Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures onze minutes)
La Présidente (Mme Marois): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous allons reprendre nos travaux.
La commission des affaires sociales siège en effet dans une
perspective de consultation générale et d'auditions publiques en
vue d'étudier l'avant-projet de loi: Loi sur les services de
santé et les services sociaux.
Nous recevrons ce matin - je crois que les personnes ont
déjà pris place devant nous, ce qui est très bien - tes
religieuses hospitalières de Saint-Joseph de Montréal, la
communauté des soeurs de Charité de la Providence et l'Institut
des soeurs de la Charité de Montréal, plus communément
appelées les "Soeurs Grises".
Vous êtes représentées par un certain nombre de
personnes. J'aimerais que la personne qui sera la porte-parole se
présente et présente les personnes qui l'accompagnent pour que
les membres de la commission puissent vous connaître un peu mieux. Par la
suite, on vous demanderait de procéder à la présentation
de votre point de vue, environ une vingtaine de minutes pour le faire; vous
êtes libres de choisir la personne qui le fera pour vous. Cette
présentation sera suivie d'une période de questions, tant de la
part des membres du gouvernement que de l'Opposition, et d'échanges de
vues avec vous.
Alors, nous vous entendons, nous vous écoutons.
Religieuses hospitalières de Saint-Joseph
de
Montréal, communauté des soeurs de
Charité de
la Providence et Institut des soeurs de la
Charité de Montréal "Soeurs
Grises"
M. Barakett (Raymond): Raymond Barakett, porte-parole, soeur
Claire Houde à ma gauche et soeur Marie-Paule Levaque; à ma
droite, soeur Denise Lafond, soeur Bernadette Poirier et Me Gustave
Monette.
Mme la Présidente, M. le ministre, MM. et Mmes les membres, j'ai
l'honneur de vous adresser la parole au nom de trois congrégations
religieuses qui ont fondé les neuf établissements
mentionnés dans notre mémoire. Nous vous remercions de nous avoir
invités à témoigner devant vous.
Le fait est notoire que chacune de ces congrégations est
associée au nom d'une femme célèbre dans l'histoire des
soins de santé et services sociaux au Québec. Les Religieuses
hospitalières de Saint-Joseph avec Jeanne Mance, les soeurs de la
Providence avec Emilie Gamelin et les Soeurs Grises avec Marguerite D'Youville.
Avec Jeanne Mance, qui demeura toujours laïque, ce fut le commencement
d'une longue tradition de collaboration laïque-religieuse, qui s'est
continuée avec les oeuvres de Marguerite D'Youville au XVIIIe
siècle et Emilie Gamelin au XXIXe siècle jusqu'à nos
jours.
Aujourd'hui, il existe des établissements de santé et de
services sociaux dans plusieurs pays du monde, fondés par ces trois
congrégations dont les maisons mères sont toujours situées
à Montréal. Ces établissements sont administrés par
des laïques et des religieuses en collaboration. Au Québec, au
cours des années soixante ou avant, chaque établissement
mentionné dans le mémoire a été incorporé
par la congrégation fondatrice. Par exemple, on peut lire aux lettres
patentes constituant en corporation l'hôpital Saint-Joseph de
Trois-Rivières, et je lis: "Attendu que la communauté des soeurs
de Charité de la Providence a présenté au
lieutenant-gouverneur une requête demandant que l'hôpital qui
existe actuellement dans la ville de Trois-Rivières et appartenant
présentement à la communauté soit constituée en
corporation."
On peut lire la même chose concernant l'hôpital du
Sacré-Coeur de Montréal: "Attendu que la communauté des
soeurs de Charité de la Providence a présenté au
lieutenant-gouverneur une requête demandant que l'hôpital qui
existe actuellement dans la cité de Montréal et appartenant
présentement à la communauté soit constituée en
corporation." Ainsi de suite avec les autres hôpitaux ou centres
d'accueil. Des lettres patentes émises par le gouvernement du
Québec.
En vertu de l'acte constitutif de ces corporations, tous les membres
doivent être membres de la congrégation fondatrice,
c'est-à-dire tous les membres doivent être nécessairement
des religieuses. Ces corporations ont toutes, pour ces motifs et en vertu des
actes constitutifs émis par le gouvernement, un caractère
religieux et missionnaire. Ces corporations sont les véhicules
juridiques par lesquels les religieuses continuent d'accomplir leur mission
auprès des malades dans les hôpitaux et auprès des
bénéficiaires dans les centres d'accueil.
Ainsi, les congrégations exercent un ministère corporatif.
La mission, dans le domaine de la santé et des services sociaux, peut se
résumer comme suit: Prodiguer des soins de qualité aux malades
dans les hôpitaux et aux résidents dans les centres d'accueil,
avec compassion; participer à la formation du personnel; promouvoir la
recherche, les connaissances et la compréhension afin d'améliorer
les soins aux
bénéficiaires; témoigner de la dignité de la
personne humaine dans le respect de ses droits fondamentaux.
Or, l'avant-projet de loi met en péril cette mission, en coupant
des liens et en détruisant les allégeances entre la
communauté religieuse fondatrice, d'une part, et l'établissement
qui a été fondé par cette communauté, d'autre
part.
Et voici comment. Je lirai seulement un paragraphe de notre
résumé pour l'illustrer. L'avant-projet remplace - je suis
à la première page du résumé, troisième
paragraphe - le conseil d'administration propre à la corporation
propriétaire par le conseil d'administration des établissements
composé en vertu de la nouvelle loi et permet à ce nouveau
conseil d'administration de s'emparer de l'administration entière de
tous les actifs de la corporation propriétaire, y compris ceux qui ne
sont pas réservés à l'usage de l'établissement. Le
nouveau conseil est seul à représenter la corporation
propriétaire, à administrer ses affaires, à
déterminer les conditions d'admission des membres de la corporation
propriétaire, leurs droits et obligations ainsi que les critères
relatifs à leur démission, suspension ou exclusion. Les
président et vice-président de la corporation élus par le
nouveau conseil d'administration en vertu de l'avant-projet de loi deviendront
président et vice-président de la corporation propriétaire
et les officiers signataires de la corporation propriétaire.
Il s'agit là, nous croyons - et nous le soumettons
respectueusement - d'une prise de possession pure et simple de la corporation
propriétaire appartenant à la communauté religieuse. Cette
prise de possession est précédée par une mise en tutelle
de la corporation propriétaire dès l'entrée en vigueur de
la nouvelle loi.
En second lieu, l'avant-projet de loi, dans les centres hospitaliers
universitaires, réduit la représentation des membres de la
corporation propriétaire de trois à deux personnes.
Troisièmement, dans le cas des conseils d'administration d'un
territoire, on réduit la représentation des membres de la
corporation propriétaire de trois à une personne par
établissement et, finalement, l'établissement perd son propre
conseil d'administration.
Voilà quatre mesures de l'avant-projet de loi qui - et je vais
lire un extrait de notre mémoire à la page 12, le premier
paragraphe - tend à écarter dans la plupart des cas, ou
réduire éventuellement à néant dans les autres cas,
la participation des communautés religieuses fondatrices à
l'administration des centres qu'elles ont fondés. Pendant des
siècles, beaucoup de religieuses membres de ces communautés ont
travaillé bénévolement au sein des établissements
de santé et, au cours des dernières décennies, elles ont
créé des fondations de charité pour aider les
établissements de santé. Je vous nommerai quelques fondations: la
Fondation Ga melin, la Fondation Providence, le Fonds Émllie-Tavernier,
la Fondation hôpital du Sacré-Coeur, la Fondation du centre
hospitalier Saint-Joseph, la Fondation Jeanne-Mance.
Elles continuent à apporter leur expérience au sein des
conseils d'administration de ces établissements. Le régime
préconisé par l'avant-projet de loi mettra fin à cette
contribution bénévole et souvent exemplaire de beaucoup de
religieuses dans un domaine où elles contribuent leur compétence
et expérience.
L'avant-projet coupe les liens et les sentiments d'appartenance. Il
n'est pas possible, nous soumettons, de concilier cette conséquence
inévitable de certaines dispositions de l'avant-projet - que j'ai
mentionnées spécifiquement dans notre mémoire - avec son
ultime objectif de faire participer plus de citoyens et citoyennes à
l'administration et à l'organisation des services de santé et
services sociaux au Québec.
J'aimerais aussi vous référer à deux autres
paragraphes. D'abord à la page 10. le paragraphe 2: La loi actuelle
permet aux corporations propriétaires qui ont fondé les
établissements mentionnés dans notre mémoire d'être
représentées sur le conseil d'administration de
l'établissement. Les articles 79 et 82, dans le cas des centres
hospitaliers, dans le cas des centres d'accueil, permettent l'élection
de trois membres de la corporation au sein du conseil d'administration. Il est
donc possible sous le régime actuellement en vigueur depuis 1972, pour
la corporation qui a fondé un centre hospitalier ou un centre d'accueil,
de continuer à contribuer directement à l'administration du
centre. De fait, les corporations fondatrices ont participé à
l'administration de chaque centre hospitalier ou centre d'accueil
mentionnés dans notre mémoire, en élisant les trois
membres prévus par la loi.
De plus, depuis 1972, l'expérience a démontré que
la présence de trois ou quatre personnes au sein du conseil
d'administration de l'établissement, choisies par les membres de la
corporation propriétaire, a ajouté un élément
positif dans la stabilité et le contrôle de la gestion de
rétablissement. Les communautés religieuses ont encore des
personnes-ressources avec une grande expertise dans le domaine de
l'administration des hôpitaux et des centres d'accueil. En permettant aux
établissements de conserver leur propre conseil d'administration, il
sera possible pour les communautés religieuses de continuer à
contribuer leur expertise à la condition qu'on leur assure une
représentation adéquate aux conseils. Nous croyons qu'une
représentation de quatre personnes serait adéquate.
Il y a, bien sûr, trois exceptions qui méritent
d'être signalées, trois exceptions d'application de ces
dispositions de la loi. Je me réfère aux exceptions
prévues aux articles 30 et 31 où la loi prévoit une
exception pour les centres d'hébergement et de soins de longue
durée et pour les centres de réadaptation.
Lorsqu'il s'agit d'une installation maintenue par une institution
religieuse pour y recevoir ses membres ou adhérents, il n'y a pas
d'application. Nous sommes très contents de ces deux
exceptions-là et aussi de l'exception prévue à l'article
385, encore une exception spécialement prévue pour les
communautés religieuses, cependant, cela, seulement avec une
autorisation écrite du ministre.
En conclusion, j'aimerais vous référer aux pages 12 et 13
de notre mémoire. Les communautés religieuses désirent
fermement continuer leur mission auprès des malades et veulent apporter
une contribution positive et utile au domaine de la santé au
Québec. Pour pouvoir le faire, il faudrait non seulement modifier
l'avant-projet, tel qu'on le mentionne dans notre mémoire, de
façon à préserver l'autonomie des corporations fondatrices
de centres hospitaliers ou centres d'accueil, mais aussi modifier le chapitre
III, titre II, de façon à redonner à chaque
établissement, dont les actifs immobiliers appartiennent aux
corporations propriétaires mentionnées dans notre mémoire,
son propre conseil d'administration.
En bref, les communautés demandent que le gouvernement respecte
l'autonomie et les droits fondamentaux des corporations propriétaires,
que chaque corporation propriétaire continue d'avoir son propre conseil
d'administration, que chaque établissement ait son propre conseil
d'administration et que la représentation des corporations
propriétaires au sein du conseil d'administration de
l'établissement soit augmentée de trois à quatre
personnes.
Nous croyons que ceci est essentiel pour la transmission de
l'héritage de Jeanne Mance, Emilie Gamelin et Marguerite d'Youville
à ceux et celles qui travaillent aujourd'hui dans le domaine de la
santé et des services sociaux et aux générations qui
viendront après. Merci.
La Présidente (Mme Marois): On vous remercie, Me Barakett,
de cette présentation. Il est intéressant que vous rappeliez
l'origine de la fondation des congrégations. On oublie souvent que les
femmes ont largement contribué à l'histoire, que les femmes ont
été d'excellentes gestionnaires, sauf que, souvent, leurs noms
ont été perdus à travers les temps, et c'est heureux qu'on
le souligne maintenant. M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Je suis tout à fait
d'accord avec vous. Évidemment, ce matin, nous avons une avant-midi un
peu spéciale et on l'a voulu ainsi, à rencontrer et discuter avec
celles et ceux qui ont, en bonne partie, façonné notre histoire
sur le plan de la dispensation des soins aux bénéficiaires. J'ai
l'impression qu'on a beaucoup à tirer, du respect du
bénéficiaire, de ce que vous avez fait, de ce que vos
prédécesseurs ont pu faire, de l'attachement aux
bénéfi- ciaires, par rapport à ce qu'on vit à
l'occasion aujourd'hui. C'est assez étonnant. Hier soir, pour un soir
que je me retrouvais à la maison, j'ai écouté tes
nouvelles françaises sur TV5 et le débat que nous vivons au
Québec aujourd'hui est aussi vécu en province en France. C'est
assez étonnant, ce sont exactement les mêmes débats:
révolution technologique avec médecine familiale versus les
nouvelles technologies tout à fait exceptionnelles. Évidemment,
c'est rafraîchissant, de par ma formation d'historien un petit peu, de
remonter un peu dans l'histoire et de nous rappeler un certain nombre de
choses.
Je voudrais peut-être dire un certain nombre de choses dès
le départ, qui m'apparais-sent extrêmement importantes. Je ne suis
pas le concepteur de la politique ni celui qui l'a rédigée, je
suis membre d'un gouvernement qui l'a acceptée comme avant-projet de
loi. En . discutant avec les proches collaborateurs qui ont travaillé
à l'élaboration des objectifs, de la politique et de
l'avant-projet de loi, il est évident qu'auprès d'aucune de ces
personnes-là, il n'a été d'intention d'enlever des droits.
Je pense que ça m'apparait fondamental et, évidemment, tout le
débat vient au niveau du conseil d'administration unifié qui
crée un certain nombre de problèmes sur le plan de la gestion,
sur le plan du sentiment d'appartenance et sur le plan des corporations
propriétaires. (10 h 30)
Donc, le message est très clair à ce niveau-là. Le
ministère, dans sa pratique, a toujours montré une ouverture et
un niveau de compréhension assez élevé; on va continuer de
le faire. Et les problèmes qui découlent d'une rédaction
qui pourrait laisser entrevoir un non-respect de droits seront
définitivement choses du passé au moment où on aura refait
le projet de loi. Donc, c'est dans cet esprit-là que nous allons aborder
nos discussions et ce n'est certainement pas moi qui vais nier les droits
acquis chèrement au fil des années par le labeur du travail avec
tout ce que ça comporte. Et ce n'est pas pour rien que le gouvernement a
décidé de rebaptiser l'édifice Joffre, Catherine de
Longpré, c'était une reconnaissance très importante et
très évidente du rôle qui a été
joué.
Donc, je me référais à la page 13 - règle
générale, ce n'est pas chanceux comme chiffre - parce que c'est
là que commencent vos recommandations, et je vais tenter de les aborder
une par une.
Que le gouvernement respecte l'autonomie et les droits fondamentaux des
corporations propriétaires des actifs immobiliers des
établissements, on ne se chicanera pas longtemps. Donc, on va faire le
nécessaire pour clarifier ce qui est à clarifier et nous sommes
en accord avec cette recommandation qui est très importante. Je pense
que cela étant dit, il s'agira, bien sûr, que ça paraisse
au moment où on refera le projet de loi et qu'on prendra un certain
nombre de décisions,
et vous serez à même de juger, au début de
l'automne, lorsque nous le ferons connaître à l'Assemblée
nationale.
La deuxième est un petit peu plus, si je me permets,
philosophique et elle n'est pas inhérente à la réforme qui
est en cours, mais relève davantage de 1972. Que chaque corporation
propriétaire continue d'avoir son propre conseil d'administration, me
dit-on. Évidemment, je n'ai pas été un témoin
oculaire de ce qui s'est passé au ministère au cours des
dernières années, mais, me dit-on, depuis 1972, le
ministère a été très ouvert devant ces situations,
mais il faut bien admettre qu'il y a eu des approches différentes,
dépendant des communautés religieuses. Il y a eu, effectivement,
au ministère, certaines ouvertures de ce côté-là,
dans le quotidien ou dans les gestes qui ont été posés et,
là-dessus, j'aimerais peut-être vous entendre davantage.
L'Impression que nous avons, c'est que... Évidemment, le débat
est là depuis 1972. Il était peut-être un peu
amplifié par cette idée de conseils d'administration unifies,
mais il est là depuis 1972 et, dans la pratique, dépendamment des
communautés religieuses, il y a un comportement différent, soit
le maintien ou la disparition du conseil d'administration. J'aimerais
peut-être vous entendre davantage là-dessus.
M. Barakett: Bien sûr, dans le régime actuel, il n'y
a pas de doute que la situation est assez flexible. La loi n'interdit en aucune
manière et ne modifie, selon notre prétention, en aucune
manière, les statuts, les actes constitutifs des corporations
propriétaires. Donc, selon nous, elles ont toujours la capacité
d'avoir leur propre conseil d'administration. Dans certains cas, les conseils
d'administration sont demeurés dormants pendant certaines années,
mais le droit existait toujours; dans d'autres cas, ces conseils
d'administration étaient assez actifs; dans certains cas même, par
une exception assez extraordinaire, le conseil d'administration de la
corporation propriétaire était aussi le conseil d'administration
de rétablissement. actuellement, et depuis 1972, on n'a jamais eu de
difficulté dans notre prétention que ces corporations, dans les
limites établies par la loi, c'est-à-dire que les actifs
immobiliers utilisés par l'établissement doivent être
réservés à l'établissement, mais on n'a jamais eu
de difficulté et on a toujours cru que les corporations
propriétaires, dans ces limites-là, étaient tout à
fait autonomes, en ce sens que c'étaient les corporations qui
déterminaient qui étaient leurs membres et qui siégeait
à leur propre conseil d'administration. mais ces corporations
n'administraient pas les établissements; il y avait cette distinction.
et elle existe toujours, cette distinction. cependant, ce qui nous
inquiète, ce sont les dispositions des articles 24, 39, 379
jusqu'à 382 qui abolissent tout çà. ces dispositions
prévoient que, dès l'entrée en vigueur de la nouvelle loi,
tout ce qui est incompatible dans les actes constitutifs des corporations est
nécessairement et automatiquement aboli, abrogé ou
modifié.
Donc, pour répondre, M. le ministre, sous la loi actuelle, nous
sommes capables de vivre comme nous le désirons en ce qui concerne
l'autonomie des corporations propriétaires, mais on demanderait une plus
grande représentation. On trouve qu'en vertu de l'actuelle loi, trois
personnes, ce n'est pas assez et qu'on devrait en avoir quatre.
M. Côté (Charlesbourg): Je gradue mes questions en
fonction de vos recommandations. Je reviendrai peut-être à la
première avant d'en arriver à la deuxième
recommandation.
La loi actuelle, à son article 76, nous dit ceci, au
quatrième alinéa: 'Toutefois, dans le cas d'un
établissement dont les actifs immobiliers sont la
propriété d'une corporation sans but lucratif autre qu'une
corporation constituée en vertu de la présente loi, ce conseil ne
peut aliéner ces actifs ou en changer la destination sans l'accord des
membres de la corporation propriétaire." Ça, c'est la loi
actuelle.
Dans l'avant-projet de loi, à l'article 73, on reproduit cet
article. Donc, il n'y a rien de changé. C'était là le
témoignage de la volonté du législateur de ne rien changer
dans ces cas et de ne pas s'immiscer dans la gestion et de maintenir ces
droits. Donc, c'était pour vous rassurer. Il se peut cependant, sans que
ce soit en aucune manière prémédité, que dans le
libellé de certains articles, on puisse interpeller, que ce ne soit pas
suffisamment clair. Ce que je veux vous dire, c'est qu'on le rendra clair de
façon à ce qu'il n'y ait pas d'équivoque, et,
évidemment, cette assurance vous est donnée dès
maintenant.
Si je reviens à la deuxième conclusion ou recommandation,
donc que chaque corporation propriétaire continue d'avoir son propre
conseil d'administration, si je fais abstraction des conseils d'administration
unifiés parce qu'on va y arriver dans le prochain, si je fais
abstraction de ces conseils d'administration unifiés parce qu'on en a
parlé depuis deux semaines, il semble bien que ça ne se vendra
pas comme les McDonald's se sont vendus en URSS, hier, et qu'il y aura des
modifications assez importantes à faire. Mais on y reviendra en
troisième lieu.
Est-ce que la situation actuelle, telle qu'administrée par le
ministère, sur le plan de l'ouverture, si elle était maintenue,
vous satisfait?
M. Barakett: En ce qui concerne ces dispositions aux lois,
c'est-à-dire en ce qui concerne l'administration des corporations
propriétaires et l'autonomie des corporations propriétaires, oui.
Cependant, j'aimerais juste revenir sur votre point concernant l'article 73. Il
est exact que l'article 73 reproduit ce qu'on trouve à l'article 76 de
la loi actuellement en
vigueur. Cependant, lorsqu'on lit l'article 73 avec les articles 74,
379, et 380 à 382, on voit que, même si les actifs
immobiliers ne peuvent pas être aliénés sans l'accord des
membres, en vertu des autres articles, c'est le nouveau conseil
d'administration qui prend possession de la corporation propriétaire et
qui détermine les membres, et ainsi de suite.
Donc, l'article 73 protège, mais les articles 74, 379, 380
à 382 enlèvent ce qu'on donnait à l'article 73.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, je viens
de la voir. Il y a une distinction entre l'article 76 qui disait "sans l'accord
des membres de la corporation propriétaire" alors qu'à l'article
73 d'aujourd'hui, on parle des deux tiers des voix exprimées. Et
voilà. Évidemment, ce n'est pas la reproduction fidèle et
compte tenu des nouveaux conseils d'administration unifiés,
effectivement, c'est un point important qu'il faudra surveiller. Mais, me
dit-on, l'esprit, à ce moment-là, n'était pas de. Si
l'esprit n'était pas de, je vous confirme aujourd'hui qu'il ne sera pas
de et qu'on fera des changements appropriés dans ces circonstances.
"3° Que chaque établissement ait son propre conseil
d'administration." Évidemment, il n'est pas clair que tout le monde
achète des conseils d'administration unifiés. Cependant, en
discutant avec les intervenants, on se rend compte que tout le monde dit oui.
Dans certaines circonstances, il y a des bénéfices - et
là, je ne parle pas uniquement de bénéfices sur le plan de
piastres et cents, parce que notre objectif doit être le
bénéficiaire - oui, il y a des bénéfices à
tirer d'une certaine unification de certains types de services.
On serait peut-être à même de penser qu'il y a
peut-être intérêt, dans certaines occasions, à
regrouper sous un même conseil d'administration des centres
d'hébergement, compte tenu que c'est dans la même
catégorie. Mais nos intervenants, depuis la semaine dernière,
nous ont quand même admis, que ce soient médecins, que ce soient
centres hospitaliers ou que ce soient d'autres formes d'établissements,
qu'il y avait un certain intérêt à ce qu'on puisse, dans un
territoire donné, avoir sous une même responsabilité, par
exemple, le CLSC, le centre hospitalier, un centre d'hébergement, pour
avoir une certaine complémentarité des rôles
vis-à-vis du bénéficiaire.
Là où le bât blessait, c'est que les centres
hospitaliers nous disaient: C'est nous qui devons avoir le leadership, nous
disant que cette unification-là était bien, alors que dans
d'autres cas les CLSC nous disaient: Oui, effectivement, c'a du bon sens, mais
en autant que ce soit nous qui ayons la responsabilité. Alors, à
ce moment-là, tout le monde s'entend sur les bénéfices
à tirer, mais personne n'est prêt à laisser aller son
leadership ou son autorité pour le bénéficiaire.
Il est clair qu'au-delà de 4°, on va oublier ça, et
l'imposition, dans une loi, n'est pas nécessairement la meilleure
méthode. Donc, il y a des choses à revoir au sujet des conseils
d'administration unifiés. La volonté était que le
bénéficiaire soit au centre de tout ça au lieu des
structures. Évidemment, en regroupant, il y a des problèmes. On a
eu la démonstration hier de centres de réadaptation dans la
région de Montréal où on regrouperait 17 centres de
réadaptation avec toute la série de paperasse et d'actes qu'il y
a à poser. Ça ne devient pas administrate.
Donc, pour les conseils d'administration unifiés, il y a un gros
point d'Interrogation et on devra, je pense, davantage trouver une formule qui
nous permettra d'atteindre les objectifs, parce que ça ne veut pas dire
que des regroupements ne sont pas nécessaires et ne sont pas utiles. Il
y a certainement des regroupements d'institutions, soit pour la
complémentarité ou pour des mêmes rôles, qui sont
possibles, toujours si on veut protéger le bénéficiaire.
Donc, il n'y a rien de moins sûr aujourd'hui qu'il y aura des conseils
d'administration unifiés tels que connus dans l'avant-projet de loi. Je
ne peux pas en dire plus parce que, évidemment, il n'y a pas de
décision prise. Il faut faire des simulations, aller voir ce qu'on peut
faire. C'est davantage par l'intérêt qu'on peut tirer au niveau
des institutions dans un regroupement qu'on va réussir à faire un
certain nombre de regroupements souhaités et voulus par les
institutions.
Donc, il va être en veilleuse pour un bout de temps et il va
très certainement subir le test d'une très bonne interrogation et
de simulations sur le terrain, ce que ça pourrait donner. Donc, je ne
peux pas me prononcer. La seule chose que je peux dire: il n'y aura
certainement pas de conseil d'administration unifié de la manière
dont il est prévu dans le projet de loi. Si vous avez de bonnes
suggestions à nous faire, de par votre vécu, je suis toujours
très ouvert aux bonnes propositions. (10 h 45)
La Présidente (Mme Marois): Oui, soeur Houde, vous voulez
intervenir ou soeur Levaque, oui?
Mme Houde (Claire): Bien, M. le ministre, Mme la
Présidente, ce que je voulais signifier, c'est que, s'il n'y avait pas
de conseil d'administration unifié, au moins que le regroupement se
fasse sur une base de la mission des centres hospitaliers. Quand nous, comme
Soeurs de la Providence, on se place au niveau de Trois-Rivières et que
nous voyons - M. Philibert n'est pas ici - Saint-Joseph avec Sainte-Marie et le
CLSC et le CSS... Pour les gens de la région, je pense que vous
connaissez très bien ce que je veux dire. Alors, comme membre du conseil
d'administration, moi qui viens de Montréal, où est-ce que je me
situe? Comment est-ce que je
peux achever la mission du centre hospitalier Saint-Joseph de
Trois-Rivières? Je vous soumets la question dans un lieu où les
gens se connaissent et se regardent et voient ce qu'ils font.
M. Côté (Charlesbourg): J'ai eu le plaisir de faire
mon cours universitaire à Trois-Rivières. Alors, ça n'a
pas beaucoup changé. Mais une chose est certaine, ce que je comprends de
votre intervention, c'est qu'il y a des possibilités qu'il y ait
unification pour des mêmes missions, dites-vous, et, moi aussi, je le
pense. Il faut trouver une formule beaucoup plus souple et amener les gens
à participer à un conseil d'administration unifié et d'en
voir les bénéfices, pas pour les structures, pour le
bénéfice des bénéficiaires. Lorsqu'on aura
placé le bénéficiaire au centre de nos
préoccupations, il y aura moins de débats de structures,
évidemment. Mais ce que je comprends, c'est quand même
possible.
Mme Houde: Avec des nuances.
M. Côté (Charlesbourg): Avec des nuances?
Mme Houde: S'il vous plaît!
M. Côté (Charlesbourg): Des nuances de missions! Ha,
ha, ha!
Mme Houde: Oui? Vous voulez intervenir, Me Monette.
M. Monette (Gustave): Oui. Soeur Levaque et moi, soeur Poirier
aussi, on est des vétérans. Nous étions là en 1970
à la commission Caston-guay, la première commission. Alors, on a
vu un peu les choses passer. Personnellement, M. le ministre, je crois que la
loi doit donner de la souplesse, des pouvoirs à ceux qui étaient
là depuis longtemps, aux corporations existantes qui ont toujours fait
leurs preuves et au ministre, les deux. Pourquoi mettre un seul système,
alors que tous les cas ne sont pas pareils?
Je vais donner des exemples. Il y a plusieurs cas où des
pavillons, des institutions, où des centres d'accueil ont
été "pavillonnés" avec des centres hospitaliers. Moi, je
connais des cas. Il y en a sûrement d'autres. Mais la plupart des cas que
je connais, ça a été "pavillonné" avec des centres
hospitaliers où il y avait justement des corporations. Pourquoi? Parce
que tout le monde était satisfait, parce qu'il y avait une structure
là, une structure qui existait et qui avait une tradition.
Sacré-Coeur a "pavillonné" le centre Prévost dans
les années 1972-1973. Combien de cas? Il y en a eu ici, à
Québec, également. Ça, c'est une possibilité.
L'important... Je le soumets. Il y a eu de gros changements. Comme vous le
dites. M. le ministre, on ne peut pas revenir à 1971 Mais il y a des
choses, évidemment.. On parlait des corporations. Il y a une
abiguité là. Personnelle- ment, je dirais: Donnons plus de
pouvoirs aux corporations par rapport à 1971. Notre mémoire n'est
pas allé jusque-là, parce que nous n'avons pas tellement
d'intérêt là-dedans. Nous essayons de voir
l'intérêt général.
Mais on va prendre les Soeurs de la Providence. Il leur reste trois
institutions. En 1972, elles en avaient 45. Les autres ont toutes
été réglées. Elles ont gardé
celles-là. Et c'est le cas dans la plupart des communautés. Les
Religieuses hospitalières ont gardé leurs institutions, parce que
c'est leur oeuvre d'être dans les hôpitaux. Alors, vous comprenez,
M. le ministre, qu'elles y tiennent. Les Soeurs Grises, la même chose,
elles ont gardé ce qu'elles ont été capables de
continuer.
Alors, je me dis: Pourquoi aller plus vite? Si elles sont
prêtes... Lorsqu'elles font partie des conseils d'administration des
hôpitaux, des centres d'accueil, elles le font
bénévolement, elles n'ont plus d'intérêt
là-dedans. La plupart du temps, comme à Sacré-Coeur,
l'indemnité de désintéressement a été
réglée. En attendant, les institutions qui ont
réglé - Trois-Rivières également - reçoivent
un petit intérêt bien en bas de celui... Puis l'indemnité
de départ n'est pas réglée. Elles restent pour exprimer
leur volonté de continuer l'oeuvre tout simplement.
Alors, pourquoi les enlever de là? Elles ont créé
ça. Elles n'ont pas créé les CLSC. Si le ministère
veut regrouper les CLSC autour des hôpitaux, je ne vois pas d'objection.
Une autre remarque, M. le ministre, que je voudrais mentionner. Dans plusieurs
hôpitaux, vous l'avez sûrement constaté, des
présidents importants qui s'occupent de leur affaire, qui ont une
réputation dans la province... Je voulais mentionner le cas de
l'Hôtel-Dieu de Montréal, par exemple. Il y a eu le juge en chef
Lavallée de la Cour du bien-être social qui a été
président, M. Lavoie, président de la Banque Nationale. Il y a eu
Lucien Saulnier, ce n'était pas n'importe qui. Il y a Marc Lalonde
actuellement, ce n'est pas n'importe qui. Ce sont tous des gens nommés
par les membres de la corporation. A Sacré-Coeur, il y a eu Gilles
Fillion qui l'a fait, qui était un membre de la corporation. Il y a
combien de cas comme ça où l'on recherche justement une certaine
stabilité, une certaine continuité, une certaine
responsabilité. C'est surtout ça le sens de notre
mémoire.
Évidemment, on a voulu insister sur les problèmes concrets
que posaient les articles. J'essaie de revenir à l'esprit
général qui vise à donner plus de pouvoirs aux
corporations qui continuent à exister.
La Présidente (Mme Marois): Brièvement, M. le
ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends...
Évidemment, comme les trois mémoires risquent d'être
à peu près identiques sur le plan
des revendications dont on va prendre connaissance jusqu'à 13
heures, je me permettrai une dernière question, et on reviendra
très certainement avec les autres. À votre recommandation 4, vous
évoquez... Revenons à 4: passons de trois à quatre le
nombre de représentants. Je vous pose la question très claire,
très simple. Évidemment, c'était pour se prémunir
du trois où il y avait un conseil d'administration unifié. Est-ce
que c'était dans cet objectif et, à partir du moment où il
n'y a plus de conseil d'administration unifié, est-ce que cette demande
est toujours nécessaire?
M. Barakett: Je crois que, d'après moi, on va dans ce
sens-là si... Vous aimeriez ajouter quelque chose là-dessus, mais
c'est certainement dans ce sens-là qu'on demande quatre.
Une voix: Oui, soeur Poirier.
Mme Poirier (Bernadette): En effet, moi je voudrais parler sur le
pourquoi de nos revendications. J'aimerais que les membres de la commission
soient bien clairs sur le fait que ce n'est pas pour défendre de la
brique et du mortier, mais c'est au nom d'une mission continuée. Comme
l'a bien dit Me Barakett, on n'a pas d'intérêt.
L'intérêt, c'est le bénéficiaire, et ce qui fait
problème dans le système actuellement, c'est que le
bénéficiaire est le dernier en ligne de piste. Les malades, dans
notre système actuel, ils viennent vraiment les derniers et que ce soit
clair que ce n'est pas à cause d'intérêts privés.
Nous, les Soeurs Grises, on a laissé les grandes institutions au moment
où on avait l'autorité, mais aucune responsabilité, par le
truchement de la loi d'alors.
Cependant, dans les autres provinces et aux États-Unis, on a des
oeuvres qui fonctiennent extrêmement bien parce qu'on fonctionne autour
de la mission qui est axée non pas sur les structures, mais sur les
bénéficiaires. Je soumets très humblement que
peut-être, au Québec, on aurait une réflexion
sérieuse à faire sur pourquoi on est dans une institution
hospitalière, pourquoi on est au service des malades et est-ce qu'on est
vraiment au service des malades. Je pense que la réflexion n'est pas
terminée là-dessus.
M. Côté (Charlesbourg): Je ne peux pas continuer
parce que c'est mon collègue, mais je souhaite que ça continue
dans la même piste parce que, effectivement, c'est une très bonne
question et c'est ce qu'on essaie de faire depuis le début de la
commission parlementaire. Si notre objectif premier est le
bénéficiaire, il n'y aura pas de grandes chicanes sur les
structures, mais on a du chemin à faire un peu.
La Présidente (Mme Marois): M. le leader de l'Opposition,
député de Joliette.
M. Chevrette: Oui, merci, Mme la Prési- dente. Je suis
content, ce matin, de voir que vous êtes la preuve vivante - je vais
commencer de même - une dame religieuse, une preuve vivante du carcan
intellectuel dans lequel on est dans la présente commission. Je le
disais dans mon texte d'ouverture, malheureusement le ministre a
été placé en position de défendre un avant-projet
qui n'est pas le sien. Je faisais une blague en entrant ce matin, je disais:
Faites-vous en pas! Je vais vous répéter ce que je lui ai dit: II
n'y croit pas à son avant-projet parce que ce n'est pas le sien.
M. Côté (Charlesbourg): II ne faut pas charrier.
M. Chevrette: D'ailleurs, je pense qu'il a démontré
depuis le début, qu'il y a des corrections à faire. On ne
reconnaîtra plus le projet définitif, je pense, pour le
mieux-être du secteur santé et aussi celui des droits des
collectivités, du droit des groupes.
Je suis content que vous ayez parié de pavillonnement, entre
autres. Je me souviens même que si on avait ce carcan juridique actuel,
je pense que Saint-Eusèbe de Joliette, pour les Soeurs de la Providence,
n'aurait pas été pavil-lonné avec le CHRDL. Pourtant,
ça s'est fait dans le cadre d'une négociation correcte, d'un
échange correct et aujourd'hui on peut voir les citoyens de Joliette qui
ont bénéficié à très bas prix
d'Installations et d'équipements de santé et même d'une
école où j'ai enseigné - en passant - avec les religieuses
de la Providence. Ma première année d'enseignement, je l'ai faite
avec trois ou quatres de vos religieuses et je me souviens encore d'une en
particulier qui m'a fait rire pendant un an. Ceci dit, je voudrais vous dire
que le droit de propriété est un droit fondamental. C'est la
deuxième fois qu'il est mis en cause au Parlement, à ma
connaissance, depuis trois ou quatre ans. J'ignore pourquoi. Ce sont les
légistes, la manière dont ils le rédigent. Je ne le sais
pas. Mais ça a été la même chose dans le cas du
système ambulancier. Quand on est arrivés .à l'unification
du service ambulancier de Montréal, ça a été
exactement la même chose, le droit de propriété a
été mis en cause. Il a fallu faire une lutte en commission
parlementaire, pour faire comprendre que ce qui ne valait rien au départ
valait des gros sous à la fin, et on a respecté le droit. C'est
un droit inaliénable, un droit vieux comme la terre, le droit de
propriété, qu'on doit respecter comme légistes, sinon, on
manquerait le bateau.
Mais le droit à la mission est tout aussi important. À mon
point de vue, la dimension humaine que vous voulez apporter dans le
présent débat, ça m'apparaît essentiel. Ça
m'apparaît essentiel parce que, si on ne développe pas ce sens de
la mission... Vous savez, des robots mécaniques qui traitent du monde,
ce n'est pas le diable. Des climats de tension à
l'intérieur de certaines bâtisses où des gens sont
des numéros et où le 87e vient "bumper" le 31e et le 32e va
"bumper" le 739e, ça fait dur en maudit, vous me permettrez
l'expression. Malheureusement, c'est un peu ça qu'on vit
présentement. On a tellement voulu un corset uniforme pour l'ensemble
des centres hospitaliers, quelle que soit la mission, au Québec, qu'on a
oublié, précisément, la vocation de chacun des
centres.
Je suis content d'entendre le ministre, ce matin, dire que les conseils
unifiés... Depuis le début, d'ailleurs, on a été
ébranlés, je pense, par les professionnels. On a
été ébranlés par les urgentologues. On a
été ébranlés par les centres de
réadaptation. Et vous venez purement rajouter, ce matin, parce que la
complémentarité des missions ne réside pas dans le conseil
d'administration, mais bien souvent, dans la volonté, y compris des
divers personnels, y compris des directeurs généraux, y compris
des équipes qui peuvent travailler en "multidisciplinarite", qu'on va
assumer ou assurer une complémentarité. Et ce n'est pas en
jugeant de l'efficience ou de l'efficacité des conseils d'administration
à augmenter le nombre de services rendus à la collectivité
qu'on va nécessairement réussir à faire quelque chose.
Là, c'est rendu que les centres hospitaliers veulent faire du
service à domicile. Pourquoi? Sous prétexte qu'ils sont
performants. Là, tu arrives avec de la duplication. Au lieu de "se
complémentariser", on cherche justement à empiéter, sous
prétexte que, là, on est dynamiques et on étend nos
services. Entre-temps, on manque de personnes pour faire du service à
bien des endroits, purement et simplement parce qu'on a deux ou trois
établissements qui jouent dans les mêmes talles; et on est surpris
de ça. Non, je pense qu'il faut réinstaurer une nouvelle
mentalité dans les services de santé. Ce n'est pas facile de
changer des mentalités; c'est souvent par des mesures assez radicales,
au départ. Mais il faut le faire, il ne faut pas avoir peur de le faire.
Et je pense que l'éclairage que vous apportez ce matin nous confirme...
En tout cas, pour avoir été brièvement ministre de la
Santé et des Services sociaux, pendant un an et un mois, je dois vous
avouer que ce constat là, cette perception-là, ça ne prend
pas tellement de temps à l'avoir; cinq ou six mois, et on sait
exactement comment ça fonctionne dans le ministère. On sait
combien cette machine est immense et centralisée à outrance. Tu
sais, quand tout part de Québec, c'est évident qu'on ne peut
pas... Si on n'oblige pas les gens à se parler, sur le plan local ou
régional, mais entre missions et non pas nécessairement en
disant: Vous disparaissez tous et il y aura un seul conseil d'administration...
Ce n'est pas en se privant, non plus, des services de professionnels ou des
conseils de professionnels qu'on va donner... On va peut-être donner
l'impression à des populations qu'elles participent beaucoup plus
à la gestion. Mais, dans le fond, c'est faux, on ne fait que
déplacer les pouvoirs. Ce qui pouvait appartenir, soit à une
infirmière, à un personnel clinique, à un personnel
médical ou à un employé général pourrait
appartenir, comme pouvoir exclusif, à un D.G. Ce n'est pas là. Il
ne faut pas rechercher l'équilibre de par le statut. À mon point
de vue, c'est beaucoup plus l'équilibre à partir de ce que tu
peux donner, dans ton propre établissement, avec la mission que tu t'es
donnée, par rapport à l'autre qui s'est donné une autre
mission. (11 heures)
C'est de même, en tout cas, que je pense qu'il faut aborder... Et
je suis heureux de voir que, ce matin, ça se dessine vers ça.
Donc, étant donné que le ministre lui-même reconnaît
que ce ne sera pas ça dans l'avant-projet et que votre revendication
portait d'abord sur le fait du droit de propriété, ça,
c'est réglé. Du droit de représentation au sein d'une
corporation ou d'un établissement, selon que le ministre va
reconnaître le conseil d'administration par établissement, il vous
restera une revendication à faire analyser, c'est: quelle est la portion
du conseil de rétablissement qui sera conservé dans la loi pour
la corporation qui est propriétaire? Je pense que ça serait
ça qui resterait si je comprends l'esprit de votre mémoire. Quant
à la mission ou au respect de votre mission, si je n'ai pas bien
compris, vous me reprendrez, maître, vous êtes payé pour
ça... Plus que ça, sans doute, mais... Quant à la mission
comme telle, je pense que ce sera sauvegardé dans le projet de loi - je
n'ai pas d'inquiétudes là-dessus les preuves sont faites dans les
milieux et contre ça, la satisfaction des gens doit être aussi
à la base de nos décisions. Est-ce que j'interprète bien
votre mémoire soit que ce qui resterait à régler, selon
qu'on maintienne les conseils d'administration par établissement, ce
serait la portion de la représentativité non pas sur
l'immobilier, mais sur la gestion de l'entreprise qui serait la portion de
représentativité de la corporation qui est
propriétaire.
La Présidente (Mme Marois): Oui, allez-y.
Mme Lafond (Denise): J'aurais un commentaire
supplémentaire. La portion des membres va dans le sens que ça
assure cette participation bénévole qualifiée à la
gestion du réseau et ça rejoint, dans l'avant-projet de loi,
cette participation plus grande qui est offerte, et le fait d'être
capable de nommer des membres en fonction de cène mission, de les
choisir - je pense que si on va vers quatre membres, c'est dans ce
sens-là - d'élargir cette possibilité de transmettre
l'héritage qu'on ne peut pas garder pour soi, mais qu'on aimerait
transmettre, et le faire avec des façons de recruter des experts, des
possibilités de gens qui se centrent sur le patient, sur le
bénéficiaire dont on a parlé tout
à l'heure, c'est dans ce sens-là, d'élargir cette
possibilité-là.
M. Chevrette: Au-delà de vos préoccupations que
vous avez bien écrites dans votre mémoire, est-ce que je pourrais
savoir comment vous voyez concrètement le phénomène de la
décentralisation qui est tout au moins amorcée ou
annoncée? Je croyais que, par la lecture de l'avant-projet de loi,
c'était une déconcentration qu'on proposait; la perception que
j'ai, moi, c'est que l'ex-ministre, Mme Lavoie-Roux, avait déposé
un avant-projet de loi en disant qu'elle décentralisait, mais, à
mon point de vue, c'était une déconcentration centralisée
parce que ce n'était pas une véritable décentralisation
qu'on offrait au niveau des régions. J'aimerais avoir votre perception,
avez-vous des idées sur la décentralisation réelle du
ministère? Croyez-vous important que ce ministère-là soit
décentralisé en région?
Mme Poirier: Je crois que oui; je crois que les objectifs de
l'avant-projet de loi sont très bons, mais les moyens et les structures
ne sont pas cohérents avec les objectifs. Je pense qu'il est absolument
important qu'on n'alourdisse pas les structures. L'avant-projet de loi,
à mon avis et de l'avis de mes consoeurs aussi, alourdit les structures
plus qu'il ne les allège. Pour la participation de la population, il
faut aller dans un sens autre. Il faut que l'action, que les décisions
soient plus près de la réalisation. C'est à ce
prix-là seulement qu'on va pouvoir répondre à ce que la
population locale, régionale, attend des institutions.
M. Chevrette: Vouliez-vous ajouter...
Mme Houde: Je répondrais par deux principes que je trouve
important en administration, c'est la subsidiarité et la
coresponsabilité. À un moment où les institutions ont
besoin... Je pense qu'il y a des contraintes au niveau de toutes sortes de
ressources. Il est important de regarder ce que l'institution peut faire par
elle-même sans recourir à un niveau supérieur. À ce
moment-là, je pense que ce principe de subsidiarité suscite la
motivation et l'intérêt et quand je dis: motivation,
intérêt, je veux dire du personnel au conseil d'administration et
du conseil d'administration au personnel. Parce que nous avons autant à
travailler avec les valeurs au niveau de l'institution avec le personnel qu'au
niveau du conseil et de tous les intervenants et intervenantes. Mon
deuxième volet, c'est le volet de la participation et de la
coresponsabilité. Si tout est trop centralisé, à ce
moment-là, il y a un manque d'intérêt et on se dit: Les
autres vont s'en occuper et je ne pense pas que ce soit bénéfique
pour la compassion que nous devons aux malades, à la personne qui
souffre, à la personne qui a besoin des autres. C'est quand on est
malade qu'on a besoin des autres; quand on est bien portant, on peut se
défendre soi-même. Ce sont les deux principes sur lesquels je
voudrais particulièrement insister.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. M. . le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Oui, d'abord quelques mots aussi pour vous
féliciter encore une fois de l'extraordinaire fidélité
à votre mission sociale au Québec et ailleurs, partout à
travers le monde, et de l'apport extrêmement important que vous avez
toujours eu et que vous continuez d'avoir dans l'ensemble des situations
difficiles que l'on vit au Québec. Et, à cet égard, c'est
rafraîchissant de vous entendre en quelque sorte. Vous disiez, il y a
quelques instants: On est un peu des vieux de la vieille dans l'organisation
des services sociaux et des services de santé au Québec. On
était là à l'époque de Claude Castonguay et on
s'aperçoit aujourd'hui, avec une note de modernité, que vous
dites la même chose et que vous ne vous êtes pas par ailleurs
transformées en assureur privé qui vient nous dire 20 ans
après qu'il faudrait peut-être introduire des régimes de
complémentarité à partir des régimes
complémentaires qu'on s'est donnés, mais vous centrez
continuellement votre discours et votre pratique sur les
bénéficiaires. Et, à cet égard, j'aimerais bien
rappeler, au moment où on connaît des conditions
particulièrement difficiles au Québec pour un certain nombre de
clientèles, au ministre qui est extrêmement
préoccupé par les coûts du système, qui est
extrêmement préoccupé par l'inflation de la production
d'actes, la production de services qui coûtent extrêmement cher que
c'est encore la Conférence des religieuses canadiennes de fa
région du Québec qui nous a fait, depuis une année, la
meilleure analyse sur les sources des coûts du système de
santé et des services sociaux au Québec et ça vaut la
peine que je lise des éléments de votre analyse que vous donniez,
il y a maintenant une année et demie, et que vous avez rappelés
au tout début de l'automne. L'appauvrissement coûte cher, c'est
bref et c'est clair. La pauvreté, c'est d'abord un manque de revenus
décents et, comme conséquence, un manque de biens et de services.
Mais le prix à payer n'est pas que matériel. Les médias,
les intervenants sociaux évoquent régulièrement les
nombreux problèmes de société provoqués par la
pauvreté: toxicomanie, délinquance, violence familiale,
prostitution, suicide. Vous êtes au coeur de ces groupes et vous
continuez d'être au coeur de ces groupes les plus en difficulté
dans notre société. La pauvreté met de côté,
marginalise, exclut des milliers de personnes de la vie sociale,
économique et même politique. Chaque jour, la
société leur répète qu'ils sont paresseux,
incompétents, malhonnêtes, trop vieux, trop jeunes et incapables
de participer à la construction du Québec. Ces
préjugés
qui s'ajoutent à leur difficile quotidien conduisent les pauvres
vers l'isolement et la solitude. Bon nombre retrouve vie par l'action et
l'implication dans les groupes communautaires, mais une majorité d'entre
eux perdent tout intérêt et désespèrent d'un avenir
meilleur. Le titre était: "L'appauvrissement au Québec".
Quand le ministre ou l'ex-ministre, Mme Lavoie-Roux, a
déposé cet avant-projet de loi tout cela avait été
précédé d'un document d'orientations où l'on fixait
un certain nombre d'objectifs de santé qui rejoignaient les
préoccupations pour une certaine part de ce que vous dénoncez
continuellement, que vous ne faites pas que dénoncer, je l'ajoute, mais
auquel vous participez en termes de résolution de problèmes, des
objectifs de santé du type: réduire la morbidité,
réduire par exemple la mortalité au Québec due au cancer
du sein, réduire de 20 % la mortalité due aux maladies
cardio-vasculaires, etc. Avec votre longue expérience, votre mission et
votre fidélité à votre mission, est-ce que vous avez
l'impression que le projet de loi est le carcan intellectuel, comme le disait
mon collègue, qui nous est présenté, que nous nous en
allons, franchement et honnêtement, vers l'atteinte de ces objectifs,
c'est-à-dire réduire le nombre d'actes qui sont posés,
réduire le nombre de bénéficiaires qui, forcément,
se retrouvent dans nos institutions? Ou encore, une façon
différente de poser la question, est-ce que le cadre qui nous est
proposé va rendre le système meilleur?
La Présidente (Mme Marois): Qui de vous veut
répondre? Vous pouvez aussi ajouter, selon les intérêts des
unes et des uns. Oui, soeur Levaque.
Mme Levaque (Marie-Paule): Je ne pense pas que le cadre actuel va
dans le sens du document "L'appauvrissement au Québec". Je ne pense pas
que le système, tel que proposé, va coûter moins cher, et
ce n'est pas par des structures unifiées...
Vous voulez augmenter la participation de la population. Je ne pense pas
que vous l'augmentiez parce que vous la diminuez en faisant un seul conseil
unifié pour trois, quatre ou cinq établissements, tandis
qu'aujourd'hui, chaque établissement a son conseil, qui n'est pas
composé de religieuses, mais qui est composé en grande
majorité de laïcs. Comme on l'a dit tout à l'heure, si nous
voulons conserver les conseils d'administration de la corporation, c'est pour
transmettre notre mission à des laïcs avec qui on travaille et
qu'on veut amener dans le bénévolat dans notre système. Je
pense que c'est ça qui est un peu notre mission. Nous sommes en
vieillissement dans nos communautés; il y a peu de recrutement. Mais
nous voulons quand même transmettre le charisme de nos fondatrices et la
mission que nous ont ligués nos fondatrices. D'ailleurs, c'est la
mission de l'Église aujourd'hui que de travailler avec le laïcat,
et c'est ce que nous voulons continuer de faire. dans toutes nos
communautés, on a des associés laïcs auxquels nous voulons
transmettre notre charisme et notre mission.
C'est un peu ce que nous défendons dans ce système parce
que nous avons toujours en vue le malade. Je vois, dans un gros système
unifié, où il y aurait de grandes institutions et de petites
institutions, des pauvres qui vont être laissés pour compte, des
bénéficiaires qui vont être trop loin de l'administration
et qu'on va oublier, et c'est ça qui nous fait mal au coeur dans le
moment, dans tout ce système-là II semble qu'on veuille unifier
le système peut-être pour qu'il coûte moins cher, mais je ne
suis pas sûre qu'il va coûter moins cher.
Je pense que c'est en suscitant beaucoup de réel
bénévolat et de gens qui vont connaître davantage les
institutions de près et non pas de loin. De loin, on voit des
défauts et on oublie le malade qui, au fond, est au coeur de la mission.
C'est ce que je voudrais vous laisser comme testament.
La Présidente (Mme Marois): Oui, M le
député, brièvement évidemment, puisqu'on a
déjà dépassé un petit peu le temps.
M. Trudel: Vous nous dites avec simplicité, mais toujours
avec la fidélité de la mission que vous avez toujours remplie au
Québec et à travers le monde, qu'il n'est pas sûr... Et
vous ajoutez que vous n'êtes pas très rassurée sur le fait
que parler de superstructures et de s'encar-caner dans un système
administratif le plus fin possible va nous permettre de récupérer
ou d'avoir les attentions nécessaires pour ceux et celles qui passent
à travers les mailles du filet, qui passent à travers les
systèmes sociaux qu'on a mis sur pied et qui sont toujours
laissés pour compte, et qu'on ne va pas, encore une fois, directement
aux causes de l'apparition de ce que c'est qu'un bénéficiaire.
(11 h 15)
Quand il existe comme personne, ce bénéficiaire, c'est
qu'il y a eu des causes, II y a eu des situations, et vous nous rappelez
très bien là où les devoirs sont à réaliser.
Une toute petite question à cet égard: Vous nous rappelez
l'importance tout à fait très grande de ce que vous appelez le
bénévolat, ce qu'on pourrait appeler aussi, je pense, l'action
communautaire. Est-ce que vous trouvez, à cet égard, que le
projet de loi nous amène effectivement à ne parler que de ceux et
celles qui sont rendus dans le système parce qu'ils ont des
problèmes et que le projet de loi ne nous parle pas et ne nous centre
pas sur le fait qu'il faut travailler au niveau de la prévention avec
les groupes communautaires qui sont, comme vous en quelque sorte, parmi les
pauvres, parmi les plus délaissés, parmi les gens qui ont les
situations les plus difficiles dans
notre société? Est-ce que les groupes communautaires,
à votre avis, et vous en êtes dans ce sens, sont rassurés
sur la participation qu'on va leur demander, la participation qu'on pourrait
leur offrir et les moyens pour la réaliser en termes de
prévention pour atteindre les objectifs de santé définis
dans les orientations qu'on ne retrouve pas dans le projet?
Mme Le vaque: Je ne retrouve pas ce projet-là dans
l'avant-projet de loi. Il n'est pas beaucoup question des groupes
communautaires pour la prévention, et le reste. Je pense que,
actuellement, la prévention se fait beaucoup par les départements
de santé communautaire, et, au contraire, on les diminue dans les
projets de loi. Je pense que c'est un développement qui est à
continuer; II y a des départements de santé communautaire qui
font énormément, peut-être même plus que les
CLSC.
La Présidente (Mme Marois): Est-ce que quelqu'un d'autre
veut ajouter à ce commentaire? Ça va? M. le député?
Ça va?
M. Chevrette: Je voudrais vous remercier infiniment de votre
témoignage et vous assurer qu'on sera présents à tous les
instants lors de l'étude article par article du projet de loi
définitif qui reflétera cette fois-ci les orientations du
ministre actuel.
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le
député?
M. Trudel: Et le ministre dit toujours qu'il prend des notes
importantes dans son petit carnet vert. Il l'a ouvert. Alors, il a bien
noté.
La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): II n'est pas noir. Il est
vert. Donc, c'est la couleur de l'espérance. Vous êtes au point
31, pas de l'ordre des priorités mais des intervenants, sur le plan des
notes que j'ai prises.
Avant de vous remercier, peut-être juste relever une
dernière affirmation au niveau des départements de santé
communautaire. C'est vrai qu'ils font un excellent travail, une bonne mission,
mais, évidemment, ce n'est pas nécessairement en réduisant
le nombre qu'on fait disparaître la mission. Évidemment, dans le
projet de loi, on passait de 32, en termes de propositions, à 22, mais
pour couvrir le même territoire et donner le même service aux
bénéficiaires, et ça m'apparaît extrêmement
important de le dire aujourd'hui. S'il y en avait 22, ils couvriraient quand
même tout le territoire du Québec, au lieu de 32. Il y a des
interrogations des gens qui se voient disparaître, et c'est
légitime qu'ils se questionnent. Mais la mission des départements
de santé communautaire va rester pratiquement inchangée - on
verra en cours de route ce que ça donne - quand même pour couvrir
l'ensemble du territoire du Québec et les besoins qu'ils couvrent
déjà.
En vous remerciant beaucoup et en souhaitant qu'on vous ait un peu
rassurés quant à vos droits et, évidemment, comme le
disait mon collègue, le député de Joliette, c'est, bien
sûr, dans le projet de loi qui sera déposé à
l'automne qu'on verra si on a bien réussi à traduire vos espoirs
et notre compréhension. Merci.
M. Barakett: Merci.
La Présidente (Mme Marois): Je remercie les
représentantes et le représentant des congrégations qui se
sont présentées devant nous ce matin aux travaux de la
commission. Merci.
Je vais appeler maintenant des représentantes et
représentants de la corporation centre Marie-Vincent, de la fondation
Marie-Vincent et de la corporation des soeurs de Sainte-Croix, s'il vous
plaît.
Alors, je vous souhaite la bienvenue à la commission. Vous
connaissez un peu nos règles: une vingtaine de minutes pour
présenter votre mémoire et, par la suite, il y a soit des
commentaires ou des questions de la part des membres de la commission.
J'aimerais que la personne qui va ouvrir la présentation se
présente et présente les personnes qui l'accompagnent.
Corporation centre Marie-Vincent,
fondation Marie-Vincent et corporation des soeurs de
Sainte-Croix
M. Charest (Pierre): O.K. Mon nom est Pierre Charest, je suis
directeur général du centre Marie-Vincent. Je vais vous
présenter, à ma droite jusqu'à ma gauche, les personnes
qui m'accompagnent: soeur Marguerite Villeneuve, qui est membre de la
corporation des soeurs de Sainte-Croix; Me Raymond Buist, qui est membre du
conseil d'administration du centre Marie-Vincent; et Mme Johanne Archambault,
qui est directrice des services de réadaptation au centre
Marie-Vincent.
Quelques mots, peut-être, pour nous introduire. La corporation des
soeurs de Sainte-Croix est à l'origine de la corporation du centre
Marie-Vincent. En 1953, sous le nom de "Service social scolaire Sainte-Croix",
elle a fondé un organisme qui venait en aide à des enfants qui
éprouvaient des problèmes sociaux et scolaires. Par la suite, en
1964, trois religieuses de cette corporation ont fondé la corporation
centre Marie-Vincent. La corporation centre Marie-Vincent, c'est principalement
un établissement qui offre des services de réadaptation à
des filles de six à douze ans dans la région de Montréal.
C'est d'ailleurs le seul centre qui offre, dans la région de
Montréal, des services de réadaptation en internat à des
filles de six à
douze ans.
On offre également des services sur un territoire donné,
qui est Saint-Laurent, à des filles et à des gars. Ce sont
toujours des services de réadaptation, mais en milieu naturel. Quant
à la fondation Marie-Vincent, la fondation est un organisme qui, si je
peux dire, fournit de l'argent au centre Marie-Vincent, qui finance, dans le
fond, des activités auprès des enfants du centre Marie-Vincent.
On représente finalement presque 32 citoyens. La majorité des
citoyens sont des gens hors réseau.
Nos commentaires vont porter sur deux aspects principalement de
l'avant-projet de loi, mais aussi du document sur les orientations. D'abord les
objectifs et, par la suite, on attirera votre attention sur certains moyens mis
en place pour répondre à ces objectifs-là.
Les objectifs. On doit vous dire, on vous l'a sans doute dit à
plusieurs reprises, on va sans doute vous le dire encore à plusieurs
reprises, c'est très intéressant de retrouver, en tête de
chapitre d'un avant-projet de loi et d'un document sur les orientations, des
objectifs qui sont centrés sur des problèmes que les citoyens
vivent. On n'insistera jamais assez là-dessus. Mais, si ces objectifs
sont clairs, nombreux, précis, mesurables au niveau de la santé,
ils ne le sont guère dans le domaine social. Les intentions, cependant,
et on doit le dire, sont très intéressantes, mais la formulation
en objectifs est imprécise, elle est timide, dirions-nous. Pourtant, il
eût été possible de le faire. je pense qu'on aurait pu se
donner comme objectif de réduire, d'ici l'an 2000, de 5 % le nombre de
signalements en ce qui a trait aux abus sexuels chez les enfants. je pense
qu'il aurait été possible de se donner comme objectif de
réduire de 10 %, d'ici l'an 2000, le nombre de couples divorcés
ou séparés. je pense également - et je pense que les
études le démontrent de plus en plus, ce que l'on pouvait savoir,
ce que plusieurs citoyens pouvaient savoir intuitivement - que la
pauvreté, on l'a noté tantôt, joue un rôle important
dans le développement de certains problèmes à la fois
psychosociaux et de santé, et peut-être que, de façon
audacieuse, on aurait pu se donner comme objectif de réduire, d'ici l'an
2000, de 5 % le nombre de familles vivant sous le seuil de la
pauvreté.
Vous l'aurez deviné, on aurait souhaité davantage
d'objectifs au plan social. Il y a - et nous en sommes convaincus - des
héritages sociaux qui sont coûteux pour une société,
coûteux financièrement, mais surtout coûteux humainement
Qu'on pense à plusieurs phénomènes qui se transportent, je
dirais, d'une généra-tion à une autre. Qu'on pense aux
abus sexuels, qu'on pense aux abus physiques, qu'on pense à la
négligence envers les enfants et qu'on pense également à
la pauvreté.
Tout compte fait, on se demande si cette réforme ne s'adressait
pas davantage au réseau de la santé. Peut-être que les
problèmes y sont plus aigus: la démotivation du personnel,
l'accessibilité à des soins spécialisés en
région, le nombre de lits insuffisant. Peut-être, cependant,
sont-ils davantage publicises? Il existe autant de besoins, dirions-nous, au
plan social qui sont tout aussi importants. Historiquement, on a plus investi
dans le domaine de la santé. On se dit que l'occasion est belle
peut-être de changer le cours de cette histoire-là.
D'autres commentaires maintenant sur les objectifs en ce qui a trait
à la participation, notamment des citoyens et du personnel du
réseau, à la gestion des établissements. On est
très étonnés de constater que l'on souhaite une
participation beaucoup plus grande des citoyens à la gestion du
réseau, alors qu'en diminuant le nombre de conseils d'administration on
diminue d'autant le nombre de citoyens qui vont participer à la gestion
directe de ce réseau-là. On souhaite également une
participation plus grande du personnel de ce réseau à la gestion
du réseau, alors qu'on les évacue complètement des
conseils d'administration. Tout ça nous amène à dire que
si les objectifs sont très intéressants. Et j'insiste
là-dessus. C'est très intéressant, les objectifs qui sont
présentés, autant dans les orientations que dans l'avant-projet
de loi, quoique nous pensons qu'ils sont davantage précisés dans
le domaine de la santé que dans le domaine social. Mais on pense que, si
les objectifs sont intéressants, peut-être que les moyens ou, en
tout cas, certains moyens mis en place ne facilitent pas l'atteinte de ces
objectifs-là.
Je n'insisterai pas longuement, parce qu'il en a été
question tantôt, sur le mode de regroupement, sur les conseils
d'administration unifiés. Peut-être attirer l'attention sur le
fait qu'il y a des particularités régionales, et je pense qu'il
serait important de tenir compte de ces particularités régionales
Je pense également qu'il est important, dans une réforme
éventuelle de ce grand réseau-là, de tenir compte des
particularités de la santé et des services sociaux.
Les besoins des citoyens au plan social, au plan santé sont
différents. La façon également d'y répondre est
différente. Je pense que dans le domaine de la santé, très
souvent, le service est médiatisé par une technologie importante.
Dans le domaine social, l'intermédiaire - si c'en est un - est une
relation directe avec des gens.
On se dit qu'on aurait dû retrouver, au niveau de cet avant-projet
de loi, des organisations qui s'inspirent davantage des besoins des citoyens et
davantage également des particularités régionales ou du
réseau L'impact possible d'un modèle unique, pour nous, c'est
l'anonymat - je pense qu'il en a été question tantôt - des
clients. C'est l'anonymat également du personnel qui oeuvre dans ce
réseau.
On pense que, dans la région de Montréal, les bases de la
concertation souhaitée sont bien en place, que les structures existantes
de
concertation sont plus efficaces que celles qui sont proposées.
Je pourrais en citer un certain nombre. Il y a des tables de concertation
jeunesse. Il y a de multiples comités sous le leadership des conseils
régionaux qui touchent différents problèmes et qui, dans
le fond, tissent un réseau complémentaire et concerté. Et
je pense que ce qu'il y a de plus important, c'est une attitude qui est en
train de changer. Et cette attitude-là, pour moi... Si, il y a quelques
années, chaque établissement, bien sûr, avait un mandat
établissement, je pense que, de plus en plus, de ce mandat
établissement est arrivé un mandat réseau. (11 h 30)
Certes, ce réseau-là n'est pas parfait, mais on se dit
qu'il vaut mieux consacrer de l'énergie à parfaire ce qui est
là qu'à refaire. Il serait intéressant, par exemple, de
mettre de l'énergie pour faire connaître davantage les ressources
existantes, les diffuser à la population et, ce faisant, on faciliterait
l'accessibilité de la population à ces services, plutôt que
de mettre de l'énergie à l'implantation d'une structure anonyme.
Je pense qu'on n'a pas d'énergie à gaspiller.
Quant aux conseils d'administration, je n'insisterai pas
là-dessus encore, il s'agissait des conseils d'administration
unifiés, il en a été abondamment question, je pense,
tantôt. Je voudrais peut-être juste souligner que, dans ce qui est
proposé et quand on le regarde à travers la lunette de la
région de Montréal, on se retrouverait avec des conseils
d'administration sûrement moins bien équipés, loin des
réalités et peu sensibles aux différences entre les
établissements et, ce faisant, entre les clientèles que ces
établissements desservent.
Il nous apparaît important qu'il y ait, au niveau des conseils
d'administration, des gens hors réseau, bien sûr, mais aussi des
gens des réseaux et des représentants des corporations
propriétaires. On imagine mal un conseil d'administration d'une
compagnie financière qui se priverait d'expériences et qui se
priverait d'expertises au plan financier.
Quant à la gestion du réseau, j'ai quelques remarques. Je
pense qu'on n'insistera jamais assez non plus, pour nous, sur l'importance de
la planification. Je pense qu'on est davantage encore un réseau qui
réagit aux situations qu'un réseau qui voit venir les choses et
s'y prépare. Je peux donner un exemple: Dans la région de
Montréal, il y a un engorgement qui est vécu depuis dix ans au
niveau des centres d'accueil de réadaptation, qui revient à
chaque année de façon récurrente. On se réunit et
il y a une concertation intéressante lorsque ces problèmes se
présentent, dans le sens où on se réunit pour trouver des
solutions, à ce moment-là, et je pense qu'il y a de
l'énergie qui devrait être mise à voir venir ces
choses-là. Je pense que voir venir les choses, ce que ça permet,
c'est d'adap- ter davantage nos services aux besoins qu'on peut voir venir et
je pense que cette absence de planification est peut-être à mettre
en relation avec, une recherche insuffisante dans le domaine social. Il est
important, je pense, que l'on investisse sérieusement et
significativement dans le domaine de la recherche sociale.
Quelques remarques sur la gestion des ressources humaines. Il nous
apparaît important de mobiliser les gens de ce réseau, qu'ils
soient mis dans le coup, dans des structures qui soient adaptées,
souples, que la population également soit mise dans le coup. On trouve
important que les citoyens soient responsabilisés en regard de leur
qualité de vie. Ce serait peut-être un premier
élément de prévention et c'est peut-être la vraie
prévention.
On pense également que la politique de contribution
exceptionnelle qui est présente dans le réseau, au niveau des
cadres, pourrait être présente, également, au niveau de
l'ensemble des travailleurs de ce réseau et de l'ensemble des
établissements. On ne pense pas nécessairement à une
contribution à la suite de performances individuelles, quoique ça
puisse être le cas, mais on pourrait penser également à des
contributions à la suite de résultats atteints par deux, trois
organismes ou établissements dans la poursuite d'objectifs
donnés.
On pense que ce qui serait mobilisant dans le réseau social,
c'est un projet qui se profile avec une couleur sociale avec, à
l'avant-plan, des dossiers qui concernent la famille et la jeunesse. Il est
important, pour nous, de retrouver une entité sociale qui mette de
l'avant des objectifs clairs, précis au niveau de la famille et de la
jeunesse.
Avant de passer aux recommandations, j'aurais peut-être un mot au
sujet de la fondation Marie-Vincent et du centre Marie-Vincent. Je pense qu'il
existe une tradition, depuis longtemps, dans le milieu anglophone au niveau des
fondations. Il existe, depuis quelques années, des fondations dans le
milieu francophone. Il existe également une tradition, je pense, plus
grande des fondations dans le domaine de la santé. Il existe, depuis
quelques années - et la fondation Marie-Vincent existe depuis 1975 - des
fondations qui oeuvrent dans le domaine social. Il y a un "team", si vous me
permettez l'expression, qui s'est créé entre la Fondation et le
centre Marie-Vincent, qui est au profit des enfants du Centre et, notamment,
les enfants qui ont été abusés sexuellement. Ce
phénomène-là est important au niveau de la
clientèle que nous recevons. Au cours des trois dernières
années, il y a 50 % à 70 % des enfants qui ont été
référés au Centre qui avaient été victimes
d'abus sexuels. Ce qu'on veut vous dire, c'est: Ne rendez pas compliqué
ce qui est actuellement simple, il y a, je pense, des liens directs entre la
Fondation et le Centre, ne compliquons pas les règles du jeu.
Quant aux recommandations, la fondation Marie-Vincent, le centre
Marie-Vincent, les soeurs de Sainte-Croix, on forme une équipe, une
équipe qui travaille ensemble, une équipe qui, depuis plusieurs
années, est au service des enfants qui sont référés
au Centre. Il y a un fort sentiment d'appartenance. Il y a une équipe,
là, je pense, qui est performante et qui est performante aussi en regard
de son sentiment d'appartenance. Et les enfants que l'on nous confie,
généralement, une de leurs caractéristiques principales,
c'est qu'ils n'ont pas de sentiment d'appartenance. Près de 90 % des
enfants qui sont confiés au centre Marie-Vincent viennent de familles
éclatées où, dans la plupart des cas, le père et la
mère ont reconstitué des familles, à un point,
quelquefois, où il est difficile pour nous, adultes, de s'y retrouver.
Et, on le constate souvent, les enfants n'ont pas d'appartenance, n'ont pas
l'impression, en tout cas, d'appartenir à quelqu'un.
En ce sens-là, nous trouvons important de privilégier les
petites structures personnalisées, où le sentiment d'appartenance
est plus facile, je pense, à être ressenti par des enfants qui
n'en ont pas, plutôt que de grosses structures anonymes. Il est important
également, pour nous, qu'il y ait une proximité qui soit la plus
grande possible entre les enfants et ceux qui décident. Il est
important, pour nous, de tenir compte de la région. Il est important de
tenir compte du réseau. Le social a ses particularités, il
répond également à des besoins particuliers. Et
peut-être que, tout compte fait, il y a de l'énergie qui peut
être mise dans une réforme au niveau de la santé et
peut-être que, dans un second temps, pourrait venir une réforme au
niveau social.
Si vous me permettez deux images, ce réseau de la santé et
des services sociaux, c'est comme un couple, un couple où les choix
santé ont toujours commandé un peu, dans le passé, les
choix sociaux, un couple, si je vais un petit peu plus loin dans mon image,
où l'homme aurait dit à sa femme comment elle doit voter; mais je
pense que c'est révolu, cette époque-là. Si vous me
permettez une autre image de ce grand réseau là, c'est comme une
famille, une grande famille où le modèle de la santé est
là depuis longtemps et le modèle social, je pense, est là
depuis moins longtemps ou il est en pleine jeunesse, si je peux dire. Et je
pense qu'il serait important de favoriser l'épanouissement de ce
réseau-là et de ceux qui y travaillent. C'est pour ça,
vous l'aurez sans doute deviné, que nous proposons la création
d'un ministère de la famille et de la jeunesse qui mettrait de l'avant
les questions relatives à la famille Ht à la jeunesse, une
structure dans laquelle les jeunes et la famille s'y reconnaîtraient, une
structure, également, dans laquelle ceux qui travaillent dans le domaine
social s'y retrouveraient certainement.
Si on regarde les jeunes, on les a un petit peu mis de côté
depuis dix, quinze ans, et comme société, des fols, et comme
parents, également. Je pense qu'actuellement ils nous rappellent, par
leur violence, qu'ils sont là. Je pense qu'au niveau de la famille on
assiste, un peu passivement, je dirais, depuis une vingtaine d'années,
à l'éclatement de la famille. Il est peut-être temps
d'essayer de freiner cet éclatement familial et, peut-être, de
réinventer sur de nouvelles bases cette famille-là. On a
l'impression que tout cela contribuerait, dans l'avenir, à avoir une
société plus équitable, à avoir une
société où la violence serait moins présente et
à avoir également des citoyens plus épanouis et
sûrement en meilleure santé.
La Présidente (Mme Marois): Merci, M. Charest, de votre
intéressante présentation. M. le ministre de la Santé et
des Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, madame. On en venait
exactement à la même conclusion. C'est un mémoire qui a
beaucoup de profondeur, qui a une recherche et un vécu aussi et une
bonne connaissance du mariage.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, vous
abordez de manière plus spécifique la place qu'occupe le social
par rapport à la santé et ça crève les yeux. La
réaction que vous avez vis-à-vis de la situation actuelle est
partagée à l'intérieur même du ministère.
Dans une session de travail que nous avons eue le 18 janvier avec tous les
cadres du ministère, le même constat que vous nous livrez
aujourd'hui était livré au niveau du ministère. C'est donc
qu'il doit y avoir un certain fond de vérité et de vécu
là-dedans et c'est là-dessus que je veux vous dire qu'il y a un
effort de fait sur le plan des objectifs. Évidemment, vous
évoquez un certain nombre d'objectifs. Vous dites: On aurait pu avoir
comme objectif... Il y en a qui s'adressent au gouvernement et il y en a qui
s'adressent, bien sûr, au ministère, celui de la pauvreté
s'adresse davantage... Je pense que c'est davantage une question de
gouvernement que de ministère. Mais, par vole de conséquence - on
le sait, des études le démontrent - la pauvreté
crée beaucoup de problèmes au niveau du ministère aussi.
Donc, dans ce sens-là, sur le plan des objectifs, je pense qu'on ne
ferait pas un combat très long avant de s'entendre sur les
objectifs.
Évidemment, ce qui m'apparaît beaucoup plus difficile,
compte tenu de la faiblesse de la recherche dans le domaine du social - c'est
ça un peu qu'on vit comme problème - II y a toute une
série d'informations que nous n'avons pas ou de recherches qui n'ont pas
été suffisamment poussées pour avoir un certain nombre de
solutions à nos problèmes, malgré le fait que vous soyez
sur le terrain à chaque jour; ça, c'est
précieux, c'est très précieux.
On investit annuellement à ce moment-ci à peu près
2 500 000 $ par année en recherche sociale, mais ce n'est pas
évident qu'il y a toujours eu cette volonté d'avoir une majeure
dans la recherche sociale, je pense qu'on a davantage eu une mineure. Les
indications que nous donnons ou transmettons au Fonds de la recherche en
santé du Québec, c'est qu'il nous faut un virage, un virage plus
important sur l'infrastructure, donc une infrastructure permanente de recherche
dans le domaine social pour pousser nos connaissances et les modèles
d'intervention Je pense qu'à ce niveau-là il y aura du travail
à faire et la commission, de toute façon... L'un des constats
importants de la commission, c'est qu'il faut rééquilibrer, et ce
n'est pas demain matin que ça va se faire. L'importance de l'un par
rapport à l'autre est actuellement tellement considérable que
c'est davantage une décision politique qu'il faudra prendre, axée
sur la prévention. Vous en avez parié tantôt, vaut
peut-être mieux prévenir que guérir. On est dans un
système curatif au possible. On en discutait hier avec les centres de
réadaptation qui sont venus; eux aussi, sont dans le curatif dans leur
domaine. Évidemment, il faut faire un virage très important sur
le plan de la prévention, mais en admettant vous et moi que c'est un
virage qui va demander du courage et qui va demander aussi du temps. Le
courage, on l'a, mais ça va être extrêmement important de
faire un virage à ce niveau-là.
J'ai très bien compris le message et la portée de
l'importance du social par rapport à... Et la création du
ministère que vous proposez vient peut-être du fait
qu'étant parent pauvre, si on avait notre propre ministère, on
serait peut-être moins pauvres sur le plan budgétaire pour
être capables de faire ce qu'on veut faire ou d'avoir les sommes pour.
Mais il y a des messages très importants qui se passent à la
commission depuis le début où il y a un virage très
important à faire sur le plan de la prévention, de tout ce qu'on
doit faire avant même qu'on arrive avec un bénéficiaire qui
est poqué sur toutes les manières. Ça, le message est
très bien capté. On va tenter de se creuser les méninges
et le génie et, si vous avez des solutions miracles, gênez-vous
pas pour nous les donner, sur comment le faire et comment le faire à
partir de demain, dans un an, dans deux ans, dans trois ans, mais il faut faire
des choses qui vont être durables et permanentes. Vous savez d'ailleurs
très bien qu'il va y avoir une résistance assez importante de la
part de ceux qui, aujourd'hui, trônent en rois et maîtres sur le
médical. (11 h 45)
Ceci étant dit, vous avez abordé le problème -
puisqu'il faut quand même en discuter - de structure et vous êtes
l'un des premiers groupes à venir nous dire, comme constat, qu'on n'a
pas besoin de réinventer une structure sur le plan régional,
qu'on en a une qui fonctionne bien. Bon, à part de ceux qui seraient
venus eux-mêmes se vanter, parce que, évidemment, quand on veut
protéger sa structure, on vient se vanter et on dit qu'elle est bonne et
qu'elle a atteint ses objectifs, vous êtes le premier à venir nous
dire: La structure régionale - donc, dans laquelle vous oeuvrez à
Montréal - n'est pas parfaite. Elle a besoin d'ajustements mais au lieu
de tenter de refaire, il faut parfaire. C'est ça. Alors, il faut
davantge parfaire que refaire. En tout cas, je vous dis, si c'est vrai chez
vous, ce n'est pas nécessairement vrai ailleurs, mais j'aimerais vous
entendre davantage sur le "parfaire" au niveau de la structure
régionale.
M. Charest: Bon, je pense qu'il existe différents... Sur
la structure régionale, je vais parler, bien sûr, plus abondamment
dans le domaine des services offerts aux jeunes. Je vais peut-être le
redire, il existe des tables de concertation, il existe des projets au niveau
de plans de services, au niveau de la clientèle, il existe une
collaboration interétablissements, je dirais, qui est très
intéressante et qui est au service des clients. "Parfaire", pour moi, je
reprends l'exemple, "parfaire" pourrait être de faire en sorte que le
conseil régional joue un rôle encore plus actif au plan de la
coordination. "Parfaire", ce pourrait être de mettre de l'avant une plus
grande diffusion de ce qui existe comme ressources dans la région de
Montréal et je pense que ça faciliterait l'accessibilité
des jeunes et des familles à des ressources que souvent ils ne
connaissent pas et que souvent, également, des professionnels et des
citoyens ne connaissent pas non plus.
M. Côté (Charlesbourg): Je trouve ça
excellent. Évidemment, ça revient constamment. On l'a vu au
"Match de la vie", les gens ne connaissent pas l'existence des CLSC. Donc, ils
se dirigent directement à l'urgence. Donc, il y a une
méconnaissance des services qui sont existants. Ça, c'est un
constat très, très important et il faut faire des efforts de ce
côté-là. Évidemment quand on parle... Vous
êtes dans un secteur qui a - on nous l'a dit hier - une bonne structure
de complémentarité, de collaboration et de concertation, à
votre niveau.
M. Charest: Oui. Je peux donner un autre exemple. Je parlais
tantôt de la planification. On a mis sur pied, au niveau des centres 0-12
ans de la région de Montréal, un travail de façon à
essayer de planifier, à essayer de cibler, si je peux dire, les besoins
des enfants au cours des cinq prochaines années et d'essayer, compte
tenu de cela, de peut-être repenser à adapter différemment
nos services. Et, pour moi, c'est un exemple aussi concret de quelque chose qui
est fait pour une meilleure concertation, en faisant le lien également
avec la planification.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'il y a des
pouvoirs additionnels qui pourraient être donnés à
l'organisme régional - bon, nommons-le, le CRSSS - des pouvoirs
additionnels qui pourraient être donnés qui permettraient... Parce
que la volonté n'est pas de tout centraliser à Québec, la
volonté est de donner davantage de pouvoirs au niveau de la
région sur le plan de cette complémentarité et de
coordination aussi. Évidemment, quand on dit qu'il y a des
problèmes de connaissance des services offerts, c'est peut-être
une partie de la faute du central à Québec, mais il y en a une
bonne partie aussi au niveau de la région. Est-ce qu'il y a des pouvoirs
additionnels qu'on pourrait transférer au niveau régional pour
corriger ces lacunes-là?
M. Charest: Je pense que l'allocation et la distribution des
enveloppes budgétaires pourraient permettre un leadership
peut-être plus musclé.
M. Côté (Charlesbourg): Et, pour vous, l'allocation
des enveloppes budgétaires, est ce que ça serait une
véritable régionalisation...
M. Charest: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): ...ou si ça serait
une déconcentration?
M. Charest: Ça serait une véritable
régionalisation.
M. Côté (Charlesbourg): est-ce que dans des cas
comme ceux-là - parce qu'on se l'est dit tantôt, on a à peu
près le même langage... des objectifs...
M. Charest: Oui. Clairs.
M. Côté (Charlesbourg): Mais ça, je n'ai pas
encore entendu grand monde contester les objectifs. Évidemment, quand on
tombe dans le dédale des projets de loi article par article, on se
retrouve plus ou moins, ou selon l'interprétation qu'on a. Mais, dans
les objectifs, c'est clair. Des objectifs de santé. Mais, si on arrivait
demain matin en disant: Parfait, dorénavant, l'argent sera versé
en fonction d'objectifs de résultats par programme, dites-moi donc, de
par votre expérience - parce que, moi, c'est quelque chose qui me
plaît et c'est peut-être le seul moyen d'être capable de
virer le système et de mettre le bénéficiaire au centre de
nos préoccupations - si on en arrivait à prendre cette
décision d'objectifs de résultats par programme, donc les
allocations de ressources vont aller en conséquence, comment est-ce
qu'on réussit à opérationaliser tout ça. Si on
disait demain matin: Parfait, la dotation budgétaire pour une
région comme celle de Montréal est de X centaines de millions de
dollars, on vous envole ça. et c'est maintenant un objectif par
programme et, donc, il y a une répartition ou il y a un jugement
à poser avec des objectifs de résultats, comment est-ce que la
régie régionale pourrait opérationaliser une idée
comme celle-là?
M. Charest: Je pense qu'elle pourrait demander à ce
réseau-là et aux gens qui en font partie de présenter des
plans pour arriver à atteindre ces objectifs et superviser, dans le
fond, très étroitement l'atteinte des objectifs, suivant les
propositions qui auraient été faites. J'en conviens avec vous, ce
serait un changement majeur. Mais il y aurait, pour moi, une très grande
mobilisation.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que vous croyez que
les régions sont prêtes pour un exercice comme celui-là? Il
faut bien se le dire entre nous autres, il y a un peu de compétition
dans le système. On dit que, dans le monde médical ou dans les
centres hospitaliers, il y a passablement de compétition. Ce n'est pas
différent dans d'autres domaines non plus.
M. Charest: Effectivement.
M. Côté (Charlesbourg): La
complémentarité est peut-être plus facile ailleurs, mais il
y a un peu de compétition dans le système.
M. Charest: Oui. De la compétition, il y en a dans le
système actuellement. Je pense qu'elle serait là, mais elle
serait là avec des règles du jeu qui seraient très
claires. Avec des objectifs clairs et un certain nombre de règles
énoncées, on aurait peut-être une compétition que je
qualifierais peut-être de plus saine dans le sens de plus au service des
besoins que l'on veut desservir dans ce réseau-là.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, dans votre esprit,
c'est possible
M. Charest: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Ça va quand
même demander de fouiller passablement la mécanique parce qu'on
sera inévitablement pris dans une mécanique de
répartition. Dans la mesure où on allait dans ce sens-là,
il reste un problème à régler qui est celui de
l'Imputabilité, qui est quand même extrêmement important.
Selon votre expérience, comment est-ce qu'on peut régler le
problème de l'imputabllité? Le ministre veut bien répondre
et être imputable des 10 400 000 000 $ qui sont sous sa
responsabilité, mais, en transférant des pouvoirs comme
ceux-là sur le plan régional, on étire l'élastique
de l'imputa-bilité. Comment est-ce qu'on règle ce
problème-là'?
M. Charest: Peut-être qu'une des façons de le
régler - mais, en même temps, ça ne m'ap-
paraît pas un moyen nécessairement performant -ce serait un
peu sur le modèle scolaire, d'avoir une représentation, des gens
élus au niveau régional. Cependant, quand je regarde dans le
domaine scolaire, l'intérêt à cela, il est mince. Mais
l'imputabilité pourrait être à ce niveau-là, tout
comme l'imputabilité pourrait être directement au niveau des
gestionnaires de ce réseau, une plus grande imputabilité au
niveau des gestionnaires, ceux qui sont impliqués.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, ce sont des
pistes à explorer. Mon temps est terminé, de ce que je comprends.
J'ai négligé d'autres aspects qui sont exprimés de
manière assez claire dans le mémoire; il y a des messages que je
comprends aussi à l'intérieur. Je ne les partage pas tous, mais
je comprends le sens des messages qui sont dans votre mémoire.
Merci.
La Présidente (Mme Marois): Merci. M. le leader de
l'Opposition et député de Joliette.
M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Je partirai
précisément du dernier point que le ministre vous souligne, le
transfert des enveloppes en région. C'a été notre dada
pratiquement depuis le début, le dada de l'Opposition, transférer
l'ensemble des enveloppes au niveau de la région. Mais ça
présuppose une décision préalable, sinon on ne ferait que
transporter les iniquités existantes. Il faut corriger d'abord, par des
formules précises, les iniquités existantes dans les
régions parce que, si on ne faisait qu'attribuer aux régions les
enveloppes actuelles par un moyen arithmétique, on ne corrigerait
absolument rien des situations, des iniquités actuelles. Donc, pour
nous, il y a une opération préalable au transfert des enveloppes.
C'est d'abord d'apporter les correctifs pour dire: Voici ce que ça
donnerait, corrigé. Sinon, on ne changerait aucun iota des
iniquités régionales et ça m'apparaîtrait une
aberration. En voulant corriger un système inéquitable, on ne
ferait que transposer l'iniquité sous prétexte qu'il y a une
grosse décentralisation des enveloppes budgétaires, mais on ne
donne pas les moyens, pas plus qu'avant, aux personnes en place de prendre des
décisions. Donc, opération préalable, correction des
iniquités; ensuite, application, une véritable
décentralisation des enveloppes, on croit que c'est là, pour
nous, l'Opposition, une piste extrêmement intéressante où
les gens devront se parler. Donc, c'est à se parler qu'on se comprend,
hein? Puis, si on se comprend, on va aller en complémentarité.
Donc, on n'ira pas en se pilant sur les pieds ou en empiétant sur les
terrains des autres puisqu'on aura à arbitrer le partage d'une enveloppe
éventuelle.
Nous sommes allés plus loin que ça. Nous avons dit
cependant que pour le côté social ça prendrait
peut-être des enveloppes réservées pour qu'elles ne soient
pas gobées exclusivement par le secteur santé qui a un lobby
extrêmement puissant et ça pourrait prendre la forme d'une
enveloppe protégée, sans enlever l'autorité ultime. Au
contraire, ça entrerait dans l'autorité ultime du
ministère de voir à ce que le côté social ne soit
pas ignoré par rapport au côté santé. Je pense que
l'Opposition officielle de l'Assemblée nationale a une perception assez
juste des choses.
Ce qui m'a plu énormément dans votre mémoire, c'est
tout l'aspect préventif. J'ai eu la chance, je pense que c'est une
chance, oui, d'avoir été un an à la tête du
ministère pour me rendre compte que tout le monde se targue, dans leur
discours, de parler de l'interdépendance du social et de la
santé, si bien que je suis allé jusque, pour bien identifier
qu'il y avait deux missions, j'ai changé le nom, le temps que
j'étais là. Au lieu du MAS, le ministère des Affaires
sociales, j'ai dit: Ça va être MSSS, Santé et Services
sociaux. Je voulais démontrer qu'il y avait deux missions
véritablement importantes dans le sigle. Ceci dit, ça ne change
pas grand-chose si, de ce beau discours, les gestes ne suivent pas et les
gestes, ça veut dire consacrer une plus large part d'argent, des
ressources financières à la vocation que représente le
social, mais aussi à la prévention.
J'ai été scandalisé, à ma première
conférence fédérale-provinciale à laquelle j'ai
assisté. On parlait avec M. Crosbie, qui était alors ministre de
la Justice, qui refusait littéralement de recommander au gouvernement
conservateur de subventionner la partie prévention. Par exemple, les
centres d'accueil pour délinquants. Si un jeune est
incarcéré, il nous coûte 72 000 $ par an. Ça, c'est
subventionné par le fédéral. Mais donner de l'argent
à des groupes ou à des centres d'accueil qui veulent faire de la
prévention, ça, ce n'est pas subventionné - croyez-le ou
non - et c'est un coût social beaucoup plus prohibitif, aller
exclusivement vers le curatif, que de consacrer un peu de finance pour aller
dans le préventif.
Mais notre société est bâtie de même,
imaginez-vous. Ce n'est pas seulement auprès des conseils
d'administration qu'il faut changer les mentalités, ce n'est pas
seulement auprès des personnels ou des différents corps
professionnels qu'il faut changer les mentalités, c'est même dans
l'approche même des gouvernants qui doivent imprégner ce nouveau
courant. Je trouve que votre mémoire est très éloquent, et
je vous en félicite, sur tout cet aspect.
J'aurais une seule question à vous poser. C'est de nature
purement axée, encore une fois, sur le domaine de la prévention.
Comment voyez-vous les ressources alternatives du milieu par rapport à
votre rôle d'établissement? Comment les voyez-vous?
M. Charest: Je dirais comme des partenaires. Si je regarde le
territoire de la ville de
Saint-Laurent où on offre des services externes, on fait partie
d'une table régionale où on travaille avec différents
organismes et différentes ressources. Ils sont là de façon
complémentaire. Je pense que le plus possible on implique directement,
et le plus près possible, les citoyens et les gens qui rencontrent des
difficultés pour solutionner leurs problèmes. Je pense qu'on se
donne des garanties que l'intervention porte plus
J'aimerais peut-être ajouter à ce qui a trait à la
prévention. Je pense que la prévention première peut
commencer par de l'information aux citoyens sur la santé, sur leur
bien-être. Je pense également qu'elle peut se traduire par un
investissement majeur auprès des enfants et auprès des familles.
Il peut se traduire, également, le préventif, sans jouer sur les
mots, par un curatif auprès des enfants. (12 heures)
M. Chevrette: Mon collègue en a une aussi.
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. Une remarque d'abord
pour aller dans le sens que vous le dites. On a bien l'impression que tout ce
projet de réforme est un projet de réforme du système de
la santé, que le rouleau compresseur de la santé continue
"exonérablement" sa poussée et que la prévention, le
communautaire, la réadaptation, les services sociaux, on traite
ça après, quand on a le temps. Et là-dessus, je voudrais
peut-être poser une question en relation avec ce que vous faites sur le
territoire auprès de votre clientèle, dans le réseau
actuel, en m'intéressant particulièrement aux
bénéficiaires.
Une personne qui, actuellement, est Insatisfaite du service qu'elle
obtient, du plan de service qu'on lui a fait, de l'inaccessibilité
à tel ou tel type de service s'adresse à son CRSSS pour
déposer une plainte. Est-ce que vous avez l'impression que le
système de traitement des plaintes et d'accueil des
bénéficiaires dans le système de santé et des
services sociaux répond effectivement avec justesse et justice aux
réclamations de services ou de traitements dans notre actuelle
organisation du système de santé et des services sociaux?
M. Charest: Je peux difficilement répondre à la
question de façon précise. Cependant, ce que je peux dire, il y a
des suites qui sont données à ces plaintes-là. Si un
parent n'est pas satisfait des services que son enfant reçoit et qu'il y
a une plainte qui est faite au Conseil régional, je suis assuré,
et l'expérience, elle est là, quo va ôtro donné
suito à sh plainte Est co que la personne va être satisfaite
après ça? Je peux difficilement me prononcer, malheureusement,
là-dessus.
M. Trudel: Mais ce que vous nous dites, c'est que ça suit
les mécanismes et ça se rend chez vous.
M. Charest: Oui.
M. Trudel: Grosso modo, on vérifiera très
certainement cela parce qu'il pourrait bien arriver que tout ne se rende pas
chez vous. En termes de redressement de situation, on vérifiera
ça bien sûr avec les CRSSS, parce que, je lis ça à
votre élément extrêmement pertinent, tout cela devrait
peut-être commencer par l'élément information. On ne peut
exercer nos droits, nos recours et la juste part auxquels on a droit dans tout
système que si on est bien informé, et on a bien l'impression
qu'on est effectivement sous-informé, qu'il y a un grand nombre de
personnes qui ne peuvent avoir accès à des services parce qu'ils
sont mal informés ou que le mécanisme de traitement de leur
situation ou de leur plainte est dans une situation difficile. J'illustre
ça par le fait, par exemple, que toute plainte qui est
déposée en générai dans un CRSSS quant à une
situation difficile, on va demander d'abord à ces personnes-là de
faire ça par écrit. Or, il y a 20 % de la population du
Québec, les plus pauvres, qui sont analphabètes ou qui ne savent
pas écrire. Comment retrouver la justice et le service à rendre
quand des personnes ne peuvent même pas rendre leur demande à
terme en vertu des mécanismes qui sont actuellement fixés?
Une toute petite question maintenant avant de terminer, puisque le temps
nous presse. Sur cette question des régies régionales et de
l'imputablllté, vous nous avez dit: Une des façons d'y arriver
serait peut-être de passer par l'élection au suffrage universel
des personnes qui siégeraient éventuellement à l'organisme
de gestion des programmes au niveau régional. Est-ce que vous avez
l'impression - parce que vous nous avez aussi rappelé la situation du
monde scolaire - que, s'il y avait une espèce d'alliance avec le monde
municipal, nous pourrions en arriver à ce nécessaire
intéressement et que les gens appelés à siéger sur
les régies régionales, pour ne pas multiplier les gestes, pour ne
pas multiplier les occasions d'élections - si vous me passez
l'expression - est-ce que vous pensez qu'on pourrait, par exemple, utiliser les
élections municipales pour en profiter pour élire les membres qui
seraient responsables de cette régie régionale et créer,
à l'occasion de ces élections, l'information nécessaire,
le courant d'information nécessaire pour responsabiliser et faire en
sorte que ce soit un geste responsable au niveau de la population? Est-ce que
ça vous apparaît umb volo passible?
M. Charest: À première vue, ça pourrait
être une piste intéressante. À première vue.
M. Trudel: Très bien. Merci.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Il y a de vos
collègues qui sont venus hier, représentants des centres de
réadaptation de la région de Montréal. J'imagine que vous
avez, bien sûr, vu leur mémoire. Et dans leur présentation,
ils étaient assez critiques quant à l'état actuel des
relations avec soit la DPJ, soit les centres de services sociaux ou d'autres
institutions; ça pouvait être les CLSC. Et quand on lit votre
mémoire et qu'on vous écoute, vous semblez dire qu'il y a des pas
de géant qui ont été franchis et que, au contraire, vous
en arrivez presque à commencer à avoir une vision
planifiée. Donc, votre évaluation à vous, à ce
moment-ci, des liens que vous avez avec les institutions environnantes dont
vous dépendez mutuellement, bien sûr, est - si je comprends bien -
beaucoup plus positive. J'aimerais vous entendre un peu sur ça.
M. Charest: Elle est plus positive, bien sûr. Il y a
beaucoup d'établissements dans la région de Montréal. Et,
tantôt, M. Côté parlait de la compétition qu'il y a
entre les établissements. Elle est là certainement. Mais il y a
des pas de... Ça fait près de quinze ans que je suis dans le
réseau. Et, au départ, si dans les établissements le
travail était fait d'une façon très cloisonnée,
aujourd'hui, je peux dire qu'il y a un décloisonnement qui est
présent. Il y a des attitudes qui ont changé. Et je pense que ces
attitudes sont garantes, en tout cas, d'un avenir qui est prometteur.
Et, pour moi, l'attitude fondamentale, c'est... Je pense que chacun des
établissements dans ce réseau est de plus en plus convaincu qu'il
a un mandat réseau et non pas uniquement un mandat
établissement.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Quand vous
suggérez, a la fin de votre intervention, que l'on constitue un nouveau
ministère qui serait préoccupé de la famille et de la
jeunesse, vous nous dites que ce qui s'est fait, jusqu'à maintenant, par
l'Intermédiaire du nouveau Conseil de la famille n'est pas satisfaisant
et n'est pas suffisant.
M. Charest: Tout à fait. Je pense que ça
demanderait une volonté beaucoup plus vigoureuse. Si on veut faire des
choses et intervenir au niveau de la famille et des jeunes, je pense qu'une
voix ministérielle pourrait contribuer énormément,
à ce niveau-là.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Nous vous remercions
de votre présentation qui fut très enrichissante, j'en suis
persuadée, pour tous les membres de la commission.
M. Charest: Merci.
La Présidente (Mme Marois): Merci. J'inviterais maintenant
les représentants et repré- sentantes de la corporation de
l'hôpital Marie-Clarac et les soeurs de Charité de Sainte-Marie
à venir prendre place pour nous présenter leur point de vue.
Je vous souhaite la bienvenue à la commission. J'aimerais que la
personne qui sera porte-parole pour présenter le mémoire se
présente, au moins, et présente les personnes qui
l'accompagnent.
Corporation de l'hôpital Marie-Clarac et soeurs
de Charité de Sainte-Marie
M. Tremblay (Charles): Mme la Présidente, M. le ministre,
M. le leader de l'Opposition, MM. les membres de la commission, mon nom est
Charles Tremblay. Je représente les soeurs de Charité de
Sainte-Marie, de même que l'hôpital Marie-Clarac des soeurs de
Charité de Sainte-Marie (1965).
J'ai, à mes côtés, mère Anselme-Marie,
directrice générale pour le Canada et présidente du
conseil de l'hôpital; à ma droite, soeur Anne-Marie,
secrétaire de l'hôpital et directrice des résidences Les
Cascades et Angelica; soeur Louise Beaulac, directrice générale
actuelle de l'hôpital, ici à ma gauche, le Dr Hector Gravel, qui
est DSP de l'hôpital, et M. Pierre Lalonde, que je n'avais pas vu,
excusez-moi, qui est le contrôleur des finances.
La Présidente (Mme Marois): Vous connaissez nos
règles, je n'ai pas à vous les rappeler. Il y a environ 20
minutes de présentation et, par la suite, nous vous adresserons soit des
questions ou des commentaires.
M. Tremblay (Charles): Je ne pense pas avoir besoin des 20
minutes pour l'exposé que je préférerais résumer
d'une façon très concrète, étant donné qu'il
doit y avoir beaucoup de répétition, de toute façon.
Il m'apparaît d'abord important, étant donné le
message que l'on veut transporter, de connaître ce que sont les soeurs de
Charité de Sainte-Marie. Les soeurs de Charité de Sainte-Marie,
ce sont d'abord des religieuses d'origine italienne qui viennent de Turin et
qui sont arrivées au Canada vers 1940-1943. Elles se sont
établies à Montréal-Nord où elles ont graduellement
monté différentes institutions qui sont les suivantes. En 1963,
l'institut Marie-Clarac. L'institut Marie-Clarac est un complexe immobilier
composé d'un seul immeuble, très moderne, très joli, qui
abrite un hôpital, l'hôpital Marie-Clarac, qui a 204 lits et qui
est un hôpital de réadaptation essentiellement et de
convalescence, également une école secondaire de 750
élèves et un noviciat.
Cette description n'est pas inutile lorsque l'on touche au
problème de la propriété des immeubles. Vous voyez donc
qu'il s'agit ici d'un hôpital qui fait partie d'un complexe et qui
n'est
donc pas isolé et facilement isolable. En 1968, on a construit la
résidence Angelica qui est située sur le bord de la
rivière des Prairies et qui peut recevoir 500 personnes
âgées. En 1972, la résidence Les Cascades, également
sur le bord de la rivière des Prairies - de toute beauté comme
site, n'est-ce pas - où il y a 500 personnes âgées
également. Il y a aussi le collège Clarac de Mexico qui va
être en opération dès septembre, qu'on achève de
construire et qui va recevoir 1200 élèves. Il faut aussi
mentionner le camp Mère-Clarac qui est situé à Salnt-Donat
dans le nord de Montréal, qui peut recevoir 225 personnes et
également, qui date de 1984, l'Étoile-du-Nord qui est une
résidence d'été, pour 80 personnes âgées. Il
faut aussi souligner que toutes ces constructions et Institutions ont
été fondées par soeur Anselme qui est à ma droite,
dont on a pu dire, par probablement de mauvaises langues, qu'elle était
à la tête d'un véritable petit empire. (12 h 15)
Nous n'entendons pas, bien entendu, faire une analyse critique
détaillée de la réforme proposée. Cet aspect du
problème est laissé au Regroupement des petits et moyens
hôpitaux de Montréal que nous n'avez peut-être pas encore
entendu, mais qui se fera entendre, je pense, après nous. Nous
espérons que nous ne vous ennuierons pas avec trop de
répétition. Nous nous en excusons, s'il y en a. Mais, d'ores et
déjà, de ce que j'ai entendu ce matin, nous avons des points de
vue différents à certains égards et surtout, pour autant
que ma part est concernée, d'aspects légaux.
Nous croyons essentiel de faire d'abord un petit rappel de
l'évolution de la situation jusqu'à maintenant. Ce sera
très bref, mais ça nous apparaît vraiment essentiel pour
démontrer comment nous en sommes arrivés à la situation
actuelle où les corporations qui sont propriétaires des immeubles
ont été écartées petit à petit de
l'administration de leurs hôpitaux. Remarquez que ce n'est pas du tout
notre propos que de se plaindre ici d'une expropriation déguisée
et autres formes de spoliation; nous ne demandons aucune indemnité du
genre. Les religieuses n'ont qu'un seul but, c'est de poursuivre leur mission
dans le domaine de la santé et non pas, en aucune façon, de vous
soumettre des considérations d'ordre purement économique,
même en ce qui regarde leurs immeubles.
Avant 1960, le monde hospitalier était essentiellement celui des
communautés religieuses. Est arrivée, en 1962, la loi sur les
hôpitaux. La loi sur les hôpitaux a dit que, dorénavant, les
corporations sans but lucratif qui sont propriétaires d'immeubles
servant d'hôpitaux seraient des hôpitaux publics. Alors, pourquoi
arrive, sans autre préavis, cette nouvelle notion d'institutions qui
étaient, évidemment, tout à fait privées et que
l'on vient déclarer publiques, contrairement, par exemple, au
système de l'éducation où on a reconnu des
établissements privés, mais d'Intérêt public?
Là, on a dit: Non, ce sont des hôpitaux publics. On doit en
attribuer, je pense, la principale raison à une loi
fédérale de 1958 qui exigeait, pour obtenir des subventions, que
l'on soit des hôpitaux publics.
Alors, ça a été le début, n'est-ce pas? Pour
s'adapter à cette demande du gouvernement fédéral, on a
dit: Très bien, on devient des hôpitaux publics. Et là, la
loi sur les hôpitaux exigeait que l'on constitue des corporations
distinctes de celle de la communauté, qui n'auraient d'autre objet que
d'opérer l'hôpital. C'était donc une séparation des
patrimoines de la communauté et de l'hôpital même, ainsi que
de tout ce qui se trouve dans l'hôpital. Le conseil d'administration
était celui de la corporation, auquel on adjoignait un médecin et
un directeur général. Et c'est la première année
que l'on a exigé un permis pour opérer un hôpital.
Devant cette situation que nous imposait la loi, l'hôpital
Marie-Clarac s'est incorporé. Ça s'appelle la corporation de
l'hôpital Marie-Clarac des soeurs de Charité de Sainte-Marie
(1965). Ça a été fait en vertu de lettres patentes. Je
m'excuse d'insister sur ces aspects qui peuvent vous paraître assez loin
du problème de la santé, mais qui sont importants, comme nous le
verrons plus loin. Parce que les lettres patentes en question prévoient
la composition des membres de l'hôpital et du conseil d'administration.
On dit, n'est-ce pas, que l'hôpital sera administré par son propre
conseil d'administration et, de plus, que les membres de l'hôpital seront
choisis par la communauté. Vous voyez comme on en est loin de ça,
aujourd'hui. Pour permettre l'émission de ces lettres patentes, il a
fallu que les religieuses obtiennent d'abord une loi privée,
spéciale, qui les incorporait et qui leur permettait de faire une
requête au lieutenant-gouverneur pour obtenir les lettres patentes d'un
hôpital, ce qui a été fait.
Je pense que la situation est demeurée telle quelle jusqu'en
1971. Donc, de 1962 à 1971, cet hôpital-là a
été mené entièrement et uniquement par les
religieuses. En 1971, la première Loi sur les services de santé
et les services sociaux a greffé, au conseil d'administration des
lettres patentes dont je viens de parler, un conseil d'administration
imposé par la loi. Et on a dit aux religieuses: Vous pourrez
élire, non pas vraiment élire mais déléguer quatre
représentants sur douze à ce conseil d'administration. On a dit
que tous les pouvoirs de l'hôpital, dans le cas de Marie-Clarac, seraient
exercés par ce conseil d'administration. Cependant, des
interprétations du temps ont ramené cette expression "tous les
pouvoirs" en seulement "des pouvoirs de gestion", en sorte qu'on a
continué à avoir le conseil d'administration de la corporation
originale en parallèle avec le conseil d'administration qui était
chargé, lui, des pouvoirs de gestion. Je pense qu'il est important
d'attirer votre attention
sur un point avec lequel ceux qui nous ont précédés
et d'autres ne sont pas d'accord, et c'est le suivant. Se sont alors
exprimées deux tendances différentes. La loi disait: Le conseil
d'administration de l'établissement. En droit, ça n'a
évidemment aucun sens. C'est comme dire: Le conseil
d'établissement d'un gymnase, le conseil d'établissement d'une
piscine. Ça n'existe pas. Il aurait fallu que l'établissement
soit lui-même une corporation pour que ça ait du sens. Or,
l'établissement n'est pas une corporation en vertu de la Loi sur les
services de santé et les services sociaux. On a dit, à l'article
68, que l'établissement était une corporation au sens du Code
civil. On s'est appuyé là-dessus pour dire: Voyez,
l'établissement, c'est une corporation, donc ça a du sens. Mais
on a oublié, n'est-ce pas, que l'article 68 ne s'appliquait qu'aux
corporations créées par la loi de 1971 et non pas aux
corporations antérieures, en sorte qu'il ne fait aucun doute, dans mon
esprit et dans celui d'autres juristes qui se sont prononcés sur le
problème, qu'il n'y a pas deux corporations, il n'y a jamais eu deux
corporations, qu'il n'y a qu'une seule corporation encore aujourd'hui. Et
j'entendais tout à l'heure un de ceux qui est venu ici prétendre
que le conseil d'ad-ministratlon de l'établissement devrait être
maintenu alors que le projet de loi l'abroge. Je soumets respectueusement que
le projet de loi ne l'abroge pas, qu'il n'a jamais existé. Il n'y a
jamais eu qu'un seul conseil d'administration, qu'une seule corporation qui
était menée par deux conseils d'administration: un conseil
d'administration original, originaire, celui des lettres patentes, qui avait
une juridiction évidemment assez limitée puisqu'on avait
enlevé les pouvoirs, et cet autre conseil greffé qui, lui, avait
les pouvoirs de gestion, en 1971. En 1974, on a amendé la loi pour dire,
cette fois-là, écoutez bien: Tous les pouvoirs maintenant seront
exercés par ce conseil d'administration imposé par la loi. Il
semblait qu'on aurait dû alors admettre qu'il n'y avait plus de pouvoir
possible pour le conseil d'administration originaire. Je soumets, à ce
propos, que môme si telle était la situation, ce que je nie,
ça n'aurait pas fait disparaître pour autant le conseil
d'administration originaire parce que c'est une chose que d'avoir des pouvoirs
et une autre que de les exercer. Et le conseil original de l'hôpital
conserve toujours les pouvoirs que ses lettres patentes lui ont donnés,
sauf qu'il est empêché de les exercer parce que la loi dit:
Ça sera exercé par un conseil d'administration greffé,
imposé par la loi.
Cependant, lorsque la loi dit, en 1974, que tous les pouvoirs vont
être exercés par le deuxième conseil d'administration, on
dit aussi, à l'article 49, que ce conseil - c'était vraiment trop
demander - ne pourrait pas aliéner les biens de la corporation des
religieuses sans le consentement de ces membres-là. Il faut donc lire la
loi de 1974 comme disant: Tous les pouvoirs sont transférés au
deuxième conseil d'administration, sauf ceux que la loi lui
reconnaît encore. Alors, il y avait des pouvoirs, n'est-ce pas, que cette
loi-là lui reconnaissait, en sorte que ce ne sont pas tous les pouvoirs
qui ont été transférés au deuxième conseil,
mais certains pouvoirs qui sont presque la totalité, mais il est
resté pour le conseil original certains pouvoirs dont celui de
s'objecter à l'aliénation, celui de déléguer des
membres au conseil d'administration du second conseil, etc.
En 1977, est arrivé l'élément important de notre
représentation ici. En 1977, est arrivée pour nous une
bouffée d'air. Le centre d'accueil, qui était un
établissement public, pouvait, à certaines conditions, conserver,
lui, un seul conseil d'administration, le sien propre, ce qui était
déjà une preuve, n'est-ce pas, qu'il n'y a jamais eu deux
conseils d'administration. Ça va de soi, parce qu'autrement on aurait vu
une corporation dont le conseil d'administration serait celui d'une autre
corporation, ce qui n'avait évidemment aucun sens. Alors, on a dit:
Certains centres d'accueil, à certaines conditions, pourront avoir leur
propre conseil d'administration.
Cette disposition-là a été maintenue dans le projet
de loi actuel, et vous verrez que c'est là l'objet de notre demande
principale. Nous vous disons: N'est-il pas possible de permettre certaines
exceptions dans la loi? Nous ne vous demandons pas que tous les
établissements publics aient leur propre conseil d'administration. Ce
serait aller plus loin que 1971, revenir sur des aspects importants de la loi.
Nous ne vous demandons pas ça. Nous vous demandons cependant: Dans
certains cas, n'est-il pas possible que la loi permette, comme dans le cas des
centres d'accueil, à certains centres hospitaliers, à certaines
conditions et toujours avec tous les contrôles, n'est-ce pas, qui sont le
droit de celui qui paye, d'avoir leur propre conseil d'administration? Nous
croyons pouvoir faire la preuve devant vous, et d'une façon
péremptoire, qu'un conseil d'administration mené par les
religieuses qui m'entourent est plus efficace, est plus humain et, à
toutes fins pratiques, est dans un meilleur intérêt de
l'État que celui que vous nous proposez maintenant.
Ce n'est évidemment pas une règle générale.
J'en conviens et, encore une fois, je ne demande pas l'ouverture de la loi "at
large" sur un point aussi délicat. Je demande cependant qu'il y ait une
possibilité de prévue dans la loi comme on en a prévu une
pour les centres d'accueil. Vous allez me dire: Qu'est-ce qu'il y a de
particulier à Marie-Clarac que les autres n'ont pas? Il y a ce petit
boniment, que je vous ai fait au début, de leurs oeuvres, qui
n'était pas inutile, comme vous le voyez maintenant, et qui signifie
qu'elles ont réussi à la perfection. À date, elles ont ce
deuxième conseil d'administration aussi, mais les relations sont
excellentes.
L'hôpital marche parce que les relations avec le conseil
d'administration, dont des membres sont ici, sont excellentes. Il va de soi que
ça peut continuer comme ça à la limite, mais on n'a aucune
garantie pour l'avenir de ce qui va se présenter. On ne contrôle
pas cette composition du conseil d'administration qui est
déterminée par l'État. Cependant, Marie-Clarac a fait la
preuve, avec et sans conseil d'administration connexe, annexe, de sa
compétence et du succès de ses entreprises. Et, de plus, et c'est
peut-être là le point principal, la corporation, les religieuses
ont de la relève. Vous avez dû entendre d'autres corporations ou
d'autres communautés vous dire: Nous n'avons presque plus de
relève. Ce n'est pas le cas et les questions là-dessus seront les
bienvenues après. Mes soeurs pourront vous répondre, ce que je ne
connais pas personnellement. Mais il existe une relève et le
passé qui est garant de l'avenir vous dit: Ils ont fait une oeuvre
magnifique et, nous, on vous dit: On peut faire une meilleure job
nous-mêmes, dans ce cas particulier, qu'en appliquant la loi. (12 h
30)
Voyons maintenant ce que le projet de loi est venu ajouter à tout
ça comme Imbroglio. Il y a évidemment...
La Présidente (Mme Marois): Vous allez me permettre de
vous demander de ramasser un peu les derniers éléments de votre
proposition, non pas que ce ne soit pas intéressant, au contraire, nous
vous écoutons très attentivement, comme vous l'aurez sans doute
remarqué, mais il restera peu de temps aux membres de la commission si
vous utilisez...
M. Tremblay (Charles): Je m'excuse. Alors très
brièvement, je vais vous dire ceci. Pour ce qui est du conseil
d'administration unifié, il va de soi que ça nous paraît
absolument inacceptable dans les circonstances. Nous croyons surtout que
l'article 74, qui permet maintenant aux conseils d'administration
greffés de venir déterminer les conditions d'admission et de
rejet des membres, est absolument inacceptable pour la communauté et
c'est facile à comprendre, n'est-ce pas? On dit: Vous pourrez faire des
règlements qui vont régir l'entrée et la sortie des
religieuses - parce qu'il s'agit de religieuses - dans la corporation.
Maintenant c'est clair, c'est établi. Votre nouveau projet de loi dit
bien que, maintenant, l'établissement constitue une corporation et que
c'est la corporation, dans ce cas-ci, des religieuses initiale. Alors vous
pouvez travailler sur les membres, changer les règlements. Vous pourrez
aliéner les immeubles très facilement, parce que vous allez avoir
leur consentement, il n'y a plus personne sur ce conseil
d'administration-là. Alors on voit que ce n'est certainement pas ce que
le gouvernement a voulu; c'est un lapsus, je pense, de quelque sorte que cet
article 74 dont on demande Instamment qu'il ne se représente pas dans le
projet de loi ou dans la loi à venir.
Nous demandons également une meilleure représentation au
sein du conseil d'administration. Si ce système continue d'exister, nous
demandons un droit de regard sur la nomination du directeur
général. Il va de soi que c'est extrêmement important.
Également, que son mandat puisse être étendu. Nous
demandons que soient précisés les droits de
propriété restants, qu'un statut analogue à celui des
centres d'accueil puisse être ouvert quelque part dans la loi afin qu'on
puisse s'en prévaloir. En dernier lieu, s'il était possible que
les conditions pour devenir privé conventionné soient plus
explicites, plus clarifiées et plus faciles d'accès dans la loi
à venir.
La Présidente (Mme Marois): Nous vous remercions de votre
présentation. M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci. Je vous souhaite la
bienvenue. C'est un rappel historique qui, je pense, était
nécessaire dans le cas précis que vous représentez. Ma
première question serait la suivante: À votre connaissance,
est-ce qu'il existe d'autres Institutions qui vivraient le même
problème que vous vivez?
M. Tremblay (Charles): M. le ministre, il me fait plaisir de vous
dire que je l'ignore. Je n'en ai aucune... Peut-être que soeur Louise
pourrait répondre.
Mme Beaulac (Louise): Soeur Beaulac. Des hôpitaux de notre
genre, actuellement, il se trouve à y avoir Villa Medlca; c'est un
centre hospitalier pour convalescents et de réadaptation. Il a 240 lits
et, chez nous, nous en avons 204.
M. Côté (Charlesbourg): Mais, avec les mêmes
problèmes sur le plan juridique, lettres patentes...
Mme Beaulac: C'est-à-dire que cette Institution est
privée conventionnée.
M. Côté (Charlesbourg): Ah bon! O. K. Je vous
écoutais et j'essayais de vous suivre. J'ai dit: On va aboutir
où? Évidemment, je me disais, en cours de route, on va
certainement entendre parler de privé conventionné, qui pourrait
être une solution au problème. Effectivement, je sais que vous
avez eu des contacts sur le plan juridique avec les gens du contentieux du
ministère la semaine dernière sur le plan d'échange
d'informations. Ça me paraît effectivement très
particulier. Je n'ai pas la prétention de connaître tous les
aléas de ce qui a pu se passer sur le plan juridique au fil des
années. Évidemment, heureusement qu'il y a des gens comme vous
qui l'avez vécu pour être capables
de nous rappeler ce qui a été fait dans le
passé.
Je vous poserai cependant une question. Conseil d'administration
originaire, j'ai suivi ça avec Intérêt. Originaire par
rapport au C. A. de gestion. Le CA. originaire se réunit de
manière, j'Imagine, régulière.
Mme Beaulac: II se réunit environ trois ou quatre fois par
année pour des réunions régulières, disons, pour
réviser le budget. Aussi quand la demande se fait pour renouveler notre
permis d'exploitation et aussi quand il y a le renouvellement des obligations.
Alors, à certaines occasions... On nous demande justement la
résolution du conseil d'administration de la Corporation. À
chaque fois que je vois le mot "corporation", j'en profite pour réunir
le conseil d'administration pour étudier ces points et faire les
demandes.
M. Côté (Charlesbourg): Quelle est l'interaction
entre les deux conseils de gestion?
Mme Beaulac: Au fond, il y en a un qui se réunit... Disons
que le conseil d'administration, selon la loi, se réunit sept fois par
année, mais, au fond... Quand la Corporation se réunit pour
étudier, supposons pour faire la demande du permis, l'autre conseil est
mis au courant. Le conseil demandé par la loi est mis au courant que la
Corporation s'est réunie pour faire telle demande. Justement, pour le
renouvellement des obligations, je mets au courant le conseil
d'administration.
M. Côté (Charlesbourg): Vous étiez ici tout
à l'heure. Vous avez entendu les discussions qu'on a eues avec les
groupes précédents sur les conseils d'administration
unifiés. Je pense qu'on n'a pas à les reprendre. Ça me
paraît, pour le stade où on en est, assez clair.
Évidemment, les choses vont se clarifier ultérieurement. Il y a
beaucoup d'appréhensions qui vont disparaître si on fait
disparaître les conseils d'administration unifiés. Je pense qu'il
faudra se trouver des mécanismes pour les permettre mais pas les
obliger. C'est une distinction quand même assez importante. C'est quand
même souhaitable. Il y a des économies à faire. Je vous
répète que sur le plan de la mission, malgré le fait que
ça puisse paraître comme ça dans le projet de loi, d'aucune
manière il n'était de l'intention des concepteurs de la
réforme de toucher à la mission et de toucher aux droits.
Évidemment, lorsqu'on fait l'analyse comme vous l'avez faite, et
c'est votre devoir, du libellé des articles - on parle de 39, vous avez
parlé de 74 et d'autres articles - il n'est pas évident qu'on a
parfaitement atteint notre but. Évidemment, un avant-projet de loi nous
permet de voir la portée de ce qu'on a écrit et
l'interprétation qu'on peut en tirer. S'il y a des
ambiguïtés dans l'interprétation, évidemment, le
signal est donné pour faire en sorte qu'on puisse faire des
modifications qui s'Imposent pour que ce soit clair et qu'il n'y ait pas
d'ambiguïté.
Donc, ça me paraît, à ce niveau, assez important. Ce
que je souhaiterai évidemment, pour ne pas aller plus loin, c'est de
prendre l'initiative d'une rencontre éventuelle. On pourra regarder vos
problèmes spécifiques parce qu'ils me paraissent
spécifiques. Ça va. Merci.
La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre. M. le
leader de l'Opposition et député de Joliette.
M. Chevrette: Merci, madame. Je voudrais vous dire que j'ai
assiste à un cours de droit accéléré sur le plan
des droits initiaux. Je voudrais vous demander, M. Tremblay, s'il y a eu
délégation de pouvoirs de la corporation originaire suite aux
législations antérieures. Dans le fond, vous profitez de
l'avant-projet actuel pour démontrer que les législations
antérieures n'ont pas enlevé les droits originaux C'est un peu
ça que vous démontrez. Est-ce qu'il y a eu des contestations du
droit originaire au moment où il y a eu les législations
préalables, par exemple, en 1974, vous dites, et en 1977 et en 1971.
M. Tremblay (Charles): C'est bien sûr que ça a
posé d'énormes problèmes. On disait, n'est-ce pas, que
l'établissement serait une corporation et qu'en conséquence elle
pouvait avoir un conseil d'administration. Mais il faut bien réaliser
que l'établissement n'avait pas de permis pour opérer
l'hôpital; c'était la corporation originale. Or, si cette
théorie devait être reçue, ça voudrait dire que
l'établissement opérait un hôpital sans permis. Ce n'est
pas ça.
M. Chevrette: Est-ce qu'il y avait délégation de
pouvoirs à ce moment-là de ta corporation originale?
M. Tremblay (Charles): Je ne le pense pas.
Délégation de pouvoirs, non je ne le pense pas. Je pense que
c'est un pouvoir qui a été donné et imposé par la
loi. C'est la loi qui vient dire: Telle corporation aura un conseil
d'administration greffé à l'autre... C'est un peu comme dans le
domaine municipal. Si une municipalité vient en tutelle...
M. Chevrette: Sans abolir les droits. Par loi là... Dans
le cadre... Parce que je n'ai pas les législations devant moi. Avoir su,
je serais allé avec les législations de l'époque pour
vérifier. C'est parce que ce que je me pose comme question - vous
êtes un homme de droit - c'est: Lorsqu'on a légiféré
pour amener un conseil d'administration en lieu et place du conseil
d'administration de la corporation originale - vous me suivez jusque-là
- le nouveau conseil d'administration qui oeuvrait dans cette
bâtisse-
là, qui ne leur appartenait môme pas parce que ce
n'était pas un hôpital privé conventionné... on a
voulu en faire un établissement public alors qu'il appartenait à
des particuliers. Je pense que j'ai saisi le dossier. Donc, à partir de
ce fait, il n'y a pas eu de demande de délégation de pouvoirs, il
n'y a pas eu de protocole de signé entre la communauté et ladite
corporation supposément légale qui ne l'est pas. Pardon?
Une voix: On s'est laissé faire, comme de bonnes
femmes.
M. Chevrette: II n'y a rien eu de ça?
M. Tremblay (Charles): Non. Ce qui est arrivé, c'est que
la communauté, au début, lors de la création de la
corporation de l'hôpital Marie-Clarac (1965) lui a
transféré ses immeubles. Ensuite, si vous me parlez d'une
délégation de pouvoirs entre la corporation elle-même et le
second conseil d'administration, je ne pense pas qu'on puisse parler de
délégation de pouvoirs parce que c'est en fait la loi qui vient
se superposer et qui dit: Les pouvoirs de cette corporation seront
exercés en partie par son conseil original, en partie par celui que l'on
vous dit.
M. Chevrette: Et sans exprimer d'une façon expresse qu'on
soustrait les droits qui ont été conférés par une
loi privée à une corporation privée. Je pense que vous
avez un excellent fondement en droit, sans être juge, parce que - Je ne
peux pas croire - on ne pourrait pas enlever un droit Inaliénable
à une corporation qui en est propriétaire en fonction d'objectifs
précisés dans une loi privée, sans, par une loi de
portée publique, enlever explicitement les droits qui ont
été accordés. Je ne vols pas comment on pourrait faire
ça. Ce serait complètement illégal. Je pense que je vous
suis dans votre raisonnement en tout cas. Je vous souhaite bonne chance, si
jamais vous devez y aller, mais je pense que ça peut être
corrigé sans aller en cour. Le meilleur règlement hors cour vaut
le pire des procès ou l'inverse. Le meilleur procès n'est pas
aussi bon que le pire règlement hors cour. C'est ça?
M. Côté (Charlesbourg): On a compris pareil.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: En tout cas, je pense que vous savez ce que je
voulais dire.
La Présidente (Mme Marois): Le pire... c'est ça,
oui.
M. Chevrette: Le pire règlement hors cour vaut le meilleur
des procès. Là, je l'ai.
La Présidente (Mme Marois): Voilà!
Voilà!
M. Joly: La pire des ententes vaut mieux que le meilleur des
procès.
M. Chevrette: Bon. Après avoir entendu trois ou quatre
gaffes, il est capable d'en sortir une bonne. C'est bien. Merci. Donc, cela
dit, je voudrais vous poser une question parce que dans votre
présentation vous semblez ne pas avoir de problème de
relève en ce qui vous concerne, puisque Me Tremblay a dit que vous aviez
des novices, un noviciat.
Une voix: Oui.
M. Chevrette: Est-ce que c'est Indiscret de vous demander combien
de novices vous avez?
Mme Beaulac: Actuellement, nous avons... Une voix: Elles
sont quatre, cinq.
Mme Beaulac: Oui, cinq novices. Mais, dans la communauté,
nous sommes 70 et puis la moyenne d'âge est de 37 ans. Alors, je pense
que nous avons une bonne relève. Actuellement, il y en a treize qui sont
à faire leur cégep et II y en a cinq à
l'université.
M. Chevrette: Vous êtes quasiment l'exception!
Une voix: C'est beau!
M. Chevrette: Est-ce que la mission sociale, par rapport à
la mission santé, parce que vous semblez insister beaucoup sur la
mission sociale aussi, de par vos oeuvres... Par exemple, les colonies de
vacances font partie de votre mission sociale, comme communauté. Est-ce
que vous vous êtes donné une double mission santé et
services sociaux? Et c'est à l'intérieur môme de votre
charte...
Mme Beaulac: Oui, nous avons toutes les oeuvres...
Sr
Anselme-Marie: Toutes les oeuvres de charité
corporelle et spirituelle. On s'occupe de la personne complète,
physique, morale, spirituelle. On cherche le bonheur de nos
assistés.
M. Chevrette: Et c'est vous qui êtes à l'origine, la
fondatrice de la communauté?
Sr Anselme-Marie: Mais non, les soeurs, toutes les soeurs
ensemble.
M. Chevrette: Oui, mais ça en a pris une pour
déclencher le mouvement; c'est vous.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Donc, c'est vous qui êtes la fondatrice de
tout ça?
Sr Anselme-Marie: Mais on est toutes ensemble. On est toutes des
pauvres...
M. Chevrette: Vous êtes donc bien humble. Vous avez donc
peur de dire que c'est vous) Ha, ha, ha! Vous avez le droit de dire que vous
êtes la première à avoir pensé à créer
cette communauté.
Sr Anselme-Marie: Bien...
M. Chevrette: II doit y avoir un phénomène
d'Identification..
Sr Anselme-Marie:... j'avais des responsabilités et il
fallait bien agir selon l'esprit de la communauté. Nous venons de saint
Vincent de Paul. Notre mère Clarac était une fille de la
Charité. Elle a vécu 30 ans dans sa communauté en Italie;
elle a été obligée de se séparer à cause de
la guerre franco-prussienne en 1871. Nous sommes restées en Italie. Elle
est restée à la tête et la communauté était
partie et les supérieures ne se trouvaient même plus... On ne
savait pas où elles étaient. Elles s'étalent
sauvées pendant le siège de Paris. Et nous sommes nées
comme ça. Mais on vient de saint Vincent de Paul, on a toutes les
règles et l'esprit de sa communauté. On essaie de faire quelque
chose.
M. Chevrette: Comment voyez-vous l'humanisation des soins de
santé au Québec?
Sr Anselme-Marie: Pardon?
M. Chevrette: Comment voyez-vous l'humanisation des soins de
santé au Québec?
Sr Anselme-Marie: L'humanisation, je la vols en traitant les
malades avec bonté, avec empressement, avec conscience, avec
dévouement et sacrifices surtout.
M. Chevrette: Est-ce que vous considérez que le
système... Vous vivez dans votre établissement, mais vous
entendez, vous savez ce qui se passe à l'extérieur de votre
établissement dans le domaine de la santé. Si vous aviez un
reproche ou deux reproches... Ne soyez pas avaricieuse, si vous en avez
plusieurs, dites-les. On est là pour les écouter. Quels sont les
reproches que vous adresseriez au système de santé, si vous en
aviez à distribuer?
Sr Anselme-Marie: Je n'ai de reproches à faire à
personne. (12 h 45)
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Non, non, ce n'est pas à personne. Je
comprends que votre très grande générosité vous
empêche de... Mais le système de santé qu'il y a au
Québec, il n'est pas parfait.
Sr Anselme-Marie: Bien, c'est parce qu'il n'est pas...
M. Chevrette: D'abord, qu'est-ce qui lui manque de bonté?
On va y aller à l'inverse: Qu'est-ce qui lui manque en bonté pour
être meilleur?
Sr Anselme-Marie: Bien, nous, c'est notre idéal, c'est
notre vie. Pour les autres, c'est un gagne-pain et, quand 15 h 30 arrive, ils
vont poinçonner parce qu'ils ont leur famille, leurs affaires. Nous
autres, on est là et c'est toute notre passion; notre Idéal,
c'est ça, le bien des malades.
M. Chevrette: Donc, une plus grande attention, une plus grande
disponibilité, une plus grande humanité.
Sr Anselme-Marie: En somme, on n'est pas parfaites non plus. On
ne s'imagine pas être parfaites, mais on donne 100 % de
nous-mêmes.
M. Chevrette: J'ai l'impression, de la manière que vous le
décrivez, que ça dépasse les 100 %. Je pense que vous avez
110 %.
Sr Anselme-Marie: On n'est pas miraculeuses, on fait tout
bonnement notre devoir comme ça.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez eu maille à partir avec
le ministère, par exemple, sur les perceptions des soins de
santé, je ne sais pas, je ne parle pas des élus
nécessairement, mais avec le ministère, des fonctionnaires ou
d'autres personnes? Est-ce que vous avez déjà eu maille à
partir avec certains fonctionnaires, par exemple, qui ne voyaient pas la
façon dont vous traitiez les soins de santé à
l'intérieur de vos établissements par rapport à votre
perception à vous, qui vous est bien personnelle?
Sr Anselme-Marie: Nous avons toujours trouvé beaucoup de
sympathie. Je suis ici, je viens rendre témoignage à ce bon
peuple québécois que j'ai trouvé magnifique quand je suis
arrivée à la fin des années quarante. Après,
ça a été moins beau, mais en tout cas, ça reste que
la racine est le peuple... C'est un très bon peuple.
M. Chevrette: Si je suivais votre raisonnement, ma s?ur, il
n'y aurait rien à changer. On a 240 mémoires nous disant qu'il y
a beaucoup de
choses qui clochent. Mme la directrice, vous qui exercez quotidiennement
votre rôle d'autorité à l'intérieur d'un centre
hospitalier, où vous êtes soumise à des contraintes,
à des directives, que suggéreriez-vous à des élus
du peuple pour améliorer les services de santé à
l'intérieur des établissements?
Mme Beaulac: Je pense qu'il y a beaucoup de directeurs
d'hôpitaux qui se plaignent qu'il y a beaucoup de paperasses. Alors,
ça limite notre temps pour essayer de penser davantage à ce qu'on
peut apporter de mieux à nos bénéficiaires.
M. Chevrette: Donc, l'allégement des paperasses.
Mme Beaulac: Ah! oui. Je pense, que le Regroupement des petits et
moyens hôpitaux en parlera probablement, cet après-midi parce
que...
M. Chevrette: Est-ce que les ressources financières sont
suffisantes par rapport à l'alourdissement des clientèles?
Mme Beaulac: II faut porter beaucoup d'attention, il faut qu'il y
ait un contrôle toujours très serré de toutes les
dépenses parce que... Jusqu'à maintenant, on ne peut pas se
plaindre. On arrive, mais il faut surveiller ça de très
près.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez eu des effets de l'application
de la loi 160 dans votre milieu?
Mme Beaulac: Pas beaucoup parce que, nous, ce sont seulement des
thérapeutes qui ont fait une journée de grève. Comme elles
ont manqué seulement une journée, iI n'y a pas eu de
décret, ça n'a pas touché l'ancienneté. Alors, on
n'a pas eu de problèmes dans ce sens-là. Mais, pour les deux
premiers points, elles ont eu des pénalités pour la
journée qu'elles ont manquée, mais ça ne touchait pas
l'ancienneté.
M. Chevrette: mol, je voudrais vous remercier et vous dire que
j'irai vous rendre visite lorsque j'irai rendre visite à mon
père. vous êtes à trois portes, donc j'irai vous voir.
M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Marois): Merci de votre
présentation.
M. Côté (Charlesbourg): Ce que je dis, c'est que
j'irai vous rendre visite aussi et j'Inviterai mon collègue de Joliette
pour qu'on y aille ensemble, de façon... On va y aller ensemble vous
rencontrer. Comme ça, il y aura une solution qui ne sera pas remise en
cause par les parlementaires.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): Si je comprends bien, vous
aurez de la visite sous peu.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): Nous suspendons les travaux de
la commission jusqu'à 13 heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 53)
(Reprise à 15 h 11)
La Présidente (Mme Marois): La commission des affaires
sociales va reprendre ses travaux. Nous entendrons, dans un premier temps, cet
après-midi, des représentants de l'hôpital Saint-Luc.
J'aimerais que la personne qui va lire le mémoire se présente,
nous présente les personnes qui l'accompagnent, prenne environ 20
minutes pour présenter le mémoire. Par la suite, on partage
équltablement le temps entre les membres de la commission pour des
questions, des commentaires, des échanges avec les personnes qui font la
présentation.
Hôpital Saint-Luc
M. Roch (Gilles): Mme la Présidente, M. le ministre,
mesdames, messieurs les députés, permettez-moi de me
présenter et de présenter les personnes qui m'accompagnent tel
que vous le demandez. Mon nom est Gilles Roch. Je suis le représentant
de la corporation et président du conseil d'administration de
l'hôpital Saint-Luc ainsi qu'un membre fondateur de la Fondation de
l'hôpital Saint-Luc. A mon extrême gauche, nous avons le Dr Morgan,
qui représente le Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens;
à ma gauche, le Dr Lajoie, qui est le directeur des services
professionnels; à mon extrême droite, M. Alain Halneault,
représentant du personnel non clinique et, finalement, à ma
droite, M. Jean Leblanc, notre directeur général.
Je tiens à vous remercier, Mme la Présidente, ainsi que
les membres de la commission des affaires sociales de nous donner l'occasion de
présenter notre mémoire sur l'avant-projet de loi sur les
services de santé et les services sociaux et vous assurer de notre plus
entière collaboration.
Nous avons l'honneur d'avoir été mandatés par le
conseil d'administration de l'hôpital Saint-Luc pour vous exprimer notre
point de vue sur un aspect particulier de l'avant-projet de loi, soit la
composition des conseils d'administration des établissements. Sans plus
tarder, Mme la Présidente, je demanderais à notre directeur
général, M. Jean Leblanc, de vous décrire
brièvement notre centre hospitalier et d'exposer notre
philosophie de gestion et les valeurs fondamentales que nous
préconisons. m. leblanc, s'il vous plaît.
M. Leblanc (Jean): Mme la Présidente, M. le ministre,
mesdames, messieurs les députés, je viens vous présenter
succinctement notre mémoire sans suivre nécessairement et de
façon très précise le texte déposé.
Saint-Luc est l'un des quinze établissements de la province à
avoir été désigné comme centre hospitalier
universitaire. Il a comme mission principale les soins
ultraspécialisés. C'est un centre majeur d'enseignement
universitaire qui compte 814 lits. C'est également un centre de
recherche clinique, plus spécifiquement au niveau de
l'hépatologie, de l'endocrinologie, de la gastro-entérologle et
de la microbiologie. Nous avons également un département de
santé communautaire qui oeuvre plus spécifiquement au niveau de
la prévention santé publique et santé au travail.
Saint-Luc représente également une particularité,
en ce sens qu'il gère le Laboratoire en santé publique du
Québec qui a une mission de dépistage et de traitement
épidémiologique au niveau des maladies infectieuses, et ce,
à l'échelle du Québec. Donc, vocation en aigu, vocation en
accueil-hébergement, en santé communautaire et, par le biais de
ce qu'on appelle communément le LSPQ ou le Laboratoire en santé
publique du Québec, le dépistage des maladies Infectieuses
à l'échelle provinciale.
La marque de commerce de Saint-Luc, si vous me permettez de m'exprimer
ainsi, s'est toujours faite par l'application de deux objectifs fondamentaux.
Le premier: une grande collaboration médico-administrative; le
deuxième: le respect de l'équilibre budgétaire. Et il faut
vous dire qu'à Saint-Luc, les règles du jeu qui ont
été établies par le ministère ont toujours
été acceptées et appliquées. Nous avons
également acquis une renommée dans le domaine de l'innovation
technologique par l'acquisition d'appareils de haute technologie. Qu'il me soit
permis de signaler le yag laser, la tomodensltométrie axiale, le
lithotriteur appliqué aux reins et au foie, le scanner à
résonance magnétique. Nous avons également implanté
des programmes assurant l'accès à la technologie de pointe au
niveau, par exemple, entre autres, si vous me permettez de le signaler, de la
transplantation hépatique et de la fécondation in vitro.
Il est évident que ces développements nécessitent,
dans les règles du jeu actuel, certains prérequis. On sait fort
bien que les principaux prérequis sont, d'une part, que ces
développements doivent être faits et effectués dans la
réalisation de l'équilibre budgétaire qui est maintenant,
dans le milieu, une condition sine qua non à tout développement.
C'est aussi relié à une implication médicale très
étroite, que ce soit au niveau de la conception, de la recherche et du
consensus organisationnel. Et tout ça aussi doit être
appuyé par une capacité de financement. Ici, je tiens à
signaler l'apport de notre fondation. Il y a neuf ans, à l'hôpital
Saint-Luc, le budget d'Immobilisation était de 80 000 $ par
année. Laissez-moi vous dire que, depuis 1981, la Fondation de
l'hôpital Saint-Luc a pu ramasser 12 000 000 $ et nous avons actuellement
un rythme de croisière, non pas de promesses mais d'encaissement de 2
000 000 $ par année.
Également au chapitre de la technologie, je tiens à
signaler que Saint-Luc est l'un des rares hôpitaux qui, par contrat de
services avec d'autres hôpitaux, rend sa technologie disponible aux
médecins d'autres hôpitaux; entre autres, la résonance
magnétique et le lithotriteur. Vous avez les médecins d'autres
hôpitaux de Montréal qui utilisent les appareils et la
technologie, et nous mettons notre personnel à leur disposition. Donc,
ce ne sont pas uniquement les bénéficiaires qu'on nous
réfère, mais ce sont les médecins d'autres hôpitaux
qui viennent à Saint-Luc y travailler.
Voyons maintenant comment se vit concrètement cette
complémentarité médico-administrative. Elle se vit d'abord
au niveau des structures. À titre d'exemple, chez nous, le directeur
général est membre de tous les comités du Conseil des
médecins, dentistes et pharmaciens. Tous les chefs de
département, le président du comité exécutif du
Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens, le coordon-nateur de
l'enseignement, le directeur du Centre de recherche clinique sont membres du
comité consultatif à la Direction générale. Donc,
à ce comité, on retrouve une participation des médecins
à la planification, aux orientations et aux priorités d'action de
l'hôpital. Au niveau des services, le médecin est impliqué
dans la gestion courante de l'hôpital. À titre d'exemple, vous
entendez rarement parier des problèmes d'urgence à
l'hôpital Saint-Luc. Pourtant, nous sommes continuellement - et je tiens
à le préciser - parmi les trois hôpitaux montréalais
qui reçoivent le plus de cas d'ambulances. Cela s'explique en grande
partie par l'application d'une politique stricte d'admission
gérée par les médecins, et je tiens à le
signaler.
L'avant-projet de loi prévoit l'exclusion des médecins des
conseils d'administration. Nous croyons que c'est une mesure rétrograde
au plan législatif car la loi 27, adoptée en 1981,
préconisait l'intégration des médecins à la gestion
des établissements. Cela a pour conséquence une privation d'un
droit de représentation, une démotivation et un
désintéressement des médecins. À notre avis, la
participation médicale doit être sauvegardée car la
composante médicale est un facteur clé dans le processus de prise
de décision d'un centre hospitalier ultraspécialisé. Par
son expertise, par sa compétence, ses connaissances
spécialisées, le médecin apporte une contribution que nous
considérons indispen-
sable au conseil d'administration. C'est également une courroie
de transmission par excellence des décisions du conseil et des
politiques vis-à-vis de ses collègues.
Voilà, Mme la Présidente, M. le ministre, les arguments
militant en faveur de la présence médicale au conseil. Par
contre, on peut invoquer la possibilité de conflit
d'intérêts. À cette objection, on peut répondre que
les médecins ont à défendre, au même titre que les
autres, certaines opinions. Les intérêts ou ces opinions ne sont
pas monolithiques, mais varient selon les milieux ou les personnes. Et je pense
que la plus grande contribution qu'on peut vous présenter, c'est que
l'expérience qu'on a vécue à Saint-Luc, dans notre milieu,
est à l'effet que les médecins sont capables aussi de faire
montre d'objectivité.
Un même constat en gestion des ressources humaines. La commission
Rochon et le ministère, au niveau du livre blanc, considèrent
unanimement que l'on doit mettre l'accent sur le développement des
ressources humaines et ils estiment essentiel que le personnel participe
à la gestion de l'établissement auquel il appartient. Si la
commission et le ministère tendent vers le même but, II y a une
divergence profonde quant aux moyens d'y parvenir. Alors que la commission
Rochon recommande de maintenir la présence des professionnels et du
personnel au sein des conseils d'administration, le ministère estime
qu'on doit plutôt limiter la participation des permanents du
réseau et les confiner à un rôle que l'on considère
strictement consultatif sinon d'exécution. Ce qui nous porte à
dire que cette attitude nous amène à conclure qu'il y a une
différence entre le geste et le discours.
En conclusion, nous encourageons une participation accrue de la
population au conseil et une représentation majoritaire des citoyens au
sein des conseils d'administration des établissements. Nous ne pensons
pas que les intérêts de la population seront mieux servis en
excluant les compétences du milieu. Les citoyens veulent de meilleurs
soins et services et non pas, à notre avis, occuper en totalité
les sièges au conseil d'administration. Être membre d'un conseil
d'administration exige des qualifications élevées et II faut y
consacrer beaucoup de temps et d'énergie avant de pouvoir intervenir
efficacement dans le fonctionnement d'un système complexe.
À l'heure où le Québec s'apprête à
effectuer un Important virage en matière de santé et de services
sociaux et compte sur le maintien d'un système public fort pour y
arriver, il est important que tous les acteurs de ce système, y compris
les conseils d'administration locaux, puissent compter dans leurs rangs des
personnes qui disposent de la connaissance la plus précise possible des
problèmes à résoudre. C'est pourquoi nous demandons que
des représentants des établissements, des représentants du
Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens, du personnel clinique et
du personnel non clinique puissent continuer à siéger aux
conseils d'administration des établissements. Merci.
La Présidente (Mme Marois): Nous vous remercions de cette
présentation. Je vais maintenant inviter le ministre de la Santé
et des Services sociaux à vous poser des questions.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente. Je suis très heureux de recevoir les
représentants de l'hôpital Saint-Luc qui, effectivement, fait
parler de lui, mais pas dans des situations d'urgence difficiles. Vous aviez
raison de le souligner et, d'ailleurs, je me suis pris une petite note pour ne
pas oublier de le dire, moi aussi, mais évidemment de garder ce point
pour la fin, parce que si ça va bien chez vous, on va essayer de trouver
pourquoi ça va bien chez vous, pourquoi ça ne marche pas ailleurs
avec les mêmes ressources. C'est toujours un bon moyen.
On a parlé de conseils d'administration. Je pense que vous le
dites bien dans votre mémoire, il y a un point principal de votre
intervention, l'exclusion des médecins et aussi des professionnels de la
santé du conseil d'administration fait en sorte qu'on se prive d'une
ressource - si on disait indispensable, j'ai l'impression qu'il y a des gens,
à votre table, qui pourraient rougir - très importante sur le
plan de l'expertise, sur le plan de l'expérience. Je pense que dans les
discussions - et vous avez participé à l'une de ces discussions
la semaine dernière, une journée - on a convenu qu'on avait des
réajustements à faire à ce niveau-là et qu'on les
ferait en bonne partie. Évidemment, on ne sait pas jusqu'où on va
les faire pour la simple et bonne raison que, maintenant, on dit le potentiel
conflit d'intérêts", même si vous nous avez dit que les
médecins ou d'autres professionnels sont capables de s'élever
au-dessus des conflits personnels ou potentiels. On nous a proposé que
les professionnels, puisqu'ils sont compétents, qu'ils ont une bonne
expérience qu'on doit utiliser, puissent oeuvrer dans un autre conseil
d'administration que là où ils travaillent. Évidemment,
à ce moment-là, on ne serait pas privés de ressources,
connaissant très bien le fonctionnement, une bonne expérience
qu'on peut utiliser dans un autre centre hospitalier, par exemple. Qu'est-ce
que vous en pensez?
M. Morgan (Stephen): II est certain que l'apport d'un
médecin dans un centre hospitalier différent du sien priverait le
conseil d'administration d'énormément d'informations pertinentes
au milieu: la connaissance des individus, la connaissance des points forts et
des points faibles, des conflits, des difficultés rencontrées sur
le plan des personnes. Je pense qu'il y a une autre dimension dont le conseil
d'administration se priverait, c'est qu'on attend du médecin et de
l'ensemble du corps médical qu'ils soient sen-
sibilisé8 au contrôle des coûts, au contrôle de
la surconsommation, à la bonne marche de l'établissement. Le
médecin de l'établissement qui siège au conseil
d'administration est un peu le symbole de cette participation du corps
médical. En le déconnectant parce qu'il serait dans un milieu
différent, on garderait un élément d'information positif,
mais certainement qu'on perdrait l'aspect humain de motivation. Ce que je dis
est vrai, d'ailleurs, autant pour le personnel clinique, non-clinique que pour
les médecins, cet aspect de motivation qu'on veut aller chercher dans le
corps médical, pour que la gestion de l'établissement soit
efficace. Alors, Je pense qu'on perdrait sur deux tableaux. On ne garderait,
finalement, qu'un élément d'information purement abstrait.
M. Côté (Charlesbourg): Je pense que... Oui?
M. Leblanc: M. le ministre, qu'il me soit permis d'ajouter que
moi, j'oeuvre depuis au-delà de 20 ans dans le système comme
directeur général, pas au môme endroit, et j'ai eu à
vivre les deux systèmes. Quand on a amené la participation du
réseau au conseil d'administration, une des critiques qu'on avait,
à ce moment-là, était de dire: Ça n'a pas de bon
sens. Mais moi, qui ai vécu les deux systèmes, je peux vous dire
que ç'a toujours été très positif, en fonction des
expériences personnelles que j'ai pu vivre. D'autant plus que comme
directeur général, l'apport... Il ne faut pas oublier qu'il y a
une espèce d'autocontrôle. Quand vous représentez, comme
directeur général, un conseil d'administration, sans que ce soit
un rôle de policier que ces gens-là aient à jouer au
conseil, pas du tout, il reste qu'il faut que le D. G. soit drôlement
préparé, parce que vous avez, autour de la table, toujours des
gens qui vivent les problèmes en môme temps que vous, dans votre
organisation, et ça, je pense que c'est un élément
très positif de la participation des éléments du milieu au
conseil d'administration.
M. Côté (Charlesbourg): Ce que vous nous dites,
c'est que ça fait le contrepoids au D. G.
M. Leblanc: Dans un sens, mais lorsque c'est bien
appliqué, c'est intéressant. Mol, je l'ai toujours bien
vécu. Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Non, mais...
Évidemment, je le pose à vous, très ouvertement parce que,
à plusieurs occasions, le ministère a requis vos services pour
aller faire des analyses ailleurs. C'est probablement parce que le
ministère jugeait que vous en étiez un bon. C'est pour ça
que je me permets de poser la question, parce que, évidemment, je sais
qu'elle ne vous embarrasse pas. Mais si ça va bien chez vous, c'est
parce qu'il y a un rapport de force qui peut être intéressant.
Là, on a parlé du D. G. par rapport aux médecins parce
qu'ils seront pesants, les médecins. Je sais qu'ils sont assez humbles
pour ne pas l'admettre, mais c'est très pesant dans un centre
hospitalier, un médecin et, évidemment, le personnel clinique
aussi. On se place dans la peau de quelqu'un qui vient de l'extérieur et
qui est un bénévole qui s'en va au conseil d'administration d'un
hôpital, je te dis que quand le médecin parte, ce n'est pas tout
le monde qui a tout ce qu'il faut pour être capable d'y faire face et
quand le D. G. parle aussi avec ses grands documents, le bénévole
est vite perdu. Je pense que ça, c'est une expérience dont on
peut se parler aussi. À moins qu'il ne soit président du conseil
d'administration...
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: II est bénévole. (15 h 30)
M. Côté (Charlesbourg):... mais il est
bénévole, on admet ça. Mais c'est quand même
à ça que voulait s'attaquer la réforme pour tenter de
trouver un équilibre et ça ne voulait pas dire que, dans certains
hôpitaux, il n'y a pas un travail qui se fait de manière
extraordinaire. Je pense que Saint-Luc est peut-être un exemple. Mais je
m'adresserais à M. Leblanc. Vous qui avez été
sollicité à plusieurs reprises par le ministère pour aller
faire un petit tour ailleurs - on ne dira pas où, ce n'est pas
nécessaire - est-ce que ça marche comme ça partout
ailleurs?
M. Leblanc: Écoutez, vous me posez une question directe,
je vais vous répondre aussi directement: Non.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, il y a des
problèmes ailleurs. S'il n'y en a pas chez vous, il y en a ailleurs.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Leblanc: Ça dépend beaucoup de la dynamique de
la direction. Je pense que cette collaboration médico-administrative...
Parce que c'est ça fondamentalement, ça dépend de la
dynamique, comment on l'applique. C'est donc drôle comme quand on sait
l'appliquer, ça va bien et, non seulement ça va bien, mais c'est
qu'à ce moment-là vous prenez... En tout cas, encore une fois
à titre d'exemple à l'hôpital Saint-Luc, je pense qu'il y a
eu une évolution extraordinaire au cours des cinq ou six
dernières années. Tout en respectant, comme je le mentionnais
tout à l'heure, tout en respectant les normes du ministère,
à travers ça, on a pu se développer de façon que je
veux qualifier d'extraordinaire dans le contexte, au niveau technologique et au
niveau du développement de programmes. Bien ça, ça
s'explique par une raison. Ce n'est pas le D. G. tout seul, ce n'est pas le
conseil d'administration tout seul qui fait
ça. C'est une polarisation des effectifs, des ressources et de
l'énergie de l'établissement. Quand les gens arrivent à
comprendre ça, c'est donc drôle comme ça marche. Ça
n'a pas l'air compliqué, la recette, mais c'est celle-là.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, c'est assez
étonnant parce que quand je regarde votre performance en
équilibre budgétaire, vous réussissez à vous
développer, vous n'avez pas d'attente aux urgences, vous réglez
vos problèmes. En tout cas, il va falloir l'éditer parce que ce
serait probablement un succès assez exceptionnel ailleurs.
M. Leblanc: Les gens sont bienvenus. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Évidemment, vous
avez abordé, par le fait môme, une question. Dans un conseil
d'administration, comme dans une administration, tout est question de relations
humaines et quand on parle de gestion de ressources humaines, avez-vous
l'Impression, vous, que vous gérez des conventions collectives?
M. Leblanc: Au niveau du conseil d'administration?
M. Côté (Charlesbourg): Non, comme D.G., j'Imagine
que... Saint-Luc, ce n'est pas petit, hein? Il y a d'autres sortes de gens qui
travaillent à l'hôpital. Parce qu'on se l'est fait dire ce matin
par des communautés religieuses - d'ailleurs d'autres nous l'ont dit la
semaine dernière - on a l'impression que notre système n'a pas
mis au centre de ses préoccupations le bénéficiaire, mais
davantage, et de manière presque quotidienne, la gestion d'une
convention collective. Ça nous a été dit, lorsqu'on mettra
le bénéficiaire au centre de nos préoccupations, on aura
moins de récriminations vis-à-vis de notre système. Donc,
quand on parte de l'aspect de gestion de ressources humaines, vous ne semblez
pas avoir beaucoup de problèmes. Qu'est-ce que vous mettez en
application?
M. Leblanc: Écoutez, M. le ministre, encore là,
c'est la môme chose, on n'a pas de formule miracle. Je peux vous dire
qu'au niveau des ressources humaines et des relations avec les syndicats - il y
en a 28 à l'hôpital Saint-Luc, pour votre information - le
principe de base est le même: Nous sommes sujets aux conventions comme
les autres centres hospitaliers. Maintenant la notion de base, c'est de mettre
les problèmes sur la table et d'en discuter ouvertement.
Je peux vous dire qu'on vit aussi des situations difficiles, entre
autres l'application de la loi 160... Chez nous, elle a été
appliquée, et bien sûr qu'H y a une démotivation, bien
sûr que ce n'est pas de gaieté de coeur, mais II reste qu'avec une
discussion franche, ouverte et une approche ouverte avec les syndicats, on a
réussi à régler ça et à appliquer la loi.
Tout a été appliqué Intégralement sans que
ça fasse sauter quoi que ce soit. Mais c'est plus une philosophie, c'est
plus une approche, c'est plus une ouverture.
La philosophie de gestion de l'hôpital Saint-Luc, c'est simple, on
ne veut pas réinventer la roue, on revient fondamentalement aux notions
de base de l'administration, au respect des droits de chacun et chacun a sa
place dans l'organisation. C'est vrai à partir des professionnels, c'est
vrai à partir des syndicats, mais l'administration a aussi sa place, ses
droits, ses privilèges.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, on
pourrait...
M. Leblanc: Et le bénéficiaire aussi.
M. Côté (Charlesbourg): ...en parler encore plus
longuement, mais on a des... J'ai quand même d'autres questions à
vous poser qui m'Intéressent. Vous nous avez dit tantôt que vous
n'entendez jamais parler de problèmes d'urgence. Parce que ça,
c'est plus croustillant. Sur la place publique, pour faire un article quand
l'urgence est bondée, c'est extraordinaire. L'oeil de la caméra
aussi, Je pense que ça choque le monde comme s'il n'y avait pas d'autres
sortes de problèmes. Mais celui-là revient périodiquement
et II semble capter davantage l'attention. Vous vous y prenez comment? Parce
que vous nous avez bien dit tantôt "par une gestion de lits avec le corps
médical". C'est donc possible, ça, à ce que je
comprends.
M. Leblanc: Écoutez, M. le ministre, Je vais
répondre à la première partie de la question et je vais
demander au Dr Morgan, qui participe à cette gestion, de vous expliquer
plus en détail comment on s'y prend. La façon dont on s'y prend,
encore une fols, c'est par l'application d'une politique d'admission à
l'urgence. Je peux vous dire que la politique d'admission est très
stricte à l'urgence, elle est suivie. Il n'y a pas de
bénéficiaires, sauf exception, qui vont séjourner à
l'urgence de l'hôpital plus de 24 heures et il y a une
réglementation automatique où le patient quitte l'urgence pour
prendre un lit lorsqu'il y a finalement un diagnostic d'hospitalisation de
posé. Ce qui veut dire qu'à ce moment-là, dans les faits
et dans la réalité, on privilégie l'admission par
l'urgence. C'est un des aspects. Dans tout ça, ici.
personnellement...
Je vais sortir du cadre de l'hôpital Saint-Luc et vous faire
plutôt part de mon expérience régionale; c'est qu'un
hôpital, ça représente, comme toute organisation, un
ensemble de ressources et ça obéit aux mêmes lois.
Un des problèmes qu'on vit dans plusieurs hôpitaux, c'est le
nombre de médecins, le nombre de spécialistes qui sont
acceptés par service ou par départe-
ment. Je dois dire que, par le passé, ça n'a
peut-être pas été l'une des préoccupations des
centres hospitaliers. Le centre qui réussit à maintenir cet
équilibre entre le nombre de médecins par département et
par service et sa vocation au niveau de l'urgence s'évite beaucoup de
problèmes. Si, d'un autre côté, vous n'avez pas eu cette
précaution et qu'au cours des années vous avez accepté,
dans des départements ou des services, plusieurs professionnels, ces
départements et ces services ont une clientèle, ce qu'on appelle
la clientèle élective, et ce qui est toujours confronté,
finalement. Le problème majeur qu'on rencontre, à mon avis, c'est
toujours le partage ou l'accès à l'hôpital entre la
clientèle élective et la clientèle provenant de
l'urgence.
Maintenant, au niveau du vécu quotidien, j'aimerais que le Dr
Morgan poursuive parce nous aussi, nous avons nos problèmes à
l'urgence dans les périodes de "peak" où il y a un accroissement
et où on doit justement interagir au niveau de cet équilibre. Il
y a même des mécanismes qui sont en place pour nous permettre
d'interagir, que ce soient des périodes de grève, des
périodes de vacances où, à ce moment-là, les
besoins de l'urgence deviennent prioritaires ou excédentaires par
rapport à l'électif. À ce moment-là, il y a des
mécanismes d'équilibre qui interagissent. J'apprécierais
que le Dr Morgan explique brièvement ce qui en est.
M. Morgan: Je pense que la problématique au niveau de
l'urgence et de la gestion des lits dans son ensemble retourne encore à
une question de motivation du corps médical. Si tous les médecins
de l'établissement, omnipraticiens ou spécialistes,
réalisent qu'il est à l'avantage du bénéficiaire,
des médecins et de l'établissement que le système
fonctionne de façon efficace, à ce moment-là, ça a
des conséquences à tous les niveaux. Ça a une
conséquence, par exemple, dans le délai d'attente entre le moment
où l'omnipratlcien fait la consultation et la visite du
spécialiste à l'urgence. Ça fait une différence si
c'est une demi-heure ou si c'est quatre heures. Ça a aussi une influence
si, par exemple, il n'y a pas de lits disponibles à ce moment-là,
si le médecin prend sur lui d'aller voir chez les patients
déjà hospitalisés s'il n'y a pas un patient qui pourrait
partir un peu plus rapidement ou dont le congé est prévu le
lendemain et que la famille pourrait venir le chercher. Il y a une foule de
situations qui demandent une dépense d'énergie et il faut qu'il y
ait la motivation en dessous. Si les médecins n'ont pas leur motivation
principale pour le centre hospitalier et leurs bénéficiaires,
à ce moment-là, c'est sûr qu'on a plus de misère
à les convaincre de faire ces efforts supplémentaires. S'ils sont
polarisés à différents niveaux à l'extérieur
de l'hôpital, à leur bureau, tout dépend des
activités de chacun, mais iI faut s'assurer à l'intérieur,
dans l'hôpital, d'avoir les ressources sur place pour
accélérer le fonctionnement dans les exemples que je vous ai
donnés.
Également, dans l'ensemble, pour les durées de
séjour, dans la gestion, on a une excellente collaboration - je prends
ça comme point clé - avec le service d'accueil à
Saint-Luc. Si un patient est admis de façon idéale par rapport
à sa cédule opératoire ou par rapport à ses examens
de radiologie, iI n'y a pas de perte de temps. Alors tout ça suppose une
implication, une imbrication médico-administrative, de sorte que ce
concept de collaboration médico-administrative entre le mot et ce qui se
vit dans la réalité, moi, je pense que c'est une question de
motivation.
Il y a une problématique qui est particulière aussi, en
terminant, sur le nombre des ressources d'omnipraticiens dans les milieux
d'urgence montréalais et cette problématique-là,
évidemment, on la vit, on la "manage" comme on peut, mais il y a un
problème de ressources certainement qui nous limite jusqu'à un
certain point.
M. Côté (Charlesbourg): Je poserais peut-être
une petite question additionnelle là-dessus, parce que dans les mesures
qu'avait mises en place Mme Lavoie-Roux, il y avait le coordon-nateur à
l'urgence. Est-ce que vous l'avez chez vous et comment se fait l'interaction
entre le coordonnateur à l'urgence et le coordonnateur à
l'admission au niveau de chacun des centres hospitaliers?
M. Morgan: Le Dr Lajoie peut répondre à cette
question.
M. Farrah-Lajoie (Claude): Oui, pour répondre d'abord
à votre première question, il y a un coordonnateur à la
salle d'urgence. Le coordonnateur à l'admission, je ne sais pas à
qui vous faites allusion à ce niveau-là. Je pense que le
coordonnateur de la salle d'urgence à Saint-Luc est en étroite
collaboration avec les chefs de département et de service. C'est
à eux qu'il se reporte. Et lorsque nous sommes en situation d'urgence,
lorsqu'il y a une augmentation impossible à vivre en termes de
civières, en termes de nombre Intolérable, lorsqu'on passe dans
une situation difficile, c'est sûr que le coordonnateur avise le groupe
d'admission, c'est-à-dire que des gens comme le Dr Morgan et d'autres se
présentent à l'urgence pour évaluer chacune des admissions
qui sont demandées et là, H y a un mécanisme de
contrôle, de contact avec le confrère sur les étages pour
libérer un certain nombre de lits pour faire monter ceux qui sont en
bas. Ce n'est pas le coordonnateur qui va hospitaliser, c'est lui qui va
déclencher le mécanisme.
M. Côté (Charlesbourg): Une dernière petite
question et j'en aurais d'autres. Je pense que c'est au début des
années quatre-vingt que le
Laboratoire de santé publique du Québec a
été détaché du ministère pour aller chez
vous. Quel est le bilan que vous en tracez depuis ce temps-là?
M. Leblanc: Le Laboratoire de santé publique du
Québec, lorsqu'on s'en est vu confier la responsabilité, Je peux
vous dire, M. le ministre, qu'on a carrément transformé la
programmation. Essentiellement, la vocation du Laboratoire de santé
publique, à ce moment-là, était de recevoir des
échantillons par courrier. C'était, à ce moment-là,
un laboratoire de première ligne, au même titre qu'un laboratoire
de centre hospitalier qui desservait les CLSC ou d'autres ressources du milieu.
La vocation du Laboratoire de santé publique, tout d'abord, comme c'est
une vocation provinciale, on a eu la précaution de mettre sur pied un
comité d'orientation représentatif du milieu où
siègent les représentants des DSC, des représentants des
universités en vue de nous indiquer au conseil d'administration de
l'hôpital les orientations que devait prendre ce laboratoire. Or,
essentiellement, la mission du laboratoire a été changée.
On en a fait maintenant un laboratoire, ce qu'on appelle, de deuxième ou
de troisième ligne de confirmation. Donc, il n'est plus question de
première ligne là parce que la première ligne est faite et
confiée à d'autres responsabilités et ce laboratoire,
maintenant, développe une expertise en microbiologie au niveau de la
confirmation, entre autres tous les tests de sida du Québec. Il n'y a
aucun test positif qui est émis à moins qu'il n'ait
été confirmé en deuxième instance par le
Laboratoire de santé publique du Québec. Il se développe
aussi au niveau de la qualité et maintenant on s'est vu confier un
dernier mandat au niveau de toute la compilation informatique et information
des maladies à déclaration obligatoire et où maintenant on
aura le profil d'évolution de ces maladies grâce au système
qui a été développé au labo de santé
publique. Alors, l'évaluation que l'on peut en faire, je crois, est plus
positive par rapport au mandat qui nous a été confié.
La Présidente (Mme Marois): M. le leader de l'Opposition
et député de Joliette.
M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Je vais me
contenter d'une rapide question pour essayer, vu que vous avez eu la chance de
voltiger à plusieurs endroits, de vous demander des réactions
différentes. Chez vous, avez-vous été touchés par
les compressions budgétaires au point de fermer des lits?
M. Leblanc: Chez nous, on a été touchés par
des compressions budgétaires et, actuellement, effectivement, on a des
lits de fermés par les compressions budgétaires. Maintenant, je
peux vous dire qu'une fois qu'on a rationalisé tous nos services, iI
reste qu'actuellement il y a des lits de fermés par les compressions
budgétaires. M. Chevrette: Combien?
M. Leblanc: Actuellement, il y a une unité de
fermée, 38 lits.
M. Chevrette: Combien de lits? Pour combien de temps?
M. Leblanc: Bon, les lits qui sont actuellement fermés
n'ont pas été rouverts depuis l'automne passé. On
prévoit les rouvrir dépendant des nouveaux programmes qui
pourront être admis l'an prochain, mais à ce stade-ci, je peux
vous dire qu'il y a une unité de fermée.
M. Chevrette: Combien de lits, pour combien de temps? Combien de
lits?
M. Leblanc: 38 lits.
M. Chevrette: 30 lits, O. K., je n'avais pas compris. Des lits de
soins de courte durée?
M. Leblanc: C'est ça.
M. Chevrette: Quel est votre pourcentage de lits de soins de
longue durée?
M. Leblanc: Notre pourcentage de lits de longue durée,
nous avons deux unités de ce qu'on appelle "long terme", 76 lits au
permis et on excède. Il y a 28 lits actuellement qui excèdent le
permis, qui se retrouvent en aigu, des lits de long terme. (15 h 45)
M. Chevrette: Donc, vous avez 28 lits de soins de courte
durée occupés par 28 patients de soins de longue durée,
plus 30 lits de soins de courte durée qui sont fermés pour fins
d'équilibre budgétaire.
M. Leblanc: C'est ça.
M. Chevrette: Vous avez donc 58 lits de soins de courte
durée de fermés, à toutes fins pratiques, non accessibles
à la population.
M. Leblanc: Pas fermés. Je peux vous dire que...
M. Chevrette: Non, mais non accessibles pour les soins de courte
durée.
M. Leblanc: En soins aigus, d'accord.
M. Chevrette: C'est plus précis. D'accord. C'est le
premier point.
Vous avez eu la chance de faire plusieurs hôpitaux. Est-ce que
c'est comparable?
M. Leblanc: Je peux vous dire que dans les
autres hôpitaux où j'ai été mandaté
pour oeu- vrer, il n'y avait pas de lits de fermés. essen- tiellement,
c'était dans les hôpitaux plus périphé- riques et
tous les lits étaient ouverts au moment où j'ai fait mon
étude.
M. Chevrette: Tous les lits étaient ouverts? M.
Leblanc: Oui.
M. Chevrette: Est-ce que c'étaient des centres
universitaires ou des centres hospitaliers réguliers?
M. Leblanc: C'étaient des centres réguliers. M.
Chevrette: Des centres réguliers. M. Leblanc: Non
universitaires.
M. Chevrette: Est-ce que c'est Indiscret de vous demander quels
endroits vous avez faits?
M. Leblanc: Écoutez, ça a été connu
publiquement.
M. Chevrette: Oui, c'est pour ça que je vous le
demande.
M. Leblanc: II y a eu l'Hôtel-Dieu de Sherbrooke et, plus
récemment, le centre Anna-Laberge. Actuellement, j'ai un mandat, qui est
tout nouveau, au Centre hospitalier d'Alma.
M. Chevrette: O. K. Vous avez affirmé tantôt que la
loi 160, vous aviez réussi à l'appliquer intégralement
sans créer de problèmes. Je voudrais bien savoir comment vous
avez fait ça et je vais vous expliquer pourquoi. Je ne peux pas
concevoir que vous puissiez avoir appliqué intégralement la lof
160 et que vous n'ayez pas créé des préjudices à
quelqu'un qui avait deux mois d'ancienneté chez vous, par exemple, par
rapport à celui qui est rentré la veille ou le lendemain, vu
qu'il est en perte d'un an d'ancienneté par année. J'aimerais que
vous me donniez votre recette pour avoir appliqué intégralement
la loi 160 sans créer aucun préjudice chez vous.
M. Leblanc: On a un représentant du personnel non clinique
qui oeuvre aussi au niveau des ressources humaines. Peut-être que M.
Haineault pourrait répondre à votre question.
M. Chevrette: Je vous pose la question et je vais vous dire
pourquoi. Dans mon milieu, il y a du monde qui travaillait depuis huit ans a
raison de deux Jours par semaine et dont le droit au travail est même en
cause présentement parce que celle qui est rentrée après
trois jours, après la grève, si elle a trois semaines de faites,
elle a trois semaines d'ancienneté et l'autre est à moins deux
ans d'ancienneté. La fille de trois semaines continue à
travailler, elle a plus d'ancienneté que celle qui est à moins
trois ans. Expliquez-moi donc, chez vous, comment vous avez pu appliquer
ça concrètement sans pouvoir créer de préjudice
envers qui que ce soit, alors que, dans certains milieux, c'est le droit
môme au travail de certains individus qui est en cause.
M. Haineault (Alain): Je voudrais préciser une chose. Il
n'y a personne qui peut avoir une ancienneté négative. Au pis
aller, quelqu'un qui avait deux ans d'ancienneté et qui aurait fait deux
jours de grève se retrouvait sans aucune ancienneté. On ne peut
pas dire qu'il n'y a pas eu de préjudice. C'est sûr qu'il y a des
gens qui ont perdu de l'ancienneté. Il y a des gens qui se sont fait
récupérer du salaire. Mais ce qu'on dit, c'est qu'on a
appliqué la loi 160 et qu'en général, il n'y a pas eu de
problèmes qui ont été soulevés.
M. Chevrette: O. K. C'est l'interprétation légale
que vous donnez, c'est qu'il ne peut pas y avoir d'ancienneté, comment
dirais-je, négative. Est-ce que c'est l'interprétation que le
niveau national vous a donnée? Je pourrais peut-être rendre
service à du monde sur le terrain.
M. Haineault: Je ne pourrais pas vous dire si...
M. Chevrette: Ou si c'est l'interprétation que vous avez
donnée.
M. Haineault: C'est l'interprétation qu'on a faite du
texte qu'on a reçu.
M. Chevrette: Donc, si j'ai bien compris, vous l'avez
appliquée intégralement selon votre conception.
M. Haineault: C'est parce qu'on voyait difficilement que
quelqu'un se retrouve avec de l'ancienneté négative et, ensuite,
recommencer à cumuler...
M. Chevrette: Moi aussi, je n'ai jamais compris ça. On a
tous pensé ça aussi, mais c'est parce que ce n'est pas de
même partout que je vous pose la question. Une autre question que je
voudrais vous poser. Comment pouvez-vous dire qu'il n'y a pas de
préjudice pour ceux qui n'ont pas fait la grève, qui
répondaient aux services d'urgence ou au plan d'urgence et qui ont perdu
de l'ancienneté par rapport à ceux qui ont fait la grève
et qui ont été pénalisés sur le plan de
l'ancienneté?
M. Leblanc: Écoutez, je pense que, pour bien saisir, on
n'a pas prétendu qu'il n'y avait pas de préjudice. Ce que j'ai
signalé tout à l'heure lors de mon exposé, c'est qu'on
l'avait
appliquée, mais de là à dire sans que les murs de
l'hôpital soient placardés! Maintenant, si vous remarquez bien,
dans notre exposé, je ne me suis pas avancé d'aucune
façon, mais ce que j'ai dit, c'est qu'on avait une job, on nous a
demandé de la faire. La loi demandait de le faire et on l'a fait, et la
réaction... C'est bien sûr que ce n'est pas parce que c'est
l'hôpital Saint-Luc que ça a été appliqué et
que ça a été accepté de gaieté de coeur,
mais je peux vous dire que ça a été appliqué.
Là-dessus, quant à nous, on ne passe pas d'autre jugement. On a
dit: On a à le faire. Il y a eu une bonne discussion au niveau du
conseil d'administration et, finalement, le conseil d'administration nous a
mandatés pour l'appliquer. Il a dit: On n'a pas le choix. On sait que
c'est une loi, un règlement, il faut y aller.
M. Chevrette: La question est directe. M. le directeur
général. Est-ce que ça crée des préjudices,
oui ou non?
M. Leblanc: Écoutez, c'est certain que la perte
d'ancienneté, c'est sûrement au niveau syndical une application
qui est très sévère...
M. Chevrette: Est-ce que...
M. Leblanc:... parce que ça ne se récupère
pas.
M. Chevrette:... ça peut aller, à cause des
conventions collectives existantes, vous savez, qui sont basées les
trois quarts du temps sur l'ancienneté, jusqu'à des
préjudices graves sur la qualité des soins, selon votre
évaluation?
M. Leblanc: Selon notre évaluation, on ne considère
pas, en ce qui concerne notre établissement, que ça peut aller
jusque là actuellement.
M. Chevrette: Jusqu'à date. M. Leblanc:
Jusqu'à date.
M. Chevrette: o. k. ça peut en créer
dépendant du réaménagement qu'il pourrait y avoir ou des
postes qui pourraient se créer.
M. Leblanc: Ça, c'est votre affirmation, M. Chevrette. Ha.
ha, ha!
M. Chevrette: Non, c'est la question que je vous pose, M. le
directeur.
M. Leblanc: Moi, je peux vous répondre que jusqu'à
date, je ne considère pas qu'il y en ait eu.
M. Chevrette: Jusqu'à date vous ne considérez pas
que vous en avez eu. Advenant un réaménagement des tâches
avec les contrats collectifs que vous avez, vous serez obligés de
respecter les nouvelles listes d'ancienneté. Est-ce que
j'interprète bien la loi, à venir jusque là? Parce que je
ne voudrais pas que vous disiez que c'est mon opinion. Je vous la pose sous la
forme Interrogative. Si vous aviez à appliquer... Vous allez avoir
à appliquer la convention collective dans les mois qui vont venir, vous
allez devoir respecter la nouvelle liste d'ancienneté, oui ou non?
M. Leblanc: C'est ça, oui.
M. Chevrette: Est-ce que c'est la liste modifiée que vous
allez appliquer, ou si c'est l'ancienne, ou si vous avez une entente officieuse
avec le syndicat pour dire que vous allez afficher l'ancienne au niveau des
postes?
M. Leblanc: Moi, je peux vous dire actuellement qu'il n'y a pas
d'entente officieuse avec le syndicat. C'est la liste d'ancienneté qui
est appliquée. C'est la liste conformément à la
réglementation.
M. Chevrette: Donc, vous pouvez vous retrouver avec une
infirmière qui a à peine un an d'ancienneté, par exemple,
dans l'établissement et qui peut aller "bumper" une femme qui en a six
et qui est très compétente.
M. Leblanc: En appliquant cette liste, oui.
M. Chevrette: Merci. Une autre question que je voulais vous
poser, c'est au niveau du conseil d'administration. J'ai bien compris que vous
y alliez en détail dans votre mémoire. J'ai manqué cette
partie, mais j'ai lu votre mémoire. Vous êtes contre le fameux
conseil d'administration proposé. Est-ce que le ministre vous a
posé... Je retirerai ma question si le ministre vous l'a posée.
Mais est-ce que le contrepoids au D. G. unique, cela a été
posé? Vous allez âtre correct sur cet aspect.
M. Leblanc: Ce que j'ai compris, c'est que le contrepoids au D.
G., c'étaient les médecins et les professionnels.
La Présidente (Mme Marois): C'étaient aussi les
bénévoles d'après ce que j'ai compris.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Après ça,
ce sont les bénévoles.
M. Chevrette: O. K.
M. Côté (Charlesbourg): C'est un autre contrepoids.
C'est un tiers, un tiers, un tiers.
M. Chevrette: Un tiers, un tiers, un tiers. Ha. ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): C'est une formule
que vous connaissez. Ha, ha, ha!
M. Chevrette: D'accord. Donc, je vais laisser mon collègue
continuer le questionnement.
La Présidente (Mme Marois): M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. Puisque la question
avait été posée au conseil d'administration, j'irai
peut-être dans des dimensions qui ne sont pas traitées strictement
dans le mémoire, puisque vous ne nous parlez que des conseils
d'administration pour les autres institutions, puisque, étant une
institution universitaire, vous n'avez pas ce problème en soi, sauf pour
la composition. La régie, la décentralisation, la
déconcentration, vous ne nous dites pas un mot de ça. Vous
êtes complètement d'accord avec tout ce qui est
présenté et vous n'avez pas de problème à
travailler avec ça.
M. Leblanc: Moi, je peux vous dire que comme expérience,
encore là, personnellement j'ai oeuvré au niveau de ce qu'on
appelle le conseil régional pendant plusieurs années. J'ai
oeuvré au niveau des diverses commissions administratives, à
partir des commissions d'achat, des commissions de services médicaux, et
aussi étrange que ça puisse paraître, actuellement,
j'assume la présidence du Conseil régional de Montréal.
Alors, je crois à la régionalisation personnellement. Ça
c'est une opinion personnelle. Quant à l'application de la
régionalisation, je pense qu'il y a sûrement des
améliorations à y apporter, mais c'est comme d'autre chose
à mon avis. Quand on s'embarque dans la régionalisation, quand on
y met le prix, il y a des effets, à mon sens, très positifs.
Je tiens à signaler, par exemple, qu'au niveau des hôpitaux
ultraspécialisés, au niveau, par exemple, de la haute
technologie, vous avez quand même des orientations qui sont prises par
des hôpitaux universitaires, en ce qui a trait, par exemple, à la
lithotritie. Il y a déjà des orientations de prises depuis trois
ans. On sait où ça va. Ce qui reste maintenant, c'est le
financement. C'est la même chose au niveau de la résonance
magnétique. Alors, il y a déjà des centres définis,
dans la région de Montréal, qui sont identifiés comme
justifiés pour recevoir cette technologie en fonction des volumes et en
fonction de la clientèle. Ce qu'on vit actuellement, c'est qu'au niveau
du financement, c'est laissé à l'Initiative à la fois de
l'État, à la fois régionale et aussi à la fois des
centres hospitaliers par le biais de leur fondation.
Actuellement, la toile de fond est désignée et on sait qui
va l'obtenir. Maintenant, elle va être obtenue selon les
possibilités de financement, selon les programmes disponibles et selon
aussi les initiatives du milieu et des fondations qui permettent cette
acquisition. Alors, la régionalisation en sol, le problème qu'on
y vit est le suivant, c'est que les conseils régionaux ont des pouvoirs
de recommandation. Une fois que la recommandation est faite, quelle application
en fait-on? Là, ça devient plus aléatoire. Mais il reste
qu'il y a quand même eu... En tout cas, au niveau de la région de
Montréal, cette planification est faite par les gens, par les ressources
du milieu et ça, à mon avis, c'est essentiel.
M. Trudel: Ce que vous nous dites, c'est qu'on est capables de
décider, en région, de faire les bons arbitrages et qu'on peut
s'y fier, une délégation, une remise de pouvoirs, de programmes
et de fric et une responsabilité d'allocation des ressources
financières des organismes régionaux - et je ne définis
pas la bebite - c'est possible que ça se fasse et on peut s'y fier que
ça se réalise.
M. Leblanc: écoutez, moi, j'y crois. si je n'y croyais
pas, ça serait renier l'énergie que j'ai placée dans ce
secteur-là depuis nombre d'années.
M. Trudel: On a eu ici beaucoup de représentations, par
exemple, des mouvements communautaires qui, pour employer une expression
simple, ont une peur bleue de toute régie régionale, de conseil
d'administration régional, de toute délégation de
pouvoirs. On s'est même fait dire ici: S'il vous plaît, de
grâce, tout ce qui regarde l'enveloppe du communautaire, laissez
ça entre les mains du ministre ou du ministère. On aime mieux
faire affaire là que de faire affaire en région. Vous admettrez
avec moi qu'il y a comme quelque chose d'incompréhensible
là-dedans. Est-ce qu'ils se sont déjà trop fait mordre les
mains et les doigts, jusqu'à maintenant, et qu'ils ont une crainte qui
n'est peut-être pas justifiée? Comment est-ce que vous expliquez
qu'on entende des choses comme cela et, dans la même question, est-ce
qu'à l'égard du communautaire qui craint beaucoup cette
décentralisation, il serait de bon aloi que le ministère ou le
ministre puisse, dans l'allocation au niveau des programmes, fixer un
pourcentage qui devrait obligatoirement aller aux organismes, au soutien et au
développement communautaires?
M. Leblanc: II y a aussi le Dr Lajoie qui a oeuvré
passablement au niveau régional, peut-être qu'il pourrait
répondre à cette question.
M. Farrah-Lajoie: Je regrette un peu de ne pas avoir à mes
côtés le Dr Jean Robert, directeur du Département de
santé communautaire de l'hôpital Saint-Luc. Je pense qu'il aurait
été beaucoup plus à même que moi de répondre
à cette question-là. Bon, j'ai oeuvré au niveau du conseil
régional et, évidemment, j'ai remarqué cette implication,
du moins pour le Conseil
régional de Montréal. Je pense que, sans l'ombre d'un
doute - je ne sais pas quel organisme communautaire est venu vous rencontrer et
vous dire ces choses, ce sont peut-être des gens des organismes
communautaires de Montréal - en général, ceux de la
région 06-A ont été, à l'exception de quelques-uns
peut-être, bien servis par le conseil régional.
Ceci étant dit, je pense qu'au niveau des départements de
santé communautaire où les organismes communautaires oeuvrent
beaucoup plus de façon précise, bien je pense que le DSC
Saint-Luc en est un exemple assez important au niveau des communautés
qui se prennent en main, par exemple, avec la nouvelle problématique du
sida. Je pense, encore une fois, que c'est un niveau d'Implication
communautaire fort intéressant qui, actuellement, fait état d'une
discussion, même au niveau de l'hôpital, avec une implication
médicale pour faire en sorte qu'on retourne le plus rapidement possible
certaines pathologies dans les milieux parce que les organismes veulent
absolument se prendre en main et je pense qu'on travaille très,
très, très loin avec ça. Évidemment, au niveau du
département de santé communautaire, encore une fois, le Dr Robert
aurait été beaucoup plus à môme que moi de vous
répondre, mais je pense que c'est suffisant.
M. Trudel: On questionnera d'autres organismes aussi
là-dessus parce qu'il y a quelque chose d'incompréhensible. (16
heures)
Une dernière question plus en relation avec les urgences. Vous
avez expliqué pourquoi ça marchait bien et qu'il y avait
relativement peu de problèmes. À cet égard, j'imagine que
ça pourrait être, entre guillemets, exportable, cette recette et
cette façon de faire les choses, et que pensez-vous, à cet
égard, de la suggestion des médecins, des urgentologues, de
créer, dans la région de Montréal, un centre sur le
modèle, si nous avons bien compris, de Toronto, un centre unique de
répartition et d'acheminement des bénéficiaires qui
doivent faire appel aux services d'urgence? Et j'ajouterais, si possible,
à partir de votre recette qui marche bien, comment ça vous
apparaît, cette possibilité-là?
M. Farrah-Lajole: Écoutez, notre recette, comme le Dr.
Morgan l'a mentionné tantôt, ce n'est pas une panacée.
C'est quand même quelque chose qui est vécu de façon
journalière. Ça prend une implication médicale très
importante. Ça prend une collaboration administrative de tout instant.
Imaginez-vous un petit peu qu'est-ce que ça peut signifier, pour un
service d'accueil et d'admission dans un hôpital, de gérer des
sorties et des entrées de bénéficiaires qui se font
à la minute. Alors, c'est un travail gigantesque et à
l'intérieur de ça, sans oublier aussi toutes les
infirmières qui se retrouvent sur les étages.
Lorsque le médecin retourne sur les étages et dit: Je
donne un congé, des fois à trois heures de l'après-midi,
quand ça n'avait pas été prévu, on met en marche
tout un processus administratif. Alors je pense qu'il faut quand même le
souligner. Ce n'est pas juste une question de gestion via la salle d'urgence.
Ce n'est pas un ordre que le médecin donne: Hospitalisez-moi ce
malade-là, c'est urgent. Le médecin signe une demande, et
là, il y a tout un processus médico-administratif qui s'installe
avec tout ce que j'ai impliqué. Je pense que c'est exportable, mais
ça prend une volonté ferme de gérer ses propres lits. Les
médecins ont tout avantage à faire rouler, si vous me permettez
cette expression, leurs lits sans, évidemment, exagérer. Je pense
que tous les médecins de l'hôpital Saint-Luc sont bien conscients
de cette chose-là. C'est pour ça que ça va. Ça ne
veut pas dire qu'on n'a pas des problèmes occasionnellement. On a aussi
nos périodes d'engorgement.
Quant à la position des médecins urgentologues, bien,
écoutez, je pense qu'entre l'idéal et le pratique, pour la
région de Montréal, II y toute une marge. Je suis bien conscient
de ce qui se passe à Toronto, mais j'invite certains membres de la
commission à aller voir le fonctionnement. C'est complètement
différent de tout ce qui existe en termes de possibilité, en
termes d'hôpitaux ultraspécialisés versus les
hôpitaux généraux, etc. Le système est
complètement différent. On peut très difficilement le
transposer à Montréal. Je pense qu'avec une bonne gestion
Interne, et évidemment d'autres composantes qui ne sont pas de la
discussion aujourd'hui ici, mais qui sont aussi importantes, je pense qu'avec
l'aide des médecins, dans chacun des milieux, oui, c'est exportable, et
c'est faisable, mais ce n'est pas facile.
M. Trudel: Merci.
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le leader de
l'Opposition?
M. Chevrette: Oui, Mme la Présidente, on sait que c'est
dans les milieux économiquement pauvres qu'on consomme le plus de soins
de santé. Vous êtes les premiers, sans doute, à vous en
rendre compte, que la mauvaise nutrition, le logement Incorrect, etc. font en
sorte que c'est dans les milieux pauvres que, malheureusement, on consomme le
plus les soins de santé. Et souvent les gens, au premier coup d'oeil,
sont portés à dire qu'il y a des abus seulement sur un
côté, c'est-à-dire que c'est toujours le
bénéficiaire. Ça me désarme à chaque fois
d'entendre des gens dire que c'est toujours le bénéficiaire qui
abuse et jamais de l'autre côté. Moi, je voudrais vous poser une
question: Êtes-vous, comme l'Association des hôpitaux, en faveur du
ticket modérateur, ou d'Impôt à rebours, ou si vous
préconisez des contrôles administratifs
contre les abus venant des deux bords, du producteur et du
consommateur?
M. Leblanc: Bon, écoutez, ce qui est important, c'est
l'accessibilité aux services. Encore une fois, vous me posez une
question directe, je réponds en mon nom personnel. Ça n'a pas
été évidemment discuté au niveau du conseil, mais,
pour moi, il y a encore un bout de rationalisation à faire, et, de plus
en plus, iI va falloir que les programmes soient examinés, à
toutes fins pratiques, et possiblement que certains programmes
périphériques pourront être évalués. Mais il
y a une chose qui m'apparaît essentielle, c'est que
l'accessibilité aux soins, au niveau de la population, je pense qu'il ne
faudrait pas toucher à ça.
En ce qui concerne les moyens de financement - je mentionnais tout
à l'heure - ça semble vite dit, mais il y a un apport important
du milieu. Quand je pense aux fondations, H ne faut pas oublier qu'à
Montréal actuellement, - en tout cas, dans notre région - il y a
beaucoup de... tous les équipements ultraspécialisés ou
l'évolution technologique est en grande partie financée par les
fondations. J'ai été étonné de voir comment, par
exemple, dans une région périphérique... J'ai fait une
visite récemment dans la région d'Alma, à
l'Hôtel-Dieu d'Alma, et je peux vous dire que cette fondation-là,
l'an passé, a ramassé 300 000 $. C'est là qu'on voit que,
au niveau du milieu, au niveau de la population, il y a tout un potentiel
où les gens sont prêts a s'impliquer. Il s'agit de les motiver et
de les organiser, mais j'ai été... Encore une fois, si un
hôpital comme Saint-Luc peut ramasser 2 000 000 $ par année, je me
dis que probablement, par rapport à Alma, ce n'est rien. Alors,
quand...
M. Chevrette: Vous êtes habile politicien. Je vous ai
posé une question et vous êtes rendu à Alma.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Vous me parlez de la
générosité des Saguenéens qui est proverbiale, vous
n'avez pas besoin de me convaincre de ça. Je vous ai posé une
question directe. Êtes-vous pour ou contre le ticket modérateur
tel que proposé par la Fédération des centres hospitaliers
du Québec, l'AHQ, l'Association des hôpitaux du Québec, oui
ou non? Sinon, considérez-vous qu'il y a des moyens administratifs pour
contrer les abus des deux côtés? Vous avez habilement, comme un
politicien d'expérience, patiné sur la bottine.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Leblanc: Je peux répondre plus directement à
votre question. Personnellement, je ne suis pas en faveur du ticket
modérateur. M. Chevrette: Parfait!
M. Leblanc: J'ai répondu, en tout cas, je crois avoir
répondu en partie ou sinon totalement à la deuxième partie
de votre question, en disant qu'il y a encore un bout de rationalisation qu'on
peut faire au sein des établissements et il y aurait peut-être une
revue de certains programmes, que j'ai qualifiés de
phériphériques, qui pourrait être faite.
La Présidente (Mme Marois): M. le député de
Fabre et vice-président de la commission.
M. Joly: Merci, Mme la Présidente. J'étais
très heureux, M. Leblanc, d'apprendre que, chez vous, tout semble
baigner dans l'huile. J'imagine que c'est un modèle à suivre et
j'espère qu'il y en a beaucoup qui vont se permettre de se servir,
peut-être, d'une ligne directe qui est le téléphone et vous
appeler. Peut-être pour vous demander certains conseils parce que ce
n'est peut-être pas tout le monde qui a la chance d'être ici en
commission ou de lire sur ce qui se passe.
Avec les données que le Or Morgan nous mentionnait, à
savoir que la majorité des opérations chirurgicales se faisaient
ou étaient commandées par l'urgence, du moins en partie - je
pense que le gros venait des urgences, si j'ai bien compris - j'imagine
qu'à ce moment-là, il doit y avoir une certaine quantité
de médecins qui doivent être moins heureux, ceux qu'on appelle les
spécialistes pour la chirurgie élective. Alors, partant de
là, je me demande quel est le pourcentage des opérations qui
proviennent de l'urgence et quel est le pourcentage de la différence qui
devient élective et, par après, est-ce que vous avez des longues
listes d'attente pour la chirurgie?
M. Morgan: On ne peut répondre à la question
simplement parce que les notions d'urgence et d'élective sont des
notions absolues alors qu'en pratique chez les patients, il y a des urgences
relatives et il y a des cas électifs qui deviennent urgents parce que
les patients attendent trop longtemps à la maison, comme vous vous en
rendez compte certainement. Ce qui est important de maintenir, c'est un
équilibre entre la demande de l'urgence qui, elle, est toujours
prioritaire parce qu'il y a une question de vie ou de mort ou encore
d'aggravation de l'état de santé. Donc ça, ça passe
toujours de façon prioritaire. Mais il y a également un certain
impératif à maintenir en faveur des patients dits électifs
qui sont toujours les éternels oubliés, mais qui souffrent
à la maison. Vous avez le patient ou la patiente qui fait des
cholécystites à répétition, etc. et dont
l'état se détériore. Donc, il faut qu'il y ait, encore
là,
une gestion, une collaboration pour que ces patients-là ne soient
pas d'éternels oubliés. Évidemment, il y a un arbitrage
à faire au niveau médical. Cet arbitrage-là doit se faire
en fonction de considérations médicales d'abord,
c'est-à-dire que la qualité des soins doit être le guide
premier et non l'avantage ou l'inconvénient que ça apporte au
médecin. Ceci dit, ça ne peut pas se faire quand même.
Môme si l'hôpital, vous le décrivez comme baignant dans
l'huile, ça ne peut pas se faire de façon immédiate. Donc,
il y a des listes d'attente. Ces listes d'attente sont, encore là...
C'est très relatif une liste d'attente. Je me souviens, quand on a pris
en main la liste d'attente de l'hôpital Saint-Luc, elle était
à environ 2000. On s'est rendu compte qu'il y a des noms en attente qui
sont soustraits de la liste parce qu'un patient peut avoir été
opéré d'urgence ou opéré ailleurs. Donc, la liste
d'attente véritable oscille au niveau de quelques centaines, 600, 700,
800 patients, de façon continuelle. Et ces attentes sont presque
toujours des listes d'attente chirurgicale.
En résumé, il y a un arbitrage à faire entre les
urgences immédiates, les électifs semi-urgents et les
électifs, et il y a un prix à payer pour ceux qui ont des
collectifs.
M. Joly: Merci, Monsieur.
La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le leader. M. le
ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je veux remercier et dire
à M. Leblanc qu'avec l'exemple d'Alma, iI faut faire attention, sur le
plan de la fondation, parce qu'on pourrait prendre aussi celui de
Brome-Missisquoi-Perkins que certains médecins de chez vous connaissent,
avec Granby. Évidemment, on peut toujours aller chercher de l'argent par
des fondations, mais c'est qu'il y a un objectif, acheter un scanner. Et
finalement c'est la bataille de deux municipalités moyennes qui se
battent pour l'avoir la première. Là, on fait jouer bien des
choses. Mais je ne suis pas sûr que pour d'autres causes nobles, on
réussira à en avoir autant. C'est la seule petite distinction que
je voulais faire. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie au nom des
membres de la commission. Oui? Vous vouliez intervenir certainement, M. le
président, bénévole. Ha, ha, ha!
M. Roch: Mme la Présidente, j'aimerais vous remercier et
remercier les membres de la commission parlementaire qui nous ont permis de
présenter notre mémoire. Inutile de vous mentionner que nous
étions très flattés et quelque peu stressés de nous
présenter devant vous. Cependant, je pense que cela s'est très
bien déroulé et je retournerai présider le conseil
d'administration de l'hôpital, comme bénévole, bien
sûr, et ce sera le pivot entre les deux contrepoids, les médecins
et la direction générale. Je pense que le seul danger que Je
vois, c'est de repartir vers Montréal avec la tête peut-être
un peu trop enflée. Il va falloir arriver puis se calmer. Encore une
fois, Messieurs et Mesdames, merci beaucoup.
La Présidente (Mme Marois): C'est pour les mauvais
jours.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): J'invite maintenant les
représentants du Centre hospitalier de Verdun à bien vouloir
prendre place, s'il vous plaît.
S'il vous plaît, nous allons reprendre nos travaux. Je souhaite la
bienvenue aux personnes qui représentent le Centre hospitalier de
Verdun. Mon collègue me fait remarquer que nous avons au moins un
habitué à la table, enfin, qui est déjà venu au nom
d'un autre groupe, nous lui souhaitons la bienvenue. Je vous inviterais donc
à présenter votre mémoire, et que la personne qui va
présenter le mémoire nous présente les personnes qui
l'accompagnent. Par la suite... pas plus d'une vingtaine de minutes et le reste
du temps est Imparti aux membres de la commission.
Centre hospitalier de Verdun
M. Chénier (François): Mme la Présidente de
la commission, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux,
Mesdames et Messieurs, membres de la commission, je me présente: mon nom
est François Chénier, président du conseil
d'administration du Centre hospitalier de Verdun. J'aimerais vous
présenter les personnes qui m'accompagnent. Tout d'abord, M. Roger
Cadieux, directeur du DSC de Verdun; M. Ghislain Girard, directeur
général du Centre d'accueil Le Manoir, situé sur notre
territoire; M. Jacques Demers, membre du conseil d'administration et aussi
président du Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens de
notre établissement, et M. Serge Ménard également membre
du conseil d'administration, nommé par le ministre et
représentant des groupes socio-économiques. (16 h 15)
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Son allégeance est connue.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): Ah oui?
M. Chénier: Enfin, Mme la Présidente, Mme Johanne
Côté, infirmière, représentante du personnel
clinique à notre conseil et M. Jean-Léon Lachaine,
représentant des centres
d'accueil nous accompagnent également ainsi que M. Georges
Maillet, directeur général du centre hospitalier de LaSalle; M.
Gilles Létoumeau, directeur général du centre hospitalier
Champlain, qui est un hôpital de soins de longue durée et,
finalement, M. Jean-Paul Bouchard, directeur général du CA-CLSC,
LaSalle.
Ceci dit, Mme la Présidente, je tiens à vous dire que
c'est un privilège pour le centre hospitalier de Verdun et pour son
département de santé communautaire d'être entendu ici
aujourd'hui et de présenter les principales réflexions que nous a
Inspirées l'étude de l'avant-projet de loi sur la services de
santé et les services sociaux.
M. Levine vous présentera, dans quelques minutes, les principales
idées que nous désirons discuter avec vous. Auparavant,
j'aimerais vous expliquer les raisons qui ont Incité le centre
hospitalier de Verdun à préparer ce document à votre
intention, il faut d'abord dire que le centre hospitalier de Verdun est un
centre de soins de courte durée, à vocation régionale et
communautaire. Fondé en 1932, il dessert principalement la population de
Verdun et des quartiers environnants, l'une des populations les plus pauvres et
les plus âgées au Québec, comme vous pouvez le constater
à l'aide de la carte qui est jointe au mémoire.
Notre établissement a une capacité de 372 lits,
sans compter les vingt lits de l'hôpital à domicile, et il
compte un peu plus de 1500 employés et reçoit un budget annuel
d'environ 50 000 000 $. Enfin, il est affilié à la faculté
de médecine de l'Université de Montréal et il offre des
programmes de formation aux futurs omnlpraticiens. En tant que conseil
d'administration d'un tel centre à vocation communautaire, nous avons
une double responsabilité. La première est d'assurer à
notre population un accès réel à l'ensemble des services
et des soins répondant à ses besoins et auxquels elle a droit; la
deuxième est d'assurer une utilisation efficace et efficiente des
ressources qui nous sont attribuées par le ministère. Ces budgets
n'ayant jamais été définis d'après les besoins de
la population à desservir, vous comprendrez que cette double
responsabilité pose des choix difficiles, des questions qui ne peuvent
être résolues que dans la contradiction.
En venant devant cette commission aujourd'hui, nous voulons exprimer
notre volonté de poursuivre nos efforts pour que soit assumée
correctement cette double obligation vis-à-vis de notre population et
vis-à-vis du ministère et du gouvernement. C'est dans cet esprit
que nous désirons vous présenter nos réflexions sur
certains aspects de l'avant-projet de loi qui risquent d'affecter nos
activités.
En premier lieu, nous aimerions porter à votre attention la
question de l'enseignement aux omnipraticiens qui constitue une activité
importante de la vie hospitalière d'un établissement comme le
nôtre. Ensuite, nous discuterons de la mission du DSC de Verdun et nous
expliquerons les trois critères qui devraient, à notre humble
avis, justifier l'existence d'un DSC, soit, premièrement, la
présence d'une zone sociosanitaire cohérente;
deuxièmement, la présence dans cette zone de ressources
adéquates pour que la concertation et le partenariat puissent se
développer harmonieusement et, troisièmement, la présence
d'une organisation de taille performante.
Après cette discussion sur notre DSC suivront quelques
commentaires sur les conseils d'administration unifiés proposés
dans l'avant-projet de loi. Enfin, nous aborderons la question de la
décentralisation et du financement du système de santé,
question incontournable dans le contexte actuel. En vous remerciant d'avance de
l'intérêt que vous accorderez à ces quelques
réflexions, Madame et Messieurs, je cède la parole à notre
directeur général, M. David Levine.
M. Levine (David): Merci beaucoup, Mme la Présidente. M.
le ministre, membres de la commission. Pour notre centre, les trois points que
notre président vient de mentionner sont réellement des points
cruciaux. Je débute avec celui de la formation des omnipraticiens. Je ne
sais pas si les membres de la commission ont déjà
été confrontés à la question de la formation en
médecine familiale. Et qu'est-ce que c'est, cette formation? C'est
sûr que les autres centres universitaires vont présenter leur
mémoire concernant l'enseignement universitaire. Mais une chose que
j'aimerais souligner, c'est l'importance à l'intérieur de la loi
d'un libellé qui touche la question de la formation des omnipraticiens.
60 % de tous les médecins formés dans la province de
Québec sont des médecins de famille maintenant et, dans la loi,
on parie uniquement de la formation en spécialité. On ne donne
aucune place et on ne mentionne aucunement la formation de cette autre partie
si Importante.
Pourquoi la médecine familiale est-elle aussi importante? Elle
est aussi importante parce que la médecine familiale parie de la
santé. Elle ne parie pas de la maladie. La médecine familiale est
importante parce que si chaque Québécois avait un médecin
de famille, il n'y aurait pas de magasinage. Si chaque famille au Québec
avait un médecin de famille, ce serait possible à ce
moment-là d'orienter cette famille vers les soins appropriés et
de ne pas abuser des urgences de nos institutions. Ce n'est pas le cas
aujourd'hui. Cette question de la formation en médecine familiale est
importante pour nous au Centre hospitalier de Verdun et pour d'autres centres
dans la province de Québec qui offrent un programme de médecine
familiale. On a été l'une des deux premières UMF dans la
province de Québec et la demande des étudiants d'oeuvrer dans
notre milieu a toujours été la plus forte au sein de notre
université. Pourquoi? Un étudiant
en médecine familiale peut travailler dans un milieu
communautaire où H a une chance de toucher réellement des malades
et d'avoir une responsabilité directe auprès des malades. Donc,
il n'a pas à suivre la hiérarchie traditionnelle: résident
3, résident 4, résident 5 et, par la suite, le patron. Pans un
milieu comme le nôtre, il a un lien direct avec le patron et une
responsabilité réelle. Quand ce médecin va aller par la
suite travailler à Alma, travailler à Arthabaska, c'est sûr
qu'il va vivre une expérience où il n'y a pas de
spécialistes en masse dans l'hôpital. Ce ne sera sûrement
pas une Institution ultraspécia-lisée, et cet omnipraticien va
être obligé de réagir, de réagir vite et il aura
vécu une expérience importante. Pourquoi je parle de l'importance
de mentionner dans la loi le rôle de l'omnipraticlen? C'est parce que
veux, veux pas, pour les universités, la médecine familiale et
les omnipraticiens sont des citoyens de deuxième classe. Ce n'est pas la
priorité. C'est nécessaire, c'est une partie de notre "business",
mais ce n'est pas vraiment notre première préoccupation. Et tant
et aussi longtemps qu'on ne mentionnera pas... parce que si, maintenant, on est
prêt à mentionner, dans la loi des centres universitaires, si
maintenant on est prêts à souligner la formation en
spécialité, on doit être capable de mentionner quelque part
dans la loi, un statut à accorder aux omnipraticiens. C'est pourquoi,
nous autres, on suggère qu'il y ait à l'intérieur de la
loi des centres de formation universitaire en médecine familiale et que
ces centres soient reconnus. Ces centres peuvent exister à
l'intérieur d'un centre universitaire comme Saint-Luc, comme
Maisonneuve-Rosemont. Ils peuvent aussi exister dans des types d'institutions,
comme la Cité de la santé à Chicoutimi, par exemple, qui
ont des unités de médecine familiale. Mais l'importance de
souligner ce type de formation, je pense que c'est un point qu'on voulait vous
mentionner.
Deuxièmement, je vais toucher à la question du
département de santé communautaire, parce que, je pense qu'il y a
beaucoup de choses à expliquer quand on parle des DSC.
Premièrement, je pense qu'on comprend mai le rôle d'un
département de santé communautaire. Ça, ce n'est pas une
boîte de recherche, ce n'est pas une entité attachée
à une université pour faire de la réflexion. Un
département de santé communautaire, c'est une entité qui
doit oeuvrer sur un territoire à faire de la prévention et
être réellement impliqué. C'est la philosophie que le
département de santé communautaire de l'hôpital de Verdun
qui dessert le sud-ouest de l'île de Montréal a depuis maintenant
18 ans. C'est une philosophie qui a abouti à des réalisations
extrêmement concrètes. Si on veut traiter la santé et non
pas réagir sur la maladie, si on veut arrêter de produire des
services et des services et qu'on est intéressé à assurer
à la population une chance de ne pas devenir malade, je pense qu'il est
Important, pour être capable de développer les structures à
l'intérieur d'une communauté, d'être capable de
répondre aux besoins avant que la maladie ou l'Incapacité arrive.
Dans ce sens-là, on mentionne les trois points qui sont importants pour
l'existence d'un DSC.
Un département de santé communautaire doit avoir une zone
sociosanitaire cohérente; ça veut dire une population
homogène, une population qui a les mêmes problèmes. Si vous
faites référence à la carte qui se trouve dans notre
mémoire que vous avez devant vous, vous trouverez facilement que notre
territoire est extrêmement pauvre, l'un des plus pauvres de l'île
de Montréal et surtout du Québec. J'ai reçu une lettre du
directeur générai du CLSC Saint-Henri, M. Pierre-Paul Lachapelle,
qui demandait si le territoire de Saint-Henri et de la Petite-Bourgogne pouvait
s'attacher aux territoires soclosanltaires du sud-ouest parce qu'il vit les
mêmes types de problèmes, les mêmes difficultés et
que, en réalité, appartenir au territoire du Montreal General ne
reflète pas nécessairement sa propre réalité. Dans
ce sens-là, je pense que l'idée d'une zone homogène est
fort importante. Si on est en train de refaire la carte en ce qui concerne les
DSC, je pense qu'il est Important de regarder cet aspect.
Deuxièmement, on parie d'une organisation de taille, d'une
organisation capable de répondre aux besoins de la clientèle. Le
département de santé communautaire de l'hôpital de Verdun
est un département avec 5 000 000 $ de budget. C'est l'un des plus
grands parmi les 32 de la province de Québec. 1 000 000 $ de cet argent
provient de la collecte que le département de santé communautaire
a faite auprès des entreprises à l'intérieur de notre
territoire, celui de Montréal, et auprès des différents
gouvernements. Parmi ce 1 000 000 $, 600 000 $ sont mis dans la promotion de la
santé. Ce n'est pas de l'argent qui vient du gouvernement du
Québec, c'est de l'argent qui provient d'autres sources, mis dans la
promotion de la santé. C'est le rôle d'un département de
santé communautaire.
Je mentionne quelques programmes. Il y en a un dont beaucoup ont
sûrement entendu parier, on l'appelle L'amitié n'a pas
d'âge. C'est un programme qui vise à mettre ensemble les personnes
âgées et les jeunes à l'intérieur de l'ensemble des
écoles de l'île de Montréal. Je pourrais vous parler de
plusieurs programmes. On a reçu une subvention de Johnson & Johnson
pour le programme Un sourire en santé, pour les programmes de soins
dentaires. Je pourrais en nommer d'autres. Ça, c'est le rôle d'un
département de santé communautaire sur un territoire.
Il y a aussi un rôle extrêmement Important en ce qui
concerne la concertation sur un territoire donné. On a
décidé, à l'intérieur de notre territoire qui
regroupe treize institutions, et vous avez plusieurs représentants ici
aujour-
d'hui, de former une table de concertation présidée par le
département de santé communautaire où on a
décidé de faire une planification stratégique
sous-régionale; non pas individuelle pour chaque institution, mais
sous-régionale. Notre première priorité qui était
dégagée était les personnes âgées sur notre
territoire parce qu'on est un des territoires ayant les personnes
âgées les plus vieilles au Québec et au Canada. Suite
à cette planification, on a développé des programmes
très concrets.
Je vous donne un exemple. On l'appelle ROSAM. C'est un programme
d'enregistrement des personnes âgées qui entrent quelque part dans
le système. Alors, chacun des treize établissements serait
interrellé par informatique et, chaque fois qu'on aurait une personne
âgée a domicile, dans un CLSC, dans un centre d'accueil ou
à l'urgence de l'hôpital, elle serait enregistrée. On a
fait notre demande au conseil régional pour nous supporter dans ce
projet-là et le conseil régional a répondu: La
concertation, ce n'est pas possible. On n'embarque pas dans ça. Alors
les treize établissements eux-mêmes ont investi 100 000 $ de leur
propre budget d'opération parce qu'ils ont vu la nécessité
de ce programme sur leur territoire. (16 h 30)
On pourrait parler d'un autre programme, par exemple, d'un service
mobile en soins dentaires. Je vous donne cet exemple parce que c'est un exemple
dé. Un centre d'accueil où iI y a une personne âgée
qui a besoin d'un nouveau "set" de dentiers, ça coûte cher, c'est
difficile. Il y a déplacement du malade et iI est difficile même
de trouver des dentistes. On a créé un programme
autofinancé de soins dentaires mobiles, on a dépensé 40
000 $ pour avoir des équipements mobiles, qui se promènent
d'institution en Institution, sur notre territoire, pour faire des dentiers et
régler des problèmes de soins dentaires chez nos personnes
âgées dans nos institutions.
Je souligne ces points. Il y en a plusieurs autres qu'on pourra
probablement mentionner suite à vos questions. Je pense que quand on
regarde ces trois éléments, une région sociosanl-taire
cohérente, une taille appropriée ainsi qu'une capacité de
faire de la concertation, voilà, on a des critères pour
l'existence d'un département de santé communautaire sur un
territoire.
Très brièvement, j'aimerais parler de la question du
conseil d'administration unifié parce que, évidemment, on est un
des centres très affectés par ce type de réorganisation.
Ce que je pense qu'on a prouvé, c'est que sur un territoire, c'est
possible de faire des programmes unifiés. C'est possible de
connaître les besoins d'une population et, par la suite, répondre
à ces besoins. Dans ce sens, je pense qu'il est important qu'il n'y ait
pas une formule unique appliquée à travers le Québec et
qu'on laisse à chacun des différents Intervenants de voir
à la concertation possible dans leur territoire. je veux toucher, dans
les dernières minutes de notre intervention, la question du financement.
évidemment, le financement est un élément clé pour
nos institutions hospitalières. c'est une question qui doit être
discutée sur deux volets: 1° la capacité à
l'intérieur de notre réseau actuel de récupérer des
sommes d'argent. 2° quel type de financement on pourrait faire pour ce
qu'il nous manque. présentement, on reste sur le premier volet parce
qu'on croit fondamentalement qu'il y a des mécanismes de contrôle
et de suivi qui ne sont pas encore mis à l'intérieur de notre
réseau. à cette fin, notre conseil d'administration a
accepté d'être l'hôpital pilote pour le projet siracoof.
l'hôpital saint-luc nous rejoint dans ce projet et nous autres, à
partir de la première ville, on va appliquer à travers l'ensemble
de notre institution le programme de coût par diagnostic dont on a
déjà fait 1000 cas dans notre institution. ce programme est
subventionné par le ministère pour 500 000 $ jusqu'à ce
jour. alors, déjà, il y a une amorce dans cette importante
réflexion. on croit que ça doit continuer.
Si on mentionne dernièrement la régie régionale,
pour nous autres, comme institution, je pense qu'il est Important qu'il y ait
une décentralisation. Mais si on parle d'une décentralisation, il
faut que ce soit une vraie décentralisation avec des pouvoirs. Il faut
réellement éviter la possibilité d'une bureaucratie plus
lourde que celle qu'on trouve à Québec. Pourquoi une bureaucratie
plus lourde? On dit plus lourde parce que face à des
établissements d'un territoire qui ont une certaine force, c'est plus
facile de se cacher derrière des règlements et une bureaucratie
pour avoir votre pouvoir. Au Québec, II y a un ministre, il y a un
sous-ministre. Le pouvoir est là. Quand le pouvoir n'est pas clairement
défini au niveau régional, il y a un danger que ça
devienne une bureaucratie deux fois plus lourde que celle qu'on vit
actuellement, avec plus de paperasse et non pas moins de paperasse.
Je pense qu'il est aussi important de s'assurer que le
décloisonnement qu'on recherche est véhiculé, parce que si
on regarde les CRSSS actuellement, ce sont des commissions de courte
durée, ce sont des commissions de CLSC, ce sont des commissions de
santé mentale, ce sont des commissions par établissement et non
pas des commissions par programme. Il n'y a rien qui a empêché
jusqu'à ce jour les conseils régionaux de développer des
commissions par programme. Ils ne l'ont pas fait parce que la volonté
n'était pas là dans la communauté des
établissements. Je pense que cela aussi, c'était quelque chose
d'important à regarder.
Je pense que je vais vous remercier à ce moment-ci, et les
membres présents avec moi
sont prêts à répondre à l'ensemble de vos
questions. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Marois): Nous vous remercions de cette
présentation. J'Inviterais maintenant M. le ministre de la Santé
et des Services sociaux à vous poser des questions ou à vous
faire ses commentaires.
M. Côté (Charlesbourg): Merci. De tout ce que
j'entends, je me sens privilégié cet après-midi de
recevoir la crème des centres hospitaliers de la région de
Montréal.
M. Chevrette: S'il fallait que les autres vous entendent!
M. Côté (Charlesbourg): Non, non, je fais juste
constater, là. évidemment, vous êtes les premiers à
aborder, de manière très claire, le département de
santé communautaire et je commencerai par ça, parce que ça
me pose un certain nombre de questions.
D'abord, j'en ai une première et je l'avais avant même que
vous nous exposiez vos points de vue. On reviendra au reste, après.
Est-ce que les départements de santé communautaire sont viables
s'ils ne sont pas rattachés à un hôpital, et pourquoi
faut-il qu'ils soient rattachés à un hôpital?
M. Levine: pour répondre à cette question, et on a
eu sûrement un sentiment qu'il y aurait une question de cet ordre
aujourd'hui, je pense que la réponse a déjà
été faite de ma part. il n'est pas nécessaire qu'un
département de santé communautaire soit rattaché à
un hôpital pour être capable d'oeuvrer sur un territoire et de
poser des gestes qu'il a à poser. ce qu'on veut dire, c'est que le fait,
depuis 18 ans, d'être rattaché à un hôpital, a
donné une crédibilité qu'il était nécessaire
de bâtir, au début. l'attache a une structure qui existe, sur le
plan administratif, fournit l'ensemble de l'administration à un
coût pas coûteux du tout. ça permet à un
département de santé communautaire d'oeuvrer sans trop se
préoccuper de l'administration dé ses 5 000 000 $ et des autres
choses qui sont liées à ça. il y a aussi le lien avec le
conseil de médecins et dentistes. donc, l'hôpital a un conseil de
médecins et dentistes et l'acte - parce qu'il y a des actes et des
gestes posés par un département de santé communautaire -
peut être évalué à l'intérieur d'un
hôpital. alors, ce que je veux dire, c'est que ce n'est pas essentiel que
ce soit rattaché à un centre hospitalier. ça peut
être détaché complètement et autonome, mais je ne
vois pas d'avantages et je vois possiblement des désavantages en donnant
le contexte déjà créé au québec.
M. Côté (Charlesbourg): Je vous pose la question
à vous parce que je me souviens de nos échanges, la semaine
dernière. Ça avait été des échanges
très directs et très francs sur le vécu; et c'est pour
ça que je pose la question sans que j'aie des idées faites parce
que... Le débat des départements de santé communautaire,
ils se sont réunis à Québec iI n'y a pas tellement
longtemps, avant les fêtes, pour avoir une stratégie et,
évidemment, on le voit dans les mémoires où chacun veut
venir défendre son département de santé communautaire. La
bataille se fait plus sur les 32, de ce que je comprends, de conserver les 32,
que sur la mission des départements de santé communautaire.
Alors, qu'il y en ait 32, qu'il y en ait 22, qu'il y en ait 16, pour
mol, ça n'a pas d'importance. L'importance, ce n'est pas le nombre.
L'importance est la mission et ça, ça m'apparaîl
extrêmement important de le dire, à ce moment-ci. Parce que
lorsqu'on se compare ailleurs, II y a un département de santé
communautaire au Québec qui regroupe un territoire de 50 000 de
population - le vôtre est de 180 000, 190 000 me dit-on, à peu
près - et il y en a un pour la région de Toronto, ce qu'on garde
avec, bien sûr, des satellites, il faut bien se le dire aussi, mais...
Évidemment, ce n'est pas le nombre. Le nombre me préoccupe parce
que plus il y en a, en règle générale, plus il y a de
l'argent dans les structures, mais l'Important, c'est la mission, et mon avis
reste là.
Donc, ce que je comprends, c'est qu'il y a certains avantages à
être rattaché à un DSC, davantage sur le plan des gestes
posés par rapport aux liens avec le CMDP sur le plan de l'expertise. Je
vous ai entendu tantôt et, à un moment donné, je me disais:
La semaine dernière, je disais: II y a de la duplication dans les
services. Je vous entendais tantôt et je me posais la question: Est-ce
que certaines expériences que vous avez menées avec votre
département de santé communautaire ne devraient pas, normalement,
relever du CLSC?
Une voix: Du CLSC.
M. Côté (Charlesbourg): Avec le département
de santé communautaire, ce que je comprends, c'est qu'on a de l'action
de première ligne. Est-ce que le département de santé
communautaire ne devrait pas être dans une deuxième ligne pour
qu'on clarifie très, très bien les champs d'intervention de
chacun?
M. Levine: Bon, pour répondre, M. le ministre, à
ces questions, je pense que je vais demander à notre chef de
département de santé communautaire, le Dr Roger Cadieux, qui a
sûrement vécu, depuis 18 ans chez nous, en tête de notre
DSC, beaucoup d'expériences à ce sujet. D'ailleurs,
l'hôpital de Verdun a géré trois CLSC pendant quatre ans
avant que ces trois CLSC soient devenus autonomes sur notre territoire.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, ce que je comprends,
c'est que vous avez fait la démonstration que c'était possible
d'avoir un centre hospitalier, un CLSC et un département de santé
communautaire sous une môme administration.
M. Levine: Je peux vous dire que, si vous voulez que )e
réponde à cette partie-là, oui, et je vous dis
honnêtement, notre conseil d'administration a donné beaucoup de
rôles au conseil d'administration provisoire de chacune des trois
entités. On a joué un rôle uniquement de fiduciaire de
ça et le dynamisme à l'intérieur de chacune de ces trois
entités venait de leur propre conseil d'administration, et
sûrement pas du nôtre, qui avait les mains pleines avec beaucoup
d'activités à faire à l'intérieur de
l'hôpital.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Oui, Dr Cadieux.
M. Cadieux (Roger): C'est-à-dire qu'on a eu
l'expérience, pendant dix ans, d'opérer, en somme, presque
l'ensemble du territoire du DSC. Actuellement, il y a trois CLSC. Il y a eu des
avantages, au début de la réforme, à faire ça,
parce qu'on a intégré une foule d'organismes, au moment de la
réforme, qui venaient d'un peu partout et, à ce moment-là,
je pense qu'en termes d'unification, ç'a eu du bon.
En contrepartie, je pense que ç'a eu comme inconvénient de
nous empêcher de jouer notre véritable rôle de santé
communautaire, du fait qu'on était très accaparés par les
services de première ligne. Le DSC, dans le temps, avait une
cinquantaine d'infirmières. On couvrait toutes les écoles, on
couvrait les soins à domicile. Il faut dire qu'on était en
structuration. C'était complexe.
C'était quoi les avantages de décentraliser les services
de première ligne dans les CLSC? C'est d'abord de les laisser
réellement aux services et de pouvoir adapter davantage les services
d'une façon assez particularisée. Je pense que
Pointe-Saint-Charles, ce n'est pas tout à fait la même dynamique,
dans un territoire, que ville LaSalle, à cause des
caractéristiques, et ça nous a permis, aussi, de
développer une expertise. L'expertise qu'on a développée
dans les dernières années, c'était d'identifier les
besoins d'un territoire. C'était quoi, les gens? C'est quoi, les
problèmes? Actuellement, le réseau de santé,
habituellement, passe directement dans l'action, sans trop, trop souvent se
préoccuper de c'est quoi les besoins. On a fait les études de
besoins par groupe, après ça on a pu faire, comme M. Levine
disait, une planification stratégique sous-régionale, où
l'ensemble des établissements du territoire actuellement se servent de
ces documents-là. Et je pense qu'il y a des services, dans les
hôpitaux, sur lesquels on commence à se poser des questions par
rapport aux besoins, parce qu'on a des données d'une façon
spécifique là-dedans. Ça, c'était en termes de
connaissance.
Le deuxième rôle, je pense, qu'on peut mieux jouer,
ç'a été de faire de la santé publique, de la
véritable santé publique. Quand j'ai commencé en
santé communautaire, une petite épidémie de deux ou trois
jours, ça mobilisait Québec. Je peux vous dire qu'on a fait le
management du dépotoir toxique de LaSalle, avec tout ce que ça
comporte comme inconvénients. Il n'y a pas eu de scandale dans tes
journaux. C'était une opération qui a coûté 10 000
000 $ et, à ce moment-là, le département de santé
communautaire assurait la santé des travailleurs, des personnes,
c'est-à-dire qu'on ne se préoccupait pas de la maladie, parce que
nos cas d'accidents, on les envoyait à l'hôpital, les maladies
professionnelles, on les envoyait à l'hôpital, mais on a pu
prévenir, par des programmes, sauvegarder la santé des gens. Je
pense que c'est ça, notre préoccupation.
La troisième préoccupation, et je pense que
là-dedans on commence à exceller, c'est de faire des programmes
de promotion de santé sans être pris par la notion de service. Je
pense qu'une des plus belles réalisations, c'est la campagne
L'amitié n'a pas d'âge. C'est fantastique comme problème;
vous pouvez vous imaginer que c'est difficile. Le service de santé n'est
pas capable de se payer ça, c'est subventionné
présentement par l'industrie privée, par toutes sortes
d'organismes, mais c'est de demander, pas à des professionnels comme
nous, mais de demander à des petits groupes de personnes
âgées ou de demander à des étudiants de voir, dans
les choses qu'on ne peut pas percevoir, c'est quoi les problèmes qu'ils
ont. Et il y a des centaines et des centaines de sous-groupes qui se
préoccupent de régler des problèmes avant que ce soit de
la maladie. Alors, nos préoccupations, c'est ça. Je veux dire,
c'est de s'occuper d'une deuxième ligne, mais une deuxième ligne
qui est axée sur la promotion de la santé. C'est très
différent. (16 h 45)
Quand on parle avec notre réseau, je pense qu'au DSC on est assez
près du réseau, on pilote la table des directeurs
généraux en termes de services, bien sûr que la clinique de
santé dentaire, ce sont des services, mais notre préoccupation
à nous, c'est de s'occuper presque uniquement de la santé. On est
à peu près les seuls à parler ce langage-là et
ça va mieux parler de ça en dehors du réseau que dans le
réseau. Nos partenaires, ce sont les gens du ministère des
Transports pour les accidents, c'est la Communauté urbaine, c'est le
ministère de l'Environnement. On pense que c'est le rôle qu'on
joue de mettre ensemble des organismes de soins et des gens qui ont d'autres
préoccupations. Ce qu'on comptabilise au niveau de la santé, ce
sont les méfaits de ça Quand quelqu'un
se casse la gueule sur les routes et que ça entre dans les
coûts de santé, peut-être qu'on peut faire des choses avant;
môme chose pour l'environnement, pour d'autres choses. je pense que c'est
la grande caractéristique. on a autant de monde, je pense qu'on en a
plus qu'on en avait su début, mais ces gens-là sont
complètement orientés vers la promotion et la protection de la
santé aussi en termes d'épidémie ou de choses comme
ça.
M. Côté (Charlesbourg): Vous parlez dans vos
recommandations, en particulier à la recommandation 2, d'une
autorité, de la nécessité d'avoir une autorité
provinciale responsable de la santé publique. Là, parlez-vous
d'un sous-mlnlstre adjoint?
M. Levine: Ce n'est pas spécifié. On parle
principalement de quelqu'un qui, comme à Toronto, est un médecin
responsable de la santé publique et que ce médecin ait le statut
d'un sous-ministre associé ou qu'il ait le statut de médecin
responsable de la santé publique, attaché directement au
ministre, mais un peu à côté. On n'est pas ailés
aussi loin dans la définition de la formule, mais ce qui est Important,
c'est qu'il y ait une porte d'entrée en haut, très proche du
ministre, qui peut véhiculer les besoins de la prévention et de
la santé communautaire au Québec.
M. Côté (Charlesbourg): Pour tenter d'éviter
ce qu'on a vécu à Saint-Basile, ça, je comprends, pour que
l'action soit plus directe, c'est un peu ça qui est recherché,
finalement.
Vous avez parlé, par la suite, de médecine familiale. Vous
en avez fait état. La Corporation professionnelle des médecins
aussi a fait des efforts pour qu'on puisse davantage former des médecins
en médecine familiale, un peu pour contrer certaines difficultés
que nous connaissions. Nous croyons, quant à nous, que l'article 153 de
l'avant-projet de loi, même s'il n'est pas aussi spécifique que
vous le souhaitez, permettait ce genre d'exercice-là et était en
conformité avec les énoncés de politique de Mme
Lavoie-Roux qu'on retrouve, à la page 77 en particulier, au niveau de la
formation médicale. Ce que ]e comprends de votre intervention, c'est que
vous souhaitez que, de manière beaucoup plus spécifique dans le
libellé même du prochain projet de loi, on puisse faire mention,
oui, de la spécialisation, mais aussi de la médecine familiale
pour être capable d'en retenir et d'en attirer. C'est ce que j'ai
compris.
M. Levine: Je pense que c'est ça l'orientation. C'est
clair que ça n'empêche pas, dans l'avant-projet de loi ni dans les
orientations présentées antérieurement par Mme
Lavoie-Roux, la formation des omnipratlciens. Ce qu'on dit, c'est que c'est une
bataille pour les omnipratl- ciens à l'intérieur des
universités, c'est difficile de trouver leur place et c'est difficile
pour les institutions qui se spécialisent dans la formation des
omnlpraticiens de trouver leur place. Dans ce sens-là, on pense qu'un
libellé dans la loi donnerait le support à ce type d'effort.
M. Côté (Charlesbourg): Une dernière
question. Vous avez dit que la structure régionale telle qu'elle est
aujourd'hui est davantage dominée par l'établissement ou par la
notion d'établissement que par la notion de programme. On en a
parlé un peu depuis le début, on va continuer d'en parler dans
les prochains jours. Mais, lorsqu'on s'adresse à un directeur
général d'un hôpital qui, par surcroît, a la chance
d'avoir un département de santé communautaire et qui souhaite le
garder...
Une voix:...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): La gestion par programme,
c'est une notion que je trouve attrayante. On pourrait davantage atteindre de
meilleurs résultats et avoir davantage l'objectif du
bénéficiaire en premier lieu. Vous voyez ça comment? On
décide demain... D'abord, H y aura une structure régionale, je
l'ai dit, je le répète; on ira au maximum de ce qu'on peut aller
sur le plan des pouvoirs, mais j'aimerais aussi qu'on fasse du chemin sur la
gestion par programme. Comment on implante ça, demain matin? Vous qui
avez à vivre avec une dynamique qui est celle qu'on connaît,
comment est-ce qu'on fait pour implanter ça demain matin, la gestion par
programme? Bien, demain matin, disons sur une période de X
années.
M. Levine: C'est évident que c'est plus facile d'en
parler, de la gestion par programme, mais vouloir l'implanter, ce n'est pas
facile. On va prendre un exemple. Supposons que, sur notre territoire
soclosanltalre, les personnes âgées sont la première
priorité et qu'on décide que, pour cette clientèle, il y a
3 800 000 $ disponibles. Cet argent-là doit aller au programme de
gériatrie actif à l'hôpital de Verdun, ça doit aller
aux soins à domicile, pour les personnes âgées. Ça
doit aller au programme psychogériatrie à domicile qui traite
principalement des personnes âgées. Ça dort aussi aller
à des groupes communautaires capables de développer un programme
d'entraide, par exemple, les popotes roulantes, qui ont besoin d'être
subventionnés.
On détermine, en regardant les besoins de la population
âgée à l'intérieur d'une communauté
donnée, une certaine somme d'argent par tête de pipe. On prend cet
argent-là et on voit si on est capables, à l'intérieur
d'une concertation sous-régionale, de développer des programmes
qui peuvent répondre à ces besoins. Alors, chacune
des institutions qui offrent déjà des services aura des
demandes. Il faut voir si les demandes peuvent entrer pour répondre
à l'ensemble des besoins - peut-être qu'il y aurait besoin d'en
couper quelques-unes, d'en augmenter d'autres -et demander aux groupes
d'étudier ces questions. Je vous donne un exemple, ce n'est pas facile.
C'est vraiment l'élément, probablement, qui va être le plus
difficile à faire. Moi aussi, je crois qu'il est important de le faire
et c'est une des recommandations principales de la commission Rochon.
La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre. M. le
leader de l'Opposition et député de Joliette.
M. Chevrette: Merci, madame. Tout d'abord, je voudrais que vous
me parliez quelques minutes des expériences d'hospitalisation a
domicile. C'est une expérience que vous avez vécue sur votre
territoire. Est-ce que c'est toujours de mise? Ce programme continue-t-il
toujours? Quelle évaluation apportez-vous à ce stade-ci,
relativement aux coûts?
M. Levine: On vient de recevoir, il y a trois semaines, notre
millième admission et patient dans le cadre du programme. Le programme
est demandé régulièrement. Mon évaluation
était une moyenne, rajouter des lits de courte durée pour pallier
des problèmes d'engorgement d'une urgence ou un problème de
manque de lits de soins prolongés sur un territoire avec un programme
qu'on dit élastique. Quand on a eu des crises à l'urgence
après la période de Noël, j'ai donné l'autorisation
de rechercher d'autres infirmières et d'augmenter le nombre de lits
disponibles, parce qu'on avait des malades, à l'urgence, qu'on a
été capable de traiter à domicile. Alors, c'est un
programme qui a cette élasticité et on est capable d'absorber une
clientèle quand la clientèle est là et on est capable de
réduire des effectifs dans le programme quand la clientèle n'a
pas besoin des services.
En termes de satisfaction de la part de la clientèle, il n'y en a
pas un qui revient qui ne demande pas l'hôpital à domicile par
après. Évidemment, on reçoit les plus grands remerciements
de tout le monde. Sur le plan financier, on reste encore à un coût
marginal par lit ou par jour-présence dans le programme autour
maintenant de 164 $ comparé à un coût marginal qui est
encore autour de 230 $ pour un lit dans nos institutions communautaires. Je ne
parle pas du coût marginal dans les lits
ultraspécialisés.
M. Chevrette: Est-ce que les médecins ont collaboré
à la mise sur pied de ce programme?
M. Levine: C'était probablement l'élément le
plus difficile au départ, de convaincre les spécialistes à
l'intérieur de l'institution d'adhérer à ce type de
programme, d'accepter qu'ils peuvent envoyer leurs patients très
malades, ces personnes qui peuvent mourir, à l'extérieur de
l'hôpital pour les traiter à domicile, mais après un
certain nombre d'années. Et avec l'expérience qu'on a maintenant,
on a de plus en plus de collaboration; les pneumologues, par exemple,
collaborent énormément et, des fois même, on a maintenant
des listes d'attente assez régulièrement dans notre
programme.
M. Chevrette: Avez-vous quelque chose à ajouter,
docteur?
M. Demers (Jacques): Moi, je voudrais simplement ajouter que
c'est une question d'entraînement de se faire à l'idée de
ce concept qui était, à toutes fins pratiques, nouveau. Est-ce
que, du jour au lendemain, on peut permettre à une population
médicale de changer ses habitudes de pratique et de permettre aux
patients de rester chez eux et d'être supervisés à distance
un peu? Mais, pour corroborer ce que M. Levine dit, les chirurgiens,
maintenant, sont de moins en moins réticents à transférer
leurs patients dans le postop immédiat, par exemple, pour aller finir la
convalescence sous les soins de l'équipe de l'hôpital à
domicile et ça se fait de façon routinière,
maintenant.
M. Chevrette: je voudrais vous poser la question suivante:
est-ce que vous avez été obligés de fermer des lits pour
fins d'équilibre budgétaire?
M. Levine: La réponse, chez nous, est non. M.
Chevrette: J'espère, avec la...
M. Levine: II arrive quand même que, pour fins de manque de
main-d'oeuvre de soins Infirmiers pendant la période de vacances
scolaires, on a été obligé de réduire la
disponibilité des lits à la population pour une période de
quatorze jours, mais, à toutes fins pratiques, disons pour à peu
près juste dix jours, et qui n'était pas liée à des
objectifs budgétaires, mais était uniquement liée à
la question de la main-d'oeuvre. Je ne suis pas capable entre minuit et 8
heures le matin, même en utilisant des agences qui vous coûtent
trois fois plus cher que le coût normal, de trouver de la
main-d'oeuvre.
M. Chevrette: Merci. Concernant le DSC, j'aurais moi aussi une
question à poser. Quelle est la frontière vis-à-vis de la
prévention entre un rôle de DSC puis un rôle de CLSC?
Ça m'apparaît, si j'écoute et si je lis, par rapport
à ce que je sais que doit faire un CLSC... Quelle est la
frontière pour... Est-ce qu'il y en a un des deux qui est de trop ou si
ça se définit claire-
ment, de par votre expérience? Vous êtes
considéré comme l'un des super D. G., pour-riez-vous nous donner
la nuance ou ce qu'on doit faire pour maintenir en vie un CLSC dans son champ
d'action par rapport à un DSC dans son champ d'action?
M. Levine: Même les D. G. de ce type vont demander à
leur directeur de répondre à ces questions précises...
M. Chevrette: Ah! C'est pour ça qu'ils sont super, ils
savent partager les tâches. Ha, ha. ha!
M. Levine:... et il faut savoir à quel moment...
M. Cadieux: Non. Il faut dire que les DSC puis les CLSC ont
été inventés la même journée; donc, ça
a créé sûrement des problèmes au départ et il
y a eu des gens qui se cherchaient, y compris les DSC, y compris les CLSC. Le
rôle des DSC devait venir un petit peu plus tard parce que, pour jouer un
rôle comme DSC, ça prend toute une série de
prérequis, c'est-à-dire qu'on ne peut pas donner de l'expertise,
ne serait-ce en santé publique, en environnement, en santé au
travail, tant qu'on ne l'a pas acquise. Ça, c'a été une
des forces pourquoi c'est une bonne chose d'être dans les hôpitaux.
Vous savez qu'avant les médecins qui étalent dans les anciennes
unités sanitaires avaient très mauvaise presse auprès de
leurs confrères; ça passait pour des gens qui... Je ne sais pas,
moi... Je ne veux pas donner trop de qualificatifs, parce que Je suis
spécialiste en santé communautaire, Je ne voudrais pas être
là-dedans. Mais la crédibilité de l'hôpital nous a
permis, dans un hôpital comme chez nous, qui n'a pas le coefficient
d'attraction d'un grand centre universitaire, d'attirer une trentaine de
médecins. Disons-le, on est venus à bout de convaincre des gens
d'aller se spécialiser en environnement, en santé au travail, en
maladies infectieuses, à tel point qu'un département de
santé communautaire, dans le cours des choses normales, peut
régler des choses alors qu'il y a quinze ans ça prenait toute la
batterie du ministère pour régler des problèmes. Cette
expertise s'est développée. (17 heures)
Vu qu'on n'est pas confrontés à des problèmes
complexes fréquemment, je ne pense pas qu'on doive retrouver dans un
CLSC toute cette gamme qui est d'ailleurs déjà difficile à
trouver dans les DSC. C'est pour ça qu'on disait que ça prend un
DSC avec une taille performante au point de vue de l'expertise. Si on n'a pas
d'expertise, comment voulez-vous qu'on remplisse notre rôle pour aider
les autres? Ça, c'est en termes de différence par rapport aux
problèmes. Par exemple, dans notre coin, avec la problématique du
sida, ce n'est pas le CLSC qui fait la formation actuellement des gens dans les
hôpi- taux. Vous savez qu'il y a des crises dans les hôpitaux parce
que, tout d'un coup, le personnel ne veut pas traiter les gens; ça prend
des semaines de formation. On a fait une semaine de formation qui a duré
dix Jours au Douglas avec des experts, des gens qui connaissent ça pour
amener les gens à évoluer. Nous on travaille sur les
intervenants. On ne travaille pas beaucoup sur la population par rapport
à de l'expertise. Quand on tombe dans la promotion de la santé,
là on veut que ça soit le monde. Ce n'est pas
nécessairement... Alors, on a deux paliers d'action. Un palier qui est
au niveau de l'expertise dans des domaines complexes de santé publique
et on a un autre domaine parce qu'on a ça comme préoccupation et
qu'on n'est pas occupé par les services... Quand je gérais les
trois CLSC, j'étais comme tout le monde, Je cherchais les
Infirmières qui ne rentraient pas et j'étais pris avec les appels
de nuit et toutes sortes d'histoires comme ça. Maintenant, j'ai le temps
avec l'équipe de me préoccuper de la santé des gens en
faisant des choses pour eux. Donc, deux paliers: mobilisation de la population
et l'autre, au niveau des intervenants. C'est ça, nos rôles. Et ce
qui est complexe, c'est que tant que les gens ne viennent pas nous voir parce
qu'ils pensent qu'on a de l'expertise, c'est parce qu'on n'est pas encore dans
notre rôle. L'expertise, c'est quand les gens nous disent en appelant
chez nous: On peut trouver des choses. Ce sont les grosses différences.
Le CLSC, plus l'organisation communautaire, plus les cas-problèmes
quotidiens de maintien à domicile; c'est le quotidien. Et ça,
c'est complexe, c'est difficile, ça accapare toutes leurs
ressources.
La Présidente (Mme Marois): Une question, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, oui?
M. Trudel: Mme la Présidente, merci. Vous nous avez dit,
M. Levine, à deux ou trois occasions, dans votre intervention, qu'en
termes de planification, vous avez toujours utilisé l'expression d'une
planification stratégique sous-régionale. Qu'est-ce que c'est
"sous-régionale" dans le cas du territoire que vous desservez?
M. Levine: C'est la carte que vous avez devant vous illustrant ce
qu'on appelle le sud-ouest de l'île de Montréal qui inclut:
LaSalle, Côte-Saint-Paul, Ville-Émard, Verdun,
Pointe-Saint-Charles, île-des-Soeurs, et on suggère: ville
Saint-Pierre, Saint-Henri et Petite-Bourgogne à la suite de leur
demande.
M. Trudel: O. K. Île-des-Soeurs.
M. Levine: Île-des-Soeurs est effectivement dans notre
territoire.
M. Trudel: II y a moins de problèmes un
petit peu, là?
M. Levine: Un peu moins de problèmes.
M. Trudel: Vous considérez donc qu'à cet
égard, la planification régionale qui, forcément,
travaille à partir de moyennes, de statistiques représentant des
problématiques moyennes qui font que ça s'équilibre
quelque part quand on met l'Île-des-Soeurs avec les quartiers dont vous
venez de nous parler, ça ne nous décrit pas bien la
réalité et qu'il faut travailler au niveau de la
sous-région et non pas au niveau de la grande région de
Montréal, par exemple, si l'on veut atteindre des résultats
probants en santé communautaire, etc.
M. Levine: Si on parle très spécifiquement de
l'île de Montréal, la réponse est oui. La
problématique du "Lakeshore", avec le type de communauté, la
culture et d'autres choses est totalement différente de celles de Verdun
et de Pointe-Saint-Charles qui ont des populations parmi les plus pauvres au
Québec et au Canada.
M. Trudel: Et avec la mécanique des régies
régionales, est-ce qu'on ne risque pas de passer à
côté de ce type de planification nécessaire que vous venez
de nous décrire, compte tenu des territoires qui seront couverts, du
nombre d'Institutions, etc. ?
M. Levine: Si la régie régionale n'est pas capable
de comprendre et de réaliser la nécessité de ce type de
sous-régionalisation à l'intérieur de sa région,
oui on va passer à côté royalement et, à ce moment,
ce serait important que la régie régionale regarde sa
capacité de fonctionner. Mais l'un des principes, j'ai l'impression que
ce sera surtout à Montréal de réaliser la divergence et
les distinctions entre les différentes populations de
Montréal.
M. Trudel: Très bien.
La Présidente (Mme Marois): Ça va? Non?
M. Trudel: Non, j'en aurais une autre si j'ai le temps
encore.
La Présidente (Mme Marois): Oui.
M. Trudel: Le ministre a souvent dit, et de notre
côté aussi, qu'il y a une apparence de gros problèmes de
financement dans le réseau. Vous l'avez abordé, vous avez
même dit au tout départ: Voyez-vous, une des solutions, ça
passe par l'omnipratique, par les médecins omniprati-ciens et tout ce
que vous avez décrit comme système, c'est que ça pourrait
nous éviter ce qu'on appelle communément le magasinage. Il est
évident, pour reprendre une expression du ministre, qu'il faut se
questionner aux deux bouts, et sur le magasinage, mais aussi sur le
système de production d'actes et d'analyses, le système
producteur d'actes. Est-ce que vous êtes d'accord avec plusieurs milieux
qui nous affirment qu'il y aurait dans le système hospitalier, en
particulier au niveau des actes médicaux, à peu près 20 %
d'actes au-dessus de ce qu'on pourrait considérer comme normal,
c'est-à-dire une surproduction de 20 % d'actes médicaux? Ou
prenez-le autrement: Est-ce qu'on pourrait réduire assez facilement de
20 % le nombre d'actes commis dans le système actuellement, ou
réalisés dans le système actuellement?
M. Levine: Pour répondre, je n'oserais pas donner un
pourcentage. Je n'ai vraiment ni les données ni l'expertise pour le
faire. On a le sentiment qu'effectivement il y a une surconsommation. Je ne
suis pas convaincu que la surconsommation soit le réel problème.
C'est ce qui découle de la surconsommation en termes d'examens
demandés, de tests demandés et tout le reste qui est
réellement problématique. Effectivement, l'introduction des
médecins de famille et l'encouragement à ce que chaque individu
au Québec ait son médecin de famille seraient des moyens
d'éviter une partie de cette problématique.
M. Trudel: Vous avez une grande expérience de la situation
et des gestes qui sont posés dans la pratique de la santé au
Québec. Il y a des médecins qui sont présents ici; il y
avait un docteur tantôt qui nous disait, par rapport à d'autres
dimensions, qu'il y a moyen de changer des pratiques médicales par
rapport à l'hospitalisation qu'on pourrait appeler "hors des murs". Il y
a aussi beaucoup d'études qui nous disent que si nous avions un
régime de "no-fault" en médecine au Québec, nous pourrions
éviter jusqu'à 20 % de gestes et d'analyses qui sont posés
par une espèce de surprotection que tendent à se donner les
médecins, les praticiens de la santé et qu'à cet
égard, toute la partie du financement qui coûte si cher,
peut-être que l'Introduction d'un régime de "no-fault" avec des
mécanismes afférents, bien sûr, pourrait nous amener
à cette réduction d'environ 20 % des actes médicaux et des
analyses, de tout ce qui en découle et qui est très
coûteux. Et, à partir de ce moment-là, nous n'aurions plus
cette problématique nécessaire du financement et l'obligation de
penser à des impôts en avant, en arrière, à rebours,
tout ce que vous pouvez penser, des tickets modérateurs et toute autre
chose du même genre. Est-ce que c'est possible, cette situation?
M. Levine: Je vais demander au Dr Demers de répondre.
La Présidente (Mme Marois): Dr Demers?
M. Demers: C'est possible, comme vous le dites. Les pourcentages,
à mon avis, sont difficiles à évaluer. Il est sûr
que l'aspect médico-légal de la pratique a causé une
augmentation du coussin de sûreté, si vous voulez, que le
praticien est obligé d'utiliser dans le traitement des malades. Cela
veut dire une plus grande utilisation d'examens de laboratoire, une plus grande
utilisation de tests radiologiques, une plus grande utilisation de l'expertise
de ses confrères, ce qui fait que vous avez une... C'est l'une des
raisons d'une certaine surconsommation. Il est évident qu'un
système "no-fault" pourrait diminuer et non abolir cette
surconsommation. Il y aura toujours certains individus dont le sentiment de
sécurité face à un patient n'est pas le même que
celui de leur voisin, qui consomment peut-être un peu plus d'examens de
laboratoire et qui se sécurisent un peu plus avec l'aide de leurs
confrères. C'est humain et on ne pourra pas abolir totalement ce que
vous notez comme une surconsommation de la part des praticiens.
La Présidente (Mme Marois): Ça va? Merci, M. le
député. M. le député de Verdun, je crois que vous
vouliez soulever une question.
M. Gautrin: Rapidement, Mme la Présidente, tout d'abord,
je voudrais féliciter le DSC pour son implication dans la
communauté. Je pense que je peux témoigner ici de son rôle
Imaginatif et de son implication dans la protection de la santé publique
dans ma région.
Dans le document de Mme Lavoie-Roux, on réduisait le nombre des
DSC de 32 à 20. Si on devait réduire le nombre de DSC, compte
tenu des critères que vous avez établis, qui sont les
critères d'une zone homogène, la possibilité de
développer un partenariat, la possibilité aussi d'avoir un
certain nombre de ressources sur le territoire, quel est le territoire maximal
qui pourrait constituer un nouveau DSC si on devait réduire le nombre
des DSC, c'est-à-dire qu'est-ce que vous pourriez avoir pour satisfaire
encore à ces critères d'homogénéité, de
partenariat et de ressources nécessaires sur le territoire? Autrement
dit, comment pouvez-vous agrandir votre territoire parce que si on diminue le
nombre de DSC, bien sûr, ils vont chacun avoir un territoire plus
grand?
M. Cadieux: D'abord, pour donner un aspect un petit peu plus
régional à la réponse, mol, je pense que l'avant-projet de
loi qui disait qu'on devrait faire des consultations régionales ou
môme qu'on devrait avoir des consultations locales va venir amoindrir ce
problème-là. Moi je pense que les critères en dehors de
ceux qu'on a - et c'est bien sûr que je pourrais répondre
spécifiquement à votre question par rapport à notre
territoire, mais ça n'aurait pas de correspondance pour vous - c'est
d'aller aux limites d'une zone soclosanltaire qui peut travailler ensemble.
C'est-à-dire, nous on est limité, par exemple, par les
communautés, par les chambres de commerce, par les associations de
marchands, par les districts que la ville de Montréal vient de former
présentement, ce que les journaux couvrent. A ce moment-là, une
zone soclosani-taire, ce n'est pas uniquement une question de localisation.
L'autre chose à laquelle il faut faire attention, c'est aux
acquis. Pendant ces quinze dernières années-là, plusieurs
DSC ont appris à travailler ensemble avec des individus et ça,
c'est compliqué que de mettre un réseau en contact, que les gens
puissent se mettre à la table, abandonner les petits clochers et voir ce
qui en est. Il est bien sûr que si on considère que le DSC devient
un petit clocher, en soi, moi, je pense qu'il faut l'abolir. Si c'est une zone
qui peut se concerter et mieux mobiliser la population, ça, c'est la
limite territoriale qu'on doit avoir.
Moi, je ne pense pas que ce soit un critère géographique.
Je ne pense surtout pas que ce soit une question de nombre. Il ne faudrait pas
tomber dans des nombres trop grands de la promotion de la santé.
À mon sens, dépasser 150 000, 200 000 personnes, c'est
très compliqué. On peut bien travailler dans nos institutions,
voir ce que cela a l'air, sauf que les résultats sont en termes de
résultats. Il faudra voir comment cela a diminué, comment il y a
moins de placements, comment il y a moins de marginalité. Ce sont des
critères de résultats, je pense, qu'il faut voir, ce n'est pas le
nombre. Pour moi, ce n'est pas Important qu'il y en ait 25, 30 ou 40. Je pense,
par exemple, qu'on doit encourager des structures qui vont vers la promotion de
la santé parce que la réforme est en termes, non pas de service,
mais en termes de prise en charge et de mobilisation d'ensemble. Donc, dans ce
sens, voyons quelles sont les bonnes raisons par rapport à tel ou tel
critère et sûrement qu'à Montréal, ce n'est pas la
même dynamique que sur la Côte-Nord ou dans le Bas-Saint-Laurent.
Chaque région a probablement ses dynamiques locales.
La Présidente (Mme Marois): Merci. Il n'y a pas d'autres
questions. Une question très brève, une minute. Je ne reviendrai
pas sur la médecine de famille. Les médecins qui oeuvrent dans
les CLSC ont marqué non pas de la résistance, loin de là,
mais ils ont dit: À cause des nouveaux modèles familiaux qui se
développent, à cause de la mobilité de la population,
c'est peut-être un peu un concept qui est difficile à appliquer au
moment où on vit maintenant. Donc, est-ce que ce n'est pas plus une
approche de continuité qu'une équipe, finalement, va assurer,
pour atteindre le même objectif et qu'on peut difficilement revenir au
concept de médecine familiale au sens du médecin attaché
à une personne, à une famille, à un noyau, à un
groupe?
M. Cadieux: C'est-à-dire que pour moi, la mobilité,
la mobilisation, disons, il ne faut pas que ce soit un terme, un concept
abstrait. La notion... Ça, ce n'est jamais abstrait. Mobiliser des gens,
ça veut dire leur donner des choses pour pouvoir eux-mêmes
s'attaquer à ça. C'est ça, la mobilisation. C'est
sûr que ça prend des choses très concrètes et
ça nous prend des objectifs très précis. Si vous regardez
la campagne, L'amitié n'a pas d'âge, notre objectif est de
cinq à dix ans, c'est d'amener une génération de
jeunes à se préoccuper de l'entraide et à se
préoccuper des personnes âgées. Donc, il faut que les gens
trouvent eux-mêmes leurs solutions. Ce n'est pas nous qui devons les
trouver et, plus le noyau est petit, plus ça fonctionne, c'est
sûr. (17 h 15)
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Oui, M. Levine.
M. Levine: Sur votre question, la médecine familiale qui
se développe, est un peu différente de la pratique des
omnlpraticiens qu'on connaît:. Vous avez de plus en plus de
polycliniques, vous avez de plus en plus de regroupements de médecins en
médecine familiale. Je pense qu'il est Important d'encourager par la
publicité et d'autres moyens, que chaque famille au Québec trouve
un endroit stable où elle peut rencontrer un médecin qui a autour
de lui un autre groupe de médecins et qu'on développe une
habitude d'utiliser ces mêmes médecins chaque fois qu'il y a une
action ou chaque fois qu'il y a un événement qui se passe.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Merci, M. le leader.
M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup. Alors, ce
que je comprends, c'est que concernant la mise en place de gestion par
programme et de subventions par programme, il faut continuer de
réfléchir sur la mécanique d'implantation.
M. Levine: Absolument.
M. Côté (Charlesbourg): On compte sur vous.
M. Chevrette: Bonne chance!
La Présidente (Mme Marois): Merci de votre
présentation et de votre présence à la commission.
J'inviterais maintenant le Regroupement des petits et moyens hôpitaux de
la région de Montréal à prendre place à la table,
s'il vous plaît.
Je vous souhaite la bienvenue à la commission. J'aimerais, comme
les autres groupes qui vous ont précédés, que la personne
qui va présenter le mémoire - je crois que c'est la
présidente du Regroupement, Mme Bailly - nous identifie les personnes
qui l'accompagnent.
Regroupement des petits et moyens hôpitaux de la
région de Montréal
Mme Bailly (Juliette P.): Merci, Mme la Présidente, M. le
ministre, Mmes et MM. les commissaires. Oui, effectivement, j'aimerais vous
présenter Mme Turenne, à ma droite, qui est présidente du
conseil d'administration du centre hospitalier Fleury et qui représente
la corporation au conseil d'administration; aussi à sa droite, M.
Bertrand Girard, directeur général du centre hospitalier
Saint-Michel et secrétaire-trésorier du Regroupement des petits
et moyens hôpitaux; M. Jean Michaud, à ma gauche, directeur
général du centre hospitalier pour convalescents Julius
Richardson; Mme Marie-Hélène Ouellette, à ma gauche, qui
est secrétaire du Regroupement. Mme la Présidente, je voudrais
aussi signaler que nous avons plusieurs présidents et directeurs
généraux dans la salle, qui nous accompagnent, qui se sont
libérés pour la rencontre d'aujourd'hui.
Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les commissaires,
au nom du Regroupement des petits et moyens hôpitaux de la région
de Montréal, je vous remercie de nous accorder le privilège de
vous présenter nous-mêmes le résultat de notre
réflexion en regard de l'avant-projet de loi sur les services de
santé et les services sociaux.
Je vous rappelle que le Regroupement est l'assemblée des
hôpitaux de la région de Montréal dispensant des soins
généraux et spécialisés et qui ne sont pas
affiliés aux universités pour l'enseignement de la
médecine. Alors, ça va faire changement de ce que vous avez
entendu depuis tantôt. au niveau du québec, les hôpitaux
généraux et spécialisés constituent les deux tiers
des hôpitaux de soins de courte durée. sans vouloir
prétendre, bien sûr, parler au nom de tous les centres
hospitaliers généraux et spécialisés de la
province, le regroupement est représentatif de la réalité
provinciale, tout en gardant des caractères distinctifs propres à
la région de montréal. en effet, la réalité
montréalaise est différente pour plusieurs raisons, dont les
principales sont l'émergence de nouvelles ethnies, les
différences socioculturelles, les regroupements de collectivités,
les démarches socio-économiques, les particularités
linguistiques, les diverses habitudes de vie. à titre indicatif, sur une
population régionale de 2 000 000, 19 % s'expriment dans une autre
langue que le français et l'anglais, 25 % sont d'origine autre que
francophone ou anglophone.
Compte tenu du rôle primordial des hôpitaux
généraux et spécialisés auprès de la
population, puisqu'ils sont confrontés habituellement les premiers aux
problèmes de santé, ils sont égale-
ment les premiers à être touchés par la
réforme des structures proposée par l'avant-projet de loi. Ladite
réforme exigera du temps, de l'énergie et sera fort
coûteuse. Nous croyons qu'elle devrait plutôt faire appel au
dynamisme des établissements et à la responsabilité de ses
administrateurs. Voilà pourquoi le Regroupement des petits et moyens
hôpitaux a jugé important de vous transmettre ses principales
préoccupations et recommandations en regard de lavant-projet de loi.
Nous profitons toutefois des quelques minutes dont nous disposons en ce moment
pour vous exprimer les recommandations que nous jugeons les plus
Importantes.
Premièrement, établir une politique globale de
santé, préalablement à la mise en place des structures
administratives, et qui tienne compte des droits et des responsabilités
des citoyens.
Deuxièmement, adapter la politique et les objectifs de
santé aux caractéristiques ilstinc-tives régionales,
particulièrement pour la région métropolitaine de
Montréal.
Troisièmement, réaffirmer et renforcer l'autonomie des
conseils d'administration. Il est essentiel, en effet, qu'une politique globale
soit connue, que chacun y adhère afin que les décisions
administratives particulières en soient le prolongement logique dans
lequel doit s'Inscrire le principe de l'autonomie des établissements.
Cette dernière réalité est trop souvent Ignorée
actuellement. Elle doit, au contraire, animer les conseils d'administration et
les directions pour permettre aux établissements d'assumer leur
véritable pouvoir, celui que leur confère la population pour
laquelle ils existent. Il serait alors facile de respecter les
caractéristiques de chaque collectivité, en adaptant à
celle-ci les moyens d'atteindre les objectifs de santé et de
bien-être.
En regard des principes d'universalité, d'accessibilité et
de qualité des services, principalement reconduits avec vigueur par les
orientations du gouvernement pour la santé et le bien-être au
Québec, le Regroupement soutient que, pour maintenir
l'universalité des services, iI faut la renforcer par leur adaptation
aux nouvelles réalités d'une société
québécoise en constante évolution. Que ce soit au plan de
la culture, de la langue, des valeurs ou de la santé, tous les services
doivent évoluer pour demeurer universels. Quant à
l'accessibilité des services, sa limite doit être clairement
établie, et les citoyens doivent assumer leurs responsabilités
face à la prise en charge de leur santé et de leur
capacité de se payer le luxe de la facilité. Le citoyen bien
informé saura, dans la majorité des cas, jouer le rôle
économique d'ajuster sa demande de services à l'offre que lui en
propose l'État.
Quatrièmement, renforcer le rôle des corporations
propriétaires. Au chapitre des établissements, nous portons
à votre attention la préoccupation du Regroupement quant à
la place des corporations propriétaires. Je sais que ce matin,
c'était très présent; on continue aussi, même si on
n'est pas des religieuses. Elles ont dit que ces corporations assurent
notamment le maintien des idéaux qui ont présidé au
développement des hôpitaux. Elles contribuent également
à assurer la continuité entre les promoteurs, les
bâtisseurs et les réalisateurs. Leurs membres sont les mieux
désignés pour maintenir les acquis alors que les autres membres
des conseils d'administration sont susceptibles de mandats passagers. De plus,
iI faut maintenir l'autonomie des corporations au lieu d'assujettir la
nomination de leurs membres au bon vouloir des conseils d'administration.
Cinquièmement, retourner les centres hospitaliers de soins de
courte durée à leur mission. À cette fin, iI est temps
d'actualiser les promesses déjà faites en regard des personnes
âgées. Actuellement, la dispensation des soins et services aux
personnes de 65 ans et plus représente 60 % des dépenses du
réseau. Ces mêmes personnes utilisent également plus de 40
% des jours d'hospitalisation dans les centres hospitaliers de soins de courte
durée. Cette situation est une des principales causes de l'engorgement
des urgences. La priorité accordée à la prise en charge
des personnes âgées ne signifie pas uniquement l'augmentation de
places d'hébergement et de soins de longue durée, mais d'abord la
consolidation des ressources déjà amorcée ou timidement
réalisée, soit la gériatrie active dans les CH de courte
durée, le maintien à domicile avec ce que cette
réalité comporte de soins de prévention et curatifs
à domicile, de réadaptation et autres ressources
légères.
Sixièmement, renforcer l'autonomie des conseils d'administration.
Quant aux conseils d'administration des hôpitaux, quelques points
Importants sont abordés dans la représentativité des
médecins et le statut du directeur général. En effet,
partant du principe de la présence médicale dans les
hôpitaux et de la responsabilité qui en découle, iI va de
soi que l'expertise professionnelle du médecin est requise au sein des
conseils pour fournir l'éclairage qui facilitera le choix des
orientations. D'autre part, nous sommes persuadés que la présence
du directeur général comme membre à part entière du
conseil d'administration ne devrait pas être questionnée.
Septièmement, faciliter la pratique médicale
hospitalière. Il faut dire également a quel point la gestion
médico-administrative est difficile dû à l'absence
d'incitatifs financiers dûment budgétés, ce qui rend la
situation des hôpitaux pour le moins inconfortable. Avec l'adoption, en
1984, de la loi 27, cette situation devait se régler. Les hôpitaux
attendent toujours. Une autre situation problématique est celle
causée par le mode de rémunération actuel des
médecins, lequel n'a rien pour les attirer dans les hôpitaux
généraux et dans les hôpitaux de réadaptation. De
plus, l'absence de charges universitaires et le contln-
gentement des spécialistes ajoutent à la difficulté
de recruter, et ce, même à Montréal.
Huitièmement, faire confiance au réseau public. Au niveau
des ressources financières, souvent, le concept de privatisation est
avancé. Sachons d'abord emprunter, au réseau privé ses
méthodes de gestion, l'utilisation optimale qu'il fait de ses ressources
humaines et surtout la marge de manoeuvre dont II dispose. Il faut surtout
transférer au système public le concept d'imputabllfté qui
caractérise le privé car les deux secteurs ont une
clientèle à respecter. Les expériences de privatisation
ont des résultats positifs dans des secteurs particuliers et non dans
une gamme complète de services. De plus, du secteur privé, il
faut accentuer l'utilisation de forces irremplaçables à titre de
bénévoles, de membres des conseils d'administration et de membres
de fondation.
Neuvièmement, encourager la créativité et
l'autonomie. L'état actuel du réseau ne favorise pas les
innovations et cela, en raison des multiples règles, procédures,
normes et décrets, tous plus sclérosants les uns que les autres.
Avant de dire que les conseils ne peuvent pas administrer et que les directeurs
généraux ne peuvent pas gérer, il serait
préférable de leur proposer des obligations de résultats
au lieu d'obligations de moyens.
Compte tenu de ce que nous venons de vous exprimer et que nous
présumons déjà de l'augmentation générale de
l'autonomie des établissements, voici trois niveaux de recommandations
que nous considérons comme les plus susceptibles de contribuer à
l'amélioration que nous souhaitons. (17 h 30)
Au niveau national, nous recommandons que le ministère
élabore une politique globale de santé et de bien-être et y
attache une enveloppe budgétaire adaptée; que le ministère
précise et diffuse les objectifs de santé et de bien-être
et y consente les enveloppes budgétaires adaptées; que le
ministère précise le niveau d'atteinte des résultats pour
en permettre l'évaluation; que le ministère spécifie ou
confirme la classification des hôpitaux et consente les ressources
financières cohérentes aux programmes; que le ministère
actualise l'implantation de la carte-santé pour chaque citoyen; que le
ministère développe des modes de rémunération
facilitant l'engagement des médecins; que le ministère
développe un mode de rémunération autorisé au
budget des hôpitaux pour les médecins ayant une tâche
administrative.
À l'égard du niveau régional, nous recommandons que
la structure régionale soit légère et souple, tenant
compte des différences régionales; que la structure
régionale développe une concertation réelle et efficace
avec les départements de santé communautaire; que la structure
régionale développe des incitatifs favorisant l'innovation et la
complémentarité des établissements; que la structure
régionale soit responsable des programmes d'entretien des
immobilisations et de renouvellement des équipements; que la structure
régionale soit responsable de la promotion, de l'implantation des
nouvelles technologies et des ressources afférentes dans les petits et
moyens hôpitaux au même titre et en même temps que dans les
centres universitaires.
Finalement, au niveau local, nous recommandons que les conseils
d'administration favorisent et facilitent la fusion des établissements
sur une base volontaire; que les corporations propriétaires soient
maintenues comme élément de continuité; que le conseil
d'administration soit maintenu dans chaque établissement qui ne va pas
à rencontre des fusions; que le conseil d'administration de chaque
établissement ait une complète autonomie en regard de la
budgétisation des soins et services à l'intérieur du
budget consenti; que le conseil d'administration soit l'unique responsable de
la durée des mandats du directeur général; que les centres
hospitaliers généraux spécialisés
bénéficient de programmes spéciaux pour l'embauche et la
rétention de médecins spécialistes; que les
établissements favorisent et facilitent localement le
développement des ressources humaines.
Nous souhaitons ardemment que vous considériez l'importance que
nous attachons aux recommandations que nous vous avons formulées. Elles
s'inscrivent dans la volonté de décentralisation
manifestée par le ministre. Elles exigent un système
administratif plus responsable, plus souple, plus respectueux des
collectivités spécifiques. Elles favorisent les engagements
professionnels et humains des individus qui conçoivent le système
et qui dirigent les organisations dans un objectif ultime de mieux
répondre aux besoins de la population.
Maintenant, Mme la Présidente, M. le ministre, Mme Denise Turenne
complétera sur les points des conseils et des corporations.
La Présidente (Mme Marois): Certainement.
Mme Turenne (Denise): Mme la Présidente, M. le ministre,
Mmes et MM. les membres de cette commission, il me fait plaisir de pousser un
peu la réflexion concernant les cinq thèmes suivants, à
savoir: l'autonomie des établissements comme tels, les corporations
propriétaires, le conseil d'administration unique pour l'ensemble des
établissements d'un territoire de CLSC, la présence
médicale à nos conseils d'administration et la durée du
mandat des directeurs généraux.
Premièrement, autonomie des établissements. Nous
conviendrons facilement tous ensemble, probablement, que l'administration de
notre réseau de la santé et des services sociaux n'est pas un
mince défi. L'avant-projet de loi met de l'avant certaines structures et
des mécanismes qui décentralisent pour certains points - on parie
de planification, de programmation, ça c'est
de la décentralisation - et on met de l'avant également
d'autres mécanismes qui sont de la déconcentration, en
particulier quand on parle de budget.
À ce stade-ci, nos interrogations sont de l'ordre suivant. Nous
nous demandons jusqu'à quel point les établissements ne seront
pas confrontés à nouveau avec deux paliers de décision au
point de vue administratif et au point de vue budgétaire. Pour les
gestionnaires d'établissement, ces multiples paliers sont habituellement
- c'est ce qu'ils nous disent régulièrement - associés
à une importante bureaucratie, et qui dit bureaucratie dit
inefficacité, inefficience et le reste. L'autonomie des
établissements, la créativité des gestionnaires, des
mandats clairs, des pouvoirs proportionnels aux responsabilités à
assumer, des décisions prises le plus près possible de l'action
sont des principes que notre regroupement privilégie.
Deuxième point: les corporations propriétaires. Je me
permettrai, bien sûr, étant donné que nous avons
assisté à la présentation des corporations religieuses ce
matin, de soutenir évidemment les points qui ont été
présentés à ce moment-là. Je pense, d'ailleurs, que
M. le ministre a bien reçu, au môme titre que les membres de cette
commission, les représentations qui ont été faites
à ce moment-là. J'insisterai sur la représentation,
toutefois, pour être bien certain qu'on s'en va du bon côté
sur ce plan-là, de ces corporations à nos conseils
d'administration, que ce soit au niveau des corporations religieuses ou encore
au niveau des corporations laïques. Bien sûr que nous, cet
après-midi, on peut plus vous parler des corporations laïques avec
lesquelles on est plus familier.
Qu'est-ce que ça veut dire, ces corporations, pour nos conseils
d'administration depuis les années que je les connais,
c'est-à-dire une quinzaine d'années? En bref, je vous dirai, pour
être bien claire, qu'habituellement, c'est un moyen pour avoir des gens
Intéressants et des gens intéressés, des gens qui
assurent, dans nos établissements, la continuité, des gens qui
assurent la stabilité, des gens qui poursuivent les idéaux, qui
poursuivent les programmes à réaliser. Chez ces
personnes-là, habituellement, on retrouve ce que j'appellerai
modestement de la maturité, un brin de sagesse; vous savez, des choses
qu'on ne retrouve pas nécessairement partout.
La corporation, c'est aussi, à l'intérieur des modes et
des collèges électoraux avec lesquels nous avons vécu ces
dernières années, un collège qui a accueilli des
administrateurs qui ont eu l'occasion de faire leurs preuves dans d'autres
collèges électoraux et qui nous semblaient fort
intéressants et intéressés et que, lorsque leur mandat n'a
pas été renouvelé, nous avons Invités, finalement,
à devenir des membres des corporations. Alors, ces gens-là, ce
collège électoral accueille également des administrateurs,
donc, comme je dis, qui ont fait leurs preuves. Cela permet ce que j'appellerai
un équilibre avec de nouveaux administrateurs qui ont à faire
leurs classes avant d'assurer pleinement leur rôle d'administrateur.
Alors, bien sûr, notre question, c'est: Pourquoi ne pas maintenir
les acquis? On a quelque chose qui est bon, quelque chose qui est valable,
pourquoi changer pour changer? Et notre regroupement, bien sûr, pousse
dans le sens du maintien de ces corporations-là. Depuis quelques
années, il y a trois membres à nos conseils; il y a quelques
années, II y en avait quatre, et je vous dirai, personnellement, que
c'était encore mieux.
Notre point suivant: les conseils d'administration. Notre projet de loi
dit: Un conseil d'administration unique par territoire de CLSC, et ceci
amène, vous le savez - j'Insiste et j'y reviens, mais pardon - des
modifications importantes pour des centres hospitaliers comme les nôtres,
c'est-à-dire des centres hospitaliers généraux et
spécialisés.
Comme membre du conseil d'administration, si j'essaie de voir cette
structure-là comme ça, je vous dirai que je trouve que c'est une
belle continuité pour continuer à servir la population. J'y vols
également - je suis au conseil d'administration de l'hôpital
Fleury depuis quinze ans - l'occasion d'agrandir mes horizons - donc, je vois
ça positivement - l'occasion, encore une fois, d'agrandir notre vision.
J'y vois également quelque chose que j'appellerais comme une diminution
du petit esprit de clocher qu'on a facilement quand on est affilié
à un centre hospitalier, à un établissement depuis de
longues années. J'y vois également quelque chose que j'aime bien
personnellement, ça s'appelle un processus électoral avec
assemblées publiques et tout ça. Au départ, lorsque je
suis arrivée, encore une fois, pour moi, dans le milieu hospitalier,
j'étais élue par les usagers. Alors, pendant sept ou huit ans,
ça a été de cette façon-là qu'a
été ma participation. Alors, ce conseil d'administration unique,
je ne suis pas réfractaire à ça au départ, mais II
y a des questions de structure hybride absolument importantes et c'est ce que
j'aimerais porter à votre attention cet après-midi. Et ça,
je suis très ambivalente à ce niveau-là. Structure hybride
par rapport à des établissements qui sont distincts à
l'intérieur, encore une fois, de ce territoire de CLSC, des
établissements distincts, des établissements qui sont
indépendants, qui ont chacun une mission complémentaire.
Ça, ça va bien.
Un conseil d'administration, plusieurs D. G. et un seul D. G. à
ce conseil d'administration-là; là, j'ai des problèmes,
par exemple, par rapport à une situation qui pourrait être tout
bonnement et tout carrément, tout honnêtement, tout directement
une fusion de ces établissements avec un conseil d'administration et un
D. G. de ces établissements-là, quitte à ce qu'il y ait
des
adjoints.
Le scénario à l'étude veut dire - à un
moment donné, on essayait de réfléchir à ce
sujet-là - qu'à tour de rôle, à ces conseils
d'admlnistratlon-là, on aurait un O. G. qui travaillerait avec nous
pendant une année et, l'année suivante, iI y aurait un autre D.
G. Moi, je me dis: Mon doux seigneur, c'est difficile de développer ce
que j'appellerais une relation adéquate avec les premiers gestionnaires
de nos établissements. Je ne suis pas capable de faire ça, moi!
J'ai beaucoup de difficultés. Imaginons-nous, à ce
moment-là, si on pousse plus loin la réflexion, comment on va
faire, comme conseil d'administration, pour évaluer ces
gestionnaires-là - c'est un rôle important du conseil
d'administration de s'assurer qu'on a le bon gestionnaire, la bonne personne,
au bon moment, au bon endroit - si on ne les connaît pas, si on ne les
voit pas? À toutes fins pratiques, c'est difficile de remplir ce
rôle-là. Donc, à ce moment-là, un
établissement, un conseil d'administration, ce sont des liens
hiérarchiques, des structures claires, des structures limpides. Alors,
il y a peut-être lieu, si on abandonne cette idée-là ou si
on la revolt, de créer des incitatifs pour plutôt favoriser la
complémentarité entre les différents
établissements, puisque c'est ça l'objectif qui est visé
par le projet de loi, probablement.
Un autre élément, la présence médicale
à nos conseils d'administration. Mme la présidente, Mme Bailly, a
mentionné tantôt que partant tout simplement - à un moment
donné les choses sont claires, les choses sont lumineuses - du principe
de la présence médicale dans nos établissements et de la
responsabilité qui en découle, il semble aller de soi, pour les
représentants de notre regroupement, que l'expertise professionnelle du
médecin est requise au sein de nos conseils d'administration pour
fournir l'éclairage qui va faciliter les choix, qui va faciliter les
différents arbitrages qu'il y a lieu de faire
régulièrement au niveau de nos conseils. Occasionnellement, vous
savez, avec les contraintes et les restrictions budgétaires que nous
vivons dans le réseau depuis plusieurs années, il est tentant de
traiter ce que j'appellerai le budget. On fait ça
régulièrement, vous savez, les gestionnaires, traiter les
budgets. Il est bon, à ce moment-là, avec la présence
médicale, de se faire rappeler que notre rôle est aussi de traiter
le budget, mais c'est surtout de traiter le patient, de traiter le malade qui
vient chercher des soins et des services à l'hôpital.
La Présidente (Mme Marois): Je m'excuse. Vous n'êtes
pas sans savoir que vous avez dépassé un peu le temps. Je vous
laisse aller, ça va.
Mme Turenne: Je termine; deux secondes, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Marois): D'accord, c'est juste parce
que ça laisse un petit moins de temps aux gens de la commission et comme
on a des obligations, évidemment, on doit quand même terminer aux
heures qui sont prévues.
Mme Turenne: Je veux bien. Je termine avec le mandat du directeur
général. Pour nous, il nous apparaît important, à ce
moment-là, de dire que, si l'objectif avoué au niveau du
gouvernement est d'assurer la mobilité des cadres supérieurs, II
y a sûrement d'autres moyens et d'autres façons de faire pour
assurer cette mobilité-là et qu'il est possible de regarder le
dossier dans ce sens-là. Donc, la mesure mise de l'avant est
négative et perçue très négativement par les
gestionnaires du réseau, et je pense qu'elle peut l'être
facilement par nos établissements. Donc, un maximum de deux contrats en
huit ans, ce n'est peut-être pas la façon de faire; on veut
être capable de garder nos D. G. quand Ils sont bons. Je vous
remercie.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Merci de votre
présentation. M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci. C'est effectivement
une présentation qui couvre, je pense, beaucoup de points
d'interrogation, évidemment, vus par des établissements qui ont
aussi des problèmes quotidiens tout aussi importants que ceux des gros
centres hospitaliers. Je serai obligé d'être très
sélectif dans mes questions. Ça me tentait de faire une analogie
avec ce que des infirmières auxiliaires, des infirmières et des
médecins vivent quand on les écoute, lorsque vous nous parlez de
la structure régionale. Les infirmières nous disent que leur
champ a été envahi par les médecins et les
infirmières auxiliaires nous disent, par le fait même, que les
infirmières auxiliaires ont eu un champ qui a été envahi
par les infirmières, laissant peu de place à l'infirmière
auxiliaire. Donc, il y a le pouvoir central, l'omnipuissance et présence
du ministère, il y a une structure régionale et il y a des
centres hospitaliers qui ont à subir les contraintes budgétaires
et des décisions de concertation au niveau régional. (17 h
45)
On a proposé une structure régionale avec des pouvoirs.
Peut-être que ça ne va pas assez loin. Évidemment, on a une
commission parlementaire et c'est pour vous entendre et pour voir ce qu'on peut
améliorer. L'intention était, bien sûr, de donner plus de
pouvoirs à la structure régionale pour décider un certain
nombre de choses en région puisque, à mon avis, la région
est encore mieux sensibilisée à sa problématique et plus
apte à faire des choix, compte tenu de sa spécifité, que
le central. Ce que je trouve différent dans votre présentation ou
dans votre
recommandation par rapport à ce qu'on a entendu jusqu'à
maintenant, c'est qu'il ne faut pas que le pouvoir régional se renforce
de pouvoirs venant du central et de pouvoirs de la base, du local, montant au
régional. Ce que je comprends, c'est que ce que vous voulez dans cette
décentralisation des pouvoirs et cette reconquête d'autonomie,
c'est que s'il en va au régional iI faudrait peut-être qu'il en
parte aussi du central et du régional vers l'institution locale. Est-ce
que ]'ai bien saisi?
Mme Bailly: Oui, c'est exactement ça. Évidemment,
M. le ministre, il faut toujours relier cela à l'avant-projet
déjà déposé. Compte tenu qu'on sait que les centres
universitaires restent au niveau central, on volt les petits et moyens
hôpitaux revenir vers les régies. À ce moment-là, si
on lit bien l'avant-projet, iI semble que ces établissements n'auraient
plus de conseil ou, tout au moins, juste un pour tous les établissements
du territoire. Il faut toujours mettre ça en dualité, ce qui fait
que nous, on réfléchit de cette façon-là. On se
dit: Si c'est seulement de la déconcentration au niveau régional,
ce n'est pas ça, c'est une vraie décentralisation, et une vraie
décentralisation comportera aussi des pouvoirs au niveau local,
c'est-à-dire des établissements. Alors, la perception que vous
aviez, c'était vraiment dans ce sens-là, toujours rattaché
à l'avant-projet, bien sûr, mais on était là ce
matin et on ne peut pas faire semblant qu'on n'a pas compris. Il y avait des
indications qui disaient que peut-être que les conseils unifiés,
on... Je ne sais pas. J'ai peut-être mal compris aussi. Corrigez-moi.
M. Côté (Charlesbourg): Vous avez très bien
compris. Peut-être que. Alors, évidemment... Ha, ha, ha!
Peut-être que. Non, non, ça va dans le sens de peut-être
que. Donc, il y a une révision. Ce que je comprends, c'est que tout le
monde nous dit qu'il y a possibilité de regroupement. Certains nous
disent: II faut le faire de manière volontaire, avec des incitatifs, et
non pas par la méthode forte d'une loi. Alors, ce que je comprends,
c'est que l'objectif de regrouper, de rendre complémentaires un certain
nombre de services, c'est possible. Évidemment, ce sont les moyens sur
lesquels on diverge, c'est pas mal toujours là qu'on finit par
s'accrocher.
Sur le plan local, dans votre mémoire, à la page 28,
recommandation 4: "Que le conseil d'administration de chaque
établissement ait complète autonomie en regard de la
budgétisation des soins et services. " Ça me tenterait de vous
dire, même si je ne suis pas bilingue: "How much?" Évidemment,
j'aimerais avoir un peu d'explications parce que, tantôt, II reste encore
que le ministre va être obligé de répondre devant
l'Assemblée nationale. Il est question d'imputabilité
budgétaire aussi. C'est une des barrières extrêmement
importantes que nous devons franchir sur le plan de la régie
régionale. Plus de pouvoir décentralisé et, par le fait
même aussi aux centres hospitaliers.
J'aime vous entendre me spécifier un peu plus: complète
autonomie en regard de la budgétisation des soins et services. Vous ne
l'avez pas?
Mme Bailly: M. le ministre, je pense que l'objectif, il est grand
dans ça. Je pense que l'intention du regroupement en disant ça,
c'était de pouvoir mettre de l'argent pour répondre
immédiatement au service de la population sur les besoins. Je pense
qu'on n'enlevait de pouvoir à personne, mais c'était de pouvoir
mieux gérer, à l'Intérieur de nos établissements,
des programmes versus les besoins établis. Je pense que M. Girard pourra
compléter sur ce propos.
M. Girard (Bertrand): Oui. Il y avait un volet qui voulait
couvrir... Au fil des années, il est arrivé qu'on ait
jusqu'à 25 %, 28 % de notre budget qui était dans des composantes
détaillées. On avait de la difficulté à passer
d'une enveloppe à l'autre et c'est cet aspect-là surtout qu'on
voulait couvrir par cette recommandation-là.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, ce que je comprends,
c'est un budget global...
M. Girard: Oui.
M. Côté (Charlesbourg):... et vous demeurez toujours
responsables du budget, mais vous êtes capables de faire des choix ou
vous avez une plus grande marge de manoeuvre pour faire des choix pour
correspondre davantage, répondre davantage aux besoins
spécifiques que vous voulez desservir.
M. Girard: C'est ça. C'est pour répondre à
l'évolution des programmes qui se développent.
M. Côté (Charlesbourg): Comment se ferait, dans ces
conditions-là, l'articulation ou la complémentarité entre
les différents centres hospitaliers de l'île de Montréal
que vous représentez, de façon à éviter qu'il y ait
duplication et qu'il y ait même compétition?
M. Girard: On ne peut pas nier qu'il y a, à des moments
donnés, des esprits de clocher. Il y a quand même eu des
initiatives heureuses. Il y a eu... Par exemple - c'est plus facile de parier
de ce qu'on connaît mieux - on a fermé, nous, l'obstétrique
et on s'est dirigé vers l'urgence pour répondre à des
besoins. À ce moment-là, on a dû discuter avec les
établissements environnants, les centres de réhabilitation, les
centres de troisième ligne aussi, pour pouvoir avoir des ententes de
complémentarité. Le fait de pouvoir décider ça avec
l'accord du ministère, on a pu
recycler 1 600 000 $ dans des programmes qui sont beaucoup plus
présents aujourd'hui. Donc, on dit: Si on a cette souplesse, il y a des
initiatives qui répondent davantage aux besoins actuels.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, je
pourrais en discuter beaucoup parce qu'il y a des points très
intéressants que vous avez soulevés. Mais je prends une
recommandation que vous avez à la page 27, niveau régional,
recommandation 2: "Que la structure régionale développe une
concertation réelle et efficace avec les départements de
santé communautaire." Ce que je comprends, c'est que, pour vous autres,
c'est facile de le dire parce que vous n'avez pas de département de
santé communautaire.
Mme Bailly. Comme je le disais tantôt, c'était plus
difficile pour les gens avant nous.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, quand on
questionne... J'aimerais ça, mol, avoir un peu plus de détails
sur ce que vous voulez dire quand vous parlez de concertation réelle?
Quand on marque là-dedans, dans une recommandation, "concertation
réelle", ça peut peut-être supposer qu'il n'y a pas de
réelle concertation, au moment où on se parte.
Mme Bailly: On vous a demandé si c'est "réelle" qui
est de trop ou "concertation", c'est ça?
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. Michaud.
M. Michaud (Jean): Je pense que les départements de
santé communautaire ont un point de vue très
privilégié dans les sous-régions d'une grande
région. Étant des observateurs sur le parquet, à toutes
fins pratiques, ils sont en mesure de connaître les besoins de la
population et de les exprimer clairement à un organisme qui est
voué à une programmation et à une planification dans
l'ensemble de la région. C'est à ce titre-là, je pense,
que ces deux composantes, la régie et les départements de
santé communautaire, ont un partenariat à développer parce
que la responsabilité dévolue au niveau régional et
l'observation importante des nouveaux besoins ou des tendances de
mobilité ou autre qu'on peut retrouver sur un territoire peuvent
être décelées et retransmises avec précision pour
une réorientation des programmes et des entités qui distribuent
les services.
M. Côté (Charlesbourg): On va être
obligés d'aller vite, ça n'a pas de bon sens. On a
discuté, tout à l'heure, avec des hôpitaux qui semblaient
bien contrôler leur situation d'urgence, mais on en entend parler chaque
année, à une période X dans l'année. Comment est-ce
que ça se comporte dans vos établissements? Ce que j'ai bien
compris, c'est que ceux qui réussissent à bien régler
leurs problèmes, c'est parce qu'il y a probablement des appétits
moins voraces sur l'électif. J'aimerais vous entendre
là-dessus.
Mme Bailly: Je pense que vous vous référez...
Évidemment, on a assisté beaucoup aux auditions, vous
remarquerez, aujourd'hui... Je pense qu'il y a une réalité, et on
en parie dans notre mémoire, dans les urgences des hôpitaux. Je
pense qu'il y a des problèmes réels. On donne des solutions a ces
problèmes-là, de revenir à nos lits de soins de courte
durée et d'enlever les pourcentages de soins de longue durée, de
donner du maintien à domicile avec la réadaptation. On
réévalue aussi, on voit l'Importance des établissements de
réadaptation versus... Je pense que ça va revenir, ces
problèmes d'urgence, et c'est présent, mais il faut apporter des
solutions.
M. Côté (Charlesbourg): Je veux juste apporter un
point spécifique, parce que ça m'a frappé; 25 %,
dites-vous, de vos lits sont occupés par des chroniques. C'est ça
que j'ai vu dans le mémoire, 25 %?
mme bailly: non, je pense que 25 %, c'était au niveau
de...
M. Michaud: On a dit: 40 % sont utilisés par les personnes
âgées, et c'est la principale source d'engorgement dans les
urgences. Si on prend l'exemple de deux personnes qui se présentent
à l'urgence, une personne relativement jeune, victime d'un accident de
la route, et une personne âgée qui a glissé sur le trottoir
et qui a une fracture de la hanche, il est probable que la personne plus jeune
va recevoir des services d'urgence de première ligne, alors que la
personne qui a besoin, à la suite d'une fracture de la hanche, d'une
réadaptation a des chances de ne pas la recevoir et de demeurer
longtemps à l'urgence, ou encore de demeurer longtemps dans un milieu
aigu, sans un programme de réadaptation et, à ce
moment-là, on va la retrouver dans un lit de soins de longue
durée presque à coup sûr.
Parce qu'une personne âgée qui est immobilisée
pendant plusieurs jours est en voie de chronicisation, si elle ne reçoit
pas des services de réadaptation. Or, le développement de
services de réadaptation, particulièrement pour les personnes
âgées, est un moyen important de déconcentrer les urgences
à problèmes. Et, à ce titre-là, on a des exemples
de collaboration entre des établissements, où les
établissements à vocation de réadaptation sont, en quelque
sorte, en ligne avec les établissements qui offrent des services
d'urgence et, à ce moment-là, on permet de désengorger ces
urgences-là et on permet de prendre et de donner des services à
une population qui est en demande croissante de services.
II y a de plus en plus de personnes âgées, de plus en plus
de personnes âgées qui vivent plus longtemps, qui ont besoin de
maximiser leur autonomie, et les établissements de réadaptation
sont des spécialistes dans ce domaine. Il faudrait les développer
au fil des années deux mille pour répondre véritablement
aux perspectives de maintien à domicile et de maintien d'une population
âgée le plus autonome possible.
M. Girard: M. le ministre, je pourrais peut-être vous aider
là-dessus. Un bon argument pour vous, vous né devez pas entendre
ça souvent. Une liste de 400 en électif, ce n'est pas une liste
si élevée que ça. Ce n'est pas 400 personnes qui sont
nécessairement prêtes à être hospitalisées
demain. À preuve, il y en a qu'on rappelle quatre ou cinq fois, et
ça nous prend des listes d'à peu près 400 pour pouvoir
gérer puis maximiser l'utilisation de nos ressources. Mol, je pense
qu'on peut vraiment doser l'urgence et l'électif sans mettre en
péril les besoins de la population. Autrement, on a déjà
baissé, nous, pour 250 lits, à 250 cas, puis tu as des lits qui
sont inoccupés en chirurgie, parce que tu n'es pas capable de faire
entrer le monde; ça prend un certain bassin.
M. Côté (Charlesbourg): II ne faut pas qu'ils soient
en vacances, il faut qu'ils soient prêts, mais évidemment
l'urgence, ça n'attend pas, ça.
M. Girard: C'est ça.
M. Côté (Charlesbourg): C'est un peu ça, une
des difficultés. Je n'avais pas rêvé, au moins pour vous
dire que j'avais pris un peu le temps d'en lire des bouts.
Mme Bailly: On l'apprécie beaucoup.
M. Côté (Charlesbourg): À la page 12, est-ce
que je dois comprendre, lorsque vous dites, en bas: "La réalisation de
cette opération est de nécessité évidente et connue
puisque la clientèle de longue durée occupe près de 25 %
des lits de courte durée des hôpitaux de Montréal. " Ce
n'est pas nécessairement dans les hôpitaux que vous
représentez, mais c'est l'ensemble des hôpitaux de
Montréal.
Mme Bailly: Absolument.
M. Côté (Charlesbourg): O. K. Ce serait
peut-être, dans ces cas-là, 40 % dans ce que vous
représentez.
Mme Bailly: Dans notre résumé.
M. Côté (Charlesbourg): Une dernière
question, pour qu'on en soit bien conscients. SI on réussit à
diminuer de beaucoup la présence de malades chroniques, de personnes
âgées dans les centres hospitaliers, ça signifie,
évidemment, une rotation plus grande des gens qui seront admis à
l'hôpital, ça signifie plus de gestes sur le plan médical
et ça signifie aussi d'interpeller, d'une manière plus
importante, la technologie qu'il faut à chaque fols payer. Ce qui
signifie que ça nécessitera des ajustements des bases
budgétaires des hôpitaux et, évidemment, tout ça
faisant en sorte que dans la mesure où on paie des coûts quand
même assez importants pour maintenir en centre hospitalier des personnes
de longue durée, où ça nous coûterait moins cher
dans des ressources alternatives, il y a peut-être des coûts pas
très très élevés que le gouvernement pourrait
encourir pour faire cette opération-là. Ce que je comprends,
c'est que la journée où on baisserait le pourcentage de lits
occupés dans vos hôpitaux respectifs, ça signifierait des
ajustements assez appréciables de budget pour être capable
d'accueillir ces nouvelles clientèles-là qui vont avoir,
forcément, une rotation plus grande. Est-ce que je me trompe? (18
heures)
Mme Bailly: Je pense qu'à ce moment-là il y aura un
ajustement nécessaire des budgets pour recevoir des gens en courte
durée, avec tout ce que ça comporte, bien sûr. D'autre
part, avec les nouvelles technologies, on peut penser que les journées
d'hospitalisation seront moins longues, les opérations moins
traumatisantes, une meilleure réadaptation, une collaboration avec les
centres de réadaptation pour ces gens-là, un retour à
domicile rapidement, moins de perte de travail. Alors, je pense qu'on pourrait
aussi mettre un fil conducteur à tous ces éléments, que
ces nouveaux montants d'argent qui devraient être mis là
donneraient des résultats.
M. Côté (Charlesbourg): Je suis obligé de
terminer. Je ne vous al même pas parlé de la mobilité.
Mme Bailly: Bien non.
M. Côté (Charlesbourg): évidemment, vous
l'aviez mis comme cinquième point dans votre intervention. c'est parce
que je savais que c'était désintéressé, donc je
n'en parlerai pas.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. Ce sont des
recommandations, d'abord une analyse de la situation extrêmement
intéressante parce que vous êtes présents partout sur le
territoire et on a souvent l'impression que vous êtes comme les PME du
système hospitalier, les PMH, et qu'à cet égard vous
êtes les institutions qui jouent un peu le rôle de
régularisation dans le système. Et on le volt, je pense, au
niveau des
objectifs, pardon, des recommandations que vous nous faites en terminant
votre mémoire. J'aurais bieh sûr quelques questions à vous
poser là-dessus, en particulier sur cet aspect extrêmement
intéressant que vous soulevez au départ et qui me semble marquer
l'ensemble de votre présentation, de votre analyse. Dans vos
recommandations, au niveau national, vous insistez pour dire que le
ministère de la Santé et des Services sociaux doit
préciser et diffuser les objectifs de santé et de bien-être
qu'il entend atteindre en mettant en place une nouvelle structure. Vous
souhaitez que ces objectifs de santé soient précisés et
soient diffusés. Est-ce que vous voulez aller jusqu'à les
Inscrire dans la loi? Ce qui, entre vous et moi, je pense, est difficile. Mais
quel est le mécanisme que nous devrions adopter pour préciser les
objectifs de santé que nous voulons obtenir au Québec?
Après quoi, on mettra en oeuvre une ou des structures pour atteindre ces
résultats. Comment ça se ferait, la publication et l'adoption de
ces objectifs de santé?
M. Mlchaud: C'est que les objectifs de santé ne concernent
pas que le seul réseau de la santé et des services sociaux.
À cet égard, le ministère a un rôle important
à jouer à l'intérieur de l'ensemble de l'appareil
gouvernemental, parce que beaucoup des moyens de prévention ne sont pas
de notre seul ressort. Quand les gens entrent dans le réseau de la
santé et des services sociaux, ils ont déjà un
problème, un problème qui résulte de leurs habitudes de
vie, un problème qui résulte des conflits de valeurs qu'on vit
dans la société.
On parlait, ce matin, de tous les problèmes de santé,
physique et psychologique, qui résultent, par exemple, du
démantèlement familial. Quand on pense à tous les
problèmes qui peuvent résulter de l'activité industrielle
qui produit de la pollution qui peut amener des maladies, qui peut amener des
problèmes de ce type-là, quand on pense aux habitudes de vie avec
la consommation qu'on a de drogues, de boissons, de cigarettes, etc., qui
génèrent beaucoup plus de coûts pour la
société qu'elles ne procurent de revenus au gouvernement,
généralement, quand on pense également à tous les
éléments de promotion, sécurité routière,
etc., donc, on volt que la prévention est beaucoup plus une affaire de
l'ensemble de la société. Elle part davantage avec une
conscientisatlon Importante du citoyen et, là, on peut voir le
rôle que peut avoir le ministère de l'Éducation en termes
d'enseignement de valeurs, d'autonomie des individus, de respect de la
santé avec une bonne éducation alimentaire, avec une bonne
activité physique, etc., qui sont parmi les moyens de prévention
les plus efficaces, à court, à moyen et à long terme pour
les sociétés. C'est à ce titre-là, je pense, que
l'effort gouvernemental est très important.
Comme on le signalait tout à l'heure, les départements de
santé communautaire peuvent être une source importante
d'aiguillonnage de l'ensemble des autres Intervenants par l'observation de
premier niveau qu'ils font des tendances, dans la population, au niveau
morbidité. C'est dans ce sens-là qu'on voit un rôle moteur
important au niveau du ministère face à la politique de
santé qui doit être véhiculée et supportée
par l'ensemble de l'appareil gouvernemental également.
M. Trudel: Parce que vous allez aller plus loin tantôt,
vous êtes très cohérents en proposant la gestion par
résultat dans les institutions, il va bien falloir que, quelque part,
très concrètement, et je suis tout à fait d'accord avec
votre description, (a responsabilité du ministère de la
Santé et des Service sociaux à l'égard de l'atteinte
d'objectifs de santé dépasse largement son mandat santé
sectoriel en soi. Alors, à quel endroit établit-on ces
objectifs-là? Est-ce que c'est l'adoption par le gouvernement du
Québec - et je dis ça un peu au hasard - annuellement,
d'objectifs de santé à obtenir à travers son
ministère? Il faut que quelqu'un les fixe; alors, est-ce qu'on aurait
à définir, est-ce que le gouvernement devrait publier des
objectifs de santé ou adopter des objectifs de santé à
poursuivre au Québec avec une certaine périodicité et axer
la gestion de nos institutions, de nos établissements de santé et
de services sociaux sur ces objectifs-là? Est-ce que c'est
l'Assemblée nationale qui devrait aller jusqu'à adopter ces
objectifs de santé au Québec?
M. Michaud: Je pense qu'il appartient définitivement au
ministère et au gouvernement de fixer ces objectifs
généraux de santé pour la population et, à partir
de là, effectivement, le réseau de la santé et des
services sociaux qui est davantage une sorte de réseau réparateur
que préventionniste par son rôle actuel, et l'aspect
prévention, on l'a vu, touche non seulement le réseau même,
mais l'ensemble de la société... À ce moment-là,
nous devons nous axer vers une efficience et une efficacité à
appliquer les politiques, à répondre aux besoins de la
clientèle et à faire en sorte qu'elle obtienne des services de
qualité à des coûts les meilleurs avec un minimum
d'emmerdements administratifs. La carte-santé, nous la voyons
très importante, parce que le client arriverait dans
l'établissement avec tout un paquet d'informations qui le concernent et
dont on a besoin pour bien le traiter. Si on ne les a pas, on recommence des
procédures de diagnostics qui sont coûteuses en termes de temps et
en termes de ressources pour obtenir une information qui existe
déjà ailleurs. À ce moment-là, la grande
efficacité d'une carte-santé permettrait de donner aux
professionnels de la santé l'Information requise pour traiter le malade
d'entrée de jeu dans l'établissement. Le con-
naissant très bien et ayant déjà les données
les plus cohérentes et les plus récentes sur lui, on sera en
mesure de traiter immédiatement cette personne-là plutôt
que de commencer à l'inves-tiguer. Là, il y a des
économies Importantes à réaliser et, là, il y a une
possibilité également de contrôler certains abus qui
existent dans le réseau, non seulement par des populations du
Québec, mais également par d'autres qui utilisent nos
services.
M. Trudel: J'allais sur ce terrain précisément,
mais je ne peux pas laisser passer la dernière intervention sur les
objectifs de santé. Les objectifs de santé
énumérés à l'article 2 du projet de loi ne sont pas
suffisamment précis à cet égard-là, ne permettent
pas suffisamment de gérer par résultats, selon toute apparence,
selon ce que vous me donnez comme opinion quant aux objectifs de santé
à fixer. Vous voulez que ce soit plus précis si on veut en
arriver à être capables de gérer par résultats
obtenus.
M. Michaud: II faut préciser les objectifs et il faut
développer des moyens d'analyse de résultats qu'on n'a pas
encore, malheureusement, à notre disposition. C'est là-dedans
qu'un effort de recherche et de développement doit se faire pendant
qu'on précise les objectifs généraux auxquels doit
répondre l'ensemble du réseau de la santé et des services
sociaux.
M. Trudel: Très bien. La carte-santé maintenant. Je
mexcuse. Est-ce qu'il y avait un autre élément de
réponse?
Une voix: Non, ça va.
M. Trudel: La carte-santé, vous venez de donner des motifs
qui devraient favoriser son implantation, une plus grande efficacité,
probablement, vous l'avez mentionné, un certain support à la
réduction de la consommation ou de la réalisation des actes
médicaux. Ça n'a pas l'air à vous inquiéter, ou
vous êtes assez certains de votre affaire, au niveau de la
confidentialité. Parce que je l'ai dit, pour le commun des mortels, pour
quelqu'un autour de la table qui regarde pour économiser ou pour tenter
de gérer le système comme il faut, qu'il rende plus de services
aux bénéficiaires... Le ministre fait une observation.
M. Côté (Charlesbourg):...
M. Trudel: Ha, ha, ha! On a vu tellement de cas là-dessus
et d'éléments qui sont quelquefois sortis en public. Est-ce que
ça ne vous préoccupe pas, la confidentialité du dossier
qui serait inscrit sur la puce?
M. Michaud: Si c'est l'individu qui transporte son dossier,
normalement, il connaît l'Information que ça contient. Et si le
moyen de lire cette carte-là est correctement protégé,
qu'on ne peut pas passer ça, par exemple, dans un guichet automatique et
lire ce qu'il y a dedans, à ce moment-là, ça
présume que ça prend une technologie pour lire la donnée,
et ça prend une technologie également pour la modifier. Cette
technologie-là peut être contrôlée par les
établissements. L'Information dont on a besoin, c'est pour traiter le
bénéficiaire et être efficace avec lui. Dans ce
sens-là, je pense que ça m'inquiète, au contraire, de ne
pas l'avoir.
M. Trudel: Peut-être, en terminant, toujours autour de
cette idée de la carte-santé sur laquelle il faudra, je pense,
être extrêmement sérieux avant de décider, parce
qu'on peut être pavé de bonnes intentions, mais on a
dé|à vu des amateurs, aux États-Unis, percer
l'Informatique ou les programmes informatiques de NORAD. Percer la lecture de
la carte-soleil, ça m'apparaît comme l'enfance de l'art, par
rapport à traverser des systèmes de défense
nord-américains. Il y a toutes sortes d'affaires là-dedans qui
peuvent se produire.
Une voix:...
M. Trudel: Ha, ha. ha! Ça dépend, ça
dépend, pour certaines entreprises, il y a peut-être beaucoup
d'intérêt à le faire.
Toujours sur la carte-santé, mais par rapport au
mécanisme, est-ce que vous pensez que non seulement ça nous
permettrait de réduire la consommation de ceux et celles qui demandent
des actes, mais également de contrôler la production des actes, de
contrôler aussi les producteurs des actes?
M. Michaud: Ça pourrait peut-être permettre de
diminuer une partie de la pratique défensive qu'on déplorait cet
après-midi même, en termes de médecine défensive,
dont l'origine vient du fait qu'on n'a pas l'information sur te patient. On ne
l'a pas à temps, et on n'a pas une information de qualité pour
pouvoir le traiter, donc on recommence tout le processus du diagnostic.
Ça, c'est générateur de coûts, de temps et
d'énergie.
M. Trudel: Très bien. Sur la mobilité des cadres,
il existe peu de choses, si j'ai bien compris, actuellement.
La Présidente (Mme Marois):... M. le
député.
M. Trudel:... j'avais fermé... il existe peu de choses,
actuellement, si j'ai bien compris, au niveau de la mobilité dans le
réseau de santé, en particulier au niveau des cadres? il y a peu
de programmes qui existent?
M. Girard: II n'y a pas de programme structuré, c'est
l'individu qui créé sa propre progression.
M. Trudel: C'est la complète autonomie, quoi?
M. Girard: Oui, oui. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): La seule chose qui existe,
c'est un programme de sécurité qui coûte 12 000 000 $ par
année.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): Nous vous...
M. Trudel: ...nous-mêmes.
M. Côté (Charlesbourg): Je ne vous le souhaite pas,
même après huit ans.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): Nous vous remercions de votre
présentation aux membres de la commission. M. le ministre ?
M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup. Il y a un
effort de réflexion et de sincérité qui a animé
votre mémoire et je pense que c'est la somme des expériences
vécues par des établissements qui est indispensable pour le
réseau. Je vous remercie de manière particulière pour le
temps que vous y avez mis, parce qu'on sait que ce n'est pas facile d'arrimer
un certain nombre d'intervenants et d'être capable de camper dans un
texte un certain nombre de choses et de recommandations. C'est tout à
votre honneur. Évidemment, ça prouve aussi l'utilité des
cadres et d'une certaine stabilité. Merci.
La Présidente (Mme Marois): Nous suspendons nos travaux
jusqu'à 20 heures.
(Suspension à 18 h 14)
(Reprise à 20 h 7)
La Présidente (Mme Marois): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous allons reprendre nos travaux. D'une part, nos gens sont
arrivés et, d'autre part, nous avons déjà eu une
très longue journée. Si on veut finir à une heure
décente, on va procéder.
Nous entendrons ce soir, et je crois que les personnes sont
déjà présentes devant nous, le Groupement régional
des directeurs des soins infirmiers de fa région 06. C'est bien cela?
Alors, Mme Lange, je crois, qui est présidente du
Groupement et directrice des soins infirmiers de l'Hôtel-Dieu de
Sorel va se présenter et nous présenter les personnes qui
l'accompagnent. Ensuite, vous procédez à la présentation
de votre mémoire à l'intérieur du temps qui vous est
imparti, environ une vingtaine de minutes. Par la suite, le temps qui reste est
alloué aux deux parties, à parts égales, pour des
questions, des commentaires, des échanges avec vous. Nous vous
entendons.
Groupement régional des directeurs des soins
infirmiers de la région 06
Mme Lange (Gisèle): Merci, Mme la Présidente. M. le
ministre, Mesdames et Messieurs, nous vous présentons notre
délégation, à savoir Mme Hélène Rajotte,
à ma gauche, présidente sortante du Groupement et directrice des
soins infirmiers à l'Hôtel-Dieu de Montréal; Mme Claudette
Rh/ard, à ma droite, vice-présidente aux affaires internes et
directrice des soins infirmiers au centre hospitalier Anna-Laberge de
Châteauguay; à mon extrême gauche, Mme Jocelyne Paquette,
vice-présidente aux affaires extérieures et directrice des soins
infirmiers de courte durée au Centre hospitalier régional de
Lanaudière et M. Richard Morin, secrétaire de l'exécutif
et directeur des soins infirmiers de longue durée au Centre hospitalier
régional de Lanaudière.
Alors, c'est au nom de tous nos membres des régions de
Montréal, Laurentides, Lanaudière, Montérégle, que
nous vous remercions de nous avoir lus et aussi d'avoir accepté de nous
entendre à cette commission des affaires sociales. Les quelques pages de
notre mémoire comportent des réflexions, des propositions,
parfois des commentaires sur des sujets que nous avons jugés essentiels
pour nous, non pas que les autres sujets non présentés dans notre
mémoire n'étaient pas valables sur le plan de la discussion. Et
notre exposé sera présenté par quelques directrices.
Le Groupement des directeurs des soins infirmiers de la région
6ABC constitue une composante majeure dans le système de santé et
des services sociaux. Nous représentons environ 20 000
bénéficiaires hospitalisés qui reçoivent des soins
et des services dans 66 établissements, dans des lits de courte
durée, de longue durée, d'hébergement de courte
durée à vocation universitaire, sans oublier les
bénéficiaires vus en externe, sans compter les
bénéficiaires sur civière.
Le budget, géré par la direction des soins infirmiers dans
ces établissements, est tout près de 1 000 000 000 $, soit
environ 40 % du budget global. Les bénéficiaires ont toujours
été et seront toujours, d'après nous, la raison
d'être de ces établissements et, en même temps, notre raison
d'être. Leurs besoins bio-psycho-socio-splrftuels, de la conception
à la mort, demeurent
la toile de fond du quotidien du personnel en soins Infirmiers, jour,
soir, nuit. Ces clientèles sont consommatrices de soins de plus en plus
complexes. Il va sans dire que nous nous préoccupons de l'aspect
préventif, curatif et de réadaptation.
L'ensemble de nos commentaires aujourd'hui repose sur la conviction que
les soins infirmiers constituent un service essentiel en sol. Ce n'est pas en
tant que support à d'autres dimensions du travail hospitalier que les
soins infirmiers doivent être définis et évalués,
mais bien en fonction d'éléments qui leur sont propres et
spécifiques. Un corollaire de cette approche, c'est que les soins
infirmiers doivent être complètement responsables et imputables du
service rendu face au bénéficiaire lui-même ou à son
répondant. Ils constituent une réalité globale,
indivisible, fondée sur la dispensation de soins infirmiers qui
s'adressent à l'ensemble de la personne. Un autre corollaire est celui
de la place occupée par les directeurs de soins infirmiers et la
nécessité de l'inscrire dans la structure légale.
Mme Claudette Rivard, à ma droite, du centre hospitalier
Anna-Laberge de Châteauguay, vous présente la partie de notre
mémoire touchant le rôle des directeurs de soins infirmiers.
Mme Rivard (Claudette): Bonsoir. La Présidente (Mme
Marois): Bonsoir.
Mme Rivard: Pour reprendre d'une façon plus explicite les
propos de ma collègue sur le texte de l'avant-projet de loi, je dirais
d'emblée que le libellé de celui-ci ne reflète pas la
réalité quotidienne du rôle et des fonctions du directeur
des soins. On s'interroge. Pourquoi les rôles et fonctions des chefs de
départements cliniques et des directeurs des services professionnels
sont-ils décrits et non ceux des soins infirmiers? On se pose des
questions face à ça. Dans la structure actuelle des centres
hospitaliers, la main-d'oeuvre en soins infirmiers composant notre direction
est appelée à assumer le plus haut pourcentage du volume de soins
et services et cette main-d'oeuvre est présente directement
auprès des bénéficiaires ou de leur répondant
à raison de 24 heures par jour, 7 jours par semaine. L'infirmière
doit donc identifier les besoins de santé des
bénéficiaires, contribuer aux méthodes
diagnostiques...
La Présidente (Mme Marois): Madame, on s'excuse, il y a un
peu de concurrence, mais nous n'y sommes pour rien.
M. Côté (Charlesbourg): Le Carnaval a une reine. On
est quand même très heureux de vous avoir...
Mme Rivard: Et ce sont des événements heureux
à l'extérieur, espérons que ça va en être
autant à l'Intérieur.
Une voix: Nous savions que nous étions entendus, mais pas
avec autant de bruit.
Mme Rivard: Est-ce que je parle assez fort, Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Marois): Oui, ça va, merci.
Mme Rivard: Je reviens à l'infirmière. La
Présidente (Mme Marois): D'accord.
Mme Rivard: Alors, je vous disais que l'infirmière doit
donc identifier des besoins de santé. Elle doit planifier, dispenser,
contrôler les soins Infirmiers tout en prodiguant les soins selon une
prescription médicale. Elle doit, de plus, dispenser des programmes
d'enseignement aux bénéficiaires en vue de diminuer le temps de
séjour moyen d'hospitalisation et le syndrome de la porte tournante que
plusieurs d'entre nous connaissons. De par sa fonction, l'infirmière est
l'agent intégrateur de l'ensemble des professionnels et des
non-professionnels oeuvrant auprès des bénéficiaires. Elle
est le lien entre le bénéficiaire et les Intervenants afin
d'améliorer les services. C'est le pivot. L'Infirmière, elle est
toujours là, 24 heures par jour, et c'est elle, vraiment, qui peut faire
le lien entre tout le monde; que ce soit les professionnels et les
non-professionnels, le bénéficiaire, s'il y a une
Inquiétude, s'il y a quelque chose, c'est quand marne à cette
personne-là qu'ils s'adressent la plupart du temps.
A la lumière de ces informations, vous comprendrez que la
direction des soins infirmiers d'un établissement de santé doit
mettre en place toutes les étapes du cycle de gestion, de façon
à gérer efficacement les ressources humaines, financières
et matérielles disponibles et ce, dans l'unique but de dispenser des
soins et services de qualité sur une base Individuelle et continue en
tenant compte de son environnement et de son milieu de vie. Les intervenants
sont choisis en fonction des besoins des bénéficiaires car tous
les intervenants ne possèdent pas le même degré de
polyvalence. Le directeur des soins Infirmiers se doit d'élaborer des
mécanismes d'orientation, d'intégration, de formation continue et
d'évaluation de rendement de la main-d'?uvre, de s'assurer de la
qualité des soins dispensés en établissant des programmes
d'évaluation de la qualité. Les responsabilités du
directeur des soins infirmiers sont en relation avec les activités de
"top management" ou de sommet stratégique, comme le décrivent
certains auteurs, puisque la direction des soins infirmiers est l'une des
principales directions de production. On sait que les théories actuelles
en management préconisent
la flexibilité des structures en fonction des organisations. Nous
sommes d'accord avec des structures souples et légères. Par
contre, le vécu quotidien du directeur des soins infirmiers nous
amène à solliciter une reconnaissance de notre rôle et de
nos fonctions dans un cadre légal, évidemment si on décrit
tous les autres membres du sommet stratégique.
Notre motivation est de répondre aux besoins des
bénéficiaires en soins infirmiers. Ceux-ci sont vraiment au coeur
de nos préoccupations et de nos décisions. Je vais vous donner
quelques exemples qui illustrent, dans le vécu quotidien, ces propos.
Vous connaissez les intérêts divergents des professionnels - c'est
vraiment humain - dans les équipes Interdisciplinaires. On a
réussi à faire le consensus de tous ces professionnels qui ont
quand même tous de bonnes intentions - on le sait très bien -quand
on est capables de les ramener à la dimension du
bénéficiaire. Le malade est toujours au coeur de nos
préoccupations. C'est au coeur de nos décisions. Quand on
réussit à railler tout le monde autour de ce principe-là,
c'est beaucoup plus facile d'avancer, beaucoup plus facile d'établir des
programmes d'enseignement et des programmes de soins.
La collaboration avec l'équipe médicale à la
gestion des lits en termes de disponibilité des ressources de soins afin
d'équilibrer l'offre et la demande. Bien sûr, quand on a une
pénurie d'infirmières et qu'on n'a pas d'infirmières, on
sait que ça a une grande influence sur la gestion des lits et à
l'urgence aussi; la formation du personnel en regard de la nouvelle
technologie; les changements de la pratique médicale et de
l'alourdissement de la clientèle; les préoccupations de
l'équipe soignante aussi envers toute la gestion des plaintes des
bénéficiaires ou de leur répondant. Ça, c'est
très présent dans les milieux psychiatriques et dans les milieux
de soins prolongés. L'équipe soignante est très
préoccupée et on investit quand même beaucoup de temps
là-dedans. Ce sont quelques exemples que je vous donne. Je pourrais vous
en donner plus, mais on va arrêter là. C'était pour vous
Illustrer nos propos et nos préoccupations.
Il est impensable, ne serait-ce qu'un seul instant, d'imaginer un
établissement de santé sans personnel infirmier. Lorsqu'on se
pose la question: Pourquoi un malade est-il hospitalisé? Pourquoi
l'hospltallse-t-on? C'est parce qu'il a besoin de soins infirmiers, 24 heures
pas jour, sinon, le médecin va le soigner à l'externe, c'est bien
sûr, parce que c'est pas mal moins traumatisant d'être à
l'externe que d'être hospitalisé. Alors, je pense que ça
nous porte à réfléchir.
Les soins et services que reçoivent les
bénéficiaires sont tributaires de la qualité et de la
quantité de personnel requis. C'est là une grande partie de notre
rôle et de notre responsabilité. Cependant, la performance est
actuellement évaluée à partir d'Indicateurs tels que les
heures-soins, les ratios comparatifs interétablissements et ces
indicateurs datent des années cinquante. Je venais de venir au monde.
Ça ne tient vraiment pas compte des besoins réels des
bénéficiaires. On apprécierait le fait que quelque chose
change.
L'esprit dans lequel nous voulons gérer est le partenariat en
complémentarité avec les autres professionnels de la santé
et, pour ce faire, il faut être reconnu de fait à ce titre. Une de
nos grandes préoccupations et à laquelle vous êtes
certainement sensibilisés est la non-satisfaction et la
démotivation de notre main-d'oeuvre.
Les institutions américaines dites d'excellence, entre
guillemets, que l'on appelle les Magnet hospitals, dont vous avez
sûrement entendu parler, se sont penchées sur le
phénomène de la non-satisfaction et de la démotivation des
infirmières et sont arrivées à la conclusion que les
infirmières ont besoin de participer aux décisions qui les
concernent et d'avoir un leader infirmier reconnu dans le "top management",
capable de traduire les réalités quotidiennes du vécu des
bénéficiaires au sommet stratégique. Pour les
infirmières de la base, c'est très important que les dirigeants
d'un centre hospitalier ou d'un établissement comprennent très
bien leur vécu quotidien, les problèmes qu'ils vivent
auprès des bénéficiaires.
Le discours qu'on entend sur les infirmières depuis quelque temps
dit qu'elles sont la force vive et l'épine dorsale du système
hospitalier. Cependant, on n'hésite pas, dans certaines organisations,
à les éliminer du processus de décision concernant
l'ensemble de l'établissement. Ceci illustre quand même
l'incohérence entre le discours et le geste.
Je reviens aux Magnet hospitals. Ceux-ci reconnaissent l'importance
d'avoir un gestionnaire infirmier capable de comprendre les
réalités quotidiennes de la main-d'oeuvre et d'être en
mesure de les traduire au niveau du "top management", comme je vous le
mentionnais précédemment. Le directeur des soins infirmiers
représente et interprète le nursing aux membres de
l'échelon supérieur puisqu'il le connaît.
Un gestionnaire infirmier devient le symbole de la reconnaissance de
l'importance de la main-d'oeuvre infirmière dans l'établissement.
En ne reconnaissant pas le gestionnaire infirmier, est-ce qu'on ne risquerait
pas de faire la preuve de la non-valorisation de la main-d'oeuvre en soins
infirmiers? Est-ce qu'on ne risquerait pas de briser le lien qui relie la
main-d'oeuvre infirmière et la main-d'oeuvre de base aux membres de
l'échelon supérieur? On s'interroge.
Nous croyons fermement que le directeur des soins infirmiers doit avoir
les connaissances et la compétence en soins infirmiers ainsi qu'une
formation supérieure en administration. L'efficacité du directeur
des soins infirmiers est reliée à ses connaissances et
habiletés clinico-administratives afin d'établir et de
réaliser des
objectifs en relation avec les tendances dans le système de
santé et la pratique des soins infirmiers. Le grand défi de
l'heure n'est-il pas de faire en sorte que le milieu de travail de notre
main-d'oeuvre devienne tellement intéressant que le personnel ait le
goût d'y travailler et le goût d'y rester, tenir leur emploi et
inciter les jeunes à choisir la profession d'infirmière afin de
pallier notre problème de pénurie actuelle?
Je vais céder la parole à Mme Rajotte, ma collègue
de gauche, qui va nous entretenir sur la pénurie en main-d'oeuvre.
Mme Rajotte (Hélène): Bonsoir. En effet, la
pénurie des infirmières qui se fait sentir au Québec
depuis plusieurs années et qui ne cesse de s'accroître a pris une
telle importance qu'elle prive actuellement la population de nos régions
de l'accessibilité aux soins. En effet, nous voyons d'année en
année une diminution du nombre de jours-présences. Par exemple,
pour un seul établissement, la clientèle sera privée de
500 jours-présences de plus que l'an dernier pour la seule
période des vacances d'hiver. Par ailleurs, il est devenu pratique
courante de diminuer de façon significative le taux d'occupation les
fins de semaine ou d'annuler des interventions chirurgicales par manque de
ressources qualifiées aux soins intensifs, pour assurer la surveillance
postopératoire. La surcharge de travail occasionnée par le manque
de ressources épuise et démotive le personnel.
Conséquemment, le taux d'absentéisme augmente et les
Infirmières quittent la profession.
Depuis près de dix ans, les établissements
s'inquiètent de l'état du marché du travail. Plusieurs
études ont identifié les causes de cette pénurie et ont
proposé des éléments de solution. En effet, en 1984,
l'enquête Sobeco confirmait un malaise important. Par la suite, le
comité d'étude sur la main-d'?uvre en soins infirmiers, dont
le rapport fut publié en 1987, a permis de mesurer et de cerner les
facteurs à la source des déséquilibres du marché et
d'identifier un problème gravé d'inadéquation des besoins
en infirmières au Québec.
Par la suite, les directeurs de soins infirmiers ont
étudié et commenté ces rapports. En 1988, l'Association
des hôpitaux du Québec présentait un mémoire
intitule: L'infirmière, force vive du centre hospitalier. Ce
mémoire identifiait très clairement les mécanismes
à mettre en place pour solutionner ce problème. Deux ans plus
tard, où en sommes-nous avec toutes ces études qui rejoignaient
d'ailleurs toutes les études américaines déjà
faites sur le sujet?
Le gouvernement a manifesté un intérêt particulier
aux conditions de travail des infirmières, lors de la dernière
ronde de négociations des conventions collectives. Quoique certains
problèmes demeurent, tel le travail de fin de semaine, un pas important
a été franchi pour améliorer les conditions de travail
reliées à la convention collective des infirmières.
D'autre part, les établissements, à l'intérieur de leurs
moyens, ont mis en oeuvre les changements qui s'imposent pour améliorer
la situation. Cependant, les centres hospitaliers ne peuvent contrôler
une situation qui dépasse la gestion de leur milieu. Par exemple, des
postes à temps complet créés à partir des heures de
remplacement afin d'assurer plus de stabilité, demeurent encore vacants,
par manque d'infirmières sur le marché du travail.
Le rapport CEMOSI notait, en 1986, 1452 postes vacants dans les centres
hospitaliers. Où en sommes-nous en 1990? Aucun monitoring de la
situation ne se fait présentement pour mesurer l'ampleur de la
pénurie. Nous croyons que le temps des études est révolu
et qu'il est essentiel de passer rapidement à l'action afin de
rétablir le marché par l'accroissement de l'influx annuel des
infirmières. Il faut également donner aux établissements
les moyens de mettre en oeuvre les mécanismes nécessaires
à la rétention des Infirmières. La motivation des
infirmières passe par la possibilité d'exercer pleinement leur
rôle. Pour ce faire, il est essentiel que la charge de travail le leur
permette et que l'on reconnaisse la contribution importante des
infirmières à l'amélioration de l'état de
santé des bénéficiaires. Valoriser et reconnaître
l'infirmière, c'est aussi lui permettre de développer un
sentiment d'appartenance. Nous croyons que de laisser les directeurs de soins
infirmiers gérer leurs ressources est essentiel à un tel
développement.
Devant l'urgence de la situation, des directeurs de soins infirmiers
sont disposés à vous rencontrer, M. le ministre, afin de vous
apporter toute la lumière nécessaire sur ce dossier et il nous
fera plaisir de répondre aux questions des membres de la commission. Je
vous remercie.
La Présidente (Mme Marois): Merci beaucoup de votre
présentation. J'inviterais maintenant M. le ministre de la Santé
et des Services sociaux à vous poser des questions ou à faire les
commentaires.
M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup. Pour avoir
séjourné deux fois dans l'espace de 18 mois dans deux
hôpitaux différents de la région de Québec, je
partage totalement votre point de vue 24 heures par jour sur la présence
des Infirmières par rapport à d'autres professionnels.
Effectivement, c'est là qu'on retrouve le réconfort.
Une voix:...
M. Côté (Charlesbourg): Non, non...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Comme
bénéficiaire. Alors, effectivement je pense que plusieurs
l'ont
dit avant nous, vous avez raison de répéter avec beaucoup
de fierté, que les Infirmières sont la cheville ouvrière
de nos institutions, en particulier dans les centres hospitaliers, et c'est
vrai, évidemment, vous avez présenté ça d'une
manière très habile, très, très habile, pour en
arriver à dire qu'on a une pénurie, tout le monde le constate.
C'est pour ça que j'ai souri quand on a dit que c'était le temps
de passer à l'action, parce que j'ai employé ça iI n'y a
pas tellement longtemps. Vous avez raison aussi là.
Pour en arriver au niveau de notre DSI, évidemment, ce que je
comprends de votre intervention, c'est un des moyens de revaloriser la
fonction. On se comprend bien?
Si je comprends bien votre interprétation, vous nous dites: Dans
le cas du DSP, à l'intérieur du projet de loi, vous
définissez, alors que dans le cas du directeur des soins infirmiers,
c'est vague. Je me penchais devant mon souffleur officiel, ma conscience
à moi, disons mon infirmière à moi 24 heures par
jour...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg):... et je pensais avoir
trouvé une mosus de bonne réponse, évidemment, on est
toujours confronté, lorsqu'on est législateur, à se faire
dire: Vous en mettez trop dans la loi, vous en mettez trop. Ma réponse
est toute trouvée, je vais leur dire que ce qu'on a voulu faire, c'est
de ne pas trop en mettre, mais que ce soit suffisamment général
pour que ça puisse bien donner de l'autonomie, l'autonomie qu'il faut au
niveau des centres hospitaliers pour être capable d'opérer.
Cependant, mon raisonnement ne résiste pas puisque, lorsque je vais voir
l'article 103, 101...
Une voix: L'article 103.
M. Côté (Charlesbourg). L'article 103 au niveau des
DSP, là on l'a défini. Donc, il y a un poids, deux mesures,
évidemment, ça a l'air fou un petit peu, un petit peu beaucoup.
Vous avez raison de le soulever. Evidemment, si j'avais une décision
à prendre ce soir, je vous dirais que, au lieu de vous donner une
définition plus large dans la loi, je pourrais l'enlever à
l'autre. Je ne sais pas si vous seriez heureuses, parce qu'évidemment,
lorsqu'on l'encarcane à l'Intérieur d'un projet de loi et d'un
article, on en est prisonnier, évidemment, la meilleure intention du
monde, que de vouloir l'inclure à l'intérieur d'un article de
loi, forcément à partir du moment où il est précis,
il est aussi très contraignant. Alors que lorsqu'il est
rédigé de manière plus large, ça laisse,
d'habitude, plus de place à l'autonomie.
Après avoir entendu ça - et c'est la reconduction
textuelle dans l'avant projet de loi, de ce qui existe maintenant - si vous
étiez à la place du ministre, compte tenu de votre niveau de
connaissance, qu'est-ce que vous feriez?
La Présidente (Mme Marois): Mme Lange, Mme Rivard?
Mme Lange: Je laisse la parole à Mme Rivard pour le
moment.
Mme Rivard: Je peux en faire une partie. Mol, je pense que si
j'étais ministre, je ne ferais pas deux poids, deux mesures, ça
c'est évident. (20 h 30)
M. Côté (Charlesbourg): Ça c'est acquis.
Mme Rivard: Ça c'est acquis?
M. Côté (Charlesbourg): Vous avez au moins ça
ce soir.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Rivard: C'est ça, ce soir. Je crois que je ne mettrais
aucune définition de personne ou on les définirait pour chacun.
Je définirais autant le rôle de la directrice des soins que du
directeur des services professionnels. Pour moi, c'est impensable, si l'on veut
vraiment que... Les infirmières de la base, la main-d'oeuvre en soins
infirmiers, ils ont besoin d'un leader. Ça été quand
même des études américaines. On a aussi des études
de l'Ontario qui disent la même chose. Alors on veut les valoriser, on a
un problème important de pénurie en main-d'oeuvre et on veut
vraiment une reconnaissance de la main-d'oeuvre en soins infirmiers. Pourquoi
la loi ne donne pas l'importance du rôle du directeur des soins? C'est
leur leader. C'est vraiment la personne qui les représente dans le
sommet stratégique. Et pour eux, c'est la personne qui peut vraiment
traduire ce qui se passe dans le quotidien. Alors, moi, j'irais pour vraiment
décrire... Si j'étais ministre, si j'étais très
préoccupée par notre problème de l'heure qui est le
problème de la pénurie... Pourquoi il y a pénurie? Je
pense qu'on le sait. Il y a une dévalorisation de cette
profession-là. Les gens travaillent 24 heures par jour, les fins de
semaine. Au niveau familial, ils travaillent le soir, la nuit. Ils travaillent
à Noël, au Jour de l'an, on sait tous ça. Et on en a bien
besoin dans un hôpital, je pense qu'on ne peut pas s'en passer. Alors,
pourquoi ne pas donner de l'importance à ça?
M. Côté (Charlesbourg): évidemment, lorsqu'on
essaie de faire une réforme ou de faire une législation, ce n'est
pas pour le plaisir de la faire, mais davantage pour qu'elle colle à la
réalité. Je pense que votre expertise dans ce domaine-là
est très intéressante. Ça va très certainement
peser lourd dans la balance. Mais ce que je dois conclure, c'est que ce que
vous préférez, c'est que ce soit inscrit dans la loi,
malgré le fait que ça puisse être contraignant,
l'ayant défini. Comme ça, vous n'enlevez rien aux
autres.
Mme Rivard: Non.
Mme Lange: Surtout pas. Il faut avoir la capacité
d'anticipation des conséquences pour le quotidien si ça
arrivait.
M. Côté (Charlesbourg): et pour vous, un geste comme
celui-là serait une valorisation du rôle du leader qui, lui, peut
définitivement influencer les autres. parce que, à partir du
moment où on a un leader, il y a des gens qui peuvent vouloir le
remplacer.
Mme Lange: Absolument. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): C'est un
élément de motivation, effectivement, assez intéressant.
Oui.
Mme Rivard: Je peux juste renchérir en disant que les
infirmières aussi ont des plans de promotion. Elles ont des plans de
carrière. Il y en a plusieurs qui aspirent à ce
rôle-là, vous savez.
M. Côté (Charlesbourg): II n'y a pas de doute. Donc,
ça ne veut pas dire que ce sera votre définition, celle que vous
suggérez, mais ça peut être une référence
assez Intéressante. Donc, on va se pencher sur le dossier de
manière très évidente. Ça m'a frappé de voir
deux traitements différents et je ne pense pas que ce soit souhaitable.
Et si ça peut être pris comme une valorisation du rôle, tant
mieux.
Avant de passer à la pénurie, parce que c'est
extrêmement important, permettez-moi de vous dire que vous avez
soulevé un point dans votre mémoire, qui est à la page -
celui qu'on a, à tout le moins - 2, je crois.
Une vote: Oui, 3. 2.
M. Côté (Charlesbourg): C'est le point 2 où
vous dites: "À notre avis, l'article 28, dans la définition d'un
centre hospitalier, le concept prévention doit y être
ajouté. " Je vais juste tenter de vous expliquer pourquoi iI n'est pas
ajouté. Parce que, évidemment, lorsqu'on est dans des centres
hospitaliers de courte durée, en règle générale,
à moins que je ne me trompe - ça arrive très souvent,
donc, je ne serai pas Insulté si vous me corrigez - la prévention
est quand même moins présente.
Mme Paquette (Jocelyne): Nous considérons qu'elle est
quand même très importante. La réalité
hospitalière démontre qu'H y a plusieurs actions qui sont
posées dans le but d'Informer les bénéficiaires. Quand on
informe les bénéfi- ciaires, tant au niveau des renseignements
que de l'enseignement, c'est qu'on veut qu'ils soient en mesure de prendre les
moyens pour éviter la maladie. On va sûrement informer le
bénéficiaire pour la prévention de la maladie cardiaque ou
encore pour prévenir des désordres psychologiques, notamment au
niveau de la gestion du stress. Alors, ça fait, pour nous, partie de la
mission d'un centre hospitalier, et on trouvait ça Important parce que
cette mission-là intègre tant les fonctions de prévention
que de traitement et de réhabilitation. C'est pour ça qu'on l'a
demandée.
Mme Lange: J'ajoute, M. le ministre, que plus il y a de
prévention, ne serait-ce qu'au niveau des complications
postopératoires ou autres, le temps de séjour est moins long,
donc plus de bénéficiaires sont hospitalisés.
M. Côté (Charlesbourg): Prévention de la
répétition.
Une voix: Le syndrome de la porte tournante.
M. Côté (Charlesbourg): J'entends l'exemple de
problèmes cardiaques...
Une voix: Oui.
M. Côté (Charlesbourg):... j'accroche dans le sens
que-Une voix: II y a la prévention...
M. Côté (Charlesbourg):... évidemment,
l'éducation peut être extrêmement importante pour
éviter une rechute et, à ce moment-là, je comprends
l'aspect préventif. Alors que ce que le législateur souhaitait,
c'est que la prévention soit davantage l'affaire des CLSC Vous comprenez
dans quel sens nous l'avions vu.
Une voix: D'accord.
M. Côté (Charlesbourg): Je pense qu'il y a quatre
mémoires qui soulèvent ce point-là et vous avez
apporté les éclaircissements que je souhaitais obtenir.
évidemment, on parie de pénurie d'infirmières. vous nous
avez dit tantôt que c'est une situation qui est dénoncée
depuis de nombreuses années. on a eu le témoignage de directeurs
de centres hospitaliers qui nous l'ont dit à la commission, il y a des
lits de fermés; ça, j'ai trouvé ça extraordinaire,
ce n'est pas l'argent qui manquait... c'est assez rare qu'on se fait dire
ça évidemment...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg):... ce n'est pas
l'argent qui manquait, c'était le personnel infirmier. On n'a pas
dit qu'il manquait de médecins, on a dit de personnel infirmier et,
évidemment, ça relève directement de la pénurie et
ça relève aussi d'une évolution des situations
familiales.
J'ai encore le souvenir, durant la campagne électorale, pour le
peu de porte-à-porte que j'ai fait, compte tenu de la crise que nous
vivions à l'époque, je choisissais d'aller voir les
infirmières chez elles et je me suis fait raconter, évidemment,
les problèmes que ça engendre sur le plan familial de travailler
le soir, de travailler la nuit, avec tout ce que ça suppose et,
évidemment, c'est très certainement l'une des causes où
c'est maintenant devenu moins intéressant de faire le travail infirmier
et qui cause des problèmes en termes de recrutement de main-d'oeuvre.
Mais on est dans un cul-de-sac épouvantable, compte tenu du fait que ne
devient pas une infirmière qui décide aujourd'hui qu'elle sera
Infirmière, ça prend à tout le moins six ans et
peut-être davantage, à partir du moment où elle
décide de faire un cours d'infirmière. Donc, on est dans une
situation assez délicate, assez précaire. Vous me direz: On vous
l'a dit depuis longtemps, toutes les études le démontraient; vous
n'avez pas nécessairement fait ce qu'il fallait... Parfait. On n'a pas
fait ce qu'il fallait, peu importe qui. Demain matin, qu'est-ce qu'on fait?
Effectivement, tout le monde dénonce la pénurie au niveau des
infirmières. Compte tenu de nos problèmes que nous aurons demain
avec le vieillissement de la population, je pense qu'on a des problèmes
assez importants. Si vous étiez à la place du ministre qui doit
avoir, lui, de la sagesse absolument infaillible, qu'est-ce que vous
feriez?
La Présidente (Mme Marois): Mme Rajotte.
Mme Rajotte: Je pense qu'il y a toutes sortes...
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment,
au-delà de ce qui a été fait dans la convention collective
parce qu'on n'a pas...
Mme Rajotte: Oui.
M. Côté (Charlesbourg):... critiqué la
convention, vous l'avez dit tantôt, elle était bonne.
Mme Rajotte: Exactement.
M. Côté (Charlesbourg): Merci.
Mme Rajotte: Alors tantôt...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Rajotte:... vous avez dit: On n'a rien fait, ce n'est pas
tout à fait vrai, je pense que des efforts ont été mis au
niveau de la convention collective, mais il demeure qu'il y a encore d'autre
chose à faire pour améliorer les conditions à
l'intérieur des établissements. Il y a aussi peut-être
ouvrir un peu les portes des collèges et des universités pour
avoir un influx plus grand d'infirmières. Depuis plusieurs
années, ça on le dit, II n'en sort pas assez. Il y a quand
môme eu beaucoup de développement dans la province. Je pense au
centre hospitalier Anna-Laberge qui a ouvert ses portes, les CLSC qui ont
été créés, ça a créé une
demande plus grande d'infirmières. Il y a toujours le même nombre
d'infirmières qui sort chaque année. Alors, je pense que
peut-être ça ne dépend pas directement de votre
ministère, mais il y a des pressions qui doivent être faites pour
assurer un plus grand nombre d'infirmières qui sortent à chaque
année.
D'autre part, il faut les attirer, les gens, peut-être qu'on va
avoir plus de places dans les collèges et les universités et que
les gens ne voudront pas y venir. Alors, il faut essayer de rendre le travail
plus intéressant dans les centres hospitaliers et je pense qu'un des
moyens, c'est de diminuer la charge de travail des gens. Si ça devient
plus intéressant, les Infirmières sont réduites à
la partie incompressible de leur profession, là, c'est-à-dire
répondre aux ordonnances médicales. Je pense qu'il faut
absolument là, au point de vue légal aussi, répondre aux
ordonnances médicales. Elles font le strict minimum alors qu'une des
parties de leur rôle qu'elles aiment beaucoup c'est faire de
l'enseignement, c'est faire des programmes de soins pour les
bénéficiaires. Cette partie-là, elles n'ont pas le temps
de la faire et elles se démotivent beaucoup. Alors, il faut mettre en
place des mécanismes pour vraiment assurer aux infirmières la
possibilité d'exercer leur profession. Il y a également au niveau
de la charge de travail.
On a dit tantôt qu'on était toujours évaluées
en fonction d'un indicateur de performance qui est le nombre d'heures-soins par
jour-présence. Il y a des mécanismes qui existent ou des outils
qui existent de façon plus précise pour évaluer le
personnel requis en soins infirmiers. Et, on sait fort bien que les budgets ont
été très serrés au cours des dernières
années et qu'on a dû faire des compressions importantes au niveau
des soins infirmiers et partout ailleurs dans les hôpitaux, pendant ce
temps-là, la clientèle vieillit. Il y a un alourdissement
important et on n'ajoute pas plus de ressources à cause des contraintes
budgétaires et là, le fardeau de tâche augmente. Les
infirmières se découragent et c'est un cercle vicieux finalement.
Alors, on n'a pas le temps non plus de faire participer les gens à la
vie de l'organisation. Vous avez l'air de douter de ce que je dis, là
vous?
M. Côté (Charlesbourg): Non, ça me
soulève certaines interrogations, parce que, évidemment... Et
puis, ce n'est pas un blâme, de toute façon, on l'entend assez
souvent. C'est toujours facile de dire que c'est les contraintes
budgétaires. Je ne dis pas qu'il n'y en a pas eu. Mais de ce que j'ai
entendu, moi, depuis le début, c'est qu'il y avait possibilité,
et ça, ça a été dit par des gens qui gèrent
le réseau, qu'il y avait possibilité de resserrer la machine et
de faire des économies. C'est qu'il y a encore dans le système de
la place - et là, ce n'est pas dit par le ministre, ça a
été dit par des gens qui ont administré quotidiennement
des budgets. Est-ce qu'il y a des mauvais choix qui se font à
l'intérieur des établissements? Ne me parlez pas des vôtres
là, pour ne pas qu'il y ait de réprimandes demain là, mais
de la connaissance et du vécu, est-ce que c'est toujours les bons choix
qui se font au niveau des centres hospitaliers? Et, moi, en tout cas, il
m'apparaît qu'il y a encore de la place un peu. Je ne vous dis pas que
tout le monde doit vivre de manière très grasse. Il y a eu quand
même des efforts assez appréciables d'indexation des budgets, de
bases budgétaires qui ont été corrigées et d'un
coût de système qui a été donné. Et
ça, le secteur social du ministère est très jaloux de ce
que le secteur santé a obtenu en termes de coûts de
système. (20 h 45)
Donc, à partir du moment où les bases budgétaires
ont été réajustées avec une injection de 100 000
000 $, à partir du moment où 186 000 000 $ et même presque
200 000 000 $ ont été- où le gouvernement a pris les
déficits accumulés des hôpitaux et qu'on indexe et qu'on
ajoute un coût de système, expliquez-moi ce qui fait qu'on a
encore des problèmes sur le plan financier? Je veux comprendre, je veux
juste comprendre. Et si je comprends, c'est plus facile pour moi de le
défendre parce que là, au moment où on se parle... et des
intervenants sont venus nous dire qu'effectivement il y avait encore de la
place dans le système. Ce n'est peut-être pas le cas où
vous travaillez. Évidemment, c'est toujours embêtant d'en parler,
mais ça m'apparaît assez important. Est-ce qu'on fait les bons
choix au niveau des centres hospitaliers? C'est peut-être plus facile de
dire non aux infirmières que de dire non aux dispensateurs de services
à l'intérieur des hôpitaux.
La Présidente (Mme Marois): Mme Paquette, oui.
Mme Paquette: Je vous dirais qu'il y a peut-être des
facteurs, M. le ministre. Notamment, je mettrais la réglementation qui
est excessive. Je dirais aussi que le manque de concertation et le manque de
complémentarité provoquent une duplication des services et,
notamment, une multiplication des coûts. Ce sont nettement des facteurs
Importants qui font qu'on a des problèmes financiers au niveau de notre
système de santé. Ce sont deux facteurs importants que je vois.
De plus, je crois que, quand on... Je ne suis pas certaine; vous vouliez
peut-être intervenir?
M. Côté (Charlesbourg): Non, non. Je vous trouve
excellente. Continuez. Je trouvais ça excellent. Je m'approchais parce
que j'ai beaucoup d'Intérêt à vous entendre. Je vous laisse
aller. J'aurai une question supplémentaire à vous poser, si vous
le permettez.
Mme Paquette: Vous savez, quand on a commencé avec la
politique financière au début des années quatre-vingt, il
y a eu des restrictions budgétaires, pour ne pas dire plan de
redressement avec plan de redressement budgétaire qui ont fait que des
décisions ont été prises au niveau de la rationalisation
des effectifs infirmiers. Il y a eu aussi des craintes au niveau de la
Corporation des infirmières qui ont fait qu'on a augmenté le
contingentement des inscriptions dans les cégeps et dans les
universités, ce qui fait que c'est un élément non
négligeable pour se retrouver aujourd'hui avec une pénurie de
main-d'oeuvre en soins infirmiers. C'est l'élément que je voulais
ajouter. Je vais répondre à votre question, si vous le
voulez.
M. Côté (Charlesbourg): Vous avez parlé de
duplication et d'un manque de concertation. Évidemment, on peut
l'appliquer à l'ensemble du réseau mais, dans le cas d'un centre
hospitalier, est-ce que ça n'existe pas aussi?
Mme Paquette: Oui, ça existe. Je pourrais peut-être
donner un exemple. Quand nous transférons un bénéficiaire
d'un centre hospitalier à un autre centre hospitalier, et ce n'est pas
pour jeter le blâme à personne...
M. Côté (Charlesbourg): Non.
Mme Paquette:... ce sont des constatations. Alors vous savez
qu'il y a une multitude d'analyses de laboratoire, par exemple, qui sont
demandées et, lorsque le bénéficiaire arrive dans l'autre
centre hospitalier, la même gang d'analyses de laboratoire est
redemandée. Alors on pourrait peut-être se questionner. C'est un
exemple.
M. Côté (Charlesbourg): En avez-vous d'autres comme
ça?
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: C'est assez!
M. Côté (Charlesbourg): Celui qui a dit: C'est
assez, en arrière, est-ce un directeur général
d'hôpital?
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): Vous savez, à cette
commission, attention! Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Ou c'est peut-être un
médecin.
La Présidente (Mme Marois): Mme Lange.
Mme Lange: J'allais continuer avec M. le ministre à savoir
peut-être qu'on pourrait en trouver. On se rencontrera.
M. Côté (Charlesbourg): Avec grand plaisir. Je vais
vous montrer mon petit calepin ici là.
Mme Lange: Votre petit calepin vert. La Présidente (Mme
Marois): C'est ça!
M. Côté (Charlesbourg): Mon petit calepin vert.
J'avais déjà pris des notes pour vous rencontrer avant même
que vous ne m'Invitiez à le faire. Ça va. Je pense que j'ai
déjà suffisamment pris de temps. Merci.
La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre. M. le
député de Rouyn-Noranda-Témls-camingue, s'il vous
plaît.
M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. Effectivement,
lorsqu'on regarde et qu'on observe attentivement en particulier tout notre
système de santé, notre système hospitalier au
Québec, on se rend compte facilement que les femmes, les
infirmières - et c'est important de noter les deux dimensions: femmes et
infirmières - sont celles qui ont permis au système souvent de
durer et de traverser les périodes les plus difficiles et à
travers les crises.
Mme la Présidente le faisait remarquer ce matin, par exemple,
à des communautés religieuses qui sont venues témoigner
devant nous et qui ont été les premières femmes et aussi
infirmières à tracer un peu la voie que vous conservez si bien
aujourd'hui. Je m'étonne un peu, un peu beaucoup, que le ministre vous
demande ce qu'il y aurait à faire demain matin, ce qu'il faudrait faire
au niveau de la pénurie, et que vous ne lui répondiez pas tout de
suite: Le premier geste que vous pouvez faire, c'est de retirer les
décrets de la loi 160 qui permettent de couper l'ancienneté.
Voilà un geste très concret que le ministre pourrait faire pour
répondre à une de vos aspirations là-dessus et revaloriser
la profession que vous partagez si bien et par laquelle vous remplissez si bien
votre devoir.
M. Côté (Charlesbourg): C'est probablement moins
dommageable que moins 20.
M. Trudel: Et, là-dessus, est-ce que vous pourriez nous
dire, effectivement, depuis la promulgation des décrets, en particulier
sur les coupures d'ancienneté, comment ça se passe dans vos
services? On va régler le circonstancié). Après ça,
on ira un petit peu plus profondément.
Mme Lange: Ça ne se passe pas bien. Sauf que nous sommes
des administrateurs. Alors, il faut avoir une vision globale des choses. La loi
160 a des gains. Il y a des gains importants, sûrs, qu'on
apprécie. C'est que le bénéficiaire, soit qu'il est
à l'hôpital, soit qu'il est sur une liste d'attente, soit qu'il
est à domicile, il peut avoir espoir que l'Illégalité
vient de prendre fin dans le réseau de la santé et des services
sociaux. Ce n'est pas peu dire d'avoir réussi cette chose-là, si
tel est le cas.
Par contre, comme Alain Dubuc disait dans La Presse, ça
peut aussi briser le cercle vicieux d'aller en grève, de signer un
protocole de retour au travail et, bon, tout est oublié et on
recommence, et de façon quasi systématique, peut-être tous
les trois ans parce qu'on n'a pas de système qui nous permet d'avoir une
négociation continue. Tous les trois ans, le réseau est
perturbé, les bénéficiaires attendent plus longtemps sur
la liste d'attente. En tout cas, vous les connaissez autant que moi, ces
choses-là. Alors, la loi 160 peut être la fin de
l'illégalité à moyen terme. Comme administrateurs, comme
personnes qui partent pour les bénéficiaires, vous ne pouvez pas
être contre.
Par contre, pour les employés, tous les employés qui ont
à souffrir de la loi 160, c'est très souffrant. La proportion,
l'ampleur des sanctions, nous, on pense que ça devrait être
révisé dans le temps pour proportionner l'ordre de grandeur des
sanctions. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre, proportionner l'ordre
de grandeur. Je pense qu'on serait assez grands puis on serait assez capables
de revenir un petit peu... Bon, laissons finir les négociations
peut-être, laissons un peu le temps, mais pas trop longtemps parce que
c'est souffrant comme climat, c'est souffrant pour nos gens de savoir que,
quand vous prenez deux ans et demi à ramasser une année
d'ancienneté sur le plan d'ancienneté d'une convention collective
et puis que, tout à coup, vous la perdez pour une heure, une
journée donnée, que vous avez accepté d'allonger votre
heure de repas, c'est hors de proportions. Mais moi, je fais confiance aux gens
qui vont peut-être réajuster ce système. L'effet y est
peut-être. Les effets d'entraînement voulus, je pense qu'on les a.
Je ne sais pas si ça répond un petit peu à votre question;
en tout cas.
M. Trudel: Ça répond très bien. Vous faites
confiance aux gens qui ont la responsabilité de la décision.
Mme Lange: Bien sûr! Bien, il faut faire confiance.
M. Trudel: ils vont y réfléchir. et vous avez
confiance au sens du devoir et des responsabilités. très bien.
très bien, madame. merci.
M. Côté (Charlesbourg): Je me retrouve dans les
propos de Mme Lange. Je me retrouve parfaitement.
M. Trudel: Sur la partie 1 et 2. Sur la partie 3 des
décrets, vous vous retrouvez aussi?
M. Côté (Charlesbourg): non, non. je me retrouve
parfaitement dans ce qu'elle dit. c'est sensé. je n'ai pas dit de choses
différentes depuis que je suis ministre.
Mme Lange: Non?
M. Côté (Charlesbourg): Et, lorsque madame dit que,
après que les conventions collectives seront signées, il y a
moyen de revoir un certain nombre de choses, c'est ce que j'ai dit. Je l'ai dit
à l'Assemblée nationale lorsque vous étiez
présent.
Mme Lange: C'est une question de bon sens.
M. Trudel: Très bien. Alors, on va donc revoir tout
ça au nom du gros bon sens et on va revenir très certainement
à l'Assemblée nationale avec cela, c'est bien sûr. Vous
aviez quelque chose à rajouter, madame, peut-être?
La Présidente (Mme Marois): Mme Lange, est-ce que vous
vouliez... ?
Mme Lange: Non, non.
La Présidente (Mme Marois): Non? D'accord.
Mme Lange: SI c'est complet pour vous autres, ça l'est
pour mol.
M. Trudel: Je voudrais toucher un autre aspect de la
présentation que vous nous avez faite au plan de l'administration, au
niveau des régies régionales. Vous nous dites de façon
assez brève que la décentralisation qui est
présentée dans la loi, ça va et qu'il y a là des
espoirs. Cependant, vous vous questionnez sur l'efficacité d'une telle
structure en regard de la lourdeur bureaucratique, comités
d'établissements, etc. C'est comme si vous nous disiez que l'orientation
est bonne et que vous perceviez que ça ne va être qu'un niveau de
plus au niveau de l'administration. Je pense qu'il est assez évident que
ce M'est pas dans l'esprit du législateur de vouloir ajouter... On en a
assez parlé. C'est principalement l'objet. Vous avez vraiment cette
impression qu'on va ne faire qu'ajouter une autre structure, un autre niveau
par les régies régionales?
La Présidente (Mme Marois): Mme Paquette. Mme Paquette:
En fait... Pardon?
La Présidente (Mme Marois): Mme Paquette, oui.
Mme Paquette: Oui. En fait, pour nous, la création de
cette nouvelle structure, quand on regarde avec les collèges, bon, pour
nous, ça ajoutait de la lourdeur. Ce qui existe présentement, ce
sont les conseils de santé et de services sociaux. Et, pour nous, cette
structure mériterait qu'on puisse l'investir d'un pouvoir
décisionnel. Parce que, quand on parle de décentralisation, ce
n'est pas de déconcentration, et on est intéressé, on l'a
mentionné, à ce que vraiment le pouvoir décisionnel se
retrouve, mais pas au niveau d'une régie régionale qui est une
nouvelle structure, mais bien au niveau de ce qui existe déjà,
les CSS.
Le rôle des CSS, présentement, est très
justifié en ce qui concerne la coordination et la concertation
parce que - j'irais même plus loin - quand ce sera bien
Intégré, ces deux concepts-là, on pourra même aller
aussi loin que décentraliser au niveau des établissements de
santé, particulièrement au niveau des budgets qui sont
alloués et, ce faisant, ça permettrait, notamment, aux cadres
d'être beaucoup plus motivés, d'être beaucoup plus
Innovateurs. Est-ce que ça répond?
M. Trudel: Pas autour des CSS, mais vous voulez dire au niveau du
CRSSS, aux régies régionales? Bon. Ça va.
Mme Paquette: Oui, les CSS et les conseils de santé et de
services sociaux.
La Présidente (Mme Marois): C'est ça.
M. Trudel: O. K., ça va. Donc, aller le plus possible
jusqu'au niveau local, la décentralisation, là où se passe
l'action. Le ministre a dit, cet après-midi, qu'au niveau des conseils
d'administration unifiés, il allait peut-être, et il l'a
noté dans son petit carnet comme étant quelque chose qui est
d'assez grande évidence pour notre part, n'a pas grand bon sens en
termes de complémentarité, mais qu'il faut par ailleurs chercher
des solutions, comme vous l'avez mentionné, à l'Intérieur
aussi des Institutions pour des établissements pour permettre de
réaliser la mission pour laquelle nous sommes dans ce
système-là.
Troisième élément de question, c'est au niveau des
ressources. Le ministre vous a indiqué, par ailleurs, le niveau d'argent
qu'on investissait dans notre système de santé et de services
sociaux et que souvent, en particulier le secteur des services sociaux, les
secteurs communautaires se plaignaient assez amèrement du
fait qu'ils étaient le parent pauvre du système. Il faut
noter aussi, cependant, que, malgré l'ampleur du montant que l'on
investit au Québec en termes de santé et de services sociaux, on
ne va pas vers la hausse, mais on va vers la baisse. Vous savez, en 1985-1986,
on consacrait au Québec 7,3 % de notre produit intérieur brut
à notre système de santé et de services sociaux, quand on
serait passé en 1989-1990 à 6,8 %-
Est-ce que vous, vous avez l'impression que l'on pourrait encore, au
Québec, dire: II faudrait en mettre un peu plus, compte tenu de
l'importance de ce secteur, tout en assurant des mesures de rationalisation
nécessaires pour faire en sorte qu'on s'intéresse vraiment aux
services à rendre aux bénéficiaires, ou si on est vraiment
rendu à l'extrême dans votre façon de voir les choses,
à l'extrême de ce qu'on peut se payer, ce qu'on peut s'offrir
comme services?
Mme Paquette: Nous dirions que nous sommes rendus à
l'extrême. Le gouvernement a des responsabilités au niveau de la
réduction du déficit provincial. On sait aussi que les transferts
fédéraux sont réduits. On sait encore, même si vous
dites qu'il y a une réduction, qu'il y a encore une bonne proportion du
produit national brut qui est consacrée par le gouvernement au budget de
la santé, même qu'il est supérieur à d'autres
provinces. Or, il y a peut-être d'autres sources de financement qui
doivent être étudiées. Par exemple, la privatisation de
certains types de services pourrait être étudiée. Nous
pensons réellement que la capacité de l'état à
payer est limitée.
Une voix: Est-ce ce que tu voulais savoir, Rémy? Ha, ha,
ha!
M. Trudel: Le ministre est certainement tenté de poser la
question: Et quels types de services - puis je lui rends service - quels types
de services, par exemple, on pourrait privatiser? C'est ça, la
comparaison...
Mme Paquette: Vous posez... Excusez, non.
M. Trudel: Non, mais donnez-nous... Je pense qu'il faut...
Mme Paquette: Ça pourrait être des types de services
médicaux, paramédicaux, la radiologie, par exemple, des services
auxiliaires, l'entretien ménager aussi, la cafétéria, etc.
Je pense qu'il y aurait lieu qu'on aille se chercher des sources de financement
de cet ordre-là. (21 heures)
M. Trudel: Je terminerai là-dessus, Mme la
Présidente, avant que vous alliez trop loin.
La Présidente (Mme Marois): Avant de reposer une question,
je crois que Mme Lange voulait intervenir.
M. Trudel: Excusez-moi, madame.
Mme Lange: Je voulais ajouter, pour notre propre gouverne
à tous, qu'il y aurait peut-être, au niveau des clientèles,
des montants d'argent à investir. Des personnes âgées sont
la priorité, bravo! Elles sont nombreuses et elles ont vraiment besoin,
c'est indéniable. Mais il y a d'autres clientèles dans la
province de Québec qui ont des besoins majeurs, ce sont nos futures
personnes âgées. Quand on voit nos jeunes adolescents, quand on
voit les problèmes de toxicomanie, les rechutes, les problèmes
d'alcoolisme chez des jeunes adolescents, quand on voit nos jeunes adultes qui
sont atteints de sida, c'est grave dans une province. Alors, là, il y a
peut-être à réviser au niveau de cette
clientèle-là. Les jeunes adultes qui sont aux prises avec de la
violence, en tout cas, toute cette proportion-là, jeunes adultes,
adolescents, il y aurait peut-être de l'investissement solide à
faire, je pense, à ce niveau-là, si ça répond
à votre question.
M. Trudel: On va tous convenir qu'on est très mal pris
puisque c'est une problématique très grandissante, énorme,
quand on parle des personnes âgées.
Mme Lange: Oui, oui, c'est vrai.
M. Trudel: Et vous nous pariez aussi de la jeunesse, et on s'en
rend bien compte. On a tout un défi de société parce qu'il
nous reste le milieu et on s'en va irrémédiablement vers quelque
chose d'encore plus grave et ça dépasse, je pense, bien
sûr, la simple question des investissements ou des coûts qu'on doit
verser pour s'intéresser à ces clientèles-là. On a
une problématique sociale importante à laquelle il va falloir
réfléchir au Québec. Merci, c'était très
intéressant, madame.
Une toute petite dernière question qui va également dans
le même sens que le ministre, les coûts dans le système. SI
on avait à investiguer là où il y a des rationalisations,
là où il faudrait regarder pour faire en sorte qu'on puisse se
servir mieux de l'argent qu'on a actuellement, est-ce qu'on doit surtout
regarder du côté de l'abus de consommation ou surtout regarder
dans le secteur d'un certain abus qu'il pourrait y avoir au niveau des
producteurs? On commence à regarder où quand on veut aller
chercher quelque chose pour aller au plus urgent dans le système?
Mme Lange: Les sources d'argent. On a quelques sources,
évidemment, auxquelles on pense. On discute souvent de l'argent, des
millions qui sont du côté des frais d'arbitrage. C'est une source
d'argent qui pourrait être récupérée par les
employés du réseau, les cadres
du réseau, leur formation, leur développement. Il y aurait
peut-être un transfert à faire à un moment donné, en
tout ou en partie, peu importe, mais s'il y avait quelque chose qui
était commencé de ce côté-là, les premiers
gagnants seraient les employés et les cadres qui seraient mieux
développés, mieux formés et ainsi de suite. Il y aurait
peut-être de la récupération à faire de ce
côté-là, limiter le nombre d'arbitrages sur le même
sujet. Par exemple, il n'y a qu'à voir la fête de la saint
Jean-Baptiste, le congé légal, qui a été
discuté en arbitrage à maintes et maintes reprises. Il y a
peut-être des récupérations d'argent à certains
endroits. Je regarde le transport ambulancier: durant des années, on a
envoyé deux patients en ambulance, un couché, un assis; on a
divisé nos coûts de moitié. C'est quand on ne peut pas le
mettre en taxi, c'est bien sûr; le taxi est autant utilisé
maintenant que des ambulances et quand on en met deux dans une ambulance, vous
voyez la réduction des coûts qu'on fait. Mais, là, tout
à coup, quelqu'un décide que: Non, c'est juste un par ambulance,
et il n'y a rien à faire, et ainsi de suite. Alors, là, on double
nos coûts, on ne les divise plus. Alors, il y a des choses comme
ça qui peuvent être regardées, il y en a.
Évidemment, ce n'est peut-être pas un milliard qu'on irait
chercher, mais il y en a.
M. Trudel: Je vous avoue que je ne pensais pas tout à fait
à cette...
Mme Lange: Dimension?
M. Trudel:... dans cette direction-là.
Mme Lange: Ah non?
M. Trudel: Vous ajoutez des dimensions qu'il faudrait regarder.
Cependant, on dit souvent: Écoutez, ça coûte cher. En
termes simples, ça coûte cher parce que les gens vont aller faire
du magasinage au niveau des médecins, ils vont aller se promener d'un
cabinet à l'autre. D'autre part, on nous dit: Bien, vous savez, au
niveau de ceux et celles qui fournissent les services, du côté de
la pratique médicale, il y a aussi - vous en avez donné un
exemple tantôt - des abus qui coûteraient très cher au
système. Alors, je vous demande: S'il faut aller au plus urgent, est-ce
qu'on regarde surtout du côté de ceux et celles qui consomment les
services et là où il y aurait possiblement des abus ou si on
regarde surtout du côté des producteurs de services?
Mme Paquette: Je voudrais vous dire que l'un comme l'autre
seraient à regarder parce que l'un engendre l'autre, si vous voulez,
tant les producteurs de services qui ont des services à donner. Si vous
augmentez, évidemment, le nombre de producteurs, nécessairement,
vous augmentez ou vous stimulez la consommation des services, c'est
évident. Je me rappelle - je ne sais pas en quelle année - on
demandait à la population de consommer. On a à
rééduquer notre population qui consomme sans cesse, parce qu'on
l'a amenée à faire ça. Or, c'est pour ça que je
vous dis: il y a les deux côtés à regarder. Je ne serais
pas en mesure de vous dire un plus que l'autre. Il est évident que la
complémentarité dont je vous parlais tantôt, elle est
toujours présente. Il y a beaucoup d'argent à aller chercher au
niveau de la duplication des services, c'est sûr.
M. Trudel: Une toute petite dernière question. Vous
êtes constamment auprès des bénéficiaires. Est-ce
que vous avez l'Impression que, dans le système actuellement, les
bénéficiaires sont bien protégés, que, lorsque les
services seraient déficients, tes appels, les lieux pour se faire
entendre sont suffisants, sont corrects, et ça nous permet de respecter
le besoin qu'auraient les bénéficiaires? Est-ce que dans la
système le bénéficiaire a sa juste part, au niveau des
appels en particulier, lorsqu'il se sent lésé dans ses droits ou
ses droits apparents?
La Présidente (Mme Marois): II y a M. Morin, je pense, qui
veut répondre.
M. Morin (Richard): Oui. Je pense qu'effectivement, II y a eu
beaucoup d'amélioration à ce niveau-là. Le personnel
infirmier, considérant sa présence continue auprès des
bénéficiaires, est de plus en plus sensible au respect des
droits, est beaucoup plus à l'aise pour supporter le
bénéficiaire ou son répondant - parce qu'on travaille
beaucoup avec l'équipe, avec la famille, tout ça - est beaucoup
plus à l'aise pour supporter le bénéficiaire dans toute la
gestion des plaintes. Je pense aussi que plusieurs centres hospitaliers sont
très Innovateurs en employant, par exemple, des ombudsmen ou des
conseillères à la clientèle. Je peux vous dire qu'en
longue durée et en psychiatrie, de plus en plus, le personnel est
très conscient que le bénéficiaire doit être
protégé dans toute son Intégrité.
M. Trudel: Merci.
La Présidente (Mme Marois): J'aimerais juste vous poser
une question, vous me le permettrez sûrement. Lors de votre intervention,
de votre présentation, vous avez beaucoup parlé,
évidemment, des problèmes de motivation, de non-reconnaissance de
statut, finalement, des personnes qui travaillent en milieu hospitalier,
particulièrement des Infirmières. Je vous fais un commentaire et
je voudrais avoir de votre part une certaine réaction. J'ai l'impression
que dans un souci de très bonne volonté, entre autres, de
réduire un petit peu les coûts en matière d'investissement
dans les soins de santé, on a réduit, par exemple, non pas le
temps de travail, mais
on a réduit la possibilité d'avoir accès à
la permanence. On a Introduit l'utilisation du temps partiel d'une façon
très systématique, ça fait déjà un bon
moment, dans les conventions collectives, dans la gestion des personnels en
milieu hospitalier, etc. Donc, dans un souci très positif, d'une part,
de permettre à des gens d'exercer des choix, mais, d'autre part, de
réduire les coûts, en faisant en sorte qu'on soit moins pris - je
le dis comme ça s'est fait à ce moment-là - avec la
permanence d'un nombre très grand de personnes, on a, dans les faits,
précarisé, bien sûr, les conditions de travail des gens qui
y sont, qui y oeuvrent, mais aussi créé un effet de
démotivation, créé un effet qui a engendré, d'autre
part, d'autres coûts dans le système.
Mme Lange: II y aurait des choses à proportionner,
là.
La Présidente (Mme Marois): oui, c'est ça, je le
dis un petit peu crûment et j'en suis consciente. je veux avoir votre
réaction là-dessus.
Mme Rajotte: Effectivement, les contraintes budgétaires
nous ont amenés à gérer de façon très
serrée nos ressources. Le phénomène du temps partiel est
venu du fait qu'à un moment donné, au niveau des conventions
collectives, on a dû accorder une fin de semaine sur deux aux
infirmières et à tout le personnel, d'ailleurs, qui travaille en
milieu hospitalier. C'est bien évident que, la fin de semaine, on se
retrouve avec la moitié du personnel en place. Ça prend des temps
partiels pour combler les fins de semaine, à moins d'avoir des
ressources à n'en plus finir, en surplus, au cours de la semaine. Alors,
ça, c'est un des phénomènes.
Dans le découpage des postes, aussi, on a créé de
plus en plus de temps partiel pour quand môme arriver à donner des
temps partiels qui sont intéressants. Si vous avez un fort pourcentage
de temps complets, ce qui reste pour les temps partiels, ce sont des deux
jours-semaine, un jour-semaine. Alors, à un moment donné, pour
équilibrer nos ressources, on a augmenté le nombre de jours
à temps partiel et ça en est arrivé à une
proportion assez grande de temps partiels par rapport aux temps complets. Il ne
faut pas penser, par exemple, que le temps partiel ne répond pas
à un certain besoin de la part du personnel infirmier qui comprend
particulièrement des femmes. Pour certaines, ce sont des postes
très intéressants, mais il y a aussi une limite à en
avoir. Je pense que des temps partiels, si tout le monde était à
sept jours-quinzaine, ce serait le bonheur parfait, mais il n'y aurait aucun
temps complet. Là, ça irait bien, ce serait facile de
gérer nos ressources. Mais c'est très difficile de faire le
dosage, entre les besoins du personnel, les besoins de l'établis-
sement, l'équilibre de nos ressources, tout au cours de la semaine.
Alors, c'est un fait qu'il y a eu un accroissement des temps partiels. Le
balancier est allé à la limite. Ça revient un peu. On
crée des postes plus stables, mais il va y avoir une limite à
ça. C'est sûr qu'on ne pourra pas éliminer
complètement les temps partiels.
La Présidente (Mme Marois): Vous vouliez intervenir, Mme
Rtvard?
Mme Rivard: Par ailleurs, je peux vous dire que, de plus en plus,
les directrices de soins tentent de faire des projets pilotes. Par exemple, on
permet à nos ressources, lorsqu'il y a consensus au niveau d'une
unité de soins.... Je pense à l'urgence où je suis
présentement, où les infirmières ont demandé de
faire du 12 heures. Elles font du 12 heures et elles ont une fin de semaine de
plus. Alors, dans le cadre de ta rétention de la main-d'oeuvre et de
l'attraction de la main-d'oeuvre, on leur permet ça. Alors, comme
directrice des soins, on a une très grande souplesse face à la
confection des horaires, plein de choses qu'on fait pour vraiment attirer notre
main-d'oeuvre. C'est ce que j'avais le goût d'ajouter.
La Présidente (Mme Marois): Donc, vous me dites que les
ajustements finissent par se faire et qu'avec le temps on atteint un certain
équilibre. C'est ça?
Mme Rivard: Oui, c'est ça.
M. Côté (Charlesbourg): Je m'en permettrais
peut-être une petite dernière... comme on est dans la même
veine. Je ne me souviens plus quelle année, mais on a octroyé,
dans une convention collective, probablement pensant bien faire, des postes
permanents de jour à celles qui avaient le plus d'ancienneté. Je
ne me souviens plus en quelle année. Est-ce que ça, aussi, n'a
pas eu l'effet de faire en sorte que les postes... Parce que ce que tout le
monde recherche, c'est un huit à quatre, on ne se le cachera pas. Et il
y a un certain nombre de postes qui, aujourd'hui, sont occupés de
manière permanente par un certain nombre d'infirmières qui,
effectivement, ont plus d'anciennté que d'autres. Est-ce que ça,
aussi, n'a pas créé un certain problème?
Mme Rajotte: C'est sûr que les quarts stables ont un
avantage. Et le roulement des quarts de travail a aussi un avantage et des
inconvénients. On pense aux jeunes qui sortent des collèges ou
des universités. Elles vont s'en aller particulièrement dans le
milieu anglophone parce qu'il y a du roulement de quarts de travail, mais elles
nous reviennent après un certain bout de temps parce que c'est
épuisant, c'est fatigant. C'est sûr que ça va attirer les
jeunes, mais, par contre, celles qui sont plus
anciennes... entreprendre une carrière et penser que, toute sa
vie, on va faire de la rotation, je pense que, ça aussi, c'est un peu
décourageant. ce qu'on tente de faire, dans les milieux, c'est de faire
des postes mi-temps de jour, mi-temps de nuit, pour essayer d'attirer les
jeunes et, en même temps, leur permettre de récupérer une
partie de l'année. il y a toutes sortes de projets qui se font dans nos
centres hospitaliers pour essayer de rejoindre toute la population
infirmière et de répondre à l'ensemble des besoins. mais
ce n'est pas facile de prendre une décision là-dessus parce que,
ou bien on s'engage pour la vie à faire de la rotation, ce qui n'est pas
alléchant trop, trop - on pense à l'attraction des
infirmières - ou bien on dit: bon, bien, on va prendre cette
profession-là, aussi, pour quatre, cinq ans, on va être de nuit.
alors, il faut trouver un juste milieu qui nous permette de répondre et
d'attirer des gens dans tous les...
La Présidente (Mme Marois): M. Morin, vous voulez
compléter?
M. Morin: J'aimerais, peut-être, juste ajouter que la
convention, aussi, parle beaucoup trop, d'après nous, je pense,
d'ancienneté. Alors, le critère absolu et divin pour obtenir un
poste intéressant, c'est l'ancienneté. Alors, évidemment,
les jeunes Infirmières doivent, comme on dit, faire leur temps de soir
et de nuit avant de penser, par ancienneté, à pouvoir s'en venir
de jour. C'était un commentaire additionnel.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que c'est la loi ou
les conventions collectives...
Une voix: Pardon?
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que c'est...
Une voix: Les conventions collectives.
M. Coté (Charlesbourg): ...la loi ou les conventions
collectives qui parlent d'ancienneté?
M. Morin: Les conventions collectives.
M. Coté (Charlesbourg): J'avais entendu "la loi".
M. Morin: Ah non! Pas du tout! Des voix: Non, non. M.
Côté (Charlesbourg): Non, non. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Côté (Charlesbourg): Mais, évidemment, les
conventions collectives ne sont pas toujours centrées sur le
bénéficiaire, celui qui est hospitalisé.
La Présidente (Mme Marois): Si nous pouvions, j'imagine,
inventer d'autres types de critères et arriver aux mêmes fins...
J'espère qu'on le fera dans l'avenir. M. le ministre. M. le
député. (21 h 15)
M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup. C'est assez
rare qu'on a dépassé notre temps de manière aussi
considérable, c'est que cela valait la peine, je pense, pas parce que
les autres ne valent pas la peine, mais comme vous êtes la cheville
ouvrière ou les chevilles ouvrières des hôpitaux, compte
tenu des excellentes pistes que vous nous avez indiquées et de celles
que vous avez en réserve pour notre rencontre, je veux vous remercier et
c'est avec beaucoup de plaisir qu'on aura une prochaine rencontre,
certainement. Merci.
La Présidente (Mme Marois): Merci beaucoup de votre
contribution à la commission.
Une voix: Merci.
La Présidente (Mme Marois): J'inviterais maintenant les
représentants du Bureau de coordination des centres hospitaliers
d'enseignement affiliés à l'Université de Montréal.
Nous vous souhaitons la bienvenue à la commission. J'aimerais inviter le
porte-parole de votre groupe à se présenter et à
présenter les personnes qui l'accompagnent. Par la suite, vous avez
environ 20 minutes pour présenter le mémoire, le reste du temps
étant laissé aux membres de la commission. Merci.
Bureau de coordination des centres
hospitaliers d'enseignement affiliés
à l'Université de
Montréal
M. Carrière (Serge): Je vous remercie, Mme la
Présidente. Je suis Dr Serge Carrière, doyen de la Faculté
de médecine de l'Université de Montréal. Je suis
accompagné de directeurs généraux d'hôpitaux
universitaires affiliés à l'université: M. Claude
Desjardins, de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, à l'extrême
droite; M. Florian Brissette de l'Hôtel-Dieu de Montréal; M.
Richard L'Écuyer de l'hôpital Sainte-Justine; M. Marcel
L'Abbé de l'hôpital Notre-Dame et M. André Ducharme, de
l'Institut de cardiologie de Montréal. M. Richard L'Écuyer et moi
vous ferons une brève présentation - chacun une dizaine de
minutes environ - des grands points du mémoire.
Tout d'abord, notre groupe représente les directeurs
généraux et les doyens des Facultés de médecine,
pharmacie et sciences infirmières de l'Université de
Montréal. L'objectif premier, évidemment, de l'université
dans son association avec les hôpitaux, c'est de former des
professionnels de la santé dont la mission sera de permettre aux
individus de protéger, de main-
tenir, d'améliorer et de récupérer leur état
de santé et leur qualité de vie.
J'aimerais tout de suite mentionner que, si la formation de
médecins et de chercheurs dans les différentes sciences de la
santé est une partie importante de nos activités, nous formons
également de nombreux professionnels de la santé, par exemple,
dans les Facultés de médecine et, ceci, dans diverses disciplines
telles la nutrition, la réadaptation, l'ergothérapie,
l'audio-logie, l'orthophonie et, également, des administrateurs de la
santé. Évidemment, comme notre groupe comprend également
les sciences Infirmières et les pharmaciens, la formation de ces deux
groupes de professionnels est également d'un intérêt
constant pour nous. L'atteinte de ces objectifs se fait en partie par une
formation en milieu universitaire, mais la formation qui se donne en milieu
hospitalier est d'une très grande Importance. Si je peux me servir de
deux exemples: Tout d'abord, lorsque nous formons un médecin
généraliste, eh bien, à compter des débuts de sa
formation comme médecin, 70 % de sa formation s'acquiert dans les
milieux hospitaliers affiliés. Quand on parle de la formation d'un
médecin spécialiste, plus de 80 % de sa formation est acquise
dans les milieux hospitaliers, c'est-à-dire que ces milieux-là
servent donc, en très grande partie, à la formation de nos
professionnels de la santé.
L'importance de la participation de l'université dans
l'organisation de l'enseignement et de la recherche dans les institutions est
évidemment capitale. Tout d'abord quant au choix des hôpitaux
universitaires. L'avant-projet de loi mentionne que le ministre décidera
des hôpitaux qui seront de calibre universitaire. Eh bien, nous croyons
que les universités devraient certainement être consultées
dans cette dénomination et dans ce choix.
Deuxièmement, dans la direction également et par la
participation au conseil d'administration, nous croyons que, à cause de
l'impact que le milieu hospitalier a sur la formation de nos étudiants,
que la participation des professionnels de la santé, par exemple, dans
le milieu, devrait jouer un rôle beaucoup plus grand que celui qui leur
est conféré par l'avant-projet de loi nouveau. La participation,
évidemment, des universités dans ces conseils d'administration
devrait sûrement être élargie.
Une grande participation à l'élaboration des programmes
d'enseignement, de formation et de recherche, est également essentielle,
et nous croyons que nous devons avoir un impact marqué sur les
décisions des conseils d'administration de ces centres hospitaliers
universitaires, et sur l'orientation qu'ils donnent à l'institution. Le
rôle prépondérant que doivent jouer nos directeurs de
départements universitaires et les directeurs de départements
hospitaliers de ces centres affiliés doit être d'une importance
capitale également dans l'orientation des pro- grammes de formation et
également dans l'orientation, jusqu'à un certain point, des
services qui sont dispensés par ces institutions affiliées, sans
compter, évidemment, leur participation à l'élaboration
des programmes de recherche. Je me permettrai de parler très
brièvement du mode de financement qui est retenu pour les centres
hospitaliers universitaires et mes commentaires se limiteront, personnellement,
à ce qui concerne la recherche. Quand on viendra au secteur de
l'enseignement, M. L'Écuyer fera davantage les commentaires
appropriés.
Tout d'abord, un mot de la situation actuelle. Je pense que le
Québec s'est doté d'une structure, il y a plus de 25 ans, pour
subventionner la recherche dans les centres hospitaliers affiliés au
ministère des Affaires sociales; cette politique était tout
à fait avant-gardiste, il y a 25 ans, et a permis le
développement de la recherche au Québec de façon
harmonieuse. Les coûts Indirects ont tout d'abord été
identifiés dans les milieux hospitaliers et remis à un organisme
qui a été formé - qui avait déjà
été formé sous le nom du Conseil de recherche en
santé du Québec, devenu le Fonds de recherche en santé du
Québec - pour ensuite être remis aux milieux hospitaliers, mais
les coûts indirects qui étaient nécessaires à
l'élaboration des programmes de recherche ont donc été
bien identifiés dans les hôpitaux affiliés.
Quant aux coûts directs de la recherche, le ministère a
créé une structure, le Conseil de recherche en santé du
Québec, comme je disais tout à l'heure, et par la suite, eh bien,
d'un fonds de FRSQ. Cette structure s'est intéressée surtout
à subventionner des centres de recherche dans les milieux hospitaliers
et à former de jeunes chercheurs dans ces centres et à
créer une structure d'accueil pour les nouveaux chercheurs qui veulent
s'établir dans les milieux hospitaliers. Donc, du point de vue de la
recherche, je crois que le Québec s'est doté d'une structure qui
est enviée non seulement dans d'autres provinces du Canada, mais
également à l'extérieur du pays. Je pense qu'il faut avoir
eu l'occasion d'être appelé à consulter et à
collaborer avec des collègues à l'extérieur du
Québec pour se rendre compte de l'importance que l'on accorde à
cette structure et de la façon jalouse dont on la regarde dans les
autres provinces.
Dans le document d'orientation, les endossements des consultations de la
communauté scientifique et l'endossement des recommandations qui avaient
été faites par cette communauté lors de la consultation,
à l'occasion de la commission Rochon ou encore de l'élaboration
des deux plans triennaux qui ont été présentés par
cet organisme, ont été largement endossés dans le document
d'orientation de telle sorte qu'un accroissement des subsides voués
à la recherche, qui vont jusqu'à l'ordre de 1 % du budget du
ministère de la Santé et des Services
sociaux, eh bien, était une proposition faite dans ces
orientations. L'avant-projet de loi est silencieux à cet égard,
aussi bien sur la structure que le financement de la recherche, mais je me
demande si on ne doit pas considérer ceci comme étant
déjà un acquis, et qu'on veut bien nous assurer qu'il n'est pas
nécessaire de l'inclure dans le projet de loi puisque c'est une
structure qui existe déjà et un financement qui est
déjà acquis par d'autres mécanismes.
La raison pour laquelle j'ai peut-être Insisté sur ce
financement de la recherche quoique très brièvement, c'est que je
pense que si on a réussi, dans le secteur de la recherche, à bien
identifier un mécanisme par lequel on pouvait supporter
adéquatement la recherche, un tel mécanisme pourrait être
également possible pour les activités d'enseignement qui, elles,
sont beaucoup plus problématiques au niveau de leur financement. Encore
une fois, M. L'Écuyer vous en fera l'exposé.
Un autre point que j'aimerais soulever, et qui est, pour les
facultés de médecine et les universités, une grande source
de soucis, c'est le contingentement des effectifs médicaux et la
façon dont ce contingentement est mis en application. Nous sommes bien
conscients que si, d'une part, un contingentement est peut-être
nécessaire pour obtenir un développement harmonieux et pour
permettre de dispenser des soins de façon adéquate dans les
différentes régions de la province, si le contingentement des
effectifs médicaux doit être fait, d'une part, en fonction des
soins qui doivent être rendus aussi bien dans chacune des régions,
et d'autre part en fonction des soins ultraspécialisés qui
doivent être concentrés dans certaines de ces réglons, il y
a également d'autres fonctions que Ion doit considérer quand on
parte de contingentement des effectifs médicaux.
Je crois que le système qui a été adopté et
qui est en fonction présentement, répond de façon
passablement adéquate aux besoins académiques,
c'est-à-dire qu'on a considéré, actuellement, que les
individus qui répondaient à la classification de
cliniciens-chercheurs par un organisme comme le FRSQ, étaient
exemptés du décret. Nulle part dans le nouvel avant-projet de
loi, nous ne trouvons une exception pour les gens qui ont parfait leur
formation bien au-delà des limites minimales normales exigées,
qui ont acquis une expertise dans un domaine de l'enseignement, dans un domaine
de la pédagogie ou de la recherche et qui envisagent une carrière
académique dans nos milieux. Il faut absolument qu'une telle structure
soit reconnue dans l'avant-projet de loi pour que nous puissions continuer
à remplacer le corps professoral de nos rangs, des rangs de notre corps
professoral qui vieillit et qui approche d'une date où un bon nombre de
médecins prendront leur retraite. Nous avons engagé beaucoup de
gens pendant une certaine période, dans les années soixante, et
les embauches, par la suite, ont été beaucoup plus rares. Donc
nous avons un bloc d'Individus qui évoluent de la même
façon, c'est-à-dire tous ensemble.
Nous aurons et nous avons déjà un problème dans les
années quatre-vingt-dix, un problème majeur, pour remplacer notre
corps professoral par des médecins qui sont bien formés, bien
au-delà des normes habituelles, et à qui nous ne pouvons garantir
de situation, lorsqu'ils reviendront dans nos milieux, à cause de
l'incertitude de tout programme concernant le contingentement des effectifs
médicaux. Ce sont, en résumé, les quelques points majeurs
que nous avions à soulever du côté de l'université
concernant cet avant-projet de loi. Je demanderais à M. L'Écuyer
de bien vouloir continuer.
M. L'Écuyer (Richard): Vous voyez un peu le contrat que
nous donne l'Université de Montréal: avoir des centres capables
d'accueillir, dans tous les domaines des sciences de la santé, des
étudiants. Mais qu'avons-nous entre les mains pour pouvoir accueillir
ces centres-là? Si on regarde les centres hospitaliers, toute
l'organisation, les lois, les règlements, les objectifs, les
procédures, le financement, tout est fait en relation avec les soins.
Jamais ou à peu près jamais nous ne nous penchons sur le volet
enseignement et tout ce qui en découle pour le financement.
C'est donc dire que ces centres hospitaliers n'ont à peu
près pas de budget. Pour faire face à toute la
problématique de l'enseignement, ils doivent gruger à même
les budgets de soins pour être en mesure de financer l'enseignement. Je
peux vous donner un exemple. Un hôpital qui aurait 500 lits et qui
pourrait avoir huit pharmaciens, et le même hôpital qui aurait 500
lits, mais qui serait un hôpital d'enseignement universitaire, avec ses
mêmes huit pharmaciens, ne pourrait pas offrir la même gamme de
soins parce que l'équivalent d'un pharmacien participerait à tous
les programmes d'enseignement et les programmes de recherche. Vous voyez un peu
les contraintes qu'on a sur les soins pour être capables de faire face au
volet de l'enseignement. Dans les deux cas, nous sommes dans une situation un
peu plus précaire.
Il serait intéressant si, au cours des prochaines années,
le ministère de la Santé - évidemment, est en cause
beaucoup le ministère de l'Éducation - si ce volet d'enseignement
était vraiment reconnu et obtenait ses lettres de noblesse comme un vrai
programme dans ces centres, de telle sorte que le financement, comme on a fait
toutes les démarches au niveau du FRSQ pour financer les coûts
indirects, la gamme des coûts indirects reliés à
l'enseignement serait financée. Nous avons des budgets très
petits pour ces secteurs. (21 h 30)
Le deuxième volet dont j'aimerais vous entretenir, c'est tout le
volet suprarégional des centres hospitaliers universitaires. Ces
centres, reliés à l'Université de Montréal, se
logent dans la région 06-A, mais, d'une façon
générale, 55 % de leur clientèle seulement viennent de
cette région. Ces centres ont environ 50 % de leur clientèle en
dehors de la région 06-A. Nous ne voulons pas partir le débat
pour ou contre la région. Il faut participer à l'intérieur
de nos régions, qu'il y ait une régie, qu'il y ait un conseil
régional, peu importent les structures, nous devons participer,
être présents parce que nous desservons 50 % de la
clientèle de ce milieu. Mais, nous pensons majeur d'avoir un
rattachement au niveau provincial, étant donné que nos programmes
sont provinciaux et que nous desservons une clientèle d'au-delà
de 50 % souvent en dehors de la région 06-A. Ça nous semble
majeur d'être en relation directe avec une structure provinciale pour
faire face à la problématique provinciale.
Le dernier volet dont je voudrais vous entretenir, c'est le volet de la
technologie. Plusieurs ont parlé, de tout le secteur de la technologie.
Dans chacun des centres hospitaliers universitaires, il y a des comités
d'évaluation technologique qui tentent de rationaliser, qui tentent
d'évaluer l'impact, qui tentent de suivre de très près ces
dossiers qui évoluent à une vitesse vertigineuse. La technologie
nous rattrape à tous les jours et nous avons de la difficulté
à nous y retrouver. C'est pour ça que nous avons mis sur pied,
dans chacun de ces centres, des comités. Mais, ce qui nous semble encore
plus majeur que le développement de la technologie à un rythme
accéléré, c'est la vétusté de notre
technologie. Souvent, ces centres hospitaliers ont des parcs de 35 000 000 $
à 40 000 000 $. Figurez-vous que, seulement avec un remplacement de la
valeur de 5 %, ça veut dire 40 000 000 $, 2 000 000 $ par année,
seulement pour remplacer la vétusté, et déjà,
ça vous prend 20 ans pour remplacer votre parc d'équipements.
Imaginez-vous la problématique qu'on vit d'année en année.
Il nous semble qu'il faudrait trouver une formule de financement statutaire,
incluse dans les budgets annuels, qui fasse en sorte qu'on puisse faire face
à l'avenir et qu'on ne fasse pas face au futur comme on a passé
les dix dernières années, en ne remplaçant à peu
près pas le parc d'équipements. La vétusté est
très grande et nous ne réussissons pas à y faire face.
Comment faire face à toutes les nouvelles technologies qui nous
sortent de partout à travers le continent nord-américain et
l'Europe? Comment faire face à la fine pointe? Les fondations, au cours
des dernières années, ont fait un effort spécial, mais cet
effort est très peu par rapport à tout ce qui peut se produire au
niveau de la fine pointe. Si nous voulons avoir des centres universitaires avec
une Université de
Montréal qui va rayonner à travers le Canada, nous devons
faire face à cette problématique. Actuellement, face à nos
fondations - et c'est rendu très critique - nous les amenons, nous leur
demandons de financer la vétusté. Peu de membres dans nos
fondations sont heureux de contribuer au financement de la
vétusté. J'espère que nous ne les découragerons
pas, parce qu'ils ont le goût de venir nous aider à aller plus
loin, mais de là à faire le vieux, c'est moins
intéressant.
Un petit mot, en terminant, sur le Bureau de coordination. Le Bureau de
coordination regroupe, comme l'a dit le doyen, l'ensemble des milieux
universitaires affiliés à l'Université de Montréal
et les trois doyens qui y participent: nursing, médecine et pharmacie.
Mais, ce bureau s'est donné une mission importante, mission que nous
essayons d'améliorer de jour en jour, soit de coordonner, de
compléter, de faire en sorte que nos ressources aient leurs
résultats optimaux pour qu'on puisse en tirer le maximum et
développer toute cette grande complémentarité dont tout le
monde rêve.
Ça m'a fait plaisir de vous entretenir.
La Présidente (Mme Marois): Merci. Merci de votre
présentation. Est-ce qu'il y a autre chose que vous vouliez ajouter?
Ça va?
Une voix: Ça va.
La Présidente (Mme Marois): Merci. Alors, M. le ministre
de la Santé et des Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci. Nous avons entre les
mains un mémoire d'une qualité nettement haut de gamme.
Évidemment, lorsqu'on reçoit des gens de milieu universitaire, on
né s'attend pas à moins que ça. Vous maintenez bien votre
réputation, il y a des pistes très intéressantes qui sont
développées à l'intérieur du mémoire:
comité d'éthique, recherche, développées à
l'intérieur du mémoire, comité d'éthique,
recherche, technologie, ce sont des points très intéressants.
Évidemment, ce ne sont pas ceux-là qu'on va questionner parce
qu'on pourrait être encore là demain matin.
Ce qui m'a frappé, d'autre part, dans la lecture du
mémoire, c'est que les quatre missions d'un centre hospitalier
universitaire sont bien définies: soins spécialisés et
ultraspécialisés, enseignement, recherche et évaluation
des technologies. Quand je prends le mémoire à la page 2, donc,
du résumé, il y a un petit paragraphe, qui est au bas de la page,
qui se lit comme suit: "En fonction de ces caractéristiques des
hôpitaux universitaires, le Bureau de coordination des centres
hospitaliers d'enseignement affiliés à l'Université de
Montréal soumet une série de recommandations visant, d'une part,
à mieux intégrer à la fois dans l'esprit de la loi et
dans
ses articles - c'est là qu'on les reprend - les dimensions de
l'enseignement, de la recherche, de l'évaluation des technologies et de
la dispensation des services ultraspécialisés. évidemment,
si je suis du ministère de l'enseignement supérieur et de la
science, je suis très heureux de l'ordre dans lequel elles sont
présentées. mais si je suis dans ma situation de ministre de la
santé et des services sociaux, ça m'inquiète un petit peu.
ça m'inquiète et lorsque je tourne la page et que j'en arrive
à la liste des recommandations, on voit en caractères plus gros:
"les centres hospitaliers d'enseignement universitaire". je dénote,
à ce moment-ci, une de vos préoccupations majeures au niveau de
l'enseignement. et ça, comme ministre de la santé et des services
sociaux ça devrait, d'un côté, sur le plan de la formation,
me réjouir, mais, comme ministre de la santé aussi, ça
m'inquiète un petit peu l'ordre des priorités parce que, pour
nous, la première devrait être soins spécialisés et
ultraspécialisés. je ne sais pas si vous partagez mon avis.
M. L'Écuyer: Vous avez tout à fait raison, M. le
ministre, mais cela a été voulu. Étant donné qu'il
y a plusieurs groupes qui viennent rencontrer la commission, que l'avant-projet
de loi est rempli d'une gamme d'articles, nous avons voulu faire ressortir que
le volet enseignement et recherche, sachant que beaucoup d'autres organismes
viendraient vous parler des soins. Et c'est pour ça que je traitais ces
deux points tantôt. Enseignement, parce que c'est l'enfant pauvre du
système. Nos centres hospitaliers doivent, comme je disais tantôt,
pour offrir de l'enseignement, pour avoir du financement pour l'enseignement,
le gruger dans les soins. Jamais le système de santé n'a
été reconnu comme étant un système d'enseignement
universitaire. Le volet enseignement universitaire n'a vraiment pas
été reconnu et ce n'est pas certain que ça ne se ferait
pas des échanges entre le ministère de la Santé et le
ministère de l'Éducation, de telle sorte que le ministère
de l'Éducation devrait financer à un très haut point les
secteurs d'enseignement.
Vous savez qu'il y a des centres hospitaliers qui reçoivent
au-delà de 2500 étudiants par année. Imaginez-vous tous
les coûts indirects engendrés par ce centre-là et comparez
ces coûts à n'importe quel autre centre de 500, 600 lits qui n'a
pas d'enseignement. Or, c'est pour ça qu'on a voulu se concentrer et
notre désir était: Nous espérons que le ministre va nous
parier seulement de l'enseignement et de la recherche et non pas des soins,
gardant ses questions pour les autres centres, afin qu'on puisse aller plus
loin et qu'il nous promette, jusqu'à un certain point, que les
prochaines législations, les prochains écrits, les prochaines
politiques vont donner des lettres de noblesse à toute cette facette de
notre mission. Nous avons habituellement quatre grandes missions, il va de soi,
mais, celle-ci, comme elle est très méconnue, nous voulions
l'explorer.
M. Côté (Charlesbourg): Une chose est certaine,
c'est que, sur les quatre grandes missions, on ne se chicanera pas longtemps.
Vous comprendrez que pour moi, la majeure doit être celle que
j'évoque. Je comprends que la vôtre peut atteindre d'autres buts
et avoir d'autres préoccupations. Le rangement n'est pas le même.
Mais en vous écoutant parler de parents pauvres, il y a une question qui
m'est venue à l'esprit: Pourquoi autant de monde veulent-ils être
un centre universitaire si c'est la pauvreté?
M. L'Écuyer: Vous savez, je pense que ça c'est un
petit peu comme rêver à la gloire. Tant que vous n'avez pas connu
ce que c'était, vous rêver de le devenir, mais à partir du
moment où vous êtes rendu un centre universitaire, que vous avez
découvert ce qu'est cette réalité-là et les
défis avec lesquels vous devez vous confronter, vous voyez ça
avec des yeux différents. Je pense que c'est un petit peu ça.
M. Côté (Charlesbourg): Comme ça,
évidemment, si on décidait, demain matin, d'en éliminer un
certain nombre, on n'aurait pas de problème, on nous remercierait.
M. L'Écuyer: Ils auraient certainement moins de
problèmes budgétaires ces centres-là, soyez-en
certain.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, c'est quand
même très agréable de pouvoir échanger comme
ça, à une heure comme celle-là, et avoir du plaisir tout
en passant des messages.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Soyez sûr d'une chose,
c'est que je me ferai un grand plaisir de parier avec M. Ryan et de lui faire
part de vos préoccupations et du fait que ça nous
libérerait passablement nous autres s'il prenait ça à sa
charge.
M. L'Écuyer: Vous êtes bien aimable.
M. Côté (Charlesbourg): À l'intérieur
de vos recommandations, à la recommandation 2, vous suggérez -
c'est nouveau - une troisième classe ou catégorie, en pariant
d'un centre hospitalier affilié. Après avoir un centre
hospitalier universitaire, un institut, vous suggérez un centre
hospitalier affilié. Ma question est très simple: Pourquoi?
M. Carrière: Je pense que les définitions sont
relativement claires. C'est qu'un centre hospitalier universitaire doit
représenter toute la
gamme, non seulement des services, mais toute la gamme des enseignements
qui peuvent être dispensés. Ce centre hospitalier universitaire
doit également avoir des programmes de recherche bien structurés
qui sous-tendent ces programmes d'enseignement et de soins
ultraspécialisés. Tandis qu'un centre affilié peut
être un centre qui peut nous rendre de grands services dans un secteur
donné ou dans une discipline donnée. Par exemple, un programme de
médecine familiale n'a peut-être pas besoin de toute la môme
infrastructure qu'un centre hospitalier universitaire qui dispenserait tout
l'enseignement de toutes les surspécialités à partir de la
neurochirurgie jusqu'à la médecine interne.
Alors, donc, un centre hospitalier affilié, pour nous, n'a pas
nécessairement la môme connotation, ne demande pas la môme
Infrastructure et n'a pas non plus les mêmes coûts indirects pour
son implication dans l'enseignement. Mais ce sont des centres qui, par contre,
peuvent nous rendre de très grands services, mais où l'essence
même, l'objectif même de ce centre n'est pas exactement le
même que celui du centre hospitalier universitaire où, comme M.
L'Écuyer le mentionnait, la composante enseignement et recherche doit
être très vivement défendue, doit être très
présente. Dans un centre hospitalier affilié, on peut s'attendre
que ceci soit très présent à l'intérieur d'un
programme, mais moins généralisé dans le reste de
l'institution.
M. Côté (Charlesbourg): Vous évoquez, dans
une autre recommandation, la recommandation 12, que les centres hospitaliers
universitaires et instituts, et j'Imagine, par le fait même aussi, les
centres hospitaliers affiliés devraient relever directement du ministre.
J'ai compris tantôt, sur le plan de dépassement, de
débordement des régions, mais ça, c'est une idée
que Rochon, dans ses recommandations, supportait. Beaucoup de réticence
au niveau du ministère parce qu'il est clair que le ministère
aura quand même un jour un rôle à jouer sur l'approbation
d'un certain nombre de choses. Sur le plan de la gestion, dites-moi pourquoi
les centres hospitaliers universitaires ou des instituts ou affiliés
devraient relever du ministre?
M. L'Écuyer: Disons que ça s'implique dans un
contexte de décentralisation où le ministère n'a pas
à assumer la gestion de ces centres hospitaliers, mais se situe au
niveau des grands objectifs et de l'opérationnalisation des programmes.
Alors, ce n'est pas une gestion comme elle est faite actuellement en relation
avec les centres où toutes les choses sont gérées plus
quotidiennement. Pourquoi ces centres-là relèveraient-ils du
provincial? Je pense que la raison est assez simple et je vais l'illustrer par
un exemple. Vous êtes dans la région. Prenons pour acquis qu'il y
a une régie. La responsabilité de la région 06-A, c'est de
voir à ce que la population de la région recoive la gamme des
services. Donc, cette région-là se préoccupe de la
population de cette région-là. Ces centres hospitaliers
universitaires ont la responsabilité de répondre à... Je
donne un exemple que je connais plus particulièrement: l'hôpital
Sainte-Justine ne donne des services qu'à 38 % de sa clientèle
qui vient de la région 06-A, 62 % viennent de l'extérieur. Alors
iI est bien sûr que si Saint-Justine est partie prenante et uniquement
partie prenante de la région 06-A, elle est prise dans une
souricière parce que cette région-là n'a la
responsabilité que d'offrir des services à 32 % de sa
clientèle. Alors, iI faut absolument que la programmation soit
provinciale et qu'a y ait des liens, mais pas des liens de gestion qui fassent
en sorte que le ministère soit pris dans le quotidien. (21 h 45)
Le ministère, je pense, plus il aura des objectifs globaux et une
opérationnalisation de ces programmes-là, plus on sera en mesure
de pouvoir décentraliser les choses, parce qu'on s'attendra que les gens
s'inscrivent dans ces grands projets-là.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends le fait qu'on
desserve une clientèle qui sort de la région 06-A. Ca peut
être les Laurentides en termes de services, Lanaudière, ça
pourrait être la Montérégie. Évidemment, notre
objectif, parce qu'on voulait décentraliser des pouvoirs au niveau d'une
régie régionale, c'était parce que les régies
régionales connaissaient mieux leurs besoins, qu'elles étaient
capables de mieux prioriser leurs besoins que le ministère au central.
Dans la mesure où les centres hospitaliers universitaires
relèvent du ministre, comment est-ce qu'on fait? Parce que vous
dispensez quand même des soins dans cette région-là,
comment est-ce qu'on fait pour s'assurer de la complémentarité et
s'assurer qu'il n'y a pas de duplication des services?
M. L'Écuyer: Les centres hospitaliers de cette
région-là devront s'impliquer et participer avec la régie
de la région pour tous les programmes qui sont offerts dans cette
région-là et aussi avec l'ensemble du ministère pour les
programmes qui sont offerts dans toutes les autres régions de la
province. Or, il y aura des liens de coordination avec la région et des
liens provinciaux pour l'ensemble des autres régions, parce que,
figurez-vous comment vont se situer les autres régions s'il n'y a aucune
préoccupation provinciale ni aucune démarche provinciale de ces
centres-là? Ce sera une minorité de centres, mais iI reste que,
ces programmes étant provinciaux dans une minorité de centres,
c'est ceux-là que l'on doit... Mais iI faudra s'orchestrer au niveau des
régions, il va de soi, parce qu'il y a des clientèles qui sont
celles de ces centres-là aussi, dans cette
région-là.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, cela tait
une mécanique qui est un petit peu plus difficile, là. Ça
peut nous mettre dans une situation difficile. Mais vous l'aimez, le ministre,
pour dépendre de lui? C'est extraordinaire, iI doit y avoir des liens
affectifs sur le plan de l'histoire qui ont été très
bénéfiques, parce que dans l'état de pauvreté
où vous êtes, de vouloir toujours dépendre de celui qui
vous nourrit mal, je trouve ça extraordinaire. C'est un esprit
d'abnégation tout à fait remarquable.
J'aimerais, à ce moment-ci, poser une question sur le
contingentement des effectifs médicaux, parce qu'il y a un volet qui
m'est apparu très Intéressant et peut-être inédit
à la commission jusqu'à ce moment-ci sur la relève du
niveau d'enseignement, de ceux qui enseignent. Évidemment, je suis un
jeune nouveau qui arrive dans ce ministère-là, j'en al beaucoup
à apprendre, et ça va très vite. On m'a parié de
cette fameuse table de concertation sur les effectifs médicaux. Un des
illustres personnages du Québec et du réseau de la santé
au Québec, qui a ouvert notre commission, M. Castonguay, est venu nous
dire que, d'après lui, il y avait trop de médecins au
Québec. On devait arrêter d'en produire au rythme où on en
produit. On est donc passé de un médecin par 575 habitants
à un par 450. Ce que je comprends, c'est que vous nous dites qu'on ne
forme pas assez de médecins, mais davantage dévolus à la
recherche. Mais pour être capable d'être un bon professeur,
à ce que j'ai compris, il faut aussi faire du terrain de temps en temps.
J'aimerais vous entendre là-dessus. Qu'est-ce qui fait que la table de
concertation sur les effectifs médicaux, elle - si vous le revendiquez,
c'est parce qu'elle ne le retient pas - ne tient pas compte de ce
critère-là?
M. Carrière: Je pars de ce que j'ai expliqué de la
situation actuelle. Premièrement, sur les effectifs médicaux,
généralement, au Québec, c'est probablement vrai dans un
certain nombre de disciplines que pour des gens qui ont obtenu la formation de
spécialiste selon les critères exigés, dans certaines
disciplines, il y a peut-être trop de spécialistes, et il faut
peut-être voir... Et même de gens dans d'autres... En
médecine familiale également, dans certaines régions,
peut-être qu'il y en a trop, et dans d'autres, pas tout à fait
assez.
L'ensemble des médecins, possiblement qu'il y a un remaniement
à faire, ça, c'est une chose. Mais le point sur lequel nous
voulons insister, c'est que des médecins qui sont formés et qui
ont acquis une formation nettement supérieure aux critères
minimaux qui sont exiges, nous en retrouvons de moins en moins de ces
médecins-là. Nous avons de plus en plus de difficultés
à en recruter. Quand nous avons de ces médecins que nous pouvons
recruter avec une telle formation, il est devenu pour nous d'une importance
capitale de pouvoir les recruter pour continuer nos programmes d'enseignement,
nos programmes de recherche et également de dispensation des soins
ultraspécialisés dans des milieux. Vous savez, des gens qui sont
des chirurgiens cardio-va8culaires et qui sont allés faire, en plus de
leur formation, trois ou quatre années de recherche, qu'elle soit
clinique ou plus fondamentale, à l'extérieur, ces gens-là,
nous devons être capables de les accepter dans nos milieux hospitaliers
universitaires, au-delà des contingentements qui sont fixés
uniquement pour la dispensation des soins, soit dans une région ou pour
l'ensemble de la province. Donc, c'est dans cet esprit que nous devons recruter
ces gens qui, finalement, participent peu aux soins, directement. Parce que si
on recrute ces gens par le biais de programmes de chercheurs boursiers du FRSQ
et que 80 % de leurs activités sont des activités de nature
académique, ces gens ne participent que 20 % de leur temps à de
la dispensation directe de soins. Donc, nous avons besoin de ces gens dans les
milieux. Et quand nous comptons ces gens comme une personne dans un milieu, il
évident qu'en termes de rendement, au point de vue des soins, on ne peut
pas les comptabiliser comme une personne. Donc, iI faut tenir compte de ce
facteur quand on considère le recrutement de la main-d'?uvre. Si on
veut des programmes de recherche et d'enseignement qui continuent et qui se
développent, on ne peut pas faire un recrutement basé uniquement
sur des besoins en soins, H faut tenir compte d'autres
considérations.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que ces
problèmes, de manière spécifique, ont été
abordés à la table de concertation?
M. Carrière: Je ne saurais vous dire, M. le ministre,
parce que, personnellement, Je n'ai jamais été invité
à cette table de concertation. Il y a un doyen qui est invité
annuellement. Alors, c'est aux quatre ans que nous sommes Invités. Ce
problème a sûrement dû... La situation actuelle qui existe
et qui a été créée par un décret, jusqu'en
1991, est une situation que nous considérons acceptable. Par contre,
nulle part dans l'avant-projet de loi nous ne pouvons prévoir qu'une
telle situation se prolongera et nous croyons qu'elle est essentielle pour
assurer la relève de notre corps académique.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, conclusion: la table
de concertation n'a pas si mal travaillé. Ce qu'on espérerait,
c'est qu'elle continue de bien travailler au-delà des années
1991.
M. Carrière: Exactement.
M. Côté (Charlesbourg): Une dernière
question sur le développement technologique. C'est
Inquiétant de parier de vétusté de nos appareHs, de notre
équipement. C'est aussi très inquiétant de voir ce que
ça coûte. C'est aussi très inquiétant de voir avec
quelle frénésie et avec quelle rapidité nos
équipements deviennent très vite dépassés. Vous
avez été généreux, tantôt, lorsque vous avez
dit: 5 % par année, ça prend 20 ans, imaginez-vous ce que
ça va être dans 20 ans. Je regardais, en début de semaine,
à l'émission Le Point, toutes les inventions de gadgets, sur le
plan électronique, au cours des dernières années, au cours
de la dernière décennie, de 1980 à 1990. Il y a des
équipements qu'on a et, finalement, ça nous est parti de
l'esprit, on pensait bien que ça faisait 20 ans à tout le moins
qu'on avait ça alors que ça fait à peine dix ans. Il y a
eu une véritable révolution en l'espace de dix ans. Est-ce que
vous pensez qu'on a les moyens, comme société, Québec, en
Investissant 10 400 000 000 $ dans la santé, de faire face à tous
ces besoins-là, demain matin, et comment est-ce qu'on fait? Probablement
que mon collègue de Rouyn-Noranda-Témiscamingue va vous dire
tantôt: Santé, vous êtes les gavés du système
et le social, c'est le parent pauvre et on devrait davantage Investir dans le
social. Comment est-ce qu'on fait? Ça me paraît être un
problème difficilement soluble parce que, finalement, on va le
régler avec des piastres et des cennes additionnelles. C'est très
inquiétant, très très Inquiétant. Comment est-ce
qu'on fait? C'est vétuste. Si on achète aujourd'hui, dans deux
ans c'est vétuste. Je pense qu'on peut se le dire. Évidemment, il
y a des vendeurs, des compagnies qui vendent très bien aussi, parce que
nos centres hospitaliers sont sollicités tous les jours, avec des
équipements complètement modernes, un peu partout sur le
territoire et, autant que possible, en mettant en compétition deux
petites communautés pour avoir un scanner, par exemple. On pourrait vous
donner des exemples très précis à ce niveau-là.
C'est clair que ça me paraît un défi presque
insurmontable.
M. L'Écuyer: Vous avez raison. La marge de manoeuvre est
très mince parce que la problématique est de taille. Mais nous
pensons que nous ne devons pas faire face aux dix prochaines années
comme nous l'avons fait dans les dix dernières. Dans les dix
dernières années, le système a arrêté et on a
dit: Les équipements, on ne touche pas à ça et on laisse
ça là. On aurait peut-être pu il y a dix ans, mettre sur
pied un système qui aurait fait en sorte que, sans Investir des
fortunes, on réussisse à même nos coûts
d'opération à avoir une forme d'amortissement qui nous permette
de préparer l'avenir. Et c'est peut-être ce volet-là qu'il
faut commencer à instaurer pour faire face graduellement aux prochaines
années. La marge est mince et c'est pour ça qu'il faut aussi y
aller avec toute la rigueur et tout le sérieux. Tout le monde de
l'évaluation des technologies, le conseil qui a été
formé, ce sont toutes des avenues qui sont extrêmement
intéressantes et il faut continuer dans ce filon-là. Mais que
l'on veuille ou que l'on ne veuille pas, nous ferons face à cette
réalité-là. Il y a des volets aussi qui peuvent,
jusqu'à un certain point, nous donner des ouvertures. Pendant des
années, il y a eu des efforts considérables pour tenter de
développer tout le monde de l'Informatique afin de nous permettre de
gérer à des meilleurs coûts, mais en investissant pour
récolter dans le futur, et afin de nous permettre aussi d'être
capables de dégager des profils de gestion. Avec l'information, vous
savez, tout le monde se rend aux évidences. Quand on n'a pas
d'Information, tout le monde en discute. Il y a des nouveaux projets qui ont
été mis sur la table. On n'a qu'à penser à CEMOSI.
Vous savez, ces projets de développement de logiciels vont nous
permettre d'aller chercher du temps de travail équivalant à peu
près à un tiers du travail d'une infirmière dans une
journée. Il y a de l'avenir dans ça. Alors, ces marges de
manoeuvre qu'on pourra dégager nous le permettront dans cinq, six, sept
ans, parce que c'est le temps de développer et de recueillir les
résultats. Une infirmière passe facilement le tiers de son temps
et un médecin passe un temps considérable assis à
écrire. À partir du moment où nous n'écrivons plus,
nous récupérons une somme de temps considérable. Alors, iI
faut être proactif et essayer de trouver toutes ces avenues-là.
Mais ce qu'il faut se dire, c'est que les solutions ne viendront pas toutes
seules et qu'on ne peut pas attendre.
La Présidente (Mme Marois): Oui, vous pouvez
compléter. Vous voulez compléter.
M. Carrière: Oui. M. le ministre, je vous félicite
d'être aussi conservateur jusqu'à un certain point en disant que
les équipements de dix ans, ce sont encore des équipements
jeunes. La génération des équipements actuels et
l'évolution de la technologie font que des équipements de cinq
ans sont déjà des équipements désuets. Je suis
entièrement d'accord avec vous, c'est un problème majeur, c'est
un problème de choix de société jusqu'à un certain
point. Jusqu'à quel point peut-on se doter d'équipements modernes
pour alléger le fardeau, si vous voulez, des investigations et le
fardeau ou les douleurs infligées par les investigations et les
traitements à des gens qui viennent requérir des soins? Alors,
c'est vraiment un choix de société. Quand on regarde le
coût de ces équipements et qu'on lit, par ailleurs, les journaux
et que l'on voit qu'un F-18 qui s'écrase est devenu un fait divers - je
me suis presque amusé à lire les journaux au cours des
dernières années et à faire la moyenne qu'environ trois
F-18 tombent par année, des engins qui coûtent environ 75 000 000
$ chacun - je ne peux pas faire
d'autre raisonnement, en arriver à d'autre raisonnement que c'est
un choix de société entre du bon équipement médical
ou des avions qui servent je ne sais pas à quoi? (22 heures)
M. Côté (Charlesbourg): Ce que vous nous
suggérez, c'est que le fédéral nous transfère ces
budgets-là?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Carrière: Évidemment, nous sommes
entièrement d'accord.
La Présidante (Mme Marois): Un F-18...
M. Côté (Charlesbourg): Pourtant, au cours des
dernières années, les transferts ont chuté dramatiquement.
Mais vous avez raison, quand on le prend sous cet angle-là, bien
sûr. Merci.
La Présidente (Mme Marois): M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Nous, on suggère de les prendre.
La Présidente (Mme Marois): Ha, ha, ha!
M. Trudel: Assez rapidement, compte tenu de l'heure. Il y a
effectivement beaucoup de choses qu'on retrouve dans votre mémoire. Il
faut bien reconnaître que la mission que vous remplissez au Québec
et les devoirs qui vous sont dévolus sont peut-être quelquefois un
peu moins glorieux au niveau de l'actualité quotlenne et que les
problèmes que vous vivez au niveau du développement et de la
recherche en particulier sont moins spectaculaires souvent, compte tenu des
périodes de temps Impliquées et des résultats que l'on
obtient. Une fois pendant une dizaine d'années, on aura une
découverte tout à fait spectaculaire, mais c'est avec un peu de
chance qu'on aura ce résultat. On aura d'excellents résultats
quotidiens qui feront avancer la science et qui feront avancer l'application de
la découverte un tout petit peu, et c'est déjà un grand
pas pour l'humanité, et c'est parfois difficile.
Je suis un peu étonné quand môme, tout comme le
ministre d'ailleurs, que vous nous disiez que vous êtes obligés de
gruger sur les budgets de soins pour réaliser cette mission
d'enseignement universitaire et de recherche. Avez-vous déjà
chiffré ça, à quelles proportions? Est-ce que vous avez
regardé ça dans vos affectations totales? Qu'est-ce que ça
peut représenter comme pourcentage de ce que vous êtes
obligés de prendre pour réaliser cette mission universitaire?
La Présidente (Mme Marois): M. L'Écuyer.
M. L'Écuyer: Écoutez, je pense que dans nos
documents, on les a listes, je ne sais pas trop à quel endroit.
Ça équivaut à peu près à 20 %.
M. Trudel: À 20 %? Et est-ce qu'on peut continuer le
raisonnement jusqu'au bout en disant: Lorsque, au niveau du financement par le
ministère, on vous exige l'équilibre budgétaire - la
religion de certains hôpitaux, paraît-il - ça se transforme,
en fin d'année ou en cours d'année, en fermeture de lits parce
qu'il faut en arriver à l'équilibre budgétaire.
M. L'Écuyer: Vous savez, tantôt, nous étions
ici quand les directrices de soins vous ont parlé. Il y a
différentes façons d'être en équilibre
budgétaire. Alors, actuellement, si vous regardez le ratio heures-soins
en relation avec tout l'alourdissement des clientèles, le vieillissement
des clientèles, notre monde des soins Infirmiers nous le dit tous les
jours: On n'a pas le minimum nécessaire en relation avec ce qui devrait
être fait. Ça, c'est une façon d'être en
équilibre, vous mettez moins de monde dans vos unités et,
évidemment, tout le monde des lits qui sont fermés, c'est
relié, selon les périodes de l'année, à cette
rareté des finances.
M. Trudel: Au niveau de l'administration et de la
réalisation de votre mission, vous réclamez ce rattachement
direct la tuyauterie directe auprès du ministère. La connexion,
on comprend facilement qu'il y a des motifs ou des raisons pour ça, que
vous avez bien exposées. Dans la mesure où la
décentralisation - déconcentration ou décentralisation, on
ne le sait trop encore jusqu'à maintenant, mais on Irait vers une
décentralisation du ministère de la Santé et des Services
sociaux, vers quelque chose de régional: régie, collège,
etc., peu Importe le terme - où le ministère déterminerait
des espèces de programmes protégés vers les régies,
c'est-à-dire pour ce qui est de la mission universitaire, la mission
d'enseignement et la mission de recherche, l'argent, les montants ou la partie
qui va jusqu'à la régie rurale qui doit être
consacrée spécifiquement à ces programmes, à ces
objets dans vos Institutions, est-ce que vous ne seriez pas là
rassurés d'être, d'une part, à la table régionale au
niveau de vos budgets pour ce qui est des soins larges, des soins à
offrir à la population et, par ailleurs, dans des programmes
protégés, pour ce qui est de la réalisation de vos
missions de type universitaire?
M. L'Écuyer: Les deux, que ce soit le programme
régional ou le programme protégé, vont être dans la
région, à ce que vous nous dites. Je pense que la
problématique qu'on va vivre, et vous le verrez, c'est qu'une
région qui reçoit de l'argent pour une clientèle et ses
activités aura tendance à refuser les autres régions du
fait que cette région a déjà assez de difficultés
avec ses budgets. J'imagine que ce
n'est pas parce qu'on va régionaliser que l'argent va sortir du
ciel. Il y aura une rareté.
Si on veut vraiment que ces programmes, ces établissements soient
ouverts à l'ensemble du Québec, il faut que ces gens ne soient
pas rattachés à un petit bloc qui va se refermer sur
lui-même du fait que la rareté y sera. Mais il faut qu'il
participe parce qu'il dessert cette clientèle-là aussi dans cette
région.
Je pense que si on veut vraiment que les programmes soient ouverts
à l'ensemble des régions, il ne faut pas les attacher à
une région, ces types de programmes. Et ça demeure une
minorité par rapport à l'ensemble des centres hospitaliers, des
centres locaux, des CLSC, de la gamme des soins et services, vous savez. C'est
une goutte d'eau.
M. Trudel: Oui, II y a certainement des moyens d'en arriver
à respecter, à travers la régionalisation, ces besoins
spécifiques; il faudra être un peu plus inventifs, vous avez
raison. Mais je pense qu'il faudrait faire bien attention d'entacher le
principe de régionalisation parce que nous aurions quelques
difficultés d'ajustement de certains programmes ou de missions par
rapport à certaines de nos institutions.
Deux autres petites questions pour terminer. Au niveau des conseils
d'administration, donc, vous allez conserver, vous autres les instituts
universitaires et les hôpitaux d'enseignement universitaire, vos propres
conseils d'administration. Là-dessus, vous le savez, vous faites l'envie
de beaucoup d'autres établissements au Québec qui nous en ont
parlé très souvent depuis le début de cette commission.
Vous nous parlez, à la page 18, des caractéristiques, en quelque
sorte, ou des qualifications requises pour être membre d'un conseil
d'administration, le cas échéant, ici, dans le type
d'institutions que vous représentez, au niveau des institutions
d'enseignement, des instituts ou des hôpitaux d'enseignement
universitaires. Ça m'intrigue un peu, je dois le dire, la recommandation
18: "...que les organismes nommant des représentants au conseil
d'administration d'un établissement s'assurent au préalable que
ces personnes partagent et appuient les objectifs de l'établissement et
puissent assumer adéquatement leurs fonctions." Je comprends très
bien la préoccupation, mais je trouve ça un petit peu fort de
dire: Oui à la démocratie, mais on voudrait bien contrôler
les démocrates.
M. L'Écuyer: Alors, l'esprit de ça c'est que les
gens qui viennent diriger nos centres, II faut qu'ils aient la piqûre de
l'établissement. Il faut qu'ils l'épousent, il faut qu'ils y
croient, puis qu'ils viennent y travailler. On n'a pas besoin de spectateurs.
Deuxièmement, on veut la crème. Ça veut dire que ceux qui
viennent, ce n'est pas le président nécessairement de la plus
grande compagnie, c'est celui qui est plus que dévoué, qui est
compétent. Donc, on veut les meilleurs et on veut qu'ils aient le
goût, qu'ils viennent tirer avec nous autres, parce que, vous savez,
être sur un conseil d'administration dans des établissements comme
ça, ce n'est pas une sinécure. Il ne faut pas être
seulement de bonne volonté. Alors, si la loi "explose" ça,
ça ne changera peut-être pas la réalité, mais au
moins le message va être clair: Ceux qui veulent coucher avec cet
établissement-là et ceux qui sont capables, parmi les meilleurs,
allez-y donc. C'est ceux-là qu'on veut.
M. Trudel: On va convenir que c'est un peu ' difficile à
contrôler.
M. L'Écuyer: c'est tout à fait vrai, mais au moins
ii faut que le message y soit, il faut que ce soit clair, il faut que les
attentes soient connues.
M. Trudel: Le message y est mais c'était... Je pense qu'on
a souvent, et heureusement que la démocratie nous l'a montré
à travers les temps, à travers les siècles, de très
heureuses surprises. Par exemple, pour faire plaisir au ministre, une madame
des Messagères de l'espoir qui nous disait, la semaine dernière:
Vous savez, quand j'ai vu l'ancien ministre des Transports être
nommé à la Santé et aux Services Sociaux, que j'ai eu
peur, que j'ai eu peur, que j'ai eu peur.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Pourtant, ça a l'air de vous faire plaisir un
peu. Certaines transactions... Et voyez-vous, il y a même des choses dans
l'avant-projet de loi qui ont été changées et qui vont
être changées. On est sûr qu'il y a beaucoup de choses qui
devraient changer aussi. On a toujours espoir d'entrer beaucoup de choses dans
le petit calepin vert. Vous voyez, parfois la démocratie nous
réserve de très belles surprises.
M. Côté (Charlesbourg): Vous n'avez pas
complété...
La Présidente (Mme Marois): Mais quel compliment, cher
ami!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): ...le message de la
messagère de l'espoir!
M. Trudel: Je ne suis pas pour tout dire! Des voix: Ha,
ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Pour un ex-recteur de
l'université, ce n'est que citer...
La Présidente (Mme Marois): Ça manque de rigueur,
vous croyez, M. le ministre?
M. Côté (Charlesbourg): Ça manque de
rigueur.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: La toute dernière question. Vous recommandez
aussi qu'au niveau de ces conseils d'administration, majoritairement, ils
proviennent de l'extérieur du réseau. C'est quoi les motifs, les
raisons?
M. L'Écuyer: C'est parce qu'on pense qu'il ne faut pas que
les gens soient trop de l'intérieur afin d'éviter qu'entre nous,
on se regarde et on s'encense. C'est bon qu'on ait un regard des gens de
l'extérieur, et aussi, ça nous permet d'avoir des antennes, des
ouvertures, des liens avec beaucoup d'autres milieux qui viennent nous aider.
On a besoin de conseils pour nous permettre d'aller plus loin. Alors,
majoritairement, il faut qu'ils soient de l'extérieur.
M. Trudel: Tout en acceptant, par ailleurs, dans votre
dernière recommandation, que le personnel de l'intérieur ne soit
pas exclu de l'institution, ne soit pas exclu de la participation, parce qu'il
y a, là aussi, une richesse importante, lorsqu'il y a des
échanges qui peuvent se produire entre l'intérieur et
l'extérieur, et une compétence que recèle aussi le
réseau lui-même au niveau des hommes et des femmes qui y
oeuvrent.
M. L'Écuyer: Ce qu'on trouve intéressant, c'est
qu'il n'y a peut-être pas une formule mur-à-mur, où tout le
monde a le même modèle et tu suis la roue. Pourquoi est-ce que
ça ne pourrait pas être des conseils qui pourraient être
modulés aux réalités de chacunes des organisations, avec
des grandes balises? Selon nos préoccupations à nous autres, je
pense qu'il y a de la place pour les gens de l'interne, oui. Mais il ne
faudrait pas qu'on la campe trop, pour qu'elle puisse s'adapter aux
différents milieux.
M. Trudel: Pas trop de mur-à-mur? M. L'Écuyer:
Pas trop de mur-à-mur. M. Trudel: Très bien, merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Marois): C'est une formule que notre
chef utilise, d'ailleurs, assez fréquemment. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, je veux tout simplement
vous remercier et peut-être un peu vous rassurer aussi, parce qu'il y a
des éléments qu'on n'a pas touchés. Vous aviez, comme
recommandations, que le milieu universitaire soit consulté sur les
désignations de centres universitaires. Je pense que ça va de
soi. Ça ne peut pas se faire dans les officines de Québec, pour
quelqu'un qui a un simple petit bac ou seulement par fui. Je pense que
ça prend plus que ça. Vous serez définitivement des
partenaires privilégiés. Nous aussi, on recherche la
crème, pour nous conseiller sur le plan des choix à faire. On
fera donc le nécessaire pour que vous soyez impliqués dans les
décisions qu'on prendra.
La Présidente (Mme Marois): Je m'excuse, M. le ministre.
M. le député de Verdun, vous aviez une question assez
brève à poser?
M. Gautrin: J'avais une question, mais, enfin, je ne veux pas
retarder indûment le travail de la commission. J'avais même deux
questions, mais enfin... La première touchait... On a eu des
représentations, cet après-midi, de gens qui se posaient des
questions sur l'enseignement de la médecine familiale,
particulièrement sur l'implication de certains centres hospitaliers dans
la formation en médecine familiale. Je comprends que, dans la
distinction que vous proposez, il existe des centres hospitaliers
universitaires, il existe des instituts universitaires et une troisième
classe qui sont les centres hospitaliers affiliés. Peut-être
qu'entre un peu dans le concept de centre hospitalier affilié ce qui
était et ce qui correspond à l'enseignement de la médecine
familiale. Mais, à part des distinctions de nom entre ces
différents établissements, qu'est-ce qu'il y aurait de
particulier? Qu'est-ce qu'il y aurait comme traitement différent entre
les trois types d'établissements dans la loi, à part leur donner
des noms différents? C'est-à-dire qu'il existe, à l'heure
actuelle, des centres hospitaliers qui donnent un enseignement et qui
correspondent à des centres hospitaliers affiliés,
particulièrement dans le cas de la médecine familiale. Je pense
aussi au centre hospitalier de Verdun, par exemple. Alors, qu'est-ce qu'il y
aurait de changé si on lui changeait son affiliation, son
appellation?
M. Carrière: Dans la loi, on dit qu'un centre hospitalier
universitaire ou un institut universitaire doit avoir un centre de recherche,
par exemple.
M. Gautrin: C'est exact.
M. Carrière: Dans un centre hospitalier affilié,
pour nous, ce n'est pas une condition sine qua non. D'ailleurs, nous ne tenons
pas à ce que nous ayons une multitude de centres de recherche et qu'il
n'y ait pas les concentrations, les masses critiques voulues de chercheurs dans
chacun de ces centres. Donc, un centre hospitalier affilié, c'est une
première distinction. Une autre distinction, c'est qu'évidemment,
quand on parle de développement des technologies, etc., ceci peut
être concentré dans un secteur spécifique, et quand on
parle de coûts Indirects de l'enseignement, ce n'est pas sur l'ensemble
des
coûts de l'institution, dans ces conditions-là, c'est sur
un secteur donné. En plus, une affiliation, à notre sens, veut
dire un Investissement à beaucoup moins long terme. Quand vous parlez
d'un centre hospitalier universitaire, c'est vraiment un centre qui fonctionne
en symbiose constante avec l'université. Il y a des professeurs qui sont
nommés dans ces centres-là, il y en a en grand nombre et des
chercheurs en grand nombre. Tandis qu'un centre hospitalier a des masses
critiques beaucoup plus petites et beaucoup plus restreintes, ce qui fait que,
dans une période d'années XYZ, si le centre ne répond plus
aux critères, iI est beaucoup plus facile de changer un petit groupe
d'étudiants et de le concentrer dans un autre centre hospitalier. C'est
donc une plus grande flexibilité du système à cause d'une
moins grande concentration et d'un moins grand Investissement dans un secteur
donné.
M. Gautrin: Mais iI pourrait recevoir des professeurs de
cliniques, par exemple, quand môme.
M. Carrière: Exactement. M. Gautrin: Parfait.
M. Carrière: Certainement. D'ailleurs, nous voyons
très bien que ces centres devraient fonctionner en étroite
collaboration avec des grands centres pour que la formation puisse se parfaire
en différents établissements.
M. Gautrin: Merci, monsieur.
La Présidente (Mme Marois): Ça va? Alors, on vous
remercie de votre contribution très appréciée,
sûrement, de la part de tous les membres de la commission. Merci.
Nous ajournons nos travaux à demain matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 22 h 15)