes. Le décrochage scolaire... Vous le savez, on dit souvent que, pour sortir les gens de la pauvreté, c'est souvent par l'éducation qui est, je pourrais dire, le cheval de bataille pour vraiment lutter contre la pauvreté. Alors, j'invite le député de Laurier-Dorion à peut-être faire ces visites-là avec moi.
n(12 heures)n 33 millions, soutenir les initiatives locales dans les milieux ruraux fragilisés; 150 millions de baisses d'impôts qu'on a eues au printemps dernier touchaient particulièrement 160 000 personnes de faibles revenus; 800 millions aux régions-ressources; on doit quand même mentionner 2 milliards pour les ressources additionnelles en santé et services sociaux; 3,5 milliards de réduction d'impôts; 728 millions additionnels en éducation. Et je pourrais vous en énumérer plein qui continueraient à parler de mesures budgétaires.
Quand le député de Laurier-Dorion me dit: Qu'est-ce qu'on fait, concrètement? Quelles sont les mesures concrètes? J'en ai encore d'autres, et celles-là, c'est les dernières. Quand on parle du «dollar vital, c'est un dollar local», ça me fait plaisir de le dire, parce que le dernier budget a été particulier par rapport à l'aide aux familles plus démunies, et je vais les redire ici: 75 millions pour les personnes à faibles revenus en indexation des prestations d'aide sociale, au 1er janvier 2002. Ceci représente 29 millions pour les personnes ayant des contraintes sévères à l'emploi et 46 millions pour les personnes aptes au travail. Cette indexation pour les personnes contraintes sévères à l'emploi et les personnes aptes au travail, on a eu, le 1er juillet dernier, si vous vous souvenez bien, déjà, une réduction, et là, encore une fois...
Maintenant, une majoration du crédit d'impôt pour la TVQ de 100 $ pour un adulte et de 200 $ pour un couple. Ça, c'est de l'argent liquide que les familles et que les gens qui ont un crédit d'impôt pour la TVQ auront directement en décembre, d'ici quelques semaines. Ceci représente pour le gouvernement 250 millions pour les personnes à revenus modestes, et ça touche 2,5 millions de personnes.
L'investissement dans le logement social, que je vous disais tout à l'heure, qui est près de 500 millions pour construire ou rénover 40 000 logements, dont 13 000 nouveaux logements au cours des cinq prochaines années et la rénovation de 27 000 logements pour des ménages à revenus modestes.
Je ne veux quand même pas oublier, M. le Président, les 50 millions pour la construction des centres à la petite enfance, une politique qui est vraiment demandée, à travers le Québec.
Alors, dans la lutte contre la pauvreté et l'exclusion, M. le Président, c'est une priorité du gouvernement, priorité du premier ministre Bernard Landry, une priorité de tous mes collègues présentement, et nous allons faire de cette lutte contre la pauvreté... nous allons intensifier notre lutte, et j'appelle les gens, les citoyens, les citoyennes du Québec, à poser un geste de cette solidarité-là que nous avons au Québec, qui est exemplaire et qui va nous amener à trouver des nouvelles façons de faire pour lutter contre la pauvreté.
Le Président (M. Beaumier): Merci beaucoup, Mme la ministre. Alors, également, le député de Laurier-Dorion pourra prendre 10 minutes.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, M. le Président. M. le Président, nous avons eu l'opportunité, pendant deux heures, d'échanger sur un sujet qui est très fondamental pour l'avenir de la société et touche de façon très directe et très réelle des milliers de personnes dans leur vie quotidienne et dans leur individualité.
Nous n'avons pas eu de réponse sur plusieurs sujets qu'on a abordés: pas de réponse sur la question de la réserve, par exemple, budgétaire qui n'est plus là; par rapport aux argents qui seront mis dans la lutte à la pauvreté au niveau de la stratégie; pas de réponse au niveau du transfert, du pourquoi du transfert, d'Emploi-Québec, et pas de réponse non plus sur les suites à donner à la procédure de validation.
La ministre me réinvite à venir à une commission, en tournée, dans les CRD. Moi, je lui suggère que ce serait plus profitable, pour la société et pour ceux qui croient vraiment qu'il faut faire une lutte à la pauvreté de façon réelle, à ce que, nous, comme parlementaires, on aille dans les régions à travers une commission parlementaire.
Cela étant dit, M. le Président, ça m'amène à se questionner sur comment on envisage le phénomène de la pauvreté. Parce que, à mon point de vue, il y a deux façons de l'aborder. Il y en a une qui est de l'accepter comme une fatalité de la société et de se dire: Bah! la pauvreté, ça a toujours été là, elle va toujours continuer à être là. Donc, il faut qu'on essaie de faire des choses pour améliorer le sort des plus pauvres, chose que tous les gouvernements ont toujours faite, de toute façon. Il n'y a rien de nouveau là-dedans, hein? Il n'y a pas un gouvernement qui ne s'est pas ? que ce soit de l'Union nationale, que ce soit du Parti libéral, que ce soit du Parti québécois ? qui n'ont pas, par toutes sortes de programmes, effectivement, voulu améliorer le sort de leurs concitoyens, de nos concitoyennes, augmenter le niveau de vie de tout le monde et, ce faisant, lutter contre la pauvreté.
Ce que le gouvernement fait actuellement est exactement la même chose, et c'est pour ça que j'avais commencé en disant qu'il a raté une occasion en or de véritablement aborder la pauvreté non pas comme une fatalité de société, mais de mettre en opération le discours qu'on profère tous quand on dit que la pauvreté, c'est un drame humain inacceptable, au niveau d'une société industrielle avancée et riche comme la nôtre.
On n'est plus dans les années cinquante, même pas dans les années soixante ou soixante-dix; on est dans le XXIe siècle. Ça serait l'opportunité de véritablement décider que le Québec, au Canada, en Amérique du Nord est capable effectivement de faire autre chose que continuer comme auparavant par rapport à la lutte à la pauvreté, de se donner une perspective de 10 à 15 ans d'élimination de la pauvreté, et c'est faisable.
Je vous rappelle que, au niveau, par exemple, des personnes âgées, hein, on a de beaucoup amélioré le sort des personnes âgées, à tel point que la plupart des gens ne disent pas que ce n'est pas difficile, des fois, de vivre avec un certain nombre de revenus minimaux, mais on a ni plus ni moins éradiqué la pauvreté fondamentale, telle qu'on la connaissait il y a 20 ans, au niveau des personnes âgées. Donc, si c'est faisable par des programmes focussés, structurés et ciblés, c'est peut-être faisable d'élargir cette démarche plus large.
Et c'est pour ça que je disais: C'est dommage que le gouvernement a choisi de mettre de côté toute la mobilisation qui a été faite sur le terrain, d'aborder même des idées nouvelles comme le revenu minimum garanti. La ministre nous dit que ça coûtera 30 milliards de dollars. Peut-être. Mais combien on dépense actuellement dans toutes sortes de programmes? Il faudrait mettre ça à côté, pour voir quels sont les coûts réels. Parce que l'aide sociale, ça nous coûte quelque chose; les programmes de supplément de revenu nous coûtent quelque chose; les garderies, ça nous coûte quelque chose. Est-ce que c'est la façon la plus efficace? Un véritable débat aurait été bienvenu, transparent et réellement démocratique, pas truqué, comme vous le faites. Et c'est effectivement truqué, ce que vous faites, et je trouve ça dommage que vous avez raté cette opportunité-là, Mme la ministre.
M. le Président, gouverner, je le répète, c'est une question de choix, et vous avez fait des choix que je ne comprends absolument pas. Je reviens sur la question des subventions aux entreprises pour transférer des emplois du nord de la ville au sud de la ville, de subventionner des emplois qui déménagent d'une entreprise à une autre, par le biais d'un achat de l'entreprise de l'autre. Vous les subventionnez, vous dépensez de l'argent du public, des taxes, quand on sait qu'on est déjà les plus taxés. Au moins, si on avait ? au moins, si on avait ? pour notre argent: que ce soit au niveau des services publics, que ce soit au niveau d'un véritable, tu sais, objectif social.
Le député qui vous accompagne disait que... tu sais, il nous citait des articles de journaux qui se questionnaient sur la crédibilité du Parti libéral dans ce virage à gauche, comme il appelait. J'en conviens, qu'il y a des gens qui se questionnent sur cette question-là, M. le Président. Mais je vous rappelle que, dans notre constitution de parti, l'élément fondamental à l'article 1 de notre programme, c'est effectivement cette question d'équité sociale, d'égalité des chances et de lutte à la pauvreté. Et je vous rappelle qu'effectivement c'est le Parti libéral qui a permis au Québec de sortir de la grande noirceur, de mettre sur pied toutes les réformes modernes qui permettent aujourd'hui au Québec d'aborder le XXIe siècle avec confiance, mais que nous arrivons effectivement au point où il faut faire un autre saut. Il faut effectivement requestionner un certain nombre de choses qui ont toujours été faites, entre autres ce genre de subvention aux entreprises pour la création d'emplois, soi-disant, entre guillemets, parce que ce n'est pas l'État qui crée les emplois. Ça, on est arrivés là, nous autres, et on fait un pas de plus, puis on se dit qu'effectivement les marges de manoeuvre qu'on peut dégager en réorientant les investissements publics, on doit le faire en fonction de la mission sociale.
La mission économique du gouvernement doit être au service de la mission sociale. La création de la richesse, elle doit être là pour la mission sociale; tout le monde doit profiter. Mais vous prenez des moyens qui nous placent derrière les moyennes canadiennes au niveau de création d'emplois, bien derrière la moyenne canadienne. Mme la ministre, vous semblez surprise. Je vais vous apprendre qu'en l'an 2000 vous avez créé... il y a eu au Québec 8 % de tous les emplois créés et que, depuis 1996, ce n'est que 19 % de tous les emplois au Canada qui ont été créés au Québec. Nous sommes en déficit d'emplois par rapport au reste du pays. On est les plus taxés, on dépense le moins au niveau de la santé, on est les plus pauvres au niveau de la pauvreté infantile, juste avant Terre-Neuve. Puis on a glissé depuis que vous êtes là, en 1994; entre 1994 et 1998, on a glissé. Avant, il y avait cinq autres provinces qui étaient pires que nous; là, il y en a juste une. Et c'est la même histoire partout.
n(12 h 10)n Alors là on se dit: Il faut donc lutter contre la pauvreté. Nous voulons et nous avons voulu effectivement le faire comme ensemble, le faire comme société, non pas de façon à changer quatre trente-sous pour 1 $ et de continuer à faire différemment ce qui a toujours été fait. Vous allez changer la couleur de la brochure qui va annoncer une stratégie globale, où vous allez ramasser tous les éléments de programme qui étaient là, les mettre ensemble dans un document avec une belle écriture, une belle page couverture. Peut-être une campagne publicitaire pour aller avec ça, hein? 5 millions dépensés, et pouf! comme ça, juste pour dire qu'on est fiers.
Là, il y a des choix à faire, et c'est ça que je trouve déplorable, que le gouvernement a fait les mauvais choix. Le gouvernement ne peut pas parler de sa volonté de retoucher sa mission sociale, retrouver sa social-démocratie, comme le disait le premier ministre, qui est le même premier ministre qui décide de traiter en sociale-démocrate CGI. Bien, franchement, CGI, c'est une entreprise qui a quand même quelques millions de profits par année, et leur donner en plus 200 millions de dollars sur 10 ans, 20 millions de dollars par année pour 10 ans, promesse faite, signée. Belle social-démocratie! Les personnes qu'on assiste socialement sont les entreprises, plutôt que les personnes qui sont dans le besoin. Alors, c'est une question de choix.
Et je vais finir, M. le Président, en réitérant ma demande à la ministre d'accepter de retourner sur le terrain par le biais d'une commission parlementaire pour qu'on ait un véritable débat sur la question et ne pas esquiver ce débat. Les attaques qu'elle fait sur les mesures proposées par le Collectif, qu'elle les fasse, j'en conviens. Peut-être même on trouvera des endroits où on sera d'accord sur la capacité ou non de se payer des programmes. Personne n'est venu ici pour délabrer les finances publiques. Au contraire, on est venus ici de part et d'autre, j'imagine, parce qu'on voulait faire des choses pour améliorer le sort de la société.
Là où on diffère, c'est sur le choix de nos moyens. Vous, vous êtes venus dans un parti qui a un projet qui n'est pas fondamentalement celui de la lutte à la pauvreté. Nous, on véhicule, à partir de notre article 1, effectivement, l'objectif social de lutte à la pauvreté. Il faudrait qu'on ait l'opportunité bientôt, aux élections, de mettre ça entre les mains du peuple.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Merci, Mme la ministre, mes collègues aussi, nos collègues de Vanier et de Masson.
Alors, nous ajournons nos travaux sine die, puisque nous avons accompli notre mandat. Merci.
(Fin de la séance à 12 h 13)