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(Dix heures quinze minutes)
Le Président (M. Joly): À l'ordre, s'il vous
plaît!
En cette belle journée ensoleillée...
J'aimerais, ce matin, rappeler notre mandat qui, en fait, est une
consultation générale où on se réunit pour
procéder à des auditions publiques dans le cadre de
l'étude de l'avant-projet de loi, Loi sur les services de santé
et les services sociaux.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Atkinson
(Notre-Dame-de-Grâce) sera remplacé par M. Holden (Westmount); M.
Beaudin (Gaspé) par M. Williams (Nelligan); Mme Loiselle (Saint-Henri)
par M. Doyon (Louis-Hébert); M. Marcil (Salaberry-Soulanges) par M.
Poulin (Chauveau).
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la
Secrétaire.
M. Chevrette: M. le Président. Je n'ai pas de
remplacement, mais comme ils sont tous pris dans la tempête, si jamais il
en arrivait un ou deux en cours de route qui voulaient venir m'accompagner, je
suis persuadé que je ferais de même pour l'autre
côté, c'est-à-dire consentement unanime pour réviser
au besoin aujourd'hui.
M. Côté (Charlesbourg): Aucun problème. M.
Chevrette: Merci.
Le Président (M. Joly): On a une très grande
flexibilité, monsieur.
M. Gautrin: ...partir assez tôt. M. Chevrette:
Pardon? M. Gautrin: ...partir plus tôt. M. Chevrette:
Vous?
M. Côté (Charlesbourg): C'est comme en santé.
Lorsqu'on est prévoyants, c'est bien plus payant.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre.
M. Chevrette: J'ai hâte de voir changer les proportions du
budget qui seront consacrées à la prévention.
Le Président (M. Joly): Très bonne remarque.
Aujourd'hui, nous recevrons la Corporation professionnelle des infirmiers et
infirmières auxiliaires, l'Association des médecins d'urgence du
Québec, le Regroupement des conseils consultatifs du personnel clinique
des centres de services sociaux du Québec, l'Association des praticiens
de service social en milieu de santé du Québec, la Corporation
professionnelle des ergothérapeutes du Québec, l'Ordre des
chiropra-ticiens du Québec, la Corporation des établissements
privés pour personnes âgées et, finalement, l'Office des
personnes handicapées du Québec.
Maintenant, je demanderais aux représentants de la Corporation
professionnelle des infirmiers et infirmières auxiliaires de bien
vouloir s'avancer, s'il vous plaît.
Je demanderais à la personne responsable de s'identifier et,
aussi, d'identifier les personnes qui l'accompagnent, s'il vous
plaît.
Corporation professionnelle des infirmiers et
infirmières auxiliaires du Québec
M. Paradis (Régis): Certainement, M. le Président.
Tout d'abord, j'aimerais dire bonjour à M. le Président, M. le
ministre, MM. et Mmes de la commission des affaires sociales. On est
très heureux d'avoir eu l'opportunité de se faire entendre
aujourd'hui par ladite commission.
Les membres de ma délégation sont: Me Monique Beaudoin,
l'avocate de la Corporation professionnelle des infirmières auxiliaires,
et M. Paul Thériault, secrétaire et directeur
général de notre Corporation.
Le Président (M. Joly): Et vous-même?
M. Paradis (régis): mon nom est régis paradis. je
suis le président de la corporation professionnelle des
infirmières et infirmiers auxiliaires du québec.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Paradis. J'aimerais vous
rappeler un peu notre procédure. Vous avez une vingtaine de minutes pour
nous livrer votre mémoire et, par après, on impartit le temps aux
deux formations pour vous poser les questions qu'elles peuvent juger à
propos. Je vous laisse aller, M. Paradis. À vous.
M. Paradis (Régis): Merci, M. le Président. Tout
d'abord, le système de santé et des services sociaux
bénéficie de la presque totalité des services des 20 000
infirmières et infirmiers auxiliaires. C'est le "membership" que nous
avons actuellement. Donc, pour nous, il va sans dire
que lavant-projet de loi, aujourd'hui, est très important en ce
qui a trait à la pratique professionnelle en soins infirmiers. À
ce titre, nous voulons vous faire part de nos préoccupations et
contribuer au débat, à cet effet.
Le Code des professions de 1973 - parce que je pense qu'il est important
dans la logique de remonter jusque là - visait, entre autres, deux
objectifs. Le premier était la protection du public. Cette protection
était assurée par l'obligation du membre d'avoir une formation
nécessaire, de souscrire à un code de déontologie et
d'être sujet à l'inspection professionnelle. Présentement,
la formation des infirmières et infirmiers auxiliaires est de niveau
secondaire, répartie sur deux ans, et d'une durée de 1350 heures.
Très bientôt, nous allons passer à une formation de 1800
heures. Il est Important de préciser que les 1800 heures vont comporter
strictement des matières en soins infirmiers ou des matières en
nursing. Le cours devrait entrer en fonction très bientôt. Il
reste seulement la validation du ministre de l'Éducation du
Québec, M. Ryan, à cet effet.
Le deuxième objectif visait essentiellement, selon le Code des
professions, la collaboration interprofessionnelle, cette collaboration qui met
l'emphase sur l'organisation du travail. Il s'agit, en outre, d'un noeud
important dans le système actuel parce que les modes d'organisation du
travail nous semblent faire le choix, au moment où on se parle, de choix
arbitraires. Parmi ces choix, il y en a un, entre autres, je pense, qu'il est
important de mentionner. Ce sont les modes d'organisation du travail dits soins
intégraux. Le soin intégral que l'on utilise, que l'on
préconise à profusion, au moment où on se parle, dans les
établissements de santé, prévoit un tandem
d'infirmières et de préposées. On se sert de cette
organisation de soins pour exclure les infirmières auxiliaires.
Et nos recherches en ce sens - ce sont des recherches quand même
assez sérieuses et très importantes, même qu'elles viennent
de la Faculté des sciences infirmières de l'Université de
Montréal - nous permettent d'en arriver aux conclusions suivantes, selon
les structures d'organisation de soins, et je cite un extrait de la conclusion
de cette recherche: "Que l'infirmière auxiliaire a le défi, comme
technicienne, d'exécuter un ensemble d'actes infirmiers
complémentaires à l'intérieur de la démarche
"nursing", quel que soit le mode d'organisation de soins
privilégiés dans le maintien d'un climat de travail sain et
motivant.
A l'Intérieur de cette problématique que constitue la
collaboration Interprofessionnelle se situe évidemment, et je pense que
plusieurs d'entre vous en ont entendu parler, la fameuse
délégation d'actes. Ce moyen qui fut mis de l'avant en 1980 -
d'ailleurs, le décret s'appelle 14-23-80 - avait pour but
essentiellement de préciser le champ de pratique de chacun des
professionnels de la santé et aussi d'assouplir les rapports entre
professionnels, c'est-à-dire les infirmières, les
infirmières auxiliaires, les préposés, etc. Enfin, et
malheureusement, la délégation d'actes a davantage servi à
raffermir le contrôle des professions délégantes sur leur
champ de pratique. Dans notre cas, la corporation délé-gante,
c'est l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec.
Un premier décret, qui est celui de la délégation
d'actes Infirmiers, comme je le mentionnais, au lieu d'ouvrir sur une
collaboration étroite, a donné davantage lieu à une
application très étroite. Malgré qu'il y ait
délégation officiellement, les conditions locales - ça se
retrouve dans la section III de ce décret 14-23-80 qui permet, en tout
cas, beaucoup de pouvoirs à la direction des soins infirmiers - viennent
restreindre à un point tel l'exercice de ces actes que, à toutes
fins utiles, ils ne peuvent pas du tout être posés par des
infirmières auxiliaires. On a inventorié, il y a environ un an et
demi ou deux ans, l'ensemble des actes qu'étaient
légitimés de faire, de poser, les infirmières et
infirmiers auxiliaires. On en dénombrait jusqu'à une centaine et
le décret que je mentionnais tout à l'heure vient les restreindre
à seize. Vous imaginez un peu, compte tenu de la formation qu'on a
reçue, en mesure de tout faire ce qu'on pouvait dans le passé et
être maintenant restreint à seulement seize actes!
Comme je le mentionnais plus tôt, les directions de soins
infirmiers, par des conditions locales, sont venues exclure la pratique des
infirmières. Et j'ai ici des exemples assez flagrants d'un centre
hospitalier qui s'appelle le centre hospitalier Pierre-Boucher, sur la rive sud
de Montréal. Vous voyez, partout où il y a un astérique,
ce sont des conditions locales, de telle sorte que parmi les seize, même
l'infirmière auxiliaire n'en pose que trois ou quatre. Un exemple: En
chirurgie neurologique, ou dans le cas d'une prostatectomie, on dit que
l'infirmière auxiliaire ne peut faire de lavage vésical, ne peut
faire un cathétérisme, changer la sonde vésicale en
postopératoire. Mais le problème, c'est que le
postopératoire dure toute la durée de l'hospitalisation. Et,
ça, ce n'est qu'un exemple, justement, parmi tant d'autres.
Donc, la non-utilisation, et non seulement la non-utilisation, mais
aussi la sous-utilisation des professionnels, infirmières et infirmiers
auxiliaires se manifestent par une diminution de postes très
marquée et très importante. Pour ne vous citer qu'un exemple - je
pourrais en citer plusieurs - peut-être le plus pathétique d'entre
tous, avant l'arrivée du décret, le centre hospitalier de
Saint-Luc sur l'île de Montréal comptait 392 infirmières et
infirmiers auxiliaires. La vérification en date d'hier - c'est quand
même récent - est de 101 postes d'infirmières. Alors, vous
vous imaginez, une diminution de tout près de 300 postes. Et ce n'est
qu'un centre hospita-
lier parmi tant d'autres.
L'autre volet de cette délégation est prévu dans un
autre décret sur la délégation des actes médicaux.
Alors que les infirmières auxiliaires peuvent, par ce décret,
participer et contribuer - je parle bien du décret des actes
médicaux - les infirmières auxiliaires devraient normalement
participer et contribuer aux 43 actes médicaux de l'annexe A. Ça,
c'est un autre décret; c'est le 14-22-80, celui-là. En fait, dans
la gestion, dans la pratique courante des soins infirmiers, les
infirmières auxiliaires ne sont pas du tout mises à contribution.
C'est devenu un champ d'exercice exclusif aux infirmières. Ce
mécanisme de délégation amène évidemment
aussi une perception des rapports interprofessionnels en cascade plutôt
que de façon complémentaire. En cascade, j'entends les
médecins qui délèguent aux infirmières et les
infirmières qui délèguent aux infirmières
auxiliaires. Et comme les autorisations nécessaires pour poser ces actes
médicaux délégués passent par la gestion des soins
infirmiers, c'est pénible.
Devant cette situation de sous-utilisation des infirmières
auxiliaires, les avenues de solutions, nous en sommes maintenant convaincus
hors de tout doute, résident dans une volonté politique. Je
dirais non seulement dans une volonté politique, mais aussi par des
gestes politiques dans un premier temps et, dans un deuxième temps, par
une gestion adéquate des ressources du milieu. En ce sens, le
législateur a jugé suffisamment importante la contribution des
infirmières et infirmiers auxiliaires pour en faire des professionnels
de la santé, profession prévue également, comme je l'ai
mentionné, au Code des professions. Le législateur a aussi
développé un mécanisme de délégation d'actes
qui devait, comme je le mentionnais plus tôt - c'est important de le dire
aussi et de le répéter - favoriser une
complémentarité entre les professionnels sur une unité de
soins donnée.
Nous sommes actuellement, dix ans plus tard après le
décret - bientôt dix ans - devant une situation de fait qui nous
indique clairement que les gestionnaires du système ont travaillé
vraiment dans un sens différent de celui prévu par le
législateur.
Dans ce sens, on est également convaincus que les directions de
soins infirmiers - quand on parle de directions de soins infirmiers, on ne se
leurrera pas, on parle, évidemment, de directrices et de directeurs de
soins infirmiers, ils ont tout le contrôle là-dessus - ont
été davantage préoccupées à implanter une
vision autre, alimentées également par l'Ordre des
infirmières et infirmiers du Québec. Il y a maintenant
évidence de conflit d'intérêts que les directrices ou
directeurs de soins infirmiers soient obligatoirement membres de l'Ordre et
gestionnaires au sein du réseau de la santé et des services
sociaux, c'est-à-dire que, comme les DSC contrôlent l'ensemble de
la formation, l'embauche, la planification des soins infirmiers et se
retrouvent en même temps, justement, alimentés par tout le
discours de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec,
ça nous cause des préjudices énormes au niveau de
l'utilisation.
En cela, nous avons constaté, entre autres, l'émergence du
modèle de soins intégraux excluant arbitrairement les
infirmières auxiliaires. J'en parlais un petit peu plus tôt, c'est
un nouveau mode d'organisation de soins qui prévoit exclusivement des
infirmières avec des préposées. Dans la
réalité, celle qui a inventé le système
intégral, Marie Manthey - c'est une infirmière américaine
- avoue elle-même que ça a été très
galvaudé et que ça ne devait exclure aucun professionnel de la
santé, ce système de soins intégraux, mais on s'en sert,
encore une fois, de façon autre.
Évidemment, tout ça a fait en sorte que l'ensemble des
postes créés dans le réseau de la santé ont presque
tous été absorbés par les infirmières. On parle,
depuis quelques années, de 12,2 % d'augmentation des infirmières
par rapport à une diminution de 2,6 % des infirmières
auxiliaires. Vous commencez, j'en suis convaincu, à comprendre la
pénurie et la rareté des ressources infirmières,
d'où vient tout cela. Ça vient, comme je le disais, de la
déqualification des infirmières auxiliaires par la restriction de
l'exercice en soins infirmiers. (10 h 30)
Je vais faire une parenthèse là-dessus pour vous faire
vraiment comprendre le cercle vicieux de cette déqualification
là. On commence par restreindre les gestes professionnels des
infirmières auxiliaires en se servant des conditions locales du
décret. Évidemment, ça nous rend moins polyvalents, moins
rentables et, là, on dit: Bien là, finalement, on doit vous
remplacer par des infirmières parce que vous ne répondez plus,
justement, aux besoins actuels du marché du travail.
Ceci résulte, comme je le mentionnais, en moins de
flexibilité et appauvrit, par le manque de vigilance, le
perfectionnement en milieu de travail. En d'autres mots, lorsque je parle de
perfectionnement, pour la formation en cours d'emploi, dans le moment, les
budgets sont déjà rares dans les établissements de
santé. Et quand il y en a, justement, il n'y en a habituellement que
pour les infirmières.
Un petit exemple là-dessus, encore. Il y a des cours, entre
autres, de réanimation cardiorespiratoire ou cardiovasculaire. Les
infirmières les reçoivent et les préposés à
la buanderie ou aux cuisines, qui que ce soit, les reçoivent et on
exclut les infirmières auxiliaires. Ça veut dire que, s'il y a un
cas, à un moment donné, demain matin, l'infirmière
auxiliaire devra justement appeler le préposé ou je ne sais trop
qui. Vous voyez l'aberration dans tout ça!
Également, le discours du professionnalisme qui vise à
augmenter les qualifications académi-
ques tout en sous-utillsant des professionnels avec la formation
actuelle, là-dessus, j'ai le goût de dire que nous vivons
présentement, justement, un phénomène de
surspécialisation et de surpro-fessionnalisation. On dirait que
ça prend un peu plus, partout. Où il y avait des
infirmières, ça prend une bachelière. Où il y avait
des infirmières auxiliaires, ça semble prendre une
infirmière et, à un moment donné... Écoutez,
regardez les écarts de salaire dans tout ça... Je pense que vous
comprendrez, à un moment donné, pourquoi c'est rendu à
près de 9 000 000 000 $, je pense, au moment où on se parle, le
budget.
On assiste aussi à du recyclage des infirmières
auxiliaires vers la profession d'Infirmière en se servant souvent de
chantage, c'est-à-dire que le recyclage se fait davantage par du
chantage au lieu de l'attrait que ça peut avoir. Là-dessus, je
vais vous donner un exemple. On dit aux infirmières auxiliaires: Vous
êtes mieux de vous recycler parce qu'il est fort possible que, dans six
mois, dans un an, vous perdiez vos postes. On va les fermer au profit d'autres
professionnels. Pour citer un exemple, le cégep de Limoilou, ici,
à Québec, paie deux chercheurs pour faire du recrutement
d'Infirmières auxiliaires dans les centres hospitaliers. Ça ne
s'arrête pas là, on les paie au pourcentage pour chaque
infirmière auxiliaire recrutée. Et ça coûte
près de 40 000 $ recycler une infirmière auxiliaire en une
infirmière. Multipliez par 20 000, ça vous donne une bonne
idée de ce que ça peut entraîner comme dépense au
Conseil du trésor.
Donc, l'absence marquée des infirmières auxiliaires dans
l'application des nouvelles technologies - parce que, justement, on est
toujours exclues de ces nouvelles technologies - et dans de nouveaux champs de
pratique tels que les soins à domicile, comme les CLSC, par exemple,
où on retrouve très peu d'Infirmières auxiliaires, encore
une fois, alors que les provinces voisines, comme l'Ontario et le
Nou-veau-Brunswick, se positionnent dans les hôpitaux hors murs pour
maintenir justement de plus en plus les personnes âgées à
domicile en maintenant l'autonomie. Et nous, c'est un peu le contraire. On
exclut les infirmières auxiliaires qui seraient justement la
main-d'oeuvre toute désignée pour répondre à ces
besoins-là. Évidemment, on est la province qui a le taux
d'hébergement des personnes âgées le plus
élevé non seulement au Canada, mais comparativement aux
États-Unis, à la Grande-Bretagne et à la France
également.
Donc, notre préoccupation première dans ce contexte se
situe au niveau d'une gestion adéquate des ressources professionnelles
que constituent les infirmières auxiliaires en soi. Pour ça,
ça prend vraiment une gestion adéquate des ressources
professionnelles et ce seratt également une réponse partielle aux
préoccupations de financement auxquelles fait face le système
actuellement.
Je vais vous donner un autre exemple à ce niveau-là pour
le financement dans un hôpital - et je vais le nommer - l'hôpital
Charles-Le-Moyne, de Greenfield Park. Dans la nuit de la Saint-Jean-Baptiste,
et celle de la Confédération, en 1988, on a payé une
Infirmière d'une agence de soins, Hélène Quévillon,
900 $, pour un quart de travail; et je n'exagère pas. Allez aux sources
et vous allez voir. On a payé, je pense, 930 $, alors que, normalement,
pour un peu plus de 100 $, on a quelqu'un. Multipliez ça maintenant par
l'ensemble et vous allez vous apercevoir que ça fait
énormément d'argent de dépensé.
Puis-je savoir combien il me reste de temps, M. le...?
Le Président (M. Joly): II vous reste deux minutes, M.
Paradis.
M. Paradis (Régis): Deux minutes. Alors, je vais passer
outre aux recommandations que j'avais l'intention de vous lire au départ
- elles se retrouvent dans notre mémoire - et je vais aller
immédiatement à la conclusion, si vous me permettez.
Notre Intervention d'aujourd'hui vient souligner finalement l'importance
de gérer adéquatement les ressources professionnelles que sont
les infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec. Je pense que
j'ai donné suffisamment d'exemples pour démontrer comment on
pourrait améliorer la situation.
À cet effet, les deux principaux axes à mettre en relief
sont d'abord une gestion impartiale des soins infirmiers en ayant, à la
direction des soins Infirmiers, des administrateurs qui sauront appliquer les
règles habituelles de gestion. D'autre part, nous voulons
également insister fortement sur la nécessité de
réviser les mécanismes de délégation d'actes dont
|e faisais mention tout à l'heure, ceci afin de favoriser davantage un
travail complémentaire et de donner aux Infirmières et infirmiers
auxiliaires, à titre de professionnels, la place qui leur revient.
Je terminerai en vous disant que je voudrais vraiment insister sur
toutes les compétences, les qualités que les administrations des
centres hospitaliers ont trouvées aux infirmières et infirmiers
auxiliaires lors du conflit de travail de l'automne 1989. Et l'AHQ a admis
elle-même que là où il y avait des infirmières
auxiliaires, ça s'est passé beaucoup, beaucoup mieux dans les
centres hospitaliers. Et non seulement pendant le conflit de travail mais
également pendant les soirs, les fins de semaine, la nuit, parce qu'on
les utilise davantage, vu qu'il y a moins de ressources infirmières.
Alors, M. le Président, ça clôt l'exposé de
la Corporation des infirmiers et infirmières auxiliaires du
Québec. Je vous remercie.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Paradis. Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre de
la Santé et des Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Merci, M. Paradis, d'être là en une
journée aussi difficile sur le plan de la circulation. Avant d'aborder
quelques questions spécifiques concernant votre profession, je voudrais
quand même aborder quelques questions des problèmes du
réseau.
Tout le monde se plaint qu'il n'y a pas suffisamment d'argent. On en a
encore un exemple dans les journaux, ce matin. Tout le monde se plaint que
partout il y a des problèmes; il y a des listes d'attente; tout le monde
se plaint que ça prend deux scanners dans deux hôpitaux à
vingt milles l'un de l'autre, etc. Toute une série de problèmes
sont soulevés au niveau de l'accessibilité, des moyens financiers
etc., et on pense toujours régler par une question de piastres et
cennes. Je ne veux pas dire qu'on n'en a pas besoin, je pense qu'on pourra
conclure à la fin de l'exercice de la réforme qu'on aura
certainement besoin de sommes additionnelles, mais, avant ça, j'ai
toujours pensé qu'on devait faire un bon - si vous me passez
l'expression - "curetage" dans notre système. Qu'est-ce qui ne va pas
dans notre système de santé au Québec, à part la
place que vous occupez - et on y reviendra tantôt, - puisque vous
êtes 20 000 acteurs privilégiés au coeur de l'action un peu
partout? D'après vous, votre expérience, l'expérience de
vos membres, qu'est-ce qui fait que notre système a des
ratés?
M. Paradis (Régis): Ce qui fait que notre système a
des ratés, peut-être que ç'a été trop vite
finalement depuis l'avènement de l'assurance-maladie en 1970. Je pense
que c'est une première constatation que l'on peut faire.
Également, le manque de contrôle sur l'ensemble de cet
appareil-là, de cette structure, par exemple les cartes
d'assurance-santé qui ont fait en sorte que c'est prêté un
petit peu à tout le monde. Je pense que ça ce n'est pas nouveau
en soi, en tant que tel. Egalement aussi, il y a des facteurs qui ne
dépendent peut-être pas nécessairement de nous, comme le
vieillissement de la population du Québec qui a fait en sorte que
ç'a pris énormément de lits, ça occupe
énormément de lits dans les soins de courte durée. Puis,
également, je dirais, par expérience, - j'ai travaillé
tout près de vingt ans dans des centres hospitaliers. - tout
l'alourdissement et la bureaucratisation de tout ça. Peut-être,
pour donner un exemple rapide, avant c'était géré par, je
ne sais pas, quatre ou cinq bonnes soeurs d'une congrégation et,
aujourd'hui, on a multiplié ça par, je ne sais pas, 100, 200. On
dirait que ça ne fonctionne jamais. Évidemment, si l'on regarde
un peu plus au niveau de la main-d'oeuvre, de la pénurie et de la
rareté des infirmières, là-dessus, nous sommes
catégoriques, c'est strictement dû à une sous-utilisation
et une non-utilisation des ressources des infirmières auxiliaires parce
que, finalement, les infirmières sont arrivées un peu dans les
années cinquante, à la suite d'une pénurie. Après
qu'elles furent arrivées, on a arrêté d'en parler.
Pour continuer au chapitre du financement, je pense que la
surprofessionnalisation, la surqualification dont je parlais a fait en sorte
que ça a entraîné justement, au chapitre des salaires, des
déboursés énormes. Je suis vraiment loin d'être
convaincu justement qu'on doive avoir toutes ces spécialités pour
faire fonctionner le système et donner les soins que requièrent
nos malades.
En résumé, je dirais que ce serait un contrôle plus
adéquat et une utilisation vraiment plus rationnelle des
infirmières et infirmiers auxiliaires aussi.
M. Côté (Charlesbourg): Je pense que vous touchez
à une série de causes sur lesquelles on n'a pas grands ressorts
ou grands moyens. Le vieillissement de la population, il faut y faire face. Ce
sera de plus en plus important au fil des prochaines années. Ça,
c'est un élément sur lequel on devra effectivement apporter des
ressources additionnelles pour régler les problèmes.
Évidemment, ce qui est frappant, vous avez insisté
à plusieurs reprises sur une meilleure gestion des ressources. Ça
peut vouloir dire ressources humaines, ça veut dire ressources sur le
plan budgétaire aussi. Je pense que vous avez donné l'exemple de
l'utilisation de ressources humaines à partir des gens que vous
représentez qui, effectivement, au bout de la ligne, si j'ai bien
compris, coûteraient moins cher que ce qu'on fait maintenant. Et vous
avez abordé très brièvement l'encadrement, si j'ai bien
compris, en disant: Auparavant, c'étaient quatre ou cinq religieuses qui
géraient l'hôpital et, aujourd'hui, on a peut-être
multiplié par 100. Est-ce que, dans ces cas-là, vous faites
référence à l'encadrement qui est devenu beaucoup plus
lourd au niveau des institutions ou si vous faites référence
à autre chose?
M. Paradis (Régis): À ce sujet, M. le
Président, M. Thériault va répondre à M.
Côté.
M. Thériault (Paul-J. ): Évidemment, c'est une
préoccupation que l'on a. Lorsqu'on a regardé le genre
d'intervention qu'on pouvait faire auprès de vous aujourd'hui, on s'est
posé des questions sur qui fait les choix dans le système? Il y
avait des choix politiques de faits; on a regardé les gestionnaires. Le
taux d'encadrement, c'est une préoccupation que l'on a. Dans les
discussions qu'on a eues au sein de nos comités à la Corporation,
il y a une infirmière auxiliaire et un membre du comité
administratif, un des vice-présidents de la Corporation, qui
mentionnaient que dans leur centre hospitalier il
y avait 250 postes de cadres sur un total de 850 a peu près. Ce
n'est peut-être pas généralisé, je ne connais pas
les taux d'encadrement de la plupart des établissements, mais il y a un
taux d'encadrement qui me semble, a priori, au niveau de la gestion,
important.
Le vice-président a donné un exemple encore plus
particulier dans son propre service. Il travaille en ORL où il y a 30
patients habituellement. L'hospitalière s'est battue pour avoir une
personne qui puisse assurer le contrôle de la qualité. Donc, II y
a un professionnel qui travaille à temps plein, qui ne dispense aucun
service auprès des patients, dont le travail est de vérifier les
actes professionnels posés par les infirmières et les
infirmières auxiliaires, donc, de vérifier de quelle façon
on fait les choses.
On peut faire appel aux corporations professionnelles si on veut
vérifier la qualité des actes, d'une part et, d'autre part,
lorsqu'il va y avoir un resserrement... S'il y avait une baisse de patients,
par exemple, ou s'il y avait des restrictions budgétaires, on ne
viendrait pas chercher ce poste pour lequel l'hospitalière s'est battue,
mais on irait probablement chercher un poste d'infirmier auxiliaire. Ce sont
des exemples qui nous préoccupent au niveau du taux d'encadrement comme
tel, des postes de cadres, des postes de conseillers, de la pertinence de ces
postes pour gérer un système.
Une autre préoccupation aussi, c'est sur la
complémentarité, pas seulement au niveau de l'utilisation des
professionnels, mais la complémentarité interprogrammes.
Ça, ce n'est pas particulier au réseau de la santé.
N'importe quelle organisation veut se développer et veut grossir comme
organisme, non pas nécessairement préoccupée d'abord par
les objectifs que l'on vise, mais l'organisation veut se développer et
croître, prendre sa propre vitesse de croisière.
Je peux peut-être donner un exemple bien spécifique
là-dessus, une anecdote très personnelle. Ma femme a
accouché au mois de décembre. Alors, au mois de janvier, la
visite chez le pédiatre s'est faite, l'enfant est en pleine
santé, on nous dit: "Vous reviendrez dans six mois". Une semaine plus
tard, on avait un appel du CLSC, une infirmière voulait venir visiter
à la maison. Alors, ça sert à quoi une visite de ce type?
On a dit non. On sait que dans les CSS, par exemple, on manque de personnel
pour des enfants battus mais, chez nous, si je battais mon enfant, personne ne
l'aurait vérifié. On n'a même pas demandé pourquoi
on avait annulé le rendez-vous; rien. Ces programmes, qui demandent
énormément de personnel, qui se recoupent avec d'autres services,
représentent des coûts importants dans le système. Si on
voulait utiliser à bon escient nos ressources, lorsqu'on parie de bonne
gestion des ressources, ce sont des exemples en plus des ressources humaines
dont on pariait tantôt: l'utilisation des professionnels, le taux
d'encadrement, et la complémentarité interprogrammes. (10 h
45)
M. Côté (Charlesbourg): Ce que je dois comprendre de
votre intervention, c'est qu'on a un problème de gestion des ressources,
on a un problème de duplication. De toute façon, on l'a dit
depuis le début de la commission. Ça, ça m'apparaît
évident. Votre exemple en témoigne au niveau des CLSC et des
pédiatres. Lorsqu'on parie de gestion des ressources, à
l'intérieur de l'institution et interinstitutions, lorsqu'il n'y a pas
de complémentarité entre les programmes, il y a une
compétition entre les programmes, il y a une compétition entre
les institutions. Je ne sais pas si c'est la même lecture que vous faites
ou si je dois tirer ça comme conclusion de ce que vous nous dites.
M. Thériault: C'est justement de ça qu'on parie.
Lorsqu'on dit qu'une organisation cherche à se développer,
ça dégénère évidemment en
compétition, pour aller chercher un plus gros morceau du gâteau,
des budgets disponibles, des ressources disponibles ou mettre sur pied des
programmes. Alors, moi je vais le faire, je sais mieux le faire que toi. Alors,
cette propension, je pense que c'est une compétitivité qui n'est
pas saine à ce niveau-là pour le système. Si on veut
être compétitif, soyons-le sur les meilleures qualités de
services à donner plutôt que de chercher à faire une
duplication dans les programmes offerts à la clientèle.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Je reviendrais
peut-être à M. Paradis qui, tantôt, nous a décrit de
manière plus spécifique des problèmes rencontrés
par les infirmiers et infirmières auxiliaires. Moi je suis de la
génération de ceux qui ont vu de leurs collègues, de leurs
copines se diriger vers la formation d'infirmière auxiliaire à
l'époque, au début des années soixante. Vous nous avez
très bien décrit ce que vous viviez de votre point de vue, sur le
plan du remplacement ou des actes délégués qui, de 100,
sont passés à 16 et encore, dans certaines institutions, si je
comprends bien, ce n'est même pas 16. Vous nous avez donné des
exemples de trois ou quatre.
L'impression que j'en tire, c'est que c'est principalement ou,
peut-être de manière assez exclusive, dans certains types
d'institutions. Ça pourrait peut-être, par exemple, être
dans des centres hospitaliers universitaires, ou pas nécessairement dans
un centre d'hébergement, peut-être pas nécessairement dans
un centre hospitalier de longue durée. Est-ce que je me trompe ou si ce
que vous nous avez décrit est généralisé dans
toutes les catégories d'institutions du réseau?
M. Paradis (Régis): Vous avez en partie raison, M. le
ministre. Effectivement, les infirmières auxiliaires, là
où elles ont perdu davantage justement dans leurs postes, c'est en
milieu
universitaire et je l'admets aussi, au niveau des hôpitaux dans
les soins vraiment à court terme, les soins aigus, comme on les appelle
traditionnellement. En tout cas, à notre avis, il n'y avait pas non plus
de raison pour ce faire, mais nous sommes placés devant une situation
justement de fait, comme je le mentionnais, en vertu du décret, en vertu
des nouveaux modes d'organisation de soins. C'est ce que cela a amené.
Tout ça pour en arriver à dire, par exemple, qu'on a perdu
énormément à ce niveau-là, mais on n'a pas
nécessairement gagné non plus, par exemple, dans les centres
d'accueil ou dans les centres hospitaliers de longue durée. On n'a pas
gagné non plus au niveau des CLSC, par exemple. Je pense que la
main-d'oeuvre vraiment la plus adéquate au niveau des CLSC serait les
infirmières auxiliaires qui sont beaucoup mieux formées et plus
polyvalentes que les infirmières pour donner un ensemble de soins que
les auxiliaires familiales, et, à toutes fins pratiques aussi, presque
autant pour les soins qu'il y a à donner à domicile. Et,
là-dessus, il n'est pas possible, pour toutes sortes de raisons, de
pénétrer ce marché-là.
Dans les centres d'accueil, également, justement, pour la
spécialisation qu'on retrouve... Lorsqu'on invoque également les
nouvelles technologies pour exclure les infirmières auxiliaires, il faut
faire attention. Regardez les budgets donnés par le ministère
depuis un certain nombre d'années pour les nouvelles technologies. Vous
allez vous apercevoir, finalement, qu'il n'y en a pas tellement. Donc,
ça ne devrait pas être un des motifs invoqués pour exclure
les infirmières auxiliaires. Je pense qu'on peut fort bien s'entendre
là-dessus.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que je dois
comprendre que vous nous dites: II est très évident que les
infirmières ont leur place au niveau des centres hospitaliers où,
évidemment, on est dans le curatif, que ça nécessite une
certaine polyvalence quant à tous les actes et qu'elles ont leur place
au niveau des centres hospitaliers? Mais vous nous dites, par contre, dans le
maintien à domicile: Nous autres, on est plus polyvalents pour
être capables de faire ce genre de travail-là, ce que n'est pas
nécessairement l'infirmière. J'ai des problèmes un petit
peu avec ça, parce que je pense que s'il y a une polyvalence chez vous,
les infirmières aussi pourraient le faire. Cependant, ce que vous nous
dites, c'est: On est aussi capables que les infirmières de faire le
travail qui est assigné pour le maintien à domicile. On le sait,
le maintien à domicile est une des mesures extrêmement importantes
auxquelles il faudra s'attaquer au cours des prochaines années pour
faire en sorte qu'on puisse maintenir à domicile de manière
encore plus importante que nous ne le faisons maintenant des personnes qui sont
en perte d'autonomie.
M. Paradis (Régis): Je me suis peut-être mal
exprimé, M. le ministre. Ce que j'ai dit, finalement, c'est que les
infirmières auxiliaires sont définitivement plus polyvalentes que
les auxiliaires familiales qu'on retrouve en grand nombre dans les CLSC. Mais
il est évident que l'infirmière auxiliaire n'est pas plus
polyvalente qu'une infirmière et nous n'avons jamais eu cette
prétention-là, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): O. K. Non, c'est parce que
la...
M. Paradis (Régis): Je me suis peut-être mal
exprimé, je m'en excuse.
M. Côté (Charlesbourg): Ça va, pour le
moment, M. le Président. le président (M. Joly): merci, m.
le ministre. je vais maintenant reconnaître m. le leader de l'opposition
et député de joliette, m. chevrette.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
commencer par un commentaire pour dire que, d'entrée de jeu, j'ai
toujours trouvé insignifiant un système qui continue à
former des individus en fonction d'une capacité de produire des services
et ne pas leur ouvrir le marché. Comme système, ça ne peut
pas être bien bien plus fou. Tu continues à former des infirmiers
et des infirmières auxiliaires et tu leur dis, par exemple: D'autres
administrateurs d'un niveau inférieur que sont les corporations
hospitalières, eux autres, ils n'en prennent plus, sous prétexte
qu'ils veulent améliorer la qualité des services professionnels.
C'est exactement ce qui se dit. Moi, je me souviens d'avoir arrêté
une hémorragie, à un moment donné, à Pierre-Boucher
justement, puis à Rouyn-Noranda, à l'hôpital de Maladie,
puis à l'hôpital de Val-d'Or, où on était en train
de rayer de la "map" à peu près tout ce qui bougeait en personnel
infirmier auxiliaire. Je trouve ça fou et vous avez raison de le
dénoncer. Je trouve ça con comme système.
Il me semble qu'une seule autorité de qui relève la
totalité de la responsabilité au niveau de la qualité des
soins, ça suppose se préoccuper également de la formation
continue et d'ouvrir les débouchés en conséquence, sinon
tu fermes carrément les options. En tout cas, personnellement, vous me
permettrez de vous appuyer là-dessus fortement.
Deuxièmement, c'est le problème de la
délégation d'actes que vous soulevez et que personne n'a eu le
courage d'affronter comme système. On en a parlé beaucoup
lorsqu'on a fait la commission sur le rapport Harnois. On en a parlé
beaucoup aussi au niveau de la commission Rochon, et la commission Rochon est
très claire: Attaquez-vous carrément et de front à la
déléga-
tion d'actes. C'est là qu'on réglerait un paquet de
problèmes, mais ça, ça prend une volonté politique
pour le faire, ça prend des décisions formelles là-dessus.
Moi, j'ai toujours trouvé aberrant qu'on forme une personne, par
exemple, pour être capable de donner une Injection, puis après
qu'elle a été engagée, tu lui refuses de faire
l'injection.
Le problème, il se pose dans les grands centres. C'a
commencé dans la surspécialisation et vous avez raison: sur la
Basse-Côte-Nord, ils ne demandent pas à un médecin de
donner l'injection, Ils ne l'ont pas, le personnel auxiliaire, s'il est
infirmier auxiliaire, il est très bon, parce qu'ils n'ont pas d'autres
ressources. Mais là où il y a des ressources en quantité,
c'est toujours le plus fort qui essaie de gober le plus petit, puis ça
devient du corporatisme absolu et moi, personnellement, je pense qu'il est
temps qu'on place les gens devant la situation de compréhension de la
complémentarité, au lieu de voir à gober tout le
gâteau qui est disponible. Je vous donne également raison
là-dessus.
Troisième point, notre système est tellement fou, en plus,
qu'au lieu, par exemple, de créer des places en centres d'accueil ou
dans des hôpitaux de soins de longue durée, on fait occuper
jusqu'à 10 %, 15 %, 20 % des lits de soins de courte durée, qui
coûtent 350 $ par jour, par des patients de lits de longue durée
qui devraient coûter de 100 $ à 150 $ de moins par jour. On dit
qu'on manque d'argent. On manque d'argent, mais, de plus en plus, on augmente
le nombre de personnes qui nécessitent des soins de longue durée
et on les couche dans des lits de soins de courte durée. Mais on manque
d'argent! On manque d'argent au point que le personnel Infirmier auxiliaire
disparaît dans les hôpitaux, pour le remplacer par une
catégorie de personnel qui coûte plus cher. Mais on manque
d'argentl Notre système manque d'argent.
Le réflexe facile de la Corporation des hôpitaux du
Québec et de certains groupes sociaux, c'est d'aller poser le ticket
modérateur à des consommateurs et, bien souvent, ce sont les plus
démunis qui consomment le plus, parce que mauvaise nutrition, parce que
mauvais logement. Ça, c'est le réflexe facile de notre
société, au lieu de regarder le problème en face, le
problème globalement et dire: Comment met-on de l'ordre dans tout
ça?
C'est un peu ça, le problème qu'on vit
présentement. Et puis, 325 nouvelles places en centres d'accueil cette
année, depuis trois ans, alors qu'on a un vieillissement de population.
En 2031, on aura 16 % de la population qui aura 65 ans et plus et elle consomme
6,3 fols le nombre d'actes médicaux ou de médication de toutes
les personnes en bas puis on ne se préoccupe pas de ça. On va
continuer à défendre les chasses gardées d'une seule
corporation ou, encore, on va surspéclallser au point que ce sera
prohibitif puis, là, on se plaindra collectivement de ne pas avoir
apporté les correctifs au moment où c'était le temps.
Moi, je pense qu'on a tous fait la même lecture du problème
ou de la situation, autant le gouvernement que l'Opposition ou même les
groupes, la commission Rochon et tout le "kit". Je pense qu'on a tous fait la
même lecture des problèmes qu'on traverse, mais on n'a pas fait la
même lecture quant aux remèdes, aux solutions. À mon point
de vue, la délégation d'actes est un des points majeurs que vous
apportez, que vous soulevez et, ensuite, bien sûr, bâtir quelque
chose en fonction des services et de l'état de la situation qui est le
vieillissement de la population du Québec. Ça, ça
m'apparaît urgent.
Je n'aurai qu'une question à vous poser, parce que quant à
l'analyse que vous faites, je partage assez bien... La question des
professionnels aux conseils d'administration ou des catégories de
professionnels aux conseils d'administration, vous vous opposez à ce que
le présent avant-projet de loi élimine, à toutes fins
pratiques, toutes les catégories de professionnels, ce qui
m'apparaît une aberration, moi aussi. Mais, concrètement, comment
voyez-vous ça? Quel type de professionnel doit siéger aux
conseils d'administration? Est-ce que vous êtes d'accord avec la formule
actuelle ou si vous voyez une autre formule que celle qui existe actuellement
comme intermédiaire entre ce qui existe et ce qu'on propose qui devrait
exister? Deuxièmement, dans la même question, ne
considérez-vous pas que l'avant-projet de loi qui parle de régies
régionales, est, à toutes fins pratiques, de la
déconcentration et non pas de la décentralisation?
M. Paradis (Régit): Sur la question, M. le
Président, M. Thériault répondra à M.
Chevrette.
Le Président (M. Joly): M. Thériault.
M. Thériault: Sur votre première question, M.
Chevrette, au niveau des professionnels, notre position là-dessus, c'est
que les professionnels au Québec, c'est un riche tissu de citoyens et
c'est important qu'on puisse leur permettre de siéger aux conseils
d'administration, non pas au coeur du conseil d'administration de leur propre
établissement, mais dans les établissements autres que le leur ou
sur d'autres territoires, qu'on ne ferme pas la porte de façon absolue,
parce qu'une personne est professionnelle de la santé. C'est dans cette
optique qu'on se dit qu'il ne faudrait pas quand même se fermer les
portes entièrement à cet sujet.
M. Chevrette: Considérez-vous le deuxième volet,
les régies régionales...
M. Thériault: Votre deuxième question, on peut
toujours se poser la question et on va revenir à la problématique
de gestion. Est-ce que
ça permet à l'État de mieux gérer ses
ressources que d'avoir une régie régionale?
Décentralisation des ressources, décentralisation de certains
pouvoirs de décision. On n'a pas nécessairement les outils pour
vous amener des réponses toutes prêtes d'avance sur ce genre de
problématique...
M. Chevrette: Je vous arrête et je reviens à
l'exemple que vous avez posé entre le pédiatre et le CLSC. Vous
ne pensez pas, si c'était régional, qu'on essaierait
d'éviter la duplication des services? Un hôpital, un centre
hospitalier, présentement, est performant s'il réussit à
empiéter sur le champ de l'autre et il est jugé par sa
performance s'il a augmenté son nombre de services. Et, automatiquement,
ce service-là se donne dans le milieu. Et on arrive avec de la
duplication de services, une surproduction et, après ça, on
reproche aux consommateurs de trop consommer.
Est-ce que vous ne pensez pas qu'une décentralisation certaine
pourrait - pas une certaine décentralisation, une
décentralisation certaine - permettre des arbitrages et automatiquement
faire cesser la duplication des services? (11 heures)
M. Thériault: Ça dépend de quel point de vue
on s'en sert. Si on veut répartir les programmes entre différents
types d'établissements, différents types d'organismes, à
ce moment-là, je pense qu'il y a des décisions à prendre
pour l'ensemble du territoire du Québec, sur qui fait quoi au niveau des
genres de programmes à donner à la population. Donc, pour tous
les gens au Québec, quant à tel genre de problème qui se
pose, un problème de santé ou un problème social, tu sais
à quelle porte frapper, peu importe où tu résides au
Québec. Je pense que ce sont des règles du jeu qui doivent
s'établir. Maintenant, comment répartir les ressources à
l'intérieur de ça, faire des modifications de programmes en
fonction des évolutions démographiques, en fonction des besoins
particuliers des populations? Il y a peut-être, sur le plan
régional, à régir ce genre de répartition qui va
tenir compte des particularités d'une région.
M. Chevrette: Je vais vous poser une question, maintenant, pour
les consommateurs québécois. Êtes-vous d'accord avec la
notion de ticket modérateur avec des impôts à rebours ou si
vous jugez qu'il y a d'autres moyens pour contrôler les abus, d'autres
moyens que le ticket modérateur ou un impôt déguisé,
un ticket modérateur déguisé qui serait un impôt
à rebours?
M. Paradis (Régis): Hors de tout doute, M. Chevrette, nous
sommes contre toute forme de ticket modérateur de quelque nature qu'il
soit. J'entendais depuis une semaine ou un peu plus d'une semaine plusieurs
intervenants dire qu'il va falloir prendre un remède de cheval, pour
reprendre l'expression. Avant vraiment de regarder le remède de cheval,
pourquoi ne regarde-t-on pas à établir davantage de
mécanismes de contrôle? Je pense que ce serait vraiment un recul
très important. Alors qu'on voit que les États-Unis se
positionnent en disant: Le Québec a le meilleur système de soins
de santé au monde ou presque, et ils veulent copier sur nous, nous,
justement, nous voulons faire marche arrière là-dessus. Quand
bien même qu'on s'en irait vers le ticket modérateur, quand bien
même qu'on s'en irait vers des méthodes de privatisation,
peut-être pas sur la ligne de pointe, les soins infirmiers en
privatisation, mais peut-être un petit peu plus au niveau des buanderies
et des cuisines... Ce qu'on ne sait pas actuellement, malgré les
bienfaits immédiats que ça pourra apporter dans X temps d'ici,
dans quelques années, voire dans quatre ou cinq ans, peut-être
moins aussi, quels seront les méfaits sur l'universalité,
l'accessibilité. Est-ce qu'on veut revenir justement à une
médecine de pauvres et de riches? Même si je paie un ticket
modérateur, des frais d'hébergement ou de quelque nature que ce
soit, qu'est-ce qui me dit, en bout de piste, que je vais manger mieux, que je
vais être traité mieux, que je vais recevoir de meilleurs soins,
que mes draps vont être changés plus souvent et que je n'attendrai
pas à l'urgence? Je suis loin d'avoir une garantie là-dessus.
M. Chevrette: Merci.
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je vais terminer, mais la
dernière intervention de M. Paradis me laisse songeur au moins sur un
point. Lorsqu'on parle d'accessibilité, c'est une chose; lorsqu'on parle
d'universalité, c'est une chose; lorsqu'on parle de gratuité,
c'est une chose; lorsqu'on parle de privatisation, c'est une autre chose.
Si je vous ai bien compris tantôt, lorsque vous avez parlé,
en particulier, de la privatisation des buanderies, ça n'a rien à
voir avec l'accessibilité, ça n'a rien à voir avec ce
genre de chose et ça ne brime en rien l'accessibilité ni la
gratuité, il faut bien se comprendre. Dans ce cas-là; si, demain
matin, une buanderie ou un service d'alimentation est privatisé quelque
part, ça ne brime en rien l'accessibilité. On se comprend bien.
L'hôpital est toujours accessible pour les soins, sauf que c'est le
privé qui pourrait éventuellement faire ces choses et il n'y a
pas d'acquis de perdus, évidemment, en tenant compte du fait qu'il y a
des conventions collectives qui sont là et qui font en sorte qu'il y a
des relations du travail plus ou moins harmonieuses, dépendamment du
moment ou vous négociez, mais ça conditionne les relations du
travail.
Donc, il y a une distinction très nette. Si on décidait,
comme gouvernement, de tenter des expériences sur le plan des
privatisations, que ce
soit des buanderies ou des cafétérias, ça ne brime
en rien la gratuité, l'accessibilité et l'universalité, on
s'entend bien là-dessus.
M. Paradis (Régis): Essentiellement, M. le ministre, ce
que je voulais dire, c'est qu'au moment où on se parle, ce dont on a le
plus entendu parler au niveau de la privatisation, ce n'était pas des
secteurs de pointe comme le secteur de la santé. J'ai entendu des
conférences de gens qui se sont penchés là-dessus et qui
ont déjà été, je pense, ministres aussi. Je parle
de M. Pierre Marc Johnson et de M. Bernard Landry aussi qui disaient qu'il
pouvait y avoir une ouverture Intéressante à ce niveau, sur la
privatisation, soit peut-être dans les secteurs de seconde ligne. Je
parlais des buanderies, des cuisines, de quelque chose du genre. On a
très peu parlé de privatiser les soins de santé proprement
dits. En ce sens-là, je suis d'accord que le fait de privatiser ces
services ne remet pas en question la qualité. Ce que je voulais dire,
c'est que je ne sais pas, par exemple, ce qui arrivera en bout de piste, et je
ne suis pas convaincu que ça va coûter nécessairement moins
cher. Dans un premier temps, souventefois, ce qui arrive, M. le ministre,
là-dedans, c'est que, pour avoir le contrat, des buanderies
extérieures vont soumissionner très bas. Mais après
qu'elles ont le contrat, au bout de six mois, un an, deux ans, là, c'est
une autre paire de manches. C'est un peu comme l'assurance automobile: la
première fois, c'est toujours moins cher et, après, ça
augmente tout le temps. Et on n'a pas nécessairement tout le
contrôle là-dessus.
M. Côté (Charlesbourg): L'assurance automobile, je
peux vous en parler aisément, je suis le premier qui a retourné
50 000 000 $ aux gens qui payaient des primes. Effectivement, il y a eu un
comportement plus responsable des gens sur les routes, il y a eu moins
d'accidents, donc, moins de morts, moins de blessés, et on a
retourné 50 000 000 $ aux assurés. Donc, c'est possible de
retourner en arrière lorsqu'il y a une gestion serrée.
Évidemment, lorsqu'on parle de privatisation, il y a d'autres exemples
où on a privatisé et ça a été
bénéfique. Aujourd'hui, Inter n'aurait pas la force qu'elle a,
sur le plan de l'aviation, si on n'avait pas privatisé Quebecalr. Et
c'est ce genre d'expérience... On ne privatise pas pour privatiser, pour
que tu puisses porter le flambeau haut en disant: J'ai un beau fleuron à
mon dossier, j'ai privatisé. Ce n'est pas ça, l'objectif.
Évidemment, ce sont des services qui doivent être examinés
et qui le seront. Ça ne veut pas dire que tout le monde, demain matin,
dans les hôpitaux, va privatiser les cafétérias et les
buanderies, ce n'est pas vrai.
Cependant, il faut bien l'admettre, dans l'état actuel des
choses, il y a des gens du privé qui se plaignent d'une
compétition de certains centres hospitaliers, par exemple, dans le cas
des buanderies. Eux voudraient, bien sûr, produire des services et
prétendent pouvoir les produire à moindres coûts et le
marché est là. À partir du moment où vous avez un
contrat de cinq ans ou de trois ans à un prix X, que vous avez
soumissionné plus bas pour l'avoir, espérant, par la suite,
être capable de faire des profits et d'augmenter les prix, ça
retourne en soumissions publiques et c'est toujours le plus bas qui l'a. Donc,
à partir de ça, lorsqu'on maintient la qualité au niveau
de la buanderie ou de la cafétéria - et il y a des
critères pour être capable de déterminer ça - j'ai
l'Impression que. demain matin, on pourrait quand môme sauver quelques
sous. Mais II faut au moins le regarder Ça ne veut pas dire que c'est
une décision qui est prise. C'est une piste qu'il faut explorer.
Évidemment, si on ne l'explore pas, on ne le saura pas, ce que vous
dites. Si on ne l'explore pas, on ne saura pas si, effectivement, il y a des
économies à voir ou pas. Évidemment, avant de
l'étendre à tout le réseau, ça, c'est une autre
affaire.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le
leader de l'Opposition et député de Joliette.
M. Chevrette: Peut-être un commentaire à la suite de
ce qui vient de se dire. Dans bien des cas, on devrait regarder, à mon
point de vue, comment rentabiliser certains équipements publics. Je
donne des exemples. C'est inconcevable, par exemple, qu'une buanderie
chromée, dans certains centres hospitaliers, ne soit pas responsable de
tout l'ensemble d'un réseau régional. C'est quasiment en
compétition, là. L'hôpital charge plus cher que le secteur
privé chargerait à un centre d'accueil. Donc, il se ramasse au
privé et un équipement majeur payé par les citoyens du
Québec ne sert pas. Moi, je pense que le premier volet à
regarder, c'est comment maximiser le rendement des équipements qui sont
en place et, deuxièmement, certains services secondaires, mais pas du
tout reliés, par exemple, aux soins de santé directement. Je
pense bien que, quand on construit un hôpital neuf maintenant, on pense
au type d'équipement qu'on donne d'une façon différente
qu'on pouvait y penser en 1960 ou en 1970.
J'aurais une question à vous poser sur la polyvalence des
fonctions. Ne croyez-vous pas que le régime de négociation des
conventions collectives actuel fait en sorte qu'on essaie de donner le
même corset à un individu qui travaille dans un centre hospitalier
majeur qu'à celui qui travaille dans un centre hospitalier de 150 lits?
Je prends un exemple. Le type travaille ou la femme travaille dans un centre
hospitalier peut-être pas de 2000 lits, mais de 1500 lits, avec trois
vocations: psychiatrie, soins de longue durée et soins de courte
durée. On peut peut-être penser à de la
spécialisation plus forte
parce qu'on a le potentiel pour se permettre ça, un peintre, par
exemple, un plâtrier ou un homme à la réparation. Mais
quand on tombe dans un petit centre hospitalier de 150 lits - ça existe
- ne croyez-vous pas que les conventions collectives font en sorte que
ça pose un carcan assez important, qu'on ne demande pas un peu plus de
polyvalence et que le fait, précisément, de vouloir donner un
corset unique à tout le monde, c'est ce qui crée un
problème aussi?
Le Président (M. Joly): M. Thériault.
M. Thériault: M. Chevrette, vous avez donné
tantôt un exemple intéressant. On regardait, par exemple, le
fonctionnement sur la Côte-Nord au niveau des professionnels. Je pense
que ça rejoint un peu le même genre d'idée où, en
fonction des besoins d'organisation de ressources dans un établissement
particulier, en fonction des clientèles, il y a peut-être des
réaffectations différentes qui peuvent être faites pour
tenir compte des gens qui y travaillent, dans le fond. Cette
flexibilité-là est nécessaire pour faire une bonne
gestion, c'est évident. SI on est gelé comme dans des carcans, si
le système est gelé dans des carcans où on tire des lignes
très strictes sur les fonctions de chacun, que ce soient des
professionnels ou autres au niveau des établissements, c'est
évident qu'à ce moment-là on se limite dans une bonne
utilisation de nos ressources.
M. Chevrette: Ça veut dire que vous pourriez être
d'accord éventuellement, supposons, avec un cadre de négociations
qui fixerait les salaires, les bénéfices marginaux, mais quant au
cadre d'attribution de fonctions, de réaffectation, ça ne
pourrait pas avoir une odeur locale, ça?
M. Thériault: là, vous nous amenez sur un terrain
qui - je vais vous dire, d'abord - n'est pas du ressort de la corporation; une
corporation professionnelle n'a pas à...
M. Chevrette: Non, mais elle peut avoir des idées
là-dessus.
M. Thériault: Ha, ha, ha! Je préférerais que
ce soit le président qui y...
M. Chevrette: Vous préférez vous abstenir? C'est
votre droit. Je m'essayais.
Le Président (M. Joly): M. Paradis.
M. Paradis (Régis): Moi également, M. Chevrette, au
niveau des conventions collectives, je pense qu'il y a des syndicats vraiment
beaucoup mieux équipés que nous autres en termes de conseillers
techniques ou de quelque spécialiste que ce soit pour répondre
à vos questions là-dessus. En d'autres mots...
M. Chevrette: Sur le plan professionnel, vous, comme corporation
professionnelle, avec les ressources que vous avez, est-ce que vous accepteriez
que, dans un département une infirmière ou un infirmier
auxiliaire ait des fonctions, par exemple, moitié professionnelles qui
dépendent exactement de votre statut professionnel et, par exemple, pour
permettre une plus grande flexibilité, qui pourrait jouer un rôle
aussi de préposé aux malades pour l'autre moitié, sans
formation d'infirmier auxiliaire? Est-ce que vous concevez que ça
pourrait se négocier localement dans le cadre où ça prend
ça dans l'agencement du portrait local?
M. Paradis (Régis): O.K. En d'autres mots, si je cherche
à bien comprendre votre question, M. Chevrette, est-ce que
l'infirmière auxiliaire pourrait accepter de faire l'unité de
soins, de faire un nombre limité de fonctions, soins infirmiers, nursing
et un nombre limité de fonctions autres, que ce soient des
fonctions...
M. Chevrette: Oui.
M. Paradis (régis): ...administratives ou quoi que ce
soit? écoutez, je vous répondrais non, m. chevrette, parce que la
formation première, justement, de l'infirmière auxiliaire, c'est
la prestation puis la distribution des soins aux malades, tandis que - et
là, je reviens peut-être un peu plus au niveau de la formation
peut-être pour les infirmières qui reçoivent davantage,
justement, de formation au niveau de l'administration des soins infirmiers - le
rôle d'administration, on n'y touche pas. je ne dis pas qu'on n'aura
jamais un intérêt et que nous n'en avons pas, mais, dans
l'immédiat, on se concentre davantage vers la prestation qui est notre
spécialité, puis c'est ce que l'infirmière auxiliaire veut
faire. l'infirmière auxiliaire ne trouve pas qu'il y a de tâche
ingrate, en passant, justement, sur une unité de soins, elle est
relativement heureuse de faire ça, tandis que d'autres professionnels
volent certaines fonctions ingrates qu'ils n'aiment pas justement toucher et
qu'ils n'aiment pas faire. alors, franchement, je pense qu'il faut en utiliser
pleinement.
M. Chevrette: Correct.
M. Paradis (Régis): En d'autres mots: Utilisez-nous donc
au maximum de nos compétences. Sous la supervision d'une
infirmière, on est d'accord.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Paradis. Le mot de la
fin, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Merci beaucoup.
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Paradis (Régis): C'est moi qui vous remercie.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, et on se souhaite
bonne chance.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paradis (Régis): Bien, moi, je désire remercier
justement toute la commission de nous avoir permis de nous faire entendre et
puis ça nous a également, je pense, permis d'apprendre à
mieux se connaître et nous en sommes fiers.
Le Président (M. Joly): Merci. Au nom des membres de cette
commission, |e remercie la Corporation professionnelle des infirmières
et Infirmiers auxiliaires. Bon voyage de retour. Merci d'avoir
été présente.
Je demanderai maintenant à l'Association des médecins
d'urgence du Québec de bien vouloir s'avancer. Je demanderais au
président de bien vouloir s'Identifier et d'identifier la personne qui
l'accompagne, s'il vous plaît. (11 h 15)
M. Cousineau (François): Bonjour, je suis François
Cousineau, médecin d'urgence, président de l'Association des
médecins d'urgence du Québec. Et, à ma gauche, le Dr
Jean-Pascal Ouellet, médecin d'urgence, président ex-officio de
la même association.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Cousineau. Vous
connaissez sans doute les règles. Nous vous consentons une vingtaine de
minutes pour l'exposé de votre mémoire, 20 minutes ou moins. Et,
par après, le même temps pour les questions est accordé aux
deux formations, tant le côté ministériel que le
côté de l'Opposition. Alors, M. Cousineau, à vous.
Association des médecins d'urgence du
Québec
M. Cousineau: Alors, je vous remercie, M. le Président.
Nous remercions la commission de donner à l'Association des
médecins d'urgence du Québec l'opportunité d'être
entendue au sujet de la réforme de la Loi sur les services de
santé et les services sociaux.
L'Association est un regroupement de médecins pratiquant et
enseignant la médecine d'urgence dans un grand nombre
d'établissements hospitaliers. Le but premier de l'existence de l'AMUQ
est de promouvoir l'amélioration de la qualité des soins
médicaux d'urgence dès la prise en charge du
bénéficiaire par le système préhos-pistalier
jusqu'à son orientation définitive après stabilisation,
diagnostic et traitement. Nous souhaitons vivement apporter notre contribution
aux amendements de la loi. Tout comme les autres intervenants participant
à cette refonte, nous sommes hautement préoccupés par les
intérêts du bénéficiaire et ses besoins et sommes
confiants que tous nous réussirons à améliorer la
qualité des soins dispensés en les prodiguant dans les conditions
les plus humaines possible.
Les bénéficiaires se présentent ou sont
amenés aux salles d'urgence pour une foule de raisons: urgences qui
menacent la vie, un membre, l'intégrité physique, mentale et
psychologique, état de crise sociale, familiale, suite d'agressions et
d'abus de toutes sortes, petite urgence qui apparaît comme une
énormité aux patients, grosse urgence que le
bénéficiaire ou son entourage ont niée ou
négligée pour différentes raisons. Toutes ces
entités ont un dénominateur commun: Ce sont des besoins qui
doivent être rencontrés de la façon la plus rationnelle,
humaine et scientifique à la fois et, enfin, économique. Nous
entendons tous dire et redire que des individus se présentent
inutilement à l'urgence, que l'attente est interminable et que le
personnel, quoique compétent, est débordé. Oui, certains
Individus se présentent pour des raisons inappropriées à
l'urgence, mais ce nombre marginal ne constitue pas le noeud du
problème. La grande majorité des patients se présentent
aux urgences de bonne foi et. à notre avis, n'abusent pas du
système. Certes, davantage de prévention, d'éducation
réglerait le cas d'emblée d'un certain nombre de visites. Un
service d'urgence ne doit pas fonctionner au mode tour de rôle, comme au
bureau des passeports. Il doit fonctionner selon les priorités qui s'y
présentent.
M. Ouellet (Jean-Pascal): En 1985, le ministère de la
Santé et des Services sociaux a commandé une analyse statistique
opérationnelle et clinique du phénomène de l'engorgement
des salles d'urgence des centres hospitaliers de courte durée de la
région de Montréal, analyse connue sous la dénomination de
rapport Spitzer. L'ensemble du rapport nous apparaît toujours très
pertinent et nous continuons à partager la majorité des
recommandations proposées. Selon ce rapport, le nombre
élevé d'individus qui fréquentent la salle d'urgence se
retrouvent principalement chez les patients ambulatoires. Le nombre de patients
sur civière demeure relativement bas et est réparti de
façon uniforme entre les hôpitaux. Rien ne laisse penser que
l'engorgement peut s'expliquer par la présence des patients
ambulatoires. Globalement, les patients alités sur civière
subissent des délais moyens d'attente de 22 heures. Tout délai de
séjour dépassant neuf heures est considéré comme
excessif, ce délai étant fondé sur un jugement clinique.
Le comité affirme qu'il est de six heures en Ontario et aux
États-Unis. Les personnes âgées, sur civière,
doivent subir des délais encore plus importants: 28 heures si on ne les
hospitalise pas et jusqu'à 39 heures et demie si on les hospitalise. Le
nombre de patients d'âge
gériatrique représentant des problèmes mentaux
constitue 40 % des patients alités sur civière dans l'ensemble
des hôpitaux sélectionnés. Les hôpitaux
présentant les indices en ressources techniques et en personnels les
plus favorables ne sont pas nécessairement les plus performants, bien au
contraire. Le rapport Spitzer démontre une autre réalité:
l'absence de priorisation des soins pour les patients alités à
l'urgence.
Une pénurie de lits n'est pas le facteur majeur sous-jacent
à l'engorgement des urgences. L'engorgement a trait à la
dynamique interne des hôpitaux et non à la demande externe. En
corollaire à ce rapport, nous croyons qu'au niveau des patients
ambulatoires il faut encourager une meilleure utilisation des ressources
déjà disponibles dans le réseau. Il faut éviter une
duplication des services et une multiplication des coûts.
Par ailleurs, l'Association des médecins d'urgence du
Québec est convaincue que la situation de congestion dans les salles
d'urgence ne s'est pas améliorée de façon significative
depuis 1985. Tout particulièrement, les efforts déployés
par le ministère à la suite du rapport Spitzer n'ont pas
enrayé le problème de la congestion, mais plutôt
empêché sa détérioration. II s'agit toutefois
d'efforts très louables qu'il faut encourager et qu'il faut
poursuivre.
Le type de gestion interne des unités d'urgence des
hôpitaux a donc une influence directe sur la congestion des urgences et,
en conséquence, il faut améliorer la gestion interne des
unités d'urgence. Qu'à l'instar de l'Ontario soit limité
à six heures tout séjour à l'urgence pour fins
d'observation et de traitements. Il faut donner aux médecins de salles
d'urgence toute l'autorité nécessaire pour admettre des patients.
Il faut accorder ou maintenir la priorité absolue aux patients de la
salle d'urgence, particulièrement aux patients sur civière en ce
qui a trait aux services de laboratoire, de radiologie et aux consultations. Il
faut aussi rationaliser la gestion intrahospitalière, donner au
médecin coordon-nateur un véritable pouvoir décisionnel
quant aux admissions, exercer un contrôle plus serré de la
durée du séjour des patients. Des normes existent d'ailleurs
à ce sujet. Et qu'on s'assure de réserver un nombre de lits
égal à la moyenne journalière d'admissions provenant de
l'urgence.
Il faut mettre sur pied et promouvoir un service de gériatrie
active. Tous les patients de soins prolongés ou de gériatrie
doivent être regroupés sous la responsabilité d'une
même équipe et non dispersés entre plusieurs
médecins traitants travaillant de façon indépendante. En
outre, les services de gériatrie devraient participer à
l'évaluation et la prise en charge immédiate de tout patient en
perte d'autonomie admis en courte durée pour un problème
aigu.
Qu'on améliore l'utilisation des lits en chirurgie en
procédant à l'investigation préopératoire
complète en externe. Les chirurgies sur une base externe et
l'utilisation des unités de courte durée doivent être
maximisées.
Que le gouvernement du Québec s'assure que toutes les mesures
susmentionnées sont appliquées et qu'il finance
adéquatement les centres hospitaliers ayant réalisé ces
objectifs.
Afin d'optimiser le développement des ressources alternatives
extra-hospitalières, le gouvernement a vu à la formation
d'équipes de psycho-gériatrie pouvant donner des soins à
domicile. Il a vu à la création de lieux d'hébergement
pour personnes itinérantes et au développement des
résidences d'accueil pour les personnes âgées et celles
souffrant d'une affection mentale. Il est temps d'évaluer l'Impact de
ces mesures et de les optimiser en favorisant les plus productives. Cet effort
de rationalisation est Important pour le réseau et pour le
bénéficiaire, l'objectif étant d'orienter d'emblée
les demandes vers les ressources appropriées où leur
évaluation et le règlement se feront avec plus de justesse et de
célérité.
En outre, il faut assurer la coordination médicale, provinciale
et régionale des soins médicaux d'urgence. L'état des
choses en ce qui regarde les soins médicaux d'urgence au Québec
fait ressortir la complexité et la quantité de variables qui
composent aujourd'hui cette sphère d'activités. Il est temps,
à l'instar de la France et de l'Ontario, que le Québec se dote
d'une direction provinciale en soins médicaux d'urgence. Des
observateurs avertis ont pu constater le dynamisme et l'efficacité qui
régnent dans ce domaine chez nos voisins ontariens où un
sous-ministre Issu d'un milieu d'urgence a été chargé
spécifiquement de cette question.
Au niveau régional, il faut instaurer une gestion
informatisée des lits pour établir une coopération plus
étroite entre les centres hospitaliers. En corollaire, une plus grande
cohésion régionale permettrait l'utilisation optimale de lits
disponibles et faciliterait la rationalisation des détournements
d'ambulance.
Remarquons qu'il existe au pays des exemples de gestion
informatisée dont les résultats sont positifs, Sudbury, Kingston,
Toronto, Vancouver, Hamilton, et dont le sous-ministre Cimpka, de l'Ontario, a
hautement vanté les mérites. Si ça marche pour nos voisins
ontariens, peut-on envisager un système comparable chez nous?
Il faut établir une direction et une supervision regroupant les
différents intervenants. Particulièrement en soins
médicaux d'urgence, il est primordial d'établir des politiques
cohérentes et articulées et de s'assurer que les centres
hospitaliers comprennent et respectent les règles du jeu. Il ne faut
qu'une seule institution fautive pour que l'ensemble du système commence
à s'ébranler. C'est la théorie des dominos. Il
appartiendra au comité régional de veiller à la gestion de
l'ensemble de son réseau. Ce comité devra posséder des
pouvoirs discrétionnaires afin
d'intervenir efficacement dans les cas de non-observance des politiques
établies. Les médecins d'urgence doivent être membres
à part entière de ces comités provinciaux et
régionaux.
M. Cousineau: II faut établir un système provincial
de soins préhospitaliers d'urgence garantissant la qualité,
l'universalité et la complémentarité des soins
médicaux. Le but d'un système préhospitalier d'urgence est
de réduire la mortalité, la morbidité et la souffrance
résultant d'une maladie ou d'un traumatisme soudain. Il faut assurer une
réponse rapide, un traitement d'urgence selon des normes
médicales reconnues, un transport adéquat et un accès
possible à des soins définitifs, peu importe où se situe
l'urgence au Québec.
Le système doit être intégré, imputable et
efficient. Il doit rencontrer quinze exigences reconnues et
éprouvées internationalement, à savoir des effectifs
appropriés, la formation adéquate, des communications
fonctionnelles et efficaces, le transport, le centre de réception, les
unités spécialisées de soins, l'utilisation des services
de sécurité publique, la participation du grand public,
l'accessibilité au système de soins préhospitaliers
d'urgence, les transferts, les dossiers, l'information et la formation du grand
public, l'évaluation, la planification des interventions en cas de
désastre, l'entente d'aide mutuelle.
Nous recommandons l'application d'un plan directeur provincial
basé sur les stratégies et les principes que nous venons
d'énumérer. Lors de l'élaboration de ce plan, il faut
à tout prix éviter d'inclure, à l'intérieur des
conventions collectives, des aspects pouvant porter préjudice à
la qualité des soins dispensés aux patients. L'association croit
qu'il y a des aspects à l'intérieur de conventions
déjà signées qui sont des embûches à
l'application intégrale de ce système.
M. Ouellet: En conclusion, une société doit
rechercher le bien-être et surmonter les conflits perpétuels
engendrés par la quête des intérêts personnels. Une
communauté de pensée et d'action doit exister. Pour assurer la
cohésion du système, nous croyons que le ministère de la
Santé et des Services sociaux doit donner le ton en élaborant des
lignes directrices et en s'as-surant par son leadership que les régions
travaillent dans le sens des objectifs visés, tout en possédant
une latitude suffisante pour faire face à leur particularisme
respectif.
M. le Président, nous avons exprimé des
préoccupations de l'Association des médecins d'urgence du
Québec concernant le présent et l'avenir des soins
médicaux d'urgence de notre province. Nous vous remercions de nous avoir
écoutés.
Le Président (M. Joly): Merci. M. Cousineau et M. Ouellet.
Maintenant, je vais reconnaître M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Je veux, en premier lieu, remercier le Dr Cousineau et le Dr
Ouellet d'être là parce que j'allais dire: Vous êtes des
oiseaux rares, mais ce n'est pas vrai. Ce n'est pas souvent qu'on a l'occasion
de discuter de nos problèmes d'urgence de la manière dont on va
le faire, compte tenu du fait qu'on se retrouve assez
régulièrement sur la place publique avec les problèmes
d'urgence, d'engorgement, de systèmes qui ne fonctionnent pas, l'homme
politique disant: On a injecté des sommes fabuleuses au cours des
dernières années et on se retrouve encore devant la même
situation. Est-ce qu'il n'y a pas là d'autres raisons qui font que notre
système a des problèmes?
Je pense que vous abordez de manière très courageuse
certains os, et c'est pour ça que c'est un moment
privilégié qui nous rend capables d'échanger des
idées avec vous. Je prends votre mémoire, qui est là et
qui reprend essentiellement les dix points mentionnés. À la fin
du deuxième, c'est ce qui m'a frappé dans un premier temps, vous
dites: Le type de gestion interne des unités d'urgence et des
hôpitaux a donc une influence directe sur la congestion des urgences. En
conséquence, il faut... Là, vous établissez,
suggérez une série de mesures aussi importantes les unes que les
autres. À vos yeux, il y en a qui sont, je pense, d'intérêt
commun et on va tenter de les discuter. (11 h 30)
Ce qu'on a dit et ce qu'on répète, c'est qu'il va
nécessairement falloir remettre des sommes d'argent pour le traitement
du problème des urgences, mais avant ça il faut, bien sûr,
secouer notre système et en voir la dynamique. C'est ce que vous dites
et je suis très heureux que vous l'exprimiez sur la place publique,
parce qu'il n'y a personne de plus averti, je pense, que vous autres, parce que
vous le pratiquez de manière quotidienne. Et vous dites à IV:
"Rationaliser la gestion intrahospitalière". Je pense qu'on va aller au
coeur du débat assez rapidement; ça ne nous donne rien
d'étirer le temps.
Au premier paragraphe, il est dit: "Donner aux médecins
coordonnateurs un véritable pouvoir décisionnel quant aux
admissions et aux congés." Ça, c'est le premier
élément et, dans les mesures que Mme Lavoie-Roux avait mises en
place, c'est elle qui a mis en place le médecin coordonnateur. Donc,
dans mon livre à moi, il est là. Ce que je comprends, c'est que
ça ne marche pas, ou, si ça marche, ça marche à
moitié, au quart, mais ça ne marche pas comme ça devrait
marcher. J'aimerais vous entendre là-dessus: pourquoi ça ne
marche pas et qu'est-ce qu'il faudrait faire davantage pour renforcer son
pouvoir?
M. Cousineau: Dans un premier temps, il y
a eu des centres hospitaliers où un coordon-nateur d'admission a
été nommé, de même qu'un coordonnateur d'urgence.
Nous y voyons la possibilité de conflits d'intérêts entre
ces deux types de coordination, le coordonnateur des admissions n'étant
pas nécessairement axé sur les priorités d'admission qui
se présentent venant de l'urgence. C'est pour ça que nous
parlons, en fait, d'un seul médecin coordonnateur, le médecin
coordonnateur de l'urgence ou autre, mais, d'emblée, ça nous
paraît primordial qu'il ne devrait y avoir qu'un seul médecin
coordonnateur dans les centres hospitaliers, d'une part, et, d'autre part, ce
médecin coordonnateur doit être véritablement axé et
penché quotidiennement sur la priorisation des admissions provenant de
l'urgence. On recommande fortement que ce médecin doit avoir pouvoir
d'admission dans le centre hospitalier où il travaille. Nous avons, en
plus, d'autres mesures où l'hôpital doit prévoir une banque
de lits disponibles dans son établissement, qui est proportionnelle
à la moyenne des admissions journalières provenant de l'urgence,
c'est une chose, mais le coordonnateur doit, en plus, avoir la capacité
de déborder: par exemple, un patient présentant un
problème médical nécessitant qu'il soit
hospitalisé, le coordonnateur peut avoir, à notre sens, la
capacité d'utiliser un lit de chirurgie pour ce patient-là, si le
besoin se fait sentir.
M. Côté (Charlesbourg): Alors, si je comprends, le
problème fondamental, c'est qu'on se retrouve dans certains
établissements avec deux coordonnateurs des admissions: un qui est
à l'urgence, qui a été nommé récemment,
compte tenu de la crise, et un qui est responsable de l'admission à
l'hôpital, mais qui a préséance sur le deuxième.
M. Cousineau: Dans une certaine mesure... C'est le cas dans
certains établissements et je pense... En fait, au chapitre de la
coordination, il y aurait lieu, en fait, de véritablement définir
des règles: quelles sont les responsabilités, quelles sont les
prérogatives dont peut disposer le coordonnateur des urgences ou,
encore, le coordonnateur des hôpitaux? Mais on revient à la
même chose que, encore une fois, il doit priori-ser les demandes
d'hospitalisation provenant de l'urgence, et non pas prioriser les demandes
d'hospitalisation qui proviennent d'ailleurs dans rétablissement.
M. Côté (Charlesbourg): Et ça, ça
explique votre deuxième paragraphe qui dit: "Abolir le système de
protection stricte des lits pour des médecins ou des
spécialistes, en adoptant plutôt une répartition
basée sur les besoins réels en hospitalisation." Normalement,
protection stricte de lits, ce n'est pas supposé exister?
M. Cousineau: Effectivement, c'est dans la loi.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Mais ça
existe.
M. Cousineau: Ça existe qu'il y a des lits
réservés pour certains départements, il y a une
sectorisation qui existe dans différents établissements. Ce qu'on
désire, d'une part, qu'il soit définitivement aboli, c'est des
lits protégés au nom d'un médecin. Je pense que même
on l'a dit, c'est dans la loi. D'autre part, la sectorisation entre chirurgie
et médecine, c'est une réalité. Je pense qu'il va toujours
y avoir une nécessité absolue que des patients soient
opérés; on doit reconnaître cette
nécessité-là et c'est pour ça qu'on l'aborde aussi,
un peu plus loin, quand on parle de privilégier l'utilisation des lits
de courte durée et ceux de la chirurgie de court séjour,
là chirurgie en externe, etc., mais on mentionne, en fait, cette
sectorisation-là pour dire qu'elle ne doit pas être d'une
rigidité telle que le coordonnateur ne puisse pas hospitaliser, le cas
échéant, des patients de l'urgence qui présentent un
problème strictement médical. Elle ne doit pas être
imperméable, cette sectorisation.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que je dois
comprendre, dé par votre vécu, qu'il y a des cas de chirurgie
élective qui passent avant des besoins des urgences?
M. Ouellet: Je pense que ça existe. Je ferai
peut-être une parenthèse pour compléter ce que
François vient de dire. C'est que, dans les hôpitaux, je pense
que, dans les mesures Lavoie-Roux, la nomination d'un médecin
coordonnateur a été une des mesures les plus productives. Je
pense que même les études du gouvernement le démontrent.
Maintenant, s'il y a des endroits où ça a été
très productif, il y a des endroits où ça n'a pas
été productif, dépendamment du pouvoir qui était
donné à ce médecin coordonnateur à l'hôpital.
Le médecin coordonnateur n'avait pas de pouvoir discrétionnaire.
À ce moment-là, si l'hôpital, de par la bonne
volonté, décidait de fonctionner en harmonie avec cette
personne-là, il y a eu beaucoup de progrès - et ces
hôpitaux-là, on les connaît - mais il y a des
hôpitaux, au contraire, où il n'y a eu aucune collaboration. Donc,
le dossier n'a pas avancé.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, on touche à un
problème d'organisation. Et vous avez dit, dans votre
présentation: Bon, il y a eu des efforts louables de faits sur le plan
financier pour être capable de régler un certain nombre de
problèmes. Quant à nous, les statistiques nous démontrent
qu'il y a eu des effets bénéfiques, passant de 18 % à
à peu près 12 % ou 13 % d'occupation des lits par des malades
chroniques, mais qu'on revient, à ce moment-ci, à une occupation
encore plus importante de ces lits-là.
Votre bilan à vous des sommes investies,
est-ce que ça a permis uniquement, d'après vous, de
régler des problèmes reliés aux urgences ou si ça
n'a pas permis à certains hôpitaux de régler certains
autres problèmes à l'intérieur des... Et vous avez dit
tantôt: Médecin coordon-nateur, c'est une bonne mesure en autant
qu'on lui donne des pouvoirs additionnels.
Qu'est-ce qu'on a fait qu'on n'aurait pas dû faire? Surtout,
qu'est-ce qu'on devrait faire qu'on n'a pas fait sur le plan de... Si vous
étiez dans la peau du ministre, demain matin, qui revendique des sommes
additionnelles, ça se placerait où en termes de priorités
d'affectation des sommes d'argent additionnelles pour régler les
problèmes d'urgence?
M. Ouellet: Je pense que le noeud du problème, c'est un
petit peu d'assurer... Moi, je le vois au niveau de la coordination
régionale. Là, les hôpitaux, à mon avis, se
comportent comme des entités indépendantes puis se
protègent l'un l'autre. Il n'y a pas de ce ciment régional qui
est nécessaire à une meilleure gestion. Je pense qu'il y a un
gros problème là. Et, là, lorsqu'on parle de
l'informatisation des lits, par exemple, je pense que l'informatisation des
lits, l'expérience de nos voisins l'a démontré, tout d'un
coup on a découvert qu'il y avait des lits, alors qu'on pensait qu'il
n'y en avait pas. Juste ça, ça a résolu plusieurs
problèmes.
Je pense que la cohésion régionale est nécessaire,
avec des pouvoirs discrétionnaires à ces directions
régionales là. Ça, ça aiderait beaucoup, parce
qu'il y a des hôpitaux déviants et je pense qu'il faudra y
voir.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Mais si je comprends,
c'est que, ayant réglé une partie des problèmes au niveau
de l'institution avec un médecin coordonnateur de toutes les admissions
- je pense que c'est ça qu'on vise - donc subordonné à
personne d'autre que lui-même sur le plan de la décision quand un
lit est utilisé actuellement en chirurgie élective... Parce que
là, ce qu'on dit: Ça ne peut pas se faire, mais ça se
fait, donc des lits réservés. Donc, selon la loi, ça ne se
fait pas. Ça ne peut pas se faire, mais ça se fait, de ce que je
comprends de l'expérience que vous nous dites.
Au-delà de tout ça, vous dites: II faut quand même
aussi que, sur le plan régional, on puisse avoir un système
d'affectation ou de répartition de ces lits qui pourrait permettre,
finalement, de désengorger un hôpital ou de dire: Bon, à
l'Enfant-Jésus, demain matin, envoyez-en pas, ils sont
déjà à pleine capacité. Par contre, à Laval,
au CHUL, il y a des possibilités et c'est là que ça
devrait aller. C'est ça que je comprends. C'est à ça que
ça servirait.
M. Ouellet: C'est un des aspects sûrement importants.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Mais, dans la mesure
où on aurait le médecin coordonnateur au niveau de chacun des
établissements qui ferait le travail qu'on souhaite, vous pensez
toujours que ça prendrait une structure régionale pour
l'affectation de ces lits-là?
M. Cousineau: Oui. Oui, parce que le coordonnateur est
parfaitement au courant de ce qui se passe dans son établissement, des
besoins des patients qui se présentent à l'urgence et pour
lesquels les demandes, entre autres, lui sont référées,
par exemple, de la clinique externe ou des cabinets privés parce qu'il y
a des demandes d'hospitalisation qui proviennent, en fait, de plusieurs
endroits. Pour avoir véritablement une vision régionale - on
reparle, en fait, de gestion informatisée - de la quantité de
lits de soins de courte durée disponibles dans une région
donnée, nous ne voyons pas, autrement que par une source
privilégiée d'information régionale, que cette information
puisse être disponible.
M. Ouellet: Est-ce que je pourrais me permettre de rajouter, de
vous citer peut-être un exemple? Il n'est pas concevable que dans un
centre hospitalier, par exemple, le médecin coordonnateur cumule aussi
les fonctions de président du conseil des médecins et dentistes,
de chef du département de médecine, tout ça ensemble.
À ce moment-là, il a peut-être intérêt, lui,
à un petit peu camoufler certaines ressources. Je pense que la
coordination régionale permettrait de jouer un peu à la police.
Je pense que c'est un peu cela qu'il faut faire.
M. Cousineau: Si je peux me permettre aussi, M. le ministre et M.
le Président, c'est que, d'une part, il y a la gestion
informatisée qui nous apparaît nécessaire pour les lits
disponibles de soins de courte durée, mais il nous apparaît aussi
nécessaire une désignation des hôpitaux, par exemple, la
désignation d'un centre hospitalier de soins tertiaires pouvant fournir
des services à un hôpital de soins secondaires, pour une
utilisation optimale et rapide aussi des lits disponibles.
Je peux vous servir l'exemple d'un centre hospitalier de soins
secondaires qui reçoit un patient à l'urgence qui est dans un
état critique. Il nous apparaît essentiel, pour le bien-être
du patient, que le médecin d'urgence, stabilisant ce patient à
l'urgence, puisse avoir accès le plus rapidement possible, pour ce
patient critique, à un centre hospitalier de soins tertiaires. Vous avez
des exemples où des centres hospitaliers de soins secondaires sont
situés à 30 minutes d'ambulance de centres hospitaliers
tertiaires. Or, ça peut prendre plusieurs heures avant de trouver une
ressource pour ce patient, autrement dit un hôpital de soins tertiaires
qui puisse accueillir le patient. Donc, la gestion régionale
s'étend à toute cette chose.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends mieux et
ça me paraît assez logique. On m'a dit tantôt qu'il me
restait deux minutes, donc il doit m'en rester au moins une pour poser une
dernière question, et ce n'est pas parce qu'on en manquerait. À
IX, vous marquez: "Développer le concept de la traumatologie.
Désigner des centres de traumatologie. " Dans les faits, il n'y en a pas
de désigné, de manière légale. On n'a pas dit que
l'Enfant-Jésus à Québec et Sacré-Coeur à
Montréal étaient désignés, mais, dans les faits,
c'est le cas. C'est pour ça qu'à un moment donné je me dis
que d'être désigné de manière officielle, outre la
gloriole, qu'est-ce qu'on en tirerait?
M. Ouellet: Je pense que ça c'est un point qui
m'apparaît clair et facile à comprendre dans le sens que, pour
bien traiter ce genre de patients, il faut développer une expertise;
pour développer une expertise, il faut en voir. Un centre de
traumatologie doit voir des patients. Sinon, si on distribue ça et
là ce genre de patients au lieu de les amener à des endroits, de
favoriser les spécialités dont vous parliez tout à
l'heure, on dilue l'expertise et je pense que c'est plus coûteux parce
qu'au lieu d'être bien traités initialement ces patients sont
traités de façon beaucoup moins adéquate que dans un
centre de traumatologie et ça finit par coûter plus cher parce
que...
M. Côté (Charlesbourg): Oui, O. K. Mais est-ce que
ce n'est pas ce que font l'Enfant-Jésus et Sacré-Coeur à
Montréal?
M. Ouellet: Je prends l'exemple de Sacré-Coeur à
Montréal. Il y a plein d'hôpitaux à Montréal qui
reçoivent des traumatisés et pas seulement Sacré-Coeur.
Sacré-Coeur en reçoit une fraction. Pour commencer à
parler de centre de traumatologie, je pense qu'il faut aller à un nombre
de 250, 300, 400, 500, 600 patients par année. Il faut en voir beaucoup.
Je pense qu'il faut les concentrer. Moins il y en a dans une région,
plus il faut les concentrer pour que l'expertise ne soit pas diluée.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends le sens de
votre intervention, mais j'ai visité moi-même Sacré-Coeur,
du temps que j'avais la responsabilité de la Régie de l'assurance
automobile, et il m'apparaissait que le volume traité, par année,
était nettement supérieur aux chiffres que vous évoquez
puisqu'on les dirigeait de manière très importante là-bas.
Ça ne veut pas dire qu'il n'y en a pas ailleurs et qu'on ne doive pas
éventuellement désigner des centres de manière très
officielle. (11 h 45)
Tous ceux qui ont des traumatismes routiers dans l'Est du Québec,
par exemple, sont référés à l'hôpital de
l'Enfant-Jésus. Il y a donc, dans les faits et dans la pratique, une
concentration. C'est pour ça que j'évoquais ces deux centres
hospitaliers où iI s'est développé une expertise assez
importante. Mais ce que vous voulez, c'est davantage un renforcement, une
concentration de centres désignés à ces effets-là,
compte tenu du volume à traiter et de l'expertise que ça oblige.
Ça va. Merci.
Le Président (M. Joly): merci, m. le ministre. je vais
maintenant reconnaître m. le leader de l'opposition et
député de joliette, m. chevrette.
M. Chevrette: merci, m. le président. je vois que vous
vous êtes beaucoup inspiré du rapport spitzer pour partir votre
analyse. vous faites une recommandation très précise en ce sens
que le coordonnateur soit à la fois le seul et unique responsable de
l'admission et des congés.
M. Couslneau: Permettez-moi, peut-être, d'arrêter
ici. Le seul responsable des congés... On précise que la question
des congés entre dans le contrôle de la durée de
séjour. Il y a des méthodes pour surveiller les durées de
séjour des patients hospitalisés. On parle, entre autres...
M. Chevrette: Sauf que, dans votre texte, c'est bien
écrit, et je vous ils: "Donner aux médecins coordonnateurs un
véritable pouvoir décisionnel quant aux admissions et aux
congés. " C'est donc lui qui a l'autorité ultime.
M. Consineau: Vous nous avez bien lu, M. Chevrette, mais dans un
deuxième temps... Nous réalisons que le coordonnateur doit
assurément disposer de pouvoirs décisionnels quant aux admissions
des patients. La question des congés, là, vous entrez un
élément d'expertise, en fait. Si le coordonnateur d'urgence, le
médecin d'urgence est un interniste, un pédiatre pour qui on
pense que cette fonction serait la plus adéquate, je pense que c'est
difficile pour un interniste de décider que tel jour doit être le
congé d'un patient dans un service de chirurgie. Je pense que,
là, il y a une expertise qui ne relève pas nécessairement
de l'expérience et de la formation du coordonnateur.
En fait, on précise maintenant que, dans la question du
congé - je ne dirais pas le "timing" - le moment le plus
approprié où s'effectue le congé doit faire partie de
toute la question du contrôle de la durée de séjour.
Ça fait partie des recommandations qu'on émet au sujet de la
rationalisation de la gestion intrahos-pitalière. On suggère de
contrôler la durée de séjour dans les hôpitaux, et il
y a des méthodologies pour ce faire.
M. Chevrette: O. K. Autant je serais en désaccord profond
avec le fait que, pour attirer un médecin, on lui garantisse un nombre
de lits quotidien, autant je serais en désaccord que la seule porte
d'entrée à l'hôpital soit l'urgence. N'y a-t-il pas danger
- et la question vient - à ce moment-là, qu'un seul bonhomme en
charge de tout et dont la préoccupation, c'est de décongestionner
l'urgence ne crée un autre préjudice majeur face, par exemple,
à toute l'hospitalisation pour des soins électifs? Qu'est-ce qui
arriverait? Est-ce que vous ne pourriez pas créer un autre
problème majeur dans notre société et qu'on dise: Bon, on
n'a plus de problème, les urgences sont vides ou à peu
près, mais on ne fait à peu près plus de
prévention, absolument rien, ce n'est que curatif, point? Est-ce que
vous ne pensez pas qu'il y a là un danger? C'est là la question
que je voudrais vous poser.
M. Ouellet: Je pense qu'il y a électif et électif.
Il y a des électifs plus urgents que d'autres et il y a des
électifs très électifs. Je pense que, si on empêche
un patient d'avoir accès à un lit de l'hôpital alors qu'il
est à l'urgence, pour entrer une chirurgie très élective,
ce n'est pas approprié.
M. Chevrette: Je comprends, mais Je ne voudrais pas que vous
l'interprétiez de cette façon-là. Ce n'est pas là
le sens de ma question. Il y a deux portes d'entrée à
l'hôpital, présentement. Il y a les médecins qui, par
exemple, pour une hernie, pour une tumeur bénigne... Tu peux entrer par
une autre porte que celle de l'urgence. Si la priorité absolue ne
devient que l'urgence, est-ce qu'il n'y a pas danger,
précisément, qu'on décongestionne nos urgences, oui, mais
on sait avec quelle difficulté, juste pour faire le trafic? Vous avez de
la difficulté à acheminer à une clinique privée
quelqu'un qui mouche un peu trop; il se tire à l'urgence. Est-ce qu'il
n'y a pas danger, à ce moment-là, que le seul souci du groupe
médical, puisqu'il y aurait un coordonnateur pour qui le seul souci
serait de décongestionner les urgences en ayant plein contrôle sur
l'entrée et la sortie... Est-ce qu'il n'y a pas là un danger et
ne doit-on pas plutôt parler, en tout cas, tout au moins, d'une
obligation, pour ce coordonnateur-là, de s'enquérir auprès
de l'équipe médicale? Moi, ça m'apparaît gros, au
départ, d'entrée de jeu, de dire: Oui, bravo, parfait! On
réglerait un problème en en créant un autre. Je verrais
plutôt un équilibre dans ça, à un moment
donné.
M. Cousineau: II y a tout de même certains centres
hospitaliers où cela est déjà une expérience
vécue. Il y en a au Québec, il y en a en Ontario où,
véritablement, II y a un coordon-nateur qui siège, en fait, au
sein d'un comité qui se réunit à tous les jours pour
décider de la priorisation des admissions, à partir des demandes
qui proviennent de l'urgence et des demandes qui proviennent de
l'électif. Il est certain qu'on coordonnateur doit être
parfaitement réaliste et envisager que favoriser à outrance tout
ce qui se présente à l'urgence et garder en tout temps 25 lits de
soins de courte durée disponibles dans son hôpital au cas
où, c'est bien sûr qu'à ce moment-là, des chirurgies
électives, il ne s'en fera plus, et, à ce moment-là, on va
être pris avec un autre problème. Je pense que c'est une question
d'ajustement au quotidien. L'expérience démontre tout de
môme qu'il y a moyen, dans un comité où l'on fait preuve
quand môme de souplesse, mais où on se préoccupe plus
particulièrement des besoins des patients, de s'ajuster à tous
les jours à cette demande. Il y a certainement des semaines où
c'est très difficile de faire entrer des patients en électif et
il y a d'autres semaines où l'inverse est tout à fait vrai. Et,
encore une fois, c'est un fait vécu.
M. Chevrette: On sait juqu'à quel point il y a des
médecins qui ne sont pas tellement friands de faire de l'urgence. Dans
certains milieux, je me souviens encore, on discutait sur la manière de
forcer les médecins à partager ce dur boulot qu'est le travail de
médecine d'urgence. Je voudrais savoir si vous considérez que le
système devrait changer et qu'on devrait créer une obligation...
Ou bien on crée une obligation à ces médecins de partager
le boulot sur un territoire donné, ou bien on change complètement
notre approche et on dit: Dorénavant, les hôpitaux seront
autorisés à engager des médecins qui font de l'urgence,
à engager des salariés de l'urgence. Seriez-vous d'accord avec
ça?
M. Cousineau: On peut peut-être répondre à la
question en deux volets. Le premier, pour ce qui est de la présence
obligatoire ou non obligatoire de médecins à l'urgence... En
fait, le premier but de l'Association, c'est l'amélioration de la
qualité des soins d'urgence au Québec et nous croyons fermement,
en vue justement d'offrir les meilleurs soins possible, que nous avons tout
intérêt à ce que les médecins qui travaillent dans
les services d'urgence, d'une part, le fassent par intérêt majeur
pour ce genre de médecine... Je pense que c'est une simple question de
bon sens. Si on force des médecins à venir pratiquer à
reculons dans les services d'urgence, je pense qu'on va avoir des raisons
d'ôtre Inquiet.
M. Chevrette: Est-ce que vous croyez...
M. Cousineau: On ne veut pas brandir ça comme une menace
en aucune façon...
M. Chevrette: Je vous arrête juste là-dessus.
Croyez-vous qu'un homme ou une femme de la Gaspésie, par exemple, qui...
C'est surtout en
Gaspésie et dans certaines régions dites excentriques
qu'on peut avoir de la difficulté plus qu'ailleurs à avoir un
partage, mais dans un endroit où ils sont seulement deux ou trois
à faire . de l'urgence, les autres n'en font pas, les médecins
des CLSC ont refusé dans certains milieux d'en faire, comment voyez-vous
ça, s'il y a une liberté complète?
M. Cousineau: La profession de médecin d'urgence demande
tout de même une formation adéquate, un maintien de cette
formation-là, et engendre des responsabilités qui sont,
reconnaissons-le, considérables. Alors, nous pensons que, si nous
désirons maintenir des médecins d'urgence dûment
qualifiés et formés dans nos salles d'urgence, et qui sont
intéressés non seulement à maintenir leur formation, mais
qui sont intéressés à participer à la gestion de
leurs services d'urgence et a rationaliser tout ce qui s'y passe, il va falloir
trouver un moyen d'intéresser les médecins à y demeurer.
Je pense que...
M. Chevrette: Donc, vous proposez, et c'est ce qui vous
amène à proposer que ce soit une spécialité
médicale.
M. Cousineau: Nous voyons la question de la
spécialité médicale comme un instrument, comme un moyen
d'assurer la meilleure qualité possible de services dans les urgences du
Québec.
M. Chevrette: Vous avez entendu parler de différentes
formes de contrôle; il y en a qui parlent de modes de
rémunération du corps médical. Comment voyez-vous le mode
de rémunération des urgentologues ou des médecins
d'urgence?
M. Cousineau: C'est une question fort à la mode.
M. Chevrette: Je ne sais pas si elle est à mode, mais elle
se pose. Elle pourra le devenir peut-être davantage.
M. Ouellet: Je pense que l'Association est prête à
étudier toutes les suggestions qui pourraient se traduire par une
amélioration de la qualité des soins à ce
niveau-là. Je pense qu'on doit retenir les plus efficientes. Maintenant,
est-ce que le salariat est une garantie de vertu, une garantie d'efficience?
Pas nécessairement. On est ouverts à regarder ce qui peut
améliorer la qualité de tout ce qui se passe et l'efficience de
tout ce qui se passe dans le système.
M. Chevrette: Est-ce que le paiement à l'acte est une
garantie d'efficience?
M. Cousineau: Nous pensons que la qualité des soins
médicaux d'urgence est fort acceptable au Québec et,
présentement, la rémunération est à l'acte.
Maintenant, nous ne voulons pas nous faire les défenseurs d'un mode de
rémunération plutôt qu'un autre. Encore une fois, nous
sommes intéressés à étudier toute forme de
rémunération que l'on pourrait envisager pour les médecins
d'urgence. Ce que l'on dit simplement, c'est qu'en bout de ligne, pourvu que
l'on soit assurés que cela va procurer aux patients la meilleure
qualité de soins possible, tout en respectant l'efficience, tout est
possible. Mais ça nous apparaît comme deux conditions
fondamentales.
M. Chevrette: Pour moi, ça va. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le leader de
l'Opposition. M. le ministre, est-ce que vous avez le mot de la fin?
M. Côté (Charlesbourg): Juste en terminant. Dans les
dernières négociations que nous avons eues avec la FMOQ, c'a a
été un des éléments extrêmement importants de
discussion, la rémunération des médecins travaillant en
urgence et, bon! on a réussi à s'entendre. Évidemment, il
faut maintenant passer à d'autres étapes avant de signer une
entente. Mais on s'est entendus sur des besoins plus spécifiques et si
demain on veut encourager des médecins à travailler davantage en
urgence, c'est reconnaître que le volume de cas traités, la nuit
ou le soir, à l'acte n'est pas suffisant pour maintenir les
médecins; ça doit donc être une rémunération
à deux niveaux, et, aussi reconnaître le phénomène
du vieillissement de la population qui se présente dans les salles
d'urgence et qui nécessite une attention particulière de la part
des urgentologues et reconnaître que 70 ans et plus, c'est un
écart important, une étape importante. On a fait beaucoup de
chemin avec la FMOQ là-dessus et très possiblement, dans les
prochaines semaines, on pourra régler une partie de ce
problème-là. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci. Au nom des membres de cette
commission, je vous remercie. Bon retour. À la prochaine.
M. Cousineau: Merci, M. le ministre.
Le Président (M. Joly): Je vais maintenant demander aux
représentants du Regroupement des conseils consultatifs du personnel
clinique des centres de services sociaux du Québec de bien vouloir
prendre place, s'il vous plaît. Bonjour, mesdames!
Une voix: Bonjour.
Le Président (M. Joly): alors, je vais demander à
la responsable et présidente du regroupement de bien vouloir
s'identifier et identifier les gens qui l'accompagnent.
Regroupement des conseils consultatifs du personnel
clinique des CSS du Québec
mme tremblay (marie-thérèse): bonjour, m. le
président. bonjour, m. le ministre, mm. les députés. mon
nom est marie-thérèse tremblay. je suis la coordonnatrice du
regroupement des conseils consultatifs du personnel clinique des centres de
services sociaux de la province. les conseils consultatifs...
Le Président (M. Joly): Excusez-moi, madame, est-ce que
vous pourriez présenter les gens qui vous accompagnent aussi?
Mme Tremblay: Oui. À ma droite, Mme Jeanne Blais du Centre
de services sociaux de Québec; à ma gauche, Mme Michèle
Brousseau, du Centre de services sociaux de Québec,
également.
Le Président (M. Joly): Alors, je vous rappelle que vous
avez une vingtaine de minutes ou moins pour la présentation de votre
mémoire et que, après, au loisir des deux formations, nous
pourrons vous poser des questions et aussi répondre à certaines
de vos questions. Merci.
Mme Tremblay: Merci. En tant que conseils consultatifs du
personnel clinique dans les établissements de services sociaux, nous
avons comme mandat de faire des recommandations au conseil d'administration des
établissements sur l'aspect scientifique et technique de la vie
professionnelle dans les établissements concernés. Alors, nous
sommes le regroupement de l'ensemble du personnel clinique des centres de
services sociaux du Québec, qui est affecté directement aux
services directs à la clientèle, à la recherche ainsi
qu'à l'enseignement. Le personnel clinique de ces établissements
doit effectivement détenir une formation collégiale ou
universitaire appropriée.
Notre objectif concernant cet avant-projet de loi est de nous assurer
que l'organisation et la gestion des services sociaux demeurent
orientées sur la dispensation de services de qualité aux
différentes clientèles du réseau. (12 heures)
Nous désirons particulièrement attirer l'attention du
législateur sur certains aspects du projet de loi: entre autres, nous
déplorons le fait que l'accent soit surtout mis sur la dimension
médicale des soins et que l'on demeure très vague en ce qui
concerne la notion de services sociaux; sur le choix que fait le
législateur en excluant totalement des conseils d'administration du
réseau des affaires sociales les professionnels du réseau qui
sont en contact direct avec les clientèles et des conséquences,
à notre avis, qui vont s'ensuivre; sur l'importance du rôle
permanent du directeur des services professionnels dans un établissement
de services sociaux et de sa responsabilité en ce qui concerne la
surveil- lance de la qualité des services professionnels dans ces
établissements; sur les droits des bénéficiaires à
des services de qualité, ainsi qu'à leur représentation
dans les établissements de services sociaux; sur l'importance de mettre
en place un recours en cas de litige entre les établissements.
En ce qui concerne la partie des dispositions générales du
projet de loi, nous recommandons au législateur de tenir davantage
compte des services à rendre auprès des clientèles des
différentes communautés culturelles.
En faisant référence au budget de recherche et
d'enseignement, nous recommandons que cet article soit libellé de la
façon suivante: "promouvoir la recherche et l'enseignement de
façon à répondre autant aux besoins sociaux qu'aux besoins
en matière de services de santé. "
En ce qui concerne l'évaluation des services, l'efficacité
devrait également inclure l'évaluation de la dimension de la
qualité des services professionnels rendus. Nous recommandons que le
volet clinique soit évalué par un expert clinique en approche
psychosociale et que le volet administratif, quant à lui, soit
évalué par un expert en gestion et en administration.
En ce qui concerne les droits à l'égard des services de
santé et des services sociaux, nous remarquons et nous nous
réjouissons du fait que le législateur souhaite que le droit aux
différents services soit plus général, mais
déplorons le fait que la deuxième partie de cet article vienne
restreindre l'énoncé et ce, en fonction du plan d'organisation de
l'établissement. Ces restrictions risquent, à notre avis, de
compromettre la mission de protection sociale des CSS, ainsi que la
qualité des services professionnels rendus. Finalement, nous constatons
une détérioration dans la crédibilité tant des
établissements de santé que de ceux de services sociaux face au
principe de l'universalité des services auxquels la population est en
droit de s'attendre d'eux.
Nous partageons l'avis du législateur sur le droit du
bénéficiaire d'être Informé. Malheureu sement, nous
constatons les déficiences actuelles dans la transmission de
l'Information auprès de la population sur les services disponibles. A
cet effet, nous recommandons que des mécanismes régionaux
d'Information auprès de la population soient prévus et
assumés par le regroupement des établissements.
En ce qui concerne le droit du bénéficiaire d'être
informé sur son état de santé, nous sommes en accord avec
le principe du droit à l'information, mais déplorons la
conception encore médicalisée des soins de santé et le
fait que l'on évacue presque la notion de soins de services sociaux.
Nous recommandons à cet effet l'application des mômes principes
cités à l'article 6 en ce qui a trait spécifiquement aux
services sociaux.
En ce qui concerne le droit de recevoir les soins que requiert son
état, nous sommes d'ac-
cord avec ce principe, sauf que nous constatons que la deuxième
partie du premier paragraphe de cet article vient en restreindre l'application
au domaine médical seulement. Nous recommandons que le libellé de
l'article élargisse son application également au domaine
social.
En ce qui concerne le droit de participer à son plan
d'intervention, nous sommes en accord avec le législateur sur le
principe suivant: tout bénéficiaire a droit de participer
à l'élaboration de son plan d'intervention tel que stipulé
à l'article 149 du présent texte de loi. Nous recommandons au
législateur que cet article soit libellé de la façon
suivante: tout bénéficiaire a le droit de participer à
l'élaboration du plan d'intervention qui le concerne tel que
stipulé à l'article 149."
En ce qui concerne les plans de services individualisés, nous
déplorons le fait qu'il n'existe pas, dans l'avant-projet de loi, de
mécanisme précis en cas de litige entre plusieurs
établissements concernés. À cet effet, nous recommandons
qu'un mécanisme précis de recours soit prévu et mis en
place dans le cas de litige entre les établissements
concernés.
En ce qui concerne l'accès au dossier, nous recommandons de
remplacer le terme "médecin traitant" par "professionnel concerné
ou le directeur des services professionnels de l'établissement en
l'absence de celui-ci".
Mme Blais (Jeanne): Concernant les conseils d'administration des
établissements concernés, le principe sous-jacent à la
nouvelle formation des conseils d'administration, ainsi que leur composition
proposées par le législateur dans son avant-projet de loi nous
laissent perplexes. Un conseil d'administration ainsi formé nous semble
peu représentatif et éloigné des préoccupations
liées aux services dispensés par les établissements du
réseau. Comment nous assurer alors que les besoins de chaque
catégorie de bénéficiaires seront rencontrés?
Nous sommes en désaccord avec le fait que le représentant
du personnel clinique ne siégera plus dorénavant au conseil
d'administration. Nous croyons que cela entraînera pour les conseils
d'administration la perte de l'expertise d'intervenants qui ont un contact
direct avec les bénéficiaires. Nous déplorons le fait que,
par cette absence, les autres membres du conseil d'administration ne soient pas
suffisamment éclairés sur tout ce qui concerne les aspects
cliniques de l'intervention. Nous recommandons donc qu'un représentant
du personnel clinique continue de siéger au conseil d'administration des
centres de services sociaux.
Concernant l'article 50.1°, nous recommandons également que
la définition de parents inclue non seulement les père et
mère, mais un membre de la famille immédiate.
Par la suite, il nous apparaît aberrant que les employés du
réseau des affaires sociales se voient refuser la possibilité de
siéger au sein d'un conseil d'administration. Nous recommandons que l'on
permette aux employés du réseau de siéger sur les conseils
d'administration d'établissements. Nous considérons, en fait, que
les droits de citoyens d'un employé de CSS sont indûment
limités par cette mesure, en particulier lorsque cet employé ou
un membre de sa famille immédiate est bénéficiaire de
services de santé ou de services sociaux.
Concernant le directeur des services professionnels, nous
déplorons fortement le fait que la fonction de directeur des services
professionnels devienne facultative au sein des établissements de
services sociaux et qu'elle soit dorénavant liée au plan
d'organisation de l'établissement. Nous recommandons au
législateur que la fonction de promotion et de contrôle de la
qualité des services professionnels rendus soit établie de
façon permanente dans tous les établissements de services
sociaux. Cette recommandation nous apparaît d'autant plus importante
qu'une forte proportion du personnel des établissements de services
sociaux n'est pas membre de corporations professionnelles. Alors, la fonction
de directeur des services professionnels nous apparaît nécessaire
pour garantir et assurer la promotion et le contrôle de la qualité
dans les établissements de services sociaux. Nous recommandons donc
qu'un directeur des services professionnels soit nommé dans tout centre
hospitalier, ainsi que dans tout centre de services sociaux.
Mme Brousseau (Michèle): En ce qui concerne plus
spécifiquement les CCPC, nous entérinons et nous appuyons le
principe d'un mandat élargi pour les CCPC. Nous recommandons au
législateur que le rôle des CCPC continue, tel que prévu au
projet de loi, d'être consultatif auprès du conseil
d'administration. Concernant la composition des CCPC à l'article 107,
quoique nous soyons favorables à l'augmentation des membres élus
de l'exécutif, c'est-à-dire à cinq membres au lieu de
trois, il ne faudrait pas que ce nombre devienne un carcan pour les petits
établissements. Nous recommandons, à cet effet, que la
composition de l'exécutif de chaque CCPC des établissements du
réseau des services sociaux comprenne au minimum trois membres
élus en plus du directeur général et du directeur des
services professionnels.
Concernant le comité de bénéficiaires à
l'article 115, nous tenons à faire remarquer au législateur que,
dans l'avant-projet de loi, il n'est pas prévu de comité de
bénéficiaires dans les établissements de services sociaux.
Nous recommandons donc que la loi prévoie l'existence d'un conseil des
usagers qui soit représentatif des clientèles dans les
établissements de services sociaux.
Pour terminer, nous résumerons quelques commentaires
généraux. Nous sommes d'avis que
le présent avant-projet de loi crée de la confusion en ce
qui concerne les missions respectives de chaque établissement du
réseau de la santé et des services sociaux. Nous
déplorons, de plus, l'absence de CCPC fonctionnels dans certains
établissements de services sociaux et ce, malgré le fait que
l'existence de ce corps constitué soit prévue par la lot actuelle
sur les services de santé et les services sociaux. Aussi, nous
souhaitons des efforts en vue de les implanter dans tous les CSS.
Nous tenons particulièrement à faire remarquer au
législateur que, dans le présent avant-projet de loi, la
dimension médicale prévaut largement sur la dimension
psychosociale que nous souhaitons voir reconnaître de façon plus
claire.
Bien que nous reconnaissions l'effort du législateur dans la
préparation du présent projet de loi, il nous apparaît
d'une importance cruciale que, pour une application efficace et efficiente de
cette loi, des ressources humaines, matérielles et financières
soient allouées pour assurer une véritable accessibilité
pour tous a des soins et à des services de qualité, y compris
à des services sociaux. Il nous apparaît aussi essentiel pour les
établissements du réseau de la santé et des services
sociaux que ceux-ci utilisent au maximum l'expertise de leur personnel clinique
à tous les niveaux de l'organisation.
Enfin, dans cette dernière ligne, nous vouions réaffirmer
qu'il est important de maintenir et de favoriser le rôle élargi
des CCPC et un maintien d'une représentation du personnel clinique au
conseil d'administration, car il constitue une reconnaissance, justement, de
l'expertise du personnel clinique dans les CSS. Merci.
Le Président (M. Gautrin): Maintenant, je vais demander au
ministre s'il peut prendre les 20 minutes pour essayer de vous poser quelques
questions.
M. Côté (Charlesbourg): Certainement, avec un grand
plaisir. Il y a un certain nombre d'éléments qui sont
soulevés dans votre présentation, sous forme d'interrogations,
qui méritent d'être questionnés un petit peu plus afin de
savoir véritablement où sont vos inquiétudes. Je
commencerais peut-être par la dernière page du mémoire,
"Commentaires généraux", au premier paragraphe. Vous dites: "Nous
sommes d'avis que le présent avant-projet de loi crée de la
confusion en ce qui concerne les missions respectives de chaque
établissement du réseau de la santé et des services
sociaux." Je suis un de ceux qui croient qu'effectivement il y a duplication de
certains services et qu'il faudra, autant que possible, tracer une ligne pour
qu'il n'y ait pas duplication et qu'on élimine la confusion. Mais ce que
je perçois de votre présentation, c'est qu'effectivement il y a
confusion et, pour ne pas percevoir les mauvaises choses, j'aimerais vous
entendre un petit peu plus et de manière plus spécifique sur cet
énonce-Jà.
Mme Brousseau: Nous pensons qu'il y a confusion
particulièrement, entre autres, au niveau des notions de fusion
d'établissements versus fusion de conseils d'administration. Nos
inquiétudes portent en partie sur ce niveau en particulier. On a
parié de fusion, par exemple, des centres de services sociaux avec les
centres d'accueil pour enfants, les centres d'accueil de réadaptation,
de CLSC avec d'autres types d'établissements. Nos inquiétudes
sont justement à ce niveau dans le sens qu'avec la poursuite du
parachèvement du réseau des CLSC il y a eu un certain nombre de
ces fusions-là qui ont été faites. Ce qu'on semble vouloir
faire avec le présent projet de loi, c'est étendre ces fusions de
conseils d'administration à l'ensemble du réseau, alors que nous
pensons qu'il n'y a pas eu vraiment une évaluation de tous les impacts,
bons et mauvais, d'un tel regroupement de conseils d'administration sur les
établissements concernés, parce que c'est une expérience
assez récente.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Ça
précise beaucoup mieux où était la confusion, parce que...
Oui, madame.
Mme Blais: J'aimerais ajouter un commentaire
complémentaire. Un autre domaine où il peut y avoir une confusion
dans la mission des établissements, je pense à la coordination
des ressources alternatives d'hébergement, qu'on nomme ressources
intermédiaires ou ressources de type familial dans l'avant-projet de
loi. Actuellement, la coordination des ressources alternatives à
l'institutionnalisation se retrouvait dans les mains des centres de services
sociaux. L'avant-projet de loi élargit cette dimension. Alors, où
se fera la coordination pour éviter une duplication? C'est un autre
point où il nous semble y avoir confusion.
M. Côté (Charlesbourg): Normalement, dans l'esprit
du législateur, c'était le niveau régional qui allait
faire les arbitrages, mais si ce n'est pas suffisamment clair, au moment
où on s'en parie, pour ceux qui sont sur le terrain comme vous, je pense
que ça va nécessiter certaines précisions.
Évidemment, on ne veut pas créer la confusion, on veut tenter de
délimiter de manière très claire et très nette les
rôles de chacun. (12 h 15)
Vous faites état de votre préoccupation quant à
l'absence des professionnels du réseau des conseils d'administration. Il
y a eu le même genre d'intervention la semaine dernière de la part
des médecins et de ceux qui sont passés en disant: Vous vous
privez d'une ressource exceptionnelle qui connaît bien son domaine et
qui
pourrait contribuer à de meilleures décisions au niveau
des conseils d'administration. Et ça, ça ébranle. Si
ça ébranle pour les médecins, ça ébranle
aussi pour les professionnels, donc de manière beaucoup plus large.
Donnez-moi donc la solution. Comment est-ce qu'on fait pour avoir un
conseil d'administration qui ne sera pas dominé... Là,
dominé, ce n'est pas la loi du nombre. A l'occasion - on l'a vu -
ça peut être le nombre, mais, dans d'autres circonstances, c'est
la présence très forte, compte tenu des connaissances, des
professionnels, de manière très large, sur un conseil
d'administration où vous risquez de noyer, d'épeurer des
bénéficiaires ou des gens qui sont élus par le public et
qui siégeraient au conseil d'administration.
Mme Tremblay: Je pense que, sur les conseils d'administration, il
y a un représentant du personnel clinique - en fait, que ce soit sur
celui d'un centre d'accueil ou de n'importe quel type d'établissement -
il y a un représentant du personnel non clinique, en tout cas, dans son
établissement particulier. Je ne crois pas qu'une personne puisse
arriver à prendre le contrôle. Maintenant, en ce qui concerne les
autres établissements du réseau, je pense qu'un employé
d'un centre de services sociaux du réseau peut siéger sur le
conseil d'administration d'un autre établissement et apporter son
expertise, apporter son expérience. C'est en tant qu'individu qu'il
siège.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Là-dessus, je
vous suis. Que quelqu'un qui fait partie d'une institution puisse aller
siéger sur un conseil d'administration d'une autre institution, moi, je
fais ce bout de chemin là. Maintenant - ce qui n'était pas
évident avant - compte tenu de l'expertise qu'il a, il n'est pas en
conflit d'intérêts sur le plan de la gestion quotidienne du centre
dans lequel il travaille. Mais, là où on en est, c'est davantage
dans l'institution où la personne travaille; sa connaissance des
dossiers fait en sorte que... Numériquement, c'est une personne, mais le
poids de tout le bagage qui est à la table (D.G., personnel clinique,
médecins) fait en sorte que - il faut bien l'admettre entre nous autres
- le reste qui numériquement est plus important, à l'occasion, ne
fait pas le poids. C'est un peu un rééquilibrage de ces
choses-là que nous voulions faire; rééquilibrer les
conseils d'administration pour faire en sorte qu'il y ait un véritable
débat et qu'il y ait des décisions, parce qu'il n'est pas
toujours évident qu'il y a une distinction entre qui mène et qui
décide.
Mme Tremblay: Quand on demande un représentant du
personnel clinique, je crois, à l'expérience, en tout cas pour
avoir vu ce qui se passait autour de moi, en particulier au CSSS de
Québec, que la dimension qui a été apportée par le
personnel clinique au conseil d'administration est une dimension qui
n'était pas présente, même si dans ce conseil
d'administration, il y avait d'autres gestionnaires du réseau. La
dimension de l'intervention clinique, l'aspect de l'intervention clinique que
le représentant du personnel clinique pouvait apporter à ce
niveau-là étaient un apport complémentaire qui n'allait
pas nécessairement dans le même sens que l'apport que pouvait
apporter un gestionnaire, d'une part.
Dans ce sens-là, je pense que ça peut apporter un
éclairage complémentaire et que, si les gens sont plus
informés, ils vont prendre des décisions plus judicieuses.
M. Côté (Charlesbourg): Je suis d'accord avec vous,
là-dessus. Expérience complémentaire qui vise à
mieux informer le conseil d'administration quant aux bonnes décisions
à prendre. Mais il faut dire que ce sont des présences de poids.
Et dans la mesure où vous êtes sur un conseil d'administration et
que vous voyez le président du CMDP qui est présent autour, le
directeur général de l'hôpital qui est là, pour
prendre cet exemple pour ne pas aller dans votre réseau, et que vous
ajoutez du personnel clinique autour de la table, je vous dis que la personne
qui représente les bénéficiaires doit se sentir petite
à l'occasion sur le plan de l'information ou sur le plan de la
connaissance des dossiers pour être capable de prendre des bonnes
décisions.
Et vous savez, les médecins ont une très bonne
crédibilité dans l'opinion publique. À partir du moment
où ils disent un certain nombre de choses au conseil d'administration,
c'est très important. Donc, la volonté qui était sous
ça, c'était d'en arriver à un certain équilibre des
gens en présence pour prendre des bonnes décisions.
Mme Brousseau: Si vous me le permettez, M. le ministre...
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
Mme Brousseau: ...nous, on vous parte principalement des
organismes du réseau des services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui, d'accord.
Mme Brousseau: C'est ce qu'on connaît et on peut
peut-être moins se prononcer. Ce qu'on a expérimenté, au
fond, c'est que le personnel clinique était finalement minoritaire sur
les conseils d'administration, alors qu'il n'y avait pas vraiment un danger de
noyautage. C'est pour ça qu'on souhaite, au contraire, que cette seule
présence soit maintenue, pour ce qui est du représentant du
personnel clinique. Et nous, on pense aussi que les employés
d'établissements
doivent pouvoir siéger au conseil d'administration, à
titre de bénéficiaires ou de représentant de
bénéficiaires. Je pense que, lorsqu'on endosse ce
chapeau-là, c'est bien sûr qu'on n'oublie pas notre formation
professionnelle, mais, en môme temps, je crois qu'on voit ça avec
d'autres yeux. Si on siège au conseil d'administration comme
bénéficiaire ou représentant de
bénéficiaires, c'est qu'on aura dû passer aussi à
travers l'étape de la nomination ou de l'élection à
l'assemblée des usagers qui aura le choix, à ce moment-là,
de choisir un membre du personnel qui est aussi un bénéficiaire
ou un simple bénéficiaire.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord. Mais vous aurez le
mandat des bénéficiaires, à ce moment-là.
Mme Brousseau: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Ça fait
différent. O.K. Mais de toute façon...
Mme Brousseau: Alors, ça touche quand même deux
articles.
Mme Tremblay: Ça n'enlève pas la
représentativité des bénéficiaires du tout.
Ça ne la touche pas.
M. Côté (Charlesbourg): non, mais je ne
m'inquiète pas des bénéficiaires. je vous le dis, c'est
toujours pour faire un équilibre des choses, pour permettre de
véritables discussions et décisions au niveau des conseils
d'administration. et le risque, c'est de noyer les bénéficiaires
et les autres personnes qui participent au conseil d'administration, qui n'en
font pas à plein temps et qui n'ont pas, forcément, toute la
formation et les connaissances pour être au même niveau que les
autres. c'est un peu ça et ça crée des situations
débalancées.
Le deuxième paragraphe de votre conclusion nous dit ceci: "Nous
déplorons l'absence de CCPC fonctionnels dans certains
établissements de services sociaux et ce, malgré le fait que
l'existence de ce corps constitué soit prévu par la Loi sur les
services de santé et les services sociaux actuelle." Est-ce que, par
ça, je dois comprendre qu'il n'y a pas de directeurs de services
professionnels dans tous les CSS ou, s'il y en a, que ça ne travaille
pas?
Mme Tremblay: Quand on parle de CCPC, on parle de conseil
consultatif du personnel clinique, ce qui est très différent du
directeur des services professionnels. Il y a un directeur des services
professionnels dans tous les établissements de services sociaux,
actuellement. O.K.?
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
Mme Tremblay: Ce qu'on déplore dans le deuxième
paragraphe, c'est que le corps constitué qu'est le conseil consultatif
du personnel clinique... Normalement, la loi de la santé et des services
sociaux prévoit qu'il y en ait un dans tous les établissements.
Ici, ce qu'on déplore, c'est que, malgré ce qu'en dit la loi, il
n'y en ait pas.
M. Côté (Charlesbourg): Qu'est-ce qui fait qu'il n'y
en ait pas?
Mme Blais: J'ai envie de vous répondre en vous disant,
chez nous, qu'est-ce qui fait qu'il y en a un. Alors, ça pourrait vous
donner certaines réponses.
M. Côté (Charlesbourg): Mais ce que je comprends,
c'est que ça va bien chez vous?
Mme Blais: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Alors, il faut essayer de
trouver là où il n'y en a pas et j'Imagine que quand vous les
représentez... Vous pouvez me dire exactement pourquoi il y en a un chez
vous, mais j'aimerais bien savoir pourquoi il n'y en a pas ailleurs.
Mme Blais: En fait, c'est que... Disons, je pense que ça
va répondre quand même à votre question...
M. Côté (Charlesbourg): Oui
Mme Blais: Lorsque je dis qu'il y en a un chez nous... Le CCPC au
CSS de Québec a toujours fonctionné, depuis environ quinze ans,
depuis la formation des CSS. C'est qu'il y a un intérêt de la part
du personnel pour les questions d'ordre clinique et professionnel et que cet
intérêt a été dissocié des
préoccupations de conditions de travail. Le CCPC, chez nous, a pris une
orientation où il se préoccupe des questions professionnelles et
cliniques et laisse aux instances syndicales les questions de conditions de
travail, d'une part. D'autre part, la direction a créé des
conditions un peu "facilitantes" en accordant une certaine libération de
tâche aux personnes qui se retrouvent sur l'exécutif du CCPC. Ce
n'est pas vrai dans tous les CSS. La volonté n'est pas aussi
marquée dans certains CSS.
Mme Tremblay: Au CSS Montréal métropolitain,
où je suis présidente du conseil consultatif, effectivement, nous
bénéficions de conditions, en tout cas, qui nous permettent
d'investir temps et énergie sur des dossiers professionnels, au niveau
de l'établissement. Je peux dire que la vie est assez dynamique et qu'on
nous appuie dans ce sens-là. Maintenant, effectivement, je pense qu'on
ie déplore, il a fallu faire le départage entre... Le CCPC n'est
pas une instance syndi-
cale. Je pense que c'est clairement compris. Je ne veux pas laisser
entendre par là que, là où il n'y en a pas, on peut
confondre les rôles. Je ne voudrais surtout pas créer de
confusion. On le déplore, on trouve ça malheureux parce que c'est
un instrument de travail qui permet la valorisation, la revalorisation de la
pratique, la remise en question de la pratique et aussi d'approfondir davantage
ce qu'on fait.
M. Côté (Charlesbourg): On a deux exemples où
ça fonctionne.
Mme Tremblay: II y a en a d'autres aussi... M.
Côté (Charlesbourg): O. K. Oui.
Mme Tremblay:... où ça fonctionne très
bien...
M. Côté (Charlesbourg): Bon!
Mme Tremblay:... qui ne sont malheureusement pas ici. Mais il y
en a d'autres.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord. Mais est-ce que je
dois comprendre de votre réponse - parce que madame de Québec me
disait: En vous donnant ma réponse, probablement que vous aurez la
réponse de ceux qui ne fonctionnent pas - qu'au coeur de tout ça,
c'est de la libération?
Mme Tremblay: Là où c'est très difficile
c'est là où le CSS couvre un territoire qui est très
large. Les gens sont obligés... L'exécutif du CCPC, les gens qui
veulent travailler au sein des comités n'ont pas d'allégement de
tâche pour pouvoir investir dans les dossiers du CCPC. Effectivement, je
pense que c'est un problème. Les gens le font. Ils disent: J'ai du
plaisir à faire ce que je fais là, mais quand je pense à
ce qui m'attend et au débordement que ça va supposer... Je pense
que ça ne facilite pas la tâche à tout le monde.
Mme Blais: Je pense que certains CCPC qui ont avorté,
aussi, historiquement parlant, ont relié de très près les
préoccupations syndicales, les préoccupations de conditions de
travail. Ça s'est déjà produit dans certains CSS.
M. Côté (Charlesbourg): Ça va, M. le
Président, pour le moment.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je vais
reconnaître le leader de l'Opposition et député de
Joliette, M. Chevrette.
M. Chevrette: Merci. Dans un premier temps, je voudrais faire un
commentaire sur la composition des conseils d'administration. Autant on
pourrait être porté à vouloir donner du pouvoir, entre
guillemets, aux bénéficiaires, sous prétexte qu'on tasse
les professionnels, autant on pourrait débalancer ce même
pouvoir-là en le donnant pratiquement totalement au D. G. C'est le seul
qui transmettrait l'expertise à ceux qui ne l'ont pas
nécessairement. A mon point de vue, on priverait même ceux
à qui on veut donner du pouvoir d'une expertise plus globale, plus
large. Je ne dis pas qu'il y a une formulé miracle. Mais, moi, je suis
personnellement ébranlé, même à la suite de ce que
les médecins nous ont dit là-dessus, de ce que vous nous dites.
Je pense qu'il faut trouver une formule où ceux qui ont à prendre
des décisions auront l'expertise globale. Si c'est par la
présence des professionnels, ils doivent être là, à
mon point de vue, quitte à ce que, dans la loi, ce soit très
explicite, à savoir que, si on traite d'un sujet spécifique
à leur catégorie de personnel, ils sont momentanément
exclus du conseil, si ça les touche.
On voit ça, par exemple, dans la loi sur les commissions
scolaires, à un moment donné. Si on traite d'un personnel
enseignant, on a le droit, pour des cas spécifiques, d'exclure des
individus, de régler le cas et de revenir avec une décision sans
pour autant qu'on ait touché à... Et ça m'apparaît
être une formule à rechercher plutôt que l'exclusion. Parce
que l'exclusion naïve pourrait avoir pour effet de donner un pouvoir
illimité à un D. G. qui a une seule orientation.
J'ai des exemples à la tonne, présentement, surtout dans
les centres de réadaptation, où un D. G. peut devenir
omnlpulssant avec son conseil d'administration. Il peut exclure à peu
près tous ces gens-là d'une expertise fondamentale, de ce qui se
passe dans sa propre boîte. Il peut même cacher à son
conseil d'administration les réalités vécues à
l'Intérieur de son centre et puis personne ne va s'en douter. Le pauvre
gars qui arrive, un assistant dans une caisse populaire, un autre bonhomme
plein de bonne foi, une femme qui travaille bénévolement et qui
est au conseil, ils n'auront jamais le son de cloche, par exemple, des
professionnels. Ils vont s'en référer exclusivement au D. G. Ce
n'est pas parce que tu es D. G. que tu as toujours la science infuse et la
vérité absolue. S'il y a des lacunes dans l'être humain,
c'en est un, lui aussi. Donc, moi, personnellement, je pense que les arbitrages
seraient mieux faits en présence des catégories de professionnels
et ça, quitte à ce qu'on précise davantage, à mon
point de vue, dans les législations, les statuts, quand ça les
touche explicitement dans leur travail. Je vous suis très très
bien. (12 h 30)
II y a une autre chose qui m'a amené à
réfléchir, tout en vous écoutant, Mme Tremblay, au
début. Vous devez être du Saguenay, Mme Tremblay?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: On a voulu, au ministère, depuis toujours,
en tout cas depuis 1974 - je n'ai pas vu de courant divergent là-dessus,
quelle que soit la formation politique qui était au pouvoir - garder
bien en évidence les deux missions du ministère de la
Santé et des Services sociaux, montrer qu'elles sont en
complémentarité et qu'elles ne se dissocient pas l'une de
l'autre. Il y a une interdépendance ou une interrelation du social
versus santé, si bien que, par exemple, je regardais les centres
d'accueil qui relevaient de la mission sociale du ministère
indépendamment du fait qu'avec l'alourdissement des clientèles il
y ait une forte portion santé. Mais, au moins, on a toujours senti cette
complémentarité-là. Et ça n'a été
remis en cause par aucune formation politique, même pas dans les
audiences de la commission Rochon; je n'ai pas senti cela, si ce n'est que
chacun dit: La santé, c'est bien important, mais le social, c'est bien
important. C'est normal, dépendant du secteur où l'on est, qu'on
prêche pour sa paroisse.
Tel que libellé, vous semblez mettre en doute - c'est là
que je veux vous entendre - la volonté de mettre en évidence
toute la dimension sociale par rapport à l'approche santé, parce
que vous parlez souvent du médical, médical, médical.
Comment verriez-vous concrètement, dans un établissement de
santé, la présence de la dimension sociale des choses? Par
exemple, en toxicomanie, en alcoolisme, il y a des professionnels cliniques qui
travaillent énormément pour assurer une
complémentarité précisément à la section
médicale. Mais est-ce que vos gens vous disent qu'ils ont
véritablement leur place? Sont-Ils partie intégrante? Est-ce que
les directions hospitalières, les administrations ont ce souci
d'impliquer dans toutes les démarches du traitement global les
professionnels que vous représentez?
Mme Tremblay: Dans le milieu hospitalier, dans la pratique, je
pense que le travailleur social, dans les différents secteurs d'un
hôpital, a sa place. Les travailleurs sociaux, dans les milieux
hospitaliers en tout cas, sont très conscients et sont très
préoccupés non seulement qu'on la reconnaisse, mais aussi de la
prendre. Je pense qu'on est préoccupé... Quand on dit que
l'accent est mis surtout sur... c'est au niveau des énoncés,
c'est au niveau de la philosophie du projet de loi. On pense que c'est aussi
important... On dit, à un moment donné, qu'évidemment
c'est important qu'il y ait au niveau des ressources humaines... Ça
Implique qu'il devra y avoir des ressources humaines supplémentaires. Je
pense qu'il n'y a qu'à regarder la lourdeur des dossiers qui est de plus
en plus évidente dans les services sociaux.
Je ne voudrais pas qu'on mette en parallèle les hôpitaux
par rapport aux services sociaux. On sait qu'il se fait des choses là,
mais, quand on parle de services sociaux, on parle de prévention, de
mettre l'accent du côté préventif au lieu d'investir du
côté curatif. En tout cas, nos nombreuses années de
pratique nous amènent à réfléchir sur le fait que,
quand on investit du côté de la prévention, quand on est
capable de répondre aux besoins des gens, on peut constater qu'au bout
de la ligne, finalement, les gens sont moins malades, les gens vont aller moins
chercher les soins dans le mileu hospitalier. Ils sont plus autonomes, Je pense
que, dans ce sens-là, on souhaite que l'accent soit mis sur des fonds,
évidemment, mais aussi sur des moyens pour qu'on puisse davantage faire
du travail de prévention.
Mme Blais: J'aimerais ajouter un commentaire
supplémentaire. En milieu de santé, effectivement, les
professionnels en service social prennent leur place dans des équipes
multidis-ciplinaires. Ils prennent de plus en plus leur place, effectivement,
et ce n'est pas nécessairement questionné. Les hôpitaux et
les directeurs des services professionnels des hôpitaux tiennent compte
de la présence et du point de vue des intervenants sociaux en milieu de
santé. Quand on souligne que c'est un peu sous-estimé dans
l'avant-projet de loi, c'est que, de façon globale, lorsqu'on parle de
recherche, on parle davantage de recherche médicale et non pas de
recherche sociale; lorsqu'on parle d'accès aux dossiers, on dit: On va
tenir compte de l'opinion du médecin traitant. Chez nous, il n'y a pas
de médecin traitant et le professionnel concerné devrait pouvoir
avoir droit de parole de la même façon. En fait, dans les
énoncés de principe, c'est comme si on mettait en veilleuse ou
qu'on oubliait un peu la dimension de l'intervention psychosociale, en
particulier en CSS. Ce n'est pas nécessairement en milieu de
santé, puis je pense que, cet après-midi, vous allez avoir
l'occasion de rencontrer l'Association des praticiens de service social en
milieu de santé. Ils pourront vous donner plus de détails sur
leur place en milieu hospitalier.
M. Chevrette: Mais prenons la santé mentale.
Mme Blais: Oui.
M. Chevrette: En santé mentale, on en a entendu, je pense,
pendant quatre ou cinq semaines, je ne sais pas - ça ne fait pas
tellement longtemps, il y a deux ans - sur le rapport Harnols. On a
parié des équipes multidlsciplinai-res. Chaque groupe est venu
dire, à toutes fins pratiques, qu'il ne savait pas quelle place il avait
dans ça ou que ce n'était pas assez précis et puis
ça risquait purement et simplement, s'il n'y avait pas de
définition des tâches, de flopper, à toutes fins pratiques.
Pourtant, ce sont des professionnels. Qu'est-ce que ça prend, là,
pour déclencher le processus naturel de l'acceptation de la
complémentarité par les groupes? Qu'est-ce
que ça prendrait, d'après vous?
Mme Blais: Pourtant, on a constaté des endroits où
ça fonctionne bien; je pense, par exemple, aux collaborations qui sont
établies - vous parlez en santé mentale - au centre hospitalier
Robert-Giffard avec les équipes du centre de services sociaux. Il y a
environ une trentaine de professionnels du centre de services sociaux de
Québec qui sont au centre hospitalier Robert-Giffard et il y a une
collaboration étroite d'établie parce qu'il y a eu des contrats
de services qui se sont négociés entre le CSS et l'hôpital.
Là, je parle encore des endroits où ça fonctionne
bien.
On constate, par contre, aussi en santé mentale, lorsqu'on a des
intervenants qui sont affectés au suivi des personnes majeures en perte
d'autonomie, des personnes qui sont placées en famille d'accueil, que,
lorsque cette personne-là est suivie dans une famille d'accueil du CSS
et qu'il n'y avait pas de liens particuliers avec un hôpital
psychiatrique, c'est très difficile d'obtenir une collaboration d'autres
établissements lorsqu'il y a une situation de crise qui éclate
pour un bénéficiaire en famille d'accueil. C'est dans ce
sens-là qu'on vous a mentionné l'importance d'établir un
mécanisme de coordination régionale et que ce mécanisme
ait une réelle autorité pour régler des litiges
interétablissements. Parce que, pour nous, quand on parle, on constate
que la situation, par exemple, du suivi des personnes âgées et des
personnes majeures, que ce soient d'ex-patients psychiatriques ou des
déficients mentaux, qui se retrouvent en famille d'accueil est
très lourde actuellement dans les centres de services sociaux parce que
les intervenants sont surchargés. La qualité des services offerts
est môme questionnée. Qu'est-ce qu'on voit comme solution?
Évidemment, il pourrait y avoir un ajout d'effectifs, mais on voit aussi
une meilleure collaboration interétablissements qui est
particulièrement déficiente.
M. Chevrette: Une question de tout autre ordre. Comment
voyez-vous l'arrimage entre les CSS et l'action communautaire?
Mme Tremblay: Je vous dirais que les CSS et l'action
communautaire ont déjà été arrimés. Lorsque
j'ai commencé à travailler au centre de services sociaux, il y
avait du personnel embauché par les centres de services sociaux qui
était affecté strictement au communautaire. Il y avait des postes
d'animateurs communautaires qui sont tous disparus. Et, bon, je pense qu'il y a
déjà eu des préoccupations. Il y a...
M. Chevrette: Est-ce à dire qu'il n'y en a plus à
cause du manque d'effectifs ou s'il devrait y en avoir? C'est un peu
ça.
Mme Brousseau: Je pense que la mission des centres de services
sociaux, depuis le partage des effectifs entre les CSS et CLSC...
Effectivement, les services communautaires ont été
transférés pour ce qui existait dans les services sociaux dans
les CLSC. De fait, on peut le comprendre, puisque les CLSC sont plus des
services de première ligne, alors que nous, on est des services plus
spécialisés et de deuxième ligne. Alors, dans ce
sens-là, on ne dit pas que ce n'est pas important. Je pense qu'il peut y
avoir des collaborations intéressantes pour certaines clientèles,
mais peut-être via aussi les CLSC.
M. Chevrette: Je vais y aller sur un exemple précis. On
sait qu'il y a des ressources communautaires qui offrent, par exemple, la
possibilité d'hébergement, puis c'est complètement
indépendant. Dans certains cas, c'est même indépendant des
CLSC. C'est une ressource qui est née du milieu, puis qui se
subventionne à la va comme je te pousse parce qu'il n'y a pas de
politique de financement pour les organismes communautaires. C'est du
discrétionnaire ou, en tout cas, décidé annuellement ou
à peu près. Ça a toujours été de même
depuis bon nombre d'années. Cela dit, il y a beaucoup de travailleurs
sociaux qui suivent les bénéficiaires. Est-ce qu'il y a des
discussions qui se font assez facilement avec les organismes du milieu? Est-ce
que c'est vu d'un bon oeil qu'il y ait des parties de prévention qui
soient faites par ces ressources alternatives?
Mme Brousseau: Lorsqu'on arrive à la clientèle des
services sociaux, qu'il s'agisse de l'enfance ou qu'il s'agisse des adultes ou
des personnes âgées, on parle rarement de prévention ou, en
tout cas, de prévention à un troisième niveau. Lorsqu'il y
a des collaborations, parce qu'il y en a... Je pense à des ressources
comme la maison hébergement jeunesse ou, encore, à
différentes ressources de popotes roulantes ou à des choses comme
ça pour les personnes âgées. Je pense qu'il y a
effectivement des collaborations, mais ce n'est pas à un niveau de
prévention. Si c'est de la prévention, c'est prévenir une
détérioration plus grande des conditions des gens avec lesquels
on travaille à cause de nos clientèles spécifiques. Mais,
je pense qu'il y a des collaborations compte tenu des ressources existantes et
compte tenu, peut-être aussi, des ressources limitées des
organismes dans lesquels on oeuvre.
M. Chevrette: Au niveau scolaire, du fait qu'il y ait eu partage
des effectifs entre les CSS et les CLSC, est-ce que les postes ont
été maintenus depuis quelques années pour les
personnes-ressources en milieu scolaire?
Mme Tremblay: En service social scolaire? M. Chevrette:
Oui.
Mme Tremblay: Les postes sont encore là, oui.
Mme Blais: La réalité n'est pas pareille partout. A
Montréal, oui; à Québec, non. Toutes les ressources en
service social en milieu scolaire ont été
transférées aux CLSC au niveau de la région 03. Je sais
que, pour la région de Montréal, c'est différent. Pour les
autres CSS, je ne pourrais pas vous donner de précisions sur comment
ça a été fait exactement.
M. Chevrette: Pour le moment, je vais laisser mon ami, M. Holden,
y aller. Il n'a pas abusé du temps de la commission.
M. Holden: Merci, M. le Président, et merci, M. le leader
de l'Opposition. Mesdames, il y a une recommandation, que vous faites au tout
début, qui m'Intrigue. Vous recommandez "au législateur de tenir
davantage compte des services à rendre auprès des
clientèles des différentes communautés culturelles."
Ça m'intrigue parce qu'à mon point de vue, si jamais le ministre
a le courage ou l'insensibilité de faire revenir cet avant-projet comme
loi tel que rédigé actuellement, les grands perdants vont
être les institutions minoritaires de langue anglaise et des
communautés culturelles. J'aimerais bien que vous nous expliquiez un peu
pourquoi vous avez fait cette recommandation et, au Juste, comment vous voyez
le traitement des communautés culturelles à l'intérieur de
cette loi.
Mme Blais: Quand on se réfère aux
communautés culturelles, c'est, je pense qu'on constatait qu'il y avait
en particulier dans la région de Montréal, une très grande
diversité ethnique. On nous soulignait, entre autres, que, quand des
jeunes se retrouvent en centre d'accueil, via le CSS Ville-Marie, une
unité de vie dans un centre d'accueil pour adolescents, c'est à
peu près la Société des nations tant il y a de
diversité culturelle.
Il y a cette réalité et il y a aussi la
réalité du milieu autochtone. Quand on se retrouve dans la
région de la Gaspésie, sur la Côte-Nord, dans
l'arrière-pays, au centre-Québec et en Abitibi, les intervenants
sociaux ont à composer avec le milieu autochtone. Ce sont ces deux
dimensions, le pluriculturalisme de la région de Montréal et le
multiculturalisme aussi, compte tenu des autochtones, qu'on a voulu rappeler
à ce niveau.
M. Holden: est-ce que vous verriez un traitement différent
des communautés culturelles surtout, disons, à montréal
qu'à d'autres endroits à travers la province?
Mme Tremblay: L'aspect sur lequel on s'est arrêté
concernant les communautés culturelles, je pense que c'est de nous
assurer qu'elles soient desservies, mais aussi qu'on soit sensible à
répondre adéquatement à leurs besoins. Évidemment,
on n'a pas... Je pense que l'aspect des ressources du côté
anglophone, francophone... En tout cas, on a évité d'aller
très loin dans cet aspect-là parce que c'est un aspect qui est
très politique, finalement, et on n'a pas voulu entrer dans ce
débat-là.
M. Holden: II y a déjà eu des discussions
politiques là-dessus. C'est vrai, madame. Merci.
M. Chevrette: Oui, et il va y en avoir encore aujourd'hui.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Westmount. Je vais reconnaître le député de Joliette et
leader de l'Opposition, M. Chevrette.
M. Chevrette: Moi, je sais que vous avez peut-être
refusé de faire la discussion, mais le député vient de me
donner une occasion d'en faire un petit bout de discussion. Je ne voudrais pas
que les propos du député qui m'a précédé
soient interprétés comme étant exacts. Je vais vous dire
pourquoi. Quand il dit que c'est au détriment de la minorité, au
niveau des CSS, je m'excuse, mais, s'il prend comme exemple Montréal,
avec tout le respect que je dois au député et à son parti,
c'est faux. Tellement faux que c'est disproportionné par rapport
à la majorité. Regardez les budgets du CSSVM par rapport à
ceux du CSSMM et vous allez voir qu'il y a une surbudgétisation et que
ça n'a pas changé depuis 1985. Il y a une surbudgétisation
au CSSVM par rapport au CSSMM, précisément parce que la notion
territoriale a joué énormément. VM s'est donné une
mission non seulement montréalaise, mais périphérique et
le gouvernement, quel qu'il soit, péquiste comme libéral, a
toujours accepté que cette, dimension soit considérée et
conservée. Mais, par rapport aux besoins, MM est
sous-budgétisé par rapport à VM. Plus que ça, on a
même conservé sur l'île de Montréal... Il faut
arrêter de dire, là... Moi, je ne veux pas avoir l'air
"quétaine" vis-à-vis des minorités. Même, dans le
partage, le CSS juif a été gardé intact sous
prétexte qu'il y avait la dimension religieuse culturelle dedans.
Arrêtons de diminuer la collectivité face à ces
minorités, bon Dieu! Il n'y a pas un pays, il n'y a pas un gouvernement
qui a affiché par tradition autant de générosité
dans tous les secteurs: éducation, santé, services sociaux. Il
faut toujours bien arrêter de se faire accuser! On a l'air de
"quêtâmes". On se laisse dire ça à une table ici,
alors que la réalité est tout autre. Moi, je ne veux pas engager
une polémique et une engueulade. Mais il y a au moins des choses que le
peuple a le droit de savoir et si on veut projeter l'image d'un Québec
"quétaine", "cheap" vis-à-vis de ses minorités, je
regrette, mais moi, je ne le tolérerai pas deux minutes, de qui que
ce soit. Au contraire, je pense qu'on a fait la preuve par le
passé... Et ça, j'ai pris la peine de le dire, non seulement
d'une formation politique, de toutes les formations politiques... On a toujours
eu énormément de sensibilité là-dessus et je vous
avoue, surtout parce que j'ai vécu... Comme ministre de la Santé,
je sais ce qu'on a attribué aux CSS, je sais ce qu'on a attribué
à certains CLSC, je sais ce qu'on a attribué aux centres
hospitaliers et dans le domaine de l'éducation. Quand on a
été sur un Conseil des ministres, on sait ce qu'on consacre. Il
faut arrêter de dire qu'on n'est pas généreux; c'est le
contraire. On est un peuple généreux et on doit en être
fier de notre générosité. Mais, de grâce, ne nous
minons pas par l'intérieur.
M. Holden: Si vous me le permettez, M. le Président...
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Joliette. M. le député de Westmount, vous avez un droit de
réplique de quelques minutes seulement.
M. Holden: Oui, oui. Ce ne sera pas long, M. le Président.
C'est toujours la même question qui est posée de façon un
peu, si je peux dire, mesquine, parce qu'on parie toujours de la
générosité de la collectivité envers la
communauté anglophone. On n'admet jamais que la communauté
anglophone et les communautés culturelles ont créé leurs
propres institutions et ont financé leurs propres institutions. On n'a
rien demandé au gouvernement pour créer notre système
public de santé et de services sociaux. Quand le gouvernement a
décidé que c'était l'État qui allait mener
ça, on avait déjà notre réseau d'institutions. On
continue à les financer avec nos propres impôts et on les finance
en dehors des impôts.
Quand vous dites - c'est toujours la môme rengaine - on est la
communauté ou le pays, ou si on veut en parier, la nation qui est la
plus généreuse envers sa minorité, la minorité ici,
on n'a pas demandé de donations. On paie nos impôts, on a
créé nos institutions. On a fait une élection
là-dessus récemment, M. le leader de l'Opposition, et on a eu
entre 150 000 et 200 000 votes là-dessus. Alors, on ne traite pas la
majorité de "cheap" ou de pas généreuse; on n'a pas
demandé la générosité. On veut notre part, on veut
être traités comme des égaux, c'est tout ce qu'on
demande.
Les dames parlent ici de tenir compte davantage des différentes
communautés culturelles. C'est vrai, avec la régionalisation et
les "super boards", on va oublier les communautés culturelles. Il y aura
des "boards" avec une quinzaine de membres et un représentant de la
communauté minoritaire. On ne demande pas de
générosité, M. le leader; on demande nos droits.
Merci.
Le Président (M. Joly): Merci. Les différents
points de vue ayant été exprimés, je crois
comprendre...
M. Chevrette: Ce n'était pas relatif à votre
mémoire.
Le Président (M. Joly): Comme mot de la fin, je me dois de
remercier les membres qui se sont présentés ici, devant nous.
Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures pour entendre
l'Association des praticiens de service social en milieu de santé du
Québec. Mesdames, merci beaucoup, bon retour.
Une voix: À tantôt.
Le Président (M. Joly): À tantôt. C'est
ça. (Suspension de la séance à 12 h 52)
(Reprise à 15 h 9)
Le Président (M. Joly): Nous allons maintenant reprendre
nos travaux. Je demanderais aux représentants de l'Association des
praticiens de service social en milieu de santé du Québec de bien
vouloir prendre place, s'il vous plaît. Bonjour, mesdames.
Une voix: Bonjour.
Le Président (M. Joly): je demanderais à la
personne responsable d'identifier les gens qui l'accompagnent et de
s'identifier elle-même, s'il vous plaît.
Association des praticiens de service social en milieu
de santé du Québec
Mme Saint-Denis (Johanne): Bonjour, mesdames et messieurs de la
commission. Nous serons trois aujourd'hui à vous présenter notre
mémoire. Je suis Johanne Saint-Denis, présidente de l'Association
et chef de service social hospitalier aux hôpitaux Charles-LeMoyne et
Pierre-Boucher. À ma droite, Mme Colette Lambert, qui est
vice-présidente de l'Association et praticienne sociale en psychiatrie
externe à l'hôpital Saint-Luc, et, à ma gauche, Mme Maude
Mercier, qui est membre de notre association et qui est praticienne sociale en
milieu de santé, en psychiatrie, à l'Hôtel-Dieu de
Lévis à Québec.
Le Président (M. Joly): Merci. Je vais
répéter pour le bénéfice de tout le monde. C'est
que vous avez une vingtaine de minutes, plus ou moins, pour présenter
votre mémoire. Par après, on se réserve une période
de questions. Le temps est dévolu en parts égales aux deux
formations tant du côté ministériel que de l'Opposition.
Alors, à vous, madame, la parole et à celles qui
vous accompagnent.
Mme Saint-Denis: Pour débuter, nous voudrions
témoigner notre reconnaissance à la commission qui accepte de
nous entendre comme praticien qui oeuvre comme professionnel social dans le
milieu de santé au Québec. Comme on vous l'a dit dans notre
mémoire, notre association existe depuis 20 ans. Nos membres sont
présents dans l'ensemble des hôpitaux de la province de
Québec et nos membres sont au service de la personne, de la famille et
du milieu significatif de cette personne en situation de perte d'autonomie due
à la maladie. C'est donc dire que notre action en tant que praticien
social porte, depuis fort longtemps, sur 1'indMdu et sur son milieu. En
d'autres mots, notre créneau, comme praticien, se situe à la
Jonction du médical et du social. Que ce soit en amont ou en aval de la
maladie, nous sommes là pour promouvoir, restaurer, maintenir
l'équilibre dynamique entre l'individu et son environnement dans un
contexte de maladie physique et dans un contexte de maladie mentale aussi.
A titre d'exemple pour vous expliquer quel est notre créneau,
notre jonction, on a pris comme exemple un foyer, une famille dans laquelle il
y a des problèmes d'alimentation. L'alimentation est déficiente
à cause de l'alcoolisme du père ou de la mère ou à
cause d'une situation de pauvreté dans laquelle cette famille-là
se retrouve. On sait que cette personne peut se prévaloir des services
de santé, éventuellement, pour ses enfants, pour des
problèmes de croissance ou encore de rachitisme. Alors, à ce
moment-là, quand l'enfant arrive à l'hôpital, nous sommes
là pour identifier les facteurs précipitants expliquant la
maladie. Ce sont des facteurs psychosociaux qui ont créé la
situation actuelle dans laquelle l'enfant se retrouve, ou encore, dans le cas
de la sclérose en plaques, la maladie elle-même produit un
changement et nous avons à intervenir à cause de ces changements,
concernant la situation financière, la situation conjugale, la situation
familiale, l'organisation de vie de cette personne-là.
S'il est vrai que notre intervention porte sur l'individu, sa famille,
son milieu, il est aussi vrai que notre Intervention porte sur le milieu
hospitalier, comme tel, parce que le milieu hospitalier est l'endroit où
le bénéficiaire est en Interaction pendant le temps où II
est en perte d'autonomie. À un autre niveau, on est aussi
présents en ce qui concerne l'équipe multkJis-ciplinaire, et
notre intervention va dans le sens de représenter le social dans
l'équipe multklis-ciplinalre. Nous pouvons dire aujourd'hui qu'en termes
de primauté de la personne, de partenariat ou de
complémentarité nous avons, de par notre position, depuis une
bonne dizaine d'années, la pratique de ce contexte et de cette
philosophie.
Notre association est présente, aujourd'hui, pour vous parier des
besoins de la clientèle aux prises avec la maladie et des besoins des
praticiens sociaux qui travaillent dans un contexte, dans une structure, avec
des ressources pour répondre à cette clientèle avec les
standards de qualité requis.
Dans notre mémoire, on vous dit que nous sommes d'accord avec vos
objectifs, d'autant plus que le dénominateur commun, pour l'ensemble du
réseau, est la personne et que les objectifs confirment que ceux qui
composent le réseau, les différents établissements, les
différents partenaires ont raison d'être là, à la
condition que ce soit dans une perspective de continuité et/ou de
complémentarité. Alors, nos objectifs et vos objectifs sont
très compatibles.
Au niveau de la protection des droits, par contre, on assiste, depuis
plusieurs années, à ce phénomène qui est visible
à travers les "ombudsperson", les représentants des usagers, les
comités de bénéficiaires, les CCPC, les comités
d'éthique. On a vu que cette préoccupation s'était
déjà installée depuis quelques années. C'est un
principe louable, mais on voit deux types d'embûche possibles à ce
qu'on confirme cette protection des droits. Un, c'est que les
établissements deviennent légalistes dans leur application
à cause de plaintes portées contre eux, contre leurs
professionnels. On peut peut-être vous citer un exemple dans notre
pratique. Un an auparavant, une signature d'un des deux parents était
manquante, à une demande de placement d'enfant... Maintenant, on en fait
une règle: si les deux parents ne signent pas le document, on ne peut
pas procéder. Alors, on dit: II faut faire attention pour ne pas tomber
dans cette embûche.
Ensuite, on parle de l'autre type d'embûche qui est dû
davantage à la situation dans laquelle, nous, comme praticiens, on se
retrouve. On est aux prises avec une clientèle qui, dans les faits, a
une bonne relation avec nous, nous confirme dans l'aide possible qu'on peut lui
apporter. Mais nous sommes confrontés, la clientèle et nous,
à une difficulté d'accessibilité et à un manque de
ressources. Alors, c'est irritant pour la personne qui se volt, en fin de
compte, sans réponse à ses besoins.
Au niveau de l'accessibilité et du manque de ressources, nous
avons remarqué, comme association, que depuis, je dirais, cinq ans nous
assistons à la création de différents comités: les
comités de placement, les comités d'orientation et d'admission
pour les gens qui doivent s'en aller en ressources institutionnelles, les
comités pour les transports adaptés et les comités pour
les fonds auxquels les praticiens doivent s'adresser pour recevoir
l'autorisation d'obtenir ce type de services.
Nous trouvons que le projet de loi... Il est important pour nous qu'il y
ait un palliatif au manque de ressources et que les services auxquels a droit
la population soient priorisés et
soient donnés dans des délais décents pour eux, ce
qui viendrait peut-être éviter une surcharge au niveau de
plaintes, qui, dans le fond, sont irrecevables parce que ce n'est pas en
fonction d'une mauvaise pratique.
Le projet de loi propose aussi des objectifs qui mettent la personne au
centre des préoccupations et qui ont comme philosophie
l'amélioration et l'augmentation des services donnés. Toutefois,
les moyens proposés sont surtout de l'ordre d'une restructuration
organisationnelle. Si, pour améliorer et augmenter les services, il faut
réformer la structure, on est d'accord, mais il faut aussi s'assurer que
cette nouvelle structure n'empêche pas l'opérationnel ou encore
n'augmente pas les paliers décisionnels en plus d'augmenter très
souvent les frais indirects et nous pensons à la CTMSP qui est le
système de placement en milieu institutionnel. Auparavant, les CSS
géraient ce type d'admission, maintenant ce sont les conseils
régionaux, on a changé de structure. Nous avions deux
intervenants techniciens à l'époque, trois ans après, on
se retrouve avec quatre universitaires qui, maintenant, utilisent des
professionnels de différents établissements pour former leur
comité. Ce sont des frais que les établissements doivent payer
indirectement pour opératio-naliser un service.
On vous parle aussi du plan de services individualisé. Ce n'est
pas une nouveauté, on en a parlé lors de la politique en
santé mentale. Ce qu'on voudrait surtout dire aujourd'hui, c'est que ce
moyen, on y croit, pour une clientèle ciblée, pas pour l'ensemble
de la clientèle, comme un moyen d'intervenir et d'être partenaires
concertés avec les gens. Ce qu'on veut aussi dire, c'est que le PSI, ce
n'est pas une mesure d'économie. Au contraire, à l'heure
actuelle, on manque d'effectifs pour donner les services réguliers, je
dirais. Il faut donc s'assurer, avant d'implanter un tel type d'outil, qu'on a
les ressources financières et les ressources humaines suffisantes.
Au niveau de l'organisation de l'ensemble des établissements, on
voudrait surtout Insister sur l'importance pour nous que le ministère
prenne des risques, fasse confiance et voie les résultats plutôt
que de systématiser à outrance. Alors, quelquefois pour des
solutions locales, régionales ou sous-régionales dans lesquelles
des partenaires s'avancent à l'intérieur d'un projet, il ne
faudrait pas que la systématisation empêche
l'opératlonallsatlon.
On voudrait aussi constater que l'avant-projet de loi oblige un
changement de mentalité et force la synergie. Et je dois vous dire ce
que ça me rappelait, en thérapie familiale, à un moment
donné, une mère s'est adressée à moi en me disant:
Je voudrais que vous nous aidiez et je souhaiterais que mon fils soit
spontané. J'ai dit: Madame, la spontanéité, ça ne
se commande pas. Si vous me disiez: Est-ce que mon fils pourrait être
attentif, pourrait être intéressé à, je pourrais
travailler avec vous et, à court terme, je pense qu'on pourrait avoir
des résultats. Mais, si vous me demandez de commander la
spontanéité de votre fils, on va en avoir pour 20 ans et on va en
parler encore dans 20 ans.
On a aussi relevé le danger à l'intérieur de
l'avant-projet de loi que les rassemblements d'établissements à
un même conseil d'administration coupent les communications entre les
directeurs généraux d'un établissement qui vont être
présents au conseil d'administration, en tant que secrétaires,
qu'une fois par quatre, cinq ou six ans, dépendamment du nombre
d'établissements regroupés. Nous, on voudrait vous
suggérer davantage d'amplifier les communications entre les conseils
d'administration et les directeurs généraux plutôt que de
les contingenter. On voudrait aussi dire que les employés du
réseau devraient, à notre avis, être présents dans
d'autres établissements que les leurs, aux conseils d'administration de
leur région. On trouve très restrictifs les articles qui
enlèvent la possibilité aux employés de réseau
d'être présents aux conseils d'administration.
Il y a aussi une question concernant l'organisation des
établissements que l'Association s'est posée. Elle est
plutôt de l'ordre de l'attribution des budgets. Alors, on se dit:
À l'heure actuelle, on veut décentraliser, ce sera les
régies régionales. Est-ce que l'attribution des budgets par les
régies sera donnée aux établissements par enveloppe
réservée? Déjà, nous vous donnons tant d'argent
pour liquider tels problèmes que vous avez identifiés, dans tant
de temps, on révise, etc. On trouve que, si oui, ça enlève
une latitude opérationnelle d'autant plus que la structure fond
plusieurs établissements ensemble. Alors, ça serait, je pense,
dangereux que les régies régionales gèrent directement les
établissements et que le directeur général se retrouve
à avoir déjà tout décidé d'avance comment il
va allouer ses budgets.
On a aussi, en termes d'organisation, relevé dans notre
mémoire un vide pour les services sociaux aux adultes et aux personnes
âgées. Nous parlons, à ce moment-ci, des services sociaux
spécialisés. On a connu, en termes d'appartenance, avant la
réforme Castonguay-Nepveu, l'emprise du médical sur le social. On
appartenait à la structure hospitalière et, à ce
moment-là, on relevait d'elle. Depuis la réforme, en vertu de
notre appartenance aux CSS, nous sommes maintenant des partenaires du
réseau à l'Intérieur des hôpitaux et nous sommes des
services sociaux spécialisés davantage régionaux que
locaux. Il est important pour nous que nous soyons regroupés à
l'intérieur d'un établissement à vocation régionale
et que cet établissement soit clairement mandaté en ce qui
concerne les personnes âgées et les adultes. Nous tenons à
maintenir des standards de qualité et nous tenons aussi à ne pas
être morcelés dans différentes structures.
Au niveau de la privatisation, nous avançons dans notre
mémoire notre accord à l'ouverture vers la privatisation des
hébergements pour personnes âgées, mais nous voulons
protéger la clientèle la plus vulnérable et nous assurer
qu'une réglementation suivra et que les personnes les plus
vulnérables ne se retrouvent pas dans un secteur privé pour
rapporter temporairement des fonds aux ressources privées et, quand
elles deviendront davantage malades, qu'on les renvoie au public via les
urgences.
En termes de privatisation aussi, nous voudrions éviter que
soient réservés les services privés à
l'élite et que les services publics se retrouvent avec une
pénurie de spécialistes ou de gens dits de services sociaux
spécialisés. Pour ce qui est du ticket modérateur, on
pense aussi que l'accessibilité à la clientèle la plus
démunie qui vit dans des conditions environnementales précaires
peut faire que cette personne se retrouve dans le réseau de santé
seulement au moment où elle est en situation aiguë et
peut-être môme précaire pour elle à ce moment.
Au niveau des organismes communautaires, on est contents que
l'avant-projet de loi confirme la complémentarité et reconnaisse
les organismes communautaires dans la vocation de support à la
communauté et d'entraide à la clientèle qui est en
première ligne.
En termes de conclusion, le ministère de la Santé et des
Services sociaux est, à notre avis, de bonne foi et vise vraiment
l'amélioration du système actuel. Toutefois, comme praticiens
sociaux de l'extérieur, nous nous interrogeons quelquefois à
savoir si la main gauche sait ce que la main droite fait. En effet, il y a deux
ans, nous étions ici pour parier de la politique en santé mentale
et on avait Identifié, à ce moment, que la santé mentale
était le secteur le plus névralgique. On parlait du
phénomène de la porte tournante. On parlait des engorgements des
hôpitaux. Et, depuis, il y a différents comités qui
travaillent au POS. On sait que l'opérationnel s'en vient d'ici peu.
Mais, en attendant, on assiste, pendant que les gens travaillent à
bonifier le système, à un autre discours. Nous disons maintenant
que ce qui engorge les hôpitaux, ce sont les personnes
âgées, et nous sommes en train d'assister au
démantèlement du réseau des pavillons, au moratoire des
familles d'accueil, et on se ramasse à la fois avec la clientèle
psychiatrique et la clientèle des personnes âgées qui sont
en besoin et qui n'ont pas encore reçu les services qu'il faut.
Il nous reste à espérer, comme association, que les
régies régionales auront l'avantage d'être vraiment proches
des besoins tant de la clientèle que des praticiens, des intervenants en
milieu de santé, qu'elles pourront répondre de façon
concertée avec les établissements et qu'elles sauront
dépasser un simple rôle de limitation des services.
Le Présidant (M. Joly): Merci, Mme Saint Denis.
Contrairement à nos habitudes où, normalement, M. le ministre
commence à poser des questions, dû à un petit contretemps,
un téléphone important, je vais demander au leader de
l'Opposition et député de Joliette, M. Chevrette, de bien vouloir
débuter, s'il vous plaît. (15 h 30)
M. Chevrette: Mesdames, je voudrais, dans un premier temps, vous
féliciter pour le courage que vous avez de dire ce que vous pensez.
Souvent, les groupes sont plutôt flatteurs dans leur présentation;
je ne sais pas pourquoi. Mais vous avez été claires en disant
qu'il y a une différence entre le discours et la réalité
politique et ça m'apparaft dénoter de votre côté une
volonté de dire clairement ce que vous pensez. Effectivement, sur
plusieurs points des exemples que vous donnez, c'est vrai. Je me souviens, j'ai
assisté au même débat que vous il y a deux ans sur le
rapport Harnois, j'ai entendu les engagements électoraux, j'ai
vécu la campagne électorale, puis je vis la réalité
comme vous autres et il y a un monde entre les deux, effectivement. D'ailleurs,
j'ai môme prétendu dans mon exposé de départ... Je
me demandais si ce n'était pas une façon de gagner du temps, de
refaire une commission parlementaire sur un avant-projet qui avait fait l'objet
d'une longue commission d'étude, au coût de 6 000 000 $, par M.
Rochon, une tournée régionale par Mme Lavoie-Roux et un
avant-projet qui, lui, subira un autre projet avant de devenir quelque chose
qui ressemblerait à une réalité. Effectivement, donc, je
partage votre point de vue là-dessus.
Une deuxième chose, sur les questions des ressources
également - c'est un commentaire que je veux faire - je pense que vous
avez aussi raison. Le partage entre les CLSC et les CSS a
démontré, on peut le voir après deux, trois ou quatre ans
maintenant, qu'effectivement il manque beaucoup de ressources sur le plan
social à peu près à tous les niveaux. On n'a pas
injecté énormément de fonds depuis quelques années
dans le social. On a suivi l'escalade des coûts en santé, on n'a
peut-être pas injecté suffisamment dans le domaine social, niant
ainsi l'interdépendance du social et de la santé, et ça je
pense que c'est une vision passablement juste, ce que vous avancez.
Je suis content de voir que vous parlez d'une véritable
décentralisation. J'ai hâte d'ailleurs que le ministre se mouille
là-dessus pour voir si ses régies régionales, c'est de la
déconcentration ou de la décentralisation, parce que c'est facile
de parier de régionalisation et de dire qu'on n'a fait que transposer
l'autorité nationale au niveau régional, sans qu'il puisse
prendre de décision. On en a des ministères qui sont
déconcentrés, mais qui ne sont pas décentralisés.
Décentraliser suppose laisser aux gens de la région le pouvoir de
décider, la latitude de décision. Là-dessus, sans doute
que le ministre
fera connaître plus à fond sa pensée. Il s'est
prononcé pour les régies régionales; j'ai hâte de
voir si c'est une décentralisation ou une déconcentration et je
partage personnellement votre point de vue de la déconcentration. Si on
ne laisse pas localement le soin de décider, je me demande: Est-ce que
ce n'est pas déconcentrer pour le plaisir de déconcentrer? Donner
l'illusion aux gens qu'ils viennent d'acquérir des pouvoirs, alors
qu'ils n'en ont pas acquis du tout? Je pense que c'est un point sensible que
vous touchez.
Je voudrais vous demander de vous expliquer davantage en ce qui regarde
les conseils d'administration. Vous sembiez être contre la disparition
des conseils d'administration, tel que proposé. Par contre, en tout cas,
je ne saisis pas au complet votre vision personnelle, comme groupe, quant aux
conseils d'administration et j'aimerais vous entendre.
Mme Saint-Denis: En termes de conseils d'administration, le
regroupement qu'en fait l'avant-projet de loi, c'est au niveau des
hôpitaux et rappelons-nous que nous sommes des praticiens de services
sociaux à contrat de services dans les hôpitaux. Les
hôpitaux ont un découpage de conseil d'administration avec les
CLSC tandis que les CSS ont un découpage de conseil d'administration
avec les centres d'accueil pour les jeunes. Alors, nous, on travaille avec les
enfants, on travaille avec les adultes et on travaille avec les personnes
âgées, autant pour le social que pour la santé. Or, on se
retrouve dans un établissement ou dans un autre avec une mission dans
laquelle on ne trouvera pas notre appartenance. Alors, c'était davantage
là-dessus.
M. Chevrette: II y a une chose qui me surprend. Vous parlez de
privatisation comme si vous acceptiez qu'il y ait privatisation au niveau des
centres d'accueil pour personnes âgées. Mais, tout en disant que
vous êtes en faveur d'une privatisation, vous avez une crainte. Comment
dirais-je, est-ce que vous seriez d'accord avec des centres privés mais
conventionnés où le gouvernement a entière
responsabilité sur les faits et gestes à l'intérieur ou
si... Parce qu'on dirait que vous êtes contre le privé
privé, mais vous seriez d'accord à ce qu'il y ait du
privé. J'aimerais que vous m'expliquiez parce qu'il y a trois types
de...
Mme Saint-Denis: Oui.
M. Chevrette: Vous connaissez les structures privées,
privées conventionnées et publiques.
Mme Lambert (Colette): Ce que je connais surtout, ce sont les
ressources d'hébergement où il y a des ressources
d'hébergement strict, il y a des ressources d'hébergement avec
services de soins connexes et ce qui s'appelle les ressources
d'hébergement de longue durée ou institutionnel bout de ligne, si
on peut dire.
M. Chevrette: Oui.
Mme Lambert: Les ressources hébergement hébergement
sont là, au fond, une fois que la maladie est installée et que la
perte d'autonomie est ou chronique ou irréversible: les gens ne peuvent
plus retourner dans leur milieu naturel même avec l'aide qui est mise en
place et doivent s'offrir des services d'aide ménagère, des
services d'alimentation, des services d'hygiène. Et ça
m'apparaîl des choses qui sont au niveau de la perte des acquis
quotidiens et une ressource d'hébergement strict pourrait être ce
que le CSS appelle les familles d'accueil. Ça, c'est le réseau
public qui offre ce... Évidemment, il y a un parallèle à
ça. Tout le monde le sait. On a parlé des foyers clandestins, il
y a une quinzaine d'années. On parle encore des foyers de la ville. Je
viens de la région métropolitaine et ça existe, des foyers
de la ville, c'est-à-dire où il y a un permis de la ville, mais
où il n'y a pas un contrôle qui est effectué par les
centres de services sociaux au niveau de la qualité des services
offerts. Mais on sait bien qu'à partir du moment où les familles
d'accueil ne peuvent pas répondre, pour toutes sortes de raisons, soit
légales ou autres, à tel type de clientèle les pensions de
la ville peuvent peut-être pallier. Ça, c'est comme un service et
c'est privé parce que ce sont des gens qui font ça comme
gagne-pain. Évidemment, ce ne sont pas les centres des services sociaux
qui ont actuellement le contrôle des services de qualité, s'il y a
abus ou enfin...
M. Chevrette: C'est de l'hôtellerie, à toutes fins
utiles. Ça commence sous forme d'hôtellerie.
Mme Lambert: Ce sont des permis d'hébergement comme ils
les appellent au niveau de la ville, en tout cas, pour ce qui est de la
région métropolitaine. Je ne voudrais pas faire une
généralité à la grandeur de la province, je ne sais
pas. Ça doit exister aussi. Peut-être que les CLSC peuvent
davantage en parler au niveau de la province, mais chez nous, comme ces
programmes personnes adultes sont encore l'affaire des services sociaux, je
parle plus de ça parce que c'est ce que je connais. Les services plus
publics d'hébergement avec soins font référence à
tout ce qui est l'institutionnel, c'est-à-dire avec la formule de
placement, de commissions d'allocation, CTMSP et ça, ce sont des
services publics. À partir du moment où ces tables d'allocation
ou, enfin, les délais deviennent beaucoup trop longs, on assiste aussi
à un hébergement parallèle où on s'assure, chez des
personnes, que les services médicaux seront assurés puisqu'il en
est question, mais que, pour ce qui est de la fonction hébergement, ce
sera fait avec la bonne volonté des
gens et des familles qui y consentent, au fond, et ça, c'est
privé aussi. Ça pallie finalement à la carence ou au
délai qu'Impose la structure actuelle. Les services qui seraient de bout
de ligne ou de longue durée, on n'y échappe pas. Alors, à
partir du moment où la personne ne peut môme plus être
hébergée, avec les soins médicaux appropriés, dans
un milieu privé d'hébergement, c'est sûr qu'elle retourne
à l'urgence, et là on enclenche toute la procédure
d'hébergement Irréversible, soit dans les centres hospitaliers de
longue durée ou, enfin, dans la structure du réseau.
Alors, ce qu'on dit, c'est que, évidemment, à cause de la
carence, II y a des gens qui sont d'accord pour vouloir héberger des
gens, dans la mesure où la majeure n'est pas trop impliquante, en termes
de soins de santé. On n'est pas contre ce principe-là. Ce qu'on
dit, c'est qu'il faut que ce soit beaucoup mieux réglementé,
autant pour les centres d'accueil, par exemple, aussi, que ce soit mieux
représenté et qu'à ce moment-là les critères
de qualité de services hôteliers autant que de soins soient mieux
contrôlés.
M. Chevrette: Oui. Vous touchez à un problème qui
n'est pas facile à résoudre, d'autre part. Ça part
souvent, j'ai cru m'en rendre compte, surtout en 1984... Avec toutes sortes de
bons principes, on part en faisant de l'hôtellerie. L'état de
santé de la personne se détériore. Ça devient un
A-1, ce n'est pas long. Et quand elle est rendue A-3 ou A-4, c'est le corridor
de l'hôpital qui en hérite parce qu'il n'y a pas de place,
8upposément, en centres d'accueil publics ou conventionnés.
Publics ou conventionnés, Ils sont soumis au dossier médical,
pour l'admission. C'est tout le dilemme. Il y a peut-être de la
clandestinité dans ça, mais il y a aussi, de bonne foi, des gens
qui ont fait de l'hôtellerie et qui ont pris les ressources
financières et les ressources humaines pour donner des services. Je
reconnais qu'il y a peut-être deux types de foyers ambigus. Mais comment
verriez-vous une solution à ça? Est-ce que vous avez des
suggestions à faire pour régler ce problème-là?
Mme Lambert: Par exemple, la régie régionale
pourrait, hypothétiquement, avoir un mandat sur les permis de la ville:
À quelles conditions émet-on des permis, à la ville? Quels
sont les critères d'hôtellerie acceptables? Ça, c'est pour
les services strictement hôteliers. Mais les gens qui sont en services
hôteliers, pour reprendre cette expression-là, ont aussi besoin de
soins. Autrement, ils seraient chez eux, et c'est souvent ce biais qui est une
lacune. À ce moment-là, quand on parle de partenariat ou quand on
parle de complémentarité de services, je pense qu'on peut y voir
là un mandat communautaire.
M. Chevrette: Un droit de regard, par exemple, d'une régie
régionale ou de la structure responsable des services à domicile,
je pensais à ça aussi. Ça pourrait être une
façon d'avoir au moins un professionnel qui puisse aller visiter de
temps en temps les conditions de salubrité, aussi. Effectivement, je
trouve que c'est...
Mme Lambert: C'est que l'articulation est aussi délicate,
parce qu'on assiste souvent à une surcharge d'un service, qu'on veut
voir déchargé sur un autre service qui, lui-même, est
surchargé. Vous me parlez du maintien à domicile. Ce qu'on
réalise, c'est que le phénomène de la
désinstitutionnalisation qu'on connaît bien offre un retour au
milieu naturel de la population qui, certainement, a un problème
d'autonomie important. Bien sûr qu'on s'est fiés sur les CLSC, par
exemple, que je ne blâme pas, pour voir, au niveau du concret, à
ce qu'il y ait des services d'aide à domicile, où, par exemple,
se trouve une jeune mère, qui est monoparentale, qui a toutes sortes de
problèmes, qui est aux prises avec la toxicomanie, ou une femme battue,
ou peu Importe, et qu'on retourne avec l'enfant dans son milieu naturel, parce
qu'on pense que le CLSC peut être garant d'un minimum de services
à domicile. Et on se rend compte, au bout de la ligne, après
évaluation, qu'avec toute la meilleure volonté du monde
l'auxiliaire familiale peut se présenter une demi-heure par semaine.
Est-ce que, pour nous, c'est une garantie comme des services de soins? Je pense
que la régie régionale ou une régionalisation, ou une
déconcentration des services pourrait offrir ce type de collaboration,
dans la mesure où il y a une volonté commune aussi et que l'un ne
vient pas en compétition avec l'autre, pour que l'on décharge
l'un au détriment de l'autre, finalement. Là-dessus, on peut y
voir un avantage.
M. Chevrette: En tant que praticiennes sociales dans le milieu de
la santé, est-ce que vous considérez que cette dimension, qui
fait partie intégrante de tout le traitement santé-services
sociaux, a sa place et qu'on doit continuer à investir et qu'on doit
surtout investir davantage de ce côté? Parce qu'il y a un
accès préventif, aussi bien qu'un accès suivi ou
posttraitement-santé. Est-ce que vous considérez qu'il y a
suffisamment d'argent injecté à ce niveau, ou s'il y a une
disproportion qui doit être corrigée dans les meilleurs
délais?
Mme Saint-Denis: Au niveau social, à l'heure actuelle, je
pense qu'il est clair que les effectifs psychosociaux en milieu de santé
n'ont à peu près pas bougé depuis dix ans, mis à
part les situations de crise, comme les engorgements des urgences. On a pris
des mesures, à ce moment-là, qui ont injecté des postes
qui étaient nécessaires, je pense, depuis fort longtemps.
À l'heure actuelle - je vous donnerai un exemple très
récent - j'ai six praticiens sociaux en
psychiatrie adulte, depuis quatorze ans. Il entre six nouveaux
médecins parce qu'il y a une pénurie de psychiatres à
l'heure actuelle en périphérie de Montréal, alors il entre
six nouveaux psychiatres. Si les psychiatres entrent, les besoins sont
là dans la population, sauf que les psychiatres qui entrent
évaluent davantage la liste d'attente. Une fois qu'on les a
évalués et qu'on les a ciblés comme étant vraiment
des gens en besoin de soins, il y a, pour un certain pourcentage de cette
clientèle, des besoins psychosociaux pour lesquels on n'est pas à
même de répondre. (15 h 45)
Quand on vous parle de services courants, selon la norme minimale du
nombre de cas qu'un praticien social doit prendre, chacun des praticiens avait
une fois et un tiers, avant l'entrée des six nouveaux. Là, les
six nouveaux sont là. La clientèle, il faut y répondre. On
ne peut pas leur dire... Je pense que, nettement, ce n'est pas un luxe, mais
c'est un Investissement. Parce que si on ne répond pas à cette
clientèle, de façon équilibrée, qu'on investit trop
d'un côté et pas assez de l'autre, ou qu'on essaie
d'économiser en faisant faire à tout le monde la même
articulation, on se retrouve avec des gens qui se promènent et utilisent
différents services.
M. Chevrette: Pour l'instant, je vais laisser la parole au
ministre.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le leader de
l'Opposition. Je vais maintenant reconnaître M. le ministre de la
Santé et des Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci. D'abord, je voudrais
m'excuser d'avoir dû m'absenter; le ministère fonctionne pareil
pendant ce temps-là et il y a des urgences qu'il faut tenter d'aller
régler.
Sur le même sujet, évidemment, on peut toujours dire qu'il
n'y a pas suffisamment de ressources. Je pense qu'il y a des évidences
qui crèvent les yeux vis-à-vis de certaines clientèles.
Peut-être qu'à l'occasion aussi, dans certaines décisions,
on a mis la charrue devant les boeufs, et je m'interroge tout haut. Il y a des
choses sur lesquelles II va falloir se questionner l'un de ces bons jours. Ce
n'est pas vrai que, dans certains cas, lorsqu'on désinstitutionnalise...
On peut se "péter" les bretelles sur la place publique, qu'on a
désinstitutionnalisé et qu'on a rendu un beau grand service et
qu'on n'a pas prévu toutes les conséquences jusqu'au support...
On en a eu un exemple, vendredi après-midi, avec les Messagères
de l'espoir qui sont venues témoigner devant la commission des
problèmes qu'elles rencontrent et, effectivement, elles ont des
problèmes de ressources, même dans le communautaire, au niveau de
la santé mentale. Donc, il faut prévoir à la chaîne
tout le proces- sus et, évidemment, aller jusqu'au bout de notre
exercice pour qu'on se dote du personnel suffisant pour y arriver. J'ai un
frère qui était en institution en Gaspésie et qui est
allé en famille d'accueil. Ça n'a pas coûté moins
d'argent, le gouvernement a mis plus d'argent, parce que tout le monde est
resté à son poste dans l'institution où il était
auparavant et, au lieu de donner les services dans l'institution, on va les
donner dans la familles d'accueil. Ça a coûté comme
ressources sur le plan financier beaucoup plus d'argent au gouvernement, parce
qu'à l'époque j'avais posé la question, étant
personnellement intéressé. Et au bout de la ligne, là
où il est, il est bien traité, bien encadré, les gens le
suivent très bien, mais évidemment ça a
nécessité plus d'argent dans le système. Je ne suis pas
sûr qu'on ait mesuré toutes les étapes et tout le support
qu'il fallait pour être capable de mener ça à terme.
Vous donnez des expériences de Montréal; je pourrais vous
donner l'expérience de l'Auberi-vière à Québec
où ça nous oblige à nous interroger sur ce qu'on va faire
demain matin. Dans la politique de désinstitutionnalisation au niveau de
la santé mentale, il y aura une étape importante, en mars et
avril 1990, pour évaluer où on est rendu, et il va falloir la
faire de manière très sérieuse. Évidemment, on
parle de ça, on parle d'autre chose et c'est là que ça me
ramène à une question très précise parce que ma
jeune expérience dans le réseau - ça fait quatre mois -
fait que je me pose toute une série de questions. Aussi bien qu'on se
les pose entre nous, compte tenu de votre expérience. Depuis la
réforme Castonguay-Nepveu, vous êtes du personnel des CSS, mais
vous êtes dans des institutions et vous relevez toujours des CSS. Si je
voulais être négatif, je poserais la question suivante: Quels sont
les malheurs qui vont vous frapper demain matin si on décidait que,
dorénavant, vous allez relever des centres hospitaliers? Si je veux
être positif, je vais vous poser ta question suivante: Quels sont les
avantages à maintenir la situation dans laquelle on est maintenant qui
paraît, à tout le moins, un peu bizarre comme structure, pour bien
se comprendre, en termes de duplication?
Mme Saint-Denis: Je ne sais pas si c'est si bizarre que
ça, mais dans notre présentation de tantôt, ce qu'on
disait, c'est qu'avant la réforme Castonguay-Nepveu on était dans
les hôpitaux et le médical avait préséance sur le
psychosocial, notre pratique était commandée par le
médical. Après la réforme, on a été
directement reliés au CSS et prêtés à contrat de
services. Là, en étant prêtés à contrat de
services, on se retrouve dans une position de partenaire dans le réseau,
travaillant dans l'hôpital pour une clientèle qui a des besoins
médicaux et psychosociaux. On a des avantages à l'heure actuelle.
Les avantages c'est d'être, d'une part, regroupés, parce que
vous
savez, M. le ministre, que dans l'ensemble des hôpitaux de la
province... Très souvent, le réflexe qu'on a c'est qu'on regarde
Montréal, on regarde Québec, on regarde les grosses
régions et on fait une caricature pour l'ensemble de la province. Mais
beaucoup d'hôpitaux n'ont qu'un intervenant psychosocial à
l'intérieur de l'hôpital. Ce n'est pas parce qu'ils n'en ont pas
besoin autant qu'à Montréal, ou, je veux dire, en termes de
diversité de problèmes. C'est parce qu'à ces
endrolts-là... Et cette personne-là, à l'heure actuelle, a
l'avantage d'être à l'intérieur d'un établissement
régional et d'avoir des standards de qualité à rencontrer,
un programme à appliquer et les avantages.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, si je comprends, la
problématique antérieure était une domination du
médical, en termes clairs là.
Mme Saint-Denis: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Ce que vous avez
recherché...
Mme Mercier (Maude): Je dirais que l'autonomie professionnelle,
en tout cas au niveau du service social dans le cadre hospitalier, pour ma
part, comme expérience depuis 20 ans, y a gagné beaucoup depuis
le rattachement aux CSS. Moi, je travaille dans une équipe de secteur,
en psychiatrie à l'Hôtel-Dieu de Lévis, et si je regarde
dans - comment je dirais - les rapports interprofessionnels, à la
limite, lorsqu'on ne se rejoint pas, je veux dire, d'autres professionnels
à côté, si je prends, par exemple, les psychologues,
relèvent, sont des employés de l'hôpital. Moi, en tout cas,
j'ai toujours ressenti, comme professionnelle, l'avantage d'avoir une certaine
autonomie au niveau de m'autodéterminer aussi dans ma profession et
d'essayer de faire valoir ma complémentarité et non pas de me
faire définir par quelqu'un d'autre. Mais tout ça, ce n'est pas
tellement dans le contexte - comment dirais-je - suggestif de domination mais
plus en termes de reconnaissance profesionnelle de partenaires
égaux.
M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends c'est
que la situation actuelle vous l'avez, mais vous l'avez par un contrat de
services, et c'est le contrat de services qui vous amène à dire:
On est véritablement des partenaires. Du côté des
mentalités, est-ce que ça a évolué aussi, parce que
bien des fois il y a des résistances à partir du moment où
II y a cohabitation, les mentalités évoluent? Est-ce que de ce
côté-là, depuis ces changements-là, on peut dire
que, dans le milieu hospitalier, la mentalité a évolué? On
peut accepter parce qu'on est mis devant le fait ou on peut accepter parce que
c'est une nécessité et on peut comprendre la
complémentarité. Est-ce qu'on en est rendu là,
aujourd'hui?
Est-ce que les mentalités ont suffisamment évolué
ou si c'est véritablement un contrat de services qui fait que vous
êtes plus autonomes?
Mme Mercier: Moi, je dirais que le fait d'avoir été
- en tout cas, je parle bien sûr pour ma part - rattachés aux CSS,
ça a fait qu'on avait une plus grande latitude. Bien sûr, quand on
ne se rejoint pas, c'est sûr que ça va discuter, etc., mais le
fait d'être à contrat de services comme tel, le niveau, en tout
cas, était plus horizontal, puis on avait comme une certaine - comment
dirais-je donc - marge de manoeuvre aussi au niveau de l'insistance qu'on
pouvait avoir pour persister dans des positions surtout par rapport à
des services à donner à la clientèle et surtout aussi, je
dirais, en termes philosophiques, par rapport à une approche globale qui
couvre les différents aspects de la personne. Mais ça, c'est du
travail quotidien. Moi, je pense aussi que d'avoir été
rattachés à un organisme où, déjà, la
pensée était à majeure psychosociale, ça donne une
chance en termes de services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): J'aimerais peut-être
revenir à Mme Saint-Denis, sur l'exemple que vous avez choisi
tantôt, pour que je comprenne bien. Vous êtes dans un milieu
où les efforts de recrutement ont fait en sorte que vous avez eu plus de
psychiatres.
Mme Saint-Denis: Les besoins étaient là, tant
mieux!
M. Côté (Charlesbourg): Ce qui m'inquiétait
un peu tantôt, c'est que je m'apercevais que la dynamique du
système faisait en sorte qu'en ayant des psychiatres il y avait plus de
besoins. Ce que...
Mme Saint-Denis: Non. Les besoins étaient là. Ils
étaient documentés par une liste d'attente. Je pense, que, dans
l'ensemble du réseau, si on parle de partenariat, de
complémentarité, il faut comprendre aussi que c'est un
système, et un système, si ça bloque quelque part,
ça s'en va. Alors, tout le système est, à l'heure
actuelle, comme une coche à côté.
On parlait tantôt des ressources avec Colette. On parlait aussi de
l'appartenance des services sociaux. Les besoins sont là. Les gens qui
étaient là et qui attendaient trois, quatre ou six mois avant
d'être vus par un psychiatre étaient malades. Ils venaient
consulter à l'urgence, en état de crise, ou ils étaient
supportés par un organisme communautaire en attendant, ou, très
souvent, supportés par la famille.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, il
faudrait voir. Je ne dis pas que, dans tous les cas, c'est évident,
parce qu'on travaille sur des dossiers de CSS de ce temps-ci: familles
d'accueil
au niveau de la dpj. il y a des choses qui, aujourd'hui, font en sorte
que les gens sont plus ouverts à communiquer leur problème et, au
plan du signalement, il y a une évolution absolument
phénoménale. forcément, s'il y a plus de signalements,
vous allez retenir en bout de piste plus de cas qui doivent être
traités. c'est vrai dans le domaine que vous évoquiez
tantôt; c'est vrai dans d'autres domaines au niveau de la jeunesse qui
créent des problèmes au niveau des css, que vous connaissez
très certainement et sur lesquels on travaille actuellement.
À la page 8 de votre mémoire, au dernier paragraphe en
bas, vous dites: "Par souci de protection des intérêts de la
population desservie par les services sociaux en milieu de santé,
l'Association trouve important, pour garder l'expertise, assurer les standards
de qualité et éviter le morcellement, qu'un établissement
régional se voie confier le mandat d'organisation et de distribution de
services sociaux spécialisés auprès des adultes et
personnes âgées. De ce fait, cet établissement devra
assumer le leadership dans ce domaine et sa région en
complémentarité avec les autres établissements du
territoire." Est-ce que je comprends qu'on crée une nouvelle
structure?
Mm» Saint-Denis: Je m'excuse. SI vous?
M. Côté (Charlesbourg): Oui, est-ce qu'on doit
comprendre que, par cette proposition, on crée une nouvelle structure
régionale?
Mme Saint-Denis: Non. Non, non, non, non.
M. Côté (Charlesbourg): Bon, alors pouvez-vous nous
identifier, si on n'en crée pas une, laquelle est-ce? Si c'est la
régie régionale, on comprendra vite. J'ai compris de votre
document que vous êtes pour la régie régionale qui peut
jouer un certain rôle à certaines conditions, évidemment.
Mais...
Une voix: ...régie décentralisée. M.
Côté (Charlesbourg): C'est ça. Une voix: Une
régie décentralisée.
M. Côté (Charlesbourg): Une régie
décentralisée. Oui, oui. Tel que vous le souhaitez. Alors, dans
ce cas-ci, quelle structure est-ce?
Mme Saint-Denis: En clair, on voulait dire qu'à l'heure
actuelle les CSS répondent à l'aspect social de notre expertise
qui est un service spécialisé. Elle pourrait recevoir un mandat
clair pour s'occuper des personnes âgées et des adultes en perte
d'autonomie et en besoins psychosociaux. Je ne parle pas d'un système de
signalement et de protection, à ce moment-là, mais d'un
mandat.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, je
comprends qu'avant mol il y a eu, à un moment donné, des
décisions qui ont fait passer une partie de la clientèle aux
CLSC.
Une voix: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): ...préoccupations.
Est-ce qu'il s'agtt, dans ce cas-là, de récupérer... Par
exemple, les placements, est-ce qu'il s'agit de récupérer une
partie dé ces pouvoirs qui ont été
délégués aux CLSC? Expliquez-moi de quelle manière
ça fonctionnerait et ce qu'on donne a ce niveau d'établissement,
aux CSS, comme responsabilités. Quand on dit personnes
âgées en perte d'autonomie, ça fait du monde demain matin,
hein? Alors, qu'est-ce qu'ils vont faire? (16 heures)
Mme Saint-Denis: À l'heure actuelle, je pense qu'on peut
respecter les missions que les autres établissements ont. Les CLSC ont
la mission du maintien à domicile et on verrait mal que ce soit le CSS
qui reçoive ce mandat. Mais ce dont on parle, à l'heure actuelle,
il y a des services, entre autres, les services sociaux ou hospitaliers qui
desservent l'ensemble de la clientèle. Nous autres, on les prend avant
même qu'ils naissent jusqu'à temps qu'ils meurent, en termes
d'âge. Avec l'organisation actuelle aussi, on a le secteur des
adultes et des personnes âgées versus le placement en familles
d'accueil.
M. Côté (Charlesbourg): Familles d'accueil. Donc, ce
que je comprends, c'est que le maintien à domicile resterait aux
CLSC...
Mme Saint-Denis: Absolument.
M. Côté (Charlesbourg): ...alors que familles
d'accueil et autres ressources alternatives en placement d'hébergement
de personnes âgées, peu importent les niveaux de déficience
ou d'autonomie, seraient sous la responsabilité du CSS.
Mme Saint-Denis: Ça pourrait avoir des avantages, en tout
cas, en termes d'efficacité, d'être régionalisé et
non localisé. Et pouvoir être aussi regroupés en termes de
dynamique de professionnels qui sont autres que des services sociaux
courants.
M. Chevrette: Vous venez de parler de familles d'accueil.
J'aimerais savoir les conséquences des décisions du Trésor
sur le moratoire du placement en familles d'accueil. Quelles
conséquences vivez-vous concrètement?
M. Côté (Charlesbourg): Ce n'est pas une
décision du Trésor. Il ne faut pas imputer au Trésor des
choses qui...
M. Chevrette: Bien, c'est un gel croisé qui
a été demandé.
M. Côté (Charlesbourg): Non, non. Ce n'est pas une
décision du Trésor. C'est une décision du...
M. Chevrette: Les décisions du ministre, d'abord.
M. Côté (Charlesbourg): Non, non. Il faut être
bien conscient dans tout ça. Quand on parle de choses comme ça,
c'est que le budget est défoncé uniquement de 17 000 000 $! Donc,
17 000 000 $, il faut quand même être prudent.
M. Chevrette: Non, mais la question demeure entière.
Quelles sont les conséquences?
M. Côté (Charlesbourg): II n'y a pas de gel. Il faut
bien se comprendre. Les CSS peuvent venir demander des places additionnelles,
mais avec justification.
M. Chevrette: Bon. Quelles sont les conséquences - moi, je
l'appelle gel - de la décision de ne pas faire du placement en familles
d'accueil automatiquement comme c'était le cas avant? Est-ce que
ça crée des malaises au niveau des institutions? C'est ça
que je veux savoir.
Mme Saint-Denis: Au niveau des institutions, des hôpitaux,
oui, certainement.
M. Chevrette: Quelle est la conséquence directe sur un
centre hospitalier? Est-ce que c'est l'engorgement des lits de soins de courte
durée?
Mme Saint-Denis: Absolument.
Une voix: La personne qui n'est pas à sa bonne place,
finalement.
M. Côté (Charlesbourg): Vous allez m'expli-quer
ça comme il faut parce que je veux...
M. Chevrette: Je ne sais pas, mais est-ce que je peux continuer
ma question?
M. Côté (Charlesbourg): Non, non, c'est parce que,
évidemment...
Le Président (M. Joly): Si on prend une entente entre les
deux parties.
M. Côté (Charlesbourg): Si c'était mon droit
de parole. Je ne veux pas qu'on se chicane pour rien.
Le Président (M. Joly): II reste cinq minutes de droit de
parole à M. le ministre.
M. Chevrette: Je me reprendrai après.
M. Côté (Charlesbourg): La question est bonne. Je ne
veux pas l'éviter. Je pense que la question est très bonne. Mais,
de là à tirer une conclusion aujourd'hui d'une décision
qui était prise le 21 décembre, dans une lettre qui était
adressée aux CSS, et de venir nous affirmer aujourd'hui qu'il y a des
conséquences directes, maintenant, sur les lits dans les hôpitaux
par rapport aux familles d'accueil, vous allez m'en faire la
démonstration.
Mme Lambert: C'est une conséquence, je crois, entre autres
qu'on ne peut pas retourner... D'ailleurs, la loi dit en termes clairs que si
on ne peut pas, devant l'état du patient, retourner dans un milieu
où on peut assurer le minimum de sa protection - ce n'est pas le
verbatim là, mais c'est l'essence, je pense, de ce qui est dit - il peut
rester en hébergement jusqu'à ce qu'on ait trouvé une
solution palliative.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais...
Mme Lambert: C'est une des conséquences. Je pense qu'il ne
faut pas tirer une conséquence directe et unique. Ce que ça peut
faire aussi, c'est comme par hasard un très grand alourdissement des
principes bureaucratiques. J'ai un exemple assez récent, justement, qui
est conséquent au moratoire, d'un patient psychiatrique qui est dans la
région de Montréal, dans une chambre subventionnée, et qui
est en perte d'autonomie, avec toutes les caractéristiques d'un patient
chronique irréversible, qui veut retourner en famille d'accueil dans sa
région natale qui est Lac-Mégantic. Or, évidemment qu'il a
été facile que ce monsieur se présente au CLSC de
Lac-Mégantic en faisant une demande en famille d'accueil, et, bon, le
CLSC a répondu: Écoutez, il faudrait qu'il passe par l'instance
des services sociaux du Montréal métropolitain. Non pas qu'une
famille d'accueil n'avait pas été pointée, mais elle
n'était pas disponible à cause du moratoire. Conséquence
directe: C'est sûr que ce que ça fait, mais il y a, sans vouloir
m'allonger davantage, qu'on dit: Évaluez donc mieux les besoins de ce
patient-là pour voir s'il ne pourrait pas aller dans une autre ressource
et, conséquemment, la CTMSP, le comité d'allocation, le conseil
régional de Montréal transfère, s'il y a lieu, au conseil
régional de l'Estrie, enfin, bref, je pense que ça peut offrir ce
type d'al-lourdissement.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, je vais
porter un jugement que j'ai porté le 21 décembre, et qui n'a pas
changé d'un iota depuis. Lorsqu'on défonce un budget au niveau
provincial de 17 000 000 $, il y a des problèmes quelque part. C'est sur
ces éléments-là qu'on a dû se pencher au mois de
décembre. Il n'est pas du tout normal qu'on défonce des budgets
de cette ampleur-là, de 17 000 000 $. La décision qui a
été prise, c'est de mettre un petit peu d'ordre dans la
cabane, parce que les principes dans un CSS ou les guides d'intervention
n'étaient pas les mêmes dans l'un comme dans l'autre. Ce qu'il a
donc fallu, c'est asseoir tout le monde autour de la table et c'est en cours
actuellement avec les représentants supérieurs - il y a une
rencontre la semaine prochaine, d'ailleurs - pour faire en sorte qu'on en
arrive à une gestion qui se ressemble, tout en respectant l'autonomie de
chacun.
A partir de ce moment-ci, on dit qu'il y a exactement le même
nombre de places qu'il y avait - il n'y en a pas une qui a été
enlevée - avec les montants d'argent. Le problème,
évidemment, c'est que certains CSS étalent beaucoup plus
généreux que d'autres sur le plan de l'allocation pour être
capables de placer des clientèles ailleurs et qu'il y avait du maraudage
inter CSS, sur le plan des territoires, pour placer des gens, par exemple, de
VM sur le territoire des Laurentides, en payant plus cher que le CSS des
Laurentides payait, donc enlevant littéralement la famille d'accueil, ce
qui est totalement inacceptable. Donc, évidemment ce que ça avait
pour but, c'était de ne pénaliser personne, mais de commencer
à avoir des règles qui sont un petit peu plus acceptables dans ce
domaine-là, malgré toute la bonne volonté de tout le
monde. Je ne mets pas en doute la bonne volonté, il y a des cas
d'exception qu'on traitera, mais de là à tirer la conclusion
aujourd'hui qu'on a des problèmes au niveau des lits d'hôpitaux
par rapport à ça, vous me permettrez de vous dire que c'est
étirer l'élastique passablement.
Mme Saint-Denis: On en avait des problèmes d'engorgement,
de patients qui attendaient des ressources de n'importe quel type, pas juste
familles d'accueil, des ressources institutionnelles et d'autres types de
ressources, de convalescence ou quoi que ce soit, qui prenaient les lits de
courte durée mais, à l'heure actuelle, on doit faire preuve
d'encore plus d'ingéniosité, de mobilisation extraordinaire de
familles, d'environnement. Un patient suicidaire qu'on décide de ne pas
garder à l'urgence parce qu'on n'a pas d'endroit encadrant à lui
fournir, peut-être que pour deux ou trois semaines il est recevable et
qu'il pourrait être placé dans une famille d'accueil. Eh bien,
là, il faut prendre le risque.
Le Président (M. Joly): Merci. Maintenant, je vais
reconnaître M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Vous voulez parler, je pense? Mme Mercier:
Je voulais dire, moi...
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, le temps de M. le
ministre est fini. C'est en addition à ce que vous avez dit?
Une voix: Oui, oui, on va la laisser dire.
Mme Mercier: Je voudrais juste ajouter qu'au-delà de la
question du moratoire, déjà, antérieurement à
ça, la situation, le contexte, pour nous autres intervenants, je le
qualifie de difficile, dans le sens que, comme réalité au niveau
des besoins, II y a un manque de ressources multiples. Il y a aussi, que,
même sans tenir compte du moratoire, même dans un contexte
où on peut développer des ressources, si je pense à la
famille d'accueil - mol je suis sur la rive sud, - même malgré des
efforts de personnel engagé pour ça dans la création, la
recherche et tout, les gens ne répondent pas à ça.
M. Côté (Charlesbourg): Savez-vous pourquoi? Je vais
vous le dire très honnêtement.
Mme Mercier: J'ai eu des petites hypothèses,
peut-être pas toutes, mais...
M. Côté (Charlesbourg): Les hypothèses, c'est
qu'on n'a pas suffisamment fait pour reconnaître la famille d'accueil
comme un intermédiaire très valable et c'est ce qui est
après se régler au moment où on se parle.
Mme Mercier: C'est cela. Quelqu'un qui a un peu une tête
sur les épaules ne s'engagerait pas dans un contrat comme ça, je
pense, avec les responsabilités, la charge, les 24 heures, les
séjours, pas de vacances, un per diem, etc., pas toujours avec des
garanties de services complémentaires.
M. Côté (Charlesbourg): C'est ça.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. leader
de l'Opposition.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. J'ai posé la
question et j'y tenais parce que je considère que depuis cinq ans
ça devait tout être réglé. C'est pour ça que
j'ai posé la question. Ça fait quatre ans et ça devait
être une des priorités de régler ce
phénomène-là. Ce matin, je disais à un groupe, je
ne me souviens pas duquel, sur les coûts, que le dilemme dans ces
histoires-là, c'est qu'il y a des personnes qui demeurent dans une
situation où ça coûte plus cher. Je prends un exemple: Si
on garde une personne qui devrait être en famille d'accueil dans un lit
de soins de courte durée, si ma mémoire est fidèle, un lit
de courte durée coûte 350 $ à l'État, contrairement
à une place dans une famille d'accueil qui coûte 15 $, au moment
où on se parle. Je sais que ça va être
amélioré. J'ai lu une lettre du ministre dans laquelle il disait
qu'il voulait réviser ça. Mais, imaginez-vous, une personne qui,
par sécurité, par son médecin, garde un lit de soins de
courte durée à 350 $, alors qu'il en coûterait 15 $ ou 70
$, si vous
voulez, dans un centre d'accueil; c'est différent en "mosus". Et
on se plaint d'un sous-financement du régime globalement. C'est
là qu'est l'aberration du système actuel. Quand tu regardes les
ressources, 350 $ pour un lit de soins de courte durée, 120 $ pour un
lit de soins de longue durée, 70 $ pour un lit dans un centre d'accueil,
15 $ dans une famille d'accueil et que tu te rends compte qu'au niveau des
soins de courte durée il y a plus ou moins de places - dans certains
milieux, ça va jusqu'à 25 % des lits occupés par des soins
de longue durée ou de toute autre nature que ceux de courte durée
- qu'est-ce qui arrive? Le système manque déjà d'argent
et, dans le système qu'on traverse, on se retrouve avec une situation
aberrante. C'est ça qu'il va falloir... Je ne dis pas qu'il ne faut pas
de préparation, qu'il ne faut pas de formation au niveau des gens qui
s'engagent dans une famille d'accueil. Si on ne veut pas qu'il y ait du
"parking", comme on le disait durant l'étude du rapport Harnois, par
exemple, précisément, il faut former les gens, ça prend du
personnel d'encadrement et tout le kit. Mais, dans la conjoncture actuelle, on
utilise une ressource qui coûte plus cher à l'État et dans
des conditions qu'on a peine à corriger. C'est un peu ça que j'ai
voulu soulever comme problème. Je vous remercie de votre mémoire.
Je le trouve clair et limpide.
Le Président (M. Joly): M. le ministre, le mot de la
fin.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, 350 $ par
jour par rapport à 20 $, ça tombe sous le sens que c'est un
système qui a besoin d'être viré. Mais il faut prendre le
temps de le faire et il ne faut pas faire en sorte qu'on puisse confier
à des families d'accueil, à des gens de bonne fol, des individus
qui ont besoin d'un encadrement et d'un suivi sur le plan professionnel qu'on
ne leur donnera pas non plus. Les familles d'accueil ont des choses à
dire aussi. On les a écoutées. Elles ont beaucoup de choses
à dire. Donc, je pense que c'est un rééquilibrage du
système et ça tombe sous le sens que 20 $ ou 25 $ par jour,
comparés à 350 $, vous allez pouvoir en faire davantage. Merci
beaucoup. Évidemment, vous allez certainement avoir des choses, des
décisions qui vont venir, à court terme et à moyen terme,
vous concernant, en souhaitant qu'on atteigne les objectifs qu'on se fixe tous,
vous autres comme nous autres: le bénéficiaire avant tout.
Merci.
Le Président (M. Joly): Mesdames, au nom des membres de
cette commission, je vous remercie de votre participation. Bon retour. Merci
beaucoup.
Une voix: Merci.
Le Président (M. Joly): Je demanderais aux membres de la
Corporation professionnelle des ergothérapeutes du Québec de bien
vouloir s'approcher, s'il vous plaît.
J'aimerais profiter du petit temps qui m'est dévolu pour
confirmer que, selon l'entente dont nous avons convenu ce matin, nous
permettons la venue de Mme Blackburn, députée de Chicoutimi pour
remplacer le député de Rouyn-Noran-da-Témlscamingue, M.
Trudel. Alors, bienvenue à cette commission, Mme la
députée.
J'apprécierais beaucoup que la personne responsable puisse
s'identifier et présenter la personne qui l'accompagne.
Mme Picard-Greffe (Huguette): Bonjour. Le Président (M.
Joly): Bonjour, madame.
Corporation professionnelle des ergothérapeutes
du Québec
Mme Picard-Greffe: Mon nom est Huguette Picard-Greffe. Je suis la
présidente de la Corporation professionnelle des ergothérapeutes
du Québec. Permettez-moi de vous présenter M. Pierre-Yves
Thériault qui est administrateur et secrétaire de notre
corporation.
Le Président (M. Joly): Merci, madame. Alors, comme vous
le savez, selon les règles de procédure, vous avez une vingtaine
de minutes, plus ou moins, pour présenter votre mémoire et
après, les deux formations s'engagent à vous questionner et
à aller chercher la lumière nécessaire. Merci.
Mme Picard-Greffe: La Corporation vous remercie de votre
invitation et a le plaisir de partager avec vous quelques réflexions sur
l'avant-projet de loi sur les services de santé et les services sociaux,
et de participer ainsi à cette démarche collective sur
l'organisation des services de santé.
Afin de bien orienter les membres de la commission, nous aimerions vous
préciser le rôle que tiennent les ergothérapeutes dans le
domaine de la santé et des services sociaux. L'ergothéra-peute
est un professionnel de la santé qui intervient au niveau du quotidien
des personnes éprouvant des difficultés physiques, psychologiques
et sociales. L'exercice de l'ergothérapie comprend, notamment,
l'évaluation du potentiel fonctionnel d'une personne, la planification
de l'intervention, l'application du traitement et le suivi. (16 h 15)
Rejoignant diverses clientèles de tout âge et oeuvrant dans
la plupart des institutions du réseau, l'ergothérapeute utilise
principalement l'activité dans le but d'aider l'individu à
trouver ou à retrouver une capacité d'action dans toutes les
sphères du quotidien. C'est donc une profession qui trouve dans
l'activité même de la
personne les moyens de promouvoir la santé et l'autonomie
fonctionnelle sur les plans physique, psychologique, professionnel et social.
L'originalité de notre pratique professionnelle tient, bien sûr,
au fait que nous utilisons l'activité comme médium
thérapeutique, mais aussi aux valeurs qui sous-tendent son exercice.
Depuis toujours, les ergothérapeutes ont une pratique qui tient compte
de l'interaction des composantes bio-psychosociales des individus et des
différents aspects de son environnement. Ainsi donc,
l'ergothérapie vise à améliorer la condition des personnes
pour ensuite les aider à s'actualiser de la façon la plus
indépendante possible et y trouver une satisfaction.
Les lignes directrices de la pratique ergothérapique sont
axées sur la primauté de la personne. Quelques exemples de
problèmes pouvant affecter les clients qui consultent en
ergothérapie. Ce peut être un accident, une maladie, des troubles
de comportement, des problèmes d'apprentissage, des handicaps, des
limites dues à l'environnement ou au processus du vieillissement.
Actuellement, nous sommes plus de 1100 ergothérapeutes qui pratiquons au
Québec. Nous sommes une profession majoritairement féminine,
à 92 %, et une portion Importante, soit 80 %, travaille dans le
réseau de la santé et des services sociaux.
Notre présence, aujourd'hui, se situe à l'intérieur
de notre mandat de protection du public et de la qualité des services
fournis aux bénéficiaires. La législation accordée
au Code des professions est celle d'une profession à titre
réservé. Bien que nous croyions que le mécanisme de titre
réservé peut protéger adéquatement le public, il
sera efficace uniquement dans la mesure où il permet au pouvoir
réel de vérifier la compétence professionnelle de tous les
ergothérapeutes. Si un professionnel veut se soustraire à la
surveillance de ses pairs, par exemple, à l'inspection professionnelle
ou à la discipline qui sont nos mécanismes de contrôle de
la pratique, il n'a qu'à se retirer de la Corporation. La Corporation,
alors, n'aura aucun pouvoir, advenant que ce professionnel offre des services
inadéquats. Cette personne pourra continuer à occuper son poste
et ses mêmes fonctions, mais n'utilisera plus le titre
d'ergothérapeute.
Cette situation est des plus déplorables et il est
décevant de constater que le législateur s'en rend complice. En
effet, en acceptant l'équivalence des titres au niveau des conventions
collectives dans le réseau des établissements de santé, le
gouvernement permet aux ergothérapeutes, comme à d'autres
professionnels, de se soustraire aux mécanismes de protection du public,
tel que souhaité par ce même gouvernement. Heureusement, les
modifications apportées au Code des professions, en octobre 1988, qui
resserrent davantage le statut des professions à titre
réservé, nous laissent croire à l'abolition des titres
équivalents dans les conventions col- lectives.
Nous aborderons maintenant, de façon plus précise, nos
commentaires sur l'avant-projet de loi. Concernant les objectifs du
système de services sociaux et de la santé, nous notons avec
satisfaction que les rédacteurs de l'avant-projet de loi font de la
réadaptation des personnes l'un des objectifs que doit poursuivre notre
système de santé. En plus d'ajouter de la qualité à
la vie, la réadaptation a des enjeux économiques. Si l'on songe
qu'une personne dépendante, devenue active et productive, non seulement
évite des déboursés à l'État, mais peut
devenir un "payeur de taxes", la valeur financière de sa
réadaptation prend des proportions encore plus Importantes.
Les orientations dans le domaine de la santé et des services
sociaux préconisent de plus en plus une approche axée sur le
développement et le maintien des capacités d'agir de la personne,
lui permettant une plus grande autonomie et une meilleure qualité de
vie. Or, pour concrétiser une telle orientation, il importe que les
services aux bénéficiaires soient rendus au moment opportun afin
de prévenir toute détérioration précoce de
l'état de santé. De plus, l'approche de réadaptation ne
peut s'actualiser sans la collaboration de tous les intervenants. C'est
pourquoi nous privilégions le travail en multidis-ciplinarlté,
qu'il ne faut pas confondre avec l'intervention parallèle de plusieurs
professionnels oeuvrant auprès d'un même
bénéficiaire. Pour nous, un membre important de l'équipe
multidis-plinaire est le client lui-même. La multidisci-plinarité
implique que l'intervenant, tout en gardant son identité
professionnelle, doit respecter les orientations de l'équipe de soins et
intervenir en fonction des priorités établies. Cette façon
de procéder nous apparaît comme le moyen par excellence de faire
des choix qui ne se limitent pas à l'intervention ou à la
connaissance d'une seule personne.
Il nous apparaît essentiel de privilégier le
développement du concept de responsabilité du public en ce qui
concerne sa santé. Mettre de l'avant ce principe implique la diffusion
et l'acquisition de connaissances relatives à la santé. Le
citoyen pourra alors avoir un impact réel sur le maintien de la
santé. Notre système doit se doter de mécanismes
d'information et de sensibilisation de façon à rejoindre le
public en général et certaines populations cibles, comme, par
exemple, il a été fait avec le port de la ceinture de
sécurité et les programmes de sensibilisation à
l'égard de la violence faite aux femmes. De plus, on ne saurait trop
souligner l'importance de l'établissement d'une véritable
politique coordonnée de prévention.
Conscients des facteurs biologiques, psychologiques, sociaux et
environnementaux pouvant favoriser la santé, on doit investir autant au
plan de l'étude de l'interaction de ces différents facteurs qu'au
niveau du développement de nouvelles approches théoriques
reflétant ces préoc-
cupations.
Les programmes de prévention doivent être favorisés
au môme titre que l'aspect curattf, tout en considérant que les
méthodes d'évaluation ne sont pas comparables.
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, madame, est-ce que le
texte que vous avez en main est le même texte que vous avez donné
aux membres de la commission? Est-ce que vous avez modifié votre
texte?
Mme Picard-Greffe: Nous avons ajouté cette partie pour
bien situer où nous étions, mais, tout de suite après,
nous venons aux "items" proposés dans le mémoire.
Le Président (M. Joly): On pensait qu'on était
vraiment hors d'ordre.
Mme Picard-Greffe: Excusez-moi. C'est parce qu'on a l'habitude
que les gens nous demandent qui on est, les ergothérapeutes.
Habituellement, personne ne nous connaît; alors, nous avons cru bon de
vous expliquer qui nous étions. Si nos propos, tantôt, sur la
réadaptation... On sait que, maintenant, on parle beaucoup de
réadaptation, mais on voulait vous donner notre vision globale de la
réadaptation.
Le Président (M. Joly): Parfait. Allez, madame. Merci.
Mme Picard-Greffe: Nous voulions aussi dire, dans l'approche
réadaptation, que nous devions développer, à tous les
niveaux, une préoccupation en fonction d'une vision humanisante et
globalisante des services de santé, qui utilise le réseau social,
familial et professionnel de l'individu. L'approche communautaire, le travail
des groupes d'entraide, les ressources alternatives ou intermédiaires
doivent être privilégiés et bien articulés, si l'on
veut enrichir et rendre plus efficace notre réseau de santé.
Concernant la primauté des droits de la personne, nous trouvons
excellent que le législateur ait choisi de centrer son projet de
réforme du système de santé en fonction des droits de la
personne. Nous souscrivons à l'établissement de mécanismes
de protection des droits des bénéficiaires. Nous croyons que les
principes d'universalité et d'accessibilité doivent être
maintenus.
Au chapitre III, intitulé "Confidentialité du dossier
médical ou social", nous avons été surpris de la
terminologie utilisée dans le titre même de ce chapitre. Pourquoi
l'emploi de l'adjectif "médical" dans l'expression
"confidentialité du dossier médical ou social"? Pourquoi ne pas
parler simplement de "confidentialité du dossier du
bénéficiaire", tel qu'employé au point 349 de
l'avant-projet de loi? Il est à noter que l'expression "dossier du
bénéficiaire" est d'usage courant dans d'autres textes de loi,
comme le Règlement d'application de la Loi sur les services de
santé et les services sociaux. Quoi qu'il en soit, si l'on tient compte
de l'approche globale du système de santé, nous trouvons que le
terme "médical" est restrictif, puisqu'il ne reflète pas
totalement la réalité. "Dossier du bénéficiaire"
serait plus approprié.
De plus, on devrait ajouter "ou à un autre professionnel",
à l'article 15, lorsque l'on dit qu'un bénéficiaire a
droit d'obtenir que l'établissement fasse parvenir une copie, un extrait
ou un résumé de son dossier à un autre
établissement ou à un médecin ou à un dentiste.
Concernant l'accès au dossier par le bénéficiaire,
à l'article 16, premier paragraphe, nous nous étonnons que seule
l'autorisation du médecin traitant soit requise. Une telle mesure, si
elle s'appliquait, serait inquiétante. Qu'adviendrait-il de la
confidentialité des notations au dossier faites par les autres
professionnels des services de santé? Pourquoi leur consentement
n'est-il pas requis également? On peut se demander si, à la
limite, ils auraient consigné aussi librement leurs réflexions au
dossier s'ils avaient su que l'autorité d'une seule personne, le
médecin traitant, pouvait décider si les renseignements doivent
ou non être transmis au patient.
Il ne faut pas comprendre ici que nous nous opposons à
l'accès par le bénéficiaire à son dossier. Nous
nous interrogeons sur le moment opportun pour lui de prendre connaissance des
renseignements et, surtout, des explications qui vont avec les notes qui sont
inscrites au dossier.
L'organisation et l'administration peuvent avoir un impact sur la
qualité des services offerts à la population. Pour cette raison,
nous recommandons l'élaboration de structures administratives
susceptibles de permettre un encadrement optimal de la pratique des
professionnels pour offrir à la population des services adéquats
et complets, compte tenu des ressources.
Comme les conditions administratives ont une conséquence directe
sur la qualité des services, il nous semble essentiel d'associer et
d'intégrer à l'administration toutes les personnes qui oeuvent
dans les établissements. C'est pourquoi nous regrettons, à
l'article 57, l'exclusion automatique de toute personne qui reçoit une
rémunération d'un établissement dispensant des services
reliés au domaine de la santé ou des services sociaux. À
ce sujet, nous estimons que les conseils d'administration se privent d'une
expertise importante.
À l'article 75, nous apprenons que le conseil d'administration,
qui siège au moins dix fois par année, "doit inviter, au moins
deux fois par année, le conseil consultatif du personnel clinique
à le rencontrer." Nous regrettons que les rencontres soient si peu
nombreuses, surtout si l'on tient compte de l'importance de son mandat que nous
avons trouvé, par ailleurs, bien défini et fort complet, à
l'article 106.
À l'article 107, nous avons été fort
étonnés que les pouvoirs du conseil consultatif du personnel
clinique sont exercés par un comité exécutif formé
de cinq personnes faisant partie du personnel clinique, du directeur
général, du directeur des services professionnels, plus un
médecin ou un dentiste désigné par un conseil des
médecins, dentistes ou pharmaciens. Pourquoi inclure un médecin
dans le conseil exécutif du personnel clinique, alors qu'il n'est
aucunement question d'inclure un représentant du personnel clinique au
sein du conseil des médecins, dentistes et pharmaciens?
À l'article 104 concernant la nomination des directeurs des
services hospitaliers et des services administratifs, nous estimons qu'il
serait plus qu'utile de prévoir la nomination de ces personnes en vue
d'un meilleur fonctionnement des établissements de santé. Ce
directeur nous semble absolument essentiel au bon fonctionnement d'un centre
hospitalier. Les services hospitaliers constituent la structure administrative
qui responsabilise à la fois les professionnels à l'emploi de
l'établissement et l'établissement lui-même par rapport
à la protection du public.
Nous croyons que tous les professionnels, qui ne sont ni
médecins, pharmaciens, dentistes ou infirmiers, qui fournissent des
soins dans un centre hospitalier ont le droit de relever d'un directeur qui
coordonne strictement les activités de ces derniers. Le présent
avant-projet de loi est muet sur ce droit aux professionnels en ne
prévoyant que ce qui concerne les médecins, dentistes,
pharmaciens et infirmiers. À notre avis, les fonctions et
responsabilités de ces directeurs doivent être clairement
établies afin d'obtenir, pour les professionnels qui fournissent des
soins, un modèle de fonctionnement aussi efficace que celui des
médecins, pharmaciens, dentistes et infirmiers.
La réglementation devrait reconnaître, sur le plan
administratif, que tous les professionnels soient clairement regroupés
dans des unités administratives distinctes des départements
cliniques médicaux, la gestion professionnelle et administrative de ces
unités devant alors être assurée par une personne
responsable de la même profession. (16 h 30)
Les données recueillies par notre comité d'inspection
professionnelle démontrent que les ergothérapeutes
regroupés dans un service dirigé par un ergothérapeute ont
un rendement supérieur tant au niveau de la qualité que de la
quantité des actes, qu'ils organisent mieux leurs interventions en
fonction des besoins des bénéficiaires et des priorités de
l'établissement. Nous notons également chez eux une plus grande
motivation à actualiser leurs connaissances.
L'article 159 traite de l'évaluation périodique de la
qualité des services. Nous apprécions que l'on ait songé
à inclure une telle mesure. Il est évident que les
établissements doivent s'assurer d'offrir des services de qualité
aux bénéficiaires. Pour arriver à cette fin, ils doivent,
notamment, instaurer des programmes d'appréciation de la
qualité.
Par nos commentaires et recommandations, nous exprimons notre souci
concernant la santé des Québécois et notre désir de
participer à l'amélioration du système de santé.
Nous vous remercions de la considération que vous accordez à ces
quelques commentaires et demeurons disponibles pour répondre à
vos questions.
Veuillez recevoir, M. le Président, M. le ministre, MM. et Mmes
les députés, le témoignage de notre grande
considération.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme Greffe. Maintenant, je
vais reconnaître M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup. Si je fais
une bonne lecture de votre mémoire, il y a un aspect fondamental de
changement de mentalité que vous interpellez. C'est fait de
manière très habile et ça pourrait changer une bonne
partie de l'économie de la loi. Cela semble découler du reste,
d'ailleurs de votre présentation. Ce n'est plus un malade, mais c'est un
bénéficiaire par rapport à un dossier médical. Ce
faisant, effectivement, ça ouvre la porte à une série
d'ajustements sur le plan législatif qui feraient reconnaître
d'autres professionnels que les médecins. Ça me paraît un
élément essentiel de votre présentation, très
habile, d'ailleurs. À ce moment-là, ça permet, si j'ai
bien saisi, de faire en sorte qu'à la fois le médical, la
santé et le social trouvent chacun leur place dans le système et
soient complémentaires davantage que l'un dominé par l'autre.
Est-ce que j'ai bien saisi?
Mme Picard-Greffe: Vous avez très bien saisi que nous
considérons que les clients ou les bénéficiaires ont des
besoins multiples qui sont d'ordre médical, social et professionnel.
Nous croyons que l'expertise d'une seule personne ne peut pas répondre
aux besoins de tous les bénéficiaires et à tous leurs
besoins. Effectivement, nous croyons qu'une équipe multidiscipli-naire
est plus habilitée à répondre aux besoins réels du
client.
M. Côté (Charlesbourg): J'aimerais vous entendre
davantage sur un cas pratique d'un centre hospitalier, sur la situation
vécue actuellement par rapport à ce qu'on vivrait si,
effectivement, sur le plan de la loi, dans l'économie de la loi, on
parlait dorénavant du dossier du bénéficiaire avec des
services professionnels. Ça se passe comment, demain matin, entre le
CMDP, le CCPC et le conseil d'administration? Comment est-ce qu'on articule
tout ça et comment est-ce que ça peut être viable à
l'intérieur d'un établissement?
Mme Picard-Greffe: Je pense qu'effectivement ça peut
être très bien viable. La difficulté qu'on éprouve
quand on travaille, par exemple, en équipe multidisciplinaire où
une seule personne peut prendre des décisions, c'est que le client est
privé de services dont II a besoin. Vous parliez tantôt de votre
frère qui avait été en centre hospitalier, qui avait
dû être transféré. Pour nous, il faut s'assurer que
le client... Quand nous disions tantôt qu'il devait avoir les services au
moment opportun, c'est ce qu'on veut dire. Est-ce qu'une personne qui est
hospitalisée en soins aigus et qui a besoin des services de
réadaptation... Parce que, pour nous, la réadaptation, ce n'est
pas quelque chose en bout de ligne; c'est quelque chose qui commence dès
l'apparition du handicap ou dès l'apparition de la maladie. Si on
pouvait offrir des services complets et adéquats à l'individu,
dans certains cas, on éviterait probablement le placement de cette
personne-là ou cette personne-là serait
référée à une ressource qui serait plus
adéquate.
La preuve de ça, c'est qu'il y a des clients qui sont
hospitalisés en soins aigus, qui vont en soins prolongés pendant
plusieurs mois, et on a vu quelques années, que l'on place en centre
d'hébergement et qui, là, parce qu'ils reçoivent des
services de réadaptation, eh bien, s'améliorent. Pour nous,
l'amélioration aurait dû arriver au tout début, parce que
ça a coûté cher à l'État que cette personne
soit maintenue avec des soins lourds alors que, si on était intervenus
au tout début, on aurait prévenu des détériorations
et le bénéficiaire aurait pu devenir actif plus rapidement.
La difficulté pour un bénéficiaire d'obtenir des
services complets de tous les professionnels dans un centre hospitalier vient
du fait que, pour être admis ou inscrit à l'intérieur d'un
établissement, c'est sur recommandation du médecin. Qu'il y ait
recommandation, très bien, pour l'hospitalisation d'un
bénéficiaire et que la demande soit adressée par un
médecin, sans contredit, nous sommes d'accord avec ça. Par
contre, au niveau des services ambulatoires et des cliniques externes, nous
croyons que l'accès aux services de réadaptation devrait
être fait directement. Il ne faut pas dissocier trop, je pense, services
médicaux et services de réadaptation en bout de ligne.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, comme je
suis un jeune ministre dans ce domaine, je me fais instruire en même
temps. C'est une bonne formation au plan de la mécanique. Effectivement,
on me confirme un certain nombre de choses en même temps. Ce n'est pas
parce qu'on doutait de votre vécu, mais je me le fais confirmer en cours
de route. C'est une facette du système et je comprends que vous
l'abordiez compte tenu de ce que vous défendez comme
préoccupations. Évidemment, vous n'avez pas à
défendre les autres aujourd'hui, vous avez à défendre les
ergothérapeutes.
Mme Picard-Greffe: Et les bénéficiaires.
M. Côté (Charlesbourg): Et les
bénéficiaires, oui, aussi, définitivement.
Mme Picard-Greffe: Surtout les bénéficiaires, parce
que vous savez, pour nous, quand on vous parte de la protection du public, les
clients qu'on voit en ergothérapie, M. le ministre, c'est une
clientèle multihandicapée, une clientèle qui a des
problèmes multiples. Ce ne sont pas des gens qui sont revendicateurs de
leurs services. C'est pour ça qu'aujourd'hui, on a voulu venir.
M. Côté (Charlesbourg): Je trouve ça
très heureux, parce qu'on a toujours dit qu'on placerait le
bénéficiaire au centre de nos préoccupations, que vous le
mentionniez et c'est très important.
Je vais vous poser une question plus générale. Le
système a des ratés. On a des problèmes dans le
système. Ces problèmes, d'après moi - on l'a abordé
au début de la commission parlementaire - dans certains cas, sont dus
à une dynamique du système. C'est un système curatif,
où on est dans le curatif. Évidemment, on paie la note et on paie
le prix. Si vous étiez a la place du ministre demain matin, pour
être capable de changer des choses, qu'est-ce que vous feriez en
premier?
Mme Picard-Greffe: Je ne sais pas ce que je ferais en premier
parce que je ne suis pas ministre, mais...
M. Côté (Charlesbourg): Rêvez. Rêvez
pour une journée. D'ailleurs, on rêve seulement une journée
dans ces postes-là.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Ne faites pas de cauchemar, madame.
Mme Picard-Greffe: Écoutez! On n'est pas des
spécialistes en évaluation des coûts, sauf qu'on peut
constater, par exemple, avec la clientèle avec laquelle on travaille,
que, quand on n'offre que des services curatifs, la santé de ces
personnes se détériore et il y a des acquis qu'elles ne font
jamais. Ça coûte cher, des programmes de prévention.
Ça coûte peut-être cher, l'intervention précoce. Je
ne le sais pas, mais je pense que ça vaudrait la peine qu'on fasse
clairement la démonstration du coût d'une intervention
précoce et des programmes de prévention par rapport au coût
des soins uniquement curatifs.
Un exemple qu'on pourrait prendre, c'est le port de la ceinture de
sécurité. Je pense qu'il a
été démontré qu'il y a moins d'accidents
d'automobile... Je ne sais pas si on a des données présentement
concernant, par exemple, ce que je mentionnais tantôt, le programme de
sensibilisation à l'égard de la violence faite aux femmes et ce
dont on parle aussi maintenant, la violence faite aux personnes
âgées. Est-ce que le ministère ne pourrait pas mettre sur
pied des programmes d'évaluation de ces campagnes de sensibilisation?
Ça coûte cher, la prévention, mais, si on la repousse tout
le temps, à un moment donné, on ne sera plus capables de payer.
Je suis peut-être une intervenante, mais je suis aussi une "payeuse de
taxes". Alors, je pense qu'à un moment donné, je sais que vous
avez des choix à faire. La population n'est pas capable de payer sans
arrêt. En tout cas, ce qu'on a remarqué par l'intervention
précoce, par la réadaptation dès le début de
l'apparition des maladies, c'est que ça évite des
déboursés à l'État. SI vous pensez, par exemple,
à un jeune paraplégique à qui on offre tous les services
et qui peut aller sur le marché du travail après, si on avait
calculé ce que ça nous aurait coûté pour le garder
dépendant en institution par rapport à ce que ça nous
coûte...
Sauf que vous avez des choix à faire à ce
moment-là. Quand, par exemple, pour ce bénéficiaire, on
demande un fauteuil roulant spécialisé qui coûte plus cher,
il faut bien penser que ce n'est pas juste parce qu'il coûte plus cher.
C'est que ce sont ses jambes qu'on lui redonne. Si un individu n'a qu'à
rester chez lui, il n'a pas besoin d'un fauteuil roulant
supersophistiqué. Par exemple, s'il doit aller au travail, il a besoin
d'un fauteuil qui soit léger afin qu'il puisse le mettre dans sa voiture
lui-même.
Par exemple, au niveau des jeunes adultes psychotiques, ça
coûte très cher à l'État, et on voit les
problème d'itinérance qui arrivent maintenant. Est-ce que
ça coûte moins cher, le développement de
l'itinérance par rapport au développement, par exemple, de
plateaux de travail. On sait qu'une grande majorité de ces clients ne
pourront peut-être pas aller sur le marché compétitif du
travail. Mais est-ce qu'on ne peut pas créer des plateaux de travail,
des ateliers de travail protégés? Je pense qu'il faudrait
peut-être nous démontrer que ça coûte moins cher,
faire juste du curatif que de la prévention. Faut-il beaucoup de
courage, par exemple, peut-être pour aller à la
prévention.
M. Côté (Charlesbourg): D'ailleurs, vous nous en
donnez déjà un exemple dans votre mémoire en parlant
davantage du bénéficiaire avec tout ce que ça comporte.
C'est peut-être la voie qu'on sera appelés à suivre
éventuellement. Mais une chose est certaine, c'est que vous mettriez
l'accent sur la prévention. Disons qu'on prendrait la chance ou le
risque d'aller du côté de la prévention par rapport au
curatif. Évidemment, ce sont des équilibres à faire, qui
ne sont pas toujours faciles. Vous l'avez dit, vous payez des taxes. Mais il y
a des limites à payer aussi. Donc, ce n'est pas toujours facile de
trouver la solution. On va tenter de s'inspirer de quelques-unes de vos
recommandations pour tenter de trouver les bonnes solutions. Merci.
Mme Picard-Greffe: Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le
leader de l'Opposition et député de Joliette, M. Chevrette.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Moi aussi, madame,
d'entrée de jeu, je vous dirai que je trouve ça
intéressant que vous parliez de la prévention. Le ministre dit
qu'il est un jeune ministre; ça fait quatre mois. Moi, j'ai fait
à peine douze mois à ce poste-là, mais c'est suffisamment
long pour comprendre la disproportion entre le curatif et le préventif.
Ce n'est pas croyable combien on peut injecter et de force, on est
obligés, parce que c'est toujours pathétique des cas flagrants
qui exigent de mettre des sommes immédiatement. Et tu oublies
précisément que, si tu en avais mis... Ça, c'est un
débat de société qu'il aurait fallu faire probablement il
y a longtemps.
Mais je suis entièrement d'accord avec l'approche. On en a eu la
preuve avec la sécurité et santé au travail quand Pierre
Marois, à l'époque, avait pris le taureau par les cornes, il faut
le dire, et avait décidé qu'on miserait dorénavant, au
niveau de la santé et de la sécurité au travail, sur le
système de prévention avec les comités d'usine, avec une
prime maintenant, je pense, qui est même basée sur le dossier de
l'entreprise. Et, dans plusieurs entreprises, on a institué toutes
sortes de campagnes de prévention, de promotion de la
sécurité et puis ça a porté des fruits.
Je suis convaincu que c'est la même chose au niveau de la
santé. Je prends les personnes âgées, en particulier,
où votre profession joue un rôle assez extraordinaire. Des
personnes qui, il y j a 20 ans, auraient été vouées au lit
et aux plaies de lit, à toutes fins pratiques, aujourd'hui,
réussissent à se déplacer pour aller prendre leurs propres
repas et sont toutes fières de faire quelques pas devant leurs enfants.
Et moi, personnellement, je trouve ça extraordinaire. Je trouve qu'il y
a de l'humain dans votre mémoire et je tenais à souligner la
justesse de vos propos. (16 h 45)
Vous posez une question au ministre. Il n'y a pas répondu, mais
je vais la reprendre pour vous et je vais lui dire qu'il prenne ça sur
mon temps pour qu'il réponde. A la page 8 du mémoire, vous
demandez au ministre pourquoi il y a un médecin qui siège sur le
comité; moi aussi, ça m'a frappé, puis ma collègue
des Chutes-de-la-Chaudière aussi. Donc, je vais demander au
ministre de répondre à la question, parce que je me
demandais, mol aussi, pourquoi un médecin viendrait arbitrer l'acte
professionnel qu'il ne connaît peut-être môme pas. Donc,
j'aimerais entendre le ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Ce n'est pas un traquenard, c'est vraiment pour
savoir.
M. Côté (Charlesbourg): Non, non, je comprends. Je
ris parce que j'ai posé la même question. Ce n'est pas moi qui
l'ai rédigé et, évidemment, c'a été fait de
bonne foi de la part de tout le monde- L'objectif visé par cela
était effectivement qu'il y ait échange d'informations,
complémentarité entre les différents services, mais,
évidemment, après, ça pose une autre question...
M. Chevrette: Le dilemme à l'inverse, oui.
M. Côté (Charlesbourg): ...l'ascenseur est
monté, est-ce qu'il redescend? Alors, s'il n'y avait pas cette
prévision au niveau de la loi? Donc, l'idée première
était, bien sûr, de rendre complémentaire et de faire
circuler l'information de la meilleure manière possible.
Évidemment, ça se fait dans un sens, à ce que j'ai
compris, ça ne se fait pas dans l'autre. J'ai vu le trou.
Mme Picard-Greffe: Merci.
M. Chevrette: Bon, bien, vous repartez enrichie, madame.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Et monsieur. Sur le conseil d'administration
unifié, j'ai difficilement compris votre position. On sait qu'il y aura
une régie régionale. D'abord, est-ce que vous acceptez ce type de
régie régionale de façon claire?
Mme Picard-Greffe: Dans notre mémoire, on n'en a pas
parié.
M. Chevrette: Non, c'est pour ça que je vous pose la
question.
Mme Picard-Greffe: Boni
M. Chevrette: Après ça, je reviendrai au conseil
d'administration. Commençons par la régie régionale.
Mme Picard-Greffe: Nous croyons à la régie
régionale. Si nous croyons, par exemple, comme on l'a
démontré tantôt, que les bénéficiaires ont
des besoins spécifiques, il faut bien croire que, dans les diverses
régions de la province, les besoins peuvent être
différents. Je pense qu'on ne vit pas sur la Côte-Nord comme on
vit dans un centre urbain. C'est pour ça que nous croyons effectivement
que des décisions au niveau des réglons doivent être prises
au niveau de comment on va dispenser des services de santé et des
services sociaux. Nous croyons effectivement que la couleur régionale
est importante dans la distribution des services de santé.
Pour ce qui est des conseils d'administration qui seraient
regroupés, nous nous sommes fortement interrogés sur ce
sujet-là et présentement on voit difficilement, en
éloignant les décideurs du milieu où se fait
l'intervention, que ça va nécessairement être dans le sens
d'un meilleur service aux bénéficiaires. Pour nous, nous croyions
à la gestion plus participative des gens quand on s'interrogeait sur le
fait que le comité consultatif ne devienne maintenant vraiment qu'un
comité consultatif, puisqu'il ne siège nulle part. Ce n'est pas
que l'on ne reconnaisse pas l'importance pour le bénéficiaire ou
pour la population de siéger dans les conseils d'administration, sauf
qu'on pense qu'on est, nous aussi, partie de la population et qu'on devrait
aussi être là, et qu'on a une expertise peut-être importante
à donner. Et, en faisant des superstructures administratives, un des
objectifs, en tout cas, qu'on avait cru comprendre, d'abord, était
d'avoir une structure plus de la base. On a comme de la difficulté
à comprendre qu'une superstructure va aller davantage vers la base.
M. Chevrette: O.K. Je vais laisser ma collègue de
Chicoutimi poser une question.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Madame, j'avais
quasiment le goût d'une demi-réponse tout à l'heure
à votre question. Je me rappelle les difficultés que ça a
posées juste d'ajouter au conseil des médecins et dentistes la
présence d'un biochimiste et de l'autoriser à diriger un
département de biochimie à l'hôpital. Ça a fait tout
un débat. Finalement, on a passé à travers, mais ça
explique que ça va dans un sens où l'ascenseur ne redescend pas
tout le temps.
Dans votre mémoire, vous nous partez, à la page 6, de
l'accès au dossier, en rappelant que le bénéficiaire est
malade. D'abord, je dois vous dire mon étonnement. D'abord, que le
patient, ou le bénéficiaire, ou le malade n'ait pas accès
à son dossier, ça m'étonne. J'avais toujours cru
naïvement que, si je demandais mon dossier médical, je l'avais.
Alors, là, on voit que ça demande l'autorisation du
médecin ou, selon vous, du professionnel impliqué.
Que dites-vous, en pariant de l'accès au dossier, du projet qui
est en train de mijoter au ministère à l'effet de mettre sur le
marché une
carte-santé avec une puce qui donnerait des informations sur le
dossier médical, ce qu'ils appellent la carte à puce, une petite
mémoire qui donnerait le dossier médical des personnes
concernées? vous, comme professionnels, qu'est-ce que vous en
pensez?
Mme Picard-Greffe: En réadaptation, nous avons peu affaire
avec une clientèle de superutilisateurs de services. Cette
carte-là, j'ai cru comprendre, bon, qu'elle donnait le dossier
médical, mais qu'elle pouvait donner aussi un portrait du type de
consultation des clients envers les services. Je pense qu'on voulait identifier
un peu s'il y avait des surutilisateurs de services. Pour ce qui a trait
à la réadaptation, ça ne s'applique pas. D'abord,
l'accès direct aux services d'ergothérapie est difficile. En
plus, les clients qu'on a n'ont pas nécessairement une
accessibilité si grande que ça. On vous a dit tantôt que la
réadaptation commençait à être reconnue, mais
peut-être pas suffisante. Quand on parte d'accessibilité, on parie
d'être suffisants aussi pour donner les services requis.
Présentement, nous sommes encore en pénurie
d'ergothé-rapeutes au Québec, malgré que nous ayons
été très heureux récemment que le ministère
ait pris, quand même, concernant l'ergothérapie, des
décisions concernant l'élargissement des contingentements
universitaires. Alors, les clients qui consultent en ergothérapie ne
sont pas des surutilisateurs de services. L'accessibilité à nos
services est encore assez difficile.
Mme Blackburn: Mais, ce n'était pas tant sur l'idée
à savoir si vous, ça vous rendrait service, mais au plan de
l'éthique, est-ce qu'il est souhaitable qu'au Québec on mette sur
le marché une telle carte pour vérifier s'il y a surconsommation
des services médicaux? Pour contrer une certaine surconsommation, est-ce
qu'on ne pourrait pas mieux envisager, vous savez, quand lorsqu'ils passent la
"castonguette", là, qu'on ait, comme pour nos cartes de crédit,
un truc là-dessus? Si le médecin mettait deux ou trois mots par
rapport à l'examen auquel il vient de procéder puis le prix au
bout? Évidemment, je suis en train d'essayer de toucher à l'autre
bout de la...
Mme Picard-Greffe: Effectivement...
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, là. J'aimerais
peut-être juste me servir de mon droit de parole de parlementaire aussi
pour ajouter que ce n'est pas dans le but de limiter des services, mais
plutôt dans...
Mme Blackburn: Non, non, ce n'est pas ça que j'ai dit.
Le Président (M. Joly): ...le but de donner un meilleur
service aussi et, par la même occasion, nécessairement, c'est bien
sûr, de découvrir s'il y a des abus en établissant un
profil de l'utilisateur.
Mme Blackburn: Mais simplement, M. le Président, je
voulais avoir l'avis de madame ou de monsieur au plan de l'éthique. Ce
nouveau "Big Brother" qu'on met en marché, qui va regarder combien de
consommations ou combien de consultations vous avez faites, qui risque de
traîner dans le dossier les préjugés des médecins -
parce qu'il y en a qui en ont, peut-être à raison aussi - est-ce
que c'est normal, est-ce que c'est souhaitable? Et si on veut contrôler,
est-ce qu'il ne serait pas préférable de s'assurer que les gens
réalisent bien ce que coûte une consultation et d'obliger le
médecin à dire quel type d'examen il a fait lorsqu'il a pris
trois minutes et que ça a coûté 35 $? Je ne
détesterais pas ça.
Mme Picard-Greffe: Bon. Face à ce que les clients soient
plus conscients de leur santé et des services parce qu'ils vont demander
les coûts de leurs services, nous sommes tout à fait d'accord.
Quel moyen prendre pour que les gens deviennent plus conscients? Ça,
c'est peut-être à déterminer. Une chose qui est certaine,
par exemple, la confidentialité des renseignements doit être
à tout prix maintenue.
M. Chevrette: Est-ce que tu me permets une suggestion?
Mme Blackburn: Oui, vas-y.
M. Chevrette: Je vous suis sur votre dernière remarque.
Moi, c'est un danger, puis de nature autre que celle de ma collègue. Je
prends, par exemple, quelqu'un qui aurait des doutes sur une maladie
éventuelle. Sachant qu'avec la puce c'est affiché, puis que la
carte fait le tour de plusieurs mains et non pas d'une seule, est-ce que
ça ne serait pas même un incitatif à ne pas se
prémunir? Ça peut aller jusque-là. Moi, je crains cette
dimension-là. Également, prenez, par exemple, à partir de
cartes, il y a toutes sortes d'ententes qui se font, d'échanges de
renseignements. En tout cas, j'ai de fortes réticences là-dessus
par rapport à l'individu parce que la puce... Un coup sur la carte,
n'oubliez pas une chose, c'est dans les mains de tous ceux à qui elle va
passer. Le dossier devient public et entre plusieurs mains. Est-ce que vous
l'avez réalisé dans ce sens-là, aussi?
Mme Picard-Greffe: Comme je vous le dis, les principes de
confidentialité, pour nous, sont très importants.
Le Président (M. Joly): Écoutez... M. Chevrette:
II nous reste du temps.
Mme Blackburn: Oui.
Le Président (M. Joly): Est-ce que je peux me permettre
une intervention? J'avais peut-être les mâmes appréhensions,
mais là où je perds ces appréhensions, c'est que, O.K., on
se dit que c'est la confidentialité qui peut peut-être en prendre
un coup, sauf que ce sont tous des professionnels qui auront le même
système et qui auront, comme on dit, le mot de passe pour entrer dans la
puce et aller chercher les informations. Sachant que ces professionnels sont
tous liés par le même secret, à ce moment-là, je
suis pas mal moins inquiet. À ce moment-là, on est en train de
mettre en doute le secret que les professionnels de la santé nous ont
garanti. Alors, partant de là, je pense que l'argument de Mme la
députée perd de la valeur.
Mme Blackburn: M. le Président...
Le Président (M. Joly): Allez, madame, vous avez du
temps.
Mme Blackburn: Bien! Alors, vous oubliez le piratage. On perce
les codes d'à peu près tous les services informatiques...
Le Président (M. Joly): Où est l'avantage de
pirater?
Mm» Blackburn: ...y compris ceux de la NASA. Alors, vous
savez, ce n'est pas très, très sûr. Mais au-delà de
ça, la question que je poserais simplement c'est: SI vous, vous saviez,
demain matin, qu'il y a une puce sur votre carte d'assurance-maladie, qui vous
suit n'importe où, même si on ne va pas souvent... C'est
peut-être moins grave parce que je ne fréquente pas souvent les
cabinets de médecin, mais, même à ça, dites-moi que
vous, personnellement, ça ne vous dérangerait pas un peu.
Là, on le voit parce qu'on semble vouloir viser les surconsommateurs. On
va les étiqueter et on va leur donner une carte, à eux autres.
Ils sont supposés surconsommer parce qu'ils font un peu de para-nota -
je ne sais pas - qu'ils sont un peu des malades imaginaires. Tantôt,
comment allez-vous les distinguer? Il faudra les donner à tout le monde.
Et vous, est-ce que vous accepteriez d'avoir ce type de carte là,
sachant que n'importe qui qui met la main sur votre carte - pas n'Importe qui,
mais n'importe quel professionnel - pourra avoir accès à votre
dossier médical? Prenons-le autrement.
M. Côté (Charlesbourg): Ce n'est pas n'importe quel
professionnel qui y aurait accès.
mme picard-greffe: c'est ce que j'allais demander: est-ce que ce
sont tous les professionnels qui y auraient accès et quel type
d'information serait accessible et par qui? nous ne sommes pas des
spécialistes en informatique. Je ne peux pas vous dire le niveau de
sécurité d'un système comme celui-là. La seule
chose, c'est que le principe de confidentialité, pour nous, par
exemple...
Le Président (M. Joly): Excusez, madame!
Mme Picard-Greffe: ...doit être très important.
Mme Blackburn: Si on veut...
Le Président (M. Joly): Est-ce que. pour le
bénéfice de cette commission, les gens de l'Opposition
permettraient au ministre d'apporter peut-être un élément
qui pourrait rassurer?
M. Chevrette: Ah! Pas question de... Mme Blackburn: Non,
ce n'était pas...
M. Chevrette: Ce n'est pas de rassurer, c'est d'expliquer comment
ça marche, mais...
Mme Blackburn: C'est sur le principe...
M. Chevrette: Ça n'enlèvera pas, sur le
principe...
Mme Blackburn: Sur le principe, j'aurais des difficultés
à...
M. Côté (Charlesbourg): Je me bornerai tout
simplement à dire, à ce moment-ci, que ce ne sont pas tous les
professionnels qui vont y avoir accès.
Mme Blackburn: Non, ce sont les médecins.
M. Côté (Charlesbourg): Non, non, pas tous les
professionnels.
Mme Blackburn: Tous les médecins. Non?
M. Côté (Charlesbourg): Ce ne sont pas tous les
professionnels et ça ne veut pas dire nécessairement tous les
médecins. Ce ne sont pas tous les professionnels qui vont avoir
accès à la carte, à certaines données de la carte.
Évidemment, de la manière dont c'est parti, la carte est devenue
un instrument de contrôle. Ça va servir à ça, mais
c'est accessoire par rapport à la flexibilité du dossier. Et ce
n'est pas tout le dossier médical qui va être sur la carte,
ça paraît déjà très évident. C'est de
l'information de base qui va permettre de suivre le dossier, question
d'efficacité dans le système, évidemment, vis-à-vis
des professionnels. Mais ce ne sont pas tous les professionnels qui vont avoir
accès à la carte, ça m'apparaft extrêmement
important. Donc, l'aspect confidentialité, ce n'est pas un dossier
d'aujourd'hui. C'est un dossier
qui a toujours été questionné. Évidemment,
à partir du moment où on réfléchit plus avant et
où on veut aller en expérience-pilote, c'est pour vérifier
un certain nombre de choses, pour bien s'assurer que la confidentialité
des informations soit respectée en tout point. (17 heures)
M. Chevrette: En ce qui me concerne, M. le Président, si
c'est pour des notions de contrôle, je trouve que c'est extrêmement
risqué de prendre des chances pour que ne serait-ce que peu d'invididus
voient leurs droits affectés. À mon point de vue, si ce sont des
contrôles, je pense qu'il faut s'organiser pour que les droits
fondamentaux des individus, qui sont protégés par la Charte des
droits et libertés, ne soient nullement en cause. Ça pourrait
risquer...
M. Côté (Charlesbourg): Sinon, ils seraient
attaqués...
M. Chevrette: Parce que je sais qu'on reçoit des appels,
des fois - c'est ça que je voulais dire tantôt - dans des
circonstances... On sait très bien, par exemple, qu'il y a des moments
précis où ça... Dans les négos, par exemple, un
individu, qui est en fusil après, quel qu'il soit, le gouvernement en
place, divulgue certaines informations. Les politiciens ne s'en servent pas
précisément de ce type d'informations, parce que c'est une
attaque aux droits et aux libertés fondamentales d'une personne, surtout
quand on parle de dossier médical. Je pense qu'avec ma consoeur on
trouve ça sacré comme principe fondamental à
respecter.
Mme Blackburn: Je ramène la question que j'avais
posée tout à l'heure. Si on veut vraiment faire des
contrôles, est-ce qu'il ne serait pas plus souhaitable et plus efficace
que le médecin, à la suite d'une visite qu'il facture,
présente, en une phrase, en quelques mots, l'essentiel de l'examen
auquel il a procédé et le coût de la visite? À mon
avis, ce serait intéressant pour le patient qui vient de se
présenter, parce qu'il saurait combien ça a coûté
et, en plus, parce que le médecin serait obligé de dire ce qu'il
a fait pour 35 $, quand vous êtes deux minutes dans son cabinet. Si c'est
un psychiatre, c'est un peu plus long et c'est un peu plus cher aussi. Est-ce
que ça ne serait pas une façon d'éviter les abus si les
gens réalisaient bien ce que ça coûte chaque fois qu'ils
s'en vont dans un cabinet de médecin? Ça éviterait ce
qu'on est en train d'envisager. Je trouve ça effrayant. Parce que ce
genre de choses n'est pas facile à contrôler, même si
j'admets avec le ministre que ce ne sera pas tous les professionnels qui y
auront accès. Si j'ai laissé penser que ça pourrait
être tous les professionnels, je pense que non. J'avais cru comprendre
que c'était les médecins. Mais le médecin
spécialiste, autant que le médecin généraliste, du
moment où vous vous présenterez dans son cabinet, j'imagine qu'il
y aura accès; sinon, ce serait inutile. j'imagine que tous ceux qui
seraient susceptibles d'être consultés par cette personne, du
moment qu'il y a un code sur sa carte, pourraient avoir accès à
son dossier. je ne vois pas trop comment ça pourrait fonctionner
autrement.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, il y a
encore des étapes à franchir. Vous aurez compris que, la semaine
dernière, c'est le Dr Richer qui a évoqué
l'hypothèse de la carte à puce, mais vous n'arrivez pas avec une
carte à puce du jour au lendemain sur la place publique.
Évidemment, si on a senti le besoin de se faire autoriser par la Conseil
des ministres pour aller vérifier sur place comment ça pourrait
se passer, c'est qu'il y a quand même des problèmes sur le plan de
la confidentialité, sur le plan de l'accessibilité. Il faut, bien
sûr, vérifier pour la rendre optimale. Le but de ça n'est
pas le contrôle... Non, non.
Mme Blackburn: Non?
M. Côté (Charlesbourg): Le but premier n'est pas le
contrôle. C'est parti comme ça, évidemment, mais ce n'est
pas le contrôle.
Vous évoquez un autre mécanisme selon lequel les gens
devraient éventuellement signer ou prendre connaissance des actes qu'a
posés le médecin et de ce qu'il a pu facturer. Ça a un
rôle d'éducation aussi. Évidemment, ça a un effet de
contrôle aussi. La personne, constatant qu'effectivement, selon la
consommation d'actes, des montants s'additionnent, va prendre conscience de ce
que ça coûte. Évidemment, c'est un autre
élément extrêmement important qui est analysé de
manière aussi sérieuse que les autres, sur le plan de
l'information, de l'éducation des gens aux coûts inhérents
à la consommation. Dans ce cas-là, ça fera l'objet de
discussions éventuellement - déjà, comme c'est sur la
place publique, tout le monde en discute et je trouve ça sain - de
façon que, sur la place publique, on puisse voir, dès maintenant,
les embûches et tenter de solutionner les embûches dans la mesure
où il y en a. Mais ce n'était pas d'abord prévu pour
être un moyen de contrôle. On a parlé de médication;
450 000 000 $ par année de médicaments. Si quelqu'un vient me
faire la démonstration qu'il n'y a pas d'abus, vous allez avoir de
l'ouvrage à faire de côté-là. Il y a des abus,
de...
Mme Blackburn: Du côté des spécialistes.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, aussi, de la même
manière. Quand on parle de la carte à puce, ce n'est pas
uniquement pour les personnes âgées. Quand on parle de la carte
à puce, c'est pour tout le monde qui va éventuellement utiliser
le système de santé.
J'ai dit que, pour qu'il y ait des abus, ça prend des abuseurs
dans la consommation et ça prend des abuseurs dans la dispensation des
services. Évidemment, un client tout seul n'abusera pas et un
médecin tout seul n'abusera pas non plus. Il faut au moins qu'ils soient
deux, donc un bénéficiaire et un dispensateur de services.
Évidemment, on verra au bout de la ligne ce que ça donne, mais on
va tenter de tenir compte de toutes les inquiétudes qu'il y a sur la
place publique et il faut les prendre au sérieux parce que la
confidentialité, ça m'ap-paraft un élément
absolument déterminant dans le processus et on va en tenir compte.
Le Président (M. Joly): Y a-t-il autre chose à
ajouter?
Une voix: Merci beaucoup. M. Côté (Charlesbourg):
Merci.
Le Président (M. Joly): Au nom des membres de la
commission, je vous remercie. J'inviterais maintenant les représentants
de l'Ordre des chiropraticiens du Québec à bien vouloir prendre
place, s'il vous plaît. Bienvenue à cette commission.
J'apprécierais si la personne responsable pouvait s'identifier et
identifier les gens qui l'accompagnent, s'il vous plaît.
Ordre des chiropraticiens du Québec
M. Denis (Normand): Dr Normand Denis. À mon extrême
gauche, le Dr Daniel Boisvert, 2e vice-président de l'Ordre; Me Louise
Ta-ché-Piette; à mon extrême droite, le Dr Yves Roy,
secrétaire-trésorier de la Corporation et le Dr
André-Marie Gonthier, 1er vice-président.
Le Président (M. Joly): Alors, vous connaissez la
procédure. Vous avez une vingtaine de minutes pour nous livrer votre
mémoire et, par après, les membres de chacune des deux formations
auront le loisir de vous poser des questions.
M. Denis (Normand): D'accord, merci. M. le Président, M.
le ministre, mesdames, messieurs de la commission. Dans le mémoire que
nous avons présenté à cette commission, nous avons
exposé les principales caractéristiques de ce que nous avons
appelé, à l'instar des membres de la commission Rochon, une
nouvelle culture de la santé. Cette nouvelle culture de la santé
a émergé des transformations que nos valeurs ont subies au cours
des deux dernières décennies. Elle a donné naissance
à des changements d'attitudes et de comportements au sein de la
population qui ont eu des répercussions dans le domaine de la
santé. À la lumière de ces caractéristiques, nous
nous sommes demandé si l'avant-projet de loi que l'on nous
présentait reflétait bien les nouvelles attentes de la population
et répondait à ses besoins. Après une étude
attentive de cet avant-projet de loi, nous en sommes venus à la
conclusion qu'il ignorait tout bonnement l'émergence de cette nouvelle
culture de la santé et qu'il perpétuait le système qu'il
voulait transformer pour solutionner les problèmes qu'il ne cesse de
générer.
Pourtant, la population a recours, de plus en plus, aux soins de
santé naturelle. Elle se préoccupe de prévention en
matière de santé; elle cherche à conserver son autonomie
physique le plus longtemps possible; elle demande que l'on fasse la promotion
de la santé. Or, le système de santé que nous avons et,
par ricochet, celui qu'on nous propose est d'abord et avant tout un
système de maladie. Tout y concourt, y compris l'approche
thérapeutique qu'il préconise. Les soins naturels en sont
absents; la prévention y est encore au stade embryonnaire; par
l'utilisation massive des médicaments, bon nombre de patients perdent
graduellement leur autonomie physique, principalement chez les personnes
âgées.
La promotion de la santé y est ponctuelle. Le temps d'une
campagne publicitaire et la responsabilisation du citoyen face à sa
santé est toujours l'apanage d'un très petit groupe de
professionnels de la santé à l'intérieur du
système. Le problème de l'engorgement des urgences et des
hôpitaux ne se réglera pas par le simple apport d'argent neuf, que
ce soit pour accroître les ressources humaines ou pour allonger les
couloirs des hôpitaux. Ce qu'il faut avoir le courage d'amorcer comme
changement, c'est la philosophie même qui sous-tend toute l'approche des
soins de santé. Elle est une des principales causes du problème.
Ce refus de modifier cette approche a depuis toujours maintenu à
l'écart du système toutes les professions de la santé qui
préconisent une approche naturelle des soins de santé. Et c'est
le cas des chiropraticiens. Cette situation a eu pour conséquence et
continue de priver toute une population de soins naturels, ce qui a eu pour
corollaire de perpétuer souvent la surconsommation de
médicaments, de soins médicaux et de soins hospitaliers.
Actuellement, tout concourt à pénaliser le citoyen qui opte pour
une approche de soins de santé naturels. D'abord, il doit assumer les
coûts des soins qu'il privilégie, puis toute déduction
fiscale lui est refusée s'il n'a pas dépensé 3 % de son
revenu brut en soins de santé et, enfin, il est tenu par ses
impôts à financer pour un montant de 1800 $ par année le
système dont la préoccupation première est d'abord la
maladie, ensuite la santé.
Or, pour celui dont le revenu annuel est de 30 000 $, ses
déboursés en soins de santé devront être
supérieurs à 900 $ avant d'espérer
bénéficier de toute déduction fiscale. Lorsque la
prévention est au centre des soins de santé, la
maladie n'est pas omniprésente et des milliers de dollars ne sont
pas nécessairement dépensés chaque année en
traitement de maladie. Cette situation entraîne une
pénalité pour celui qui favorise la santé, contrairement
à celui qui demeure dépendant d'un système axé sur
la maladie.
Pour illustrer de façon encore plus précise cette
pénalité, nous rappellerons ici un fait que nous mentionnions
dans notre mémoire, à savoir l'obligation pour un citoyen
hospitalisé désireux de recevoir des soins chiropratiques de
faire appel à un avocat afin d'obtenir de la cour une ordonnance
l'autorisant à recevoir des soins chiropratiques à
l'hôpital en acquittant, bien sûr, les honoraires du chiropraticien
et de l'avocat, sans oublier les frais de la cour. Comme on peut le constater,
rien n'est épargné pour décourager le
Québécois et la Québécoise qui désire
recourir à des soins de santé naturels qui ont pour effet de le
maintenir en santé, le garder physiquement autonome, le responsabiliser
face à sa santé, l'inciter à privilégier la
prévention, et par surcroît, permettre au système de
santé d'économiser à plus d'un égard.
La question essentielle à se poser est de savoir si nous voulons
uniquement traiter la maladie ou travailler à garder la population en
bonne santé? Nous savons tous que la médecine traditionnelle a
toujours orienté ses efforts par le traitement de la maladie. Ne
serait-Il pas temps d'adjoindre à l'Intervention médicale
traditionnelle une nouvelle approche? Celle des soins de santé naturels
qui permettrait non seulement de répondre aux attentes et aux besoins
qui émergent de la nouvelle culture de la santé, mais
également d'apporter un élément de solution aux
problèmes de notre système de santé. Les seuls
professionnels de la santé légalement reconnus aptes à
prodiguer des soins de santé naturels et dont la formation universitaire
est égale à celle du médecin, comme le démontre
d'ailleurs le document de l'Université du Québec sur le projet de
doctorat en chiropra-tique que nous avons transmis en annexe de notre
mémoire, ce sont les chiropraticiens. Il est clair que, sans la
chiropratique notre système demeure sans soins de santé naturels
et que le législateur, s'il donne suite à son avant-projet de
loi, tel qu'il est formulé, perpétuera cette situation de
fait.
Nous ne sommes pas venus ici en promoteurs inconditionnels de
l'insertion des soins chiropratiques à l'Intérieur du
système de santé. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Nous
sommes 750 chiropraticiens au Québec. Il s'effectue environ 4 000 000 de
visites par année dans nos bureaux, ce qui représente une
dépense de la part de Québécois et de
Québécoises de 100 000 000 $ par année. Seulement, nous
sommes conscients que le système de santé au Québec
traverse une crise majeure et, selon notre diagnostic, nous savons que nous
détenons un des éléments importants de la solution. Si on
facilitait l'accès aux soins de santé naturels que
représente la chiropratique, la population serait en meilleure
santé car elle aurait à coeur la prévention de la maladie,
également, le maintien de sa santé et de son autonomie à
tout âge. Et comme corollaire, elle consommerait moins de
médicaments, séjournerait moins dans les hôpitaux, n'aurait
plus tendance à abuser de soins médicaux car elle serait en
santé et pourvue d'une éducation en la matière qui la
responsabiliserait.
Pour qu'une véritable réforme du système de
santé se réalise, il faudrait faire appel aux soins naturels et
aux professionnels reconnus qui les dispensent et s'assurer qu'ils prennent
leur place dans les institutions comme dans l'ensemble des autres structures et
organismes afin que soit promue la santé d'abord. Il va sans dire que
les transformations que nous proposons ne pourront pas s'effectuer du jour au
lendemain, mais devront certainement s'amorcer dans un proche avenir. Il faudra
en arriver à modifier, comme nous le recommandons dans notre
mémoire, la composition du Conseil des médecins, des dentistes et
des pharmaciens qui contrôle à toutes fins pratiques la vie
professionnelle de nos établissements dits de santé. Tant qu'un
chiropraticien ne siégera pas à ce conseil la population sera
privée de tout accès en milieu hospitalier à des soins de
santé naturels. (17 h 15)
Plusieurs de ceux qui nous ont précédés à
cette table ont préconisé de nouvelles injections d'argent pour
répondre à la congestion du système. Nous sommes d'avis,
et les expériences passées que le système a vécues
semblent nous le démontrer, que l'apport pur et simple de nouveaux fonds
ne ferait que prolonger le marasme de ce système. Nous n'affirmons pas
qu'il faille rejeter toute révision du système de financement. Ce
que nous suggérons est l'amorce d'un virage à 180 degrés
qui s'imposera d'ailleurs dans un avenir peut-être pas si lointain.
D'autres avant nous ont parlé du besoin d'une révision de
fond au cours de laquelle il faudrait avoir le courage de s'attaquer aux
problèmes réels. Nous sommes d'accord. Sauf que, pour beaucoup de
gens, les seuls problèmes réels sont financiers. Ils
répugnent à questionner la philosophie et les approches
thérapeutiques d'un système qui a conduit un nombre trop grand de
personnes à la surconsommation de médicaments et qui
s'entête à se préoccuper presque exclusivement de maladies
et non de santé. Ce qui est troublant dans le discours qui se tient
présentement sur le système de santé et ses malaises,
c'est l'absence d'une préoccupation d'offrir aux gens l'accès aux
soins de santé naturels et de les percevoir comme un des
éléments de la solution. Toutes les recherches effectuées
au cours de la dernière décennie ont constaté
l'émergence d'une nouvelle culture de la
santé et ont identifié comme l'un des traits dominants le
recours, par une portion de plus en plus grande de la population, aux soins de
santé naturels et, en particulier, à la chlropratl-que.
On dit que si les personnes âgées n'occupaient pas les lits
d'hôpitaux, l'encombrement des salles d'urgence serait
réglé. Mais il semblerait qu'on ne se soit jamais posé la
question sur la façon de réduire l'occupation des lits
d'hôpitaux par les personnes âgées, sauf par des moyens
extérieurs aux personnes elles-mêmes. Certains ont répondu
qu'il faudrait construire de nouveaux centres d'accueil adaptés aux
nouveaux besoins. D'autres ont préconisé un accroissement des
soins à domicile. Ces approches ne font que déplacer le besoin
des ressources et le mal de place. Ce qu'il faut viser comme objectif est une
plus grande autonomie physique de nos aînés afin d'éviter
d'enclencher une dépendance aux médicaments qui
détériore souvent cette autonomie, ce qui entraîne la
dépendance aux services hospitaliers et à l'usage assidu de soins
médicaux.
Si nous travaillons dés maintenant à maintenir les gens en
santé, à les responsabiliser face à elle et à les
aider à conserver leur autonomie physique, nous pourrons utiliser les
ressources que nous devons consacrer à d'autres tâches et ainsi
rentabiliser notre système de santé. Le ministre de la
Santé et des Services sociaux est d'avis qu'il importe de
dénoncer les objectifs qui devront donner lieu à des
résultats concrets. Nous appuyons entièrement le ministre sur ce
point et nous croyons que cette voie sera créatrice d'avenir pour notre
système. Par ailleurs, nous lui demandons de s'assurer que les moyens
pour réaliser ces objectifs passeront, entre autres, par les soins de
santé naturels qui, seuls, pourront véritablement apporter le
changement de cap tant désiré par la population.
En terminant, je dirai aux membres de cette commission que les
problèmes de congestion des hôpitaux, de ceux qui entraînent
la perte d'autonomie physique de nos aînés et de la
surconsommation de médicaments, s'atténueront de façon
significative lorsqu'on favorisera les soins de santé naturels. Nous
n'avons pas la prétention de dire qu'ils ont réponse à
tout, mais ils pourraient participer à la solution de nombreux
problèmes de santé et à leurs conséquences pour la
population. L'accès à des soins de santé naturels signifie
à la fois une population en santé et un système de
santé qui en bénéficierait financièrement.
Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Denis. Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, j'ai
tenté de suivre avec le mémoire, mais j'ai l'impression que vous
aviez un autre texte.
M. Denis: Je vous ai pris par surprise.
M. Côté (Charlesbourg): Complètement par
surprise. J'ai eu de la difficulté à vous suivre, tout en vous
écoutant, à l'intérieur de votre texte. C'est un petit
peu... Évidemment on fait l'analyse du document qui était
là.
Ma première question est la suivante. Très
honnêtement, je pense que, partout dans nos familles, il y a des exemples
où l'on a effectivement mis la main dans notre poche pour aller voir un
chiro, à un moment ou à un autre, pour tenter de solutionner un
de nos problèmes de chasse ou après avoir forcé de
mauvaise manière, et en revenir très satisfait sur le plan des
services offerts et bien d'autres. Ce que vous proposez là, bien
sûr, est le virage, et vous l'avez qualifié à 180
degrés en allant dans le sens de la prévention. Je pense qu'il va
falloir en faire davantage de ce côté-là. Evidemment, il
s'agit de savoir comment on fait pour le faire. Après l'avoir dit,
ça va bien, mais le réaliser demande une bonne dose de courage et
d'habileté, à tout le moins. Lorsqu'on parle de la
présence des chiros un peu partout, parce que les trois recommandations
dans le mémoire font appel à une présence plus officielle
des chiros au CMDP qui pourrait être un CMDPC, ainsi de suite, avec tout
ce que ça concerne au niveau de l'appareil, est-ce qu'il existe dans
d'autres provinces ou dans d'autres pays des situations qui pourraient
être comparables à celle que vous proposez?
M. Denis: Aux États-Unis, il y a plusieurs
expériences qui ont cours depuis des années où cohabitent
médecins et chlropratlclens.
M. Côté (Charlesbourg): Dans le privé
là.
M. Denis: Pardon?
M. Coté (Charlesbourg): Dans le privé.
M. Denis: Aux États-Unis. Alors, j'imagine que c'est dans
le...
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, c'est parce que
la dynamique n'est pas la même si on est dans une situation où
c'est privé, où la complémentarité...
M. Denis: Ça diffère quelque peu.
M. Côté (Charlesbourg): C'est ça. Pardon?
M. Denis: Ça diffère quelque peu, le système
hospitalier.
M. Côté (Charlesbourg): avec un système comme
celui qu'on a, financé par le public presque en totalité, il n'y
a pas de ces expériences qui ont été vécues nulle
part ailleurs. on me
dit qu'en Ontario, il y a une assurance, semble-t-il. L'Ontario paie des
frais de chiro.
M. Denis: II y a huit provinces canadiennes où les soins
chiropratiques sont couverts par la Régie de l'assurance-maladie.
M. Côté (Charlesbourg): Mais dans les centres
hospitaliers, comment est-ce que ça se passe?
M. Denis: Bon. Dans les centres hospitaliers, c'est en
négociation présentement. Il n'y a pas encore d'expérience
vécue, à ce moment-ci.
M. Côté (Charlesbourg): Ce qu'on comprend, c'est que
dans le cas des actes par des chiropra-ticiens, c'est payé par
l'État, mais dans des cabinets privés.
M. Denis: C'est ça. Ce qu'il faut bien comprendre dans
cette approche... Nous, quand on dit que c'est un virage à 180°,
c'est nouveau, c'est difficile de l'imposer dans un système maladie. Par
contre, ce qu'on dit, c'est: laissons le choix aux patients, aux
bénéficiaires. S'ils se présentent et demandent des soins
chiropratiques, ils sont disponibles. Alors, selon nous, le choix premier
appartient aux bénéficiaires et non à une structure
hospitalière préétablie et qui date de plusieurs
années. Alors, les temps changent et ces structures devraient changer.
Je crois et nous croyons que c'est le bénéficiaire qui a un
premier droit de regard sur les soins de santé qu'il veut recevoir.
M. Côté (Charlesbourg): On me distrait par toutes
sortes de bonnes informations qu'on me transmet. Évidemment, demain, si
on décidait de vous inclure dans des centres hospitaliers, est-ce que,
dans votre esprit à vous, quand on a cette reconnaissance-là,
c'est qu'on va jusqu'au bout de notre raisonnement. Ça veut dire aussi,
probablement, en centre d'hébergement pour personnes âgées.
On va manquer de chiros tantôt parce que, si vous êtes 750, je
pense qu'on va avoir des problèmes tantôt.
M. Denis: Oui. Et je pense que c'est exactement notre point, ici,
qu'il faut commencer quelque part. Bon. Alors, on ne vous dira pas que demain
matin, soudainement, nous avons un système de santé versus un
système de maladie. Il y a un problème existant,
présentement, mais pour amorcer l'avenir, à un moment
donné, II faut arrêter et dire: À partir d'aujourd'hui,
nous allons essayer d'implanter une nouvelle philosophie qui va amener un
chiropratlcien à consulter dans des institutions et essayer de
promouvoir la santé plus que la surconsommation de
médicaments.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Donc, si je comprends,
si on faisait le virage de la prévention, je comprends qu'on ne vous
retrouverait pas nécessairement en centres hospitaliers ou dans les
centres d'hébergement parce que ça, c'est du curatif. D'ailleurs,
c'est ce que vous dénoncez un peu. On est dans le curatif.
M. Denis: Selon le spectre du système actuel, c'est
difficile de s'en sortir.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends, mais c'est
parce que quand on va à l'hôpital, en règle
générale, c'est parce qu'on est malade.
M. Denis: Par contre, considérez le nombre de gens qui se
promènent avec des lombalgies aiguës à l'urgence.
M. Côté (Charlesbourg): Je pourrais vous en parler
facilement. Je pourrais vous en parler facilement par une expérience
personnelle. Mais une chose est certaine, c'est que si on faisait le virage on
mettrait davantage l'accent sur la prévention. Dans ces
conditions-là, je vous verrais - c'est purement personnel. On
échange - pas dans un centre hospitalier, pas dans un centre
d'hébergement, mais peut-être davantage dans un niveau de service
sur le plan gouvernemental qui peut être offert à la
collectivité.
Première ligne, CLSC, par exemple, est-ce que ce ne serait pas au
niveau d'un CLSC qu'on devrait retrouver des chiros sur le plan de la
prévention au lieu de les retrouver en centre hospitalier ou en centre
d'hébergement, au moment où on est dans le curatif au
complet?
M. Denis: Encore là, si on prend... Il faut bien
comprendre. Quand on parle de 180 degrés, il faut essayer
d'éliminer les préconcepts que l'on a d'un centre
d'hébergement et de l'hôpital. L'hôpital, on pourrait en
discuter longtemps mais on ne tombera pas dans les "technicalités",
n'est pas obligatoirement un endroit où les gens reçoivent des
médicaments à haute dose. Bon, il peut y avoir une intervention
d'un spécialiste quelconque, suivi d'un autre par la suite pour qu'en
termes de santé, la santé revienne plus rapidement. C'est la
première des choses. Et c'est sûr que, dans ce contexte-là,
ce n'est pas uniquement le chiropraticien qui va changer l'approche ou une
philosophie sociale. Il va falloir qu'il y ait des efforts de faits qui
entourent l'éducation. Pour vous donner un exemple, on a fait un sondage
dernièrement: un chiropraticien donne, en moyenne, 22 minutes
d'éducation à un nouveau patient. Alors, nous évoluons
dans le système privé. Je vous entendais parler de la puce
tantôt. Nous, on n'a pas ce problème-là parce qu'ils paient
et ils savent combien, faites-vous en pas! En donnant l'éducation de 22
minutes, le patient considère que c'est inclus dans le prix de son
examen, mais cette éducation-là - et c'est là qu'il faut
bien corn-
prendre - elle est requise pour que le patient puisse comprendre que les
soins naturels, on y adhère uniquement lorsqu'on devient actif dans
notre thérapie. On ne peut plus être passif, c'est-à-dire:
donnez-moi des choses. Alors, notre intervention en est d'abord une
d'éducation pour que le patient comprenne comment fonctionne le corps
humain et, dans un deuxième temps, l'intervention se fait sans
médicament. Mais toute cette philosophie-là, on ne peut pas la
centraliser et dire: Non pas dans un centre d'hébergement mais dans un
CLSC, parce que là, on joue le jeu de l'ancien système de
santé. Je ne sais pas si je me fais clair, là.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, je comprends,
mais je ne suis pas sûr de partager votre point de vue, parce qu'il va
falloir commencer quelque part, sur le plan de la prévention. Il y en a
qui se fait un peu. On dit modestement: II faut en faire davantage. Les CLSC
sont là pour demeurer. Ils ont une vocation qui est extrêmement
importante. C'est pour ça que j'essayais de voir comment est-ce que
ça peut se faire. L'idéal, ce serait qu'il n'y ait pas un seul
patient dans les centres hospitaliers, au Québec. C'est ça,
l'Idéal. Si on n'avait pas un patient dans les centres hospitaliers, on
aurait réglé une grosse partie de nos problèmes mais,
évidemment, du curatlf, II y en aura toujours. Ce qu'on vise, c'est de
faire en sorte que les gens ajoutent des années à leur vie et de
la qualité aux années de leur vie. D'ailleurs, il en est question
dans votre mémoire aussi. Ça, je pense qu'il faut le prendre de
manière plutôt sur le plan de l'éducation. À
l'intérieur de l'éducation, il y a aussi de la prévention.
C'est pour ça que mon éclair s'est allumé en disant: Oui,
effectivement, peut-être qu'au niveau des CLSC, ce serait là que
ça devrait arriver en commençant le virage, parce que ce sont des
virages de générations, hein? Il faut bien se le dire. La
cigarette a fini par à peu près disparaître totalement. Il
reste encore quelques irréductibles, mais ça finit par presque
complément disparaître, mais ça a pris des
générations à faire l'évolution. Alors, si on pense
que, demain matin, on va faire le virage, mettez 90, 180 ou 360, ce n'est pas
vrai, on ne pourra pas le faire de cette manière-là. Il va
falloir enclencher un processus qui va nous mener
irrémédiablement vers cette... et je pense qu'on aurait
peut-être avantage à aller vers la prévention et
l'éducation de la population vers les CLSC. Si c'était le cas,
à ce moment-là, est-ce que vous pensez qu'il y a un certain
nombre de chiros qui seraient intéressés sur le plan de la
dispensation de ces services-là et quel serait le mode de
rémunération qu'il faudrait accorder?
M. Denis: À ce chapitre-là, je vous avouerai qu'en
tant que corporation, notre mandat premier est la protection du public. Je sais
que le syndicat professionnel a présenté un mémoire.
Vous aurez peut-être l'occasion de discuter avec eux de
façon plus approfondie sur le sujet. Quant à nous, on
préfère leur laisser ça entre les mains parce que c'est
vraiment leur mandat. (17 h 30)
Juste pour revenir sur votre commentaire concernant les centres
d'hébergement, vu de notre côté, nous, on se posait la
question suivante: Pourquoi priver les patients des hôpitaux et de
centres d'hébergement de soins chiropratiques? Vu de notre
côté, mais je comprends le vôtre également?
M. Côté (Charlesbourg): Oui, évidemment, je
comprends, c'est un échange. Évidemment, quand on parle de CLSC,
on parle de maintien à domicile. Évidemment, c'est là
qu'on doit ajouter des efforts pour faire en sorte que les gens... Ce n'est pas
normal qu'on institutionnalise autant nos personnes âgées et on
est dans une situation où on devra encore en institutionnaliser
davantage, d'où l'obligation pour nous de dire: Notre priorité
est, bien sûr, les personnes âgées, mais en faisant en sorte
qu'on puisse les maintenir à domicile. A ce moment-là, il y a
toute une panoplie de professionnels de la santé qui pourraient
effectivement apporter une nouvelle culture à la santé qui ferait
en sorte qu'on puisse maintenir les gens à domicile de manière
plus importante.
Evidemment, à partir de ça, tu ne coupes pas la ligne en
disant: Dorénavant, c'est uniquement dans le cas des CLSC, maintien
à domicile et, dans les centres d'hébergement, maintenant que
vous êtes dedans et que vous êtes en perte d'autonomie presque
totale, on vous laisse là et on vous parque là sans service
additionnel. Mais il y a une évolution à faire sur le plan des
mentalités. De ce côté-là, je pense que la
prévention et l'éducation devraient davantage commencer là
où on est en première ligne, un peu partout sur le territoire.
Évidemment, je connais les combats que vous avez menés au fil des
années pour être capables d'être reconnus et de dispenser
les services, mais ça m'apparaît assez important de faire les
virages prévention. Jusqu'où on pourrait aller? Jusqu'où
on nous laissera aller parce que, évidemment, on va s'attaquer à
des pouvoirs assez bien établis et il faudra être capable de se
défendre aussi. Donc, ça prendra du courage et du support.
Merci.
le préskient (M. Joly): merci, m. le ministre. je vais
maintenant reconnaître m. le leader de l'opposition et
député de joliette, m. chevrette.
M. Chevrette: Merci. Je suppose que vous vous définissez
comme un groupe axé sur la prévention. C'est ce que j'ai
compris.
M. Denis: Principalement, oui.
M. Chevrette: II m'apparaît, d'autre part, qu'on requiert
vos services quand on a des malaises, pour se faire guérir. Donc, c'est
curatif. La démarche du bénéficiaire, pour utiliser la
même expression que les ergothérapeu-tes avant vous, le
bénéficiaire qui va vous voir, c'est parce qu'il a un tour de
reins, il a mal quelque part, il a joué au tennis, il revient de la
chasse et, je ne sais pas, il a un mal de dos chronique, mais il va vous voir
parce qu'il a un bobo. Donc, il s'en va pour se faire guérir,
guérir sans médication, sans injection de cortisone, je comprends
tout ça, mais il y a un aspect curatif au malaise qui se traite à
partir de méthodes autres que les méthodes médicales,
quoiqu'un médecin pourrait très bien utiliser les mêmes
méthodes que vous s'il croyait que ça puisse se faire. Il y a
trois catégories, par exemple,, qui oeuvrent au niveau de la
prévention comme vous: les physiothérapeutes, les
ergothé-rapeutes, les chiropraticiens. Vous allez me dire: Les
acupuncteurs vont peut-être nous dire la même chose. Comment nous
démêleriez-vous tout ça, moi qui ne connais rien dans
ça? Vous me diriez: Comment vous situez-vous dans tout ça?
M. Denis: D'abord, concernant votre premier commentaire, il est
vrai que bon nombre de patients, la première fois qu'ils consultent un
chiropraticien, c'est à cause d'un problème, d'un bobo, comme
vous l'avez dit. On serait très étonnés que, demain matin,
les gens cognent à notre porte et insistent pour être vus pour
faire de la prévention parce qu'ils sont habitués dans un
système maladie. Bon, ceci dit, une fois que le patient entre, il y a
une éducation qui se fait et je peux vous dire par expérience et
les patients peuvent le dire, c'est que les gens reviennent de façon
périodique, souvent pour des examens de contrôle. La chiropratique
n'est pas uniquement une profession musculo-squelettique, c'est une profession
de premier contact qui pose un diagnostic et qui, par des méthodes
naturelles, rétablit l'homéostasie des organes via le
système nerveux, principalement. Alors, les gens ne consultent pas
seulement pour des algies, mais ils nous consultent également pour des
problèmes somatiques. Alors, le chiropraticien, son diagnostic premier
est de déterminer si la condition du patient, physiologiquement, est
réversible de façon naturelle ou si elle demande un
contrôle médicamenteux ou chirurgical. Une fois qu'il est
établi que le contrôle médicamenteux ou chirurgical n'est
pas nécessaire et qu'il peut y avoir un retour à la normale de
façon naturelle, à ce moment-là, il y a des conseils
alimentaires, des exercices, des manipulations, si c'est indiqué, ou
d'autres traitements de la sorte. Mais il faut bien comprendre que la
chiropractie, ce n'est pas uniquement une profession qui traite des algies.
M. Chevrette: Au cours des années, je me souviens, quand
je négociais pour les enseignants dans les années 1970, 1972, on
a réussi à négocier, dans le plan d'assurance, la
reconnaissance, pour fins de paiement par les compagnies d'assurances, des
soins de la chiropractie, soit par des déductibles - on en parlait avec
M. Joly, tantôt - soit par un genre de ticket modérateur à
la fois, peu Importe, et limité à tant de visites par
année. Ce que je voudrais savoir: À partir de ces
faits-là, connus par les médecins, est-ce qu'il y a des
médecins qui prescrivent des soins de chiropractie à leurs
clients? Si oui, pourriez-vous me donner une idée de la proportion pour
voir si ç'a commencé à faire son chemin par rapport
à 1976, par exemple? Je parle d'une façon plus expresse.
M. Denis: En ce moment? M. Chevrette: Oui.
M. Denis: Je dirais moins de 1 % des médecins.
M. Chevrette: Moins de 1 %. Et est-ce que la majorité de
vos clients - ce n'est pas un secret, j'espère, que je vous demande -
sont issus des secteurs où ils sont couverts par des polices d'assurance
ou bien si c'est vraiment l'inverse, c'est la majorité des gens qui
paient de leurs poches?
M. Denis: environ 50 % ont une couverture partielle ou totale,
surtout partielle, avec les contrats qui existent en ce moment, pour les soins
chiropratiques.
M. Chevrette: Est-ce que les démarches ont continué
- je sais que vous en avez fait -auprès de la Corporation des
médecins du Québec, les échanges en vue de voir qu'ils ne
vous considèrent pas, par exemple, comme des concurrents, mais bien
comme des gens qui pourraient éviter, précisément,
certaines choses?
M. Denis: C'est sûr que la Corporation des médecins
et nous...
M. Chevrette: C'est peut-être naïf sur... M.
Denis:... sommes de bons amis. M. Chevrette: Oui.
M. Denis: Mais je ne crois pas que ce sujet-là soit
discuté très fréquemment parce que, pour eux, il est clair
que c'est une compétition et que, dans certains domaines, il y a
quelques "confrontements" philosophiques chez certains patients. Si vous voulez
un exemple bien terre à terre: Un patient qui se présente chez
nous et qui prend du valium depuis sept ans, on va sûrement lui
recommander une bonne alimentation, un programme d'exercices et des
méthodes
de relaxation. Alors, c'est un peu ça qui crée le
"confrontement". Mais U faut bien comprendre que les temps changent et devant
la nouvelle culture de la santé, je crois que, de plus en plus, les
médecins et nous allons bien nous entendre.
Une voix:...
M. Chevrette: Oui, j'ai compris ça aussi. Est-ce que vous
avez chiffré le coût social ou l'économie quant au
coût social de vos 100 000 000 $? Étant donné qu'il y a 4
000 000 de visites, je suppose que si vous n'existiez pas il y aurait 4 000 000
de visites chez les médecins, chez les spécialistes ou je ne sais
pas trop où. Est-ce que vous avez des données qui vous permettent
de chiffrer l'économie du coût social? Les 100 000 000 $
représenteraient quoi, par exemple, si vous n'existiez pas? Je suppose
que ce serait plus de 100 000 000 $.
M. Denis: Juste au niveau de la CSST, il y a une étude,
qui a été rendue publique II y a trois ans, des cas chroniques
qui représentent uniquement 7 % des travailleurs blessés. S'ils
étaient traités en chiropratlque - et l'étude a
été faite à l'hôpital de Saskatoon par un
orthopédiste et un chiropraticien - il y aurait une économie, par
année, de 70 000 000 $...
Une voix: Par le gouvernement.
M. Denis: ...qui serait faite à la CSST.
M. Chevrette: Exclusivement pour les travailleurs
accidentés?
M. Denis: Exclusivement pour les cas chroniques lombaires
d'accidents du travail. Et la CSST a ce document-là depuis trois ans. Le
problème, c'est qu'encore une fois on passe par la fameuse prescription
médicale pour aller voir un chiropraticien, ce qui crée un
dédoublement des dépenses. Et nous, nous sommes convaincus que,
dans certains cas, la CSST se prive d'une économie.
M. Chevrette: Combien ça coûte? Juste pour mon
information, est-ce qu'il est possible d'avoir le coût d'une visite chez
le médecin pour aller chercher une prescription? Est-ce qu'il y a un
tarif pour ça? Est-ce qu'il y a moyen de me trouver ça, parce que
j'aimerais faire des chiffres, moi aussi, à l'heure du souper?
Est-ce que vous avez, d'autre part, comment dirais-je, des chiffres qui
nous permettraient d'évaluer, par exemple, ce que serait le coût
social dans l'élimination des 100 000 000 $? Demain matin, il y a 4 000
000 de visites qui ne se font pas chez vous, qui se font dans le
système. Je suppose qu'elles sont soumises au tarif - et, là, ma
question s'adresse peut-être encore plus au ministre - d'une visite avec
un diagnostic partiel, complet ou général. Est-ce que le
glissement des visites, pour les médecins... Je me souviens qu'on avait
négocié à l'époque des tarifs pour un examen
complet, un examen partiel et un examen général. Apres avoir mis
des tarifs différents, au lieu de se faire 60 % d'examens partiels
contre 20 % de complets et 20 % de général, il s'est fait, comme
par hasard, 60 % d'examens complets et 20 % de partiels. On appelle ça
le glissement, ou le vice du système. Est-ce que les statistiques sont
à portée de vue encore? Est-ce qu'on pourrait avoir ça
éventuellement, pour notre bénéfice personnel, pour
comprendre comment on pourrait évaluer le coût social? J'aimerais
évaluer véritablement le coût social de ça.
M. Denis: Je crois qu'il ne faudrait pas juste regarder l'aspect
de ce que ça coûte, mais comme Je vous le dis, juste à la
CSST, on a fait une étude qu'il y aurait une économie de 70 %. Il
faudrait calculer l'économie, si vous voulez, à court terme, mais
également à long terme...
M. Chevrette: Ah oui, mais...
M. Denis: ...au niveau de l'éducation du patient qui est
faite.
M. Chevrette: Je comprends que vous ne vouliez pas que j'oublie
un seul "item" ou un seul aspect, mais je dois vous avouer qu'il y a des
chiffres, des fois, qui influencent des décisions politiques.
M. Denis: Oui, je n'en doute pas. Une voix: 17 $.
M. Chevrette: 17 $ qui s'ajoutent aux 25 $ que l'individu paie de
sa poche. Si j'ai bien compris, 4 000 000 de visites, 100 000 000 $ de
dépenses, ça veut dire 25 $ en moyenne la visite.
M. Denis: Environ.
M. Chevrette: Ah oui! Je comprends que ce n'est pas tout le
monde, cependant, qui a besoin de la prescription. D'accord. Ce sont seulement
ceux qui sont référés pour les fins d'accidents du
travail. O.K.
M. Denis: C'est ça, la Régie de l'assurance-maladie
également.
M. Chevrette: O.K.
M. Denis: D'ailleurs, c'est un phénomène unique
pour le Québec. Toutes les autres provinces ne demandent pas de
prescription médicale.
M. Chevrette: Quand vous dites, maintenant,
que vous ne détesteriez pas être présents sur les
CMDP, les conseils de médecins, dentistes et pharmaciens, ça
présuppose que vous voudriez être intégrés au
système global de santé et de services sociaux? Et ce n'est pas
contraire à votre philosophie, à partir du fait que vous vouliez
être axés seulement sur la prévention? Ce bout-là,
j'aimerais le comprendre.
M. Denis: Encore une fols, c'est que nous, si on conceptualise le
nouveau système santé, on voit la part qu'on pourrait apporter.
Maintenant, si vous me dites: Demain matin, tu vas dans le système
maladie; essaie de faire de la prévention; on te regarde aller,
ça va être difficile. Il faut toujours revenir... C'est un peu
comme avoir la première approche, le premier pas, dans ce
sens-là, et qui va être minime au début, parce que,
là, et encore une fois je le répète, on demanderait au
patient de choisir. Il y aurait un choix du bénéficiaire: Pour
telle chose, j'aimerais mieux que ce soient des soins naturels, j'aimerais
mieux recevoir des soins naturels. En ce moment, dans le système
maladie, ça n'existe pas. Alors, c'est très difficile de vous
dire: On s'insère demain matin, voici comment on fonctionne.
M. Chevrette: Mais toute la base de votre argumentation - je veux
bien comprendre; je pense que j'ai saisi, en tout cas, je vais m'es-sayer et
vous me direz si j'ai compris - est axée sur un nouveau concept de
traitement et le concept de traitement d'un bobo ou d'un malaise, appelez
ça comme vous voudrez, c'est à partir ou bien de manipulations ou
bien d'exercices ou bien de réchauffement, mais c'est naturel. C'est
correct?
Une voix: Oui.
M. Chevrette: Vous n'auriez pas peur d'être
assimilés vite, et rapidement, si vous étiez dans un centre
hospitalier? Il y a une différence entre reconnaître le paiement
d'un acte et oeuvrer dans un système. N'auriez-vous pas peur
d'être assimilés, le fait de faire partie d'un centre hospitalier
où on aurait imposé, par voie législative, la
présence de chiropraticiens en institution et là, comme par
hasard, le fait que vous êtes reconnus, que vous êtes en
institution, on n'hésite plus à vous repasser les patients? Vous
n'auriez pas peur de perdre cette dimension de vouloir transformer les
mentalités d'une façon profonde et que vous ne deviendriez pas,
à toutes fins pratiques, un exécutant de la pratique
médicale actuelle qui considérerait que vous êtes un
sous-traitant à la médecine actuelle? C'est peut-être
charrié un peu, mais ça...
M. Denis: Non. Je comprends très bien votre commentaire.
Dans un premier temps, je ne vois pas un chiropraticien qui serait là
à plein temps, je le verrais sans doute moitié-moitié ou
trois quarts-un quart. Dans un deuxième temps, il faut, quant à
nous, bien comprendre que - et c'est notre expérience - quand une
personne a un bobo, donc une maladie, et qu'elle a le choix entre la cortisone
et les soins naturels, il faut qu'il y ait une éducation qui se fasse
lorsqu'elle choisit les soins naturels parce qu'il faut qu'elle comprenne que
la disparition de la douleur ne sera pas instantanée, mais que, par
contre, la physiologie va redevenir normale et II n'y aura pas d'effets
secondaires. Pour que la personne comprenne ça, il faut qu'il y ait une
éducation. Quand vous me dites: Est-ce qu'on va perdre ça, cette
philosophie d'éducation que l'on a en ce moment, parce qu'il faut que
les gens comprennent pourquoi ils viennent nous voir? Quant à moi, c'est
difficile à imaginer parce qu'il y aura toujours l'option cortisone ou
les soins naturels. Il va falloir qu'ils comprennent la démarche pour
choisir.
M. Chevrette: Monsieur veut ajouter...
M. Gonthier (André-Marie): J'aimerais juste
éclairer les gens ici sur les nouveaux concepts dont on parle. C'est un
peu difficile quand on regarde ça les premières fois, les
concepts de santé. On parle ici d'une approche positive de santé.
C'est tout à fait différent d'une approche axée sur la
maladie ou sur la solution de problèmes particuliers. Juste pour revenir
à ce dont on parlait tantôt, nos gens qui consultent en crise
aiguë. Si on regarde ce qui se faisait au niveau de l'équipe
olympique américaine il y a dix ans, sur les motifs de consultations,
les gens consultaient souvent pour de simples blessures. Aujourd'hui, le temps
a fait son cours; les concepts ont été amenés et les
athlètes olympiques américains sont suivis de façon
régulière et préventive par les chiropraticiens pas
nécessairement pour les soulager de bobos, mais pour leur permettre
d'atteindre un niveau de performance physique meilleur et prévenir
l'apparition de problèmes. Le même exemple peut se situer par
exemple, au niveau d'une clinique ou d'un hôpital où le patient
est dirigé automatiquement vers une approche axée sur la solution
momentanée d'un problème: injection de cortisone quand tu fais
une bursite, par exemple, point à la ligne; repos; on le retourne
à la maison après quelque temps. Nous, on arrive, on peut arriver
avec de nouveaux outils ou de nouvelles options pour éviter, justement,
une médication qui, souvent, devient excessive, un repos qui est souvent
maintenant contre-indiqué après trois jours, alors qu'avant
c'était la règle de mettre quelqu'un au repos pendant au moins
deux semaines. On amène de nouveaux outils, de nouveaux moyens qui vont
permettre au gouvernement d'économiser des sous. C'est un "challenge"
pour nous. C'est sûr que ça amène de notre part
l'obligation de travailler avec de nouvelles idées puis de se confronter
aussi à des résistances énormes qu'on
connaît très bien. Moi, personnellement, j'ai eu beaucoup
de plaisir à développer le dossier à l'Université
du Québec parce que j'ai fait face à des pressions de ce
genre-là. Il y avait des gens, au début, qui étaient
très résistants et négatifs face aux nouvelles approches
qu'on expliquait parce que les gens ne connaissaient pas du tout la
chiropratique. Avec les discussions qu'on a eues ils ont compris puis ils ont
dit: Mon Dieu, c'est intéressant. Et puis les chiffres arrivent, les
recherches arrivent. La recherche qui a été faite à
l'Université de Saskatoon, ce sont des chiffres qui ont
été étudiés de bas en haut, de long en large par
plusieurs actuaires et, c'est tout à fait juste, ça
amènerait une économie énorme. Et il y a des
résistances par le système...
M. Chevrette: Le changement...
M. Gonthier: ...actuellement. On dit: Non, c'est des recherches
qu'on n'accepte pas.
M. Chevrette: Moi, je pense que l'approche du changement de
mentalité vers des moyens naturels, il me semble qu'on ne peut pas se
reposer à ça, surtout quand on voit du monde se bidonner en
disant: On donne des petites pilules de farine puis on leur fait accroire que
c'est des Valium puis ça dort bien. Tu saisi Puis ça se bidonne.
C'est pour montrer comment et jusqu'à quel point on peut devenir
dépendants à la fois de la médication mais aussi
dépendant de l'institution, soit dit en passant, parce que ça
aussi, c'est un réflexe qu'on a développé. Il y a des
personnes qui, pour toutes sortes de raisons... Notre système a fait
qu'il y a eu un glissement à l'effet que, quand tu atteins un certain
âge, c'est comme par hasard, tu demandes: Je "vais-tu" pouvoir rentrer au
centre d'accueil? Puis il y en a qui sont en parfaite santé au moment
où ils nous demandent s'ils peuvent rentrer au centre d'accueil parce
que, il y a à peu près 30 ans, il y a du monde qui rentrait en
parfaite santé dans les centres d'accueil. Il y a des gens qui ont
vécu 30 ans dans les centres d'accueil puis ils sont encore pas pire,
alors qu'on sait très bien qu'il y en a qui sont chez eux, en attente ou
dans les corridors de certains centres hospitaliers et qui attendent leur
place.
Sur l'objectif, on ne peut pas être en désaccord avec
ça, loin de là, mais je pense qu'il va falloir continuer à
pousser parce qu'il y a d'autres mouvement qui partent. Ce que je crains,
cependant, puis je vous manifeste une crainte en réfléchissant
tout haut, c'est la multiplicité des groupes qui parlent de
médecine naturelle. C'est le Groupe des ressources alternatives en
santé, c'est vous autres, c'est d'autres. Je me demande si un jour
ça ne sera pas ramassé, ça, dans quelque chose d'unique
puis quelque chose qui va constituer une force tellement forte, qui va
créer ce nouvel élan, ce nouvel objectif puis qui va contribuer
à changer des mentalités. Mais lâchez pas! Je vous
félicite et bonne chancel
M. Denis: Merci. Juste sur votre dernier commentaire, j'aimerais
ajouter que notre position à nous, elle est claire. Quand on parle de
d'autres groupes comme PAPSI et puis tout ça, bon, ces médecines
douces-ià, s'il y a une formation académique valable, ça
va amener automatiquement une légalisation, une reconnaissance
légale. En ce moment, il n'y a rien qui démontre que c'est vrai
dans certains cas, et dans plusieurs cas même. Alors, quant à
nous, ce mouvement-là, on l'évite un petit peu parce que entre un
doctorat universitaire et une formation douteuse...
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Brièvement
parce que je sais qu'il reste peu de temps. Je me demandais, vous nous avez
remis la copie d'un projet, d'un programme de doctorat en chiropratique et qui
a été présenté au décanat des études
de premier cycle de l'Université de Trois-Rivières, en mai 1989.
Deux questions: Est-ce que ce document a dépassé
l'université? Est-ce qu'il est rendu au ministère et au Conseil
des universités? Quelle a été la réponse? Ma
deuxième question: ne croyez-vous pas, avant de demander une
reconnaissance officielle et l'accès pour les patients ou les
bénéficiaires aux services de santé par le biais de la
carte d'assurance-maladie, est-ce qu'il ne faudrait pas d'abord qu'on
reconnaisse une formation au Québec? Je m'étonne toujours que ce
ne soit pas fait; je ne serais pas la seule qui bloque ça, mais...
M. Denis: Dans un premier temps...
Mme Blackburn: ...la situation, c'est celle qu'on
connaît.
M. Denis: ...le document est présentement devant la
CREPUQ.
Mme Blackburn: Pardon?
M. Denis: Le document est présentement devant la
CREPUQ.
Mme Blackburn: La CREPUQ? Le Conseil des universités.
M. Denis: Oui. La Conférence des recteurs et principaux
des universités du Québec. C'est la première étape
avant le Conseil des universités parce que la CREPUQ doit se prononcer
sur la qualité du programme et le Conseil des universités se
prononce sur l'opportunité du program-
me. Il y a deux étapes bien distinctes à suivre. La CREPUQ
est à l'étude présentement.
Dans un deuxième temps, quand vous me dites: Ah bien, ce n'est
pas encore reconnu, le doctorat en chiropratique est reconnu par le
gouvernement du Québec.
Mme Blackburn: II est dispensé à
l'étranger.
M. Denis: Étant donné... Oui, voilà. Il
était dispensé à l'étranger, donc il n'avait pas le
choix.
Mme Taché-Piette (Louise): Mais le diplôme est
reconnu par règlement du gouvernement du Québec depuis 1974.
Mme Blackburn: Oui, mais la question est-ce qu'il ne serait pas
plus urgent si jamais... Je ne veux pas parler au nom du ministre, Dieu m'en
garde, mais si jamais nous avions accès, avec la carte
d'assurance-maladie, à vos services, il faudrait plus que 750
chiropraticiens au Québec. Alors est-ce qu'il ne serait pas plus urgent
qu'on offre une formation, ici au Québec?
M. Denis: C'est souhaité par la corporation, je peux vous
l'assurer. Par contre, il y a quand même un bon nombre de nouveaux
chiropraticiens qui entrent chaque année, venant des Etats-Unis et de
Toronto. Alors de ce côté-là, si on regarde ce qui est
proposé par l'Université du Québec à
Trois-Rivières, on répond en ce moment au nombre de finissants
qu'elle propose.
Mme Blackburn: Très bien, je vous remercie.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi...
Mme Taché-Piette: Je pourrais peut-être, ajouter,
Mme la députée, qu'en ce qui concerne la protection du public, le
gouvernement s'est assuré, au moment de la légalisation, que la
formation des chiropraticiens répondait aux critères
nécessaires.
Mme Blackburn: Je sais comment ça...
Le Président (M. Joly): Très brièvement, je
voudrais aussi profiter du court temps qu'il me reste pour vous poser une
question. Remarquez bien, M. Denis, que je ne voudrais pas me faire, comme on
dit, le grain de sable dans la grande roue, mais j'ai suivi avec beaucoup
d'attention tous les chiffres que vous avez mentionnés dont les 4 000
000 de visites, les 750 chiropraticiens à travers la province, et j'en
arrive avec une moyenne de 5366 visites annuelles par chiro, ce qui veut dire
qu'il y en a qui en font plus et d'autres moins. Si on prend ce que vous avez
mentionné tantôt comme autre chiffre qui disait que vous faisiez
22 minutes d'éducation par patient, à ce moment-là, j'en
arrive avec dix heures d'éducation par jour juste à ce niveau.
Ça ne comprend pas les radiographies, ça ne comprend pas le temps
de rhabillage, ça ne comprend pas tout ça. Alors, est-ce que,
physiquement, c'est vraiment possible de faire une moyenne de 22 minutes
d'éducation par jour sur une quantité telle que celle que vous
nous avez mentionnée?
M. Denis: C'était 22 minutes par nouveau patient.
C'est-à-dire la première fois. Alors, c'est 22 minutes par
patient et non pas à chaque visite.
Le Président (M. Joly): Merveilleux. Ça
répond à ma question. Merci.
M. Denis: Ça va. Merci.
Le Président (M. Joly): Alors, je vous remercie d'avoir
participé à cette commission. Nous allons maintenant suspendre
nos travaux jusqu'à 20 heures pour entendre la Corporation des
établissements privés pour personnes âgées. Merci,
à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 56)
(Reprise à 20 h 10)
Le Président (M. Joly): Nous allons reprendre nos travaux.
Alors, je demanderais aux personnes représentant la Corporation des
établissements privés pour personnes âgées de bien
vouloir s'avancer, s'il vous plaît.
S'il vous plaît! Si vous voulez prendre place.
J'apprécierais si la personne responsable du groupe pouvait se
présenter et présenter aussi les gens qui l'accompagnent.
Corporation des établissements privés
pour personnes âgées du Québec
M. Pageau (Raymond): Raymond Pageau. Je suis le président
de la Corporation des établissements privés pour personnes
âgées du Québec. À ma gauche, le
vice-président, Gilles Lavigne, et, à ma droite, notre conseiller
légal, Me Jacques Lamoureux.
Le Président (M. Joly): Je vous rappelle que vous avez une
vingtaine de minutes pour nous présenter votre mémoire, plus ou
moins, et que, après, les membres des deux formations auront le loisir
de vous poser les questions d'usage. Merci. Allez.
M. Pageau: M. le Président, M. le ministre, MM. les
députés, je tiens à remercier la commission des affaires
sociales d'avoir invité la Corporation des établissements
privés pour personnes âgées du Québec, que je vais
appeler à
partir de maintenant CEPAQ, à venir présenter ses
réflexions sur l'avant-projet de loi sur la santé et les services
sociaux.
La présentation comporte deux grandes sections. La
première présente l'association et traite brièvement des
caractéristiques des centres d'accueil privés
autofinancés, décrit les objectifs de la CEPAQ et, enfin, aborde
l'interaction qui peut exister entre le réseau privé
autofinancé de l'hébergement pour personnes âgées et
le réseau public de la santé. La deuxième partie traite
plus spécifiquement des réactions de la CEPAQ vis-à-vis de
l'avant-projet de loi.
La Corporation des établissements privés pour personnes
âgées du Québec est une association qui représente
des centres d'accueil privés autofinancés opérant avec un
permis du ministère de la Santé et des Services sociaux, selon
les exigences de la présente Loi sur la santé et les services
sociaux. En janvier 1990, la CEPAQ représente plus de 900 lits de
centres d'accueil privés autofinancés.
Il me semble important de souligner ici que la CEPAQ est dirigée
par un conseil de neuf membres dont sept doivent être, par
règlement, des représentants provenant de différentes
régions administratives du Québec.
Un centre d'accueil privé autofinancé type est un
établissement qui, d'une façon générale, est bien
implanté dans le milieu naturel des bénéficiaires qu'il
héberge. L'autonomie de ces bénéficiaires présente
habituellement des niveaux qui varient d'un établissement à
l'autre. C'est un sujet qui pourrait être repris durant la discussion,
après la présentation. La caractéristique
prédominante d'un établissement privé autofinancé
est l'ambiance familiale qu'on y trouve habituellement. J'ai personnellement
été en mesure de remarquer ce trait dominant dans presque tous
les centres que j'ai eu l'occasion de visiter.
Je vais maintenant présenter et commenter chacun des trois
objectifs qui sous-tendent les activités de la CEPAQ. Le premier se
rapporte aux bénéficiaires; quant au deuxième et au
troisième, ils ont trait à la façon dont la CEPAQ
entrevoit une collaboration harmonieuse entre le réseau privé
autofinancé de l'hébergement et le réseau public de la
santé.
L'objectif premier de la CEPAQ est d'améliorer la qualité
des services et la qualité de vie pour les personnes âgées
qui ont décidé de recourir à l'hébergement. Il
arrive parfois que cette décision relève d'un choix personnel,
mais plus souvent il s'agit d'une décision qui est forcée par les
circonstances. Je dois souligner Ici que le choix d'un établissement
privé autofinancé, que ce choix soit fait par le
bénéficiaire lui-même ou par ses proches, n'est
habituellement pas le fruit du hasard. Ce choix est généralement
basé sur la réputation locale de l'établissement,
réputation qui est fondée à son tour sur la qualité
de la direction et sur la qualité du personnel.
Avec son deuxième objectif, la CEPAQ aborde directement la
question des relations entre le réseau privé autofinancé
de l'hébergement et le réseau public de la santé.
L'association vise ainsi à établir une collaboration que j'aime
appeler utile entre les deux réseaux, collaboration qui est
envisagée comme pouvant profiter aux deux parties en cause. L'avantage
pour le ministère consiste en une diminution de ses dépenses
d'immobilisations, de ses dépenses d'entretien et de maintenance et une
diminution des frais encourus dans le secteur des ressources humaines. Quant
à l'avantage qui revient au réseau privé
autofinancé de l'hébergement, la CEPAQ entrevoit une Juste
compensation pour des services rendus à une clientèle qui,
autrement, serait nécessairement passée à la charge du
réseau public. En pratique, cette collaboration avec le ministère
et son réseau présente l'avantage de procurer une
stabilité de revenus, de pouvoir réaliser ensemble, avec le
réseau de la santé, une planification à moyen et long
terme basée sur les besoins prévisibles et, troisièmement
- il s'agit, bien sûr, d'un avantage qui n'est pas à
négliger quand on est dans le secteur privé - de rendre possibles
des négociations plus faciles que celles qu'on peut avoir
présentement avec les institutions financières. Mais l'avantage
majeur que va retirer le secteur privé d'une collaboration utile avec le
ministère et son réseau consiste en la possibilité
d'élaborer et de mettre sur pied des services et des soins de meilleure
qualité, non plus sur une base temporaire et sporadique, comme on est
forcé de le faire présentement, mais sur une base permanente.
Par son troisième objectif, la CEPAQ précise la
façon dont elle entrevoit la collaboration avec ie ministère et
son réseau. Mais, cette fois, la collaboration est envisagée sur
une base opérationnelle. La CEPAQ croit que cette collaboration doit se
faire en tenant compte des besoins et des priorités de chaque
région en matière de santé et de services sociaux. Cette
collaboration doit donc passer par les conseils régionaux actuels ou,
selon les termes de l'avant-projet de loi, par les régies
régionales.
Dans l'esprit de cet objectif, la CEPAQ travaille présentement
à mettre sur pied des organisations régionales de centres
d'accueil privés autofinancés, organisations dont le
fonctionnement sera intégré à celui de la corporation. La
CEPAQ souhaite que ces organisations soient en communication fréquente
avec les régies régionales de façon à pouvoir
intégrer localement les ressources privées autofinancées
de l'hébergement au réseau de la santé.
Je tiens à souligner ici que la réalisation des objectifs
de la CEPAQ concernant une collaboration utile entre le réseau
privé autofinancé de l'hébergement et le réseau
public de la santé présuppose un réajustement dans la
façon
de considérer le secteur privé autofinancé de
l'hébergement par le ministère et plus précisément
par ses hauts fonctionnaires ainsi que par ses représentants et ses
intervenants locaux. Depuis trop longtemps, le réseau privé
autofinancé de l'hébergement est considéré comme le
dépanneur du réseau public. Ce manque de reconnaissance du
rôle joué par le réseau privé autofinancé de
l'hébergement non seulement pénalise les
bénéficiaires, mais contribue à diminuer
l'efficacité du fonctionnement du réseau public. L'une des
conséquences la mieux couverte par les médias d'Information et
découlant de ce comportement est l'engorgement des urgences. Or, cet
engorgement existe malgré un taux de vacance de plus de 10 % touchant
les centres d'accueil privés autofinancés dans certaines
régions.
Je vais passer maintenant aux réactions de la CEPAQ à
l'avant-projet de loi. La CEPAQ voit l'avant-projet de loi comme une tentative
sérieuse par ie ministère de réorienter ses
priorités en matière de santé et de services sociaux de
façon à pouvoir faire face aux différents défis du
moment. Ces défis concernent plus particulièrement le
vieillissement de la population et la rationalisation des dépenses
allouées à la santé et aux services sociaux.
La CEPAQ ne peut que voir d'un bon oeil l'ouverture du ministère
à l'endroit du secteur privé. Elle espère que le
réseau privé autofinancé de l'hébergement va enfin
pouvoir devenir une partie intégrante du réseau de la
santé. L'association espère que l'Intégration va
dépasser, cette fois, le texte de loi pour atteindre le vécu
quotidien des personnes âgées par l'intermédiaire des CLSC
et des CSS.
La CEPAQ est consciente, toutefois, qu'un effort d'éducation doit
être fait auprès de certains dirigeants de centres d'accueil
privés autofinancés concernant la qualité des services,
des soins, des installations matérielles et, peut-être pas la
moindre des choses, concernant la qualité des relations avec les
instances décisionnelles et avec les intervenants du ministère et
de son réseau.
La CEPAQ est prête à relever ce défi. Elle croit,
cependant, qu'elle va pouvoir le faire d'autant plus facilement que le
ministère va rapidement faire connaître ses critères
concernant - et là je reprends un titre d'une des parties de
l'avant-projet de loi - "l'agrément de certaines ressources
privées aux fins d'attribution d'allocations financières". Dans
ce contexte, la CEPAQ considère l'agrément comme un moyen
fonctionnel d'intégrer le secteur privé autofinancé de
l'hébergement au réseau public de la santé.
La CEPAQ est d'accord avec le principe de l'accessibilité pour
tous aux services de santé. Elle croit, de plus, qu'on doit laisser
à une personne âgée le libre choix de l'endroit où
elle veut aller demeurer, ce principe étant à la base de la
qualité de vie de la personne âgée. On peut ajouter ici que
ce principe est aussi à la base d'une saine concurrence entre les
centres, qu'ils soient privés ou publics, avec les répercussions
prévisibles d'une telle concurrence sur la qualité des services
et des soins.
La CEPAQ voit d'un bon oeil la création des régies
régionales dont les fonctions et les pouvoirs touchant la coordination
des services de santé et des services sociaux sont définis
à l'article 244 de l'avant-projet de loi. Cet article laisse entendre
que c'est la régie, dans chaque région, qui va voir à ce
que toutes les ressources soient utilisées efficacement dans une
ambiance de collaboration et de complémentarité. Compte tenu de
l'Importance du rôle décisionnel accordé à la
régie, la CEPAQ regrette que le secteur privé ne soit pas
représenté au sein des conseils d'administration des
régies. Sans cette représentation à l'endroit où
les besoins seront définis et les priorités seront
décidées, la CEPAQ croit que le secteur privé
autofinancé de l'hébergement ne pourra pas être
complètement intégré au réseau de la santé.
L'amendement à l'article 260 de l'avant-projet de loi visant à
permettre au secteur privé de siéger au conseil d'administration
d'une régie permettrait d'officialiser, mais cette fois en termes
vraiment opérationnels, le rôle du secteur privé dans le
réseau de la santé au Québec.
Avant de terminer, j'aimerais faire part de quelques réflexions
que la CEPAQ a été amenée à faire en
préparant son mémoire pour la commission des affaires sociales.
Nous entendons beaucoup parler de l'amélioration de la santé et
de l'augmentation de l'espérance de vie. Il est permis de se questionner
sur la valeur de ces deux priorités si elles ne sont pas
accompagnées du souci...
M. Chevrette: On ne comprend plus rien là.
M. Pageau: À partir d'où?
M. Chevrette: O.K. C'est revenu.
M. Pageau: Nous entendons beaucoup parler de
l'amélioration de la santé et de l'augmentation de
l'espérance de vie. Il est permis de se questionner sur la valeur de ces
deux priorités si elles ne sont pas accompagnées du souci
d'assurer une qualité de vie dans une ambiance de sécurité
à des personnes pour qui il est maintenant possible de vivre plus
longtemps. Une société qui n'est pas capable de relever ces deux
derniers défis gaspille tout simplement ses énergies à
tenter d'accroître l'espérance de vie.
Le réseau privé autofinancé de l'hébergement
croit pouvoir jouer un rôle actif dans l'amélioration de la
qualité de vie des personnes âgées en leur fournissant un
milieu de vie plaisant à l'intérieur duquel elles peuvent se
sentir en sécurité.
En terminant, je tiens à préciser que, dans
et par ses interventions, la CEPAQ vise beaucoup plus loin que les
simples compensations monétaires pour les services rendus par ses
membres à la société québécoise. Elle tient,
d'abord, à ce que ses membres, ainsi que l'ensemble du réseau
privé autofinancé de l'hébergement soient
intégrés au réseau de la santé du Québec en
tant que partenaires à part entière.
Plus cette intégration se reflétera dans un vécu
tangible et quotidien, plus les retombées seront importantes non
seulement pour le secteur privé, mais surtout pour les
bénéficiaires qu'il héberge et pour le réseau de la
santé du Québec. Je vous remercie.
Le Préskient (M. Joly): Merci, M. Pageau. Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci. Évidemment, on
est devant un regroupement de centres d'accueil privés qui font face en
bonne partie aux mômes problèmes auxquels le réseau
lui-même fait face.
J'ai pris un certain nombre de petites notes. Vous représentez 21
centres, 900 places au permis, et c'est de l'autofinancement à 100 %.
Vous avez parlé d'un taux de vacance de 10 % dans vos institutions.
M. Pageau: Dans certaines régions.
M. Côté (Charlesbourg): C'est ça. Qu'est-ce
qui explique un taux de vacance comme celui-là?
M. Pageau: Deux raisons. Une première raison, c'est la
question financière. Il y a des gens qui ne peuvent pas se permettre de
tout défrayer, même si nos coûts sont relativement peu
élevés; d'une façon moyenne, c'est autour de 750 $
à 800 $. La deuxième raison, c'est ce que j'ai mentionné
tout à l'heure, l'absence de collaboration de la part de la plupart des
intervenants du réseau.
M. Côté (Charlesbourg): Vous expliquez cette absence
de collaboration par quoi?
M. Pageau: II y a des raisons historiques, il y a des raisons
personnelles, il y a des raisons de philosophie un petit peu à
l'opposé.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Les raisons
historiques, quelles sont-elles?
M. Pageau: Les raisons historiques, c'est que, il y a 20 ans, on
a mis en marche un réseau de la santé au Québec où
l'esprit, à ce moment, était la gratuité de tout pour
tous, en même temps qu'on avait une accessibilité. À cause
de cet esprit, il y a eu des gens qui ont été engagés avec
cet esprit, pour aller avec l'esprit de ce projet de loi, à ce
moment-là, et c'est un peu ce qui reste présentement. Je dois
avouer que c'est en train légèrement de se modifier, mais avec
difficulté.
L'Interaction du réseau privé avec les intervenants ne se
fait pas facilement, malgré la lettre du sous-ministre, Réjean
Cantin, à cet effet, II y a quelque temps.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, ça, c'est les
raisons historiques. Vous avez parlé de raisons plus fondamentales de
philosophie. Je pense que ça, on...
M. Pageau: Ça revient à dire la même
chose.
M. Côté (Charlesbourg): ...se comprend. Vous aviez
parlé d'un autre niveau de raisons.
M. Pageau: Oui, ce sont les relations humaines.
M. Côté (Charlesbourg): Pourtant, on a entendu
parler cet après-midi que c'était extraordinaire, les relations
humaines. Dans certaines institutions du réseau, c'était
ça qui devait primer. Ce que je comprends, c'est que le réseau a
des problèmes de relations humaines avec les intervenants de la
CEPAQ.
M. Pageau: Le privé aussi.
M. Côté (Charlesbourg): Le privé.
M. Pageau: Je pariais d'éducation tout à
l'heure.
M. Côté (Charlesbourg): Bon. Historiquement pariant,
vous dites: À peu près 750 $, 800 $ par personne, c'est ce que
ça coûte en moyenne chez vous.
M. Pageau: cela varie selon la région. il y a des
régions où c'est plutôt dans le bout de 550 $ à 600
$ et, dans la région de montréal, ça monte facilement
autour de 1000 $.
M. Côté (Charlesbourg): J'imagine que les moins
chers, c'est en région.
Une voix: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): De 1500 $ à 1600 $,
j'imagine que les services vont avec aussi.
M. Pageau: Oui. (20 h 30)
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, ils ne
réussissent pas tous à survivre non plus. Évidemment, vous
devez faire face exactement au même problème que le réseau,
un alourdissement de clientèles. Quel est le niveau d'heures-soins en
moyenne dans vos établissements pour les
bénéficiaires?
M. Pageau: Présentement, sans aucune aide, on fonctionne
entre .6 et .8, avec des pointes. Les pointes peuvent aller jusqu'à deux
heures, temporairement.
M. Côté (Charlesbourg): Lorsque vous parlez d'une
reconnaissance de vos établissements, parce qu'on va devoir être
ingénieux tout à l'heure, c'est dans le sens particulier
où on devrait prendre une part de l'alourdissement de clientèles
ou si c'est davantage?
M. Pageau: L'avant-projet de loi est très clair
là-dessus. L'avant-projet de loi parle de l'agrément et
d'allocations financières basées sur une évaluation qui,
selon la CEPAQ, serait faite dans chaque région, selon les besoins et
les priorités de chaque région.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. D'accord. Toute la
mécanique... Je pense que, si jamais on devait aller dans ce
sens-là, c'est clair que ça prendra, parce que ce n'est pas le
cas actuellement, une référence par le ministère, donc, du
temps des personnes qui seraient référées
éventuellement. Si vous êtes agréés dans le
programme, ce serait donc le ministère, par ses instances, qui ferait la
référence de personnes, ce qui n'est pas le cas au moment
où on se parle.
M. Pageau: Ce qui n'est pas le cas présentement.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, évidemment,
à ce moment-là, il y a, bien sûr, des cas où on
devra traiter à une heure-soins par jour, une heure et demie, avec une
moyenne de x. Ça présuppose que ce qu'on demande aujourd'hui,
c'est une reconnaissance par le ministère de l'alourdissement des
clientèles, puisque là où on en est rendu, si les
personnes sont autonomes, règle générale, le
ministère ne se montre pas beaucoup, beaucoup le bout du nez
là-dedans. On est beaucoup plus dans une situation où on est en
perte d'autonomie et où on sort les gens d'un centre hospitalier et on
va les placer en centre d'accueil, au centre d'hébergement, qu'il soit
privé ou pas, privé quand c'est possible, ou chez nous quand ce
n'est pas possible. Donc, il y a un phénomène où c'est de
l'alourdissement de clientèles. Ce dont on se parle, si vous aviez
exactement les mêmes personnes que vous aviez au début, il y a
cinq ans ou il y a dix ans, vous seriez capables d'arriver. Ce qui fait que
votre problème s'amplifie, c'est que vos bénéficiaires
s'alourdissent comme cas. Ils vont demander tantôt, vous dites, dans des
périodes de pointe, deux heures-soins. A un moment donné, il est
bien évident qu'avec les 700, 750 $ tu finis par ne pas arriver si tu as
une moyenne de deux heures-soins par patient. Ce qui est recherché,
donc...
M. Pageau: Ou la qualité en souffre.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. C'est ça.
Évidemment, votre clientèle s'alourdit. Vos problèmes
aussi. Dans ce sens-là, lorsqu'on cherche la reconnaissance et
l'agrément par le ministère, c'est afin d'avoir du support sur le
plan financier qui éventuellement viendrait supporter cette charge
d'alourdissement et de soins additionnels à donner à la
clientèle.
M. Pageau: ce qu'on recherche, c'est une collaboration, c'est une
reconnaissance du rôle joué par le privé et une
reconnaissance du fait qu'on peut aider le réseau public.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord avec ça, je
pense que oui, mais...
M. Pageau: Le reste, c'est dans l'avant-projet de loi.
M. Côté (Charlesbourg): Mais ça se traduit
par des piastres et cents, évidemment.
M. Pageau: Et une économie pour le réseau.
M. Côté (Charlesbourg): C'est clair qu'on ne
reprendra pas la comparaison de cet après-midi. S'il est dans un centre
hospitalier de courte durée, à 350 $ par jour, il est bien
évident que, lorsque tu vas en ressource alternative dans des pavillons
ou dans des foyers privés, ce n'est pas ça que ça va te
coûter. Bon.
Est-ce que vous seriez d'accord avec l'idée que, dans ces cas
particuliers, on puisse développer une formule où l'argent ou la
reconnaissance d'un montant, compte tenu de la lourdeur du cas, irait à
la personne au lieu de l'institution?
M. Pageau: C'est ce qu'on a demandé depuis longtemps.
À la personne plutôt qu'au centre?
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
M. Pageau: C'est ce qu'on a demandé depuis longtemps.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, on
était, semble-t-il, bien pourvus avant. Alors, on bâtissait nos
propres équipements, puis ça nous coûtait un peu plus cher.
Ce que je comprends, c'est que le privé peut nous apporter une
alternative: vos 900 places, mais j'imagine que votre ambition ne se limitera
pas à 900 places, compte tenu du vieillissement. Reconnaissant les 900
places, vous allez nous dire dans pas grand temps ou dès maintenant: On
est capables d'en faire plus encore, compte tenu de notre expertise. Vous
n'aurez pas tort.
M. Pageau: Présentement, il y a autour de 4000 lits. Il y
a autour de 4000 lits de centres d'accueil privés autofinancés,
opérant avec un permis présentement.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui, mais vous
regroupez 21 centres pour 900 lits.
M. Pageau: Oui.
M. Coté (Charlesbourg): C'est 900 sur 4000? Oui. Donc, on
est...
M. Pageau: C'est un nombre variable, parce que, vous savez, il y
a un taux de fluctuation là-dedans.
M. Côté (Charlesbourg): Ah, oui! Donc, dans ces
conditions-là, si on allait vers une reconnaissance d'une allocation
à donner à une personne qui, éventuellement, elle,
pourrait choisir à partir d'une liste de gens agréés par
le ministère, vous seriez donc d'accord pour suivre toutes les
recommandations du ministère sur le plan de la qualité des soins
à dispenser aux personnes, avec tout ce que ça comporte comme
inspections, mais pour autant que l'argent suive. Parce que, évidemment,
si on n'intervient pas demain matin, si, disons, demain matin, on n'est pas
là, on dit: Parfait, on n'est pas capables d'y aller, vos
problèmes vont en s'alourdissant pareil. Qu'est-ce qui arrive de vos cas
les plus lourds? Est-ce qu'ils se retrouvent à l'hôpital?
Règle générale, qu'est-ce qui arrive avec les cas qui sont
chez vous, qui sont beaucoup plus lourds et que vous ne pouvez pas traiter?
M. Pageau: On fait face à des problèmes de
ressources matérielles, de facilités matérielles. C'est
qu'on a des corridors qui ne permettent pas de s'alourdir trop. Bon, on a des
portes qui ne sont pas assez larges. Donc, on a besoin de faire des
améliorations à l'immeuble.
C'est évident qu'on ne fera pas de planification dans ce
sens-là si on n'a pas la certitude d'aller chercher des revenus
supplémentaires qui vont justifier ces Investissements-là. Je
mentionnais tout à l'heure les problèmes qu'on a avec les
institutions financières... Ça ne répond pas à
votre question, hein?
M. Côté (Charlesbourg): Non, c'est parce qu'il
s'échange toutes sortes d'Informations en même temps qui me
distraient. Mais une chose est certaine, c'est que vous faites face à
des problèmes d'immobilisation, donc de réaménagement
fonctionnel, de la même manière que le réseau y fait face
aussi, parce que ce qu'on a construit à l'époque, c'est pour des
cas beaucoup moins lourds que ceux d'aujourd'hui. Mais vous faites face, tout
de même, à des cas qui nécessitent beaucoup plus
d'attention. Ils sont plus lourds. Qu'est-ce qui arrive dans vos
établisse- ments à ce moment-ci lorsque... Si on était
dans une situation où, par exemple, la moyenne d'heures-soins
était de deux heures, ça veut dire que les gens ne seraient plus
chez vous. Si je comprends, vous n'auriez pas la capacité
financière de les supporter.
M. Pageau: Avec allocations ou pas?
M. Côté (Charlesbourg): Non, non, sans
allocation.
M. Pageau: Sans allocation?
M. Côté (Charlesbourg): Dans le contexte actuel, ces
gens-là se retrouvent où? À l'hôpital?
M. Pageau: À l'hôpital.
M. Côté (Charlesbourg): C'est clair que,
évidemment, ça crée le problème d'engorgement au
niveau des hôpitaux et ça pose la question fondamentale. On a beau
avoir des ressources alternatives, il reste qu'à un moment donné
ces ressources-là ne suffisent plus et le meilleur moyen, c'est
l'hôpital. Donc, c'est un peu ça qui fait que ça engorge
les hôpitaux et c'est pour ça qu'il y a eu des décisions
antérieures aussi, par exemple, qui doivent certainement faire votre
envie: des privés conventionnés, en termes de nouveaux
établissements beaucoup plus fonctionnels, capables d'accueillir des
patients avec une moyenne d'heures-soins de deux heures et demie. Donc, c'est
le problème fondamental. Tout le problème, par la suite, que vous
soulevez des structures ou d'intégration aux structures
présuppose qu'effectivement il y a agrément et qu'on participe
à la vie intense du réseau, étant reconnues par le
réseau, étant en partie financées, soit directement ou
indirectement, par le ministère. Alors, je comprends que le reste suit
sur le plan des accommodements de participation au conseil d'administration,
aux régies régionales et ainsi de suite. Oui, oui, c'est
ça, de toute façon. C'est conventionné d'une
manière, ou ça peut être le patient...
Une voix: II paie directement ou...?
M. Côté (Charlesbourg): Oui, c'est ça. C'est
conventionné d'une manière où ça peut être le
patient, le bénéficiaire ou directement l'institution. O.K.
Ça va pour le moment.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Maintenant,
le chef de l'Opposition et député de Joliette.
M. Chevrette: Non, je ne suis plus chef de l'Opposition, je suis
leader.
Le Président (M. Joly): Excusez! Le leader
de l'Opposition. C'est peut-être un souvenir que je n'aurais pas
voulu vous rappeler.
M. Chevrette: J'aime qu'on m'attribue...
Le Président (M. Joly): C'est un souvenir que je n'aurais
pas voulu vous rappeler.
M. Chevrette: Je suis l'ex, futur, n'importe quoi.
Une voix: Juste leader?
M. Chevrette: Et la Santé. M. le Président, je
voudrais continuer dans la même foulée. Les centres d'accueil
privés, vous recrutiez des gens, à ce moment-là, qui
pouvaient entrer chez vous en parfaite santé.
M. Pageau: C'est ce qui se passe encore présentement.
M. Chevrette: C'est ce qui se passe encore présentement,
c'est ça. Et tant et aussi longtemps qu'elle paie la redevance, le temps
où elle est en santé, ça ne vous crée pas de
problème.
M. Pageau: C'est qu'on a un budget à balancer.
M. Chevrette: oui, mais vous allez me voir venir. c'est parce que
je veux vous faire faire un cheminement. on se fait dire... je voudrais le
faire avec vous, si vous arrivez bien à... vous m'avez vu venir,
déjà, donc... je viens de comprendre que vous avez compris, vous
aussi, où je m'en vais. je veux vous amener sur ce terrain-là.
vous les amenez avec vous. ils sont en parfaite santé. au bout de cinq
ans ou dix ans, je ne sais pas, ils sont frappés d'une maladie. la
redevance que vous demandiez au départ a évolué en cours
de route.
M. Pageau: Je n'ai pas compris votre dernière
question.
M. Chevrette: L'allocation que vous lui demandez, la subvention
que vous lui demandez mensuellement, est-ce qu'elle a évolué en
cours de route? À partir du moment où vous avez pris une personne
- je ne sais pas - à 500 $, son état de santé se
détériore un peu, ça n'a pas monté à 600 $
ou 700 $?
M. Pageau: Écoutez, je vais vous répondre d'une
autre façon. Dans le réseau privé, les coûts vont de
550 $ à 600 $ pour une chambre simple privée, à 950 $ ou
1000 $ pour des soins d'infirmerie à deux, trois ou quatre par chambre.
C'est le niveau de prix, de taux que les gens peuvent supporter par
eux-mêmes, les gens ou la famille.
M. Chevrette: C'est-à-dire les gens que vous regroupez,
les 23 %.
M. Pageau: Là, je parle du réseau privé
autofinancé.
M. Chevrette: O.K.
M. Pageau: Ils ne sont pas nécessairement membres de la
CEPAQ.
M. Chevrette: Non, mais vous n'avez pas de centres d'accueil
autofinancés qui perçoivent plus que ça de la part de
leurs bénéficiaires?
M. Pageau: Exceptionnellement. Là, vous vous
référez peut-être au centre de Cap-Rouge.
M. Chevrette: Oui, il y avait Cap-Rouge.
M. Pageau: Exceptionnellement, il y en a. Mais, là, je
parle de la valeur moyenne.
M. Chevrette: Le centre d'accueil Heather, à Rawdon. C'est
parce qu'ils peuvent avoir les services, comme disait le ministre,
tantôt, mais je pense... En tout cas, à ma connaissance, il y a
des centres d'accueil privés qui perçoivent plus que ça,
mais ils ont les services en conséquence. Ils peuvent avoir
l'ergothérapie. Ils peuvent avoir la physiothérapie. Je ne mets
pas en cause la relation du paiement, mais c'est ça qui me frappe, on
s'en tient toujours en bas de 1000 $. Il me semble que je connais au moins
deux, trois centres d'accueil qui ont des cotisations plus fortes, mais qui ont
une gamme de services probablement plus forte aussi. Peut-être qu'ils ne
font pas partie de votre groupement, non plus.
M. Pageau: Non.
M. Chevrette: O.K. Quand vous demandez de vous intégrer au
réseau, vous savez que le réseau subventionne des lits dans le
secteur privé, ce qu'on appelle les centres d'accueil
conventionnés. Il les subventionne à partir, à ce
moment-là, des mêmes critères que les centres d'accueils
publics. En d'autres mots, un centre d'accueil privé qui devient
conventionné devient assujetti à la norme du dossier
médical pour l'admission d'un bénéficiaire. On s'entend
bien? Il faut qu'il soit accepté par un comité de
sélection comme bénéficiaire pour être dans un lit
conventionné. Autrement dit, un propriétaire d'un centre
d'accueil privé conventionné, qui aurait des lits
d'autofinancés et des lits de conventionnés, devrait avoir,
à ce moment-là, dans les 10, dans les 30 ou dans les 40 lits
conventionnés qu'il a, nécessairement des personnes qui sont
passées par le comité de sélection et qui, de par leur
dossier médical, auraient eu une place en centre d'accueil public, par
exemple, s'il y avait de la place, à l'époque. On se suit
jusque-là?
M. Chevrette: On se suit jusque-là? (20 h 45)
M. Pageau: Oui.
M. Chevrette: Quand vous demandez d'être
intégrés au système et d'être compensés pour
l'alourdissement ou compensés parce que les heures-soins-jour
augmentent, est-ce que, à toutes fins pratiques, ce n'est pas devenir
des centres d'accueil privés conventionnés que vous
désirez?
M. Pageau: ce que m. le ministre disait tout à l'heure,
c'était qu'il parlait d'allocation aux bénéficiaires et
non pas aux centres. c'est la différence.
M. Chevrette: Oui, mais si j'insiste, M. Pageau, c'est parce que,
si on veut conserver un système, quand vous demandez l'aide à la
personne, la personne, de par son dossier médical, ne serait
peut-être pas la personne qui serait dans votre centre; elle serait
peut-être un A-1 qui aurait passé après un A-2 ou un A-3 ou
un A-4. Je ne sais pas si on se comprend. Et le fait d'aller à la
personne, je ne suis pas sûr que ça ne brise pas le système
qui veut que ce soit la personne la plus malade en vertu de son statut
médical, de son dossier médical. Comment répondez-vous
à ça? Ça fait deux ou trois fols que l'objection me vient.
Vous êtes dans le milieu, j'aimerais ça que vous nous donniez une
réponse.
M. Pageau: J'aimerais vous répondre un peu par la bande.
C'est que, quand je pariais de reconnaissance du privé
autofinancé par le réseau, je parlais de la reconnaissance des
capacités qui peuvent être spécifiques à
différents centres. Si un centre ne peut pas donner plus d'une
heure-soins par jour, c'est évident qu'on ne lui enverra pas de cas
d'infirmerie. Mais, par contre, d'autres centres vont pouvoir alourdjr
jusqu'à trois heures et, à ce moment-là, allons-y.
M. Chevrette: Vous m'avez répondu par la bande. Je vais me
reprendre directement sans bande. Vous avez du monde dans votre milieu, dans
vos centres d'accueil, vous dites: Mme X, M. Y demande trois quarts d'heure de
soins et Mme Z, elle, c'est une heure. Je vous dis que, si le ministre suivait
la logique du "subventionne-ment" des centres, il devrait d'abord s'interroger
dans le milieu pour voir si c'est bien une personne qui devrait être
là. Sinon, si elle ne devait pas être là, le ministre
n'aurait pas à verser une subvention dans notre système actuel.
C'est ça que je veux bien vous faire comprendre. Dès qu'il se met
à subventionner la personne, pourquoi ne subventionnerait-il pas d'abord
une personne qui se paie, chez elle, une garde-malade privée et qui a
besoin peut-être d'une heure et demie de soins-jour? Suivons cette
logique-là, elle le pourrait.
Moi, ce que je veux vous dire, c'est: Qu'est-ce qui vous empêche
de prendre le taureau par les cornes dans ce cas-la, de faire faire
l'évaluation des bénéficiaires et de demander d'être
transposés en centres d'accueil conventionnés?
Mais, là, que vous le vouliez ou pas, vous êtes
nécessairement intégrés dans la structure
régionale, ce que vous souhaitez d'ailleurs, parce que, par la suite,
par exemple, dès qu'il part un bénéficiaire, vous
êtes assujettis à la règle de l'évaluation
médicale pour la personne qui rentrerait chez vous par la suite, par
exemple. Est-ce que ce n'est pas ça que vous recherchez?
M. Pageau: Le privé autofinancé serait ouvert
à l'idée de conventionner une partie de ses lits.
M. Chevrette: O.K.
M. Pageau: Ce serait facilement négociable.
M. Chevrette: Donc, en d'autres mots, vous voudriez être
compensés...
M. Pageau: ...pour les services rendus.
M. Chevrette: Oui, je comprends, pour les services. Là, je
vais y aller d'une autre façon. Quand vous décidez qu'il est trop
malade et qu'il n'a pas assez d'argent, c'est l'hôpital qui en
hérite. D'accord? Vous n'avez pas le choix. Si la personne ne paie pas,
si vous n'êtes plus capables de lui donner les soins ou si elle dit: Je
ne suis plus capable de vous payer plus que 600 $, vous appelez les parents ou
les enfants et vous dites: Ecoute, je ne peux plus garder ton père ou ta
mère, moi. Et, s'ils n'ont pas de parents, bien, c'est l'urgence. C'est
ça qui arrive.
M. Pageau: Oui.
M. Chevrette: Vous l'avez dit tantôt. À ce
moment-là, s'il y avait une offre de... Je comprends qu'il y a des
alourdissements de clientèles et ça ne doit pas être un
cadeau; je ne veux pas minimiser votre problème, au contraire. Je sais
ce que c'est. Mais il m'apparait difficile de subventionner la personne sans
créer un précédent pour ne pas subventionner toute
personne qui a besoin de soins. Je me demande si ce n'est pas mieux de
s'enligner, au moins, sur un régime uniforme d'évaluation des
personnes, puis chaque fois, à ce moment-là, qu'il se crée
une vacance et que vous avez un nombre de lits conventionnés, bien, pour
la partie lits conventionnés, les 15 ou les 20, ou je ne sais pas,
là, dans ces lits-là, c'est le régime de subvention
gouvernementale avec obligation de les prendre en fonction du dossier
médical et, dans la partie autofinancée, vous gardez l'autonomie
de prendre qui vous voulez, quand vous voulez et comme vous le voulez.
M. Pageau: Je n'aurai même pas besoin de vous
répondre par la bande, on s'en va dans la même direction. On parle
la même langue.
M. Chevrette: Bon.
M. Pageau: On est entièrement d'accord avec une
évaluation régionale pour les heures-soins. Bon, que ça se
manifeste sous forme de lits conventionnés ou d'une autre
façon.
M. Chevrette: Non, c'est parce que je cherche un moyen pour ne
pas créer, non plus, une injustice envers ceux qui auraient des besoins
et qui n'ont pas nécessairement la chance d'être
déjà chez vous. Il y a du monde qui peut attendre sur des listes
d'attente et ces personnes peuvent être des A-3, alors que, si on s'en
allait dans un système où on subventionnait un centre
privé comme tel, la personne pourrait être
pénalisée, chez elle, être en attente, et l'autre qui a un
dossier médical plus léger pourrait être
subventionnée par le ministère. Ça m'apparaîtrait
fausser le régime actuel, c'est juste ça que je veux
souligner.
M. Pageau: D'habitude, ça ne se passe pas comme ça.
Les gens n'entrent pas A-3. Ils entrent A-1 et graduellement ils deviennent
A-2, A-2 1/2, A-3. Mais, s'ils entraient A-3, je serais d'accord avec vous,
mais ça ne se passe pas comme ça. Donc, quand on ne peut pas les
garder plus que A-2 ou A-2 1/2, ça les insécurise parce que la
ils commencent à se dire ou la famille commence à se dire: II
faut qu'on trouve une place là.
M. Chevrette: Et là ils appellent les
députés.
M. Pageau: La place d'habitude, c'est aux urgences.
M. Chevrette: O.K. M. Trudel: M. Pageau.
Le Président (M. Joly): À vous, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, M. Trudel.
M. Trudel: Merci, M. le Président. Abordons un autre
aspect de votre mémoire, M. le président, parce que je pense
qu'on a bien fait la distinction de ce que ça va vouloir dire comme
choix tantôt. Qui s'occupe des cas lourds? Est-ce que les cas lourds sont
tous au public et les autres chez vous? Il y a certaines responsabilités
là-dedans. À la page 6 du mémoire, vous nous parlez des
régies régionales. Vous voyez d'un bon oeil la création
des régies régionales. Actuellement, il existe une certaine forme
de régionalisation qui s'appelle les CRSSS. Est-ce que ça
fonctionne bien avec les CRSSS ou si ça fonctionne mal? Ça ne
marche pas?
M. Pageau: Le rôle des CRSSS n'est pas le même que
celui qui est prévu pour les régies régionales. On donne
beaucoup plus de pouvoir décisionnel aux régies qu'aux CRSSS, des
décisions quant au budget. En tout cas, à moins que je ne sois
vraiment à côté de la coche, les CRSSS sont très
limités du côté décisionnel budgétaire.
M. Trudel: Et là vous avez l'impression qu'avec ce qui est
proposé...
M. Pageau: Si j'ai bien lu l'avant-projet de loi, oui.
M. Trudel: C'est correct, vous avez bien lu. Vous avez
l'impression que la forme que vont prendre les régies régionales,
ça va être fort différent de ce qui se passe dans les CRSSS
habituellement en termes d'administration, en termes de ceux et celles qui
décideront autour de la table de la répartition des ressources et
des allocations et des précisions qui seront apportées. Ça
vous fait...
M. Pageau: C'est ma perception de ce que je lis de l'avant-projet
de loi.
M. Trudel: Et vous, vous dites: Nous aimerions ça
être autour de la table comme membres du conseil d'administration. Vous
ne trouvez pas ça un peu difficile que tout le réseau du public
fasse introduire dans son conseil d'administration des établissements
privés qui ont leur pleine responsabilité, parce que j'imagine
que vous n'accepteriez pas, en tant que privés, que le public, que le
ministre puissent déléguer quelqu'un au conseil d'administration;
c'est hors de question, c'est un établissement privé. Comment
vous justifiez ça qu'un établissement privé soit assis
à une régie publique qui administre les sous du public et un
régime universel avec ce que vous êtes vous autres? Est-ce qu'il
n'y aurait pas des problèmes de conflits d'intérêts en
quelque sorte?
M. Pageau: Si l'on s'oriente vers une convention partielle d'un
certain nombre de lits en privé, on parle d'un certain contrôle
venant de la régie sur le fonctionnement quotidien du privé. On
mentionne l'évaluation. Il y a des rapports qui vont être faits de
nos activités.
M. Trudel: Et ça justifierait votre présence
à l'organisme régional par la partie qui serait
conventionnée, pas nécessairement pour ceux et celles qui
seraient strictement privés au sens de votre description.
M. Pageau: Au sens strictement privé, non, parce que
ça n'a pas de rapport.
M. Trudel: Un autre aspect qui, je pense, devrait nous
intéresser quant au type de clientèle avec laquelle vous
travaillez. Vous êtes appelés à intervenir, j'imagine,
assez fréquemment avec les CLSC. Est-ce que les rapports sont bons?
Est-ce que les services que vous recevez sont satisfaisants? Est-ce que, somme
toute, la relation de la responsabilité du CLSC vis-à-vis des
regroupements de personnes que vous hébergez est satisfaisante en termes
de suivi des gens qui sont avec vous en centres privés?
M. Pageau: Quand vous pariez de CLSC, j'imagine que vous parlez
du réseau des CLSC; alors, je vais être obligé de vous dire
non.
M. Trudel: Le CLSC est quelque part. Votre
établissement...
M. Pageau: avec certains clsc, au niveau individuel, ça
fonctionne bien. mais, d'habitude, le bon fonctionnement se fait entre
quelqu'un d'un centre d'accueil privé autofinancé avec une
personne qui est intervenante dans le clsc. ça ne se fait pas au niveau
de l'institution qui s'appelle le clsc.
M. Trudel: Mais avec les personnes qui interviennent, les
relations sont bonnes. Vous avez les services que vous voulez avoir.
M. Pageau: Des relations individuelles.
M. Trudel: Oui. Mais même à ça - on va le
poser dans ce cadre-là, des relations individuelles - est-ce
satisfaisant pour vous?
M. Pageau: Alors, là, ça dépend des
individus. On est pris là. Ça va dépendre des individus.
Il y a des individus qui sont prêts à collaborer et d'autres qui
ne le sont pas. Ça me ramène un peu à ce que je disais au
début.
M. Trudel: Oui, pour les raisons que vous exposiez au ministre
tantôt...
M. Pageau: C'est ça, oui.
M. Trudel: ...sur cet aspect-là. Un autre aspect aussi.
Est-ce qu'il y a une certaine forme de comité de
bénéficiaires que l'on retrouve dans vos établissements,
généralement?
M. Pageau: Oui. Une certaine forme. Ce n'est
généralement pas un comité de bénéficiaires
qui répond aux normes du ministère, mais il y a un comité
de bénéficiaires fonctionnel.
M. Trudel: En se dirigeant peut-être, comme avenue, vers
une certaine partie - oui, je prends votre hypothèse - qui serait
conventionnée, vous seriez d'accord pour obéir aux règles
générales prévues par le projet de formation des
comités de bénéficiaires, avec tous les pouvoirs, etc.
Seriez-vous pleinement d'accord avec cela?
M. Pageau: Oui, oui.
M. Trudel: Pour suivre les règles au complet, même
avec seulement une partie qui serait conventionnée.
M. Pageau: Écoutez, c'est une question... Oui. On n'est
pas contre le comité de bénéficiaires si ça peut
nous aider à bien gérer notre centre d'accueil et surtout
à accroître la qualité de vie du
bénéficiaire.
M. Trudel: Juste une petite remarque là-dessus. Je pense
que tous les membres de l'Assemblée nationale qui sont ici - et ce n'est
pas une question de blâme ou de tirer sur le privé, sur le genre
d'institution que vous dirigez - il nous arrive assez fréquemment de
recevoir... Je ne dis pas que ce sont spécifiquement les centres qui
sont dans votre association, dans votre regroupement provincial, mais on est
l'espèce de déversoir pour faire valoir leurs droits et ce qu'ils
devraient avoir dans ces centres-là compte tenu du coût qu'ils
ont; on les a souvent dans nos bureaux de député et on est
obligés de dire: Bien, vous êtes en matière privée.
Vous êtes dans un centre privé et votre privilège, c'est de
vous retirer.
M. Pageau: Est-ce que vous partez de centres d'accueil avec
permis du ministère ou si vous parlez de résidences, de chambres
et pension ou de n'importe quel système qui s'appelle privé? (21
heures)
M. Trudel: À mon avis, il y en a un peu partout, mais avec
permis aussi, souvent. En tout cas, moi, j'en reçois dans le
comté. Ce n'est pas pour jeter un blâme complet. C'est pour
ça que je parie des comités de bénéficiaires, parce
qu'il y a toujours un certain nombre de problèmes qui peuvent se
présenter et une des bonnes façons - et ce n'est pas pour rien
qu'on l'a institué au public - de gérer cela, c'est de donner un
certain nombre de droits ou de créer des canaux pour faire valoir les
droits dans le secteur public, pour autant que le secteur privé voudrait
se plier à ça aussi parce que les services que vous donnez, on
paie pour un certain type de services. Les bénéficiaires, je
pense, auraient le droit, mais je sais qu'on est en matière
privée, si on discute uniquement des
centres complètement autofinancés, mais, si on s'en va en
termes de conventionnés, je ne pense pas que l'État devrait avoir
la pensée de dire: On est en matière de
moitié-moitié ou quelque chose du genre. Ça va être
tout l'un ou tout l'autre. Si l'État intervient au niveau financier et
au niveau des services...
Le Président (M. Joly): En conclusion, s'il vous
plaît!
M. Trudel: ...en allouant des ressources, qu'on se plie
également aux règles. Vous m'avez répondu oui
là-dessus.
M. Pageau: Oui, oui.
M. Trudel: Ça va. Merci, M. Pageau.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député.
Je pense que toutes les parties ont posé les questions
nécessaires...
M. Côté (Charlesbourg): En terminant, j'aimerais
dire à M. Pageau que, globalement, je ne m'inquiète pas plus
qu'il ne faut de ses institutions qu'il représente. Étant au
permis, les gens savent qu'il doit y avoir un minimum de respect. Ce sont
davantage les foyers clandestins qui doivent être l'objet de notre
inquiétude à ce moment-ci sur le plan du minimum de services
à donner. Il s'agit de faire une campagne électorale pour
s'apercevoir, en faisant du porte-à-porte ou en rencontrer à
l'occasion, que c'est davantage ceux-là. Ce n'est pas chez vous que...
C'est inquiétant pour vous autres sur le plan financier, compte tenu de
l'alourdissement... Je comprends ça. Il y a des besoins aussi ailleurs
au niveau, en particulier, des foyers clandestins. C'est là-dessus qu'il
faudra porter notre attention. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci. Donc, au nom des membres de
cette commission, je tiens à remercier les membres de la Corporation des
établissements privés pour personnes âgées. Merci
d'avoir été avec nous et nous avoir présenté votre
mémoire.
Je demanderais aux représentants de l'Office des personnes
handicapées du Québec de bien vouloir s'avancer, s'il vous
plaît.
Bonsoir, mesdames, bonsoir, M. Mercure. J'apprécierais si vous
pouviez présenter les gens qui vous accompagnent.
Office des personnes handicapées du
Québec
M. Mercure (Paul): Oui. À ma droite, vous avez Mme
Christine Gourgue, qui est membre du conseil d'administration et du
comité exécutif de l'Office, et, à ma gauche, Mme Lise
Constantin, conseillère à la coordination nationale au service de
la coordination et de la recherche.
Le Président (M. Joly): Même si je sais que vous
êtes familier avec les procédures, M. Mercure, je me permets de
vous rappeler que vous avez une vingtaine de minutes pour présenter
votre mémoire et, par après, le temps... Même un peu plus,
à ce qu'on me fait mention. Par après, la balance du temps
demeure un temps privilégié pour les parlementaires des deux
partis pour vous poser les questions nécessaires. Merci. Allez.
M. Mercure: Merci, M. le Président. L'OPHQ a
participé à la réflexion menant aux orientations
gouvernementales que le présent projet de loi veut traduire. C'est avec
satisfaction que nous avions retrouvé dans les orientations
gouvernementales les principes auxquels nous adhérons nous-mêmes.
Notre principale préoccupation a été de vérifier si
les modalités organisationnelles proposées dans le projet
satisfaisaient bien aux conditions qui nous apparaissent nécessaires
pour assurer l'accès aux services, la participation de la personne
à la gestion des services qu'elle reçoit, la participation des
clientèles à l'administration des systèmes et le respect
du droit à des services de santé et des services sociaux
adéquats pour toutes les personnes handicapées.
D'une façon générale, nous ne pouvons que souscrire
aux objectifs et aux finalités inscrits dans le projet de loi. Nous
sommes heureux de la formulation utilisée dans l'article 1. Cette notion
de santé et de socialite dans un espace de liberté et
d'équilibre correspond à ce que nous souhaitons pour tous les
Québécois et que nous avons essayé de faire progresser
dans nos interventions pour l'intégration sociale des personnes
handicapées.
C'est d'abord pour celles-ci que nous voulons nous assurer que les
objectifs généraux énoncés dans la loi trouveront
à s'actualiser de la façon la plus harmonieuse possible. La
politique d'ensemble "À part... égale" proposait à la
société québécoise un modèle d'apparition du
handicap, mais aussi un modèle d'intervention que l'on peut appliquer
à la nouvelle loi.
Il existe un grande nombre d'agencements et de combinaisons possibles
dans l'aménagement des systèmes de distribution de services de
santé et de services sociaux. Aussi, importe-t-il de circonscrire le
plus clairement possible les objectifs de ces systèmes. C'est pourquoi
nous désirons attirer l'attention de la commission sur le premier
paragraphe de l'article 2 de l'avant-projet de loi. On y dit que les services
prévus seront dispensés en vue, entre autres, de favoriser la
réadaptation des personnes. Nous savons que certaines personnes
handicapées, atteintes dans leurs possibilités intellectuelles ou
psychiques, requièrent non pas de la réadaptation, mais une aide
particulière pour vivre en société de manière
active et de la façon la plus autonome
possible. Aussi, nous proposons d'ajouter cette notion d'adaptation pour
que le texte se lise: Favoriser l'adaptation et la réadaptation des
personnes.
Permettez-nous d'attirer votre attention sur les conditions
préalables à la participation des individus et des groupes
à l'instauration, l'administration et au développement des
services qui leur sont destinés. Pour les personnes handicapées,
cela suppose des conditions particulières portant sur la compensation
des limitations fonctionnelles. On devra donc s'attacher à mettre en
place des moyens de communication adaptés à leurs
incapacités.
Pour les personnes ayant des déficiences sensorielles,
l'élimination des barrières consistera à utiliser des
moyens de communication en médias substituts. Afin d'assurer un bon
fonctionnement aux services et l'élimination d'un certain nombre
d'obstacles à la pleine participation des personnes ayant des
déficiences, nous recommandons qu'un cinquième paragraphe soit
ajouté à l'article 2 de la loi. Les personnes handicapées,
comme les personnes des différentes communautés culturelles du
Québec, devraient recevoir une attention particulière. Voici le
paragraphe que nous vous proposons d'ajouter: 5° Favoriser l'accès
à des services de santé et des services sociaux selon des modes
de communication adaptés aux limitations fonctionnelles des
personnes.
Le chapitre II du projet de loi nous apparaît très
important. Le droit à l'information qu'assure à toute personne
l'article 5 exige les adaptations des modes de communication. Il nous
apparaît donc souhaitable que les régies régionales aient
le devoir d'élaborer un programme portant sur l'accès à
l'information, sur les services et les ressources aussi bien qu'un programme
portant sur l'accès aux services eux-mêmes.
Le programme d'accès prévoirait des modes de communication
entre professionnels et clientèles ayant des limitations fonctionnelles.
Il prévoirait aussi les communications entre les établissements
et la population, notamment, au moment de la séance annuelle
d'information publique. Le règlement de la régie
régionale, prévu à l'article 70, devrait refléter
ce programme d'accès.
Nous sommes heureux de constater que le droit au plan de services
individualisé est affirmé dans la loi. Nous proposons toutefois
que l'article 9 soit plus spécifique à cet égard. Nous
recommandons que soient ajoutés à l'article 9 les
éléments suivants: Ce plan de services doit assurer la
planification et la coordination des services et ressources requis pour la mise
en oeuvre et être élaboré selon une évaluation
globale des besoins du bénéficiaire. L'établissement qui
dispense la majeure partie des services en cause doit voir à son
élaboration en collaboration avec le bénéficiaire ou son
représen- tant. Il doit, le cas échéant, tenir compte des
ressources extérieures au système de services de santé et
des services sociaux, parce que le plan de services doit déborder dans
tous les domaines où une personne a des besoins.
L'article 8 établissant le droit de toute personne de participer
à l'élaboration du plan d'intervention correspond à nos
attentes. Toutefois, pour nous, l'article 149 ne reflète pas
suffisamment ce droit. Il indique que l'établissement doit
élaborer un plan d'intervention pour chaque bénéficiaire.
Il ne lui crée cependant pas l'obligation d'impliquer ce dernier dans
cette élaboration, ni de l'informer, sauf s'il survient un changement
important. Le dernier paragraphe de cet article trahit encore plus le
décalage entre l'article 8 et les devoirs que l'on attribue aux
établissements. Il y est indiqué que l'établissement doit
informer le bénéficiaire de tout changement important à
son plan d'intervention. Si le bénéficiaire participait vraiment
à la décision, aucun changement ne pourrait se produire sans
qu'il en soit informé. Nous recommandons donc un ajout à
l'article 149.
L'article 43 forme un conseil d'administration responsable d'un ensemble
d'établissements où peuvent se trouver regroupés CLSC,
centre hospitalier général, spécialisé ou
psychiatrique, centre d'hébergement et de soins de longue durée,
centre de réadaptation pour toxicomanes ou personnes ayant des
déficiences intellectuelles ou physiques. Nous comprenons que ce mode
d'organisation correspond à un souci d'intégration des services.
Nous nous demandons cependant, et nous avons des inquiétudes, si ces
conseils pourront arbitrer entre les demandes de leurs diverses composantes.
Nous craignons de voir les centres de réadaptation pour personnes ayant
une déficience intellectuelle en particulier jouir d'une écoute
amoindrie s'ils étaient juxtaposés à des
établissements hospitaliers.
Des moyens spécifiques devraient être prévus pour
assurer l'équilibre dans la réponse à l'ensemble des
besoins. Dans la composition des comités de bénéficiaires,
nous demandons une prépondérance accrue des
bénéficiaires eux-mêmes. Nous demandons que l'on augmente
à trois le nombre de leurs représentants en diminuant à un
membre la représentation des bénévoles. Ces comités
devraient être consultés par les établissements lorsque
ceux-ci veulent édicter des règlements susceptibles d'avoir un
impact sur les conditions de vie des bénéficiaires. Il importe
que ces comités se voient garantir un minimum de moyens matériels
et de conditions leur permettant de s'acquitter de leur mandat. Si
c'était fait d'une façon statutaire, ça leur permettrait
une véritable autonomie.
Par ailleurs, pour certains, la pratique ne leur a pas encore permis
d'atteindre le niveau de maturité correspondant au mandat
proposé. L'Office sera heureux de concourir au soutien de
ces comités selon leurs besoins.
Dans le même souci de participation, nous souhaitons que l'on
retrouve au conseil d'administration au moins une personne représentant
les personnes handicapées. Celle-ci devrait être nommée
à la suite d'une consultation des organismes les plus
représentatifs des personnes handicapées du territoire.
Nous sommes préoccupés par ailleurs par l'article 57
concernant la qualification des membres des conseils d'administration. À
l'alinéa 2, il nous semble exclure une gamme trop étendue de
personnes. Nous pensons que les employés des établissements
devraient être admissibles au conseil d'administration
d'établissements autres que celui avec lequel Ils ont des liens
contractuels.
L'office désire attirer l'attention de la commission sur
l'article 230 du projet de loi qui traite des subventions aux organismes
communautaires, notamment en ce qui concerne la promotion et la défense
des droits et des intérêts des usagers. Étant donné
les pouvoirs de l'Office concernant le financement des organismes de
défense des droits et des intérêts des personnes
handicapées, les articles 230, 232, 233 du projet de loi devraient faire
l'objet de discussions entre l'Office et le ministère, afin d'arriver
à des formulations reflétant les rôles que pourraient
exercer la régie, l'Office et le ministère, respectivement.
Enfin, l'Office est persuadé de la nécessité de la
coexistence de voies de recours et de révision interne et de
mécanismes indépendants pour garantir les droits des
bénéficiaires, sans exclure, bien sûr, la
possibilité de recours judiciaires. Il faut se prémunir contre le
risque que la consultation des organismes communautaires prévue au
paragraphe 3 de l'article 238 ne devienne qu'une simple formalité. La
régie régionale devra faire surgir de la communauté un
consensus déterminant le choix de l'organisme chargé d'aider et
d'accompagner le bénéficiaire qui désire porter
plainte.
L'article 11 de l'avant-projet établit le droit qu'a toute
personne de porter plainte. Nous voulons qu'il soit formulé de
manière à préciser qu'un organisme communautaire ou une
association intéressée aux services ou le représentant
légal du bénéficiaire puisse porter plainte à la
place du bénéficiaire.
Dans ses orientations, Mme la ministre Lavoie-Roux avait affirmé
la nécessité d'un mécanisme de recours ultime,
indépendant et doté de pouvoirs d'enquête et d'intervention
pour l'application des lois et la prestation des services. Le projet de loi
n'apporte pas, à cet égard, les changements que nous
espérions. Compte tenu du diagnostic que posait la ministre et de notre
propre réflexion sur la protection des droits des personnes
handicapées, nous demandons que la future loi confie au Protecteur du
citoyen les nouveaux mandats annoncés dans le document "Orientations -
Pour améliorer la santé et le bien-être au Québec".
Nous attendons avec confiance l'actualisation de cette mesure ainsi que la
révision des statuts des corporations professionnelles. (21 h 15)
Compte tenu de ses mandats, l'Office concourra à l'actualisation
d'une réforme des services de santé et des services sociaux en
priorisant les services de support à la famille, l'application du plan
de services et un soutien accru au mouvement associatif des personnes
handicapées.
Lorsqu'on juin 1978 l'Assemblée nationale adopta unanimement une
loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées, elle a
ouvert une voie vers l'autonomie et l'égalité dans notre
société. Elle mit à leur disposition une ressource pour
leur faciliter ce cheminement: l'Office dont j'ai l'honneur d'être
président. Malgré les progrès accomplis depuis 1978, nous
sommes persuadés que notre concours reste encore nécessaire. Nos
bureaux régionaux reçoivent encore beaucoup de demandes d'aide,
motivées non pas uniquement par l'absence de ressources
financières, mais aussi par les barrières que constituent
l'incompréhension, la méconnaissance des problèmes, les
pratiques bureaucratiques ou, même, le non-respect de la personne
différente dans son corps ou dans son esprit.
Notre mission est toujours d'actualité. C'est pourquoi nous
désirons assurer la commission de notre concours actif à un
système renouvelé de distribution des services sociaux et de
soins de santé. L'Office a été créé à
la demande des personnes handicapées, principalement pour favoriser la
coordination des services en vue de leur intégration sociale,
professionnelle et scolaire. Ayant eu à intervenir dans
différents systèmes de distribution de services, nous sommes bien
au fait de l'implication de divers réseaux, de l'ensemble des ressources
à mettre en oeuvre et de la dynamique menant à
l'élaboration et à la réalisation des plans de services.
Nous avons d'ailleurs été les promoteurs de cette approche, au
Québec.
Au-delà de l'aide matérielle qu'il nous a
été trop souvent contraint d'apporter pour pallier aux carences
des programmes existants, l'Office souhaite que son expertise puisse être
mise à profit là où elle est la plus nécessaire:
dans la communauté. Nous souhaitons que le personnel de nos bureaux
régionaux soit mis à contribution pour faciliter l'ouverture du
système de distribution des services aux besoins des personnes
handicapées et la réponse à ces besoins, dans le respect
de la dignité, de l'autonomie et des choix des personnes
handicapées, peu importe leur type de déficience.
Je remercie les membres de la commission de leur invitation et les
assure de notre entière collaboration.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le président. M.
le ministre de la Santé et des Services sociaux, s'il vous
plaît.
M. Côté (Charlesbourg): Merci. Je veux souhaiter la
bienvenue à M. Mercure, ainsi qu'aux gens du conseil qui l'accompagnent.
Dans le mémoire qui nous a été remis, à la page 2,
il est dit, au milieu du deuxième paragraphe: "Or, le document "Pour
améliorer la santé et le bien-être au Québec" lui a
paru - en parlant de l'Office, bien sûr - Ignorer trop facilement la
politique "A part... égale" et le mouvement social qui la sous-tend."
J'aimerais peut-être vous entendre un peu plus là-dessus. Je dois
vous dire honnêtement que ce n'était pas l'impression des gens qui
ont travaillé sur le document. Évidemment, étant dans le
document, on n'a pas toujours la même perception que ceux qui sont
à l'extérieur et qui peuvent l'analyser pas mal plus
détachés. Alors, j'aimerais peut-être vous entendre
davantage là-dessus puisque, effectivement, "À part...
égale" est un document de référence tout à fait
exceptionnel.
M. Mercure: Peut-être que je voudrais nuancer le sens
premier de cette expression-là. C'est que c'est sûr qu'on a dit,
à plusieurs reprises, que ce document-là s'inspirait de "À
part... égale". La question peut-être un peu difficile, c'est que
"À part... égale", évidemment, s'intéressait
à tous les réseaux de services et aux responsabilités de
l'ensemble des ministères. Aussi, l'approche "plan de services" est une
approche globale sur l'ensemble des besoins de la personne handicapée.
Je demanderai peut-être à Mme Constantin de préciser, mais
c'est dans ce sens-là de la globalité des besoins et de la
nécessité de la coordination interréseaux. Je pense que,
dans un document spécifique à un ministère, on n'a pas
retrouvé la préoccupation de rejoindre les autres réseaux,
de se coordonner et de s'assurer que la réponse, par exemple, à
des questions comme le transport ou l'éducation arrive en même
temps que celles qui concernent la réadaptation, les besoins de
santé et les besoins d'aide technologique, par exemple. Je ne sais pas
si, Mme Constantin, vous voulez compléter.
Le Président (M. Joly): Madame.
Mme Constantin (Lise): Je crois que la référence
est peut-être Implicite, mais elle n'est pas explicite et c'est ce qui
satisferait les personnes handicapées, le mouvement associatif des
personnes handicapées et les gens qui croient en "À part...
égale". Il aurait été peut-être intéressant
de s'y référer. C'est pour ça que je dis que ça
traverse sans doute les orientations et l'avant-projet de loi. Mais nous
aurions aimé que ce soit peut-être davantage mis en
évidence.
M. Côté (Charlesbourg): Plus explicite. Mme
Constantin: Plus explicite.
M. Côté (Charlesbourg): Ça va. Dans
l'avant-projet de loi, on définit le droit de l'usager. On le
définit comme suit, à l'article 14: droit au service, droit
à l'information, droit à l'intégrité physique,
droit à un plan de services individualisé dans certaines
circonstances, droit d'exercer un recours, droit à l'assistance, droit
à la protection et, enfin, droit de recevoir des services dans sa
langue, selon certaines dlsposl tlons. Évidemment, dans votre
présentation, vous avez repris un certain nombre de droits à
l'accessibilité, au plan de services, d'être informés.
Est-ce que ça vous apparaît... Je l'ai posée à
d'autres intervenants, la semaine dernière, compte tenu de votre niveau
de représentativité, je vais aussi vous la poser. Est-ce que
ça vous apparaissait complet? Est-ce que c'est suffisamment englobant
pour qu'on puisse le maintenir tel qu'il est?
M. Mercure: Disons que c'est...
M. Côté (Charlesbourg): C'est l'article 4.
M. Mercure: Excusez! Je pense que c'est une bonne nomenclature.
Je pense que la définition des droits, évidemment, au
début de la loi, c'est essentiel. Mais je pense que notre
préoccupation, au-delà de la définition des droits, c'est
l'assurance qu'il y a des mécanismes de révision et de recours
internes et, en particulier, un mécanisme de recours indépendant
qui peut permettre que les droits qui sont exprimés ici puissent, dans
un cas particulier, vraiment se réaliser dans le concret. Mme
Gourgue.
Mme Gourgue (Christine): Je ne sais pas si vous faites allusion
aux différents endroits où on mentionne, entre autres, au niveau
du plan de services, que la personne y participe. Ici, on parle de droit de
recevoir des services. C'est bien dit, mais je crois que, lorsqu'on entre dans
les détails, c'est très bien, au niveau des gestionnaires du
réseau, que ce soit répété et que ce soit vraiment
explicite. Malheureusement, au niveau des plans de services, lorsqu'on lit que
c'est l'établissement qui est responsable de mettre en place des plans
de services, je pense qu'il est important que la personne... Je pense qu'on
tente de responsabiliser des gens face à leur propre santé, mais
je pense qu'il est peut-être temps de les impliquer aussi dans les
différents mécanismes. Déjà, au départ,
lorsqu'on parle de plan de services, j'entends une autre version où on
parle de plan de soins. Je trouve très malheureux d'entendre ça
dans le réseau, actuellement, parce que, pour moi, le plan de soins,
c'est vraiment au niveau médical et infirmier. Mais je pense que,
lorsqu'on essaie
d'amener un nouveau concept, on se doit aussi de changer les termes. Je
pense que la personne doit être beaucoup plus considérée
dans le système, actuellement, et dans tout le processus, entre autres,
dans les plans de services.
M. Mercure: Peut-être, M. le ministre, si vous me le
permettez.
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
M. Mercure: Je voudrais aussi signaler qu'il y a une phrase,
ici... C'est l'expression: "Compte tenu de l'organisation et des ressources
humaines, matérielles et financières des établissements
qui dispensent ces services..." Dans un article comme celui-là...
M. Côté (Charlesbourg): M. Mercure, à quel
article?
M. Mercure: À l'article 4.
M. Côté (Charlesbourg): L'article 4? O.K.
M. Mercure: Un article comme celui-là, évidemment,
c'est bien sûr que ça a pour effet d'atténuer sensiblement
la définition du droit. Disons que...
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Évidemment, ce
que je comprends, c'est: Libellé comme il est, il peut être
limitatif...
M. Mercure: Oui, il peut être limitatif.
M. Côté (Charlesbourg): II peut être
limitatif. Mais j'ai l'impression que le législateur, à tout le
moins le concepteur de cette législation, inspiré probablement
par certaines orientations, a décidé que c'était bon de le
mettre là pour ne pas qu'on se retrouve devant une situation où
on demande n'importe quoi n'importe où n'importe quand. Je comprends un
peu l'interprétation que vous en faites un peu avec inquiétude
parce que ça pourrait être restrictif et, évidemment, je
comprends très bien aussi la notion de plan de services que vous
évoquez ou de plan de soins. J'espère que ce n'est pas trop
répandu dans le réseau parce que vous avez dit tantôt: On
entend ça davantage dans le réseau maintenant en termes de plan
de soins au lieu de plan de services. Vous avez raison d'être inquiet et,
en me le communiquant, vous m'inquiétez un peu aussi. On aura
certainement l'occasion d'en rediscuter dans d'autres forums.
Je voudrais revenir au support des comités de
bénéficiaires. Vous le voyez comment? Une expérience est
en cours actuellement au niveau de la santé mentale. Comme c'est quand
même très jeune, je pense qu'on peut se servir de cette
expérience-là pour tenter d'éviter les erreurs, s'il y en
a, dans ce cas-là. Le comité de bénéficiaires en
centre hospitalier de courte durée, je ne suis pas sûr qu'il
serait très utile parce que, le temps de revendiquer, possiblement que
le patient, le bénéficiaire sera déjà sorti de
l'hôpital. C'est peut-être dans des établissements de plus
longue durée. Mais j'aimerais vous entendre là-dessus davantage,
sur le support à apporter aux comités de
bénéficiaires.
M. Mercure: C'est une question qui, personnellement,
m'intéresse beaucoup. J'ai moi-même participé pendant un
certain temps au travail d'un comité de bénéficiaires dans
un centre d'accueil pour déficience intellectuelle. Je pense que c'est
très important que le support aux comités de
bénéficiaires provienne de l'extérieur, au moins en
partie, pour assurer une certaine indépendance de fonctionnement. Ce que
je verrais, c'est qu'un organisme comme le nôtre ou un organisme comme le
Comité provincial des malades, qui s'intéresse beaucoup à
cette question-là, ou d'autres associations, ou même
qu'éventuellement une fédération des comités de
bénéficiaires apporte un certain support pour donner de la
formation et pour expliquer aux comités de bénéficiaires
différentes méthodes pour obtenir le respect de leurs droits. Je
pense que c'est très intéressant et très important. Je
verrais même que l'on ait un mode... Il y a un certain financement
peut-être très minimal qui est nécessaire et je verrais
très bien qu'on ait un programme de subventions statutaire, à
condition qu'il soit statutaire, pour empêcher... Parce que, dans le
moment, on sait que les comités de bénéficiaires sont
déjà là, en principe, dans la loi, qu'ils ont
déjà une définition assez précise et qu'ils ont la
responsabilité d'intervenir dans le domaine des droits. Mais on sait
très bien - et je dis ça en toute connaissance de cause parce que
j'ai discuté avec d'autres organismes de défense des droits sur
cette question-là - et dans beaucoup de cas, qu'ils sont
récupérés par les administrations et ils sont
orientés vers des activités comme les loisirs, des
activités un peu moins dérangeantes.
Moi, je crois beaucoup à la vie active des comités de
bénéficiaires supportés par un mode de subventions
statutaire et un support externe pour leur animation et pour leur formation.
Moi, je crois plus à ça qu'à l'ombudsman dans les
établissements. Je pense que l'ombudsman peut plus facilement être
récupéré et ça arrive. Il peut plus facilement se
sentir solidaire de l'ensemble de l'établissement que le comité
de bénéficiaires.
M. Côté (Charlesbourg): Si je comprends, c'est pour
s'assurer qu'il ait les moyens de travailler, il faut qu'il soit
indépendant, indépendant de fortune. Ce que vous nous dites,
c'est que...
M. Mercure: Ce ne sont pas des montants
considérables tout de même, mais... (21 h 30)
M. Côté (Charlesbourg): Non, non d'accord. Je
comprends, mais ce que vous nous dites, c'est que dans la mesure où
l'ombudsman vient de l'institution il est récupéré
règle générale par l'institution - bon, c'est normal - et
que, dans ce cas-là, on devrait avoir une structure de support sur le
plan financier, quelque chose de léger qui nous permettrait de supporter
le comité des bénéficiaires mais qui s'occuperait d'autres
choses que le loisir.
M. Mercure: C'est ça.
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
Mme Gourgue: II y a peut-être un autre point. On parle de
financement mais je pense qu'il y a un point qui est très important.
Pour avoir été dans l'implantation du Comité des
résidents de Robert-Giffard, il est évident que, pendant un
certain temps, on tentait de les garder au niveau du loisir.
Déjà, d'aller chercher le financement auprès de
l'établissement, il a fallu manoeuvrer et louvoyer assez subtilement.
D'autre part, ce qui se produit, c'est que dans tout le mécanisme de
demandes, ne serait-ce que d'essayer de se trouver un bureau etc., les gens, il
y en a qui ont été un peu pris en charge par les gens qui y
travaillent. On a pensé pour eux et là, tout à coup, bon
bien, c'est quoi vos besoins?
En plus du financement, je pense qu'il y a énormément
d'éducation à faire pour passer à travers toute la
bureaucratie, pour réussir à se faire entendre parce qu'avant les
mécanismes n'étaient même pas là. Donc, c'est de
développer des mécanismes au sein de ces comités pour
qu'il y ait vraiment une écoute en bout de ligne. Et je pense que
ça, c'est très important. Je veux dire, ça peut s'appeler
politiser ce comité de résidents.
Et je reviens un peu à ce que vous avez mentionné par
rapport à des centres qui ont des permis de moyenne durée et de
longue durée, pourquoi pas de courte durée? Je pense que,
lorsqu'on parle de personnes qui utilisent des services, on peut
peut-être aussi parler des ex-utilisateurs de services. Je ne vois pas
pourquoi, dans un établissement de courte durée, il n'y aurait
pas un comité de bénéficiaires qui soit là pour
s'assurer que des services sont adéquats aussi. J'ai de la
difficulté à concevoir que c'est strictement dans la moyenne et
la longue durée qu'il faut que les gens résident pendant un
certain temps et que c'est dans ces établissements-là qu'il y a
les services ou les qualités de vie; je pense qu'il y a peut-être
aussi dans la courte durée...
M. Côté (Charlesbourg): Je m'interrogeais parce que,
effectivement, si la moyenne de séjour est de sept ou huit jours par
bénéficiaire dans la courte durée, évidemment,
l'idée étant qu'on doit offrir certains services, il y a une
rotation quand même assez importante. Évidemment, vous soulevez un
point qui a... Vous avez tout à fait raison, peu importe que ce soit
Pierre, Jean ou Jacques, il faut bien sûr s'assurer que le centre de
courte durée donne des services à ses
bénéficiaires. Alors, pris sous cet angle-là, c'est
sûr que ça pourrait être le cas aussi. Je pensais que
c'était peut-être d'abord prioritaire pour ceux qui sont là
à moyen et long termes. Évidemment, tout est question de mesure
là-dedans. Alors, ça va, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le
leader de l'Opposition et député de Joliette.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais demander
au président si c'est lui ou un de ses collaborateurs qui,
dernièrement, écrivait une lettre à certains
bénéficiaires pour leur dire: Si vous avez des revendications,
allez voir vos députés!
M. Mercure: Ce n'est pas moi. M. Chevrette: C'est qui?
M. Mercure: Ça peut être certains employés de
l'Office et ça peut arriver que, et ce n'est pas une excuse que je veux
faire, dans certaines situations budgétaires difficiles les
employés, en première ligne, arrivent à poser des gestes
qu'on ne poserait pas à tête reposée, dans des
circonstances très confortables. Donc, il peut arriver que ce genre de
lettre soit envoyée mais ce n'est pas moi...
M. Chevrette: Êtes-vous au courant s'il y en a eu?
M. Mercure: Pardon?
M. Chevrette: Êtes-vous au courant qu'il y en a eu?
M. Mercure: Oui.
M. Chevrette: Êtes-vous au courant qu'il y a eu des appels
téléphoniques aussi?
M. Mercure: Bon, disons que j'ai moins de contrôle sur les
appels téléphoniques, M. le député.
M. Chevrette: Vous avez des contrôles sur les lettres?
M. Mercure: Oui, les lettres, je les vois. Oui, j'en vois un
certain nombre mais probablement que je vois...
M. Chevrette: qu'est-ce qui manque présentement à
l'office pour que celui-ci puisse exercer pleinement son travail pour
réussir à passer son test de civilisation?
M. Mercure: Bon, je pense que peut-être on peut dire qu'il
manque des budgets, on ne serait pas tout seul à dire ça.
M. Chevrette: Mais là je ne le demande pas aux autres, je
le demande à vous.
M. Mercure: II manque une définition claire aussi du
rôle principal de l'Office dans le sens que moi j'ai souvent tenu ce
langage-là, et je pense qu'on va devoir demander au gouvernement de se
prononcer à nouveau sur le transfert des programmes de soutien direct.
Je pense qu'on ne peut pas être en même temps un organisme de
défense de droits, de coordination, un organisme horizontal de
collaboration avec tous les réseaux de services et, en même temps,
intervenir directement, en première ligne, dans le financement des
services.
M. Chevrette: Vous savez qu'il existe certains organismes - je ne
sais pas combien il y en a, il y en a peut-être qui se sont
ajoutés - comme Le Bouclier et, à Hull, je ne me souviens pas du
nom, qui négocient des contrats de services avec les
établissements existants pour ne pas créer de duplication et qui,
je pense, jouent un rôle de complémentarité au point de vue
de l'accessibilité des personnes handicapées.
M. Mercure: Le Bouclier est un centre d'accueil qui n'est pas
institutionnel, qui n'a pas de ressources d'institution.
M. Chevrette: Exact.
M. Mercure: Je pense que vous faites allusion à une
idée nouvelle qui est expérimentée aux États-Unis
et, en particulier, au Canada, à Vancouver, où on conçoit
un système de services beaucoup plus souple - on appelle ça le
courtage de services - et où on apporte le financement, non pas à
l'établissement, mais à une corporation, et le financement est
apporté pour un individu, pour chaque individu. On achète des
services dans la communauté à moindre coût et à
l'endroit où c'est le plus efficace. Je pense que c'est quelque chose
d'intéressant. Ce n'est pas très compatible avec notre structure
très complète d'établissements et de mandat, mais il
serait certainement très utile de continuer l'expérimentation
dans ce domaine-là.
M. Chevrette: Est-ce que l'OPHQ suit de près ces... Il me
semble que ce sont deux ou trois groupes au maximum qui vivent ce genre
d'expérience de courtage de services. Est-ce que vous suivez ça
de près, vous autres?
M. Mercure: Disons qu'on les suit moyennement de près. On
est au courant et il y a des expériences qui sont promues par des
associations avec lesquelles on est en contact constant. Je pense que c'est
peut-être une solution à la difficulté de fonctionner avec
l'idée du plan de services, parce que le plan de services,
évidemment, dans un contexte comme ça, il est l'outil tout
indiqué pour vraiment évaluer l'ensemble des besoins et trouver
des solutions à l'ensemble des besoins au même instant et dans un
contexte très peu structuré et, je le pense, avec des avantages
au plan financier aussi.
M. Chevrette: Je pense exactement la même chose. C'est pour
ça que je souhaite qu'on puisse peut-être, à moyen terme,
comme commission en tout cas, questionner cette formule parce qu'il
m'apparaît que ça favorise l'accessibilité à des
services que, autrement, des gens n'auraient même pas le loisir d'aller
chercher et, par l'intermédiaire de leurs structures, ils ont
accès à certains services et il y a une intégration
sociale que vous recherchez, plus facile, plus correcte et plus décente
à par ça.
Une dernière petite question que je vous poserais. Il y a
énormément de demandes financières - il n'y a pas de
cachette - auprès de l'OPHQ et, si ma mémoire est fidèle,
à peine deux ou trois mois après la parution du budget,
déjà, on se butait - en tout cas dans nos bureaux de
comté, à ce qu'on nous disait, et je pense que ce devait
être la même chose partout - à la réponse suivante:
II n'y a plus aucune disponibilité financière. À quoi
attribuez-vous ce court laps de temps, tout de suite après, et qu'il n'y
ait plus rien? Est-ce dû au fait que vous traitez... Il faudrait
peut-être que vous m'informiez comment vous traitez les dossiers, parce
qu'on dit aux gens, nous autres, aux mois de janvier, février, mars:
Attendez, le 1er avril s'en vient. Il va y avoir un budget. Rendu au mois de
mai, les gens nous disent: Ça ne donne plus rien de le demander, il n'y
en a plus. Comment traitez-vous vos dossiers pour qu'on puisse peut-être
s'ajuster?
M. Mercure: Disons que parfois c'est dit, alors que ça
devrait être explicité davantage, ce qu'on veut dire par
là. Même actuellement, il n'y a pas carence de budget à
l'Office. On continue à fonctionner à partir de budgets
additionnels qui nous ont été attribués.
Le problème, c'est qu'on a des listes d'attente et, quand
quelqu'un arrive et qu'il n'est même pas sur la liste d'attente, on lui
dit qu'il n'y a pas disponibilité budgétaire. On lui dit
ça dans les bureaux régionaux.
M. Chevrette: Je vous arrête, M. le président, parce
que, là-dessus, dans ce cas-là, on serait beaucoup mieux, comme
élus, nous, de savoir exactement ces faits parce qu'on leur
donne - et je vous avoue... ils ne doivent pas tous être des
menteurs, ils nous disent tous la même chose - la réponse
suivante: II n'y a pas de crédits. Si c'est parce que vous traitez des
listes d'attente qui n'ont pas été vidées les
années antérieures, on serait bien mieux de répondre
ça parce que nous passons pour des gens qui ne connaissons pas nos
dossiers.
Je pourrais vous donner des noms d'individus qui s'en vont voir des
personnes-ressources dans le milieu et qui répondent à nos
bénéficiaires: Oui, il y en a de l'argent. Exactement ce que vous
venez de dire. Puis, quand ils arrivent à l'Office pour faire la
demande, ils disent qu'il n'y a plus d'argent. À l'intérieur
même de la structure, il y a contradiction sur ce fait et nous avons
l'air joliment mal pris dans ça. On répond quoi? On a une
réponse de vous autres dans certains cas où il n'y a pas d'argent
et de personnes du milieu du réseau qui connaissent les budgets et les
programmes de l'Office qui disent: Pourtant, il y en a de l'argent, je suis
allé à l'Office la semaine passée et ils m'ont dit qu'il y
en avait. Il y a un ajustement à faire au niveau de l'information. Je ne
le dis pas pour vous accabler de bêtises, je vous le dis parce que c'est
important, je pense, que les vraies raisons sortent. On a à renseigner
le public, nous, et c'est drôlement important.
La réponse que vous m'avez donnée, il y a un monsieur de
Sainte-Julienne, qui est du comté de Rousseau, qui me l'a donnée.
C'est exactement la même réponse que vous me donnez. Par contre,
quand mon personnel appelle pour certaines demandes, on nous répond
à l'Office qu'il n'y a plus d'argent. Il y aurait un réajustement
dans l'information à donner. Je vous le dis comme conseil. Puis,
ça nous servirait, nous aussi, comme élus du peuple qui recevons
chaque lundi matin des personnes à qui on doit donner des informations
justes. Après ça, il nous disent: Coudon, est-ce qu'il y en a ou
non? T'es-tu renseigné ou si tu voulais te débarrasser de moi? Il
y en a peut-être quelques-uns qui ont le goût de nous liquider
vite. Êtes-vous conscients de ça?
M. Mercure: Oui, je suis conscient de ça. Je dois
peut-être compléter ma réponse en disant qu'il y a quand
même des secteurs comme l'intégration scolaire, cette
année, où on a eu des difficultés budgétaires qui
persistent encore, qui sont très importantes. À ce
moment-là, si ce sont des cas qui sont en instance d'intégration
scolaire, la réponse, étant donné qu'on aura des budgets
limités à l'intérieur de l'enveloppe pour cette
activité, la réponse "on n'a pas d'argent cette année"
était valable.
M. Chevrette: Non, mais les gros refus, nous, c'est vraiment de
l'aménagement pour accessibilité aux maisons. C'est vraiment sur
ce programme, je pense. Les grosses demandes et les plus grandes
déceptions de la part des personnes handicapées, c'est vraiment
au niveau de ce programme: pas d'argent pour une rampe d'accès suite
à un accident, suite à beaucoup de problèmes.
M. Mercure: Pourtant, toutes les semaines, on émet des
chèques et on paie des cas, seulement dans certaines régions, ce
sont des cas qui sont en attente depuis douze mois. Si quelqu'un nous arrive
maintenant, on va devoir lui dire: On ne pourra pas traiter votre demande avant
X mois.
M. Chevrette: Oui, mais c'est peut-être mieux de le dire de
même, d'être très franc que de créer l'attente et
l'espoir et, à ce moment, il y a une déception très
profonde. Sans doute que vous serez d'accord avec moi, M. Mercure, le jour
où on fait miroiter à la personne handicapée qu'elle doit
se prendre en main, qu'elle doit s'intégrer socialement, qu'on va lui
donner les moyens et qu'elle embarque dans des comités, qu'elle se
motive et, le jour où elle veut se donner un service elle ne l'a pas,
vous admettrez que c'est encore pire pour une personne du genre qui est sortie
de son milieu renfermé, qui a voulu participer. La frustration a des
effets très négatifs.
M. Mercure: Oui, c'est vrai ça, mais je vais revenir
encore sur le conflit des rôles. On forme notre personnel, nous autres,
pour être des personnes qui sont du côté des personnes
handicapées. On forme notre personnel pour les habituer à
défendre leurs droits, à se prendre en main, à faire de la
représentation. Il arrive que notre personnel qui ne peut pas donner une
solution suggère à la personne de faire de la
représentation. C'est normal. Mais nous, on n'est pas une structure de
services. Ce qui n'est pas normal...
M. Chevrette: On ne vous dit pas qu'on ne veut pas avoir de
pression. On vous dit qu'on veut avoir les bonnes réponses.
Mme Marois: Si vous permettez, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Taillon et présidente de la commission, oui.
Mme Marois: Vous nous dites: Dans le fond, il y a un conflit de
rôles, il y a un conflit de vocations, il serait bon qu'on se penche sur
cette réalité. Est-ce que vous croyez que le rôle
fondamental de l'Office - quitte à ce qu'on le change de nom, ce n'est
pas grave - ça devrait être la promotion des droits,
l'éducation, le travail sur les changements de mentalité et
laisser à l'ensemble du réseau, comme c'est
généralement le cas, sauf quelques programmes
précis, laisser l'ensemble du réseau de la santé et des
services sociaux distribuer les services? (21 h 45)
M. Mercure: Oui, c'est ma conviction, moi. J'ajoute, par exemple,
que notre rôle veut aussi, est en fait aussi de conseiller le
gouvernement en matière de législation et de
réglementation, conseiller les ministères dans l'organisation des
services en ce qui concerne les personnes handicapées et s'assurer une
coordination interministérielle. C'est ça notre rôle
fondamental. C'est assez clair dans la loi et c'est clair dans "À
part... égale" aussi. Ce qu'on voudrait, c'est que les services...
Mme Marois: Revenir à cette vocation fondamentale.
M. Mercure: Exactement.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la
députée. Je vais maintenant reconnaître M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, M. Trudel, et aussi
critique en matière d'affaires sociales pour sa formation.
M. Trudel: À la page 11 de votre mémoire, vous
touchez un aspect intéressant au niveau de la régionalisation,
les conseils d'administration des régies régionales et les
conseils d'administration unifiés. On peut vous comprendre, compte tenu
de la position dans laquelle vous êtes. Ce que vous êtes en train
de nous dire, et j'aimerais ça vous entendre un peu plus
là-dessus si c'est possible, avec les conseils d'administration
unifiés qui nous sont proposés, vous dites qu'on est en
très grand danger que les hôpitaux mettent la main sur les CLSC,
les services sociaux, les services de réadaptation et les services
d'adaptation. C'est clairement ça que vous dites?
M. Mercure: Disons pas mettre la main peut-être, mais ce
qu'on veut dire c'est que dans un même conseil d'administration, quand il
y a des problèmes concernant des grosses structures, des gros budgets,
des gros équipements, la préoccupation risque d'être
monopolisée autour de ce genre de problème. Dans les centres
d'accueil de réadaptation où, disons, les aspects proprement
techniques sont moins importants, mais où il y a une
nécessité de qualité de relations interpersonnelles, on
pense que ce genre de problème risque d'être difficile à
expliquer et difficile pour les représentants. On espère qu'il va
y avoir quand même dans ces conseils d'administration suffisamment de
représentants des centres de réadaptation pour la
déficience intellectuelle, mais aussi pour la déficience du
psychisme et la réadaptation physique. Mais on pense que les grosses
structures, dans les conseils qui auront des gros hôpitaux, ça va
prendre une partie importante de la préoccupation du conseil. On a
vécu ça aussi au niveau des CRSSS, l'importance des
hôpitaux dans les conseils régionaux, alors on se dit: Bon, dans
des structures, même au niveau des CLSC, où il y aura un ou deux
gros centres hospitaliers, on pense que beaucoup de la discussion, beaucoup de
l'orientation va tourner autour de ces deux gros établissements.
M. Trudel: Là-dessus, nous pensons pas mal la même
chose. Vous voyez, depuis le début des travaux de cette commission, le
rouleau compresseur de la santé et des spécialistes intervenants
dans le secteur de la santé par rapport aux services d'adaptation et de
réadaptation est très très clair y compris... Non, pas y
compris cela. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: C'est clair de l'autre côté aussi, cette
semaine on en a parié. Voyez, la réflexion qui est faite, c'est
qu'il y a des gens qui sont dans ce système, en partie dans le
système hospitalier, des professionnels qui ont comme lieu de travail
l'hôpital et dont l'instrument est également l'hôpital.
À cet égard, il y a comme une mainmise sur le système qui
serait comme prolongée. Il y a des dangers réels qui sont
présents, compte tenu de l'expérience et compte tenu aussi
peut-être de l'expérience que vous avez, vous autres, à
l'Office, quand vous transférez des programmes et que ça se
retrouve dans un autre ministère ou direction qui, effectivement,
direction ou ministère ou service, n'a pas la même
préoccupation première. Donc, on se comprend vite
là-dessus, c'est ce qu'on veut dire et je pense qu'on va vivre ça
également, de façon assez aiguë, dans des conseils
d'administration unifiés, en particulier, au niveau de nouveaux
organismes qui sont apparus dans le décor relativement récemment
et qui s'appellent les CLSC. Ils sont encore - je pense que tout le monde va en
convenir - des instruments relativement fragiles au niveau de la
prévention. Avez-vous quelques réflexions là-dessus,
aussi?
M. Mercure: Disons que pour nous les CLSC sont la ligne
d'entrée pour beaucoup des services dont les personnes
handicapées ont besoin. C'est sûr que dans beaucoup de milieux,
comme vous dites, les CLSC se sont formés récemment et n'ont pas
le prestige et la capacité professionnelle qu'ont les grands centres
hospitaliers. Mais, je parlais surtout... parce que notre préoccupation
principale, c'est peut-être les centres d'accueil. Mais c'est aussi vrai
pour d'autres ressources plus légères, effectivement.
M. Trudel: Merci, merci beaucoup.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député.
Je pense que nous avons accompli ce que nous
avions à faire.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, je pense qu'il
apparaît extrêmement Important à ce moment-ci de dire un mot
à... M. Mercure avait raison de l'évoquer, il faut requestionner
le rôle et bien cibler ce que l'on doit demander à l'OPHQ. En lui
demandant dans le passé et encore aujourd'hui d'être entre l'arbre
et l'écorce, je pense que c'était très mal servir l'OPHQ
à ce niveau-là. Dans ce sens-là, il y aura des rencontres
très prochaines qui vont nous permettre d'élaborer un retour
normal des choses, avec un calendrier. Ça, je pense que ce serait rendre
justice à l'OPHQ, le rôle qu'on voulait lui donner étant un
rôle de promotion, d'éducation et de défense des
intérêts. Je pense que ce sera un rôle un peu plus
confortable que celui que vous avez au moment où on se parle. Je tenais
au moins à le dire parce qu'on l'a évoqué. Ça
m'apparaît extrêmement important pour les gens qui s'occupent
très activement de l'OPHQ. Merci.
M. Mercure: Mais l'inconfort, ça peut être utile
parfois, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Bien, ça va faire
comprendre l'inconfort de ceux qui vont prendre la relève au niveau des
programmes. Merci.
Une voix: Appelez votre député! Des voix:
Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je tiens
à remercier les membres de l'Office des personnes handicapées du
Québec et je vous souhaite bon retour. Je vous remercie d'avoir
été avec nous.
M. Mercure: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Alors, nous ajournons les travaux
à demain matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 21 h 53)