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(Onze heures vingt-quatre minutes)
Le Président (M. Joly): Je déclare la séance
ouverte. Je vous rappelle le mandat qui fait en sorte que la commission des
affaires sociales se réunit afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 97 qui est la Loi
modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions
législatives. On me fait mention, Mme la secrétaire, qu'on a des
remplacements.
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Marois
(Taillon) sera remplacée par Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve); M.
Paradis (Matapédia) par M. Poulin (Chauveau) et M. Williams (Nel-ligan)
par M. MacMillan (Papineau).
Étude détaillée (suite) Loi sur
les normes du travail (suite) Demande de renseignements (suite)
Le Président (M. Joly): Afin de se rappeler où nous
en étions à la fin de nos travaux hier soir, à minuit, je
vous remémore que nous étions à l'article 87, introduit
par l'article 38. Deux amendements, c'est-à-dire un amendement soumis
par Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière et un
amendement soumis par M. le ministre, nous ont été
présentés et les deux ont été jugés
recevables. Alors, à nous, maintenant, d'en disposer.
Alors, je vais commencer, par celui soumis par Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière, car c'en est un qui
vient, qui précède, si on peut dire... Ça devient un
alinéa, qui devient un premier alinéa, donc devançant
celui qui était proposé dans le projet de loi. Alors, on a, comme
je l'expliquais, deux choix: ou on en dispose par vote, ou vous avez le droit
aussi de le retirer, si vous voulez.
Mme Carrier-Perreault: On peut en discuter un par un, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Je n'ai pas d'objection. Je pense
qu'on a déjà touché quand même le fond. On a aussi
touché la forme et la recevabilité et on a aussi débattu,
là, d'une façon un peu moins contrôlée, hier, le
fond, mais, s'il y a d'autres arguments à apporter ou d'autres
éléments qui peuvent aider avant qu'on procède à la
disposition, je suis prêt à entendre les intervenants. Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière.
Mme Carrier-Perreault: Par rapport à l'amendement qu'on a
apporté hier, nous autres, le long amendement qui touche l'affichage,
d'une part, l'avis pour l'affichage des normes minimales de travail et aussi
des diverses dispositions de la Charte des droits et libertés concernant
le travail, si j'ai apporté cet avis-là, cet
amendement-là, pardon, c'est que, justement, je trouve que c'est une
lacune. Plusieurs soulignent le manque d'information au niveau des
règles, au niveau de la Loi sur les normes du travail. Je sais qu'il y a
des groupes qui nous en avaient parlé, particulièrement Au Bas de
l'échelle nous en avait parlé et ce n'est un secret pour personne
d'ailleurs. Je pense que c'est important. Le ministre nous disait que des
copies à tout le monde, c'était onéreux pour les
entreprises. Disons que, sur demande, ils devront sûrement en procurer
aux travailleurs, c'est un fait, mais il reste que le fait d'afficher donne une
chance supplémentaire aux gens de prendre l'information
nécessaire.
Par rapport aux différents articles concernant le travail dans la
Charte des droits et libertés, disons que, si les normes du travail sont
peu connues par les travailleurs, il semble aussi que les travailleurs
connaissent encore moins certaines dispositions de la Charte des droits et
libertés. J'aimerais terminer mon intervention et M. le ministre aura
sûrement des choses à ajouter après, M. le
Président.
Alors, le fait d'ajouter certaines dispositions concernant le milieu de
travail, concernant les règles qui régissent le travail qui sont
déjà incluses dans la Charte des droits et libertés, je ne
vois pas cela comme grave ou dangereux, je trouve même ça
intéressant et important. Déjà, dans la Loi sur les normes
du travail, on se réfère à d'autres lois et c'est
accepté par rapport à la législation. On peut faire des
références - on parle du Code civil; on y fait
référence de toute façon - et, par rapport aux
règles qui sont contenues dans la Charte des droits et libertés,
ce faisant, M. le Président, on permettrait de faire connaître aux
travailleurs les différentes règles concernant la discrimination,
les différentes règles concernant le harcèlement.
On a beaucoup parlé, au début de la commission, à
différents articles, des possibilités d'inclure le
harcèlement quelque part et on se souvient de ce que la Commission des
droits de la personne avait donné comme recommandation. J'aimerais quand
même vous réitérer la recommandation de la Commission des
droits de la personne: "Afin d'orienter le régime de proteG-tion des
droits et libertés dans le sens de la prévention, l'obligation de
l'employeur de se doter d'une politique contre le harcèlement
devrait être inscrite à la loi des normes minimales. Il est
toutefois approprié de référer spécifiquement
à la Charte des droits et de préciser, même si cela n'est
pas légalement nécessaire, que toute violation donne ouverture
aux recours prévus," etc. C'était une recommandation, à ce
niveau-là, de la Commission des droits de la personne. Ça
permettait évidemment aussi autre chose. À ce niveau-là,
c'est un dossier qui me tient à coeur et je trouve que c'est important
de le répéter et de le redire pour que tout le monde soit au
courant et que ce dossier-là avance un peu plus vite et un peu plus
rapidement que ce qui s'est fait jusqu'à date, ce serait le dossier de
l'équité salariale.
Au niveau de ta Charte des droits et libertés, on sait que le
principe est reconnu, à l'article 19 - si ma mémoire est
fidèle - le principe du salaire égal pour un travail
équivalent, c'est là qu'il est reconnu, et, le Québec,
dans ce sens-là, avait un peu innové en inscrivant le principe du
travail équivalent dans la Charte des droits et libertés. Sauf
que, depuis ce temps-là, M. le Président, on a pris du retard et
il semble que, depuis 15 ans, ça n'a pas beaucoup avancé comme
dossier. On sait qu'il y a encore beaucoup d'inégalités, que les
fonctions et différents postes sont sous-évalués encore
aujourd'hui, surtout des postes à forte population de travailleuses.
Alors, en ce faisant, ça permettrait évidemment à
tous, surtout aux travailleurs évidemment, de savoir que ce
principe-là, le principe de l'équité salariale est reconnu
au Québec. Ils pourraient sûrement, à ce moment-là,
faire peut-être des demandes supplémentaires au niveau de la
Commission des droits de la personne, parce qu'on sait que la Commission c'est
un système à plaintes, on sait aussi qu'il n'y a quand même
pas eu beaucoup de plaintes et je suis persuadée que la
méconnaissance y est pour beaucoup. C'est sûr que ce n'est pas
régler le problème, à mon avis, de l'équité
salariale, mais je pense que c'est important de réitérer le
principe le plus possible surtout quand on parle d'une loi qui touche
directement les travailleurs et c'est une loi qui est utilisée par les
employeurs et les travailleurs normalement. C'est beaucoup plus utilisé
que la Charte des droits et libertés, donc ça permettrait de
faire avancer le dossier dans ce sens-là en attendant d'avoir une
véritable loi pro-active ici comme il y en a ailleurs. Je pense à
la loi ontarienne, entre autres. Parce que, de toute façon, je suis
persuadée aussi qu'il va falloir en arriver là si on veut
vraiment que ce dossier-là finisse par se régler. Alors, c'est
dans ce sens-là que je voyais des intérêts, d'une part,
à afficher et, d'autre part, à réitérer les
principes déjà reconnus dans la Charte des droits et
libertés pour une meilleure connaissance justement, pour que les
travailleurs en aient une meilleure connaissance. Voilà pourquoi, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière. Est-ce qu'il y a
d'autres interventions avant que nous en disposions?
M. Bourbeau: Toujours sur l'amendement là...
Le Président (M. Joly): Sur l'amendement de Mme la
députée.
M. Bourbeau: Pouvez-vous me lire le texte de l'amendement. Je
veux être bien sûr que j'ai le bon amendement. Est-ce que c'est
celui qui dit: "La commission peut aussi obliger l'employeur à afficher
dans un endroit qu'elle juge approprié ou un endroit
approprié..."
Le Président (M. Joly): Sur le vôtre ou celui de
madame?
M. Bourbeau: Bien, je ne le sais pas. Est-ce qu'on a
incorporé le "qu'elle juge approprié" ou non à
l'amendement? Pardon?
Mme Harel: Vous n'êtes pas sur l'amendement dont on va
disposer.
M. Bourbeau: C'est pourquoi je pose la question, M. le
Président, parce qu'on a déposé devant moi l'amendement
à l'article 38 et...
Le Président (M. Joly): Ça, c'est votre amendement
à vous, M. le ministre, que vous nous avez soumis hier en fin de
soirée.
M. Bourbeau: De là, M. le Président, mes questions.
Je veux savoir de quoi on parle.
Le Président (M. Joly): Alors, là, j'en suis
encore...
M. Bourbeau: J'ai entendu l'homélie de la
députée de... Mais...
Mme Harel: Vous allez encore lui reprocher de vous faire la
morale.
M. Bourbeau: ...je me demandais sur quel amendement elle parlait,
M. le Président.
Le Président (M. Joly): non, c'est sur celui sur lequel je
me disposais à prendre action, à demander le vote, alors qui
était le sien. le vôtre...
M. Bourbeau: Bon. Est-ce qu'on pourrait me lire l'amendement, M.
le Président, j'ai de la difficulté à lire, c'est
illisible ce que j'ai devant moi ici.
Le Président (M. Joly): Je vous comprends parce que je
sais qu'on n'a pas eu une bonne
qualité de reproduction, alors...
M. Bourbeau: Je veux bien voter, mais je veux savoir sur quoi je
vote, c'est le minimum qu'on peut demander.
Mme Harel: M. le Président, juste avant de prendre le vote
là, nous avions...
M. Bourbeau: Je n'ai pas entendu la réponse à ma
question. Je voudrais bien écouter les commentaires de la
députée de Maisonneuve dans le cadre de l'amendement que je
voudrais connaître.
Le Président (M. Joly): Je vais relire l'amendement tel
que proposé par Mme la députée où on dit ici:
"L'employeur affiche dans son établissement et dans un endroit
fréquenté par les salariés, un avis relatif aux normes du
travail, et aux dispositions de la Charte des droits et libertés de la
personne, relatives au travail" et, nécessairement, dans le
deuxième volet on dit: "2° par le remplacement à
l'alinéa actuel des mots "qu'elle lui fournit" par les suivants: "et aux
dispositions de la Charte des droits et libertés de la personne
relatives au travail qu'elle lui fournit"."
Mme Harel: Alors, M. le Président, tout simplement un mot,
avant que vous preniez le vote sur l'amendement présenté par Mme
la députée des Chutes-de-la-Chaudière, pour vous rappeler
que Mme la députée, hier, était prête à faire
sienne la proposition du ministre d'introduire que ce soit a la demande de la
Commission, que l'employeur doive afficher. Cependant, l'intention de Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière, c'est de clairement
souhaiter, par son amendement, que l'affichage demandé le soit non
seulement des normes du travail contenues dans la loi des normes, mais aussi
des dispositions relatives au travail contenues dans la Charte des droits.
Et puis, dans le fond, M. le Président, je voudrais simplement
peut-être saisir l'occasion pour demander au ministre: Qu'est-ce que
ça coûte de faire connaître des droits à des gens?
Qu'est-ce que c'est le coût, parce que, de ce côté-ci, de
bonne foi, je pense qu'on s'est rendus aux arguments du ministre, que
l'affichage obligatoire ne devait l'être qu'à la demande de la
Commission des normes, n'est-ce pas? Ce n'est peut-être pas le
libellé de l'amendement, mais on serait prêts, certainement,
à le modifier en conséquence. Finalement, l'Opposition n'en a pas
fait une question de principe. On se rallie facilement à cette
idée que ce serait à la demande de la Commission des normes que
cet affichage devrait se faire chez l'employeur. Mais cet affichage, pourquoi
ne serait-il pas complet? Pourquoi simplement s'en tenir aux dispositions des
normes? À ce moment-là, le ministre va conséquemment
devoir accepter qu'on essaie, nous, d'entrer dans les normes des dispositions
comme l'équité salariale, des dispositions comme celles traitant
du harcèlement sexuel et d'autres dispositions qui ne s'y trouvent pas
et qui pourraient ne pas être portées à la connaissance,
finalement, des salariés. Et puis, ça coûte quoi,
finalement, de faire cet affichage-là en ajoutant les dispositions
relatives au travail, qui sont contenues dans la Charte des droits pour que le
salarié ait, finalement, une information plus complète?
Dans une étude que le ministère avait fait réaliser
et qui avait été publiée, on faisait état d'une
situation assez alarmante, parce que 44 % de la population qui avait
été consultée dans le cadre de ce sondage, fait il y a
deux, trois ans, 44 % de la population du Québec disaient tout ignorer
de l'existence d'une loi sur les normes. Bon, je veux bien croire que
c'était un sondage auprès de la population en
général et que ce n'était pas juste auprès des
salariés, mais c'était quand même un sondage chez les 18
ans et plus, donc susceptibles d'être sur le marché du travail, et
quand on constate que 44 % de la population ignorent qu'il existe une loi des
normes - ils n'ignorent pas des dispositions de la loi, mais ignorent que la
loi existe - il me semble que ça mériterait d'être
attentivement examiné par le ministre pour être corrigé.
C'est en 1986, plus exactement, que l'étude réalisée par
la Commission des normes avait démontré que plus de 44 % de la
population ignoraient encore qu'il existait, au Québec, une loi
déterminant les conditions minimales de travail. Alors, de là
à penser qu'il y en a aussi qui ignorent qu'il existe des dispositions
contre le harcèlement sexuel ou des dispositions en faveur de
l'équité salariale, il y a un pas qu'on peut franchir
certainement, en toute rigueur intellectuelle. Puis le fait qu'il y ait, comme
ça, un peu partout, là, des dispositions relatives aux normes du
travail dans toutes sortes de lois et qu'il n'y ait nulle part une sorte de
condensé, ça ne doit certainement pas en favoriser, en tout cas,
ni la connaissance ni l'application. Alors, dans ce sens-là, M. le
Président, je regrette que le ministre ait l'air de se disposer à
voter contre cet amendement.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président. Je ne dis pas que les propos
de la députée de Hochelaga-Maisonneuve ne sont pas
intéressants, qu'il n'y aurait pas un certain intérêt
à étudier la possibilité de, éventuellement,
publier, dans les lieux de travail au Québec, des informations sur un
ensemble de lois qui soit d'intérêt public. La Charte des droits
et libertés de la personne est une loi intéressante. On pourrait
aussi penser que la Loi sur l'accès à l'information pourrait
aussi être publiée un peu partout dans les milieux de
travail et la Loi sur la santé et la sécurité du travail.
Il y a même des éléments du Code civil du Québec qui
auraient intérêt à être mieux connus.
M. le Président, le problème, c'est que je ne suis pas
responsable de ces lois-là et je verrais mal que... enfin mon
collègue, le ministre responsable de l'application de la Charte des
droits et libertés de la personne, probablement, aimerait être
consulté sur une modification comme ça qui ferait en sorte qu'une
charte, qu'une loi, qu'un extrait d'une loi, qui ne dépend pas de moi,
devienne... qu'on oblige les employeurs à agir à l'endroit de
cette loi-là sans que le ministre responsable soit consulté. Je
ne sais pas ce qu'en dirait la Commission des droits de la personne
elle-même. On m'avise que, dans sa propre charte et loi, la Commission
des droits de la personne a des pouvoirs qui font en sorte qu'elle peut
également faire connaître sa loi. Peut-être que la
Commission a des idées différentes. Peut-être qu'elle
choisira un véhicule différent. Il ne m'appartient pas de venir
donner des instructions à la Commission des droits de la personne, je
n'ai pas avec cette commission-là un lien tellement étroit qu'il
me permette d'intervenir de cette façon. Peut-être que la
députée de Hochelaga-Maisonneuve a des liens un peu plus
étroits avec la Commission, mais, quant à moi, je me garde bien
d'intervenir dans son administration.
Alors, M. le Président, tout en reconnaissant qu'il y a
certainement du mérite à faire connaître la Charte des
droits et libertés de la personne, je ne pense pas que ce soit ici
l'endroit pour le faire.
Le Président (M. Joly): Bon, merci, M. le ministre. Nous
allons maintenant disposer de l'amendement présenté par Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière à l'article 38
introduisant l'article 87. Donc, est-ce que l'amendement est adopté?
Mme Harel: Vote nominal, s'il vous plaît, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Vote nominal, Mme la
députée. Je peux inverser parce qu'il y a eu une coutume, en
fait, d'établie...
Une voix: II est gêné de voter non là-dessus,
c'est pour ça qu'il...
M. Bourbeau: Vous savez, hier, quand on a voté sur un
autre amendement où on faisait disparaître le filet de
sécurité, j'aurais aimé mieux entendre les
députés de l'Opposition voter les premiers. Ils auraient
été extrêmement mal pris de voter, s'ils avaient
voté avant nous.
Mme Harel: C'est vous qui le faites dis- paraître le filet
de sécurité dans votre loi pour le congé parental.
M. Bourbeau: C'est à titre indicatif, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Bien, je m'excuse, mais nous
sommes sur le vote. Le vote est demandé. M. le ministre.
Mme Harel: M. le Président, que le ministre ne fasse pas
des allusions semblables s'il ne veut pas avoir de réponse.
Le Président (M. Joly): Je pense que, ce matin,
j'apprécierais, si on ne se compliquait pas la vie sur la
procédure, savoir qui va voter en premier. Vous savez...
Mme Harel: ...jovial, parce que, sinon, ça va être
l'enfer.
Le Président (M. Joly): Oui. Je pourrais, moi aussi, me
mettre de la partie. Alors, afin de respecter la tradition et de
reconnaître... Normalement, on y va par ordre alphabétique ici
là, mais comme il y a toujours des remplacements, ça devient, des
fois, assez difficile à suivre ici.
M. Bourbeau: M. le Président, je vous soumets une
question.
Le Président (M. Joly): Mais j'ai tendance à
respecter normalement et je demande toujours au ministre en premier.
M. Bourbeau: Question de règlement, M. le
Président. Ici, on doit suivre, en général, les
mêmes règles qu'en Chambre. Or, en Chambre, c'est toujours le
proposeur, on demande toujours le vote en premier au parti qui propose une
motion, il me semble.
Le Président (M. Joly): Avec votre permission, je vais
m'enquérir du règlement...
Mme Harel: C'est un vote par ordre alphabétique
normalement ici.
M. Bourbeau: Mais pas en Chambre. En Chambre, non.
Mme Harel: Ici.
M. Bourbeau: Enquérez-vous donc, M. le
Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): ..et je vais voir si votre propos
se doit d'être exécuté tel que suggéré.
M. Bourbeau: C'était facile de voter pour, mais, si
ç'avait été l'inverse, vous auriez été un
petit peu mal pris. (11 h 45)
Le Président (M. Joly): M. le ministre, pour
répondre, en fait, au voeu que vous formuliez il y a quelques minutes,
il n'y a pas de règle précise comme telle qui nous est
donnée ici dans nos règlements. On nous dit simplement là,
ici, que "le Président, au moment du vote sur un amendement, donne
successivement lecture de la motion, de l'amendement et de la motion telle
qu'elle se lirait une fois amendée", qu'il procède de même
pour un sous-amendement, puis qu'il appelle le vote. Donc, à ce
moment-là, il n'y a pas d'endroit, là... Si, occasionnellement,
vous aimeriez qu'on partage et puis, de temps en temps, que ce soit un
côté qui commence à s'exprimer sur son vote et que, la fois
d'ensuite, ce soit l'autre, moi, je n'ai pas d'objection à alterner
à ce niveau-là, mais...
Mme Harel: ...le Président non plus, parce qu'on a
toujours de la suite dans les idées.
Le Président (M. Joly): Bon, bien, écoutez...
Alors, pour ce matin, je vais commencer par M. le ministre?
M. Bourbeau: M. le Président, je suis contre.
Le Président (M. Joly): M. le député de
Verdun?
M. Gautrin: Contre.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Saint-Henri?
Mme Loiselle: Contre.
Le Président (M. Joly): M. le député de
Trois-Rivières?
M. Philibert: Contre.
Le Président (M. Joly): M. le député de
Fabre? Je suis contre. Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve?
Mme Harel: Pour.
Le Président (M. Joly): Mme la députée des
Chutes-de-la-Chaudière?
Mme Carrier-Perreault: Pour.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Marie-Victorin?
Mme Vermette: Pour.
Le Président (M. Joly): Alors, l'amendement est
rejeté. Nous passons maintenant à l'amendement soumis par M. le
ministre; qui disait d'ajouter, à la fin de l'article 87 - toujours
à l'article introduit à l'article 38 - l'alinéa suivant:
"La commission peut aussi obliger l'employeur à afficher dans un endroit
qu'elle juge approprié un tel document." Alors...
M. Bourbeau: M. le Président, à défaut de
l'autre qui a été rejeté par la commission, je
présume que l'Opposition va se rallier à celui-ci, qui est quand
même une amélioration par rapport au statu quo, mais je laisse
l'Opposition libre de voter selon sa conscience, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Donc, est-ce que
l'amendement...
Mme Harel: Parce qu'on a une conscience, on va voter pour, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Tel que libellé, il est
adopté?
M. Bourbeau: Adopté.
Le Président (M. Joly): Adopté, Mme la
secrétaire. J'en appelle donc... Est-ce que l'article 38, tel
qu'amendé, est adopté?
Mme Harel: Un instant, un instant, un instant.
Le Président (M. Joly): Oui, dans le fond, c'est juste
ça, ici.
Mme Harel: Oui.
Le Président (M. Joly): J'appelle maintenant l'article
39.
M. Bourbeau: II a été adopté, l'article 38,
là, oui?
Une voix: Oui. Oui, oui, tel qu'amendé.
Exclusion du salaire minimum (suite)
M. Bourbeau: Ces deux dispositions visent à permettre au
gouvernement, tel que je le disais hier soir, M. le Président, d'exclure
du salaire minimum les étudiants travaillant dans une colonie de
vacances à but lucratif.
Mme Harel: Ça, ça vaut pour le premier
alinéa.
M. Bourbeau: C'est ça.
Mme Harel: Et pour le deuxième.
M. Bourbeau: Alors, en ce qui concerne le deuxième,
puisque c'est ce que souhaite la députée de Hochelaga-Maisonneuve
et que, M. le Président, on tient à garder la
députée de Hochelaga-Maisonneuve dans de bonnes dispositions,
bien, le commentaire que je viens de faire, M. le Président, s'applique
autant au premier alinéa qu'au deuxième. Dans les deux
alinéas, on fait en sorte d'exclure les étudiants qui travaillent
dans une colonie de vacances à but lucratif. En fait, il s'agit de
traiter sur le même pied...
Mme Harel: Et le troisième concerne les employés de
ferme... Le troisième alinéa.
M. Bourbeau: Un instant, M. le Président, je n'avais pas
encore terminé. Pardon?
Mme Harel: Le troisième alinéa.
Le Président (M. Joly): Oui, ce qu'on a vu hier
soir...
M. Bourbeau: M. le Président, comme je le disais
là, les deux premiers paragraphes visent à faire en sorte de
traiter sur le même pied les colonies de vacances à but lucratif
et à but non lucratif. Le troisième alinéa a pour objet
d'établir une concordance avec l'amendement, par l'article 12 du projet
de loi, quant à l'assujettissement possible par règlement des
salariés des petites fermes à la section relative au salaire
minimum.
En fait, notre intention est de fixer, après étude et
consultation, un salaire minimum, tout en tenant compte des
particularités du secteur agricole. Le quatrième alinéa
vise à permettre au gouvernement de déterminer, pour les
salariés des petites fermes, des normes différentes de celles
prévues dans la section de la loi relative au salaire, comme il peut
déjà le faire à l'égard de tous les salariés
visés au premier alinéa de l'article 88. À titre
d'exemple, là où le gouvernement pourrait fixer des normes
différentes: à l'égard du salaire, du bulletin de paie,
des retenues sur le salaire, etc. Voilà, M. le Président,
essentiellement ce que contient l'article 39.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, nous l'avons
déjà dit, cette façon de faire à l'égard des
étudiants et à l'égard des travailleurs agricoles est
totalement déplorable, elle l'était en matière d'heures de
travail d'une semaine normale de travail, puis elle l'est tout autant en
matière d'exclusion du salaire minimum. Je vous rappelle, à
l'égard des travailleurs agricoles, qu'il ne s'agit pas d'une
minorité d'entrés eux, puisque les travailleurs de petites fermes
constituent 92 % de la main-d'oeuvre agricole et que seulement 8 % des
travailleurs agricoles sont embauchés sur des fermes qui opèrent
avec quatre travailleurs et plus, c'est-à-dire 3 000 fermes sur 37 300
fermes au Québec.
Donc, c'est l'immense majorité des travailleurs agricoles qui
vont être exclus du bénéfice du salaire minimum, tel que
fixé à 5,30 $, quand on sait pourtant que le salaire minimum,
malgré l'augmentation, depuis quatre ans, a pris un retard
considérable en termes de proportion du pouvoir d'achat, quand on pense
qu'en quatre ans la progression a à peine dépassé l'indice
du coût de la vie, mais qu'il n'y a eu, évidemment, aucune
augmentation du pouvoir d'achat en valeur réelle et qu'au contraire,
dans des secteurs, parce qu'on parie évidemment des secteurs de la
forêt, de la construction, des services, ils ont subi une baisse
d'environ 5 % de leur pouvoir d'achat en valeur réelle. Alors que,
là, on vienne exclure des normes les travailleurs agricoles, l'immense
majorité d'entre eux et les étudiants qui vont travailler dans
des organismes de loisirs, des colonies de vacances...
Mon collègue de Dubuc regrettait beaucoup de ne pas être
avec nous aujourd'hui parce que, comme ancien maire de Dubuc, il voulait faire
valoir que c'était inéquitable que les municipalités
puissent opérer des organisations de loisir en embauchant, non pas des
employés, mais des étudiants, parce qu'ils peuvent discriminer le
salaire des étudiants, tandis qu'ils ne pourraient le discriminer si la
personne cessait ses études. Alors, il trouvait ça
extrêmement regrettable que les municipalités, au Québec,
prétendent ne pas avoir les moyens de payer au salaire minimum les
personnes qui sont embauchées pour travailler dans des organisations de
loisir. Alors, pourquoi en est-il ainsi dans cette catégorie d'emplois
et pourquoi n'en est-il pas ainsi dans toutes les autres catégories
d'emplois qui relèvent du pouvoir des municipalités? Il y a
évidemment quelque chose qui rebute.
Ma collègue, la députée des
Chutes-de-la-Chaudière, se demande si, dans la définition des
colonies de vacances, on inclut également les bases de plein air?
Le Président (M. Joly): M. le ministre, il y a une
question qui vous est acheminée. C'est que, dans l'ancien article 88, on
n'en fait pas mention. On dit: "...tel une colonie de vacances ou un organisme
de loisir..." Bien, plein air, c'est quoi?
Mme Vermette: Les bases de plein air, c'est aux
municipalités généralement. Et puis c'est gouvernemental,
Jouvence. Ça c'est des bases de plein air qui appartiennent au
gouvernement.
M. Bourbeau: Avez-vous déjà statué
là-dessus, vous autres?
Une voix: Oui.
Une voix: C'est ça que je cherchais.
M. Bourbeau: II y a une certaine jurisprudence là-dessus
à la Commission des normes du travail. On peut peut-être demander
à Me Parent, qui est conseiller juridique à la Commission, de
nous faire état de sa jurisprudence.
Le Président (M. Joly): Me Parent?
M. Parent (Richard): M. le Président, en ce qui concerne
les organismes de loisir qui relèvent des municipalités, il est
à remarquer que les étudiants dont il est question qui
travaillent dans un organisme de loisir, il faut absolument que cet organisme
de loisir là soit à but non lucratif pour que l'exception
s'applique, c'est-à-dire, qu'ils n'aient pas droit au salaire minimum ni
au temps supplémentaire. Or, quand c'est un organisme de loisir dans une
municipalité, il y a une cause qui a été plaidée,
qui s'appelle Commission des normes du travail contre la ville d'Outremont,
où il a été établi qu'une municipalité
impose des taxes, entre autres. Or, ce n'est pas un organisme sans but
lucratif, une municipalité. Alors, lorsque l'organisme de loisir
relève et fait partie intégrante de la municipalité,
l'exception ne s'applique pas. Ça n'empêche pas qu'il pourrait
exister, dans une municipalité, un organisme de loisir qui ne
relève pas directement de la municipalité, mais bien d'un groupe
sans but lucratif et ce n'est qu'à ce moment-là que l'exception
s'appliquerait.
Le Président (M. Joly): Merci, Me Parent. Mme la
députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Mon autre question était pour les bases de
plein air parce qu'une bonne partie des bases de plein air appartient aussi au
gouvernement. Je fais référence à la base de plein air
Jouvence et à la base de plein air Davignon. Voilà.
Le Président (M. Joly): Est-ce que, Me Parent, vous voulez
compléter peut-être ou M. le ministre?
Mme Vermette: C'est la même chose.
M. Parent (Richard): Alors, en ce qui concerne les bases de plein
air, il s'agit également d'organismes de loisir à vocation
sociale ou communautaire et, à ce moment-là, c'est le même
principe qui s'applique. Si ce n'est pas à but non lucratif, les
exceptions ne s'appliquent pas. Si c'est à but lucratif, bien sûr,
les étudiants seront payés et, si ça relève d'une
municipalité, le même principe va s'appliquer
également.
Le Président (M. Joly): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
Mme Harel: Ça veut donc dire que c'est dans le cas des
organismes de loisir, puisque c'est cette expression-là qui a
été définie et qui a donné lieu à la
jurisprudence dont vous nous parlez. Mais, dans le cas des colonies de
vacances, est-ce que les bases de plein air sont incluses dans la
définition des colonies de vacances?
Le Président (M. Joly): M. Parent.
M. Parent (Richard): Lorsqu'il s'agit d'une base de plein air, ce
n'est pas nécessairement un organisme de loisir. Ça peut faire
partie, par exemple, d'un programme qu'une municipalité se donne d'avoir
une base de plein air. Si on pense à certaines municipalités qui
ont des bases de plein air opérées par elles-mêmes, c'est
le même principe qui va s'appliquer si ce n'est pas à but non
lucratif. Donc, l'exception ne s'appliquera pas.
Le Président (M. Joly): Merci, maître.
Mme Harel: À ce moment-là, les bases de plein air
qui, elles, sont subventionnées par le ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche et qui sont des organismes autonomes, toutes les
bases de plein air...
M. Parent (Richard): si c'est un organisme autonome, à but
non lucratif, à vocation sociale ou communautaire, l'exception va
s'appliquer à ces bases-là.
Mme Harel: Et si c'est à but lucratif?
M. Parent (Richard): Si c'est à but lucratif, l'exception
ne s'applique pas parce que c'est seulement lorsque... C'est ça.
Le Président (M. Joly): Mais si on...
M. Parent (Richard): On parle de colonies de vacances. Il ne faut
pas mêler la colonie de vacances et la base de plein air, par
exemple.
Mme Harel: Oui, mais pourquoi? Parce que les mots "colonie de
vacances", c'est une expression qui est dépassée maintenant. Je
ne pense pas qu'au Québec s'ouvrent, s'opèrent ou s'incorporent
de nouvelles colonies de vacances. Ce n'est plus sur ces bases-là. On
parle de centres, de camps familiaux, de bases de plein air. D'ailleurs, le
programme du MLCP, le programme de financement, c'est un programme qui porte le
titre, je pense, de Financement de bases de plein air. Vous nous dites que ce
n'est pas élargi, ça, que l'exclusion au salaire minimum, elle
n'est pas élargie aux colonies de vacances à but lucratif?
M. Parent (Richard): Dans le cas de colonies de vacances,
qu'elles soient à but lucratif ou à but non lucratif, l'exception
s'applique. En ce qui concerne les autres organismes de loisir à
vocation sociale ou communautaire, ce ne sera qu'à ces
organismes-là qui sont à but lucratif que l'exception ne
s'appliquera pas. Dès que c'est à but non lucratif, là,
l'exception s'applique. (12 heures)
Mme Vermette: Moi, je comprends très bien que vous faites
une exception pour les colonies de vacances et puis les bases de plein air
à but non lucratif ou lucratif, de toute façon, c'est la
même exception qui s'applique...
Le Président (M. Joly): C'est-à-dire pas pour les
bases de plein air, pas...
Mme Vermette: Pas pour les colonies de vacances, mais pour les
bases de plein air.
M. Parent (Richard): Ce n'est que lorsque c'est à but non
lucratif que ça s'applique.
Le Président (M. Joly): Non lucratif. À but
lucratif, ça ne s'applique pas.
Mme Vermette: Mais est-ce que... Il y a juste une chose
que...
Mme Harel: c'est parce que vous, vous dites que les bases de
plein air sont assimilées plus aux organismes de loisirs qu'aux colonies
de vacances.
Mme Vermette: Oui.
Mme Harel: Mais est-ce que ça, c'est une
interprétation personnelle ou si ça vient se fonder sur une
jurisprudence ou une définition?
M. Parent (Richard): C'est l'application qui en est faite
actuellement. Parce que ça existe, ça, c'est dans la loi actuelle
et on a eu à traiter ces causes-là. Et la différence,
justement, entre un organisme de loisirs à vocation sociale et
communautaire et une colonie de vacances, on la retrouve justement dans les
faits, dans cette terminologie-là. Sinon, ce serait tout à fait
la même chose si on ne faisait pas les distinctions.
Mme Vermette: Moi, je comprends les distinctions sauf que,
concrètement parlant, si ça s'applique de cette
façon-là, quand on regarde, ça peut être à
but non lucratif, mais c'est la ville qui détient... ou tout ça.
Donc, je ne comprends pas, parce que ça fait une classe
particulière pour des étudiants qui, généralement,
travaillent sur des emplois saisonniers. C'est la seule façon dont ils
peuvent se faire un certain revenu et, finalement, on va leur demander de
travailler en deçà du salaire minimum. C'est là- dessus
que je trouve ça difficile à accepter parce que ce sont des
municipalités ou c'est, finalement, même le gouvernement dans
certains autres cas. Pourquoi ne pas, finalement, leur donner le même
statut que l'ensemble des travailleurs, même si c'est du temps saisonnier
ou du temps pour une colonie de vacances ou quoi que ce soit, même si
c'est à but non lucratif, puisque, dans le fond, c'est un service que
soit une municipalité donne à ses contribuables, par le biais
d'un organisme de loisir à but non lucratif, ou le gouvernement, par ses
trucs de bases de plein air aussi, dans le cadre d'un ministère?
M. Parent (Richard): Mais, chaque fois que c'est
opéré par une municipalité, les exceptions dont on vient
de parler ne s'appliquent pas.
Mme Vermette: Oui, mais c'est parce qu'elles passent par une
autre formule, certaines municipalités passent par des associations
à but non lucratif.
Le Président (M. Joly): Quant à l'exemple,
maître, juste pour ma compréhension à moi, qu'on a
soulevé tantôt, à savoir pour tout ce qui était
bases de plein air à but non lucratif financées par le
gouvernement comme telles, à ce moment-là, est-ce que l'exception
s'applique?
M. Parent (Richard): L'exception va s'appliquer, oui.
Le Président (M. Joly): Même si c'est
entièrement financé par le gouvernement provincial?
M. Parent (Richard): Quand on parle de financer, je
présume qu'on parle de subventions qui sont données pour
l'opération de la base de plein air, par exemple, qui, elle, est
opérée par un groupe de bénévoles qui ne font pas
ça pour faire des profits mais qui font ça, évidemment,
dans une idée d'entraide communautaire pour que, l'été,
les enfants aient un endroit où aller qu'ils n'auraient pas si ce
n'était pas opéré à but non lucratif. Ce n'est pas
pour faire de l'argent, à ce moment-là.
Mme Vermette: Je comprends le principe, mais, quand tu regardes
d'où ça vient en haut, c'est que tu trouves que ça fait
une disproportion pour cette catégorie-là, puisque ce sont
généralement des étudiants et que, finalement, c'est
encore eux qui ont de la difficulté, plus souvent qu'autrement, à
avoir des sous, surtout pour payer leurs études pendant la...
Le Président (M. Joly): Mais, dans le fond...
Mme Vermette: C'est saisonnier, c'est tout du travail très
saisonnier.
Le Président (M. Joly): Mais, dans le fond, le
gouvernement aide un organisme qui lui, disons, devient, en fait, ce qu'on peut
appeler l'administrateur qui redistribue. Il ne peut pas redistribuer ce qu'il
n'a pas, dans le fond. Ce serait d'assujettir le gouvernement à des
conditions ou à des engagements, donc...
Mme Vermette: Dans le fond, les municipalités, c'est autre
chose.
M. Parent (Richard): C'est que, si on procédait à
l'inverse, il y aurait moins d'organismes comme ça, à but non
lucratif, qui opéreraient pour justement que les gens, les jeunes
puissent en bénéficier l'été. Lorsque ça
relève d'une municipalité, la municipalité n'étant
pas un organisme à but non lucratif, les étudiants qui oeuvrent
sont payés comme les autres et l'exception ne s'applique pas. Ce n'est
que lorsque c'est un...
Mme Vermette: Je comprends le rationnel, c'est juste sur le... Le
rationnel, je le comprends. Mais c'est parce que je sais aussi qu'il y a des
étudiants qui ont travaillé pour une municipalité dans
d'autres services, comme un travail saisonnier aussi, qui vont avoir le salaire
de la convention collective parce qu'ils vont entrer dans une autre
catégorie et que celui-là, parce qu'il a le malheur de
travailler... Enfin, dans le fond, c'est un service qu'une municipalité
se donne par un organisme à but lucratif communautaire, dans le domaine
du loisir, souvent.
Mme Harel: M. le Président.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Je me rappelle qu'au moment de sa nomination, le
prédécesseur du ministre actuel, l'actuel ministre de
l'Environnement, faisait grand état de la discrimination fondée
sur l'âge qui existait toujours dans la loi des normes à
l'égard du salaire minimum. C'était là le principal objet
de toute son attention de modifier cette façon de faire. Là, il
faut comprendre que cette distinction fondée sur l'âge est
restée, mais qu'elle ne se présente plus ouvertement comme
c'était le cas auparavant. Là, on peut vraiment l'appeler de la
discrimination systémi-que. Alors, sans doute que Me Paradis va pouvoir
expliquer...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: ...au ministre qu'en excluant les étudiants du
bénéfice... ce n'est pas les gens qui travaillent dans les
colonies de vacances ou les salariés qui travaillent dans les organismes
de loisir, c'est nommément les étudiants qui sont exclus du
bénéfice du salaire minimum. Les autres qui ne sont pas
étudiants peuvent réclamer le salaire minimum, sauf que,
évidemment, il est possible qu'eux soient discriminés à
l'embauche parce qu'ils ne sont pas étudiants et que les
étudiants coûtent moins cher. Mais, c'est évident que
l'effet obtenu est celui d'accorder un salaire minimum à une
catégorie jeune, parce que la majorité des étudiants se
recrutent chez les jeunes.
Ça, c'est des considérations. Me Parent, je peux vous dire
que je prends bonne note et avec beaucoup d'intérêt de tous vos
propos tant qu'ils sont juridiques, mais quand ils sont politiques comme ceux
qui consistent à dire que cette disposition-là est
nécessaire parce que les organismes en ont besoin pour pouvoir offrir
des services, ça je pense que c'est une question de jugement. Bon. Vous
avez droit au vôtre, c'est sûr, mais j'aimerais mieux que ce soit
le ministre qui nous donne cet argument-là, si tant est qu'il y
souscrit, parce que c'est à lui, en fait, que les étudiants vont
faire valoir qu'avec l'augmentation des frais de scolarité à
l'université, ils doivent assumer une part croissante du financement de
leurs études et que, s'il y a peut-être des inconvénients
pour les employeurs, il y en a aussi pour les étudiants eux-mêmes,
des étudiants à qui, pourtant, le système des prêts
et bourses attribue un montant fictif, finalement, de revenus gagnés
durant l'été qui correspond au salaire minimum.
Je ne sais pas si les membres de la commission savent que, dans le
calcul du prêt et bourse, il y a toujours un montant qui est comme
estimé d'un revenu qui aurait été gagné pendant les
vacances d'été et ce montant estimé est basé sur le
salaire minimum. Et c'est en vertu de ce montant qui est, si vous voulez,
estimé qu'ensuite est déterminé le montant du prêt
ou de la bourse. Alors, dans ce contexte-là, il y a comme une
incohérence à bâtir, d'une part, un système sur des
revenus que, de toute façon, dans une autre loi, on exclut qu'ils
puissent gagner s'ils font ce travail-là. Ça peut avoir un
impact; tout simplement, c'est une plus grande difficulté de recrutement
des organismes qui embauchent des étudiants, une plus grande
difficulté de recrutement pour un grand nombre d'entre eux qui vont se
retrouver à court, finalement, d'étudiants peut-être
qualifiés qui vont chercher à se faire embaucher ailleurs.
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je dois dire que je souscris
aux propos politiques qu'aurait pu prononcer Me Parent. Donc, je peux reprendre
à mon compte le volet politique, puisque Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve ne prêtait pas de crédibilité aux
propos politiques de Me Parent.
Mme Harel: Non, non, je leur en prête
autant que ceux que vous pouvez tenir vous-même.
M. Bourbeau: Alors, M. le Président, vous êtes deux
fois rassuré. Deuxièmement, j'aimerais simplement aviser les
membres de la commission que les étudiants qui travaillent dans les
colonies de vacances à but lucratif présentement et qui
bénéficient du salaire minimum continueront à
bénéficier du salaire minimum tant qu'un règlement du
gouvernement n'aura pas été adopté, puisque c'est
présentement la règle. Alors, c'est maintenu en vigueur.
Maintenant, nous n'avons pas l'intention là de
décréter un règlement tout de suite. Nous poursuivons les
études à ce sujet-là et, lorsque nous ie ferons, H n'est
pas dit que nous allons nécessairement déréglementer
totalement ce domaine-là. En fait, si nous passons un règlement,
c'est donc que nous allons réglementer et il est possible que ce que
nous proposerons soit beaucoup moins discriminatoire, entre guillemets, que ce
que pourrait craindre la députée de Hochelaga-Malsonneuve.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Donc,
l'article 39 est adopté?
Mme Harel: Adopté, sur division.
Le Président (M. Joly): Sur division. J'appelle l'article
40. M. le ministre.
Semaine normale de travail
M. Bourbeau: Cet amendement a pour objet d'effectuer une
concordance avec le dernier alinéa de l'article 54, tel qu'amendé
par le paragraphe 3° de l'article 16 du projet de loi, et de permettre
ainsi au gouvernement de déterminer une semaine normale de travail pour
les étudiants travaillant dans une colonie de vacances ou dans un
organisme à but non lucratif, pour les travailleurs agricoles, les
employés des petites fermes et les salariés affectés
à la récolte et à la mise en conserve des fruits, des
légumes et des poissons. Je m'excuse, M. le Président, comme on
dit couramment, j'ai un chat dans la gorge et non pas une chatte. Il s'agit de
permettre au gouvernement de fixer, s'H y a lieu, après étude et
consultation, une semaine normale de travail qui tienne compte des
particularités propres à certains emplois qui ne
bénéficient pas du temps supplémentaire.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Deux questions d'information. D'abord, l'article 40,
alinéa 1, sous-paragraphe i, fait référence à
l'article 54 de la loi et puis aux paragraphes 2° et 5° à
8°. Moi, à l'article 54 de la loi, j'ai seulement les paragraphes
jusqu'à 7°.
Je n'ai pas de paragraphe 8° à l'article 54.
M. Bourbeau: C'est parce que le paragraphe a été
ajouté dans notre projet de loi. Il s'agit d'"un salarié
employé a l'exploitation d'une ferme mise en valeur". C'est à
l'article 16 de notre projet de loi, sous-paragraphe 2°.
Mme Harel: D'accord. Ensuite, au deuxième paragraphe de
l'article 40, vous proposez la suppression du paragraphe 5° de l'article 89
de la loi. Le paragraphe dit que le gouvernement peut fixer, par
règlement, des normes portant sur les jours fériés,
chômés et payés. Alors, quelle est la portée
là d'une telle suppression?
M. Bourbeau: C'est qu'on les a mis dans la loi eHe-même
maintenant, donc on n'en a plus besoin dans le règlement.
Mme Harel: Et puis, quant au paragraphe 3°, toujours de
l'article 40, vous souhaitez, là, introduire un pouvoir
réglementaire pour fixer des normes qui vont porter sur "la durée
du congé de maternité ou, le cas échéant, sa
durée supplémentaire, le moment où il peut être
pris, les avis qui doivent être donnés et les autres conditions
applicables dans les cas visés à l'article 81.7 et les avantages
dont un salarié peut bénéficier pendant le congé de
maternité". Alors, vous vous donnez le pouvoir réglementaire
à l'égard de ce qu'on peut appeler le congé
spécial?
M. Bourbeau: C'est exact. Mme Harel: Bon,
adopté.
Le Président (M. Joly): Parfait. L'article 40 est
adopté. J'appelle l'article 41. Nous prenons ce qu'on appelle une
vitesse de croisière, M. le ministre. (12 h 15)
Assujettissement de certains gardiens ou
gardiennes
M. Bourbeau: Cette modification vise à permettre au
gouvernement, par règlement, d'assujettir en tout ou en partie à
la Loi sur les normes, les gardiennes ou gardiens d'enfants, de malades, de
personnes handicapées ou âgées ou certaines
catégories de ces personnes. Il pourra aussi, par règlement,
déterminer des normes particulières à leur sujet. En fait,
M. le Président, nous tentons de limiter les exclusions
définitives de la loi, de préciser le pouvoir
réglementaire prévu à l'article 3, deuxièmement, et
de laisser au gouvernement une souplesse et une capacité d'agir à
la suite d'études sur ce sujet.
Le Président (M. Joly): Mme la députée
de
Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous plaît.
Mme Harel: Alors, vous vous référez à
l'article 95 de la loi, qui est le pouvoir réglementaire, c'est
ça?
M. Bourbeau: C'est l'article 90. Le Président (M.
Joly): L'article 90.
Mme Harel: Ah! Excusez-moi, l'article 90. Et, en fait, ce que
vous voulez, c'est ajouter, au pouvoir réglementaire qui existe
déjà, de soustraire de la loi certains établissements?
M. Bourbeau: Non, c'est plutôt le contraire, c'est qu'on
veut donner le pouvoir d'assujettir plutôt que de soustraire.
Mme Harel: Oui, en fait, à l'article 90, au premier
alinéa, c'est un pouvoir de soustraire. Là, avec l'article 41,
vous voulez ajouter un pouvoir d'assujettir. C'est ça?
M. Bourbeau: Oui, c'est ça. Assujettir.
Mme Harel: Ça, c'est parce que votre idée n'est pas
faite? Parce qu'au paragraphe 2° de l'article 3 - bon, ça c'est pour
les gardiennes, hein, le personnel domestique - vous assujettissez à la
loi les gardiennes, sauf celles qui ont comme fonction de prendre soin d'un
enfant, d'un malade, d'une personne handicapée ou d'une personne
âgée, y compris en effectuant des travaux ménagers
reliés aux besoins immédiats de cette personne. Alors, sauf les
personnes qui sont exclues, les autres sont assujetties. C'est ça? Et
qu'est-ce que c'est la portée de l'article 90, vous dites: "...sous
réserve d'un règlement".
M. Bourbeau: C'est parce que, éventuellement, quand les
études qui sont en cours seront complétées, il y aura la
possibilité peut-être d'assujettir encore plus de gardiennes ou
d'augmenter le degré d'assujettissement, selon les résultats des
études que nous faisons présentement. Par exemple...
Mme Harel: Ça ne peut pas être l'inverse? La
portée ne pourrait être, par ailleurs, par exemple, sous
réserve du règlement, d'exclure un plus grand nombre de
gardiennes que celles qui le sont par le paragraphe 2°.
M. Bourbeau: Les gardiennes sont déjà exclues
totalement. Alors, on peut pas les exclure plus qu'elles ne sont exclues,
là.
Mme Harel: Elles le sont par l'article? M. Bourbeau: Par
l'article 3. Mme Harel: Paragraphe?
M. Bourbeau: Paragraphe 2°. Les gardiennes sont exclues, les
domestiques sont inclus.
Mme Harel: Oui, mais vous dites: "...sous réserve d'un
règlement pris en vertu du deuxième alinéa de l'article
90". Dans votre règlement, pourriez-vous venir assujettir les
domestiques?
M. Bourbeau: Ils sont déjà assujettis à la
loi, les domestiques.
Mme Harel: Pourriez-vous, dans votre règlement, venir les
exclure en partie?
M. Bourbeau: Non, pas les domestiques. Non, parce qu'ils sont
déjà assujettis à la loi. Ils sont déjà
assujettis. Ce que nous donne le pouvoir ici, c'est d'assujettir des
catégories qui ne sont pas assujetties présentement,
nommément les gardiennes.
Mme Harel: Bon. Ça, c'est le pouvoir que donne l'article
90 au deuxième alinéa. Bon. Si vous le dites, on va vous
croire.
Le Président (M. Joly): Bien, vous n'avez aucune
raison...
M. Bourbeau: Bien, je ne vous demande pas d'avoir la foi du
charbonnier, là, vous pouvez lire le projet.
Le Président (M. Joly): Donc, article 41,
adopté?
Mme Harel: Ha, ha, ha! J'ai l'impression d'avoir les neurones qui
flanchent! Ha, ha, ha!
Une voix: Ha, ha, ha! Vous êtes excusée de tomber.
Est-ce vous êtes assujettie?
Mme Harel: Alors, si ça ne peut être qu'une
amélioration, donc si ça ne peut avoir comme effet...
M. Bourbeau: Ça pave la voie à des
améliorations.
Mme Harel: ...qu'une plus grande protection. On va voter en
faveur, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Adopté. Article 41.
J'appelle l'article 42?
Salariés de moins de 18 ans
M. Bourbeau: II s'agit de la suppression du dernier alinéa
de l'article 91. Alors, l'amendement abroge le pouvoir réglementaire qui
permettait au gouvernement de fixer un salaire minimum différent pour
les salariés de moins de 18 ans. Voilà qui va certainement plaire
à la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Le Président (M. Joly): Ça doit vous satisfaire
ça, madame.
M. Bourbeau: C'est une concordance avec la décision du
gouvernement qui avait décidé, en octobre 1986, d'abolir les taux
différenciés de salaire minimum pour les moins de 18 ans en
raison de leur caractère jugé discriminatoire.
Mme Harel: Alors, mes considérations sur la discrimination
systémique demeurent.
M. Bourbeau: M. le Président, on en prend note.
Le Président (M. Joly): Article 42, adopté? Mme
Harel: Adopté.
Le Président (M. Joly): J'appelle l'article 43?
Suppression de la limite des
réclamations
M. Bourbeau: Cette modification a pour objet de supprimer la
limite des réclamations au double du salaire minimum imposée par
la loi actuelle à la Commission des normes du travail. Celle-ci pourra
dorénavant ainsi réclamer tout le salaire dû à un
employé. Maintenant, vous comprendrez que ça permet à la
Commission de réclamer la totalité des sommes dues évitant
ainsi à un travailleur l'obligation d'entreprendre lui-même,
à ses propres frais, une deuxième poursuite pour
l'excédent non réclamé par la Commission. Ça
évite la multiplication des procédures judiciaires et ça
fait suite à la recommandation du rapport Beaudry. Adopté, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Article 43. Adopté, Mme la
députée?
Mme Harel: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Adopté. Je pense que madame
voulait vous féliciter.
M. Bourbeau: M. le Président...
Mme Harel: C'est ça. Bien, s'il veut être
expéditif, tant pis pour lui.
Le Président (M. Joly): C'est pour ça que je
voulais lui laisser le loisir et le plaisir, si vous voulez. Donc, un plaisir
pa.tagé.
M. Bourbeau: Je préférerais de beaucoup, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): J'appelle l'article 44?
M. Bourbeau: La suppression de l'article 100 de la loi est rendue
nécessaire à la suite de la modification apportée par
l'article 43 du projet de loi. Le salarié n'ayant plus à exercer
par lui-même le recours pour l'excédent là, pour ce qui
excède le double du salaire minimum, l'article 100 devient inutile.
Adopté, M. le Président.
Mme Harel: C'est une... C'est ça. M. Bourbeau: De
la concordance.
Le Président (M. Joly): Excusez, article... Dans le fond,
c'est de la concordance.
Mme Harel: C'est une disposition de concordance.
Le Président (M. Joly): Article 44, adopté?
Mme Harel: Un instant. C'est une disposition de
concordance...
Le Président (M. Joly): Exactement.
Mme Harel: ...puisque, dorénavant, le salarié n'a
plus besoin d'exercer ce droit étant donné que la Commission va
pouvoir réclamer l'en-tièreté du salaire. C'est bien
ça?
Le Président (M. Joly): C'est bien ça dans mon
interprétation à moi.
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Joly): Article 45.
Permission de porter plainte au nom d'un
salarié
M. Bourbeau: Cet amendement a pour objet de permettre à un
organisme de défense des droits des salariés de porter plainte au
nom d'un salarié qui l'a autorisé par écrit. Il s'agit, M.
le Président, de reconnaître formellement à un organisme de
défense des droits des citoyens le droit de demander l'intervention de
la Commission des normes du travail.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Pour cet article, il y a eu des représentations
et je souhaiterais que le ministre soit attentif.
M. Bourbeau: M. le Président, je ne peux pas pas
l'être plus que je ne le suis présentement.
Mme Harel: Est-ce que le ministre a l'intention d'apporter des
amendements?
M. Bourbeau: À l'article 45? Mme Harel: Oui.
M. Bourbeau: Non. Pas pour l'instant, M. le Président,
à moins que les plaidoiries de l'Opposition ne nous en convainquent.
Mme Harel: Je suis sûre, M. le Président, que
cette...
Le Président (M. Joly): Si je comprends bien, vous avez un
amendement, madame.
Mme Harel: ...modification... Bien, c'est-à-dire que je
l'apporterai si tant est que ce soit nécessaire, à moins que le
ministre juge lui-même utile de le faire.
Ce qui a été, je pense, transmis au secrétariat de
la commission dans un ou deux mémoires là qui ont
été distribués, c'est le fait que, si on n'ajoute pas le
terme "sans but lucratif", les organismes de défense peuvent devenir,
donc, des organismes, comme les agences de placement, qui vont se
spécialiser, mais avec un coût pour faire valoir un droit. Et
là, présentement - je n'en ai pas encore parlé au ministre
pas tant sur cette question-là que sur la question des agences de
placement - moi, je m'inquiète beaucoup de ce qui se passe dans le
secteur des agences de placement. Je ne sais pas si le ministre suit ça,
il y a une série de reportages là qui a commencé à
la radio de Radio-Canada, aujourd'hui, sur les agences de placement. La revue
Protégez-vous, l'Office de la protection du consommateur a aussi
préparé des dossiers là-dessus, bon, le journal Les
Affaires a aussi publié sur cette question-là et je me suis
rendu compte, en demandant tout simplement à la bibliothèque de
l'Assemblée nationale de me préparer un dossier sur ce qui se
passe dans les autres provinces, qu'on était la seule, que le
Québec était la seule province qui n'ait pas encore une
législation qui concerne les agences de placement. Et il y a eu une
prolifération absolument incroyable de ces agences.
Bon, j'y reviendrai, là. Je ne veux pas, entre autres, parler des
agences maintenant, mais je suis inquiète que l'on fasse une
activité lucrative de la défense des droits d'une loi d'ordre
public. Oui, ça m'inquiète et je me dis qu'on aurait
intérêt à, tout de suite, là, afficher clairement
l'intention du ministre et de son gouvernement à cet égard, parce
qu'il peut se produire dans le milieu - puis je pense que c'est assez
fréquent - que les salariés aient des réticences à
formuler des plaintes parce qu'ils ont peur des représailles. Et un
certain nombre d'entre eux, présentement, s'adressaient à des
organismes de défense et puis souhaitaient que l'organisme le fasse
à leur place, ce qui n'était pas possible, là. C'est donc
un avantage de permettre que cette plainte puisse être adressée,
pour le compte d'un salarié qui y consent par écrit, par un
organisme de défense. Mais ces organismes-là nous recommandent
très fortement d'être vigilants dans le libellé de
l'article pour qu'on conçoive que ce sont des organismes de
défense sans but lucratif. Il ne faudrait quand même pas qu'il y
ait des entreprises qui se spécialisent, au Québec, dans la -
comment dire, donc? - vente de services, pour faire reconnaître des
droits d'une loi d'ordre public.
Il y a aussi une autre question qui...
Le Président (M. Joly): Bon, allez, Mme la
députée.
Mme Harel: Dans les notes explicatives du projet de loi 97, on
retrouve ceci, à la page 2, dans les notes explicatives justement, au
paragraphe 3°: "...en permettant aux organismes de défense des
droits des salariés de porter plainte à la Commission des normes
du travail pour le compte d'un salarié qui y consent
expressément". Alors, il me semble qu'il y aurait intérêt
à établir, là, dès le départ, que ce sont
des organismes à but non lucratif. Ça n'empêche
peut-être pas qu'il y ait un coût, peut-être y aura-t-il un
coût, là, mais... Ou bien, de toute façon, les
salariés vont aller voir l'aide juridique, hein? Il va y avoir un
coût, de toute façon, s'ils y sont admissibles. Mais ça
serait étonnant qu'ils y soient admissibles, parce que, s'ils sont
salariés, en vertu maintenant des seuils d'admissibilité à
l'aide juridique, même les salariés au salaire minimum sont
exclus. Alors, puisqu'ils sont exclus de l'aide juridique... C'est le cas,
là, présentement. Même actuellement les
bénéficiaires d'aide sociale qui reçoivent le programme
Soutien financier, à cause des seuils d'admissibilité très
bas de l'aide juridique, ne sont même plus éligibles. Alors, comme
ils n'auront plus accès à l'aide juridique, on aurait
peut-être intérêt... Bon.
Le Président (M. Joly): M. le ministre, voulez-vous
commenter quelques minutes? Il nous reste quelques minutes.
M. Bourbeau: M. le Président, j'aimerais simplement
indiquer aux membres de la commission que le Québec avait une loi qui
régissait les bureaux de placement. Elle avait été
votée par le gouvernement libéral de M. Jean Lesage, en 1960, et
elle a été abolie par le Parti québécois, en 1982.
Alors, je comprends que, maintenant, on nous demande d'en passer une nouvelle,
mais je vous signale que, lorsque le Parti québécois a pris le
pouvoir, il existait une telle loi. Je prends quand même bonne note des
voeux de la députée de Hochelaga-Maisonneuve qui nous demande de
réinstaurer une loi qui a été abolie - cela dit sans
vouloir faire de politique, M. le Président, là, ce sont des
faits que je constate. Alors, on a aboli, en 1982, la Loi sur les bureaux de
placement. Je souligne que ce ne sont
pas toutes les provinces canadiennes qui ont adopté une telle
loi. Certaines, comme Terre-Neuve et l'île-du-Prince-Édouard ne
l'ont pas fait. De plus, l'Alberta a abrogé le Employment Agency Act en
1988. La Colombie-Britannique, quant à elle, a intégré ces
dispositions à son Employment Standards Act pour en faire le chapitre X
de celui-ci. Maintenant, en Ontario, la loi existe toujours et les amendes sont
maintenant très élevées, mais cela résulte d'une
loi omnibus qui a haussé l'ensemble des amendes prévues dans
toute la législation ontarienne. Aucune plainte, semble-t-il. Une
vérification que nous avons faite récemment, il y a à peu
près deux, trois mois, indique qu'aucune plainte n'a, par ailleurs,
été portée en vertu de cette loi depuis des
années.
La députée de Hochelaga-Maisonneuve faisait état
d'un reportage de Radio-Canada qui évoquait dernièrement la
situation des bas salariés recrutés au jour le jour, parfois par
de grandes chaînes commerciales via ces agences privées. Il semble
que ces travailleurs seraient moins bien payés que les employés
réguliers des mêmes entreprises qui, même syndiqués,
se sentent menacés par cette activité. On doit aussi souligner
que le reportage fait état des nombreuses agences privées qui
respectent un code d'éthique et qui se sont même regroupées
en association.
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Bourbeau: Oui.
Le Président (M. Joly): En conclusion.
M. Bourbeau: Oui, je conclus, M. le Président.
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît.
M. Bourbeau: À moins que... Si la commission me donne
encore une minute, je vais terminer là-dessus.
Le Président (M. Joly): II y a consentement.
M. Bourbeau: Je ne pense pas qu'il y ait lieu de parler
d'exploitation dans ces cas-là, dans ceux qui se sont regroupés
en association, certains travailleurs avouant même préférer
offrir leurs services via ces agences, même qu'il y en avait un exemple
dans le reportage, des secrétaires volantes qui offraient leurs services
via Office Overload.
Maintenant, en conclusion, M. le Président, je dois dire que nous
sommes présentement en train d'étudier sérieusement tout
ce problème-là en tenant compte du fait que certains ne se
plaignent pas, par exemple les immigrants qui utilisent ces services-là
et qui pourraient peut-être se plaindre s'ils étaient un peu plus
au courant des droits. Tout ce que je peux dire, c'est que c'est un dossier sur
lequel nous nous penchons présentement, que nous suivons et que je
n'écarte pas la possibilité de soumettre, dans les mois à
venir, des propositions concrètes à ce sujet.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Donc, nous
allons suspendre nos travaux.
(Suspension de la séance à 12 h 33)
(Reprise à 15 h 44)
Le Président (M. Gautrin): Le commission des affaires
sociales reprend ses travaux pour poursuivre l'étude du projet de loi
97. Au moment où nous avions suspendu, je pense qu'on était
rendus... À quel article?
M. Bourbeau: On considérait un amendement...
Une voix: À l'article 45.
Le Président (M. Gautrin): à l'article 45 un petit
amendement à l'article 45. bon. alors, l'amendement à l'article
45 avait donc été déposé, si j'ai bien compris?
Mme Harel: Pas encore.
Le Président (M. Gautrin): Pas encore.
Mme Harel: annoncé, mais, en fait, ce qu'on souhaiterait
c'est que le ministre le dépose, il aurait plus de chance d'être
adopté.
Le Président (M. Gautrin): Bien. Alors, ce joli petit
amendement est attendu.
M. Bourbeau: m. le président, je n'ai pas d'amendement,
forcément, puisque c'est la députée de
hochelaga-maisonneuve qui en annonçait un.
Le Président (M. Gautrin): Bon. S'il n'y a pas
d'amendement, on peut adopter l'article tel que rédigé,
alors.
Mme Harel: M. le Président, on vous pardonne ià
parce que vous n'étiez pas des nôtres avant la suspension de ce
midi...
Le Président (M. Gautrin): Pas tout à fait.
J'étais des vôtres, mais je n'écoutais pas.
Une voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: Que ces mots soient retranchés du Journal
des débats!
Le Président (M. Gautrin): Bien sûr, bien
sûr.
Mme Harel: Bon. Alors, on avait parlé des agences de
placement et c'est là-dessus que ça s'est terminé. Je
voudrais dire deux mots, peut-être, au ministre sur cette
question-là sur laquelle nous nous étions laissés à
l'heure du dîner.
Le Président (M. Gautrin): Alors, vous avez la parole, Mme
la députée de Hochelaga-Maison-neuve, sur les agences de
placement.
Mme Harel: Rapidement, parce qu'on aura sûrement l'occasion
d'y revenir, M. le Président. J'ai avec moi là les
différents textes législatifs des diverses provinces et puis,
essentiellement, les lois des autres provinces visent à interdire aux
agences d'imposer des frais aux personnes à la recherche d'emploi qui
font appel à leurs services. Alors, il ne s'agit pas d'interdire les
agences, mais il s'agit de réglementer leur pratique. Donc, une des
pratiques qui est réglementée, c'est le fait d'imposer des frais
et aussi d'imposer aux agences de détenir une licence. Alors, n'importe
qui ne peut pas avoir pignon sur rue en se déclarant offrant un service
de placement sans qu'il ait eu, préalablement, l'obligation de
détenir une licence et puis aussi de tenir des registres, selon certains
critères.
Finalement, notre conclusion à nous c'est que ce sont des
législations qui s'inscrivent plus dans le droit de protection du
consommateur que dans le droit du travail. Mais, il n'en demeure pas moins...
et je me référais à une étude ou un reportage
plutôt qui a paru dans le journal Les Affaires il y a quelques
mois et qui faisait état, entre autres, d'une firme appelée
Profil International, qui emploie 115 personnes et exploite 10 centres de
recherche d'emplois dans la région de Montréal, qui
annonçait sa volonté de s'étendre dans toutes les
régions en vendant des franchises. Et, déjà, il y avait eu
vente de franchises qui se situaient rien de moins qu'entre 25 000 $ et 45 000
$. Les frais chargés variaient de 80 $ à 300 $ par personne et,
évidemment, il y avait également des déboursés pour
les entreprises qui entraient, qui devenaient membres de cette agence, des
déboursés qui pouvaient varier de 1500 $ à 5000 $, et
là, on faisait état de bien des difficultés judiciaires de
cette entreprise, mais avant que ça se multiplie... Parce que je dois
vous dire que les promoteurs considéraient que c'était le
Klondike pour faire des affaires, car, dans la réalité,
finalement, des avocats spécialisés dans le droit des franchises,
qui étaient interviewés dans ce reportage, disaient que,
légalement, presque rien n'est exigé. En fait, légalement,
rien n'est exigé présentement pour que se multiplie... surtout
dans une période de recherche d'emploi intensive, avec le taux de
chômage de 11,7 % que l'on connaît présentement, et il me
semble que ce sont souvent les immigrants qui sont le plus victimes de ce genre
d'exploitation.
Alors, je voulais simplement qu'on se rende compte que, de plus en plus,
toutes sortes de pratiques se sont développées dans le secteur de
l'emploi, en marge des services gouvernementaux habituels. Le secteur du
placement, par exemple, pendant 80 ans, le Québec a été
très actif dans le secteur du placement de la main-d'oeuvre. C'est au
début du siècle qu'il y a eu un service gouvernemental de
placement québécois et c'a été aboli par le
prédécesseur du ministre actuel, l'actuel ministre de
l'Environnement. Ça, c'était pour le motif que ce service de
placement québécois faisait double emploi avec le service de
placement du fédéral dans les Centres d'emploi et
d'immigration.
Mais, un an et demi plus tard, le fédéral, pour des motifs
de compression budgétaire, à toutes fins utiles,
rétrécissait son service de placement à tout simplement
des annonces sur les babillards dans des locaux du Centre d'emploi et
d'immigration, à peu de chose près. Et c'est tellement
incroyable, M. le Président, qu'on me faisait part cette semaine,
très tôt le matin - parce que c'est à peu près le
seul moment où on peut communiquer avec notre bureau - qu'au Centre
d'emploi et d'immigration du Canada, dans l'est de Montréal, sur la rue
Sherbrooke, il y avait une si longue file de chômeurs qui, malgré
tout, essayaient d'obtenir des services, que cette file était à
l'extérieur. Imaginez-vous, on est en plein hiver avec la
température qu'il fait! Il y avait cette file pour plusieurs heures.
L'attente était de presque quatre heures. Vous vous rendez compte. Et la
file était à l'extérieur sur la rue Sherbrooke.
Moi, j'ai regretté qu'il n'y ait pas eu de journaliste pour aller
prendre des photos. Et, ça, c'étaient des chômeurs qui
cherchaient, soit à s'inscrire à un cours de formation, soit
à obtenir des conseils pour trouver un emploi. Et, finalement, la
personne qui s'y était rendue, qui était elle-même dans
cette situation-là, avait fini par se décourager, devant rentrer
à la maison pour s'occuper des enfants qui rentraient de l'école.
Alors, vous vous rendez compte que, dans un contexte comme celui-là, le
moindrement que les gens ont un peu d'argent et qu'ils se font miroiter que
d'être inscrits à une agence... parce que beaucoup d'agences font
miroiter l'idée que, si vous êtes quelqu'un d'important, vous
n'allez pas utiliser les services gouvernementaux ordinaires. Ça, c'est
des services pour les gens qui n'ont pas de moyens. Ça, c'est des
services pour les pauvres. Mais quand vous avez de l'argent, la première
chose... Vous-même, M. le Président, je suis convaincue que, si
jamais vous nous quittiez - ce que je ne souhaite pas - vous mettriez votre
avenir entre les mains de chercheurs de têtes.
Le Président (M. Gautrin): J'ai la sécurité
d'emploi.
Mme Harel: Ah bon! Vous avez la sécurité d'emploi!
Bon, alors peut-être notre ministre. Lui, il n'a pas la
sécurité d'emploi. Ha, ha, ha! Il mettrait sa tête entre
les mains de chercheurs de têtes. Mais II est vrai que, dans les emplois
de cadres supérieurs, ça se fait beaucoup, cette recherche et
cette...
Une voix:...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: Ça se fait beaucoup dans les milieux où
les emplois sont à revenus supérieurs. Alors, on fait miroiter
que les autres milieux, ouvriers ou des milieux de services, par exemple, ou
autres, peuvent mieux réussir que les services gouvernementaux à
trouver de l'emploi, surtout qu'une personne est souvent en désarroi et
prête à tenter sa chance.
Alors, ceci dit - je pense qu'on aura l'occasion de revenir
là-dessus - je demande au ministre si, dans ce contexte-là, un
contexte où rien n'est plus comme avant sur le plan de l'emploi et, sans
doute, rien ne sera plus comme avant, avec tous ces changements qui
bouleversent toute l'économie, il ne serait pas prudent de tout de suite
prévoir qu'en matière de plaintes, en matière de
défense des droits des salariés, en regard d'une loi comme celle
des normes, on détermine bien que ce sont des organismes sans but
lucratif qui peuvent accompagner un salarié qui a une plainte à
formuler.
Le Président (M. Gautrin): Parfait. Vous n'avez pas de
remarques, M. le ministre? Donc, on est prêts à adopter l'article
45. Vous avez des remarques?
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. J'attendais que vous me
donniez la parole.
Le Président (M. Gautrin): Ah bon! Mais avec plaisir!
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Je ne voulais pas
m'arroger le droit de parole. M. le Président, le sujet dont parle la
députée de Hochelaga-Maisonneuve est un sujet très
important et qui m'intéresse beaucoup. J'ai dit, ce matin, un certain
nombre de choses à ce sujet et, lors de la visite que j'ai faite en
Europe, en début d'année, j'ai eu l'occasion de voir des
systèmes de placement qui fonctionnaient relativement bien en Allemagne,
en Suède ainsi qu'au États-Unis, en certains endroits, entre
autres dans la région de Boston. Avec la venue de l'informatique,
aujourd'hui, si on a le moindrement d'imagination, on peut avoir des
systèmes extrêmement performants, qui peuvent indiquer à
peu près à chaque travailleur d'un pays quels emplois sont
disponibles dans chaque village, quelles catégories d'emplois, quel est
le niveau de salaire offert, quel est le niveau de formation requis. Avec des
équipements adéquats, on pourrait facilement, si on avait la
responsabilité de ce domaine, doter le Québec d'un réseau
complet qui permettrait instantanément de savoir, à peu
près partout au Québec, ce qu'il y a d'à peu près
disponible partout.
À mon avis, ce serait extrêmement fascinant et
intéressant et j'aimerais bien pouvoir m'y intéresser, M. le
Président, sauf que, présentement, il y a comme un flottement
dans l'air en ce qui concerne les responsabilités des deux ordres de
gouvernement dans ce domaine. Le fédéral est déjà
là-dedans. C'est intimement lié, bien sûr, au régime
d'assurance-chômage qui, comme on le sait, est encore, à ce jour,
une responsabilité dévolue au gouvernement fédéral
en vertu de la Constitution canadienne, mais je conserve l'espoir qu'à
court terme on pourra mettre un peu d'ordre là-dedans et permettre au
Québec de jouer un rôle prépondérant et actif dans
le domaine du placement.
Mme Harel: Est-ce qu'on peut savoir du président s'il est
d'accord avec les propos du ministre?
Le Président (M. Gautrin): Le président dans cette
chaise ne se prononce pas sur ces questions.
M. Bourbeau: M. le Président, en ce qui concerne la
proposition de la députée de Hochelaga-Maisonneuve visant
à restreindre aux organismes à but non lucratif la
possibilité de porter plainte au nom d'un salarié, là, je
suis porté, justement, à suivre le conseil de la
députée de Hochelaga-Maisonneuve et à agir avec prudence,
mais pas dans le même sens que ce qu'elle a indiqué. L'objectif
visé, bien sûr, est d'éviter l'exploitation des
travailleurs. Ça, j'en suis. Ça implique, en confiant à un
organisme sans but lucratif l'exclusivité de ce champ d'activité,
qu'il n'y aurait pas de frais, semble-t-il, d'imposés, mais je ne suis
pas certain que même les organismes sans but lucratif n'imposent pas des
tickets modérateurs ou des charges souvent. Maintenant, est-ce que les
syndicats, par exemple, sont des organismes à but non lucratif? La
députée de Hochelaga-Maisonneuve opine du bonnet, moi, je n'en
suis pas absolument certain.
Mme Harel: Ils ne sont pas incorporés au Québec,
d'ailleurs.
M. Bourbeau: Enfin, disons qu'il y a des opinions, ici, un petit
peu divergentes.
Mme Harel: Ils sont accrédités, ils ne sont
pas incorporés. Un syndicat n'est pas incorporé, il est
accrédité.
M. Bourbeau: Je n'ai pas affirmé qu'il était
incorporé non plus.
Mme Harel: Non, mais... M. le Président. Le
Président (M. Gautrin): Bien sûr, allez!
Mme Harel: Ils ne sont pas incorporés. C'est d'ailleurs
l'un des motifs pour lesquels ils sont souvent insaisissables.
M. Bourbeau: Comme la députée de
Hochela-ga-Maisonneuve d'ailleurs.
Mme Harel: Ah non!
Le Président (M. Gautrin): Là, je pense
qu'on...
Mme Harel: Je vais vous préparer un amendement de toute
façon.
Le Président (M. Gautrin): Non, pas d'amendement. Finissez
votre...
M. Bourbeau: M. le Président, vous avez compris que je
parlais au point de vue figuratif.
Le Président (M. Gautrin): Bien sûr, j'ai bien
compris. Nous avons tous compris.
M. Bourbeau: Je parlais plutôt de ses opinions et de ses
remarques. Maintenant, on me dit que certains syndicats sont incorporés.
Ce n'est pas aussi clair que semble l'affirmer la députée de
Hochelaga-Maisonneuve. Maintenant, interdire à des organismes
privés, disons, à but lucratif de porter plainte au nom d'un
salarié ou, enfin, de s'occuper de la défense des droits d'un
salarié, c'est, en quelque sorte, restreindre la liberté des
gens. On interdirait à des gens qui voudraient le faire de demander
l'aide d'un organisme à but lucratif. Est-ce qu'on ne brime pas des
droits en ce faisant? Peut-être, M. le Président, qu'il y aurait
lieu de consulter la Charte des droits et libertés de la personne pour
voir si on ne fait pas de la discrimination sys-témique en interdisant,
justement, à des personnes d'offrir leurs services ou de faire appel
à des gens qui voudraient les aider à défendre leurs
droits. Il y a les avocats, par exemple, qui sont du secteur privé, qui
sont des organismes à but lucratif qui peuvent défendre, à
l'occasion, des travailleurs et porter plainte en leur nom ou les conseiller
dans la façon de porter plainte et de réclamer leurs droits. (16
heures)
II y aussi la disponibilité. Est-ce que les organismes en
question sont répartis sur l'ensemble du territoire? Est-ce que, dans
chacune des régions du Québec ou des localités du
Québec, on pourrait trouver des organismes à but non lucratif
disposés et capables de s'occuper des droits de ces travailleurs? Enfin,
c'est toute une série de questions que nous nous posons et qui font en
sorte que j'hésite à accepter, d'emblée, une proposition
visant à limiter les possiblités dans ce domaine-là.
Enfin, je conclus en disant, M. le Président, que ce problème du
placement privé est un problème d'actualité qui se pose
non seulement au Québec, mais un peu partout en Occident et que nous
avons l'intention de nous intéresser à ça. D'ailleurs,
nous nous intéressons déjà à ce problème
depuis un certain temps. Nous avons l'intention d'accentuer notre
intérêt pour ce problème-là et de voir dans quelle
mesure le gouvernement du Québec ne pourrait pas, éventuellement,
légiférer dans ce domaine-là, comme il l'avait fait dans
les années soixante, bien sûr, pour tenter d'apporter à ce
domaine-là un peu d'ordre et faire en sorte d'éviter les
abus.
Le Président (M. Gautrin): merci, m. le ministre. est-ce
que, sur l'article 45, parce que je n'ai pas d'amendement, j'ai d'autres
interventions?
Mme Harel: Je vais présenter un amendement, M. le
Président.
Le Président (M. Gautrin): Ah! Bien sûr. Vous voulez
qu'on suspende un peu pour vous permettre de rédiger?
Mme Harel: D'accord.
Le Président (M. Gautrin): Alors, vous voulez qu'on
suspende?
Mme Harel: Oui, quelques minutes.
Le Président (M. Gautrin): Alors, on suspend deux
minutes...
Mme Harel: O.K.
Le Président (M. Gautrin): ...pour permettre la
rédaction de l'amendement.
(Suspension de la séance à 16 h 2)
(Reprise à 16 h 5)
Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve, si j'ai bien compris, vous avez un amendement à
déposer.
Mme Harel: Oui. Alors, M. lé Président,
l'amendement consiste à introduire, au premier alinéa de
l'article 45, la modification suivante: "Le premier alinéa de l'article
45 est modifié par
l'ajout à la fin de l'alinéa des mots: "sans but
lucratif"."
Le Président (M. Gautrin): Bon. Prima facie, j'ai
l'impression que ça ne fait que préciser et que c'est tout
à fait recevable. Alors, vous voulez parler sur votre amendement,
j'imagine?
Mme Harel: Oui, M. le Président. M. le Président,
le ministre a invoqué certaines réticences. Je pense pouvoir les
lever et, si tel était le cas, je souhaiterais pouvoir le convaincre
qu'il devrait plutôt voter en faveur de l'amendement.
Le Président (M. Gautrin): Nous sommes tout ouïe.
Mme Harel: D'abord, le ministre a invoqué que l'ajout d'un
tel amendement ne permettrait pas de demander les services d'un avocat pour
agir à la place du salarié, mais je lui rappelle que c'est
déjà le cas. Tel que libellé, l'article ne parle que d'un
organisme de défense des droits des salariés et ne parle pas d'un
professionnel. Je ne crois pas qu'avec ou sans le caractère lucratif cet
article-là ouvre la possibilité pour un professionnel de se
spécialiser dans la défense des salariés en portant
plainte pour leur compte. Je pense que ce sont les organismes de défense
seuls qui, selon le libellé, peuvent le faire.
Donc, on a restreint déjà à des organismes de
défense. À un moment donné, il y aura sûrement de la
jurisprudence, parce qu'on sait très bien qu'avec une disposition
pareille, ça va permettre à des procureurs d'employeurs de
prétendre que l'organisme qui a porté plainte pour le compte d'un
salarié n'est pas un organisme au sens défini par l'article 45 de
la loi. Ça, il faut bien s'attendre que ce soit, à un moment
donné, l'objet d'une contestation.
Il vaut mieux être le plus précis possible, parce que, ce
qui est brimé, plus fondamentalement, ce n'est pas de pouvoir se faire
exploiter, d'avoir le droit de se faire exploiter, c'est d'avoir justement le
droit d'être protégé. Le ministre a invoqué
tantôt - c'est tout en son honneur - l'argument de liberté, mais
je pense que ses craintes sont non fondées, parce que toute sa loi,
d'une certaine façon, vient rétablir la liberté qui, sur
les apparences, est la même entre les individus mais qui,
évidemment, dans la réalité, s'avère illusoire,
puisque la liberté de celui qui possède, ou la liberté des
droits de gérance, ou la liberté de celui qui offre est bien
différente de la liberté de celui qui demande. D'ailleurs, il
faut lire simplement le mémoire que le ministre avait
présenté au Conseil des ministres, dans sa partie accessible au
public, pour comprendre, pour vibrer à toute cette question, quand le
ministre disait: Cette loi vise à énoncer et garantir
formellement l'ensemble des conditions de travail devant normalement constituer
la protection de base de toute personne salariée afin d'éviter
l'exploitation et la marginalisation d'une partie de la main-d'oeuvre à
trop faible pouvoir de négociation sur ses conditions de travail.
M. le Président, si tant est que ce n'est pas par la
clarté de sa législation que cette protection est
accordée, il va sûrement y avoir des plaintes à l'Office de
la protection du consommateur. Il va sûrement y avoir une demande pour
que ces organismes de défense des droits des salariés, tels que
définis dans la loi, soient accrédités quelque part et il
va y avoir... De toute façon, moi, à mon point de vue, il
vaudrait mieux que le ministre soit clair dans son projet de loi, parce que
ça va donner libre cours à toutes sortes de contestations.
Imaginez, par exemple... Ça peut être le cas. On n'a pas
idée combien, quand il y a de l'argent à faire, il y a assez vite
des gens qui sautent sur l'occasion d'en faire. Et dans la mesure où,
par exemple, un bureau se spécialise... On l'a vu. Par exemple, moi,
dans mon quartier, vous allez sur la rue Ontario et, à peu près
à chaque coin de rue, ce qui remplace les tavernes, c'est une sorte
d'agence où vous pouvez changer vos chèques. Là, ils
changent les chèques, et ils vous chargent 15 %. Ça, c'est
supposé être interdit. C'est toujours là et ça
opère. Il y a des plaintes et ils paient des amendes. Mais ça
doit être payant, parce qu'ils continuent tout le temps. J'ai
l'impression que ça peut être payant, à un moment
donné. Ça peut être payant si quelqu'un dit: Je fais une
plainte à ta place et puis je la fais... Je n'en ai pas contre le fait
que les services soient rémunérés. Je n'en ai pas contre
ce fait-là. Je pense qu'il n'y a rien de gratuit, de toute façon.
Je n'en ai pas contre le fait qu'on puisse avoir un montant à
débourser. J'en ai contre le fait qu'on fasse un profit sur la plainte
que quelqu'un a le droit, en vertu d'une loi, de faire. Je n'en ai pas contre
le fait qu'il ait peut-être à débourser pour les
services-conseils qu'il va aller chercher, mais j'en ai contre le fait qu'on
profite de lui. Et je ne peux pas croire qu'un organisme à but
lucratif... Je n'en ai pas contre le fait qu'on paie pour un service-conseil;
j'en ai contre le fait que des gens puissent dire: Je vais porter plainte et je
vais prendre un pourcentage. À dire vrai, je trouverais ça
dangereux et inquiétant. Pourquoi pas? Ça peut se multiplier: Je
porte plainte et, sur ce que tu gagnes, je prends un pourcentage. Je prends 15
%, je prends 20 %. Tôt ou tard, ça va se retrouver, de toute
façon, à l'Office de la protection du consommateur,
ça.
M. Bourbeau: Est-ce qu'un organisme sans but lucratif ne pourrait
pas faire ça aussi, charger un montant?
Mme Harel: Oui. Je n'en ai pas contre le fait qu'on charge des
frais. J'en ai contre le fait
qu'on cherche à faire un profit sur le fait qu'on puisse
déposer une plainte en vertu d'une loi d'ordre public.
M. Bourbeau: Je veux bien examiner ça attentivement, M. le
Président, parce que, là-dessus, je ne suis pas fermé.
Sauf que, si on convient que ce n'est pas nécessairement une
économie pour le salarié, que les deux organismes, à but
lucratif ou non, puissent le charger, qu'est-ce qu'il reste? Il reste qu'il y
en a un qui ferait peut-être un profit commercial...
Mme Harel: Paierait les services.
M. Bourbeau: ...et que l'autre retirerait le même montant
d'argent mais qu'il serait redistribué pour un organisme, mais que, pour
le travailleur, lui, si on ne permet pas à tout le monde de le
représenter, si on en coupe certains, il y aurait moins
d'accessibilité.
Mme Harel: O.K. Alors, entendons-nous sur une chose: au moins que
les organismes de défense des droits des salariés soient
accrédités quelque part. Il faut qu'il y ait un mécanisme
d'accréditation. Si vous n'accréditez pas les
mécanismes... Sinon, mettez-les sans but lucratif.
Le Président (M. Gautrin): S'il vous plaît, restez
sur votre amendement.
Mme Harel: Oui, oui. Sinon, mettez-les sans but lucratif.
Le Président (M. Gautrin): Là, vous faites un autre
sous-amendement, mais continuez.
Mme Harel: Ce que je signale, M. le Président, c'est qu'il
vaudrait mieux...
Le Président (M. Gautrin): Si on suspendait
peut-être une minute pour que vous vous parliez?
M. Bourbeau: Écoutez, moi, je veux bien attendre...
Le Président (M. Gautrin): O.K. Alors, on continue.
M. Bourbeau: Je ne demande pas mieux que d'être convaincu,
M. le Président, mais je me demande...
Le Président (M. Gautrin): C'est parce qu'on était
passé de sans but lucratif à accrédité, alors
peut-être que...
M. Bourbeau: Accrédité, je ne vois pas. On n'est
pas pour mettre sur pied un système d'accréditation.
Le Président (M. Gautrin): Parfait, alors on reste sur
sans but lucratif.
M. Bourbeau: On va engager 99 fonctionnaires de plus, là.
On va...
Le Président (M. Gautrin): Parfait, restons sur sans but
lucratif.
Mme Harel: Remarquez que la Commission des normes aurait pu avoir
ce pouvoir d'accréditer.
Le Président (M. Gautrin): Non, non, ce n'est pas sur la
table, donc on revient à sans but lucratif.
Mme Harel: parce que, en fait, la seule réalité,
c'est qu'on est dans un domaine où il y a quand même... pensez
à toute la main-d'oeuvre immigrante. moi, par exemple, dans mon
quartier, il y a une usine qui fait des bas de nylon. tout ce qui se fait en
bas de nylon au québec, de toutes les marques, ne pensons pas que c'est
fait à des endroits différents, c'est tout fait au même
endroit. 80 % de la main-d'oeuvre est immigrante. d'ailleurs, les gens de mon
quartier, les femmes me disent que, pour se faire engager, il faut
habituellement qu'elles disent: no habla frances, no habla ingles, comme
ça, ça leur donne plus de chances, le patron étant
convaincu que...
Le Président (M. Gautrin): II n'y aura pas une
unité syndicale qui entrera.
Mme Harel: Oui. Il n'y en a pas, d'ailleurs. Mais elles ont fait
appel à moi, l'an passé, en 1989, vous savez pourquoi, M. le
Président?
Le Président (M. Gautrin): Ah! parce que vous avez
beaucoup de...
Mme Harel: Pour qu'il y ait un exterminateur qui vienne faire
disparaître les coquerel-les, parce qu'elles en rapportaient chez elles,
que, le samedi matin, comme elles sont obligées de faire du temps
supplémentaire, les portes ne soient pas barrées puis qu'il y ait
un agent de sécurité comme d'habitude, parce qu'au
deuxième ils barraient les portes pour que personne ne rentre au
premier, mais, comme elles travaillent au deuxième, il n'y avait
personne, finalement, qui pouvait ouvrir ou fermer les portes - alors, bon,
c'est un cas de CSST; ça a changé - puis aussi parce qu'elles
mangeaient sur leur machine, puis le bas de nylon, ça fait beaucoup,
beaucoup, beaucoup de coton, ça. Mettons qu'on se croyait à
l'époque de Zola.
Le Président (M. Gautrin): Bien.
Mme Harel: C'est incroyable! On ne pense pas, là...
Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Alors, est-ce
que M. le ministre...
M. Bourbeau: Je pense qu'on va suspendre...
Le Président (M. Gautrin): Vous voulez suspendre un petit
peu pour savoir ce qu'on fait. Alors, Mme la députée de
Hochelaga-Maison-neuve, j'imagine que, dans l'amendement que vous avez
déposé, vous voulez dire le premier "paragraphe" et pas
"alinéa", hein?
Mme Harel: Ah?
Le Président (M. Gautrin): C'est purement technique...
Mme Harel: Oui.
Le Président (M. Gautrin): Alors, nous avons reçu
"paragraphe" au lieu de "alinéa".
Mme Harel: Oui.
Le Président (M. Gautrin): Parfait. Alors, on suspend.
(Suspension de la séance à 16 h 16)
(Reprise à 16 h 22)
Le Président (M. Gautrin): La commission des affaires
sociales reprend ses travaux. M. le ministre, actuellement, voudrait
réagir au plaidoyer brillant de la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
M. Bourbeau: Alors, M. le Président, pour que la
postérité prenne en note mes paroles, tout à l'heure la
députée de Hochelaga-Maisonneuve, en lisant le mémoire que
j'ai soumis au Conseil des ministres, disait que ça la faisait vibrer,
alors je voudrais que mes paroles aussi puissent la faire vibrer et je vais lui
dire que nous accepterions son amendement, mais en s'assurant qu'il soit bien
rédigé.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gautrin): Bien, alors voulez-vous
peut-être...
M. Bourbeau: Les légistes me disent qu'il faudrait faire
une modification pour que les mots "sans but lucratif' ne se retrouvent pas
à la fin de l'alinéa, mais plutôt après le mot
"organisme". Alors, ça se lirait: ...pour le compte d'un salarié
qui y consent par écrit, par un organisme sans but lucratif de
défense des droits des salariés." Sans quoi, on pourrait penser
que ce sont les salariés qui sont à but non lucratif.
Le Président (M. Gautrin): Bon. Alors, peut-être que
la manière de fonctionner, c'est qu'on pourrait retirer cet
amendement...
Mme Harel: C'est ça.
Le Président (M. Gautrin): ...que vous avez
déposé...
Mme Harel: Tout à fait.
Le Président (M. Gautrin): ...et redéposez
maintenant un nouvel amendement. C'est vous qui le déposez, M. le
ministre?
M. Bourbeau: Bien, disons, que...
Le Président (M. Gautrin): Alors, on va en laisser la
paternité à Mme...
Mme Harel: Non, non, non.
M. Bourbeau: La maternité.
Mme Harel: Non, non.
Le Président (M. Gautrin): La maternité.
Mme Harel: La maternité, d'ailleurs, se constate; c'est
toujours la paternité qui se présume.
Le Président (M. Gautrin): Sur ça, vous avez
parfaitement raison, madame.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gautrin): Vous avez parfaitement raison.
Alors, est-ce que vous voulez en assumer la maternité?
Mme Harel: Non, non, non, allez-y.
Le Président (M. Gautrin): Vous laissez la
paternité alors?
Mme Harel: Tout à fait.
Le Président (M. Gautrin): Bon. Alors, la paternité
revient à..
M. Bourbeau: M. le Président, c'est manifestement
l'amendement de la députée de Hochelaga-Maisonneuve que vous
avez, en tant que président..
Le Président (M. Gautrin): Bon. Alors, écoutez, je
vais rendre un jugement. J'imagine que c'est le député de
Trois-Rivières qui dépose actuellement cet amendement. On
s'entend là-dessus? Merci, M. le député de
Trois-Rivières. Alors, on débat actuellement d'un amendement du
député do Trois Rivières...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gautrin): ...qui est de placer,
après "organisme", les mots "sans but lucratif". C'est bien
ça?
Mme Harel: C'est bien ça.
Le Président (M. Gautrin): Merci, alors est-ce que vous
avez encore à vous exprimer?
M. Bourbeau: Adopté.
Mme Harel: M. le député de
Trois-Rivières?
Le Président (M. Gautrin): Adopté?
Mme Harel: Bien, M. le député de
Trois-Rivières?
Le Président (M. Gautrin): Bien...
M. Philibert: Tout en souhaitant que cet ajout-là, qui,
manifestement, est mis là par souci de permettre une plus grande
accessibilité, rencontre son objectif et que l'effet pervers ne fasse
pas en sorte qu'il y ait des gens qui pourraient vouloir utiliser un recours
mais en soient privés parce qu'il n'y aurait pas d'organisme à
but non lucratif qui serait constitué, enfin en espérant que
l'esprit se transformera en réalité.
Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le
député de Trois-Rivières. Alors, ceci étant
dit...
Mme Harel: Mais vous êtes bien servi à
Trois-Rivières.
M. Philibert: Pardon?
Mme Harel: Vous êtes bien servi.
M. Philibert: CANO fait un excellent travail.
Mme Harel: C'est incroyable. Si chaque ville avait un organisme
comme celui-là.
Le Président (M. Gautrin): Bon. Passons donc... Est-ce que
vous êtes prêts à voter sur l'amendement? Il est
adopté?
M. Bourbeau: Oui.
Le Président (M. Gautrin): Adopté. Est-ce que
l'article 45, premier paragraphe, est adopté?
M. Bourbeau: Adopté. Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Gautrin): Adopté. Le
deuxième paragraphe est-il adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Gautrin): Adopté. On tombe sur
l'article 46.
Une voix: II a été adopté tel
qu'amendé?
Le Président (M. Gautrin): Oui, le premier est
adopté tel qu'amendé. Bon.
Une voix: Mais l'article?
Le Président (M. Gautrin): L'article 45, dans sa
totalité, est-il adopté?
Une voix: Tel qu'amendé.
Le Président (M. Gautrin): Tel qu'amendé? Il est
bien adopté. Nous passons à l'article 46. 46 une fois...
M. Bourbeau: Un instant, M. le Président, j'aurais...
Le Président (M. Gautrin): Oui, oui. Je vous laisse...
M. Bourbeau: ...un commentaire à faire.
Le Président (M. Gautrin): J'ai essayé, mais je
n'ai pas réussi.
M. Bourbeau: Cette modification a pour objet d'effectuer une
concordance avec l'amendement apporté par le paragraphe premier de
l'article 45 du projet de loi qui donne à un organisme sans but lucratif
de défense des droits des salariés le droit de porter plainte
à la Commission.
Le Président (M. Gautrin): Bien. Adopté? Mme
Harel: Adopté.
Le Président (M. Gautrin): Adopté. 47, M. le
ministre.
M. Bourbeau: Cette modification vise à remplacer, en
concordance avec l'amendement apporté par le paragraphe premier de
l'article 45 du projet, le terme "salarié", donc à remplacer le
terme "salarié" par celui de "plaignant" et à exiger que la
Commission des normes du travail informe le plaignant de son droit de demander
une révision d'une décision de celle-ci, quant à la
poursuite d'une enquête.
Évidemment, M. le Président, l'objectif est de mettre
l'organisme de défense des droits des salariés sur le même
pied que le salarié qui porte plainte.
Le Président (M. Gautrin): Ça va pour vous?
Mme Harel: Oui. Ça, on peut dire que c'est une belle
amélioration.
Le Président (M. Gautrin): Merci. Alors sur l'article 47,
vous êtes prêts à vous prononcer?
Mme Harel: Oui.
Le Président (M. Gautrin): Adopté.
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Gautrin): Adopté. L'article 48, M.
le ministre.
M. Bourbeau: Ce changement a pour objet d'accorder à un
plaignant le droit de demander à la Commission des normes du travail de
réviser sa décision relativement à la poursuite d'une
enquête, de préciser le délai pour exercer ce droit et pour
rendre la décision finale.
En fait, il s'agit de reconnaître de façon formelle le
droit à une révision administrative d'une décision de la
Commission des normes du travail, décision relative au refus de
poursuivre une enquête.
Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Hochelaga-Maison-neuve, vous avez quelques
commentaires? Bon.
Mme Harel: Par quel mécanisme entend-on définir
l'instance qui sera responsable de la révision? Bon, là, il y a
le droit de révision, qui n'existait pas auparavant et qui est dans la
loi maintenant, ça c'est une nette amélioration, mais la
révision de la décision ne sera certainement pas transmise aux
personnes mêmes qui avaient pris la décision. On ne va pas
demander à des personnes qui ont pris la décision de
réviser leur propre décision, comme c'est le cas, par exemple,
pour la CSST ou d'autres lois où c'est une instance supérieure,
en général, qui est chargée de la révision.
Le Président (M. Gautrin): Je pense que Me Parent, si vous
n'avez pas d'objection, pourrait donner quelques commentaires explicatifs.
M. Parent (Richard): Alors, M. le Président, suite
à l'enquête ou au cours de l'enquête plutôt...
Le Président (M. Gautrin): Petit caucus. Est-ce qu'on
suspend pour un caucus?
Mme Harel: Non. De toute façon, ce n'est pas grave,
ça reprend comme si de rien n'était.
Le Président (M. Gautrin): Alors, allez-y,
Me Parent.
M. Parent (Richard): Alors, M. le Président, ce n'est pas
encore totalement défini, sauf que l'intention est que ce ne soit,
évidemment, ni la même personne, ni la même unité de
personnes qui ont pris la première décision qui vont
procéder à la révision et qui en communiqueront les
résultats aux personnes concernées.
Le Président (M. Gautrin): Bien.
Mme Harel: Déjà, je pense que la Loi sur la
santé et la sécurité du travail et aussi la Loi sur
l'assurance-chômage prévoient la révision, mais, en
prévoyant la révision, elles prévoient, en même
temps, une instance. Ici, finalement, il y a le droit à la
révision, mais sans qu'on ait spécifié à qui.
Est-ce que c'est par règlement que ce le sera ou si c'est laissé
totalement à la discrétion de la Commission? (16 h 30)
Le Président (M. Gautrin): Le ministre a pris bonne note
de vos questions et il va tâcher d'y répondre dans les plus brefs
délais. Vous êtes prêt à répondre? Me
Parent?
M. Parent (Richard): M. le Président, les seuls pouvoirs
que possède la Commission sont des pouvoirs administratifs, ce ne sont
pas des pouvoirs judiciaires. On n'a pas de tribunaux administratifs. Alors,
évidemment, la révision va rester au niveau administratif, sauf
que ce que l'on dit, c'est que le niveau qui va procéder à la
révision sera différent de celui qui a pris la première
décision. Ce ne seront pas les mêmes gens.
Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: J'essaie de retrouver, dans la loi ontarienne, the
Employment Standards Act...
Le Président (M. Gautrin): Voulez-vous un petit caucus? Au
football, c'est 20 secondes, après c'est une perte de 10 verges.
Merci.
Mme Harel: Bon, alors, M. le Président, on n'a pas avec
nous les dispositions des lois similaires. De toute façon, la garantie
qu'on a, c'est qu'il y ait une révision, mais ça reste une
garantie verbale que la révision soit prise par une autre unité,
mais...
M. Bourbeau: M. le Président, je ne suis pas
vraiment...
Le Président (M. Gautrin): M le ministre.
M. Bourbeau: ...un expert dans ces choses, mais ce que je sais,
c'est que, si la révision se fait par le même organisme, on va
rapidement
avoir le protecteur du citoyen et le président de la commission
des droits de la personne dans les jambes. je le sais par expérience, m.
le président.
Le Président (M. Gautrin): Ce sont vos amis, si j'ai bien
compris, qui vous fréquentent régulièrement.
M. Bourbeau: Puis probablement l'aide juridique aussi et
possiblement le président de la Commission d'accès à
l'information...
Le Président (M. Gautrin): Bon!
M. Bourbeau: ...en plus de la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gautrin): De quoi alimenter vos
cauchemars. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Gautrin): Adopté, merci. L'article
49.
Obligation d'un avis indiquant le montant
réclamé
M. Bourbeau: L'amendement proposé obligera la Commission
des normes du travail à transmettre à chaque salarié un
avis indiquant le montant réclamé en sa faveur plutôt
qu'une copie de la mise en demeure transmise à l'employeur.
En fait, cet amendement confirme une pratique présente ou
actuelle de la Commission et permettra à la Commission d'informer chaque
personne salariée du montant réclamé en sa faveur en
tenant compte de la confidentialité des renseignements personnels,
conformément à la loi sur l'accès à
l'information.
Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: C'était déjà une politique en
application à la Commission des normes du travail, je crois?
M. Bourbeau: C'est ce qu'on me dit, c'est ce que je viens de
dire, oui.
Le Président (M. Gautrin): Ça va? Mme Harel:
Adopté.
Le Président (M. Gautrin): Adopté. Article 50, M.
le ministre.
Permission de poursuivre les responsables de salaires
impayés
M. Bourbeau: Cet amendement vise à permettre à la
Commission des normes du travail de poursuivre, au nom des salariés, les
administrateurs d'une compagnie qui, dans certaines circonstances, peuvent
être tenus responsables de salaires impayés. Je vous rappelle que
la commission Beaudry - M. le Président, vous êtes au courant,
mais je vous le rappelle au cas où vous l'auriez oublié - a fait
une recommandation en ce sens.
Le Président (M. Gautrin): Oui.
M. Bourbeau: II s'agit d'améliorer les possibilités
de recouvrement d'une somme due à une personne salariée, surtout
en cas d'insolvabilité et de faillite.
Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve, quelques commentaires?
Mme Harel: Je cherche, M. le Président, le point de vue du
groupe Au Bas de l'échelle sur cette question.
Le Président (M. Gautrin): On va le chercher. Mais je
pense qu'ils ne peuvent être qu'en faveur.
M. Bourbeau: On me dit que le groupe Au Bas de l'échelle
voulait qu'on modifie la clause pour dire qu'à la demande du
salarié "la Commission doit", alors que nous avons ici "la Commission
peut".
Le Président (M. Gautrin): Ça va? Peut-être
qu'une petite suspension? Non, pas de suspension?
Mme Harel: Non.
Une voix: Vous tenez absolument à suspendre?
Le Président (M. Gautrin): Non, pas du tout mais...
M. Bourbeau: la recommandation du groupe c'est d'obliger la
commission à poursuivre les administrateurs au nom d'une personne
salariée, si elle le lui demande.
Le Président (M. Gautrin): C'était la
recommandation du groupe Au Bas de l'échelle.
Mme Harel: Tandis que vous, vous avez choisi plutôt...
M. Bourbeau: Plutôt que d'obliger la
Commission, nous on dit: "La Commission peut", si elle le juge à
propos.
Mme Harel: Et ça c'est à défaut du
salarié de le faire ou à la place du salarié?
M. Bourbeau: Si le salarié n'exerce pas son recours, la
Commission peut le faire à sa place.
Mme Harel: Oui. En fait, ce qui est dit là, au premier
paragraphe c'est: "...à défaut par celui-ci d'informer la
Commission de son intention de poursuivre lui-même à l'expiration
du délai prévu par l'article 111." Donc, ce n'est pas à
défaut de le faire, mais c'est à défaut d'en informer la
Commission.
Le Président (M. Gautrin): C'est exact.
M. Bourbeau: Alors, on va demander à Me Parent un
complément de réponse.
Le Président (M. Gautrin): Me Parent. M. Parent
(Richard): M: le Président.
Le Président (M. Gautrin): Bon, sortez-nous de ce
dédale.
M. Parent (Richard): L'ajout qu'on fait, soit le deuxième
paragraphe à l'article 113, se situe dans un ensemble qui est le
processus à suivre à la suite d'une plainte du salarié.
C'est que la loi actuelle prévoit, à l'article 111, que, lorsque,
à la suite d'une enquête, la Commission est d'avis qu'une somme
d'argent est due à un salarié conformément à la
présente loi ou aux règlements, elle met l'employeur en demeure
de payer cette somme à la Commission dans les 20 jours de la mise
à la poste de cette mise en demeure par courrier recommandé. En
même temps, ce qu'on vient de voir, c'est que la Commission va envoyer au
salarié un avis lui indiquant quel montant elle réclame pour lui.
À la suite de cette réclamation-là devant les tribunaux,
la Commission va recevoir un jugement en faveur du salarié. Si le
jugement reçu n'est pas exécutable parce que la compagnie
à but lucratif est insolvable, l'ajout qu'on fait à l'article
113, qui n'existait pas avant, c'est qu'avant ça le salarié
pouvait lui-même poursuivre les administrateurs, mais la Commission ne
pouvait pas le faire en son nom. Alors, ce qu'on ajoute, c'est un article qui
dit que la Commission pourra, lorsqu'elle aura un jugement en faveur d'un
salarié contre une compagnie et qu'elle ne pourra pas l'exécuter
parce que la compagnie est insolvable, poursuivre les administrateurs pour
récupérer les sommes qui sont dues.
Le Président (M. Gautrin): Merci, Me Parent. Est-ce que
ça vous convainc, Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve?
Mme Harel: Bien, je comprends bien la mécanique, mais,
à ce moment-là, il faut donc que le salarié informe, en
vertu du premier paragraphe, la Commission de son intention de poursuivre
lui-même, sinon la Commission est comme automatiquement subrogée
dans les droits du salarié. C'est ça? Est-ce que c'est ça
qu'il faut comprendre? Parce que, évidemment, votre article 50 ne se lit
qu'à la lumière de l'article 113 et, déjà l'article
113 stipule, là, que "la Commission peut exercer pour le compte d'un
salarié l'action appropriée à défaut par celui-ci
d'informer la Commission de son intention de poursuivre lui-même". Donc,
s'il n'informe pas, c'est la Commission qui est subrogée
automatiquement. Est-ce que c'est ça qu'il faut comprendre?
Le Président (M. Gautrin): Me Parent.
M. Parent (Richard): Lorsqu'on va envoyer une mise en demeure
à l'employeur, l'avis qu'on va envoyer au salarié va contenir les
indications suivantes. C'est que, si l'employeur ne nous a pas payés
dans les 20 jours et que le salarié lui-même ne nous a pas
avisés qu'il désire poursuivre lui-même, là, la
Commission intentera une poursuite à son nom pour le compte du
salarié.
Le Président (M. Gautrin): Ça va?
Mme Harel: Oui. M. le Président, à l'article 112
qui n'est pas encore en vigueur, on retrouve cette...
Le Président (M. Gautrin): "À défaut par
l'employeur de payer cette somme dans le délai fixé..."
Mme Harel: Oui, c'est ça. On trouve cette idée que
"à défaut par l'employeur de payer cette somme dans le
délai fixé à l'article 111 - donc la somme qui est due
mais qui ne l'est pas - la Commission peut, de son propre chef, dans les cas
prévus par règlement adopté en vertu du paragraphe 6°
de l'article 29, la verser au salarié dans la mesure prévue par
le paragraphe 6° de l'article 39. La Commission est dès lors
subrogée dans tous les droits du salarié jusqu'à
concurrence de la somme ainsi payée."
Est-ce que le ministre a une idée du moment où il mettra
en vigueur cette disposition?
M. Bourbeau: Vous avez remarqué la formule très
subtile, M. le Président, hein? On ne me demande pas si je vais le
mettre en vigueur, on me demande le moment où je vais le mettre en
vigueur.
Tout comme nos prédécesseurs du Parti
québécois qui ne l'ont pas mis en vigueur de 1979 à 1985,
M. le Président, nous regardons présentement quels seraient les
inconvénients de
le faire. Inutile de dire que ce n'est peut-être pas
présentement le meilleur temps pour imposer aux employeurs une surprime
parce que ça signifierait, bien sûr, une augmentation des primes
chargées aux employeurs de la cotisation à la Commission des
normes du travail. Mais je suis personnellement assez sensible à
l'importance de protéger les salaires des travailleurs et de faciliter
les réclamations pour les salaires impayés, soit dans le cours
normal des affaires ou même dans le cas d'une faillite.
J'ai demandé récemment à mes fonctionnaires de
préparer divers scénarios que nous étudions
présentement. Maintenant, je ne sais pas si on sera en mesure de mettre
en vigueur cet article-là au cours des prochains mois. Je ne peux pas
cacher que la conjoncture économique présente ne milite pas
nécessairement en faveur d'un accroissement subit des cotisations des
employeurs, surtout des petites entreprises, mais c'est mon intention, M. le
Président, dans les meilleurs délais, de tenter de
remédier à cette situation.
Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. le
ministre. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Dans ce contexte-là, est-ce qu'il ne serait pas
opportun jusqu'à ce que 112 soit mis en vigueur, que le recours
prévu à 113 soit un recours automatique, à savoir que "la
Commission doit exercer pour le compte d'un salarié l'action
appropriée" plutôt que "peut" seulement? Dans le fond, on nous dit
qu'il y a possibilité ultérieure que ce soit mis en vigueur,
mais, entre-temps, il faut rappeler que ce travailleur qui, en vertu d'un
droit, n'est-ce pas... parce qu'il faut bien se comprendre, il y a
déjà eu chose jugée, ce droit-là lui a
été reconnu et puis l'employeur, finalement, ne paie pas le
montant qui lui est réclamé et l'employé, lui, va avoir
les délais de carence de l'assurance-chômage et les délais
administratifs etc. à supporter. À ce moment-là, tant que
ce n'est pas en vigueur, est-ce que ce ne serait pas mieux que ce soit "doit"
ou est-ce que c'est la pratique courante?
Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, on me signale que ce ne
serait pas sage d'obliger la Commission à poursuivre dans tous les cas
parce qu'il y a plusieurs cas où, premièrement, les
administrateurs ne sont pas en faute, par exemple, une société ou
une compagnie qui va en faillite ou qui est en difficulté
financière. Il peut arriver des cas où les administrateurs ne
sont pas responsables et ne pourraient pas même être tenus
responsables en vertu des lois. D'autres cas pourraient se présenter
où des administrateurs pourraient être responsables, mais sont
devenus insolvables. À ce moment-là, si la Commission devait, en
aucune façon, exercer une discrétion et devait prendre des
poursuites continuellement, on pourrait voir, finalement, une série de
poursuites interminables entreprises sans aucune chance de réussite, ce
qui ferait en sorte de retarder les autres causes qui, elles, pourraient
être bonnes. Donc, la Commission doit pouvoir exercer une
discrétion, il faut qu'il y ait des chances raisonnables de
réussite avant d'entreprendre une action.
Ça serait très bon pour faire travailler les avocats, mais
pas nécessairement bon pour la justice. (16 h 45)
Le Président (M. Gautrin): Je comprends.
Mme Harel: M. le Président, je me rends aux arguments du
ministre en ce qui a trait à l'article 50, qui ajoute un alinéa
à l'article 113. Mais, quant au premier paragraphe de l'article 113,
est-ce qu'il ne serait pas opportun de considérer le fait que les
recours devraient être exercés? Ce que dit l'article 113, c'est:
"La Commission peut". Alors, on pourrait, par exemple, dire: "La commission
doit exercer pour le compte d'un salarié l'action appropriée",
et, au deuxième alinéa, on pourrait trouver: "Elle peut aussi
exercer à i'encontre des administrateurs d'une personne morale les
recours". Alors, autant elle pourrait exercer cette discrétion à
I'encontre des administrateurs, autant elle devrait exercer le recours.
Le Président (M. Gautrin): Est-ce que vous voulez
procéder par amendement ou vous attendez une réaction du
ministre? Vous préférez attendre une réaction. M. le
ministre, vous avez compris la demande?
M. Bourbeau: Oui, oui, très bien. Je suis en train d'en
discuter avec M. le président de la Commission des normes du travail, M.
le Président.
Le Président (M. Gautrin): Bon. Peut-être
voulez-vous une petite suspension?
M. Bourbeau: Non, je pense qu'on est en train...
Mme Harel: Vous êtes toujours prêt à nous en
donner une, vous.
Le Président (M. Gautrin): Non, mais c'est parce
que...
M. Bourbeau: M. le Président, il arrive qu'on parle de
sujets qui portent sur l'administration presque quotidienne de la Commission et
il est bon de vérifier auprès des gens qui sont...
Le Président (M. Gautrin): Je comprends
tout à fait, tout à fait.
M. Bourbeau: ...experts en la matière.
M. le Président, c'est un peu la même réponse que
tout à l'heure. Ici, on parle de poursuivre la compagnie et, dans le
paragraphe précédent, ses administrateurs. Le président de
la Commission me dit que la Commission poursuit systématiquement,
qu'elle n'exerce aucune discrétion lorsqu'il existe un droit et que le
salarié, évidemment, n'a pas poursuivi lui-même, enfin,
s'il existe un droit et des chances de réussite.
Mais si la Commission en vient à la conclusion qu'il n'y a pas de
droit ou encore que, même s'il y a des droits, il n'y a aucune chance de
récupérer des sommes si la compagnie, par exemple, est en
faillite ou des choses comme ça, bien c'est la même chose. Elle
pourrait, elle devrait avoir une discrétion de ne pas poursuivre, de
façon à ne pas générer des frais inutiles.
Le Président (M. Gautrin): Est-ce que ça vous
convainc? Vous êtes convaincue, alors est-ce que qu'on peut
considérer l'article 50 comme adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Gautrin): L'article 51, M. le ministre,
qui modifie l'article 114.
Détermination du taux
d'intérêt
M. Bourbeau: II s'agit d'un amendement de concordance avec un
amendement qui a été apporté à l'article 28 de la
Loi sur le ministère du Revenu. L'article 28 de la Loi sur le
ministère du Revenu a été modifié par l'article 250
du chapitre V de 1990. Le taux d'intérêt est maintenant
déterminé selon une méthode déterminée par
règlement. Le règlement même ne fixe pas directement le
taux d'intérêt. Alors, M. le Président, c'est d'une
simplicité et d'une clarté totales et absolues.
Mme Harel: Ça se réfère à l'article 9
du projet de loi?
M. Bourbeau: C'est ça. On a fait la même
modification à l'article 9.
Mme Harel: Et ça portait sur quoi, l'article 9?
M. Bourbeau: C'était le taux d'intérêt sur le
montant dû pour les prélèvements.
Mme Harel: Ah oui! La somme due porte intérêt, pour
le salarié, à compter de la mise en demeure visée dans
l'article 111, c'est-à-dire que ce n'est pas à partir de la
plainte.
M. Bourbeau: C'est manifestement à compter de la mise en
demeure.
Mme Harel: La plainte n'est pas considérée comme
une mise en demeure? Moi, je peux comprendre qu'il n'y ait pas
intérêt automatiquement, mais si la plainte est reçue...
parce que l'article 111, c'est quand la plainte est accordée. C'est
parce qu'on donne suite à la plainte. La plainte était
fondée, en fait. Alors, pourquoi n'y a-t-il pas
rétroactivité? Si, par exemple, il n'y avait pas la Loi sur les
normes et que le Code civil était, finalement, l'outil, alors le
salarié irait voir un avocat, qui enverrait une mise en demeure, et
ça porterait intérêt à partir de la mise en
demeure.
M. Bourbeau: M. le Président, étant donné
qu'on est dans la procédure civile, on pourrait demander à Me
Paradis de répondre.
Le Président (M. Gautrin): Bien sûr, Me Paradis.
M. Paradis (Michel): C'est exactement la même chose que
dans le Code civil. Le taux d'intérêt va commencer à partir
de la mise en demeure.
Mme Harel: Ah! Et 111, c'est la mise en demeure?
M. Bourbeau: Oui. Vous l'avez découvert tantôt.
Mme Harel: Oui, d'accord, mais c'est différent là.
111, c'est la mise en demeure après l'enquête. 111, ce n'est pas
la mise en demeure lorsque la plainte est déposée. Par exemple,
l'enquête peut durer...
M. Paradis (Michel): II n'y a qu'une mise en demeure
Mme Harel: Lorsque, à la suite d'une enquête, la
Commission est d'avis qu'une somme d'argent est due à un salarié
- je reprends mon exemple - qui va voir un avocat, l'avocat envoie une mise en
demeure. Si l'employeur ne paie pas, l'avocat, par exemple, irait devant un
tribunal, la Cour des petites créances si c'était pour moins de
1000 $, par exemple, s'il n'y avait pas la Loi sur les normes, ou il irait
devant un autre tribunal si c'était un montant supérieur, et si
le juge considérait que cette somme d'argent est due, alors, à ce
moment-là, l'intérêt couru le serait à partir de la
mise en demeure, pas à partir de la décision.
Le Président (M. Gautrin): Me Paradis, pouvez-vous nous
éclairer?
Mme Harel: L'enquête peut durer combien...
Cinq ou six mois? Le délai?
Le Président (M. Gautrin): Attendez. Alors, deux
questions: la durée de l'enquête...
M. Bourbeau: On me dit que ça prend, en moyenne, 45 jours,
pour leur enquête...
Le Président (M. Gautrin): 45 jours de moyenne pour une
enquête.
M. Bourbeau: ...et que, dans 65 % des cas, on en vient à
la conclusion que...
Le Président (M. Gautrin): Les écarts types.
M. Bourbeau: M. le Président, vous l'avez entendu autant
que moi, non?
Le Président (M. Gautrin): Non.
M. Bourbeau: On me dit que, dans 65 % des cas... Je parlais au
président parce qu'évidemment ce sont des cas de
statistiques.
Le Président (M. Gautrin): Oui, intéressantes.
M. Bourbeau: II y a des droits dans 65 % des cas et, à ce
moment-là, ça prend, en moyenne, 45 jours pour terminer ces
enquêtes.
Mme Harel: C'est toujours la même comparaison: on peut
aussi se noyer dans trois pieds d'eau de moyenne. Je ne sais pas si c'est parce
que ce sont des cas plus lourds, mais les seuls dossiers de comté que
j'ai, ce sont des gens qui ont été congédiés, qui
ont déposé une plainte et qui sont en attente depuis un an et
demi.
M. Bourbeau: On va peut-être donner la parole,
finalement...
Le Président (M. Gautrin): Dans une distribution
statistique, ça peut arriver, vous savez. Il n'y a aucun problème
là-dedans.
M. Bourbeau: M. Bergeron est le président...
Mme Harel: Le problème, c'est quand ça fait un an
et demi qu'on attend, par exemple.
Le Président (M. Gautrin): Absolument, oui.
M. Bourbeau: II faudrait peut-être le demander à M.
le président de la Commission des normes du travail.
Le Président (M. Gautrin): M. Bergeron.
M. Bergeron (Paul-Émile): Je pense qu'il faut distinguer
deux choses. Il y a des plaintes monétaires où on réclame
de l'argent pour le salarié. C'est dans ces cas-là qu'on va
informer l'employeur, par mise en demeure, qu'on considère qu'il doit de
l'argent au salarié et c'est à partir de là que
l'intérêt commence à compter. Si l'employeur ne nous paie
pas dans les 20 jours, on part les poursuites. Là, c'est une poursuite
et là, il y a des délais qui dépendent des tribunaux.
L'autre partie, quand vous parlez de recours à rencontre d'un
congédiement, nous autres, on va ramasser les faits, on va regarder
l'admissibilité et on essaie de faire un rapprochement des parties. Si
ça ne fonctionne pas et si un salarié nous demande la nomination
d'un arbitre ou la référence au commissaire, on procède
et, après ça, ce n'est plus de notre recours. Le délai
appartient à l'arbitre et c'est l'arbitre qui convoque les parties,
à la convenance des parties et avec les parties qui ajoutent des
délais là-dedans. Souvent, des plaintes de recours qui
traînent depuis un an, un an et demi, il y a des grosses chances qu'elles
soient chez le commissaire ou chez l'arbitre et qu'elles ne soient plus
à l'intérieur de notre juridiction.
Le Président (M. Gautrin): Merci, M. Bergeron. Mme la
députée.
Mme Harel: Je m'en voudrais de laisser croire que la Commission
n'a pas un fonctionnement vraiment très, très dynamique.
Ça a été une des premières institutions à
publier, par exemple, ses brochures en plusieurs langues, à offrir aussi
un service d'information des droits en plusieurs langues. C'est une des
commissions qui a fait des choses exemplaires...
Le Président (M. Gautrin): Remarquables. Mme Harel:
...dans ce domaine.
Le Président (M. Gautrin): Bien. Est-ce que vous
êtes prêts à adopter l'article 52?
M. Bourbeau: Elle ferait une bonne ministre, hein?
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gautrin): L'article 52 est-il
adopté?
Une voix: L'article 51.
Le Président (M. Gautrin): L'article 51, excusez-moi.
M. Bourbeau: L'article 52, si vous voulez, M. le
Président.
Le Président (M. Gautrin): L'article 51, non? C'est sur
l'intérêt.
Mme Harel: D'accord, adopté.
Le Président (M. Gautrin): Adopté. J'appelle
l'article 52. M. le ministre.
Délai de prescription
M. Bourbeau: Cette modification a pour but de clarifier l'article
ainsi que la date d'échéance de la prescription. Il s'agit, M. le
Président, de mettre fin aux possibilités
d'interprétations différentes sur le sujet et de limiter à
un an et demi le délai maximum puisque celui-ci s'avère
suffisant.
Le Président (M. Gautrin): Bon.
M. Bourbeau: Je vous signale, M. le Président, comme vous
le savez, que le délai de prescription est normalement d'un an.
Le Président (M. Gautrin): C'est exact.
M. Bourbeau: Certains juristes, dont possiblement ceux qui
m'entourent, prétendent que le délai de prescription est
gelé pour six mois après l'expédition d'un avis
d'enquête, tandis que d'autres - peut-être êtes-vous du
nombre -affirment que le délai est annulé et qu'en
conséquence le calcul du délai doit être recommencé.
Dans un tel cas, le délai pourrait atteindre deux ans et demi au lieu
d'un an et demi, selon la première interprétation.
Le Président (M. Gautrin): On pourrait demander à
la Cour suprême de trancher. Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
M. Bourbeau: Pour l'instant, on demande à la Commission,
c'est suffisant.
Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: C'est donc dire que, lorsqu'il y a plainte devant la
Commission, la plainte suspend le délai de prescription, est-ce bien
ça?
M. Bourbeau: Je vais passer ça à Me Parent. Le
délai de prescription exact, oui.
Le Président (M. Gautrin): Me Parent.
M. Parent (Richard): Oui.
Le Président (M. Gautrin): C'est ça.
Mme Harel: Puis, la suspension du délai de prescription
s'annule quand?
Le Président (M. Gautrin): Me Parent.
M. Parent (Richard): La suspension du délai... L'avis
d'enquête qui suspend la prescription le suspend à l'égard
de tous les salariés chez l'employeur pour une période de six
mois. Ça veut donc dire qu'à l'échéance, lorsque le
montant est dû, la Commission a un an pour intenter une poursuite.
Lorsqu'elle envoie l'avis d'enquête, lorsqu'elle reçoit la
plainte, s'il y a deux mois de passés, par exemple, la prescription est
suspendue pour six mois. Au bout de six mois, elle recommence à courir
pour les 10 mois qui restent. Donc, ça fait un total maximum de 18
mois.
Le Président (M. Gautrin): Merci. Adopté? Mme
Harel: Adopté.
Le Président (M. Gautrin): Adopté. Merci. J'appelle
l'article 53.
Poursuites devant les tribunaux civils
M. Bourbeau: M. le Président, cette disposition vise
à permettre que les causes civiles découlant de la Loi sur les
normes du travail soient inscrites sur le rôle d'urgence pour en
accélérer l'audition. Il s'agit bien sûr de réduire
les délais qui sont préjudiciables aux personnes
salariées. Et je vous rappelle, M. le Président, ne serait-ce que
pour les fins du Journal des débats, parce que vous,
sûrement, vous vous en souvenez...
Le Président (M. Gautrin): Ah oui! certainement.
M. Bourbeau: ...que les lois suivantes contiennent
déjà une disposition similaire, c'est-à-dire la Loi sur
les décrets de convention collective, la Loi sur les relations du
travail dans l'industrie de la construction, la Loi sur les architectes et la
Loi sur les ingénieurs forestiers.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, est-ce que, parce que c'est
écrit, c'est fait aussi?
M. Bourbeau: Me Parent
Le Président (M. Joly): Me Parent, à vous la
parole.
M. Parent (Richard): Dès que la loi sera adoptée et
en vigueur, nous pourrons inscrire les causes que nous présenterons,
devant soit la Cour du Québec ou la Cour supérieure, sur le
rôle qui doit être instruit et jugé d'urgence, au lieu du
rôle ordinaire comme c'est le cas actuellement.
Mme Harel: Adopté. (17 heures)
Le Président (M. Joly): Adopté Article 54.
M. Bourbeau: Cet amendement vise à rendre
l'intitulé en cause plus conforme au contenu de la section II du
chapitre V.
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Joly): Adopté. Article 55. M. le
ministre.
Interdiction d'imposer des mesures discriminatoires ou
des représailles
M. Bourbeau: L'article 55 hein? Cet amendement, M. le
Président, a pour but d'interdire, à l'instar de plusieurs autres
lois, l'imposition de mesures discriminatoires ou des représailles ou
toute autre sanction dans les circonstances prévues à l'article
122 de la loi. Cette disposition s'inspire des lois suivantes: la Loi sur les
tribunaux judiciaires, la Loi sur les jurés, la Loi sur la santé
et la sécurité du travail, ainsi que du Code du travail.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, là, on peut vraiment dire que cette
disposition-là est un des fondements du projet de loi 97. Alors,
là, j'aimerais connaître la mécanique de cette protection.
Il y a un élargissement aux mesures discriminatoires ou de
représailles. Ce n'est pas simplement, comme c'était le cas
à l'article 122, au premier alinéa... Le premier paragraphe de
l'article 55 ajoute, dans la deuxième ligne du premier alinéa et
après le mot "salarié", les mots "d'exercer à son endroit
des mesures discriminatoires ou des représailles ou de lui imposer toute
autre sanction." Le premier alinéa se lirait comme suit: "II est
interdit à un employeur ou à son agent de congédier, de
suspendre ou de déplacer un salarié, d'exercer à son
endroit des mesures discriminatoires ou des représailles ou de lui
imposer toute autre sanction."
M. Bourbeau: Oui, c'est ça.
Mme Harel: première question. dans le code du travail,
à l'article 14, on retrouve des dispositions concernant les contraintes
prohibées. bon, vous voyez, d'abord, que ça cause
déjà un problème qui est des terminologies
différentes en matière de normes du travail. ce serait toujours
utile de pouvoir se référer, grosso modo, à la même
chose quand on parle de congédiement, ou de cessation d'emploi, ou de
licenciement, pour que, dans la mesure du possible, on parle de la même
chose. là, ça s'appelle "contraintes prohibées" et ici,
dans la loi des normes, on va l'appeler, je pense, "pratiques interdites".
L'article 14 se lit de la manière suivante: "Aucun employeur, ni
aucune personne agissant pour un employeur ou une association d'employeurs ne
doit refuser d'employer une personne à cause de l'exercice par cette
personne d'un droit qui lui résulte du présent Code, ni chercher
par intimidation, mesures discriminatoires ou des représailles, menace
de renvoi ou autre menace, ou par l'imposition d'une sanction ou par quelque
autre moyen à contraindre un salarié à s'abstenir ou
à cesser d'exercer un droit qui lui résulte du présent
Code." Vous avez une autre formulation. Est-ce que c'est parce que celle du
Code du travail était archaïque ou est-ce que c'est parce que le
choix de la formulation est plus global? Parce que, vous, vous proposez
d'ajouter "d'exercer à son endroit des mesures discriminatoires ou des
représailles ou de lui imposer toute autre sanction". Alors, on ne
retrouve pas, par exemple, l'intimidation, la menace de renvoi ou autre
menace.
Le Président (M. Joly): Me Paradis.
M. Paradis (Michel): C'est parce que le Code du travail est un
petit peu archaïque qu'on a choisi une formulation qui se rapproche
beaucoup plus d'amendements qui ont été apportés à
la Loi sur les tribunaux judiciaires, à la Loi sur les jurés et
à la Loi sur la santé et la sécurité du travail qui
sont beaucoup plus récentes. Dans le Code du travail, il semble y avoir
des répétitions et "toute autre sanction" couvre la menace de
renvoi et les mesures discriminatoires. On a un terme générique
et des termes très, très détaillés. Donc, on s'en
est tenus beaucoup plus aux législations récentes qui ont
amélioré sensiblement le texte.
Mme Harel: Et, pour vous, ça couvre les mêmes
contraintes prohibées qu'on retrouve dans le Code du travail?
M. Paradis (Michel): Le Code du travail, dans le cas de
l'intimidation, c'est... On est, dans le cas du Code du travail, dans
l'exercice du droit d'association. L'intimidation, c'est d'empêcher
quelqu'un de se syndiquer et de faire des menaces dans ce sens-là. C'est
un peu différent de notre contexte.
Le Président (M. Joly): Est-ce que ça va?
Mme Harel: Non, M. le Président. Ça va, en fait,
pour les explications qu'on nous a données, mais on a d'autres
questions.
M. Bourbeau: En somme, M. le Président, c'est une
phraséologie qui est plus moderne et moins archaïque. C'est ce que
j'ai...
Le Président (M. Joly): Donc, on modernise les projets de
loi.
M. Bourbeau: ...retenu des propos de Me Paradis.
Le Président (M. Joly): Et dans le libellé, et dans
la forme.
Mme Harel: On va le vérifier à l'usage, parce que
j'imagine qu'il y aura de la contestation qui permettra de
définir...
Le Président (M. Joly): La portée. Mme Harel:
...la portée.
Le Président (M. Joly): Voyez-vous que je vous
écoute?
Mme Harel: C'est bien dit.
Le Président (M. Joly): Vous, vous pensiez que
j'étais là juste pour la forme.
Mme Harel: Non, non.
Le Président (M. Joly) Mais non.
Mme Harel: Alors, sur l'article 122, proprement dit parce qu'il y
a aussi des répercussions sur les articles 122.1 et 123, quant aux
motifs qui donnent droit à cette présomption, il y a actuellement
cinq motifs. Un des motifs, c'est de recourir à la loi elle-même;
un autre, c'est pour la raison qu'une salariée est enceinte; l'autre,
dans le but d'éluder l'application de la présente loi ou d'un
règlement. Qu'est-ce que ça peut signifier, ça, dans la
réalité?
M. Parent (Richard): Par exemple, dans le cas des
congédiements sans cause juste et suffisante, on a vu ou on va voir
qu'on va baisser les conditions d'admission de cinq ans à quatre ans et
à trois ans, en 1992. L'employeur qui dirait, au bout de deux ans et
onze mois: Ecoute, je ne peux plus te garder à mon emploi parce que, si
je te garde un mois de plus, je ne pourrai plus te congédier sans avoir
une cause juste et suffisante, ce serait un congédiement auquel
s'appliquerait le cinquième paragraphe de l'article 122.
Mme Harel: Est-ce qu'il arrive que l'employeur soit si franc?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parent (Richard): C'était un exemple,
évidemment!
Mme Harel: Quant au troisième motif contenu au
paragraphe... on dit l'alinéa 3?
Une voix: S'il est numéroté, c'est un
paragraphe.
Mme Harel: Au paragraphe 3°, "pour la raison qu'une
saisie-arrêt a été pratiquée à l'égard
du salarié ou peut l'être", c'est parce que ça ne doit pas
lui soustraire des droits, le fait que quelqu'un veuille faire respecter les
siens.
M. Parent (Richard): C'est ça, exactement.
Mme Harel: Puis, le premier, "à cause de l'exercice par ce
salarié d'un droit, autre que celui visé à l'article
84.1"?
M. Parent (Richard): L'article 84.1, c'est relatif à la
retraite et on a une disposition spécifique qui donne une protection en
cas de mise à la retraite.
Mme Harel: Oui. Et, justement, quelles sont les intentions du
gouvernement à l'égard de cette disposition spécifique
qu'on retrouve dans le règlement, je crois? Non?
M. Parent (Richard): L'article 122.1 de la loi actuelle
prévoit qu'il est interdit à un employeur ou à son agent
de congédier, suspendre ou mettre à la retraite un salarié
pour le motif qu'il a atteint ou dépassé l'âge ou le nombre
d'années de service, etc."
Mme Harel: Très bien. L'intention du gouvernement est-elle
de maintenir la portée de telles dispositions, compte tenu du jugement
de la Cour suprême? (17 h 15)
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Bourbeau: La députée de Hochelaga-Maisonneuve a
fait allusion au récent jugement d'hier, en fait, de la Cour
suprême du Canada qui a porté sur la mise à la retraite.
Tout ce que je peux dire, c'est que, pour l'instant, le gouvernement, à
ma connaissance en tous les cas, n'a pas fini de faire l'étude de ce
jugement et je ne suis pas en mesure de faire quelque commentaire que ce soit
sur les intentions que pourrait avoir le gouvernement à ce sujet.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Alors, en regard de l'article 122, donc de l'article
55, nous aurions un amendement à présenter, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Oui, madame, soumettez-nous
ça. On va en regarder la recevabilité et on pourra en discuter.
Est-ce que vous pourriez lire votre amendement, Mme la députée,
s'il vous plaît?
Mme Harel: M. le Président, c'est un amendement de
concordance avec l'amendement que nous avons déjà
déposé à l'article 15.1, un
amendement qui a été jugé recevable par le
député de LaFontaine.
Le Président (M. Joly): Est-ce que l'amendement a
été accepté?
Mme Harel: Non, c'est en suspens. C'est toujours en suspens, mais
vous vous rappelez peut-être que nous avons déposé un
amendement qui portait sur la journée maximale au-delà de
laquelle il devait y avoir la possibilité de refus du temps
supplémentaire.
Le Président (M. Joly): Ici, moi, je vois que l'article 15
a été...
Mme Harel: L'article 15.1. Il s'agissait d'introduire un nouvel
article numéroté 15.1.
Le Président (M. Joly): Ah oui!
M. Bourbeau: Le célèbre jugement Gobé.
Le Président (M. Joly): Où on avait réussi
à satisfaire 50 % des parties.
M. Bourbeau: C'est ça, un jugement de 43 pages, M. le
Président.
Mme Harel: en concordance avec cet amendement que nous avons
déposé et qui est toujours en suspens, nous aimerions en
déposer un qui ajouterait, à l'article 122, un sixième
paragraphe.
M. Bourbeau: II y en a déjà six. Mme Harel:
À l'article 122?
M. Bourbeau: Oui, avec le projet de loi, il y en a six.
Mme Harel: Avec le projet de loi, le sixième.
Effectivement, vous avez raison, M. le ministre.
M. Bourbeau: A moins que vous ne vouliez remplacer celui qui est
là, le sixième, ce qui m'étonnerait un peu parce que c'est
un amendement avec lequel vous nous avez indiqué être en
accord.
Mme Harel: M. le Président, nous allons présenter
une modification au sixième paragraphe, tel que proposé à
l'article 55 du projet de loi 97, plutôt que de proposer un
septième paragraphe.
Le Président (M. Joly): Le paragraphe débute par
"le premier alinéa". C'est ça que vous voulez changer?
Mme Harel: C'est le deuxième paragraphe, qui introduit un
sixième paragraphe à l'article 122. Alors, il va s'agir de
modifier le deuxième paragraphe de l'article 55.
Le Président (M. Joly): Nous allons ajourner quelques
minutes.
Une voix: Suspendre quelques minutes.
Le Président (M. Joly): Suspendre, c'est vrai.
(Suspension de la séance à 17 h 23) (Reprise à 17 h
35)
Le Président (M. Joly): Nous poursuivons nos travaux. Nous
en étions à l'article 55 et Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve faisait mention qu'elle avait un amendement à
apporter ou une suppression de...
Mme Harel: Un amendement, M. le Président...
Le Président (M. Joly): Un amendement.
Mme Harel: ...qui est prêt. Alors, si on voulait
peut-être le distribuer.
Le Président (M. Joly): Merci.
Mme Harel: C'est un amendement de concordance qui consiste
à remplacer le deuxième paragraphe par le suivant: "6° pour
le motif qu'un salarié a refusé de continuer de travailler
après 48 heures de travail dans une semaine ou après 8 heures de
travail dans une journée". C'est un amendement de concordance avec celui
que nous avons déposé à 15.1.
Le Président (M. Joly): Alors, voici. Suite à la
présentation de l'amendement, je me dois, disons, de me
référer à ce qui s'est passé aussi dans les heures
antérieures, les jours antérieurs. Quoique l'amendement ait
été jugé recevable, je me dois de juger, ici, celui-ci
irrecevable - oui, irrecevable - pour la simple et bonne raison que,
nécessairement, on n'a pas encore statué sur l'article comme
tel.
Mme Harel: Ah! parce que c'est suspendu. Le Président
(M. Joly): Oui, exactement.
Mme Harel: Ah bon! On va suspendre celui-ci alors, parce
qu'à ce moment-là... ou quitte... Tout simplement, ce que je vais
faire, c'est que je vais le retirer et je le représenterai quand on aura
disposé de l'article 15.1.
Le Président (M. Joly): C'est votre privilège.
M. Bourbeau: Moi, je serais disposé à prendre le
vote sur cet article-là, M. le Président, tout de suite.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: Recevable ou pas!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): À suivre.
Mme Harel: M. le Président, votre décision est la
vôtre, personne ne peut vous la contester, alors...
Le Président (M. Joly): Si je comprends bien, vous
aimeriez retirer...
Mme Harel: ...pour les motifs que vous avez
énoncés, je vais le retirer.
Le Président (M. Joly): Vous retirez votre amendement.
Mme Harel: Comme ça, j'aurai l'occasion de le
représenter...
Le Président (M. Joly): Parfait! Mme Harel: ...donc
gardez-le.
Le Président (M. Joly): Si je comprends bien, vous
aimeriez adopter l'article 55.
Mme Harel: L'article 55, M. le Président, non,
évidemment pas.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): Je vois que...
M. Bourbeau: Suspendez le deuxième alinéa de
l'article 55.
Mme Harel: On va adopter - c'est ça -l'article 55,
paragraphe 1°, en suspendant le paragraphe 2°.
Le Président (M. Joly): Vous adoptez le paragraphe 1°
et on suspend le paragraphe 2° et l'article 55 comme tel. J'appelle
l'article 56.
Recours du salarié congédié,
suspendu ou déplacé pour cause de maladie ou d'accident
M. Bourbeau: M. le Président, cet article a pour but
d'accorder un recours au salarié congédié, suspendu ou
déplacé pour cause de maladie ou d'accident. Cependant, dans le
cas d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, le
salarié devra exercer le recours prévu par le chapitre VII de la
Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
M. le Président, j'aimerais apporter un amendement à
l'article 56 qui vise à remplacer l'article que nous avons devant nous
par le suivant. Est-ce qu'on en a des copies? On pourrait peut-être faire
circuler les copies.
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, je
l'apprécierais.
M. Bourbeau: L'amendement vise à remplacer l'article 122.2
par le suivant: "II est interdit à un employeur ou à son agent de
congédier, de suspendre ou de déplacer un salarié qui
justifie de trois mois de service continu, pour le motif qu'il s'est
absenté pour cause de maladie ou d'accident durant une période
d'au plus 17 semaines au cours d'une même année. "Le premier
alinéa n'a pas pour effet d'empêcher un employeur ou son agent de
congédier, de suspendre ou de déplacer un salarié si les
conséquences de la maladie ou de l'accident ou le caractère
répétitif des absences constituent une cause juste et suffisante,
selon les circonstances. De plus, à la fin d'une absence pour cause de
maladie ou d'accident excédant quatre semaines consécutives,
l'employeur peut, au lieu de réinstaller le salarié dans son
poste habituel, l'affecter à un emploi comparable dans le même
établissement avec au moins le salaire auquel il aurait droit s'il
était resté au travail et avec un régime de retraite et
d'assurance équivalent, le cas échéant. "Le présent
article ne s'applique pas dans le cas d'un accident du travail ou d'une maladie
professionnelle au sens de la Loi sur les accidents du travail et les maladies
professionnelles."
M. le Président, l'article proposé, comme le projet de
loi, vise à accorder un recours aux salariés qui ont trois mois
de service continu s'ils sont congédiés, suspendus ou
déplacés, parce qu'ils se sont absentés pour cause d'une
maladie ou d'accident pendant une période n'excédant pas 17
semaines. Par rapport au projet de loi, il précise que l'absence ne doit
pas excéder 17 semaines par année et que des absences
répétitives peuvent, selon les circonstances, constituer une
cause juste et suffisante. Enfin, l'amendement assouplit le projet de loi en
permettant aux employeurs de réintégrer les salariés qui
ont été absents pendant plus de quatre semaines
consécutives dans un emploi comparable avec, au moins, le même
salaire et un régime de retraite et d'assurance équivalent,
plutôt que de les réintégrer dans leur poste habituel.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, j'aimerais d'abord savoir quel
est le régime présentement. Il doit y avoir eu des plaintes pour
congédiement
qui ont été transmises à la Commission des normes.
Est-ce que la Commission des normes les jugeait non admissibles, les
écartait du simple fait que c'était pour le motif de maladie, par
exemple? C'est quoi, la pratique actuellement?
Le Président (M. Joly): Est-ce que Me Parent ou...
M. Bourbeau: M. le Président, je pense qu'on doit demander
à quelqu'un de la Commission de répondre, puisqu'on demande
quelle est la pratique à la Commission, soit M. le président ou
Me Parent.
Le Président (M. Joly): Oui, allez, Me Parent, je vous
reconnais.
M. Parent (Richard): Actuellement, s'il y a un
congédiement à cause d'une absence pour . maladie ou accident,
c'est le recours conformément à l'article 124 actuel de la loi,
qui est modifié pour devenir quatre ans et trois ans, qui s'applique.
Alors, ce serait, actuellement, au bout de cinq ans que cette protection serait
accordée au salarié qui pourrait demander à un arbitre de
décider si la cause est juste et suffisante.
Mme Harel: II y a donc eu des plaintes. Il a dû y en avoir,
parce que les organismes de défense nous disent que le tiers, environ,
des salariés qui s'adressent à eux le font pour le motif d'un
congédiement suite à une maladie, que c'est un motif très
important. Est-ce qu'il y a eu déjà des choses jugées en
matière de congédiement sans cause juste et suffisante?
M. Parent (Richard): II y a eu des décisions arbitrales en
vertu de l'article 124 et ces décisions, à ma connaissance,
suivent ce qui se fait pour toute autre cause de congédiement lorsque
l'arbitre en vient à la conclusion que l'absence pour cause de maladie
ne constitue pas une cause juste et suffisante. Après avoir
analysé les faits, il peut y avoir réintégration ou,
encore, si l'arbitre décide que ce n'est pas possible de
réintégrer le salarié, des dommages et
intérêts peuvent être donnés au salarié dans
le même cas. (17 h 45)
Mme Harel: Parce que, moi, je me pose sérieusement la
question: Est-ce que la pratique actuelle est mieux? Non, pas
nécessairement mieux, je me suis mal exprimée. Est-ce que la
pratique actuelle pourrait être améliorée, par exemple, du
fait d'ouvrir le recours de congédiement sans cause juste et suffisante
à des salariés qui ont complété une année de
service? Là, c'était cinq ans et le ministre propose trois ans,
je pense.
M. Parent (Richard): Dans le présent cas, M. le
Président, ça va être beaucoup plus que ça.
Mme Harel: Un instant!
M. Parent (Richard): Ce sera après trois semaines de
service qu'il y aura un recours.
Mme Harel: Oui, mais, après trois ans, ceuz qui auront...
Trois mois.
M. Parent (Richard): Trois mois, pardon.
Mme Harel: Ceux qui avaient un recours après trois
ans...
M. Parent (Richard): C'était après cinq ans, parce
que la loi actuelle prévoyait cinq ans.
Mme Harel: Oui, mais le projet de loi prévoit trois ans,
n'est-ce pas?
M. Parent (Richard): Oui.
Mme Harel: II serait pensable, par exemple dans un
scénario, d'élargir des droits, de penser à un an, par
exemple, qu'après un an de service, comme c'est le cas dans d'autres
législations, il y ait le recours au congédiement sans cause
juste et suffisante. Moi, ce que je veux savoir - c'est ça qui me
préoccupe - c'est: Est-ce qu'en adoptant l'article 56 on diminue des
droits à des personnes? Vous allez me dire qu'on en offre à
d'autres, c'est-à-dire que celles à qui on en offre sont celles
qui ont complété trois mois, mais est-ce qu'on n'en retire pas,
en fait, compte tenu des décisions arbitraires, à celles qui
pourraient plaider un congédiement sans cause juste et suffisante,
après, par exemple, une année de service? Est-ce qu'on a raison
ou non de procéder en multipliant comme ça, par exemple? Parce
que, là, ça aurait pu entrer comme un motif parmi ceux de
l'article 122. Là, vous en avez fait une disposition à part pour
pouvoir lui donner un régime à part. Il y aura le régime
de l'article 122 et le régime de l'article 122, il va finir par
être connu assez rapidement: Quand ça t'arrive, ça, que tu
es une salariée enceinte ou bien que tu avais besoin de rentrer à
la maison pour la garde d'un enfant, tu as droit... Ça se passe comme
ça. La présomption se passe de telle manière. C'est
l'article 122.
Vous savez, les recours, plus on peut les simplifier, mieux c'est, dans
le fond, pour que le salarié n'ait pas besoin de dire: Si telle chose
m'arrive, c'est ça qui va se passer, ou que lui ou quelqu'un d'autre
dans sa famille ou dans son entourage puisse lui dire: Écoute, c'est
ça qui va se passer. Sinon, si on a un régime... Là, on a
des régimes différents pour des motifs différents. Si
c'est pour maladie, là, le régime est complètement
différent. C'est un régime de quatre semaines, après quoi
l'employeur peut le réin-téger dans un emploi comparable. C'est
un régime où on est protégés en cas de
congédiement, de suspension ou de déplacement, mais on ne
l'est
pas, comme à l'article 122, à l'égard des mesures
discriminatoires ou des représailles. En fait, on bâtit un autre
régime.
Moi, je me demande vraiment si c'est la bonne façon de faire,
parce qu'après ça il y aura un autre régime pour un autre
motif et un autre régime pour un autre motif. Moi, cette
manière... Vous comprendrez que mon objectif, ça reste quand
même une protection à trouver en matière d'absence pour
congé de maladie. Le ministre parle de rigidité, mais la
flexibilité, ça ne donne pas, dans l'application,
nécessairement plus de recours parce que, finalement, ça oblige
des personnes à faire appel à des experts pour connaître
leurs droits.
Le Président (M. Joly): Me Parent.
M. Parent (Richard): Voici, M. le Président, j'aimerais
d'abord dire qu'à l'article 124, même si on voit une protection
additionnelle qui n'était pas présente, dans la loi actuelle,
pour un congédiement pour cause de maladie ou d'accident, je crois qu'il
faut remarquer que, s'il s'agit d'un accident du travail, il ne faudrait pas
penser que ça enlève au salarié qui a un accident du
travail le recours qu'il possède en vertu de la Loi sur la santé
et la sécurité du travail. Il s'agit, ici, uniquement d'un
accident qui n'est pas relié au travail. Donc, on accorde un droit qui
n'existait pas, c'est-à-dire d'avoir un recours après trois mois
de service continu si le congédiement survient après une maladie
ou un accident et que ça n'a pas excédé 17 semaines. Et en
plus de ça, j'aimerais ajouter, M. le Président, que le recours,
en vertu de l'article 124, sans cause juste et suffisante, dont on a fait
mention tout à l'heure, demeure quand même parce que, si le
salarié est congédié et qu'il a plus de trois ans de
service continu, il pourra également se servir du recours en vertu de
l'article 124. Alors, je ne pense pas qu'on enlève de droit, tout au
contraire, je pense que c'est vraiment un ajout.
Mme Harel: Oui, mais c'est ça là. C'est que,
dorénavant, même si ce recours est continu à l'article 124,
il va être très, très balisé. Après trois
années, le commissaire va quand même utiliser l'article 122.2,
enfin ce qu'il en arrivera.
M. Parent (Richard): Non, parce que le recours basé sur
l'article 124, lorsqu'il sera jugé par le commissaire, les principes
à la base des éléments qu'il aura à examiner ne
sont pas les mêmes que dans le recours actuel, en vertu de l'article
122.2. Les pouvoirs que le commissaire du travail possède lorsqu'il
entend une plainte en vertu de l'article 124 sont également
différents des pouvoirs que possède le commissaire lorsqu'il agit
en vertu de l'article 122.2.
En vertu de l'article 122.2, le commissaire a à décider
uniquement si le congédiement est dû à un accident ou
à une maladie et, suite à ça, selon sa conclusion, il doit
réintégrer le salarié en lui accordant tout le salaire
qu'il a perdu pendant le congédiement, s'il en vient à la
conclusion qu'il a été congédié pour cause de
maladie ou d'accident après une absence de moins de 17 semaines. Alors
que le commissaire qui juge en vertu de l'article 124, lui, devra
également tenir compte si la mesure disciplinaire, qui, en l'occurrence,
est le congédiement, est juste et proportionnelle quant à
l'offense commise, si on veut s'exprimer ainsi, d'avoir quitté son
emploi pendant x jours. Alors, si le commissaire qui agit en vertu de l'article
124 décide qu'il y a eu effectivement une offense de commise ou si,
encore, l'absence a duré plus de 17 semaines, le commissaire qui agit en
vertu de l'article 124 pourra, lui, décider de réintégrer
le salarié et ordonner que tout son salaire perdu lui soit remis. Alors,
c'est très différent de la disposition qu'on introduit ici.
Mme Harel: Alors, pensez-vous que le commissaire du travail qui
va juger en vertu de l'article 124 ne sera pas influencé par le fait
qu'il n'y aura pas une pratique qui va s'imposer, à savoir que l'absence
est motivée, si c'est à l'intérieur de 17 semaines, et
qu'il ne s'agit pas d'une pratique interdite, si l'emploi dans lequel il est
réintégré est un emploi comparable, après quatre
semaines? Ne pensez-vous pas que les dispositions de l'article 122.2 vont
devenir comme une pratique en vigueur, même pour la décision
à rendre en vertu de l'article 124?
M. Parent (Richard): Les règles sur lesquelles doit se
baser le commissaire du travail qui juge en vertu de l'article 124 de la loi ne
lui imposent pas de tenir compte du nombre de semaines d'absence et il ne doit
pas en tenir compte puisque l'article 124 est beaucoup plus large, quant au
nombre de semaines que le salarié peut s'être absenté, que
l'article 122.2. À mon avis, le commissaire du travail, agissant en
vertu de l'article 124, va respecter les règles qui ont
été établies quant aux décisions rendues en vertu
de cet article-là sans tenir compte, évidemment, des
règles de l'article 122.2 qui sont très spécifiques et
précises dans l'article.
J'aimerais juste ajouter que, si 122.2 c'est aussi précis qu'un
nombre de semaines de prévu, c'est parce qu'il s'agit vraiment d'une
pratique interdite à 122.2, tandis qu'à 124, c'est vraiment
élargi à tous les autres recours.
Mme Harel: Et puis, à 122.2, vous avez choisi de ne
rendre, finalement, que certaines pratiques interdites, vraiment interdites
là, au moment où il y a absence pour maladie. Les pratiques
interdites nouvelles que vous introduisez comme les mesures discriminatoires ou
les représailles, ça, en fait, vous ne les interdisez pas. Vous
ne donnez pas de recours pour ces
pratiques-là, lorsqu'il y a absence pour congé de maladie.
C'est bien le cas?
M. Parent (Richard): C'est exact.
Mme Harel: Là, je vais demander au ministre pour quelle
raison.
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
Mme Harel: II fait quoi Me Paradis, lui. Est-ce qu'il est aux
normes?
Une voix: Non.
M. Bourbeau: M. le Président, est-ce qu'on pourrait
suspendre un instant? Je voudrais m'entretenir avec mes adjoints sur la...
Le Président (M. Joly): Brièvement, s'il vous
plaît, M. le ministre. Sûrement, M. le ministre, tout le temps,
mais il faut le négocier.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise à 18 h 2)
Le Président (M. Joly): Compte tenu de ce que nous avons
à étudier, je vais suspendre l'article 56 et l'amendement et
ajourner sine die.
(Fin de la séance à 18 h 3)