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(Neuf heures quarante-trois minutes)
Le Président (M. Philibert): La commission des affaires
sociales reprend ses travaux. Je rappelle brièvement le mandat. La
commission des affaires sociales se réunit afin de procéder
à une consultation générale et tenir des auditions
publiques sur le document de consultation intitulé «Partenaires
pour un Québec compétent et compétitif» et sur le
projet de loi 408, Loi sur la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre. Mme la secrétaire, est-ce
qu'il y aurait des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Cardinal,
députée de Châteauguay, sera remplacée par M.
Gobé, député de LaFontaine; Mme Juneau (Johnson) par M.
Bourdon (Pointe-aux-Trembles); Mme Loiselle (Saint-Henri) par M. MacMillan
(Papineau); M. Trudel (Rouyn-Noranda - Témiscamingue) par Mme Harel,
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Le Président (M. Philibert): Merci, Mme la
secrétaire. Je rappelle brièvement l'ordre du jour pour la
journée. Alors, à 9 h 30, nous recevons la
Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du
Québec inc.; à 10 h 30, l'Institut de formation en
développement économique communautaire; à 11 h 30, le
Centre de linguistique de l'entreprise. Nous allons suspendre pour l'heure du
repas. À 15 h 30, nous allons reprendre avec la Corporation de
développement des Laurentides et, à 16 h 30, avec Alliance
Québec, pour clôturer la journée vers 17 h 30.
Alors, maintenant, j'appelle la Fédération
interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du Québec et, pendant
que vous prenez place, je vous informe que nous avons un bloc d'une heure
à votre disposition, réparti en 3 périodes de 20 minutes:
20 minutes pour présenter votre mémoire, 20 minutes du
côté ministériel et 20 minutes du côté de
l'Opposition.
Alors, M. le président ou le représentant de la
Fédération, je vous invite, pour les fins du Journal des
débats, à vous identifier et également à nous
identifier les personnes qui vous accompagnent. Allez-y.
FIHOQ
M. Boulet (Guy): Mon nom, c'est Guy Boulet. Je suis
président de la Fédération de l'horticulture ornementale
du Québec. À ma gauche, vous avez M. André Mousseau, qui
est vice-président de la Fédération, responsable du dos-
sier de formation et de la main-d'oeuvre et aussi président du groupe de
travail québécois mis en place par Emploi et Immigration sur
l'étude des ressources humaines dans le secteur de l'horticulture
ornementale au Canada. Et vous avez Jean Tremblay, qui est directeur
général de notre Fédération.
Le Président (M. Philibert): Merci. Vous pouvez y aller
pour la présentation de votre mémoire.
M. Boulet: M. le Président, MM. et Mmes les
députés, M. le ministre, permettez-moi, au nom de la
Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du.
Québec, de vous remercier de l'occasion que vous nous offrez afin que
nous puissions vous faire part de nos préoccupations concernant le
projet de loi 408.
Comme vous avez pu le constater à la lecture de notre
mémoire, l'industrie horticole ornementale est une composante importante
non seulement de l'agriculture, mais aussi de l'activité
économique québécoise. Elle donne de l'emploi à
plus de 23 000 personnes. Elle est particulière puisqu'elle est
constituée de telle façon que l'on retrouve des entreprises
oeuvrant dans la production, la commercialisation et les services. Avant de
commenter le projet de loi, nous tenons à vous féliciter, M. le
ministre, pour l'énoncé de politique sur le développement
de la main-d'oeuvre, lequel était attendu de tous depuis plusieurs
décennies.
Cet énoncé confirme la volonté du gouvernement du
Québec de vouloir enfin définir une stratégie
d'investissement dans son patrimoine le plus cher, soit la main-d'oeuvre. En
effet, dans un monde où les barrières, quelles qu'elles soient,
tombent et que les rapports économiques s'internationalisent, la
qualité de la main-d'oeuvre est un élément primordial pour
un Québec productif et compétitif.
On peut donc souscrire à une telle démarche. Cependant, si
les objectifs de concertation, de partenariat et de décentralisation
sont bien circonscrits dans l'énoncé de politique, nous ne
pouvons conclure qu'il en est de même dans le projet de loi. Même
si la Société québécoise de développement de
la main-d'oeuvre est une corporation au sens du Code civil, il n'en demeure pas
moins que le pouvoir d'intervention du ministre auprès de la
Société est, à plusieurs égards, significatif.
En effet, il concerne plusieurs aspects, entre autres la nomination du
président-directeur général à l'article 5, la
nomination d'un ou des
vice-présidents à l'article 9, la nomination des membres
du conseil d'administration à l'article 5, l'élaboration, la
modification ou la suppression d'un ou des programmes aux articles 21 et 22,
l'acceptation des règlements de régie interne à l'article
28, l'émission de directives portant sur les objectifs de la
Société, ses orientations et l'exécution de ses fonctions.
Nous ne présumons aucunement des mauvaises intentions du ministre. Nous
constatons plutôt l'existence d'un pouvoir ou d'un processus qui est,
à tout le moins, discrétionnaire.
Par ailleurs, plusieurs groupes qui ne sont pas identifiés
à des organisations de salariés ou d'employeurs ne pourront
trouver place au conseil d'administration de la Société. Le
secteur agricole est l'un de ceux qui n'auront pas droit au chapitre. Nous
remarquons également qu'il n'y a aucune forme de représentation
des régions. Cette situation nous préoccupe au plus haut point.
En effet, nous nous interrogeons à savoir si c'est bien la même
décentralisation qui est proposée dans l'énoncé de
politique sur le développement de la main-d'oeuvre. Pour nous, il est
absolument nécessaire qu'il y ait une forme de représentation
régionale au sein de la Société et considérant les
particularités et les spécificités de chacune.
Concernant le rôle des sociétés régionales
dans le développement de la main-d'oeuvre, nous sommes d'avis qu'elles
doivent avoir une certaine forme d'autonomie. Pour ce faire, il faut, au
même titre que la Société québécoise,
qu'elles deviennent des corporations au sens du Code civil. Elles pourront
dès lors détenir des pouvoirs de gestion nécessaires au
développement des partenaires du monde du travail.
Dans ce contexte, il est essentiel, pour accomplir et réaliser
ces objectifs, que la société régionale crée
obligatoirement des comités consultatifs. Également, pour
conserver l'intérêt des partenaires du monde du travail, 11 faut
maintenir un lien électif entre la structure consultative et la
structure administrative. Ce lien symbiotique est particulièrement
important si on veut favoriser l'investissement à la fois des
salariés et des employeurs. Pour nous, il est évident que nous ne
considérons d'aucune façon nous ingérer dans le processus
de nomination que prévoit le projet de loi. Au contraire, notre
proposition est complémentaire.
Finalement, nous sommes bien conscients que l'approche sectorielle en
matière de développement de la main-d'oeuvre doit être
traitée d'une façon sérieuse. Cependant, elle ne doit pas
l'être au détriment de l'approche régionale. Cette
proposition va dans le même sens que la volonté gouvernementale de
remettre aux régions les moyens nécessaires à leur
développement.
Nous aimerions, avant de terminer, réitérer les huit
recommandations contenues dans notre mémoire, soft: 1° Au niveau de
la représentation du monde agricole: Considérant que la
représentation du monde du travail au sein de la Société
québécoise ne se limite qu'aux associations de salariés et
d'employeurs, nous recommandons que cette représentation soit
élargie au monde agricole, qui inclut l'horticulture ornementale. 2°
Au niveau de la représentation des régions: Considérant la
particularité des problématiques régionales en
matière de développement de la main-d'oeuvre, nous recommandons
que des représentants du monde du travail issus de chacune des
sociétés régionales soient intégrés dans la
composition de la Société québécoise. 3° Pour
l'incorporation des sociétés régionales de
développement de la main-d'oeuvre: Considérant qu'il est
essentiel que les sociétés régionales de
développement de la main-d'oeuvre détiennent des pouvoirs de
gestion, nous recommandons que les sociétés régionales
soient des corporations au sens du Code civil. 4° Pour les comités
consultatifs régionaux: Considérant que la structure consultative
est essentielle à l'accomplissement de la mission de ta
société régionale de développement de la
main-d'oeuvre, nous recommandons que la mise en place des comités
consultatifs régionaux soit obligatoire et que leur mandat soit
élargi. 5° Pour un lien électif: Considérant qu'il
faut conserver l'intérêt des partenaires du monde du travail afin
qu'ils investissent dans le développement de la main-d'oeuvre, nous
recommandons que soit maintenu un lien électif entre la structure
consultative et administrative. 6° Au niveau des comités
consultatifs régionaux et le conseil d'administration de la
société régionale de développement de la
main-d'oeuvre: Considérant l'importance des CCR au sein de la
société régionale de développement, nous
recommandons que le conseil d'administration de la société
régionale intègre par voie élective des
représentants d'employeurs et de salariés issus des conseils
régionaux. 7° Au niveau des responsabilités de la
société régionale de développement de la
main-d'oeuvre: Considérant que le service à la clientèle
est fait à partir des régions, nous recommandons que les
sociétés régionales de développement de la
main-d'oeuvre aient plus de responsabilités et de latitude dans la
gestion des ressources et dans le choix de leurs interventions. 8°
Comités consultatifs régionaux et comités sectoriels:
Considérant l'importance de l'approche sectorielle et la reconnaissance
du marché du travail régional, nous recommandons que l'approche
sectorielle soit complémentaire à l'approche régionale,
ceci étant nécessaire puisque nous ne voulons pas que la
première approche soit traitée au détriment de la
seconde.
M. le ministre, nous tenons à vous remercier de l'attention que
vous nous avez accordée et nous sommes persuadés que vous
accueillerez
positivement nos recommandations que nous, voulons constructives.
Merci.
Le Président (M. Philibert): Alors, merci, M. le
président. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, on vient d'entendre
l'exposé de la Fédération interdisciplinaire de
l'horticulture ornementale du Québec et, comme on a pu le constater, la
Fédération se préoccupe beaucoup de l'aspect
régional, de la décentralisation. Or, le député de
Matapédia est particulièrement intéressé par ces
sujets-là, M. le Président, et je proposerais qu'on lui
cède la parole, dans un premier temps, quitte à ce que je puisse
poser quelques questions après.
Le Président (M. Philibert): Alors, nous cédons la
parole à l'honorable député de Matapédia.
Une voix: Oh! Honorable!
Mme Harel: Honorable, c'est très rare!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Philibert): M. le député de
Matapédia, allez-y.
M. Paradis (matapédia): merci, m. le président.
oui, je suis très intéressé par la question
régionale. lorsque vous parlez d'autonomie régionale, j'aimerais
vous entendre un petit peu plus longtemps sur la façon de faire et
jusqu'où vous suggérez votre autonomie régionale, la
décentralisation ou l'autonomie.
M. Mousseau (André): O.K. Ce qu'on voit, nous, c'est que
dans les CFP régionales, à l'heure actuelle, les groupes de
travailleurs qui sont intéressés à y participer, peu
importe les secteurs, sans être nécessairement de grands secteurs,
peuvent s'y approcher par les CCR. On pense qu'il est très important,
dans un développement futur, que ces sociétés
régionales là aient de plus en plus de pouvoirs pour permettre
justement de répondre aux besoins des régions et, par là,
de permettre aux gens des régions de pouvoir s'exprimer et
définir leurs propres besoins. Parce que c'est souvent en centralisant
qu'on diminue justement l'intérêt des petits secteurs ou des
petits groupes de travailleurs qui, dans les régions, sont souvent loin
de ce qui se passe au niveau central.
On pense qu'à ce niveau-là, il serait important que les
sociétés régionales soient justement des entités
administratives complètes, c'est-à-dire comme une
société à part entière au niveau du Code civil avec
leur mode d'administration, mais tout en étant rattachées
naturellement au central. Mais excepté qu'on veut vrai- ment qu'au
niveau des régions, il y ait plus d'énergie là, puis
ça pourrait permettre aux petites entreprises d'être vraiment plus
présentes à ce niveau-là parce que, dans les
régions, on est beaucoup plus présents, les petites entreprises,
qu'au niveau provincial où là, c'est plus compliqué
à cause, justement, des dimensions qu'il faut avoir pour permettre de
venir en commission parlementaire ou autres choses de ce genre-là.
Tandis qu'au niveau des régions, souvent, il y a des regroupements
d'entreprises qui sont précis et qui permettent, justement, de faire
évoluer les systèmes plus facilement et une création
d'emploi plus importante.
M. Paradis (matapédia): mais tout ça en partenariat
avec les différents interpellés ou intervenants des secteurs
concernés, que ce soit les groupes représentatifs, là.
M. Mousseau: Oui, c'est ça. C'est que, naturellement, moi,
je pense qu'à l'heure actuelle, au niveau des CCR, il y a une
représentation égale entre le monde des travailleurs et le monde
des employeurs. Je pense que ce mode-là permet justement un partenariat
vraiment efficace. Je pense que de plus en plus au niveau des régions,
on a appris à travailler entre les employeurs et les employés
d'une façon efficace pour permettre un développement. Le seul
problème, à un moment donné, c'est que souvent, les
règles qui sont fixées en haut sont beaucoup trop larges et ne
permettent pas d'entrer avec des petits problèmes régionaux.
M. Paradis (Matapédia): Des petits problèmes
régionaux? C'est relatif.
M. Mousseau: Oui, bien, dans le fond, on a dit que pour le
central, souvent, pour en haut, ce sont des petits problèmes
régionaux alors que pour les régions, ce sont des vrais
problèmes très importants et qu'on peut traiter
régionale-ment. Je pense qu'on s'en va vers une société
où il faut de plus en plus donner du pouvoir aux régions si on
veut arriver quelque part.
M. Paradis (matapédia): puis vous, vous suggérez
que l'agriculture soit incluse pour que vous puissiez faire entrer
l'horticulture là-dedans.
M. Mousseau: Exactement. Depuis quelques années, au niveau
des CCR agricoles, on prend de plus en plus d'importance dans les
régions. On voit qu'aujourd'hui, maintenant qu'il va y avoir une
décentralisation dans le sens qu'à un moment donné, les
sommes d'argent qui venaient du fédéral vont s'en venir plus
facilement au provincial. Bien là, on va avoir moins de pouvoir
d'intervention étant donné que là, les CCR vont pouvoir
être juste consultatifs et au niveau des régions, bien, disons, on
ne sera plus élus au
niveau des CCR tel que décrit dans le projet de loi.
Pour nous autres, c'est intéressant d'avoir à la fois une
participation à la consultation, mais aussi à l'action parce que,
pour nous autres, c'est important. Quand on est des chefs d'entreprise qui ont
moins de 20 employés, il faut vraiment déployer
énormément d'énergie dans nos entreprises parce qu'on est
à la fois un peu partout au niveau de l'entreprise. On n'a pas la
possibilité comme dans les grandes entreprises d'avoir plusieurs
délégations. Ça fait qu'on soigne vraiment les lieux de
représentation où on va. Quand on se rend compte, à un
moment donné, qu'on est juste consultés et qu'après
ça, la décision se prend ailleurs, qu'on ne peut pas vraiment
influencer la décision, souvent, après trois ou quatre
réunions, on s'en retourne chez nous et on se dit: Bien, qu'ils se
débrouillent. On va continuer tout seuls chez nous.
M. Paradis (Matapédia): Le groupement que vous
représentez, ce n'est pas juste l'horticulture ornementale,
là?
M. Mousseau: Oui.
M. Paradis (Matapédia): Exclusivement?
M. Mousseau: La Fédération représente
exclusivement l'horticulture ornementale. Nous autres... moi, je suis aussi
vice-président du Syndicat des producteurs en serres du Québec,
qui est un groupement fondamental et qui s'occupe aussi de maraîchage. On
est aussi membres du Conseil québécois en horticulture, qui est
un groupe qui représente l'ensemble de l'horticulture.
M. Paradis (Matapédia): Est-ce que vous avez
été consultés entre autres dans le dossier des Jardins de
Métis?
M. Boulet: Pas à notre connaissance. M. Mousseau:
Non.
M. Paradis (Matapédia): Où on fait l'enseignement,
là...
M. Mousseau: Pas vraiment au niveau de la
Fédération. Je n'ai pas eu d'écho là-dessus. C'est
pour ça que je demandais au directeur général. D'habitude,
c'est lui qui reçoit le premier le dossier.
M. Tremblay (Jean): J'imagine que vous parlez dans le cadre de la
formation comme telle au niveau des Jardins de Métis?
M. Paradis (Matapédia): Oui, exact.
M. Tremblay (Jean): Entre autres, en collaboration avec le
cégep de Matane, si je me souviens bien, on a effectivement entendu des
discussions, mais à savoir si on a été approchés
pour être impliqués, que ce soit dans l'élaboration des
programmes, que ce soit au niveau de la formation ou autre, je ne pense pas
qu'on ait été invités à participer à tout
ça. (10 heures)
M. Paradis (Matapédia): Je pose cette question-là
parce que ce n'est pas toujours évident qu'on ait une collaboration
totale et complète entre les intervenants. Souventefols, on a une
espèce de surenchère qui peut se faire entre les
différents partenaires. Je ne nommerai pas le système
collégial par rapport au système secondaire où c'est plus
intéressant d'avoir un papier de cégep que d'avoir un papier du
secondaire. Mais ce n'est pas là le but visé. Le but visé,
c'est d'avoir la formation de la main-d'oeuvre, de bien former notre monde.
C'est dans ce cadre-là que... Est-ce que vous voyez un problème
entre cette possibilité d'avoir un système parallèle ou un
système bonifié sous prétexte qu'on aurait un certificat
ou une attestation collégiale par rapport au secondaire?
M. Mousseau: Disons que nous autres, en général, du
moment qu'on aura du monde formé, on va être contents. Chez nous,
dans l'entreprise, qu'on ait un diplôme secondaire ou collégial,
ça ne change rien par rapport à l'em-ployabilité. Le
problème, c'est qu'il n'y en a pas assez à l'heure actuelle.
Ça fait que plus il va y en avoir, à un moment donné, il
n'y aura pas de problème. Qu'il ait un diplôme ou l'autre,
ça n'a pas vraiment de différence. La seule différence
qu'il y a, c'est si la formation est vraiment pareille entre le niveau
secondaire et le collégial. Ce n'est pas sûr, à l'heure
actuelle, que ce soit de même niveau, parce qu'il y a des gens qui
sortent des ITA. Ils ne sont quand même pas, à l'heure actuelle,
au même niveau que le niveau secondaire, de ce qu'on connaît
aujourd'hui. Mais du moment que le monde va être formé, on peut
vous dire que dans notre secteur, il n'y a pas de petite case pour chacune des
personnes dans nos entreprises. Ils rentrent dans l'entreprise puis, au fur et
à mesure qu'ils veulent se développer, on a de la place pour leur
permettre de s'épanouir dans les entreprises. Ça fait qu'il n'y a
pas de problème, qu'ils soient du niveau secondaire ou collégial.
Le plus gros problème, c'est qu'il n'y a pas de formation à
l'heure actuelle.
M. Paradis (matapédia): mais c'est une
réalité dans les régions qu'il y a une espèce de
surenchère entre... une compétition, si vous voulez.
M. Mousseau: Je ne le sais pas. Tu parles au niveau de la
formation?
M. Paradis (Matapédia): Oui.
M. Mousseau: Oui, au niveau de la formation, je suis d'accord
avec toi. Oui, il y a une surenchère. Mais nous autres, en tant
qu'industrie, ce qu'on veut, c'est qu'il y ait du monde formé. À
l'heure actuelle, il n'y a pas plus de 12 % de la main-d'oeuvre en horticulture
ornementale qui a une formation minimale. Ça fait que...
M. Paradis (Matapédia): J'arrive d'un voyage en Allemagne.
J'arrive d'Allemagne. Iriez-vous aussi loin que le système de formation
allemand?
M. Mousseau: Nous autres, on a déjà pensé,
à un moment donné, à faire des représentations pour
vraiment avoir des écoles particulières en horticulture. On pense
que si vraiment on avait ce secteur-là, comme c'est en Hollande, comme
c'est en Allemagne, où vraiment il y a un double secteur, il y a un
secteur qui est vraiment de formation régulière, pour la
formation en horticulture, mais qui est en parallèle, qui
s'intègre l'un dans l'autre, ce qui permet que tu peux monter dans un
système ou dans l'autre. Mais, à un moment donné, quand
même, tu peux rejoindre les deux systèmes. Pour nous autres, on ne
serait pas en désaccord avec ça. On serait bien d'accord avec
ça, surtout si on le gérait.
M. Paradis (Matapédia): Parce que la formation
professionnelle est tout à fait exceptionnelle. C'est peut-être un
modèle à imiter jusqu'à un certain point. Après le
secondaire III, si un individu ne veut plus faire sa formation
générale, s'il veut s'en aller dans une formation
professionnelle, il peut le faire. Il le fait sur une base de 30 mois à
peu près, dont une journée à l'école et quatre
journées dans l'entreprise. Lorsqu'il termine son cours, il est
formé et adapté à l'entreprise ou au secteur
d'activité où il veut oeuvrer, évidemment. C'est pour
ça qu'on interpelle beaucoup les entreprises. Au Québec, ce
mariage-là n'a pas été évident dans le
passé, il faut l'avouer. On a formé bien du monde.
Je me souviens, dans le système d'éducation où j'ai
été formé, on disait: Allez à l'école, mais
on ne disait pas où puis on ne disait pas c'était quoi les
besoins. Vous, vous nous dites: Nous sommes en pénurie. Nous sommes des
partenaires, nous voulons développer notre main-d'oeuvre en partenariat
avec les maisons d'enseignement. C'est ça que vous dites.
M. Mousseau: C'est ça qu'on fait le plus possible quand
les besoins de l'enseignement l'acceptent. Nous, on a des comités
conjoints avec les écoles, principalement où il y a des
informations. Que ce soit l'ITA de Saint-Hyacinthe ou les commissions
scolaires, on a des comités école-industrie qu'on forme au fur et
à mesure que l'école veut bien nous accepter autour de la table.
Ce n'est pas toujours facile parce qu'en général, au niveau
dés écoles, quand elles vont bien toutes seules, elles n'ont pas
besoin de nous autres. À un moment donné, quand ils ont des
problèmes avec leur grand «boss», là, ils nous
téléphonent, puis on aurait besoin d'un comité
conjoint.
Mais nous autres, on est tout à fait favorables à
ça. Nous autres, on serait bien d'accord même, à un moment
donné, à ce qu'il y ait un genre de chose comme il se passe en
Europe où il y a un montant d'argent qui est retenu pour permettre,
justement, un partenariat plus exact entre l'industrie... Il n'y a aucun
problème là-dedans. Nous autres, on est prêts à
embarquer. La seule affaire qu'il y a, c'est qu'à l'heure actuelle, les
structures qui sont au Québec ne nous permettent pas tellement d'aller
dans ce sens-là. On a vraiment tout décentralisé, c'est
tout large pour tout le monde. On a même eu, à un moment
donné, de la misère à pouvoir conserver nos ITA pour
pouvoir donner de la formation agricole parce que le ministère de
l'Éducation voulait tout rapatrier ia formation.
Là, tranquillement, on sent qu'if y a un élargissement de
ce côté-là. Mais dans les années quatre-vingt,
ça brassait un peu parce que le ministère de l'Éducation
voulait vraiment tout rapatrier. Mais là, depuis trois, quatre ans, on
sent vraiment que les groupes peuvent se donner des formations plus
particulières. Nous autres, ça nous intéresse
énormément parce qu'on est dans un secteur où, on vous le
dit, il n'y a pas plus de 12 % de notre main-d'oeuvre qui est formée.
C'est très difficile aujourd'hui, dans les temps où se donne la
formation, d'avoir le genre de formation école-industrie telle que vous
parlez.
Les professeurs, ça ne travaille pas tellement
l'été, puis nous autres, on travaille surtout
l'été. Ça fait que c'est assez compliqué. Il faut
vraiment être très près d'eux autres pour réussir
à avancer. Je pense que s'il y avait vraiment une volonté
politique à un haut niveau, eux autres, ils seraient prêts
à embarquer parce que, de plus en plus, on est prêts de ces
administrations-là. Elles sont prêtes à travailler avec
nous autres. Des fois, il y a des conventions collectives, il y a toutes sortes
d'affaires, en tout cas, qui existent, qui font qu'à un moment
donné, ça devient plus difficile. Mais même au niveau des
professeurs qu'on rencontre, avec qui on a des bonnes relations, Us seraient
ouverts, eux autres. Mais c'est parce qu'à un moment donné, il y
a des cadres qui existent, puis on ne peut pas en sortir facilement.
Il faut dire que nous autres, en tout cas... moi, je suis près de
Saint-Hyacinthe, puis on a de très bonnes relations avec l'ITA, avec les
professeurs et avec tout l'ensemble. Puis il n'y a aura vraiment... C'est juste
question de cadres administratifs qui les dérangent un peu.
M. Paradis (Matapédia): Merci.
Lé Président (M. Philibert): Alors, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Ça me fait
plaisir de vous saluer à nouveau, M. Boulet et M. Mousseau. Vous
étiez venus lors de la révision de la loi des normes du travail.
M. Tremblay, vous y étiez aussi, je crois. Vous aviez
présenté à ce moment-là un mémoire qui
était très convaincant. Je me rappelle particulièrement
que vous aviez fait valoir au ministre que vous deviez chaque année
recruter une partie de votre main-d'oeuvre à l'étranger pour
combler la pénurie pendant la période intensive. Je crois que
c'étaient presque 800 personnes que vous deviez faire venir du Mexique.
En fait, je le mets au passé, mais c'est encore le cas maintenant,
j'imagine, et vous nous aviez expliqué que c'était très
spécialisé et que votre main-d'oeuvre n'arrivait pas à
suivre des cours, à se qualifier, étant donné que
lorsqu'ils avaient leur chômage, il fallait qu'ils aient six mois, en
fait, l'équivalent, je pense, des 30 dernières semaines pour
pouvoir se qualifier à des cours. Alors, ils n'arrivaient jamais
à pouvoir se qualifier, étant donné qu'ils
recommençaient à travailler à la fin de ces 30
semaines-là. En fait, l'absurdité du système était
bien illustrée par la situation qui prévalait dans votre
secteur.
Je vous félicite d'être venus devant la commission. Ce que
vous nous dites, dans le fond, ça rejoint ce que les CFP et
l'association des CFP sont venues dire, et ça rejoint également
ce que l'UPA est venue dire. Je ne sais pas s'il y a des relations entre
vous... Ha, ha, ha!
Une voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: Tant mieux! Ça prouve qu'il y a quelque chose
qui marche sur le terrain. Moi, la question que je me suis posée, c'est:
Comment ça va les relations actuellement entre vos membres et les CFP
dans les régions?
M. Mousseau: À l'heure actuelle, dans les régions,
on établit de plus en plus au niveau de l'horticulture des CCR agricoles
avec une sous-section horticulture qui, dans les régions où on
est installés, sont très performants dans le sens qu'ils ont voix
au chapitre puis ils peuvent participer vraiment à l'élaboration.
On peut vous dire, en tout cas, que dans la CFP de Québec qui, depuis
quelque temps, est vraiment effective, le secteur de l'horticulture est celui
où il y a eu le plus de formation à travers le Québec au
niveau de l'agriculture parce que, justement, le moule est bien
enclenché puis là, on se rend compte que c'est possible de le
faire. Ça fait que dans les autres régions, ils ont
enclenché le mouvement puis, pour nous autres, en tout cas, c'est une
très bonne sortie pour pouvoir, justement, faire connaître nos
besoins en formation de main-d'?uvre.
Mme Harel: Parce que c'est quand même une industrie
importante. Moi-même, j'avais été surprise de constater que
c'est au-delà de 1 000 000 000 $ par année de chiffre d'affaires
dans l'industrie horticole ornementale. C'est ça qu'il faut
comprendre.
M. Mousseau: Exactement.
Mme Harel: Alors, j'imagine que dans l'ensemble de l'industrie
horticole, quand on y ajoute les serres et le maraîchage, ça doit
être encore plus important que ce milliard ornemental.
M. Mousseau: Oui. C'est sûr qu'au niveau de la production,
l'ensemble de la production maraîchère est à peu
près une fois et demie ce qu'est l'horticulture ornementale au niveau de
la production, et le reste, c'est les commerces de détail, etc., qui
continuent le travail.
Mme Harel: Vous disiez tantôt qu'il y a 12 % de votre
main-d'oeuvre qui ont reçu une formation. Je dois comprendre une
formation qui est qualifiante, c'est-à-dire qui résulte en un
diplôme, mais les 88 % de votre main-d'oeuvre ont-ils cette formation
acquise sur le tas? C'est ça qu'il faut comprendre.
M. Mousseau: Oui.
Mme Harel: Mais, est-ce que vous souhaiteriez qu'il y ait une
formation continue qui se donne dans l'entreprise? Parce que là, vous
échangiez surtout, j'imagine, sur la relève avec la formation qui
se fait dans l'institution d'enseignement pour les nouveaux arrivants, mais
pour ceux qui sont déjà en place, qu'est-ce qui est prévu
dans votre industrie?
M. Mousseau: Bien, à l'heure actuelle, il y a quand
même des cours qui se donnent, comme au niveau des ITA, pour la formation
continue.
Mme Harel: Au niveau de?
M. Mousseau: Des ITA. Principalement de l'ITA de Saint-Hyacinthe,
qui est quand même notre école primaire au niveau de
l'horticulture, où il se donne le plus de cours. Il y a
possibilité d'avoir des relations avec eux autres.
Mme Harel: Ça, c'est au niveau collégial?
M. Mousseau: Oui. Puis en même temps au niveau ces CFP, on
arrive à donner des cours dans les différentes régions
pour la formation durant l'hiver. Le seul problème qui a toujours
existé qui est là-dedans, c'est au niveau, comme on vous pariait
tantôt, de la règle des 24 heures qui, à un moment
donné, limitait énormément la possibilité d'avoir
une formation un peu plus longue dans le sens qu'à l'heure actuelle,
nos
employés, on peut les envoyer en périodes de travail une
demi-journée, une journée de temps en temps, pour aller suivre
des cours. Ça, ce n'est pas trop, trop problématique, mais durant
la saison morte, c'est quand même assez compliqué d'avoir des
sessions assez longues puis, en même temps, que ce soit reconnu. Dans le
fond, d'être capable puis, en même temps... eh bien, c'est
compliqué.
Mme Harel: Est-ce que ça s'est réglé avec
l'assurance-chômage?
M. Mousseau: Oui. Mme Harel: Ça s'est
réglé.
M. Mousseau: Oui, c'est réglé maintenant. Ça
permet de faire suivre les cours, mais c'est surtout de s'imprimer partout
à la grandeur, c'est-à-dire de continuer le travail, comme je
vous disais, qui s'est fait à Québec au niveau de la CFP et de
continuer dans les autres régions. C'est sûr qu'au niveau de la
formation, il y a des problèmes au niveau des formateurs parce que c'est
quand même un secteur qui est nouveau et il y a quand même peu de
gens formés pour donner de la formation. C'est un problème qui
est assez majeur. On en a discuté la dernière fois à notre
dernier conseil d'administration. Plusieurs intervenants se plaignaient,
justement, du manque de formation des formateurs au niveau du champ pour aller
plus loin. Ça va se régler avec le temps, mais à l'heure
actuelle, c'est quand même un problème qui est assez majeur,
oui.
Mme Harel: Mais où pourrait-elle se donner, cette
formation des formateurs?
M. Mousseau: Bien, à travers les CFP, je pense. À
un moment donné, je pense, on avait quand même demandé,
nous, à l'Université Laval et même aux ITA de pouvoir, mais
excepté que c'est une roue et il faut que ça s'enclenche.
Ça s'en vient tranquillement, mais ce n'est pas pour demain matin. A
l'heure actuelle, c'est un gros problème.
Mme Harel: tantôt, on parlait de la situation de la
formation en allemagne. les entreprises allemandes investissent
énormément. je pense que c'est 8 % de leur masse salariale, 8 %
en formation professionnelle. hier, je prenais connaissance dans les journaux
de déclarations de m. wagner, qui est responsable de la formation
à sidbec-dosco et président de l'association, je pense, des
professionnels en ressources humaines du québec, qui tenait un
congrès au palais des congrès à montréal. ce
monsieur de l'entreprise disait être en faveur, lui, d'une participation
obligatoire à la formation professionnelle de la part des entreprises
qu'il chif- frait, lui, à 2 %. je me disais: mon dieu, il rejoint
là la csn parce que, finalement, la csn est venue devant la commission
plaider pour qu'il y ait 2 %. en fait, moi, ma formation politique propose 1 %,
mais 1 % que l'entreprise dépense pour sa formation, c'est-à-dire
que si l'entreprise le dépense, elle peut être dispensée
d'avoir à le fournir, si vous voulez. je crois comprendre par vos propos
que vous, vous êtes en faveur d'une participation. est-ce que c'est bien
le cas?
M. Mousseau: Oui. Nous autres, à l'heure actuelle, on est
en faveur, justement, d'un pourcentage qui pourrait être fixé
d'une façon fixe à travers l'industrie du moment que, nous
autres, on pourrait participer à l'élaboration des programmes de
main-d'oeuvre et à toute la gestion de ces choses-là. Nous, on
est parfaitement favorables à ce genre de choses-là. Parce
qu'à l'heure actuelle, il existe des crédits d'impôt
à la formation. Chez nous, on n'a pas vraiment utilisé ça.
Je fais faire de la formation à mes gens, mais j'en ai assez de toutes
les formules que le gouvernement envoie sans en avoir une de plus à
remplir. Ça ne représente quand même pas des sommes
importantes, tu sais. On est une quinzaine d'employés. Ils vont suivre
peut-être 15 ou 20 jours par année de formation, en
général, ceux qui sont là à temps plein, parce que,
chez nous, dans notre entreprise, ils travaillent 12 mois par année.
Ça fait que ça devient compliqué, tu sais. C'est sûr
qu'il y a des sommes d'argent à ramasser, là, mais nous autres,
on dit qu'on a assez de papiers à remplir à l'heure actuelle.
Ça devient compliqué. C'est sûr qu'on pourrait le faire,
mais on n'a pas vraiment... Surtout dans des périodes de
récession comme ça, où ce n'est pas facile, on est mieux
de travailler sur la production que les genres de travaux. Mais à long
terme, nous autres, on serait d'accord pour avoir un pourcentage puis faire
comme en Europe ou en France. Ça travaille comme ça. C'est le
groupe des employeurs avec les employés en parité qui ramasse des
sommes d'argent et, comme vous dites, à un moment donné, les
employeurs qui participent à fa formation n'ont pas à verser et
ceux qui ne participent pas versent pour permettre, justement, que ça se
continue.
Mme Harel: Vous recommandez donc une corporation au sens du Code
civil pour les sociétés régionales et vous recommandez une
participation du monde agricole au niveau de la société
mère. C'est bien ça qu'il faut comprendre?
M. Mousseau: Oui.
Mme Harel: Quel serait le mode de désignation de la
représentation du monde agricole? Vous savez que l'UPA a aussi
demandé de siéger.
M. Mousseau: Oui. Nous autres, ce qu'on pense, c'est qu'à
travers les CCR régionaux, on a déjà des fonctions dans fe
sens qu'on peut, par mode électif, monter dans la structure et, si on
est assez important au niveau de la structure, on peut se rendre au niveau de
responsable, président d'une région et monter au central. Nous
autres, on pense que les régions devraient être présentes
au central, et c'est par là, principalement, qu'on voit notre
façon de se rendre en haut par mode électif à partir du
bas. Sans ça, si on donne la place à tout le monde en haut puis
à dire: Parce que le monde agricole, on est 40 000 employeurs, un autre
a 10 000, un autre a 5000, bien, là, la table va être beaucoup
trop large. Nous autres, on compte beaucoup plus sur le mode électif au
niveau des régions pour monter en haut et dire: Bien, là, si les
gens sont intéressés, ils vont se rendre en haut. Il faut se
rendre compte que si on n'est pas intéressé... (10 h 15)
Je regardais justement le livre de l'énoncé de politique
sur le développement de la main-d'oeuvre. Quand je regarde les chiffres
de création d'emplois nets, on voit très clairement que c'est les
petites entreprises de 0 à 19 employés qui, même par leurs
efforts de création d'emplois, n'arrivent pas à reprendre ce que
les grosses perdent. Puis ce dont on se rend compte, c'est que dans la
politique qu'il y a là, ça va être les syndicats des
grosses compagnies, ça va être les conseils du patronat des
grosses compagnies qui vont encore avoir voix au chapitre tandis que nous
autres, les petites entreprises, on n'a pas les moyens de jouer à
ça. On ne sera pas là. Mais c'est qui qui les crée, les
emplois? Il va falloir se rendre compte, à un moment donné, que
c'est les petites entreprises qui créent les emplois, et la seule
façon qu'on a, nous autres, de travailler, c'est au niveau des
régions.
Au niveau central, c'est bien trop compliqué, mais au niveau des
régions, on est intéressés. C'est proche de notre milieu.
C'est proche de notre milieu de travail. Ça veut dire que si je vais
à Saint-Hyacinthe de chez nous, c'est 15 minutes. Si je monte à
Québec, bien, c'est deux heures. Ce n'est pas pareil pantoute. C'est
plus facile d'intervenir, et on peut travailler beaucoup plus facilement dans
ce temps-là.
Une voix:...
M. Mousseau: Bien, trois heures ce matin, mais d'habitude, c'est
deux heures.
Mme Harel: Vous savez, M. Mousseau, vous, vous êtes de
l'industrie des serres, de l'horticulture ornementale, de Saint-Hyacinthe, et
vous tenez le même discours que M. Patenaude, hier, de la CFP
Montréal, mais lui, qui est du secteur de la danse, tenait, en disant au
ministre: A Montréal, s'il n'y avait pas les CCR, moi, je n'aurais
jamais pu devenir vice-président de la CFP de Montréal et je
n'aurais pas pu être ici parce que ce sont les appareils d'en haut,
syndicaux ou patronaux, qui auraient désignés finalement leurs
représentants. Et ça, c'est quelque chose de très,
très important dans le fond parce que le choix à faire, c'est:
Est-ce qu'on laisse aux appareils... Les appareils, on se comprend. Il y a un
appareil gouvernemental, l'appareil syndical, l'appareil patronal. Les
appareils, entre eux, ont tendance à... C'est un peu comme Cyrano de
Bergerac, ça. Il est prêt à parler contre lui-même,
mais il n'est pas prêt à ce que personne parle contre lui.
M. Mousseau: C'est ça.
Mme Harel: Alors, c'est un peu la même chose dans les
appareils. Alors, les appareils se protègent les uns les autres et la
grande question, c'est: Est-ce que, justement, le fait de rendre les CCR
obligatoires et le processus électif, ça ne permet pas un peu
d'air, ça ne permet pas de rafraîchir, justement, le climat entre
les appareils? C'est un peu ça, finalement, que vous nous dites, ce
matin...
M. Mousseau: C'est ça. Nous autres, on se dit: On est un
groupe qui s'intéresse énormément au niveau de la
formation de main-d'oeuvre, qui est un milieu un peu défavorisé
au niveau de la main-d'oeuvre, comme on disait tantôt. On s'implique au
niveau national pour aller voir ce qui se passe en horticulture parce qu'on est
en train de faire une étude, justement, au niveau de la main-d'oeuvre.
L'évolution de la main-d'oeuvre dans les 10 prochaines années;
ça va être quoi, la formation qui va être nécessaire?
Face au problème vraiment du décrochage des jeunes, on se dit:
Est-ce que le milieu agricole, il n'y a pas vraiment un lieu où est-ce
qu'il pourrait en venir, du monde?
On en a besoin, de monde formé, mais il n'y a personne qui incite
les gens à venir dans notre milieu. On va voir c'est quoi, les
technologies du futur, comment ça va se faire. Mais quand va arriver le
lieu final où vont se prendre les décisions, on ne sera jamais
là, même si on fait tous les efforts partout où est-ce
qu'on peut aller, au niveau de qu'est-ce qu'on est. Tu sais, dans le fond, s'il
n'y a pas un lieu électif, là, où est-ce qu'on peut
vraiment monter dans la structure? C'est sûr qu'il n'y aura jamais de
place pour nous autres plus haut. Pour nous autres, même si on est
vraiment très intéressés, on ne sent pas que dans la loi,
à l'heure actuelle, qui va créer la société
mère, on va avoir voix au chapitre. C'est sûr qu'ils vont penser
à nous autres. Ils ne peuvent pas ne pas penser à nous autres, on
existe. Mais ils n'auront pas le vécu qu'on a pour permettre, justement,
de pouvoir placer les bonnes affaires aux bonnes places pour nous permettre
d'aller plus loin.
Pour nous autres, c'est une question de suivie. Avec 12 % de
main-d'oeuvre qualifiée, on ne peut pas aller bien, bien plus loin. Puis
quand on parle souvent de choses comme ça, où on parle d'emplois
précaires dans les milieux comme les nôtres, je me demande souvent
si la précarité de l'emploi ne vient pas justement du manque de
formation de notre personnel qui fait qu'à un moment donné, il y
a un désintéressement, il y a un manque de
productivité.
Donc, quand il n'y a pas de productivité, tu ne peux pas les
payer non plus et ça crée des emplois précaires. Si nos
gens étaient plus formés, moi, je suis sûr que, chez nous,
nos emplois seraient beaucoup moins précaires et beaucoup plus payants
malgré la compétitivité. Des gens qui sont formés
et qui veulent travailler en entreprise, ils peuvent vraiment performer et nous
rendre, justement, ces emplois-là moins précaires dans le
futur.
Mme Harel: Les Mexicains, encore cet été... Quoi,
ils étaient peut-être 800...
M. Mousseau: C'est ça. Mme Harel: ...qui sont
venus?
M. Boulet: Mais ce que je voudrais préciser au niveau des
Mexicains, parce que vous avez semblé dire que c'est parce qu'on n'avait
pas de travailleurs spécialisés qu'on allait chercher des
Mexicains.
Mme Harel: Oui.
M. Boulet: Le problème, ce n'est pas ça. Ce n'est
vraiment pas des travailleurs spécialisés qu'on va chercher. On
emploie des Mexicains parce qu'on n'a pas la main-d'oeuvre
québécoise qui veut faire ce travail-là.
Mme Harel: Ah, O.K.
M. Boulet: Parce que c'est un travail qui est, comme on dit, dans
le bas de la rémunération et dans le bas au niveau de la
formation. C'est des manoeuvres, tout simplement.
Mme Harel: Ce sont des manoeuvres.
M. Boulet: C'est carrément des manoeuvres.
Mme Harel: C'est ça, la question que j'allais vous
poser.
M. Boulet: C'est ça. C'est juste des manoeuvres sans
formation, des bras, mais qui aiment ça.
Mme Harel: Qui aiment ça? M. Boulet: C'est
ça.
Mme Harel: Oui. Qu'est-ce que c'est les... Bon. Vous dites: On ne
peut pas aller chercher la main-d'oeuvre qui pourrait faire ce genre de
travail. Mais vous les payez relativement bien. Ce n'est pas 8 $ l'heure?
M. Boulet: Non. Mme Harel: Non.
M. Boulet: Cette année, les Mexicains, le salaire n'est
pas fixé par nous autres. C'est le gouvernement fédéral
qui fixe. Dans les pépinières, le salaire le plus
élevé en horticulture ornementale, c'est 6,91 $ l'heure, mais
à ça est rattaché le logement qu'on fournit
gratuitement.
M. Bourbeau: Sur les fermes, c'est moins que ça.
M. Boulet: non, non. dans le secteur maraîcher, c'est 5 $
ou 6 $, quelque chose du genre, mais au niveau des pépinières
ornementales...
Mme Harel: C'est le salaire minimum.
M. Boulet: ...c'est le salaire minimum normalement.
Mme Harel: Et dans les emplois d'été des
étudiants, il n'y avait pas...
M. Boulet: Ça n'arrive pas dans la bonne saison. Nous, on
commence à travailler dans la région de Québec le 15
avril, le 1er avril à Montréal. Alors, il n'y a aucune
école d'enseignement où les étudiants sont
disponibles.
Mme Harel: D'accord. Je vous remercie vraiment de venir devant la
commission rappeler l'importance de votre réalité. Vous l'aviez
fait, comme je le signalais, il y a un an et demi, et c'est important de le
refaire encore aujourd'hui. J'espère que votre message a
été compris. Moi, en tout cas, je vois bien se dessiner comment
les CCR sont la pierre de départ du reste. Merci.
Le Président (M. Philibert): Mme la députée
de Hochelaga-Maisonneuve, merci. M. le député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. J'aimerais savoir de
votre part: Est-ce que les employeurs se plaignent de ne pas avoir assez de
Mexicains qui viennent travailler pour le travail qu'il y a à faire en
région, comme ça se fait dans ma région de
Lanaudière? Les gens demandent davantage des Mexicains parce qu'il n'y a
pas assez de Québécois pour travailler pour faire l'ouvrage, peu
importe le travail, là.
M. Boulet: Je pense qu'il y a deux problè-
mes de ce côté-là. C'est qu'il y a un
problème de stabilité de la main-d'oeuvre. Nous, quand on parle
de travailleurs mexicains, qu'ils soient dans le maraîcher ou dans
l'ornemental, c'est que ces gens-là viennent et sont contents de venir.
Le problème, c'est qu'au niveau des emplois qu'on offre, il y a des
manoeuvres et on travaille aussi dans des conditions climatiques propres au
Québec. Les travailleurs québécois qu'on peut trouver pour
faire ce travail-là, d'abord, ce n'est pas une main-d'oeuvre stable
parce qu'aussitôt qu'ils vont se trouver un travail d'une part plus
rémunérateur et d'autre part dans des conditions plus faciles,
parce que ce n'est pas tout le monde qui aime ça travailler dehors quand
il pleut et autre, parce que c'est une réalité de notre
production, ils vont s'en aller tout de suite.
Alors, ces gens-là sont habitués de travailler à la
production, et nos plantes poussent 7 jours par semaine, 24 heures par jour.
Alors, c'est difficile de trouver des gens qui veulent travailler les fins de
semaine, des choses comme ça. C'est une stabilité comme
ça.
Une autre chose, c'est qu'on essaie, avec les pressions au niveau,
supposons, du ministère de l'Environnement quant à l'utilisation
minimum des pesticides dans nos entreprises. Pour compenser pour les
pesticides, ça prend des gens qui, manuellement, sont habiles et qui
aiment faire ces travaux manuels. Alors, si on n'a pas cette
main-d'oeuvre-là, on va être obligé d'employer des
pesticides d'une façon plus grande. Mais quand on parle des Mexicains,
c'est vraiment une main-d'oeuvre, comme on dit, sans aucune expérience.
C'est quelque chose qui ne peut pas être fait par des machines, dans le
fond. Je ne veux pas les comparer à ça, mais...
M. Houde: Oui, oui. L'autre point, est-ce que les gens que vous
engagez, les Québécois ne donnent pas la raison suivante: On va
être coupés pour notre bien-être social ou bien on va
être coupés pour l'assurance-chômage dans certains cas?
Moins sur l'assurance-chômage, mais plus sur le bien-être social.
On va être affectés, et ça va prendre du temps avant qu'on
puisse ravoir notre bien-être social. Est-ce qu'il n'y en a pas qui
refusent de travailler pour cette raison-là?
M. Boulet: Je ne pense pas... Ils ne viennent pas nous voir dans
ce sens-là.
M. Houde: Non, mais quand les gens demandent... Un employeur va
demander cinq personnes pour travailler demain matin et ils vont
répondre: Eh bien, on est coupés pour notre bien-être
social, et ça nous dérange. Ça fait qu'on ne veut rien
savoir. Ça ne dure pas assez longtemps, le travail que vous nous offrez.
On ne veut rien savoir. Les employeurs dans ma région se plaignent de
ça.
M. Boulet: Ça, on ne peut rien faire contre le climat,
mais je peux vous donner l'exemple de la formation qui s'est faite en Europe,
en Savoie, où les gens qui travaillent en horticulture ont la formation
combinée entre travailler en horticulture et ensuite de ça
travailleur en montagne, dans les centres de ski ou autre. Je veux dire, c'est
une formation. Les gens, ils ont une formation double. Ça veut dire
qu'à la fois, ils sont formés pour travailler dans les
pépinières ou dans l'horticulture ornementale et, quand ils
arrivent en hiver comme il y a là, ils vont travailler dans d'autres
domaines, mais qui sont des domaines développés pour l'hiver, en
somme.
C'est évident que si j'ai un travail qui est saisonnier, mais
à courte durée, c'est difficile. C'est le système qui est
comme ça. On vit au Québec.
M. Houde: Merci.
Le Président (M. Philibert): M. le député de
Berthier, merci. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, vous demandez que le secteur
agricole soit représenté au sein de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Dans
votre esprit, est-ce que le secteur agricole devrait faire partie de la
délégation patronale ou de la délégation des
travailleurs? Des employeurs ou des travailleurs?
M. Mousseau: Nous autres, ce qu'on vous a dit et ce que je vous
ai dit tantôt, c'est que nous autres, on pensait que la meilleure
façon d'être représentés en haut, c'était par
les CCR. C'est sûr que c'est le problème qu'on a en agriculture.
Est-ce qu'on est des employeurs ou des travailleurs? Je sais qu'on travaille
à tous les jours et qu'on est tous des employeurs. On doit être
des travailleurs employeurs et, quand on essaie de me cataloguer dans l'un ou
dans l'autre, je pense que, souvent, on a autant d'affinités avec le
Conseil du patronat qu'avec les syndicats.
Ce n'est pas facile quand vous me demandez dans lequel des deux on veut
être. Nous autres ce qu'on pense, c'est que la meilleure façon de
vraiment rentrer là, ce serait par les CCR régionaux où
là, par voie élective... Si le secteur agricole est vraiment plus
important dans ce coln-là, bien, ce serait un agriculteur qui serait le
président de la CFP régionale, comme dans certaines
régions où l'agriculture est très importante, et cette
personne-là pourrait monter au central. C'est pour ça que nous
autres, on pense que l'agriculture devrait être représentée
de cette façon-là.
M. Bourbeau: Oui, mais ce n'est pas ta formule qui a
été retenue dans le projet de loi. Les CCR, bon, ils pourront
continuer à exister, il n'y a pas de problème, sauf que ce ne
seront
plus les CCR qui vont nommer ou élire les membres de la
société régionale. Ça va être le gouvernement
qui va le faire, d'ailleurs, comme le gouvernement, présentement, nomme
les CCR. Vous savez que c'est le ministre qui nomme les CCR
présentement. Alors, il n'y a pas grand changement sur le plan
philosophique.
M. Mousseau: Bien...
M. Bourbeau: Les CCR n'existent pas sans que le ministre ne les
nomme.
M. Mousseau: oui, mais excepté que le mode électif
est respecté dans le sens qu'en général, vous allez
respecter ce que les gens du milieu vont vous donner.
M. Bourbeau: oui.
M. Mousseau: Je pense que c'est là-dessus qu'on tient, je
pense, à avoir un suivi.
M. Bourbeau: je bien d'accord, mais comme le ministre nomme les
ccr, on peut bien concevoir que, dorénavant, le ministre va consulter le
milieu avant de nommer les membres du conseil d'administration.
M. Mousseau: C'est sûr, comme on dit, qu'on ne vous
prête pas de mauvaises intentions au niveau des nominations. La seule
chose qu'on dit, nous autres, c'est que si vraiment, au niveau des
régions, on veut être représentés en haut et on veut
vraiment que ce soit efficace...
M. Bourbeau: Quand vous parlez d'en haut, vous voulez dire
où, ça?
M. Mousseau: Au niveau de la société
régionale autant que de la société centrale.
M. Bourbeau: Hum, hum!
M. Mousseau: O.K. Si on veut être représentés
en haut, si on veut vraiment pouvoir répondre aux besoins de celui qui
crée l'emploi, ça veut dire la petite et moyenne entreprise,
parce que c'est elle qui crée l'emploi - je pense que votre projet de
loi va dans ce sens-là - ça veut dire d'aller vers ceux qui
créent des emplois pour en créer plus dans le futur. Bien, si on
veut rencontrer ça, il faut aller chercher les gens dans le champ qui
ont des petites et moyennes entreprises. Je pense que ceux qui sont dans le
champ qui ont de petites et moyennes entreprises, ils sont
représentés.
Quand on a fait notre mémoire et quand on vient en commission
parlementaire, nous autres, on travaille en fonction de dire: Le projet de loi
est perfectible, et on vient apporter des arguments. Vous me dites, à
l'heure actuelle, que le projet de loi est final de la manière dont vous
parlez et que, de toute façon, peu importent les représentations,
vous continuez à dire par où vous l'avez placé. Moi, je me
dis que vous me demandez de travailler et moi, je viens vous apporter ici des
arguments pour dire que ce que vous avez fait par rapport à ça,
on préférerait que ce soit différent. C'est la seule
chose. Je me dis que si on diminuait le nombre de grands représentants
en haut pour rentrer plus de gens des régions, bien, mon agriculture
serait représentée parce que, dans plusieurs régions du
Québec, l'agriculture est la première place dans
l'économie régionale. Puis, naturellement, dans certaines
régions, l'agricole va être le représentant. C'est
ça qu'on vous dit.
Si vous me demandez où je le vois parmi vos six, ça
devient compliqué parce que moi, les six, j'en créerais un autre
pour l'agriculture et j'en créerais un autre pour un autre, pour un
autre, parce que tout le monde veut avoir sa place en haut. Là-dessus,
ça devient bien compliqué. Tandis que moi, quand je le vois au
niveau des régions, je me dis: Si les régions, si c'est vraiment
les gens intéressés qui s'impliquent, eux autres vont monter dans
la structure puis ils vont se rendre. Là, on va avoir des gens
intéressés en haut. C'est principalement par rapport à
ça que je me dis que quand vous me demandez si c'est vraiment du
côté du patronat ou des syndicats, là, je me sens des deux.
Des fois, je me sens représenté par des gens de la FTQ et, des
fois, je me sens représenté par le Conseil du patronat, mais pas
tout le temps.
M. Bourbeau: Je ne voudrais pas que vous vous imaginiez qu'on ne
tient pas compte de ce que vous dites. Je n'essaie pas de vous dire que le
projet de loi est final. Il n'y a aucun projet de loi qui est final. Je n'ai
jamais vu encore, en 11 ans d'expérience parlementaire, un projet de loi
qui n'a pas été modifié en cours de route. C'est certain
que le projet de loi va être modifié. Maintenant, comment il va
l'être? Bien, on va décider ça à la fin de la
commission parlementaire, à la suite de ce qui s'est dit. Donc, dans ce
sens-là, ce que vous nous dites, ça ne tombe pas dans l'oreille
d'un sourd, d'autant plus que je viens moi-même d'une région qui
est passablement agricole, la Montérégie. Devrai-je ajouter:
d'autant plus que je suis moi-même un producteur agricole avec ma carte,
à part de ça!
M. Mousseau: Je suis très au courant.
M. Bourbeau: M. le Président, vous ne le saviez pas, hein!
M. le Président, je n'ai pas que des défauts.
Des voix: Ha, ha, ha! (10 h 30)
M. Bourbeau: Donc, c'est certain que le secteur agricole est un
secteur important et générateur d'emplois, qu'il devrait avoir un
mot à
dire dans l'organisation de ce que l'on propose. Maintenant, il reste
à voir comment ça pourra se faire. Nous avons prévu des
groupes au sein des sociétés régionales et de la
Société québécoise, des blocs, des blocs
employeurs, des blocs travailleurs. Il faudra voir comment Insérer le
monde agricole là-dedans. Évidemment, au niveau des
régions, ça peut être encore plus facile parce qu'il y a
des régions où l'agriculture est très importante. Donc,
ça va spontanément s'imposer que le monde agricole soit partie
intégrante de la société régionale. Au niveau de la
Société québécoise, là, il faudrait voir
aussi si le secteur agricole est suffisamment important dans l'économie
québécoise pour générer une place, deux ou trois au
sein du conseil de la Société. Il y a les grandes centrales
syndicates, bien sûr, qui prétendent être très
représentatives, etc. Alors, il faudra voir. L'UPA n'est quand
même pas un très gros syndicat par rapport à la FTQ, la
CSN, la CSD, etc., ou la CEQ.
Pour ce qui est des entreprises, vous avez bien raison de dire que la
PME est celle qui génère le plus grand nombre d'emplois. Il
faudra nécessairement que la petite et la moyenne entreprise soient
présentes au conseil d'administration de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Il
faudrait qu'elles soient représentées. M. le Président, je
pense qu'on a un peu couvert tout avec les députés de notre
formation politique et de l'Opposition. Moi, ça pourrait terminer mes
questions. D'ailleurs, je vois que le temps est terminé.
Le Président (M. Joly): Oui, déjà, M. le
ministre. Je vous remercie beaucoup, M. le ministre. Alors, à mon tour,
au nom des membres de la commission, il me fait plaisir de remercier MM.
Mousseau, Boulet et Tremblay. Ça me fait plaisir. Merci beaucoup.
Je demanderais maintenant à l'Institut de formation en
développement économique communautaire de bien vouloir prendre
place, s'il vous plaît.
Bonjour, messieurs. Il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue
à cette commission. Je pense que c'est M. Fontan qui est responsable.
Oui.
IFDEC
M. Fontan (Jean-Marc): Oui, Jean-Marc Fontan, donc, coordonnateur
de l'Institut de formation en développement économique
communautaire, et Bill Ninacs, qui est le président de l'IFDEC.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Alors, vous avez
environ une vingtaine de minutes pour nous exposer votre mémoire et, par
après, les parlementaires échangeront avec vous.
M. Ninacs (William): D'accord. Avant de commencer, M. le
Président, si c'était possible de parler un peu plus fort parce
que j'ai une surdité et je n'ai pas d'appareil auditif.
Le Président (M. Joly): Je vais demander à monsieur
qui s'occupe du son...
M. Ninacs: est-ce qu'il y aurait un appareil? oui, d'accord.
merci beaucoup.
Le Président (M. Joly): c'est correct. parfait. merci.
M. Ninacs: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Est-ce que ça va mieux,
là?
M. Ninacs: Oui, oui.
Le Président (M. Joly): Oui, parfait.
M. Ninacs: Je veux vous entendre si j'ai des questions à
vous poser.
Le Président (M. Joly): Oui, oui, c'est important
M. Ninacs: d'accord. alors, je vous rappelle la mission de
l'ifdec. on est un organisme sans but lucratif, un regroupement d'organismes et
d'individus qui a pour mission de faire la promotion du développement
économique communautaire et du développement local, en favorisant
à travers nos activités la concertation et le partenariat entre
les personnes concernées par le développement social.
On ne va pas lire notre mémoire. Je demanderais à
Jean-Marc de commenter ou de résumer au moins la première partie
du mémoire.
M. Fontan: Alors, notre mémoire est divisé en deux
parties. La première touche les fondements et les
présupposés théoriques de l'énoncé de
politique et la deuxième a plus trait à la définition qui
est donnée de la concertation et du partenariat.
Donc, dans un premier temps, si on revient rapidement sur les
fondements, le premier fondement ou le fondement central, ça touche un
point théorique selon lequel la crise actuelle entre la demande et
l'offre d'emploi est passagère et qu'à moyen terme, il va se
produire un réajustement structurel qui va permettre, en fin de compte,
de sortir de la crise et de redynamiser l'économie.
Les observations du malheureusement défunt Conseil
économique du Canada qui démontrent clairement que nous ne sommes
pas dans une crise conjoncturelle, mais que c'est une situation qui
résulte d'un processus de long terme, de dualisation de
l'économie entre deux grands types d'emplois et que la dualisation
entraîne une
polarisation des revenus, évidemment, entre des revenus
importants et des faibles revenus.
Le deuxième fondement qu'on retrouve à l'intérieur
de l'énoncé de politique est qu'une reprise va s'opérer
d'elle-même sans qu'une intervention ne soit nécessaire, un peu
comme ça se faisait dans l'ancien temps, une espèce de main
magique qui viendrait redresser la situation, donc, qu'il se
régénérerait une économie sans qu'on ait besoin de
définir une politique de maintien, conciliation, création
d'emplois ou qu'on aille vers une politique de plein emploi.
Les observations du ministre Tremblay et le plan de relance Johnson
consacrent tout au plus aux industries gagnantes et aux réglons
gagnantes du Grand Montréal une place qui fait qu'il va y avoir
effectivement un soutien qui va être accordé aux grandes
entreprises, mais qu'en est-il des entreprises qui ne font pas partie de ces
grappes? Est-ce qu'elles vont disparaître tout simplement et aussi, avec
elles, des milliers d'emplois?
Le troisième fondement qu'on retrouve, c'est qu'il faut
principalement s'attaquer au recyclage de la main-d'oeuvre active et, dans un
certain sens, on se dit que le système scolaire fonctionne bien de
lui-même. On n'a pas vraiment besoin de développer à
l'intérieur de la politique des éléments pour s'attaquer
à cette question-là. Par contre, la plupart des intervenants
sociaux voient bien qu'il y a des problèmes importants à
l'intérieur de la formation des jeunes et que l'arrimage ne se fait plus
entre, disons, la formation scolaire précollégiale et le
marché du travail. Nous voyons donc qu'il est important de s'adresser
à ces questions-là même si ça ne touche pas
directement le ministère en question.
Ces trois facteurs nous incitent à revendiquer une
stratégie gouvernementale au pluriel, donc qui ne miserait pas seulement
sur une stratégie gagnante pour redynamiser l'économie. Il nous
faut, d'une part, miser et consolider les stratégies gagnantes. Il nous
faut aussi développer des interventions pour soutenir la population et
les entreprises qui sont exclues de la catégorie gagnante. Il nous faut
miser sur une politique de plein emploi qui intègre de façon
harmonieuse toutes les parties du puzzle nécessaires à une
société qui veut offrir à sa population autre chose qu'une
situation d'exclusion ou de pauvreté. À cet égard, ce
qu'on observe, c'est qu'on veut redynamiser le tout à partir d'acteurs,
de partenaires, mais on oublie évidemment un acteur qui existe depuis
maintenant un siècle et demi au Québec, mais qui a toujours
été marginalisé, qui est le secteur communautaire.
On trouve important, à l'intérieur de
l'énoncé de politique, d'appuyer le travail qui est fait par ces
acteurs-là, que ce soit à travers des expériences
existantes ou des structures existantes qui ont été mises sur
pied dans les dernières années, comme les corporations de
développement communautaire ou les corporations de développement
économique communautaire, mais aussi à travers toutes sortes
d'expériences qui foisonnent actuellement au Québec en termes de
jumelage école-entreprise, de programmes d'entreprises d'insertion ou
d'autres types d'alternatives qui essaient de combiner des objectifs à
la fois socio-économiques pour aider les populations qui sont exclues
à réintégrer le marché du travail. Donc, ça
toucherait en gros les éléments que l'on voulait résumer
dans cette présentation d'énoncé, et nous sommes
prêts à répondre à vos questions. Merci.
M. Ninacs: II y a peut-être aussi la deuxième partie
du mémoire qui touchait beaucoup plus l'axe de concertation qu'on
retrouve dans l'énoncé de politique et, à ce
niveau-là, on a des préoccupations de deux angles. La
première touche, évidemment, notre membership et, à ce
niveau-là, vous avez reçu des présentations du mouvement
communautaire et populaire, de nombreuses présentations à notre
connaissance; on ne reviendra pas là-dessus. Sauf que ce qu'on trouve
important, c'est une certaine reconnaissance des structures de concertation que
le mouvement populaire et communautaire s'est déjà données
au niveau du développement et ça, en particulier, les
corporations de développement communautaire et les corporations de
développement économique et communautaire. Lorsqu'on dit que le
soutien des organismes de développement économique et
communautaire doit être soutenu, notre point de vue, c'est que ça
devrait tenir compte des deux sortes de structures et non pas seulement que des
CDEC.
Le deuxième commentaire par rapport à notre membership,
c'est que les corporations de développement économique et
communautaire devraient être partie prenante de la concertation qui est
souhaitée dans l'énoncé de politique et non pas juste leur
confier un rôle de sous-traitance. Il faut que ça aille plus loin
que ça, et on devrait les retrouver à part entière et
à part égale dans les mécanismes et dans les structures
qui seront développées.
Finalement, toujours à l'intérieur de cette même
préoccupation-là, c'est que les corporations de
développement communautaire et économique communautaire ont
développé une compétence dans des domaines précis
et c'est d'en tenir compte lorsqu'on décentralise des pouvoirs
sectoriels, et ça s'applique aussi à l'ensemble du mouvement
populaire.
Finalement, des préoccupations d'ordre plus
général... il y en a deux. La première, c'est que la
concertation n'est pas exclusivement ce qui fait consensus. Il faut être
capable de tenir compte d'avoir une certaine souplesse dans les programmes pour
tenir compte de l'innovation, des choses un peu dérangeantes de
l'entrepre-neurship local qui, entre guillemets, ne «fitte» pas
dans les critères qui sont souvent relative-
ment rigides. l'autre point, pour être capable d'arriver à
un développement plus global, il faut la nécessité d'un
arrimage avec les autres structures de concertation régionale. c'est
important. on parle ici des structures prévues dans le cadre du
développement régional que le ministre picotte a annoncées
il n'y a pas tellement longtemps, mais aussi des autres structures qui ont un
impact sur le développement dans certaines régions. on peut
penser à la culture, à la santé et aux services sociaux,
etc. lorsque le plus gros employeur dans une ville comme victoriaville,
d'où je viens, est l'hôtel-dieu d'arthabaska, c'est important de
tenir compte de la santé et des services sociaux lorsqu'on parle du
développement local.
Ça terminerait un peu le résumé de notre
mémoire.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Alors, M. le
ministre, s'il vous plaît.
M. Bourbeau: M. le Président, nous sommes en
présence d'un mémoire relativement court qui, en fait, ne traite
que de deux points: l'analyse et le partenariat. Quant à l'analyse, on
nous demande de reconsidérer l'analyse. L'Institut est en
désaccord avec le diagnostic, l'analyse et les objectifs de
l'énoncé. Pour ce qui est du partenariat qui est envisagé,
on nous demande de reconsidérer également le partenariat pour y
inclure le secteur communautaire.
Je pense que j'ai résumé assez rapidement votre
mémoire. Alors, on va traiter des deux points qui sont soulevés
forcément, surtout le partenariat. Vous vouliez qu'on augmente la
participation, enfin, qu'on élargisse la participation plutôt
à la Société québécoise de
dévelope-ment de la main-d'oeuvre en y incluant le secteur
communautaire. Quels organismes du secteur communautaire visiez-vous plus
particulièrement?
M. Ninacs: D'une part, les structures de concertation au niveau
du développement régional, du développement local.
Là, je pense aux corporations de développement communautaire et
aux corporations de développement économique et communautaire qui
sont les membres chez nous, pour commencer. Après ça, il y a les
autres structures de concertation qu'on peut appeler plus sectorielles qui
peuvent être regroupées, par exemple, sous la bannière de
l'ICEA, l'Institut canadien d'éducation des adultes, du MEPACQ et des
autres structures. Après ça, il y a des regroupements
d'organismes comme tels. Alors, lorsqu'on parle d'induré le mouvement
communautaire et populaire, on parle de ces structures dans notre tête
à nous autres.
M. Bourbeau: Mais ça, c'est des voeux pieux, mais en
pratique, quelle formule proposez-vous pour choisir les représentants du
milieu communautaire? Comment devrait-on s'y prendre? Mettre les noms dans un
chapeau et tirer, faire une loterie ou...
M. Ninacs: le mouvement communautaire, en tout cas, si je me fie
à l'expérience du ministère de la santé et des
services sociaux qui a obligé récemment une concertation qui
n'avait pas heu antérieurement, qui a forcé des organismes
à ne pas juste se replier sur eux autres mêmes, de se
requestionner, de regarder c'était quoi qui était leur lien avec
le développement dans ie milieu, le ministère, lui, a
laissé la porte ouverte un peu au communautaire jusqu'à un
certain point, il a dit: définissez-vous et après ça venez
nous voir pour nous dire qui vous êtes. c'était un peu plus
restrictif. le ministère de la santé et des services sociaux dans
certaines régions n'a voulu accepter que les organismes financés
par lui-même.
Cependant, cela étant dit, dans toutes les régions,
à ma connaissance, il y a eu des concertations régionales. Donc,
les organisations elles-mêmes ont été probablement les
mieux placées pour définir qui devrait les représenter et
à quel niveau, en tenant compte des compétences très,
très précises qui sont formées à un niveau local.
Je pourrais donner l'exemple de Victoriaville où il y a eu des
interventions assez nombreuses avec l'intégration de personnes
handicapées dans des structures d'entreprises, des coopératives
de travail, des choses semblables. On ne retrouvera pas nécessairement
ce même genre d'expertise là ailleurs. Mais possiblement que c'est
quelque chose qui manquerait au niveau local, régional et donc, le
communautaire en tiendrait compte pour voir qui devrait les représenter.
(10 h 45)
La représentation au niveau du développement local est
toujours un problème. C'est un problème et c'est là
où je reviens avec la question de souplesse à l'intérieur
des programmes. On ne peut pas déterminer d'avance qui est le meilleur
acteur lorsque c'est la population qui, elle-même, se prend en main sur
certaines choses spécifiques qui sont propres à elle. Comment y
arriver? Le ministère de la Santé et des Services sociaux offre
peut-être certaines pistes intéressantes dans la manière
avec laquelle il a procédé à sa concertation.
M. Bourbeau: Vous suggérez qu'on organise un
collège électoral régional pour élire les gens qui
seraient les membres du conseil d'administration des sociétés
régionales de développement de la maln-d'oeuvre, comme on a fait
lundi soir dernier dans les hôpitaux et les CLSC.
M. Ninacs: ...pas tout compris, M. le ministre. Je m'excuse. Ma
surdité...
M. Bourbeau: Alors, j'ai simplement posé
comme question: Est-ce que vous souhaitez que le processus qu'on a
utilisé lundi soir dernier pour élire les membres des conseils
d'administration des hôpitaux et des CLSC soit repris pour élire
les membres du conseil de la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre?
Une voix: Non.
M. Ninacs: Je parle exclusivement des sièges
réservés pour le mouvement populaire et communautaire à
l'intérieur des régies régionales. A ma connaissance, ces
structures-là n'ont pas fait l'objet d'un vote par la population et ont
fait l'objet d'une concertation régionale ou sous-régionale,
selon le cas. Ces personnes-là sont ni plus ni moins nommées
après avoir été élues par leur collège
électoral, si je peux parler ainsi. C'est ce processus-là.
Excusez.
M. Bourbeau: À l'exception des articles du projet de loi
qui traitent de fa participation des partenaires, les articles 5, 6 et 8,
est-ce que vous êtes d'accord avec le reste du projet de loi ou si vous
êtes en désaccord avec le reste du projet de loi?
M. Fontan: On est en accord avec le projet de loi, sauf qu'on
aimerait voir un arrimage de la politique qui est amenée avec d'autres
politiques plus structurantes au niveau de l'emploi au Québec. Dans
l'ensemble, on trouve que c'est un énoncé positif qui, tant par
sa volonté de rapatriement de pouvoirs que par celle de faire, si vous
me permettez l'expression, le ménage dans les programmes existants, est
intéressant.
Par contre, ce que l'on déplore, c'est que travailler seulement
en ciblant seulement une population gagnante qui, déjà, est plus
ou moins bien équipée pour travailler en délaissant les
exclus, à ce moment-là, c'est se donner quel type de projet de
société pour le Québec? C'est ça qu'on reproche
à l'intérieur des objectifs initiaux de l'énoncé de
politique. Par contre, les éléments de stratégie qui sont
définis pour s'attaquer à la population gagnante, nous n'avons
pas cru bon réagir à ces derniers parce qu'on n'était pas
nécessairement bien placés pour comprendre tous les
mécanismes et les finalités qui étaient en jeu à
travers les instruments que vous étiez en train de
développer.
Il y a d'autres organismes qui sont venus présenter... qui ont
beaucoup plus d'expérience que nous pour faire ce genre d'expertise.
M. Bourbeau: Bon, aussi bien profiter de votre passage, puisque
vous êtes un organisme qui est actif dans la formation de la
main-d'oeuvre, l'Institut de formation en développement
économique communautaire, pour vous poser une question qui porte sur la
formation, d'autant plus que si on ne le faisait pas, ça
décevrait les observateurs du ministère de l'Éducation et
de l'Enseignement professionnel qui prennent des notes ici puis qui sont
intéressés à ce qu'on parle d'eux un peu.
J'avais le goût de vous demander: Est-ce que vous rencontrez des
problèmes quand vous vous occupez de formation, d'accessibilité
à la formation professionnelle à cause des prérequis qui
sont imposés par le ministère de l'Éducation ou
l'Enseignement supérieur en ce qui concerne l'accessibilité
à la formation, les prérequis académiques, j'entends?
M. Fontan: nous travaillons principalement avec la
clientèle de notre organisme. ce sont des intervenants et intervenantes
sociaux qui travaillent dans des corporations de développement
économique communautaire ou des corporations de développement
communautaire. donc, nous sommes tous un groupe de ressources techniques pour
les intervenants sociaux. par contre, si je comprends votre question en disant:
est-ce que ces gens-là rencontrent des problèmes lorsqu'ils
travaillent dans le cadre de l'employabilité? avec le type de
problème que vous avez mentionné, oui, effectivement. ils sont
tout le temps confrontés à ces espèces de critères,
d'exigences qui sont présents, qui font que leur montage de formation
est handicapé par toutes ces restrictions qui sont mises de l'avant par
les ministères. par exemple, le simple cas de nécessiter un
secondaire v pour avoir accès à une formation. ça, c'est
une réalité courante que l'on retrouve dans ces organismes.
M. Bourbeau: Y a-t-il d'autres contraines d'accessibilité
qui vous viennent à l'esprit?
M. Ninacs: ...au niveau invidivuel, pour les personnes qui
suivent des formations individuellement. Il y en a certainement au niveau de la
durée des programmes de formation.
En ce qui concerne les personnes handicapées, d'une
façon...
M. Bourbeau: Le nombre d'heures de cours, je veux dire.
M. Ninacs: c'est qu'il y a deux choses. c'est que la personne qui
doit s'inscrire - je parle plus au niveau des programmes de formation - pour
une certaine durée et souvent, les personnes ont de la misère
à penser juste pour une durée de quelques semaines d'avance.
elles ont de la misère à penser en fonction de six mois ou de
huit mois en termes de planification. les programmes cependant sont
«gearés», en bon français, sur une période un
peu plus prolongée et pas nécessairement adaptés à
la personne qui, elle, doit s'inscrire à un programme. c'est dans ce
sens-là que je voulais le dire. je pense plus particulièrement
à la clientèle des personnes
handicapées où les exigences en termes de se rendre comme
ici ce matin ou être dans un autre programme de formation ou ailleurs. On
tient peu compte de tous les autres facteurs qui peuvent entrer en ligne de
compte. Je présume que ces mêmes problèmes-là
doivent se répercuter sur d'autres clientèles, entre guillemets.
Ça peut être les coûts additionnels qui sont amenés
par le fait de se déplacer en fauteuil ou autre, le problème
d'équipement qui soulevait un manque: appareils auditifs ou rampes
d'accessibilité. Ça peut être le temps et l'énergie
pour se rendre qui sont différents pour une personne handicapée
que pour d'autres personnes. Donc, dans ce sens-là, je présume
que pour une personne qui est exclue du marché du travail ou en
chômage, ces mêmes phénomènes-là
s'appliquent.
M. Bourbeau: Vous êtes le président de l'Institut,
hein?
M. Ninacs: Je n'ai pas entendu, M. le Président.
M. Bourbeau: Vous, vous êtes le président de
l'Institut?
M. Ninacs: Je suis président? Oui. C'est ça,
oui.
M. Bourbeau: Bon, ça va, M. le Président. ' Le
Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le ministre. Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous plaît!
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je vous salue, M.
Fontan et M. Ninacs. J'avais déjà eu l'occasion de vous
rencontrer sur le terrain, et vous avez pendant bien longtemps oeuvré
dans le secteur des Bois-Francs, pendant près de 20 ans, je crois.
M. Ninacs: Oui, c'est ça, depuis le début des
années soixante-dix. Oui, de Victoriaville. C'est ça.
Mme Harel: Alors, là, vous êtes installé
à Montréal?
M. Ninacs: Non, non, pas du tout.
Mme Harel: Ah! vous êtes toujours à
Vlctoriaville?
M. Ninacs: Oui, je suis toujours à Victoriaville.
Mme Harel: Mais l'Institut est sur la rue Saint-Paul à
Montréal.
M. Ninacs: L'Institut, c'est un organisme québécois
avec des demandes partout en provin- ce, dont la Corporation de
développement communautaire des Bois-Francs, dont je suis le responsable
de la recherche. Je ne suis plus coordonateur de la Corporation de
développement communautaire des Bois-Francs. À l'intérieur
de la Corporation et membre de l'Institut, moi, je suis
délégué dans les structures démocratiques.
Mme Harel: Nous avons reçu d'ailleurs la Corporation des
Bois-Francs cette semaine. Dans le mémoire que vous nous
présentez, vous nous partez également de la polarisation des
revenus et de la dualisation du marché du travail. Ce sont là
deux aspects importants sur lesquels le ministre a glissé rapidement,
mais j'aimerais revenir avec vous sur la question de la polarisation des
revenus. À l'occasion du 8 mars, il y a eu d'ailleurs beaucoup
d'information sur cette réalité nouvelle d'une diminution de la
participation des hommes au marché de l'emploi bien
rémunéré ou du marché de l'emploi tout court. Le
chômage augmente chez les hommes et une participation accrue des femmes,
mais à des salaires inférieurs.
Alors, combinée, cette situation-là nous donne comme
résultat la pauvreté croissante d'une bonne partie des familles
du Québec et, quant à la dualisation du marché du travail,
vous nous rappelez que l'image entre les emplois bien
rémunérés et les emplois plutôt précaires,
mal rémunérés... Et 40 % des nouveaux emplois au
Québec depuis un an ont été créés à
temps partiel.
Hier, une personne qui, dans l'assistance, a particité à
nos travaux, me disait en fin de journée un peu sa déception de
voir qu'on ne pariait que de structures dans cette commission. Elle m'en
faisait un peu le reproche et d'ailleurs, moi-même, je me faisais le
reproche. On n'en est quand même pas encore à l'examen article par
article du projet de loi. On y arrivera évidemment lorsqu'on
étudiera le projet de loi 408 et on étudiera la structure, mais
à ce stade-ci, on devrait vraiment plus en être au niveau des
objectifs, n'est-ce pas, et après, ajuster nos structures en
conséquence pour atteindre les objectifs qu'on se fixe.
Dans votre mémoire, il y a cette idée que l'approche
curative... En fait, ce que vous constatez, je pense, de
l'énoncé, c'est une approche curative. Vous en donnez quelques
exemples dans votre mémoire et vous plaidez, vous, pour une approche
préventive qui s'adresserait à l'ensemble de la population
active. J'aimerais peut-être vous entendre sur cette question-là.
Vous savez qu'il y aurait exclusion des personnes assistées sociales.
Les personnes assistées sociales se verraient offrir les mesures
d'employabilité qui sont actuellement gérées par les CTQ
et ça resterait des réseaux différents. Alors, j'aimerais
vous entendre sur les conséquences que ça peut avoir.
M. Forrtan: Fondamentalement, vous les avez fait ressortir, ces
conséquences-là. C'est que, effectivement, ça va avoir une
très forte augmentation sur le taux de pauvreté au Québec.
L'approche que nous, on préconise, comme vous l'avez mentionné,
c'est de revenir à des objectifs qui sont plus sociaux
qu'économiques à l'intérieur de l'énoncé. En
termes de prévention, ce qui nous paraît important, c'est
d'arriver rapidement à des mesures à court terme pour faire en
sorte que la population reprenne confiance à l'emploi, ce qui n'est pas
une situation que l'on retrouve présentement. C'est une situation, au
contraire, de perte de confiance dans le projet économique
québécois où la population a plus l'impression de se voir
retirer un droit qui lui avait été consacré historiquement
et qui, là, disparaît de jour en jour, au fur et à mesure
que des grandes entreprises, pour ce qu'il en reste, et maintenant, des petites
et moyennes entreprises ferment.
Donc, c'est pourquoi on a mis cette première section dans notre
énoncé qui visait à revoir les objectifs
généraux. Parce que si on ne s'attaque pas à cette
question-là, on va consacrer, et là, structurellement, cette
société dualisée et on va faire en sorte qu'une partie de
la population québécoise devienne, à toutes fins
pratiques, à jamais exclue.
Maintenant, ça va jusqu'à reproduire cette
exclusion-là au sein du système scolaire qui, lui, produit, comme
on le sait très bien, de 30 % à 35 % de décrocheurs. C'est
là que je ne comprends pas les prérequis ou les fondements
théoriques de l'énoncé qui nous disent que, bon, on a,
d'une part, un manque au niveau de la jeunesse. On ne se reproduit plus, entre
guillemets, au Québec. Donc, ça m'apparaît, cette
population qui est dans nos écoles, comme une perle rare. On en a
besoin. D'un autre côté, on se dit: Ce n'est pas plus grave que
ça si 30 % ou 40 % de cette population-là décroche en
cours de route. Mais d'un autre côté, on nous dit: On est
prêts à dépenser des millions pour former la population
qui, elle, est présentement en train de quitter l'emploi pour le
non-emploi parce qu'on se dit: II y a des compétences, là. Il
s'agirait juste de donner un coup de pouce pour leur permettre de redevenir
extrêmement compétitives à l'intérieur du
marché de l'emploi. Donc, c'est là que j'ai de la
difficulté avec l'arrimage théorique qui est fait et, si on ne
revoit pas cela, bien, on va effectivement consacrer la société
à deux vitesses et on ne va pas se donner les outils pour refaire un
Québec d'inclusion et non pas d'exclusion.
Mme Harel: Dans votre mémoire, on retrouve un chiffre
très éloquent: c'est l'augmentation du nombre de personnes sans
emploi aptes au travail depuis 17 ans. Vous nous dites qu'en 1971, il
s'agissait de 36 % des personnes sur l'aide sociale qui étaient aptes au
travail. En 1988, il s'agit de 87 %. Je pense que c'est un peu trop
élevé, par ailleurs. J'allais vous demander où vous avez
pris vos chiffres. Les derniers chiffres que j'ai, moi, sur Montréal,
c'est 85, 8 %. Mais Montréal a une situation, justement, plus difficile
en regard de cela parce qu'il y a des personnes qui perdent leur emploi en
région, vident les régions et descendent à
Montréal. Alors, c'est comme 85, 8 %. On est autour des 86 %, mais c'est
pour Montréal. Pour l'ensemble du Québec, le ministre va
certainement nous donner les chiffres. Mais de toute façon, convenons,
que ce soit 80 %... Moi, je pense que c'est autour de 80 %, 80, 4 %...
Une voix: 78 %.
(11 heures)
Mme Harel: 78 %? Autour de 78 %. Quoi qu'il en soit, c'est le
double ou presque, 72 %. C'est un peu plus que le double. Le chômage est
un peu plus que le double de 1971. Quel était le chômage en 1971?
Il ne faisait pas 5 %. Le chômage, en 1974, dans les années
où ç'a commencé à poser des inquiétudes, il
était autour de 5, 8 %. Il est monté à 6, 5 %. On
n'était pas à 7 %, et on était bien inquiet. finalement,
vous savez, les courbes se suivent. s'il y a plus de personnes sans emploi
aptes au travail, s'il y en a le double sur l'aide sociale, c'est parce qu'il
n'y a pas loin de plus que le double du chômage. vous savez, dans le
discours sur le budget du ministre des finances, au mois d'avril dernier, le
ministre annonçait qu'on allait se sortir de la récession dans
les six mois, et il annonçait, pour les trois prochaines années,
le maintien du taux de chômage à 11, 5 %. il annonçait que
ça allait bien aller et que le chômage allait rester à 11,
5 %.
Ce qu'il faut constater, c'est que chaque cycle de récession
économique nous fait monter d'un palier le taux de chômage. En
1982-1983, on est passé à 9 % à la fin de la
récession et on est resté là. Maintenant, on va passer
à 11 % et on va rester là. C'est dans ce sens-là qu'on
peut dire que la population a perdu confiance. Elle pense maintenant que c'est
des cycles qui vont déqualifier au fur et à mesure des nouveaux
emplois, de la concurrence de la mondialisation et que ça va, comme une
sédimentation, s'entasser.
M. Forrtan: Ce qui est extrêmement inquiétant, c'est
que non seulement ça augmente au niveau des gens qui sont aptes au
travail dans la situation de bien-être social, mais c'est qu'on a tous
les phénomènes de marginalité qui sont en croissance, que
ce soit l'économie informelle au Québec, que ce soit toute
l'économie au noir. Là, quand on parle d'économie au noir,
si encore c'était l'économie au noir italienne où on a
développé des coopératives de travail pour produire des
biens qui vont sur le marché, même si elles ne sont pas
déclarées au niveau de
l'État, mais non. Ce n'est pas de cette
économie-là. C'est de la prostitution, c'est de la drogue, c'est
du recel, c'est du vol.
Donc, c'est ça, maintenant, si on veut obtenir un revenu. C'est
ce vers quoi on tend. Ce sont les nouvelles portes d'entrée à la
société de consommation. Là, on peut se poser encore...
revenir aux fondements sociaux de l'énoncé. Jusqu'où
est-ce qu'on va avoir une proposition acheteur dans la population à
travers l'énoncé qu'on a ici? Est-ce que la population va se
retrouver à l'intérieur de cet énoncé, pour se
dire: Oui, la nouvelle usine ultra haute technologie, il y a une place pour moi
à l'intérieur de cette usine, quand on sait très bien que
les nouvelles usines sont très, très peu employantes de
main-d'oeuvre môme si elles sont spécialisées.
Donc, on ne voit pas de solution pour de la création d'emploi. Si
on veut former la population, (I faut de l'emploi. Deuxièmement, si on
veut former la population, il faut une variété d'emplois, pas
seulement des emplois de haute technologie. Il faut aussi des emplois qu'on
peut appeler bas de gamme, qui vont pouvoir permettre à des gens qui ont
peu de spécialisation d'avoir accès à un revenu
décent. Or, on n'a pas ce genre d'élément de
réponse.
Mme Harel: Finalement, ce qui est préoccupant, c'est qu'on
ne sait plus vraiment où est la population. Là, le ministre va
nous dire qu'il y a moins de bénéficiaires d'aide sociale cette
année en comparaison à la fin de la récession de 1984.
Effectivement, c'est exact. À ce moment-ci, il y en a quelques dizaines
de milliers de moins, malgré que ça augmente avec une
régularité constante depuis un an. Mais on a le même taux
de population inactive maintenant en proportion avec ce qu'on avait en
1984.
Alors, donc, les gens ne travaillent pas plus. La population inactive
est restée la même. Alors, où est-ce qu'ils sont?
Peut-être dans le travail au noir. Où est-ce qu'ils sont,
finalement? Peut-être aussi dans la petite criminalité. Il y a,
finalement, tout un secteur qui va échapper au contrôle. Est-ce
que tout ça ce n'est pas préoccupant, finalement? Hier - je ne
lui en veux pas là - il nous disait que ça allait bien, qu'il y
avait 10 000 chômeurs de moins par rapport au mois passé, sauf que
vous savez comment, maintenant, on se satisfait des statistiques
d'amélioration. C'est que les gens se découragent, et ils ne
s'inscrivent plus à la recherche d'emploi. Alors, la population inactive
augmente, mais la statistique du chômage, elle, reste à l'abri de
ça, parce que la statistique du chômage ne calcule que les
personnes inscrites à l'assurance-chômage ou en recherche
d'emploi.
M. Fontan: Je pense que vous avez bien résumé la
situation telle qu'elle est présentement.
Mme Harel: Alors, écoutez, je vais vous remercier pour
votre participation, remercier l'Institut. C'est utile ce que vous faites, ce
que vous nous rappelez. Je suis convaincue que le ministre va en prendre bonne
note, comme toute la commission, comme moi-même. On va certainement avoir
l'occasion, dans un autre forum, lors de l'examen du projet de loi, de modifier
les structures en conséquence. Je le souhaite.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la
députée. M. le ministre, vous avez quelques mots.
M. Bourbeau: Je voudrais faire une mise au point. Je ne veux pas
faire de blâme à la député de Hochelaga-Maisonneuve;
elle a ses arguments, et on les écoute avec beaucoup d'attention, sauf
que la députée de Hochelaga-Maisonneuve a une habitude qu'elle a
développée et qui me préoccupe un peu. C'est qu'elle
affirme des choses et, arguments à l'appui, elle avance des chiffres.
Nous, on est là béats, on écoute ces chiffres et on
conclut que ça doit être très vrai puisqu'elle le dit. Je
me rends compte, M. le Président, de plus en plus, que la
députée de Hochelaga-Maisonneuve avance des choses et des
chiffres qui ne sont pas souvent conformes à la réalité.
Je vous donne des exemples. Elle nous a dit, tout à l'heure, que le taux
de chômage a doublé depuis 1971, que c'était 5 % en 1971 et
qu'aujourd'hui, c'est 10 %. Évidemment, ça frappe beaucoup et
ça nous impressionne.
Mme Harel: Ce n'est pas 10 % aujourd'hui.
M. Bourbeau: Mais quand on regarde la
réalité...
Le Président (M. Joly): 11 %.
Mme Harel: Ce n'est pas 11 % aujourd'hui, c'est 12 %.
Le Président (M. Joly): 12 %.
M. Bourbeau:... en 1971, le taux de chômage n'était
pas de 5 %, comme l'a affirmé la députée, il était
de 7, 3 %. Donc, ça affaiblit l'argument. Moi, j'aimerais que la
députée de Hochelaga-Maisonneuve fasse plus attention à
ses chiffres.
Mme Harel: Alors, est-ce que le ministre peut me donner...
M. Bourbeau: Mais là, je vais terminer, M. le
Président.
Mme Harel:... le taux de chômage en 1974?
M. Bourbeau: Oui, en 1974, c'était de 6, 6 %, ce
n'était pas 5 %.
Mme Harel: Qu'il me donne l'année dans les années
soixante-dix juste avant 1973.
M. Bourbeau: Avant 1973, c'était 1972, et c'était
7, 5 %.
Mme Harel: Et 1973? M. Bourbeau: 6, 8 %.
Mme Harel: Bon.
M. Bourbeau: alors, voyez-vous, on est loin de 5 %. c'est quand
même...
Le Président (M. Joly): Toute une différence.
Mme Harel: On est dans... M. Bourbeau: II faudrait
être... Mme Harel: Oui.
M. Bourbeau: Ce que je demande, c'est d'être plus rigoureux
dans les chiffres.
Mme Harel: Mais on est loin du 10 %, maintenant.
M. Bourbeau: Je ne nie pas ça, M. le Président, ce
que je dis...
Mme Harel: Alors, si c'est 6, 8 % et qu'on multiplie par deux, on
est bien dans le 12, 5 % que l'on a maintenant.
M. Bourbeau: Oui. Mais pourquoi affirmer 5 % quand ce n'est pas 5
%? Ne dites rien du tout.
Mme Harel: Oui. Mais vous, vous venez de nous dire qu'on est
à 10 %, maintenant.
M. Bourbeau: Bien, ça dépend. Vous demandez quelle
année?
Mme Harel: Maintenant, au moment où on se parle.
M. Bourbeau: Je vais vous dire ça, j'ai tout ça
ici, les taux de chômage. Quel mois? Quel mois que vous voulez?
Mme Harel: M. le ministre...
M. Bourbeau: On était à 11, 9 % en février,
11, 8 % en janvier, et je peux vous les donner en 1991 aussi. Il n'y a pas de
problème, on peut vous donner chaque mois. Mais il ne faut pas affirmer
des choses.
Deuxièmement, un autre exemple. Tout à l'heure, la
députée de Hochelaga-Maisonneuve a dit qu'en Allemagne, on
dépensait 8 % du salaire, de la masse salariale pour la main-d'oeuvre.
Je n'ai pas le chiffre, mais je vais le vérifier.
Mme Harel: Certainement.
M. Bourbeau: Je vais le vérifier et je le dirai à
la députée de Hochelaga-Maisonneuve. En parlant de ça,
hier soir, M. le Président, la députée de
Hochelaga-Maisonneuve vous a affirmé, tout de go, que, depuis la
réforme de l'aide sociale, le nombre de personnes qui utilisent des
mesures d'employabilité n'avait pas changé. Avant la
réforme, vous vous souvenez que ce n'était que les moins de 30
ans qui avaient accès aux mesures et, maintenant, c'est tout le monde et
il n'y a pas plus de gens. je vais vous donner les chiffres, m. le
président. je prends le mois de décembre de chaque année,
et je vais retourner jusqu'en 1984. en 1984, il y avait 17 000 personnes -
j'arrondis le 17 000 et quelques cents - qui utilisaient les mesures
d'employabilité; en 1985, 30 000, en décembre; en 1986, 25 000;
en 1987, 24 500; en 1988, 22 000 - là, on arrive à la
réforme, m. le président - en 1989, 19 782. alors, là, la
réforme est venue en vigueur, vous vous souvenez, au mois d'août.
il y a eu une année de transition et là, la réforme a pris
effet. alors, en décembre 1990, c'était 37 900, presque 38 000.
là, on a doublé sur l'année précédente. en
décembre 1991, c'était 50 000. alors, de venir affirmer qu'il n'y
a pas eu de changements, c'était gros un peu. évidemment,
hier...
Mme Harel: Oui.
M. Bourbeau:... je n'ai rien dit parce que j'ai attendu d'avoir
les chiffres. Là, je les ai.
Mme Harel: Mais...
M. Bourbeau: Je voudrais seulement demander à la
députée de Hochelaga-Maisonneuve d'être un peu plus
rigoureuse quand elle affirme des choses parce que ça nous oblige
continuellement... À l'avenir, je vais la contredire sans avoir les
chiffres.
Mme Harel: M. le Président...
Le Président (M. Joly): Allez, Mme la
députée.
Mme Harel:... je vais demander au ministre qu'il soit aussi,
comment dire, attentif à ne pas gonfler les chiffres qu'il nous donne.
En 1985, lorsqu'il y a eu un changement de gouvernement, lui, il nous dit qu'il
y avait 30 000 participants dans des mesures.
M. Bourbeau: Décembre 1985.
Mme Harel: Voilà. En décembre 1985, au moment
même où se situe le changement de gouvernement, il y a 30 000
participants dans des mesures et ces mesures ne s'adressent qu'aux
moins de 30 ans.
M. Bourbeau: C'est ça.
Mme Harel: Avec sa réforme en 1990, cinq ans plus tard, il
élargit l'offre des mesures à 225 000 nouveaux ménages.
Alors, il fait passer de 80 000 ménages qui avaient accès aux
mesures à trois fois plus de ménages. Normalement, les mesures
auraient dû tripler. Il élargit les mesures et, plus encore, il
introduit une réforme où, pour maintenir son niveau d'aide de
dernier recours, il faut participer à une mesure. Si on n'y participe
pas, on a moins. Et il n'élargit pas son offre de mesures, il ne la
triple pas, il ne la double pas. Ce qu'il nous dit maintenant, c'est que
l'année qui a suivi sa réforme. II y a eu 37 900 participants,
c'est-à-dire 7900 et, là, il nous parle de 50 000. Moi, je vais
vérifier ça, les 50 000, parce que ce ne sont pas les chiffres
que j'ai et je veux voir si derrière ces 50 000 il ne met pas PAIE
là-dedans. On va vérifier ce qu'il y a comme autres
programmes.
Mais quoi qu'il en soit, avec ses chiffres de 30 000 en 1985, même
en prenant ses chiffres - et encore là je vous le dis, M. le
Président, je vais avoir besoin de les vérifier parce que 50 000,
ça ne m'apparaît pas conforme aux chiffres que j'ai chaque mois -
ce qui est vraiment incompréhensible, c'est qu'il puisse se satisfaire
du fait qu'il ait élargi à au-delà de 225 000
ménages dans les mesures et qu'il y en aurait à peine...
Ça ne correspond même pas, je pense, à 20 % d'augmentation
de mesures et, pourtant, il a augmenté le nombre de ménages qui
doivent y participer juste s'ils veulent maintenir leurs prestations.
M. Bourbeau: M. le Président, les chiffres sont de
décembre. J'ai comparé décembre d'une année
à l'autre. M. le Président, la députée de
Hochelaga-Malsonneuve tente de noyer le poisson. Je n'ai pas dit qu'il y a
assez de participants. Il devrait y en avoir 200 000 dans un monde
idéal. Tout ce que j'ai dit, c'est que l'affirmation qu'elle a faite
hier était inexacte à l'effet qu'il n'y avait pas plus de monde
aujourd'hui dans les mesures qu'il n'y en avait avant la réforme. Ce
n'est pas exact. Si on prend le mois de décembre 1985, c'est
passé de 30 000 à 50 000.
Mme Harel: Alors, je vais prendre le mois de mars.
M. Bourbeau: Regardez quelque mois que vous voulez,
là.
Mme Harel: Le ministre sait très bien qu'à chaque
mois, ça varie...
M. Bourbeau: Oui, oui, je peux prendre mars. Mars de quelle
année, alors?
Mme Harel:... et que ça varie considérablement. Il
sait très bien que ce qu'il calcule...
M. Bourbeau: Alors, je vais vous le donner, le mois de mars. Vous
le voulez? Bien non, mais...
Mme Harel:... ce sont les étudiants qui suivent des cours
scolaires.
M. Bourbeau: Tout est compris là-dedans. C'est une
question de principe, M. le Président. Je demande à la
députée de Hochelaga-Malsonneuve, quand elle affirme des choses,
de les affirmer chiffres à l'appui, sans ça, on va être
obligé continuellement de nier ce qu'elle dit et ça va donner
lieu à des discussions inutiles.
Mme Harel: Moi, je vais vous dire, M. le Président,
j'apprécie comme ça... Le ministre...
M. Bourbeau: II écoute.
Mme Harel:... fait des calculs qui peuvent ensuite me servir pour
le questionner...
M. Bourbeau: Très bien.
Mme Harel:... sur ce qu'il lui reste encore à faire.
M. Bourbeau: Mais utilisez les bons chiffres parce qu'à ce
moment-là, M. le Président, les arguments deviennent très
mous quand Ils sont épaulés par des chiffres semblables.
Voilà. J'ai fait ma mise au point, M. le Président.
Le Président (M. Joly): M. le ministre, Mme la
députée...
Mme Harel: Je ne sais pas si nos invités voudraient
conclure avant de quitter.
Le Président (M. Joly): Est-ce que vous aimeriez ajouter
quelque chose?
M. Fontan: Oui. Une bataille de chiffres, c'est très
intéressant, mais ça touche du monde en dernière instance,
et du monde qui se retrouve dans la pauvreté. Alors, c'est très
intéresssant comme débat, mais si c'était un débat
entre 1, 5 % et 2 % de chômage, je serais très content de ce type
de débat-là, mais quand c'est du 12 %, je trouve ça
extrêmement grave et extrêmement conséquent pour la
population, parce que c'est de la pauvreté. C'est du monde qui vit de
plus en plus dans l'isolement et qui n'a plus rien à faire d'un projet
de société québécoise. Ça, ça me
choque énormément. J'espère que vous allez ramener cette
bataille de chiffres à l'intérieur
d'objectifs sociaux qui Vont satisfaire la population
québécoise. Merci.
Le Président (M. Joly): Mme la députée.
Mme Harel: M. le Président, j'ai un collègue qui
disait hier: Les statistiques sont aux politiciens ce que les lampadaires sont
aux chiens. Ça sert à s'accoter, mais pas à
éclairer.
M. Fontan: Voilà.
M. Bourbeau: Alors, aussi bien de ne pas les utiliser, M. le
Président, quand elles ne sont pas bonnes.
Mme Harel: Le ministre les utilise abondamment, alors...
M. Bourbeau: Moi, je prends les bons chiffres.
Le Président (M. Joly): Alors, je pense que, tout au long
de cette commission, on est en train de faire la preuve de la différence
entre un chômage structurel et conjoncturel. Je pense que tout ça
mis de l'avant va sûrement aider à faire progresser cette
commission. Alors, vous voulez ajouter quelque chose, M. Ninacs?
M. Ninacs: Oui, brièvement. C'est que j'ai eu l'occasion,
dans les derniers mois, de faire un peu le tour du Québec comme
commissaire, moi aussi, d'une autre commission et j'ai eu l'occasion de
discuter avec des personnes qui sont en chômage, assistées
sociales, bas salaries, etc. Le souhait est un désir de participer
à part entière dans leur propre développement et non pas
nécessairement d'être à la merci de l'appareil
gouvernemental, mais certainement d'être soutenu par l'appareil
gouvernemental.
L'approche de prévention qu'on soutient dans l'organisation ici,
c'est le développement économique communautaire. Le mot
«communautaire» est important parce que c'en est un qui repose sur
la prise en charge par la base pour être capable d'avoir un
développement de l'autonomie d'action et d'intervention, pour ne pas
dire le mot anglais «empowerment», des personnes dans leur propre
destin économique. C'est cette approche préventive que nous
préconisons avant tout et qui devrait être reflétée,
j'espère en tout cas, dans la concertation telle qu'on l'a vue dans
l'énoncé de politique. Merci.
Le Président (M. Joly): Je vous remercie. Messieurs, merci
beaucoup. Merci. Je demanderais maintenant aux gens représentant le
Centre de linguistique de l'entreprise de bien vouloir s'avancer, s'il vous
plaît. Nous allons suspendre nos travaux deux petites minutes. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 18)
(Reprise à 11 h 31)
Le Président (M. Joly): La commission reprend ses travaux.
Vous nous excuserez, mais la vie de parlementaires nous amène souvent
à avoir besoin de documents qui commandent une petite recherche. Alors,
nous avons rapatrié les principaux intéressés.
J'apprécierais que vous puissiez vous présenter, s'il vous
plaît. Après ça, je vous expliquerai un peu la
procédure.
CLE
M. Guillotte (Michel): Certainement. Je suis Michel Guillotte,
directeur général du Centre de linguistique de l'entreprise. Je
suis accompagné, à ma gauche, de M. Pierre-André Carignan,
qui est directeur aux affaires publiques de Northern Telecom Canada
Itée, membre de notre conseil d'administration et également chef
du groupe de travail sur la formation et l'éducation du Comité
d'action pour le français dans l'informatique, dont il est fait mention
dans notre mémoire.
Le Président (M. Joly): Je vois qu'il y a quelques membres
qui ont fait faux bond.
M. Guillotte: Deux personnes, effectivement. Je vous prie
d'excuser Mme Lacoursière et M. Gutkin, qui devaient nous rejoindre par
la route dans le courant de la matinée. Alors, les circonstances
étant ce qu'elles sont, je vous prie de nous excuser.
Le Président (M. Joly): Pas de problème. Alors, je
vous laisse le temps de nous livrer votre réflexion, votre
mémoire et, par après, les parlementaires échangeront avec
vous.
M. Guillotte: Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes
et MM. les députés, je vous remercie beaucoup d'avoir pris le
temps de prendre en considération la question que le Centre de
linguistique de l'entreprise apporte dans son mémoire. Je ne vais pas
lire le mémoire. C'est assez vite lu, finalement; c'est un
mémoire succinct.
Je vous rappellerai brièvement que le Centre de linguistique de
l'entreprise existe depuis 20 ans. C'est un organisme patronal sans but
lucratif qui a pour fonction, essentiellement, d'aider le milieu du travail et
des affaires à gérer les questions linguistiques, lois,
règlements et politiques linguistiques touchant le fonctionnement des
entreprises et du milieu du travail. Le CLE exerce à la fois son
rôle d'association, c'est-à-dire de porte-parole des entreprises
qui en font partie, sur différentes positions qui appellent l'attention
des gestionnaires d'entreprise en matière de langue et, d'autre part,
comme beaucoup d'associations, il est également conseiller en
administration qui rend les services précis de gestion linguistique et
de formation
linguistique à ses membres.
Je vais entrer dans le vif du sujet tout de suite parce que, au moment
où on a mis la dernière main au mémoire qui vous est
soumis, le président de la Banque de Montréal, au moment de
l'assemblée annuelle de ses actionnaires à la fin de janvier,
Matthew Barrett, déclarait, d'une part, qu'il fallait déclarer la
guerre au chômage et, d'autre part, insistait de façon très
précise sur l'importance de la langue dans la formation
générale des travailleurs, et je cite ici M. Barrett, dans la
conclusion de son discours: «La formation et le recyclage des
sans-travail seraient bien évidemment au coeur du programme. Bref, il
faudrait à tout le moins faire en sorte que les milliers de postes qui
restent vacants parce qu'il est impossible de trouver des candidats
possédant les qualifications minimales, notamment en lecture et en
écriture, trouvent preneurs.» M. Barrett avait certainement
à l'esprit la langue anglaise également, et je pense que, dans le
contexte du Québec et de notre situation de société de
langue minoritaire, le chapeau nous fait certainement également.
Est-ce qu'il existe une activité qui passe par la langue, sinon
la formation technique professionnelle, la formation à tout niveau de la
main-d'oeuvre, des travailleurs, de l'éducation, etc.? La langue est au
coeur même d'une politique efficace et cohérente de formation de
la main-d'oeuvre. Le seul objet du mémoire du CLE, c'est de porter
à votre connaissance que, dans l'énoncé de politique...
Nous sommes ici pour parler de l'énoncé de politique et non pas
du projet de loi, qui n'est pas notre propos. C'est un projet de loi pour
structurer une activité, et je laisserai à d'autres associations
le soin de se pencher sur cette question-là. Mais la dimension
linguistique, qui est un critère fondamental de performance maintenant
dans les milieux économiques, est à toutes fins utiles absente de
l'énoncé de politique.
La langue est présente partout. Les entreprises que nous
représentons ont toutes des programmes de francisation qui leur sont
imposés par les législations linguistiques du Québec. Tous
ces programmes de francisation doivent tenir en compte la francisation des
programmes de formation technique et professionnelle, de perfectionnement de la
main-d'oeuvre, etc. Il nous faut rechercher ces programmes-là en
français, il faut les implanter et il faut s'assurer ensuite,
évidemment, qu'ils aient un rendement adéquat avec la
productivité recherchée.
Dans les milieux économiques maintenant, et
particulièrement au Québec depuis bientôt 15 ans de
politique de francisation des entreprises, le critère linguistique est
devenu un critère de compétence comme bien d'autres dans les
activités techniques et professionnelles. J'ajoute à cela que les
nouveaux emplois, les emplois enrichis, les emplois de qualité que l'on
devra de plus en plus offrir à nos jeunes travailleurs et professionnels
exigeront des volumes, des proportions de communication de plus en plus
considérables.
L'ensemble des nouvelles activités humaines ainsi que les
technologies font appel à des compétences en communication qui
sont plus nombreuses que, disons, les catégories d'emplois traditionnels
que l'on connaissait auparavant. Les communications que nous aurons à
entretenir deviendront également de plus en plus complexes. Il faudra
manier l'outil linguistique au même titre que d'autres outils de
façon de plus en plus compétente et alerte. Il est donc
nécessaire - en tout cas c'est ce que nous tentons de faire maintenant
dans les entreprises - d'intégrer le critère linguistique comme
tout autre facteur de gestion à l'évaluation des situations de
travail, des performances, des descriptions de tâches et ainsi de
suite.
Par ailleurs, ceci étant dit, trop souvent la langue s'inscrit
comme une dimension parallèle secondaire. C'est-à-dire que tout
le monde est favorable à la politique linguistique, tout le monde
partage en gros les objectifs, mais lorsqu'on se pose la question de voir
comment le critère linguistique, ce facteur-là, est
géré dans l'éventail des activités humaines et,
notamment, dans le cas qui nous préoccupe ici, la formation, on
s'aperçoit que très souvent, bien, c'est tombé dans
l'inertie. On a pris pour acquis que la question, d'autres personnes s'en
occupaient, qu'il y avait des organismes, des structures au gouvernement et
dans les entreprises, des structures parallèles pour s'occuper de cette
dimensioh-là à la place de tous et chacun des citoyens, des
cadres, des travailleurs d'entreprises et des gestionnaires.
Je voudrais vous donner quelques exemples précis. Notre
mémoire est court. Je préférerais profiter du temps qu'il
nous reste pour illustrer par des exemples précis, sans donner de
chiffres cependant, les quelques situations dans lesquelles le dossier
linguistique doit encore, à notre avis, subir des aménagements
d'importance. On voit depuis quelques années et encore des commissions
scolaires qui font l'acquisition de matériel pédagogique, de
logiciels en langue anglaise tout simplement parce que, ou bien on a simplement
négligé de s'interroger sur l'existence de produits identiques en
langue française, ou tout simplement parce qu'on a oublié de les
commander en français, ou encore qu'on ne connaissait pas les ressources
disponibles.
Nous avons fondé, il y a trois ans maintenant, au Centre de
linguistique de l'entreprise, en collaboration avec d'autres entreprises, avec
des partenaires du gouvernement du Québec et du Canada ainsi que les
universités, le Comité d'action pour le français dans
l'informatique dont M. Carignan pourrait vous parler un peu plus. Un des
groupes d'action Importants et fondamentaux de ce comité, c'est
très précisément celui qui se consacre aux questions de
formation et d'éduca-
tlon parce que, dès que l'on s'adresse à la technologie
informatique et à ses ramifications quasiment sans fin aujourd'hui, en
développement croissant et constant, le point de départ, c'est
l'initiation des personnes, des citoyens à l'usage de ces outils dans
une langue ou dans l'autre. Alors, si nous maintenons les lacunes que nous
avons, eu égard à la place du français à cet
égard, il est certain que nous contrevenons à l'objectif de toute
politique de formation de la main-d'oeuvre en français au
Québec.
Nous avons également au CLE créé une table de
concertation de l'industrie aéronautique et aérospatiale il y a
un peu plus d'un an. Douze grandes entreprises du secteur en font partie dans
la région de Montréal. Parmi les quatre grands thèmes qui
sont discutés et approfondis en termes de recherche, de créneaux
stratégiques pour l'amélioration de la place de la langue, il y a
la formation technique et professionnelle. Justement, au Québec, on a la
chance d'avoir à la fois des ressources pour le faire et un milieu
important. Il s'agit d'une des grappes industrielles les plus importantes, les
mieux identifiées par le ministre Tremblay, vous vous en rappellerez. Eh
bien, très précisément, on essaie d'agir à cet
égard sur l'amélioration de la place du français dans la
formation technique et professionnelle à travers les multiples
programmes d'échange que l'industrie entretient et essaie de
développer avec les établissements d'enseignement
collégial et technique. la terminologie, nous insistons
Par ailleurs, nous avons des carences extrêmement significatives
quand il s'agit de faire le marketing de cette terminologie. Nous avons une
difficulté extrêment importante à la faire entrer dans les
manuels, dans les programmes de formation technique et professionnelle et
partant, donc, dans les moeurs et donc dans l'amélioration de la
formation, encore une fois, de nos travailleurs.
Je rappelle dans le mémoire qu'au Centre de linguistique de
l'entreprise nous avons même dû mettre en place depuis les deux
dernières années un programme de correction de formation de la
main-d'oeuvre en langue première. Je parle de la main-d'oeuvre. Je pense
aux cols blancs, ici, cols blancs professionnels, bien sûr, plutôt
que la main-d'oeuvre de base. Nous devons, dans l'entreprise, suppléer
les carences, les lacunes très réelles des travailleurs et des
employés en matière de maîtrise de la langue
première. Je ne parle pas, encore une fois, de formation technique et
professionnelle, mais du B.A.-BA du français des affaires, du
français des procès-verbaux, etc.
Alors, je ne voudrais pas abuser du temps qui nous est Imparti, sinon,
en conclusion, pour vous signaler l'ampleur et l'importance de cette question
qui devrait être, à notre avis, prise en considération dans
la suite de l'élaboration de la politique et, plus
particulièrement, dans son insertion dans l'ensemble des
activités concrètes qui découleront de son implantation.
Je vous offre, évidemment, à cet égard l'entière
collaboration du Centre de linguistique de l'entreprise et de ses membres pour
contribuer, si la chose vous est utile et d'intérêt, à la
recherche d'éléments de solutions concrets et pratiques à
la question que nous venons de soulever. Mon collègue, M. Carignan,
aurait peut-être quelques observations supplémentaires à
ajouter.
Le Président (M. Joly): M. Carignan.
M. Carignan (Pierre-André): Au niveau du Comité
d'action pour le français dans l'informatique, du CAFI, il y est
évident que notre préoccupation est de connaître et de
pouvoir collecter l'information concernant le niveau de langue et l'utilisation
du français dans la formation, principalement en ce qui a trait à
l'informatique, comme vous le rappelait M. Guillotte.
Les entreprises se préoccupent énormément, comme le
disait M. Guillotte, au niveau du programme de francisation dans chacune de ces
entreprises. Nous devons suppléer à des carences effectives,
parce que, lorsqu'on va plus loin, lorsqu'on parle de mondialisation des
marchés, si on a des gens qui ont eu une formation technique
intéressante et très de pointe, une formation pointue, il appert
que, lorsque nous avons ces gens-là devant nous et que nous devons leur
demander de faire affaire au niveau mondial, ils ont peine à même
rédiger dans leur langue maternelle, ne serait-ce que de pouvoir
utiliser un français, le vocabulaire dont on parlait tantôt, qui
soit diffusé. Nous, au niveau des entreprises, on a
développé énormément de vocabulaire qu'on doit leur
faire passer. C'est un choc culturel pour ces gens-là lorsqu'ils
arrivent en entreprise de devoir utiliser une terminologie qui découvre,
finalement... Ils ont été formés souventefois, surtout
dans le domaine technique, dans une autre langue, principalement l'anglais. Ces
gens-là en deviennent gênés d'utiliser le français,
ces termes français là, parce qu'ils n'ont pas eu l'habitude. (11
h 45)
Alors, toute cette problématique devient encore plus
évidente lorsqu'on parle d'une réforme ou de l'éducation
ou, tout ou moins, de la formation avancée, lorsqu'on n'a pas, dans ces
énoncés, si vous voulez, une conscience, à savoir
ce qu'on va faire au niveau de la langue et du véhicule de cette
formation-là, parce qu'on suppose que la formation au Québec se
donnera en français. Alors, c'est un peu ce que l'entreprise et le CLE
veulent souligner ici. Je vous remercie.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. M. le ministre,
s'il vous plaît.
M. Bourbeau: M. le Président, c'est toujours très
intéressant de discuter avec des gens qui sont dans un milieu comme
celui du Centre de linguistique de l'entreprise. On voit les applications
pratiques et les problèmes que peut causer une déficience
à ce titre-là.
M. le Président, c'est le chanoine Groulx qui disait: En parlant
bien sa langue, on garde bien son âme. Quand on regarde l'état de
la langue parlée au Québec, je suis porté à me
demander: Où en est-on rendu avec notre âme
québécoise? Mais trêve de poésie, vous nous dites
dans votre document... Enfin, j'ai des notes qui m'ont été faites
ici et qui résument votre document. Je vais les lire. Première
note: On me dit que tous les programmes de formation envisagés, tant
dans leur ensemble que suivant une approche sectorielle, devraient, notamment,
viser le développement rapide de compétences linguistiques
directement reliées aux situations de travail. La deuxième note
dit ceci: Le système scolaire doit corriger la piètre
qualité de l'enseignement de la langue première et de la langue
seconde. Alors, je présume que de nombreux observateurs de
l'enseignement du ministère de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur et de la Science vont commencer à prendre des notes
à partir de maintenant. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: Alors, vous portez un jugement sévère
sur la qualité de l'enseignement de la langue dans notre système
d'enseignement. Certainement que des efforts doivent être faits pour
corriger cette situation-là. Vous dites que le Québec,
théoriquement, posséderait un atout linguistique important sur le
pian concurrentiel, ayant accès a deux langues. Est-ce que vous pourriez
nous fournir des illustrations de cet atout, du fait que ça peut
constituer un atout important de posséder les deux langues? Est-ce qu'il
existe des évaluations économiques relativement au coût
qu'entraîne la mauvaise gestion de la question linguistique, pour
utiliser vos propres termes?
M. Guillotte: II y a quatre questions dans votre
énoncé. La première, je la prends... Je commence par la
seconde. Effectivement, nous dénonçons, comme beaucoup de
personnes, beaucoup d'études savantes et collectives l'ont fait depuis
au moins six ou sept ans, la piètre qualité de l'enseignement de
la langue générale dans le réseau scolaire en
général. Je pense que là on apporte de l'eau à la
mer, mais il fallait que ça passe dans l'économie
générale du document qui est là, qui essaie d'être
un tout, de situer la problématique de la langue dans son ensemble.
Alors, à cet égard-là, on n'a pas la prétention de
répéter autre chose que ce qui a déjà
été dit.
Deuxièmement, c'est la première citation de notre
mémoire que vous faisiez, qui portait justement sur l'acquisition rapide
des connaissances reliées aux situations de travail. J'aimerais,
effectivement, m'attacher à cette question-là: Oui, c'est ce que
nous recherchons principalement. Je le signalais tout à l'heure dans mon
bref exposé, les communications de travail devenant de plus en plus
nombreuses et de plus en plus complexes nécessitent que les outils de
formation, les contenus pédagogiques, les méthodes, la
façon d'enseigner, les terminologies mènent rapidement les
personnes en situation d'apprentissage à l'acquisition de notions, d'une
habilité, d'un confort linguistique qui leur permettent d'être
compétents dans leur langue. la troisième question portait sur le
privilège qu'a' le québec d'avoir sur son soi la présence
et l'usage de deux grandes langues, deux cultures. les avantages sont
très importants. si nous parvenions à être à la fois
- comment dirais-je? - compétents, sûrs, efficaces d'abord dans
notre langue première, le français en ce qui concerne le
québec, et que notre apprentissage de la langue seconde et notre
maîtrise de la langue seconde, en l'occurrence l'anglais ici, continuait
de se faire, ce que nous souhaitons aussi d'ailleurs dans notre mémoire,
également d'une façon plus compétente, d'ailleurs, eh
bien, le résultat de tout ça nous donnerait des professionnels,
des cadres, des citoyens extrêmement bien équipés au plan
international pour affronter la concurrence, pour faire valoir leur point de
vue et conquérir des marchés. il y a indéniablement un
plus pour le québec - excusez le barbarisme - à cet
égard-là.
Votre dernière question concerne les études. Il y a eu
quelques études au cours des 15 dernières années faites
sur les coûts-bénéfices et certaines tentatives
d'études coûts-bénéfices de la francisation des
entreprises. Effectivement, à l'origine, dans les milieux
économiques, on voyait davantage les coûts que les avantages parce
qu'il s'agissait de mettre en place les programmes de francisation avec les
dépenses, les coûts directs que cela impliquait, y compris en
matière de formationlinguistlque.
Maintenant, certaines entreprises commencent, par ailleurs, à
voir des avantages aussi, c'est-à-dire que des entreprises dont le
programme de francisation s'est bien déroulé au cours des 10
à 15 dernières années ont maintenant acquis une certaine
capacité concurrentielle en français dont elles peuvent
maintenant tirer parti
sur d'autres marchés que le seul bassin canadien et
nord-américain. à cet égard-là, on commence
à voir, bien sûr, des avantages. il n'y a pas d'études
chiffrées, récentes à cet égard-là, mais il
y a quand même - comment dirais-je? - une connaissance qui s'étend
de cette réalité-là dans le milieu économique
maintenant.
M. Bourbeau: alors, vous dites que le québec gère
mal un de ses principaux aspects concurrentiels, c'est-à-dire les deux
langues en présence. selon votre mémoire, des efforts sont
à faire dans trois secteurs, sur trois points: assurer l'utilisation de
la langue française, franciser les équipements informatiques et
favoriser l'apprentissage des terminologies. bien sûr, ces efforts
doivent se faire largement sur le, marché du travail. quels sont les
moyens, selon vous, dont on devrait disposer pour agir sur ces
éléments-là? comment ces moyens peuvent-ils être
intégrés dans le cadre des interventions que propose
l'énoncé de politique?
M. Guillotte: Dans chacun dès éléments
où nous énonçons qu'il devrait y avoir des chantiers
particuliers, évidemment, il y a des moyens qui devraient être
appropriés, ou des stratégies d'abord qui devraient être
appropriées à chacun de ces secteurs-là. Ça peut
être très long d'y répondre, mais je vais au moins vous
donner, de façon stratégique encore une fois, comment on pourrait
s'y adresser.
Finalement, l'énoncé de politique couvre l'ensemble de ce
qui s'appelle formation de main-d'oeuvre au Québec. C'est
extrêmement vaste, l'énoncé de politique. Il faudrait
d'abord intégrer, comme on vous le recommande, le critère
linguistique comme un facteur d'évaluation et de suivi de tous les
éléments ou sous-ensembles de la problématique de la
formation. Il faudrait analyser ensuite l'existence ou non du facteur
linguistique, quantitativement et qualitativement, dans l'éventail des
situations considérées. Il faudrait faire l'inventaire des moyens
qui existent déjà, qui ne sont pas connus ou qui sont mal
coordonnés ou pas coordonnés du tout, d'améliorer la place
du français. Il faudrait agir sur la diffusion massive de la
terminologie, mais pas juste en publiant les lexiques que personne ne lit dans
un coin sauf les spécialistes de la langue, mais en les intégrant
de plus en plus par des mesures proactives, une volonté suivie de
mesures proactives d'intégration dans les outils de formation qui sont
aussi bien des manuels et des programmes que des logiciels, etc.
En matière d'informatique, on essaie de le faire au CAFI à
la mesure de nos modestes moyens. On essaie de trouver des créneaux, pas
de tout faire en même temps - on n'a pas les moyens, on n'est pas
capables et on se heurte souvent à des murs - mais de trouver par
ailleurs des petits créneaux à l'intérieur desquels des
actions ciblées, des biens livrables peuvent améliorer la place
du français, son rayonnement, son utilisation effective en informatique.
On pourrait vous en énoncer pendant longtemps. Il faudrait prendre
chacun des lièvres que nous soulevons dans notre mémoire et puis,
bien sûr, bâtir une arborescence de moyens. C'est faisable, M. le
ministre.
M. Bourbeau: Toujours selon votre mémoire, tous les
programmes de formation devraient viser le développement rapide de
compétence linguistique. Étant donné que vous intervenez
continuellement, fréquemment en entreprises, est-ce que vous pourriez
nous brosser un tableau sommaire des besoins? Dans quels secteurs, par exemple,
ces besoins sont-ils les plus manifestes, les plus Impérieux? Quel type
d'employés retirent ou seraient plus susceptibles de retirer un
bénéfice d'une telle intervention? Autre question, par exemple: Y
a-t-il des clientèles qui devraient être ciblées? Est-ce
qu'on devrait cibler. des régions, par exemple, plutôt que
d'autres?
M. Carignan: Je vais donner une partie de la réponse et je
vais laisser M. Guillotte compléter. Je vais mettre mon chapeau de
directeur dans une grande entreprise et également directeur des affaires
linguistiques chez Northern Telecom. Je dois mettre en application le programme
de francisation. On s'est aperçus, évidemment, au cours des ans,
que tous les niveaux de compétence, que ce soit du travailleur sur la
chaîne de montage ou le directeur des affaires financières,
doivent avoir l'information et les outils pour pouvoir fonctionner, ne
serait-ce que les gammes de fabrication en français qui atterrissent sur
le plancher de l'atelier. Les gens ne sont pas préparés à
utiliser la terminologie qui est utilisée là et qui, pourtant, a
été recherchée, comme on a dit, fouillée, etc.
Alors, si on transporte ça au niveau d'une entreprise de haute
technologie comme Northern Telecom à une entreprise qui fabrique pour
nous, en tant que fournisseur, ne serait-ce que des ampoules, la même
problématique se pose. Étant donné que nous, comme
entreprise, demandons à nos fournisseurs de nous éclairer en
français, eh bien, à ce moment-là, ils ne sont pas en
mesure de nous donner ou ils ont de la difficulté à comprendre
notre terminologie. Alors, c'est un peu la problématique qui est globale
parce qu'on fait affaire partout dans le monde.
Pour ramener également l'autre problématique, qui n'est
pas une problématique mais qui est une chose qui est existante, c'est
que, nous, on s'est aperçus que les compétences, effectivement,
de certaines personnes du point de vue linguistique et la dualité,
effectivement, linguistique dont on parlait tantôt font qu'on peut miser
là-dessus et bâtir là-dessus une compétence
internationale. C'est que les gens qui sont aptes et qui sont ouverts, peu
importent leur niveau de compétence et leur niveau de travail, peuvent,
à
ce moment-là, exporter cette connaissance dans d'autres langues
et l'apprentissage même d'autres langues parce qu'ils sont ouverts.
Alors, à ce moment-là, vous avez une situation avantageuse.
Je vais citer un exemple d'un de nos fiers compétiteurs, qui est
AT&T, qui a ouvert spécifiquement à Montréal un centre
de traduction de technologie parce qu'ils ont découvert qu'à
Montréal, c'était une plate-forme linguistique, lis ne pouvaient
pas installer ça en Caroline du Nord, à Wlnston-Salem, où
ils ont leur centre de documentation, où ils ont 900 personnes. Ils
n'ont aucune autre compétence que l'anglais, finalement. Ils font un peu
d'espagnol, etc. Alors, c'est vraiment la plate-forme.
Je vais citer encore une fois Northern Telecom, au niveau des affaires
linguistiques. Nous traitons maintenant, au niveau linguistique, des langues
étrangères, mais ici, à Montréal. Tout est
centralisé, et nous utilisons des ressources à
l'extérieur. Donc, ce sont des compétences
québécoises qui utilisent des ressources à
l'extérieur.
Une fois qu'on a situé ceci, déplaçons cette
situation-là à tous les niveaux. Vous avez une porte ouverte,
effectivement. Au Québec, nous avons une porte ouverte à la
mondialisation des marchés à tout point de vue. Ça va nous
permettre d'éduquer nos gens, peu importe leur niveau, dans une langue
et solidement, tout en intégrant à la politique ou à
l'énoncé de politique l'aspect linguistique à tous les
points de vue. Nous aurons des gens qui vont être davantage
motivés, parce qu'ils vont comprendre davantage. Ils n'arriveront pas en
entreprise avec un bagage de connaissances techniques ou autres qu'ils ne
pourront pas véhiculer à cause d'une barrière
linguistique. Est-ce que vous voulez ajouter quelque chose?
M. Gulllotte: Deux mots, ouf, qui sont également en
relation avec la question de M. le ministre. Bon, vous posiez la question des
secteurs, s'il y en avait qui étaient prioritaires. Ils le sont tous,
finalement. Si on regarde la situation du chômage en ce moment, il est
extrêmement élevé. Par ailleurs, beaucoup d'employeurs se
plaignent d'être incapables de trouver des catégories de
travailleurs compétents par secteur complet, parce que, bon, on n'en
forme pas ou, alors, la clientèle étudiante est faible. (12
heures)
Je vous disais, tout à l'heure, dans la présentation, que
nous devons déjà combler des lacunes élémentaires
en langue première: comment faire une lettre, un procès-verbal,
etc. Ajoutons à cela la question de la terminologie. La terminologie,
c'est une troisième langue pour beaucoup de travailleurs
québécois. Ils l'ont acquise de façon boiteuse sur le tas
ou alors, plus souvent qu'autrement, ils l'ont acquise en anglais, parce qu'il
y a des lacunes dans nos stratégies de formation terminologique de la
main-d'oeuvre. Alors, ces gens-là arrivent en entreprise. Nous sommes
obligés de combler l'ensemble de leurs lacunes linguistiques, y compris
les lacunes terminologiques. Ça vaut pour l'aérospatial, les
télécommunications, l'informatique, les biotechnologies. C'est
tout secteur confondu. Il s'agit vraiment d'une problématique globale
où il serait souhaitable d'arrimer la question linguistique en termes
concrets, pratiques, en termes d'action, de gestion quotidienne dans tous les
programmes, dans tous les éléments plutôt qu'au seul niveau
de cette image publique. C'est finalement ce qui justifie le choix du titre de
notre bref mémoire, «Franciser de l'intérieur». Pour
franciser de l'intérieur, il faut essayer de voir à quoi la
langue se rattache dans le fonctionnement normal, banal des entreprises. Ce
n'est plus une question d'idéologie. C'est une question
d'efficacité et de productivité.
Le Président (M. Joly): M. le ministre. Vous avez
terminé? Merci. Mme la députée de Hoche-laga-Maisonneuve,
s'il vous plaît.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je vous écoute
avec énormément d'intérêt. Je vous remercie
d'être venus devant cette commission. Je crois que nous entendrons 80
organismes qui, au total, auront présenté des mémoires. Je
crois que vous êtes, à date, le seul organisme à nous faire
valoir cette problématique de la francisation, mais, en fait, cette
problématique linguistique, pour l'élargir à ce qu'elle
est en réalité. Et on termine nos travaux la semaine
prochaine.
Alors, je me dis qu'il y a sûrement à trouver une
façon organique pour que la future société mère de
développement de la main-d'?uvre et pour que les
sociétés régionales qui en résulteront soient
préoccupées de cette dimension-là. Dans votre
mémoire, je pense que c'est à la page 4, vous signalez que
lorsqu'une entreprise énonce les éléments de son programme
de francisation, elle réunit les cadres et le personnel pour expliquer
ses objectifs et répondre aux questions. Et vous ajoutez: On ne
rencontre plus de réactions fondamentalement négatives lors de
ces séances. Que cela est dit de manière élégante,
mais c'est vraiment intéressant de le constater. Vous avez l'expertise
qu'il faut pour nous en informer.
Finalement, il y a, en fait, une sorte de consensus à l'effet que
oui, c'est important. Mais c'est le paragraphe qui suit qui
révèle combien c'est un peu a contre-courant tout cela, parce que
vous dites que, finalement, au bout d'un an ou deux, quand vous en faites le
bilan, vous vous apercevez que le programme a souvent sombré dans
l'inertie. Alors, finalement, ce n'est plus une question de volonté ou
de mauvaise ou de bonne. Ça n'a plus rien à voir avec ça.
Ça n'a rien à voir avec les moyens qu'on prend pour finalement en
arriver au résultat que l'on
souhaite.
Et s'il n'y a pas quelqu'un pour aiguillonner tout le temps, comme M.
Carignan dans son entreprise, je crois comprendre que vous êtes en charge
de l'ensemble du service linguistique pour Northern Telecom...
M. Carignan: Oui, effectivement.
Mme Harel: ...mais ce n'est pas nécessairement le cas pour
bien des entreprises. Alors, dans le fond, ce qu'il faut comprendre, c'est
comment contrer cette force d'inertie. En vous écoutant, je me disais:
Qu'est-ce qui pourrait être envisagé, au niveau de la
société mère, au niveau des sociétés
régionales, pour que la dimension linguistique ne soit jamais
oubliée?
Le Président (M. Joly): M. Guillotte.
M. Guillotte: Merci. Merci, madame. Disons que le constat que
nous faisons à la page 4, en fait, nous essayons de résumer
finalement une situation qui fait qu'on est proactif pour implanter un
programme qui découle d'une loi et d'obligations formelles, que nous
franchissons un certain nombre de démarches administratives et
communicationnelles pour y parvenir, et qu'ensuite, le milieu est à
réévaluer périodiquement. C'est ça que nous
disons.
Ce que ça signifie, c'est que pour la question linguistique,
très souvent, elle est programmée de façon à mener
très, très vite à une structure parallèle dans
l'organisation. Je le disais tout à l'heure, on se dit: On est pour. Il
n'y a plus de réactions fondamentalement négatives ou alors elles
sont folkloriques maintenant, effectivement. Là-dessus, on a
indéniablement fait beaucoup de chemin depuis 15 ans.
Mais à partir du moment où on est dans un groupe humain
donné, que ce soit en entreprise, que ce soit dans une administration
publique, à partir du moment où on a dit «La question de la
langue, c'est ceux-là qui s'en occupent», les gens se sentent
déresponsabilisés, désinvestis de leur
responsabilité personnelle à cet égard-là. En plus,
évidemment, à l'époque où on a fait les premiers
programmes, on les a un petit peu moins traduits de façon organique,
comme vous le dites vous-même, dans le fonctionnement des
administrations, quelles qu'elles soient, beaucoup moins que nous
commençons à le faire maintenant.
Chez nous, au Centre de linguistique de l'entreprise, je vais essayer
peut-être de répondre techniquement à votre question de
cette façon-là, nous travaillons depuis deux ans justement
à trouver des moyens, des recettes finalement, pour responsabiliser les
gestionnaires dans les entreprises à la dimension linguistique. Nous
avons quitté le discours du «il faut faire ceci, il faut faire
cela», mais nous leur disons:
Vous vous occupez d'achat, vous vous occupez d'informatique, vous vous
occupez de gestion de personnel, de communications, etc. Voici quels sont les
critères, les dimensions linguistiques qui vont avec votre
activité professionnelle. Seulement celles-là, est-ce que vous
les prenez en charge, oui ou non? Et voici des moyens, des
éléments de recette - je me répète - pour y
parvenir. C'est comme ça qu'on travaille, en ne faisant plus un discours
général sur la langue, mais un discours administratif en
plaçant ce facteur. Il ne s'agit plus de le mettre au-dessus des autres.
Ce n'est pas ça. Il s'agit de le placer. Un gestionnaire qui a des
personnes à superviser, il doit s'occuper de l'assiduité, il doit
s'occuper des bonnes relations interpersonnelles entre les employés, il
doit s'occuper de productivité, des fois d'environnement; la langue en
fait partie.
Mme Harel: Alors, on n'est plus au niveau de ce qui est
souhaitable, mais au niveau de la manière de réaliser. Et,
c'était en fait par analogie, je me demandais si, une fois
consultée, ta société mère, les
sociétés régionales qui seraient créées vont
aussi, comme un peu l'entreprise, se déclarer en faveur, être pour
comme vous dites, et puis... Mais, j'aurais peur qu'un an ou deux après,
quand on fera le bilan, on se rende compte aussi qu'il y a une sorte de force
d'inertie.
Et la question que je me pose, c'est: Comment, qu'est-ce qui devrait
être envisagé pour qu'il y ait une action positive constante qui
soit menée au niveau de la société mère?
M. Guillotte: Premièrement, programmer de façon
claire et évidente la dimension linguistique dans l'énoncé
de politique. Deuxièmement, la programmer dans les énoncés
ou les critères d'élaboration de politique de gestion de
l'organisation. Troisièmement, mettre en place les mécanismes
pour y parvenir. Quatrièmement, les surveiller, de façon non
coercitive et policière, mais de façon intelligente, comme un
gestionnaire surveille d'autres dimensions de ses responsabilités.
M. Carignan: Parce qu'à toutes fins pratiques, les gens
qui arrivent en entreprise, employés ou autres, deviennent des clients.
S'ils demandent à travailler en français, s'ils ont le
vocabulaire, s'ils ont été formés en français et
qu'ils fonctionnent, l'entreprise n'a pas d'autre choix que de fonctionner. Et
non seulement fonctionner, mais les gens qui sont en place auront les outils.
Alors donc, a ce moment-là, ça va faire d'office l'effet
recherché par l'application, finalement, de programmes qui ont
été faits depuis des années. Il est temps maintenant de
venir à une clientèle, parce qu'il faut traiter ça comme
une clientèle. Vous devez rencontrer les besoins de votre
clientèle.
Mme Harel: C'est d'autant plus important, comme vous le disiez
tantôt, que la terminologie est devenue comme une troisième langue
en fait.
M. Carignan: Effectivement.
Mme Harel: Et puis, vous avez souvent utilisé le mot
«confort linguistique».
M. Carignan: Oui.
Mme Harel: Le fait est qu'il faut s'assurer d'une sorte de
confort linguistique dans des secteurs d'activité à haut
rendement technologique pour que les gens se sentent à l'aise et n'aient
pas l'impression d'utiliser, finalement, des mots inusités. Ça
c'est, j'imagine, pour que l'usage en soit répandu.
Et la question que je continue quand même de me poser, finalement,
c'est plus de savoir comment il pourrait y avoir des gestes proactifs, parce
que la formation est l'élément clé, étant
donné que la Société va mettre en place des programmes de
développement de la main-d'?uvre, etc., puisque ça introduit
souvent, par ces programmes, des changements technologiques, ça les
accompagne et tout ça. C'est une occasion vraiment
inespérée de faire ces transformations terminologiques. Est-ce
que la société mère ne devrait pas avoir... Actuellement,
je ne pense pas que ce soit intégré. Vous allez me permettre une
analogie. Pensez, par exemple, à la condition féminine, n'est-ce
pas? Hum! Je sens que le ministre va rechigner encore, mais je ne lui donnerai
pas de statistiques.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: Mais la condition féminine, n'empêche, a
progressé quand, dans chaque ministère, il y a eu un bureau de la
Condition féminine et que, de ce bureau, H y a eu un certain nombre de
personnes - c'aurait pu être des hommes ou des femmes - qui avaient comme
préoccupation de faire progresser le pourcentage. C'est tout simplement,
souvent, des objectifs numériques qu'il faut se poser, etc. Est-ce qu'il
y aurait lieu de penser à un service linguistique qui serait vraiment
offert par la société à tous ces comités sectoriels
qui vont être mis sur pied? Est-ce qu'il faut penser dans cette
vision-là?
Le Président (M. Joly): M. GuHlotte, s'il vous
plaît.
M. GuHlotte: Par service, je serais prudent avec la notion de
service. La réponse à votre question, c'est oui au sens où
il faudrait sans doute identifier, à un niveau élevé de la
hiérarchie, un centre de responsabilité à l'égard
de la dimension linguistique avec un mandat clair quant à son
introduction et sa surveillance. Mais il ne faudrait pas, par ailleurs,
créer une superstructure qui déresponsabilise l'ensemble des
autres éléments, notamment régionaux, de la structure
proposée qui s'en remettraient à cette structure de leur
responsabilité en matière de langue. Il faudrait donc que les
objectifs soient définis par un centre, qu'il y ait un centre de
responsabilité qui définisse les objectifs, qui dispose d'un
minimum de moyens, et on ne parle pas nécessairement de grands moyens
financiers ici. Il y a des choses qui peuvent se faire. Sans dépenser
plus d'argent, on dépenserait autrement l'argent qu'on dépense
déjà de toute façon; ça coûte très
cher, la formation. Mais que ce critère linguistique, avec les moyens de
l'implanter efficacement, soit identifié et mis en place, imposé
dans le sens positif du terme à tous les autres éléments
de la structure et qu'ils soient redevables, ensuite, chacun d'entre eux, de
l'usage qu'ils en font et du retour sur l'investissement linguistique qu'ils
font.
Là, tout se passe comme si on disait: En formation... Je vous
donnais l'exemple des commissions scolaires. On a fait des achats massifs de
logiciels anglais. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas eu de directives claires. On
sait qu'il y a une loi linguistique, mais... On se promène dans un flou,
et je m'excuse de l'expression; je ne veux pas qu'elle soit péjorative,
mais c'est une situation... Ce flou peut aussi bien exister aussi, d'ailleurs,
dans les entreprises.
Ce n'est pas un reproche, mais on ne structure pas l'action sur la
langue. On en fait un discours idéologique, on est pour la cause, mais,
ensuite, on ne se penche pas sur les moyens, sur les outils pour la
gérer comme du monde. Vous souleviez, tout à l'heure, une chose
sur le confort linguistique des gens. Nous sommes une société qui
a des lacunes en matière de maîtrise de la langue première.
On se gargarise en disant que c'est commun à toutes les langues, y
compris l'anglais. Bien sûr, mais ça ne nous avance pas bien bien.
Une langue minoritaire comme la nôtre, et pourtant dans une
société avancée, par ailleurs, ça ne nous valorise
pas. Cela a pour effet que, étant insécures et peu
compétents dans...
Mme Harel: La maîtrise.
M. GuHlotte: ...la maîtrise de notre propre langue,
évidemment, nous véhiculons ces carences-là dans
l'apprentissage et la maîtrise de la langue seconde. Alors, on est
médiocres partout. On est médiocres en français, on est
médiocres en anglais, mais on veut se lancer dans la globalisation des
marchés, on veut percer le marché mondial et on veut, comme le
disait mon collègue tout à l'heure, envoyer des gens faire des
présentations à Rome, New York, Paris et Bangkok, et ils vont
dire: Tu sais, je veux dire.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: En fait, il y a des choses. Vous savez, là, on
complète des heures et des heures de commission et le mot
«vécu», je ne l'ai pas entendu une seule fois. Vous savez,
«mon vécu».
M. Guillotte: Ah oui, oui!
Mme Harel: C'était un mot tellement utilisé.
M. Guillotte: C'est de l'idéologie pédagogique
à la mode, ça.
Mme Harel: Mais vous savez, ce qu'on entend maintenant, c'est le
terme «en quèque part».
M. Guillotte: Oui.
Mme Harel: Ça, j'ai dû l'entendre 1000 fois depuis
qu'on a commencé nos travaux.
M. Bourbeau: C'est le mot «problématique»
qu'on entend maintenant.
Mme Harel: Mais «en quèque part»,
«quèque part»... Oui, «problématique»,
c'est un mot qui veut bien dire ce que ça veut dire. Le mot
«problématique», c'est un mot utilisé pour un sens
précis. Mais le mot «en quèque part»...
M. Bourbeau: ...à toutes les sauces.
Mme Harel: ...quel sens peut-on lui donner? moi, le seul sens que
je lui donne, c'est que, dans le fond, comme on n'est nulle part, alors
on...
Une voix:...
Mme Harel: ...est «en quèque part». Ceci dit,
je veux revenir à des propos plus sérieux, il y a une grande
partie de notre main-d'oeuvre qui, pour les années immédiates qui
viennent, sera constituée des nouveaux arrivants qui, au moment de leur
accueil, ici, ne parlent ni français ni anglais. Ce sera en partie aussi
des gens qui appartiennent aux minorités visibles. Alors, je me
demandais si vous aviez déjà réfléchi, à
votre Centre, sur ces questions concernant la main-d'oeuvre, surtout à
Montréal. Le maire de Montréal, hier soir, devant cette
commission, disait qu'il faut prévoir, d'ici 10 ans, que le tiers de la
main-d'oeuvre, sur l'île de Montréal, sera constituée de
membres de minorités visibles. D'autre part, je me demandais si le
crédit d'impôt à la formation, actuellement, est
utilisé pour la francisation des entreprises. Quel résultat cela
donne-t-il? Pensez-vous que les entreprises s'en satisfont?
M. Guillotte: En ce qui a trait à l'intégra- tion
des travailleurs, je réponds à la question. je commence à
y répondre, bien sûr, du point de vue de l'entreprise, de ce que
je connais le moins mal. l'intégration...
Mme Harel: Linguistique.
M. Guillotte: ...linguistique des travailleurs allophones,
étrangers, enfin, qui ne sont pas, en d'autres termes, francophones ou
anglophones de souche, à la dynamique des programmes de francisation
d'entreprises, elle n'est, pour ainsi dire, pas faite. C'est malheureux parce
que l'ensemble de l'économie de la Charte de la langue française
et de la culture qui s'est créée dans son application nous
mène à positionner l'effort de francisation dans le rapport entre
l'anglais et le français. Or, il y a aussi un travail organique à
faire, pour reprendre votre expression, à l'égard de
l'intégration des allophones aux politiques de francisation. Leur
motivation, il faut aller la chercher. Nous n'avons pas de programmes ni
publics ni privés pour leur expliquer les enjeux, ou bien peu. Il y a
des programmes d'enseignement, comme vous le mentionniez vous-même, mais
les choses s'arrêtent là. Il n'y a pas de programme proactif pour
les faire s'approprier leur place dans la francisation du milieu de travail.
À moins que, toi, tu en aies vu ailleurs...
M. Carignan: Non. Je peux ajouter, si vous voulez, une dimension
et reprendre un peu la question précédente à la fois.
C'est qu'effectivement la dimension des minorités ou des
visibilités, ou ce que vous avez mentionné, fait partie de ce qui
nous préoccupe quotidiennement, mais pas spécifiquement. Par
contre, lorsqu'on parle de programmes de francisation et de qualité
linguistique ou de questions linguistiques, je reviens sur les méthodes
ou les méthodologies d'implantation. Oui, c'est vrai que l'entreprise a
un rôle à jouer. Les entreprises ou l'ensemble des entreprises, au
Québec, ont un rôle à jouer, mais je pense que c'est un
rôle à la fois moteur, mais également un rôle
d'indicateur. Autrement dit, c'est d'aider aux politiques d'application de la
formation de guider et dans quelle direction. Je donne comme exemple: vous
allez dans n'importe quelle formation aux adultes, quelqu'un qui veut se
recycler, il va y avoir des prérequis. Dans ces prérequis, est-ce
que les prérequis linguistiques sont considérés? On entend
mathématiques 2000, etc., mais le français, où est-il
là-dedans? C'est un peu cette dimension-là qu'il faut apporter,
que les entreprises sont prêtes à aider, à diriger pour,
effectivement, avoir cette notion-là. Évidemment, ce sont les
entreprises, en général, de concert avec le gouvernement, qui
vont dire: Bien, écoutez, le secteur d'activité, au
Québec, il y a un gros boom économique qui est possible. Si on va
dans cette direction-là, ça va donner des tas de postes à
des gens, des postes
de soutien ou des entreprises de soutien à cette activité
économique. Alors, on peut aider à cibler la formation, mais,
moi, je verrais très bien l'aspect linguistique faisant partie des
mêmes prérequis que mathématiques 2000, etc.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Mme la
députée.
Mme Harel: Je vous remercie. En fait, il n'y a pas de projet de
qualité totale sans qu'il y ait prise en compte, dans n'importe quelle
entreprise qui veut performer, de la question linguistique, c'est ça
qu'il faut comprendre, et de la francisation.
M. Carignan: Voilà!
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. M. le
ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai pas d'autres
questions. Je remercie nos amis du Centre de linguistique de l'entreprise pour
leur présentation extrêmement intéressante qui va
certainement contribuer à nous éclairer pour l'avenir, y compris,
bien sûr, nos observateurs du ministère de l'Éducation, de
l'Enseignement supérieur et de la Science.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Guillotte et M.
Carignan. Merci beaucoup. Au plaisir. La commission ajourne ses travaux sine
die.
(Suspension de la séance à 12 h 20)
(Reprise à 15 h 49)
Le Président (M. Joly): II me fait plaisir de vous
souhaiter à toutes et à tous la bienvenue à cette
commission. Cet après-midi, la commission reçoit la Corporation
de développement des Laurentides et Alliance Québec.
Déjà, je m'aperçois que les gens représentant la
Corporation de développement des Laurentides ont pris place.
J'apprécierais que la personne responsable du groupe puisse se
présenter et aussi nous introduire les gens qui l'accompagnent. S'il
vous plaît!
CDL
M. Benoit (Jocelyn): D'abord, on tient à remercier les
membres de la commission de nous recevoir dans le cadre de la commission des
affaires sociales concernant l'énoncé de politique
«Partenaires pour un Québec compétent et
compétitif». Les représentants de la Corporation de
développement des Laurentides: à ma gauche, M. Jean-Pierre
Labrie, secrétaire exécutif du comité du Forum pour
l'emploi et agent de développement de la Corporation de
développement des Laurentides; à ma droite, M. Jocelyn
Lachance, président du comité du Forum pour l'emploi,
région Laurentides, directeur général du Centre de
recherche d'emploi des Laurentides-Lanaudière-Laval et
président-directeur général de la Coopérative des
travailleurs conseillers en intégration au marché du travail du
Québec et Jocelyn Benoit, vice-président de la Corporation de
développement des Laurentides et directeur du Service de
l'éducation des adultes du cégep de
Saint-Jérôme.
Le Président (M. Joly): Déjà, nous avons
reçu votre mémoire. Ça a été
étudié, ça a été analysé, etc. Si
vous voulez déjà d'emblée discuter avec le ministre, il
n'y a pas de problème, à moins que vous aimeriez relire à
nouveau votre mémoire. Je ne sais pas c'est quoi, votre façon de
procéder; une quinzaine de minutes, 15 à 20 minutes.
M. Benoit (Jocelyn): M. le Président, sans relire au
complet le document, nous voudrions quand même citer quelques
éléments qui nous apparaissent importants, où on doit
aussi mettre plus d'emphase.
D'abord, nous tenons à saluer la présence du
député de Labelle, notre région, M. Jacques
Léonard, et la Corporation de développement des
Laurentides...
Le Préskient (M. Joly): Bonjour, M. Léonard.
Une voix:...
M. Léonard: Je vous remercie pour tant de
bonté!
M. Benoit (Jocelyn): nous aurions souhaité saluer la
présence du député de prévost qu'on a vu tout
à l'heure, m. forget. malheureusement, il a dû quitter.
Une voix: Un à zéro...
M. Benoit (Jocelyn): Ce qui est important pour nous, c'est que
lors du Forum sur l'emploi les gens de la région Laurentides se sont
engagés, et nous avons continué après le Forum sur
l'emploi à y travailler par la création d'un groupe de travail
régional sous l'égide de la Corporation de développement
des Laurentides. C'est sur une base volontaire que les gens qui s'y sont
engagés ont poursuivi dans les objectifs du Forum.
Ce comité est composé de représentants de divers
organismes du milieu, tels que: les centrales syndicales, les commissions
scolaires, les cégeps, les corporations de développement
économique, la Commission de formation professionnelle
Laurentides-Lanaudière, les centres d'emploi, les groupes sectoriels et
ministères. C'est à ce niveau-là que la réflexion
sur le
développement de l'emploi se fait en termes de concertation
régionale. On parle bien de concertation et non de programmes.
Le fruit de nos réflexions, c'est un petit peu la position qu'on
vous présente aujourd'hui. D'abord, la Corporation de
développement des Laurentides est une corporation régionale
privée à but non lucratif regroupant plus de 260 membres
provenant de différents milieux: le municipal, les travailleurs, les
affaires et les milieux institutionnels. Dans les milieux institutionnels
associatifs, nous y retrouvons beaucoup de milieux sectoriels, ce que nous
allons aborder tout à l'heure.
Notre Corporation est un organisme de concertation et d'action dont le
mandat est d'assurer la promotion et la défense des
intérêts de la région et d'assurer aussi la
préparation, l'organisation et le suivi des conférences
socio-économiques régionales. Dans le cadre de la réforme
Picotte, évidemment, nos mandats seront modifiés. La CDL a
consulté son conseil d'administration, donc, 39 personnes et
différents groupes, avant d'en arriver à la proposition qu'on
propose aujourd'hui. Dans un premier temps, disons que la politique ou
l'énoncé de politique, tout comme l'énoncé
gouvernemental en matière de développement de la main-d'oeuvre,
nous les avons accueillis positivement.
Le projet de loi 408 a reçu un accueil plus mitigé,
peut-être parce qu'on n'avait pas tout l'éclairage voulu ou que
les arrimages ne se faisaient pas. Nous croyons qu'en matière de
formation de la main-d'oeuvre, un coup de barre gouvernemental s'imposait.
D'une part, une politique gouvernementale entraîne une priorisa-tion du
sujet et, d'autre part, permet d'encadrer les différents intervenants
dans une stratégie commune.
Nous aurions, et de loin, souhaité une politique de plein emploi,
où la préoccupation de formation aurait été
intégrée à une stratégie de développement
social et économique. Une prochaine étape, peut-être.
Contrairement à l'énoncé de politique, si les structures
soulèvent moins d'enthousiame, c'est qu'elles n'offrent pas toutes les
garanties qu'elles répondront adéquatement aux objectifs pour
lesquels elles ont été créées. Nous savons qu'il
n'existe pas de solution miracle. Aussi, sommes-nous prêts à
laisser la chance au coureur. Les ajustements nécessaires pourront
toujours, être apportés en temps et lieu et au fur et à
mesure de l'actualisation des objectifs poursuivis en autant que, dans chaque
région, nous puissions avoir l'attitude qu'il faut pour s'adapter et
adapter les nouveaux modes de fonctionnement. Je laisse la parole à mon
collègue, Jocelyn.
M. Lachance (Jocelyn): Au niveau de l'analyse de la situation,
globalement, je pense qu'on est d'accord avec une petite sourdine. Le document
laisse l'impression que le manque de formation est une cause importante, sinon
la cause du chômage. On ne pense pas que ce soit le cas. On ne pense pas
que ce soit le manque de formation des travailleurs qui soit la cause du
chômage. Il y en a un tas qu'on énumère, à laquelle
liste on pourrait ajouter. Cependant, nous avons été heureux de
constater la volonté d'établir une concordance entre les
politiques de formation et les stratégies de développement
économique. Il faut s'assurer que cette concordance suive
l'évolution de la stratégie afin d'assurer la cohérence de
notre développement.
Au niveau du raffermissement de l'approche sectorielle, le ministre
Bourbeau déclare: «De toute évidence, on assistera au cours
des prochaines années au raffermissement de cette tendance qui consiste
à réduire notre dépendance des ressources naturelles au
profit des activités de production faisant appel au génie, au
savoir, aux compétences, en somme...»
Oui, mais parmi les 13 grappes industrielles de son collègue
mises de l'avant par le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la
Technologie, 4 reposent sur la transformation des ressources naturelles.
Exporter ces ressources dans un marché mondial hautement concurrentiel
suppose des activités de production qui, pour paraphraser le ministre,
si on y revient, «font appel, elles aussi, au génie, au savoir,
aux compétences.» Selon nous, il ne faut surtout pas mettre en
contradiction les ressources naturelles et les compétences.
L'agriculture peut en être un exemple à plusieurs niveaux.
Il nous semble donc important que cette question soit approfondie afin
que les secteurs reliés aux ressources naturelles ne soient pas
pénalisés par la mise en place de politiques gouvernementales sur
le développement de la main-d'oeuvre. Comment ces secteurs pourront-ils
évoluer vers des produits à valeur ajoutée, comme le
souhaite la nouvelle stratégie de développement
économique, si on ne reconnaît pas leur poids dans
l'économie du Québec et si on ne les supporte pas dans leur
évolution, entre autres, par des programmes de formation
appropriés? Autrement dit, ne pas perpétuer le réflexe que
si, à l'école, tu n'es pas bon, tu ne seras qu'un travailleur
forestier ou qu'un travailleur minier.
Nous trouvons très intéressant le principe de l'approche
sectorielle. Et là, je peux vous dire qu'on a des problèmes. Au
niveau des questions, on a trouvé une non-adéquation entre la
sémantique de la loi et celle de l'énoncé de politique.
D'une part, on parle de comités d'adaptation de la main-d'oeuvre et,
d'autre part, on parle de comités de main-d'oeuvre. Alors, ce qu'on se
demande: Est-ce qu'on parle de la même chose? Est-ce qu'on parle des bons
vieux CAMO sectoriels qu'on a connus au niveau national habituellement, ou si
on parle des anciens comités sectoriels, des CFP dans nos
régions? J'avoue que pour nous autres, ce n'était pas clair.
Ça ne
l'est toujours pas. C'est une question qu'on vous laisse et, suite aux
réponses, on pourra en discuter. Quelle que soit la réponse de
toute façon, on ne retrouve pas là l'aspect régional. On
peut parler de transport au niveau régional, ça ne correspondra
peut-être pas à notre problématique régionale de
transport.
Une autre question importante: Outre les catégories
d'entreprises, il y a des catégories de travailleurs. Puisque cette
politique ne repose pas sur la fusion des ministères qui assurent la
sécurité du revenu, il nous apparaît important de ne pas
créer deux ou trois catégories de travailleurs selon qu'ils sont
en emploi, qu'ils reçoivent des prestations de la sécurité
du revenu, des prestations d'assurance-chômage ou qu'ils soient
catégorisés comme étant sans revenu, où on retrouve
en très forte partie des femmes qui veulent réintégrer le
marché du travail, mais qui ne sont dans aucune catégorie. Et
quand on met des programmes de formation, on nous taxe toujours ou on y accole
une catégorie de travailleurs.
Dans le même ordre d'idées, l'article 25 est beaucoup trop
large et pourrait constituer une barrière à ceux qui pourraient
peut-être le plus bénéficier de cette politique. En
conséquence, nous en demandons le retrait ou, du moins, que l'on ajoute
à la loi une politique de tarification qui soit «congruente»
à la capacité de payer de l'utilisateur. (16 heures)
Au niveau des structures, nous l'avons signalé au début de
cet exposé, nous voulons bien donner une chance au coureur. Cependant,
cela ne nous empêche pas de nous questionner. Nos principales
interrogations portent sur la cohérence entre l'énoncé de
politique et la structure proposée dans la loi. Dans un premier temps,
nous avons été surpris de constater que, malgré des
visions très décentralisées de la politique, nous nous
retrouvons avec une structure fortement hiérarchisée et
centralisée. Si certains de nos membres privilégient un
resserrement de la structure actuelle afin d'assurer une action plus
cohérente sur les plans national, régional et local, on craint
qu'une trop forte dépendance de ta structure régionale à
la société nationale ne soit sclérosante.
D'une part, il ne faut pas oublier que l'innovation ou encore la
réponse à des besoins locaux ou régionaux
spécifiques provient rarement des paliers supérieurs. Il faut
s'assurer de marges de manoeuvre adéquates pour bien mener à
terme cette mission. On peut donner, à titre d'exemple, ce que le
gouvernement du Québec a mis sur pied, les comités de
reclassement à entrées continues. On se rend compte que, selon
les régions, ils prennent des formes complètement
différentes. Il ne faudrait pas perdre cette latitude.
Au niveau des compositions de la société nationale, on est
d'accord. On identifie, par contre, que certains groupes pourraient
peut-être y voir leur place sans pour autant changer le projet de loi.
C'est un petit peu la même chose au niveau de la composition de la
société régionale. On aimerait avoir un petit peu de
latitude pour augmenter la représentation à ce
niveau-là.
Je finis par la région. Je vous le résume très
rapidement. On nous a identifiés comme étant la région
Laurentides-Lanaudière au niveau de la CFP. Par contre, II y a un
arrêté en conseil... Les articles 31 et 56. On accepte, dans ces
articles-là, que Laurentides soit séparé de
Lanaudière. C'est un arrêté en conseil et ce qu'on vous
demanderait au niveau des nouvelles structures, c'est d'en former deux, une
pour Laurentides, une pour Lanaudière, et j'aimerais beaucoup qu'on
revienne à ça dans la période de questions. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Lachance.
M. Benoit (Jocelyn): En terminant, si vous permettez».
Le President (M. Joly): Oui, M. Benoit.
M. Benoit (Jocelyn): ...il y a deux éléments...
Le Président (M. Joly): Vous aimeriez souligner la
présence du député de Prévost...
M. Benoit (Jocelyn): J'aimerais souligner la présence du
député de Prévost, M. Forget.
Le Président (M. Joly): Merci. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Benoit (Jocelyn): Une chose très importante dans notre
région et une particularité régionale quand on parie de
développement de la main-d'oeuvre, de formation de la main-d'oeuvre,
c'est le travail saisonnier dans le domaine de la forêt, de
l'agriculture, du tourisme, de la chasse et de ta pêche. Et il faut avoir
des moyens autres que ce qui vient d'en haut pour être capable de
permettre à cette main-d'oeuvre de s'adapter.
L'autre élément qui est toujours très important
pour moi, c'est la région Laurentides, ce n'est pas le nord de
Montréal. C'est une région eh soi, ce n'est pas un parc
d'amusement pour les. Montréalais, c'est une région qui a des
caractériques particulières, et ça, on y tient beaucoup.
Dans ce sens-là, je pense que le ministre responsable du
Développement régional l'a bien compris, le ministre de la
Santé et des Services . sociaux l'a bien compris, il y a une
région Laurentides. On aura notre développement de la
santé indépendant de Lanaudière, et nous avons la
Corporation de développement régional qui est Laurentides. Dans
le cadre de l'implanta-
tion des sociétés de développement régional
de la main-d'oeuvre, nous tenons absolument à avoir notre propre
entité régionale. Et ça, c'est unanime, et même nos
collègues de Lanaudière partagent notre point de vue.
Le Président (M. Joly): Parfait. Je vous remercie, M.
Benoit. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Bourbeau: M. le Président, il me fait plaisir de
souhaiter la bienvenue à la Corporation de développement des
Laurentides, une région qui fait un peu le pendant à la
Montérégie, M. le Président. Moi, je suis de la rive sud
et vous, des Laurentides, de la rive nord de Montréal. Donc, nous sommes
des cousins.
Le Président (M. Joly): Effectivement, mais...
M. Bourbeau: Des cousins germains.
Le Président (M. Joly): ...on se sent enclavés
quand on est à Laval.
M. Bourbeau: Alors, votre problématique...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: ...je la comprends.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre.
M. Bourbeau: Dans votre document, vous pariez de la
problématique sectorielle. Vous en traitez abondamment et vous dites, en
page 7: Nous trouvons très intéressant le principe de l'approche
sectorielle, et vous nous dites que le document est vague à souhait sur
ces comités. Alors, vous posez la question: Quels sont donc ces
comités sectoriels auxquels le document fait référence et
de quel ministère relèvent-ils? Ça m'étonne un peu,
cette question-là, parce que les comités sectoriels, ils existent
présentement, depuis un bon bout de temps. Pour votre information, je
peux vous en donner la nomenclature. Nous en avons un bon nombre
présentement. Nous en avons une dizaine, de comités sectoriels,
qui existent et qui relèvent du ministère de la Main-d'oeuvre, de
la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.
Mme Harel: Est-ce qu'on peut demander, M. le Président, si
le ministre accepterait de déposer sa liste aux membres de la
commission?
M. Bourbeau: Oui. Je la ferai parvenir, M. le Président.
Je n'en ai qu'une seule copie.
Le Président (M. Joly): II me fera plaisir de faire
reproduire et de la distribuer aux membres de cette commission.
M. Bourbeau: Alors, le plus ancien, c'est celui qu'on appelle le
CAMAQ. C'est le Centre d'adaptation de la main-d'oeuvre aérospatiale du
Québec, qui date d'avril 1979. Il y a eu, après ça, le
Comité sectoriel du meuble et des articles d'ameublement, en avril 1989.
Il y a celui du transport routier des marchandises, en avril 1990; l'industrie
des services automobiles, en septembre 1990; l'industrie de la
pétrochimie et de la chimie connexe, en novembre 1990; l'industrie du
verre plat, en mars 1991; l'industrie de la fonderie, en mars 1991; l'industrie
de la mode, le Comité sectoriel du vêtement, en mai 1991; il y a
également un Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre pour le
centre spécialisé de la mode, en mai 1991 et, finalement, dans le
secteur du cuir, dans les régions 01 et 03, en avril 1991. Alors, vous
voyez que ce n'est pas pour nous une innovation, les comités sectoriels.
On est habitués, on les connaît et on en voit les bienfaits depuis
quelques années déjà. Alors, ces
comités-là...
Je pense qu'en lisant votre mémoire, on sent chez vous une
incertitude par rapport à ces comités quant à leurs
objects et à leur fonctionnement. Alors, ces comités ont pour
mandat de faire une analyse de la situation dans un secteur donné et non
pas dans une région donnée. L'industrie - je ne sais pas - de la
mode, elle peut être présente dans plusieurs régions du
Québec à la fois, de même que le transport, ou la fonderie,
ou le verre plat. Alors, on réunit les principaux intervenants d'un
secteur donné, on fait une analyse de la situation, des
problèmes, une analyse prospective: quelles sont les perspectives de
développement, les débouchés, et on tente de trouver des
solutions pour le développement, bien sûr, des secteurs et, quand
ce sont des comités sectoriels main-d'oeuvre, on tente, bien sûr,
de voir quels seront, dans l'avenir, les problèmes de main-d'oeuvre dans
ce secteur-là, en tentant de voir venir un peu les changements
technologiques et, en conséquence, on prend des actions maintenant pour
faire en sorte qu'éventuellement la main-d'oeuvre soit au rendez-vous de
la technologie. Alors, c'est ainsi que certains des comités sectoriels
ont recommandé la mise sur pied d'écoles
spécialisées. La députée de Hochelaga-Maisonneuve a
participé à quelques lancements. Des centres
spécialisés, par exemple, qui vont faire en sorte qu'on va... Et
ça se fait en collaboration avec le ministère de
l'Éducation, que je salue ici par ses représentants, de
l'Enseignement supérieur et de la Science. Ça se fait
également souvent avec le ministère de l'Industrie et du
Commerce. En fait, tous ces groupes-là ensemble, les gens du milieu,
travaillent pour faire en sorte de promouvoir le développement de la
main-d'oeuvre dans ces secteurs.
Vous comprenez alors que ça n'a pas
nécessairement une... Ça a des retombées
régionales, bien sûr, mais ça peut difficilement ne
s'appliquer que sur un territoire d'une région. C'est une analyse
globale dans un secteur. Alors, quand vous me dites... Vous parlez de
l'arrimage et vous dites: II nous semble primordial de retrouver sur le plan
régional une adaptation de ces comités sectoriels pour
répondre aux particularités régionales. Je vous dis: Oui
et non. Oui, il y a certainement des applications régionales, mais, en
général, les problèmes d'un secteur, Ils sont les
mêmes partout. Les problèmes de régions ne sont pas les
mêmes partout. Ça, je suis d'accord avec vous. Et si un secteur a
des problèmes d'adaptation de la technologie, ça va être
vrai autant dans les Laurentides que dans l'Estrie - je vais vous donner la
parole après, là - que dans la Montérégie, et il
faut étudier les problèmes du secteur. Souvent ces
problèmes sont les mêmes aux États-Unis qu'en Ontario et au
Québec. C'est la technologie en général qui évolue.
Donc, il faut s'adapter à ça.
Alors, c'est pour ça qu'on peut difficilement demander d'avoir un
comité sectoriel régional, à moins qu'un secteur soit
concentré uniquement dans une région, par exemple. Je ne sais
pas, moi, s'il y avait une région au Québec qui était la
seule à avoir une industrie ou une activité quelconque,
économique, là on pourrait faire un comité sectoriel qui
serait sectoriel. On n'a pas besoin d'ajouter régional. Il serait
sectoriel. Et comme les secteurs seraient confinés à une
région, il serait, par voie de conséquence, régional
aussi. Alors, vous saisissez un peu les nuances. Je voulais vous faire ce
point-là.
M. Benoit (Jocelyn): M. le ministre, par rapport à votre
préoccupation, on connaît un petit peu... Notre
préoccupation, elle origine d'une problématique très
particulière qu'on a vécue dans le cadre de ces comités
sectoriels provinciaux. Malgré l'appui de toute la deputation au
pouvoir, le caucus des députés libéraux des Laurentides,
la Corporation de développement des Laurentides, de nos élus
fédéraux, nous avions des problèmes d'adaptation de la
main-d'oeuvre dans le secteur de l'aéronautique. Malgré la
concertation entre le collège Edouard-Montpetit et son école
nationale d'aéronautique, qui a une expertise provinciale, et les
collèges de la région, le CAMAQ n'a jamais daigné nous
entendre, nous, les gens de la région Laurentides. C'est dans cette
perspective-là que notre crainte de voir que des comités
d'adaptation nationaux sans antenne régionale, ça risque,
à certains moments donnés, de donner toujours le maximum. On
n'est pas contre que l'est de Montréal ait ses bonbons - on l'a vu -
parce qu'il y a une équité à avoir au Québec, mais
on a une problématique dans la région, et je peux vous dire, M.
Bourbeau, que toute l'équipe ministérielle nous a appuyés
a 100 % avec M. Ryan en tête, les organismes régionaux, les
entreprises régionales, et on n'a pas daigné être
reçus. Il y a des particularités chez Techner, par exemple, ou
chez Bell Helicopter qu'on ne retrouve pas ailleurs. C'est dans cet esprit
qu'on dit qu'il faut avoir une antenne régionale. Les problèmes
de la foresterie, le mixte feuillus-résineux dans la région
Antoine-Labelle, c'est particulier au Québec. Ce qu'on vous demande,
c'est: quelle que soit la solution que vous prendrez, assurez-vous qu'au niveau
régional il y ait des antennes et, pour nous, ça nous
apparaît vital.
La formation de 2000 personnes comme machinistes pour Pratt &
Whitney ou Canadair, on pense que c'est prioritaire. C'est important Mais
ça ne règle pas les problèmes de Nationair,
indépendamment d'autres types de problèmes, problèmes de
formation technologique ou chez Bell Helicopter ou ailleurs. C'est ce
besoin-là, cette demande-là qu'on fait, parce que ça nous
inquiète, qui sera toujours très large. Le textile, par
origine... Je suis Beauceron d'origine. Le textile, il y en a dans la Beauce.
Je pense que le textile de la Beauce n'est pas le même que le textile de
Montréal.
Quand on parle de mode, de textile, il faut penser aux régions.
Et je me souviens, et c'est une anecdote que je veux vous rappeler, quand les
gens de la commission Bélanger-Campeau se sont mis à se promener,
l'an passé, à travers le Québec, H y a une journaliste qui
disait: On va aller voir le pouls des régions. Il y en a peut-être
beaucoup qui ont été déçus. Les gens ne se sont pas
prononcés pour une option plus qu'une autre. Ils ont dit: On veut, dans
les régions, avoir l'autonomie. Et dans le développement de la
main-d'oeuvre, on tient à avoir un minimum d'autonomie.
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Bourbeau: Oui, oui, je suis bien d'accord avec vous. Quand
vous dites que vous avez eu l'appui unanime de la députation, est-ce que
vous pariez de la députation fédérale aussi?
M. Benoit (Jocelyn): La députation fédérale,
M. Bourbeau, vous avez sûrement des liens dans notre région. (16 h
15)
M. Bourbeau: bon, très bien. je suis content. je ferai
rapport à qui de droit de votre satisfaction. revenons à la
main-d'?uvre, si vous voulez. je comprends très bien ce que vous me
dites. moi, je trouve aussi inexcusable qu'un comité d'adaptation de la
main-d'oeuvre ait refusé de vous entendre. c'est ce que vous dites. je
peux vous assurer que je vais m'assurer que, dorénavant, votre voix soft
entendue. je trouve cela assez incroyable qu'un camo refuse d'entendre des gens
qualifiés, là, particulièrement intéressés
dans un projet. je vais voir ce qui s'est passé. que vous n'ayez pas eu
gain de
cause, ça, il peut y avoir des raisons, mais que vous ne soyez
pas entendus, ça, c'est assez inexcusable.
Maintenant, je sais, par ailleurs, qu'il y a une entente assez
intéressante entre le collège Édouard-Montpetit et le
cégep de Saint-Jérôme pour ce qui est des cours
donnés chez Bell Helicopter, pour la formation chez Bell Helicopter. Je
crois que ça a quand même assez bien fonctionné sur le plan
de la formation des élèves, des étudiants en
aéronautique. Je crois que ça fonctionne bien, ça?
M. Benoit (Jocelyn): Oui, et je voudrais ajouter le
collège Lionel-Groulx aussi, de Sainte-Thérèse. Oui,
ça, ça va bien, mais je pense que les besoins régionaux,
c'est d'un autre ordre. Je ne voudrais pas faire un débat
là-dessus, parce qu'il y a d'autres préoccupations et que le
temps file, mais on aura sûrement l'occasion d'en reparler.
Ce qu'on veut faire sentir, c'est l'importance d'antennes sectorielles,
d'antennes de sous-régions et de régions.
M. Bourbeau: O.K. Le conseil d'administration de la
société régionale - vous parlez un peu de ça, je
crois, dans votre mémoire - comment voyez-vous la composition de ce
conseil-là, vous, pour qu'il soit efficace et qu'il représente
toutes les couches de la société?
Une voix: Jocelyn.
M. Lachance: Vous parlez de composition de sociétés
nationale ou régionale?
M. Bourbeau: Les deux. Vous avez traité de ça dans
votre mémoire, là. Vous pariiez de...
M. Lachance: Bien, on a deux propositions. On s'est rendu compte
qu'il y avait comme des trous qu'on pourrait remplir. Et, à ce
niveau-là, quand on vous dit, par exemple, qu'au niveau de la
composition de la Société nationale, on aimerait revoir des
groupes présents...
M. Bourbeau: Les jeunes.
M. Lachance: ...à cette table-là, mais sans pour
autant changer l'ensemble de la proposition, ça veut dire s'assurer
d'une représentation de groupes qui constituent une tendance... Parmi
ces groupes, on a identifié: jeunes, femmes, groupes ethniques. Et on
vous propose de vous servir de l'article 5 pour intégrer ces
gens-là.
M. Bourbeau: Bon, je voulais vous le faire dire. Ce qui
m'étonne un petit peu là-dedans, d'abord vous voulez que ces
groupes-là soient une délégation dite gouvernementale, ce
qui permettrait au gouvernement de n'avoir aucun autre représentant ou
à peu près. Mais pourquoi vous choisissez les jeunes, les femmes
et les groupes ethniques, qui sont parmi ce qu'on appelle «les groupes
cibles», mais, il y a quand même d'autres groupes qui revendiquent
aussi de faire partie de la Société. Par exemple, les personnes
handicapées nous ont demandé d'être
représentées, les organismes communautaires, Jes travailleurs
autonomes. J'en oublie sûrement. Et... Pardon?
Une voix: Les communautés culturelles.
M. Bourbeau: Les communautés culturelles, donc, les
groupes ethniques ici.
Une voix: Les groupes ethniques sont là.
M. Bourbeau: Et pourquoi vous en choisissez quelques-uns et vous
en excluez d'autres?
M. Lachance: On est un petit peu pris comme vous, il faut bien
faire des choix de temps en temps. Mais si vous regardez aussi la composition
au niveau régional, on va combler d'autres... Si vous parlez
d'organismes communautaires, on les retrouve au niveau régional.
Alors, ce qu'on a essayé de faire, c'est de faire une
espèce de représentation plus globale tant au niveau
régional que national, et, ce que vous avez nommé, on les
retrouve - si vous fartes la part des choses - ou au régional ou au
national, finalement.
M. Bourbeau: O.K. Pour l'instant, M. le Président, je vais
céder mon droit de parole et je reviendrai peut-être
tantôt.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous plaît.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, il me fait
plaisir de vous accueillir au nom de l'Opposition, M. Benoit, M. Lachance et M.
Labrie, et peut-être de continuer l'échange là où
vous l'avez laissé avec le ministre, sur la question des comités
sectoriels régionaux.
Votre exemple était extrêmement percutant et c'est
intéressant, parce que finalement vous voyez, vous faisiez justement
allusion à cette école d'aéronautique qui a
été annoncée pour l'est de Montréal. Et ici
même, dans cette commission, nous avons reçu la Corporation de
développement de l'est et la société PRO-EST qui sont
venues nous dire qu'elles auraient préféré l'école
des plastiques. Et le fait est que moi, comme députée, quand le
ministre de l'Éducation m'avait annoncé l'école
d'aéronautique, bon, très bien, merci, mais c'est plutôt
l'école de plastiques. Parce qu'on a assez d'inconvénients avec
les raffineries, vous comprenez que dans l'est on voudrait avoir aussi un peu
d'avantages de ce qui peut découler de la transformation, en
deuxième et troisième transformations avec Soligaz
éventuellement et avec le butane, etc. Donc, le plastique, pour nous,
c'est étroitement associé. Là, le gouvernement vient de
décider que le plastique, ça s'en va dans le sud-ouest. Vous
voyez?
Donc, dans le fond, la question que je me posais en lisant votre
mémoire, c'est: Comment faire, effectivement - et vous n'êtes pas
les seuls à demander au ministre, mais, aujourd'hui, vous êtes
convaincants avec l'exemple que vous nous donnez - pour que les comités
sectoriels ne planent pas trop haut, là où il n'y a finalement
que des très grandes entreprises, et comment faire pour qu'il y ait
cette dimension sectorielle qui soit prise en considération? Est-ce que
ce n'est pas par les CCR, les comités consultatifs régionaux qui
existent déjà? Est-ce que ce n'est pas par ce biais-là?
Est-ce qu'il ne faut pas les maintenir? Parce que plusieurs organismes sont
venus demander que les comités consultatifs régionaux soient
obligatoirement maintenus dans la structure et introduits dans le projet de loi
408. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
Le Président (M. Joly): M. Labrie.
M. Labrie (Jean-Pierre): À ce niveau-là, je pense
qu'il faut comprendre que les comités consultatifs, dans la structure
actuelle, sont intéressants. Par contre, le fait d'en avoir sur le plan
national... Je pense que M. Bourbeau le soulignait, les problématiques,
par exemple, au niveau de la mode, de l'industrie de la couture, ce n'est pas
très différent dans les Laurentides que ça peut
l'être sur la Montérégie, à Québec ou
ailleurs à travers la province.
Par contre, II peut arriver que certains secteurs d'activité, on
parle d'aéronautique, on pourrait parler de la forêt
d'Antoine-Labelle qui a des particularités tout à fait, je ne
dirais pas particulières, mais un synonyme si vous voulez, ce qui fait
que la région est mal desservie par un comité sectoriel qui ne
répond pas aux besoins spécifiques d'une région.
Mme Harel: Vous parlez d'un comité sectoriel national.
M. Labrie: National. Alors, ce qu'on demande, nous, c'est dans
les cas où ça s'applique, où II y en a
véritablement un besoin, c'est que les régions aient des
possibilités de créer des structures régionales, des
espèces de comités consultatifs ou l'équivalent, si vous
voulez, des structures, des comités sectoriels, mais sur un plan
régional, là où il y en a véritablement un besoin,
où les spécificités de la région le demandent,
qu'on puisse le faire.
Mme Harel: D'accord.
M. Labrie: C'est dans ce sens-là, notre demande.
M. Benoit (Jocelyn): Si vous le permettez, en relation avec votre
question, quand on dit «sectoriel» et «grand secteur
d'activité», on pense qu'il doit y avoir comme un comité
parapluie - on a entendu ça déjà au Québec - qui va
parier davantage du grand secteur. Mais il ne faut jamais perdre de vue les
sous-secteurs.
On ne parie pas, dans notre mémoire, et on en parie très
peu dans le projet, de toute la sous-traitance, de la sectorisation. Il faut
avoir de la cohérence. Quand le ministre de l'Industrie et du Commerce
nous parie de grappes industrielles, ça nous emballe. En région -
le ministre va être chez nous, dans notre région, le 6 avril - on
a parlé des différents décideurs économiques, les
gens sont emballés. Quand le ministre du Développement
régional nous parie de ramener des choses au niveau régional dans
le cadre de sa nouvelle politique, et il nous en annoncera les grandes lignes
demain en région, on est emballés. Quand le ministre de la
Santé nous dit: Les régies de la santé vont avoir du
pouvoir... Il ne faudrait pas, quand on parie de main-d'oeuvre, qu'on
centralise ça à Québec. Il faut avoir de la
cohérence. Or, H est important d'avoir des comités de type
parapluie, et on sait que pour la petite et moyenne entreprise, il est
difficile de siéger sur ces commissions-là parce qu'elles n'en
ont pas les moyens.
Je ne fais pas de discrimination dans ce que je vais dire.
Libérer quelqu'un de Canadair pour aller travailler sur un comité
sectoriel d'adaptation de la main-d'oeuvre ou de développement de la
main-d'?uvre en aéronautique, c'est peut-être facile. Pour la
petite PME qui fait une petite pièce, je pense à
Saint-Rémi-d'Amherst, on a des pièces qui sont faites pour
Canadair. Le président-directeur général de la compagnie a
20 employés; il est président-directeur général,
contremaître puis il est ouvrier spécialisé. Lui, il ne
pourra pas aller au sectoriel et jamais il ne se fera entendre. Par contre, il
fait partie des petites entreprises qui produisent des petites pièces
pour l'aérotechnique au Québec, mais il n'a pas de place.
Mme Harel: Vous pariez de sous-secteurs et vous pariez, dans
votre mémoire, de sous-régions également. Vous en pariez
à la page 11 de votre mémoire et vous vous demandez comment,
cette fois, la société régionale elle-même peut
assurer l'équité de présentation pour toutes les
sous-régions d'une région administrative aussi vaste que celle
des Laurentides.
D'autre part, je souhaite peut-être que le ministre, aujourd'hui,
fasse la même chose qu'hier quand il a rassuré le maire de
Montréal en lui confirmant qu'il envisageait qu'il y ait une Commission
de formation professionnelle au niveau de l'île et non plus du
Montréal métro
qui comprenait Laval. Vous, vous venez nous dire: II faut qu'il y ait
une société régionale. Enfin, je dis une «Commission
de formation professionnelle», mais je devrais dire plutôt une
nouvelle société régionale au niveau de 111e seulement.
Vous, vous nous dites: II en faut une au niveau des Laurentides seulement comme
il en faut une au niveau de Lanaudière. C'est ça que vous venez
de dire au ministre, aujourd'hui.
M. Benoit (Jocelyn): Oui. Ce qu'on pense aussi, qui est
très important, c'est que dans le cadre de cette société
de développement régional, je pense qu'autant M. Forget que M.
Léonard vont nous appuyer, la région des Laurentides a des
sous-régions qui ont des particularités. Présentement,
dans la région de la MRC de Mirabel, on développe beaucoup
l'industrie de pointe, particulièrement l'aérotechnologie. Quand
on se trouve dans les MRC Pays-d'en-Haut et Laurentides, on parle beaucoup de
tourisme. Quand on se trouve dans Antoine-Labelle, on parle de forêt et
d'un autre type de tourisme. Quand on se retrouve dans RMère-du-Nord, on
parie de services et de développement industriel et technologique. Quand
on parle de Groulx et de Deux-Montagnes, c'est d'autres particularités.
Je pense qu'au niveau de la Société régionale, il est
important que les gens de nos sous-régions ne soient pas oubliés,
qu'on ait la garantie qu'il y ait des gens d'Antoine-Labelle à la
Société comme de RMère-du-Nord, indépendamment du
sectoriel.
Mme Harel: Là, vous êtes obligés de vous fier
à la bonne volonté des ministres qui vont se succéder et
qui vont faire les nominations parce que, finalement, dans le projet de loi,
les conseils régionaux sont comme des comités consultatifs de
personnes entièrement nommées par le ministre. Il faudrait que du
milieu, à ce moment-là, il y ait aussi des recommandations qui
viennent parce que le milieu syndical et le milieu patronal auront des
recommandations à faire. Il en faudrait donc, parmi les recommandations,
qui viennent de ces sous-régions. C'est ça qu'il faut
comprendre.
M. Benoit (Jocelyn): On trouve ça important et prioritaire
parce qu'on peut se retrouver avec une société régionale
où les gens sont tous du sud et qu'il n'y ait personne du nord.
Ça devient dramatique.
Mme Harel: Ne vaudrait-il pas mieux laisser jouer le processus
électif régional plutôt que la nomination, comme le
changement qui est prévu dans le projet de loi?
M. Benoit (Jocelyn): On a fait l'expérience, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve, dans le cadre de la
réforme de la santé dans le comité d'implantation de la
régie par collège électoral et, notre évaluation,
on a trouvé ça très riche parce que chacune des
sous-régions était représentée soit dans le cadre
d'élus municipaux, d'intervenants sociaux, de groupes communautaires ou
socio-économiques. Alors, tu trouves du monde de partout, et ça
fait une représentation équilibrée.
Mme Harel: Donc, il faut comprendre que pour assurer une
meilleure garantie de représentation des sous-régions, c'est
peut-être, justement, le mode électif.
M. Benoit (Jocelyn): Je pense que le ministre Côté,
qui a été ministre responsable du Développement
régional, qui est un régionaliste, qui a une très bonne
vision des régions du Québec, a eu une très bonne
idée dans cette démarche-là. Peut-être que la
main-d'oeuvre pourrait se l'approprier.
Mme Harel: dans votre mémoire, à la page 8, vous
soulignez combien il est important de ne pas créer deux ou trois
catégories de travailleurs selon qu'ils sont en emploi ou qu'ils
reçoivent des prestations de telle ou telle source. je comprends que
vous êtes en désaccord avec l'exclusion des personnes
assistées sociales aptes au travail qui sont nombreuses, là, 225
000, de l'application des programmes de formation. est-ce que c'est ça
qu'il faut comprendre?
M. Lachance: C'est qu'à chaque fois qu'on va faire des
catégories... Si on regarde les programmes, il y a des programmes de la
main-d'oeuvre financés par le fédéral, des programmes
financés par le provincial où tu peux, si ton revenu vient du
provincial; tu peux s'il vient du fédéral. Ton chômage
n'est pas encore commencé, tu ne peux pas tout de suite, il faut que tu
attendes, mais les inscriptions sont tout de suite. La troisième
catégorie qu'il ne faut pas oublier parce que... Je travaille pour les
Laurentides, oui, mais il y a une problématique. Ils vont me chicaner un
peu, mais la problématique Laval, c'est que n'importe qui, à
Laval, peut bénéficier des services de recherche d'emploi, sauf
les personnes qui n'ont pas de revenus.
Mme Harel: Les femmes au foyer.
M. Lachance: Voilà! ...qui veulent retourner sur le
marché du travail. Elles n'entrent dans aucune coche. C'est
peut-être une problématique spécifique à Laval, mais
on la retrouve à d'autres échelles un peu partout. Quelqu'un est
prestataire de la sécurité du revenu, il a sa scolarité,
il a un petit peu d'expérience, il y a un cours qui part via ce qu'on
appelait, à l'époque, des groupes de coordination, la norme,
c'est: il faut que tu retires du chômage. Il est fait, il ne peut pas.
Alors, qu'on arrête de catégoriser des gens. Qu'on parte
dès besoins des gens et qu'on leur
donne un coup de main.
Mme Harel: On m'indique qu'il me reste peu de temps. Dans votre
mémoire, il y a un aspect nouveau dont on n'a jamais encore parlé
jusqu'à maintenant, ici, devant cette commission, et puis on
achève. On aura entendu quand même presque 80 groupes au total,
à la fin, la semaine prochaine. Vous nous dites de faire bien attention
de ne pas confondre le fait qu'il peut y avoir des grappes industrielles avec
le fait qu'il faille laisser tomber les ressources naturelles, que, finalement,
les grappes industrielles souvent dans les secteurs qui sont en croissance, ce
sont les secteurs de transformation des ressources naturelles. Vous donnez
l'exemple des métaux, minéraux, pétrochimie, plastique,
industries bioalimentaires, industries forestières. J'aimerais vous
entendre là-dessus. Il me semble qu'il y a quelque chose d'important
là. De la valeur ajoutée, on s'en fait parier.
M. Benoit (Jocelyn): Ce qu'on veut dire là-dedans est
important pour notre région et sûrement pour beaucoup d'autres
régions. Il ne faut pas engager un combat entre le développement
technologique et la mort des ressources naturelles. Le Québec,
étant ce qu'il est, a des mines, des forêts, des terres. Ce qu'on
a reproché traditionnellement et historiquement aux gouvernements du
Québec, c'est de ne jamais avoir fait d'efforts pour faire de la
transformation, qu'on parie de l'amiante, qu'on parle de l'or, qu'on parle de
la forêt. Quand on va abattre des arbres, on va les aménager un
petit peu dans une scierie et on va les envoyer transformer en Norvège,
en France, en Angleterre. Quand on parle de valeur ajoutée, c'est qu'il
faut être capable d'avoir un produit fini qui est exportable. Quand on
parle d'agriculture, on peut, au Québec...
Je prends un exemple très concret dans notre région: tout
le développement des hydroserres, dans la région de Mirabel.
C'est une expérience qui est très riche. Qu'est-ce qu'on fait
avec ça? Alors, II ne faut pas mettre en compétition un
développement technologique de pointe ou des grappes où on va
parler d'expertise très pointue et notre réalité.
J'écoute et je lis un peu les journaux, et on parle
d'hydroélectricité comme un des outils. Peut-être que
l'énergie hydroélectrique pourrait nous amener à
développer des technologies nouvelles. Il faut faire le maillage des
deux et non pas affronter les deux. Et çà,
particulièrement pour notre région où on parie d'eau,
d'air, de soi, de forêt et d'agriculture, c'est vital. Je me plais
à le répéter, les Laurentides, ce n'est pas juste un parc
d'amusement. C'est une région économique.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Benoit.
Brièvement, M. Labrie. Déjà, vous avez
dépassé...
M. Labrie: Je voulais juste ajouter à ça qu'il y a
une question de culture scientifique à laquelle il faut faire attention.
L'énoncé de M. Bourbeau semblait véhiculer une conception
dans laquelle les aspects traditionnels des secteurs d'activité
pourraient être moins générateurs de technologie, de
savoir, etc. On faisait juste une mise en garde face à ça. On
pense, par exemple, à l'agriculture où il y a de la
génétique très poussée, de la biologie, etc.
C'était juste une mise en garde, faire attention de ne pas tomber dans
le panneau et dire: C'est juste les secteurs de haute technologie nouvelle
qu'on doit regarder. Il faut regarder aussi nos acquis. Je pense que ce
n'était pas la volonté de M. Bourbeau, mais on voulait quand
même souligner de faire attention.
Le Président (M. Joly): M. Lachance, s'il vous
plaît.
Mme Harel: Excellent!
M. Lachance: Juste une petite chose. Quand j'ai lu mon texte, je
suis passé par-dessus et je m'en veux. À la page 10, le premier
paragraphe est peut-être l'endroit où on parie le plus de la
main-d'oeuvre. J'aimerais souligner avec insistance, même si ce n'est pas
long, qu'il faudrait faire attention de ne pas tomber, quand on fait de la
formation de la main-d'oeuvre en entreprise, de ne pas la faire pointue
à ce point que les travailleurs qui reçoivent cette formation
soient liés ou à l'entreprise ou à un domaine de travail
pour le restant de leurs jours, du style mines dans le Nord où
l'entreprise finance la maison de sorte qu'ils ne puissent plus s'en aller. Je
pense qu'il y a moyen, on n'a pas la solution, mais il faut avoir la
préoccupation de faire en sorte de former notre main-d'oeuvre, oui, mais
non pas si pointue qu'elle ait les poings et les mains liés à une
entreprise ou à un secteur d'activité.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. M. Benoit
(Jocelyn): Juste pour terminer... Lé Président (M. Joly):
S'il vous plaît, oui.
M. Benoit (Jocelyn): M. le Président, M. le ministre de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle, MM. les députés de l'Opposition, M.
Léonard et M. Forget de notre région, on tient à vous
remercier pour le temps que vous nous avez accordé. Soyez assurés
que la Corporation de développement des Laurentides va continuer de se
préoccuper du développement de la main-d'oeuvre pour faire de
notre région la région du Québec. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, messieurs. M. le
ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je ne peux rien faire de
plus que vous souhaiter bonne chance pour être la meilleure région
du Québec, mais vous allez avoir la Montérégle en
compétition avec vous, ça, je vous le promets!
Une voix:...
Le Président (M. Joly): Alors, au nom des membres de la
commission, à mon tour de vous remercier. Merci beaucoup. Je demanderais
maintenant aux représentants d'Alliance Québec de bien vouloir
prendre place, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 16 h 35)
(Reprise à 16 h 40)
Le Président (M. Joly): La commission reprend ses travaux.
M. Rabinovitch, j'imagine, je pense, et il y a aussi enregistrée Mme
Victoria Percival-Hilton. Madame et madame?
Alliance Québec
Mme Kearney-Gauvin (Ann): Ann Kearney-Gauvin. I am here
representing the board of directors of the Québec Association of Adult
Learning, at the request of Alliance Québec.
Le Président (M. Joly): Thank you. Could you repeat your
name, so it could be registered?
Mme Kearney-Gauvin: Ann Kearney-Gauvin.
Le Président (M. Joly): Thank you. Alors, M. Rabinovitch,
est-ce que vous êtes le porte-parole du groupe?
M. Rabinovitch (Joseph): Je pense que oui.
Le Président (M. Joly): Oui, merci. Vous avez besoin de
combien de temps pour nous présenter votre mémoire?
M. Rabinovitch: Ah! Peut-être 10 minutes, pas plus.
Le Président (M. Joly): Alors, on vous laisse le temps
nécessaire. Par après, les parlementaires vont échanger
avec vous.
M. Rabinovitch: On ne va pas relire le mémoire que nous
vous avons soumis. Le mémoire, vous l'avez en main; alors, on vous le
laisse comme ça.
Je vous remercie, M. le Président, M. le ministre, de nous
accorder le temps de vous rencontrer ici et d'exprimer notre point de vue sur
le projet de loi 408. On ne va pas rentrer dans les détails parce que
j'aimerais exprimer un point de vue général sur les grands
principes.
Nous ne sommes pas des experts, nous ne représentons pas des
régions, nous représentons la communauté d'expression
anglaise. Nous sommes ici, premièrement, pour souligner le fait que,
dans toutes les planifications que le ministère entreprend en ce qui
concerne la main-d'oeuvre, il faut considérer aussi le fait qu'il y a
plus de 10 % de la communauté québécoise qui est
d'expression anglaise, qui a les mêmes besoins, les mêmes... comme
la majorité. Alors, quand on parle de représentations à
tout niveau, à tout palier de la société, des
régions, etc., il faut tenir compte que, dans plusieurs régions,
il y a un segment, une communauté qui doivent être
représentés en ce qui concerne le développement et la
formulation des politiques en main-d'oeuvre. Deuxièmement, des grands
principes que j'aimerais soulever cet après-midi, peut-être que
les autres les ont soulevés auparavant, mais ce n'est pas d'un point de
vue linguistique, c'est d'un point de vue de structures et d'autres choses
aussi.
En ce qui concerne les structures, dans le développement d'un
encadrement de stuctures de délivrance des services, il faut,
premièrement, minimiser le nombre des paliers ou des niveaux, et ce, de
la salle de classe jusqu'au ministère. Il faut aussi assurer que ceux
qui sont le plus proche des projets puissent obtenir l'approbation
aussitôt que possible. Ils doivent aussi instaurer un système qui
peut répondre tout de suite et efficacement aux besoins d'une
région. Il faut éviter en tout cas d'ériger des
barrières administratives en ce qui concerne la différence entre
les programmes. Si on considère ça, il faut éviter les
structures très élaborées ou trop restrictives.
We have to make sure that any structure that is developed can respond
closely and immediately to the regional concerns. The closer we get to the
classroom, the more efficient and responsive will be the system. I will give
you an example from industry that you might find astonishing. At General
Motors, three, four years ago, from the assembly floor to the president
involved over 40 levels to go from the person who works on the assembly floor
to the president of General Motors. In Japan, at Toyota, the level from the
assembly floor worker to the president was 9. It shows how the response
mechanism is different in terms of our culture as well, going from over 40 to
9. So, in the development of any administrative structure with respect the
delivery of programs, we have to insure that we are as close to the classroom -
classroom could be in the school, could be in a plant, it does not make a
difference - as possible. deuxième chose. in terms of regional
development - and i am just repeating myself again - il faut tenir compte du
contenu linguistique aussi dans le développement des programmes. c'est
un fait qu'en france comme en angleterre, comme aux états-unis, il y a
des
usines spécifiquement, in the «aerospace programs»,
où les travailleurs travaillent dans deux langues: en anglais et en
français parce que la plupart des documents sont rédigés
en anglais. Mais, ici, pour nous, les gens de la communauté d'expression
anglaise, il faut tenir compte de nos besoins aussi. I just said that before,
so I will not repeat that.
Troisièmement, we have here... Nous avons une situation ici, au
Québec, dans la formation professionnelle où s'impliquent trois
ministères différents. Nous avons des programmes au niveau
secondaire avec les commissions scolaires. Nous avons des programmes au
cégep et nous avons des programmes dans le secteur privé. Au
secteur qui implique les commissions scolaires, ça découle du
ministère de l'Éducation. Le secteur collégial
découle du ministère «Higher Education and Science»
et, dans le secteur privé, c'est les deux et, aussi, le ministre de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu, etc. Ça
représente beaucoup de problèmes parce que, si on doit obtenir
l'approbation de trois ministères différents, ça va
ériger une autre barrière, un autre obstacle qu'on doit
surmonter.
Si je peux, j'aimerais recommander, si on parie d'une restructuration,
de penser, au fond, de mettre tout ça sur un «boss, under one
boss, under one area», et pour tous les autres aussi, it's going to
indicate a lot of red tape. En dessous de ça, il faut ajouter le fait
que le gouvernement fédéral est aussi impliqué dans ce
type de dossier là, alors c'est un autre, un quatrième niveau
dont on parie before we ever start. Si nous commençons at the beginning,
au commencement maintenant; et si nous sommes libres d'ériger des
structures administratives différentes, il faut tenir compte que
«the less, the better».
La quatrième chose très importante pour nous, c'est la
recherche en ce qui concerne l'ouvrage ou les emplois qui seront disponibles
dans l'avenir. Toute la recherche démontre une chose, les faits
démontrent une autre chose. Ça veut dire, nous sommes «out
of phase», parce que, si on parle de long terme ou de court terme, on
parle de trois ans. J'aimerais soulever un exemple particulier qui nous frappe
dans le secteur de l'éducation où je suis, où je
travaille.
Dans les années 1995, 1996 et 1997 environ, nous prévoyons
que, dans le secteur de l'éducation, il y aura un grand nombre de
professeurs qui vont prendre leur retraite. On parle peut-être entre 3000
et 6000 professeurs par année. Il y aura un besoin. Mais, quand on
regarde maintenant nos collèges et nos universités où les
professeurs de l'avenir reçoivent leur formation, les nombres qui sont
en place maintenant ne reflètent pas, aucun mot, in any way, aucun
moyen, sur le fait que, dans trois, quatre ou cinq années, on aura
besoin de 5000 professeurs.
I mention this now because ça va prendre environ quatre ou cinq
ans pour développer un professeur; au niveau collégial, primaire,
secondaire, ça prend au moins cinq ans. Si on projette nos besoins de
quatre années, we are going to be short 2000 to 3000 thousand teachers,
that we are going to have to look to hire. These are facts that are on the
table now. Nothing is being done to encourage our young people to go into
teaching. And I can only speak from teaching now because that is my
«métier» ! have a great concern that in 1995, 1996, we are
going to be scrambling to hire anybody that we can to go into teaching, while
we still have people graduating from university at that period of time with
skills that are not applicable. So, there has to be extensive research, it has
to be a requirement that the job market analysis has to corollate with the
programs that come into place and that we have to look at long-term
development. Some of the skills that we are going to need in four, five, years,
we have to start now.
It has to be an obligation to any «société»
that is established, any regional council, at is least twice a year, to update
the ever changing labor market. We always seem to be out of phase. How can we
explain the fact that today in Québec, with unemployment exceeding 12 %,
we still have approximately 80 000 jobs that remain vacant, without the skills
to fill them. There has to be a coordination of our future job needs with the
present day situation.
I also have brought to you... we did not have a chance to bring it in.
J'ai reçu, il y a deux jours, un journal des États-Unis qui
s'appelle Educational Leadership. Ce journal au complet est
consacré seulement à «Education for Employment».
Alors, il y a peut-être 15 articles différents qui expriment le
point de vue américain en ce qui concerne le développement et la
formation de la main-d'oeuvre. L'expérience américaine n'est pas
nécessairement exactement notre expérience, mais ça
reflète dans des grands moyens... it reflects in many ways what we
should be looking at. I am going to leave this here. Perhaps some of the
professionals in the Ministry would take a look at it because it deals with
industry, training, job forecasting, skills that are going to be needed,
partnership between unions, corporations, etc. And it is done from a practical
point of view with actual suggestions or recommendations on how to proceed.
La dernière chose que j'aimerais soulever, c'est le fait qu'on ne
peut pas emprunter des approches complètes qu'on utilise dans les autres
pays. L'approche qui fonctionne, qui marche bien au Japon, ou en Suède,
ou en Allemagne, n'est pas nécessairement la même approche qu'on
doit développer ici, au Québec, parce que l'approche qu'il faut
développer dans ce domaine-là découle aussi de notre
culture spécifique. Nos problèmes sont peut-être les
mêmes, en grande partie, que dans les autres pays, mais l'approche ou la
délivrance de services... Peut-être que ce qui
marche au Japon ou en Suède ne va pas marcher ici.
Alors, moi, I do not encourage... I would like to study what other
countries do, but I do not necessarily believe that what works well in Sweden
will work well in Québec. I think we are our own society over here, with
our own specific approaches, and we should develop our own approaches that
reflect our respective needs. Alors, je vous remercie.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Rabino-vitch. J'ai ici,
à titre exceptionnel, M. le député de Pointe-aux-Trembles
qui a demandé de prendre la parole en premier. Normalement, c'est M. le
ministre, mais M. le ministre, avec sa candeur, sa gentillesse, a voulu
coopérer. Alors, encore une fois, c'est l'ouverture d'esprit du
côté ministériel...
M. Bourbeau: Je ne vous le fais pas dire, M. le Président.
C'est une double exception: premièrement, il prend la parole avant le
ministre; deuxièmement, il se substitue à la porte-parole
officielle du Parti québécois. Mais, parce que c'est le
député de Pointe-aux-Trembles, M. le Président, et qu'on
l'aime bien, on va lui permettre ça.
Le Président (M. Joly): And he promised us to behave, so!
Ha, ha, ha! O. K. M. le député de Pointe-aux-Trembles, s'il vous
plaît.
M. Bourdon: M. le Président, je voudrais saluer les
porte-parole d'Alliance Québec et leur dire que j'ai lu avec beaucoup
d'intérêt leur mémoire. J'ai apprécié aussi
que M. Rabinovitch ne répète pas ce qu'il y avait dans le
mémoire, mais ajoute des éléments que je trouve
très pertinents au débat qu'on a.
Pour ce qui est du contenu du mémoire, je voudrais vous dire
d'entrée de jeu que, de notre côté, on est d'accord qu'on
assure que les personnes de la communauté anglo-québécoise
soient représentées dans les organismes qui sont
créés par la loi qu'on est en train d'étudier. J'ai eu
l'occasion récemment de lire attentivement le rapport de Mme Gretta
Chambers sur la situation scolaire de la minorité
anglo-québécoise, un rapport dont une partie, c'est connu, avec
laquelle on n'est pas d'accord, mais qui a le mérite de poser un
diagnostic, je pense, très réaliste sur l'état des
institutions et où on parle, pas longtemps, mais où on parle
quand même des insuffisances de fa formation professionnelle, en
insistant, je pense, avec raison sur le fait que ce n'est pas particulier aux
écoles de langue anglaise s'il y a un problème de formation
professionnelle au Québec et qu'il faut s'y attaquer.
Alors, à cet égard-là, je vous dis d'entrée
de jeu que je suis très d'accord qu'il faut, au niveau central et au
niveau des régions, que la minorité
anglo-québécoise soit représentée. Il me semble
qu'avec l'organisme assez large qu'on veut créer, où il y aura
notamment les employeurs et les organisations syndicales, ça ne
m'apparaîtrait pas compliqué d'assurer une représentation
efficace à cet égard-là.
Une autre chose que je trouve intéressante et novatrice dans le
mémoire, c'est le français perçu comme un moyen
d'accès à l'employabilité. Je trouve que c'est très
vrai. D'ailleurs... Et vous parlez de rendre accessible aux adultes anglophones
l'accès au français. Je pense que vous mettez le doigt sur un
problème très réel. Que le Québec fasse un effort
pour donner des cours et de la formation en français aux nouveaux
arrivants, tout le monde est d'accord là-dessus, mais il faut l'ouvrir
dans le mesure où non seulement c'est la langue de la majorité,
mais, en termes d'employabilité et d'accès aux emplois, je pense
que c'est un élément important.
Ma question, c'est: Est-ce que vous avez pensé à des
mesures particulières qui pourraient être mises en vigueur pour
assurer un meilleur accès?
M. Rabinovitch: Premièrement, pour moi personnellement, il
faut manifester une volonté politique qui va encourager les adultes
d'expression anglaise à s'inscrire. Il faut mettre en place... Vous avez
en place maintenant des institutions comme le COFI, ou l'éducation
permanente. Tout ce qui manque, c'est le financement, l'encouragement et la
volonté. La volonté, pour moi, c'est une chose symbolique, mais
c'est très, très important. Moi, je crois qu'il existe
déjà des structures administratives, des infrastructures qu'on
peut utiliser pour encourager et pour promouvoir l'accès aux cours de
français pour les adultes. Nous parlons ici des adultes qui sont
peut-être nés ici, au Québec, mais à une
époque où l'enseignement du français dans les
écoles était très, très pauvre. Presque rien. Moi,
franchement, tout le français que je parle, je l'ai appris après
l'école et non pas quand j'ai fréquenté
l'école.
Mais tout ça change maintenant. Moi, j'ai deux jeunes filles qui
sont... toutes, absolument, couramment en français, en anglais et en
espagnol, en espagnol aussi. Mais ça, c'est une autre histoire. Mais il
faut les encourager. Il faut démontrer une volonté.
J'aimerais ajouter aussi, M. Bourdon, qu'avec un porte-parole comme vous
il n'y a rien que je peux ajouter. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourdon: Merci.
Le Président (M. Joly): Est-ce que vous avez d'autres
questions, M. Bourdon?
M. Bourdon: Oui. Vous avez fait allusion
aussi au remplacement des enseignants à cause des mises à
la retraite qu'on prévoit importantes dans l'éducation dans les
années 1995, 1996, 1997. Je pense que ça touche, dans le fond, du
côté du gouvernement, d'avoir une politique de la main-d'oeuvre
aux fins du gouvernement en tant que tel aussi.
Ce que je veux dire, c'est que le document que le ministre a
déposé, le projet de loi sur une Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre, ça
part de la constatation qu'il faut se mettre au travail pour faire mieux et
faire plus dans ce qui est de la formation professionnelle. C'est normal aussi
que, dans ce sens-là, le gouvernement donne le ton et dise aux
entreprises de s'en préoccuper, mais je pense qu'à ce
niveau-là il faut que le gouvernement lui-même, qui est le plus
gros employeur de toutes sortes de façons, voie au remplacement de sa
main-d'oeuvre. Il y a une critique qui a eu cours, il y a quelques
années, de dire: Les enseignants, l'âge moyen est
élevé puis ça pose des difficultés. Mais le
remplacement rapide de peut-être 60 % des enseignants, si on ne le
prépare pas, va aussi poser des difficultés.
Il y en a qui disent que le personnel enseignant est trop
âgé. Je ne suis pas sûr que, dans une école, ils
souhaiteraient qu'on change 60 % des enseignants en deux ou trois ans, parce
que l'inexpérience aussi comporte des inconvénients.
Vous parlez du secteur de l'éducation, mais la fonction publique
aussi va vivre la même chose parce qu'elle s'est construite, comme le
système d'enseignement...
M. Rabinovttch: Dans les années soixante.
M. Bourdon: ...à peu près entièrement dans
les années soixante.
M. Rabinovttch: C'est ça. (17 heures)
M. Bourdon: Donc, les gens vont prendre leur retraite à
peu près en même temps. C'est une question que je vous pose: Vous
ne pensez pas qu'en termes de fonction publique il y aurait peut-être,
là aussi, des possibilités de vraiment avoir des programmes pour
assurer une meilleure représentation de la minorité
anglo-québécoise? Quand on parle d'action positive en emploi, on
a toujours le problème que, quand il ne se crée pas de postes, on
peut souhaiter qu'il y ait du monde de tel ou tel groupe, mais, quand il ne se
crée pas de poste, ce n'est guère possible. Je pense que, dans la
fonction publique aussi, si on mettait sur pied les bonnes mesures... Il y a
une question d'équité, d'avoir une meilleure
représentation des Anglo-Québécois puis des
communautés culturelles pour avoir une fonction publique qui
reflète la société.
M. Rabinovttch: La société
québécoise, oui, je suis d'accord. Merci.
Le Président (M. Joly): C'est tout? M. le ministre, s'il
vous plaît.
M. Bourbeau: M. le Président, il me fait plaisir de saluer
la présence d'Alliance Québec. Venant d'un comté où
il y a une bonne proportion de Québécois anglophones, je suis
particulièrement sensibilisé à l'importance de s'assurer
qu'ils aient tous les services dans leur langue. Je racontais hier, je crois,
lorsqu'il y a eu un groupe qui était ici, que j'assistais, il y a
environ six mois, à l'inauguration des nouveaux locaux...
I was presiding at the overture... not the overture. How do you say
that?
M. Rabinovttch: The opening.
M. Bourbeau: The opening of new premises at the Champlain
Regional College, in Saint-Lambert. We had a committee there, the English, the
anglophone committee was there and, at one point, the general director, Mr.
Wallace, mentioned to the people that it happened during that year, that given
year where these funds were committed, the Champlain Regional CEGEP was the
only CEGEP in Québec that had been allowed some substantial credits for
increasing the premises and, therefore, was telling the people, was witnessing
the fact that there was no discrimination in the allowing of funds for
increasing the capacity of CEGEPs and that, obviously, the funds were allowed
only on the basis of the needs and the dossier, and not for any other reason. I
am very proud to repeat that, because this really came from Mr. Wallace
himself, the general director. It shows that, when some people say that we are
discriminating in Québec as to the services to the anglophone community,
it did not appear so in anyway in the riding of Laporte this year.
Also, recently, I had some discussions with people of my riding as to
the existence of the Saint-Exupéry school commission in Saint-Lambert,
part of Longueuil and Boucherville. There are some threats right now as to the
maintenance or not of that school commission. A lot of the people in the
anglophone community of Saint-Lambert came to me and asked me to insist on the
maintenance of this school commission. They told me that it is the school
commission that guarantees the most - on the South Shore anyway - the services
in French for the anglophone community for the immersion courses.
So, I think that we can say that I am quite sensitive to the problems of
the anglophone community, especially in view of the fact, Mr. President, that I
am a graduate from McGill University. I learned part of my English there.
This being said, you talk about the recognition of the anglophone
community and you say
that the government will not attain its objective to have a valuable
strategy, an efficient strategy, unless we make room for the anglophone
community or for teaching in English.
I would like to ask you: Right now in the system of vocational training,
do you feel that there is a lack of services to the anglophone community and,
if such, where?
M. Rabinovitch: Yes. This was demonstrated in the Chambers Report
which did extensive research in that area. Basically, at the technical
vocational level at the secondary school level, the province is divided into
«une carte d'enseignement» where they define specific «cours
de formation» for specific regions. Because the English-speaking
community is very thinly distributed outside the island of Montréal, it
cannot have access to some of these programs because of the linguistic
difficulty.
So, what we are asking for in terms of the English-speaking community is
that, when you define «la carte d'enseignement» for the
English-speaking community, we define it provincially and not regionally
because of the lack of numbers. For example, if you have region 1 in
Lanaudière, let us say, and you define that, in that region, this is
what «les programmes de formation» will be, there is not enough
English there to really make it viable for any course to be given only, in
English. But, if you define provincially that, in this area, we will be giving
one specific «programme de formation en anglais» that is open to
everybody, that will certainly go a long way.
You see, the difficulty we have in the English community is that the
majority, if not the strong, strong majority - it is probably over 80 % if not
higher - is situated in the Greater Montreal area. And in that Greater Montreal
area, although there are needs, they can be met because the numbers are
sufficient. There are administrative problems, but that exists. French,
English, it does not make a difference. Our concern is with the
English-speaking community and the outlying regions, in the Gaspé, the
Lower-North-Shore, Québec City, etc., where, to have access to some of
these programs, some of these children have to leave the province sometimes or
have to leave at a high school level to go in a boarding school, if these
programs are offered elsewhere. It is very difficult, I know, because if you
have only 10 English speakers and they have 5 different career choices, there
is not much you can do in Québec City for it. All we have to do is
develop areas where we can...
Also, in some of the programs that are developed in the French sector,
there should be thought given to developing some bilingual programs as well. In
certain «métiers» and certain trades, it is necessary to
learn both English and French. If you have certain centers declared bilingual,
not from the point of view of being available to the English-speaking community
but of being available to the French-speaking community as well. The need to
learn some of the trades in English because the majority of some of the books
sometimes are in English. So, the establishment of bilingual centers, I think,
I do not know where or how, but on a regional basis, will go a long way toward
addressing the needs.
I am not proposing the establishment of unillngual English for small,
small numbers because I am a man that deals with figures and finances on an
everyday basis and it is not economical. But, if you look at establishing what
I would call bilingual centers, which would benefit both the English-speaking
community and the French-speaking community in «les formations
spécifiques», I think this would go a long way toward resolving
some of our concerns.
M. Bourbeau: This commission does not really deal with teaching,
you know. We are dealing with manpower problems and adequation between the
offer and demand in the market place, but we have some people from the
Education Ministry here, who are taking notes on a regular basis.
M. Rabinovitch: Good!
M. Bourbeau: Although it is past 16 h 30, they are probably
out...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: Est-ce qu'il reste des gens de l'Éducation,
ici? No, they are all gone. That is funny. M. le Président, je note
qu'il s'est dit des choses très... I am speaking now for the Journal
des débats.
M. Rabinovitch: Oui.
M. Bourbeau: Je note, M. le Président, que les
représentants du ministère de l'Éducation et de
l'Enseignement supérieur nous ont quittés puisqu'il est 17 h 10
et qu'ils sont partis pour 16 h 30. C'est malheureux, M. le Président,
parce que, là, on entend des choses, des remarques très
pertinentes qui s'adressent à nos collègues de
l'Éducation. Alors, il faudra leur envoyer une copie du Journal des
débats pour que les notes soient prises.
This being said, vous avez parlé précédemment de
l'importance de s'assurer que nous fassions une bonne adéquation entre
l'offre et la demande d'emploi. En entendant vos propos, j'avais l'impression
que vous étiez sous l'impression que ça ne se faisait pas
présentement. Alors, vous savez que, présentement, le
ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et
de la Formation professionnelle, qui est le
ministère que je dirige, a pour objectif principal dans ce
domaine-là de faire ce travail-là. Dans le document
«Partners for a Skilled and Competitive Québec» that we have
before us...
Mme Percfval-Hilton (Victoria): On a la version
française.
M. Bourbeau: Oui? Moi, je suis très fier de vous le lire
en anglais parce que je veux qu'on sache que nous avons publié le
document dans les deux langues.
Mme Percival-Hllton: Oui, oui, c'est bien noté et bien
reçu. Nous apprécions beaucoup.
M. Bourbeau: En page 17, vous avez: «Each year, the
Ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et
de la Formation professionnelle publishes a forecast of labour surpluses and
shortages in the various regions of Québec. The 1991 forecast lists 90
occupational groups and professions experiencing shortages throughout the
province. The most highly sought employees are engineers and technicians - vous
remarquerez, M. le député de Pointe-aux-Trembles, qu'il n'y a pas
de syndicaliste là-dedans encore - particularly in...
M. Bourdon: II y a des techniciens et des ingénieurs qui
deviennent syndicalistes.
M. Bourbeau:... the field of industrial chemistry, electronic
engineering, mechanics, quality control, aerospace and computers. There are
also shortages of employees in certain health related professions, as well as a
lack of operators of machine tools and similar equipment, automobile...
»
What I mean is that this is really a thing we do. We do it not only
provincially, we do it regionally. In every region of Québec, we will do
it because the market place varies from one region to another. And when this is
all done, we will compile it into a summary for the whole Québec.
So, we do this job, you know. Maybe we should improve our work, and we
will probably, but I would like you to notice that we do it already.
M. Rabinovttch: Oh, I was aware that this was being done. My
comments were made that what is being done is not really, I guess... I do not
want to use the word «adequate», but the fact is that when we still
have skilled shortages of labour in various areas that we can project where it
is going to happen and it still comes up that we are short, we have shortages,
there has to be something that can be done to correct it. Because we have the
raw skills here to train our people just like in any other country and yet we
still end up with these shortages.
I bring up this specific point of teachers, and Mr. Bourdon brought up
the point of the «fonction publique», and that I can project right
here today that, in five years time, we are going to be hiring teachers from
France and from Belgium, from Haïti, to fill positions that we do not have
our own training here. And this is something that I can see right now. And I
guarantee you I will be here in three or four years, unless there are changes,
saying that we have to bring immigrants from France, from Belgium, from certain
parts of Africa, from French-speaking regions to fill our schools in terms of
teaching needs.
Le Président (M. Philibert): M. le ministre, est-ce que
vous pourriez retenir vos bonnes idées pour quelques secondes? Il y
avait eu une entente tantôt avec mon prédécesseur pour
permettre au député de Pointe-aux-Trembles de pouvoir quitter
lorsqu'il serait appelé en Chambre. Alors, il voudrait saluer nos
invités avant de quitter.
Mme Percival-Hilton: Est-ce que vous pouvez juste rester encore
une minute parce que j'aurais une couple de précisions à apporter
à mon commentaire? Premièrement, sur la question
d'améliorer l'apprentissage du français pour les adultes, pour
les anglophones en général. Je pense qu'un aspect qu'il est
important de souligner, c'est la contrepartie qui fait que la compétence
professionnelle, en étant reconnue comme étant le
français, doit effectivement être reconnue comme étant une
exigence professionnelle normale; ensuite, il en découlera que,
justement, ce sera apprécié par rapport à chaque emploi.
Un des problèmes qu'on a rencontrés beaucoup avec les
anglophones, c'est que la plupart ont appris un français de
conversation, un certain niveau qui est très
généralisé, mais, par rapport à une application,
à un emploi, il n'y a pas beaucoup de relation. Ils ne savent pas s'ils
sont assez bilingues pour faire application à l'emploi. Donc, je pense
que c'est quand même une contrepartie qui est absolument
nécessaire. D'ailleurs, je tiens à vous souligner que je trouve
personnellement qu'il y a un certain manque de cohérence avec la loi
101. Justement, le fait que, d'un côté, ils exigent le
français comme étant un critère d'emploi, ils regardent du
«testing» avant de pouvoir avoir un emploi, etc. Par contre, ce
n'est pas très, très élaboré au point de vue des
critères, et justement quel niveau et ensuite de permettre une certaine
gradation au cours de français. (17 h 15)
Un deuxième commentaire que je fais sur ça, c'est une
façon également de faire le français ou des cours qui se
situent par rapport à des emplois spécifiques, ce qu'on appellera
en français ou en anglais, excusez-moi, «jobs
specific French» pour que, justement, on ne commence pas avec
l'Académie française pour un emploi qui est assez technique, la
fameuse terminologie française, etc.
Deuxièmement, je dois vous dire, au nom d'Alliance Québec,
que nous sommes très, très heureux de vous entendre sur la
question du manque de représentation des anglophones dans la fonction
publique. Nous trouvons que c'est quand même un point qui est très
fondamental, qui doit être adressé. D'ailleurs, je trouve que
ça revient beaucoup sur la question de la représentation;
effectivement, nous, si on veut vraiment devenir une partie du partenariat, il
faut absolument qu'on soit impliqués dans le processus
d'élaboration de politiques et, du fait qu'on n'existe pas, si je peux
dire, si je peux m'expri-mer ainsi, on n'existe pas dans la fonction publique,
pas du tout, effectivement. D'autant plus, il est important de trouver une
représentation pour qu'on puisse avoir un apport qui soit très
fondamental dans l'élaboration non seulement de cette politique-ci, mais
de toutes les politiques qui vont affecter l'avenir du Québec.
Donc, je m'excuse, mais je voulais quand même vous passer ces
commentaires-là.
M. Bourdon: Non, non, ne vous excusez pas. C'est à moi
plutôt de m'excuser parce que je dois quitter puisque je suis le critique
pour un projet de loi qui est appelé en Chambre. Alors, c'est la raison.
J'ai pris bonne note de vos observations et je pense que, dans le fond, il
s'agit de trouver les moyens pour que l'adéquation au marché du
travail, ça comporte un élément linguistique et qu'il soit
traité comme tel. Que la majorité francophone trouve normal que
la minorité apprenne le français, ça, c'a
été assez dit qu'on n'a plus besoin de le répéter,
mais en termes d'emploi...
Mme Percival-Hilton: C'est ça.
M. Bourdon: ...il faut que ça se traduise par des
politiques gouvernementales qui vont permettre que ça se fasse.
Souhaiter quelque chose et ne pas outiller les gens pour que ça se
fasse, je pense que ce serait quelque chose de non cohérent. Alors, je
vous remercie beaucoup de votre mémoire. Je remercie le ministre de sa
gentillesse coutumière qui me permet d'aller...
M. Bourbeau: C'est vous qui êtes le plus à plaindre.
La Chambre ou nous...
Est-ce qu'on peut revenir à notre conversation de tout à
l'heure? M. Rabinovitch, vous avez soulevé un excellent point
tantôt. Vous l'aviez fait une fois, vous l'avez fait une deuxième
fois. La perspective d'une pénurie de professeurs qualifiés dans
trois ou quatre ans, dans quatre ou cinq ans, je crois que vous avez raison de
le dire. Il va falloir absolument qu'on sonne la clochette d'alarme - je vois
que la sous- ministre adjointe à la Formation professionnelle est ici -
il va falloir absolument qu'on mette une priorité absolue
là-dessus. Quand le Québec a fait la Révolution tranquille
des années soixante et qu'on a littéralement mis à la
porte, dans l'espace de deux ans, tous les anciens professeurs des cours
classiques, les professeurs religieux, les religieuses et ceux qui
enseignaient, on a eu une pénurie de professeurs laïques. On a
introduit, à ce moment-là, des professeurs...
M. Rabinovitch: Non qualifiés.
M. Bourbeau: ...on les a pris où on pouvait. Sans vouloir,
en aucune façon, porter de jugement trop sévère, je pense
qu'on a été obligés, parfois, de prendre des professeurs
qui n'avaient peut-être pas toute la compétence voulue parce qu'on
avait besoin d'un grand nombre de professeurs. Je sais qu'ici il y a des
professeurs, derrière moi, qui ne sont peut-être pas d'accord avec
ça, des ex-professeurs, mais disons que la qualité... On avait la
quantité, en tous les cas. Est-ce qu'on avait la qualité?
Ça se pouvait! Mais, comme on avait besoin d'un grand nombre de
professeurs, il a fallu faire en sorte que ces gens-là viennent tout de
suite à l'enseignement et, parfois, ils n'ont pas eu le temps de faire
des études, disons, postuniversitaires. Peut-être qu'ils auraient
pu le faire s'ils avaient eu le temps. Là, aujourd'hui, si on ne fait
pas attention, on va se retrouver dans la même position.
M. Rabinovitch: Oui.
M. Bourbeau: C'est ce que vous nous dites.
M. Rabinovitch: Oui.
M. Bourbeau: Ces gens-là arrivent maintenant à la
retraite...
M. Rabinovitch: C'est ça.
M. Bourbeau: ...et, comme ils ont tous été
engagés à la même époque, ils arrivent tous à
la retraite en même temps. On va se retrouver avec une pénurie de
professeurs et, si on ne fait pas attention, on va être obligés
encore, comme vous le dites, soit de prendre des gens qui seront à demi
qualifiés ou encore d'aller chercher des gens à
l'extérieur. Donc, c'est intéressant de le souligner,
peut-être qu'on ne le réalise pas assez. Quant à moi, je
vais certainement prendre une note dans mon calepin, je pense que d'autres
prennent des notes pour s'assurer qu'on sonne le signal, qu'on allume la
lumière rouge tout de suite.
Je voudrais revenir sur un autre point. Vous parlez de la
représentation de la communauté anglophone dans les structures
qu'on a là. Est-ce que vous pensez que la structure qu'on propose
présentement n'est pas susceptible d'assurer une
représentation adéquate de l'élément
anglophone, en ce sens que nous disons: Nous allons choisir des membres du
conseil d'administration parmi les employeurs, parmi les groupes de
travailleurs et le parti gouvernemental? Est-ce que vous souhaiteriez avoir des
représentants qui soient là uniquement comme représentants
des anglophones ou, plutôt, que nous prenions des gens employeurs qui
s'adonneraient à être anglophones, par exemple? Est-ce que vous
voudriez qu'il y ait un poste spécifique pour les anglophones, comme on
nous demande, par exemple, un poste pour les femmes, un poste pour les jeunes,
comme un groupe cible? Est-ce que vous voudriez être un groupe cible?
M. Rabinovitch: O.K. Je vais répondre oui et non. Je vais
expliquer. Moi, personnellement, je n'aime pas qu'on désigne un
siège spécifique pour une minorité spécifique parce
que, de temps en temps, il y a beaucoup... Il travaille dans deux sens comme
ça. Peut-être qu'il y avait des gens de la communauté
anglophone... that we should have two or three who have different skills. If
you reserve a specific spot for a specific ethnic or linguistic minority, then
that becomes the minimum and the maximum.
That is what happens. If there is one spot for women, then you are going
to appoint one woman, and that is it, although there might be three, or four,
or five, or more that have competencies that you want as well. Because the
practise always shows that when you designate one spot, that becomes your
minimum and maximum. So if we designate a specific number to represent
linguistic minorities or other target clientèle, that works, yes. It is
good that we recognize that, but it does not work as well because it limits the
number that we can...
What we would like to have done, from my personal point of view, is to
have an expression of «volonté», that Anglophones, or
individuals from the English-speaking community will be appointed to express a
point of view related to their community. I would not like to see a specific
seat reserved for a specific community.
I have to, at this point in time, have confidence. Il faut que j'aie
confiance au gouvernement qu'il va nommer les gens compétents, tenir
compte des besoins des communautés spécifiques. So this is why I
said, c'est pourquoi j'ai dit oui et non en même temps.
M. Bourbeau: M. le Président, je dois dire aux gens
d'Alliance Québec que j'ai très bien compris le message que vous
nous donnez. Je partage votre point de vue, à savoir qu'il serait
préférable d'avoir des gens de la communauté anglophone
qui soient nommés en fonction de leur compétence. Je peux vous
assurer que, oui, il y a une volonté de la part du gouvernement de faire
en sorte que la communauté anglophone soit adéquatement
représentée dans les struc- tures. Je peux vous dire que,
personnellement, je m'engage à m'assurer que cette
volonté-là soit traduite dans les faits. Je pense que, de cette
façon-là, on pourra rendre justice à la communauté
anglophone.
M. le Président, je pense que ça termine, en ce qui me
concerne, les questions. Je pense que l'heure est arrivée, là,
si... Je tiens à remercier les gens d'Alliance Québec pour leur
présentation, leur mémoire et les assurer que nous allons tenir
compte des points de vue qui sont exprimés.
M. Rabinovitch: on behalf of alliance québec, we would
like to thank you as well for having us here today. we certainly enjoyed the
discussion. alors, nous vous remercions.
Le Président (M. Philibert): Alors, au nom de la
commission et des membres de la commission des affaires sociales, je vous
remercie de votre présentation et de votre présence à fa
commission des affaires sociales. Maintenant, j'informe cette commission que la
commission est ajournée sine die.
(Fin de la séance à 17 h 24)