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(Vingt heures trente-cinq minutes)
Le Président (M. Joly); Bonsoir à tous. Nous
ouvrons la séance. Je vous rappelle le mandat. La commission des
affaires sociales se réunit afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 97, qui est la Loi
modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres disposions
législatives. Mme la secrétaire, est-ce que nous avons des
remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président: Mme
Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière) sera remplacée par Mme
Dupuis (Verchères); M. Chevrette (Joliette) par M. Bourdon
(Pointe-aux-Trembles); Mme Marois (Taillon) par Mme Harel
(Hochelaga-Maisonneuve).
Le Président (M. Joly): merci, mme la secrétaire.
alors, je vous rappelle qu'en vertu de l'article 209 vous avez droit à
des remarques préliminaires pendant 20 minutes, mais dans un temps de
parole seulement. alors, m. le ministre, j'imagine que vous avez des remarques
préliminaires.
Remarques préliminaires M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Nous débutons
aujourd'hui l'étude détaillée du projet de loi 97, Loi
modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions
législatives. Cette commission parlementaire est déjà bien
au fait du contexte qui a présidé la, ' préparation de
cette pièce législative. En février dernier, les
représentants des personnes salariées, des employeurs et des
organismes qui s'intéressent aux conditions minimales de travail nous
ont présenté une quarantaine de mémoires sur les normes du
travail à l'occasion d'un avant-projet de loi
Le projet de loi que nous avons devant nous répond à
plusieurs préoccupations dominantes véhiculées lors de
cette importante consultation. Bien sûr, il ne satisfait pas à
l'ensemble des revendications et des attentes exprimées lors de cette
consultation, puisque certaines demandes étaient en opposition les unes
avec les autres. On remarquera cependant, en étudiant le projet de loi
article par article, que nous avons retenu plusieurs suggestions
adressées aux membres de cette commission parlementaire.
J'ai dit hier, à l'Assemblée nationale, qu'en
matière de normes du travail il fallait prendre position sur les
revendications de ceux et celles qui réclament la couverture la plus
étendue des droits des personnes salariées et les mises en garde
adressées par les autres au sujet des coûts directs et indirects
de toute nouvelle initiative prise à l'égard des conditions
minimales de travail. Tout est donc affaire de mesure, d'équilibre.
L'Opposition officielle a, bien entendu, soulevé des objections.
Dans notre régime parlementaire, l'Opposition a un rôle à
jouer et elle le joue. Toutefois, l'Opposition reconnaît, je pense, que
le projet de loi que nous allons bientôt étudier en détail
améliorera nettement la protection des droits des personnes
salariées. Bien sûr, l'Opposition officielle a pointé des
dispositions qui, à ses yeux, ne vont pas suffisamment loin dans la
protection absolue des droits des personnes en emploi. Je ne lui tiens pas
rigueur de vouloir illustrer que, dans le meilleur des mondes, les normes du
travail préserveraient autre chose que des conditions minimaies de
travail. Il n'appartient généralement pas à l'Opposition
d'expliquer les contraintes qui nous obligent à composer avec les
réalités économiques et sociales de notre monde à
nous; c'est souvent le lot du gouvernement. Cette réalité veut
que, dans une société comme la nôtre, une Loi sur les
normes du travail garantisse avant tout des conditions décentes de
travail à l'ensemble de la main-d'oeuvre. Elle leur confère des
droits minimaux que les personnes en emploi peuvent tenter d'améliorer
par la libre négociation de leurs conditions de travail et de
rémunération.
Il convient donc, en étudiant ce projet de loi, de situer dans
son juste contexte la Loi sur les normes du travail. Cette loi ne constitue pas
une convention collective de travail totale et entière. Elle ne regroupe
pas non plus l'ensemble des programmes du gouvernement destinés aux
travailleurs et travailleuses. Il ne faut pas lui confier des attentes qu'elle
ne peut satisfaire, par exemple en matière de remplacement du revenu de
travail pendant les congés de maternité ou les congés
parentaux. Chez nous, ces questions relèvent de certains programmes
sociaux et non pas des normes du travail.
En appelant un par un les articles du projet de loi, vous vous rendrez
compte, M. le Président, qu'ils réforment substantiellement la
Loi sur les normes du travail, loi qui n'a fait l'objet d'aucun amendement
significatif depuis son adoption, en 1979. Vous remarquerez aussi que, dans
plusieurs cas, l'article en question répond précisément
à des doléances entendues à cette commission
parlementaire, lors de la consultation de février dernier. Dans d'autres
cas, vous constaterez que le gouvernement a fait un choix entre des positions
divergentes exprimées ici. J'expliquerai ces choix et nous pourrons
évidem-
ment en débattre.
Je ne m'attends pas à ce que tous les articles de ce projet de
loi recueillent l'assentiment unanime des membres de la commission. Je demeure
cependant convaincu que l'exercice que nous entreprenons nous permettra de
mieux saisir toute la réalité des conditions minimales de travail
et d'apprécier à sa juste valeur la révision de la Loi sur
les normes du travail que nous voulons mener à terme dans les meilleurs
délais.
Comme j'en ai déjà fait part aux membres de
l'Assemblée nationale lors du débat sur la motion de report
déposée par l'Opposition officielle, je suis évidemment
disposé à accueillir favorablement toute proposition d'amendement
qui clarifierait le projet de loi. Je remercie d'avance l'ensemble des membres
de cette commission pour l'attention qu'ils porteront au projet de loi
modifiant la Loi sur les normes du travail ainsi que pour leur appui. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je vais
donc respecter l'alternance et je vais reconnaître Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. Madame.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je ne sais s'il s'agit
également des notes dont le ministre s'est servi lors de sa
réplique lors de l'étude en deuxième lecture qui s'est
complétée cet après-midi. On m'avait dit que le ministre
avait présenté, finalement, le projet de loi comme étant
la résultante d'un équilibre entre les demandes des travailleurs
et travailleuses à bas salaire ou à conditions de travail
précaires et, d'autre part, un équilibre entre ces demandes ou
les demandes des organismes qui les représentent et les demandes ou
plutôt les réticences ou les résistances du monde... des
employeurs comme étant un équilibre entre les deux. Et il y a un
danger, M. le Président, un danger évident à penser que,
dans ce domaine-là, l'État a à faire un arbitrage en ne
prenant pas d'abord en considération que, dans la formidable
restructuration du marché du travail à laquelle on assiste
présentement, l'État n'a pas à basculer favorablement du
côté des employés à statut précaire ou, tout
au moins, ceux qui ont un faible pouvoir de négociation. Le ministre
peut toujours invoqué qu'il garantit des conditions décentes ou
des droits minimaux et que les travailleurs peuvent utiliser leur pouvoir de
négociation, en fait, leur liberté de s'organiser sur le plan
syndical pour obtenir plus, mais on sait très bien qu'on n'est plus dans
ce contexte-là à la fin d'une période qui a
été bouleversante sur le plan du marché do l'emploi durant
ces 10 dernières années.
M. le Président, l'avais le plaisir, on rentrant de
Sept-Îles cet après midi, d'écouter une émission qui
a été présentée par la radio de Radio-Canada et
qui, d'ailleurs, se complétera demain par une série d'entrevues
sur la situation des pauvres dans notre société. Ça
portait sur la pauvreté. Je crois comprendre qu'il y a eu comme
ça une série de reportages cette semaine et que l'émission
de ce soir ne venait que s'ajouter à celles qui avaient
déjà eu lieu durant la semaine. On faisait valoir, ce soir, que
la majorité des pauvres travaillent, contrairement à l'opinion
répandue que les pauvres sont des personnes paresseuses et
fainéantes. Alors, on nous prouvait, statistiques à l'appui, que
la majorité des pauvres travaillent et que la situation s'est
dégradée quant à leurs revenus de travail, quant à
leurs conditions de travail, en partie à cause des changements
structurels survenus après la récession de 1982, changements
structurels qui ont amené la précarisation de l'emploi. Je
voudrais vous citer quelques chiffres effarants sur l'augmentation du travail
à temps partiel, non pas au début des années quatre-vingt,
mais deptiis le début de la présente année. Un emploi sur
deux créés au Québec cette année est à temps
partiel.
M. le Président, c'est donc dire que ce projet de loi, qui
s'adresse aux personnes en emploi, doit certainement prendre le parti de ces
personnes qui, en emploi, ne doivent pas porter le fardeau des changements
structurels qui se font présentement. D'ailleurs, le ministre, en
signant le mémoire qui a été déposé au
Conseil des ministres, disait justement à cet effet: II serait injuste
qu'une main-d'oeuvre particulièrement vulnérable ait à
subir plus que sa part du fardeau des ajustements requis sur le marché
du travail en raison de son faible pouvoir de négociation. Moi, je veux
comprendre qu'à l'occasion, quand on a à arbitrer entre les
syndicats et le patronat, on puisse avoir un point de vue qui soit un peu plus
distant par rapport aux exigences des uns et aux offres des autres. Mais
ça, il n'est pas question, en regard du projet de loi 97, de groupes de
travailleurs ou de travailleuses qui ont réellement un pouvoir de
négociation. Ceux-là, M. le Président, mon Dieu, ce n'est
pas ici, mais c'est à la Commission des normes du travail et C'est
à l'intérieur du Code du travail qu'ils peuvent retrouver
finalement des dispositions qui permettent justement de faire valoir ce pouvoir
de négociation. Ce n'est pas d'eux dont il s'agit là, pas du
tout. Il s'agit de gens en emploi qui ont un faible pouvoir de
négociation. Et parce qu'ils ont ce faible pouvoir de négociation
et parce qu'on considère dans la société qu'il serait
injuste de leur faire porter le fardeau de ce faible pouvoir de
négociation sur leurs conditions de travail et parce qu'on
considère qu'il faut éviter non seulement l'exploitation mais
également éviter qu'il n'y ait des conditions de travail
in|ustes, bien, M. le Président. Il y a un consensus dans la
société pour introduire un projet de loi, pour introduire des
dispositions à l'égard des normes qui s'appliquent
à l'ensemble de la main-d'oeuvre québécoise.
À cet égard, ce que je souhaiterais dire au ministre ce
soir, c'est que tout ce qui permet l'application de la loi devrait être
recherché lors de l'examen que nous entreprenons. Cela veut dire que
tout ce qui peut permettre d'obtenir un recours pour faire appliquer la loi
devrait être facilité. Pourquoi à la fois adopter une loi
sur papier et, en même temps, ne donner accès aux recours
qu'à un groupe de personnes après, par exemple, un délai
trop long de service continu pour le même employeur concrètement,
jusqu'à maintenant par exemple dans les cas de congédiement sans
cause juste et suffisante? Le nombre d'années requis pour avoir droit
aux recours était de cinq ans et, ce faisant, écartait les deux
tiers de la main-d'oeuvre de l'application de la loi. Le ministre a introduit
dans le projet de loi une amélioration qui consiste à diminuer de
cinq à trois le nombre d'années de service requis pour avoir
droit à la protection de la loi. Et là, c'est une
amélioration. On fait passer des deux tiers qui étaient
écartés, qui étaient, comment dit-on, exclus de
l'application de la protection de la loi... Maintenant, ça va être
la moitié. Vous voyez l'esprit de collaboration au sein de l'Opposition!
Alors, là, ça va être la moitié.
Pourquoi dans une loi de conditions minimales que l'on considère
|à... Le ministre a dit de droits minimaux. Pourquoi alors exclure la
moitié de la main-d'oeuvre de l'application de cette protection
minimale? Ça, M. le Président, c'est une énigme,
l'énigme de penser que ça coûte quelque chose. En quoi
est-ce que ça coûte quelque chose d'appliquer une loi? Vous voyez,
l'application de la loi, puisque ce sont des droits minimaux, devrait
être d'ordre général. Quand un employeur enfreint la loi,
il ne devrait pas avoir la bénédiction de dispositions qui le
justifient du fait que son employé est là depuis deux ans et demi
seulement et pas trois ans. Ça ne lui coûte rien d'appliquer la
loi. Mais, quand il ne l'applique pas et qu'il a de plus, dans le fond, la
bénédiction de l'État, du fait que sa main-d'oeuvre est
exclue de l'application de la loi, il y a là, en fait, une injustice. Ce
qu'on souhaite certainement, c'est que, si le ministre n'élargit pas les
droits minimaux, au moins, on s'entende pour que l'application de la loi, donc
de ces droits minimaux, se fasse au plu6 grand nombre.
Je vais vous donner un exemple très concret, M. le
Président. Le ministre a introduit, dans le projet de loi 97, la
possibilité d'un congé de paternité de cinq jours, dont
deux rémunérés et trois non payés. Parce que
là, il faut bien expliquer que, quand on dit sans solde, on se comprend,
mais il y a bien des gens qui ne nous comprennent pas. Quand on dit "pas
payé", là, tout le monde comprend. Tout le monde comprend que
ça va être des pongés sur papier. Mais enfin! Il y a cinq
congés prévus, des congés de paternité. Le ministre
prévoit deux jours payés et trois qui seraient donc
laissés au libre choix de l'employé. Mais il n'est pas
prévu que ces congés obtiennent la protection de dispositions en
matière de pratiques interdites. C'est-à-dire que s'il y a
congédiement... Parce qu'une pratique interdite, ça peut
être une rétrogradation, ça peut être une suspension
et ça peut être un congédiement. S'il y a un
congédiement parce qu'un travailleur du Québec, de bonne foi,
aurait utilisé un congé qu'on lui a dit être un
congé qui lui était maintenant ouvert, un congé de
paternité, et qu'il se voit congédié, il n'aura d'abord
pas droit au recours devant la Commission des normes du travail s'il n'a pas
complété trois années. Ça veut donc dire que le
congé de paternité, dans les faits, il ne sera offert qu'à
des travailleurs qui deviennent pères de famille et qui ont
complété trois années. Qui va prendre la chance? On parle
de travailleurs non syndiqués. Les travailleurs syndiqués ont des
conventions collectives de travail et ça fait partie du Code du travail.
C'est autre chose. Si tant est qu'il soit l'objet d'une suspension ou d'une
rétrogradation dans le cadre d'une convention collective, il y aurait un
arbitrage. Mais, pour le travailleur, le congé de paternité de
cinq jours n'est pas couvert par les pratiques interdites.
On me fait signe que oui, mais je laisserais le ministre s'expliquer
tout de suite. Le congé de paternité de cinq jours va être
couvert par les pratiques interdites. C'est bien ça? Est-ce que...
M. Bourbeau: Mais moi, je ne veux pas interrompre la
députée de Hochelaga-Maison-neuve.
Le Président (M. Joly): Je dois vous expliquer comment
ça fonctionne au niveau du temps. Si vous êtes d'accord que M. le
ministre réponde immédiatement, ça va être sur votre
temps de 20 minutes.
Mme Harel: Ah bon! Bon, alors, il répondra
après.
Le Président (M. Joly): mais s'il y a un consentement
mutuel entre vous autres et qu'on vous laisse continuer, après
ça, dans votre intervention, je n'ai pas d'objection à le
faire.
M. Bourbeau: Si la députée de Hochelaga-Maisonneuve
le permet, je lui faisais des signes, je n'osais pas l'interrompre, M. le
Président, mais...
Le Président (M. Joly): Vous voulez lui enlever des
inquiétudes, si je comprends bien.
M. Bourbeau: Oui. Je ne voudrais pas qu'elle commence la
commission sur un ton morose alors que la loi protège justement les
congédiements de ce genre-là. J'attire son attention sur
l'article
122 qui dit: "II est interdit à un employeur ou à son
agent de congédier, de suspendre ou de déplacer un
salarié: "1° à cause de l'exercice par ce salarié d'un
droit, autre que celui visé à l'article 84.1, qui lui
résulte de la présente loi ou d'un règlement". Alors,
ça couvre le cas en question.
Mme Harel: C'est-à-dire que ça couvre.. Est-ce que
vous interprétez que ça couvre tous les congés
parentaux?
Le Président (M. Joly): Si vous êtes d'accord, je
vais vous négocier ça comme ça.
M. Bourbeau: Ça couvre tous les droits que peut exercer un
salarié, tant en vertu de la loi que des règlements, aux termes
de la loi. Tous les congés, ça couvre tout.
Mme Harel: M. le ministre, on va bien s'entendre. Ça veut
donc dire que les congés, par exemple, mobiles de cinq jours,
congés qui peuvent être utilisés par le parent d'un enfant
mineur, les congés sans solde pour responsabilité familiale, sont
couverts par la disposition sur les pratiques interdites.
M. Bourbeau: Si un individu est congédié pour un
des motifs dont vient de parler la députée, c'est couvert par la
loi.
Mme Harel: Le congédiement et l'ensemble des autres
pratiques interdites. Est-ce que c'est le cas?
M. Bourbeau: Oui, oui.
Mme Harel: L'ensemble des pratiques interdites. Ça veut
donc dire qu'il y aura quand même, parce que la disposition
prévoit que pour avoir droit à ce recours le travailleur,
l'employé ou la travailleuse doit avoir complété trois
années de service... Non, pas pour les pratiques interdites.
M. Bourbeau: Non.
Mme Harel: Alors, l'ensemble, donc, de tous les congés
parentaux, ceux de responsabilité parentale sont donc couverts par les
pratiques interdites. Et ça, c'est par le règlement ou par la
disposition 122.
M. Bourbeau: La disposition 122, ce sont les recours à
rencontre d'un congédiement illégal, alors que 124, c'est le
recours à l'encontre d'un congédiement fait sans une cause juste
et suffisante.
Mme Harel: C'est ça.
M. Bourbeau: A la disposition 124, ça va prendre... En
vertu de" 124, ça va prendre les trois années de service continu
Mais en vertu de 122, ça s'applique immédiatement.
Mme Harel: Est-ce que vous me citez 122.2 ou 122.1?
M. Bourbeau: La disposition 122, paragraphe 1.
Mme Harel: Alors, c'est quand même un exemple où ces
congés-là seront couverts par la disposition sur les pratiques
interdites qui donne accès immédiatement ail recours. Tandis que
les autres, l'ensemble des autres protections qui ne donnent pas accès
au recours pour pratiques interdites, mais simplement au recours pour
congédiement sans cause juste et suffisante, cela nécessite trois
années de service continu.
M. Bourbeau: Exact.
Mme Harel: Donc, à ce moment-là, ça reste la
moitié de la main-d'?uvre du Québec qui ne complète
pas trois années de service continu et qui n'a donc pas accès
à ces recours. Je comprends et on va faire... De toute façon, on
aura l'occasion pendant l'examen du projet de loi de faire l'étude de
l'ensemble des projections qui sont introduites et qui donnent ou non
accès à un recours. Parce que, exiger trois années pour la
protection, c'est, d'une certaine façon, accepter d'exclure la
moitié de la main-d'oeuvre de l'application de ce recours-là. M.
le Président, on va faire..
Le Président (M. Joly): Si je comprends bien, vous
reprenez vos remarques préliminaires. Merci. (21 heures)
Mme Harel: alors, on va... nous allons, nous de l'opposition,
procéder à un examen extrêmement minutieux du projet de
loi, non pas par esprit d'hostilité à l'égard du ministre
mais, au contraire, parce que ça met en cause les conditions de vie de
millions de personnes dans notre société. nous sommes
déçus, ça, je crois qu'il faut le dire, m. le
président. nous sommes déçus de la timidité avec
laquelle le ministre et son gouvernement ont examiné les changements
qu'il fallait apporter à la loi sur les normes, surtout - on a eu
l'occasion de le dire, mais je le répète - en regard des
protections qui sont maintenant offertes à la main-d'oeuvre ontarien-ne
et au retard, au recul, même, dans certains domaines.
Il y a tout un aspect de la Loi sur les normes qui, jusqu'à
maintenant, a été omis et sur lequel nous allons insister pendant
l'examen du projet de loi, c'est celui des agences de placement privées.
Contrairement à toutes les autres provinces canadiennes, je crois que le
Québec est la seule Législature qui n'a pas adopté une loi
à
l'égard des agences de placement privées. C'est là
pourtant une réalité qui tend à se développer.
Simplement sur I'Île de Montréal, il semble qu'on
dénombrerait au-delà d'une centaine d'agences de placement
privées qui ont, à toutes fins utiles, remplacé, qui se
sont substituées aux services de placement gouvernementaux qui
existaient précédemment, soit dans le cadre des centres d'emploi
et d'immigration du Canada ou des centres Travail-Québec qui offraient
des services de placement et qui, en fait, tout compte fait, n'existent plus
concrètement, puisque les travailleurs et travailleuses sans emploi sont
laissés à leur propre initiative, souvent sans réseau
d'amis ou sans connaissance du milieu do travail qui leur faciliterait la
rechercha d'un emploi. Cette question devient d'autant plus importante que des
pratiques abusives se seraient développées dans un certain nombre
d'agences de placement qui exigeraient une indemnité, enfin, une
compensation, lorsqu'un travailleur dont elles détiennent le contrat se
trouverait à se faire engager à plein temps dans une entreprise.
Alors, ça, c'est également un aspect qui est complètement
absent du projet de loi qui est devant nous présentement.
Je voudrais insister certainement, M. le Président, sur le fait
que les travailleurs qui sont en âge de procréer sont, pour la
plupart d'entre eux, ceux qui ont les situations de travail les plus
précaires, qui connaissent le taux de chômage le plus
élevé, qui ont les emplois les moins stables et les salaires les
plus faibles. Donc, il y a là une sorte de contradiction que de leur
faire miroiter la possibilité de congés auxquels ils n'auront,
finalement, pas accès, parce que ce sont des congés qui ne sont
pas payés.
J'ai eu l'occasion d'épouter le ministre lors de certaines
entrevues radiophoniques où il faisait valoir que les couples auraient
des sacrifices à faire, si tant est qu'ils voulaient utiliser les
congés. M. je Président, je crois que... Oui, c'était une
émission de Radio-Canada. Je crois comprendre que, malheureusement, ce
sont les couples plus âgés qui ont la stabilité d'emploi
suffisante, les reyenus qui augmentent et qui permettraient d'utiliser ces
congés, tandis que les chefs de jeune famille qui ont moins de 35 ans
ont, eux, connu durant la dernière décennie la situation d'emploi
la plus précaire. C'est, en fait, le groupe d'âge qui a
été le plus affecté par la restructuration de notre
économie puis la restructuration du marché du travail.
Alors, je vais terminer ces remarques préliminaires en signalant
au ministre que nous espérons qu'il pourra démontrer une
ouverture d'esprit qui nous amènera finalement, à un travail
fructueux durant cet examen. Nous souhaitons pouvoir bonifier son projet de
loi. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. Je vais maintenant
reconnaître Mme la ministre déléguée à la
Condition féminine et à la Famille. Madame.
Mme Violette Trépanier
Mme Trépanier: Merci, M. le Président.
Contrairement aux propos que me prêtait hier le député de
La Prairie, lors du débat sur l'adoption de principe, quant à mes
états d'âme face au projet de loi 97, je tiens à
préciser que je suis fière d'avoir contribué à ce
projet de loi qui modifie la Loi sur les nonnes du travail, non seulement
à titre de ministre déléguée à la Condition
féminine, mais aussi à titre de ministre responsable de la
Famille. La conciliation des responsabilités professionnelles et
familiales qui sera facilitée par le projet de loi est une double
préoccupation présente, d'une part, dans le plan d'orientation
triennal en matière de condition féminine dont le Québec
s'est doté en 1987. D'autre part, plusieurs mesures du plan d'action
gouvernementale en matière de politique familiale se concrétisent
par cette loi devenue indispensable pour répondre aux nouvelles
réalités sociales. Cette loi vient consacrer la place que notre
société accorde à l'enfant, également. N'est-ce pas
l'enfant d'aujourd'hui qui formera la société de demain?
Parmi les mutations profondes que nous avons connues, la principale est,
sans contredit, la présence croissante des femmes sur le marché
du travail, y compris les mères de jeunes enfants. Ce
phénomène a entraîné une hausse du nombre des
familles avec des enfants en bas âge dont les deux parents travaillent
à l'extérieur du foyer. On a également observé une
augmentation des familles monoparentales qui sont le plus souvent
dirigées par une femme. Notons que les femmes représentent 43 %
de la main-d'oeuvre et que ce sont elles, très souvent, qui portent
à bout de bras les responsabilités familiales.
Même si avoir des enfants est avant tout un acte privé, une
certaine responsabilité collective doit être reconnue afin
d'appuyer les familles aux prises avec des difficultés de conciliation
des tâches parentales et professionnelles. Parce qu'ils sont peu
nombreux, les enfants québécois sont un investissement
précieux et indispensable pour la société de demain, et
tous les partenaires socio-économiques devraient se sentir
interpellés. Même si certains employeurs ont exprimé des
réticences face à certaines modifications proposées aux
normes du travail, je crois, au contraire, qu'ils ont tout à gagner
à simplifier la vie des personnes salariées qui ont des enfants.
À titre d'exemple, un meilleur climat de travail qui réduit le
stress et une plus grande stabilité du personnel permettront aux
employeurs de mieux planifier les opérations de leurs entreprises.
La Loi sur les normes du travail régit les rapports entre les
personnes salariées et les
employeurs. Elle ne peut, évidemment, à elle seule
solutionner tous les problèmes rencontrés par les travailleurs et
les travailleuses qui ont des obligations parentales. Il s'agit donc ici d'une
première étape que nous franchissons et ce, dans la mesure des
moyens actuellement à notre disposition. Je suis consciente qu'il reste
encore à faire pour permettre une meilleure harmonisation des
responsabilités professionnelles et parentales. Toutefois, je suis
certaine que l'Opposition reconnaît avec moi l'importance du cadre
juridique que constitue la Loi sur les normes du travail pour parvenir à
cet objectif. J'ai d'ailleurs ressenti un appui en ce sens dans la
majorité des interventions faites lors du débat de l'adoption de
principe.
En terminant, je souhaite que, grâce à la collaboration de
tous, nous puissions franchir cette première étape dans les
délais que nous nous sommes fixés pour servir au mieux les
intérêts des travailleurs et des travailleuses,
spécialement ceux qui ont des responsabilités parentales à
assumer. Je vous remercie.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la ministre. Je vais
maintenant reconnaître M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, nous abordons l'étude
de ce projet de loi dans un esprit éminemment positif. C'est
évident qu'on pense que le projet de loi qui est devant nous comporte
des améliorations à la loi sur les normes minimales du travail
qui n'avait pas été touchée depuis 1979, soit depuis 11
ans. Avant d'être député, j'ai eu une expérience des
relations du travail qui m'a enseigné que les normes minimales,
finalement, ne sont pas respectées quand on n'est pas capable de
réunir deux conditions. La première, c'est que la personne n'ait
pas peur de perdre son emploi. Et même s'il y a une disposition bienvenue
quant aux pratiques interdites qui va permettre de faire un certain bien, il
reste qu'une personne qui a peur pour son emploi a peur de revendiquer ce qui
lui est accordé par la loi. Et, à cet égard, on pense que
donner un recours suite à un congédiement après un an au
lieu de trois ans, ça garantirait mieux l'ensemble des droits qui sont
dans les normes minimales. En fait, dans nos bureaux de comté, il y a
des gens qui viennent nous voir avec des violations réelles des normes
minimales, mais quand ils n'ont pas les cinq ans actuels - ce serait mieux
trois ans, mais on pense que ce serait préférable un an - les
gens ne veulent pas exercer leurs recours, même si la Commission fait un
travail très correct en général et qu'elle assure la
confidentialité. Mais les personnes, dans des milieux de travail assez
petits en termes d'effectif, nous disent: Bien oui, on est quatre, et mol je
suis celle qui parle le plus et si la Commission des normes s'en vient, eh
bien, je vais être la première à être
congédiée parce que je n'ai pas cette garantie d'emploi. Il doit
d'ailleurs exister à la Commission certaines statistiques sur certains
droits monétaires que les gens exercent quand ils ont
décidé de quitter l'endroit. Là, bien, on dit: On va aller
le dire. Et je pense qu'on ne peut pas être moraliste et dire: C'est la
faute des personnes. On ne peut pas demander aux gens de se sacrifier.
À cet égard, je voudrais signaler que l'existence d'un
recours en cas de congédiement empêche et les congédiements
et la violation d'autres dispositions. Je veux me faire comprendre à cet
égard. Le congédiement, même en milieu syndiqué,
signale souvent, même quand la personne gagne en arbitrage, la fin du
lien d'emploi avec l'employeur et habituellement on le monnaye, que ça
soit en vertu des normes minimales ou que ce soit en vertu d'une convention
collective. Mais ('existence de ce recours peut amener l'employeur à
respecter l'employé et vivre avec et s'arranger avec. Alors, dans ce
sens là, on pense qu'une des choses qui seraient importantes, ça
serait le recours en cas de congédiement après un an au lieu de
trois ans. Et ça, c'est positif. Je pense que c'est simpliste de dire:
Ils sont dans l'Opposition parce qu'ils sont négatifs et on est au
pouvoir parce qu'on est positif. De toute façon, c'est subjectif, la
notion de qu'est-ce qui est positif, qu'est-ce qui est négatif. Quand le
Parti québécois était au pouvoir, les gens se pensaient
très positifs jusqu'à temps qu'ils se retrouvent toujours aussi
positifs mais dans l'Opposition. Et, à cet égard, j'ai confiance
qu'on puisse convaincre le ministre de faire certaines choses. Même celui
des ministres actuels connus - qu'on pense infaillible - accepte d'amender ses
projets de loi en commission quand vient le temps.
Il y a également le droit d'être représenté,
M. le Président, qui, quant à nous, nous apparaît
important: donc, avoir un recours et avoir le droit de désigner une
organisation ou un organisme pour exercer ce recours en son nom. On le
reconnaît aux commerçants qu'on regroupe dans des SIDAC; pourquoi
ne pas le reconnaître à leurs employés, quand ce sont des
commerces, pour que ces personnes-là puissent faire appel à une
organisation comme Au Bas de l'échelle ou à d'autres pour les
représenter?
Finalement, M. le Président, une des choses qui manquent le plus
dans ce projet de loi, donc, c'est les moyens concrets de faire en sorte que la
fille de ma voisine de table à un club de l'âge d'or, samedi soir
passé, ait pu avoir un recours quand elle a eu une mésaventure.
Je vais donner des prénoms fictifs juste pour dire comment, nous, on
voit le travail. (21 h 15)
Jeannine, qui a 61 ans, ce n'est pas une personne qui vit dans la
misère. Elle est propriétaire dans le comté de
Pointe-aux-Trembles. Elle
a une maison et un peu d'économies et la moitié de la
retraite de son mari qui est décédé. Elle est veuve. Sa
fille Denise, qui a 35 ans, n'a jamais eu un vrai emploi pour plus de 14 mois
Elle a une formation de commis-comptable et elle est compétente, mais le
chômage est important à Montréal. L'emploi qu'elle a eu
pendant 14 mois, , elle le faisait bien pour 6, $ l'heure. C'est une personne
qui est travaillante et, pour ne pas déprimer, elle prend toutes sortes
de cours, comme bien du monde. Comme bien du monde aussi, sa fille Denise, qui
a 35 ans, est comme garrochée d'un programme à l'autre au
gré des gouvernements qui disent: Bon, tu fais 20 semaines, tu tombes
sur le phômage et, après ça, tu as fini ton chômage,
tu retombes sur 20 semaines. Mais l'emploi qu'elle a eu pendant 14 mois
à 6 $ l'heure dans un entreprise de plastique, elle le faisait bien.
Tellement que quand l'employeur, qui a exercé du harcèlement
sexuel à son endroit, s'est mis à |a discriminer et lui a fourni
rien de moins - elle était commis-comptable - qu'une calculatrice qui
était inexacte et qui n'avait pas un bon fonctionnement, eh bien, pour
corriger ses données, elle a pris trois jours de ses vacances et elle
est venue travailler bénévolement pour corriger les
données parce qu'elle voulait garder son emploi. En bout de ligne, elle
a été congédiée. On l'a mise à pied et on
lui a donné ses 4 % de vacances et, en pratique, ça a
constitué un congédiement. Elle revenait demander de pouvoir
recommencer à travailler et on lui disait que la personne qui
était là, qui avait pris sa place, ce n'était pas vraiment
sa remplaçante, c'était quelqu'un qui dépannait depuis
deux, trois ou quatre mois.
Ce que je veux dire, c'est qu'on politique, indépendamment des
lignes de parti, si on ne tient pas compte de Jeannine qui a 61 ans et qui
trouve qu'entre 60 et 65, quand tu as été une femme a la maison,
tu n'as pas grand-chose en termes de rentes. Elle, encore, elle a la
moitié de la rente au conjoint survivant de son mari et de sa fille
Denise de 35 ans. L'emploi qu'elle avait, elle l'aurait peut-être
gardé si elle avait eu un recours après un an. Moi, je pense que
c'est ça qu'il faut dire. Par ailleurs, il y a eu, depuis cinq ans, 1300
fermetures d'entreprises au Québec qui ont occasionné des pertes
de 78 000 emplois. Quand le Parti québécois était au
pouvoir, il y a eu aussi des centaines de ferme tures d'entreprises qui ont
occasionné des dizaines de milliers de pertes d'emploi. La question
n'est pas, comme telle, partisane. Et, à cet égard, on est en
retard sur l'Ontario. Los seules choses que les gens continuent d'avoir avec le
projet de loi - et je pense que ça intéresse les deux ministres
parce que, dans les fermetures, il y a des femmes aussi qui sont
concernées - on a droit à un préavis d'une semaine quand
on a moins de trois mois de service, de deux semaines pour un an à cinq
ans de service, de quatre semaines pour cinq à dix ans de service et de
huit semaines, pour les salariés ayant dix ans de service et plus.
Ça n'est qu'un préavis, et je répète ici ce que
j'ai dit en Chambre: Un préavis, ce n'est pas de l'argent, ça ne
devient de l'argent que quand on n'a pas le préavis. Si dans la petite
cafétéria, dans huit semaines, vous êtes dehors, on aura eu
son préavis.
Or, en Ontario, on donne jusqu'à 26 semaines d'indemnité
de départ en cas de fermeture d'entreprise. En Ontario. Et ça,
ça a été adopté - je le répète au
ministre, et il le sait - sous les libéraux ontariens, pas les
méchants sociaux-démocrates, parti des frères
séparés du parti qui est devant vous, sous les libéraux de
Peterson, à l'époque où il était minoritaire et
où le Nouveau Parti démocratique avait la balance du pouvoir.
Mais on donne une semaine par année de service jusqu'à
concurrence de 26 semaines. Et je pense, moi, qu'on serait capable de faire
pareil. On serait même capable de faire mieux, on a déjà
fait mieux que l'Ontario et on ne s'en est pas plus mal trouvé. Si on
appliquait, par exemple, le rapport de Grand-pré, M. de Grandpré
de Bell Canada qui a fait un rapport sur les conséquences du
libre-échange et qui a parlé de l'adaptation de la main-d'oeuvre
et de ce qu'on devait faire en termes de main-d'oeuvre. M. de Grandpré
n'est pas membre en règle de mon parti ni du NPD ontarien, j'en suis
certain. Mais il a quand même écrit des choses dans son rapport
que je partage entièrement, et je cite. Il a écrit pour justifier
que l'indemnité de départ devrait être de 26 semaines comme
en Ontario, mais de 39 semaines pour les travailleurs qui ont 55 ans et plus.
Il a écrit, pour justifier que ça ne soit pas imposable, et je
cite: "L'indemnité de départ est un versement qui tient compte,
entré autres choses, de la perte du capital constitué à
son travail par un employé. Ce capital peut prendre différentes
formes: droits d'ancienneté, par exemple, ou autres avantages
particuliers à un employeur. Toutes ces formes peuvent être
considérées comme un capital humain qui représente
l'investissement fait par le travailleur dans son emploi et s'apparente aux
catégories d'investissement fiscal particulier des gains en capital."
Fin de la citation.
M. le Président, je trouve que c'est très vrai, ce qu'on
écrit dans le rapport de Grandpré, que les premiers 100 000 $ de
gains en capital sont exclus de l'impôt. Mais pourquoi ne pas
considérer, par exemple, qu'une personne qui aurait donné 25
années de sa vie à la Vickers et qui aurait le malheur
d'être Québécoise francophone alors que le contrat a
été donné pour les frégates par le
fédéral au chantier de St. Johns dans les Maritimes... En
passant, on se demande ce que les frégates vont faire en bout de ligne,
parce que les trois destroyeurs vont être revenus quand les
frégates seront terminées.
M. Bourbeau: On va ramener le député de
Pointe-aux-Trembles aux normes du travail, M. le Président.
M. Bourdon: M. le Président, l'une des causes de fermeture
dans l'est de Montréal a été l'octroi d'un contrat par le
fédéral dans les Maritimes, et les travailleurs de Vickers que je
rencontre dans mon comté sont réels, ils existent. C'est
pertinent, je pense, de parler de eu qui est arrivé à ces
personnes. Donc, il faudrait avoir des indemnités de départ qui
se comparent à celles qui se versent en Ontario notamment - et je
termine là-dessus, M. le Président, je ne veux pas être
long, notre idée n'est pas de faire du temps mais d'essayer de
convaincre le ministre que son projet de loi pourrait être
amélioré - C'est qu'en attendant qu'on introduise dans le projet
de loi des indemnités de départ en cas de fermeture, la logique
économique fait qu'une entreprise qui a une surcapacité de
production, par exemple, et qui a une entreprise au Québec et une autre
en Ontario, si ça ne coûte rien de fermer au Québec et que
ça coûte quelques millions de fermer en Ontario, elle va fermer au
Québec. Ici, les fermetures sont gratuites, alors on paie pour,
économiquement. Il faudrait les rendre plus onéreuses en les
rendant au moins aussi onéreuses que chez notre principal concur rent
dans l'espace politique qu'on partage pour un temps encore. Donc, aussi
onéreuses qu'en Ontario, sinon, je voudrais qu'on me réponde,
dans le fond, à cette question-là: Pourquoi fermeraient-Ils en
Ontario si ça coûte cher alors qu'au Québec on leur permet
de fermer gratuitement?
En terminant, je voudrais dire que 45 % des personnes
bénéficiaires de l'aide sociale aptes au travail ont fait six
années de service continu avant de se retrouver sur l'aide sociale et 25
% ont fait 20 années continues de travail avant de se retrouver sur
l'aide sociale, et c'est ce qui arrive. Fermetures. 78 000, ça commence
à être pas mal de monde. Avec les dépendants, c'est 250 000
personnes, l'équivalent de la ville de Laval. Donc, des personnes qui
travaillaient souvent depuis longtemps dans une entreprise, ça a
fermé. On touche l'assurance-chômage, on l'épuisé et
de plus en plus vite parce que le fédéral coupe et, après
ça, on se retrouve à l'aide sociale. Les indemnités de
départ pour raient permettre de commencer par avoir une période
de grâce de 39 semaines et de donner aux gens le temps de se retourner
quand les changements inévitables de l'économie font que leur
entreprise ferme.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Pointe-aux-Trembles. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission du
côté ministériel... Je pense qu'on se doit de respecter
l'alternance toujours. Je vais respecter, en ce sens que je demande aux membres
du côté ministériel. Vous,
M. le ministre, vous avez déjà utilisé votre droit
de parole, alors je vais reconnaître un membre de la formation de
l'Opposition officielle. M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Oui, M. le Président. Quelques mots en
préliminaire sur l'étude du projet de loi 97 à
''étape de l'étude article par article. Il est important,
peut-être même au-delà des nombreuses remarques que nous
avons faites à l'étape de l'adoption du principe du projet de
loi, de faire remarquer que oui, bien sûr, si après 11 ans on
révise les normes minimales du travail il faut se mettre dans l'esprit
ici que nous sommes, dans les faits, en train d'écrire la convention
collective d'un groupe qui peut aller jusqu'à 1 000 000 de personnes.
Certaines catégories de travailleurs et de travailleuses ont la chance
de vivre dans un contexte qui fait en sorte qu'ils font partie d'un groupe
organisé et reconnu et qu'ils sont couverts par un autre code au niveau
de l'organisation du travail qui s'appelle le Code du travail. Nous, ici, on
est en train de réécrire la convention collective d'un
très grand nombre de personnes et de ces personnes les plus
démunies sur le marché de l'emploi et qui vivent ce marché
de l'emploi dans les conditions les plus difficiles. alors, c'est dans cet
esprit là, je pense, qu'on peut dire au ministre aujourd'hui que c'est
dans un esprit de collaboration qu'on va débattre les différentes
composantes des articles de ce projet de loi 97, dans l'espoir de bonifier au
maximum les conditions qui s'appliquent à tous et qui, à toutes
fins utiles, ne devraient comprendre aucune exclusion d'une personne qui vend
ses services à une autre, que ces personnes soient couvertes par un
ensemble de normes auxquelles on ne peut pas échapper, que ce soit
reconnu dans la société québécoise que, dès
le moment où, en échange d'une rémunération de la
prestation salaire, on va fournir une prestation travail, on ne peut pas aller
en deçà de cette norme et qu'on ne comprenne pas, dans la loi, et
qu'on ne dise pas, qu'on n'inclue pas des exclusions pour un certain nombre
dé catégories de personnes parce que la prestation de travail,
peu importe la condition sociale de la personne, peu importe le contexte dans
lequel s'exerce cette prestation-là, il faut qu'on puisse dire. ta force
de travail, ma force de travail, elle a un prix, en termes de conditions et de
rémunération, qui est minimal et, peu importe que je sois au
gouvernement du québec, que je sois dans l'opposition, que je sois
à la garde des enfants, dans une maison, que je sois dans une entreprise
de restauration, il faut se placer, à mon avis, m. le ministre, dans
l'esprit de la charte, une charte. nous sommes en train d'écrire la
charte des droits minimaux pour un très grand nombre de
québécois et de québécoises et nous avons, à
cet égard, une énorme
responsabilité.
C'est pourquoi le ministre va probablement très facilement
comprendre que nous allons revenir sur les articles qui touchent
particulièrement les exclusions, les catégories de personnes ou
les catégories d'articles qui sont exclues pour certains travailleurs,
toute cette question des gardiennes, du travail au foyer et, encore là,
revenir à cette notion que la prestation travail ou une prestation,
suivant le côté où on se place, la prestation salariale
correspond à une prestation travail et qu'il faut qu'il y ait une valeur
minimale établie dans notre société là-dessus et
qu'il faut, à tout le moins, qu'il y ait débat à
l'intérieur d'une politique de services de garde et pour les personnes,
et on le prendra de l'autre bout lorsqu'il s'agira de la politique familiale.
Mais nous allons parler, M. le ministre, des exclusions, pour les, travailleurs
agricoles, d'un certain nombre de dépositions des normes minimales
présentées ici, qui ne s'appliqueront pas pour les travailleurs
agricoles.
On peut toujours comprendre les motifs économiques dans notre
société qui nous amènent à inclure ces exclusions
dans les normes minimales, sauf que, pour les personnes qui sont en situation
de travail, nous qui sommes, encore une fois, à écrire cette
convention collective pour ces personnes, ça ne doit pas être, de
prime abord, notre préoccupation principale. Et, si un certain secteur
d'activité pouvait vivre des moments difficiles parce que nous
imposerions des normes de travail qui sont un peu élevées par
rapport à l'état de santé du secteur économique, eh
bien, le rôle de l'État, ce n'est pas, à mon avis, de
réduire les normes pour les personnes qui ont à fournir la
prestation travail. Il n'y a pas moins d'efforts pour un travailleur sur une
ferme agricole, sur une exploitation agricole, qu'il n'y en a pour le
travailleur ou la travailleuse qui est dans une entreprise de transformation
à Montréal, à Québec ou peu importe au
Québec. La force de travail, la dépense de travail est exactement
de môme nature. L'État a d'autres moyens pour réduire ou
ppur ajuster les impossibilités ou les difficultés
économiques, c'est-à-dire que ça peut être soit des
politiques d'aide, des politiques de support, des mesures restrictives, des
mesures d'encouragement et de stimulation. Ça n'appartient pas aux
normes minimales du travail. Ce qui doit nous intéresser ici, c'est
toute personne qui est sur le marché du travail qui fournit une
prestation travail en retour d'une prestation salariale, il doit y avoir une
banque, il doit y avoir une limite, un plancher qui est établi. (21 h
30)
On va donc revenir là-dessus, sur les questions des exclusions.
Revenir aussi sur un certain nombre d'éléments qui ne sont pas
présents dans le projet de loi. Le congé éducation. On
sait la vitesse à laquelle ça va maintenant, au niveau
économique, en Amérique du
Nord et dans le monde au niveau de la mondialisation des marchés.
On sait aussi qu'un des problèmes les plus difficiles auxquels on a
à faire face au Québec - le ministre, qui est également
responsable de la Main-d'oeuvre et de la Formation professionnelle
connaît ça presque par coeur - une de nos difficultés les
plus grandes, c'est l'employabilité des personnes. Je me souviens
toujours bien de ce débat un peu grossi de la situation: Où
allions-nous déposer en quelque sorte l'agence spatiale
fédérale à Montréal? Est-ce qu'on ferait ça
dans l'est de Montréal ou sur la rive sud, avec une bataille assez
invraisemblable? Est-ce que, vraiment, aller situer les installations de
l'agence spatiale fédérale nous aurait amenés au
relèvement du taux de l'emploi pour les personnes employées dans
cette agence-là? Eh bien, on a été capable de
diagnostiquer dans plusieurs milieux que l'employabilité des personnes
aurait très certainement fait défaut lorsque nous aurions
situé cette entreprise de haute technologie dans un secteur où on
sait que les critères d'employabilité sont plus réduits.
Bien sûr, ça aurait créé une autre série
d'activités, dont des activités connexes ou indirectes, mais sur
les emplois même de l'agence spatiale...
Quand on sait donc que la dimension formation, la dimension
éducation est primordiale et fondamentale pour passer au travers non pas
seulement comme personne mais comme société, et aussi que, bien
sûr, ça pourrait entraîner un certain nombre de
dépenses, un certain nombre d'implications financières pour
l'État et pour les employeurs, mais que c'est maintenant quasiment une
condition sine qua non des sociétés qui veulent être en
avant et s'en sortir, je pense qu'il était heureux que l'on puisse
introduire dans le projet de loi les notions de congé éducation
avec les participations nécessaires de la part des entrepreneurs.
Je ne vous dirai pas que ça aurait été la parade et
le bonheur total des employeurs qui seraient venus ici applaudir parce que nous
aurions introduit le congé éducation, sauf que, M. le ministre,
pour avoir été dans le domaine de l'éducation très
longtemps, la remarque la plus fréquente que nous entendions, et tous
les niveaux ne sont pas comparables à l'université,
c'étaient les employeurs qui venaient nous dire: Mais
préparez-nous les donc pour qu'ils travaillent, s'il vous plaît,
dans ce qu'on a à faire, nous autres, comme entreprise. Vous allez nous
les préparer pour que, quand ça sort de chez vous avec un
diplôme, avec un papier, ça, ça puisse être actif et
ça puisse être productif le lendemain matin. Impossible! C'est
impossible qu'on puisse réussir ça de cette
façon-là.
Ce que les employeurs nous signalaient, c'est qu'il y avait de
très nombreux travailleurs qui devaient affronter des modifications au
sein même de leur entreprise et qu'il n'y avait absolument pas de banque,
en quelque sorte. Il ne s'est pas constitué de banque de réserve
pour
permettre de quasiment reformer continuellement travailleurs et
travailleuses qui sont dans cette entreprise-là et, pour avoir
été dans ce milieu-là aussi un bon nombre d'années,
évidemment, la vue est parfois assez courte dans ce secteur là du
point de vue de l'employeur, et je ne caricature pas uniquement la situation,
je caricature... Il y a ceux que l'employeur écoute souvent. D'abord,
son comptable, qui lui dit que les marges de profit sont très minces.
Dès le moment où il voudrait introduire des mesures en termes de
congé éducation pour sa main-d'oeuvre, évidemment, il ne
faut pas qu'il perde sa capacité concurrentielle par rapport au
dépanneur voisin, par rapport à la pizzéria voisine. Mais
comment enlever cet aspect discriminatoire, entre guillemets, de celui ou celle
qui en aurait bien besoin, sinon que de rendre la mesure universelle applicable
à toutes les entreprises? On a vu que par rapport à certaines
mesures en termes d'équité salariale, par rapport aux
indemnités de départ pour les fermetures d'usines, comme mon
collègue le rappelait il y a quelques secondes, ça n'a pas
été le drame en Ontario, ça. Ce n'est pas vrai, ça
n'a pas été le drame, ça ne s'est pas mis à fuir
l'Ontario comme si cette province venait de déclarer la guerre à
ses travailleurs et à ses travailleuses et aux entrepreneurs surtout.
Pas du tout, pas du tout.
Alors, congé éducation, il faut, il va falloir y revenir
pour qu'au moins on ait des éléments d'introduction dans la loi
des normes minimales du travail. Les congés parentaux, la même
chose. Les congés parentaux, bien sûr, on va élargir pour
différentes catégories de personnes à 34 semaines
supplémentaires sans solde. Comme dirait ma collègue de Hochelaga
Maisonneuve, ce n'est pas payé, là; sans solde, ça veut
dire "pas payé". C'est pour les personnes qui sont en emploi depuis un
certain nombre de semaines de façon continue dans une entreprise.
Bon, alors là, ce que l'on touche, c'est évidemment toute
la question des normes minimales du travail pour ceux qui ne sont pas couverts
par une convention collective, mais qui sont en emploi de façon
continue. Mais qu'en est-il de tous les autres qui participent, en quelque
sorte, à la force de travail? Nous aurions pu saisir l'occasion des
normes minimales pour se donner un véritable régime universel de
support à la maternité parce que, la ministre responsable de la
Famille le rappelait dans ses notes préliminaires de son
côté, c'est un des biens les plus précieux que nous
possédons et les quelques enfants ou les enfants que nous avons encore
et surtout ceux et celles que nous voudrions avoir de plus au Québec
pour assurer le renouvellement de la nation, eh bien, il faut créer les
conditions nécessaires.
Des droits sur papier qui n'impliquent pas ou qui ne signifient surtout
pas l'obligation ou qui ne correspondent pas à une
rémunération ou à un régime de remplacement du
revenu, eh bien, ça demeure évidemment un petit pas
supplémentaire dans la bonne direction, mais ça demeure nettement
insuffisant, compte tenu de la situation en particulier des jeunes
ménages où la précarité de l'emploi est le fait de
plus en plus de personnes. Les conseils, le Conseil des affaires sociales, le
Conseil de la jeunesse... Le Conseil du statut de la femme nous a assez
rappelé au cours des derniers mois que c'est la précarité
qui s'est installée au niveau de l'emploi chez les jeunes parents et
que, dans ces conditions-là, il n'est pas surprenant qu'on ait encore un
taux de renouvellement ou un taux de natalité qui soit à 1, 7,
quand on sait que c'est 2, 1, la norme minimale dans ce cadre-là pour
assurer le renouvellement de la nation.
Toujours aussi au niveau de ces remarques préliminaires, revenir
sur un certain nombre d'éléments, mais vraiment minimaux dans
cette loi et ne pas avoir peur de se comparer avec d'autres pays parce qu'on se
gargarise, à bien des moments, de l'ajustement de nos lois ou de
l'ajustement de nos normes de société dont le gouvernement est
responsable en disant: Ça, ça répond à la
mondialisation des marchés, il y a aussi la mondialisation des
conditions de travail. Pensez à cet aspect du droit aux vacances
minimales annuelles. On élargit, on fait voir qu'on va élargir
à trois semaines, après cinq ans de service, le minimum de
vacances. D'abord, ce qu'il faut bien rappeler, si le projet de loi va un petit
peu plus de l'avant dans ce secteur-là, c'est qu'il y va vraiment
à pas de tortue parce que c'est seulement en 1995, c'est seulement en
1995 que tout travailleur qui aura plus de cinq ans de service de façon
continue au sein de la même entreprise aura droit à trois semaines
de vacances.
Mondialisation de l'économie et mondialisation des conditions. Je
ne suis pas capable de citer, M le ministre, l'année exacte de, par
exemple, un pays comme la France...
M. Bourdon: 1936, Quatre semaines.
M. Trudel: Hein?
M. Bourdon: En 193$.
M. Trudel: 1936 En 1936.
M. Bourdon: Quatre semaines.
M. Trudel: En 1936, le député de
Pointe-aux-Trembles, je ne suis pas sûr qu'il était au monde
à cette époque-là. En tout cas, le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue n'était pas au monde et
déjà, en 1936, la France se donnait des normes minimales du
travail qui nous amenaient à quatre semaines de vacances parce qu'ils
considéraient, encore une fois, que la force de travail, peu importe
dans quel secteur elle se situe, elle doit quand même permettre
certaines
conditions de vie raisonnables. Alors, 1936, M. le ministre, où,
dans certains pays européens dont la France, on dit: Minimal, un mois de
travail, 50 ans. Alors, notre rattrapage, nous autres, on dit: On va prendre
cinq ans pour arriver, après cinq ans de service, à trois
semaines de vacances. Disons qu'on ne pèche pas par excès. Et,
encore une fois, je ne pense pas, qu'on puisse évoquer les conditions
concurrentielles de l'économie avec un certain nombre de marchés
extérieurs, même européens, pour en arriver à faire
de si petits pas au niveau de ces normes minimales. Souvent aussi... Mon
collègue parlait tantôt non seulement des normes minimales, mais
des capacités de recours et des possibilités de recours pour les
exercer, ces droits-là. Eh bien, pour les travailleurs et les
travailleuses, nommément en matière de congés et de
vacances annuelles, écoutez, comme ces gens vivent souvent, on le
rappelle - et le ministre en est conscient, je le sais, il est très
conscient de cela - ce sont les gens qui vivent dans des conditions de travail
les plus difficiles. Ce n'est pas des entreprises de très haute
technologie qui vont avoir à appliquer les normes minimales du travail
dans une très large part. On sait généralement à
quel secteur de l'activité économique ça s'applique.
Alors, comme ce sont des personnes qui vivent dans des conditions de travail
annuelles, dans un climat de travail qui est très difficile, d'autant
plus que l'État doit être conscient et l'État doit assurer
cette partie-là aussi des normes minimales du travail, de la convention
collective que nous sommes à écrire - et je p'oserais pas dire
que vous êtes de la partie patronale et que nous sommes de la partie
syndicale, loin de moi cette idée - nous devons en arriver à
avoir la meilleure convention collective pour ce presque million de personnes
qui vont avoir, dans les années à venir, ou qui peuvent avoir
à faire appel à ces normes minimales du travail. une
dernière remarque, sur une situation qui mériterait très
certainement d'être examinée plus à fond à
l'intérieur des normes minimales du travail, à cette
occasion-là, parce qu'il y a des... parlant de convention collective, on
va souvent trouver dans les conventions collectives des clauses
préventives, c'est-à-dire qui ne gèrent pas uniquement les
conditions exactes qui se présentent dans tel type d'entreprise, pour
tel type de travaux, dans telle entreprise. on a souvent des clauses
préventives qui disent: l'employeur et les employés vont convenir
de se donner une politique en telle matière, en telle matière. je
fais allusion ici à tout le volet du harcèlement sexuel, sur
lequel on entend de plus en plus de remarques et de façons difficiles de
vivre ce phénomène-là à l'intérieur des
entreprises, des histoires abracadabrantes de... on fait le tour. mon
collègue faisait allusion tantôt à une situation dont il
avait été témoin dans son comté: ce que je dis,
c'est: pourquoi ne pas inclure aussi dans notre convention collective, au
niveau des normes minimales du travail, l'obligation d'une politique, d'une
politique préventive au niveau du harcèlement sexuel. Encore
là, ma collègue de Hochelaga-Maisonneuve n'a pas à avoir
peur d'inclure des éléments de protection et de prévention
qui ne correspondent pas à des dépenses immédiates, mais
qui font appel à la conscientisation, à la responsabilisation et
à des pratiques que cela va probablement créer à
l'intérieur de l'entreprise. Cela nous permettra d'avoir, finalement, un
meilleur climat, de meilleures conditions, un meilleur respect et probablement
un meilleur rendement, mais une convention collective qui ne fait pas
d'exclusion et qu'on puisse dire: Dans ce pays, au Québec, quand on est
en situation de travail, voilà les normes que l'on doit respecter.
Voilà, M. le Président, les remarques préliminaires
que j'avais à faire en rapport avec le projet de loi.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. J'ai une demande d'intervention
très courte. De par les règles de procédure, j'ai besoin
du consentement des membres de cette commission. M. le ministre de la
Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu aimerait intervenir
deux minutes.
Mme Harel: Deux minutes?
Le Président (M. Joly): Deux minutes. Avec la permission
des membres.
Mme Harel: Est-ce qu'il va me donner ensuite le même
temps?
M. Bourbeau: Ça ne me dérange pas du tout.
Le Président (M. Joly): Moi. je suis prêt à
vous accorder tout ça.
Mme Harel: D'accord. Même consentement: deux minutes.
Le Président (M. Joly): Alors, M. le ministre, je vous
reconnais.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, je ne veux pas m'imposer,
sauf que je pensais peut-être que ce serait peut-être
intéressant pour le député de Pointe-aux-Trembles qui a
ouvert la porte, tantôt, sur un sujet à l'égard duquel
j'aimerais dire quelque chose.
Le député a parlé de l'intérêt qu'il y
aurait à introduire, dans cette loi-ci, des clauses qui
prévoiraient des indemnités en cas de cessation d'emploi ou de
fermeture d'usine. Je dois dire que je suis très sympathique à ce
projet-là et
que j'ai déjà demandé à mes fonctionnaires,
depuis quelques mois, de regarder la possiblité d'améliorer le
système québécois pour permettre, justement, aux
employés qui sont licenciés lors de fermetures d'usines d'avoir
une meilleure protection. Je suis personnellement très sensible à
ça et très désireux d'apporter cette protection-là.
Et j'avais l'intention de le faire dans une loi qu'on devait originellement
étudier cet automne, qui devait réformer ia Loi sur la formation
et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre parce que vous savez
que c'est dans cette loi-là qu'existe la possibilité de
légiférer dans ce domaine-là. (21 h 45)
Sauf que nous avons dû retarder l'adoption de cette
réforme-là, la loi qui va réformer les CFP, à cause
des problèmes qu'on a présentement, de juridiction en
matière de main-d'oeuvre et de l'annonce que le premier ministre a
faite, au mois de juin, de l'intention du gouvernement du Québec de
réclamer le rapatriement des pouvoirs dans ce domaine-là. Il est
bien évident que, si le Québec devient investi de tous les
pouvoirs en matière de main-d'oeuvre, les CFP, ça va devenir
autre chose, un peu. que ce que c'est présentement; ça va prendre
une importance accrue et la structure va être modifiée. Donc, il
devenait illogique de modifier la structure des CFP, enfin, d'améliorer
la loi qui gouverne les CFP à l'automne pour, peut-être au
printemps, être obligé de faire autre chose.
Alors, nous avons retardé, pour cette raison-là, la
réforme de cette loi-là et, par voie de conséquence, nous
devons retarder de quelques mois les projets que nous avons d'inclure dans
cette loi-là, justement, des clauses qui prévoiraient des
indemnités aux employés qui seraient mis à pied lors de
fermetures d'usines, tout en vous soulignant qu'en Ontario ce n'est quand
même pas le régime total et la gratuité totale non plus. Il
faut quand même avoir un service continu de cinq ans, si j'ai bien
compris, en Ontario, pour y avoir droit. C'est limité aux entreprises de
plus de 50 employés, donc, c'est balisé, ce n'est pas
général et universel, mais, quand même, ça
présente un intérêt.
Vous connaissez mon ardeur sociale, je dirais même ma hantise
à réformer nos lois sociales. Ma feuille de route n'est quand
même pas si mauvaise, depuis deux ans. Alors, je vous prie de croire
à ma bonne volonté dans ce domaine-là et à mon
intention d'y arriver le plus rapidement possible.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Hochelaga-Maison-neuve.
Mme Harel: Une remarque, d'abord, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Allez, madame.
Mme Harel: J'espère que le ministre n'interprète
pas la fâcheuse Ioi 37 comme étant une loi à
caractère progressiste et social parce que, là, il va
évidemment ouvrir un débat que je ne pense pas être utile
d'ouvrir.
Le Président (M. Joly): Je serais obligé, à
ce moment-là, de vous rappeler à la pertinence.
M. Bourbeau: Je vais vous parler de mon ardeur, M. le
Président.
Mme Harel: L'ardeur. D'accord.
Le Président (M. Joly): D'ailleurs, M. le ministre, vous
avez été jugé sur la perception. Mme la
députée.
Mme Harel: On ne parlera pas des effets pervers de l'ardeur du
ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: J'ai pris connaissance du discours que le ministre a
prononcé cet après-midi, en Chambre, en réplique au
débat de deuxième lecture et. justement, je notais qu'il se
référait à la Loi sur il formation et la qualification
professionnelles de la main-d'?uvre en matière de licenciement
collectif. Je lui rappelle qu'évidemment, c'est dans cette loi que l'on
retrouve * les préavis. On pourrait retrouver les indemnités dans
la loi Sur les normes ou, tout au moins, une disposition réglementaire
comme celle du salaire minimum qui permettrait... ceci dit, peut-être
simplement signaler qu'il y a une indemnité en cas de départ.
cette indemnité, c'est celle de l'assurance-chômage et,
finalement, il y a des travailleurs et des employeurs qui cotisent pour
financer les prestations de chômage à ceux et celles qui sont
victimes de fermetures d'entreprises et qui, pendant, pour la plupart, 48
semaines, vont toucher 60 % de leur revenu, de leur salaire, en compensation de
leur perte d'emploi. sauf que ce sont finalement les employeurs qui continuent
de garder leurs entreprises ouvertes qui paient pour ceux qui les restructurent
ou qui fusionnent ou qui font des acquisitions et qui les ferment. sur le
strict plan de l'équité économique dans notre
société, il y à quelque chose qui est extrêmement
injuste, de faire porter le fardeau des fermetures sur les épaules des
travailleurs et travailleuses et des employeurs qui opèrent toujours et
puis de ne rien charger du tout à ceux qui ferment. parce que là,
on ne parie pas des faillites. c'est autre chose. on parie de ceux qui, pour
des raisons d'opérationalisation de leur production, en fait, pour des
raisons qui sont liées à leur désir de faire du profit,
fusionnent ou encore déménagent, en fait, pour toutes sortes de
raisons qui finalement font que ce sont les autres qui portent le poids. et
là, maintenant
que le gouvernement fédéral s'est totalement
désengagé dans le financement de la caisse d'assurance
chômage, c'est entièrement les travailleurs et les employeurs qui
paient pour la restructuration des autres. Il y a quelque chose d'absolument
inéquitable et vraiment, je dirais, scandaleux là-dedans.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. Est-ce qu'il y a... Compte tenu
de l'alternance, est-ce qu'il y a des membres du côté
ministériel qui aimeraient intervenir? Non. Je vais maintenant
reconnaître Mme la députée de Verchères. Nous vous
souhaitons la bienvenue, Mme la députée de Verchères,
à cette commission.
Mme Luce Dupuis
Mme Dupuis: Merci, M. le Président. Je suis heureuse
d'avoir l'opportunité, à cause de l'absence de ma
collègue, la députée des Chutes-de-la-Chaudière, de
sensibiliser M. le ministre à quelques cas, si vous voulez Le hasard
veut et la nature veut que je fasse partie, dans l'ensemble, ou que j'aie
affaire à des gens qui sont peut-être les plus démunis ou
dans des situations les plus précaires. La situation des femmes
mères, d'abord... Je vous en ai parlé hier en Chambre. Vous aviez
l'air un petit peu occupé, je pense que je vais peut-être me
répéter, mais en plus bref un petit peu. C'est certain que Mme la
ministre dit qu'elle est satisfaite et qu'elle est heureuse des gains qui sont
acquis, moi aussi C'est vrai qu'il y a un bon pas de fait. Mais lorsqu'on vit
la situation des mères qui ont à travailler, lorsqu'on veut
répondre, lorsque les femmes veulent répondre à leurs
besoins fondamentaux et je parle des deux, ça ne veut pas dire que c'est
accepté cornme tel. Mais avec ma vision, moi, de la femme, eIle doit
être autonome à tous points de vue. On les élève
depuis le début, on leur apprend à être autonomes. II
arrive, à un moment donné, une fois adultes, qu'elles ne le sont
plus, pour la plupart, parce qu'elles sont dépendantes d'un homme. Donc,
ce besoin fondamental moi, je le vois comme un besoin fondamental - d'une
autonomie financière.
L'autre besoin aussi, qui est fondamental, et ça, on le sait dans
la pratique, c'est celui d'être mère. Je ne suis pas certaine
qu'avec les mesures qui sont là présentement elles puissent
répondre à ça. C'est vrai qu'il y a des
améliorations, mais c'est pratiquement imposable pour une jeune
mère qui a deux enfants de travailler d'une façon sereine. Je le
vis là, parce que... Parce que je suis une femme, peut-être que je
n'y ai pas pensé assez, mais la situation a voulu que j'aie quatre
mères de famille à mon emploi. Monsieur, je suis obligée
de vous dire la catastrophe. Pourquoi? Parce que ces petites mamans-là,
à un moment donné, elles n'ont pas de garderie, elles ne sont pas
capables de se payer des gardiennes.
J'en avais une à temps partiel. Je disais: Pourquoi ne te paies
tu pas une gardienne? Elle me dit: Luce, si je me paie une gardienne, c'est
tout mon salaire qui y passe. Donc, encore là, on arrive au temps
partiel qui est défavorisé. Donc, la femme qui est mère,
à temps partiel, c'est pratiquement impossible pour elle de revenir sur
le marché du travail. Pardon?
M. Bourbeau: Vous demanderez une garderie à votre bureau
de comté.
Mme Dupuis: Voilà, j'y arrive, M. le Président.
Oui, je pense que si on veut être un petit peu créateur et
avant-gardiste il faudrait peut-être penser... Parce qu'on parle d'une
politique familiale. Je dis familiale, parce que si on s'acharne trop à
vouloir aider les femmes en âge de procréer, ce que ça peut
amener comme résultat ou comme effets secondaires, c'est que les
employeurs ne les emploient plus. Là, ça peut être
négatif pour elles. Tandis que si l'on parle de politique familiale, de
garderies en milieu de travail mais pas dans un milieu de travail où les
femmes sont là seulement, les hommes aussi parce que vous autres vous
avez été dans l'ensemble des hommes... Ce n'est pas un reproche,
je ne veux pas faire de cas particulier, vous étiez surtout, disons,
à 70 % des pourvoyeurs. Mais le côté éducatif
était remis aux femmes et c'est les femmes qui s'occupaient des enfants.
Moi, je dis des garderies en milieu de travail et dans les milieux de travail
où il y a des hommes, que des hommes aussi parce que vous êtes
pères, vous autres aussi. Quand je parle des mères, vous
êtes pères vous autres aussi. Je me demande...
Le Président (M. Joly): Maire de Saint-Lambert.
Mme Dupuis: Je me demande si, dans un Québec qui se
veut... Je me demande si on ne pourrait pas sur ce point-là être
un petit peu avant-gardiste et ne pas être en arrière de
l'Ontario, des garderies sur place. Je pourrais vous entretenir une heure sur
les cas, comment ça se passe dans la vraie vie avec l'histoire des
gardiennes, etc. C'est invivable pour elles, c'est pratiquement invivable.
Alors, je veux soumettre ça à votre attention. Mon idée,
moi, ce n'est pas de faire du temps, c'est de vous dire comme je le
perçois dans différents secteurs. Alors, ça, je vous en ai
parlé hier. J'aimerais que ça mijote et qu'éventuellement,
quand vous feriez une refonte de tout ça, si ça ne pourrait pas
être inclus.
Le temps partiel aussi, je trouve qu'ils sont encore... Ce qui
m'inquiète, c'est que notre société devienne ou... Ceux
qui ont du travail, ça va, ils ont une protection. Mais que les plus
défavorisés le soient encore plus et que les plus pauvres le
soient encore plus... Vous parlez des congés de maternité, mais,
finalement, un congé de maternité, il faut avoir les moyens de
le
prendre; les 34 semaines ne sont pas payées. Alors, la petite
madame à temps partiel qui est rendue à son troisième
enfant, il faut qu'elle revienne et elle ne peut pas. Donc, elle... C'est
quasiment réservé uniquement aux personnes qui ont les moyens de
le prendre. Est-ce que ça veut dire que les familles riches vont pouvoir
avoir des enfants? J'espère que non parce que ce n'est pas un
critère de qualité. Le temps partiel aussi, je vous en ai
parié un petit peu.
Quelques mots sur l'équité salariale. C'est quasiment
impensable qu'il n'y ait rien dans votre loi sur l'équité
salariale. Quand on pense que la Charte des droits et libertés de la
personne du Québec, depuis son adoption il y a 15 ans, reconnaissait
qu'à travail égal ou à travail équivalent...
Là, on se rend compte que les femmes gagnent en moyenne 69 % de ce que
touche un homme. Il existe aujourd'hui des moyens fiables pour mettre en
parallèle des emplois différents, mais qui pourraient arriver au
même salaire, si vous voulez. Les statistiques, on les voit ici, partout
où les femmes sont majoritaires, les salaires sont plus bas. Je le
disais hier à M. le ministre, c'est quasiment impensable, sans vouloir
trouver que des emplois sont mieux que d'autres, mais c'est quasiment
impensable qu'un magasinier dans une usine, celui qui donne les outils au
travailleur - ça ne demande tout de même pas une scolarité
énorme - gagne aussi cher qu'une secrétaire administrative.
Là, qu'on me dise que le travail où les femmes sont en
majorité n'est pas moins bien payé, on a des évidences
comme ça alors que ça existe et là, on ne s'en est pas
occupé. Une étude de l'Ordre des comptables agréés
du Québec auprès des comptables de 35 ans et moins
révèle que 46 % des hommes, mais seulement 20 % des femmes
gagnent plus de 50 000 $. Et je pourrais vous citer des cas comme ça. On
ne s'en est pas occupé, dans la loi, de ça.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Verchères, je me dois de vous interrompre, compte tenu de l'heure et
compte tenu de l'ordre de la Chambre.
Mme Dupuit: Je n'ai plus de temps.
Le Président (M. Joly): Malheureusement. Mais je dois
quand même vous aviser...
Mme Dupuls: Oui, d'aller un peu plus vite?
Le Président (M. Joly): ...non... que, tors de la
prochaine séance, vous aurez un droit d'intervention de 11 minutes qui
vous sera consenti. Alors, si vous voulez vous préparer en
conséquence.
Mme Dupuis. Est-ce que vous pourrez le passer à ma
collègue, Mme Carrier-Perreault?
Le Président (M. Joly): Sûrement. Sûrement. On
va faire ça avec grand, grand plaisir.
Alors, comme je te disais, compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux
à 9 h 30 demain matin, dans la même salle, ici. Bonsoir et
merci.
(Fin de la séance à 22 heures)