(Neuf heures quarante et une minutes)
Le Président (M. Beaumier): Alors, la commission des affaires sociales est réunie afin de procéder à une consultation générale et de tenir des audiences publiques sur le projet de loi n° 36, Loi sur la santé publique.
Alors, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce) va être remplacé par M. Fournier (Châteauguay).
Le Président (M. Beaumier): Merci. Alors, comme ordre du jour, nous aurons des remarques préliminaires, 30 minutes pour le groupe ministériel et 30 minutes pour l'opposition officielle; ensuite, nous recevrons l'Association des CLSC et CHSLD du Québec; et, enfin, à 11 h 30, le Collège des médecins du Québec. Alors, ça serait notre menu pour cet avant-midi.
Remarques préliminaires
Alors, on procéderait aux remarques préliminaires. Alors, M. le ministre.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Merci, M. le Président. Bonjour, bonne journée et bonne session de consultation, consultation générale et auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 36, la Loi sur la santé publique.
M'accompagneront pendant toutes ces consultations le sous-ministre adjoint à la santé publique qui est avec nous ce matin, le Dr Richard Massé, M. Michel Lavallée qui est au cabinet du ministre, ainsi que l'équipe de santé publique, Mme Filiatrault, et Me... j'hésite à prononcer le nom encore parce que je veux pas me tromper...
Une voix: Denise Mc Maniman.
M. Trudel: ...Mc Maniman, qui a travaillé beaucoup sur ce projet de loi, alors je voulais pas me tromper sur la prononciation, n'est-ce pas. Nous allons donc avoir l'occasion, M. le Président, d'entendre ceux et celles qui sont reliés d'une façon ou l'autre à la santé publique.
Le gouvernement a donc pris la décision d'introduire ce projet de loi à la fin de la dernière session, après plusieurs années de travail à la santé publique, au ministère de la Santé et des Services sociaux, dans les instances régionales et les directions de santé publique à travers le Québec, pour qu'il y ait un renouvellement et une vision et des moyens ajustés pour intervenir en matière de santé publique au Québec.
M. le Président, si vous le permettez, avec votre autorisation, je ferai les remarques préliminaires en deux temps, en quelque sorte, c'est-à-dire le cadre dans lequel s'inscrit le nouveau projet de loi sur la santé publique, et je demanderai à M. le sous-ministre, le Dr Massé, de compléter la présentation des principaux aspects fondamentaux en matière de santé publique à cet égard-là.
Le Président (M. Beaumier): À ce moment-là, avec l'accord des membres de la commission, bien sûr.
M. Fournier: C'est pas une habitude qu'on veut généraliser, là, mais je comprends que c'est un cas exceptionnel.
M. Trudel: Oui, tout à fait.
Le Président (M. Beaumier): Très bien. Alors, M. le ministre.
M. Trudel: Merci. Donc, dans le propre libellé du projet de loi, M. le Président, je dirais que presque la totalité de la signification s'y retrouve.
La dernière version de notre Loi sur la protection de la santé publique, c'est l972, on est 29 ans plus tard. Il y a beaucoup d'eau qui a coulé sous les ponts et un très grand nombre d'éléments qui ont changé dans le contexte de vie, dans le cadre de vie des Québécois et des Québécoises sur l'ensemble du territoire québécois. Nous avons donc... Avec cette expérience de 29 ans d'administration, d'encadrement, de politiques, de travail, d'interventions avec, au départ ? on s'en souviendra très certainement ? les départements de santé communautaire, nous sommes passés, au tournant des années quatre-vingt-dix, dans la foulée du rapport de la commission Rochon et avec la loi sur la réorganisation des services de santé et des services sociaux au Québec, à des directions de santé publique et une organisation de santé publique au niveau national qui chapeautaient toute cette section de la vie collective au Québec. Nous avons donc pendant cette période-là expérimenté aussi différentes formes d'intervention pour en arriver toujours à un résultat, globalement, de diminuer les risques, diminuer les risques. Faire de la prévention, en conséquence diminuer les risques.
Et, tout au cours de ce travail avec nos directions de santé publique, avec la direction nationale de la santé publique du ministère, eh bien, on s'est forcément aperçu que nous devions moderniser nos instruments d'intervention pour passer de la protection à véritablement être proactifs au niveau de la santé publique. C'est pourquoi je dis: Le libellé du titre du projet de loi qui est soumis à l'Assemblée nationale décrit l'essence en quelque sorte de notre projet de loi. Passer d'une loi uniquement axée sur la protection pour passer à une loi proactive, une loi qui va faire en sorte qu'on va travailler davantage sur les déterminants, qu'est-ce qui cause, qu'est-ce qui cause les problèmes à la santé, parce que la santé publique, c'est un être de raison, ça. La véritable situation, c'est la santé des hommes et des femmes qui vivent dans différents territoires et qui sont exposés à un certain nombre de conditions, à un certain nombre d'éléments qui peuvent avoir incidence sur leur état de santé. Et la santé publique, dans cette foulée-là, aura dorénavant ? aurait dorénavant ? de nouveaux instruments pour passer moins en mode de protection, en mode défensif, plus en mode offensif, à travailler sur les déterminants, à travailler davantage sur la prévention. D'autant plus que, dans l'évolution de notre travail, de nos interventions d'État en santé publique est apparu aussi l'Institut national de santé publique. Nous nous sommes donné un instrument, un instrument et de réflexion et d'action pour nous accompagner dans ces actions-là: l'Institut national de santé publique qui a été créé il y a quelques années et qui constitue un élément supplémentaire.
Nous avons tout réalisé cela collectivement, que ce soit en 1990 avec l'ex-ministre de la Santé et des Services sociaux et député de Charlesbourg, M. Côté, ou encore avec M. Rochon au tournant des années 1997-1998. Nous avons doté le Québec d'instruments nouveaux, mais nous n'avons jamais ajusté le cadre législatif pour passer du mode protection au mode prévention. De davantage mettre l'accent sur les déterminants de la santé et qu'on soit davantage axés sur la proaction que plutôt la réaction et la défensive, c'est ça, l'essence du projet de loi qui nous est soumis. C'est une modernisation de la Loi de la protection qui va devenir la Loi de la santé publique.
Au-delà de ces éléments qui visent à changer l'angle, il nous faut par ailleurs, M. le Président, prendre tout le temps nécessaire pour analyser chacun des éléments de cette loi parce que c'est une réforme, c'est une réorganisation qui est assez fondamentale. On le voit bien dans l'angle de travail que nous allons dorénavant adopté et qui va nous donner un élan XXIe siècle en termes de santé publique au Québec et en Amérique du Nord. C'est extrêmement important. C'est pour ça qu'il faudra prendre tout le temps nécessaire pour que la mécanique qui risque de durer longtemps, si on se fie à l'expérience d'une trentaine d'années en arrière de nous autres, il faudra donc être particulièrement attentifs. Mais particulièrement attentifs ne veut pas dire attentistes pour ne pas bouger ou ne rien faire, parce que ce serait un peu trop facile de prendre la position de se mettre en mode d'attente, parce que le mieux étant l'ennemi du bien, le mieux étant l'ennemi du bien, eh bien, nous n'arriverons pas à moderniser notre loi et à doter le Québec, les autorités professionnelles et au plan de l'encadrement également en santé publique, des instruments nécessaires pour en arriver à être proactifs, à travailler sur les déterminants et les causes plutôt qu'à être tout simplement des joueurs défensifs qui, après le diagnostic... Le mal étant fait, on peut moins mal ou ne pas suffisamment intervenir efficacement sur des déterminants de la santé des Québécois et des Québécoises.
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(9 h 50)
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Voilà, M. le Président, c'est ça, l'essence du projet de loi n° 36 qui nous est présenté, dans son contenu même. Des équipes médicales, des équipes professionnelles, bien sûr, au niveau du droit également, ont travaillé depuis des années sur ce projet de loi. Nous sommes arrivés maintenant au moment de la discussion publique de ce projet de loi et, avec votre permission donc, je demanderais au sous-ministre à la santé, au sous-ministre adjoint à la santé publique, Dr Richard Massé, de nous donner les principaux éléments du changement d'angle, du changement de perspective que devrait opérer ce projet de loi sur la santé publique au Québec.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le ministre. Alors, Dr Massé.
Exposé du sous-ministre adjoint au ministère
de la Santé et des Services sociaux
M. Richard Massé
M. Massé (Richard): Merci, M. le Président. D'abord, il faut vous dire que, en santé publique, il y a plusieurs assises légales avec lesquelles on doit travailler; donc, il y a plusieurs législations qui encadrent les activités de santé publique. Il y en a une particulière qui est la Loi santé et services sociaux qui définit les responsabilités des directeurs de santé publique et qui ont été revues dans le cadre de la gouverne au printemps dernier. C'est particulièrement important parce qu'on voulait pas créer un système de santé publique parallèle au système de santé mais bien intégré à l'ensemble des activités du système de santé.
La loi actuelle, comme vous l'a mentionné M. Trudel, date de presque 30 ans. Elle devait être revue de fond en comble compte tenu des éléments notamment en surveillance et en promotion de la santé qui n'étaient pas présents dans l'ancienne loi ou présents de façon partielle. La loi se veut habilitante par deux ensembles de mesures législatives notamment soutenir l'exercice de ce qu'on appelle les fonctions essentielles de la santé publique. L'OMS, le Center for Disease Control, aux États-Unis, et l'ensemble de la communauté de santé publique au niveau international reconnaissent quatre fonctions essentielles. Il y en a qui en mettent plus, il y en a qui en ont jusqu'à huit avec des fonctions secondaires. On s'est tenu pour les quatre qui font vraiment consensus: la surveillance de l'état de santé, la promotion de la santé, la prévention et la protection. Et, essentiellement, la loi est basée sur ces fonctions essentielles là qui sont largement reconnues, et le programme de santé publique dont on va parler dans la loi est aussi basé sur ces fonctions essentielles.
La loi veut jeter des passerelles avec l'ensemble des autres secteurs qui ont un impact sur la santé. Les gens reconnaissent bien que, pour améliorer la santé de la population, c'est pas seulement les gens qui travaillent dans le domaine de la santé et encore moins seulement les gens qui travaillent dans le domaine de la santé publique qui peuvent influencer, améliorer la santé. Ça prend des gens qui vont avoir un rôle d'initiateur, un rôle de supporteur, mais c'est l'ensemble des activités de la société qui contribue à améliorer l'état de santé. Donc, c'est important d'avoir ces passerelles-là dans le réseau de santé, mais aussi à l'extérieur des réseaux de santé.
Deuxième grand volet de la loi, c'est pour favoriser l'harmonisation des pratiques de santé publique. Celles-ci ont pas été balisées dans le passé. Il y a plusieurs acteurs qui contribuaient de façon très active à la santé publique pour laquelle la reconnaissance était pas toujours évidente, et c'était nécessaire de préciser les rôles et responsabilités de ces différentes personnes-là. Donc, on va le voir dans les présentations qui vont nous être faites: la loi vise à harmoniser ces pratiques-là.
Le premier élément structurant de la loi, c'est le programme national de santé publique. Cet élément-là existe déjà dans la Loi santé et services sociaux mais a pas été mis en opération comme tel, puisqu'on a élaboré ? ce qui était tout à fait normal ? la Politique de santé et de bien-être du Québec en 1992, les priorités nationales de santé publique en 1997, et maintenant je pense qu'on est prêts pour arriver à une étape ultérieure dans laquelle il va y avoir un programme national qui va être basé sur les fonctions essentielles, dans lequel on va préciser des paramètres de mise en oeuvre pour que les gens sachent exactement ce qui doit être fait, tant au niveau central qu'au niveau régional qu'au niveau local ? donc, encore une fois, l'esprit est de préciser les rôles et responsabilités de chacun, à chacun de ces paliers-là ? et dans lequel on va introduire aussi la notion de rapport sur l'état de santé de la population, tant au niveau régional qu'au niveau national. Et ça, c'est une plus-value qu'on n'a pas encore au Québec, et on pense qu'il va permettre aux gens de savoir qu'est-ce que c'est, les endroits où est-ce qu'ils doivent focusser, prioriser, pour améliorer la santé des gens.
Dans cette loi, on introduit la notion d'avoir un comité d'éthique. L'examen d'éthique paraît essentiel à l'ensemble de la société. C'est une valeur nouvelle qui s'est développée au cours des dernières années. On pense que c'est incontournable de l'introduire. Donc, on propose d'avoir un comité d'éthique qui va avoir pour fonction de donner avis au ministre, à sa demande, notamment sur les plans de surveillance nationaux et régionaux, d'une part, d'autre part, sur les projets d'intervention en promotion, prévention ou protection dépendant des besoins et de la demande spécifique et sur toutes autres questions qui vont être soulevées par l'application de la loi ou du programme de santé publique.
Le deuxième volet après le programme de santé publique, c'est la notion de surveillance épidémiologique. Donc, c'est une fonction qui est attribuée au ministre et aux directeurs de santé publique non pas dans une fin qu'ils le fassent tout seuls ? c'est impossible de faire la notion de surveillance tout seul ? mais bien pour s'assurer qu'il y a des personnes qui vont être responsables, qui vont être imputables, que ça se fasse et puis qui puissent assurer, pour ramasser cet ensemble d'informations-là et en préserver la confidentialité.
Donc, il y a un accès aux données qui va être requis par différentes sources complémentaires d'information, notamment les systèmes de collecte systématique, des banques de données, d'une part et, d'autre part, certaines données qui sont détenues par des organismes pour lesquels il y a un impact direct sur la santé publique. On peut penser à des ministères ou des organismes dont les données qui touchent des choses connexes, par exemple l'alimentation ou la santé animale, ont un impact sur la santé des humains, entre lesquels c'est nécessaire d'être capable de faire des interfaces.
Troisièmement, des enquêtes sociosanitaires comme l'enquête Santé Québec par exemple, qui doivent être maintenues pour qu'on puisse avoir l'information sur la santé des gens, permettre, encore une fois, d'ajuster les programmes, de viser les priorités. Les enquêtes puis les systèmes de surveillance en santé sont l'équivalent du diagnostic populationnel, ce qu'on pourrait faire, le diagnostic médical que les gens font auprès des individus. Si on n'a pas un bon diagnostic, on peut pas appliquer un bon traitement.
Un autre des éléments qui est introduit dans la loi ? j'y vais presque chapitre par chapitre à ce moment-ci ? c'est la notion de promotion de la santé et de la prévention. Ce champ-là est campé à travers les stratégies de promotion de la santé de l'OMS, stratégies qui ont été reconnues déjà par la charte d'Ottawa en promotion de la santé. Ces cinq stratégies-là sont retrouvées dans la loi et adaptées à la réalité québécoise.
Ce qu'on veut aussi, c'est être capable d'obtenir un soutien pour la recherche de solutions aux problèmes évitables dans l'état de santé des gens. Donc, si on a des problèmes de mortalité et de morbidité évitables pour lesquels il y a des solutions, on veut que les acteurs puissent être capables de s'asseoir ensemble, faire un effort de concertation pour trouver des solutions et, au besoin même, on va permettre que les directeurs de santé publique puissent demander à ces personnes-là de s'asseoir avec eux pour trouver des solutions, puisque ces solutions sont intersectorielles. On sait que l'amélioration de la santé passe par des activités intersectorielles, comme je l'ai dit dans l'introduction.
On parle aussi, en promotion de la santé, de la fluoration de l'eau potable, fluoration qui était déjà une mesure contenue dans la loi de 1972. Cependant, il y avait une obligation de fluorer, et on sait que c'est pas l'optique par laquelle on veut fonctionner. On veut inciter la fluoration, mais on veut pas forcer la fluoration et, donc, on va retirer l'élément obligatoire pour laisser cependant la capacité de supporter financièrement le développement de la fluoration au Québec qui en a grandement besoin.
Au niveau de la promotion de la santé toujours, le soutien au sein du gouvernement puis auprès des ministres à la promotion et l'adoption de politiques aptes à favoriser une amélioration de l'état de santé. Ce qu'on veut, c'est que le ministre de la Santé puisse être vraiment le conseil du gouvernement en termes de santé publique et qu'il puisse donner des avis sur les lois et règlements qui ont un impact sur la santé, avis qui devraient être préparés par chacun des ministères qui développent ces lois et règlements-là, mais pour lesquels le ministère de la Santé, étant consulté, va pouvoir éclairer le ministre. Et le ministre va donner l'avis au gouvernement. Donc, on pense que ça, c'est très important, et il y a plusieurs autres endroits dans le monde qui commencent à considérer cette mesure-là comme étant une de celles par lesquelles la notion d'améliorer la santé doit passer.
Le ministre, donc, doit être consulté sur les lois et règlements
qui vont avoir un impact sur la santé. Ça, ça va se faire avec la capacité qui va se développer tant dans les autres ministères qu'au ministère de la Santé.
En protection de la santé de la population, il y a plusieurs conditions nécessaires et il y a certaines capacités pour être capable d'agir efficacement, notamment au niveau de l'accès à l'information, la notion de signalement. Donc, autoriser que les personnes qui ont de l'information sur un risque de transmission de maladie infectieuse ou d'autres risques de nature environnementale ou toxique puissent informer les directeurs de santé publique de ces risques-là pour qu'ils puissent prendre action et, au besoin, faire une enquête ou intervenir.
La révision de la liste des maladies à déclaration obligatoire existe déjà actuellement, mais les procédures de réglementation seraient modifiées, les critères seraient introduits dans des réglementations gouvernementales, et la liste comme telle serait donnée dans une réglementation ministérielle pour permettre de l'ajuster plus... de façon plus efficace qu'actuellement.
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(10 heures)
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On propose aussi l'introduction d'un registre central de vaccination un peu partout en Amérique du Nord. Maintenant, les gens disent: Si on veut être capables de suivre qu'est-ce qui se passe en vaccination, les gens ne se souvenant pas, souvent, des vaccinations qu'ils ont eues ou que leurs enfants ont eues... La capacité d'avoir un registre informatisé pour pouvoir retourner cette information-là aux vaccinateurs et aux personnes concernées. On va pouvoir aussi, si jamais il y a des réactions secondaires associées à la vaccination, informer les gens qui ont reçu ces vaccins-là pour qu'on puisse au besoin les voir ou faire un suivi de ces personnes-là. La capacité aussi d'élaborer d'autres registres pour des questions de protection de la santé publique ou à des fins cliniques déterminées. Quand c'est pour la protection de la santé publique, ça pourrait se faire sans nécessairement l'autorisation des personnes: on pense à des registres sur le sang, pour lesquels on a absolument besoin d'avoir l'information des donneurs, des releveurs pour faire le suivi, mais, si c'était pas pour des fins de protection, à ce moment-là il faudrait toujours avoir le consentement de la personne avec un droit de retrait.
Différents pouvoirs pour pouvoir intervenir. Le premier, c'est un pouvoir d'enquête qui existe déjà dans les législations actuelles, qui va permettre d'avoir accès à de l'information nominale ? ce qui est pas le cas en surveillance de l'état de santé ? qui va pouvoir permettre aussi de prendre des actions immédiates ou à moyen terme pour pouvoir contrôler la situation. Le deuxième, c'est un pouvoir d'ordonnance si jamais il y avait des interventions nécessaires ? puis ça pourrait aller jusqu'à l'isolement de la personne, ça pourrait aller jusqu'à son hospitalisation ? donc, s'il était nécessaire de prendre action rapidement et que, à ce moment-là, on devait avoir soit une action prolongée ou s'il y avait des gens qui ne voulaient pas accepter ces mesures-là, on pourrait aller voir un juge pour demander une ordonnance de la cour et pouvoir utiliser les pouvoirs de retirer les personnes de cette situation de risque là. Le troisième, c'est un pouvoir de mobilisation: plutôt que de se retrouver, dans les situations d'urgence, à intervenir sans que les responsabilités soient établies, la capacité, un, d'établir d'avance les règles en cas d'urgence, deux, de pouvoir mobiliser les gens dans ces situations-là pour pouvoir intervenir immédiatement et non pas passer les premières heures, voire les premiers jours, à s'organiser plutôt qu'à intervenir. Donc, capacité de pouvoir agir rapidement et efficacement. Le quatrième, le pouvoir d'urgence, qui existe déjà dans la législation actuelle ? qui a été mis à jour ? qui permet au gouvernement du Québec de pouvoir intervenir s'il y a des situations ou des menaces à la santé de façon beaucoup plus globale, évidemment en corrélation avec la législation qui est en train d'être discutée concernant la sécurité publique. Donc, il y a une interface entre les deux qui a déjà été bien discutée avec les personnes qui élaborent l'autre législation.
Au niveau de la vaccination, on a parlé tantôt d'élaboration d'un registre central de vaccination. Ça va introduire aussi la notion de déclaration de manifestation clinique inhabituelle; si jamais les gens ont des réactions particulières associées au vaccin, qu'on puisse les connaître, les suivre et au besoin effectuer les mesures nécessaires pour le retrait, et ça introduit aussi une autre question qui s'appelle l'indemnisation des victimes à la vaccination. On est la seule province qui a un programme d'indemnisation des victimes causées par la vaccination. On pense que c'est une très bonne mesure et on la reconduit dans la législation actuelle.
On a parlé tantôt des situations de menace réelle ou appréhendée où est-ce que les gens pouvaient faire le signalement. Ça, ça se fait sans données nominales, donc c'est pas quelque chose dans lequel les gens vont donner le nom de la personne. Ça serait un devoir de signaler pour les ministères, les organismes ou les médecins; cependant, une autorisation à signaler pour les personnes qui sont en autorité dans un établissement public ? on pourrait penser à des écoles ou des garderies, par exemple, ou certaines entreprises ? ça pourrait même aller dans d'autres milieux où est-ce qu'on pense qu'il y a un risque de transmission d'infection. Ça exclut les maladies transmises sexuellement parce qu'on pense que c'est pas la façon avec laquelle on doit lutter contre les maladies transmises sexuellement.
La notion d'intoxication et d'infection à une maladie à déclaration obligatoire. On a parlé tantôt des règlements qui étaient établis par règlement ministériel. On va définir le type d'intoxication qui va être inscrit dans cette liste-là, les paramètres de déclaration puis qui doit déclarer; ça va être fait par les laboratoires, ça va être fait par les médecins, puis, dans la liste, ça va être précisé qui doit faire quoi et comment est-ce que ça doit être fait.
Traitements et mesures de prophylaxie obligatoires. Il y a actuellement dans la loi la notion de traitement obligatoire, par exemple, pour les maladies transmises sexuellement ? le traitement obligatoire pour les maladies vénériennes, en fait. Les maladies vénériennes ne seront plus à traitement obligatoire, puis on enlève le concept de «maladies vénériennes» pour parler de «maladies transmises sexuellement». Cependant, il va rester des maladies pour lesquelles il peut y avoir un traitement obligatoire. On en identifie une qui est la tuberculose. C'est des mesures d'exception, mais on pense que, dans certains cas où est-ce qu'on n'est pas capable d'avoir un traitement efficace ou une prophylaxie efficace, ça peut être nécessaire de prendre des mesures pour isoler, voire s'assurer que le traitement est bien fait auprès de la personne, pour la protection de sa famille et de la communauté, puis on peut avoir une ordonnance de la cour si jamais les gens sont pas d'accord pour faire cette chose-là.
Enquête épidémiologique, toujours située par rapport aux maladies à déclaration obligatoire, par rapport aux maladies à traitement obligatoire ou la prophylaxie, et ça introduit aussi la notion de «signalement» pour lequel on peut utiliser le pouvoir d'enquête seulement quand la santé de populations est menacée et pouvant l'être. Dans la loi, on précise qu'est-ce que c'est qu'une menace à la santé ? c'est dans les articles d'introduction de la loi ? et puis on parle de risques physiques, chimiques et biologiques. On l'a encadré de façon assez restreinte, puisqu'une menace à la santé donne la capacité d'avoir de l'information personnelle et d'utiliser les pouvoirs dont on a parlé tantôt. Donc, c'est vraiment balisé de façon étroite, ce qui n'était pas le cas nécessairement antérieurement, dans l'ancienne loi.
Dans le pouvoir d'enquête, on va partager cette responsabilité-là auprès des directeurs de santé publique et auprès des partenaires. Quand les partenaires ont des responsabilités d'enquête ? on peut penser à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, on peut penser à la responsabilité de certains intervenants dans les milieux de santé ? la responsabilité du directeur s'arrête là où la responsabilité des autres commence, pour éviter le chevauchement de ces responsabilités-là. Cependant, dans certaines situations où il y aurait un risque qui continuerait, où les mesures ne sont pas prises à ce moment-là, sur autorisation du ministre il pourrait y avoir une enquête qui pourrait continuer.
Peut-être qu'à ce moment-ci, je pourrais parler des... juste les suivis de la loi actuelle. La loi... Oui? La loi est scindée, parce que, actuellement, la loi est comme une loi omnibus dans laquelle on parlait autant des laboratoires, de la disposition des cadavres, que des choses qui concernaient la santé publique. Donc, la Loi sur la protection de la santé publique va être renommée et va contenir ces éléments-là qui ne sont pas, à strictement parler, de la santé publique, pour se concentrer uniquement sur la santé publique.
Dans les autres choses qu'on doit noter, c'est la notion de registre. On en a parlé tantôt, ces registres-là vont se faire avec l'autorisation de la Commission d'accès à l'information qui a été consultée tout au long du processus et pour lesquels on est obligé d'ajuster, et il y a vraiment une entente mutuelle qui s'est faite sur la façon de à la fois de protéger la santé publique et protéger l'information confidentielle aux citoyens, qui est un équilibre nécessaire en santé publique.
J'arrêterais là, M. le Président, à moins qu'il y ait d'autres choses.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Dr Massé. M. le ministre.
M. Trudel: Vous voyez, M. le Président, comment se matérialise cette nouvelle orientation bien davantage axée sur, au départ, prévenir et travailler en amont plutôt qu'être dans une situation d'intervenir au fait ou après le fait, après que les événements se soient produits. Et pour ce faire, il faut donc que les intervenants professionnels aient l'instrumentation pour le faire parce que ? on le notait puis il faut le rappeler encore ? par ailleurs, en matière d'information, en matière d'information santé, nos lois, nos encadrements législatifs ont aussi évolués considérablement. Alors, il faut que tout cela constitue, en matière de santé publique, un nouveau corpus d'ajustement par rapport aux balises, aux balises de société que nous nous sommes données en termes d'information; deuxièmement, que nous puissions constituer, au niveau de l'autorité professionnelle largement médicale et des autres professionnels qui interviennent dans tel domaine, les capacités d'intervenir avant que le mal soit fait, avant que cela n'apparaisse dans la société. Et nous aurons beaucoup moins, en pareille matière, en termes de réparation, de faire en sorte que nous retrouvions à corriger, nous aurons moins d'actions correctrices parce que nous aurons été davantage dans la prévention en santé publique. Mais faire cela, juste comme souhait, ça fonctionne pas. Il faut que nous ayons, au niveau des professionnels de la santé, les instruments nécessaires.
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(10 h 10)
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Deuxièmement, également, les situations en amont, sur lesquelles on veut travailler, elles ne sont pas uniformes à travers le Québec. Les éléments de prévention, en termes de santé, sur lesquels nous pouvons agir, ces éléments ne sont pas les mêmes à Gaspé qu'ils le sont à Hull, qu'ils le sont à Montréal, dans un milieu ultra-urbanisé, ou à Québec, ou en Chaudière-Appalaches, ou en Abitibi-Témiscamingue, puisque c'est la nature même de la composition et du territoire et des activités qu'on y retrouve qui peuvent constituer des éléments de risques pour lesquels il nous faut prendre des actions spécifiques. Voilà pourquoi, pour toutes les couches d'âge, pour les éléments différenciés dans chacune des régions, il faut avoir une orientation nationale, un programme national au niveau de la prévention et des interventions et le plan d'action avec des assises au niveau législatif qui soit extrêmement clair et la capacité, pour ces professionnels et les autres intervenants du système de la santé et des services sociaux, d'avoir cette capacité d'intervention, parce que ? je pense, M. le Président, qu'il faut le rappeler ? la santé et les services sociaux, c'est la plus grande entreprise sociale du Québec, c'est 250 000 employés, c'est 2 000 points de services à travers tout le Québec. Si on attend continuellement d'être en réparation, en correction suite et avec l'apparition des événements, on va jamais rattraper, on va jamais rattraper ce qui est la finalité du système: prévenir, soigner lorsqu'il y a lieu et guérir. Mais il faut commencer par prévenir. Prévenir, soigner et guérir. Le projet de loi n° 36, M. le Président, c'est prévenir.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Châteauguay.
Remarques préliminaires (suite)
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Oui. Merci, M. le Président. Vous m'excuserez, tantôt ? bonjour ? vous m'excuserez auprès du groupe qui devait commencer à 10 h 30; je vais tenter de compléter mes remarques dans le délai mais, si jamais le groupe n'est pas là, vous m'excuserez auprès d'eux.
Peut-être des remarques préliminaires à mes remarques préliminaires, M. le Président. C'est un retour après l'été, alors, évidemment, j'avais pas l'intention d'empêcher quoi que ce soit et d'user d'une attitude plus agressive, mais je voudrais quand même préciser que c'est à titre exceptionnel que le ministre a pu laisser le Dr Massé faire ses remarques. Je le dis parce que, ce que le Dr Massé nous a dit, le ministre aurait pu nous le dire. C'est pas parce que je veux forcer le ministre à faire des choses, mais je qualifie ça un peu d'une dérive institutionnelle dans la mesure où le ministre, avec ses gens, crée sa loi, en débat à l'Exécutif, mais lorsque nous sommes en commission, c'est notre système parlementaire qui le veut ainsi, lorsque nous sommes en commission ou dans les travaux de la Chambre, c'est le ministre en tant que législateur qui vient se joindre à nous. Et je le dis pour l'avenir, autant que faire se peut si on peut suivre les règles de notre régime parlementaire... Si tant est qu'un jour on le change, bien, on le changera; je sais qu'il y a des discussions qui se font là-dessus parfois, dans des occasions très rares. Mais...
M. Trudel: Je voulais pas jouer au docteur.
M. Fournier: Mais je pense pas qu'on ait joué au docteur ici; on joue au législateur si je me trompe pas, et c'est le rôle auquel je nous convie tous pour la suite des événements. Bon, voici pour quelques mots d'introduction.
Mes remarques maintenant à l'égard de ce projet de loi et de la consultation que nous allons lancer. Je pense qu'on peut affirmer que c'est une nouvelle loi; ça, c'est assez clair. Je pense même qu'on peut y déceler des pouvoirs nouveaux. Mais pouvons-nous vraiment y voir une nouvelle pratique en santé publique? Et je vais me référer, au cours de ces quelques remarques, à quelques mémoires que nous avons reçus et des avis que nous allons entendre. Peut-être ces avis changeront-ils au cours de la consultation, peut-être que nous entendrons la même chose. Mais une chose est sûre: l'Institut national de santé publique dont parlait le ministre tantôt commet ce passage dans son mémoire où l'Institut nous dit: «L'histoire de la santé publique au Québec et certains de ses succès enviables démontrent bien que les responsables au ministère ou dans le réseau n'ont pas été freinés dans leurs actions, même en situation d'urgence, ni par l'absence de pouvoir légal ni par l'absence de menace de dispositions pénales. Il faut éviter que, pour des dispositions légales qui ne changeront à peu près rien dans l'action, l'ensemble du beau projet puisse être perçu comme une recherche trop importante du pouvoir.» Je pense que, d'entrée de jeu, il est important de placer cette nouvelle loi, ce qu'elle va changer dans le quotidien des gens. S'il faut se fier à l'Institut national de santé publique qui viendra nous voir au cours de la semaine, elle nous dit que les dispositions légales ne changeront à peu près rien dans l'action. On verra. Peut-être que c'est une position qui sera évolutive au cours de la semaine, Dr Massé.
Par ailleurs, un autre élément qu'il me semble important de préciser dans le contexte qu'on a connu au cours des dernières années, dans le contexte des coupures répétées: peut-on vraiment croire que cette nouvelle loi constitue un changement de cap, une réelle priorisation? Je voudrais citer ici un court passage de l'Association des CLSC et CHSLD qu'on va entendre tantôt, qui nous rappelait combien, et je cite, «les établissements exploitant un centre local de services communautaires ont été soumis à des pressions importantes pour développer des services curatifs, et ce sont souvent les services préventifs et de promotion de la santé et du bien-être qui ont dû en subir les conséquences.» La Centrale des syndicats du Québec nous dit ceci: «Ce sont malheureusement les contraintes budgétaires qui, dans la majorité des cas, ont dicté les priorités des établissements offrant des services de première ligne. Ceux-ci ont accordé la primauté aux besoins curatifs criants, et les volets de prévention, souvent perçus comme n'étant pas socialement requis, ont beaucoup écopé.» Et là, la CSQ continue sur ce passage qui me semble donner le vrai test à la crédibilité de cette nouvelle loi ou de cette action gouvernementale, la CSQ rajoute et dit: «S'ils ? parlant des établissements ? s'ils ne reçoivent pas de subsides supplémentaires dédiés à la mission de promotion-prévention, ces établissements ne pourront guère plus appliquer des programmes répondant à des objectifs de santé publique.» En somme, la CSQ nous dit, échaudée par les années de gouverne du Parti québécois où on a vu les coupures année après année dans le domaine de la santé, nous dit: On n'a pas pu relever les défis dans le passé. Aujourd'hui, on nous présente un changement de cap, soi-disant. Est-ce qu'il y aura les ressources? C'est une question qui est posée, et c'est, je pense, qu'est là le test de crédibilité: est-ce que les ressources financières, les ressources humaines nécessaires à l'implantation des plans nationaux, régionaux et locaux seront au rendez-vous? C'est le test de cette nouvelle loi.
Et c'est pas juste la CSQ, M. le Président, qui impose ce test. La Conférence des régies, qui va aussi venir, insiste pour que le programme national fasse état des ressources nécessaires à l'implantation du même programme. Il y a comme une crise de confiance chez ceux qui ont à appliquer les lois, qui en seront redevables tantôt. On connaît combien ces organismes-là, ces établissements, ces dirigeants sont... se voient, dans le collimateur de l'équilibre budgétaire, à remplir des devoirs pour lesquels ils n'ont pas, en début d'année, les moyens et à se faire taper sur les doigts à la fin parce qu'ils n'ont pas rencontré les objectifs de l'équilibre alors que, au départ, ils avaient déjà pas les ressources. On sent poindre une nouvelle tendance à cause des habitudes du passé.
Ce test posé, je retiens que le projet de loi reste timide au titre de la promotion de la santé. D'ailleurs, c'est soulevé par plusieurs des intervenants, notamment par la Fédération québécoise des centres de réadaptation en déficience intellectuelle. Et les CRDI rappellent d'ailleurs les propos de la commission Clair, les CLSC-CHLSD vont aussi nous souligner l'importance de nombreux volets qui sont souvent vus plus sous l'angle social, et on n'y voit pas ou on n'y voyait pas... Et je pense que, ça, c'est un des objectifs du projet de loi, qu'on y voit l'importance de l'impact sur la santé. Le social et la santé sont directement liés. Et ce que ces groupes viennent nous dire, c'est l'importance du revenu, de la scolarité, du logement, des chances d'accès au marché du travail, qui sont associés aux problèmes de santé; l'environnement, les habitudes de vie doivent constituer des priorités.
Et, si vous me permettez, M. le Président ? sans avoir attendu une nouvelle loi, avec les outils qui existaient avant ? je me permets ici de saluer le travail des nombreux groupes communautaires à travers le Québec et le soutien des organismes communautaires, souvent dans les CLSC, à travers tout le Québec, qui ont toujours travaillé dans ce sens de promotion et de prévention à l'égard de la santé et du bien-être et qui doivent, je pense, de temps à autre, être félicités pour le travail qu'ils ont fait. Et on n'a pas souvent l'occasion de le faire. Nos yeux sont souvent attirés vers les médecins et les donneurs de soins de première ligne, les infirmières, mais il y a tous ces gens qui ont travaillé depuis de nombreuses années dans le domaine du logement social, les soupes populaires, la réinsertion au travail, essayer de freiner l'isolement, que les gens puissent s'en sortir. Je pense aux organisations communautaires de mon comté, de notre CLSC, M. le Président, je pensais à eux en regardant le projet de loi puis en lisant les rapports. Je pense à des Carlos Borgès, des Jean-Denis Lefebvre, des Manon Desnoyers, Pierre Lagrenade, des gens qui ont donné leur vie et qui donnent encore leur vie. D'ailleurs, deux de ceux-là sont sur une liste pour aller aux États-Unis, à New York ? les décisions vont se prendre bientôt ? des gens qui se dépensent sans compter pour le bien de la population pour venir... pour assurer un meilleur bien-être. Et je tiens à le noter parce que, au-delà des actions législatives, c'est dans le quotidien que ça prend sa force, la prévention, la promotion de la santé et du bien-être. Et ce sont ces acteurs-là qu'on oublie parfois ? et je tenais à prendre quelques minutes pour saluer le travail qu'ils font à travers tout le Québec ? et qui sont même reconnus pour leur expertise pour des crises qui affligent l'étranger.
n(10 h 20)n M. le Président, dans un autre volet de promotion et de prévention, je pense qu'il faut souligner certains mémoires, les médecins spécialistes qui, notamment, plaident pour qu'on inclue des actions d'évaluation des impacts du programme. Alors là, il y a un programme national mais il faudrait qu'on le suive, il faudrait qu'on s'assure que, lorsqu'on se met des indicateurs, lorsqu'on se met des mandats, des devoirs, on les suive pour vrai; qu'on les oublie pas puis qu'on en vienne qu'on oublie qu'on a une imputabilité. Je pense qu'ils ont raison.
Mais, pour ma part ? et dans ce sens-là j'appuie fortement l'Association pour la santé publique du Québec ? je pense qu'il ne faut pas que suivre le programme national de santé publique, je pense qu'il faut suivre l'ensemble de l'action gouvernementale. C'est pas juste son programme national qu'il faut suivre, c'est le gouvernement lui-même qu'il faut suivre. Je vous dirais qu'il faut se prémunir, agir en prévention à l'égard de décisions et d'actions gouvernementales.
Avant d'y arriver, je voudrais quand même vous parler de la Centrale des syndicats du Québec qui offre ce passage et qui me semble très important dans son mémoire. Elle nous dit: «Le premier alinéa de l'article 51, bien que louable et utile ? en reconnaissant que le ministre est d'office conseiller du gouvernement en santé publique et qu'il peut donner des avis pour promouvoir la santé et adopter des politiques publiques favorables à la santé et au bien-être ? ne constitue pas vraiment une innovation. Ce n'est pas un nouveau pouvoir du ministre, ce n'est que l'explication d'une fonction qui semble aller de soi avec le poste de ministre de la Santé au sein du gouvernement et qui, à la limite, peut s'exercer lors des réunions régulières du cabinet. Nous souhaiterions que la loi prévoie un mécanisme plus formel.» Dans ce premier paragraphe, ce que la CSQ nous dit, c'est: Quand la loi vient nous dire que le ministre est le conseiller, les bras nous tombent. On a toujours pensé qu'il en était ainsi.
Et la CSQ continue: «De plus, le second alinéa crée une obligation de le consulter lors de l'élaboration de mesures prévues par les lois et les règlements qui pourraient avoir un impact sur la santé de la population. Cette mesure constitue, selon nous, une innovation intéressante, puisqu'elle établit un principe, quoiqu'elle demeure vague au niveau de son implantation. En effet, l'article n'identifie pas qui des autres ministres, sous-ministres ou autres fonctionnaires, doit faire cette consultation ni qui évaluera si de telles mesures pourraient avoir un impact significatif sur la santé, ce qui déclencherait le processus de consultation. Nul mot non plus au sujet du cadre temporel ou administratif à l'intérieur duquel cette consultation se déroulerait.
«Nous aimerions que le pouvoir du ministre d'émettre des avis formels à ses collègues ministres, tel que prévu au premier alinéa, s'appuie ouvertement sur un mécanisme formel d'analyse systématique de l'impact des politiques gouvernementales sur la santé et le bien-être ainsi que des mesures légales et gouvernementales qui en découlent. Sans ces précisions, nous craignons que cet article demeure lettre morte. La commission Clair en faisait la recommandation, et le dernier document de planification stratégique du ministère prévoit l'instauration d'un tel processus. Malheureusement, on n'y retrouve plus de trace.» Et, M. le Président, j'ai voulu mettre en lumière ce qui était soulevé ici parce que c'était pas l'opposition libérale qui le soulignait, c'étaient des gens qui vont venir témoigner devant nous, des rapports que nous avons reçus. Et, pour moi, ça m'interpellait de façon importante. Quel est le plus gros problème que le réseau de la santé, dit curatif, connaît actuellement? Les pénuries de médecins et d'infirmières. Qu'est-ce qui s'est passé pour que nous ayons cette pénurie si grave en ressources humaines, infirmiers, médecins? Il s'est passé, M. le Président, que le gouvernement du Parti québécois ? le gouvernement ? a décidé de lancer un programme de départs massifs à la retraite, de dire à des gens de quitter l'emploi en échange d'un bonus, M. le Président. En même temps, comme si c'était pas assez ? en même temps ? le gouvernement a décidé de contingenter de façon grave et importante la formation en soins infirmiers, la formation en médecine. Autrement dit, pendant que la porte de sortie était grande ouverte, la portée d'entrée était cadenassée. On se retrouve aujourd'hui avec une situation terrible. Je ne voudrais pas que cela se reproduise. Je me dis que si nous avons à nous prémunir de différentes menaces, il y a certaines préventions qui doivent se faire à l'égard des actions gouvernementales. Et il me semble qu'on a là un bel exemple de décisions qui ont été prises, je dirais, par une tutelle du ministère de la Santé, par le Conseil du trésor et que personne ne s'est levé à ce moment-là pour défendre la santé des Québécois dans les années à venir.
Aujourd'hui, nous sommes au plus creux en termes de pénurie de médecins. Pourquoi? Parce que le contingentement est arrivé en 1996, ça prend de cinq à sept ans pour former les médecins. On est en 2001; le creux, on commence à le connaître. On n'est pas en train de sortir du creux, M. le Président, on rentre dans le creux.
Vous allez me dire: Bon, bien, là, l'opposition ressasse des vieilles choses. Mais j'ai pensé au même événement, à la même action gouvernementale en écoutant l'émission J.E. vendredi dernier. À J.E., il y avait un topo sur le Casino de Montréal et sur des dames, femmes enceintes, qui demandent des retraits préventifs. Et je retiens les propos du ministre qui disait tantôt: Il faut agir avant que le mal soit fait, il faut diminuer les risques. Et je note qu'il est toujours le conseiller du gouvernement et qu'il n'a pas besoin de sa loi pour être le conseiller du gouvernement. Et je savais ça, en écoutant l'émission J.E., qu'on était pour en parler cette semaine. Et qu'est-ce que j'ai appris à J.E.? Bien, j'ai appris que les femmes enceintes qui travaillent au Casino de Montréal où le droit de fumer est permis et que, semble-t-il, selon ce qui est dit, on l'utilise abondamment, bien leur retrait préventif de leur travail où elles sont emboucanées, à telle enseigne que leur linge, leurs cheveux en sortent imprégnés à la fin du quart de travail, le retrait préventif est refusé.
M. Trudel: Les médecins ont changé d'avis, là, hein.
M. Fournier: Les retraits préventifs sont refusés...
M. Trudel: Les médecins ont changé d'avis.
M. Fournier: Et j'ai écouté J.E. et il y avait un médecin de la santé publique de Montréal qui disait qu'il y avait une zone grise puis il savait pas trop. Il y avait un médecin de la santé publique de Québec qui disait: Il y a pas de zone grise là-dedans, là.
Moi, je me pose la question suivante, M. le Président: Le Casino, comme bras de l'État québécois, quel signal il envoie à la société lorsqu'il refuse des retraits préventifs dans des situations comme celles-là qui, de toute évidence... Simplement à regarder le reportage, on se dit: mais, au moins, réaffectez-les à un endroit où il y a pas de... il y a pas ces dangers-là. Je reprends les propos du ministre tantôt, là: Agir avant que le mal soit fait. On est rendu, à l'égard du tabac, à faire des... à mettre des images spectaculaires sur les paquets de cigarettes, on ne compte plus le nombre de publicités qui sont faites à l'égard du tabac. On sait que c'est au Québec qu'on détient le record du tabagisme, puis, comme message ? et qu'on dépense des sommes d'argent dans des campagnes de publicité ? mais, en même temps, le message de l'État québécois qui n'a pas encore été, là, corrigé par les hauts responsables de la santé du gouvernement dont on pourrait penser que le ministre, qui en est le conseiller auprès du gouvernement, pourrait dire quelque chose, bien, comme modèle de société à l'égard notamment de la santé des gens, à l'égard d'un concept de famille-travail, est-ce qu'on encourage ça, on peut pas dire que c'est une formule gagnante.
Et je tiens, M. le Président, à souligner ces éléments. Il me semble que, lorsqu'on veut parler de prévention et de promotion, ce que plusieurs groupes vont venir nous dire, c'est qu'ils trouvent la loi timide; ce que je dis, c'est que dans l'action gouvernementale il y a aussi une trop grande timidité et qu'elle n'a pas besoin de loi, la voix du ministre, pour se faire entendre.
n(10 h 30)n Le test de crédibilité, donc, d'une nouvelle loi de santé, santé publique, doit attendre des fonds appropriés. Pour l'heure, nous n'avons que des mots. Cette nouvelle loi contient donc une omission grave à mon sens. On ne peut pas valablement, avec un mécanisme institutionnel systématique fort, nous prémunir contre l'action gouvernementale.
Par ailleurs, la loi proposée comporte certains irritants d'un autre ordre, notamment les examens médicaux réglementaires mais non pertinents ? qui d'ailleurs sont soulevés ici par de nombreux groupes ? la multiplicité des plans nationaux, régionaux, locaux qui, selon certains, pourraient constituer des freins à l'action terrain. Et, je pense qu'il faudra porter une attention particulière, on ne souhaite surtout pas, comme le disait un groupe dont je faisais état dans une citation tantôt, de nouveaux pouvoirs qui ralentissent l'action. Un autre irritant plus important touche la question de la crédibilité, de la transparence et de l'indépendance. Elles sont relatives au comité d'éthique. Il y a le Collège des médecins, les médecins spécialistes, l'Institut national de santé publique, CSN, CSQ, l'Association de santé publique du Québec qui le soulèvent. Il y a les questions d'indépendance, de transparence à l'égard du directeur national de santé publique ? le ministre ne m'entend pas pour la première fois en parler, on en a parlé à l'égard du projet de loi n° 28. C'est soulevé à nouveau devant nous par le Collège des médecins, les médecins spécialistes, la Conférence des régies, l'Association pour la santé publique du Québec qui vont venir en parler.
Dans ces matières, l'omniprésence du ministre devient non seulement paralysante, elle nie le sens du mot «réseau» et elle nie la confiance. Dans un domaine de prévention et de promotion de la santé, le diktat n'est pas à mon avis la bonne recette, il faut rechercher l'adhésion volontaire. Il faut surtout faire oeuvre pédagogique. L'exemple que je donnais à l'égard du Casino de Montréal est toujours un bon exemple. C'est d'ailleurs pourquoi les propositions d'initiatives laissées aux citoyens, qui sont amenées par l'Institut national et la CSN, sont à mon avis fort intéressantes: de permettre qu'il y ait une porte ouverte aux citoyens pour qu'ils puissent prendre à bras-le-corps, eux aussi, la santé publique, pour qu'ils sentent qu'ils y ont un rôle. C'est pas dans la loi actuelle, peut-être qu'à la fin de ces consultations on pourra déboucher sur quelque chose là-dessus.
Pour la suite des événements, l'attention de l'opposition, M. le Président, se portera sur les ressources pour la mise en place de ces programmes: est-ce qu'il y aura effectivement des fonds qui vont accompagner les nouveaux plans; sur les mécanismes d'analyse des actions gouvernementales: le gouvernement souhaite-t-il se refuser les mécanismes systématiques qui nous permettent de nous protéger à l'égard de décisions qui peuvent être néfastes pour l'avenir de la santé des Québécois; et nous continuerons de nous interroger et de favoriser la nécessaire crédibilité qui est encore plus importante que dans bien d'autres secteurs en matière de santé publique et donc, pour atteindre cette crédibilité, sur la transparence et sur l'indépendance des intervenants. Voilà pour mes remarques préliminaires. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le député de Châteauguay. Alors, avant de suspendre quelques secondes... Je vais suspendre pour permettre aux représentantes et représentants de l'Association des CLSC et des CHSLD du Québec de se joindre à nous à la table. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 33)
(Reprise à 10 h 34)
Auditions
Le Président (M. Beaumier): Alors, on reprend nos travaux avec l'Association des CLSC et des CHSLD du Québec. Alors, je comprends que M. le vice-président, M. Tremblay... Alors, bonjour, et puis peut-être nous présenter les personnes qui vous accompagnent et puis y aller de votre message.
Association des CLSC
et des CHSLD du Québec
M. Tremblay (Alain): Oui. Alors, les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui sont Lucille Rocheleau, directrice générale adjointe à l'Association des CLSC et des CHSLD du Québec; nous avons aussi Renée Lamontagne, ici, à ma droite, qui est directrice générale du CLSC des Hautes-Marées et présidente du dossier santé publique au niveau national; et nous avons aussi Denis St-Amand, qui est conseiller à l'Association des CLSC et des CHSLD du Québec.
Le Président (M. Beaumier): Alors, M. Tremblay, vous avez 20 minutes pour la présentation du mémoire, puis ensuite ça sera suivi d'un 40 minutes d'échanges avec les membres de la commission. Alors, allons-y.
M. Tremblay (Alain): Je vous remercie. Au nom des établissements de santé et de services sociaux exploitant un centre local de services communautaires, l'Association des CLSC et CHSLD du Québec remercie la commission des affaires sociales de lui donner l'occasion de présenter ses commentaires et ses recommandations sur le projet de loi n° 36, Loi sur la santé publique.
C'est avec beaucoup d'intérêt que l'Association des CLSC et des CHSLD du Québec a analysé ce projet de loi. C'est dans un esprit de franche collaboration que nous nous sommes engagés dans ce processus qui offrira à la population du Québec une loi renouvelée sur la santé publique.
D'entrée de jeu, nous désirons signifier l'importance que revêt ce projet de loi pour les établissements exploitant une mission de centre local de services communautaires. Tout au long de la présentation, nous référerons à la réalité CLSC pour désigner tout type d'établissement exploitant une mission CLSC, incluant les centres de santé.
En plus d'offrir une vision globale de la santé publique en y précisant les fonctions non seulement de protection, mais aussi celles de surveillance épidémiologique, de promotion et de prévention, ce projet de loi propose une ligne d'autorité professionnelle et un partage de responsabilités institutionnelles qui favoriseront, nous en sommes convaincus, une plus grande cohérence dans les services de santé publique au Québec.
Aujourd'hui, le projet de loi reconnaît les CLSC comme partie prenante à l'action concertée du réseau de la santé et des services sociaux dans la dispensation des services de santé publique. Nous ne pouvons que souscrire à une telle approche qui nous permettra de contribuer plus efficacement à la protection de la santé de la population et à la mise en place des conditions favorables au maintien et à l'amélioration de l'état de santé et de bien-être de la population en général, tel que stipulé dans l'objet du présent projet de loi. Le présent projet de loi sera un outil précieux pour favoriser chez nos membres une démarche de réflexion sur la santé publique, pour répondre à nos mandats légaux et consolider notre partenariat avec les instances de santé publique institutionnelles, civiles et communautaires.
À la lecture de ce projet de loi, nous constatons la volonté du législateur d'outiller les autorités de santé publique afin qu'elles répondent à des responsabilités légales, notamment afin d'assurer une intervention efficace lorsque la santé de la population est menacée. Nous partageons entièrement ces dispositions et comptons nous associer aux opérations qu'exige la réalisation de ces mesures.
La lecture attentive traduit aussi la volonté du législateur de renforcer, par ce projet de loi, la capacité des milieux à agir pour la protection, le maintien ou l'amélioration de l'état de santé des populations. Nous partageons encore là l'esprit du législateur, et dans ce sens il nous semble nécessaire d'inscrire concrètement cet objet dès l'article 2 en y ajoutant une quatrième mesure qui pourrait se traduire comme suit: Soutenir les initiatives des groupes et des collectivités qui agissent pour le développement des milieux de vie et de conditions de vie favorables à la santé et au bien-être. Cet ajout est nécessaire pour s'assurer de l'inclusion des acteurs non institutionnels qui travaillent à l'amélioration et au maintien de la santé et du bien-être sur le plan local, régional et national.
n(10 h 40)n Il nous faut aussi considérer les acteurs civils et communautaires qui s'investissent dans l'approche populationnelle et qui méritent notre appréciation et notre reconnaissance, compte tenu qu'ils contribuent à répondre aux besoins des individus et des milieux souvent en situation de vulnérabilité. Cette proposition donnerait, à notre avis, la pleine portée à l'article 50 du présent projet de loi en matière de promotion de la santé et du bien-être et de prévention. Par ailleurs, les dispositions générales de l'article 50 circonscrivent de façon satisfaisante nos activités dans les champs de la promotion et de prévention.
L'article 156 propose un ajout à la mission d'un CLSC: «La mission d'un tel centre est également de réaliser des activités de santé publique sur son territoire.» Même si notre compréhension de la mission inscrite dans la Loi sur la santé et les services sociaux inclut les activités de santé publique, nous comprenons que l'ajout proposé vise à confirmer d'une façon non équivoque le rôle des CLSC dans le champ de la santé publique. De manière à harmoniser les services de santé publique, il s'avère impératif pour les CLSC d'être représentés aux instances formelles de coordination sur le plan national, ce qui n'est pas encore une réalité à ce moment-ci. Nous sommes invités souvent à la pièce, selon la nature des discussions, selon la gravité du problème ou encore en considération du besoin d'expertise. Nous confirmons ici notre volonté d'être représentés aux différentes instances nationales de santé publique, puisque ces lieux permettent de coordonner plus efficacement les efforts des différents partenaires.
Nous sommes heureux de constater dans le projet de loi l'obligation pour les CLSC de présenter un plan d'action local en santé publique. Ce dernier assurera des actions plus structurées au plan local. Cependant, il nous apparaît important que ce plan d'action, en plus de répondre aux prescriptions du programme national, inscrive aussi les activités de santé publique qui reflètent les interventions, projets ou programmes favorables à la santé et au bien-être des individus, des groupes et des communautés sur le territoire de CLSC. Dans ce sens, nous insistons sur l'importance d'intégrer dans le programme national une plage ouverte aux projets en émergence sur le plan local et régional.
Les CLSC sont quotidiennement confrontés à de nouveaux enjeux de santé et de bien-être qui nécessitent la mobilisation des collectivités locales afin de lutter contre les inégalités de santé et de bien-être, la pauvreté, la violence et agir sur les déterminants de la santé et du bien-être. C'est pourquoi nous proposons d'ajouter au paragraphe 3° de l'article 6: La promotion de mesures systémiques aptes à favoriser une amélioration de l'état de santé et de bien-être de la population «et une prise en charge des communautés locales dans une perspective de développement social».
Les CLSC ont développé des expertises que nous entendons mettre à profit dans le cadre d'un plan local et régional, notamment en promotion, prévention et en développement des communautés, et il nous paraît essentiel que les directions régionales de santé publique prennent en compte ces expertises et puissent convenir de modalités qui intègrent ces pratiques. Plus encore, il y a lieu de nommer le support attendu des ressources dites de deuxième ligne qui, à notre avis, devraient fournir des outils de développement, de l'intervention et s'assurer de la consolidation et du maintien de l'expertise de même qu'un soutien réel sur le plan local. C'est pourquoi nous proposons d'ajouter au paragraphe 4° de l'article 7 la proposition suivante: Prévoir de la formation pour les ressources humaines oeuvrant en santé publique «et les outils nécessaires pour soutenir l'intervention de santé publique aux niveaux régional et local».
Le plan d'action local suppose aussi pour les CLSC une harmonisation des services de santé publique de première ligne et la clarification des services de protection, de promotion-prévention et de développement communautaire axés sur des mesures favorables à la santé et au bien-être à développer sur nos territoires respectifs. Dans cet esprit, à la suite de l'adoption de ce projet de loi, nous comptons réaliser un profil de services de santé publique de première ligne et ainsi favoriser une harmonisation des services de santé publique en CLSC.
Cette formulation que représente un programme national de santé publique doit nécessairement inclure une dimension éthique. Nous sommes d'avis que la création d'un comité d'éthique de santé publique est impératif et que notre participation l'est tout autant, compte tenu de nos responsabilités et de notre imputabilité. Nous avons proposé de spécifier au paragraphe 4° de l'article 21: deux professionnels oeuvrant dans le domaine de la santé publique «dont un provenant au niveau local». Cependant, nous voulons souligner que l'idée ici est de s'assurer que, parmi les membres de ce comité, il y aura un représentant d'un établissement exploitant un CLSC.
Nous insistons pour que les CLSC participent à part entière avec les autorités de santé publique à la définition des outils susceptibles de rencontrer les objectifs populationnels visés. Mais, pour ce faire, nous devons, sur le plan local, avoir accès aux données favorisant la planification des services et des activités ainsi qu'à celles reflétant les résultats des interventions, nous permettant ainsi d'avoir une vue d'ensemble des objectifs atteints dans nos territoires respectifs.
En dernier lieu, nous aimerions que vous portiez une attention particulière à l'environnement social, qui constitue un facteur important sinon déterminant dans l'amélioration de l'état de santé et de bien-être de la population. Les conditions de vie, telles que le revenu, la scolarité, les conditions de logement et les chances d'accès au marché du travail, sont directement associées aux problèmes de santé et de bien-être, de même que les divers milieux de vie, comme la famille, l'école, le milieu du travail et le réseau social, conditionnent en grande partie les modes de vie. Les CLSC tiennent compte de cet environnement dans leurs interventions de santé publique pour l'amélioration des facteurs susceptibles d'avoir un impact négatif sur l'état de santé. La lutte contre la pauvreté, le développement des communautés, le développement des réseaux d'entraide, qui permettent à la collectivité de mieux répondre à ses besoins, constituent des assises à l'intervention de nos établissements.
Comme vous le savez, les enjeux de santé publique sont de plus en plus sociaux. Ces enjeux méritent une attention particulière et nous confirment qu'une approche en santé publique doit intégrer la dimension sociale et que cette dernière ne peut se réaliser que par des approches qui impliquent la participation des individus et des acteurs civils et communautaires des milieux.
Enfin, considérant l'importance de ce projet de loi, qui confirme le rôle de porteur institutionnel de santé publique sur le plan local, nous espérons que les suites à donner à ce projet de loi nous permettront enfin de convenir des modalités organisationnelles qui favoriseront, dans le respect des responsabilités de chacun des acteurs, l'atteinte des résultats attendus en faveur de la santé et du bien-être des Québécois et des Québécoises.
Nous vous remercions de votre attention et sommes maintenant disponibles, mes collègues et moi, pour répondre à vos questions.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. Tremblay. Alors, à la période des échanges, M. le ministre.
M. Trudel: Bien, M. le Président, mais c'est une envolée d'enthousiasme! C'est particulièrement, je pense, remarquable, je le dis, d'entendre... de vous entendre, M. le vice-président et les gens qui vous accompagnent, et qui représentent les 147 portes d'entrée en santé communautaire au Québec. C'est ces gens-là qui viennent nous parler ce matin, et je loue la façon dont vous avez déjà envisagé comment vous allez vous inscrire dans la, si la tendance se maintient, la tendance lourde d'accentuer la présence des équipes de professionnels au niveau populationnel dans les 147 territoires de CLSC du Québec. Je vais vous dire, ça donne une puissante poussée ascendante pour que les choses puissent arriver, aboutir et faire en sorte qu'on mette en place les mécanismes pour vous permettre de réaliser davantage ce rôle, davantage ce rôle au niveau de la santé publique, parce que, effectivement, je confirme que vous avez très bien lu l'article 156. Il y a là une volonté explicite du législateur, du gouvernement non seulement de confirmer ce qui est déjà dans la mission générale de première ligne des CLSC, mais, à l'article 156, que nommément vous soyez dorénavant, les 147 grandes équipes en services de santé communautaire, qui s'appellent les CLSC, sur le territoire québécois, que vous soyez de la partie.
n(10 h 50)n Dans ce contexte-là, dans ce contexte-là, je vais vous poser une première question surtout pour vos impressions pour la suite des choses. Parce que, je dois dire, quand on fait l'analyse des 17 mémoires qui nous ont été présentés, on dirait que vous êtes comme représentatifs en quelque sorte de la poussée ascendante et de l'élan nouveau que l'on va donner en santé publique. Et le premier de ces 17, bien, ça va nous amener maintenant rapidement à: Comment faire après. Parce que, si tout ça n'est pas suivi d'actions, ça compte pas, ça. Ça compte pas. Dans un autre contexte, je le disais souvent, je le répète: La foi sans les oeuvres, ça compte pas, n'est-ce pas? Ça, c'est une citation de ma mère.
M. Tremblay, vous allez être, oui, effectivement, comme un peu nouveau dans l'échiquier de la santé publique. Comment vous voyez la coordination avec le niveau régional, à partir des préoccupations de votre territoire bien sûr, et aussi le niveau national? Je vous demande pas de régler tous les problèmes, là. Je voudrais avoir votre vision sur comment vous pensez que cela devrait ou cela s'articulera dans ce grand ensemble local, régional, national. Puis je commence pas par, je commence pas par hasard par le local, là, c'est nommément l'esprit de la loi.
Le Président (M. Beaumier): M. Tremblay.
M. Trudel: Ou vos collaborateurs et collaboratrices bien sûr.
Le Président (M. Beaumier): Bien sûr. M. Tremblay.
M. Tremblay (Alain): Quand vous dites que nous sommes un peu nouveau, je pense que les CLSC ont démontré au cours des dernières années comment ils ont participé de façon active à la promotion et prévention de la santé et du bien-être sur les territoires locaux, et on le fait depuis l'existence des CLSC. Alors, je pense que c'est pas tout à fait nouveau, notre participation à cet égard. Au contraire, elle doit être renforcée, elle doit être présente, et on doit nous inclure dans l'ensemble des décisions qui sont prises et dans les processus qui mènent à la collaboration, qui mènent à l'organisation sur les territoires local, régional et national. Je vais laisser Lucille Rocheleau vous entretenir davantage sur le sujet.
Le Président (M. Beaumier): Bien. Mme Rocheleau.
Mme Rocheleau (Lucille): Alors, bonjour.
Le Président (M. Beaumier): Bonjour.
Mme Rocheleau (Lucille): Sur la question de la coordination du local au national, je pense que, M. le ministre, nous sommes très heureux de vous entendre parler de l'importance du local dans le cadre de la santé publique. Effectivement, on a une préoccupation importante de faire jaillir des dynamiques locales pour travailler sur toute la question des déterminants de la santé. Quand on parle de la coordination, je pense qu'il faut regarder... On a parlé de quatre grandes fonctions de santé publique. On a parlé de la surveillance de l'état de santé de la population, de la promotion, de la prévention et de la protection. Et je pense que la coordination, la façon de s'arrimer doit être différente en fonction de ces différentes fonctions.
Quand on parle de protection, je pense que tous les acteurs sont d'accord, il faut vraiment qu'il y ait une ligne d'autorité quelque part et il faut agir rapidement, avec une coordination très claire, qui vient du national au local. Et là-dessus on n'a pas de problème. Par contre, quand on parle de travailler avec les dynamiques des communautés locales, de travailler sur les milieux de vie, de travailler sur les déterminants de la santé, c'est souvent au niveau local que ça se passe. Et ça ne peut pas être une prescription qui vient du national. Au contraire, il faut que l'organisation nationale et régionale vienne soutenir ces actions-là au niveau local qui relèvent en fait des acteurs locaux dont les CLSC font partie.
C'est très clair qu'au niveau local on n'est pas les seuls acteurs, sauf qu'au niveau local les CLSC jouent souvent un rôle d'animation par rapport à l'ensemble de la population du territoire, soit pour soutenir ce qui est déjà là ou soit pour essayer de faire émerger des choses qui sont pas là. Et, en ce sens-là, concrètement, le programme de santé publique, dans le cadre de la promotion et de la prévention, mais particulièrement dans le cadre de la promotion, devrait donner des grandes orientations et faire en sorte que le terrain puisse utiliser toutes les dynamiques qui sont au niveau des communautés locales. Je ne sais pas si Mme Lamontagne veut ajouter des choses.
Le Président (M. Beaumier): Oui, Mme Lamontagne.
Mme Lamontagne (Renée): Moi, je compléterais sur deux éléments. En tout cas, je pensais aussi à la réflexion récente de nos amis les Anglais, pas ceux du côté... à notre ouest, mais les Britanniques, qui ont fait une réflexion récente sur la santé publique et qui ont articulé leur réflexion autour de deux grandes assises, deux grandes pierres d'assise qu'on retrouve en filigrane de notre réflexion québécoise aussi, qui sont, d'une part, la concertation des acteurs et, d'autre part, l'appropriation par les citoyens des problèmes et des solutions.
La loi définit assez bien les préoccupations, et, M. le ministre, vous la réitérez, une préoccupation de concertation des acteurs, et ça, c'est une des deux pierres d'assise effectivement très importante. M. Tremblay y faisait allusion, le premier niveau de concertation des acteurs, c'est la présence du palier local à des instances nationales. Présentement, effectivement, je pense qu'il faut réitérer ce problème-là, il y a des instances, qui s'appellent des instances de coordination nationales, dont le palier local est absent, et, à mon avis, on ne peut pas parler de concertation nationale lorsque le palier local est absent. C'est une partie de la concertation, elle est centrale, nationale et régionale, et il faudra absolument trouver les moyens d'y associer le palier local pour parler d'une véritable concertation nationale. C'est une première modalité effectivement.
Pour les autres modalités, effectivement, je pense qu'on est très... nous sommes très à l'aise avec le fait que la prescription... qu'il y ait une partie prescriptive importante dans plusieurs champs de la santé publique qui provienne du palier central, pour assurer une cohérence dans le système. Si on veut une cohésion dans la société québécoise, ça nous prend une partie prescriptive. Par ailleurs, la partie de l'appropriation par les citoyens doit absolument s'appuyer sur une partie plus d'émergence et de créativité au palier local. M. Fournier disait tout à l'heure: C'est au niveau local que ça se passe, moi, je pense qu'il se passe des choses au palier... à tous les paliers, mais selon la pertinence des niveaux.
Je donnerais un exemple de l'importance de l'émergence et de la... de la dynamique locale qu'on a vus apparaître au cours des dernières années et qui ont des effets effectivement directs sur la santé des populations. Et, dans ce sens-là, je reprendrais les propos de M. Tremblay, qui disait: C'est pas nouveau pour les CLSC d'intervenir dans le champ de la santé publique. Avec l'apparition des CLD et des CLE, on a vu apparaître une dynamique absolument intéressante au niveau des territoires locaux, c'est-à-dire du travail en concertation des CLD, des CLE, des CLSC et, je dirais, des organismes communautaires également, qui agissent directement, je vous dirais, sur des déterminants majeurs de la santé.
On sait quels sont les déterminants majeurs de la santé, ce sont des déterminants économiques et sociaux ? on en a mentionné tout à l'heure. Et effectivement, quand ces partenaires-là s'associent au palier local et permettent l'émergence de l'économie sociale, permettent le développement de l'emploi, permettent effectivement de contribuer à réduire des problèmes reliés à des déterminants, c'est une action qui est directement reliée à la santé publique. Et ça, effectivement on est très préoccupé que cette partie-là puisse demeurer, à la condition bien sûr qu'elle se soumette à une obligation de résultats, de reddition de comptes, qu'elle se soumette à de l'évaluation, pour qu'on puisse en faire par la suite des projets de dissémination.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme Lamontagne. M. le ministre.
M. Trudel: Vous rajoutez une autre feuille de musique, là, à votre présentation, parce que, effectivement... Je dirais même que, je veux pas confondre la société d'admiration mutuelle, là, mais je dirais que, moi, je suis personnellement, d'une façon ou d'une autre, autour de cette table depuis une douzaine d'années, dans l'organisation des services de santé et services sociaux. Moi, je vais vous dire avec une grande candeur: Des bouts, on ne vous reconnaît plus, des bouts, on ne vous reconnaît plus, les CLSC, tellement vous êtes devenus des acteurs locaux imprégnés dans le tissu de cette société et toujours prêts à assumer les responsabilités nécessaires sur toute la ligne, avec la disparition aussi d'un certain nombre de mythes qui nous habitaient, hein? Je donne comme illustration, je donne comme illustration, exemple choisi au hasard évidemment, le développement des services médicaux dans chacun, hein, la porte d'entrée médicale.
n(11 heures)n Avec la mise sur pied des groupes de médecine de famille, le rôle des CLSC, avec les cabinets privés, va être essentiel, et on note chez nos 147 portes d'entrée en services de santé communautaires au Québec une ouverture et une adaptation pour travailler avec les gens du territoire, professionnels et autres niveaux, et, comme vous venez de le mentionner, avec les CLD. Il y a donc une appropriation du territoire local, et il faut que cette appropriation aille encore plus loin.
Je veux juste faire une note sur les éléments de coordination, tel que vous avez mentionné, avec le mot coordination, pas un régime militaire d'ordonnancement, des orientations nationales qui s'inspirent de la politique de santé et bien-être, des orientations nationales, un programme et un plan d'action assez clairs. mais si cela s'élaborait sans les gens en terrain, ça n'aurait pas de sens. Je vous préviens tout de suite. Prévenus, ça permet généralement, en termes de prévention, de faire mieux.
Assez curieusement, le gros de notre travail ne sera pas de convaincre les autorités nationales de la nécessité de la présence du local mais c'est au niveau régional. Vous aurez là-dessus à faire du travail vous-même au niveau régional parce que notre mode de fonctionnement depuis, en gros, une trentaine d'année ? modifié il y a une dizaine d'années ? a placé l'autorité et les responsabilités décentralisées au niveau régional. Et, sans qu'on fasse de procès, ça a pas toujours descendu ? vous y avez fait allusion avec une politesse et un doigté extraordinaires ? au niveau local. Alors, tout de suite là... et quand vous mentionnez à la page 7 que vous n'attendez pas d'ailleurs pour agir, vous dites: Dès ce moment, nous, on va réaliser un profil de services de santé publique de première ligne. Vous allez être dedans.
Vous avez cette capacité de réaction maintenant, et surtout de proaction. On le voit là, en particulier avec la vaste campagne de vaccination nationale au niveau de la méningite. Et là, vous nous avez pas demandé six mois pour vous organiser là, vous nous avez pas requis du temps extra. Là, on a dit: Il y a comme une nécessité de santé publique, il nous faut procéder à une vaccination massive contre la méningite à méningocoque de type C, puis vous êtes les intervenants de première ligne. Le lendemain matin, je vous ai vus vous virer de bord: Pouf! Au plan d'action, puis 24 septembre jusqu'au 31 décembre. Dans ce sens-là, je voudrais vous poser une question plus générale sur tout cet élément du développement social qu'on doit lier à la santé publique. Mais ça, ça risque d'être un peu «marshmallow» cette affaire-là, hein. La santé publique et le développement social, c'est tout puis c'est rien en même temps, cette notion-là.
Pouvez-vous me préciser un peu comment vous voyez les pourtours du soutien au développement social quand on est un établissement de santé et de services sociaux, un centre de santé, au niveau local, dans l'ensemble du territoire québécois? Parce qu'il va falloir creuser ça, parce qu'un programme national et un plan d'action national, là, il faut que ça soit suffisamment précis pour qu'on puisse mesurer et évaluer, comme disait l'opposition dans ses notes d'entrée.
Le Président (M. Beaumier): Oui...
M. Tremblay (Alain): Mme Lamontagne.
Le Président (M. Beaumier): Mme Lamontagne.
Mme Lamontagne (Renée): Bon. Quand on parle de développement social, on parle nécessairement de développement avec des acteurs qui sont, je dirais, multi... qui viennent de différents secteurs d'activité, de l'activité de la société, tant économique que de l'emploi, effectivement, que du domaine de la santé et des services sociaux. Et que la santé publique contribue au développement social, ça nous apparaît un incontournable, et ça doit se faire sûrement à tous les paliers. On évoquait tout à l'heure ce qui se fait au palier local, vous comprendrez qu'on est plus à l'aise pour parler de ce palier-là, c'est notre... notre expérience est plus éminente à ce palier-là. Et, effectivement, je pense que la mobilisation... Vous devez bien vous douter qu'au départ les CLD et les CLÉ n'étaient pas... ne voyaient pas très bien leur rôle dans le champ de la réduction des problèmes de santé et de bien-être, mais c'est à force de travailler ensemble sur le terrain, effectivement, qu'on a pu donner un sens. Vous comprendrez aussi que le sens du développement de l'économie sociale, c'était évident pour personne, aussi bien pour les CLSC que pour les CLD que les CLÉ. On a pataugé un peu mais on a... Je pense qu'on pourrait ensemble, les territoires locaux, présenter quelques belles «success stories» dans ce domaine-là.
Ça ne doit pas s'arrêter sûrement au palier local uniquement. Les mêmes... L'action intersectorielle doit aussi se faire au palier régional et au palier municipal, mais selon la pertinence des responsabilités réciproques de chacun. Ce que j'entends par là, c'est que le rôle, par exemple, du palier régional dans le développement social, il en est sûrement plus un de soutien que d'intervention directe. Ce qui m'apparaît important, c'est de bien définir les rôles réciproques de chacun et que chacun des paliers soit un soutien à l'autre pour atteindre le même objectif commun.
Le Président (M. Beaumier): M. le ministre.
M. Tremblay (Alain): Je m'excuse, Mme Rocheleau veut ajouter aussi...
Le Président (M. Beaumier): Mme Rocheleau, je m'excuse.
M. Trudel: Vous avez une minute parce que sans ça il me restera pas une minute pour vous remercier.
Le Président (M. Beaumier): O.K. Alors, chacun une minute.
M. Trudel: Chacun une minute, on partage ça en deux.
Mme Rocheleau (Lucille): Très rapidement, juste pour illustrer un petit peu les liens qu'il pourrait y avoir, quand on parlait tout à l'heure qu'il faut s'appuyer sur la politique de santé et bien-être. Il y a un des objectifs dans la politique de santé bien-être qui est de diminuer les obstacles à l'intégration des personnes, à l'intégration sociale des personnes âgées. Si on prend cet objectif-là comme étant une orientation, quelque chose qu'on doit atteindre sur le plan national, évidemment, la façon de le travailler au plan national, au plan régional et au plan local va être différente mais va être cohérente. Et c'est ça qu'il est important de se donner comme mécanisme. Et le national peut pas venir dire au local comment travailler, de la même façon que le régional peut pas dire au national ou au local comment travailler; chacun a ses expertises. Ce qui est important, c'est de se donner les mécanismes pour dire: L'objectif à atteindre est là et voilà ce que chacun peut apporter. Et c'est dans nos mécanismes qu'il va falloir s'assurer qu'on peut faire ça.
Le Président (M. Beaumier): M. le ministre.
M. Trudel: Tout cela précédé d'orientations nationales, régionales et locales claires.
Mme Lamontagne (Renée): Voilà.
M. Trudel: La mécanique sans objectifs, ça tire partout et ça atteint rien. Très bien, c'est une très bonne précision, Mme Lamontagne, c'est très éclairant. Les trois C sont en train de produire du soutien au développement local, régional et national. Les CLD, les CLE et les CLSC sont en train de nous donner les fruits que nous avions escomptés même si c'était pas évident de partir du territoire local, du territoire, grosso modo, de CLSC, du territoire de MRC. Les trois C sont en train de donner leurs fruits.
Je termine en vous remerciant. Chacune des lignes de votre mémoire va être analysée avec grande attention. Nous sommes à l'écoute. Il y aura une période suivante d'ajustement compte tenu de l'écoute, mais je veux quand même vous dire tout de suite, là, que votre idée d'ajout à l'article 4 ? vous êtes d'une cohérence bétonnée en nous demandant cela, si vous voyez ce que je veux dire, parce qu'on ne saurait tenir un discours paradoxal ou contradictoire à cet égard-là ? il faudra voir la manière, mais c'est un argument et c'est une suggestion qui tient parfaitement la route quant à moi.
Je vous remercie beaucoup de votre présentation. Bonne campagne de méningite contre le méningocoque de type C et merci d'être là, 147 portes d'entrée, centres de santé au Québec. C'est important pour le Québec.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Châteauguay.
n(11 h 10)nM. Fournier: Merci, M. le Président. À mon tour de vous souhaiter la bienvenue. Je suis très content d'avoir pu bénéficier de vos lumières à la lecture de votre mémoire. Probablement que je vais être ici pour défendre le ministre. Je pense qu'il a commis un lapsus tantôt quand il vous disait que vous étiez nouveaux dans l'organisation, vous l'avez noté. Je pense qu'il voulait pas dire que vous étiez nouveaux, il veut dire que vous aviez un rôle nouveau à l'égard du nouveau projet de loi. Alors, je me permets de comprendre que c'est ce qu'il voulait dire. Je le dis parce que, d'abord, vous en parlez dans votre mémoire, notamment à la page 9 des accomplissements que vous faites. Mais les citoyens ? oublions qui nous sommes pour le ministre qui est pris dans son ministère de la Santé, donc qui est intervenant majeur de la santé, les fonctionnaires, les médecins, les infirmières, même les gens des CLSC connaissent le réseau, ils savent où sont les paramètres, la Régie, tout ça ? le citoyen lui-même, là, celui qui prend son auto le matin, va travailler, rentre chez eux, il connaît rien de la santé, sauf quand il est malade, puis il y en a quelques-uns là-dedans qui deviennent des bénévoles d'organismes communautaires, ces gens-là, pour eux autres, lorsqu'on parle de santé publique, de prévention et de promotion, je pense pas qu'ils vous voient comme nouveau, ils vous voient comme tout seul. Parce que, dans la réalité du quotidien de tous les jours, c'est au niveau local que ça se passe. Puis le reste... Puis je pense qu'il faut s'assurer d'une cohérence, puis c'est tout à fait normal qu'on essaie de voir comment le local peut vivre avec le régional, peut-être national; je pense que ça, c'est ce qu'il faut atteindre. Mais, à mon avis ? puis c'est ce je voulais... et je pense que je l'ai souligné tantôt dans mes remarques préliminaires ? il faut bien voir que... Et moi, je le dis avec beaucoup d'affection pour les gens de chez nous qui font... des organisateurs communautaires qui passent du temps, c'est incroyable, parce que c'est des bénévoles, ni plus ni moins, là, avec des bénévoles dans les organismes communautaires qui s'occupent de réinsertion sociale, d'employabilité, c'est assez exemplaire, ce qu'ils font, et ils permettent à des gens de développer des nouvelles habitudes de vie, de leur donner peut-être à terme un revenu plus intéressant, s'alimenter un peu mieux, se loger un peu mieux, qu'ils soient équilibrés dans leur budget, puis peut-être qu'ils entreront pas à l'hôpital, et peut-être qu'on va avoir, sans s'en rendre compte ? et ça, c'est malheureusement pas assez évalué ? mais sans s'en rendre compte... C'est ça, les maudits problèmes de silo: on saura jamais quel aura été l'effet bénéfique de l'investissement, mais on peut certainement se douter du bienfait.
Ceci étant dit, après vous avoir encensés un peu, la même chose que le ministre a fait, j'ai deux ordres de questions qui sont dans le même domaine, soit référence aux outils, aux ressources. Le premier élément, c'est le passé, et le deuxième élément sera l'avenir. À l'égard du passé, vous dites à la page 4, et je vous cite ? je vous ai cité tantôt, de toute façon, et j'ai noté que, à la lecture, c'est un passage que vous avez cru bon ne pas rappeler, puisque je l'avais souligné, mais, quand même, reprenons-le: «Les établissements exploitant un centre local de services communautaires ont été soumis à des pressions importantes pour développer des services curatifs et ce sont souvent les services préventifs et de promotion de la santé et du bien-être qui ont dû en subir les conséquences.» Est-ce que vous pourriez m'en dire plus? Auquel cas je pourrais dire: Oui, bon, très bien, tout le monde peut dire ça. Mais est-ce que vous avez des évaluations, vous avez des chiffres? Est-ce que, effectivement, la prévention a dû et la promotion a dû faire une pause, je dirais, pour colmater des crises qu'il y avait dans le domaine de la santé avec le sous-financement?
M. Tremblay (Alain): Mme Rocheleau.
Mme Rocheleau (Lucille): Alors, oui, effectivement, quand on regarde dans le passé, les actions de santé publique des CLSC n'étaient pas confirmées dans une loi. Pour nous, on comprenait que c'était un rôle qu'on jouait, mais ce rôle-là, je dirais, il était moins officialisé, de sorte que, quand on avait des pressions ? dans le cadre du virage ambulatoire, par exemple, quand les gens sortaient de l'hôpital ? on pouvait pas dire: On va attendre dans deux mois ou dans trois mois pour donner le service, il fallait le donner immédiatement. Ça a mis une pression importante sur l'ensemble des services.
Évidemment, quand on doit répondre avec des ressources limitées, ce qu'on fait, c'est qu'on se donne des priorités, et ce qui peut attendre peut attendre, de sorte qu'il y a un développement qui s'est fait beaucoup du côté curatif, le développement du côté promotionnel et préventif a été, je dirais, ralenti sinon arrêté, de sorte qu'on n'a pas nécessairement diminué ces services-là, mais, comme les autres ont augmenté énormément, la proportion accordée à ces services-là est beaucoup moindre. Dans certains cas, on a dû effectivement diminuer ces services-là parce qu'on n'avait pas les ressources nécessaires. Donc, c'est pas que les CLSC ne voyaient pas ça comme étant un rôle très important... Parce que, d'ailleurs, vous savez, la prévention, c'est un peu l'art de ce qui ne se produit pas. Alors, comme vous dites, c'est très difficile à évaluer, et, comme les choses ne se produisent pas, c'est des choses qu'on peut remettre. C'est pas parce qu'on n'y croit pas, mais c'était une question de priorité.
L'intérêt de la loi et la reconnaissance du rôle des CLSC dans ce cadre-là font en sorte qu'on vient mettre en lumière qu'il faut aussi accorder des ressources à ce niveau-là, et je pense que c'est garant de l'avenir. Je dois vous dire qu'on a certains exemples dernièrement qui nous ont montré que les ressources, quand on est capable de les mettre à la bonne place, ça donne des résultats. Peut-être que Mme Lamontagne pourrait donner quelques exemples de ce type-là.
Mme Lamontagne (Renée): Oui. Effectivement, quand on dit: La pression a été forte pour le service curatif, ça a été accompagné aussi d'un soutien financier pour donner ce nouveau service. On oublie souvent que les CLSC... Il y a eu plusieurs générations de CLSC et plusieurs se sont développés dans la pénurie, on se souviendra des années quatre-vingt ? et, effectivement, on n'a jamais eu les... On oublie souvent... On pense que les CLSC ont obtenu à un moment ou à un autre du financement pour réaliser des activités de vaccination, de prévention ou de promotion, mais jamais les CLSC n'ont obtenu de financement pour réaliser ces activités spécifiques, si bien que, souvent... M. le ministre y faisait allusion tout à l'heure en disant: On a développé... On a des mythes autour des CLSC et de leur capacité parfois même de livrer la marchandise. Et l'exemple que j'aimerais donner, c'est que, effectivement, on assiste ? dès qu'on soutient l'action des CLSC de façon directe ? on assiste à des résultats que je qualifierais bien modestement de mirobolants. Un exemple: anti-influenza. Ça faisait des années qu'on nous disait: Écoutez, les gens vont pas dans les CLSC. Quand ils vont au CLSC, vous les envoyez dans les cabinets privés. Mais on oubliait de dire que si on réorientait la clientèle, c'était faute de capacité d'accueillir la clientèle. On nous a donné... Je vais donner en exemple la région de Québec ? vous me pardonnerez, c'est la région que je connais le mieux ? dans la région de Québec, dans les années 1996-1997, le taux de couverture vaccinale des personnes de 65 ans et plus, de vaccination anti-influenza, tournait autour de 33, 34, 35 %. Dans les deux dernières années, on a commencé à donner un soutien aux CLSC pas seulement pour qu'ils interviennent, eux, mais pour qu'ils travaillent en collaboration avec les médecins en cabinet privé de leur territoire et avec d'autres partenaires. Avec un soutien financier, écoutez, de l'ordre de 100 000 $ sur deux ans ? c'est loin d'être impressionnant ? on a vu passer pour la première fois un taux comparable aux autres provinces. On a terminé l'an dernier avec un taux d'atteinte qui dépasse 60 % des personnes de 65 ans et plus. On n'avait jamais vu ça. Ce que ça démontre, c'est que, lorsqu'on soutient l'action des CLSC avec des moyens, compte tenu de l'organisation qu'on a, de petites organisations ? c'est pas très onéreux, ça demande pas une technologie très sophistiquée ? on atteint des résultats de santé publique qui sont intéressants.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme Lamontagne. M. le député.
M. Fournier: Oui. Dans la foulée de ce que vous nous disiez tantôt: Alors, si on regardait maintenant les passages de votre mémoire ? je les citerai pas tous, mais il y a plusieurs passages où vous parlez des nouveaux outils, des nouveaux moyens ? à la page 7 ? aussi à la page 1, à la page 5 ? à la page 7, vous dites: «Nous sommes d'avis que le présent projet de loi rend impératif une révision des moyens pour actualiser le programme national [...] afin d'assurer l'accès à des services minimaux de santé publique dans toutes les régions du Québec.» Bon. J'imagine que vous faites référence à des ressources qui doivent accompagner le nouveau projet de loi, ce nouvel objectif qui vous est consacré par la loi. Tantôt je vous ai entendu dire que ? et là, je dois vous avouer que ça m'a inquiété un petit peu, mais je suis sûr que vous allez me clarifier ça, puis mes inquiétudes vont s'estomper ? vous m'avez dit: Puisque maintenant, dans la loi, ce sera clair qu'on a le mandat de prévention et de promotion et que, à l'époque, on ne l'avait pas, donc, on a mis beaucoup sur le maintien à domicile. J'ai cru comprendre de ce que vous disiez que, puisque maintenant on a une disposition dans la loi qui dit que, ça aussi, c'est dedans, bien là, l'arbitrage va peut-être être un peu plus compliqué à faire. Et, évidemment, dans le maintien à domicile, vous savez qu'il y a encore beaucoup de croûtes à manger, alors... Et, jusqu'à un certain point, on peut qualifier ça aussi de mesures préventives pour éviter qu'il y ait un retour à l'hôpital. Exposez-moi donc comment vous voyez cette nouvelle législation là? Beaucoup de groupes ? je le disais tantôt ? beaucoup de groupes dans leur mémoire disent, dans le fond: Bon, il y a des mots, il y a des pouvoirs qu'on dit là-dedans, mais ils vont vraiment se vérifier dans le quotidien s'il y a des ressources financières et humaines qui l'accompagnent. Est-ce que vous avez évalué l'impact de ce nouveau projet de loi sur votre organisation en termes de ressources financières et humaines?
Le Président (M. Beaumier): Mme Rocheleau.
Mme Rocheleau (Lucille): Alors, je voudrais juste corriger, si j'ai donné cette impression-là. C'était pas du tout dans ce sens-là que j'avais parlé de la reconnaissance des actions de santé publique des CLSC, c'est pas pour faire un arbitrage avec le médecin à domicile. Effectivement, on a encore beaucoup de travail à faire de ce côté-là. Il nous manque beaucoup de ressources. Donc, c'était simplement pour dire que la notion de promotion et de prévention n'a jamais été une notion qui a été reconnue officiellement comme étant, je dirais... On en parle, mais on s'est pas donné les mécanismes pour s'assurer que, sur le terrain, ça va se concrétiser et on va y accorder l'importance qu'on doit y accorder ? pas au détriment des autres choses ? simplement accorder l'importance qu'on doit accorder à la promotion et à la prévention. Et, en ce sens-là, le projet de loi est intéressant, et c'est le programme de santé publique qui va y mettre cette importance-là. Et c'est sûr que, si on développe un programme national et qu'on développe des activités et qu'on doit aller jusqu'au plan local, c'est bien évident qu'il va falloir qu'il y ait des ressources qui accompagnent ce développement-là de programmes. Mais ce qu'on a aussi, c'est qu'on a déjà des ressources qui sont sur le terrain, et il y a certaines activités dans les programmes de santé publique, si on tient compte des dynamiques du milieu qui peut utiliser déjà ce qui est là. Mais c'est la reconnaissance, dans le fond, de l'importance de ce volet-là que je voulais faire ressortir ici.
M. Fournier: Je vous relance ma question principale, dans le fond, qui est à notre égard. Je vais vous expliquer un peu ce qu'on fait ici: on est législateurs, il y a un nouveau projet de loi, il faut savoir si la pièce législative... Tout le monde se plaint des fois qu'il y a trop de lois puis qu'il y a trop de règlements puis qu'on sait pas, on peut pas se retrouver. Et, pour vérifier si une loi va vraiment atteindre le but qu'elle se donne, des fois il faut aussi qu'il y ait des moyens qui l'accompagnent.
n(11 h 20)n Alors, je vous relance la question: Vous avez étudié ce projet de loi là. Vous semblez y avoir décelé pour vous une reconnaissance d'un rôle. Peut-être souhaitez-vous ? c'est ce que je comprends ? une présence plus importante dans le champ de la prévention et de la promotion en termes de ressources financières et de ressources humaines pour votre regroupement. Est-ce que vous avez évalué ce que ça peut représenter en termes financiers? Vous allez me dire que ça dépend du programme, mais, néanmoins, vous avez sans doute une petite idée de ce que ça doit représenter, ne serait-ce que des projets que vous auriez voulu faire dans le passé et que vous avez pas faits. Est-ce que vous avez fait une analyse comme celle-là?
Le Président (M. Beaumier): Mme Rocheleau.
Mme Rocheleau (Lucille): Alors, on n'a pas fait une évaluation globale de ce ça pourrait avoir comme impact parce qu'effectivement ça va être dépendant des programmes qu'on va développer. Mais, concrètement, sur le terrain, peut-être pour vous donner des exemples plus précis, je demanderais à Mme Lamontagne peut-être de vous répondre. Mais ça sera pas sur le plan national, ça va être plus au niveau local.
M. Fournier: ...au hasard!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Beaumier): Mme Lamontagne.
Mme Lamontagne (Renée): Je vais sans doute décevoir à la fois Mme Rocheleau et M. Fournier parce que ma réponse sera pas du palier local, elle va être plus nationale et elle répondra pas effectivement, elle sera pas chiffrée.
Quand on parle de l'ordre des moyens... Et je pense que la loi effectivement nous donne des indicateurs qui sont encourageants. La suite est à venir, mais, dans les moyens ? M. le ministre y faisait allusion tout à l'heure ? la première chose qu'il faut donner, c'est des orientations claires, un plan de match clair au palier national et une bonne articulation, une appropriation par le palier régional par la suite, de sorte effectivement qu'il puisse se définir des choses plus précises au palier local.
Dans l'ordre des moyens, il y a les ressources, mais il y a aussi un autre aspect des moyens qui est effectivement de bien définir ces orientations nationales de façon très, très claire, la partie prescriptive de façon claire, de donner la place à l'émergence dont on a besoin pour permettre l'appropriation par les citoyens. Le soutien très clair effectivement des paliers régionaux et nationaux à l'action locale, ça, ça fait partie de l'ordre des moyens. C'est aussi important que les ressources parce que, dans les ressources, elles sont pas toutes au palier local et elles doivent pas toutes être au palier local. Mais il faut que les ressources des autres paliers se situent, je vous dirais, à la fois en amont et en aval au soutien de l'action locale, c'est-à-dire en fournissant l'expertise, la connaissance, et en fournissant le soutien à l'évaluation aussi, pour être sûr qu'on reste dans le champ, je veux dire, qu'on reste dans la bonne ligne, qu'on sorte pas des lignes directrices.
Dans l'ordre des ressources, faut bien admettre que, dans le système de santé québécois, le parent pauvre, c'est la prévention et la promotion. Ça, de façon générale, faut l'admettre effectivement. Ça fera jamais le poids, ça ne fait pas le poids avec l'ensemble des investissements qui sont consacrés au domaine curatif.
Mais on doit aussi... Un des avantages d'une loi comme celle-là, même si on ne fait pas partie du système riche de la santé, il reste de la place, il demeure encore des espaces pour de la révision d'activités, avoir une approche plus critique et se recentrer finalement sur des objectifs de résultats dont on convient ensemble, et il y a sûrement une place pour une révision, pour permettre justement de remettre les effectifs et les ressources au service des objectifs qu'on veut atteindre tous ensemble, d'avoir une activité qui est somme toute assez douloureuse, il faut en convenir, pour vraiment se recentrer sur des objectifs prioritaires.
Je pense que, si on veut être honnêtes, même nous, les CLSC, ça a été difficile parfois, mais les exercices auxquels ça nous a confrontés, la pression du curatif, ça a été de remettre en question des activités de prévention dont la nécessité restait à... dont l'utilité et la pertinence restaient à démontrer. Ça nous met dans une dynamique comme celle-là de vraiment se dire: Dorénavant, on doit s'assurer que l'argent qu'on va chercher de façon coercitive dans la poche des citoyens on l'utilise effectivement de la façon la plus efficace et la plus pertinente avec des activités et des moyens qui donnent des résultats en termes de prévention et de promotion.
Le Président (M. Beaumier): Merci. M. le député de Châteauguay.
M. Fournier: Je pense que madame voulait compléter.
Mme Rocheleau (Lucille): Oui, je voulais juste compléter...
Le Président (M. Beaumier): Ah, excusez. Allez-y, madame. Allez. Je m'excuse.
Mme Rocheleau (Lucille): ...par un exemple, dans le fond, qu'on est en train de vivre actuellement qui est toute la compagne de la méningite. Alors, la campagne de la méningite est une orientation qui a été donnée nationalement. Dans ce cadre-là, tous les acteurs régionaux de la santé se sont mobilisés pour déterminer un peu de quelle façon ça convenait de le faire sur leur région, mais on a mobilisé aussi tous les CLSC pour voir, concrètement, sur le terrain, comment ça se passerait. Bon. Chacun des niveaux a son expertise et ses façons de faire.
Mais, pour soutenir le niveau local, ce qu'on a fait... D'abord, on avait des orientations claires ? O.K.? Ça, ça va ? mais on a aussi donné des argents aux CLSC pour être capable d'ajouter les ressources supplémentaires qu'une telle campagne ? on appelait une corvée nationale ? nécessite. Donc, dans ce cadre-là, on va avoir des ressources supplémentaires qui vont nous permettre de continuer nos activités régulières mais de faire un blitz par rapport à la campagne de vaccination. Mais, en même temps, au niveau régional de santé publique, on a le soutien professionnel de ces experts de santé publique là au niveau local. Ils ne viennent pas faire la job à notre place, mais ils viennent nous soutenir, et ils développent aussi des outils pour nous faciliter le travail sur le terrain. Alors, je trouve que c'est un exemple, la campagne de méningite, qui fait qu'on pourrait la reproduire dans d'autres objectifs aussi qu'on vise.
Le Président (M. Beaumier): M. le député de Châteauguay.
M. Fournier: Oui, merci. Je veux juste changer d'angle un peu pour ma dernière question. Tantôt... Dans votre document, vous parlez d'une plage ouverte, là, dans le programme ? c'est à la page 6 ? une plage ouverte dans le programme national. Vous parlez du rôle qui devrait vous être dévolu à l'égard de la confection de ce plan national. Je vais vous poser une question sur la plage ouverte, mais je veux revenir sur ce que le ministre vous disait, là, que, dans le fond, au niveau national, il n'y avait pas de problème à faire une place au local, que parfois c'était plus le régional qui pouvait, là, qu'ils hésitaient, peut-être... Je sais pas. Une chose est sûre, en tout cas, quant à moi, là ? peut-être que je me trompe, je sais pas si la bataille devrait être très, très longue ? je comprends que le régional, depuis le projet de loi n° 28, a quand même changé. Il a un certain lien direct avec le national. Alors, j'imagine que ce que disait le ministre, c'est, dans le fond, porteur pour vous, si on tient compte du projet de loi n° 28 et s'il faut prendre comme avérés ses propos à l'égard de l'état d'esprit du national. Puisque le régional, avec le projet de loi n° 28, n'en est que le prolongement, probablement que votre bataille sera de plus courte durée.
Ceci étant, dans votre mémoire, vous parlez donc de cette plage ouverte. D'autres, dans d'autres mémoires, nous parlent d'un plan qui est beaucoup plus en termes d'atteinte de résultats mais vraiment pas ciblés, très général, je dirais. Pourtant, je nous entends tous dire qu'il faut qu'on se donne des cibles claires. Aidez-moi un peu, là. Des fois, c'est clair quand c'est précis. Alors, dites-moi comment la plage ouverte va rester claire, un objectif très, très précis, ou comment... Prenez votre exemple, si vous voulez, là, parce que, sur la méningite, je veux dire, c'était précis, là. Je comprends que vous nous dites que c'est national puis vous le faites comme vous voulez, là, mais, tu sais, un vaccin, c'est un vaccin, là. Qu'on le fasse à Gaspé, ou qu'on le fasse à Châteauguay, ou qu'on le fasse à Rouyn, là, j'imagine qu'on le donne pareil. Mais aidez-moi à comprendre votre plage ouverte, les choses qui sont claires et comment on s'adapte au terrain.
Le Président (M. Beaumier): Merci. Nous possédons un crédit d'à peu près une minute, une minute et demie.
Mme Rocheleau (Lucille): Alors, très, très rapidement, là-dessus. La plage ouverte, quand je vous parlais, tout à l'heure, qu'il y a quatre fonctions en santé publique, pour nous autres, la plage ouverte est importante par rapport à la promotion de la santé et à la prévention en général.
Pour ce qui est des... Quand ça touche plus la protection de la santé publique ou comme la vaccination, je veux dire, effectivement, la vaccination, on n'a pas à la discuter, on la fait. Ce volet-là peut être prescriptif du national au local, on n'a pas de problème. Mais quand on parle de promotion et de prévention, il faut qu'au niveau national, qui est prescriptif, ce soit des objectifs, des orientations claires, mais que la façon de les atteindre soit... qu'il y ait une plage ouverte pour justement permettre à toutes les dynamiques des communautés locales de s'exercer.
Le Président (M. Beaumier): Merci bien. Alors, je remercie M. Tremblay, Mmes Rocheleau et Lamontagne, M. St-Amand également.
Alors, avant de suspendre quelques secondes, j'inviterais les représentants du Collège des médecins du Québec à se joindre à nous, et pour laisser aussi la présidence à mon collègue de Masson.
(Suspension de la séance à 11 h 29)
(Reprise à 11 h 32)
Le Président (M. Labbé): Alors, maintenant... Nous sommes maintenant prêts à procéder à une deuxième audition, avec le Collège des médecins. Alors, sans plus tarder... Dr Lamontagne, vous êtes mondialement connu maintenant, alors vous connaissez un petit peu les règles du jeu. Alors, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire avec votre équipe, ensuite nous aurons 40 minutes qui seront réparties équitablement entre les deux formations politiques. Alors, sans plus tarder, je vous cède la parole.
Collège des médecins du Québec (CMQ)
M. Lamontagne (Yves): Merci, M. le Président. M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les parlementaires, d'abord j'ai l'impression que c'est l'avant-midi des Lamontagne puisque Mme Lamontagne, il y a M. Lamontagne et Mme Lamontagne qui est secrétaire de la commission.
M. Trudel: ...
M. Lamontagne (Yves): C'est ça, oui. Vous savez, on descend tous des baquets même si on est encore un peu minces. Je voudrais vous présenter également, avec moi, ce matin, les gens qui m'accompagnent. Tout d'abord, le Dr Jean-Marc Lepage, qui est médecin de famille et qui travaille également en santé au travail et qui est le vice-président du Collège, de même que le recteur Jean Robert, qui est spécialiste en microbiologie et maladies infectieuses et qui ? il a deux spécialités, Jean ? est également spécialiste en santé communautaire et qui est membre du comité exécutif du Collège.
D'abord, je vous dirais bien sûr merci de nous recevoir, et ce, malgré les courts délais auxquels nous étions à nouveau confrontés. Nous tenons à vous faire part du point de vue du Collège des médecins du Québec relativement au projet de loi qui vise la refonte du dispositif législatif sur la santé publique. Cet exercice, réclamé depuis plus de 15 ans, faisait d'ailleurs l'objet d'une recommandation de la commission Rochon.
Je vous rappelle que la Loi sur la protection de la santé publique, datant de 1972, est aujourd'hui en grande partie désuète en ce qu'elle ignore une fonction essentielle de santé publique, celle de la surveillance de l'état de santé de la population qui permet de connaître, prévoir, agir et évaluer et aussi rendre compte. De plus, elle occulte les fonctions de promotion de la santé et de prévention de la mortalité et de la morbidité que, pourtant, on sait évitables.
Par ailleurs, le contexte juridique a lui aussi passablement évolué depuis 1972. Pensons à l'adoption des chartes des droits et libertés de même qu'aux lois qui visent l'accès et la protection des renseignements personnels. Les droits, ainsi mieux affirmés, doivent parfois, dans des circonstances précises et pour des motifs de protection de la santé publique, être limités dans leur application. Soucieuse du respect des droits fondamentaux des individus, bien sûr la société s'attend à ce que les limitations soient le moins arbitraires possible, d'où l'importance de légiférer en ces matières.
Enfin, l'évolution des technologies, celle des laboratoires, celle de l'information et des communications ouvrent sans aucun doute des perspectives nouvelles en même temps qu'elles exigent des réflexions sur les enjeux éthiques. Le dépistage massif de maladies génétiques ou l'établissement de profils génétiques d'une population en sont des exemples. En résumé, le Collège est convaincu du bien-fondé d'une refonte de la loi de 1972.
Ceci étant dit, nous tenons absolument à ce que vous reteniez le message suivant. Vous devez saisir l'occasion de diminuer les risques de politisation de l'action santé publique pour reconnaître et faire une plus grande place à la dimension professionnelle de cette action. Au printemps dernier, vous vous en souvenez sans doute, lors du débat, devant cette même commission, sur le projet de loi n° 28 introduisant le directeur national de santé publique, en réponse à une question du critique de l'opposition, M. Fournier, en matière de santé, nous avons fait valoir effectivement notre souci relativement à l'indépendance professionnelle du directeur national de santé publique.
L'autorité du directeur national de santé publique, un genre d'officier médical de santé publique en chef, un peu comme un «chief medical officer», est d'un grand intérêt pour tous dans la mesure où celui-ci pourra vraiment exercer ses responsabilités légales et ses pouvoirs avec toute l'indépendance professionnelle requise. Si vous vous rappelez bien, les représentations que nous avons faites à cet égard l'ont été alors que nous plaidions pour dépolitiser la santé. Nous avons alors appuyé la création du poste de directeur national de santé publique, ayant à l'esprit bien sûr que des mandats lui seraient bientôt attribués sur sa tête par cette nouvelle Loi sur la santé publique.
Aujourd'hui, nous constatons que tel n'est pas le cas. Le projet de loi occulte la création récente de la fonction du directeur national de santé publique, qui sera occupée par un médecin spécialiste. Conséquemment, il ne lui confie aucun mandat légal, il propose plutôt, si je puis dire, que le ministre joue au docteur. Le médicalement requis en santé publique fait place au politiquement requis. Le ministre se substitue aux médecins spécialistes en santé communautaire, mais le chapitre XV du projet de loi ne contient aucune modification à la Loi médicale pour lui permettre d'exercer la médecine. Bref, il s'expose à exercer illégalement la médecine.
Mmes, MM. les parlementaires, en attribuant par une loi des pouvoirs et des responsabilités de protection à divers mandataires, ne perdez pas le réflexe de protéger le ministre, au sens légal du terme bien sûr, contre lui-même. Il y a quelque chose de dangereux, à notre avis, dans ce projet de loi. L'action de santé publique risque d'être asservie à des agendas strictement politiques au détriment des règles de l'art qui doivent servir à promouvoir et à protéger la santé de la population. Un jour, il pourrait arriver à un ministre de vacciner non pas la population à risque dans un comté, mais la population dans un comté à risque. Ce genre de dérive n'est pas une vue de l'esprit.
Pour illustrer notre propos, c'est-à-dire la politisation de la santé publique, prenons l'exemple des examens médicaux imposés par règlement du gouvernement à des catégories de travailleurs. Peut-être ne le savez-vous pas, mais des populations de travailleurs et de travailleuses asymptomatiques doivent se soumettre à des examens médicaux inutiles, coûteux et discriminatoires. Qui a donc prescrit ces examens? Des médecins? Non. Ces examens sont largement reconnus impertinents par la communauté scientifique et par les médecins spécialistes en santé communautaire, ont été prescrits par des médecins... des politiciens, dis-je, qui ont usé de leur pouvoir réglementaire alors qu'ils siégeaient au Conseil des ministres.
L'a b c en santé publique veut que de tels examens ne soient justifiables que lorsqu'ils permettent de prévenir l'apparition ou la progression de maladies liées au travail chez le travailleur qui les subit ou encore lorsqu'ils permettent d'assurer la protection de la santé publique ou celle des collègues de travail. Or, trop souvent ce n'est pas le cas. Pire, ces examens médicaux imposés créent de l'inaptitude et des limitations qui n'ont pas de fondement dans la réalité. Ils entraînent une détérioration objective de la santé publique, ce qui a l'effet contraire et opposé à celui qui pourrait servir de justification à une obligation réglementaire.
Pour qu'un examen médical devienne exigible par un règlement du gouvernement, c'est-à-dire qu'un État impose une telle servitude à une catégorie de citoyens et, de ce fait, limite leurs droits individuels établis par la Charte, il faut une bonne raison. Lorsque l'examen n'est pas médicalement requis, même si la RAMQ le rembourse, il n'y aucune bonne raison en partant. De plus, les lois et règlements qui exigent les examens médicaux ont souvent pour effet de figer des pratiques professionnelles en les rendant imperméables à l'évolution des connaissances scientifiques. Ils imposent aux médecins de poser des actes médicaux désuets ou mal fondés, en contradiction avec leurs obligations déontologiques, lesquelles font aussi l'objet d'un règlement.
n(11 h 40)n Voilà où conduit un peu la politisation en santé, surtout en santé publique, étant donné que l'exercice de la médecine communautaire ne procède pas dans le cadre d'une relation privée, d'un colloque singulier, de la relation médecin-malade.
Aujourd'hui, nous demandons que tous les pouvoirs et responsabilités qui comportent les exigences d'une expertise médicale et d'une indépendance professionnelle soient explicitement confiés au directeur national de santé publique plutôt qu'au ministre de la Santé et des Services sociaux. Il s'agit non seulement d'une entreprise d'harmonisation avec la Loi médicale mais d'une affaire de bon sens dans l'intérêt public et pour la protection de la santé publique.
Nous demandons également de clarifier la procédure de destitution du directeur national de santé publique. Pour respecter l'indépendance professionnelle du médecin spécialiste qui exerce les responsabilités et pouvoirs d'un directeur national de santé publique, nous croyons que des règles claires d'imputabilité et une procédure non partisane de destitution s'imposent. Le ministre, quel qu'il soit, au sens légal du terme, à lui seul ne doit pas avoir droit de vie et de mort sur le directeur national de santé publique. En commission parlementaire, sur le projet de loi n° 28, le ministre nous a confirmé qu'il était dans son intention bien sûr de respecter l'imputabilité de ce médecin à l'endroit de son ordre professionnel. Nous ne doutons absolument pas de ses intentions mais nous envisageons déjà, hélas!, que son successeur risque, lui, de ne plus s'en rappeler.
Enfin, concernant la structure du projet de loi telle qu'en témoignent les sujets abordés dans chaque chapitre et section, elle nous apparaît correcte. Aussi, nous irons de commentaires propres à chaque chapitre de loi. Et là je vais résumer bien sûr, à cause du temps, et vous avez le texte devant vous.
En ce qui a trait au programme national et aux plans d'action régionaux, l'article 5 de ce chapitre, à notre avis, doit être modifié pour confier au directeur national de santé publique l'élaboration du programme national de santé publique. Il revient au ministre d'élaborer les politiques et de convenir avec le Conseil du trésor des programmes budgétaires qui, en accord avec la Loi sur l'administration financière, serviront à financer les activités du système de service. Ici, nous parlons d'un programme dont le contenu comporte une haute teneur scientifique et professionnelle. C'est pourquoi la loi doit confier au directeur national de santé publique les responsabilités de l'élaborer, de coordonner sa mise en oeuvre aux plans régional et local et de l'évaluer.
Nous sommes par ailleurs, je vous dirais, inquiets de la procédurite qui est introduite par les articles 8 à 16. C'est un peu comme à l'image des poupées russes, on y prévoit fabriquer plan par-dessus plan, prenant soin de prescrire que les projets de plans doivent faire l'objet tantôt d'une procédure de concertation, tantôt d'une démarche de consultation, pour conclure que le premier plan d'action local, dont la négociation aura peut-être dilué toute la substance, ne sera mis en oeuvre qu'une fois déposé, peut-être même après avoir été soumis à l'examen du comité d'éthique éventuel, comme le permet la disposition au chapitre suivant.
En ce qui a trait justement au comité d'éthique, le principe d'un comité d'éthique nous semble très opportun. Nous souhaitons qu'une place quelconque lui soit faite pour des mandats d'initiative, mais des mandats qui ne compromettraient pas la réalisation de ceux lui venant du ministre ou d'un directeur de santé publique. Nous croyons que ce comité d'éthique devrait relever directement du directeur national de santé publique. De plus, la composition suggérée par l'article 21 devrait être revue. D'abord, qu'est-ce qu'un éthicien? Un avocat? Un représentant du ministre? Un représentant du clergé? Je pense que même les éthiciens entre eux autres s'entendent pas pour se définir. Et on suggère davantage, si vous voulez, que ce comité soit donc composé du directeur national de santé publique, qui le préside, d'un directeur régional de santé publique, de deux professionnels de la santé et de deux personnes intéressées mais n'ayant aucun lien professionnel avec le réseau de la santé et des services sociaux. Il y aurait place, par l'entremise de ces représentations, à des gens qui ont vraiment une compétence en éthique. Le comité devrait pouvoir s'adjoindre des personnes-ressources au besoin, et le ministre pourrait nommer des membres de ce comité après consultation du directeur national de santé publique.
Au chapitre VI, en ce qui a trait à la promotion et prévention de la santé, le premier article, soit l'article 50, énonce une possibilité qui a toujours existé. L'inscrire dans une loi sans en faire une obligation changera-t-il vraiment quelque chose? Pourquoi pas un «doit» plutôt qu'un «peut»? C'est une première question à laquelle on n'a pas de réponse. Et d'autant plus que, quand on regarde l'article 50 aussi, c'est un peu comme... ça nous donne un peu l'impression que tout le monde peut faire ce qu'il veut, et on peut se retrouver avec des directives complètement contradictoires d'une région à l'autre.
Plus fondamentalement, nous pensons que la responsabilité de conseiller le gouvernement ou un ministre sur une question de santé publique devrait être celle du directeur national de santé publique. Quant à lui, le ministre de la Santé et des Services sociaux, qui est à l'origine de la nomination du directeur général... du directeur national de santé publique, devrait être en mesure de le soutenir dans les avis qu'il donne. Il est bien certain qu'un ministre ou un gouvernement peut faire fi d'un avis, il en assume les conséquences. Mais, si le ministre de la Santé était lui-même le conseiller du gouvernement en santé publique, ça poserait un problème de crédibilité quelles que soient les compétences de la personne à qui le premier, ministre a confié la charge du ministère de la Santé. Bref, c'est une question d'indépendance professionnelle.
En ce qui a trait au chapitre II sur la fluoration de l'eau potable, je vous dirais, cette section-là devrait accorder au ministre de la Santé un pouvoir spécifique de dépenser afin de soutenir financièrement toute l'initiative de promotion de la santé et de prévention déployée localement par une corporation municipale ou un de ses arrondissements qui correspond aux objectifs du projet national de santé publique. Cela peut vouloir dire de subventionner la fluoration de l'eau mais aussi et surtout bien d'autres interventions locales de santé publique. À cet effet, les articles 54 et 55 pourraient avantageusement être déplacés dans la Loi sur la qualité de l'eau potable, sous la tutelle du ministre de l'Environnement.
Finalement, chapitre IX, traitement obligatoire et mesures de prophylaxie dans certaines maladies contagieuses. La section 1 de cet important chapitre nous semble devoir être réexaminée attentivement. C'est ici que, pour des motifs de protection de santé publique, on retrouve les dispositions sur lesquelles s'appuyer pour contraindre, si nécessaire, une personne à se faire traiter. Cette contrainte peut aller jusqu'à l'hospitalisation d'une personne contre son gré.
À notre avis, les articles 80 et 81 sont absolument inutiles. À l'article 80, quelle obligation veut-on faire au médecin que son code de déontologie ne contient déjà? Veut-on qu'il n'examine pas lui-même la personne souffrante plutôt que de la faire examiner? Et évidemment l'article pourrait dire que le médecin doit prendre sans délai les mesures requises pour lui assurer les soins requis par son état, ce qui va de soi de toute façon, à mon avis. L'article 81 est également inutile. Un malade urgent doit être admis. Et c'est évident, le 80 comme le 81, c'est évident pour des médecins. J'ai l'impression que c'est des avocats qui ont écrit ça, ils savent pas c'est quoi, la médecine, certain.
En lien avec l'article 85, on est aussi en désaccord avec un règlement du ministre qui viendrait prévoir l'obligation d'admettre d'urgence une personne. L'exercice de la médecine a été confié, en vertu des dispositions de la Loi médicale et des règlements qui en découlent, à des personnes qui détiennent un permis à cette fin, soit les médecins. Même si on nous servait la sauce à l'effet que, dans la loi, le mot «ministre», ça veut dire dans les faits le directeur national de santé publique, nous n'y adhérons pas. Dans la Loi médicale, on ne parle pas du ministre qui soigne les gens. Dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux, on ne parle pas du ministre qui admet à l'hôpital. C'est une responsabilité médicale de le faire. Il faut soigneusement mesurer les conséquences du glissement que propose le projet de loi. La journée où un médecin dira que ce n'est pas de sa responsabilité mais de celle du ministre d'admettre une personne qui ne l'a pas été, il sera trop tard. Et, personnellement, je crois que c'est pas au ministre à faire ça. Pensez aussi au temps que ça peut prendre dans le cas d'un seul malade.
Enfin, signalement aux autorités publiques. Je vais sauter ça pour le moment parce que je vois le temps qui file, de même que les pouvoirs aux autorités.
La protection des renseignements, peut-être, en terminant. L'article 127 devrait permettre de couvrir la confidentialité de tous les renseignements personnels obtenus par le directeur de santé publique dans l'exercice de ses fonctions découlant de la présente loi et non seulement dans quelques chapitres de loi.
Donc, bref, à cause du temps, je vous dirais, puisque vous avez le texte: Ceci termine la présentation des commentaires et des suggestions que vous fait le Collège en rapport avec le contenu du projet de loi 36 sur la santé publique. Nous souhaitons qu'il soit utile aux parlementaires et nous demeurons bien sûr disponibles pour fournir tout autre éclairage qui permettrait de bonifier ce projet.
Enfin, en comptant sur votre appui, M. le ministre, je peux vous dire que le Collège est prêt à s'engager à examiner la pertinence de produire et de diffuser des lignes directrices ou des guides de pratique, une fois bien sûr que la structure sera bien établie, qui pourraient avantageusement remplacer les règlements qu'on estime désuets en apportant aux médecins des règles de bonne pratique clinique qu'il faut suivre évidemment pour protéger le public et les travailleurs. Je vous remercie.
n(11 h 50)nLe Président (M. Labbé): Alors, merci, Dr Lamontagne, pour la qualité de votre présentation. Alors, sans plus tarder, je cède maintenant la parole au ministre pour une période de 20 minutes.
M. Trudel: Merci, M. le Président. Dr Lamontagne, vos collègues, bienvenue à cette commission parlementaire et d'y jeter de l'éclairage sur les bonifications à un projet qui va devenir une loi, loi qui n'a pas été révisée depuis 29 ans. Et vous-même et vos collègues sur le terrain effectivement ont vécu beaucoup de changements de pratique, qui font maintenant que nous devons moderniser, adapter la loi pour fournir les meilleurs instruments, les meilleurs outils possible et que cela se fasse bien sûr dans le respect des responsabilités professionnelles et des responsabilités de chacun.
Je comprends que vous demandez au ministre de pas jouer au docteur, mais vous jouez allégrement au politicien, mon cher docteur. Et, en pareille matière, je pense qu'il nous faut jeter davantage d'éclairage parce que, là, il y a une question, il y a une question importante à laquelle il faut répondre, c'est celle de l'imputabilité, à deux égards. L'imputabilité professionnelle de l'acte de nature médicale, elle est devant les pairs. Elle est devant les pairs, elle sera devant les pairs et elle demeurera toujours de par-devers les pairs, même avec ce projet de loi qui deviendrait une loi. Et, à cet égard-là, je vais vous dire la façon dont je lis ces... les affirmations que vous faites de totalement dédier la responsabilité de la santé publique uniquement à une personne en situation professionnelle redevable à des pairs. En fait, c'est pour moi une déresponsabilisation, une déresponsabilisation du ministre de la Santé.
M. Lamontagne, qui va répondre publiquement des actions entreprises en matière de santé publique et qui va porter la responsabilité des corrections nécessaires auprès de la population, que ce soit au niveau local, régional ou national? Cela m'inquiète beaucoup d'y voir une tendance à la déresponsabilisation sociale du politique, du parlementaire dans notre système démocratique et plutôt y voir une dérive vers une responsabilité professionnelle nécessaire, nécessaire, quand on est dans un secteur aussi important que celui de la santé ? mais il vaut aussi pour les autres professions. Comment va-t-on éviter cette déresponsabilisation politique à l'égard de la santé ou comment, à l'inverse pourrait-on dire, va-t-on s'assurer de la responsabilité et de l'imputabilité publiques des actions en santé publique si nous adoptions cette direction?
Le Président (M. Labbé): Dr Lamontagne, c'est à vous, la parole.
M. Lamontagne (Yves): Oui. Je vous dirais que c'est intéressant, la discussion qu'on a, M. le Président, et je suis en partie d'accord avec vous. Ce que je trouve intéressant, vous parlez de la... de l'imputabilité professionnelle, où le médecin doit être jugé devant ses pairs, et, vous, vous interprétez ça comme une déresponsabilisation du ministre. Mais, moi, j'aimerais vous entendre dire qu'il y a une autre sorte d'imputabilité qui s'appelle l'imputabilité politique.
Nous, ce qu'on dit, c'est que l'imputabilité professionnelle, laissez-la aux docteurs. En bout de ligne, vous l'avez encore, le contrôle. On vous a dit: Le directeur national de la santé publique pourrait vous donner des avis puis vous pourriez faire fi de ces avis parce que, en haut de lui, avec sa responsabilité professionnelle, son imputabilité professionnelle, il y a de l'imputabilité politique et donc vous pourriez faire fi absolument de son avis et, vous, décider, sous le chapeau de votre imputabilité politique, de décider de le mettre en marche.
De votre côté, vous avez raison, je veux... Même si vous dites que je fais un peu le politicien, je veux pas aller jouer dans votre talle mais je veux pas non plus que vous veniez jouer dans notre talle. Vous comprenez? C'est ça, l'affaire. Et que, quand le médecin est là avec son imputabilité professionnelle, j'aime autant, moi, qu'il ait pas les mains attachées dans le dos, dans son imputabilité professionnelle. C'est juste ça. Qu'il vous dise quelque chose, vous êtes pas d'accord puis, vous, vous décidez autrement? Aucun problème avec ça. Là, c'est pas lui qui répondra, c'est vous qui répondrez au peuple. Et, si lui fait une erreur au niveau professionnel, c'est pas vous qui répondrez, c'est lui qui va passer en discipline chez nous. Mais, nous autres, on va l'avoir sur le côté professionnel puis vous, vous allez l'avoir, l'imputabilité au niveau politique.
Donc, à mon avis il y a aucune déresponsabilisation ni du ministre ni du gouvernement. C'est que ça fait en sorte, à mon avis, que, vous, vous avez pas les mains attachées avec lui puis, lui, il a pas les mains attachées avec vous non plus et que chacun a son imputabilité chacun de son côté.
M. Trudel: C'est extrêmement important que cet élément-là soit rendu très clair parce qu'il y aurait changement de régime si nous diminuions ou nous réduisions l'imputabilité, on va l'appeler parlementaire, l'imputabilité publique du ministre et du gouvernement à l'égard des actions posées et de comment s'est prise une décision à l'égard ? ce qui est devant nous ? d'un cas de santé publique. Parce que vous disiez d'entrée de jeu: En santé publique, la loi, jusqu'à maintenant, et la continuité qui est assurée, c'est prévoir, agir, évaluer et rendre des comptes. Prévoir, agir, évaluer et rendre des comptes. Sur le terrain d'un système public de santé, comme nous le disait d'ailleurs la dernière commission qui a examiné le système, décider, agir, évaluer et corriger, et corriger, ça, c'est la responsabilité dans un régime public.
Le projet de loi qui est devant nous, il ne prévoit pas qu'il y aura des diagnostics de posés par celui qui assume la responsabilité publique. Pourquoi en arriver, je pense, à une... aussi loin que presque une dénaturation du système, de dire que la personne désignée par l'État pour assumer la responsabilité ne puisse pas disposer des informations professionnelles nécessaires pour prendre une décision et qu'il en rende compte en public et qu'il corrige, et qu'il corrige, s'il y a lieu?
Comment va-t-on en arriver à s'assurer, disons-le simplement, que le public soit en contrôle de son système de santé, et de son système de santé à l'égard de la santé publique, sans que l'on ait à toucher au jugement apporté sur un acte professionnel? Comment arriver à cela si on enlève la partie d'imputabilité au représentant de l'État?
Le Président (M. Labbé): Alors, Dr Lamontagne.
M. Lamontagne (Yves): Oui, je vous suis... Je vous suivais jusque-là, mais là vous m'avez perdu un petit peu, là. Je vais me retrouver.
Je pense pas... Encore là, je pense que c'est comme si ça vous faisait peur, cette idée-là. Je vais vous donner, dans mes images... Vous savez qu'on est habitué à se parler ensemble, j'ai des images. Moi, j'appelle ça «le beau petit couple». Chacun a son affaire à faire et chacun truste l'autre, jusqu'à temps que ça va bien, là. Et, une fois que les choses sont claires... Les gens tantôt en ont parlé tantôt. Ce que vous avez soulevé puis nos affaires qu'on a parlé, au fond, je vous écoutais puis c'est la même affaire que dans le management: planification, organisation, exécution, contrôle. C'est la même chose que dans le management. Donc, ça, je suis tout à fait d'accord avec ça. C'est écrit dans les livres depuis, depuis longtemps, et je suis d'accord avec ça.
Le contrôle, il y a deux façons de l'exercer. Ça peut être un contrôle très autocratique où c'est moi qui ai le bout et ça peut être un contrôle beaucoup plus démocratique. Et c'est dans ce sens-là. Moi, je vous dis: Le contrôle, il est davantage démocratique lorsque vous avez un tandem qui fonctionne bien ensemble mais où chacun des associés dans la compagnie est à 50-50, si je peux dire, et non pas qu'il y en ait un qui est un actionnaire très majoritaire et que l'autre est obligé de se fermer parce que, sans ça, il va vendre la compagnie. C'est juste ça, notre crainte.
n(12 heures)n Et la crainte, comme je vous dis, elle est pas de votre côté, contre vous. Elle est la crainte que le directeur national de santé publique, qui lui est dans notre camp, au niveau professionnel, que, lui, il se fasse manger par le politique. J'ai pas de crainte à l'inverse, moi, pas du tout. C'est dans ce sens-là.
Le Président (M. Labbé): M. le ministre.
M. Trudel: Cela me rassure un tantinet.
M. Lamontagne (Yves): Bien, c'est bien...
M. Trudel: Cela me rassure un tantinet, cher docteur. Ce que je vais vous dire: J'ai une réaction assez épidermique à ce que l'on mette sur pied de nouvelles bureaucraties nationales pour administrer un système public de santé. Je suis assez allergique à ça. Je ne dénie pas qu'il y ait certaines possibilités, mais de confier à de grandes bureaucraties nationales l'administration d'un système public de santé qui constitue une valeur fondamentale ? vous l'avez bien illustré, c'est un choix vers la démocratie dans un système de santé ? ça comporte des difficultés, ça comporte des difficultés. On dit souvent, par exemple: Il y a pas de listes d'attente aux États-Unis. Il y a pas de listes d'attente pour les services médicaux aux États-Unis. Non. Il n'y a pas de listes d'attente pour les services médicaux aux États-Unis, il y a seulement 56 millions d'Américains qui n'ont pas accès à des services médicaux. Ils sont pas dans une liste d'attente. Quand on est dans une régime public, oui, il y a une partie d'accessibilité avec laquelle il faut ? c'est pourquoi j'ajoute toujours aussi, à mon avis, à la lecture des faits, pour pratiquer la médecine au Québec ? il faut avoir un degré plus élevé de conscience sociale que d'aller pratiquer aux États-Unis. Parce qu'aux États-Unis il suffit d'avoir la capacité de fermer l'oeil gauche pour ne pas voir les 56 millions d'Américains qui ont pas de services médicaux accessibles, et la vie est belle, Il faut avoir un degré de conscience sociale plus élevée, j'en suis convaincu, pour pratiquer la médecine au Québec et le faire comme nous la pratiquons actuellement. C'est un petit peu plus difficile, surtout que, chez les Américains, ils sont à 13,5 % de leur produit intérieur brut, mais toujours pour ceux et celles qui ont du fric. On vérifie pas la carte de citoyenneté pour l'admissibilité au régime public de santé aux États-Unis, on vérifie la carte de crédit en entrant. Alors, quand tu n'as que des cartes de crédit bien dotées, cela est plus facile.
À cet égard-là, quand vous dites à la page de votre mémoire... ? je pense que c'est à la page 8 ? la question de l'accès aux renseignements personnels, dans l'éventuel registre de vaccination, je vais reprendre la phrase: «L'accès aux renseignements personnels contenus au registre devrait être accordé au directeur national de santé publique, plutôt qu'au ministre. Il devrait aussi être accordé à un type de personnel du CLSC, et non à l'établissement.» Je trouve ça large. Je trouve ça large, de confier, encore là, l'accès à des renseignements, à des renseignements à caractère nominatif, à caractère personnel, à des personnes qui sont d'une part liées au secret processionnel ? ça, ça va et rien n'est changé ? mais, d'autre part, à des gens qui n'ont pas à répondre publiquement de cette responsabilité. Vous trouvez pas ça un peu large, docteur?
M. Lamontagne (Yves): C'est juste que je vous dirais: Pour cette affaire-là, le danger toujours, c'est qu'il y a des notions de confidentialité. Vous savez, on est dans tout le domaine justement de l'informatisation et vous savez comme moi que c'est un problème très épineux au niveau de l'éthique. Jusqu'où on va? Où on arrête? Qu'est-ce qu'on dit? Qu'est-ce qu'on prend dans le dossier? Et donc, c'est un peu, si vous voulez, c'est un peu de juste faire attention où là aussi il pourrait y avoir un glissement en ce qui a trait à la confidentialité des dossiers ou des choses qui sont rapportés à un professionnel de la santé d'où, si vous voulez, l'idée de dire ? et c'est bien marqué ? «à un type de personnel du CLSC» par exemple, parce que c'est là que les soins se passent; c'est pas dans l'établissement «overall», si vous voulez. Il y a une notion de relation professionnel de la santé-malade qui se passe. Et donc, dans ce temps-là, c'est juste comme un avertissement de faire attention où ça pourrait sortir, puis à un moment donné on peut se mettre dans le trouble avec ça, à cause de ça, ou il y a des choses qui vont sortir comme ça.
Je voudrais juste vous dire ? parce que tantôt vous avez parlé d'augmenter la bureaucratie, vous savez comment j'haïs ça la bureaucratie ?...
M. Trudel: On est deux dans ce club-là, je sais ça.
M. Lamontagne (Yves): ...il faut pas augmenter la bureaucratie. Moi, ce que je vous dis, c'est pas de créer une affaire en-dehors du ministère avec une autre structure, c'est: Garder la même structure, moi, ça me fait rien, c'est juste qu'il y ait pas trop tendance, si vous voulez, que l'un ait une emprise sur l'autre dans chacun de leur domaine. Et comme je vous dit: Moi, je sépare très bien l'imputabilité professionnelle de l'imputabilité politique. Et, en bout de ligne, il est évident, M. le ministre, que c'est vous qui avez à prendre une décision au bout. C'est comme votre expert, ça, que vous avez pour vous conseiller. Là, vous avez deux choix: ou vous le croyez, votre expert, ou vous le croyez pas; ou vous le croyez, mais, pour des raisons économiques, politiques, sociales ? ce que vous voulez ? vous dites à votre expert: «C'est bien de valeur, mais je peux pas faire ça», ou «je peux le faire», ou «j'ai pas les moyens de le faire». Mais c'est vous, en bout de ligne, qui avez cette imputabilité face au public, au système public et aux politiques. Et, là-dessus, je pense que ça handicaperait pas et, surtout ? je suis bien d'accord avec vous ? il faut surtout pas augmenter la bureaucratie encore.
Le Président (M. Labbé): M. le ministre.
M. Trudel: Donc, à cet égard-là, lorsque nous serons amenés à préciser d'abord l'existence d'un directeur national de la santé publique ? parce qu'on comprend facilement que ce projet de loi qui a été déposé en juin, à la fin juin, l'autre loi sur la gouverne du système de santé et des services sociaux au Québec, nous ne pouvions présumer de l'adoption de la loi ? donc, vont entrer dans la loi la nouvelle disposition de la création du poste de directeur national de la santé publique et aussi des éléments de relation avec la responsabilité publique à l'égard de la personne qui est responsable dans le gouvernement.
Il nous reste combien de temps?
Le Président (M. Labbé): Trois minutes.
M. Trudel: Ah, trois minutes! Bon. Là, une intrigue: des «examens médicaux imposés créent de l'inaptitude et des limitations qui n'ont pas de fondement dans la réalité». Là, ça me prend l'éclairage d'un docteur. Des examens médicaux qui créent de l'inaptitude et des limitations? Je comprends pas!
M. Lamontagne (Yves): Jean-Marc Lepage est bien placé.
M. Trudel: Vous allez me dire ça, là.
M. Lamontagne (Yves): Il pourrait vous en raconter jusqu'à demain, là.
Le Président (M. Labbé): Alors donc, je cède la parole au Dr Lepage. Dr Lepage, vous avez deux grosses minutes.
M. Lepage (Jean-Marc): Ça va être très court. Ça fait référence beaucoup, entre autres, à la loi qui prévoit les examens médicaux pré-emploi pour les policiers, avec un dépistage qui n'est plus adéquat. Exemple... Par exemple, un électrocardiogramme à 22 ans, ça n'a aucune raison d'être; un dépistage de cholestérol, la même chose. Donc, il y a toute une série d'examens qui sont prévus et qui n'ont pas de connotation dans la réalité. Ça fait référence surtout à ces choses-là.
M. Trudel: Mais pourquoi écrire ça, comme ça, que les examens médicaux créent de l'inaptitude?
M. Lepage (Jean-Marc): C'est-à-dire...
M. Trudel: Il y a comme un glissement de verbe, là.
M. Lepage (Jean-Marc): Oui. C'est parce qu'on sait que, dans les examens que vous passez, si vous en passez suffisamment, vous allez avoir des faux positifs et aussi des faux négatifs, de telle sorte que... Par exemple, regardons l'examen de la colonne vertébrale. Ce n'est plus indiqué depuis déjà fort longtemps, depuis 25 ans, et ça se prescrit encore en pré-emploi, beaucoup, de telle sorte que, si on en passe suffisamment, il va y avoir des lésions dépistées par une radiographie de dépistage pour la colonne lombo-sacrée, et ça ne veut pas dire que cet individu-là va développer des problèmes de colonne, tout comme le fait d'avoir une colonne normale n'empêche pas un individu d'avoir mal au dos. Donc, ça a pas de connotation dans la réalité, et c'est pour ça que c'est laissé de côté, mais, dans certains règlements qu'on voit, c'est encore appliqué. Donc, ça fait référence plus à ça, et on se dit que, dans un programme comme celui-là...
Je voudrais peut-être juste faire une petite remarque, puis à l'intérieur de ça, par rapport... il y a un élément important, quand on parle... Dans la proposition qu'on vous fait, par rapport au directeur national et au directeur du réseau de santé publique, c'est de pouvoir établir une ligne d'autorité précise par rapport au niveau professionnel et éviter ce qu'on voit maintenant, cette espèce d'incohérence régionale où il y a des programmes dans une région, il y en a pas dans l'autre. L'approche est différente. Donc, ça fait référence à ça. Le directeur national, avec ses directeurs régionaux, pourrait établir les premiers programmes et s'assurer que ces programmes seront appliqués à peu près partout pareil, quand ils s'appliquent évidemment, parce que c'est sûr que les programmes peuvent être différents d'une région à l'autre. Mais je voudrais juste vous signaler tout le dossier des retraits préventifs, par exemple, de la femme enceinte.
Le Président (M. Labbé): Alors, Dr Lepage, je vous remercie de votre réponse. Il y avait peut-être un petit commentaire pour arrondir le deux minutes.
M. Trudel: Bien, pour dire merci...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Arrondir le deux minutes, pour dire merci pour la présentation et, la même chose, vous avez fait une présentation abrégée, mais on va regarder chacun des aspects que vous soulevez.
Je voulais juste aussi terminer en disant: Je suis pas très amateur de procédure de destitution non plus, hein, parce que ? par exemple, du directeur de santé publique ou du directeur national de santé publique ? parce que s'il y avait, justement, dans votre logique, s'il y avait des gestes à caractère professionnel, nous les porterions au Collège, à l'ordre professionnel concerné, et ça me semblerait justement débarquer dans un champ qui n'est pas celui de la responsabilité publique.
Le Président (M. Labbé): Alors, 22,4 secondes.
M. Lamontagne (Yves): La même chose: j'ai bien confiance en vous, M. Trudel, mais on en a déjà vu d'autres qui étaient pas mal cowboys, puis on risque d'en voir d'autres aussi comme ça. C'est juste ça, ma crainte.
n(12 h 10)n Trois petits points rapidement. Je vais dire, M. le ministre: C'est important de faire le ménage dans la santé publique. Il y a des affaires qu'on sait même pas d'où ça sort puis on sait pas qui fait quoi. Il faudrait peut-être le savoir, puis ça, ça vient d'en haut. Le directeur national, grosse, grosse tâche à faire en partant. Deuxième des choses: la promotion de la santé. Je suis très pour ça, puis c'est sûr qu'il faut mettre de l'argent là-dedans, mais, à un moment donné, on est en train de faire accroire au monde qu'ils mourront jamais, qu'ils seront jamais malades. Vous savez, la perception de la santé par les citoyens, là, c'est très simple, c'est ce qu'on n'a plus quand on est malade; et, si vous voulez changer ça, on a une couple de générations en ligne à faire, là. Troisième des choses: j'entendais aussi parler tantôt du national, du régional et du local, et, pour ce que disait le Dr Lepage, c'est comme, des fois, on dit: On va partir du local pour monter au national. Mais la médecine, comme la santé publique, c'est pas... Il y a des standards nationaux qu'on diffuse au régional ou au local, et j'espère que, ça, ça sera pas perdu de vue, parce qu'on va se retrouver dans un chaos épouvantable. Dans un comté, on va décréter que telle affaire, c'est dangereux, puis l'autre va dire le contraire à côté. Ça va être l'enfer. Donc, il faut quelqu'un en haut et qu'il y ait des directives qui partent d'en haut, du national, pour arriver au régional ou au local.
Qu'il y ait du «fine-tuning» en bas, pas de problème avec ça. Mais on jasait, en montant, Dr Lepage. Quand vous parlez des retraites préventives des femmes enceintes, il y en a un qui dit blanc, l'autre dit noir; une place, le taux de plomb pour les envoyer chez eux, c'est à tel degré, dans l'autre compagnie, c'est un autre, l'autre décide qu'il augmente son taux de plomb, la compagnie risque de fermer parce qu'il va mettre tout le monde dehors à cause de cette chose-là. Ça a pas d'allure, il faut qu'il y ait quelqu'un en haut qui dise: Voici, en s'entend, puis c'est ça. Il y a des bases scientifiques à ces affaires-là aussi, là, c'est pas...
Le Président (M. Labbé): Alors, merci, Dr Lamontagne, pour votre intervention. Alors, pour donner la chance au député de Châteauguay de prendre un bon 20 minutes, alors, je vous cède la parole à ce stade-ci.
M. Fournier: Merci...
Une voix: ...
M. Fournier: ...merci, M. le Président, mais je vous annonce d'entrée de jeu que ma collègue va probablement intervenir aussi tantôt. Donc, ce sera un 20 minutes partagé. Bienvenue à vous, il me fait plaisir de vous revoir, on a l'impression de faire la suite du projet de loi n° 28. D'ailleurs, je vais prendre au vol les quelques commentaires du ministre sur la destitution.
Je pense qu'il faut bien comprendre ? et on l'avait soulevé à l'égard du 28 ? que, comme le pouvoir de nommer comprend celui de destituer, c'est à cet égard-là que vous l'avez amené dans votre mémoire, pour faire comprendre au ministre: Bon, maintenant que vous avez choisi, au gouvernement, de nommer le directeur national, si on veut lui assurer une indépendance, on va le prendre du côté de la destitution. Alors, on touchera pas au mode de nomination, qui, lui, a déjà été prévu il y a trois mois, puis on va regarder l'autre petit bout pour assurer qu'il y a une indépendance. Alors, je pense que c'est dans ce sens-là que vos remarques sont faites. Comme vous avez déjà assisté et qu'on a déjà partagé ensemble, vous savez aussi où je loge, et disons que c'est ce qu'il y a à faire si on veut prendre conscience des lois qui ont déjà été adoptées et qu'on veut assurer une certaine indépendance; c'est de ce côté-là qu'il doit y avoir une action, là, maintenant qu'il a été décidé que ce directeur national serait un sous-ministre et qu'il serait ni plus ni moins que l'employé du ministère.
Je voudrais ajouter sur ces éléments, avant de vous poser une question très concrète sur l'importance, pour vous, de l'indépendance ? et je sais combien l'indépendance, pour vous, est importante ? mais l'importance de l'indépendance à l'égard du directeur national de santé publique notamment, il y a un élément que je voudrais mettre dans le dossier, c'est celui ? et il me semble qu'il est occulté ? c'est celui de la transparence, c'est celui de la diffusion de l'information, celui de la capacité... On parlait de démocratie tantôt. La démocratie n'existe pas s'il y a pas d'information, s'il y a pas de possibilité aux gens de savoir. Et je pense qu'un des éléments à ajouter à la cause de l'indépendance d'un directeur national de santé publique, c'est de s'assurer que, lorsqu'il émet un avis, lorsqu'il a une opinion, lorsqu'il dit: C'est dans telle direction qu'il faut qu'on aille, que cela soit connu, et qu'en toute franchise, en toute ouverture le ministre ? et c'est là que vient jouer le rôle politique qui doit être joué, qui existe dans notre système et qui va continuer d'exister si on veut et moi, j'en suis qu'un système se perpétue ? l'exécutif, le ministre va continuer de vivre avec les décisions qu'il aura prises, mais ces décisions-là seront basées, à la face du monde, sur l'avis qui a été donné et non pas sur: Je décide ça, mes avis sont assurés, ils sont secrets parce que c'est mon sous-ministre. Puis qu'est-ce que tu veux? Tu essaies d'aller obtenir ça par une loi d'accès à l'information, c'est toujours ce qu'on nous dit, d'ailleurs, de faire: Je te les donne pas, passe par la Loi d'accès à l'information. Et il y a des exceptions qui font qu'on ne peux pas le savoir. Comment voulez-vous que la population puisse s'y retrouver en termes d'imputabilité et de démocratie. Alors, je vais quand même mettre cette notion-là de transparence, d'indépendance, de crédibilité, dire au ministre qu'il y a déjà des institutions qui ont un degré d'indépendance dans notre système, qui sont nommées par l'Assemblée nationale. Ça vit, avec un système parlementaire, ces notions-là. L'indépendance d'un directeur national de santé publique ne met pas en péril le système parlementaire québécois. Et moi, je considère que, dans l'état actuel des choses, le niveau de confiance étant atteint, on est obligé d'aller vers ce genre de mécanisme d'indépendance.
Ceci étant dit, puisqu'on en parle beaucoup de cette indépendance, donnez-moi des exemples concrets, des cas qui vont amener le ministre à mettre dans sa réflexion, qu'il va faire au cours des prochains jours, pourquoi c'est important, la dépense. Mettez-vous dans ses souliers quand vous allez répondre. Lui, il est ministre, c'est le boss, O.K.? Il faut lui faire la preuve que, pour les citoyens, pour le système et à l'égard de votre institution, comme Collège des médecins, de votre rôle dans la société, pourquoi c'est important, l'indépendance. Des cas concrets là, dans la vie de tous les jours, qui se sont passés ou qui pourraient se passer. Mais imagez, là ? puis je sais, Dr Lamontagne, combien vous êtes un exemple à suivre en termes d'images dans les débats ? imagez cette proposition-là, combien c'est important, d'avoir une telle indépendance.
Le Président (M. Labbé): Alors, Dr Lamontagne, c'est à vous.
M. Lamontagne (Yves): Oui. Bien là, M. Fournier, il me prend les culottes à terre parce que j'ai pas bien, bien d'images à lui donner. Mais mes collègues qui sont dans le milieu plus que moi maintenant, peut-être qu'ils peuvent montrer ça. Au fond, quand vous parlez de la transparence, on dit la même chose, et un peu ce que M. le ministre disait tantôt: l'imputabilité professionnelle, ça existe, ça rentre dans la transparence puis toute l'affaire. Bon. Il y a des situations ? et un peu comme vous parlez quand vous parlez de la transparence ? il y a des situations où, par exemple, le directeur de santé publique pourrait bien dire: Il faut faire ça. Et, pour des raisons politiques et économiques, les gens du gouvernement pourraient bien dire: On peut pas le faire. Mais un peu comme vous dites, c'est basé sur la science, je veux dire... mais si on n'a pas d'argent... En Afrique, il y a bien des choses qu'ils pourraient faire mais ils ont pas d'argent pour le backer, ça fait que, quand même qu'ils auraient toute la science de la santé publique, ils l'ont pas. Alors, il faut aussi arriver un peu dans la réalité, dans le concret. Et ça, nous, on est prêts à le laisser au ministre. La seule affaire, c'est un peu comme vous disiez, il faut que celui qui s'occupe de santé publique, il le dise, puis il faut qu'il soit à l'aise dans ses souliers. Et lui, de dire: Selon la science actuellement, il y a ça qui va se passer, ou qui se passera pas, ou... Puis, vous savez, il y a du mou là-dedans, là. On va dire: Il y a une épidémie qui s'en vient. Combien, pour cent, on est sûr qu'elle va venir? Je le sais pas, moi. On vaccine-tu tout le monde si c'est à peu près 10 % des chances qu'elle vienne, ou si c'est 90 %? Alors, c'est une autre paire de manches. Alors, vous voyez, c'est ces choses-là. Peut-être que le Dr Robert avait quelque chose...
Le Président (M. Labbé): Alors, Dr Robert.
M. Robert (Jean): Oui, bien, pour prendre un exemple un peu ancien, pour éviter des choses un peu trop vives, mais je prends l'exemple les BPC, l'incendie des BPC. Évidemment, il y avait, dans les indications d'une intervention, il y avait des indications scientifiques, des indications médicales, mais il y avait aussi des indications sociales, psychologiques et politiques. Un des exemples que je pourrais vous donner, c'est: lorsque l'incendie a eu lieu ? et j'y étais ? il a fallu examiner tous les pompiers, mais on savait pas ce qu'on cherchait. Alors, c'était une décision politico-scientifique, si vous voulez, dans le feu de l'action ? si je peux employer cette expression-là ? d'examiner les pompiers sans savoir ce que l'on cherche.
Puis, une fois que l'incendie a été sous contrôle, on a décidé ? je dis «on» là, parce qu'on sait pas trop qui a décidé quoi ? de nettoyer, de laver les maisons avec un savon x, un produit x, et de l'eau. Et la question qu'on se posait, nous ? j'étais chef du département de santé communautaire à Saint-Luc à l'époque ? c'est: où va l'eau et le savon qu'on utilise à grande eau? Alors, tout ce qu'on m'a répondu, c'est... On m'a dit: Tu es bien mieux de pas poser cette question-là. Ha, ha, ha! Alors, on arrive dans des situations dites urgentes où, à un moment donné, il faut prendre une décision. Sur quelle base on la prend? Sur une base scientifique? Sur une base politique? Sur une base sociale? Parce qu'il faut comprendre qu'on est dans un mode d'action et de réaction. Alors, l'exemple que je prends avec les BPC, c'est un exemple: on arrive au bout puis on ne sait plus qui a décidé quoi, ce qu'on cherche et ce qu'on fait.
Le Président (M. Labbé): M. le député de Châteauguay.
n(12 h 20)nM. Fournier: Oui. Rapidement sur ce sujet-là parce que je veux passer à une autre question. Sur la transparence, vous en avez parlé en termes d'imputabilité professionnelle. Moi, de ce côté-ci puis dans mes souliers à moi, c'est plutôt en termes d'imputabilité politique, dans la mesure où, lorsqu'un avis d'un expert est donné, surtout si c'est un directeur national de santé publique ? je veux dire, tu sais, il chapeaute quelque chose là, lui là ? s'il émet un avis dans une idée d'indépendance, c'est que cet avis soit connu. Parce que s'il n'est pas connu, s'il y a pas des mécanismes rendant publics ces avis-là, comment voulez-vous qu'il y ait une réelle imputabilité de la partie politique? Parce que je vous entends, Dr Lamontagne, lorsque vous nous dites: Vous ferez... Comme ministre, vous suivrez l'avis ou vous le suivrez pas, et vous vivrez avec votre imputabilité. Mais suivre ou ne pas suivre quelque chose qui est secret, ce n'est pas vivre l'imputabilité, là, ça, là, c'est agir, puis il y a personne qui te demande des comptes.
Alors, c'est pour ça que je veux absolument mettre dans le portrait de l'indépendance l'aspect de la transparence, de la publication des avis, un peu à l'instar de l'exemple que vous donnez d'une question qui est posée et qui est tue. Le public a, à mon avis, là ? il y a pas encore personne qui s'est levé, ça doit prendre beaucoup de courage pour se lever pour dire ça ? mais à mon avis, le public a le droit de savoir. Puis les gens doivent prendre les décisions puis vivre avec, ça fait partie du système.
Puis, c'est la même chose pour chez vous quand vous vérifiez l'imputabilité professionnelle. Déjà, dans notre secteur, quand on vérifie l'imputabilité politique ? et à l'égard de la santé je vous dirais que où est le problème présentement, entre autres un des problèmes ? c'est que l'imputabilité politique est de plus en plus difficile à aller chercher parce que l'information sur ce qui se passe réellement est de plus en plus difficile à aller obtenir. Et je vous fais grâce des expériences que nous vivons.
Mais je vais vous amener sur un autre sujet. On a parlé de vaccination tantôt...
M. Robert (Jean): Est-ce que je peux...
M. Fournier: Oui, oui, je vous en prie.
Le Président (M. Labbé): Alors, Dr Robert.
M. Robert (Jean): Il est de notre avis que le directeur national ne soit pas un sous-ministre.
M. Fournier: Il est de votre avis que ça ne soit pas un sous-ministre?
M. Robert (Jean): Que le directeur national n'ait pas le statut de sous-ministre justement pour éviter cette ambivalence du pouvoir politique et du pouvoir scientifique.
M. Fournier: Mais je comprends l'essence de votre mémoire, puisqu'il est un sous-ministre, à cause du projet de loi n° 28, puisqu'on a déjà échangé sur le sujet, vous vous dites: Prenons-le par le côté de la destitution, c'est-à-dire assurons-lui de l'indépendance en s'assurant que le ministre ne dira pas: Si tu dis pas ça, je te mets dehors.
Une voix: C'est ça. C'est ça.
M. Fournier: Tu sais, c'est le volet, puis tout ça, je pense qu'on s'était compris, il y a pas de problème là-dessus.
Je vous ramène sur un autre sujet à la page 8 à l'égard de la vaccination. Expliquez-moi ? parce que je le comprends pas ? le premier paragraphe, la vaccination, la dernière phrase: «Quelqu'un qui refuserait son inscription à un registre central contenant des renseignements sur son état vaccinal devrait pouvoir être retraçable au besoin par un autre moyen.» Je vois probablement des vertus à retracer les gens, là, j'en disconviens pas, ça m'apparaît... À première vue, j'imagine que je pourrais moi-même en trouver. Mais est-ce que, si on demande aux gens la permission de s'inscrire au registre central, qu'il faut avoir d'autres méthodes pour les retrouver, on n'est pas en train de faire un registre parallèle, là, ou comment ça peut fonctionner?
M. Lamontagne (Yves): Ma vision de cette affaire-là, vous savez, c'est relativement facile de dire aux gens: Vous devez vous inscrire ? vous le savez encore plus que moi ? vous devez vous inscrire sur un registre central. Au départ, on va peut-être en avoir 10 ? c'est comme une enquête, quand on fait une enquête scientifique ? tu vas peut-être en avoir 10, 15 % qui vont s'inscrire, là, il va falloir revenir, revenir, revenir, puis en bout de ligne, s'il manque quelque chose en quelque part, c'est qu'on dit qu'il faudrait peut-être trouver d'autres moyens pour aller chercher ceux qui ne viendront pas dans... si on veut avoir des données. En d'autres mots, quand vous faites une enquête scientifique, si vous avez un taux de réponse qui est à 10 %, vos résultats vont être plus mous que si vous avez un taux de réponse à 90 %.
M. Fournier: Est-ce que vous parlez donc de ceux qui ne seraient pas allés se faire vacciner?
M. Lamontagne (Yves): C'est ça.
M. Fournier: Ah! O.K., O.K., O.K., je pensais que c'est ceux qui s'étaient fait vacciner mais qu'on tentait de retracer sous raison que...
M. Lamontagne (Yves): Bien, ça pourrait être ça aussi parce qu'il y en aurait qui auraient pu s'être fait vacciner puis qui auraient passé à côté des mailles, si vous voulez, puis qui se sont pas inscrits ou quoi que ce soit, puis le dossier est perdu, et quoi diable, puis qu'il y aurait pas d'autre moyen que si vous veniez juste, vous, vous inscrire. Alors, c'est pas complètement fermer la porte parce que c'est évident que, inscrire du monde, c'est une sacrée job. De toute façon...
M. Fournier: Donc, c'est beaucoup plus en termes de s'assurer que, les gens qui ont le vaccin, il y ait une procédure pour aller les chercher.
M. Lamontagne (Yves): Tout à fait, pour avoir les meilleures données possible en bout de ligne, tout à fait.
M. Fournier: Je vais laisser ma collègue...
Le Président (M. Labbé): Oui. Alors, merci, M. le député de Châteauguay. Maintenant, je cède la parole à la députée de Mercier. Madame.
Mme Rochefort: Merci, M. le Président. Très rapidement: «Chapitre VIII. Intoxications, infections et maladies à déclaration obligatoire.» Je me questionne sur une chose que je n'ai pas vue passer dans aucun mémoire, c'est-à-dire les délais d'inscription au règlement. À savoir: Est-ce que les délais sont raisonnables ou non?
J'ai, entre autres, en tête une maladie qui est devenue à déclaration obligatoire 20 ans après sa découverte alors qu'elle est mortelle, je me questionne. Je pense que vous êtes une des meilleures personnes pour y répondre.
M. Robert (Jean): D'où l'importance...
Le Président (M. Labbé): Alors, Dr Robert.
M. Robert (Jean): Pardon. D'où l'importance du rôle du directeur national qui peut dans des situations comme ça décider que telle intoxication possible est à signalement obligatoire en disant: Oups! Attention! Il y a une usine, il y a une industrie où il y a beaucoup de plomb et, à ce moment-là, on peut décréter ou porter à l'attention des directeurs régionaux qu'il y a un problème possible de plomb dans telle usine. Alors, à ce moment-là, on peut raccourcir les délais. Ça serait imprudent, à mon avis, de mettre dans la loi des délais précis parce que ça tient pas compte de la réalité.
Le Président (M. Labbé): Oui, allez-y, madame.
Mme Rochefort: Mais, sans nécessairement mettre dans la loi des délais, est-ce que le fait que l'inscription au règlement relève du ministre et qu'il n'y ait pas une certaine flexibilité de la part du directeur de la santé publique de pouvoir mettre en place un mécanisme, rapidement, de déclaration obligatoire avec des délais, pour permettre justement au ministre d'analyser la situation, ça peut pas engendrer des problèmes au niveau santé publique pour la population?
M. Robert (Jean): Oui. Il faut pas confondre le rôle du médecin traitant et le rôle du médecin qui travaille comme directeur régional qui peut, lui, supporter un délai plus long, d'être bien certain que la déclaration correspond à une maladie. Le médecin traitant comme tel va signaler rapidement au directeur régional qui, lui, va décider des interventions à faire, quitte à ce que, plus tard, lorsque la science ou les connaissances, face à telle intoxication ? pour prendre cet exemple-là ? seront connues, bien on pourra dire à ce moment-là: Oui, maintenant, c'est une maladie à déclaration obligatoire. Mais, dans la transparence, on dirait: Bien oui, ça fait 10 ans, ou 15 ans, ou 20 ans que l'on étudie le sujet, puis on est maintenant rendu à ce degré de connaissances là. Donc, c'est... Il faut pas confondre le rôle du médecin traitant qui s'occupe du ou des malades et le rôle que le directeur régional pourrait avoir... la connaissance de faits.
Le Président (M. Labbé): Dr Lamontagne.
M. Lamontagne (Yves): En ce qui a trait au chapitre VIII, tout ce qu'on voulait dire, c'est que... on dit «démontre», mais, nous, on voulait dire «que tout dirigeant de laboratoire suggère». Parce que, au niveau clinique, si on attend la démonstration, à un moment donné, paf! Il est trop tard. Mais que, là, s'il y a des... si ça suggère quelque chose, bien, de pouvoir le rapporter tout de suite, même si on dit: Écoute, là, ça, ça suggère ça, c'est pas sûr à 100 %, c'est pas démontré, mais surveillez ça, là, parce que ça risque d'arriver. C'est tout ce qu'on voulait dire à ce niveau-là.
Le Président (M. Labbé): Alors, merci beaucoup. Le temps, malheureusement, est terminé. Alors, je remercie beaucoup les gens du Collège des médecins du Québec. M. Lamontagne, Dr Lepage et Dr Robert, merci beaucoup. Compte tenu qu'on a épuisé notre ordre du jour pour ce matin, j'ajourne donc... En fait, je suspends les travaux jusqu'à 14 heures cet après-midi, ici même. Merci. Bonne fin de journée.
(Suspension de la séance à 12 h 27)
(Reprise à 14 h 5)
Le Président (M. Beaumier): Alors, la commission des affaires sociales est réunie afin de procéder à une consultation générale et de tenir des audiences publiques sur le projet de loi n° 36, Loi sur la santé publique. Et nous recevons cet après-midi l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées, la Fédération des médecins spécialistes du Québec, la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux et Conseil des directeurs et des directrices de santé publique et finalement, avant l'ajournement à 18 heures, le Protecteur du citoyen.
Alors, bonjour tout le monde. Bonjour, Mme Bourdon. Alors, vous auriez à peu près 20 minutes pour le message puis 40 minutes d'échanges avec les membres de la commission, et peut-être préalablement nous dire qui est-ce qui vous accompagne.
Association québécoise de défense des droits
des personnes retraitées et préretraitées (AQDR)
Mme Bourdon (Lucie): Oui. Parfait. Alors, je commence tout d'abord par vous remercier de nous avoir invités. Alors, Mme Ann Gagnon qui est responsable du comité de santé et M. Smereka qui est le nouveau directeur de l'AQDR provinciale.
Alors, l'AQDR, fondée en 1979 ? l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées, mieux connue sous l'acronyme AQDR ? compte maintenant, à travers la plupart des régions de Québec, plus de 40 sections dont la mission est de défendre les droits économiques, culturels et sociaux de l'ensemble des personnes retraitées et préretraitées. Depuis 22 ans, des milliers de membres de l'AQDR, femmes et hommes de toute origine et provenance, luttent pour faire respecter leurs droits et améliorer les conditions de vie de celles et ceux qui vieillissent.
L'AQDR poursuit un objectif principal: transformer les conditions de vie à la retraite. Les principales revendications de l'AQDR sont: un revenu décent au-dessus du seuil de pauvreté, logement convenable et à prix abordable, services des soins à domicile pour maintenir l'autonomie, égalité en droits et en faits des femmes et des hommes, accessibilité universelle et gratuite des services de santé et des services sociaux.
Alors, en ce qui concerne le projet, c'est à titre d'expert en défense de droits depuis 22 ans au Québec que l'AQDR s'adresse à la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale du Québec. Les sujets couverts par le projet de loi n° 36, la Loi sur la santé publique, sont fort variés. L'AQDR se concentrera sur trois sujets seulement: premièrement, la création d'un comité d'éthique de santé publique, la vaccination, les situations qui constituent une menace pour la santé de la population et leur signalement.
La création d'un comité d'éthique de santé publique. Les articles 17 à 30 du projet de loi n° 36 traitent de la création d'un comité d'éthique de santé publique. Les membres seront nommés par le ministre de la Santé et des Services sociaux. De façon plus précise, parmi les nominations, on lit, à l'article 21, paragraphe 2°: «Deux représentants de la population intéressés aux travaux du Comité, qui n'ont aucun lien professionnel avec le réseau de la santé et des services sociaux.» La réalité des soins médicaux infirmiers hospitaliers dans le Québec des années 2000 appelle un regard critique mais lucide des choix sociaux en matière de santé publique. Les diverses générations exigent la plus grande équité de services entre ceux et celles qui recevront les soins de santé. Les personnes âgées doivent être au coeur des débats à venir. Par conséquent, l'AQDR recommande que le ministre de la Santé et des Services sociaux nomme un représentant de l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées, AQDR, comme un des deux représentants de la population, tel que mentionné dans l'article 21, paragraphe 2°, du projet de loi n° 36.
La vaccination. Le projet de loi n° 36 propose, dans les articles 57 à 63, en matière de vaccination, la création d'un registre central où seront inscrites, avec le consentement des individus, les vaccinations reçues par la population. L'AQDR se questionne sur la pertinence d'un tel registre si tous les vaccinés n'y sont pas inscrits, ce d'autant plus que l'on peut lire, à l'article 62, ce qui suit: «L'accès aux renseignements personnels que contient le registre est accordé aux personnes qui en font la demande dans la mesure et aux fins suivantes: [...] au ministre s'il a reçu un avis l'informant qu'un lot de vaccins est inadéquat et qu'il juge qu'il faut retracer les personnes ayant reçu ce vaccin.» Comment retraçons-nous ceux qui n'ont pas donné leur consentement? Ne vise-t-on pas, dans les faits, que de dresser un inventaire des produits de vaccination? Je vais passer la parole à ma consoeur.
Mme Gagnon (Ann): Alors, je continue en parlant des situations qui constituent une menace pour la santé de la population et leur signalement. Alors, le projet de loi n° 36, dans ses articles de 88 à 91, impose aussi à certaines personnes l'obligation de signaler au directeur de santé publique les situations qui constituent une menace pour la santé de la population. Ces personnes, entre guillemets, sont qualifiées, à l'article 90, comme les «directeurs d'établissements qui constituent des milieux de travail ou des milieux de vie». Elles peuvent, entre guillemets encore, signaler les situations où ils ont des motifs de croire qu'il existe une menace à la santé des personnes qui fréquentent ces endroits.
n(14 h 10)n Or, une grand-mère qui constate la détérioration physique de son petit-fils fin de semaine après fin de semaine sous l'effet de l'ecstasie consommée dans les partys «rave» peut-elle signaler au directeur de santé publique de son territoire la situation où elle a des motifs de croire qu'il existe une menace à la santé des personnes, comme son petit-fils, qui fréquentent les endroits où se tiennent ces partys et où la consommation d'ecstasie est tolérée? On s'est donné comme rôle d'être les chiens de garde des politiques, et c'est une des questions qu'on lance au ministre de la Santé.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme Gagnon. Alors, est-ce qu'on procéderait à ce moment-là aux échanges avec les membres de la commission? Oui. D'accord, merci. Alors, M. le ministre.
M. Trudel: Merci, M. le Président, Mme la présidente et les gens qui vous accompagnent; M. Smereka dans son nouvel habit, son nouvel habit de... ses nouveaux habits de retraité.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Ils les prennent de plus en plus jeunes, hein? Bienvenue à cette commission parlementaire. Bon, merci d'avoir pris le temps et d'avoir pris aussi de l'intérêt pour ce projet qui veut changer, incliner davantage, changer un peu la direction de la façon dont nous voulons aborder dorénavant la santé publique, une Loi sur la santé publique et non plus uniquement la protection de la santé publique. Être davantage actif, proactif, poser des gestes avant au lieu d'être après et être plus en termes de correction de ce qui peut arriver dans la population en général mais pour les hommes et les femmes qui vivent partout sur le territoire. Et ça vous concerne, oui, parce que, évidemment, la catégorie d'âge peut faire en sorte que pour certains éléments on est plus à risque; donc on aurait à faire davantage avec les populations concernées.
Vous vous en limitez... D'abord, je dois aussi noter que vous êtes comme les 17 autres, c'est-à-dire que vous êtes favorables à cette loi-là. Mais il faut faire attention à trois éléments que vous soulevez. D'abord, une manifestation concrète d'intérêt. Vous placez vos éléments tout de suite; vous voulez être l'une des deux ? des deux personnes. Il va falloir que je trouve une réponse pour les 17 autres, là, moi; il va rester rien qu'une place, là. Mais disons que là-dessus... c'est évident que des personnes, je dirais, des personnes de la catégorie d'âge que vous représentez très majoritairement vont devoir être prises en considération au niveau des... du comité d'éthique.
Je fais cependant une petite distinction à ce comité d'éthique de santé publique. Il va y avoir des personnes en provenance de tel ou tel autre milieu mais ce ne sont pas des représentants. On sera pas là comme représentants, on sera personnes compétentes issues de tels groupes en particulier pour s'assurer d'une... non pas d'une représentation, mais d'avoir toutes les voix autour de la table quant aux objets qui seront en discussion. Alors, je peux pas vous donner la réponse aujourd'hui, mais disons que les astres sont assez bien alignés.
La vaccination. Pourquoi? Vous posez la question de l'utilité d'un registre central des vaccinations qui ne serait pas obligatoire, par ailleurs. Vous soulevez là un problème réel. Oui, c'est un problème réel. Il faut qu'on soit capable de dire que ce sera un registre imparfait.
Mme Gagnon (Ann): Un registre?
Mme Bourdon (Lucie): Imparfait.
M. Trudel: Imparfait. Ce sera un registre imparfait. Les meilleurs estimés que nous avons des comportements en général de la population à l'égard de ce type de registre quant aux données qui y sont contenues, il y a en général autour de 95 % qui donnent le consentement. Mais il nous faudra respecter le 5, 6, 4 % de population qui ne donnera pas son adhésion, ça appartient à la personne. Mais vous imaginez bien que, à 95 %, ça nous permet quand même... ça permet quand même d'avoir une bien meilleure analyse de la situation au plan de la santé de certains groupes, des niveaux de risques et des actions qu'on peut encourir. Est-ce que vous souhaitez que ce soit obligatoire?
Mme Gagnon (Ann): Bien, si je posais une question, M. le ministre. Est-ce que c'est à cause de ce qu'on appelle le droit à la confidentialité que le 5 % refuse que leur nom soit inscrit comme quoi ils ont reçu un vaccin?
M. Trudel: C'est pour l'accès aux renseignements à caractère nominatif, ce qu'on appelle confidentialité, effectivement, parce que ça appartient à la personne, ça. Pour qu'on soit en mesure de colliger dans un registre le fait d'avoir eu accès à tel vaccin, c'est personnel, c'est à la personne. Il faut avoir son autorisation.
Mme Gagnon (Ann): Par contre, la question qu'on se posait... est-ce que vous permettez, Mme la présidente?
Mme Bourdon (Lucie) Oui, oui.
Mme Gagnon (Ann): C'est que supposons ? je veux pas faire un scénario qui est épeurant ? mais supposons tout à coup que vous, comme ministre de la Santé, vous avez la nouvelle que tel vaccin n'est pas efficace, et n'aurait pas dû être donné, et qu'il a été donné «at large». Les 5 % qu'on ne peut pas retracer, est-ce qu'on n'a pas une obligation morale à les retrouver ces gens-là? C'est là qu'on comprend mal ce...
Mme Bourdon (Lucie) Ce projet.
Mme Gagnon (Ann): ...sous prétexte de confidentialité, on voit pas le bien général dans ça.
M. Trudel: Vous avez pas tort. Mais, pour avoir raison, il faudrait franchir d'autres barrières que notre société n'a pas encore autorisées, n'a pas encore autorisées, c'est-à-dire on ne peut poser un certain nombre de gestes qui appartiennent à la personne et à la décision qui doit être prise par cette personne qui assure sa responsabilité de sa vie, et nous nous sommes donné en société des mécanismes de protection des renseignements à caractère personnel, et charge est aux responsables de la santé publique, sur avis et sur recommandation du directeur national de santé publique, de prendre les moyens pour faire savoir à ces personnes soit qu'elles sont à risque ou qu'il y a des actions qui peuvent être posées pour corriger une situation. Mais on ne peut pas invoquer que, auquel cas ça arriverait, la situation, cela est une raison suffisante pour exiger, imposer le consentement pour faire partie d'un registre.
Il y a là tout un débat; vous avez raison. Il y a là tout un débat, et est-ce que l'on doit attendre d'avoir le registre parfait avant d'utiliser un tel instrument, un tel outil? L'avis des spécialistes sur la santé publique, c'est de dire: L'instrument ne sera pas parfait mais il aura beaucoup de vertus parce qu'il nous permettra à tout le moins ? prenons l'hypothèse que vous soulevez ? d'informer publiquement les autres personnes qu'il y a cette situation qui se présente, et elles peuvent avoir accès à des solutions correctrices, s'il en est, le cas échéant.
n(14 h 20)n Alors, ça fait... vous soulevez là une question qui nous permet de décrire que ce sera un mécanisme imparfait, mais nous avons choisi la meilleure des solutions, le mieux étant l'ennemi du bien. Le mieux étant l'ennemi du bien, on se dit qu'on peut faire bien davantage avec 95 % des gens qui donneraient leur consentement que pas de pourcentage, surtout à cause du type de société maintenant et les valeurs qui animent notre société.
Maintenant, la mobilité, par exemple, des personnes est beaucoup plus grande dans leur vie que probablement vous et moi avons été mobiles, hein? Les gens vont se déplacer beaucoup plus facilement en Amérique du Nord, par exemple, vont se déplacer encore plus fréquemment comme lieu de domicile sur le territoire québécois, et là, il est fréquent maintenant que les médecins nous indiquent... que les médecins nous indiquent qu'il est fréquent qu'on demande à quelqu'un: Est-ce que vous avez été vacciné pour telle, telle ou telle infections, par exemple? Les gens disent: Je le sais pas; je le sais pas. Le médecin demande: Avez-vous reçu tel vaccin? Je le sais pas. Je suis pas au courant, j'ai pas retenu cette information-là ? à cause de la mouvance des personnes en particulier. Alors, le fait d'instituer un registre va nous permettre plus facilement de supporter le travail professionnel de réaliser les interventions tout en n'ayant pas d'obligation de le faire.
Revenons aussi sur la question... la troisième dimension que vous abordez, la question du signalement d'une situation qui peut porter préjudice en termes de santé publique. Là aussi, vous vous questionnez sur le fait de ne pas inclure dans la loi ? guillemets, là, c'est pas le terme que vous employez ? l'obligation de signaler une situation de danger. Nous l'avons incluse lorsque cela constitue une menace à la santé dans certaines situations ou établissements spécifiques, parce que les niveaux de degré sont pas toujours pareils. Alors, pour un certain nombre d'établissements où il peut y avoir un indice plus élevé prévisible de menace pour la santé de la population, on fait devoir à ces établissements de nous le signaler. Mais vous avez l'impression, si j'ai bien compris, que la loi ne vous donne pas l'autorisation morale de signaler ce qui apparaîtrait...
Mme Gagnon (Ann): Ou même la liberté, M. Trudel. Parce que, quand on a soulevé ce point-là en discussion entre nous, on s'est fait dire: Non. Ça, ça relèverait de la justice. Mais vous venez de dire le mot «établissement», puis on veut pas s'accrocher dans la sémantique. Mais quand on voit un groupe d'adolescents qui ont accès... Appelons ça un «établissement public». Les gens qui vont dans les partys «rave», ce sont dans des établissements publics. Alors, les parents et les grands-parents qui s'inquiètent de ces endroits où, paraît-il, l'ecstasie est distribuée comme des bonbons, pour nous, dans notre discussion, on considère que c'est une menace à la santé de nos jeunes.
Parce que je tiens à vous dire que, même si on a les cheveux blancs, on fait une activité sociale, on a une conscience sociale comme parents et comme grands-parents. On ne défend pas seulement les dossiers qui touchent les retraités, puis dans les lois, on a dû faire un choix difficile. Parce qu'on aurait eu envie de parler de services à domicile, on aurait eu envie de parler de bien des choses, mais on a dû retenir trois points.
Alors, si on revient à notre questionnement, les établissements où la drogue est presque gratuite ou abondante, et qui reçoivent à portes ouvertes nos adolescents, on considérait dans notre discussion que c'était une menace à la santé publique.
M. Trudel: Vous m'amenez sur un terrain glissant, vous, là!
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Gagnon (Ann): Bien, c'est la réalité!
M. Trudel: Faut pas que je dérape, là.
Mme Gagnon (Ann): C'est notre rôle de chiens de garde, M. Trudel.
Mme Bourdon (Lucie): Nous sommes des sages, n'oubliez pas; nous siégeons en ce moment. Ha, ha, ha!
M. Trudel: Oui, je vois ça; je vois ça.
M. Smereka (Myroslaw): C'est pourquoi je me suis joint à eux.
M. Trudel: Il faut cependant... Pardon, M. Smereka?
M. Smereka (Myroslaw): C'est pourquoi je me suis joint à eux.
M. Trudel: Oui, ha, ha, ha! Cependant, il faut bien lire la définition dans le projet de loi. Dans la présente loi, on entend par une «menace à la santé de la population» la présence au sein de celle-ci d'un agent biologique, chimique ou physique susceptible de causer une épidémie ? susceptible de causer une épidémie ? si la présence de cet agent n'est pas contrôlée. Dans certains milieux, dans certains établissements de santé, à cause de la nature du travail et des interventions et du type d'infections qu'on va y traiter, le risque, avec la présence d'agents biologiques, chimiques ou physiques, est plus élevé. On le... on fait en sorte de voir, on fait obligation aux établissements de signaler ces éléments-là parce que ça peut présenter un risque d'épidémie, tandis que, là, vous nous amenez sur le terrain de l'épidémiologie sociale.
Mme Gagnon (Ann): Oui.
M. Trudel: ...oui. Et là...
Mme Gagnon (Ann): Mais elle est présente, hein?
M. Trudel: Oui. Je comprends que, là, vous faites pas de partys «rave» quand même, là, hein?
Mme Gagnon (Ann): Ha, ha, ha! Pas encore.
Mme Bourdon (Lucie): Ha, ha, ha!
M. Smereka (Myroslaw): ...
M. Trudel: Pas encore? ...encore le même sujet. Ha, ha, ha!
Mme Bourdon (Lucie): On n'est pas rendu là. Ha, ha, ha!
M. Trudel: Je comprends qu'il y a là donc une espèce d'avertissement au niveau de la société qu'il faudra aussi se préoccuper et s'occuper de cette situation-là. Mais je ne pense pas que ce soit... bien simplement, je ne pense pas que ce soit à partir d'une Loi sur la santé publique que nous pourrions en arriver à des interventions, en mentionnant ceci, cependant.
On va revoir le texte du projet de loi, là, au détail. Si les citoyens ne se sentent pas en état de situation d'être autorisés à signaler à la direction de la santé publique ce qui leur apparaît comme une menace, là, nous aurions un problème, parce que la loi n'interdit pas, n'interdit pas à une personne de signaler à la direction de la santé publique qu'il lui apparaît qu'une situation est menaçante. Les vérifications... les vérifications épidémiologiques, les vérifications en termes de situations seront faites par les 18 directions de la santé publique sur le territoire québécois, mais il faut pas que le projet de loi indique qu'on ne peut pas ou qu'on n'a pas comme l'autorisation morale de signaler une situation préoccupante; c'est loin de l'intention du législateur.
Écoutez, à la lecture de votre mémoire, on sera... on va être très attentif à chacune des dimensions que vous avez soulevées. Le projet de loi va donc revenir ici, dans une étape ultérieure, à l'étude article par article, et d'ici ce temps-là, même si les 17 groupes qui vont se présenter devant nous nous disent qu'ils sont tous d'accord avec cette révision 29 ans plus tard ? parce que ça fait depuis 1972 qu'on vit avec la loi actuelle ? il y a des ajustements, et c'est pour ça qu'on fait des consultations publiques.
Je vous remercie de votre présence, continuez de vous préoccuper de la santé publique largement. Je sais que vous allez passer l'année à vous occuper de nous autres aussi. Ça, c'est bien pour la santé publique et la santé démocratique, et c'est toujours avec plaisir qu'on va vous recevoir ici. Merci de votre contribution.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le ministre.
Mme Gagnon (Ann): Merci beaucoup de nous avoir invités.
Le Président (M. Beaumier): Merci. Alors, M. le député de Châteauguay.
M. Fournier: Merci, M. le Président. À mon tour de vous souhaiter la bienvenue; merci d'être avec nous. Je vais, si vous me le permettez, puisque vous nous avez avoué être... en ce moment, on vous a pris un peu de temps, si je comprends bien, dans vos délibérations au Parlement des Sages; j'ai presque le goût de me laisser influencer par vous.
On me dit que vos expériences antérieures vous ont amenés à avoir des attitudes, dans ce Parlement des Sages, un peu moins belliqueuses que dans la réalité nous assumons parfois. Alors, je vais donc essayer de subir votre influence, et je vais prendre les points que vous avez soulevés, tout en disant qu'il y a certains éléments du projet de loi ? je l'ai mentionné ce matin, à l'égard des remarques préliminaires, à certains groupes qui sont venus ? il y a certaines modifications qui, à mon sens, devraient être apportées, mais je vais néanmoins concourir, dans une bonne partie, avec ce que le ministre disait, à l'égard de vos remarques.
n(14 h 30)n D'abord, sur la vaccination, moi, ce que je comprends de l'approche qui était mise dans le projet de loi, c'est de s'assurer qu'il y ait le plus de gens vaccinés possible. Lorsqu'on décide ? je suis pas compétent en la matière ? mais lorsque des autorités compétentes décident que la vaccination est utile, importante, si on devait être face à une situation où les gens, sous prétexte qu'ils ne veulent pas faire partie du registre, renoncent à la vaccination, on serait là dans une situation plus grave que l'autre, qui est de dire: Vaccinons tout le monde; ceux qui veulent que leur nom... et dans une très grande proportion, s'inscrivent au registre, ça règle le problème, et ceux qui ne le veulent pas doivent avoir pris une décision éclairée. Donc, il faut vraiment que ça leur soit déclaré, que les bienfaits de la déclaration, de la participation et de l'inscription au registre, ça, cette étape-là soit valablement faite. Mais, par la suite, la personne accepte la décision qu'elle prend, et, dans notre société, il faut laisser, me semble-t-il ? moi, je suis favorable à ça ? la plus grande part de décision aux individus; qu'ils assument leur liberté quand ils connaissent quels sont les choix. Et, à cet égard-là, je pense que le choix qui est fait, à moins d'être... Tout au long de cette consultation, on aura des gens qui viendront nous présenter des avis, comme vous le faites si bien, des gens qui viendront nous dire pourquoi, ou sur la base de chiffres, est-ce qu'on manque beaucoup de vaccinations, de toute façon. Mais, à ce moment-ci, je dois avouer que je concours passablement avec le ministre. Vous voyez, je subis déjà beaucoup votre influence.
M. Trudel: Continuez, ça va bien. Beau travail. C'est un beau travail. C'est bon, ça.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Fournier: Deuxièmement ? on peut toujours en profiter ? deuxièmement, sur l'aspect où vous mentionnez la participation du citoyen à l'égard du signalement, je dois avouer ? si je module un peu l'argumentation que vous faites, mais si comprends de votre intervention qui est de dire: On aimerait ça, dire notre mot, on aimerait ça, pouvoir intervenir. Là, je vais non seulement concourir avec le ministre, mais je vais en rajouter et il va pouvoir concourir avec moi, subissant ainsi votre influence à son tour. Il y a des groupes, comme l'Institut national de santé publique, la CSN, qui ont soumis des rapports qu'on va entendre au cours des prochains jours ? peut-être cet après-midi, je le sais pas... je ne me souviens plus ? mais qui ouvrent une place à la participation du citoyen, qui soulignent qu'il devrait y avoir des forums de citoyens en relation avec le comité d'éthique mais qu'il y ait une porte ouverte à ce que des gens puissent venir faire part de leurs préoccupations.
Et je pense que, lorsqu'on parle de santé publique ? j'ai eu l'occasion de le dire puis je suis pas le premier ? la santé publique, c'est d'abord l'affaire de chacun, et il faut laisser la place à chacun dans ce système-là. Chacun, ça inclut le gouvernement qui a sa job à faire; chacun, ça implique les acteurs qui découlent aux plans régional, local. On a eu les CLSC ce matin, j'ai eu l'occasion de dire combien la santé publique dans sa vie quotidienne, c'étaient ces gens-là des CLSC. Mais, au net-net, si on est pour dire que la santé publique, c'est aussi jouer sur les déterminants de la santé que sont le revenu, l'accès au travail, la réinsertion, le logement, le logement social, la pauvreté, bon, les habitudes de vie, on va être obligé en quelque part de dire que ça concerne tout le monde et chacune des personnes.
Et donc, moi, je suis plutôt... j'accueille très favorablement, quant à moi, toute proposition qui trouve sa bonne place, là. Je dois le dire, je trouve que l'idée de forums, de symposiums ou de colloques ? ou, en tout cas, où les gens peuvent se présenter et donner... soit livrer leur cri d'alerte ou simplement décrire comment eux vivent la situation ? il me semble que c'est une manière de rechercher l'adhésion volontaire essentielle en matière de santé publique. Alors, voyez-vous, encore, je concours un peu avec le ministre, j'en ajoute un peu. Peut-être qu'il pourra concourir avec moi dans un moment magique aujourd'hui.
Je termine avec le comité d'éthique. Je pense qu'il y a une différence fondamentale entre un comité d'éthique et un comité de lobby ou de représentation ou... Alors, quand vous soulignez que... C'est ça, des représentations de l'AQDR. Je trouve qu'on est pas mal dans le lobby. Et, à mon avis ? c'est la question que je vous pose et convainquez-moi du contraire ? j'ai pas l'impression que c'est au sein d'un comité d'éthique qui, par ailleurs, devrait être beaucoup plus transparent que ce qui est prévu dans la loi, beaucoup plus indépendant, beaucoup plus proche du public qui rend des avis publics... Ce qui est pas le cas. Ça, c'est d'autre chose. Revenons à l'aspect que vous mentionnez: Comment voyez-vous ce comité d'éthique si vous souhaitez qu'on y trouve en son sein des représentants de regroupements ? et c'est non seulement tout à fait légitime, mais utile ? qui vont à l'intérieur du comité d'éthique faire des représentations en faveur de leur association? Est-ce qu'on n'est pas en train de mêler des genres? Ou, sinon, quelle sorte de comité d'éthique vous voyez?
(Consultation)
Mme Bourdon (Lucie): On défend des droits. Il me semble que ? je ne sais pas ? nous, les sections de l'AQDR, nous sommes 40 sections, hein, puis, parmi nous, il y a beaucoup de personnes bénévoles d'expérience, puis elles ont vraiment... C'est des aînés qui sont bien représentés et qui connaissent les problèmes de santé. Alors, je pense que c'est très important. On défend les droits. Alors, je pense que c'est très important que l'AQDR fasse partie du comité d'éthique.
Le Président (M. Beaumier): Oui, M. Smereka.
M. Smereka (Myroslaw): Je voulais juste ajouter, c'est parce que, vous savez, d'un côté, qu'il y a aussi par exemple en France un comité d'éthique. Là, c'est peut-être plus des experts mais, en même temps, quand vous lisez leurs documents tels que le document de 1997 sur le vieillissement, vous voyez tout de même qu'il y a une préoccupation fondamentale dans le comité d'éthique: c'est le droit à la dignité humaine. Or, contrairement à la plupart d'organismes, l'AQDR n'en est pas un de façon sectorielle, il en est un des droits, défense des droits. Donc, il y a un lien tout à fait intégral entre la notion de, à la fois, oui, le ministre aura à en avoir, des experts, entre guillemets, qui auront à peut-être regarder les questions déontologiques et assez particulières, mais, en même temps, tout ça, il faut camper la personne humaine et ses droits et sa dignité. Et, quand on fait référence à l'AQDR, c'est l'association qui en fait représente les droits de la grande... le grand segment, si vous voulez, de ceux qui auront justement à avoir droit à cette dignité-là.
Il ne faut pas prendre l'AQDR dans une perspective d'État, un organisme sectoriel de défendre, par exemple, la problématique de la toxicomanie ou le tourisme dans telle région du Québec. C'est vraiment horizontal, comme approche. C'est... L'être humain, à partir de sa réalité d'une prolongation de vie, a des droits, et notre société a aussi à tenir compte de ça. Et c'est au coeur même des choix, parce qu'il ne faut jamais oublier qu'une des choses que l'AQDR prône aussi, c'est l'intergénérationnel, le lien entre les générations. Mais il faut que la section qui est la cohorte d'âge à partir des 50 ans et plus puisse être là pour échanger avec les autres cohortes, mais dans une perspective de droits ? ce qui est intimement lié avec éthique ? à côté de laquelle il y aura nécessairement la nécessité d'avoir des experts, entre guillemets.
M. Fournier: Merci.
Le Président (M. Beaumier): Merci bien. Alors, merci, Mme la présidente, Mme Gagnon, M. Smereka. Et j'inviterais les représentants de la Fédération des médecins spécialistes du Québec à se joindre à nous, et je suspends pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 14 h 38)
(Reprise à 14 h 40)
Le Président (M. Beaumier): La commission reprend ses travaux avec les représentants de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, avec M. Yves Dugré, président, résident de Champlain, on peut dire ça, par exemple, hein? Oui.
Une voix: Beau comté.
Le Président (M. Beaumier): Oui.
Une voix: ...
Le Président (M. Beaumier): Et vous pourriez présenter les personnes qui vous accompagnent, avec leur comté, peut-être que ça peut...
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: Non, le moins chauvin.
M. Trudel: M. le Président, point d'ordre...
Le Président (M. Beaumier): Oui.
M. Trudel: ...signaler la présence de gens de Sainte-Thècle aussi. Parce que là, si vous vous mettez à faire ça pour Champlain, là, pour avoir leur juste part, il y a du monde...
Le Président (M. Beaumier): À l'avenir, je le ferai que pour Champlain, effectivement. M. Dugré, M. le président.
Fédération des médecins spécialistes
du Québec (FMSQ)
M. Dugré (Yves): Oui. M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les parlementaires, la Fédération des médecins spécialistes du Québec désire remercier la commission des affaires sociales de l'occasion qui nous est offerte d'exprimer son opinion sur le projet de loi n° 36, la Loi sur la santé publique. Je suis accompagné, à ma gauche, du Dr André Poirier, président de l'Association des médecins microbiologistes et infectiologues du Québec, et du Dr Alain Messier, à ma droite, président désigné de l'Association des spécialistes en santé communautaire du Québec.
Comme vous le savez, la Fédération des médecins spécialistes du Québec regroupe 34 associations de médecins spécialistes représentant toutes les disciplines médicales, chirurgicales et de laboratoire; au total, 7 500 médecins spécialistes.
La mission de la Fédération est de défendre et de promouvoir les intérêts économiques, professionnels et scientifiques de ses membres, et cette mission ne peut s'accomplir pleinement sans une participation aux décisions entourant l'organisation des soins de santé.
La Fédération croit fermement que les intérêts professionnels et scientifiques des médecins spécialistes se confondent avec ceux de la population. C'est aussi dans ce contexte, convaincue de son rôle social et politique, que la Fédération veut participer activement aux discussions entourant l'élaboration du projet de loi n° 36 sur la santé publique.
Même si ce projet de loi touche tous les médecins spécialistes, il touche tout particulièrement les microbiologistes infectiologues et les médecins spécialistes en santé communautaire dont la pratique quotidienne consiste à intervenir directement dans le champ de la prévention et de la protection de la santé publique. Nos commentaires refléteront notamment leurs préoccupations.
Comme type de présentation, je ferais une lecture rapide des remarques générales sur le projet de loi et, par la suite, je m'attarderai à cinq points particuliers concernant ce projet.
La remise à jour de la Loi sur la protection de la santé publique s'avérait une nécessité. Et, de façon générale, nous accueillons donc positivement le projet de loi n° 36 que nous considérons pertinent afin de permettre au Québec de moderniser son approche en santé publique.
Ce projet de loi comporte plusieurs éléments novateurs qui méritent d'être salués:
Le premier: la notion de programme de santé publique qu'il introduit et la contribution significative quant à la promotion de la santé, deux aspects qui devraient engendrer de réels résultats.
Deuxième point: le projet de loi confie des responsabilités aux directeurs de la santé publique leur permettant d'intervenir dans des conditions de risques appréhendés pour la santé de la population non seulement en lien avec la protection de la santé publique au sens classique du terme, mais également dans des conditions de risques d'une autre nature comme par exemple certaines conditions environnementales ou encore des facteurs psychosociaux à l'origine d'une morbidité ou d'une mortalité évitables. Nous appuyons cet élément original qui constitue une innovation très intéressante.
Troisième point: la mise en place d'un registre de vaccination. Certaines dispositions législatives nous font toutefois douter de la capacité réelle de ces registres à rencontrer les objectifs souhaités. Nous y reviendrons.
Enfin, quatrième point positif: les mesures de prophylaxie obligatoires prévues au projet de loi, qui permettront de protéger la population face à la menace de certaines maladies ou infections graves.
Par contre, voici quelques autres points qu'on voudrait souligner pour améliorer le projet de loi actuellement. Au-delà, donc, de l'appui général au projet de loi, nous sommes en désaccord avec certains éléments et avons également noté les lacunes que nous souhaitons voir corrigées. Nous ferons état de nos commentaires maintenant.
Le premier point, c'est que nous aurions souhaité que le projet de loi s'en tienne aux grands objectifs d'amélioration de santé en identifiant des moyens pour y parvenir plutôt que d'établir des règles strictes qui impliquent souvent une forme d'ingérence dans le champ de pratique des professionnels. Nous croyons que cette façon de faire élimine la flexibilité nécessaire aux différents intervenants pour agir efficacement sur des questions de santé publique. De plus, la décision du législateur de considérer l'exception comme la règle et de gérer cette exception tout au long du projet de loi n'est pas appropriée et risque plutôt de nuire à la dynamique de collaboration qui existe actuellement.
n(14 h 50)n Deuxième point de désaccord: à plusieurs égards, le projet de loi n° 36 confie aux directeurs de santé publique des pouvoirs qui, à notre avis, vont parfois au-delà des moyens nécessaires pour une saine gestion de la santé publique. Aussi, souvent, le seul jugement du directeur de santé publique, selon des critères imprécis, est suffisant pour décréter une intervention, par exemple, à l'article 36 où les pouvoirs du directeur de santé publique sont carrément arbitraires et l'étendue et la portée de ces demandes ne sont même pas définies. Nous souhaitons ainsi voir les pouvoirs des directeurs de santé publique mieux balisés en ce qui leur donne ouverture et également dans leur application.
Troisième point: nous sommes surpris du fait que le projet de loi ignore complètement le rôle des établissements en santé publique et des médecins spécialistes qui y oeuvrent. Nous déplorons en effet que le projet de loi fasse fi de l'apport essentiel des professionnels de la santé en établissement. Et la façon dont le projet de loi est rédigée laisse complètement de côté le travail de promotion et de prévention actuellement effectué au sein des établissements. Pourtant, le travail y étant accompli, notamment par les médecins spécialistes, demeure fort important. À titre d'exemple, la plupart des hôpitaux se dotent d'infirmières en prévention des infections, supervisées par des microbiologistes infectiologues qui agissent comme responsables à ce niveau. D'ailleurs, ces intervenants travaillent toujours de concert avec les directeurs de santé publique.
De plus, le projet de loi prévoit à plusieurs reprises que le directeur de santé publique se substitue carrément aux intervenants en place dans les établissements, ce qui, à notre avis, est tout à fait incompréhensible, puisque ces intervenants sont plus souvent mieux qualifiés pour agir. Dans ce contexte, nous demandons que le projet de loi spécifie que toute intervention de santé publique s'exerçant dans un établissement se fasse en collaboration avec les intervenants concernés à l'intérieur de cet établissement. Ces modifications devraient être apportées à tous les articles concernés, notamment aux articles 10 et 39.
Quatrième point: il est inconcevable pour notre Fédération que les médecins spécialistes soient ignorés dans l'élaboration des politiques et des plans. Nous croyons nécessaire que le projet de loi prévoit la consultation des médecins spécialistes, entre autres par le biais de leur CMDP ou de leur commission médicale régionale, comme les DMRG sont consultés ou les CHSLD. Donc, lors de l'élaboration de ces programmes, consultation des médecins spécialistes également aux articles 9 et 13.
Cinquième point: nous sommes surpris du ton impératif utilisé dans le projet de loi, qui tranche nettement avec l'esprit de collaboration qui existe entre les directeurs de santé publique et les médecins spécialistes au sein des établissements. Jamais les membres de notre Fédération, notamment les microbiologistes infectiologues, n'ont refusé de collaborer avec les différentes directions de santé publique, surtout lorsqu'il existait un réel danger pour la population. Nous déplorons ainsi que le législateur ait choisi des mots tels que «exiger», «ordonner» ou «demander formellement». Nous demandons donc que ces dispositions soient modifiées. Que l'on utilise plutôt un vocabulaire se référant à la collaboration.
Sixième point: nous nous opposons au fait que la fonction de surveillance épidémiologique soit dévolue de façon exclusive au ministre et au directeur de santé publique; nous y reviendrons.
Septième point: de façon générale, le projet de loi entraîne un certain nombre d'obligations et de tâches supplémentaires pour les médecins. Il y a une énumération de tâches cléricales, et, dans le contexte actuel où les soins aux malades requièrent la disponibilité complète des médecins, nous sommes préoccupés par l'ajout de ces tâches qui, pour plusieurs, sont de nature cléricale. Il est clair, pour la Fédération des médecins spécialistes, que ces tâches additionnelles devront être prises en compte dans le cadre des négociations avec le ministère.
Huitième point: qui plus est, on assujettit les médecins à des amendes s'ils omettent de remplir ces tâches, et nous dénonçons l'imposition de ces amendes pour trois raisons:
Premièrement, trop souvent, le cadre de l'infraction demeure flou; deuxièmement, les amendes sont prévues pour certains professionnels en particulier qui n'ont pas, en réalité, le contrôle sur toutes les tâches en cause; et, enfin, l'imposition de ces amendes relève du directeur de santé publique, qui détient toute la latitude qu'il veut pour décréter qu'un professionnel a refusé d'obéir à un de ses ordres et qu'une amende s'impose.
Pour la suite des points, je vous invite à aller à la page 7 où on parle du programme national et des plans d'action régionaux et locaux de santé publique. Dans le cadre de cet élément, nous craignons ? et nous voulons surtout éviter ? que toute énergie soit faite à faire des plans, à élaborer des plans et qu'il soit fait... Et la suggestion, c'est que ça soit fait sur le plan national et élaboré par la suite sur le plan régional. Et, dans ce cadre, nous pensons qu'il serait beaucoup plus fonctionnel pour le ministère de proposer un programme national de santé publique qui oriente des actions et de définir avec ses partenaires du réseau ce que devraient être un programme régional et un programme local type de santé publique en fonction des ressources disponibles et des orientations du programme. Le ministère devrait par la suite s'assurer, par le biais des résultats obtenus, que les instances régionales et locales assument bien leur mandat de santé publique et utilisent efficacement les ressources mises à leur disposition.
Je vous invite maintenant à la page 8 sur le comité d'éthique de santé publique. Oui, la Fédération est en faveur d'un comité d'éthique. Il était normal que cette orientation puisse enlever des tensions qui sont inévitables entre les droits des individus et les droits de la collectivité. Cependant, nous, dans le projet de loi, nous ne voyons pas la clarté suffisante du rôle de ce comité d'éthique et il semble parfois relever beaucoup plus d'un comité de scientifiques et même, jusqu'à certains égards, d'un comité de contrôle, alors qu'il devrait être un comité d'éthique. La Fédération propose qu'on revoie la composition, qu'elle soit plus transparente dans le comité d'éthique et croit qu'un des professionnels de la santé qui y siège puisse être suggéré par la Fédération des médecins spécialistes dans le cadre de ce comité d'éthique.
À la page 8 encore, sur le dossier de la surveillance épidémiologique de l'état de santé de la population. Je l'ai dit en introduction, nous croyons pas nécessaire que le ministère et le directeur de santé publique aient l'exclusivité de la fonction de surveillance épidémiologique. Est-ce à dire que les médecins spécialistes dans un établissement, en particulier les microbiologistes infectiologues qui font la surveillance mettons des infections nosocomiales ou encore des résistances bactériennes, deviendraient des hors-la-loi dans ce cadre? Je pense que, donc, l'exclusivité n'est pas nécessairement la meilleure solution pour la surveillance épidémiologique.
Le quatrième point que je veux souligner, c'est concernant la vaccination, à la page 10. Nous notons dans le projet de loi une certaine complexité dans le processus de consentement et, souvent, une absence d'information adéquate ? qui pourrait survenir ? sur la population visée. La suggestion de la Fédération dans son mémoire est que l'information soit versée automatiquement, mais qu'il y ait un processus d'«opting out» pour celui qui veut s'en soustraire. On aura plus de chances d'avoir des données plus précises, croyons-nous.
Cinquième point à la page 12, sur le pouvoir des autorités de santé publique et du gouvernement en cas de menace à la santé de la population. Et c'est là que je ramène le point que j'ai fait en introduction, c'est: la collaboration existe déjà entre les établissements et les directeurs de santé publique. La preuve ? nous l'avons vu dans, je crois, les problèmes de ventilation au Royal Vic ? les établissements, souvent, le personnel, les connaissances et la volonté de le faire, et ça devrait beaucoup plus se faire dans un cadre de collaboration entre le directeur de santé publique et les professionnels d'établissement plutôt qu'une suspension des privilèges dans les établissements.
En conclusion, nous espérons que les commentaires et les suggestions formulées par la Fédération seront pris en considération et que les modifications nécessaires seront apportées au projet de loi sur la santé publique.
Nous vous le répétons: Nous appuyons la démarche en cours visant à réviser la Loi; nous sommes enthousiastes quant à la mise en place de plusieurs mesures novatrices. Nous sommes toutefois persuadés que les corrections proposées permettront une loi sur la santé publique plus appropriée eu égard à la réalité mais aussi beaucoup plus utile pour la population. Et soyez assurés de la collaboration de la Fédération des médecins spécialistes. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le président également. Alors, au niveau des échanges, M. le ministre.
M. Trudel: Merci, M. le Président. M. le président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec et les gens qui vous accompagnent, bienvenue. Merci d'avoir pris temps et intérêt pour ce projet de loi qui prend le relais en quelque sorte pour moderniser un instrument de santé publique. Ce n'est qu'un instrument. Après 29 ans d'existence, était venu le moment de moderniser notre loi. Et il est extrêmement important que votre oeil microscopique passe à travers ce projet de loi parce que vous êtes les professionnels ? vous êtes les professionnels ? pour regrouper les professionnels qui interviennent dans ce secteur spécialisé de la santé communautaire, de la santé publique. Alors, nous nous devons d'avoir votre éclairage.
Effectivement, nous devons pouvoir compter sur votre vision des choses. Et, quand vous dites: Bon, maintenant, en programme de santé publique ? c'est un élément central du projet de loi ? des moyens, des outils pour être capable d'agir avant et le moins possible en termes de corrections après parce que nous aurions... nous serions intervenus en amont. Deuxièmement, la promotion, la promotion au niveau de la santé publique est ciblée à l'intérieur dans le programme et aussi la possibilité, la possibilité, pour le directeur de santé publique dans la région donnée, d'avoir ce pouvoir d'initiative lorsqu'une menace apparaît, c'est tout à fait nouveau.
Promotion de la santé publique. Bon. Là, il va nous falloir éviter d'être trop larges à l'intérieur de cette notion de loi, instrument, programme et plan d'action. Pour vous autres, de façon la plus précise possible, c'est quoi, les domaines ou les secteurs que nous devrions aborder massivement, systématiquement, en termes de promotion au niveau de la santé publique? Quels sont les gros morceaux auxquels on devrait s'attaquer de façon ferme, avec ce que vous avez comme expérience, que votre monde dans votre association, dans le regroupement, vous mentionne, vos colloques disciplinaires, vos échanges? Quels sont les grands morceaux auxquels on devrait s'attaquer dans ce programme-là? Et je dis, là, tout de suite: Ça n'a pas besoin d'être exclusif, puis ex cathedra, là, mais ce qui vous apparaît être majeur pour la santé des Québécois et des Québécoises?
M. Dugré (Yves): Je vais relever votre point. Tantôt, vous parliez de notre oeil microscopique, mais je vais rajouter qu'on a aussi un oeil macroscopique de santé communautaire; on n'a pas de microscope, mais on voit ça sous l'oeil des populations, et les microbiologistes voient ça microscopique. Je vais laisser le Dr Messier, peut-être.
M. Messier (Alain): Bien, si on parle d'un programme de promotion de la santé, il faut certainement s'attaquer du côté des déterminants de la santé, des facteurs de risques: les habitudes de vie, le tabac, la sédentarité; évidemment, en plus, tout ce qui concerne les maladies chroniques aussi où est-ce qu'il y a une possibilité d'agir parfois en prévention de maladies chroniques comme le diabète adulte obèse par exemple où est-ce qu'on sait qu'on peut prévenir 25 % en s'attaquant à la sédentarité et au problème du poids; la pauvreté évidemment; toutes les autres habitudes de vie. J'ai mentionné le tabac, j'espère. Maintenant, en fait, on pourrait trouver... J'étais pas préparé à vous faire un programme... En général, mais c'est de ce côté-là qu'il faut s'en aller.
M. Trudel: Ça va. Habitudes de vie, alimentation, exercice, lutte au tabagisme. Bon, et je pense que nous sommes dans un même registre, mais il va falloir être davantage précis et vous et moi: lutte à la pauvreté. Lutte à la pauvreté, parce que c'est tout puis c'est rien lorsqu'on n'identifie pas des lieux, des groupes plus vulnérables, des situations plus particulières, mais ce que vous nous indiquez, c'est qu'il ne faut pas tout arroser en même temps parce qu'on finit par saupoudrer.
Concentrer, concentrer nos efforts de promotion en matière de santé sur des objectifs très précis dans un programme. Et, déjà, vous imaginez bien, vous imaginez bien la politique de santé et bien-être et les réflexions que nous avons faites jusqu'à maintenant parce que, dès le moment où on aura adopté notre loi, la volonté là, c'est d'aller assez rapidement sur le programme, puis le plan d'action. Alors, je vous le dis tout de suite là: Là, je vous ai pris à brûle-pourpoint là, au dépourvu un peu, mais pensez-y parce qu'on va revenir vous voir. On va revenir vous voir puis on va avoir besoin de votre éclairage. Il va falloir qu'on aille assez rapidement au niveau des priorités en matière de santé publique.
M. Dugré (Yves): Peut-être le Dr Poirier a quelque chose à rajouter du côté de...
Le Président (M. Beaumier): Oui.
M. Trudel: Oui, Dr Poirier.
M. Poirier (André): Pour continuer dans la même veine, vous comprendrez ? comme on oeuvre en maladie infectieuse ? vous comprendrez que je vais vous parler de priorités et de maladies infectieuses comme telles. Je pense qu'actuellement le ministère fait des efforts louables en termes de prévention des maladies transmissibles sexuellement, en termes de prévention du VIH, qui sont des secteurs de prévention de la plus haute importance, et on est tout à fait d'accord à ce que le ministère et les régies poursuivent dans le même sens.
n(15 heures)n Concernant plus spécifiquement le projet de loi au niveau de la vaccination ? le Dr Dugré l'a mentionné ? on est tout à fait d'accord avec le registre national de vaccination avec le système de retrait optionnel qui est beaucoup plus flexible à gérer comme tel. Alors, je pense que là il y a des gains à faire, parce que, comme vous l'avez dit précédemment, le médecin est souvent confronté à deviner l'état vaccinal d'un patient. Alors, on espère que les modalités d'application de ce registre-là seront faciles d'accès pour tous les professionnels comme tels.
Il y a aussi la liste des maladies à déclaration obligatoire, les MADO, qui sont appelées à être revues par règlement comme tel. Évidemment que c'est une liste qui est désuète. Vous l'avez dit tantôt, ça fait plusieurs années que la loi n'a pas été revue en ce sens-là, et on espère que la liste des maladies à déclaration obligatoire va être complète et va refléter la situation actuelle. Et on est même prêts à s'associer à vous si besoin est.
L'autre volet important ? et on en a parlé un peu dans le rapport ? est le volet des infections nosocomiales. Par définition, une infection nosocomiale est une infection qui s'acquiert lorsqu'un patient est hospitalisé dans un établissement de santé. Donc, c'est une infection qui, par définition, peut être prévenable, et je pense que, actuellement, il y a des efforts qui sont mis dans plusieurs établissements pour prévenir ce type d'infections là. Malheureusement, je dirais que les ressources qui sont dévolues par centre hospitalier ne correspondent pas toujours aux normes minimales. On aimerait que les gens, que les directeurs des centres hospitaliers mettent des ressources, parce que c'est... En fait, il y a un argument économique aussi, c'est que chaque infection nosocomiale génère des coûts importants. Et, actuellement, plusieurs centres hospitaliers font face à l'apparition de germes multirésistants, et il y a besoin, je dirais, d'une logistique provinciale et régionale pour aider les établissements comme tels.
Alors, ça résume un peu le point de vue d'un microbiologiste infectiologue face, je dirais, aux grands dossiers qui devraient inquiéter les représentants du gouvernement.
M. Trudel: M. le docteur microbiologiste infectiologue, on a des nouvelles pour vous aujourd'hui, parce qu'on a énoncé publiquement ce matin, par exemple, qui va... Ça va à l'appui, essentiellement, de votre thèse, nous allons maintenant... Le projet de règlement a été publié dans la Gazette officielle, et maintenant on va ajouter à la liste de déclaration obligatoire et confidentielle l'infection au VIH. Je pense que ça fait un bon moment que vous nous aviez donné des avis, en particulier votre secteur de spécialisation... des avis sur la nécessité ou l'utilité, en tout cas, en termes d'aide et de soutien, d'en faire une maladie à déclaration obligatoire, une infection à déclaration obligatoire. Alors, on aura 60 jours, là, pour se prononcer, et, dans 60 jours, ça deviendra, selon toute vraisemblance, le projet de loi, une infection à déclaration obligatoire. Et les groupes concernés aussi, parce que maintenant les sciences médicales ont développé des outils, des instruments, des traitements qui peuvent nous aider, mais encore faut-il le savoir, le connaître et avoir la séquence de propagation de l'infection.
Par ailleurs, est-ce que vous jugez suffisant pour les infections nosocomiales dans les établissements... Vous savez, ça, c'est une responsabilité de l'établissement, vous en avez donné une illustration. Mais là nous irions, dans la Loi de la santé publique, comme en faire une obligation de signalement de ces situations. Est-ce que cela, je dirais, va nous aider, va vous aider suffisamment de poser ce geste supplémentaire pour, encore une fois, qu'on puisse agir en amont, avant, et, si tant est qu'il y a situation de menace, qu'on puisse intervenir le plus rapidement possible pour éviter ces infections?
M. Poirier (André): En fait, c'est clair qu'il y a un système de surveillance efficace qui doit être établi au niveau de la province, au niveau des établissements aussi. Certains centres hospitaliers le font, je dirais, donnent des ressources qui sont limites mais font quand même une surveillance qui est adéquate. Mais plusieurs ne le font pas, et je pense que d'en faire une priorité est tout à fait justifiable.
Par contre, il faut voir que l'éventail des infections nosocomiales est très, très large et il faut cibler... Moi, je pense qu'il faut cibler les infections nosocomiales sur lesquelles on peut avoir une rétroaction positive pour le patient. Autrement dit, ça donne rien d'engranger des chiffres, voir comment on peut, je dirais, monitorer toutes les infections nosocomiales, on préfère de beaucoup voir quels types d'infections nosocomiales peuvent avoir, encore une fois, une rétroaction. Et on a un comité, actuellement, qui y travaille de façon étroite avec la santé publique, qui est le Comité CINQ, le Comité sur les infections nosocomiales du Québec, et qui serait, je dirais, la tribune tout à fait appropriée pour donner ce genre de définition là.
M. Trudel: Tout en notant aussi, cependant, qu'on va pas tout mettre la responsabilité sur le dos du directeur régional ou le directeur de la santé publique. Il faut que l'établissement, oui, conserve et prenne la responsabilité de la prévention et des actions qui, en termes de rétroaction, pourraient avoir de l'effet ? vous allez être certainement d'accord pour dire ? non seulement sur le patient, mais sur la population, parce qu'il y a aussi la famille qui entoure, les proches qui sont dans l'environnement de votre patient. On n'ira pas charger le directeur de santé publique d'avoir tout sur ses épaules, mais il pourra... Dans ce que le Dr Dugré a mentionné comme commentaire également, il pourra initier, enquêter, documenter et aller jusqu'à la responsabilité de l'établissement et signaler cette situation. Parce que, bon, on donnera pas de noms aujourd'hui, là, hein, mais, effectivement, il y a des établissements qui prennent pas toujours suffisamment... Et vous, vous êtes le spécialiste en pareille matière, ils prennent pas toujours les actions requises, nécessaires en pareille matière, et on doit renforcer la capacité de signalement, de connaissance des situations, et des mécanismes, et des actions correctrices. Je pense qu'on pourra y arriver davantage avec ce qu'on va ajouter.
Bon, le temps file rapidement, il doit nous rester quatre ou cinq minutes, quelque chose du genre, alors, Dr Dugré, on va avoir... Ça va. Dr Dugré, on va avoir, donc, toute une mécanique qui va se mettre en marche. Et, encore une fois, on partage quelque chose, docteur...
M. Dugré (Yves): ...
M. Trudel: ...la préoccupation que cela ne se bureaucratise pas, que ça ne se bureaucratise pas. Mais, par ailleurs, si... Je crois déceler une tendance chez vous. Peut-être allez-vous me corriger, je crois déceler une tendance chez vous de faire ça par le haut vers le bas: des orientations des directions nationales incarnées au niveau régional, puis appliquez-moi ça au niveau local. Est-ce que vous, là... Est-ce que vous avez l'impression qu'on peut relever le défi? Parce qu'on n'a pas tout à fait choisi cet angle-là. On a choisi l'angle, oui, d'avoir de grandes orientations nationales, mais selon des plans qui vont se fabriquer au niveau régional et au niveau local, incluant les établissements, parce que vous aviez une note là-dessus dans votre mémoire. Mais tout ça devra s'incorporer, s'inclure dans un... dans une... dans des actions nationales et un plan national qu'il faudra approuver.
n(15 h 10)n Est-ce que, pour vous, c'est possible d'y arriver de cette façon-là et de tenir compte que les milieux ne sont pas tous pareils? Qu'est-ce que vous voulez, il y avait un peu de plomb dans le quartier Notre-Dame, au pied de Minéraux Noranda, à Noranda, puis c'était pas la même chose à Valleyfield, étant le zinc, et puis vous qui avez été dans ça, les situations sont pas les mêmes partout. Est-ce qu'on peut y arriver donc: orientations nationales, fabrication, construction, en quelque sorte, de plans au niveau régional avec l'implication locale puis inscrits à l'intérieur d'orientations claires, pour qu'on puisse tenir compte aussi, hein, des acquis de la science, des acquis de ce secteur d'activité professionnelle? Il y a des standards qui existent maintenant au niveau international. Est-ce qu'on peut y arriver, selon vous?
M. Dugré (Yves): Regardez, je pense, si vous notez une tendance, c'est peut-être un «mixed feeling», parce qu'on n'est pas nécessairement pour le «top down», nécessairement à partir d'en haut et faire descendre en bas parce qu'on a... On le dit, dans le fond, dans le mémoire que ça pose un problème, disons, d'adapter ou d'adopter le plan s'il vient trop d'en haut. Mais c'est, je veux dire, une espèce de mélange des deux où il doit y avoir un plan... Mais ce qui est important dans ce qu'on veut, vous l'avez mentionné, c'est qu'il y ait pas une bureaucratisation, qu'on passe notre temps à faire des plans. Je pense que le plan national devrait être assez souple pour pouvoir incorporer toutes ces particularités des régions, mais chaque région pourrait... devrait s'adapter, jusqu'à un certain point, dans le cadre régional. Mais ça va toujours demeurer la problématique de partir d'en haut, partir d'en bas, mais je pense que c'est un peu des deux. Si ça vient trop d'en haut, les gens ne l'adopteront pas, ils vont le contester puis n'en feront pas leur propre plan. Donc...
Et comment, dans les faits, le faire? Je le sais pas, j'ai pas de recette magique, mais c'est certainement pas nécessairement de partir d'en haut complètement, ce n'est pas notre vision. Mais, surtout, c'est qu'un plan national devrait être assez large, assez souple pour pouvoir prendre toutes ces particularités-là, que ce soient les rivières contaminées, les régions agricoles, les régions des mines ou la forêt, etc. Je veux dire, je pense qu'il y a des particularités, il y a des régions urbaines, mais il y a certainement des régions qui n'ont pas nécessairement les ressources non plus pour mettre en application tout le plan national, ça peut être une partie. Mais c'est la notion de gestion par résultats qu'ils devraient faire, par exemple. Finalement, si on les laisse avec leur propre plan et puis on n'a pas de gestion de résultats, on a peut-être un peu perdu notre temps, puis c'est ça qu'on veut éviter. C'est qu'on veut qu'il y ait des actions sur le terrain, pas nécessairement s'éparpiller, comme vous avez dit, puis avoir 22 ou 122 projets et puis qu'on a ait des résultats faibles, mais plutôt d'aller fortement dans certains secteurs puis qu'on évalue les résultats. C'est ça, notre position.
Le Président (M. Beaumier): Merci, M. Dugré. Alors...
M. Trudel: Souple, mais pas floue.
M. Dugré (Yves): Oui, souple, mais pas floue.
M. Trudel: Mais pas floue.
M. Dugré(Yves): Non.
M. Trudel: Merci.
Le Président (M. Beaumier): M. le député de Châteauguay.
M. Fournier: Merci, M. le Président. Je voulais faire un jeu de mots que je vais retenir. Merci beaucoup d'être avec nous, M. Dugré, les gens qui l'accompagnent. Je notais... Je vais y aller d'abord, d'entrée de jeu, en remarquant un des éléments que vous nous avez lus tantôt où vous vous dites surpris du ton impératif utilisé dans le projet de loi et qui tranche nettement, dites-vous, avec l'esprit de collaboration existant entre les directeurs de santé publique et les médecins spécialistes. Je ne peux m'empêcher de me rappeler un extrait d'un autre mémoire de l'Institut national de santé publique, dont je lisais un extrait ce matin, qui... Et le coupe un peu, mais qui disait ceci: «Il faut éviter que, pour des dispositions légales qui ne changeront à peu près rien dans l'action, l'ensemble d'un beau projet puisse être perçu comme une recherche trop importante de pouvoirs.» Tout ça pour dire qu'il semble pas que vous êtes les seuls à avoir eu une impression en faisant une lecture du projet de loi, et, comme je le disais, surtout en santé publique, m'inspirant de ce que beaucoup de monde ont dit, il faut surtout éviter de donner l'impression que les gens ont à marcher au pas de celui qui dicte le pas. Il faut plutôt que les gens aient le goût d'embarquer volontairement dans la marche. Et, ceci étant, votre message est passé, et l'Institut viendra passer le sien aussi.
Je voudrais attirer votre attention sur la page 6, un élément que vous nous avez laissé lire, mais dont on n'a pu bénéficier, malheureusement, de votre envolée oratoire. Peut-être que vous pourriez revenir sur l'élément 3.1.2, l'évaluation des objectifs. J'aimerais ça que vous me parliez un peu de l'importance que vous faites d'inclure l'élément d'évaluation d'impact du programme lui-même. Pourquoi croyez-vous que c'est essentiel d'apporter cet ajout au projet de loi?
M. Messier (Alain): En programmation, ça ferait partie... Ça compléterait, en fait, les programmes, les activités et les interventions coordonnées pour être capable d'évaluer à savoir si les objectifs sont atteints, parce que l'objectif des programmes est d'en arriver à des résultats aussi. Alors, ça serait un plus d'être capable de faire cette évaluation-là.
M. Fournier: Ça se faisait pas précédemment?
M. Messier (Alain): Ça se fait, oui, mais si... Ça pourrait même être inclus dans les grands programmes. L'évaluation est une pratique courante en santé publique aussi, mais elle est pas incluse dans la loi.
M. Fournier: Et vous pensez que, si elle n'est pas incluse, l'évaluation des impacts du programme lui-même ne se ferait pas.
M. Messier (Alain): Non, elle pourrait se faire quand même, mais, étant donné qu'on peut souhaiter... On pourrait souhaiter aussi qu'il y ait de l'évaluation de résultats pour être capable de partir des résultats pour élaborer de nouveaux programmes ensuite.
M. Fournier: Souhaiteriez-vous que cette évaluation soit la plus publique possible, la plus large possible, ou restreinte à des milieux tels les médecins spécialistes et le ministère, ou est-ce que vous considérez, notamment pour un programme de santé publique, que cette évaluation des impacts du programme devrait être diffusée le plus largement possible?
M. Messier (Alain): Ce serait souhaitable que ça soit diffusé.
M. Fournier: Le plus largement possible?
M. Messier (Alain): Oui.
M. Fournier: Je vais vous amener maintenant à la page 8, le comité d'éthique, et vous avez dit notamment: «Nous questionnons la trop grande mainmise du ministre sur ce comité, notamment par le fait qu'il en nomme tous les membres.» J'aimerais que vous me disiez quel est le problème que vous voyez pour nous faire cette déclaration où vous vous questionnez, tout au moins pour qu'il y ait des questions qui se soulèvent dans votre esprit. En quoi le fait qu'il n'y ait pas d'indépendance à ce comité d'éthique, ça vous pose un problème?
M. Dugré (Yves): ...il y en a peut-être de l'indépendance, il faut qu'il y ait aussi l'apparence d'indépendance. C'est peut-être dans ce sens-là que... Le comité d'éthique, en soi, là, je pense que c'est quelque chose où les gens... C'est crédible. Peut-être que dans le processus on voudrait une plus grande transparence dans ce cadre-là. C'est l'esprit de notre intervention. Et puis peut-être qu'il y a des membres qui pourraient être nommés à partir d'une liste. C'est pour ça qu'on suggère qu'à partir d'une liste suggérée peut-être... En tout cas, entre autres, pour notre Fédération, j'ai vu qu'il y avait beaucoup de gens qui voulaient être sur le comité d'éthique, là, mais, je veux dire, à partir du moment où on a défini qu'est-ce que c'est qu'un éthicien... Mais que cette liste-là puisse être transparente, et c'est l'esprit de notre intervention.
M. Fournier: Merci. Si je vous comprends bien, pour que le comité d'éthique soit crédible au sein de la population, il faut qu'il y ait une distance à l'égard du gouvernement.
M. Dugré (Yves): Par rapport au contrôle, que ça soit pas nécessairement... C'est ce qu'on a dit tantôt, que c'était un comité d'éthique, mais, des fois, quand on lit la loi, on peut penser que ça peut ressembler à un comité soit scientifique ou même un comité qui est plus proche du contrôle des... qui contrôle le contenu ou des choses comme ça. Donc, on veut que ça soit vraiment un comité d'éthique avec une indépendance qui est, somme toute, probablement réelle, mais aussi évidente.
M. Fournier: Je vous suis tout à fait, tant qu'à moi, vous le savez sans doute, sur les aspects d'indépendance et de crédibilité accrue. Lorsque les gens savent qui fait quoi et... Est-ce que vous souhaitez que les avis émis par le comité d'éthique soient publics, diffusés le plus largement possible ou que ce soit restreint à des petits groupes?
M. Dugré (Yves): Bien, il y a pas vraiment d'idée ou d'avantage à être pas transparent. Je pense que la transparence est bonne dans ce dossier-là. Je pense que c'est un dossier de santé publique. Donc, je pense que ça doit être le plus transparent possible.
M. Fournier: Donc, une publicité à l'égard des avis qui sont donnés par le comité d'éthique.
Je vous amène à la page 14. Je pourrais peut-être le faire en jonction avec la page 9, mais prenons le titre de la page 14. En fait, vous nous parlez du directeur national de santé publique. C'est le même thème, et je voudrais vous entendre sur le même thème. Je sais pas si vous aviez eu l'occasion de nous en parler à l'égard du projet de loi n° 28 lorsque le directeur national de santé... Puis je m'en souviens plus, là, lorsque... Je me souviens du Collège des médecins clairement, mais c'était plus frappant.
M. Dugré (Yves): Ce matin ou...
M. Fournier: Non, au mois de juin...
M. Dugré (Yves): Au mois de juin, oui.
M. Fournier: ...sur le 28, à l'égard du directeur national de santé publique. Mais je comprends bien que ce que vous nous dites notamment, c'est qu'il devait, là aussi, y avoir une certaine indépendance à l'égard du directeur national de santé publique.
M. Dugré (Yves): C'est sûr que le directeur de santé publique est un médecin spécialiste, mais on a tout avantage, dans le domaine de la santé publique, à ce qu'il y ait pas une apparence de liens trop étroits avec le ministère. Je comprends avec le ministre ou... Pour pas que ça soit... Les recommandations du directeur de la santé publique peuvent être teintées d'un aspect politique. Je pense que cet aspect-là est important, d'avoir l'indépendance. C'est un professionnel qui connaît... qui sera choisi pour sa capacité, il faut qu'il l'ait, mais il faut qu'il soit indépendant du côté politique, et c'est l'esprit que nous véhiculons.
n(15 h 20)nM. Fournier: En ce moment, avec le projet de loi n° 28, il est le sous-ministre adjoint en santé publique. C'est ce qu'a amené le projet de loi n° 28, sous l'autorité du ministre, aucune distance. Enfin, il a un patron, c'est le ministre. Le Collège des médecins venait, ce matin... Puis je vais essayer de reprendre la compréhension que j'avais, bien que quelqu'un a ajouté qu'il aurait souhaité qu'il soit vraiment nommé... que le processus de nomination soit lui-même changé. Mais le mémoire du Collège des médecins vient dire: Bien, maintenant qu'il est nommé par le gouvernement, par le ministre, c'est son sous-ministre adjoint, là, mais que c'est fait de même puis qu'on peut pas jouer là-dedans parce que le 28 est déjà passé, il faudrait jouer dans la destitution, c'est-à-dire il faudrait s'assurer qu'il ne peut pas être limogé simplement parce que l'avis qu'il a donné fait pas l'affaire du gouvernement.
Est-ce que vous partagez les pistes de solution envisagées par le Collège des médecins, c'est-à-dire qu'on s'assure, au niveau des règles de destitution, qu'ils soient le plus... qu'ils lui assurent le plus d'indépendance possible ou si vous souhaiteriez qu'on revoie l'ensemble du processus de nomination?
M. Dugré (Yves): Non, on s'est pas tellement attachés à ça. Je veux dire, plutôt, quand on parle du comité d'éthique qui, lui, pourrait être indépendant, il pourrait, disons, être comme le chien de garde en tant que tel. On s'est pas attardés sur le processus de nomination, que ce soit un... Je pense que le Collège parlait de... Je sais pas, d'un médecin-chef ou «general surgeon» comme aux États-Unis, jusqu'à un certain point, où il est complètement en dehors de la politique, mais je sais pas si ça existe dans la vie, ça, quelqu'un qui est en dehors complètement de la politique et je sais pas si c'est une bebite qui est visible ou qui vit longtemps, là, je suis pas certain de ça. Donc, on s'est pas attachés à ce processus-là, mais on se met des gardes à l'intérieur, que les gens les plus compétents y soient, qu'on ait un comité d'éthique. C'est plutôt ça, notre pensée, plutôt que de tout refaire le processus de nomination.
M. Fournier: Donc, à l'égard du directeur national de santé publique, vous dites: Il est là, il est là, on veut pas intervenir là-dedans, là.
M. Dugré (Yves): Non, c'est pas l'objet de notre... C'est pas l'objet de notre rapport, absolument.
M. Fournier: Simplement le comité d'éthique, que lui soit...
M. Dugré (Yves): Bien, on se donne des mécanismes, là, pour... que la population, que les gens qui connaissent le domaine, que les médecins spécialistes entre autres, que les associations de médecine... santé communautaire ou microbiologistes puissent intervenir. Et c'est des garanties qu'on se donne qu'on ait une porte d'entrée. C'est de là qu'on parle collaboration, on parle rôle des médecins dans les établissements. Disons qu'on met des points forts sur les points qui existent actuellement, et on ne veut pas un système bureaucratique ou encore un... accaparer du pouvoir à l'occasion de cette loi, mais d'utiliser ce qui est déjà en place et de le valoriser sans refaire tout le système au complet.
M. Fournier: Je vous relis rapidement ? ma collègue a une question aussi à vous poser: «L'inquiétude de nos membres concernant un contrôle bureaucratique inapproprié du ministère sur leur pratique professionnelle ? je suis dans le chapitre du directeur national de santé publique ? serait un peu atténuée si le projet de loi indiquait que les directives à caractère professionnel du MSSS doivent être émises par le directeur national de santé publique, lui ou elle-même médecin spécialiste en santé communautaire.» Est-ce que vous considéreriez qu'il y aurait une plus grande crédibilité si ces directives avaient un caractère public?
M. Messier (Alain): Le principe, c'est de garder l'indépendance professionnelle, l'autonomie professionnelle du médecin qui est officier comme le «surgeon general», qu'il ait un rôle administratif et politique aussi ou administratif comme sous-ministre, mais qu'en même temps il ait un statut aussi de professionnel indépendant, de médecin indépendant qui peut émettre un avis en toute objectivité vis-à-vis une situation.
M. Fournier: Est-ce que cet avis devrait être public? Est-ce que vous considéreriez qu'il y a une amélioration de la perception à l'égard des avis qui sont émis ou des actions qui sont prises en santé publique si ces avis professionnels du directeur national de santé publique sont rendus publics?
M. Messier (Alain): À mon avis, ils devraient être rendus publics, parce que ça pourrait être deux éléments: d'une part, admettre une situation ou porter un jugement sur une situation médicale; et, d'autre part, la baliser avec les moyens qu'on a de la réaliser. Alors, je pense que c'est un discours transparent qu'il devrait être capable de tenir.
M. Fournier: Merci. Ma collègue de Mercier.
Le Président (M. Beaumier): Merci. Alors, Mme la députée de Mercier.
Mme Rochefort: Merci, M. le Président. Je vous ramène à l'article 74 de la loi, au chapitre VIII, Intoxications, infections et maladies à déclaration obligatoire. Donc, Dr Poirier, tout à l'heure, vous mentionniez les effets de la déclaration, vous donniez certains exemples, et le questionnement qui me vient spontanément à l'esprit, dont j'ai déjà fait part plus tôt en journée, c'est: Est-ce qu'il y a les... Le fait que ça soit une déclaration par règlement ministériel, est-ce que ça engendre des délais qui peuvent être nocifs à la santé?
M. Poirier (André): Je vous dirai que, bon, il y a toujours un certain délai, de toute façon, à la déclaration. Les choses urgentes, par contre, qu'on doit déclarer dans les 24 heures, généralement le directeur de santé publique est avisé dans les 24 heures. Le reste ne nécessite pas nécessairement une action qui est immédiate comme telle. Alors, en ce sens-là, je pense pas que ça engendre un délai supplémentaire. D'après moi, non.
Mme Rochefort: Est-ce qu'il y aurait moyen d'avoir plus de flexibilité de façon à pouvoir avoir peut-être des situations où le DSP, comme directeur, peut, avant qu'il y ait eu vraiment la mise en place d'un règlement... Qu'il y ait au moins un certain laps de temps?
M. Poirier (André): Bien, actuellement, bon, de toute façon, il y en a déjà une liste de maladies à déclaration obligatoire. Elle a besoin d'être remise à jour, on est tout à fait d'accord avec ça, mais je pense pas que le délai avant l'application du règlement comme tel soit nocif à la santé de la population. Ça fait quand même plusieurs années qu'on est dû pour refaire cette liste-là, c'est pas quelques mois, je pense, qui vont faire la différence comme telle. Je crois pas.
M. Messier (Alain): Si la liste des maladies est inscrite dans le règlement, c'est plus facile à modifier ou à ajouter que lorsque c'est dans une loi.
Le Président (M. Beaumier): Merci. Alors, merci, M. Dugré, M. Messier et M. Poirier. Et puis j'inviterais les représentants de la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux et Conseil des directeurs et des directrices de santé publique.
Je suspendrais les travaux. Puis, à la demande d'un de nos membres, on suspendrait 10 minutes, s'il vous plaît. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 26)
(Reprise à 15 h 41)
Le Président (M. Labbé): Alors, bonjour tout le monde. Si vous permettez, nous allons maintenant poursuivre nos travaux au niveau de la commission des affaires sociales comme telle. Alors, si... Évidemment, nous avons le plaisir de recevoir la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux et le Conseil des directeurs et directrices de santé publique. Alors, sans plus tarder, vous savez que vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire comme tel, et, par la suite, il y aura une période d'échange de 40 minutes qui sera divisée équitablement entre les deux formations politiques. Alors, je cède la parole au représentant, qui va se faire un plaisir de présenter évidemment les personnes qui l'accompagnent. À vous la parole.
Conférence des régies régionales de la santé
et des services sociaux et Conseil des directeurs
et des directrices de santé publique
M. Dontigny (André): Bonjour. Mon nom est André Dontigny, je suis le président du Conseil des directeurs de santé publique et directeur de santé publique en Mauricie?Centre-du-Québec. À ma gauche, le Dr Richard Lessard, qui est directeur de santé publique à Montréal-Centre, et, à ma droite, Dr François Desbiens, directeur de santé publique à Québec.
Le Président (M. Labbé): Bienvenue.
M. Dontigny (André): Alors, M. le ministre, M. le Président, MM., Mmes les parlementaires, nous vous remercions de nous donner cette occasion de discuter du projet de loi n° 36 portant sur la Loi de la santé publique. Notre allocution sera brève pour laisser toute la place aux échanges par la suite.
Permettez-nous de rappeler aux membres de la commission que les directions régionales de santé publique sont responsables dans chacune de leur région sociosanitaire respective d'informer la population sur leur état de santé et d'identifier des facteurs de risque, des groupes vulnérables de même que des interventions susceptibles de prévenir des problèmes de santé et des problèmes sociaux et de contribuer à l'amélioration de la santé de la population desservie. Nous avons aussi comme responsabilité d'identifier des situations de menaces réelles ou appréhendées et de mettre en place les mesures susceptibles de remédier à ces menaces. Nous devons aussi assurer l'expertise en prévention et promotion de la santé. Ces responsabilités se sont vu préciser dans le cadre de l'adoption récente de la loi n° 28, notamment en reconnaissant explicitement l'importance des actions gouvernementales et intersectorielles afin de mettre en place les conditions favorisant l'amélioration de la santé des individus et des collectivités.
Nous soulevons d'entrée de jeu, dans le mémoire qui vous a été déposé, notre appui à cette proposition d'un nouveau cadre législatif venant baliser l'action de santé publique. Nous en souhaitons l'adoption et formulons certaines propositions et questionnements pour que le législateur puisse faire les ajustements nécessaires au projet afin que les prescriptions légales puissent avoir un meilleur impact sur la santé et le bien-être des individus et des groupes.
Premièrement, en ce qui concerne l'objet de la loi, nous saluons l'intention du législateur d'intégrer tant les volets de protection de la santé que ceux portant sur l'amélioration de la santé. Des suggestions de réaménagement de l'article 2 sont faites afin de s'assurer que l'esprit de la loi soit clairement saisi. En effet, la promotion de la santé est une dimension novatrice et fondamentale de ce projet de loi, comparativement à l'ancienne loi de la protection de la santé publique. Nous souhaitons que le gouvernement garde à l'esprit l'importance du message préventif dans l'application du programme national de santé publique et l'octroi des ressources nécessaires à son application. Nous avions d'ailleurs eu l'occasion, lors de la commission d'étude récente, de rappeler la perte de ressources locales agissant en prévention dans le contexte de la réforme récente et du virage ambulatoire.
En ce qui concerne les acteurs de santé publique, l'identification de ceux-ci nous apparaît un élément majeur du projet et s'inscrit en continuité avec la décision récente de nommer, pour conseiller et assister le ministre et le sous-ministre, un directeur national de santé publique. Nous sommes d'avis que la présence du directeur national de santé publique constituera un appui important dans la réalisation de nos fonctions régionales. Tout en étant satisfaits de l'indication du rôle des établissements exploitant des centres locaux de services communautaires, nous souhaitons que ne soient pas passés sous silence les autres intervenants concernés par les activités de santé publique.
Nous faisons aussi part dans cette section de notre inquiétude à l'effet que la loi puisse induire de la lourdeur administrative par l'exigence de production d'un ensemble de plans ? plan d'action, plan de mobilisation des ressources, plan de surveillance ? qui risquerait de détourner l'action de santé publique des besoins prioritaires de la population. Toutefois, doit demeurer clairement et en conformité avec l'urgence de prévenir évoquée par la commission d'étude sur la santé et les services sociaux la capacité, notamment des CLSC, de disposer des ressources requises en matière de prévention.
En matière de vie privée, conscients du caractère sensible de l'accès à des données nominales ou du type d'action qui peut découler d'une situation de menace réelle ou appréhendée, nous tenons à rappeler que l'intérêt de la population peut justifier un régime d'exception au principe fondamental du respect au droit de la vie privée des individus. Considérant que de telles limites ne peuvent aller au-delà de ce qui est strictement nécessaire, nous émettons quelques suggestions afin d'insister davantage sur les éléments de sécurité.
En ce qui a trait à la liste des intoxications, infections et maladies à déclaration obligatoire, nous suggérons aussi d'ajouter un alinéa à l'article 74 afin de disposer, sur une base temporaire, des informations requises dans un contexte de menace appréhendé.
À l'égard du comité d'éthique, et bien que jugeant essentielle la réflexion éthique pour éclairer les décisions de santé publique, nous appelons à une certaine prudence et suggérons que le mandat du comité touche prioritairement les plans de surveillance. Nous croyons, de plus, que des clarifications devraient être apportées à la section sur la fluoration afin que l'intention des autorités de santé publique de promouvoir cette mesure soit davantage explicite.
Enfin, tout en supportant l'avènement d'un registre central de vaccination, nous suggérons une modification qui permettra aux directeurs régionaux de santé publique de s'assurer de disposer des informations utiles pour mesurer le taux de couverture vaccinale et ainsi être en mesure d'ajuster la promotion de la vaccination sur la base d'une bonne connaissance de cette donnée essentielle dans notre région. Cet élément peut paraître périphérique; nous l'estimons toutefois central dans notre capacité de surveiller et d'intervenir.
En somme, un projet de loi nécessaire, qui a pu bénéficier des résultats d'une vaste consultation avant son élaboration, que nous souhaitons voir adopter et pour l'application duquel nous comptons agir dans un esprit de collaboration avec les partenaires tant intersectoriels que du réseau de la santé.
Nous vous remercions de nous avoir entendus sur un projet qui nous concerne directement et pour lequel nous sommes évidemment en faveur. Nous souhaitons toutefois terminer cet exposé en attirant votre attention à l'égard d'un aspect pour lequel la prise en compte dans le projet de loi nous facilitera grandement notre capacité à assumer nos responsabilités en matière de surveillance. Nous croyons raisonnable de donner un accès plus grand mais quand même limité aux directeurs régionaux de santé publique en matière de données nominales, lesquelles données seraient gérées en respectant les règles évidemment de sécurité et de confidentialité. La prise en compte de cet aspect constituera un élément tangible d'amélioration de la loi. Merci de votre attention.
Le Président (M. Labbé): Alors, merci, Dr Dontigny, alors pour votre présentation. Sans plus tarder, je cède maintenant la parole au ministre pour une période de 20 minutes.
M. Trudel: Merci, Dr Dontigny, de votre présentation et bienvenue également à vos collègues, Dr Lessard, qui est à Montréal, Dr Desbiens. La capitale et la métropole, la santé publique étant là, le Centre-du-Québec fait l'arbitrage, on est correct. Merci de votre présentation et d'indiquer la nécessité de ce projet de loi, parce que vous êtes nos personnes terrains. C'est vous autres, là, la santé publique au quotidien, là, c'est vous autres qui en portez la responsabilité très concrètement, lorsqu'il y a à saisir une situation de menace à la santé publique, d'initier des actions correctrices et de voir aussi à ce qu'il y ait intervention en matière de prévention.
Il a été mentionné, depuis le matin que nous entendons les intervenants... On comprend que votre appui, là, vous l'avez libellé sous la forme d'un projet de loi nécessaire et attendu depuis longtemps. Il a été indiqué qu'on vous donnait trop de pouvoir, que vous avez trop de pouvoir, vous auriez trop de pouvoir en termes d'intervention. Vous avez une expérience ? je vais faire un pléonasme ? une expérience historique, parce que c'est votre spécialité en termes de science médicale. Deuxièmement, pour vous connaître... puis vous occupez vos responsabilités depuis un très grand nombre d'années, donc vous avez l'expérience de pratique du terrain puis vous voyez qu'est-ce qui s'en vient.
Est-ce qu'à l'égard de ce que vous réalisez actuellement et ce que vous devez réaliser, est-ce que vous pensez que le législateur est allé trop loin ou pas assez loin à l'égard de vos responsabilités actuelles, qui vont se poursuivre mais avec, sans l'ombre d'un doute, des situations nouvelles dans nos sociétés?
n(15 h 50)nLe Président (M. Labbé): Dr Dontigny, à vous la parole.
M. Dontigny (André): Nous estimons que le projet de loi est allé suffisamment loin. Ce qui importe ici, c'est, pour nous du moins, de rappeler que cette perception-là est associée à des éléments qui sont quand même de nature exceptionnelle, parce qu'on parle ici du pouvoir relatif à des situations de menaces réelles et appréhendées qui ne constituent pas le lot de la pratique de santé publique quotidienne. Mais, au moment où arrivent de telles situations, il y a tout avantage à ce que les pouvoirs soient bien balisés, et c'est ce que permet le projet de loi présentement.
En ce qui nous concerne, il existe trois balises, au fond. Nous comprenons qu'il y a trois balises dans le projet de loi de santé publique pour venir clarifier ce pouvoir des directeurs de santé publique. Il y a, premièrement, la définition même de la menace telle qu'elle apparaît à l'article 2 qui vient déjà définir le champ à l'intérieur duquel une intervention de nature exceptionnelle peut se réaliser. Il y a, deuxièmement, le fait, que l'on identifie d'une façon qui nous apparaît claire, le fait que le pouvoir des directeurs régionaux de santé publique se termine là où débute le pouvoir des autres établissements, des autres institutions qui peuvent avoir des pouvoirs d'intervention dans notre société.
Enfin, le troisième point, le fait d'identifier une situation de menaces et de devoir agir dans un contexte exceptionnel exige aussi des ordres de cour, exige aussi une situation où l'aspect juridique sera pris en considération. On estime que, compte tenu de ces éléments-là... Mais évidemment il y a une perception qui est associée à l'ampleur écrite dans le projet de loi de la dimension de protection. On estime toutefois aussi que la place laissée à la promotion de la santé est extrêmement importante dans le projet de loi.
M. Trudel: Je pense que ce sont des arguments qui s'ajoutent, parce qu'il y aura très certainement au niveau du processus d'adoption de la loi... il va y avoir clairement débat sur cet aspect-là à l'égard de vos responsabilités et de vos capacités d'agir, les pouvoirs dont vous devez disposer pour être capable d'agir dans le contexte de l'organisation de nos services de santé et services sociaux, en n'oubliant pas, et là je le... vous faites bien de l'ajouter, quant à moi, en terminant votre réponse.
Par ailleurs, la nécessité de la promotion, la nécessité d'un programme et d'un plan de promotion au niveau de la santé, au niveau de la santé publique... parce que nous vivons dans une société où effectivement nous devons non seulement disposer des pouvoirs pour intervenir lorsqu'il y a menace ou qu'il y a problème, problème qui... lorsqu'il y a éclosion, éclosion d'un problème, mais également faut travailler en amont sur la promotion, les habitudes de vie, l'alimentation, l'exercice, la lutte au tabagisme et bien centrer nos actions à l'égard de la santé publique.
Un autre aspect que je voudrais toucher, MM. les directeurs de santé publique, c'est... on vient avec vos prédécesseurs d'aborder la question de la reddition de comptes et de l'évaluation. C'est extrêmement important parce que, là, il y a eu comme une mauvaise donne. J'espère que cela pourra être rectifié. Parlant de l'évaluation et de la reddition de comptes, un article de la loi, l'article 14, est on ne peut plus clair. Le programme national de santé publique et les plans d'action régionaux et locaux de santé publique doivent comporter des mécanismes de reddition de comptes et un cadre d'évaluation des résultats. À vous... Alors, ça existe. Il y a pas... Il y a pas de souhaitable là-dedans, c'est dans le projet. Il faut que cela existe en termes de gestion de ce secteur d'activité. Est-ce que ça vous fait peur, vous autres, d'être dans cet article de loi qui... pour le directeur de santé publique et pour ceux et celles qui auront la responsabilité des plans aux niveaux local, régional et national, de comporter ou d'agir en sachant qu'il y aura toujours reddition et évaluation de vos résultats.
Le Président (M. Labbé): Alors, Dr Dontigny, c'est à vous.
M. Dontigny (André): Si vous souhaitez une réponse brève, je dirais: D'aucune façon, cela nous inquiète.
Le Président (M. Labbé): Alors... Oui, Dr Lessard?
M. Lessard (Richard): Bien au contraire, c'est un instrument qui va être extrêmement utile parce qu'on va pouvoir avoir des attentes signifiées du national vers le régional et du régional avec le local. Et, au niveau local, je pense même que ça va être d'une certaine aide parce que, dans les multiples décisions d'allocations de ressources qui ont à être faites au niveau régional... au niveau local en particulier, parce qu'il y a compétition entre les différentes... les différents budgets, on a parlé de maintien à domicile, on a parlé de prévention. Je pense que d'avoir des attentes signifiées à ce niveau-là aussi va aider les décideurs locaux à définir où leur argent devrait aller.
Alors, de ce point de vue là, c'est tout à fait souhaitable, tout à fait bienvenu, et il va y avoir une nécessaire discussion entre le niveau régional en particulier et le niveau local sur les programmes à mettre en place, toujours sous l'éclairage du national, mais l'opérationnalisation va se faire entre le régional et le local. Et il va falloir s'entendre aussi sur les résultats pour l'argent qu'il va y avoir de disponible, parce que, nous aussi, on vit la compétition entre les différentes enveloppes pour les différents besoins de la population. Et on peut pas dire, au cours des 10 dernières années, que la prévention a gagné sur toute la ligne. En fait, à Montréal, on a très bien démontré que c'est pas juste relativement parlant que le budget de prévention en CLSC a diminué, mais, même objectivement, le nombre d'heures travaillées en CLSC en prévention-promotion a diminué. Donc, c'est pas une donnée relative, ça, c'est une donnée absolue, si on veut.
Alors, de ce point de vue là, c'est sûr qu'un programme de santé publique qui vient prévoir les activités, qui vient prévoir un budget, ce qui est pas écrit là mais qu'on aimerait probablement voir ajouté, et qui vient aussi signifier des attentes à l'ensemble des joueurs du réseau en santé publique, c'est tout à fait bienvenu et souhaité.
Le Président (M. Labbé): Dr Desbiens, je pense, en complémentaire.
M. Desbiens (François): C'est ça, juste en complémentaire. Et d'évaluer ce que l'on fait, ça nous permet tout simplement d'améliorer les interventions qu'on va continuer par la suite. C'est la seule façon de s'améliorer. Si on n'évalue pas ce qu'on fait, on peut pas savoir si on a bien fait les choses. Donc, cet élément d'esprit critique par rapport à nos interventions, l'ensemble de nos professionnels sont, je dirais, à l'aise avec cela, et en aucune façon on est mal à l'aise avec ces attentes précises des résultats à atteindre, des processus évaluatifs qui doivent pas coûter plus cher que l'intervention elle-même. On est capable de toujours pondérer l'ampleur de l'évaluation à l'ampleur de l'investissement. Et à ce moment-là, ça nous permet d'ajuster le tir lorsqu'on manque notre coup, parce que, dans n'importe quoi, on peut ne pas atteindre les résultats qu'on ciblait. Si on n'évalue pas, on le sait pas. Donc, là-dessus je vous dirais: On appuie à 100 % cet article de la loi.
Le Président (M. Labbé): M. Dontigny.
M. Dontigny (André): En terminant... d'ailleurs, c'est pas une nouveauté. Depuis quelques années, avec les priorités nationales de santé publique, on a mis en place un processus évaluatif qui est prévu dans le cadre de l'élaboration du programme national de santé publique. De tenir compte aussi des leçons tirées de cette évaluation-là pour pouvoir même ajuster et améliorer le processus d'évaluation... on est en plein là-dedans.
M. Trudel: Il y a un certain nombre de choses qui vont sans le dire, mais ça va encore beaucoup mieux lorsqu'on le dit, lorsqu'on l'énonce. C'est important, ce que vous venez de nous dire, parce que c'est évident qu'en termes de responsabilité vous devez avoir toute la zone de distance avec l'organisation administrative en prenant comme point d'ancrage votre responsabilité professionnelle d'abord et votre capacité de jugement professionnel d'une situation... d'une situation donnée. Mais, par ailleurs, tout cela s'exerce dans un cadre de société, et que vous l'énonciez clairement que cela constitue finalement un avantage en quelque sorte, vous faites du judo avec la situation: Oui, nous réalisons des actions publiques en santé publique et nous pensons que nous devons dire à la société et aux gens qui sont responsables à d'autres niveaux ce que nous réalisons. Puis, par ailleurs, au niveau de l'évaluation, Dr Desbiens, ça peut paraître très élémentaire de le mentionner, mais faut le dire: L'évaluation permet de progresser, permet de progresser, de corriger. C'est aussi ce que la commission Clair nous dit.
À cet égard-là, lorsqu'on aura donc à intervenir, il y aura, je dirais, encadrement différent. J'ose... je ne veux pas employer les mots «un nouveau type de programme ou un nouvel encadrement», parce que, bon, on sera plus formel sur les plans d'intervention au niveau local, régional et national. Cependant, on part pas à zéro, là, c'est pas qu'il s'en fait pas de ces actions et de ces planifications sur le territoire, mais on sera davantage encadré. Et on va du même coup renforcer, déplacer vers le niveau local davantage d'activités, d'actions en matière de santé publique.
Alors, juste avant l'article 14, il y a donc l'article 13 qui prévoit explicitement que l'on devra consulter la population et les divers intervenants concernés sur le plan, notamment les organismes communautaires et le Département régional de médecine générale, bon, qui est fixé en vertu de la Loi sur la santé et les services sociaux. De votre expérience terrain, prévoyez-vous des difficultés, de grandes difficultés, des zones de perturbation lorsqu'on va maintenant établir ces plans au niveau local, régional et national?
n(16 heures)nLe Président (M. Labbé): M. Dontigny.
M. Dontigny (André): Ce que l'on soulève dans le cadre du mémoire, ce n'est pas tant qu'on prévoie de nombreuses difficultés ou d'intenses difficultés, mais une préoccupation d'arrimage, une préoccupation d'articulation entre un ensemble de démarches qui sont déjà prévues dans le cadre de la loi n° 28. On pense ici, par exemple, au plan d'action stratégique triennal prévu à l'intérieur de chacune des régies régionales, on pense aux questions d'ententes de gestion, on pense au fait, comme on le soulevait tout à l'heure dans l'allocution, qu'il y a au moins trois plans qui sont prévus, qu'il s'agisse du plan de mobilisation des ressources dans un contexte d'urgence, qu'il s'agisse du plan de surveillance, qu'il s'agisse des plans d'action régionaux et locaux.
Donc, au fond, tout sera en fonction du niveau prescriptif qui est associé à ces démarches-là. La logique de consulter est une logique, encore une fois, où on rend ici explicite une pratique courante et traditionnelle en santé publique, où le souhait de pouvoir valider, de faire en sorte qu'on puisse s'associer à un ensemble d'autres acteurs lorsqu'on élabore des plans, je dirais, c'est déjà une préoccupation et une pratique. Bien entendu, ici comme dans d'autres domaines, peut-être y a-t-il eu des pratiques variables où... Je ne peux pas me prononcer de façon systématique pour l'ensemble des régions, mais ce souci-là de consulter, ce souci-là de pouvoir le faire avec une logique d'articulation avec l'ensemble des autres démarches prévues, on l'aura. Et je ne crois pas que ce sera une difficulté certaine ou voire même extrême si justement on a le souci de bien associer la régie régionale... au sein de la régie régionale la Direction de la santé publique dans le cadre de l'élaboration d'un tel plan, pour pouvoir tenir compte justement de l'élaboration des plans stratégiques triennale et des ententes de gestion. C'est ça qui sera important, là, de pouvoir assurer ces articulations-là.
Le Président (M. Labbé): En complémentaire, M. Desbiens.
M. Desbiens (François): Oui, juste un petit exemple. À l'article 13, on mentionne le Département régional de médecine générale ainsi que les organismes communautaires. Bien, avec la loi, la gouverne qui a été votée tout récemment, on se rend compte qu'il y a un conseil des infirmiers et des infirmières qui va siéger aussi, qui va donner des avis au C.A. de la régie régionale, mais il y a des infirmiers et des infirmières qui oeuvrent dans les CLSC ou qui oeuvrent dans d'autres établissements, et probablement que ça va être une instance qui pourrait être mise aussi à contribution dans l'élaboration du plan d'action régional ou des plans d'action locaux. Est-ce que le comité multidisciplinaire, qui est créé aussi, ne devrait pas aussi faire partie des instances à être consultées et donner son avis au niveau régional?
Donc, de tenter, dans une loi, d'identifier l'ensemble des procédures de consultation en identifiant des partenaires, on risque des fois de pas tous les identifier quand, de toute façon, dans une bonne démarche régionale de planification de la santé, on se doit d'identifier tous ces partenaires-là et de se les associer dès le début du processus, et même se les associer à la toute fin, à l'évaluation, pour la mise à jour du programme. Donc, déjà, pour le 13, dans la région de Québec, on va s'associer d'autres partenaires que le DRMG et les organismes communautaires parce que, sinon, notre démarche serait incomplète.
Le Président (M. Labbé): Merci, M. Desbiens.
M. Trudel: ...
Le Président (M. Labbé): M. Lessard aurait peut-être un petit commentaire, M. le ministre.
M. Trudel: Ah, je m'excuse.
Le Président (M. Labbé): Oui, M. Lessard.
M. Lessard (Richard): Si vous permettez, d'un point de vue régional, à Montréal, il y a 29 CLSC. Quand on parle d'une consultation régionale pour définir un plan d'action, c'est pas simple; on est pour, mais il faut pas s'attendre à ce que ce soit simple et... Par contre, il y a dans le projet de loi des choses qui viennent supporter une démarche comme ça, la rendre plus facile. Il y a, premièrement, une clarification du rôle des CLSC en santé publique. C'est pas qu'ils n'avaient jamais eu de rôle en santé publique, mais là c'est dans un projet de loi. Alors, ça, c'est intéressant.
Le programme national de santé publique est une demande et un appui du ministère qu'il se passe quelque chose en santé publique dans le réseau. Ce n'était pas toujours présent auparavant. Et, si le politique s'en mêlait pour avoir des attentes spécifiques de la part de son réseau en matière de prévention-promotion, ça viendrait encore supporter et faciliter ces démarches-là, parce que ce sont des démarches de mobilisation qui se font toujours dans un contexte, comme je le disais plus tôt, de compétition pour les ressources entre différents programmes. Alors, si on n'a que des attentes pour le maintien à domicile, c'est évident que les gens qui doivent répondre à ces attentes font des choix différents que s'il y a des attentes aussi clairement signifiées et attendues dans le domaine de la santé publique.
Le Président (M. Labbé): M. le ministre, peut-être, pour une dernière question.
M. Trudel: Oui, tout à fait. J'entends ces propos, et c'est tout à fait la philosophie, quant à cet aspect-là, qui est en arrière du projet de législation, et il n'y a aucunement l'intention de dire: On va aller jouer au docteur avec ça, sauf que la pratique médicale en matière de santé publique, c'est une donnée sociale, effectivement, elle fait partie de nos problématiques de société et il faut qu'elle soit dans cette direction, quant à moi.
Écoutez, je peux pas me priver, cependant, de votre expertise professionnelle. En terminant, il y a un aspect qui est pas beaucoup questionné dans le projet de loi. Je vous le dis, je l'ai moi-même questionné assez longuement lorsque les spécialistes de santé publique, dont vous êtes, m'ont recommandé de retirer l'obligation pour les municipalités de la fluoration de l'eau potable. Je vais vous dire que, la première fois que j'ai entendu ça, j'ai sursauté, j'ai dit: Eh! La santé dentaire! On peut pas faire cela! Je sais que vous avez été consultés sur cette question largement. J'aimerais ça, je souhaiterais que vous puissiez donner quelques arguments publics sur le geste qui est présenté au niveau législatif et surtout de votre indication, ici, de coupler cet article, qui maintenant enlèverait l'obligation, avec le geste de la promotion de la fluoration de l'eau potable au Québec. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Labbé): Alors, vous avez un gros deux minutes pour nous donner toutes vos remarques par rapport à cette question.
M. Dontigny (André): Il s'agit de deux minutes, je vais donc laisser le Dr Lessard répondre brièvement.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Labbé): Dr Lessard. Ha, ha, ha!
M. Lessard (Richard): Merci beaucoup, MM. les présidents. Écoutez, en général, en santé publique, quand il y a déjà une loi qui est là pour obliger la fluoration de l'eau, en général, on est pour la loi qui oblige à... Par contre, on est obligé de se rendre compte que, au Canada, la seule province qui a l'obligation de fluorurer, c'est la province où il n'y a que 8 % de la population qui boit de l'eau fluorurée, alors que la province voisine, l'Ontario, où il n'y a pas obligation de fluorurer, il y a 64 % de la population qui boit de l'eau fluorurée. Donc, en termes de stratégie pour promouvoir la fluoruration, qui est une mesure appuyée par la santé publique dans tous les pays du monde et qui a fait l'objet d'un rapport scientifique tout à fait récent du CDC, du Centers for Disease Control, aux États-Unis, en faveur de la fluoruration, il est sûr qu'on est plus déçus par notre performance sur le terrain que par le fait qu'on ait une loi qui n'a pas été appliquée depuis qu'elle est entrée en fonction.
Par contre, ce qu'on trouvait dans la loi actuelle qui restait sur la fluoruration était plutôt, j'allais dire, «drab», si vous me permettez. On est pour, on va payer, on va mettre des règlements, ce qui est correct d'un point de vue réglementaire, mais d'un point de vue de message de santé publique, c'était pas très clair. Or, nous, on peut vous donner... En tout cas, vous pouvez consulter tous les scientifiques appropriés dans ce dossier-là, la fluoruration de l'eau, c'est une mesure efficace qui n'est pas dangereuse pour la santé et qui pourrait, de façon extraordinaire, améliorer l'état de santé buccodentaire de la population et en particulier des régions les plus pauvres du Québec, et Montréal serait une situation particulière où on pourrait montrer les réussites, des résultats extraordinaires.
Donc, de ce point de vue là, on s'est rallié à l'idée que peut-être qu'on devait changer de stratégie après un certain nombre d'années, de ne pas rendre la fluoruration de l'eau obligatoire, mais certainement d'en promouvoir l'utilisation et de promouvoir la mesure, de supporter l'implantation de la mesure par les ressources appropriées, tel que ça se faisait auparavant, et aussi de permettre au réseau de la santé de faire la promotion de cette mesure-là qui est extrêmement efficace.
n(16 h 10)nM. Trudel: J'aurais une précision, il y a d'autres aspects encore dans votre mémoire, bien sûr on va y retenir... on va en retenir un certain nombre probablement, en tout cas ça va retenir notre attention. Et on espère le plus tôt possible vous doter des meilleurs outils possibles, messieurs, et les dames qui sont avec vous, en santé publique pour en faire davantage. Merci.
Le Président (M. Labbé): Alors, merci, M. le ministre. Alors, sans plus tarder, je cède maintenant la parole au député de Châteauguay pour une période...
M. Fournier: Merci, M. le Président. Bonjour à vous, merci d'être avec nous. Je ne peux pas m'empêcher de soulever quelques commentaires suite au dernier débat sur la fluoration. Tant qu'à moi, je trouve plutôt léger que nous passions d'une étape d'obligation ? je reconnais que l'obligation avait donné des résultats qui étaient pauvres, pour dire le moins ? ...mais qu'on passe néanmoins d'une étape d'obligation, donc un message d'importance, à quelque chose comme: J'aimerais ça qu'il y en ait plus. Et s'il faut passer un message qui accompagne la fin de l'obligation, à mon avis, ça devrait être beaucoup plus fort que ça; peut-être que ce sera inclus dans le plan national, mais il faudrait qu'il y ait des objectifs, il faudrait qu'il y ait des indicateurs, il faudrait qu'on puisse dire vers quoi on tend et qu'on sente qu'il y ait une obligation.
Je dois vous dire, quant à moi, là, puis je suis pas l'expert que vous pouvez être, vous et bien d'autres intervenants, mais, ma compréhension à moi, c'est que c'est très léger. On dit: Bien, c'était une obligation puis ç'a pas donné de résultat. Alors, pour l'avenir, on va souhaiter que ça marche. Mais on sent pas qu'il y a une volonté, on sent pas qu'il y a un indicateur qu'on se donne, qu'il y a un objectif à atteindre. On se dit pas: Voici, j'ai un horizon cinq ans, je voudrais me rendre à tel endroit. Et je dois avouer que j'ai l'impression qu'on parle mais que ça changera pas grand-chose. Je sais pas si vous voulez intervenir là-dessus. Mais est-ce que vous croyez pas que l'échange entre ce qui n'est plus une obligation et le souhait ténu, il y a pas... Entre les deux, il y a pas quelque chose d'autre qu'il faudrait qu'on fasse puis qu'on se donne un objectif, disons, dans un horizon cinq ans, où on devrait aller là-dessus?
Le Président (M. Labbé): Alors, peut-être que le Dr Dontigny a un commentaire.
M. Dontigny (André): Bien, je pense qu'on peut avoir des instruments là-dessus, là. D'ailleurs... Mais on rappelle que, dans notre proposition, dans le mémoire, on veut que cet aspect de promotion de la santé soit davantage présent. Nous faisons des suggestions à cet égard-là. On peut aussi rappeler que, dans la politique de santé et de bien-être, il y a un objectif 15 qui porte sur la santé buccodentaire et à l'intérieur duquel le volet de fluoration fait partie de l'ensemble des mesures qui sont prônées. Et, dans un processus de mise à jour d'une politique de santé et de bien-être, on peut présumer que cet aspect-là pourra être pris en compte. Bien entendu, il y a aussi le programme national de santé publique qui peut être un élément à l'intérieur duquel on peut aussi donner plus de force à cette intention de promotion de la santé.
M. Fournier: Pendant qu'on y est, sur cet aspect-là ? je reviendrai sur d'autres aspects du mémoire ? est-ce que vous croyez pas qu'il serait utile que tous ces plans, tous ces indicateurs qu'on retrouve à différents endroits, dans les ententes de gestion, enfin il y en a... Ça se retrouve dans un ensemble de documents disparates, difficiles à cerner. Est-ce que vous croyez pas qu'à un moment donné il devrait pas y avoir... Ça sera peut-être le plan national, j'en ai aucune idée, peut-être que ça va ressembler à ça. Mais est-ce que ce serait pas public, avec un effort de diffusion large pour que ça soit approprié par plus de gens? Je vais vous dire pourquoi je pense qu'il faut que ça soit approprié par plus de gens que les spécialistes qui travaillent avec, c'est-à-dire pour créer une vraie mesure d'imputabilité.
Dans l'état actuel des choses, vous me parlez des objectifs, puis certains m'ont dit que la plupart des objectifs qu'on s'est donnés, on les a pas atteints, personne paie le prix parce qu'on les a pas atteints. Il y a pas de coût politique, disons-le comme ça, au fait qu'on se donne des indicateurs mais qu'on les remplisse pas. Alors, jusqu'à un certain point, il y a pas de pression publique ou de pression... d'engagements précis, qui ont été tenus avant, qui ont été pris avant, pour l'accomplir. Alors, on passe vers d'autres choses, on gère au gré des crises, au quotidien, puis, finalement, on finit par perdre de vue ces indicateurs-là.
Alors, ma question, c'est: Comment réagissez-vous à ce que je suis en train de vous dire? Est-ce que, vous, vous considérez que c'est suffisamment public, puis que c'est clair, ou qu'il y ait pas un avantage, quant à la gouverne, que ça soit... que la population se l'approprie, qu'il y ait des débats périodiques pour voir on en est rendu où, qu'il y ait un chien de garde quelque part qui dise: Bien, on n'a pas atteint le résultat qu'on devait atteindre et voici pourquoi on l'a pas atteint; qu'il y ait pas, finalement, une meilleure transparence et donc une meilleure imputabilité?
Le Président (M. Labbé): Dr Dontigny.
M. Dontigny (André): En fait, on pourrait répondre sur deux dimensions. Il y a la dimension reddition de comptes et évaluation sur laquelle on a élaboré tout à l'heure puis pour laquelle on dit: Effectivement, ce volet-là doit être intensifié, doit être accru. Puis on a mis en place, historiquement, donc avec les priorités nationales de santé publique, un processus évaluatif des bilans pour pouvoir être en mesure de porter un jugement sur l'avancement à l'égard de ces mesures-là. Mais effectivement, on sait... Bon, la Commission d'étude sur la santé et les services sociaux a rappelé cette notion de glissement en prévention ? le Dr Lessard en faisait mention tout à l'heure ? en ce qui concerne la situation à Montréal; on sait aussi qu'on dispose de données où on sait que ce tableau-là est davantage généralisé dans le contexte de la réforme.
Donc, si on peut faire en sorte que, dans les processus d'évaluation à venir, ça devienne davantage clair et diffusé et que, lorsqu'on mesure des écarts, on dise: Bien, quels sont les meilleurs moyens, par la suite, pour pouvoir amenuiser ces écarts-là et que ce soit du domaine public, nous en sommes. Ça fait que, ça, c'est une dimension, et que ce soit toute la question de la façon dont évolueront nos processus d'évaluation et de reddition de comptes. Mais on est là puis on est partant.
Il y a un autre élément, dans ce que vous amenez, qui est la question des indicateurs. Pour pouvoir avoir des indicateurs fiables, ce sera nécessaire que nous ayons accès à des données qui nous permettent de pouvoir porter un jugement adéquat sur l'évolution des situations. Là-dessus ? nous en avons fait mention tout à l'heure ? nous souhaitons pouvoir avoir un accès raisonnable et correct, dans le contexte d'une société démocratique, à des données. Et, peut-être là-dessus, je laisserais le Dr Lessard compléter sur ces éléments-là.
Le Président (M. Labbé): Alors, Dr Lessard.
M. Lessard (Richard): Oui. Bien, ça concerne plusieurs éléments du projet de loi, mais, par exemple, tout le débat autour du comité d'éthique sur... qui doit donner un avis sur les plans de surveillance, et la question aussi de... et donner un avis sur les plans de surveillance avant d'aller à la Commission d'accès à l'information pour obtenir les données.
Depuis plusieurs années, c'est devenu extrêmement difficile d'avoir accès aux données pour faire la surveillance de l'état de santé de la population. Le gouvernement a mis en place la Commission d'accès à l'information, objectif que nous partageons et mission que nous partageons totalement, mais ce qui est arrivé, c'est qu'il est devenu relativement... Bon, on sait comment faire pour obtenir des données pour des périodes courtes, de trois ans ou de quatre ans, dans le cadre de projets de recherche qui ont une fin. Mais ce qu'on fait, en santé publique, ce n'est pas que des projets de recherche, c'est de la surveillance à long terme, de telle sorte que nous avons besoin d'avoir accès à des banques de données sur des longues périodes pour pouvoir faire une surveillance adéquate de la santé de la population. Et dans le cadre actuel du fonctionnement de l'accès à l'information, il n'est permis de créer des banques que pour des projets de recherche, et, à la fin du projet de recherche, il faut détruire la banque.
Je vais vous donner un exemple. À Montréal, dans le cadre d'un projet auquel on aurait pu s'associer, il s'est créé une banque air et météo pour être capable d'évaluer l'impact sur la santé de la population des particules dans l'air et de la pollution de l'air. Or, cette banque-là, ça a pris trois ans pour la monter à partir des données de mortalité et d'hospitalisation de régies d'assurance maladie et des particules dans l'air provenant de différents ministères, de différents niveaux. Au moment où il aurait peut-être fallu déclencher, cet été, l'alerte chaleur pour la région de Montréal, comme ils l'avaient fait à Toronto, on avait besoin de savoir si le nombre de décès chez les personnes âgées augmentait quotidiennement à Montréal à cause de la chaleur. Cette banque-là qui avait été constituée nous aurait permis ? pour retourner en arrière ? de savoir combien de personnes décédaient dans les années précédentes durant la période de chaleur ou dans les moments où la chaleur était intense. Or, on n'a pas pu avoir accès à cette banque-là parce qu'elle venait d'être détruite, et ça avait pris trois ans pour la monter.
Donc, ça pose des problèmes majeurs quand vient le temps de faire la surveillance de l'état de santé à long terme. Mais on comprend les contraintes que fixe la Commission d'accès à l'information, on comprend que ces données-là ne peuvent pas être utilisées à n'importe quel escient, mais la difficulté, c'est que, pour être capable précisément de donner... de suivre l'état de santé, on a besoin de partir d'individus. On n'a pas besoin du nom, puis du numéro de téléphone, puis de données confidentielles, mais on a besoin de tracer dans le temps ce qui arrive à des individus dans la société, bon, à partir d'un numéro qui est choisi de façon aléatoire, puis on n'a même pas besoin de savoir que le numéro correspond à quelle personne, mais on a besoin que ce numéro-là nous permette de tracer des individus dans le système pendant de longues périodes de temps.
Et c'est devenu un enjeu fondamental pour la surveillance de l'état de santé que d'avoir accès, sur des bases continues, à ces banques de données là, je dirais, en prenant toutes les précautions et tous les conseils, et même en étant extrêmement vigilant, plus vigilant qu'il le faut pour protéger la confidentialité des personnes, on est bien conscient de ça. Mais il faut pas que ça devienne un obstacle à la connaissance puis à l'information qu'on peut sortir des banques de données pour éclairer la décision en santé publique.
n(16 h 20)n Alors, on voulait vous en parler. On utilise votre question, de toute évidence, pour ne pas y répondre, non mais pour parler de ce dossier-là, mais il est fondamental, on le trouve extrêmement important et on pense que vous, comme parlementaires, avez un rôle extrêmement vigilant et important à jouer pour un peu clarifier ce débat-là. Ce n'est pas un débat idéologique, c'est pas la question de protéger ou pas l'accès à l'information, il faut qu'elle soit protégée. C'est pas... Mais le débat, il est aussi d'un point de vue... Il faut voir qu'il y a d'autres intérêts dans la société que de protéger les intérêts individuels, ce qu'il faut faire, mais qu'on pourrait créer des conditions qui font en sorte qu'on peut aussi surveiller l'état de santé de la population sans mettre en péril les données individuelles. Et ça, on voulait absolument vous saisir de cet enjeu-là. C'est un enjeu majeur pour la santé publique.
Le Président (M. Labbé): ...que vous nous avez très bien sensibilisés à ce que vous vivez.
M. Lessard (Richard): Pas de problème.
Le Président (M. Labbé): M. le député.
M. Fournier: C'est intéressant. Moi, je sens que vous avez répondu à la question, vous en avez même mis un peu plus, parce que...
M. Lessard (Richard): Merci.
M. Fournier: ...je vais vous dire, dans la mesure où ce en quoi je suis... en tout cas, je suis fervent de ça, c'est de s'assurer qu'on puisse vérifier l'imputabilité, qu'on puisse s'assurer des suivis des décisions qui sont prises. Et là je dis: Bien, une fois qu'il y a des plans, qu'on les rende publics, que les gens puissent se les approprier, qu'il y ait des experts même qui en deviennent, entre guillemets, des chiens de garde, mais pas pour prendre le rôle, là, agressif du chien de garde, mais qui deviennent l'espèce de protecteur de la population. On leur dit: Bien, c'est la direction qui a été prise avec l'ensemble des intervenants. Nous verrons au cours des années, dans l'horizon cinq ans qui a été fixé, si on les obtient. Et ce qui arrivera, c'est ce que vous nous dites, ça plaide pour votre cause. Si on s'engageait dans un tel processus public largement diffusé, qui devient contraignant parce qu'il est largement diffusé, bien là on va avoir des réponses comme: Celui-là, on l'a pas atteint parce qu'on pouvait pas l'atteindre, parce qu'on n'avait pas les données, parce qu'on a détruit les bases. Et là il y aura une influence encore plus grande à l'égard du législateur qu'une comparution devant la commission, mais une influence à l'égard de toute la population qui va se dire: Je prends conscience de la limite du collectif et de l'individuel et comment je dois faire vivre les deux. Mais tout ça pour dire que je considérais que vous répondiez tout à fait à la question.
J'en ai une petite dernière...
Une voix: ...
M. Fournier: ...avant de passer... mais j'ai passé mon message. Avant de passer la parole à ma collègue de Mercier, je veux juste poser une question faussement innocente. Je vais vous lire deux passages de la page 4 du mémoire qui est déposé devant nous. «Nous recommandons que les articles 6 et 7 du projet de loi, concernant le contenu du programme national, soient modifiés afin d'inclure dans le contenu du programme l'identification des ressources requises pour la réalisation du programme. Nous insistons pour que la législation limite la responsabilité des directeurs de santé publique et des centres locaux de services communautaires en fonction des ressources qui seront mises à leur disposition.» Question faussement innocente: Qu'est-ce que vous voulez nous dire et pourquoi vous nous le dites?
Le Président (M. Labbé): Dr Dontigny, oui.
M. Dontigny (André): Oui. Bien, en première partie, comme nous l'avons soulevé tout à l'heure, vous êtes parfaitement conscients des recommandations de la commission d'étude sur la santé et les services sociaux. Vous êtes parfaitement conscients d'un premier chapitre qui porte sur l'urgence de prévenir. Et je crois qu'il sera peut-être pas nécessaire de réinsister sur les éléments qu'on a soulevés dans les dernières minutes puis même aujourd'hui concernant les glissements qu'il a pu y avoir dans la capacité de réaliser des activités de prévention sur le plan local dans le contexte du virage ambulatoire, dans le contexte de la réforme. Alors, voilà, ça, c'est un premier élément.
On juge qu'il apparaît opportun que le législateur soit saisi de cette importance-là que le discours soit associé aux actions, que le discours soit associé à une nécessaire capacité de pouvoir accroître notre capacité à agir en matière de prévention et de promotion de la santé. C'est ce qu'on souhaite. On veut le rappeler. Bon, ça se fait dans le cadre d'une loi que l'on souhaite voir adopter, ça se fait dans le cadre d'un programme national de santé publique pour lequel on souhaite que l'on puisse disposer des ressources pour pouvoir réaliser l'ensemble des activités qui sont prévues dans le cadre d'un tel programme national.
En ce qui concerne l'autre dimension de l'identifier clairement, je dirais que c'est plus par souci de cohérence aussi. On sait, à titre d'exemple, que, dans la loi n° 28, à l'article 346.1, si ma mémoire est bonne, l'ensemble des activités qui sont prévues dans le cadre d'un plan stratégique triennal, au sein d'une régie, doit identifier les ressources financières qui sont prévues à cette fin-là. Donc, par souci de cohérence aussi, nous faisons cette demande.
M. Fournier: Là où mon intérêt était... J'avais bien compris les glissements dont vous parliez et l'importance d'avoir des ressources si on veut réaliser concrètement les voeux qui sont énoncés dans une législation, dans un programme. Mais ce qui m'a surpris, c'est: «Nous insistons pour que la législation limite la responsabilité des directeurs de santé publique et des CLSC en fonction des ressources...» J'ai comme pu sentir qu'il y avait un bris de confiance, là, j'ai comme pu sentir qu'il y avait comme une menace, c'est comme: Dites-nous, dans la loi, que les ressources... que notre responsabilité est conséquente aux ressources que vous nous donnez et, si vous nous en donnez pas assez de ressources, bien, on sera pas responsables. Je sens comme des gens qui ont été échaudés dans le passé puis qui disent: Pour l'avenir, on voudrait être intervenant, mais en fonction des ressources que vous nous donnez, puis vous serez responsables s'il n'y a pas assez de ressources.
M. Dontigny (André): C'est certainement pas...
Le Président (M. Labbé): M. Dontigny.
M. Dontigny (André): Excusez-moi. C'est certainement pas une logique de bris de confiance au départ, mais c'est une logique de diagnostic par rapport à une situation qu'on a vue dans les dernières années, puis un souci de cohérence. Il n'y avait pas d'intention de cette nature.
M. Fournier: Je passe la parole à ma collègue.
Le Président (M. Labbé): D'accord. Alors, Mme la députée de Mercier, s'il vous plaît.
Mme Rochefort: Merci, M. le Président. Donc, je tiens à souligner que, bon, d'une part, les DSP, les directeurs de santé publique, vous êtes des partenaires privilégiés du milieu communautaire depuis des années. Donc, je pense que la loi vient réaffirmer ce que vous faites déjà depuis longtemps en collaboration avec les CLSC sur le plan très local, je pense par exemple à des campagnes de vaccination ? hépatites A, B ? qui n'auraient pas pu être mises en place sans la DSP, donc, d'une part.
J'aimerais savoir dans un premier temps, pour vous, de quelle façon est-ce qu'on pourrait actualiser ou mettre vraiment de l'avant un volet prévention efficace en matière de santé publique. Oui, on a besoin de financement, ça, je pense qu'on s'entend sur le sujet. Mais par où on part puis vers quoi on s'en va? Et je pense que Dr Lessard doit me suivre un peu parce que je lui ai déjà parlé de mon questionnement sur le sujet. Donc, d'une part, ça.
Ensuite, deuxième volet à la question qui a vraiment pas rapport avec la première partie, page 7, vous dites: «Nous croyons [...] qu'il faudrait ajouter, à l'article 74 [...], un alinéa à l'effet que le DSP puisse, avec l'assentiment du ministre, identifier, sur une base temporaire et dans un contexte d'urgence, une intoxication, une affection [...] lorsque le directeur estime que la situation le requiert et dans un contexte de menace appréhendée.» Est-ce que vous pourriez, peut-être, le détailler?
Le Président (M. Labbé): Alors, vous avez...
Mme Rochefort: Donc, c'est en deux volets.
Le Président (M. Labbé): Dr Dontigny, vous avez trois minutes pour répondre à cette question-là. Soit vous prenez une minute chaque ou bien vous répondez pour les trois.
M. Dontigny (André): Comme d'habitude, par respect pour mon collègue de Montréal-Centre, je vais lui donner les 30 secondes pour répondre à la deuxième partie de la question, et j'entrerai dans le deux minutes et demie, s'il veut.
Le Président (M. Labbé): J'apprécie énormément. Dr Lessard, s'il vous plaît.
M. Lessard (Richard): La raison pour laquelle on propose cette chose, c'est que la liste des maladies à déclaration obligatoire qui va faire maintenant l'objet d'un règlement, ça prend un certain temps avant que ce soit revu. Ça peut prendre jusqu'à trois mois, six mois, au niveau national, au niveau provincial, pour que ça se fasse, mais il y a des situations où on aurait besoin sur le plan régional de demander que des maladies nous soient déclarées de façon rapide, et pas juste en provenance d'un établissement, comme le mentionnait le collègue microbiologiste tout à l'heure, mais d'un ensemble d'établissements. Si on avait ce pouvoir-là de rendre une maladie à déclaration obligatoire dans la région, mais pour une période brève, genre six mois, de telle sorte que ça puisse donner le temps au niveau national de considérer si c'est une maladie qui vaut la peine de la rendre à déclaration obligatoire pour l'ensemble de la province, ça nous permettrait d'agir plus rapidement que d'attendre que ce soit une maladie officielle à déclaration obligatoire. Donc, ce pouvoir-là, pour une période brève, un échéancier genre de six mois, nous permettrait de capter des choses qu'on ne capte pas autrement, et je pourrais vous donner des exemples si on avait plus de temps.
Le Président (M. Labbé): Oui, Dr Dontigny, vous avez un commentaire?
M. Dontigny (André): Deux minutes et demie pour parler de l'ensemble des services préventifs efficaces. J'aurais tendance plutôt à vous soulever le fait qu'il y a présentement un processus d'élaboration d'un programme national de santé publique. Il y a un ensemble d'interventions préventives qu'on peut mettre de l'avant à l'intérieur de ça. Il y a toute la logique de l'esprit de la loi qui va dans le sens de promouvoir la santé de la population. Donc, il y a un ensemble d'interventions, et je crois que ce serait pas rendre justice à l'ensemble des interventions de santé publique de tenter de les décrire en deux minutes.
Par contre, on a des bases. On a des bases solides. On peut penser, à titre d'exemple, aux priorités nationales de santé publique. Depuis 1997, sept priorités nationales que nous suivons, sur lesquelles nous intervenons, sur lesquelles nous souhaiterions intervenir avec encore plus de capacité, mais déjà il y a là du matériel. On a fait allusion à la question du développement social et au rôle qu'on est appelé à jouer soit en termes d'information sur les inégalités de santé ou des initiatives qui peuvent être prises sur le plan local pour pouvoir améliorer les conditions de vie, revitaliser les quartiers. Je pense que la situation à Montréal est une situation particulière, mais quelles que soient... est une situation qui est connue, pardon, mais, quelles que soient les régions, on sait qu'il existe des territoires, des communautés qui sont dans des états de vulnérabilité accrue et pour lesquels il y a tout avantage à pouvoir suivre dans le temps ces situations-là et soutenir les initiatives et évaluer les initiatives qui sont prises là-dedans.
n(16 h 30)n Donc, les priorités nationales de santé publique, certaines mesures en prévention des maladies chroniques, des mesures davantage traditionnelles qui touchent des volets liés aux maladies infectieuses transmissibles, on pourrait en faire une liste d'un ensemble d'interventions reconnues efficaces avec toute la rigueur scientifique voulue. Mais je ne sais pas si je dispose encore de temps.
Le Président (M. Labbé): Vous avez... vous avez déjà étiré l'élastique, comme on dit, au maximum. Alors, malheureusement, je suis obligé de vous interrompre. Alors, merci, Dr Dontigny, Dr Lessard et Dr Desbiens, pour la qualité de votre présentation.
Alors, sans plus tarder maintenant, j'inviterais le groupe qui va représenter le Protecteur du citoyen à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Labbé): Alors, si vous permettez, maintenant que nous avons bien pris place, alors, sans plus tarder, nous allons écouter maintenant les représentants du Protecteur du citoyen. Alors, je présume que c'est Mme Pauline Champoux-Lesage qui va nous faire le plaisir de présenter l'équipe avec qui elle doit faire sa présentation. Alors, je vous informe que vous avez 20 minutes pour faire la présentation comme il se doit. Alors, sans plus tarder, je vous laisse la parole, et nous aurons par la suite 40 minutes pour pouvoir dialoguer avec vous.
Protecteur du citoyen
Mme Champoux-Lesage (Pauline): Merci, M. le Président. Alors, à ma gauche, Me Fernande Rousseau, qui est plus particulièrement responsable du domaine de la santé chez la protectrice du citoyen, et, à ma droite, Me Micheline McNicoll, qui est commissaire à la qualité des services, mais qui est aussi particulièrement responsable du dossier de la protection des renseignements personnels. Alors, avec mes collaborateurs et collaboratrices, j'ai pris connaissance du projet de loi n° 36. C'est un projet d'envergure, aussi je souhaiterais souligner d'entrée de jeu la qualité de la réflexion sous-jacente à son élaboration ainsi que la clarté des textes qui nous ont été... qui ont été portés à notre attention.
Ce projet de loi plus que tout autre nous ramène à certaines réalités de notre société. L'une d'elles est la complexité de son organisation civile et juridique, complexité reliée aux agents... au danger des agents d'origine biologique, chimique et physique qui nous entourent et font partie de notre vie quotidienne, et finalement une complexité inhérente à la mondialisation des échanges: il y a une planète et de moins en moins de frontières. Une autre de ces réalités est l'expression de la social-démocratie avec ses programmes sociaux de répartition des richesses, de gestion des activités professionnelles, commerciales ou industrielles et de protection de la population et de leurs biens.
La santé publique est une facette importante de la protection de la population, et son action n'échappe pas à la complexité. Par ce projet de loi, le législateur doit relever le défi de définir et d'atteindre le difficile équilibre du bien collectif et du droit de l'individu à la vie privée et à l'autonomie dans ses relations avec l'État. En effet, ce projet de loi ne peut assurer la protection de la santé publique sans toucher à des aspects majeurs de la vie privée et de l'autonomie de la personne: l'atteinte de l'intégrité physique de la personne dans les cas de maladies à traitement obligatoire; l'atteinte de la liberté de circulation lors de contraintes à l'isolement, par exemple; et la collecte et l'utilisation de renseignements personnels hypersensibles, à savoir des renseignements sur la santé et même sur le comportement des personnes.
Lors de l'examen de ce projet de loi, nous nous sommes attardés à mesurer l'équilibre nécessaire entre les pouvoirs importants conférés au gouvernement, au ministre de la Santé et des Services sociaux, et aux directeurs de santé publique, d'une part, et la protection des droits fondamentaux des individus, d'autre part. D'emblée, je suis d'avis que le projet de loi n° 36 présente un cadre juridique et une organisation de services aptes à rencontrer les objectifs qui seront définis dans un programme de santé publique en conformité avec la Politique de santé et de bien-être de la population.
En effet, le projet de loi élargit la portée de l'actuelle loi en dotant le ministre de la Santé et des Services sociaux de moyens et de pouvoirs pour protéger la santé publique et aussi assurer la surveillance et la prévention dans ce domaine. En contrepartie, il prévoit, à certaines occasions, le recours aux tribunaux pour assurer le respect des droits individuels, des mesures pour encadrer la déclaration d'un état d'urgence sanitaire par le gouvernement ou par le ministre, dont le recours à l'Assemblée nationale pour l'entériner ou la désavouer. Le ministre doit rendre compte à l'Assemblée nationale des événements ayant donné lieu à une telle déclaration.
On y retrouve aussi une meilleure définition des rôles des différents acteurs sur les plans national, régional et local et de nouveaux moyens leur permettant de jouer efficacement leurs rôles. Enfin, le ministre et ses représentants régionaux peuvent de plein droit accéder à l'information nécessaire pour décrire l'état de santé de la population, identifier les problèmes et produire l'information utile aux décideurs. Ce mandat s'accompagne de pouvoirs pour intervenir rapidement et d'autorité auprès des ministères et organismes, et aussi pour rechercher leur collaboration dans la mise en oeuvre des activités de santé publique.
La concertation entre les différents acteurs, ministères et organismes gouvernementaux m'apparaît être une voie facilitant l'atteinte des objectifs du programme national de santé publique. À l'égard de la protection des renseignements personnels, je suis satisfaite que la présence de la Commission d'accès à l'information soit assurée à toutes les étapes de la gestion des renseignements personnels. Sur le plan des diverses collectes de ces renseignements, je me suis interrogée sur la nécessité de recueillir les renseignements nominatifs à des fins cliniques. Toutefois, les explications fournies par le ministère confirmant les objectifs de dépistage de certaines maladies m'ont convaincue de cette nécessité.
Outre ces remarques générales, je souhaiterais formuler quelques commentaires et faire un certain nombre de recommandations. D'abord, en ce qui concerne le consentement lors de l'inscription au registre central de vaccination, les modalités de gestion du consentement d'une personne à l'inscription de son nom au registre central des vaccins méritent quelques observations. J'apprécie bien sûr le caractère volontaire de l'inscription au registre, mais le consentement général avec option de retrait ponctuel pour certains vaccins me fait douter du maintien des attributs du consentement. Je m'explique. Un consentement, pour être valable, doit être libre, éclairé et, selon moi, être donné pour une durée déterminée. Or, la vaccination peut être échelonnée sur une période plus ou moins longue, et, malheureusement, la mémoire est une faculté qui oublie. Je recommande donc que le consentement soit donné à chaque vaccination.
De plus, il m'apparaît nécessaire que, dans tous les lieux de vaccination, on affiche, de manière à attirer l'attention, l'information sur le caractère volontaire de l'inscription au registre, les droits de la personne à l'égard de ce registre, et enfin je recommande qu'on mette... qu'on remette cette information sous forme de dépliant à chaque personne qui se présente pour une vaccination.
La confidentialité, de la collecte à l'utilisation des renseignements personnels. La Loi sur la protection des renseignements personnels, les principes qui la sous-tendent et le rôle de la Commission d'accès à l'information offrent des garanties de respect de la confidentialité des données recueillies. Toutefois, toutes ces balises demeurent insuffisantes si les processus de collecte et d'utilisation des renseignements personnels par le personnel médical ou les chercheurs ne sont pas assortis d'un maximum de précautions afin d'assurer un véritable respect de la vie privée et de l'autonomie de la personne.
n(16 h 40)n Il faut que les comportements de tout le personnel agissant auprès des personnes témoignent du respect de ces valeurs. Les circonstances entourant toute collecte de renseignements personnels doivent faire l'objet d'une réflexion et d'une planification où se retrouve le souci de traiter les personnes avec courtoisie et respect. Il y aurait donc lieu d'instaurer un processus continu de sensibilisation du personnel afin que chacun, de la collecte à l'utilisation des données, intègre ces valeurs et comprenne la nécessité de traiter les personnes avec la plus grande courtoisie et un profond respect de leurs droits actuels mais aussi futurs.
Seule une conscience aiguisée peut permettre de traduire ces valeurs en gestes bien concrets. Dans ce domaine, aucun geste n'est anodin: s'assurer d'un lieu discret avant de recueillir des renseignements sensibles, ne pas commenter la situation médicale de qui que ce soit en plein corridor, prendre le temps de dire, le faire avec ménagement, expliquer, s'assurer que la personne comprend et consent librement, préserver l'écran d'ordinateur des regards indiscrets n'en sont que quelques exemples. Je recommande donc:
Que soit mentionné dans la Loi sur la santé publique que, en tout lieu et en tout temps, la collecte de renseignements personnels doit être effectuée de manière à assurer le respect de la vie privée et de l'autonomie de la personne.
Un mot sur le comité d'éthique en santé publique. Selon l'information contenue au mémoire au Conseil des ministres, un comité est créé dans le but de donner au ministre et aux directeurs de santé publique la capacité de soumettre à un examen éthique les activités de santé publique qui risquent de porter atteinte à la vie privée et aux libertés individuelles ou aux valeurs d'équité et de solidarité de notre société. On peut lire dans ce mémoire que «cette mesure assure une transparence dans l'utilisation des données et maintient un lien de confiance et une crédibilité auprès de la population».
La création de ce comité constitue une très heureuse initiative. le vaste champ d'action qui lui est assigné témoigne de l'importance qu'entend lui donner le ministre. Je ne crois pas me tromper en concluant à la lecture des articles 17 à 30 du projet de loi que ce comité est essentiellement un comité aviseur dont les avis ne seront pas publics et ne seront pas accessibles avant 10 ans, à moins que le ministre n'en décide autrement. La transparence dans l'utilisation des données, évoquée dans le mémoire, ne me semble donc pas assurée, à moins d'inverser la règle citée précédemment et d'inscrire dans la loi que les avis du comité d'éthique seront publics sous réserve que, pour des motifs exceptionnels, le ministre n'en décide autrement.
Sur le plan de la confiance et de la crédibilité auprès de la population, je vois aussi certaines lacunes qui risquent d'y faire échec. La confiance et la crédibilité reposent sur la compétence bien sûr, mais aussi sur les conditions d'exercice de cette compétence. Or, le fait que le ministre nomme lui-même les membres du comité sans consultation préalable et qu'il désigne parmi ceux-ci un président qui aura une voix prépondérante en cas de partage sont de nature à nuire aux objectifs recherchés. Si le ministre veut réellement un comité d'éthique qui soit prestigieux et qui inspire confiance, il doit non seulement nommer des gens compétents, mais également leur donner des conditions d'exercice adéquates. Dans cette optique, je recommande;
Que les avis du comité d'éthique soient publics à moins que, pour des motifs exceptionnels, le ministre n'en décide autrement;
Que le ministre nomme les membres du comité d'éthique après consultation des groupes ayant montré de l'intérêt dans le domaine de la santé publique, groupes socioéconomiques, pour la plupart; et
Que les membres du comité d'éthique se nomment eux-mêmes, se désignent eux-mêmes un président et un vice-président.
Enfin, pour ce qui concerne le signalement aux autorités de santé publique, le projet de loi prévoit, à son article 38, que:
«Les ministères et organismes gouvernementaux doivent signaler au directeur de santé publique du territoire concerné ou au ministre les menaces à la santé de la population dont ils ont connaissance ou les situations qui leur donnent des motifs sérieux de croire que la santé de la population est menacée.» Je recommande:
Que les municipalités, qui sont des corps publics ayant des responsabilités à l'égard de la population, soient nommées à l'article 88.
En conclusion, je souscris à l'ensemble des objectifs du projet de loi sur la santé publique. Mes commentaires et mes recommandations visent à assurer une réelle transparence lors de la collecte des renseignements personnels et lorsque se prennent des décisions en santé publique. Cette transparence ne peut que contribuer à augmenter la confiance de la population à l'égard de l'action du gouvernement dans un domaine particulièrement sensible. Je vous remercie.
Le Président (M. Labbé): Alors, merci beaucoup, Mme Champoux-Lesage. Alors, sans plus tarder, je cède maintenant la parole à M. le ministre.
M. Trudel: Je vais m'habituer... On dit: Mme le protecteur du citoyen?
Mme Champoux-Lesage (Pauline): Mme la protectrice. Ha, ha, ha!
M. Trudel: Mme la protectrice. Alors, Mme la protectrice du citoyen et les gens qui vous accompagnent, qui travaillent avec vous, bienvenue. Il y a de ces moments dans la vie publique où quelquefois on se dit: Bien, ma foi, on n'a pas fait si mal notre travail. Et ça, je vous le dis bien simplement: Ça fait du bien de l'entendre. Ça fait du bien de l'entendre et d'aussi recevoir, avec un sentiment très positif, les suggestions que vous nous faites pour améliorer encore davantage le projet de loi. Quand je dis: Ça fait du bien de l'entendre, je dois dire que tout cela retombe sur une équipe de professionnels qui, bien avant que j'en sois responsable, a longuement travaillé sur l'élaboration de ce projet de loi. C'est une façon de leur dire... de leur faire un bon clin d'oeil sur leurs compétences professionnelles, aussi d'avoir su consulter très longtemps, très largement les concernés et d'essayer de saisir non pas uniquement la lettre de la loi, la lettre de ce que nous voulions réaliser en termes de santé publique, mais également l'esprit.
Alors, que Mme la protectrice du citoyen vienne le dire comme cela aujourd'hui, c'est aussi un signe que les différents cadres qui ont été mis en place au cours des années à l'égard soit de la santé publique puis de la prise en considération de la vie privée et des obligations à l'égard de la vie privée et des limites qu'on doit observer, eh bien, tout cela est passé. C'est passé dans la réflexion des professionnels, c'est passé dans la réflexion des hommes et des femmes qui font l'État au quotidien, et ça, je pense qu'il faut s'en féliciter.
Mme la protectrice du citoyen, on dirait que votre deuxième paragraphe a été écrit le 12 septembre; c'est particulièrement d'actualité. Là, je ne veux pas que l'on insiste, mais vous aviez comme une espèce de... je ne sais trop si c'est le bon mot, une espèce de prémonition. Effectivement, effectivement, les mots que vous employez ont rapidement passé la barrière et l'épreuve de l'histoire... la preuve de l'histoire: «Les dangers des agents d'origine biologique, chimique et physique qui nous entourent et qui font partie de notre vie quotidienne et, finalement, une complexité inhérente à la mondialisation des échanges commerciaux: il y a une planète et de moins en moins de frontières.» Ça nous rappelle encore à l'obligation de la réflexion avec ce qui s'est passé depuis le moment où vous écriviez ça, le 30 août, et aussi illustre que, au Québec, nous sommes particulièrement conscients de ces situations.
Votre suggestion à l'égard d'inclure ce que j'appellerais une notion de valeur dans une loi, la valeur du respect de la vie privée et de l'autonomie de la personne à l'égard d'un moment de cueillette de renseignements personnels, de le dire... Il y a bien des choses qui vont sans le dire, mais vous suggérez de le dire dans la loi. Je peux pas, moi, vous dire aujourd'hui tout de suite que ce sera fait, mais disons que c'est rare que l'on entende des requêtes, en quelque sorte de cette nature, d'inscrire des valeurs de société à l'égard des citoyens et des citoyennes dans une loi, et vous sentez bien que l'inclinaison et la pente de mon esprit vont dans cette direction.
Les avis du comité d'éthique, qu'ils soient publics, je vois les raisons qui motivent votre recommandation. Mais, en pareille matière, vous ne trouvez pas qu'il y a un certain danger de rendre ces informations publiques systématiquement, compte tenu qu'on va toucher très certainement des données sensibles et des sujets à... je vais faire un guillemet, qui sont sujettes à épidémiologie sociale? Vous trouvez pas que ça serait un peu dangereux, c'est le mot qui me vient à l'esprit, de systématiquement rendre publics les avis du comité d'éthique? C'est pas des questions simples qui vont intéresser ce comité d'éthique là.
Le Président (M. Labbé): Mme Champoux.
n(16 h 50)nMme Champoux-Lesage (Pauline): Pour ma part... On comprend que la transparence, pour moi, c'est une valeur essentielle dans à la fois l'éducation mais aussi dans nos relations avec les citoyens. Et l'objectif, et c'est comme ça que je le présentais, qui est véhiculé par votre ministère... c'est-à-dire que c'est dans une perspective de transparence qu'un tel comité est mis en place. C'est pour... je pense que c'est gage d'assurer la confiance de la population à l'endroit justement des gestes qui seront pris. J'inversais la proposition, c'est-à-dire pas systématiquement, mais je pense que, de manière générale, on devrait le faire, mais on conserve un pouvoir au ministre de juger justement dans certaines circonstances particulières, qui pourraient peut-être, en raison de la nature de l'objet de l'avis, susciter soit de la panique ou être mal interprétées, là, laisser au ministre le soin de juger de la pertinence de rendre ou non public, mais que l'idée de rendre public devrait être reconnue pour atteindre cet objectif de transparence qui semble être à la base de la création de ce comité-là.
M. Trudel: Bien là vous élevez le taux de probabilité avec une réponse comme celle-là. Parce que je pense que c'est pas une question de manque de transparence, mais ? j'espère que j'entends bien ? il y a des données sensibles qui peuvent être en termes d'opinion... qui peuvent être rendues publiques, là, par le fait de systématiquement avoir l'obligation de rendre publics les avis d'un comité d'éthique. Et je ne suis pas parfaitement convaincu qu'il faille toujours, en toutes occasions, au nom de la transparence, mais qu'on puisse inverser cela, que le principe général soit celui de la publication des avis du comité d'éthique, mais qu'il puisse y avoir possibilité de jugement, de la place pour le jugement de la part de l'autorité imputable devant l'Assemblée nationale et devant le public, devant la population en général. Je pense que ça, c'est une notion qui peut se... qui peut très bien se discuter en termes d'insertion dans un projet de... dans un tel projet de loi, tout comme la suggestion que vous avez, là, de... que le comité d'éthique nomme son président et son vice-président en autant que cela... Évidemment, là, ça contribue à élever le niveau de confiance du public dans de pareils mécanismes. Je pense qu'on va... je... on va concourir dans cette direction également à l'égard du comité d'éthique.
Et cela me ramène à une autre question, qui n'est pas contenue dans votre mémoire... Depuis tantôt que je me pose la question si je vais vous la poser, ça fait que je vais arrêter, je vais vous la poser. La nomination du président, du vice-président du comité d'éthique... Mais on se retrouve aussi avec la même dimension avec la nomination du directeur national de santé publique, avec rang de fonction publique supérieur, rang de sous-ministre, mais nommé forcément par le gouvernement et sous la responsabilité du ministre. Avez-vous un avis là-dessus? Parce que c'est... ça devient des questions de valeur extrêmement importantes en termes de protection, puis ça m'a tout l'air qu'on s'entend avec l'opposition là-dessus, c'est la protection de la... du régime public d'administration, de l'imputabilité de l'exécutif à l'égard du public, de la population et de cette responsabilité qu'un membre de l'exécutif a à l'égard d'un aspect de la vie collective à... Si nous n'étions pas dans ce monde, j'estime, c'est une question d'évaluation, j'estime que nous déresponsabiliserions la fonction de responsabilité publique du ministre ou du membre de l'exécutif. Qu'est-ce que vous avez comme opinion à cet égard-là, vous comme protectrice du citoyen, puisqu'on traite de cette question-là aussi par incidence avec la nomination des membres du comité d'éthique?
Le Président (M. Labbé): Mme Champoux.
Mme Champoux-Lesage (Pauline): Si je comprends bien, on n'a pas porté une attention particulière à cela...
M. Trudel: Non, non, mais je... vous en parlez pas.
Mme Champoux-Lesage (Pauline): ...mais je comprends que c'est, par analogie, un haut fonctionnaire qui pourrait être... devient par vous donc assimilé, désigné par vous.
M. Trudel: Nommé par le gouvernement, selon les...
Mme Champoux-Lesage (Pauline): Par le gouvernement. Alors assimilé à un sous-ministre, par exemple, comme type de fonction.
M. Trudel: C'est ça. Oui.
Mme Champoux-Lesage (Pauline): Moi, ça me semble pas en tout cas une difficulté majeure, là, dans le contexte actuel, là. Je sais pas si mes collègues veulent réagir.
Mme McNicoll (Micheline): C'est à quel article?
Le Président (M. Labbé): Mme McNicoll.
M. Trudel: C'est déjà dans l'article sur la loi, sur la gouverne du réseau de la santé et des services sociaux, le directeur national de la santé publique. Et on a largement indiqué que ça aurait... c'est une personne qui aurait à... qui aurait la... le rang de sous-ministre et qui sera chargée d'aviser le ministre en matière de santé publique. Alors, on a eu différentes analyses ici, en disant, bon: En matière de santé publique, il faut un degré d'indépendance. Bon. L'opposition a fait des remarques là-dessus également. Je n'y vois guère, à l'égard de notre système parlementaire, de notre système d'imputabilité des membres de l'exécutif, d'accrocs. Au contraire, il faut que quelqu'un porte la responsabilité. Il faut que le public puisse dire: Je peux poser les questions, je peux interpeller le membre de l'exécutif qui est responsable de cette question. Et je voulais avoir votre opinion là-dessus.
Mme Champoux-Lesage (Pauline): Je pense que, dans le contexte de la proposition de la loi, il y a quand même un encadrement à l'exercice de la fonction de ce directeur de la fonction publique, ne serait-ce que par le comité d'éthique, entre autres choses, auquel il aura à se référer. Il me semble, en tout cas, à première vue, que l'équilibre me semble respecté, qu'il y a quand même suffisamment de marge de manoeuvre pour agir, et je ne vois pas en quoi... Peut-être qu'il faudrait me l'expliquer davantage, le fait d'être absolument indépendant ou le fait que ne pas être indépendant puisse être une contrainte, mais peut-être parce que je saisis mal la portée des arguments qui nous sont soumis.
M. Trudel: Bon. J'ai une expression de votre opinion. C'est important d'avoir votre opinion sur des dimensions comme celles-là. Bon. Alors, en tout dernier lieu... Mon Dieu! vous l'avez scruté, le projet de loi, avec minutie. Sur l'obligation, sur l'obligation des ministères, organismes gouvernementaux, qui doivent signaler au directeur de la santé publique du territoire concerné ou au ministre les menaces à la santé de la population, bien, oui, Mme la protectrice du citoyen, on avait oublié les municipalités. On l'avait oublié dans le remaniement gigantesque de cette loi. Avec le nouveau cadre, on l'avait comme oublié et on va voir à corriger cela parce que ce sont des cas publics de premier niveau pour les citoyens. Et, pour voir, observer, identifier des situations de menace à la santé publique, ce sont des acteurs de premier plan, alors on inclura ça dans notre projet de loi en termes de corrections.
Je vous remercie de votre contribution. J'espère qu'on pourra se rendre à l'ensemble de vos recommandations, et on va tâcher aussi, subséquemment, dans l'élaboration du programme de santé publique et du plan d'action, de tenir en compte la notion essentielle, la valeur essentielle de respect des citoyens et des citoyennes dans ce que nous allons mettre sur pied, tel que le témoigne aujourd'hui votre représentation. Merci. Merci à vos collaboratrices.
Le Président (M. Labbé): Alors, merci, M. le ministre. Alors, sans plus tarder, je cède maintenant la parole au député de Châteauguay.
M. Fournier: Merci, M. le Président. Bienvenue à vous, merci d'être là. Je me vois un petit peu forcé... Le ministre m'a forcé d'embarquer dans le dossier du projet de loi n° 28, du mois de juin dernier, du directeur national de santé publique. Et peut-être que vous aimeriez regarder notamment le mémoire qui a été déposé aujourd'hui par le Collège des médecins. Je vous en cite un court extrait, la page 3: «L'action de santé publique risque d'être asservie à des agendas strictement politiques, au détriment des règles de l'art qui doivent servir à promouvoir et à protéger la santé de la population. Un jour, il pourrait arriver à un ministre de vacciner non pas la population à risque dans un comté, mais la population dans un comté à risque.» Petite formule. Vous connaissez M. Lamontagne, qui est habitué aux formules, il nous en a fait encore montre aujourd'hui. Et ce que disait le Collège des médecins... ce qu'ils disent, c'est: En matière de santé publique, il faudrait qu'il soit... qu'on n'ait pas eu... qu'on soit pas face à un sous-ministre adjoint. C'est le cas en ce moment. C'est un sous-ministre adjoint qui est sous l'autorité du ministre. C'est très, très lié... le ministre, c'est son patron. C'est aussi simple que ça, là. Et ce que le Collège des médecins vient nous dire, et, moi, je suis plutôt de cette vision aussi, c'est qu'en santé publique il faudrait que les gens qui ont à donner des avis, un peu au même esprit que le comité d'éthique, un, que ces avis-là professionnels de santé publique soient publics. Ce qui n'empêche pas...
n(17 heures)n Et c'est là que je tiens à faire des précisions par rapport à ce que le ministre disait, que nous concourrions à la même idée, c'est que, quant à moi, il est possible d'avoir un directeur national de santé publique qui a un degré d'indépendance en vertu de ses fonctions professionnelles. Et, comme le disait le Collège des médecins, ça n'empêche absolument pas le ministre de dire oui à ton avis, non à ton avis, pour des raisons qui peuvent être légitimes, bonnes ou pas bonnes, contestées ou contestables, peu importe. Ça, c'est le débat politique qui se fait ailleurs. Mais, dans un régime comme le nôtre, un système parlementaire, il est très possible d'avoir des instances ? mon Dieu! je vous le dis à vous, c'est pas à vous que je devrais convaincre ? qu'il est possible d'avoir des instances indépendantes dans un régime, dans un système parlementaire comme le nôtre. Et donc, à l'égard du directeur national de santé publique, ce qui était proposé, c'est qu'il soit indépendant, qu'il y ait une apparence vécue par la population et donc une crédibilité accordée, qu'on y ajoute des notions de transparence en lui demandant, à ce directeur national de santé publique, que ses avis soient publics. Et je comprends que le ministre vous ait amené sur ce sujet-là, puisque j'ai l'impression que vous êtes mus par ce même sentiment lorsque vous regardez le comité d'éthique et que vous nous dites: Bien, ce comité-là, il doit... Autant que possible, ça doit être public, sauf...
Je n'ai pas votre expérience, puis, avant de poser les autres questions sur le comité, dites-moi pourquoi il y aurait des exceptions. Donnez-moi les cas des exceptions, parce que, à mon avis, le comité d'éthique, c'est un outil pas pour le ministre, pas pour le gouvernement, c'est un outil pour la population. Ce sont des débats de société, là, qui se font là. C'est excessivement important, on joue avec droits individuels, droits collectifs, le minimum, tant qu'à moi, là, c'est qu'on le dise au monde.
Alors, vous, vous me dites, par rapport au projet de loi, puis le ministre nous dit: Bien, là, maintenant, on est tous ensemble, là, on s'en va vers un amendement où il y aura votre proposition qui sera intégrée. Mais dites-moi quels sont les cas qui sont imaginables où, bien que la règle publique existe, l'exception puisse être soulevée? Dans quels cas on va empêcher que ça soit public?
Le Président (M. Labbé): Alors, peut-être Mme McNicoll.
Mme McNicoll (Micheline): Oui. On a beaucoup discuté de ça pour savoir ça serait quoi, des balises. On n'irait pas jusqu'à vous dire dans quels cas, là, mais on avait à l'esprit deux types de situation plutôt. Alors, le premier type de situation, c'est lorsqu'il y a danger de créer de la panique. On sait que, depuis bien des années, là, tous nos experts attendent une pandémie de grippe ? je ne sais plus laquelle, là ? parce que les souches, là, vont se renouveler, et disons que le comité d'éthique serait saisi de quelque chose, d'un programme quelconque relatif à une éventuelle pandémie dont on sait même pas si elle va survenir, et que, bon, on estime que de rendre cet avis-là public, les gens pourraient l'interpréter comme: Oh, ça s'en vient pour Noël ou ça s'en vient pour Pâques, qu'est-ce qu'on fait? C'est la panique. Je pense qu'il y a des situations où des personnes raisonnables, là, imaginent que, bon, ça sort par... public dans les journaux, bon, c'est la panique générale. C'est sûrement pas le cas de tous les avis du comité d'éthique.
Une autre situation qu'on a évoquée, c'est, par exemple, les cas où on va dire: Malgré la Loi d'accès ? je prends cet exemple-là ? et où il y a eu une dérogation qui avait été accordée à la Commission des droits de la personne malgré la Loi d'accès, parce que, si les gens avaient accès à ces documents-là, ça compromettrait totalement l'action qui était prévue. Alors, s'il y avait un sujet quelconque qui était soumis au comité d'éthique et que le fait de rendre public l'avis compromette le programme en question, je dirais: Bien, là, ce qu'on vise, c'est l'efficacité. La transparence, c'est notre idéal et c'est ce dont on fait la promotion, mais on comprend aussi qu'il y a des situations, un peu comme ces deux situations-là qui sont plus des situations types qui vont exiger quand même l'exercice d'une discrétion, d'une analyse de raisonnabilité de ce qu'on fait, qui pourraient être des circonstances où, là, l'avis serait gardé secret peut-être pour un certain temps. Mais il nous est difficile d'imaginer beaucoup d'autres cas. Mais, au moins, dans ces créneaux-là, on pense que c'est possible de gérer la situation.
M. Fournier: Est-ce qu'on... Je vous le dis d'entrée de jeu, je suis pas totalement convaincu. Je vous entends, là, je comprends, surtout la notion d'efficacité. Puis, comme on parle dans le vide, on n'a pas de cas, c'est... Je comprends la contrainte puis je comprends surtout la raison qui pourrait exister. Si, d'aventure, la transparence nous pénalise, bien là il faut prendre d'autres choix, d'autres chemins, mais est-ce que dans ce sens-là il y aurait pas lieu de bonifier votre proposition et de dire que, de façon générale, c'est public et que, dans certains cas tels que... et d'y aller en les précisant? Parce que dans la façon... Je veux pas faire de personnalité, mais certains politologues pourraient écrire que, de façon générale, les gouvernements sont très forts pour trouver des mesures exceptionnelles et pour faire en sorte que l'exception devienne la règle générale.
Il y a de très beaux écrits sur la loi d'accès à l'information, lorsqu'elle a été adoptée, où on disait: Il ne faudrait pas, il ne faudrait pas, et nous savons que le gouvernement le fera pas, mais il fait exactement ce que les gens disaient, lorsqu'ils l'ont adoptée, qu'il faudrait pas faire. Et pourquoi? Parce que le silence... Et, lorsque les gens savent pas, ça a l'air que c'est plus facile. Alors, je me demande s'il y a pas lieu de le baliser, si les considérations exceptionnelles, si c'est suffisant dans un texte, s'il y aurait pas lieu de dire: Lorsque l'avis pénaliserait... L'avis rendu public pénaliserait l'action à prendre, pour une certaine période de temps, point, et qu'on finisse par mettre la main sur cet avis.
Parce que tantôt le ministre disait ceci, là: Il faut laisser la discrétion à l'autorité imputable. C'est faux. Il dit: Il faut laisser la discrétion à l'autorité imputable de rendre public ou pas, mais, quand c'est pas public, il y a pas d'imputabilité. Il faut ou semer un doute ou présumer de la bonne foi. Mais on parle dans le vide, tout le monde. Alors, moi, je trouve que, lorsqu'il y a une discrétion à l'autorité imputable, c'est lorsque, au moins, on sait de quoi on parle ou, au minimum, à une certaine date on va savoir de quoi on parle. Et, là on pourra vérifier a posteriori une imputabilité, sinon on s'en sauve.
Alors, est-ce qu'il y aurait pas une limite à donner en termes de temps, peut-être, à ces avis pour qu'ils soient aussi rendus publics? Encore une fois, on parle du comité d'éthique qui a à vérifier la... à arbitrer le lien entre les droits collectifs et les droits individuels. Pour moi, ça toujours référence à chacun et chacune de mes concitoyens.
Le Président (M. Labbé): Mme Champoux.
Mme Champoux-Lesage (Pauline): Je pense que notre objectif a été de donner une orientation, d'établir des principes, là. On n'est pas allés jusqu'à opérationnaliser, je pense pas que ça soit notre rôle de le faire. Ce qu'on souhaitait, c'est justement d'inverser le processus, disant qu'il peut y avoir des situations d'exception. À ce titre-là, est-ce qu'il y aurait des balises à ajouter? Peut-être, mais je sais pas si nous sommes les mieux placés pour le faire. Il faudrait sûrement en discuter. Mais, à la limite des balises, ça s'interprète toujours aussi, là. Alors, c'est très difficile de... Mais je pense qu'il faudrait pousser la réflexion. Peut-être Me...
Le Président (M. Labbé): Alors, Mme McNicoll.
Mme McNicoll (Micheline): Oui. Comme on le mentionnait dans notre... Comme la protectrice le mentionne dans son mémoire, si on n'inverse pas la règle dans la loi, ça va être la règle générale qui va s'appliquer. Et, comme c'est un avis de personnes qui sont pas du ministère, si on appliquait la loi sur l'accès à l'information actuellement, ces avis seraient accessibles seulement dans 10 ans. Alors, on peut imaginer que, si le ministre ne le donne pas, là, pour des raisons exceptionnelles, la règle qui s'appliquerait, ce serait celle-là. Mais on n'a pas... En tout cas, on peut y réfléchir si Mme la protectrice le désire maintenant.
M. Fournier: Toujours en parlant du comité d'éthique, si vous me permettez, il y a... Puisqu'on parlait de l'indépendance, tantôt, du directeur national de santé publique et que c'était relié à... ça découlait de votre position sur la publication des avis du comité d'éthique, il y a l'Institut national de santé publique qui a déposé un mémoire et il y a deux éléments qui sont... que je trouve intéressants dans leur mémoire. Et je vais donc prendre le premier et le second par la suite.
Le premier, alors, c'est toujours cette discussion sur l'indépendance du directeur national de santé publique. Ils disent que le comité d'éthique devrait relever d'une instance nationale, mais non ministérielle ? évidemment, ils prêchent pour leur paroisse ? tel l'Institut national de santé publique. Mais, peu importe qu'ils prêchent pour leur paroisse, je trouvais un certain intérêt à la proposition pour qu'il y ait, à l'égard de ce comité d'éthique, une crédibilité accrue dans la population lorsqu'on peut trouver le moyen... Que ce soit là ou ailleurs, là, trouver le moyen de créer une distance entre la fonction décidante et la fonction aviseur, de réflexion que constitue un comité comme celui-là. Je sais pas comment vous réagissez à une proposition qui serait de mettre ce comité d'éthique sous une autorité autre que ministérielle.
Le Président (M. Labbé): Mme Champoux.
Mme Champoux-Lesage (Pauline): Bien, je crois que ça dépend sous quelle autorité on la pose, je pense. Je pense que la proposition actuelle offre, si on répond aux préoccupations qui étaient les nôtres, une forme d'indépendance qui me semble suffisante dans la mesure où il y a pas d'autorité fonctionnelle de la part du ministre à l'endroit de ces gens-là, si les gens sont désignés après avoir fait l'objet d'une consultation, donc sur recommandation des personnes intéressées. Par analogie, c'est peut-être loin, mais je pense que le Conseil supérieur de l'éducation, par exemple, dont les membres sont nommés de cette manière-là, conserve une grande indépendance par rapport aux interventions ministérielles. C'est vraiment un regard extérieur. Alors, moi, j'ai analysé un peu la situation de cet organisme-là de la même manière.
Autrement dit, dans la mesure où les gens sont désignés, que les règles de transparence sont assurées, ils ont l'autonomie parce qu'ils... Moi, j'ai pas compris qu'ils étaient en autorité hiérarchique, là, c'est un comité qui est complètement à l'extérieur.
n(17 h 10)nM. Fournier: Je vais... Vous avez un deuxième point qui est donné par l'Institut national. Vous êtes pas obligée de me répondre, je voudrais pas... Pas réfléchi à ça, là, je comprends, mais je trouve ça intéressant aussi. «Au plan des mandats, en plus de répondre aux demandes d'avis provenant du ministre ou des directeurs de la santé publique, le comité devrait pouvoir répondre aux demandes provenant des groupes de citoyens, de groupes sociaux ou d'intervenants directement impliqués par les actions de santé publique proposées.» Alors, on est toujours... Moi, je suis toujours dans cette réflexion de distance, de crédibilité, de s'assurer que les gens s'y reconnaissent et font confiance. Il y a une idée là-dedans qui est celle de l'appropriation citoyenne du comité. Bon, je suis pas en train de plaider pour qu'on les inonde d'études à faire, mais de trouver un mécanisme pour que le comité d'éthique puisse aussi entendre les souhaits ou les interrogations des personnes directement. Est-ce que vous trouveriez que c'est favorable à assurer une meilleure crédibilité à un comité d'éthique? Encore une fois, l'éthique, c'est... Je dirais que c'est récent dans nos modes d'opération, là. Je sais même pas si «récent», on devrait le dire, ça sera pour bientôt plutôt. Je trouvais qu'il y avait là une idée, en tout cas, intéressante.
Le Président (M. Labbé): Mme Champoux.
Mme Champoux-Lesage (Pauline): C'est peut-être une idée intéressante, mais j'ai l'impression ? en tout cas, je réponds spontanément, là ? qu'il faut laisser le temps à un tel comité de vivre et de prendre, j'allais dire, de l'expérience. Justement parce que c'est une fonction qui est nouvelle, qui va mettre en contexte plusieurs partenaires, il me semblerait prématuré... À l'usage, peut-être qu'on pourra voir, mais aussi il faut être réaliste, je pense, dans... Quand on fixe un mandat à des comités de cette taille-là, dans le fond, il faut qu'ils soient capables de remplir des mandats. Donc, je sais pas si le réalisme... Est-ce qu'il y aurait pas, par exemple, d'autres lieux ? et c'est peut-être à explorer, là ? pour pouvoir accueillir des préoccupations des citoyens? Mais, à court terme, moi, j'aurais tendance à laisser vivre ce comité-là avec le mandat qu'on lui confie dans un premier temps.
M. Fournier: Comme le ministre nous rappelle souvent que ça fait 30 ans qu'on a eu la phase I puis qu'on va passer à la phase II 30 ans après, peut-être que c'est prématuré, puis il faudrait attendre 30 ans pour la phase III et laisser la place des citoyens... Non, non, je badine, là, on pourra certainement trouver des mécanismes soit dans le temps ou sous d'autres forums pour que le citoyen puisse intervenir dans un débat, à mon avis, qui le concerne, dans une des questions les plus compliquées à régler: Comment le citoyen et la collectivité se marient. C'est évolutif en plus.
Je termine en vous amenant sur la question de la vaccination. Selon vous, le fait qu'on demande une autorisation à chaque étape, à chaque vaccin peut-il constituer un frein à la vaccination ou ça changera rien dans... Les gens donnent leur consentement, bon, puis ça changera rien de... Ça empêchera pas qu'on vaccine les gens. Que d'avoir une autorisation généralisée... une autorisation ponctuelle, pour vous, ça ne changerait pas la réalité des faits?
Mme Champoux-Lesage (Pauline): Autrement dit, la recommandation que nous faisons, si vous pensez que ça va être un frein à la vaccination? Non, je ne croirais pas personnellement, mais...
Une voix: ...
Mme Champoux-Lesage (Pauline): C'est l'inscription au registre seulement, là...
M. Fournier: Oui, mais, bon...
Mme Champoux-Lesage (Pauline): ...et les gens sont en processus de vaccination au moment où on demande d'inscrire au registre. Alors, je pense pas que ça amène les gens à dire: Je me ferai plus vacciner ou j'irai pas me faire vacciner.
M. Fournier: On en a déjà parlé un peu plus tôt, ceux qui ne se feraient pas... qui n'accepteraient pas de s'inscrire... J'ai noté dans l'ensemble des prescriptions que le consentement à l'inscription, le... soit donné à chaque vaccination, que l'information sur le caractère volontaire soit affichée, que l'information concernant le registre soit remise sous forme de dépliant. Est-ce qu'il ne devrait pas y avoir aussi une explication des conséquences de la non-inscription au registre?
Mme Champoux-Lesage (Pauline): Je pense que ça serait intéressant, très intéressant même, effectivement.
M. Fournier: Parce qu'on a déjà parlé plus tôt des complications que provoque la non-inscription, et me semble-t-il que, si c'est pour compliquer la vie des gens de pas être inscrit, tant qu'à afficher des choses, affichons donc à ceux qui refusent l'inscription...
Mme Champoux-Lesage (Pauline): Je regrette de ne pas y avoir pensé, je trouve que c'est... Non, mais je trouve que c'est une proposition intéressante qui vient justement faire un contrepoids, parce que, en faisant cette proposition-là, c'est pour nous assurer que ce soit un consentement réel, là, de la part des individus, et c'est très important pour la protection de la santé publique qu'on puisse être capables aussi de tenir un registre de vaccination, à savoir quelles sont les personnes qui l'ont été ou pas. Alors, oui, je pense que ça serait une proposition intéressante.
M. Fournier: Si ça se termine en ayant la protectrice du citoyen qui dit qu'on a eu une bonne idée, M. le Président, je pense que c'est le temps d'arrêter.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Labbé): Alors, merci, M. le député de Châteauguay. Alors, Mme Champoux-Lesage, Mme McNicoll, Mme Rousseau, merci beaucoup de votre présentation et de la qualité de vos réponses.
Compte tenu qu'on a épuisé l'ordre du jour de la journée, alors sans plus tarder, j'ajourne les travaux à mercredi ? demain, en fait ? le 19 septembre 2001, à 9 h 30, ici même.
(Fin de la séance à 17 h 15)