Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Neuf heures quarante-quatre minutes)
Le Président (M. Joly): Bonjour tout le monde.
J'apprécierais si on pouvait prendre place, s'il vous plaît, de
façon à ce que nous débutions. Je rappelle le mandat de la
commission. La commission des affaires sociales se réunit afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 120, Loi sur les services de santé et les services sociaux et
modifiant diverses dispositions législatives.
Mme la secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Chevrette
(Joliette) sera remplacé par Mme Caron (Terrebonne).
Auditions
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la secrétaire.
Je vais maintenant à l'ordre du jour amendé. Aujourd'hui, nous
entendrons le groupe représentatif des médecins du Québec,
la Conférence des CRSSS du Québec, le groupe représentatif
des associations syndicales dont les membres oeuvrent dans le réseau de
la santé et des services sociaux, la Fédération des CLSC
du Québec, l'Association des hôpitaux du Québec et
finalement l'Association des centres d'accueil du Québec.
Je rappelle brièvement que l'ordre du jour est amendé
à la suite nécessairement de l'article 244 du règlement
qui prévoit qu'avant d'entreprendre l'étude
détaillée du projet de loi, la commission peut décider de
tenir des consultations particulières dans le cadre de son mandat.
Alors, je vois des figures réjouies, ce matin. Partant de là, je
vous rappelle les règles du jeu: vous avez une vingtaine de minutes pour
livrer, en fait, ce que vous avez à livrer et, après, les membres
de la commission ont, à loisir eux aussi, chacune des formations, une
vingtaine de minutes pour en arriver à poser les questions qui peuvent
être d'intérêt. Je vous rappelle que si vous prenez plus de
20 minutes, automatiquement ça écourte le temps des questions,
autant de la part de M. le ministre que de la part, disons, de l'Opposition. Je
vais essayer de tenir une cédule assez rigide de façon à
ce qu'on puisse entendre tous les organismes à l'intérieur de la
cédule qui nous est allouée.
Alors, je vois que, déjà, les membres du groupe
représentatif des médecins du Québec sont avancés.
J'apprécierais si le porte-parole pouvait s'identifier et aussi nous
présenter les gens qui l'accompagnent.
Groupe représentatif des médecins du
Québec
M. Roy (Augustin): Merci, M. le Président. Il y a
plusieurs porte-parole pour notre groupe. Je suis le Dr Augustin Roy,
président de la Corporation professionnelle des médecins du
Québec. Je présente immédiatement les représentants
du groupe des médecins. À ma droite, le Dr Clément Richer,
président de la Fédération des médecins
omnipraticiens du Québec; à côté de lui, le Dr
Robert Marier, le nouveau président de la Fédération des
médecins spécialistes du Québec; immédiatement
à ma gauche, le Dr Jean-Hugues Brassard, président de la
Fédération des médecins résidents du Québec;
à sa gauche, le Dr Michel L'Allier, président de la
Fédération des étudiants en médecine du
Québec; et à sa gauche, le Dr André Aubry,
président de l'Association des conseils des médecins et dentistes
du Québec.
Je veux tout d'abord, M. le Président, remercier M. le ministre
et les députés de l'Opposition de nous avoir donné
l'occasion de nous présenter en commission parlementaire, un peu en
catastrophe, mais quand même, nous avons l'occasion de dire, en termes
succincts, ce qu'on a à dire sur le projet de loi 120. C'est
évident que le laps de temps est extrêmement court. Nous allons
tenter de résumer notre pensée. Aussi, il y a quelque chose qui
nous dérange énormément, c'est le fait que les 309
amendements que le ministre a annoncés ne sont pas encore connus, ce qui
nous empêche évidemment d'étayer notre argumentation. Sans
plus tarder, je passe immédiatement la parole au Dr Clément
Richer pour une introduction.
Le Président (M. Joly): Dr Richer, je vous reconnais.
M. Richer (Clément): Merci, M. le Président. Ce
matin, nous allons faire un rapide retour sur trois thèmes principaux
qui ont été élaborés dans nos différents
mémoires. Bien sûr, il y aurait bien d'autres sujets à
traiter, mais compte tenu du peu de temps que nous avons, nous allons nous
limiter à ces thèmes-là. Tout d'abord, notre ami Augustin
vous reviendra pour vous parler un petit peu de l'effritement de certaines
libertés individuelles tant pour le citoyen que pour le médecin,
et peut-être ajouter un petit mot sur la confidentialité du
dossier qui pourrait être menacée à certains
égards.
Ensuite, le Dr Aubry vous parlera un petit peu de l'organisation
médicale et de l'organisation clinique dans les hôpitaux,
c'est-à-dire ce qui a trait au CMDP, à la DSP et à la
départementalisation dans les établissements. Par la
suite, le Dr Brassard - et, au besoin, interviendront les Drs L'Allier,
Marier et moi-même - pourra vous dire un petit mot sur les effectifs
médicaux. Je pense que c'est le clou de nos différents
mémoires. Et le Dr Marier se chargera de faire la conclusion.
Bien sûr, on aurait aimé ça, peut-être, faire
certains rappels sur la participation à la gestion. C'est une chose
à laquelle on croit, les médecins. On ne veut pas en être
éliminés complètement. On aurait aimé vous parler
aussi du régime de négociation, de l'importance de
préserver les organismes représentatifs, si vous voulez, au
niveau du Québec, et peut-être de certaines tracasseries
administratives - enfin, ce qu'on appelle les tracasseries administratives que
vous connaissez bien - au niveau du projet de loi, mais on pourra y revenir un
peu plus tard. Peut-être qu'on sera invités de nouveau d'ailleurs,
dans un deuxième temps, en commission parlementaire un petit peu plus
tard.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Richer: Alors, je passe la parole, sur cette introduction, au
Dr Augustin Roy.
M. Roy: Merci. Les médecins du Québec, comme tout
le monde, souscrivent aux grands objectifs poursuivis par le ministre de la
Santé et des Services sociaux - je sais que ça lui fait plaisir
qu'on le dise - particulièrement en ce qui concerne
l'amélioration de l'état de santé de la population et la
nécessité d'assurer l'accessibilité de services
médicaux généraux de qualité à tous les
citoyens, sur l'ensemble du territoire québécois. J'ai bien dit,
donc, services médicaux accessibles, services médicaux de base,
par ailleurs, de qualité, à tous les citoyens et partout. Les
médecins ont à coeur le bien-être des malades. C'est
pourquoi ils ont formulé des suggestions sur les améliorations
à apporter au projet de loi, notamment en rapport avec l'organisation
médicale en établissement, la liberté et l'autonomie des
médecins ainsi que le sort réservé aux dossiers des
malades.
La réforme projetée du système de santé
annonce un virage technocratique sans précédent en
Amérique du Nord. Tout en s'inspirant de louables objectifs
d'équité, les changements radicaux appréhendés
risquent de déstabiliser complètement la pratique de la
médecine et de desservir les intérêts des malades à
plus ou moins long terme, ceux-là mêmes qu'on veut
protéger.
Le citoyen doit s'inquiéter d'un projet de loi qui impose des
mesures exorbitantes à l'égard d'une catégorie de citoyens
- les médecins - en limitant leur liberté d'installation, de
mobilité et de choix de champ d'exercice. Que l'on ne parle pas do
responsabilité collective, comme je l'ai entendu récemment. Les
médecins sont des citoyens responsables, désirant travailler dans
le respect de leurs libertés fondamentales, comme tout citoyen.
On doit également s'inquiéter d'un projet de loi qui
exclut les médecins de toute participation à l'organisation du
système de santé, d'un projet de loi qui galvaude le droit
fondamental du malade de choisir son médecin traitant, et
également d'un projet de loi qui met en péril la relation
médecin-patient, notamment au chapitre de la confidentialité, en
permettant l'utilisation des dossiers des patients à des fins autres que
médicales. Le dossier médical risque ainsi de devenir un outil de
planification et de gestion du système.
Le projet de loi 120, à ce sujet de confidentialité,
risque de permettre d'introduire imperceptiblement dans le système de
santé un changement radical en ce qui concerne la confidentialité
des informations sur les usagers et le respect du secret professionnel.
Si la réforme vise, à court terme, à replacer le
citoyen au centre du réseau de la santé, il ne faudrait pas
qu'à plus long terme, il y perde quant au respect d'une valeur
chère, le secret professionnel et, partant, le respect de sa vie
privée.
La lecture du livre blanc et du projet de loi 120, de même que la
connaissance d'un certain nombre de projets en cours dans le réseau
quant à l'informatisation des informations sur les usagers, nous
amènent à conclure que le ministre se donne des moyens de
gérer un système de santé en fonction des objectifs
fixés par son ministère.
Pour fixer ces objectifs, le ministre se doit de connaître les
besoins de la population en matière de santé et de services
sociaux. Il peut parvenir à connaître ces besoins par le biais
d'enquêtes, de sondages, ou par le biais d'un système
d'informations cueillies à même les dossiers des usagers, ce qui
serait évidemment beaucoup plus fiable. Certaines dispositions de la loi
nous incitent à croire que le ministre est en train de lever les
obstacles empêchant la mise en place éventuelle d'un
système centralisé d'Informations. C'est un chèque en
blanc que la loi semble lui donner. Le ministre doit profiter de cette
commission pour déclarer solennellement que le caractère
confidentiel du dossier médical sera respecté et qu'aucune
information concernant la vie privée des citoyens ne sera à la
disposition des fonctionnaires et des politiciens.
Alors, nous passons maintenant à l'organisation médicale
des établissements, et je passe la parole au Dr André Aubry.
M. Aubry (André): M. le Président, M. le ministre,
Mmes les députées et MM. les députés, le projet de
loi 120 concernant l'organisation médicale en établissement
comporte des change-ments majeurs par rapport à la loi actuelle sur les
services de santé et les services sociaux. De plus, sur certains
aspects, ce projet de loi risque
de modifier considérablement la relation médecin-malade.
Visant le même objectif que vous, M. le ministre, nous désirons
conserver la grande qualité des soins qui sont offerts aux citoyens du
Québec. La structure actuelle ayant déjà fait ses preuves,
nous nous étonnons qu'on veuille la modifier si profondément.
Vous ayant déjà fait parvenir notre mémoire,
endossé par plus de 125 centres hospitaliers et CLSC et plus de 10 000
médecins, je me permets très brièvement de souligner ce
que j'appellerais la substantifique moelle de nos commentaires. Je
débute fort rapidement par l'article 99, qui détermine la
composition du conseil d'administration d'un centre hospitalier ou d'un
établissement de soins d'hébergement et de soins de longue
durée disposant de plus de 50 lits de soins généraux
spécialisés. L'Association estime que le médecin
élu au conseil d'administration devrait l'être par
l'assemblée générale du CMDP plutôt que par
l'ensemble du personnel travaillant en établissement. À ce titre,
nous suggérons que la disposition de la loi actuelle concernant
l'élection du membre du CMDP au conseil d'administration soit maintenue
et que l'article 99 soit modifié en conséquence. Nous ajoutons
une petite suggestion. Nous croyons qu'un échange avec le conseil
d'administration et les officiers du CMDP devrait être établi sur
une base bisannuelle, ce qui, dans les dispositions actuelles, pourrait
être indiqué et favoriserait les relations.
À l'article 140, sous la rubrique plan d'organisation, cet
article stipule qu'un centre hospitalier doit prévoir la formation de
départements et de services cliniques et établir un plan
d'effectifs médicaux conformes au plan régional des effectifs
médicaux approuvés par la régie régionale et le
ministre. Nous pensons que le libellé est beaucoup trop sommaire et nous
suggérons de reconduire les dispositions de la loi actuelle relative aux
fonctions et aux responsabilités du chef du département clinique
contenues aux articles 71.1, 71.2 et 71.3, ainsi que les dispositions
pertinentes du règlement 6 concernant l'organisation des
établissements.
À noter ici que, déjà en 1981, ces articles 71.1,
71.2 et 71.3 ont fait l'objet d'une entente entre l'AHQ et la profession qui,
à ce moment-là, était représentée par la
Corporation. Cette situation n'a semblé apporter que de bons
éléments. On se demande pourquoi la changer.
L'Association est d'ailleurs d'avis que le chef d'un département
clinique joue un rôle crucial dans la bonne marche d'un
établissement et que ce rôle doit être non seulement
maintenu mais étendu. Afin de faciliter la préparation des plans
régionaux d'effectifs médicaux, il nous apparaît
intéressant de considérer la formation d'une structure
régionale dont la base serait constituée par les CMDP des
différents établissements de la région qui pourraient, en
collaboration avec la régie régionale, établir des plans
d'effectifs médicaux basés sur l'établissement des plans
de services.
Notons que les plans de services constituent la pierre angulaire de
toute planification des soins et devraient d'ailleurs s'intégrer
à une politique globale de santé. À notre avis - nous
parlons du DSP - la loi avait, dans sa sagesse, des provisions claires
concernant les qualifications et le mandat du directeur des services
professionnels, notamment sa qualité de médecin. Est-il utile de
rappeler que ce poste est une charnière importante dans la
mécanique médico-administrative? Nous ne comprenons pas les
raisons qui ont pu justifier le retrait des prescriptions relatives au
directeur des services professionnels dans le projet de loi et nous pensons que
le législateur devrait reconduire les dispositions de la loi actuelle
qui ont trait à la direction des services professionnels.
À l'article 153, nous disons qu'un conseil . des médecins
et dentistes devrait être obligatoirement institué dans les
établissements suivants du réseau, à savoir: centres
hospitaliers, centres d'hébergement et de longue durée et centres
locaux de services communautaires, dès que cinq membres ou plus oeuvrent
dans ce centre. Par ailleurs, le projet de loi ne devrait pas exclure la
possibilité de former un CMDP s'il existe moins de ces cinq
médecins, dentistes ou pharmaciens dans l'établissement. À
ce titre, nous suggérons de reconduire les dispositions de l'article 111
de la loi actuelle.
À 154 - et ceci est très important - cet article
édicté les responsabilités du CMDP sous l'autorité
du directeur général ou de son représentant. Le fait qu'un
CMDP soit responsable vis-à-vis de la personne morale du conseil
d'administration nous apparaît préférable au fait
d'être sous l'autorité de la personne du directeur
général ou de son représentant. Même si le
représentant du directeur général était un
médecin, par exemple un DSP qui pourrait être prévu au plan
d'organisation, la nature même des obligations telle que libellée
au premier, deuxième et troisième alinéas de l'article 154
pourrait être entravée par une ingérence administrative de
la part du directeur général. (10 heures)
Par la suite, dans ce même article extrêmement important,
l'Association continue de s'étonner quand elle remarque que le
sixième alinéa de l'article 112 de la loi actuelle concernant la
responsabilité d'établir les modalités d'un système
de garde permanent dans l'établissement n'est plus sous la
responsabilité du CMDP, mais a plutôt été
déplacée sous l'autorité du conseil d'administration. Il
faut comprendre ici "sous la responsabilité du directeur
général ou de son représentant".
Nous sommes d'avis que le système de garde est une
responsabilité éminemment clinique déterminée par
un examen approfondi de plusieurs paramètres professionnels
individuels
comme, par exemple, la compétence particulière dans un
champ d'activité, l'âge et l'état de santé, pour ne
mentionner que ceux-là. nous considérons vexatoire
vis-à-vis du cmdp le retrait de cette responsabilité et ne
comprenons pas quels sont les motifs qui ont poussé le
législateur à envisager cette mesure. enfin, nous sommes
convaincus que les dispositions précitées permettent au cmdp
d'exercer pleinement son rôle en ce qui a trait à l'organisation
scientifique et technique de l'établissement et permet d'assurer une
bonne distribution de services médicaux, dentaires et
pharmaceutiques.
Pour terminer avec l'article 154 tel que proposé, nous nous
interrogeons sur le libellé de l'alinéa 4°, où il est
mentionné que le CMDP aura comme interlocuteur le directeur
général ou son représentant. Se pourrait-il que certains
directeurs généraux considèrent que leur présence
au comité exécutif du CMDP n'est pas une nécessité
et qu'ils désirent avoir le loisir d'y déléguer une
personne de leur choix? S'il en est ainsi, l'avenir de la pratique
hospitalière est sombre. On ne saurait trop insister sur le fait que le
CMDP, pour jouer pleinement son rôle à l'intérieur d'un
établissement, doit demeurer sous la responsabilité du conseil
d'administration. Nous pensons également que la présence du
directeur général est essentielle au bon fonctionnement du
comité exécutif, tout comme celle d'un directeur des services
professionnels.
Enfin, l'article 170. Nous voyons dans cet article que l'attribution de
privilèges à un membre par le conseil d'administration devrait
être assortie d'obligations. Je néglige la deuxième
portion, assortie d'obligations, qui sera vraisemblablement
évaluée par mes confrères. Le petit point sur lequel nous
voulons faire une parenthèse importante, ici, c'est que l'Association,
après examen du libellé de cet article, estime qu'il semble
exister, dans l'esprit du législateur, une notion erronée de ce
que sont les privilèges hospitaliers. On a, en effet, l'impression que
le mot clé qu'on rattache aux privilèges est "jouissance". Cette
idée est d'ailleurs renforcée par la consultation de la
définition du terme dans le Larousse. Il faut rétablir les
faits.
Le terme "privilège" nous a été légué
par les Anglo-saxons et s'est intégré dans l'histoire de la
médecine hospitalière québécoise. Dans les faits et
dans la loi et ses règlements, il comporte des obligations et, surtout,
une restriction du champ d'activité qui correspond, en fait, au champ de
pratique du médecin. En effet, nul membre des CMDP n'a de
privilège illimité, et ceux dont il jouit sont limités
à sa compétence reconnue. Cependant, cette jouissance comporte,
en pratique, des obligations et des responsabilités.
Le dernier article de tout, l'article 306, pour nous, contient des
dispositions qui s'appliquent à la composition du conseil
d'administration de la régie régionale et est
complété par la stipulation que l'on retrouve aux articles 329 et
332, qui exclue certains citoyens de sa composition. Force est d'admettre,
à l'analyse de ces dispositions du projet de loi, que le
législateur a cru bon d'exclure totalement le médecin du niveau
décisionnel qu'est le conseil d'administration d'une régie
régionale. Pour être quotidiennement confrontés avec la
maladie en établissement, les membres de l'Association sont
carrément outrés du fait qu'on ne les considère pas comme
des citoyens à part entière, mais plutôt comme des
incapables, des personnes dangereuses pour raison de maladie mentale, voire des
criminels sentences. Est-il utile de rappeler que les médecins,
dentistes et pharmaciens sont également des citoyens payeurs de taxes et
ont le droit de prendre une part active aux décisions d'une régie
régionale? Ils possèdent, en outre, une expertise
précieuse dont il serait excessivement nuisible de se priver.
Finalement, afin que le conseil d'administration d'une régie
puisse se doter d'une expertise médicale, dentaire et pharmaceutique
valable, nous suggérons de maintenir l'élection de
représentants du corps médical au niveau du conseil
d'administration et d'instaurer le même processus au niveau des
commissions administratives, en utilisant comme collège électoral
un regroupement régional des CMDP, ce qui existe déjà au
Lac-Saint-Jean, en Abitibi et à Québec aussi bien qu'à
Hull. L'Association espère qu'un dialogue est toujours possible avec le
ministre et demeure convaincue que les médecins, dentistes et
pharmaciens, de par leur formation et leur expertise, sont encore les meilleurs
gardiens de la qualité de leur pratique, puisqu'ils s'y consacrent
quotidiennement. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, Dr Aubry. Je vous rappelle
qu'il y a déjà 18 minutes d'écoulées.
M. Roy: Merci. Avant de passer la parole au Dr Jean-Hugues
Brossard, il va sans dire, je le répète, que les propos du Dr
Aubry sont des propos représentant l'opinion unanime de la profession
médicale en ce qui concerne l'organisation médicale dans les
établissements. Dr Jean-Hugues Brossard.
Le Président (M. Joly): Dr Brossard.
M. Brossard (Jean-Hugues): J'ai l'ambitieux mandat de discuter en
deux minutes des effectifs médicaux. Je serai donc bref, comme
d'habitude. Le projet de loi 120 limite énormément les
libertés d'installation et les libertés de pratique des
médecins, particulièrement des jeunes médecins. La raison
évoquée, c'est que c'est le seul moyen d'améliorer
l'accessibilité des soins et des services pour les usagers dans
certaines régions du Québec et qu'il faut donc limiter les
libertés. Évidemment, nous sommes tous convaincus ici, la
profession médicale est convaincue que ce n'est pas
nécessaire, ce n'est pas souhaitable de limiter ces
libertés-là, et les libertés d'installation, et les
libertés de pratique.
Et ce n'est surtout pas souhaitable d'embrigader les médecins
dans un ensemble de mesures punitives comme celles qui sont
énumérées dans la loi 120. Des mesures punitives - et le
mot est tout à fait juste - que sont des plans d'effectifs
médicaux souvent arbitraires, incontournables, qui font en sorte que les
jeunes médecins ne choisissent plus leur lieu de pratique, des
rémunérations différentes, à la baisse, pour des
périodes indéterminées, qui touchent des jeunes
médecins, sans considération de leur compétence, qui est
égale à celle des autres, l'agrément des cabinets
privés, les lettres d'entente entre les médecins et les centres
hospitaliers, tout un ensemble de mesures punitives qui affectent les
médecins bien au-delà de l'ampleur réelle que
représente le problème des effectifs médicaux, le
problème de répartition. On en fait beaucoup pour le
problème réel.
La profession médicale propose un projet de solution, un ensemble
de solutions qui cible et qui est appelé à régler les
inégalités, les inéquités de répartition des
effectifs médicaux au Québec. La première étape de
ce projet de solution là est la prise en charge par la profession
elle-même de ce problème-là, en remettant à des
instances régionales médicales - la commission médicale
régionale - la responsabilité d'assurer
C'adéquacité" des services dans chaque région. Et pour
permettre à ces commissions de le faire, nous proposons deux outils: la
capacité pour ces commissions d'exiger des médecins
omnipraticiens dans chaque région d'effectuer certaines tâches qui
seraient délaissées afin que l'omnipratique et les services
d'omnipratique soient complets dans chaque région. Deuxième
outil, la capacité pour ces commissions de mettre sur pied des
programmes de complémentarité de services, pour faire en sorte
que, dans les disciplines spécialisées, on puisse organiser une
complémentarité interrégionale faisant en sorte que chaque
région bénéficie de services
spécialisés.
Peut-être que ces outils-là ne seraient pas
entièrement suffisants pour solutionner l'ensemble de
l'inégalité des services. Il y a les incitatifs, aussi. Les
divers incitatifs, qui ont commencé à être instaurés
depuis 1985, commencent à porter fruit, et particulièrement pour
les spécialistes qui s'installent de plus en plus en région.
C'est normal que ça commence à porter fruit, puisque ces
gens-là ont commencé leur formation en 1985 et finissent
actuellement leur formation.
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, Dr Brassard, nous
avons déjà dépassé le temps. Avec le consentement
des membres de cette commission, nous débordons. Merci.
M. Brassard: Merci. Nous pensons que les incitatifs sont l'outil
de base qui doit permettre de répartir les médecins sur le
territoire et qu'il faut réévaluer régulièrement,
réanalyser les incitatifs régulièrement, et les moduler en
fonction de chaque spécialité. Peut-être que les incitatifs
nécessaires pour arriver à nos fins ne doivent pas être les
mêmes pour chaque spécialité, pour chaque discipline
médicale, pour chaque groupe de médecins, et que, à
appliquer à tout le monde une même médecine, on n'obtient
pas nécessairement les résultats souhaités. Il faut faire
un diagnostic juste avant de poser un remède, et là, on a fait un
diagnostic général qui manque de nuance. Il y a quelques
spécialités - trois, quatre, cinq, je ne sais pas - qui sont en
pénurie régionale et il n'y a peut-être pas assez de
médecins installés dans les régions
périphériques. Pour ces groupes-là, il faudrait
peut-être prévoir des incitatifs particuliers plutôt que de
leur appliquer la solution de tous.
Mais la profession médicale va plus loin que les incitatifs.
Au-delà de ça, les médecins québécois sont
prêts à faire plus que ça. Nous sommes prêts, pour
certaines spécialités, certaines disciplines médicales
pour lesquelles il y aurait des problèmes plus criants et pour
lesquelles on pourrait faire la preuve que les incitatifs n'ont
été d'aucune utilité, d'aucune efficacité, et que
ce n'est pas une avenue de solution, nous sommes prêts à discuter,
à envisager, à appliquer toute autre solution, tout autre outil
de répartition qui serait négocié et réglé
par entente pour solutionner les problèmes de répartition.
Nous n'accepterons pas des mesures qui touchent tout le monde sans
discrimination - et enchâssées dans la loi - et qui limitent
au-delà de toute raison nos libertés d'installation et de
pratique. Mais nous sommes prêts, et c'est un engagement comme groupe,
à négocier, à nous asseoir et à négocier
tous les outils nécessaires avec tous les leviers qu'ils comporteront
pour solutionner les problèmes sectoriels et les problèmes qui
touchent certaines spécialités. Nous avons la volonté de
le solutionner, ce problème-là. Nous sommes les seuls en mesure
de le faire et nous vous proposons les moyens pour le solutionner. Mais, non,
on n'est pas prêts à se laisser embrigader dans un ensemble de
mesures technocratiques qui nous enlèvent nos libertés
d'installation et de pratique au-delà de toute raison. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, Dr Brossard. Je vous
rappelle que le temps débordant, c'est automatiquement coupé sur
les périodes de questions. Merci. Dr Richer.
M. Richer: Ça va.
M. Roy: Ça va. Alors, Dr Robert Marier...
Le Président (M. Joly): Dr Marier.
M. Roy: ...qui est le nouveau président de la
Fédération des médecins spécialistes du
Québec et qui, donc, n'était pas membre de notre groupe quand on
a établi notre position sur les effectifs médicaux, va clore la
période.
M. Marier (Robert): Alors donc, ce qui a été dit
par notre compagnon, le Dr Brossard, nous l'endossons entièrement, comme
médecins spécialistes, et je passerai immédiatement
à la conclusion. Alors, M. le Président, M. le ministre, membres
de la commission, vous avez devant vous tous les représentants de la
profession médicale ce matin qui, unanimement, sont venus vous rappeler
que leur préoccupation principale, comme médecins, a
été et demeurera le patient. Non seulement voulons-nous
préserver la confidentialité et la qualité du lien
patient-médecin, mais encore nous sommes prêts à nous
compromettre via les ententes pour collaborer avec le ministère pour
s'assurer d'une distribution optimale des soins médicaux, tant en
omnipratique qu'en spécialité.
M. le ministre, actuellement, si on peut se vanter d'avoir un des
systèmes de santé parmi les meUieurs au monde, c'est en grande
partie grâce à des citoyens québécois qui ont su
faire fructifier leurs talents et ont pu acquérir une formation et des
connaissances leur permettant d'offrir une qualité excellente de
services médicaux. Ces femmes et ces hommes du Québec souhaitent
retrouver leur fierté en cessant d'être traités comme des
citoyens de seconde zone, entre guillemets, qui ne peuvent participer à
la gestion de notre système de santé. Si on a un des meilleurs
systèmes de santé, pourquoi faudrait-il le remplacer par de
nouvelles approches? Maintenons plutôt les acquis, réajustons le
tir et bonifions-le.
M. le ministre, nous voulons vous dire que tous nos amendements
proposés ont pour objectif de maintenir les acquis. Mais, après
20 ans, notre système de santé, comme vous lavez constaté,
a besoin d'une vraie réforme, une vraie réforme qui s'appuiera
sur une réflexion en profondeur de notre système de santé,
qui n'escamotera pas les problèmes de fond et n'exclura pas les experts
du système de santé, comme l'a malheureusement fait le rapport
Rochon. Nous devons connaître quels sont les services de santé
dont la population a besoin, en évaluer les coûts et prendre les
décisions qui s'imposent. Avant de légiférer, nous devons
établir une politique de santé au Québec. Pour ce faire,
la profession médicale, avec ses représentants unis ici ce matin,
vous dit qu'elle est prête à vivre un véritable partenariat
avec le ministère.
Dans cette optique et en terminant, on vous pose la question: Compte
tenu que le dernier projet de loi, avec ses 500 articles, nécessite de
votre part des amendements sur 309 articles, est-ce qu'il serait temps ou
est-ce que ce serait opportun qu'on fasse un moratoire pour faire une
véritable mise au point? Ou bien le dossier de la santé, qui est
tellement important pour les Québécois, pourrait-il utiliser une
formule connue actuellement, une commission style Bélanger-Campeau,
où les syndicats, les hommes d'affaires et les membres du gouvernement
pourraient s'asseoir et essayer d'avoir un consensus élargi sur le type
de système de santé que les Québécois souhaitent
vraiment? Merci. (10 h 15)
Le Président (M. Joly): Merci, Dr Marier. Est-ce qu'il y a
d'autres intervenants?
M. Roy: Non, ça conclut notre présentation,
très brève, malheureusement.
Le Président (M. Joly): Merci, Dr Roy. M. le ministre, je
vous reconnais.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. À ce moment-ci, comme c'est un peu la journée
de l'Opposition et qu'on a voulu entendre différents intervenants au
choix de l'Opposition, je pense que la délicatesse voudrait que les
premières questions, pour toute la journée, viennent aussi de
l'Opposition, en partageant le temps. Je prendrai la relève par la
suite. Donc, je laisse la parole à mon collègue.
Le Président (M. Joly): Merci. M. le député
de Rouyn-Noranda-Témiscamingue et aussi porte-parole du dossier.
M. Trudel: Le ministre a une délicatesse
stratégique consommée. Il serait de bon aloi, et ces
gens-là ne nous en voudront pas, que je prenne quand même 30
secondes pour faire les choses correctement et remercier le ministre d'avoir
déposé cette offre sur la table. On pourrait allonger le discours
et dire que c'est insuffisant, etc., sauf qu'il y aura six heures où les
gens pourront s'exprimer sur les enjeux publics de cette réforme, comme
nous venons de l'entendre. Et ça, je veux que, dans un esprit de
collaboration, des parlementaires puissent le reconnaître ici, de un.
Deuxièmement, quant à la délicatesse de laisser poser les
questions à l'Opposition, vous pouvez être sûr qu'on accepte
tout de suite, M. le ministre, cette délicatesse. Et je comprends qu'on
va partager en deux le temps qui reste, ou enfin, ce sont les arrangements
habituels. Et je dis aussi au ministre que, oui, mardi matin, 9 h 30, nous
respecterons notre entente. À la Fédération des
résidents du Québec, les questions vont être brèves
et vont être directes.
M. le Président de la Corporation professionnelle des
médecins l'a mentionné et dit souhaiter que nous ayons devant
nous, ce matin, les amendements que le ministre a annoncé qu'il
déposerait. Cependant, disons clairement que le ministre a quand
même - c'est à lui de faire ses commentaires - expliqué et
donné les dimensions sur lesquelles il va déposer des
amendements.
Votre présentation au niveau de la répartition des
effectifs médicaux, tout le rôle de la commission médicale
régionale, est-ce que vous pensez que ce n'est pas là un
mécanisme qui nous permettrait éventuellement, je risquerais de
dire, quasiment de recouvrir toutes les dimensions de vos réclamations
en matière des PROS, des programmes régionaux d'organisation de
services et des plans d'effectifs, tel que c'est prévu actuellement,
puisqu'il serait rattaché éventuellement, je le suppose, à
la régie régionale? Est-ce que ce n'est pas là un
mécanisme-clé qui nous permettrait de discuter et de
régler un bon nombre de questions quant à la répartition
des effectifs médicaux au Québec?
M. Brassard: C'est en effet un mécanisme, une partie, en
tout cas, du plan qu'on propose, qui est très importante. Importante,
parce qu'elle implique les médecins dans la solution et leur remet le
rôle de gérer la solution de la mauvaise répartition des
effectifs. Cette structure-là, oui, est intégrée à
la régie régionale et dépend de la régie
régionale, et, oui, elle a le pouvoir de répartir les
tâches pour les omnipraticiens et de structurer des programmes de
complémentarité de services. Et aussi, elle a comme tâche
de travailler à l'élaboration des plans de services. Le mot "plan
d'effectifs médicaux" comme on le conçoit est quelque chose que
nous, nous ne concevons pas. Les plans de services devraient être la base
de la répartition des effectifs. Les centres hospitaliers qui sont les
plus proches de leurs usagers et les plus proches des besoins régionaux,
des besoins locaux, doivent élaborer leurs plans de services et les
besoins qu'ils ont en effectifs. Il faut laisser les médecins se
répartir librement sur le territoire et faire en sorte d'identifier les
problèmes précis. En omniprati-que, les médecins sont bien
répartis, mais certaines tâches sont des fois
négligées ou ne sont pas satisfaites de façon
satisfaisante. Répartissons les tâches plus adéquatement.
Puisque ce sont les médecins qui sont bien répartis, travaillons
sur les tâches.
Les spécialistes: II y a diverses sortes de
spécialités, il y en a 32. Il n'y a pas un problème de
répartition des spécialistes, ce sont 32 réalités
différentes. Alors, pourquoi appliquer une solution, un plan d'effectifs
qui touche tout le monde, une solution avec des incitatifs financiers qui
touchent tout le monde, alors qu'il n'y a pas de raison de toucher tout le
monde, puisque le problème n'est pas pour toutes ces
spécialités-là?
Une voix: Est-ce que...
M. Roy: Je voudrais juste ajouter un complément.
Une voix: O.K.
M. Roy: Dans le système décentralisé qui est
suggéré dans le projet de loi, la commission médicale
régionale devient un organisme essentiel. À l'heure actuelle, les
plans d'effectifs médicaux ont été faits
unilatéralement par le grand manitou du ministère de la
Santé à Québec, sans consultation avec les organismes
médicaux, sans aucune discussion avec la table de planification qui
siège depuis cinq ans, sans aucune consultation, je le
répète. C'est un modèle mathématique, un
modèle arithmétique, où on a voulu habiller Pierre en
déshabillant Jacques. On a voulu faire une certaine équité
dans le Québec. On a pris Montréal - il y a évidemment
plus de médecins à Montréal par tête de population
qu'il y en a sur la Côte-Nord - et on a établi un prorata à
partir de ça. On est arrivé avec des erreurs monumentales, par
exemple un surplus d'omnipraticiens sur la Côte-Nord, alors qu'on sait
fort bien qu'il n'y en a pas trop. Mais il reste que c'est un modèle
mathématique, un modèle technocratique, sans consultation avec
les médecins.
Si on veut que ça fonctionne, il faut que les médecins
soient impliqués à la base, dans la région. Ce sont eux
qui connaissent les besoins de la population, et il faut encore, avant
d'établir des plans d'effectifs, savoir quels services on va donner.
Comme le Dr Brossard le dit, il faut établir dans chaque région
le genre de services qui va être disponible à la population,
savoir le plan d'organisation des établissements, et, ensuite, on
établit le nombre de médecins requis. Et ce sont les
médecins eux-mêmes qui sont les mieux disposés pour en
discuter avec les conseils régionaux, les régies
régionales, et tous les administrateurs des régions avec,
évidemment, la collaboration des autorités de Québec.
M. Trudel: Est-ce que vous êtes en train de nous dire, Dr
Roy et Dr Brossard, que du moment où on aurait installé,
défini dans la loi l'obligation de la création d'une commission
médicale régionale au sein des régies régionales,
si on est suffisamment précieux au niveau des objets sur lesquels on
peut travailler... Parce que vous venez d'employer les mots: Nous, de la
pratique médicale, on connaît les besoins de la population, on est
capables de les définir. Je comprends aussi que vous êtes capables
de les discuter, d'échanger avec d'autres personnes qui sont
responsables au niveau de la planification. Dans ce sens-là... Et je
veux que l'idée soit assez claire, parce que, écoutez, quand on
va arriver au niveau de la discussion des articles de ce projet de loi,
précisément là-dessus, avec les amendements que le
ministre a annoncés, n'avez-vous pas l'impression qu'on pourra, dans ce
lieu, discuter effectivement de la définition des plans d'effectifs
médicaux, et que vous pourrez avoir votre mot à dire dans un lieu
strictement défini
par la loi. Et, est-ce que ça vous apparaît suffisant?
M. Roy: Écoutez, on veut être impliqués. On
veut collaborer avec les établissements...
M. Trudel: O.K.
M. Roy: ...faire ça en communauté. Il y a
déjà eu une très bonne expérience dans la
région de Trois-Rivières, avec les hôpitaux, avec les CLSC,
pour savoir combien de médecins ils ont besoin. Mais H faut que les
médecins soient impliqués. On ne veut pas se faire distribuer les
tâches sans être là.
M. Brassard: La commission médicale est un lieu de
rencontre, oui, un lieu de décisions dans ce qu'on propose quant au
problème des effectifs. Une fois qu'on a déterminé quels
sont les besoins dans la région, qu'on a déterminé ce dont
on a besoin comme pian de services pour satisfaire ces besoins-là,
maintenant, il faut faire en sorte que les effectifs s'installent, et
là, ça prend des outils. Et cette commission médicale
là, en plus de déterminer les besoins, en plus d'évaluer
les besoins en services, les besoins de la population de participer à
l'élaboration des plans, elle doit avoir des outils pour les
réaliser. Et là, on énumère un certain type
d'outils: les outils qui sont la capacité d'exiger des tâches pour
les omnipraticiens; les outils qui sont de pouvoir mettre sur pied des
programmes de complémentarité de services
spécialisés; des outils qui sont des incitatifs qui pourraient
être ciblés sur certaines spécialités ou sur
certains besoins spécifiques dans une région; et des outils qui
pourraient, si tout ça ne fonctionne pas - et c'est déjà
beaucoup - être d'autres solutions négociées entre les
fédérations et le gouvernement pour des problèmes
spécifiques et ponctuels. Des outils, on en offre beaucoup, mais non des
outils qui sont des plans d'effectifs médicaux qui touchent tout le
monde, et arbttaires, et aveugles; des rémunérations
différenciées qui touchent tout le monde de façon
arbitraire et aveugle. Non. Ça, ce n'est pas possible. Il faut moduler
les choses.
Une voix: II y a quelqu'un qui veut ajouter à la
réponse parmi les étudiants.
Le Président (M. Joly): Oui. M. L'Allier.
M. L'Allier (Michel): Ce qu'on veut bien répondre à
ce qui a été dit ici, c'est que c'est des outils
différents qui vont être discutés par la commission et non
pas les outils actuels qui vont être amenés à la
commission, puis dire que la commission médicale va discuter toutes les
solutions qui viennent du ministère et dire: On accepte tout si la
commission médicale est mise en place.
Le Président (M. Joly): Merci. M. le
député.
M. Trudel: Soyons très précis, il y a là, je
pense, quelque chose d'extrêmement intéressant, c'est votre
suggestion. Nous, ce qu'on a toujours dit de ce côté-ci, c'est: II
ne nous semble pas qu'il faut entrer dans une réforme en excluant nos
professionnels, en particulier les professionnels de la médecine. Il
nous semble important que ce lieu soit formellement créé au sein
des régies régionales - et pour l'instant, je pense, qu'on
pourrait dire - et d'avoir un article assez précis sur les pouvoirs
d'échanges que vous aurez avec les partenaires au sein de la
régie régionale. Or Brassard, très rapidement, vous n'avez
pas l'impression, justement, qu'on va pouvoir moduler les tâches a
l'intérieur de la discussion à la régie régionale
avec sa commission médicale?
M. Brassard: C'est certain que chaque région a des
réalités différentes et chaque région a des besoins
différents. Si cette commission médicale là, qui a pour
tâche d'apprêter ces besoins-là et de faire en sorte
d'associer les tâches médicales réalisées aux
besoins de la population, si cette commission ne peut pas discuter ces
tâches-là, ne peut pas discuter la modulation des tâches et
ne peut pas faire que cette commission soit un lieu de rencontre entre les gens
qui les décident et qui les organisent, elle aura été un
échec. Donc, oui, certes, cette commission-là devra être un
lieu qui va permettre de réaliser tout ça.
M. Trudel: Nous serons très attentifs là-dessus au
niveau, donc, de la définition de cet instrument pour en arriver
à non seulement que ce soit permis à la profession
médicale d'être dans la réalisation des plans d'effectifs,
mais qu'elle sente également qu'elle est concernée, qu'elle ait
la perception et le sentiment qu'elle est considérée dans ce
réseau et dans cette réforme de la santé et des services
sociaux. Je pense qu'on pourrait en discuter sur cette base-là. Le
ministre, bien sûr, donnera sa vision des choses comme ministre
responsable.
Question rapide aussi, forcément, au Dr Marier de la
Fédération des médecins spécialistes. Dr Marier, il
y a eu quelques allusions, hier, au changement de direction démocratique
au sein de la Fédération. Est-ce que les ententes du 3
décembre 1990 - dans une circulaire de la Fédération des
médecins spécialistes du Québec qui a été
expédiée à tous vos membres - tiennent encore? J'en cite
une. Votre Fédération disait: Suite aux représentations de
la Fédération des médecins spécialistes du
Québec, le ministre retirera du projet de réforme la formule des
contrats spécifiques entre les médecins spécialistes et
les centres hospitaliers, contrats qui auraient accompagné l'obligatoire
octroi des statuts et privilèges. Est-ce que cette entente avec le
ministre tient toujours?
M. Marier: Je n'ai pas eu l'occasion de discuter avec le ministre
sur ce sujet précis là. J'ai cru comprendre, dans les
formulations, les intentions du ministre. Comme vous en avez pris connaissance
hier, il y aurait une modification dans cette voie-là. Mais il est clair
que, nous, de notre côté, nous souhaitons ardemment qu'il y ait un
retrait de cette approche ministérielle ou gouvernementale. (10 h
30)
M. Trudel: Nous sommes un peu surpris, c'est le moins que l'on
puisse dire, que le 3 décembre 1990, avant le dépôt de la
réforme, nous ayons pu prendre connaissance - dans quelque chose qui
n'est pas confidentiel, c'est une circulaire à vos membres, un bulletin
d'information - qu'il y avait des ententes avec le ministre et que ce qui a
été déposé à l'Assemblée nationale,
à ce chapitre, avait déjà fait l'objet d'ententes avec le
ministre et que ce serait retiré du projet de loi. Est-ce que ça
vaut aussi... Une autre dimension de cette information qui a été
diffusée le 3 décembre: les médecins qui pratiquent en
laboratoire, les pathologistes, les microbiologistes, les biochimistes et les
hématologistes ne seront pas rémunérés à
salaire. En parlant de catégories de spécialistes qui ont des
médecins pour clients, le ministre faisait référence
à ces spécialistes. Est-ce que ça tient toujours aussi,
à votre connaissance, cette entente, telle que libellée et
expédiée à vos membres le 3 décembre 1990?
M. Marier: Les rencontres de consultation qui ont
été faites avec le ministre et mon prédécesseur
étaient dans la préparation du projet de loi qui devait
être soumis, ou du livre blanc et du projet de loi. Je pense
qu'actuellement, je suis en train de prendre connaissance des dossiers de la
Fédération. Vous me laisserez au moins le minimum qu'on
confère à un ministre pour prendre en charge un ministère
pour refaire le point sur tous ces dossiers-là. Pour l'instant, je pense
que le communiqué qui a été émis demeure le
communiqué qui a été émis. Et la
Fédération se réserve le loisir de réajuster le tir
en temps et lieu.
M. Trudel: Remarquez que mes questions ne visaient pas à
vous ligoter.
Le Président (M. Joly): En conclusion, s'il vous
plaît, M. le député.
M. Trudel: Conclusion au Dr Desjardins, des CMDP...
Une voix: Aubry.
M. Trudel: Aubry, pardon. Lapsus.
M. Côté (Charlesbourg): Vous êtes dans le
passé.
M. Trudel: Vous pensez que le rattachement des CMDP au conseil
d'administration plutôt qu'au directeur général de
l'établissement serait de nature à maintenir les
responsabilités et l'exercice de ces responsabilités, de
façon correcte dans l'établissement, et vous y voyez, encore une
fois, de grands dangers d'être attachés au directeur
général de l'établissement?
M. Aubry: Absolument. Et à ce niveau-là, je puis
parler d'une double expérience, puisque je suis président d'un
conseil d'administration depuis deux ans et membre du conseil d'administration
depuis 17 ans. C'est à la face même de l'activité
médicale que le Conseil des médecins et dentistes, qui a la
charge d'évaluer la qualité des soins, la pertinence des soins,
doit relever de l'instance qui, elle-même, relève du ministre,
à savoir le conseil d'administration, et non pas d'un directeur
médical qui aura, évidemment, des objectifs et des
impératifs. Je pense que cette attache, qui a été
présente dans le passé et a été garante de bonne
qualité de soins, il m'apparaît essentiel qu'elle demeure.
Le Président (M. Joly): On va essayer de la garder. Je
vais maintenant reconnaître M. le ministre, pour 16 minutes.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Moi aussi, malgré mon recul, ce qu'on qualifiait de
recul, ce matin dans les journaux, c'est toujours un plaisir renouvelé
de pouvoir échanger en privé, et même en public - parce que
mon discours ne sera pas différent en public qu'en privé - avec
le corps médical. Et, évidemment, de vous voir tous là ce
matin, il y aura au moins une action bénéfique que j'aurai pu
faire dans ma vie, c'est de vous avoir regroupés ensemble autour d'une
table, y compris le futur, d'après ce que j'ai compris, puisque les
étudiants et les résidents sont à cette même
table.
D'entrée de jeu, pour qu'il n'y ait pas d'équivoque, et
comme ça va être enregistré, ça pourra toujours
servir ultimement... Alors, pour me glorifier, pour m'encenser ou pour faire
autre chose que vous souhaiterez faire, puisque vous aurez toujours la
liberté totale, pleine et entière de le faire, je vais
répéter ce que j'ai dit à plusieurs reprises et qui n'a
pas semblé vous atteindre comme profession. Je l'espère bien, en
vous le disant directement, puisque c'est enregistré à
l'Assemblée nationale, que ce sera aussi de nature à se diffuser
un peu partout parmi les 15 000 ou 16 000 membres, puisque vous avez des bons
moyens de diffusion.
J'ai dit à plusieurs reprises, premièrement, qu'il n'y
avait personne de plus qualifié - et ça, c'est le Dr Desjardins
qui m'a appris ça, et M. Marier ne se sera pas surpris, je le lui ai dit
ce matin à notre très bref déjeuner - c'est le Dr
Desjardins qui, à un moment donné, m'a rappelé un certain
nombre d'éléments de base qu'un
simple petit professeur n'ayant fait que trois ans d'université -
et surtout beaucoup plus de politique que d'enseignement - avait eu
probablement tendance à oublier, ou ne l'a jamais su. Un médecin
qui a fait 6 ans d'université, ou qui en a fait 10 pour une
spécialité, a été, est et sera toujours la personne
la plus qualifiée pour diagnostiquer, pour prescrire, pour soigner, pour
guérir. C'est-y clair? Je pense que ça ne peut pas être
plus clair que ça. Et quand je le dis, je ne le dis pas avec des
arrière-pensées, je le dis parce que je le pense, et parce que
c'est aussi la réalité d'hier, c'est la réalité
d'aujourd'hui, et quel que soit le biais par lequel on analyse la
réforme, c'est aussi la réalité de demain. C'est
clair.
Donc, pour avoir été malade moi-même à
quelques reprises - et j'imagine que les étudiants se rappellent d'une
fois, au moment où je les ai rencontrés - j'ai eu affaire au
corps médical, aux professionnels qui m'ont toujours très bien
soigné. La plus belle preuve: je suis encore là. Et si j'avais
essayé de me soigner moi-même, ou de me faire soigner par un
directeur général d'hôpital qui n'est pas un
médecin, j'aurais eu des problèmes. Ce n'est pas ça qui
est le système au moment où on se parle, et ce n'est pas
là qu'on envoie le système non plus. Donc, cette profession de
foi, elle est publique, et elle est sincère aussi de la part de
l'appareil gouvernemental.
Ayant dit cela, est-ce que, pour autant - et on va se poser la vraie
question - avec cette auréole bien méritée, qui est
là aujourd'hui, est-ce que vous devez tout mener, tout décider?
C'est non, c'est clair, c'est non. Est-ce que, pour autant, ça veut dire
que le pouvoir suprême qu'on impute parfois aux technocrates du
ministère... J'entends ça souvent: Le meilleur moyen de ne pas
trop blesser le ministre, pour se le garder, pour qu'on soit capables de
continuer à se parler, c'est de parier des technocrates, qu'ils soient
régionaux, dans les établissements ou au ministère.
Évidemment, on n'affronte pas le ministre directement, mais on parle de
ceux qui le conseillent, pensant que le ministre n'est pas capable de faire la
distinction entre ce que ces technocrates, qui ont un mandat et un rôle
extrêmement important à jouer, parce que la loi confie au
ministère des responsabilités qu'il doit assumer, et la
responsabilité ultime est entre les mains du ministre, elle est entre
ses mains, et il y a effectivement un appareil pour le conseiller. Est-ce que
ça veut dire pour autant que l'appareil qui le conseille a une emprise
totale et absolue sur le ministre? Ce serait le "fun" de laisser
répondre les fonctionnaires de temps en temps. Je pense qu'ils
pourraient peut-être vous en apprendre des petits bouts.
Donc, à partir de ce moment-là, il faut que les choses
soient claires. Je porterai le poids politique des décisions que je fais
prendre à mon gouvernement, de la même manière que vous les
portez par des élections auxquelles vous faites face. Et dans ce
sens-là, je dois vous dire que ce que j'ai entendu ce matin, pour moi,
il n'y a pas de grandes surprises, évidemment, mais, il y a des
ouvertures. Peut-être que je me fats des illusions, mais en tout cas, on
est aussi bien de s'en faire pour le temps qu'on peut. Ce matin, il y a des
ouvertures.
Et je vais vous dire tout simplement que, pour moi, l'un des beaux
moments de la réforme avec les médecins, c'est quand vous
êtes revenus au mois de janvier, changeant d'orientation. J'aime autant
vous le dire tel que je le pense, parce que vous savez que je n'irai pas
à côté, ça va être direct. Vous avez senti le
besoin d'admettre qu'il y avait un problème majeur d'effectifs
médicaux à travers les régbns du Québec, qui ne se
réglait pas nécessairement par des primes, et qui ne se
réglait pas nécessairement par de la coercition - et ça a
été répété par M. Brossard tantôt,
parce qu'il n'y avait par seulement de la coercition, il y a du "candy" de
temps en temps aussi, et il faut aussi en parier - que ça ne se
réglait pas uniquement de cette manière-là, et vous avez
senti le besoin de travailler ensemble pour venir faire une proposition qui
allait dans le bon sens. Chapeau! Je l'ai dit publiquement, et je le
répète, et je l'ai dit d'entrée de jeu à la
commission parlementaire: Chapeau! Vous avez réuni la Corporation, la
Fédération des médecins omnipratlciens, des
spécalistes, des résidents et des étudiants. Et vous avez
fait une proposition commune qui allait dans le bon sens.
Mais laissez-moi vous dire une chose: J'ai la ferme conviction que s'il
n'y avait pas eu, à l'intérieur du projet de loi, certains
éléments qui pouvaient amener des mesures un peu plus
sévères, est-ce que vous auriez eu la même proposition? Si
oui, pourquoi n'est-elle pas venue avant pour être capable de combler les
besoins que les régions du Québec ont à combler? Parce
qu'ils sont là, les besoins. On pourrait pérorer pendant cinq
heures de temps sur le sujet.
Je regarde un article du journal d'hier, parce qu'il y en a d'autres qui
écrivent aussi. Peut-être qu'il a le malheur d'être
écrit par des technocrates aussi, mais des régionalistes,
ceux-là, du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, qui parient des effectifs
médicaux en régions périphériques, puis qui donnent
des chiffres qui sont là très évidents. Il y a des
problèmes. Oui, on a un bon système, le Dr Marier le disait
tantôt, je l'ai dit aussi, je l'ai dit partout, puis je vais continuer
à le dire: On a un maudit bon système, qui se compare très
avantageusement à ce qui passe aux États-Unis puis dans le reste
du Canada, à des coûts nettement comparables. Oui, c'est vrai,
mais je ne veux pas arrêter là, moi, je veux qu'on continue. Et je
suis convaincu que tous les médecins veulent la même chose aussi,
bien sûr, pour le bénéfice du citoyen consommateur qui n'a
pas le choix d'être un citoyen consommateur. À
partir de ça, oui, ça m'intéresse. Chaque fois
qu'il y aura une ouverture de votre part, vous trouverez le miroir chez nous.
C'est clair: chaque fois qu'il va y en avoir une.
Et des exemples de ça, c'est que, les amendements qui vont
être déposés, les 309, ils ne viennent pas seulement des
technocrates, pour être capables de renforcer un pouvoir qu'on aurait pu
échapper dans la rédaction de certains articles, ils viennent de
rencontres que j'ai eues avec le corps médical, avec les
différentes associations, pour tenter de bonifier et de faire en sorte
qu'on atteigne l'objectif qu'on souhaitait.
Ce tour de piste étant fait, je pense que, de part et d'autre,
à l'occasion, on peut reconnaître qu'on a fait des bons coups. Ma
question va s'adresser à mon bon ami Augustin. D'abord, merci pour les
bons mots d'hier, j'ai pu dormir plus facilement. La première question,
c'est: Vous avez évoqué, M. Roy, tantôt, que des plans
d'effectifs médicaux étaient faits par des technocrates. Vous
êtes comme moi, j'ai l'impression des fois, à l'occasion sur le
plan public, nos propos dépassent nettement notre pensée. Je vais
essayer de vous donner la chance de vous rattraper parce que ce n'est pas vrai
que les plans d'effectifs médicaux sont faits uniquement par des
technocrates. Il y a des consultations, elles ne sont peut-être pas
suffisantes à votre point de vue, mais il y a des consultations.
Je vais prendre l'exemple que vous m'avez donné. Vous avez dit:
On a mené une expérience très intéressante dans la
région de Trois-Rivières, où la Corporation a dit: Voici
ce que ça prendrait sur le plan des effectifs médicaux. À
votre point de vue, je ne sais pas si vous avez comparé avec des plans
d'effectifs médicaux faits par les technocrates, puis qu'est-ce que
ça donne. Je vais vous donner la réponse tout de suite, pour que
ça n'ait pas l'air d'un piège de fou. La réponse, c'est:
sept dizièmes d'un médecin de différence entre votre
méthode puis celle des technocrates, qu'on décrit. Ce n'est pas
si mai comme expérience.
Alors, à partir de ça, des plans d'effectifs
médicaux, s'ils devaient être faits - puis là, j'en arrive
à ma question précise - comme vous le souhaitez, à partir
des plans de services et de soins que l'hôpital va se donner, dites-moi
comment tout ça va se faire pour réussir à se mettre
ensemble, éventuellement, pour faire quelque chose qui a de l'allure,
contrairement à ce qu'on fait aujourd'hui lorsqu'on additionne
l'ensemble des plans de services que les centres hospitaliers et tous les
établissements à travers le Québec font? On aurait besoin
à peu près du double de médecins qu'on a actuellement.
C'est ça, le problème. Comment ça se fait, cette
chimie-là, autour, cet arbitrage?
Le Président (M. Joly): Dr Roy. (10 h 45)
M. Roy: Je répète que le cadre de
référence qui a donné lieu à l'ensemble de la
planification des effectifs médicaux au Québec a
été fait uniquement par des fonctionnaires du ministère,
selon un modèle mathématique, pour avoir une certaine
équité dans la distribution des médecins au Québec.
À partir de ça, les régions ont fait des plans.
Évidemment, dans la région de Trois-Rivières, après
une étude qui a duré deux ans, avec la collaboration du conseil
régional et des établissements, on en est arrivé à
une distribution semblable, ou à peu près pareille, de la
nécessité d'effectifs médicaux.
Sauf que, si le nombre est semblable, il y a des changements importants
d'établissement en établissement parce que, là, on a
établi la complémentarité des établissements. Il y
avait des guerres importantes, dans la région de Trois-Rivières -
le député de Trois-Rivières le sait très bien, dans
toute la grande région de la Mauricie - des chicanes importantes dans
des établissements. Et là, après entente des groupes qui
se sont assis ensemble, on a réussi à ce que les gens s'entendent
sur le genre de complémentarité des services qui devaient
être donnés, mais on en arrive, par ailleurs, au même nombre
approximatif de médecins nécessaires.
Mais c'est une opération qui doit avoir lieu dans chaque
région du Québec. Il ne faut pas que les régions
exagèrent non plus le besoin en médecins parce qu'on dit que le
besoin en effectifs médicaux n'est pas très grand dans les
régions qui en ont vraiment besoin. On parie de 160 omnipraticiens,
à peu près, et de 125, 150 spécialistes. Ce n'est pas un
très grand nombre de médecins, ça, mais il faut quand
même les former.
Et là, il y a une question importante. C'est qu'en même
temps que les régions ont besoin de médecins, en même
temps, les facultés de médecine forment moins de médecins
parce que le gouvernement contingente l'entrée a l'admission en
médecine, et il y a également un contingentement à
l'entrée en spécialités. Alors, il va falloir articuler
tout ça ensemble, le gouvernement, les facultés de
médecine, les fédérations et la Corporation pour qu'on
forme les médecins pour la population, pour répondre aux besoins
de la population.
On est conscients qu'il faut des médecins, mais il faut aussi des
complémentarités de services. Il faut aussi des contrats entre
hôpitaux, entre les régions. Par exemple, il faut que les
hôpitaux universitaires, les hôpitaux des grandes villes aident les
hôpitaux de la périphérie, les hôpitaux des
régions excentriques. Il n'est pas question d'avoir toute la gamme de
chirurgies sur la Côte-Nord ou même en Abitibi, dépendant du
besoin de la population, parce que pour être bon chirurgien...
Le Président (M. Joly): En conclusion, s'il vous
plaît.
M. Roy:... s'il n'y a pas de malades, on perd sa
compétence. Il faut aussi penser à tout l'équipement
requis. Alors, ce qu'on dit, c'est qu'on est prêts à travailler
avec les gens du ministère, avec le gouvernement, pour établir le
meilleur système de santé possible.
Il faut penser qu'un ministre, malheureusement, ça passe, alors
que les fonctionnaires, ça reste. Alors, le ministre est important pour
distribuer les effectifs médicaux correctement. Il n'y a pas de
système idéal dans le monde. Il n'y en a pas. Le Québec
est peut-être la province où H y a la meilleure distribution
à l'heure actuelle. On ne peut pas penser que c'est idéal, cette
affaire-là, mais ce n'est pas par la coercition qu'on va la
régler. On dit: À l'heure actuelle, il y a une volonté
très nette des résidents et des étudiants en
médecine de servir les régions du Québec, à
condition - et le ministre a annoncé ses couleurs - qu'on leur permette
de revenir en ville quand ils le veulent, à condition qu'on tienne
compte de leurs capacités personnelles de s'adapter à la...
Le Président (M. Joly): Dr Roy, je vous arrête.
Merci beaucoup. Le mot de la fin, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Une dernière
question. Je vais m'en servir pour une question, M. le Président.
Évidemment, je voudrais échanger avec Augustin; ça serait
trop beau, parce que c'est vrai que les ministres passent, mais...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Roy: Heureusement ou malheureusement!
M. Côté (Charlesbourg): Ce que j'ai compris, c'est
que ça commence au niveau des fédérations, là
aussi.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): On va peut-être finir
par atteindre la Corporation.
Des voix: Ha,ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Mais tout ça est dit
en bonne amitié. Ma question serait peut-être au Dr Marier.
Sachant que le Dr Marier est tout frais émoulu, d'une semaine, dans son
rôle, mais qu'il est quelqu'un qui a oeuvré en région
pendant - si ma mémoire est fidèle - sept ou huit ans en
Abitibi-Témiscamingue. Le problème des spécialités
de base au niveau du Québec, dans les régions du Québec,
c'est un problème qui est crucial. Si vous étiez le ministre,
demain - parce qu'on ne sait jamais où ça mène ce genre
d'exercice que vous avez mené - si vous étiez ministre, demain,
comment réussiriez-vous, en prenant pour acquis qu'au niveau des
omni-praticiens, on a un certain équilibre à travers les
régions du Québec? "Intrarégionalement", c'est une autre
affaire, mais au niveau des régions du Québec, c'est un
équilibre qui n'est pas si mauvais et je remercie ceux qui ont
contribué à le faire au niveau des spécialités de
base, et les régions ne demandent pas d'ultraspécialités.
Il y a le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue qui
dépose des pétitions de temps en temps sur la radio-oncologie
pour l'Abitibi-Témiscamingue, mais c'est son rôle de
député de le faire. Il y a des services qui peuvent se donner en
complémentarité, c'est un peu ça qui peut se faire. Dr
Marier, deux problèmes assez importants auxquels on doit faire face
maintenant et dans les prochaines années: chirurgie, médecins de
médecine interne; deux problèmes assez importants dans les
régions du Québec. Si vous étiez ministre, demain matin,
vous régleriez ça de quelle manière, ces
problèmes?
M. Marier: je ne pensais pas que vous m'en vouliez tant que
ça en me laissant penser que je pourrais devenir ministre un jour. J'en
ai assez avec la Fédération, actuellement.
M. Côté (Charlesbourg): Vous trouvez que c'est une
dure tâche.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Marier: Écoutez, je pense que, dans un premier temps,
il faut dire, M. le ministre, que les politiques que le ministère a
mises en place actuellement n'ont peut-être pas encore porté tous
les fruits qu'elles devraient porter étant donné le
caractère de la formation des médecins spécialistes qui
s'échelonne tout au long de plusieurs années. Donc, les
politiques incitatives vont sûrement donner des fruits. Ça a
commencé, mais ça devrait s'accentuer. Je pense que c'est le
secret - d'autres endroits comme l'Ontario l'ont démontré - les
politiques incitatives, ça donne définitivement des
résultats.
Mais, de façon plus précise, je pense qu'actuellement, il
est temps de s'asseoir pour cibler les besoins réels et non pas faire
des politiques incitatives pour tous les médecins spécialistes,
mais pour ceux dont on a vraiment besoin, selon les plans de services qui
pourraient être établis, des plans de services
rationalisés, évidemment. Vous l'avez bien dit tout à
l'heure, on va avoir besoin de beaucoup trop de médecins si on s'en
tient seulement à cela.
Mais, comme je ne suis pas ministre et que je suis président de
la Fédération des médecins spécialistes, j'ai un
avantage. C'est que, moi, j'ai les gens pour solutionner les problèmes,
dans le sens que j'ai des chirurgiens généraux, j'ai des
internistes pour régler les problèmes des régions, tandis
que la machine gouvernementale bureaucratique n'en a pas.
M. Côté (Charlesbourg): Là-dessus, c'est
vrai, vous avez raison, la machine gouvernementale bureaucratique n'en a pas.
Je ne suis pas convaincu qu'on n'est pas en pénurie, au moment où
on se parle, de chirurgiens généraux et de médecins de
médecine interne. Je pense qu'il y a des problèmes assez
importants. Il y a des problèmes de nombre. Vous en avez un certain
nombre, mais je pense qu'il en manque encore quelques-uns. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. À
mon tour, je remercie le groupe représentatif des médecins du
Québec d'avoir comparu devant nous. Alors, merci beaucoup, au nom...
Une voix: On aurait intérêt à se rencontrer
beaucoup plus souvent, parce qu'on a encore beaucoup de choses à dire.
Merci.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Je demanderais
maintenant aux gens représentant la Conférence des CRSSS du
Québec de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. Alors,
bonjour à vous tous. J'apprécierais que la personne responsable
du groupe puisse s'identifier et nous présenter les gens qui
l'accompagnent, s'il vous plaît. S'il vous plaît! Ceux qui se
doivent de tenir de petits caucus ou des comités d'organisation, s'il
vous plaît! Merci. Alors, je vous laisse la parole.
Conférence des CRSSS du Québec
M. Levine (David): David Levine, président de
l'Association des D.G. Il a été convenu que, pendant la
première demi-heure, l'Association des D.G. parlerait pendant 10
minutes, et 20 minutes de questions, si je ne me trompe pas. Par la suite, pour
le conseil régional, M. Rodrigue pourra parler.
Le Président (M. Joly): On vous laisse une quinzaine de
minutes, si vous voulez, pour pouvoir exposer.
M. Levine: À ma droite, il y a M. Réginald Grenier,
directeur général de l'hôpital de Val-d'Or et M. Michel
Denis, directeur général de l'Association des D.G.
M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, merci
de votre invitation qui permet aux 744 D.G. du réseau de la santé
et des services sociaux de vous présenter quelques-unes de leurs
opinions et leurs commentaires concernant le projet de loi. C'est les 744 D.G.
qui gèrent quotidiennement le réseau...
Le Président (M. Joly): Je m'excuse. Là, vous
êtes l'Association des D.G. et, après, c'est les CRSSS.
M. Levine: C'est ça.
Le Président (M. Joly): Écoutez, je veux être
bien clair. Vous avez seulement une dizaine de minutes.
M. Levine: C'est ça.
Le Président (M. Joly): C'est correct.
M. Levine: Donc, les D.G. qui gèrent quotidiennement le
réseau de la santé et qui sont confrontés à
l'ensemble des problèmes, qui sera le groupe qui sera impliqué
dans l'implantation de cette loi.
Dans un premier temps, on aimerait dire au ministre et, disons, à
l'ensemble des technocrates: Bravo à une réforme qui a du
courage, une réforme d'envergure, le courage d'avoir abordé la
question du rôle du médecin dans notre réseau, son impact
sur les coûts, son impact sur la gestion de nos institutions et son
impact sur les services qu'on offre aux requérants; le courage de
vouloir décloisonner les établissements et de s'orienter vers le
client et non pas vers des structures, ce qu'on fait depuis 20 ans maintenant;
le courage de vouloir réduire les coûts en supportant les mesures
préventives, les soins à domicile, le premier "link" et les
services proches du requérant; le courage et le désir, je
souligne le mot "désir", de décentraliser le réseau, de
donner l'autonomie aux établissements et conseils d'administration pour
nous donner la marge de manoeuvre dans nos établissements; la
déréglementation, donner un souffle d'innovation et
d'"entrepreneurship"; le courage de laisser le directeur général
gérer l'établissement et de clarifier la "bicéphalie" qui
existe entre l'administration et le corps médical dans nos institutions.
Notre système est un système où le médecin est,
à toutes fins pratiques, un entrepreneur libre dans nos
établissements, qui peut générer des services sans
être préoccupé de leurs coûts, ce qui est la
responsabilité du conseil d'administration. En étant directeur
général, on est le premier mandataire du conseil d'administration
responsable d'administrer les fonds publics. Mais, des fois, il est difficile
de trouver dans la loi cette réforme et j'aimerais parler de quatre
chapitres en particulier. La Régie, les regroupements, les conseils
d'administration des établissements et le rôle du directeur
général. En ce qui concerne la Régie, l'ensemble du
concept de la décentralisation est supporté par l'ensemble des
directeurs généraux. On travaille chacun dans nos
établissements, dans nos régions, et quand on est capables de se
regrouper avec le conseil régional de la Régie, on arrive
à des solutions. Mais on sent que le gouvernement, dans le désir
de décentraliser, avait peur. Il avait peur de donner trop de pouvoirs
à des régies et que la Régie et les établissements
ne soient pas capables de gérer localement. En conséquence, il y
a
plusieurs exigences dans la loi où on doit chercher une
approbation de la part de la Régie plus exigeante que celle existant
actuellement, ce qui va, à toutes fins pratiques, lier les mains des
établissements, créer une bureaucratie régionale et nous
mettre dans une position plus difficile, plus compliquée que celle qu'on
vit aujourd'hui. On souhaite ardemment qu'à l'intérieur de ces
309 amendements il y ait plusieurs éléments qui allègent
ce fardeau et qu'on arrive à un système qui permette cette
autonomie aux établissements.
Deux mots très brefs sur le conseil d'administration de la
Régie. J'ai déjà mentionné ça, M. le
ministre, autant on juge qu'il est nécessaire d'avoir des professionnels
au conseil d'administration des établissements pour aider à
gérer les établissements, autant on pense qu'un organisme aussi
important que la Régie doit avoir un certain nombre de professionnels du
réseau sur le conseil d'administration pour aider à la prise des
décisions.
Je parle aussi de la question du regroupement, un élément
très important. Un élément qui, à toutes fins
pratiques, va nettoyer le réseau et va arriver à rationaliser,
dans les termes des administrateurs, notre système. Pour faire ce
regroupement, il faut sûrement tenir compte de la diversité qui
existe au Québec, même à l'intérieur d'une MRC, de
la diversité entre deux types de centres d'accueil qui peuvent avoir
deux philosophies complètement différentes. À ce
moment-là, on suggère de laisser l'article 95 s'appliquer avant
l'article 88, c'est-à-dire laisser le conseil régional jouer un
rôle de négociateur entre les établissements pour arriver
à une solution locale, et pas l'article 88 qui crée une
entité par MRC. (11 heures)
En ce qui concerne les directeurs généraux dans le
regroupement, on espère que les premiers gestionnaires du réseau
auront une chance, dans ce regroupement, de continuer à gérer
à l'intérieur de ces institutions-là, et c'est une
préoccupation évidente de notre part. En ce qui concerne les
conseils d'administration de nos établissements, vous savez, comme D.G.,
on siège sur les conseils d'administration, puis dans la loi on continue
à siéger. Ces conseils d'administration, pour nous, sont fort
importants, ce sont nos patrons, ça influence les établissements
et le choix des membres est clé. Il y a un élément de la
loi qui, pour nous, est peut-être l'élément le plus
important, et j'aimerais le souligner. L'élection des
représentants de la population par une assemblée
générale dont les membres ne sont pas définis, aucunement.
Ça veut dire que les gens de la Gaspésie peuvent arriver à
Verdun et choisir les membres de mon conseil d'administration, s'ils ont
intérêt à venir. Je pense que dans le système
d'élections au Québec, on a un comté, chacun doit
être enregistré d'une manière ou d'une autre, et quelqu'un
d'un comté voisin ne peut pas venir dans le comté et mettre son
mot sur qui sera le député local. Je pense qu'il y a là
une notion extrêmement importante dans notre système
démocratique. On suggère à ce chapitre, parce qu'il est
extrêmement important d'avoir cette participation de la population, parce
que la qualité de la représentation de la population est aussi
très importante, on recommande que les citoyens d'un territoire
intéressés à participer à nos conseils
d'administration soumettent leurs demandes au conseil régional, et que
ce soit le conseil régional local, qui connaît les besoins
particuliers de chaque établissement, qui joue un rôle important
dans la nomination des représentants du public sur nos conseils
d'administration. Vous avez les CLSC qui ont suggéré, par exemple
- vous pouvez en parier cet après-midi - un type de suffrage universel,
parce qu'Us sont dans un territoire où vous avez des commissions
scolaires et un mécanisme d'élection qui peut permettre, par lieu
géographique, de déterminer les électeurs.
En ce qui concerne les autres membres des conseils d'administration,
pour les employés de nos établissements, j'espère - comme
c'était demandé pour les médecins - que les groupes
internes, médecins, infirmières ou autres, pourront, à
l'intérieur de l'établissement, continuer à choisir leurs
représentants. Je pense qu'il y a eu une réponse positive
jusqu'à date, à ce sujet.
Le dernier point. En ce qui concerne non seulement nos membres mais
l'ensemble des travailleurs dans le réseau, on demande que, comme
citoyens du Québec, on ait le droit de siéger sur un conseil
d'administration autre que notre propre conseil d'administration, et que mon
expertise à titre de citoyen du Québec me permettre de
siéger au conseil d'administration d'un CLSC, par exemple, où mes
enfants sont traités, même si je travaille comme directeur
général d'un hôpital dans un autre comté.
Le dernier point que j'aimerais mentionner avant de terminer pour une
petite période de questions concerne les directeurs
généraux. Pour les directeurs généraux, il y a eu
plusieurs changements dans les lois. Il y a un sentiment de la part du
ministère qu'il faut d'une certaine manière encadrer, qu'il faut
d'une certaine manière contrôler, et qu'il faut d'une certaine
manière s'assurer que ces premiers gestionnaires du réseau ont la
capacité de faire leur travail. On a dans la loi deux
éléments, la reconduction de la loi 97, dans deux articles de la
loi actuelle, qui exigent que le directeur général cherche
l'approbation do son conseil d'administration ou du ministre chaque fois qu'il
veut faire un autre travail non relié à son secteur, le secteur
de la santé. Je pense qu'un certain assouplissement est
nécessaire, je ne déborde pas, on en a déjà
parié assez longuement, et j'espère qu'on peut l'assouplir.
En ce qui concerne un élément qui n'est pas directement
dans la loi, et je termine là-
dessus...
Le Président (M. Joly): Rapidement, s'il vous
plaît.
M. Levine:... c'est la question de ce qu'on peut appeler la
certification de compétence des D. G. dans le réseau. Je pense
qu'il est important que les conseils d'administration qui ont la
responsabilité d'engager les D. G. aient la responsabilité de les
évaluer. Le gouvernement peut fournir les critères et les
mécanismes de l'évaluation qui doit être faite
annuellement, et si le D. G. ne fait pas l'affaire du conseil d'administration,
c'est sa responsabilité de le remercier. Je ne pense pas que ça
puisse être un autre type d'organisme que le conseil qui vit avec le D.
G. quotidiennement et le rencontre au moins une fois par mois, sinon plus, qui
soit capable de juger de sa compétence. En ce qui concerne le
mécanisme de sélection des D. G., je pense qu'il n'apparaît
pas comme tel dans la loi. On va avoir l'opportunité d'en discuter par
après dans les modalités de sélection, et des
critères qui seront choisis. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Levine. M. le
ministre.
M. Côté (Charlesbourg): La même
délicatesse est pour toute la journée, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le
député...
M. Trudel: La même force sur les arguments jouera toute la
journée.
Le Président (M. Joly):... de
Rouyn-Noran-da-Témiscamingue.
M. Trudel: Merci, M. le Président. Allons-y directement et
franchement. Que vous ameniez en tout dernier lieu cette remarque sur ce qui
est annoncé dans la réforme et qui n'est pas dans le projet de
loi, c'est-à-dire la certification de la qualification, je dois bien
vous avouer que, pour avoir rencontré des groupes de directeurs
généraux d'établissements, j'ai reçu des remarques
assez virulentes à cet égard, en particulier sur ce qui
était apprécié de la position du ministère quant
à la valeur des chefs d'établissements actuellement en fonction
au Québec, quelque chose comme 950. De faire en sorte qu'on va
maintenant devoir vous accoler un certificat de qualification pour que vous
puissiez poursuivre votre carrière, est-ce que vous pensez...
M. Côté (Charlesbourg): C'est C. A.:
"Côté Approuved".
M. Trudel: Ah! "Côté Approved". Est-ce que vous
pensez que le "Côté Approval" a de bonnes chances d'augmenter la
confiance, la compétence et la motivation au travail pour faire en sorte
que, quand le ministre aura fait son travail au niveau de la réforme, et
que vous autres, vous aurez à l'implanter partout au Québec, vous
vous sentirez motivés pour le faire?
M. Levine: Si vous me posez cette question, je peux vous dire que
l'objectif recherché est valable. Le moyen recherché est non
recevable. L'objectif d'avoir des mécanismes qui puissent assurer la
compétence de nos premiers gestionnaires est nécessaire, dans
n'importe quel réseau. Je pense que le moyen suggéré de la
part du ministre n'est pas tout à fait ce qu'on veut. Je suggère,
pour les conseils d'administration, que pour l'évaluation du D. G.,
surtout pour le renouvellement du D. G., des 744 qui sont dans le réseau
actuellement, il n'y ait pas d'examen, ni de certification, ni de rencontre
avec un groupe qui, pendant deux heures, va évaluer si cette personne
est ou n'est pas apte à gérer, si après six ans dans la
boîte à laquelle elle rend compte, le conseil d'administration
n'est pas capable de décider si c'est le bon D. G. ou pas. Le conseil ne
devrait pas être là. Ça ne devrait pas être ces
conseils-là qui gèrent notre système. Si on accepte que
c'est ce type de conseil qui va gérer nos institutions de santé,
au moins, qu'ils soient capables de juger de la compétence de leurs D.
G. Ils sont avec eux tous les jours.
La deuxième question. Pour les nouveaux engagements, qu'on ouvre
un concours et qu'on cherche un D. G. pour aller à ce nouveau concours.
Oui, il y a probablement la nécessité d'avoir un mécanisme
qui définit mieux les critères, qui définit mieux les
exigences et que l'ensemble de la définition de ces exigences est
l'assurance que ces exigences sont maintenues. Il peut y avoir un
mécanisme qu'on détermine avec le ministre à ce
sujet-là, qui, pour moi, n'est pas un examen qui dure deux heures, un
jour, un mois, et tout est fini après ça.
M. Trudel: Vous, ce que vous dites, c'est: Faisons confiance aux
citoyens décideurs sur toute la ligne, y compris dans son conseil
d'administration, pour choisir et évaluer son directeur
d'établissement. C'est bien ça?
M. Levine: En lui donnant les outils nécessaires et les
professionnels qui peuvent aider les conseil d'administration à faire ce
travail, oui, il faut laisser ça aux C. A.
M. Trudel: Est-ce que vous ne pensez pas que la plus belle
garantie, la plus belle mécanique, la plus simple, la plus efficace et
la plus ouverte, c'est un concours public avec un comité de
sélection, et qu'on peut faire confiance aux citoyens décideurs
et ne pas lui dire uniquement: Tu es au centre de la réforme, mais quand
tu
arrives pour décider qui va conduire dans l'établissement,
on va te mettre une ceinture et des bretelles?
M. Levine: Notre orientation est de dire oui à votre
intervention, mais il faut trouver l'objectif recherché actuellement. On
ne nie pas la nécessité d'avoir des critères de
sélection et de bien définir les exigences de chaque poste. On ne
nie pas, non plus, la nécessité d'une certaine aide pour
l'ensemble de nos établissements. Ce ne sont pas tous des
établissements de 120 000 000 $ par année, avec des avocats, des
experts. Ce sont des établissements qui peuvent bénéficier
grandement d'une aide dans ce geste important. C'est ça qu'on
suggère qui soit fait par le ministère à ce
sujet-là pour assurer l'objectif.
M. Grenier (Réginald): Si vous me permettez, je pense
qu'il faut situer la réponse aussi dans le continuum juridique. Il y a
quelques années, il y a eu la loi 97 qui obligeait chaque directeur
général à demander à son conseil d'administration
pour exercer la moindre activité - et je dis bien la moindre des
moindres - activités à caractère lucratif. Quelqu'un avait
un condominium de huit appartements, il fallait qu'il demande à son
conseil. C'était le secrétaire, puis s'il touchait des revenus,
il fallait demander la permission et c'est encore comme ça dans la loi
qui est reconduite devant vous, la loi 97 est reconduite. Donc ça,
c'était là et c'est encore là. Lorsque Mme Lavoie-Roux est
arrivée avec la question des mandats de huit ans, c'était la
même chose, c'était un élément qui était
uniquement pour les directeurs généraux du réseau de la
santé. Ce n'est pas comme ça pour le réseau de
l'éducation, ce n'est pas comme ça pour les commissions
scolaires.
La certification, qui arrive en troisième lieu, c'est la
même chose, c'est un examen qu'on veut faire passer aux directeurs
généraux qui sont en fonction pour rester en fonction, qui n'a
aucune commune mesure avec ce qui se passe dans le réseau de
l'éducation. Le message qui - ce n'est peut-être pas celui qu'on
veut envoyer, je sais que ce n'est pas ce que le ministre veut dire - mais le
message qui est perçu, c'est que ces gens-là sont des gens
incompétents, des gens qui font mal leur travail, d'une part, et que,
d'autre part, les citoyens décideurs qu'on a placés là
n'ont pas non plus la compétence qu'il faut pour trouver un directeur
général capable de gérer le réseau. C'est ce qui
est reçu comme message, et ça, les directeurs
généraux trouvent que c'est vraiment unique.
M. Trudel: M. Grenier du centre hospitalier Saint-Sauveur
à Val-d'Or, quand vous parlez de la mécanique des
assemblées générales pour élire les
représentants des citoyens au conseil d'administration, en clair, vous
êtes en train de nous lancer un avertissement que tout ça peut
être une vaste machine paquetée.
M. Grenier: C'est ça, c'est ça.
M. Trudel: C'est à peu près ça? Moi, ce que
je veux vous dire ou ce que je veux vous demander, c'est quand, par exemple -
je prendrai l'exemple le plus proche de moi - à la MRC de Rouyn-Noranda,
un citoyen d'un village qui s'appelle Cadillac est à plus de 100
kilomètres, probablement, inévitablement, d'où aura lieu
l'assemblée générale, est-ce que ce citoyen-là a
autant de chances d'être à l'assemblée
générale le soir pour élire les représentants du
public, et est-ce qu'il ne risque pas d'être noyauté par des
groupes d'intérêt? Il faut parler clairement, et là-dessus,
on pourrait sortir... Il y a même déjà des livres de
recettes publiés sur comment la paqueter l'assemblée pour que les
groupes d'intérêt jouent davantage que la représentation du
citoyen.
M. Grenier: On pense effectivement que c'est ça qui peut
arriver. On ne dit pas que ça va arriver, mais on place le citoyen
décideur dans une drôle de position quand on sait que des groupes
d'intérêt peuvent noyauter une assemblée
générale où on élit un conseil d'administration ou
des membres d'un conseil d'administration. Il nous semble que la
démocratie, ce n'est pas nécessairement ça qu'on veut dire
quand on parle de démocratie poussée jusque-là. On
souhaiterait qu'un mécanisme, géré peut-être par la
régie régionale, puisse favoriser le citoyen représentatif
de son milieu à nos conseils d'administration.
M. Trudel: Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député,
merci, M. Grenier. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Je ne serais pas gentil si je ne vous disais pas merci pour
toute votre entrée en matière, que je trouvais très
juste.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: C'est la deuxième partie, sur laquelle il n'y a
pas...
M. Côté (Charlesbourg): J'ai trouvé ça
très à propos, je pense que vous aviez compris le sens de la
réforme. Au delà de tout ça, mes questions ne seront
peut-être pas nécessairement sur la dernière partie des
échanges parce que vous connaissez une bonne partie de mon point de vue
pour avoir répondu pendant quatre heures à 350, 400 personnes.
Ça doit vous rappeler des souvenirs, en tout cas, moi, ça m'en
rappelle. On réussit toujours à se passer ces messages inter-
nés, on continuera de le faire de cette manière-là
sur des choses qui sont plus individuelles. Ce ne sont pas des choses
collectives, des choses individuelles. Donc, pour le citoyen producteur que le
D.G. est, on réglera ça en temps opportun, sur le plan des
échanges.
Ma première question va porter sur les CMDP. Pas sur les CMDP,
parce que c'est toujours de compétence, au niveau des médecins en
particulier. Vous l'avez dit tantôt, d'entrée de jeu, que, pour
vous, c'était un élément assez important que le CMDP
puisse être en ligne directe avec le conseil d'administration. J'y crois
aussi, je n'ai pas changé d'idée encore et j'y crois toujours, il
est dans la réforme, il y a la volonté de le faire. J'aimerais
ça vous entendre davantage sur cet élément-là, et
aussi répondre à certaines inquiétudes qui ont
été véhiculées, et qui sont réelles. (11 h
15)
On peut toujours prendre un cas d'espèce. Bon, un des exemples,
sans le nommer, on m'a dit: T'imagines-tu que tel directeur
général de tel CLSC est habilité à dire au
médecin du CMDP ce qu'il va faire, ou ce qu'il doit faire? Par
l'exemple, j'étais pas mal "shaké", sans faire de
personnalité. J'ai aussi proposé la contrepartie. J'ai dit:
Est-ce qu'un CMDP sous la direction d'un D.G. qui serait un médecin est
plus acceptable? J'ai eu des réponses oui. Dans votre esprit à
vous qui avez la responsabilité d'une administration actuellement, quels
seraient les avantages qu'un D.G. soit aussi responsable de l'ensemble de
l'administration, et comment est-ce que voyez un D.G. qui n'est pas
médecin, qui est le D.G. d'un hôpital, fonctionner avec un
CMDP?
M. Levine: Je pense qu'il faut regarder l'ensemble de cette
question-là. Pour les D.G., c'est une ouverture en matière.
Ça veut dire que, depuis fort longtemps, il y avait cette
"bicéphaiie" de gestion. Il y avait le médecin entrepreneur
libre. Je prends, par exemple, la pose des lentilles, les prothèses, les
pacemakers, n'importe quelle chose. Un D.G. ne va jamais intervenir sur le plan
médical. On n'a aucune compétence à le faire et on ne
prétend jamais vouloir le faire. Mais on doit être responsable du
nombre de chacune de ces prothèses qu'on pose, parce que chacune
coûte quelque chose. Il faut qu'il y ait un dialogue qui s'ouvre,
où le médecin sent une certaine responsabilité de
participer à ce dialogue. Actuellement, il n'y a rien qui impose cette
responsabilité, sauf la bonne volonté. Il y a des fois où
la bonne volonté est là, et d'autres fois où la bonne
volonté n'est pas là. Quand la bonne volonté n'est pas
là, le directeur général et le conseil d'administration se
trouvent dans des situations difficiles. Moi, je pense que la demande pour que
les représentants au Conseil des médecins et dentistes soient
élus par le Conseil des médecins et dentistes est une excellente
suggestion. Il faut qu'il y ait un membre du conseil d'administration qui
vienne directement du corps médical et qui siège à
l'exécutif du CMDP avec le D.G., que toutes les recommandations du CMDP
aillent au conseil d'administration, le D.G. ne peut pas les "scree-ner" pour
éviter, disons, que quelque chose arrive, mais que cette ouverture en
matière en disant que le CMDP relève du D.G., c'était une
manière de dire: Les médecins et l'administration doivent
participer ensemble maintenant, et ça donne le cadre légal pour
le faire. Avant, on n'avait pas ce cadre-là.
M. Côté (Charlesbourg): Votre expérience vous
démontre que c'est donc possible qu'il puisse y avoir cette
complémentarité parce que c'est une complémentarité
des rôles aussi. Le D.G. respectant finalement le corps médical
dans son intégrité sur le plan des choix qu'il a à faire,
et en contrepartie, le médecin respectant qu'il y a des balises sur le
plan financier qui sont la responsabilité d'un D.G., qui lui-même,
doit se rapporter au conseil d'administration, auquel siège, d'ailleurs
un médecin, et où il y aura les débats qu'il faudra
à ce moment-là. Donc, c'est une situation qui est vivable, qui
est viable, c'est une remarque qu'on a souvent entendue, qui n'est pas
justifiée, je pense. Mais elle est là, et il y a certaines
appréhensions. À l'occasion, des médecins nous disent, et
vous devez être à même, vous autres les directeurs
généraux de comprendre ça, compte tenu de ce qu'on a
entendu sur la dernière partie, la crainte des médecins, c'est
d'être inféodés par des directeurs généraux
qui ne sont pas des médecins. C'est la crainte.
M. Levine: La crainte, je la comprends bien, mais on n'intervient
pas au niveau de l'acte médical. La responsabilité de
qualité de l'acte est clairement donnée par le conseil
d'administration au CMDP, et si le CMDP n'exécute pas cette
activité-là, il faut qu'il y ait quelqu'un qui le suive et qui
dise: Aïe! Ce n'est pas bien exécuté. Ça c'est le
rôle administratif du D.G., mais pas au niveau de la qualité de
l'acte.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Oui?
M. Grenier: Si vous me permettez, dans le même sens, M. le
ministre, les pouvoirs du CMDP, si je lis bien l'article 155 du projet, sont
exercés par un comité exécutif composé de trois
médecins, du directeur général et d'un représentant
du Conseil des infirmiers. Donc, encore là, ils sont en
majorité...
M. Côté (Charlesbourg): Jusqu'à
maintenant.
M. Grenier: Jusqu'à maintenant. Ils sont en
majorité et je pense que ce qui est important c'est - comme l'ensemble
des professionnels, même si ce sont des professionnels très
par-
ticuliers - que le directeur général puisse avoir la
latitude de faire respecter les objectifs d'ensemble de l'établissement
même si c'est un groupe extrêmement particulier et
particulièrement utile, y compris les médecins comme n'importe
quel autre corps professionnel.
M. Côté (Charlesbourg): O. K. Juste pour clarifier
ce que j'ai dit tantôt: Jusqu'à maintenant. C'est qu'il y a des
papillons qui ont été annoncés sur le croisement des
présidents de Cl et de CMDP qui va être éliminé.
Donc, c'est pour ça qu'il y avait une représentation de trop,
là. Dernière question. Comment?
M. Trudel: II serait plus simple de déposer ça ces
papillons-ià, on ne parlerait pas pour rien.
M. Côté (Charlesbourg): On va vous échanger
ça pour les vôtres. Alors...
M. Trudel: Très bien. Des voix: Ha,ha,
ha!
M. Côté (Charlesbourg): II y a une série de
structures - DSP, DSI, chefs de département - qui n'apparaissent plus
comme définies dans la loi et la volonté du législateur.
À tout le moins, notre parti à nous était de laisser plus
de souplesse à l'établissement pour être capable de
gérer le quotidien. Est-ce que, là-dessus, c'est une orientation
qui est bien comprise, qui est bien connue et qui est gérable?
M. Levine: de la part des d. g., on a eu plusieurs discussions
là-dessus, je pense que l'orientation est claire. si un
établissement est bien géré, on va nommer notre dsp, on va
nommer notre dsi, on va nommer les gestionnaires parce que c'est un conseil
d'administration qui doit bien gérer une institution. pourquoi? on
arrive dans une loi qui définit une partie du plan d'organisation pour
créer un certain niveau de protection en disant que le conseil
d'administration n'est pas capable d'en arriver à ces mêmes
conclusions. si on sent la nécessité de cette protection, on va
mettre ça dans la loi. si on sent que le conseil d'administration peut
gérer adéquatement, je peux vous dire qu'il n'y aura pas un ch au
québec qui n'aura pas un dsp. mais il y a peut-être des petits
petits centres qui auraient un demi-temps, un quart de temps qui partagent ou
d'autres centres qui peuvent juger qu'us n'en ont pas besoin. ce sont les
médecins eux-mêmes qui peuvent s'autogérer parce que vous
en avez juste cinq, six dans la boîte. mais si la loi exige un dsp, il
faut en nommer un et le payer en conséquence.
M. Côté (Charlesbourg): Une dernière petite
question, parce que je sais que mon temps...
Le Président (M. Joly): Est déjà largement
débordé, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Ah! Bien vous allez voir
qu'elle ne sera pas longue parce que comme... Vous avez parié de
circonscription. Ça va faire plaisir au député de
Rouyn-Noranda-Témis-camingue, s'il m'écoute. Vous reprendrez
ça tantôt. Mon temps, je vous le donnerai. Vous avez
évoqué l'idée de la possibilité de paquetage
d'assemblée. Ça peut se faire des deux bords.
M. Levine: Oui, oui.
M. Côté (Charlesbourg): II faut bien se
comprendre?
M. Levine: Oui, oui.
M. Côté (Charlesbourg): évidemment, à
l'occasion... je ne dis pas ça pour vous autres, je dis ça pour
l'ensemble du réseau. quand on a paqueté dans le passé, on
sait comment ça se fait. on a peut-être peur que d'autres le
fassent.
M. Levine: Oui, ouf.
M. Côté (Charlesbourg): Alors, il faut bien se
comprendre...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Je l'ai dit pour
moi-même aussi parce que je l'ai fait. Si tu ne paquettes pas des
élections, tu te fais battre. "C'est-tu" clair là? Dans le sens
qu'il faut que tu t'organises.
Des voix: Ha, ha, ha! M. Trudel: Avec les mêmes
moyens. M. Côté (Charlesbourg): Comment? M. Trudel:
Avec les mêmes moyens.
M. Côté (Charlesbourg): Non, non, je comprends.
M. Trudel: T'as fait pareil.
M. Côté (Charlesbourg): Avec les variantes et les
variantes, mais il ne faut pas tenter de se compter des peurs avec les
histoires de paquetage, d'appréhension de paquetage de groupes. Voyons
donc! Il n'y a pas d'autobus de loué encore. En tout cas, je n'ai pas
été informé. Donc, à partir de ce moment-ci,
lorsque vous évoquez la possibilité de circonscription, on dit
que, quand on fait l'élection d'un député, sur le plan
géographique, c'est délimité. Je vais vous en poser une
petite. Je la trouve bonne. L'hôpital Notre-Dame à
Montréal, avec toutes ses spéciali-
tés, va représenter quelle circonscription?
M. Levine: Exactement. Voilà le problème et la
raison pour laquelle on dit: Les citoyens intéressés à
être sur le conseil d'administration de l'hôpital Notre-Dame
doivent, à la limite, déposer une demande au conseil
régional parce que Notre-Dame est différent de Verdun et c'est
différent du petit CLSC. L'individu qui se trouve à aider la
gestion de Notre-Dame n'est peut-être pas nécessairement le
même type d'individu. De laisser la porte ouverte à
l'hôpital Notre-Dame aux groupes communautaires de Saint-Louis du Parc
aux groupes communautaires du Centre-Sud ou au syndicat pour venir nommer les
quatre personnes qu'ils veulent nommer, simplement parce qu'ils paquettent
l'assemblée, ce n'est pas juste.
Une voix: Bien, M. le ministre, là-dessus...
M. Côté (Charlesbourg): non, un instant. je ne veux
pas laisser passer des affaires parce qu'il ne faut pas prêter des
intentions au syndicat...
M. Levine: Non, non. J'ai dit les groupes communautaires ou
autres, là.
M. Côté (Charlesbourg): Non, non. Mais vous savez
qu'à votre suggestion, les employés des établissements
n'ont pas droit de vote. Il faut faire attention. Ils peuvent toujours aller
chercher la belle-mère puis le beau-père...
M. Levine: C'est ça.
M. Côté (Charlesbourg): ...la belle-mère puis
le beau-père...
M. Levine: Mais je ne parle pas du syndicat de la boîte en
question. Je fais référence au groupe des anglophones,
Montréal, 1985, où c'était clairement identifié
dans les établissements de Montréal qu'on voulait avoir des
anglophones sur les conseils d'administration. C'était organisé
par ce groupe-là, à Montréal, et ils ont réussi
à le faire. Je ne pense pas que ce soit une façon correcte de
gérer nos établissements de santé.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Levine, merci M. le
ministre. Merci beaucoup. Alors, M. Rodrigue, le responsable du groupe? M.
Fortin.
M. Fortin (Gilles): Bonjour, mon nom est Gilles Fortin,
président de la Conférence. Je tiens tout d'abord à vous
présenter M. Norbert Rodrigue, qui est directeur général
de la Conférence et M. Hubert Gauthier qui est vice-président de
la Conférence.
Tout d'abord, je tiens bien simplement à remercier les membres de
la commission pour cette invitation à venir participer à vos
travaux. Je tiens aussi à préciser que les conseillers
régionaux, de façon historique, traitent beaucoup des concepts
d'intersectorialité, de collaboration, de complémentarité.
On tient à préciser que, malgré tout ça, ce matin,
l'organisation de l'audience a fait en sorte qu'on a dû partager notre
temps, qui devait être d'une heure au départ, avec nos
collaborateurs, les directeurs généraux, et qu'à ce
titre-là, on souhaite avoir à tout le moins notre demi-heure pour
présenter notre message.
Alors, au fond, M. le Président, on n'est pas ici aujourd'hui
pour reprendre toute notre position sur la réforme, qui est somme toute
connue, mais bien pour vous rappeler l'essentiel de notre position qui
réside, d'abord et avant tout, dans le fait qu'on est en accord avec la
réforme qui est présentée, qui vise au fond une meilleure
gestion et une meilleure accessibilité aux services de santé et
aux services sociaux. Du fait qu'on y croit, à cette réforme, on
voit l'importance que la loi soit adoptée le plus vite possible pour
rester dans le momentum actuel. Notre crainte, c'est que des délais trop
longs pourraient impliquer que soient dilués certains
éléments majeurs, certains éléments fondamentaux de
la réforme. Ça pourrait avoir aussi une implication
extrêmement négative en termes de démobilisation, non
seulement des acteurs du réseau, mais aussi de la population en
général. Il y a eu beaucoup d'attentes de créées
depuis de nombreuses années, et, à ce titre-là aussi, on
croit à l'importance que la loi soit adoptée le plus correctement
possible, c'est bien sûr, mais le plus rapidement possible.
Donc, l'esprit de la réforme, pour nous autres, il est
formidable. Par contre, on est bien conscients qu'il y a certains
assouplissements qui sont nécessaires pour garantir - un terme qui a
été utilisé depuis un certain temps - de l'oxygène
au milieu. Là-dessus, on fait confiance aux membres de la commission,
aux travaux de la commission, pour que les amendements qui s'avéreront
nécessaires soient réalisés au cours de vos travaux.
Ce qu'on veut dire simplement ce matin, ce que je souhaite dire, c'est
qu'il ne faut pas sous-estimer la capacité de gestion des intervenants
régionaux. À la base d'ailleurs de toute action de planification,
quand on parle de gestion du réseau de la santé et des services
sociaux, on parle de planification. C'est un terme qui est bien connu et qui
est utilisé à de nombreuses sauces. Quand on parle de
planification, c'est donc dire que pour faire de la planification, il faut
avoir une bonne connaissance de ce qu'on a à planifier. Il faut avoir
une bonne connaissance du milieu, il faut avoir une bonne connaissance des
problèmes, et qui de mieux que les régions du Québec, que
chacune des régions du Québec, pour avoir une bonne connaissance
de ce qui se passe, puis pour pouvoir planifier correctement.
La réforme prend donc comme base, bien simplement,
l'intérêt premier du citoyen, qu'il soit payeur, consommateur ou
décideur, concepts qui ont été largement utilisés
au cours des dernières semaines. Si on veut que la réforme prenne
vraiment son envol, il faut absolument s'assurer de la participation des
citoyens. Pour avoir cette participation au sein des nombreuses instances du
réseau, qu'on parie du collège électoral, qu'on parle des
nombreux conseils d'administration, il faut absolument attirer ce
citoyen-là pour qu'il puisse vraiment prendre part au processus
décisionnel. Sans ça, la participation serait non seulement
compromise, mais ce qui va arriver, c'est que la participation du citoyen
serait non seulement réelle, mais surtout intéressée. Il
faut non seulement qu'il ait participé, mais il faut faire attention
aussi à ce que le citoyen soit intéressé à
participer. Le fait que la décentralisation se fasse dans les faits
apparaît comme un élément majeur. (11 h 30)
Alors, la réussite de la réforme passe par le fait qu'on
donne aux régions une réelle marge de manoeuvre au niveau de la
planification et de la gestion du réseau. C'est simplement ça que
je voulais dire pour l'instant. Là-dessus, je céderai la parole
à M. Rodrigue.
Le Président (M. Joly): M. Rodrigue.
M. Rodrigue (Norbert): Très brièvement, M. le
Président, M. le ministre, membres de l'Opposition. M. le ministre, vous
disiez tout à l'heure qu'on parie de choses collectives. Je ne
m'occuperai pas des questions individuelles, on va parier des choses
collectives pendant trois ou quatre minutes.
À ma connaissance, on est en processus depuis sept ans,
minimalement, sur des changements de perspective dans le réseau de la
santé et des services sociaux. Nous avons atteint, depuis le
début de l'année, un momentum extraordinaire, quoi qu'en disent
les acteurs - et j'en suis un - pour certains, trop de décentralisation,
pour d'autres, pas de décentralisation. Il n'en demeure pas moins
qu'à mon avis, on est dans un momentum. S'il souffrait,
éventuellement, de délais supplémentaires, la
qualité de cette réforme en dépendrait. C'est pourquoi, on
vient insister ce matin. Dans la vie, on m'a appris qu'il fallait
répéter. Comme organisateur, vous devez savoir qu'il faut
répéter constamment.
M. Côté (Charlesbourg): Chez les organisateurs.
M. Rodrigue (Norbert): Donc, on vient répéter, ce
matin, notre conviction que dans la loi actuelle qui est sur la table, en
termes d'esprit, en termes de volonté, nous retrouvons la volonté
de décentraliser le système de la santé et des services
sociaux. Nous y retrouvons aussi la volonté de reconnaître, je
dirais, la réalité régionale. Je voudrais dire en passant,
pour ceux qui disaient que la commission Rochon avait escamoté un
certain nombre de choses précédemment, que la commission Rochon,
notamment, a découvert, au cours de sa tournée, cette
réalité régionale, et elle l'a affirmée dans son
rapport, parce que plusieurs l'ignoraient. La Commission
Bélanger-Campeau, hier, a encore découvert cette
réalité régionale et plusieurs de ses membres l'ignoraient
parce que, parfois, il faut aller dans les régions pour savoir ce qui se
passe. Quand on reste dans les grands centres, on manque notre coup. Donc,
c'est une réalité qui existe. C'est une réalité, M.
le ministre, qu'il faut accélérer à part ça en
termes d'appropriation par les communautés régionales de leur
devenir, de leurs besoins et des réponses à ces
besoins-là.
Bien sûr, il y a des ajustements qui sont probablement
nécessaires. Bien sûr, il y a une souplesse supplémentaire
qu'il faudrait probablement ajouter. Je voudrais, à ce propos, tout
simplement souligner quelques exemples. En termes de souci régional -
parce qu'on n'est pas des régies, il faut bien se le dire, on se l'est
fait dire, on n'est pas des régies, on est des CRSSS, on verra ce que
l'avenir nous réserve - mais en termes de souplesse et d'ajustement, je
voudrais souligner qu'il me semble que ce n'est pas à négliger
les leviers d'action ou les leviers que nous pourrions avoir au niveau
régional, en termes de financement, par exemple. Certains disent: Ce
n'est pas une décentralisation. Moi, je dis qu'il y a de la
décentralisation, et, bien sûr, le pouvoir central ne
délaisse pas tous ses pouvoirs d'un coup sec. Ça m'apparaît
comme un processus progressif, et je pense qu'on en est là. Ce qu'on
dit, nous, c'est peut-être que... Pardon?
M. Côté (Charlesbourg): C'est une
souveraineté par étapes.
M. Rodrigue (Norbert): Peut-être que ça
pourraît être souverain un peu plus vite et un peu plus fort.
M. Côté (Charlesbourg): Avec la taxation et le
suffrage universel.
M. Rodrigue (Norbert): Même sans ça que je dirais,
M. le ministre, et je vais vous dire pourquoi. Il me semble que la loi, on
pourrait la regarder et j'invite la commission à la regarder dans cet
esprit-là. Possiblement qu'on pourrait élaguer ou délester
plus de marge de manoeuvre au niveau régional, à mon avis. Vous
l'avez d'ailleurs annoncé en termes d'oxygène, mais on ne
connaît pas, nous non plus, les 309 amendements ou papillons. Mais on
pense qu'il faut, effectivement, donner un peu plus d'oxygène. Pourquoi
donner un peu plus d'oxygène? Hier,
encore, j'étais à une conférence, à
montréal, avec un groupe qui est responsable des achats en commun, une
commission donnée, et j'écoutais les expériences qui
étaient racontées. bien, dans une négociation pour
l'approvisionnement du gaz dans la région de montréal, des
négociations de deux ans avec toutes sortes d'entreprises ont fait en
sorte qu'on a économisé 2 000 000 $ sur les achats qu'on avait
à faire en termes de gaz. mais ce n'est pas négligeable,
ça. à ce titre-là, je dirais: faites attention dans la loi
pour ne pas vous départir des leviers ou de ceux qui ont les leviers
d'action de ces réalisations-là en permettant, par exemple, une
sectorialisation trop forte des établissements qui ferait en sorte qu'on
perdrait notre pouvoir d'achat au niveau régional. je vous donne cet
exemple-là simplement pour ne pas être...
Le Président (M. Joly): En conclusion, M. Rodrigue, s'il
vous plaît.
M. Rodrigue (Norbert): Pardon?
Le Président (M. Joly): En conclusion.
M. Rodrigue (Norbert): ...trop long. Je vous dis, par ailleurs,
que sur les autres questions, on est prêts à répondre.
Mais, notamment, sur la question médicale, je voudrais juste souligner
une affaire concernant les médecins. Moi, je suis très souple
vis-à-vis des médecins. Je connais leur pouvoir, d'abord. Je suis
très conscient de leur pouvoir, alors, souple ou pas souple, ils ont
leur pouvoir. Je suis très souple vis-à-vis des médecins.
Je dis: Oui, les médecins doivent être dans les processus
décisionnels, oui, ils doivent être impliqués, mais pas
exclusivement. Ce n'est pas parce qu'on est médecin qu'on possède
toutes les sciences, qu'on est capable de se substituer à n'importe quel
gestionnaire. Je connais beaucoup de gestionnaires médecins qui n'ont
jamais été capables d'arriver à leurs fins, même
s'ils étaient médecins, M. le ministre, parce qu'ils n'avaient
pas les leviers nécessaires pour s'opposer à certains
comportements ou à certaines décisions.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Rodrigue. M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Merci, M. le Président. Il faut que je
réconcilie une couple de choses avec vos déclarations. L'esprit
est bon, mais vous nous demandez de corriger la lettre du projet de loi. Vous
voulez qu'on fasse vite, mais en même temps, qu'on mette tout
l'oxygène dedans. Je regardais vos déclarations, en particulier
celle du 18 févier, où vous disiez, grosso modo: Attention, ce
n'est pas fait, et il nous faut beaucoup plus de précisions et davantage
de garanties. Là, comment va-t-on réconcilier tout ça et,
plus précisément, à quel endroit souhaitez-vous que, dans
la loi, on détermine et on inscrive le véritable pouvoir de
régionalisation ou les véritables pouvoirs régionaux, sans
trop de bretelles, de ceinture, de tutelle, d'interventionnisme venant du
haut.
M. Rodrigue (Norbert): Écoutez, je pense qu'effectivement,
je l'ai dit et je le répéterai ce matin, ce ne sera pas simple
avec ce qu'on a sur la table. Je ne connais pas, encore une fois, les 309
papillons. J'espère les connaître bientôt, mais ce que je
peux vous dire, c'est qu'on a un départ, on a une amorce, et c'est dans
ce sens-là que je trouve que l'esprit est important, que le temps est
important. Deuxièmement, en termes de clarification pour l'appropriation
éventuelle par les régions de ces réels pouvoirs, je pense
que dans l'allocation des ressources, notamment, il me semble qu'une fois que
le gouvernement, par le biais du ministère, a décidé
d'allouer les ressources au niveau régional, une fois qu'il a
décidé ça, il me semble qu'il doit considérer que
ce levier-là est assez important pour éviter d'avoir à se
mêler lui-même de l'intrarégional. Autrement dit: Allouez
les ressources au niveau des régions, oui, et rendez-nous imputables.
D'ailleurs, c'est prévu, les conditions d'imputabi-lité.
Laissez-nous gérer ces affaires-là à l'intérieur de
la région, et on reviendra devant la commission parlementaire des
affaires sociales pour préciser et rendre compte de nos gestes. Dans ce
sens-là je dis: Oui, un peu plus de souplesse, probablement, pour
éviter que le central ne descende jusqu'à l'intrarégional.
Je considère que les leviers du central au plan de l'allocation des
ressources, sont de même nature que les leviers régionaux, en
termes d'importance. Si on a ces leviers-là, par exemple, comme on nous
l'a annoncé en vertu de la loi sur l'allocation des ressources en
fonction des programmes, il me semble que les régions ayant ces
leviers-là devront en tenir compte aussi. Comme le central tient compte
du régional, les régions devont tenir compte de
l'intrarégional, du local, etc. Dans cet esprit-là, je vous
dirais: C'est cette souplesse dont on parle pour l'instant, mais ça ne
diminue en rien pour nous l'importance de procéder. Je pense que
l'Opposition, si elle avait cette loi-là comme base dans l'avenir, si
jamais elle prenait le pouvoir, probablement qu'elle serait plus à
l'aise pour les réformes futures. Si le gouvernement actuel garde le
pouvoir, bien il y aura ça de fait, on pourra progresser et
accélérer le processus.
M. Trudel: Je dois vous dire là-dessus qu'on serait
beaucoup plus à l'aise dans l'Opposition, si, au chapitre de la
régionalisation, on passait de l'intention aux mots dans la loi,
effectivement. Ça m'amène à ma question, M. Fortin. C'est
très juste, vous touchez, à mon avis, l'élément
essentiel de la volonté manifestée à la pratique dans le
texte, si l'on peut faire ce passage de la théorie à la pratique.
Vous dites:
Ne sous-estimez pas la capacité de planification dans les
régions. Mais là, vous êtes bien conscients qu'à
260, vous n'êtes pas dans la planification. C'est clair. On peut dire ce
qu'on voudra de l'intention, de la volonté, les régies
régionales vont organiser, mettre en oeuvre et évaluer les
programmes décidés par le ministre. "Period". C'est ça, la
définition. Alors, la planification, est-ce que vous en faites un
élément essentiel du pouvoir de délégation et du
pouvoir de décentralisation pour qu'on puisse véritablement
parler de régie régionale?
M. Fortin: Pour ma part, bien sûr. Il est bien certain,
quand on parie de décentraliser, quand on parle de gérer les
choses, de gérer les problèmes régionaux, il est bien
certain qu'il faut laisser l'opportunité aux gens des régions de
pouvoir décider eux-mêmes quels services devront s'appliquer aux
citoyens de la région. L'importance à donner à tel
service, diminuer tel autre service. Est-ce que c'est plus important le
maintien à domicile? Est-ce que c'est plus important les personnes
âgées? Est-ce que c'est plus important les dossiers jeunesse?
D'une région à l'autre du Québec, les problèmes
sont différents. C'est ça qui fait que c'est important que les
projets soient gérés en région. Bien sûr que le
ministère garde - et c'est normal - toute la planification provinciale;
il est responsable des budgets régionaux, de l'équité
interrégionale et de l'élaboration des priorités
nationales. Mais en dedans de tout ça, je crois que c'est à
chacune des régions du Québec de préciser le contenu
même de chacun des programmes - j'irais même plus loin - et de
donner de l'importance à un programme plutôt qu'à un autre,
dépendamment du type de clientèle et du type de problème
qu'on a dans chacune des régions. D'ailleurs, toute la question des
objectifs santé et bien-être au Québec va nous permettre
d'asseoir la planification sur une bonne connaissance de la
problématique du Québec. Mais il faut que ça se fasse par
région.
Une voix: M. Gauthier voudrait ajouter à cette
réponse.
M. Gauthier (Hubert): Si vous permettez, à l'article 260,
on pourrait comprendre que programme - et on l'a compris comme ça en ce
qui nous concerne - signifie sept ou huit grands pans de mur sur lesquels
l'État aura à dire quel accent met-on sur l'un ou sur l'autre. Si
on parle de programmes comme un amalgame de 50, 75 à 100 programmes,
là, on va être dans un corset où il n'y aura plus de marge
de manoeuvre. Notre compréhension de 260, c'est que les programmes sont
de grands ensembles qui vont toucher les grandes clientèles au
Québec. Dans cette conception, et vous nous posiez tantôt la
question: A quoi toucheriez-vous en termes d'articles de loi pour de
l'oxygène? On pourrait n'en cibler qu'un seul, le 369, ou on pourrait
l'interpréter comme étant très large, mais on pourrait
aussi se poser la question: Pour l'approbation des plans régionaux de
services et la répartition des ressources, est-ce que l'esprit - et
c'est un peu l'interrogation qu'on a - c'est de l'approbation à la ligne
ou est-ce que c'est de l'approbation par grands pans de mur ou par grands
morceaux où il y aura de la marge de manoeuvre? Si c'est à la
ligne, ça signifie: pas suffisamment d'oxygène sur le plan
régional, et par conséquent, pas d'oxygène sur le plan
local. Si ça signifie par grands pans de mur, à ce
moment-là, ça signifie oxygène sur le plan régional
et oxygène sur le plan local.
M. Trudel: Le ministre a toujours déclaré qu'il
voulait avoir le maximum de précision dans la définition des
missions des établissements et ne pas laisser trop de choses floues.
Là-dessus, message reçu. Il va falloir qu'on s'organise pour que
ce soit clair parce que ça peut être votre interprétation
et vous souhaitez que ce soit celle du ministre ou des gens actuellement. Moi,
je pense effectivement qu'il ne faut pas, en matière de volonté
de décentralisation réelle, laisser ces
définitions-là aussi floues. Si on l'a, la volonté,
ça s'écrit quelque part. Une dernière question, quant
à moi.
Le Président (M. Joly): Oui, s'il vous plaît, une
dernière question.
M. Trudel: Vous savez, on a fait une proposition
générale dans les remarques préliminaires de cette
commission. Le ministre a bien expliqué, quant à lui, la
dynamique qu'il a choisie au niveau de la responsabilité et de
l'imputabilité en disant: Comme je ne suis pas allé jusqu'au
suffrage universel pour les membres des conseils d'administration des
régies régionales, et que je ne suis pas allé non plus au
niveau de la taxation, eh bien, je demeure donc responsable devant
l'Assemblée nationale en termes d'imputabilité. Dans ce
sens-là, je peux apporter des ajustements, mais je finis par être
l'ultime responsable. Nous, on dit, eh bien, s'il y a une volonté de
décentralisation, il y a, nous semble-t-il, un bon cran qu'on peut
ajouter entre les deux parce qu'on joue sur le tiers du budget de l'État
et qu'on gère des services pour l'ensemble de la population en
matière de santé et de services sociaux. Est-ce que vous seriez
d'accord, vous autres là, que l'Assemblée nationale, par sa
commission des affaires sociales, appelle devant elle, chaque année,
quatre régies régionales, ce qui veut dire qu'à toutes
fins utiles, tous les quatre ans, nous pourrions entendre ce qui se passe au
niveau des régions...
Le Président (M. Joly): M. le député, s'il
vous plaît. (11 h 45)
M. Trudel: ...nommément.
Le Président (M. Joly): On déborde largement,
là. Il n'y aura plus de contrôle, je veux dire, l'idée de
séparer les deux groupes, c'est...
M. Trudel: Correct. Ça va. Merci.
Le Président (M. Joly): ...bien. Mais je pense que tout le
monde devrait se discipliner davantage.
M. Trudel: D'accord.
M. Rodrigue (Norbert): Alors, M. le Président, vous me
permettez de répondre à cette question?
Le Président (M. Joly): Brièvement, s'il vous
plaît, M. Rodrigue.
M. Rodrigue (Norbert): Alors, sans hésitation, M. Trudel.
On a même dit précédemment que nous étions
prêts à comparaître tous les ans devant la commission des
affaires sociales. Si c'était une formule comme celle-là,
ça nous donnerait un peu plus d'oxygène dans le temps pour
gérer les choses, faire rapport et être imputable d'une
manière plus perfectible.
M. Trudel: Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député.
M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. C'est avec enthousiasme, depuis le matin, qu'on reçoit
des groupes qui parlent de bonifier ce qui est déjà bon. Je
trouve ça extraordinaire cette ouverture d'esprit qu'on connaît
depuis le matin. Je n'étais pas du tout surpris des propos que vous
aviez, compte tenu des tournées que vous avez faites au Québec et
des régions que vous représentez. Vous parlez de momentum, il y
en a un, momentum. Je pense qu'effectivement, il a été
écorché un peu, juste du fait qu'on a retardé la
commission parlementaire pour l'étude article par article, du mois de
janvier jusqu'à aujourd'hui. Il y a des gens qui, dans le milieu,
disaient: On commence à l'avoir. Il commence à faiblir. On n'est
pas sûr qu'il va se rendre au bout. Alors, je peux vous rassurer
là-dessus, il est encore assez fort pour être capable de livrer ce
projet de loi là. Que ce soit dit à tout le réseau, la
réforme, elle va être là. J'ai toujours dit que dans le
"comment", il y avait des choses qui pouvaient être modifiées.
S'il y a 309 papillons qui sont déposés, c'est parce qu'il y a
une ouverture d'esprit à changer des choses compte tenu du fait que le
fardeau de la preuve incombe à ceux qui veulent nous faire changer les
choses, que ce soit pour les médecins ou pour les autres. Je n'aurai pas
honte, demain matin, de ramener d'autres papillons pour bonifier le projet de
loi en autant qu'on m'en fasse la démonstration. Même si je suis
un Bélier, une tête têtue, je suis capable d'être
ouvert à l'occasion pour régler des choses. Pas pour le
président-directeur général de tel établissement ou
du CRSSS, pas pour le président du CMDP, pas pour le DSP ni le DSI, mais
pour celui qui a besoin des services. C'est dans cet esprit-là que
ça doit se faire, que ça va continuer de se faire. Je vous ai
entendus tantôt dire: On est encore des CRSSS, on n'est pas tout à
fait des régies. Essentiellement, ce que je comprends de vous autres et
de ceux qui seront soumis à votre autorité future, ils ne veulent
pas non plus que vous deveniez des "CRSSS de régies." On va, tout en
jouant avec le jeu de mots, bien s'assurer aussi que cet oxygène qui
part du central, qui va au régional, bon, il peut être imparfait.
La bonbonne n'est peut-être pas assez grosse, ça en prend
probablement plus. Ce que j'ai compris, c'est qu'elle ne se reflète pas
dans la loi de la même manière que dans les documents de la
réforme. Bon, on pourrait de manière très simpliste dire:
Après la faute des technocrates, c'est la faute des technocrates
légistes. Mais eux autres, ils font ce qu'on leur demande, et ce n'est
pas toujours facile de traduire en termes juridiques. C'est pour ça
qu'il y a un exercice d'analyse article par article pour voir jusqu'où
ça va. Confrontés à plusieurs versions, on a un choix
à faire, comme parlementaires, qu'on fera sur le plan du sens qu'on doit
lui donner. Donc, c'est là qu'on va aller dans l'exercice qu'on va
commencer mardi prochain. Ma première question va porter sur une
commission médicale régionale dont on a entendu parler depuis un
certain temps et qui fait l'objet d'une revendication assez forte et d'une
volonté assez forte de la part du corps médical. J'imagine que
vous êtes à même de comprendre cette
revendication-là, parce qu'à l'occasion, eux aussi se sentent
dans la même situation où vous êtes, où les D.G.
sont, pas toujours très très considérés dans le
geste qui est posé. Donc, d'après vous, ce serait quoi le mandat
d'une commission médicale régionale, c'est quand même assez
important? Comment est-ce que vous voyez ça dans l'appareil, dans
l'organisation, de façon qu'on puisse examiner la faisabilité de
cette commission médicale régionale? Par rapport au rôle
futur que vous auriez, compte tenu que vous allez avoir pas mal de pouvoir
tantôt?
M. Rodrigue (Norbert): M. le Président, M. le ministre,
sur l'idée, le moyen, ça ne nous pose aucun problème. On
considère que les médecins, je l'ai dit tout à l'heure,
doivent être dans le processus décisionnel, notamment, sur les
matières qui les concernent, sur les matières dont ils ont la
compétence. Avant de permettre à Hubert Gauthier de
répondre sur la faisabilité, ce que je voudrais ajouter, c'est
qu'il y a une chose, j'ai
dit les médecins aussi, oui, participants, mêlés
à tous les processus. Exclusivement, non. Dans ce sens-là, on
souhaiterait, bien sûr, que la commission existe, qu'elle se mêle
des questions médicales et de tout ce qui concerne cet aspect-là,
mais qu'elle soit quelque chose comme conseil à la régie, aviseur
à la régie, de manière que la régie puisse remplir
sa mission globale, de la manière la plus efficace possible. M.
Gauthier.
M. Gauthier: Peut-être, si vous me permettez, M. le
Président, de compléter. Je pense qu'effectivement, les conseils
régionaux pourront laisser un héritage aux régies, une
tradition presque culturelle de travailler depuis qu'on a à faire les
plans d'effectifs médicaux avec les corps médicaux. Il existe
déjà, dans la plupart des conseils régionaux, des
regroupements qu'on appelle tantôt des comités, des commissions ou
des tables qui impliquent les médecins dans la fabrication des plans
d'effectifs médicaux. J'y ai été personnellement
mêlé dans deux régions. Premièrement, il faut se
rappeller de ça. Par conséquent, c'est assez facile de
répondre. Il faut absolument une implication médicale, et j'irais
même plus loin, je pense que sur une commission médicale, si on
veut légiférer, on peut parler de tout ce qui touche les
questions de pratique, les questions professionnelles, les questions qui
touchent le travail du médecin comme tel dans le milieu, les liens qu'il
y a à tisser entre les cabinets privés et les institutions sur le
plan de la pratique et sur le plan professionnel. Par ailleurs, j'ajouterais
qu'il va falloir, comme c'est fait à l'heure actuelle, impliquer les
médecins dans d'autres questions: la planification des services avec
d'autres partenaires du réseau. Donc, c'est aller plus loin qu'une
commission médicale unique qui aurait - de ce que j'en comprends - des
responsabilités spécifiques: impliquer les médecins dans
la planification de choses comme les services aux personnes âgées,
les jeunes... Ils ne sont pas en-dehors de ça, ils sont parties
prenantes. Au niveau de la santé mentale, ça a été
l'expérience des conseils régionaux de voir les médecins
impliqués en santé mentale, et j'en passe, des exemples. Donc, je
pense qu'il y a deux niveaux. Celui d'une commission médicale qui
pourrait être davantage centrée sur les questions de pratique
professionnelle, d'Implication importante au niveau de la fabrication des plans
d'effectifs médicaux. Quand on parle des plans de services, je pense
qu'il faut avoir aussi une participation médicale quant à la
planification, mais là, avec d'autres partenaires du réseau.
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, si je comprends - une
commission médicale est uniquement médicale - plus le mandat est
restrictif, plus la commission médicale est large, plus ça doit
regrouper d'autres personnes que le monde médical, si je comprends,
d'autres professionnels de la santé, selon votre point de vue. Je veux
juste revenir, parce que je l'ai dit à plusieurs reprises, à
l'oxygène - c'est vrai que le projet de loi ne traduisait
peut-être pas finement la volonté, ce qui n'est pas toujours
facile, on va tenter de le faire en commission parlementaire - pour donner plus
d'oxygène à la régie régionale, pour en donner plus
aussi au pouvoir local, c'était la volonté qui était
exprimée au début. Cependant, je vais vous poser la question,
parce qu'en vous entendant, en écoutant le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue qui aspire à être au pouvoir
éventuellement, donc occuper probablement des fonctions
ministérielles, dites-moi donc, dans votre esprit à vous autres,
quand vous avez tout planifié ça, vous êtes d'accord,
qu'est-ce qui va rester au ministre? On va le prendre de ce bord-là, de
ce bout-là. Dites-moi ce qui va rester au ministre. Va-t-il lui rester
un petit peu d'oxygène, compte tenu du fait qu'il va taxer et qu'il va
être obligé de répondre?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Dites-moi ça pour que
je comprenne un peu.
Le Président (M. Joly): M. Rodrigue.
M. Rodrigue (Norbert): Je dirais toujours que ça
dépend un peu de l'appétit du ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rodrigue (Norbert): Je pense qu'il en resterait pas mal au
ministre: toutes les fonctions de planification nationale, de régulation
nationale, d'allocation des ressources et d'équité
interrégionale. Vous me permettrez de vous confier humblement, sans que
personne ne nous écoute, que si c'est vous qui êtes le boss, qui
avez le portefeuille, qui m'allouez mes ressources, je trouve que ça
détermine pas mal mon sort, ça. Une fois que je les ai, ces
ressources-là, tout ce qu'on dit, c'est qu'une fois que l'allocation des
ressources est faite dans l'esprit dont on parle, envers les régions,
là on se dit: Est-ce que le ministre, par ailleurs, doit descendre
jusque dans l'intrarégional a priori? Qu'il nous pose des questions a
posteriori sur ce qu'on a fait avec ce qu'il nous a alloué, ça
c'est une autre affaire. Mais, a priori, on pense que vous devriez regarder
ça, humblement, toujours.
M. Côté (Charlesbourg): En vous écoutant,
ça me rassure. Parce que je craignais de me retrouver dans une situation
qui pourrait être, par exemple - et Dieu sait que l'Opposition joue bien
son rôle - celle où je posais la question aux fonctionnaires
tantôt: Écoutez là, est-ce qu'il
y a quelque chose de plus décentralisé
qu'urgen-ces-santé à montréal? ils ont un budget, ils ont
la liberté. et dieu sait que les questions, ils ne tes posent pas
à pierre lamarche de ce temps-là. ils vont les poser à
marc-yvan côté, au ministre, c'est lui qui est imputable. donc,
évidemment, au bout de la ligne, l'imputabilité, elle
relève du ministre qui est à l'assemblée, qui doit
répondre. donc, ce que je comprends, c'est que le "quoi", sur le plan
provincial, doit être déterminé par le ministre et qu'il
doit être assorti de mécanismes d'imputabilité et de
reddition de comptes, ce qui m'apparaît normal, à ce moment-ci,
tant et aussi longtemps qu'on n'ira pas vers une taxation régionale et
un pouvoir de suffrage universel sur le plan régional. donc, je pense
que, là-dessus, on se comprend. il s'agit d'adapter certaines plomberies
au niveau du projet de loi. merci, m. le président.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le ministre.
Est-ce que...
Une voix: ...vous remercier.
Le Président (M. Joly): Merci. Alors, au nom des membres
de cette commission, à mon tour, je vous remercie. Merci bien.
J'apprécierais que les gens représentant le Groupe
représentatif des associations syndicales dont des membres oeuvrent dans
le réseau de la santé et des services sociaux, s'avancent, s'il
vous plaît.
Bonjour. Je vais juste vous donner le O.K. dans quelques minutes, s'il
vous plaît, de façon à pouvoir accélérer. On
a déjà une demi-heure de retard. Je tiens à vous rassurer,
nous n'empiéterons pas sur le temps qui vous est normalement
dévolu. On va essayer de se discipliner davantage parce qu'on est
censés finir à 12 h 30. Avec le consentement des parlementaires,
nous allons déborder 12 h 30 afin d'écouter ce que vous avez
à nous dire. Je voudrais quand même que M. le ministre soit de
retour afin qu'il puisse vous entendre.
Vous avez en fait une vingtaine de minutes pour présenter votre
mémoire, pas plus. Alors, je vous inviterai tantôt à
synthétiser ou à comprimer ce que vous avez à dire pour
permettre l'échange, par après, entre parlementaires, le ministre
et...
Groupe représentatif des associations
syndicales du réseau de la santé
et des services sociaux
Mme Lamontagne (Céline): II y aurait trois
présentations. Nous sommes trois groupes et on s'est disciplinés
pour entrer dans la période qui nous est allouée. (12 heures)
Le Président (M. Joly): Oui, parce qu'à ce
moment-là, si un des groupes déborde, ça enlève du
temps à l'autre. Alors, je serai obligé de couper.
Une voix: Au gouvernement.
Le Président (M. Joly): je vous avertis à l'avance
que, déjà, j'ai une demi-heure de retard et puis qu'il y a quand
même assez de difficultés. alors, nous débutons.
j'apprécierais si la personne responsable de la première
présentation pouvait se présenter de façon à ce
qu'on puisse établir ce qui en est. vous avez au total, ensemble, vingt
minutes pour présenter ce que vous avez à nous dire.
Mme Lamontagne: Alors, très rapidement, je vais me
présenter: Céline Lamontagne, vice-présidente de la CSN.
Avec moi, il y a Cécile Côté qui est secrétaire
générale de la Fédération des affaires sociales. Et
je vais inviter les deux autres organisations syndicales à se
présenter.
Mme Boulanger (Sylvie): Bonjour, je suis Sylvie Boulanger,
première vice-présidente à la Fédération des
infirmières et infirmiers du Québec, et je suis
accompagnée de Lucie Mercier qui est conseillère au secteur
santé à la Fédération.
Le Président (M. Joly): Merci.
M. Frenette (Jean-Guy): Je suis Jean-Guy Frenette, conseiller
politique de la FTQ, et je serai accompagné, pour répondre
à vos questions, de Astrid Gagnon de notre syndicat affilié dans
le domaine de la santé, il s'agit de l'Union des employés de
service, et de Claude Généreux du Syndicat canadien de la
fonction publique, l'autre syndicat affilié dans le domaine de la
santé à la FTQ.
Le Président (M. Joly): Merci. Qui débute?
Madame?
Mme Lamontagne: Alors, moi, je vais débuter. Je vais
essayer d'être très très disciplinée.
Alors, première remarque. Nous allons dans des grands traits. On
n'ira pas dans le raffinement des mots de la loi. Une première remarque
venant de la CSN - ce n'est pas nouveau, mais on veut le rappeler - c'est que,
depuis longtemps, on a soutenu qu'il fallait, qu'il était urgent que le
Québec se dote d'une politique de santé et de bien-être,
qu'on ait une politique en matière de santé mais aussi de
services sociaux. On nous l'avait promise et on déplore que ce soit
reporté en juin. Et, à notre avis, la réforme qui est
devant nous aujourd'hui procède un peu à l'envers parce qu'avant
de faire des réformes de structures, on aurait aimé avoir une
politique de santé très claire et des objectifs très
clairs venant du gouvernement. Alors, la politique de
santé, pour nous, vise à changer des conditions de vie.
Particulièrement, on connaît la situation du Québec
cassé en deux, l'appauvrissement des personnes, des communautés,
qui sont finalement des écarts importants qu'on peut observer en termes
de santé, de bien-être et de vie sociale. Et on pourra faire le
lien aussi avec tout le volet prévention de la politique actuelle.
Deuxièmement, au niveau de la réforme et du projet de loi,
je peux dire d'entrée de jeu que certains aspects - on l'a dit aussi
publiquement - nous apparaissent intéressants. Par exemple,
d'élargir le rôle des CLSC, de maintenir, contrairement aux
politiques d'orientation, les représentants du personnel au conseil
d'administration et qu'il y ait aussi une répartition plus
équitable des services médicaux, c'est des aspects qui nous
apparaissent positifs dans la réforme.
Par ailleurs, un des aspects - et les autres intervenants le feront
beaucoup plus, le développeront davantage - c'est qu'on considère
que cette réforme fait des brèches majeures dans la
gratuité, l'universalité et le caractère public de notre
système de santé et de services sociaux. C'est un recul qui est
important. Les autres y reviendront.
Un autre aspect important qui est aussi majeur, c'est le peu de place
qu'on fait aux services sociaux dans la réforme. On a tenu un colloque
récemment avec nos intervenantes et intervenants en service social, et
il y a de très très vives inquiétudes des intervenants et
des professionnels de ce secteur. Oui, on fait disparaître les CSS. Je
dis tout de suite qu'on ne tient pas à la structure des CSS, mais on ne
sait pas où on s'en va en matière de services sociaux. Est-ce
qu'on va garantir, par exemple, le développement en milieu hospitalier
de l'aspect social? Est-ce qu'on va le garantir dans les CLSC quand on va faire
les choix budgétaires? Est-ce que les CLSC... Même si on est
d'accord avec l'élargissement, l'inquiétude qu'ils avaient, c'est
que ça ressemble de plus en plus à des polycliniques
médicales et qu'on abandonne un peu la pratique multidisciplinaire, la
pratique communautaire. Et quelle sera la place, dans les CLSC de demain, des
services psychosociaux et de l'approche collective des problèmes? Alors,
faute de réponse à ces questions et à bien d'autres, nous,
on demanderait un moratoire sur le démantèlement des centres de
services sociaux jusqu'à temps qu'on soit assuré de la place des
services sociaux et du communautaire dans le système actuel. Et il ne
manque pas de problèmes sociaux. Actuellement, on parte des
problèmes des jeunes, de la pauvreté, des problèmes de
violence, de la détresse psychologique. On est tellement conscient de
ces problèmes-là qu'il y a déjà des comités
de travail qui les étudient. On propose aussi, dans le livre blanc, des
études sur le personnel. Alors, on dit: Toutes ces études
devraient être faites avant de changer la struc- ture sans avoir de
perspectives d'avenir.
Un autre aspect qu'on déplore dans le livre blanc c'est que le
projet de loi ne fait pas de place au personnel. On parie beaucoup de la
valorisation, de la démotivation du personnel, mais, quand on regarde
les textes de loi, on se rend compte que jamais on ne parie des syndicats,
jamais on ne parie des représentants des travailleuses et des
travailleurs. Il y a des ingérences, à certains endroits, dans
les négociations, dans ce qui doit être convenu entre les parties.
Alors, si on veut vraiment motiver le personnel, il faut avoir des droits qui
soient consacrés dans la loi, entre autres, le droit à
l'information, le droit aussi d'être associé, non pas juste comme
individu, mais comme organisation de travailleuses et de travailleurs; c'est
les syndicats, au plan de formation, au plan de développement du
personnel. Alors, pour nous, c'est majeur. Et ça, on a fouillé
vraiment le projet de loi et c'est le silence complet quand on parie des
organisations du personnel.
Un autre aspect, c'est toute la question des mécanismes de
plaintes pour les citoyens. On est d'accord, on l'a dit, que le citoyen doit
être au centre du système. On est d'accord de renforcer les
mécanismes de plaintes dans la loi, mais les mécanismes qui sont
là nous font poser beaucoup de questions. Entre autres, comme c'est
laissé à des cadres, comme c'est laissé à la
direction de rétablissement dans bien des cas, ce n'est pas
indépendant, finalement, de l'établissement et ça peut
manquer de crédibilité. Alors, il faut renforcer ces
mécanismes-là. Et on peut vous dire aussi que, souvent, comme
travailleuses et travailleurs du réseau, c'est nous autres qui recevons
les plaintes et qu'on est des fois les plus démunis pour faire suite
à ces plaintes-là parce qu'il n'y a pas de lieu pour les
acheminer. Et on est souvent d'accord avec les plaintes qui sont faites par les
bénéficiaires.
L'autre aspect qui inquiète non seulement les organisations
syndicales, mais aussi beaucoup de groupes communautaires, beaucoup de groupes
qui oeuvrent au niveau des droits des citoyens, c'est toute l'augmentation des
banques de données, la question de la confidentialité des
dossiers, toute l'expérience de la carte à puce. On veut bien que
le citoyen soit au centre de ce système, on veut bien qu'on ait des
moyens pour contrôler le système, mais on ne voudrait pas non plus
se regrouper avec un citoyen qui soit fiché.
Je termine sur un autre point très précis, c'est le
caractère public du réseau. Je l'ai mentionné, il y a un
aspect précis sur lequel on demande, c'est que les établissements
privés et conventionnés doivent devenir des établissements
publics à l'avenir. Ils ne doivent pas avoir le statut
d'établissements privés conventionnés. Dans ce
sens-là aussi, cesser le développement de ce
réseau-là, mais développer un réseau public.
En terminant, j'ajouterais aussi une inquiétude d'ordre
général. On trouve qu'il y a un décalage entre ce qui
était écrit dans le livre blanc et le projet de loi. Il y avait
des programmes qui nous apparaissaient très intéressants dans le
livre blanc, je pense aux programmes pour les jeunes, aux programmes pour les
personnes âgées, à d'autres aspects importants et
intéressants. On ne retrouve rien dans la loi et cette inquiétude
est doublée du fait qu'on est dans une période, semble-t-il,
difficile - en tout cas, c'est ce qu'on dit - financièrement. Alors,
où seront les augmentations d'allocation des ressources, où en
seront les programmes qui étaient plus axés sur la
prévention, plus axés sur la communautaire, plus axés sur
régler les causes des problèmes et non pas juste faire du
curatif? Je termine et je laisse la parole à mes collègues.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme Lamon-tagne. Qui prend
la relève? Mme Boulanger?
Mme Boulanger: Oui, c'est ça. Nous, nous allons d'abord
aborder des éléments qui nous inquiètent davantage. Je
pense que, dans les grands principes, on pouvait être en accord avec la
réforme, mais il y a des éléments qui nous
inquiètent davantage, c'est ce pourquoi on est ici aujourd'hui. Donc, il
nous apparaît que, dans les textes de loi, il y a plusieurs mesures qui
facilitent le glissement vers la privatisation. Qu'on pense, par exemple, aux
allocations financières, l'article 360, au ticket orienteur et à
l'impôt-services. Il y a aussi l'article 341 qui vise des projets
expérimentaux "concernant l'organisation des ressources humaines ou
matérielles des établissements aux fins de favoriser
l'organisation et la prestation intégrées des services de
santé et des services sociaux".
Moi, je trouve qu'il n'y a rien qui ressemble plus à ça
que les OSIS. Les OSIS, dans la présentation de notre mémoire, on
s'étaient prononcés contre, effectivement, parce que ça
instaure déjà comme deux systèmes de santé, des
mieux nantis et des moins bien nantis, et que ça vise davantage des
objectifs de rentabilité que des objectifs communautaires. Donc, nos
objections à la privatisation, même partielle, c'est que ça
entraînerait effectivement l'accumulation des projets dans les secteurs
les plus rentables au détriment de la qualité des soins et des
services, le développement d'une médecine de riches, la
dégradation du réseau public et une hausse considérable
des coûts.
Plus fondamentalement, la privatisation porte atteinte à un choix
de société qui repose sur deux grands principes universels de
justice et d'équité sociale. Nous tenons à
réitérer notre désir de maintenir l'universalité et
la gratuité des soins, donc on fait référence ici qu'on
veut retirer le ticket orienteur et l'impôt-services. Parlant du ticket
orienteur, je pense qu'il n'atteindra pas... En tout cas, ce que le livre blanc
nous révèle, c'est qu'il veut davantage servir à
éduquer la population. L'objectif qu'on voit inavoué en dessous
de ça, c'est d'habituer les gens à payer. Ce n'est pas non plus
une solution aux problèmes d'urgence, le ticket orienteur; il faudrait
davantage s'attarder à donner plus d'information à la
population.
L'impôt-services, évidemment, c'est une brèche
importante à l'universalité des soins. Heureusement, à ce
stade-ci, nous avons la Loi canadienne sur la santé qui empêche
d'ouvrir cette brèche-là davantage. Quant à la
décentralisation, nous nous sommes prononcés en faveur de la
décentralisation administrative, mais c'est différent d'une
décentralisation politique qui instaurerait, entre autres, un pouvoir de
taxation dans les régions. Le but de la décentralisation, c'est
de mieux répondre aux besoins spécifiques de la population,
d'éliminer les problèmes comme le manque de concertation entre
les établissements, la duplication des services et la
non-complémentarité. Alors là, dans ce but-là, oui,
nous sommes d'accord.
Si, par ailleurs, le but est le désengagement du gouvernement en
matière de santé et de limiter la marge d'autonomie de chacun des
éléments du système ou uniquement d'obtenir une meilleure
efficience économique, nous ne sommes plus d'accord. On ne veut pas voir
se reproduire, avec le système de santé et de services sociaux,
ce qui se passe, par exemple, avec les municipalités actuellement,
où on voit que tout leur est déchargé et qu'elles devront
taxer nécessairement. Donc, il est important que l'État reste
maître d'oeuvre du système et nous trouvons très important
qu'il conserve le pouvoir d'établir le niveau global adéquat des
ressources humaines, matérielles et financières et des grandes
orientations de secteurs.
La charge de travail. Je voudrais aborder ce point-là parce qu'il
est évident qu'avec le changement de vocation et de mission des
établissements, c'est clair que tous les employés du
réseau de la santé et des services sociaux vont se retrouver
inévitablement avec une surcharge de travail. Qu'on pense, par exemple,
à la diminution des temps de séjour dans les hôpitaux.
Nécessairement, en bout de ligne, ces gens-là se retrouvent
à devoir recevoir des services de soins à domicile, de maintien
à domicile. En ça, c'est louable de vouloir diminuer le temps de
séjour, et tout ça, mais ça ne devrait pas, par exemple,
avoir pour effet d'augmenter la charge de travail du personnel dans le
réseau de la santé et des services sociaux. Pour ça, il
faudra nécessairement qu'on alloue des ressources financières et
humaines en conséquence. De plus, il faut le faire dans la mesure aussi
où, ne faisant pas cette allocation suffisante de ressources humaines et
financières, on pourrait mettre en conflit le citoyen et le personnel du
réseau. Dans le sens qu'on donne, par le projet de loi, des mesures,
plus de
mesures aux citoyens pour porter plainte, il y a plus de droits pour les
citoyens, mais si, effectivement, il n'y a pas d'ajout de ressources humaines
et de ressources financières, le personnel ne pourra pas suffire
à la tâche et donner la qualité de soins à laquelle
le citoyen a droit et à laquelle il doit s'attendre. Donc,
éventuellement, on peut s'attendre à avoir davantage de recours
et de plaintes de la part des citoyens. Je vais... (12 h 15)
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, il vous reste
quelques minutes, si vous voulez respecter le temps de l'autre groupe
là.
Mme Boulanger: Oui, c'est ça. En fait, je vais couper
court à la politique de santé. Mme Lamontagne l'avait
déjà abordée, mais elle est très très
importante pour nous aussi. Monsieur...
Le Président (M. Joly): Oui, allez. Parfait, vous pouvez
quand même y aller, s'il vous reste... On va empiéter sur le temps
des parlementaires.
Mme Boulanger: Merci.
M. Côté (Charlesbourg): On va couper notre
temps.
Une voix: Le ministre est généreux aujourd'hui.
Le Président (M. Joly): Comme d'habitude. M.
Côté (Charlesbourg): II l'est toujours.
Le Président (M. Joly): C'est naturel chez lui.
M. Côté (Charlesbourg): On gèle notre
temps.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Boulanger: Alors, sur la politique de santé, je vais
réitérer ce qu'on a toujours dit et ce que Mme Lamontagne vient
de souligner, c'est qu'elle aurait dû normalement précéder
une réforme. Selon toute logique, c'est ce qui aurait dû se
passer. Bon, elle arrive au mois de juin, on va la prendre à ce
moment-là, mais elle devra quand même se pencher sur tous les
déterminants de la santé, dont l'appauvrissement, l'augmentation
du taux de chômage, la polarisation des classes sociales, l'augmentation
des accidents de travail, la détérioration de l'environnement, et
il y en a d'autres. On peut en rajouter.
Donc, la politique de santé devrait passer par le maintien des
qualifications professionnelles pour répondre à
l'évolution du marché du travail. Ça devrait aussi traiter
d'une politique de plein emploi, d'avoir des salaires décents, de
l'équité salariale, de la réduction des accidents de
travail et des maladies professionnelles et de l'assainis- sement de
l'environnement. Ça nécessite un virage fondamental si on ne veut
pas que le coût de notre système de soins continue à
augmenter.
Votre véritable audace, M. le ministre Côté,
réside dans votre capacité de questionner et de faire converger
l'action gouvernementale vers un projet social de santé. Voilà.
M. Frenette.
M. Frenette: M. le Président, Mmes, MM. les
députés, M. le ministre, nous vous remercions d'avoir finalement
consenti à nous recevoir aujourd'hui pour qu'on puisse vous transmettre
nos vues sur cet important projet de loi. Même si c'est sur le tard, H
n'est jamais trop tard pour bien faire, M. le ministre, et on espère que
ce même esprit d'ouverture va vous accompagner et va vous animer toute la
journée pour changer radicalement certaines orientations et politiques
inacceptables dans votre projet de loi.
On le sait - et vous nous l'avez démontré
éloquemment encore récemment - que vous et votre parti êtes
capables de vous tourner vite de bord sur des politiques fondamentales sur
l'avenir du Québec. On espère que vous pourrez le faire
également pour l'avenir de notre système des services sociaux et
de santé aujourd'hui, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): À ce
rythme-là, on va manquer de temps.
M. Frenette: Ah! vous aviez donné votre parole. Parce que
vous avez démontré un souci extrême de réduire les
coûts du service de santé et des services sociaux, nous aurions
souhaité que le projet de loi consacre un véritable virage vers
la prévention. Votre approche est trop timide, est trop
hésitante, trop frileuse. On ne vous reconnaît pas dans cette
mesure, M. le ministre.
Pourtant, il nous apparaît que c'est la seule véritable
manière de réduire les coûts de santé sans nuire
à la santé de la population. C'est en s'attaquant au
chômage, à la pauvreté, à la pollution de
l'environnement, à tout ce qui rend notre société injuste
et dure pour les plus faibles d'entre nous que nous améliorerons
substantiellement la santé et le bien-être de la population
québécoise. Le plein emploi, des revenus décents, un
environnement sain, une société juste et accueillante,
voilà les conditions favorables à la santé et au
bien-être.
Mais le gouvernement n'a pas choisi cette voie. Il a plutôt choisi
des moyens bien cyniques de réduire les coûts du système:
rendre plus difficile l'accès aux services. L'adéquation est
simple, si les gens consomment moins de services, ça coûtera moins
cher. Qu'importe s'ils ne reçoivent pas les soins adéquats,
qu'importe si leur état s'aggrave. N'y a-t-il pas de nombreux abuseurs
parmi eux? À notre avis, il n'y a pas d'autres raisons d'expliquer des
mesures comme le ticket orienteur et l'impôt-services sur les
médicaments aux personnes âgées, qui ouvrent la
porte à la facturation des services. Vous allez nous obliger à
nous tourner vers le gouvernement fédéral pour vous
empêcher de détruire les bases de notre système. Ce n'est
pas nous rendre service dans le contexte politique actuel que de nous forcer
à agir ainsi.
Notre principale inquiétude c'est que le projet de loi, de
diverses manières, encourage le démantèlement du
système public. On fait plus de place au secteur privé dans le
domaine de l'hébergement. On confie le maintien à domicile
à des organismes communautaires. On accorde une allocation directe aux
bénéficiaires pour qu'ils achètent des services sur le
marché. On encourage la création de fondations privées
pour financer des dépenses d'immobilisations. Bref, l'État perd
peu à peu le contrôle sur les sommes qu'il dépense dans le
système et sur la qualité des services. Et ces sommes proviennent
des taxes des Québécois et Québécoises.
Les conséquences de ce désengagement progressif de
l'État dans le domaine de la santé et des services sociaux sont
graves. La qualité des soins est mise en danger, l'accessibilité
et l'universalité des services sont de moins en moins garanties. Nous
nous dirigeons vers un système à deux vitesses: chromé
pour les riches et déficient pour les pauvres. Les résultats d'un
tel système en termes d'indicateur de santé sont
déjà connus. Le système américain l'illustre
à merveille. Ce n'est pas la société que nous voulons pour
le Québec, ni vous, M. le ministre, on en est convaincus. Ces
conséquences sont extrêmement coûteuses pour une
société, mais il nous semble que le gouvernement n'a pas fait le
calcul de ces coûts et s'est limité à une approche purement
comptable. La santé et le bien-être se mesurent difficilement,
tout comme le chômage, la pauvreté et la maladie, il faut voir
plus loin et penser le système de santé et des services sociaux
en fonction d'objectifs de bien-être.
Devant les besoins financiers du réseau, nous comprenons que le
gouvernement cherche, par son impôt-services, quelques centaines de
millions de dollars. Mais nous sommes encore convaincus que la façon la
plus équitable de financer le système demeure l'impôt sur
les profits des corporations et l'impôt progressif sur le revenu des
particuliers. Personne, chez nous, n'a jamais refusé de payer ses
impôts et même les augmentations d'impôts pour avoir les
services de qualité auxquels on a droit et qu'on veut se donner comme
société québécoise. Si le gouvernement
s'entête à maintenir l'impôt-services, il fera la preuve que
son intention est d'habituer la population du Québec à accepter
que chacun doit payer individuellement pour les conséquences de la
maladie.
Les mesures destinées à mieux répartir les
médecins dans les régions et dans les institutions du
réseau nous apparaissent plus qu'urgentes.
Nous vous invitons vivement, M. le ministre, à ne pas
céder aux très fortes pressions qu'exerce actuellement le corps
médical afin de maintenir ses privilèges.
Enfin, nous réitérons notre proposition de collaborer
à la recherche de solutions pourvu qu'on ne mette pas en péril le
caractère public, universel et gratuit du système de santé
et des services sociaux au Québec. Si j'avais encore du temps, M. le
ministre, je pourrais énumérer tous les points positifs qu'il y a
dans votre projet de loi, mais, malheureusement, j'ai déjà
abusé de votre générosité. Merci.
M. Côté (Charlesbourg): Vous voulez dire que je suis
victime du peu de temps qu'on vous a laissé.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Frenette. Je vais
maintenant reconnaître, M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue...
M. Trudel: Je vais d'abord remercier...
Le Président (M. Joly): Excusez, juste un consentement
qu'on doit aller chercher. On se devra de déborder d'environ 25 minutes.
Est-ce que vous êtes d'accord pour qu'on continue?
M. Trudel: Ça va.
Le Président (M. Joly): Merci. Alors, M. le
député.
M. Trudel: Alors, merci, M. le Président. Je vais d'abord
commencer par remercier les trois groupes qui sont avec nous ce matin d'avoir
accepté de se regrouper à une même table. Vous voyez, la
concertation dans le monde des travailleurs et travailleuses, ça va
rapidement lorsqu'on voit l'importance des objectifs et ce n'est pas
évident pour tout le monde qu'on est capable de se regrouper sur une
même table et d'employer un langage aussi qui va nettement dans la
même direction. Merci d'avoir aussi fait cet effort-là à
l'intérieur des contraintes que nous avons.
Alors, il nous faut donc aller sur un certain nombre
d'éléments précis. On ne peut certainement pas vous
reprocher et dire: Vous n'avez pas abordé telle ou telle autre question,
compte tenu du temps extrêmement restreint que nous avons à notre
disposition. À Mme Lamontagne, et quiconque à la table peut
répondre, le projet de réforme prévoit également
des modifications assez substantielles au régime de négociation
dans le secteur d'activité dans lequel vous oeuvrez. En exprimant une
volonté de retourner à des négociations beaucoup plus
localisées, est-ce réaliste, est-ce souhaitable, est-ce possible,
est-ce réalisable, dans le contexte de l'histoire de nos relations du
travail, à l'intérieur du Québec, dans le secteur de la
santé et des
services sociaux? Alors, je m'adresse à Mme Lamontagne, mais
quiconque veut s'exprimer là-dessus pourrait donner un complément
de réponse, s'il vous plaît. C'est un élément
extrêmement important, je pense.
Mme Lamontagne: Alors, vous n'êtes pas sans savoir - ici,
je pense qu'on s'entend tout le monde - qu'on est fort insatisfait du
régime de négociation actuellement, fort insatisfait de certaines
dispositions de loi ou de certaines lois qui existent, qui encadrent de
façon très serrée le système de négociation
ou le déroulement des négociations, qu'il y a des impacts
majeurs.
Par ailleurs, ce qu'on peut dire, en tout cas, moi, c'est qu'on se
prononce sur est-ce qu'il faut, oui, décentraliser jusqu'au niveau
local, quelles matières devraient être négociées
localement, quelles matières, s'il devait y en avoir, devraient
être négociées régionalement, etc. Je peux dire,
premièrement, qu'on a toujours souhaité négocier avec ceux
et celles qui avaient les véritables mandats pour négocier. Donc,
ça, c'est un principe qu'on émet. Deuxièmement, ajouter
qu'on est toujours disposés à discuter du régime de
négociation, mais que c'est une discussion qui doit se faire entre les
parties. On doit discuter comme à une table de négociation du
régime de négociation et ça ne devrait pas être
imposé par une loi via une loi sur la santé et les services
sociaux. Alors, c'est des éléments, mais on est disposés,
ouverts, et, nous aussi, on aurait sûrement des changements à
proposer dans le cadre de la négociation.
Je ne sais pas si les...
M. Frenette: Je pourrais ajouter, M. le Président,
qu'effectivement, nous aussi, on n'est pas enclins à accepter un nouveau
palier de négociation qui est la négociation régionale,
alors que, déjà, à l'heure actuelle, au niveau.. Et la
proposition va dans le sens que la négociation centrale serait sur le
monétaire et que la négociation sur les autres conditions de
travail se feraient à un niveau régional. On vous rappelle qu'en
négociations, il est difficile de régler les deux
éléments séparément et que c'est donc un sujet
conflictuel de plus que l'on ajoute si on se crée deux niveaux de
négociation. Déjà, on a la possibilité, et on le
fait lors des négociations, d'avoir des ajustements locaux. On a une
négociation centrale et on a des ajustements locaux au niveau des
établissements sur des horaires de travail, sur des ajustements, etc. Il
y a aussi, dans les conventions collectives, une possibilité d'avoir une
négociation régionale. Y compris le gouvernement, y compris les
parties, en négociations, n'ont jamais voulu utiliser cette
possibilité-là dans le secteur public et, lorsque cette
hypothèse-là existait au niveau du secteur public, entre autres
chez les enseignants, il y a quelques années, c'est le gouvernement
lui-même, évidemment avec l'accord des enseignants, qui a fait
disparaître ce niveau de négociation régional. Alors, on ne
croit pas que multiplier les niveaux de négociation va aider à
diminuer des possibilités de conflits qui peuvent exister lors des
négociations, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Mme Lamontagne.
Mme Lamontagne: Juste un petit élément. Nous, on
est prêts à faire le débat, je le répète, et
je voudrais rappeler que le meilleur régime de négociation, c'est
celui qui est convenu entre les parties et non pas celui qui est
imposé.
M. Trudel: Double message reçu, j'imagine. Mme
Boulanger...
M. Côté (Charlesbourg): Ça s'adressait. M.
Trudel: Mme Boulanger...
M. Côté (Charlesbourg): ...aux deux parce que la loi
37 avait un parrain.
M. Trudel: Mme Boulanger...
Mme Lamontagne: Oui. On ne fait pas de distinction entre
les...
M. Côté (Charlesbourg): Oui. C'est pour ça
que, quand je vois la flèche, je la trouve en Y.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Elle est partie par là et elle n'est pas
revenue.
M. Côté (Charlesbourg): C'est des missiles Patriot:
vous en avez lancé deux pour être bien sûr de ne pas manquer
votre cible.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Mme Boulanger, le ministre a fait un certain nombre
d'ouvertures sur ce qu'il appelle le croisement au niveau des sièges sur
le Conseil des infirmiers, infirmières, et le CMDP. Qu'est-ce que vous
pensez, vous, de l'idée d'un comité mixte au sein, par exemple,
de l'institution hospitalière, de l'établissement hospitalier,
regroupant les représentants du corps médical et du corps
infirmier, pour en arriver justement à travailler sur les dimensions
communes sans que l'un et l'autre soient obligés, si vous voulez, en
quelque sorte, d'en discuter formellement dans leur instance avec la
présence de - si je peux appeler ça comme ça - l'autre
partie? Est-ce que vous êtes ouverts à la création d'un
comité mixte - corps médical, personnel infirmier - dans
l'établissement pour gérer tout l'aspect des soins avec le
personnel médical? (12 h 30)
Mme Boulanger: Bon. Si vous faites référence par
là au Conseil des infirmières et infirmiers, effectivement, on
est en accord avec cet ajout-là à la loi. Je pense que c'est un
aspect positif pour les infirmières, à tout le moins pour se
faire entendre et nous donner là une chance de revaloriser, à
tout le moins, un tant soit peu la profession d'infirmière, de retrouver
nos lettres de noblesse. Cependant, je dois vous avouer qu'il ne
m'apparaît pas simple de s'installer tout de suite à une
même table, par exemple à l'exécutif du Conseil des
infirmières et infirmiers, alors que les médecins ont
décrié notre présence sur leur conseil à eux, le
CMDP. Je pense qu'il va falloir beaucoup d'ajustements pour arriver à
s'entendre, mais je peux vous assurer, par exemple, qu'on va tous faire en
sorte pour qu'on arrive à s'entendre sur les points qui relèvent
du Conseil des infirmières et infirmiers et dont il a la
responsabilité. Il va falloir qu'on s'entende et on va s'organiser
effectivement pour que ça fonctionne. Ça va demander beaucoup
d'adaptation, par exemple.
Le Président (M. Joly): M. le député... Mme
Lamontagne, vous voulez rajouter...
Mme Lamontagne: Une remarque complémentaire. Oui, le
Conseil des infirmiers et infirmières reconnaît le rôle
important des infirmières dans le système hospitalier, dans le
système de santé en général. Par ailleurs, nous, on
a une inquiétude qui est le fait que les autres professionnels ne sont
pas représentés nulle part. Dans la loi, on met même fin au
comité consultatif. On peut dire que ça ne fonctionnait pas
parfaitement partout, mais où vont se retrouver les autres
professionnels, où on va mettre en valeur le travail des équipes
multidisciplinaires, surtout dans les hôpitaux, parce que, dans les CLSC,
c'est déjà beaucoup plus avancé à ce
niveau-là? Alors, c'est une inquiétude que nous avons parce qu'on
ne veut pas non plus se retrouver avec des cloisons entre les différents
types de professionnels. On veut qu'on mise beaucoup plus sur le travail
d'équipe et interdisciplinaire. Parce que chaque profession a son
approche et sa spécificité et concourt au bien-être des
citoyens et des citoyennes.
M. Frenette: Nous avons fait savoir au ministre, et à
plusieurs reprises, qu'il avait négligé complètement, dans
cette réforme, la participation du personnel du réseau et qu'il
avait mis de côté leur expertise. On voudrait qu'il leur trouve
une place pour qu'ils puissent, eux aussi, participer dans le réseau, et
avec les autres professionnels de la santé, pour qu'ils puissent oeuvrer
- et ils veulent le faire - à l'amélioration de la qualité
des services et des soins dans l'ensemble du réseau.
Le Président (M. Joly): Mme Côté.
Mme Côté (Cécile): Moi, je veux tout
simplement ajouter qu'au niveau de ces conseils, il serait très
important, entre autres, que le personnel qui représente le social soit
sur ce type de comité là. Une raison très
particulière, c'est que, si la réforme se fait dans le sens
où elle est prévue maintenant, au niveau des services sociaux -
ce que je ne souhaite pas nécessairement à 100 % - au minimum, il
faudrait que les gens qui vont dans des milieux qui ne sont pas leur milieu
d'origine, par exemple les hôpitaux, les centres d'accueil, tous ces
types de milieux, soient représentés et qu'ils puissent apporter
tout l'aspect social des missions sociales de ces types
d'établissement.
Le Président (M. Joly): Merci, madame. Je vais maintenant
reconnaître Mme la députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Ce que j'aurais le
goût de vous dire c'est que, lorsque vous avez fait votre
présentation, ce qui m'a surtout frappée, c'est que vous avez
porté une très grande attention à tout ce qui touche
vraiment le côté humain, plutôt que le côté
structure et tout ce qui touche vraiment le citoyen consommateur, plutôt
que ce qui touche les règles qui régissent votre travail.
Plutôt que de défendre uniquement les intérêts de ce
que vous représentez comme groupe de travailleurs, vous avez vraiment
touché à tout ce qui a trait au citoyen consommateur, et je pense
que c'est extrêmement significatif pour la réforme qui va
s'appliquer. Vous avez touché à l'universalité des
services, à la confidentialité, aux services sociaux, au peu de
place qu'on y retrouve, à l'importance d'une politique de santé
et bien-être. Je serais peut-être portée à dire que
c'est peut-être parce que c'est la première fois que nous avons
sur la table des intervenantes féminines majoritairement depuis le
matin.
Je vais donc vous demander - parce que, là, j'ai beaucoup
d'espoir en vous entendant parler presque exclusivement du citoyen consommateur
- côté motivation, Mme Lamontagne l'a soulevé un petit peu,
le personnel a besoin de motivation pour l'appliquer cette réforme,
qu'est-ce qui vous manque vraiment comme outil de motivation à l'heure
actuelle?
Mme Gagnon (Astrid): Nous, nous avons fait, justement, une
consultation sur la valorisation et la satisfaction au travail du personnel
salarié dans le réseau. Naturellement, on se réjouit de
voir, dans le projet de loi, qu'il y a une partie du message qui a
été entendue: un changement de cap. Finie la gestion autoritaire,
nous allons consulter les salariés. Ce que les salariés disent,
en général, c'est effectivement que ça manque de
consultation dans le système. Par contre, on parle des consultations
bidon. Ce qu'ils veulent, c'est de la consultation, être
vraiment écoutés. Et Dieu sait que l'expertise, ils l'ont,
parce qu'ils sont toujours les plus près des
bénéficiaires. Alors, ils connaissent très bien les
besoins des bénéficiaires à plusieurs niveaux et ils ne
sont jamais écoutés à ce nlveau-là. Alors,
ça, c'est l'une des parties qui est très importante dans la
satisfaction au travail.
Il y a évidemment la possibilité de travailler avec les
outils nécessaires pour rencontrer des grands objectifs, il faut le
dire. On ne doit pas se gêner d'avoir l'objectif de donner des soins et
des services de qualité. Malheureusement, dans plusieurs
établissements, c'est soit l'équipement, soit le personnel, qui
manque. Effectivement, si le ministère voulait savoir ce qui manque au
personnel, il n'aurait qu'à se pointer à la fin des quarts de
travail pour leur demander s'ils sont satisfaits de leur journée de
travail. Il va avoir là toutes les réponses. Alors ça,
c'est une partie importante, et probablement que la raison pour laquelle on est
très à l'aise de parler de qualité des services aux
bénéficiaires, c'est parce qu'on sait très bien qu'elle
est intimement liée à la satisfaction au travail. Pour nous, il
n'y a aucun problème et aucune dichotomie là-dedans.
Par rapport à la qualité des soins, entre autres, nous,
à la FTQ, on a un grand reproche à faire au projet de loi. On se
serait attendus à ce que le projet de loi soit beaucoup plus
précis sur les mesures de contrôle de la qualité des soins
et on n'est pas d'accord que le projet de loi vise à privatiser
davantage le système. Alors, si on met tous ces éléments
ensemble, la privatisation, on laisse les bénéficiaires dans les
mains des propriétaires qui peuvent faire du profit - je parle
particulièrement des centres d'accueil pour personnes âgées
- sans mécanisme de contrôle de la qualité. Il y en a un
service de contrôle de la qualité au ministère qui n'a ni
les ressources ni le temps suffisant pour même faire une inspection
annuelle. Alors, on donne des permis de fonctionnement à des
établissements sans faire les inspections. Et si on tient compte de
l'évolution de l'âge des personnes âgées dans les
résidences, actuellement, on va se retrouver, dans 10 ans, avec beaucoup
de foyers clandestins. Je le mets entre guillemets, si vous voulez, mais des
foyers qui ont des permis et qui ne sont pas inspectés, c'est des foyers
clandestins, à notre sens.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme Gagnon.
Mme Gagnon: Alors, ça, ça fait partie beaucoup de
la motivation du personnel.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme Gagnon. Mme la
députée de Terrebonne, est-ce que vous avez une autre
question?
Mme Caron: Je crois que Mme Lamontagne voulait dire un mot.
Le Président (M. Joly): Mme Lamontagne, vous voulez
rajouter?
Mme Lamontagne: je pense que c'est une question très
importante et qui demanderait un long développement, mais je voudrais
ajouter quelques éléments.
Le Président (M. Joly): Je ne pourrai pas vous le
permettre, parce que, si vous considérez, là...
Mme Lamontagne: Alors, je ne reviendrai pas sur ce qu'on a
déjà dit sur certaines lois qui démotivent notre monde et
sur ce qu'on nous a annoncé cette semaine, mardi dernier. Ça
n'aidera pas à la motivation du personnel. Ça n'a pas aidé
en 1982 et ça n'aidera pas en 1991.
Le Président (M. Joly): J'espère que ce
n'était pas le but de votre visite, ce matin.
Mme Lamontagne: Non. L'autre remarque, c'est que ce qu'on peut
dire, c'est qu'on veut être dans le coup de la réforme. C'est
qu'on ne veut pas sentir que la réforme se fait sur nos épaules,
se traduit par des surcharges, par la détérioration des
équipements, par une détérioration de nos conditions. Je
vais donner un exemple très concret. Nous sommes d'accord, on a fait un
colloque sur la question, pour que les CLSC élargissent leurs heures
d'ouverture, élargissent leur gamme de services, mais on ne veut pas que
ce soit aussi les travailleuses, les professionnels de ces secteurs qui en
fassent les frais. On veut un meilleur service pour les citoyens. On veut, pour
une mère de famille, quand son enfant a un problème à 10
heures le soir, qu'elle puisse aller dans son CLSC et non pas courir à
l'urgence de l'hôpital Sainte-Justine ou de tout autre hôpital,
mais on veut aussi qu'on tienne compte du personnel quand on va
réorienter les services. On veut être consulté, on veut
être de la partie, si on veut, partager les objectifs de la
réforme, parce que tous les travailleurs et travailleuses veulent donner
un bon service, un service de qualité.
Le Président (M. Joly): Merci, madame.
Mme Lamontagne: Ça, il faut que vous en soyez convaincus.
le président (m. joly): une dernière question. mme
la députée de marie victorin, une courte question, s'il vous
plaît, et une courte réponse aussi.
Mme Vermette: Oui, alors, dans la structure actuelle, il y a le
comité pour le personnel clinique qui va disparaître avec la
nouvelle réforme. C'est ça que j'ai entendu? Le personnel
clinique...
Une voix: Ils veulent le garder.
Mme Vermette: Mais pourquoi, finalement, on me disait que
ça n'a pas toujours bien fonctionné? Quelles sont les raisons qui
font en sorte que ça n'a pas pu bien fonctionner et pourquoi,
finalement, demandez-vous à ce qu'il puisse rester en place?
Le Président (M. Joly): Mme Lamontagne.
Mme Lamontagne: nous, on ne tient pas à une structure plus
qu'à une autre. là, au niveau des conseils d'administration, il y
a trois personnes, et ce qu'on craint, c'est que, pour les autres personnels,
on n'a pas de garanties d'être représentés au conseil
d'administration, parce qu'il y a les médecins et les
infirmières. ça, c'est une première remarque. on veut
avoir des garanties d'être représentés au conseil
d'administration et, si ce n'est pas le comité du personnel clinique,
que ce soit d'autres comités, mais un lieu de consultations et
d'échanges sur les orientations, la mission de l'établissement et
aussi les plans de développement, les politiques de personnel. on veut
qu'il y ait des lieux assurés de ça. alors, on n'a pas de
formule. on peut réfléchir à une formule très
concrète. on ne veut pas de la bureaucratie pour de la bureaucratie,
mais on veut des garanties d'être présents.
Le Président (M. Joly): Merci, madame. M. le ministre,
s'il vous plaît.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Je suis très heureux de pouvoir échanger
brièvement avec vous ce matin, à la même table, de la
même manière qu'on l'a fait avec les autres, et je prendrai, dans
un premier temps, deux éléments qui m'apparaissent plus
essentiels dans votre présentation, c'est commun sur le plan de
politique de santé et bien-être et le social. Je ne suis pas de
ceux qui pensent qu'il aurait fallu que la politique de santé et
bien-être précède la réforme. Ce ne sera pas nouveau
pour vous autres, là, mais je vais vous dire pourquoi. Dites-moi ce que
ça changerait d'avoir entre les mains aujourd'hui la politique de
santé et bien-être, quant à l'impact de la consolidation de
la première ligne, à la décentralisation, à la
participation des citoyens. À mon point de vue à moi, ça
ne changera rien. La politique de santé et bien-être a son
importance sur la concertation multisectorielle - ça me paraît
évident, ça me paraît sauter aux yeux et c'est la
réalité de demain - sur les priorités de services, parce
qu'il y a des incitations à donner là, sur l'allocation des
ressources. Mais ça, ce n'est pas dans la loi. Il faut s'enlever de
l'esprit que la loi 120 doit nécessairement, sur le plan
législatif, contenir toutes les mesures de la réforme. Ce n'est
pas possible et ce n'est pas ça l'esprit de la loi 120. Il y a donc une
série d'étapes qui doivent venir: la réforme, le projet de
loi 120, la politique de santé et bien-être et le plan de mise en
oeuvre des 222 mesures que contiennent la réforme. Mais c'est un tout,
et le jugement global sur la réforme devra se faire dans le tout.
C'est sûr qu'à ce moment-ci, il y a des
éléments qui paraissent plus ou moins clairs dans la loi et qui
doivent être précisés, j'en conviens avec vous. D'ailleurs,
c'est le but de l'exercice. Il y a des éléments qui vont venir
ultérieurement, qui vont venir compléter le projet de loi et qui
vont donner l'ensemble du point de vue et de l'organisation. Donc, la
politique, son importance, pour moi, c'est qu'elle arrive, qu'elle vienne. On
ne peut pas dire qu'on va la faire en 1992. Quand on parle du mois de juin, il
faut qu'il y ait convergence avec la politique de santé et
bien-être qui serait rendue publique au mois de juin, au terme duquel on
aurait fini l'exercice d'adoption du projet de loi 120 et, par le fait
même aussi, j'espère à tout le moins, l'exercice du plan de
mise en oeuvre des mesures qui n'ont pas d'implications sur le plan
législatif, mais qui ont une drôle d'importance au niveau de la
réforme. Tantôt, vous évoquiez: On ne volt nulle part pour
des clientèles spécifiques, que se soient les personnes
âgées ou les jeunes, des éléments. C'est clair que
c'est dans des mesures spécifiques qu'on va les retrouver sur le plan du
financement et sur le plan de la mise en oeuvre de ces choses-là. (12 h
45)
Le deuxième, et évidemment ça m'avait
étonné un petit peu, parce que je me rappelle qu'en commission
parlementaire l'an passé, on avait eu une participation assez
exceptionnelle des centrales syndicales avec des mémoires très
étoffés et avec des surprises, quant à moi - je ne le dis
pas pour les autres, je le dis pour moi - quant à l'ouverture des
centrales syndicales sur un certain nombre de choses et je l'avais dit à
l'époque d'ailleurs, je le répète parce que la
mémoire est une faculté qui oublie et Dieu sait que c'est une
chose qu'on peut appliquer à la politique et, de temps en temps, aux
employés aussi bien sûr, aux centrales syndicales.
Ce qui m'avait frappé dans les commentaires, au lendemain de la
réforme, de la part du monde syndical, c'est qu'on nous disait: Absence
totale ou presque totale de dimension sociale. Il n'y a rien de plus faux. Les
mesures majeures sont des mesures qui concernent le social. Quand même
que je tenterais de faire accroire aux médecins que les mesures qui
concernent les CLSC ce ne sont pas des mesures sociales, je vais avoir des
problèmes un peu là. Pour moi, dans mon livre à moi, quand
je parle des mesures qui concernent les CLSC, ce sont des mesures qui sont dans
la grande famille du social. Quand on parle des personnes âgées,
ça me paraît très très important. Quand on me parle
de services en
milieu scolaire, des mesures spécifiques qu'il y a à
l'intérieur de la réforme pour augmenter le nombre de
travailleurs sociaux dans les écoles du Québec, ça devrait
être une mesure sociale. Donc, ce qui concerne les jeunes, et ça
c'est très très important, quand on parle, à
l'intérieur de la réforme, des CPEJ, nos nouveaux CSS, nos CPEJ
et des CLSC, on parle toujours du social. Je ne pense pas qu'on parte d'autres
choses. Et c'est une consolidation qui, à ce moment-ci, reçoit un
assentiment très large qui soulève des inquiétudes, en
particulier au niveau des travailleurs, et je pense que j'en conviens et que,
si j'étais un de ces travailleurs-là, j'aurais probablement les
mêmes inquiétudes tant que je n'aurais pas des
réponses.
Mais c'est clair que ce sont des choses qui sont majeures. Dans les
amendements qui ont été ou qui vont être
déposés très prochainement et qui ont été
annoncés mercredi, quand on parle d'un mécanisme
multidisciplinaire d'évaluation de la qualité des soins,
ça veut dire que ça ouvre la porte à d'autres que les
médecins et les infirmières, dans la mesure où chacun des
établissements en a besoin, et ce n'est pas limitatif uniquement aux
centres hospitaliers, pour faire place aux revendications, en particulier, de
ceux qui sont dans la catégorie sociale, qui nous ont dit effectivement
qu'ils risquaient d'être des parents oubliés.
Et on en arrive à parler de qualité, parce que vous l'avez
évoquée tantôt en disant: Qui va contrôler la
qualité? Je pense que c'est madame qui l'a fait en fin de course, en
parlant des foyers clandestins ou d'autres, qui ont des permis mais où,
sur le plan de la qualité, le contrôle ne s'exerce pas. L'autre
message qui m'apparatt très clair c'est la volonté de tous ceux
qui sont venus en commission parlementaire - ils l'ont signifié à
Rochon, ils l'ont signifié à ma prédé-cesseure, Mme
Lavoie-Roux - quant à la nécessité de
décentraliser, de régionaliser. Et ça c'est une ligne de
forces. Donc, si on décentralise, si on régionalise, il faut
nécessairement qu'il y ait des pouvoirs qui soient au central. Bon, ce
n'est peut-être pas fait d'une manière parfaite dans la loi 120
actuellement là, comme les gens le souhaiteraient, mais, au moins, il y
a l'effort. Il ne faut pas demander en même temps au législateur
d'encadrer la loi et de décentraliser. Mors, quand on
décentralise, on décentralise. S'il faut donner de
l'oxygène à la régie régionale, on donne de
l'oxygène à la régie régionale, et, s'il faut
donner de l'oxygène au conseil d'administration, on lui en donne. Tout
ça pour rejoindre le dernier point qui a été
évoqué par madame qui parlait de l'évaluation de la
qualité. Il est faux de prétendre que le ministère,
à Québec, a eu, a et aura suffisamment de monde pour faire le
tour du Québec, des 950 établissements, pour faire
l'évaluation de la qualité. On peut bien dire que ça se
fait, je vous dis qu'on n'a pas le monde pour le faire et qu'on est
embarqué dans l'avant, dans le pendant et dans l'après et qu'on
veut sortir du pendant pour laisser la liberté aux gens et plus
d'oxygène pour être capable de faire le pendant. Ça veut
dire quoi ça? Ça veut dire que, dans la loi, on dit: Les conseils
d'administration d'établissements sur lesquels vous siégez... Ce
n'est pas le voisin qui choisit là. Le médecin est choisi par le
médecin, l'infirmière est choisie par l'infirmière et
l'autre travailleur est choisi par les autres travailleurs. On vous dit: II y a
quatre objectifs. Le premier, c'est la qualité de la dispensation des
soins; le deuxième, c'est la qualité de la gestion
financière; le troisième, la qualité de la gestion de la
ressource financière; et le quatrième, la qualité de la
dispensation des services. Puis on dit quoi? On dit: Vous êtes assez
"matures" pour vous donner les structures dont vous avez besoin pour
vérifier la qualité. Et, après ça, le
ministère va intervenir, lui, sur le plan d'une tournée, pas
nécessairement dans les 950 établissements, mais en mettant des
mécanismes en place pour être capable de faire la
vérification si effectivement, ultimement, ces choses-là se font.
Ça ne veut pas dire que ça règle tous les
problèmes, ça veut dire qu'il faut donner plus d'oxygène
aux conseils d'administration, et le message qui est dans la réforme, il
n'est peut-être pas suffisamment clair dans la loi 120. Ce n'est pas vrai
que la réforme va pouvoir se faire s'il n'y a pas une participation
intensive des employés, peu importe qui ils sont, où ils sont,
qu'ils soient de la santé ou qu'ils soient du social. Ça, pour
moi, c'est clair que c'est fondamental, il s'agit d'y aller. Il s'agit
d'être hospitalisé, d'aller fréquenter un service, pour
s'apercevoir qu'il y a quelqu'un quelque part qui donne des services puis que,
s'il est malheureux, ça ne l'influence pas au point de mettre en
péril la qualité, mais l'humeur peut être
différente. Je l'ai vécu, bon. C'est un petit peu normal, c'est
humain, nous autres aussi notre humeur change de temps en temps, à
l'occasion. Pourquoi pas les employés du réseau? C'est un
élément fondamental.
Ceci étant dit, je comprends que les points que vous avez
soulevés, ce sont les points qui étaient questionnâmes. Si
on vous avait donné une heure, probablement que vous n'en auriez pas eu
suffisamment pour dire les bons points qu'il y a à l'intérieur de
la réforme. J'en conviens, vous avez eu l'honnêteté de le
dire. Évidemment, ma première question irait à M.
Frenette.
Vous m'inquiétez quand vous me dites que, sur le plan de la
négociation, de décentraliser la négociation, les
employés ne seront pas gagnants. Ce sont les employés qui vont
être gagnants, à mon point de vue. Et quand je vous entends dire
ça, vous feriez un maudit bon gars au Trésor, parce que le
Trésor puis les centrales syndicales, sur le plan provincial, ils ont
à peu près la même idée sur garder le pouvoir
central de négociation. Et ce qu'on dit dans la réforme,
c'est: Nous autres, on est convaincus qu'en en envoyant plus au niveau
local, il y a bien plus de choses qui vont se régler et qui vont se
modeler à la manière de ce que les établissements veulent.
Et le rapport de force devra se faire là. On ne l'a pas écrit
dans le projet de loi 120, parce que ce n'est pas de notre affaire. On l'a dit
dans la réforme, en disant que ça devrait se faire avec les
syndicats. Vous m'inquiétez quand vous me dites ça, puis je
voudrais bien être capable de vous percevoir comme il faut puis de vous
donner la chance de vous rattraper en disant: Vous m'avez mal compris, puis,
effectivement, il y a un avantage à aller négocier sur le plan
local.
M. Frenette: Non, vous nous avez bien compris, M. le
Président. C'est que ce sera toujours au niveau central que sera le
pouvoir de dépenser. Et, évidemment, comme on est contre la
taxation au niveau régional, c'est au niveau central, où est le
pouvoir de dépenser, que se dégage la marge de manoeuvre
financière à tous les niveaux, et ça ne sert à rien
de passer, à ce moment-là, au niveau régional, par des
commis qui auront à administrer les décisions financières
prises au niveau central. C'est là qu'est notre inquiétude, c'est
là qu'on dit: II n'y aura probablement pas de pouvoir au niveau
régional pour négocier, et la formule actuelle le permet, d'avoir
une négociation au niveau régional. Les parties, de part et
d'autre, n'ont jamais voulu l'utiliser, mais il leur revient, comme on l'a
souligné, et c'est notre approche. Si les parties s'entendent, qu'est-ce
qui pourrait être le négociable à ce niveau-là et
qu'est-ce qui pourrait faciliter les ententes ou la rapidité des
règlements, etc., on n'a pas de problème à le regarder.
Mais on n'a pas de projet qui est étudiable à ce moment-ci, dans
le cadre d'une décentralisation régionale des négociations
où et pour laquelle les intervenants n'auraient pas le pouvoir d'agir et
d'engager le réseau.
Là est notre problème, M. le ministre, mais on est
prêts à discuter de ça et à se définir un
meilleur système de négociation qu'on a. Mais on est sûrs,
pour nous, en tout cas, que, déjà, les négociations et
l'adaptation au niveau local, elles se font, que la négociation se fait
là et que c'est là que se vivent les problèmes de
l'organisation du travail, de la définition des tâches, des
fonctions, etc. Et on l'encourage cette négociation-là au niveau
local, et on la soutient, mais l'ensemble du monétaire reste central,
tant et aussi longtemps que c'est vous qui avez le pouvoir de
dépenser.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, on ne peut pas
régler ça en deux minutes, on serait trop efficaces, si on
faisait ça.
M. Frenette: Ha, ha, ha! On peut s'essayer.
M. Côté (Charlesbourg): Une chose est certaine, en
tout cas, surveillez-moi, je vais revenir à la charge de manière
certaine parce que je l'ai mis dans la réforme parce que j'y crois. J'ai
été particulièrement estomaqué d'une
expérience qu'on m'a soulevée dans le coeur de la Mauricie
où, effectivement, un représentant syndical avait proposé
au directeur général de pouvoir faire en sorte que quelqu'un sur
un étage puisse aller aider un autre parce qu'il y avait un surplus de
travail sur l'autre étage. Croyez-le ou pas, c'est le directeur
général qui avait refusé à ce moment-là.
J'ose espérer que ce n'est pas trop répandu, parce que
j'étais déjà renversé de voir qu'un
délégué syndical pouvait accepter une chose comme
celle-là, parce que ce n'était pas...
M. Frenette: II faut croire que vous nous connaissez mal, M. le
ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Bien sûr, bien
sûr.
Mme Lamontagne: La qualité des services, on en est
très préoccupés.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais, en tout cas, il y
a d'autres sortes de problèmes dont on pourrait se parler, mais vous
donnez un exemple où c'est possible, ce genre d'accomodement là,
sans que ça ait d'effet sur le plan financier. Il y a bien des choses
qui peuvent se régler sur le plan local sans que ça n'ait
d'impact sur le plan financier, et c'est le bénéficiaire qui va
en avoir le plus grand bénéfice. Donc, ça aussi, c'est des
choses qui sont possibles. Je pose la question, vous me répondrez et je
vais jouer le rôle comme si j'étais un chef syndical qui pose une
question à un homme politique, on va jouer le rôle inverse. On a
souvent entendu parler, dans la bouche des dirigeants syndicaux que
c'était un désengagement de la part du gouvernement, qu'il y
avait un désengagement, on entend ça assez souvent. Est-ce que
vous considérez qu'un budget de la santé et des services sociaux
qui est à l'IPC + 3 % est un désengagement de l'État? Si
oui, expliquez-moi comment.
M. Frenette: Si on fait comme les politiques, on ne vous
répondra pas, M. le ministre. Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): C'est pour ça que
j'avais pris soin de faire l'inverse, pour ne pas que vous...
M. Frenette: Le problème...
M. Côté (Charlesbourg): ...me serviez cette
réponse-là.
M. Frenette:le problème n'est pas nécessairement
vos 3 % que vous vous engagez à
maintenir, le problème est sur les ouvertures que vous faites et
que vous venez concrétiser peut-être des initiatives malheureuses
de vos prédécesseurs dans le domaine de la santé et des
services sociaux qui ont permis certaines pénétrations
insidieuses parfois du secteur privé dans le réseau. Ce que l'on
voudrait avoir de vous, c'est qu'on dit: Le système, avec une politique
de santé et de prévention, doit pouvoir contrôler ses
coûts. On est conscients des coûts du système et que
ça ne peut pas être des coûts qui augmentent
incommensurablement chaque année, etc. Il faut que ce soit
contrôlé, on est d'accord. On dit que le meilleur moyen, c'est une
politique de prévention et qu'on a un effort à faire parce qu'on
ne l'a pas fait, parce qu'effectivement, malgré tout, on a un
système qui ne coûte pas très cher, qui coûte
peut-être le moins cher au Canada et qu'on n'a pas besoin de ticket
modérateur et d'impôt-services pour continuer à le faire
fonctionner correctement.
M. Côté (Charlesbourg): Ticket modérateur...
Je vais vous envoyer un dictionnaire, vous.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: II y a juste lui qui a la bonne page, par exemple.
M. Côté (Charlesbourg): 412.
M. Frenette: Et les ouvertures, c'est les ouvertures que vous
faites qui nous inquiètent à la venue du secteur privé
dedans. On ne pense pas à l'exemple - et pourtant on en a des exemples
partout - M. le Président, que le secteur privé est capable de
faire mieux que le secteur public dans l'administration et la saine gestion des
services de santé et des services sociaux. C'est pour ça qu'on
pense qu'il faut le faire nous mêmes.
M. Côté (Charlesbourg): C'est...
Le Président (M. Joly): En conclusion, s'il vous
plaît.
M. Côté (Charlesbourg): Sans ouvrir de
brèche, je pense que l'affirmation est grosse. Je vous dis que, dans
tout ce qui est clinique, vous avez raison. Dans le reste, on pourrait
peut-être s'en parler. Ça ne veut pas dire que je vous
convaincrais et que vous pourriez me convaincre non plus, mais je pense qu'il y
a place à la discussion, il faut au moins admettre ça.
M. Frenette: On est toujours ouvert à ça, nous.
Le Président (M. Joly): Merci, brièvement, Mme
Lamontagne, très brièvement parce qu'on a déjà
débordé d'une demi-heure.
Mme Lamontagne: D'abord, on n'a pas encore vu les crédits
et les crédits futurs nous inquiètent. Deuxièmement...
M. Côté (Charlesbourg): Mais quand vous allez les
voir, je vais surveiller votre réaction.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Lamontagne: J'aurais aimé faire un petit commentaire
sur le social, est-ce que je peux, M. le ministre?
Le Président (M. Joly): Madame, non.
Mme Lamontagne: Non?
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, non.
Mme Lamontagne: On enverra nos commentaires à M.
Côté.
Le Président (M. Joly): S'il vous plan, merci. Alors nous
allons ajourner nos travaux sine die.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 35)
Le Président (M. Joly): Alors, nous allons reprendre nos
travaux. Il me fait plaisir de réaliser que, déjà, les
membres de la Fédération des CLSC sont déjà
présents et ceux de l'Association des centres d'accueil du Québec
aussi.
Une voix: L'Association des centres de services sociaux du
Québec.
Le Président (M. Joly): Ah! Les centres de services
sociaux.
Une voix: Oui.
Le Président (M. Joly): Alors, voici très
brièvement. Vous avez 25 minutes combinées...
M. Côté (Charlesbourg): ...pas entendu encore.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): ...pour nous livrer ce que vous
avez à nous livrer, et, par après, la balance du temps est
impartie de façon égale entre les deux formations. Donc, si vous
décidez de prendre 15 minutes d'un côté, il reste 10
minutes de l'autre. C'est à vous autres d'organiser ça selon ce
que vous avez à livrer comme message. Alors, j'apprécierais si
les personnes responsables des groupes pouvaient peut-être se
présenter et aussi nous présenter
les gens qui les accompagnent.
Fédération des CLSC du
Québec
M. Payette (Maurice): Très bien. Mon nom est Maurice
Payette. Je suis président de la Fédération des CLSC. Je
vais présenter du côté des CLSC les gens qui
m'accompagnent: à ma droite, Mme Jeanne-d'Arc Vaillant, directrice
générale de la Fédération; plus à droite,
Jean Rodrigue, médecin d'un CLSC, le CLSC Centre-Sud de Montréal;
à l'extrémité, M. Marcel Sénéchal,
cadre-conseil, directeur du service d'analyse et de développement
à la Fédération des CLSC. À ma gauche, Mme Lise
Denis, directrice générale de l'Association des centres de
services sociaux...
Le Président (M. Joly): Services sociaux du
Québec.
M. Payette: ...et je lui laisse le soin de présenter les
personnes qui l'accompagnent.
Mme Denis (Lise): D'accord. Alors, à ma gauche, M. Jacques
Perreault, vice-président de l'Association des CSS et directeur
général du CSS de Richelieu, et M. Jacques Vachon, membre
coopté du conseil d'administration de l'Association et directeur de
l'École de service social de l'Université Laval.
Le Président (M. Joly): Merci. Alors, qui
débute?
M. Payette: Je vais...
Le Président (M. Joly): M. Payette.
M. Payette: La Fédération des CLSC va prendre les
15 minutes et elle laissera 10 minutes pour nos collègues. Juste
en...
M. Côté (Charlesbourg): C'est la base de la
pyramide.
M. Payette: C'est la base de la pyramide. On va revenir
là-dessus.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît!
M. Payette: Écoutez, oui, pour partir avec la pyramide,
depuis que le livre blanc a été déposé et le projet
de loi, je pense qu'il s'est dégagé beaucoup de choses au sens
où la population a manifesté qu'elle était d'accord avec
le fait que les CLSC soient la base de la pyramide, soient la porte
d'entrée principale. Alors, il y a toutes sortes de signes qui se sont
présentés. D'abord, il y a une augmentation de clientèle
d'environ 15 % qui s'est produite à peu près dans tous les CLSC.
Il y a aussi les commentaires qu'on a pu lire dans les journaux à
l'effet qu'il y avait presque unanimement un appui à ce principe. Il y a
aussi nos partenaires, je pense, aussi bien dans des centres de services
sociaux, des hôpitaux, ainsi de suite, qui ont bien manifesté
qu'ils étaient d'accord avec ce point-là. Et récemment, un
sondage sur le maintien à domicile manifestait très clairement
que des citoyens et des citoyennes québécois sont tout à
fait désireux de demeurer chez eux et pensent que les CLSC doivent
être les maîtres d'oeuvre et qu'on devrait permettre aux citoyens
d'avoir les services nécessaires pour demeurer chez eux.
J'aimerais dire simplement aux membres de la commission que, comme
représentant des usagers et comme citoyen, il y a quatre besoins
auxquels je voudrais que le projet de loi réponde. Le premier besoin
concernant les CLSC, c'est que les citoyens sachent clairement ce qu'ils sont
en droit d'attendre d'un CLSC, exactement quels sont les services. Donc, qu'il
y ait une distinction claire, je pense, pour les citoyens, entre des services
de première ligne et des services de deuxième ligne.
Deuxièmement, je pense que les citoyens aimeraient avoir
l'assurance que, dans chaque CLSC, on puisse offrir sensiblement la même
gamme de services et une gamme complète, et je dirais, y compris des
services médicaux. Nous allons revenir là-dessus au cours de
notre présentation. Les citoyens aussi aimeraient que les CLSC soient
tous accessibles, c'est-à-dire que la porte d'entrée que devrait
être les CLSC soit grande ouverte et qu'elle soit ouverte suffisamment
longtemps pour que les citoyens puissent vraiment profiter de cette porte.
Quatrièmement, je pense que les citoyens aimeraient aussi
être aidés et savoir comment s'orienter à
l'intérieur du système qui, souvent, leur paraît un peu un
labyrinthe. Pour ça, avoir des services d'information, de
référence. Ce que je souhaite, c'est que les citoyens
développent progressivement le réflexe CLSC, c'est-à-dire
que les différents problèmes mineurs, les problèmes des
services de base, automatiquement qu'un citoyen pense: Je m'adresse au CLSC et
c'est là qu'on va. On va avoir ce réflexe-la et la base de la
pyramide sera vraiment ce qu'on a souhaité qu'elle soit. Je vais laisser
à Mme Vaillant le soin d'aborder plus précisément certains
points.
Le Président (M. Joly): Mme Vaillant
Mme Vaillant (Jeanne-d'Arc): D'accord. Donc, de façon
très succincte, ce qui est important que la loi adoptée traduise
- c'était dans le cadre du livre blanc et c'est repris dans le projet de
loi - c'est la mission des CLSC: établissements publics de
première ligne. Ça veut dire quoi? Ça veut dire des
services sociaux et de santé non pas courants mais de base ou de
première ligne, parce que "courants" se réfère
plus à des interventions d'ordre individuel. Donc, premier
élément, des services sociaux. Sur les services sociaux, je pense
qu'il y a une importance très grande, compte tenu des
problématiques, de la nécessité de développer des
services sociaux. Je fais juste une parenthèse pour la politique de
santé et bien-être qui va être une pièce
maîtresse, vous l'avez dit en début de commission parlementaire,
et j'attire juste l'attention sur l'importance que, dans la politique de
santé et bien-être, on attache beaucoup d'importance aux services
sociaux.
Je ferme la parenthèse. Si on revient au niveau du projet de loi,
des services sociaux, des services de santé y compris les services
médicaux. Nous pensons que c'est important que ça soit
précisé pour que clairement, ce soit compris que, dans les
services de base, les citoyens puissent avoir accès, en CLSC, à
une gamme assez complète de services. Je vais laisser le soin
tantôt au Dr Rodrigue de développer le projet médical en
CLSC.
Un autre élément, c'est évidemment les lieux de
dlspensation de services. Je pense qu'il faut, comme les CLSC sont et doivent
être à la base du système, que les lieux de dispensation de
services doivent comprendre les milieux de travail, les milieux de vie. On
intervient dans les arcades, on n'intervient pas seulement à domIcHe.
Donc, il faut que, dans le libellé de la loi, on ne puisse limiter les
interventions ou les lieux d'intervention.
Un autre élément est l'approche communautaire, qui est une
des caractéristiques des CLSC. Ça nous apparaît important,
surtout en matière de prévention, qu'on puisse
caractériser l'approche communautaire. On parle d'un projet de loi de
nature préventive, curatlve, de réinsertion sociale et de
réadaptation. Donc, nous soulignons l'importance d'une intervention
auprès à la fois des groupes et des collectivités, et
ça pourrait se refléter au niveau de la mission du CLSC. Il est
évident, et c'est un ensemble de moyens qui vont découler de la
mise en application de la loi, que les systèmes d'information
téléphonique et de référence de 24 heures sur 24, 7
jours par semaine, doivent être articulés en première
ligne. Il y a également une majeure au niveau des services de soutien
à domicile. Un récent sondage témoigne du désir des
Québécois de rester chez eux, malgré un handicap ou une
perte d'autonomie. Donc, les services à domicile sont extrêmement
importants dans ce contexte-là, et sous plusieurs aspects, dont un qui
se retrouve dans le projet de loi qui est celui du centre de jour et qui, pour
nous, constitue un outil de maintien à domicile. Là-dessus, je
dis aux parlementaires, et je vais reprendre votre biais ou votre prisme, que
la décision doit être prise non pas en fonction des
intérêts corporatistes de l'une ou l'autre des catégories
d'établissements, mais en fonction des besoins de la clientèle.
Et je m'arrête là-dessus.
Si je poursuis, au niveau de l'organisation des services
médicaux, ce qui a été annoncé par le ministre dans
le discours sur le fait qu'il y ait des CMDP là où il y a cinq
médecins et plus dans tout établissement, donc centre hospitalier
ou CLSC, nous sommes d'accord.
Au niveau des régies régionales, deux
éléments retiennent notre attention. Dans le libellé
actuel, pour nous, il est important de préciser que les régies
doivent intervenir dans le respect des missions d'établissements pour
faire en sorte que les règles du jeu soient claires toujours avec
l'objectif que les citoyens s'y retrouvent partout au Québec et toujours
dans l'objectif d'éviter les luttes corporatives, ce que
dénonçait la commission Rochon.
Le deuxième élément qui présente pour nous
des ambiguïtés, c'est le fait que les régies
régionales, quant à nous, ne doivent pas dispenser de services
directs en ayant des responsabilités de coordination, de planification
et d'organisation de services. Donc, ce que nous disons, et là nous nous
référons carrément, puis je vais l'identifier, ce n'est
pas un objet volant non identifié, à la santé au travail,
pour être très claire. On sait le litige qui entoure la
santé au travail. Pour nous, la santé au travail, ce sont des
services directs qui doivent être dispensés en première
ligne. À ce moment-là, il nous apparaît important que ces
services puissent être organisés - à partir du moment
où les DSC sont intégrés à la structure d'une
régie régionale pour faire de la planification, de la
coordination et de l'organisation de services, c'est important pour nous que ne
subsistent pas d'ambiguïtés à ce chapitre. Donc, c'est les
principaux commentaires sur ce point.
Je passe rapidement au mode d'élection des représentants
de la population. Nous avions demandé le suffrage universel. Nous
comprenons la très grande difficulté et, là-dessus, nous
attirons l'attention qu'il faudrait permettre de tenir plus d'une
assemblée publique dans les territoires, dans des endroits
différents pour choisir les représentants.
Donc, je vais m'arrêter sur ces questions en vous disant que ce
qui nous apparaît majeur, c'est que la loi puisse être
adoptée et des stratégies de mise en application rapide. La
population a pris le virage et la population a pris très au
sérieux la réforme. On a déjà, en CLSC, un
achalandage moyen de 15 % de plus suite à un sondage maison. Dans
certains territoires de CLSC, c'est 30 %. Je vais laisser le Dr Rodrigue
présenter le projet médical en CLSC.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme Vaillant. Dr Rodrigue,
il vous reste trois minutes.
M. Rodrigue (Jean): Oui, sûrement. Disons que la
Fédération des CLSC a construit ou élaboré un
comité qui réfléchit actuellement sur
le projet médical en clsc. essentiellement, le projet
médical se développe autour de deux axes. le premier, c'est celui
de développer un modèle original et efficace de soins de
médecine familiale dans tous les clsc. cette médecine familiale,
quant à nous, inclut le maintien à domicile. ça inclut
aussi, on l'espère, si c'est permis dans les ententes pour les
médecins, la continuité des soins et l'intégration des
soins avec d'autres structures comme telles. essentiellement, le modèle
tourne autour de cette dispensation de services de médecine familiale,
principalement dans les clsc, mais ouverts aussi dans les autres
établissements du réseau. le deuxième axe, c'est celui de
permettre à cette équipe de médecins de dispenser, en
complémentarité avec les médecins du réseau, des
activités de santé communautaire de première ligne et de
pouvoir intervenir aussi sur des problématiques spécifiques de
santé comme, par exemple, des catastrophes environnementales ou des
choses de cet ordre-là.
Essentiellement, on pense qu'il y a deux conditions pour
développer ce modèle de médecine familiale. On a
déjà parlé de la structure médico-administrative.
Quant à nous, ça prend une équipe homogène qui
partage les objectifs du CLSC et non pas des médecins qui
proviendraient, en bonne partie, des cabinets agréés. Donc, pour
nous, cette équipe-là, ça doit tourner autour de 8
à 10 médecins par CLSC. Pour ces médecins-là, on
pense qu'il faut aussi qu'il y ait un mode de rémunération qui
soit un peu équivalent à la rémunération des
médecins à l'acte. On pense aussi, pour donner une certaine
liberté dans chaque établissement, qu'il doit y avoir une
mixité des modes de rémunération, de façon à
permettre justement des rémunérations d'appoint, là
où c'est nécessaire.
La mesure d'impact, si on peut dire, de la médecine familiale, on
en a parlé tantôt avec le plus grand achalandage, on vise que les
services de médecine familiale en CLSC occupent environ 10 % à 20
% des services médicaux de médecine familiale. Actuellement, si
on regarde la dernière enquête de Santé Québec, les
services de santé en CLSC occupent 6 % des consultations et 60 % pour
les cabinets privés, 6 % à 10 % à l'urgence. On vise,
nous, à offrir dans tous les territoires de CLSC de 10 % à 20 %,
dépendamment des régions, de ces services. Essentiellement, notre
projet médical, c'est celui-là.
Le Président (M. Joly): On peut vous laisser aller
quelques minutes, mais ça empiète sur le temps des deux
formations.
M. Rodrigue (Jean): Ça va.
Le Président (M. Joly): Parfait. Oui? Merveilleux! Donc,
merci beaucoup. Mme Denis.
Mme Denis: Oui, bonjour. D'abord, je voudrais dire
d'entrée de jeu que l'Association et les centres de services sociaux
sont d'accord avec la réforme et ses orientations
générales, et ce, tout en reconnaissant les impacts majeurs que
cette réforme aura sur les centres de services sociaux actuels. Il y a
cependant certains aspects de la loi qui, selon nous, méritent des
clarifications ou des modifications.
Je vais aborder trois thèmes. D'abord, les services sociaux pour
tous ceux qui en ont besoin, jeunes, adultes, personnes âgées;
deuxièmement, des ressources intermédiaires, notamment familles
d'accueil; troisièmement, le temps d'agir.
Des services sociaux pour tous ceux qui en ont besoin. La
réforme, ce qu'elle nous propose au niveau des services sociaux,
fondamentalement, c'est de confier à chaque réseau
d'établissements la responsabilité de donner les services sociaux
et psychosociaux aux clientèles que ce réseau-là dessert.
Ceci vise à faciliter pour les usagers l'accès aux services,
à mieux intégrer les programmes de services pour une
clientèle donnée et à responsabiliser les réseaux
d'établissements vis-à-vis des besoins sociaux. Nous savons tous
qu'actuellement, ce sont uniquement les CLSC et les actuels CSS qui
détiennent ces mandats. Et, en ce sens-là, la réforme
constitue un changement majeur pour toutes les catégories
d'établissements.
Pour les jeunes, les CSS se transforment en centres de protection de
l'enfance et à la jeunesse et se rapprochent des centres d'accueil pour
jeunes mésadaptés. La mission jeunesse des actuels CSS est
confirmée, et nous croyons que le rapprochement proposé est de
nature à consolider, en deuxième ligne, les services aux jeunes
en difficulté. Nous avons proposé cependant quelques
améliorations à la mission du CPEJ pour y inclure la dimension
familiale. Nous avons proposé aussi certains amendements à la
composition des conseils d'administration unifiés pour s'assurer d'un
respect des dynamiques en présence, tant celle des centres d'accueil que
celle des CPEJ ou des CSS transformés. Nous croyons aussi que pour
répondre vraiment aux besoins des jeunes en difficulté et de leur
famille, il faut renforcer, en première ligne, les services de base dans
les CLSC, de façon à éviter que trop de jeunes se
retrouvent en deuxième ligne en protection de la jeunesse ou sous la
couverture de la loi des jeunes contrevenants.
Nous souscrivons aussi à l'annonce qui a été faite
hier par le ministre, au moment du discours d'ouverture, quant à la
création sur l'Ile de Montréal d'un CPEJ anglophone avec un
mandat linguistique.
Pour les adultes et les personnes âgées. Les CSS
n'offriront plus aux adultes et aux personnes âgées les services
sociaux qu'ils offrent actuellement. Ce sont les nouveaux regroupements, CAH et
CHSLD, les centres de réadaptation et les hôpitaux qui, à
l'avenir, auront la responsabilité de répondre aux besoins
psychosociaux de ces
bénéficiaires. Les CSS transféreront à ces
réseaux de 30 % à 40 % de leur personnel pour que l'on assure aux
clientèles actuellement desservies le maintien de services
psychosociaux. Pour que tous les centres soient vraiment responsables de ces
services, nous avons proposé un ajout à la mission des
établissements, notamment à celle des centres hospitaliers,
c'est-à-dire un ajout concernant la dimension complémentaire que
devraient représenter les services psychosociaux à
l'intérieur de l'hôpital.
Nous considérons que la mission, à l'article 57, des CAH
et CHSLD, telle que présentée, correspond vraiment à notre
préoccupation et qu'on devrait appliquer la même logique aux
centres hospitaliers. Nous croyons que pour un grand nombre d'usagers des
hôpitaux qui reçoivent des services sociaux, pour les CSS qui ont
développé des programmes sociaux en milieux de santé, pour
les travailleurs sociaux que nous transférons et qui souhaitent
continuer à soulager les problèmes sociaux des personnes aux
prises avec un problème de santé, nous demandons que le centre
hospitalier soit responsabilisé formellement par rapport à la
dimension psychosociale et que, par la suite, le ministre signifie selon
quelles modalités il transférera l'ensemble des programmes, des
budgets et assurera l'encadrement de ces services.
Par ailleurs, le volume des personnes ayant besoin d'une réponse
sociale à leurs problèmes est croissant. On pense aux personnes
âgées, aux adultes en difficulté d'adaptation. Ces besoins
sont aussi de plus en plus diversifiés. Une partie d'entre eux ne
correspondent pas ni à l'une ni à l'autre des missions des
établissements telles que définies dans le projet de loi. C'est
pourquoi, pour ces usagers des zones grises, pour ces "entre deux chaises",
nous proposons que l'article 64 soit modifié pour permettre aux
régies de confier des mandats à des établissements pour
rendre les services nécessaires à ces clientèles. On pense
ici aux clientèles comme les itinérants, les
réfugiés, les adultes ayant eu des problèmes avec la
justice, les multi-handicapés qui sont autant de clientèles pour
lesquelles les missions, telles que définies, ne correspondent pas
parfaitement. Ceci pour les services sociaux jeunesse, adultes et personnes
âgées.
Pour les familles d'accueil. Les articles concernant les familles
d'accueil dans le projet de loi et autres ressources intermédiaires
méritent, à notre point de vue, des clarifications. Pour les
futurs centres de protection de l'enfance et de la jeunesse qui auront la
responsabilité des placements d'enfants, il est essentiel que le
réseau des familles d'accueil pour jeunes leur soit associé.
Recruter, évaluer, gérer, payer, contrôler,
développer, assurer une formation et un suivi des familles d'accueil
constituent des activités bien identifiées qui doivent continuer
à être regroupées au plan régional, et ce, en
fonction d'un meilleur service aux jeunes pour leur assurer une
disponibilité de ressources, une variété de ressources et
pour le maintien et le développement d'une banque de ressources de
qualité qui répondent à de hauts standards. On sait qu'un
placement, pour un jeune, c'est une mesure déchirante, lourde, qui doit
être prise quand aucune autre alternative n'est possible. Si on veut
arriver à en diminuer le nombre, à contrôler cette
activité, on doit s'assurer que la décision de placement, de
même que la banque de ressources soient développées et
gérées par le centre de protection de l'enfance et de la jeunesse
en deuxième ligne.
Pour les familles d'accueil aux adultes et personnes âgées
ou pour ce qu'il est maintenant convenu d'appeler les résidences
d'accueil, nous pensons nécessaire que les fonctions de recrutement et
de gestion de ces ressources puissent être confiées selon les
régions à un nombre limité d'organisations dans la
région. Et c'est en ce sens qu'on a proposé un certain nombre de
clarifications.
Troisièmement, le temps d'agir. On pense important de vous
sensibiliser. Le projet de loi prévoit des dispositions par rapport aux
ressources humaines. Pour nous, c'est une préoccupation importante, et
on pense qu'il est essentiel que le projet de loi soit adopté rapidement
et qu'un plan d'action soit déposé aussi rapidement.
Nous sommes le seul réseau où on transférera 30 %
à 40 % du personnel et des bénéficiaires. Notre
réseau aura besoin de savoir, pour ces gens-là qui seront
transférés, où ils vont, quand ils y vont et dans quel
genre de conditions ils y vont. Tout délai supplémentaire
à l'échéancier prévu est un facteur de
démobilisation et d'insécurité. En ce sens-là, pour
du personnel qui a à transférer, il nous apparaît important
que les choses se passent, et se passent dans les meilleurs délais.
Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme Denis. M. le
député d'Abitibi, Rouyn-Noranda, Témiscamingue en plus,
grande région. (16 heures)
M. Trudel: Merci beaucoup, mesdames, messieurs, d'abord d'avoir
accepté de vous regrouper à ce qu'on pourrait appeler la table du
"social". Ce n'est pas peu fréquent, alors on fait là, je pense,
un autre symbole, une autre démonstration que l'on peut compter sur la
complémentarité des intervenants dans le réseau de la
santé et des services sociaux. Il suffit d'installer seulement les bons
instruments et les bons canaux pour que ça se parte, et qu'on n'ait pas
besoin d'installer des barrières artificielles ou des
éléments bureaucratiques qui feraient en sorte que la
résultante serait peut-être l'inverse au niveau de la
réalisation des services à donner aux citoyens.
Évidemment, je commencerai par, tel que ça a
été dans l'ordre de présentation, une question à la
Fédération des CLSC. Le projet médical, je
comprends qu'exposé en deux minutes, ça ne donne pas tout
le spectre de ce que ça pourrait être. Ce que vous nous dites
essentiellement, c'est, en termes de médecine familiale: Nous, on est
capables de s'occuper de 20 % des activités d'un CSLC dans un
territoire. C'est ça comme objectif que vous vous donnez. Moi, j'irais
encore plus précis que ça, parce que je pense que tout le monde a
bien compris qu'avec la volonté que vous soyez effectivement la porte
d'entrée du système, bien il faut une clé, puis il faut
une porte, puis il faut être capable de l'ouvrir.
À combien estimez-vous vos besoins financiers? De quel ordre de
grandeur est le besoin financier des CLSC pour répondre à la
mission qui vous est donnée, à la mission modifiée que
vous nous avez suggérée, pour que vous soyez capables
d'accomplir, de réaliser les responsabilités qu'on a l'intention
de vous confier, et que ce ne soit pas que du vent là, mais que vous
puissiez la réaliser dans la réalité? C'est une question
de plus de 5 $.
Le Président (M. Joly): Qui prend la parole?
Mme Vaillant: C'est le cas de le dire, c'est une question de 1
000 000 $ ou de plusieurs millions.
Le Président (M. Joly): Mme Vaillant, voulez-vous vous
risquer?
M. Trudel: Ça, ça va être la
deuxième.
Mme Vaillant: Bon, écoutez, ce serait présomptueux
de notre part de vous dire qu'on a fait toutes les études
financières complètes et exhaustives. On n'a pas l'ensemble des
équipes techniques du ministère. On se comprend
là-dessus.
M. Trudel: On vous comprend.
Mme Vaillant: On va parler en termes de pourcentage parce que
parler en termes de millions, ça fausse, quant a moi, parce qu'on fait
partie d'un système. Actuellement, le budget des CLSC est autour de 4,9
% du budget global. C'est 500 000 000 $ sur à peu près 11 000 000
000 $, donc c'est à peu près 4,9 %, je vous dirais, sur une
trajectoire d'implantation de cinq ans avec des variables dans l'implantation
et dans le financement, et je vais donner des exemples.
Frais afférents à la pratique médicale. Si les
frais afférents sont financés à même les budgets de
la RAMQ, et qu'il y a des modifications et que les 600 médecins requis
sont financés, ça coûte à peu près 30 000 $
par médecin, vous avez là du financement pour cette
partie-là. Pour les autres services, de l'accessibilité 7 jours
par semaine - pas ouverture complète - avec écoute
téléphonique 24 heures par jour, 7 jours par semaine, et avec une
plage horaire exten-sionnée à tout le moins de 9 heures le matin
à 10 heures du soir, avec un développement des services à
domicile, je vous dirais que sur la trajectoire de cinq à huit ans,
probablement qu'on représenterait approximativement 10 %, je pense. et
je me fie sur le passé. au début des années quatre-vingt,
les clsc représentaient environ 100 000 000 $ dans l'ensemble, et on est
à 500 000 000 $ actuellement. pour atteindre cet objectif-là,
ça va nécessiter de l'argent neuf, mais ça va
nécessiter également, au fil des ans, certaines
réallocations de ressources, comme il s'en est fait dans le
passé. et pour faire ça, il faut échelonner ça sur
une trajectoire financière d'au moins cinq ans.
M. Trudel: Très bien. Il a été
mentionné quelque part, et on est en matière d'évaluation
de l'ordre de grandeur. Vous avez déjà dit à la
Fédération: Si nous voulons accomplir comme il le faut le mandat
qui nous est dévolu actuellement, on pense qu'il faudrait aller à
peu près à la hauteur - et corrigez-moi si mon chiffre est faux -
de 180 000 000 $ de réalignement financier pour accomplir ce qu'on
réalise et ce qu'on veut bien réaliser actuellement. C'est juste,
ce que je dis là?
Mme Vaillant: On a fait différentes études. 11 y a
les clsc sous-budgétisés qui ont été
implantés au début des années quatre-vingt et qui
nécessitent une révision, si on veut, des bases
budgétaires. donc, quand vous dites 180 000 000 $, ça
dépend de ce à quoi ça se réfère. parce
qu'on a également inclus le maintien à domicile. on
évalue, par exemple, le maintien à domicile, avec la
réduction du taux d'institutionnalisation et le haussement couplé
au vieillissement de la population, et le ministre l'a annoncé, à
200 000 000 $ au cours des cinq prochaines années. donc, je vous dirais
que, grosso modo, c'est évident que rapidement, si on veut que le virage
se fasse, il va falloir de l'injection, du financement pour la première
ligne. c'est clair, net et précis que pour rendre les clsc accessibles,
oui, il va y avoir nécessité d'un financement. maintenant, quand
je vous dis un ordre de 10 % sur cinq ans, ça vous donne une bonne
idée de la trajectoire financière.
M. Trudel: Très bien. Le ticket. Vous en avez
parlé. On en a parlé assez largement aussi dans les médias
d'information. Dans toutes les informations qui ont été
transmises depuis l'annonce du projet de réforme, vous avez dit
tantôt que vous avez encore des données plus précises. Dans
certains CLSC, vous avez eu des augmentations allant jusqu'à 30 % de
votre clientèle. Alors, est-ce que vous êtes en mesure maintenant
de dire ou d'évaluer que pour jouer le rôle de porte
d'entrée du système, on n'a peut-être pas besoin d'aller
imposer un ticket à
la salle d'urgence, pourvu qu'on ait un bon système d'information
qui dise aux citoyens, centre de la réforme, c'est à cet
endroit-là que ces problèmes-là se traitent? Est-ce qu'on
est obligé de mettre ça sur pied, ce système-là,
pour en arriver à ce que les CLSC jouent véritablement leur
rôle de porte d'entrée ou bien donc si on doit continuer à
dire: Ne misons pas sur la compréhension des gens, on va les mettre
à l'amende à la place?
M. Payette: La position de notre conseil d'administration a
été claire là-dessus. La Fédération des CLSC
est d'accord avec le principe de l'orientation de la consommation et d'avoir
des mécanismes qui vont favoriser cette orientation-là. Par
contre, nous pensons que ce n'est sans doute pas le moyen le plus
adéquat pour orienter cette consommation-là et qu'il faudrait
peut-être commencer par d'autres comme de l'information, une plus grande
accessibilité, une gamme complète de services. Des gens qui
changent de quartier et qui, en s'en allant dans un autre quartier, n'ont plus
les mêmes services, par exemple n'ont pas de services médicaux,
c'est clair qu'ils vont finir par se dire à un moment donné: Je
n'y vais pas parce que je ne sais pas ce qui m'attend. Donc, nous, on pense
qu'il y a des mesures incitatives qui pourraient produire les mêmes
résultats qui, au bout de la ligne, consistent à modifier les
comportements de consommation des citoyens sans nécessairement utiliser
un moyen comme le ticket orienteur.
M. Trudel: Très bien. Est-ce que, et très
rapidement parce que le temps est forcément très restreint, vous
ne trouvez pas que, pour un problème, pour traiter d'un problème
d'orientation du citoyen, on trace une si grande brèche dans
l'universalité du régime au Québec, dans
l'accessibilité, dans la gratuité du système? Est-ce que
le niveau de risque ne vous apparaît pas disproportionné par
rapport aux problèmes qu'on semble avoir d'être CLSC comme porte
d'entrée et, par ailleurs, pour faire en sorte qu'au-delà de 30
%, être vraiment au CLSC pour aller chercher les services qui se donnent,
les services de première ligne? Est-ce que ce n'est pas un prix trop
élevé, ça? Pas les 5 $, là.
M. Payette: On n'a pas évalué le niveau de risque
comme vous pensez qu'on aurait pu le faire. Mais nous, c'est l'objectif qu'on
vise. L'objectif, c'est que la consommation s'oriente, qu'H y ait une plus
grande orientation. Ce qu'on pense, c'est qu'il faudrait examiner un ensemble
de moyens et choisir parmi ces différents moyens celui ou ceux qui
paraîtraient des plus adéquats. Ce qu'on trouve, en tout cas,
dangereux, le ticket orienteur, c'est que si on ne fait pas en même temps
l'ouverture des CLSC, l'accessibilité, la gamme complète et
l'information, on va être dans un cul-de-sac.
M. Trudel: À l'Association des CSS, évidemment, la
grande question, une des grandes questions, c'est le maintien d'un niveau
d'intervention dans le social dans les établissements maintenant, les 40
% que vous avez identifié. Vous, est-ce que vous avez imaginé,
quand on considère ça comme important - et nous, on
considère ça comme important - comment on pourrait mettre des
verrous dans le système? Comprenons bien la mécanique, là.
Prenons un exemple très concret: pour ta partie en établissement
de santé, où maintenant on aura de» travailleurs sociaux
qui étaient auparavant dans les CSS, le risque est élevé.
Le risque est très élevé qu'en période de
compressions budgétaires qui ont comme caractéristique de se
présenter assez périodiquement, on dise: Bon, il vaut mieux
soigner celui ou celle qui est là, pour te mal de ventre qu'elle a,
qu'il a, et pour les travailleurs sociaux. Bien. Et c'est donc bien de valeur.
Où va-t-on mettre les verrous là-dedans pour ne pas retourner
à une situation que je pense qu'on a déjà connue au
Québec?
Mme Denis: Je vais le reprendre de deux façons. D'abord,
au niveau des centres hospitaliers comme tels, le rapatriement, ce qu'on peut
qualifier de rapatriement des travailleurs sociaux en milieu hospitalier, il
nous semble à nous qu'H doit y avoir deux approches. Une où
Idéalement dans la loi, dans la mission du centre hospitalier, il y ait
à titre de service complémentaire la reconnaissance de la
dimension des services sociaux d'incluse. Ça, c'est une chose, mais
c'est comme autre chose, même si c'est dans la loi, il nous
apparaît important que, lorsque les modalités de transfert seront
arrêtées, ce ne soit pas uniquement un transfert direct des
travailleurs sociaux vers les centres hospitaliers, mais qu'un certain nombre
de fonctions soit assumé. Par exemple, que les programmes qui ont
été développés, l'enveloppe budgétaire, la
protection de cette enveloppe budgétaire, de même que
l'encadrement de ces professionnels-là puissent être
assurés et avec des fonctions regroupées soit par la
Régie, soit par un hôpital qui aurait spécifiquement ce
mandat-là. Chez nous, en tout cas, ça nous apparaît,
ça, constituer des espèces de garanties qui permettraient que ces
programmes-là continuent de se développer, qu'il y ait une forme
de protection de cette enveloppe-là et que ces travailleurs sociaux
là soient bien encadrés. Effectivement, notre inquiétude
est à l'effet que les efforts qui ont été mis pour
préciser des programmes, pour travailler sur des priorités, pour
développer ces travailleurs sociaux là et les budgets
afférents, qu'il y a un risque à transférer aux
hôpitaux sans s'assurer que ces fonctions-là qu'on assume à
l'heure actuelle, qu'on a développées, soient reprises en charge
par ailleurs. Ça, pour les centres hospitaliers. Pour les autres
secteurs, particulièrement les CAH et les CHSLD, quand on regarde leur
mission telle
qu'elle est définie dans l'article 57, je crois, au niveau des
CAH et des CHSLD, qu'il est clair que, dans leur mission, il y a à la
fois la question des milieux substituts, et la dimension des services
psychosociaux. C'est vrai aussi dans le cas des centres de réadaptation.
Alors, il nous semble que, là, il y a, du fait de leur mission, une
garantie importante comme quoi ces dimensions-là seront prises en
charge. L'important aussi, à ce qui nous apparaît... Parce que
vous dites que c'est tentant, à un moment donné, ça peut
être tentant dans un contexte d'équilibre budgétaire, dans
un hôpital, par exemple, de dire: Bien, coudon, on va couper un certain
nombre de travailleurs sociaux en milieu hospitalier. Je pense que le
défi de la réforme est aussi de faire en sorte qu'au plan social,
on reconnaisse que, dans le fond, il y a des problèmes pour lesquels la
réponse doit être non seulement une réponse médicale
ou de santé, mais aussi une réponse sociale. Et je pense que
c'est le défi de cette réforme-là. (16 h 15)
M. Trudel: CPEJ. Est-ce que vous avez l'impression qu'avec ce qui
va être mis sur pied et de ce qu'on en connaît au niveau de
l'application... Ce n'est pas la question des listes d'attente en soi qui
m'intéresse, mais je pense qu'on peut dire qu'on a vécu certains
problèmes au niveau de la protection de la jeunesse, soit en termes de
signalement, d'évaluation ou de traitement. Puis je ne fais pas allusion
à la longueur des listes ni aux problèmes, etc., je veux dire: II
y a eu une situation d'exposée. Est-ce que vous pensez clairement
qu'avec la mission qui va vous être impartie, les responsabilités
qui vont vous être imparties, on va pouvoir en arriver à avoir une
bien meilleure adéquation entre ce qui semble être les besoins
manifestés et la capacité de réponse qu'on a actuellement?
Est-ce qu'on va augmenter, en clair, une meilleure capacité de
réponse en matière de protection de la jeunesse avec la mission
et les responsabilités que vous aurez maintenant?
Mme Denis: Moi, je pense que c'est oui, à deux conditions.
D'abord, le rapprochement avec les centres d'accueil est important dans ce
contexte-là, parce que le placement d'un jeune en centre d'accueil, le
jeune qui arrive en centre d'accueil est nécessairement placé par
la protection de la jeunesse ou la loi des jeunes contrevenants. Donc, il y a
là, en termes de rapprochement, des efforts à faire de mieux
consolider les programmes et de mieux s'utiliser mutuellement pour offrir les
services. Mais ça, c'est, je dirais, je ne sais pas si c'est en aval ou
en amont, mais, en tout cas, ça me paraît être une condition
importante pour que, globalement, pour les jeunes qui sont en
difficulté, notre réseau jeunesse de deuxième ligne soit
mieux capable de répondre. En aval - je n'ai pas fait de bateau souvent,
mais en tout cas - je dirais cependant que ce qui est majeur pour qu'on ne
reproduise pas le phénomène de l'attente à l'entrée
en protection de la jeunesse, c'est qu'on puisse retrouver en CLSC,
effectivement, des services de base adéquats pour les jeunes et leur
famille. Je vais vous donner un exemple. Chez nous, l'année
passée, sur 56 000 signalements, il y en a 20 000 qui n'ont pas
été retenus, O.K.? Qu'est-ce qu'on dit à ces
gens-là? On dit à ces gens-là que leur signalement n'est
pas retenu, qu'on peut les référer. On les réfère,
mais quand les gens vont cogner aux portes... Puis il faut bien voir qu'un
signalement, c'est un tiers qui le fait, ce n'est pas la personne qui appelle
pour dire: J'ai besoin d'aide. C'est quelqu'un qui appelle pour dire: J'ai vu
une situation. Qui, finalement, après une rapide évaluation,
s'avère non fondée. Cependant, ces gens-là ont souvent
besoin d'aide. Quand on les réfère au CLSC, par exemple, il faut
que le CLSC soit en mesure de leur donner le service, autrement le risque qu'on
prend, c'est que six mois après, la situation s'est
détériorée, et il revient par la protection de la
jeunesse, et là, on n'a pas le choix parce que le signalement est
fondé, on doit le retenir. Je dis que, pour que ce
système-là soit à son optimum, il faut qu'on
intègre bien les services de deuxième ligne ensemble, qu'on
consolide les programmes, puis il faut qu'à la base les citoyens
trouvent à l'intérieur des CLSC, qu'on puisse
référer aux CLSC des situations pour lesquelles ce n'est pas une
intervention de deuxième ligne qui est nécessaire, mais bien un
service au jeune et à sa famille.
M. Trudel: Montréal, un peu, parce qu'on ne sait pas
grand-chose de Montréal. Dans ce projet de loi là, on ne sait pas
trop. Il y a un article qui permet au ministre, lui, de tout faire, mais pour
ce qui est du Parlement, il n'y a pas grand-chose. On a un petit bout de plus
depuis hier. Un petit bout de plus, vous avez dit: On est d'accord, nous, un
CPEJ pour la communauté anglophone puis un autre pour la
communauté francophone. Et là, il s'est glissé - parce que
le ministre n'a pas encore déposé ses amendements,
peut-être que la question est superflue, je ne le sais pas, c'est une
question de temps avant qu'il ne dépose ses amendements, j'imagine -
hier, et on ne sait plus si c'est du ministre ou de son adjoint, des services
également ethnoculturels, aux communautés ethnoculturelles.
Est-ce que vous voyez ça dans le système, sur me de
Montréal, compte tenu de l'expérience que vous avez comme
regroupement des centres de services sociaux, qu'on doive, disons,
élargir, peut-être la création en vertu de l'article 95,
à autant de centres qu'il y aurait de besoins en termes de
communautés ethnoculturelles, sur l'île de Montréal, par
exemple?
Mme Denis: Ce que j'ai compris. Écoutez, je n'étais
pas là moi, hier...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Je sais qu'on fait de l'interprétation tous les
deux, mais il n'en tient qu'au ministre de se préciser par ailleurs.
Mme Denis: Non, mais j'ai effectivement pris connaissance du
discours d'ouverture de M. Côté. Ce que j'ai compris, c'est un
CPEJ anglophone avec mandat linguistique; je n'ai pas compris cependant que
c'était automatique, un CPEJ francophone. Mais là,
peut-être que j'ai mal compris. Moi, dans mon esprit, à date, en
tout cas, à moins que vous ne m'indiquiez le contraire, à date,
ce qui est assuré, c'est un CPEJ qui va être propose comme
amendement, un CPEJ anglophone, et, en vertu de l'article 95, la régie
régionale aura à faire une proposition au ministre sur
l'organisation des services sur 111e. C'est ma compréhension à ce
moment-ci.
En ce qui concerne la dimension qu'on appelle maintenant ethnoculturelle
- j'imagine que c'est ce qu'on appelait avant socioculturelle, quelque chose
comme ça - ce que je veux dire, c'est que pour nous, comme
réseau, il est certain qu'on ne doit pas, je pense, créer pour
chacune des communautés des institutions spécifiques. Je pense
que l'objectif, comment dirais-je, d'intégration des services et de
disponibilité des services, on doit s'assurer qu'à
l'intérieur des institutions existantes ou en développement, on
assure à l'ensemble des communautés un accès et qu'on soit
capable de répondre à leurs besoins, que ce soit pour des
communautés italiennes, pour des communautés grecques, pour toute
communauté habitant sur l'île de Montréal. Je pense que
ça, pour moi, ça me semble être... Et les centres de
services sociaux se sont dans le temps ajustés à cette
réalité montréalaise aussi comme les autres
catégories d'établissements se sont ajustés à cette
réalité montréalaise de façon à être
capables de desservir l'ensemble des communautés. La dimension,
cependant, qu'il faut probablement assurer et c'est un peu comme ça que
j'avais compris l'approche proposée hier par rapport à la
dimension ethnoculturelle, et je me réfère au CSS juif à
la famille où voilà une communauté qui est
déjà dotée d'un certain nombre d'institutions pour
lesquelles, je pense, il y a aussi des efforts à faire pour que les
acquis qu'ils se sont donnés, leur capacité de spécialiser
leurs services en fonction de leur communauté, bien qu'on s'assure
quelque part que ces services-là puissent continuer à leur
être rendus surtout quand on pense que, pour la communauté juive,
par exemple, 75 % de la clientèle du CSS juif à la famille
à l'heure actuelle, ce sont des adultes et des personnes
âgées parce que la communauté, leur population
démographiquement... Alors, moi, c'est comme ça que j'avais
compris ça. Je me dis: Si c'est ça, je pense qu'il est possible
d'envisager qu'un ou des CPEJ - il y en aura des, de toute façon, sur
111e, au minimum, un anglophone et, j'imagine, au minimum, un francophone -
assurent l'ensemble des services à l'ensemble des communautés en
ce qui concerne la jeunesse.
M. Trudel: ii ne reste pas beaucoup de temps.
Le Président (M. Joly): II reste une minute, tout
juste.
M. Trudel: Écoutez, c'est bien de valeur, mais je pose
quand même la question et vous pourrez glisser vos réponses
ailleurs.
Une voix: Sur mon temps. M. Trudel: Sur son temps. Une
voix: II est généreux.
M. Trudel: Écoutez, nous recevons le message. Ça
m'a l'air d'être comme le constitutionnel, cette affaire-là. C'est
qu'il faudrait aller vite pour boucler ça. On serait quasiment d'accord,
mais faire les deux en même temps, par exemple: et sur le constitutionnel
et sur santé et services sociaux. Mais nous pensons... Par ailleurs,
c'est une remarque de contenu parce que, du côté de l'Opposition,
on a aussi un rôle à jouer là-dedans. Et, oui, on l'a
assurée, notre volonté pour mener à bien ce
projet-là, mais pas au prix d'aller vite pour aller vite. Ça ne
se passera pas comme ça.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le
député.
M. Trudel: On va regarder... Je m'excuse, M. le Président,
je pense que, ce matin, j'ai été tolérant et si le
ministre donne son accord...
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
Le Président (M. Joly): Sur le temps du ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Ne vous choquez pas, on va
vous retrouver dans le réseau.
Des voix: Ha, ha, ha! M. Trudel: Ça va?
Le Président (M. Joly): Alors, sur le temps du ministre.
Si le ministre est d'accord.
M. Trudel: Là-dessus...
M. Côté (Charlesbourg): Le ministre est bien
généreux.
M. Trudel: ...pour qu'on soit bien clairs, nous allons prendre le
temps nécessaire pour
regarder article par article, y compris les changements essentiels que
vous réclamez - je pense, par exemple, au niveau des missions -
paragraphe par paragraphe, phrase par phrase parce que nous sommes à
travailler sur une politique qui va affecter tous les citoyens et citoyennes du
Québec pour de très longues années à venir. On va
prendre le temps. Mon observation, c'était qu'on semble un peu
exaspéré par le temps que ça prend à finir les
opérations en l'absence même d'une politique de santé et de
bien-être parce que, nous, on n'achète pas encore, loin de
là, la vision du ministre qui dit: Essayez de m'expliquer en quoi
ça changerait l'outil, la mécanique, en l'absence d'une politique
de santé et de bien-être qui, elle, va venir plus tard. Ce matin,
il disait: Au début de juin. Nous, on n'est pas encore d'accord avec
cela parce que, si un des éléments fondamentaux de la politique
de santé et de bien-être, c'était, par exemple, de
travailler sur les causes par la lutte à la pauvreté, ça
ne veut pas dire la même chose pour vos institutions, ça ne veut
pas dire la même chose pour les intervenants dans le réseau. Ma
question à laquelle vous pourrez essayer de répondre, c'est:
Comment faire ça le plus adéquatement possible, puisqu'on est
dans ce circuit-là, sans politique de santé et de
bien-être? Merci, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député.
M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Mon cher ami,
l'excédent du temps que vous avez utilisé pourrait mener à
un débat très intéressant, surtout avec le niveau que vous
avez acquis dans le réseau de l'éducation. Donc, comme recteur,
on pourrait avoir un débat très élevé. Je suis
très très heureux de saluer la présence de deux groupes
extrêmement importants au niveau du réseau, qui ont offert une
collaboration - si je disais sans limite, on pourrait se retrouver à une
émission du vendredi soir, ça pourrait prêter à
confusion - qui ont joué des coudées franches, du début de
l'opération et encore aujourd'hui, ayant comme objectif premier celui du
citoyen. C'est l'esprit de la réforme, et je tiens à vous le dire
de manière publique. Et ça, finalement, je pense que c'est tout
à l'honneur du travail que vous avez fait.
Je vais commencer par quelques petites questions au niveau des CLSC.
Vous ne serez pas étonnés de ma question, je suis convaincu de
ça, pour tenter de comprendre parce qu'il y a des interventions qui sont
bonnes, sur lesquelles je vais passer parce que les papillons vont
régler un certain nombre de problèmes, comme on l'a dit
tantôt. Cependant, dans votre première intervention, vous avez
parlé de la mission des CLSC, ça m'apparaît
extrêmement important de discuter. Je souhaiterais avoir un petit peu
plus d'explications sur le sens que vous donnez, puisque l'article 54 du projet
de loi dit: "54 La mission d'un centre local de services communautaires est
d'offrir à la population du territoire qu'il dessert des services de
santé et des services sociaux courants, de nature préventive,
curative, de réadaptation ou de réinsertion."
Donc, pour nous, ça me semblait couvrir ce que vous souhaitez
comme amendement, puisque vous nous parlez d'inclure la notion de services
médicaux de base. Quelle distinction faites-vous entre des services de
santé courants et des services médicaux de base? Je veux
être capable de bien saisir la distinction entre les deux, parce que,
pour moi, ça nous semblait être plus large en termes de
couverture, ce que nous avons dans la loi que ce que vous nous proposez,
à moins que j'aie mal compris. Je ne demande pas mieux que de me
corriger si tel était le cas.
Le Président (M. Joly): Mme Vaillant.
Mme Vaillant: Là-dessus, M. le ministre, ce que vous
avancez au niveau des services de santé, ce pour quoi nous demandons
d'ajouter, y compris les services médicaux, c'est pour être bien
sûr que, dans la gamme des services de santé, il va y avoir, dans
l'ensemble des CLSC, des services médicaux. Effectivement, quand on
parle de l'ensemble des services de santé, les services médicaux
peuvent être compris. On y mettait un accent particulier pour bien
indiquer l'importance de s'assurer finalement que la couverture
médicale, les services médicaux vont également se faire en
CLSC, qu'il va y avoir également des services médicaux en CLSC.
Je pense que le Dr Rodrigue aurait quelque chose à ajouter
là-dessus.
M. Rodrigue (Jean): Oui. Vous aviez parlé, lorsque vous
avez déposé le projet de réforme et le projet de loi, que
vous étiez ouvert aux avis sur le comment. Ce qui nous a frappés
dans la lecture de votre projet de loi, c'est qu'au niveau des services
médicaux de première ligne, le comment, c'était surtout
les cabinets agréés et ce n'était pas beaucoup les CLSC.
Dans le projet de réforme aussi, il y avait une espèce
d'équivoque sur les services médicaux en CLSC qui devaient
être, à toutes fins pratiques, une espèce d'appoint aux
services médicaux en cabinet privé. Ce qui nous apparaissait
important de vous dire aujourd'hui, c'est qu'au niveau du comment, si vous
voulez effectivement que les CLSC remplissent leur mission, il doit y avoir une
masse critique de médecins à l'intérieur de ces CLSC avec
une structure médico-administrative précise. Ces médecins
doivent être formés dans une équipe comme telle pour
être capables d'offrir des services de façon globale, continue et
si possible, nous l'espérons, intégrée avec les autres
ressources du réseau. Donc, c'est beaucoup plus au niveau du comment
qu'il nous apparais-
sait important d'insister sur le fait de dire: Si effectivement vous
voulez qu'on remplisse cette mission-là, ça prend des
médecins dans les CLSC, pour pas très cher. (16 h 30)
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rodrigue (Jean): Dans le fond, si vous calculez, si les
médecins vont dans le secteur privé, il y a quand même
d'ajouter qu'ils vont gagner le revenu moyen brut.
M. Côté (Charlesbourg): Être sûr que
ça n'attirerait pas les débats, je demanderais à Augustin
de répliquer tout de suite.
M. Rodrigue (Jean): On connaît les impressions du Dr Roy
sur les CLSC et sur les médecins de CLSC.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Je ne veux pas mettre la
chicane...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Vous avez une
deuxième interpellation qui demande au niveau de l'action communautaire.
Pour vous, elle n'était pas très présente dans le projet
de loi 120, article 54, et vous demandez certaines précisions à
ce niveau-là. Je vais vous poser ma question. Vous connaissez ce que je
pense, vous savez ce que j'ai déjà dit, donc toutes les mises en
garde sont fartes quant à la réponse que vous pourriez me donner,
mais vous donnez la réponse que vous pensez que vous devez donner.
L'approche communautaire. C'est quoi, pour vous, l'approche
communautaire? Et je vais même aller plus loin que ça. Combattre
le chômage, pour vous, est-ce que c'est de l'approche communautaire?
M. Payette: Je suis un défenseur de l'approche
communautaire en CLSC, M. le ministre. J'aimerais prendre un exemple: lorsque
nous travaillons avec les familles pour le maintien à domicile. Quand on
dit qu'on a une approche communautaire pour favoriser le maintien à
domicile, ça veut dire qu'on ne fera pas uniquement un travail
auprès des personnes qui ont besoin de rester à domicile, mais
qu'on va aussi s'arranger pour faciliter une participation de la
communauté pour soutenir. On sait très bien comment c'est
important pour une famille, une personne âgée, par exemple, une
personne handicapée, qui veut demeurer à domicile, de pouvoir
avoir un soutien social, un soutien communautaire.
Je pense que les organisateurs communautaires des CLSC qui vont aider
à ce que le voisinage, la famille, la communauté puissent
apporter ce support-là, ce sont des gens qui travaillent avec une
approche communautaire. Bon. Votre deuxième question. Je ne pense pas
que, quand je dis "action communautaire", il soit question de lancer une guerre
contre la pauvreté et de faire des actions qui sont dans ce
sens-là. On a actuellement un comité de travail qui essaie de
cerner ce en quoi devrait consister l'action communautaire en CLSC, et, dans le
moment, ce n'est pas ce sens de mflitantisme politique qu'on va donner à
l'action communautaire.
Mais on pense quand même que l'action des CLSC peut se faire aussi
bien auprès des individus, auprès des groupes et auprès
des communautés aussi. Je pense que les CLSC jouent un rôle
important dans ce que j'appellerais le dynamisme des communautés
locales, et c'est ça, notre approche communautaire. Peut-être que
Marcel aurait des choses à ajouter là-dessus.
M. Sénéchal (Marcel): Peut-être pour
compléter rapidement. On a un peu l'impression que c'est le
ministère qui va nous demander, qui va demander aux CLSC de faire aussi
de l'action communautaire. Je me réfère ici aux travaux
importants qui ont été faits par le ministère sur la
promotion de la santé, où on identifie l'action communautaire
comme étant une stratégie importante de la promotion de la
santé et qui identifie également les CLSC comme étant les
acteurs locaux en promotion de la santé. À ce niveau-là,
nous, on se dit: Tant qu'à l'avoir - parce que de toute façon, et
le ministère et des départements de santé communautaire
vont demander qu'on s'associe à eux quant à certaines actions -
tant qu'à l'avoir, il faut bien la cerner, il faut la baliser, il faut
se donner des conditions pour que ça se fasse correctement. Mais on
pense toujours que l'action communautaire, à un certain niveau, est un
élément important de la mission des CLSC.
M. Côté (Charlesbourg): Nous sommes satisfaits parce
que c'est mieux balisé, de ce que je comprends, et moins ouvert sur le
monde, l'immensité. Vous avez davantage tenté de répondre
à une de vos demandes. Vous avez évoqué tantôt
santé au travail, régie régionale. J'ai toujours
tenté d'être le plus clair possible, je vais tenter de continuer
de l'être, même si je ne le suis pas toujours suffisamment à
la volonté de l'Opposition. Évidemment, quand on est dans
l'Opposition, on en demande toujours un peu plus, c'est normal. Il est clair
pour moi qu'il faut aller le plus loin possible comme message aux régies
régionales, y compris dans la loi, qu'elles n'ont pas à dispenser
des services, point, "pe-riod", à la ligne. Ça ne peut pas
être plus clair que ça. Évidemment, lorsqu'on parle des
départements de santé communautaire où on va rattacher
l'autorité aux régies régionales, il n'a jamais
été question de rattacher le personnel aux régies
régionales pour dispenser des services.
Ces travailleurs-là vont demeurer à l'intérieur
d'un certain nombre d'établissements du réseau, puis dans
certains cas, même peut-être dans la plupart des cas, là
où ils sont actuellement, dans la mesure où il y a
restructuration. C'est l'autorité administrative qui est
rattachée, sans pour autant que la régie dispense des services.
C'est une chimie qui n'est pas toujours très facile puis qui peut porter
à interprétation, mais on va être à l'écoute
de ceux qui veulent faire en sorte qu'on puisse baliser un certain nombre de
choses à ce niveau-là pour que le message soit clair, très
très très très très très très
très clair. En tout cas, le message est clair, mais il s'agit que ce
soit bien clair dans l'application. M. le Président, le ticket
orienteur, c'est le jouet de mon ami Trudel, on ne peut pas lui donner plus de
vertus qu'il n'en a. Et j'ai toujours répété puis je vais
continuer de le dire: II y a une distinction fondamentale entre ticket
modérateur et ticket orienteur. Le ticket orienteur vise à faire
en sorte que des individus aillent chercher des services là où
ils sont disponibles, donc accessibles et gratuits. Tant mieux si juste le fait
d'en parler dans la réforme vous a amené de l'achalandage
additionnel de 15 %, 20 %, et de 30 % dans certains cas. C'est la
démonstration évidente que c'est possible, puis que ça
peut se faire, puis qu'il y a du monde qui allait là où ils ne
devaient pas aller. Ça doit vous occasionner certains problèmes.
Puis tout ce service-là a été donné au monde sans
une cenne additionnelle. N'est-ce pas extraordinaire de voir ce qu'on peut
faire avec ce réseau-là?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Bon. À partir de
ça, le ticket orienteur vise donc...
M. Trudel: ...c'est en conclusion, ça.
M. Côté (Charlesbourg): Le ticket orienteur vise
donc à orienter les gens aux bons endroits ou à des endroits
alternatifs qui ne leur coûtent rien, qui sont accessibles. Je l'ai dit:
Je ne veux pas une cenne. Je n'en veux pas. Je ne suis pas
intéressé à avoir une cenne, et on aura atteint notre
objectif la journée où on aura collecté zéro sou du
ticket orienteur parce que les gens seront allés aux bonnes places.
Évidemment, pour ceux qui sont plus tatillons, ils y voient une mesure
tatillonne. Ça va avec l'esprit que tu as, ça.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Et dans la mesure
où...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Je ne voudrais pas voir
cette mesure-là entre les mains du Dr Trudel, ça serait
dangereux. Donc, ce n'est pas ça qui est l'objectif, c'est clair. Donc,
il y a une distinction fondamentale, alors que le ticket modérateur vise
une modération et vise une participation financière de tous les
individus, peu importe leur capacité de payer, et pour tous les
services. Donc, ça me paraît être assez clair pour celui qui
veut comprendre. Vous m'indiquez mon temps, M. le Président,
là?
Le Président (M. Joly): Oui, monsieur. Oui, M. le
ministre, il vous reste 10 minutes.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Une amende de cinq
piastres. Donc, ça me paraît très clair.
L'impôt-services, c'est un autre débat et c'est d'un autre ordre.
Je l'admets volontiers que c'est définitivement d'un autre niveau de
discussion. Évidemment, c'est une question fondamentale sur le plan de
la capacité de payer et des revenus, et on en discutera en temps
opportun, mais il y a une distinction pour moi très nette entre les deux
mesures. Merci.
Les CSS. Je ne sais pas si je me trompe, mais mon appréciation de
ce qu'est aujourd'hui notre système et ce qu'il sera demain, c'est que
probablement les CSS seront les plus touchés. Un peu partout ailleurs,
on peut dire aux CLSC: reconnaissance d'un rôle mieux campé avec
des additions. On peut dire aux centres d'accueil et d'hébergement: une
mission encore mieux campée, avec des additions. On peut faire le tour
d'à peu près tout le réseau de cette
manière-là. Les départements de santé
communautaire, sur le nombre, il y a aussi des transformations assez
importantes. Mais il n'y a pas aucune structure comme les CSS qui sont
touchés de la manière... On va le faire de manière
substantielle. Vous l'avez évoqué tantôt, lorsqu'on parte
de 30 % des gens qui pourraient éventuellement changer de patron, c'est
majeur dans une réforme, si on touche des individus. Et à ce
niveau-là, je veux redire publiquement à l'ensemble des gens qui
ont représenté des CSS et en particulier à Mme Denis, que
j'ai retrouvé chez vous un très haut niveau de
responsabilité et que c'a été d'abord et avant tout la
personne qui a été l'objet de vos préoccupations et non
pas les postes ou l'ampleur du domaine que vous aviez géré.
Ça, je pense qu'on ne le dira pas assez souvent, et je vous en
félicite. Je pense qu'au bout de la ligne, c'est les jeunes qui seront
les gagnants de cet exercice-là. Vous en avez discuté avec le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue tantôt, il y
aura des changements profonds, que ce soit certains tranferts de
responsabilités aux CLSC en milieu scolaire, certains transferts de
responsabilités à nos nouveaux centres d'hébergement pour
les adultes. Il y aura une nouvelle vocation centre hospitalier avec les
travailleurs sociaux, des choses à redéfinir. Pour chacune de ces
catégories, quels sont les écueils qu'il faut éviter?
C'est une question très large. Mais, au moment où on
s'apprête à faire un certain nombre de choses, je pense que si on
veut faire les choses de la bonne manière, votre expérience doit
certainement nous permettre de tenter de voir où sont les écueils
puisque... J'ai oublié de le dire, mais lorsque vous avez parié
d'aval et d'amont empruntant les voies maritimes, je me suis aperçu que
mon message de Gaspésien en empruntant la voie maritime passait et que,
donc, le courant passait, ce qui est merveilleux. Le courant est source
d'oxygène, à tout le moins pour le saumon, et je n'ai pas besoin
de vous rappeler de quelle race est le saumon, une race très
fière et qui a une survie tout à fait exceptionnelle.
Mme Dente: D'abord, un premier élément. J'imagine
probablement pour les régies, je pense qu'il y aura des messages qui
devront être clairs. Il va falloir, pour le transfert, évaluer
comment on fait ça: Est-ce qu'on fait ça à un jour J ou
est-ce qu'on fait ça par étalement? Je pense qu'il y a là
une question d'approche, puis je parlerai après des receveurs, mais
ça, par rapport au départ, l'image qu'on a à l'heure
actuelle, c'est que probablement il vaudra mieux faire ça à un
jour J. Pour donner un exemple puis dans les échanges puis c'est encore
en discussion, je pense bien, mais dans les échanges qu'on a avec les
CSS, par exemple si demain matin on transférait les travailleurs sociaux
en milieu hospitalier mais que le secteur des ressources adultes, des personnes
âgées, n'était pas transféré, on a comme un
problème parce que c'est comme des vases communicants à l'heure
actuelle. Les travailleurs sociaux en milieu hospitalier vont chercher dans le
bassin de ressources la famille d'accueil nécessaire pour sortir la
personne âgée de l'hôpital. Donc, il faut s'assurer qu'en
termes de "timing", je dirais, il y a la meilleure stratégie; c'est
peut-être un jour J, mais je dis: À bien l'évaluer.
Ça, ça me paraît être un premier
élément. Deuxième élément, c'est les
receveurs. Excusez l'expression, je suis rendue dans le baseball. Au niveau des
receveurs, moi, je pense qu'il est important que les futurs regroupements, CAH,
CHSLD, comme les centres de réadaptation qui recevront ces travailleurs
sociaux campent bien dans leur nouvelle mission la dimension des services
sociaux et que rapidement, une fois les amendements connus à la loi, une
fois la loi adoptée, ces partenaires puissent s'asseoir et commencer
à regarder comment les choses se passeront et comment les services
s'intégreront dans la nouvelle mission. Donc, si ça, ça ne
se passe pas, là on a des écueils importants. Je vais vous donner
un exemple: II y a une région où le CSS à l'heure actuelle
est en discussion avec le centre d'accueil pour déficients
intellectuels. Ils ne sont pas en discussion sur des protocoles de relations du
travail, des choses comme ça, ils sont en discussion autour des
programmes de services pour que les travailleurs sociaux, qui sont actuellement
au CSS mais qui s'en iront dans ce centre-là, sachent dans quel amalgame
de programmes ils se retrouveront. Ça, c'est le fondamental; le reste,
ça sera instrumental, après, de savoir si ça prend un
protocole de transfert en termes de relations du travail. Le fondamental, c'est
que les gens retrouvent le service qu'ils donnent dans une nouvelle
organisation. Donc, un écueil à éviter, c'est de commencer
à penser en termes de protocole de relations du travail avant d'avoir
pensé en termes de définition de services. (16 h 45)
Et c'est un appel aussi, je dirais, qu'il faut faire aux autres
réseaux, de s'asseoir avec les actuels CSS et de préparer la
définition de ces services-là. Je pense qu'avec ça, on
risque d'éviter des écueils et de s'assurer l'objectif qu'on vise
qui est que les services dans les réseaux soient mieux
intégrés. J'ajouterais aussi un élément qui va
peut-être sembler très instrumental. Je vais vous donner un
exemple. Ce n'est pas parce que le CSS va se départir de 30 % de son
personnel que son vérificateur va lui coûter 30 % moins cher.
Alors, je dis: À ce niveau-là, de ce que j'appellerais
l'infrastructure des organisations, il y a des précautions à
prendre avec les régies, et je pense que, sûrement, elles auront
un mandat de regarder ça pour qu'on ne fasse pas une coupure directement
proportionnelle dans l'infrastructure au personnel qui part. Et je dis:
Ça, ce serait un écueil aussi parce qu'il y a certaines
dépenses fixes - je donne le vérificateur, c'est un bel exemple,
mais il y en a d'autres aussi - mais que ça, on le regarde. Que les
régies aient, pour ce faire, un certain nombre de règles du jeu.
Je vous dirai aussi, M. Côté, et c'est un élément
important: Autant les régies doivent avoir des marges pour bien
définir l'organisation des services dans leurs régions, autant
elles doivent avoir des balises claires pour le faire. Ça, ça me
semble être l'autre... Je pense qu'il faut éviter d'uniquement
dire: Allez, procédez. Il faut donner des balises. Que ce soit sur les
"timings", que ce soit sur... Il faut donner des balises, mais, après
ça, laisser un travail se faire en région. En tout cas,
spontanément, je ne sais pas si mes collègues...
M. Perreault (Jacques): Moi, j'aimerais ça
compléter. Je suis dans un CSS et j'aimerais ça compléter
en vous disant ce que j'entends sur le terrain. Ce que j'entends sur le
terrain, c'est deux types de préoccupation. Une préoccupation
clientèle et une préoccupation humaine et personnelle. La
préoccupation clientèle que j'entends, si je prends l'exemple des
services sociaux hospitaliers, c'est de dire: On est regroupés dans un
établissement CSS - et je ne prône pas pour que le regroupement
reste là, ce n'est pas ça - mais on est regroupés, on
partage des expertises, des expériences, on partage un
cadre, on se forme ensemble, etc. J'ai peur, quand je vais être
tout seul dans mon hôpital à Brome-Missisquoi sur mon demi-poste,
d'être isolé, d'être seul et de ne pas évoluer sur le
plan clinique et professionnel, donc de me scléroser en termes de
services à ma clientèle. Ça, c'est un langage que
j'entends. Je pense que les gens souhaitent que, sous une forme ou sous une
autre, soit au niveau de la régie ou au niveau d'un hôpital
sous-régional ou régional, ce regroupement-là continue
d'exister parce qu'il a permis des choses. Je pense qu'on souhaite dans la
réforme qu'il y ait un décloisonnement entre les hôpitaux,
entre les différents établissements. Je pense qu'il pourrait y
avoir un décloisonnement entre les hôpitaux entre eux et qu'un
hôpital gère, au niveau régional ou sous-régional,
les services sociaux, et on garderait les acquis du passé par rapport
à ça. Un autre exemple de ce que j'entends par rapport aux
services à la clientèle ou à la préoccupation
clientèle, c'est de dire: le fonctionnement que la réforme
propose, met de l'avant, c'est un fonctionnement par clientèle. Les
jeunes, les déficients, les handicapés physiques, etc. Nous,
comme on est une espèce de carrefour. J'ai envie de dire: Des fois, on
est une poubelle aussi, et on reçoit toute la clientèle qui ne
fitte pas nulle part. Des déficients mais qui ont aussi des troubles de
comportement, ou qui prennent un coup ou de la drogue, ou qui ont des
problèmes de santé mentale, ou des mésadaptés
sociaux qui émanent de la justice. Comme c'est un fonctionnement par
clientèle, les intervenants sur le terrain ont la crainte qu'il y ait de
la clientèle entre deux chaises. Et ça, je pense qu'on l'a dit
à plusieurs reprises dans des rencontres à la commission
parlementaire, c'est une préoccupation dont le plan d'action ou
d'implantation va devoir tenir compte. Le risque, quand on se spécialise
par clientèle comme ça, il est là, et ça va
être facile qu'on se garroche la balle, parce qu'il sera plus jeune ou
parce qu'il n'aura pas tel ou tel problème. Une autre chose que
j'entends sur le terrain, c'est le problème relié au personnel.
Les gens disent: Étant dans un établissement régional,
j'ai la chance d'avoir une certaine mobilité. Je peux aller en
protection, je peux aller dans les services sociaux hospitaliers, je peux aller
dans les adultes ou les personnes âgées. À partir du moment
où je suis affecté à un établissement en
déficience intellectuelle, est-ce que ça veut dire que je vais
être pris pour faire ma vie en déficience intellectuelle? Sinon je
vais tout perdre mon ancienneté si je veux aller ailleurs. Ma
personne...
Le Président (M. Joly): Je vous inviterais à
conclure, M. Perreault, s'il vous plaît.
M. Perreault: ...de Brome-Missisquoi, elle se voit
confinée à cet hôpital-là si on ne se
préoccupe pas qu'il y ait des règles de mobilité du
personnel. Et je pense que ça fait partie de la philosophie de gestion
des ressources humaines qu'on trouve dans la réforme.
M. Côté (Charlesbourg): Je sais, M. le
Président, que vous avez déjà interpellé. Je vais
juste indexer le temps que mon collègue a pris tantôt. Très
rapidement...
Le Président (M. Joly): Vous marchez sur une
réserve.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Très rapidement,
pour tenter de répondre à certaines interrogations. Si on peut le
faire maintenant, autant le faire, et je suis sûr que vous allez
être des interlocuteurs très valables auprès de vos
commettants.
Il n'est absolument pas question qu'on cautionne en aucune
manière l'éparpillement. L'encadrement est absolument
indispensable pour l'individu, mais aussi pour le bienheureux qui va recevoir
les services. Alors, à partir de ce moment-là, il n'est pas
question d'éparpillement; il y aura d'ailleurs ce qu'il faut pour
être capable de se prémunir contre ce genre d'intervention
là. Des clientèles entre deux chaises, il en existe
déjà aujourd'hui, et on se retrouve malheureusement avec des
situations comme celles-là qui ont été
dénoncées par vous et d'autres et qu'il faut tenter
d'éviter.
Quant à la préoccupation qui était celle de dire:
Écoutez, à partir du moment où tu transfères 30 %
de ton personnel, est-ce que ça veut dire que 30 % du budget du
vérificateur va suivre? J'ai à l'esprit, je le prends comme
ça au hasard, l'exemple de Louis-Hippolyte-Lafontai-ne - par hasard, il
y a des événements qui nous permettent de nous rafraîchir
l'esprit - où il y a eu désinstitutionnalisation, et il y a eu
des méthodes qui ont été appliquées, et puis je ne
suis pas sûr que finalement, après tout ce que j'ai vu et qui
n'est pas nécessairement public là, ce que j'ai vu, c'est qu'il y
avait eu... En tout cas, Louis-Hippolyte-Lafontaine était sorti perdant
sur le plan financier de tout ça. Il y a donc des
déséquilibres, et je pense que le message était bien
placé, il était à la bonne place.
Le message très important que vous passez, et c'est aussi celui
de la nécessité que j'ai toujours évoquée d'un plan
d'implantation de la réforme où les choses vont s'appliquer de
manière logique, très logique, continuelle et dans le temps, de
façon à ce qu'un geste ne soit pas posé aujourd'hui, alors
qu'il devrait être posé dans six mois, et qu'un geste devant
être posé dans six mois soit posé aujourd'hui.
Donc, ce que je peux vous garantir, c'est que vous allez être
associés de manière très importante, comme intervenants,
dans la mise en oeuvre de cette réforme. Vous conviendrez que je ne peux
pas la mettre en oeuvre maintenant,
tant et aussi longtemps que le projet de loi 120 ne sera pas
voté. J'ai entre les mains mon document, un premier - il n'est pas
parfait - de mise en oeuvre des 222 mesures de la réforme qui
tantôt interpellent quoi, interpellent qui, interpellent comment, et puis
interpellent le signe de piastre.
Donc, à partir de ça, je pense que tout le monde, y
compris les régies régionales, va être associé de
manière très intensive dans chacun des domaines. C'est la seule
chose que je souhaite. Je passe le message, je m'apprête à signer
des lettres - ça vaut ce que ça vaut des lettres d'un ministre
là, quand il n'y a pas d'argent dedans surtout - et à passer le
message très clair aux établissements, à ceux qui ont un
appétit plus vorace sur le terrain, qui sont déjà
insuffisamment imbibés de l'esprit de la réforme pour être
capables de l'appliquer, pour dire grossir l'empire, ou bien se positionner de
façon à ce que ça soit plus difficile de lui en enlever
que de lui en donner. Je pense que le message va être très clair
aujourd'hui: Ne montez pas trop de châteaux à ce moment-ci, il y
en a qui vont risquer d'être faits en briques, alors que ça prend
juste du "color lock". Et dans ce sens-là, c'est un message qui
m'apparaît très clair, ça va être fait en
complicité avec tout le monde. Vous nous donnez un exemple
d'écueii qu'il faut éviter, qui est extrêmement important,
et la plus belle preuve qu'il faut le faire en harmonie avec nos intervenants,
et puis c'est possible de le faire. C'est ça qui est le message. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. C'est
à mon tour, au nom des membres de cette commission, de remercier les
membres de la Fédération des CLSC ainsi que l'Association des
centres de services sociaux du Québec. Merci bien.
Je demanderais aux gens représentant l'Association des
hôpitaux du Québec de bien vouloir s'avancer, s'il vous
plaît.
On vous souhaite la bienvenue à cette commission.
J'apprécierais que la personne responsable du dossier et porte-parole
puisse se présenter et aussi nous introduire les gens qui
l'accompagnent, s'il vous plaît.
Association des hôpitaux du
Québec
M. Favre (Henri): Je vous remercie. M. le Président, M. le
ministre, M. le critique officiel, Mmes et MM. les députés,
permettez-moi tout d'abord, à titre de président de l'Association
des hôpitaux du Québec, de vous présenter les personnes qui
comparaissent aujourd'hui avec moi devant cette commission. À ma gauche,
le Dr Jacques Brunet, premier vice-président de l'Association des
hôpitaux du Québec et directeur général du Centre
hospitalier de l'Université Laval; à ma droite, le Dr Paul
Landry, vice- président, programmes et recherches, à l'Associa
tion; un peu plus loin, M. Léandre Nadeau, vice-président,
système de gestion, à l'Association également; et
finalement, à l'extrême droite, à l'extrême gauche
pour vous, Me Ghislaine Gosselin, directrice des affaires juridiques de
l'Association.
Le Président (M. Joly): Alors, vous connaissez la
procédure. Vous avez une vingtaine de minutes pour nous livrer votre
mémoire. Par après, il y a un temps imparti aux deux
formations.
M. Favre: Merci, M. le Président. Compte tenu du temps qui
nous est imparti, nous irons à l'essentiel des recommandations que nous
avons déjà présentées et sur lesquelles nous
croyons nécessaire de revenir. Bien sûr, chacun de ces
thèmes sera abordé en sachant que la chasse aux papillons est
ouverte, mais que les boîtes sont encore bien scellées et que ces
petites bêtes que nous attendons ne sont pas encore disponibles. Nous
tiendrons compte également de la proverbiale ouverture d'esprit dont le
ministre nous a rappelé la dimension, certainement importante, et du
milieu fortement oxygéné, je pourrais presque dire,
suroxygéné, qu'il nous promet.
Toute réforme doit faire appel à un vocabulaire neuf et
l'on entend parier de prisme, de biais. On parie beaucoup du citoyen et le
citoyen est devenu partie d'une trinité: le citoyen payeur, le citoyen
consommateur et le citoyen décideur. Je pense que la réforme
s'annonce bien avec des termes aussi prometteurs.
Cependant, depuis quelque temps déjà, nous utilisons une
expression qui n'est pas vieillotte, qui était assez d'actualité
il y a quelque temps, c'est le concept de la qualité totale que nous
appliquons dans les hôpitaux et dans les établissements de
l'Association, qui doit se refléter sur la pertinence de nos
opérations, l'efficacité en termes d'atteinte des objectifs,
l'efficience, les relations, de bonnes relations, l'optimisation entre les
coûts-bénéfices, et surtout, la qualité totale par
rapport aux services que dispensent nos établissements aux citoyens qui
sont les usagers à compter de la réforme. C'est très fort,
mais elle ne nous fait pas peur, et, même, nous l'attendons avec une
certaine impatience. Donc, les thèmes que nous allons reprendre
aujourd'hui sont le droit des usagers, la mission des établissements,
l'administration de ces derniers, la déréglementation et enfin,
on s'en doute bien, le financement. J'invite donc le Dr Paul Landry, si vous me
le permettez, M. le Président, à discuter de ces points
immédiatement.
M. Landry (Paul): M. le Président...
Le Président (M. Joly): Alors, vous êtes
prêt.
M. Landry: Oui, monsieur.
Le Président (M. Joly): Alors, M. le député
de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Non? Ah bon! Il y a M. Landry.
M. Trudel: Pas tout à fait. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Favre: M. le Président, je vous demandais la permission
de céder la parole au Dr Landry.
Le Président (M. Joly): Au Dr Landry. Alors, Dr Landry, on
vous reconnaît.
M. Côté (Charlesbourg):... au président aussi
les droits de l'usager.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): Dr Landry, à vous.
M. Landry: M. le Président, je reconnais votre message
subliminal et je serai donc très bref et aussi concis que possible en
essayant d'éviter de répéter les choses qui ont
été dites dans cette noble enceinte depuis ce matin. (17
heures)
Disons, en premier lieu, concernant les droits de l'usager que ça
s'inscrit dans notre préoccupation pour la qualité totale. On est
tout à fait d'accord avec le projet de loi, avec l'esprit du projet de
loi, avec aussi la préservation des droits, en particulier, la
liberté de choisir son médecin ou son établissement et,
réciproquement, du médecin de choisir, en dehors des situations
d'urgence, d'accepter de traiter des patients. Évidemment, il faut des
balises, on pense que les balises sont là, que l'on songe au cas de la
Cité de la santé de Laval, ou encore au cas de l'hôpital
Laval qui est encore sub judice. On pense également que le projet de loi
permet ces balises-là.
Au niveau de la confidentialité, on se permet de vous dire que
nous ne partageons pas tout à fait les appréhensions de la
Corporation des médecins du Québec, concernant la mauvaise
utilisation du dossier médical. On pense qu'on a certainement à
préserver la confidentialité, mais il y a moyen de se donner des
garde-fous qui permettront quand même d'utiliser, à des fins de
gestion et de planification des services, l'information qui est là.
L'informatisation du dossier permettra éventuellement davantage
d'assurer la sauvegarde de l'information que ce qui existe actuellement dans
nos hôpitaux.
Concernant la gestion des plaintes, on est tout à fait d'accord
avec ça. Ça nous semble encore là un élément
qui s'inscrit dans le mécanisme de la qualité totale. On a
formulé plusieurs recommandations d'ordre plus technique concernant ces
articles-là, et on espère que les papillons multicolores de M.
Côté et de l'Opposition nous informeront bientôt sur les
modifications qui ont été apportées.
Un point qui est peut-être un petit peu plus important, c'est
celui de l'admission des établissements. Et encore là, on fait
référence aux citoyens consommateurs. On est tout à fait
d'accord avec l'esprit de la réforme qui dit qu'il faut assurer une
complémentarité maximale des établissements pour
éviter le chevauchement et la duplication entre ce que les uns et les
autres peuvent faire dans le système, mais il y a des effets pervers
dans ce système-là. Et on a misé beaucoup sur la
nécessité de souligner ces effets pervers là, de
façon autant que possible à les éliminer à la
source. Les effets pervers se situent principalement pour le citoyen
consommateur au niveau d'un risque, d'un bris de continuité dans les
services. C'est sûr que la continuité des services, ce n'est pas
pour les établissements, c'est pour celui qui a besoin de services.
Je vais passer les différents types d'établissements,
principalement les CLSC, les hôpitaux et les centres d'hébergement
et de soins de longue durée pour essayer d'illustrer un petit peu la
problématique que l'on rencontre. Au niveau des CLSC, c'est
évident - et on reconnaît l'importance des CLSC comme partenaires
à part entière - qu'ils devront aussi assurer une
complémentarité nécessaire avec les cabinets privés
et les polycliniques. On est d'accord bien sûr pour rehausser le niveau
des services de maintien à domicile au Québec pour l'amener
à des niveaux comparables à ce qui existe dans d'autres provinces
ou dans d'autres pays. Ça nous apparaît essentiel. On est
d'accord, bien sûr, avec les notions de prévention et de
promotion, on est même d'accord pour que certains CLSC fassent de la
santé et sécurité au travail. On va y revenir un petit peu
plus tard.
Au niveau des urgences, encore là, on est d'accord et on est tout
à fait avec vous quand vous dites qu'il faut que les CLSC puissent
livrer des services d'urgence, mais il ne faudrait pas y voir une
panacée, parce que vous savez comme moi que ce n'est pas
réellement les cas ambulants qui encombrent nos salles d'urgence, mais
beaucoup plus les patients sur civière et que la solution - et vous
aurez sûrement l'occasion d'en reparler au cours des prochains jours -
est bien plus dans une approche systémique globale que dans une approche
purement parcellaire.
Au niveau des hôpitaux - c'est là évidemment que
ça nous tient un petit peu à coeur - le projet de loi
définit la mission d'un hôpital comme un endroit où on
dispense des services de diagnostics et de traitements médicaux
spécialisés. Ça nous semble, ça, une approche
réduction-niste très loin de la réalité de ce que
font et feront les centres hospitaliers dans notre système. Bien
sûr, il y a des soins infirmiers qui se
donnent en milieu hospitalier, et pas uniquement sous la gouverne et la
prescription médicale. Bien sûr, II va y avoir bientôt des
services sociaux, et, à ce titre-là, on fait tout à fait
écho aux propos tenus par Mme Denis il y a à peine quelques
minutes, et bien sûr, quand un malade fait une angine ou un infarctus et
qu'il arrive à l'hôpital, c'est le temps pour son cardiologue, son
médecin de le sensibiliser à l'importance de bien manger, de
faire de l'exercice, et peut-être aussi d'arrêter de fumer, enfin
d'éliminer les agents agresseurs. Bien sûr aussi, la
réadaptation, il va s'en faire quand on a un patient qui est
paralysé ou même qui a un infarctus ou qui a une fracture, il va
falloir faire de la réadaptation. Or, si on doit continuer à en
faire - et ça me semblerait aberrant de ne pas en faire - je ne vois pas
pourquoi ça n'apparaîtrait pas dans notre mission.
Vous avez parlé tantôt brièvement des
départements de santé communautaire, et nous nous
réjouissons aussi des propos que vous venez de tenir autour de cette
table. Les DSC vont se retrouver dans les régies, c'est une
décision qui a été prise, que l'on accepte, mais les
effectifs des départements de santé communautaire, le personnel,
les professionnels, qui oeuvrent déjà dans nos milieux
hospitaliers, si j'ai bien compris le message du ministre, pourraient et
devraient continuer à oeuvrer dans les milieux hospitaliers tant au
niveau de la santé et sécurité au travail en concertation
et en complémentarité avec les CLSC que dans des domaines
d'expertise plus particuliers telles les maladies transmises sexuellement, la
santé environnementale et autres. Il faut bien sûr que l'expertise
clinique en toxicologie, en maladies infectieuses, en ergonomie, etc., se
retrouvent au service des travailleurs qui en ont besoin. Encore là, ce
sont des consommateurs, des citoyens consommateurs.
Pour ce qui est des CHSLD, là c'est un petit peu plus
délicat. Vous proposez de regrouper en une catégorie
d'établissements les centres d'accueil d'hébergement et nos
hôpitaux de longue durée qui font partie du réseau
hospitalier depuis plusieurs années. Grosso modo, nous sommes d'accord
avec ça; nous sommes d'accord principalement en raison des
clientèles. On a constaté que, depuis les cinq ou six
dernières années et de plus en plus avec le vieillissement de
notre population, les clientèles commencent à se ressembler de
plus en plus. Les gens en perte d'autonomie, les personnes âgées
en perte d'autonomie, avec des déficits cognitifs significatifs, quand
on regarde les listes d'attente, c'est un âge moyen d'environ 80 ans, les
personnes qui sont à la veille d'entrer; il y en a 78 % qui ont des
déficits cognitifs, 40 % qui peuvent souffrir de démence
sévère, et, en moyenne, elles ont trois à quatre
problèmes de santé physique. Ça veut dire qu'il y a un
alourdissement de ces clientèles. Ce que l'on veut faire ressortir
là, c'est l'importance d'avoir, à la fois, des milieux de vie
pour ce monde-là parce qu'ils vont passer le restant de leurs jours en
institution. Autant que possible ils devraient avoir le droit là de
vivre comme des personnes humaines autant qu'ils peuvent, mais aussi la
nécessité d'avoir une qualité de soins, il faut que ce
soit aussi un milieu de soins. Autrement dit, il faut faire une
synthèse; ne pas opposer milieu de vie à milieu de soins, ne pas
opposer les services de nature plus sociale à des services
médicaux ou des soins mais plutôt intégrer ces deux
données-là de façon a avoir une approche qui est plus
globale, qui se veut biopyschosociale. Ça nous semble important,
cela.
L'autre point qu'on veut dire là-dessus, c'est qu'il faudrait
avoir de la souplesse. Le regroupement au niveau d'une MRC, de 700 à 800
lits de longue durée de trois ou quatre établissements, ça
pourrait amener à créer des bureaucraties à ces niveaux et
peut-être un cloisonnement et peut-être un certain isolement entre
les services en première ligne des CLSC et les services des
hôpitaux et aussi les services de maintien à domicile.
La question des centres de jour et des hôpitaux de jour, ce n'est
pas clair, clair, qui va faire ça et comment ça va être
géré et administré dans le projet de loi. Peut-être
que les papillons le précisent. Ce que l'on vous dit finalement, c'est
que le critère de regroupement, ça devrait être
essentiellement l'efficacité, l'efficience et la qualité des
services. Nous, on pense qu'il devrait y avoir de la souplesse dans le
système, que les fusions, si possible, devraient être volontaires,
et on pense qu'on ne devrait pas fermer la porte à ce concept d'ensemble
de santé. On ne sait pas trop trop pourquoi ça a
été complètement balaye - on le sait - de l'avant-projet
de loi, mais on pense que c'est une formule qui est intéressante, et,
quand ça marche bien, on ne devrait pas les défaire. On devrait
permettre là une certaine souplesse. On va des fois un peu plus loin.
Peut-être aussi qu'il faudrait éviter de créer des
mégastructures au niveau horizontal. L'intégration verticale,
ça peut aller avec des niveaux de soins différents, mais au
niveau horizontal peut-être que 100 lits, ce serait une limite
agréable pour les CHSLD pour avoir leur propre conseil plutôt que
d'être regroupés sous un conseil qui chapeauterait l'ensemble de
ces structures. On passe vite là.
M. le Président, je vois que mon temps file rapidement, avant que
vous me fassiez signe, j'arrive à l'administration des
établissements, soit le citoyen décideur. Ça, c'est beau.
Nous autres, on est pour ça. Nos membres, ce sont des citoyens
décideurs, les membres de conseils d'administration. Encore là,
le ministre a fait preuve de beaucoup d'ouverture dans les papillons
annoncés concernant la présence des professionnels, concernant la
cooptation au niveau des conseils d'administration des régies de membres
qui pourraient venir des groupes
ethniques et des universités, aussi la présence de
professionnels ou de gestionnaires à ces conseils-là. On
répète et ça a été dit et je
n'étayerai pas la preuve, le risque ou le danger de noyautage par des
groupes d'intérêt, que je ne nommerai pas bien sûr - ce
n'est pas de bonne guerre - c'est un danger et il y a un besoin, là, de
baliser en définissant les modes d'élection.
Concernant l'organisation interne, là je pense qu'on a un sujet
qui est conflictuel et qui pose des problèmes. Nos membres nous ont dit
que ce qu'on préférait à ce niveau-là pour que
notre citoyen décideur soit vraiment un décideur, c'est un
maximum de souplesse, laissant autant que possible à chaque
hôpital, selon son milieu, selon ses ressources, selon ses objectifs et
selon ce qu'il veut réellement être, sa mission, le soin de
s'organiser à l'interne, et c'est un concept qui nous plaît
beaucoup. Ce à quoi aussi on veut faire référence avec un
peu d'insistance, c'est la notion de "bicéphalie". C'a été
décrié par M. Rochon, c'a été dénoncé
aussi ce matin par les directeurs généraux. Comme le citoyen
décideur doit faire une synthèse entre les intérêts
du citoyen consommateur et ceux du citoyen payeur - parce qu'il faut que
ça se concilie - on pense aussi qu'un directeur général,
ça doit être capable de réconcilier et de faire une
synthèse entre les intérêts des médecins, les
intérêts du personnel et des cadres, et surtout centrer ces
intérêts-là sur ceux du bénéficiaire.
On pense aussi qu'il y a une notion là-dedans extrêmement
importante; c'est celle de leadership. On est dans une salle où il y a
beaucoup de leadership qui s'exprime. Vous en êtes tous, membres de la
commission, des leaders. Eh bien, un leader, ce n'est pas une commission ou un
comité, un leader, habituellement, ça s'incarne dans une
personne: un chef de gouvernement, un ministre, un chef de parti, un chef de
l'Opposition, etc. Alors, on pense, nous, que ça implique une vision de
ce que l'organisation devrait être; ça implique aussi une vision
partagée par les membres de l'organisation et ça implique aussi
un pouvoir partagé. Ça implique la capacité de rendre ces
gens-là capables d'agir. Pour ça, ça doit s'incarner dans
une personne, et on pense que le directeur général est
précisément cette personne-là et que ça ne devrait
en aucune façon, mais je dis bien "en aucune façon", porter
atteinte à l'autonomie professionnelle et à la liberté
thérapeutique et clinique. Le directeur générai n'ira pas
dire au docteur quelle pilule prescrire, quel médicament prescrire,
comment tenir son scalpel ou quel organe enlever. Au contraire, ça va
permettre une plus grande unité dans l'organisation et d'intégrer
davantage les médecins à ces phénomènes de
gestion.
J'accélère, M. le Président. Au niveau des
effectifs médicaux, on ne peut pas ne pas en parler, on pense, nous,
qu'il faut absolument, avec des mesures principalement incitatives, amener les
médecins spécialistes à mieux se répartir dans nos
hôpitaux de la périphérie. Il faut pour cela aussi
peut-être pas nécessairement les conscrire de façon
abusive; je pense qu'on peut amener un cheval à l'abreuvoir, mais qu'on
ne peut pas le forcer à boire, donc il faudra avoir des mesures beaucoup
plus incitatives. À ce titre-là, vous faites des pas excellents
dans la bonne direction avec le jumelage des régions universitaires avec
les régions périphériques et surtout des provisions
claires, nettes et précises pour assurer que ces jeunes
médecins-là ne seront pas condamnés à travailler
toute leur vie loin de leur famille, de leurs amis dans les grands centres.
Donc, des manières, des méthodes pour assurer des retours de
pratique.
Au niveau de la décentralisation, ce que nous appelons la marge
de manoeuvre nécessaire pour nos décideurs locaux - là, je
parle d'un citoyen décideur encore - votre projet de réforme
était d'une éloquence extraordinaire. Il y a un chapitre,
à la page 62 - j'ai presque le goût; je ne sais pas, je n'ai
peut-être pas le temps de le lire - mais qui était d'une...
Le Président (M. Gautrin): II vous reste deux minutes pour
votre...
M. Landry: ...telle limpidité, M. le Président,
qu'on aurait cru que c'était tiré du mémoire de l'AHQ.
C'était à ce point-là. Sauf que le projet de loi, lui, est
un petit peu moins...
M. Côté (Charlesbourg): Vous assurez un certain
leadership.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Landry: ...enfin, un petit peu moins explicite, et,
heureusement, l'oxygène s'en vient, l'espace s'en vient, du moins, c'est
ce que vous nous dites, mais il faudrait aussi quand même tenir compte de
plusieurs suggestions concernant la gestion des immobilisations, les achats en
commun, les fondations, les activités commerciales accessoires, les
autorisations d'emprunt, etc. J'espère que les papillons nous
révéleront des surprises agréables.
Je termine, M. le Président, en parlant très
brièvement et de façon superficielle du financement,
c'est-à-dire du citoyen payeur. La réforme proposée va
coûter environ 1 800 000 000 $ au cours des 10 prochaines années:
maintien à domicile, lits de courte durée, lits de longue
durée, rénovations, alourdissement des clientèles, etc. M.
Côté a parlé de 3 % + l'IPC; on se demande si ça va
être suffisant, on n'est pas sûr. On se demande aussi où
notre gouvernement va trouver l'argent parce que le fédéral
diminue ses paiements de transfert, comme on sait tous, et la situation
financière du Québec ne semble pas des plus reluisantes
actuellement. (17 h 15)
Ce que nous proposons, M. le Président, c'est d'envisager des
sources alternatives de financement, et je fais référence au
mémoire que l'AHQ a déposé au gouvernement du
Québec en janvier 1990.
D'autre part, sans demander à M. Côté de traverser
ta Chambre pour aller contester la loi C-3 - ce n'est peut-être pas
nécessaire de traverser la Chambre pour ça - l'AHQ se dit
également disposée à favoriser ou à appuyer les
démarches qui seront faites par le gouvernement du Québec pour
modifier ou s'organiser pour se soustraire à la loi C-3.
Finalement, ce qui nous semble important...
Le Président (M. Gautrin): Est-ce que vous pourriez
conclure, M. Landry?
M. Landry: Je conclus. Finalement, ce qui nous semble important,
c'est de garantir l'accessibilité aux services. Et je
répète que nous disons oui à la réforme dans une
optique de qualité totale pour les services à nos
bénéficiaires, à nos clients, à nos patients pour
employer le terme adéquant, que nous sommes prêts à
collaborer, que nous souhaitons une marge de manoeuvre adéquate pour le
décideur local, que nous allons étudier les papillons dès
qu'ils seront en vol attentivement et que nous suivrons avec
intérêt les débats de cette commission.
Le Président (M. Gautrin): Merci, Dr Landry. Je
reconnaîtrai maintenant le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Oui. Merci, M. le Président. On a pris un petit
peu de retard dans nos travaux. Alors, on va essayer d'y aller assez
directement, encore une fois, sur la méthode de financement, où
aller chercher les sous supplémentaires. Je veux juste vous signaler au
passage qu'on n'a pas besoin de traverser le parquet. On peut s'entendre
autrement. Et que, de l'avis de Serge Saucier, le président d'une grande
firme de comptables, suite au dernier budget fédéral, juste les
dédoublements au niveau du fédéral et du Québec,
ça coûte 10 000 000 000 $. Alors, on n'a pas besoin de faire
sauter C-3. On a juste à se donner la même ligne, le même
niveau de services et la même garantie et s'occuper de nos affaires, et
ça a tout l'air que ça nous sauverait 10 000 000 000 $. Je pense
qu'on pourrait se donner le niveau qu'on souhaite se donner au Québec en
matière de santé et de services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): ...régler
Campeau-Bélanger tous les deux?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Vous avez dit, M. le ministre. l'autre jour, qu'on n'a
pas besoin de discuter ça des longues nuits de temps...
M. Côté (Charlesbourg): Pas vrai.
M. Trudel: ...qu'entre vous et moi, ici, on pourrait
régler ça.
M. Côté (Charlesbourg): Ah! Je suis convaincu de
ça.
M. Trudel: Les nouvelles sont juste à 18 heures, on peut
leur régler ça.
M. Côté (Charlesbourg): Je suis convaincu de
ça. Le rapport Allaire, avec le rapatriement de certains pouvoirs, et on
va enlever les doublures.
M. Trudel: On enlève 22 doublures.
M. Côté (Charlesbourg): Mais H va se maintenir un
lien.
M. Trudel: Alors, 22 doublures qu'on pourrait
éliminer...
Le Président (M. Gautrin): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Trudel: Là-dessus, il s'agit là d'un processus
que nous appelons l'étapisme. Nous aimons bien l'utiliser, mais pas en
être victimes. Alors, oui, allez à 22 pour commencer. Ça
viendra plus tard. Nous sommes contents que ce pas-là se fasse. Mais
plus directement relié à l'Association des hôpitaux, en ce
qui concerne les fondations, vous avez juste fait une allusion à la fin.
Vous ne trouvez pas ça un très grand danger qu'on ouvre dans le
projet de loi la possibilité que les fondations soient appelées
à financer également des services que vous offrez dans votre
institution? On le sait, il y a une certaine zone d'incertitude à
gérer en quelque sorte au niveau des équipements, et ça,
c'est une autre question. Mais je pense qu'il y a beaucoup de citoyens et de
citoyennes au Québec, des regroupements, des collaborateurs, de membres
de votre association qui font un travail assez extraordinaire là-dessus
et, dès le matin où ils sentiraient ou ils auraient le signe que
le travail que ces personnes-là font pour nous aider au niveau des
équipements dans les institutions, ça pourrait servir, disons-le
carrément, à éponger le déficit. C'en est fini de
cette contribution en quelque sorte.
Le Président (M. Gautrin): Dr Landry
M. Landry: Peut-être M. Nadeau qui est notre
économiste.
Le Président (M. Gautrin): M Nadeau
M. Nadeau (Léandre): Vous vous référez
à l'article 196, alinéa 4°.
M. Trudel: 219 et suivants.
M. Nadeau: Effectivement, il est prévu dans le projet de
loi 120 que les fonds de la Fondation pourraient servir, notamment, à
l'amélioration ou à la consolidation de la situation
financière des centres hospitaliers. Nous y voyons là un danger
qu'effectivement, les sources de financement, ou les campagnes de financement
faites par les fondations puissent servir à équilibrer les
budgets. On pense qu'effectivement, ça pourrait probablement
décourager ou enfin nuire au dynamisme des gens qui se dévouent
bénévolement dans les fondations, et c'est une proposition que
nous avons déjà faite au ministre de retirer cet
alinéa-là du projet de loi 120.
Une voix: Merci.
Le Président (M. Gautrin): M. le député.
M. Trudel: Très bien. Mission des établissements,
en particulier donc, des établissements de centres hospitaliers. Est-ce
que vous jugez là vraiment essentiel que dans la mission du centre
hospitalier soit inscrite la dimension prévention et
rééducation? Quand je pose la question, avec ce ton-là,
c'est peut-être un peu dire... De toute façon, dans le travail que
vous faites actuellement au plan curatif, pour prendre celui-là,
ça implique déjà, au niveau de vos professionnels et de
votre organisation structurelle, que vous accomplissez ce mandat de
prévention et de réadaptation, par exemple. Est-ce qu'on ne
risquerait pas de faire en sorte que ce soit moins clair dans les missions de
chacun des centres si on incluait aussi la mission de prévention par
ailleurs nécessaire dans la mission du centre hospitalier?
M. Landry: Écoutez, c'est essentiel pour la raison
suivante. Quand on intervient dans une relation d'aide, dans une relation de
service, la préoccupation, la pensée prévention doit
devenir aussi importante que la préoccupation diagnostic, la
préoccupation traitement. Et la réadaptation, c'est la même
chose. Je veux dire, c'est des éléments essentiels d'une approche
thérapeutique qui se veut globale. La personne, elle, elle a besoin de
se faire dire comment se prendre en charge au niveau de sa santé. Elle a
besoin d'avoir des conseils au niveau de la prévention.
En plus d'avoir un bon diagnostic, en plus d'avoir un bon traitement,
elle a besoin surtout aussi de savoir comment se reprendre en charge et
d'être réadaptée, etc. Vu qu'on le fait, vu que ça
fait partie de ce qu'on appelle les soins médicaux, les soins de
santé, pourquoi ne pas le laisser dans notre définition? Je veux
dire, pourquoi l'enlever? C'était là avant. Pourquoi on
l'enlève? Je ne comprends pas. Si ce n'est parce qu'on vise à
cloisonner, à sectoriser, à faire de l'hôpital quelque
chose qui est déconnecté du restant. Ça, je pense que ce
n'est pas bon. C'est à contre-courant. C'est ce que je ressents.
Si ce n'est pas ça, qu'on me le dise, mais nous, c'est ce qu'on
pense. C'est ce que nos membres nous ont dit. D'où l'importance d'avoir
cette approche plus globale. Il faut parler de soins aussi. Il faut parler de
soins généraux. Le projet de loi n'en parle pas. Soins
généraux et spécialisés. Parce qu'il y a des soins
infirmiers qui se font dans les hôpitaux aussi. C'est important, les
soins infirmiers dans les hôpitaux.
M. Trudel: Mais est-ce que, là-dessus, vous convenez que
le type d'action préventive, ou le type de prévention que,
généralement, vous réalisez dans un centre hospitalier, il
est beaucoup plus de nature individuelle qu'il ne le serait par rapport
à la prévention dans un CLSC qui serait beaucoup plus de nature
communautaire, de nature à atteindre la population en
général et qu'à tout le moins, si nous
réintroduisions cela dans la mission du centre hospitalier, il faudrait
baliser cette définition de la prévention, dans le cas du centre
hospitalier.
M. Landry: La notion de prévention individuelle et de
prévention collective, je trouve que c'est flou. La prévention,
c'est une préoccupation. Le ministère va en faire de la
prévention, j'espère. La promotion de la santé aussi.
C'est une préoccupation qu'on doit retrouver. Les régies aussi
devraient être centrées et préoccupées par la
prévention. Ce n'est pas une chose qui appartient à une
catégorie donnée d'établissements. C'est sûr qu'il
va s'en faire probablement plus au niveau de la première ligne, au
niveau des CLSC, qui sont équipés pour de l'action communautaire,
comme le ministre disait tantôt, en la balisant et en disant clairement
à quoi ça sert. C'est une technique et une approche, la
prévention.
La prévention, on parle de prévention primaire, qui est la
promotion de la santé et l'élimination des risques à la
base. La prévention secondaire, elle, est beaucoup plus du
dépistage, de l'intervention précoce, de façon à
diminuer l'impact et l'incidence des symptômes et de la maladie. Et on
peut parler même de prévention tertiaire en parlant de
réadaptation. Ce n'est pas secret, ça. C'est vieux comme le
monde. Je n'essaie pas de vous donner un cours non plus, c'est connu,
ça. Pourquoi dire qu'il faut que la prévention, ce soit
uniquement un type d'établissement qui fasse ça? Moi, je pense
qu'il faut en faire à tous les niveaux dans le système.
M. Trudel: Vous avez...
Le Président (M. Gautrin): M. le député,
à vous.
M. Trudel: Vous avez fait état que, dans l'espèce
de changement de catégorie, suivant ce qu'il y a sur la table
actuellement comme projet de loi, certains centres hospitaliers de longue
durée s'en allaient du côté des centres d'accueil, et vous
avez dit: II va falloir gérer ça, là, avec beaucoup de
souplesse, parce qu'il va falloir éviter la création de
mégastructures. Est-ce que vous avez fait des simulations?
M. Landry: II y en a qui ont été faites, en effet,
on a regardé les territoires de MRC, puis on a regardé le nombre
de lits de longue durée et le nombre d'établissements qui se
retrouvaient dans ces différentes MRC. On a trouvé certaines MRC
où H y avait trois ou quatre établissements de longue
durée avec un nombre de lits qui pouvait atteindre 700 à 800, 850
lits. Dans certains territoires, c'est un énorme établissement de
longue durée - je pense à St-Hyacinthe, pour ne pas le nommer -
qui va être jumelé avec un ou deux petits centres d'accueil, tout
petits. Alors, je pense que, là, il y a une disproportion très
nette, puis ce qu'on proposait, c'est que, quand Hs ont plus de 100 lits,
peut-être qu'ils devraient avoir leur propre conseil d'administration.
Ça serait peut-être une manière d'éviter que les
regroupements soient beaucoup trop gros puis qu'ils deviennent dysfoncttonnels.
Enfin, ce sont des questions que vous allez sûrement discuter quand vous
allez arriver à l'étude article par article.
M. Trudel: Si vous avez fait des simulations, est-ce qu'on peut
vous demander si c'est pour l'ensemble du territoire du Québec?
L'adoption de votre critère à 100 lits, ça augmenterait de
combien le nombre de conseils d'administration au Québec?
M. Landry: Ce n'était pas énorme, finalement, je
pense que c'était autour de... Je ne me souviens pas du chiffre exact,
mais ce n'était pas tant que ça, finalement. Le critère de
100 lits, je ne me souviens pas du nombre, mais c'est minime. Ce n'est pas
énorme.
M. Trudel: En tout cas, je peux vous demander que si vous
retrouvez ces documents, j'aimerais ça que vous puissiez les
déposer devant cette commission, les faire parvenir au
secrétariat de la commission. Je pense que, quand on en arrivera
à ces articles-là, ce sera intéressant d'avoir ces
simulations-là. Un petit mot sur le noyautage au niveau du citoyen
décideur. C'est quoi, le remède que vous suggérez vous
autres, quand vous achetez le rôle du citoyen en tant que décideur
- moi, je pense toujours que tous ceux et celles qui sont là
déjà, ce sont aussi des citoyens décideurs, là,
puis qu'ils ne faisaient pas si mal leur travail que cela, je dirais même
qu'ils faisaient très bien leur travail. Mais pour éviter cela,
quel est le moyen pratique que vous suggérez en dehors du suffrage
universel, parce que le ministre a dit: Je ne le choisis pas ce
moyen-là, c'est lui qui fait la présentation. Alors, qu'est-ce
qu'on fait, à partir de ce moment-là, à l'intérieur
des autres possibilités qui nous restent?
M. Landry: C'est une question difficile qu'on a posée
à nos membres, puis, finalement, il y a une hypothèse qui est
apparue. On pense qu'il faut de la démocratie. Il faut procéder
autant que possible en respectant le processus des assemblées publiques,
sauf qu'on proposait peut-être de restreindre à deux personnes
élues parmi les personnes présentes lors de l'assemblée
publique d'élection et que deux autres pourraient être
élues mais à partir d'une liste de personnes qui serait
formulée à partir des groupes socio-économiques reconnus
par la régie régionale. Autrement dit, on pense qu'il devrait y
avoir des moyens de baliser le choix de façon à ce que le
mécanisme puisse éviter ce noyautage par des groupes particuliers
qui débarqueraient tout d'un coup pour fausser le jeu de la
démocratie. Enfin, c'est une hypothèse, mais, encore là,
je pense qu'il va falloir essayer de trouver la meilleure.
M. Trudel: Merci.
Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le
député. M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M le
Président. Je remarque et j'entends qu'il y a beaucoup de positif,
à moins que ce ne soit mon bien personnel ou mon ego qui en prenne pour
son rhume de manière positive, quand j'entends tout ça,
là. Ça fait du bien, ça fait du bien, de temps en temps,
parce que, des fois, on entend toujours ce qui va mal. Bon...
Une voix:...
M. Côté (Charlesbourg): Ah! en entendant ça,
aujourd'hui, je regrette de ne pas avoir accepté avant puis que ce soit
plus long.
M. Trudel: ...huit heures pour vous faire du bien, M. le
ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je pense qu'au niveau du
droit de l'usager, pour tenter de prendre la séquence dans laquelle vous
l'avez présenté, il y a une bonne harmonie de pensée, y
compris sur la confidentialité. Ça me choque - j'aime autant le
dire comme je le pense - de voir l'abus public qu'on fait de cet
aspect-là. Il n'y a pas plus "sécure" que la Commission
d'accès à l'Information, et, probablement, que l'AHQ le sait un
petit peu aussi, compte tenu des projets qui ont été
élaborés un peu partout, que ce soit avec le SIOOCI ou
d'autres, sur les difficultés de convaincre la Commission
d'accès à l'information d'être capable de se donner des
outils qui ne sont pas uniquement des outils de gestion, mais aussi de
qualité et de continuité de qualité de dispensation des
services. (17 h 30)
Je pense que c'est abusif, ce qu'on a pu lire dans la presse - ça
ne fait pas tellement longtemps - en début de semaine et ce qu'on entend
à ce niveau-là. Il n'y a pas un pouce de travail qui va se faire
à ce niveau-là, si la Commission d'accès à
l'information n'a pas donné son accord. Je pense que, comme
autorité crédible, c'est probablement celle qui est la plus
crédible, au-delà de tout ce qui peut être professeur
universitaire qui peut écrire, au-delà de tout ce que les gens
peuvent penser, il n'y a pas meilleure balise, à ce niveau-là,
que la Commission d'accès à l'information. Je suis très
heureux de vous dire qu'ils ont été sensibilisés au projet
de loi 120. A tous les papillons qui s'en viennent, ils trouvent qu'on est
allé pas mal plus loin que bien d'autre monde jusqu'à maintenant.
Donc, à ce niveau-là, j'espère que ça va
sécuriser un certain nombre de personnes. la mission. c'est quand
même l'un des éléments très importants de votre
intervention. l'idée de base de la réforme, ce n'est pas de
tenter, comme vous l'avez si bien traduit tantôt, d'isoler une mission.
l'idée de base, c'est de dire: on va définir un noyau dur.
ça va être ça, la mission de l'établissement et, en
aucune manière, ça n'empêchera l'ajout de
périphérie au noyau dur dans la mesure où il y a, à
ce moment-là, concertation sur les plans régionaux d'organisation
de services.
C'est ça, l'idée qu'on avait dans la réforme et
qu'on a tenté de traduire à l'intérieur du projet de loi
120. Ça, c'est fa base. Est-ce que ça veut dire, pour autant,
que, pour le reste, tu ne peux pas rien faire? On va prendre la
prévention; on va prendre la prévention et on va prendre la
réadaptation; on va prendre les deux. Au-delà de la mission de
base et très ultraspécialisée des centres hospitaliers,
vous allez faire de la prévention parce qu'il y a un patient qui se
présente chez vous. Vous avez pris le cas d'un arrêt cardiaque
tantôt; le noyau dur est le fait d'être capable de traiter
quelqu'un qui a un problème cardio-vasculaire, et, par incidence, donc
par accessoire, à partir du moment où il est chez vous, vous
allez faire de la prévention, et c'est normal. Si on n'en faisait pas,
ce serait mauditement inquiétant. Donc, ce n'est pas l'apanage d'un
groupe en particulier, mais c'est une responsabilité collective. C'est
pour ça que, quand on a eu des discussions avec les départements
de santé communautaire, on s'est dit: II ne faut pas l'isoler, il faut
qu'il y ait un leadership, mais il faut que tout le monde en fasse. Donc,
l'idée est celle-là. Si quelqu'un a besoin de prévention,
d'après moi, ce n'est pas à l'hôpital qu'il faut qu'il
aille, il devrait aller ailleurs où la prévention est une
dominante des services à dispenser, d'après moi; je vous donne
mon point de vue. Mais ça n'exclut pas que le centre hospitalier de
courte durée puisse dispenser de la prévention, pas en dispenser,
mais ait l'obligation de le faire à partir du moment où les gens
sont à ce niveau-là. Et je continue dans mon exemple. Ça
va être quoi tantôt, la différence entre les centres de
réadaptation et le centre hospitalier au niveau de la
réadaptation? Est-ce qu'on fait un centre hospitalier de courte
durée pour la réadaptation ou si on le fait pour dispenser des
soins qui sont extrêmement importants, à la fois de
première, de deuxième ou de troisième ligne, mais qui,
à partir du moment où ils sont faits, peuvent être
dispensés par les centres de réadaptation? Il me semble que le
noyau dur est clair et que la périphérie, exceptionnellement, il
peut y en avoir, mais que ce soit en complémentarité avec les
plans régionaux d'organisation de services. Il me semble que c'est comme
ça que moi, je le perçois. Évidemment, c'est quoi l'effet
sur la définition de la mission dans la loi? Je vous passe, à ce
moment-là, la parole.
Le Président (M. Gautrin): Alors, Dr Landry ou M.
Favre.
M. Favre: Dr Brunet...
Le Président (M. Gautrin): Dr Brunet.
M. Favre: ...va prendre la parole.
M. Brunet (Jacques): Là-dessus, M. le ministre, je pense
que l'inquiétude de l'AHQ, c'est que la disparition dans la
définition et l'impression que ça donne, c'est qu'il va falloir
demander un peu la permission à la régie pour pouvoir faire de la
prévention et pouvoir faire de la réadaptation, alors que
ça fait partie essentielle... Je veux qu'on le limite, qu'on le balise
à l'intérieur des murs, qu'on n'en fasse pas une fonction
principale, on est d'accord. C'est déjà difficile de vendre dans
nos milieux, à certains de nos professionnels, à l'occasion, que
la prévention ou que la promotion de la santé ou que la
réadaptation est fondamentale dès l'arrivée du malade
à l'hôpital. On peut prendre une personne âgée avec
une fracture de la hanche, les activités de réadaptation sont
essentielles dès le départ. Ce qu'on aimerait, c'est que le texte
de loi laisse clairement entendre, quitte à le baliser, que ce n'est pas
exclu et que, pour faire ça, il ne faut pas demander une permission
à la régie régionale. Ça fait partie de la mission
de l'hôpital, particulièrement à l'interne. Vous me dites
que ce n'est pas exclu, mais il reste que le fait de le faire
disparaître, le fait de ne pas en parler, le fait de l'insérer
ailleurs et de laisser entendre qu'il faut demander des permissions, c'est un
peu exclu.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas C'est parce que
dans le sens de permission, je pense que ça traduit bien, là, la
manière dont vous le voyez, finalement, dans quel ombre on est. En tout
cas, pour moi, il me semble qu'il n'y aurait pas de problème à
demander à quelqu'un et à ceux qui auront la planification sur le
plan régional de s'assurer de la complémentarité des
services à dispenser au niveau d'une région. Mais je comprends
dans quel sens vous l'évoquez. On va l'examiner parce que notre objectif
était très clair pour tout le monde, que la mission, le noyau dur
soit très clair, qu'on permette de la périphérie, mais,
évidemment, la périphérie s'ajoute à partir du
moment où on a l'autorisation, où on va chercher l'autorisation,
et dans un plan plus global, sur le plan de la régionalisation des
services. Donc, c'est un peu ça. Je ne sais pas s'il y a autre chose
à ajouter là-dessus.
Deuxième petite question - bien, petite, elle est grosse aussi -
c'est sur les centres hospitaliers de soins de longue durée. Est-ce
qu'idéalement parlant - ce n'est pas mon habitude de me cacher trop trop
- les centres hospitaliers de soins de longue durée devraient être
rattachés à d'autres établissements qu'un centre
hospitalier de soins de courte durée? Je vous pose la question,
très direct. Historiquement partant, il y a des centres hospitaliers de
soins de longue durée qui ont reçu des permis du
ministère, parce que ça rendait bien service au ministère.
On a transformé des lits, au cours des années, de courte
durée en longue durée et ça a bien fait paraître le
ministère; ça a fait l'affaire des centres hospitaliers aussi,
j'imagine. Sur le plan des missions très claires, quel est l'avantage
d'avoir des lits de longue durée rattachés à la courte
durée? Je vais vous poser l'exemple d'un hôpital en particulier,
que j'ai entendu tantôt sur les centres de santé; je suis
convaincu que mon ami Pelland vous en a glissé un petit mot parce que
quand j'ai séjourné à l'hôpital, il a pris soin de
me rendre visite comme citoyen consommateur pour me parler de son centre de
santé et des merveilles de son centre de santé.
Évidemment, quand il y en a de rattachés à
l'hôpital, après le même building, c'est une affaire, mais
quand il y en a d'éparpillés dans le champ, c'est une autre
chose. Je vous la pose telle quelle. Comme vous voyez, il n'y a pas
d'arrière-pensée, c'est assez clair.
Le Président (M. Gautrin): Qui va répondre? M.
Landry.
M. Landry: S'il vous plaît. Peut-être que le Dr
Brunet a des choses à ajouter. M. le ministre, mon argumentation... M.
le Président...
M. Côté (Charlesbourg): Non, non. Il n'y a pas
d'insulte à appeler M. le Président, M. le ministre. Ça
fait longtemps qu'il souhaite ça.
M. Landry: Mon argumentation...
M. Côté (Charlesbourg): On a toujours du "fun", M.
le Président.
M. Landry: ...elle rejoint tout à fait le sens, l'esprit,
le c?ur même de votre réforme, c'est celle de la
continuité des soins pour les personnes âgées en perte
d'autonomie. Écoutez, dans nos hôpitaux de courte durée, 50
% des jours d'hospitalisation, la moitié de nos jours d'hospitalisation,
c'est des personnes de 65 ans et plus. Et la tendance va en augmentant.
Ça veut dire, ça, que le "know-how", l'expertise, le savoir-faire
pour prodiguer des soins de longue durée à une clientèle
en perte d'autonomie de plus en plus grande et volumineuse, c'est essentiel,
ça, dans le système. Il ne faut pas compartimenter ça. Il
faut intégrer ça. Et l'évaluation gériatrique en
courte durée - habituellement, c'est là que ça se fait -
il ne faut pas la séparer du restant. C'est une partie du tout. Et dans
nos hôpitaux de courte durée, on a besoin de cette
expertise-là en longue durée. Il ne faut pas l'isoler et la
séparer. Au contraire, il faut en plus... Et le rapport sur les urgences
va vous le dire et le Dr Brunet pourrait en ajouter, un des gros
problèmes d'engorgement des salles d'urgence, c'est l'attitude que nos
hôpitaux et nos médecins ont vis-à-vis des patients
âgés et des patients de longue durée. Alors, il ne faut pas
compartimenter. Il faut qu'on demeure présents là-dedans. Il faut
que l'interaction et l'interface se fassent facilement. Alors, pourquoi ne pas
garder centres d'hébergement et de soins de longue durée,
acoquinés, mariés, en complémentarité,
chapeautés, intégrés avec des hôpitaux de courte
durée? Il n'y a pas de logique pour défaire ça.
C'était même la logique de votre avant-projet de loi. Vous le
savez. C'est la voie de l'avenir. Et si vous voulez réellement briser
les fiefs des associations d'établissements ou des établissements
particuliers, peut-être que la meilleure manière, c'est de
favoriser plus de complémentarité et d'intégration et de
communication entre les types d'établissements.
M. Côté (Charlesbourg): Quand on pousse plus loin,
parce qu'en vous écoutant, je trouve qu'il y a des bouts qu'ils ont bien
raison, hein... Je vais poser la même question à l'ACAQ
tantôt, on va voir quelle réponse qu'on va avoir. Donc...
M. Landry: Ça ne sera pas les mêmes
sûrement.
M. Côté (Charlesbourg): ...tout le monde est
avisé tout de suite, pour qu'il n'y ait d'équivoque. Bon,
maintenir l'expertise, vous avez, dans un centre hospitalier de 400 lits, 100
lits qui sont réservés pour des personnes âgées. Il
n'est pas question de prendre l'aile de l'hôpital et dire: Parfait, on la
déménage. Mais à partir du
moment où c'est un centre d'accueil d'hébergement qui est
complètement autonome et qui est à l'extérieur, est-ce
qu'il n'y a pas une distinction quand même entre les deux?
M. Landry: II y a une distinction, mais ça marche bien
actuellement. Évaluez-les, les centres de longue durée qui sont
intégrés dans les ensembles de santé. Ça marche
bien. Pourquoi défaire ça? Le monde est heureux. Ça se
fait de façon volontaire. Gardez donc de la souplesse là-dedans
plutôt que d'Imposer avec une loi un modèle mur-à-mur qui
ne sera pas acceptable. Moi, en tout cas...
M. Côté (Charlesbourg): Pour finir avec une petite
question, parce que j'en ai une bonne. Je vous connaissais un peu. J'ai
commencé à préparer le terrain. On dit que dans le cas des
centres hospitaliers d'hébergement de longue durée, 600 lits -
pour prendre l'exemple de Saint-Hyacinthe - ça peut être gros.
C'est quoi, la différence entre un centre hospitalier ou
d'hébergement pour personnes âgées à 600 lits qui
est trop gros par rapport à un centre hospitalier de courte durée
qui en a 900 ou qui en a 800 ou qui en a 700 ou qui en a 600? C'est quoi?
Est-ce que, pour un, c'est bon, pour l'autre, ça ne l'est pas ou...
M. Brunet: Ils sont tous les deux trop gros, M. le ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Brunet: Ils sont tous les deux trop gros.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Landry: À moins, M. le ministre et M. le
Président, qu'on ait une gestion véritablement
décentralisée, intégrée mais
décentralisée. C'est possible, ça. Il y a moyen de
remettre aux gestionnaires, sur les unités de soins, plus de manoeuvre,
plus d'autonomie, une philosophie de gestion différente qui va faire que
ça va bien fonctionner.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. en terminant... Le
Président (M. Gautrin): En conclusion.
M. Côté (Charlesbourg): "Fondations", les papillons
ont l'avantage, à l'occasion, d'ajouter des choses et il y a des
papillons qui ont l'avantage d'enlever des choses. Donc, à ce
moment-là, je pense que le problème va être assez clair au
niveau du papillon quant aux préoccupations.
Dernière question: noyautage. Ça m'achale et ça
m'effraie d'entendre ce que j'entends sur les possibilités de noyautage.
Dites-moi ce qui pourrait mettre en péril un conseil d'administra- tion
d'un centre hospitalier alors que... Prenons l'hôpital Notre-Dame
à Montréal comme exemple. Il va y avoir quatre personnes
nommées par l'assemblée générale. Il va y avoir
trois personnes venant du personnel, trois de la corporation, une personne de
la fondation, deux représentants d'université, le D.G., plus deux
cooptés, ce qui veut dire qu'il y aura d'élues au suffrage
populaire quatre personnes sur 16. Je ne comprends pas, moi. Évidemment,
je sais qu'à l'occasion, à Montréal, il s'est passé
des choses où des gens se sont mobilisés et ont effectivement
paqueté la salle. Dans les assemblées tel que prévu, les
syndicats, les employés n'ont même pas le droit de vote. Je ne
comprends pas cette peur du noyautage des assemblées publiques.
Expliquez-moi à nouveau. (17 h 45)
M. Favre: Brièvement...
Le Président (M. Gautrin): M. Favre.
M. Favre: Je pense que, lorsqu'on parle de noyautage, nous
voulons des conseils d'administration qui soient diversifiés, où
les personnes aient des qualités pour gérer un système. Ce
sont des citoyens décideurs; ce sont des citoyens qui ont une
responsabilité. Et on se dit que si le noyautage n'est pas
nécessairement un mauvais noyautage, il pourrait arriver que quatre
membres d'un conseil d'administration soient finalement peu opérants.
Ça serait très gênant; ça serait des citoyens
décideurs, mais qui finalement ne représenteraient pas la
population. Moi, ce qui me préoccupe dans tout ça, c'est qu'ils
doivent représenter la population, et on risquerait d'avoir, par suite
disons, d'un concours de circonstances, où quatre personnes se feraient
élire, qui auraient un peu les mêmes idées, un peu les
mêmes pensées, et tout ça. Sans faire de procès
d'intention malheureux quant à ces personnes-là, elles auraient
peut-être de bonnes intentions, mais comme citoyens décideurs, ce
n'est pas certain que l'hôpital va gagner. Et ensuite, il me semble que,
lorsqu'on regarde un peu plus loin, ce sont ces élus et les
représentants des services communautaires qui ont le droit de passer
à la régie. Est-ce que ceci reste encore dans le projet de
loi?
M. Côté (Charlesbourg): C'est les gens du conseil
d'administration...
M. Favre: N'importe qui?
M. Côté (Charlesbourg): ...au niveau de la
régie qui n'ont pas de... Ce ne sont pas des employés. C'est les
gens du conseil d'administration qui ne sont pas des employés de
l'établissement.
M. Favre: C'est-à-dire que la régie, M. le
Président, si je comprends bien, les 40 % qui
représentent les membres des conseils d'administration, tout
membre de conseil d'administration est éligible à la
régie.
M. Côté (Charlesbourg): Sauf les
employés.
M. Favre: Sauf les employés. Ah bon! Parce que le texte de
loi n'est pas clair là-dessus. Quand on le lit, on...
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, c'était
clair.
M. Favre: En tout cas, il faudrait le vérifier, parce ce
qu'on peut faire l'interprétation que seuls les élus...
M. Côté (Charlesbourg): Mais... M. Favre:
...peuvent arriver à la régie.
M. Côté (Charlesbourg): Si c'était ça,
est-ce que ça changerait vos appréhensions?
M. Favre: M. le Président, je comprends que des
élus, c'est nécessaire. On n'est pas encore au point où
ils seront tous élus. Mais je me pose la question. Qui va se faire
élire, va présenter un programme? Dans le fond, c'est une
élection. Donc, on va avoir un programme électoral. Et on va dire
quoi dans un programme électoral? On va se faire élire pour
être d'accord avec le gouvernement, pour être contre le
gouvernement, pour dire: Cet hôpital, c'est affreux, on manque d'argent?
Alors que vous savez très bien qu'on a peu de chose à dire sur
l'argent qui vient à l'hôpital. Est-ce que les élus vont
avoir vraiment un mot à dire particulier par rapport à ce qui se
fait aujourd'hui? C'est donc une préoccupation électorale que
j'ai de qualité que les élections permettent d'amener au conseil
d'administration des élus qui sont des citoyens décideurs
parfaitement responsables et conscients de leurs responsabilités et de
l'importance qu'ils ont dans le réseau, pouvant aller jusqu'à la
régie, donc pouvant finalement avoir de l'importance quant à la
distribution des masses monétaires.
Le Président (M. Gautrin): Merci. En conclusion,
peut-être, M. le ministre, parce qu'on a dépassé le temps
actuellement.
M. Côté (Charlesbourg): je suis heureux d'apporter
l'éclaicissement que c'est les membres du conseil d'administration sauf
les employés, et encore, qu'il y ait des amendements au niveau de la
régie régionale, que nous allons apporter pour permettre des
postes cooptés, à l'intérieur desquels il pourrait se
retrouver des employés au niveau de la régie
régionale.
Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Au nom de la
commission, je veux remercier l'Association des hôpitaux de s'être
déplacée et de sa présentation. J'appellerai maintenant
l'Association des centres d'accueil du Québec, s'il vous
plaît.
M. Dolan.
La Secrétaire: il n'est pas là.
Le Président (M. Gautrin): II n'est pas là. Je suis
ravi de vous souhaiter la bienvenue à l'Assemblée nationale, Me
Clair. Est-ce que vous représentez les gens qui sont au bout?
Association des centres d'accueil du
Québec
M. Clair (Michel): M. le Président, je me présente.
Michel Clair, directeur général de l'Association des centres
d'accueil du Québec. Je vous présente la délégation
qui m'accompagne, en commençant par ma gauche. Il y a d'abord M. Pierre
Lamarche, président de la Commission des centres de réadaptation
pour personnes alcooliques et toxicomanes, M. Gaston Robert, président
de la Commission des centres de réadaptation pour jeunes en
difficulté d'adaptation. À ma droite immédiate, Me
Christiane Lepage, conseillère juridique de l'Association; ensuite, M.
Jean-Yves Poisson, président de la Commission des centres d'accueil
d'hébergement, et M. Gilles Proulx, trésorier de
l'Association.
M. le Président, je n'insisterai pas sur la présentation
de notre association qui regroupe également deux autres familles, soit
des centres de réadaptation en déficience intellectuelle et de
réadaptation en déficience physique.
J'entrerai immédiatement dans la présentation, non pas de
notre mémoire puisque j'ai eu l'occasion effectivement, tant du
côté gouvernemental que du côté de l'Opposition, de
sensibiliser les parlementaires à l'ensemble de nos propositions et
commentaires contenus dans un document extrêmement
détaillé, avec des amendements à la forme prêts
à être adoptés, sinon "prêts-à-porter". Alors,
je dirai simplement que les présentations qu'on a eu l'occasion de
faire, tant du côté ministériel que du côté de
l'Opposition, nous ont semblé, en privé, en tout cas, être
extrêmement bien accueillies, ce qui fait qu'on vient ici aujourd'hui, en
toute confiance, les présenter publiquement.
J'insisterai, dans un premier temps, sur six éléments de
préoccupation communs à l'ensemble des centres d'accueil
d'hébergement et des centres de réadaptation. Vous savez que ce
sont les établissements de réadaptation et d'hébergement
qui sont principalement concernés par l'unification des conseils
d'administration. Ce que nous souhaitons à ce sujet-là, nous
acceptons, nous sommes favorables à cette initiative, mais nous
demandons avec insistance une mesure transitoire pour permettre aux 5000
membres actuels de conseils d'administration des établis-
sements que nous représentons de pouvoir foncier les nouveaux
conseils d'administration, non pas pour empêcher la réforme, mais
au contraire pour assurer que celle-ci pourra permettre l'intégration
des cultures d'établissements différents, qu'il y aura une
continuité dans le changement, une maîtrise de celui-ci et que,
dans l'intérêt de nos clientèles, nous minimiserons les
risques de dérapage dans la prestation des services aux
bénéficiaires.
Deuxième préoccupation générale à
l'égard de l'ensemble de nos membres. Nous souhaitons - et cela pourra
vous surprendre, d'après ce que vous venez d'entendre - quant à
nous, qu'il y ait encore plus de précisions, plus de clarifications dans
les missions des différents centres de services, pour des raisons qui
touchent tant l'usager que l'administration. Pour l'usager, nous pensons que la
clarté dans les missions simplifiera la compréhension du
rôle des différentes catégories de centres et
évitera, en ce qui concerne l'administration, la compétition
entre les établissements.
Le projet de loi fait un grand pas dans la précision des
rôles et responsabilités des différents types
d'établissements, mais il y a encore place à amélioration.
Nous croyons en la théorie du noyau dur, et celle-ci doit conduire,
à notre avis, à réduire au minimum les chevauchements de
responsabilités et favoriser une certaine pureté, entre
guillemets, de mission. Quelques exemples rapides au niveau du projet de loi.
On pense que, par exemple, entre les centres locaux de services communautaires
et les centres de réadaptation, les notions de services sociaux courants
de réadaptation et de réinsertion qui sont
généralement plutôt compris comme étant des
fonctions de deuxième ligne que de première ligne
mériteraient d'être précisées parce que ça
pose des problèmes en toxicomanie, en déficience intellectuelle,
pour les jeunes en difficulté d'adaptation.
Notre solution: nous pensons que, oui, les CLSC ont un rôle
à jouer là-dedans, mais que l'expression seule de "services
sociaux courants" pourrait être suffisante. Quelques autres exemples.
Entre les centres de protection de l'enfance et de la jeunesse et les centres
de réadaptation pour jeunes, il y a des problèmes à
l'égard des responsabilités en ce qui concerne les familles
d'accueil qui recrutent, qui recourent, qui gèrent; même chose en
ce qui concerne - et vous en parliez tantôt, on pense qu'il y a un grand
pas de fait - la précision des centres de réadaptation physique
et des hôpitaux, mais on pense que, même sur le plan de la
constitution des conseils d'administration et de la mission de ceux-ci, il y
aurait éventuellement des précisions à apporter.
Une conclusion très rapide sur ce point-là. J'ai entendu
l'argumentation du Dr Landry sur la souplesse. Nous, les centres d'accueil, on
peut vous dire bien simplement ceci, par expérience:
La théorie de la souplesse dans la biologie propre au
réseau "sociosanitaire", ce à quoi ça a conduit, c'est
beaucoup plus à ce que les plus gros puissent faire à peu
près n'importe quoi. Si l'on prend le problème à l'envers
ou autrement, avez-vous déjà vu ça un centre de
réadaptation pour personnes alcooliques et toxicomanes ouvrir, je ne
sais pas moi, un service de maternité ou bien non ouvrir un service de
réadaptation en déficience intellectuelle? Est-ce qu'on a
déjà vu un centre d'hébergement pour personnes
âgées décider comme ça d'ouvrir un service en
santé mentale de façon large? La souplesse dans les missions a
plutôt conduit à faciliter à ce que les plus gros
établissements puissent faire ce qu'ils voulaient. Quant à la
précision des rôles, l'autre souplesse, quant à moi, c'est
l'autoroute qui conduit à la fusion des mandats.
La troisième préoccupation générale: la
répartition des pouvoirs entre les régies et les
établissements. Nous pensons qu'il faut beaucoup plus d'autonomie aux
établissements pour réaliser la réforme. On est d'accord
avec les grands objets, les grandes fonctions des régies, mais nous ne
le sommes pas avec la kyrielle de petits contrôles bureaucratiques a
priori des régies sur les établissements, en matière
administrative. Je pourrais vous en faire une longue liste: l'autorisation
préalable pour réparer nos immeubles pour qu'une fondation puisse
acheter un fauteuil gériatrique, pour un contrat de déneigement.
Il y en a toute une série à éliminer. Je sais que le
ministre a été sensible à ces points de vue. Nous, ce
qu'on favorise, c'est sur le plan local, l'imputabilité locale et le
contrôle a posteriori
Quatrième préoccupation générale: soumettre
l'exercice des pouvoirs des régies à un certain nombre de
critères. Encore là, par expérience, à titre
d'établissement de taille moyenne généralement, on sait
à quel point les influences politiques au niveau national comme au
niveau régional peuvent jouer un rôle quand vient le temps
d'extensionner la mission de certains établissements. Si l'on veut
véritablement - ah oui! vous avez eu l'occasion d'en parler à
notre colloque, ça remonte à de nombreuses années - que
les décisions que prendront les régies ne soient pas
basées sur la force des lobbies politiques de catégories
d'établissements, mais sur des critères valables en
matière administrative, on pense que l'efficacité,
l'économie et l'efficience dans l'utilisation des ressources devraient
être des critères obligatoires dans l'extension des missions
complémentaires.
Cinquième préoccupation générale:
l'initiation du changement pour les établissements devrait partir de la
base. On ne remet pas en cause les responsabilités des régies,
mais quant à l'article 95 qui prévoit la possibilité de
tenir compte d'un grand nombre de situations, nous pensons qu'il serait valable
que tous les établissements éventuellement concernés par
un regroupement de conseils aient une période de 90 jours
suivant l'entrée en vigueur de l'article 447 qui assure la
transformation des CRSSS en régies pour soumettre des propositions ou
une proposition de formation du conseil d'administration. Les régies en
feront ce qu'elles voudront par la suite, mais, au moins, pour les gens qui
auront à prendre des décisions, qu'ils aient, avant de le faire,
un peu l'opinion des établissements à la base.
Je pense maintenant à des préoccupations plus
spécifiques par famille - je vais assez rapidement, c'est un peu un
exercice de jogging intellectuel avant le souper - d'établissements,
celles que nous représentons. En ce qui concerne les centres d'accueil
d'hébergement, trois grandes préoccupations. Premièrement,
l'article 88. Nous insistons fortement pour que tous les lits
d'hébergement de type centres d'accueil d'hébergement et de
centres hospitaliers de soins de longue durée actuels soient
confiés pour gestion au même conseil d'administration
unifié, y compris et surtout ceux gérés actuellement par
des hôpitaux de courte durée. On ne peut pas avoir deux poids,
deux mesures. On ne peut pas avoir deux réseaux de centres d'accueil
d'hébergement ou de centres d'hébergement de soins de longue
durée; un qui est, je dirais, un pilier fondamental dans le continuum de
services et qui assume une certaine autonomie sur le plan de la
spécificité de sa mission et un autre qui est géré
par le réseau hospitalier de courte durée. Des arguments:
cohérence de la mission, bon fonctionnement du système
régional d'admission. Si l'on veut qu'il y ait un système
d'admission qui fonctionne, il ne faut pas - je ne veux pas trop argumenter -
que les hôpitaux de courte durée puissent, en dehors d'une saine
concertation entre le CLSC et son maintien à domicile, le centre
d'hébergement et de soins de longue durée, son centre de jour et
un système d'admission qui assure une juste circulation, une juste
utilisation des ressources, il ne faut pas qu'en dehors de ça, il y ait
des hôpitaux de courte durée qui puissent utiliser les lits
d'hébergement qu'ils contrôlent à des fins davantage de
préoccupation de la corporation hospitalière que des besoins des
personnes âgées en perte d'autonomie du territoire. (18
heures)
Dans la mesure où on adopte une approche territoriale et
où les CHSLD futurs seront responsables de l'ensemble des personnes
âgées en perte sévère d'autonomie dans un territoire
donné, eh bien, il nous semble que le conseil d'administration
unifié doit avoir une responsabilité sur l'ensemble de ces lits,
sauf exception, et non pas l'inverse.
Deuxième grande préoccupation des centres d'accueil
d'hébergement actuels, c'est de confirmer l'ouverture sur la
communauté de cette catégorie d'établissements par deux
grandes mesures. L'une est déjà prévue au projet de loi:
la responsabilité des centres de jour doit demeu- rer principalement
à la catégorie centre d'hébergement et de soins de longue
durée.
Je pense que tant pour des raisons d'efficacité, d'ouverture sur
la communauté et des raisons de commodité, entre guillemets, on
ne peut pas équiper deux réseaux de places d'hébergement
temporaire, par exemple, celui des CLSC et celui des centres d'accueil. On ne
peut pas avoir deux services alimentaires. Il y en a déjà un dans
les centres d'accueil d'hébergement dans la mesure où on en a
besoin pour les fins du centre de jour. Pourquoi aller en développer un
deuxième ailleurs? Sur le plan matériel des équipements,
sur le plan des espaces disponibles, je pense qu'il y a là une
série d'arguments concrets en faveur du maintien des centres de jour
dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée.
Finalement, une préoccupation un petit peu en dehors de notre
secteur d'activité à l'égard des personnes
âgées, c'est l'agrément des ressources privées des
articles 360 et suivants. Nous avons été des partenaires de
choix, je pense, dans les années 1975-1976, dans l'opération
pavillonnement et la fermeture des foyers illicites, entre guillemets. Nous
pensons que si on veut éviter que naissent dans l'avenir de nouvelles
situations comme celles-là, il faut bien répartir les
responsabilités à trois niveaux: que le ministre soit responsable
de l'établissement des normes, que les régies soient responsables
d'identifier les besoins, d'agréer les ressources et de gérer le
budget, mais qu'en ce qui concerne le contrôle de la qualité des
services cliniques et professionnels, que les centres d'hébergement et
de soins de longue durée en aient localement cette responsabilité
en extensionnant le concept, si on veut, qui a été mis de l'avant
par le pavillonnement au début des années quatre-vingt.
En déficience intellectuelle, quatre préoccupations. On
voudrait bien préciser que le recrutement et le recours, la gestion des
familles d'accueil relève de ceux-ci non seulement pour les adultes
déficients intellectuels, mais également pour les enfants.
Deuxièmement, nous apprécierions une déclaration du
ministre à l'effet que l'article 95 signifie bien que les régies
devront tenir compte d'un critère de masse critique de population
optimale à desservir, soit plus ou moins 150 000 personnes, pour
éviter que l'on crée des établissements qui auraient une
vocation beaucoup trop large sur le plan territorial et quant à la
population à desservir.
Troisième préoccupation, les ressources
intermédiaires. On pense qu'il y a une nécessité de
souplesse dans la définition de ce qu'est une ressource
intermédiaire parce que, si on tente trop de tout prévoir ce
qu'est peut-être une ressource intermédiaire, on pense qu'on
risque de bloquer l'imagination puisque les différentes formules de
ressources intermédiaires, de notre point de vue, n'ont pas fini
d'être inventées.
Finalement, j'insiste sur le fait qu'en ce qui concerne la
déficience intellectuelle, le projet de loi actuel prévoit que
les établissements recevraient, sur référence, toute leur
clientèle. J'attire votre attention sur le fait que déjà
plus de 50 % de la clientèle se présentent directement.
Au niveau des jeunes en difficulté d'adaptation, quatre
préoccupations majeures. La première, l'articulation des services
entre le CLSC et le centre de réadaptation pour jeunes. La lecture qu'on
fait actuellement de l'article 421 empêcherait le CLSC de recourir
directement aux services externes du centre de réadaptation pour jeunes
en dehors d'un placement. Il nous semble que ce n'est pas souhaitable d'obliger
un détour par le centre de protection de l'enfance et de la jeunesse et
qu'une relation bidirectionnelle, si on veut, puisse s'établir.
Deuxième grande préoccupation. La situation de
Montréal, à notre avis, en ce qui concerne les jeunes en
difficulté d'adaptation, ne peut être réglée par le
modèle prévu actuellement, qui conduirait, normalement, si on a
bien compris, malgré les pouvoirs de l'article 95, qui pourrait conduire
à ce que 21 établissements pour jeunes en difficulté
d'adaptation, plus un CSSMM qui est déjà considéré
comme un énorme établissement, que ces 22 établissements
se retrouvent sous un même conseil d'administration. Alors, quant
à nous, on pense qu'une approche territoriale et une approche de
concertation entre les CPEJ de Montréal et les centres de
réadaptation devraient guider tout autant les régies que le
ministre sur cette question-là.
Troisième préoccupation. La gestion des familles
d'accueil. Vous êtes bien au fait de la différence de point de vue
entre l'Association des CSS et la nôtre, en ce qui concerne cette
gestion. Quant à nous, on préconise, c'est vrai, que les familles
d'accueil soient confiées pour gestion aux centres de
réadaptation pour jeunes en difficulté d'adaptation. Nous y
voyons deux avantages. Il peut y avoir - ce n'est pas une médaille qui a
un seul côté - à notre avis, des avantages
définitifs à ce que la gestion soit confiée aux centres de
réadaptation.
Premièrement, une raison d'économie. Si on veut que le
plus tôt possible, dans le processus de réadaptation, le jeune
puisse aller d'une ressource moins lourde vers une ressource plus
légère, il nous semble qu'il y aurait un net avantage à ce
qu'une même autorité hiérarchique fonctionnelle puisse
avoir juridiction sur les deux. Deuxièmement, à l'égard du
jeune lui-même, la continuité du service, les listes d'attente
à raccourcir. Si on veut qu'encore une fois, dans l'intérêt
du jeune, on ait recours le plus rapidement possible dans le processus de
réadaptation à une ressource plus légère que le
centre d'accueil, eh bien, à ce moment-là on pense que la
logique, ce serait qu'il y ait un seul et même décideur, et non
pas deux décideurs.
Dernière préoccupation, en ce qui concerne les jeunes en
difficulté d'adaptation, la neutralité du directeur de la
protection de la jeunesse. On pense, nous, que le modèle qui a eu
tendance à se développer dans certaines régions, à
l'effet de confier à la même personne le rôle de DPJ,
directeur de la protection de la jeunesse, et de gestionnaire de familles
d'accueil, ce n'est pas un modèle souhaitable, ni dans
l'intérêt du jeune, ni dans l'intérêt des
établissements de façon générale. Et nous demandons
que dans la Loi sur la protection de la jeunesse, ou dans celle-ci, soit
clairement prévu que la personne qui assume la responsabilité de
directeur de la protection de la jeunesse ait une sorte d'exclusivité de
fonction, entre guillemets, à respecter.
En déficience physique, des préoccupations auxquelles le
ministre a déjà donné suite dans deux cas majeurs.
À l'égard des conseils d'administration unifiés, le
ministre nous a déjà dit qu'il voulait tenir compte de la
différence entre la déficience visuelle, auditive et motrice, et
on a hâte de voir les amendements à cet effet-là.
Même chose en ce qui concerne l'annonce faite hier à
l'égard de l'abandon de l'impôt-services sur les
orthèses-prothèses. On félicite le ministre. On pense que
cette décision-là était tout à fait
souhaitable.
On entretient, cependant - je l'ai dit tantôt rapidement - une
inquiétude du côté de la déficience physique. C'est
de voir réapparaître la responsabilité réadaptation
dans la mission des hôpitaux de courte durée. Loin de nous
l'idée de penser qu'il faut enlever toute responsabilité aux
hôpitaux de courte durée, à l'égard de la
réadaptation consécutive à l'exercice de la
responsabilité des hôpitaux. Mais on pense que, s'il doit exister
une catégorie d'établissements qui s'appellent centres de
réadaptation pour personnes ayant une déficience physique, leur
responsabilité ne peut pas se trouver à trois, quatre
endroits.
Quatrième préoccupation. La gestion des centres de
réadaptation, qui sont actuellement gérés par des
hôpitaux de courte durée, et le statut d'un certain nombre
d'établissements. Ça crée un malaise parce que ces
établissements-là sont membres associés, par exemple, de
notre Association. L'hôpital Marie Enfant, l'Institut de
réadaptation de Montréal, l'Hôpital de Mont-Joli,
voilà des établissements qui ont un statut d'hôpital et
qui, en partie ou en quasi-totalité, font la même chose, à
toutes fins pratiques, que les centres de réadaptation. On pense qu'il y
a des clarifications à apporter là-dessus.
Pour l'obligation de référence, qui est prévue
à l'article 58, même commentaire que du côté de la
déficience intellectuelle. Plus de la moitié des personnes qui se
présentent en réadaption physique dans nos centres le font
directement sans référence, et on ne voit pas quel
inconvénient cela crée et on ne voit pas quel avantage il y
aurait à les empêcher; donc, on pense qu'il devrait eux aussi
être considérés
comme recevant des personnes principalement sur référence
et non pas exclusivement sur référence.
Personnes alcooliques et toxicomanes, les centres de
réadaptation. Une préoccupation qui pourra surprendre à
première vue, mais elle est beaucoup plus que symbolique. Le projet de
loi propose de les appeler dorénavant simplement des centres de
réadaptation pour personnes toxicomanes, alors qu'actuellement,
l'appellation est "personnes alcooliques et toxicomanes". Il est vrai que, dans
le dictionnaire, on peut inclure les personnes souffrant d'alcoolisme, dans
l'appellation générique "toxicomane", mais dans le langage
commun, pour les personnes que nous desservons, il y a une grande
différence entre, entre guillemets, un alcoolique et, entre guillemets,
un drogué. C'est la façon dont les clientèles parfois se
définissent l'une à l'égard de l'autre. Nous pensons que
ce serait important de conserver l'appellation "personnes alcooliques et autres
toxicomanes". Ce serait, je dirais, plus respectueux, à notre avis, de
l'image que les personnes qui vivent des problèmes d'alcoolisme ou de
toxicomanie ont d'elles-mêmes et ce serait également, pour nous,
l'occasion de rappeler au gouvernement, de façon générale,
que s'il y a une politique intéressante, je dois dire, dans le rapport
Bertrand qui a porté sur les toxicomanies, on semble prendre un peu la
tendance depuis quelques années d'oublier la problématique de
l'alcoolisme. On pense que, non seulement pour les clientèles, mais
comme une sorte de rappel pour les autrorités publiques, l'alcoolisme
présente une problématique particulière qui, oui, fait
partie de la grande problématique de toxicomanie, mais qui mérite
considération particulière.
Deuxième grande préoccupation: le contrôle de la
qualité des ressources publiques et privées. Dans nos centres, on
ne craint pas le contrôle de la qualité, on le souhaite
même, mais on pense qu'il faut extensionner cette
préoccupation-là à l'égard des différents
centres d'accueil privés, entre guillemets, de réadaptation pour
personnes alcooliques, toxicomanes, où on trouve toutes sortes de
choses. On a donc proposé un resserrement des textes en matière
de délivrance des permis et d'agrément pour être bien
sûr que tout le monde satisfait aux normes.
Une dernière préoccupation majeure pour alcoolisme et
toxicomanie. Une insistance en ce qui concerne le processus de
réadaptation. Certaines interprétations, encore une fois - on
espère que ce n'est pas ça qui était l'objectif - en ce
qui concerne la responsabilité des CLSC en matière de
toxicomanie: Oui, on veut travailler avec eux; oui, ils ont une grande
responsabilité de première ligne. On le fait déjà,
on travaille déjà avec eux, mais quand on voit la
réadaptation en matière de toxicomanie apparaître dans le
mandat indirectement des CLSC. on su pose une question sur le plan clinique,
parce que, s'il y a un secteur où la réadaptation ne peut pas
être interrompue en passant de l'établissement A à
l'établissement B, c'est bien en matière de toxicomanie.
Je terminerai, M. le Président, avec une phrase en ce qui
concerne notre sixième famille d'établissements, les centres de
réadaptation pour mères en difficulté d'adaptation qui
verraient leur appellation changer pour s'appeler dorénavant des centres
de réadaptation pour jeunes mères en difficulté
d'adaptation. Il s'agit de cinq établissements au Québec qui ont
un rôle très spécifique. Si on retenait cette
appellation-là, ce serait comme faire disparaître la moitié
de la clientèle qu'ils desservent, puisque la moitié des
personnes desservies au cours de l'année 1989 étaient des
majeures.
S'il me restait deux minutes, M. le Président, dans la
présentation...
Le Président (M. Gautrin): Vous ne les avez pas, mais ce
sera des questions en moins de la part des...
M. Côté (Charlesbourg): Ce qui est important
aujourd'hui, c'est de passer les messages.
Le Président (M. Gautrin): Allez-y.
M. Clair: S'il me restait deux minutes, compte tenu, je sais, de
la difficulté pour les parlementaires et pour le ministre aussi de voir
ce qui est le mieux comme modèle de gestion des familles d'accueil du
côté des centres de réadaptation pour jeunes en
difficulté d'adaptation ou vers les CPEJ, j'aimerais que M. Gaston
Robert, notre président de Commission, puisse peut-être
élaborer une minute ou deux sur ce point là.
Le Président (M. Gautrin): M. Robert.
M. Robert (Gaston): Tout à l'heure, on a fait allusion
à la dimension économique et on a très bien lu dans le
projet de réforme les trois épithètes: efficience,
efficacité et économie. Effectivement - et ça vous est
rapporté régulièrement dans la presse par les temps qui
courent - tous les vendredis après-midi, on se fait ramasser à 16
heures par une conférence téléphonique avec le DPJ, des
gens du ministère, etc., et on est pris avec 3, 4, 5, 6, 10 jeunes qui
ont besoin de place très rapidement, sur une base urgente. Par grandeur
d'âme, très souvent en prenant beaucoup de risques, on accepte ces
jeunes-là, plutôt que de les laisser moisir dans des postes de
police, des choses comme ça, on les prend dans des salles d'isolement
puis dans des endroits moins appropriés dans nos établissements,
et le lundi, on a le comité de protection des droits des jeunes sur le
dos. On est en situation d'engorgement, actuellement. Il y aurait une
façon simple actuellement et on est en train de l'évaluer dans ma
région. C"est de voir s'il n'y aurait pas rapidement possibilité
de faire
débouler en cascade des jeunes qui occupent des places lourdes
institutionnelles vers des places intermédiaires moins lourdes. Et
ça, c'est plus facile quand on gère l'ensemble, tout l'arsenal,
ou tout l'éventail de ces ressources-là. Quand il y a des
ratées dans le milieu de la chaîne, qu'on ne gère pas,
c'est plus compliqué. Ce qu'on dit: Si on gérait des familles
d'accueil au même titre que les autres ressources de prises en charge des
jeunes, ça pourrait être plus facile par la gestionnaire unique
d'équilibrer ce type de répartition là des jeunes.
Ça se fait chez les autres catégories de centres de
réadaptation. On se demande pourquoi il y a là une anicroche tout
à coup, quand on parie de la jeunesse en difficulté. En tout
cas...
Le Président (M. Gautrin): Merci, M. Clair et M. Robert.
On avait convenu d'ajourner à 18 h 30. Il est 18 h 18. Alors, il
resterait à peu près 9 minutes, même moins que ça.
Bon, alors, 5 à 7 minutes...
M. Trudel: Bon, écoutez...
Le Président (M. Gautrin): ...entre l'un et l'autre. M. le
député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue.
M. Trudel: Écoutez, je pense qu'on a convenu rapidement
avec le ministre que, d'abord, les messages étaient très bien
articulés, et je peux vous dire que - le ministre donnera son message
à lui - l'objectif de l'Opposition, en demandant ces auditions,
c'était pour entendre non seulement des réclamations, mais de
l'argumentation autour des positions en laissant le législateur faire
son devoir, réaliser son travail. Je pense que vous nous
présentez là un ensemble de positions qui sont extrêmement
intéressantes et qui doivent nous préoccuper. Je ne peux pas
revenir évidemment sur chacune d'entre elles. Je me rends bien compte,
cependant, qu'hier soir lorsque le ministre a dit: Moi, je ne m'occupe pas des
convocations, l'Opposition va s'en occuper. J'avais tenté, à un
certain moment, de mettre à la même table l'AHQ et l'ACAQ, j'ai
donc bien fait de sélectionner deux groupes là-dessus, le moins
que l'on puisse dire. Mais, même à ça, je pense qu'on peut
voir chez les deux groupes la responsabilité vis-à-vis des
citoyens, d'une certaine catégorie qui vous préoccupe et d'une
autre catégorie qui préoccupe l'AHQ, et ce que j'apprécie
et ce qui faut être... Je pense que quelque chose qui se dégage de
la journée que nous avons eue ici, c'est la franchise des intervenants,
c'est les messages très clairs qui nous sont parvenus à nouveau
et des dangers qui nous guettent en matière d'administration, en
matière de services à donner aux citoyens du Québec, peu
importe le niveau où on se situe. Et s'il y a - on l'a dit, nous autres,
dans notre discours d'ouverture - un certain nombre de problèmes
où on avait même, on a été francs, de la
difficulté à se brancher, vous ajoutez l'argumentation du
pourquoi on devrait prendre telle ou telle décision.
Alors, là-dessus, moi, je vais tout simplement vous remercier de
votre présentation. Je n'aurai pas de questions, c'était
extrêmement clair. Et vous avez raison, votre document est d'une
clarté impressionnante. On espère là-dessus, avec vous
aussi, qu'on pourra partir pour la fin de semaine avec un nouveau document de
travail, que le ministre pourra déposer ses amendements aujourd'hui, ce
qui faciliterait le travail de tout le monde - parce que c'est lui qui a
initié la législation, évidemment - et ça nous
permettrait, tel que nous nous sommes entendus, de dire mardi matin, 9 h 30:
Nous commençons à l'article de ce projet de loi et que nous...
Mardi matin? Mardi après-midi, 15 h 30, 16 heures, nous pourrions
commencer notre travail et répondre en cela à un souhait, pas
quant aux amendements uniquement, de la plupart des groupes aujourd'hui en
disant: Ce processus, comme l'a souhaité le ministre lui-même
à d'autres égards, soit le plus ouvert possible pour que nous en
arrivions à une loi qui nous permette toujours de dire aux citoyens et
citoyennes du Québec: Nous pensons vous donner un produit qui va faire
en sorte qu'on va avoir un meilleur service en particulier avec ce que nous
avons entendu aujourd'hui dans le cadre de ce que nous avons à faire
comme travail, en commission parlementaire et ensuite à
l'Assemblée nationale. Soyez donc sûrs que vos messages sont
très bien reçus et que nous verrons systématiquement
à prendre le temps nécessaire pour faire en sorte qu'on aille au
fond des choses sur chacune des dimensions extrêmement importantes que
vous avez soulevées et qui ont été étayées
par des arguments. Alors, merci beaucoup de votre présence, de vous
être déplacés si rapidement que cela et de nous avoir fait
cette excellente présentation.
Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. le
député. M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. À mon tour, je ne veux pas ajouter à vos
supplices. En entendant la présentation, je lisais en diagonale vos
représentations, ça me paraissait assez fidèle au document
qu'on a reçu, et il ne m'a pas semblé y avoir de choses neuves
par rapport à ce que vous avez véhiculé, à moins
que je n'en aie échappé, et c'est fort possible. Donc, il y a,
dans les papillons, plusieurs réponses à vos interrogations.
Alors, ce que j'ai compris, vous représentez des gens qui se situent,
sur le plan géographique de l'organisation, des fois au centre, et ce
que vous sentez, c'est grugé par la périphérie d'un peu
partout, et la tentative que vous faites, c'est de bien nous
signaler que nous avons davantage intérêt à
définir clairement les émissions et les zones grises, pour
éviter que finalement il y ait duplication ou qu'on retrouve le citoyen
entre les deux. Et ça, je pense que c'est un message qui est très
très clair dans les messages que vous nous avez passés.
Évidemment, les papillons seront éventuellement
déposés. Dans à peu près tous les messages qui ont
été passés, tantôt vous avez trouvé les
réponses satisfaisantes, tantôt certainement que vous trouverez
que les réponses ne sont pas satisfaisantes. Quand je m'adresse à
un ex-parlementaire - et c'est toute la marge de manoeuvre que peut avoir un
parlementaire et un ministre en plus, surtout quand il a été
ministre - et qu'effectivement, lorsque vous évoquez la
nécessité d'oxygène additionnel, par rapport au projet de
loi, c'est vrai... Et je pense que les papillons vont dans ce sens-là.
À l'étude article par article, si jamais on ne devait pas aller
suffisamment loin ou aller aussi loin qu'on le pense dans le libellé, on
examinera jusqu'où on peut aller, compte tenu des obligations qu'on a
aussi sur le plan de notre propre imputabilité, l'idée
étant qu'il faut donner cette souplesse et aussi cette marge de
manoeuvre au niveau des établissements pour qu'ils puissent remplir leur
rôle et qu'on puisse leur frapper sur les doigts après, dans la
vérification de la qualité. Et ça, je pense que c'est une
de nos responsabilités. Ce qu'on ne s'est même pas dit en cours de
journée, c'est qu'il y a des responsabilités qui incombent au
sous-ministère, on n'en a pas beaucoup parlé, parce qu'au
ministère, je les ai retenus, ils voulaient venir témoigner, j'ai
dit: Non, non...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Pour défendre leur
intérêt, j'ai dit: C'est M. Trudel qui fait les invitations
et...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): ...alors, à ce
moment-là, il ne faut pas faire en sorte que le ministère vienne
occuper trop trop de place dans cette histoire-là. Et il aura l'avantage
de s'exprimer par la voix du ministre au cours de cette étude. J'avais
posé une question tantôt l'AHQ, et vous en avez profité,
vous n'avez pas perdu la main encore...
M. Clair: J'en ai encore à ajouter.
M. Côté (Charlesbourg): Vous n'avez pas perdu la
main parce que j'ai bien vu, dans la présentation, que vous en avez
profité pour passer l'essence de votre message. Alors, merci beaucoup.
Si je n'ai pas de questions, ce n'est pas parce que ce n'est pas
d'intérêt, mais je pense que poser une question pour me faire dire
"oui", si vous faisiez ça, vous seriez bon, ce n'est pas
nécessairement le but de l'exercice. Et on verra après les
papillons. Il doit y avoir possibilité de se parler par la suite.
Merci.
Le Président (M. Gautrin): Avez-vous des commentaires
finaux à ajouter, Me Clair?
M. Clair: Je voudrais peut-être insister brièvement
sur une chose, en ce qui concerne la responsabilité ministérielle
à l'égard des établissements et des pouvoirs des
régies. Entendons-nous bien, on ne vise pas du tout à faire en
sorte que les établissements, sur le plan de leurs programmes, sur le
plan de leur gestion, soient libres de faire ce qu'ils veulent, mais il nous
semble qu'en matière administrative, les contrôles a priori qui
sont prévus par les régies sont beaucoup trop nombreux et
beaucoup trop pointus. Et je pense que c'est sur ça qu'il y a des choses
à faire, sans pour autant laisser les établissements aller
à leur gré.
Dépôt de commentaires
Le Président (M. Gautrin): Alors, au nom de la commission,
je vous remercie de vous être déplacés. Je voudrais faire
un dépôt pour rendre un ensemble de commentaires qui ont
été transmis à la commission. Je dépose des
commentaires des organismes suivants, sur le projet de loi 120, Loi sur les
services de santé et les services sociaux et modifiant diverses
dispositions législatives: l'Association des centres d'accueil du
Québec, l'Association des centres de services sociaux du Québec,
l'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens du
Québec, le Barreau du Québec, la Coalition des aînés
du Québec, la Commission d'accès à l'information, le
Curateur public du Québec, la Fédération des associations
des étudiants en médecine du Québec, la
Fédération des médecins omniprati-ciens du Québec,
la Fédération des médecins résidents du
Québec, l'Institut conjoint hospitalier de Montréal, et le
Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec.
La commission ayant rempli... Non, la commission ajourne ses travaux
sine die. Elle n'a pas encore fini de remplir son mandat, ça, c'est
clair. Ha, ha, ha!
(Fin de la séance à 18 h 27)