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(Dix heures neuf minutes)
Le Président (M. Joly): J'aimerais rappeler le mandat
qu'on s'est donné. C'est une consultation générale et des
auditions publiques dans le cadre de l'étude de l'avant-projet de loi,
Loi sur les services de santé et les services sociaux. Je vois que nous
avons quorum, Mme la Présidente. Est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. Atkinson
(Notre-Dame-de-Grâce) est remplacé par M. Holden (Westmount); M.
Marcil (Salaberry-Soulanges) est remplacé par M. Williams (Nelligan) et
Mme Marois (Taillon) est remplacée par Mme Blackburn (Chicoutimi).
Le Président (M. Joly): Merci, madame.
M. Chevrette: Mme Vermette est remplacée par M. Jacques
Baril. Il s'en vient.
Le Président (M. Joly): Merci. J'aimerais, pour le
bénéfice des membres de cette commission, rappeler
qu'aujourd'hui, nous entendrons le Conseil de la santé et des services
sociaux de la région du Montréal métropolitain,
l'hôpital Marie Enfant, le Centre d'accueil Father Dowd, le Regroupement
des organismes de promotion du Montréal métropolitain, les
Messagères de l'espoir et le Comité de
bénéficiaires du centre hospitalier Douglas.
Je vois que, déjà, les membres du Conseil de la
santé et des services sociaux de la région du Montréal
métropolitain se sont avancés. J'aimerais vous rappeler un peu
les règles de procédure. Il vous est consenti une vingtaine de
minutes, un peu plus, un peu moins, pour la présentation de votre
mémoire. Par après, vingt minutes sont imparties à chacune
des formations politiques pour poser des questions ou, des fois,
peut-être répondre à des questions.
Alors, pour le bénéfice des membres de cette commission,
j'aimerais que le représentant du Conseil de la santé s'identifie
et identifie les membres qui l'accompagnent.
Conseil de la santé et des services sociaux de
la région du Montréal métropolitain
M. Leblanc (Jean): M. le Président, M. le ministre, Mmes
et MM. les députés, dès le début de nos
échanges, permettez que je vous présente les personnes qui
m'accompagnent. À mon extrême gauche, M. Raphaël Assor qui
est élu par les groupes communautaires bénévoles. Dr. Marc
Bois, élu par le Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens.
À mon extrême droite, Mme Rolande Laurin Dorval, élue par
les centres d'accueil. M. Yves Mongeau élu par les cégeps. M.
Gérard Marcoux, notre directeur général et moi-même,
Jean Leblanc, élu par les centres hospitaliers.
Nous tenons à remercier les membres de la commission des affaires
sociales de donner l'occasion au Conseil de la santé et des services
sociaux de la région du Montréal métropolitain de
présenter son mémoire sur l'avant-projet de loi sur les services
de santé et les services sociaux.
Nous sommes mandatés par le conseil d'administration du conseil
régional pour venir vous communiquer nos recommandations sur
l'avant-projet et vous faire part de quelques considérations
particulières qui touchent le fonctionnement du système de
santé et des services sociaux.
Un bref survol, si vous permettez, pour débuter, de notre
région qui compte quelque 2 000 000 d'habitants, soit près du
tiers de la population québécoise. Le vieillissement de cette
population est plus accentué dans le Montréal
métropolitain que dans l'ensemble du Québec. Le pourcentage de
personnes âgées de 65 ans et plus y est passé de 10,8 %
à 14 % entre 1981 et 1990, alors que pour la même période,
le taux est passé de 8,8 % à 10 % pour le Québec. Cet
écart, selon les diverses prévisions, aura tendance à
continuer de croître. Ceci se traduit, par exemple, par le fait que plus
de 46 % des personnes âgées vivant seules au Québec se
retrouvent dans l'une ou l'autre des 29 municipalités du Montréal
métropolitain.
La région compte une forte représentation des groupes
linguistiques et culturels diversifiés: 17 % des citoyens sont
anglophones, 22 % allophones et 61 % francophones. Montréal est la
principale région de la province concernée par
l'accessibilité aux services pour les anglophones et les autres
communautés culturelles.
Le problème des itinérants et des itinérantes est
une dure réalité qui se retrouve surtout à
Montréal. Nous avons dénombré 15 000 sans-abri. Ils
s'entassent dans les salles d'urgence des hôpitaux, ensuite, en dernier
recours, pour revenir dans les salles d'urgence. À titre d'exemple, on
retrouve quotidiennement une dizaine de ces cas de misère sociale dans
la salle d'urgence de l'hôpital Saint-Luc. Ce sont surtout de jeunes
adultes, des femmes et des personnes âgées qui sont sans emploi.
Pour tous ces marginaux, le Conseil régional tente, depuis des
années, d'interpeller tous les établissements du réseau
pour partager les recours appropriés à ces
membres de notre société.
Les personnes à faible revenu ou vivant sous le seuil de la
pauvreté constituent 24,5 % de la population de Montréal et ce
pourcentage est formé majoritairement de personnes de moins de 18 ans et
de personnes âgées. Les femmes sont davantage affectées que
les hommes, souvent en vertu de leur statut de chef de famille monoparentale.
Je vous parle d'un problème majeur. Le taux de pauvreté, chez les
femmes, est 10 % plus élevé que la moyenne provinciale et 23 %
plus élevé que chez les hommes; 80 % des familles monoparentales
ont une femme à leur tête. Tous les problèmes sociaux
qu'engendre cette réalité quotidienne réclament une
réponse régionale structurée et complémentaire par
l'ensemble des établissements du territoire, particulièrement les
trois CSS et les 34 CLSC. Cette description du portrait montréalais est
une partie importante, mais incomplète de tous les problèmes que
nous rencontrons dans notre région. Dans les 245 établissements
de services de santé et de services sociaux, 161 publics et 84
privés conventionnés, 38 000 lits sont à la disposition de
la population lorsqu'ils ne sont pas en partie fermés pour des raisons
budgétaires, pour des raisons de vacance ou pour des raisons de
pénurie de personnel. Pendant ce temps-là, les malades attendent
et les établissements qui, par leur envergure ou leur prestige,
échappent à la coordination régionale, se permettent de
privilégier l'électif et, dans certains cas, de bouder l'urgent.
Tant et aussi longtemps qu'ils ne seront pas tous associés à
l'application des mesures régionales, la situation demeurera
critique.
Je désire ici préciser qu'à mon avis les facteurs
suivants devront être réévalués pour solutionner le
problème des urgences, soit les champs cliniques en milieu hospitalier
universitaire, le nombre de médecins par spécialité et par
service, les cas électifs en regard des cas urgents et les malades
à long terme occupant les lits d'aigus.
La situation d'ensemble, notre réalité, nous amène
à vous affirmer clairement qu'une coordination régionale
fortement appuyée par les orientations et par la volonté
ministérielle et gouvernementale est absolument essentielle à la
mise en place de services intégrés à toutes ces
clientèles prioritaires. Pour répondre aux vrais besoins, pour
déterminer les vraies priorités, pour rationaliser afin d'offrir
les vrais services, pour rentabiliser les investissements qui sont faits dans
les services de santé et les services sociaux, il faut à tout
prix que les services soient tous complémentaires les uns les autres,
sans dédoublement, sans duplication et prodigués,
dispensés de façon efficace, dans un souci de partage, dans une
approche de réseau de services intégrés pour les
clientèles et non dans une approche de réseau
d'établissements.
C'est pourquoi le Conseil régional de
Montréal demande à cette commission parlementaire de bien
faire en sorte que, dans l'avant-projet, tous les établissements, sans
exception, publics et privés, de l'ultraspécialisé, de
l'universitaire, de l'institut jusqu'au CLSC, soient régis par les
mêmes règlements, peu importe leur statut, d'ultra ou de
général, qu'ils aient l'obligation de jouer les mêmes
règles du jeu que tous les autres partenaires.
Le Conseil régional de Montréal existe depuis 1972.
Pendant 17 ans, plusieurs conseils d'administration se sont
succédé et notre expérience nous a amenés à
conclure qu'un certain nombre, au niveau de l'équilibre, de
représentants qui siègent au conseil d'administration
méritent d'être considérés de façon
très importante dans l'avant-projet de loi. Les collèges actuels
ne doivent pas être totalement sacrifiés dans leurs
représentations. À ce jour, non seulement nous avons
préservé la représentativité de la population en
général, mais aussi celle des communautés culturelles et
linguistiques. Des représentants de la population, des
municipalités, du milieu de l'enseignement, des administrateurs et
administrateurs chevronnés, des professionnels, des médecins ont
coordonné la mise en place de plusieurs pièces importantes du
réseau montréalais de services de santé et de services
sociaux.
Je vous cite les principales pièces d'importance: les
réseaux de première ligne sur les 34 territoires de CLSC, les
services de maintien à domicile, incluant les cas lourds, des programmes
régionaux pour la personne âgée, les adultes en perte
d'autonomie et les jeunes en difficulté, les programmes régionaux
de santé mentale, de déficience intellectuelle et plusieurs
spécialités en courte durée. Je dois vous signaler
particulièrement les programmes d'accès aux services pour les
communautés culturelles.
Une vingtaine de commissions administratives et de comités
régionaux mobilisent quelque 250 représentants des
établissements et organismes pour organiser le mieux possible les
services à la population. Je pourrais vous énumérer
plusieurs autres programmes régionaux touchant la toxicomanie, la
violence, la protection des droits des usagers, le traitement des plaintes. Je
veux souligner ici que, comme agent de concertation, comme entité
responsable, le conseil régional a implanté un système
d'urgence préhospitalière, Urgences-santé, et a mis sept
ans d'efforts soutenus pour gérer le système. Il a amorcé,
élaboré et, par la suite, après le lancement du programme
par le ministère, géré la mise en place des mesures pour
améliorer la situation dans les salles d'urgence.
Pour nous, les établissements ont toujours été des
partenaires qui devaient dépasser leurs murs et se soucier, d'abord et
avant tout, des besoins de la population et participer à l'effort
régional collectif de bien identifier les priorités pour faire
les bons choix sur les moyens. Voilà,
en gros, les activités dont nous sommes fiers concernant la
clientèle. Ces activités doivent être valorisées et
fortifiées dans le nouveau texte de loi.
Concernant les services aux établissements,
particulièrement les services partagés, nous pourrions, là
aussi, vous parler longuement des bienfaits de la régionalisation,
spécialement au chapitre des approvisionnements, des immobilisations,
des locations d'espaces, des programmes de rénovation, de construction,
d'acquisition et de remplacement des équipements.
Environ 1000 projets sont analysés annuellement par les
professionnels du conseil régional et leur réalisation se
concrétise dans des délais satisfaisants. Les économies
annuelles réalisées par les approvisionnements en commun sont
très significatives: 15 000 000 $ annuellement. À lui seul, ce
dossier nous permet d'affirmer que le Conseil régional de
Montréal, par ses activités, génère des
économies beaucoup plus élevées que son budget total de
dépenses qui s'élève à 10 000 000 $
annuellement.
Nous avons réussi à vivre avec les représentants
des établissements une mise en commun très
bénéfique pour le réseau et pour sa clientèle.
C'est ce partenariat que nous voulons maintenir dans notre région.
J'invite maintenant M. Marcoux à poursuivre la présentation du
mémoire.
M. Marcoux (Gérard): M. le Président, M. le
ministre, Mmes et MM. les députés, je vais vous proposer de
quitter le texte parce que ce que je veux vous dire, c'est ce que nous avons
écrit entre les lignes. Dans le mémoire que le conseil
d'administration vous a présenté, nous prônons trois
niveaux décisionnels d'autorité. Un premier qui est le
véritable maître d'oeuvre du système, le ministre et le
ministère. En aucune circonstance, nos propos ne devront vous laisser
croire que nous mettons en cause l'imputabilité du ministre et de son
ministère à l'Assemblée nationale. Nous croyons que le
ministre et ses adjoints, son personnel, doivent définir les grandes
orientations, déterminer les objectifs fondamentaux, déterminer
les priorités nationales, décider du financement des enveloppes,
autoriser ce financement et, enfin, contrôler les résultats
obtenus. Au niveau régional, nous pensons qu'une véritable
autorité doit être aussi présente pour planifier les
programmes régionaux, organiser les services, allouer les ressources et
contrôler les ressources et évaluer enfin les résultats. Le
contenu des articles 234 à 254 dans l'avant-projet de loi répond
à nos attentes quant aux fonctions qu'on vient de vous
énumérer.
Le conseil régional de Montréal ne vient pas
défendre une structure, encore moins une bureaucratie. Il vient devant
vous redire son credo à la régionalisation,
régionalisation qui, quant à nous, est l'élément
moteur de l'égalité des chances et de l'égalité
d'accès aux services aux clientèles. Les régions veulent
se prendre en charge. Les régions demandent qu'on leur accorde une
autorité, donc une véritable capacité de décider
dans un cadre général déterminé. Dans votre
discours d'ouverture, M. le ministre, vous avez évoqué la
création de niveaux d'arbitrage pour permettre d'éliminer le
dédoublement interétablissements. Cette approche est, quant
à nous, nouvelle, mais nous l'acceptons avec empressement en vous disant
que ce n'est pas dans une structure nouvelle que l'arbitrage devrait se faire,
à notre point de vue, mais qu'il pourrait très bien, en
continuité, se localiser dans les instances régionales actuelles
existantes qui ont acquis une expérience intéressante. Et quoi
qu'en disent les personnes qui nous font la vie dure, les conseils
régionaux ont quand même obtenu quelques bons résultats et
M. le président vous en a cité quelques-uns pour autant que notre
conseil régional est concerné. Cette régionalisation, nous
ne voulons pas qu'elle se fasse sur le dos des établissements. Nous
croyons que tous les établissements doivent jouir d'un degré
maximum d'autonomie dans la gérance et dans la dispensation des soins et
services à la population. La seule condition, c'est en autant qu'ils
s'intègrent et qu'ils respectent les responsabilités nationales
et régionales.
Les conseils d'administration des établissements. Je vous dirai
très rapidement le point de vue de notre conseil d'administration. La
formule des conseils d'administration unifiés dans la région de
Montréal nous apparaît inapplicable pour trois raisons majeures.
La première, c'est ta multiplicité des établissements
à vocation différente et à mission différente sur
un même territoire de CLSC. La deuxième, ce sont les dimensions
linguistiques et culturelles fort variables de territoires et de
sous-région en sous-région dans le Montréal
métropolitain. Et, enfin, la dernière particularité qui
est importante pour tout le secteur social, ce sont les trois CSS qui existent
dans la région de Montréal métropolitain plus sur une base
culturelle et linguistique que sur une base territoriale.
Nous recommandons donc que l'instance régionale de
Montréal soit mandatée pour proposer des modes de formation de
conseil d'administration d'ici un an, c'est-à-dire un an après le
projet de loi voté à l'Assemblée nationale, en tenant
compte des critères majeurs suivants: le premier, vocation
régionale et suprarégionale possible des différents
centres; le deuxième critère: les dimensions linguistiques et
culturelles et, enfin, la complémentarité et la continuité
des services.
Quant aux centres hospitaliers universitaires et aux instituts, le
libellé de l'article 48 nous convient très bien pour la
composition des conseils d'administration. Nous voulons cependant attirer votre
attention sur une question fort importante. Certains centres hospitaliers
ultraspécialisés et universitaires voudraient bien
échapper à l'application des règles de base de la
régionalisation. Nous vous disons que tous les établissements
doivent être soumis aux mêmes règles. Le motif principal qui
fait que, pour Montréal, les mêmes règles doivent exister
pour les ultraspécialisés. Je vous donne de façon
très rapide des chiffres éloquents: 72 % des lits à
Montréal, soit 8000 lits sur 11 000 lits de courte durée, se
retrouvent dans des centres hospitaliers ultraspécialisés et
universitaires. Douze départements de psychiatrie sur dix-sept
départements de psychiatrie active à Montréal se
retrouvent dans les centres hospitaliers universitaires à
Montréal. Six départements de pédopsychiatrie sur six sont
dans les hôpitaux universitaires à Montréal. Les centres
ultraspécialisés et spécialisés ont tous un
pourcentage d'activités plus grand en services et en soins
généraux qu'en ultraspécialité. Vous n'avez
qu'à penser aux urgences et aux cliniques externes, à la
médecine générale, à la chirurgie
générale, aux soins aux personnes âgées, à la
santé mentale. Comment organiser des programmes sur une base
régionale si 75 % des activités échappent à
l'application des règles de partnership avec les autres
établissements? Pour la continuité des soins, les CLSC, les
centres d'accueil, les CSS ont besoin de l'ultraspécialité pour
diriger la clientèle, mais n'allons pas oublier que les centres
hospitaliers universitaires ont grandement besoin de toutes les autres
catégories d'établissements aussi pour la continuité des
soins et pensez à l'hébergement, pensez aux services à
domicile, pensez aux programmes de santé mentale.
Mmes et MM. les parlementaires, je voudrais vous rendre un
témoignage non émotif mais un vécu devant cette illustre
Assemblée. J'oeuvre dans le réseau de la santé depuis 1956
comme cadre supérieur. J'ai vécu toutes les étapes
décrites par M. Castonguay à l'ouverture de cette commission
parlementaire. Dans l'évolution du système qu'il a décrit,
il arrive que j'étais justement à la direction
générale de différents types d'établissements au
cours des 25 dernières années. J'ai constaté que, oui, le
partage que, oui, la mise en commun sont des objectifs très difficiles
à atteindre quand on est à la tête d'un
établissement, mais ce n'est pas parce qu'ils sont difficiles à
atteindre qu'il faut sacrifier le bénéficiaire au profit des
établissements. Je n'ai pas perdu la foi dans la régionalisation.
Depuis douze ans, j'oeuvre à la direction du Conseil régional de
Montréal et je vous dis que le vécu, le constat, c'est que ceux
qui, du revers de la main, balaient le concept de la régionalisation,
c'est pour des intérêts strictement individuels et corporatifs.
(10 h 30)
Ce n'est pas comme ça qu'on va vraiment réaliser... La
beauté de votre avant-projet de loi, M. le ministre, c'est que toutes
les activités sont centrées sur le bénéficiaire et,
pour centrer les activités sur le bénéficiaire, il faut
être capable de mesurer la qualité du contenu et d'enlever les
velléités de trop de structures et de trop de bureaucratie.
Ça se règle, ce problè me-là. Mais conservons
l'orientation sur le bénéficiaire et centrons les
activités sur les résultats.
La régionalisation, Mmes et MM. les parlementaires, nous croyons
qu'il faut l'épouser. Ce n'est pas une formule magique, mais elle a le
mérite de réunir les partenaires au service du
bénéficiaire et non pas l'inverse. C'est elle, M. le ministre, la
régionalisation, votre dynamique nouvelle qui s'offre pour
régler, avec la réforme, les problèmes d'iniquités
interrégionales, les problèmes d'iniquités
interétablissements et les problèmes de mauvaise distribution des
ressources. Comme vous l'avez si bien dit dans votre introduction, s'il n'y a
pas d'avis d'arbitrage, on pourrait parier fort que personne ne se fera
hara-kiri pour se faire enlever des services, et ces services ne sont pas
nôcossairomont la réponse aux besoins réels des
citoyens.
Le Président (M. Joly): M. Marcoux, le temps qui vous
était imparti est actuellement terminé. Est-ce que vous avez
encore...
M. Marcoux: Une minute.
Le Président (M. Joly): Une minute, avec le
consentement.
M. Marcoux: Si M. le ministre le permet. Une voix: Une
minute et demie.
M. Marcoux: Une minute et demie? C'est la partie la plus
importante, finalement.
Vous excuserez peut-être un peu cette conviction que je veux vous
manifester, mais on dit régionalisation, on dit instance
régionale, mais pas avec un laisser-aller et à la
va-comme-je-te-pousse. Une instance régionale, pour nous, c'est
l'assemblée générale, la rencontre des
bénéficiaires, des groupes organisés et des
représentants des établissements. Cette instance doit avoir trois
qualités. Elle a trois défis: elle doit être responsable,
elle doit être rentable et elle doit être imputable.
Se responsabiliser par rapport au bénéficiaire, ça
veut dire faire passer ses besoins à lui avant ceux des
établissements. Donc, réseau intégré de services et
non réseau d'établissements. Deuxièmement, se
rentabiliser, c'est d'abord faire les bons choix dans l'utilisation des
ressources et c'est avoir le courage de rationaliser par
réaménagement et par réallocation. Cela ne peut pas se
faire sans une autorité désignée pour arbitrer, comme vous
l'a dit M. le ministre, dans son exposé préliminaire. Être
imputable, être imputable, nous le souhaitons ardemment et, quant
à nous, notre définition d'être imputable, c'est de devoir
rendre compte.
Nous vous proposons de rendre les instances régionales imputables
de la façon suivante. M. le ministre, associez les instances
régionales à la défense des crédits en commission
parlementaire pour venir vous supporter dans la défense des
crédits, dans le résultat des dépenses effectuées
et dans l'évaluation des résultats de la marchandise
livrée. Ce procédé démocratique a
déjà été vécu et je vous signale que nous
l'avons fait comme élément de support à des ministres,
pour le transport ambulancier, pour les urgences et pour les mesures d'urgence
dans les hôpitaux.
Je conclus en vous disant qu'il y a deux éléments majeurs
qu'on conteste dans l'avant-projet: d'abord, le conseil d'administration de la
régie régionale. Nous acceptons totalement l'article 260 avec ses
différents collèges. Cependant, notre conseil d'administration ne
voit pas la création d'un collège régional. Nous proposons
que les collèges qui sont prévus à l'article 260
élisent eux-mêmes leurs représentants à la
régie régionale. Quant au collège régional, nous
croyons que les objectifs de démocratisation, de participation et
d'imputabilité peuvent quand même être atteints sans la
création de cette nouvelle structure qui nécessiterait
sûrement une nouvelle bureaucratisation et des ressources
financières additionnelles. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci. Je vais maintenant
reconnaître M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Évidemment, vous l'aurez constaté, la
première journée, notre première préoccupation a
été celle des bénéficiaires, la deuxième a
été celle de recevoir les dispensateurs de services et la
troisième journée, on aborde un élément tout
à fait particulier avec votre participation. Je pense que ce n'est pas
par hasard que vous êtes là ce matin comme premier CRSSS, compte
tenu de la diversité des problèmes et des gens
représentés, que vous êtes les premiers à être
entendus par la commission et qu'on fasse une journée régionale
pour mieux connaître et mieux apprécier la problématique de
la grande région de Montréal.
D'entrée de jeu, on va tenter d'aller à l'os parce que,
évidemment, c'est la structure du corps qui est indispensable.
Une voix: L'ossature.
M. Côté (Charlesbourg): L'ossature. Je vais
commencer par un énoncé que vous faites à la page 4 de
votre mémoire que je veux reprendre en partie et on va échanger
un peu là-dessus avant de revenir à certaines questions plus
précises.
Vous dites dans le milieu du paragraphe: "Pour répondre aux vrais
besoins, pour déterminer les vraies priorités, pour rationaliser
afin d'offrir les vrais services, pour rentabiliser les investissements qui
sont faits dans les services de santé et les services sociaux, il faut
à tout prix que les services soient tous complémentaires les uns
les autres sans dédoublement, sans duplication et prodiguer, dispenser
de façon efficace dans un souci de partage, dans une approche de
réseau de services intégrés pour les clientèles et
non dans une approche de réseau d'établissements. " Est-ce que je
dois conclure qu'aujourd'hui, nous avons une approche de réseau
d'établissements?
M. Marcoux: Je pense que la parade éloquente qui se
déroule devant vous est la réponse à votre question. Les
différents organismes qui sont venus jusqu'à maintenant et ceux
qui viendront plus tard, parce qu'il vous en reste énormément
d'autres à revoir, je pense qu'ils sont la démonstration que oui,
M. le ministre, nous sommes malheureusement dans un réseau qui s'est
très fortement structuré autour des institutions plutôt
qu'autour du bénéficiaire.
Le discours de tous ceux qui vont venir ici va être le même
que le nôtre. On va tous vous dire qu'on est là pour le
bénéficiaire, c'est la raison d'être. Ça, M. le
ministre, c'est le discours. La réalité, c'est que vous allez
avoir en parade devant vous, à tout le moins, six poids lourds
d'associations d'établissements qui vont venir vous dire que c'est
important que les services soient chez eux. Vous allez voir les contradictions
entre le discours et la réalité quotidienne.
Vous savez, M. le ministre, quand vous avez parlé d'arbitrage au
début de votre exposé, ça nous a tous frappés, ceux
qui sont régionalistes convaincus comme vous. Ça nous a tous
frappés. Cet objectif qui était la clé aussi de la
réforme Castonguay-Nepveu n'a jamais pris naissance parce que les
oppositions et la résistance ont toujours été trop fortes.
Au lieu d'appliquer le concept, on a proliféré, après
avoir catégorisé les établissements, on a
créé des empires de plus en plus importants.
Je vous dirais avec beaucoup de franchise que même la plus petite
association d'établissements aujourd'hui au Québec module son
comportement - et ce n'est pas négatif en vous disant ça -
à peu près sur le Conseil du patronat du Québec. Nous
sommes dans une mission sociale de soins et de services, pas à n'importe
quel prix, bien sûr, dans un cadre déterminé, mais le prix
le plus fort qu'on paye actuellement, c'est sur cette multiplicité
d'organismes de toutes sortes.
Vous avez raison de proclamer, M. le ministre, qu'il ne doit pas y avoir
autant de structures, mais demandez à vos fonctionnaires les plus
avertis de vous énumérer les quelques centaines d'associations et
de regroupements que moi je qualifie d'illégitimes, mais qui vivent
très bien, dans la société, du système de
santé et de services sociaux. Qui plus est, c'est que quand
vient le temps de régler les vrais problèmes en commission
parlementaire ou entre les commissions parlementaires, vous autres, qui
répondez au peuple, M. le ministre et MM. les membres parlementaires,
vous êtes obligés de créer toutes sortes de comités
conjoints avec tous ces regroupements-là, du plus petit au plus grand,
pour analyser comment on va passer... Ce n'est pas ça l'objectif, mais
dans la réalité, souvent les représentants viennent
analyser pour savoir comment ils vont échapper à la
réglementation, à la directive et aux décisions. C'est une
réponse qui était longue. Excusez.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, ce que je
comprends, c'est qu'on peut partager ou pas votre point de vue, mais ça
vient des tripes et du vécu.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Alors, on parle de
structures; évidemment, on est dans un système où il y a
des structures. Moi-même, je suis toujours émerveillé de
voir le nombre de structures et pour quelqu'un même dans l'appareil
gouvernemental, qui est là depuis un certain temps, il n'est pas
toujours évident qu'on connaît les limites ou les champs des
CRSSS, des CSS, des départements de santé communautaire, des
CLSC. Je vous le dis tout de suite: Moi, ce qui m'a frappé lorsque je me
suis fait instruire - parce qu'on se fait toujours instruire, quand on arrive
comme ministre - par toutes sortes de personnes bien intentionnées, y
compris par ses fonctionnaires, quand on se fait instruire, on dit: il faut
essayer de comprendre. Est-ce que vous ne croyez pas que dans la mesure
où on veut avoir des objectifs, comme nous les aurons
éventuellement, de vieillissement - ça me paraît
évident dans votre texte, s'il y a une place où, effectivement,
la population vieillit, pas toujours dans des conditions optimales, c'est bien
sur 111e de Montréal - si on veut avoir des objectifs de jeunesse, parce
que c'est ça nos principales lacunes du système au moment
où on se parle, est-ce qu'on peut imaginer une structure
régionale qui n'aura pas la responsabilité totale de l'ensemble
de la politique de santé et de services sociaux? Est-ce que vous pensez
que demain on va régler nos problèmes si on fait une structure
régionale qui n'embrasse qu'une partie ou qui n'a une
responsabilité de planification et de décision que pour une
partie seulement de la fonction ou si elle est reliée directement
à la nomenclature que j'ai faite tantôt de CRSSS, CSS,
départements de santé communautaire, CLSC, parce que vous avez
des liens avec les CLSC pour certains programmes spécifiques, comme le
maintien à domicile? Ce n'est pas évident qu'il y a une jonction
très claire partout. Est-ce qu'il n'y a pas un peu de travail à
faire de ce côté-là aussi?
M. Marcoux: Je pense que votre approche est fort
intéressante. Ce serait être bien malin de vouloir penser qu'un
problème n'est pas soluble, quand on a une approche comme la
vôtre, pour dire: Allons-y progressivement, par partie. C'est une
possibilité. On ne peut pas la mesurer. L'inquiétude que je veux
vous manifester, c'est qu'il n'y a a peu près pas de
problématiques en santé et en services sociaux qui ne sont pas
concernées par tous les types d'instances. Et le vieillissement de la
population est un bel exemple. Ce qu'on a pu réussir comme bon coup pour
la personne âgée et la personne en perte d'autonomie à
Montréal, c'est chaque fois qu'on a pu véritablement concerter
tous les réseaux autour d'une cause, même les choses aussi
difficiles...
M. le ministre, je vous donne un exemple d'arbitrage dans l'allocation
des ressources que les conseils régionaux ont réussi de peine et
de misère l'an passé, à coups de bras: la distribution des
enveloppes alourdissement de clientèle entre centres d'accueil et CLSC.
Je ne serai pas dur non plus, même qu'à certains moments, il a
fallu mettre ses pieds à terre pour dire: Ça fait assez longtemps
qu'on fait l'étude; est-ce que notre recommandation qu'on fait au niveau
central peut être acceptable, parce qu'on a créé le
consensus dans la région? Et ça, c'est important aussi.
Je dois vous dire, M. le ministre, qu'on a à faire ensemble un
grand bout de chemin pour aussi éliminer la duplication de la gestion
répétée sur les mêmes dossiers. Nous, on demande
rien de mieux que vous sortiez de la commission parlementaire avec un mandat
bien clair puis-qu'en même temps vous invitiez tous les intervenants
à jouer dans leurs parterres, mais pas tout le monde jouer dans le
même parterre en reprenant incessamment les mêmes analyses.
M. Leblanc: J'aimerais ajouter un élément
d'information que je signalais tout à l'heure, par exemple, pour montrer
jusqu'à quel point c'est fragile et je suis d'accord avec votre
intervention, M. le ministre. Je signalais, par exemple, un dernier recours
où, par une localisation physique d'une catégorie de population
à Montréal qui se situe à deux pas d'un
établissement, vous venez, à ce moment-là, perturber le
fonctionnement. Mais comment l'éviter? C'est aussi fragile que
ça. Et il m'apparaît que ce mécanisme de coordination au
niveau régional devrait être amplifié pour permettre de
redistribuer ce type de problème. (10 h 45)
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, quand on
questionne une structure comme la vôtre, ne vous imaginez pas qu'on ne
questionnera pas la structure chez nous non plus. Quand on parle de
réforme, évidemment, on va se réformer tout le monde en
même temps, on va se mettre au même diapason aussi et ça
m'apparaît important de le dire à ce moment-ci pour ne pas qu'il y
ait
d'équivoque. Je ne pense pas que c'est parfait chez nous. Il y a
des problèmes ailleurs aussi, évidemment; ce sont des
problèmes vécus. Mais on est obligés de parler de
structures, parce que, au bout de la ligne, c'est le
bénéficiaire. Et il n'y a personne qui va me faire la
démonstration aujourd'hui que si on garde nos objectifs, si une
structure disparaît, on ne rend pas service à la population. Je
veux bien qu'on se comprenne.
À la commission, effectivement, il y en a qui vont venir nous
dire: Les départements de santé communautaire, écoutez une
chose, ce n'est pas 22 qu'on veut, c'est 32. Ce qu'on comprend, c'est que ce
sont les 32 qui sont bien plus importants que le service qu'on rend. Alors, il
va falloir se rendre à l'évidence que c'est le service qu'on rend
à une population, qu'on doit arrêter de dédoubler et qu'on
doit mieux planifier. Dans ce sens-là, je suis profondément
convaincu qu'une régie régionale, avec les pouvoirs, avec de
l'imputabilité, peut faire un meilleur arbitrage que nous faisons, nous,
au central. C'est ça le message, mais, inévitablement, il va
falloir questionner nos structures existantes et voir s'il n'y a pas
possibilité de fondre un certain nombre de ces structures pour les
rendre plus opérationnelles.
Évidemment, il est clair que le gouvernement avec toute sa bonne
volonté, qu'un CRSSS avec la meilleure volonté ne réussira
pas, non plus, à régler tous les problèmes seul. On a
entendu, la première journée, les gens du communautaire nous
dire: On veut être des partenaires à part entière comme
source alternative de solution aux problèmes. J'ai regardé dans
le texte et votre texte, je l'ai trouvé bien habile parce que,
évidemment, vous ne mettez pas les médecins contre vous autres.
On dit: Bon, ils devraient être sur les conseils d'administration. Vous
ne mettez pas le communautaire contre vous, vous dites: II n'occupe pas assez
de place, il devrait en occuper... C'est très habile, très
très habile. Évidemment, pour qu'on puisse survivre, comme CRSSS,
il faut être très habile.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Ce que j'ai compris, c'est
que sur le plan de la structure et des choses à
réaménager, vous avez déjà commencé à
faire votre travail de régie, en supposant que ce sera vous autres.
Alors, à partir de ça, c'est clair qu'il faut une certaine
unité dans l'action, mais il y a quand même un message très
clair que sont venus nous poser, comme problème, les gens du
communautaire quand ils sont venus ici. Ils ont dit: Nous autres, on est
bénévoles, des initiatives partent de chez nous et se font
littéralement aspirer par les CRSSS ou des institutions du
réseau, faisant en sorte que le communautaire n'est plus du
communautaire, mais est accaparé par un établissement qui va
mieux rémunérer pour le travail. J'aimerais vous entendre
là-dessus. C'est où la frontière du communautaire? Vous
pensez de bonnes choses du communautaire, j'en suis pleinement convaincu, mais
comment fait-on pour calmer les craintes des gens du communautaire dont nous
aurons besoin comme partenaires demain? Parce qu'il n'est pas vrai que
l'État aura toujours l'argent qu'il faut pour être capable de
régler tous les problèmes?
M. Marcoux: Je me ferai aider, avec votre permission aussi, par
M. Assor, concernant les groupes communautaires. Les groupes communautaires qui
sont venus devant vous, que nous connaissons bien aussi, acceptent très
difficilement qu'on mette en doute quelque subvention qui est accordée,
que ce soit par vous directement, l'autorité nationale ou provinciale,
ou que ce soit par nous.
Cependant, même si ça soulève une critique, M. le
ministre, on est capables de vivre avec ça parce que, quand on a
été en désaccord, c'est parce qu'on a pris nos
responsabilités d'administrateurs de fonds publics et on ne pense pas
qu'on puisse, en votre nom, par délégation, garrocher des
subventions, ne serait-ce qu'une subvention de 25 000 $ ou 30 000 $, et ne pas
se soucier de savoir quelle va être l'utilisation de ce fonds. C'est
seulement ça. Mais l'autonomie pour ces groupes, on la réclame
autant que pour les gestionnaires du réseau, dans un cadre
déterminé cependant. Quand il y a des accrochages ou des
conflits, c'est justement parce qu'on a essayé de mettre en vigueur
l'obligation de rendre compte et ça, ça ne fait pas plaisir. Les
groupes nous disent: Subventionnez-nous, laissez-nous aller et on n'a pas de
comptes à vous rendre. C'est ça. Alors, nous, quand on se
responsabilise, on ne leur fait pas plaisir, M. le ministre, c'est tout ce que
je peux vous répondre. Peut-être que monsieur...
Une voix: Ce serait intéressant d'entendre M. Assor qui
participe...
M. Assor (Raphaël): C'est une question difficile...
Le Président (M. Joly): Excusez, monsieur...
M. Assor: Je vous en prie. C'est évident qu'il y a du
chemin à faire. Si j'abandonne le chapeau du conseil d'administration
comme représentant des organismes bénévoles, ça me
met dans une situation difficile. Je pense que, effectivement, il y a du chemin
à faire. On ne parle pas simplement de subventions, on parle de contrats
de services, de partenariat, d'initiatives. C'est vrai que les organismes
bénévoles et communautaires ont souvent amené des
propositions de projets-pilotes ou autres qui, forcément, ne cadrent pas
avec la loi et il y a un vacuum.
À quel niveau ce dynamisme communautaire peut-il se marier avec
les règles du jeu du réseau? Mais je pense qu'on est dans la
bonne direction, que les organismes communautaires participent maintenant
davantage dans les comités aviseurs, les commissions administratives, au
conseil d'administration du CRSSS. On ne parle pas simplement que d'une
question de financement, mais de partenariat. C'est vrai que ça ne va
pas être facile d'harmoniser, mais il y a un dynamisme extraordinaire
dans les organismes bénévoles, communautaires et multiethniques,
à Montréal, qu'il faudrait intégrer dans toute la
programmation. Il faudrait qu'il y ait des budgets aussi, pour les pians
d'action, pour l'accessibilité aux communautés culturelles, par
exemple.
Le Président (M. Joly): Je vais maintenant
reconnaître une dernière question à la formation
ministérielle en reconnaissant M. Slrros, le ministre
délégué à la Santé et aux Services
sociaux.
M. Sirros: Merci, M. le Président. J'aimerais ne pas
prendre trop de temps de ce qui nous reste, à ce moment-ci, mais revenir
peut-être sur toute la question que vous avez soulevée de la
diversité culturelle et linguistique sur 111e de Montréal, la
particularité qu'on a à Montréal, et toute la
problématique qu'elle peut soulever par rapport à la formation
des conseils d'administration. Vous proposez, et je trouve ça
intéressant, que le CRSSS ou l'instance régionale ait une
période de temps durant laquelle elle pourra étudier la
possibilité de former des conseils d'administration sur d'autres bases
que celles qui sont proposées dans le document et que, par la suite, des
recommandations soient faites au ministère pour une adoption par
règlement.
Vous avez, à Montréal, et vous l'avez soulevé
aussi, trois éléments, je pense, qui sont particuliers,
l'existence de trois CSS, le CSS: Montréal métropolitain, surtout
francophone; le CSSVM, qui s'adresse surtout à la clientèle
anglophone; le CSS juif à la famille. Vous avez une multiplicité,
en plus, de différentes communautés culturelles qui, en dehors du
français et de l'anglais, parlent plusieurs autres langues
également et, souvent, une partie de leur population, ne parle ni
anglais ni français, mais est encore à un stade, si vous voulez,
d'intégration dans la société québécoise et
il y a aussi la situation, l'existence des établissements qui sont
désignés comme ayant une responsabilité
particulière par rapport aux services en langue anglaise par le biais,
entre autres, de la loi 142.
Tenant compte de ces éléments-là et en particulier
de l'existence des trois CSS, quelles sont les hypothèses que vous avez
peut-être commencé à examiner par rapport à la
formation des conseils d'administration et est-ce que ce qu'on a prévu
dans l'avant-projet de loi au niveau de l'article 47, qui prévoit des
exceptions possibles pour la formation des conseils d'administration, ce semble
être le genre de chose avec laquelle vous pourriez travailler? Quelles
sont plus précisément les hypothèses que vous avez, si
vous avez examiné la formation des conseils d'administration sur IHe de
Montréal, en tenant compte de cette diversité linguistique et
culturelle?
M. Marcoux: À ce jour, les hypothèses sont
très fragiles et la raison en est assez simple. C'est que, même si
on s'évertue à vouloir faire une consultation, chacun de ceux qui
vont venir devant vous voudra garder son secret sur la proposition qu'ils vont
faire pour les conseils d'administration, de telle sorte qu'on n'est pas
très avancés. Mais on peut vous dire que les hypothèses,
par exemple, pour autant que les CSS sont concernés, à ce jour,
au lieu de livrer des batailles. II s'agit plus de les envisager comme ayant
chacun leur conseil d'administration. Pas nécessairement... La situation
géographique, pour nous, de même que surtout la vocation des CSS
et leur mission nous invitent à y penser deux fois avant de vouloir
associer le conseil d'administration du CSS à n'importe quelle autre
catégorie d'établissement. C'est une interrogation.
M. Sirros: Est-ce que, au niveau des CSS, à
Montréal, vous voyez, dans un votre raisonnement, les CSS comme ayant
une responsabilité régionale ou sous-régionale,
chacun?
M. Marcoux: Écoutez, on a eu, là-dessus, des
mandats différents qui ont évolué et ça
dépend de l'orientation politique. Avant de vous faire une
recommandation concernant l'orientation des CSS, nous aurons besoin de
connaître l'orientation poilitique nationale, pour savoir si cette
structure va être basée sur des notions de territoire ou si elle
va être basée sur des notions socioculturelles. Après
ça, on est capables de vous donner une réponse. Mais nous ne
sommes pas décisionnels dans ce choix-là. On s'est
essayés, mais on a été obligés d'arrêter.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Marcoux. Je vous
remercie. Je vais maintenant reconnaître le porte-parole de l'Opposition
en matière de santé et député de Joliette.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais dire
à M. Marcoux: Vous êtes meilleur sans texte. Je vous reconnais,
dans les années 1984, où on signait une entente avec la
conférence des CRSSS au niveau de la régionalisation. Ceux qui
veulent véritablement une régionalisation, il faut qu'ils le
manifestent par l'accroissement de pouvoirs au niveau de la région, par
une décentralisation et non pas par une déconcentration. À
mon point de vue, l'erreur passée - on peut remonter loin en
arrière - c'est qu'on a donné l'illusion que la région
avait un rôle à jouer. Chaque fois que ça ne
marchait pas en région, on remontait en haut, précisément
parce que les pouvoirs ne sont pas identifiés. Il n'y a pas
d'arrêt après la région. On peut, si on est puissant, faire
un lobby au niveau national et contrer tout le travail de concertation sur le
plan régional. C'est ce qui arrive, malheureusement. De sorte que si on
ne va pas vers une véritable décentralisation au niveau de la
région, je pense que c'est utopique que de penser à de la
complémentarité entre les établissements. Chacun,
égoïstement, voudra, à tout moment, voir son propre dossier
réglé et si ça ne fait pas au niveau régional, ils
auront toujours, par l'intermédiaire d'une députation ou d'un
ministre, ces orientations de changées.
Ça veut dire que si on décentralise, on donne
l'entièreté des pouvoirs, ça comprend
l'imputabilité. Ça veut dire qu'on doit changer la loi de la
gestion financière. Ç'a toujours été le fameux
problème: pas capable de décentraliser parce qu'ils ne sont pas
imputables devant qui que ce soit. Ç'a toujours été la
grande question et ç'a permis de garder une centralisation, à mon
point de vue, qui a desservi précisément le
bénéficiaire. Je suis d'accord avec vous dans l'analyse que vous
faites, ça dessert le bénéficiaire parce que, en bout de
course, tout le monde se targue de placer l'individu en première ligne
et, dans le fin fond, ce n'est qu'une défaite parce que c'est du
corporatisme "au boutte, au boutte". On en a entendu toute la journée
hier. Ça, c'est clair.
Donc, moi personnellement, je vous suis dans la régionalisation,
mais une véritable régionalisation, une véritable
décentralisation où les individus devront,
précisément, faire faire leur arbitrage là, jouer du coude
là et non pas se fier sur Dieu le père, à Québec.
Ça n'enlève pas, cependant - je suis content que vous le
souligniez - les pouvoirs ultimes ou la responsabilité ultime des
grandes orientations en matière de santé. Et si le communautaire
- je ne voudrais pas me porter à leur défense - craint
précisément les arbitrages régionaux, c'est parce que le
communautaire ne se sent pas de taille pour lutter sur le plan des lobbies avec
le secteur santé. J'ai bien compris qu'ils préféreraient
que le ministre fixe des balises, dire: Tant du budget que vous avez en
région doit être consacré au communautaire. Si ce
secteur-là n'est pas fait, ce sera l'éternelle chicane entre le
social et la santé. Et, à mon point de vue, ils ont raison. C'est
beaucoup plus pathétique de regarder quelqu'un saigner que de regarder
quelqu'un qui veut empêcher que ça saigne, avant même qu'on
se coupe; tu le crois après que la prévention peut avoir un
rôle à jouer, mais c'est aussi important. La preuve, c'est qu'on
n'a jamais voulu, au niveau du ministère, quels que soient les
gouvernements, on n'a jamais voulu scinder le social de la santé parce
qu'il y avait une interdépendance et ç'a prévalu au niveau
de toutes les formations politiques à venir jusqu'à date. Donc,
je voulais me porter, au moins temporairement, à la défense du
communautaire parce que ça m'apparaissait important.
Il ne faudra pas non plus, si on vise la complémentarité,
par exemple, sous prétexte qu'on veut faire plaisir à un groupe,
venir chambarder les habitudes, les coutumes et les arbitrages qui ont
déjà été faits. Je prends Montréal, le CRSSS
- je connais assez bien votre CRSSS, pour y avoir séjourné
quelques jours, vous vous rappellerez, dans des conditions où le
Père Noël faisait de bons voeux à tout le monde - il ne
faudra pas que le gouvernement non plus vienne fausser les règles du
jeu, créer des monopoles aux mains d'un groupe qui prend à la
merci et en otage les centres hospitaliers, les autorités des
établissements, le bénéficiaire et les autorités en
région. (11 heures)
Vous savez ce dont je veux parler: La réforme des ambulances
là, ça n'a pas été un succès pour demander
au milieu de faire sa part. Au contraire, on a passé par-dessus la
tête de tout le monde, si bien que vous n'avez aucun contrôle. Vous
le savez, le CRSSS, vous êtes sortis du décor. Et, à mon
point de vue, ça aurait dû être à vous autres de
régler votre problème avec le soutien gouvernemental. Mais
là, ce n'est pas le cas. On vous a tassés pour régler le
cas de certains individus. Et ça, ça m'apparaît une erreur
monumentale que vous aurez à traîner pendant quelques
années d'ailleurs sur l'île de Montréal.
Cela étant dit, je vous suis. Je trouve que c'est un excellent
mémoire parmi tous ceux qui nous ont présenté des
mémoires à date, surtout ce que vous avez dit en dehors de votre
texte aussi. Parce que, à mon point de vue, vous n'avez pas parlé
exclusivement de structures. Vous avez parlé du rôle fondamental
que vous avez à jouer dans une région. Il y a un volet qui n'est
pas mentionné et que je voudrais traiter avec vous, c'est le financement
du réseau.
Il y a des problèmes, il y a de graves problèmes de
financement du réseau, vous le savez. Vous avez vu des gens venir dire
que ça prenait des tickets modérateurs, la très
responsable Association des hôpitaux du Québec. Vous avez vu le
Conseil du patronat qui parle d'impôt à rebours. Vous avez vu des
médecins qui ont plus ou moins accepté de dire qu'il y avait des
moyens de s'en sortir même par des contrôles plus rigoureux.
Même Augustin Roy est venu dire que son monde était tout bon, tout
parfait. Les abus étaient quasiment seulement au niveau du
bénéficiaire. Ce n'est pas tout à fait ça qu'il a
dit mais pour quelqu'un qui lisait entre les lignes, ça pouvait vouloir
dire ça.
Face au financement, quelle est votre réaction? Comment peut-on
s'en sortir pour avoir un réseau qui ne vit pas ce problème
chronique de financement depuis quelques années?
M. Marcoux: Évidemment, nous n'avons pas traité
dans notre mémoire de l'aspect financement intentionnellement parce que
ce n'était pas le propos du conseil régional de le faire.
Cependant, je vais vous dire qu'on a fait des recommandations. Il y a deux ans,
notre conseil d'administration, de façon unanime, a fait des
recommandations à la suite d'une étude exhaustive qui a
été faite par des professionnels sur l'état du parc
immobilier à Montréal. Plusieurs ont utilisé les
données par la suite pour étaler les difficultés qui sont
rencontrées pour l'équipement et la vétusté.
À la môme occasion, le Conseil régional de
Montréal a fait des propositions concrètes de financement.
Basés sur le fait suivant, il nous apparaît impossible pour vous,
les élus, et pour le gouvernement, de faire face, seuls, à tout
le financement de tous ces besoins et à cette demande qui s'en va
grandissante. Il faut trouver des améliorations au financement. On en
avait proposé deux et on se propose de revenir à nouveau à
la charge vis-à-vis de ça. C'est de trouver un moyen de financer
par la voie de la consommation des produits dangereux une plus grande part des
services à la clientèle. Vous avez tout de suite pensé au
tabac, à l'alcool, etc. et même une partie de l'essence -
même si ce n'est pas un produit dangereux - pourrait aussi contribuer
à un financement.
M. Chevrette: Surtout qu'elle est gelée au plafond
M. Marcoux: Une deuxième recommandation que nous avons
faite, c'est une espèce d'association avec les grands magnats de la
finance, avec des formules de crédit-bail pour l'acquisition des
équipements. Il y a des expériences-pilotes qui ont
été faites à date avec profit. C'est une autre
possibilité de financement. Pour nous il est certain, je pense - ce que
disait hier notre collègue David Levine - qu'on est tous conscients,
comme vous autres qui êtes des élus, qu'il faut préserver
la gratuité. Mais en même temps, on est tous conscients, comme
vous autres, à l'intérieur de vous-mêmes, vous le savez
fort bien, que tous ces services-là sont payés par un financement
qui vient quand même des poches des citoyens sous forme de taxes. Alors,
on pense qu'il faut trouver un autre type de financement en laissant le "front"
de la gratuité là pour ne pas qu'il y ait des impairs et que des
démunis soient véritablement frustrés par le
système et il faut être imaginatifs pour aller chercher une autre
forme de taxation. Mais je m'arrête là parce qu'on n'a pas fait
une analyse exhaustive.
M. Chevrette: Merci. Vous avez été directs et
carrés dans vos remarques concernant l'équité dans le
traitement des établissements en faisant carrément allusion au
fait que les milieux, dits ultraspécialisés, ou encore certains
établissements universitaires, pouvaient être traités
différemment et que ça créait un problème au niveau
des complémentarités, au niveau de l'agencement, en tout cas, de
l'harmonie des services sur 111e de Montréal. J'aimerais que vous nous
donniez certains exemples pour bien faire comprendre les difficultés que
vous vivez à cause de l'iniquité dans ces traitements.
M. Marcoux: Je vais vous donner deux petits exemples. On pourrait
en parler très longuement parce que ne sont pas des histoires faciles
à vivre pour nous. On a un mandat précis dans la
législation, depuis 1979, comme respon sables de la planification des
effectifs médicaux. On a fait face à des murs, à des
cathédrales, à des monuments. Malgré toutes les
difficultés, on a eu un mandat très précis du
gouvernement, l'année passée, pour faire en sorte qu'on ne nomme
pas à Montréal plus de 70 nouveaux spécialistes, et nous
avons livré la marchandise au grand dam de toutes les organisations qui
ont dit: Ce n'est pas l'affaire du conseil régional de venir
contrôler les effectifs médicaux. Les premiers en tête, bien
sûr - et je ne leur en veux pas, c'est leur rôle - ce sont les
doyens des facultés de médecine. Les facultés de
médecine, actuellement, quand on est en relation ou en communication,
ont de la peine à accepter que ces établissements relèvent
d'un autre ministère que celui de l'Éducation mais, pourtant, on
est dans deux ministères différents.
Dans les établissements spécialisés universitaires,
la difficulté qu'on vit, c'est justement le fait suivant: c'est qu'ils
peuvent avoir la grande tentation de se faire "baquer" par l'assemblée
universitaire et par les universités en mettant en priorité la
fonction enseignement et recherche. Moi, depuis le milieu... Je vous ai
parlé de 30 ans dans le milieu, j'ai dirigé des hôpitaux
ultraspécialisés universitaires, j'ai toujours reconnu qu'il y a
les trois fonctions: soins, enseignement, recherche, mais, d'abord et avant
tout, un établissement est là pour donner des soins et il
participe, après ça, comme laboratoire à l'enseignement et
à la recherche, mais ce n'est pas le rôle du ministère des
affaires sociales de faire la formation de médecins. L'université
voit dans ces contrats d'affiliation, actuellement, beaucoup les
établissements comme étant des activités secondaires
à leur orientation. Et ça apporte des problèmes. Tout
ça n'est pas facile à concilier.
M. Chevrette: Étant donné que vous êtes assez
direct, je vais vous en poser une très directe: La médecine au
Québec, le salariat par rapport au paiement à l'acte, comment
voyez-vous ça, vous? Hier, on a entendu des gens dire que le meilleur
système était le paiement à l'acte. Dans les urgences,
certains prétendent que ça devrait être le salariat; dans
les régions
éloignées, certains prétendent que ça
devrait être le salariat parce qu'il n'y a pas suffisamment d'actes
à poser, donc il n'y a pas d'incitation pour certains
spécialistes à aller en région éloignée.
Sous prétexte qu'il n'y a pas assez d'actes, donc si c'était le
salariat, on pourrait régler peut-être le problème de la
répartition des effectifs médicaux dont on parle depuis fort
longtemps. Mais au-delà même de...
Étant donné que c'est la seule profession dont on ne
contrôle pas l'entrée sur le marché du travail - qu'on
prenne les enseignants, c'est un ratio 1-12, s'il n'y a pas plus... s'il y a 11
enfants et pas 12, il n'y a pas d'enseignant. Tu le coupes. C'est de même
que ça marche. Si on a besoin de 24 infirmières dans un centre
hospitalier, la 25e n'entre pas. Si tu sors de l'université avec ton
diplôme de médecin omnipraticien ou ton diplôme de
médecin spécialiste, tu pratiques. Tu pratiques et on ne
contrôle même pas la limite de ta pratique, si ce n'est que quand
ton quota est atteint, tu es obligé d'attendre aux trois mois,
là. Et ce système-là peut, à mon point de vue,
développer a la longue - je ne dis pas qu'il développe chez tout
le monde, ce n'est pas vrai, ce n'est pas ça, on ne me fera pas dire ce
que je ne veux pas dire - chez plusieurs des vices du système.
Tu sais, quand tu n'as pas de rendez-vous le lendemain, le bobo que tu
vois la veille est peut-être plus laid que d'habitude. On est
portés, par exemple, à dire: Ha! Il y a des personnes
âgées qui vont voir trois ou quatre médecins dans la
même semaine; ça, c'est affreux. Mais celui qui convoque trois
fois la même personne dans la même semaine, c'est aussi affreux, et
il n'est pas contrôlé. On a la facilité de condamner le
gagne-petit, par exemple, les assistés sociaux, il y a 4 % ou 5 % de
voleurs, ce sont tous des voleurs! Est-ce qu'on pourrait regarder ces deux
côtés et nous parler s'il n'y a pas des mesures de contrôle
qui pourraient peut-être équilibrer le système un peu plus
qu'il ne l'est présentement?
M. Marcoux: M. Chevrette, je pense que vous soulevez, vous le
savez bien d'ailleurs, le problème de l'heure...On n'a pas
évolué beaucoup sur l'analyse de la rémunération
pour les médecins. C'est un "must", il faut trouver un moyen d'adapter
des enveloppes budgétaires à des programmes
déterminés. Je ne sais pas comment encore, mais il faut
véritablement en arriver à pouvoir indiquer qu'on n'a pas une
enveloppe budgétaire illimitée pour un nombre illimité
d'actes. Après avoir cerné des enveloppes budgétaires pour
des services, les modalités de rémunération viendront bien
facilement. Pour l'instant, ce que je peux vous dire, c'est qu'il nous
apparaît que la pratique en établissement devrait beaucoup plus
ressembler au salariat qu'à la rémunération à
l'acte, pour la pratique en établissement. Hors établissement, il
y aurait des moyens de contrôle d'enveloppes budgétaires aussi, et
la détermination d'enveloppes par région peut en être une.
Bon. Il serait très intéressant, à mon point de vue, pour
répondre franchement à votre question, que les études qui
avaient été faites sur les honoraires modulés reviennent
sur la table pour être réanalysées. Avec l'évolution
maintenant qui s'est faite chez les médecins aussi, il faut que vous
pensiez qu'un grand nombre de médecins sont prêts à changer
leur mode de rémunération.
Le Président (M. Joly): Merci. Je vais maintenant
reconnaître le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Je vais reconnaître aussi, à mon tour, la
franchise de vos affirmations et de vos déclarations. Mon
collègue soulignait les déclarations hors texte mais le texte
aussi, quant à moi, est extrêmement intéressant, en
particulier à la page 3 où vous nous décrivez très
bien le type de population auquel vous avez à faire face en termes de
services et de dispensation de services, ses caractéristiques
particulières comme étant évidemment les causes
fondamentales de la nature du service que vous devez dispenser. Nous l'avons
fait de ce côté-ci, remarquez, à l'ouverture de la
commission. Il nous apparaît qu'il va falloir tenir compte du type de
clientèle dans telle ou telle région, dans tel ou tel secteur
dans l'allocation des ressources. Je prends en exemple que vous nous ramenez
très bien le problème de l"'itinérance" à
Montréal, sur l'île, forcément et tout à fait
différent comme défi de ce que ça peut être à
Québec, en Beauce, en Abitibi, dans le Bas-du-Fleuve, etc. Et, à
cet égard, est-ce qu'au niveau - on a parlé de financement - de
la répartition, au niveau de l'allocation des ressources, est-ce qu'on
ne devrait pas axer le système d'allocation des ressources en fonction,
par exemple, de l'état de santé d'une population, du taux de
"prévalence" de certaines maladies, du niveau de risques sur telle
population concernée et là, nous retrouverions, je pense, et je
voudrais avoir votre opinion là-dessus, nous pourrions répondre
aux caractéristiques de la population qu'il y a à servir et ce
sera probablement fort différent sur l'île, sur la rive sud dans
la ceinture ou les environs de Montréal, et la même chose dans
d'autres régions par rapport à d'autres situations? Est-ce qu'on
devrait en tenir compte, plus qu'en tenir compte, est-ce qu'on ne devrait pas
baser la répartition des allocations financières, les allocations
de ressources sur ce critère fondamental?
M. Marcoux: Je pense que vous avez une analyse assez rigoureuse
d'une projection qui doit venir, et les signes avant-coureurs des gestes
posés actuellement par M. Côté nous laissent croire qu'on
va se diriger rapidement vers des enveloppes sur des programmes prioritaires.
Il
nous en a annoncé deux: La personne âgée, la
jeunesse. Il arrive que dans rttinérance", on retrouve les deux
catégories. À notre goût, cependant, c'est que, comme on
retrouve dans ritinérance" beaucoup plus de jeunes, il faudra qu'on ait
une ouverture plus grande sur ce programme-là, sur le financement de ce
programme. Actuellement, n'eût été la décision de la
ville de Montréal pour continuer de financer les 15 000
itinérants par certaines ressources, on serait dans une impasse
terrible, au moment où on se parle. (11 h 15)
M. Trudel: Très bien. Je ne sais pas si vous avez
noté, cependant, qu'à la volonté manifestée par le
ministre, comme vous venez de le souligner, on ne retrouve pas ça dans
le projet de loi. Regardez l'article 1 du projet de loi qui nous parie du but.
Le but: l'amélioration de la capacité physique et d'agir de
l'individu. À l'article 2, on décrit très bien, au niveau
des objectifs, que le système doit agir sur les déterminants pour
la santé. Et là surtout, allez à l'article 3 au niveau des
moyens, au cinquièmement des moyens, tout à coup, on ne retrouve
plus, comme facteur de répartition, l'allocation des ressources
basée sur la description. Là-dessus, on va être très
précis. Regardez donc l'article 2, 3°, au niveau des objectifs. "Les
objectifs répondent aux besoins de la population en tenant compte des
particularités géographiques, linguistiques, socioculturelles et
socio-économiques des régions." Article 3, 5°, "favoriser une
répartition des ressources humaines et financières la plus juste
et la plus rationnelle possible". On vient d'échapper les
déterminants de la santé, on vient d'échapper les
caractéristiques socioculturelles et socio-économiques des
régions. Est-ce qu'on ne devrait pas retrouver ça
là-dedans?
M. Marcoux: Oui.
M. Trudel: Également au niveau des moyens pour être
sûr que celui qui agit au niveau de la répartition des ressources
tienne compte des éléments déterminants de la
santé.
M. Marcoux: Oui. En effet...
Le Président (M. Joly): Je vous inviterais à
conclure assez brièvement, s'il vous plaît. Notre temps est
déjà dépassé.
M. Marcoux: Oui. Je ne peux que mentionner qu'il faut, bien
sûr, trouver dans le texte de loi qui sera le texte de loi final, toutes
les mesures suffisantes pour protéger les grands objectifs et les
déterminants qui sont énoncés.
M. Chevrette: En d'autres mots, il faut que le ministre confirme
maintenant par écrit ce qu'il dit verbalement.
Le Président (M. Joly): Malheureusement... M. Trudel:
C'est ça.
Le Président (M. Joly): ...nous avons déjà
largement dépassé, alors je me dois de conclure et de remercier
les membres du Conseil de la santé et des services sociaux de la
région de Montréal métropolitain.
M. Côté (Charlesbourg): Peut-être que vous me
permettrez...
Le Président (M. Joly): Je demanderais à M. le
ministre de conclure.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Uniquement pour vous
dire merci. Je pense que sur le plan des effectifs médicaux, et
ça vaut la peine de le dire, vous avez joué un rôle tout
à fait extraordinaire et responsable. Vous avez fait la
démonstration qu'il y avait des possibilités et des espoirs de ce
côté-là. Je tenais au moins à le souligner parce que
ce n'était pas une situation facile de tirage de poignets, et vous en
savez quelque chose. Vous avez joué votre rôle et je tenais
à le dire. Évidemment, c'est prometteur pour l'avenir.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Merci,
messieurs et mesdames.
M. Leblanc: M. le Président, je tiens à remercier
la commission. Merci.
Le Président (M. Joly): Pourriez-vous, s'il vous
plaît, accélérer et libérer?
Je demanderais aux représentants de l'hôpital Marie Enfant
de bien vouloir s'avancer, s'il vous plaît, afin que nous puissions
débuter. Nous avons un petit peu de rattrapage de temps à
faire.
Pour le bénéfice des membres de cette commission,
j'aimerais demander au responsable du groupe de l'hôpital Marie Enfant de
bien vouloir se présenter et présenter les personnes qui
l'accompagnent.
Hôpital Marie Enfant
M. Baril (Femand): M. le Président, M. le ministre, Mmes
et MM. les députés. Fernand Baril, hôpital Marie Enfant,
président du conseil d'administration.
J'aimerais vous présenter les deux personnes qui m'accompagnent.
Il s'agit, en l'occurrence, de Me Michel Brunet, directeur
général, qui est immédiatement à ma droite, et du
Dr Michel Vanasse, président du Conseil des médecins, dentistes
et pharmaciens et chercheur principal à notre établissement.
Le Président (M. Joly): M. Baril, je vous
rappelle que nous avons une vingtaine de minutes pour la
présentation de votre mémoire.
M. Baril (Fernand): Oui.
Le Président (M. Joly): Après, le temps est
réparti en parts égales aux deux formations.
M. Baril (Fernand): En tout premier lieu, je voudrais vous
remercier pour avoir permis à notre hôpital d'exposer sa position.
C'est un établissement qui présente, croyons-nous, des
particularités telles qu'il ne doit pas être intégré
au moule uniforme tracé par les orientations ministérielles
présentées au printemps dernier et par l'avant-projet de loi qui
fait l'objet de votre examen.
Si on fait un peu l'historique, on peut dire que l'hôpital Marie
Enfant est issu des travaux du Dr Armand Frappier sur la tuberculose infantile,
il y a maintenant plus de 50 ans, et a été fondé par un
groupes d'hommes et de femmes bénévoles soucieux d'enrayer ce
fléau à Montréal et au Québec. L'hôpital
Marie Enfant a progressivement traité, adapté et
réadapté des enfants âgés de zéro à 18
ans affectés de pathologies graves, souvent évolutives, parfois
multiples. Au long des années, au fil des progrès scientifiques
remarquables, l'hôpital a accueilli des clientèles nouvelles
provenant de régions de plus en plus lointaines de son emplacement
montréalais et nécessitant des interventions toujours plus
complexes et spécialisées.
Il a reçu en 1982 du ministère des Affaires sociales et du
Conseil de la santé et des services sociaux de la région de
Montréal métropolitain le mandat de ne traiter désormais
que des clientèles présentant des déficiences motrices
associées à des incapacités ou handicaps. Cette
population, comme en fait foi le tableau présenté en page 4 du
présent mémoire, provient, dans une proportion de 50 %, de
l'extérieur de la région 06A.
En 1985, l'hôpital Marie Enfant voyait son statut juridique
transformé de la classe "centre hospitalier de soins prolongés
pour convalescents" à celle de "centre hospitalier de courte
durée" avec mission unique en adaptation et réadaptation physique
pédiatrique. Il était et est toujours aujourd'hui le seul centre
hospitalier au Québec à remplir exclusivement cette mission
spécifique. Par ce seul fait, il ne serait pas utile de poursuivre plus
avant pour constater que l'hôpital Marie Enfant ne cadre d'aucune
manière dans la logique qui sous-tend le regroupement
d'établissements par territoires de centres locaux de services
communautaires.
Nous démontrerons tantôt, par la voix du directeur
général, que notre centre, non pas tant pour sa survie en tant
qu'entité juridique et administrative autonome, mais pour
préserver la qualité des services ultra spécialisés
qu'il rend, doit maintenir son identité et son autonomie en
accédant au statut d'institut universitaire en réadaptation
physique pédiatrique. Sans cela, l'ensemble du territoire du
Québec sera totalement dépourvu de ce type
d'établissements et le sera pour de nombreuses années à
venir, selon le dossier des "Orientations" intitulé "Pour
améliorer la santé et le bien-être au Québec",
déposé au printemps 1989, qui ne fait état d'aucun
établissement universitaire de ce genre.
J'invite maintenant Me Michel Brunet à présenter le
dossier.
M. Brunet (Michel): Merci, M. le Président. M. le
Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, merci
à mon tour de nous recevoir. Je ne pense pas que la présentation
du conseil régional, qui a précédé, nous ait
tellement facilité la tâche. Je vous avoue que nous étions
déjà, en nous en venant tout à l'heure, un peu petits
à la pensée de suivre un organisme aussi prestigieux. Je me
demande si les commentaires de M. Marcoux concernant les hôpitaux
universitaires vont tellement nous rendre service. Mais, en tout cas, nous
allons continuer, puisque nous sommes venus.
M. Chevrette: Qui ne risque rien n'a rien.
M. Brunet: Et vous êtes vraiment très
indulgents.
Justement, ce que nous voudrions tenter de démontrer au cours des
quelques minutes qui nous sont accordées... En passant, M. le ministre,
si notre président, M. Baril, parle de mol comme étant Me Brunet
- je vous avoue que ça lui arrive extrêmement rarement - je
voudrais absolument vous rassurer: la loi 97 s'applique à
l'hôpital Marie Enfant et je n'ai pas deux professions. Il se produit
toutefois que je suis avocat et encore membre du Barreau.
Nous voudrions précisément, M. le ministre, tenter de
démontrer qu'un petit établissement, quoique nous n'ayons pas le
complexe du misérabilisme, que je voudrais situer pour les personnes qui
ne le connaissent pas... On a la mauvaise habitude de le désigner comme
étant le voisin immédiat de l'Institut de cardiologie sur la rue
Bélanger, à Montréal. Quand je dis: mauvaise habitude,
c'est évidemment en blaguant. Alors, voilà où nous sommes.
Notre établissement a 100 lits. Il a un foyer de groupe de neuf lits et
nous administrons également un centre d'accueil de 125 lits.
Je vais revenir à mon propos d'origine. Nous essayons par ce
mémoire modeste, M. le ministre, de démontrer qu'un petit
établissement comme le nôtre ne cadre en rien, en bon
français ne "fit" d'aucune manière dans un moule qui a, par
ailleurs, ses vertus. Il peut avoir ses vertus dans telle ou telle
région du Québec. Certains de mes collègues à la
Direction des établissements de santé de Montréal
admettent tout à fait que le principe de l'unification et non de la
fusion, comme il est dit dans notre tex-
te - je tiens a le corriger immédiatement car notre utilisation
du mot "fusion" est sur le plan juridique un peu abusive donc il est
très probable et très possible que dans certaines régions
et dans certains quartiers l'amalgame des conseils d'administration, sans la
disparition toutefois des entités juridiques, soit tout à fait
souhaitable. On a môme vu des exemples semblables se réaliser
à travers le Québec et, ma fol, de plus en plus, et
particulièrement ici, dans la région de la ville de
Québec, sans qu'il ne soit nécessaire, M. le ministre, de
l'imposer par voie législative.
Pour l'hôpital Marie Enfant, il y a là, dans cette
perspective - et c'est ce qui nous amène ici - une réelle
possibilité que le Québec se dispense malheureusement de ce qui
est aujourd'hui, avons-nous dit, le seul centre hospitalier en
réadaptation pédiatrique. Nous ne faisons aucune forme
d'ostentation, M. le ministre, en insistant sur le fait que nous sommes le seul
centre hospitalier avec ce statut juridique, qui a cette mission unique et
spécifique en réadaptation d'enfants physiquement
handicapés. Ce n'est pas par ostentation, mais pour vous rappeler que
les officiers de votre ministère nous ont confié cette mission et
qu'ils ont gardé à un CH cette mission, avec une priorité
en rééducation ou en réadaptation fonctionnelle, et nous
démontrons, ma foi, tous les jours que nous nous Impliquons
également énormément dans la réinsertion sociale
des enfants handicapés.
Pourquoi y a-t-il danger? Il y a danger pour toutes les raisons que vous
avez sans doute entendues et que vous entendrez probablement dans les
mémoires ultérieurs. La population, nous semble-t-il, quant
à moi, depuis plusieurs années à la direction de cet
hôpital, n'a pas toujours été la mieux servie. Nous diluer,
diluer l'effort des membres du conseil d'administration actuel dont notre
président est lui-même - et il ne m'en voudra pas de le rappeler -
parent d'un enfant handicapé, un vrai citoyen... Les vrais citoyens ne
sont pas qu'ailleurs du réseau. Nous croyons que tous les efforts de ces
membres de conseil d'administration, des 150 gouverneurs de l'hôpital
Marie Enfant, tel est le nom de notre fondation, l'implication des membres de
la corporation, M. le ministre - quoi qu'on en pense, quoi qu'on en dise,
toutes les corporations ne sont pas aussi inefficaces que ce qu'on entend dire
- que tous ces efforts, donc, seront indûment dilués dans un
ensemble qui n'a strictement rien à voir avec notre
réalité.
Alors, nous sommes coincés. C'est vous, M. le ministre, qui, en
vertu de l'article 37, désignez et désignerez les
établissements qui seront instituts universitaires et ceux qui ne le
seront pas. Dans le dossier des orientations de votre
prédécesseur, le nom de l'hôpital Marie Enfant est absent.
Celui de l'institut François-Charron ici, à Québec, est
présent et nous n'avons rien contre cela, c'est un excellent
établissement. L'Institut de réadaptation de Montréal,
avec lequel nous entretenons d'étroites collaborations, est un institut
universitaire depuis longtemps et il nous semble qu'en réadaptation
pédiatrique, M. le ministre, il n'y a pas de CH au Québec qui
pourra conserver - oui, oui, c'est une partie de nos motifs - son
Identité et son dynamisme. (11 h 30)
Je vais laisser le Dr Michel Variasse, neurologue, vous exposer, pour
les quelques minutes qui nous restent - et, ensuite, nous répondrons
à vos questions - l'état d'avancement du dossier scientifique
chez nous et en particulier, et malgré ce que nous venons juste
d'entendre, l'état d'avancement de la recherche et des technologies.
Le Président (M. Joly): M. Vanasse.
M. Variasse (Michel): M. le Président, M. le ministre,
mesdames et messieurs, malgré sa taille relativement modeste,
l'hôpital Marie Enfant est un hôpital qui possède des
particularités. M. Brunet vient d'insister sur les particularités
de sa vocation de réadaptation pédiatrique qui fait que notre
hôpital est différent des centres hospitaliers pour enfants comme
l'hôpital Sainte-Justine ou l'hôpital de Montréal pour
enfants, du fait de sa vocation de réadaptation et, en même temps,
différent des centres d'accueil ou centres hospitaliers de
réadaptation adulte du fait, bien sûr, de sa vocation
pédiatrique.
C'est un hôpital qui est particulier aussi par sa
clientèle. Nous traitons des enfants ou des adolescents qui
présentent une incapacité physique et les handicaps qui en
découlent. Mais cette clientèle n'est prise en charge par aucun
autre centre hospitalier. Comme exemple, on peut penser à nos 515
enfants ou adolescents qui sont atteints de maladies neuromusculaires,
c'est-à-dire de maladies progressives et héréditaires, qui
sont suivis chez nous et qui, malheureusement, ne peuvent pas être suivis
ailleurs.
On peut donner aussi comme exemple les enfants qui ont subi un
traumatisme crâniocéré-bral et qui sont suivis en
réadaptation dans notre milieu. C'est aussi un hôpital qui a des
particularités du fait de son approche que je qualifierai de
multidisciplinaire obligatoire puisque nous traitons des enfants qui
présentent une incapacité et un handicap. L'aspect psychosocial
nous semble important et ce, tant au niveau des soins - et je le mentionnerai
tout à l'heure - qu'au niveau de la recherche.
Bien sûr, l'approche multidisciplinaire existe dans d'autres
centres hospitaliers. Mais, chez nous, elle est obligatoire, puisqu'on doit
prendre en considération aussi bien les besoins physiques,
psychologiques, psychosociaux d'intégration et de réinsertion
sociales. Donc, on doit travailler avec des équipes qui comportent aussi
bien des médecins, physiothérapeutes, ergothérapeutes,
mais aussi des travailleurs sociaux et des psychologues.
Par contre, l'hôpital Marie Enfant n'est pas un hôpital
isolé. Ce n'est pas un élément isolé dans le
réseau. Mais c'est un hôpital qui a un rôle de
complémentarité à jouer, complémentarité au
niveau des soins, que ce soit avec les centres hospitaliers de courte
durée, que ce soit avec les centres d'accueil, que ce soit avec les
CLSC. Je pense que nous avons joué ce rôle. Mais c'est aussi un
hôpital qui a un rôle à jouer au niveau de la recherche et
de la prévention, là aussi en soi, mais dans un
élément de complémentarité. Au cours des
dernières années - une vocation qui est, somme toute, assez
récente - on a tenté de développer la recherche à
l'hôpital Marie Enfant. Cette recherche est faite d'abord à
l'hôpital mais aussi, le plus souvent, en collaboration soit avec un
autre centre hospitalier. Je peux donner comme exemple des projets de
traitement expérimentaux de la dystrophie musculaire que nous faisons
avec l'Hôpital de Montréal pour enfants, des projets de
génétique moléculaire que nous faisons avec
l'hôpital Sainte-Justine.
Plus, nous avons tenté de nous intégrer et je pense que
nous avons contribué à former un réseau de recherche en
réadaptation au niveau de la région montréalaise,
réseau de recherche qui, bien sûr, a été
suggéré ou formé d'abord par le Fonds de la recherche en
santé du Québec. Nous faisons aussi partie du réseau
provincial de médecine génétique à titre de membre
du sous-comité de maladies neuromusculaires et l'hôpital Marie
Enfant, par son programme de maladies neuromusculaires a été un
élément déterminant dans la formation d'un réseau
de dépistage des porteurs de la dystrophie musculaire de Duchenne et de
Becker, de même que d'un réseau de diagnostics
anténatals.
Ce réseau regroupe les hôpitaux de Chicou-timi, le Centre
Cardinal-Villeneuve à Québec, l'hôpital de Sherbrooke,
l'Hôpital de Montréal pour enfants, ainsi que les hôpitaux
Marie Enfant et Sainte-Justine.
Actuellement, on tente de former un réseau canadien de maladies
neuromusculaires et on tente aussi de faire une collaboration internationale au
niveau de la génétique moléculaire qui est certainement
une approche extrêmement importante au niveau de la recherche en
général et de la recherche en réadaptation, puisque nous
voulons traiter les causes. Nous voulons trouver des moyens préventifs
à ces maladies et, éventuellement, en aboutir à amener des
soins de meilleure qualité.
Je pense que l'obtention d'un statut universitaire est extrêmement
important pour l'hôpital Marie Enfant. Je pense que la recherche n'est
certainement pas contradictoire à la qualité des soins et qu'une
recherche de bonne qualité ne peut qu'amener des soins de meilleure
qualité.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Vanasse. Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre délégué
à la Santé, M. Sirros.
M. Sirros: Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais,
à mon tour, remercier les personnes qui sont ici, de l'hôpital
Marie Enfant, pour leur présentation, en particulier, peut-être,
Me Brunet. Finalement, ce qu'on a, c'est un plaidoyer - c'est peut-être
par formation - un plaidoyer éloquent, je devrais dire aussi, par
rapport à la reconnaissance de l'hôpital Marie Enfant comme
institut universitaire, comme établissement universitaire. Je comprends
que vous pointez un peu le document d'orientation qui ne nomme pas
l'hôpital Marie Enfant comme un des établissements universitaires
possibles. Je tenais simplement à souligner que ce choix n'est pas fait.
Ce n'est pas encore déterminé quels seront les instituts
universitaires comme tels. C'est aussi dans les intentions du ministère
- et je pense qu'on pourra le dire - de nommer des instituts universitaires en
dehors du secteur traditionnel médical, mais peut-être plus
particulièrement par rapport aux personnes âgées et
à la réadaption. Il y aura, évidemment, à un moment
donné, des choix à faire dans ce sens-là, mais je ne pense
pas qu'on soit en mesure, aujourd'hui, de répondre à cette
requête que vous faites. On en prend note, effectivement.
Mais j'aimerais, peut-être, réaligner en quelque sorte
votre présence ici en vous posant la question à l'inverse. Si,
par exemple, on garantissait l'autonomie de votre conseil d'administration,
donc l'autonomie ou la désignation d'un conseil d'administration par
rapport à votre hôpital, est-ce que le désir serait si
intense d'être nommé centre universitaire?
M. Brunet: Oui, monsieur, et très sincèrement.
Évidemment, vous le savez très bien, vous allez entendre des gens
trouver - j'imagine, et je les respecte - toutes sortes de prétextes
pour échapper à ce changement majeur et pour conserver les
habitudes, bien sûr. Mais je vous réponds: Très
sincèrement, oui, parce que ce n'est pas d'hier et ce n'est pas du
printemps dernier, M. le député, que nous avons amorcé ces
démarches avec l'Université de Montréal, en particulier.
Curieusement, dans de petits secteurs d'activité, outre ce que le Dr
Vanasse vient de rappeler concernant nos liens assez étroits avec
l'hôpital Sainte-Justine dont l'immense majorité des
médecins spécialistes de l'hôpital Marie Enfant
proviennent, outre cela, curieusement, nous avons des affiliations ponctuelles
avec l'Université McGill, en dentisterie, par exemple, en chirurgie
dentaire pour les enfants handicapés, parce que nous avons une salle de
chirurgie chez nous.
Je vous répondrai que oui, il y a bien des années que nous
souhaitons obtenir ce qui est important pour le développement de cet
hôpital, un hôpital, encore une fols, que votre ministère a
soutenu depuis des années alors qu'il aurait pu, à une certaine
époque de son existence, laisser tomber. Je vous répondrai que
oui.
M. Sirros: Je pourrais aussi poser la question à
l'inverse: Si vous étiez nommé institut universitaire, à
un moment donné, est-ce que vous pourriez envisager plus facilement la
participation à un conseil d'administration unifié?
M. Brunet: Pas vraiment plus et pour les raisons ou l'envers des
raisons que j'ai exprimées tantôt. Nous avons le sentiment
très net que la particularité de cet établissement, le
fait, comme nous tentons de le démontrer dans ce document, que sa
population, que sa clientèle qui habite le territoire du CLSC -
puisqu'il s'agit de cela dans l'avant-projet de loi comme délimitation -
est de 4 %, nous avons le sentiment très net qu'il n'y a pas de
résonnance à faire administrer cet établissement et
d'autres du territoire du CLSC Rosemont dans l'est de la ville de
Montréal par une autre entité que celle du conseil
d'administration actuel, je veux bien dire actuel ou remodelé. Je ne
parle par des individus qui le composent, bien sûr.
Nous ne nous objectons pas, et d'ailleurs quel serait donc notre
pouvoir? nous ne nous objectons nullement à ce qu'il y ait une
modification du "membership" des conseils d'administration, mais - j'allais
dire par pitié - ne sombrons pas dans d'autres choses. S'il vous
plaît, considérez qu'il y a une implication considérable,
extrêmement importante de citoyens, malgré les apparences. Ce
n'est pas un centre hospitalier comme les autres. Beaucoup vont vous dire la
même chose, j'en conviens. Ce n'est pas la cause des autres que nous
défendons ici aujourd'hui. Il y a des conséquences majeures pour
les enfants physiquement handicapés, à long terme. Elles sont
tout à fait Imprévisibles lorsqu'on lit le dossier des
orientations, lorsqu'on épluche aussi les objectifs de l'avant-projet de
loi qui vous occupe. Mais je vous affirme qu'à long terme il y a des
conséquences importantes à ne pas décider, entendons-nous
bien, avec le Conseil régional, comme cela vient d'être
exprimé - comme d'ailleurs le Conseil régional, en ce moment,
dans l'état actuel des choses et depuis des années, a le pouvoir
de le faire - en concertation avec Sainte-Justine, en concertation avec MacKay
Center, en concertation avec l'Hôpital de Montréal pour enfants.
Vous avez une petite série, dans ce document, d'exemples de concertation
qui, M. le ministre, ne nous placent nullement, nous semble-t-il, dans la
catégorie des établissements qui se sont cloisonnés les
uns par rapport aux autres.
Permettez-moi d'ajouter, en terminant, à cette question... Assez
curieusement, nous venons d'entendre certains exemples de cloisonnement au
niveau des hôpitaux universitaires, je veux dire des centres hospitaliers
universitaires - ce n'est pas notre cas - qui offrent la gamme complète
de services de santé. Assez curieusement, si la matière
reprochée est vraie, si elle était vraie, ce sont les
hôpitaux universitaires, ceux-là, les grands hôpitaux
universitaires, qui échapperaient au conseil d'administration
unifié. Je trouve qu'il y a là comme une ambiguïté.
Mais ce n'est pas vraiment le propos de l'hôpital Marie Enfant,
aujourd'hui. Ce que je veux dire, c'est qu'il me semble qu'il y a encore des
choses à explorer. J'apprécie et je vous remercie pour la
précision que vous faisiez au début. Nous savons que nous sommes
presque techniquement hors du sujet, ici; nous le savons, mais nous sommes
coincés et sans ressources pour procéder autrement. Si notre
conseil disparaît demain matin ou après l'adoption d'une loi qui
serait identique à celle-ci, il sera trop tard pour devenir un
institut.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Brunet. Je vais
maintenant reconnaître la députée de Bourget, Mme
Boucher-Bacon.
Mme Boucher-Bacon: Je vous remercie beaucoup d'avoir
présenté votre mémoire, ce matin, devant nous. Je
reconnais aussi que votre hôpital est un établissement qui
déborde du moule. Je le connais pour l'avoir fréquenté par
mes enfants et aussi parce que vous êtes en complémentarité
avec l'hôpital Maisonneuve-Rosemont. Maintenant, je reconnais votre
vocation et je vous en félicite.
J'aimerais bien, au-delà de mon ministre, que vous soyez reconnus
comme institut, bien que les pouvoirs de l'avant-projet ne vous le permettent
pas. Ça ne veut pas dire que la porte est fermée. Il faut
être un petit peu optimiste, dans le domaine de la santé, pour
savoir que ça prend du temps avant d'être reconnu. Alors, moi,
j'aimerais savoir comment vous voyez votre rôle de
complémentarité face à l'hôpital
Maisonneuve-Rosemont.
M. Brunet: Je risquerais une réponse parce que j'ai un
certain nombre d'idées là-dessus Je préfère
probablement laisser au Dr Vanasse, qui est du secteur scientifique, le soin de
vous répondre.
M. Vanasse: Je pense que la complémentarité est une
complémentarité qui est, somme toute, la même qu'avec
l'Hôpital de Montréal pour enfants et l'hôpital
Sainte-Justine, dans le sens où une partie de la clientèle que
l'on dessert vient de Maisonneuve-Rosemont. Je pense, par exemple, aux enfants
qui ont un traumatisme crânio-cérébral; on en a plusieurs
qui viennent de Maisonneuve-Rosemont. Par ailleurs, c'est sûr qu'il y a
une complémentarité, jusqu'à un certain point, un peu plus
physique. Mais comme notre vocation est très spécifiquement la
réadaptation pédiatrique, ce sont vraiment les cas de
réadaptation pédiatrique. c'est-à-dire les enfants
présentant un handicap physique, que l'on suit, que l'on voit à
Marie Enfant, à l'exclusion de tout autre. On n'est pas un
hôpital
de pédiatrie générale, je pense qu'il faut le
reconnaître. Et le conseil d'administration, aussi bien les
médecins et les autres professionnels de la santé, on s'est
vraiment cantonnés, depuis les six dernières années,
à la réadaptation pédiatri-que, dans ce
sens-là.
Mme Boucher-Bacon: Si je comprends bien, vous avez des cas de
pathologie bien spécifiques.
M. Vanasse: Oui. Une voix: Absolument.
Mme Boucher-Bacon: Est-ce que vous pourriez en déterminer
quelques-uns pour la commission?
Une voix: Oui, absolument.
M. Vanasse: Je pense que j'ai peut-être parlé tout
à l'heure du programme qui me tient le plus à coeur puisque je le
dirige depuis onze ans maintenant, c'est-à-dire le programme de maladies
neuromuscuiaires. Ce sont vraiment des enfants qui sont atteints de dystrophie
musculaire, d'Ataxie de Friedreich, qui sont, comme je le mentionnais, des
maladies héréditaires évolutives. C'est pour ça que
j'ai peut-être beaucoup insisté sur l'élément de
génétique moléculaire, pour des raisons, là aussi,
qui me tiennent à coeur, parce que ce sont des éléments de
prévention. C'est vraiment là où on pense qu'on pourra
trouver la cause de ces maladies-là et le traitement.
Je mentionnais aussi que nous commençons dans quelques semaines
un traitement expérimental en collaboration avec l'Hôpital de
Montréal pour enfants. À côté de ça, le
programme le plus important, numériquement, ce sont les enfants qui
présentent un déficit moteur cérébral qu'on
connaît parfois sous le terme de paralysie cérébrale. Nous
avons deux programmes de DMC ou de déficit moteur cérébral
qui regroupent 600 cas actifs. Quand je dis "cas actifs", ce sont des gens qui
sont pris en charge par une équipe multidisciplinaire. Un programme plus
jeune, mais qui est extrêmement important pour nous aussi - je le
mentionnais - est le programme pour enfants ayant subi un traumatisme
crânio-céré-bral, qui est un programme fait en
collaboration avec la Régie de l'assurance automobile du Québec.
C'est vraiment un programme qui est fait - les autres aussi, je dois dire, mais
vraiment celui-là - pour essayer de minimiser les séquelles d'une
atteinte cérébrale comme celle-là et faire une
réintégration sociale. (11 h 45)
II y a, après ça, le programme de développement,
qui est un programme de surveillance des enfants qui présentent un
retard de développement, des programmes plus spécifiques de
scoliose, des problèmes musculo-squelettiques. Enfin, je pense que tout
ce qu'on peut concevoir comme handicaps physiques, je dirais, comme
déficiences et handicaps physiques chez l'enfant, on le retrouve
à Marie Enfant. Je mentionnais aussi notre intérêt... Les
soins qu'on tente de prodiguer ne sont pas uniquement physiques - je n'ai
peut-être pas suffisamment insisté sur l'élément
psychosocial - mais on travaille... On a, actuellement, trois étudiants
qui font leur doctorat à l'Université de Montréal, dans le
Département de psychologie, qui étudient les impacts des
handicaps ou des incapacités physiques, devrais-je dire, les impacts
psychosociaux, les processus d'adaptation. Je pense que cet
élément-là est un élément extrêment
important pour nous.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Vanasse. Je vais
maintenant reconnaître le député de Verdun, M. Gautrin.
M. Gautrin: Vous n'avez pas besoin de me convaincre, au
départ, de l'importance de la recherche en milieu hospitalier, ni de
l'importance des hôpitaux d'enseignement. Mais, pour bien comprendre la
demande que vous faites, j'aurais besoin de deux informations. La
première, c'est: Quelle est votre implication, à l'heure
actuelle, dans la formation universitaire? Vous avez dit, à la page 11,
que vous avez un contrat par le biais de l'hôpital Sainte-Justine, un
contrat d'affiliation avec l'Université de Montréal et un autre
avec le Département d'administration de la santé. Qu'est-ce que
vous faites, exactement, dans la formation universitaire? Le deuxième
élément de ma question, donc je vais vous dire mes deux questions
tout de suite, c'est: Vous donnez la liste de vos projets de recherche actifs.
Je comprends, monsieur, que vous êtes le chercheur principal; le
principal des projets de recherche, c'est vous qui les assumez. Qui est
impliqué dans les activités de recherche à
l'intérieur de votre groupe? Combien de personnes sont impliquées
dans les activités de recherche à l'intérieur de vos
hôpitaux? Vos projets de recherche sont financés par le FRSQ,
j'aurais aimé voir quel est le montant... Pour chacun de vos projets de
recherche, combien obtiennent-ils en termes de financement? Sont-ils
financés par le CRM? C'est-à-dire, est-ce que... Ce sont les
trois volets d'une même question, c'est-à-dire avoir une
idée de votre implication dans l'enseignement et la recherche
universitaires.
M. Brunet: Si vous permettez, je vais amorcer la réponse
et laisser le Dr Vanasse donner les précisions qui s'imposent à
cette excellente question.
Le protocole avec l'hôpital Sainte-Justine dit, en substance,
ceci, à l'article 1 ou à l'article 2, je crois: L'hôpital
Marie Enfant et l'hôpital
Sainte-Justine s'associent pour des fins d'enseignement universitaire et
de recherche seulement. Suivent d'autres articles moins pertinents, moins
essentiels. Cela était une tentative afin d'obtenir que des stagiaires,
que des résidents en médecine, dans les disciplines
médicales qui touchent à la réadaptation -
évidemment, la physiatrie et l'orthopédie notamment, la
neurologie - fassent des stages suffisamment substantiels à
l'hôpital Marie Enfant pour que l'on puisse considérer qu'il y a
un noyau assez consistant pour que ce soit incitatif, et développer
également, chez les futurs médecins, un attrait pour la pratique
de cette médecine difficile et pas la plus
rémunératrice.
Ce n'est pas un échec complet, c'est bien loin d'être un
succès. Et, dans mes propos, il n'y a rien qui soit agressif à
l'endroit de l'hôpital Sainte-Justine ou de son administration, c'est
tout à fait le contraire. C'est complètement insuffisant, M. le
député, parce qu'il n'y a pas cette identité très
nette. Nous devons constamment - et je le dis, encore une fois, avec
déférence pour Sainte-Justine - être à la remorque
des volontés et des horaires, d'une part, de l'université, bien
sûr, mais par le transit de l'hôpital Sainte-Justine, et ça
nous paraît totalement insuffisant.
En ce qui concerne le nombre de chercheurs, je cède la parole
à M. Vanasse.
M. Vanasse: Disons qu'actuellement, au point de vue du nombre de
chercheurs, je pense qu'il faut peut-être se resituer. Je disais que la
vocation de recherche de l'hôpital Marie Enfant est une vocation
relativement récente et une des raisons est assez évidente, c'est
que, n'étant pas un hôpital où un institut universitaire,
il est difficile de faire directement des demandes. Vous savez, pour faire une
demande auprès de quelque organisme que ce soit, il faut avoir un titre
universitaire, professeur agrégé, adjoint, etc. Donc, ça
devient un petit peu difficile, quand tu travailles dans un hôpital qui
n'est pas universitaire comme tel, de faire une demande à partir de
là. Le nombre de chercheurs, actuellement - je pourrais les appeler
cliniciens - ou de cliniciens qui contribuent à la recherche, il y en a
quatre qui travaillent dans ce domaine. Ce que nous avons tenté de faire
au cours des deux dernières années, c'est de nous adjoindre des
méthodologistes, pour justement améliorer la qualité de
nos travaux de recherche, et une épidémiologiste, le Dr Nancy
Mayo, un professeur de statistiques, le Dr Lambert, et aussi un
neurophysiologiste qui est professeur à l'école de
réadaptation.
Source de financement. Actuellement - je faisais les comptes rapidement
- on a, pour l'an dernier, 150 000 $ de subvention de recherche pour
l'hôpital Marie Enfant, directement ou avec des projets conjoints avec
Sainte-Justine, qui viennent de l'Association canadienne de l'Ataxie de
Frledreich, de l'Association canadienne de la dystrophie musculaire et
l'Association de la paralysie cérébrale du Québec. Pour
l'année prochaine, donc à partir de juillet 1990, on a fait des
demandes d'un ordre de grandeur de 300 000 $ de subvention, dont une bonne
partie auprès du Fonds de la recherche en santé du Québec
et une majeure, c'est vraiment sur le thème d'une équipe de
recherche en émergence, puisque, outre les méthodologistes dont
je vous parlais tantôt, on veut s'adjoindre deux professeurs du
Département de psychologie de l'Université de Montréal.
Donc, c'est vraiment la majeure. On essaie de mettre le pied dans
l'étrier, si je peux dire, à partir de là tout en
continuant avec les autres organismes que je vous ai mentionnés
tantôt.
Le Président
(M. Joly): merci, m. vanasse, je vais
maintenant reconnaître le responsable des dossiers de la santé
pour l'opposition, m. chevrette.
M. Chevrette: Je vous concède, d'entrée de jeu, que
c'est très différent des hôpitaux universitaires qui ont
l'ensemble des services. Donc, c'était là-dessus qu'auraient
porté mes questions mais je pense que vous l'avez très bien
plaidé.
Deuxièmement, je pense que c'est une excellente plaidoirie en
faveur de la reconnaissance, puisque vous traitez des critères qui,
normalement, aboutissent à une reconnaissance d'un institut
universitaire. C'est très bien développé et les questions
que j'aurais eues à vous poser l'ont été par le
côté ministériel. Donc, je voudrais vous souhaiter une
excellente chance, en espérant que votre plaidoirie sera prise en
considération au moment où le ministre reconnaîtra les
instituts de niveau universitaire. Et je pense que même si vous
étiez hors d'ordre - ce que vous aviez compris - je dois vous dire,
à votre décharge, que c'était habile de le faire.
Le Président (M. Joly): Je tiens à remercier le
responsable de l'hôpital Marie Enfant et je vais maintenant demander au
Centre d'accueil Father Dowd de s'avancer.
M. Brunet: Je veux vous remercier également, M. le
ministre. Je vous remercie infiniment, ce fut intéressant.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Brunet. Je vous souhaite
la bienvenue et j'aimerais vous rappeler les règles établies,
à savoir que vous avez plus ou moins 15, 20 minutes pour
présenter votre mémoire. Et, par après, nous laissons,
autant le côté ministériel que le côté de
l'Opposition, vous poser les questions qui peuvent susciter de
l'intérêt. Alors, pour le bénéfice des membres de la
commission, pourriez-vous vous identifier, s'il vous plaît?
Centre d'accueil Father Dowd
M. Simsons (George): M. le Président... Excuse me. Je suis
George Simsons, président du conseil d'administration de Father Dowd.
À ma gauche c'est M. Albert Eisenring, directeur
général.
Je vous remercie de nous avoir invités ici, ce matin, pour
présenter nos mémoires. Le centre d'accueil Father Dowd est un
centre d'hébergement pour 135 bénéficiaires. Cette
année, il célébrera son 125e anniversaire. Il a
été fondé le 17 mars 1865 par la communauté
catholique irlandaise de Montréal. Depuis, et sans interruption, il a
desservi la communauté catholique anglophone, contribuant
généreusement de ses ressources financières et humaines
afin de prendre soin des personnes âgées de la
communauté.
Bien que Father Dowd soit devenue une institution publique, le sentiment
d'appartenance demeure bien présent parmi la communauté
anglophone et plus précisément auprès de la
communauté catholique anglophone. Le centre reçoit toujours un
bon appui de sa communauté du côté financier et plus
particulièrement du côté bénévolat. Les
auxiliaires de Father Dowd comptent 350 membres dont 135
bénévoles sont très actifs. Ils sont recrutés parmi
toutes les paroisses catholiques anglophones de l'île de Montréal,
ce qui ajoute au rôle unique du centre d'accueil Father Dowd dans la
communauté d'aujourd'hui. Son rôle sera accru avec la construction
du centre d'accueil Agnes Hlggins qui sera administré par le centre
d'accueil Father Dowd.
Étant donné nos antécédents et notre
participation active dans la communauté, nous sommes vraiment
préoccupés par certains aspects de l'avant-projet de loi sur les
services de santé et les services sociaux. Plusieurs changements seront
accueillis favorablement. Pour n'en nommer que quelques-uns:
premièrement, la création d'une seule catégorie
d'établissement, soit un centre d'hébergement et de soins de
longue durée beaucoup plus représentatif de la clientèle
actuelle dans les institutions de santé; deuxièmement, les
efforts dirigés vers une meilleure coopération entre les
différents établissements; troisièmement, l'accent sur la
formation du personnel afin de dispenser des soins de qualité
supérieure.
Toutefois, nous sommes vraiment inquiets par la réorganisation du
réseau qui, en réalité, élimine complètement
l'autonomie de chaque établissement. En un seul geste législatif,
nos antécédents de 125 ans, notre identité, nos liens
étroits avec la communauté s'en trouvent terminés avec une
administration qui est remise à un nouveau superconseil
d'administration.
Au nom de la décentralisation et d'une meilleure coordination des
services, l'article 43, en réalité, prive notre
établissement d'éléments essentiels qui sont garantis sous
la loi actuelle: l'identité, la philosophie et le mandat basé sur
125 ans de service à notre communauté, ses valeurs et ses
traditions. Tel que proposé par l'article 86, son rôle est
réduit à présenter des recommandations et à
soumettre des opinions à un superconseil sur lequel nous n'aurions
qu'une représentation minime. La nouvelle loi propose d'augmenter les
pouvoirs et de renforcer le comité de bénéficiaires. En
réalité, les comités de bénéficiaires qui
possèdent présentement deux représentants au conseil
d'administration auront moins d'autorité en n'ayant qu'un seul
représentant de tous les comités de bénéficiaires
des établissements dans le territoire d'un centre local de services
communautaires.
Les "Orientations" parlent avec éloquence de la
nécessité de renforcer l'autonomie des personnes, des
réseaux naturels et des communautés: "La personne vit et agit
dans un réseau composé de parents, d'amis et de voisins... Le
renforcement de l'autonomie des personnes signifie que le système de
services doit mettre l'accent sur la personne et privilégier les
interventions qui respectent le plus possible le dynamisme du milieu
naturel."
Nous désirons combattre l'éloignement de notre
établissement de son milieu traditionnel, de notre communauté
dont les frontières excèdent largement le territoire du CLSC, car
cette situation va nous priver rapidement de notre héritage et plus
particulièrement de notre ressource la plus précieuse, soit
l'armée de bénévoles qui, par l'entremise du réseau
des paroisses, sont associés au Centre d'accueil Father Dowd comme
étant une institution distincte, hautement respectée et
aimée de ses concitoyens. Ils vont perdre leur voix au conseil
d'administration; on leur demandera de servir un établissement qui,
à son mieux, sera une filiale d'un superconseil éloigné,
composé de citoyens du CLSC qui ne représentent nullement ce que
nous sommes maintenant ou ce que nous étions.
En résumé, l'article 43 qui vise l'amélioration des
services aurait l'effet contraire dans le cas de notre institution. Les
bénéficiaires et la communauté de leur origine vont perdre
ce qui a toujours ajouté fortement à la qualité de la vie
du Centre d'accueil Father Dowd: respect de leurs traditions, culture et
implication dans "leur institution". (12 heures)
L'article 92, "Nomination du directeur général", confirme
davantage notre affirmation que les établissements locaux conserveront
à peine leur nom. Le superconseil élira le directeur
général et l'imposera à l'établissement qui n'aura
aucun pouvoir sur la sélection de ses administrateurs seniors, selon le
projet de loi. Le directeur général deviendra un directeur de
succursale.
Dans la même ligne de pensée, il est permis de se demander
pourquoi la législation ne poursuit pas avec la suite logique qui
serait
d'intégrer tous les établissements d'un territoire de CLSC
sous une superadministration. Du point de vue administratif, il serait plus
plausible d'avoir une seule administration avec un directeur
général et un certain nombre de directeurs de succursales
plutôt que d'avoir, pour la forme, une préservation des
établissements locaux qui, sous un superconseil, possèdent peu ou
pas de représentation.
The unrealistic organisational structure, as envisaged in article 43,
strengthens to impede the objectives of the law rather than making it more
efficient and effective.
La coordination des services et des programmes avec le CLSC peut
sûrement être améliorée. Il existe déjà
un système efficace entre les tables de concertation et le DSC qui
coordonne le placement de personnes âgées en perte d'autonomie. En
établissant certains mécanismes qui mandateraient les directeurs
généraux d'établissements de santé compris dans le
territoire d'un CLSC de travailler ensemble, d'orienter les opérations,
de partager les services et de promouvoir des projets innovateurs qui
profiteraient à plusieurs groupes de patients... Cela comprend le
regroupement des directeurs et directrices de nursing, les directeurs de
services administratifs, les groupes communautaires, etc. Cela
répondrait aux objectifs de la nouvelle loi tout en conservant
l'autonomie des établissements et de leurs communautés.
The Board of directors is convinced that there are ways to improve the
system other than destroying it. The proposed reorganisation throws the baby
out with the bathwater rather than preserving what is proved invaluable in
service of our community.
The Board of directors of Centre d'accueil Father Dowd unanimously
opposes article 43 based on the above reasons.
The Board of directors strongly feels it has responsibilities not only
to the residents but to the community it represents. We all will lose if,
through the reorganization, our identity and our autonomy are taken away.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Simsons. Je vais
maintenant reconnaître, M. le ministre délégué
à la Santé et aux Services sociaux, M. Sirros.
M. Sirros: Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais en
premier lieu peut-être remercier les représentants de Father Dowd
pour leur présentation. Je constate que vous exprimez, en fait,
certaines inquiétudes qui ont été aussi exprimées
et reprises dans les journaux récemment par l'ensemble des
établissements qui desservent une clientèle anglophone. Je pense
que ça vaut la peine qu'on s'attarde quelques minutes sur ces
inquiétudes, telles que vous les avez présentées, parce
que je pense que vous en résumez assez bien le fond.
Vos préoccupations se retrouvent surtout au niveau de la
possibilité, avec la réorganisation qui est proposée dans
le document d'orientation et dans l'avant-projet de loi, que la
spécificité des établissements de la communauté
anglophone soit perdue en quelque sorte, qu'ils perdent leur autonomie et, par
la suite, qu'ils puissent aussi subir une perte de l'implication des
bénévoles, des membres de la communauté anglophone qui,
depuis nombre d'années, participent activement. Vous donnez l'exemple de
votre institution qui a été fondée il y a 125 ans, donc
bien avant la réforme de 1972-1973. Vous envisagez évidemment,
j'imagine, la possibilité d'être ici dans 125 ans. Nous, on n'y
sera pas, mais...
Face à ça, moi je pense qu'il y a une façon
d'aborder ces auditions qui peut être un esprit de confiance qui devrait
régner, parce qu'il me semble que - et je le dirai peut-être en
anglais également pour le bénéfice de ceux à
l'extérieur de nos murs qui nous écoutent - ça a
été prouvé, je pense bien, que la
spécificité culturelle et linguistique est un facteur qu'on
reconnaît en tant que gouvernement comme étant déterminant
dans la distribution des services dans le réseau de santé et des
services sociaux And that, In that sense, it is an obvious truth that language
and culture are determining factors in the field of health and social services,
that we have proven our committment to this truth with the adoption of Bill
142, and that, in the present reorganization, we must reconcile what we see as
the cultural and linguistic diversities that are there with the need to
rein-vigorate and reorganize a system that many people and all of us find as
having perhaps come to a point where there is this need for
rein-vigoration.
C'est un réseau unique que nous avons. Nous n'avons pas deux
réseaux parallèles. Il y a un besoin donc d'intégrer la
spécificité sociale et culturelle et non pas d'assimiler et
d'homogénéiser tout le monde dans un réseau unique, mais
de garder cette spécificité, et c'est dans cette optique que nous
abordons ces consultations. Nous allons, pendant les longues semaines à
venir, entendre les points de vue de nombreux groupes. Je souhaite et je pense
qu'on exprime tous, ici, le souhait qu'on puisse aborder ces consultations dans
l'esprit d'une réforme d'un système qui appartient a l'ensemble
de la collectivité québécoise, y inclus ces
éléments spécifiques sociaux et culturels.
Nous avons fait, je pense, des progrès énormes par rapport
aux derniers quatre ou cinq ans, par rapport à cette reconnaissance de
la place qu'occupe la spécificité linguistique et culturelle dans
la dispensation des services sociaux et de santé. Je pense que c'est un
acquis sur lequel il faut qu'on bâtisse, mais c'est un acquis qui doit
aussi nous permettre de réor ganiser nos structures en fonction de la
néces-
site d'avoir un réseau de services à une population de
plus en plus efficace, dynamique, capable de répondre aux
véritables besoins, et c'est dans le contexte de réponse à
des besoins que nous devons tenir compte de la spécificité
sociale, culturelle et linguistique.
Je tenais à faire ces quelques précisions dans ce
sens-là parce que je ne voudrais pas que s'installe une
atmosphère de méfiance par rapport à cette
réorganisation. J'aimerais plutôt que la communauté
anglophone, comme tous les autres éléments de la
société québécoise, voie qu'elle a aussi un
intérêt à participer activement à cette
réorganisation parce qu'elle a l'assurance, par les gestes du
passé et non pas par les paroles, que la reconnaissance des institutions
de sa communauté, c'est un acquis par la désignation des
établissements dans la loi 142, entre autres, et par cette
volonté de suivre de près cette réforme et les impacts
qu'elle peut avoir sur les institutions et sur cette spécificité
que vous avez mise si éloquemment de l'avant.
Cela étant dit, il me semble que ce serait intéressant de
discuter un peu de cette réforme dans son ensemble et de vous demander
comment vous voyez la possibilité d'envisager cette
réorganisation de notre système sans retourner, ce qui, je pense,
est impossible. I do not believe it is possible and, even less, I do not
believe that we should return to the situation of two solitudes in the sense of
Québec. I think that we have made enormous progress, especially in
health and social services of the two major linguistic groups working together
in one unified network, et c'est dans ce sens-là que je pense qu'il faut
qu'on poursuive. Alors, c'est dans ce sens-là que j'aimerais vous poser
une question: Est-ce que, d'une part, vous ne constatez pas, vous aussi...
parce que, depuis 1972, c'est la première fois que les
établissements anglophones et francophones travaillent ensemble dans un
réseau unique; avant, c'étaient véritablement les deux
solitudes, en quelque sorte. Est-ce que vous ne constatez pas, vous aussi,
qu'il est nécessaire d'introduire une nouvelle dynamique dans le
système, pour mieux répondre justement aux besoins des
bénéficiaires?
Le Président (M. Joly): M. Eisenring.
M. Eisenring (Albert): Je vais répondre un peu. Oui, on
est d'accord sur ce que ça veut dire. Ce n'est pas une question de
retourner dans le passé. J'ai travaillé dans ce secteur. Avant la
loi 65, on a vu beaucoup de réorganisations et de changements. Chaque
année, il y avait des changements. On a toujours coopéré
avec les services sociaux et les centres d'accueil parce qu'on fait partie du
système; on travaille ensemble dans les conseils régionaux, dans
les DSC, Sainte-Justine, aussi... On a une collaboration assez excellente avec
les établissements, par exemple, dans notre DSC Côte-des-Neiges,
avec l'hôpital St. Mary's, l'hôpital des convalescents, le CLSC
Côte-des-Neiges et nous-mêmes. Nous avons commencé à
nous rencontrer régulièrement, les directeurs
généraux. Nous avons déjà commencé à
avoir des rencontres avec les cadres supérieurs pour voir où on
peut collaborer ou coordonner les services encore mieux. On peut partager les
services parce que nous sommes relativement petits, on peut
bénéficier, nous en sommes très conscients, d'autres
ressources qu'on peut partager, qu'on peut avoir.
Jusqu'à maintenant, ça remet en question de perdre notre
identité. C'est ce qui nous concerne. Qu'on adapte, qu'on trouve des
changements mais qu'on ne perde pas... Pour nous, le plus important, c'est le
bénéficiaire. La coordination, la coopération... Par
exemple, je travaille, je suis directeur général de deux centres
d'accueil. Je travaille pour deux conseils d'administration - c'est par
intérim - depuis . déjà quatre ans. Les deux sont assez
différents, ils sont dans des régions différentes. Ce
n'est pas une question de ne pas collaborer. C'est de trouver des solutions,
comme on dit dans notre mémoire: 'To find solutions without throwing the
baby over with the bath water."
Le fusionnement des conseils, je pense que ce n'est pas
nécessaire pour trouver ces solutions. J'ai trouvé dans notre
secteur - je ne sais pas dans les autres secteurs - hébergement,
où on se rencontre régulièrement dans notre district avec
les services sociaux, les CLSC, les établissements juifs, les
établissements francophones, les établissements anglophones, pour
discuter non pas des différences mais on a des problèmes de
ressources, par exemple. Il n'y a pas de compétition entre les quatre
parce qu'on n'a pas de lits suffisants, mais de trouver des solutions ensemble
tout en respectant les caractères différents du réseau
juif, de notre réseau... Pour moi, il y a des moyens qui sont assez
efficaces pour améliorer le système.
M. Sirros: Vous dites, finalement: Faisons attention de ne pas
jeter le bébé avec l'eau du bain.
M. Eisenring:...
M. Sirros: You do not want to throw the baby over the bath water.
Je voulais vous dire: We want to keep the baby.
ML Eisenring: C'est ça.
M. Sirros: It is obvious, because it is a fundamental truth that
I was saying earlier...
M. Eisenring: C'est ça.
M. Sirros: ...que la langue est nécessairement un
élément important, déterminant même
dans la dispensation des services. Par ce fait, le lien qu'on peut avoir
avec la communauté d'origine - et ça pourrait s'appliquer
à d'autres communautés culturelles aussi - mais la
communauté anglophone ayant une histoire particulière ici au
Québec, il est évident qu'on veuille garder le bébé
et on l'a prouvé, en quelque sorte, en disant: On va désigner des
établissements qui sont historiquement liés à la
communauté anglophone.
M. Eisenring: C'est ça.
M. Sirros: On va leur dire qu'ils ont une responsabilité
pour que leurs services soient disponibles en langue anglaise.
J'aimerais poursuivre dans ce sens. Par exemple, est-ce qu'il y a
d'autres genres de choses qui peuvent être faites? Comme je le disais
tout à l'heure, vous proposez dans votre mémoire, par exemple,
des tables de directeurs généraux comme mécanisme de
coordination. Vous êtes, vous aussi donc, à la recherche d'autres
dynamiques ou d'autres éléments ou d'autres façons pour
qu'on puisse mieux concerter nos efforts, mieux desservir la population.
Dans la proposition que vous faites, en particulier par rapport aux
directeurs généraux, pouvez-vous élaborer un peu?
D'où est-ce qu'ils auraient leur mandat? À qui
répondraient-ils? Comment est-ce que ça assurerait une meilleure
concertation? Et, une dernière question, et je laisserai peut-être
le temps à d'autres de notre formation politique de poser une question,
il y a, dans l'avant-projet de loi, un article qui prévoit des
exceptions...
M. Eisenring: Oui.
M. Sirros: ...quant à la formation des conseils
d'administration...
M. Eisenring: Oui, c'est ça. (12 h 15)
M. Sirros: ...c'était... Comment évaluez-vous
ça? Ce n'est pas assez? C'est trop limité? Et, quelle est votre
réaction par rapport à la proposition qui a été
faite par le Conseil régional, ce matin, qui, lui aussi, reconnaît
ces diversités culturelles et linguistiques, qui dit finalement:
Regardons la situation, en particulier de Montréal, de façon
spécifique et faisons des propositions au gouvernement par la suite
quant à l'organisation de nos conseils d'administration. Comment
réagissez-vous au conseil régional? Décrivez-moi un petit
peu plus vos mécanismes de coordination et que pensez-vous de
l'exception qui est prévue dans l'avant-projet de loi?
M. Eisenring: Je pense que le conseil régional a un
rôle important à jouer, parce que c'est lui qui connaît la
région, les différences, mais sur les gestes, je ne suis pas
sûr, parce que si on parle de gestion, de coordination, on touche
toujours le conseil d'administration. À mon avis, les conseils
d'administration ont peu de pouvoirs aujourd'hui, parce le budget vient de
Québec, les règlements, tout ça vient de Québec, et
on se conforme, parce que c'est nécessaire pour les services, mais les
conseils d'un établissement ont un rôle important dans ce cas: ils
sont les protecteurs des bénéficiaires. Ils les connaissent. Ils
sont familiers avec l'esprit de ça.
Je trouve que ce n'est pas le fusionnement des conseils qui
répond aux besoins ici, mais d'avoir des règlements, des
modalités de faire travailler les établissements ensemble. Je
pense que ça doit être réglé par le gouvernement,
par les conseils régionaux, tout en respectant les autres, que j'ai
mentionnés.
Le Président (M. Joly): Merci, monsieur. Je vais
maintenant reconnaître le député de Nel-ligan, M. Russ
Williams.
M. Williams: Merci, M. le Président. Je voudrais souligner
un peu la même piste de questions que le ministre
délégué a déjà commencé. C'est plus
une question, et ce n'est pas la première fois que nous avons
discuté de ça. Je pense que nous avons eu une bonne discussion
dans les années passées sur les questions de partage et de
responsabilités CSS-CLSC. Nous avons eu le même type de
discussions quand la loi 142 a été adoptée. Comment
sommes-nous capables de mélanger une approche des services et des
institutions qui réponde à une communauté linguistique ou
culturelle et, en même temps, entrer, pas créer un réseau
parallèle, mais bien impliqué dans le système unique qui
existe et basé sur un aspect régional?
I would like to go to the comments made by the Conseil régional
de la santé et des services sociaux du Montréal
métropolitain this morning which talked about the problems they saw
within institutions and, in fact, talked a bit of franchising of services. As
much as the minister "délégué" mentioned that language's
part of services, I think institutions are part of services In which we cannot
"McDonall/e" In lacl the delivery of services.
So, what I would like you to do is again to go back and to talk about
the particular role of the English-speaking Father Dowd institution, how it
gets its clients, what is its base and also make comments about its private
sector involvement and how the effected law would change that. As you respond
it out, I would ask you to reflect on: Are the institutions based on CRSSS 06-A
different des autres? Est-ce qu'il faut que nous ayons un système pour
le Montréal métropolitain, qui est peut-être un peu
différent des autres régions de Montréal?
M. Eisenring: Je pense qu'on a un système partout dans la
région de Montréal. On a un
système d'admission; on a un système pour tous les
règlements. nos bénéficiaires, 60 % ou 70 % de nos
bénéficiaires, leur origine n'est pas dans la région du
dsc sainte-justine, c'est de partout dans la ville. on eh a toujours
été conscients, le conseil régional a accepté
ça.
Nos bénéficiaires ne sont pas de notre région. Ils
sont de partout, même de l'ouest de l'île. C'est peut-être un
peu spécial, parce qu'ils étaient toujours... Le succès de
Father Dowd, je pense, c'était d'être un établissement
public et, en même temps, avec l'aide de la communauté, de
préserver les mêmes traditions. Ce n'est pas seulement une
question de langue, c'est une question de valeurs, de philosophie, la question
qu'on a des Irlandais qui étaient à l'origine. Aujourd'hui, on a
des Irlandais, des Anglais, des allophones. Mais c'est quand même
l'ensemble de ces traits qui sont importants. Et pour avoir seulement un
territoire... Par exemple, si on passe de l'autre côté, les
enfants qui doivent placer quelqu'un dans un centre d'accueil, les
enquêtes ne sont pas sur la politique gouvernementale, sur la gestion,
mais pour trouver quelqu'un, avec difficulté, une place, un
environnement où les membres de la famille peuvent se sentir chez eux
parce qu'il y a l'art, la tradition, la religion. Pour moi, ça, c'est
l'essentiel si on parle des personnes âgées parce qu'on ne peut
pas demander de changer quelqu'un à 80, 90 ans. Si on reconnaît le
nom "centre d'accueil", si c'est un foyer, vraiment, où ils se sentent
chez eux, c'est important de préserver ça pour nos clients. Et
nos clients sont de partout. C'est notre réponse à ça.
M. Williams: If I can. If we continue to respect the principles
of Bill 142 and all the articles reappeared in the "avant-projet de loi", how
would you suggest, if we accept - and I understood that you, in your brief,
accept the concept of regional planning - how do we merge the two, how do we
keep linguistically and culturally response of institutions like Father Dowd,
in a coordinated way into regional planning process, a territorial planning
process. Have you been able to reflect on that, given that that has been the
direction that we have tried to do in the last four years? How do we continue
that with a new planning model for regions?
M. Eisenring: Well, we have, you know, because of the regional
council, we have had long discussions and long negotiations with other regional
council to recognize or establish a number of orders that we can be partners
"des partenaires", you know, and take part in everything and still maintain our
identity.
Pour moi, ce n'est pas un conflit. D'une part, on parle de gestion,
d'administration et, d'autre part, on parle d'un organisme vivant et vibrant.
Pour moi, il faut s'assurer que ce n'est pas un conflit entre les deux. On peut
présumer de l'un en même temps qu'on peut suivre la loi de la
province.
Le Président (M. Joly): Merci, monsieur. Le temps
dévolu à la formation ministérielle est terminé.
Maintenant, je vais reconnaître le responsable en matière de
santé et affaires sociales, le député de Joliette, M.
Chevrette.
M. Chevrette: M. le Président, je reconnais que vous avez
raison d'être inquiets puisque l'avant-projet, tel que
rédigé, dit exactement ce que vous prétendez. Vous allez
disparaître comme conseil d'administration, donc, votre identité,
vous ne l'avez plus. D'ailleurs, je suis un peu surpris des propos du ministre
délégué parce que l'avant-projet... C'est évident
qu'il y a une disparition du conseil d'administration. Donc, s'il y a une
disparition du conseil d'administration qui parle de vos propres
méthodologies, de vos propres fonctionnements, avec vos propres
structures de consultation, de concertation avec le milieu, c'est en danger
avec l'avant-projet. Vous avez absolument raison.
La deuxième chose, c'est que je crois que vous avez une double
raison. À mon point de vue, ce n'est pas parti sur une base
exclusivement linguistique. C'est parti aussi sur une base religieuse et, qui
plus est, répondait à des besoins extraterritoriaux parce que
vous ne pouviez pas - à l'époque, sans doute - regrouper
exclusivement des gens d'un territoire délimité, comme un CLSC ou
comme un territoire de département de santé communautaire
à l'époque, ou je ne sais trop quoi; on appelait ça les
dispensaires, en tout cas, on peut remonter très loin. Effectivement, un
organisme comme le vôtre, par ce type de réforme, est en danger.
J'ai passé par là et je sais ce que c'est que de faire une
réforme quand on frappe ces dimensions-là. Je pense au CSS juif,
par exemple. Quand on a parlé d'intégration des CSS, j'ai,
personnellement, demandé aux fonctionnaires de ne pas procéder au
niveau du CSS juif parce que ça dépassait largement la notion
linguistique, qu'il y avait aussi une question de culture, une question de
fonctionnement très très propre, très interne. Je ne crois
pas que ce soit... En tout cas, si ça peut vous rassurer, je suis de
ceux qui prétendent que, pour des cas spécifiques, toute
règle générale a des exceptions. D'accord? Je ne serais
pas scandalisé de voir quelques exceptions à la règle
générale, moi, personnellement. Je le soutiens parce que je
crois, fondamentalement, que ce sont des valeurs autres.
Il y a des choses différentes, d'autre part. Quand on oeuvre sur
un ensemble de territoires, comme, par exemple... Si on parlait du CSSVM qui
est dans une position, me dlrez-vous, Identique, je dirais non, parce qu'il y
en a qui pourrait s'attacher du fait... Du fait que je me prononce ainsi pour
une institution comme la vôtre, vous pourriez dire: Vous allez avoir
la
même logique, mon Chevrette, par rapport à notre CSSVM.
C'est faux. Là, c'est différent. Quand il n'y a que l'aspect
linguistique, je pense que tu peux véritablement, au niveau des
intégrations de personnels, y aller différemment et sur des
territoires..., s'organiser sur le découpage des territoires, parce
qu'il y a des territoires... Si on parle de CLSC, il y a des territoires
où déjà on dispense des soins, des services en plusieurs
langues. Donc, ce n'est pas seulement une question linguistique.
Dans votre cas, je reconnais que vos inquiétudes sont bel et bien
fondées, que vous avez raison d'être inquiets, mais que de la
manière dont le ministre délégué à la
Santé a parlé, ça devrait être de nature à
vous rassurer et, surtout, de la manière dont l'Opposition vient de
parler, vous devriez retourner chez vous en paix.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Chevrette. Je vais
maintenant reconnaître le député de Westmount, M.
Holden.
M. Holden: Gentlemen, I would be very very nervous if I were you
because the junior Minister told us that we should really judge the Government
by its past actions. Of course, he failed to mention the Bill 178, which is one
of the trampling of fundamental rights in this Province and which is one of the
best examples we have of the Government's past actions. The gentlemen from the
Government party, who did not question you, who lectured you, keep coming back
to Bill 142. Well, I would not use Bill 142 as a great justification for having
faith in this Government, because we waited for two years for access plans
under Bill 142 and they only finally came in, in Montreal, under the pressure
of the election campaign. Now, we are still waiting for nominations under Bill
142 and the junior Minister is telling us that he is going to have them done in
two weeks. I wish him well, but if the past is any guarantee of the future, we
are going to be waiting for sometime for those.
The Member for Nelligan says: "Well, they repeat in the "avant-projet"
the terms of Bill 142" and it is true. They make these grand declarations in
section 13: "Every English speaking person has a right to receive health
services in the English language." And it sounds wonderful, except that they
refer you to section 241. And section 241 says: 'They are going to have more
access plans." And the programme of access must be approved by the Government.
So, it comes back to a question of whether you trust this Government or you do
not. I do not. And, as I said in my opening statement, this draft legislation
attempts, according to its own definition, to meet the needs of the
population.
Well, what is really going to happen under these regional boards, as far
as minority groups are concerned, is that they continue to insist upon this
territorial model. And it is another indication, really, of the lack of concern
that the Government has for the needs and the importance of the English
speaking and multicultural presence in Québec. Because, what is really
going to happen is, ultimately, the English and multicultural institutions are
going to be absorbed; they are going to disappear. And I do not care how the
twisting and turning of the Government tries to pretend that they are not. If
this regional territorial board concept is adopted, there will be one token
representative on a board of ten or twelve or fifteen and the needs of the
community will be totally ignored. And that is why I would like to ask you,
gentlemen, if, in your submission, it would be best to scrap the idea of the
territorial boards and go back to the drawing board.
Le Président (M. Joly): M. Simsons.
M. Simsons: Mr. Holden, the fact that whether we trust or do not
trust the present government, I do not think is relevant at this point.
M. Holden: It is only relevant for me.
M. Simsons: I figure it. No, it is the Government in power and we
must respect their views. In our brief, we were very strongly against
superboards because it will deteriorate our input into our institution. As the
chairman of the board, I have two interests: that is the residents, primarily,
and our tradition. We do things - you know the Coliseum and the Irish Mafia -
we do things our own way. We would like to protect that. If we became a member
of a superboard, we would have nothing to say about what the input into our
home is, what our residents would be. And if superboards become a fact, then I
think we would see the loss of people who work for the health and social
service network, who form a very strong and very, very good part of our board,
we would lose all that expertise and professionalism. These are people who know
what they are doing. They know the network. They know how to relate to our
clientele. And without them, it would be very difficult and we would never get
that sort of thing from a superboard.
M. Holden: Mr. Castonguay was telling us, at the opening of the
hearings, about his experience with foundations and he was saying how important
they were and how he is in favour of continuing the institution of a foundation
and keeping it the particular véhicule or one of the many
véhicules for adding to the financing of all the institutions. Could you
give your views on the question of the foundation?
And how in this drafted bill it seems that over a period of time, all
foundations will be integrated into the government funds and there will be no
more funding from foundations?
M. Simsons: Well, I think I can understand any Finance minister
wanting to get his hands on foundations. Our foundation, which is not ours, it
is just called the Father Dowd Foundation, was formed about eight years ago and
it contributes greatly to the needs of our residents. And if it did not exist,
there are certain services that we would not be able to offer because they do
not come under our budget. And so we rely on them for that. Now, the Father
Dowd Foundation is not strictly a foundation created to care for the Father
Dowd but it is to care for the elderly of the community despite their cultural
backgrounds or anything. If there is a problem, a need for help to the elderly,
they can apply to our foundation. But they do help us to a large extent.
M. Holder): Do you think, if your donor is new, that, ultimately,
the Government would have control over those funds, that they would be as
generous as they are now?
M. Simsons: No, they would not. M. Holden: Thank you, very
much.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Holden. Je pense que le
député de Joliette avait quelque chose à ajouter.
M. Chevrette: Je vais laisser faire. On va remercier.
Le Président (M. Joly): Bon, parfait. En conclusion,
M...
M. Sirros: De notre part aussi, je tiens à vous remercier.
Merci pour votre présentation. Je pense que c'était très
sain qu'on soulève ce genre de questionnement ici. C'est pour ça
qu'on a des commissions parlementaires. J'apprécie votre
objectivité, le fait que vous veniez mettre sur la place publique ici
ces craintes et je vous assure de l'attention particulière qu'on
portera, comme gouvernement, a toutes vos inquiétudes. Je pense que
c'est dans cet esprit de confiance qu'on devrait aborder le reste des
audiences. Merci beaucoup.
M. Chevrette: On vous remercie, messieurs.
Le Président (M. Joly): merci, m. simsons, merci, m.
eisenring. nous allons maintenant suspendre nos travaux pour les reprendre
à 15 heures. merci.
(Suspension de la séance à 12 h 36)
(Reprise à 15 h 10)
Le Président (M. Joly): Nous allons reprendre nos travaux.
J'inviterais donc le Regroupement des organismes de promotion du
Montréal métropolitain à s'avancer et à prendre
place. On a déjà quelques minutes de retard. On va essayer de
coopérer au maximum, tout le monde ensemble. Alors, c'est sûr
qu'on vous laisse le temps de livrer votre mémoire et son contenu, et
tant le parti ministériel que le parti de l'Opposition auront à
leur loisir le choix de vous poser des questions.
Alors, on vous laisse aller, mais, avant de débuter,
j'apprécierais si vous pouviez vous présenter de façon
à ce qu'on puisse enregistrer ça dans les galées.
Merci.
Regroupement des organismes de promotion du
Montréal métropolitain et Comité
régional des
associations en déficience
Intellectuelle
M. Berger (Pierre): Pierre Berger, Comité régional
des associations en déficience intellectuelle.
M. Lévesque (Pierre-Yves): Pierre-Yves Lévesque, du
Regroupement des organismes de promotion du Montréal
métropolitain.
Le Président (M. Joly): Merci.
M. Hébert (Alain): Alain Hébert, travaillant au
Regroupement des organismes de promotion du Montréal
métropolitain.
Le Président (M. Joly): Merci, monsieur. Alors, allez.
M. Hébert: Nous allons débuter en faisant
l'identification et la présentation de qui nous sommes et, pour ce
faire, pour le Regroupement des organismes de promotion du Montréal
métropolitain, M. Pierre-Yves Lévesque va faire la
présentation et M. Pierre Berger fera la présentation concernant
le Comité régional des associations en déficience
intellectuelle. Je voudrais préciser immédiatement que le
mémoire a été fait conjointement, le Comité
régional des associations et le Regroupement. Je laisse la parole
à M. Pierre-Yves Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves): Bonjour, tout le monde. Merci
de nous avoir invités à cette commission. Avant d'aller plus
loin, si vous ne comprenez pas, vous me faites répéter. Vous
pouvez me faire répéter si vous n'avez pas compris. Avez-vous
compris ce que j'ai dit?
Une voix: Oui.
M. Lévesque (Pierre-Yves): Qu'est-ce que
j'ai dit?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lévesque (Pierre-Yves): Qu'est-ce que j'ai dit?
Une voix: As-tu compris, toi?
Le Président (M. Joly): On va demander les galées
immédiatement.
M. Trudel: Oui, oui, ce n'est pas pire. On pourrait le faire
répéter, en plus.
Une voix: Oui.
M. Trudel: On pourrait vous faire répéter si on ne
vous comprend pas?
M. Lévesque (Pierre-Yves): Oh! Il y en a qui ont
compris.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lévesque (Pierre-Yves): Pour la sécurité,
si vous ne comprenez pas, vous avez rien qu'à...
Une voix: Répétez.
M. Lévesque (Pierre-Yves): ...téléphoner,
oui ou non. Ce matin, je lis des remarques d'un des deux "dépôts"
qui regroupent seize organismes de défense des personnes
handicapées et ont toujours favorisé la consultation entre les
organismes pour pouvoir faire des représentations au niveau des
gouvernements municipal, provincial et fédéral. Donc, on
travaille ensemble, tous les organismes, à préparer des dossiers
soit sur les services à l'individu, sur l'aspect de
l'accessibilité et d'autres dossiers qui concernent la personne
handicapée dans la vie quotidienne.
Donc, au début, on a travaillé à un mémoire
avec le regroupement des associations de personnes handicapées
intellectuelles et on vous présente nos commentaires et des
recommandations concernant la Loi sur la santé et les services sociaux.
J'espère que vous avez compris le plus possible et, si la
secrétaire a des problèmes, elle a seulement à me
téléphoner; ça va me faire plaisir de résumer au
téléphone, si elle n'a pas compris.
Merci beaucoup. Je passe la parole à mes collègues.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Lévesque.
Une voix: C'est un bel effort.
Le Président (M. Joly): M. Berger.
M. Berger: Pour faire suite à ce que Pierre-Yves disait,
le Comité régional des associations en déficience
intellectuelle s'est rallié au Regroupement des organismes de promotion
qui regroupe des associations en déficience physique pour
présenter ce mémoire. Le Comité régional, c'est une
association, une table de concertation régionale des organismes en
déficience intellectuelle de la région de Montréal.
Ça fait une dizaine d'années qu'il se fait de la concertation et
l'organisme est incorporé depuis à peu près un an. On a
donc fait une démarche conjointe avec le ROPMM.
Notre mémoire se présente en quatre parties. On va
commencer par des remarques spécifiques sur la place des personnes
handicapées physiques par rapport à l'avant-projet de loi - quand
je parle de l'avant-projet de loi, ce sont aussi les orientations qui l'ont
précédé - la place des personnes handicapées au
niveau de la composition des comités: le comité consultatif
à la direction générale, le comité des
bénéficiaires, l'organisme communautaire mandaté pour
aider les usagers à porter des plaintes. La troisième partie va
porter sur les organismes communautaires: reconnaissance et financement. Et,
enfin, une quatrième partie sur les modalités de la
représentation dans les établissements et les institutions
régionales.
Je vais passer la parole à Alain Hébert.
M. Hébert: Je voudrais vérifier auparavant si les
gens ont bien en main le mémoire révisé parce que nous
avons envoyé deux documents, dont le deuxième qui a
été envoyé. Donc, tout le monde a le mémoire
révisé. D'accord.
Donc, on va immédiatement aborder le premier point qui concernait
les remarques spécifiques sur la place des personnes handicapées
physiques par rapport à l'avant-projet de loi. On note une absence
d'orientation spécifique et précise concernant les personnes
handicapées en ce qui a trait au plan de services individualisé.
Ce point nous apparaît non négligeable dans la mesure où
les orientations présentées par Mme Lavoie-Roux
préconisaient l'obligation de plans de services pour les personnes ayant
une déficience intellectuelle, celles qui éprouvent des
problèmes mentaux et les personnes âgées en perte
d'autonomie. Rien n'est prévu pour les personnes handicapées
physiques.
Aussi, cela est non négligeable dans la mesure où le
ministère de la Santé et des Services sociaux n'a pas encore
adopté de nouvelles politiques concernant la problématique des
services de maintien à domicile. Cet aspect vient poser des
interrogations sur l'avenir des services auprès de la personne
handicapée physique, compte tenu que l'on assiste actuellement au
transfert de programmes de l'office vers le ministère de la Santé
et des Services sociaux, entre autres concernant le programme de maintien
à domicile.
Je pourrais peut-être passer immédiatement au
deuxième point qui est la place des personnes
handicapées au niveau de la composition des comités.
Concernant le comité consultatif à la direction
générale, à l'article de loi 114, il faudrait
prévoir, au niveau de la composition de celui-ci, la présence
d'une représentation des bénéficiaires. En effet, pour que
ces derniers puissent participer pleinement aux orientations et
priorités de l'établissement, cet ajout s'impose. C'est là
un moyen pour eux de faire ressortir leurs préoccupations, besoins,
réalités et, ainsi, d'exprimer leurs recommandations tel que
spécifié, comme je le disais tantôt, par l'article 114.
C'est une question, en fait, d'éviter l'exclusion des
bénéficiaires et d'un respect au niveau de l'autonomie de
ceux-ci.
Le comité de bénéficiaires, qui est le point b.
Pour ce qui est des comités de bénéficiaires, on doit
s'arrêter sur la nature de leur composition, telle que stipulée
à l'article 115. Il faut s'assurer qu'il y ait une bonne
répartition dans la composition de ces comités,
c'est-à-dire éviter que ne se reproduise le modèle
paternaliste et bien définir le rôle et la place occupée
par les représentants bénévoles sur ces comités,
toujours la question de l'autonomie des bénéficiaires.
Également, nous demandons que la représentation sur le
comité de bénéficiaires soit étendue aux services
internes et externes des établissements. Par contre, même si le
pouvoir du comité de bénéficiaires est accru à
l'échelle de son établissement, il n'en demeure pas moins que le
pouvoir réel de celui-ci est affaibli en regard de la mise en place de
la formule des conseils d'administration de territoire de CLSC, telle que
proposée par l'avant-projet de loi.
Nous considérons qu'il faut également renforcer le
comité de bénéficiaires en augmentant les ressources
financières disponibles afin de permettre un fonctionnement
adéquat de celui-ci. Également, il faudrait garantir qu'il y ait
dans toutes les institutions privées de soins un comité actif
pour assurer le respect des droits des bénéficiaires. Donc, une
extension.
Il faut noter qu'il serait bon également d'ajouter à
l'article 119, l'alinéa 1° la notion de droit: "défendre les
droits et intérêts des bénéficiaires". Cela
permettrait d'éviter toute confusion qui pourrait se glisser entre les
deux notions et viendrait, selon nous, compléter l'alinéa 1°.
Donc, rajouter la notion de droit.
L'organisme communautaire qui a été mandaté pour
aider les usagers à porter plainte. Finalement, l'article 238,
alinéa 3, qui porte sur la mise en place d'un organisme communautaire
qui offrirait un service d'aide et d'accompagnement pour les personnes qui
désirent porter plainte, n'est pas exempt de lacunes, selon nous.
Entre autres, nous nous interrogeons sur la faisabilité de
celui-ci, compte tenu de la grande diversité des types de population
touchée, ainsi que des services visés. Également, on voit
mal comment les sommes d'argent seront allouées et comment va
s'effectuer le choix de l'organisme. Par contre, il est louable que des
organismes communautaires aient à jouer un tel rôle et nous
croyons que ce n'est pas à la régie régionale de les
désigner.
Concernant le troisième point, les organismes communautaires:
l'aspect reconnaissance et financement. Plusieurs articles de l'avant-projet de
loi ont trait aux organismes communautaires. Nous constatons à ce
chapitre la reconnaissance des organismes communautaires comme partenaires.
Cette reconnaissance semble visible aux articles 27, 28 et 29 où l'on
indique que le CLSC, le centre hospitalier, le centre des services
régionaux dirigent les personnes vers les organismes communautaires.
Également, à l'article 152, il est question de la
possibilité de conclure une entente avec des organismes.
Également, on spécifie que la régie régionale peut
requérir des organismes communautaires de santé et de services
sociaux de sa région les renseignements nécessaires sur les
clientèles, les services demandés et dispensés et les
ressources utilisées, à l'article 243.
Par ailleurs, cette reconnaissance nous apparaît comme
dépendante des fonctions et pouvoirs de la régie
régionale. Cette vulnérabilité de l'autonomie des
organismes communautaires se trouve exprimée dans la flexibilité
qu'accordent à la régie régionale les articles 244, 251 et
317. En résumé, la question de la coordination de l'action des
établissements et des organismes communautaires par rapport à la
complémentarité et le dédoublement; également, la
question du financement par rapport à la représentation des
besoins d'octrois ou de subventions auprès du ministère et autres
éléments.
La retranscription de la reconnaissance des organismes communautaires
comme partenaires, telle qu'on la retrouve dans les articles de l'avant-projet
de loi, ne correspond pas aux attentes des organismes communautaires.
Nous ne voulons pas d'un financement établi par les régies
régionales, qui nous obligerait à être de force des
partenaires avec le réseau. Nous voulons que les organismes
communautaires continuent d'être financés directement par
Québec et ce, de façon globale, selon les modalités du
service de soutien aux organismes communautaires, tel qu'actuellement. Nous ne
voulons pas de programmes-cadres pour les organismes communautaires, qui ont
pour effet de contraindre les groupes à travailler sur des
problématiques bien précises et de découper les personnes
en problèmes.
Nous ne voulons pas des régies régionales pour surveiller
et comptabiliser notre travail. Nous voulons que l'évaluation de notre
travail continue de se faire de manière qualitative par nos membres et
par le ministère de la Santé et des Services sociaux. Nous
demandons que les regroupements provinciaux et régionaux continuent
d'être financés et ce, directement par le
ministère.
Pour élaborer un peu plus sur ces points, nous voudrions
signaler, au départ, une lacune importante: il y a une
sous-représentation des organismes communautaires au sein des conseils
d'administration des régies régionales et également au
chapitre du collège électoral.
Pour l'instant, arrêtons-nous à la
sous-représentation identifiée au sein des CA des régies
régionales. Cette sous-représentation ne permettra pas d'assurer
une représentation suffisante lorsque sera venu le temps de voir, par
exemple, à la répartition des octrois et des subventions,
référant aux articles 251 et 317 mentionnés auparavant.
Cet aspect est important, d'autant plus que chaque régie
régionale doit fournir les informations pour fins d'analyse au
ministère qui, à son tour, détermine le montant des
dépenses de fonctionnement à allouer aux régies
régionales sous forme d'enveloppe globale par programme, ce qui
correspond à l'article 317. En fait, il n'y a, au chapitre du
financement alloué aux organismes communautaires, aucune garantie
assurant qu'il y ait un budget suffisant d'octroyé.
Nous ne favorisons pas un financement qui serait limité aux
services rendus par les organismes communautaires. Je rappelle que les
organismes communautaires, ça touche également les organismes
pour les personnes handicapées. Je crois que, de toute façon,
c'est une évidence. Sinon, on risquerait d'assister à la mise en
place d'un type nouveau de sous-traitance à la pièce. Nous
considérons qu'il est capital de fournir un budget global,
protégé et récurrent, qui respecte, d'une part,
l'autonomie de fonctionnement des organismes communautaires dans leurs choix
d'actions et de pratiques et, d'autre part, qui réponde à la
volonté démocratique des citoyens et citoyennes de pouvoir
intervenir adéquatement sur les réalités quotidiennes de
leur vie, soit l'expression d'une logique des besoins, d'une démocratie
qu'on pourrait appeler du quotidien.
C'est donc sur la base d'une subvention globale et non sur des
priorités de programmes-cadres que doit être assuré le
financement des organismes communautaires, un financement sur la base de
subventions directement allouées par le ministère de la
Santé et des Services sociaux sans qu'il y ait une distinction entre les
types de services offerts.
Concernant les articles de l'avant-projet de loi qui se trouvent au
titre III "Les organismes communautaires", il faudrait abroger l'article 231,
tel que formulé présentement. Nous considérons qu'il est
préférable de rédiger un article qui se lirait comme suit:
les regroupements provinciaux et régionaux doivent être
financés directement par le ministère de la Santé et des
Services sociaux.
En effet, nous considérons que les regroupements d'organismes
communautaires à l'échelle régionale et provinciale jouent
un rôle important dans la représentation des intérêts
de leurs organismes membres, donc également des individus membres de ces
organismes et ce, entre autres, auprès des différentes instances
décisionnelles. De plus, ils favorisent la concertation, les liens de
communication, l'échange entre les membres et voient à
répondre à des besoins immédiats en termes d'organisation,
de fonctionnement et de promotion.
Je vais laisser la parole à Pierre, pour la suite.
Le Président (M. Joly): II ne vous reste que quelques
minutes, s'il vous plaît, pour conclure.
M. Berger: Oui. Je vais poursuivre et je vais essayer
d'être rapide. Donc, l'analyse qu'on a faite de l'avant-projet de loi, au
chapitre des conseils d'administration des établissements et même,
à la limite, du conseil d'administration des régies
régionales, nous amène à penser que le projet de loi a
été construit dans une rationalité carrément
administrative, qui omet le caractère de rationalité de besoins.
Donc, au chapitre des conseils d'administration des établissements et de
la régie régionale, la réforme que propose le
ministère de la Santé et des Services sociaux semble
répondre essentiellement à deux critères: une
réduction du nombre de conseils d'administration et une
rationalité proprement administrative de gestion.
Le ministère, dans sa réforme, propose que le nombre de
conseils d'administration soit réduit de manière qu'un même
conseil d'administration gère un ensemble d'établissements sur un
territoire donné. L'existence de conseils d'administration qui
gèrent des établissements de clientèles variées
comporte des inconvénients. Dans une démarche de simple gestion
financière, dans un cadre de rationalité purement administrative,
à l'abri de toute rationalité de besoins, un conseil
d'administration de plusieurs établissements peut, d'un point de vue de
gestion budgétaire, faire un travail d'une qualité raisonnable.
Mais le rôle d'un conseil d'administration ne peut se réduire
à une simple gestion budgé taire, qu'on se le tienne pour dit Une
rationalité de besoins vient toujours s'interposer dans la dynamique
administrative.
Dans ce sens, les conseils d'administration auront, qu'on le veuille ou
non, un rôle important à jouer au niveau des orientations et des
priorités des établissements. Dans un cadre où la
rationalité administrative devra répondre à une
variété de besoins, les conseils d'administration de groupements
d'établissements, donc les conseils d'administration unifiés,
auront à faire des choix budgétaires qui provoqueront
vraisemblablement des inégalités dans la réponse aux
besoins de certaines clientèles, comparativement à d'autres.
À ce titre, si l'expression des besoins se limite au cadre
décisionnel des conseils d'administration, il est à craindre que
les
groupes les plus minoritaires et isolés, comme les personnes
handicapées que nous représentons ici, voient leurs
intérêts dissous dans une mer de besoins. L'article 182 de
l'avant-projet de loi, tel qu'il est formulé, permet aux conseils
d'administration unifiés d'effectuer, effectivement, des transferts
budgétaires d'un établissement à un autre, à partir
des enveloppes budgétaires qu'ils ont à gérer. Comme vous
pourrez le lire, en tout cas, la régie régionale donne au conseil
d'administration une enveloppe globale. Donc, le conseil d'administration peut
faire des transferts budgétaires d'un établissement à un
autre.
Dans le contexte que propose l'avant-projet de loi, ce sont les
clientèles les plus isolées et minoritaires qui risquent de faire
les frais des transferts budgétaires interétabllssements au
profit des clientèles nombreuses dont les besoins sont plus connus et
communs. Nous craignons, à ce titre, que les besoins des personnes
handicapées soient marginalisés et oubliés; que, par
exemple, les budgets des centres d'accueil et de réadaptation se
trouvent amputés au profit de ceux d'autres établissements qui
rejoignent des clientèles plus nombreuses et plus communes. En ce sens,
nous pensons que la formule doit être repensée de façon
à donner une place importante à une rationalité de besoins
et à garantir une réponse équitable à toute
clientèle en besoin de services.
Pour s'orienter vis-à-vis d'une rationalité de besoins,
les éléments qu'on recommande, qui sont à retenir de notre
point de vue: premièrement, il faut chercher à répondre
aux besoins et non privilégier une organisation administrative. Dans ce
sens, pour nous, il est préférable de penser à faire des
regroupements, si on veut faire des regroupements de conseils d'administration,
en fonction non pas d'un découpage territorial, mais d'un
découpage par types d'établissements. Il faut
deuxièmement, préserver une représentation des usagers au
sein des conseils d'administration et, particulièrement, de la
régie régionale et du collège électoral. Cependant,
cette formule, telle qu'elle se présente actuellement et depuis de
nombreuses années dans la présente loi, en ce qui a trait aux
conseils d'administration des établissements - en tout cas,
l'expérience nous l'a démontré - ne peut garantir
infailliblement l'émergence d'une rationalité de besoins qui
rencontre les aspirations des usagers.
Pour que la formule soit efficiente et efficace, il faut que la
présence des usagers dans les lieux décisionnels soit
suffisamment importante, autant en quantité qu'en qualité. Les
personnes représentant les usagers au sein des conseils d'administration
nous ont maintes fois souligné leur isolement et leur sentiment
d'impuissance. Cet isolement, et ce sentiment d'impuissance s'expliquent dans
de nombreux cas, par une méconnaissance du vocabulaire et des pratiques
des professionnels du réseau.
De notre point de vue, il est important donc que les usagers soient
davantage présents aux conseils d'administration et qu'ils soient
également mieux préparés. De plus, nous pensons que la
qualité de la représentation serait augmentée et
assurée si les représentants étaient élus et
redevables, ce qui n'a jamais été le cas - je dis bien "et
redevables" - devant les usagers et les organismes communautaires qui les
représentent. (15 h 30)
Ainsi, la représentation des usagers au sein des conseils
d'administration, particulièrement auprès de la régie
régionale et du collège électoral, implique qu'il y ait,
dans leur composition, une forte représentation numérique des
organismes communautaires. Également, il faut préciser que les
membres issus de ces organismes représentent chacun des grands domaines
de besoins: les personnes âgées, les femmes, les jeunes et les
personnes handicapées. Ceci permettrait de représenter tous les
intérêts au sein des établissements-clés
plutôt que des intérêts trop spécifiques à une
clientèle.
Enfin, il est important que les travailleurs des organismes
communautaires puissent siéger aux conseils d'administration au
même titre que des bénévoles. Nous estimons que les
travailleurs des organismes communautaires, en raison de leur connaissance des
besoins et de leur familiarité avec les enjeux et le langage du
réseau, devraient également pouvoir siéger aux conseils
d'administration des établissements.
On sait que, dans les groupes communautaires, les travailleurs
détiennent aussi une expertise. Ils disposent d'un minimum de temps que
la plupart des bénévoles n'ont pas pour siéger aux
conseils d'administration. Enfin, dans la majeure partie des cas, les
salariés des organismes communautaires font une large part de
bénévolat et sont souvent - et ça, c'est davantage vrai
pour les organismes de personnes handicapées - issus de ces
milieux-là.
En résumé, nous estimons que les articles 49 à 66
de l'avant-projet de loi devraient être reformulés de
manière à faire intervenir une rationalité de besoins.
Dans ce sens, nous pensons qu'ils devraient prévoir une augmentation,
par rapport à la présente loi, du nombre de représentants
des usagers aux conseils d'administration des établissements et,
ultérieurement, du collège électoral et de la régie
régionale, et permettre, contrairement à l'article 57.2 de
l'avant-projet de loi, la présence des travailleurs des organismes
communautaires aux conseils d'administration des établissements et,
ultérieurement, du collège électoral et de la régie
régionale.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Berger. Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Quelques questions. La première: à la
page 7 de votre mémoire, vous évoquez une lacune - vous
n'êtes pas les premiers à le faire - entre la
représentation au collège électoral et celle au conseil
d'administration et vous dites que c'est une lacune importante. Vous avez
totalement raison. Il n'y a pas d'adéquation du tout entre les 25 %
accordés au collège électoral et les 12,5 % ou à
peu près, les 12 % ou 13 % accordés au conseil d'administration.
Et ça, ce sont des choses qui sont pardonnables dans le contexte actuel,
mais qui ne le seraient pas dans un contexte où il y aurait des
changements. Il doit y avoir une adéquation importante. Lorsque vous
formez un collège électoral, c'est pour qu'il soit le plus
représentatif possible et, si vous donnez un pourcentage au
collège électoral, il doit, par le fait même, y avoir le
même pourcentage au niveau du conseil d'administration. Ça me
semble logique. Je pense que ce sont des choses qui nous ont
échappé lorsqu'on a fait la composition. Donc, je ne dis pas
qu'il sera à 25 % partout, mais ce que je dis, c'est que ça doit
au moins être de même niveau pour l'un comme pour l'autre et vous
aviez raison de le soulever.
J'irai à la page 8 et, là, ça me heurte un peu,
à votre premier paragraphe. Je voudrais qu'on le relise ensemble. "C'est
donc sur la base d'une subvention globale et non sur des priorités de
programmes-cadres que doit être assuré le financement des
organismes communautaires. Un financement sur la base de subventions
directement allouées par le ministère de la Santé et des
Services sociaux sans qu'il y ait de distinction entre les types de services
offerts." C'est une problématique qui n'est pas facile et je pense que
c'est de deux ordres. Ce que nous avions souhaité, c'est
qu'effectivement, en décentralisant, on donne à la régie
régionale les pouvoirs de faire l'analyse et la sélection de ceux
qui devraient bénéficier de subventions, pensant que le
régional connaissait davantage les besoins de sa région et
était capable d'arbitrer de la meilleure manière ce qui doit se
passer dans sa région. Évidemment on entend une tout autre
chanson de la part des organismes communautaires qui ont une résistance
que je comprends. J'ai dit tantôt: Ils ne veulent pas se faire avaler par
la pieuvre, un des tentacules de la pieuvre.
Hier, c'est-à-dire la première journée, mercredi,
il y a des groupes communautaires qui nous ont donné des exemples d'un
programme qui avait été mis sur pied par un organisme
communautaire. Une institution l'a trouvé bien intéressant et
s'est portée acquéreur littéralement de l'initiative du
groupe communautaire. Cependant, il doit quand même y avoir un certain
nombre de limites. Si on se dit aujourd'hui: Nos priorités, c'est le
vieillissement de la population et notre jeunesse, est-ce que vous ne croyez
pas, non pas de manière exclusive, que la priorité devrait
être donnée aux organismes qui oeuvrent dans ces secteurs? Est-ce
qu'on ne doit pas les "prioriser" effectivement? Bien sûr qu'il y a des
formules à trouver, mais est-ce qu'on ne doit pas "prioriser" l'action
des groupes communautaires dans les priorités gouvernementales au moment
où nous nous parlons et, par le fait même, dans les
priorités au niveau régional aussi?
M. Berger: Bon, je vais réagir d'une façon assez
générale pour peut-être essayer d'arriver plus à
votre question qui est un peu plus spécifique. Le paragraphe a
été surtout écrit dans le cadre d'une réaction
à un partenariat qui serait Imposé dans le sens qu'effectivement,
si la régie régionale finançait directement les organismes
communautaires sur le plan régional, ce qu'on craint, c'est que la
régie régionale oblige un certain partenariat. Je pense que le
partenariat, pour qu'il soit louable, il faut que ça se négocie.
Si le financement venait d'ailleurs que de la régie régionale,
l'organisme communautaire qui, parce qu'il est communautaire, doit se
définir de par lui-même - je ne crois pas que ce soit à la
régie régionale de définir ses rôles et ses
orientations - je pense, serait plus sur un pied d'égalité
à ce moment-là pour pouvoir négocier ce qu'il entend faire
dans ce partenariat. Donc, le partenariat reste un jeu de négociation,
de notre point de vue. On ne veut pas que les organismes communautaires
deviennent une extension du réseau sans que la communauté se
définisse par elle-même au niveau de ses orientations. Dans ce
sens-là, le paragraphe vise essentiellement à favoriser un
financement via Québec plutôt que via la régie
régionale pour permettre finalement une négociation du
partenariat.
Maintenant, concernant les questions de priorités, je ne pense
pas que l'articulation qu'il y a là empêche le ministère
d'avoir des priorités sauf que ce qui est essentiel pour les organismes
communautaires... Un organisme communautaire n'apparaît pas parce qu'il y
a une absence de besoins; il apparaît, au contraire, parce qu'il y a une
nécessité de répondre à des besoins. Puis, ce dont
on veut s'assurer, c'est qu'il y ait un financement pour les initiatives qui
viennent de la communauté et qui visent à combler les lacunes que
le réseau, que le système a oubliées. Dans ce
sens-là, on veut être assurés que, même s'il y a des
priorités, l'on puisse y répondre. Le problème des
programmes-cadres, c'est de cadrer, justement, l'initiative des organismes
communautaires dans ce que le réseau estime être les vrais
besoins. Mais si un organisme communautaire apparaît et veut
répondre d'une certaine façon à des besoins, c'est parce
que l'organisme communautaire estime qu'il y a un besoin qui n'est pas
comblé là. Quand je dis les organismes communautaires, c'est la
communauté elle-même qui estime qu'il y a un besoin qui n'est pas
comblé; donc, elle se donne des outils pour y
répondre.
M. Hébert: Peut-être juste pour ajouter, dans le
sens, au niveau du... Vous avez parlé de mesures et de perception
régionale. À ce moment-là, aucune garantie ne peut
être donnée dans l'élaboration des programmes-cadres qui
correspondraient à l'expression des organismes communautaires par
rapport à l'expertise du vécu quotidien qui est mesurée,
on pourrait dire à la base, en tant que telle. Donc, au niveau du
respect de l'expression ou de ce qui définirait la priorité
à ce moment-là, c'est là une des bases du problème,
à savoir où vont se retrouver les priorités ou
l'expression des priorités, entre autres, des personnes
handicapées ou des autres organismes par rapport aux définitions
des programmes-cadres en tant que tels? Vont-elles être simplement
annexées selon des priorités préétablies et avec un
financement indépendant? À ce moment-là, il y aurait comme
un problème. Au niveau de la perception de la mesure régionale il
n'y a pas nécessairement de garantie de la représentation des
priorités émanant de la population composant les organismes et
des représentants en tant que tels.
M. Côté (Charlesbourg): Je me permettrais
peut-être... Je ne veux pas m'embourber dans le libellé de
l'avant-projet de loi, mais j'ai l'article 233 ici - je peux peut-être
vous le lire, je ne suis pas sûr que vous l'ayez entre les mains
là - qui me paraît répondre, à tout le moins en
partie, à vos appréhensions. Ça se lit comme suit: "Le
ministre peut, conformément aux règles budgétaires
applicables, subventionner les organismes communautaires relativement à
des activités répondant à des besoins nouveaux,
procédant d'approches nouvelles ou visant des groupes particuliers de
personnes non prévus à un programme d'une régie
régionale. " Ça me semblait couvrir un peu certaines
inquiétudes que vous avez et ça, c'est parfaitement fidèle
et en conformité avec ce qu'on retrouve à la page 83 du document,
comme expression de besoins. C'est un petit peu ce que voulait le
ministère - étant, évidemment, conscient que les
programmes-cadres, en règle générale, ne répondent
pas à tout et ne peuvent pas tout prévoir - se donner une balise,
à tout le moins, pour répondre à ça. Vous ne le
trouvez pas assez confortable encore comme article?
M. Hébert: Si j'ai bien compris, quand vous énoncez
cet article, ce qu'il précise, c'est que ce qui est exprimé
présentement comme besoins et priorités par les organismes
communautaires serait déjà inclus automatiquement dans les
programmes-cadres et que ce qui pourrait apparaître par la suite, ce
serait au niveau des besoins nouveaux. Donc ça partirait du
présupposé que les programmes-cadres actuels répondent
déjà aux besoins exprimés des organismes communautaires
et, à ce moment-là, ce serait peut-être une tout autre
question, un autre débat, dans le sens que ce n'est pas
nécessairement évident et que ce ne sont pas
nécessairement des besoins nouveaux. Il y a une ouverture au niveau des
besoins nouveaux, mais il y a quand même, actuellement, une
réalité qui, elle, n'est pas nécessairement incluse et
compatible - "compatible" est peut-être un peu fort -dans ce...
M. Côté (Charlesbourg): Je terminerai
peut-être par un commentaire que j'ai dans cette situation-là. Au
cours des dernières années, il y a eu une croissance
phénoménale du nombre d'organismes communautaires qui ont
revendiqué des sommes ou une reconnaissance à partir du programme
que vous connaissez tous. Je pense qu'il y a des organismes qui
répondent à des besoins; c'est clair et ça me paraît
évident. La démonstration peut en être faite de
manière quotidienne dans des secteurs fort différents.
Évidemment cette croissance extrêmement importante ne veut
pas dire non plus que tout ce qui s'est implanté comme organisme est
nécessaire. J'ai l'impression qu'on a assisté à une
multiplication d'organismes dans certains cas, évidemment parce qu'on
avait accès à un programme où il y avait de l'argent. Je
ne suis pas sûr qu'on serve bien dans ces cas-là, en multipliant
le nombre d'organismes qui, effectivement, répondent à des
besoins auxquels le système lui-même ne peut pas répondre
au moment où on se parle ou ne veut pas répondre. Ça
m'apparaît important de laisser aux groupes communautaires une place
comme partenaires dans le système. Évidemment, il faut se parler
et se le dire, on doit jouer dans des priorités gouvernementales qui
sont extrêmement importantes parce qu'il y a des besoins et ne pas
doubler ce qui se fait actuellement, mais être complémentaire
à ce qui se passe déjà dans le réseau, parce qu'il
y a des ressources du réseau aussi qui sont peut-être mal
utilisées.
Évidemment, on va tenir compte de vos représentations. Je
pense qu'il y a des points d'interrogation qui méritent d'être
fouillés davantage.
M. Berger: Est-ce que je pourrais me permettre une autre
intervention? Ce n'est pas écrit dans notre mémoire, puisqu'on
avait une orientation qui était autre, sauf que les articles 230 et 231
tels que formulés posent un problème majeur s'ils devaient rester
tels quels. On parle du financement par la régie régionale. Nous,
on veut que ça vienne du ministère, mais dans un contexte
où ça resterait comme ça, il y a un problème
majeur. La régie régionale pourrait financer les organismes
communautaires qui offrent des services et pourrait financer la promotion
également, sur une base régionale.
Concernant la promotion, il peut le faire
sur une base régionale dans cet article-là. Le
problème, c'est qu'il est écrit dans un article plus bas qu'il ne
peut pas financer directement les regroupements et, sur la base
régionale, ce sont habituellement les regroupements qui font la
promotion, ce qui veut dire que la promotion n'est plus financée nulle
part. Si les articles devaient rester tels quels, les regroupements
d'organismes de promotion ne pourraient plus être financés selon
ce cadre législatif.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord.
Le Président (M. Joly): Merci. Je vais maintenant
reconnaître le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, M. Trudel.
M. Berger: M. Lévesque voudrait intervenir.
Le Président (M. Joly): Oh! Excusez-moi. Oui, M.
Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves): II y a un autre
problème... On en a parlé, mais j'aimerais le
répéter: Comment va être évalué le
partenariat? Est-ce que le partenariat va être incité à
financer ou non un organisme de promotion? Je pense qu'il faut avoir la notion
du rôle d'un organisme de promotion qui est de défendre les droits
et les intérêts de toute la clientèle. La crainte qu'on
avait, c'était comment va être évalué le
partenariat, le partenariat qui ne fait pas affaire avec les bailleurs de
fonds. Est-ce que l'organisme va être privé de subventions?
Ça, on ne le voit pas dans l'avant-projet de loi et on a peur de
ça. Avez-vous compris, M. Côté? Merci beaucoup. (15 h
45)
M. Côté (Charlesbourg): J'ai bien saisi. C'est qu'il
y avait une discussion que nous avions sur le partenariat qui est
extrêmement important. On juge qu'il est important.
Ce que je remarque et retiens de votre intervention, c'est que le
partenariat est possible et, dans votre opinion, il sera davantage
bénéfique et possible si c'est le ministère qui garde
l'attribution des subventions aux organismes communautaires, laissant le soin
de développer le partenariat avec la régie régionale
éventuellement.
Ce que j'ai compris de votre message, c'est que vous n'êtes pas
contre le partenariat, mais que, si on devait donner à la régie
régionale à la fois le pouvoir de dispensation des subventions et
toute la négociation du partenariat, vous seriez dans les mains d'un
monopole. Bon, ce que vous souhaitez, c'est qu'il reste un niveau d'arbitrage
par le ministre sur le plan financier et que, sur le plan de la
négociation du partenariat, ça puisse se faire avec le reste.
M. Lévesque (Pierre-Yves): Mais il faut faire attention
comment on évalue le partenariat pour ne pas nuire à
l'institution ou aux organismes. Merci, M. Côté.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, dans
l'état actuel des choses, c'est le CRSSS ou la régie
régionale qui aurait la responsabilité d'évaluer le
partenariat; d'où une inquiétude amplifiée dans votre cas.
Évidemment, vous soulevez un point qui est important et sur lequel on
devra se pencher.
M. Hébert: Si vous me le permettez, il soulignait qu'il
peut y avoir conflit d'intérêts au niveau même du
mécanisme d'évaluation en fonction même de la régie,
d'autant plus qu'il y aurait une sous-représentation. Donc, a ce moment,
il y aurait une remise en cause éventuelle des pratiques et du
financement des organismes.
M. Côté (Charlesbourg): J'ai bien dit tantôt
que la sous-représentation au niveau du conseil d'administration serait
réévaluée, compte tenu du pourcentage qu'on mettait au
collège électoral. Malgré tout ça, c'est clair que
vous ne serez pas 51 % demain matin au conseil d'administration, à moins
d'avoir l'habileté de vous faire représenter dans d'autres
secteurs qui pourraient être représentés au conseil
d'administration.
M. Hébert: Mais il y avait deux remarques dans notre
mémoire également à ce niveau sur la participation et la
composition même de ces...
M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui. D'ailleurs,
ça appelle... Oui. Je comprends.
M. Hébert: C'est un élément, quand
même, important au niveau même de la représentation dans la
structure de représentation. Merci.
M. Côté (Charlesbourg): Ça va. Oui.
Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Lévesque et M.
Hébert. Je vais maintenant reconnaître M. Trudel,
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, qui est aussi le
critique des affaires sociales pour sa formation.
M. Trudel: C'est très intéressant, ce que vous nous
présentez aujourd'hui. Déjà, votre première
intervention permet au ministre de constater que dans la mécanique il y
a des petites corrections. C'est important, donc, d'entendre les gens non
seulement sur la mécanique en soi, mais sur les grands objectifs
poursuivis par ce projet de réforme.
Je vais continuer tout de suite en allant un peu dans la même
ligne de questionnement que le ministre, mais pas tout à fait sous le
même angle. Je dois vous dire que, depuis deux ou trois jours, en
particulier au niveau des organismes communautaires ou des
bénéficiaires, je suis
personnellement très étonné, très,
très étonné de voir des regroupements de
bénéficiaires, d'usagers ou des groupes communautaires être
extrêmement craintifs au sujet des régies régionales. C'est
d'autant plus étonnant que ces gens-là nous disent... Vous le
dites très clairement et vous avez, bien sûr, droit à votre
opinion. Vous imaginez, par exemple, et je vais prendre l'extrême, les
groupements communautaires d'une région comme la Gaspésie, d'une
région comme l'Abitibi-Témiscamingue, d'autres régions
éloignées. Vous dites: On veut que ça reste
centralisé, on veut que ça reste au ministère de la
Santé et des Services sociaux, comme s'il n'y avait pas à cet
endroit des difficultés de définition de programmes et
d'orientations, de bras de fer entre les différentes directions, comme
si le ministre n'était pas, lui, pris, par exemple, avec le rouleau
compresseur du curatif des centres hospitaliers et qu'il y avait au
ministère... Et ce ne sont ni les gens qui sont dedans ni le ministre
que je veux toucher ici, c'est l'appareil, tout appareil d'État. Comme
si un appareil centralisé pouvait être plus sensible aux besoins
des individus en région, compte tenu de leur situation minoritaire,
comme vous le soulignez très bien. Moi, je suis tout à fait
étonné de cette attitude-là, et vous n'êtes pas les
premiers. C'est peut-être moi qui suis tout croche dans ma
réflexion.
Je complète ma question de la façon suivante, en disant:
II me semble - et vous vivez cette condition de minoritaires, entre guillemets,
quotidiennement - qu'on a beaucoup plus de facilité à obtenir ce
dont on pense avoir besoin avec des gens, avec des groupements ou avec des
personnes ou des organismes que l'on connaît bien et dont on est, en
quelque sorte, partenaire social qu'avec un organisme national ou supranational
qui, lui, forcément, par définition, est plus loin des besoins
des groupes de la base. D'où mon étonnement à votre
position de dire: "Nous ne voulons pas - et vous y allez très
carrément - d'un financement établi par les régies
régionales qui nous obligerait à être de force des
partenaires, etc.;" nous ne voulons pas des régies régionales
pour nous surveiller, nous comptabiliser. "Nous voulons - encore plus - que
l'évaluation de notre travail continue de se faire de manière
qualitative par nos membres et par le ministère de la Santé et
des Services sociaux."
La question est assez simple, après cette réflexion assez
longue: Mais comment les régies régionales pourraient-elles
être des blbites si dangereuses, compte tenu de la proximité que
vous auriez dans la relation?
M. Berger: Bien, c'est la question de l'imposition du
partenariat. Les organismes communautaires n'ont rien contre le partenariat,
sauf qu'ils veulent pouvoir le définir eux-mêmes. Moi, je suis
prêt à être partenaire, quelque part. Si je me marie, je
suis prêt à être partenaire avec ma conjointe, mais je
définis, mol, les limites de mon partenariat.
M. Trudel: Si vous me permettez...
M. Berger: Mais si tout l'argent vient de la même
place.
M. Trudel: C'est parce que ce n'est pas ça la
question.
M. Berger: Oui, mais la question, c'est ça. C'est parce
que, si tout l'argent passe à la même place, passe par la
régie régionale, la régie régionale a tous les
outils en main pour imposer aux organismes communautaires: Si vous voulez avoir
du financement, c'est de cette façon-là que vous rendez le
service, c'est dans ce cadre-là, cela s'inscrit dans tel programme.
M. Trudel: Et ce n'est pas le cas du ministère
actuellement? Ce ne serait pas le cas du ministère? C'est ça qui
m'étonne.
M. Berger: C'est qu'on ne veut pas que ce soit le cas par un
financement via le ministère. C'est parce que le financement via le
ministère suppose qu'il s'agit de deux sources de revenus
différentes et là, une fois qu'on reconnaît le besoin et
l'action d'un organisme communautaire, l'organisme communautaire peut
définir les modalités d'application de ses activités par
des tables de concertation régionales. Je ne sais pas si vous
comprenez.
M. Trudel: Je comprends très bien la résistance et
votre analyse - que j'accompagne, d'ailleurs - au niveau de la liberté
de travail, de la façon d'utiliser des groupes communautaires. Mais ce
qui nous est dit ici, c'est que tout ça, ça marche quand c'est
avec le ministre dans un endroit centralisé et que ça ne marchera
pas dans les régies. Et, traduction libre, à la fin, pour
l'observateur ou pour les gens autour de la table, c'est: En
conséquence, les régies régionales, ce n'est pas bon.
Votre raisonnement, il faut bien le préciser, c'est de dire: C'est au
niveau de la reconnaissance des organismes et de la façon dont on veut
intervenir que nous avons des craintes, soit vis-à-vis du
ministère, soit vis-à-vis des régies régionales.
Mais votre crainte n'est pas vis-à-vis des régies
elles-mêmes.
Encore une fois, je le répète, c'est parce que ça
fait trois ou quatre fois que l'on entend ici dire: Les régies en
région, elles vont être tellement méchantes, elles vont
être tellement mal organisées qu'elles ne seront pas capables de
respecter nos besoins. Et ça me semble un contre-sens. Ce sont des gens
qui sont plus proches de nous autres. C'est notre monde à nous
autres.
Moi, je vous le dis franchement, je vous apporte un témoignage de
la région de l'Abitibi-
Témiscamingue. Quand ils appellent leur député et
disent: Écoute, le ministre n'a pas voulu, vous savez la première
réponse que je leur fais? Je leur dis: Je peux comprendre que le
ministre n'ait pas examiné votre demande parmi les 50 000, 60 000, 70
000 demandes. J'exagère pour caricaturer. Si c'est en région, ce
sont des gens qui se connaissent, ils pourront intervenir à travers leur
regroupement, môme au conseil d'administration. Vous voyez un peu la
préoccupation?
M. Hébert: historiquement, d'accord. il y a une histoire
au niveau même du financement en provenance directement du
ministère. d'une part, ça ne veut pas dire que ce n'est pas
exempt de lacunes ni de problèmes. d'un autre côté, je
crois que ce qui est sous-tendu aussi, c'est au niveau de certaines conditions
qui étaient posées tantôt. on a parlé de la question
de la représentation, au niveau même de la composition, à
ces régies qui n'assurent, en aucun cas, une représentation
potentielle. vous allez peut-être me dire qu'au niveau des structures
administratives et gouvernementales vous pouvez être très en
équilibre aussi, sauf que, là, on nous parle d'un nouveau
modèle, d'une nouvelle forme de gestion sur laquelle on nous dit que, de
toute manière, on ne sera pas nécessairement présents,
sinon exclus. lorsqu'on parle de représentation des organismes
communautaires, si on dit les jeunes, les femmes, les personnes
handicapées et tout ça - on parle de deux représentants
par région, sauf erreur - à ce moment-là, il va y avoir un
melting-pot pour ces deux niveaux de représentation quand, auparavant,
il pouvait y avoir des représentations au niveau même des
différentes expressions.
Ça revenait au niveau de la question de la représentation,
au niveau même des mécanismes. Tantôt, M. Lévesque a
parlé de l'évaluation. A ce moment-là, oui, il existe des
mécanismes d'évaluation, mais on parle de terrain nouveau. Il
peut y avoir du bon dans du terrain nouveau comme il peut y avoir des
coûts sévères au niveau du nouveau. Et, en même
temps, il y a la place ou la définition même de notre
participation. Je ne sais pas si ça donne une certaine explication.
M. Trudel: Oui, mais vous venez de dire, et je veux bien le
rappeler, que c'est au niveau de la représentation qu'il faut d'abord
travailler pour être présents sur ces organismes, pour s'assurer
de votre place, et on est complètement d'accord avec ça, pour ce
qui est d'être équitable. Le ministre a, d'ailleurs, fait
là-dessus quelques remarques d'entrée de jeu. Je ne voudrais pas
- et là, je vais émettre mon opinion, à moi - que l'on
conclue que toute la présence de ces personnes et de ces groupes est
magnifiquement bien assurée au niveau ministériel, au niveau du
ministère de la Santé et des Services sociaux, qu'on a une
protection entière et complète au niveau des besoins au
ministère. Et, dans les régies régionales
corrigées, au niveau de la représentation, comme vous le
soulevez, je suis tout à fait d'accord que même là,
ça n'aurait pas de bon sens.
Je pense qu'on est toujours mieux de travailler avec les gens qui sont
le plus proches des besoins, les gens qui sont sur le terrain. Ils ont
généralement une sensibilité qui est plus grande. Ce n'est
pas un reproche, encore une fois, que je fais à tout l'appareil
ministériel. Le ministre, l'appareil ministériel ne peut pas
être sur le terrain partout. Ça va de soi que sa
sensibilité ne peut pas être aussi profonde partout, tandis qu'une
véritable décentralisation avec une représentation
adéquate, c'est un gage d'une plus grande sensibilité.
C'est ce que moi, en tout cas, j'ai compris et je voulais
éclaircir ça avec vous. Deux petits éléments. Je
suis tout à fait d'accord sur le niveau de financement. Là, par
exemple, moi, je pense qu'il y a effectivement une faiblesse très grande
dans le projet de loi en disant: II y a autorité pour la régie
régionale de vous subventionner, de vous aider. Le ministre vous
rajoute, en faisant une observation sur l'article 230, que, s'il y a des
besoins nouveaux, etc., il pourra y aller. Moi, je pense que le projet de loi
en soi ou par règlement devrait nous indiquer que le ministre, le
ministère obligera les régies régionales à
consacrer tel pourcentage de leurs allocations, de leurs ressources
financières pour les fins des organismes communautaires ou de promotion,
y compris que le ministère lui-même, dans son budget global,
devrait être contraint à l'utilisation d'un tel pourcentage pour
vous garantir un niveau de financement. Est-ce que, si cela est inscrit dans le
projet de loi ou par règlement, ce serait suffisant pour vous, ce serait
plus encourageant, plus rassurant?
M. Berger: en tout cas, ce serait déjà un pas en
avant, sauf que ce n'est pas tellement rassurant parce qu'il y a encore la
problématique du partenariat imposé. effectivement, tantôt,
quand vous avez souligné qu'on est plus près des besoins par la
régie, ça va de soi, mais les mécanismes qu'on
prévoit...
Le Président (M. Joly): Excusez! Je voudrais vous rappeler
que, déjà, nous avons épuisé notre temps. Il nous
reste peut-être une minute pour conclure. Est-ce que vous auriez quelque
chose à rajouter, M. Trudel? M. Lévesque, en conclusion
peut-être.
M. Lévesque (Pierre-Yves): J'ai une question à
poser au député, ça va prendre deux minutes. Il y a un
proverbe qui dit de ne pas mordre la main qui te nourrit. Nous autres, comme
regroupement régional, on a fait des représentations au niveau de
la nouvelle régie régionale. Et si on parle trop fort, est-ce que
ça va avoir des
conséquences sur le financement par rapport au dicton qui dit: On
mord la main qui nous nourrit? Tandis que, si c'est le ministère qui
fait une évaluation des nécessités, c'est mieux que la
régie régionale. Avez-vous compris?
M. Trudel: Je suis d'accord...
M. Lévesque (Pierre-Yves): Pouvez-vous le
répéter pour m'assurer... (16 heures)
M. Trudel: M. Lévesque, quand vous dites: On a peur
d'être pris dans la situation où on ne pourrait mordre la main qui
nous nourrit, on comprend qu'au niveau de l'évaluation il y aura
là un certain problème. Je faisais l'observation que ce n'est pas
différent au niveau de l'organisme central qui s'appelle le
ministère de la Santé et des Services sociaux et que, dans l'un
ou l'autre des cas, il faut prévoir qu'il n'y ait pas effectivement ce
qu'on pourrait appeler de bris d'autonomie des groupes pour réaliser...
Moi, il me semble - et je le répète parce que j'ai trop
d'expérience, j'ai 20 ans d'activité régionale - que ceux
qui peuvent le mieux comprendre cela, la liberté, la nécessaire
liberté des groupes communautaires, ce sont encore les gens sur le
terrain, les gens des régions, lorsqu'il s'agit de besoins en
région. Si c'est à Montréal, c'est à
Montréal. Si c'est à Québec, c'est à Québec.
J'ai toujours peur des instruments centralisés là-dessus. Mais on
est d'accord avec vous que ça ne doit pas être le seul et
même organisme qui distribue et qui évalue.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le
député.
M. Hébert: M. le Président, en terminant, est-ce
que je pourrais donner un petit document, en annexe, qui donne un portrait de
la situation des personnes handicapées mentalement, de l'organisme?
Le Président (M. Joly): Oui, vous avez la liberté
de le faire. Merci. Alors, je vous...
M. Lévesque (Pierre-Yves): Merci beaucoup de votre
attention.
Le Président (M. Joly): Merci. M. Trudel: C'est un
plaisir.
Le Président (M. Joly): Alors, je vous remercie.
Je demanderais maintenant au prochain groupe de s'avancer, les
Messagères de l'espoir.
Je présume que vous êtes Mme Gaétane Grenier. Alors,
vous connaissez la procédure, j'imagine, vous avez suivi un peu les
débats. Nous vous écoutons.
Mme Grenier (Gaétane): Je ne suis pas trop habituée
à ça parce que je suis terrain" pas mal, moi, mais ça va
aller. Alors...
Le Président (M. Joly): Alors, si vous voulez vous
asseoir, madame, soyez bien à l'aise.
Mme Grenier: Vous, vous êtes le président. Le
Président (M. Joly): C'est ça. Mme Grenier: O.K.?
Le Président (M. Joly): C'est ça. On est ici pour
vous...
Les Messagères de l'espoir
Mme Grenier: M. Côté, M. le ministre, bonjour!
Merci, membres, d'avoir accepté d'entendre les Messagères de
l'espoir. Je suis seule, mais faites un effort, imaginez-vous que j'ai 360
personnes affligées avec moi. O.K.? Parce qu'ils ne peuvent pas venir,
eux autres. O.K.? Ils sont trop malades.
Je vais attaquer tout de suite par le partenariat. Moi, je suis
intéressée à venir vous donner mon expertise, l'expertise
des Messagères de l'espoir. Ça fait cinq ans que nous existons.
Ça fait cinq ans qu'on est avant-gardistes, qu'on est avant le projet de
loi. O.K.? En 1985, je suis venue en commission parlementaire sur la
réinsertion sociale des personnes qui ont des troubles mentaux et
j'avais demandé le service de répit aux familles, en 1985.
Ça prend du temps, le gouvernement, mais ça ne fait rien, je l'ai
eu, j'en ai eu un petit peu. Tu sais, c'est petit à petit. Je comprends
la lourdeur du système.
Pour le partenariat, je ne sais pas si je comprends comme il faut ou, si
je ne comprends pas bien, M. le Président, M. le ministre, vous me le
direz. Moi, on a du partenariat chez nous. C'est quoi, pour nous autres, le
partenariat? C'est, par exemple, de fonctionner avec les organismes
communautaires de notre milieu-Exemple: On fait partie d'une table des
aînés, dans Anjou. Alors, on est plusieurs organismes
communautaires, on est 20. Un organisme communautaire part un projet sur
l'autonomie des aînés. L'autre organisme communautaire ne le part
pas, là - un, pour cette année. O.K.? Après ce sont les
aînés qui vont prendre le projet. Nous autres, on les aide. Pour
nous autres, c'est ça du partenariat.
Pour les Messagères de l'espoir, le partenariat, ce sont des
ressources humaines. Par exemple, on est un service de répit aux
familles, pour les personnes qui ont des troubles mentaux sévères
et persistants. Vous savez que c'est difficile; on ne connaît pas toutes
les stratégies à faire quand on est seul à la maison avec
une personne qui a un trouble mental. On appelle la Clinique psychiatrique
d'Anjou et le Dr Wolf,
psychiatre, vient une fois par mois, bénévolement, nous
aider et il est tout heureux de ça. À un moment donné, on
est encore embêté et un psychologue, M. Michel Mongeon vient,
bénévolement, nous aider.
Partenariat aussi au point de vue des hôpitaux, Louis-H.
-Lafontaine. Il y a quelqu'un qui doit sortir de l'hôpital, il n'est pas
capable de prendre l'autobus seul. O. K. ? Alors, c'est tout ça.
L'hôpital le met dans l'autobus, nous autres, on l'attend. Au bout d'un
mois, iI peut prendre l'autobus tout seul. Nous autres, c'est le partenariat au
point de vue des ressources humaines. Moi, Je ne sais pas... Pensez-vous que
j'ai bien compris ça, cette affaire-là? En tout cas, moi, c'est
comme ça que ça fonctionne. Nous autres, c'est comme ça
que ça fonctionne. O. K. ?
Notre crainte est encore au point de vue des régies
régionales, pas par rapport à la régie régionale,
par rapport à la constitution du conseil d'administration. Étant
donné qu'on a, nous, un comité aviseur, donc on peut faire un
parallèle, on peut dire: Ça va aller à peu près
dans le môme sens. O. K. ? Alors, sur le comité aviseur, il y a
treize personnes, deux communautaires. Nous, étant situés dans
l'est de Montréal - je ne sais pas si c'est le môme
problème partout, mais moi, je parle pour ma petite paroisse - il y a
deux personnes du communautaire. Alors, il y a Louis-H. -Lafontaine, DSC
Maisonneuve-Rosemont, un gros paquet d'affaires, là, tu sais: alors,
bien des professionnels, de gros hôpitaux. Alors, qu'est-ce qui arrive au
communautaire pour le répit aux familles? Il nous reste seulement des
graines. Moi, ce qui me fait de la peine, c'est que j'ai rencontré Mme
Lavoie-Roux et elle m'a dit: Mme Grenier, j'ai donné un million pour le
Répit aux familles. Mais, j'ai dit: Comment ça se fait qu'il nous
reste 0, 02 $? Bien, elle dit: Mol, je ne comprends pas. Ça fait que, M.
le ministre et M. le Président, à vous de voir à
ça, je ne suis pas capable de répondre à la question.
Alors, c'est vrai, il nous reste juste de petits sous. Pour tout le DSC
Maisonneuve-Rosemont, imaginez-vous, 20 000 $! Ça fait 1, 5
intervenante. Je réponds à douze familles. La treizième
famille - j'ai 18 personnes en attente - qu'est-ce qu'elle a? Elle n'a rien,
ça fait pitié ça. Après tout, on est des humains,
tu sais, ce sont des personnes qui sont malades. Moi, je parle en connaissance
de cause, je vis avec mon conjoint qui est un traumatisé crânien
depuis dix ans. O. K. ? Il est fonctionnel - je suis assez fière de
ça - O. K., on ne peut pas discuter comme ça, mais au moins il a
sa place au soleil. Moi, je suis une personne qui est vraiment, vraiment pour
le milieu naturel de vie. Alors, ça fait cinq ans que je me bats pour
ça.
Alors, le partenariat, c'est ça, cette histoire-là. Et le
conseil régional, il faudra que ce soit plus que deux communautaires
parce que je vous dis que notre voix n'est pas bien forte, là! Tu sais,
Louis-H. -Lafontaine, oui, ils en prennent pas mal eux autres. Enfin! Nous, on
travaille fort.
Dans mon petit - ah, il est tout petit, mon mémoire, c'est
modeste, c'est de l'expertise que je vous donne. Alors, j'ai le goût,
étant donné que vous êtes bien occupés - je vois
ça - je pense que vous en avez pris connaissance un peu, j'aurais le
goût d'aller tout de suite au point de vue d'économie. Moi, j'aime
bien ça, l'économie, parce qu'on rend service aux personnes,
c'est ça. Mais parler de l'économie pour dire comment, pour le
fardeau fiscal du gouvernement, ça peut être un bon Investissement
de donner aux organismes communautaires, mais pas à tort et à
travers. Alors, dans l'économie, c'est à la page 14.
Un organisme communautaire, vous le savez, c'est le pivot de la
société. Tout investissement dans le communautaire ne constitue
pas une dépense sèche. La communauté travaillant main dans
la main pour contribuer à l'employabilité des personnes ayant des
troubles mentaux, les Messagères de l'espoir, en gardant les familles en
bonne santé, en leur permettant de rester sur le marché du
travail, donnent un sérieux coup de pouce à l'économie.
Parce que, nous autres, iI n'y a rien de plus intéressant, quand on va
dans les centres d'achat, et ci et ça, et qu'on a aidé quelqu'un,
qu'il nous envoie la main et qu'il nous sourie parce qu'il est au travail; le
résultat pour nous autres, c'est tout. Alors, des citoyens et des
citoyennes, grâce aux services rendus par la corporation, sont
Intégrés au marché du travail.
Ah bien là, j'arrive à l'économie. Êtes-vous
économiste, M. le ministre? Êtes-vous économiste?
M. Côté (Charlesbourg): Non.
Mme Grenier: En tout cas, il y a un économiste bien le
fun...
M. Côté (Charlesbourg): Ha, ha, ha!
Mme Grenier:... il s'appelle John Maynard Keynes. Il disait: "Au
lieu de se serrer la ceinture, la société doit au contraire
dépenser pour activer l'économie. " Il ne s'agit pas de
dépenser à tort et à travers. En subventionnant les
organismes communautaires, on contribue à aider les ressources les plus
importantes qui sont les ressources humaines, et celles-ci, de par leurs
objectifs, peuvent activer l'économie en augmentant le nombre de
personnes à l'emploi et à la productivité. La
société peut augmenter ses revenus - ça c'est vrai - elle
oriente ses dépenses de façon à stimuler la production de
biens et services dans les organismes communautaires. Et il y a quelque chose
qui m'avait bien... Le Dr Castonguay est venu - je suis ça de proche la
commission parlementaire - alors il parlait beaucoup pour l'innovation, ceux
qui font de l'innovation... Tabarnouche, les Messagères de
l'espoir, on est innovatrices en pristi! Ça fait qu'on
espère être subventionnées, pour toujours,
consolidées. Parce qu'on n'est pas encore consolidées. Mais
ça va venir. Je vais le demander au ministre, "anyway".
Bon, ah oui, M. le ministre, vous avez écrit dans le Journal
de Montréal l'"entrepreneurship", ceux qui avaient de
Tentrepreneurship". Pensez-vous qu'on n'en a pas, nous autres, hein? O.K. Au
fond, l'économie, c'est ce qui permet aux gens d'obtenir les biens et
services dont ils ont besoin. La conception de l'organisme étant
axée - ça c'est important pour le gouvernement - la conception de
l'organisme étant axée sur l'utilisation des ressources du
milieu, sur du support financier diversifié, cela apporte une
contribution économique appréciable en ne misant pas sur une
subvention de l'État à 100 %. L'implication de la
communauté est un outil pour la sensibilisation de la population sur le
vécu des personnes ayant des troubles mentaux.
Quand je dis de ne pas miser à 100 % c'est parce que, quand on
crée un projet humanitaire, c'est toute une dynamique ça. Alors
si on a une subvention à 100 % de l'État, ouach! on est
dépendant de l'État et moi je n'y tiens pas en tous les cas.
Parce qu'on veut garder notre couleur communautaire. C'est ça qu'il y a.
Alors que le gouvernement nous donne une régie régionale, s'il y
a plus de communautaires dedans, on a une chance d'avoir plus, enfin... Mais
nous, on a fait une demande à Centraide et on est allés voir...
Une chance, j'ai rencontré le président des hommes d'affaires de
la ville d'Anjou, de l'est, et il a accepté de faire un petit projet et
il m'a dit: Mme Grenier, c'est ce qui est plus difficile pour vous, je vais
essayer de trouver le mot, le terme pour sensibiliser les industriels. Parce
que nous, O.K., on travaille avec la personne qui a un trouble mental, à
la maison. Mais notre grand but c'est de sauvegarder la santé mentale de
ceux qui gardent le malade à la maison. Parce que si, moi, je n'avais
pas eu d'aide, je ne serais pas ici aujourd'hui, je serais folle. Parce que
rester avec un - excusez le mot, "folle" entre guillemets... Parce que si je
n'avais pas eu d'aide, je ne serais pas ici, c'est certain. Alors, c'est de
sauvegarder. Alors, le monsieur, le président des hommes d'affaires a
dit: Ça c'est dur, parce qu'on est plus porté à donner
pour une personne qui est malade, qui est ci, qui est ça. Mais, maudit,
si on parle d'économie, qu'on aide la personne qui est en santé
et qui garde le malade là. C'est fantastique ça. Alors le
monsieur des hommes d'affaires, espérons qu'il va convaincre les
industriels... Et puis... Bon, c'est ça que j'avais à dire pour
l'économie.
Parlons de l'espoir. Messagères de l'espoir, hein? On a espoir.
Il ne faut pas lâcher. Je dis toujours: La vie nous récompense...
Quand on croit beaucoup... Il suffit de croire. Je me dis la vie est là,
c'est certain. Là, je regardais dans les journaux et on ne parlait pas
beaucoup de la personne. On pariait beaucoup d'économie et
d'économie, le ticket modérateur, tatitata... Mais là on
éduque aussi nos personnes à faire attention à leur carte
d'assurance-maladie. Ça c'est important. Savez-vous, on donne de
l'éducation jusqu'à ça. On éduque les familles. Ils
ont une carte d'assurance-maladie. Ils ont des rendez-vous médicaux.
Disons, par exemple, il y a un rendez-vous médical. Et là le
docteur fait "clic-clic" avec la carte d'assurance-maladie. Quinze jours avant,
il avait eu une prise de sang. Là, le rapport des prises de sang n'est
pas rendu. Qu'est-ce que ça fait ça? Vous reviendrez dans quinze
jours, votre rapport de prise de sang n'est pas rendu. Sapristi! ça
coûte cher au gouvernement une affaire de même. Ça fait que
nous, on dit à nos personnes: S'il vous plaît, quand ça
arrive - parce que c'est de l'argent du peuple - s'il vous plaît quand
ça arrive, dites au docteur: Non, je ne reviendrai pas. Vous
m'appellerez quand vous aurez le rapport. Ça fait qu'on éduque
les personnes. Ça peut être niai-seux ce que je dis là,
mais c'est important. Si personne ne vous dit ce qui se passe... Vous
êtes bien bons... Moi je suis toujours très mystifiée. Je
suis en admiration devant des personnes qui ont des postes-clés parce
qu'elles ont des forts potentiels. Ça fait que prenez ça,
là. C'est pour vous autres. (16 h 15)
Eh cristi qu'on a hâte d'être... Je sais de quoi je parle
parce que je le vis à 100 %. On a des recommandations. Moi, je n'appelle
pas ça "recommandations", appelez ça "suggestions", c'est plus
"cute". Bon, les Messagères de l'espoir, en accordant une subvention
pour la survie, non pas à 100 %, parce qu'on veut que la
communauté nous aide... C'est comme pour les bénévoles,
hein? On a certaines bénévoles qui font des
téléphones d'entraide pour le suivi et le suivi à
l'hôpital et un peu d'accompagnement. Quand c'est le temps de faire une
fête, bien, là c'est les bénévoles de tous les
organismes, d'au moins une dizaine d'organismes communautaires d'Anjou qui
viennent nous aider. Ça en est du partenariat ça, je viens de
penser à ça. Enfin!
Alors, pour garder des malades à la maison, ça prend du
monde rémunéré. Une bénévole peut bien y
aller une fois par semaine mais, au bout d'un mois, cette pauvre enfant est
fatiguée et ce n'est pas trop valorisant tandis que nous, en
rémunérant... Parce que c'est tellement compliqué et le
plan d'action qu'on fait pour chacune des familles, ce sont les besoins
spécifiques et le contexte particulier dans lequel vit la famille qui
déterminent le plan. Le plan d'action qu'on a pour chacune des familles
c'est cas par cas.
L'autre partenariat qu'on a, eh bien ça, je vais vous le dire,
c'est trop "cute". J'avais une dame dont le frère était
schizophrène et ça fait six mois qu'on l'aide beaucoup, beaucoup.
Elle n'en pouvait plus. Elle a dit: J'ai besoin de trois
semaines de vacances, je n'en peux plus. C'est très, très
long la réadaptation, je n'ai pas besoin de vous le dire, vous le savez.
Bien, j'ai téléphoné au centre de crise L'entremise. J'ai
dit: Aurais-tu un lit de "spare" pour trois semaines de vacances? Qu'est-ce
qu'elle a fait? Elle a envoyé deux de ses personnes à la maison
voir Michel, le schizophrène, et sa parente. Il a accepté. Alors,
la madame a pu se libérer trois semaines moyennant une petite
contribution de 4,75 $ par jour, ce n'est pas dispendieux. Moi, je trouve que
c'est du partenariat. En tout cas, ça l'a aidée. Moi,
j'étais bien contente parce que j'ai dit: Enfin, si quelqu'un veut se
reposer, ils ont une place, tu sais!
Des suggestions. Que les dirigeants des organismes qui offrent des
services de répit possèdent des connaissances en santé
mentale et sur le vécu quotidien des familles. Ce n'est pas n'importe
qui qui peut avoir un organisme de répit aux familles en santé
mentale. Oh non! Nous suggérons que les organismes communautaires qui
offrent des services de répit continuent à collaborer avec les
Intervenants professionnels et les organismes de leur milieu respectif.
Nous suggérons que les organismes communautaires voués
à la cause du répit aux familles soient assurés de
recevoir des services de personnes-ressources. Nous suggérons que les
aidants naturels aient une formation adéquate. Nous, on donne une
formation continue, on n'arrête pas. Bien, si on fait venir le
psychiatre, etc., là, je vous l'ai dit, c'est une preuve. Il y a un type
de supervision qui met en évidence les conséquences positives des
interventions que le personnel fait. Le personnel a besoin d'être bien
encadré. Moi, je n'ai pas trop le temps de l'encadrer, je le fais comme
je peux; les 75 % de mon temps c'est pour faire vivre l'organisme.
Déjà ça fait cinq ans. Bon! Après ça, le
personnel a besoin d'avoir un suivi sur une base hebdomadaire.
Une dernière suggestion. Nous suggérons la mise sur pied
et l'actualisation des services de répit aux familles par des organismes
communautaires dans un bref délai afin de redonner espoir aux familles,
afin de sauvegarder la santé mentale et physique des membres de la
famille, afin d'éviter que le fardeau fiscal dans le domaine social
s'alourdisse par l'hospitalisation des membres de la famille qui gardent des
personnes ayant des troubles mentaux, afin que les familles retrouvent un sens
à leur vie, afin de permettre aux familles la possibilité de
faire des choix, afin que les familles puissent contribuer à l'essor
économique de la société.
Mes chers... Je partais pour dire mes chers amis. En tout cas, vous
êtes mes amis. Je n'ai pas la prétention de changer la loi. Oh,
non pas du tout, du tout. Mais mon modeste témoignage, mon petit
mémoire, tout petit, peut-être va vous aider dans l'orientation,
peut-être! Alors, au nom de tous mes affligés, je les aime
beaucoup.
Merci. Voilà, c'est tout!
Le Président (M. Joly): Merci, Mme Grenier.
Mme Grenier: Avez-vous d'autres choses? Ah!
Le Président (M. Joly): Je vais maintenant
reconnaître M. le ministre qui va sûrement s'entretenir avec vous.
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Grenier: Excusez-moi. M. le ministre, quand vous avez
été... On peut-u dire quelque chose de particulier?
M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui. Allez.
Mme Grenier: Quand j'ai vu que vous aviez été
nommé, j'ai eu peur. J'ai dit: Mon dieu! Du transport au social!
Qu'est-ce qu'il fait là?
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Grenier: Bien oui, c'est ce qui m'est arrivé.
Après, j'ai appris. Je vous suivais, j'ai suivi les journaux et j'ai
dit: Cristi, il a raison. C'est lui, c'est un administrateur que ça
prend parce que, de l'argent, H y en a, mais il est mal distribué et
moi, j'ai confiance que vous dites: II y a de l'argent pour le Répit aux
familles; ça va au Répit aux familles. Je ne le sais pas, mais je
suis rendue que j'ai confiance en vous. C'est pas pire!
M. Côté (Charlesbourg): Ah bien! C'est
extraordinaire. C'est un très beau témoignage que
j'apprécie. Mais je n'avais pas besoin du témoignage que vous
venez de faire pour me rendre compte que...
Mme Grenier: J'avais besoin de vous le dire.
M. Côté (Charlesbourg): Votre témoignage,
depuis le début, est un témoignage très sincère qui
s'inspire du vécu, d'un vécu qui n'est pas toujours facile et je
pense que c'est ce qu'il y a peut-être de plus précieux dans le
régime au moment où on se parle, qu'on se parle
véritablement de bénévolat.
Vous touchez, quant à moi, un point. On pourrait bien se parier
de structure pendant bien du temps et ce n'est pas ça qui nous rendrait
service. Messagères de l'espoir, quand j'ai vu ça, sans vous
connaître, je vais vous confier quelque chose de particulier, moi aussi,
j'ai dit: Qu'est-ce qu'ils vont nous apprendre, eux autres? Mais je viens de
comprendre maintenant l'espoir, parce que vous le traduisez très bien
par votre présentation simple, mais inspirée d'un vécu,
qui est véritablement authentique et qui parle d'un problème
particulier, celui du répit. C'est là que vous m'accrochez. Il
parle du répit. Le répit,
c'est vrai chez vous, c'est vrai pour à peu près tous les
secteurs de la société, c'est vrai en santé mentale, c'est
vrai pour les personnes âgées. Il y a des gens qui, effectivement,
pourraient continuer de garder les gens chez eux, le lien familial, mais qui,
finalement, au bout de la ligne, n'en peuvent plus parce qu'ils n'ont pas de
répit. C'est un élément extrêmement important de
votre présentation et je pense que c'est le coeur. L'économie,
bien sûr, est là, mais vous visez à nous démontrer
que le répit est l'un des rouages très importants de notre
système et que, si on y met les efforts, ça va être
très économique. C'est ça que vous voulez nous dire
finalement.
Mme Grenier: Oui, c'est vrai. La preuve, c'est que je suis ici.
Sans ça, je serais à l'hôpital.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Et ça, j'y crois
profondément. Je voudrais vous poser des questions. Qu'est-ce que vous
avez comme budget d'opération, comme organisme?
Mme Grenier: 20 000 $ pour tout le DSC Maisonneuve-Rosemont.
Ça, c'est une personne et demie. C'est tout. L'organisme n'est pas
consolidé... depuis cinq ans. Nous avons aussi ce qu'on appelait les
PDE, O.K. Vous devez être au courant que les PDE, ça coupe. Le
ministre du Travail, M. Jean Corbeil, est pourtant notre député,
que vous connaissez depuis longtemps. Alors le communautaire s'en va chez le
diable. Cette année, j'ai 800 heures d'accordées; pour le
projet... Attendez une minute. Pour le projet, c'est 35 000 $ qu'il donne pour
20 semaines. On va vous parler de chiffres. On aime ça. On comprend
bien. 35 000 $ qu'il donne pour 20 semaines. Sur 20 semaines, il y a cinq
personnes et, sur les 20 semaines, 450 heures de formation; on donne la
formation en santé mentale et en informatique. Moi, ça me fait
mal parce que la moitié de mes familles n'ont pas les services. L'an
prochain, c'est 100 % de formation et l'organisme n'a plus rien. Alors, il va
falloir se brancher quelque part.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Peut-être
pour...
Mme Grenier: C'est ça, notre budget.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Mais c'était
juste pour être capable de voir l'importance. Je pense que vous faites
face à un problème, compte tenu du fédéral qui se
retire. Mais je veux aller plus loin que ça avec vous.
Vous vous occupez donc des gens qui ont des problèmes en
santé mentale.
Mme Grenier: Et aussi de tous les autres, avec le projet Canada,
de ceux qui gardent les malades a la maison, sans discrimination d'âge et
de maladie.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Mme Grenier: Ça,
c'est avec Ottawa.
M. Côté (Charlesbourg): C'est parce que j'ai vu dans
vos buts tantôt que vous vous occupiez aussi des aînés.
Mme Grenier: Oh ouil
M. Côté (Charlesbourg): Des personnes
aînées.
Mme Grenier: Oui. Il y en a beaucoup.
M. Côté (Charlesbourg): d'accord. mais parlons en
particulier de problèmes de santé mentale. est-ce que ce sont des
gens qui étaient en institution qui sont
désinstitutionnalisés?
Mme Grenier: Oui. Il y en a pour qui ça faisait 20 ans.
Nous autres, on leur apprend à réadministrer leur quotidien.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Et vous êtes en
train de nous dire que vous êtes la seule ressource qui puisse le
faire.
Mme Grenier: Oui, pour le moment. Oui, j'ai une preuve. C'est que
je suis demandée pour aller parler, pour aller faire ma paiiotte, aller
expliquer ça un peu partout dans les groupes de parents. O.K.? A
Pierrefonds, à Pointe-Claire, Vieux-Lachine. Le 6 février, je
vais à Longueuil. Je leur explique ce qu'on fait et je voudrais qu'eux
autres aussi le fassent. Alors, je suis la seule. On est la seule.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Et vous êtes
là depuis cinq ans. Donc, vous êtes là depuis qu'il y a une
désinstitutionnalisation.
Mme Grenier: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Et toujours pour tenter de
remettre dans leur milieu, un milieu plus naturel, les gens qui ont certains
troubles.
Mme Grenier: On a des résultats, M. le ministre, pour ceux
qui ont des troubles mentaux. Quand ils ont fini avec nous autres, on les
réfère à Auto-Psy ou à un autre organisme
communautaire pour continuer. Ils ne restent pas toujours dépendants de
nous autres.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. Mme Grenier: O.K.
Continuez.
M. Côté (Charlesbourg): Mais, évidemment, ce
que vous faites, c'est que vous êtes corn-
plémentaires au réseau actuel qui est en place et vous
intervenez avant qu'Auto-Psy intervienne.
Mme Grenier: Oui, parce qu'on les prend, ils sont dans la jungle.
On ne se pile pas sur les pieds. Assez qu'une travailleuse sociale m'a
appelée pour me dire: Ça fait dix ans que je m'occupe de X
madames et j'aimerais essayer une nouvelle approche et son psychiatre est
à Rosemont. On a une collaboration avec les psychiatres. On ne se pile
pas sur les pieds, on est complémentaires. Et on ne coûte par cher
au gouvernement. Imaginez, notre personnel, 300 $ par semaine, 40 heures.
Comptez ça, 300 $ par semaine, 40 heures. Ils ne font pas 40 heures, ce
n'est pas du 9 à 5. C'est ça la beauté. Ils peuvent faire
du bénévolat après.
M. Côté (Charlesbourg): Je vous pose une
dernière question parce que...
Mme Grenier: C'est intéressant votre affaire. Votre
affaire est intéressante.
M. Côté (Charlesbourg): Je vous pose une
dernière question. Oui, parce que, sur le plan de la
désinstitutionnalisation, on l'a fait puis vous avez une expertise qui
est intéressante sur le plancher. Directement, le
bénéficiaire étant sorti de l'institution, étant
réintégré au niveau du milieu, l'objectif était de
le remettre dans son milieu pour qu'il ait le plus d'autonomie possible.
Évidemment, il faut avoir des mesures d'encadrement et être
capable de le suivre aussi pour que le phénomène qui est connu
à Montréal, au centre-ville, ne s'amplifie pas. Je pense qu'il
faut être extrêmement prudent à ce niveau.
Vous qui êtes une dame qui consacrez sa vie, parce que vous avez
beau avoir 300 $ par semaine, à 40 heures par semaine, vous devez faire
probablement 70, 80 heures par semaine, le restant c'est du
bénévolat, quel est le problème du système? Vous en
avez abordé quelques-uns tantôt, dans le domaine bien pratique, la
prise de sang avec la visite, les doubles visites.
Mme Grenier: Ah oui!
M. Côté (Charlesbourg): Mais, pour vous, c'est quoi
le système? SI, demain matin...
Mme Grenier: II y a quelqu'un, quelque part, qui ne fait pas sa
job.
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
Mme Grenier: Je ne sais pas qui, moi là.
M. Côté (Charlesbourg): O. K. Mais, au-delà
du médecin ou... Si vous étiez ministre, demain matin...
Mme Grenier: Je ne veux pas.
M. Côté (Charlesbourg): Non. Mais, compte tenu de
votre expérience...
Mme Grenier: Je n'ai pas cette force.
M. Côté (Charlesbourg): Ah! Vous en avez une
bonne.
Mme Grenier: Non, non, je suis le terrain, moi.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais c'est important
pour le ministre, pour prendre des bonnes décisions, qu'il soit
éclairé par le terrain.
Mme Grenier: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Votre expérience
à vous...
Mme Grenier: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): La priorité, demain,
est-ce que c'est de s'occuper de nos personnes âgées?
Mme Grenier: La priorité?
M. Côté (Charlesbourg): Oui. La priorité, ce
qu'on devrait faire en premier. Pensez-vous que c'est au niveau des personnes
âgées qu'est la priorité, la santé mentale ou...
Mme Grenier: Je suis en conflit d'intérêts.
M. Côté (Charlesbourg): Vous êtes en conflit
d'intérêts.
Mme Grenier: Oui. Parce que je suis avec un malade à la
maison, pour être bien honnête avec vous.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, vous l'êtes
déjà en disant que vous êtes eh conflit
d'intérêts. Malgré tout ça, j'aimerais avoir votre
opinion quand même. Qu'est-ce que c'est la priorité de demain?
À Montréal, il y a un vieillissement de la population aussi.
Mme Grenier: II y a les jeunes et les personnes
âgées. Et là, vous venez de me faire sortir "les personnes
âgées".
M. Côté (Charlesbourg): Non, pas obligatoirement. Si
vous ne le pensez pas, ne le dites pas pour me faire plaisir. Mais, je pense
que, comme vous...
Mme Grenier: Je fais partie d'une table de concertation des
aînés et, vraiment, ils ont besoin d'aide et plus ça va,
plus la population vieillit, ça c'est vrai, les 75 ans et plus, c'est
vrai, si vous avez une priorité à faire. Là, je
vous ai rendu une réponse franche, mais n'oubliez pas les malades
a la maison, ceux qui les gardent.
M. Côté (Charlesbourg): Je n'oublierai pas le
répit.
Mme Grenier: Si vous voulez qu'on garde notre tête, mon
dieu!
M. Côté (Charlesbourg): Je n'oublierai pas le
répit.
Merci beaucoup et continuez votre excellent travail.
Mme Grenier: Aïe, monsieur! M. Côté
(Charlesbourg): Oui.
Mme Grenier: Pensez-vous qu'on va avoir une consolidation de
l'organisme? Bon dieu! Après cinq ans, vous ne seriez pas fatigué
de courir, vous?
M. Côté (Charlesbourg): Oh oui! De courir
après la reconnaissance, hein?
Mme Grenier: Oui, parce qu'ils disent dans ça - je vous
l'ai envoyé - que le ministre peut donner lui-même. En tout cas,
si eux autres ne donnent pas, s'il vous plaît...
M. Côté (Charlesbourg): Je me traîne toujours
un petit cahier vert.
Mme Grenier: Oui. L'espoir.
M. Côté (Charlesbourg): II y a des choses qui me
frappent et j'ai pris une note.
Mme Grenier: Ah! Une autre affaire qui est intéressante,
avant de partir: la collaboration avec les fonctionnaires.
Le Président (M. Joly): Mme Grenier.
Mme Grenier: Oh! Je vous avais oublié, vous.
Le Président (M. Joly): Je vais encore vous consacrer un
peu de temps, mais je vais reconnaître ici le député de
Rouyn-Noranda-Témis-camingue qui est aussi le critique des affaires
sociales pour sa formation. Donc, vous allez avoir la chance d'échanger
encore quelques minutes avec M. Trudel.
Mme Grenier: Est-ce que c'est l'avocat du diable?
Le Président (M. Joly): M. Trudel, oui, l'Opposition. (16
h 30)
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Vous avez comme un langage désarmant. C'est
très important qu'on puisse faire un tour parce que vous savez, quand
vous allez être partie, c'est moi qui est chargé de
protéger les intérêts, de "checker" le ministre, s'il va
vraiment vous reconnaître. Hein? Pour lui rappeler ça
constamment.
Mme Grenier: II faut qu'il ait une bonne mémoire.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Juste pour vous dire, très rapidement, parce
que mes questions seraient allées dans le même sens que le
ministre, vous nous apportez là un témoignage extrêmement
intéressant. Je vais juste sortir quelques dimensions de votre
présentation sur lesquelles on doit insister pour rappeler au ministre,
d'abord, un: la franchise. Si tout le monde était venu nous dire ici, de
la façon que vous le faites, c'est quoi les problèmes dans le
système, qu'est-ce qui nous apparaît comme le plus difficile...
Vous nous avez dit en tout dernier lieu, avec une très grande candeur:
Vous savez, là-dessus, je suis un peu en conflit
d'intérêts. Heureusement, madame, que vous n'étiez pas ici
toute la journée d'hier où des gens nous ont parlé toute
la journée...
Mme Grenier: Cela a chicané, hein!
M. Trudel: ...avec une très grande apparente candeur et
avec une absence apparente de conflit d'intérêts mais vous
êtes venue ici parler des besoins des personnes qui sont en situation
difficile. Vous savez que c'est très valorisant parce qu'il y a
tellement de monde qui sont venus ici nous dire qu'ils étaient, eux,
dans des situations vraiment difficiles, en oubliant les gens qui sont en
situation de difficultés sur le terrain. Et ça, là-dessus,
ça nous rappelle, et ça rappelle au ministre qui aura à
présenter un projet de loi à l'Assemblée nationale,
d'inclure, et vous l'avez bien souligné, dans le projet de loi la partie
du budget du gouvernement à investir dans le mouvement communautaire.
Vous êtes la première du mouvement communautaire qui vient nous
parler d'investissement. Nous, on parle de ça depuis aussi un certain
nombre de mois et d'années. Dans le communautaire, c'est un
investissement qui rapporte beaucoup, parce que, vous l'avez bien
démontré, cela coûte peu et donne d'excellents
résultats. C'est pour ça qu'il faut se garantir. Vous avez
raison, par ailleurs, d'être très craintive sur la part du budget
qui vous reste. Vous faites votre belle description en disant: Ils sont
tellement gros et grosses ceux et celles qui sont à côté de
nous, les centres hospitaliers, etc., qu'on est laissés pour compte.
Et c'est pour ça qu'il faut que la garantie d'un niveau de
financement apparaisse au niveau du ministère et dans les régies
régionales, s'il y avait lieu.
Une toute petite question. J'ai bien compris quand vous nous avez dit:
Je passe 75 % de mon temps à assurer la survie de mon organisme au
niveau des sous, au niveau de ce que j'ai à courir pour assurer la
survie de cet organisme qui s'occupe prioritairement du répit? Je passe
75 % de mon temps à cela, c'est bien ce que vous avez dit? Dites.
Mme Grenier: 75 % de mon temps et une partie de mon budget
personnel. Parce que je suis venue ici, c'était tellement important, en
taxi, 200 $. Mais ça ne me fait rien, c'est de l'investissement pour
ceux que je défends. Quand j'ai monté à Ottawa, la
même affaire. Parce que je ne fais plus de voyage, moi, parce que je suis
confinée à la maison, alors je prends cet argent-là...
Vous allez me dire: C'est symbolique. Mais je le fais par sacrifice, pour
aider. Mais je sais que vous êtes capable de comprendre. O.K. Mais 75 %
de mon temps, oui. Dès trois heures du matin, envoyé donc! Pour
la survie de l'organisme, 400 $ ici, 500 $ là. Les services, c'est
important.
M. Trudel: Et on comprend tous que ce 75 % là,
évidemment, vous préféreriez le consacrer aux familles,
aux personnes qui auraient besoin de répit, qui auraient besoin d'aide.
Vous êtes obligée de faire cela pour permettre qu'au moins il y
ait un minimum qui leur soit accordé et qui, à travers le cadre
institutionnel ou les cadres des institutions dans lesquelles nous vivons
actuellement, devient impossible.
Là-dessus, je vais tout simplement, au nom de l'Opposition, Mme
Grenier...
Mme Grenier: Monsieur, 75 %... M. Trudel: Oui?
Mme Grenier: J'aimerais bien mieux les porter à la
formation parce que je suis formée. J'ai 20 ans de... Je suis une
éternelle étudiante à l'Université de
Montréal. Alors, j'aimerais bien mieux... Si mon personnel est mieux
encadré, mieux formé, il va rendre mieux service aux familles.
Aïe! C'est "tough", hein, vivre 24 heures par jour! En tous les cas,
O.K...
M. Trudel: Tout à fait.
Mme Grenier: Mais c'est positif. Une personne qui vit 24 heures
par jour, si elle a de l'aide... Moi, j'ai de l'aide par la Régie de
l'assurance automobile, bien c'est le "fun". On a une personne, un être
à part entière qu'on aime. Mais, pour nous, savez-vous ce que
ça fait? Ça nous permet d'Intérioriser le monde. C'est
ça que ça nous permet de faire. Voilà. Est-ce qu'il y a
autre chose?
Une voix: Non.
Mme Grenier: II faut que je m'en aille à
Montréal.
M. Trudel: Alors, je vais vous remercier beaucoup, Mme Grenier,
de votre témoignage. Ma petite part - parce que je ne suis pas en
situation de responsabilité dans l'administration des budgets -
ça va être donc de surveiller si le ministre a toujours son petit
calepin et la journée où il va vous amener une réponse
positive...
Mme Grenier: II n'est plus là, allez-vous lui dire?
M. Trudel: Je vais lui dire certain parce que vous, vous allez
quitter pour Montréal. Nous, on est encore ici pour un bon bout de
temps. Merci beaucoup, Mme Grenier.
Le Président (M. Joly): Mme Grenier, je vais demander au
ministre délégué à la Santé, M. Sirros, de
conclure.
M. Sirros: Une toute petite chose, Mme Grenier. Le ministre
étant pris au téléphone, il m'a demandé de vous
remercier et il a trouvé tout ce que vous avez dit intéressant et
en tiendra compte dans la suite de nos travaux. Donc, de sa part, de ma part et
de la part de tous les membres de la formation gouvernementale, merci
beaucoup.
Mme Grenier: Au nom des affligés, vous lui direz
merci.
M. Sirros: Avec plaisir.
Le Président (M. Joly): À mon tour, madame, au nom
des membres de cette commission, je vous remercie pour votre authentique
témoignage et bon voyage de retour. Merci beaucoup, madame.
Je vais maintenant demander à la représentante du
Comité de bénéficiaires du centre hospitalier Douglas, Mme
Martha Bishop, de bien vouloir s'avancer. Alors, Mme Bishop, je ne sais pas si
vous connaissez un peu les règles.
Mme Bishop (Martha): J'ai 20 minutes pour discuter...
Le Président (M. Joly): Vous avez environ une vingtaine de
minutes puis, par après, au loisir, disons, des deux formations, on a
aussi une période de temps qui nous est dévolue pour vous poser
les questions d'usage nécessaires qui peuvent susciter de
l'intérêt. Alors, Mme Bishop,
la parole est à vous.
Comité de bénéficiaires du centre
hospitalier Douglas
Mme Bishop: Merci, mesdames et messieurs et merci aussi pour
essayer de comprendre mon français.
Le Comité de bénéficiaires de l'hôpital
Douglas veut juste faire des commentaires sur quelques points de l'avant-projet
de loi parce que vraiment la loi est très difficile à comprendre
et il y a des points qui, pour nous, sont très importants.
Dans le mémoire que nous avons envoyé à la
commission des affaires sociales, nous avons dit, à la deuxième
page, que nous avons une inquiétude sur la composition de comités
de bénéficiaires. J'ai écrit, dans ce mémoire, une
petite histoire sur un conseil similaire, le conseil des patients qui a
été commencé à l'hôpital Douglas en
l'année 1955. Dans les temps passés, il y avait d'autres
personnes, c'était ouvert à tous les bénéficiaires
de l'hôpital. Ces réunions sont à chaque semaine et, dans
les temps passés, il y avait peut-être un aumônier, un
bénévole comme moi, I'ombudsman, peut-être une personne du
"staff1 qui étaient présents à ces réunions. Mais
l'année passée, la régie régionale a dit qu'il
serait mieux de ne pas avoir de membres de "star.
La présente loi sur la santé et les services sociaux dit
que ces comités de bénéficiaires sont composés
seulement de bénéficiaires, de bénévoles ou de
parents. Alors, pour une première fois en 35 années, les
bénéficiaires ont élu une personne qui n'est pas un
bénéficiaire et, pour moi, un bénévole qui remplace
un bénéficiaire, j'ai une prise de conscience parce que j'ai pris
une place qui, traditionnellement, était une place pour un
bénéficiaire.
La chose qui est très difficile pour les
bénéficiaires maintenant, c'est qu'un comité qui s'appelle
Comité de bénéficiaires est supposé, dans
l'avant-projet de loi, avoir seulement deux bénéficiaires et les
autres personnes, ce sont des parents, des bénévoles ou quelque
chose comme ça. Une des bénéficiaires m'a dit - je pense
que c'est un vieux proverbe autochtone, je ne sais pas si je vais dire
ça assez bien en français - ce n'est pas possible de marcher dans
les souliers d'une autre personne. Bien des fois, quand nous parlons, au
Comité de bénéficiaires, les bénéficiaires
me disent: Non, ça ce n'est pas bon pour les bénéficiaires
ou ça, c'est notre réalité, vous ne comprenez pas
ça. Les bénéficiaires ont peur que si la majorité
des membres de ce comité soit des personnes qui ne se sont pas battues,
"struggle", avec les problèmes mentaux, peut-être qu'ils vont
manipuler ou pousser ou quelque chose comme ça et ne comprendront pas la
réalité de la vie des personnes avec des problèmes
mentaux. Dans l'hôpital Douglas, depuis quelques années, les
patients pouvaient faire exactement le même travail, eux-mêmes,
avec un peu d'assistance.
Alors, la première recommandation que nous avons faite, à
la page 3, c'est que le Comité de bénéficiaires soit
constitué par une majorité de bénéficiaires et que
les sièges qui restent soient occupés par les
bénévoles ou par les parents, tuteurs ou autres
représentants légaux pour les bénéficiaires
âgés de moins de 18 ans ou qui sont sous curatelle. C'est la
première recommandation.
La deuxième, c'est... Dans l'avant-projet de loi, vous avez dit
que la durée du mandat d'un membre d'un comité de
bénéficiaires, c'est une année et nous sommes en accord
avec ça. Parce que dans un établissement regroupant des personnes
avec des problèmes mentaux, il y a beaucoup de fluctuations dans les
conditions des patients. Nous avons ce mandat pour une année dans nos
règlements internes. Nous avons aussi un petit mécanisme, si une
personne est malade pour un mois, une semaine, quelque chose pour remplacer.
Mais là où nous avons un problème... Vous avez
écrit, dans l'avant-projet de loi, qu'une personne qui se fait
élire - élire, est-ce que c'est le mot juste? - on peut seulement
la réélire deux fois. Vraiment, dans un hôpital comme
Douglas - et je pense que c'est la même chose avec les autres
hôpitaux de longue durée - les patients sont suivis par
l'hôpital depuis plusieurs années, vingt ans, dix ans. Il y a un
noyau de patients qui sont capables de travailler dans un comité de
bénéficiaires. Il y a des membres qui sont actifs depuis cinq,
dix années.
Il y a d'autres personnes. Vous voyez, dans notre mémoire, deux
fois par année, nous envoyons à chaque "ward" et service un
mémoire pour dire: Ce que nous voulons, ce sont des personnes, s'il vous
plaît, envoyez des personnes. Mais c'est seulement huit ou dix personnes
qui sont intéressées. Nos réunions, chaque semaine, sont
ouvertes à ces huit ou dix personnes. Les officiers, ce sont des membres
qui font partie de ces huit ou dix personnes. Si c'est un terme d'office et
qu'après trois années c'est nécessaire qu'elles
disparaissent, alors, le comité, peut-être, aussi disparaît
parce que ce noyau, ce sont les personnes les plus
intéressées.
Je pense que ce règlement, c'est mieux de le laisser dans le
règlement de chaque établissement qui connaît le
fonctionnement des bénéficiaires. Notre recommandation, c'est que
le nombre de fois qu'une personne peut être réélue pour
siéger au Comité des bénéficiaires soit
laissé à la discrétion des règlements
généraux de chaque comité.
Les dernières recommandations concernent le conseil
d'administration de l'établissement. Premièrement, nous sommes
très heureux de nos relations avec notre conseil d'administration. Nous
avons des membres. Il y a eu deux sièges au conseil d'administration de
1973 à 1984.
Maintenant, il y a une personne qui siège au conseil
d'administration et une autre personne comme observateur. Mais il y a beaucoup
d'occasions pour qu'un bénéficiaire dise à la
réunion: Je pense que cette idée... Nous avons eu un exemple
à la dernière réunion. Le conseil d'administration voulait
changer l'utilisation d'un des édifices. Le bénéficiaire,
qui est membre, a dit "non, c'est un édifice dont les patients ont
beaucoup besoin", alors l'administration a fermé cette idée. (16
h 45)
Ce petit préambule, c'est pour dire que nous avons de bonnes
relations, mais nous pensons que c'est nécessaire à
l'hôpital Douglas - c'est un institut universitaire avec un conseil
d'administration comme dans beaucoup d'autres; c'est le seul conseil
d'administration que nous avons mentionné dans notre mémoire -
nous pensons qu'il est très important d'avoir des représentants
des bénéficiaires, Ils sont la raison d'être de
l'établissement. Et avec la meilleure volonté du monde, c'est
simple pour des personnes qui n'ont pas de problèmes mentaux de prendre
une décision pour les malades, pour les patients. Les autres membres du
Comité de bénéficiaires à Douglas ont beaucoup peur
de ne pas avoir une voix, comme d'ailleurs dans le conseil d'administration.
Ils disent que les recommandations, c'est qu'à l'intérieur d'un
institut où les bénéficiaires reçoivent des soins
de longue durée, il y ait deux membres additionnels. Dans le moment,
c'est un membre, vous le savez. Nous pensons qu'il est nécessaire
d'avoir deux membres additionnels qui représenteraient les
bénéficiaires, qu'ils soient nommés au conseil
d'administration de ces établissements.
La dernière partie concerne le conseil d'administration. J'ai
écrit dans le mémoire: Vous ne construisez pas un pont sans des
ingénieurs, vous ne faites pas l'école sans des maîtresses.
Je pense que vous ne faites pas un avant-projet de loi sans des avocats. Je ne
me rappelle pas combien d'avocats il y a dans cette Chambre, mais je pense
qu'il y en a peut-être un ou deux. Nous avons peur que le conseil
d'administration soit, je ne sais pas le mot en français, des "laymen",
des personnes qui ne sont pas des professionnels, pas des travailleurs sociaux,
des gardes-malades ou autres. Il y a maintenant des "laymen" au conseil
d'administration. Ils avaient de bonnes idées de "business", de
communauté, de quelque chose comme ça. Mais il est
nécessaire pour nous d'avoir une personne ou des personnes qui soient
des professionnels. Peut-être un conseil d'administration dirait: Ah,
ça coûte trop cher d'avoir une pharmacie. Fermez la pharmacie.
Allez tout le monde chez Jean Coutu. Mais peut-être qu'il y a des raisons
censées d'avoir une pharmacie ou un service de chirurgie ou quelque
chose dans un hôpital. S'il n'y a pas des experts, alors quelle voix
dira: Non, ne fermez pas ça ou n'ouvrez pas ça? Ce sont nos
recommandations, que les médecins ne soient pas exclus du conseil
d'administration de tous les genres d'hôpitaux, pas seulement des
hôpitaux psychiatriques.
L'autre côté, la même chose. Si vous avez un
médecin dans un hôpital psychiatrique, c'est meilleur d'avoir un
médecin qui connaît la psychiatrie, pas un médecin qui
connaît les oreilles, les yeux, la langue ou qui sait, un chirurgien ou
quelque chose comme ça, parce que quand vous travaillez en psychiatrie
ou quand vous êtes un bénévole en psychiatrie, vous
commencez à connaître le monde des personnes comme ça, les
limitations, les pouvoirs, les problèmes, les vouloirs. Je ne sais pas
tous les mots, les verbes, mais un psychiatre qui travaille avec des malades
avec des problèmes mentaux doit connaître un peu le monde des
malades mentaux, j'espère! Ce n'est pas une bonne Idée d'avoir un
médecin qui est spécialisé dans un autre domaine. Cela, ce
sont nos "concerns". Et l'autre chose qu'un bénéficiaire m'a dite
lundi, quand il a su que je venais Ici. Il est très touché que
les membres de la Législature, que le ministre, que toutes les personnes
ici à Québec soient concernés par les malades et
spécialement avec les malades mentaux. Parce que pendant plusieurs
années, il a pensé qu'il était orphelin du système
et maintenant, il est très heureux d'avoir un petit mot dans le
système. Je vous remercie.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme Bishop. Je vais
maintenant reconnaître M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. J'avais demandé...
Mme Bishop: M. Côté, est-ce que vous pourriez parier
lentement?
M. Côté (Charlesbourg): Je vais parler
lentement.
Mme Bishop: O.K.
M. Côté (Charlesbourg): J'avais demandé
à mon collègue, M. Sirros, de prendre la parole. Je viens de la
lui enlever parce que vous avez touché des points d'un vécu tout
à fait extraordinaire et l'expression d'une réalité de ce
que vous vivez chaque jour, c'est très touchant. Et je peux
déjà vous assurer que nous allons changer un certain nombre de
choses.
Premièrement, le comité des bénéficiaires va
être majoritairement formé de bénéficiaires. Et il
n'y a pas personne de mieux placé pour défendre les
bénéficiaires que les représentants de
bénéficiaires. Donc, je pense que c'est un témoignage
très, très important et nous allons régler ça.
Deuxième point de vos recommandations, des règles internes
du comité des bénéficiaires
faites par les comités aussi, oui. j'ai particulièrement
apprécié votreimage d'ingénieur avec la fabrication des
ponts. ça me touche, étant exministre des transports.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Vous aviez bien choisi votre
image et il est clair que pour faire des lois ça prend, règle
générale, un avocat et que des professionnels de la santé,
ce n'est pas nécessairement nuisible sur un conseil d'administration
pour faire des bons choix.
Le seul message que je veux vous dire, c'est que votre message est
clair. Il est inspiré d'une pratique dans le champ, les deux pieds par
terre et nous allons en tenir compte et apporter les modifications qui
s'imposent. C'était le message que je voulais vous livrer et vous
féliciter pour l'avoir fait en français. Je trouve ça
touchant avec tout ce que ça peut imposer comme exigences pour une
personne dont la langue maternelle n'est pas la langue française et vous
l'avez très bien fait. Et je vous en félicite.
Mme Bishop: Je voudrais que mon français soit meilleur
mais je pense que... J'ai une fille... et je pense que j'avais poussé le
mur...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): Est-ce que...
M. Gautrin: Sur l'intervention, je...
Le Président (M. Joly): M. Gautrin, député
de Verdun, s'il vous plaît.
M. Gautrin: Merci. Je n'ai pas de question à poser, si ce
n'est rendre aussi témoignage sur l'importance et le travail
extrêmement sérieux que vous faites à l'intérieur de
l'hôpital. Je pense que, d'après ce que j'ai pu voir, le
Comité de bénéficiaires de l'hôpital Douglas est un
comité qui est réellement au service et qui travaille pour le
mieux-être et l'amélioration du statut des
bénéficiaires. Je peux seulement m'associer aux propos du
ministre pour vous féliciter pour votre présentation et, d'autre
part, féliciter aussi le Comité des bénéficiaires
pour tout le travail que vous faites à l'hôpital Douglas.
Merci.
Le Président (M. Joly): Maintenant, M. le ministre
délégué à la Santé et aux Services
sociaux.
M. Sirros: Merci, M. le Président. Je vais reprendre un
petit peu la parole que le ministre m'a prise. Je voudrais profiter de cette
expérience que vous avez d'implication au niveau des comités de
bénéficiaires et des bénévoles d'un centre
psychiatrique pour vous poser une question qui n'a rien à faire avec
votre mémoire mais j'aimerais peut-être avoir le
bénéfice de vos réflexions sur ça.
Les hôpitaux psychiatriques sont ce qu'on appelle
"sectorisés" et, donc, les résidents d'un territoire donné
doivent normalement s'adresser à l'hôpital Untel qui couvre le
secteur donné. Il y a, je sais, dans l'esprit de plusieurs, des
différences d'opinions avec cette approche dans le sens qu'on dit
souvent qu'il y a des liens qui peuvent se créer par rapport au choix
d'un bénéficiaire d'un psychiatre ou d'un hôpital en
particulier et que ça ne devrait pas être le secteur ou ce
découpage administratif qui prenne le dessus, qui devienne plus
important que le choix de la personne. J'aimerais avoir, d'une part, vos points
de vue sur la question et, d'autre part, savoir, au Douglas, comment ça
se vit. D'où viennent la majorité des
bénéficiaires, selon votre connaissance, et qu'est-ce que vous en
pensez de cette sectorisation?
Mme Bishop: Vraiment, à l'hôpital Douglas, nous
avons le centre communautaire avec les personnes dans le secteur, mais nous
avons aussi, peut-être que vous le savez, le mandat pour tous les
anglophones pour la pyschiatrie de longue durée dans la province. Alors,
moi, je connais beaucoup de personnes de la Gaspésie, du "North Shore"
de quelque chose comme ça... Vraiment, parce que je travaille comme
bénévole avec un autre groupe de parents comme travailleuse
sociale et plusieurs fois des parents veulent choisir un hôpital parce
qu'ils aiment un psychiatre ou s'ils n'aiment pas un psychiatre dans tel
hôpital, ils veulent alors en choisir un autre. Les patients au Douglas,
les patients de longue durée, demeurent dans la communauté, ils
se voient malades, ils entrent à l'urgence et ils veulent un
médecin. Quand ils sont un peu mieux, ils vont dans un "Admission ward"
et il y a un autre médecin. Ils ont donc peut-être
été dans un service de longue durée, un autre
médecin! "Predischarged", un autre médecin! Après 20 ou 30
années, vous avez passé tous les médecins dans
l'hôpital. C'est la confusion. Mais est-ce qu'il y a des médecins
avec deux personnes ici, dans ce service, trois ici, cinq ici? Pour les
patients de longue durée à l'hôpital Douglas, la
majorité demeure dans les environs: LaSalle, Verdun, Ville-Émard.
Il y a des centres d'accueil au "south shore", un dans Lachute, un à
Rawdon. Beaucoup de ces patients demeurent près de l'hôpital.
C'est un ghetto peut-être.
M. Sirros: Merci beaucoup.
Le Président (M. Joly): Merci madame. Je vais maintenant
reconnaître M. Trudel, le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue et aussi critique des affaires sociales pour
sa formation. M. Trudel.
M. Trudel: Merci, M. le Président. Très
brièvement, Mme Bishop, je veux vous remercier aussi à la suite
de ce que le ministre vous a indiqué et je n'aurai pas beaucoup de
questions, seulement quelques très brefs commentaires. D'abord, pour
vous remercier aussi de nous avoir présenté votre expertise,
votre témoignage en français. On sent bien l'effort que vous
faites et veuillez croire que du côté de l'Opposition aussi, nous
apprécions vivement l'effort que vous avez fait et ce que vous nous avez
dit comme contenu cet après-midi. Nous avons môme l'impression que
nous allons ramener plus de groupes ou plus d'interventions au niveau
individuel, surtout le vendredi après-midi, face au ministre. Ou vous
êtes une très bonne avocate ou le ministre faiblit le vendredi
après-midi, et heureusement puisque c'est ce qui fait en sorte que nos
questions sont presque annulées parce que le ministre répond
toujours oui à d'excellentes suggestions que vous amenez parce que vous
avez une expérience-terrain.
Là-dessus, il ne me restera qu'une seule remarque à
ajouter: Les ingénieurs sont nécessaires pour les ponts, pour
construire les ponts, le ministre en a pris bonne note, et je suis sûr,
puisqu'il n'a pas dit oui complètement là-dessus, qu'il va
également penser aux techniciens et aux travailleurs qui
réalisent les ponts sans quoi l'oeuvre ne serait pas achevée et
que nos 130 000 travailleurs et intervernants dans le secteur public ont aussi
une expertise qui, pour peu qu'on protège les conflits
d'intérêts directs, pourrait nous permettre de jouir de leur
expertise et de leur expérience au niveau des conseils d'administration
dans chacun des établissements ou des lieux où nous avons
à administrer des soins de santé ou des activités
d'adaptation ou de réadaptation.
Madame, merci beaucoup de votre témoignage et, en termes d'avocat
ou d'avocate, on fera peut-être appel à vous lorsqu'on aura des
causes plus difficiles vis-à-vis du ministre. Merci beaucoup,
madame.
Mme Bishop: Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme Bishop. Au nom des
membres de cette commission, je vous remercie très sincèrement de
votre présentation et de votre vécu.
La commission, ayant accompli son mandat pour la journée, ajourne
ses travaux au mardi 30 juin-Une voix: Janvier.
Le Président (M. Joly): Excusez-moi, au 30 janvier,
à compter de 10 heures.
(Fin de la séance à 17 h 1 )