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(Dix heures sept minutes)
Le Président (M. Joly): Bonjour, tout le monde. Bienvenue
à cette commission. Il me fait plaisir de vous rappeler que nous sommes
réunis afin de procéder à une consultation
générale et de tenir des auditions publiques dans le cadre de
l'étude de l'avant-projet de loi qui est la Loi sur les services de
santé et les services sociaux. Mme la secrétaire, est-ce que nous
avons des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président: Mme
Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière) sera remplacée par M.
Lazure (La Prairie).
Le Président (M. Joly): Merci, madame. Alors, aujourd'hui,
nous entendrons l'Association du Québec pour l'intégration
sociale, l'Alliance des communautés culturelles pour
l'égalité dans la santé et les services sociaux inc., le
groupe Auto-Psy provincial, la Commission d'accès à l'information
et, finalement, la Commission des droits de la personne.
Il me fait plaisir de saluer les gens de l'Association du Québec
pour l'intégration sociale. Je vois qu'ils ont déjà pris
place. Est-ce que la personne responsable du groupe peut s'identifier et aussi
nous présenter les gens qui l'accompagnent, s'il vous plaît?
Association du Québec pour l'intégration
sociale
Mme Girard (Madeleine): M. le Président, M. le ministre,
M. le critique officiel de l'Opposition, mesdames et messieurs les
députés, permettez-moi tout d'abord de nous présenter. Je
me nomme Madeleine Girard et je réside à Fabrevil-le, dans ville
de Laval.
Le Président (M. Joly): Double bienvenue.
Mme Girard: J'ai une jeune fille de 18 ans qui vit avec une
déficience intellectuelle, qui a vécu les 5 premières
années de sa vie à la maison, 10 ans à
Rivière-des-Prairies. Je suis un des parents ayant demandé
l'enquête sur la qualité de vie à
Rivière-des-Prairies et, comme on n'a pas obtenu la tutelle
après, j'ai repris ma fille qui est à la maison depuis 4 ans et
j'attends encore des services.
J'ai, à ma droite, Mme Bernadette Salois, mère d'un fils
de 30 ans qui se nomme Gilles et membre de notre conseil; M. Jacques Turgeon,
directeur général de l'Association; Mme Colette Savard,
mère d'un garçon de 18 ans, un beau jeune homme qui s'appelle
Olivier, et M. Denis Gauthier, à l'arrière, notre collaborateur
à l'AQIS.
Le Président (M. Joly): Je vous rappelle, Mme Girard, que
vous avez une vingtaine de minutes pour nous présenter votre
mémoire et, par après, les membres des deux formations se
réservent le loisir de vous poser quelques questions.
Mme Girard: Ça va.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup.
Mme Girard: Nous voulons rappeler, dès le début,
que nous sommes une organisation bénévole de type
fédératif qui regroupe près de 50 associations membres
réparties sur l'ensemble du territoire québécois. Depuis
bientôt 40 ans, nous réunissons les parents des personnes ayant
une déficience intellectuelle et, de plus, les personnes adultes qui
vivent aussi avec une déficience intellectuelle se défendent
elles-mêmes.
Notre bras technique, l'Institut québécois de la
déficience mentale, a été l'un des principaux promoteurs
du droit à la vie au sein des communautés de personnes
déficientes, longtemps rejetées et marginalisées au nom de
perceptions erronées. C'est donc dans cette perspective que nous avons
examiné l'avant-projet de loi élaboré par le
ministère de la Santé et des Services sociaux, rassurés
que nous étions de lire dans le préambule du document
"L'intégration des personnes présentant une déficience
intellectuelle, Un impératif humain et social, Orientations et Guide
d'action" qu'on spécifiait: "Nous avons voulu, dans ce document,
considérer la personne non seulement comme un bénéficiaire
de services, mais surtout comme le véritable responsable et principal
artisan de son projet de vie, même s'il devra requérir l'appui de
son entourage dans certaines circonstances."
Nous tenons à adresser personnellement à chacun et
à chacune des membres de la commission des affaires sociales nos
salutations et à leur assurer que notre exercice n'a visé
qu'à apporter notre contribution aux travaux de perfectionnement de la
proposition que constitue cet avant-projet de loi modifiant la Loi sur les
services de santé et les services sociaux du Québec, notre
intérêt fondamental étant l'amélioration des
conditions de vie de nos fils et de nos filles, sans oublier tous ceux et
celles qui n'ont pas de parents.
Nous sommes animés par la croyance fondamentale que les personnes
ayant une
déficience intellectuelle sont des citoyens et des citoyennes
à part entière du Québec et que, comme tout être
humain d'ailleurs, ils et elles sont capables de développement et de
croissance.
Tous les services conçus et gérés pour elles et
leur famille doivent faire en sorte de les accompagner sur une base
individualisée, dans les contextes les plus valorisants possible et
considérer leurs besoins comme guide d'action et critères
d'évaluation de la performance qualitative de ces services.
Nous avons identifié plusieurs points positifs dans cette
proposition de refonte de notre système de services sociaux et de
santé que nous présentons à la première partie du
chapitre 1 et que nous vous rappelons.
Les acquis que l'on retrouve dans l'avant-projet de loi: un mandat
visant à l'utilisation de l'autorité gouvernementale pour
remodeler le système, la planification et l'administration
régionale, l'orientation vers la prévention, le blocage des
admissions en institution et la mise en place de plans de
désinstttutlonnalisatlon, une idéologie de services humaniste et
logique.
Nos inquiétudes et nos questionnements à l'Association: la
récupération des forces bénévoles. Nos commentaires
regroupés sous le titre Thème 5", sur le mouvement associatif,
cernent l'essentiel de notre position. Rappelons, cependant, que nous voulons
comprendre que dorénavant, au Québec, un organisme communautaire
est considéré, de par la loi, comme étant d'égale
valeur à un établissement puisqu'ils peuvent conclure des
ententes, travailler conjointement à la réalisation de projets
et, pour l'organisme communautaire, facturer des services à
l'établissement qui contracte avec lui. Nous venons ainsi de franchir
une étape historique: l'organisme communautaire sera dorénavant
un interlocuteur de même palier. Il ne s'agit donc plus pour eux de vivre
des situations d'acceptation forcée, de tolérance ou
d'acceptation de leur légitimité, mais bien d'une reconnaissance
de leur rôle et de leur mandat. Nous serions très inquiets si
telle n'était pas la compréhension à avoir.
La participation d'un établissement à la
réalisation d'un projet d'un organisme communautaire comporte un danger
certain d'Ingérence. Pour éviter cet état de fait, nous
proposons que les règlements qui découleront de la loi
prévoient spécifiquement les balises de cette participation afin
d'assurer à l'organisme communautaire son autonomie pleine et
entière, sous réserve, bien sûr, des obligations
prévues au contrat à intervenir entre les parties. Mais,
malgré tout ça, dans les faits, nous tenons à resouligner
notre inquiétude puisqu'il est connu et reconnu que les organismes
communautaires ont une culture qui leur est propre, se traduisant, entre
autres, dans des modes de fonctionnement reposant largement sur l'expertise
empirique et les forces de même que les aléas du
bénévolat.
En équivalence, les structures publiques possèdent leur
propre culture se traduisant, pour leur part, par une certitude quasi absolue
de durée et des modes de fonctionnement affectionnant les
contrôles. Malgré le constat certain de la cohabitation de deux
solitudes, nous savons que des expériences de travail en commun
existent, peuvent fonctionner harmonieusement et fonctionnent effectivement en
respect des caractéristiques du partenaire social que constitue
l'organisme communautaire. Cependant, nous connaissons tous et toutes une liste
noire d'expériences vécues. Ces réalités viennent
doubler la nécessité de la réglementation discutée
au paragraphe précédent.
D'autre part, nous questionnons sérieusement le pouvoir de
contrôle que pourrait exercer la Régie dans son rôle de
coordination de l'action des établissements et des groupes
communautaires. Ce qui peut être inquiétant, c'est la
possibilité que peut avoir la Régie de juger et d'éliminer
ce qu'elle considérerait comme un dédoublement qui n'en serait
pas un, du point de vue des consommateurs et consommatrices de services. Un
service donné dans une approche différente, qui convient mieux
aux attentes des personnes, donné par un organisme communautaire
pourrait-il être considéré comme un dédoublement si
ce genre de service est donné par un établissement mais d'une
façon qui ne convienne pas à un certain type de
clientèle?
Enfin, toute la question du financement devra faire l'objet d'un
débat de fond. Je passe maintenant la parole à Mme Savard.
Mme Savard (Colette): Nous avons dit, dans notre commentaire
général du chapitre 2, que l'absence de programmes rigoureux et
systématiques de formation en cours d'emploi affecte sérieusement
la qualité de vie dans la communauté des personnes ayant une
déficience intellectuelle. À titre d'exemple, un éducateur
en établissement, qui a travaillé pendant des années
auprès de personnes ayant une déficience intellectuelle, ne peut
se retrouver du jour au lendemain éducateur en communauté, dans
la communauté sans avoir une formation pertinente, parce que sa
façon de faire avec la personne change, du fait qu'il n'est plus en
institution mais dans la communauté.
Un autre exemple, les intervenants au CLSC doivent être
sensibilisés aux besoins des personnes, parce que les personnes qui ont
une déficience intellectuelle ne sont pas la majorité de leur
clientèle, ce n'est pas la majorité des gens qu'ils
reçoivent. Par exemple, moi, quand on évalue les besoins de mon
fils Olivier et les miens en fonction de support à domicile, j'invite
l'intervenant à la maison pour qu'il nous voie, Olivier et moi, dans
notre contexte familial.
Nous avons besoin d'être assurés de la volonté du
ministère sur le principe, mais surtout
sur les moyens à mettre en place afin que la formation
s'opère en conformité avec les orientations du document
"L'Intégration des personnes présentant une déficience
intellectuelle, Un impératif humain et social". Vous remarquerez que
notre mémoire parle, entre autres, de six thèmes qui
reflètent tous nos préoccupations de base.
Centrer le système sur la personne est le thème 3.
L'avant-projet de loi reconnaît légalement le plan de services
individualisés comme l'instrument privilégié pour
répondre aux besoins de la personne. Mais nous nous inquiétons du
fait qu'il ne propose que peu de mécanismes concrets et formels pour
faire en sorte de s'assurer que les services soient conçus à
partir des besoins de la personne et de sa famille et qu'ils soient des
services de qualité.
Nous sommes convaincus, et l'ensemble de la recherche te
démontre, que deux mécanismes sont essentiels pour assurer une
réponse appropriée aux besoins des personnes et de leur famille,
à savoir: la coordination rigoureuse des plans individualisés par
une instance indépendante des dispensateurs de services - il est, je
pense, difficile d'être à la fois juge et partie - et la mise en
place de mesures formelles, d'assurance de qualité.
Il faut se rappeler qu'historiquement, ce sont les parents qui ont mis
sur pied les services dans la communauté à l'intention de leurs
enfants. À titre d'exemple, les programmes de stimulation
précoce, les écoles, les camps de jour, les camps de vacances.
L'État a pris le relais dans un double souci d'universaliser et
d'accessibiliser. En 1990, selon les informations que l'on nous a fournies, la
clientèle des personnes ayant une déficience Intellectuelle est
actuellement celle la moins financée. Nous voulons que soit
statué que les sommes d'argent actuelles en déficience
intellectuelle deviennent des sommes protégées par région
et que soit ajustée l'équité des ressources
financières entre les clientèles.
L'article 289 énonce l'élaboration de la politique
globale, et je cite: "en collaboration avec les autres ministres
intéressés." Nous pensons qu'un pas est ainsi franchi puisque ces
mots se retrouvent écrits dans un texte de loi. Nous nous demandons,
cependant, pourquoi ne pas inscrire dans cette même loi l'obligation des
autres ministères d'aller dans les mêmes orientations. Les parents
dont les enfants sont ou ont passé par le système scolaire, leur
cauchemar, c'est la mission MSSS-MEQ. Pourquoi? Parce que nos enfants ont des
besoins spéciaux et, à l'école, ils ont aussi besoin des
services de réadaptation, à savoir: les services d'orthophonie,
d'ergothérapie, de physiothérapie, et c'est souvent très
difficile d'en avoir et de coordonner tout ça. Une autre des
difficultés, c'est le transport adapté. Le parent a à
faire face, si je peux m'exprimer ainsi, à un perpétuel
décalage horaire, c'est-à-dire qu'il se promène entre les
fuseaux horaires des différents ministères.
J'ai parlé, au début de mon intervention, d'assurance de
qualité des services. L'assurance de qualité est le thème
4 de nos préoccupations de base. À l'article 242, il est dit au
sujet de la régie régionale, et je cite: "élaborer et
mettre en oeuvre, conformément aux directives du ministre, un programme
d'évaluation de la qualité des services offerts par les
établissements;" Nous nous demandons si cela suppose que les
régies régionales se doteront d'une structure de contrôle
de la qualité des services. Nous vous proposons, pour assurer cette
surveillance, un programme "assurance de la qualité*. Ses objectifs,
principalement, seraient: favoriser l'autonomie et l'indépendance de la
personne, admettre la représentation de la personne et permettre la
surveillance de la qualité des services par le biais d'un système
qu'on appelle d'intercession, qui est peut-être plus connu sous le terme
"advocacy". Nous croyons qu'il est essentiel que le système de services
soit doté d'un mécanisme formel permettant l'atteinte des
objectifs fixés. Le système doit s'assurer qu'il est
cohérent avec les besoins des personnes.
Je passe la parole maintenant à Mme Salois.
Mme Salois (Bernadette): Le privé à but lucratif.
Dans notre mémoire présenté à l'automne 1976 au
premier ministre du Québec, nous disions: II existe au Québec
plusieurs services pour personnes déficientes intellectuelles
administres par des entreprises ou corporations à but lucratif. La
majeure partie de ces services sont institutionnels. L'Association du
Québec pour l'intégration sociale s'oppose formellement au fait
qu'une entreprise puisse tirer des profits à cause de la
déficience et des handicaps d'une partie de la population. Nous ne
voulons pas juger les personnes responsables de ces corporations, mais nous
condamnons ce genre d'établissement.
Permettez-moi d'ouvrir une parenthèse pour vous citer un exemple
qui illustre bien ce genre d'entreprise: le pavillon Saint-Théophile,
situé à Laval-Ouest, près de Montréal, où
vivaient 88 adultes handicapés intellectuels, dont mon fils Gilles. Ce
centre d'accueil a fait l'objet d'une enquête publique par la Commission
des droits de la personne sur l'exploitation des bénéficiaires et
sur la qualité de vie. Cette enquête vient de se terminer
après 74 jours d'audition. D'après les témoignages
entendus, il nous apparaît clairement que ces 88 personnes ont
été exploitées et abusées durant de nombreuses
années.
Si nos renseignements sont exacts, au 31 mars 1988, il restait encore
cinq centres privés conventionnés à but lucratif, recevant
401 personnes. En 1987-1988, un budget d'au moins 15 000 000 $ a
été réparti entre ces institutions, ce qui
représente 37 640 $ par personne, annuellement. Nous ne pouvons
réconcilier les notions
de réadaptation, d'intégration sociale et de
valorisation des rôles sociaux avec la notion de profit. Nous croyons
qu'à court terme le gouvernement devrait s'approprier ces centres et
confier leur gestion a des organismes régionaux de type parapubllc, et
ce, pour le plus grand bien des personnes desservies et pour une utilisation
Judicieuse et plus rationnelle de nos ressources.
Il va de soi que l'AQIS s'oppose à ce que le MAS
confie à ces institutions privées des mandats de
développer des services dits communautaires, ce qui équivaudrait
à consolider leur emprise tout en nuisant au développement de
réseaux intégrés de services. Nous demandons donc
l'abolition du secteur privé à but lucratif dans le domaine des
services aux personnes déficientes intellectuelles et l'encouragement au
secteur privé à but non lucratif dans son rôle de
complémentarité au réseau de services.
Notre premier mémoire date de 1976. Quatorze
années plus tard, nous réécrivons ces mêmes mots:
Quand le gouvernement du Québec statuera-t-il sur l'arrêt de
l'exploitation basée sur la déficience intellectuelle?
Durant les deux dernières décennies, les
revendications de notre mouvement ont systématiquement été
formulées dans le sens d'une reconnaissance pleine et entière de
la personne ayant une déficience intellectuelle et demandait à
l'État québécois, via son ministère de la
Santé et des Services sociaux, de réorganiser les services
offerts aux personnes et aux familles sur les bases d'un système de
services intégrés à la communauté. Nous nous
permettons d'en rappeler les principaux jalons.
Dans notre mémoire présenté à
l'automne 1976, nous disions: Si nous avons un reproche à faire au
gouvernement, c'est celui de ne pas concevoir la déficience mentale
comme un problème global qui part de la naissance de la personne et
continue jusqu'à sa mort. C'est une problématique qui touche
l'individu, sa famille, sa collectivité immédiate et la
société en général. Toutes les solutions à
ce problème sont interdépendantes, ce qui veut dire, en fait, que
la politique d'un gouvernement doit absolument être une politique
d'ensemble.
Au printemps 1977, le gouvernement du Québec
publiait un livre blanc, "Proposition de politique à l'égard des
personnes handicapées", où nous retrouvions dans la
préface: "À une époque où l'on parie de plus en
plus de l'égalité des chances pour tous, il est un groupe dont
les conditions de vie actuelles sont devenues intolérables. La
société québécoise vient de prendre conscience de
la situation des personnes handicapées et, notamment, des adultes
handicapés. "
Quatre ans plus tard, en décembre 1981, au nom du
gouvernement, M. Denis Lazure annonçait que: "De plus, par
l'intermédiaire de l'Office des personnes handicapées, nous
élaborons en ce moment une politique d'ensemble à l'égard
des personnes handicapées qui permettra une meilleure coordination des
services que nous assumons déjà. "
Il faut attendre 1984 pour se réjouir de la
divulgation de la politique d'ensemble "À part... égale", par
laquelle la communauté est nettement identifiée comme lieu de vie
de la personne ayant une déficience intellectuelle et où il est
clarifié les nécessités de concertation, de
continuité et de complémentarité.
En 1986, la ministre de la Santé et des Services
sociaux, Mme Thérèse Lavoie-Roux, réitérait "la
volonté du ministre de favoriser davantage l'intégration des
personnes présentant une déficience intellectuelle et de
réaliser leur intégration sociale. " les deux dernières
années ont été très fertiles en
événements au niveau des services sociaux et des services de
santé. nous retenons trois de ces événements: la
publication, au printemps 1988, de la position officielle du gouvernement du
québec, "l'intégration des personnes présentant une
déficience intellectuelle, un impératif humain et social,
orientations et guide d'action", appelé le "livre vert"; le
dévoilement, au printemps 1989, du document intitulé "pour
améliorer la santé et le bien-être au québec,
orientations" qui expose les modifications que l'état entend apporter au
système et, enfin, la présentation, à l'automne 1989, de
l'avant-projet de loi. loi sur les services de santé et les services
sociaux. (10 h 30)
On peut lire, au préambule du livre vert:
"L'intégration sociale des personnes présentant une
déficience intellectuelle est un impératif humain et social.
Cette affirmation, qui constituait le message principal des orientations que
j'annonçais il y a deux ans, demeure encore aujourd'hui et pour les
prochaines années un objectif prioritaire pour le ministère de la
Santé et des Services sociaux. À la demande des personnes
elles-mêmes et de leur famille, le ministère a été
invité à leur reconnaître, dans les faits, l'accès
à la même qualité de vie et aux mêmes
prérogatives dont bénéficie la majorité des gens.
Nous avons voulu, dans ce document, considérer la personne non seulement
comme un bénéficiaire de services, mais surtout comme le
véritable responsable et principal artisan de son projet de vie,
même s'il devra requérir l'appui de son entourage dans certaines
circonstances. "
Je passe la parole à Mme Madeleine Girard.
Le Président (M. Joly): Madame, je vous laisse
déborder là, mais vous réalisez que ça laisse
beaucoup moins de temps pour les questions.
Mme Girard: D'accord, il reste juste quelques minutes.
Le Préskient (M. Joly): Merci.
Mme Girard: Dans le document "Orientations", nous pouvons lire
que: "Les orientations pour l'intégration des personnes
présentant une déficience intellectuelle sont venues
récemment confirmer et étayer la perspective de
réinsertion sociale adoptée par le ministère. Cette
perspective sera maintenue."
L'avant-projet de loi sur les services de santé et les services
sociaux doit s'inscrire dans la foulée des décisions qui a
jalonné la démarche visant à la libération des
personnes ayant une déficience intellectuelle des fardeaux de
l'exclusion sociale et de la dévalorisation. Les propositions que nous
avons présentées dans ce mémoire vont dans ce sens, et
nous prenons pour acquis que l'actuel titulaire du ministère saura nous
confirmer formellement que l'avant-projet de loi servira de nouveaux
jalons.
Nous avons une double attente à l'égard du ministre
actuel: d'une part, nous nous attendons à le voir formellement
reconfirmer la volonté politique du gouvernement de poursuivre la
reconnaissance pleine et entière de la personne ayant une
déficience intellectuelle et la réorganisation des services sur
les bases d'un système de services intégrés à la
communauté; d'autre part, nous nous attentons à le voir s'engager
à prendre les moyens nécessaires pour en arriver le plus
rapidement possible à rétablir l'équilibre entre les
budgets programmes de son ministère afin de rendre justice au
financement des services en déficience intellectuelle.
L'engagement de l'État québécois envers
l'obligation collective de reconnaître les personnes ayant une
déficience intellectuelle dans leur statut de concitoyens et
concitoyennes à part entière sans discrimination basée sur
la différence doit se traduire dans des lois préservant les
acquis et complétant les mécanismes d'action, tout en
étant appuyé du rajustement des ressources financières
nécessaires et d'une nette emphase sur la formation des personnes. C'est
une partie qui est très importante, je pense, la formation du personnel.
Peut-être commencerons-nous enfin à récolter dans nos vies
quotidiennes, avec nos fils et nos filles, les fruits de notre
ténacité. Permettez-moi de vous dire qu'on en a, de la
ténacité, parce que, quand on est parents de handicapés,
de leur naissance aller jusqu'à leur mort, il faut 25
téléphones avant d'être capables d'avoir des services. Je
vous remercie.
Le Président (M. Joly): Merci, mesdames et monsieur. Je
vais maintenant reconnaître M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Nous sommes très heureux de vous recevoir. Je pense
que nous en sommes à un exercice qui, dans deux semaines, sera
terminé. C'est un exercice qui nous semble, assis après 140
mémoires et encore une cinquantaine à venir, à l'occasion
fastidieux, long et répétitif. Mais, ce matin, ce n'est pas le
cas, compte tenu du fait que nous abordons un sujet qui n'a pas
été abordé de manière - formelle en commission
parlementaire. Il faut bien situer que nous sommes dans un processus donc
d'échanges et d'emmagasinage d'un certain nombre de réflexions de
la part des intervenants qui, quant à eux, se prononcent sur
"Orientations" déposé par Mme Lavoie-Roux, tel que madame le
disait tantôt, aussi un avant-projet de loi qui, forcément, n'est
pas pariait, on l'a dit en cours d'exercice, et mérite d'être
bonifié à la lumière des interventions de chacun des
groupes qui veulent bien se faire entendre à cette commission. Donc,
c'est dans cette perspective-là, ce matin, que nous entamerons la
discussion avec vous, tentant de bonifier notre perception de la situation
réelle et de mettre le focus sur les véritables enjeux, et faire
en sorte qu'effectivement on réussisse à faire en sorte que le
bénéficiaire soit véritablement celui qui soit l'objet de
la réforme et que tous nos efforts soient canalisés en fonction
de ce que nous devons donner au bénéficiaire et que, par
l'ensemble des intervenants, au lieu de faire en sorte que, comme aujourd'hui,
le bénéficiaire soit l'objet d'un établissement, soit
l'objet d'un professionnel de la santé, pour une fois, que l'objet soit
le professionnel de la santé ou rétablissement au service du
bénéficiaire. Évidemment, là, on s'est dit cela
entre nous autres. Vous avez exactement la même Idée que nous
autres. L'Opposition partage notre idée aussi, mais ça, ça
demeure dans le domaine du théorique. C'est dans la pratique qu'on va
voir si on a atteint notre but et qu'il faut faire des changements
extrêmement importants de mentalité, en particulier de la part de
ceux qui dispensent les services, de ceux qui organisent les services, et
ça, ça m'apparaît être le virage là où
on est le plus interpellés et ce n'est pas différent ce matin,
dans votre présentation, pour une clientèle plus
spécifique.
Les lignes de force de votre présentation de votre
mémoire, moi, je les perçois comme une volonté de tout
mettre en oeuvre pour la qualité des services dispensés. On voit
ça par, d'abord, l'insistance sur la formation, on voit ça par
une inquiétude de ce qui se passe dans certains établissements
privés par rapport aux coûts, par rapport au public et par rapport
à leur mission, par rapport aux plans de services, par rapport à
l'interrelation dans les différents ministères.
Évidemment, votre préoccupation, bon, on dit: Pour une fois,
n'agissez pas uniquement en ministère de la Santé et des Services
sociaux mais en gouvernement, en tentant de faire en sorte que tout le monde
soit concerné par le cas qui est soulevé ce matin.
Je commencerais par la formation. Si on n'a pas de formation, ça
risque d'atteindre éventuellement la qualité. Il me paraît
y avoir un lien
assez important. Ce n'est pas parce que les gens ne sont pas de bonne
foi. Mais ce qui m'a accroché dans votre présentation, ce n'est
pas uniquement formation adéquate, c'est formation continue. Alors,
j'aimerais vous entendre davantage. Dans des domaines spécifiques,
ça veut dire quoi, demain par rapport a aujourd'hui, lorsqu'on parle de
formation continue? Parce que c'est un élément très
important. Tantôt, si on veut faire valider la qualité de la
dispensation des services, il faut donc qu'on se parie de formation et de
formation continue, tel que vous le souhaitez. Dans votre esprit, illustrez-moi
ça d'un exemple dans votre domaine. Illustrez-moi ça d'un
exemple.
Mme Savard: alors, moi, je peux vous donner l'exemple des plans
individualisés. pour nous, parents, ce n'est pas nouveau mais, pour les
intervenants, c'est très nouveau.:
M. Côté (Charlesbourg): Les intervenants, c'est
qui?
Mme Savard: Les intervenants de première ligne. J'ai
demandé pour mon fils, dans la région de Hull, un plan de
services individualisés. Alors, je sais que le centre qui est
responsable de donner les services aux personnes déficientes dans la
région 07 a fait la formation de ses personnels sur les valeurs. Nous,
on demande des services de qualité et c'est basé sur des valeurs
que nos fils et nos filles aient les mêmes droits que quiconque. Je veux
dire qu'on ne veut pas non plus les materner ou les paterner, en ce sens que,
la dignité, ça existe aussi pour nos fils et nos filles. Alors,
c'est tout un changement qu'on demande aux intervenants mais il faut que dans
leur formation... C'est à partir des valeurs aussi que leur formation
doit leur être donnée. Alors, pour qu'un plan individualisé
réponde aux attentes des personnes et de leur famille, il faut qu'on ait
un langage commun, qu'on sache de quoi on parie. SI on parle en fonction des
mêmes valeurs, bien, disons qu'on aura moins de difficultés
à répondre aux besoins des personnes. C'est un exemple.
M. Côté (Charlesbourg): Mais, à ce
moment-là, ce n'est pas nécessairement une formation qui est
dispensée dans les universités ou dans les cégeps, parce
que ça, c'est théorique, c'est une formation théorique.
Dieu sait le décalage qui peut exister entre la formation
théorique à peu près dans tous les domaines... Un
économiste qui sort de l'université et qui tombe à
travailler dans l'économie, il a les surprises de sa vie. Un historien
qui va à l'université et qui, quand il sort de là, se
retrouve à donner un cours, il est obligé de revoir des livres
parce qu'il lui en manque de bons bouts. Donc, c'est le même
phénomène dans ces cas-ci.
Comment est-ce qu'on fait... Ce n'est pas une question pour vous
embêter, mais pour tenter de trouver des mécanismes pour s'assurer
que cette formation continue et adaptée à la clientèle
spécifique, comment est-ce qu'on fait pour le faire?
Mme Savard: Moi, je pense que ça doit être en lien
avec les institutions qui font la formation ou de l'enseignement aussi. Un
système de formation continue peut être en lien avec les
organismes qui donnent cette formation.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que ce n'est pas
davantage par des stages, des stages pratiques qu'on réussira à
faire cette formation continue qui, forcément, quand on parle de
formation continue, va évoluer avec le temps, avec les
mentalités, avec les méthodes. À partir de ça, ce
sont des ressources qui sont là et qui doivent être
libérées un certain nombre de temps ou d'heures pour faire cette
formation-là. J'Imagine que c'est ça que vous visez.
Mme Savard: Je veux juste ajouter un petit commentaire, puis je
vais passer... Je ne sais pas s'il y a d'autres de mes collègues ici qui
veulent ajouter. Vous dites que le plus grand défi, ce sont les
intervenants, dans un sens, pour permettre cette réforme. Les
intervenants veulent le bien des personnes - il n'y a personne qui veut le mal
de ces personnes-là - sauf que la façon de faire auprès de
la personne est très influencée par les valeurs et la philosophie
de base. La grande majorité de nos intervenants n'ont pas reçu
cette formation en fonction de ces valeurs. Ce sera d'autant plus difficile
pour eux de faire en sorte que ce soit des services dans la
communauté.
M. Côté (Charlesbourg): C'est un échange qui
est très intéressant, on n'a pas eu la chance d'en avoir un
semblable. Je vais très loin dans mes propos pour tenter de
découvrir des pistes et des choses intéressantes.
Est-ce que vous diriez que le communautaire est peut-être
davantage près de cette mentalité recherchée que ne le
sont les professionnels?
Mme Girard: Je pense que le communautaire est très
près, d'autant plus que si on parle de nos associations, ce sont des
associations de parents. Je pense que quand on parie de nos fils et de nos
filles, et même ceux qui n'ont pas de parents, on connaît leurs
besoins Quand on parle de formation continue, je pense que la formation est
importante. Je ne veux pas répéter ce que disait Colette
tantôt, mais, si les personnes qui travaillent auprès de nos fils
et de nos filles n'ont pas des valeurs, ou si leur attitude n'est pas bonne...
Au départ, je pense que c'est un gros bon sens que ça leur
prend.
M. Côté (Charlesbourg): Mais puisque vous le
soulevez, est-ce que vous iriez jusqu'à dire que c'est le cas
maintenant? Ce serait inquiétant, si c'était le cas. Je sais que
c'est une question qui peut être embarrassante pour vous...
Mme Girard: C'est le cas maintenant, dans le moment. On retrouve
dans beaucoup de services, qui sont dans la communauté, des personnes,
des intervenants qui ont travaillé en institution, qui ont
commencé par travailler soit dans les buanderies, dans les cuisines ou
à des travaux lourds, pour faire le ménage, puis se sont
retrouvés avec les personnes et ils n'ont pas du tout l'attitude, ils
n'ont pas du tout de valeurs. Je dois dire que pour les personnes ce n'est
pas...
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends maintenant
davantage vos inquiétudes, surtout en relation avec ce que vous appelez
l'assurance-qualité. Je ne le comprenais pas au début. Tout le
monde parie de qualité de dispensation des soins, de vérification
des plaintes, de mécanismes pour bien s'assurer qu'il y ait une
qualité de dispensation de services. En levant le voile sur certains
faits un peu plus précis, votre inquiétude, c'est que, dans la
mesure où on poursuit dans la veine dont on parie, il y a des gens qui,
forcément, de par une sécurité d'emploi, se retrouvent
dans des postes qu'autrement ils n'auraient pas occupés si on
s'était davantage préoccupé de la qualité du
service à dispenser et de la formation de base nécessaire pour
dispenser ce service-là. (10 h 45)
Mme Girard: Je pense qu'on sait très bien, M.
Côté - je ne sais pas si tout le monde est au courant ici - que
les personnes qui se sont retrouvées à travailler auprès
des personnes qui étaient en institution ou en centre d'accueil sont des
personnes qui travaillaient dans le voisinage du centre d'accueil ou de
l'hôpital, ce qui ne veut pas dire que c'étaient les personnes qui
étaient les mieux adaptées pour travailler auprès de nos
personnes. Ça, je pense que ça nous cause beaucoup
d'inquiétude.
M. Côté (Charlesbourg): Je le comprends mieux pour
avoir suivi un cas, récemment, qui risque de revenir sur la place
publique, quant à l'évaluation des capacités du personnel.
Évidemment, quand on dit que le système est prisonnier
d'intérêts particuliers - on a parlé des médecins,
on parie aussi des syndicats, à l'occasion. Mais il y a un cas qui est
sur la place publique, au moment où on se parie, où il y a des
intérêts de syndicat, donc, de protéger l'emploi de
quelqu'un qui, selon l'évaluation de spécialistes, n'ont pas la
compétence pour effectuer le travail qu'on voudrait leur confier. Par
conséquent: qualité de la dispensation du service pour un des
bénéficiaires qui en a besoin. Je comprends un petit peu mieux,
mais le président m'a signifié qu'il ne-me restait pas
grand-temps.
Je souhaiterais avoir un petit peu plus d'informations de votre part, si
c'était possible, sur le mécanisme d'assurance-qualité,
parce qu'on dit: Bon, parfait, on va décentraliser, on va
régionaliser, mais ça n'empêche pas, sur le plan
régional, d'avoir une assurance-qualité. On sait que, dans la
mesure où on va jusqu'au bout - et on est capables d'y aller - ce sera
donc par programmes, avec des objectifs par programmes. Donc, ça va
protéger des budgets en fonction d'objectifs réels à
atteindre et ça, ça en est un élément, d'être
capable de mesurer la qualité. Mais probablement que, dans votre esprit,
ça devrait aller beaucoup plus loin que ça, et j'aimerais vous
entendre là-dessus.
M. Turgeon (Jacques): Oui. Je pense que, d'abord et avant tout,
c'est le mécanisme de contrôle qui est primordial pour assurer une
certaine qualité. Un établissement aura beau avoir des
barèmes, des critères, des normes de qualité,
d'efficacité, d'efficience, si les personnes qui évaluent
l'atteinte, le respect de ces normes sont partie prenante à la gestion
du réseau, d'une façon ou d'une autre. Nous, on craint que des
intérêts, je dirais, corporatifs, dans le sens large du terme, se
révèlent. D'ailleurs, actuellement, c'est malheureusement le cas;
parfois, il peut y avoir des intérêts communs qui se dessinent
entre un fonctionnaire - je dis ça théoriquement, je ne peux pas
nommer de cas précis - entre, par exemple, une instance
régionale, un établissement, voire même des gens qui
interviennent au niveau du ministère central. Nous, on pense que la
meilleure assurance qu'il ne peut pas y avoir, en fait, même, ce qui
pourrait constituer une espèce de stimulation pour les
établissements à respecter un niveau minimum de qualité et
même à aller vers l'excellence, ce serait un mécanisme de
contrôle extérieur, externe, entre les mains de gens qui
n'auraient aucune contrainte de vérification. Ça pourrait
s'articuler tantôt au niveau provincial, régional, mais on est
à étudier, d'ailleurs, une formule où... On a fait une
table ronde de plusieurs présidents d'organismes de protection et on
s'en va vers une formule, c'est une option, où il pourrait y avoir un
plan d'ensemble dans lequel s'inséreraient des organismes,
c'est-à-dire dans lequel agiraient des organismes qui assumeraient le
contrôle, localement, régionale-ment, mais dans le cadre d'un plan
d'ensemble. Je ne sais pas si ça répond à votre question,
M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. C'est parce que le
président me signale que j'ai déjà passé amplement
mon temps, alors, je suis obligé de me taire. Ça répond,
mais, si j'ai besoin d'informations additionnelles...
M. Turgeon: Oui, on est prêts à se mettre en
relation directe avec...
M. Côté (Charlesbourg): Comme on s'est
déjà parlé, on continuera de taire de môme.
M. Turgeon: Oui, oui, oui.
Mme Savard: Je peux peut-être ajouter que notre bras
technique... Tout à l'heure, on a parlé du bras technique, bien,
le bras technique a un instrument qu'il est en train d'expérimenter.
M. Turgeon: On a fait déjà une couple
d'expériences-pilotes et on s'apprête à élargir le
champ d'expérimentation.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je vais
maintenant reconnaître M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, aussi critique, pour sa formation, en
matière d'affaires sociales.
M. Trudel: Merci beaucoup, M. le Président. À mon
tour, rapidement, parce que votre mémoire est tellement dense et il y a
tellement de bonnes pistes qui nous sont fournies qu'il faut essayer d'y voir
le plus clair possible. Pendant cette consultation, il y a un certain nombre de
choses qui sont des redites, au niveau de cette commission, mais, ce matin, il
y a vraiment un genre de piste, en particulier pour des clientèles, pour
des personnes qui nous semblent, en tout cas, particulièrement
vulnérables dans le système. Vous avez des propositions qui sont
extrêmement claires en termes de bonification au niveau de la
réécriture complète de ce projet de loi tel que l'a
énoncé le ministre, il y a maintenant quelques semaines. Pour ma
part, parce que le député de La Prairie aura aussi un bon nombre
de questions, je vais me limiter à une seule question en poursuivant sur
la voie du ministre au niveau de cette assurance qualité.
Je pense que vous avez d'abord une réflexion, je pense que vous
avez bien raison de dire qu'il faut absolument bonifier dans cette
réorganisation des services toute la question de la protection et de
l'exercice des droits, en particulier pour les personnes les plus
démunies et qui sont faibles dans le système.
Est-ce que vous pensez que ce mécanisme de type externe à
mettre sur pied en termes de définition ne pourrait pas être, par
exemple, rattaché à la fonction de protection du citoyen ou des
responsabilités du Protecteur du citoyen au Québec? Dans le sens
suivant, il faut que ce soit, bien sûr, le plus proche des
bénéficiaires et des victimes potentielles, entre guillemets.
Mais comme vous dites, ça doit être un mécanisme qui a des
assises légales et des assises sociales. Est-ce que vous pensez que nous
pourrions nous donner les mécanismes de plainte et d'exercice des droits
à travers la fonction du Protecteur du citoyen, pour ce mécanisme
externe aux régies régionales ou aux organismes chargés
d'administrer dans le système?
M. Turgeon: Je vous disais tout à l'heure que nous avons
formé une table ronde de réflexion à ce sujet, table ronde
autour de laquelle se retrouvent le président de l'Office des personnes
handicapées, la directrice de la curatelle publique, de même que
l'ombudsman. C'est sur la table actuellement. Il y a une opinion qui est en
train de prendre forme. À l'origine de nos discussions, effectivement,
on croyait que ce qu'on appelle les porte-parole des
bénéficiaires dans les établissements, qui portent le nom
commun d'ombudsman d'établissement, pourraient peut-être, de
façon à garantir leur autonomie d'action, être
rattachés à l'ombudsman, au Protecteur du citoyen. C'est une
avenue; on n'est pas encore positionné de façon définitive
là-dessus. Je ne voudrais pas justement faire des conclusions avant que
le comité ait terminé ses travaux. On doit faire le point
là-dessus au mois de juin, mais on doit vous avouer que c'est une avenue
sérieuse qu'on examine.
On examine également une autre avenue qui est celle d'associer et
de donner une autonomie d'action, d'examen au comité de
bénéficiaires des établissements, mais en association
étroite, puisqu'on parle d'amener les gens, de réinsérer
les gens dans leur communauté, il faut aussi que ce ne soit pas
uniquement un mécanisme qui existe à l'intérieur des
quatre murs d'un établissement. Il faut qu'il y ait une espèce de
sortie vers la communauté, une association vers les organismes
communautaires. Pour notre part, on pense que nos organismes locaux pourraient
servir de tête de pont à ce genre d'association-là, une
espèce, pas une fusion, mais une espèce d'entente très
intime entre le comité de bénéficiaires et les
associations locales. Cependant, on a découvert, constaté que les
comités de bénéficiaires sont isolés, et,
très tôt, on verrait poindre à l'horizon le besoin de
regroupement pour se donner des services centraux pour mieux analyser les
situations.
Je vois le ministre: Encore une structure qui pointe à l'horizon!
Nous, on se dit: Pourquoi en créer d'autres, puisqu'on veut aller vers
la communauté? Et on pense que des organismes majeurs - on se
considère majeur - et aussi le Comité provincial des malades,
pourraient, avec leur expertise, définir une espèce de protocole
d'intervention, qui pourrait être administré localement par des
groupes locaux.
M. Trudel: Très bien. Juste une toute petite remarque, au
niveau du texte, à la page 28, sur ce mécanisme. Vous recommandez
de modifier l'article 234, quant aux responsabilités des régies
régionales, et vous suggérez: "que soit rajouté au
présent alinéa 6 "via un mécanisme d'évaluation de
la qualité des services"." Vous voulez dire un
mécanisme externe d'évaluation? M. Turgeon:
Oui.
M. Trudel: 11 faudrait peut-être le noter, si les gens au
ministère regardent ça de près, c'est un mécanisme
externe d'évaluation. Là-dessus, M. le
Président...
M. Turgeon: Si je peux me permettre une image, il faudrait
s'inventer une espèce de Croix-Rouge des services de santé. Ils
peuvent entrer partout eux. Il n'y a pas d'endroit où ils ne peuvent pas
entrer. Et le seul fait qu'on refuse l'entrée à un inspecteur de
la Croix-Rouge, c'est qu'on a de quoi à cacher. Nous, on pense qu'on
pourrait avoir à peu près le même genre de formule.
M. Trudel: Merci.
Le Président (M. Joly): Je vais maintenant
reconnaître M. le député de LaPrairie.
M. Lazure: Je veux féliciter l'Association pour son
mémoire, leurs interventions. Il reste très peu de temps,
malheureusement. J'avais plusieurs questions et des commentaires. Je partage
votre position quand vous dites: "Nous avons une double attente à
l'égard du ministre actuel", les budgets-programmes. Je poserais la
question... Et sur un autre point aussi, je partage entièrement, nous
partageons entièrement votre position, à savoir sur l'abolition
des centres d'accueil pour déficients intellectuels à but
lucratif. J'aimerais poser la question au ministre, est-ce qu'il est d'accord
pour cette abolition là?
M. Côté (Charlesbourg): C'est un point que je n'ai
pas relevé, je gardais ça pour ma conclusion, compte tenu du
double défi. On est dans une situation où, effectivement, on va
vers ça. On me signale que ce ne sont pas nécessairement les cinq
qui donnent des services de la même qualité et qu'il y en a,
à tout le moins, un qui est même très, très bon sur
le plan des services qu'on dispense, donc, il faut faire attention. En
principe, dans l'évaluation des coûts, si, effectivement, le
privé coûte aussi cher ou plus cher que le public ou le
parapublic, il y a des questions qu'on doit se poser. On va l'examiner de
très près. C'est d'abord et avant tout la qualité de la
dispensation des soins aux bénéficiaires qui est importante.
M. Lazure: On pourrait prendre leçon de
l'expérience qui avait été faite en 1977, lorsque nous
avions acheté un grand nombre d'institutions privées à but
lucratif, qui faisaient de l'exploitation comme les gens de l'Association
viennent de nous l'expliquer. Dans les deux minutes qui restent, je voudrais
aussi faire un commentaire sur les budgets protégés. Nous
partageons... Moi, je crois que, parmi l'ensemble des handicapés mentaux
ou physiques, les déficients intellectuels sont peut-être parmi
ceux et celles qui ont été les plus négligés de
toutes les personnes handicapées. Pour une période de rattrapage,
à tout le moins, la formule du budget protégé,
région par région, me paraît une bonne formule.
Maintenant, est-ce qu'on peut espérer qu'il y aura de l'argent
nouveau pour ces programmes-là? Depuis hier, avec les commentaires du
collègue du ministre de la Santé, le président du Conseil
du trésor, qui remet en question la gratuité des soins, qui parie
d'un ticket modérateur, qui dit: "La gratuité des soins nous
mène vers la pauvreté." Évidemment, l'Opposition
officielle n'est absolument pas d'accord avec ce genre de commentaires, que la
gratuité des soins mène à la pauvreté. La
gratuité des soins, depuis plusieurs années, au contraire,
ça va de pair avec la prospérité économique. Nous
pensons que le ministre de la Santé aura un gros boulot, parce que... il
a reçu l'avertissement de son collègue, M. Johnson a lancé
un message clair à son collègue Marc-Yvan Côté: "Si
M. Côté ressort de la présente commission parlementaire,
notre commission, en recommandant l'ajout de fonds nouveaux, il devra aller se
rhabiller." Il n'est pas encore déshabillé...
M. Côté (Charlesbourg): Je peux vous dire que je
suis déjà habillé.
M. Lazure: ...puis on espère qu'il ne se laissera pas
déshabiller par son collègue, le président du Conseil du
trésor, parce que les demandes que vous faites, ça va demander de
l'argent nouveau, ça. Quand Madame dit, et j'ai pris la citation au tout
début: "J'attends encore les services pour mon fils adulte, mon fils
adulte qui est rendu à domicile". Elle attend encore les services,
qu'elle nous dit, pour son fils qui a passé plusieurs années en
institution. Mais on le sait qu'il y a des listes d'attente énormes pour
l'aide à domicile des personnes handicapées, on le sait,
ça. Il me semble que le gouvernement actuel devrait, au moins pour
certaines clientèles, comme les personnes handicapées
intellectuellement, qui ont encore besoin d'une période de rattrapage,
devrait faire des efforts supplémentaires.
Nous, l'Opposition officielle, nous partageons l'opinion de
l'Association. J'ai peut-être une dernière question ou
avant-dernière au ministre. Les gens de l'Association ont fait allusion
au comité conjoint MASS-MEQ, c'est un comité qui a
été créé pour améliorer les relations et les
services qui touchent les deux ministères, qu'en est-il de ce
comité? Est-ce qu'il est actif? Et surtout en fonction de
l'intégration des enfants handicapés intellectuellement aux
écoles régulières et aux classes régu-
Hères, est-ce que les travaux de ce comité conjoint sont
satisfaisants? (11 heures)
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, j'ai
eu l'opportunité, quant à moi, d'avoir une première
rencontre avec l'Association qui est devant nous ce matin, il y a deux
mois...
M. Turgeon: Moins que ça.
M. Côté (Charlesbourg): Un mois?
M. Turgeon: Un mois et demi.
M. Côté (Charlesbourg): Un mois et demi. Ils nous
ont soulevé, à l'occasion de signatures de protocoles d'entente,
certains points relativement à certains messages à passer
à l'Éducation. Je sais qu'ils ont eux-mêmes
été reçus, il y a quelques jours à peine, je pense,
ou quelques semaines, par...
M. Turgeon: Deux, trois... Trois semaines.
M. Côté (Charlesbourg): Deux, trois semaines par M.
Ryan, sur le plan des discussions. Quant à nous, avec l'entremise de
l'OPHQ, il y a des rencontres très, très, très intenses au
moment où nous nous parlons pour tenter de finaliser un certain nombre
de dossiers. Encore aujourd'hui, il y a des rencontres entre les hauts
fonctionnaires pour tenter de solutionner certains dossiers. J'espère
qu'on va aboutir très rapidement. Il y a, effectivement, beaucoup
d'échanges à ce moment-ci et on tente d'en régler le plus
possible. C'est actif.
M. Lazure: Je voudrais peut-être attirer l'attention du
ministre sur un problème particulier, et l'Association pourrait nous en
parler aussi, je suis sûr. Dans les réglons, et dans ma
région, la Montérégie, par exemple, il y a encore,
après plusieurs années de tentative d'intégration... Et
c'est la politique officielle du ministère de l'Éducation
d'intégrer les enfants handicapés intellectuellement aux classes
régulières autant que possible ou, au moins, aux écoles
régulières. Mais il y a encore des douzaines et des douzaines
d'enfants qui sont transportés de la Montérégie vers
Montréal, chaque jour. Ça n'a pas sa raison d'être. Vous
parliez tantôt de décalage pour le transport. Il y en a une qui a
fait mention des problèmes de transport. Il y a de gros
problèmes, parce que les commissions scolaires - c'est là,
l'importance du comité MAS-MEQ - il y a encore des commissions scolaires
qui n'assument pas leurs responsabilités, qui ne fournissent pas les
services aux enfants handicapés intellectuellement.
M. Côté (Charlesbourg): Ce n'est pas seulement en
Montérégie. Je pourrais vous nommer d'autres cas, d'autres
commissions scolaires, où il y a des problèmes. Il s'agit de
faire du bureau de comté pour en recevoir dans chacun de nos milieux.
J'en ai reçu chez nous, moi-même, des personnes qui sont
intervenues pour davantage nous sensibiliser. Il y a, au niveau de certaines
commissions scolaires - ce n'est pas le lot - .certains retards, même
certaines résistances. C'est là-dessus qu'il faut continuer de
travailler, davantage avec la persuasion que la coercition, parce que la
coercition ne donnera pas nécessairement la qualité qu'on
souhaite avoir.
Dans ce sens-là, en terminant, peut-être pour remercier les
gens qui se sont présentés ce matin, quant au double défi,
je dois vous dire qu'à ce moment-ci il n'y a rien de changé sur
les orientations que le ministère a prises. Évidemment, comme on
est en commission parlementaire pour entendre et pour analyser un certain
nombre de choses, il y a des décisions qui seront à prendre chez
nous. Je partage très largement les points de vue que vous avez
exprimés ce matin, qu'on devrait retrouver renforcés dans la
réforme et au niveau du projet de loi éventuellement. Si je vous
donnais la réponse finale ce matin, on aurait juste à mettre fin
aux travaux de la commission et s'en aller travailler. Donc, on va continuer le
processus, et vous verrez, lorsque le projet de loi sera déposé
et la réforme elle-même, qu'il y aura des choses à ce
niveau-là.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. A mon tour,
au nom des membres de cette commission, je tiens à vous remercier. Bon
retour dans chacune de vos régions respectives, spécialement
à Mme Girard de Laval. Au plaisir, madame.
Mme Girard: Je tiens à remercier tout le monde. Et s'il y
a des questions qui sont sans réponse: à l'Association, on est
toujours disponibles pour répondre à vos questions.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup.
Je demanderais maintenant aux gens représentant l'Alliance des
communautés culturelles pour l'égalité dans la
santé et les services sociaux inc. de bien vouloir s'avancer, s'il vous
plaît.
Bonjour et bienvenue à cette commissionl J'apprécierais
que la personne responsable du mouvement, du groupe se présente et aussi
identifie les gens qui l'accompagnent. S'il vous plaît.
Alliance des communautés culturelles pour
l'égalité dans la santé et les services sociaux
Mme Soave (Luciana): C'est Luciana Soave. Je suis
présidente d'ACCESSS. ACCESSS est une fédération qui
regroupe actuellement 42 orga-
nismes offrant des services aux communautés culturelles, plus des
membres affiliés ou associés. Je présente les autres
membres de la table. À ma gauche, c'est la secrétaire du conseil
d'administration, Mme Thérèse Amoni; à ma droite, M.
Pascual Delgado, qui est un des fondateurs d'ACCESSS, et Mme Nancy William, qui
est la coordonnatrice d'ACCESSS.
Le Président (M. Joly): Madame, vous connaissez la
procédure. Vous êtes une habituée. Alors vous avez une
vingtaine de minutes pour nous livrer votre réflexion et, par
après, les membres de cette commission se réservent le
privilège de vous poser quelques questions.
Mme Soave: On va chercher à faire moins de 20 minutes pour
laisser plus de temps au débat.
Le Président (M. Joly): Plus de temps pour
l'échange, madame.
Mme Soave: On aime plus échanger. On a envoyé le
mémoire; j'imagine ou j'espère que tout le monde en a pris
connaissance.
Je ne veux pas, donc, m'attarder aux détails. Ce qui est quand
même important, on va y revenir après au cours de la discussion:
le concept des communautés culturelles qui est très important. On
vient de découvrir que le terme "communautés culturelles" n'est
pas un terme juridique et on aimerait bien que dans la prochaine loi ce
terme-là soit défini.
Par la suite, on apprécie beaucoup qu'on commence dans
l'avant-projet de loi à mentionner les droits à
l'accessibilité des services à tout le monde. Ça c'est
très bon en théorie. Cependant, on aimerait bien qu'on arrive un
peu plus en profondeur avec une définition du terme "communautés
culturelles", arriver à stipuler aussi dans la loi la
nécessité d'implanter une accessibilité - ça se
fait un petit peu à Montréal, ça commence à
Montréal, dans la Montérégie - des plans
d'accessibilité. On voudrait donc que ça devienne une loi, que
ça rentre dans la loi pour s'assurer que ça ne reste pas des
initiatives sporadiques mais que ça devienne partie intégrante de
la société québécoise. Les droits aux services de
santé et au services sociaux sont des droits acquis. Les droits à
l'immigration, je pense qu'on n'est pas là pour en discuter aujourd'hui.
Le Québec fait venir des gens. Quand ils arrivent, ils ont besoin de
soins de santé.
On demande donc un effort de la part du gouvernement pour faciliter
cette accessibilité. Et là, dans notre mémoire, on
souligne plusieurs points, entre autres, les comités de
bénéficiaires. C'est important que tous les
bénéficiaires puissent en faire partie. Il faut tenir compte de
ce qui arrive aux gens qui n'arrivent pas à se défendre.
Les conseils d'administration, c'est vital.
C'est dans les conseils d'administration qu'on prend les
décisions et très souvent les personnes originaires des
communautés culturelles ne sont pas représentées dans les
conseils d'administration. On demande donc une vigilance auprès du
gouvernement et surtout, dans la loi, de prévoir un moyen d'avoir des
conseils d'administration qui sont représentatifs du milieu en tenant
compte de la composition sociale, économique, ethnoculturelle du
territoire.
On parte des organismes communautaires. Je pense que la valeur et
l'importance des organismes communautaires n'est pas à prouver
aujourd'hui. On voit avec beaucoup de faveur l'importance que l'avant-projet de
loi a donnée aux organismes communautaires, le partenariat qu'on veut
donner à ces organismes-là; mais on veut s'assurer qu'ils
puissent aussi survivre, qu'ils aient des moyens de maintenir leur autonomie,
leur capacité de se développer, de travailler avec des
bénévoles de façon très informelle et qu'ils aient
aussi les moyens économiques pour continuer.
On se préoccupe, en parlant de la santé aussi, de beaucoup
de personnes, en particulier des médecins diplômés à
l'étranger qui arrivent ici, qui se trouvent à travailler dans
des restaurants, à faire des ménages. Pourquoi pas utiliser...
Pourquoi pas donner à des gens qui ont des capacités d'aider la
population, de faire ce pour quoi d'autres pays ont payé pour leur
instruction? C'est un gaspillage énorme de ressources humaines et des
années d'études qui sont gaspillées parfois à faire
de l'entretien dans des restaurants. Ce n'est pas une honte de faire de
l'entretien dans les restaurants, mais pourquoi pas utiliser cette ressource
humaine énorme?
Je ne voudrais pas prendre toute la place. Je donnerai la place à
mes collègues. Mais on insiste beaucoup sur le fait que le projet de loi
ou la future loi inclut l'accessibilité des communautés
culturelles comme un article de loi, après avoir défini qu'est-ce
que c'est, pour le gouvernement, les communautés culturelles.
M. Oelgado (Pascual): Je vais aborder certains points
spécifiques qui, à notre avis, sont particulièrement
importants. Il ne faut pas oublier que les communautés culturelles
composent aujourd'hui 15,6 % de la population du Québec, et qu'il y a de
plus en plus de groupes de minorités qui vont chaque fois grandissant.
Alors nous avons regardé, par exemple, à la page 7 de notre
mémoire, le terme "communautés culturelles", semble-t-il qu'il y
a un problème de définition dans la jurisprudence actuellement au
Québec. Vraiment, il y a une ambivalence par rapport au terme. Nous
demandons que, dans le projet de loi, le ministère procède
à une définition des termes "communautés culturelles" tel
qu'entendu aujourd'hui par les différents paliers de gouvernement et que
ceci apparaisse dans un préambule, dans l'introduction de la loi. De
notre
part, dans notre mémoire et pour clarification, par
"communautés culturelles", nous entendons les personnes habitant le
Québec qui sont issues d'une culture autre que québécoise
francophone ou québécoise anglophone de vieille souche, ou
autochtone. Donc, nous aimerions que ça apparaisse quelque part dans la
loi.
La deuxième chose dont je veux parier, c'est au sujet des
articles qui touchent les garanties de services à la communauté
anglophone et plus spécifiquement les articles 13 et 241 du projet de
lof. On peut lire, dans ces articles, surtout à l'article 13, que toute
personne d'expression anglaise a le droit de recevoir en langue anglaise des
services de santé et des services sociaux. À l'article 241, plus
spécifiquement on stipule qu'une régie régionale doit
élaborer, en collaboration avec les établissements, conjointement
avec d'autres régies régionales, le cas échéant, un
programme d'accès aux services de santé et aux services sociaux,
en langue anglaise, pour les personnes visées à l'article 13,
dans les établissements qui l'indiquent, compte tenu de l'organisation
et des ressources de ces établissements. Ce que nous demandons, en
effet, à la page 9 de notre mémoire, c'est un amendement des
articles 13 et 241 ou qu'on ajoute un deuxième article pour assurer que
ces services doivent aussi être garantis aux communautés
culturelles. Nous pensons sérieusement que c'est un grand pas en avant,
c'est une évolution positive que de garantir à une partie
minoritaire de la population des services de santé et des services
sociaux, notamment à la partie anglophone de notre communauté.
Néanmoins, on découvre qu'if y a une partie énorme de la
population qui ne parle ni anglais ni français, qui est d'origine
alloch-tone et qui, finalement, ne reçoit pas la même
qualité de services. Donc, dans la recommandation 4, à la page 9
de notre mémoire, nous recommandons que le ministère amende les
articles 13 et 241 afin d'assurer également aux personnes issues des
différentes communautés ethnoculturelles le même droit de
recevoir des services adaptés à leurs besoins, tel qu'il est fait
pour les personnes d'expression anglaise, et conformément à
l'esprit de l'article 2,4. Pour nous, c'est une chose absolument essentielle,
car s'il n'y a pas une définition claire dans le projet de loi et s'il
n'y a pas un reflet de ce besoin, évidemment nous manquons une
unité de défense assez importante. Ça, c'est une
recommandation. On passe maintenant aux prochaines personnes de notre
groupe.
Mme William (Nancy): Oui. Si vous regardez maintenant la
recommandation 7, on croit qu'il est important que dans la formation des
maîtres on tienne compte de la réalité multiculturelle du
Québec, qu'il y ait des cours obligatoires qui soient donnés sur
les communautés culturelles, par exemple, en travail social, en
psycho-éduca- tion, des choses comme ça, parce qu'ils auront
à Intervenir directement auprès des communautés
culturelles. Si on regarde dans le réseau, ce serait important aussi que
les intervenants reçoivent une formation par rapport aux
communautés culturelles, mais que la formation soit continue. Donc,
d'une part, des cours obligatoires au niveau universitaire, au niveau
collégial, et, d'autre part, une formation continue dans le
réseau.
Mme Soave: je trouve qu'il est très important de voir
qu'il y a un mouvement près du gouvernement. je fais partie avec m.
sirros, qu'on a le plaisir de voir aujourd'hui en tant que ministre, du
comité qui a abouti un peu à enchaîher une série de
ressources, de services qui montrent qu'on est en train d'aller quelque part.
on ne voudrait pas que ça reste quand môme des initiatives locales
ou des initiatives sporadiques. on voudrait que l'intention première
vienne du gouvernement. c'est un peu ce qu'on demande. (11 h 15)
À ce point-ci, je pense que j'aimerais mieux continuer les
débats plutôt que d'être toute seule à parler parce
qu'on se répète. Mais ce qui est important, et c'est ce que M.
Delgado a dit aussi, c'est que parfois ça ne coûte pas très
cher pour favoriser l'accessibilité. On a apporté l'exemple de la
communauté anglophone justement pour montrer un excellent exemple de la
façon dont on peut résoudre des services sans faire beaucoup de
dépenses ni investir beaucoup d'énergies. C'est un bon exemple
qu'on prend, c'est très bien ce qui a été fait, c'est une
excellente initiative. Alors on voit que si le gouvernement veut faire quelque
chose, il peut le faire sans dépenser des sommes énormes.
Ce qu'on dit pour les communautés culturelles, c'est que
ça ne coûte pas des milliards, mais il faut mettre une petite
ressource ou des budgets protégés, même s'ils ne sont pas
énormes. Il y a des choses qu'on peut faire avec la bonne volonté
des institutions et c'est ce qu'ils sont en train de faire à
Montréal et dans la Montérégie. Mais arrive le moment
où on parle d'interprètes, d'une banque d'interprètes
professionnels. On peut parler de formation obligatoire dans les
différentes institutions, on peut parler de formation des maîtres,
on peut parler de campagnes de sensibilisation ou de production de
matériel dans d'autres langues et, à ce moment-là, il faut
que le gouvernement s'engage physiquement dans les intérêts qu'il
a démontrés dans l'avant-projet de loi.
M. Delgado: J'aimerais ajouter, par rapport au budget
réservé, que nous notons une certaine carence en ce qui concerne
les subventions ou allocations aux organismes communautaires des
communuautés culturelles. Pour donner un exemple, à
l'intérieur de la région de Montréal,
actuellement, les subventions qui vont aux organismes qui travaillent
auprès des communautés culturelles représentent à
peu près 5 % de l'enveloppe totale des subventions octroyées aux
organismes non gouvernementaux. Alors, nous croyons que c'est un moyen de
pallier la carence. Mais il ne faut pas oublier non plus qu'à
l'intérieur même des établissements, il n'y a pas de
budgets réservés pour servir les populations dans le
réseau public. Ça nous paraît absolument essentiel.
Une autre chose, ce sont les conseils d'administration. Il y a eu
beaucoup d'accroissement du nombre des individus et des groupes ethniques qui
siègent maintenant aux conseils d'administration des
établissements. Pourtant nous croyons qu'il y a encore beaucoup d'espace
pour évoluer et nous croyons qu'il est important de faire des gestes
concrets et des nominations, de nommer des personnes directement au conseil
s'il y a un déséquilibre dans une région où il y a
une forte concentration. Certains quartiers de la région de
Montréal, par exemple, sont maintenant composés principalement de
40 % ou de 50 % de personnes originaires des communautés
ethnocul-turelles et ça ne se reflète pas dans la composition des
conseils d'administration. Un très bon exemple de ça, c'est la
Commission administrative du conseil régional: dans toute la Commission
administrative du conseil régional du Montréal
métropolitain, il y a seulement une personne qu'on pourrait qualifier
d'originaire des communautés culturelles. Alors, pour nous, ça
implique une déficience.
Je pense que c'est maintenant le temps de permettre des questions parce
qu'on a pas mal...
Le Président (M. Joly): Je vous remercie, je vais
maintenant reconnaître M. le ministre délégué
à la Santé et aux Services sociaux.
M. Slrros: Merci, M. le Président. Moi aussi, il me fait
plaisir de revoir Mme Soave et tous les autres membres de l'ACCESSS avec
lesquels on a eu l'occasion de travailler, tant au comité qui a
formulé un certain nombre de recommandations il y a maintenant deux ans
et demi ou trois ans... Non?
M. Oelgado: Le comité Sirros. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Sirros: Deux ans et demi ou trois ans. Je dois commencer en
disant, au départ, que je suis d'accord avec le fait que souligne Mme
Soave, que ça prend et que ça prendra de plus en plus une
volonté gouvernementale pour faire avancer les choses. Peut-être,
pour souligner cette volonté gouvernementale, que je pourrais prendre
l'occasion qui m'est offerte par la commission parlementaire pour
réitérer le fait qu'en dépit de la situation dans laquelle
les finances se trouvent, comme on l'a vu hier, nous avons pu procéder,
au ministère de la Santé et des Services sociaux, à la
consolidation et à l'accroissement des ressources affectées au
bureau de coordination pour les services aux communautés culturelles, un
peu, si vous voulez, comme un signal qu'il y a une volonté ferme de
procéder dans un dossier qui, de plus en plus, devient important par
rapport au réseau, surtout dans les régions de Montréal et
de la Montéré-gie. Laval, éventuellement, quand ce sera
une région autonome, on devra en tenir compte également. Mais il
est clair, et j'ai eu l'occasion de le souligner, il y a à peu
près deux semaines, que, de plus en plus, le réseau doit tenir
compte de cette nouvelle réalité démographique que vit le
Québec actuellement.
J'aimerais reprendre un peu ce à quoi vous avez fait allusion
pour souligner qu'il y a effectivement quelque chose d'assez important qui est
en train de se passer actuellement à Montréal où, il y a
deux semaines, on a identifié de façon publique au-delà
d'une quarantaine d'établissements à peu près qui ont
accepté de s'afficher comme des établissements qui
présenteront des plans d'accès à leurs services aux
membres des communautés culturelles qui pourraient être
concernés. J'aimerais relier ça à la demande que vous
faites de voir quelque chose de plus formel inscrit dans la loi, au même
plan et sans les mettre en contradiction, où les conseils
régionaux actuellement sont obligés de fournir un plan
d'accessibilité pour des services disponibles en langue anglaise. Vous
dites finalement: Est-ce qu'on ne pourrait pas avoir dans le projet de loi qui
viendra une obligation pour une régie régionale de soumettre
à l'approbation du gouvernement un plan d'accès à des
services aux communautés culturelles dans la région que le
gouvernement pourrait désigner? Pourriez-vous un peu élaborer sur
ça? Est-ce que c'est finalement de mettre dans la loi ce qui se fait
actuellement sur le terrain dans la pratique, ou ce qui est en train de se
faire avec les 40 établissements de la région de Montréal
et de la Montérégie actuellement? Est-ce que c'est à
ça que vous...
Mme Soave: C'est de mettre dans la loi des principes
d'accessibilité bien définis. Les moyens viendront par la suite
et les moyens, ça pourrait être ce qui se fait maintenant à
Montréal et dans la Montérégie: la création de
plans... Je ne voudrais pas qu'on se limite à Montréal et
à la Montérégie. À Québec il va y avoir un
besoin, là aussi, et éventuellement dans d'autres villes ou dans
d'autres régions du Québec. Donc, c'est important de ne pas se
limiter à une région, à ce qui se fait actuellement
à Montréal, mais d'avoir des principes d'accessibilité
universelle à des services pour toute la population. Qui engagera les
différentes régies régionales, quand il y en aura,
à présenter des plans d'accessibilité pour la
population originaire des différentes communautés
ethnoculturelles pour s'assurer que les services soient rendus de façon
humaine et personnalisée?
M. Delgado: Je veux insister sur le fait que ce n'est pas
seulement une question de langue ou d'utilisation d'une langue. Dans le cas des
communautés culturelles, ça dépasse la question
linguistique. En effet, il y a plusieurs groupes qui, à cause de leur
race, à cause de leur religion, de certaines pratiques, de leur
vécu quotidien - par exemple, un régime alimentaire, une
diète, etc. - rendent nécessaire d'adapter nos hôpitaux,
nos cliniques, nos centres d'hébergement à cette nouvelle
réalité. Il y en a d'autres qui souffrent de problèmes de
santé mentale reliés à la souffrance vécue dans un
camp de réfugiés ou reliés à la guerre, ou à
la torture, qui demandent une application très qualitative des services
psychiatriques et psychologiques et qu'on ne trouve pas aujourd'hui dans nos
ressources. Pour donner un exemple, au Canada, il y a seulement un centre de
thérapie pour les victimes de torture et ce centre existe à
Toronto. Nous aimerions avoir la même chose ici, dans la province de
Québec. Alors, ça, c'est pour vous dire que ça
dépasse simplement les services dans les langues ethniques, autres que
l'anglais ou le français. C'est une question qui touche l'adaptation de
soins aux multiculturels, aux interculturels, si vous voulez.
Mme Soave: Quand on parle de différences, on parle de
différences de langue et de culture, de façons différentes
de percevoir la maladie ou de façons différentes de percevoir les
problèmes. M. Lazure se rappellera sûrement, en 1981, lors de la
préconsultation sur la politique familiale, les difficultés qu'on
avait dans ce temps-là à seulement définir la famille. On
n'était pas capables. A ce moment-là, on passait des
soirées à chercher à définir qu'est-ce que
c'était la famille. Une chose qui peut être tellement banale avec
des différentes perceptions culturelles, on n'arrivait pas à
avoir une définition qui allait pour tout le monde. Quand on parle de
maladies, de soins de santé et de santé mentale, la perception
même de la déficience ou du handicap, tout change. C'est
très important pour un professionnel de la santé d'être
conscient et de respecter aussi les différences.
M. Sinros: Si je comprends bien ce que vous dites, pour qu'on
puisse discuter de tout ça d'une façon systématique, sans
se baser finalement sur la bonne volonté des gens qui peuvent être
là ou ne pas être là, c'est qu'on aimerait voir, dans la
loi, une obligation qui serait faite aux régions et que le gouvernement
pourrait indiquer.
M. Delgado: C'est pour ça, justement, qu'on demande une
modification de l'article 241, pour arriver à cela.
M. Sirros: C'est dans ce sens-là. Vous voulez un
instrument, dans la loi, qui ferait ressortir les plans d'accessibilité
destinés aux communautés culturelles et qui permettrait, à
ce moment-là, de dire autour de quel genre de services. C'est
ça?
Mme Soave: On aimerait bien que ça apparaisse dans la loi,
pas seulement la phrase qu'on a maintenant "favoriser l'accessibilité
pour les communautés culturelles". On trouve que c'est vague. Tout le
monde est d'accord avec l'idée, mais comment concrétiser cela? Au
moins, qu'on ait un article aussi spécifique, comme on l'a vu aux
articles 241 et 13 qui sont des articles spécifiques, clairs et dont
découlent après les différents moyens qui peuvent en
découler, une fois qu'on a stipulé le droit à
l'accessibilité et la nécessité pour les
différentes régies de créer et de présenter au
gouvernement des plans d'accessibilité. Les plans d'accessibilité
vont contenir, éventuellement, l'embauche de personnel, la formation,
les banques d'interprètes. Ça, ce sont des moyens qui pourraient
entrer dans les plans que les régies présenteraient sur demande
du gouvernement, parce que ça serait inscrit dans la loi.
M. Sirros: Si je peux continuer...
Le Président (M. Joly): Quelques minutes, M. le
ministre.
M. Sirros: Encore quelques minutes. Si je les
décèle bien dans vos propos, vous avez deux objectifs,
finalement. D'une part, que le réseau dans son fonctionnement soit
représentatif de la population, dans le sens que plus il va y avoir
d'intervenants issus des différents milieux qu'on retrouve sur le
territoire desservi par le réseau, à ce moment-là, plus on
va pouvoir sentir que les services sont vraiment accessibles et adaptés,
parce qu'on sera en mesure de faire la jonction entre qui les donne et ceux
à qui ils sont destinés. Donc, ce premier objectif serait de
rendre le réseau...
M. Delgado: Représentatif.
M. Sirros: ...serait que le réseau reflète un peu
la composition de l'ensemble du territoire qu'il dessert. Le deuxième
objectif est d'avoir des services adaptés à la
réalité ethno-culturelle de certains groupes selon, j'imagine,
certains services, et j'aimerais m'expliquer. Je pense surtout à la
question des services d'hébergement pour les personnes
âgées en perte d'autonomie, dans les CHSP, par exemple, les
centres hospitaliers de soins prolongés. Hier, on avait l'Institut
canadien polonais du bien-être, Je pense, qui est un institut ou un
centre d'hébergement pour les gens d'origine polonaise. Il y a
l'hôpital chinois, il y en a encore un autre. Mais ce sont aussi
là
des initiatives qui ont été mises sur pied de
façon...
Mme Soave: Pour répondre à des besoins
spécifiques.
M. Sirros: ...spécifique, selon la bonne volonté
des gens.
Mme Soave: Cela peut aller jusqu'à la nourriture, des
choses banales.
M. Sirros: Donc, si je vous interprète bien, ce serait de
dire que, dans son fonctionnement et dans sa planification, par exemple en
matière de besoin en places d'hébergement, le réseau
devrait prévoir qu'il y aurait des places adaptées pour
différents groupes, dans la mesure où il y aura une demande assez
grande pour assurer une certaine masse critique ou assurer qu'à
l'intérieur...
Mme Soave: Je ne crois pas tellement à la création
d'institutions spécifiques à chacune des communautés
culturelles; ça serait utopique de penser d'en créer pour chacun
des groupes ethniques. Des Tibétains, à Montréal, on en a
peut-être une centaine. Ça va être l'utopie. Mais dans les
institutions existantes, avec très peu de ressources
supplémentaires, on pourrait, par exemple, offrir un choix de spaghetti
pour les Italiens ou de la nourriture chinoise pour les Chinois, avoir la
possibilité qu'ils puissent trouver un peu de leur ambiance ou permettre
qu'ils soient localisés pas loin d'où ils habitent.
Par exemple, je me rappelle un couple de personnes très
âgées qui ont habité toute leur vie dans le quartier
Saint-Michel. Quand le monsieur a perdu ses jambes, ils l'ont mis dans un
centre d'accueil à Côte-Saint-Luc. La femme n'était pas
capable de se rendre là-bas et lui était totalement
dépaysé. Il ne pouvait pas communiquer, il avait tout perdu: son
milieu, ses amis, sa langue, la nourriture qu'il connaissait. Alors, il
était vraiment dépaysé. Il aurait simplement fallu dire
que, lui, il avait là tout son entourage et lui trouver une place dans
un lieu où il aurait pu se trouver plus à l'aise.
Ça ne coûte pas cher. On ne demande pas la construction de
centres d'accueil, d'hôpitaux, de CLSC spécifiques à chacun
des groupes ethniques. On demande que chacune des institutions où il y a
un tel besoin, prévole l'embauche de personnel, la formation du
personnel, voie aussi à la collaboration avec les organismes du
quartier. Comme je l'ai dit, ce ne sont pas des solutions qui coûtent des
millions. Souvent, ce sont des solutions que, juste une fois qu'on a la
volonté politique de le faire, on va en trouver les moyens. (11 h
30)
M. Delgado: Moi, je veux ajouter que, pour le moment, ça
se fait de façon sporadique. Il y a certains établissements, en
effet, qui ont répondu à certains besoins. Mais comme le ministre
délégué le disait tout à l'heure, on aimerait que
ce soit cohérent et planifié de façon cohérente
dans toutes les différentes régions. Évidemment, des fois,
il y a des endroits qui manquent de ressources, il y a d'autres endroits qui
ont trop de ressources, il y a des endroits qui "ghettoïsent", si vous
voulez, tes services. Nous aimerions qu'il y ait une planification globale qui
soit cohérente et des budgets réservés pour pouvoir
arriver à donner ces programmes et les rendre accessibles à toute
la population.
Mme Soave: Donc, la régie devrait rendre compte au
gouvernement une fois que la loi aura prévu cette accessibilité
totale. J'aimerais prendre quelques minutes, s'il nous en reste-Le
Président (M. Joly): 11 minutes. Mme Soave.
Mme Soave: ...pour ne pas oublier les groupes communautaires. Les
groupes, disons, on est très bien conscients que l'avant-projet de loi
reconnaît une grande importance aux organismes et, comme on l'a dit dans
notre mémoire, nous apprécions beaucoup l'aspect de partenariat
où on demanderait aux institutions d'inclure les organismes dans la
planification, dans le suivi et dans l'évaluation de chaque projet, de
chaque programme des institutions. Cependant, on veut garder notre
indépendance quand même, notre façon propre de fonctionner
et on voudrait aussi s'assurer que, de la part des institutions, il y ait un
partenariat véritable.
Tout dernièrement, il y a eu le dépôt du programme
sur la santé mentale et on voit que tout est catégorisé.
Les CLSC vont s'occuper de ça, les groupes communautaires vont s'occuper
de ça, les CH vont s'occuper d'autre chose. On ne volt plus le
partenariat qui est souhaité dans l'avant-projet de loi. On voit un
morcellement des responsabilités: là, moi, je prends la grande,
tu prends la petite. On aimerait bien que le partenariat se fasse... Moi,
personnellement, je crois au partenariat. Les organismes sont proches de la
base, sont proches de la clientèle qui vient nous exprimer les premiers
besoins. Je crois qu'on devrait être contacté par toutes les
institutions du réseau, pas juste celles qui touchent les groupes
communautaires, mais qu'on fasse partie vraiment, avec les CH, les CLSC, que
les groupes communautaires soient consultés pour chacun des programmes.
On aimerait demander des subventions qui nous permettent de vivre sans passer
40 % de notre temps à chercher des sous, à faire des bazars,
à faire des courses partout et pour nous permettre, à la fin,
d'être de vrais partenaires.
On aimerait souligner aussi ceci. Nous croyons qu'il y a d'autres
fédérations et d'autres
regroupements d'organismes qui, comme ACCESSS jouent un rôle
très important pour coordonner et pour venir ici, - des groupes locaux
n'auraient pas pu préparer de mémoire - défendre les
intérêts des organismes. On croit qu'on a le droit d'exister. Si
la loi nous enlève le droit aux subventions, ça va rester
beaucoup de petits groupes qui vont travailler et l'esprit de partenariat,
d'éviter la duplication des services, tout ça va se perdre s'il
manque la collaboration des fédérations, des regroupements
d'organismes.
Pour nous, c'est très important, c'est déjà
là dans la loi, mais qu'on s'assure que ce soit implanté, qu'on
nous laisse jouer le rôle pour lequel, je pense, nous sommes assez
bons.
Le Président (M. Joly): Merci, Madame. M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux
féliciter l'Alliance pour son mémoire qui est bien bâti.
Les recommandations sont bien claires. Je pense que c'est un mémoire qui
fait des demandes très raisonnables. L'Opposition appuie ces demandes.
Je retrouve, avec plaisir, plusieurs personnes avec qui j'ai travaillé
dans le passé. Je voudrais relever deux ou trois des recommandations qui
sont contenues dans le mémoire. Celle, peut-être, qui
m'apparaît la plus importante, c'est l'embauche de personnel, l'embauche
de personnel qui peut communiquer avec les personnes de différents
groupes ethniques, en particulier avec les personnes âgées qui
n'ont pas eu le temps, l'opportunité ou la chance d'apprendre le
français, qui est la langue officielle du Québec. Nous partageons
cette demande de l'Alliance concernant l'accès aux services de
santé et aux services sociaux pour les personnes handicapées,
pour les personnes âgées, en fait, pour que tous les
bénéficiaires puissent avoir, surtout dans certains quartiers, du
personnel qui peut comprendre un certain nombre de langues et qui peut parler
un certain nombre de langues. Ça s'est fait jusqu'à un certain
point, mais pas suffisamment.
Quant à la question d'aménager plus
particulièrement des centres d'accueil, je pense que ça
dépend de chaque communauté culturelle. Il y a certaines
communautés, comme la communauté d'origine italienne qui, compte
tenu du grand nombre et compte tenu aussi des désirs de cette
communauté... Cette communauté désirait, par exemple, un
centre d'accueil pour personnes âgées, ça a
été fait et je pense que ça rend de grands services. La
communauté grecque, peut-être... Elle a désiré une
école particulière et elle l'a eue au temps du Parti
québécois. Il serait temps que le Parti libéral au pouvoir
réponde à certains besoins de ces communautés. La
communauté grecque, que je sache, n'a pas de centre d'accueil pour
personnes âgées dans la communauté grecque et c'est
probablement un besoin.
Nous appuyons totalement cette demande que le personnel dans les CLSC,
dans les hôpitaux, dans les centres d'accueil, même s'il ne parie
pas un certain nombre de langues, soit au moins sensibilisé aux besoins
particuliers de ces clientèles.
Deuxième remarque, sur les médecins venant de
différentes communautés culturelles. D'abord, je poserais la
question: est-ce que l'Alliance est au courant du nombre approximatif de
médecins qui ne travaillent pas comme médecins actuellement?
Est-ce que vous êtes au courant?
M. Delgado: Si nos informations sont correctes, nous croyons
qu'il en reste encore une centaine, entre 50 et 100, mais je crois qu'à
ce moment-ci, il y a des efforts farts pour intégrer ces
médecins. Malheureusement, ça n'arrive pas encore à
résoudre la situation. Nous croyons qu'il y a un problème
d'équité et qu'il y a des citoyens canadiens qui sont
diplômés hors du Québec qui devraient pouvoir pratiquer la
médecine ici au Québec. Malheureusement, ils ne trouvent pas de
place de stage dans les hôpitaux d'éducation. Il y a,
là-dedans, un problème systémique qu'il va falloir,
à un moment donné, régler.
M. Lazure: II va falloir que le ministre de la Santé et
des Services sociaux intervienne parce que les universités, les
facultés de médecine ainsi que la Corporation professionnelle des
médecins d'elles-mêmes ne vont pas régler le
problème, malheureusement.
Le Président (M. Joly): Est-ce que vous permettez, Dr
Lazure, que le ministre...
M. Lazure: Je pose la question au ministre de la Santé et
des Services sociaux. Est-ce qu'il a un plan pour régler à court
terme ce problème, qui non seulement cause des iniquités, mais
qui prive des régions éloignées en particulier? Beaucoup
de ces médecins-là sont prêts à aller travailler en
région éloignée pour deux ans, quatre ans, cinq ans. Je
sais que ça a été fait dans certains cas, mais pas assez,
pas suffisamment en ce qui concerne le nombre et pas assez rapidement non plus.
Quel est le plan du ministre à cet égard?
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je trouve le
député de La Prairie davantage, dans son costume politique,
vindicatif ce matin. Ça ne me dérange pas du tout de
répondre à ses questions parce que, dans le cas des... .
M. Lazure: C'est la question qui est soulevée par
l'Alliance.
M. Côté (Charlesbourg): Non, mais c'est que vous
endossez bien des affaires, ce matin.
Évidemment...
M- Lazure: II se trouve que je suis d'accord avec.
M. Côté (Charlesbourg): J'ai connu ça moi
aussi, j'étais dans l'Opposition. C'est toujours plus facile d'endosser
dans l'Opposition qu'au pouvoir.
M. Lazure: Surtout quand les demandes sont raisonnables.
M. Côté (Charlesbourg): II y avait 141
médecins qui avaient un certain nombre de problèmes. Mme
Lavoie-Roux avait demandé au sénateur David de faire des
recommandations; elles ont été faites. La semaine
dernière, j'ai signé une lettre adressée au Dr Augustin
Roy lui signifiant que j'avais accepté de confirmer ce que Mme
Lavoie-Roux avait fait à l'époque. Nous sommes dans une situation
où, effectivement, 25 médecins par année pendant quatre
ans vont être acceptés et il y en a maintenant, non plus 141, mais
plutôt 128 sur la liste. Sur une période de quatre ans, le
problème devrait être résorbé de manière
finale, totale, de telle sorte qu'il n'y aura plus de problème
après ça. Ce sont des décisions qui sont claires. Elles
ont été prises et elles ont été confirmées
au Dr Augustin Roy, la semaine dernière, parce que j'ai eu des contacts
avec des médecins qui vivaient dans l'attente de cette lettre.
Maintenant, tout le phénomène de régularisation est en
cours de manière un peu plus accélérée, 25 par
année, pendant quatre ans, avec phénomène d'attrition. On
sera dans une situation, au bout de trois ans d'ailleurs, où le
phénomène sera réglé de manière finale.
M. Lazure: M. le Président.
Le Président (M. Joly): Allez, M. le
député!
M. Lazure: M. le Président, pour bien montrer au ministre
que je ne suis pas que vindicatif, je le félicite d'avoir
réglé si rapidement ce problème-là. Je le
félicite. Il me fait plaisir de le féliciter.
M. Côté (Charlesbourg): Je suis pleinement convaincu
que vous n'êtes pas uniquement vindicatif. D'ailleurs, j'ai pris le soin
de le dire, tantôt, ce matin.
M. Lazure: De temps en temps. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: Espérons aussi, tant qu'à y être,
pour le vider ce problème-là, que le ministre de la Santé
va faire des interventions auprès de sa collègue de l'Immigration
pour que cessent d'entrer, malheureusement, parfois, sous de fausses
représentations ou ml-fausses représentations - on connaît
le problème, on sait comment plusieurs d'entre eux ou d'entre elles
entrent - pour que cesse cette entrée plus ou moins clandestine, parce
que ça ne rend service à personne, finalement, pas même
à ceux et à celles qui entrent clandestinement sous de fausses
représentations, et ça ne rend pas service non plus à
l'État ni à la population. Il y a moyen de l'arrêter, ce
problème-là.
M. Côté (Charlesbourg): II est réglé.
En complément d'Information, au terme de ces quatre années, nous
serons dans une situation où il y aura dix postes annuels, pour lesquels
des examens devront être passés. Les dix premiers qui vont passer
seront les dix reçus. Au-delà de tout ça, il n'y en a pas.
Donc, c'est parce que les règles n'ont jamais été claires.
Alors, les règles vont être très claires maintenant, de
telle sorte qu'il va y avoir de la place par la suite, mais pour un nombre
limité, très clair, très clairement défini, les
règles étant connues aussi pour l'immigration.
M. Delgado: Par rapport à notre intervention,
l'année passée, pendant la grève de la faim qui a
été faite par les médecins, on avait indiqué
clairement qu'il y a un problème juridique qui se pose par rapport
à l'égalité de chance pour les citoyens canadiens qui sont
médecins diplômés hors du Québec et les citoyens
canadiens nés ici qui étudient la médecine. Alors, il faut
vraiment voir qu'il y a un problème vraiment juridique là-dedans.
On dirait deux poids, deux mesures.
Aussi, il y a une question qui touche les services aux groupes
ethniques. À part l'équité et à part la question
juridique d'égalité qui se pose par rapport à ça,
les professionnels de la santé venant de différents groupes
peuvent servir la population d'une communauté culturelle dans sa langue.
Un médecin vietnamien, un médecin latino-américain est
peut-être un peu plus apte à servir la population de son propre
groupe ethnique; il pourrait comprendre un peu plus ce qui se passe. C'est la
même chose pour les psychologues, la même chose pour les
travailleurs sociaux et travailleuses sociales. Nous croyons que c'est
important que les professionnels aient une certaine équité, si
vous voulez. Maintenant que le gouvernement a lancé un programme
d'accès à l'égalité en emploi, et on vous
félicite de l'avoir fait, nous aimerions que les professionnels de la
santé soient perçus à l'intérieur du
ministère comme étant la cible principale,
privilégiée pour ces programmes d'accès à
l'égalité.
Mme Soave: En tout cas, nous retenons aussi comme vitale et
importante, la formation. Je parle de formation obligatoire pour les actuels
Intervenants qui travaillent dans tout le réseau
de la santé et des services sociaux, obligatoire et
éventuellement répétée, et aussi la formation
obligatoire dans les collèges et les universités pour tous les
domaines qui touchent aux services à la clientèle. à ce
moment-ci, on donne un cours de quatre heures ou de quatre jours et puis, c'est
fini. les gens ne se trouvent pas vraiment face à la
réalité. parfois, ça peut sauver des vies. par exemple,
dans certaines cultures, on n'exprime pas ses besoins, on les manifeste d'une
autre façon. c'est comme l'exemple que je cite un peu tout le temps. la
première fois que j'ai entendu une dame qui était enceinte de
cinq mois me dire qu'elle avait mal au coeur, je cherchais un
téléphone pour appeler l'ambulance, parce que j'ai dit: bon,
c'est une femme enceinte, elle a mal au coeur, une crise cardiaque, ambulance,
pour découvrir, à la fin, que c'était juste des
nausées. il y a des expressions de ce genre dans les différentes
communautés et, éventuellement, quelqu'un va te dire qu'il a mal
à l'estomac tandis qu'il peut avoir mal au coeur ou avoir mal ailleurs.
c'est important. je ne dis pas que les professionnels connaissent toutes les
langues et toutes les cultures, mais qu'ils aient une perception
générale et globale qu'il existe des différences, qu'il
existe des valeurs différentes. je me rappelle qu'il y a quelques
années on riait comme des fous des chinois qui utilisaient
l'acupuncture. maintenant c'est à la mode. (11 h 45)
Alors, il y a des valeurs que les gens emportent avec eux, comme les
Italiens qui plantaient des tomates dans les jardins. C'était un peu
bizarre. Maintenant, il y a des jardins communautaires. Alors il y a des
valeurs qu'on acquiert, qu'on échange. On s'enrichit et c'est important.
Dans la santé et les services sociaux, c'est la même chose. Il
faut que les professionnels soient au courant que différent, ça
ne veut pas dire nécessairement barbare. Et même si c'était
barbare, donnons-lui le temps d'apprendre et de s'intégrer, avec
patience et avec respect. Et c'est là la formation... M.
Côté n'était pas là quand on a montré
l'importance que ce soit enregistré, inclus dans la loi et d'avoir des
budgets pour toute cette formation et l'embauche dont on vient de parler.
Le Président (M. Joly): Allez, M. le
député.
M. Lazure: Pour conclure, M. le Président, je vais relever
encore une autre recommandation contenue dans ce mémoire. C'est celle,
no 22: "que le montant total destiné aux subventions des organismes
communautaires représente 3 % du budget global du ministère de la
Santé et des Services sociaux". 3 %! Je vous félicite pour votre
audace, vos ambitions. Mais c'est quoi actuellement? Ce n'est même pas
0,5 %?
M. Delgado: C'est 0,6 %.
M. Lazure: Ah oui?
M. Delgado: C'est 0,6 %.
M. Lazure: Bon, 0,6 %. On est loin des 3 %, très loin des
3 %. Et le ministre délégué à la Santé et au
Services sociaux et député de Laurier disait tantôt: II y a
une volonté gouvernementale de faire avancer les choses. J'ai bien pris
soin de le noter, mais est-ce qu'il y aura de l'argent pour faire avancer les
choses? Le président du Conseil du trésor, votre collègue
- c'est à pleine page dans les journaux d'aujourd'hui - nous dit:
Préparez-vous, surtout en matière de santé. Vous allez
devoir vous serrer la ceinture. La gratuité mène à la
pauvreté, dit-il. Deuxièmement: "Les programmes gratuits et
universels - ça, c'est entre guillemets - "sont considérés
comme un principe sacré au Canada anglais. Ça nous conduit
à la faillite". Qu'est-ce que c'est ça, Canada anglais? C'est
aussi sacré pour les Québécois francophones ou les
communautés culturelles, le principe de l'accessibilité
universelle, la gratuité des soins. Alors moi, je pose ces
questions-là à ses deux collègues qui sont ici
présents, parce que ce groupe comme bien d'autres groupes demande une
augmentation des enveloppes budgétaires, surtout pour les groupes
communautaires.
Et, pendant ce temps-là, le gouvernement actuel est en train de
nous dire que, non seulement il n'y aura pas de nouvel argent pour les groupes
communautaires, mais, mais on va peut-être couper dans les services de
santé et les services sociaux. C'est votre collègue qui le dit.
Dans Le Soleil de ce matin, on dit: "II laisse, bien sûr, à
son collègue de la Santé le soin de trouver des solutions. Ce
dernier n'était pas disponible pour commenter hier soir." Il est
disponible aujourd'hui. Peut-être qu'il va commenter là-dessus.
Ça va être quoi ses façons d'économiser de
l'argent?
Alors, M. le Président, je pense que les groupes qui viennent
présenter des mémoires ici, qui sont dans le réseau de la
santé et des services sociaux, doivent être rassurés par le
ministre, s'il est en mesure de le faire, qu'il n'y aura pas d'abolition de la
gratuité des soins, que ce principe est aussi sacré pour une
personne d'origine italienne ou haïtienne ou urugayenne que pour des gens
d'origine anglophone ou francophone. C'est un principe sacré,
l'universalité des soins. Et ce n'est pas vrai que la gratuité
mène à la pauvreté. Ce n'est pas vrai du tout. Le
pourcentage - je conclus, M. le Président - du produit intérieur
brut, du PIB, pour les soins de santé, il est le même depuis 10
ans. Il ne bouge pas pratiquement, 9 %. Alors, il faudrait que le ministre de
la Santé prenne position là-dessus et nous fasse part de ses
commentaires à l'égard des remarques de son collègue du
Trésor. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député.
M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Très, très
brièvement. Je pense qu'il y a d'autres forums pour être capable
d'exprimer mon opinion sur ce qu'a pu dire mon collègue du Conseil du
trésor, dans sa perspective à lui, de Trésor. Je me
permettrai, à ce moment-ci, de rappeler au député de La
Prairie l'évolution considérable des budgets de 1985-1986
à aujourd'hui au niveau des groupes communautaires. Je ne dis pas que
c'est suffisant. Tout ce que je dis, c'est qu'il y a eu une progression
très intéressante des budgets dans notre premier terme, puisque
nous étions capables de le faire.
Les gens nous demandent 3 %. Il est évident pour moi que, depuis
le début de la commission parlementaire, les communautaires sont venus
nous faire la démonstration que de l'argent dans le communautaire,
c'était de l'argent bien investi et que le communautaire faisait, avec
peu d'argent, beaucoup plus que le secteur public avec beaucoup d'argent.
Alors, je pense que la démonstration est très claire, très
nette à ce niveau-là.
Et lorsque, depuis le début, je parle de réallocation de
ressources, ça présuppose qu'il nous faut, dans un premier temps,
interpeller l'ensemble du réseau sur l'utilisation des sommes qui lui
sont confiées et de faire un questionnement de A à Z sur
l'utilisation de ces sommes. On a eu des exemples par centaines, en commission
parlementaire, d'utilisation d'argent ou de dépenses qui pouvaient
être faites à moindre coût pour donner un meilleur
résultat. Donc, ça me paraît être assez important.
Oui, nous allons progresser dans la voie du communautaire
complémentaire, du bénévolat aussi, avec la
réforme, avec des réallocations de ressources. Vous avez pris un
engagement, durant la campagne électorale, qui était 1 % du
budget; c'était votre objectif, dans la mesure où vous
étiez portés au pouvoir. Vous allez prendre l'engagement, nous
autres, on va tenter de le livrer. C'est clair qu'on ne sera pas à 3 %
parce que, évidemment, sur le plan... Peut-être, on ne sait
jamais.
Mais une chose est certaine, c'est que nous avons, depuis le 23 janvier,
interpellé le système sur sa capacité d'éliminer ce
qui est en double, de faire plus avec ce que nous avons maintenant et il y a
des démonstrations de là où on peut le faire. C'est
d'abord par là que ça va passer, avant de parler
d'éléments qui vont attaquer la gratuité,
l'accessibilité et l'universalité. Ça ne veut pas dire
que, dans le système, il n'y a pas des abus. Il y en a, des abus. Vous
en connaissez, tout le monde en connaît des abus dans le système,
à la fois des dispensateurs de services et des consommateurs de
services, et c'est davantage ça qu'il faut éliminer, en
protégeant de manière tout à fait prioritaire les
personnes âgées et les jeunes. C'est à partir de ça
que nous allons travailler. Évidemment, on aura l'occasion de discuter
éventuellement du fond de tous ces dossiers. Mais le premier ministre a
toujours été très clair, il n'y aura pas de ticket
modérateur. Donc, à partir du moment où il n'y a pas de
ticket modérateur, selon le premier ministre, moi, je suis un ministre,
je partage cette idée et je vais m'assurer qu'on puisse la livrer.
Mme Soave: J'aimerais avoir la position du ministre, M.
Côté, sur les regroupements ou les fédérations, tel
que nous sommes aujourd'hui. Croyez-vous que notre présence est
importante? Si oui, pourquoi éventuellement couper les subventions,
parce que les regroupements on ne les subventionne plus?
M. Côté (Charlesbourg): Mon opinion a
évolué en cours de route. Au début, j'avais beaucoup
d'interrogations. J'en ai moins maintenant, mais il ne demeure pas moins qu'il
reste encore des interrogations. À la question: est-ce que les
regroupements d'organismes communautaires doivent demeurer et être
supportés financièrement?, la réponse est oui. Est-ce que
tous les organismes regroupant des organismes communautaires doivent demeurer?
Là, ma réponse est aussi claire, c'est non. Ils peuvent demeurer,
mais ils ne seront pas nécessairement financés. S'il y a
autonomie de la part des groupes communautaires et des regroupements de groupes
communautaires quant à leur mission, quant à leur objectif, il y
a aussi l'autonomie du gouvernement de reconnaître les champs dans
lesquels ils veulent exercer et nous devrons effectivement parler de
complémentarité des rôles. Et effectivement, le
communautaire, ou les regroupements communautaires, devra dans notre
perspective à nous être complémentaire au réseau et,
à ce moment-là, il n'y a pas de problème. Il n'y en aura
pas de problème. Ceux qui ne seront pas complémentaires risquent
peut-être d'avoir des problèmes, compte tenu de la mission que
nous avons. Je ne sais pas si ça répond à votre
question.
Le Président (M. Joly): M. le député.
M. Lazure: Sur cette question-là, je pense que
l'Opposition a une position qui est pas mal différente de celle du
ministre. Nous pensons qu'une fédération... Si je comprends bien,
vous êtes une fédération...
Mme Soave: Oui.
M. Lazure: ...de différents groupements. si je comprends
bien la réponse du ministre, ça voudrait dire que, selon le
nouveau plan, vous ne seriez pas financés.
M. Côté (Charlesbourg): Ce n'est pas ce que j'ai dit
du tout.
M. Lazure: Bien, vous avez dit: Une association d'associations ne
serait pas financée.
M. Côté (Charlesbourg): Non, non. M. Lazure:
Bien...
M. Côté (Charlesbourg): Au sens large, on parle de
regroupements.
M. Lazure: On va sortir les galées.
M. Côté (Charlesbourg): Non, non, on parle de
regroupements.
M. Delgado: Si on se réfère, s'il vous plaît,
aux orientations de Mme Lavole-Roux et aussi, je crois, à certains
articles de l'avant-projet de loi...
M. Lazure: Bien, expliquez-vous!
M. Delgado: ...ceux-ci, justement, parlent du fait que les
regroupements d'organismes ne seront pas considérés pour des
subventions. Alors, si c'est ça qu'on...
M. Lazure: J'ai bien compris ça, moi aussi. M. le
Président, si le ministre veut faire une mise au point...
Le Président (M. Joly): Je m'excuse... M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Dans mon esprit, ça a
toujours été très clair, peut-être que je ne l'ai
pas... Les regroupements, c'est oui en principe.
M. Lazure: Qu'est-ce qui est non, d'abord? C'est pour qui le
non?
M. Côté (Charlesbourg): C'est non. Non.
M. Lazure: Le non s'applique à qui?
M. Côté (Charlesbourg): Le non s'applique à,
mais je ne dis pas à tous les regroupements.
M. Lazure: Ah!
M. Côté (Charlesbourg): Non.
M. Lazure: m. le président, je pense que le regroupement
qui est une fédération d'associations, on ne va pas se mettre
à faire une sélection là-dedans. le gouvernement ne va pas
se mettre à faire une sélection: cette
fédération-ci, je la finance et, celle-là, je ne la
finance pas.
M. Côté (Charlesbourg): non, mais vous continuez
exactement dans la même veine dans laquelle vous étiez parti ce
matin donc, à tenter de trouver des...
M. Lazure: Non, mais je ne suis pas le seul à ne pas vous
comprendre, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): ...à tenter de
trouver des poux. Non, non, laissez-moi finir.
M. Lazure: Mais allez-y.
M. Côté (Charlesbourg): Laissez-moi finir. Si vous
avez bien suivi l'explication, je vous ai dit par après qu'il y avait
l'autonomie des groupes communautaires à se constituer avec des missions
qu'eux-mêmes se choisissent...
M. Lazure: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): ...ce que nous reconnaissons
et que nous allons clarifier dans la loi en termes de reconnaissance plus
clairs que nous ne les avons maintenant. J'ai aussi dit qu'il y avait
l'autonomie du gouvernement à accepter de financer des organismes
communautaires ou des regroupements d'organismes communautaires, compte tenu de
la mission propre du ministère et de la complémentarité de
ce qu'ils peuvent offrir. Donc, c'est dans cet esprit-là que ça
se passe.
M. Lazure: M. le Président, est-ce que je peux continuer
ma phrase?
Le Président (M. Joly): Faudrait voir à ne pas
faire un long débat.
M. Lazure: J'avais bien compris. Le ministre répète
que c'est l'autonomie du gouvernement de financer ou de ne pas financer. Bon.
Alors j'ai bien compris, mais nous, on dît que les
fédérations doivent être financées, les
fédérations de groupements qui s'occupent du réseau de la
santé et des services sociaux. Évidemment, on parle du
réseau des services de santé et des services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Dites-moi donc, du temps
où vous avez été ministre de la Santé, s'il y a des
gens à qui vous avez dit non. Des fédérations ou des
regroupements? Est-ce que c'est déjà arrivé?
M. Lazure: Non, pas à ma connaissance.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Je vais
vérifier.
M. Lazure: Pas à ma connaissance.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Parfait. Je
vais vérifier et je vais revenir.
M. Lazure: Vérifiez. Oui, oui. Vous vérifierez. Pas
à ma connaissance. On l'a fait pour des groupes de personnes
handicapées en particulier. Alors, M. le Président, je pense
qu'une fédération...
Le Président (M. Joly): J'ai été assez
permissif. On a déjà donné chacun son point de vue.
M. Lazure: Sauf pour...
Le Président (M. Joly): je dis que le temps est
terminé. alors, partant de là, j'apprécierais beaucoup que
vous puissiez respecter les règles du jeu...
M. Lazure: Je vais au moins terminer ma phrase, M. te
Président.
Le Président (M. Joly): Partant de là, si vous
voulez remercier peut-être les gens qui sont là et qui se sont
déplacés pour venir nous voir.
M. Lazure: Je termine ma phrase, M. le Président. En tout
cas, l'Opposition prend une position qui est beaucoup plus claire que celle du
gouvernement et nous disons oui au financement des fédérations.
Je remercie l'Alliance pour son excellent mémoire.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Laprairie. M. le ministre délégué à la
Santé et aux Services sociaux.
M. Sirros: J'aimerais tout simplement remercier les gens qui sont
venus nous présenter leurs préoccupations quant au dossier de
l'accessibilité et peut-être pas tellement assister à un
débat politique avec l'Opposition. J'aimerais quand même profiter
de ces quelques secondes qui me restent pour faire une mise au point des faits,
parce que ce n'est pas le Parti québécois qui a donné les
écoles à la communauté grecque. Il faudrait que
l'ex-ministre, s'il...
M. Lazure: Le financement.
M. Sirros: Même pas le financement, même pas le
financement, M. le Président. Juste pour "the record", pour les
galées.
Le Président (M. Joly): Allez! Allez! Allez! Les faits,
donnez les faits, monsieur. Je pense que c'est pertinent.
M. Sirros: Le financement des écoles grecques a
été entrepris par le gouvernement libéral en 1971 et
c'était parce que, en plus, les écoles grecques avaient
changé le nom d'École anglo-grecque... C'était
l'école grecque, Anglo-
Greek School, et elle avait adopté le programme de langue
française comme langue d'enseignement, en 1971 pour être exact.
Ça a été reconnu et financé par le gouvernement
libéral. Alors il faudrait bien que l'ex-ministre, avant de faire des
affirmations comme celle-là, rétablisse au moins les faits. Ce
que le Parti québécois a fait en 1978, c'est d'avoir
modifié la formule de financement.
M. Lazure: Ah oui! On a assuré le financement sur une base
permanente, M. le Président.
M. Sirros: Ha, ha, ha! On peut interpréter les choses
comme on le veut, mais les faits sont là.
M. Lazure: Sur une base permanente et non pas temporaire.
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît. Merci pour
ces précisions.
M. Sirros: C'était permanent. (12 heures)
Le Président (M. Joly): Au nom des membres de cette
commission, je tiens à vous remercier et je pense que ce qui a
été dit est déjà enregistré. Alors partant
de là, c'est déjà de bon augure.
Je vais demander aux gens représentant le groupe Auto-Psy
provincial de bien vouloir s'avancer, s'il vous plaît!
Alors, bonjour et bienvenue à cette commission. Vous voyez que
c'est un sujet qui suscite beaucoup d'intérêt. Alors, vous
connaissez les règles du jeu. Vous avez une vingtaine de minutes pour
pouvoir vous exprimer de façon la plus concise et la plus précise
possible. Par après les membres de cette commission se réservent
le privilège de vous poser quelques questions. Alors, que la personne
responsable du groupe puisse bien s'identifier et aussi nous introduire les
gens qui l'accompagnent, s'il vous plaît.
Groupe Auto-Psy provincial
M. Vaz (Joviano): Alors, moi, je suis Joviano Vaz,
président du conseil d'administration. À ma gauche, Mme Lucie
Dupré, vice-présidente. À ma droite, M. Pierre Carpentier,
agent de développement et, un peu plus loin, M. Paul Morin, membre du
conseil d'administration.
Le Président (M. Joly): Alors, allez, M. Vaz.
M. Vaz: Autonomie-Psychiatrisé-e-s est un organisme
provincial de défense et de protection des droits des personnes
psychiatrisées. Depuis bientôt dix ans,
Autonomie-Psychiatrisé-e-s fait de la défense de droits aussi
bien individuels que collectifs, agit à titre de groupe de vigilance et
de pression et par les moyens dont il s'est doté
fait un travail d'information, de sensibilisation et de promotion. Il a
publié un guide des droits, un guide des médicaments du
système nerveux central. Et a produit quatre documents vidéos
portant sur les conditions de vie des personnes psychiatrisées. En 1984
et 1987, il a été le maître d'oeuvre des festivals
Folie-Culture à Québec et à Montréal.
Autonomie-psychiatrisé-e-s opère sur une base régionale en
cinq endroits du Québec: l'Annonciation, Shawinigan, Châteauguay,
Montréal et Québec.
La Loi sur les services de santé et les services sociaux est le
cadre d'un système avec lequel toute la population du Québec a
à composer un jour ou l'autre. Cette loi occupe donc une place
importante dans la vie de chacun et chacune d'entre nous. Il convient donc d'y
poser un regard critique. C'est ce que nous tenterons de faire ici.
En tant que membres d'un organisme communautaire dont l'activité
principale est la défense des droits des personnes
pyschiatrisées, nous avons cherché à questionner surtout
les articles de l'avant-projet de loi qui risquent d'avoir une incidence sur la
qualité de vie des personnes dont nous défendons les
intérêts. Nous endossons par ailleurs les recommandations
contenues dans le mémoire déposé par le Regroupement des
ressources alternatives en santé mentale du Québec dont nous
sommes membres, un mémoire qui propose une appréciation de
l'ensemble de l'avant-projet de loi. Maintenant, Je cède la parole
à Lucie.
Mme Dupré (Lucie): Merci. Je vais débuter avec
l'article 8 de l'avant-projet de loi sur la santé et les services
sociaux qui stipule que: Toute personne a le droit de participer à
l'élaboration du plan d'intervention visé à l'article
149." La formulation de cet article est ambiguë en ce qu'elle peut vouloir
dire que n'importe qui peut participer à l'élaboration d'un plan
d'intervention destiné à une personne donnée alors que, de
toute évidence, le législateur voulait par là
établir le droit de toute personne à participer à
l'élaboration du plan d'intervention qui la concerne.
L'article 8 renvoit à l'article 149 qui établit le devoir
qu'a l'établissement d'élaborer un plan d'intervention pour
chaque bénéficiaire faisant partie d'une catégorie
déterminée par règlement. Le document "Orientations" du
ministère de la Santé et des Services sociaux reconnaissait, et
je cite que "la personne est la raison d'être du système de
services. Pourtant elle a souvent plus de prise sur son organisation, son
fonctionnement et parfois même sur les décisions qui la concernent
directement. Cette situation est d'autant plus paradoxale que les
résultats dépendent, dans une large mesure, de la capacité
d'adaptation et du degré d'autonomie de la personne. Il importe donc de
définir des modes d'intervention souples, personnalisés qui
tiennent compte des besoins et des ressources de chacun".
Dans cette optique, nous croyons qu'il serait judicieux de
préciser qu'"un établissement doit élaborer, pour chaque
usager et usagère et avec sa participation, un plan d'intervention", de
façon à responsabiliser les personnes visées, d'une part,
et aussi à prévenir les situations fréquentes où la
personne pour qui on a élaboré un plan d'intervention se voit
obligée de l'accepter en bloc sans quoi elle est menacée
d'être privée des soins auxquels elle consent. Dans bien des cas,
c'est la règle du tout ou rien qui fait que la personne n'a pas vraiment
le choix d'accepter ou de refuser le plan d'intervention.
Nous recommandons donc que la formulation de l'article 149 tienne compte
de la pertinence de la participation de l'usager ou de l'usagère
à l'élaboration de son plan d'intervention.
De plus, au deuxième alinéa de l'article 149, il est dit
que le plan d'intervention peut être modifié en tout temps. Nous
demandons que soit ajouté "sous réserve de l'acceptation de
l'usager ou de l'usagère ou de son représentant", et ce, afin de
respecter l'esprit de la recommandation précédente.
L'article 14 stipule que rien ne limite les libertés qu'a une
personne de choisir le professionnel ou l'établissement dont elle
désire recevoir des services. La loi actuelle reconnaît
également ce droit. Cependant il s'avère que, dans la pratique,
cette liberté est entravée de bien des façons. On nous a
souvent rapporté les difficultés auxquelles se heurtent les
personnes qui veulent changer de psychiatre dans un établissement.
L'expérience démontre que ces professionnels refusent presque
systématiquement de traiter une personne qui n'est pas satisfaite des
soins prodigués par un confrère. Les psychiatres d'un même
établissement font preuve d'une telle "solidarité11
qu'elle constitue en fait une entrave à une liberté inscrite dans
la loi.
Nous demandons qu'obligatoirement, dans les cas où une personne
cherche à obtenir les services d'un professionnel et que cette demande
est refusée, les raisons de ce refus lui soient fournies par
écrit. Le choix du professionnel constitue également un
problème de taille pour les personnes qui habitent dans les
régions éloignées. La pénurie de
spécialistes dans ces régions rend problématique la
possibilité qu'a une personne de choisir. Malgré les mesures
in-citatrices qu'a prises le ministère, la situation est demeurée
inchangée, c'est-à-dire que la liberté de choisir le
professionnel est très souvent restreinte.
En ce qui a trait au choix de l'établissement,
l'expérience démontre que les personnes qui ont reçu des
services d'un établissement et qui sont de retour dans la
communauté ont beaucoup de mal à obtenir les services d'un autre
établissement. Pourtant, il se peut très bien que les besoins de
la personne aient changé ou qu'elle ressente le besoin de changer d'air,
ce
qui nous apparaît très légitime, compte tenu de la
charge dramatique dont est souvent porteuse l'hospitalisation en psychiatrie.
Une personne qui a vécu pendant un certain temps dans un centre
hospitalier de longue durée et qui est de retour dans la
communauté, devrait pouvoir obtenir des services d'une ressource moins
lourde, dont le caractère stigmatisant serait moins marqué.
Dans l'état actuel des choses, il s'avère impossible
à une personne qui a déjà séjourné au centre
hospitalier Robert-Giffard, par exemple, d'être suivie par un
professionnel travaillant dans un département de psychiatrie d'un
hôpital général. On invoque alors le fait que la personne a
déjà un dossier dans un autre établissement et que c'est
là qu'elle doit s'adresser. Nous trouvons inadmissible que, pour des
raisons administratives, la personne soit privée d'un droit reconnu par
la loi. En quoi il nous apparaît que la politique de sectorisation
constitue également une entrave à l'exercice du droit de choisir
l'établissement.
La récente affaire de la Cité de la santé de Laval
illustre bien les résistances qui s'opposent à l'application de
l'article 6 de la loi actuelle. On se rappellera que l'affaire en question a
été portée devant la Cour supérieure à la
suite de la décision de la Cité de la santé de Laval de
limiter l'accès aux services d'obstétrique aux femmes de la
région. Un médecin et deux de ses clientes ont donc
décidé de contester la réglementation de l'hôpital
devant un tribunal dont le juge, invoquant les articles 4, 5 et 6 de la Loi sur
les services de santé et les services sociaux, donna raison aux
plaignants en invalidant les règlements de l'hôpital qui
limitaient l'accès au service. Les deux règlements, a conclu la
Cour, portent illégalement atteinte au libre choix du médecin et
de l'établissement, de môme qu'au droit du médecin de
traiter les patientes qu'il accepte de suivre.
M. Vaz: Je demanderais maintenant à Paul Morin de
continuer l'exposé de notre mémoire.
M. Morin (Paul): L'article 16 stipule que l'établissement
ne peut refuser l'accès au dossier médical ou social d'un
bénéficiaire de 14 ans ou plus que momentanément, et je
cite, "si, de l'avis de son médecin traitant, il en résulterait
vraisemblablement un préjudice grave à sa santé". Nous
croyons, quant à nous, que toute personne doit avoir le contrôle
sur son avenir et qu'une meilleure information donne aux usagers et aux
usagères une meilleure prise sur le devenir de leur santé. Le
fait d'être mieux informés leur permet de prendre une part plus
active à leur traitement, favorise la prise en charge du processus de
recouvrement de la santé, bref leur permet d'accéder à une
plus grande autonomie.
L'exception du "préjudice grave" est surtout invoquée dans
le cas de demandes provenant de personnes recevant des soins psychiatriques,
alors que c'est là que le risque de dérogation à la
règle touchant le consentement éclairé est peut-être
le plus élevé. L'expérience montre que l'exception du
préjudice grave est beaucoup trop souvent invoquée par les
médecins. Nous recommandons que cette exception ne soit plus
prévue par la loi. Si le législateur décidait de la
maintenir, nous demandons que le médecin soit tenu d'expliquer par
écrit son refus et qu'une révision obligatoire soit prévue
à tous les cinq jours ouvrables.
Au sujet de l'article 112, l'article 112 stipule, et je cite, que
malgré la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et
sur la protection des renseignements personnels, les dossiers et procès
verbaux du conseil des médecins, dentistes et pharmaciens sont
confidentiels. Nous ne sommes pas d'accord avec cette exception. Le conseil des
médecins, dentistes et pharmaciens est l'instance responsable du
contrôle et de l'appréciation des actes médicaux dans ces
établissements, c'est-à-dire l'article 110. Les dossiers et
procès-verbaux du CMDP sont donc des documents pertinents pour
évaluer la qualité des soins et les moyens susceptibles de les
améliorer. Pourquoi donc ces grands secrets? Un des objectifs du
système de santé n'est-il pas de donner les meilleurs soins
possibles?
C'est pourquoi nous recommandons que les dossiers et
procès-verbaux du CMDP soient assujettis à la Loi sur
l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des
renseignements personnels.
Au sujet de l'article 202, nous recommandons que les organismes
communautaires bénéficient de la même assurance qu'un
permis ou un certificat médical - municipal pardon ne pourra leur
être refusé. - Vous avez raison. C'est un cas de curatif. - Au
Québec, au nom de la solidarité et de la responsabilité
des communautés locales envers les personnes en difficulté, le
gouvernement a, en 1977, par le biais de l'article 158 de la Loi sur les
services de santé et services sociaux, interdit aux municipalités
d'approuver des règlements proscrivant des structures d'accueil. Donc,
c'est l'article 158 que vous avez devant vous: Nul permis ou certificat
médical - encore - municipal ne peut être refusé... Enfin
vous avez l'article devant vous.
Cependant, cette mesure s'est avérée insuffisante à
disséminer les ressources et à contrer l'opposition d'un nombre
de quartiers voisins potentiels de ressources. Il faut donc mettre l'accent sur
la nécessité d'un développement harmonieux des ressources
résidentielles, tout en respectant les droits et intérêts
des personnes psychiatrisées, considérant: que l'article 158 n'a
rien résolu en termes de discrimination; que l'article 158 n'intervient
pas au niveau de la concentration des ressources, donc, avec le risque de
créer des ghettos - c'est plus qu'un risque, c'est la
réalité - qu'il y a nécessité d'une concertation
structurée entre la population,
_ les municipalités et les ressources; qu'il faut faciliter le
développement harmonieux de ressources résidentielles dans la
communauté, tout en assurant le droit de toute personne de vivre dans la
communauté.
Pour ce faire, nous recommandons que le législateur s'inspire du
modèle de la loi PADAVAN de l'État de New York qui a
encadré de façon précise le processus de
dissémination des ressources dans la communauté.
À partir du principe qu'aucune communauté ne devrait
être "envahie" et que chacun doit faire sa part, le processus
d'implantation des ressources résidentielles est régi de
façon stricte. Une collectivité locale a 40 jours pour en appeler
de la décision de l'État de permettre l'établissement
d'une ressource. Cependant, les seuls motifs d'appel sont la concentration de
telles ressources dans la communauté ou la possibilité d'une
alternative plus adéquate; un commissaire a 90 jours pour rendre sa
décision. Depuis l'adoption de la loi, en 1977, 6000 places se sont
ajoutées dans les ressources résidentielles.
Article 229. Au sujet des organismes communautaires, la
définition proposée par l'avant-projet de loi ne correspond pas
à celle formulée dans la politique de santé mentale. La
politique précise, d'une part, que la communauté doit être
à l'origine de la création de l'organisme et d'autre part, que
celui-ci est autonome dans ses orientations et ses pratiques et que son conseil
d'administration est composé majoritairement d'usagers et
d'usagères de ses services et des personnes de son milieu.
L'avant-projet de loi ne dit rien de ce qui doit être à l'origine
de leur création et, chose plus grave, ne précise pas qu'ils
doivent être autonomes dans leurs orientations et leurs pratiques. Enfin,
la composition du conseil d'administration proposée par l'avant-projet
de loi ne donne pas l'assurance qu'il y aura des usagers ou des usagères
de l'organisme au conseil. En raison de l'imprécision de la
définition, une ressource intermédiaire peut prétendre
être un organisme communautaire.
Article 230. La formulation de l'article suggère que la
régie régionale a le loisir de financer ou de ne pas financer un
organisme communautaire selon son bon vouloir: "Une régie
régionale peut...". Y a-t-il un recours de prévu, si un organisme
se voit refusé tout financement? Et qu'est-ce qui garantit que la
régie régionale n'exercera pas un contrôle sur les
orientations et les pratiques des organismes communautaires, par le biais du
financement?
Article 231. Cet article signe ni plus ni moins l'arrêt de mort du
Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du
Québec, ainsi que d'autres regroupements d'organismes communautaires.
Nous trouvons inacceptable que l'avenir des regroupements qui ont
contribué grandement à l'essor et au développement du
mouvement communautaire soit ainsi mis en péril. Nous demandons que cet
article soit retiré de l'avant-projet de loi et que la loi
prévole le financement des regroupements provinciaux d'organismes
communautaires.
Et je passe la parole à Pierre Carpentier. (12 h 15)
M. Carpentier (Pierre): Articles 238 et 239. Le contenu de ces
articles mérite que nous nous attardions à l'examen de l'ensemble
des mécanismes devant assurer la protection des droits des
bénéficiaires. Jusqu'à tout récemment, la
promotion, le respect et la protection des droits des personnes vivant des
problèmes de santé mentale ne faisaient pas l'objet d'une
attention particulière de la part, aussi bien des intervenants que du
législateur. Quelques initiatives, par ailleurs isolées, mal
concertées, ont peu à peu fourni un éclairage permettant
d'identifier un certain nombre de situations où les droits des usagers
et des usagères des services de santé et de services sociaux ne
sont pas respectés.
Le dépôt récent de la politique de santé
mentale est venu confirmer la pertinence et la nécessité de
l'instauration d'un système complet de promotion, de respect et de
protection des droits. L'imminence de la mise en place d'un tel système
invite, dans un premier temps, à considérer l'état actuel
des choses et, ensuite, à proposer un cadre d'intervention qui soit
opérationnel et indépendant du réseau de services. Il
importe qu'en regard aussi bien de la politique de santé mentale que des
dispositions législatives que le Parlement s'apprête à
étudier, ce cadre assure l'exercice des droits fondamentaux de
l'individu aussi bien que le respect de ses droits relatifs à
l'utilisation des services.
Dans la loi actuelle, une des fonctions du comité des
bénéficiaires est de défendre les intérêts
collectifs des bénéficiaires ou, à la demande d'un
bénéficiaire, ses intérêts en tant que
bénéficiaire auprès d'un établissement ou de toute
autorité compétente. On notera, au passage, qu'il est question,
dans le texte de loi, d'"intérêts0 et non de droits. La
loi actuelle prévoit la mise en place de comités de
bénéficiaires seulement dans les établissements offrant
des soins de longue durée et l'hébergement. Selon l'avocat
Jean-Pierre Ménard, il s'avère "que la plupart des comités
de bénéficiaires sont sous le contrôle effectif du
directeur général de rétablissement. Un bon nombre ne
s'occupe que des loisirs et très peu sont impliqués dans la
défense des droits collectifs ou individuels".
Par ailleurs, l'imprécision du mandat de certains comités
est accentuée, dans certains établissements, par la mise en place
d'un ombudsman chargé de défendre les droits des
bénéficiaires. Le poste d'ombudsman n'est pas inscrit dans la loi
et les personnes qui occupent ce poste sont engagées, supervisées
et payées par l'établissement qui fournit également les
services aux bénéficiaires. Je cite Me Ménard: "En
pratique, même si l'établissement l'identifie commodément
comme protecteur du bénéficiaire
ou ombudsman, ses pouvoirs ne lui permettent pas de remplir
ce rôle adéquatement. Il s'avère qu'il remplit le plus
souvent le rôle d'agent de liaison entre les bénéficiaires
et l'établissement".
Pour ce qui est des personnes qui ne sont pas
hospitalisées dans un centre hospitalier de longue durée, centre
hospitalier de courte durée, ressources extérieures,
département de psychiatrie, etc., ou vivant dans la communauté,
certains organismes communautaires se sont donnés pour mandat d'assurer
la promotion et la défense de leurs droits. Ces organismes ne sont pas
reconnus par la loi actuelle et ne disposent donc d'aucun pouvoir, ce qui
limite forcément leur intervention. Quoique prévu par la
politique de santé mentale, leur financement n'est toujours pas
assuré.
En ce qui a trait au traitement des plaintes, plusieurs
instances peuvent être appelées à Jouer un rôle. En
vertu de la Loi sur les commissions d'enquêtes, la Commission des droits
de la personne possède les pouvoirs d'enquête et l'immunité
attribuée aux commissaires. Je cite: "Elle peut tenter d'amener les
parties à régler leur différend ou, à
défaut, recommander la cessation de l'acte reproché,
l'accomplissement d'un acte ou le paiement d'une indemnité". Cependant,
son mandat est très limité. Elle ne peut intervenir que s'il y a
discrimination ou exploitation. Par ailleurs, l'Office des personnes
handicapées du Québec, tout en fournissant des services, peut
faire de la défense et de la promotion des droits. Il apparaît
cependant que ces deux mandats sont difficilement conciliâmes.
Pour ce qui est des fautes professionnelles, ce sont les
corporations professionnelles qui ont la responsabilité de traiter les
plaintes. La justice professionnelle est donc exercée par les pairs. Les
usagers ne participent en aucune façon au processus de décision
relatif à une plainte, et ce, peu importe l'étape où la
plainte est traitée.
Enfin, le recours au CRSSS constitue le premier et le seul
recours non judiciaire, général, disponible aux usagers et aux
usagères du système de santé du Québec. Le CRSS a
le pouvoir de recommander à l'établissement de rectifier la
situation qui a fait l'objet d'une plainte ou de s'adresser, par requête,
à la Commission des affaires sociales pour obtenir des correctifs
à la situation. Il s'avère cependant que les CRSSS n'ont pas,
jusqu'à maintenant, démontré la volonté politique
d'assumer ce pouvoir face aux établissements.
"L'étude détaillée des plaintes a
révélé que, de façon systématique et peu
importe les régions, les plaintes qui mettent en cause des politiques et
des pratiques institutionnelles, administratives ou professionnelles,
étaient soit référées, soit neutralisées au
niveau du CRSSS. Dans ce contexte, nous croyons fermement que le CRSSS est en
conflit d'intérêt direct lorsqu'il doit traiter les plaintes des
usagers qui mettent en cause certaines de ses politiques. Nous croyons donc que
les CRSSS ne devraient plus exercer la fonction de recevoir les plaintes des
usagers, car ils sont trop associés à la prestation de services
pour avoir une indépendance réelle dans le traitement des
plaintes des usagers. Présentement, les CRSSS ne remplissent finalement
qu'un rôle tampon entre les usagers et les établissements."
Je vais devoir abréger. Je voudrais quand même
aborder la question qui, pour nous, est centrale dans notre mémoire,
c'est la proposition qu'on fait d'un système régional
d'"advocacy", en comparant cette proposition à ce qui découlerait
de l'application de l'avant-projet de loi.
Voici, en bref, ce qui découlerait de la mise en
application des dispositions contenues dans l'avant-projet de loi. Les
comités de bénéficiaires, dont la mise sur pied est
dorénavant rendue obligatoire dans les centres hospitaliers
psychiatriques, joueraient sensiblement le rôle qui leur était
dévolu, l'organisation des loisirs en moins. L'aide et l'accompagnement
des personnes admises dans les départements de psychiatrie, dans les
ressources intermédiaires, les ressources de type familial ou vivant
dans la communauté, seraient assurés par un organisme
communautaire. Le recours au CRSSS (Régie régionale) serait
maintenu, de même que l'éventualité que le CRSSS adresse
une requête à la Commission des affaires sociales, s'il est d'avis
que les droits du plaignant risquent d'être mis en péril à
cause de l'attitude d'un établissement. Dans la logique de ce cadre
d'intervention, le Protecteur du citoyen deviendrait le recours ultime. Nous
croyons que ce cadre d'intervention manque d'indépendance à
l'égard du réseau et qu'il n'est donc pas apte à assurer
la défense et la protection des droits dans le domaine de la
santé mentale.
Le modèle que nous proposons, quant à nous,
suggère l'implantation d'un système régional d'"advocacy"
qui aurait un pouvoir d'enquête et de recommandation. Ce système
serait mis en place par un OSBL indépendant du réseau et rendrait
caduc le service des plaintes du CRSSS. Ce système régional
pourrait intervenir dans les cas de plaintes provenant de personnes vivant dans
les établissements et dans la communauté. Les liens
étroits qu'il entretiendrait avec les comités de
bénéficiaires pourraient résulter en ententes de services
qui laisseraient aux comités la latitude nécessaire à
l'exercice de la fonction d'aide et d'accompagnement. L'organisme
régional disposerait de pouvoirs d'enquête (accès aux
dossiers médicaux, circulation libre dans les établissements) et
de recommandation. Indépendant du réseau, H serait amené
à intervenir tant au niveau des droits individuels que des droits
collectifs, dans leurs dimensions légale, sociale et
thérapeutique. Selon la nature de la plainte, cet organisme pourrait
être amené à faire des représentations auprès
d'une cour civile ou criminelle, d'une corporation professionnelle, de
la Commission des droits de la personne ou de la Commission des affaires
sociales.
M. Vaz: M. le Président, malgré le temps...
Le Président (M. Joly): Je vous permets quand même
de déborder de quelques minutes.
M. Vaz: Merci beaucoup, M. le Président. Je demanderai
à Paul de faire une courte Intervention, donc c'est un ajout, concernant
le contrôle de la qualité dans les établissements.
M. Morin (Paul): Je siège présentement au
comité tripartite de Montréal qui fait le plan d'organisation de
services. Le plan est terminé, il est en consultation,
présentement, et, depuis ce temps, j'ai commencé à
travailler au niveau de la Montérégle à implanter le
système d'aide et d'accompagnement en santé mentale prévu
par la politique. Au niveau du comité tripartite de Montréal, un
des points majeurs, ça a été toute la question de la
convergence, de la nécessité qu'il n'y ait plus de réseaux
parallèles de services, que les réseaux parallèles de
services puissent se fusionner. À ma grande surprise, en travaillant
dans la Montérégie, je me suis rendu compte qu'il y a un
réseau parallèle effectif en Montéregie, c'est le
réseau des ressources clandestines. J'ai appris que le réseau des
ressources clandestines en Montéregie était
particulièrement vigoureux et assez actif. Ça existe en
Montéregie, c'est un réseau parallèle de services, et je
pense que le ministère doit agir à ce niveau-là.
Il y a un autre point, aussi, qui pose problème, c'est la
question du contrôle de la qualité. J'ai étudié un
peu ta question du contrôle de la qualité et H semblerait qu'au
niveau du ministère ce service-là est relativement
débordé. En Montéregie, effectivement, ça cause des
problèmes. Je fais une référence au document "Vieillir en
toute liberté" qui fait un bilan du contrôle de la qualité.
On dit: "Jusqu'à présent, l'usage qu'a fait le ministère
des mesures législatives de contrôle a semblé
démontrer que celles-ci sont mal adaptées et ne permettent pas de
réaliser la mission du ministère. Bien que l'attribution et
l'annulation d'un permis soient réglementés, II s'avère,
dans les faits, très difficile de retirer un permis. En effet, les
normes inscrites dans les règlements sont très imprécises
en matière de qualité des services et l'invocation du seul
intérêt public s'est avéré jusqu'à maintenant
relativement inefficace." Le rapport sur les abus faits aux personnes
âgées recommande: "Que les dispositions pertinentes de la Loi sur
la santé et les services sociaux devraient donc être
révisés pour permettre la surveillance adéquate des
activités sanitaires et la cessation des activités
Illégales."
Ce qu'on vous soumet là-dessus, c'est qu'il y a un
problème majeur dans ce sens-là. M. le ministre, vous avez agi
récemment au niveau des derniers recours; je pense qu'il y a aussi des
mesures qui, très bientôt, seront prises au niveau du centre
hospitalier Louis-Hippolyte-Lafontaine. Donc, la question de la qualité
de vie vous tient à coeur. Et cette question du contrôle de la
qualité des permis qui existent présentement et aussi le fait
qu'il y a un développement des ressources illégales, au niveau de
l'avant-projet de loi, ce n'est pas très clair ce qu'il y a
là-dedans. C'est cet ajout important qu'on voulait vous signaler.
M. Vaz: Je terminerai, M. le Président, en vous disant que
nous croyons que les recommandations formulées ici, si le
législateur veut bien en tenir compte, peuvent contribuer à
changer les choses. C'est ce que nous souhaitons.
Le Président (M. Joly): Merci, monsieur. M. le ministre de
la Santé et des Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président C'est un mémoire que je considère très
intéressant et relevé, qui a comme préoccupation le
bénéficiaire. Ça fait différent de notre premier
accrochage connu sur la place publique, qui n'était pas la meilleure
sortie de moi et de vous. Mais, en tout cas, disons qu'on va tenter de se
réajuster avec votre mémoire, qui m'apparaît
définitivement centré sur les besoins de la personne, du
bénéficiaire. Ça, comme on l'a dit, je le
répète, ça doit être la ligne de conduite qu'on doit
adopter dans la réforme.
Vous avez évoqué le cas de dernier recours. Oui,
effectivement, c'est ça. Je pourrais vous en nommer d'autres qui ne sont
pas encore passés, mais qui vont venir aussi, dans la même ligne
de pensée, et qui vont brasser le système, demander au
système qu'il se réajuste.
Si je tire une première conclusion de votre présentation,
c'est le bénéficiaire, l'usager avant tout. Ça a toujours
marqué et caractérisé vos défenses, et ce n'est pas
différent dans le mémoire que vous présentez ce matin.
C'est une approche avec laquelle je suis d'accord. Ça ne veut pas dire
que je suis d'accord avec tout ce qu'il y a dans votre présentation,
parce que je comprends qu'à l'occasion il faut toujours en demander pas
mal plus pour être capable d'en avoir un petit peu. Ça a toujours
été la technique dans le passé et le réseau est
habitué à ça. Donc, ce sont ces mentalités qu'il
faut tenter de changer.
Mes questions porteront davantage sur les intérêts du
bénéficiaire, autant que possible, tout le long de la
chaîne. En particulier, dans le cas de... Et je commencerai par
ça. C'est vrai que la loi actuelle du ministère ne permet pas -
ou très difficilement demain matin - de faire la démonstration
qu'on puisse révoquer un permis. C'est vrai qu'il faut se donner dans la
prochaine loi tout ce qu'il faut pour être capable de le faire
sans être contesté devant les tribunaux. Dans
ces cas-là comme dans d'autres, c'est l'exemple qu'il faut finir par
être capable de donner. La journée où on va "canceller" un
permis, vous allez voir une certaine qualité augmenter. Mais il va
falloir finir par y arriver, sans que ça puisse prendre cinq ans devant
les tribunaux et sans que ça coûte une fortune pour être
capable de le faire. À ce niveau, je partage votre point de vue. Il faut
renforcer les mesures qui, sur le plan légal, seront l'assise même
de la "cancellation" des permis demain matin.
Ça ne veut pas dire que tous les
établissements sont mauvais. Ça ne veut pas dire qu'il ne se
dispense pas une bonne qualité de services. Ça ne veut pas dire
non plus que certains établissements qui ont créé le poste
d'ombudsman l'ont fait pour cacher des choses, je ne pense pas. Il y a
peut-être certains établissements, mais ce n'est certainement pas
le lot.
Vous avez évoqué l'ombudsman. Qu'est-ce qu'il
faudrait donner à l'ombudsman? On les a reçus au début de
la commission parlementaire. Ils sont venus nous expliquer leurs forces, leurs
faiblesses et leur dépendance, donc qui fait partie des faiblesses.
Qu'est ce qu'il faudrait faire de plus - ombudsman? comité des
bénéficiaires? - pour être capable de régler
certains problèmes? Et je vous donne uniquement un exemple, c'est le
comité des bénéficiaires de Louis-Hippolyte-Lafontaine,
qui m'a contacté pour me parler de certains problèmes. Pas des
professionnels, le comité des bénéficiaires. Donc, qu'est
ce qu'il faut ajouter, dans toute la chaîne qu'on devra faire, pour
s'assurer que le bénéficiaire est au centre? Ombudsman, est-ce
que ça doit être maintenu? Si c'est maintenu, qu'est-ce qu'on doit
lui donner comme pouvoirs pour qu'il puisse remplir son rôle? Qu'est ce
qu'on doit donner au comité de bénéficiaires pour faire
ça? Et on va monter la chaîne comme ça jusqu'à la
Régie régionale, et jusqu'à des pouvoirs additionnels pour
être capable d'intervenir au-delà que dans le réseau. Je
suis d'accord avec ça. Pas nécessairement avec votre structure,
mais où est-ce qu'on se raccroche ou s'attache pour être capable
d'aller en dehors des cercles d'initiés pour juger des plaintes? On en a
tous les jours au cabinet, mais on n'a pas plus de pouvoirs que n'importe qui
pour les régler. On ne fait que questionner. Ça crée un
peu de tumulte et d'inquiétude mais, au-delà de tout ça,
ça ne veut pas dire qu'on règle tout.
M. Morin (Paul): Moi, ce que je répondrais
là-dessus, c'est que ça prend des règles claires et
précises. Je vous donnerais deux exemples: l'exemple américain et
l'exemple hollandais. (12 h 30)
Aux États-Unis, on a inscrit dans la loi
l'advocacy". C'est une loi fédérale. Chaque État
américain doit avoir un système d'"advocacy". C'est clair. Ce
système d'"advocacy" c'est, soit un organisme sans but lucratif, soit
une agence de l'État qui ne fait pas affaire en santé et services
sociaux. C'est inscrit. C'est une loi américaine. C'est clair. C'est
précis.
En Hollande, ce n'est pas une loi, sauf que c'est beaucoup
plus... ça fonctionne à la bonne entente. En Hollande, ils ont
des comités de bénéficiaires. Les comités de
bénéficiaires en Hollande font uniquement du collectif, et les
ombudsmans, qui sont en fédération, une fédération
autonome, indépendante, financée par le ministère, eux,
font de l'individuel. Donc, là, c'est clair. Chacun connaît sa
place.
Ici, au Québec, le problème c'est que tu as
des ombudsmans qui ne sont pas dans la loi, tu as le service des plaintes du
Conseil régional qui n'a pas beaucoup... qui semble assez peu efficace -
enfin, c'est notre analyse - et, finalement, tu as les comités de
bénéficiaires dont le mandat est relativement assez large, mais -
il faut quand même dire les choses clairement - en santé mentale,
il y en a deux qui fonctionnent dans le sens du monde: celui de
Louis-Hippolyte-Lafontaine et celui de Robert-Giffard. Mais celui de
Robert-Giffard fait l'intervention individuelle et celui de
Louis-Hippolyte-Lafontaine est plus centré sur le collectif.
Ça fait que nous, ce qu'on dit dans notre
mémoire, ce qu'on propose... C'est sûr qu'on va à l'inverse
de ce qui est proposé dans le document "Orientations" où on parie
du Protecteur du citoyen et des ombudsmans. Nous, ce qu'on propose c'est
plutôt de faire une fusion entre... de laisser tomber la question
d'extensionner le mandat du Protecteur du citoyen. Nous, ce qu'on propose c'est
de fusionner le mandat au niveau des conseils régionaux et au niveau des
ombudsmans et de créer des OSBL C'est un peu le modèle
américain, finalement. C'est que tu donnes un mandat à un OSBL,
dans une région particulière, et cet organisme-là a un
mandat, comme aux États-Unis, un mandat de pouvoir et un pouvoir
d'enquête et de recommandation. Ce ne sont pas des gens qui sont
intégrés dans la fonction publique. Ça a l'avantage de
coûter moins cher. Ce sont des gens qui viennent de la communauté.
Ça se trouve à moins faire toute une espèce de
hiérarchie entre le comité de bénéficiaires,
après ça, ça va être le conseil régional,
après ça, il va y avoir l'ombudsman au travers de ça et,
finalement, en bout de ligne tu as tous les recours judiciaires qui,
évidemment, vont rester. C'est ça finalement qu'on propose. Nous
on n'est pas d'accord à ce qu'on généralise la fonction
d'ombudsman. C'est sûr que ça va à rencontre de certaines
idées. Mais on calcule que nous on veut plus miser sur les forces de la
communauté. Et c'est un peu ce que vous disait l'AQIS ce matin; quand
ils pariaient de système d'"advocacy", c'était plus dans le sens
général où on pariait des personnes vulnérables.
Mais si, comme dans le document "Orientations" on parie de créer un
organisme d'aide accompagnement. Là
déjà, on donne un mandat au communautaire. Pourquoi pas
l'extensionner? Pourquoi pas avoir un organisme communautaire qui fait de
l'aide et de l'accompagnement et un organisme communautaire, un OSBL, qui a un
pouvoir d'enquête? C'est dans ce sens-là que nous allons.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que je vous saisis
bien? Lorsque vous évoquez votre vécu ou le vécu que vous
connaissez, ce n'est pas un jugement négatif sur le comité des
bénéficiaires ni de l'ombudsman, mais c'est davantage un constat
du peu de pouvoirs qu'ils ont.
M. Morin (Paul): Enfin, les comités de
bénéficiaires ont tout simplement un pouvoir de recommandation,
enfin, pouvoir c'est un grand mot. Les comités de
bénéficiaires dans la réalité et dans beaucoup
d'établissements en santé mentale n'existent que sur papier.
Nous, on est en train de faire une recherche au niveau du suivi au niveau de la
politique de santé mentale par rapport aux comités de
bénéficiaires qui sont supposés avoir un pourcentage
d'argent. Il y a eu énormément de problèmes. Il y a eu une
entente claire entre celui de Robert-Giffard et l'administration. Ailleurs,
ça n'a pas été ça. On pourrait même vous
donner l'exemple que le ministère avait prévu qu'il y avait un
comité de bénéficiaires à la clinique Roy Rousseau.
On a appris, à notre grande surprise, que, finalement, H semble qu'il y
ait eu une entente entre la clinique Roy Rousseau et le Conseil régional
de Québec: vu que c'était du court terme à Roy Rousseau,
pas de comité de bénéficiaires à Roy Rousseau.
Nous, on considère que c'est extrêmement important au
niveau de la vie démocratique d'avoir des comités de
bénéficiaires. Là n'est pas la question. C'est simplement
que lorsqu'on parie de pouvoir d'enquête, il ne faut pas confondre. C'est
ça qui est intéressant entre le système hollandais et le
système... Au niveau du système hollandais, tu as... eux autres
ont été... au niveau des ombudsmans qui font de l'individuel...
Nous ce qu'on vous dit: Gardez les comités de
bénéficiaires. Là où II y a des comités de
bénéficalres qui sont très actifs, on peut Imaginer qu'ils
font de l'individuel, mais là où ils sont moins actifs, qu'ils
s'orientent surtout sur le collectif, et là tu vas avoir un organisme
sans but lucratif qui, lui, va vraiment avoir un pouvoir d'enquête. Donc,
là c'est clair. Mais le problème au Québec, c'est que tu
as une multitude de mandats, ça coûte une fortune et finalement,
en bout de ligne, les droits ne sont pas plus respectés. Nous ce qu'on
attend finalement de vous, du projet de loi, en bout de ligne, c'est que les
droits soient respectés mais avec des mandats très précis,
très clairs, comme aux États-Unis ou comme en Hollande et avec un
modèle original, ici, au Québec.
M. Côté (Charlesbourg): Je pense que c'est votre
voisin de gauche qui a évoqué tantôt qu'H y avait eu une
étude détaillée des plaintes. Ça été
fait par vous?
M. Carpentler: Non, ça n'a pas été fait
par... L'étude détaillée...
Une voix: M. Ménard.
M. Morin (Paul): Vous faites mention de l'étude
détaillée au sujet du traitement des plaintes, au niveau du
CRSSS, c'est Me Ménard.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Non, c'est parce que
vous l'aviez évoqué tantôt et je pensais que c'était
peut-être une étude parallèle qui pouvait donner d'autres
résultats.
M. Morin (Paul): Non. C'est Me Ménard. C'est
l'étude de Me Ménard.
M. Côté (Charlesbourg): Vous avez
évoqué tantôt le problème des régions. C'est
un problème qui a marqué la commission parlementaire de
manière très très évidente du début à
la fin: pénurie de ressources professionnelles et
spécialisées dans les régions du Québec. Je me
souviens que le député de Joliette, M. Chevrette, avait
évoqué que lui-même, à une demi-heure de voiture de
Montréal, avait énormément de difficulté à
avoir les ressources, tout le monde voulant se concentrer à
Montréal. Évidemment, nous autres aussi, on l'a fait, il y a eu
des mesures incitatives, vous l'avez dit tantôt, et ça n'a pas
donné grand-chose. On fait quoi? Comment est-ce qu'on règle le
dossier? Si vous étiez ministre, demain matin, qu'est-ce que vous feriez
pour régler ce problème-là?
M. Morin (Paul): Au niveau des ressources professionnelles?
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
M. Morin (Paul): Disons que c'est mon avis à moi, ce n'est
pas l'avis du groupe. On n'a pas vraiment travaillé là-dessus.
Mais je pense que pour les ressources professionnelles, spécifiquement
les ressources médicales, ici au Québec, enfin, c'est le
système de la libre entreprise. Les médecins peuvent
s'établir où ils veulent. Encore récemment, on m'a
raconté qu'à Châteauguay qui n'est pas très loin, il
y a deux ou trois semaines, pendant toute une nuit, il n'y a pas eu de
médecin à l'urgence. On ne parle pas de psychiatrie où on
est obligé d'importer des psychiatres d'un peu partout dans le monde
parce que les psychiatres ne veulent pas sortir de 111e de Montréal. Je
pense que l'État québécois devrait beaucoup, compte tenu
que ce sont nos taxes et compte tenu que ce sont des gens dans lesquels on
investit beaucoup... Et je pense que la
majorité des citoyens ne pleureraient pas si on encadrait
beaucoup plus strictement le travail des médecins et s'ils
étaient obligés finalement d'aller travailler dans certains
endroits, comme cela se fait dans d'autres pays. Je pense que ça a
peut-être l'air dictatorial, mais, bon, s'ils ne sont pas contents, ils
iront ailleurs et il va toujours y avoir assez de médecins au
Québec de toute façon pour donner des services aux gens. C'est
sûr que ça peut sembler une solution simpliste, sauf que, d'un
autre côté, le ministère a essayé l'incitation, 80
%, 120 %. Ça donne quoi en bout de ligne?
Spécifiquement au niveau de la santé mentale, il y a un
problème majeur finalement. La moyenne d'âge des psychiatres est
très élevée; elle est d'environ 55 ans. La profession est
très contingentée. Alors, si on dit qu'on veut avoir un
modèle biopsychosocial avec une intervention psychiatrique et qu'il n'y
a pas de psychiatres, qu'on soit conséquent et qu'on développe de
l'information pour les omnipraticiens, ce que fait un peu la politique de
santé mentale et que, finalement, les omnipraticiens soient
obligés d'aller un peu partout dans ce qu'on appelle les régions
périphériques. Parce que ça n'a pas de bon sens de
continuer à importer des psychiatres de France, parce qu'en France, il y
en a à la pelle, des psychiatres. On trouve ça assez ahurissant,
on parie des communautés culturelles qui ont le droit d'avoir des
services dans leur langue, mais lorsque vous avez des psychiatres de
différentes nationalités qui vont aller travailler dans des
hôpitaux de longue durée parce que nos psychiatres francophones ne
veulent pas aller travailler là, parce que c'est une clientèle
lourde qu'ils n'aiment pas et qu'ils aiment mieux faire du privé et que
là, vous avez des gens qui ont de la difficulté à
articuler trois mots en français et qui sont supposés comprendre
le délire psychotique de la personne quand ils ne sont même pas de
la même culture. Je ne voudrais pas m'étendre là-dessus,
mais je pense que ça pose problème.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, après des
mesures incitatives, c'est la coercition.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Morin (paul): je n'ai aucun problème avec ça. je
ne sais pas ce que mes collègues et consoeurs en pensent, mais je n'ai
aucun problème avec ça.
M. Côté (Charlesbourg): O. K. C'est
intéressant parce que, effectivement, il y a un problème assez
important. Je ne suis pas loin de partager à peu près tout ce que
vous avez dit.
M. Carpentier: On croirait que vous êtes dans
l'Opposition.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Non, pas du tout. Je pense
que... Non, c'est parce que je suis originaire d'une région.
Une voix: Vous êtes plus sensible.
M. Côté (Charlesbourg): Ça donne
peut-être un autre niveau de compréhension. De toute façon,
dans pas grand temps, il y a des mesures qui vont s'appliquer, qui ne feront
pas plaisir, mais |e ne suis pas là pour faire plaisir aux
professionnels. Je suis là davantage pour m'assurer que les
bénéficiaires aient les services qu'il faut.
Vous avez beaucoup parié d'accès aux dossiers, de
participation au plan de services. Évidemment, ce que je comprends,
c'est que, participation au plan de services, c'est oui, mais on est quand
même dans des situations peut-être extrêmes où on a un
bénéficiaire qui est en crise et c'est un petit peu plus
difficile de le faire participer à son plan de services ou d'avoir son
consentement quant au traitement à avoir. Je pense que ce sont ces
distinctions qui sont extrêmement importantes.
Quant à l'accès au dossier, c'est très
intéressant et ça pourrait éventuellement changer la
culture. Effectivement, c'est assez difficile et II faut être
culotté un peu de ce temps-là pour être capable d'avoir
accès au dossier médical. Il faut être tenace aussi. Est-ce
qu'il y a des limites à l'accès au dossier?
M. Vaz: Je crois qu'on doit définitivement l'adopter sans
restrictions.
M. Côté (Charlesbourg): Sans restrictions?
M. Vaz: Oui. Parce que, voyez-vous, M. le ministre, chaque fois
qu'un usager ou une usagère fait une demande pour avoir accès
à son dossier, malheureusement, c'est encore courant qu'on lui
réponde: Vous savez, dans votre dossier, il y a des choses que vous
n'aimeriez pas savoir, qui vont vous déranger. Je trouve ça
curieux, quand même, qu'en 1990 on pense encore comme ça. Il faut
se battre pour obtenir un résumé de dossier.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'on a des exemples?
Est-ce que vous avez... Tantôt, dans d'autres cas, vous avez donné
des exemples des États-Unis, de la Hollande. Est-ce qu'il y a des
exemples d'autres pays où l'accès au dossier est total?
M. Morin (Paul): Pas à ma connaissance. Même avec
cette loi-là, par rapport à la France, le Québec est
à l'avant-garde. Là-dessus, je vous le concède, on est
à l'avant-garde. Même si ce n'est pas total comme on le demande,
on est à
l'avant-garde sur l'accès au dossier.
M. Vaz: M. le ministre, cela ne nous empêche pas de nous
améliorer nous-mêmes.
M. Côté (Charlesbourg): Définitivement. Vous
savez, dans la vie, il y a des locomotives et il y a des wagons qui s'ajoutent
au train. À l'occasion, tu peux être la locomotive qui va
traîner les wagons. Ça va, merci.
Le Président (M. Joly): Merci. M. le député
de La Prairie.
M. Lazure: Merci. J'ai hâte de parler parce que c'est un
excellent mémoire. J'ai plusieurs questions. Je vais peut-être
commencer par les dernières que le ministre a soulevées. C'est
vrai qu'au Québec, l'accès au dossier a fait du progrès,
pour ainsi dire, depuis quelques années. Mais c'est vrai aussi qu'il y a
encore beaucoup d'interférence, de résistance. Moi, j'aime bien
la suggestion contenue dans votre mémoire où le médecin,
lorsqu'il pense que c'est à rencontre du bien du patient et qu'il
refuse, qu'il soit obligé de motiver par écrit, M. le ministre,
son refus. Je pense que c'est ça qui est... Motiver par écrit son
refus. Je pense que c'est la suggestion que vous faites. Je pense que c'est
très pertinent, ça. Ça n'a pas besoin d'être
très long. Une note au dossier: Je refuse l'accès du patient
à son dossier pour telle ou telle raison, point. C'est une excellente
suggestion, quant à mol, en tout cas, et c'est réalisable. Je
reviens de la pratique de... J'ai fait de la pratique pendant quatre ans et
demi, en psychiatrie, à Charles-LeMoyne, dans la région de M.
Morin et je dois dire, en tout cas, que de l'expérience que j'ai vue,
depuis quatre ans, à LeMoyne, en psychiatrie, l'accès est plus
ouvert au dossier. L'accès est plus ouvert, mais il y a encore du
progrès à faire.
La deuxième question, la pratique en région, en
particulier pour la psychiatrie. Je pense que le ministre pourrait compter sur
l'appui de l'Opposition, en plus des incitatifs qui ont plus ou moins
échoué, s'il veut recourir à des méthodes
coercltives. Je pense, malheureusement, moi, avec le recul - Je connais cette
question-là depuis des années et des années - je suis
obligé d'admettre que les seuls endroits où ça fonctionne,
c'est par la coercition, où le jeune spécialiste est
obligé d'aller, pendant deux ans, trois ans, quatre ans, pratiquer, soit
dans une région désignée, dépourvue de
spécialistes, soit dans un établissement d'une grande ville, mais
qui est dépourvu de spécialistes aussi, que ce soit à
Robert-Giffard ou à Louis-Hippolyte... Et conditionner ça
à l'obtention du permis et du numéro de paiement par la
Régie de l'assurance-maladie. Je pense que c'est la seule façon
de régler le problème.
Vos commentaires sur le conflit d'intérêts des CRSSS
concernant les plaintes, je les endosse à 100 %. Je pense que, là
aussi, avec le recul, maintenant, mol, j'ai la conviction profonde qu'il ne
faut pas laisser au CRSSS le traitement des plaintes. Parce que le CRSSS,
rappelons-le, est formé, à toutes fins pratiques, de
représentants d'établissements. Alors, il a à se juger
lui-même lorsqu'il a à étudier une plainte de
l'hôpital untel ou du CLSC untel et ça le place dans une position
intenable. Alors, je pense que le concept d'"advocacy" qui a été
disséminé aux États-Unis est un bon concept. C'est
à la fois une personne qui est protecteur du droit de la personne, mais
aussi promoteur. Ce n'est pas seulement un protecteur, c'est un promoteur des
droits de l'individu. C'est pour ça que le terme "advocacy" est
difficile à traduire. C'est plus qu'un avocat, c'est un promoteur en
même temps. Et en réalité, il marche très bien aux
États-Unis, ce système-là. Moi, je pense qu'il faut
regarder de ce côté-là, M. le ministre, et soustraire,
enlever aux CRSSS cette obligation qu'ils ne peuvent pas remplir. Même
s'ils n'étaient pas en conflit d'intérêts, je pense que la
machine est trop lourde, ils ont trop d'autres problèmes à
régler et le traitement des plaintes n'est pas du tout dans leurs
priorités. (12 h 45)
M. Vaz: M. le Président, si vous me le permettez,
j'aimerais savoir si M. le ministre endosse cette suggestion de M. le
député de Lavaltrie. Ça serait assez important.
M. Lazure: La Prairie.
M. Côté (Charlesbourg): À ce moment-ci, le
ministre ne se prononcera pas. Quand il sera parfaitement informé, il va
se prononcer, pour ne pas dire n'importe quoi. Une chose est certaine, c'est
qu'on va aller davantage aux informations. Ça me paraît une piste
intéressante. Si je vous dis oui tout de suite, la réforme est
finie. Ce n'est pas parce que je ne veux pas la finir le plus vite possible,
mais j'ai une préoccupation très importante quant au traitement
des plaintes qui m'apparaît extrêmement important. C'est un volume
assez important au niveau d'un cabinet de ministre où on est impuissant
devant l'autonomie de tout le système. C'est une piste très
très intéressante.
M. Lazure: Puis, elle pourrait, M. le Président,
être accrochée, possiblement, au Protecteur du citoyen. Ce n'est
peut-être pas nécessaire de constituer toute une autre structure
nouvelle, mais peut-être que ça pourrait être
accroché, ça, à la fonction du Protecteur du citoyen; je
n'en suis pas sûr. Mais chose certaine, c'est que le système
actuel ne marche pas.
La sectorisation a été implantée non pas pour
exclure du service telle ou telle personne, mais, au contraire, pour donner le
droit à la personne d'exiger un service à l'hôpital ou
à la clinique de son secteur. Autrement dit, ce n'est
pas un système qui prive les gens d'un service, c'est un
système qui assure la personne, qui garantit à la personne: Vous
habitez dans le secteur de l'hôpital Notre-Dame; donc, l'hôpital
Notre-Dame est obligé de vous donner un service en psychiatrie. En
général, il fonctionne assez bien, je dois dire, mais il y a des
gens qui sont trop rigides. Prenez l'exemple d'une personne qui est mise en
congé de Giffard et qui s'en va résider près de
Saint-Sacrement où il y a une clinique de psychiatrie, normalement, elle
devrait être suivie à la clinique de Saint-Sacrement, normalement,
là. Je sais qu'il y a des problèmes dans l'acceptation des
transferts, mais ça, ce n'est pas le système de sectorisation qui
est en cause. Ce qui est en cause, à ce moment-là, c'est
peut-être la résistance de certains services d'hôpitaux
généraux à accepter des patients venant de Giffard, et la
même chose à Montréal pour Louis-H.-Lafontaine.
Autre commentaire, le choix du psychiatre. C'est vrai que c'est
difficile dans certains cas. Mais, là encore, je ne pense pas que
ça soit le système. Je crois que c'est le directeur du
département de psychiatrie qui fait mal son boulot. Si un patient n'est
pas satisfait du psychiatre traitant et qu'il veut changer, il y a des
mécanismes, dans un département bien organisé, dans un
hôpital bien organisé, mais c'est vrai qu'il est lent, te
mécanisme, c'est vrai que beaucoup de psychiatres résistent
à ça. Mais, à ce moment-là, justement, s'il y avait
un système d'advocacy ou l'équivalent, à ce
moment-là, je pense que les patients auraient plus de satisfaction.
Vous avez parlé d'un réseau parallèle clandestin
dans la Montérégie. Et le ministre a répondu en pariant
des difficultés juridiques. Il a raison, mais en dehors des
difficultés juridiques d'enlever un permis à quelqu'un, il y a
des choses non juridiques qui pourraient être offertes et qui seraient
efficaces. Parce que beaucoup de ces foyers clandestins sont alimentés
par des centres de services sociaux du Montréal métropolitain en
particulier, francophones, anglophones et juifs, qui prennent les patients dans
une clinique de psychiatrie d'un hôpital général, le Royal
Victoria ou le Montreal General, peu importe, et qui, avec le petit
réseau de foyers clandestins de la rive sud, viennent placer ces
patients-là, indirectement. Ils les dirigent vers là. Autrement
dit, ils ne sont pas clandestins aux yeux des CSS; les CSS les connaissent
très bien, la plupart du temps, et même les encouragent. Ce qui
est cocasse, ce n'est pas le CSS de la Montégérie qui les
encourage, ce sont les CSS de Montréal, un peu comme - bon, je
n'utiliserai pas la comparaison, parce qu'elle pourrait être odieuse; je
n'ai rien dit. Mais le ministre serait en mesure d'intervenir auprès des
CSS. C'est difficile, parce que, pour eux, ça devient un
débouché. Mais faire en sorte que ces foyers... Parfois, souvent,
ce sont des familles d'accueil de moins de 9 patients; souvent ce sont des
pavillons, entre 9 et 30 et qui sont littéralement alimentés par
des CSS ou des hôpitaux de Montréal.
Dernière remarque, au tout début de votre mémoire,
vous dites: Le projet de loi garantit à la personne de langue anglaise
des services... "L'article 13 reconnaît le droit à toute personne
d'expression anglaise de recevoir dans sa langue des services de
santé..." Et vous ajoutez: "La reconnaissance de ce droit ne doit pas
nous faire oublier qu'il arrive que certaines personnes d'expression
française se heurtent à la barrière linguistique..." Et
ça, c'est très vrai, M. le ministre, dans la région de
Montréal. Je ne sais pas jusqu'à quel point on vous a
sensibilisé à ça, mais en psychiatrie, notamment dans les
hôpitaux anglophones, Royal Victoria, Montreal General, Douglas, il y a
beaucoup de nos patients francophones qui ont de la misère à se
faire servir, à être traités en langue française;
c'est un problème réel, ça.
M. le Président, moi, je veux remercier les gens d'Auto-psy pour
leur excellent mémoire et dire au ministre qu'il est chanceux d'avoir
des suggestions aussi constructives, aussi pertinentes.
M. Morin (Paul): En terminant, M. le Président...
Le Président (M. Joly): Oui, allez.
M. Morin (Paul): ...ni M. le ministre ni M. le
député de l'Opposition n'ont relevé la question de la
dissémination des ressources qui, pour nous, est un point important de
notre mémoire. Je rappellerai à M. Lazure que, lorsqu'il
était ministre des Affaires sociales, en 1977, il y a eu un conflit
à Pointe-aux-Trembles et, d'ailleurs, lui-même, dans un texte qui
est cité par M. Henri Dorvil, dans son excellent livre: "Histoire de la
folle"... M. Lazure faisait référence à cette
question-là, qu'il y avait des points de saturation. Au niveau de notre
dernier recours, justement, la municipalité a été
sensibilisée à cette question; on a fait un point de fixation, un
abcès au niveau de l'espace du centre-ville de Montréal et,
justement, les trois ressources, on veut les disséminer un peu
partout.
Nous, ce qu'on dit, c'est qu'on ne peut pas fermer les yeux. Il existe
des concentrations et, à Montréal, la majorité des gens -
enfin, une bonne partie, on dit 40 % des ressources, sur l'île de
Montréal, externes - sont à Pointe-aux-Trembles. Les gens de
Pointe-aux-Trembles passent pour des racistes lorsqu'ils disent qu'ils ne
veulent plus d'une autre ressource, sauf qu'il y a des communautés...
Curieusement, ce sont toujours les communautés les plus riches qui,
elles, n'ont pas de ce type de ressources. Nous, ce qu'on dit, c'est que
l'article 158 n'a pas été efficace et que, nous, on est
disposés à collaborer en comité, où on pourrait
retrouver des
municipalités ou différents acteurs parce qu'on ne peut
pas le laisser agir juste en s'appuyant sur l'article 158 qui dit, finalement,
les gens peuvent... Il n'y a pas de discrimination faite contre tes familles
d'accueil. En réalité, iI y en a une, de facto. Il y a une
concentration, II y a des ghettos un peu partout qui se font de détenus,
de personnes toxicomanes. On parle de la qualité de vie des personnes,
des personnes psychiatrisées, puis des communautés locales. Mais
ce n'est pas une vie, ça, finalement, d'être entouré
d'ex-détenus, de gens de ta condition; la vie, c'est d'être
disséminé un peu partout. Donc, on vous soumet que, nous, on est
très disponibles à travailler sur ce dossier-là, en
collaboration.
M. Lazure: M. le Président, je l'avais dans mes notes, je
n'ai pas eu le temps de tout dire, mais je suis d'accord avec vous. Je pense
que le système PADAVAN de l'État de New York me paraît
intéressant parce que le seul critère d'exclusion devient la
concentration, à ce moment-là, si je comprends bien.
M. Morin (Paul): Oui, tout à fait.
M. Lazare: On avait en 1977, justement, amendé la loi pour
qu'une municipalité ne puisse pas refuser un permis sur la base que
c'étaient des anciens patients psychiatriques. Mais, moi, je suis
d'accord avec votre suggestion. Je pense que c'est pertinent et le milieu
aurait à démontrer qu'il y a une trop grande concentration.
Ça me paraîtrait, très équitable.
Le Président (M. Joly): Merci. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
l'avais noté dans mon petit calepin vert qui va me suivre; c'est ce que
je garde de la commission parlementaire. Comme premier point, ça me
paraissait l'évidence môme. J'ai vécu dans Charlesbourg un
problème qui a fait l'objet des manchettes de Journaux, mais qui n'a
réglé aucun problème... Dans ce sens-là, ça
me paraissait être un élément assez intéressant. Par
contre, M. m'a indiqué qu'on a réussi à régler
certains problèmes à Pointe-au-Père avec une certaine
prise de loi que nous avons maintenant, mais ça ne veut pas
nécessairement dire que ça pourrait se régler ailleurs.
Les tribunaux ont tranché, mais évidemment je pense qu'il faut
être là-dessus bien conscients des limites des tribunaux et qu'on
a avantage à renforcer notre base légale pour être capables
de faire un certain nombre de choses. Je vais y regarder de très
près. Alors, je vous remercie. Je trouve que notre deuxième
contact est plus intéressant que le premier.
M. Vaz: J'espère qu'ils vont se continuer.
M. Côté (Charlesbourg): D'autant plus qu'il est
visuel et non pas uniquement par écrit. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. À
mon tour, au nom des membres de cette commission, je tiens à remercier
le groupe Auto-psy provincial. Merci beaucoup. Nous allons suspendre nos
travaux jusqu'à 16 h 30.
(Suspension de la séance à 12 h 55) (Reprise à 16 h
41)
Le Président (M. Joly): Bon après-midi. Nous allons
maintenant reprendre nos travaux. Je demanderais aux gens représentant
la Commission d'accès à l'information de bien vouloir prendre
place, s'il vous plaît.
Bonjour, messieurs. Bienvenue à cette commission, officiellement.
Vous connaissez la procédure, mais au cas où... Je vous fais
mention que vous avez environ une vingtaine de minutes pour nous
présenter votre mémoire de la façon la plus concise
possible. Par après, les parlementaires des deux formations se
réservent le privilège, le plaisir de vous poser quelques
questions. J'apprécierais que la personne responsable du groupe
s'Identifie et nous présente les gens qui l'accompagnent.
Commission d'accès à
l'information
M. O'Bready (Jacques): Merci. M. le Président. Jacques
O'Bready, président de la Commission d'accès. M'accompagnant,
ici, à ma gauche, M. Clarence White, responsable de la recherche et des
analyses; Me Yves Dussault, qui a travaillé à la rédaction
de notre avis et Me André Ouimet, directeur des services juridiques.
Comme vous l'avez mentionné, M. le Président, je vais faire
lecture de l'avis que nous avions adressé, en date du 18 décembre
1989, à la commission et, par après, les gens qui m'accompagnent
pourront répondre à des questions d'ordre un peu plus
technique.
Mesdames et messieurs, le présent avis expose sommairement les
éléments de l'avant-projet de loi sur les services de
santé et les services sociaux qui ont retenu l'attention de la
Commission d'accès à l'information, dans un contexte où
celle-ci souhaite intervenir pour faire valoir les principes et les droits
reconnus par la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et
sur la protection des renseignements personnels.
Nous verrons dans un premier temps les conséquences virtuelles
qu'a perçues la Commission derrière les grands principes de la
réforme envisagée par cet avant-projet de loi. Ensuite, nous
examinerons les dispositions relatives au droit d'accès au dossier
médical, social et administratif détenu par un
établissement. Enfin, nous traiterons de l'impact des changements
institutionnels prévus par la réforme eu égard
à la portée de la loi sur l'accès.
Les grands principes de l'avant-projet de loi versus les grands
principes de la loi sur l'accès. Les principales idées motrices
qui rassortent de cet avant-projet de loi se résument en deux mots
clés, soient coordination et concertation. En effet, suivant l'article 3
de l'avant-projet de loi, le nouveau régime que l'on veut instituer a
pour objet, notamment: 1e d'assurer un partage adéquat des
responsabilités entre les organismes publics, les organismes
communautaires et les autres intervenants du domaine de la santé et des
services sociaux; 2° de favoriser une répartition des ressources
humaines, matérielles et financières entre les services, les
établissements et les régions qui soit la plus juste et la plus
rationnelle possible, et 3° de favoriser la participation de tous les
intervenants des différents secteurs d'activité de la vie
collective dont l'action peut avoir un impact sur la santé et le
bien-être de la population.
Les moyens institutionnels choisis pour arriver à une meilleure
coordination et concertation ont été de diminuer le nombre
d'autorités à la base en assujettissant plusieurs types
d'établissements sur un même territoire à un seul conseil
d'administration et en renforçant le sommet de la hiérarchie en
créant des supra-organismes appelés les régies
régionales de la santé et des services sociaux.
Sans entrer dans les détails de ces nouvelles structures, il
convient de mentionner que dorénavant, les établissements ne
pourront plus fonctionner en vase clos, mais plutôt dans de multiples
interrelations. A titre d'exemple, mentionnons d'abord que certaines personnes
qui requièrent l'intervention de plusieurs ressources auront droit
à un plan de services individualisé. C'est l'article 9. On
prévoit que ce plan de services individualisé est
élaboré par l'établissement qui dispense la majeure partie
des services en cause et que ce plan doit indiquer les différents
établissements ou organismes concernés, les services qui seront
dispensés par chacun d'entre eux, ainsi que le nom de la personne
responsable de la coordination de l'ensemble de ces services.
D'autres illustrations de cette intention d'augmenter les relations
entre établissements peuvent être choisies à même les
fonctions attribuées aux régies régionales comme, par
exemple, celle d'élaborer des programmes interétablissements en
vue de répondre à certains besoins de la population que la
Régie juge prioritaires. Et c'est l'article 240.
Cet accent prononcé de l'avant-projet de loi en faveur d'une
coordination interétablissements, même s'il peut être
louable, évoque tout de suite la problématique des transferts de
renseignements nominatifs. En effet, on ne peut imaginer une plus grande
collaboration et concertation entre les établissements de santé
et de services sociaux sans que cela n'entraîne davantage
d'échanges de renseignements nominatifs. Or, l'avant-projet de loi
recèle déjà quelques cas expressément
envisagés. Par exemple, je cite: "La Régie régionale peut,
pour l'exercice de ses fonctions, requérir des établissements et
des organismes communautaires de santé et de services sociaux de sa
région les renseignements nécessaires sur les clientèles,
les services demandés et dispensés et les ressources
utilisées." C'est l'article 243.
Aussi, on attribue plus particulièrement à la Régie
régionale de Montréal la fonction, dans le but de répartir
les cas d'urgence, de concevoir et d'implanter un système d'information
régionale pour connaître de façon quotidienne la situation
dans les centres exploités par ces établissements en regard du
nombre et de la nature des Inscriptions et des admissions de
bénéficiaires et de leur transfert et transport en ambulance.
C'est l'article 250.
Il est à prévoir que les échanges de renseignements
nominatifs entre établissements seront d'une ampleur encore plus
considérable selon le document d'orientation expliquant la
réforme envisagée, document qui est intitulé "Pour
améliorer la santé et le bien-être au Québec". En
effet, dans ce document, on propose de cumuler sur une carte
électronique à microprocesseur intégré des
renseignements sur l'état de santé d'un
bénéficiaire pour améliorer le suivi du
bénéficiaire. C'est à la page 51 de ce rapport. Il est
aussi question de créer un dossier unique par
bénéficiaire. On retrouve ça à la page 133 du
même rapport.
Bien qu'il soit indéniable que ces différentes mesures
représentent des atouts pour une gestion efficace, il est à
craindre que ce soit le droit au respect de la vie privée qui en paie le
prix. De plus, on se questionnera sur les effets de ces mesures, sur la
liberté d'une personne de choisir le professionnel ou
l'établissement duquel elle désire recevoir des soins de
santé ou des services sociaux, une liberté qui est par ailleurs
reconnue par cet avant-projet de loi à l'article 14.
Face à ces différents projets, la Commission
d'accès à l'information souhaiterait d'abord être
associée de près aux différentes étapes de leur
cheminement et, dès à présent, elle sent le besoin de
faire quelques mises en garde à leur sujet.
Un dossier unique par bénéficiaire. La Commission veut
attirer l'attention des parlementaires concernant le désir
exprimé par le ministère d'implanter un dossier unique par
bénéficiaire. La constitution d'un dossier unique comporte,
croyons-nous, de grands risques pour la protection des renseignements
personnels, l'un des .aspects importants du respect de la vie
privée, et pour les droits et libertés de la personne.
Tous les établissements de santé recueillent actuellement une
foule de renseignements personnels plutôt sensibles concernant les
bénéficiaires et leurs proches. À chaque visite ou
séjour dans un établissement, un grand nombre de renseignements
sont ajoutés dans le dossier du bénéficiaire. La
Commission ose espérer qu'il n'est pas de l'intention du
ministère d'emmagasiner tous ces renseignements dans une banque centrale
de données. Le document d'orientation du ministère n'Indique pas
quelles sont les Informations minimales qui constitueraient le sommaire du
dossier unique. À ce sujet, la Commission rappelle qu'un organisme
public ne peut recueillir que les renseignements nécessaires à
ses attributions ou à la mise en oeuvre d'un programme dont H a la
gestion.
L'expérience nous démontre que plus une banque de
données est bien garnie, plus elle suscite de l'intérêt et
plus les finalités de sa création risquent d'être
détournées. On voudra se servir de cette banque d'information
pour mie et une raisons d'apparence toutes valables, mais, au départ
insoupçonnées. Par ailleurs, où seraient détenues
ces informations? Qui contrôlerait ce dossier unique et y donnerait
accès, et selon quelles modalités? La détention de tels
renseignements ne devrait être permise, croyons-nous, que pour un
organisme assujetti à la Loi sur l'accès aux documents des
organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Aussi,
toute intervention dans ce dossier unique devrait être assujettie au
consentement de la personne concernée.
La carte-santé. Il est aussi question dans le document
d'orientation d'une carte électonlque à microprocesseur
intégré permettant de mémoriser des Informations relatives
à un individu, en l'occurrence le porteur. La lecture et
l'écriture des informations peuvent faire l'objet de divers niveaux de
protection. Jusqu'à maintenant, l'utilisation d'une telle carte comme un
dossier portable n'est pas très répandue. Certaines
expériences font présentement l'objet d'évaluation en
France, pour des clientèles spécifiques dans certaines villes.
Ces expériences, autorisées par la Commission nationale de
l'informatique et des libertés, la CNIL, permettront à
l'organisme français voué à la protection des
renseignements personnels d'analyser les aspects éthiques et juridiques
reliés à l'introduction de cette carte à mémoire
dans le secteur de la santé.
Déjà la CNIL a fixé des limites sur le contenu de
cette carte en s'opposant, par exemple, à l'enregistrement d'une mention
relative aux interruptions volontaires de grossesse. On a prévu, sauf
exception, que le droit d'accès pour les personnes concernées
peut s'exercer sur l'ensemble du contenu de la carte par l'intermédiaire
d'un médecin disposant d'un matériel de lecture. Ces cartes, en
fait, ne sont attribuées qu'aux personnes ayant manifesté leur
accord par écrit et elles ne sont jamais exigibles par le
médecin.
Si on introduit cette innovation technologique chez nous, II nous
apparaît évident que l'utilisation de cette carte, l'Information
qu'elle contiendra, les mesures de sécurité requises et les
autres mesures nécessaires devront être encadrées
strictement par des dispositions législatives appropriées. On
devra alors établir les types de renseignements pouvant être
consignés sur cette carte, les catégories de personnes qui auront
le pouvoir d'y faire des inscriptions, celles qui pourront les lire. On devra
préciser en outre les moyens dont disposera la personne concernée
pour prendre connaissance des informations qui y sont contenues.
Certains prétendront que les renseignements inscrits sur ce genre
de carte jouiront d'une confidentialité à toute épreuve,
puisque la personne concernée en aura la garde et en disposera à
son gré. Toutefois, les risques de bris de confidentialité
pourraient, par exemple, être plus élevés si le maniement
de cette carte entraînait l'utilisation de la télématique.
En réalité, cela dépendra grandement des moyens
techniques, organisationnels et législatifs qui encadreront cette
nouvelle technologie. De plus, le législateur devrait intervenir pour
empêcher que cette carte ne devienne une autre carte d'identité,
comme le sont devenus la carte d'assurance-maladie, le permis de conduire et la
carte d'assurance sociale.
Si elle était implantée, la carte à microprocesseur
contiendrait tellement de renseignements sensibles qu'il faudrait
prévenir législativement toute utilisation non conforme à
sa finalité première. Il faudrait prévoir une utilisation
dédiée aux professionnels de la santé exerçant des
soins auprès de ia personne concernée et de fortes
pénalités pour toute personne qui exigerait sans droit la
production de cette carte ou qui, illégalement, réussirait
à s'introduire dans ce fichier pour consulter ou pour modifier des
renseignements.
Nous n'avons pas la prétention de penser que ces quelques lignes
font le tour complet d'une question aussi technique qu'inquiétante.
Cependant, elles indiquent un certain nombre de préoccupations de la
Commission d'accès à l'information à propos de
l'éventuelle Introduction d'une carte à microprocesseur dans le
domaine de la santé. La Commission a fait savoir au ministère, il
y a plusieurs mois, que ce dossier l'intéressait au plus haut point et
qu'elle voulait connaître son évolution. Il me fait plaisir
d'ajouter, M. le Président, et ce n'est pas dans l'avis, qu'au cours des
dernières semaines, plus précisément il y a une dizaine de
jours, des rencontres ont eu lieu entre les hautes autorités du
ministère, de la Régie de l'assurance-maladie, moi-même et
mes collaborateurs, et que des mécanismes de dialogue sont
déjà en place. Des rencontres ont déjà eu lieu et
d'autres auront
lieu dans les prochains jours pour étudier tous les tenants et
aboutissants de ce système de carte à microprocesseur.
L'accès au dossier médical, social ou administratif d'un
établissement. On constate que les dispositions de l'avant-projet de loi
relatives à l'accessibilité des dossiers médicaux ou
sociaux sont sensiblement les mêmes que celles de la loi existante
à ce sujet si ce n'est qu'on a apporté certaines
améliorations de forme et de fond. En ce qui a trait aux
améliorations de forme, la Commission prend note que, dorénavant,
les personnes à qui on accorde un droit d'accès au dossier d'un
bénéficiaire, pourront, à l'instar du
bénéficiaire lui-même, s'adresser aux tribunaux judiciaires
et quasi judiciaires pour mettre en oeuvre leur droit.
Plus globalement, cependant, la Commission met en question
l'opportunité de prévoir un recours pour la personne qui s'est vu
refuser l'accès à un dossier médical ou social devant
plusieurs types de tribunaux: la Cour du Québec, la Commission des
affaires sociales et la Commission d'accès à l'information. Cette
panoplie de tribunaux compétents en la matière risque,
croyons-nous, d'entraîner non seulement des décisions
contradictoires, mais aussi du magasinage de la part du justiciable.
L'administration de la justice et l'uniformité du régime
d'accès à l'information gagneraient en confiant ce recours
uniquement à la Commission d'accès à l'information. Aussi,
les articles 15 à 20 sur la confidentialité du dossier
médical ou social mériteraient d'être revus sur le plan
strictement technique en ce qui a trait aux dérogations à la loi
sur l'accès. Les représentants du service juridique de la
Commission sont incidemment à la disposition du ministère
à cet effet.
Quant aux améliorations de fond, la Commission constate que les
personnes liées par le sang à un bénéficiaire
décédé peuvent recevoir des renseignements contenus dans
son dossier dans la mesure où cette communication est nécessaire
pour vérifier l'existence d'une maladie génétique ou d'une
maladie à caractère familial. De plus, le conjoint, les
ascendants, les descendants directs du bénéficiaire
décédé peuvent recevoir communication des renseignements
relatifs à la cause du décès de ce
bénéficiaire. La Commission ne peut qu'approuver ces
initiatives.
Par ailleurs, la Commission constate aussi qu'on étend quelque
peu la notion de représentant en matière d'accès au
dossier médical ou social lorsqu'on lit en conjonction les articles 19.1
et 23 de l'avant-projet de loi. Toutefois, II semble que ces ajouts à la
liste des personnes ayant droit d'accès au dossier médical d'un
bénéficiaire soient justifiés.
La Commission constate aussi que le ministère de la Santé
et des Services sociaux entend ériger un régime particulier en ce
qui a trait aux informations relatives au don de gamètes suivant le
document d'orientation. On retrouve ça à la page 60. Ici encore,
la Commission souhaite être associée de près à la
création de ce régime afin de faire prévaloir le droit au
respect de la vie privée de toutes les personnes concernées.
Quant à l'accès aux documents administratifs, signalons
que l'article 76 de l'avant-projet de loi prévoit que les séances
d'un conseil d'administration sont publiques et que, toutefois, le conseil peut
décréter le huis clos pour étudier tout sujet qui peut
causer préjudice à une personne, sans régler le sort des
documents relatant les propos de ces séances. Or, par souci de
cohérence, la Commission suggère que les documents et archives
authentiques d'un conseil d'administration et les documents faisant état
de ces séances soient déclarés accessibles sous
réserve de la protection des renseignements personnels.
Les changements institutionnels et la portée de la loi sur
l'accès. Dans un autre ordre de préoccupations, il convient de
signaler que cet avant-projet de loi amènera la Commission à se
pencher sur une reformulation de l'article 7 de la Loi sur l'accès
assujettissant les établissements de santé ou de services sociaux
considérant les nouveaux types d'organismes qui s'ajoutent à la
structure du régime des services de santé et de services sociaux
que l'on veut instaurer, tels les régies régionales - article 234
- les collèges régionaux - article 276 - ou, enfin, les
établissements qui peuvent se composer d'une seule personne - article
25.
À première vue on peut penser que cette
préoccupation relève simplement de la technique de
rédaction législative, mais en étudiant plus en profondeur
ce chapitre, on découvrira que le défi est beaucoup plus grand.
En effet, dans l'optique de la concertation, il ressort clairement de
l'avant-projet de loi et du document d'orientation qu'on veut davantage faire
appel aux intervenants du secteur privé qu'on qualifie par exemple de
ressources intermédiaires - l'article 201 - ou d'organismes
communautaires - l'article 228. (17 heures)
Devant cet état de fait, la Commission ne peut que prôner
une extension de la portée de la loi sur l'accès. En effet,
suivant le personnel professionnel de la Commission qui agit parfois à
titre d'agent d'information, il semble que celui-ci soit fréquemment
confronté à la désolation de devoir expliquer à un
concitoyen que le droit d'accès à son dossier médical ou
social prévu par la loi ne s'étend pas aux cliniques
privées ni aux centres d'accueil privés conventionnés. Non
seulement la Commission ne tient-elle pas à ce que d'autres types
d'organismes s'ajoutent à ceux-ci, mais elle souhaite aussi que le
régime de protection et d'accès au dossier médical ou
social prévu par la loi soit applicable à tout organisme public
ou privé susceptible de détenir un tel
dossier.
Vous me permettrez donc de vous réciter maintenant les six
recommandations qui émergent de ce dossIeNà. Premièrement,
face aux différents projets du ministère de la Santé et
des Services sociaux visant à faciliter la circulation des
renseignements nominatifs entre les établissements, la Commission
souhaite être associée de près aux différentes
étapes de leur cheminement. Deuxièmement, la Commission
recommande que ces différents projets tiennent compte des mises en garde
exprimées dans le présent avis afin que soit mieux
protégé le respect de la vie privée des personnes
concernées. Troisièmement, la Commission suggère qu'elle
soit le seul tribunal compétent en matière d'accès au
dossier médical ou social. Quatrièmement, la Commission signale
que les articles 15 à 20 sur la confidentialité du dossier
médical ou social devraient être revus sur le plan technique en ce
qui a trait aux dérogations à la loi sur l'accès.
Cinquièmement, la Commission recommande que soit prévu dans la
Loi sur les services de santé et les services sociaux un droit
d'accès clair aux mémoires de délibérations d'un
conseil d'administration des établissements ainsi qu'aux archives et
documents techniques d'un tel conseil, sous réserve toutefois de la
protection des renseignements personnels. Enfin, sixièmement, la
Commission souhaite que le régime d'accès au dossier
médical ou social prévu par la loi soit applicable dans tout
organisme public ou privé susceptible de détenir un tel
dossier.
Voilà, M. le Président, mesdames et messieurs les
députés, les remarques que la Commission d'accès
souhaitait formuler sur cet avant-projet de loi. Je vous indique,
évidemment, que nous les avons formulées à
l'intérieur des limites de nos connaissances et de la juridiction de la
Commission et, comme je l'ai dit, avant la lecture de ce mémoire, les
personnes qui m'accompagnent sont à votre disposition pour vous fournir
des précisions de nature juridique ou technique. Je vous remercie de
m'avoir écouté.
Le Président (M. Joly): Merci, M. O'Bready. Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre délégué
à la Santé et aux Services sociaux.
M. ShTOs: Merci, M. le Président. J'aimerais souhaiter la
bienvenue, en mon nom et au nom du ministre Côté, qui a
malheureusement dû s'absenter pour aller au Conseil des ministres, aux
membres de la Commission d'accès à l'information. Je voudrais
peut-être commencer en disant que je constate que votre mémoire
date du 18 décembre, si je ne m'abuse. L'élément majeur
sur lequel vous vous attardez beaucoup, c'est toute la question de
l'interrelation qu'il va y avoir entre les établissements, surtout dans
le contexte de la notion des conseils d'administration unifiés,
où il pourrait y avoir un échange d'informations peut-être
accru avec un seul conseil qui chapeaute.
Comme on sait que, depuis ce temps-là, la pensée a
évolué de ce côté-ci et que les conseils
d'administration unifiés n'ont pas été retenus, est-ce
qu'on peut aussi vous poser la question, à savoir si votre
pensée, depuis ce temps-là, a évolué
également et si vous avez peut-être regardé la question
dans le contexte de ce changement, et plus particulièrement par rapport
au plan de services, d'une part? On pourra parler, par la suite, quant à
la carte à puce. Par rapport aux plans de services pour les individus et
au dossier unique dans le contexte nouveau, est-ce que, depuis la
rédaction de votre mémoire, il y a d'autres
éléments que vous voulez apporter?
M. O'Bready: Évidemment, on n'a pas eu de documents
à notre disposition, si vous voulez, pour prendre connaissance du
changement de cap qui a pu s'effectuer. On en a pris connaissance,
peut-être, par des moyens tels que les médias. Je suis tout
à fait d'accord que si on voulait nous donner les nouvelles orientations
avec un peu plus de précisions et un peu plus de nuances, bien sûr
que la Commission se ferait un plaisir de réajuster son tir en
conséquence. Je l'ai dit, la préoccupation qui a
présidé à la rédaction de ce mémoire, comme
c'était basé sur une plus grande concertation et un plus grand
réseau Interétablissements et des conseils comme ça... Si
vous changez cette philosophie ou cette approche et qu'on en est saisis, il
nous fera plaisir de donner notre avis sur ça comme sur les autres
questions que j'ai soulevées.
M. Sirros: Indépendamment du changement de structure
administrative, le fonctionnement, disons, au moyen d'un plan de services pour
les individus devrait normalement se retrouver dans un système qui
fonctionnerait dorénavant par programmes. Vous dites que vous voudriez
être associés de plus près à l'élaboration
des règles d'échange d'informations nominatives entre les
établissements. Est-ce que, depuis ce temps-là, vous avez pu
regarder un peu plus cette question-là? Est-ce que vous pourriez
peut-être élaborer sur certains paramètres dont on pourrait
tenir compte dans le contexte d'un plan de services...
M. O'Bready: Si vous le permettez, je vais demander à Me
Ouimet de vous faire certains commentaires sur le sujet.
M. Ouimet (André): On sait qu'à l'heure actuelle,
il existe des plans de services un peu individualisés, de sorte qu'un
individu peut recevoir des services médicaux ou sociaux de la part de
différents organismes publics. La Commission ne s'est jamais
opposée formellement à ça, à ce type d'intervention
par de multiples intervenants. Cependant, ce sur quoi la Commis-
sion alerte le législateur ici, c'est sur le fait que si ces
interventions deviennent formelles au niveau d'un individu, il risque d'y avoir
un échange d'informations et la constitution d'un dossier unique pour
cet individu. en sol, ce n'est pas une chose à laquelle la commission
d'accès à l'information s'oppose, mais si ça devait amener
la création d'un dossier... et là, c'est là-dessus je
pense que vous vouliez nous amener tranquillement, pour chacun des individus,
chacun des citoyens du québec, la commission dit: ii y a peut-être
des règles différentes qui devraient s'appliquer.
M. Sirros: On me signale... Il existe déjà un
fonctionnement par plan de service, par exemple, au niveau de l'Office des
personnes handicapées, par rapport aux personnes qui demandent un
service vis-à-vis un handicap qu'elles peuvent avoir. Est-ce que vous
avez eu des cas qui sont venus à votre attention qui poseraient
problème? Ça fonctionne, je pense que ça doit faire un bon
sept ou huit ans que ça doit fonctionner. Est-ce qu'il y a eu des
problèmes par rapport à la confidentialité de ces dossiers
qui vous ont été soumis ou qui sont venus à votre
attention?
M. O'Bready: M. White, avec votre permission.
M. White (Clarence): Pas au niveau, M. le ministre, de l'OPHQ,
des personnes handicapées, on n'a pas eu de problème sur
ça. On a eu des problèmes entre établissements. On a eu
des enquêtes et on a été amenés à aller
vérifier des transferts de renseignements entre établissements,
entre travailleurs sociaux d'établissements, entre médecins
d'établissements, où on est allés vérifier la
nécessité du transfert. Et on est arrivés à la
conclusion, dans un cas entre autres, que la nécessité du
transfert n'était pas là parce que ce n'était pas pour des
soins. C'était au cas où... On dit: On connaît ce bonhomme
ou cette madame et on sait que c'est quelqu'un à problème dans le
coin. Alors, le dossier se communique entre établissements et ce n'est
pas pour des soins. Nous, on dit: La loi permet... Dans le fond, la loi
actuelle permet les communications si c'est dans un but de soins. Mais ce qu'on
se rend compte, c'est qu'il y a des communications qui ne se font pas pour
ça pantoute.
Notre autre problème qu'on a, c'est qu'on a de la
difficulté à établir qui est vraiment le détenteur
du document. On a ce problème aux endroits où on a un travailleur
social. Si le travailleur social est un employé du CSS qui travaille en
établissement, la grosse discussion, c'est: Est-ce que c'est un dossier
de l'établissement ou si c'est un dossier du CSS? Naturellement, s'il y
a eu bris de confidentialité, là on va dire: Ce n'est pas le
dossier du CSS certain, c'est le dossier de l'établissement.
L'établissement dit: Bien non, je ne suis pas sûr que c'est mon
dossier, c'est un travailleur du CSS. C'est qui? Alors, II y a tous ces
problèmes de communication. Nous autres, ce qu'on voudrait, c'est qu'on
puisse dire: Bien, le législateur a prévu que c'est telle
personne, que c'est tel établissement. C'est clair que c'est un dossier
de l'établissement, c'est clair que c'est un dossier du CSS. Mais
là, jusqu'à maintenant, ce n'est pas ça, ce n'est pas
clair. Et il y a des communications qui se font. Qui est responsable? Nous, on
a une idée. O.K. On a dit: Dans ce cas, c'est un dossier de
l'établissement. Si c'est un prêt de service, le CSS, c'est un
prêt de service. L'employé qui est là travaille dans
l'établissement Sauf que...
M. Sirros: Ce matin, on a eu un échange au niveau de
l'accès que peuvent avoir les patients à leur propre dossier.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Sirros: II semble que je soulève des rires. Je vous
demanderais peut-être d'expliquer la réaction. Mais,
indépendamment de ça, j'allais enchaîner sur la question de
la carte à puce et le lien à cette discussion qu'on a eue, en
vous posant la question suivante: Indépendamment des autres
difficultés, qu'il faudrait prendre une grande attention par rapport
à l'accessibilité à l'information... Et comme vous l'avez
souligné, les pourparlers ont commencé entre le ministère
et la Commission. C'est dans cette voie qu'on veut arriver avec des projets
pilotes, d'une part, et avec une évaluation très serrée,
etc. Mais indépendamment de ça, sur un plan plus
théorique, est-ce que le fait qu'un patient, un
bénéficiaire aurait toujours avec lui son propre dossier
médical ne lui donnerait pas un accès plus immédiat
à ce moment-là à ce qui le concerne? Si oui,
jusqu'à quel point est-ce que ça devrait être accessible?
Il y a des médecins qui prétendent, en tout cas...
M. O'Bready: C'est que le système actuel prévoit
qu'un patient a accès à son dossier sauf si ça peut lui
causer un préjudice grave. Mais le simple fait... Remarquez qu'on a peu
de données techniques, comment ça va fonctionner ces cartes
à microprocesseur. Le simple fait qu'un patient ait sa carte sur
laquelle il y a évidemment le contenu de son dossier, il faudrait voir
est-ce qu'il peut avoir accès à ça, lui? Est-ce qu'il
dispose du matériel qui peut lui donner accès à ça?
Là, je ne veux pas jouer au technicien mais je lisais un article dans
les journaux qui dit: Bon, ça peut tout être mis dans des tiroirs
différents. C'était l'expression qu'on prenait dans le journal,
des tiroirs différents, parce qu'ils parlent de la carte à puce
et il y aurait un code d'accès ou une clé d'accès à
chacun de ces tiroirs.
Techniquement, j'imagine que les possibilités
sont illimitées. Mais encore ià, II faudrait voir si le
fait qu'un patient détienne cette carte lui donne un accès plus
grand à son dossier sans le protéger contre, justement, des plus
grands dommages que la connaissance d'un dossier qui pourrait lui apporter...
Autrement dit, est-ce qu'on devrait trouver la façon de maintenir la
protection qui existe dans le système actuel, môme au niveau d'une
carte à microprocesseur? Très honnêtement, je veux dire, on
n'est pas rendu à ce stade dans nos réflexions. Je vous le
précise, les pourparlers débutent à peine avec les
autorités du ministère ou de la RAMQ.
M. Simm: Juste une dernière question pour les deux ou
trois minutes qui restent. Vous dites à un moment donné... Vous
suggérez que vous soyez le seul tribunal compétent en
matière d'accès au dossier médical ou social, donc, en
quelque sorte, créer un genre de statut spécial par rapport aux
autres tribunaux administratifs, ne pas permettre un recours à la Cour
supérieure. J'imagine que derrière ça, il y a le
désir de voir évoluer vers une certaine direction toute la notion
du dossier de l'accès à l'information. Je reviendrai avec la
question qui a fait rire une de vos collègues. Est-ce que vous avez donc
une opinion par rapport à cette accessibilité que doivent avoir
les personnes par rapport à leur propre dossier médical?
M. O'Bready: Une opinion quant au tribunal qui pourrait statuer
sur ça ou... Nous, dans le fond, ce qu'on dit, M. le ministre, c'est que
c'est la multiplication des recours qui crée des problèmes et qui
risque d'entraîner un certain marchandage, d'une part. D'autre part, je
veux dire, et ceci étant dit en toute déférence pour les
tribunaux de droit commun... Évidemment, je n'ai pas exclu bien
sûr les évocations devant la Cour supérieure ou des choses
comme ça. On n'aurait pas le pouvoir de faire ça mais... En toute
déférence, je pense qu'un recours devant les tribunaux de droit
commun est beaucoup plus coûteux, beaucoup moins rapide et beaucoup plus
laborieux pour un justiciable alors que la Commission a déjà
développé une expertise en matière d'accès à
des dossiers médicaux, en matière de rectification de dossiers
médicaux. Pourquoi avoir la Cour du Québec, la Commission des
affaires sociales, la Commission d'accès? Et encore en toute
déférence pour le mémoire du Barreau dont j'ai rapidement
pris connaissance, je ne partage pas nécessairement l'opinion du Barreau
à l'effet que la Commission d'accès n'est pas suffisamment
compétente pour avoir juridiction en semblable matière.
Dans le fond, nous, c'est dans un contexte de simplification et c'est
toute la problématique des tribunaux administratifs. Pourquoi multiplier
les recours? Pourquoi les alourdir, les rendre plus coûteux, moins
expéditifs et tout ce que vous voudrez? C'est un peu la philosophie qui
est à la base. Si on est capables de le faire actuellement... Parce
qu'il y a quand môme bien des gens qui s'adressent à nous pour
avoir accès à leur dossier médical dans les
établissements assujettis. On est capables de faire la job. Alors, je ne
vois pas pourquoi on serait moins capables de le faire si on était le
seul organisme.
M. Sirros: Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je vais
maintenant reconnaître M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamlngue.
M. Trudel: Merci, M. le Président. Alors, je vous remercie
au nom de l'Opposition de cette présentation. C'est très
important que la Commission d'accès à l'information nous donne
son avis sur différents mécanismes apparents ou non apparents qui
sont dans l'avant-projet de loi et quant aux écueils possibles que nous
pourrons retrouver lorsque seront éventuellement mises en vigueur un
certain nombre de réformes, à l'intérieur de
l'organisation des services de santé et des services sociaux au
Québec.
On s'est donné, au Québec... votre Commission, la
Commission d'accès à l'Information, vous êtes un peu
beaucoup le chien de garde, en particulier, de tout ce qui concerne cette
question des renseignements à caractère nominatif. Je souhaite,
dès lors que nous aurons le véritable projet de loi sur la
véritable réforme envisagée, que l'on oblige en quelque
sorte la Commission d'accès à l'Information de donner un avis
formel à l'État sur les implications du contenu des
éléments retenus par le ministre responsable au moment où
on s'engagera dans cette éventuelle réforme si nous y arrivons un
jour. (17 h 15)
À cet égard, je pense qu'il faut reconnaître que
d'avoir créé cet organisme au Québec, il faut maintenant
s'en servir et c'est par là que je voudrais commencer, pas tellement sur
le cas en soi, mais sur l'exemple. Cette expérience pilote, qui se
déroule en particulier dans la région de Québec, de mise
en commun de dossiers et d'informatisation de dossiers d'un certain nombre de
bénéficiaires, si j'ai bien compris, l'expérience a
été déclenchée au ministère de la
Santé et des Services sociaux sans aucune consultation au départ
de la Commission d'accès à l'information.
M. O'Bready: C'est exact de dire qu'actuellement... sauf pour les
développements, il y a environ dix jours où nous avons
rencontré, comme je l'ai mentionné, les autorités du
ministère, le ministre en tête, nous serons maintenant partie
prenante dans ce dossier-là. On pourra en tout cas au moins examiner ce
qui se fait et faire notre propre opinion sur certains paramètres, mais
à ce jour, il est vrai de dire qu'à l'exception d'une seule
rencontre ou peut-
être une deuxième qui a eu lieu, on n'a pas
été associés à la démarche comme telle. Il
ne m'appartient pas de dire pourquoi, je ne le sais pas, mais c'est
ça.
M. Trudel: Je ne veux pas charger en disant: Le ministère
a voulu faire ça en dehors de l'avis de la Commission d'accès
à l'information, mais ça nous révèle quand
môme une situation qu'on vit tous un jour ou l'autre. On est au coeur
d'une organisation ou d'une réorganisation de services et si ce n'est
pas inscrit formellement quelque part dans un texte législatif, on
risque de passer à côté et dire: On veut tellement arriver
à la meilleure solution qu'on néglige certains sentiers, certains
aspects d'une réglementation. Est-ce que vous seriez d'accord pour dire
que le projet de loi devrait contenir un article spécifique disant que
dés le moment où dans le processus d'organisation ou de
réorganisation des services de santé et de services sociaux au
Québec, on touche au dossier individuel, au dossier d'un
bénéficiaire, on devrait obligatoirement consulter, pour avis, la
Commission d'accès à l'information, de façon à
éviter que la trop bonne volonté nous amène à des
dangers ou à des difficultés qui n'étaient pas apparents
à prime abord?
M. O'Bready: Sous toute réserve, je ne veux pas vous
donner d'avis juridique séance tenante, mais comme notre loi est une loi
qui a préséance sur toutes les autres lois, à moins qu'il
y ait une clause disant: nonobstant les dispositions de la loi d'accès
à l'information etc, je pense qu'on n'aurait même pas besoin
d'inscrire ça dans une éventuelle loi sur la
réorganisation. Nous avons juridiction et c'est notre droit de nous
prononcer sur ça et même de sanctionner si quelque chose se
faisait en contravention avec notre propre loi. Alors, je vous dis ça
sous toute resserve, mais sur le plan de l'esprit de la disposition, c'est bien
sûr qu'on souhaite être associés, puis donner notre avis,
pas nécessairement empêcher des projets de se réaliser,
mais de permettre que ces projets-là se réalisent à
l'intérieur des paramètres de notre loi. C'est ce qu'on
souhaite.
M. Trudel: Je peux dire de ce côté-ci que je pense
qu'il faut aller plus loin que le souhait de donner votre avis. Il faut le
rappel et l'obligation de l'avis, parce que vous êtes la Commission, le
groupe qui a été créé par l'État pour
surveiller les droits en matière d'accès, en particulier, les
renseignements à caractère nominatif. Si la loi d'accès
à l'information a préséance pour modérer cette
information-là, je pense qu'il serait utile d'avoir ce rappel qu'en tout
ce qui concerne les renseignements à caractère nominatif et toute
initiative qui touche au dossier du bénéficiaire, on devrait
formellement avoir recours à un avis de la Commission d'accès
à l'information.
Je voudrais toucher un autre aspect que vous n'avez pas touché
dans votre avis. Tous les conseils d'administration des établissements
publics, peu importe s'ils sont unifiés ou pas - je ne parle pas des
conventionnés et des privés subventionnés, on
décrit tout - évidemment, la composition de ces
conseils-là, on leur fait obligation de tenir une réunion
annuelle d'information auprès de la population concernée sur le
territoire concerné, y compris d'autres réunions si le territoire
est trop grand. Est-ce qu'une réunion du conseil d'administration d'une
régie régionale, c'est une réunion publique?
M. O'Bready: Écoutez, il faudrait vérifier s'il y a
des dispositions dans la loi. Je ne sais pas si... On me dit que, dans le
projet de loi, il y a des dispositions qui disent que les réunions du
conseil d'administration sont publiques. Donc, c'est pour ça que, nous
autres, on disait que, par esprit de cohérence, avec les documents des
organismes dont les réunions sont publiques, par exemple, les conseils
de ville ou les conseils de commmissalres. On disait que les documents
devraient être publics. Mais, là, si vous me posez... pour la
régie régionale, il faudrait peut-être vérifier le
point particulier.
On me dit que, sous toute réserve à vérifier, que
c'est prévu dans le projet de loi que les réunions seraient
publiques. Donc, c'est au même exemple que je vous dis que les conseils
d'une ville, les réunions étant publiques, les documents qui sont
déposés là seraient des documents publics. C'est ce qu'on
demande, de faire cette espèce de cohérence dans le projet de
loi.
M. Trudel: Et là-dessus, juste une remarque. C'est que si
on précise qu'il doit y avoir au moins une réunion
générale d'information par année au public sur les plans
et les services offerts par une régie régionale ou par un
établissement, il arrive souvent que, dans la pratique, les conseils
d'administration d'établissements publics en viennent à
considérer leur réunion comme étant privée. Et,
à cet égard, les droits des bénéficiaires sont
souvent... En tout cas, dans un bureau de député, on en entend
souvent de telles sortes... On empêche... d'assister, parce qu'on dit: Ce
n'est pas réunion largement ouverte au public. Et, à cet
égard, je souhaiterais que l'on puisse examiner toutes les dispositions
semblables qui existent au Code municipal qui oblige un conseil de toute
municipalité ou cité et ville au Québec à avoir,
nommément, à l'ordre du jour une période qui s'appelle les
questions verbales.
Alors, là-dessus, je fais cette remarque-là en
vérifiant... Je vais vérifier l'article 76... mais d'indiquer
nommément que, pour l'accès à l'information et permettre
la discussion du public et le droit à demander de l'information sur
l'organisation, qu'on puisse inscrire formellement,
comme dans la Loi sur les cités et villes, pour les
établissements et pour la régie?
M. Sirros: ...établissements ou les... Un* voix:
Les deux sortes...
M. Trudel: Là-dessus, peut-être une dernière
question, parce que vous y aviez partiellement répondu. Quant aux droits
des bénéficiaires, quant aux droits de recours, soit pour
l'accès aux dossiers ou pour un établissement ou pour un
professionnel, je veux juste vous appuyer en disant qu'il faudra simplifier les
mécanismes de recours. Ce qui existe actuellement et ce que vous nous
décrivez comme pouvant possiblement exister comme processus d'appels
auprès de différents types de tribunaux, ça fait en sorte
qu'on est encore en train de développer une hyper ou une super
judiciaiisation pour l'exercice du droit d'accès à l'Information.
Et je veux dire que ça me semble très sage, la recommandation que
vous nous faites de bien mentionner que le tribunal de première
instance, le lieu de première instance pour faire appel d'une
décision ou pour en appeler quant aux droits qu'on prétend avoir,
que ça peut se centraliser à la Commission d'accès
à l'information. Il me semble que ça pourra peut-être
être plus léger, d'ailleurs, en termes de mécanismes que
d'aller devant les tribunaux de droit commun ou d'autres commissions qui, par
ailleurs, ont d'autres responsabilités en d'autres matières
aussi, ce qui fait que ça allonge le processus.
Dernière petite question. Est-ce que vous pensez qu'il serait
utile, au moment ou elle sera mise en application, cette réforme, et que
l'on aura déterminé des objectifs de santé et des
objectifs de bien-être pour la population du Québec, que nous
puissions, d'une part, examiner annuellement - ça ne porte pas sur vous,
cette question-là, c'est la deuxième partie seulement - on
pourrait, d'une part, en commission parlementaire, largement examiner
l'état de réalisation de ces objectifs. Est-ce que ce serait une
bonne idée, également, que, annuellement, nous puissions entendre
la Commission d'accès à l'information en commission parlementaire
sur l'état du dossier d'accès aux renseignements à
caractère nominatif et de tout ce qui a pu se présenter en cours
d'année, faire un état de situation? En commission parlementaire,
nous pourrions en débattre largement.
M. O'Bready: Je dois vous dire que la loi prévoit
déjà que le rapport annuel de la Commission d'accès
à l'information doit être débattu en commission
parlementaire, sur la commission de la culture, à chaque année.
Et dans notre rapport annuel apparaissent une quantité importante de
données de ce qu'on a fait au cours de l'année, la nature des
dossiers traités, les plaintes reçues, ce qui veut dire que le
débat qui se fait, à chaque année, sur notre rapport
annuel pourrait, évidemment, porter non seulement sur les dossiers qui
ont trait au réseau de la santé, mais sur tous les autres
dossiers. Alors, je pense qu'on pourrait remplir cet objectif-là.
Je voudrais aussi juste ajouter - ça ne regarde pas cette
question, mais si vous me le permettez - quand j'ai parlé, tantôt,
des mécanismes d'accès à un dossier médical ou de
rectifications, j'aurais aussi voulu mentionner l'importance d'avoir de la
cohérence dans les décisions. La multiplication des instances
risque d'entraîner, parfois, de l'Incohérence dans certaines
décisions. Il faut quand même se rappeler que les décisions
de la Commission d'accès, ce n'est pas juste du "wishful thinking", ce
sont de véritables décisions et que nous sommes appelâmes
devant trois juges de la Cour du Québec. Il y a toujours,
évidemment, aussi cette possibilité d'évocation devant la
Cour supérieure. Alors, quand même, je veux dire, le risque n'est
pas grand. Un justiciable qui sentirait ses droits brimés par une
décision de la Commission, il peut toujours aller en appel devant la
Cour du Québec et, éventuellement, en Cour supérieure s'H
pense qu'il y a excès de juridiction. Alors, je ne pense pas que notre
demande risquerait de priver quelqu'un de quelque droit que ce soit.
M. Trudel: Très bien, merci beaucoup de votre
contribution.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député.
M. le ministre.
M. Sirros: C'est simplement pour remercier les gens de la
commission pour leur présentation et peut-être, en guise de
conclusion, je voudrais simplement dire que la réforme n'a aucunement
comme but d'aller chercher de l'information dans la vie privée des gens,
mais de mieux servir les gens qui ont besoin des services du réseau.
Tous les changements dont on a fart référence avant
l'entrée en vigueur seront faits en consultation et en collaboration
avec la Commission d'accès comme, d'ailleurs, le constate la commission
avec la rencontre récente et simplement quant au dossier, comme tel, de
la carte à puce, le dossier est encore à la phase
préliminaire de préparation d'un projet de loi. Donc, on est en
bonne position pour prendre tous les moyens nécessaires pour s'assurer
de la confidentialité de l'information.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. C'est
à mon tour. Au nom des membres de cette commission, merci d'avoir
été présents. Je demanderais, maintenant, aux gens
représentant la Commission des droits de la personne, s'il vous
plaît, de bien vouloir prendre place. Bonjour madame, bonjour messieurs,
bienvenue à cette commission. Je vous rappelle que vous avez
une vingtaine de minutes pour présenter votre mémoire et,
par après, les membres des deux formations se réservent le
privilège de vous poser quelques questions. alors, j'imagine que c'est
m. lachapelle qui est le porte-parole.
Une voix: C'est ça.
Le Président (M. Joly): Alors, veuillez juste nous
présenter les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît, M.
Lachapelle.
Commission des droits de la personne
M. Lachapelle (Jacques): Merci, M. le Président, mesdames
et messieurs. Il me fait plaisir d'être ici avec vous cet
après-midi à cette commission parlementaire. J'aimerais, bien
sûr, tout d'abord, comme on m'a invité à le faire, vous
présenter Mme Murielle Garon, directrice de la recherche à la
section recherche socio-économique à la Commission des droits de
la personne.
Comme vous le savez, la Commission des droits de la personne a un mandat
très vaste, presque aussi vaste que la Charte des droits et
libertés qui regroupe un nombre important et très
généreux de droits. Nous aurions pu vous adresser un très
large mémoire sur tout l'éventail des droits qui sont dans la
Charte des droits et libertés, à partir de l'accès
à l'information en passant par les personnes handicapées et
autres services. Nous avons voulu nous restreindre à certains secteurs
étant bien entendu que si vous vouliez nous poser des questions sur
d'autres aspects de la Charte, par exemple: la Commission des droits de la
personne, comme vous le savez, a un mandat de faire enquête concernant
l'exploitation de personnes âgées. La Commission a,
également, eu des mandats d'enquête pour enquêter dans le
cas d'enfants trisomiques où nous avions reçu... Nous avons
encore, à la Commission des droits de la personne, des plaintes dans ce
secteur d'activités. Alors, nous nous restreignons, si vous voulez,
à un secteur bien particulier qui est l'accès aux services de
santé d'une partie de la clientèle québécoise que
sont les minorités visibles et ethniques. (17 h 30)
Alors, dans une étude que nous avions déjà faite en
novembre 1987 et portant sur l'accès des minorités visibles aux
services publics, la Commission a souligné la nécessité
d'une définition du rôle des établissements appuyée
sur une conception élargie de la notion d'accessibilité. Ainsi,
dans le secteur de la santé et des services sociaux, bien que
l'accessibilité universelle et gratuite à ces services soit
acquise, on constate des lacunes importantes dans la distribution des services.
Certains services sont inadaptés en raison de barrières
linguistiques mais ils sont surtout susceptibles d'être affectés
par un manque de sensibilité aux particularités des groupes
minoritaires et sous-groupes au sein de ceux-ci, les jeunes, les personnes
âgées, les personnes qui présentent une déficience
ou une limitation. Cela est vrai tant au plan de la santé physique, de
la santé mentale, que des problèmes sociaux. Ces lacunes
constituent autant d'obstacles à l'accès égalitaire
à ces services pour divers groupes de la population, notamment les
autochtones, les minorités visibles et ethniques. Dans ce contexte,
l'interrogation sur les mécanismes de distribution de services qui
soient les plus aptes à permettre un accès égalitaire
demeure donc entièrement pertinente.
La question qui se pose est celle de la prise en charge effective des
besoins divers. Dans le domaine de la santé, cette variation dans les
besoins est considérable non seulement d'un individu mais d'un groupe
à l'autre. On ne saurait traiter de façon identique les besoins
des femmes enceintes, des personnes âgées, des personnes qui
présentent une déficience physique ou intellectuelle et ceux des
autochtones. Dans une société pluraliste, la satisfaction des
besoins de santé et des services sociaux comporte également une
dimension ethno culturelle importante. Si nous insistons sur cette notion
d'accessibilité et sur sa prise en charge effective, c'est qu'elle
constitue le versant positif d'une réalité à laquelle la
Commission a pour mandat primordial de s'attaquer, à savoir la
discrimination. En effet, l'absence d'accessibilité et d'adaptation des
services a pour résultat de compromettre, pour des groupes entiers, un
accès égalitaire aux services. Ce résultat est
généralement produit par un ensemble de pratiques qui ont trait
soit à l'information sur les services disponibles, la langue, contenu,
diffusion, etc., soit au mode de distribution des services, soit aux
caractéristiques des services offerts, par exemple la nourriture, le
loisir, etc. De telles situations renvoient aux éléments de base
de la discrimination indirecte.
La discrimination indirecte est celle qui découle d'une
règle ou d'une pratique en apparence neutre qui, quoiqu'appliquée
également à tous, exclut ou désavantage de façon
significative les personnes appartenant à un groupe défini selon
un critère mentionné à l'article 10 de la Charte. De
telles situations peuvent se présenter, par exemple, à l'occasion
de l'hospitalisation dans une grande ville d'un autochtone qui n'a jamais
quitté sa région éloignée. Lors du placement dans
un centre d'accueil de personnes immigrantes âgées qui n'ont
jamais appris le français ni l'anglais et qui ne sont pas
habituées à la nourriture de type nord-américain, à
l'occasion de soins psychiatriques donnés à des personnes
originaires de pays ayant un milieu culturel et social différent de
celui qui prévaut ici ou qui ont vécu des traumatismes
importants, guerre, menace, fuite, torture, etc. Dans cette perspective, la
notion d'accessibilité doit faire l'objet d'un examen sérieux. Ce
dont il faut s'assurer, c'est que ces services sont véritablement
accessibles, c'est-à-dire non seulement disponibles
mais consommables pour tous. Des barrières commencent à
s'ériger quand les services offerts ne tiennent pas compte des besoins
diversifiés, de la capacité de les exprimer, des écarts
entre les attitudes de bénéficiaires et celles des dispensateurs
de services, entre les attentes de chacun, leur comportement, etc.
Il nous apparaît que pour qu'un service réponde
adéquatement au besoin pour lequel il a été établi,
la notion d'accessibilité qui lui est attachée doit être
doublée de celle d'adaptation. Cette notion nous paraît pour apte
à conférer un sens vraiment dynamique à l'approche des
services plus qu'à une simple virtualité. Cette notion renvoie,
par définition, à une action d'accommodement.
Il paraît Important de noter Ici une limite qui s'oppose,
toutefois, du point de vue de la Charte des droits et des libertés,
à cette exigence d'adaptation. C'est celle des préférences
discriminatoires de la clientèle. À cet égard, la
Commission des droits de la personne a déjà émis des
accommodements fondés sur le sexe des préposés au service,
dans le domaine de la santé, pour des raisons fondées sur le
respect de la pudeur et, par la suite, de la dignité des
bénéficiaires. Cependant, elle ne saurait souscrire à des
exigences d'accommodement en fonction de préférences
fondées sur d'autres motifs illicites, notamment des
préférences ethniques ou raciales, dans la mesure ou de telles
exigences pourraient entraîner des atteintes à la dignité
des préposés et à leur droit à des conditions de
travail non discriminatoires. Ainsi, par exemple, la Commission des droits de
la personne a reçu une demande par un établissement offrant des
services de santé et des services sociaux, le CSSMM de Montréal.
Le problème est le suivant.
Dans le cadre des travaux du comité du plan d'action
"Accessibilité des CLSC aux groupes linguistiques et ethnoculturels
minoritaires du Conseil de la santé et des services sociaux de la
région de Montréal métropolitain", un fait a
été porté à leur attention. Le fait est le suivant:
le comité désire savoir jusqu'où s'exerce le droit des
bénéficiaires à recevoir des services personnalisés
tels que définis dans la Loi sur les services de santé. Autrement
dit, le droit du bénéficiaire de refuser des services lui
semblant incompatibles avec sa définition de services
personnalisés et de qualité. Le cas porté à notre
attention concerne le refus de recevoir des services intimes à domicile,
services dispensés par une personne dite de minorité visible
à une personne dite du groupe majoritaire. Ce refus provient d'une
personne âgée et est appuyé par des membres de sa famille.
La Commission des droits de la personne a conclu, au sujet de la mise sur pied
d'une politique d'accommodement à cet égard, fondée sur un
refus discriminatoire, qu'une telle politique ne peut manquer d'avoir un impact
discriminatoire sur les conditions de travail du personnel concerné. En
effet, les salariés éconduits sur la base de leur race et
affectés à d'autres tâches, alors qu'un collègue
racialement acceptable aux yeux du bénéficiaire accomplit la
tâche initiale, sont victimes d'une grave humiliation et d'une atteinte
discriminatoire à leur dignité. À cet égard,
l'article 14 du projet de loi situe la liberté de choix du professionnel
à l'intérieur de certaines limites par l'expression "sous
réserve de toute autre disposition législative applicable". Nous
déplorons qu'une telle réserve face aux préférences
discriminatoires exprimées par les bénéficiaires soit
limitée seulement au choix du professionnel et ne s'étende pas,
par exemple, à celui du préposé aux
bénéficiaires.
Dans le bilan évaluatif de la Commission des droits de la
personne sur l'étendue et la qualité des services offerts aux
minorités visibles, présenté à l'automne 1987, la
Commission proposait un cadre général devant présider
à la définition et à la mise en place de mesures
d'accommodement qui pourraient permettre au service de répondre aux
besoins de ses diverses clientèles. Les orientations qui sont contenues
dans ce document peuvent se résumer ainsi: 1. réaffirmation, au
plus haut niveau décisionnel, de cette volonté de
développer des réponses adéquates aux besoins
diversifiés des clientèles. 2. sensibilisation des responsables
et des intervenants, à tous les niveaux, aux diversités
culturelles. 3. planification des ressources et des services en ce sens. 4.
représentation des minorités à tous les paliers de
décision. 5. reconnaissance des organisations communautaires comme
partenaires et reconnaissance de leur rôle de dispensateurs de
services.
La Commission des droits de la personne situe ces orientations dans le
cadre de l'obligation de corriger les effets discriminatoires de pratique, en
apparence neutres, mais qui résultent dans des inégalités
face à l'accès aux services de santé et services sociaux,
en raison des critères inscrits à l'article 10 de la Charte des
droits et libertés de la personne dont je vous dispense de la
lecture.
L'article 86.1 de la Charte des droits et libertés définit
le cadre à l'intérieur duquel pourrait être corrigée
la situation de personnes faisant partie de groupes victimes de discrimination,
notamment dans le secteur de l'emploi, de la santé, de
l'éducation et dans tout autre service ordinairement offert au public.
Ce cadre peut, bien sûr, s'appliquer à l'embauche du personnel
dans différents établissements et centres. La présence,
aux divers paliers des organismes dispensateurs de services, de membres des
groupes pour lesquels se pose un problème d'accès a
l'égalité à ces services paraît essentielle pour au
moins deux raisons. Premièrement, pour qu'une sensibilité aux
problèmes à résoudre
soit véhiculée à tous les niveaux.
Deuxièmement, pour que les populations desservies soient à
même de constater qu'elles ont une place à part entière
dans l'institution qui les dessert et soient, de ce fait, incitées
à avoir recours à ces services.
On reconnaît ici, donc, deux types de fonctions à cette
représentation: l'une, instrumentale, rendre les services les plus
appropriés; l'autre, d'image, permettre aux individus de se
reconnaître dans' les services qui sont offerts. Toutefois, dans le
secteur de la santé et des services sociaux, l'approche des programmes
d'accès à l'égalité ne saurait, on s'en rend bien
compte, se limiter seulement aux questions d'embauché. Elle renvoie plus
largement à une analyse des besoins spécifiques des
clientèles à desservir et à une évaluation, dans
cette perspective, des services offerts. Elle nécessite une adaptation
de l'offre de services aux besoins de la clientèle dans les termes que
nous avons décrits plus hauts. Une telle approche exige que des
objectifs de rattrapage soient fixés là où ils sont
requis. En bout de ligne, une évaluation de ce rattrapage devra
être faite par une comparaison des clientèles rejointes par
rapport à celles visées lors de la définition des
objectifs.
Dans ce cadre, la Commission des droits de la personne aimerait situer
ses recommandations en regard des objectifs de l'avant-projet de loi relatifs
à la Loi sur les services de santé et les services sociaux et
leur mode de réalisation. Nous aimerions, tout d'abord, vous signaler la
disparition de l'article 5, qui était dans la loi actuelle et qui
énonce le principe de non discrimination dans l'octroi des services de
santé et des services sociaux mais qui ne figure plus dans
l'avant-projet de loi actuel. L'article 5 se lit comme suit: "Les services de
santé et les services sociaux doivent être accordés sans
distinction ou préférence fondée sur la race, la couleur,
le sexe, la religion, la langue, l'ascendance nationale, l'origine sociale, les
moeurs ou les convictions politiques de la personne qui les demande ou les
membres de sa famille". Bien sûr, avec la promulgation de la Charte des
droits et libertés en 1976, cet article était devenu, en grande
partie, superflu. Il y aurait lieu, toutefois, de noter que
rénumération des motifs interdits de discrimination
diffère de celle de la Charte des droits et libertés. Elle
inclut, par exemple, les moeurs d'une personne parmi les motifs interdits. Or,
nous estimons que l'absence de toute référence à
l'interdiction de discrimination fondée sur les moeurs dans
l'avant-projet de loi enlèverait la protection dont peuvent jouir
certaines personnes susceptibles d'être victimes de discrimination comme,
par exemple, les toxicomanes, les alcooliques invétérés,
les sidéens, etc. Aussi, nous aimerions proposer, en vue de combler une
telle lacune, d'amender le deuxième paragraphe de l'article 2 comme
suit: Rendre accessible à toute personne, quelles que soient les causes
de sa maladie, de manière continue, etc.
La Commission des droits de la personne souscrit aux objectifs
définis à l'article 2. Elle soumet toutefois que, pour être
atteints, ces objectifs doivent être traduits dans des impératifs
organisationnels. Une réponse aux besoins dans une perspective du "cas
par cas" ne peut que faire surgir très rapidement les limites
évoquées par l'article 4 de l'avant-projet de loi qui se lit
comme suit: Toute personne a droit de recevoir des services de santé et
des services sociaux adéquats sur les plans à la fois,
scientifique, humain et social, avec continuité et de façon
personnalisée, compte tenu de l'organisation et des ressources humaines,
matérielles et financières des établissements qui
dispensent ces services". Comme on vient de le voir, ces limites pourraient
difficilement être invoquées si l'on n'a pas
développé les mesures organisationnelles nécessaires pour
éviter les effets discriminatoires dans la distribution des services sur
certains groupes de personnes. Compte tenu de ces exigences, il nous
apparaît important que l'article 21, qui précise le rôle des
établissements et de leurs centres, reprenne le plus explicitement
possible les caractéristiques des services définis à
l'article 2. À savoir: leur accessibilité et leur
continuité, leur adaptation aux besoins et aux caractéristiques
de la population, leur accessibilité linguistique. Ainsi, la Commission
recom-mande-t-elle la modification de l'article 21 dans les termes suivants:
Les établissements ont pour mission de fournir aux
bénéficiaires des services de santé et des services
sociaux de qualité qui soient continus, accessibles et adaptés
aux besoins des individus et aux particularités de la population, tels
que précisés aux paragraphes 2°, 3° et 4° de
l'article 2 de la présente loi et à cette fin, de gérer
avec efficience les ressources humaines, matérielles et
financières et de collaborer avec les autres intervenants du domaine de
la santé et des services sociaux. (17 h 45)
Comme, par ailleurs, les mesures devant faciliter l'accès aux
services devront être définies en fonction de la clientèle
précise, la Commission s'inquiète de l'absence de
définition, dans l'avant-projet de loi, de la notion de
communauté culturelle qui apparaît au paragraphe 4 de l'article 2.
Certes, il ne s'agit pas d'une situation nouvelle, puisque la notion n'a
reçu à ce jour aucune définition législative.
Toutefois, son utilisation dans divers énoncés de politiques ou
législations, et plus spécifiquement en référence
à des organismes créés à l'Intention des
communautés culturelles, réfère clairement aux
communautés distinctes des Amérindiens, des communautés
d'origine française ou britannique. Par contraste, l'utilisation de la
formule "pour les différentes communautés culturelles du
Québec", au paragraphe 4 de l'article 2 de l'actuel avant-projet de loi,
ouvre la voie à une
définition beaucoup plus large, chaque citoyen pouvant se
réclamer membre d'une communauté culturelle. Divers groupes
représentant des communautés minoritaires nous ont
confirmé qu'une telle interprétation leur avait été
donnée en milieu autorisé. En conséquence, la Commission
recommande l'insertion dans la loi d'une définition de la notion de
communauté culturelle qui soit conforme au sens de ce terme dans les
politiques et programmes développés à l'intention de ces
communautés. Elle devrait, de ce fait, viser minimalement la
minorité ethnoculturelle et raciale dans la société.
De plus, la Commission considère que le fait d'assurer, dans le
texte de l'avant-projet de loi, une représentation adéquate des
diverses composantes de la population à desservir au plus haut niveau
administratif constitue une garantie de base pour la réalisation des
objectifs visés par l'avant-projet de loi. À cet égard,
les objectifs de représentation dans les conseils d'administration des
établissements publics explicités à l'avant-projet de loi
lui paraissent tout à fait adéquats. Quoique... Pardon,
inadéquats. Quoique louable que puisse paraître la volonté
d'y voir représentés premièrement, les personnes
âgées au sein des conseils d'administration des
établissements de chaque territoire de Centre local de services
communautaires et deuxièmement, les parents des
bénéficiaires d'un établissement au sein du conseil
d'administration des établissements de chaque territoire de centre de
services sociaux, une telle approche énuméra-tive ne lui
paraît pas servir les objectifs souhaités d'une telle
représentation. La Commission recommande plutôt l'insertion d'un
article chapeau, au deuxième paragraphe de la première section du
chapitre, qui préciserait cette obligation de représentation. Cet
article pourrait être stipulé comme suit: La composition des
conseils d'administration décrite aux article 49 et 50 devra
refléter adéquatement les particularités des populations
desservies.
Le Président (M. Joly): M. Lachapelle. M. Lachapelle:
Ce même type d'article...
Le Président (M. Joly): Excusez, M. Lachapelle, je vous
inviterais peut-être à conclure.
M. Lachapelle: J'en ai encore pour quatre secondes.
Le Président (M. Joly): Parfait, merci.
M. Lachapelle: Ce même type d'article devrait se retrouver
au chapitre I du titre IV qui institue les régies régionales de
la santé et des services sociaux. Je vous remercie.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Lachapelle. Vous aviez
bien minuté votre...
M. Lachapelle: Mais je n'avais pas la même montre que vous,
probablement.
Le Président (M. Joly): ...présentation. Merci. M.
le ministre délégué à la Santé et aux
Services sociaux.
M. Sirros: Oui, moi, je suis encore dans le texte.
Le Président (M. Joly): Ce n'est pas le même
texte.
M. Sirros: Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais
remercier la Commission des droits de la personne pour leur
présentation. Tout le mémoire est caractérisé par
un souci évident d'assurer le respect des droits des personnes à
l'intérieur de la dispensation des services, avec une attention plus
particulière accordée aux membres de communautés
culturelles. Je disais ici que ce serait un peu difficile de vous questionner,
parce que je trouve que, finalement, vous venez beaucoup... Il y a comme une
convergence de points de vue, finalement. Parce que si on reprend le document
"Oritentations", ainsi que plusieurs autres projets qui ont été
mis de l'avant par le ministère, on y retrouve beaucoup d'objectifs en
commun, en ce qui concerne l'adaptation des services du réseau aux
différents membres des différentes communautés
culturelles. Je pense qu'on peut prendre votre présentation un peu comme
un appui à cette démarche, un appui important. Vous rejoignez
beaucoup les éléments qui ont été
énumérés à la page 46, par exemple, du document
"Orientations", pages 46 et 47, où on parie de cette
nécessité d'adapter le réseau, même au niveau des
autochtones, de la nécessité d'uautochtoniser", en
quelque sorte, les services, en incitant les membres des communautés
autochtones à s'intégrer au sein des différentes
professions, pour pouvoir, par la présence du personnel dans les
établissements, être en mesure d'offrir des services
adaptés. Et je pense que c'est au niveau de cette possibilité
d'envisager un véritable programme d'accès à
l'égalité en emploi dans le réseau qu'on pourrait assurer,
à moyen et à long terme, je dirais, la pérennité,
en quelque sorte, des services adaptés. Moi, j'aimerais revenir
peut-être sur deux choses. D'une part, vous mentionnez la
nécessité de trouver une définition des membres des
communautés culturelles. C'est une question que l'on a commencé
à traiter. Est-ce que vous pouvez aller plus loin que la simple
suggestion de trouver une définition? Est-ce que vous avez, à la
Commission, regardé différentes possibilités en termes de
définition? Et si oui, pouvez-vous nous en faire part? Sinon,
accepteriez-vous peut-être de nous soumettre une suggestion?
M. Lachapelle: Justement. Mme Garon, alors qu'on regardait
ensemble le mémoire, me disait:
Et si on vous demandait une définition...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lachapelle: ...qu'est-ce que vous pourriez donner? Oui.
Effectivement, ce n'est pas une question facile. Vous savez peut-être
qu'aux Nations Unies, pendant de nombreuses années, le comité de
la Commission des droits de l'homme s'est penché sur cette question.
Deux savants juristes ont remis des documents sur cette question. Le dernier en
liste, c'était le juge Deschênes, qui a remis une
définition qui est encore sur la table des Nations Unies, à
savoir ce qu'est une minorité ethnique, une minorité
culturelle... Bon. Cela dit, il reste qu'on peut tout de même arriver
à avoir une définition qui soit convenable, qui soit, je dirais,
québécoise des minorités culturelles. Et la Commission des
droits de la personne a fait une étude assez vaste sur ce sujet, ces
derniers temps. Je n'ai pas évidemment une définition, comme
ça, en poche, mais on pourrait sûrement, à partir des
études et des consultations que nous avons faites, vous fournir une
telle définition des communautés culturelles. Parce qu'encore une
fois, telle qu'elle est dans le texte actuellement, elle pourrait être un
peu embêtante, tout le monde pouvant revendiquer d'être d'une
communauté culturelle. Je viens d'une communauté culturelle; vous
aussi... Chacun des citoyens appartient à une communauté
culturelle. Et on imagine bien que l'objectif du texte de loi n'était
pas de marquer chacune des personnes des communautés culturelles qui a
droit à un service, ça me semble assez évident. On voulait
donc cibler probablement des communautés culturelles minoritaires; mais
le mot "minoritaires" n'est pas là. Je ne sais pas si Mme Garon peut
ajouter... Si elle a elle-même une définition qu'elle pourrait
nous proposer, comme ça, tout de go?
Mme Garon (Murielle): Non. Je pense que, toutefois, à
l'occasion de la publicisation de la recherche qui est à peu près
terminée, à peu près prête à être
dévoilée, nous pourrons tenter de suggérer.
M. Sirros: On attendra...
Mme Garon: En tout cas, c'est un objectif à très
court terme. C'est d'ici un mois ou deux.
M. Sirros: On attendra avec intérêt, et hâte,
d'avoir la recherche et la définition.
Mme Garon: Oui. Mais quand même, je pense qu'il est
très important de souligner, de rappeler que l'intention qui vous semble
partagée - vous le signaliez - entre les rédacteurs du projet de
loi et la Commission des droits de la personne nous paraît très
diluée et même prête à disparaître, du fait de
cette homogénéi- sation, finalement, du statut d'appartenant
à une communauté culturelle, d'une part, et d'autre part, d'une
certaine faiblesse que nous avons voulu signaler à l'effet qu'à
l'article 21, qui définit très précisément le
rôle des établissements, on ne retrouve pas très
spécifiquement... Alors que quant à un établissement
à définir son rôle, c'est l'article 21 qu'il regarde. Et
nous voudrions que l'intention qui est définie à l'article 2
paragraphe 2 se trouve à l'article 21 et donc, qu'il y ait une
référence. C'est-à-dire que les services au milieu de
l'article 21...
M. Sirros: Donc, ils auraient la mission d'offrir des services
qui seraient adaptés...
Mme Garon: Exactement.
M. Sirros: ...aux réalités socioculturelles et
linguistiques.
Mme Garon: Ça me paraît important, parce qu'une loi
ne parle pas pour rien dire.
M. Sirros: On a, dans la loi actuelle des dispositions, par
exemple - ce qui a été reconduit dans l'avant-projet de loi - qui
prévoient qu'un conseil régional doit soumettre, pour approbation
au gouvernement, un plan de service pour des personnes d'expression anglaise.
C'est suite à la loi 142 que ça a été mis
là-dedans. Quelle serait la réaction de la commission, s'il y
avait en plus un article de loi qui prévoierait, par exemple, qu'une
régie régionale soumettrait, pour approbation au gouvernement, un
plan régional de services pour les communautés culturelles. Sur
le plan légal, d'une part, ou sur le plan de... Votre mémoire,
finalement, dit: Nous voulons nous assurer que cette question de
l'accessibilité pour les membres des différentes
communautés culturelles dans le réseau de la santé et des
services sociaux soit prise en compte à l'intérieur même du
fonctionnement du système, dans sa planification, dans sa distribution
des services, dans l'engagement de son personnel, pour que
"accessibilité" veuille aussi dire "consommation possible de services".
Comment réagissez-vous à l'idée d'introduire, dans la loi
même, un article qui appelle la préparation d'un pian de services.
D'une façon prévue dans la loi?
M. Lachapelle: Et sous une forme, d'une certaine façon,
obligatoire, plus que laisser seulement...
M. Sirros: Une obligation de soumettre au gouvernement, pour
approbation, un plan d'accessibilité à des services, dans lequel
serait spécifiée la nature de ces services, et à qui ils
seraient disponibles, à quelles communautés. Un peu comme le
parallèle qui existe actuellement
pour les services en langue anglaise.
M. Lachapelle: Oui. Vous savez... D'abord, une première
remarque. Dans la Charte des droits et libertés, on prévolt
déjà, à l'article 86.1, qu'un programme d'accès
à l'égalité peut être prévu en emploi dans
les services de santé, dans les services sociaux et dans tout autre
service offert au public. Donc, on a là une ouverture qui vient de
mettre à l'abri, si vous voulez, des questions de chartes. Donc, c'est
déjà inscrit dans la Charte des droits et libertés. Il n'y
a donc pas de difficulté à ce que, dans une autre loi, on puisse
aller inscrire, de façon spécifique, la prévision de plans
et de programmes d'accès à l'égalité, en
matière d'accès à la santé.
D'autre part, nous croyons, à la commission - et l'étude
nous l'a démontré - qu'il y a beaucoup de travaux qui ont
été faits en matière d'accès à
l'égalité. Je pense que, M. le député, vous avez
été à même de le constater, en faisant une
étude sur ce sujet-là que dans beaucoup d'hôpitaux, dans
beaucoup de centres, dans beaucoup de centres d'accueil, on a fait des travaux
à ce sujet-là. Et qu'il y a beaucoup de travail qui se fait,
actuellement. Mais nous croyons qu'il doit y avoir un incitatif un peu plus
puissant pour faire décoller, de façon plus vivante, ces
programmes d'accès à l'égalité en matière de
services de santé. Donc, nous venions d'un très bon oeil
l'insertion, avec obligation de produire de tels plans.
Mme Garon: J'ajouterais même qu'il est très
important de se rendre compte que des programmes d'accès à
l'égalité, dans le domaine des services sociaux et services de
santé, ça ne peut pas se limiter à des programmes
d'accès à légalité en emploi. Quand vous avez
parié de programmes d'accès à l'égalité,
tout à l'heure, vous avez dit "programmes d'accès à
l'égalité en emploi". Ce qui renverrait à cette
idée que, pour répondre à des besoins des
communautés culturelles, par exemple, ou des personnes
âgées, ou des handicapés, ça prend des personnes des
communautés culturelles dans la main-d'oeuvre qui dessert une certaine
population.
Nous croyons qu'effectivement, ça doit se faire, et qu'un
programme d'accès à l'égalité en emploi, c'est une
possibilité d'une représentation parmi le personnel d'un
établissement, une entreprise ou d'un centre de services sociaux, une
représentation qui corresponde à la disponibilité de la
main-d'oeuvre sur le marché du travail. Pour nous, les programmes
d'accès à l'égalité dans le domaine de la
santé, ça ne veut pas dire uniquement programmes d'accès
à l'emploi. Le programme d'accès à l'emploi, c'est
permettre à des gens, qui ont une certaine compétence et qui
appartiennent à des minorités qui sont victimes de
discrimination, d'accéder à l'emploi.
Là, le problème doit être vu d'une façon
différente. Et c'est un peu le visage nouveau qu'on a voulu donner,
l'extension nouvelle à une notion de programme d'accès à
l'égalité. Pour nous, dans ce cas-là, ce qu'il s'agit de
faire, c'est d'assurer aux personnes qui font partie de la population et qui
ont besoin de services de santé d'avoir des services qui correspondent
à leurs besoins. Ce n'est plus de l'emploi, ce sont des services de
santé. Voilà. (18 heures)
On a essayé d'analyser comment on pourrait transposer aux
situations des services de santé ce regard sur les programmes
d'accès à l'égalité en emploi. Alors, on se dit:
Comment on fait ça? On a un canevas pour analyser les emplois qui nous
amène à évaluer, d'une part, la représentation du
groupe et d'autre part, à la comparer à la représentation
de ce groupe dans la main-d'?uvre, en général. Actuellement,
nous considérons que, pour les questions de santé, transposer
cette préoccupation, c'est examiner des besoins dans la population et
voir comment on y répond dans les services de santé. Pour
définir une programmation qui permette de répondre à ces
besoins, d'une part, il faut qu'il y ait une sensibilisation des personnes qui
sont au plus haut niveau - c'est une exigence que nous croyons absolument
nécessaire - et d'autre part, il faut évaluer ces
besoins-là, il faut faire des études de besoins et de ressources
nécessaires. Éventuellement, l'embauche de personnel de ces
communautés-là peut être une des ressources qui permette de
répondre aux besoins; mais on n'aura pas nécessairement des
Portugais pour répondre aux besoins des Portugais, des Grecs pour
répondre aux besoins des Grecs et des Chinois pour répondre aux
besoins des Chinois. Ce qu'il faut, c'est qu'on ait un service qui soit
adapté. Ça demande beaucoup plus. Ça demande,
au-delà de l'embauche de personnel de communautés culturelles,
une sensibilisation de l'ensemble du personnel à des problèmes
qui peuvent se présenter.
M. Sirros: Je suis tout à fait d'accord, mais il y a deux
choses... Je ne sais pas si j'ai encore le temps...
Le Président (M. Joly): Encore quelques minutes, M. le
ministre.
M. Sirros: II y a deux choses. D'une part, n'y aurait-il pas, par
contre, certains services où ce serait souhaitable que ce soit
culturellement adapté? Par exemple, je reviens avec la question des
personnes placées pour soins chroniques en centre d'accueil ou en centre
hospitalier, en centre de soins prolongés, issues d'une
communauté culturelle x, qui voudraient se retrouver dans un milieu qui
leur est familier et dans lequel elles pourraient se sentir un peu à
l'aise, étant donné que, de toute façon, il y a une perte
d'autonomie importante qui les amène à
être placées, etc. est-ce que ce serait un problème,
à ce moment-là, d'avoir des services dispensés, par
exemple, par des chinois pour des chinois, par des grecs pour des grecs, selon
la charte et tout ça?
Mme Garon: Nous pensons, au contraire, qu'il y a une
économie d'échelle. Prenez la question des personnes
âgées, des immigrantes qui sont venues avec leur famille, qui sont
restées dans des familles très refermées, qui n'ont pas
appris la langue de la majorité et qui ont gardé leurs coutumes
de base - par exemple, les coutumes autour de la nourriture - des coutumes de
base qui font partie de la vie quotidienne...
M. Sirros: Nourriture, moeurs, culture, religion, etc.
Mme Garon: Exactement. Si elles ont à être
placées en maison d'hébergement ou en centre d'accueil,
plutôt que de les placer au hasard, effectivement, l'Idée de les
réunir amène la possibilité de répondre à
des besoins, de centraliser la réponse à leurs besoins. Au
contraire, ça nous paraît une réponse tout à fait
adéquate à ce genre de besoin. C'est pour ça qu'il est
important de les définir, ces besoins. Ils sont diversifiés.
M. Sirros: S'il y avait une telle approche, il y aurait une
protection par rapport à des accusations de discrimination. Par exemple,
en disant qu'on exige que quelqu'un soit sensibilisé à cette
réalité pour pouvoir travailler dans un tel centre.
Ce qui amène ma deuxième question. Vous avez
mentionné tout à l'heure que, dans toute la question de
l'accès à l'égalité en emploi pour des membres des
différentes minorités, souvent, ça dépend aussi de
la disponibilité sur le marché. Je ne sais pas si vous pouvez
répondre à cette question, ou même si je la pose au bon
endroit. Le problème, c'est comme un cercle vicieux, un peu. Souvent, il
n'y a pas assez de gens formés pour accéder aux emplois; donc il
n'y a pas assez de gens dans les endroits pour pouvoir adapter les services.
Jusqu'à quel point, par exemple, est-ce qu'un programme d'accès
à l'égalité pourrait même venir changer les
règles du jeu mêmes, en quelque sorte des conventions
collectives?
Je m'explique. Souvent, les gens sont dans la situation qu'ils ne
peuvent pas engager quelqu'un qui n'a pas les compétences requises selon
la description de poste. Même si cette personne-là acceptait
d'aller les chercher, les compétences requises, de peur de créer
un précédent dans l'application des conventions collectives, qui
aurait des effets bien au-delà de l'effet recherché,
c'est-à-dire compenser pour le manque d'un certain type de personne dans
le cadre d'emploi concerné... Est-ce qu'il pourrait y avoir une
façon de protéger ce genre de programme qui permettrait, par
exemple, l'embauche de personnes ayant certaines compétences pratiques
qui accepteraient d'aller chercher les compétences académiques
requises selon les conventions collectives, par exemple?
Est-ce que les programmes d'accès à
l'égalité pourraient venir protéger contre la
création de précédents à l'intérieur de
l'application des conventions collectives?
M. Lachapelle: Je pense qu'on peut parler d'un autre aspect des
programmes d'accès à l'égalité. Parce que l'on
parle souvent des programmes d'accès à l'égalité en
emploi et, dans ce cas-là, comme vous dites, souvent, on retombe dans le
cercle vicieux. Quoique, en matière de programmes d'accès
à l'égalité, on essaie d'aller chercher dans ces groupes
disponibles, comme vous dites, des personnes qui ont des compétences,
celles qui sont aptes, donc celles qui, dans un délai raisonnable, dans
un délai relativement court, pourraient occuper des fonctions de
personnes compétentes. Donc, il y a là une espèce de
soupape dans les programmes d'accès à l'égalité
mêmes, où on peut aller recruter des personnes aptes
à...
L'autre aspect que vous mentionnez, et qui se rattache, justement, au
programme d'accès à l'égalité - un autre genre de
programme d'accès à l'égalité, en matière
d'éducation - est extrêmement important. Justement, les
études de la Commission des droits de la personne, dont Mme Garon vous
parlait tantôt, se sont penchées sur cette question-là:
Quel est le bassin potentiel, quels sont les éléments
discriminatoires dans le système d'éducation, par rapport aux
communautés culturelles? Parce que, là, cette fols, on renvoie au
système d'éducation vis-à-vis les communautés
culturelles. Je pense bien qu'on ne pourrait pas dire qu'un programme
d'accès à l'égalité en emploi au niveau de
l'embauche puisse faire fi des compétences des gens et des exigences
minimales qui, encore une fois, doivent être révisées dans
un programme d'accès à l'égalité, pour être
bien sûrs que les compétences que l'on requiert ne sont pas
exagérées. Mais on ne pourrait pas faire fi des
compétences des personnes, dans un programme d'accès à
l'égalité à l'embauche. Mais, par ailleurs, II faut
intervenir au niveau du système d'éducation.
Mme Garon: Mais, d'autre part, pour ce qui est de l'embauche des
femmes, par exemple, la question s'est déjà posée. Et la
question d'avoir la possibilité d'obtenir de la formation en cours
d'emploi peut être définie comme une façon de contrer un
effet discriminatoire; et toute la notion de formation en cours d'emploi peut
être examinée. Mais, si on se rend compte effectivement, dans une
convention collective, d'une exigence qui paraît exorbitante par rapport
à un groupe, il y a toujours possibilité d'intervenir
à
ce niveau-là. Et, dans un programme d'accès à
l'égalité, l'examen de l'ensemble des conditions, des situations
d'emploi, du système d'embauché, et la convention collective font
partie, sont en fait périphériques au système
d'embauché. Donc, c'est un élément qui peut être
examiné.
Le Président (M. Joly): Merci. Dernière question,
M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Sirrot: J'ai une dernière question. À la page 3
de votre mémoire, vous soulevez la question de la disparition de
l'article 5 de l'ancien projet de loi, qui est l'article qui parle des services
de santé qui sont donnés sans discrimination; effectivement, on
ne retrouve pas cet article-là dans l'avant-projet de loi. La raison,
c'est qu'il a été estimé que, étant donné
que la Charte est venue en quelque sorte offrir cette protection à
l'ensemble des citoyens, on n'enlevait rien à la question en laissant
tomber l'article. Vous ne semblez pas être tout à fait d'accord
avec ça et j'aimerais vous entendre brièvement sur ça.
M. Lachapelle: Très brièvement, on y retrouve
là les principaux motifs qu'on retrouve à l'article 10. Il n'en
manque seulement qu'un: la discrimination fondée sur les moeurs. Et
à cet égard, nous disons que celui-là, n'étant pas
dans la Charte, ne couvrira peut-être pas certaines personnes
sidéennes... Et c'est là qu'on dit qu'on pourrait amender
l'article, l'article 2, pour qu'il se lise: Le rendre accessible à toute
personne, quelles que soient les causes de sa maladie. Alors, à ce
moment-là...
M. Slrros: Question très rapide
M. Lachapelle: ...il me semble que ça couvrirait
l'ensemble, et ça couvrirait la question des moeurs.
M. Sirros: question très rapide. à ce
moment-là, ça voudrait dire que cette loi-ci, la loi sur les
services de santé et les services sociaux, irait plus loin que la
charte?
M. Lachapelle: Sur cet aspect-là, oui. M. Sirros:
Et, avec ça ...
Mme Garon: Elle allait plus loin que la Charte.
M. Lachapelle: Elle allait plus loin que la Charte,
évidemment, avec "moeurs" qui n'est pas dans la Charte.
M. Sirros: O.K., c'est dans ce sens-là que vous dites que,
en le retranchant, on diminue...
Mme Garon: On recule.
M. Sirros: ...ce qui existait. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le
député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue, s'il vous
plaît.
M. Trudel: Merci beaucoup, M. te Président. Il y a un bon
nombre de questions qui vous ont été posées à la
suite de votre contribution dans le document que vous avez déposé
aujourd'hui, document extrêmement intéressant, sur l'exercice des
droits des bénéficiaires. J'ai envie d'aborder la question d'une
autre minorité ou d'autres minorités qui sont rendues invisibles,
parce qu'elles ressemblent trop à la majorité. Je trouve
absolument intéressante la partie de votre mémoire qui concerne
l'accommodement des services, et le rappel que vous faites ici au
législateur que la notion d'accessibilité doit donc faire l'objet
d'un examen sérieux et que, ce dont il faut s'assurer, c'est que ces
services sont véritablement accessibles, c'est-à-dire non
seulement disponibles, mais consommables par tous. Est-ce que vous
considérez - et ce n'est pas un jugement de la Commission des droits que
je veux avoir, mais plutôt une opinion, un avis -que dans le cas d'un
résidant d'une région périphérique qui, par manque
d'effectifs, par manque de ressources humaines, par manque de tout ce que vous
voudrez bien énumérer n'a pas accès à un certain
nombre de services, et qui souffre donc d'un préjudice suite à
cela, qu'il y a là une question de discrimination vis-à-vis cette
personne? Par exemple, les personnes habitant les régions
périphériques. Parce que vous vous intéressez, et à
juste titre d'ailleurs, aux communautés culturelles, à tout
l'imbroglio de la définition et de l'éclaircissement à
obtenir; mais il y a de nombreuses communautés géographiques - il
faut aussi mettre ça entre guillemets - qui ont des problèmes
d'accès au niveau du consommable. L'universalité, la
gratuité, l'accessibilité me semblent en prendre un coup
très sérieux pour bon nombre de régions. Est-ce une cause
de discrimination, à votre avis, le fait de ne pas avoir accès
à un certain nombre de services, à un seuil de services dans une
région périphérique donnée, par exemple?
M. Lachapelle: Sur la base de l'article 10 - pas de l'article 10,
mais de la charte - si on parle spécifiquement de discrimination et si
on voulait s'en tenir à une question strictement juridique, les motifs
de discrimination sont inscrits dans l'article 10: L'exclusion
préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la
grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge, les
convictions religieuses, les convictions politiques, la langue, l'origine
ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l'utilisation d'un
moyen pour y pallier. Donc, techniquement, sur la base de l'article 10, on
ne
pourra pas dire que les personnes en milieux périphériques
ou loin de centres hospitaliers qui peuvent donner des services convenables
sont victimes de discrimination. Donc, une personne ne pourrait pas venir
à la commission comme ça, techniquement, porter une plainte.
Toutefois, je peux peut-être vous rappeler l'article 45 de la
Charte - et là, on n'est plus dans le domaine de la discrimination...
Mais quand on lit, à l'article 45: Toute personne dans le besoin a
droit, pour elle et sa famille, à des mesures d'assistance
financière et des mesures sociales prévues par la loi
susceptibles de lui assurer un niveau de vie décent. " Nous, on pense
qu'un niveau de vie décent, c'est bien sûr un niveau de vie
où sa santé est protégée et où il
reçoit les mêmes services que tout le monde à travers toute
la province.
Sous ce chapitre-là, ça irait à l'encontre de la
Charte. Même si on dit "des mesures prévues par la loi", les
mesures prévues par la loi doivent être égales pour tout le
monde. Elles ne doivent pas être différentes pour tout le monde.
Dans ce sens-là, il y a évidemment, selon nous, une entrave
à la Charte, s'il n'y a pas de service adéquat ailleurs.
M. Trudel: Est-ce qu'on vous a déjà soumis,
à la Commission, des cas d'apparente discrimination, compte tenu de
l'absence de services ou encore souvent -je le mentionne dans la même
question - compte tenu des coûts qui sont entraînés pour
pouvoir jouir d'un service, pour qu'il soit consommable. Par exemple, un
résidant d'une région périphérique - je peux vous
parler ici d'une région comme l'Abitibi-Témiscamingue ou le
Bas-du-Fleuve - qui demande d'aller consommer des services
ultraspécialisés dans une région plus centrale. Et je ne
parle pas d'un transfert établissement-établissement pour un
diagnostic ou pour qu'il puisse bénéficier d'un traitement
unique, qui ne demanderait qu'une visite.
L'universalité et l'accessibilité me semblent
drôlement mises en cause quant à ce que l'usager doit
débourser, lui, contrairement à d'autres résidants, pour
aller consommer ce service-là. Est-ce que ça vous apparaît
aussi être un motif de discrimination et croyez-vous qu'il devrait y
avoir des mentions spécifiques dans la loi pour prévoir cette
espèce d'universalité? J'appellerais ça comme ça -
on trouverait les définitions plus tard - l'universalité minimum
d'accessibilité.
M. Lachapelle: Encore une fois, ce n'est pas discriminatoire.
Bien sûr, tout le monde est au courant, et chaque fois que je rencontre
des groupes de personnes handicapées, en régions ou ailleurs, on
me parle toujours de la difficulté d'avoir des services sur place pour
ne pas être obligé de prendre l'avion ou des moyens de transport
extrêmement coûteux pour se rendre dans un hôpital de
Montréal ou de Québec. Or, ce problème-là nous est
soumis régulièrement. Bien sûr, encore une fois, sur la
base de l'article 10 de la Charte, ce n'est pas une question discriminatoire.
Mais encore une fois, en termes du respect intégral de l'article 45 et
de son principe, bien sûr, ce n'est pas là assurer un niveau de
vie décent à une personne, si effectivement elle ne peut pas
avoir des services adéquats et de qualité dans une région
immédiate. (18 h 15)
M. Trudel: Toujours quant à l'exercice des droits des
personnes, des bénéficiaires, des usagers, de la population,
est-ce que vous avez examiné la question du traitement - qu'on appelle
vraiment le traitement des plaintes -d'un bénéficiaire ou d'un
usager ou usagère qui pense avoir été lésé
dans l'accès des services qui lui ont été fournis, ou par
l'absence de ces services, selon le cas? Est-ce que vous avez regardé
ça, le mécanisme des plaintes actuelles et prévues dans la
loi?
M. Lachapelle: Non, nous n'avons pas examiné cette
question-là. La Commission des droits de la personne, comme vous le
savez peut-être, a le mandat de faire enquête dans les cas
où les personnes subissent de l'exploitation, soit par leurs proches,
soit même par des centres d'accueil, des services d'hébergement.
La Commission n'a jamais examiné cette dimension, si vous voulez, de la
protection accordée aux personnes par rapport aux services qu'elles
peuvent recevoir.
Nous avons une petite étude, à la Commission, qui date
déjà de plusieurs années, mais qui est probablement encore
vraie. On ne pense pas qu'on ait remédié à ces
questions-là, mais je crois que ces questions sont souvent
référées, soit au Protecteur du citoyen, soit à
l'Office des personnes handicapées. Et peut-être que sous ce
chapitre, ce qui était suggéré par le Protecteur du
citoyen devrait être mis de l'avant, c'est-à-dire essayer d'avoir,
dans chacun des établissements, des ombudsmen; peut-être
même devrait-on élargir leur pouvoir, leur donner davantage de
prérogatives et de force dans l'organisation.
Mais on comprend que, de la façon qu'ils sont placés
actuellement, les pouvoirs qu'ils ont reçus sont passablement faibles.
Bien sûr, la Commission des droits de la personne a eu à faire des
recommandations, à l'époque de cette enquête à
Rivière-des-Prairies. Et la Commission avait suggéré,
là aussi, la mise en place de certains services de protection ou de
certains services de plaintes à l'intérieur de cette
institution.
Mais on constate, encore une fois, actuellement - je veux dire, ce n'est
pas l'objet d'une enquête mais, au moins, l'objet de discussions avec
certains groupes de personnes - que ces services d'ombudsman dans ces
institutions ne sont pas adéquats. Pour toutes sortes de raisons,
je pense, qui sont bien exposées dans le mémoire du
Protecteur du citoyen.
M. Trudel: Notez, en passant, que le Protecteur du citoyen n'a
pas mandat.
M. Lachapelle: II n'a pas mandat.
M. Trudel: II n'a pas mandat, il n'a pas juridiction
auprès de ses clientèles, de ces personnes, parce qu'elles ne
dépendent pas directement de l'administration publique gouvernementale.
Donc, il y a une espèce de vide à quelque part qui fait en sorte
que, actuellement, ce sont les Conseils régionaux de la santé et
des services sociaux qui sont chargés de recevoir les plaintes. Et ce
qui nous apparaît le plus important, ce n'est pas tellement de recevoir
les plaintes, mais c'est le traitement de ces plaintes.
J'ai répété, à une couple d'occasions...
Mais il faut que je le redise, ici, devant vous, pour... J'espère que
ça peut vous chatouiller un peu, cette histoire-là. En
matière d'exercice des droits, la pratique générale,
usuelle d'un bénéficiaire qui pense avoir été
lésé en termes de droit de services veut qu'il se présente
à son Conseil régional de la santé et des services
sociaux. La première chose qu'on va lui demander, bien sûr, c'est
de décrire de façon détaillée en quoi il a
été lésé.
Or, 20 % de la population québécoise ne sait pas
écrire, sont analphabètes ou sont Incapables de s'exprimer.
Alors, il y a là un droit fondamental de traitement. Il n'y a pas
d'assistance à la personne pour le traitement de son droit pour lequel
il aurait été lésé.
Deux questions, deux avis - pas des décisions. Deux avis à
la Commission des droits de la personne. L'article du projet de loi qui
prévoit que toute personne salariée, toute personne
rémunérée par le système de santé et des
services sociaux est exclue des conseils d'administration de tout
établissement vous apparaît-il discriminatoire pour ces personnes
pour lesquelles la loi interdirait d'exercer leurs droits fondamentaux - en
termes de questions - dans le système de santé et de services
sociaux, en siégeant à un conseil d'administration? Est-ce que
ça vous apparaît discriminatoire?
M. Lachapelle: Est-ce que c'est discriminatoire, ou tout
simplement... Parce que je fais une distinction entre être
discriminatoire - c'est-à-dire, encore une fois, sur les bases de
l'article 10 de ta Charte - et pouvant aller à rencontre de certains
principes de la Charte; principes de démocratie, par exemple, que toute
personne peut être élue ou être nommée à des
postes.
M. Trudel: Est-ce que ça va à rencontre de la
Charte?
M. Lachapelle: D'après moi, oui. Ça m'ap-
paraîl. Nous avons déjà fait des représentations
dans d'autres secteurs d'activités. Dans le monde scolaire, par exemple,
où on ne permet pas, si ma mémoire est bonne, au gérant
d'une municipalité, par exemple, de se présenter un jour à
un poste de conseiller. À ce moment-là, nous avions dit que
ça allait à rencontre des principes de la Charte.
Écoutez, on pourrait peut-être pousser plus loin
l'Investigation et vous répondre plus précisément à
ce sujet-là. Je ne voudrais pas... Vous m'avez dit que vous ne vouliez
pas avoir d'opinion juridique. Je vous donne un petit déblayage sur la
question, mais on pourrait peut-être aller plus loin, si cette commission
désire qu'on regarde davantage la question.
M. Trudel: Toujours dans la même veine, est-ce que
l'article prévoyait une limite dans l'exercice des mandats de direction
d'établissement ou d'institution? Deux mandats... Deux mandats de quatre
ans. Est-ce que ça aussi, eu égard à la Charte, ça
vous apparaît une discrimination, par rapport à ces personnes, de
limiter les mandats que l'on peut exercer à la direction d'un
établissement dans les systèmes de santé et les services
sociaux? Eu égard à la Charte, là.
M. Lachapelle: Une réponse rapide: j'en douterais
beaucoup. Ce serait la même chose pour le président de la
Commission des droits de la personne, qui a un mandat limité par
l'Assemblée nationale à un maximum de 10 ans. Est-ce qu'il
pourrait se plaindre de discrimination à la Commission des droits de la
personne? J'en douterais beaucoup.
M. Trudel: Ça ferait partie des conditions d'emploi.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lachapelle: Ça fait partie des conditions d'emploi.
M. Trudel: Merci. Je n'ai plus d'autres questions. Sur la
question de la participation des employés et des salariés dans
les systèmes de santé et les services sociaux, si jamais vous
avez de la documentation, je souhaite vraiment que vous me la fassiez parvenir.
Faites-là parvenir au ministre, et envoyez-moi une copie conforme. On
sera plus rassurés quant aux possibilités; si le ministre refuse
de l'examiner, bien, on sera là pour poser les questions
là-dessus. Alors, merci beaucoup de votre contribution. Je souhaiterais
recevoir cette documentation. C'est un avis, en termes de contenu, qui est
extrêmement intéressant. Je le redis, en terminant et en vous
remerciant: cette notion d'accessibilité, à partir de la
définition du consommable, c'est un aspect extrêmement important
de ce que nous avons à
faire comme examen de ce projet de réforme des services de
santé et des services sociaux au Québec. Merci beaucoup.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député.
M. le ministre.
M. Lachapelle: Merci.
M. Sirros: Simplement vous remercier et aller dans la même
veine. Ce fut très apprécié. Merci.
Le Président (M. Joly): Alors, au nom des membres de cette
commission, moi aussi, je tiens à vous remercier.
Je voudrais aussi aviser les membres de cette commission de quelques
modifications apportées à l'ordre du jour du jeudi 29 mars. Le
CLSC de Bellechasse sera entendu à 17 h 30 au lieu de 20 heures; le
centre Cardinal-Villeneuve, le centre François-Charron, le centre
Louis-Hébert et l'Institut des sourds de Charlesbourg seront entendus
à 18 heures au lieu de 20 heures; l'ajournement est prévu pour 18
h 30; et en ce qui concerne le centre hospitalier Hôtel-Dieu de
Lévis, l'audition a été reportée.
Alors, nous allons maintenant ajourner nos travaux à demain
matin, 10 heures, à la salle du Conseil législatif. Merci.
(Fin de la séance à 18 h 23)