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(Dix heures six minutes)
Le Président (M. Joly): La commission est réunie
afin de procéder à une consultation générale et
tenir des auditions publiques, dans ie cadre de l'étude de
l'avant-projet de loi, Loi sur les services de santé et les services
sociaux. Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la secrétaire?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Atkinson
(Notre-Dame-de-Grâce) est remplacé par M. Holden (Westmount),
ainsi que M. Paradis (Matapédia) par M. Charbonneau (Saint-Jean).
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la secrétaire.
Aujourd'hui, nous entendrons les organismes suivants: le Curateur public du
Québec; le Protecteur du citoyen; la Fédération des CLSC
du Québec; l'Association des cadres intermédiaires des affaires
sociales; l'Association des administrateurs des services de santé et des
services sociaux du Québec.
Alors, je vois que, déjà, le premier organisme a pris
place. J'apprécierais que la personne responsable se présente et
présente les gens qui l'accompagnent.
Curateur public du Québec
Mme Fontaine (Nicole): Nicole Fontaine, Curatrice publique. Je
vous présente les gens qui m'accompagnent: à ma gauche, Mme
Marjolaine Loiselle, directrice de la planification; à mon extrême
gauche, Mme Marie Boivin, avocate, responsable du service de
représentation à la Direction de la protection des majeurs;
enfin, à ma droite, M. Bruno Maheu, directeur de la Protection des
majeurs au Curateur public.
Le Président (M. Joly): Merci, madame. Je vous rappelle un
peu la procédure: vous avez une vingtaine de minutes pour
présenter votre mémoire de la façon la plus concise
possible et, par après, les parlementaires des deux formations se
réservent le loisir et le plaisir de vous poser des questions. Merci.
Alors, allez madame.
Mme Fontaine: M. le Président, M. le ministre Marc-Yvan
Côté, MM. et Mmes les députés, je suis en fonction
depuis quatre semaines comme Curatrice publique, mais j'ai tenu à
profiter de l'occasion pour m'exprimer personnellement devant vous afin de bien
présenter l'opinion du Curateur public du Québec. J'ai voulu
profiter de l'occasion d'autant plus que j'ai oeuvré, depuis environ une
vingtaine d'années, dans le réseau de la santé et des
services sociaux. Ainsi, après un bref rappel de la mission et des
clientèles du Curateur public, nous vous présenterons quatre
aspects principaux qui ont retenu notre attention dans l'avant-projet de
loi.
Les quatre aspects sont les suivants: certains éléments de
l'organisation des services qui ont attiré notre attention; le
comité des bénéficiaires; les organismes communautaires
et, enfin, la définition présentée dans la loi des
CLSC.
Bon. Je commence par la mission, un bref rappel de notre mission. Le
Curateur public représente actuellement quelque 16 000 personnes au
Québec dont la majorité vivent ou reçoivent des services
des établissements du réseau, soit sur une base interne ou
externe à domicile. Le Curateur public, je le rappelle, supervise
également 5000 tuteurs et curateurs privés dont les
protégés sont également, pour une partie d'entre eux, des
bénéficiaires du réseau de la santé et des services
sociaux. De par cette représentation légale, les rôles et
fonctions du Curateur public sont multiples. J'en rappelle deux volets
principaux qui sont pertinents pour aujourd'hui: le premier volet, qui est bien
connu, je pense, l'administration du patrimoine des personnes
représentées; le deuxième volet, qui est la promotion et
l'assurance, par des gestes concrets, du respect des besoins, des
intérêts et des droits des personnes que nous représentons.
C'est ce dernier volet qui a pris, au cours des dernières années,
beaucoup plus d'ampleur et a entraîné la mise en place
d'orientations axées sur le mieux-être, la représentation
des personnes. Ces orientations ont d'ailleurs inspiré la réforme
des régimes de protection et la nouvelle loi 145 qui a été
adoptée en juin 1989 et qui devrait être en application le 1er
avril.
Je rappelle les types de clientèle que nous représentons
et qui vous sont sûrement très familiers. Ce sont principalement
des personnes souffrant de troubles mentaux, qui sont principalement dans les
établissements comme l'hôpital Louis-H.-Lafontaine et le centre
hospitalier Robert-Giffard que vous connaissez, des personnes souffrant de
déficience intellectuelle, des personnes âgées qui ont des
atteintes, des maladies dégénératives et, enfin, des
traumatisés de toutes sortes: crâniens ou des ACV, qui rendent ces
personnes inaptes, soit pour des périodes temporaires ou des
périodes plus permanentes et à différents niveaux.
En d'autres termes, comme vous le constatez, c'est une clientèle
qui se trouve parmi les plus vulnérables du réseau, parce que
beaucoup moins en mesure que d'autres de se faire
entendre et de faire valoir ses besoins et ses droits.
Le Curateur public est souvent, dans ses fonctions, confronté
dans son administration quotidienne aux différents problèmes et
ajustements du réseau de la santé et des services sociaux. J'en
cite quelques-uns: le manque de ressources, entre autres, dans le cadre de la
déskislitutionnalisation qui touche une bonne partie de notre
clientèle; l'engorgement de l'hébergement institutionnel; les
longues listes d'attente pour l'accès dans les centres d'accueil et
d'hébergement, je pense que ça vous est famiiter
également, concernant les adultes et les personnes âgées en
perte d'autonomie; la pénurie de ressources en matière de
services de réadaptation pour les traumatisés de diverses causes
et aussi les services de maintien à domicile, les services et les soins
à domicile, l'insuffisance aussi de services pour les personnes
atteintes d'une déficience intellectuelle et physique.
Ainsi, vous comprendrez que le Curateur public ne peut demeurer
indifférent aux nouvelles orientations proposées par
lavant-projet de loi sur la santé et les services sociaux. Compte tenu
des objectifs de santé et de bien-être pour tous et des
stratégies suggérées par votre ministère en vue de
la réalisation de cette réforme, nous pensons qu'elle devrait se
traduire par un système mieux adapté aux besoins engendrés
par les transformations sociales récentes dans la population
québécoise. Je cite quelques transformations: le vieillissement
de la population, bien sûr, également les taux d'incapacité
dans la population dont on peut s'attendre qu'ils vont aller en augmentant, en
partie, à cause du vieillissement de la population, mais aussi, en
partie, dû au fait de l'avancement de nos technologies qui
dorénavant permettent de maintenir en vie des personnes qui, par
ailleurs, vont avoir une durée de vie présentant des inaptitudes
de façon importante. Enfin, l'itinérance qui est une
caractéristique de notre société qui va probablement en
augmentant.
Mous appuyons les objectifs visés par la réforme qui sont
ceux d'accessibilité, de continuité, de
complémentarité et de qualité des services. Nous appuyons
plus fortement certains objectifs ou nous vous les proposons, qui sont des
objectifs de conserver une flexibilité dans l'organisation du
réseau et des possibilités d'innovation.
Nous appuyons aussi les moyens privilégiés tels que, de
façon peut-être plus particulière, la
régionalisation des services, mais nous pensons que les moyens devraient
aussi s'orienter vers la sous-régionalisation et une approche locale et
communautaire. Enfin, nous pensons qu'une action centrée sur des
programmes de services intégrés interétablissements serait
une approche à valoriser.
Enfin, le système devrait être centré sur la
personne, mais nous ajouterions "la personne et son milieu de vie", de
façon à profiter des forces vives de la communauté et
à ne pas renforcer l'isolement et l'individualisme
J'aborderai nos quatre points principaux. L'organisation des services.
Un élément a attiré notre attention,
particulièrement les conseils d'administration unifiés. C'est un
des changements majeurs suggérés par l'avant-projet de loi: la
création de conseils d'administration unifiés, soit la fusion sur
une base territoriale de conseils d'administration de divers
établissements. Nous comprenons qu'à travers cette
intégration, le ministère poursuit plusieurs objectifs que nous
partageons également, plus particulièrement endiguer le
phénomène de cloisonnement des établissements, favoriser
la liaison entre les établissements et, enfin - et pour nous, c'est un
élément capital aux yeux du Curateur public - susciter une plus
grande participation de la population à la gestion des
établissements et développer chez celle-ci un sentiment
d'appartenance et d'identification à un territoire donné. Pour
nous, c'est un objectif que nous partageons.
De toute évidence, ces objectifs sont primordiaux et fort
louables. Toutefois, nous ne sommes pas convaincus, pour les atteindre, qu'il
faille passer par la création de conseils d'administration
unifiés, ce qui veut dire changer beaucoup les structures du
réseau On pense que la mise en oeuvre de ces changements risque de
s'avérer complexe, onéreuse en termes de temps et
d'énergie et que ce n'est peut-être pas là qu'il faut
mettre l'emphase.
Nous pensons que les conseils d'administration actuels sont une tribune
où s'expriment des intérêts divers, sûrement. Les
personnes que cette tribune regroupe sont insufflées du même souci
d'attirer et d'assurer la qualité, la continuité des soins, mais
nous pensons que les membres des conseils d'administration ne sont pas de
simples gestionnaires de ressources au service de l'établissement, mais
ils ont un rôle crucial à jouer en regard de l'humanisation des
soins et aussi des liens à maintenir et à renforcer avec ta
communauté.
Ainsi, nous croyons que la création des conseils d'administration
unifiés s'éloigne de cette dernière réalité
et des bienfaits qui sont susceptibles d'en résulter. Nous doutons de la
viabilité de cette formule qui, on le pense, pourrait plus attirer des
luttes de pouvoir que peut-être les amenuiser.
Nous sommes inquiets aussi particulièrement pour les
clientèles marginales, dont la nôtre, il va sans dire, qui
nécessitent une approche spécifique et nous ne sommes pas
certains que ces clientèles y trouveront leur compte et pourront s'y
faire entendre et sauvegarder leurs intérêts. Nous sommes d'autant
plus inquiets que la composition de ces conseils et le mode de
désignation de leurs membres, tels que proposés, n'offrent aucune
garantie quant à une représentation adéquate des
bénéficiaires au sein des
établissements. Pourtant, nous pensons que c'est une voix
importante et qu'elle s'avère, pour les administrateurs, une source
régulière d'information privilégiée concernant la
satisfaction par rapport aux services dispensés et nous pensons que
c'est un acquis à protéger.
Le ministère semble vouloir privilégier la participation
des citoyens à l'intérieur des conseils d'administration. Nous
pensons que c'est un objectif important. Toutefois, nous trouvons ça un
peu moins intéressant si cela se réalise au détriment des
principaux concernés, soit les bénéficiaires. Nous
comprenons qu'il faut viser une intégration des services sur un
territoire donné. Je pense que nos bénéficiaires, notre
clientèle en serait la première à bénéficier
des bons résultats, mais les conseils unifiés ne nous
apparaissent peut-être pas la solution pertinente.
Nous pensons que le ministère pourrait peut-être parvenir
à ses fins autrement. Par exemple, trois voies à explorer: la
première, un renforcement de certaines structures déjà
existantes ou embryonnaires telles que les tables de coordination qui sont de
concertation présentement, mais qui pourraient être de
coordination, sur un plan local, sous-régional et régional. Bien
sûr, le renforcement des régies régionales est un des
éléments.
Deuxièmement, nous pensons qu'il serait peut-être plus sage
de fusionner selon les circonstances et sur une base volontaire des
établissements ayant une même vocation et qui ont maintenant une
petite taille et qui pourraient être regroupés sur un territoire
donné. Nous pensons que ce serait plus pertinent puisque ça
crée moins d'interlocuteurs à se concerter sur un territoire
donné. Ça devrait être facilitateur.
Enfin, un troisième élément qui nous apparaît
important serait la question de clarifier davantage la mission et le champ de
responsabilité de chaque catégorie d'établissements. En
éliminant la duplication de services ou les apparences de duplication de
services, nous pensons que les établissements pourront être plus
facilement complémentaires et pourront s'échanger des services si
ces services sont différents, autrement, nous pensons qu'il y a une
compétition qui s'installe pour développer et se partager des
services qui peuvent être assez semblables. Nous vous apportons quelques
exemples, dont la question des soins et services à domicile qu'il nous
apparaîtrait peut-être approprié de mettre clairement et
complètement sous la responsabilité des CLSC au lieu d'avoir trop
de partenaires qui ont ce même mandat, ce qui pourrait entraîner de
longues discussions quant à qui fait quoi et comment et quelle
clientèle et sur quel territoire.
Enfin, un autre élément que, je pense, on retrouve dans
les orientations qui ont été publiées déjà,
c'est qu'il nous apparaîtrait important de clarifier toute la question
des missions et mandats concernant les cliniques externes, les unités de
médecine familiale versus ou en complémentarité avec la
question des services de santé et des services sociaux de base dans les
CLSC.
Nous pensons que le réseau y gagnerait peut-être, à
ce moment-là, puisqu'il serait plus facilement compréhensible et
que la population saurait davantage où s'adresser et pour quel service,
et d'autant plus pour notre clientèle qui ne sait pas toujours ou qui
peut être ballottée d'un service à l'autre.
La question des ressources intermédiaires. Le Curateur public
partage les vues du ministère relatives au maintien, le plus longtemps
possible, des personnes dans leur milieu de vie naturel ou dans un autre milieu
semblable. L'institutionnalisation devrait être un dernier recours. C'est
encore, malheureusement, une solution de rechange parce qu'il n'y a pas d'autre
ressource possible. Le Curateur s'associe également aux volontés
exprimées par divers groupes et intervenants sociaux à l'effet de
poursuivre et d'accélérer le processus de réadaptation et
de réinsertion sociale des personnes qui vivent actuellement dans les
établissements psychiatriques ou de réadaptation ou, encore, pour
une partie de notre clientèle dans les CHCD après un traumatisme,
soit de la route ou autre, et qui, trop souvent, y séjourne
peut-être une semaine de plus ou deux semaines de plus, parce qu'elle ne
peut pas être référée à domicile, les
services étant insuffisants ou, encore, elle n'a pas assez rapidement
accès à des services de réadaptation.
Nous pensons que le succès de la démarche de
désinstitutionnalisation ou de non-institutionnalisation repose
entièrement sur la mise en oeuvre de moyens de ressources dans la
communauté et un partenariat interétablissements. Par la
reconnaissance officielle, dans l'avant-projet de loi, des ressources
intermédiaires favorisant le maintien ou l'intégration des
personnes, le ministère fait un pas important en ce sens, nous
pensons.
Pour plusieurs personnes, ce type de ressources est vraiment la
réponse à leur désir de vivre dans un milieu de vie
sécuritaire et répondant à leurs besoins. Toutefois, nous
aimerions attirer votre attention sur le fait qu'il existe d'autres types de
ressources à caractère résidentiel qui hébergent
des personnes et qui n'ont pas l'approbation officielle pour ce faire. Dans
bien des cas, ce type d'hébergement s'avère adéquat mais,
à l'opposé, il peut aussi donner lieu à des situations
d'abus et d'exploitation. Notre clientèle, étant très
vulnérable, se retrouve dans ces situations. Ainsi, nous vous invitons
à être vigilants et à renforcer les mécanismes
d'enquête et de contrôle concernant la qualité des lieux
d'hébergement résidentiel.
Nous aimerions aborder la question des comités de
bénéficiaires. L'avant-projet de loi confirme l'existence des
comités de bénéficiaires dans tout centre hospitalier
psychiatrique, centre d'hébergement et de soins de longue durée
ou
centre de réadaptation. L'expérience a
démontré leur nécessité en tant que porte-parole
officiel des bénéficiaires de ces établissements
auprès de la direction.
Pour le Curateur public - et je pense aussi pour le réseau - les
comités de bénéficiaires constituent une source
d'information fort précieuse concernant les personnes qu'il
représente À maintes reprises, certains problèmes
vécus par celles-ci à l'intérieur de leur
établissement ont été portés à notre
attention par l'entremise de ces comités. Étant donné, par
ailleurs, la volonté du Curateur public d'être de plus en plus
présent auprès de sa clientèle, cette collaboration est,
pour nous, appelée à s'intensifier.
À cet effet, nous pensons que les comités de
bénéficiaires doivent jouir d'une autonomie certaine quant au
choix de leurs membres et la durée de leur mandat. La loi actuelle le
leur garantit, tandis que l'avant-projet de loi apporte certaines restrictions
à cet égard, en imposant, par exemple, un mode strict de
composition de ce comité et en limitant la durée possible du
mandat de ses membres. À notre avis, il s'agit là d'une forme de
contrôle et d'une ingérence dans la régie interne de ces
comités et nous sommes enclins à la rejeter. Nous ne comprenons
pas très bien la raison d'être. S'il est nécessaire d'avoir
une limite à la durée du mandat des membres du comité,
nous pensons qu'il faudrait s'appuyer sur un principe général,
qui est aussi bon pour les directeurs généraux
d'établissements que pour les membres des comités de
bénéficiaires. À ce moment-là, ça nous
apparaîtrait plus acceptable.
Les organismes communautaires
Une voix:...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Fontaine: II y a beaucoup de choses qui ont de l'allure. Ha,
ha, ha! Les organismes communautaires, nous nous réjouissons, bien
sûr, de la reconnaissance officielle dans l'avant-projet de loi de ces
organismes. Nous pensons qu'ils jouent un rôle essentiel dans la
société québécoise, en termes de renforcement de
tissu social dans la communauté où ils oeuvrent. Mais nous
pensons aussi qu'ils agisssent comme initiateurs de nouvelles approches et
comme portant des innovations qui peuvent être fort intéressantes
pour le réseau. Ainsi, nous trouvons que favoriser les organismes
communautaires dans l'avant-projet de loi correspond aux besoins de notre
société actuelle. Nous pensons que ces actions enfin reconnues
par le ministre et qui rejoignent le Curateur public sont des orientations
fondamentales. En fait, la définition des CLSC...
Le Président (M. Joly): Excusez-moi, Mme Fontaine. Est-ce
qu'on consent à ce qu'on déborde du temps un peu? Oui?
M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui, pas de
problème.
Le Président (M. Joly): Merci
M. Chevrette: Sûrement que madame en est à ses
premières armes et puis...
Le Président (M. Joly): Allez, Mme Fontaine.
Mme Fontaine: Donc, je vais bénéficier de
ça. Écoutez, c'est très bref. Je termine avec les CLSC, la
définition des CLSC. Nous, nous constatons tous, je pense, qu'ils n'ont
pas joué pleinement leur rôle actuellement dans le réseau
de la santé et des services sociaux, particulièrement en ce qui
concerne les services médicaux et infirmiers de première ligne,
et ça, pour toutes sortes de raisons, dont un manque d'information
auprès de la population, une insuffisance de ressources, enfin cette
vocation-là ne s'est pas clairement et vraiment
concrétisée, et la population continue de s'adresser aux services
d'urgence et aux cliniques externes des centres hospitaliers pour recevoir ce
type de services Nous pensons que la définition dans l'avant-projet de
loi actuel ne confirme pas clairement cette vocation pour les CLSC. Les soins
médicaux et infirmiers sont inclus dans l'expression "services de
santé" utilisée à l'article, mais on ne pense pas que ce
soit évident pour le profane et la population en général
et encore moins, probablement, pour notre clientèle que ce sont,
ça, des services médicaux et infirmiers de base. On pense que
ça gagnerait à être clarifié. À notre avis,
dans la foulée des intentions à l'effet de réorienter la
demande des centres hospitaliers vers, entre autres, les CLSC, ce qui
contribuerait à désengorger les urgences, nous pensons, le
ministère devrait revoir cette définition et l'étoffer
d'une mission spécifique concernant les soins médicaux et
infirmiers de base. Le champ d'intervention des CLSC devrait faire l'objet
d'une diffusion très large et bien orchestrée, de façon
à ce que le message passe la rampe auprès de la population, dont,
entre autres, notre clientèle au Curateur public, et que des habitudes
de consommation modifiées s'installent dans la population afin de
laisser les autres partenaires du réseau, qui ont des mandats, des
missions spécialisées, faire et rendre adéquatement ces
services spécialisés.
Nous portons à votre attention, sans peut-être les
présenter ici, aussi certains éléments de concordance qui
devraient être faits entre l'avant projet de loi et la loi 145.
Enfin, plusieurs autres points auraient pu être envisagés
mais nous comptons, à l'avenir, nous exprimer sur d'autres aspects, dans
d'autres domaines aussi. Il ne me reste qu'à vous remercier de votre
attention et à attendre vos questions.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme Fontaine. Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux. (10 h 30)
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Je suis très heureux que nous puissions, pour nos deux
journées de commission de cette semaine, centrer nos
préoccupations sur les bénéficiaires, sur les
clientèles. Je pense que c'est assez heureux, à l'occasion, qu'on
puisse au moins prendre le temps d'en parler. On l'a dit depuis un certain
temps: II faut faire en sorte que le système soit davantage
centré sur le bénéficiaire que sur le producteur. Et
ça m'ap-paraît toujours une ligne de force. Est-ce qu'on
réussira? Si on réussit à 50 %, l'objectif étant
100 % mais si on réussit à 50 %, ce sera déjà un
pas extrêmement important de franchi. Compte tenu de la nature même
de ce que vous représentez, ma première question irait
définitivement dans votre appréciation du rôle des
ombudsmen qui ont été créés dans certains
établissements. Quelle est l'évaluation que vous en faites?
Est-ce que c'est une formule qui mérite d'être supportée,
mieux encadrée, plus indépendante des établissements
auxquels ils sont rattachés? Selon votre appréciation, compte
tenu de la nature même des gens que vous avez à protéger,
est-ce que l'ombudsman d'établissement est une solution quant au
règlement d'un certain nombre de plaintes?
Mme Fontaine: C'est une question qui touche effectivement de
très près notre clientèle. Je pense que... Je
soulèverais certaines questions quant à la pertinence de
rattacher l'ombudsman à une organisation d'autant plus que, si on
regarde les principales clientèles que nous représentons, la
clientèle de santé mentale, la clientèle de
déficience intellectuelle, la clientèle de personnes
âgées, admettons, ce sont des clientèles qui vont faire
l'objet et qui font l'objet présentement, dans les différentes
régions du Québec, de plans d'organisation de services. Ce sont
des plans de services interétablissements. Donc, est-ce
nécessaire de rattacher un ombudsman à un établissement?
Serait-il pertinent de le rattacher plutôt soit à une
sous-région qui comprend un ensemble de services dans différents
établissements pour une clientèle donnée? Il faudrait voir
à quelle entité le rattacher, mais je soulèverais la
question de la pertinence de le rattacher à une catégorie
d'établissements. Peut-être pourrait-il être rattaché
à un conseil régional ou une régie régionale. Je
pense qu'il y aurait lieu de regarder d'autres façons de faire et d'en
expérimenter. Bon. je pense qu'il y aurait peut-être lieu de faire
des expériences avant de dire: On va faire cette façon de
faire-là un peu partout. Je pense qu'il est pertinent d'avoir des
ombudsmen. Je pense qu'ils ont besoin de support, qu'ils restent dans les
établissements ou non. Ils ont besoin d'être mieux
encadrés, mieux supportés, mieux informés.
J'ai en tête l'expérience qui se passe présentement
entre l'hôpital de Joliette et le Protecteur du citoyen. C'est une
expérience qui m'apparaît intéressante, où
l'ombudsman est rattaché, je pense, fonctionnellement ou travaille en
même temps avec le Protecteur du citoyen. Il y a peut-être lieu de
regarder plus cette voie-là, de voir quelles sont les
possibilités.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, ce n'est pas
nécessairement une expérience qui est négative. Elle
pourrait être positive et encore davantage si c'était
élargi à une sous-région, un territoire plus grand, pour
éliminer la dépendance d'un établissement, par
exemple.
Mme Fontaine: Ça aurait ça comme impact, mais
ça aurait aussi comme impact que souvent les clientèles
reçoivent des services de plusieurs établissements. Un exemple de
ça, c'est qu'une personne qui a un trouble mental peut être suivie
dans une clinique externe d'un hôpital psychiatrique mais peut aussi, en
même temps, résider dans une maison de transition qui peut
relever, admettons, d'un CSS et peut aussi recevoir des services, admettons,
médicaux et sociaux de base du CLSC pour un problème, admettons,
physique. Alors, qu'est-ce que l'ombudsman rattaché à
l'hôpital psychiatrique va faire? Il va s'occuper juste de cette
partie-là. C'est l'optique du réseau, dorénavant, de
travailler avec des plans d'organisation de services intégrés.
Donc, peut-être dans ce cas-là aussi, il serait intéressant
de dépasser les murs de l'établissement.
M. Côté (Charlesbourg): Je trouve ça
intéressant parce qu'effectivement, on a reçu des ombudsmen qui
sont venus témoigner à titre individuel. Ils nous ont
parlé du lien de dépendance vis-à-vis de l'institution
mais on n'avait abordé l'aspect davantage de
complémentarité au niveau d'une région,
complémentarité contre différents services et je pense que
c'est un point très intéressant que vous soulevez.
Évidemment, on parle de comité de
bénéficiaires. Au niveau de lavant-projet de foi, ce que j'ai
compris, c'est que ça mérite d'être bonifié pour
davantage respecter l'autonomie du comité de
bénéficiaires. M. le député de Joliette avait
raison de dire que c'est un mandat qui est très court, qui avait
été prévu et qui sera définitivement élargi.
Il ne peut pas être élargi ad vitam aeternam. Je pense qu'on doit
quand même avoir un certain nombre de balises, un minimum, à ce
niveau-là. Ce sont des choses qu'on va revoir définitivement.
Quel serait le lien de dépendance ou de
complémentarité, ombudsman et comité de
bénéficiaires? Je pense qu'il devrait y avoir une certaine
parenté proche, à tout le moins entre le comité des
bénéficiaires et l'ombudsman, dans la
mesure où il existerait. Quelle est votre vision, avec un
ombudsman et sans un ombudsman, en ce qui concerne le comité de
bénéficiaires?
Mme Fontaine: Je pense que les deux ont leur place. Je pense que
le comité de bénéficiaires permet aux personnes dans
l'établissement de se regrouper, de parler de leurs difficultés,
de s'entraider, de faire valoir un point de vue, de regarder aussi certaines
plaintes, mais de façon officieuse. Ce n'est pas un rôle officiel.
Je pense que c'est un rôle très important qui est différent
de celui de l'ombudsman qui, lui, est plus là pour aider les gens
à mieux s'exprimer ou pour faire un lien avec le comité de
bénéficiaires, pour voir comment régler la plainte au sein
de rétablissement; il a un rôle plus officiel. Les deux ont leur
raison d'être.
Il y a aussi que le comité de bénéficiaires a un
rôle plus collectif, plus d'ensemble, de regroupement et d'entraide,
tandis que l'ombudsman a un rôle plus individuel, par personne. C'est
important aussi parce que ça favorise la libre expression.
M. Côté (Charlesbourg): Sur le plan de la formation
du comité do bénéficiaires, on faisait de la place aux
parents et aux bénéficiaires. Est-ce que vous avez des
idées là-dessus? Est ce que ça devrait être
totalement des bénéficiaires ou si, effectivement, il y a
toujours de la place pour des parents dans le comité des
bénéficiaires?
On a soulevé le fait que, évidemment, dans la composition
telle qu'on l'avait soumise, que la majorité n'était pas des
bénéficiaires et qu'on devrait en arriver à former,
à tout le moins, un comité de bénéficiaires dont la
majorité sont des bénéficiaires. Je pense que ça
m'apparaît évident. Est-ce qu'il y a, à ce
niveau-là, des personnes externes qui pourraient se greffer pour
apporter du support a ces gens-là?
Mme Fontaine: Je pense que les parents pourraient faire partie du
comité de bénéficiaires. Il serait peut-être
intéressant de l'étendre à plus que les parents. Ça
pourrait être la parenté ou des alliés, quelqu'un de
relié à la famille. Mais, H y aurait lieu, je pense, que les
parents en fasse partie; peut-être pas d'une façon majoritaire,
sûrement pas. Mais ça aiderait sûrement à un meilleur
fonctionnement.
M. Côté (Charlesbourg): Vous avez
évoqué ou parlé de clinique externe. Ça m'a
accroché un peu. J'aimerais peut-être vous entendre davantage
expliquer votre point de vue sur le rôle de la clinique externe, tel que
vous le voyez.
Mme Fontaine: C'est que je pense que, dans les hôpitaux,
les cliniques externes jouent le rôle de médecine de tous les
jours, médecine quotidienne. À ce titre-là, les cliniques
externes jouent un rôle très semblable à celui des CLSC,
des services médicaux de base des CLSC Je vois là une
espèce de duplication de services Bien sûr, il y a des cliniques
externes très spécialisées, mettons en orthopédie,
ou en ORL, des choses comme ça. Mais il y a aussi des cliniques externes
assez générales Je pense qu'il y aurait matière à
regarder comment un rapprochement pourrait se faire entre ce que font certaines
cliniques externes dans les hôpitaux généraux et
spécialisés et ce qui devrait se faire dans les CLSC, au niveau
des services médicaux de base.
M. Côté (Charlesbourg): Selon votre opinion,
ça pourrait-il être moins coûteux en CLSC qu'en centre
hospitalier?
Mme Fontaine: Non, je ne pense pas que ce serait moins
coûteux. Ça ne serait pas moins coûteux. Par contre, il y
aurait là un meilleur aménagement de services où les
rôles entre les deux entités seraient clairs et ça
permettrait vraiment à l'hôpital de jouer son rôle
spécialisé, ce pourquoi il est créé, et au CLSC de
jouor son rôle de services médicaux de base.
M. Côte (Charlesbourg): Par conséquent, l'opinion
est-elle que le CLSC pourrait être beaucoup plus près de la
population que le centre hospitalier, en termes d'accessibilité?
Mme Fontaine: Oui, il y a sûrement cet
élément-là, mais aussi les services médicaux,
infirmiers de base dans les CLSC sont des services qui sont en interrelation
avec les autres programmes des CLSC. Il y a là une interaction fort
intéressante, par exemple, avec le service des soins à domicile,
de santé maternelle, infantile, où il y a des échanges qui
peuvent se faire, où la clientèle, à ce moment-là,
peut avoir accès peut être plus facilement aux autres programmes
des CLSC qui sont des services globaux courants de base, de santé, et
auxquels peut-être les références ne se font pas aussi
facilement ou ne se font même pas du tout, quand les personnes
s'adressent aux cliniques externes des hôpitaux.
M. Côté (Charlesbourg): Vous avez
évoqué les conseils d'administration unifiés. Bon, les
objectifs sont globalement valables; ce qu'on tente de faire avec, par contre,
la méthode forte proposée d'unification obligatoire, ce n'est pas
souhaitable. Mais, en tout cas. je pense que c'est connu maintenant, j'ai dit
qu'il n'y aurait pas de conseil d'administration unifié sous l'empire de
la loi II demeure quand même des domaines où c'est souhaitable
qu'il y en ait, soit pour des sous-régions II faut trouver davantage des
éléments positifs qui vont le faire sans l'obliger.
Vous avez parlé de structures alternatives ou de renforcement de
structures alternatives
pour atteindre à peu près les mêmes objectifs et
vous avez dit, dans votre texte... on pourrait songer à un renforcement
de certaines structures déjà existantes, telles les tables de
concertation régionales et les commissions administratives, en les
assortissant de pouvoirs réels. Lorsqu'on parle de ça, "en les
assortissant de pouvoirs réels", quels sont les pouvoirs réels
qu'il faut donner pour que ce qui n'a pas fonctionné jusqu'à
maintenant, du moins parfaitement... Il y a quand même eu de bons
résultats, il y en a eu de moins bons, alors ce n'est jamais blanc et
noir. Quels sont les pouvoirs additionnels qu'il faudrait donner à ce
genre de table pour s'assurer que ça puisse fonctionner?
Mme Fontaine: Les tables de concertation qui existent
présentement, celles que je connais ou que j'ai connues; en tout cas,
ont des pouvoirs de recommandation. Elles ont des pouvoirs de recommandation
à l'instance régionale, aux conseils régionaux, parce
qu'eux mêmes ont également seulement des pouvoirs de
recommandation. Or, si cet aménagement-là et cette
répartition des pouvoirs changent et que la régie
régionale a, effectivement, plus de pouvoirs et la possibilité de
gérer un programme et les ressources qui se rattachent à ce
programme-là - je donnerai l'exemple de la santé mentale, pour
laquelle c'est en discussion présentement et c'est en train de se passer
- il y a des tables de concertation qui existent en santé mentale. Elles
sont conseils. Est-ce qu'elles pourraient accéder à un autre.
niveau, par exemple à une organisation sous-régionale dos
services entre plusieurs catégories d'établissements? Je pense
que oui, je pense que ce serait un rôle fort intéressant qu'elles
pourraient jouer et qui rendrait les services, dans une sous-région,
plus facilement complémentaires en faisant que les partenaires
s'assoient ensemble pour discuter de problématiques concrètes et
d'aménagement de services, par exemple où on va installer les
différentes maisons de transition, est-ce qu'on va en mettre trois sur
la même rue. C'est ce qui a pu se passer dans le passé, mais
peut-être que, si une sous-région s'assoyait et planifiait comment
implanter ces ressources, il y aurait là un aménagement
probablement beaucoup plus judicieux et un partage de ressources entre les
établissements qui serait d'autant facilité.
M. Côté (Charlesbourg): Cela nous amène donc,
après ces conseils d'administration unifiés, avec une alternative
sur le plan de la concertation complémentarité, évidemment
au palier régional. Je pense que vous souscrivez à une structure
régionale beaucoup plus forte, avec plus de pouvoirs Ce que je trouve
rafraîchissant dans votre vision, non pas seulement parce que je la
partage...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg):.. mais davantage parce
qu'elle me paraît être le reflet de ce qu'on pourrait vivre demain,
s'il y a une concentration de tous les pouvoirs dans une capitale
régionale... Que ce soient les sous-régions de la région
qui deviennent les parents pauvres de la région... Et, lorsque vous
évoquez des problèmes de sous-régions à
l'intérieur des régions, ça m'apparaît un
élément extrêmement important dont on doit tenir compte
dans cette planification-là pour bien s'assurer qu'il y ait une parfaite
harmonie, une complémentarité des sous-régions avec la
volonté de l'ensemble des régions. (10 h 45)
À ce niveau-là, le CRSSS du Saguenay-Lac-Saint-Jean est
peut-être celui qui, jusqu'à maintenant, est allé le plus
loin dans la tentative de définir l'imputabilité, mais aussi de
définir le rapport de forces qui va exister dans une sous-région
à l'intérieur de la région, faisant en sorte qu'on parle
à ce moment-là de districts où on obligerait les DG et les
présidents de conseil d'administration des établissements d'une
sous-région à faire une table de concertation, de discussion,
avec certains pouvoirs, qui, elle, aurait son rapport de forces avec les autres
sous-régions. Évidemment, ce ne serait pas le pouvoir central de
la région qui pourrait uniquement mener et dicter ses volontés,
mais ça pourrait venir aussi de la base au niveau dès districts.
Ça me paraît au moins correspondre à une
préoccupation que vous avez et qui doit être la nôtre aussi,
demain matin.
En terminant, tout ce que je veux vous dire, c'est que vous avez
évoqué certaines inquiétudes quant à notre avant
projet de loi et votre nouvelle loi, parce qu'il n'y a pas
nécessairement une complémentarité très claire
entre certains de vos articles et les nôtres. Évidemment,
l'avant-projet de loi a été écrit avant même que
votre loi ne soit en force et on fera le nécessaire pour qu'il y ait une
harmonie entre votre loi et la nôtre sur le plan... On en tient compte.
Merci beaucoup.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je vais
maintenant reconnaître M. le député de Joliette, leader de
l'Opposition et porte-parole officiel en matière de santé.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais tout
d'abord souhaiter à Mme Fontaine un bon mandat, puisqu'elle en est
à son tout début. J'irai directement aux questions que j'ai
à lui poser. J'aurai un commentaire à la fin.
Dans un premier temps, à la page 9 de votre mémoire, vous
écrivez ceci au troisième paragraphe: "Aussi, le Curateur public
invite le MSSS à être vigilant et à prévoir des
mécanismes d'enquête et de contrôle concernant la
qualité de ces lieux résidentiels. " Étant - donné
que vous êtes le prolongement du bénéficiaire, à
toutes fins pratiques, ou le substitut à la personne elle-
même, quels sont les mécanismes que vous avez à la
Curatelle publique, vous, pour contrôler la qualité des lieux
où les patients sont hébergés? Vous demandez au ministre
de le faire, mais est ce que la Curatelle comme telle a ses propres
mécanismes, a ses propres moyens?
Mme Fontaine: En fait, nous, nous n'avons pas comme mandat de
contrôler la qualité des lieux, mais nous avons comme mandat de
nous assurer de voir où est située notre clientèle, quelle
sorte de services elle reçoit et s'ils sont adéquats. Ce qui
revient peut être un peu au même.
Je vais demander à M. Maheu, qui est directeur de la Protection
des majeurs, puisque ce sont des éléments plus précis, de
répondre à votre question.
M. Chevrette: D'accord.
M. Maheu (Bruno): Effectivement, nous avons un grand nombre de
nos personnes représentées qui sont actuellement dans des milieux
de vie non accrédités, soit par les centres de services sociaux,
les centres d'accueil à titre de pavillon ou autres catégories
d'établissement. Ces personnes-là, on peut les visiter, c'est
sûr, et c'est peut-être notre mandat et notre obligation - ce qu'on
n'a peut-être pas toujours fait, mais qu'on s'efforce de faire maintenant
- on peut les visiter, s'assurer qu'elles reçoivent les services requis,
mais au-delà de ça, nous n'avons pas de pouvoir d'intervention
directement sur la ressource même pour exiger d'elle des normes do
sécurité, des normes d'hygiène, des normes do
qualité do services Ce pouvoir-là est actuelle ment dévolu
au ministère de la Santé et des Services sociaux par la loi et
nous espérons que l'avant-projet de loi ne rejette pas cette
responsabilité-là, mais qu'il la réaccentue pour permettre
un contrôle... Nous ne sommes pas contre le développement des
ressources privées, bien au contraire, nous sommes pour le
contrôle de ces ressources-là, afin qu'il n'y ait pas d'abus ni de
mauvais traitements.
M. Chevrette: Si je vous pose la question, c'est pour l'objectif
suivant. On sait très bien qu'en santé mentale, il y a peu de
chose qui se fait. On est en arrière, on est en retard de
peut-être 25 ou 30 ans. Dans la majorité des cas, c'est beaucoup
plus du "parking" qu'on fait avec les bénéficiaires que vous
représentez que de les situer dans des endroits où les gens ont
été formés pour répondre précisément
aux besoins de ces clientèles-là. Je comprends que c'est une
responsabilité du ministère de la Santé et des Services
sociaux, mais étant donné que vous êtes le
bénéficiaire, si je peux m'exprimer ainsi, de par votre loi
constituante, votre pouvoir de plainte, votre pouvoir de contrôle doit
exister, parce que si vous êtes... Vous ne pouvez pas vous fier
exclusivement.. Il n'y a pas de comité de bénéficiaires
dans ces endroits là. C'est huit, c'est neuf, c'est dix, c'est un petit
nombre, les trois quarts du temps. Je tiens pour acquis, en vertu de votre loi
constituante, que vous avez le pouvoir de parler pour et en leur nom. À
ce moment là, quel est le mécanisme qui existe à la
Curatelle publique pour permettre précisément... Parce que je ne
suis pas certain, moi non plus, que le ministère ait les ressources en
santé mentale actuellement pour exercer un contrôle bien
adéquat en ce qui regarde la santé mentale, en ce qui regarde en
particulier les lieux de placement pour ces personnes-là Pour en avoir
visité des dizaines, je vous avoue, personnellement, que je suis
très inquiet et je me demande quel est le rôle que la Curatelle
publique joue concrètement vis à vis de ça?
Mme Fontaine: Je pense que vous l'avez mentionné. On a un
rôle de représentation et, donc, de dire. de faire connaître
ces situations-là et de demander qu'il y ait des modifications dans les
soins et services qui sont donnés à ces personnes là. Si
elles sont dans des entités privées, il y aura peut être
lieu, à ce moment là, de trouver un autre endroit, en
collaboration avec le réseau de la santé et des services sociaux,
où elles pourront recevoir des services et des soins adéquats
Mais vous savez tous, comme moi, qu'il n'y a pas foison. Il n'y en a pas
beaucoup de ces autres lieux-là. C'est un problème qui existe
présentement dans le réseau. Il y a peu de petites ressources
adaptées, bien encadrées. Il y en a. mais il n'y en a pas de
facilement trouvables et accessibles Je pense que si je résume notre
rôle, il va être de suivre de très prés la
désinstitutionnalisation dont j'ai parlé un peu plus tôt,
de s assurer que les personnes qui sont dans des processus d'insertion, ou qui
sont déjà dans des ressources privées ou publiques, aient
vraiment les services dont elles ont besoin.
M. Chevrette: On sait que dans la protection, en particulier, des
maladies mentales, pour les bénéficiaires que vous
représentez, sur simple avis d'un psychiatre, ils peuvent être
internes. Ça prend deux avis pour un internement de plus de 4 jours ou
de 96 heures, si ma mémoire est fidèle, dans la loi. Le seul
privilège ou le seul droit qu'a un bénéficiaire, toujours
si ma mémoire est fidèle, c'est d'écrire à son
député ou au Protecteur du citoyen qui va vous suivre dans
quelques minutes. Quel est le rôle... Est ce que le Curateur public a un
pouvoir d'intervention auprès du Protecteur du citoyen dans le cas, par
exemple, où un ministère n'exercerait pas sa
responsabilité vis-à-vis du bénéficiaire? Est-ce
que vous avez exercé par le passé ou est-ce que vous savez si.
dans le passé, la Curatelle publique est intervenue auprès du
Protecteur du citoyen pour défendre des bénéficiaires qui
sont
complètement démunis, qui n'ont plus aucun recours sauf
d'écrire... Et, entre vous et moi, ils ne sont peut-être
même pas capables d'écrire à la fois au
député et au Protecteur du citoyen. Je vous avoue que c'est mince
quand on parle ou qu'on se fait les champions des droits et libertés des
personnes et qu'on regarde ce qui se passe dans le concret, c'est mince comme
recours. À ce moment-là, est-ce que la Curatelle songe à
établir des mécanismes ou à se doter de moyens pour
véritablement représenter le bénéficiaire? Parce
qu'on aura beau se targuer et se gargariser que tout est centré sur la
personne, si on ne lui donne aucun recours, en particulier pour le type de
clientèle que vous représentez, entre vous et moi, ça ne
veut rien dire. Ce sont des mots, de beaux discours, mais dans les faits, ce
n'est rien.
Mme Fontaine: Comme vous le savez, chez le Curateur public,
encore la Curatelle jusqu'au 1er avril, il n'y avait pas, il y a deux ans, une
direction de la Protection des majeurs. Cette direction existe maintenant. Elle
est composée d'une équipe qui comporte des gens qui proviennent
du réseau de la santé et des services sociaux et qui peuvent donc
assurer un suivi d'une représentation des personnes. Nous sommes
à poursuivre cette consolidation de notre équipe, de notre
direction de la Protection des majeurs, de façon à mieux
connaître toutes les clientèles que nous représentons.
Un des objectifs de la loi 145 est la personnalisation davantage avec
chacun de nos clients. Nous en avons 16 000 et nous comptons les visiter plus
fréquemment qu'auparavant. Nous rencontrons plus fréquemment
aussi les comités de bénéficiaires pour voir comment
ça se passe, qu'est-ce qui se passe. Nous avons des liens avec les
ombudsmen également et notre représentation peut aller
jusqu'à iaire connaître des situations, les discuter avec le
réseau de la santé et des services sociaux, de façon
à inciter, à favoriser ou à amener une amélioration
de ces situations-là pour des gens qui, comme vous le dites, ne peuvent
pas les faire connaître facilement ou ne peuvent pas les véhiculer
elles-mêmes. Ça fait partie de notre mandat de
représentation.
M. Chevrette: J'aurais peut-être un commentaire sur ce que
vous avancez sur les CLSC. Je pense que c'est de notoriété
publique, même si le réseau est complété, qu'il n'y
a pas nécessairement eu de consolidation et que les ressources
financières ne sont pas là pour exercer précisément
la médecine de première ligne dont vous parlez. Mais compte tenu
de l'escalade des coûts dans le domaine de la santé et des
services sociaux, est-ce qu'il n'y a pas lieu, avant de songer à
injecter des sommes très fortes, de contrôler plutôt, par
exemple, par des accréditations, des cliniques privées? Je vous
donne un exemple. Je suis inquiet du fait qu'on s'en prenne aux supercliniques
publiques que représentent les hôpitaux, qu'on veuille, dans un
même souffle, parler de supercliniques publiques dans les CLSC, puis
qu'en parallèle de ça, il y ait des supercliniques privées
qui marchent. Et, en bout de course, j'ai entendu beaucoup d'intervenants dire:
Oui, mais le consommateur abuse. On est porté à toujours lancer
la pierre au consommateur. C'est le consommateur qui abuse. C'est le
consommateur qui va visiter une clinique privée puis, dans la même
journée, une clinique publique. Puis, c'est le consommateur qui fait
ceci, puis c'est le consommateur qui fait ça. Puis on oublie qu'il y a
du monde qui en offre. Puis on exige d'en offrir davantage. Comment voyez-vous
ça, vous? Un peu de logique, là. Ne faudrait-il pas
accréditer certaines cliniques privées pour pouvoir
contrôler effectivement? Parce que, on aura beau parler d'engorgement ou
de désengor-gement des urgences, puis tout le kit, si on ne met pas
d'ordre dans tout ça, en améliorant, par exemple, la
qualité des soins à domicile, en ouvrant des places pour nos
personnes âgées qui occupent des lits de soins de courte
durée, on ne réglera pas le problème. On ne fait que
retarder l'échéance par des mesures temporaires. On aura beau
installer une équipe de l'escouade tactique de Charlesbourg dans les
urgences, on ne réglera pas la situation si, concrètement, on ne
prend pas le taureau par les cornes, puis on dit: Voici la situation, il y a
vieillissement de la population, il y a la santé mentale; il faut poser
tel geste en santé mentale, la personne doit demeurer chez elle le plus
longtemps possible. Si on ne met pas un sou pour les soins à domicile,
si on ne crée pas des places en centre d'accueil pour nos personnes
âgées qui en ont véritablement besoin, elles vont se
ramasser sur des civières, la même chose. Et si on veut les sortir
des hôpitaux, parce qu'elles se ramassent à l'urgence pour aller
dans les polycliniques publiques des hôpitaux, il va falloir les envoyer
ailleurs. Si on crée ça dans les CLSC, on vient de créer
une offre additionnelle, puis on est surpris de l'escalade des coûts.
Qu'est-ce que vous pensez de tout ça?
Mme Fontaine: Oui, il y a une escalade des coûts. Mais je
pense que le Québec se compare assez bien aux autres provinces du Canada
et à d'autres pays.
M. Chevrette: Sur le PIB, ça, vous avez raison.
Mme Fontaine: Je pense que c'est très connu - vous le
savez aussi - qu'au Québec, on a eu, dans les années
passées, durant plusieurs années, une approche très
institutionnelle dans le réseau de la santé et des services
sociaux. Je pense que le défi qui se pose, c'est comment orienter le
réseau, le réorienter vers une approche plus axée vers des
ressources plus
légères, plus communautaires en misant sur l'apport des
gens, sur le bénévolat. Ça ne règle pas tous les
problèmes. Bien sûr, on a encore besoin de services
spécialisés, de services ultraspécialisés. Mais je
pense qu'il y a moyen de redéployer le réseau, et
l'élément que vous apportez concernant les polycliniques,
d'abord, je pense que ce n'est pas tout à fait exact de dire qu'elles
sont privées. Elles sont peut-être privées dans le choix
qu'elles font de leur site et de leur façon de s'organiser, mais ce sont
les fonds publics qui les paient, ce sont nos taxes qui défraient...
Alors, il y a peut-être lieu... Et je pense que je les inclurais dans la
nécessaire coordination qu'il y a à faire entre tous les
éléments de première ligne que sont les cliniques
externes, les unités de médecine familiale, les urgences aussi,
les CLSC et les polycliniques qui, dans bien des cas, offrent des services tout
à fait semblables aux cliniques externes, sur une autre base,
organisés différemment, mais des services que les CLSC pourraient
aussi offrir. Il y a lieu de regarder. Il y a des avenues à explorer et
je pense qu'il y a certainement une rationalisation des services à
faire. Je pense que c'est un défi qui est majeur pour le réseau
de la santé et des services sociaux, la coordination,
l'aménagement de tout cet ensemble de première ligne, qui,
à ce moment-ci, n'est pas coordonné à . un seul lieu, mais
est assez éparpillé et dont les éléments sont
indépendants les uns des autres. (11 heures)
À l'automne, j'étais à ce moment-là au
Conseil régional de Montréal, et on a eu un stagiaire qui a voulu
venir faire son stage chez nous, et il s'était donné comme
intérêt de regarder les liens, les interrelations et la
complémentarité qui existaient, justement entre cliniques
externes, CLSC et polycliniques. Et ça serait intéressant de voir
ce qui ressort de ça. Ce n'est pas sûr qu'il y a tant de liens que
ça et que les gens y voient une nécessité. Ce sont des
entités qui oeuvrent dans un même champ d'intervention, mais qui
sont assez indépendantes les unes des autres, présentement.
M. Chevrette: Merci, madame.
Le Président (M. Joly): Merci. Je vais maintenant
reconnaître le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, porte-parole officiel de l'Opposition en
matière de services sociaux.
M. Trudel: Merci, M. le Président. Avec le peu de temps
qu'il nous reste j'irai directement. Je vais commencer par un autre secteur,
Mme Fontaine, mais je vais continuer un petit peu dans le sens de mon
collègue ici, au niveau des polycliniques ou des cliniques
privées. Très carrément, qu'est-ce que vous pensez du fait
que, pour établir au Québec une pratique médicale, ouvrir
un bureau de médecin, l'on doive détenir un permis
ministériel pour offrir des services de santé?
Mme Fontaine: Vous me demandez ce que je pense...
M. Trudel: Oui.
Mme Fontaine: ...du fait que ces cliniques-là aient besoin
d'avoir un permis?
M. Trudel: Oui.
Mme Fontaine: Vous savez, dans les dernières
années, j'ai eu à participer à l'implantation de maisons
de transition et ces maisons-là qui sont très simples, n'est-ce
pas, devaient se procurer, je pense, deux ou trois permis pour pouvoir exister.
Voilà!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Je comprends très bien. Je pense que le message
est important ici, compte tenu de l'importance de la médecine
privée, de la pratique privée dans ce secteur-là, dans
notre réseau de système de santé et de services sociaux.
Vous nous avez, d'entrée de jeu, exprimé aussi votre opinion sur
tout le problème de l'engorgement de l'hébergement
institutionnel. Vous êtes ici, un ou des bénéficiaires.
Est-ce que vous vivez des situations problématiques en tant que
représentants, comme bénéficiaires, en termes
d'hébergement? Est-ce qu'il vous est référé, est-ce
que vous vivez des situations de difficultés d'hébergement, comme
bénéficiaires?
Mme Fontaine: Bien sûr. La réponse qu'on donne
présentement dans le réseau de la santé et des services
sociaux à des niveaux d'inaptitude ou de perte d'autonomie est de deux
ou trois ordres. Ça peut être d'être mis dans un centre
d'accueil ou d'hébergement - il y a des éléments pour
ça - mais ça peut aussi, et à mon avis ça devrait
bien davantage d'être maintenu dans sa communauté ou à
domicile, mais ce n'est pas possible présentement; ce n'est pas
suffisamment possible. Je pense qu'il faudrait rendre ça beaucoup plus
accessible, l'hébergement ou le support à domicile ou dans une
communauté, et n'utiliser les centres d'accueil et d'hébergement
que pour des cas vraiment très lourds. Ce qui est commencé, ce
qui est bien amorcé, et ça, ça a un autre effet sur le
réseau des centres d'accueil, c'est que leurs clientèles
s'alourdissant, bon, ça coûte plus cher.
J'aimerais dire ici que le Québec, par rapport aux services
à domicHe, je pense, devrait accélérer les investissements
dans ce domaine-là, si on compare le Québec à d'autres
provinces comme l'Ontario et la Colombie-Britannique, et à d'autres pays
qui ont peut-être eu une approche moins institutionnelle. Vous me posez
la question par rapport à notre clientèle. Notre clientèle
suit
aussi le même pattern. Il y a eu des études, il y a un an
ou deux, dans le réseau de la santé et des services sociaux sur
l'ensemble des clientèles de santé mentale et de
déficience intellectuelle, qui ont amplement démontré que
le niveau de services que ces clientèles-là reçoivent
présentement dans les institutions n'est pas vraiment, ne répond
pas vraiment à leurs besoins, que ce sont plutôt des ressources
plus légères, plus communautaires pour une partie d'entre eux,
pas pour tous, qui seraient plus adéquates. Et ça aussi, ce sont
des niveaux d'hébergement. Je pense que c'est le même
problème. On peut avoir un type d'hébergement institutionnel,
mais il y a d'autres niveaux d'hébergement qu'il faudrait davantage
développer.
M. Trudel: Vous nous communiquez des informations très
importantes sur l'effort que nous devrions consentir globalement au
Québec au niveau du maintien à domicile. Là, il y a comme
un choix de société. Au-delà de l'organisation de la
santé et des services sociaux en termes administratifs, bureaucratiques
il y a effectivement dans ce débat, dans l'étude que nous faisons
actuellement de cet avant-projet de loi, un choix à faire au
ministère et chez le ministre de la Santé et des Services sociaux
pour une véritable politique du maintien à domicile et des
ressources à y affecter, de commencer par la base de la situation et non
pas par le bout, lorsqu'on les retrouve dans les urgences. J'imagine que c'est
pour ça que vous nous dites en quelque sorte: Vous allez possiblement
inclure dans la définition d'un CLSC également la notion de soins
médicaux et de soins infirmiers. Vous me contredirez - c'est parce qu'il
ne reste pas beaucoup de temps - si ce n'est pas tout juste. Vous dites: Parce
que les bénéficiaires, ils entrent par la mauvaise porte dans le
système de la santé et des services sociaux.
Une toute dernière question...
Le Président (M. Joly): Très brièvement.
Mme Fontaine: Vous savez, les bénéficiaires entrent
par toutes les portes qu'ils peuvent trouver.
M. Trudel: Y compris les plus chères possible, des
fois.
mme fontaine: je dirais que, par rapport aux services à
domicile, il y a des efforts importants qui ont été consentis; il
faut les poursuivre.
M. Trudel: M. le Président, ce n'était pas ma
question.
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, le commentaire que
vous avez fait est l'équivalent de la question que vous aviez
posée, alors...
M. Trudel: Je me reprendrai bien.
Le Président (M. Joly): J'imagine que vous passerez le
message que vous devez passer.
M. Trudel: Merci, madame.
Le Président (M. Joly): Au nom des membres de cette
commission, je tiens à remercier les représentants du Curateur
public du Québec. Merci beaucoup.
Je demanderais aux représentants du Protecteur du citoyen de bien
vouloir prendre place, s'il vous plaît.
Bonjour, messieurs. Bienvenue à cette commission. Je demanderais
à Me Jacoby de bien vouloir présenter les gens qui
l'accompagnent, s'il vous plaît.
Protecteur du citoyen
M. Jacoby (Daniel): À ma gauche, Me Jacques Meunier qui
est l'adjoint du Protecteur du citoyen; à mon extrême gauche, M.
Guy Pagé qui est recherchiste chez nous; et à ma droite, M.
Paul-Émile Racine, qui est directeur de la recherche.
Le Président (M. Joly): Merci. Vous connaissez la
procédure, vous avez une vingtaine de minutes pour présenter
votre mémoire et, par après, une période de questions, en
temps également dévolu aux deux formations. Merci. Allez, M.
Jacoby.
M. Jacoby: Merci, M. le Président. Mmes et MM. les membres
de la commission. D'abord, je voudrais vous préciser que mon intention
n'est pas de faire une analyse critique de l'ensemble du projet de loi, ma
préoccupation comme Protecteur du citoyen étant d'abord
l'exercice et la défense des droits des usagers du réseau de la
santé et des services sociaux.
Je vais prendre quelques instants pour expliquer le mandat et le
rôle du Protecteur du citoyen. Le Protecteur du citoyen est une
institution qui n'est pas un organisme du gouvernement. C'est un organisme qui
relève de l'Assemblée nationale et dont le mandat est de recevoir
les plaintes des citoyens qui se sentent, à tort ou à raison,
victimes d'injustice de la part de l'administration provinciale. De ce fait,
nous avons juridiction sur 110 ministères et organismes du gouvernement.
Nous n'avons pas juridiction sur le réseau parapublic ou
péripublic. Pour l'année en cours nous aurons reçu, d'ici
le 1er avril, si la tendance se maintient, près de 24 000 plaintes ou
demandes de renseignements, et, toujours si cette tendance se maintient, nous
aurons enquêté dans plus de 8000 dossiers.
En termes de fonctionnement, même si le Protecteur du citoyen a
un pouvoir de recom-
mandation, l'administration provinciale suit nos recommandations dans
plus de 99,5 % des cas. d'une part. Par ailleurs, nous avons constaté
que, d'une manière générale et sans faire de
particularités suivant les secteurs, les citoyens et les citoyennes du
Québec ont raison de se plaindre parce qu'environ le tiers des plaintes
qui nous sont adressées s'avèrent fondées après
enquête. Nos délais moyens de traitement d'un dossier sont de
l'ordre de trois semaines.
Comme Protecteur du citoyen et sensibilisé, bien sûr,
à la question de l'exercice des droits, j'ai, depuis les deux derniers
rapports annuels, insisté sur les lacunes que j'ai pu constater en
matière de protection des droits dans le secteur de la santé et
des services sociaux. Et, ce que j'ai pu constater comme lacunes, il y en a
plusieurs, mars je pourrais les résumer à six. D'abord, les
mécanismes actuels qui existent dans le réseau sont très
disparates, ils sont parfois pas du tout fonctionnels, parfois créent de
la confusion, parfois sont tout à fait inexistants. D'ailleurs, il y a
plusieurs groupes de travail gouvernementaux, comme le rapport Bussières
ou le rapport Harnois qui ne font que constater ces lacunes en matière
de défense des droits. Même si ces groupes de travail visaient des
personnes particulièrement vulnérables, comme les personnes
âgées en perte d'autonomie ainsi que les personnes qui
éprouvent des problèmes d'ordre mental, il n'en demeure pas moins
que, pour n'importe quel bénéficiaire du réseau de la
santé et des services sociaux qui se considère lésé
par la qualité d'un service ou qui a un problème administratif,
la situation est telle qu'il n'y a pas plus pour cette personne de recours
possible adéquat à moins d'être très riche et
à moins d'avoir les moyens de se payer les services d'un professionnel
pour défendre ses intérêts.
Les raisons pour lesquelles les recours sont plus ou moins confus ou
inefficaces dans certains cas, ou insuffisants, c'est que dans certains
établissements, on porte plainte à des personnes qui n'ont pas
toujours toute la marge de manoeuvre pour intervenir, soit en raison de
l'insuffisance de leurs pouvoirs ou parce qu'elles relèvent de
l'administration des établissements. Si je prends le cas des ombudsmen
d'hôpitaux, les porte-parole des malades, pour la quasi totalité,
ces personnes font un travail excellent, à mon point de vue. Cependant,
elles atteignent, dans certains dossiers parfois, leurs limites et elles sont
souvent aux prises avec certaines chasses gardées.
Si je parle maintenant des comités de
bénéficiaires, ces recours sont plus ou moins efficaces parce que
la loi qui les encadre actuellement ne leur donne pas suffisamment d'autonomie
de fonctionnement ou, encore, ils n'ont pas les moyens financiers de
réaliser leur mandat D'autres instances du réseau sont
perçues, à tort ou à raison, comme peu crédibles
parce que ces instances seraient en conflit d'intérêts - je parie
des CRSSS - ou parce que plusieurs de ces CRSSS interprètent ou
accomplissent leur mandat d'une manière très restrictive.
Un autre point qui me frappe dans le secteur de la santé et des
services sociaux par rapport au secteur gouvernemental, c'est que les usagers
manquent d'information sur leurs droits. Rares sont les établissements
du réseau qui vont communiquer aux usagers la liste des droits et des
recours qu'ils peuvent exercer s'ils sont insatisfaits des services. Il
m'apparaft qu'en 1990, une situation de ce genre est tout à fait
anormale.
Le troisième élément, c'est que les usagers du
réseau sont des clientèles captives parce qu'ils ont un
problème de santé ou un problème social qu'ils ne peuvent
régler autrement qu'en recourant aux services dispensés par le
réseau. Dans le réseau, la compétition, la concurrence
n'existe pas ou peu et, finalement, l'usager du réseau doit affronter
une machine qui est lourde et puissante même s'il s'agit d'un petit
établissement. Les rapports de forces sont tels qu'ils créent un
déséquilibre qu'aucun mécanisme adéquat ne peut
contrebalancer. De plus, les usagers du réseau qui veulent
défendre leurs droits, généralement, ne peuvent pas
bénéficier de services d'aide et d'accompagnement dans les
démarches qu'ils entreprennent pour faire respecter leurs droits. (11 h
15)
Par ailleurs, l'expérience démontre une
inégalité de traitement à travers le réseau
à l'échelle provinciale, parce que la qualité de la
défense des droits tient à toutes sortes de facteurs
circonstanciels ou conjoncturels, par exemple, au degré de
sensibilisation de l'établissement, de son conseil d'administration, de
son directeur général et de son personnel, à cette
préoccupation de donner des services de qualité. Alors, ce sont
des facteurs qui peuvent être circonstanciels. Ça tient aussi au
fait qu'il y ait ou non un comité de bénéficiaires et
encore, lorsqu'il existe des comités de bénéficiaires,
ça tient aussi à leur degré d'efficacité. Ça
tient aussi au fait qu'il y ait un ombudsman dans l'hôpital et encore,
lorsqu'il en existe, ça tient aussi au degré d'efficacité
de l'ombudsman Ça tient aussi à la capacité
financière de I usager d'avoir recours aux services d'un professionnel
pour défendre ses droits. Ça tient aussi au degré
d'autonomie de l'usager et à sa capacité physique d'affronter
l'établissement pour défendre ses droits. Ça tient aussi,
et ça on peut le constater d'une manière générale,
à une crainte qu'éprouve, à tort ou à raison, la
majorité des usagers qui désiraient porter plainte, crainte de
subir des représailles ou d'être mis sur des listes noires. En
somme, ce que je constate, c'est que le traitement et l'exercice des droits
dans le réseau de la santé et des services sociaux est quelque
peu inégal et que ça met en cause le principe d'accès
à l'égalité.
Enfin, ce qu'il manque, je pense, dans le réseau, et cela a
été souligné par plusieurs groupes de travail, c'est un
mécanisme indépendant de recours qui soit un mécanisme
léger, un mécanisme non judiciaire, un mécanisme qui soit
facilement accessible à la population. Alors, devant ces constats, je
considère qu'il y a lieu de retravailler, finalement, toute cette
problématique de la protection des droits dans le réseau.
L'avant-projet de loi apporte beaucoup, je pense, parce qu'on y trouve des
dispositions maintenant sur le droit à l'information, sur la
participation des bénéficiaires au plan d'intervention et au plan
individualisé de services, des dispositions sur l'aide et
l'accompagnement, la représentation des incapables, sur les
comités de bénéficiaires - on consolide les
bénéficiaires. On prévoit de nouveaux recours comme, par
exemple, des recours à la régie régionale par des
ressources de type familial qui se voient désaccréditées
par un CSS. Les régies régionales aussi voient leur rôle
quelque peu modifié ou renforcé au niveau de la mise en oeuvre
des mécanismes d'aide et d'accompagnement, au niveau du traitement des
plaintes, au niveau de l'information qui doit être donnée aux
usagers sur un plan régional. Et ce que j'ai trouvé
intéressant aussi, c'est l'article 234 de l'avant-projet de loi, qui a
été repris de façon à ce que les régies
régionales ne se trouvent pas à interpréter ou à
appliquer leur mandat de traitement de plaintes de manière
restrictive.
Donc, l'avant-projet de loi constitue un pas en avant dans les
mécanismes de protection des droits des bénéficiaires. Je
pense cependant qu'il faudrait explorer certaines nouvelles avenues. Bien
sûr, la raison d'être ici du Protecteur du citoyen, c'est de
proposer la création d'un mécanisme indépendant de
recours, mais je pense que, indépendamment du mécanisme - et
d'ailleurs, s'il y avait un mécanisme indépendant, ça
prendrait autre chose... Est-ce que l'avant-projet de loi ne va pas assez loin
ou fait fausse route?
Les comités de bénéficiaires. On peut se poser la
question, à savoir pourquoi on restreint la création de
comités de bénéficiaires dans certains
établissements, dans trois catégories d'établissement du
réseau. Si c'est un mécanisme valable, s'il est reconnu comme tel
par le législateur, je ne vois pas pourquoi il ne serait pas
étendu, dans la mesure du possible, à l'ensemble des
établissements du réseau de la santé et des services
sociaux. Parce que, en dehors des centres psychiatriques, des centres
d'hébergement de longue durée, des centres de
réadaptation, même les centres hospitaliers de courte durée
contiennent notamment 20 % de malades chroniques qui attendent pendant des mois
et des mois pour être dans des centres de longue durée, et aussi
parce qu'il y a des gens qui reviennent régulièrement. Moi, je
dis que si le mécanisme était bon lorsqu'il a été
inventé et qu'on l'évalue encore comme étant bon, il n'y a
pas de raison de ne pas l'étendre à tous les
établissements. Ce serait une façon, en créant des
comités d'usagers à l'échelle provinciale, d'impliquer les
usagers dans la défense de leurs droits parce qu'autrement, je
considère que ce qui est proposé dans l'avant-projet de loi,
c'est quelque peu discriminatoire et je ne comprends pas les fondements de
cette distinction-là qui doit être historique, j'imagine.
L'autre chose qui m'inquiète dans l'avant-projet de loi, c'est
qu'on donne la mission d'assurer la protection des droits exclusivement
à la régie régionale. Moi, je trouve qu'on ne place pas
les choses au bon endroit, auprès des bonnes personnes. Il me semble que
c'est le premier dispensateur de services, qui est l'établissement, qui
doit voir, dans ses prestations de services, au respect des droits des
bénéficiaires, des usagers. C'est lui qui doit voir à ce
que les gens soient traités avec égards et avec diligence. Il me
semble que si on met cette responsabilité de protection des droits
uniquement à ce palier de la régie régionale, je pense
qu'on ne fait rien pour sensibiliser le personnel et les directions
d'établissement quant à la qualité des soins et des
services dispensés. Dans le fond, ce qu'on dit: On crée un chien
de garde et si ça va mal, le chien de garde va être là.
Comme je prétends actuellement aux ministères et organismes du
gouvernement... Quand je leur dis: Assumez-vous, soyez imputables, c'est
à vous les premiers à corriger les erreurs ou à prendre
les moyens pour que vous n'en commettiez pas; quand je leur dis:
Établissez-vous des mécanismes de traitement de plaintes, je
pense que je mets les responsabilités aux bons endroits. Ce n'est pas
normal, dans le régime gouvernemental, que le Protecteur du citoyen
intervienne en première ligne sur un paquet de dossiers. Et, moi, je
pense que la première chose qui devrait être faite dans le secteur
de la santé, c'est d'avoir cette imputabilité au niveau des
établissements.
Par ailleurs, il m'apparaît évident que les régies
régionales, dans ce cadre-là, vont continuer, bien sûr,
à assurer, comme le propose l'avant-projet, un rôle de protection.
Mais là, on pourrait prévoir, finalement, que les régies
régionales exerceraient ce rôle à un deuxième niveau
plutôt que d'être prises sur la ligne de feu alors qu'elles ne sont
pas dans les opérations. Je pense également que si on allait
jusqu'à obliger, donc, les établissements au niveau local
à établir des mécanismes de traitement de plaintes, genre
ombudsman d'hôpital, je pense également qu'à ce
moment-là on pourrait donner à la régie régionale
le pouvoir de faire des évaluations de la qualité de ces
mécanismes de traitement de plaintes dans chacun des
établissements.
Finalement, je pense qu'il est nécessaire, dans le réseau
de la santé et des services sociaux, d'établir un
mécanisme qui soit un
mécanisme indépendant de recours, peut-être de
troisième niveau, de dernier recours, pour les gens qui n'auraient pu
obtenir satisfaction, soit au niveau local auprès de
l'établissement, soit au niveau régional auprès de la
régie régionale. Je pense que c'est essentiel. Parce qu'on
rêve en couleur quand on pense et qu'on se fait dire: Ah! si vous avez
des problèmes, vous savez, allez voir un avocat, quand on sait que 80 %
de la population n'a plus les moyens de se payer un avocat, quand on sait que
les tribunaux judiciaires, comme les tribunaux administratifs, constituent dans
bien des cas des dénis de justice à cause des délais qui
deviennent de plus en plus déraisonnables, quand on sait, par ailleurs,
que les tribunaux, qu'ils soient judiciaires ou administratifs, ne
règlent pas tous les problèmes. Ils ne règlent pas les
questions d'équité, ils ne règlent pas les questions de
raisonnabilité, de politique, de directives administratives, ce n'est
pas de leur juridiction. Je pense donc qu'il faut un mécanisme
indépendant de recours qui soit, finalement, adapté aux besoins
de la population, mais qui devrait être utilisé en dernier recours
et de manière exceptionnelle. Je vous remercie.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Jacoby. Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Je veux souhaiter la bienvenue à M. le Protecteur du
citoyen et je suis très heureux qu'on puisse échanger certains
propos directement, compte tenu du courrier que nous nous échangeons
depuis un certain temps, toujours avec les mêmes préoccupations,
bien sûr.
Vous avez évoqué tout à l'heure qu'en vitesse de
croisière, cette année, le Protecteur du citoyen aura reçu
24 000 plaintes ou demandes de renseignements dont 8000 dossiers ouverts -
j'imagine que ce sont des plaintes dans ces cas-là - et qu'en
règle générale, pour un tiers de ces 8000, ce sont des
plaintes justifiées où vous faites des recommandations
précises au ministère et que, dans à peu près tous
les cas, elles sont retenues. J'en ai certaines du passé à la
mémoire, compte tenu des occupations que j'avais avant. Vous devez quand
même recevoir un certain nombre de plaintes, si j'ai bien compris, qui
concernent le réseau de la santé et des services sociaux. Si ma
mémoire est fidèle, compte tenu de ce que nous avons
échangé, c'est à peu près 500 plaintes. Est-ce que
je me trompe?
M. Jacoby: C'est de l'ordre de 500 plaintes, effectivement.
M. Côté (Charlesbourg): Mais vous n'êtes pas
habilité à les traiter, compte tenu du fait que... Est-ce que
votre opinion est à l'effet que si vous étiez habilité
à les traiter, vous en auriez davantage? Parce que 500 plaintes par
rapport à 950 établissements du réseau, c'est important,
s'il y en a 500 qui pourraient être justifiées, mais c'est par
rapport à 950 établissements, tout aussi autonomes les uns que
les autres. Est-ce que votre impression est a l'effet que c'est un volume
beaucoup plus considérable.. Si les gens avaient accès
évidemment à quelqu'un qui est crédible et
indépendant, et je pense que vous avez cette
indépendance-là... Je ne veux pas vous dire que je vais tout vous
confier ça demain matin, parce que, évidemment, la demande de
personnel va suivre après, mais est-ce que les 500 plaintes, elles sont
traitées, ou regardées, ou tout simplement retournées?
Qu'est-ce que vous en faites?
M. Jacoby: Ce que l'on fait, c'est qu'on agit comme service de
référence. On réfère les personnes au service
adéquat, on les renvoie au CRSSS; quand il y a un ombudsman
d'hôpital, on les réfère à l'ombudsman, on les
réfère au comité de bénéficiaires. On fait
ce qu'on peut avec les moyens du bord. Maintenant, pour répondre
à votre question, M. le ministre, je vous dirais que si le Protecteur du
citoyen ou l'équivalent, au moment où on se parle, avait cette
juridiction, ce serait impossible de fonctionner, parce que, finalement, cet
organisme-là se trouverait à prendre des plaintes de
première ligne. Moi, je pense que ce serait impraticable et très
mauvais pour le réseau, parce que je pense qu'un mécanisme de
deuxième ou de troisième niveau qui prend des plaintes de
première ligne et qui s'en occupe personnellement se trouve à
déresponsabiliser les directions d'établissement, les
intervenants et les professionnels.
Je pense que dans la mesure où l'éventuelle
législation aura mis sur pied, tant sur le plan local que sur le plan
régional, des mécanismes d'exercice de protection des droits, des
mécanismes d'aide et d'accompagnement, ça signifiera, à
toutes fins pratiques, que les mécanismes seront là pour que les
établissements, ainsi que les corporations que sont les régies
régionales, fassent leur job en matière de protection des droits.
Donc, cette instance ultime ne devrait en principe recevoir qu'une infime
partie de plaintes. Même lorsqu'il recevrait des plaintes à ce
niveau-là, je pense que cet organisme n'étant pas judiciaire, il
y a moyen de parler au bon monde, de convaincre du monde, sans faire de grosses
interventions et de faire en sorte que les gens assument leurs
responsabilités. Alors, pour clore ma réponse, c'est ça.
Au moment actuel, ce serait épouvantable et ça n'aurait aucun bon
sens. Dans un mécanisme intégré, ça aurait de
l'allure.
M. Côté (Charlesbourg): Si j'ai bien compris
lavant-projet de loi et la réforme, c'est un peu ce que visait,
peut-être timidement, mais c'est un peu ce que visait la réforme
en disant: Renfor-
cement du comité de bénéficiaires, avec un code
d'éthique. C'était davantage vers ça que la réforme
voulait se diriger. Ce que je comprends, c'est que ce n'est pas
nécessairement suffisant, si je vous comprends bien, pour être
capable d'avoir l'indépendance... Parce que c'est l'indépendance
qu'il faut au niveau de la personne qui aura oeuvré ou des personnes qui
auront oeuvré au niveau de l'établissement, que ce soit un
ombudsman ou un comité de bénéficiaires ou les deux.
Ça prend de l'indépendance vis-à-vis de la structure et
ça prend la structure de l'établissement imputable, dites-vous,
de ses responsabilités à ce niveau-là.
Qu'est-ce qu'il faut ajouter au comité de
bénéficiaires ou à l'ombudsman pour qu'il puisse
suffisamment, au-delà de ce qui est prévu dans l'avant-projet de
loi, qu'il puisse véritablement exercer le rôle de première
ligne qu'on veut lui voir confié? Quant à l'établissement,
dans la mesure où il y a indépendance du comité de
bénéficiaires ou de l'ombudsman avec des pouvoirs qui, de toute
façon, ne peuvent pas aller au-delà des pouvoirs qu'on donne au
Protecteur du citoyen, j'imagine, en termes de recommandations, qu'est-ce qu'on
peut ajouter de plus pour que ces gens-là puissent véritablement
défendre l'intérêt des bénéficiaires? (11 h
30)
M. Jacoby: Je pense que ce qui est proposé dans
l'avant-projet de loi pour ce qui est des comités de
bénéficaires, d'une manière générale, donne
un statut d'indépendance acceptable aux comités de
bénéficiaires. Il y a certainement des petites choses à
améliorer mais, dans l'ensemble, ça m'apparaft un statut qui est
suffisamment loin, entre guillemets, de l'établissement ou de la
direction dans la mesure... Et, ça, c'est important. La direction ne se
mêle pas de la gestion du budget du comité de
bénéficiaires, parce que c'est là qu'est le nerf de la
guerre. Moi, je dis que là, il y a certainement du plus dans
l'avant-projet de loi.
Ce que je trouve problématique, au moment où on se parle,
c'est plutôt avec ces personnes qui sont des porte-parole des malades et
que des établissements ont créés: ce sont les ombudsmen ou
ombudspersonnes d'hôpital. Moi, je suis convaincu, pour avoir fait des
expériences pilotes avec certains ombudsmen d'hôpital, que ces
gens-là font un travail extraordinaire. Mais, finalement, la
qualité ou l'intensité de leurs interventions dépend de la
discrétion totale de l'administration. Et c'est pour ça
qu'à certaines époques, des ombudsmen d'hôpital ont le vent
dans les voiles. Ils sont "backués" par l'administration. Un bon matin,
le comité des médecins, pour quelque raison que ce soit, veut que
l'ombudsman ne fasse plus rien et ça déteint, ils perdent leur
autorité, ils perdent leur pouvoir d'intervenir et c'est comme ça
que les rapports de forces fonctionnent.
Moi, je dis que les ombudsmen d'hôpitat, éventuellement,
dans la ligne de ce que je proposais que chaque établissement
crée un ombudsman en plus des comités de
bénéficaires, je dis que ces gens-là, leur statut devrait
être défini dans la loi. Sans être complètement
indépendants, il y a moyen de trouver des mécaniques qui font en
sorte qu'ils ont une relative indépendance de statut. Par exemple, que
ces gens-là soient nommés suite à des concours; que ces
gens-là soient choisis par le conseil d'administration de
l'établissement; que ces personnes-là soient nommées pour
une durée fixe, renouvelable; que ces personnes-là, sans
nécessairement avoir des pouvoirs d'enquête et de commission
d'enquête, qu'on précise bien le type d'interventions qu'elles
peuvent faire; que la direction générale et toute la direction
des services professionnels de l'hôpital et tous les intervenants aient
l'obligation de collaborer avec cette personne-là. Tout en demeurant des
personnes qui sont des employées de l'institution, elles ne seront pas
laissées aux aléas et aux caprices des rapports de forces qui
existent dans les institutions, parce que ça ne sert à rien... Un
ombudsman d'hôpital qui n'a plus de marge de manoeuvre, qui n'est plus
écouté, ça devient purement et simplement un agent de
relations publiques.
M. Côté (Charlesbourg): Je trouve ça
intéressant, surtout lorsqu'on le met en rapport avec ce qui se passe
actuellement au niveau de la santé mentale. Et puisque vous êtes
associé à cette expérience, au moment où nous nous
parlons, qu'est-ce qui, dans l'expérience de santé mentale,
fonctionne ou ne fonctionne pas par rapport aux comités qu'on voudrait
mettre sur pied dans chacun des établissements, des comités
bénéficiaires-ombudsmen? Qu'est-ce qu'il faut aussi
améliorer par rapport à ce qu'on vit en santé mentale
à ce moment-ci?
M. Jacoby: Je pense qu'il faut que les comités de
bénéficiaires... Je ne peux pas porter de jugement ou faire une
évaluation de l'efficacité des comités de
bénéficiaires. Tout ce que je constate actuellement, c'est qu'il
y en a qui sont plus efficaces que d'autres. Je pense que, d'une manière
générale, il n'y a pas cet esprit de concertation et de
collaboration entre les comités de bénéficiaires et la
direction des établissements là où ils se trouvent. Je
pense qu'on les considère comme des intrus, comme des loups dans la
bergerie et je crois que c'est une approche qui manque de fair-play, à
mon point de vue. Je pense que les comités de
bénéficiaires sont des gens qui représentent les
intérêts des usagers et je pense que les directions
d'établissement devraient accepter ça comme faisant partie de
leurs obligations normales, de leurs activités normales. C'est normal.
On traite un usager, il est normal que l'usager ait son mot à dire sur
la qualité du traitement.
Alors, c'est beaucoup plus une question d'approche, de
tempérament, de perception qu'on peut avoir des comités de
bénéficiaires. Il est évident que dans n'importe quel
organisme, qu'il soit gouvernemental, paragouvernemental ou
péri-gouvernemental, dès que vous mettez une institution qui est
là un peu pour surveiller certains agissements de cet organisme, bien
ça crée de la méfiance. Moi, je trouve que ça n'a
pas de bons sens.
Maintenant, c'est un climat qu'il faut créer et je ne pense pas
que ce soit la loi qui va créer le climat. Je pense également
qu'il y a un problème au niveau du recrutement et des mandats des
membres du comité de bénéficiaires. Je pense qu'il y a un
plus qui est apporté par l'avant-projet de loi.
Je pense qu'un des grands problèmes, c'est le financement des
comités de bénéficiaires. D'une part, c'est laissé
à la discrétion de l'établissement. Je pense que le projet
de politique sur la santé mentale précisait des minimums et
maximums. Je pense que ça doit être absolument mis en oeuvre par
voie réglementaire ou autrement. Je pense également que le
comité de bénéficiaires n'a pas de comptes à rendre
dans ses activités quotidiennes dans l'utilisation de ses budgets. Je
pense que c'est le monde à l'envers. Tout ce que le comité de
bénéficiaires devrait avoir comme obligation, c'est de faire une
reddition de comptes, en fin d'année Ça n'empêcherait pas
la direction ou le conseil d'ad ministration d'envoyer un contrôleur pour
voir si les budgets sont bien gérés, ne sont pas
dilapidés, mais c'est cette autonomie de fonctionnement qui est
nécessaire, je pense.
Un autre point pour lequel il y a des carences, actuellement, dans le
système, c'est le fait qu'il y a peu de permanence. C'est rare, les
comités de bénéficiaires où vous avez une personne
qui est permanente, qui s'occupe de la job à temps plein, à
l'année. Je pense que c'est très important. Il faut trouver des
mécanismes pour faire en sorte ou bien que ces comités de
bénéficiaires puissent se doter d'un permanent, à tout le
moins, pour la continuité ou, en tout cas, trouver d'autres moyens. Je
pense aussi, faute de budget, que les comités de
bénéficiaires ont peu de chances de développer des
expertises, finalement.
Une voix: Ça va.
M. Côté (Charlesbourg): Bon, je pense qu'on se
comprend assez bien sur le niveau local: imputabilité,
indépendance des comités de bénéficiaires. À
ce moment-là, on est probablement dans la bonne voie pour
résorber certains problèmes, y compris d'information et de
traitement des plaintes.
Si on monte au deuxième niveau, le régional, je vous ai
entendu dire tantôt que, là aussi, c'était traité de
manière inégale et que le niveau de crédibilité
variait aussi pour être capable de traiter les plaintes. Le CRSSS ou les
régies régionales éventuelles n'ont pas et n'auront pas
à dispenser directement des services. C'est davantage un travail de
coordination, de planification et, à ce moment-là, ils ne peuvent
pas être - je pense, en tout cas, à tout le moins d'aucune
manière - en conflit d'intérêts quant à eux pour le
traitement de ces plaintes.
Effectivement, ce qu'on prévoyait, c'est que le niveau
régional, par l'entremise du CRSSS ou d'une régie
régionale, puisse être le deuxième niveau de plaintes,
à ce moment là. Quel est votre constat, à ce moment-ci? Il
est là Quest ce qu'on devrait ajouter à ce que nous avions
prévu au niveau des intentions législatives pour que ce niveau
régional puisse effectivement jouer son rôle, étant aussi
un rôle de support extrêmement important au niveau du comité
des bénéficiaires d'établissements à
l'intérieur de leurs limites géographiques des territoires?
M. Jacoby: Bien, si je regarde ce qui se passe actuellement et
qu'on souhaiterait une solution idéale, l'avant-projet de loi y
répond en partie. Ce qui se passe, actuellement, c'est que le traitement
des plaintes par les CRSSS est tout à fait inégal, et ça,
je trouve ça extrêmement grave. Ça veut dire que, sur un
plan régional, un bénéficiaire ou un usager n'a pas le
traitement dépendant qu'il demeure à Gaspé ou qu'il
demeure à Rouyn-Noranda.
Cela étant dit, je pense qu'il y avait un grand problème.
Un des grands problèmes, c'était le fait que l'article 18 de la
Loi sur les services de santé et les services sociaux disait que la
plainte n'était recevable que si l'établissement n'avait pas
fourni les services de santé et les services sociaux que la loi lui
donne droit de recevoir. Or, l'interprétation qu'ont faite plusieurs
CRSSS est de dire: À partir du moment où c'est une plainte sur la
qualité du service ou l'insuffisance du service, on n'a pas juridiction.
Moi, je pense que le projet de loi, c'est un grand pas en avant
là-dessus.
Maintenant, ce qui s'est passé aussi très souvent, selon
l'information que j'ai, c'est que, pour des raisons que je n'ai pas à
juger, il arrivait, à l'occasion et, dans certaines régions,
très souvent que dès qu'un bénéficiaire ou un
usager du réseau transmettait une plainte au niveau du CRSSS, tout ce
qu'il faisait, c'est qu'il se servait de services de référence,
renvoyait la plainte à l'établissement. L'établissement
retournait la réponse et le CRSSS faisait du "rubber stamping" Je ne
pense pas que le projet de loi puisse empêcher ça, même si
on ajoutait un mot. Je ne pense pas que, dans les faits, ça corrigera le
problème. Je dis encore là, c'est une mentalité qu'il faut
développer, une bonne conscience que la régie régionale
agit à un deuxième niveau, que c'est un rôle parapluie en
termes de protection des droits. C'est une mission importante. Main-
tenant, c'est sûr que, dans l'avant-projet de loi, il y a beaucoup
moins de possibilités de conflits d'intérêts quoique
encore, la régie régionale, même si son pouvoir est
relativement limité, va allouer les ressources aux différents
établissements de la région. Mais je ne pense pas que ce soit, en
soi, un problème majeur.
M. Côté (Charlesbourg): Dans l'hypothèse
où on se retrouve avec une situation qu'on peut décrire, à
ce moment-ci, de quasi idéale, compte tenu de notre connaissance de la
pratique, au niveau local et au niveau régional, est-ce qu'il ne manque
pas quand même un pan de mur assez important? Ma question qui s'adresse
à vous est la suivante, c'est un terrain assez ouvert, merci: Est-ce que
vous avez déjà envisagé ou est-ce que vous envisagez avoir
le pouvoir d'enquêter sur la pratique médicale? Si non, on est
dans une situation où il y aura toujours un pan de mur très
important... Et vous l'avez dit vous-même tantôt: Un ombudsman qui
peut faire du bruit dans un centre hospitalier, ça va aller très
bien tant et aussi longtemps qu'il n'est pas dérangeant. Mais si,
à l'occasion, il est dérangeant pour le corps médical, il
peut y avoir une fermeture de la coquille, assez rapidement, merci, c'est
fini.
M. Jacoby: M. le ministre, je pense que ce qui prévaut
actuellement dans les établissements, les comités de
médecins et de dentistes, c'est certainement un plus, parce que ce sont
des comités de discipline interne. Mais ce sont des comités qui,
à mon point de vue, ne répondent plus aux normes, aux garanties
de justice naturelle qu'on connaît dans nos sociétés depuis
déjà une vingtaine d'années.
Je me dis que le fait que tout soit fait de manière
confidentielle, que l'on ne sache pas comment et pourquoi les décisions
sont prises, je trouve ça très grave dans notre
société démocratique. Je comprends que les professions
aient besoin, peut-être, de plus de marge de manoeuvre, ou elles pensent
en avoir besoin, je ne porterai pas de jugement. Je considère qu'en
1990, c'est inacceptable que l'on continue à faire en sorte qu'on force
un bénéficiaire éventuellement à s'adresser au
tribunal des professions. Je pense qu'il y aurait quelque chose à faire
au niveau des établissements. Mais je peux vous dire une chose: Si
jamais le Protecteur du citoyen, à une autre instance, a ce pouvoir, je
ne suis pas convaincu, en tout cas, dans les premiers temps, que le taux de
solution ou que les recommandations seront suivies à 99,5 %.
Des voix: Ha, ha. ha! le président (m. joly):
merci, m. le ministre. je vais maintenant reconnaître m. le leader de
l'opposition et porte-parole officiel de l'opposition en matière de
santé.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je
vous remercie, M. Jacoby, de vous présenter à cette commission.
Ce n'est pas coutume que le Protecteur du citoyen soit spontanément
emballé pour venir se présenter devant les parlementaires,
même s'il relève de l'Assemblée nationale.
Là-dessus, je voudrais vous féliciter.
J'ai été surpris de voir, dans l'avant-projet, que l'on ne
retrouve pas l'élargissement du mandat du Protecteur du citoyen,
puisqu'on a fait de beaux discours, il y a une couple d'années, lors de
la commission Rochon. Il y a un document qui est intitulé "Pour
améliorer la santé et le bien-être au Québec",
document d'orientation sur l'amélioration des services de santé
et des services sociaux. À la page 56 de ce document d'orientation, on
peut y lire à peu près ceci: Demander l'élargissement du
mandat du Protecteur du citoyen pour y inclure désormais le champ des
services de santé et des services sociaux, eu égard à
certaines clientèles particulières: les personnes
déficientes intellectuelles, les personnes aux prises avec un
problème de santé mentale et les personnes âgées et
en perte d'autonomie. Quelle ne fut pas ma surprise de constater que, dans
l'avant-projet, il n'y avait rien là-dessus, alors qu'on s'est
targué, on s'est bidonné, on s'est pété les
bretelles à l'effet d'axer tout sur la personne et lui donner tous les
droits et les recours! On ne retrouve rien dans l'avant-projet. Ma question ne
devrait sûrement pas s'adresser à vous, vous comprendrez, mais,
par le fait que je vous l'achemine, je sais que le message est maintenant
compris. (11 h 45)
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Et je suis sûr que le ministre qui, à
toutes fins pratiques, a nié à peu près 95 % de
l'avant-projet actuel, continuera à le faire pour les 5 % et qu'on
retrouvera dans le projet, en septembre prochain...
M. Côté (Charlesbourg): Vos vacances vous ont fait
du bien.
M. Chevrette: Vous avez remarqué que j'étais
éclairé, depuis le temps. Je suis convaincu que les 5 % manquants
maintenant pour changer complètement l'avant-projet, on retrouvera, dans
ces 5 % manquants, l'élargissement du mandat du Protecteur du citoyen.
Cela dit, au-delà de ma surprise maintenant, j'aurais quelques
questions. Est-ce que vous recevez directement des plaintes de la Curatelle
publique, au nom des bénéficiaires? Il faut que je sois
cohérent avec ce que j'ai dit à Mme Fontaine, tantôt.
M. Jacoby: Pas directement. On reçoit indirectement des
plaintes de personnes qui se plaignent de la Curatelle publique, parce que
nous avons juridiction sur la Curetalle publique.
M. Chevrette: Je ne m'attendais pas à cette
réponse-là.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Jacoby: Alors on reçoit des plaintes de leurs
administrés.
M. Chevrette: Des administrés. Par l'intermédiaire
des parents?
M. Jacoby: Des administrés ou des personnes qui les
représentent parce que... pour différentes raisons. Nous avons
juridiction sur tous les organismes gouvernementaux, dont les employés
sont régis par la Loi sur la fonction publique. Alors finalement, on
intervient aussi dans des dossiers de Curatelle publique. Bon an mal an, je
pense que, pour l'année en cours, nous avons reçu quelque chose
comme une centaine de plaintes concernant la Curatelle publique. Quand on dit
100 plaintes, ça ne veut pas dire que, dans 100 % des cas, les plaintes
étaient fondées, parce que les plaintes sont fondées dans
notre moyenne de 30 %. Les plaintes sont généralement
basées sur le fait qu'il y a, en tout cas, ce que j'ai pu constater, une
certaine insuffisance de ressources ou mauvaise allocation des ressources, je
ne suis pas capable de juger, ce qui fait... Vous savez, c'est toujours le
problème dans les services publics, quand il y a des insuffisances de
ressources, non seulement on a les délais mais il y a aussi le fait
qu'on arrondit les coins, qu'on prend des décisions trop rapides,
arbitraires, qu'on néglige certains dossiers qui restent sur les
tablettes, c'est toujours le problème éternel, mais c'est...
M. Chevrette: est-ce que vous recevez des plaintes directement
maintenant de comités de bénéficiaires, par exemple, pour
et au nom de psychiatrisés?
M. Jacoby: Nous avons, oui, nous avons reçu des plaintes,
mais ce sont plutôt des plaintes de nature systémique, par
exemple. On a beaucoup de relations avec certains comités de
bénéficiaires, comme celui qui existe à Robert-Giffard ou
à Louis-Hippolyte-Lafontaine, parce que co sont des comités de
bénéficiaires qui sont très actifs. Alors on
échange de l'information et ils nous transmettent... ou on leur donne du
soutien dans certains types de dossiers. On reçoit également des
plaintes d'organismes communautaires par l'entremise du comité
provincial des malades, ou encore d'organismes communautaires comme
Auto-psy.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez reçu des plaintes de la
nature de l'exemple que je vais vous donner? Dans certains centres d'accueil
pour psychiatrisés, que des médications soient prescrites par
téléphone aux patients sans qu'il y ait de visite de la part des
médecins ou des psychiatres en question? Est-ce que vous avez
reçu ce genre de plaintes, en tout cas, moi, qui me sont
rapportées par deux ou trois institutions différentes? Est-ce que
ça a été porté à l'attention du Protecteur
du citoyen?
M. Jacoby: Je vérifie avec le responsable des
enquêtes, je croirais qu'à première vue, non, parce que...
en principe, non, la réponse vient de m'être confirmée,
c'est non, parce que, premièrement, on n'a pas juridiction et,
deuxièmement, on ne nous les signale pas toutes, en plus de ne pas avoir
juridiction. On a eu ce problème-là, cependant, ce genre de
plainte dans les prisons provinciales, où on a juridiction, et nous
sommes intervenus, effectivement, pour faire cesser ces
pratiques-là.
M. Chevrette: Mais quand on compare certains centres de
détention avec certains centres pour psychiatrisés, vous savez,
il n'y a pas grand différence. C'est pour ça que ça me
surprend que vous n'en ayez pas eu, parce qu'on nous en a rapportées
comme formations politiques, je suis convaincu, des deux côtés de
la Chambre. Au moment d'une crise, par exemple, souvent c'est un coup de fil
qui fait en sorte qu'on administre une médication relativement forte ou
encore les fameuses méthodes de tranquilisants abusifs, nous dit-on, en
particulier chez les jeunes. C'est pour ça que je suis surpris de voir
que vous n'ayez pas eu de plainte, parce que ça nous est rapporté
assez couramment, assez régulièrement.
M. Jacoby: M. le député, si on ne reçoit pas
de plainte, c'est parce qu'on n'est pas connu, bien sûr, mais surtout
parce qu'on n'a pas...
M. Chevrette: Je trouve que vous êtes bien parti pour vous
faire connaître.
M. Jacoby: et surtout parce qu'on n'a pas juridiction sur le
réseau. on ne serait pas en mesure d'évaluer toutes les
problématiques qui existent dans le réseau de la santé et
des services sociaux. ça nous est impossible; on n'a pas les
données qu'il faut.
M. Chevrette: Je voudrais reprendre avec vous les niveaux
d'intervention dont vous avez parlé dans votre exposé. Vous dites
que c'est en ultime recours que le Protecteur du citoyen doit être mis
à contribution, et je pense que vous avez raison. Je vous suis
très bien dans le cheminement. Mais au niveau de l'ombudsman en
particulier qu'on ne retrouve pas dans les hôpitaux même pour
chroniques, peut-être qu'on devrait le retrouver là, comme vous
disiez, je partagerais passablement votre point de vue, pour
éliminer un paquet de plaintes. Mais par rapport au traitement du
CRSSS, comment voyez-vous le pont entre le rôle de l'ombudsman et le
niveau du traitement des plaintes au niveau des CRSSS actuels ou de la
régie, éventuellement?
Vous dites que ce n'est pas le niveau où on devrait régler
les plaintes au niveau régional, mais si on fait une véritable
décentralisation, et c'est là ma question, si on s'en va vers une
véritable décentralisation et non pas une déconcentration,
on va donner une autonomie certaine aux régions, quel est le palier,
à ce moment-là, si la régie ou le CRSSS n'est pas
l'instance appropriée pour régler des plaintes au niveau
régional dans le cadre d'une décentralisation réelle
véritable, comment voyez-vous ça?
M. Jacoby: Je me suis peut-être mal exprimé plus
tôt, mais la mécanique que je proposerais est la suivante. Que
chaque établissement, dans la mesure du possible, possède un
comité d'usagers qui pourrait s'occuper notamment de la défense
d'intérêts collectifs et un ombudsman ou un porte-parole qui
relève du conseil d'administration, par exemple, de
l'établissement. Bon. Alors, un bénéficiaire se plaint II
s'adresse à ces personnes-là. On sait que l'ombudsman
actuellement n'est pas indépendant, mais il fait une très bonne
job, il peut régler un paquet de problèmes. Si jamais, en bout de
ligne, la personne se considère encore lésée, même
après avoir transmis son dossier au comité de
bénéficiaires sous des aspects plus collectifs, je me dis,
à ce moment-là, que le bénéficiaire va s'adresser
au deuxième palier qui est l'instance régionale. Et, l'instance
régionale, elle est absolument essentielle, et ce qui va être
extraordinaire avec l'instance régionale avec son pouvoir, c'est qu'elle
va par sa jurisprudence, entre guillemets, influer sur la qualité des
services qui vont être offerts au niveau régional, quel que soit
l'établissement, elle va développer sa jurisprudence, elle va
donner des exemples. Ce qui veut dire que, dans la même région,
avec le temps, les usagers d'un CSS, d'un CLSC, d'un centre hospitalier
psychiatrique seront traités avec tous les égards qu'ils
méritent comme usagers et bénéficiaires, parce qu'il y
aura une instance régionale qui va rayonner à l'échelle
régionale.
M. Chevrette: Au niveau toujours du cheminement d'une plainte, je
comprends qu'au niveau d'un centre hospitalier, ça pourrait être
l'ombudsman. Si ça ne se règle pas là au niveau
supérieur qu'est la région, après ça vous voyez
ça au niveau de l'ombudsman et c'est là que vous voyez
l'élargissement de votre mandat parce que, actuellement, vous n'avez pas
juridiction.
Vous avez dit dans votre exposé que vous faisiez cheminer les
plaintes aux endroits appropriés dans la conjoncture actuelle. Est-ce
à dire que vous faites directement affaire avec des institutions quand
vous voyez que le problème peut être réglé au niveau
de l'institution ou si vous passez nécessairement par le CRSSS ou par le
ministère?
M. Jacoby: C'est-à-dire qu'on réfère les
gens au CRSSS.
M. Chevrette: À cause du système maintenant.
M. Jacoby: Oui, mais personne, à peu près personne
ne sait que le CRSSS, au moment où on se parle, a un pouvoir
d'intervention.
M. Chevrette: Les députés le savent en maudit.
M. Jacoby: Mais le monde ne le sait pas. Le vrai monde ne le sait
pas.
M. Chevrette: Le vrai monde? Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Vous pourriez peut-être avoir un front commun
là-dessus.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Jacoby: Alors, on agit comme service de
référence, actuellement. On n'ouvre pas un dossier. On a bien
sûr des contacts. Au niveau de la Direction des enquêtes chez nous,
les délégués et les représentants du Protecteur du
citoyen ont des contacts dans certains établissements, et ça aide
à régler des dossiers. On appelle des gens, mais c'est tout
à fait informel et ça vaut ce que ça vaut. Parce qu'il n'y
a pas de mécanisme organisé et intégré, ni sur le
plan local ni sur le plan régional. En tout cas, si ça existe,
ça fonctionne plus ou moins.
M. Chevrette: Comme je voudrais laisser mon collègue de
Rouyn vous poser quelques questions sur le changement de mentalité, je
dois souhaiter que votre recommandation se retrouve dans l'avant-projet, ainsi
que la page 56 du document d'orientation du gouvernement actuel.
M. Côté (Charlesbourg): Dans le projet, pas dans
l'avant-projet.
M. Chevrette: Dans le projet, j'ai bien dit. L'avant-projet, je
sais que vous n'y croyez pas, M. le ministre.
Le Président (M. Joly): Merci. Je vais maintenant
reconnaître le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Merci, M. le Président. Donc, M. Jacoby,
l'article 238 de l'avant-projet de loi qui sera modifié pour noue amener
un vrai projet de
loi sur lequel on pourra discuter, si je comprends bien, vous ne croyez
pas beaucoup que de confier à un organisme communautaire
désigné par la régie régionale comme instrument
d'assistance pour les bénéficiaires qui auraient des plaintes,
compte tenu de l'inégalité que vous avez observée dans le
traitement actuellement et dans les années passées, est-ce que
ça ne vous semble pas, si j'ai bien compris, un mécanisme
suffisant? Là, je parle du support au traitement des plaintes.
M. Jacoby: Je pense que, dans l'avant-projet de loi à
l'article 238, il n'y aurait pas grand-chose à changer, à mon
point de vue. Je trouve tout à fait impérieux que la régie
régionale ait le pouvoir et ait l'obligation, à toutes fins
pratiques, de voir à mettre sur pied sur un plan régional des
mécanismes d'aide et d'accompagnement. C'est absolument essentiel, parce
que c'est une des grandes lacunes du système actuellement. Je pense que
ça ne peut être dispensé que par la régie
régionale et non pas par l'établissement au niveau local.
Ça, c'est fondamental.
Ce que je dis, c'est que mettre le focus de protection des droits au
niveau de la régie régionale, on fait fausse route, en se
limitant à ça. Il faut mettre le focus au niveau de
l'établissement, au niveau local. Ce que je veux dire par là,
c'est que non seulement on doit dire que les établissements doivent
fournir des services de santé et sociaux de qualité, mais qu'ils
doivent les fournir dans le respect des droits des usagers et qu'ils doivent
traiter, comme on trouve dans nos lois provinciales, les usagers avec les
égards qui leurs sont dus - c'est important, même si, dans
certains cas, les lois ont valeur pédagogique très importante -
et doivent dispenser leurs services dans des délais raisonnables.
Moi, je pense qu'avec ça, on met l'im-putabilité au bon
endroit. On dit aux établissements: Vous dispensez le service, mais
dispensez-le dans les formes et en respectant les droits. C'est normal. On doit
respecter les droits d'autrui. Commençons par les établissements.
À ce moment là, la direction sera sensibilisée, les
professionnels, les intervenants, tout le personnel. Et, à ce
moment-là, plutôt que d'avoir seulement la deuxième ligne
qui vient par en arrière et dit: Vous n'avez pas bien fait votre job,
dans quelques années, avec les changements de mentalité, la
formation du personnel, on aura des services de qualité, respect des
droits dès la première ligne. Donc, il faut ajouter cette
obligation en première ligne.
M. Trudel: Est-ce que vous n'avez pas l'impression, cependant,
toujours compte tenu de l'histoire... Et vous avez bien insisté pour
décrire les inégalités des différents
bénéficiaires suivants là où ils sont. Vous avez
donnez l'exemple... Je ne suis pas sûr qu'à Gaspé et
à Rouyn-Noranda, on ait le môme traitement au niveau du respect
des droits. Est-ce que vous n'avez pas l'impression que, l'objectif premier,
évidemment, du Protecteur du citoyen étant d'assurer les droits,
c'est le Protecteur du citoyen qui devrait avoir la responsabilité
juridique de voir à la mise sur pied de ces mécanismes à
niveaux que vous nous présentez ce matin, parce qu'on n'est pas
sûrs, compte tenu de l'histoire, que les institutions, compte tenu de
leur objectif premier et des rapports de forces - vous avez eu une
réponse très éclairante là-dessus tantôt -
qui jouent à l'intérieur des institutions, que le mandat au
niveau de l'organisation du traitement des plaintes et des organismes
responsables, parce que vous avez parlé de l'importance de créer
un climat - ça, c'est très intéressant - il faut donc
qu'il y ait un organisme au niveau québécois qui soit
chargé, je dirais, entre guillemets, de surveiller l'existence ou la
création de ce climat dont c'est l'objectif principal. Est-ce qu'on ne
devrait pas juridiquement, au niveau de la loi, confier la
responsabilité du traitement et de l'organisation du système de
traitement des plaintes, du respect des droits, au bureau du Protecteur du
citoyen? (12 heures)
M. Jacoby: Je pense que c'est faisable, mais je pense aussi qu'on
ne doit pas mettre tout sur le Protecteur du citoyen. Il faut penser que dans
la structure proposée, il y a des régies, la régie
régionale. Je me dis que si la régie régionale joue un
rôle de deuxième niveau concernant des plaintes, elle pourrait
aussi donner du support en termes d'établissement de mécanismes
de traitement de plaintes sans exclure la possibilité, pour le
Protecteur du citoyen, de donner du support sur un plan régional.
Dans la réalité de tous les jours, MM les membres de la
commission, depuis que j'ai proposé et recommandé, l'an dernier,
que les ministères et les organismes se dotent de mécanismes de
traitement de plaintes, je suis sollicité régulièrement
pour conseiller les ministères et organismes dans l'élaboration
et la mise sur pied do leur service de traitement de plaintes.
Alors, si jamais le gouvernement met cette responsabilité en
première ligne de créer des services de plaintes, je pense qu'il
va falloir que la loi prévoie également que la régie
régionale puisse donner non seulement du soutien, mais également
puisse faire une évaluation de ces services de plaintes quant à
leur efficacité et leur qualité parce qu'on donne
déjà dans lavant-projet... J'ai cru voir certaines
activités d'évaluation de programmes au niveau des
établissements. Ça pourrait être un autre volet que
pourrait jouer la régie régionale, soit d'évaluer ces
mécanismes-là.
M. Trudel: Je crois qu'il est heureux de constater que vous
insistez sur le fait que la régie régionale doit avoir cette
responsabilité et l'exercer Je me permets de dire que j'ai aussi
encore quelques craintes et j'aimerais bien que la régie
régionale soit elle-même surveillée au niveau du respect et
de l'exercice du mandat du traitement. C'est pour ça, je pense, que le
Protecteur du citoyen doit avoir comme recours ultime au niveau des plaintes en
soi, mais surtout au niveau de la création de ce climat dont vous avez
parlé et du suivi parce qu'on est souvent portés à oublier
l'exercice des droits dans un système, vous l'avez bien décrit,
très très complexe... Merci beaucoup de votre
témoignage.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député.
M. le ministre, avez-vous quelque chose à rajouter?
M. Côté (Charlesbourg): Non, ça va. Merci
beaucoup de vous être présentés. Probablement que vous vous
retrouverez davantage dans le projet de loi; je le souhaite à tout le
moins.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Jacoby. Au nom des gens
de cette commission, au nom du vrai monde, on vous salue. Merci beaucoup.
Je vais maintenant demander aux gens représentant la
Fédération des CLSC du Québec de bien vouloir s'avancer.
Je profite de ce petit temps d'arrêt pour demander la coopération
des gens, si on peut s'avancer un peu plus ici vers l'avant et un peu plus
aussi en arrière afin de dégager la porte, question de
sécurité. On vous demanderait d'accélérer, s'il
vous plaît. Merci.
Alors, nous allons reprendre nos travaux. Bienvenue aux membres de la
Fédération des CLSC du Québec. Bienvenue à cette
commission. J'apprécierais si la personne responsable pouvait se
présenter et aussi présenter les gens qui l'accompagnent, s'il
vous plaît.
Fédération des CLSC du
Québec
M. Payette (Maurice): Merci, M. le Président. J'aimerais
d'abord me présenter. Mon nom est Maurice Payette. Je suis
président du conseil d'administration de la Fédération des
CLSC.
Le Président (M. Joly): Un instant s'il vous plaît,
M. Payette, j'apprécierais beaucoup la coopération des gens,
à savoir au niveau des conversations. Merci.
M. Payette: À ma droite, Mme Jeanne-d'Arc Vaillant,
directrice générale de la Fédération et, au bout
à ma droite, M. Fernand Roy, vice-président de Vidéotron
et membre du conseil d'administration et du comité exécutif de la
Fédération des CLSC. À ma gauche, Mme Suzanne Roy,
vice-présidente de la Fédération et directrice
générale du CLSC Les Méandres et, à l'extrême
gauche, M. Jean-Pierre Bélanger, un recherchiste de la
Fédération.
J'aimerais d'abord donner le sens un peu du mémoire dont vous
avez pris connaissance. Ce mémoire, il représente ce que pensent
et ce que veulent les usagers des CLSC. Je suis moi-même un usager. On
m'a dit tout à l'heure, le monde ordinaire, le vrai monde. Je
siège sur le conseil d'administration du CLSC qui dessert mon village et
c'est à titre de représentant des 10 000 usagers de ma MRC, que
j'accomplis cette fonction.
Le mémoire a été préparé par un
conseil d'administration majoritairement composé de représentants
des citoyens. Il a été soumis, étudié et
adopté par une assemblée générale majoritairement
composée aussi de représentants des citoyens. Et ce matin, parmi
les gens qui sont dans la salle, il y a de nombreux usagers,
particulièrement des présidentes et des présidents des
regroupements régionaux qui sont tous des représentants des
usagers. Je n'ai pas l'intention de résumer l'ensemble du
mémoire. J'aimerais de mon côté dire les trois choses que
je trouve les plus importantes, trois demandes que nous, les usagers des CLSC,
nous faisons. La première demande, c'est qu'en accomplissant cette
réforme, vous placiez l'utilisateur au centre du système dans les
décisions que vous aurez à prendre dans les mois à venir.
Nous vous demandons de penser d'abord et avant tout aux besoins de la
population, aux besoins actuels et aux besoins futurs que nous avons
décrits dans notre mémoire. La seule raison d'être du
système de santé et des services sociaux, ce sont les personnes.
Nous pensons qu'il faut dans cette réforme intégrer l'ensemble
des services autour du client plutôt qu'autour des établissements.
Au sortir de cette réforme, je pense qu'il ne devrait y avoir qu'un seul
gagnant, le citoyen.
Ma deuxième demande, c'est de donner à tous les citoyens
et à toutes les citoyennes du Québec, les moyens de rester chez
eux. Nous désirons rester chez nous, rester dans notre maison, dans
notre village, notre quartier, notre communauté locale. C'est là
que nous sommes bien et c'est là que nous voulons vieillir en continuant
à contribuer au dynamisme de notre communauté. Nous voulons
éviter le plus possible et à tout prix de placer les personnes
âgées en perte d'autonomie, de placer les personnes
handicapées, de placer les jeunes en difficulté. Nos proches, nos
parents, nos voisins font déjà beaucoup de choses pour permettre
le maintien dans le milieu de vie, le maintien à domicile. Mais je pense
que nous avons besoin du support de l'État, d'un support
significatif.
Ma troisième demande, c'est de prioriser le développement
des services légers. Je me suis permis pour visualiser, pour illustrer,
de construire une pyramide tronquée. Comme vous le voyez, elle repose
sur une base qui est plus étroite que le sommet.
M. Chevrette: Je croyais que c'était l'édifice de
la CEQ.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Payette: Pour nous, cette pyramide représente un peu ce
qu'est le système actuel. Au sommet, ce sont les ressources lourdes, les
services lourds, les services spécialisés, les services
d'institutionnalisation, hôpitaux, maisons d'accueil, etc. Ces services
qui entraînent évidemment la dépendance des citoyens, qui
entraînent aussi la surconsommation, des services, vous le savez, dont le
coût est dans un état de croissance exponentielle.
À la base, ce sont les services légers, les services
communautaires, pas uniquement les CLSC. Ce sont des services qui tendent
à respecter et favoriser l'autonomie des personnes, à les
maintenir dans leur milieu naturel, à utiliser les dynamismes de la
communauté, des services qui sont centrés sur la
prévention. Ce sont des services, je pense, moins coûteux.
Ce que nous pensons, c'est qu'il faudrait progressivement renverser
cette pyramide, renverser la pyramide de façon à ce que la
première ligne, les services de base, puissent devenir la base
réelle de l'ensemble du système. Là-dessus, nous croyons
que les CLSC sont là, à cette base, 158 établissements.
Mais ils ne sont pas assez là, au sens où, pour nous les usagers,
les CLSC ne sont pas suffisamment accessibles. Et, deuxièmement, tous
les CLSC n'offrent pas toute la gamme des services courants, des services
médicaux, des services sociaux. Et je pense qu'il faut élargir
cette porte d'entrée pour que la base de la pyramide puisse être
vraiment solide et qu'on puisse donc prioriser les ressources et les services
légers pour s'assurer que la pyramide continue à rester
là.
Je vais laisser à M. Roy le soin de terminer cette
présentation.
Le Président (M. Joly): M. Roy.
M. Roy (Fernand): M. le ministre, mesdames et messieurs de la
commission, je vais tenter de parcourir les grandes idées du
mémoire de la Fédération des CLSC. D'une part,
d'emblée, je vous dirais qu'on doit maintenir et préserver au
Québec les grands principes du système de santé et des
services sociaux. Ces principes, comme vous le savez, sont
l'accessibilité aux services, l'universalité et la
gratuité des soins, l'aide sociale, l'approche médicale globale
et la participation des citoyens. (12 h 15)
Pour quelle raison, me direz-vous? Essentiellement, pour permettre
à la population entière l'accès aux services dont ils ont
besoin, tant en quantité nécessaire qu'en qualité
nécessaire. En ce sens, la privatisation des services de santé
créerait un double système: l'un rapide, à forte teneur
technologique, pour ceux qui en ont les moyens; le second, public, pour les
autres. Comme aux États-Unis où plus de 30 000 000 de personnes
ne sont pas assez riches pour se payer des assurances ni assez pauvres pour
bénéficier des services publics donnés aux démunis.
Nous croyons qu'avant de jeter par-dessus bord ces grands principes, le
gouvernement du Québec doit tout faire pour rendre le système de
santé et de services sociaux le plus efficace possible et, bien
sûr, le moins coûteux possible. C'est ce que la population attend
de son gouvernement La Fédération des CLSC considère que
le système de santé tel qu'il se présente actuellement
démontre des ratés. Nous constatons chaque jour qu'il y a une
inadéquation entre, d'une part, la demande des services de santé
par la population et, d'autre part, l'offre de ces services par les organismes
et les institutions du système. Ainsi, comme vous le savez, nous
assistons à l'engorgement des salles d'urgence, nous assistons à
la pénurie des centres d'accueil, nous constatons une trop grande
institutionnalisation au Québec, notamment 50 % de plus au Québec
qu'ailleurs au Canada, et ce, malgré qu'au Québec, le
système de santé coûte 10 000 000 000 $ dont 50 % de ce
budget se retrouve dans les hôpitaux. Enfin, nous constatons surtout que
la population est insatisfaite des services.
La demande, elle, a évoluée notamment par le
vieillissement de la population, le taux élevé de chômage
chez les jeunes, l'éclatement de la famille. L'offre des services de
santé n'a pas, à notre avis, évoluée. Et de plus,
nous savons que la capacité de payer de l'État est
limitée.
La Fédération des CLSC croit qu'il est possible de
corriger la situation, et ce, sans qu'il en coûte plus cher au
gouvernement ou sans taxer davantage la population. Il faut réduire la
trop grande institutionnalisation. Il faut que cessent les luttes corporatives
et institutionnelles. Il faut corriger l'absence de
complémentarité entre les différents acteurs au sein du
système de santé. Il faut que l'accès aux services de
santé et aux services sociaux se fasse autrement que par la porte des
urgences des hôpitaux II faut donc donner à la population du
Québec un système de santé au lieu d'un système de
maladie. Dans sa réforme, le gouvernement doit rendre les services de
base, autant médicaux que sociaux, plus facilement accessibles et
organisés pour répondre adéquatement aux besoins de la
communauté locale. Le gouvernement doit privilégier le maintien
des gens dans leur milieu de vie en favorisant le développement en CLSC
d'une pratique médicale salariée et multidisciplinaire. Le
maintien à domicile est un virage nécessaire pour prévenir
la trop facile institutionnalisation des gens, pour résorber les listes
d'attente dans les centres d'accueil d'hébergement et les
hôpitaux, pour contribuer au désengorgement des urgences
d'hôpitaux.
Rappelons qu'en 1986-1987, on évaluait qu'il en coûtait en
moyenne par année par bénéficiaire 1175 $ pour des
services réguliers de santé à domicile, entre 7000 $ et
8000 $ pour des
services intensifs de santé à domicile, 25 000 $ pour
l'hébergement en centre d'accueil et 44 600 $ pour l'hébergement
en centre hospitalier de longue durée. Le maintien des personnes dans
leur milieu naturel est un moyen fondamental pour prévenir la mise en
institution. Le vieillissement accéléré de la population
québécoise, la hausse des coûts en hébergement et
finalement la capacité de payer des contribuables rendent prioritaire le
maintien à domicile dans le milieu de vie. La Fédération
des CLSC soutient que ce choix doit être fait maintenant. Les
recommandations de la Fédération des CLSC veulent influencer
tantôt l'offre, tantôt la demande. Les CLSC ne sont pas insensibles
aux problèmes auxquels le système est confronté, mais il
ne préconise pas l'adoption de la solution qui vise à produire un
plus fort volume de services dits spécialisés et surtout plus
coûteux. Dit autrement, les CLSC pensent plutôt que le
ministère doit faire une meilleure utilisation de son réseau
public de CLSC. Il doit rentabiliser l'investissement de plusieurs centaines de
millions, qu'il a fait à ce niveau afin que son réseau de CLSC
contribue davantage à réduire l'achalandage et le recours aux
services spécialisés et à prévenir la
détérioration des situations de ceux et celles qui se
défendent moins bien face à certains facteurs de risque parce que
plus vulnérables.
Les CLSC, en collaboration avec leurs partenaires, peuvent intervenir et
avoir, par les services qu'ils offrent déjà ou qu'ils pourraient
développer, un impact sur la demande de services plus lourds et plus
coûteux. Les services offerts par les CLSC sont d'abord plus
légers parce que leurs professionnels doivent, au plan de leur pratique,
continuer à faire appel le plus possible au potentiel des personnes, des
familles, des proches et des communautés. Ils doivent aussi intervenir
sur l'environnement des personnes qui constitue souvent un facteur important
dans l'éclosion des problèmes. D'ailleurs, la
Fédération des CLSC est en voie de produire des guides de
pratique plus rigoureux qui visent à réduire, à sa juste
mesure, l'implication du professionnel dans le processus de traitement de la
demande.
Dispensés de cette façon, plusieurs services offerts par
les CLSC sont, à n'en pas douter, une solution aux problèmes que
le système rencontre. Prenons l'exemple des services courants
médicaux. Il a déjà été
démontré que les consultations médicales effectuées
dans les CLSC, là où les médecins sont salariés,
comportent des diagnostics plus précis et plus justes, une diminution de
prescriptions et permettent aux utilisateurs d'être mieux informés
et de faire, par conséquent, une meilleure utilisation des ressources.
Cette raison, à elle seule, justifierait le ministère de vouloir
développer la pratique médicale dans son réseau public de
CLSC.
Les CLSC veulent accorder une place importante à la demande
médicale dans l'identification des besoins de la population de leur
territoire. Ils veulent aussi répondre à la demande du
ministère qui souhaite que la population du Québec ait
accès à des services globaux. Il est donc impérieux que le
ministère, s'il veut assurer des services de meilleure qualité et
à un coût moins élevé et s'il veut, en même
temps, diminuer l'achalandage des hôpitaux, confie aux CLSC la
responsabilité de dispenser plus de services, tels les
prélèvements, plus de consultations médicales, certaines
urgences mineures avec, si nécessaire, lits d'observation.
Nous avons parlé des services de soins à domicile et des
services médicaux courants. Ces services sont, d'ores et
déjà, présents dans les CLSC. Cependant, il faut
officialiser ces services, les dynamiser par la réforme qu'entend faire
le gouvernement. Il ne faut pas oublier également que les CLSC
dispensent des services sociaux et, ce, dans une approche globale.
Le réseau des CLSC comprend 158 établissements. En
1988-1989, 2 500 000 personnes furent desservies par ce réseau, soit 38
% de la population. Le gouvernement consacre 4,9 % de son budget global du
ministère de la Santé et des Services sociaux. La
Fédération des CLSC demande au gouvernement de bâtir sa
réforme sur ces 158 CLSC qui offrent actuellement 476 lieux
différents de services dans toutes les régions du Québec.
Mesdames et messieurs, merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Roy. Je vais maintenant
reconnaître M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Mes premiers mots seront, très certainement, pour
féliciter la Fédération pour l'excellent mémoire
qui est devant nous et je suis convaincu qu'une heure n'est pas suffisante pour
rendre justice à tout le travail qui a été fait pour
supporter votre mémoire. Malheureusement, il y a des contraintes de
temps, mais je veux vous dire que ce sera un instrument de
référence dans les jours qui viennent, puisque c'est une question
de jours après la commission quant aux décisions à
prendre, mais qui a eu, on le sent bien à la lecture, un travail
fouillé et qui vient de la base. Ça, c'est très
rafraîchissant. Je n'aurais pas toujours tenu ces propos-là face
aux CLSC...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): ...et vous pourrez constater
ma grande évolution vis-à-vis...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): ...de l'existence et de la
permanence des CLSC. Autant être franc comme je le suis d'habitude,
malgré le fait que ce ne soit pas toujours payant politiquement.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Non, je pense que,
définitivement, dans la réforme, dans mon esprit, autant je l'ai
dit jusqu'à maintenant, il y aurait des régies ou des CRSSS sur
le plan régional qui seraient un élément extrêmement
important de la réforme, je peux affirmer aujourd'hui que les CLSC vont
être la base même de cette réforme au niveau local avec tout
ce que ça comporte comme remise en question d'autres structures et de
pouvoirs additionnels à être confiés éventuellement
aux CLSC, bien sûr, toujours en étant capable de taire cette
réallocation de ressources d'abord dans un premier temps.
Je commencerais - parce que j'ai encore souvenir de ma première
rencontre avec M. Payette qui avait fait la distinction. Il avait dit: Je suis
un bénévole. Je me souviens et vous l'avez refait aujourd'hui et
ça donne d'autant plus de valeur à la démarche et au
bénévolat que vous faites, parce qu'il y a beaucoup de
bénévolat - avec votre pyramide. Ça vous a pris dix
minutes à l'inverser théoriquement. Ça prend combien de
temps pour l'inverser vraiment?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Payette: M. le ministre, j'ai utilisé le mot
"progressivement". Il faut inverser progressivement la pyramide. Je sais que
nous sommes en présence d'un système qui, je dirais, est
très structuré, qui a ses modes de fonctionnement, ses habitudes,
ses règles, ses lois, un système au sein duquel il y a bien
sûr des intérêts, des domaines protégés, mais
je pense que ce que nous attendons, c'est de se mettre sur la voie du
renversement de la pyramide. Je ne pense pas qu'on puisse le faire du jour au
lendemain. Je souhaiterais qu'au XXIe siècle, la pyramide soit
renversée pour qu'elle puisse être sur une base solide.
M. Côté (Charlesbourg): Sans ébranler les
colonnes du temple.
M. Payette: Sans ébranler... Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Avant d'entrer dans un
questionnement plus pointu sur des sujets particuliers, j'ai encore frais
à l'esprit une émission que Claude Charron a faite très
tôt après les fêtes où on mettait en situation la
problématique des urgences dans un hôpital 24 heures et la
méconnaissance que les gens avaient de l'existence du CLSC. Ils ne
savaient pas où ils étaient localisés et quels
étaient les services qu'ils offraient. Vous expliquez ça
comment9 Évidemment, on dit 158, avec quelque 450 points de
services à travers tout le territoire, c'est un très vaste
réseau un peu partout, doté de moyens financiers très
inégaux, je le comprends, quand on passe d'un per capita de 12 à
107 en termes de fourchette, ce n'est pas nécessairement des biens
nantis que vous entendez parler, c'est davantage de ceux qui n'en ont pas mais
c'est quand même tout près de 500 établissements sur le
territoire. qu'est-ce qui fait qu'il y ait une méconnaissance ou une
malconnaissance de l'existence des clsc?
M. Payette: II y a un paradoxe là-dedans, M. le ministre.
On a fait faire un sondage scientifique par une firme indépendante le
printemps dernier et, premièrement, on découvre qu'il y a quand
même 2 500 000 Québécois qui utilisent les services des
CLSC On peut penser qu'ils ne les ignorent pas, puisqu'ils les utilisent. Au
niveau de la connaissance, je pense, et Jean-Pierre pourra me corriger, que ce
sont 80 % des Québécois et des Québécoises qui
connaissent, non seulement l'existence des CLSC, mais qui connaissent les
services qui sont rendus par les CLSC. Il faut dire quand même,
peut-être pour expliquer le paradoxe, que quand on compare à un
autre sondage qui a eu lieu il y a cinq ans. il y a une croissance très
grande dans les dernières années au niveau de la connaissance et
au niveau de l'utilisation Peut être aussi que c'est parce que nous
sommes trop modestes et que nous ne nous faisons pas connaître
suffisamment Madame. (12 h 30)
Mme Vaillant (Jeanne-d'Arc): M. le ministre, je peux ajouter que
le réseau vient à peine d'être complété. Vous
avez des secteurs entiers: prenez Montréal, la région de
Québec. Il y a certaines régions comme l'Outaouais où
ça a été complété en 1975, mais le dernier
CLSC a été implanté en 1988. Donc, dans la région
de Montréal, il y avait, il y a à peine cinq ans, la
moitié des territoires qui n'étaient pas couverts par des CLSC.
Et l'autre facteur, vous le soulignez au niveau du per capita, il y a des CLSC
qui ne peuvent pas offrir toute la gamme de services, bt j'ajouterais un
dernier élément, M. le ministre. Ça dépend aussi...
Vous avez des régions, surtout en milieu rural, où le CLSC est
très connu et c'est lié aussi à un dernier facteur. C'est
lié aussi à l'accessibilité.
M. Côté (Charlesbourg): On parle beaucoup de
duplication. Pour être capable de renverser cette fameuse pyramide, il va
aussi falloir, autant que possible, éliminer les duplications. Dans
votre document, vous dites: II faut mieux définir les champs de chacun
pour être capable d'éliminer cette duplication. Et du fait que les
champs soient bien identifiés, bien clairs, on pourra davantage parler
de complémentarité.
À votre point de vue, je sais qui sera partisan, mais on se le
dit dès le départ. Alors, au point de vue des CLSC, quelle est la
duplication entre les CLSC et les CSS et quelle est la duplication entre les
CLSC et les départements de santé communautaire?
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: On aurait dû les inviter aussi!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Payette: Ils vont venir.
M. Côté (Charlesbourg): C'est pour ça que
j'ai dit: Ça va être partisan. Je le sais d'avance, mais,
évidemment, vous saurez que je poserai les mêmes questions lorsque
les deux autres groupes se présenteront.
Mme Vaillant: Nous allons également être très
francs, M. le ministre. Prenons les services sociaux. Ce que nous disons au
niveau des services sociaux... Et nous en parlons dans notre mémoire,
les services sociaux - c'est le cas dans la plupart des pays - doivent
être dispensés le plus possible au niveau local et
s'intégrer dans une approche globale. Donc, je vous dirais qu'en termes
de duplication et dans le cadre d'une réforme, on pourrait au niveau des
services sociaux, l'ensemble des services sociaux qui sont dispensés
dans les centres de services sociaux, que ce soient les services sociaux aux
enfants et à la famille ou, encore, aux adultes, aux personnes
âgées, en milieu scolaire, dans le cas de Montréal ou aux
réfugiés, l'ensemble de ces services sociaux gagneraient à
être dispensés en CLSC.
Je ferais abstraction des services sociaux, de ce qui est relié
au processus judiciaire qui est une jonction avec le Tribunal de la jeunesse
qui s'inscrit dans un contexte, dans celui de la Loi sur la protection de la
jeunesse, dans la loi des jeunes contrevenants. Donc, ça
m'apparaî-trait - avec l'expérience que j'ai un peu à ce
niveau-là - difficile d'intégrer ça au niveau local et
ça desservirait, effectivement. Mais l'ensemble des autres services, ce
sont des services qui rejoignent des clientèles, que ce soient des
adultes, des personnes âgées, enfance, famille, ce sont des
personnes qui sont au niveau local.
Donc, il pourrait y avoir une meilleure utilisation et une meilleure
articulation des services sociaux, parce qu'on sait qu'un grand nombre de
problèmes sont au niveau psychosocial. Mais je ferais abstraction de la
Loi sur la protection de la jeunesse et de la loi des jeunes contrevenants.
Maintenant, concernant les DSC, je vais laisser Suzanne...
Mme Roy (Suzanne): Concernant les DSC, là où il
peut y avoir duplication encore, c'est au niveau de la santé au travail.
Il y a encore des DSC qui dispensent directement des services dans les
entreprises alors que, effectivement, ce sont des mandats qui, dans plusieurs
autres cas, sont dispensés par les CLSC.
On trouve aussi occasionnellement des DSC qui, on ne sait par quelle
possibilité qu'ils ont financièrement, mais qui font encore des
interventions à caractère d'action communautaire. À
nouveau, ce sont des services qui sont de l'ordre des mandats des CLSC.
Toutefois, les DSC ont des mandats très importants au niveau de la
santé publique. Ces mandats doivent être protégés
comme mandats des DSC, mais tous les mandats de première ligne devraient
aller dans les CLSC. Quant aux DSC, à ce moment-là, ils
pourraient être rattachés, enfin, protégés dans leur
entité, mais rattachés aux régies régionales,
sortis des hôpitaux et rattachés aux régies
régionales.
M. Côté (Charlesbourg): Pourquoi faudrait-il les
sortir des hôpitaux? Je me fais l'avocat du diable parce que,
évidemment, commencer à recevoir des petits mémoires
où chacun veut être attaché à son hôpital,
compte tenu de la complémentarité entre les deux, il y a bien de
l'information qu'on ne peut pas éliminer du revers de la main. Mais
pourquoi, selon votre point de vue, les départements de santé
communautaire devraient-ils être rattachés à la
régie régionale, et donc dispenser peut-être même des
services par rapport aux centres hospitaliers?
Mme Vaillant: Écoutez, moi, je pense que le mandat de
santé publique est un mandat . très important. C'est un mandat
qui doit être joué à un niveau régional et je pense
qu'à ce niveau-là, il y a une rationalisation à faire. Je
ne souhaiterais pas, pour ma part, que le mandat de santé publique soit
dilué. Quand la santé publique est en cause, il faut absolument -
que ce soient des événements comme à Saint-Basile-le-Grand
ou autres - qu'il y ait une décision qui soit prise et qu'elle soit
prise rapidement pour protéger la santé de la population. Mais ce
mandat, à notre point de vue, se situe à un niveau
régional. Qu'on parle de la promotion de la santé, c'est
extrêmement important. Quand on a des objectifs de santé, à
ce moment-là, le DSC pourrait, en protégeant son mandat pour ne
pas qu'il soit avalé par le restant de l'organisation, jouer un
rôle important au niveau de la régie régionale. Lors des
enquêtes, de l'évaluation et de la recherche qui sont faites pour
mieux soutenir l'action des établissements, ça devrait être
fait de concert avec les établissements. Et il y aurait un lien plus
logique entre le mandat qu'ont les DSC et la régie régionale.
M. Côté (Charlesbourg): donc, ce que je constate
c'est, effectivement, qu'il y a des endroits où il y a duplication; on
les identifie nettement. vous nous indiquez vos couleurs.
Mme Vaillant: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Je ne peux pas
vous dire aujourd'hui si je les partage. Il faut au moins attendre de
voir l'autre côté de la médaille et on verra par la suite.
Mais il y a, effectivement, duplications et il faudra les éliminer.
Vous avez parlé de cliniques externes. Il me semble que
d'être un centre hospitalier, ce matin, je serais très heureux.
Évidemment, ce n'est pas l'amour parfait, je l'ai compris depuis un
certain nombre d'années. Vous proposez, finalement, si j'ai bien
compris, qu'H y ait au niveau des CLSC étant plus près, de
première ligne, des cliniques externes ou l'équivalent de
cliniques externes dans les CLSC. D'abord, est-ce que ce serait dans tous les
CLSC ou tous les points de services de CLSC? Et si tel est le cas, est-ce qu'il
y a maintien des cliniques externes au niveau des centres hospitaliers?
Troisième question, parce que c'est aussi assez important, j'aimerais
savoir combien, parmi les médecins qui pratiquent en CLSC, sont à
vacation, combien sont à salaire et quel serait le mode de
rémunération privilégié à ce
moment-là, parce que peut-être qu'on a tendance à croire
qu'à l'acte c'est plus vite et qu'à vacation, c'est plus lent,
plus humain? En tout cas, je mets ça entre guillemets parce qu'on
risquerait peut-être d'avoir des problèmes à prouver tout
ça.
M. Bélanger (Jean-Pierre): si vous me le permettez, m. le
ministre, à l'acte, effectivement, c'est souvent plus vite, mais c'est
aussi souvent plus fréquent.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bélanger (Jean-Pierre): Ce que je veux dire par
là, c'est la conviction...
M. Côté (Charlesbourg): Mais vous n'êtes pas
médecin, vous.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bélanger (Jean-Pierre): Je suis juste docteur, mais en
sociologie. La conviction profonde qu'on a, c'est que le fait de donner les
services médicaux sur une base salariée et en ayant facilement
accès à d'autres professionnels qui peuvent traiter des
problèmes. Parce que de plus en plus les problèmes auxquels on a
à faire face, que ce soient les problèmes de santé mentale
ou les problèmes liés au vieillissement de la population, ne sont
pas uniquement des problèmes de nature médicale. Ce sont souvent
des problèmes qui ont aussi d'autres dimensions ou des problèmes
de santé, mais qui sont la conséquence de situations sociales et
qui requièrent l'intervention d'un médecin, mais qui ne
requièrent pas que l'intervention d'un médecin, qui
requièrent aussi l'intervention d'autres professionnels. Ce dont on est
convaincu, quand on a une équipe multidisciplinaire au sein de laquelle
un médecin est présent, c'est qu'avec un mode d'intervention
comme ça, on est en mesure d'agir de façon plus efficace. Ce qui
fait que les gens ont besoin de revenir moins souvent, si on veut, voir leur
médecin.
Actuellement, grosso modo, il y a à peu près 800
médecins qui travaillent en CLSC, soit l'équivalent d'à
peu près 600 médecins à temps plein. Vous posez la
question à savoir quelle était la base de
rémunération. À 95 %, ils sont payés à
salaire. C'est un choix qui a été fait au début de
l'évolution des CLSC. C'est un choix qu'on maintient, justement pour
favoriser la pratique en équipe multidisciplinaire.
On pense qu'en permettant à tous les CLSC 6 offrir des services
médicaux salariés, on pourrait atteindre un seuil d'à peu
près 15 % de l'ensemble des services médicaux donnés par
des médecins omnipraticiens qui seraient dispensés en CLSC.
À partir de ce seuil-là, ce qu'on pense, c'est que la roue se
mettrait à rouler de plus en plus vite. Les gens auraient un choix. Ils
auraient le choix d'aller en cabinet privé de médecin où
ça va plus vite, ou aller au CLSC où, à ce
moment-là, il pourrait y avoir une médecine plus humaine. Et les
gens auraient le choix, selon le type de problème qu'ils auraient.
À partir de ce seuil, la roue tournerait de plus en plus vite. Il y
aurait un plus grand nombre de personnes chaque année qui choisirait
d'aller au CLSC plutôt qu'en cabinet privé de médecin.
M. Côté (Charlesbourg): Est ce que vous me permettez
une question? Évidemment, s'il y a 800 médecins qui pratiquent
dont 600 à temps plein, 80 % sont à salaire.
M. Bélanger (Jean-Pierre): 95 %
M. Côté (Charlesbourg): Ah, bon! 95 % à
salaire. Est-ce que vous avez fait l'inventaire assez exhaustif du nombre de
cas, de patients ou de bénéficiaires pour être capable de
voir le ratio coût par bénéficiaire, à salaire, par
rapport à ce que ça aurait été à
vacation?
M. Bélanger (Jean-Pierre): Ça n'a pas
été évalué. Ce qu'on peut vous dire, quand on fait
nos sondages, en termes de clients qui viennent au CLSC pour des services
médicaux, on a une proportion semblable de médecins en CLSC quand
on compare au restant des médecins Ce qui veut dire, grosso modo, que 7
% des médecins omnipraticiens pratiquent en CLSC, qu'on reçoit 7
% des gens qui consomment des services médicaux au cours d'une
année donnée. Donc, à ce niveau, il y a correspondance. Ce
que je peux vous dire, c'est que ça ne coûte pas plus cher, les
services médicaux en CLSC, que ça coûte en clinique
privée.
M. Côté (Charlesbourg): On me signale qu'il me reste
deux minutes. Oubliez les autres volets.
J'avais des questions sur le maintien à domicile, mais je sais
que mon collègue Chevrette qui a à peu près le même
style que moi va pouvoir continuer.
M. Chevrette: Le même style que moi! Une voix: Ha,
ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): D'ailleurs, ça
inquiète bien des gens du réseau, parce qu'il paraît que je
vais terminer ce qu'il avait commencé et qu'il n'a pas eu le temps de
finir.
Je vous ai posé la question des duplications avec les CSS et avec
les départements de santé communautaires. Est-ce que les CLSC
font des choses qu'ils ne devraient pas faire, étant donné que je
vous ai donné mes couleurs dès le départ, que vous allez
continuer d'exister et qu'on va renforcer votre rôle?
Mme Vaillant: Écoutez, on peut dire que par le
passé les CLSC ont fait un certain nombre de choses qu'ils n'auraient
pas dû faire. En fait, je pense que ce qui est important - et ça
été fait dans le rapport Brunet - c'est que les services de
santé et les services sociaux soient resserrés, que l'approche
communautaire soit également centrée. Je vais répondre
à votre question, je pense que les CLSC ne peuvent pas intervenir tous
azimuts, dans tous les dossiers, allant de l'écologie à la
pauvreté, et se substituer à toutes les ressources. Ils ne
peuvent pas se substituer à la communauté locale. Donc, dans ce
sens-là, il y a une mission qui doit être resserrée, et je
pense qu'il fut un temps où on ne savait pas exactement ce que voulait
dire la prévention. On l'actualisé plus, c'est dans la
dispensation des services et c'est par une approche. Donc, ce n'est pas juste
faire des études. Les CLSC sont très conscients de ça; en
1987, ils ont adopté le rapport Brunet et les services sont
resserrés et centrés sur la population.
Le Président (M. Joly): Merci, oui, c'est terminé,
M. le ministre. M. Roy, vous voulez ajouter quelque chose?
M. Roy: Oui, un commentaire à cette question-là.
(12 h 45)
Le Président (M. Joly): Parce que c'est sur le temps de M.
Chevrette.
M. Roy: Oui, ça va être très rapide, M.
Chevrette. J'ai eu l'occasion d'être président d'un conseil
d'administration de CLSC, dans la vague de ce qu'on appelle la deuxième
fondation des CLSC, j'entends par là le parachèvement du
réseau. Et je vous dirais ceci: J'ai constaté qu'il y a eu une
évolution dans les CLSC, et je parle en tant que bénévole,
personne de l'extérieur. Je ne travaille pas, je ne vis pas dans le
système.
Et un des faits marquants - et je termine sur ça pour ne pas
prendre trop de temps - c'est qu'il y a quelques mois, il y a peut-être
même six mois, les CLSC se sont donné un système
d'accréditation; eux-mêmes se sont dit, nous allons nous
créer, via la Fédération des CLSC, un système
d'accréditation pour être certains que ce qu'on va faire, c'est ce
qu'on doit faire. Je pense que c'est significatif de cette
évolution.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Roy. Je vais maintenant
reconnaître le député de Joliette et leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je
voudrais saluer Mme Vaillant et lui dire que, par ses réponses, elle est
en train d'amener le ministre à un deuxième et à un
troisième cadre de partage.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Après en avoir vécu un avec le
prédécesseur du ministre, c'est un peu ça, à toutes
fins pratiques. Il me semble que ça aurait été plus simple
que vous suggériez le transfert total des responsabilités,
c'eût été plus simple à appliquer, comme cadre.
Blague à part, je voudrais vous féliciter, moi aussi, pour la
qualité du mémoire. L'interprétation que je fais de votre
mémoire est la suivante: Donnez-nous donc la chance, à même
une réallocation des ressources, et non pas à même
d'ajouts, de réaliser ce que vous pensiez qu'on devait faire en 1970.
C'est à peu près le résumé que je peux faire de
votre mémoire. J'espère que j'ai bien compris. Si ce n'est p9S
ça, vous me le direz.
M. Payette: C'est en plein ça.
M. Chevrette: Donc, je peux faire partie du monde ordinaire moi
aussi? Ce que je voudrais vous poser comme question directe, c'est: Quel type
de réallocation voyez-vous dans l'immédiat pour commencer
à faire pencher la tour de Pise?
Mme Vaillant: Écoutez, moi, là-dessus, je pense que
si on veut inverser la pyramide, il faut d'abord que dans les budgets de
développement... Je vais prendre le budget d'alourdissement de la
clientèle. Le budget d'alourdissement de la clientèle qui est de
25 000 000 $ et qui a été envoyé dans le réseau,
ça s'est soldé par 70 % dans les centres d'accueil, 30 % pour le
maintien à domicile. Je pense qu'au niveau du développement, au
niveau de l'argent neuf qui est injecté, il faut qu'il y ait une
priorisation pour faire en sorte que la première ligne se fasse. Le
deuxième élément: À partir du moment où on
organise la première ligne, qu'on maintient le plus à domicile,
qu'on désengorge les urgences et qu'on est en
complémentarité, ce qu'il faut éviter - et on a eu le cas
dans les hôpitaux psychiatriques
avec Louis-Hippolyte-Lafontaine et Robert-Gif-fard - c'est qu'on va
libérer des lits, on va finalement libérer des sommes d'argent
mais elles ne sont pas réallouées. Ça donne à
l'autre réseau des marges de manoeuvre additionnelles, ce qui fait que
la première ligne à ce moment-là est comme
étouffée. Ce dont il faut s'assurer, c'est que pour l'inversion
de la pyramide, si on prend des mesures pour désengorger les urgences,
libérer des lits, désinstitutionnaliser ou prévenir
l'institutionnalisation, il va falloir avoir une méthodologie pour faire
en sorte que la réallocation de ressources se fasse parce qu'autrement,
ça ne mène nulle part. Et ça, ce sont des interfaces. Je
vais vous donner juste un petit exemple, toutes proportions gardées, si
on regarde l'ajout. Prenons les CHCD. Il y avait à peu près 3 700
000 000 $ en 1984-1985. Ils sont à 5 000 000 000 $. C'est 1 300 000 000
$. C'est deux fois et demie le budget des CLSC. Dans les urgences, M. le
ministre annonçait les sommes qui ont été investies les
quatre dernières années et on pourrait remonter. Il y en a eu
aussi d'investies depuis les années quatre-vingt. Ces 500 000 000 $, si
on en avait pris 100 000 000 $ pour le mettre dans le maintien à
domicile parce qu'on sait que la clientèle des urgences, il y a une
clientèle qui est composée de personnes âgées et les
lits en CHCD, il y en a un bon pourcentage qui sont pour les personnes
âgées. Donc, nous, ce qu'on dit, c'est qu'on est prêts
à vivre la réallocation de ressources. Les CLSC ont
été développés comme ça C'est la seule
catégorie d'établissement qui a été
développée de cette façon-là. Donc, on dit:
Attention. Oui, on va travailler pour désengorger. On va jouer
pleinement notre rôle. Mais il faut que le ministère s'assure, par
une méthodologie avec la régie régionale, que l'argent qui
est libéré va revenir.
M. Chevrette: O.K. Mme Vaillant ou M. Payette, je vais me
permettre un commentaire. On s'en va vers une décentralisation, du moins
au niveau du discours, on le verra au niveau du projet, mais au niveau du
discours, on dit qu'il y aura une décentralisation certaine. Je vais
prendre exactement l'exemple que vous avez donné: l'alourdissement des
clientèles. Dans le cas de l'Estrie, par exemple, le partage n'a pas
été de 70 %-30 %, si mes informations sont bonnes.
Mme Vaillant: C'est exact
M. Chevrette: II y a eu une concertation du milieu et on a
décidé de donner beaucoup plus aux CLSC pour l'alourdissement
qu'aux centres d'accueil, contrairement à certains endroits du
Québec où ça a été le contraire, 80 %-20 %,
à certains endroits, si bien qu'au niveau du Québec, on se
retrouve à 70 %-30 %.
Dans le cas où on s'en va vers une politique de
décentralisation puis et qu'on permet la concertation, comment
voyez-vous pouvoir se réaliser un peu les orientations que vous dites,
quand vous laissez au milieu... Ça, c'est un premier aspect.
Le deuxième, moi, je trouve ça intéressant que vous
parliez du rôle fondamental que le CLSC peut jouer au niveau local, sa
mission première, la réallocation des ressources, tout le kit,
mais je veux vous poser une question. Qu'est-ce que vous êtes prêts
à faire comme structure pour essayer de changer les mentalités?
Parce que, à la base de tout le système de santé, à
moins que je ne me trompe, l'expérience que j'ai vécue, il faut
d'abord sortir l'idée de dépendance de l'individu
vis-à-vis de l'institution et aussi "démédicaliser" -
c'est une façon de s'exprimer - l'approche santé et services
sociaux. Qu'est-ce que vous êtes prêts à faire comme
structure pour, par exemple, contrer le discours - je vais le nommer, moi -
d'Augustin Roy qui, pour lui, son groupe ne se trompe jamais et tous les autres
sont dans les carottes? Qu'est-ce que vous êtes prêts à
faire comme structure pour préparer la population à des
changements aussi importants et qui sont à la base même d'une
réforme? Parce que, si on ne réussit pas à changer les
mentalités, vous savez très bien qu'on peut rendre
pathétique toute situation, et en santé en particulier, et que
les lobbies sont extrêmement puissants. On peut faire trembler un Conseil
des ministres par une menace, par n'importe quoi.
Qu'est-ce que vous êtes prêts à faire, vous autres
qui êtes proches du citoyen, là?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: C'est vrai!
M. Côté (Charlesbourg): Moins, un peu..
M. Chevrette: Peut-être pas le ministre de la Santé,
parce qu'il est fort.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: II n'a peur de rien. Il l'a dit à la TV,
l'autre soir, je l'ai vu. Mais, cela dit, il y en a qui sont plus peureux les
uns que les autres, c'est majoritairement que ça décide Donc,
qu'est-ce que vous êtes prêts à faire...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Qu'est-ce que vous êtes prêts à
faire concrètement pour préparer ce changement de
mentalité?
M. Payette: On a déjà commencé, M.
Chevrette, mais je vais laisser Mme Roy continuer parce qu'il y a une
expérience dans votre région qui illustre bien ce qu'on peut
faire et ce qu'on a commencé à faire pour changer les
mentalités. Mme Roy.
Mme Roy: Dans le cadre du désengorgement des urgences dans
les régions, les treize CLSC se sont mis ensemble et ont mis en place un
système qu'on appelle le 24-7. Le système a au moins deux gros
volets. L'un d'eux, c'est une centrale d'écoute
téléphonique où les treize CLSC sont branchés sur
un premier CLSC, le CLSC de Sainte-Thérèse. Donc, 24 heures par
jour, 7 jours par semaine, toute personne qui est sortie de l'hôpital et
qui, pour différentes raisons, nécessite un contact plus direct
avec le réseau peut téléphoner à cette centrale et
immédiatement avoir les services d'une infirmière
compétente qui va soit réagir à des demandes de services
directs ou encore qui va répondre à des problèmes
d'anxiété ou des choses comme ça. Donc, ce service
d'écoute téléphonique a couvert, l'année
dernière, plusieurs personnes et on a constaté que si ces
personnes n'avaient pas été rejointes ou n'avaient pas pu
rejoindre la centrale téléphonique - la plupart avait
au-delà de 75 ans - au moins 60 % de ces personnes se seraient
retrouvées dans les hôpitaux. Ça, c'est un des volets
où on a commencé à faire des choses.
Le deuxième, c'est ce qu'on appelle le SIMAD, le service intensif
de maintien à domicile, où, à nouveau dans notre
région, il y a 700 personnes qui ont été rejointes et on
constate, quand on regarde le profil de la clientèle, que 75 % d'entre
elles, c'est-à-dire 40 % d'entre elles avaient plus de 75 ans et qu'un
autre 34 % étaient des malades en attente de placement.
Donc, si on regarde l'efficacité des mesures de ce service, on
constate qu'il y en a 53 % qui ont retrouvé une capacité
fonctionnelle. N'eût été de ce service, elles seraient
retournées dans les hôpitaux. Alors, à votre question,
qu'est-ce qu'on peut faire et qu'est-ce qu'on fait actuellement pour modifier
le profil de consommation? Ce sont là les exemples qui se font.
M. Chevrette: Au-delà de quelques expériences qui
se font, actuellement, dans le cadre actuel budgétaire dans lequel vous
oeuvrez, il y a un manque de ressources. C'est évident, au niveau des
CLSC, tout le monde en convient, là-dessus on ne se chicane pas. On sait
que la phase de consolidation n'a jamais été faite. Qu'est-ce que
vous voulez? On a préféré y aller graduellement en
implantant, sur une période d'ailleurs passablement longue. On a
finalisé un réseau mais il n'est pas consolidé, si bien
qu'il y avait même des disparités entre les services qu'on donne
d'un CLSC à un autre. Ce qui explique, d'ailleurs, la
méconnaissance que Charron, moi, je l'ai interprété de
même... À Montréal, ils ont été les derniers,
puis ils sont habitués à avoir des urgences qui débordent.
En province, ce n'est pas la même chose, j'ai compris que les
Montréalais là-dessus ne pouvaient pas s'apparenter au reste du
Québec, effectivement, mais ça peut fausser les chiffres d'un
sondage.
Cela dit, je pense que, au-delà même des expériences
que vous tentez, il va falloir que vous provoquiez vous aussi le débat,
que vous le souteniez. Ce n'est pas vrai que ça doit partir
exclusivement du politique. Parce qu'on aurait beau, comme Parlement, à
mon point de vue, comme législateurs, lancer la plus belle
opération d'une réforme, si on n'a pas sensibilisé...
C'est ce que je reproche personnellement à la commission Rochon, pour
votre information. Je reproche à Rochon, personnellement, de ne pas
avoir profité des audiences publiques pour donner les aberrations du
système et sensibiliser la population, l'amener à penser
changements. On a préféré étudier, c'est le seul
reproche, grand reproche, que j'ai à faire à la commission
Rochon, qui a fait des études merveilleuses. Mais, à mon point de
vue, elle aurait dû sensibiliser sur les aberrations du système,
de sorte que la population aurait été très
réceptive à des changements radicaux et en profondeur.
Là-dessus, je m'arrête parce que j'aurais le goût de vous
faire un bon discours. Mon collège veut questionner, je
m'arrête.
M. Trudel: C'était beau, mon collègue.
M. Chevrette: J'étais bien parti, laisse-moi faire.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député.
Je vais maintenant reconnaître M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Merci, M. le Président. D'abord, essayer de
valider une statistique qui est apparue dans le décor depuis que l'on
travaille sur cet avant-projet de loi. Ici, au Québec, on hospitalise 50
% de plus qu'ailleurs au Canada ou dans la plupart des autres pays
industrialisés. Est-ce que vous avez déjà travaillé
là-dessus?
Mme Vaillant: On institutionnalise, c'est dans les centres
d'accueil d'hébergement, c'est la clientèle des personnes
âgées. Effectivement, le taux d'institutionnalisation est autour
de 7,2 %. Il y a quelques années, il était à 8 % et, dans
plusieurs pays occidentaux, il est à 4 % ou à 5 %, ce taux
d'institutionnalisation. Au ministère, on a parlé d'une norme,
l'objectif qui a déjà été visé,
c'était de ramener le taux d'institutionnalisation à 6 %. Et au
niveau du placement d'enfants, il y a des données très solides
là-dessus. Le Québec a un taux de placement d'enfants deux fois
plus élevé qu'en Ontario et là-dessus, il y a
également des données très très solides. Au niveau
de l'institutionnalisation, on a un pattern d'institutionnalisation et il est
plus élevé qu'ailleurs.
M. Trudel: Et compte tenu des coûts qui sont
impliqués, c'est là que se crée d'abord la
problématique financière, le support au réseau, de
l'organisation des systèmes de la santé et des services
sociaux.
Mme Vaillant: C'est sûr. Il y a différentes
études, je ne les ai pas apportées qui ont été
faites. Il y a eu une politique sur les personnes âgées qui a
été élaborée et qui est sortie en 1985 et les
analyses qui avaient été faites à l'époque
démontraient que si... Voyez-vous, nous sommes à 10 % au niveau
du viellissement, il y a 700 000 personnes âgées, et en l'an 2000,
on va être à 12 %. Donc, si on maintient notre taux
d'institutionnalistion, prenez juste aujourd'hui, prenez 2 %, c'est 10 000
personnes de plus et on sait que, à partir du moment où une
personne âgée est en institution, après six mois, un an,
son milieu de vie est défait, on ne peut pas la retourner chez elle et
ce sont des sommes récurrentes. Et ajouter à ça l'autre
facteur qui est l'immobilisation, tout ce que ça coûte en termes
d'immobilisation. Donc, si on fait une projection de coûts, il est
évident que, si on ne change pas notre façon de faire, en l'an
2000 ce n'est pas 10 000 000 000 $ que ça va coûter, ça va
être 20 000 000 000 $. Et pour parer à ça -
échelonné sur une douzaine d'anges, d'après une projection
qui a été faite à partir de la politique sur les personnes
âgées - ça prendrait autour de 176 000 000 $ qu'il faudrait
injecter dans le maintien à domicile, d'ici l'an 2000, pour
éviter l'institutionnalisation. Et en faisant ça, on
épargne des centaines de millions en alourdissement, en CAH et en
institutionnel.
M. Trudel: Et là-dessus, le problème ou la
situation problématique commence à la porte d'entrée.
Mme Vaillant: Oui.
M. Trudel: Par quelle porte on entre? Est-ce qu'on entre par la
porte de l'urgence de l'institution hospitalière - et, là, comme
disait mon collègue, on s'embarque dans la filière
médicale - ou on peut entrer par une autre porte? Est-ce que de
façon réaliste vous pensez que, effectivement, au Québec,
on puisse, au niveau des soins à recevoir, en arriver à entrer
par une autre porte dans le système que l'urgence de
l'hôpital?
M. Bélanger (Jean-Pierre): Je dirais, là dessus,
qu'il y a déjà 37 % des Québécois à chaque
année qui rentrent par le CLSC. Et on ne prétend pas avoir un
monopole sur ce qu'on appelle la première porte, entre guillemets. Mais
ce qu'on sait, c'est que pour des problèmes de type liés au
vieillissement de la population, aux problèmes de santé mentale,
aux problèmes qui n'ont pas strictement de dimension médicale.
c'est qu'on est une porte d'entrée qui est efficace et ça, on est
en mesure d'en faire la preuve avec les programmes qu'on a
développés Ils ne sont pas encore suffisamment connus, mais c'est
une preuve qu'on est en train de faire de plus en plus à chaque
année Et simplement au rythme actuel, il n'est pas impensable que d'ici
quatre ou cinq ans, ce soit pas mal plus que la moitié de la population
du Québec qui fasse affaire avec son CLSC à chaque
année.
Mme Vaillant: Là-dessus, je voudrais ajouter ceci. C'est
que je pense qu'au niveau des services de base médico-sociaux, urgence
mineure, 24-7, les CLSC devraient constituer la base du système,
c'est-à-dire qu'on devrait d'abord avoir accès aux services du
CLSC Ils devraient être connus et ça devrait être la
référence. Et les ressources plus lourdes, que ce soit l'urgence,
que ce soit l'hospitalisation ou l'institutionnalisation, c'est du
spécialisé, c'est à un autre niveau. Je pense qu'en
faisant ça, on épargnerait beaucoup de coûts et ça
permettrait aussi au citoyen de se retrouver quelque part, de se retrouver dans
le système. Il sait où est son CLSC et il pourrait, à ce
moment-là, y référer.
Le Président (M. Joly): Dernière question, s'il
vous plaft, brièvement.
M. Trudel: Est-ce que vous pensez, finale ment, que le
ministère pour ne pas dire le ministre, que la planification de la
dispensation des soins de santé et des services sociaux au Québec
peut venir à bout du corporatisme, du rouleau compresseur des
établissements de santé pour en arriver à inverser cette
pyramide? Par quelle clé faut-il passer pour en arriver à
enclencher ce renversement et ne plus céder au terrorisme?
Mme Vaillant: Là dessus, nous sommes fondamentalement
convaincus que c'est une volonté politique, c'est la décision
d'un gouvernement. On est en démocratie. Et, là-dessus, je vous
dirais, au-delà du fait que nous sommes la Fédération des
CLSC, que, comme citoyens du Québec, nous n'avons pas le choix. C'est le
bon sens. C'est le sens commun. Nous n'avons pas le choix. Et, à ce
titre-là, il y a des conseils d'administration qui sont formés de
citoyens. Il y en avait 450 lors de notre assemblée
générale et eux vont parler et vont s'exprimer. Nous n'avons pas
le choix.
M. Payette: Réponse brève à M.
Bérubé. Le Président (M. Joly): Oui. Une voix:
M. Trudel.
M. Payette: M. Trudel, excusez. C'est, je pense, en donnant plus
de pouvoirs aux usagers,
aux citoyens qui participent dans des différents processus
décisionnels. je pense que ce serait une voie qui permettrait de pouvoir
faire un meilleur équilibre entre les différents pouvoirs.
M. Trudel: Merci. M. Payette: Merci.
Le Président (M. Joly): Merci bien. Au nom des membres de
cette commission, je tiens à remercier les représentants de la
Fédération des CLSC du Québec. Merci. Nous allons
suspendre jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 6)
(Reprise à 15 h 10)
Association des cadres intermédiaires des
affaires sociales
Le Président (M. Joly): Je vois que, déjà,
les membres de, l'Association des cadres intermédiaires des affaires
sociales ont pris place. Alors, j'apprécierais si la personne
responsable pouvait s'identifier et aussi identifier les gens qui
l'accompagnent, s'il vous plaît!
M. Lessard (Jacques): M. le ministre, M. le président de
la commission, mesdames et messieurs membres de la commission, mon nom est
Jacques Lessard. Je suis président de l'Association des cadres
intermédiaires et je vais vous présenter les gens qui
m'accompagnent. Tout d'abord, à ma gauche, M. Jasmin Bilodeau, qui est
notre vice-président de la région du Saguenay, et, à ma
droite, M. Laurian Lefrançois, qui est notre directeur
général.
Le Président (M. Joly): Bonjour. Bienvenue à cette
commission. Vous connaissez un peu la procédure. Vous avez une vingtaine
de minutes pour nous exposer votre mémoire et, par après, autnnl
du côté ministériol que du côté de
l'Opposition, on se réservera le plaisir, le loisir de vous poser les
questions d'usage. M. Lessard.
Une voix: Et hors d'usage.
Le Président (M. Joly): Et hors d'usage,
occasionnellement. Ha, ha!
M. Lessard: Comme nous vous l'avons indiqué dans le
mémoire que nous vous avons fait parvenir en janvier, notre association
est formée de cadres de niveau intermédiaire à l'emploi
des établissements du réseau de la santé et des services
sociaux qui se sont regroupés en vue de promouvoir et de défendre
leurs intérêts socio-économiques.
Nous nous présentons donc devant vous aujourd'hui en tant que
représentants de 6800 cadres intermédiaires du réseau
soucieux de leurs conditions de travail et de l'impact que pourraient avoir sur
leur carrière, leurs conditions de travail et la sécurité
de leurs emplois, certaines dispositions législatives contenues dans
l'avant-projet de loi.
Nous n'avons pas sollicité de mandat autre auprès de nos
membres et si nous devions, dans le feu de la discussion, dépasser le
champ des relations du travail, nous ne parlerions qu'en notre nom personnel.
Par contre, nous avons effectué deux tournées en région
dans la dernière année et nos propos seront ceux des cadres
intermédiaires du réseau quand il sera question des relations du
travail. Ainsi, nous sommes particulièrement à l'aise de dire que
les cadres intermédiaires que nous représentons jugent être
traités avec considérablement moins d'égard que ne le sont
les autres employés de l'État, syndiqués et cadres. Ils
fondent, en conséquence, beaucoup d'espoir sur l'ouverture
créée par l'article 352 et surtout sur l'ouverture d'esprit du
ministre à s'en prévaloir pour corriger les iniquités dont
ils font l'objet.
En effet, sous prétexte qu'ils font partie de la direction,
qu'ils représentent l'employeur auprès des employés
d'exécution et parce que c'est sur eux que l'employeur se complaît
à se rabattre en tout temps, surtout dans les périodes
difficiles, parce que ce sont les employés les plus
dévoués à la poursuite des objectifs de nos
établissements et organismes, le ministère de la Santé et
des Services sociaux et les associations d'employeurs n'ont jusqu'à
maintenant pas cru bon de faire le nécessaire pour que le gouvernement
leur accorde les conditions d'emploi qu'il a accordées d'emblée
aux cadres des autres réseaux et dont il a convenu avec les centrales
syndicales pour les employés d'exécution de tous les secteurs,
incluant ceux de notre réseau.
Le monologuiste Yvon Deschamps, dans son annonce publicitaire sur le
port de la ceinture de sécurité, avait une phrase qui
décrivait bien ce que les cadres du réseau ressentent comme
message de la part des décideurs de leurs conditions de travail. Cette
phrase est la suivante: Je t'attache parce que je t'aime.
Une voix: Cela dépend...
M. Lessard: Ha, ha, ha! Espérons que l'article 352
permettra au ministre de mettre un terme à cet excès d'amour qui
a trop duré, quant à nous.
Le projet de loi prévoit des changements considérables de
structure, des déplacements importants de niveaux de décision.
L'implantation de toutes ces nouveautés créera sans doute des
remous violents susceptibles de perturber la dispensation quotidienne des
services dont les cadres intermédiaires de nos établissements
sont responsables au nom de leurs employeurs.
II sera donc très important que leur collaboration entière
soit acquise durant toutes les phases de changement qui prendront place.
L'incurie du réseau à leur égard en matière de
formation, de perfectionnement, d'accessibilité de moyens pour le
maintien à jour de leurs connaissances tant professionnelles
qu'administratives, le peu de souci pour leurs conditions d'emploi, bref
l'absence flagrante de considération du réseau en contrepartie de
l'allégeance indéfectible qu'il exige d'eux ne sont
sûrement pas des atouts pour le réseau dans le contexte des
changements à venir.
Les cadres intermédiaires sont les bougies d'allumage du
fonctionnement journalier de nos établissements. Ce sont, entre autres,
des motivateurs. Et l'on sait combien la motivation est importante pour le
succès de toute entreprise. Le moins qu'on pourrait faire pour assurer
que les changements s'opèrent sans heurts et que les services ne se
détériorent pas durant la période de transition et
d'adaptation serait de faire en sorte qu'on traite les motivateurs de telle
façon qu'ils soient d'abord eux-mêmes motivés. Ils sont
incapables de transmettre à d'autres autre chose que ce qu'on leur aura
donné à transmettre.
Nous tenons évidemment pour acquis que vous êtes tous
parfaitement familiers avec la teneur de notre mémoire. Nous vous ferons
donc grâce d'en reprendre maintenant tout le contenu, à moins que
vous n'en exprimiez le désir. Nous sommes à votre entière
disposition pour en discuter et pour répondre, si possible, à
toutes les questions que vous voudriez nous adresser.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Lessard Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux
M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup. Dans un
premier temps, pour bien nous situer, 6800 cadres intermédiaires, c'est
passablement de monde. Ça se ventile comment? Excusez mon ignorance, je
suis un petit nouveau, j'arrive au ministère.
M. Lefrançois (Laurian): II y a évidemment, M. le
ministre, plus de cadres intermédiaires que ceux qui sont membres chez
nous, mais 6800 représentent les cadres qui sont membres chez nous
à l'heure actuelle. Ça se répartit, au niveau des types
d'emploi, à peu près dans tous les secteurs d'activité. Ce
sont des infirmières-chefs, des chefs-techniciens de radiologie, des
tech-nologistes médicaux, etc., les cadres aussi dans les divers
services auxiliaires, financiers, de personnel. Les seuls qui ne sont pas aussi
bien représentés que d'autres groupes, à
l'intérieur de notre Association, sont les cadres des services sociaux.
Pour le reste, nous sommes présents dans toutes les sphères
d'activité et dans tous les établissements ou presque.
M. Côté (Charlesbourg): Dans le résume qu'on
m'a fait de votre mémoire, il y a des bouts très forts; autant y
aller dès maintenant sur le plan de la reconnaissance. On est ici pour
aborder les vrais problèmes et ne pas tenter de se conter de peurs, mais
de se dire la vérité. Donc, on va peut-être finir par
s'attacher et ça va être mutuellement vrai. Donc, on va
s'aimer.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Pas de passe-droit à l'Assemblée
nationale.
M. Côté (Charlesbourg): On parlait presque de
négligence du MSSS envers ses cadres en matière de
développement professionnel, dans la définition des conditions de
travail, de la stabilité d'emploi, ce qui en résulte une
crédibilité de la part du ministère pas très grande
vis-à-vis des cadres intermédiaires. Donc, ce que vous nous
dites, c'est qu'historiquement - j'imagine que ce n'est pas depuis mon
arrivée - il y a, à ce niveau, un désintéressement
quant à la formation des gens que vous représentez et vous ne
vous sentez pas appuyés et vous ne vous sentez pas respectés. Je
comprends que c'est ça. J'aimerais en entendre un petit peu plus. Comme
je suis un gars qui a aussi enseigné l'histoire pendant quelques
années, et que ma formation est d'abord celle d'un historien, juste pour
ma culture personnelle, sachant que l'histoire, c'est très important sur
le plan des données pour être capable de bien analyser et tenter
d'éviter des erreurs dans le futur, j'aimerais vous entendre un petit
peu plus là-dessus, de manière plus précise.
M. Lefrançois: Dans ce cas là, je pense que la
façon la plus facile serait de le décortiquer par les
éléments que vous avez soulevés. D'abord, en
matière de formation, de perfectionnement, de développement en
général, je pense que c'est facile de constater que le
réseau a été très faible. Le mot
"négligence", je ne pense pas qu'il soit exagéré, en
l'occurrence, quand on sait, par exemple, que le même gouvernement dans
le fond, qui alloue des montants dans les divers secteurs a cru bon, par
exemple, d'investir dans l'éducation 250 $ par tête de cadre,
alors que, dans la fonction publique, il a jugé que c'était
encore plus important et il a investi annuellement 300 $. et ça,
historiquement, dans les dernières années. Et dans notre
réseau, directement du ministère, ça représentait
23 $. mais avec les contributions des établissements, dans certains cas,
ça peut avoir monté a une moyenne d'environ 42, 50 $ par
année, qui sont investis par tête de cadre pour la formation et le
développement et, évidemment, le maintien à jour des
connaissances. C'est donc...
M. Côté (Charlesbourg): ce que je corn prends, c'est
que c'est surtout lorsque vous vous comparez à d'autres secteurs du
gouvernement. ne nous en donnez pas plus qu'ailleurs, mais au moins
traitez-nous comme les autres secteurs du gouvernement traitent leurs cadres
intermédiaires.
M. Lefrançois: Oui, mais le malheur que ressentent les
cadres n'est pas exclusivement en vertu de la comparaison qui se fait ailleurs.
C'est vraiment leurs besoins à eux qu'ils sentent
négligés. Vous savez, le scénario habituel qu'on a connu
dans le réseau, et il faudrait retourner un petit peu plus loin,
ça prendrait plus de temps qu'on n'en a probablement, mais vous savez
d'où vient le réseau, comment il a été bâti,
et il a conservé au moment de sa mise en marche des acquis qui... Il y a
eu un héritage qui lui est arrivé par les établissements
qui étaient déjà en place, et le mode de recrutement, le
type de personnel qu'on recrutait, à ce moment-là, était
peut-être différent. Sans vouloir minimiser, je pense que ces
gens-là y ont mis tout leur coeur et ils ont très bien fait, mais
les critères qu'on avait dans ce temps-là n'étaient pas
les mêmes - d'ailleurs, pas plus au niveau de la santé que dans le
resto de la société C'était grandement différent.
Le moins qu'on aurait pu penser, c'est que ce réseau-là, qui est
en constante évolution, je dirais en ebullition, quasiment, du point de
vue technologique, sous tous les rapports, n'a pas cru bon de faciliter pour
son personnel-cadre le maintien à jour des connaissances ou encore des
percées dans les nouvelles techniques. Ça a été
vraiment très minime ce qu'il a investi là. Et ce qu'on a
vécu dans les dernières années, c'est que plusieurs cadres
se font dire: Bien, je regrette, tu étais bien correct quand tu as
été engagé, quand tu as été promu cadre,
mais aujourd'hui, bien, tu es dépassé. Et on prend tous les
moyens pour s'assurer qu'on va le remplacer. Alors, ce qu'on a institué,
ce sont des mesures de stabilité d'emploi, dont on pourra parler tout
à l'heure, mais qui, à toutes fins pratiques, ne rendent pas
justice à des gens qui, par rapport à la longévité
qu'ils ont dans le réseau, le peu de ressources qui ont
été consenties pour les aider à se maintenir à jour
dans leurs connaissances... Parce que vous savez, ce qui est vécu, ce
n'est pas nécessairement qu'on va manquer de fonds, ce ne serait pas la
seule raison, mais le cadre qui voudrait avoir quatre jours, par exemple, pour
aller suivre un cours de perfectionnement, plus souvent qu'autrement, il se
fait dire: Bien, tu ne peux pas y aller, on a bien trop besoin de toi. C'est
ça, là.
M. Côté (Charlesbourg): On va tenter de fouiller un
petit peu plus loin parce qu'il y a deux points dans le... Pas seulement deux,
mais je vais en prendre deux en particulier, compte tenu de l'importance du
sujet, on va tenter de les fouiller davantage. Parce que dans le mémoire
il est dit quelque part "désintéressement du MSSS
vis-à-vis des cadres de son réseau, politiques qui ont
poussé certains employeurs locaux à faire vivre à leurs
cadres des conditions qui seraient jugées inacceptables dans la plupart
des milieux de travail." C'est ça que vous évoquiez,
tantôt?
M. Lefrançois: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Sur le plan de la formation
et du...
M. Lefrançois: Et sur le plan aussi des méthodes
administratives pour remplacer les gens, et quand je parle...
M. Côté (Charlesbourg): Une petite réforme
administrative, là.
M. Lefrançois: Oui, bien...
M. Côté (Charlesbourg): Une petite réforme
administrative, à ce qu'on comprend, en règle
générale. Je ne t'aime pas la face, je te fais une
réforme.
M. Lefrançois: Oui, des réorganisations, des trucs
comme ça, parce qu'on n'a pas vraiment de données suffisantes
pour justifier un congédiement. Les mesures de stabilité d'emploi
étant là, bien, c'est une porte qui permet quand même
d'atteindre des fins. Il y en a qui le font par maladresse, mais
d'autres, ce sont des qualités moins grandes.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends. M.
Lefrançois: Par caprice, des fois, aussi.
M. Côté (Charlesbourg): C'est parce qu'on a un
système qui n'est pas tout à fait correct. Quand tu demandes au
ministère de payer à 100 % les deux ans, tu peux te permettre, au
niveau des administrations locales d'établissement, de faire une
réforme sur le plan administratif s'il y a quelqu'un dont tu n'aimes pas
la face. Évidemment, ça coûte 12 000 000 $ par année
au gouvernement, ça. Je serais peut-être prêt à
penser que ces 12 000 000 $, on pourrait en prendre une bonne partie pour
former notre monde un peu plus, avec le même argent. Il y a des messages
qui ont été envoyés au réseau, il n'y a pas
tellement longtemps. Je ne sais pas si vous avez vu circuler les lettres, mais
ça m'a frappé quand je suis arrivé. Je trouvais que
c'était passablement d'argent uniquement pour faire des réformes
administratives. Parce que ça peut arriver, des bonnes réformes
administratives.
M. Lefrançois: C'est exact.
M. Côté (Charlesbourg): Et ça peut arriver
aussi qu'il y ait des gens en poste qui n'ont, pas tout ce qu'il faut pour
être capables d'occuper le poste et qui rVont pas effectivement
évolué. Mais il faut au moins donner la chance à notre
monde de suivre la formation qu'il faut. Je pense qu'avec la même source,
le même argent, on est capables d'en mettre davantage sur la formation au
niveau des cadres intermédiaires et même Supérieurs et
ça, ça pourrait être intéressant. C'est pour
ça que je voulais vous, le faire préciser. Mais ce que j'ai
compris, ce n'est pas fait de manière égale partout. Vous dites
bien: "qui ont poussé certains employeurs locaux - certains employeurs
focaux, donc, pas tous. - à faire vivre à leurs cadres des
conditions qui seraient jugées inacceptables dans la plupart des milieux
de travail. " Donc, ce n'est pas partout. Est-ce qu'on généralise
ou si ce n'est pas partout?
M. Lefrançois: Non. Il ne faudrait surtout pas
généraliser parce qu'on ne classerait pas quand même le
nombre d'employeurs, je n'utiliserai pas de qualificatif, autres que ceux qui
seraient visés là-dedans. Ce n'est pas vraiment la
majorité, c'est clair. Ce sont des gens marginaux. Mais pour nous,
lorsque tu lances, un taureau dans une arène avec des gens
vulnérables en avant, peu importe le nombre de taureaux; c'est le nombre
de gens qui se font enfourcher qui compte. Et, quand il y en a un, il y en a
déjà un de trop. Ça, c'est notre point de vue à
nous.
M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends, c'est
que c'est une situation, mais qui n'est pas généralisée,
qui est quand même présente dans le réseau et ça,
ça...
M. Lefrançois: Qui est présente, oui, mais pas
généralisée.
M. Côté (Charlesbourg): lorsque les mandats de d. g.
sont abordés, deux mandats de quatre ans, vous sernbfez avoir beaucoup
de réticences vis-à-vis de ces mandats-là. j'aimerais
peut-être vous lire mon petit résumé pour qu'on se
comprenne bien: "cette nouvelle. orientation amènerait possiblement des
défis différents et nouveaux pour les d. g. cependant, un nouveau
directeur général amène des changements de vision, de
méthodes de travail, de relations interpersonnelles, la remise en cause
de leur, utilité pu celle de leur poste au sein de
l'établissement. cette approche pourrait s'avérer
intéressante pour les personnes en fin de carrière. " bon,
ça, ça veut dire que c'est une pratique qui serait bonne pour
dire à quelqu'un qu'il lui manque quelques années avant d'avoir
sa pension, libéré par le haut et avoir de l'air frais eh bas.
est-ce que c'est uniquement dans ces cas-là que deux mandats de quatre
ans au niveau du réseau, ce serait bon?
M. Lefrançois: La façon dont on l'a
présenté, M. le ministre, c'était plutôt à
l'inversé. Ce qu'on disait, c'est qu'il va être difficile
d'attirer des gens qui n'avaient pas dans leur plan de carrière de
prendre leur retraite après un mandat de deux ans, parce qu'on sait que
le record du réseau pour replacer son monde, il n'est pas très
glorieux. Ce n'est pas le manque d'efforts ' de certains, mais il n'en reste
pas moins qu'il n'y pas lieu de commencer à se promener avec des
étendards pour se glorifier de notre record. Alors, je me disais: La
confiance que les gens vont avoir face à ce réseau-là pour
pouvoir se déplacer d'un établissement à l'autre et
aspirer, lorsqu'ils vont devoir quitter un poste, s'assurer qu'il va y en avoir
un autre sur lequel ils auraient une certaine priorité, quand
même. Là, on ne parle pas d'un individu qui n'a pas donné
de bons services. On parte d'un individu qui est rendu à un terme en
fonction d'un calendrier, qui peut être utile pour le réseau aussi
en raison de son expérience. Tout ça, on dit: Bien, en plus de
ça, à moins que tu n'insères' ça dans une
planification de carrière où il est bien prêt à se
faire hara-kiri au bout de la ligne, on n'attirera pas les gens qu'on
voudrait.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'il n'y a pas un
danger de routine après huit ans?
M. Lefrançois: je pense qu'il y a un danger, mais de la
même façon qu'on disait qu'on ne généralisait pas
les comportements des établissements, je pense qu'on ne pourrait pas non
plus généraliser le comportement de ces individus-là. ii y
en a que, moi, je connais, qui sont dans leur établissement depuis
au-delà de huit ans à l'heure actuelle et qui se tirent
très bien d'affaire, je peux vous le dire. (15h30)
M. Côté (Charlesbourg): Vous êtes des
observateurs quotidiens de ce qui se passe dans notre réseau. À
un moment donné, au début de la commission, j'ai posé une
question: Qui décide et qui mène? Ça me paraît
être - en tout cas, je la juge moi-même - une bonne question parce
que, normalement, qui décide? C'est le conseil d'administration de
l'établissement. Qui mène, normalement? Ça devrait
être aussi le conseil d'administration de l'établissement. Mais ce
n'est pas évident. Il y a, donc, le pouvoir médical, il y a le
pouvoir du D. G, et il y a peut-être un autre petit pouvoir ailleurs,
là. Ça a toujours été voulu dans un rapport de
forces pour être capable d'équilibrer un certain nombre de choses.
Ce n'est pas évident que tout ça se fait partout et ça
implique un certain nombre de problèmes. Chacun bâtit sa chapelle,
évidemment, à l'intérieur du système. Et,
évidemment, de rester plus de huit ans, ça crée des
chapelles. Je comprends le problème que vous soulevez. Si on veut
attirer
les meilleurs éléments comme directeur
général d'un centre hospitalier ou d'un établissement du
réseau, il faut, à tout le moins, nous garantir une
sécurité. Bon! La seule sécurité qu'on nous
garantit maintenant, c'est deux ans après, s'il s'en va, au maximum.
Mais si on était dans une situation où, effectivement, on
garantit un bassin de récupération, dans un bassin, et, à
ce moment là, qu'ils puissent avoir la sécurité d'emploi,
mais qu'ils puissent être utilisés ailleurs dans le réseau,
un peu comme on a fait dans le cas de l'éducation avec certains
professeurs, est-ce qu'on ne serait pas dans une situation où la
sécurité serait là? On pourrait, effectivement, attirer
des bonnes personnes, mais ça permettrait un certain changement au
niveau de certaines administrations qui serait salutaire. Ce serait salutaire.
Est-ce que vous ne croyez pas que ça pourrait être une mesure
intéressante au niveau desD.G.?
M. Lefrançois: Là, je dois admettre que la
réponse que je vais vous donner, elle est plus un sentiment
personnel.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, je comprends.
M. Lefrançois: Je pense que si on lient compte des
problèmes que les gens ont à vivre et qu'on ne les flanque pas
dans une situation où ils vont, invariablement, se retrouver devant un
gouffre, mais qu'on dise: On t'offre aussi des moyens de t'en sortir une fois
que c'est terminé, je pense bien que vous attireriez des gens dans le
réseau qu'il serait intéressant d'avoir. Il est possible, par
contre, que dans cette optique-là le mode de sélection, le triage
doive être vu différemment qu'un triage local, à ce
moment-là. Ce serait plus une banque qui aurait un caractère
provincial. Donc, le triage devrait aussi avoir un caractère qui
s'apparente à ça.
M. Côté (Charlesbourg): Est .e que je me trompe en
disant, vu de votre point de vue, et je ne vous défends pas... Ce n'est
pas... Je pense que vous avez le droit de défendre votre point de vue
à vous autres et celui des gens que vous représentez, là.
Est-ce que vu de votre point de vue, la plus grosse inquiétude
vis-à-vis de la fin d'un D.G. pour un établissement au bout des
huit ans, c'est le changement que ça implique? Une nouvelle personne qui
arrive, avec des nouvelles méthodes, qui n'aimera pas la face d'Untel,
qui va aimer mieux travailler avec un autre, ça fait dès
bouleversements au niveau des cadres intermédiaires. Est-ce que ce
n'était pas un peu cette crainte là qui...
M. Lefrançois: C'est une très grande crainte, M. le
ministre, et je vais vous dire qu'on a constaté... C'est ça, ce
n'est pas une épidémie là, mais on a constaté
fréquemment que le changement d'un directeur général
signifiait, à brève échéance, le changement de
toutes les têtes de direction et, à brève
échéance encore, d'un grand nombre de cadres
intermédiaires, selon chacun des directeurs arrivés
là.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que vous avez des
statistiques là-dessus, sur les D.G. qui ont changé dans une
institution et sur ce que ça a amené par la suite, en termes de
changement de cadres intermédiaires? Est-ce qu'il y a eu des
études de faites là-dessus par votre association ou... À
ce que je comprends, c'est que ça a un impact assez important. On dit
presque là: Un D.G. va amener, dans une période de temps x, le
changement de presque tous les cadres intermédiaires. C'est ça
que ça veut presque dire.
M. Lefrançois: Malheureusement, on n'a pas de statistiques
là-dessus, mais disons que si vous lancez comme idée...
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
M. Lefrançois: ...que le directeur général
va changer dans tel établissement, la réaction qui va vous venir,
c'est presque une réaction naturelle, c'est: Oui, il va y avoir des
changements tout à l'heure, hein? Ça fait que...
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, on est
dans un réseau, soyons égoïstes un petit peu. De mon point
de vue à moi, on va parler de nos problèmes de santé et de
services sociaux. Vous êtes des observateurs au carrefour de
l'activité qui se passe dans tout le réseau
d'établissements. Est-ce qu'on n'a pas un problème fondamental de
mobilité de la main-d'oeuvre gelée par les conventions
collectives? S'il y avait une plus grande mobilité de notre
main-d'oeuvre, est-ce qu'on serait capables de faire face davantage à la
musique, ou si ce manque de mobilité ne nous crée pas des
problèmes énormes sur le plan du fonctionnement?
M. Lefrançois: Ça cause des problèmes, c'est
évident. Moi, ce que j'identifiais plus tôt, c'était le
cloisonnement des tâches, cloisonnement qui est tellement
hermétique que tu peux avoir une personne qui tricotte d'un
côté puis l'autre qui ne fournit pas à répondre dU
téléphone, mais il y en a une qui, au moment où ça
survient, n'a pas de travail à effectuer et l'autre s'adonne à en
avoir trop; là, c'est qu'on entre dans un domaine qui dépasse
largement, dans le fond, les conventions collectives. On rentre dans un domaine
qui a trait au comportement des individus les uns envers les autres, vous savez
ce que je veux dire. Si vous voyez votre voisin se noyer, vous allez sauter
à l'eau pour le sauver. Ce n'est pas évident, par exemple, que
tout le monde va faire la même chose. C'est un peu ça. Il y a
beaucoup de comportements comme ceux-là qu'on attribue peut-être
aux conventions collée-
tives, mais qui relèvent beaucoup plus, je pense, de l'attitude
des gens.
Maintenant, c'est quoi? C'est de la motivation, c'est que les gens n'y
retrouvent pas une sécurité qu'ils ont besoin d'avoir, je ne sais
pas exactement c'est quoi. Mais, effectivement, il y a un problème
là qui, peut-être, commence à se régler par un
décloisonnement qui est rendu excessif des tâches.
M. Côté (Charlesbourg): Comme le temps presse
toujours, une dernière petite question. Vous parlez du directeur des
soins infirmiers et, si j'ai compris, vous demandez une précision, de
préciser. J'aimerais savoir la nature de la précision que vous
souhaitez et quels sont les problèmes qui seraient réglés
par la nature des demandes que vous faites au niveau du directeur des soins
infirmiers, en particulier.
M. Lefrançois: En tout cas, la chose qu'on voulait
souligner, c'est qu'on précise certains rôles de façon
claire, puis on arrive aux soins infirmiers et on donne juste.. On ne donne pas
la rue, on donne la ville, point à la ligne, puis c'est juste. On sait
que, dans certains cas - ce n'est pas nécessairement répandu puis
vécu difficilement - le fait de laisser cette zone grise qui n'affirme
pas que le directeur des soins infirmiers, en matière de soins
infirmiers, est à la fois le responsable et l'autorité, je pense
que c'est quelque chose, c'est une zone grise qui ne devrait pas exister. On a
la chance, là, tant qu'à y être. En tout cas, on a
déjà constaté, dans les établissements, que
ça causait un problème, que la direction des soins infirmiers
n'ait pas toute la liberté de choisir les modes d'intervention de nature
soins infirmiers, et on s'entend toujours. Et je pense que cette profession a
droit aux mêmes égards, à l'intérieur de la loi, que
les autres professions. Je pense qu'elle doit être aussi respectée
parce qu'elle le mérite.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je vais
maintenant reconnaître le leader de l'Opposition et porte-parole officiel
en matière de santé.
M. Chevrette: Merci. À vous écouter, je croyais me
retrouver il y a deux, trois ans, 1987, je pense, 1986. Vous avez dit à
peu près la même chose, semblable à ça. J'ai lu le
mémoire de ceux qui vont vous suivre, c'est à peu près la
même chose aussi. H y a un point que je partage beaucoup c'est,
effectivement, au niveau de la santé et des services sociaux, au
Québec, il n'y a pas eu cette reconnaissance du droit à la
formation continue. J'appellerais ça de même, moi,
peut-être. J'ai toujours trouvé inconcevable qu'en
éducation, par exemple, on puisse avoir 1 % du budget, par exemple,
à la CEQ, des sommes assez importantes qui permettaient annuellement
d'en- voyer des enseignants, à 80 %, ou selon différentes
modalités - je ne sais pas si ça a été
modifié - on avait de l'argent pour le perfectionnement de son personnel
et au niveau de la santé, ça n'a jamais été pris
pour acquis. S'il y a un secteur où la technologie évolue,
où les méthodes changent, c'est bien dans le domaine de la
santé et des services sociaux. Et moi, je suis extrêmement
sympathique à vos revendications dans ce secteur-là. C'est pour
ça que je ne parlerai à peu près pas de votre
mémoire, je vais vous parler des aspects dont vous ne traitez pas dans
votre mémoire mais qui ont fait l'objet de commentaires d'autres groupes
et peut-être qu'étant donné que vous regroupez des cadres
intermédiaires de plusieurs groupes, ça peut nous permettre
d'avoir une impression ou un son de cloche différent.
Je voudrais vous parler de decentralisation On sait que lavant-projet de
loi parle de regie mais ne dit pas nécessairement que c'est une
décentralisation certaine. Ça peut être des régies
qui assument une déconcentration et non pas nécessairement une
décentralisation. Donc, je voudrais savoir, comme cadres
intermédiaires en tant qu'association de cadres intermédiaires,
qu'est ce que vous pensez de la decentralisation. Est-ce que vous êtes
pour une décentralisation réelle ou si vous êtes, dans un
premier temps, pour une déconcentration du ministère, comme
d'autres ministères d'ailleurs le sont. Je pense au MLCP, c'est un
ministère qui est déconcentré en région, il y a des
bureaux du MLCP un peu partout dans chacune des régions. La
santé, avec les CRSSS, est-ce qu'on peut parler d'une
déconcentration? Je ne suis même pas sûr qu'on puisse aller
jusque là. Je ne pense pas que les CRSSS... C'est plutôt un
rôle consultatif. Ils acheminent après les... Ils ont l'illusion
de certains pouvoirs en tout cas, pour être plus précis. Mais,
vous autres, vous préconisez quoi? Déconcentration ou
décentralisation?
M. Lefrançois: Je dirais plutôt... On serait
portés à aller plutôt vers la déconcentration. Par
contre, on ne la venait pas sans, au départ, un bon encadrement
législatif et aussi, évidemment, au niveau du ministre, des
pouvoirs qui permettent de fixer des objectifs qui sont de nature provinciale
et qui puissent avoir aussi les moyens de les faire respecter sur l'ensemble du
territoire. Mais c'est sûr que si on arrive au niveau des régions,
comme il a déjà été fait, il y a eu un peu une
décentralisation mais, dans le fond, on a décentralisé les
problèmes sans décentraliser les solutions ou la
possibilité d'amener des solutions. Le mérite qu'on voyait dans
le present projet de loi, c'est quand même qu'il y avait un alliage des
deux. Il n'y avait pas seulement une décentralisation des
problèmes ou l'identification des problèmes etc, mais
égale ment une déconcentration des pouvoirs pour arriver à
les régler.
M. Chevrette: Je ne suis pas sûr qu'on se comprend. Je vais
reprendre ma question parce qu'une déconcentration des pouvoirs,
ça peut vouloir dire une décentralisation. On n'a peut-être
pas le même langage ou le même sens des mots. On ne donne
peut-être pas le même sens aux mots mais selon vous... Je vais y
aller différemment: Est-ce que c'est à la région, à
partir d'une enveloppe globale, à décider de ses
priorités, de l'affectation de son argent, ou si c'est au ministre ou au
ministère ou au gouvernement à dire: Voici, c'est tant pour la
santé, tant pour les services sociaux, tant pour le communautaire, tant
pour ci, tant pour ça? Est-ce que c'est à la région? Et,
selon votre réponse, je vous dirai que moi, dans mon jargon, ça
pourrait être déconcentration ou décentralisation, mais je
pense qu'on ne s'entend pas sur le sens du mot.
M. Lefrançois: C'est vraiment une question qui
m'embête parce que je n'ai jamais posé la question à
d'autres du réseau là-dessus.
M. Chevrette: Si vous préférez ne pas
répondre, ne répondez pas.
M. Lefrançois: Non mais c'est que... Ce serait purement
personnel mais en tout cas...
M. Chevrette: Vous êtes là comme individu aussi,
envoyez donc! (15 h 45)
M. Lefrançois: En principe, je pense que la région
est mieux placée pour identifier les besoins à son niveau et les
régions sont tellement différentes l'une de l'autre au
Québec que c'est clair que la région est mieux placée dans
à peu près tous les cas. Mais cela étant dit, si elle a
identifié le problème et qu'elle a la volonté de le
régler - et ça, c'est au ministre de s'en assurer, par contre, de
cette question de volonté...
M. Chevrette: Sur la responsabilité ultime, on s'entend.
Moi, je pense que vous avez raison. Il n'y a personne qui remet ça en
question.
M. Lefrançois: D'accord, et que les budgets soient aussi
envoyés dans les régions, mais pas sans aucun paramètre.
Je veux dire, il y a quand même des risques d'erreur au niveau d'une
utilisation rationnelle. Il doit y avoir un "ballpark" qui est défini.
Les budgets devraient être confiés aux régions, tel qu'il
était prévu dans le projet de loi. Là, on ne
décentralisera pas seulement les problèmes, mais également
les moyens de les solutionner et c'est la seule façon.
M. Chevrette: Est-ce que vous croyez qu'on doive aller
jusqu'à décentraliser les enveloppes de la RAMQ? Elle est pas
pire, comme question, hein?
M. Lefrançois: ouais! non, là-dessus, je pense que
je n'irai pas là, non. je dois dire que, dans le fond, c'est une
question quand même de...
M. Chevrette: De quelques dollars. Ha, ha, ha!
M. Lefrançois: Oui, sauf que c'est une chose que de passer
une commande et une autre chose que de faire le chèque pour payer. Ce
sont deux choses différentes.
M. Chevrette: Oui, mais le citoyen de l'Abitibi ou de la
Gaspésie, il paie les impôts. Et ce n'est pas parce qu'il est en
Abitibi qu'il paie moins cher d'impôt.
M. Lefrançois: Ah non! Ça, je...
M. Chevrette: Est-ce qu'il n'aurait pas droit, par exemple,
à un per capita identique au Montréalais, dans sa région,
pour se faire traiter, à une qualité de services? Ce n'est pas
une question de faire un chèque, une facture. Je ne suis pas d'accord
avec vous pantoute. C'est une question d'équité. Je viens d'une
région et je n'ai pas honte de dire ça. S'il y avait des gens de
Montréal qui se levaient dans la salle, je dirais: Messieurs, vous ne
payez pas plus cher d'impôt que moi. Ils s'écraseraient
probablement.
M. Lefrançois: Évidemment, vos propos ont de
l'allure, sauf que la réalité...
M. Chevrette: Je vous remercie bien.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Je n'en doutais pas.
M. Lefrançois: Je n'étais pas là seulement
pour vous dire des bêtises, quand même.
M. Chevrette: Non, non, je sais bien. J'espère.
M. Lefrançois: Mais il y a des réalités avec
lesquelles il faut vivre. D'abord, attirer un groupe équivalent de
médecins per capita en Abitibi, ce n'est pas aussi facile. D'ailleurs,
on en avait parlé déjà dans certaines interventions
auprès de Mme Lavoie-Roux, par exemple, qu'il y avait lieu,
peut-être, de contingenter au niveau des internes et des
résidents. Tu aurais moins de difficultés à envoyer
quelqu'un en Abitibi après s'il provient déjà de
là. Mais ce n'est pas facile quand même de convaincre un gars qui
a été élevé dans la région de
Montréal d'aller oeuvrer à Gaspé. Alors, le
résultat, c'est que...
M. Chevrette: Ah! Là, je vous arrête. Je
suis quasiment scandalisé par ce que vous dites. M.
Lefrançois: Soyez-le parce que...
M. Chevrette: Et je vais vous expliquer pourquoi. Moi, je suis
enseignant. Quand il n'y avait pas d'enfants à Montréal, si je
voulais enseigner, j'allais en Abitibi. S'il n'y avait pas d'enfants à
Montréal, il fallait bien que j'aille sur la Côte-Nord, s'il y
avait seulement là qu'il y avait des besoins. Pourquoi '.es
médecins iraient-ils où ils voudraient alors qu'il y a des
besoins ailleurs? Là-dessus, je m'excuse, il va falloir faire un
débat de société. S'il y a une profession qui veut se
cantonner à Montréal pour avoir 1 par 400 ou 1 par 300 habitants
et qu'ailleurs on en a 1 par 2000 ou par 3000, je m'excuse, c'est le rôle
d'un État de répartir les ressources. Et ce n'est pas parce
qu'ils veulent aller tous là. Moi, c'est pour ça que je suis un
des tenants très forts des enveloppes de la RAMQ, que ça aille au
niveau des régions. Il faut arrêter de maintenir les
iniquités qui se perpétuent. Si on laisse ça au vouloir
d'une profession, qu'est-ce qu'on va faire? On ne fera jamais rien. Est-ce que
ça a de l'allure, ça aussi?
M. Lefrançois: Ça a de l'allure, évidemment.
Mais H ne faut jamais oublier quand même qu'actuellement... En tout cas,
tant et aussi longtemps que ce ne sera pas changé, c'est que nos
médecins sont quand même des entrepreneurs privés.
M. Chevrette: Payés par le public, monsieur. M.
Lefrançois: Oui, mais pas à salaire.
M. Chevrette: Là, je rebondis une autre fois. Un
médecin a beau être privé, ce sont les deniers, les
impôts publics qui le paient. Et le rôle d'un État, quelle
que soit la couleur du gouvernement, c'est de faire en sorte qu'il y ait une
équité dans les services de santé. Je ne parle pas dans la
surspécialisation - on ne peut pas en mettre partout - mais des
spécialités de base; je pense qu'on doit chercher à ce que
chacune des régions du Québec reçoive une qualité
assez identique de services. Et ça, c'est le mythe, la peur des lobbies
tout puissants. Et tant et aussi longtemps qu'on va réfléchir de
même, on ne changera rien. Le jour où on va prendre le taureau par
les cornes, on va changer des choses. Vous ne croyez pas ça?
M. Lefrançois: Je suis entièrement d'accord avec
vous sur ce que les régions doivent avoir comme services. C'est clair
que ce n'est pas à cause que l'individu demeure à Gaspé ou
à Saint-quelque-chose le long du fleuve, où il n'y a absolument
rien, qu'on lui accorde pour autant un dégrèvement d'impôt.
Bien plus que ça, s'il voulait se faire traiter dans le passé, il
payait son avion puis son autobus pour venir se faire traiter à
Québec. Ça, vraiment, c'est criant comme manque de justice dans
ce système-là. Je pense qu'il y a des mesures qui ont
été prises, d'ailleurs, tout récemment, pour contrevenir,
quand même, dans la mesure du possible, à ça.
M. Chevrette: Je vais poser une question à votre
président. Quelle est la place que vous voyez, la place du
communautaire? Comme cadre intermédiaire, vous avez à voir
oeuvrer le communautaire dans le domaine de la santé et services
sociaux; quelle est la place que vous y voyez, à ce réseau du
communautaire?
M. Lessard: Qu'est-ce que vous entendez par communautaire?
M. Chevrette: Les organismes, les ressources alternatives en
santé, que ce soit en santé mentale, que ce soit à
l'organisation du communautaire, vous avez à oeuvrer souvent avec des
dirigeants d'organismes, vous êtes sans doute appelé, comme cadre
intermédiaire, à rencontrer ces groupes là. Ils ont
très peur, eux, de la décentralisation, sous prétexte que
le côté santé, si les arbitrages se font au niveau d'une
région, est tellement puissant On sait très bien que c'est facile
à dramatiser, la situation d'un malade. C'est beaucoup plus facile
à convraincre du monde qu'il y a une urgence d'agir que d'aller, par
exemple, sensibiliser du monde à l'importance de faire de la
prévention. Vous avez à oeuvrer avec ces groupes communautaires
là; est-ce que vous croyez qu'on doive, comme gouvernement ou comme
Assemblée nationale, voter des mesures qui permettent, par exemple, une
politique de financement à ces organismes là et qu'on pourrait
aussi penser à des enveloppes protégées au niveau de la
région pour ne pas qu'ils soient gobés en entier par le volet
santé?
M. Lessard: Je préfère ne pas répondre
à ça.
M. Chevrette: C'est votre choix. Est ce que vous croyez que les
cadres intermédiaires, dans la présente réforme, ont un
rôle fondamental à jouer auprès du changement de
mentalité à apporter en ce qui regarde le réflexe de la
dépendance face à l'institution?
M. Lessard: Voulez-vous préciser votre question?
M. Chevrette: Oui. Tous les gens qui sont appelés à
faire des discours se targuent qu'on doit axer nos ressources sur la personne,
et on sait que la personne a pris ou a épousé ce réflexe
de dépendance quasi totale vis-à vis de l'institution. Tu
vieillis et tu songes à avoir ta place en centre d'accueil avant
même d'être malade. Tu vieillis un tant soit peu et tu veux
sortir de ton village pour t'en aller dans un HLM. On veut s'en aller
toujours vers l'institution. On a un enfant de malade, on dit: le centre
d'accueil. Une personne handicapée: centre d'accueil pour
mésadaptés socio-affectifs. Le milieu cherche à habituer
la personne à toujours dépendre de l'institution. Je pense qu'un
des secrets ou une des avenues, une des voies pour se sortir de ce
merdier-là, c'est précisément d'amener un changement de
mentalité en profondeur; faire en sorte que la personne, d-'abord,
puisse avoir des ressources pour se prendre en main avant de songer à
aller en institution. Croyez-vous que votre association de cadres
intermédiaires a un rôle fondamental à jouer face à
ce changement de mentalité? Si oui, quel type d'avenue
préconiseriez-vous?
M. Lessard: C'est évident que le problème que vous
soulignez, il est existant. On ne peut pas le nier. En tant qu'association,
non, je ne vois pas ce qu'on peut y faire là-dedans. On est
réellement une association qui a pour but la protection des
intérêts socio-économiques et professionnels de nos
membres. C'est sûr qu'on vit dans le réseau et on voit que les
gens sont accrochés au système, aux différents
établissements qui composent le système. Si je regarde ma
fonction de représentant d'une association de cadres...
M. Chevrette: Vous êtes cadre intermédiaire
où?
M. Lessard: Où?
M. Chevrette: Oui.
M. Lessard: À l'hôpital Laval.
M. Chevrette: Vous oeuvrez auprès du monde, auprès
des gens?
M. Lessard: Oui.
M. Chevrette: Vous avez à parler avec du monde? Vous avez
à rencontrer du monde?
M. Lessard: Oui.
M. Chevrette: En dehors de votre syndicat, vous consacrez au
moins 37 heures et demie à votre travail de cadre
intermédiaire?
M. Lessard: Oui.
M. Chevrette: vous avez à parler à du monde. est-ce
que vous croyez que vous avez un rôle à jouer auprès du
changement de mentalité de dépendance? ou si votre premier
souci...
M. Lessard: Individuellement...
M. Chevrette: J'espère que quand vous êtes au
travail, durant vos 37 heures, vous ne pensez pas à votre statut de
président de l'Association.
M. Lessard: Non. Je l'enlève de temps en temps, mon
statut.
M. Chevrette: C'est justement ce que je veux vous faire enlever
pendant quelques minutes.
M. Lessard: C'est bien évident qu'on a un rôle
à jouer individuellement. Mais, à ce moment-là, je n'ai
pas besoin de venir ici comme président de l'Association des cadres
intermédiaires pour discuter de ça, en ce sens que n'importe qui,
dans la société, a un rôle à jouer pour essayer de
briser cette fameuse dépendance. C'est ce que je veux vous dire. C'est
évident qu'on a tous des idées comme cadre intermédiaire,
qu'on a un rôle à jouer là-dedans, même pas comme
cadre intermédiaire, comme individu pour sensibiliser les gens au
coût du système.
M. Chevrette: à l'ouverture de cette commission
d'enquête, m. le président - et les mots que je vais dire ne vous
attaquent pas, ne vous visent pas - je voudrais rappeler quelque chose. si vous
vous sentez visé, ce n'est pas méchamment, mais c'est sûr
que vous allez vous sentir visé.
M. Lessard: Bon.
M. Chevrette: À l'ouverture de cette commission
d'enquête, j'avais lu environ 50 à 60 mémoires avant
qu'elle ne commence, ou à peu près, et j'ai dit, dans mon
discours d'ouverture, que je déplorais précisément qu'on
pense surtout en fonction du rôle ou du statut exclusif et qu'on ne
traite pas globalement des problèmes qu'on rencontrait au niveau de la
santé et des services sociaux. Je l'ai fait exprès avec votre
organisme, contrairement à mon habitude, je l'admets, pour essayer de
vous faire parler d'autres problèmes que celui qui vous confrontait.
À mon point de vue, on ne réussira pas... Je suis d'accord que
vous vous exprimiez, c'est votre rôle fondamental comme association
professionnelle. Je suis entièrement d'accord que vous nous
présentiez votre problème. Vous êtes confronté
à un problème majeur. Je vous donne même raison sur le
fond. J'ai commencé par ça. Ce que je veux dire, c'est que ce
n'est pas vrai; on va réussir quelque chose de valable... Si,
au-delà de votre problème particulier, il n'y a pas ce souci de
travailler ensemble à faire quelque chose globalement, on ne
réussira pas. Si Augustin Roy vient ici nous dire que tout se fait bien,
tout ce qui est fait par le corps médical est bien fait, il n'y a rien
qui accroche, tout est parfait, tout est merveilleux; eux autres ne font pas
de
gaffes, ce n'est que le consommateur qui exagère et tout le
"kit"... Quand il a fini, il dit: Bonjour, et H s'en va. Les cadres
intermédiaires arrivent: Nous autres, on veut plus de perfectionnement
et après ça, bonjour Luc, on s'en va. Ce n'est pas de même,
je pense, qu'on va réussir à bâtir une réforme qui a
de l'allure, qui est cohérente, parce qu'il y a un coût social
extraordinaire derrière cette réforme.
Je suis d'accord avec vous qu'il devrait y avoir une affectation des
ressources pour que nos cadres intermédiaires soient toujours "up to
date" comme disent les Anglais, soient toujours à la page dans la
gestion, dans l'administration publique. On a des défis constants
à relever et, si on veut que les gens soient capables d'avoir des
idées, il faut les perfectionner. Cela dit, de grâce,
embarquez-vous aussi dans le débat de société qu'on doit
mener dans la réforme. C'est ça que je voulais dire. (16
heures)
M. Lessard: Je pourrais vous répondre que c'est
évident qu'en tant qu'individu on ne regarde pas passer le train. On ne
regarde pas passer la parade. On est dedans. Mais ce que je dois vous dire,
c'est que moi, ici, aujourd'hui, je représente 6800 cadres
intermédiaires et je n'ai pas consulté, je n'ai pas de mandat de
ces gens-là pour me prononcer sur autre chose que sur nos relations du
travail. Partez-moi des relations du travail, demandez-moi le "feeling" de
notre monde, je vais vous le dire, on le connaît, on a des documents. On
a fait des tournées en région, on sait ce que nos gens pensent,
et on est mandatés pour parler de ça. Mais si je vous dis que
oui, on devrait s'impliquer dans telle chose, on devrait s'impliquer dans telle
chose, que quelqu'un de notre conseil d'administration, ou tout autre membre
qui ne partage pas mon opinion... Quel pouvoir as tu, toi, Jacques Lessard,
d'arriver et de te prononcer au nom de l'Association des cadres
intermédiaires comme quoi l'Association est d'accord avec telle
position? Je n'en ai pas. C'est moi, personnellement, comme invtdidu, et
à ce moment-là si...
M. Chevrette: Je finis là-dessus. Mais, M. Lessard, vous
me demandez, par exemple, à moi, député...
M. Lessard: Oui.
M. Chevrette:... de trancher votre dilemme. Et vous êtes
une personne-ressource.
M. Lessard: Oui
M. Chevrette: Je dois être en droit de vous demander.
Comment penses-tu que je pourrais régler ton dilemme? Si je peux
régler ton dilemme en injectant exclusivement de l'argent, ça,
c'est facile à mort. Je ne pense pas que ce soit le but de l'exercice
exclusivement. Si c'était ça, on ne vous convoquerait pas, on
dirait: Eux autres, ça représente 400 000 $ - 400 000 $. Les
médecins ont passé avant, ça représente 6 000 000 $
- 6 000 000 $. Au bout de la course, on dit à M. le ministre: Ça
représente 25 000 000 $, paie donc et c'est final. On n'a pas besoin de
vous convoquer pour ça. On dit: Envoyez-nous donc votre commande. Mais
quand on fait l'exercice de la réaffectation des sommes ou des
ressources et des correctifs à apporter à un système, je
ne pense pas que vous dépasseriez votre mandat... Je n'ai pas de morale
à vous faire, vous pouvez m'envoyer chez le diable si vous voulez, mais
H me semble que j'aurais aimé que vous me donniez plus d'outils pour me
permettre peut-être de regarder où devrait aller la
réaffectation. Qu'est-ce qu'on pourrait abolir? Est-ce qu'on doit aller
vers le salariat des médecins? Est-ce que c'est trop onéreux, le
paiement à l'acte? Est-ce que la décentralisation peut sauver des
coûts? Qu'est-ce que vous verriez comme structures qui devraient
disparaître pour économiser des coûts sur une échelle
quelconque? Je ne le sais pas. mais si le monde, chaque groupe dit: Moi, je
suis venu pour ça, je ne sais pas ce que ça va donner en bout de
course. Je vous avoue que, comme député qui a à voter sur
un projet de loi, plus vous allez m'outiller... Il y a peut-être des
recettes que vous auriez pu me donner, que j'aurais trouvées
fantastiques. Au moment où je vous parle, si vous vous limitez à
me dire: Moi, c'est ça, je respecte ça, mais ça ne m'aide
pas gros.
M. Lessard: Si vous voulez qu'on vous parle des médecins,
c'est évident que dans tout l'exercice actuel... Moi, ça me fait
penser que le 2, je pense... Le 2 février, il y a eu une
émission, Droit de parole, avec Claire Lamarche, qui parlait de la
confiance que les gens avaient envers le système de santé au
Québec. Et là, tu avais une brochette d'invités, et
c'était bien intéressant, tout ce qui s'est dit là, mais
il n'y en a pas un qui a touché au problème fondamental du
coût des médecins à l'acte. Quand tu es capable de
générer le revenu que tu veux, bien je pense que c'est
évident... Ça, c'est personnel, ce n'est pas l'Association des
cadres intermédiaires qui dit ça, c'est moi qui le dis,
là.
M. Chevrette: Bien, c'est ça que je vous pose comme
question. J'étais convaincu que vous aviez des idées
personnelles.
M. Lessard: Ah oui! Oui, oui.
M. Chevrette: J'avais hâte que vous sortiez de votre carcan
de président.
M. Lessard: Mais je trouve inconfortable de sortir de...
M. Chevrette: Personne ne vous en fera
grief; ils diront que c'est la faute à Chevrette s'il est
sorti.
M. Lessard: C'est ca, c'est ca. M. Chevrette: Je vous
remercie.
Le Président (M. Joly): Je me dois, disons, de vous
ramener a l'intérieur des cadres, justement, puisque c'est
terminé. Alors, messieurs, au nom de la commission, je vous remercie de
votre présentation. Je suis convaincu que l'éclairage que vous
avez apporté va sûrement aider à orienter le projet de loi.
Merci beaucoup. Je demanderais maintenant aux gens de l'Association des
administrateurs des services de santé et des services sociaux du
Québec de bien vouloir s'avancer, s'il vous plaît.
Association des administrateurs des services de
santé et des services sociaux du Québec
Bonjour, madame, bonjour, messieurs. Alors, au nom des membres de cette
commission, je vous souhaite la bienvenue. Vous connaissez les règles du
jeu. Vous avez une vingtaine de minutes pour nous exposer votre mémoire
et nécessairement, par après, l'échange est laissé
libre entre les parlementaires. Alors, j'apprécierais que la personne
responsable du groupe, de l'Association, s'identifie et identifie les personnes
qui l'accompagnent.
M. Dumais (Benoit): M. le Président, merci. Benoît
Dumais. M. Côté et M. Chevrette, merci de nous accueillir. On va
tenter de se dégager de notre mémoire pour vous alimenter en
commençant par vous présenter Marielle Lavallée, qui est
première vice-présidente de l'Association, qui est aussi un cadre
supérieur du Conseil régional de la région de
Québec, qui est aussi responsable d'Info-Santé, qui est la grosse
oreille à l'écoute des bénéficiaires dans la
région de Québec, et de la centrale de la coordination des
urgences qu'on devrait plutôt appeler la centrale de coordination des
ambulances. Mme Lavallée est responsable du réseau hospitalier au
sein du Conseil régional. À ma gauche, Jean-Luc Tremblay, qui est
directeur des services administratifs du Centre de l'ouïe et de la parole,
qui est aussi l'Institut des sourds pour ceux qui auraient mal entendu, qui est
aussi une institution qui est située dans le Québec
métropolitain, évidemment à Charlesbourg. Enfin, M. Gaston
Saint-Pierre, qui est de Rimouski. M. Saint-Pierre est directeur des services
techniques alias les services auxiliaires. M. Saint-Pierre est peut-être
né dans le même berceau que M. Côté, puisqu'il est
né entre Cap-Chat et Sainte-Anne-des-Monts, peut-être à
Migneaultville. Je crois que M. Saint-Pierre est ici aussi pour
démontrer que, comme Migneaultville Cap-Chat, pour ceux qui n'auraient
pas saisi... Je pense que même M.
Côté ne connaissait pas cette expression-là,
même s'il est né dans cette région-là. Enfin, M.
Robert Savard, qui est directeur général de l'Association des
administrateurs des services de santé et des services sociaux depuis
1982, et moi-même, Benoît Dumais, qui suis président de
l'Association et directeur des services professionnels au CHUL, à
Québec.
Je veux prévenir les questions. L'Association des administrateurs
est une association de 2000 personnes qui regroupent tous les cadrés
supérieurs de tous les établissements de ce fameux réseau
de la santé et des services sociaux, les CRSSS, les CLSC, les centres
d'accueil, les CHSP, les centres hospitaliers pour soins de courte
durée, avec une petite marge de patients en soins prolongés
à l'intérieur, etc. Tous ces cadres supérieurs là,
qu'ils soient directeurs des soins infirmiers, directeurs médicaux,
directeurs des services professionnels, directeurs des services auxiliaires,
directeurs des finances, directeurs des ressources humaines, vous avez
l'ensemble... J'espère que j'ai nommé le directeur des soins
infirmiers, parce que j'ai le défaut d'être médecin. Je
m'en accuse tout de suite. Je fais amende honorable. C'est un de mes trois
défauts.
M. Chevrette: Les deux autres?
M. Dumais: Je vais vous les dire à l'instant, M.
Chevrette. Nous représentons l'ensemble de ces cadres-là dans
tous les établissements du réseau et, s'il y a quelqu'un ou une
association qui peut parler d'intersectorialité, à part la
commission Rochon, c'est bien gros. Alors, on vous invite à vous servir
de nous, puisqu'on se prétend très intersectoriels entre nous, du
moins à notre niveau. Alors, j'ai un défaut, je suis
médecin. Le deuxième, c'est que je suis, semble-t-il, responsable
du dégagement des salles d'urgence de la ville de Québec, donc,
je suis une police. C'est mon deuxième défaut. Et mon
troisième défaut, je l'ai peut-être oublié, c'est
que je parle beaucoup trop. C'est ça que je voulais vous dire.
M. Chevrette: C'est votre humilité, le
troisième?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dumais: À peu près. Ce défaut-là
m'entraîne parfois à communiquer, lorsque j'ai des mandats
d'établissement, avec certains jounalistes qui parfois mettent de
l'huile sur le feu. C'est là mon troisième défaut.
Si l'Association est ici, c'est évidemment pour vous parler du
mémoire, mais on va laisser ces points techniques dans les quelques
dernières minutes. Mais j'aimerais ça attirer votre attention sur
certains constats. Et là, je vais même peut-être surprendre
de mes collègues parce que
je comprends et je sens qu'une commission comme ça, elle a une
portée, ça sert à quelque chose et que ça sert, en
bout de ligne, aux bénéficiaires qui sont autour de la salle et
autour de nos établissements. Il faut parler des
bénéficiaires.
Alors, nous, il y a trois choses qui nous animent. On est d'accord
évidemment avec la régionalisation à outrance. Le pouvoir
régional, que ce soit dans les domaines de la santé, de
l'économie, de la culture, etc., on croit à ça.
Deuxièmement, on croit beaucoup aux objectifs d'atteinte de
résultats et non pas de moyens. 10 000 000 000 $, je pense que M.
Côté ne cesse de le dire, H a donc raison... Je rappelle juste aux
gens ici autour de la table, et peut-être même aux gens qui sont
derrière, que dans un milliard H y a, si je ne me trompe pas, mille
millions. Alors, 10 000 000 000 $ québécois, des dollars
québécois, je dis bien, investis en santé, c'est de
l'argent...
M. Chevrette: On est prospères. Vous pouvez
continuer...
M. Dumais:... et on est d'accord, c'est en masse. C'est assez.
Alors, l'atteinte de moyens, l'atteinte non pas de développement de
moyens mais de résultats, on est d'accord avec ça.
Et, troisièmement, le bénéficiaire. Je m'engage, au
nom des membres de l'Association, aux yeux des membres de la commission, si les
propos qu'on vous tenait n'aidaient pas les bénéficiaires du
Québec, à ce qu'on vous invite à nous mettre dehors.
Ça nous ferait énormément plaisir. Si on ne parle pas dans
l'intérêt des bénéficiaires, je m'engage aussi - une
façon de parler - à me retirer de l'Association des
administrateurs des services de santé et des services sociaux du
Québec. Je dis ça en badinant toujours, parce que je badine
souvent. Mais vous comprenez bien notre propos, on veut travailler dans
l'intérêt des bénéficiaires.
Je me permettrais de faire quatre constatations. Vous avez lu le
mémoire, évidemment, avec attention. Vous avez même eu des
fonctionnaires qui vous ont résumé ça. Je ne reviendrai
pas là-dessus. Je vais laisser à Robert Savard, qui est directeur
général, l'attention de préciser certains points. Mais
avant, j'aimerais, faire quatre constatations.
La première. Je vais y aller par conclusion. Je vais en tirer
quatre. C'est vrai, et ça va peut-être faire sourire M. Chevrette
et même M. Côté, que le système de santé
québécois est loin d'être gratuit. J'insiste. Il est loin
d'être gratuit parce que, même les gens de l'Abitibi paient autant,
peut-être, pour ce système-là, à moins qu'ils ne
soient sur le chômage ou autrement, mais comme contribuables, s'ils ont
un emploi, ils paient cher le système de santé au Québec,
puisque 1300 $ en 1987 sont sortis de la poche des contribuables. Je rappelle
que 400 $ viennent du réseau privé. Alors, 22 % des coûts,
encore des coûts, reviennent et passent par le réseau privé
au Québec. Donc, le système n'est pas gratuit, n'est pas que
public et, au Québec il est déjà extrêmement
dispendieux. Alors, 1300 $ du public et 400 $ du privé, ça fait
1700 $, en 1987, per capita. C'est ce que les Québécois paient
pour s'assurer contre la santé ou, je devrais dire, contre la maladie et
l'atteinte au bien-être. Je suis d'accord avec probablement les membres
de la commission, c'est extrêmement dispendieux. Alors, ce
système-là n'est pas gratuit, c'est évident.
Deuxième conclusion. Le réseau de la santé n'est
sûrement pas le propriétaire unique de la santé des
Québécois. Je me fais comprendre. Le réseau de la
santé, et je pense que M. Côté nous a attiré, depuis
qu'y est là, sur ce terrain-là, et avec combien de raisons... En
fait, la santé c'est le problème du monde. Ce n'est pas le
problème du réseau de la santé. Ce n'est pas le
problème du ministère de la Santé et des Services sociaux.
C'est le problème de tout le monde et c'est à chacun de
régler son problème. Comme association, je pense que plusieurs de
nos membres seraient d'accord avec cette affirmation-là.
Je vais vous donner trois exemples rapidement, pour me faire comprendre.
On se pose la question si, au Québec, les routes sont entretenues par
des entrepreneurs de pompes funèbres. Il y a des courbes qui tuent
combien de gens par année? Combien de gens? Est-ce que c'est la
responsabilité des directeurs généraux des hôpitaux
de courte durée de prendre le pic et la pelle et d'aller corriger les
courbes en question? Je ne pense pas. On ne peut pas crier. MM. les D. G.,
prenez vos pics et vos pelles et venez-vous-en, on va aller corriger telle
courbe dans le coin de Rimouski parce qu'il y a eu 22 morts, cette
année, dans cette courbe-là. Ce n'est pas la
responsabilité du réseau de la santé et des services
sociaux. autre exemple, si quelqu'un veut fumer une cigarette, et je le fais de
façon très humoristique, la palice disait ou aurait pu dire d'un
fumeur: un quart d'heure avant sa mort, il était vivant, ce
fumeur-là. si quelqu'un veut griller une cigarette et se faire plaisir,
qu'il en assume les responsabilités et qu'il ne demande pas aux
québécois, peu importe le degré de
social-démocratie qui les anime, de payer pour la maladie pulmonaire
chronique que ce patient-là présentera un jour. je pense qu'il
faut assumer ses responsabilités, en d'autres mots. et là, je ne
le fais pas de façon calculée.
J'ajouterais, comme troisième exemple, que la santé n'est
pas la responsabilité entière du ministère, que si 20 % ou
18 % des lits de courte durée dans certains hôpitaux de
Québec, Montréal, Montérégie, Lanaudière et
Trois-Rivières sont occupés par des patients de soins
prolongés, ce n'est peut-être pas aussi la responsabilité
du
réseau de courte durée d'assumer cette
responsabilité-là.
Troisième conclusion. 10 000 000 000 $, j'ai dit tout à
l'heure que c'était beaucoup d'argent. Je rappelle qu'en fait, si dans 1
000 000 000 $, il y a 1000 millions de dollars, ça fait 10 000 millions
de dollars. On est d'accord, c'est assez. C'est assez d'argent et, même
si on veut transfuser des globules rouges du dollar - je ne fais pas de
politique ici, même si les globules sont rouges, parce que vous me
comprenez, je suis médecin, alors quand on transfuse, on transfuse des
globules rouges, pas des globules blancs -même si on voulait les
transfuser au débit où on fait ça au niveau du
réseau de la santé, ce serait insuffisant. Alors, au fond, 10 000
000 000 $, c'est beaucoup et c'est trop peu en même temps.
Dernière conclusion, le peuple québécois n'est
peut-être pas le peuple de l'Ontario ou de la Californie ou, en tout cas
- puisque c'est une société distincte - n'est pas aussi riche que
l'Ontario. Ça me semble évident. Comme peuple
québécois, on n'a pas, je crois, à investir autant, ou du
moins on doit avoir plus d'imagination, à travers une commission des
affaires sociales comme celle-ci, que nos voisins par rapport à
ça. En somme, si on changeait les déterminants de la santé
- on est d'accord avec ça et on est prêts à travailler
là-dessus - si les gens fumaient moins, si les gens mangeaient moins de
cretons, si les gens écoutaient moins la télévision et
faisaient un peu plus de sport, si les gens conduisaient moins ivres au volant,
on pense qu'on fermerait le ministère de la Santé et qu'on
pourrait peut-être faire du ministère de la Santé une
bibliothèque, à propos de la capacité de la santé
publique, ou un musée, encore, qui pourrait témoigner que les
Québécois, en 1990, étaient dans un piètre
état au niveau de leur santé et de leur bien-être. (16 h
15)
Pour corriger ces quatre observations, si je les résume: la
santé, non gratuite et pas tout à fait à 100 % publique;
le réseau de la santé, responsable d'une partie seulement de
notre santé; un système sous-financé par rapport à
des besoins exprimés, mais avec 10 000 000 000 $, c'est peut-être
déjà en masse; et, enfin, une société
québécoise distincte, mais un peu plus pauvre que les voisins.
Qu'est-ce qu'on peut faire avec ça? J'espère que ça va
alimenter certaines questions, et là, j'exprime un point de vue
personnel, je pense qu'il faut scolariser à outrance les
Québécois et les éduquer. L'autre jour, je disais à
Claire Lamarche: En faire des Japonais de l'Amérique du Nord. Les
Japonais, ce sont des maniaques de l'information. Ce sont eux qui lisent le
plus de lignes de journaux par jour. Même les femmes au foyer - parce
qu'il y en a encore là-bas, au Japon - sont obligées et
incitées à s'éduquer, entre guillemets,
c'est-à-dire à être curieuses. Si les
Québécois étaient comme ça, peu; être qu'ils
seraient en meilleure santé. Donc: scolarisation.
Deuxièmement: imputation, responsabilité des citoyens -
cigarettes, cretons, alcool au volant, etc. - imputation et
responsabilité des corporations qui empilent des pneus quelque part et
qui mettent le feu dedans à un moment donné. Imputation des
corporations et des collectivités pour faire en sorte que le
réseau arrête de supporter la santé des
Québécois. En d'autres mots, la santé, c'est notre
problème, ce n'est pas le vôtre. J'espère que ce n'est pas
le mien comme cadre supérieur. C'est le problème de celui qui en
présente un. Il faudrait qu'il l'assume. Maintenant, cette
médecine de scolarisation et d'imputation, nous autres, on veut se la
servir comme cadres supérieurs. On pense que, si on n'est pas
scolarisés suffisamment et qu'on n'est pas à la hauteur de la
réforme que le ministère veut mettre en place, il y a un
problème. Je pense qu'on n'est pas prêts.
Troisièmement, on veut être imputés des
décisions que l'on prend, puisque les 2000 cadres supérieurs sont
des collaborateurs étroits de ces 10 000 000 000 $ et qu'on est des
partenaires très étroits de M. Côté et de ses
fonctionnaires par rapport à ça. Si on n'a pas des conditions de
travail adéquates ou modernes, je dirais, pour gérer cette
immense entreprise privée qu'est la santé au Québec - 10
000 000 000 $, c'est beaucoup d'argent comme chiffre d'affaires, qu'on soit
dans le privé ou dans le public - on pense qu'on n'a pas d'affaire
là. Nous autres, on vous invite - c'est essentiellement le message -
à faire de nous des cadres modernes et, si on n'est pas à la
hauteur, à nous clairer. Avant de nous clairer, on a des demandes
à faire puisqu'on pense que malgré... Pas des demandes en termes
d'argent, ça va rassurer M. Chevrette, on n'a pas besoin de globules
rouges, plutôt d'une attitude et on aimerait...
M. Chevrette: ...ça doit être du sang bleu, parce
que c'est du sang en dehors de tout.
M. Dumais: Peut-être. Je n'en ai pas encore vu dans ma
pratique, M. Chevrette, des globules bleus. À travers le respect, entre
guillemets, c'est-à-dire, je dirais, la confiance que le directeur
général de ce grand réseau de la santé et que le
ministre pourraient avoir à l'égard des cadres supérieurs,
nous, on embarque dans cette réforme-là. Mais on invite M.
Côté à penser que si on est anémiques, non
perfectionnés si, donc, on n'est pas scolarisés, qu'on n'est pas
imputables de nos décisions et qu'on n'a pas les moyens de le devenir,
on pense que cette réforme-là va aussi être un effort de
réflexion sociétale inutile, encore une fois. Et on ne voudrait
pas. Au contraire. On est d'accord, je l'ai répété tout
à l'heure en introduisant, avec la régionalisation, avec
l'atteinte des résultats, avec tous ces grands objectifs de la
réforme. Alors, au fond,
on veut devenir des partenaires modernes là-dedans, nous, les
cadres supérieurs. On pense que, si on n'est pas dans le bateau et que
le bateau a besoin d'être renippé et redirigé, au lieu
d'aller vers l'iceberg - pensez au Titanic - parce qu'il y a un docteur qui
conduit le bateau, s'il faut mettre quelqu'un à sa place, s'il faut
changer le pouvoir de place, on est d'accord avec ça, en
intégrant ces ressources-là à l'appareil administratif. la
solution, en bout de ligne, zst sûrement l'intégration
clinico-administrative. on ne peut pas gérer un hôpital, un centre
d'accueil ou n'importe quoi sans les docteurs, et les docteurs ne peuvent pas
avancer sans les cadres, etc. les cadres intermédiaires, les cadres
supérieurs et les directeurs généraux sont dans le
même bateau et on vous invite à nous voir et à nous doter
de moyens modernes pour être des partenaires modernes de cette
entreprise-là qu'est la santé.
Il est 16 h 20, donc il nous reste quelques minutes. Je pourrais
demander à Robert de préciser certains points, faire le lien,
peut-être, brièvement avec le mémoire que vous avez lu, de
toute façon. Ça nous fera plaisir, à chacun de nous, de
répondre aux questions que vous auriez.
M, Savard (Robert): M. le Président, vous êtes
conscient que je dois résoudre la quadrature du cercle. Notre
président à l'Association, M. Dumais, effectivement, vous a fait
part des grandes préoccupations. Essentiellement, les cadres
supérieurs du réseau de la santé travaillent, veulent un
réseau bien administré, un réseau toujours mieux
administré. Ils veulent un réseau non pas tourné vers des
fins qui lui sont internes, mais tourné vers l'extérieur, vers
les bénéficiaires, la satisfaction de leurs besoins. On s'excuse
d'avance, on pense qu'il y a des conditions qui doivent exister pour que les
cadres s'assurent, garantissent localement que le réseau sert aux
bénéficiaires et, ces conditions, ce sont les cadres
compétents, 42,50 $, dans les dix dernières années, par
tête de pipe, pour perfectionner les cadres du réseau.
On vous lance le cri d'alarme. C'était dramatiquement
insuffisant, si on se compare aux efforts que la société
québécoise a faits pour les cadres de l'Éducation, les
cadres de la Fonction publique, les cadres d'Hydro-Québec où
c'est dix, quinze, vingt fois plus qui a été fait. D'autre part,
les cadres sont prêts à s'embarquer avec enthousiasme dans la
réforme que vous proposez. Les cadres ont pris des paris difficiles, ont
répondu "présent" lors des difficiles opérations de
compressions budgétaires. D'ailleurs, plusieurs centaines de postes de
cadres ont été coupés. Mais, malheureusement, lorsqu'il
s'agit de prendre des risques, les cadres souhaiteraient, comme les autres,
avoir un minimum de filet de protection pour être capables de faire tous
les sauts périlleux qu'il faut faire.
Troisièmement, les cadres voudraient avoir un minimum de respect
de la part des administrations locales, lorsque les décisions les
concernent. Au moment où on se parle, les cadres, par centaines, sont
affligés par des décisions qui sont peut-être justes, mais
qui sont prises d'une façon très spéciale. Pour vous
donner un exemple - et je brûle de vous le donner puisque je l'ai appris
ce matin, ce matin - il y a un cadre supérieur qui me
téléphonait pour m'in-former qu'il avait appris par la radio
locale que son congédiement serait proposé au conseil
d'administration, au début de mars. Tous les établissements ne
fonctionnent pas comme ça, mais il nous faut des roues de secours pour
empêcher que des aberrations de ce genre nous distraient de ce pourquoi
on existe, c'est-à-dire un réseau bien géré et
essentiellement tourné vers la satisfaction des besoins des
bénéficiaires.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Savard. Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. C'est avec grand plaisir que je veux saluer d'une
manière particulière M. Dumais.
Une voix:...
M. Côté (Charlesbourg): À 5 h 45, ce matin,
j'ai vérifié, il y avait même deux lits de trop.
Alors...
Une voix: Vous êtes bien renseigné. Des voix:
Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, je suis
très heureux de vous recevoir, à ce moment-ci, parce que vous
êtes définitivement un rouage extrêmement important de tout
le réseau. Si je comprends bien un certain nombre de messages, il y en a
d'abord un qui est un cri du coeur. De ce que je comprends, c'est que ce n'est
pas la première fois qu'il est fait. Vous avez été
très habile dans votre présentation. Je ne vous connaissais pas
cette habileté-là, compte tenu des rapports qu'on a eus
antérieurement.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, lorsqu'on
est face à face, on peut se reconnaître des qualités
davantage que lorsqu'on est derrière une caméra.
Évidemment, tout ça expliqué dans la réforme, en
disant que les cadres, supérieurs si je résume bien, n'ont pas
peur de la réforme, non pas n'importe quelle réforme, n'ont pas
peur de la réforme. On est pleinement conscients que ça prend une
réforme, il faut changer de cap et que, dans cette situation-là,
vous ne pouvez pas la faire sans avoir la qualité au niveau des cadres
supérieurs et c'est un peu vous qui allez
la faire, finalement. C'est ce que je comprends.
En tout cas, ce qui me frappe, parce que ce n'est pas un dossier que je
possédais, que je connaissais, c'est la situation, pour en avoir entendu
parler un peu au niveau du ministère, mais c'est la situation de la
formation, formation évolutive avec les techniques et les
méthodes et ce sont des choses que nous nous devrons de corriger le plus
rapidement possible. Et ce qui me frappe - vous étiez ici tantôt,
je le dis encore à nouveau - c'est qu'on aura consacré, cette
année, tout près de 12 000 000 $ en stabilité d'emploi
pour des chaises qui tournent - et on l'a dit tantôt, vous le vivez vous
autres aussi à votre niveau - alors qu'on pourrait avec le même
argent, définitivement, aller davantage dans de la formation ou dans
l'accompagnement de la formation pour être capables de faire face
à la musique. Ça, je pense que le message est très bien
reçu et, si le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue était ici, il l'aurait mis dans son
petit cahier vert, donc le petit cahier vert va le suivre jusqu'à la fin
de la réforme. Mais vous avez abordé des points au-delà de
ceux-là, je ne veux pas y revenir parce que l'évidence, c'est
qu'on n'a pas besoin d'y revenir.
Mais vous semblez jouer dans les mêmes talles que nous. On parie
d'atteindre des résultats par programme avec des objectifs de
résultat. Évidemment, on est au niveau du discours, par rapport
à une pratique qui n'est pas tout à fait celle-là qu'on a
aujourd'hui. Comment est-ce qu'on fait ce virage-là? Je m'adresserais
peut-être à M. Dumais, compte tenu d'expériences qu'il a
lui-même dans un établissement. Comment est-ce qu'on fait
ça demain matin et quels conseils avez-vous à nous donner pour
être capables d'y aller? Parce que je suis pleinement convaincu que vous
pouvez nous donner de bons conseils.
M. Dumais: Je ne suis pas certain que les conseils vont
être nécessairement appropriés, et j'inviterais mes
collègues à compléter aussi. Je commencerais en disant:
L'approche par programmes régionaux, d'abord, est sûrement un
ingrédient pour atteindre des résultats, que ce soit en
santé mentale, chez la personne âgée en perte d'autonomie,
que ce soit en pédiatrie ou dans des problèmes similaires.
Déjà, je connais mieux la région de Québec -
quatrième défaut - je suis un chauvin de la région de
Québec, je ne suis pas un Montréalais.
M. Côté (Charlesbourg): On a au moins le même
défaut.
M. Dumais: D'accord. Ha, ha, ha! À cet effet-là, la
région de Québec, déjà depuis quelques
années - et Mme Lavallée pourra en témoigner - fait une
approche par programmes en ce sens-là. Ça demande un changement
de conception intellectuelle et, en ce sens-là, les cadres
supérieurs bien formés, modernes dans leurs attitudes, non pas
dans le contenu technique, seraient des outils importants pour faire en sorte
que ce virage-là se produise. Donc, des programmes régionaux
d'organisation de santé et de bien-être, c'est sûrement un
élément de réponse à la question de M.
Côté, je crois, sur une base régionale. Je ne crois pas
qu'on puisse étendre une telle approche sur une base
interrégionale ou provinciale parce ça me semble trop
collé aux racines de la population qu'on a à desservir. Alors, je
pense que déjà les expériences, avant même la
réforme, vont vers là.
Un deuxième moyen - là je ne sais pas comment la
commission va régler ça ou l'avant-projet de loi ou le projet de
loi lui-même ou la réforme - ce sont les tables
d'établissement de concertation. C'est assez curieux comme, dans
l'avant-projet de loi, on a oublié de rappeler, et ce, sans
règlement, sans décret, sans loi pour une fois - ce
n'était pas une rime que je voulais faire nécessairement - que
des tables d'établissement se sont formées spontanément,
toujours dans la région de Québec où il y a sept
districts. Les directeurs généraux et les conseils
d'administration de ces établissements-là s'assoient
régulièrement ensemble et font des programmations
concertées, ensemble. Ce ne sont pas des mots que j'emploie, c'est
réel. En fait, à Québec, que ce soit Sainte-Foy,
Québec-Centre, Orléans, que ce soit rive sud - parce qu'ils sont
encore dans la région - que ce soit les régions
périphériques, on aborde les sujets maintenant, les programmes de
santé et des services sociaux par concertation d'établissement.
Je pense que c'est un deuxième moyen. Je ne crois pas que ce soit la
fusion du conseil d'administration qui va donner ça. Pour moi, les
conseils d'administration, avec tout le respect que je dois aux gens qui sont
autour, je ne crois pas qu'il y ait du pouvoir là-dedans. Le pouvoir
n'est pas là. Je crois que le pouvoir peut appartenir à des
établissements qui sont concertés et qui sont capables sans loi,
sans conseil d'administration, de desservir des bénéficiaires
dans un sous-territoire d'une région donnée. Alors, voici deux
moyens que je proposerais. Peut-être que Mme Lavallée pourrait
compléter.
Mme Lavallée (Marielle): Ce n'est pas tellement en termes
de moyens que je proposerais comme en termes d'assurance qu'on peut garantir
des résultats. On dit, par exemple, que le passé est garant de
l'avenir. Je vous rappelle le début des années quatre-vingt pour
souligner comment les cadres supérieurs se sont impliqués dans
tout ce qu'on a appelé compressions budgétaires,
restrictions budgétaires, équilibre budgétaire. Et ils se
sont embarqués, j'allais dire, dans une espèce de mariage pour le
meilleur et pour le pire, et on a, depuis quelques années,
géré le pire parce que ça touchait directement les
bénéficiaires. Alors, je voudrais vous dire qu'on est
prêts à s'impliquer, comme on l'a déjà fait
antérieurement, pour atteindre les résultats
escomptés.
Une voix: Jean-Luc. (16 h 30)
M. Tremblay (Jean-Luc): Je voudrais rajouter... Moi,
personnellement - et l'Association partage ce point de vue là - je pense
qu'il est temps qu'on redonne les hôpitaux eux malades, que le malade
soit vraiment le point central du fonctionnement des hôpitaux. C'est
quand même étonnant de constater qu'il y a des malades qui
attendent des heures de temps dans des cliniques externes, avec des
rendez-vous. C'est étonnant aussi de constater que, pendant qu'on fait
un "lifting" à des patients, dans les salles d'urgence il y a des gens
qui attendent sur des civières. Comme vous le savez, dans les
hôpitaux, il y a effectivement un certain nombre de rapports de forces et
je vous dirais que ce n'est pas évident, mais alors pas du tout
évident, que ce sont toujours les administrateurs qui font le
trafic.
Donc, les cadres, finalement, sont d'accord avec tout le processus de
rationalisation et on est derrière, à 200 milles à
l'heure, M. Côté, et on est convaincus, on est vraiment convaincus
qu'on peut sauver effectivement des millions au système. Sauf que,
parallèlement à ça, on vous avoue qu'on a une
préoccupation. Nous demander de nous asseoir à des tables avec
d'autres établissements, d'être des gens émulateurs,
faisant preuve de dépassement professionnel pour trouver des moyens de
rationaliser des dépenses, moi, je suis prêt à embarquer
là-dedans et ça m'intéresse drôlement, sauf que le
problème majeur qu'on a tous, c'est de se dire: En bout de ligne, est-ce
que je ne paierai pas la facture? Et finalement, comme on le sait, on dit
souvent: Les perceptions génèrent les attitudes et les attitudes
conditionnent les comportements. Dans les orientations du ministère, on
touche à peine du bout des lèvres ce qu'on va faire avec les
cadres du réseau.
En fait, nous, je pense qu'on est intéressés à
être dans le mouvement, on est prêts à s'asseoir autour de
la table, sauf qu'on voudrait très certainement être
rassurés par rapport à ça Et l'attitude des gens
dépend évidemment du type de partenariat qu'on va sentir de la
part du ministère, parce que, effectivement, nous, ce qu'on croit, c'est
qu'on est des partenaires et, à ce titre-là, on voudrait
effectivement être considérés comme des partenaires.
On trouve également que le quoi pourrait drôlement
être compromis si on ne se soucie pas, justement, du comment. C'est donc
pour ça, finalement, qu'on a fait certaines formes de
représentations.
M. Saint-Pierre (Gaston): Ayant été à
l'université de Sainte-Anne-des-Monts, on va se parler.
M. Côté (Charlesbourg): Ha, ha, ha!
M. Saint-Pierre: Ha, ha, ha! M. le ministre et M. le chef de
l'Opposition, ancien ministre des Affaires sociales...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Quand il va reprendre
ça, tout va être à l'ordre.
Une voix: Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Que de prétention!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Saint-Pierre: Je suis extrêmement heureux de savoir que
je parle à un régionaliste, et ça, c'est important pour
nous, en région, pour la région de Rimouski
particulièrement Et je parle au nom de mes collègues de la
région, des cadres supérieurs de la région comme telle et,
effectivement, je pense qu'il faut séparer un petit peu ce qui se passe
à Montréal, ce qui se passe à Québec, ce qui se
passe en Abitibi et ce qui se passe dans notre région. Et dans notre
région, quand on parle de formation de cadres supérieurs, vous le
savez, M. le ministre, je suis sûr que vous n'avez pas fait ça
à Sainte-Anne-des-Monts, vous avez dû vous déplacer, et
ça coûte des dollars de se déplacer, l'Association en sait
quelque chose.
Moi, ce qui m'intéresse, finalement, comme cadre supérieur
au réseau de la santé, c'est le cheminement que vous êtes
en train de faire et les décisions que vous êtes en train de
prendre. Moi, ce que je suis heureux d'entendre de vous - je vais vous flatter
un petit peu, puis c'est très honnête, puis c'est particulier aux
gens de chez nous - c'est vraiment, finalement, de prendre des
décisions, puis je pense qu'il y a des choses à corriger. Mais
j'ai été quand même profondément choqué
d'entendre un peu ce que j'ai entendu ou ce que j'ai mal lu, que le
réseau était mal géré, puis c'est nous, finalement,
qui le gérons, je pense. Je dois vous dire qu'il y a eu un effort
extraordinaire qui a été fait par nous, par des heures et
beaucoup de travail, et beaucoup beaucoup de luttes à l'intérieur
de nos boîtes. Je dois vous dire que je siège à un CLSC, je
siège aussi à un centre d'accueil et, la
complémentarité, je connais ça. C'est du
bénévolat, ça, on en fait aussi, puis ça, ce n'est
pas connu et ce n'est pas vu. C'est important que vous sachiez ça.
Finalement, on siège à d'autres conseils d'administration dans le
but vraiment d'administrer d'une façon correcte ce
réseau-là puis on tient ça à coeur, puis on aime ce
qu'on
fait; on voudrait maintenant que vous reconnaissiez notre statut de
cadre supérieur puis on va travailler avec vous autres, puis pour vous
autres, puis pour le bénéficiaire.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, évidemment, M.
le Président, on en a couvert large. J'ai senti des courants passer qui
m'intéressaient. Il y en a que je vais laisser aller volontairement
parce qu'on se rapprocherait trop des urgences puis je ne le veux pas, cet
après-midi.
Une voix: On est là pour ça.
M. Côté (Charlesbourg): Ce sera votre liberté
à vous.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Une chose qui est certaine,
c'est que lorsqu'on parle de régionalisation, ça m'apparaît
être une des voies extrêmement intéressantes. Il y a
toujours la limite de l'imputabilité parce qu'elle demeurera toujours
celle du ministre devant ses pairs à l'Assemblée nationale, mais
il faut tenter de pousser le plus loin possible les pouvoirs qu'on peut donner
au niveau d'une région.
Selon votre expérience, vous qui avez à travailler en
coordination sur le plan régional, quels sont les pouvoirs que nous
devons donner en additionnel pour que véritablement le pouvoir, au
niveau régional, ait ce qu'il faut pour être capable de faire des
choix et de faire les virages dont on se parlait tantôt, la personne et
le bénéficiaire avant toute chose? Quels sont les pouvoirs qu'on
doit donner à la région pour être capables d'y arriver?
M. Oumais: Vous m'avez invité à le faire. Allons
directement au coeur d'un problème qui vous tient beaucoup à
coeur, le bénéficiaire "jammé" dans une salle d'urgence
dans une région. Comment - transformons votre question - un pouvoir
régional pourrait-il régler ce problème-là? Et vous
nous avez invités, depuis quelques semaines, à
réfléchir à ça avec beaucoup, d'ailleurs,
d'opportunité. Robert pourrait, parce qu'on avait touché ce
thème-là, ajouter à ça. Mais à cet
exemple-là, moi, personnellement en tout cas, je crois que
l'imputabilité dans une région, dans le sens des
responsabilités d'une région, qu'on soit un membre élu ou
non, je crois qu'on en est responsable, comme employé d'une entreprise
publique qu'est le réseau de la santé dans une région.
Alors, ce bénéficiaire-là dans cette
urgence-là, c'est notre problème. Il faut, sur une base locale,
le régler et, associé à une dynamique régionale
avec des incitatifs et des désincitatifs, régler le
problème. Je pense que les conseils régionaux ne demandent
qu'à régler ça, et je ne suis pas membre d'un conseil
régional quand je dis ça. Et les conseils régionaux ont
besoin d'une approche par consensus, évidemment, de concertation avec
les établissements, autrement, ça ne passe pas. Et combien
d'établissements passent par-dessus, se rendent au cabinet avant que
vous y soyez. Et combien de conseils régionaux ne demanderaient
qu'à avoir un certain pouvoir pour modifier des comportements dans
certaines salles d'urgence, mettons.
Alors, en ce sens-là, moi, je crois que si on donne à une
dynamique régionale des cordons, du pouvoir avec des incitatifs, que ce
soit sous forme de budget, sous forme de sortie de bénéficiaires
de soins prolongés qui occupent des lits de longue durée dans les
hôpitaux de courte durée, que ce soit alourdir des
clientèles de centres d'accueil parce que les gens sont très
lourds et que ce centre d'accueil, étant performant, devrait
bénéficier, peut-être, d'un encouragement en dollars, qu'on
déplacera d'ailleurs... Je pense que sur une base locale et
régionale, ça se fait. Je ne sais pas si Robert voudrait, au
niveau de la régionalisation, ajouter quelque chose.
M. Savard: Bien, M. le ministre, je voudrais simplement ajouter
que pour nous, malgré la régionalisation, il demeure très
clair que demeure la responsabilité du ministère de la
Santé et des Services sociaux d'établir des standards. Et pour
nous, les standards doivent être les mêmes d'une région
à l'autre au Québec. Et je pense qu'on pourrait donner - le temps
est court - plusieurs exemples où cependant, dans le passé, le
ministère s'est non seulement préoccupé d'établir
des standards mais est allé jusqu'à préciser dans le
moindre détail les modalités. Les régions - c'est notre
conviction, on a beaucoup réfléchi, à plusieurs reprises
dans le cadre des travaux de la commission Rochon - sont capables, en
concertation avec les établissements, de prendre en charge les
modalités. Mais les standards, c'est la mission socio-sanitaire et c'est
le ministère qui doit faire ça. Peu d'interventions au niveau des
modalités, beaucoup au niveau des standards.
J'ajouterais un post-scriptum, si vous le permettez. Au niveau des
conditions de travail des cadres, nous autres, on est arrivés à
la conclusion que parce que la mission des cadres dépasse
l'établissement local où ils sont, dépasse parfois la
région et qu'ils participent à l'ensemble de la mission
socio-sanitaire, étant donné le petit groupe, ça,
ça ne doit pas être décentralisé, ça ne doit
pas être local, ça ne doit pas être régional. La
mobilité, on ne peut pas limiter ça à une région.
Le perfectionnement, il y a des choses qui doivent remonter à la petite
société qu'on est, finalement, de 6 000 000. Et ça,
ça doit être pris en charge centralement.
M. Côté (Charlesbourg): Je pense qu'on illustre bien
avec un exemple, l'exemple des urgences, au niveau d'une région. Si je
vous
comprends bien, Dr Dumais, il faut reconnaître aussi la
performance. Ce n'est pas toujours ce qu'on a fait dans le passé au
niveau des urgences. Donc, reconnaître là où on est
performants et, effectivement, avec des sommes additionnelles,
reconnaître cette performance-là. Mais ça implique tout de
môme qu'au niveau régional il y ait quelqu'un quelque part qui a
le pouvoir de décider.
Prenons un exemple particulier, celui qu'on a vécu. On a appris,
par la suite, que la situation compliquée du CHUL, à un certain
jour X, était due au fait qu'il y avait de l'électif qui avait
été repoussé et il y avait des médecins, sur le
plan interne, qui avaient le feu au derrière, pour la simple et bonne
raison qu'ils ne pouvaient pas faire leur intervention élective, alors
que ces gens-là qui étaient sur les listes d'attente - il y avait
des exemples - étaient allés dans deux autres hôpitaux de
la région du Québec et avaient pu court-circuiter la liste
d'attente et être traités de manière plus rapide qu'au
CHUL. Ça, ça impliquait qu'il y a deux autres hôpitaux dans
la région de Québec qui n'avaient pas eu le sens de la
région pour régler des problèmes d'engorgement d'urgence
alors qu'il y avait des disponibilités. Vrai ou pas vrai?
M. Dumais: En partie vrai.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Même, presque
totalement vrai. À ce moment-là, on arrive dans une situation
où, effectivement, il faut qu'il y ait quelqu'un, quelque part, sur le
plan régional, qui ait le pouvoir de décider. Si ce n'est pas au
ministère, il faut que ce soit quelque part. Donc, ça prend un
coordonnateur régional qui ait le pouvoir, non pas uniquement au niveau
de l'établissement mais au niveau régional, de faire ces
choix-là fondamentaux, au moment où on a des problèmes
à régler. Moi, ça me paraît être une... Parce
que ça va toujours prendre... Même, de la concertation sur le plan
régional, on peut prendre des exemples très précis dans la
région de Québec où ça a donné des
résultats, mais on peut en prendre d'autres où ça n'en a
pas donné du tout, où ça a amené des culs-de-sac
sur le plan des décisions. Évidemment, chacun défendant
son intérêt, il faut que cette structure-là soit capable
d'arbitrer et de prendre des décisions et de ne pas avoir de
possibilité de recours au ministère, à Dieu le
Père, ou à la Cour suprême, Cour supérieure,
appelez-la comme vous voulez, pour qu'on puisse aHer demander un arbitrage
ailleurs. C'est ça, la volonté de transférer des pouvoirs
au niveau régional pour qu'ils puissent se prendre là sans
appel.
Évidemment, je pense que la porte était trop belle pour
qu'on soit capables de se parler de ça, mais j'avais soulevé
quand même des choses qui m'intéresseraient. Dans votre
mémoire, vous attaquez un problème qui me paraît
très intéressant à ce moment-ci et qui risque de prendre
de l'ampleur lorsque le phénomène sera connu. C'est à la
page 24, je crois. Page 22, les fondations. On ne se le cachera pas, la
vérité, aussi crue qu'elle puisse paraître aujourd'hui,
c'est que les compagnies pharmaceutiques, les vendeurs de produits ont
trouvé le moyen d'entrer par la porte des fondations. Il y a des
exemples. Le lait pour bébé, c'en est un exemple. Vous nous dites
ici, là-dedans, de manière assez crue: Certaines fondations - je
n'ai pas de cas précis mais j'ai entendu bien des rumeurs - peuvent
servir à payer la différence pour des médecins qui sont
impliqués dans la rémunération différenciée,
donc, pour les garder au niveau d'un établissement, et ça peut
être, à l'occasion, la fondation qui paie. En tout cas, j'ai
compris que, dans certaines allusions, il y avait ça. Ce que vous dites:
II ne faut pas entraver le travail des fondations, il ne faut pas
empêcher non plus les gens de travailler au niveau des fondations, parce
que c'est toujours utile, puis, effectivement, c'est utile. Ils vont chercher
des sommes que le gouvernement n'irait jamais chercher autrement que par des
compagnies qui produisent des biens. Mais vous dites, là-dedans: "D'une
part, l'Association est d'accord que les sommes recueillies par des fondations
ne doivent pas servir à combler les insuffisances, même
réelles, de la politique salariale s'appliquant aux cadres. " C'est
parent proche de ce que je vous ai dit, là. Donc, c'est une situation
qui existe. C'est clair qu'il peut y avoir une insuffisance, du point de vue
où on se place, mais le rôle fondamental d'une fondation, pour
vous autres, est-ce que c'est de pallier des carences sur le plan du paiement
salarial ou si ça doit servir à autre chose au niveau des
établissements que vous représentez?
M. Dumais: II n'y a aucun doute dans notre esprit que ça
ne doit pas servir à payer mieux les cadres ou les médecins,
c'est vous qui le dites. Moi, je ne suis aucunement au courant de situations de
ce genre-là, et j'espère que c'est vrai aussi pour les fondations
des grands hôpitaux de I'île de Montréal, que ce soit
Sacré-Coeur ou d'autres. Je n'en doute pas du tout.
Les fondations elles-mêmes, pour moi, c'est extrêmement
clair, font partie du quart de la budgétisation des coûts de
santé au Québec. J'ai dit tantôt qu'un quart était
payé par le privé, et les fondations font partie de ce quart des
1700 $ per capita qui sont payés par année pour les soins de
santé. Les fondations font partie de ça. Alors, les fondations,
pour nous autres, c'est évident que c'est un moyen d'impliquer la
communauté - je pense que les Anglo-Saxons ont compris ça depuis
longtemps - pour développer des services dont les
bénéficiaires ont besoin au niveau de l'enseignement des soins et
de la recherche. Nous autres, c'est strictement en ce sens-là qu'on a
introduit ces trois paragraphes-là.
M. Savard: On attirait simplement votre attention, M. le
ministre, sur le fait que la prohibition contenue dans la loi était
absolue. On pensait qu'au lieu d'avoir recours à des firmes
privées les fondations pouvaient tout naturellement se tourner vers les
gens qui travaillent dans les établissements pour leur faire faire du
travail à moindre coût. (16 h 45)
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je vais
maintenant reconnaître le leader de l'Opposition et porte-parole officiel
en matière de santé.
M. Chevrette: Je vais commencer par les urgences, tel que je vous
l'avais promis. Je suis un peu surpris de la réaction du ministre, tout
en étant heureux de la remarque de M. Saint-Pierre, parce que je pense
qu'on est portés à généraliser et, à mon
point de vue, c'était un petit peu, pas mal, pas correct
vis-à-vis de l'ensemble du réseau. Je pense qu'effectivement...
Parce que un, deux ou trois établissements se paient la tête d'un
ministère, on ne doit pas juger l'ensemble des administrateurs.
Effectivement. D'autant plus que je suis surpris de la réaction du
ministre, d'abord, de sa réaction vive du départ;
deuxièmement, de sa réaction par rapport aux propos qu'il tient
depuis le début de la commission. Il a dit à tous ceux qui
voulaient l'entendre que les conseils d'administration unifiés, il n'y
en aurait plus. L'avant-projet était caduc là-dessus.
Il dit que ça prend, d'autre part, de la coordination
régionale. L'exemple du CHUL, il ne peut pas se produire mille et une
fois, avec des conseils d'administration uniques. Vous le savez très
bien, c'est l'autonomie d'un établissement. Ou bien vous allez faire une
seule gestion unique au niveau de la région, pour éviter que des
situations... C'est utopique de penser que ça ne se produirait pas. Il
faudrait être naïf de penser qu'à l'intérieur du
réseau il ne se produirait pas un problème de cédule
d'opération élective dans un hôpital, qu'il y ait un
événement qui bouleverse la cédule d'un hôpital,
d'un centre hospitalier et que ça n'aura pas une incidence, à un
moment donné, dans un autre centre d'une même région.
Je ne vous penserais pas... à vous avertir, ce n'est pas vrai. La
complémentarité n'ira pas là La
complémentarité dos établissements, c'est beaucoup plus un
peu comme Urgences-santé fait à Montréal, qui dit: Je suis
débordé ce matin, prends quelque chose. Si vous vous piquez de
penser que vous allez prévoir, même dans un centre hospitalier, ce
qui pourrait se passer le lendemain matin, c'est une aberration, pour deux
lits. Si vous pensez éliminer ça, vous rêvez en couleur,
à mon point de vue.
C'est bien beau se parler, "6 000 000, il faut se parler", mais quatre,
cinq centres hospitaliers dans la région de Québec, un coordon-
nateur pour l'ensemble des urgences, ça n'a pas d'allure, vous le savez
très bien. La centrale Urgences-santé ne réussit
même pas, à Montréal. Et ils ont des spécialistes
à la tonne pour le faire. Vous savez que les imprévus dans un
centre hospitalier, il y en de même. Un accident grave, à
Québec, sur le pont de Québec, l'Hôtel-Dieu... Ils ne
pourraient même pas les garder tous au CHUL, vous savez. Vous allez
déranger même la planification de l'Hôtel-Dieu.
M. Dumais: Vous parlez d'une fusillade au parlement, quand
vous...
M. Chevrette: Je ne crois pas d'une façon réaliste
et pragmatique qu'on puisse régler ce genre de situation ponctuelle qui
peut déranger. Il ne faudrait surtout pas juger de la qualité de
l'efficacité des administrateurs parce qu'il y a un dérangement
subi. Il faut d'abord aller aux causes. C'est vrai que les causes peuvent
dépendre d'une autre institution, mais les causes peuvent être
d'une nature purement conjoncturelle. Il faut les accepter. Ça fait
partie de la vie quotidienne d'un centre hospitalier. En tout cas, c'est comme
ça que je l'ai compris. C'est pour ça que je pense que les vraies
manières de régler et de planifier à long terme au niveau
des urgences, si on ne donne pas un coup de barre au niveau du domicile, si on
n'injecte pas des sommes valables pour garder nos personnes chez elles, on va
les retrouver à l'urgence. Des fois, à cause de la
température, vous allez peut-être avoir un flot plus grand. Par
exemple, en février, ça arrive des fois. À Noël, il y
a toutes sortes d'événements qui font qu'à un moment
donné, oups, il nous arrive toutes sortes de gens qui ont une
fragilité de santé un peu plus grande. C'est normal. Si on
n'injecte pas, on ne corrige pas à la source.
Je pense que la perspective d'avenir dans ça: ou bien on
crée des postes en centre d'accueil ou bien on injecte de l'argent dans
les soins à domicile, et là, on risque de corriger à long
terme. Sinon...
Une voix:...
M. Chevrette: Ça prend les deux, effectivement. Sinon,
à court terme, on aura beau avoir un agent de trafic mieux
structuré avec plus de pouvoir, je ne crois pas qu'on va éviter,
par exemple, que ça passe. C'est clair.
M. Dumais: II n'y a pas de question, au bout de votre
description.
M. Chevrette: Je n'en veux pas.
M. Dumais: J'aimerais rappeler des événements.
Urgences-santé, à Toronto, coûte 44 000 000 $ par
année; à Montréal, avant que ce soit sorti du conseil
régional, ça coûtait
40 000 000 $. Et il n'y a aucun indicateur de santé qui
démontre que les Montréalais...
M. Chevrette: Mais vous êtes en retard dans les chiffres,
à Montréal.
M. Dumais: Oui, oui, je parle de plusieurs années. Et il
n'y a aucun indicateur de santé qui démontre que les
Montréalais sont en meilleure santé que les gens de la
région de Rimouski ou de Québec parce qu'ils ont une centrale
comme Urgences-santé.
M. Chevrette: Au contraire, ils sont plus à la merci du
système.
M. Dumais: Oui. Deuxièmement, j'aimerais rappeler à
M. Chevrette que les urgences, c'est comme un pont. Un pont, que ce soit
Jacques-Cartier ou celui de Québec, à 17 heures, il est tout le
temps paqueté. Les urgences sont là pour ça. Il y aura
toujours des afflux qui varient d'heure en heure et de jour en jour...
M. Chevrette: Oui, mais là-dessus, docteur...
M. Dumais: Je suis d'accord avec vous dans ce sens-là.
M. Chevrette: ...je pense qu'on pourrait... J'ai visité
d'autres pays et ils n'ont pas ce flot aux urgences. Pourquoi? Parce qu'ils ont
habitué, ils ont acheminé, ils ont déjà des
critères de base qui font.. Prenons un exemple concret, c'est la
Belgique. En Belgique, vous n'avez pas 200, 300 ou 400 patients par jour aux
urgences. Pourquoi? Parce que, pour des problèmes mineurs, ce n'est pas
à l'urgence que ça va, c'est dans des polycliniques
accréditées ou bien c'est dans des cliniques privées, en
dehors. Les vraies urgences, ce sont des cas majeurs.
M. Dumais: Vous permettez?
M. Chevrette: C'est une question de mentalité, ici, et de
fonctionnement. Les médecins qui chialent, dont vous êtes du
corps, mon cher collègue, les médecins qui chialent souvent que
les urgences sont encombrées, j'en connais même qui font venir
leurs patients à l'urgence parce qu'ils sont de garde. J'en connais
même sur leur répondeur automatique qui disent au client: Oui,
voici, nous sommes fermés depuis 17 heures. Si vous avez des
problèmes, venez à l'urgence. Bon Dieu! Si on a
développé le réflexe de l'institution, il y a des
médecins qui ont développé le réflexe de l'urgence,
en convenez-vous?
M. Dumais: J'aimerais rassurer M. Chevrette quand même sur
un élément. Les gens qui encombrent nos urgences, ce ne sont pas
les gens qui achalandent nos urgences. Si 80 %, 40 % et 60 %... J'ai fait de
l'urgence pendant dix ans, sur la ligne de feu, je peux vous dire que les gens
qui sont là, ce n'est pas pour des bineries genre psychosocial ou je ne
sais pas quoi C'est parce qu'ils ont soit une infection dans l'oreille, soit
une température, une plaie, une fracture, ou pour des urgences majeures.
Le problème d'encombrement d'urgence est un problème majeur. Ce
ne sont pas les CLSC, les polycliniques privées ou la santé
communautaire qui vont régler les ACV, les infarctus, les
polytraumatisés qu'on a dans nos urgences. Pour l'achalandage,
ça, c'est une question de politique de réseau. Cet achalandage
là peut être réparti, do toutn façon, à
travers le réseau actuel Et j'aimerais juste rappeler à M.
Chevrette trois événements: des gens qui ont consulté pour
leurs problèmes de santé, l'an dernier, sur l'île de
Montréal, 67 % ont consulté les médecins dans les
polycliniques privées, 7 % dans les hôpitaux, 12 % dans les CLSC.
Alors, je ne vois pas où est le problème. Ce n'est pas un
réel problème. De là à changer les
mentalités, de faire en sorte que la population s'adresse en prenant sa
santé en main, au niveau de la première ligne, on en est,
évidemment.
Mme Lavallée: Si vous me le permettez... M. Chevrette:
Oui madame.
Mme Lavallée: ...je compléterai en disant On a dit
tantôt que, pour nous, on trouvait que c'était important, la
régionalisation. Moi, je dirais, j'ajouterais à ça que si,
au lieu de dire que ça prend un coordonnateur, on disait que, selon la
région qui connaît sa population, qui connaît ses
intervenants et les gens avec qui on travaille, on décidait de la
meilleure solution plutôt que de penser à un coordonnateur pour
tous. C'est une première chose. Mais je voudrais revenir aussi sur le
fait qu'on a dit: Reconnaissons les performants dune façon tangible et
on va avoir des résultats. On a parlé des résutats;
tantôt, on va en avoir des résultats, si on reconnaît les
performants, parce que les non-performants, ils viendront se joindre aux
performants parce qu'ils sauront qu'ils sont reconnus.
M. Chevrette: Mais il ne faudrait pas aller non plus... J'aurais
une remarque. Je ne sais pas si c'est dans l'Estrie, hier.. Ce n'est pas un
problème mathématique, le problème des urgences et du
désengorgement des urgences. Il y en a qui disent: Oui, mais
l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul passe tant de patients et
l'Hôtel-Dieu. à côté, en passe plus. Ça ne
veut rien dire, ça dépend de la nature, de la
spécialisation, bien souvent, du centre hospitalier. J'espère que
les gens vont arrêter de comparer des choses qui ne sont pas comparables
à partir des vocations ou des spécialisations. Les
spécialités, qu'est-ce que ça donne à un centre
hospitalier? Je pense que
l'Hôtel-Dieu de Québec ne pourrait pas être
jugé sur un même pied que l'hôpital du Saint-Sacrement
à Québec, et tout le monde en conviendrait, quand il a les grands
brûlés où les grands traumatisés. Je veux dire, on
ne prend pas, ça ne commande pas le même nombre d'heures de soins,
et ça, je pense que les gens ne comprennent pas ça. Ils
comparaient... Il y a une personne qui me disait: À l'hôpital
Saint-Vinceht-de-Paul, 40 000 par année et à l'Hôtel-Dieu,
90 000, n'est-ce pas effrayant comme l'autre n'est pas performant? On ne peut
pas baser la performance non plus à partir de chiffres aussi
mathématiques que ça parce que, là, ça deviendrait
encore plus injuste vis-à-vis des administrateurs et vis-à-vis
des cadres qui gèrent la boîte. Moi, j'ai trouvé ça
un petit peu fort, mais il y a du monde qui va jusque-là, se servant du
prétexte, précisément, que le ministre dit: Bon,
j'instaure un système de contrôle très
sévère. Si c'est ça, je vous avoue qu'on contribuerait en
maudit à déshumaniser encore davantage le système, si on
le rend mathématique, au point de vue performance.
Mme Lavallée: Je voudrais juste ajouter un commentaire.
Depuis les propos qu'on tient, vous vous êtes sans doute aperçus
qu'on a parlé de l'abondance du coeur des problèmes qui nous sont
tous communs. Donc, vous pouvez constater, comme cadres supérieurs,
comment on a de l'intérêt à vouloir régler avec
vous, en partenariat, cette problématique-là. On veut travailler
en collaboration. On veut être des partenaires. On veut être des
associés pour le meilleur et pour le pire, bien sûr, mais en
ajoutant un petit peu de meilleur dans le pire qu'on a à gérer,
bien sûr, et tout en vous disant que, bien sûr, il faut être
responsable et imputable des gestes qu'on pose. Nous avons un sentiment de
fierté. Nous avons un sentiment d'appartenance au réseau. On
travaille avec conviction et foi et je pense que ça... On a besoin
d'avoir une certaine réhabilitation sur ça et votre apport est
absolument important. Je me permets de dire que je rêve... Je me permets
de rêver, mais ce sont des rêves réalisables et des
rêves collectifs où, ensemble, on pourrait travailler et se
reconnaître dans nos fonctions.
M. Chevrette: Pour votre...
Une voix: Peut-être que M. Tremblay...
M. Chevrette: Excusez-moi.
M. Tremblay (Jean-Luc): Est-ce que je pourrais ajouter quelque
chose?
Le Président (M. Joly): Oui.
M. Tremblay (Jean-Luc): L'été, par exemple, dans
les urgences, il n'y en a pas de problème, relativement pas. Pourquoi
ça? Parce qu'il y a des lits. Pourquoi y a-t-il des lits?
M. Chevrette: C'est parce qu'il ne se fait pas de chirurgie
élective.
M. Tremblay (Jean-Luc): Parce qu'il y a moins d'électif.
La même chose, les fins de semaine. Si on regardait, par exemple, les
résultats de la semaine de relâche, je suis à peu
près certain qu'on va peut-être être étonnés
tout à l'heure de voir les places disponibles. Alors... Je voudrais
ajouter, finalement, ce que j'ai dit tout à l'heure, si vous me le
permettez. Si ça prend cinq ans ou même dix ans au système
pour être capable de faire une forme d'épuration, parce qu'on se
sera associé l'ensemble des cadres, parce qu'on aura mis tous les cadres
ensemble pour être capables d'être imaginatifs, de trouver des
solutions rentables et économiques, si ça prend cinq ans à
cause de l'attrition, à cause des départs, moi, je me dis: On va
sauver des millions, des millions et des millions. Et je pense qu'on doit
certainement considérer une forme de partenariat et de complicité
entre le ministère et nous autres. Ce qui nous préoccupe, et je
reviens sur ça, c'est, effectivement, la considération et ce que
le ministère pense faire avec cette dimension-là. Que va-t-il
advenir tout à l'heure de l'ensemble des cadres qui vont s'asseoir
autour des tables et qui vont travailler avec vous?
Le Président (M. Joly): M. Saint-Pierre.
M. Saint-Pierre: M. Côté, je sais qu'il nous a
compris mais vous, M. Chevrette, ayant été gâté de
l'éducation, un négociateur chevronné il y a quelques
années, je suis sûr que vous allez défendre cette
partie-là, au niveau de l'Opposition, soit au moins
l'équité au niveau des cadres des affaires sociales par rapport
aux autres employés du gouvernement. On ne vient pas quêter. Je
pense que c'est aberrant, que c'est tout simplement aberrant et on
espère que vous ne nous oublierez pas.
M. Chevrette: M. Saint-Pierre, M. Savard a dû vous
donner l'information...
M. Saint-Pierre: Non, c'est Ghislain Jean ... M. Chevrette:
...à l'effet que j'ai...
M. Saint-Pierre: C'est Ghislain Jean qui m'a donné
ça.
M. Chevrette: Oui, mais M. Savard vous a sans doute dit que
ça n'a pas bougé depuis que je suis parti.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Saint-Pierre: Je ne serais pas prêt à dire
ça, quand même.
M. Chevrette: Demandez-lui. Demandez-lui publiquement: Qu'est-ce
qui s'est fait au niveau du perfectionnement, depuis 1985?
M. Saint-Pierre: Ce que j'aimerais dire, M. Chevrette, c'est que,
comme société, moi, je peux le dire, je suis un homme, c'est
gênant d'avoir le problème des disparités dans les
conditions de travail des cadres parce qu'à la fonction publique, les
postes de cadres sont occupés à 4 % par des femmes. Dans
l'éducation, ce n'est même pas 20 %. Dans les affaires sociales,
près de 55 % des postes de cadres sont occupés par des femmes. Ce
ne sont pas juste les cadres intermédiaires. Chez les cadres
supérieurs, il y a 36 % des postes qui sont occupés par des
femmes. Moi, je trouve ça gênant que le réseau le moins
bien doté en termes de conditions modernes de travail et le
réseau pour lequel on a beaucoup de difficultés à
régler, ce soit un réseau qui est surtout constitué de
femmes. En tant qu'homme, je tiens à le dire.
M. Chevrette: Là-dessus, j'aurais dû commencer mon
questionnement par le suivant: Depuis quand ça a-t-il bougé,
ça n'a-t-il pas bougé? Et vous auriez répondu: Depuis
1985.
M. Saint-Pierre: Hum!
M. Chevrette: Ceci dit... C'est vrai, effectivement. Je la
savais, l'information, c'est pour ça que je ne vous l'ai pas
posée. C'est parce que je vous ai entendu, M. Savard, dire la même
chose, lors de l'adoption de la loi - je pense que c'est 97 ou 197, je ne le
sais pas - 97. Quand on a parlé des effectifs médicaux, des
fameuses fondations et des conflits d'intérêts des D.G. sur...
C'est à cette loi-là que vous étiez là Quand j'ai
lu votre mémoire, j'ai dit: Tiens, ils reprennent des passages
formulés dans leur mémoire sur la loi 97.
M. Dumais: II reste encore quelques champs dans le réseau
des cadres supérieurs, mais ils sont encore importants.
M. Chevrette: Non, je vous donne raison, je vous donne raison
à 100 milles à l'heure Je conçois mal, surtout au niveau
de la santé et des services sociaux, qu'on n'ait pas les mêmes
sommes comparables au niveau du perfectionnement des cadres. Parce qu'on joue
avec la santé des gens, on joue avec des milliards encore plus, si on
compare avec l'éducation. 30 % du budget d'une province, c'est quelque
chose. On doit avoir des cadres à la page, "up to date", comme disent
les Anglais.
C'est vrai que je n'ai jamais compris pourquoi même tous les
gouvernements... Je ne cherche pas à être un partisan aveugle. Je
vous dis que je n'ai jamais compris pourquoi il y a une disparité dans
le perfectionnement entre l'éducation et les affaires sociales, quand on
est supposé avoir une politique monétaire, une politique
salariale, une politique de traitement de ses employés, de ses cadres.
Je n'ai jamais compris pourquoi il y avait une disparité,
effectivement.
En 1985, effectivement - je le faisais peut-être en boutade mais
j'étais sérieux - je lavais dit publiquement, à ce
moment-là, je ne comprenais pas la disparité. Il y a un
gouvernement dans un gouvernement qu'on appelle le Trésor, ça ne
va pas toujours aussi vite qu'on voudrait, au niveau d'un ministère,
ça, je n'en disconviens pas, mais il reste qu'on n'a jamais
donné, comme gouvernement ou comme État, de réponses
intelligentes au pourquoi de la disparité. Vous avez raison. On n'est
pas pour se cacher, vous avez raison.
M. Savard: M. Chevrette, ce que je peux vous dire, c'est que les
Conseils du trésor ont l'air de se suivre et de se ressembler.
M. Chevrette: C'est exactement ce que je viens de vous dire.
M. Savard: L'autre chose qui a l'air de se ressembler beaucoup,
au niveau des conditions normatives, c'est-à-dire au niveau, par
exemple, de la protection contre les décisions arbitraires, les
associations d'employeurs, l'AHQ, l'ACAQ et les autres, et je vous parle de
façon bien sincère, c'est qu'on a l'impression qu'on prie le
gouvernement de ne pas prendre toutes ses responsabilités.
M. Chevrette: Oui, mais...
M. Savard: Et nous, on s'attend que le ministère des
Affaires sociales règle ce problème social.
M. Chevrette: J'ai découvert, dernièrement - c'est
par hasard, c'est un cadre qui est venu à mon bureau - que le
gouvernement, lors de l'adoption des normes du travail, les anciennes normes -
je ne me souviens pas en quelle année - s'était soustrait sur
toute la ligne, comme gouvernement et avec ses sociétés d'Etat,
à l'application même des normes minimales, de sorte qu'on ne peut
pas se servir des normes minimales pour défendre ou soutenir même
un cadre d'une société d'État ou du gouvernement.
Ça, j'ai trouvé ça... Je l'ai découvert par hasard.
Si je n'avais pas eu un cas du genre, je ne l'aurais pas su, ce qui prouve que
des adoptions de législation dans les fins de session, avec une
avalanche de projets de loi, tu n'es pas toujours sur place quand ça
s'étudie et tu te rends compte, par après, a posteriori, quo
l'Assemblée nationale crée des discriminations dans le
traitement de ses personnels. Donc, oui, je suis très sensible
à ça. Si le ministre l'inclut dans son projet, on l'appuiera;
s'il ne l'inclut pas, on fera des amendements pour l'inclure.
M. Dumais: Peut-être, M. le Président, avant de...
J'imagine que le temps est écoulé.
Le Président (M. Joly): Quelques minutes.
M. Dumais: J'aimerais conclure en disant qu'on veut être
des cadres avec M. Côté, dans cette réforme-là, dans
cette entreprise-là, même s'il n'y avait pas de réforme, on
tient à être des cadres maniaques de la connaissance, des cadres
japonais, entre guillemets, j'insiste. On veut être les meilleurs
là-dedans parce que le réseau de la santé et du
bien-être social, c'est un réseau complexe, délicat et qui
ne ressemble à aucune autre raison sociale au Québec. Alors, on
veut être partenaires là-dedans. Et peut-être, en terminant,
qu'on pourrait, en collaboration avec Gaston, sûrement inviter M.
Côté à Rimouski, en octobre, puisqu'on tient notre
congrès à ce moment-là. Je suis certain que vous ne
pourrez pas éviter de repasser dans cette région-là. Je
suis certain que Gaston va être d'accord avec ça, puisqu'il
préside le congrès. J'ai raison?
M. Saint-Pierre: Je suis tout à fait d'accord et je
voudrais vous dire quand même que le soleil se lève à
l'est.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, en terminant, pour ne
pas être injuste vis-à-vis du Trésor, il a un rôle
très ingrat à jouer, je tiens à le répéter
et à ne pas l'oublier, c'est lui qui doit balancer un certain nombre de
choses. Il s'agit que le ministre en fasse un dossier prioritaire pour lui et
qu'il convainque le Trésor; c'est son rôle fondamental à
lui. Le Trésor a son rôle à jouer, c'est au ministre de
jouer le sien. J'ai compris l'essence du message qui a été
livré aujourd'hui; non pas seulement entendu, mais compris.
Évidemment, octobre, c'est un très beau temps pour être
capable d'aller vous parler de la vraie réforme. Merci.
Le Président (M. Joly): Alors à mon tour, au nom
des membres de cette commission, je tiens à vous remercier et je me
permettrai de dire à tous ceux qui se sont identifiés comme
chauvins qu'on dit qu'un péché avoué est à
moitié pardonné, alors on comprend les situations.
Alors, nous ajournons nos travaux à demain 10 heures, ici, dans
la même salle. Merci.
(Fin de la séance à 17 h 6)