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(Dix heures neuf minutes)
Le Président (M. Joly): Bonjour tout le monde. Cette
commission se réunit dans le cadre d'une consultation
générale et d'auditions publiques afin d'étudier
l'avant-projet de loi qui est la loi modifiant la Loi sur les normes du travail
et, nécessairement, d'autres dispositions législatives. Mme la
secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Boucher
Bacon (Bourget) sera remplacée par M. Charbonneau (Saint-Jean); M.
Chevrette (Joliette) par Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve); M. Paradis
(Matapédia) par M. Poulin (Chauveau). Voilà.
Le Président (M. Joly): Aujourd'hui, nous recevrons
l'Association des camps du Québec, le Regroupement interorganismes pour
une politique familiale au Québec et, finalement, le Syndicat des
fonctionnaires provinciaux du Québec. J'inviterais donc l'Association
des camps du Québec à bien vouloir prendre place, s'il vous
plaît, à s'approcher.
Bonjour et bienvenue à cette commission. J'apprécierais si
la personne responsable pouvait s'identifier et aussi nous présenter les
gens qui l'accompagnent, s'il vous plaît.
Association des camps du Québec
M. Jean (Louis): Bonjour, je suis directeur général
de l'Association des camps. À ma droite, M. Pierre Bigaouette, membre du
conseil d'administration de l'Association et directeur général
des camps Trois-Saumons et Minogami. M. Bigaouette est également
trésorier de l'Association. À ma gauche, Mme Catherine Geoffroy,
membre du conseil d'administration et secrétaire de l'Association, du
camp Le Ranch Massawippi.
Le Président (M. Joly): Merci. Brièvement, je vous
explique un peu la procédure. Vous avez une quinzaine de minutes pour
nous présenter votre mémoire de la façon la plus concise
possible et, par après, eh bien, les membres de cette commission, autant
du côté ministériel que des membres de l'Opposition, se
réservent le plaisir et le loisir de vous poser des questions. Alors,
allez, M. Jean.
M. Jean: Rapidement, pour vous présenter un peu c'est qui
et c'est quoi l'Association des camps du Québec. L'Association regroupe
115 camps de vacances, qu'on trouve un peu partout au Québec, dans un
peu toutes les régions du
Québec. L'Association offre à ses membres un certain
nombre de services dans le domaine de la formation, de l'assistance-conseil, de
la promotion, de la communication et également un service
d'accréditation. Chaque camp membre de l'Association doit être
reconnu par l'Association, c'est-à-dire qu'il doit respecter les normes
de l'Association des camps, les normes qui couvrent différents secteurs
d'intervention des camps au niveau de tout ce qui est qualité des menus,
par exemple, formation du personnel, encadrement des campeurs. Ici, on parle du
ratio personnel-campeurs, une question d'intervention en cas d'urgence, des
relations des consommateurs, des choses de cet ordre-là.
L'Association existe depuis 1961. C'est un organisme évidemment
sans but lucratif. Elle regroupe environ 80 % des camps de vacances au
Québec. Évidemment, l'adhésion à l'Association est
sur une base volontaire.
Je vais commencer par vous présenter un peu le fonctionnement
d'un camp de vacances pour vous illustrer un peu c'est quoi le milieu de
travail en camp de vacances. Chaque année, un peu plus de 100 000
enfants fréquentent les camps de vacances de l'Association des camps. On
dit que tout près de 150 000 enfants en tout fréquentent chaque
été les camps de vacances au Québec. Ordinairement, c'est
pour des périodes de deux semaines. C'est la période la plus
populaire, malgré qu'un certain nombre y vont pour une semaine ou pour
un mois ou même plus, mais c'est la période de deux semaines dans
80 % des cas, qu'on retrouve. Les jeunes, pour la majeure partie, ont de 8
à 14 ans. Il y a environ 10 ou 11 camps, je crois, de l'Association qui
accueillent à partir de l'âge de 4 ans. De plus en plus, on
s'oriente vers et on accueille une clientèle préscolaire, puis on
va jusqu'à l'âge de 16 et 17 ans. C'est une gamme de programmes,
qui est offerte selon les âges et selon ce que chaque camp
développe comme programme, comme produit, finalement.
Alors, quant à la vie en camp de vacances, je suis certain que
plusieurs d'entre vous sont déjà familiers un peu avec le camp de
vacances. C'est un peu le prolongement de la famille. L'enfant sort de son
milieu familial, il n'est pas accompagné de ses parents, il se rend sur
place pour passer son camp de vacances de deux semaines. Le camp de vacances
doit non seulement procureur à ses campeurs un programme d'animation qui
se veut éducatif et récréatif, mais également
procureur à cet enfant-là tous les soins auxquels il est en droit
de s'attendre en famille: tout ce qui est côté sanitaire,
côté alimentation, l'enfant qui s'ennuie, deux conflits entre deux
enfants, la surveillance lors du
sommeil la nuit, s'assurer que tout le monde mange bien, qu'on change de
linge chaque jour, qu'on ait du linge propre, tout ce qui est question aussi
d'alimentation, non seulement de fournir les repas, mais s'assurer que les
enfants mangent bien, qu'ils mangent leurs pois verts, qu'ils boivent leur jus
d'orange, un peu toutes ces choses-là.
La vie en camp de vacances, c'est une journée type, une
journée normale. Réveil le matin, activités qui s'y
déroulent toute la journée, puis en soirée grandes
activités, coucher, puis ensuite on se reporte au lendemain matin.
D'autres programmes sont un peu plus spécialisés, où les
jeunes vont partir avec un groupe de moniteurs ou d'animateurs - ceux qui
accompagnent les jeunes en activités, on les appelle les moniteurs -
pour une période plus prolongée qui peut être de 24 heures
et qui peut aller jusqu'à 21 jours. C'est ce qu'on appelle des
randonnées, des excursions, des grandes randonnées. A ce
moment-là, les jeunes sont pris en charge par un groupe d'animateurs et
vont vivre souvent en pleine nature, soit en canot-camping, en randonnée
pédestre, en cyclotourisme, peu importe, bon, un programme avec un
certain nombre d'expériences, maintenant, pour développer surtout
la vie de groupe et développer la vie en plein air, le contact avec la
nature. Les études de marché qu'on fait
régulièrement révèlent chaque fois que ce qui est
recherché le plus par le jeune et par le parent, c'est la richesse de la
vie de groupe et le contact avec la nature. Aussi, on attache beaucoup
d'importance pour ce qui est du parent qui est également consommateur.
Il n'est peut-être pas client, mais concommateur quand même. Il a
certaines attentes qui ne sont pas nécessairement les mêmes que
l'enfant, mais le parent a souvent une attente par rapport à la
réputation du camp, à savoir la qualité des soins que le
camp est réputé d'apporter à ses campeurs, une
qualité de l'attention. Alors, tout ça pour nous, comme je le
disais un peu plus tôt, le camp de vacances, c'est un peu un prolongement
de la famille. Lorsque l'enfant est envoyé à un camp de vacances,
qu'un parent inscrit son enfant à un camp de vacances, on s'attend
à ce qu'il puisse vivre dans un milieu d'aussi bonne qualité que
celui qu'il va trouver dans son milieu familial. Tout ça appelle les
camps de vacances à recruter et à former un personnel qui est en
mesure d'apporter cette attention-là et qui est présent sur place
pour être effectivement capable d'apporter cette qualité de soins
dont on s'attend et qu'il est important aussi d'apporter aux jeunes
campeurs.
Qui sont ces étudiants? Pour la majeure partie, ces
employés, ces moniteurs et monitrices, sont des étudiants et des
étudiantes. On sait que le camp de vacances, le gros de l'année,
est surtout durant la période de congé scolaire
d'été. Il y a de plus en plus de camps de vacances qui
opèrent l'hiver, ainsi cette semaine et la semaine prochaine pour les
semaines de relâche scolaire. C'est de plus en plus populaire. Mais
évidemment, c'est la période d'été, le congé
scolaire d'été qui est le plus populaire. Tout près de
4000 étudiants chaque été trouvent un emploi en camp de
vacances, au niveau de l'animation pour la majeure partie, au niveau d'autres
travaux genre entretien ou supervision du personnel pour ceux qui ont un peu
plus d'expérience, surpervision des programmes, à la cuisine, au
niveau des premiers soins et ce qu'on appelle l'infirmerie, mais la majeure
partie des emplois sont au niveau de l'animation et de l'encadrement du
campeur. Ce sont environ, à 95 %, des étudiants qui ont
déjà une certaine formation à leur arrivée et qui
reçoivent également une formation de la part du camp de vacances.
Une des normes de l'Association des camps exige que le camp de vacances apporte
une formation à son personnel d'environ 60 heures avant le début
du camp de vacances pour connaître un peu les procédures
d'intervention en cas d'urgence, pour connaître une banque
d'activités, une banque de types d'interventions, connaître un peu
la clientèle qui vient au camp, des techniques d'animation, aussi le
travail en équipe, etc. Alors, il y a des moniteurs qui constituent la
majeure partie des employés. Ensuite, d'autres employés sont ce
qu'on appelle les chefs d'unités qui ont à superviser un groupe
de moniteurs qui, eux, ont le soin d'un groupe d'enfants. Alors, le chef
d'unité des garçons de 9 à 11 ans ou des jeunes filles de
6 à 8 ans, par exemple, c'est ce qu'on appelle une unité en camp
de vacances. Il y a aussi des moniteurs qui ont une tache qu'on dit de
spécialistes, c'est-à-dire qu'ils ont à enseigner une
activité, soit le tir à l'arc, la natation, la voile ou peu
importe. Il y en a qui ont des tâches, moins d'encadrement d'un groupe
d'enfants, mais plus d'enseignement d'une activité pour la majeure
partie du temps qu'il passe au camp de vacances. Alors, c'est pour dire que cet
emploi de moniteur et monitrice en camp de vacances, d'intervenant en camp de
vacances, nécessite une présence continue comme le parent en
milieu familial sur le site du camp et auprès des campeurs. Alors,
finalement, on fait souvent une farce. On ne peut pas, par exemple, pendant
certaines heures de la journée, placer les enfants dans un placard et
dire: Là, on est en pause, on fait d'autre chose. Évidemment,
c'est continu. C'est 24 heures sur 24. Puis d'autres tâches sont plus
particulières. Par exemple, j'ai mentionnné tout à l'heure
les grandes randonnées. Évidemment, un groupe de trois moniteurs,
par exemple, qui accueille un groupe de 12 à 15 enfants qui partent en
canot-camping pendant 10 jours ou 3 jours ou 21 jours, évidemment, c'est
intensif, c'est du 24 heures sur 24. Ils ont une présence, une
responsabilité auprès des campeurs pendant toute la durée
de la randonnée ou de l'excursion. Et tout ça appelle le camp de
vacances à se doter d'une structure de personnel de ressources
humaines qui est en mesure d'apporter cette attention et cette
qualité d'intervention qui procure non seulement une qualité de
programmes et de services à laquelle tout bon consommateur a le droit de
s'attendre, mais également un environnement sain et surtout
sécuritaire pour le camp de vacances. Et c'est un peu là que le
ratio entre en ligne de compte. Lorsque l'Association des camps du
Québec a dit, par exemple, que pour les jeunes de six à huit ans,
c'est un ratio d'un moniteur pour six enfants qui est nécessaire en
activité. C'est parce que, avec l'expérience et avec les
années, on considère que, pour avoir un milieu sain et
sécuritaire, on doit avoir au moins un adulte, un moniteur avec au
maximum six enfants. Des fois, certaines activités vont peut-être
exiger un ratio plus serré. Si on parle des grandes randonnées,
c'est un ratio de un pour trois, un pour cinq, selon l'âge des
enfants.
Alors, c'est un peu, rapidement, pour illustrer ce que ça
implique, un camp de vacances, comme milieu de travail. C'est cette
présence continue et aussi cette présence intensive de la part
des moniteurs auprès des enfants. Je parle souvent des enfants, mais il
faut aussi mentionner qu'il n'y a pas uniquement des enfants qui
fréquentent les camps de vacances, il y a également des adultes
qui les fréquentent. La majeure partie de ces adultes ont des besoins
spéciaux, soit pour un handicap physique ou mental. Il y a un certain
nombre de camps de vacances qui font l'intégration ou qui sont
spécialisés dans l'accueil de ces personnes-là, et qui ont
développé une façon d'intervenir et une certaine
facilité physique pour accueillir ces personnes. Souvent, dans ces
camps, on trouve un ratio beaucoup plus élevé, soit,
ordinairement, un moniteur pour deux ou trois campeurs, parce que ça
demande une intervention plus particulière. Aussi, de plus en plus de
personnes du troisième âge fréquentent les camps de
vacances. Pour plusieurs d'entre eux, surtout ceux qui demeurent maintenant
dans les grands centres urbains, c'est un retour auprès de la nature,
qu'ils peuvent se permettre. Alors, c'est la même chose, ce sont souvent
des étudiants qui interviennent auprès de ces gens-là et
c'est un peu les mêmes ratios que dans les camps pour enfants que l'on y
retrouve. Ça demande une attention aussi particulière, surtout en
ce qui concerne les personnes qui ont des besoins spéciaux, soit pour un
handicap physique ou mental.
Tout ça amène un peu la problématique des normes du
travail, l'application, par exemple, d'une loi sur les normes du travail. Il y
a trois sections où, dans la loi actuelle, il y a des exemptions pour
les camps sans but lucratif, au niveau de la semaine normale de travail.
Évidemment, j'ai mentionné un peu la présence du moniteur
auprès de l'enfant, qu'exige le camp de vacances. Pour compter les
heures d'un membre du personnel en camp de vacances, si on part en
randonnée avec un groupe de jeunes, pour trois jours, même pas
après la fin de la deuxième journée, on a
déjà totalisé, à toutes fins pratiques, 44 heures
dans notre semaine. C'est un peu une présence comme un parent. On est
là de façon continue. Alors, toute la question de la semaine
normale de travail est difficile à appliquer dans un contexte de camp de
vacances comme tel, parce que, finalement, les heures ne sont pas
comptées. Ça ne veut pas dire que l'employé est
continuellement en fonction, mais, du fait que le camp est souvent isolé
en région, on demande une présence continue du personnel sur
place. Il y a des heures, pendant la journée, où les animateurs,
les moniteurs et monitrices peuvent se retrouver en périodes où
ils sont moins directement responsables de la tâche, où ils sont
pour accompagner. Par exemple, si on regarde la baignade, on se rend à
la plage; et les plages, en camp de vacances, ce sont des bains publics comme
bien d'autres. Alors, il y a des surveillants sauveteurs prévus selon
les normes prévues dans le règlement. Il n'en demeure pas moins
que l'on demande aux moniteurs de groupes d'accompagner quand même les
enfants à la baignade et, non seulement de se baigner avec les enfants,
mais d'apporter aussi une part de suveillance pour améliorer le niveau
de sécurité. Comme un parent fait lorsqu'il se rend à la
plage, il ne se fie pas uniquement au sauveteur, mais II doit lui-même
fournir une certaine part de surveillance et d'encadrement de l'enfant. Alors,
en camp de vacances, les heures sont difficiles à comptabiliser comme
telles.
Il y a aussi la question du salaire minimum proprement dit. Il serait
presque impossible d'appliquer le règlement sur le salaire minimum, tel
qu'on le retrouve dans la loi actuelle. Il y a également une exemption,
à ce niveau-là, pour les camps sans but lucratif.
Évidemment, après 44 heures, aller au temps et demi, et ces
choses-là, ce qu'on retrouve, en camp de vacances, c'est surtout un
salaire sur une base hebdomadaire. Lorsque l'étudiant est employé
pour une période de 10, 9, 8, 12 semaines, ce qui peut varier d'un camp
à l'autre, c'est un salaire hebdomadaire qui est versé à
l'employé plutôt qu'un salaire horaire, sachant très bien
qu'après seulement deux jours, déjà on a atteint les 44
heures de travail, à toutes fins pratiques.
Il y a également une exemption au niveau des congés
annuels payés qui, toujours encore une fois, pour des camps sans but
lucratif, un peu au niveau de la même problématique, est difficile
à appliquer de la même façon qu'on l'applique
peut-être dans d'autres secteurs de travail. Ce qu'on trouve dans le
projet de loi et un peu ce qu'on demande au niveau de l'Association des camps,
c'est de maintenir ces exemptions pour les camps de vacances. On
considère que les camps de vacances font un effort quand même fort
intéressant et louable en termes de conditions de travail, de milieu de
travail et de
conditions salariales également. Sans être capables de se
payer le salaire minimum comme tel, les camps font quand même un effort
fort louable en termes de conditions salariales. Il faut dire aussi que le
milieu de travail est fort intéressant pour les gens qui viennent en
camp de vacances où ils peuvent appliquer plusieurs notions qu'ils
apprennent à leurs études où ils apprennent un peu le
travail d'équipe, puis le leadership, puis ces choses-là.
Le Président (M. Joly): M. Jean, je vous inviterais
à conclure, je pense qu'on approche la petite minute de la fin.
M. Jean: Certainement. Alors, pour dire, c'est qu'on invite le
ministère à maintenir les exemptions telles qu'on les retrouve
dans la loi. Et aussi, ce qu'on aimerait comme changements, c'est
qu'actuellement, dans la loi, les exemptions sont pour les camps sans but
lucratif seulement. Maintenant, le milieu de travail étant semblable
dans un camp à but lucratif que dans un camp sans but lucratif, on
demande, tel que prévu dans le projet de loi, l'extension de l'exemption
à tout ce qui est camp de vacances, sans distinction de statut
corporatif comme tel. Et c'est ce que l'avant-projet de loi prévoit. Sur
les articles 15, 24 et 34 de l'avant-projet de loi, qui se
réfèrent aux articles 54, 77 et 78 de la loi actuelle,
l'Association des camps recommande au ministre de mettre en application ce qui
est proposé dans l'avant-projet de loi. Nous vous remercions.
Le Président (M. Joly): merci, m. jean. je vais maintenant
reconnaître m. le ministre de la main-d'?uvre, de la
sécurité du revenu et de la formation professionnelle. m.
bourbeau.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Je pense que c'est
une des rares fois, depuis le début de cette commission, où nous
avons devant nous un organisme qui se déclare totalement d'accord avec
le projet de loi, sans aucune modification, si j'ai bien compris. Alors, c'est
rassurant. La commission semble se diriger vers des organismes qui sont plus
d'accord avec le projet de loi que d'autres. J'ai quand même un certain
nombre de questions à vous poser pour notre édification
personnelle. Vos camps de vacances, en général, la période
où ils opèrent, ça se situe entre quoi, entre le mois de
mai, juin et septembre ou c'est quoi la période?
M. Jean: La période intensive, c'est du mois de mai
à la fin août. De plus en plus de camps de vacances, tout
près de 60 % des camps de vacances à l'Association,
opèrent maintenant sur une base de quatre saisons, c'est-à-dire
qu'ils accueillent beaucoup de groupes scolaires pendant la période de
septembre à mai, ce qu'on appelle les classes nature - les classes
rouges, les classes blanches, les classes vertes - et accueillent aussi des
groupes les fins de semaine. Évidemment, la capacité d'accueil
l'hiver est beaucoup plus petite que...
M. Bourbeau: ...les classes rouges, si ça ne vous fait
rien.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Jean: Là, je vous invite à essayer les deux
autres, elles sont intéressantes.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Jean: Évidemment, la capacité d'accueil est
moindre pendant les périodes de l'automne, de l'hiver et du printemps.
C'est surtout l'été où, la capacité d'accueil est
plus élevée, c'est plus intensif, évidemment, comme
activités.
M. Bourbeau: Maintenant, combien d'étudiants ou
d'étudiantes, les camps de vacances à but lucratif embauchent-ils
comparativement à ceux à but non lucratif?
M. Jean: Toute proportion gardée, environ 20 % des emplois
sont en camps à but lucratif.
M. Bourbeau: 20 %.
M. Jean: 20 % On parle de 4000 emplois au total, à peu
près.
M. Bourbeau: Parmi les membres de votre Association, quelle est
la proportion de colonies à but lucratif ou de camps à but
lucratif versus non lucratif?
M. Jean: Sur 115 camps membres, H y en a 21 qui sont à but
lucratif.
M. Bourbeau: 21, donc, c'est la même proportion de camps
que d'étudiants, quoi?
M. Jean: Oui
M. Bourbeau: Est-ce qu'en général, ce sont les plus
gros camps qui sont à but lucratif ou les plus petits? (10 h 30)
M. Jean: Les camps à but lucratif sont dans la moyenne ou
au-dessus de la moyenne. Il faut dire que les plus petits camps sont surtout
des camps qui ont une vocation très spécialisée, soit
l'accueil d'une personne ou de personnes avec des besoins spéciaux.
Alors, c'est surtout au niveau de ces camps-là qu'on trouve des petites
capacités d'accueil de 60, 70 ou en bas de 100.
M. Bourbeau: Maintenant, dans un camp de vacances, soit à
but lucratif ou non, parmi le personnel d'un camp, quelle est la proportion
de
gens qui travaillent, qui sont étudiants par rapport à la
totalité du personnel?
M. Jean: C'est tout près de 90 % qui sont
étudiants, la majeure partie, même pendant les périodes de
classes rouges, vertes et blanches, ce sont des étudiants qui ont des
heures de disponibilité. La permanence se retrouve surtout au niveau de
l'administration avec le directeur du camp, peut-être un adjoint lorsque
c'est un gros camp, au niveau du secrétariat, avec une ou deux ou trois
personnes à certaines occasions, puis peut-être au niveau de la
cuisine et de l'entretien aussi, on retrouve trois ou quatre personnes.
M. Bourbeau: Dans une journée normale que travaille un
étudiant qui est embauché chez vous, est-ce qu'on peut savoir
à peu près combien d'heures de travail réel ils peuvent
faire. Il y a des heures de repos, il y a des heures de garde, mais les heures
de travail réel, avez-vous une idée?
M. Jean: Je peux peut-être passer la parole à mes
collègues, M. Blgaouette et Mme Geoffroy qui eux sont directeurs de
camps. Je l'ai été, voilà cinq ans.
M. Bigaouette (Pierre): Alors, quand on rencontre des parents qui
veulent envoyer leurs enfants chez nous, ils nous demandent souvent: Une
journée type, c'est quoi chez vous? Et moi, je leur réponds
toujours: C'est quoi chez vous une journée type? Alors, c'est
écrit par exemple: lever, 7 h 30. Mais venez donc voir un groupe de 10
enfants de sept ans. Quand il y en a un qui se réveille à 6 h,
à 6 h 1, je vous garantis que les 9 ou les 10 autres sont
réveillés. Alors, un moniteur à qui on a dit que son
travail commençait à 7 h 30, en réalité, il
commence déjà à 6 h. Ça ne se compte pas. Il mange
avec les enfants, il couche avec les enfants, et il n'y a pas de répit
dans une journée dans un camp de vacances. On ne prend pas l'enfant pour
dire: Bien là, tu vas aller à l'école pendant quelques
heures. On ne dit pas: Tu vas aller à telle place où on te case
pendant que... C'est tout un contexte où l'enfant est en activité
24 heures sur 24. Il est encore plus occupant qu'il ne l'est à la
maison, parce qu'à la maison, comme je vous dis, il peut aller au
terrain de jeux, il peut aller à l'école, il peut aller en
garderie, mais, au camp, ce n'est pas possible. Donc, le moniteur, il fait
comme on dit nous autres sur papier des fois 8 heures, 10 heures, 12 heures.
Mais un moniteur, nous autres, il travaille six jours sur sept et facilement 70
heures par semaine, parce qu'il est toujours en présence des
enfants.
M. Bourbeau: Maintenant, quel est le salaire... Bon, je comprends
que le salaire est hebdomadaire là. Alors, un étudiant qui fait
ce genre de travail-là, qui couche avec les enfants dans les camps, les
cabanes, donc qui est avec eux - je ne parle pas des étudiants qui
pourraient travailler dans l'administration, s'il y en a, ou dans l'entretien -
mais ceux qui suivent les enfants, ils font combien? C'est quoi le salaire
moyen, disons?
M. Bigaouette: Ça va varier de 100 $ à 220 $ par
semaine.
M. Bourbeau: Ça comprend évidemment la pension, la
nourriture et tout ça?
M. Bigaouette: C'est ça, oui. On va soustraire une pension
qui peut varier de 10 $ à 32 $, finalement. Ce qui fait que le salaire
varie, ça dépend de la fonction, de l'expérience ou de la
formation du moniteur en question. Aussi, certains camps ont des vocations
sociales bien définies, et ils vont, par exemple, avoir une tarification
pour le consommateur, qui est moindre que le coût réel du
séjour, soit avec des subventions du ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche ou d'autres groupes, genre Centraide, ou à
partir de levées de fonds qu'ils font en collaboration avec des clubs
sociaux ou d'eux-mêmes; ils peuvent se permettre d'avoir une tarification
qui est moindre que la tarification réelle. Évidemment, tout
ça, ça affecte un peu aussi la masse salariale, ça fait
qu'on va retrouver une variation comme ça.
M. Bourbeau: ça ne fait pas quand même beaucoup de
dollars l'heure. est-ce que vous avez de la difficulté à trouver
des moniteurs ou si vous n'avez pas de difficultés?
M. Bigaouette: En général, les postes sont
comblés pour la fin de mai ou le début de juin.
Évidemment, il y a toujours des postes clés qui
nécessitent une formation bien précise, et on peut
peut-être avoir plus de difficulté, d'une année à
l'autre, d'un camp à l'autre. Mais, en général, les postes
se comblent assez bien. Il faut dire que les jeunes étudiants aussi
valorisent beaucoup ce type d'emploi là. Puis, évidemment, le
salaire n'est pas comparable à ce qu'on peut retrouver par exemple dans
l'industrie. Par contre, on réussit à économiser une bonne
partie du salaire parce qu'en milieu de camp de vacances, bon, on
dépense très peu, c'est pas comme lorsqu'on est en ville,
évidemment.
M. Bourbeau: Là, je comprends très bien qu'il y a
une tradition que même les moniteurs sont un peu en vacances eux aussi,
là, avec les autres. Je présume que c'est un peu ça.
M. Jean: Oui, c'est un milieu de vie qui est très
enrichissant, et on ne leur dit pas qu'ils sont en vacances et vous ne direz
pas ça, vous autres, non plus parce que les responsabilités
sont assez élevées. Avoir la charge d'un groupe d'enfants
et faire certaines activités à risques, quand même, pour ce
qui est randonnée en forêt, escalade, baignade et ces
choses-là, c'est quand même des responsabilités. Mais toute
la vie de groupe et la dynamique de l'équipe et les respon
sabilités qu'ils ont, bien qu'elles soient lourdes, sont fort
enrichissantes. À ce niveau-là, évidemment, ce n'est pas
un fardeau comme emploi.
M. Bourbeau: Est-ce que çg arrive des moniteurs qui ne
sont pas payés du tout, qui le font bénévolement, sans
aucun salaire?
M. Jean: Les bénévoles qu'on retrouve, c'est
surtout au niveau des adultes, des personnes qui sont attachées au camp,
qui étaient anciens campeurs ou qui croient un peu en la vocation du
camp, et qui sont soit des enseignants ou qui sont disponibles pendant une
période, un été, à intervenir auprès du
camp, à jouer un rôle de supervision ou de s'occuper d'un secteur
quelconque, ou des personnes qui proviennent de communautés, la majeure
partie des bénévoles qu'on retrouve, ce sont ces
gens-là.
M. Bourbeau: Maintenant, parmi les membres de votre Association,
quel est le nombre de colonies de vacances qui sont des colonies de vacances
pour enfants par rapport aux autres catégories de colonies de
vacances?
M. Jean: Au niveau des membres de l'Asso ciation, si on regarde
la période de l'été, c'est environ 90 % qui accueillent
des enfants. D'autres vont accueillir soit des familles uniquement ou des
personnes âgées ou des adultes ayant des besoins spéciaux.
Certains vont accueillir les deux, sont aménagés de façon
à pouvoir accueillir et, par exemple, des familles et des personnes
âgées et des enfants dans deux sections différentes du
terrain. Mais à 90 %, ils accueillent des enfants.
M. Bourbeau: Alors, il y a 90 % à peu près de la
clientèle qui sont des enfants, autrement dit, c'est ce que vous
dites?
M. Jean: Oui.
M. Bourbeau: Maintenant, est-ce que la clientèle des
colonies de vacances à but lucratif, cette clientèle-là
varie par rapport à la clientèle des buts non lucratif?
M. Jean: Simplement au niveau socio-économique, la
tarification des services qu'on va retrouver, par exemple, dans le secteur
à but lucratif ou dans un camp de vacances qui ne
bénéficie pas de subventions ou qui ne fait pas de levée
de fonds spéciale pour être capable d'être accessible
financièrement, à ce niveau-là, on peut dire que la
clientèle varie. On dit que ce n'est pas tous les camps de vacances qui
sont accessibles à toutes les bourses, mais tout citoyen, peu importe le
revenu familial, peut trouver un camp de vacances qui peut l'accueillir. Il n'y
a pas d'enfant au Québec qui peut dire: Je ne vais pas au camp de
vacances parce que je n'ai pas d'argent. Il y a des camps de vacances qui vont
accueillir une clientèle, évidemment, de vocation, vont
accueillir une clientèle qui est moins bien nantie
socio-écono-miquement.
M. Bourbeau: Votre mémoire n'en fait pas mention, mais je
présume que vous avez réalisé que le projet de loi qu'on a
déposé vise à soustraire les colonies de vacances a but
lucratif de la loi sur les normes, mais uniquement celles qui s'adressent
à des enfants. Vous êtes au courant de ça, hein? On a exclu
les colonies de vacances à but lucratif pour enfants et non pas les
autres.
M. Jean: Oui. On avait compris qu'étaient exclus les camps
de vacances à but lucratif. Par contre, ce n'était pas
précis si c'était exclusivement dans le cas de l'accueil
d'enfants ou peu importe
M. Bourbeau: C'est seulement celles pour enfants qui sont
exclues. Est-ce que ça entraîne une réaction chez vous?
M. Jean: C'est un peu ce que mon collègue me souligne.
Est-ce que c'est vraiment strictement les enfants, mais également au
niveau de l'accueil d'une personne adulte qui a un besoin spécial, soit
une personne âgée qui a des besoins spéciaux ou une
personne handicapée quelconque?
M. Bourbeau: Quand je dis "exclues", je parle de la question des
salaires. L'exclusion est là. À l'égard des salaires, les
colonies de vacances pour adultes, par exemple, ne seraient pas exclues de la
loi.
M. Jean: O.K. Si je comprends bien, pour ce qui a trait aux
salaires, semaine normale de travail, congés payés, seraient
exclues de la loi toutes ces colonies de vacances, soit à but lucratif
ou sans but lucratif, pour ce qui est de l'accueil d'enfants seulement?
M. Bourbeau: Un petit instant, je vais simplement parler à
mon conseiller juridique, ici, pour avoir une précision.
Simplement pour clarifier. Dans la loi actuelle, les colonies de
vacances à but lucratif sont sujettes à la loi sur les normes,
hein? On les exclut, sauf pour le salaire, où elles vont continuer
à être sujettes â la loi sur les normes. Mais pour les
vacances, le temps supplémentaire, elles ne seront plus sujettes
à la loi sur les normes. Je parle toujours pour les colonies de
vacances pour les adultes, enfin autres que pour les enfants. Pour les
enfants, elles sont exclues de tout.
M. Jean: O. K. Alors, juste pour préciser, pour l'accueil
d'enfants...
M. Bourbeau: Dès que vous parlez d'enfants, la loi sur les
normes ne s'applique pas.
M. Jean: Pour toute colonie de vacances, peu importe le statut
corporatif?
M. Bourbeau: C'est ça. À but lucratif ou non
lucratif.
M. Jean: O. K. Et en ce qui concerne l'accueil d'adultes...
M. Bourbeau: si vous parlez des adultes, là, ça va
être exclu de la loi sur les normes aussi, sauf pour les salaires. il
faudra respecter le salaire minimum.
M. Jean: Ça, c'est autant pour le sans but lucratif que
pour le but lucratif, ou uniquement pour le but lucratif, ce que vous
mentionnez?
M. Bourbeau: Les deux sur le même pied. M. Jean: Les
deux sur le même pied.
M. Bourbeau: Mais ça, c'est le statu quo, si je comprends
bien, c'est comme ça maintenant?
M. Jean: Actuellement, pas de la façon dont s'est
appliqué, de l'interprétation qu'on en fait puis de
l'expérience qu'on a, finalement, surtout pour ce qui est de l'accueil
d'adultes handicapés et de personnes âgées.
M. Bourbeau: Je m'excuse, là, on me dit le contraire.
Effectivement, les salaires, actuellement, vous ne respectez pas le salaire
minimum, et vous ne serez pas obligés non plus de le respecter dans
l'avenir. Seulement pour les colonies de vacances pour adultes, lucratif...
M. Jean: Alors, le camp à but lucratif qui accueille des
adultes, nonobstant une personne handicapée ou pas, devra respecter
intégralement le salaire minimum. (10 h 45)
M. Bourbeau: Dans l'état du projet actuel, on a
l'intention, je le reprends, d'exclure de la loi sur les normes tant les
colonies de vacances à but lucratif que non lucratif. Maintenant, une
exception, c'est que, pour les camps de vacances qui accueillent des adultes,
à ce moment-là, il faudra respecter la loi sur les normes en ce
qui concerne les salaires. Uniquement pour les camps de vacances à but
lucratif pour adultes.
M. Jean: Seulement pour le camp...
M. Bourbeau: Les camps de vacances pour adultes à but
lucratif devront respecter le salaire minimum, mais ils ne seront pas sujets
aux autres prescriptions de la loi sur les normes. Par exemple, le nombre
d'heures par jour, des trucs comme ça, ça continuera à
être exclu. C'est l'état actuel du projet.
M. Jean: O. K. Selon les heures travaillées dans la
semaine par l'employé, il est payé au salaire minimum, sans
égard au nombre d'heures travaillées, que ça
dépasse les 44 heures ou peu importe, si je comprends bien.
M. Bourbeau: C'est l'état actuel du projet; c'est comme
ça qu'il est présenté. Maintenant, si jamais vous avez des
représentations à faire... C'est parce que vous n'en avez pas
fait de représentations, alors, on s'est dit: Peut-être qu'ils
n'ont pas compris très bien le sens de notre proposition. Je vous dis
que si jamais ça cause des gros problèmes et que vous pouvez nous
faire la preuve que c'est impraticable, vous pourrez toujours communiquer avec
nos fonctionnaires dans les prochains jours, dans les prochaines semaines.
C'est la façon dont le projet de loi est rédigé
maintenant. Comme ce n'est pas un projet de loi, c'est un avant-projet de loi,
donc, c'est une proposition que nous faisons, mais on est ouvert à toute
considération que vous voudriez nous faire tenir, qui serait de nature
à nous démontrer que ce n'est pas praticable, par exemple. Si
jamais vous nous faites la preuve que cette proposition-là n'est pas
praticable, on peut la regarder.
M. Jean: On vous avoue qu'à notre lecture de
l'avant-projet de loi, ça ne nous est pas apparu clair cette
distinction-là que vous faites.
M. Bourbeau: C'est pour ça que j'ai tenu à vous en
parler, parce qu'on pensait peut-être que vous n'aviez pas saisi cela,
parce que avec le jargon juridique qui est employé parfois, il y a des
choses qui passent et on ne les voit même pas passer.
M. Jean: J'imagine qu'auprès du ministère, comme
vous dites, il y a moyen d'obtenir le libellé précis de ce que
vous venez de dire, puis ensuite, on pourra...
M. Bourbeau: Oui. Et j'aimerais ça connaître votre
réaction sur cette proposition-là, la proposition dont je viens
de vous parler, qui est celle qui est contenue dans le projet.
M. Jean: Dans un premier temps, rapidement, pour ce qui est de
l'accueil de l'adulte handicapé et de la personne âgée, M.
Bigaouette pourra vous en parler. Effectivement, ça peut poser
problème.
M. Bigaouette: Alors, je donne l'exemple pour la personne
âgée, je peux vous dire qu'elle demande plus que l'enfant. Nous
avons connu quelques saisons, nous autres, où on a accueilli la personne
âgée, je pense aux années 1978 et 1979. Comme ça
demandait plus d'encadrement, on a vraiment diminué. C'est exceptionnel,
maintenant. Il y a un été où on a reçu
jusqu'à 2000 personnes âgées qui ont couché au moins
deux soirs là entre le mois de mai... Maintenant, il en passe, par
été, 200 à 300, pas plus, parce que ça demande
énormément, ces groupes-là.
Aussi, moi, je ne connais pas le monde de la personne handicapée,
mais c'est sûr, on dit, dans les statistiques, que ça demande
presque un adulte par handicapé dans les camps. Alors, pour ces deux
clientèles, ça m'apparaîtrait un petit peu difficile que
ça soit cette situation-là. C'est parce que ce n'est pas
seulement des soins professionnels dont je parle, mais c'est tout au niveau de
l'animation, de l'encadrement. On sait que la personne âgée, par
exemple, demande énormément d'écoute. Si on passe notre
temps à les écouter, alors, c'est ça, là, ça
demande beaucoup pour les jeunes animateurs auprès de ces
gens-là. Les autres clientèles, c'est bien sûr que si un
groupe va s'installer quelque part, je pense, s'ils vont faire du ski, ils
demandent, entre guillemets, presque de l'hôtellerie, ça, ce n'est
pas la même chose, mais ils ne demandent même pas d'animation. Je
pense à ces deux clientèles-là dans les camps de vacances.
Elle est demandée, mais ça demande beaucoup.
Le Président (M. Joly): Merci, M. lo minis tre. Je vais
reconnaître Mme la députée de Ho-chelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
vous accueillir à la commission, M. Jean et les personnes qui vous
accompagnent, M. Bigaouette et Mme Geoffroy. Vos bureaux sont d'ailleurs
installés dans le comté de Hochelaga-Maisonneuve. Vous partagez
avec l'ensemble des autres organismes membres du Regroupement des organismes de
loisirs du Québec le sous-sol du Stade olympique, c'est bien
ça?
M. Jean: C'est bien ça, oui.
Mme Harel: Tantôt, vous signaliez qu'à peu
près 20 % de votre "membership" était constitué do camps
de vacances à but lucratif Est ce que l'ensemble des camps de vacances
ont un sort similaire quant aux politiques de subventions gouvernementales?
M. Jean: Tout ce qui est subventions gouvernementales, soit pour
le fonctionnement ou la consolidation des équipements, par exemple du
programme du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui
est le plus gros programme, ce n'est accessible qu'aux camps sans but
lucratif.
Mme Harel: Donc, ça confirme en fait ce que je croyais,
c'est que la politique gouvernementale n'en est une d'injection des fonds
publics que dans le réseau à but non lucratif, c'est bien le
cas?
M. Jean: C'est le cas surtout au niveau du ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche maintenant. Comme entreprise, il y a
peut-être d'autres programmes gouvernementaux auxquels un camp à
but lucratif peut avoir accès, mais en ce qui concerne le programme du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, c'est sans but
lucratif.
Mme Harel: Donc le programme des camps de vacances, c'est pour
des organismes à but non lucratif?
M. Jean: Oui, c'est un critère.
Mme Harel: D'autre part, les camps de vacances qui sont membres
de l'Association, vous en comptez 115, sont-Ils tous des camps de vacances pour
enfants?
M. Jean: Oui, la majeure partie, comme je le mentionnais tout
à l'heure, 90 % accueillent des enfants.
Mme Harel: Des enfants. Et les 10 % qui restent.
M. Jean: Ils accueillent soit des familles ou des adultes
handicapés ou des personnes âgées.
Mme Harel: Parce qu'il y a une autre association, l'association
des camps de vacances en milieu familial ou...
M. Jean: C'est au Mouvement des camps familiaux, probablement,
que vous faites allusion.
Mme Harel: Le Mouvement des camps familiaux. Ça, ça
existe aussi au 4545, Pierre-de-Coubertin, hein?
M. Jean: Oui.
Mme Harel: C'est quoi? Ce n'est pas des concurrents, c'est
des...
M. Jean: En fart, eux, le groupe, surtout, ce sont des groupes de
quartiers des grands centres urbains, qui font une série
d'activités, entre autres, l'activité vacances qui s'articule par
le camp famille.
Mme Harel: Et ces camps familiaux, eux, sont-ils couverts par ces
dispositions-là?
M. Jean: À ma connaissance, oui.
Mme Harel: S'ils sont à but non lucratif, aussi. Parce que
la grande question c'est. Faut-il faire une distinction entre adultes et
enfants ou une distinction entre à but lucratif et à but non
lucratif? Parce que là, on nous dit que les camps qui s'adressent
à des adultes, en fait, ce sont des familles, les adultes, hein? Il faut
voir que ça ne ne veut pas dire que ce n'est pas des adultes seuls, sur
le marché du travail, les adultes, ça peut être aussi des
familles.
M. Jean: O.K. À quoi on faisait allusion, tout à
l'heure, lorsqu'on parlait de l'adulte handicapé ou la personne
âgée...
Mme Harel: C'est l'adulte seul?
M. Jean: C'est ça, il ne vient pas en famille,
nécessairement.
Mme Harel: Oui, mais les camps familiaux, par exemple, qui
offrent des services dans mon quartier, s'adressent aux familles monoparentales
la plupart du temps. C'est le cas, je pense, pour la majorité de la
clientèle des camps familiaux, où il y a un adulte et des
enfants.
M. Jean: Oui.
Mme Harel: Et comme tel, la disposition de l'avant-projet de loi
ne permettrait pas à ces camps-là de bénéficier de
l'exclusion, parce que ça ne s'adresse pas qu'à des enfants.
C'est bien le cas?
M. Jean: C'est un fait, oui.
Mme Harel: Et la grande question c'est: Quelle doit être la
démarcation socialement parlant? Est-ce que ça doit être
adultes et enfants ou ça doit être à but lucratif et non
lucratif? H y a eu la Commission-Jeunesse du Parti libéral qui est venue
plaider, il y a quelques jours de ça, avec, ma foi, pas mal
d'intelligence, le fait qu'il y avait une participation à la
communauté en travaillant dans un organisme à but non lucratif,
étant entendu que la portion, si vous voulez, du salaire minimum non
versé, était, d'une certaine façon, une contribution du
moniteur ou de la monitrice à la communauté, mais que
l'équivalent appliqué à des cas à but lucratif, ce
n'était pas une contribution à la communauté,
c'était la marge de profit du camp qui, finalement, se réalisait
par du salaire impayé. Qu'est-ce que vous pensez de cet argument
à l'égard des camps à but lucratif?
M. Jean: C'est-à-dire que le coût d'un camp de
vacances est le même pour le camp sans but lucratif que le camp à
but lucratif.
Mme Harel: La tarification est la même?
M. Jean: Pas la tarification, je parle du coût.
Évidemment, le camp sans but lucratif qui bénéficie de
subventions ou d'une autre aide financière de l'extérieur, d'une
subvention gouvernementale, ou qui a une structure de bénévolat
peut de cette façon-là réduire sa tarification au
consommateur. Mais en termes de coût de tous les achats et ces
choses-là, enfin, c'est un peu de même.
Mme Harel: On pourrait penser, par exemple, raisonnable qu'il
puisse réduire sa tarification du fait justement qu'il y ait des
moniteurs et des monitrices qui, par service civique, d'une certaine
façon, par engagement, le font en étant exclus des
bénéfices qu'on offre aux autres travailleurs. Mais est-ce que
c'est raisonnable que la même chose se passe dans des camps où la
tarification est très élevée, où il y a une notion
de profit et où, finalement, le jeune le fait un peu comme du "cheap
labour"?
M. Jean: Nous autres, ce qu'on apporte, c'est que, de par la
nature même de l'opération, de tout ce que ça exige comme
soutien de ressources humaines dans un camp de vavances, même un camp
sans but lucratif ne pourrait pas se permettre d'appliquer intégralement
la loi du salaire minimum, des normes du travail.
Mme Harel: Sans but lucratif. Oui, mais à but
lucratif?
M. Jean: Même un camp à but lucratif ne pourrait pas
se permettre d'appliquer intégralement...
Mme Harel: Sur le salaire minimum? Je ne parle pas des autres
dispositions, mais sur le salaire minimum?
M. Jean: Si vous dites sur le salaire minimum qui, lui, est
payé pour toutes les heures travaillées nonobstant le nombre
d'heures, on ne parle pas de temps et demi après x heures, il faudrait y
voir, mais même là, ce serait possiblement difficile.
Mme Harel: Les 100 000 enfants qui fréquentent le camp
sont des enfants qui sont hébergés ou s'il y a des camps de ville
parce que ça se développe la notion de camps de ville? C'est de
plus en plus fréquent maintenant.
M. Jean: Le camp de jour.
Mme Harel: Oui, le camp de jour.
M. Jean: Quand on parle des 100 camps ce
sont des enfants qui fréquentent des camps de séjour.
Mme Harel: De séjour, hein?
M. Jean: II y a effectivement environ, je crois, 16 camps ou 15
camps de l'Association des camps qui sont des camps de séjour,
c'est-à-dire que l'enfant héberge à domicile. Le coucher
est à domicile chaque Jour finalement.
Mme Harel: Sont-ils membres aussi de votre association?
M. Jean: Une quinzaine, oui.
Mme Harel: Parce qu'à ce moment-là, c'est souvent
des camps ouverts par des municipalités, c'est-à-dire que c'est
des services municipaux qui ouvrent un service qu'on appelle un camp de jour
où l'enfant se rend le matin, on lui fait faire des activités,
puis il est ramené à la maison le soir. Est-ce que vous pensez
que la même exclusion doit valoir pour ce genre de camps de jour, qui
sont des camps sans hébergement?
M. Jean: Oui, mais il faut voir aussi c'est quoi un camp de jour
comme tel, parce qu'un peu tout le monde se donne l'appelation camp de jour. Ce
qui se retrouve chez nous, c'est une municipalité qui a un camp de jour
qui est membre de notre Association, mais les autres, c'est surtout soit des
corporations qui ont déjà des camps de séjour qui, dans
leur quartier en ville, partent un camp de jour ou des centres
d'activités physiques, par exemple, de cégeps ou de
collèges, qui, l'été, mette sur pied un camp de jour pour
les gens de leur communauté.
Mme Harel: Parce qu'il va y avoir de plus en plus maintenant de
ce genre de camps avec la loi qui a été adoptée sur les
services de garde au printemps dernier. Il y a un volet qui est censé se
développer en collaboration avec les municipalités pour la garde
durant la période estivale. Et on devrait le souhaiter, de toute
façon, parce que l'Office des services de garde a maintenant une table
de concertation avec l'Union des municipalités, et c'est censé se
développer.
M. Jean: Oui, nous, on pense qu'effectivement, c'est
appelé à se développer. D'ailleurs, c'est un secteur, un
type de camp qui se développe depuis un certain nombre d'années.
Nous, on souhaite que les exemptions soient appliquées à tout ce
qui est camp de vacances, incluant ce dont on parle, les camps de jour.
Mme Harel: Est-ce que les moniteurs et les monitrices qui
travaillent sont assujettis aux lois, par exemple, de protection? Par exemple,
dans les camps chez vous qui sont membres de l'Association, les corporations
sont assujetties, j'imagine - je ne connais pas la réponse, en fait,
c'est pour ça que je vous pose la question - à la CSST, à
l'ensemble des autres protections?
M. Jean: En tant qu'employeur, oui. Tout ce qui est CSST, chaque
camp est un employeur inscrit à la CSST et paie sa cotisation.
Mme Harel: Parce que tantôt vous parliez des
bénévoles. Moi, je connais personnellement des jeunes de 14, 15
ans qui servent d'aides bénévoles et qui n'ont pas de
rémunération du tout, qui le font avec grand grand plaisir. Elles
font finalement au camp ce qu'elles ne feraient pas à la maison. Elles
lavent les chaudrons et les latrines comme si c'était une
responsabilité, entre toutes, qui leur était confiée.
Mais, je reviens, en tout cas, avec la question qui me préoccupe.
Faut-il démarquer sur la base enfant et adulte ou s'il ne faut pas
démarquer sur la base à but lucratif et non lucratif, au moins en
ce qui regarde le salaire minimum et faire en sorte que les camps familiaux,
que les camps de vacances pour enfants, oui, puissent être exclus, mais
que l'ensemble des camps à but lucratif, eux, ils soient assujettis. (11
heures)
M. Jean: Quand on parte de colonies de vacances, on mentionnait
tout à l'heure l'accueH d'adultes, l'adulte qui lui vient seul, qui a
des besoins spéciaux, et de personnes âgées.
Évidemment, lorsqu'on parie de camps famille, c'est également
à nos yeux une colonie de vacances. Si on veut que l'adulte en camp de
famille ne joue pas le rôle du moniteur, il est là comme campeur,
si on veut qu'il puisse effectivement profiter de la vacance, il y a
déjà certaines taches qui lui sont... Il n'a pas à
prévoir la nourriture, les repas et ces choses-là. Ça
demande quand même un encadrement assez serré. Finalement,
l'adulte n'est pas toujours auprès de l'enfant. Souvent en camp famille,
les enfants sont avec une équipe d'animation et les adultes sont de leur
côté sur leur propre... Évidemment, il y a des
activités qui se font en famille, mais ce n'est pas toute la
journée. Puis l'encadrement de l'adulte aussi dans certaines
activités à risques, ça demande quand même un ratio
aussi élevé qu'avec des enfants parce que l'adulte n'est pas
nécessairement habitué...
Mme Harel: Oui, mais à vos yeux ce n'est pas finalement ce
qui va être proposé dans l'avant-projet de loi.
M. Jean: Dans ce qu'on voit dans l'avant-projet de loi, ce qu'on
semblait mentionner tout à l'heure, ce que le ministre Bourbeau semblait
mentionné tout à l'heure, c'était l'accueil d'adultes qui
viennent individuellement.
Mme Harel: L'accueil d'adultes seuls?
M. Jean: Seuls.
Mme Harel: Sans enfants. Ça, je pense bien que c'est
à préciser. Je ne pense pas que ça l'était en fait
dans l'avant-projet. Il ne faut pas prendre ses désirs pour des
réalités, là. Je pense qu'il va falloir le
préciser, vous faire une lecture plus attentive, hein? Bien, M. le
Président, je veux... Oui, excusez.
M. Jean: Ça va, effectivement, je tiens bonne note de ce
que vous dites. Une fois qu'on pourra faire effectivement une lecture attentive
avec toute l'information.
Le Président (M. Joly): Merci, Madame...
Mme Harel: Peut-être faire un bémol à votre
appui inconditionnel à l'avant-projet de loi.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la
députée. Avec la permission des membres de cette commission, M.
le ministre avait une toute petite question à poser.
M. Bourbeau: Simplement pour rappeler que la question des
garderies à but lucratif et non lucratif, puisqu'on est sur ce sujet
là...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: Vous m'excusez, mon esprit était ailleurs.
C'est parce que j'ai, à côté de moi, la ministre
responsable de la Famille et de la Condition féminine, et des garderies.
Les camps de vacances. Alors, parlons donc des camps de vacances, c'est bien ce
que j'avais à l'esprit, les camps de vacances à but lucratif.
Dans l'état actuel des choses, le Québec n'exclut pas de la loi
sur les normes, les camps de vacances à but lucratif. L'Ontario les
exclut, cependant. Maintenant, tout à l'heure, vous nous avez dit que le
salaire d'un moniteur peut varier de 225 $, à peu près, à
100 $, selon l'expérience et l'âge, je présume, du
moniteur. Par contre, vous nous avez dit également qu'une journée
de travail, ça peut être de 10 heures, 12 heures par jour et six
jours par semaine. On voit donc ce que ça peut faire comme salaire
horaire. Comment se fait-il que, dans l'état actuel des choses, les
camps de vacances à but lucratif sont sujets au salaire minimum, par
exemple? Comment pouvez-vous me dire qu'on ne paie que des salaires de 100 $
à 225 $ dans la loi actuelle, puisque manifestement, ça fait
beaucoup moins que le salaire minimum? Est-ce que ça veut dire ça
que, dans l'état actuel des choses, les camps de vacances à but
lucratif ne respectent pas la loi?
M. Jean: Évidemment, ça demande toute une
acrobatie, puis ça demande aussi de fractionner dans certains cas
l'encadrement, ce qui n'est pas nécessairement bon pour le produit.
Avoir un gardien de nuit, par exemple, qui rentre en soirée, pour que
ses moniteurs soient dégagés. Alors, effectivement, cela pose des
problèmes dans plusieurs cas, tant aux yeux de la Commission des normes
qu'au niveau de l'employeur.
M. Bourbeau: Je ne comprends pas. Là, vous me parlez de la
nuit. Voulez-vous dire que vous les payez quand ils dorment?
M. Jean: Non, c'est-à-dire qu'on demande quand même
aux moniteurs d'être présents la nuit, il y en a qui sont
désignés...
M. Bourbeau: Oui, je comprends, vous ne leur comptez pas
ça comme des heures payées?
M. Jean: Au niveau de la Commission, lorsqu'on demande
d'être présent, c'est vu comme étant...
M. Bourbeau: Bon, je reviens au gardien là, au moniteur,
qui est là de 6 heures le matin là à 20 heures le soir.
Monsieur nous expliquait tantôt que parfois ça commence tôt.
Disons qu'il fait une journée de 12 heures là. Le salaire
minimum, c'est 5 $ l'heure. Est-ce que ces camps de vacances à but
lucratif payent 60 $ par jour, cinq jours par semaine? Ça ferait
beaucoup plus que le salaire dont vous nous avez parlé tantôt.
M. Jean: Non, effectivement, ils ne sont pas en mesure de
l'appliquer. Ce que certains camps à but lucratif ont fait sur la
recommandation, je crois que c'était du ministre Johnson du temps, c'est
de former un camp sans but lucratif tout en étant propriétaires
de leur terrain. Certains peuvent s'en sortir de cette façon-là.
Mais celui qui est strictement à but lucratif, pour son opération
au camp, c'est très difficile à appliquer.
M. Bourbeau: On doit constater que les camps de vacances à
but lucratif, à toutes fins pratiques, ne sont pas capables de respecter
la loi du salaire minimum actuelle. Est-ce qu'on peut dire ça?
M. Jean: Oui.
M. Bigaouette: J'ajouterais qu'ils ont contourné aussi,
d'une certaine façon, en faisant de la garderie. Par exemple le soir, au
lieu d'avoir un moniteur par groupe de 10, comme on fait dans un camp comme
chez nous, bien ils vont prendre un moniteur qui va s'occuper de 40 enfants et
va s'occuper de les coucher. Et tout ça dure une heure et il s'occupe
après ça de faire... Le lendemain matin, c'est un autre qui va
s'occuper du lever des 40. Mais, en tout cas, ce n'est pas une formule
idéale dans un camp de
vacances. C'est impensable qu'une personne s'occupe de 40. Mais c'est
comme ça qu'ils ont réussi un peu à diminuer la
tâche.
M. Bourbeau: O.K. Merci.
Mme Geoffroy (Catherine): Ce qui arrive également dans les
camps privés à but lucratif - je suis directrice d'un camp
privé à but lucratif - c'est qu'on est obligés de faire un
horaire de travail pour les membres du personnel. Donc, le moniteur responsable
d'activités chez nous donne quatre heures d'activités et,
après ça, il est Hbre. C'est son intégration personnelle,
son bon vouloir. Sauf que nécessairement, lorsqu'il est engagé,
on l'engage en fonction de son intérêt vis-à-vis des
enfants. Si les enfants jouent une partie de ballon-chasseur à
l'extérieur, on a une équipe qui est avec eux. Veut ou veut pas,
le moniteur, il ne restera pas enfermé dans son local ou quoi que ce
soit. C'est son implication volontaire et personnelle. C'est ce qu'il recherche
finalement. Mais nécessairement, pour chacune des activités,
l'encadrement, le nombre de moniteurs, le nombre de ratios est plus grand chez
nous comparativement à un camp privé à but non
lucratif.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Alors, au nom des
membres de cette commission, je veux remercier les gens qui
représentaient l'Association des camps du Québec. Très
intéressant, merci, au plaisir.
M. Jean: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Je demanderais aux gens qui
représentent le Regroupement interorganismes pour une politique
familiale au Québec de bien vouloir s'avancer, s'il vous
plaît.
Bonjour, messieurs. Bienvenue à cette commission.
J'apprécierais si la personne responsable pouvait s'identifier et
identifier aussi la personne qui l'accompagne.
Regroupement interorganismes pour une politique
familiale au Québec
M. Lajoie (Yves): M. le Président, je suis membre du
conseil d'administration du Regroupement interorganismes pour une politique
familiale au Québec. M. Georges C. Savard est aussi membre du conseil
d'administration du Regroupement et nous représentons ici le
Regroupement. Nous comparaissons, si on peut dire, au nom de Mme Denise
Casimir, qui a signé le mémoire.
Le Président (M. Joly): Merci. Alors, je vous explique que
vous avez une quinzaine de minutes pour nous présenter votre
mémoire et que, par après, nous nous réservons le
privilège de vous questionner. Merci.
M. Lajoie: J'aurais quand même une annexe à
déposer, M. le Président, qui fait partie intégrante de
notre mémoire et qui est devenue plus tardive.
Le Président (M. Joly): alors, nous nous engageons
à la distribuer aux membres de cette commission. alors, la parole est
à vous, monsieur.
M. Lajoie: Alors, rappeler d'abord que le Regroupement
interorganismes pour une politique familiale au Québec regroupe 65
membres, qu'on appelle des organismes familiaux ou à
intérêt familial. C'est-à-dire que des organismes à
intérêts familiaux sont des organismes qui, dans leurs
activités ou dans leurs buts, veulent se préoccuper de politique
familiale au Québec. Et nous fonctionnons aussi par consensus,
c'est-à-dire que, pour que nous mettions de l'avant certaines
politiques, tous nos membres sont d'accord.
Ce que nous vous présentons ce matin n'est pas un travail
peut-être scientifique, sur des normes, sur des choses très
précises. Mais notre mémoire, ce matin, veut attirer l'attention
sur un certain nombre de domaines reliés à la famille et au
travail ou les reliant. Car s'il est un domaine où la politique
familiale doit s'exercer, c'est bien celui du monde du travail. Le gouvernement
du Québec, dans son énoncé de politique familiale
adopté en décembre 1987, reconnaît comme second champ
d'application de la politique familiale le secteur travail, quant à ce
qui peut faciliter la conciliation des rôles de parents et de
travailleurs ou travailleuses De plus, le plan d'action, en matière de
politique familiale 1989-1991, rendu public par le gouvernement en septembre
1989, consacre son chapitre II aux responsabilités parentales et au
marché du travail. La conciliation des tâches professionnelles et
des responsabilités parentales, dit ce plan d'action, revêt une
importance capitale pour les jeunes adultes puisque les premières
années de leur vie professionnelle correspondent
généralement aux années pendant lesquelles ils fondent une
famille. Il est donc important, poursuit Familles en tête, que ces
jeunes adultes bénéficient d'un soutien financier raisonnable et
de conditions de travail adéquates. L'absence d'un soutien
adéquat, note le programme, aura souvent pour effet de reporter le
moment de la première naissance ou de ne pas donner suite au nombre
d'enfants souhaités.
Ce que nous venons vous dire ici, aujourd'hui, c'est qu'il faut qu'un
gouvernement ait l'intention sérieuse, soutenue et efficace de permettre
à des gens qui travaillent de pouvoir avoir et élever des enfants
dans des conditions honorables. Évidemment, ce qu'on vous dit ici, ce
n'est pas des mesures très précises, mais on voudrait que
l'Assemblée nationale réfléchisse profondément au
fait qu'une fois pour toutes, il
ne faut pas qu'il y ait d'opposition, au Québec, entre famille et
travail, et qu'on puisse s'épanouir au travail et aussi dans le milieu
familial, et qu'il n'y ait pas de contradiction. On ne vous donnera
peut-être pas de recette, aujourd'hui, mais on va vous dire qu'il y a des
choses importantes et que si on veut avoir une société
équilibrée et épanouissante, il faut vraiment prendre ces
choses-là en considération et aller de l'avant.
Le Regroupement interorganismes pour une politique familiale au
Québec a considéré, depuis près de deux ans, le
domaine du travail comme champ prioritaire d'application de la politique
familiale. Un des premiers groupes de travail, constitué par le
"Carrefour des affaires familiales", fut celui de "Famille et travail". Lors
d'une soirée publique d'information tenue par ce groupe à
Montréal en octobre 1988, et dont nous avons des publications, une
centaine de personnes vinrent entendre des représentants du personnel de
la compagnie Lavalin et de la Banque Nationale ainsi que la présidente
de la Centrale des enseignants du Québec et le président de la
Centrale des syndicats démocratiques du Québec venir nous parier,
eux aussi, de ce qu'était famille et travail. On a donc le point de vue
des entreprises et aussi celui du monde syndical dans ce domaine. Des garderies
de travail chez Lavalin et à la Banque Nationale
présentèrent les efforts, entre autres, entrepris par des
compagnies privées pour faciliter les rôles parentaux de leurs
employés. Et les personnalités syndicales, quant à elles,
firent part des possibilités d'ouverture des conventions collectives, eu
égard à des mesures profamiliales. Cette amorce, dans le domaine
"famille et travail", initiée par le Regroupement, fut responsable de la
création, au congrès de la CSD qui se tint le mois suivant, d'un
atelier intitulé "famille et travail", et la CSD a accepté de se
donner, comme priorité de travail pour les deux prochaines
années, un volet "famille et travail".
Au mois d'octobre dernier, le Regroupement a aussi organisé une
autre assemblée où, là, on a essayé de cerner, si
vous voulez, je résume un peu, le travail qui se fait en famille, parce
que c'est un aspect qu'on voit peu ou pas souvent. On connaît le monde du
travail, on connaît la vie familliale, mais on est un peu absents ou peu
inconscients qu'il se fait, en famille, du travail. On a aussi
considéré, si vous voulez, le travail de la femme au foyer. Les
Cercles de fermières du Québec préconisèrent alors,
par la voie de leurs représentants, que l'État se devait de
contribuer au manque de ressources du ménage. (11 h 15)
Le mari a beau avoir la volonté de reconnaître le travail
de la femme à la maison, il se voit empêché, ses ressources
étant limitées, de traduire cette reconnaissance en salaire pour
sa conjointe. Avec étonnement, constatent les Cercles de
fermières, le système fiscal favorise davantage les gens
séparés et divorcés que ceux qui sont mariés.
Enfin, notent les Cercles de fermières, l'État ne reconnaît
pas le rôle fondamental de la femme en tant qu'éducatrice et
formatrice de la nouvelle génération. Cette attitude semble aller
à rencontre des objectifs d'un État aux prises avec un grave
problème de natalité. On soulève cette question-là,
on n'a pas de réponse précise, mais on dit dans nos travaux:
cette question de la femme au foyer ou du conjoint au foyer, c'est un
problème auquel il faut réfléchir, et c'est ce que le
Regroupement vient vous dire.
L'Association des femmes collaboratrices apporta un concours
précieux à l'organisation de cette journée
consacrée au travail en milieu familial. Dans sa recherche d'un statut
pour toutes les femmes collaboratrices, l'Association propose comme
référence de base une répartition du travail à
50-50 sans toutefois que celle-ci soit automatiquement utilisée ou
revendiquée: le pourcentage revenant à chaque ménage
varierait selon le cas. Mais nous attirons encore l'attention sur le fait que
le conjoint collaborateur, ça s'adonne qu'il y a plus de femmes
collaboratrices, mais que le conjoint collaborateur, il y a là des
problèmes au niveau du travail. On a soulevé aussi le
problème du travail au noir, que ce soit dans l'industrie du
vêtement, lorsque l'employeur, nous dit un syndicaliste, offre du travail
au noir, ce n'est pas pour le déclarer au comité paritaire.
À leur avis, le gouvernement a un rôle important à jouer
afin d'éliminer le travail au noir et obliger, entre autres, les
employeurs à déclarer le travail. Les actions du comité
paritaire seront efficaces à condition que ce travail soit
déclaré. C'est un point de vue, M. le ministre, qu'on vous dit,
le travail au noir pose problème.
La question aussi des services de garde. Là aussi, on note qu'un
sondage réalisé à l'automne 1986 démontrait que
parmi les services au noir employés le plus communément, ceux des
gardiennes arrivaient en tête de liste. L'étude démontrait
aussi que 11 % des ménages québécois avaient eu recours en
1985 aux services d'une gardienne au noir, ce qui représentait 249 000
000 $, c'est-à-dire 36 % de la masse salariale totale consacrée
aux travaux, biens et services payés en argent, de main à main,
et sans facture. Ce qu'on vient vous dire par rapport au travail au noir, c'est
qu'un travail d'information est donc à poursuivre à ce sujet, par
les agences de service de garde, bien sûr, mais aussi par l'État,
auprès des gardiennes qui travaillent au noir, afin de leur faire
prendre conscience que cette forme de clandestinité les empêche de
se prévaloir socialement de la reconnaissance de leur travail. Demeurer
dans cet état clandestin peut, à courte échéance,
procurer quelques avantages financiers, mais, à long terme, cette
clandestinité les prive de la possibilité d'accéder
à une situation financière qui pourrait être plus
avantageuse, car le temps
passé à travailler au noir leur bloque tout accès
aux bénéfices marginaux que peut leur procurer un emploi
reconnu.
Voici donc quelques observations. Je résume aussi, parce que je
veux laisser un peu plus de temps à M. Savard pour un point plus
particulier. On a participé aussi à l'atelier "Famille" du Forum
pour l'emploi. Et, selon cet atelier, des mesures pourraient contribuer, au
chapitre des conditions de travail, à faciliter la conciliation travail
et famille, et ce serait 'os suivantes: reconnaître les
bénéfices marginaux au prorata des heures travaillées, la
diminution des heures de travail, les horaires flexibles, la formation sur les
heures de travail, une politique de vacances améliorée pour les
parents, le temps partagé, une meilleure et plus souple politique de
réintégration en emploi après un congé de
maternité et un accès plus grand à la possibilité
de traitements différés. Ces améliorations dans le monde
du travail, je crois, sont du ressort de cette commission. Nous avons
attiré l'attention dans les pages qui précèdent sur
différents états de fait qu'il faut corriger. Je pense que vous
pouvez les lire comme nous. Cependant, depuis l'envoi de ce mémoire le
19 janvier dernier au secrétariat de la commission, il nous a
été possible de considérer le mémoire du Conseil du
statut de la femme présenté à cette commission et sa
réclamation concernant la mise sur pied d'un régime de
prestations parentales administré exclusivement par le Québec, et
nous souscrivons entièrement a ça. Nous appuyons cette demande du
CSF et également ses suggestions sur la politique globale des
congés parentaux. On pourrait peut-être s'arrêter sur les 18
semaines, les 34, les 32, je pense qu'on n'est pas des spécialistes de
ceci, mais on pense qu'il y a là sur la table vraiment des choses fort
importantes. Nous voulons aussi appuyer très fortement le plan d'action
gouvernemental et ce qui est dit dans Familles en tète où
on réclame qu'il nous apparaît que le congé de
maternité réclamé pourrait être transformé
aussi en congé de paternité s'il y a décès ou
incapacité de la mère. Nous avons aussi considéré
la proposition récente de la FTQ relative à la création
d'un régime d'assurances parentales II y a lieu, me semble t-il, de la
regarder et de procéder à ce sujet à une étude
approfondie.
Nous voulons aussi, M. le ministre, apporter notre appui à un
mémoire qui a été déposé le 2 juin ici par
la Confédération des organismes familiaux du Québec. C'est
un mémoire en date du 2 juin qui traite de congés parentaux, de
flexibilité des horaires de travail, de mesures de protection et des
mesures favorisant la réinsertion des femmes dans le monde du travail.
Voilà donc quelques points. Je laisse à mon collègue
Georges Savard de continuer la présentation d'un point encore que l'on
met de l'avant.
Le Président (M. Joly): M. Savard.
M. Savard (Georges C): M. le Président, cette partie du
mémoire porte sur les programmes d'aide aux employés, et, selon
nous, se relie à l'obligation qu'ont le gouvernement et les employeurs
de s'occuper des travailleurs qui ont des responsabilités
familiales.
L'économie québécoise est en train de vivre une
autre Révolution tranquille. Les aspects sociaux du développement
économique prennent une importance considérable. C'est, par
exemple, Culinar qui, par son président, se donne comme mission de
devenir une des meilleures et plus rentables entreprises alimentaires
canadiennes et, ce faisant, de favoriser la croissance et le
développement de tous ses employés sur les plans professionnel et
personnel.
C'est le chef de la direction d'Alcan qui affirme que, si les profits
sont un but nécessaire, ils ne constituent pas l'objectif primordial.
Chaque entreprise est moralement tenue, dans la mesure de ses moyens, de jouer
un rôle social et humanitaire.
Ce rôle, l'entreprise doit le jouer d'abord avec ses
employés et c'est là qu'intervient le défi crucial auquel
fait face l'employeur qui veut gagner et garder sa place sur un marché
qui se mondialise rapidement. Dans cette optique, l'excellence ne suffit plus,
c'est la perfection qu'il faut, comme ose dire le directeur
général d'Agropur.
Mais comment obtenir la perfection d'êtres humains qui ne sont pas
des robots, qui ont très souvent des responsabilités familiales
et, de plus en plus, même envers leurs parents âgés, des
employés qui, malgré une formation supérieure quelquefois,
ne sont pas préparés à assumer un changement ou à
accélérer leur performance, des employés aussi qui pensent
désormais plus à la qualité de leur vie et qui seraient
prêts, pour l'obtenir, à réduire leurs revenus. C'est le
cas, en effet, de 35 % des travailleurs et travailleuses de 25 à 44
ans.
L'employeur doit faire face à la compétitivité,
mais il doit aussi recruter et retenir les meilleurs employés. Pour y
arriver, il ne peut plus compter seulement sur l'attrait d'un salaire
élevé, il doit offrir des avantages sociaux et familiaux qui
pourront séduire les meilleurs employés.
Le premier vice-président de la Banque Nationale du Canada
s'explique ainsi: "De nos jours, il est difficile de vouloir séparer les
problèmes de la famille et de l'entreprise, car on sait que si
l'entreprise refuse de faire des compromis, c'est la performance qui s'en
ressent... les bons employés ne restent pas. Ils sont prêts
à sacrifier ou, à tout le moins, à ralentir la progression
de leur carrière pour conserver leur qualité de vie."
On a beaucoup expérimenté, récemment, dans ce
domaine. On a parlé, par exemple, de management participatif, de patage
des profits, et le reste. Le Regroupement désire aujourd'hui
attirer l'attention sur des programmes de moins haute gamme
peut-être, mais tout aussi avantageux par les bénéfices
qu'ils apportent à la fois, et c'est là une de leurs
caractéristiques les plus séduisantes, à l'employeur et
aux employés. Ce sont les PAE, programmes d'aide aux employés,
dont la rentabilité n'est pas à démontrer puisqu'on
s'accorde pour leur reconnaître un rapport
coûts-bénéfices de 1 à 10 au moins et aussi une
influence très positive sur le bien-être des employés.
Précisons ici que les PAE sont des programmes qui ont pour
objectif de résoudre ou, mieux, de prévenir les problèmes
personnels des employés, en d'autres mots, d'empêcher que les
problèmes personnels ne deviennent des problèmes de
personnel.
Le Président (M. Joly): M. Savard, je vous inviterais
à conclure, s'il vous plaît.
M. Savard: II me reste une page et demie, je vais essayer d'aller
un petit peu plus vite.
Le Président (M. Joly): Allez, s'il vous plaît,
allez.
M. Savard: Le PAE n'interfère ni avec la gestion des
ressources humaines, ni avec le travail du syndicat. Il s'ajoute à tout
cela au même titre que l'assurance-maladie, sauf qu'il vise les maladies
ou les malaises psychosociaux dont on s'occupe peu ou pas et qui prennent de
plus en plus de place. Selon le Bureau International du travail, en effet, une
personne sur quatre risque de présenter des troubles psychiques à
un moment ou à un autre de sa vie active. Proportion qui a
été jugée réaliste par le Centre
québécois pour le développement de la productivité
et qui a motivé le Conseil du trésor, en 1986, à
recommander la création de PAE dans tous les organismes
gouvernementaux.
Le BIT considère aussi que ce sont des problèmes
personnels et non le manque de compétence qui sont reliés
à 80 % des accidents, 65 % à 80 % des congédiements et 61
% des absences. Sur ce dernier point, on peut se rappeler que le taux
d'absentéisme moyen annuel au Québec est de 9,8 jours par
travailleur. Si on calcule les coûts du salaire versé au
remplaçant, de la formation donnée à celui-ci et de la
productivité perdue, on arrive à une perte de 4 600 000 000 $
pour l'économie québécoise par année.
Sans faire l'analyse de toutes les causes de l'absentéisme,
rappelons, enfin, que la majorité des entreprises interrogées par
le Conference Board of Canada, en 1988 et 1989, ont affirmé que 25 % des
cas d'absentéisme étaient reliés à des conflits
entre le travail et la maison. 11 000 employés interviewés par le
Board ont dit qu'ils avaient de la difficulté à concilier emploi
et responsabilités familiales. En fait, 10 % des personnes
interrogées ont affirmé qu'elles avaient perdu un emploi à
cause de ces conflits et 14 % envisageaient de quitter leur emploi actuel pour
la même raison.
Il y a maintenant plus de femmes sur le marché du travail que
jamais et, en l'an 2000, elles seront plus nombreuses que les hommes à y
entrer. Il y a surtout plus de mères que jamais. En effet, 60 % des
mères d'enfants de plus de six ans exercent un emploi. Il y a
également plus de travailleurs qui tiennent à bien jouer leur
rôle de père. Pas étonnant si, très souvent
aujourd'hui, les difficultés conjugales ou parentales prennent le pas
sur les problèmes d'alcool ou de toxicomanie.
Les femmes, partout au monde, ont été les premières
à protester contre cet ordre de choses et à demander que le monde
du travail tienne davantage compte des changements sociaux. Petit à
petit des changements s'opèrent pour faciliter aux travailleurs
l'exercice de leurs responsabilités parentales. Le Conference Board
parle de réaménagements qui affectent déjà 50 % des
travailleurs, pour l'horaire flexible; 30 % des travailleurs, pour le travail
partiel et les avantages sociaux au prorata du temps travaillé; 25 % des
travailleurs, pour la semaine comprimée; 20 %, pour la
possibilité du travail partagé; et 11 %, pour le travail à
la maison.
Les entreprises offrent aussi des services qui aident les travailleurs
à honorer leurs responsabilités parentales: 8,4 % d'entre elles
offrent de l'information et de la référence pour les services de
garde; 4,8 %, une garderie; 7,8 % de l'assistance pour enfant malade; 4,6 %,
des ateliers pour l'éducation à la vie familiale; 6 %, de
l'information et de la référence pour aider un membre
âgé ou malade de la famille; et 2 %, de l'assistance pour
faciliter cette aide.
Beaucoup de choses ont commencé à se faire. Partout, les
nouvelles...
Le Président (M. Joly): Excusez, M. Savard, est-ce que
vous arrivez à la fin?
M. Savard: Oui.
Le Président (M. Joly): Oui? S'il vous plaît.
M. Savard: J'arrive à la recommandation. Partout, les
nouvelles familles essaient d'imposer le rythme aux entreprises et celles-ci,
au moins les meilleures, ajustent tranquillement leur montre à l'horaire
souvent trépident des familles modernes, car leurs employés les
plus efficaces sont souvent ceux qui, chaque jour, doivent jongler avec leur
horaire de travail et leurs obligations familiales.
Ces parents travailleurs ont besoin d'être appuyés et le
Regroupement désire signaler à la commission parlementaire que
les PAE sont un des moyens de le faire, un moyen rentable et qui
bénéficie aux employeurs, aux travailleurs et
travailleuses et aux entreprises. Le gouvernement du Nouveau-Brunswick,
entre autres, en est convaincu, au point d'avoir créé la
Commission de l'alcoolisme et de la pharmacodépendance, qui compte,
parmi ses missions, celle de faciliter l'implantation et le
développement des PAE dans toutes les entreprises. (11 h 30)
Au Québec, la majorité des grandes entreprises, et surtout
les plus fortes, comme les banques ont leur PAE. Tous les organismes
gouvernementaux, comme on l'a dit, ont aussi les leurs. Ce sont les petites et
moyennes entreprises qui, souvent, sont privées, alors que leurs
employés en auraient tout autant besoin. D'où la recommandation
du Regroupement interorganismes pour une politique familiale au Québec,
que les ministres responsables du Travail, de l'Emploi et de la
Sécurité du revenu insistent sur l'importance de communiquer aux
employeurs combien il est urgent de créer et de développer des
programmes d'aide aux employés, offrant les services de counselling
à l'intention des travailleurs et des travailleuses ayant des
responsabilités familiales et que ces ministres encouragent et appuient
la prestation de services de counselling pour répondre aux besoins des
travailleurs parents. Je vous remercie et je m'excuse si j'ai été
un peu trop long.
Le Président (M. Joly): Parfait, M. Savard, et M. Lajoie,
merci Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine et à
la Famille.
Mme Trépanier: Merci, M. le Président. Bonjour, M.
Lajoie et M. Savard. Votre organisme a été fondé en 1984,
je pense, avec l'objectif principal de veiller à l'élaboration
d'une politique familiale au Québec. Vous avez participé
intensivement au processus de l'élaboration de la politique et, dans
l'ensemble, vous avez appuyé le plan d'action proposé au
printemps dernier.
Vous avez réitéré, ce matin, votre appui au plan
d'action Familles en tête. Vous appuyez, également, dans
votre présentation, ce matin, le principe de congés parentaux
avancé par le Conseil du statut de la femme, ainsi que celui du
regroupement des congés de maternité et parentaux. Il y a quand
même des différences fondamentales entre ces deux régimes,
et j'aimerais qu'on en discute plus, parce que je trouve extrêmement
important qu'on puisse établir une chose.
Dans la politique Familles en tête, il y a le soutien
financier aux familles et on accorde une importance certaine à l'appui
financier aux parents d'enfant de troisième rang. Dans la proposition du
Conseil du statut de la femme, au sujet des congés parentaux, on fait
une prestation universelle et une réallocation des fonds qui sont
présentement accordés. En fait, l'enfant du troisième rang
n'a pas plus d'importance que les autres. La COFAQ, elle, fait ça de
façon différente, elle dit: Premier et deuxième rang pour
la réallocation et le troisième rang est considéré
de façon autonome.
Vous, vous voyez ça... Est-ce que dans votre approche, vous
dites: Réallocation et avec appui à l'enfant de troisième
rang, en surplus, ou si vous faites ça dans un ensemble, là.
Est-ce que vous appuyez plutôt le Conseil ou plutôt la COFAQ
là-dessus? Quand j'ai parié de regroupement, je me suis
trompée, je voulais dire la COFAQ.
M. Lajoie: Je vais peut-être vous décevoir. Vous
savez que le regroupement a 65 membres et qu'on fonctionne par consensus. On a,
du côté des congés parentaux, des congés de
parentalité, de toute cette question-là, des opinions qui sont
modulées et variées. Je ne peux, ce matin, ni vous donner un avis
pour un, ni pour l'autre, parce que de nos membres sont pour l'un et de nos
membres sont pour l'autre. Mais ce qu'on vient vous dire avec force, ce matin:
Faites vos devoirs, consultez les dossiers, écoutez nos membres, mais ce
qui est important, c'est qu'on ait au Québec des congés parentaux
importants, qu'on y mette les ressources nécessaires et que, s'il faut
qu'on y mette aussi l'argent nécessaire, qu'il soit de premier, de
deuxième ou de troisième rang, je ne peux pas, ce matin, moi,
vous dire ce que je préfère ou ce que je ne préfère
pas. J'ai peut-être des opinions personnelles, mais il ne sied pas que je
vous les donne. Mais ce que je viens vous dire, au nom de tous nos membres,
c'est qu'une fois pour toutes, qu'on mette, si on peut dire, le paquet
là-dessus, qu'on se réveille, qu'on fasse quelque chose, qu'on
rapatrie des ressources peut-être, qu'on en fasse un service
intégré, mais qu'on bouge et qu'on n'ait pas peur de mettre des
ressources parce que les familles qui viennent nous voir, qui sont à la
recherche d'une politique familiale, nous disent que cette question de la garde
des enfants, concilier des responsabilités parentales et de travail,
c'est difficile. Alors, notre message, c'est qu'il faut bouger. Dans quelle
direction il faut bouger? C'est à vous de faire votre devoir. C'est
à l'Opposition de...
Mme Trépanier: De nous aider à faire notre devoir.
Ha, ha, ha!
M. Lajoie: Ils feront ce qu'ils voudront comme ils pourront. On
souhaite que tout le monde prenne sa responsabilité très au
sérieux parce qu'il faut qu'au Québec on ait une politique
familiale et que, ça, c'est excessivement important. Il ne faudrait pas
passer par-dessus. Je pense que les Québécois et les
Québécoises ne pardonneraient pas à qui que ce soit
qu'à ce moment-ci, on passe par-dessus.
Mme Trépanier: Une dernière question à
deux volets. Donc, premièrement, vous êtes d'accord avec la
démarche de l'avant-projet sur les normes minimales de travail,
C'était un chapitre important dans la politique familiale, je pense que
vous l'avez bien énoncé. Deuxièmement, j'en conclus donc
que la politique familiale que vous appuyez, le plan d'action que vous avez
appuyé et que vous appuyez encore, dans votre esprit, peut être
amélioré, peut évoluer. Ce n'est pas coulé dans le
béton pour vous. Et vous nous dites: Retournez faire vos devoirs avec
les propositions que vous avez eues sur la table, ces semaines
dernières, et revenez-nous avec des propositions.
M. Lajoie: On trouve que c'est un peu timide.
Mme Trépanier: Vous n'êtes pas fermés
à une modification du plan d'action.
M. Lajoie: Non. Regardez, Mme la ministre, dans les années
soixante, on a décidé, au Québec, de mettre le paquet, si
vous voulez, en éducation. On y consacre, bon an, mal an, 6 000 000 000
$ à 7 000 000 000 $. Dans les années soixante-dix, on a
décidé que la santé des Québécois,
c'était important. On y met, bon an, mal an, 6 000 000 000 $ à 7
000 000 000 $. Est-ce qu'on ne pourrait pas mettre le paquet pour ce qui est
d'une politique familiale parce que c'est important? On avait
considéré que l'éducation, c'était important, on a
mis le paquet. On a considéré que la santé, c'était
le paquet, c'était important. Est-ce que la politique familiale ne
pourrait pas être importante à ce point-là qu'on y mette le
paquet? Et peut-être, je pense, ce qui revient souvent aussi, c'est de
rapatrier, dans un seul gouvernement aussi, tous les pouvoirs en ce qui regarde
la famille, qu'on arrête d'avoir des juridictions partagées. Je
pense qu'il y a assez d'argent dans ce côté-là. Mais qu'il
y ait un seul et unique programme intégré et que ce
programme-là origine du Québec. Je pense que ça, c'est une
chose excessivement importante, qu'on sache où s'adresser, que ce
programme soit global un peu comme l'éducation, si vous voulez, un peu
comme la santé, si vous voulez, mais qu'on n'ait qu'une politique
familiale qui n'ait qu'un lieu et qu'une origine et que ce soit le
Québec.
Mme Trépanier: Je conclus en vous disant que cette
commission-ci vise les normes minimales de travail. On en profite pour prendre
des positions sur l'ensemble des sujets qui peuvent nous aider dans ce
domaine-là. Vous nous avez dit tout à l'heure que le gouvernement
doit avoir une intention sérieuse, soutenue et efficace dans le domaine
d'une politique familiale, je suis tout à fait d'accord avec,
monsieur.
Le Président (M. Joly): Merci. Je vais maintenant
reconnaître Mme la députée de Hochela- ga-Maisonneuve.
Mme Harel: merci, m. le président. il me fait plaisir de
saluer les représentants du regroupement interorganismes. j'ai eu
l'occasion de vous rencontrer à quelques reprises dans le passé,
ayant eu la responsabilité du dossier de la famille, ma collègue
des chutes-de-la-chaudière qui a maintenant la responsabilité de
la condition féminine et qui est aussi intéressée par
l'échange que nous aurons. vous avez, dès l'entrée de jeu
de votre mémoire, rappelé la politique familiale qui faisait du
volet du travail un élément déterminant dans une
véritable politique familiale. l'enjeu est là maintenant.
l'enjeu, essentiellement, est celui de permettre la réconciliation.
parce que, finalement, la conciliation, quand on regarde vos chiffres, on doit
se rendre compte qu'il y a bien du monde qui concilie, et c'est surtout des
femmes, évidemment parce qu'elles sont massivement sur le marché
du travail. eiles y sont et, en plus, elles sont mères de jeunes
enfants, avec des pourcentages vertigineux. alors, elles ont à concilier
des rôles qui, d'une certaine façon, sont irréconciliables
du fait de la non-réconciliation du marché du travail et des
responsabilités familiales. vous avez fait état des programmes
d'aide à l'emploi, c'est particulièrement m. savard qui en a
parlé, et des expériences que vous menez avec des dirigeants
d'entreprise. vous nous disiez, entre autres, à la page 10, que "partout
les nouvelles familles essaient d'imposer leur ryhtme aux entreprises et
celles-ci, au moins les meilleures, dites-vous, ajustent tranquillement leur
montre à l'horaire souvent trépidant des familles modernes". vous
savez, hier on a passé une journée, du début ou presque
à la fin, à une exception près, avec uniquement des
dirigeants de grands regroupements et de grandes associations de secteurs
clés dans l'économie, que ce soit au niveau de l'acier, par
exemple, que ce soit au niveau des mines, que ce soit dans tous les secteurs de
fabrication où il y a des usines qui paient dès salaires
extrêmement élevés. et je peux vous dire que la
réceptivité était nulle ou presque, nulle, et disons que
le jugement n'est pas trop sévère. et au contraire, loin de
s'améliorer, ce dont on nous faisait part, c'est qu'il y avait
maintenant des horaires de travail qui, disait-on, étaient très
très très bien reçus par les employés, sur 12
heures, des horaires de 12 heures. et ça, ça fait boule de neige,
maintenant, paraît-il, s'est une vraie avalanche, c'est bien bien bien
apprécié. c'est des opérations continues, mais tout ce qui
est payant est en opération continue, finalement, d'une certaine
façon. et puis, c'est sur des quarts où il y a des 12 heures de
travail pendant deux jours, deux jours de 12 heures et une journée de
repos, trois jours de 12 heures, trois jours de repos, tout étant
fractionné. alors, qu'est-ce que vous considérez de cette
question de la durée du travail qui, loin de s'améliorer,
est en train, non pas de s'ajuster aux responsabilités
familiales, mais complètement de s'en détacher?
M. Savard: C'est très complexe. Il y a des endroits
où on a offert aux travailleurs de travailler toute leur semaine,
vendredi soir, samedi et dimanche, et ça a été très
populaire. J'espère qu'ils font des choses intéressantes pour le
reste de la semaine, mais ce sont des choix. Je pense qu'il faut distinguer
dans la population travaillante les responsables de famille et les autres qui
ont plus de liberté aussi. Mais c'est sûr qu'il se fait beaucoup
d'expérimentation actuellement et qu'il se fait aussi, je crois, une
prise de conscience très forte sur l'importance du travail posté,
je pense qu'on peut dire par quart aussi, qui occupe 30 % de nos travailleurs.
C'est formidable, au Québec, 30 % de gens qui travaillent par poste.
Savez-vous qu'on ne connaît pas beaucoup la façon de s'adapter
à ce travail-là. Il y a des ajustements physiques, des
ajustements psychologiques, il y a des ajustements sociaux aussi, à
faire, lorsqu'on est à l'écart, lorsqu'on est
déphasé par rapport à tout le reste de la population.
Ça, c'est des conditions de travail qu'on néglige un peu, mais
qui prennent de l'importance, ici, et qui nous coûtent très cher,
parce que la productivité d'un travailleur qui est sur un poste, la
nuit, disons, est diminuée de 30 % à 40 % dans beaucoup de cas.
Surtout, par exemple, les infirmières, et aussi une autre
catégorie d'emploi que j'oublie maintenant. C'est vrai qu'il y a des
choses qui ne nous paraissent pas familiales et qui ne le sont pas.
Alors...
Mme Harel: Me permettez-vous, parce qu'il y a si peu de temps, le
président vient encore de me...
M. Savard: Ah, bon! Je m'excuse.
Mme Harel: Non, non, c'est très bien. Mais vous avez dit
quelque chose d'important, qui est un enjeu important dans cette commission.
Faut-il distinguer ceux qui ont des responsabilités familiales de ceux
qui n'en ont pas sur le plan des règles minimales, des règles
normatives? Et là, la question est: Faut-il introduire des mesures
protectionnistes? Et cette idée généreuse peut-elle se
révéler à l'usage extrêmement perverse? Parce que
des mesures protectionnistes, on en retrouve dans l'avant-projet de loi: celle
de pouvoir refuser de faire du temps supplémentaire pour le
salarié qui a des responsabilités familiales. Bon. Sauf
qu'à ce moment-là, on prétend ne pas améliorer les
conditions de travail générales, hein? On en arrive à des
mesures protectionnistes qui peuvent discriminer aussi les chefs de famille,
parce que si, à l'embauche, on se rend compte que la personne a trois ou
quatre enfants, ou est susceptible d'en avoir plus et de refuser, si ce n'est
qu'à elle qu'on offre ce droit de refus, les chances d'embauché,
de promotion seront diminuées. C'est ce que les femmes ont connu avec
les mesures protectionnistes des décennies passées. Est-ce qu'on
veut les introduire dorénavant pour la famille, parce qu'on n'a pas le
courage, comme société, d'ajuster les conditions de travail
à une qualité de vie pour tout le monde? C'est la question que je
vous pose. (11 h 45)
M. Savard: J'appuie tout à fait le fait qu'il faut avoir
beaucoup de courage pour prendre les bonnes décisions, mais, sur ce
point-là, je m'excuse, je trouve la question trop complexe pour que je
puisse y répondre. Mais je voudrais simplement ajouter une chose dans la
perspective du programme d'aide, c'est qu'on remarque, actuellement, qu'il y a
beaucoup de stress sur le marché du travail, dans les entreprises de
comptabilité, dans toutes les entreprises. Et il faut, je crois, moi,
trouver un moyen d'aider nos travailleurs à survivre dans ces
conditions-là, parce que l'entreprise n'est pas libre de tout changer.
Il faut rivaliser avec les autres. Alors, je crois qu'il y a un effort
d'adaptation psychologique, de santé physique et tout, pour qu'on puisse
survivre dans la compétition qui est celle de nos entreprises
d'aujourd'hui.
M. Lajoie: Me permettez-vous, M. le Président...
Le Président (M. Joly): Brièvement.
M. Lajoie: ...de donner une expérience qui s'est faite en
Belgique? Parce que, de ce côté-là, il y a des choses fort
intéressantes. Un programme gouvernemental, une loi qui s'appelle la
pause carrière. Il est possible à un employé de prendre,
à un moment donné dans sa vie, une pause carrière qui peut
aller jusqu'à six ans. Les normes du travail et la loi disent: lorsque
cette personne-là revient à son travail, elle doit être
réintégrée avec toutes les conditions de son ancien poste,
etc. Cette personne, cependant, pour qu'elle puisse être
libérée, doit se pairer avec quelqu'un qui est au chômage.
Et le travailleur qui s'en va en pause carrière a l'allocation de
chômage et le chômeur qui prend le travail a, lui, le salaire de la
personne qui quitte pour la pause carrière. L'inconvénient
à l'usage, après deux ans, c'est que, souvent, le chômeur
qui a pris la place qui est allé en pause carrière, voulant
garder l'ouvrage après, travaille plus fort, est plus vaillant, est plus
consciencieux. Mais, il y a des mesures dans la loi qui disent qu'il est
protégé pendant six mois, un an, etc. Mais voilà, je
pense, M. le ministre, de l'imagination au pouvoir qui permet, à un
moment donné, dans les normes du travail, à des gens, soit
l'homme ou la femme, qui voudraient prendre un congé, une pause
carrière, pour des activités
familiales et de le faire sans être pénalisés, et
ça ne coûterait rien. Ça, ça ne coûte rien. En
plus, ce que j'aimerais dire aussi, c'est que toutes ces législations
doivent être pour l'homme et pour la femme, parce que la meilleure
façon de protéger les femmes au travail, c'est d'accorder les
mêmes avantages aux hommes. Parce que, si, dans la question de la
discrimination, on donne des avantages aux femmes, les employeurs, voyant
venir, à un moment donné, une jeune femme en âge dit de
procréer, va la voir venir avec des réserves. Mais si ces mesures
s'appliquent aussi aux hommes, à ce moment-là, on pense qu'il y
aura moins de discrimination parce que...
Mme Harel: Le même problème se pose entre les gens
en âge de procréer et ceux qui ne le sont pas, c'est-à-dire
entre ceux, hommes ou femmes, indistinctement, qui bénéficient de
ces mesures protectionnistes.
M. Lajoie: Exact.
Mme Harel: Pour terminer, M. le Président...
Le Président (M. Joly): Je vous le permets.
Mme Harel: ...j'aimerais simplement remercier le Regroupement en
signalant que si le gouvernement souhaite aussi avantager les parents d'un
enfant de troisième rang, ils peuvent bonifier la proposition du Conseil
du statut et introduire l'engagement qu'ils avaient pris durant la campagne
d'offrir le même revenu de remplacement, jusqu'à
l'épuisement des 52 semaines, pour les parents d'enfants de
troisième rang.
Le Président (M. Joly): Je reconnais votre
habileté, Mme la députée, à passer toujours le mot
de la fin. Alors...
Mme Trépanier: Je vous remercie de votre participation,
messieurs.
Le Président (M. Joly): Alors, au nom des membres de cette
commission, à mon tour, de vous remercier. C'est très
intéressant, quoique le temps nous presse un peu, comme vous
remarquez.
Alors, je demanderais aux représentants du Syndicat des
fonctionnaires provinciaux du Québec de bien vouloir s'avancer et
prendre place, s'il vous plaît. Est-ce qu'on manque de fauteuils? Ou
est-ce qu'on peut s'organiser, là? Parce que je vois que vous avez
amené une batterie de gens intéressés. Alors, bonjour et
bienvenue à cette commission, M. Harguindeguy. J'apprécierais
beaucoup si vous pouviez présenter les gens qui vous accompagnent, s'il
vous plaît.
Syndicat des fonctionnaires provinciaux du
Québec
M. Harguindeguy (Jean-Louis): Sûrement, M. le
Président. Alors, à ma gauche, notre secrétaire
générale, Mme Danielle-Maude Gosselin, que vous avez eu le
plaisir de voir la semaine dernière...
Le Président (M. Joly): On la connaît, oui.
M. Harguindeguy: ...comme représentante de
l'Intersyndicale sur la question des droits parentaux, entre autres. Et
également, en suivant à ma gauche, René-Jean Banville,
Denis Savard et, à ma droite, Jean-Chartes Morin, qui sont
vice-présidents à l'exécutif.
Le Président (M. Joly): Merci. Je ne vous apprends rien en
vous disant que vous avez une quinzaine de minutes pour présenter votre
mémoire de la façon la plus concise possible.
M. Harguindeguy: On va sûrement être brefs, M. le
Président, compte tenu de l'heure également.
Le Président (M. Joly): Pour vous donner plus de temps
pour les échanges. Merci.
M. Harguindeguy: Merci, M. le Président. Mesdames et
messieurs, il nous fait plaisir de vous présenter notre position. Bien
entendu, vous avez déjà pris connaissance de notre position
concernant toute la question des femmes et des droits parentaux, la semaine
dernière, par le mémoire de l'Intersyndicale.
Aujourd'hui, nous allons nous en tenir à des sujets plus
particuliers, en fait, plus terre à terre peut-être, concernant
quand même certains de nos membres. Nos revendications principales sont
à tout le moins de faire en sorte que, dans la Loi sur les normes
minimales de travail, il n'y ait pas de discrimination possible. Donc, on
traite tout le monde à égalité, ce qui n'est
malheureusement pas le cas puisqu'il y a toutes sortes de mesures, à
l'heure actuelle, qui permettent à des employeurs de pouvoir
éventuellement assujettir des gens de façon différente et
donc d'accorder aussi des conditions de travail qui peuvent être
différentes.
Également, notre revendication principale au niveau de
l'applicabilité et de l'universalité du régime, c'est de
faire en sorte que tous les employés, tous les personnels soient
assujettis à la loi, ce qui n'est malheureusement pas le cas pour les
employés du gouvernement. Nous avons passablement d'autres lois aussi
qui nous imposent des restrictions, qui ne nous accordent pas les mêmes
conditions que d'autres travailleurs et travailleuses du Québec. Sans
vouloir dire qu'on est traités comme des travailleurs et des
travailleuses de second ordre, il n'en demeure pas moins que la loi des normes
minimales du travail
ne s'applique pas aux employés de l'État, même si
vous avez fait un certain pas en avant en assujettissant dorénavant les
sociétés mandataires du gouvernement, les organismes
mandataires.
Nous souhaiterions également que le gouvernement comme tel, les
ministères, soient aussi assujettis. Vous allez peut-être me dire:
Pourquoi, Parce que vous avez une convention collective, vous négociez
les conditions? C'est un fait, sauf qu'il y a quand même uno
majorité de nos membres maintenant qui ne sont pas couverts. De plus en
plus, le gouvernement, depuis quelques années, embauche des
employés occasionnels, dont la plupart ne possèdent aucun droit,
aucun recours, lorsque, éventuellement, ils sont mis à pied ou
que certaines conditions ne sont pas applicables. C'est également le
fait même de vos propres employés Ici à l'Assemblée
nationale. Une forte majorité du personnel est occasionnel, n'est pas
couvert ni par la convention collective ni par la loi. Vous avez un
règlement qui les régit, selon lequel, par contre les
employés n'ont aucun recours contre l'arbitraire éventuel qui
pourrait s'exercer. On souhaite donc, parce qu'on a quand même
près de 25 % de nos effectifs qui sont occasionnels, qui ne
possèdent donc pas de recours... Et on estime qu'en 1990, c'est à
peu près le temps que le gouvernement se considère
également comme un employeur au même titre que les autres. Les
obligations que vous imposez aux autres entreprises du Québec devraient
également être les vôtres.
Pour ce qui est également du salaire, entre autres, il y a la
question de la clause "orphelin" que nous voudrions voir disparaître. Le
gouvernement n'est pas non plus à l'abri de cette disposition-là,
puisque le Conseil du trésor qui vous représente nous oblige
pratiquement, nous a obligés déjà auparavant, lors de la
création de certaines sociétés, à adopter une telle
mesure de clause "orphelin", en ayant deux traitements différents pour
des fonctions similaires et des conditions de travail et des engagements, en
fait, des conditions d'embauché identiques. On estime donc que cette
question de salaire devait être léglférée en ce sens
qu'on ne puisse pas permettre, dans une entreprise, de faire des distinctions
quant au salaire, mises à part peut-être les distinctions qui
peuvent être justifiables lorsqu'il y a une question de progression dans
la carrière, d'acquisition de l'expérience qui est requise pour
l'exercice de certaines fonctions.
D'autre part également, compte tenu des pouvoirs que
possède la Commission de réglementer dans certaines
matières, nous estimons que les représentants des travailleurs et
travailleuses devraient être présents, comme ils le sont dans
d'autres organismes tels la CARRA, la Commission de la santé et de la
sécurité. Je pense que ce serait une certaine façon
d'assurer à tout le moins une certaine équité pour les
gens qui ne possèdent pas de syndicat dans certaines entreprises, compte
tenu parfois de l'ampleur de l'entreprise, c'est parfois difficile.
Pour ce qui est également des modalités concernant les
conditions de travail proprement dites, en plus des éléments sur
le salaire, on estime qu'on devrait limiter quand même la durée du
travail, particulièrement pour les gens dont on prétend, ou
l'employeur prétend, que les oeuvres sont incontrôlables. Parce
que c'est une façon... Tantôt, vous avez traité de la
volonté ou, en fait, des intentions indiquées d'augmenter la
durée de travail quotidien jusqu'à 12 heures. On vit aussi
certaines situations où parfois les gens sont dans l'obligation inverse
de travailler jusqu'à sept jours par semaine, ce qui nous semble, dans
les années quatre-vingt-dix, une situation intolérable.
Pour ce qui est également du paiement des jours
fériés, il nous semble que la loi actuelle permet trop de
latitude aux employeurs. C'est une façon d'éviter, compte tenu
des modalités qui sont applicables, qui se réfèrent
à la durée de service d'un employé, pour éviter de
payer des jours fériés à des individus. On vit cette
même situation-là également au gouvernement, ce qui est une
des justifications pour lesquelles on souhaite que la loi s'applique aussi.
Pour ce qui est des repos, on estime qu'en 1990, c'est un peu aberrant de
constater qu'on ne puisse pas assurer une certaine qualité de vie au
travail du personnel. On parle partout de qualité de vie, que ce soit
dans l'environnement, dans la famille. En fait, on traite de ces grands
thèmes-là de façon assez intensive, sauf que, lorsque
vient le temps d'accorder un minimum de temps de repos pour une période
de repas, on vit encore, en 1990, une situation, en tout cas, où les
employeurs prétendent que c'est impossible. On estime que la loi devrait
à tout le moins permettre un minimum d'arrêt pour permettre aux
gens, quand même, de se sustenter, comme tout le monde le fait
généralement partout, même ici à l'Assemblée
nationale.
Il y a certaines autres modalités que nous voudrions voir
modifiées, dont on a traité dans notre mémoire.
Essentiellement, ce qu'on souhaite c'est d'éliminer, à toutes
fins pratiques, les discriminations possibles qui sont le lot, dans la loi sur
les normes du travail, que vous n'avez pas indiqué comme étant
une intention de modifier, d'assujettir tous les personnels, quels qu'ils
soient, même ceux du gouvernement, et aussi d'assurer la présence
des travailleurs et travailleuses au sein de la Commission, de l'organisme qui
légifère et réglemente les conditions et l'application de
la loi. C'est, en bref, ce que nous avons à vous dire ce matin.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Harguin-deguy. Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre de la Main-d'?uvre, de ia
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
saluer le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec et son
président qui, si je me souviens bien, est en congé sans
traitement d'un ministère que j'ai déjà occupé
autrefois.
M. Harguindeguy: J'ai déjà été, oui,
sous votre gouverne. En tout cas, c'est une façon de parier, d'une
façon théorique, mais je ne suis pas en congé sans
traitement, je suis en congé avec traitement, selon les modalités
de la convention collective. Je demeure encore un employé de
l'État.
M. Bourbeau: Oui, oui. Très bien. Mais le congé se
prolonge.
M. Harguindeguy: Force nous est de demeurer, si on veut continuer
notre travail.
M. Bourbeau: Éventuellement, je pourrais peut-être
vous reprendre dans mon nouveau ministère, puisque je m'occupe du
recyclage de la main-d'oeuvre. Peut-être qu'éventuellement, on
pourra...
M. Harguindeguy: Disons que ce n'est pas la grâce que je me
souhaite d'aller au ministère de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu. Ce n'est pas le ministère que
j'enligne.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: Alors, dans votre mémoire, en ce qui concerne
l'accumulation de service continu, vous demandez de préciser la
définition de service continu, de façon à permettre
l'accumulation du service continu pendant une période de mise à
pied avec droit de rappel. Or, selon l'interprétation qu'on fait de la
loi actuelle, le service continu s'accumule déjà durant une mise
à pied avec droit de rappel, puisque le lien d'emploi est maintenu. La
question que je vous pose, c'est: Compte tenu que la loi actuelle nous
apparaît déjà rencontrer votre proposition quant à
l'accumulation du service continu durant une période de mise à
pied avec droit de rappel, est-ce que votre proposition vise alors un
problème particulier qu'on ne voit pas, nous?
M. Harguindeguy: En fait, c'est évident que le 12e
alinéa de l'article 1 y pourvoit, mais, quant à nous, il
justifierait une certaine clarification, parce que vous êtes quand
même... On dit "lié à l'employeur par un contrat de
travail", ce qui n'est quand même pas nécessairement le cas
partout. Dans certaines entreprises, il y a effectivement, pas des genres de
contrat, mais, en fait, des conventions collectives qui pourvoient à un
tel droit de rappel, mais ce n'est pas le cas partout. On a déjà
vécu dans certaines sociétés, celle que le gouvernement a
créé en 1985, entre autres la SEPAQ, pour ne pas la nommer, et la
SIQ, des employés qui, même si on aurait pu estimer qu'il y avait
un contrat de travail qui les liait, n'étaient pas nécessairement
assujettis, puisque la loi comme telle, aussi, entre autres, ne s'applique pas
à eux. Alors, le contrat de travail, il n'y a pas de définition
de ce qu'est un contrat de travail.
M. Bourbeau: Très bien. Maintenant, vous proposez que le
temps qui est passé à une pause café soit
considéré comme du temps travaillé aux fins du calcul du
salaire. Pourriez-vous m'expli-quer votre demande, puisque l'article 59 de la
loi stipule, et je cite: "Un salarié est réputé être
au travail durant la pause café." Alors, je ne comprends pas vraiment
cette proposition-là. (12 heures)
M. Harguindeguy: En fait, vous l'avez aussi avec la question des
repas, il est réputé être au travail, sauf que vous avez la
disposition qui prévoit que, nécessairement, il peut être
requis d'être à son poste de travail de façon
générale, pour ce qui est de la période de repas, qui est
aussi en pratique applicable également pour la pause café, parce
qu'entre ce que dit la loi et ce qui est appliqué, ce n'est pas
nécessairement des réalités concrètes partout. Ce
sont peut-être des questions de clarification beaucoup plus qu'autre
chose sur des matières, dans certains domaines. Vous avez encore des
gens, même au gouvernement, qui n'ont pas de pause café.
M. Bourbeau: Bon, écoutez, disons ceci, je ne saurais pas
commenter si oui ou non il y a des gens qui n'ont pas de pause café,
mais tout ce que je peux dire, c'est que la loi sur les normes me semble
très claire. Un salarié qui prend une pause café est
réputé être au travail. Il me semble que ça ne peut
pas être plus clair, je ne vois pas ce qu'on pourrait faire de plus clair
que ça, dans la loi en tout cas.
M. Harguindeguy: II est réputé, mais on
souhaiterait aussi qu'il la prenne effectivement, ce qui n'est pas
nécessairement le cas. Une pause café, ce n'est pas
nécessairement d'avoir son café sur le bord du bureau. Dans bien
des cas, ce sont des employés manuels aussi.
M. Bourbeau: Vous conviendrez alors que votre remarque ne vise
pas à modifier la loi, mais plutôt les usages, les coutumes dans
les...
M. Harguindeguy: qu'il y ait des clarifications aussi dans les
dispositions, je pense que si on veut éviter des difficultés
ultérieures, c'est d'être précis dans la loi.
M. Bourbeau: oui, bien, la loi, est-ce que vous reconnaissez que
la loi est précise, ou est-ce que vous souhaitez qu'on modifie le texte
que je viens de lire?
M. Harguindeguy: Bien, en fait, on souhaiterait qu'elle soit
peut-être plus précise, également. Nous, ce qu'on
revendique, quand on parle de qualité de vie au travail, c'est
également de prévoir un temps d'arrêt. Ça devrait
être, en 1990, une réalité que les gens puissent
effectivement arrêter.
M. Bourbeau: Bon, O.K., c'est un peu la même chose pour les
repas. Vous demandez de prévoir qu'une personne salariée ait
effectivement le droit de s'arrêter 30 minutes pour prendre un repas.
L'article 79 dit: "Sauf une disposition contraire d'une convention collective
ou d'un décret, l'employeur doit accorder au salarié pour le
repas une période de 30 minutes sans salaire au-delà d'une
période de travail de cinq heures consécutives. Cette
période doit être rémunérée si le
salarié n'est pas autorisé à quitter son poste de
travail." J'aimerais seulement que vous me précisiez la
différence que vous faites entre ce que l'article 69 accorde, soit une
pause de 30 minutes sans traitement pour un repas, et votre proposition sur ce
sujet qui est présentée à la page 5 de votre
mémoire.
M. Harguindeguy: C'est que, nous, c'est l'arrêt effectif
que nous souhaitons. Quand on parle, dans la loi, c'est évident que
cette période est rémunérée, étant
donné que si la personne n'est pas autorisée à quitter son
poste de travail. Il y a même chez nous, les gens que nous
représentons, des personnes qui ne peuvent quitter leur poste de
travail. Elles sont rémunérées, c'est évident. Sauf
qu'à notre sens, ce n'est pas logique qu'en 1990, quelqu'un soit dans
l'obligation de prendre son repas tout en continuant à travailler.
M. Bourbeau: Est-ce que ça s'applique aux ministres aussi
ça?
M. Harguindeguy: Je pense que vous devez probablement prendre au
moins un minimum de 30 minutes, en tout cas, vous avez l'opportunité
parfois de le faire. Mais ça, c'est peut-être une question de
choix comme ministre...
M. Bourbeau: Oui, oui, je comprends. Disons que, dans mon cas
personnel, je ne quitte pas le poste de travail au moins 50 % du temps, mais
par contre, je ne suis pas ici pour m'en plaindre.
M. Harguindeguy: Je dirais que c'est un peu la même
condition pour les présidents de syndicats aussi, mais...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Harguindeguy: On le fait sur une base volontaire, nous sommes
des bénévoles, peut-être en tout cas, alors que, nous, on
parle de salariés qui n'ont pas le choix, eux, de demeurer, c'est un peu
différent.
M. Bourbeau: Non, je comprends très bien. C'était
évidemment une blague. Je vais passer la parole à d'autres, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je vais
maintenant reconnaître Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
vous accueillir, M. Harguindeguy, et les personnes qui vous accompagnent. Vous
souhaitez que le gouvernement et ses ministères et organismes,
même si les personnels sont nommés et
rémunérés en vertu de la Loi sur la fonction publique,
soient asujettis à l'ensemble de la législation des normes.
Est-ce qu'on peut vous entendre, là-dessus?
M. Harguindeguy: Parce qu'en fait, des fols, il y a des gens qui
pensent que le fait que les fonctionnaires soient généralement
nommés en vertu de la loi, ça leur donne déjà une
assurance bien grande. Sauf qu'il faut admettre aussi que près de 25 %
des effectifs que nous représentons sont des employés
occasionnels qui ne sont pas nommés en vertu de la loi. Ils n'ont donc
pas de couverture légale et ne sont pas non plus couverts par les normes
minimales de travail. Ce qui fait que, dans les employés qui n'ont pas
acquis un droit de rappel en vertu des dispositions de la convention
collective, ce qui regroupe environ 5000 personnes chez nous, à chaque
période de paie, sur liste de rappel, vous avez quand même
près de 5000 occasionnels au gouvernement dans divers ministères
qui sont embauchés sans avoir de droit de rappel. Ces gens-là
sont à la merci de toutes sortes de décisions. Même pour
des questions d'ordre budgétaire, on vient de le vivre au mois de
décembre, il y a eu une mise à pied énorme
d'employés occasionnels qui n'avaient pas de telle garantie, qui
n'avaient aucun recours pour justifier même le choix ou la
sélection des personnes qui ont été mises à pied.
Parce que la loi ne s'applique pas.
Vous avez même les propres employés occasionnels de
l'Assemblée nationale, ceux du Parlementaire ou ainsi de suite.
Même vos propres employés ici, qui sont les pages, ne sont pas
couverts par la Loi sur la fonction publique, ne sont pas couverts par la
convention collective parce qu'ils sont exclus par décision de
l'Assemblée nationale. Il y a une réglementation qui fixe leurs
conditions de travail, mais qui ne donne pas non plus de recours possible pour
contester quelque décision que ce soit.
On estime qu'en 1990, c'est absurde d'avoir de telles situations. Le
gouvernement impose des conditions à tous les employeurs du
Québec, fixe finalement aussi ou accorde des recours à des
personnes. On estime qu'on a suffisamment de restrictions en tant
qu'employé de l'État. On devrait avoir au moins ce
minimum-là. Et on vit des situations qui sont parfois aberrantes dans
les ministères ou organismes. Donc, on estime qu'on devrait être
assujettis.
Mme Harel: Ceux qui sont occasionnels, ce sont ceux qui sont dits
être embauchés pour un surcroît de travail.
M. Harguindeguy: II y a une question de surcroît de
travail. On a aussi ce qu'on appelle, entre guillemets, des projets
spécifiques qui n'en sont pas nécessairement. C'est beaucoup plus
une politique de gestion et de financement aussi. Parce que, quant à
nous, c'est des postes permanents qui devraient être comblés, mais
ça, c'est une question politique, et il n'y a peut-être pas de
volonté politique de régler ce problème-là.
Mme Harel: Et il y a toujours le décret du Conseil du
trésor qui impose une durée maximum de trois ans pour un
employé occasionnel?
M. Harguindeguy: Ça a été quelque peu
corrigé tout récemment, à la suite de nos récentes
négociations. Parce qu'on avait aussi cette situation aberrante
où quelqu'un, après trois ans maximum d'emploi, qui avait
donné d'excellents services, qui rendait satisfaction, a
été mis à pied pour le seul motif qu'il avait
complété trois ans. Ça, ça a été
corrigé quelque peu. Mais nos craintes, c'est peut-être qu'on
abuse quelque peu de la réglementation qui permet de déterminer
que, finalement, ça devient plutôt des projets spécifiques.
On pourra évaluer qu'à la rigueur, la vocation d'un
ministère ou la création même d'un ministère est
strictement pour une question temporaire et qu'éventuellement, dans deux
ou trois ans, le ministère pourrait disparaître pour se justifier
de ne pas embaucher d'employés permanents. Ça peut aller
jusque-là, à la rigueur. Ce sont d'ailleurs nos
préoccupations premières. Non pas pour retirer des cotisations
syndicales, parce que faut-il vous dire que les occasionnels paient leur
cotisation comme les permanents, mais c'est quand même pour assurer une
stabilité dans la fonction publique. On estime qu'on se doit
d'être à l'abri de toute intervention politique.
Mme Harel: Les employés à temps partiel font quel
pourcentage de vos membres?
M. Harguindeguy: C'est difficile à évaluer parce
que, généralement, il y a quand même, mis à part la
Régie des rentes qui embauche des employés à temps partie'
de façon bien spécifique et la Régie du logement, les
employés à temps partiel que nous avons, ce sont beaucoup plus
des personnes, après un congé de maternité, qui
choisissent de revenir travailler de façon... de réduire la
période de travail. C'est difficile à dénombrer
exactement, le pourcentage.
Mme Harel: Les employés occasionnels ont-ils les
mêmes rémunérations, les mêmes conditions de travail
que l'ensemble de vos membres?
M. Harguindeguy: Ça dépend. Certaines, oui, pas
toutes. Il y a des conditions qui ne leur sont pas applicables. Et vous
comprendrez que, quand les gens ne sont pas à l'emploi lorsqu'on
négocie une convention collective, c'est difficile pour eux de faire
valoir leurs points de vue ou leurs droits. D'autre part, charité bien
ordonnée commençant par soi-même, les personnes en place
n'ont pas tendance, au Québec, à se battre pour ceux qui vont les
suivre. Donc, on a des difficultés pour obtenir peut-être des
garanties particulières. C'est pour ça qu'on revendique certaines
choses dans les normes minimales de travail. Mais généralement,
ça l'est, avec quand même des restrictions. Exemple: un
employé occasionnel peut se voir embauché avec un tel traitement,
se voir reconnaître un maximum de cinq ans d'expérience. Si,
éventuellement, il fait l'objet d'une mise à pied,
réembauché deux ans après ou deux mois après,
indépendamment, et qu'il a acquis trois ou quatre ans
d'expériences de travail, on ne lui reconnaîtra pas cette
expérience-là, même si elle a été acquise
dans le même milieu, dans les mêmes fonctions. Il y a des
restrictions comme ça, de ce genre.
Mme Harel: Et les personnes qui sont sur les programmes dits
d'employabilité, elles sont nombreuses, je pense, ces personnes?
M. Harguindeguy: Ça, c'est ce qu'on appelle, nous, du
"cheap labour". C'est qu'on embauche des gens...
Mme Harel: 11 y en a plusieurs?
M. Harguindeguy: II y en a malheureusement trop. Et, compte tenu
qu'il y a encore certaines dispositions de la loi qui ne sont pas
appliquées, la réforme de l'aide sociale, il y a malheureusement
trop de ces gens-là qui occupent aussi des emplois qui, normalement,
seraient occupés par des employés occasionnels. Mais il n'y a pas
de recours non plus pour ces personnes-là.
Mme Harel: Et ces personnes n'ont aucun assujettissement, aucune
protection, enfin, des lois du travail.
M. Harguindeguy: Aucune. Les normes ne les couvrent pas. Alors,
ils doivent se contenter d'avoir l'aide sociale plus les 100 $ qui sont
versés par le ministère de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Mme Harel: Et qui ne l'est plus.
M. Harguindeguy: Non.
Mme Harel: II n'y a plus maintenant...
M. Harguindeguy: Non. Mais, en tout cas, vous irez voir dans les
ministères, II y en a encore qui vont venir travailler comme stagiaires
avec des conditions différentes et qui prennent la place
d'employés qui. normalement, auraient été à
l'emploi. Le ministère de la Justice en est un friand d'une telle
utilisation. Même le propre ministère de M. Bourbeau aussi a
quelques péchés véniels sur la conscience.
Mme Harel: Est-ce que vous partagez le point de vue qui
était exprimé dans le journal du SPGQ sur... Mon Dieu, il y a eu
un article qui a été publié dans le journal Le Soleil
sur... Pardon?
M. Harguindeguy: Que c'est souvent des jeunes et des femmes?
Mme Harel: Oui.
M. Harguindeguy: Oui. D'ailleurs on a contribué quelque
peu aussi à l'article, en tout cas, le journaliste concerné, M.
Corbeil, nous a également rencontrés. C'est effectivement le
fait. Qu'est-ce que vous voulez? Des gens d'expérience avec des
conditions d'embauche où on limite la reconnaissance de leur
expérience n'ont aucun intérêt à venir. Donc, ce
sont généralement des jeunes qui doivent aussi se trouver quelque
chose. Parce que, finalement, il y a des entreprises où on exige
l'expérience de travail qu'ils ne peuvent acquérir qu'à
ces conditions-là. Et aussi comme de plus en plus... On a quand
même près de 52 % de nos membres qui sont des femmes, et ça
se retrouve également dans les emplois occasionnels.
Mme Harel: Les clauses "orphelins" qui existent encore, vous
dites qu'elles devraient être interdites. Mais votre convention en
comprend-elle?
M. Harguindeguy: Notre convention avec le gouvernement, non. Nous
avons eu dans les conventions de la SEPAQ, la Société des
établissements de plein air du Québec, une clause "orphelin". On
se rappellera qu'en 1985, quand le gouvernement a créé la
Société, c'était pour administrer et gérer les
établissements de loisirs. Comme c'était pour rentabiliser
essentiellement, il fallait donc que la Société se finance
elle-même à même ses revenus. Il n'y avait pas ou
très peu de subventions d'équilibre budgétaire. Ce qui
fait que, pour arriver à administrer avec ces revenus, la
Société a... Et comme on était en première
convention collective, on n'avait pas les mêmes droits dans une
première convention que quand c'est une renouvellement. On n'a donc pas
eu le choix ou d'alternative que d'accepter que les nouveaux employés
embauchés après le 4 juin 1986 soient
rémunérés 20 % de moins que les employés qui
étaient en place, même s'ils exerçaient les mêmes
attributions, les mêmes responsabilités.
On a réussi, tout récemment, dans le premier
renouvellement pour la convention du Mont-Sainte-Anne à corriger quelque
peu, mais pas de façon encore complète - mais c'est un premier
pas - en établissant des échelles de traitement qui, finalement,
n'en sont pas, parce que ce n'est pas aux fins de reconnaître
l'expérience acquise qui est nécessaire pour l'exécution
du travail. C'est beaucoup plus pour une question de rémunération
pour, à tout le moins, permettre aux nouveaux employés
d'acquérir éventuellement le salaire maximal, alors que,
généralement, dans les politiques de rémunération,
lorsqu'on a des échelons, c'est parce qu'on reconnaît
l'acquisition de l'expérience qui, elle, est nécessaire pour
l'exécution des fonctions, pour acquérir une certaine autonomie
au niveau du travail, ce qui n'est pas le cas dans les situations qu'on vit. Et
on estime que ça devrait être interdit de telles dispositions,
même pour le gouvernement. Parce que les décisions viennent du
Conseil du trésor. Mais comme c'est l'argent qui mène le monde,
vous savez...
Le Président (M. Joly): C'est ce qu'on dit. Mme Harel:
Même le syndicat?
M. Harguindeguy: bien, nous on est redevables de ça aussi.
parce que les politiques budgétaires du gouvernement ont des
conséquences chez nous également.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: Merci, M. le Président. Merci, M. Harguindeguy
et l'ensemble des personnes qui vous accompagnent.
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Bourbeau: Merci M. Harguindeguy et aux membres de son syndicat
pour cette contribution dont nous tiendrons sûrement compte.
M. Harguindeguy: Nous vous remercions.
Le Président (M. Joly): Au nom des membres de cette
commission, à mon tour de vous remercier. Merci beaucoup d'avoir
été présents.
Une voix: Merci.
Le Président (M. Joly): Nous allons suspendre pour uno
minute, 30 secondes.
(Suspension de la séance à 12 h 14)
(Reprise à 12 h 16)
Dépôt de mémoires
Le Président (M. Joly): Nous allons reprendre nos travaux.
Comme nous sommes au terme des auditions, je vais maintenant procéder au
dépôt des mémoires. Alors, pour les rendre publics et
valoir comme s'ils étaient récités au long, je
dépose les mémoires des personnes et des organismes qui ont faire
parvenir un mémoire dans le cadre de la présente consultation et
qui n'ont pas été entendus par la commission, à savoir
l'Association des usagers de la langue française, mémoire 41 M,
le Barreau du Québec, mémoire 40M, la Commission des services
juridiques, mémoire 1M, General Motors du Canada Itée,
mémoire 9M et 9R, l'Union des municipalités du Québec,
mémoire 37M, et l'Union des producteurs agricoles, mémoire
39M.
Nous sommes rendus au stage final, est-ce qu'il y a des remarques de
clôture? Oui? Je vais donc maintenant reconnaître les deux
formations, à savoir 4 minutes pour Mme la ministre, 8 minutes pour
l'Opposition et 4 minutes pour M. le ministre par après. Ça peut
sembler sévère, mais on se doit, disons, de se baliser, autrement
on sait ce qui arrive. Alors Mme la ministre déléguée
à la Condition féminine et à la Famille.
Conclusions Mme Violette Trépanier
Mme Trépanier: M. le Président, je vais essayer de
donner l'exemple. La consultation publique qui s'achève a permis de
dégager des consensus évidents autour des grands objectifs
poursuivis par l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur les normes du
travail.
Les différents partenaires socio-économiques et plus
particulièrement les groupes de femmes et les organismes familiaux
s'entendent pour reconnaître la nécessité d'aider les
travailleuses et les travailleurs à réaliser leurs objectifs
professionnels et à assumer également leurs
responsabilités.
Comme prévu dans le plan d'action Familles en tête,
le gouvernement entend favoriser une meilleure conciliation des
tâches professionnelles et parentales. Cette voie continuera d'être
privilégiée par notre gouvernement. D'ailleurs, la très
grande majorité des participants à cette commission parlementaire
ont fait valoir la nécessité d'en faire une responsabilité
collective. On peut dégager dès maintenant un accord de principe
sur la mise en place de congés de courte et de longue durée, lors
de la naissance ou de l'adoption d'un enfant, et de congés ponctuels
pour l'exercice de responsabilités parentales. Les propositions se
rapportant à l'élargissement de l'accès aux droits
parentaux et à l'amélioration de la protection des personnes
salariées qui s'en prévalent sont endossés par la presque
totalité des intervenants entendus.
Parmi les recommandations déposées à cette
commission, plusieurs sont innovatrices, dépassant l'unique cadre sur la
Loi sur les normes du travail. Bon nombre d'entre elles portent sur le
remplacement du revenu de travail pendant les congés de maternité
et parentaux.
Les propositions soumises par les groupes seront sérieusement
évaluées tout en tenant compte des changements proposés
par le projet de loi C-21 du gouvernement fédéral.
D'autre part, les modifications apportées aux normes du travail
visent aussi à assurer une meilleure protection de la main-d'oeuvre,
notamment en élargissant le champ d'application de la loi. La
problématique des domestiques et des gardiennes a été
beaucoup discutée. Il est évident que les travaux à ce
sujet devront s'intensifier.
Un autre point largement débattu est celui de la situation des
travailleuses et travailleurs occupant des emplois atypiques. Actuellement, une
personne salariée sur deux exerce ce type d'emplois. Les droits
collectifs tels que définis par le Code du travail demeurent souvent
inaccessibles à cette partie de la main-d'oeuvre qui compte sur la Loi
sur les normes du travail pour se protéger plus adéquatement face
aux fluctuations du marché du travail. Plusieurs participants ont
défendu le principe d'une rémunération équitable et
du droit à la proportionnalité des avantages sociaux. Ces
principes et ces recommandations rejoignent les objectifs mis de l'avant dans
le plan d'aciion gouvernemental en matière de condition
féminine.
Je m'engage à porter une attention toute spéciale aux
différentes avenues proposées pour assurer une meilleure
protection contre le harcèlement sexuel en milieu de travail. Les
recommandations des groupes ont enrichi le projet gouvernemental et permettront
de réévaluer certaines propositions.
En terminant, M. le Président, permettez-moi de remercier les
organismes et, plus spécialement, les personnes qui, au sein des groupes
de femmes et des groupes familiaux, ont réussi avec des moyens souvent
très restreints, à mettre en lumière les
préoccupations des clientèles qu'ils représentent. Et je
vous remercie.
Le Président (M. Joly): Merci. C'est exemplaire, Mme la
ministre.
Mme Trépanier: Combien de minutes? Le Président
(M. Joly): Trois minutes dix.
Mme Harel: Je voudrais que vous me fassiez signe à cinq,
M. le Président.
Le Président (M. Joly): Madame, je me ferai
un devoir de vous aviser.
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous
plaît!
Mme Louise Harel
Mme Harel: M. le Président, dans le contexte des fortes
pressions concurrentielles à la suite de la libéralisation de
l'économie nord-américaine, le Québec ne doit pas miser
sur du "cheap labour" pour accroître ses exportations et sa
productivité. À défaut d'intervenir efficacement et
courageusement pour soustraire l'économie du Québec des effets
nocifs de la politique monétaire canadienne et des effets pervers du
taux de change, le gouvernement libéral ne doit pas, sous
prétexte d'améliorer la situation compétitive et
concurrentielle de l'économie québécoise, profiter du
faible pouvoir de négociation d'une partie trop importante de sa
main-d'oeuvre.
Pour tout le Canada, en 1988, l'augmentation du coût de la
main-d'oeuvre évalué en dollars américains à 11 %
par le Centre canadien du marché du travail était dû pour 8
% à l'augmentation du dollar canadien et pour 3 % seulement à
l'accroissement des coûts salariaux, bien en deçà donc de
l'augmentation des prix à la consommation. Ce sont là des
indications et bien d'autres que l'on retrouve dans le numéro de
février de la revue Le marché du travail, portant sur les
relations du travail au Québec dans le contexte du libre-échange
Canada-États-Unis. La faible marge de manoeuvre du Québec en
matière de productivité à l'égard des
Américains provient, non pas des exigences de sa main-d'oeuvre mais
d'une fluctuation à la hausse du capital canadien. Ces choses doivent
être dites pour rappeler surtout qu'une hausse du salaire minimum
n'entraîne pas d'impact important sur les exportations du Canada vers les
États-Unis, que 6 % seulement de la population en emploi au
Québec est rémunérée au salaire minimum et que la
moitié des 153 000 personnes concernées sont concentrées
dans les secteurs de l'hébergement, de la restauration et du commerce do
détail, qui ne sont pas directement visés par le
libre-échange. Ce sont là également des données que
nous pouvons retrouver dans cette publication.
M. le Président, résolument et le plus tôt possible,
le ministre et son gouvernement doivent engager l'exercice de révision
de la loi. Nous assurons d'ailleurs le ministre de toute notre collaboration,
si cette révision consiste à faire autre chose que des
ajustements timides à l'égard des bouleversements structurels du
marché du travail et à l'égard des transformations
importantes des rôles parentaux. Oui, nous souscrivons à la
nécessité de tenir compte dans la législation
québécoise de la comparaison avec d'autres législations
voisines et nous disons que le Québec doit rattraper le retard à
l'égard de l'Ontario, un retard qui s'accentue depuis trois ans. La loi
ne doit pas simplement tenter de corriger les effets du passé, mais
résolument s'engager à s'ajuster au présent et à
l'avenir.
M. le Président, il faut reconnaître que malgré la
faible amélioration Introduite dans l'avant-projet de loi à
l'égard de la famille et l'exercice qui est théoriquement
facilité des congés parentaux et de certains recours en
matière d'application de la loi, toutes les autres questions pourtant
d'actualité brûlante ont été mises de
côté dans lavant-projet de loi et devront se retrouver dans le
projet de loi que nous examinerons, notamment ces questions relatives au
travail à temps partiel, à l'équité salariale, aux
vacances annuelles, et aux régimes d'assurances et autres avantages
sociaux.
D'autres aspects stratégiques en matière d'adaptation de
la main-d'oeuvre, qui ont été complètement passés
sous silence dans cet avant-projet de loi, devront également être
examinés dans le projet de loi, soit les questions relatives aux
indemnités de départ lors de licenciements, aux congés
pour la formation professionnelle, au salaire minimum, aux congés de
maladie et aux indemnités pour les faillites.
Alors, à cet égard, M. le Président, je voudrais
vous informer que j'entends, comme le permet le règlement à
l'article 176, inviter les membres de la commission et vous-même à
convoquer une séance de travail le plus tôt possible pour
procéder à l'examen des recommandations, des obervations et des
conclusions que nous tirons de nos travaux.
L'article 176 de notre règlement prévoit qu'au terme de
l'examen d'une affaire qui lui a été confiée par
l'Assemblée, une commission dispose d'un jour franc pour
déterminer en séance de travail les observations, conclusions et
recommandations qu'elle entend déposer à l'Assemblée.
Évidemment, ce sera à la présidence de notre
commission de voir à la convocation la séance de travail, et,
comme nous l'avions fait l'année dernière à l'égard
d'une autre loi, j'espère que nous pourrons également, tous les
membres de la commission, examiner plus à fund les conclusions que nous
devons tirer de nos travaux. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Alors, je prends acte de votre
demande en vertu de l'article 176, demande qui est consignée
actuellement au procès-verbal de la présente séance. Quant
au surplus, je vous rappelle que, nécessairement, en vertu de l'article
148, par contre, qu'il revient à la présidence de convoquer une
séance de travail qui verra à s'occuper de tout ça. Alors,
j'espère que ça vous satisfait, Mme la députée.
Mme Harel: Parfait. Et ça nous permettra un débat
à l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Joly): Bon. Est-ce que vous avez
terminé, Mme la députée?
Mme Harel: Oui.
Le Président (M. Joly): Alors, vous aussi, vous êtes
exemplaire.
Mme Harel: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): Maintenant, je vais
reconnaître M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. M. le
ministre.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, en clôturant cette
consultation publique, je veux d'abord exprimer notre très grande
satisfaction à l'égard de la qualité et de la
sérénité des interventions entendues ici au cours des deux
dernières semaines. Je tiens aussi à remercier les organismes qui
ont soumis des mémoires à la commission parlementaire, qui nous
ont présenté un éclairage fort utile à la
compréhension de certaines réalités du marché du
travail et qui nous ont formulé des propositions concrètes, dont
plusieurs vont contribuer à bonifier la prochaine Loi sur sur les normes
du travail.
Le besoin de procéder à une révision majeure des
conditions minimales de travail du Québec fait l'unanimité des
intervenants. Par delà les divergences exprimées quant au choix
des moyens, tous partagent les grands objectifs poursuivis par le gouvernement,
dans sa démarche de mise à jour et d'amélioration de la
Loi sur les normes du travail. J'ai aussi été frappé par
la qualité des mémoires et par l'ouverture d'esprit dont ont fait
preuve les organismes qui nous ont adressé des recommandations. En tout
temps, j'ai senti chez eux le souci d'améliorer l'avant-projet de loi,
de le compléter et de simplifier l'application de la Loi sur les normes
du travail.
J'ai soutenu, à l'ouverture de cette commission, que
l'avant-projet de loi sur les normes du travail constitue un chantier ouvert,
en ce sens qu'il regroupe des propositions soumises à la consultation,
sans arrière-pensée. Nous avons été
impressionné par plusieurs arguments défendus à l'appui de
modifications aux normes proposées ou à l'ajout de nouvelles
propositions. Je ne veux pas présumer ici de nos conclusions, mais il
m'apparaît évident que nous devrons revoir, par exemple, les
dispositions prévoyant que le droit de se prévaloir d'un recours
en cas de congédiement arbitraire n'est acquis qu'après cinq ans
de service continu. Plusieurs intervenants ont élo-quemment
plaidé ici en faveur d'un abaissement de cette norme. À la
lumière des témoignages entendus et des propositions
formulées durant cette consultation, nous devrons réexaminer tout
le chapitre qui touche le travail à temps partiel, en particulier, les
questions relatives aux salaires et aux vacances annuelles. Il faudra aussi
s'interroger sur la pertinence de modifier les dispositions touchant l'avis
préalable au temps supplémentaire et l'opportunité de
faire précéder les congés parentaux et familiaux de
semblables préavis. Notre réflexion devra également
s'étendre à la protection de l'emploi des personnes devant
s'absenter pour cause de maladie.
On a beaucoup insisté aussi sur l'importance de diffuser la plus
large information possible, afin que les salariés connaissent la Loi sur
les normes du travail et exercent les recours visant à préserver
leurs droits. Nous allons accorder aux articles traitant de l'information et de
l'accessibilité aux recours une attention spéciale, parce que,
à toutes fins pratiques ces dispositions législatives assurent
l'efficacité de la loi devant garantir des conditions de travail
décentes. (12 h 30)
À partir de maintenant, nous allons étudier, de concert
avec le Secrétariat à la famille et le Secrétariat
à la condition féminine, les propositions que nous ont
adressées les organismes au cours des deux dernières
semaines.
J'envisage de déposer à l'Assemblée nationale,
dès cette année, un projet de loi, afin que la nouvelle Loi sur
les normes du travail entre en vigueur en janvier 1991, pourvu, bien sûr
que l'Assemblée nationale adopte le projet de loi dans des délais
raisonnables et non pas à un train de sénateur comme on peut voir
dans un autre Parlement.
D'emblée, je tiens à préciser que les choix
fondamentaux que nous retiendrons dans le projet de loi seront établis
à partir de quatre critères principaux. Premièrement, la
protection accrue des personnes en emploi. Deuxièmement, la recherche du
meilleur équilibre entre les besoins sociaux et les besoins des
entreprises. Troisièmement, la préservation de la situation
concurrentielle du Québec. Quatrièmement, le souci de la
simplification de la Loi sur les normes du travail.
Je réitère que, lors de cette étape décisive
d'analyse des propositions et de rédaction d'un projet de loi, nous
maintiendrons le cap sur les objectifs essentiels de la révision de la
Loi sur les normes du travail, objectifs que je résumerai ainsi.
Premièrement, répondre aux impératifs de ia politique
familiale, c'est-à-dire mieux concilier les obligations professionnelles
et les responsabilités parentales. Deuxième objectif: adapter les
normes du travail aux besoins des travailleurs, des jeunes, des personnes non
organisées et des bas salariés. Troisième objectif: tenir
compte des problèmes résultant des changements structuraux de
l'économie, comme le recours grandissant au travail à temps
partiel et la précarité accrue des emplois. Quatrième
objectif: améliorer la qualité de vie des personnes en
emploi.
Avant de retourner à notre chantier, je tiens, M. le
Président, en terminant, à remercier ma collègue, la
ministre déléguée à la Condition féminine et
à la Famille pour son précieux concours. Je veux aussi saluer le
travail accompli par mes collègues, députés
ministériels. Je remercie enfin l'Opposition officielle pour
l'excellente collaboration qu'elle a offerte pendant toute la durée de
nos travaux et en particulier la députée de
Hochelaga-Maisonneuve, dont on doit souligner la rigueur intellectuelle, la
subtilité dans la critique et la bonne humeur à peu près
constante. Et enfin, je ne peux oublier la sagesse et le doigté de la
présidence. Et quand je dis la présidence, M. le
Président, vous comprenez que je comprends l'ancienne et le nouveau. Je
tiens à remercier le personnel de la commission. Tout
spécialement, je tiens à remercier mes collaborateurs
immédiats, les membres de mon cabinet, les fonctionnaires du
ministère que je dirige et ceux de la Condition féminine et du
Secrétariat à la famille. Je tiens aussi à remercier le
président de la Commission des normes du travail qui a été
avec nous pendant tout le temps des débats. Et, je dois dire que la
contribution de tous et de chacun augure bien pour les travaux que nous allons
entreprendre, visant à remanier la Loi sur les normes du travail. Je
vous remercie.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Alors,
à mon tour je tiens à remercier tous ceux qui ont
participé à cette commission pour la grande coopération et
la compréhension souvent du rôle ingrat qu'on peut jouer en tant
que président et présidente. Alors, compte tenu que la commission
a accompli son mandat, nous allons maintenant ajourner nos travaux sine die.
Mais je me dois de rappeler aux membres de cette commission qu'ils sont
convoqués demain matin à 10 heures, et ceci, dans le cadre de la
consultation générale et des auditions publiques sur
l'étude de l'avant-projet de loi sur la Loi sur les services de
santé et les services sociaux. Alors, merci et à demain matin, 10
heures.
(Fin de la séance à 12 h 34)