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(Onze heures trente-six minutes)
La Présidente (Mme Marois): Bonjour. C'est mon
baptême de l'air comme présidente de la commission. Bonjour,
bienvenue aux membres de la commission et aux gens qui vont nous assister dans
notre travail.
J'aimerais d'abord que l'on constate le quorum. Je pense que ça
va, ça ne pose aucun problème. J'aimerais surtout rappeler le
mandat de la commission qui fait que l'on se réunit ce matin: Nous
souhaitons procéder à des consultations particulières et,
donc, tenir des auditions publiques dans le cadre de l'étude du projet
de loi 4, soit la Loi sur la pratique des sages-femmes dans le cadre de
projets-pilotes. Alors, voilà pour le mandat de notre commission.
Est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Non, Mme la Présidente.
Organisation des travaux
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Je crois qu'il y a
la présence, comme prévu par un ordre de la Chambre, de deux
ministres représentant le gouvernement, dont le porteur du projet de loi
et sa collègue, la ministre déléguée à la
Condition féminine... et à la Famille, j'allais le dire; on
m'enlève les mots de la bouche.
Je crois qu'il y a eu entente quant au partage du temps de parole. Je le
rappelle pour être bien certaine que tout cela est clair. D'abord,
évidemment, on s'entend que le ou la ministre - libre à vous de
partager le temps comme vous le souhaitez - prendra 20 minutes pour la
déclaration d'ouverture. De la même façon, les porte-parole
de l'Opposition officielle prendront à leur tour 20 minutes et il est
prévu 10 minutes pour le député indépendant qui
souhaiterait faire des remarques.
Nous sommes ce matin, bien sûr, aux déclarations
d'ouverture et c'est à la reprise de la séance, cet
après-midi, que nous commencerons à entendre les groupes et,
à ce moment-là, on établira aussi les temps qui seront
alloués pour les auditions. D'accord? Est-ce que ça va, Mme la
secrétaire? Il n'y a pas d'oubli?
Mme la secrétaire me souligne qu'il serait peut-être utile
de mentionner l'ordre du jour. Effectivement, après les allocutions qui
sont prévues, nous entendrons, au début de l'après-midi,
l'Association des sages-femmes du Québec; par la suite, la
Fédération des CLSC du Québec et la
Fédération des infirmières et infirmiers du Québec,
pour reprendre au début de la soirée avec le Regroupement de
professionnels en santé communautaire, suivi de la
Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.
Nous ter- minerons les audiences avec la Fédération des
médecins spécialistes du Québec. Pardon, on ne terminera
pas avec eux; s'ajoute, à la toute fin de la soirée,
l'Association des obstétriciens et gynécologues du Québec.
Voilà pour ce qui est de l'ordre du jour prévu pour notre
séance de travail.
Je voudrais souhaiter la bienvenue aux membres de la commission et leur
dire le plaisir que j'ai à assumer cette fonction qui m'a
été dévolue, d'une part, par la connaissance que j'ai d'un
certain nombre de dossiers. Je veux vous dire que ça me fait
particulièrement plaisir que l'on commence avec le dossier des
sages-femmes, puisque j'ai eu - tout le monde le sait - quatre enfants
jusqu'à maintenant et que j'ai été assistée, lors
d'un de mes accouchements, par une sage-femme en présence aussi, bien
sûr, de mon médecin.
Alors, ce sera pour moi un plaisir que de les entendre, d'entendre aussi
d'autres groupes, que l'on puisse aussi imaginer des avenues de solution aux
problèmes qui sont soulevés, puisque quelques-uns sont
soulevés et je puis compter - j'en suis persuadée - sur la
collaboration de l'ensemble des membres de la commission.
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
Déclarations d'ouverture M. Marc-Yvan
Côté
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente. D'entrée de jeu, je veux vous assurer de mon
entière collaboration pour ce projet et pour d'autres qui suivront
puisque, dès janvier 1990, nous aurons à nous réunir
pendant de longues semaines pour entendre les intervenants sur la
réforme proposée par Mme Lavoie-Roux.
Il me fait donc plaisir, Mme la Présidente, de prononcer le
discours d'ouverture de cette commission parlementaire qui, avec la
participation de l'Opposition, devra constituer une étape cruciale pour
l'aboutissement d'un projet qui a subi un long cheminement, tout au long des
dernières décennies.
Depuis le milieu des années soixante-dix, plusieurs groupes,
organismes et individus, tant du monde de la santé, du mouvement
féministe et syndical que d'ailleurs, ont réclamé du
gouvernement de légiférer, afin de légaliser la pratique
des sages-femmes au Québec. Mentionnons plus particulièrement les
colloques "Accoucher ou se faire accoucher", tenus en 1981 dans presque toutes
les régions du Québec, qui ont livré un message clair et
explicite au législateur qui pourrait se résumer ainsi:
L'humanisation des soins entourant la grossesse et la naissance est
une nécessité et l'un des moyens est l'implication dune
pratique de sages-femmes au Québec.
Ces colloques ont été suivis de travaux de plusieurs
comités, dont le comité interministériel sur les
sages-femmes, en 1983, et le comité de travail sur la pratique des
sages-femmes au Québec en 1987. Tous ont recommandé la
légalisation de la pratique de sages-femmes au Québec. Ce sont
ces travaux qui ont conduit, en juin dernier, au dépôt par Mme
Thérèse Lavoie-Roux du projet de loi sur la pratique des
sages-femmes dans le cadre de projets-pilotes.
Mon premier geste, en tant que ministre de la Santé et des
Services sociaux, fut de redéposer ce projet de loi. Je m'associe donc
à un mouvement initié depuis déjà deux
décennies.
Ce projet de loi vise deux objectifs: premièrement, de permettre
la pratique des sages-femmes au Québec et, deuxièmement,
d'encadrer cette pratique en la permettant uniquement à
l'intérieur de projets-pHotes. Une telle expérimentation nous
permettra de voir si la pratique des sages-femmes constitue, effectivement, un
moyen pour améliorer les services entourant la grossesse et la naissance
au Québec.
Pour démontrer le bien-fondé de ce projet de loi,
permettez-moi d'insister brièvement sur les trois points suivants:
premièrement, l'évolution de la périnatalité au
Québec; deuxièmement, l'impact possible de la pratique des
sages-femmes et, troisièmement, les raisons militant en faveur de
projets-pilotes.
Je terminerai en précisant les objectifs que devrait poursuivre
cette commission par ces audiences.
L'évolution de la périnatalité au Québec. Il
faut reconnaître au point de départ que le Québec a
réussi des progrès remarquables dans le domaine de la
santé de la mère et de l'enfant au cours des dernières
décennies. Il s'y est même constitué une place enviable et
enviée sur la scène canadienne et même sur la scène
internationale. Le meilleur exemple de ce progrès est certes la baisse
vertigineuse qu'a subie la mortalité chez les nourrissons, donc dans les
sept premiers jours après la naissance, chez l'enfant, de la naissance
jusqu'à la première année, et chez la mère.
Entre 1965 et 1985, la mortalité des nourrissons et des enfants a
chuté de près de 70 %, pour atteindre 8,2 décès de
nourrissons par 1000 naissances vivantes et 7,2 décès chez les
enfants de moins d'un an. Le Québec affiche, avec l'Alberta, les
meilleurs taux canadiens à ces égards. Sur le plan international,
le Québec se classe parmi les pays les plus performants après la
Suède, la Finlande et le Japon et sa performance est supérieure
à celle de pays tels les États-Unis, la France et
l'Angleterre.
Quant à la mortalité maternelle, la tendance est aussi
nettement à la baisse. Entre 1975 et 1985, la mortalité
maternelle a diminué des deux tiers. Le taux québécois de
1985 (0,2) est plus faible que celui du Canada (0,4) et de l'Ontario (0,7).
Parmi les facteurs responsables de ces diminutions, mentionnons
l'espacement des grossesses, des conditions hygiéniques
supérieures, une meilleure surveillance prénatale, le
développement de la technologie médicale et une plus grande
information des femmes enceintes.
Bien que ces résultats soient encourageants pour le
Québec, les efforts doivent se poursuivre dans les quatre domaines
suivants: le poids à la naissance et la prématurité; la
grossesse chez les adolescentes, chez les femmes de milieux
défavorisés et chez tes femmes des régions
éloignées; l'utilisation des interventions obstétricales
et, quatrièmement, l'humanisation des services entourant la grossesse et
la naissance.
Le poids à la naissance et la prématurité. La
relation entre le poids à la naissance, la prématurité, la
mortalité et la morbidité des nourrissons est bien
établie. Qu'il nous suffise de rappeler que les nouveau-nés de
petit poids, pesant donc moins de 2500 grammes, représentent 70 % des
décès survenant avant le premier mois, présentent deux
fois plus d'anomalies congénitales, ont dix fois plus de risques de
souffrir d'infirmités motrices cérébrales qui influencent
leur développement cognitrf et social et sont plus susceptibles d'abus
physiques et de négligence.
Les nombreuses complications rencontrées chez ces
bébés, dont certains disent qu'ils naissent perdants, justifient
l'insistance que nous voulons mettre sur la réduction des taux de
prématurité et de bébés de petit poids. À
ces égards, le Québec a encore des progrès à
accomplir.
Entre 1965 et 1980, le pourcentage de naissances de moins de 2500
grammes a diminué de 30 %. Mais, depuis 1979, on assiste à une
quasi-stabilité de ce pourcentage, aux environs de 6,3
bébés de moins de 2500 grammes par 100 naissances vivantes. Ce
pourcentage est supérieur à celui du Canada, 5,8 %, et de la
plupart des pays européens. Il est près du double de celui de la
Finlande et de l'Irlande, qui enregistrent les taux les plus bas, soit 3,7 %.
Quant à la proportion des naissances prématurées, à
moins de 37 semaines, elle se maintient aux environs de 6 %. On note toutefois
une légère hausse depuis 1980-1981.
Grossesses chez les femmes à risque. Toujours dans le but
d'améliorer la santé de la mère et de l'enfant, trois
groupes de femmes sont considérés comme socialement à
risque: les adolescentes, les femmes de milieux défavorisés et
les femmes des régions éloignées. Les plus hauts taux de
naissance de bébés de faible poids se retrouvent chez les femmes
de moins de 20 ans. Plus particulièrement depuis 1983, on note une
augmentation des taux annuels de première
grossesse chez les femmes de moins de 20 ans, soft +6 %. L'augmentation
est d'ailleurs plus prononcée chez les moins de 15 ans, soit +26 %. En
plus d'être associée à des problèmes de
santé, la grossesse pose des problèmes à l'adolescente non
encore fixée sur son avenir et dépendante de ses parents. Si elle
est désirée par quelques adolescentes, la grossesse vient souvent
confirmer un échec à la contraception et un manque
d'information.
En ce qui concerne la maternité en milieux
défavorisés, l'environnement physique, le niveau
socio-économique et les habitudes de vie ont des effets sur la
santé de la mère et de l'enfant. Quel que soit l'indicateur
utilisé, la scolarité de la mère, le revenu ou la classe
sociale, on constate toujours plus de prématurité, d'insuffisance
de poids à la naissance, de retard de croissance intra-utérine et
de mortalité dans les classes défavorisées.
Ces clientèles ont une chose importante en commun: le
système de soins, tel qu'il existe actuellement, semble avoir de la
difficulté à les rejoindre. Actuellement, au Québec, il y
a peu de services conçus spécifiquement pour les jeunes.
Malgré les résultats obtenus par les cliniques d'adolescents qui
existent, les établissements hésitent à implanter et
à supporter des services à la jeunesse. Les femmes jeunes, peu
scolarisées ou de bas niveau socio-économique
bénéficient moins de soins prénatals. Elles ont de plus
tendance à consulter plus tardivement et moins fréquemment au
cours de la grossesse.
L'utilisation des interventions obstétricales. Je vous vois
écrire, Mme la Présidente. Je suis à faire faire des
photocopies pour vous en remettre. Je pense que ça facilitera le travail
de tous les membres de la commission.
La Présidente (Mme Marois): Merci. J'aime bien compter
aussi sur mes notes, parfois une remarque ou l'autre.
M. Côté (Charlesbourg): Au cours des
dernières années, l'utilisation de certaines interventions
obstétricales a fait l'objet de nombreuses remises en question.
Aujourd'hui, le dicton "une césarienne un jour, une césarienne
toujours", devient graduellement hors standard. Le recours routinier à
l'épisiotomie et à l'application des forceps n'est plus
acceptable en obstétrique moderne, affirme d'ailleurs la Corporation
professionnelle des médecins du Québec. Or, le taux de
césariennes au Québec a triplé au cours des 20
dernières années. Il se chiffre à environ 19 %, ce qui est
comparable à ce qui se fait sur le continent nord-américain.
Mais, avec des taux de mortalité comparables à ceux du
Québec, certains pays européens ont des taux de
césariennes qui se situent entre 4 % et 12 %.
L'utilisation de forceps a aussi diminué depuis 1981, -8,3 %. On
assiste toutefois à une augmentation parallèle de l'utilisation
des ventouses, ce qui laisse supposer une substitution d'une technique par une
autre.
Le taux d'épisiotomie tend à baisser au Québec
depuis 1981, mais il est demeuré élevé. En 1987,
l'épisiotomie est pratiquée chez les deux tiers des femmes qui
accouchent par voies naturelles. L'Organisation mondiale de la santé
considère qu'un taux acceptable d'épisiotomie ne devrait pas
excéder 20 %.
Bref, en ce qui concerne les interventions obstétricales lors de
l'accouchement, seulement 8 % des femmes ne subissent aucune intervention. Ces
taux d'intervention lors de l'accouchement sont plus élevés que
dans la plupart des pays européens.
Humanisation des soins à l'accouchement. Enfin, au cours de la
dernière décennie, divers groupes de femmes et de parents ont
réclamé une plus grande humanisation des soins entourant la
maternité. Ces demandes ont été à l'origine de
plusieurs changements dans les hôpitaux. Cependant, le
développement des services parallèles s'est poursuivi,
démontrant ainsi qu'il nous faut aller plus loin.
Parmi les raisons évoquées pour le développement
des services parallèles, trois attirent particulièrement notre
attention. Ces services se développent là où les services
périnatals officiels ont mis l'accent sur l'aspect plus technologique
des soins; ces services sont presque exclusivement dispensés en milieu
hospitalier et, troisièmement, là où il y a absence de
continuité des soins, c'est-à-dire des soins qui ne sont pas
assurés par la même personne ou par la même petite
équipe avant, pendant et après la naissance.
Pour la femme, l'assurance de contrôler les
événements, la possibilité d'influencer certaines
décisions, le sentiment de faire partie de l'équipe et
l'assurance de l'implication de la famille l'amènent à vivre une
expérience positive de sa grossesse et de son accouchement.
C'est donc à ces problèmes que doit s'attaquer le
Québec. C'est d'ailleurs dans ce contexte que s'inscrit la
volonté du gouvernement de permettre l'expérience de
projets-pilotes de sages-femmes au Québec. Nous n'avons certes pas la
prétention de laisser croire que les sages-femmes peuvent, à
elles seules, solutionner tous ces problèmes, mais les résultats
obtenus dans d'autres pays nous permettent de croire que les sages-femmes
peuvent contribuer de façon significative à en diminuer leur
importance au Québec.
La pratique des sages-femmes. La pratique des sages-femmes existe dans
presque tous les pays du monde et ce, depuis déjà fort longtemps.
Nous nous sommes toutefois limités aux expériences des
sages-femmes dans des pays aussi, sinon plus développés que le
Canada et le Québec, tels la Finlande, la France, l'Angleterre et
prin-
cipalement les États-Unis.
Dans ces pays, la pratique des sages-femmes a fait l'objet de certaines
évaluations qui, quoique souvent contestables, nous permettent quand
même d'en apprécier les résultats. Il ressort de ces
études que là où elles oeuvrent, seules ou au sein d'une
équipe multidisciplinaire, les sages-femmes contribuent à la
solution de problèmes rencontrés en périnatal ité
et ce, même pour des clientèles défavorisées. Il est
également rapporté que le taux d'interventions
obstétricales sont plus bas lorsque les sages-femmes ont la
responsabilité des accouchements.
En ce qui concerne l'amélioration des taux de mortalité
périnatale et la diminution des taux de naissances
prématurées et de faible poids, nous nous référons
à des études principalement américaines. Destinés
à des clientèles favorisées ou socio-économiquement
à risque, les projets qui ont été examinés, qu'ils
soient de l'État du Kentucky, de la Californie, du Texas ou de
l'Arizona, obtiennent des résultats semblables: les centres où
oeuvrent les sages-femmes affichent des taux inférieurs à ceux
constatés dans leur milieu avoisinant.
Je n'ai certes pas l'intention de vous inonder et de m'inonder moi aussi
de toute une série de chiffres, mais un cas semble
particulièrement remarquable. Le Madera County Hospital de Californie a
mis sur pied un projet expérimental d'une durée de trois ans,
afin de réduire la mortalité néonatale. La
clientèle visée est constituée d'agriculteurs pauvres. Les
intervenants sont des sages-femmes et une équipe médicale. Le
projet a donc été retiré après trois ans. Or,
pendant le temps du projet, le taux de mortalité néonatale est
passé de 23,9 à 10,3 par 1000 naissances. La
prématurité a été réduite. Mais, trois ans
après la fin du projet, le taux de prématurité avait
augmenté et le taux de mortalité néonatale se situait
à 32,1 pour 1000 naissances, soit un niveau supérieur à
celui constaté avant la réalisation du projet.
L'adaptation des approches et services à des clientèles
cibles est illustrée par des projets impliquant des sages-femmes
destinés aux adolescentes enceintes, à des femmes enceintes
provenant de milieux défavorisés ou habitant des régions
périphériques ou éloignées. À cause de leur
situation, ces femmes constituent une clientèle à risque social
et médical. Les résultats de ces projets, qu'ils soient de la
Caroline du Sud, du Wisconsin ou de Povungnituk dans le Nord du Québec,
indiquent que, malgré ce potentiel de risque, des taux plus bas que ceux
du milieu de référence sont constatés pour les principaux
indicateurs en périnatalité, soit la mortalité et le petit
poids, de même que des taux moindres au chapitre des interventions
obstétricales.
On peut apporter ici deux exemples: l'Adolescent Obstetric Clinic de la
Caroline du Sud et le North Central Bronx Hospital de New York. Dans le premier
cas, on y reçoit une clientèle d'adolescentes enceintes
socio-économiquement défavorisées. Les sages-femmes
coordonnent une équipe multidisciplinaire composée
d'obstétriciens, de diététistes, de travailleurs sociaux
et d'infirmières. On a constaté, lors d'une recherche avec des
groupes témoins d'adolescentes, que les clientes de la clinique avaient
des taux de complication, soit anémie, pré-éclampsie,
bébé de faible poids et mortalité périnatale, plus
bas que chez les groupes témoins. Le North Central Bronx Hospital,
situé dans l'un des quartiers les plus défavorisés de la
ville de New York et où travaillent des infirmières sages-femmes,
dessert une clientèle ethnique sujette à des problèmes
obstétricaux. L'étude révèle un taux de
mortalité périnatale de 14,5 pour 1000 naissances comparativement
à 15,9 pour la ville de New York et un taux de césariennes de 9
%.
Concernant l'impact du travail de la sage-femme en regard des
interventions obstétricales, notons ici une étude de
l'Organisation mondiale de la santé qui indique que le taux
d'interventions obstétricales est moindre dans les pays où la
pratique des sages-femmes est bien implantée. Cette même
étude met en évidence le fait que les taux de mortalité
périnatale les plus bas sont observés dans les pays où les
taux de césariennes sont inférieurs à 10 %.
Il nous apparaît donc important d'apprécier l'impact de la
pratique des sages-femmes en réponse aux problématiques
soulevées en périnatalité. C'est dans ce contexte que nous
proposons la réalisation de projets-pilotes, vu le rôle que les
sages-femmes peuvent assumer dans la prestation des soins et services en
périnatalité. Il serait, en effet, approprié
d'expérimenter cette approche avant de procéder à une
reconnaissance légale de la pratique des sages-femmes.
Pourquoi, à ce moment-ci, des projets-pilotes? L'approche des
projets-pilotes s'inscrit dans un cadre évaluât if qui devrait
permettre de voir comment la sage-femme s'intègre à
l'équipe périnatale actuelle, de préciser le champ de
pratique que peut ou pourrait occuper la sage-femme et la formation qui lui
serait en conséquence nécessaire, et surtout, tel que je viens de
le mentionner, d'apprécier l'impact de la pratique des sages-femmes en
réponse aux problématiques vécues en
périnatalité.
À cet effet, les résultats des expériences
étrangères citées précédemment sont
révélateurs, mais ils soulèvent aussi deux questions. On
peut douter de la fiabilité des données rapportées,
puisqu'il n'y a pas eu de validation à la source de celles-ci ni de la
méthodologie de recherche. On peut également se demander si des
résultats obtenus ailleurs sont transposâmes au Québec.
J'en conclus que ces expériences nous fournissent des indications mais
non des certitudes. En ce sens, il devient important de valider l'impact de
la pratique dans le contexte québécois.
Le nombre de projets est limité à huit. C'est un nombre
peu élevé afin de garder le contrôle de l'expérience
et de ne pas procéder dans les faits à une implantation
déguisée de la pratique des sages-femmes. C'est aussi un nombre
suffisant puisqu'il permet la réalisation de projets en milieux urbain
et rural ainsi que selon des modes d'organisation différents, tels qu'en
centre hospitalier ou dans des lieux qui lui sont rattachés. Ces projets
devraient aussi permettre de valider un cadre de pratique visant à
assurer la sécurité aux personnes qui font le choix d'une
approche différente.
Au terme de cette expérience, dans cinq ans, le gouvernement sera
appelé à se prononcer sur la légalisation de la pratique
des sages-femmes. Il le fera en tenant compte des conclusions à tirer
des projets-pilotes quant à l'intégration de la sage-femme au
sein de l'équipe et aussi en considérant les résultats
obtenus quant à l'atteinte des objectifs en
périnatalité.
La Présidente (Mme Marois): J'imagine, M. le ministre, que
vous en êtes à vos conclusions?
M. Côté (Charlesbourg): Effectivement. Donc...
La Présidente (Mme Marois): Pas de problème.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente, de votre niveau de compréhension. On vous en assure
tout autant.
Je voudrais en terminant, Mme la Présidente, vous signifier qu'en
tant que ministre de la Santé et des Services sociaux il ne fait aucun
doute que nous aurons, au Québec, une loi permettant la pratique des
sages-femmes dans le cadre de projets-pilotes. Il ne fait aucun doute non plus
que nous aurons, au Québec, des projets-pilotes. Il importe toutefois de
préciser le cadre dans lequel évolueront ces projets-pilotes,
afin qu'ils puissent clairement indiquer l'apport de la pratique des
sages-femmes en périnatalité au Québec tout en
fournissant, tant aux sages-femmes qu'à leur clientèle, le
support médical approprié. (12 heures)
C'est sur ce cadre que j'invite particulièrement les membres de
cette commission à se pencher. Au cours des quatre prochains jours, nous
aurons l'occasion d'entendre les commentaires et les recommandations de divers
groupes concernés par cette pratique: les sages-femmes, les
médecins, les infirmières, les organismes gouvernementaux et
aussi les associations féminines. Je les invite donc à se
prononcer, à partir du libellé du projet de loi, sur les aspects
suivants: le champ de pratique des sages-femmes, la reconnaissance des
projets-pilotes et les modalités organisationnelles. J'aimerais
également connaître les articles du projet de loi qui rencontrent
leur accord et aussi ceux sur lesquels ils ont des réserves ou une
opposition. Dans ce dernier cas, il serait intéressant qu'ils soumettent
à cette commission des alternatives.
En terminant, Mme la Présidente, je suis convaincu qu'avec la
collaboration des membres de l'Opposition de même que de la
majorité gouvernementale, ainsi qu'avec l'ouverture d'esprit dont on a
besoin pour être capable d'y arriver, nous saurons trouver le juste terme
pour que cette pratique soit expérimentée dans huit projets
à travers le Québec et qu'on puisse donner la chance au coureur,
de part et d'autre. Merci bien.
La Présidente (Mme Marois): Je le souhaite avec vous.
Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
Avec l'assentiment des membres de la commission, nous permettrions au
député de Notre-Dame-de-Grâce de présenter son
intervention, compte tenu que le leader du gouvernement est actuellement
à l'Assemblée en train de terminer son discours. Il devrait
pouvoir se joindre à nous d'ici une dizaine de minutes. Est-ce qu'il y a
objection à ce que le député de Notre-Dame-de-Grâce
fasse maintenant son intervention? Cela va? Alors, s'il vous plaît, M. le
député.
M. Gordon Atkinson
M. Atkinson: Merci, Mme la Présidente. L'existence des
sages-femmes remonte au tout début de notre civilisation. Avant
l'entrée en scène de la profession médicale,
c'étaient les femmes elles-mêmes qui s'entraidaient durant la
grossesse et l'accouchement. Les efforts de ces femmes "sages", en ce qui
concernait ce processus merveilleux qu'est la naissance d'un enfant, ont
certainement amélioré la vie de nos ancêtres.
Les sages-femmes peuvent être un atout important dans notre
système de santé. Au point de vue économique, les
coûts d'un accouchement chez soi sans l'intervention d'un médecin
sont nettement inférieurs à ceux de l'accouchement traditionnel.
Dû au manque d'espace qui existe aujourd'hui dans nos hôpitaux,
nous devons sérieusement examiner toute proposition qui pourrait
améliorer cette situation.
There are quite possibly some of the deputies sitting today in this
Legislature who were delivered without the assistance of a medical doctor but
through the intervention of a midwife. Most assuredly some of the parents of
the current members of this Assembly were indeed given the breath of life by a
sympathetic midwife.
The medical advances in the field of obstetrics have been astounding.
The infant
mortality rate has decreased dramatically but even one newborn death is
one too many. And this is the dilemma facing the introduction of the midwife
system. We should not, however, be fearful of facing the future using all the
skills of the medical practitioner in conjunction with midwifery in a strict
controlled environment.
The first obvious course of action would be to licence midwives to
operate only under the supervision of a hospital surrounding. That, however,
does not take into consideration that many remote communities of Québec
do not have an easy access to the skills of a modern hospital or immediate
access to an obstetrician.
Il va sans dire que les femmes du Québec ont droit au meilleur
service médical que peut leur fournir la science moderne. Mais nous
devons aussi regarder l'aspect pratique, surtout en ce qui concerne les
services dans les petits villages et les régions isolées. Un
système qui incorpore les sages-femmes nous semble acceptable et
pratique. Mais ce système doit être surveillé par des
responsables choisis par la communauté ainsi que par des corporations
professionnelles dans le domaine de la santé. De plus, le gouvernement
doit s'assurer que les sages-femmes reçoivent un entraînement du
plus haut calibre.
That being said, it is also incumbent upon the medical profession not to
close its eyes and ears to the reality of the world that surrounds it.
Qualified doctors are not always available to service the needs in the more
remote communities. Hence the need for an additional support-arm that would
extend the health care system beyond the strict confines and jurisdiction of
doctors. Such a system is now before this Legislature, the adoption of a bill
allowing midwives to assist in the delivery of a healthy child.
Même dans des cas de naissance difficile, les sages-femmes peuvent
être très utiles. J'ai entendu l'histoire d'une sage-femme qui a
sauvé la vie d'un bébé né avec le cordon ombilical
autour de son cou. Après avoir enlevé le cordon, la sage-femme
lui a donné de l'oxygène pour le ranimer. Le nouveau né
était en bonne condition à l'arrivée de l'ambulance qui
avait été appelée.
Le but de ce projet n'est pas de diminuer le rôle de la profession
médicale dans l'obstétrique, mais de simplifier le processus des
accouchements normaux. Reconnaître les sages-femmes et le rôle
qu'elles ont joué depuis l'antiquité, c'est reconnaître la
réalité d'aujourd'hui.
Midwives have been and will continue to be. if controlled and supervised
with the life of the mother and the child foremost in the minds of the
Government and the medical practitioners, an asset to the present system in
which babies are born, more often than not, without the intervention of a third
party.
Sûrement qu'à l'intérieur de notre vaste
système de santé il doit y avoir de la place pour ces femmes qui
ont desservi l'humanité durant des siècles et qui ont
accouché des milliards d'enfants sans aucun problème.
It must not, however, become a license for the abuse of the prerogatives
of the medical profession, which is dedicated to the preservation of life
itself.
The five-year pilot project in the major hospitals of Québec
should be initiated with a further extension of the program to be undertaken
sometime within this five-year period in order to better serve the needs and
health of our mothers-to-be, in the more remote regions of Québec.
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce. Je céderai maintenant
la parole au leader de l'Opposition et critique en matière de
santé et de services sociaux.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Je vous remercie, Mme la Présidente. Je
m'excuse, je devais faire mon exposé sur le message inaugural. Vous me
permettrez tout d'abord de souhaiter la bienvenue aux groupes qui
défileront devant nous; je pense que nous en aurons une vingtaine. Je
dois vous dire que pour moi, c'est un genre de vieux rêve qui se
réalise, puisque je me souviens qu'en 1984, au congrès de
l'Association des sages-femmes, nous avions lancé cette idée,
précisément, d'une reconnaissance de cette profession. Et comme
ministre, à l'époque, je m'étais engagé
précisément à reconnaître la profession de
sage-femme, moyennant certaines conditions. Donc, il n'y a pas grand nouvelle
dans ça, sauf que de considérer que le projet de loi, à
mon point de vue, est un suçon, est une béquille temporaire, et,
plus que ça, est un outil qui risque de faire, à moyen terme,
disparaître les sages-femmes.
Je vais m'expliquer, parce que je ne suis pas sûr que tout le
monde partage mon point de vue. À mon point de vue, tel que
conçu, c'est un projet-pilote, d'abord, dans huit centres hospitaliers.
Où? Sans doute qu'on pourra questionner le ministre qui nous dira les
endroits qu'il favorisera. Est-ce que ce sont des centres universitaires?
Est-ce qu'il favorisera des régions différentes au Québec?
Est-ce qu'il pourra permettre, en bout de ligne, que ce ne soit pas
nécessairement sous la tutelle d'un hôpital, parce qu'on verra ce
que viendront nous dire les centres hospitaliers. C'est très
différent. Il y a un article dans la loi qui risque de créer
tellement de confusion et qui risque peut-être, à mon point de
vue, d'étouffer toute cette expérience, c'est l'article 15. Je
sais
qu'on n'en est pas au moment de l'étude article par article, mais
c'est là qu'on retrouve peut-être une des clés de
l'argumentation, à savoir la responsabilité.
Dans le projet de loi, on dit très bien jusqu'où va la
responsabilité en cas d'une grossesse à risque. Mais dans le cas
d'une grossesse naturelle, on n'identifie pas qui a la responsabilité.
Et ça, c'est aussi important pour une sage-femme de le savoir avant que
pour un centre hospitalier, pour une administration, ou pour tout le
système, parce que notre système est maintenant
judiciarisé avec nos législations, de sorte qu'il y a des
poursuites possibles; et on le sait, il y en aura même une la semaine
prochaine, je le sais.
Donc, il nous faut clarifier nos positions dans le projet de loi pour
bien Identifier qui est responsable de quoi et c'est là que je dis que
le projet de loi demeure extrêmement dangereux. Peut-être que les
sages-femmes, nous diront certains groupes, vaut mieux ça que rien. J'en
al entendu dire ça. Mais je peux vous dire que sous la
responsabilité... Une sage-femme, est-ce que c'est une femme qui aura la
responsabilité de l'accouchement dans le cas d'une grossesse qui ne
présente aucun risque, qui aura la responsabilité de A à Z
à ce moment-là, ou si elle sera considérée, par
exemple, dans le plan du ministre ou dans les projets du ministre, comme
étant une professionnelle au service du centre hospitalier,
dépendant du centre hospitalier, sous la responsabilité du centre
hospitalier? A ce moment-là, qui prend fait et cause? Le centre
hospitalier, ou si c'est une professionnelle qui a la responsabilité de
A à Z? C'est très différent comme approche.
Je pourrais vous donner un exemple concret. Si la sage-femme, on veut
que ce soit une femme qui ait la responsabilité de l'accouchement parce
que ça ne présente aucun risque, c'est elle qui, de A à Z,
donne les ordres, les directives, et conduit l'accouchement jusqu'à
terme. Mais si c'est une professionnelle au sein d'un centre hospitalier, elle
relève des professionnels, des cadres de l'institution. Tout ça
devra être clarifié. C'est très important que ça le
soit à part ça, parce qu'il y a de la responsabilité qui
est accordé à ça. Est ce que c'est une police d'assurance
qu'on fera prendre à une sage-femme ou si c'est le centre ou le
ministère qui prendra fait et cause pour les sages-femmes? Voilà
autant de questions qu'à mon point de vue il est très important
de régler parce que, si on ne les règle pas au départ et
si on va continuellement d'un problème à l'autre, au bout de cinq
ans, on dira: Expérience négative, projets-pilotes
négatifs, on met un gros X là-dessus et on ne s'en occupe pas.
Pourtant, Dieu sait que ce n'est pas ça que doit rechercher le
gouvernement, je pense, ce n'est pas ça que doit rechercher le
législateur quand il légifère. Je pense qu'on a trop long-
temps considéré l'accouchement au Québec comme quelque
chose de médical, d'exclusivement médical. On n'a qu'à
aller dans les réserves indiennes, chez les Inuit, on sait qu'il y en a
des sages femmes. Je suis né d'une sage-femme et je ne suis pas mort.
J'aurais peut-être avantage à être refait un peu, mais je ne
suis pas mort.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Ça n'enlève rien. Mes frères
et soeurs, on est tous nés d'une sage-femme. On vivait de même
dans nos petits villages à l'époque et ce n'est pas si loin que
ça. Cette tradition-là a changé, on a pris des
précautions, on a médicalisé l'accouchement, on a fait en
sorte qu'aujourd'hui on sait d'avance si ce sera un gars ou une fille qu'on
aura, si on veut le savoir, si le bébé se présente bien,
etc. Tout ça, c'est sûrement bon, mais je pense que le
côté fondamental qu'on veut faire ressortir, c'est l'humanisation
de l'accouchement, du processus de maternité. C'est ça qui
m'avait fait adhérer spontanément, au moment où
j'étais ministre de la Santé et des Services sociaux, à la
profession de sage-femme, c'est toute la dimension humaine qu'il faut
ajouter.
Certains centres hospitaliers ont compris, ils ont même des
chambres de maternité qui sont beaucoup mieux équipées
maintenant et ou tout le monde peut participer. Par contre, on voit aussi - et
j'ai hâte d'entendre les médecins - de plus en plus de
gynécologues qui ne veulent plus en faire. Il y a des omnis qui ne
veulent plus en faire sous prétexte que leur police d'assurance
coûte tellement cher que ce n'est plus payant s'ils n'en font pas
à un rythme assez imposant. Durant ce temps, qui se retrouve seule?
C'est souvent la femme. Avec le type de famille que nous avons
présentement au Québec, de plus en plus, il ne faut pas se cacher
les réalités, il y a de plus en plus de familles monoparentales
et les femmes se retrouvent démunies, personne. Moi, je considère
que c'est une dimension qu'il faut rechercher. C'est l'humanisation du
processus de maternité comme tel.
Donc, nous allons avoir les yeux et les oreilles grands ouverts pour
écouter ce que les groupes nous diront. Nous n'avons pas l'intention de
bloquer un projet de loi pour le plaisir de le bloquer, mais non plus
d'accepter un projet de loi qui ne serait que de la poudre aux yeux, qui ne
serait qu'un projet de loi qui donne l'impression d'avoir une grande
sensibilité mais qui, par son libellé actuel, risquerait
d'être plus négatif que positif à la fin de
l'expérience. Et nous allons travailler fort sur son contenu. Nous
allons faire en sorte que cette expérience qu'on veut vivre soit une
expérience valable, une expérience, bien sûr, qui sera
suivie selon certaines normes, selon un certain encadrement, mais ce n'est pas
vrai qu'on va voter pour une
expérience qui, à toutes fins utiles, ne donnerait peu ou
pas d'autonomie aux sages-femmes.
La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le leader de
l'Opposition. Est-ce que Mme la députée des
Chutes-de-la-Chaudière a quelque chose à ajouter?
Mme Carrier Perreault: Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Marois): Ne vous inquiétez pas
trop, il prend bien la voix.
Mme Denise Carrier-Perreault
Mme Carrier-Perreault: Mme la Présidente, M. le ministre,
mesdames et messieurs, membres de la commission. De mon côté,
c'est avec beaucoup d'enthousiasme que je me joins à mon
collègue, le député de Joliette, pour prendre part
à ces consultations particulières portant sur la Loi sur la
pratique des sages femmes dans le cadre de projets-pilotes. Cette loi comme
nous le savons, est attendue par une importante partie de la
collectivité québécoise, et ce, depuis longtemps.
En tant que porte-parole officielle de l'Opposition en matière de
condition féminine et étant nouvellement élue dans ce
Parlement, je me ferai un devoir d'écouter attentivement tous les
intervenants et intervenantes qui viendront aujourd'hui et au cours des
prochains jours nous présenter leurs recommandations à
l'égard de ce projet de loi. Ayant à coeur le bien-être des
femmes du Québec, je tenterai évidemment de mesurer la pertinence
de cette loi et d'identifier les possibilités qu'elle offre ainsi que
les limites qu'elle impose. le projet de loi sur lequel nous nous penchons
suscite des réactions divergentes, qu'elles proviennent du milieu des
femmes, des sages-femmes, ou du corps médical québécois.
Heureusement, les groupes auront la possibilité de se faire entendre et
pourront ainsi éclairer les membres de cette commission à
plusieurs égards Si les associations, fédérations ou
corporations peuvent, au cours de cette consultation, faire connaître
leur opinion aux membres de cette commission, il en va tout autrement pour les
hommes et les femmes qui choisissent de donner la vie, c'est-à-dire les
parents québécois. C'est donc dans cet esprit que je me permets
de rappeler aux membres de cette commission les résultats d'un sondage
effectué par la firme Léger & Léger, rendu public le
22 avril 1989, et dans lequel on apprenait que 80, 2 % de la population adulte
du Québec souhaite la reconnaissance officielle des sages-femmes et que
60, 5 % des femmes aimeraient pouvoir compter sur la présente d'une
sage-femme si elles avaient à vivre un accouchement.
De plus, je désire rappeler que ce projet de loi n'arrive pas
à l'improviste. Cette question, en plus d'avoir fait l'objet
d'études lors du dernier mandat du Parti québécois, a
donné lieu à la formation d'un comité de travail sur la
pratique des sages-femmes qui rendait son rapport public en août 1987. Il
recommandait entre autres que différentes possibilités
d'implantation de la pratique des sages-femmes dans le système actuel
soient expérimentées et évaluées. Le Conseil des
affaires sociales et de la famille faisait également connaître son
point de vue à ce sujet en janvier 1988, recommandant que soient mis en
place des projets-pilotes dans différents milieux auprès de
clientèles différentes et qu'à cette fin les
projets-pilotes soient développés dans des centres hospitaliers,
CLSC et maisons de naissance. Le Conseil faisait aussi d'autres recommandations
dont nous pourrons faire état au cours de cette consultation. C'est avec
ces données en tête que je m'appliquerai à écouter
très attentivement tous les propos émis par les Invités de
cette commission. Je souhaite vivement que ce travail en soit un de
collaboration entre les membres de cette commission et les représentants
des différents groupes sociaux. J'espère sincèrement que
le travail de cette commission permettra au gouvernement de prendre les bonnes
décisions dans ce dossier si important pour les hommes et les femmes du
Québec.
La Présidente (Mme Marois): Merci, Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière. Est-ce qu'il... Oui,
Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, vous auriez
souhaité intervenir? Cela me prend le consentement...
Mme Harel: La règle d'alternance va sans doute
amener..
La Présidente (Mme Marois): Non, le temps n'est pas
terminé. Si vous le souhaitez et si vous le permettez... Il nous reste,
combien? Il nous reste sept minutes, alors, si vous en preniez quatre ou
cinq.
Mme Harel: Je serai très brève parce que.
M. Chevrette: Vous avez été bons pour nous.
Mme Harel:... j'imagine que vous êtes tellement bons pour
nous que je vais...
La Présidente (Mme Marois): un instant cependant, mme la
députée. il n'y a pas d'objection de votre côté
à ce que mme la députée soit entendue? merci.
Mme Louise Harel Mme Harel: Merci de votre consentement.
C'est avec un intérêt très très grand que |e
souhaite pouvoir épisodiquement suivre les travaux de votre commission
parlementaire sur cette question des sages-femmes qui m'intéresse au
plus haut point, malgré que d'autres responsabilités
m'amènent à siéger à d'autres commissions
parlementaires.
Je remercie mon collègue, le député de Joliette. En
écoutant les interventions du ministre responsable du dossier et celles
du porte-parole pour l'Opposition, cela me rappelait la même commission
que nous tenions ici sur un tout autre sujet, celui du patrimoine familial, au
printemps dernier, et où de nombreux éditorialistes avaient fait
état qu'un sujet aussi important ne pouvait pas, disaient-ils,
être discuté qu'entre deux femmes: l'une étant ministre et
l'autre étant porte-parole. Là, je me disais que nous aurons
peut-être l'occasion - sans doute pas -de lire demain des
éditorialistes mettant en cause le fait qu'un tel dossier puisse
être géré, en fait, animé lors de nos travaux
parlementaires par deux hommes. Je ne le fais pas moi-même, mais je pense
qu'il est utile de rappeler à ce moment-ci de nos travaux que si tout le
monda naît et meurt, il n'y a toujours que les femmes qui accouchent.
S'il y a deux gestes les plus naturels au monde, c'est évidemment de
naître et de mourir et, pourtant, ces gestes, qui sont les plus naturels,
ont malheureusement très souvent été
détournés de leur fin.
Quand j'entendais mon collègue, le député de
Joliette, rappeler que l'accouchement est parfois considéré comme
un acte médical, je veux lui signaler que la loi elle-même de 1973
considère l'accouchement comme faisant partie de l'exercice de la
médecine. Je vous lis l'article 31 de cette loi qui dit ceci: "Constitue
l'exercice de la médecine tout acte qui a pour objet de diagnostiquer ou
de traiter toute déficience de la santé d'un être humain -
et suit la nomenclature - notamment, la pratique des accouchements". C'est
l'objet même des dispositions légales dans notre
société. On en est... On a, je crois, perverti ces gestes
jusqu'à les écarter de leur sens premier. Je voulais simplement
le rappeler, parce que l'accouchement n'est pas plus un acte médical que
la mort et les rasages, les lavements, les étriers, les forceps,
l'épisiotomie qui ont été l'expérience des femmes
de ma génération qui ont accouché et les ont
amenées pour la majorité d'entre elles à souhaiter un
changement profond dans la conception même qu'on se fait de ces gestes
qui sont évidemment les expériences humaines les plus profondes
que l'on puisse vivre. C'est dans cette optique évidemment, Mme la
Présidente, que je souhaite qu'on n'oublie jamais qu'il s'agit
essentiellement du début de la réappropriation par les femmes du
Québec de ce que bien d'autres femmes dans bien d'autres
sociétés ont déjà acquis: la réappropriation
de ce geste qu'elles ont, elles d'abord, à déci- der.
Je ne pensais pas, et c'est depuis peu que j'ai pu vérifier, que
la pratique des sages-femmes pourrait être poursuivie comme
illégale, puisque c'est considéré comme un acte
médical. Alors, est-ce qu'il est même envisageable qu'une femme
puisse être interdite de choix quant à ce geste fondamentale qui
est de son accouchement?
Évidemment, Mme la Présidente, on a un grand bout de
chemin à faire pour permettre aux femmes du Québec de se
réapproprier leurs accouchements. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Marois): Merci, Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Si vous me permettez, il nous
reste deux minutes, quelques commentaires seulement. J'écoutais le
ministre de la Santé et des Services sociaux faire état d'un
certain nombre de données et, dans le fond, ce qu'il faut retirer, je
dirais, de toutes les expériences qui ont été
vécues, des expériences que les sages-femmes elles-mêmes
nous citent, c'est de dire: On ne veut pas humaniser seulement le geste
spectaculaire, parce que ça en est un l'événement
spectaculaire qu'est l'accouchement, mais c'est tout ce qui entoure, tout oe
qui précède et ce qui suit l'accouchement. Souvent, justement,
les médecins se sont préoccupés de
l'événement lui-même qui est - et, la député
d'Hochelaga-Maisonneuve l'a rappelé à juste titre - une
réalité que vivent les femmes assistées par des personnes
qui veulent bien les aider, mais c'est la femme qui est la première
à procéder à l'accouchement, on en conviendra.
Mais c'est tout le processus qui précède cela, donc, le
suivi de la grossesse et ce qui suit la grossesse qui permet, justement,
d'aller vers des gens qui autrement ne donneraient pas naissance à
certains enfants, qui, d'autre part, pourraient donner naissance a des enfants,
mais dans des conditions et des circonstances qui font en sorte que cet
enfant-là risque d'être handicapé loudement et pour toute
sa vie. C'est à cela que le ministre référait, lorsqu'il
nous donnait les Informations et des données. Je pense qu'on ferait
fausse route - c'est ce que j'aimerais rappeler aux membres de la commission -
si on ne s'attardait qu'à l'événement qui est
l'accouchement qui est, bien sûr, celui le plus clair, le plus
évident et qu'on oubliait le rôle qu'ont joué ou qu'on
souhaite voir jouer aux sages-femmes tout au long de la grossesse avant et par
la suite, aussi.
Alors, je vous remercie de l'attention qui a été
accordée aux interventions, de part et d'autre. Nous sommes prêts
à suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi
où nous procéderons à l'audition des groupes qui sont
présents ici. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 25)
(Reprise à 15 h 7)
La Présidente (Mme Marois): Si vous me le permettez, la
commission des affaires sociales va reprendre ses travaux là où
elle les avait laissés. Avant que nous nous engagions dans l'audition
des différents groupes qui veulent présenter différents
points de vue, je rappelle au monde de la commission qu'on s'est entendus - et
]e m'adresse aussi aux groupes qui vont présenter des mémoires -
qu'environ une vingtaine de minutes étalent allouées à
l'exposé de l'organisme pour la présentation des mémoires.
Quand je dis "environ", si en 15 minutes vous pouvez le faire, ça va.
Si, par contre, ça vous prend 22 minutes, on va vous écouter
jusqu'à 22 minutes. De la môme façon, entre les partis, II
y a des temps sur lesquels on s'est entendus, c'est-à-dire qu'on
prévoit une quarantaine de minutes pour des questions, des
échanges de vues avec les gens qui vont avoir présenté
leur mémoire, et ce temps se répartissant le plus
équttablement entre les partis, laissant aussi au député
de Notre Dame de Grâce, qui siège comme indépendant, la
possibilité, à l'occasion, de poser une question ou l'autre.
Si on est d'accord, si les membres de la commission sont d'accord,
j'inviterais, à ce moment-ci, l'Association des sages-femmes du
Québec à venir nous faire part de son point de vue. Alors, vous
prenez place dans les fauteuils qui sont là. J'aimerais que la
porte-parole de l'organisme se présente et présente les personnes
qui l'accompagnent, s'il vous plaît. Vous ne vous préoccupez pas
des micros, tout ça fonctionne tout seul. Il y a des gens qui nous
aident et puis qui s'occupent de nous.
Une voix: Merci
Auditions
La Présidente (Mme Marois): Alors, vous vous
présentez et vous présentez les personnes qui vous
accompagnent.
Association des sages-femmes du Québec
Mme Couillard (Lucie): D'accord. Mme la Présidente de la
commission, M. le ministre de la Santé, messieurs les ministres,
messieurs et mesdames les députés, mon nom est Lucie Couillard,
je suis vice-présidente de l'Association des sages-femmes du
Québec, justement, et j'aimerais vous présenter mes
collègues. Nous sommes fières de représenter, cet
après-midi, notre association.
D'abord, à ma gauche, Mme Marcelle Rousseau, présidente
actuelle de l'association. Marcelle est infirmière de formation, elle a
travaillé trois ans en obstétrique à Montréal avant
de poursuivre ses études de sage-femme en
Angleterre. Au cours de huit années passées en Afrique,
elle a eu l'occasion de pratiquer la profession nouvellement acquise dans des
maternités de brousse, dans un centre hospitalier de 200 lits dont elle
avait la charge et même dans un camion devenu, pour l'occasion, une
clinique prénatale mobile. Bilan sommaire: 700 à 800 suivis de
grossesse et 400 nouveau-nés vigoureux.
Depuis sa rentrée au pays, II y a tout juste 20 ans, elle
enseigne l'obstétrique à des étudiantes infirmières
qu'elle accompagne en centre hospitalier pour la totalité de leur stage.
Poursuivant ses études au niveau de la maîtrise en
éducation, elle a fait partager son enthousiasme pour les soins
mère-enfant à ses professeurs à travers ses travaux
orientés vers un projet de mise à jour et de rehaussement des
connaissances destinées à des sages-femmes désireuses de
pratiquer leur art chez nous. La recherche d'un moyen d'offrir des stages
pratiques l'a amenée à préparer un projet-pilote à
double visée: L'intégration des sages femmes dans un centre
hospitalier qui serait apppelé à devenir un milieu de stage pour
que les sages-femmes se réapproprient les gestes importants de leur
profession.
À ma droite, Mme Gertrude Lavoie, actuellement secrétaire,
nouvellement secrétaire, qui était présidente de
l'association - les gens de Québec la connaissent bien - jusqu'à
il y a quelques semaines. Alors, Mme Lavoie est infirmière sage-femme
aussi. Elle possède une expérience diversifiée en milieu
hospitalier et communautaire. Ses deux ans de pratique en milieu rural
péruvien lui ont permis d'instaurer le suivi des femmes enceintes et des
nourrissons. Elle y a été responsable de 250 accouchements un
plus du répondre aux urgences d'un poste sanitaire isolé. A son
compte à Québec depuis janvier 1983, elle a effectué 300
suivis de grossesse, assisté 180 mères lors de leur accouchement
à domicile et accompagné les 120 autres à l'hôpital.
À cause de la situation actuelle au Québec, toutes ses clientes
ont été suivies parallèlement par des médecins ou
des obstétriciens. N'est-ce pas tout de même la preuve vivante que
la collaboration entre médecins et sages-femmes n'est pas une mission
impossible?
Mme Lavoie travaille au sein de l'Association des sages-femmes depuis
1981. Elle est co-auteure d'un projet-pilote de maisons de naissance
intitulé "Centres de maternité de Québec". Ce projet,
logé à proximité d'un hôpital, où la
collaboration avec les services médicaux existants a déjà
été manifestée, deviendrait le lieu d'une
recherche-action. À chaque année, une centaine de femmes, dont la
grossesse serait considérée comme normale, auraient l'occasion de
vivre dans un endroit, avec un suivi de grossesse, une préparation, un
accouchement et un suivi postna-
tal.
Enfin, moi-môme, qui suis d'abord mère, comme d'ailleurs
mes deux compagnes, Infirmière spécialisée en
obstétrique et sage-femme aussi depuis 1964. Mes expériences de
pratique sage-femme se sont déroulées surtout dans le Grand-Nord,
de la pointe de Terre-Neuve jusqu'au Yukon, et aussi en Afrique de l'Ouest, sur
une période d'environ douze ans. J'ai également fait de
l'enseignement aux étudiantes Infirmières, enseignement de
l'obstétrique, et à des infirmières licenciées qui
se préparaient à travailler dans le Grand-Nord. J'ai eu, pendant
quelques années, des responsabilités en ce qui concerne
l'organisation des soins de santé primaires et des
responsabilités en gestion et en évaluation de projets de
santé en pays en développement. J'ai même travaillé
avec le gouvernement du Québec à la direction Afrique sur un
projet de santé en Afrique. Enfin, j'ai eu aussi le grand plaisir
d'accueillir au moins 250 nouveau-nés, 250 beaux accouchements normaux,
me permettant de continuer à penser, avec les sages-femmes et les
femmes, qu'avec un bon suivi de grossesse, jusqu'à preuve du contraire,
un accouchement demeure un phénomène physiologique et naturel. Je
suis co-auteure du projet énoncé par Mme Lavole. Depuis trois
ans, je travaille au sein de l'Association. Les tâches y sont tout aussi
variées qu'intéressantes et quelquefois imprévisibles,
comme se retrouver à l'Assemblée nationale.
Bien. Au nom de tous les membres de l'Association des sages-femmes, je
remercie le gouvernement d'avoir mis sur pied cette commission parlementaire.
Je tiens à souligner l'aspect démocratique de ce geste envers la
population, et particulièrement envers les femmes et les couples qui
réclament, depuis plus de dix ans, l'accès à une approche
plus naturelle de la maternité, englobant les aspects psychologiques et
sociaux du devenir parents. Sans plus tarder, je vous parlerai de nos attentes
et de nos recommandations relatives à ce projet de loi 4. Mais, avant de
m'engager dans cette brève communication, j'oserais vous demander 40
secondes d'attention pour écouter, en ce temps particulier de
l'année, l'extrait d'une histoire racontée aux enfants pour
Noël. "Beaucoup de paille jonchait le sol si bien qu'ils purent en faire
un beau lit douillet. Ils s'endormirent très vite. Mais, en plein milieu
de la nuit, Marie s'éveilla: "Joseph, j'ai très mal au ventre.
Éveille-toi, je pense que le bébé arrive". Et le
bébé naquit. Il avait de petits cheveux duveteux et des doigts
minuscules. Ils l'appelèrent Jésus et l'enveloppèrent dans
les couvertures de laine. Heureux et soulagés, ils étalent tous
les trois couchés dans la paille, l'un contre l'autre. " A mentionner
que ceci n'est pas une promotion pour des projets-pilotes dans une
étable.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mm» Couillard: Je suppose que l'accouchement de Marie
devait être parmi les 80 % d'accouchements considérés comme
normaux et peut-être dans les 5 % ou 10 % d'accouchements où
absolument aucune intervention n'est nécessaire, sinon un support
psychologique et affectif que Joseph s'est bien débrouillé pour
offrit à son épouse.
De notre mémoire, je ne retiendrai que les aspects les plus
conséquents pour l'étape à venir, c'est-à-dire
celle de l'implantation de projets-pilotes. Nous espérons que la
période de questions pourra répondre aux points qui ne seraient
pas suffisamment explicités dans le mémoire. Le tout dans
l'espoir que, pour nous, ce projet de loi soit plutôt bonifié que
totalement changé. Nous appuyons ce projet de loi dans la mesure
où il subira des modifications, bien sûr, le rendant conforme aux
attentes et aux demandes de la population, c'est-à-dire qu'il permettra
aux femmes d'avoir un choix, donc un accès à une forme de
pratique en périnatalité conforme à leur attente, choix de
lieu, choix d'intervenant. Si le projet ne devait pas permettre aux
sages-femmes d'exercer une pratique différente de celle actuellement
offerte dans le système, il serait Inutile de se donner la peine de le
mettre en oeuvre. Je suis d'accord avec M. le député Chevrette;
une intervenante de plus qui n'apporterait rien de spécifique et de
souhaité par la clientèle, ce serait déraisonnable et
superflu. Je crois que les minutes passent et qu'on devrait peut-être
aller directement aux recommandations.
Dans nos recommandations, je voudrais vous redire que nous avons
essayé de proposer des solutions les plus concrètes possible
plutôt que d'élaborer sur la situation sociale. L'association
recommande que la définition internationale de la sage-femme soit
reconnue comme la pierre angulaire de la profession de sage-femme au
Québec. Nous savons que sa définition englobe des champs de
pratique, des activités mais, tout de même, elle est ce que nous
avons en commun, toutes les sages-femmes dans le monde, et elle a
été approuvée par des groupes d'obstétriciens au
niveau de l'OMS.
L'association recommande aussi que la délimitation précise
du champ de pratique soit identifiée avant la mise en route des
projets-pilotes par un comité d'experts, ce qui n'est pas clair dans la
version actuelle.
Nous recommandons que soient considérés comme admissibles
les projets présentés par un CLSC ou par des sages-femmes avec
l'accord explicite d'un centre hospitalier. Cet accord a d'ailleurs
déjà été fourni et exprimé au
ministère de la Santé et des Services sociaux dans quatre
cas.
En ce qui concerne la diversité des lieux, nous recommandons que
le gouvernement réponde
aux demandes répétées de In population on mettant
sur pied un éventail de projets-pilotes en centres hospitaliers, CLSC,
maisons de naissances, tant en milieu rural qu'urbain. Un effort devrait
être fait pour conserver un certain équilibre dans le choix des
divers types de projets.
Les types de projets devenant différents les uns des autres, nous
pensons que l'organisation autour de ces projets pourrait être
déterminés localement. L'organigramme avec ses canaux de
communication et les relations d'autorité seront différents d'un
projet à l'autre. En conséquence, nous recommandons que le projet
de loi ne retienne pas une formule unique et rigide, mais qu'il prévoie
plutôt une structure de type léger pour l'encadrement de tous les
projets pendant la période de cinq ans.
Pour nous, les caractéristiques essentielles à respecter
dans chaque projet sont: le respect de l'autonomie professionnelle des
sages-femmes à partir d'un champ de pratique
prédéterminé, de conventions et d'ententes avec les
partenaires qui seront au projet, de la continuité dans les services
professionnels décrits ce matin, c'est-à-dire que les mômes
personnes, la môme équipe de deux sages-femmes suive la cliente ou
le couple du début de la grossesse jusqu'après l'accouchement, et
de l'autogestion dans l'administration quotidienne des projets, ce point
étant important pour donner une liberté en ce qui concerne les
programmes d'activité. Nous recommandons que le gouvernement s'assure
que ces trois éléments soient bien présents tout au long
des projets.
L'ASFQ recommande aussi que le gouvernement nomme, dès
l'acceptation du projet do loi 4, un comité consultatif. Pour nous, ce
pourrait être un comité temporaire d'où certaines
personnes-ressources seraient reprises au moment de l'implantation. Ce
comité devrait étudier les projets-pilotes proposés avec
des recommandations aux deux ministères concernés, voir à
l'identification du champ de pratique, à l'établissement des
critères de sélection des sages-femmes candidates, à
l'approbation d'un contenu de programme d'actualisation, à la mise en
place de mécanismes d'évaluation des sages-femmes.
Ce comité pourrait être formé de trois sages-femmes,
d'un représentant du corps médical (un obstétricien
probablement), d'un représentant du ministère de la Santé
et des Services sociaux (peut-être un administrateur gestionnaire), d'un
représentant de l'Office des professions (probablement quelqu'un qui est
expert en évaluation et surtout familier avec la profession de
sage-femme). Ce comité pourrait être remplacé, au moment de
l'implantation, par un comité qui justement pourrait superviser
l'implantation, le suivi, le fonctionnement et l'évaluation
périodique et finale des projets. De plus, ce comité, qui
superviserait l'ensemble de l'expérimentation, pourrait voir au bon
déroulement des projets. faciliter, dans des situations difficiles, le
dialogue entre les partenaires et assumer un rôle d'inspection
professionnelle, de médiateur, comme je viens de le dire. Il
déterminera les objectifs de recherche reliés à cette
expérimentation et pourra fournir aux responsables des projets les
outils requis à cet effet.
Paraît-Il que je dois conclure. Il reste quelques recommandations
que vous avez avec voua. Je pense que, pour nous, la mise à jour des
connaissances des sages-femmes est une étape importante. Elle ne remet
pas en question la préparation qui est déjà là: II
ne s'agit pas d'un cours de base, mais d'une actualisation pour mieux s'ajuster
à la pratique actuelle dans le système de santé. Pour
l'évaluation des candidates et même pour la formation ou
l'actualisation, le principe de la formation par les pairs est très
important; II est même mis de l'avant par le corps médical
régulièrement. C'est vrai pour toutes les professions, pour les
Infirmières, et cela devrait être vrai pour les sages-femmes
aussi, d'autant plus que l'Association et les associations de sages-femmes
comprennent des gens qui ont beaucoup d'expérience et aussi que nous
avons accès à des ressources extérieures si besoin
est.
Un dernier mot, sur l'assurance-responsabilité. La position de
l'Association est que nous sommes responsables de A à Z, comme le dirait
M. Chevrette, du suivi du déroulement d'une grossesse et de
l'accouchement. La formation de sage-femme, qui est de premier cycle
universitaire en tout cas, qui correspond à quatre années
d'expérience pour l'obstétrique normale, est très longue
par rapport à la formation que les médecins reçoivent, qui
est de l'ordre de quatre à cinq mois. Je ne parle pas des
obstétriciens qui devraient s'occuper des cas compliqués. La
formation de sage-femme la prépare bien à prendre des
responsabilités totales par rapport à une évolution
normale d'une grossesse. Nous sommes prêtes à prendre nos
responsabilités. Il y a des questions d'assurances qu'il faut
régler. C'est un dossier qui doit être investigué. Je vous
remercie et vous invite à poser des questions.
La Présidente (Mme Marois): C'est nous qui vous
remercions, Mme Couillard. Est-ce que M. le ministre a des questions à
poser?
M. Côté (Charlesbourg): Oui, définitivement.
Je réserverai une partie de mon temps pour ma collègue de Dorion,
sur le plan de partage notre temps.
D'abord, je veux saluer d'une manière tout à fait
particulière Mmes Couillard, Rousseau et Lavoie et les féliciter
pour la manière assez originale... Ce n'est pas très souvent
qu'on a une présentation, une entrée en matière comme
celle-là qui nous ramène un peu a nos origines les plus
naturelles possible. Évidemment, je l'ai dit
dans mon discours d'Introduction, |e l'ai répété
depuis un certain temps, II y aura un projet de lof sur les sages-femmes, je
veux le répéter à ce moment-ci, et il y aura des
projets-pilotes qui vont se faire au niveau de tout le Québec contre
vents et marées, en souhaitant qu'il n'y ait pas de vent ni de
marée.
Évidemment, on est dans une situation où, à partir
du projet de loi 4, qui est forcément un projet de loi qui, au lendemain
de la commission parlementaire, devra être modifié, étant
assez clair là-dessus, dans sa forme actuelle, ne pourrait pas, bien
sûr, assurer que les projets-pilotes puissent être viables et
puissent subir le test d'un projet-pilote avec tout l'encadrement et toute la
liberté qu'il faut.
Dans ce sens-là, ma première question est: Comment
définissez-vous l'autonomie de la sage-femme, parce que,
évidemment, vous l'abordez dans votre mémoire dans le cadre des
projets-pilote, parce que c'est dans ce cadre là que nous devrons
procéder et, à cet égard-là, quelle condition
serait essentielle à la matérialisation de votre conception de
l'autonomie? Alors, c'est ma première question et j'aimerais vous
entendre là-dessus.
La Présidente (Mme Marois): Vous êtes bien
conscientes que vous répondez: une peut commencer et une autre peut
ajouter. Vous y allez au mieux de ce qui vous apparaît être
souhaitable.
Mme Lavole (Gertrude): Je vais y aller. L'autonomie dans la
pratique des sages-femmes, en tout cas, dans le contexte des projets-pilotes,
devrait avoir toute la latitude d'action dans les actes qui la concernent, mais
compte tenu du contexte des projets-pilotes on pense que l'autonomie doit
être définie au départ en ayant défini le champ de
pratique, et les conventions ou les protocoles d'entente sur les actes en
particulier doivent être acceptés au départ par les centres
hospitaliers qui acceptent de collaborer à des projets-pilotes.
Alors, les ententes ou les protocoles ayant été
ratifiés permettraient à la sage-femme d'avoir une attitude dans
ses actes ou dans son quotidien. Dans les protocoles, évidemment, les
champs de pratique ont été acceptés et les actes
médicaux, si on peut les appeler ainsi, doivent permettre à la
sage-femme de les faire et, quand il y a des cas d'exception ou des cas de
référence, ils doivent être bien reçus de l'autre
côté avec les spécialistes concernés.
Alors, les choses doivent être claires au départ pour
permettre à la sage-femme une attitude d'agir dans son quotidien.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, si je comprends, c'est
peut-être davantage... Ce n'est pas une trappe, là, parce que, il
faut bien se com- prendre, on est dans un exercice où on va
échanger des vues pour tenter de voir là où on doit aller.
Si je comprends bien, c'est donc par le champ de pratique que l'on
réussira à dégager le niveau d'autonomie que vous
souhaitez avoir, pour que l'expérience soit vraiment une
expérience-pilote et qu'on puisse conclure à la fin de
l'expérience-pilote. Mais c'est par le champ de pratique qu'on
réussira à définir l'autonomie.
Mme Lavoie: Oui, par un champ de pratique, mais aussi en
respectant l'approche que les sages-femmes ont de particulier, de
spécifique, c'est-à-dire aussi de permettre la continuité
ou encore, pour vous donner un exemple très concret, si, dans une
pratique sage-femme, une sage-femme ne conçoit pas nécessaire une
échographie, elle doit avoir la latitude de la prescrire ou de passer
à côté.
Alors les ententes peuvent être claires au départ, qu'on a
le droit de faire certaines choses sans tous les jours aller demander une
permission pour faire telle et telle choses.
M. Côté (Charlesbourg): O. K. Je vais aller plus
loin dans ce rôle-là, parce que, évidemment, nous qui avons
à légiférer et à prendre la responsabilité,
on a la responsabilité de la santé des
bénéficiaires. Quel rôle accordez-vous aux médecins
dans ce cadre de projet-pilote par rapport à votre propre rôle
d'autonomie? (15 h 30)
Mme Lavoie: C'est un rôle de collaboration qui est
absolument nécessaire. Les sages-femmes ne conçoivent pas leur
pratique sans la collaboration des médecins, surtout en ce qui concerne
les spécialistes. Alors, le rôle des médecins est
absolument nécessaire parce qu'il y a des limites, il y a des grilles,
si vous voulez, des standards de pratique où les sages-femmes doivent
absolument faire des références aux médecins. Alors, une
sage-femme se tient dans tout ce qui est plus normal. À la
première détection d'une anomalie, elle doit aller faire la
référence au médecin. Alors, il est important d'avoir la
collaboration et une acceptation d'avance de ce qu'une sage-femme peut faire
comme référence au spécialiste.
La Présidente (Mme Marois): Mme Couillard, je crois que
vous vouliez intervenir.
Mme Couillard: Oui. La difficulté existerait à
peine si on était dans un cadre de maisons de naissances où on
est responsable clairement de nos actes. Quand on parie d'un projet-pilote qui
serait dans un centre hospitalier, ça devient plus délicat parce
qu'on rentre dans une institution qui a déjà des standards, qui a
déjà des pratiques. Habituellement, quand un médecin
rentre, il a un droit d'accoucher dans un hôpital, il
accepte l'ensemble des règlements 81 un projet de sage-femme est
accepté par un centre hospitalier, il pourrait y avoir des
difficultés.
Une pratique de sage-femme, c'est une pratique qui est acceptable, qui
est scientifiquement acceptable et qui est différente de celle
pratiquée dans l'hôpital. C'est là que jouent les
protocoles d'entente et les conventions. Si un centre hospitalier ne se sent
pas prêt à laisser vivre une approche différente dans son
hôpital et qu'il est trop Insécure, c'est qu'il ne peut pas
accepter un projet-pilote. Mais la pratique de sage-femme ne faisant pas
affaire à la maladie, les gens doivent se fier ou regarder notre
formation qui prouve que nous sommes capables de détecter quand la
normalité disparaît, que ça devient de l'anormalité.
À cause de ça, je pense qu'il y a moyen de discuter. Dans nos
relations personnelles avec beaucoup d'obstétriciens, ça ne fait
pas de difficulté.
La Présidente (Mme Marois): Mme Rousseau, est-ce que vous
vouliez intervenir?
Mme Rousseau (Marcelle): Non, elle a un peu répondu dans
le sens de ce que je voulais dire sauf que j'ajouterais peut-être que,
dans un premier temps, au début, il faudra que les protocoles soient
très clairs. Je pense qu'avec un petit moment de collaboration, quelques
semaines de collaboration et lorsque les personnes sur place nous auront
observées un peu, elles se rendront compte que ce n'est pas si
compliqué que ça de négocier avec nous. Les
expériences qu'on a déjà à l'heure actuelle de
relations avec certains médecins nous font voir que ce n'est pas
compliqué, en fait. C'est évident qu'on a besoin d'âtre
connues avant et les gens ont besoin de voir notre expertise et, après
ça, je suis convaincue qu'on va nous faire confiance.
La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je ne voudrais pas priver ma
collègue de Dorion de pouvoir intervenir. Je vous pose une question; en
réalité, ce sont deux questions, mais je me tais après
pour passer la parole à ma collègue. Vous avez
évoqué beaucoup - et c'est là le projet de loi 4 - de
centres hospitaliers, mais dans votre présentation vous avez
évoqué d'autres possibilités à l'extérieur
des murs d'un centre hospitalier sur le plan d'expériences à
faire. Vous avez évoqué le CLSC. On sait qu'il y a des
médecins aussi en CLSC. Ce que je comprends, c'est que vous souhaitez
que le projet de loi soit plus large sur le plan des projets-pilotes et qu'on
permette, au-delà des centres hospitaliers, la possibilité de le
faire aussi au niveau du CLSC. Première question, si je comprends:
Est-ce que vous appréhendez les mômes problèmes au niveau
d'un CLSC que dans un centre hospitalier? Si oui, pourquoi? Et la
dernière question que |e vous pose, vous me répondrez ça
tout d'une même filée: est-ce que vous considérez que le
privilège d'admission est essentiel à l'autonomie dont vous
parlez?
Mme Rousseau: Est-ce que je pourrais répondre?
La Présidente (Mme Marois): Oui, oui, vous y allez.
Mme Rousseau: C'est vrai qu'on pense que ça serait
souhaitable, très souhaitable môme, que l'expérience soit
vécue et en milieu hospitalier et à l'extérieur du milieu
hospitalier. En ce qui concerne les ententes possibles, les structures
hospitalières nous apparaissent comme les plus difficiles. La structure
du CLSC est déjà plus souple et plus ouverte à ce genre
d'expérience. En ce qui concerne le privilège d'admission,
ça nous apparaît Indispensable, oui. Dans la mesure où
ça représente... On ne doit pas avoir à passer par un
médecin pour rentrer une dame parce que, quand elle rentre en travail,
ce n'est pas le temps de faire des démarches pour trouver quelqu'un
d'autre pour signer.
La Présidente (Mme Marois): Est-ce qu'il y avait autre
chose que vous vouliez ajouter à ce qu'a demandé le ministre?
Cela va?
Mme Lavoie: Cela me fait penser à quelque chose. C'est que
le CLSC ou les maisons de naissances actuellement, en tout cas,
présentent pour nous une complexité d'organisation, si vous
voulez, ou de hiérarchie d'autorité. C'est sûr que les
projets en CLSC vont dépendre probablement d'un CA de CLSC. Ils ne
peuvent à la fois dépendre d'un conseil d'administration aussi de
l'hôpital. Alors, c'est pour ça qu'on demande d'avoir une certaine
souplesse à l'intérieur du projet-pilote, par rapport à
ces projets-là, et de regarder ça peut-être
différemment, parce que, d'après nous, le projet de loi comme tel
est pratiquement conçu pour les centres hospitaliers. Alors, il y a un
réajustement à faire par rapport à l'organigramme
possible, si vous voulez, dans les différentes situations.
La Présidente (Mme Marois): D'accord Mme la ministre.
Mme Trépanier: Merci. Alors, au départ, je voudrais
vous féliciter aussi pour votre présentation et la manière
étoffée qu'est présenté votre mémoire. Je
voudrais souligner aussi le fait que cette commission est la première de
la, je ne sais pas, trente-troisième ou trente-quatrième
Législature. C'est la commission sur les sages femmes ut c'est tout
à fait important. Je remercie la commission d'avoir accepté ma
présence dans votre enceinte.
M. Chevrette: Grâce à l'Opposition et au
consentement qu'on a donné.
Mme Trépanier: Et je l'apprécie
énormément.
M. Chevrette: Merci, madame. Bienvenue, bienvenue.
Mme Trépanier: Pour en venir au fait. La
Présidente (Mme Marois): Bien sûr.
Mme Trépanier: Ha, ha, ha! Je ne croyais pas soulever un
débat.
La Présidente (Mme Marois): On soustraira une minute, Mme
la ministre.
Mme Trépanier: Vous êtes quand même positives
face au projet de loi. Donc, est ce que vous considérez que des
projets-pilotes sont bienvenus? Est-ce que vous croyez que nous aurions les
conditions nécessaires pour légaliser immédiatement la
pratique des sages-femmes? Comment voyez-vous la venue des projets-pilotes?
Mme Lavoie: Je serais peut-être tentée de
répondre, mais mes compagnes rajouteront des choses. On pense que c'est
une étape importante à cause de l'incrédulité, si
vous voulez, du corps médical actuel, lïncrédibilité
du corps médical actuel. On pense qu'il est important d'avoir des
expériences de collaboration pour faire tomber le scepticisme par
rapport à la pratique de sage-femme.
Dans ce sens-là, le projet-pilote est une étape Importante
pour nous. Cela n'empêche pas qu'on pense, qu'avant la fin des
projets-pilotes, peut-être à mi-étape ou après trois
ans, ça vaudrait vraiment la peine de regarder les évaluations
qui vont avoir lieu à ce moment-là pour déjà
penser, si on veut, à vraiment légaliser au bout de cinq ans. Ne
pas arriver et n'avoir rien de fait au bout de cinq ans, mais
déjà que le terrain soit préparé pour une
légalisation future.
Mme Trépanier: Dans votre mémoire, à la page
34 plus précisément, vous suggérez un programme de mise
à jour des connaissances des sages-femmes. D'après vous, quels
éléments devrait comporter un tel programme? Est-ce qu'il devrait
prendre en compte les acquis d'expérience? Comment voyez-vous
ça?
Mme Rousseau: Je vais répondre. Alors, II devrait tenir
compte des acquis, à plus forte raison que les acquis sont très
nombreux. On vous a donné un peu un exemple de la préparation que
les trois personnes avaient ici. On a des acquis extrêmement
Intéressants déjà, aussi bien dans notre association que
dans l'autre association qui sera présentée demain matin.
À titre de projet de mise à jour des connaissances, je pense que
ces acquis sont très différents et ils sont très
diversifiés. Alors, le moyen de mettre à jour les connaissances,
ce serait justement de les échanger, ces acquis différents et
d'aller chercher chez chaque Individu ce qu'il a à offrir et de lui
offrir, entre autres... Il y a des personnes qui connaissent beaucoup le
système de santé québécois, II y en a qui le
connaissent moins. Il y a des personnes qui connaissent beaucoup la
clientèle potentielle des sages-femmes québécoises, il en
a qui la connaissent moins. Il y a des personnes qui ont une formation
théorique plus poussée, il y en a d'autres qui ont une
expérience plus récente. Toutes ces choses-là mises
ensemble, ça pourrait faire éventuellement le lieu d'un
échange de connaissances qui serait très valable pour tout le
monde.
Une voix: Vous avez parlé...
La Présidente (Mme Marois): Je m'excuse, Mme la ministre,
je crois que Mme Couillard voulait ajouter quelque chose.
Mme Couillard: Je voulais rajouter que la profession de
sage-femme au Québec, comme elle n'est plus très vigoureuse, en
tout cas au niveau légal depuis quelques années, doit trouver sa
couleur par rapport aux attentes de la population, et par rapport au milieu
médical ici et de la façon qu'on pense la santé
actuellement. Et à cause de ça, si on regarde la profession de
sage-femme en Europe actuellement, où peut-être les sages-femmes,
dirait-on, se médicalisent, et où nous voulons justement
démédicaliser, il faut faire un corps avec toutes ces
sages-femmes disparates qui ont eu des expériences en Angleterre, qui
ont fait leur cours un peu partout, et c'est très très important
de développer un profil sage-femme qui nous convienne. Et
l'actualisation sera le premier exercice de ça. Après, un cours
de base unlaversltaire continuera de délimiter ce profil sage-femme.
Vous savez qu'au Québec, il y a 20 ans, on a plus ou moins
décrié l'allaitement maternel. Pendant un bon moment, les
Québécoises n'allaitaient plus, on trouvait que c'était
rétrograde. On est revenu à ça. On a dit: Bon, la
modernité à tout prix, il faut arrêter. Les femmes ont
réagi à ça, bon. Aujourd'hui, les
Québécoises, devant la profession de sage-femme, veulent aussi
revenir à quelque chose de naturel, mais pas moins scientifique, et on
doit faire attention. La profession de sage-femme prend des Images
différentes un peu partout. Qu'est-ce qu'on veut ici? Il faut se le
dire, II faut écouter ce que les femmes ont a dire et ce que les
médecins ont a dire, et bien se préparer à le faire.
La Présidente (Mme Marois): Merci.
Une voix: Une petite dernière, pour l'assurance.
La Présidente (Mme Marois): Certainement, il vous reste
quelques minutes encore.
Mme Trépanier: L'assurance-responsabilité, vous en
avez parlé à deux reprises. Est-ce que vous avez une position sur
ça? Est ce que vous avez fait des études là-dessus?
Mme Couillard: Les études sont en cours et on se confronte
à de grandes difficultés, parce que tout le monde sait que les
assurances... assurer des gens qui font des accouchements, qui font de
l'anesthésie, qui font de l'architecture, ce sont les grandes
bêtes noires. Ça joue beaucoup contre nous, parce que, comme la
profession n'est pas connue, comme on sait assez peu qu'on ne fait pas
d'interventions et qu'on est bien formées, je pense qu'il y a une
éducation à faire auprès des gens qui voudraient nous
assurer. Je pense qu'il n'y a pas de limite à l'imagination. Il faut
peut-être accepter de payer plus cher au début et que ça
baisse après, quand on verra qu'il n'y a pas beaucoup de risques
à assurer une sage femme C'est une question très sérieuse.
Nous, comme association, nous faisons des recherches. Je pense que le
gouvernement en fait aussi et il doit en faire. Je pense qu'il faut continuer
à en faire, qu'il y a une solution. Dans d'autres pays, il y a des
sages-femmes qui sont assurées. Et pour le projet-pilote, si ça
doit coûter un peu plus cher, çn coûtera un peu plus cher
et, après ça, on verra; ça fait partie de
l'expérience.
M. Côté (Charlesbourg): pour compléter le
temps, deux petites questions très rapides, mais d'importance. mme
lavoie, tantôt, parlait de crédulité.
Mme Lavoie: D'incrédulité.
M. Côté (Charlesbourg): Moi, je voudrais vous parler
de crédibilité. C'est extrêmement important je pense, c'est
l'enjeu majeur du projet pilote Et à ce moment là, je pense qu'il
serait important de vous entendre sur le mécanisme de reconnaissance des
sages-femmes et de la compétence des sages-femmes. Ça
m'apparaît extrêmement important. J'aimerais vous entendre
là-dessus. (15 h 45)
Et ma deuxième petite question, parce que ça
complétera possiblement le temps, on a tendance dans certains milieux
à dire que la pratique des sages-femmes au Québec, c'est quand
même marginal sur le plan du nombre d 'accouchements. Sachant que vous
nous le dites dans votre mémoire - vous êtes 70 membres et qu'il y
a une autre association, et qu'on parle peut-être de 150 à 200
sages-femmes au niveau du Québec, combien d'accouchements annuels se
fait-il?
Mme Lavoie:... d'accouchements annuels au Québec, par des
sages-femmes?
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
Mme Lavoie: L'année dernière, on avait
avancé, avec l'Alliance des sages-femmes praticiennes, environ 2000
naissances par année, par les mains des sages-femmes. Mais dans les
projets-pilotes, on pense qu'il peut y avoir moins de 1 % des naissances par
année, à peine 1000 sur 88 000. Alors, c'est moins de 1 % dans
les projets-plotes. Je pense que ce n'est pas menaçant en tant que
clientèle éventuelle.
M. Côté (Charlesbourg): II ne faut pas voir une
menace, ce qui est bon peut progresser facilement. C'était de voir
l'importance par rapport aux 80 000 ou aux 85 000. Je ne vois pas ça
comme une menace. S'il y en a qui le voient, c'est leur problème. On
verra dans la pratique. Mais définitivement, à ce moment-ci,
c'était pour savoir le nombre qui découle de l'expérience
et, l'autre question, était la crédibilité Les
mécanismes de reconnaissance m'apparaissent extrêmement
importants. Je voudrais vous entendre là-dessus pour terminer.
Mme Couillard: Quand on parle de crédibilité, jo
trouvo qu'il y a un élément trot» impotant, c'est quand on
parle de la crédibilité que les médecins auraient. Quels
médecins? C'est très différent quand on parie à
beaucoup d'individus et des spécialistes et quand on s'adresse à
des associations. Les réactions sont différentes. Je crois que si
le corps médical pour la crédibilité doit participer
à l'évaluation des compétences des sages-femmes, il est
très important que le gouvernement choisisse des gens qui ne sont pas
contre avant de commencer, qui sont représentatifs de leur association
et qui sont sensibles à l'humanisation des soins en
périnatalité. Je pense que si ces deux conditions y sont, avec le
temps, la crédibilité va augmenter chez l'ensemble des
médecins.
La Présidente (Mme Marois): Merci, Mme Couillard. Je crois
que le critique de l'Opposition a maintenant quelques questions à vous
poser à son tour.
M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Bonjour mesdames,
je voudrais tout simplement essayer de comprendre avec vous ce qu'il y a dans
le projet do loi Vous allez peut-être me l'expliquer parce qu'à
vous entendre, vous voulez
de l'autonomie parce que vous considérez que l'accouchement en
soi n'est pas un acte médical. Quand ça va bien, ce n'est pas
nécessairement un acte médical, c'est un acte naturel. Et vous
voulez de l'autonomie de A jusqu'à Z puisque vous parlez d'assurance
môme, ce qui fait de vous non pas un professionne travaillant a
l'intérieur d'un centre hospitalier, mais un professionnel qui est
capable de superviser l'ensemble d'un acte complet, précis. Je regarde
le projet de loi et voici ce que j'y découvre. Je vous demanderai si
vous avez saisi la même chose que moi. Tout d'abord, on doit vous
évaluer par un comité national qui vous évalue au complet,
premier point, qui fixe ses critères et qui vous évalue.
Après ça, on décide d'un projet qui a lieu dans un centre
hospitalier qui, lui, a un conseil d'administration et à
l'intérieur d'un centre hospitalier, il y a un CMDP, conseil des
médecins, dentistes et pharmaciens. Mais vous formez un conseil des
sages-femmes et ce que vous décidez doit être
entériné par le conseil d'administration de l'hôpital, mais
vos pouvoirs relèvent d'un conseil exécutif créé
expressément pour ça, avec un médecin, une
infirmière ou une couple de médecins, une couple
d'infirmières spécialistes et quelques sages-femmes, et le tout
relève d'un coordonnateur nommé par le conseil d'administration.
Est-ce que c'est tout ça? Et comment voyez-vous votre rôle dans
tout ça?
La Présidente (Mme Marois): Oui, ça va.
Mme Couillard: Je vous ferai remarquer que toute la partie du
projet, la troisième partie, qui concerne le conseil des sages-femmes et
tout ça, on nous avait demandé que tout ce chapitre soit refait.
qu'il ne correspond pas à ce que nous attendons du tout.
M. Chevrette: Ce que je voudrais que vous me disiez en quelques
mots, madame, c'est comment vous voyez ça, vous, d'une façon
hiérarchique des choses, pour qu'on puisse bien comprendre?
Mme Couillard: Le patron, c'est le gouvernement.
M. Chevrette: Parce que, ici, une chatte ne retrouverait pas ses
petits dans ça.
Mme Couillard: Le premier patron c'est le gouvernement. Au nom de
la population, je crois qu'il doit garder l'orchestration Je pense que s'il y a
un message le plus Important à garder, II est dans notre
résumé. Le gouvernement, pour nous, devrait garder le rôle
d'orchestration de toute l'expérimentation. On sait très bien que
si on est dans une institution comme un CH, il y a des lois là, il va
falloir s'ajuster. Notre vision la plus simpliste, la plus claire, ce serait
qu'une sage-femme qui va accoucher dans un hôpital, autant que possible
elle n'accouche pas dans une salle d'accouchement. Cela prendrait une bonne
chambre privée pour accoucher pour une sage-femme, ce serait suffisant
avec l'équipement technique nécessaire pour l'accouchement. Ce
qu'on voudrait, ce serait de louer, si vous voulez, un espace dans un
hôpital.
Quant aux relations d'autorité, en ce qui concerne les
conventions et les protocoles d'entente pour notre pratique, qui devraient
être clairs avant de commencer un projet, il n'y a pas de
problème. Si on fait des conventions, l'autorité de
l'hôpital, que ce soit l'obstétrique, que ce soit le CMDP, devra
nous dire: Les conventions, c'était ça, vous ne les suivez pas.
Si, d'un côté, c'est l'hôpital, c'est le CH qui ne suit pas
les conventions et que, trois mois après le début du projet, on
nous dit: À partir d'aujourd'hui, tout le monde fait quatre
échographles à chaque cliente, nous serons dans la position de
subir ça s'il n'y a que l'autorité de l'hôpital. On est
assez grandes pour discuter et s'il y avait des conventions, ce serait bien
d'être appuyées par ce que nous avons proposé: un
comité d'encadrement pour l'ensemble qui pourra nous aider à
négocier avec le CH.
La relation d'autorité ne nous ennuie pas si les conventions sont
claires. Nous croyons que ce sera una autre formule qui sera mise de l'avant
quand les gens se connaîtront
M. Chevrette:... tel que stipulé dans le projet de loi,
vous auriez beau être jugées compétentes au niveau
national, il y a trois autres ou même quatre intervenants qui peuvent
bloquer le processus. Quand je disais, ce matin, dans mon exposé
Initial, qu'une histoire du genre a peu de chances d'aboutir telle que
libellée, c'est parce qu'il s'en trouverait toujours en cours de route
pour donner le moins de chances possible à sa réalisation. C'est
un peu l'optique dans laquelle je présentais, ce matin...
On ne peut pas les blâmer, ça pourrait être
très humain parce qu'il y a une question corporative dans ça.
Vous êtes dérangeantes, vous autres, vous venez de prendre une
partie du gâteau.
Mme Couillard: Ça dépend pour qui.
M. Chevrette: Je ne sais pas si vous le savez, mais je vais vous
le dire, en tout cas. C'est évident qu'il y a des gens qui vous voient
venir comme étant des gens qui viennent prendre une partie d'un
gâteau qui leur est réservé J'ai hâte d'entendre le
Dr Augustin Roy.
Une voix:...
M. Chevrette: C'est demain? Ça va être
suave, sûrement, la rencontre qu'on va avoir, le connaissant. Il
va sûrement vous dire, d'ailleurs, que la profession médicale se
féminise et qu'il y a sûrement des sages-femmes parmi les femmes
médecins Cela dit, ne croyez-vous pas que quant à décider
qu'il y a des sages-femmes, on doit véritablement avoir un processus
fort simple dans des endroits qui sont peut-être
démédicalisés, parce que vous ne voulez pas que ce soit
médicalisé, mais que, par contre, parce que c'est une
expérience-pilote qui se veut peut-être l'amorce de l'Introduction
d'une nouvelle profession, il y ait cependant un professionnel ou deux
chargés spécifiquement de faire une supervision? Ce ne serait pas
plus simple, comme projet? Tout le monde y trouverait son compte. Tant
qu'à limiter le nombre de projets, au moins, ce serait quelque chose que
tout le monde comprendrait. Il poserait le geste délibéré
d'opter pour un accouchement un peu médicalisé ou pour un
accouchement qui ne l'est pas. Est-ce que ce n'est pas ça, dans le fond,
que vous recherchez?
Mme Coulllard: Je vous avoue que plus les structures seront
simples, légères et souples, plus on pourra démontrer des
éléments qui, à la fin, nous permettront d'évaluer,
c'est certain. Nous avons réfléchi en pensant que les
négociations ne seraient pas simples avec les corporations, avec les
associations. Nous savons que ce n'est pas très clair dans la tête
de beaucoup de Québécois, ce que c'est, les sages-femmes, ce que
ça fait. C'est peut-être pour ça qu'on est resté...
quoique nous ayons refusé beaucoup de choses du projet de loi sans
refuser l'ensemble, espérant que, dans la reformulation, les
propositions que vous faites et qu'on fait à notre façon seront
là. C'est certain qu'on a toujours pensé que si le gouvernement
veut se donner des consultants qui connaissent le monde médical, qui
connaissent bien la périnatalité, il a le droit de le faire. On a
fait une distinction, à un moment donné, pour les
infirmières, en pensant que nous avons, pour la
périnatalité et la normalité, l'équivalent de ce
que les infirmières reçoivent dans leur formation. On ne voit pas
très bien ce qu'elles viendraient faire dans l'évaluation. Cela,
c'est clair.
Que les obstétriciens, que les néonatalogis-tes soient
impliqués, jusqu'à un certain point, ça ne nous
dérange pas, mais pas au point d'avoir le contrôle. C'est pour
ça que, dans nos comités, c'était toujours la
prédominance des sages-femmes toujours et partout.
M. Chevrette: Concernant l'assurance, Je voudrais aussi vous
poser une question - peut-être une dernière - pour permettre
à ma collègue... Concernant l'assurance - je regarde ça -
vous ave? dit que vous étiez en train de faire des études, mais
on me dit peut-être à tort et à travers, je ne le sais pas
- que les gynécologues, par exemple, paient des primes exorbitantes, et
c'est un peu pourquoi ils ne sont pas nécessairement tentés de
faire des accouchements et on voit de moins en moins... En tout cas, dans
certains milieux, il y a des gynécologues qui ne font plus
d'accouchements ou presque. Il en est de même pour certains
omnipraticiens qui trouvent que les "bondage" de responsabilité ou
l'assurance est rendue à un coût prohibitif. Quand vous demandez
l'autonomie, cela suppose que vous demandez la responsabilité totale et
entière, donc la garantie que vous pourriez être
protégées au moins par voie d'assurance. Est-ce que ça
vous paraît, dans le cadre d'un projet-pilote, acceptable d'avoir
à payer l'ensemble d'une prime d'assurance qui depuis quelques
années, à cause des jugements, en Ontario, il faut le dire, plus
en Ontario et quelques jurisprudences américaines... En Ontario, si on
parle du Canada, il y a eu des jugements très lourds avec des sommes
extrêmement gigantesques qui ont dû être versées. Cela
me paraît, dans le cadre d'un projet-pilote, audacieux de votre part
d'exiger que personne ne prenne fait et cause pour vous.
Mme Couillard: Moi, je pense que c'est parce que nous avons
beaucoup moins peur des gestes que nous posons, par rapport à d'autres
Intervenants qui font beaucoup plus de gestes. Je pense qu'on ne peut pas
comparer un gynécologue à une sage-femme. Une sage-femme,
ça travaille quand ça va bien et ça réfère,
et ça connaît bien sa cliente, comme dans le temps des bons vieux
médecins de famille qui n'avaient pas de poursuite. Cela n'est
peut-être pas évident pour les assureurs, maintenant, et
peut-être qu'il va falloir leur donner le temps de comprendre et
d'expliquer ces choses-là, mais il reste que pour nous, peut-être
qu'on est un petit peu trop braves, mais c'est notre réalité,
c'est notre profession, on connaît notre profession, on sait qu'on fait
affaire avec des femmes en santé et qu'on les réfère,
qu'on les respecte et qu'on écoute: avant de faire quelque chose, on
leur demande si elles sont d'accord. Je pense que le problème est
difficile à percevoir pour les assureurs, peut-être, mais
ça aussi, c'est du cheminement à faire faire. Les sages-femmes
sont habituées avec les femmes à essayer de faire faire du
cheminement et peut-être qu'un jour il y aura...
La Présidente (Mme Marois): Cela va, M. le leader? Oui?
Mme la députée des Chutes-de-la Chaudière?
Mme Carrier-Perreault: bonjour. disons qu'il y a plusieurs
questions qui ont été posées jusqu'ici et qu'il ne m'en
reste vraiment pas beaucoup. mais ii y a une chose sur laquelle je m'interroge.
par rapport à la rémunération,
présentement, le travail, ce sont les gens qui paient pour
ça, ce sont les femmes qui paient. est-ce que c'est très
dispendieuux, pour la clientèle féminine, le genre de services
que vous offrez présentement, et la rémunération que vous
désirez avoir à l'avenir, ce serait combien?
rémunérées à l'acte et combien?
Mme Lavoie: Je peux répondre à cette question.
Actuellement, les services d'une sage-femme sont relatifs d'une sage-femme
à l'autre. Cela peut varier entre 500 $ et 1000 $, comprenant le tout.
Maintenant, dans les projets-pilotes, on parle de rémunération
sous forme de salariat, c'est ce qui est avancé. On n'est pas
allées très loin là-dedans, je dois vous dire, mais il y a
quand même consensus là-dessus, parce que ce ne sera pas
calculable en nombre d'heures, tout le temps qu'on peut donner à nos
clientes. Alors, je pense qu'on s'entend là-dessus.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Est-ce qu'il y a
d'autres... Oui?
M. Chevrette: II ne nous reste plus de temps?
La Présidente (Mme Marois): Oui, il nous reste du temps,
M. le leader.
M. Chevrette: Va» y.
Mme Carrier-Perreault: Selon vous, les sages-femmes devront-elles
être diplômées pour participer aux projets-pilotes? D'autre
part, qu'est-ce qui arrive des sages-femmes qui sont non diplômées
et qui ont quand même une bonne expérience dans le domaine?
Comment voyez-vous ça, c'est quoi votre position?
Mme Rousseau: Les sages-femmes qui doivent participer aux
projets-pilotes vont être évaluées - on a parlé
d'évaluation au point de départ - les acquis seront reconnus et,
s'il y a des sages-femmes non diplômées qui sont admises,
ça relèvera du fait qu'elles peuvent prouver leur
compétence. Évidemment, l'ensemble des sages-femmes qui vont
participer et qui devraient participer aux projets-pilotes auront eu la chance
de faire une mise à jour des connaissances aussi. Alors, je pense que
quelqu'un qui pourrait être examinateur, si je me mets à la place
d'un examinateur, par exemple, je me dis que si je rencontre... en
évaluant les acquis de quelqu'un qui a beaucoup de potentiel, qui a
beaucoup d'acquisitions, je pense que je peux lui prescrire à la carte
les choses qui lui manquent avant que cette personne-ià commence
à travailler et, potentiellement, c'est certainement réalisable
d'évaluer... D'ailleurs, dans notre société, aujourd'hui,
on travaille beaucoup avec la vérification des acquis. C'est
évident que si quelqu'un arrive à passer à travers les
démarches préliminaires, ce sera là que le verdict sera
rendu. ( 16 heures)
M. Chevrette: Quant au comité de sélection lui
même, est-ce que vous êtes d'accord avec sa composition?
Mme Rousseau: Qui doit comporter une sage-femme?
M. Chevrette: Vous avez là le conseil des
sages-femmes...
Mme Rousseau: Oui, oui.
M. Chevrette:... doit élaborer les critères
d'admissibilité applicables aux femmes qui désirent recevoir...
Ce n'est pas ça, excusez. Le premier là: Le ministre de la
Santé et des Services sociaux, responsable de l'application de la loi
des professionnels, nomme trois sages-femmes en tenant compte notamment des
critères établis par la Confédération
Internationale des sages-femmes, un médecin, un infirmier ou une
Infirmière aux fins suivantes. C'est dans le but, à toutes fins
utiles, d'accréditer, si vous me permettez l'expression, celles qui
n'auraient peut-être pas la formation académique, le premier cycle
universitaire.
Mme Rousseau: En tait, quand on évalue les acquis, on
vérifie que ce n'est pas simplement en termes d'expérience. Ce
n'est pas quelqu'un qui vient dire: J'ai fait tant de choses, j'ai tant
d'années d'expérience; ce que l'on vérifie c'est: est-ce
que c'est mesurable? Et il y a de plus en plus de moyens maintenant de mesurer
non seulement l'expérience, mais véritablement les acquis en
termes de connaissances. À ce moment-là, ça peut
être évalué de différentes façons. Donc, par
exemple, ça pourrait être des sages-femmes qui sont reconnues sur
le plan international qui pourraient questionner, faire une entrevue assez
sérieuse. Il y a énormément de moyens maintenant. Il y a
des examens écrits aussi et des examens oraux qui peuvent être
passés. Ce n'est pas quelqu'un qui pourrait arriver et dire: J'ai fait
150 accouchements; ça veut donc dire que j'ai de l'expérience.
J'ai peut-être de l'expérience, mais je n'ai peut-être pas
les connaissances de base. Seulement, si quelqu'un me dit: Tu nous dis que tu
sais faire des accouchements, tu vas nous le prouver, tu vas en faire devant
nous, à ce moment-là, si ce sont des personnes qui sont
jugées, qu'on a déjà accréditées pour
évaluer, ces personnes-là peuvent vraiment porter des jugements
de valeur sur les personnes qui présentent ces acquis-là. Il y a
une étape qui est de préparer un portfolio pour s'assurer que
tous ces acquis sont inscrits, mais il y a aussi une deuxième
étape qui est aussi très importante: ce sont les personnes
qui
vont évaluer ces acquis-là.
La Présidente (Mme Marois): D'accord? Est ce qu'il y a
d'autres...
M. Chevrette: Oui, il me reste une autre question.
La Présidente (Mme Marois): Oui.
M. Chevrette: À l'article 17 vous avez sans doute lu le
projet de loi autant que mol - on dit que les pouvoirs du conseil des
sages-femmes dans un centre hospitalier sont exercés par un
comité exécutif formé de la façon suivante... Si je
comprends bien... C'est là que j'en perds mon latin un peu quand on sait
que dans un centre hospitalier il y a un conseil des médecins, des
dentistes et des pharmaciens, puis là, il y aurait un conseil des
sages-femmes de trois ou un conseil de toutes les sages-femmes qui
déterminerait comment ça fonctionne, c'est entériné
par le conseil d'administration et les pouvoirs de tout ce beau
monde-là, c'est exercé par un comité: deux
médecins, un coordonnateur, un infirmier et deux sages-femmes. Comment
trouvez-vous ça?
La Prétldente (Mme Marois): Mme Coulllard.
Mme Couillard: Je vous redis que nous avons refusé toute
cette partie-là d'emblée et peut-être que notre tort n'a
pas été à ce moment-là - vous savez que le moment
où on a présenté notre mémoire, le temps a
passé très vite de ne pas proposer une autre structure
concrète, mais la difficulté c'est qu'on était devant une
proposition, un type unique de projet qui était en CH, alors qu'on veut
proposer d'autres types. Mais on refuse cet aspect-là. Le conseil des
sages-femmes est bien sympathique à le regarder, mais quand on regarde
comme il faut, il n'a aucun pouvoir. Donc, en commençant... et toute
cette structure-là est très complexe. Alors, on refuse ça;
il faut recommencer la réflexion par rapport à cette
étape-là.
La Présidente (Mme Marois): D'accord? Est-ce que ça
va?
M. Chevrette: II faut que j'aille de l'autre
côté.
La Présidente (Mme Marois): On me dit que c'est la reprise
des travaux à l'Assemblée nationale. Il ne faut pas
s'inquiéter, ce n'est pas un appel à autre chose.
S'il n'y a pas d'autres questions, comme il reste un peu de temps, le
député de Fabre et vice-président, d'ailleurs, de la
commission, vous auriez un commentaire ou une question, une petite
question.
M. Joly: Oui, j'aurais peut-être une question, une toute
petite question qui reviendrait surtout au niveau de l'assurance. Quand on
parle d'assurances, on parle statistiques, normalement Tantôt, dans votre
énoncé, vous avez soumis des chiffres, à savoir que sur
les 88 000 accouchements qui se faisaient au Québec, il y en avait
environ 1000 qui avaient été, en fait, accomplis par les
sages-femmes.
Est-ce que, d'après vous, c'est une statistque assez Importante,
pour en arriver à con vaincre l'assureur que si l'expérience a
été bonne, il n'y a pas tellement de danger et on pourrait en
arriver à négocier des primes raisonnables? Et l'autre volet de
ma question, c'est que, dans votre mémoire, vous soulignez que la prime
d'assurance devrait être répartie tant par les budgets
votés au niveau du projet-pilote et tant par les sages-femmes
elles-mêmes.
Mais je me pose la question, parce que sur la quantité
d'accouchements qui se fait, si ça implique 200 sages-femmes, ça,
ça veut dire que la moyenne des salaires ou des revenus de ces
sages-femmes se situe entre 5000 $ et 10 000 $ par année. Comment en
arriver à assumer, dès le départ, une prime qui, à
ce qu'on dit, est toujours exorbitante au niveau de cette responsabilité
professionnelle, compte tenu surtout que les salaires ou les revenus des
sages-femmes, actuellement, sont très bas?
Mme Couillard: Je pense qu'on le compare à une situation
qui est tout à fait anormale. Je veux dire, une sage femme, aujourd'hui,
qui pratique ne devient ipas riche. C'est tout juste pour changer son auto,
puis, pas toujours. Ce n'est pas une situation normale. Les sages-femmes le
font pour répondre aux besoins des femmes à leurs propres
dépens, très souvent. Et on ne peut pas se fier à
ça. Même le nombre et même les statistiques, comme c'est
dans une situation pas tout à fait illégale, mais pas
légalisée non plus, on ne peut rien prouver, ni les statistiques.
Je vous invite à écouter très bien demain soir une
intervention d'une expérimentation de sages-femmes, actuellement, dans
le Grand-Nord, où il y aura probablement des statistiques
vérifiées, tout ça, et qui pourrait influencer les
assureurs. pour ce qui est du salaire, de ce que je comprends de votre
question, pour nous autres, c'est dificile à imaginer jusqu'où
pourrait aller la négociation à la hausse d'une prime d'as
surance par rapport à notre salaire. mais ce qu'on sait, parce qu'on l'a
fait dans une étude de projet de centre de maternité, c'est qu'un
accouchement avec une sage-femme dans un centre de maternité qui couvre
tous les frais du centre de maternité plus le salaire des trois ou
quatre sages femmes qui seraient là, comparé au coût actuel
pour un accouchement - malheureu-
sèment, on n'a pas nos chiffres - dans le système de
l'hôpital coûterait beaucoup moins cher. De sorte que si une femme
accouche aujourd'hui à l'hôpital et que ça coûte...
On a dit que pour des étrangères qui accouchent ici, ça
coûte...
Une voix: 3000 $.
Mme Couillard:... 3000 $; un accouchement avec une sage-femme,
avec le suivi, avec môme dans le projet, il y avait les dépenses
du centre de maternité, coûtait autour de 1600 $, quelque chose
comme ça. Alors, il faut se pencher sur les problèmes des
chiffres qui sont complexes, mais c'est difficile de les extrapoler à
partir de l'expérience de pratique des sages-femmes actuelle, parce
qu'il n'y a pas moyen, ce ne sont pas des sages-femmes salariées qui ont
un salaire convenable, actuellement.
Parce que vous savez qu'une sage-femme, avec le temps de suivi qu'on
veut accorder, surtout quand on s'occupera dés populations cibles
défavorisées, c'est plus que le double que ce que le
système donne, de sorte que, une sage-femme, pour bien faire sa
profession de sage-femme, ne pourrait pas suivre plus que 50 accouchements par
année. Elle peut donner jusqu'à 45 heures à chaque cliente
pendant sa grossesse, ce qui est beaucoup moins dans le système. Mais
même à ça, les calculs qui ont été faits par
des gens préparés ont démontré que ça
coûtait beaucoup moins cher. Donc, là, il faudrait accrocher
ça à la prime d'assurance et à tout ce que vous voulez. Je
ne suis pas en mesure de le faire maintenant, mais ce qui est certain, c'est
que ça coûte beaucoup moins cher et que le salaire de la
sage-femme est inclus dans ces calculs.
La Présidente (Mme Marois): Merci. Je vous indique que
notre temps est écoulé. J'ai une demande du député
de La Prairie pour une toute petite question. Ça me prend l'accord des
gens du gouvernement. Êtes-vous d'accord? Une très brève
question, M. le député.
M. Lazure: Merci, Mme la Présidente et merci au parti
gouvernemental. C'est au sujet de la rémunération, justement. La
représentation de l'Assocation nous a donné une idée de la
rémunération qui serait nécessaire; mais voici la question
que je poserais au ministre de la Santé et des Services sociaux: Est-ce
qu'on a évalué, au ministère, le montant approximatif du
salaire, parce qu'on n'en parle pas? J'ai relu le projet de loi tantôt,
rapidement, et puis, on ne parle pas de rémunération dans le
projet de loi. A ma connaissance, on n'en parle pas. Si on n'en parle pas dans
le projet de loi, est-ce que c'est parce que les études ne sont pas
complétées? La question a deux volets: est-ce qu'on a l'inten-
tion, au ministère, de payer les sages-femmes sous forme de salariat? Si
oui, à quelle échelle de salaire va-t-on se
référer?
M. Côté (Charlesbourg): Je ne ferai pas de
différend en Chambre. A votre première question, c'est oui, donc,
à salaire. La deuxième, évidemment, il reste des
négociations à terminer pour bien s'assurer qu'on aura un projet
de loi, puis qu'il y aura des expériences-pilotes et, qu'à ce
moment-là, on aura des sages-femmes qu'il faudra payer. Ça va
venir.
La Présidente (Mme Marois): Ça va. Merci, M. le
ministre. Est-ce que vous voulez ajouter quelques mots M. le ministre à
l'endroit des...
M. Côté (Charlesbourg): Je voudrais juste voua
remercier pour cette présentation très originale. On sait que ce
n'est pas toujours facile de se présenter devant ce genre de commission.
Je vous dirai que vous l'avez bien fait, vous avez répondu à nos
questions et je suis très heureux. On verra la suite des
événements, souhaitant qu'on puisse effectivement y arriver avant
Noël.
La Présidente (Mme Marois): Je remercie, à mon
tour, l'Association de ses explications, de ses éclairages sur ses
points de vue et j'espère qu'ils pourront être entendus dans les
faits aussi. Merci.
J'inviterais maintenant la Fédération des CLSC du
Québec à venir nous présenter son mémoire. Est-ce
que les membres de la commission pourraient reprendre leur siège s'il
vous plaît pour que nous puissions entendre les représentants de
la Fédération? M. le président ou Mme la directrice
générale?
Une voix: M. le président.
La Présidente (Mme Marois): M. le président,
bonjour.
M. Payette (Maurice): Bonjour madame.
Fédération des CLSC du
Québec
La Présidente (Mme Marois): J'aimerais, à l'instar
des gens qui vous ont précédé, que vous présentiez
les gens qui vous accompagnent. Nos règles, je pense, vous les
connaissez: une vingtaine de minutes pour la présentation de votre
mémoire, par la suite, une quarantaine de minutes qui se partagent entre
les deux groupes parlementaires, à part égale, et, si le
député indépendant veut poser une question, il a le loisir
de le faire aussi.
M. Payette: Merci, Mme la Présidente. Je suis
accompagné, à ma droite, de Mme Jeanne-
d'Arc Vaillant, la nouvelle directrice générale de la
Fédération des CLSC et aussi de Mme Lucllle Rocheleau, une
permanente de la Fédération, qui a particulièrement
développé une expertise dans le dossier des sages-femmes.
Comme vous avez reçu tardivement notre mémoire, nous
prendrons le temps de lire ce mémoire et nous ne croyons pas que
ça dépassera les 20 minutes.
La Présidente (Mme Marois): Je voudrais m'assurer que les
membres de la commission ont une copie du mémoire.
M. Payette: On a des copies supplémentaires.
La Présidente (Mme Marois): C'est parce que... Est-ce que
c'est la copie révisée que vous avez? Vous n'avez pas, je crois
M. le député, la copie révisée. Alors, on va
s'assurer que des copies soient disponibles. Ne vous inquiétez pas, on
va faire ça ici. (16 h 15)
M. Payette: D'accord. Merci. Lors du dépôt du projet
de loi 156 en juin dernier, la Fédération des CLSC du
Québec a fait connaître son point de vue en déposant un
mémoire au secrétariat des commissions parlementaires. Les courts
délais qui nous étaient alors impartis pour réagir ne nous
avaient pas permis de proposer des modalités concrètes pour
actualiser des alternatives proposées.
Ayant approfondi notre réflexion depuis lors, nous avons voulu
bonifier notre mémoire en proposant des moyens concrets pour atteindre
les objectifs visés par la loi et en suggérant des
modalités organisationnelles précises pouvant assurer une
expérimentation plus diversifiée, plus souple et plus
concluante.
Cette bonification du mémoire nous apparaissait d'autant plus
importante qu'en octobre dernier, la Fédération dos CLSC tenait
son quinzième congrès sous le thème de la santé des
femmes. On y relevait plusieurs défis pour les CLSC dont, entre autres
choses, celui de fixer des objectifs clairs en matière de santé
et de bien-être des femmes.
Or, l'humanisation des soins entourant la grossesse et la naissance est
un objectif auquel souscrit la Fédération des CLSC. La
reconnaissance de la pratique de la sage-femme s'Inscrit dans la poursuite de
cet objectif. L'expérimentation de l'introduction des sages-femmes dans
le réseau doit se faire non seulement pour les femmes dites à
risque mais pour l'ensemble des femmes qui réclament ce service depuis
plus de dix ans.
Nous étions heureux lors de l'annonce du dépôt du
projet de loi qui permettait enfin d'expérimenter de façon
officielle la pratique des sages-femmes au sein du réseau des services
de santé et des services sociaux du Québec. La
Fédération des CLSC, porte-parole en cette matière des 159
CLSC du Québec, a en effet toujours supporté les prises de
position et les Initiatives qui allaient dans le sens d'une intégration
progressive et d'une reconnaissance officielle des sages-femmes au
Québec. Il est grandement temps que le Québec reconnaisse une
pratique qui existe dans la plupart des autres pays et qui, en plus, se
développe ici même dans une sorte de
semi-clandestinité.
Notre enthousiasme a cependant rapidement fondu lorsque nous avons pris
connaissance du libellé du projet de loi. Le texte est en effet
inutilement restrictif en limitant l'expérimentation du rôle des
sages-femmes à des pro|ets qui ne peuvent être
présentés que par des centres hospitaliers. De plus, en les
assujettissant à des contrôles tellement nombreux et
tâtillons au sein même de ces institutions, ils rendent ces
projets, à toutes fins pratiques, impossibles à
réaliser.
Comme la plus grande partie de l'opposition à l'Introduction des
sages-femmes vient des milieux médicaux en général et des
milieux spécialisés en particulier, il nous semble un peu
aberrant de réserver de façon exclusive l'expérimentation
aux centres hospitaliers qui constituent justement les lieux où ce
pouvoir médical s'exerce avec le plus de force. Au pire, le
succès des expérimentations risque de s'en trouver compromis
avant même qu'elles ne débutent, au mieux elles pourraient bien
n'être que peu concluantes ou récupérées.
Mme Vaillant (Jeanne-d'Arc): Pour ma part, je vais vous
présenter les mécanismes d'encadrement, les modalités
organisationnelles et la façon dont ça pourrait se faire en
CLSC.
Le principe de l'expérimentation quant à nous est d'abord
et avant tout que ça puisse se faire en milieux diversifiés. Il y
a un concensus dans le réseau depuis plusieurs années parmi les
principaux intéressés à l'exception, bien sûr, des
porte-parole officiels de la corporation médicale. Donc, le concensus
existe pour que l'expérimentation soit envisagée de façon
diversifiée et non seulement dans les centres hospitaliers. Que ce
soient les avis du ministère, les avis du Conseil des affaires sociales,
les prises de position au niveau de l'Association pour la santé
publique, tout le monde s'entend pour dire que ça doit se faire et que
ça doit déborder les seuls centres hospitaliers. Donc, quel est
le champ de pratique et l'articulation avec le réseau?
Pour les fins des projets-pilotes, le projet de loi prévoit huit
champs de pratique pour les sages-femmes: éducation prénatale des
parents, éducation sanitaire de la famille, soins préventifs,
suivis de grossesse, dépistage de conditions anormales chez la
mère ou l'enfant, accouchement, planification familiale et enseignement
des soins à donner au nouveau-né.
Ces champs de pratique sont suffisamment larges pour
permettre une expérimentation variée. Toutefois, le lieu, comme
on l'a dit tantôt, pose un problème. En effet, le ministère
a toujours voulu rapprocher le plus possible la dispensatlon concrète
des services du milieu naturel dans lequel les personnes vivent. C'est dans ce
contexte qu'il a ainsi privilégié les CLSC pour la dispensatlon
de services de première ligne et la mise en place de stratégies
préventives. Évidemment, la proposition contenue dans le projet
de loi aurait pour effet de rapatrier sous la Juridiction du centre hospitalier
la dlspensation de toute une gamme de services qui n'ont rien à voir
avec la dispensatlon de services spécialisés et qui sont
actuellement rendus. Ce sont des services normaux de première ligne.
Donc, de plus, ce modèle risque d'assujettir la
pratique sage-femme à la pratique médicale, reléguant au
second plan le spécifique de la pratique sage-femmes soit une approche
globale centrée sur la normalité. C'est un processus normal,
grossesse-naissance et qui prend en compte les dynamiques du milieu de vie de
la clientèle.
Selon nous, l'essentiel n'est pas de régir et de
contrôler avec un appareil démesuré les quelques jours que
la mère passera au centre hospitalier, mais plutôt de s'assurer
que l'ensemble de la grossesse, de l'accouchement, de la période
post-partum soit considérée comme un tout et vécue de
façon harmonieuse et dans les meilleures conditions possible. Dans ce
contexte, le fait que ce soit la sage-femme plutôt que
l'obstétricien qui délivre en tout ou en partie l'enfant n'est
pas la seule question fondamentale en cause. Il nous apparaît encore plus
fondamental que les sages-femmes puissent agir dans un contexte qui leur
permette de maintenir leur approche globale, d'assurer la continuité des
services et de demeurer proche des dynamiques du milieu et des capacités
de support communautaire. Or, l'approche globale et la prise en compte des
dynamiques du milieu et des capacités de support communautaire font
partie intégrante des programmes de périnatallté en
CLSC.
Donc, pour assurer la continuité des services aux
femmes enceintes et à leur famille, les projets-pilotes devront
nécessairement établir des liens avec ces programmes de
périnatallté. Il faut absolument éviter que la pratique
sage-femme se fasse en parallèle des services périna-tals en CLSC
comme c'est généralement actuellement le cas pour le suivi de
grossesse par les médecins en pratique privée. Bref, ce n'est pas
le champ de pratique qu'on propose de donner aux sages-femmes qui est en cause.
Nous sommes d'accord avec les objectifs du projet de loi mais c'est la
façon dont on veut l'articuler à l'Intérieur du
réseau.
Le point important, ce sont les modalités
organisationnelles et le contrôle de la qualité.
Les modalités organisationnelles proposées,
la création d'un service de maternité, conseil des sages-femmes
et exécutif sont, quant à nous, lourdes et complexes et elles ne
conviennent pas à un contexte expérimental qui, par
définition, doit permettre l'expression d'une plus grande liberté
et d'une plus grande Imagination créatrice. De plus, compte tenu que
seul le centre hospitalier peut être promoteur d'un projet-pilote, le
projet de loi actuel limite de façon importante l'envergure des
expérimentations envisagées et réduit sensiblement la
possibilité de généralisation par la suite.
Nous sommes tout à fait en accord avec la
nécessité de mettre sur pied un mécanisme qui assurera la
qualité des actes posés. C'est là une
responsabilité fondamentale à laquelle l'État ne peut se
soustraire. Nous voudrions vous proposer ici des modalités
organisationnelles beaucoup plus souples. Celles-ci, tout en assurant un
contrôle de la qualité non seulement pour l'acte d'accoucher, mais
pour l'ensemble des actes qu'une sage-femme doit poser, permettraient une
expérimentation suffisamment diversifiée pour pouvoir apporter
des conclusions intéressantes.
Nous proposons trois scénarios: un projet qui serait
présenté par un centre hospitalier en collaboration avec le CLSC
pour le prénatal et le postnatal, un projet présenté par
un CLSC qui serait promoteur en collaboration avec un centre hospitalier et un
projet présenté par un CLSC et une maison des naissances.
Pour assurer une expérimentation diversifiée,
il serait souhaitable que les huit projets-pilotes qui seraient choisis
couvrent, quant à nous, ces trois scénarios. Actuellement, deux
CLSC ont déjà élaboré et présenté des
projets d'expérimentation du rôle des sages-femmes dans le cadre
de leurs activités de périnatallté. Déjà des
modalités organisationnelles ont été prévues entre
le CLSC promoteur et le centre hospitalier collaborateur. Il nous
apparaît donc possible de mener à terme des expériences
fructueuses en milieu de CLSC qui garantissent la qualité des services.
Pour que de telles expériences soient possibles, certaines conditions
préalables sont cependant nécessaires. Ainsi, de façon
générale, nous sommes d'accord avec le fait que les accouchements
aient lieu, dans la mesure du possible, en milieu hospitalier. Nous ne sommes
pas contre l'expérimentation en maison des naissances mais cela
requiert, d'après nous, un encadrement particulier sur lequel nous
reviendrons un petit peu plus loin.
Dans le cas où le CLSC serait promoteur du
projet-pilote, un protocole d'entente entre le CLSC et le centre hospitalier
concerné définira à la fois la procédure
d'admission en centre hospitalier lors de l'accouchement et des
différentes procédures que devra suivre la sage-femme lorsqu'elle
oeuvrera dans le centre hospitalier, notamment dans quelles circonstances
elle devra faire appel aux différentes ressources du centre
hospitalier, y compris les ressources spécialisées. Le centre
hospitalier devra, quant à lui, rendre ses ressources disponibles. Dans
le cas d'un centre hospitalier promoteur, un protocole d'entente entre ce CH et
le ou les CLSC impliqués garantira la cohérence et la
continuité des services pour les périodes pré et
postnatales.
L'encadrement professionnel des expériences en CLSC. Des
protocoles régiront ce qui se passera lorsque la sage femme oeuvrera au
centre hospitalier. Il reste cependant à s'assurer d'un encadrement
professionnel adéquat pour l'ensemble de l'intervention de la sage-femme
qui s'étend tout au long du processus de la grossesse, de l'accouchement
et de la période postnatale. Cet encadrement professionnel est d'autant
plus nécessaire qu'il n'y a pas actuellement d'ordre professionnel qui
puisse assumer cette responsabilité dans le cas des sages-femmes. Or,
dans le cadre des projets expérimentaux, nous proposons un encadrement
professionnel qui serait assuré par un comité multidisciplinaire.
Certains principes doivent être respectés quand on parie
d'encadrement professionnel de la sage-femme. L'encadrement doit se faire par
des pairs, l'encadrement doit être partagé avec des membres
d'autres professions dont des médecins, les mécanismes
d'encadrement doivent permettre le partage de connaissances entre
professionnels des différentes disciplines, les mécanismes
d'encadrement doivent garantir à la clientèle et à
l'Institution la qualité des actes posés, en tenant compte du
fait que ces actes dépassent l'aspect strictement médical. Ils
doivent également favoriser l'établissement de liens entre les
professionnels et les institutions Impliquées en
périnatalité afin de maintenir la continuité des
services.
Pour ce faire, nous proposons la formation d'un comité
multidisciplinaire relevant du conseil d'administration du CLSC promoteur. Les
responsabilités du comité seraient les suivantes: contrôle
et appréciation des actes posés par les sages-femmes qui exercent
leur fonction dans le CLSC, l'élaboration de règles de soins - et
de règles d'utilisation des ressources applicables aux sages-femmes qui
exercent en CLSC, la formulation des recommandations au conseil
d'administration du CLSC sur l'organisation scientifique et technique
applicable aux sages-femmes, l'élaboration du protocole d'entente qui
sera soumis au centre hospitalier.
Donc, les règles de soins dont on a parlé
précédemment devraient être soumises pour consultation
à un représentant de chacune des disciplines concernées
par le suivi en périnatalité, obstétricien,
infirmière, pédiatre, travailleuse sociale, et devraient
être approuvées par le conseil d'administration.
Le comité multidisciplinaire devrait aussi élaborer les
critères d'admissibilité applicables aux femmes qui
désirent recevoir les services d'une sage-femme dans le cadre du
projet-pilote. Les deux derniers alinéas de l'article 15 du
présent projet de loi continuent, quant à nous, de s'appliquer.
Nous sommes en accord. Chacun des comités multidisciplinaires devrait
être composé minimalement des personnes suivantes: donc,
l'ensemble des sages-femmes. Ce que nous connaissons des projets
expérimentaux, il n'y a pas un très grand nombre de sages-femmes
dans chacun des pro|et8, donc l'ensemble des sages femmes devrait faire
partie du comité multidisciplinaire, un membre du conseil des
médecins, dentistes et pharmaciens du CLSC ou, à défaut du
CMDP, un médecin du CLSC, le coordonnateur ou la coordonnatrice du
programme, une représentante des usagères désignée
par le conseil d'administration du CLSC. (16 h 30)
Ce comité, quant à nous, remplacerait les
différents paliers prévus au présent projet de loi.
à savoir le conseil des sages-femmes et le conseil exécutif.
Donc, ce modèle, quant à nous, serait beaucoup plus souple,
beaucoup plus léger et nous pensons que ce modèle de
comité multidisciplinaire pourrait s'appliquer également quand
c'est le centre hospitalier qui est le promoteur.
La Présidente (Mme Marois): Je vous informe qu'il vous
reste peu de temps mais je suis persuadée que les membres de cette
commission sont d'accord pour vous donner quelques minutes de plus pour que
vous alliez...
Mme Vaillant: Bon, je vois...
La Présidente (Mme Marois): Mais allez à la fin du
mémoire, Je pense qu'il faut...
Mme Vaillant: Oui, d'accord.
La Présidente (Mme Marois):... c'est-à-dire allez
jusqu'au bout du mémoire, s'il vous plaît.
Mme Vaillant: Je vais essayer d'accélérer, Mme la
Présidente. Nous proposons également que des expériences
soient faites en maison des naissances. Pour les expériences en maison
des naissances, il devrait y avoir, quant à nous, une entente avec le
CLSC pour le pré et le postnatal et également une entente avec le
centre hospitalier pour assurer les services en cas de complications
Imprévues. Et, à l'intérieur de la maison des naissances,
pour assurer le contrôle de la qualité de l'acte, un comité
devrait être mis sur pied. Dans le cas où le CLSC est promoteur
conjointement avec une maison des naissances, l'encadrement par un
comité multidisciplinaire devrait, quant à nous, s'appliquer.
Pour la sélection et l'évaluation des projets-pilotes, il
faut bien s'entendre sur ce que nous devons évaluer et nous proposons
la
création d'un comité provincial d'évaluation qui va
préciser les conditions d'acceptation, recevoir et évaluer les
projets d'expérimentation. Donc, ce comité va déterminer
les critères de sélection, le suivi des projets, en coordonner
l'évaluation. Il serait multlpartite: le ministère de la
Santé et des Services sociaux, le ministre responsable de l'application
des lois professionnelles, les conseils régionaux, l'Association des
hôpitaux, la Fédération des CLSC, des sages-femmes, le
Conseil des affaires sociales et de la famille, la Corporation des
médecins, le Conseil des universités. Ce comité devrait
procéder à l'évaluation et le déposer auprès
des ministres responsables qui devraient le rendre public dans les trois mois
suivant le dépôt du rapport par le comité.
Pour l'accréditation des sages-femmes, nous sommes d'accord avec
les mécanismes qui ont été prévus aux articles 5 et
6 du projet de loi. Je laisse le président de la
Fédération conclure.
M. Payette: En conclusion, notre objectif premier est do
répondre aux besoins des femmes durant la période
périnatale.
La Présidente (Mme Marois): Cela va? Merci, M. le
président. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente. Je veux remercier M. Payette, Mme Vaillant et Mme Rocheleau.
Je pense qu'ils ont compris le message - comme première remarque - que
j'ai lancé à quelques occasions, qu'il y aurait un projet de loi
et qu'il y aurait des expériences-pilotes, que Je souhaitais que la
commission parlementaire nous serve de tremplin pour expérimenter autre
chose que ce qu'il y avait dans le projet de loi, des choses qui pourraient
être un peu plus viables. En tout cas, à tout le moins, le nouveau
texte, Je l'ai parcouru en même temps que vous. Sur le plan de la
présentation, il fait cette démonstration de la capacité
d'aller au-delà du projet de loi et de voir ce qui peut être
davantage viable que ce qu'on a connu dans le projet de loi. Je pense, à
tout le moins, que je dois vous rendre hommage à ce niveau-là.
Vous répondez très bien, à la dernière phrase de
votre deuxième paragraphe, en disant: "... pouvant assurer une
expérimentation plus diversifiée, plus souple et plus concluante.
"
Evidemment, après cela, on tombe dans la mécanique.
D'abord, après, je dirais presque l'Insulte de ne pas avoir
été Intégrés dans le projet de loi, que
c'étaient uniquement les centres hospitaliers, que ce n'étalent
pas des CLSC, je comprends que ce que vous souhaitez et ce que les sages-femmes
souhaitent aussi, c'est qu'on aille au-delà des centres hospitaliers et
qu'on reconnaisse le neuvième champ d'application, qu'au niveau des CLSC
on puisse vous introduire dans tout cela par un nouveau projet de loi, si
jamais c'était le cas.
Sur ce, les messages sont très bien capté, et II y en
avait tout au long de votre discours. J'irais peut-être à la page
3 de votre mémoire, où vous soulevez, à la fin du premier
paragraphe, à la dernière phrase, et je vais vous la lire: "II
est grandement temps que le Québec reconnaisse une pratique qui existe
dans la plupart des autres pays - jusque là, ce n'est pas si mal - et
qui, en plus, se développe ici même dans une sorte de
semi-clandestinité. ''
C'est une affirmation, J'imagine, que vous pouvez étayer et qui
est du vécu. J'aimerais vous entendre un petit peu plus là-dessus
avant d'arriver à certaines modalités.
Une voix:...
M. Côté (Charlesbourg): Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme Vaillant.
M. Côté (Charlesbourg): Alors, Je ne cherche pas
à savoir des choses extraordinaires, mais c'est quand même
là, dans le texte.
Mme Vaillant: En fait, ce que nous disons, M. le ministre, c'est
qu'il faut que cette pratique-là se fasse au Québec. Sur 210 pays
de l'OMS, II y en a huit qui ne reconnaissent pas les sages-femmes, dont le
Canada, et ici, le Québec. Quand on parle de semi-clandestinité,
c'est que finalement il y a une certaine pratique qui se passe, mais qui n'est
pas reconnue comme telle. Le réseau public doit, quant à nous, au
niveau de la santé et des services sociaux, avoir droit de cité,
cela doit s'insérer dans une approche globale, cela doit être
reconnu. On sait que c'est une longue lutte, que ce sont des revendications que
les femmes font depuis dix ans, et c'est une chose qui doit être
officiellement reconnue par voie législative au Québec et par les
modifications qui s'imposent aux différentes lois, dont la Loi
médicale.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. C'est donc une pratique
qui existe en semi-clandestinité et je comprends ce que vous nous dites.
Cela veut dire qu'il y a peut-être des choses qui se passent qui ne
devraient pas se passer, dans la mesure...
M. Chevrette: Qui devraient être
généralisées.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, je pense qu'on
se comprend bien. Dans la mesure où on a un projet de loi, qu'il y a des
expériences-pilotes, est-ce que pour vous, nous devrons être
tolérants sur ce qui se passe au-delà des
expériences-pilotes ou si, à partir de ce moment-là, la
loi s'applique?
Mme Vaillant: Là-dessus, M. le ministre, deux choses.
D'une part, nous sommes convaincus que les expériences-pilotes doivent
se faire dans les meilleures conditions possible, l'objectif visé
étant subséquemment une généralisation,
c'est-à-dire la possibilité de l'étendre, et c'est un
choix que les femmes feront.
Pour le reste de la question, je vous dirais qu'H y a une question de
santé publique et de responsabilité que le ministre de la
Santé et des Services sociaux a et je ne peux aller plus loin, vous me
comprendrez.
M. Côté (Charlesbourg): A la responsabilité
de.., mais, comme vous êtes des partenaires privilégiés du
ministre et du ministère...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Vaillant: c'est pourquoi, m. le ministre, nous sommes
prêts à nous embarquer à plein...
M. Coté (Charlesbourg): D'accord. Mme Vaillant:...
dans les projets-pilotes.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord. Donc, si je
comprends votre présentation, je pourrais peut-être dire que le
projet de loi, tel qu'il est actuellement, n'offre pas suffisamment ou offre
trop d'encadrement pour permettre l'expérimentation et, quand on parle
d'une expérience, on ne veut pas conclure, avant môme qu'on la
fasse, qu'elle est bonne ou mauvaise. Donc, si je comprends votre
présentation, le projet 4, tel qu'il est actuellement, encadre trop
d'expériences et vous souhaitez qu'on l'encadre beaucoup moins. Donc,
beaucoup plus d'autonomie à ce niveau-là, et ça
m'amène à vous dire: Où se partage la
responsabilité locale si, par exemple, on reconnaissait cette pratique
au niveau des CLSC, par rapport à celle qui est provinciale?
Mme Vaillant: Là-dessus, M. le ministre, l'encadrement est
beaucoup plus souple: II faut garantir la qualité de l'acte. Donc, le
comité multidisciplinaire, avec les fonctions qui lui sont imparties,
garantit ce contrôle de la qualité de l'acte.
Au niveau provincial, avec notre comité provincial
d'évaluation, à ce moment-là, les grands critères
sont établis et on assure un encadrement général au niveau
provincial. On parle du projet de loi et nous sommes en accord avec l'article 7
qui parle des mécanismes prévus pour assurer la supervision,
l'identification des actes médicaux que les sages-femmes seront
autorisées à poser, l'avis du conseil des médecins et
dentistes et les différents critères pour l'approbation du
projet-pilote... Donc, c'est déjà là un
élément. En plus, nous ajoutons le suivi des projets-pilotes et
l'évaluation/ Donc, le comité provincial assure un encadrement
général des projets et, au niveau local, c'est dans la
quotidienneté des actes que le comité multidisciplinaire, qui est
là, qui est léger, assure cette responsabilité.
M. Côté (Charlesbourg): On continue notre
mémoire. Évidemment, il faut toujours faire vite dans ces
circonstances-là. Le mémoire est assez complet, mais je
m'étonne de manière positive à certaines occasions et de
manière négative, à d'autres.
Un des principaux reproches à votre mémoire, c'est de vous
avoir oublié dans le projet de loi au niveau des projets-pilotes.
À la page 7, lorsque vous faites la nomenclature des possibilités
du mémoire, vous dites: Centre hospitalier, en collaboration avec CLSC;
deuxième alternative: CLSC, en collaboration avec le centre hospitalier
et troisième alternative. CLSC, avec maisons de maternité
Là on oublie centre hospitalier seul. Est-ce que vous avez des
objections?
Mme Vaillant: Nous ne l'avons pas mis volontairement,
délibérément, pour une seule raison: parce que nous
pensons qu'à cause de la continuité des services, si le centre
hospitalier est promoteur, nous sommes tout à fait d'accord qu'il y ait
des projets en ce sens-là. Il faut assurer la continuité. Donc,
il y a le prénatal et le postnatal. Il y a la période de
grossesse et c'est ce pourquoi nous retenons, nous vous proposons trois
hypothèses. C'est l'objectif de continuité des services.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, ce que je comprends,
c'est l'avant, le pendant et l'après sur toute la ligne.
Mme Vaillant: C'est ça.
La Présidente (Mme Marois): Oui, s'il vous plaît,
madame.
Mme Rocheleau (Lucille): Je voudrais juste préciser, pour
compléter la pensée là-dessus, qu'il n'est pas Ici au
niveau de l'hypothèse, parce que quand on parle d'accouchement normal -
ce dont il est question dans les projets ici - si vous regardez dans notre
mémoire, on parle quand môme d'ententes avec les centres
hospitaliers, dans le cas de maisons des naissances et de CLSC, pour les cas
qui n'auraient pas été prévus, c'est-à-dire pour
des complications imprévues. C'est évident qu'il faut faire une
entente avec les centres hospitaliers, sauf que si on s'en tient à la
grossesse, à la naissance et au postnatal normal, on peut
présenter des projets CLSC et maisons des naissances.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Je continue toujours
dans ma recherche: page 12, paragraphe en haut: "Dans un tel contexte, les
sages-femmes deviendraient employés du CLSC, lequel devrait donc signer
un protocole d'entente avec l'organisme sans but lucratif promoteur du projet
de maison des naissances. " Alors, vous allez m'expliquer ça; vous
commencez à me faire peur un peu. (16 h 45)
Mme Vaillant: Concernant la maison des naissances, il y a deux
hypothèses: il y a l'hypothèse où le CLSC est promoteur,
auquel cas la sage femme est employée du CLSC, et Je pourrai vous parler
de la responsabilité médicale, de la responsabilité
civile. J'ai quelque chose là-dessus. Donc, dans ce cas-là, la
sage-femme est employée du CLSC, et c'est le comité
multldisciplinaire qui s'applique. L'autre hypothèse, et ça nous
savons qu'il y a au moins un projet au Québec de maison des naissances
dans l'Outaouais. Dans le cas où la sage-femme serait employée de
la maison des naissances, à ce moment, il faudrait qu'il y ait - c'est
un organisme sans but lucratif - une entente avec le CLSC pour assurer la
continuité des services et pour assurer un certain suivi. C'est pour
ça que, dans cette partie, vous voyez, on parle d'un encadrement
nécessaire, mais dans l'hypothèse où c'est la maison des
naissances qui serait promoteur avec entente avec le CLSC, à ce moment,
la modalité organisationnelle, la sage-femme pourrait être
employée de la maison des naissances, mais ça va
nécessiter une entente avec le CLSC
La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Juste pour dire qu'on va
éliminer une possibilité tout de suite - ce qu'on peut
éliminer, pour ne pas se créer de problème - celle de
l'organisme sans but lucratif, si la maison des naissances... Ça sera
rattaché au CLSC, si jamais on devait aller là. Ça ne me
paraît pas, en tout cas pour moi, à ce moment-ci, je pense qu'il
faut...
La Présidente (Mme Marois): Si je comprends bien, le
ministre nous donne un avis clair sur l'orientation qu'il souhaite donner
à cet égard.
M. Côté (Charlesbourg): Écoutez, je suis
là pour entendre. On fait des propositions. Quand on pourra
régler des choses des maintenant, dans mon esprit à moi, il
s'agira de le faire adopter après, à tout le moins pour que ce
soit clair, c'est un peu comme ça que je fonctionne, quand je peux le
faire, évidemment.
Ça m'amène à la question suivante qui est: A partir
du moment où la maison des naissances est rattachée au CLSC, si
on acceptait, il y a donc une responsabilité qui doit être
couverte sur le plan des assurances. On a entendu toutes sortes d'horreurs sur
le plan des assurances: 10 000 $, 5000 $, 1000 $; on a entendu toutes sortes de
choses. Les sages-femmes nous ont dit, dans le mémoire
précédent, qu'elles étaient prêtes à aller de
l'avant et qu'elles y croyaient suffisamment pour être capables d'assumer
un certain risque. J'imagine que si vous êtes allées aussi loin
dans la présentation, c'est que vous y croyez; y croire tellement...
J'imagine que vous avez dû vérifier cet aspect des assurances. Si
vous l'avez vérifié, j'aimerais vous entendre là
dessus.
Mme Vaillant: Pour y croire, nous y croyons. Oui, nous avons
vérifié. Au niveau de l'assurance-responsabilité civile et
professionnelle, nous avons vérifié avec nos assureurs. Pour
nous, ça ne poserait pas de problème de couvrir les sages-femmes
à l'intérieur de notre couverture actuelle
d'assurance-responsabilité civile et professionnelle. J'ai une lettre
officielle de notre assureur que je peux déposer auprès de la
commission parlementaire, si vous le désirez, qui donne les coûts
approximatifs par sage-femme, ce que ça nous coûterait en CLSC
pour le faire. Je peux vous donner cette information, si vous le
désirez.
La Présidente (Mme Marois): Nous aimerions l'obtenir, Mme
Vaillant.
Mme Vaillant: Je vais vous la donner. Les coûts
approximatifs selon les options, 500 $ par sage femme, lorsque les
accouchements ont lieu dans un centre hospitalier; 750 $ par sage-femme lorsque
les accouchements ont lieu dans un centre aménagé à cet
effet ayant des services d'urgence disponibles en centre hospitalier. Pour ce
qui est de l'assurance-responsabilité excédentaire, un coût
additionnel d'environ 35 % des primes plus haut mentionnées pourrait
être exigé. Ça veut dire que
l'assurance-responsabilité excédentaire s'ajoute à notre
couverture de base. Donc, pour avoir une couverture maximale, on augmenterait
de 35 %; donc, par sage-femme, ça ferait 650 $ en CLSC. Nous avons une
lettre de nos assureurs à cet effet.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'il y a une
franchise maximum?
Mme Vaillant: Actuellement, nous sommes restés à
l'Intérieur de notre couverture actuelle; elle pourrait être
majorée. La responsabilité professionnelle est de 4 000 000 $
couvrant le primaire et l'excédentaire; au niveau de la
responsabilité civile, nous n'avons pas de maximum.
M. Côté (Charlesbourg): Pas de franchise?
Mme Vaillant: C'est...
Un» voix: Pour aider Ia oommission.
Mme Vaillant: Je peux vous déposer ces documents.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, s'il vous
plaît.
La Présidente (Mme Marois): Oui, s'il vous plaît.
Mme la secrétaire va prendre votre document.
M. Côté (Charlesbourg): Je passe la parole à
mon collègue de Verdun qui avait quelques questions.
La Présidente (Mme Marois): II vous reste quatre minutes,
M. le député.
M. Gautrin: Brièvement, Mme la Présidente J'ai une
question sur la page 9 de votre document, c'est-à-dire sur l'encadrement
professionnel. Est-ce que, pour vous, les sages-femmes sont toutes d'abord des
infirmières, ou non? Deuxième question, si vous me
répondez non, parce que j'ai cru que c'était implicite dans votre
document. Est-ce que chaque conseil d'administration de CLSC va pouvoir
décider qui est sage-femme et qui n'est pas sage-femme?
Mme Rocheleau: Je peux répondre là-dessus.
La Présidente (Mme Marois): Très certainement.
Mme Rocheleau: C'est que pour nous, pour être sage-femme,
il ne faut pas nécessairement être une infirmière. Une
infirmière peut devenir sage-femme ou peut être sage-femme.
Ça, c'est notre position.
M. Gautrin: II faut d'abord être infirmière avant
d'être sage-femme.
Des voix: Non
Mme Rocheleau: Non, ce n'est pas nécessaire.
M. Gautrin: Non. Ce n'est pas ça que vous dites.
Mme Rocheleau: Ce n'est pas nécessaire.
M. Gautrin: N'importe qui peut être sage-femme.
Mme Rocheleau: En autant qu'elles ont la formation
nécessaire. Là-dessus, pour nous, la question de la
compétence de la sage-femme, elle se décide non pas au niveau de
chaque conseil d'administration, mais au niveau d'un comité provincial
qui est proposé déjà au projet de loi, à l'article
5 et à l'article 6, avec lequel on est d'accord.
La Présidente (Mme Marois): Ça va? M. Gautrin:
O. K. Merci.
La Présidente (Mme Marois): Est-ce que vous avez d'autres
questions, M. le député? Est-ce qu'il y a d'autres questions du
côté gouvernemental? Alors, je passe la parole à M. le
leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Merci, M. le Président.
La Présidente (Mme Marois): Mme la Présidente.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Je suis tellement habitué...
La Présidente (Mme Marois): On va s'y habituer.
M. Chevrette: Je suis tellement habitué de plaider de
l'autre bord et on a...
La Présidente (Mme Marois):... masculinisé la
présidence.
M. Chevrette:... masculinisé la présidence de
l'autre côté. Donc, c'est pour ça. D'autant plus que je
voulais m'adresser à mon ancien sous-ministre adjoint. Je vous salue
tout d'abord et je voudrais vous dire, dans un premier temps, que je partage
entièrement l'analyse que vous faites du projet de loi.
Je demeure convaincu, tout comme vous, que le meilleur moyen de tuer le
projet, c'est d'adopter intégralement le projet de loi 4 qui est sur la
table. Je suis convaincu de ça. Je vous reconnais aussi, bien sûr,
habilement la compétence de présenter une alternative
théorique que |e partage en partie, mais pas sur toute la ligne, d'autre
part.
Il m'apparaît que vous créez beaucoup de paperasses
juridiques vous aussi, sans doute par déformation. Vous voulez clarifier
par protocole à peu près tout ce qui bouge. Mais tout en
réclamant beaucoup de souplesse, vous ne trouvez pas que vous y allez
beaucoup dans le juridique, vous aussi? Ah! Lâchez-vous! Je vous ouvre la
porte.
La Présidente (Mme Marois): Mme Vaillant.
Mme Vaillant: Écoutez, là-dessus nous pensons,
parce qu'il n'y a pas d'ordre profession-
nel et qu'il y a une obligation de garantir le contrôle de la
qualité des actes; c'est une question aussi de crédibilité
pour la clientèle, mais aussi pour les sages-femmes, Je pense que la
pratique comme telle doit être encadrée ou doit être
balisée. On propose un comité multidis-ciplinaire, oui. Il est
quand même beaucoup plus léger que le projet de loi.
Maintenant, quand vous parlez de juridisme, moi, je pense que c'est
important, comme les sage-femmes l'ont souligné
précédemment, que ça soit clair. Qui va être admis
en centre hospitalier? Quel type de grossesse? SI c'est une grossesse à
risque, il faut, dès l'admission en centre hospitalier, qu'il y ait des
ententes. Il faut que la sage-femme puisse, quand elle va accoucher en centre
hospitalier... que les règles du jeu soient claires. Or, la seule
façon de le faire, c'est par un protocole d'entente et ce protocole
d'entente va définir qui, va définir quand; il va définir
comment la sage-femme peut faire appel aux ressources. A notre point de vue,
connaissant le réseau, il faut absolument - je dirais plus que c'est par
une déformation de connaissance du réseau - que ce soit clair
avant de commencer et ce, pour s'assurer que l'expérimentation soit
concluante.
C'est pourquoi nous prévoyons un protocole d'entente avec le
centre hospitalier. Avant de partir, quand la sage-femme va Intervenir en
milieu hospitalier, elle n'aura aucun problème. Les portes vont lui
être ouvertes et elle va pouvoir exercer dans des conditions favorables.
Notre conviction, c'est que ça doit être défini avant de
partir. C'est pourquoi nous proposons un protocole d'entente qui va être
élaboré par le comité multldisclpllnalre, auquel
comité siège l'ensemble des sages-femmes. Donc, elles vont
être partie prenante à l'élaboration du protocole et
à ce dont elles ont besoin pour exercer leur pratique en milieu
hospitalier. C'est dans ce sens-là. Eu égard à la
situation actuelle et compte tenu des objectifs, nous ne voyons pas d'autres
façons de faire.
M. Chevrette: Oui, merci. Pour ce qui est de la
responsabilité civile, ce n'est pas par protocole que vous allez
établir une responsabilité civile. C'est donc par
législation que vous allez donner une assise pour rendre responsable
quelqu'un de A à Z dans le processus normal d'un accouchement, par
exemple. Dans l'article 15 de la présente loi, II est clairement
identifié qu'une grossesse à risque relève d'un
médecin ou d'un professionnel de la santé. Mais dans le reste du
projet de loi, je ne vois rien qui établisse clairement une
responsabilité claire et précise à une sage-femme,
d'autant plus que ce n'est pas un ordre professionnel, comme vous dites.
Comment voyez-vous l'Inclusion de ça à l'intérieur d'un
projet de loi? Est-ce que vous avez des Idées claires? Vous connaissez
bien le milieu, vous connaissez bien le ministère. Comment vous verriez
ça, vous, dans un projet de loi, l'Identification d'une
responsabilité précise pour une sage-femme?
Mme Vaillant: notre position là-dessus est la suivante.
à partir du moment où le clsc est promoteur et que la sage-femme
est rattachée au clsc, à ce moment-là, c'est le clsc qui
va assumer la responsabilité dans le cadre de sa responsabilité
globale, la responsabilité que l'établissement a pour l'exercice
de l'ensemble de ses employés. Donc...
M. Chevrette: Vous êtes en train de me répondre...
Je vous arrête.
Mme Vaillant: Oui.
M. Chevrette: Vous êtes en train de me répondre que
dorénavant - là, ça serait vraiment du droit nouveau en
santé - ce sera une institution et non l'individu qui sera responsable
du geste qui est posé par un individu. Est-ce qu'on se comprend bien?
Ordinairement, c'est conjointement et solidairement que l'individu a une
responsabilité. Par exemple, dans les cas de poursuite, on poursuit M.
le docteur X conjointement et solidairement avec l'hôpital ou le centre
hospitalier X. Dans les circonstances, vous dites: Parce que c'est un
salarié - parce que j'ai bien compris que vous préconisiez le
fait que les sages-femmes deviennent des salariés... En réponse
à... À moins que je n'aie mal compris une de vos réponses
à M le ministre.
Mme Vaillant: C'est exact.
M. Chevrette: Vous favorisiez le salariat pour la sage-femme
à un CLSC. Et vous me dites qu'à ce moment-là, c'est
l'institution qui deviendrait, sur le plan de la responsabilité civile,
le seul et unique responsable, même en cas de faute lourde? C'est
peut-être pour ça que ça ne vous coûte pas cher
d'assurance.
Mme Vaillant: Non. Si vous intervenez au niveau de la
responsabilité civile - 1053 du Code civil - pour nous, le CLSC
étant l'employeur, il a une police d'assurance et il a une
responsabilité. Pour le reste, au niveau de la responsabilité
délictuelle ou de la responsabilité s'il y a faute lourde et
autres, normalement, les gens sont poursuivis conjointement et solidairement.
Cela veut dire que le professionnel est poursuivi... Habituellement, les
avocats poursuivent de façon conjointe ou en...
M. Chevrette: Si j'ai posé la question, Mme Vaillant,
c'est que, tantôt, |e me souviens de l'écart que vous avez
présenté quand vous avez soumis le coût des polices
d'assurance.
La Présidente (Mme Marois): Que vous avez d'ailleurs, M.
le leader, devant vous, là.
M. Chevrette: Oui. Mais quand elle a soumis ça
tantôt, ma surprise était grande parce que, dans l'espace d'un an
dans le domaine de la santé... Par exemple, assurer les hôpitaux
au Québec, ça a augmenté de 400 % d'un coup sec. De 2 000
000 $, c'est passé à 8 000 000 $. Je me disais: Comment il se
fait que l'inclusion d'une nouvelle profession sans ordre professionnel peut
avoir une tarification aussi basse, quand on sait comment c'est
élevé dans le système que je connais? Je me disais: C'est
sûrement parce que la question a été posée
différemment qu'on peut arriver à une tarification aussi basse,
sinon on va conseiller à tous les hôpitaux du Québec et
à tous lus professionnels de la santé d'aller voir votre
compagnie, elle n'est pas chère Mais là |e viens de comprendre
pourquoi elle est moins chère, c'est que la responsabilité...
Vous prenez fait et cause comme institution pour les professionnels qui y
oeuvrent. C'est ça que je voulais souligner.
Mme Vaillant: C'était notre hypothèse. Pour le
reste, je n'ai pas fait faire d'avis juridique, vous le comprendrez bien.
M. Chevrette: D'accord.
Mme Vaillant: Mais auprès de notre compagnie d'assurances,
c'est sûr que la couverture implique que la sage-femme est
employée du CLSC. C'est ça, notre hypothèse.
M. Chevrette: Quand on parle d'autonomie pour la profession des
sages-femmes, ne croyez-vous pas - je vous pose la question - que les
projets-pilotes pourraient être précisément des femmes non
salariées d'une institution, mais qui se regroupent pour vivre une
expérience-pilote où elles sont véritablement autonomes et
indépendantes de toute institution traditionnelle, y compris le
CLSC.
Mme Vaillant: Moi, là-dessus, M. Chevrette, je vous dirais
ceci: Nous favorisons des expérimentations diversifiées; il n'y a
pas d'exclusivité. On se comprend bien. Ce que nous disons, c'est qu'en
suggérant, par exemple, une maison des naissances qui... Ce que vous
proposez pourrait être dans le cadre d'une maison des naissances, mais
dans un tel cas il faudrait s'assurer d'ententes avec un centre hospitalier ou
un CLSC afin que ça ne se développe pas de façon
totalement indépendante et parallèle. Il y a quand même des
services pré et postnatals qui sont disponibles. Mais nous ne nous
opposons absolument pas à ce qu'il y ait différentes
expériences. Ce que nous disons, c'est que les CLSC peuvent être
promoteurs. C'est le réseau public en première ligne. Donc, quand
nous mettons de l'avant la maison des naissances, ça rejoint un peu ce
que vous suggérez.
La Présidente (Mme Marois): D'accord.
M. Chevrette: Maintenant, vous préconisez... Le ministre a
réussi à vous faire dire que vous ne préconisiez pas la
formule d'hôpital seul. Dans l'hypothèse où un centre...
Prenons un exemple où un centre hospitalier est à peu près
la seule institution un peu régionale et que le CLSC, c'est minime, ce
sont des sous-postes de CLSC qui existent et c'est loin. Est-ce que ce n'est
pas possible d'envisager dans un centre hospitalier où l'approche
médicale, par exemple, de ce centre hospitalier serait extrêmement
favorable à un tel projet pilote et qu'il y ait une très grande
collaboration, dans ce cas là, est ce que vous réviseriez votre
option quant à la possibilité, par exemple, d'utiliser un
projet-pilote en centre hospitalier?
Mme Vaillant: Là-dessus, je reviens à l'objectif
que nous avons qui est la continuité des services. Donc, ce n'est pas
juste l'accouchement. C'est le pré et le postnatal. Donc, dans ce
sens-là, je vous dirais qu'en régions éloignées, ce
sont des centres de santé qui ont une vocation de CLSC, mais qui ont
également une vocation de centre hospitalier. Si un tel cas existait,
encore là, il n'y a pas, quant à nous, d'exclusivité. Ce
que nous visons, c'est la continuité des services, que le pré et
le postnatal soient couverts. Or, le réseau des CLSC est
parachevé actuellement au Québec et, à ma connaissance, il
y a des services surtout en périnatalité qui sont disponibles
dans les 159 CLSC, y compris en centres de santé qui ont une vocation de
CLSC. Mais il n'y a pas d'exclusivité dans ce que nous proposons.
L'expérimentation doit être diversifiée et ce que nous
disons, c'est que nous sommes favorables au projet de loi, nous sommes
prêts â nous embarquer nous, comme fédération, et
à faire en sorte qu'il y ait des projets-pilotes.
M. Chevrette: Comme vous écartez, en tout cas, de toute
façon vous l'avez écarté des centres hospitaliers, est-ce
que vous préconisez des expériences... Il y a huit projets.
Est-ce que vous voulez voir une expérimentation un peu
diversifiée dans tout le Québec ou centralisée dans
certaines villes?
Mme Vaillant: Là-dessus...
M. Chevrette: Comme Fédération des CLSC, je dis
bien.
Mme Vaillant: Comme Fédération des CLSC...
M. Chevrette: Je m'essaie. C'est parce que je ne veux pas avoir
l'air... Vous savez ce que |e veux dire.
Mme Vaillant: actuellement, les projets que les clsc ont sont
à la fois en milieux ruraux (le clsc des chenaux) et en milieu urbain,
à montréal (le clsc du plateau). donc, quant à nous, on
doit tenir compte de ces dimensions parce que c'est différent. il faut
tenir compte de la diversité. comme fédération des clsc,
ça se reflète aussi dans les projets-pilotes.
La Présidente (Mme Marois): Ça va?
M. Chevrette: Oui. Est-ce qu'il y en a d'autres qui...
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Une toute petite question, parce que l'avale d'abord
commencé par lire votre mémoire qui avait été
déposé au mois d'août et, comme il y a des morceaux qui
sont partis, je voudrais savoir s'il y a eu des changements d'idées. En
particulier, vous parliez au mois d'août de la question
d'accessibilité. Est-ce que, très carrément, cela suppose
que tous ces services seraient accessibles gratuitement à tous, qu'il
n'y aurait pas de "priorisation", que ce serait vraiment accessible à
toute femme qui souhaiterait être avec ce service du CLSC? C'est parce
qu'il y avait dans votre mémoire du mois d'août une question non
pas de "priorisation", mais vous posiez la question à savoir s'il devait
y avoir une "priorisation", alors j'imagine qu'il y avait un questionnement
quelque part.
Mme Rocheleau: Je peux répondre là-dessus. Pour
nous, c'est toujours le même principe, dans le fond, qu'on a
développé davantage qui est la question de faire des projets
différents pour être capable de conclure des choses
intéressantes par la suite. Alors, je pense que, par rapport à ce
qu'on avait écrit au mois d'août, on l'a tout simplement
élargi dans le sens qu'il dit que ce qui serait Intéressant
d'avoir au Québec comme projets-pilotes, ce sont des projets qui
s'adressent à des populations à risque pour voir ce que ça
donne et des projets qui s'adressent à l'ensemble des femmes qui sont
Intéressées à avoir les services d'une sage-femme, pour
voir aussi ce que ça donne comme résultats et être capable
d'avoir des conclusions intéressantes à la fin des
projets-pilotes pour dire si, oui ou non, c'est intéressant pour le
Québec que la sage-femme soit intégrée au système
de santé québécois
La Présidente (Mme Marois): Oui, ça va.
M. Trudel: Une autre toute petite. Dans le comité, les
membres du comité de sélection des projets, vous prévoyez
- on comprend facilement pourquoi - un membre du Conseil des
universités; c'est probablement quant à l'évaluation de la
compétence ou de la qualification des membres, en particulier les
sages-femmes qui feraient partie du projet. Là-dessus, est-ce que vous
seriez d'accord qu'on parle peut-être plus largement, au lieu d'un membre
du Conseil des universités qui n'a pas toujours les ressources
nécessaires pour évaluer de tels types de programmes de formation
ou d'évaluation de compétence, que ce soit un représentant
universitaire reconnu par les parties, par le ministère, par le
responsable des corporations professionnelles, parce qu'on peut retrouver dans
une université, généralement dans la faculté ou
dans le département concerné, probablement une bien meilleure
connaissance d'évaluation de la compétence que dans un organisme
de coordination? Est-ce que vous seriez d'accord avec ça?
Mme Vaillant: Nous n'avons pas de problème avec...
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. Payette.
M. Payette: Certainement qu'on serait d'accord. D'ailleurs, on
parle d'un représentant mais ce qu'on voulait dire, c'est du monde
universitaire qui serait reconnu, crédible et compétent pour
faire partie d'un tel comité.
La Présidente (Mme Marois): Ça va? Merci. M. le
ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je ne peux pas
m'empêcher de relever la balle qui vient d'être lancée par
notre ami, le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue,
compte tenu de ses antécédents...
M. Trudel: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg):... sur le plan
universitaire. Ce n'est pas méchant.
Je veux remercier les représentants de la
Fédération des CLSC du Québec pour leur contribution.
C'est vraiment une contribution très ouverte à un débat
qui doit être ouvert, si on veut que ça porte fruit, et il y aura
très certainement des choses à l'intérieur du
mémoire qui vont nous inspirer pour la rédaction du projet de loi
final. Merci.
La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie à mon
tour, comme présidente de la commission. Je vous félicite aussi
pour votre nomination, Mme Vaillant, puisque ça semble très
nouveau. Merci pour, effectivement, la contribution que vous apportez qui est
tout à fait de
fond et Intéressante à cet égard.
J'appelle maintenant la Fédération des Infirmières
et Infirmiers du Québec.
On peut suspendre les travaux une ou deux minutes, le temps de faire le
changement.
(Suspension de la séance à 17 h 10)
(Reprise 17 h 14)
La Présidente (Mme Marois): Si les membres de la
commission veulent bien reprendre leur fauteuil... sauf qu'on n'a personne
à auditionner. Ha, ha, ha!
Est-ce que les personnes représentant la Fédération
des infirmières et infirmiers du Québec peuvent prendre place,
s'il vous plaît? Est-ce qu'elles sont là?
M. Chevrette: Où sont les Infirmières?
La Présidente (Mme Marois): La Fédération
était représentée par Mmes Fortier et Dufresne; est-ce que
ces personnes sont là? Est-ce que le Regroupement de professionnels en
santé communautaire... On arrive? D'accord.
Bienvenue à la commission. Nous aimerions, comme je l'ai
mentionné à ceux et à celles qui vous ont
précédés, que vous vous présentiez aux membres de
la commission. Vous avez une vingtaine de minutes pour présenter votre
mémoire et, ensuite, nous avons environ 40 minutes pour soulever des
questions. Merci.
Fédération des infirmières et
Infirmiers du Québec
Mme Fortier (Lucie): Bonjour. Je suis Lucie Fortier,
première vice-présidente à la Fédération des
infirmières et infirmiers du Québec.
Mme Dufresne (Danielle): Danielle Dufresne, conseillère en
santé pour la Fédération des Infirmières et
infirmiers du Québec. Bonjour.
La Présidente (Mme Marois): Bonjour et bienvenue.
Mme Fortier: Mme la Présidente de la commission, mesdames
et messieurs les députés, il me fait plaisir de vous rencontrer
cet après-midi afin de vous présenter le mémoire de la
FIIQ sur le projet de loi 4. La FIIQ est une nouvelle fédération
dans le secteur de la santé. Née en décembre 1987, elle
regroupe 40 000 infirmières. C'est comme infirmières,
professionnelles en santé, que nous jugeons pertinent d'apporter notre
point de vue face à ce projet de loi. C'est aussi en fonction de notre
rôle, comme groupe organisé, intéressé au maintien
et au développement de la santé publique, que nous voulons
apporter notre contribution. Enfin, c'est comme femmes et usagères,
souvent confrontées à des maternités hautement
médicalisées, que nous voulons faire entendre notre voix.
Tout d'abord, il est important de mentionner ici que la FIIQ accueille
très favorablement la reconnaissance de la pratique des sages-femmes.
Cette reconnaissance par le gouvernement du Québec va dans le sens des
préoccupations et des prises de position de la FIIQ. La FIIQ, en se
basant sur la philosophie professionnelle de ses membres, s'est montrée
clairement en faveur d'une approche globale en santé,
privilégiant la prévention et s'opposant au morcellement des
soins. La médicalisation à outrance et la fragmentation de nos
tâches dans la stricte hiérarchie des soins et des traitements
nous semblent manifestement contradictoires avec une approche de soins,
approche davantage bénéfique de bien-être physique et
psychologique des bénéficiaires. C'est une approche qui vise,
entre autres, à redonner aux femmes le contrôle de leur corps, le
vécu de leur grossesse et de leur accouchement par un suivi attentif
d'accompagnement et d'aide, et non d'Intervention autoritaire. la pratique des
sages-femmes se situe dans le droit fil de la problématique de la fiiq.
nous souscrivons au principe de la reconnaissance de la pratique des
sages-femmes tel qu'édicté dans le projet de loi 4. notre
approbation est toute-fois mitigée, face à l'aspect limitatif du
projet de loi qui reporte ultérieurement la véritable
reconnaissance légale du travail de la sage-femme. nous estimons trop
restrictive la perspective gouvernementale de la reconnaissance du travail de
la sage-femme. à ce stade-ci. nous aurions préféré
une reconnaissance légale immédlate de la pratique des
sages-femmes à l'intérieur d'un projet de loi qui tienne
davantage compte de la philosophie de cette intervenante.
L'histoire nous enseigne qu'en santé l'évolution de la
division du travail selon les sexes a été profonde. Aux hommes a
été dévolu tout ce qui, du sorcier au prêtre, en
passant par le médecin, a permis de faire reculer l'ennemi, qui est la
souffrance et la mort. Aux femmes a été dévolu tout ce
qui, de la sage-femme à l'esthéticienne, en passant par
l'infirmière, a permis l'entretien, le maintien et la qualité de
la vie. Avec rétablissement d'une médecine en profession, de son
organisation en corporation, s'est développée et a
triomphé une pratique médicale très interventionniste,
axée fortement sur l'aspect curatif et le traitement de la maladie. Elle
a aussi pour effet de morceler l'individu en portions à traiter. La
maternité n'a pas échappé à ce processus et
l'accouchement devient un acte médical, la plupart du temps soustrait de
la maternité dans sa globalité.
Nous savons cependant que toute femme, pour l'avoir vécu ou pour
être appelée à le
vivre, sait que c'est un acte hautement humain et naturel que de porter
et de mettre au monde un enfant. Les sages-femmes, dont la conception va dans
ce sens, n'ont pas le droit de pratique au Québec. Par ailleurs,
à l'échelle mondiale, les trois quarts des bébés
naissent des mains des sages-femmes. Elles pratiquent sur toute la
planète, notamment dans l'ensemble des pays industrialisés, sauf
en Afrique du Sud et au Canada, où la profession est encore
illégale. Une telle similitude, dans le contexte politique mondial
actuel, est susceptible d'être remise en question.
Notre intervention, ici, en audience publique, s'articulera à
partir de trois principes qui nous semblent fondamentaux dans ce dossier:
l'accessibilité des services de la sage-femme pour toutes les femmes de
toutes les régions du Québec, l'autonomie nécessaire de la
sage-femme dans le champ de sa pratique et les moyens qui lui permettent de
l'exercer et, enfin, l'importance d'un partenariat entre la sage-femme et les
divers intervenants, en particulier l'infirmière, pour assurer une
collaboration fructueuse et efficace.
D'autres points, telles la formation de la sage femme et sa
rémunération, ont aussi retenu notre attention dans ce
mémoire. C'est dans cette perspective que la Fédération
souhaite que ces propositions de modifications à apporter au projet de
loi soient prises en considération. Nous considérons qu'elles
sont primordiales pour permettre une reconnaissance réelle de la
pratique de la sage-femme, introduisant ainsi un plus pour la santé et
le bien-être de l'ensemble des femmes et de la population du
Québec.
Les principes. L'accessibilité des services. Cette
accessibilité des services s'articule, pour nous, en trois points.
Premièrement, la possibilité pour l'usagère de vivre une
grossesse et un accouchement qui respectent son rythme par le recours aux
services d'une sage-femme. La femme, usagère des services de
santé au Québec, doit pouvoir avoir le choix de recourir, soit
aux services d'une sage-femme ou d'un médecin ou, encore, des deux
intervenants, concurremment.
Dans un deuxième temps, ce principe d'accessibilité
s'incarne aussi dans la possibilité d'implanter les projets-pilotes dans
divers lieux autres que le centre hospitalier actuellement
privilégié dans le projet de loi 4.
Enfin, l'accessibilité des services concerne aussi la
répartition régionale. L'universalité des services sociaux
et de la santé posée comme principe par l'État et la
population du Québec depuis quelque deux décennies comprend aussi
le droit à l'égalité des services pour les
différentes régions de la province et l'ensemble de la
province.
Ces trois points, importants pour nous, constituent le principe
d'accessibilité des services et nous semblent avoir été
limités par les modalités d'application du projet de loi. C'est
la FIIQ qui salué le premier geste concret du gouvernement dans ce
dossier. Elle déplore toutefois la précarité d'une
législation définie dans le temps par le nombre et sujette
à une réévaluation permanente. En effet, nombre
d'études de faisabilité et une opinion largement favorable
auraient dû décider le gouvernement à procéder
à une reconnaissance légale et immédiate de la pratique
des sages-femmes pour l'ensemble du territoire québécois.
Le gouvernement, par le biais du projet de loi en débat
présentement, semble y répondre timidement. À la FIIQ,
nous serions davantage favorables à préciser ces projets-pilotes
et que ces projets-pilotes s'établissent là où la demande
le justifie. C'est pourquoi nous recommandons une reconnaissance légale
Immédiate de la pratique des sages-femmes et que ce service soit
accessible sur l'ensemble du territoire du Québec.
En ce qui a trait au lieu d'implantation, la fédération ne
s'oppose pas à l'existence d'un projet-pilote en centre hospitalier,
mais aurait préféré qu'on considère ce lieu comme
un choix parmi d'autres pour reconnaître la pratique des sages-femmes
D'autre part, la restriction des projets pilotes au seul centre hospitalier ne
peut que desservir ou, à tout le moins, rendre plus difficile
l'accessibilité aux services d'une sage-femme pour les femmes demeurant,
entre autres, à l'extérieur des centres urbains. Cependant, dans
l'optique de l'implantation d'un projet-pilote en centre hospitalier, la
création d'une maternité autonome, distincte des unités
d'obstétrique traditionnelles, pourrait permettre une approche moins
interventionniste et une meilleure intégration de la sage-femme, tout en
rassurant plusieurs femmes sur la sécurité des lieux.
D'autres lieux, telles les maisons de naissances plus petites et
flexibles face aux besoins des femmes, pourraient être envisagés.
Le CLSC aussi nous semble être un lieu très favorable pour
l'exercice de la pratique des sages-femmes. La mission même du CLSC,
orientée vers le préventif, l'approche globale et communautaire,
est davantage proche de la pratique et de la philosophie des sages-femmes.
En définitive, la Fédération favorise, comme lieux
d'implantation du travail de la sage-femme, ceux offrant le plus de
correspondance avec le champ de pratique de la sage-femme. Dans ce cadre, la
Fédération recommande de privilégier les CLSC, les maisons
de naissances, les départements de maternité autonomes en centres
hospitaliers comme lieux de réalisation du travail de la sage-femme.
La FIIQ recommande aussi qu'un privilège hospitalier soit
octroyé à la sage-femme exerçant en CLSC, maison de
naissances, dans une maternité autonome ou à domicile et
qu'enfin, si l'accouchement à domicile est choisi, il puisse s'exercer
en toute liberté pour la femme, dans
les meilleures conditions de sécurité et de
salubrité. Ainsi, le centre hospitalier pourrait se réserver les
accouchements à risque exigeant un potentiel élevé
d'Intervention médicale et un grand déploiement de technologie
utilisé à bon escient. C'est ainsi, croyons-nous, que pourront
s'exercer concurremment la liberté de choix pour l'usagère, la
diversification des lieux d'implantation des projets-pilotes et
l'égalité de toutes les régions du Québec dans le
cadre d'une plus grande accessibilité des services pour l'ensemble des
usagères.
Le deuxième principe: l'autonomie de la sage-femme. Ce principe
d'autonomie concerne celle de l'usagère sur sa grossesse et son
accouchement, mais surtout, en premier chef, celle de la sage-femme sur son
champ de pratique. La Fédération souhaite étendre au
maximum cette autonomie et les conditions de cet élargissement, de sorte
que la philosophie davantage médicalisée propre à la sage
femme et appuyée par les infirmières puisse prendre davantage son
essor. Dans le projet de loi actuel, le conseil des sages-femmes n'a qu'un
pouvoir de recommandation face au conseil d'administration d'un centre
hospitalier. Dans ce cadre, la Fédération suggère donc que
le pouvoir du conseil local des sages-femmes soit décisionnel concernant
l'organisation scientifique et technique de son travail. L'extension d'un
pouvoir décisionnel au conseil local des sages-femmes nous semble une
condition importante au développement de l'autonomie de la sage-femme
dans son travail.
L'aspect légal et réglementaire entourant la
définition et l'exercice de la profession de la sage-femme nous semble
aussi fort important. Ainsi, l'article 3 du projet de loi 4 fait
référence à certains articles de la Loi médicale
pour y soustraire les sages-femmes. Mais ce retrait d'application de la Loi
médicale aux sages-femmes n'est pas complet et la Loi médicale
continuerait donc de s'appliquer pour les sages-femmes dans d'autres articles.
Dans un tel cas, II nous faut envisager la possibilité d'un conflit
d'interprétation entre les articles du projet de loi 4 et les articles
non soustraits de la Loi médicale qui concernent les sages-femmes. De
plus, la profession de sage-femme reste actuellement assujettie, tant pour
l'examen des connaissances que pour l'émission d'un permis de pratique,
a la Corporation des médecins dont on connaît, malheureusement,
l'opposition farouche à la venue des sages-femmes.
Nous croyons donc Important de bien délimiter le champ de
pratique de la sage-femme comme spécialiste du processus normal de la
maternité. La définition de son rôle nous est fournie par
l'énoncé de la Conférence internationale des sages-femmes
en 1972. Cette même définition est aussi reprise par la
Fédération internationale des gynécologues et
obstétriciens. Cette définition du rôle de la sage-femme
reconnue et diplômée devrait, sans être restrictive par
rapport aux sages-femmes praticiennes, nous guider dans la définition et
la délimitation de son champ de pratique, tant en période
pré, péri que postnatale. (17 h 30)
C'est ainsi qu'à la lumière des expériences
à l'étranger nous recommandons que, si besoin est, la sage-femme
puisse poser, dans le cadre de son travail, des actes actuellement
définis comme exclusivement médicaux, même si le propre de
la sage-femme est de laisser le processus normal de l'accouchement s'accomplir
et de privilégier les techniques douces aux méthodes
interventionnistes.
Plus globalement, par rapport au champ de pratique dévolu
à la sage-femme, se pose aussi le problème de la
définition même du processus de la grossesse et de l'accouchement,
processus normal et naturel dans la majorité des cas pour la sage femme,
processus plus ou moins porteur de risques pour le médecin Cette
définition a pourtant son Importance car une grossesse à risque
est susceptible d'entraîner un accouchement de type
médicalisé. Ainsi, la pratique médicale, de plus en plus
interventionniste, a fait en sorte que certains actes posés par mesure
préventive face aux grossesses à risque sont devenus monnaie
courante pour les accouchements normaux.
Enfin, concernant les grossesses à risque, la
fédération s'interroge sur les critères déterminant
une telle appellation. C'est pourquoi, en ce cas, la FIIQ recommande que si tel
est le désir de la parturiente, la sage-femme puisse être
présente lors d'un accouchement à risque et que la
définition d'une grossesse à risque soit du ressort d'une
collaboration de la sage-femme et du médecin traitant.
D'autre part, concernant le rôle de la sage-femme dans la
dispensation des soins prénatals et postnatals, un processus de
clarification s'avère nécessaire afin de départager les
responsabilités des sages-femmes et des infirmières pour qu'il
existe une réelle collaboration entre ces deux intervenantes.
Le troisième principe: le partenariat avec l'infirmière.
La collaboration des infirmières à toutes les étapes
d'implantation de la pratique des sages-femmes est primordiale pour nous. C'est
dans ce contexte que la présence infirmière aux niveaux
provincial et local, mentionnée dans le projet de loi, correspond
à nos revendications. La collaboration des infirmières à
ces deux niveaux permettra d'orienter prioritairement lu pratique des
sages-femmes et des infirmières vers une approche globale et
démédicalisée de la maternité.
Les choix politiques et administratifs du gouvernement en matière
de santé qui lui font privilégier, souvent, le curatif et de
coûteux investissements technologiques au détriment d'une
approche préventive de la santé publique encadrent
étroitement une pratique infirmière de plus en plus
morcelée. Ce choix du curatif a l'avantage, pour le gouvernement,
d'être rentable politiquement à court terme, mais il accentue la
dégradation de la santé générale des citoyens dont
la société aura, un jour ou l'autre, à en payer le
prix.
La mission principale de l'infirmière, celle d'assurer des soins
continus à la personne, est de plus en plus érodée, faute
de temps. Cependant, lorsque l'infirmière peut exercer son rôle
avec une certaine autonomie, elle est en mesure d'élargir ce rôle
face au support et au suivi des femmes qui accouchent. Ainsi apparaissent
d'autres alternatives proposées par les infirmières. Certaines,
à l'instar des sages-femmes, soutiennent des approches douces et
orientent de plus en plus les classes prénatales selon des programmes
qui correspondent mieux aux besoins des femmes et du couple. Par leur action
collective, elles sont et peuvent devenir des instigatrices de changement dans
le milieu comme elles l'ont été pour la mise en place de chambres
de naissances, de cohabitation mère-enfant et de promotion pour
l'allaitement maternel.
Les infirmières, de concert avec les sages-femmes, doivent
continuer, par leur initiative, à changer les attitudes afin que
l'approche face à la naissance soit souple et mieux adaptée
à la famille. Cette collaboration infirmières et sages-femmes en
obstétrique ou en périnatalité pourra être
harmonieuse et respectueuse de la part de chacune des intervenantes, devra
s'exercer sous la forme d'un partenariat et non d'une division de plus en plus
poussée des tâches de chacune. Pour avoir ce réel cadre
d'exercice autonome, la sage-femme et l'infirmière devront pouvoir
déterminer elles-mêmes les conditions, les normes entourant leur
intervention et leur formation.
Nous abordons maintenant les deux autres points que nous avons tenu
à préciser dans notre mémoire: la formation des
sages-femmes...
La Présidente (Mme Marois): Je voudrais juste vous
prévenir que votre temps est presque terminé. Alors, essayez de
vous ramasser un peu...
Mme Fortier: Parfait.
La Présidente (Mme Marois): Allez quand même...
Parce que je pense que c'est important pour éclairer les membres de la
commission, alors présentez-nous les points sur lesquels vous souhaitiez
encore intervenir.
Mme Fortier: Parfait.
La Présidente (Mme Marois): Essayez de les ramasser un
petit peu.
Mme Fortier: Parfait.
M. Côté (Charlesbourg): Mme la Présidente, je
n'ai pas d'objection à ce qu'on empiète un peu sur notre temps.
C'est une présentation majeure.
La Présidente (Mme Marois): Je pense que oui,
effectivement.
M. Côté (Charlesbourg): II faut prendre le temps de
la présenter. S'il nous reste dix minutes pour les questions, on prendra
dix minutes. Prenez le temps de faire votre présentation.
Mme Fortier: II reste, en fin de compte, à peu près
cinq minutes de présentation.
La Présidente (Mme Marois): Alors, prenez vos cinq
minutes.
Mme Fortier: Je vous remercie. Formation de la sage-femme. La
formation donnée aux sages-femmes doit correspondre à leur champ
de pratique, à leur exercice autonome et à leurs
responsabilités. La formation actuellement donnée aux
sages-femmes varie d'un pays à l'autre. La formation d'infirmière
accélère généralement l'accès à cette
profession. C'est ainsi que, compte tenu de la complémentarité
des rôles de la sage-femme et de l'infirmière, de la formation de
cette dernière, compte tenu aussi des principes mis de l'avant par la
Fédération en faveur d'une démédicalisation et
d'une humanisation des soins dans le processus de la naissance, compte tenu,
entre autres, de la prise en charge par certaines infirmières de
techniques douces dans les dépar-tements d'obstétrlque, la
Fédération recommande la reconnaissance, par des
mécanismes d'équivalence, de la formation et de
l'expérience de l'infirmière dans l'accession à la
fonction de sage-femme. Elle recommande aussi que ces mécanismes
d'équivalence s'appliquent de façon plus rapide, afin de
reconnaître l'expérience de l'infirmière travaillant en
obstétrique et en périnatalité. La FIIQ est aussi
favorable à la reconnaissance des acquis des sages-femmes praticiennes.
C'est en vertu de l'expérience qu'elles ont accumulée dans leur
travail. Elles souhaitent que ces acquis soient reconnus selon des
critères uniformes.
La rémunération de la sage-femme. Même si le projet
de loi est muet sur cet aspect, ce point n'en demeure pas moins fort important.
Dans l'optique d'une reconnaissance de la pratique et du travail de la
sage-femme, la rémunération de cette sage-femme doit
refléter la nature et la responsabilité inhérente à
sa tâche. Toutefois, nous devons éviter de reproduire le
modèle de rémunération à l'acte des
médecins. Ce type de rémunération, souvent
dénoncé, entraîne trop fréquemment une
surfacturation due à l'accom-
plissement d'actes quelquefois inutiles. Comme fédération,
nous privilégions surtout que la sage-femme rattachée à un
établissement centre hospitalier, CLSC, maison de naissances,
maternité - soit rémunérée par le salariat. D'autre
part, dans le cadre des principes d'universalité et de gratuité
des services de santé du Québec, la FIIQ recommande que la
sage-femme exerçant de façon autonome soit
rémunérée au cas. Cette rémunération doit
être basée sur un nombre optimal d'accouchements par mois.
En conclusion, c'est en vertu de l'ensemble de ces raisons que la FIIQ,
comme organisation syndicale d'infirmières et de femmes exerçant
un rôle primordial dans le domaine de la santé, souhaite que le
gouvernement procède avec célérité. La FIIQ inscrit
donc sa volonté de contribuer activement à ce dossier, afin
qu'une collaboration des infirmières, des sages-femmes et des
usagères soit non seulement souhaitable, mais réelle et
bénéfique pour toutes les femmes et la population du
Québec. Merci de votre attention.
La Présidente (Mme Marois): Merci, Mme Fortier. M. le
ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente. Je veux aussi remercier Mme Fortier et Mme Dufresne. C'est
effectivement un texte assez substantiel et, si je ne m'abuse, de par les
informations - ce sera ma première question - que l'on m'a transmises,
ça semble être un changement de cap sur le plan de la position en
termes de mémoire par rapport à 1984, semble-t-il. Je
n'étais pas là, mol, à l'époque. J'aimerais
peut-être, à ce moment-ci, savoir quelles sont les raisons qui
motivent cela, s'il y a changement de cap. Comme je n'étais pas
là, expliquez-moi s'il y en a eu un ou pas. Si jamais il y a eu un
changement de cap, qu'est-ce qui motive aujourd'hui ce changement de cap, parce
que c'est le mémoire, de tous les mémoires que l'on a
reçus, qui va certainement le plus loin? Ne le prenez pas comme un
blâme, je pense que c'est une très bonne contribution. Ce sera
à nous de faire nos gestes après. Mais c'est une contribution
très substantielle, qui va beaucoup plus loin que ce que nous
attendions, en tout cas, moi personnellement. Alors, si c'est un changement de
cap par rapport à 1984, j'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Fortier: Par rapport à 1984, le seul changement de cap
qui pourrait laisser supposer qu'on en ait eu un, c'est sur l'accès au
statut des sages-femmes. En 1984, les ex-fédérations, entre
autres celles des SPIIQ et FIIQ, s'étaient prononcées ouvertement
pour la pratique de sage-femme. À cette époque, notre
délégué avait demandé que se soient admisesà
la prratique de sage-femme que des infirmières, comme
préalable.
L'élargissement de notre pensée va à l'ensemble des
femmes qui veulent aller dans cette pratique et on demanda, an plus, un
accès plus rapide à la profession, compte tenu de la formation
Initiale que nous possédons déjà.
M. Côté (Charlesbourg): C'est donc sur le fait qu'il
y a un élargissement de la base même sur le plan... Parlons
peut-être, d'entrée de jeu, puisqu'on y est, de
l'accréditation. Il y aurait un comité provincial sur lequel il y
aurait des sages-femmes, des médecins et des infirmières. Sur le
plan de l'accréditation, comment voyez-vous ça?
Mme Fortier: Est-ce que vous pourriez préciser? Sur le
plan de l'accréditation syndicale?
M. Côté (Charlesbourg): De l'accréditation,
de la reconnaissance puisqu'on aura un comité qui devra,
éventuellement, reconnaître qui est autorisé...
La Présidente (Mme Marois): Oui, qui a droit de
pratique.
M. Côté (Charlesbourg):... qui a le droit de
pratique puisque, évidemment, II n'y a personne qui, aujourd'hui, est
reconnu légalement comme sage-femme au Québec. On devra donc
faire affaire avec quelqu'un de l'extérieur pour les trois sages-femmes
du comité. Vous êtes ou vous serez éventuellement
invitées à participer à ce comité. Alors, comment
voyez-vous votre participation à l'intérieur d'un comité
comme celui-là, compte tenu qu'à l'époque vous souhaitiez
que ce soit uniquement des infirmières et qu'aujourd'hui vous dites: On
est un peu plus ouvert que nous ne l'étions à cette
période?
Mme Fortier: Je pense que, dans un premier temps, ce que la
Fédération envisage, à tout le moins pour la
reconnaissance actuelle des infirmières qui sont déjà en
pratique, c'est que soient reconnues comme sages-femmes celles détenant
déjà un diplôme, reconnu ailleurs ou dans un autre pays, de
pratique sage-femme, suivant des critères que le comité aura pu
préalablement définir. Compte tenu de la différence entre
les différents diplômes qui se donnent à l'intérieur
des pays européens ou américains - il y a quand même
souvent des différences qui sont assez grandes - il faudra que le
comité, préalablement, statue sur une idée et un portrait
de ce que devrait être initialement les sages-femmes. Par la suite, les
formations ou les reconnaissances d'équivalence se feront suivant ce qui
sera préalablement établi par le comité.
M. Côté (Charlesbourg): Dans la mémoire, je
pense que l'une des critiques les plus soutenues
est sur le fait que l'on reporte à une période
ultérieure la reconnaissance ou la légalisation de la pratique
des sages-femmes, au-delà des projets-pilotes, dans cinq ans. Ma
question est la suivante Est ce que vous croyez que nous avons.. Parce que
c'est là le principal reproche que font les gens vis-à-vis de
notre pratique connue au Québec, c'est qu'on n'a pas suffisamment
d'expérience au Québec, que ce qui se fait en Europe ou aux
États-Unis n'est pas nécessairement exportable chez nous, au
Québec, et que, par conséquent, on n'a pas suffisamment
d'expérience québécoise de la pratique sage-femme pour la
reconnaître de manière plus large. Mais, d'après votre
expérience, puisque vous demandez une reconnaissance et une
légalisation immédiates, vous devez conclure que nous avons
suffisamment d'expérience au Québec. Alors, j'aimerais vous
entendre là-dessus.
Mme Fortier: Je pense qu'il y a une chose fondamentale. Pour
nous, la pratique sage femme est une pratique qui doit être reconnue
immédiatement parce que jamais la Fédération ne pourrait
la remettre en doute, compte tenu de sa philosophie d'approche
démédicalisée de l'accouchement. Dans un deuxième
temps, la Fédération, dans son mémoire, ne demande pas,
demain matin, d'accorder à tout le monde des droits de pratique
sage-femme, ni d'implanter simultanément, à l'ensemble du
Québec, des projets-pilotes ou ça peut être une
façon d'implanter la pratique, mais que soit légalisée la
pratique sage-femme et qu'ensuite, par le biais de projets-pilotes petit
à petit et à la suite d'expériences qui seront prises
à l'intérieur de ces mêmes projets-pilotes, que soit
étendue à l'ensemble du Québec la pratique sage-femme. Mme
Couture pourrait...
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Mme Dufresne. (17 h 45)
Mme Dufresne: II y a aussi le fait qu'il y a le fameux
comité d'experts qui est nommé par le ministère auquel
vont siéger des sages-femmes, des médecins et des
infirmières. Cela va être à ce comité
d'établir les critères d'admissibilité des sages-femmes
aux projets-pilotes. Nous, ce qu'on demande, par exemple, c'est de
reconnaître que les sages-femmes autodidactes, du fait qu'elles ont une
expérience, peuvent y avoir droit elles aussi, mais selon des
critères uniformes, c'est-à-dire des critères pour tout le
monde. Dans le cas des sages-femmes qui sont reconnues et
diplômées à l'étranger, soit aux États-Unis,
en Grande-Bretagne ou en Europe, là aussi on demande que le
comité se penche sur leurs cas et il y a aussi le cas des
infirmières dont certaines ont des formations de sage-femme à
l'étranger généralement. Ça aussi, c'est un autre
cas. Alors ce qu'on demande, c'est que le comité d'experts se penche sur
les cas de ces différentes pratiques de sage-femme qui existent à
l'heure actuelle parce que. même s'il n'y a pas de pratique sage-femme
qui existe légalement, il y a une pratique qui se fait depuis plusieurs
années et il y a des gens qui sont qualifiés,
diplômés qui peuvent le faire, soit des infirmières ou des
sages-femmes.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends maintenant
très bien la différence. Ce n'est pas nécessairement en
reconnaissant sur le plan légal la pratique sage-femme qu'on va
l'étendre immédiatement à tout le Québec. Qu'on le
fasse d'abord dans le cadre des projets-pilotes, mais reconnaissance
légale d'abord.
Mme Dufresne: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends iI y a une
distinction très nette que je n'avais pas perçue dès le
départ. Est-ce que vous considérez le support médical
comme essentiel? Si oui, comment est-ce que ce support médical va
être assuré si la sage-femme a une complète autonomie?
Mme Fortier: Je pense que notre document est quand même
assez explicite sur la façon d'aborder le processus de maternité.
Nous ne croyons pas qu'initialement, dans le cas de grossesses et
d'accouchements normaux, le support médical soit essentiel. Lorsque, par
contre, intervient, lors du processus de la grossesse ou préalablement
à la grossesse, un état de santé ou un état de
grossesse plus à risque, à ce moment-là, la sage-femme
pourra se référer au médecin et, de façon
conjointe, ils décideront des interventions à établir pour
la continuité des soins de cette personne.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, cela
amène toute une série de questions parce que vous avez
parlé de complémentarité entre l'infirmière et la
sage-femme. Je n'ai pas eu l'occasion de passer à travers le
mémoire parce que vous en avez fait une lecture qui est un petit peu
différente et je ne l'avais pas eu ce midi. Je n'ai pas compris dans
votre présentation qu'il y avait une explication poussée de la
complémentarité sage-femme et infirmière et j'aimerais
peut-être vous entendre davantage là-dessus.
Mme Fortier: II va de soi, pour nous, que la
complémentarité, pas dans le sens d'une soumission à un
autre thérapeute mais dans le sens d'un partenariat entre
infirmière et sage-femme, soit définie et puisse s'exercer en
toute équité pour le bien et des deux intervenantes et de la
patiente, surtout, qui a à vivre tout son processus de
maternité soutenue par ces intervenantes. Le partenariat doit s'exercer
au niveau du champ de pratique, soit à l'intérieur des
départements d'obstétrique, soit en CLSC, soit en péri ou
en postnatalité. Présentement, le suivi assuré, les cours
prénatals, les visites, l'enseignement, c'est assumé par
l'infirmière. C'est une portion qu'on devra partager avec la sage-femme
et en collaboration avec elle. C'est pour ça qu'on était
très heureux de voir qu'on était présent aux
différents paliers pour être capable d'établir notre champ
de pratlque respectif, ne pas se nuire et, au contraire, se compléter
l'un et l'autre.
M. Côté (Charlesbourg): Vous avez parlé de
répartition régionale puisque ça devrait
éventuellement... Dans la mesure où l'expérience-pilote
sera positive, ça s'étendra au Québec, bien sûr, et
dans la mesure où ça ne le sera pas, il s'agira de
réévaluer à l'époque. Mais vous avez parlé
d'une répartition régionale. Je vous pose la question puisque le
projet de loi parle d'expériences-pilotes, de huit. Est-ce que votre
intervention parlait de répartition régionale dans le cadre des
huit expériences-pilotes, à savoir de l'urbain et du rural? Vous
avez, si j'ai bien compris, évoqué la possibilité que
ça puisse être dans les CLSC aussi, donc CLSC et centres
hospitaliers. Donc, une répartition rurale, urbaine sur le territoire du
Québec en CLSC et en centres hospitaliers, c'est ce que vous vouliez
dire par répartition régionale?
La Présidente (Mme Marois): Mme Dufresne.
Mme Dufresne: Oui, d'accord. Dans notre projet de mémoire,
ce qu'on avait dit, c'est qu'en ce qui concerne la répartition
régionale - et ça on l'a exprimé aussi dans le texte - on
veut que ce soit là où la demande le justifie. On trouve que
mettre un nombre, comme un maximum de huit, ce n'est pas assez précis.
Ce qu'on voudrait, c'est que... Le Québec, depuis une vingtaine
d'années, a reconnu l'universalité des soins sociaux et de
santé, alors on voudrait que ce soit là où la demande le
justifie, parce qu'il y a déjà des demandes au niveau, soit des
maisons de naissances, des centres hospitaliers ou des chambres de naissances,
de pouvoir mettre en exercice des projets-pilotes. Il n'y a rien dans le projet
de loi qui précise ça. On voudrait que ce soit un principe, que
ce soit étendu au niveau régional parce que, quand ce n'est pas
marqué, ça peut favoriser les centres urbains ou encore seulement
les régions éloignées. On ne voulait pas que ce soit...
Par exemple, dans les régions éloignées, ça agit en
palliatif du fait qu'il n'y a pas de médecin disponible. Alors, on
voulait que ce soit érigé comme principe pour que ce soit
là où la demande le justifie pour toute la population du
Québec.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, ce matin,
dans l'Introduction, j'avais évoqué le fait qu'on visait des
objectifs avec ces projets-pilotes, bébés de petit poids, jeunes
adolescentes, femmes en milieux défavorisés, alors,
inévitablement, dans le choix des huit projets, on devra tenir compte de
ces phénomènes et tenter de combler certaines lacunes qu'on a
actuellement.
Vous avez évoqué tantôt, dans votre
présentation, vous avez dit: Oui. possible on centre hospitalier,
possible dans les CLSC avec maison de naissances, donc, il y a une certaine
ouverture, alors que la Fédération des CLSC nous a dit: Centres
hospitaliers, pensez-y deux fois avant d'y aller, et sur la base d'à peu
près les mêmes arguments. La Fédération des CLSC
nous a dit: Ce qui est très important c'est avant, pendant et
après. Vous avez exactement la même base: il ne faut pas s'en
occuper uniquement pendant, il faut s'en occuper avant et il faut s'en occuper
après. La Fédération des CLSC nous disait: Dans un centre
hospitalier, on va s'en occuper uniquement pendant, alors que vous venez nous
dire qu'il est quand même possible dans un centre hospitalier de s'en
occuper avant, pendant et après Je voudrais comprendre.
Mme Fortier: Dans une présentation, on oublie parfois des
parties. Elle était longue aussi parce que je voulais dire quand
même l'essence du mémoire. Il va de soi que la
Fédération privilégie, en premier, les CLSC, les maisons
de naissances et non les centres hospitaliers. On dit, dans notre
mémoire: Si on implante dans les centres hospitaliers, on voudrait,
à tout le moins, que ce soit dans une maternité autonome,
différente de l'obstrétique qu'on connaît actuellement qui
est de type interventionniste. Entre autres - et là je réinclus
toute la notion de partenariat avec l'infirmière - c'est en péri,
en pré et en postnatalité que l'infirmière a le plus
d'action chez la femme qui vit un processus de maternité. En
obstrétique, leur rôle est aussi très morcelé. Ils
la voient durant l'accouchement. C'est en CLSC, entre autres, que se joue toute
l'approche d'enseignement et de partenariat qui devra s'installer avec la
sage-femme qui, elle, va assumer le suivi pré, péri et
postnatal.
La Présidente (Mme Marois): Est ce que c'est
terminé pour les questions?
M. Côté (Charlesbourg): Pour le moment.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. M. le leader?
M. Chevrette: Oui, très peu de questions puisque le
ministre en a touché une partie et que
ça ressemble étrangement, comme approche, au
mémoire de la Fédération des CLSC qui est passée
avant vous. Sur le plan des principes, je trouve que ça se ressemble
assez étrangement merci. Peut-être que c'est une mauvaise
évaluation qu'on fait, mais je trouve que ça se ressemble.
Je voudrais cependant vous poser une question. Vous n'êtes pas
aussi radicale que la Fédération des CLSC en ce qui regarde le
rôle des médecins. Vous n'allez pas jusqu'à la signature de
protocoles cherchant à délimiter les fonctions. Comment
voyez-vous ça?
Mme Fortier: Dans la présentation, j'ai peut-être
moins insisté sur la délimitation des actes médicaux et
des actes qui devront non seulement être délégués,
mais transférés à la pratique sage-femme. Dans le
mémoire, c'est plus substantiel. Je pense qu'il faudra, au niveau du
mémoire et au niveau de sa conception, de sa réglementation, au
niveau du projet de loi, c'est-à-dire, bien définir le champ de
pratique et les possibilités d'intervention de ces deux intervenants
parce qu'il risque d'y avoir des courts-circuits entre les deux; on les voit
déjà qui commencent.
M. Chevrette: Ce qui me plaît beaucoup dans votre
mémoire, c'est que vous dites: Commencez donc par définir ce que
pourrait être une profession de sage-femme et, après ça,
mettez-la à l'épreuve dans des projets-pilotes plutôt que
de faire des projets-pilotes pour essayer de bâtir ce que pourrait
être une profession. Moi, je pense que sur le plan de la logique, tu
reconnais une profession, tu la limites quant à l'accès et tu
bonifies avant de l'ouvrir "at large", comme on dit. Ça me paraît
très logique, surtout comme processus, comme travail Intellectuel,
ça m'apparaît plus logique.
J'avais le goût de vous faire une boutade, à un moment
donné, en lisant votre mémoire. C'était marqué:
"reconnaître l'expérience des infirmières en
obstétrique"; je pensais que vous vouliez marquer dans votre
mémoire "reconnaître l'ancienneté des infirmières en
obstétrique".
Une voix: Ha. ha, ha!
M. Chevrette: Je n'ai pas...
Mme Fortier: Le mémoire a été écrit
préalablement à ce qui nous est tombé sur la
tête.
M. Chevrette: Pardon?
Mme Fortier: Le mémoire a été écrit
préalablement à ce qui nous arrive présentement.
M. Chevrette: Donc, ça n'aurait pas été une
boutade, c'est l'esprit que vous aviez quand vous l'avez écrit. Ha, ha,
ha! Je vous remercie beaucoup de votre mémoire. Il est clair,
très substantiel, et sans doute que lors de l'étude article par
article, si jamais le ministre - il a ouvert une porte tantôt - no
réécrit pas un mémoire plus complet, un projet de loi
peut-être neuf même, j'aurai sans doute des amendements qui
partiront de votre texte pour bonifier le projet.
Mme Fortier: Je vous remercie.
La Présidente (Mme Marois): Mme la députée
de Chutes-de-la-Chaudière.
Mme Carrier-Perreault: Disons que j'ai aussi trouvé le
mémoire très bien fait et que je vous félicite, c'est
clair. Il y a un petit point que j'ai trouvé intéressant aussi,
dans les recommandations, à la page 50 du mémoire, soit que la
sage-femme puisse aussi pratiquer à domicile. On parle un peu de
ça quelque part, à la mi-page. C'est un milieu pourtant naturel
qui n'était pas recommandé par le comité de travail, qui
semble écarté d'ailleurs par plusieurs intervenants, en tout cas,
on n'a pas vu ça beaucoup dans les différents mémoires.
J'aimerais que vous m'expliquiez un petit peu votre point de vue, ce que vous
voulez dire exactement par là.
Mme Fortier: le principe de base qu'on a détendu en
amenant cette recommandation, c'est qu'il y a des femmes qui, par choix et
parce qu'elles ont vécu un processus de maternité normal, ne se
sentent bien que chez elles, avec leur famille, dans leur intimité et
c'est dans cette intimité qu'elles veulent vivre le processus de
l'accouchement. Si elles décident de le choisir, que l'exercice puisse
être non seulement légal, mais fait avec le support
nécessaire. Que l'accès ne soit pas fermé à un
accouchement à domicile. On n'affirme pas, par ça, que demain
matin, parce qu'on légalisera la pratique des sages-femmes, toutes les
femmes et majoritairement les femmes vont choisir l'accouchement à
domicile. Ça va peut-être venir à plus longue
échéance. Donc, demain matin, on ne pense pas que ce soit le
choix des femmes, de façon très majoritaire, d'accoucher à
domicile, mais on veut quand même leur permettre de le faire ot leur
laisser la liberté et le choix de le faire.
Une voix: Et la responsabilité.
La Présidente (Mme Marois): Cela va?
Mme Fortier: Et la responsabilité.
M. Joly: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le
député de Fabre.
M. Joly: Le groupe venu nous rencontrer avant vous avait avec lui
un document qui parlait de coût possible
d'assurance-responsabilité. Dans ce document, on mentionnait que le
coût de la couverture de l'assurance-responsabilité dans un centre
hospitalier était de 500 $ et ailleurs que dans un centre hospitalier,
dans un centre spécialement aménagé, le coût
était de 750 $, ce qui laisse supposer qu'il y a un assureur potentiel
qui évalue le risque comme étaient 50 % plus élevé
dans un centre autre qu'hospitalier. Maintenant, si vous transposez ce que vous
venez de dire et que vous souhaitez que la maternité ou que
nécessairement la délivrance, que le petit bébé
nous soit livré dans ce qu'il y a de plus naturel, chez lui, comment
l'assureur peut-il évaluer le risque à ce niveau? Je pense que,
quand vous nous dites que vous êtes prêtes à laisser la
responsabilité à la personne qui accouche, II faudrait justement
qu'elle soit sensible à cet élément ou à cette
possibilité, même si ce n'est pas monnaie courante, parce qu'on
sait que dans la majorité des accouchements il n'y a pas
énormément de complications, mais ce ne sont pas ceux qui
réussissent bien qui font éclat dans les journaux, mais ceux
où ça ne fonctionne pas et où il y a des complications.
Alors, quand vous souhaitez - vous en faites un voeu qui semble quand
même assez sérieux - que ça arrive dans le foyer, je
m'inquiète un peu.
Mme Fortier: Étant moi-même une infirmière,
pour avoir travaillé en obstrétique et en milieu hospitalier,
pour avoir vu nombre d'accouchements et assisté à plusieurs
accouchements, les risques de potentiel dont vous parlez et malheureusement,
les morts d'enfants à la naissance sont aussi le lot des salles
d'obstréti-que. Ce n'est pas le lot des accouchements à domicile
uniquement et ce qui est dommageable, c'est que présentement la
publicité fait en sorte qu'un enfant qui est mis au monde à la
maison et qui meurt, c'est épouvantable: la femme n'est pas responsable;
la femme est complètement farfelue d'avoir risqué la vie d'un
l'enfant. Mais, lorsqu'un enfant meurt en salle d'accouchement, en plein milieu
d'un gros centre hospitalier, que ce soit le CHUL ou à
Saint-François où c'est super spécialisé,
là, l'enfant n'était pas viable et ce n'est pas dramatique aux
yeux de la population. Il faudrait peut-être à un moment
donné démystifier ce fait-là aussi.
M. Joly: On va se fier sur les journaux pour le faire.
La Présidente (Mme Marois): II y a une meilleire
couverture des événements. si vous me le permettez, M. le
député, lorsque ces événements se passent, qu'une
sage-femme est concernée et que ça arrive à la maison. Je
vais me permettre un dernier commentaire, puisque le temps de ma formation
politique n'a pas été utilisé au complet. Une minute. Il y
a consentement, j'imagine, et à la suite on suspendra nos travaux
jusqu'au début de la soirée.
J'ai lu effectivement votre document avec beaucoup d'attention et je
vous ai écoutée le présenter. Il y a manifestement, tout
au long du document, un parti pris très clair au refus de la
remédicalisation, de la surspécialisation, de la "morcellisation"
et. donc, de la pratique en milieu hospitalier traditionnel. Je ne me trompe
pas?
Une voix: Non.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Même pour dire
que si c'est dans un centre hospitalier, ce que l'on souhaite, c'est que ce
soit mis à part l'appareillage que l'on utilise habituellement. C'est
bien ça?
Mme Fortier: C'est exactement ça.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Vous le craignez
à ce point?
Mme Fortier: Je pense que, comme infirmières, on est
à même de constater les bienfaits de la médicalisation. Ce
qui est dommageable, c'est le fait que la surspécialisation et le
morcellement, y compris de la tâche médicale en portions, ont fait
oublier la globalité de la personne humaine dans son entité et
qu'elle ne peut pas se soigner par un orteil ou par un foie, mais par
l'ensemble de sa vie et de ce qu'elle ressent et de ce qu'elle est.
L'accouchement, on le veut comme ça, nous, comme femmes et
infirmières.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Je vous
remercie.
M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je veux vous remercier pour
cette participation qui va très certainement influencer ce que sera le
nouveau projet de loi.
La Présidente (Mme Marois): Merci de votre présence
parmi nous. Nous suspendons nos travaux pour les reprendre à 20 heures
avec le Regroupement de professionnels en santé communautaire, la
Fédération des médecins omnipraticiens, la
Fédération des médecins spécialistes du
Québec et l'Association des obstétriciens et gynécologues
du Québec. Merci.
(Suspension de la séance à 18 h 4 )
(Reprise à 20 h 8)
La Présidente (Mme Marois): Que les membres de la
commission veuillent bien prendre place à leur fauteuil, nous allons
reprendre nos travaux. Comme le rythme a été bon tout
l'après-midi, l'espère qu'il continuera ainsi pour la
soirée.
M. Côté (Charlesbourg): Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg):... je ne sais pas si je
pourrais me permettre de vous proposer, quitte à ce que vous
décidiez ou que la commission décide... j'ai entendu des bruits,
à 18 heures, qui ne m'ont pas plu du tout, en particulier sur le fait
qu'on reçoive des gens à 23 heures ce soir, à une heure
qui n'est quand même pas très convenable, j'en conviens, en
particulier des obstétriciens et des gynécologues; '23 heures
ça me paraît effectivement une heure qui n'est pas très
à propos pour une présentation aussi importante que
celle-là. ce que j'allais vous proposer, compte tenu de l'obligation que
nous aurons d'avoir une autre réunion lundi, c'était de leur
permettre d'intervenir en dernier lieu, si cela leur sied, de façon
à être capables d'entendre tout ce qui se passe, et qu'ils nous
donnent leur élément de réponse et de situation les
derniers, de façon qu'il y ait une équité sur le plan de
la qualité de l'information. moi, je n'aurais pas d'objection à
ça du tout.
La Présidente (Mme Marois): M. le leader du
gouvernement.
M. Chevrette: mme la présidente, on pourrait
peut-être demander immédiatement à ces gens de s'identifier
dans la salle et de nous dire si ça leur convient.
La Présidente (Mme Marois): Oui, c'était un peu ce
que je voulais soulever parce que...
M. Chevrette: Je dirais oui, moi.
La Présidente (Mme Marois):... je suis d'accord. On en
avait discuté un petit peu, M. le ministre et moi, avant que l'on
commence la séance. Cependant, évidemment, ceci impliquerait...
Pour qu'on soit bien compris, il est prévu, ce soir, que le dernier
groupe d'intervenants soit l'Association des obstétriciens et
gynécoloques. Ceci amènerait leur présentation à 23
heures à peu près ce soir, ce qui est tard, bien sûr - on
est comme un petit peu fatigués à la fin de la journée -
ce qui est trop tard. Alors, on leur propose de se présenter lundi soir
- puisque nous aurons à travailler lundi toute la jour- née -
à la fin de la séance, autour de 18 heures. S'ils
préfèrent intervenir ce soir, ils sont déjà
à l'agenda; on les retiendra. Sinon, on les entendra lundi soir autour
de 18 heures. Mme la secrétaire peut peut-être... Oui?
Une voix: Nous préférons passer ce soir.
La Présidente (Mme Marois): Parfait, je vous remercie. On
vous entendra.
M. Chevrette: Donc, vous allez passer ce soir.
La Présidente (Mme Marois): Cela vous va, M. le ministre?
D'accord. Nous entendons maintenant... L'ordre sera le suivant: - j'aimerais le
rappeler pour le dire en même temps aux groupes - d'abord, le
Regroupement de professionnels en santé communautaire; par la suite, la
Fédération des médecins omnipraticiens du Québec,
la Fédération des médecins spécialistes du
Québec et l'Association des obstétriciens et gynécologues
du Québec. J'aimerais que la commission entende maintenant le
Regroupement de professionnels en santé communautaire qui est
représenté par le Dr Michel Vézina et le Dr Gilles Julien.
Si d'autres personnes vous accompagnaient, ce qui semble être le cas,
j'aimerais que vous les présentiez aux membres de la commission.
Regroupement de professionnels en santé
communautaire
M. Julien (Gilles): Merci. Bonsoir et merci de nous avoir
invités à la commission. Je voudrais vous présenter,
effectivement, des professionnels parmi ceux qui sont signataires et qui ont
accepté de venir assister à la commission. D'abord, Mme
Geneviève Tremblay, médecin de Québec; Mme Jocelyne
Gagné, consultante en périnatalité au DSC du CHUL.
À mon extrême droite, Mme Nicole April. médecin aussi
à Québec; Mme Christiane Brunelle, coordonnatrice d'un projet
"Enfance famille-jeunesse"; M. Michel Vézina, médecin à
Québec et moi-même, Gilles Julien, pédiatre et
médecin à Québec et à Montmagny.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Je rappelle
peut-être - je m'excuse, je ne l'ai pas fait au début de la
séance - rapidement qu'une vingtaine de minutes sont allouées
pour la présentation de votre intervention. Nous avons ensuite environ
40 minutes partagées entre les membres de la commission pour soulever
des questions sur votre présentation. Merci.
M. Julien: Merci. Je voudrais préciser que nous n'avons
pas présenté un mémoire détaillé. Il s'agit
d'une lettre d'intention qui manifeste bien notre témoignage par rapport
à la problématique
dont vous discutez. Nous verrons, à la période des
questions, à préciser certaines choses de la lettre et je vous en
fais part immédiatement. Je vais la lire et essayer un peu de la
commenter pendant la lecture, si vous le permettez.
Alors, on est un groupe de professionnels de la santé qui est
hautement concerné par les soins périnatals au Québec et
leurs impacts sur la santé et le bien-être des femmes et de la
famille. Nous Insistons sur la notion de famille, bien sûr, parce que,
pour nous, il s'agit d'un événement clé dans
l'évolution d'une famille qui regroupe un groupe de personnes qui vit un
événement important et qui supporte un événement
important, du début à la fin.
Dans ce contexte, bien sûr, la pratique sage-femme n'est pas notre
seule préoccupation, mais elle en est une d'importance, compte tenu de
l'importance accordée au champ de la périnatalité par le
ministère de la Santé et des Services sociaux. Je fais
référence aux objectifs de santé, récemment, du
document d'orientation, à l'énoncé de politique familiale,
au plan d'action sur la politique familiale, à la commandite des cinq
avis en périnatalité et au projet de loi actuel. à ce
titre, nous aimerions vous soumettre, et soumettre à l'attention de la
commission, les considérations suivantes. nous souhaitions être
entendus, ce qui est le cas, et nous vous en remercions. parmi les faits qui
méritent d'être pris en considération, selon nous, c'est
qu'il existe actuellement au québec une pratique sage-femme qui est
isolée, qui est illicite mais qui. d'après nous, correspond
à un besoin réel et à une demande des femmes, des parents
et des familles. ce n'est un secret pour personne de reconnaître que
cette pratique existe et qu'il y a beaucoup de femmes qui la demandent. on peut
se référer à divers colloques, à des
expériences personnelles de pratique où des femmes souhaitent et
obtiennent souvent de pouvoir accoucher avec l'aide d'une sage-femme. certaines
autres souhaitent pouvoir accoucher avec l'aide d'une sage-femme et ne peuvent
pas l'obtenir et ça cause, je dois vous le dire, des frustrations
parfois importantes et une inadéquation des besoins et des attentes de
ces familles.
Chez plusieurs médecins aussi - un autre fait qui mérite
d'être signalé - on observe un abandon de la pratique
obstétricale et une perte d'intérêt concernant le suivi
complet avant, pendant et après l'accouchement. Ce n'est pas un secret
non plus de dire que la formation médicale ne s'oriente pas
nécessairement dans un suivi de ce type-là à cause de
plusieurs facteurs, dont le temps passé en formation périnatale.
Je peux vous faire remarquer aussi, à ce sujet, qu'une étude qui
date de 1985 montrait qu'il y avait à pou près 00 % dos
médecins qui ne faisaient pas d'accouchement et qu'il y en avait
à peu près 6 % qui en faisaient 30 et plus par année. Ce
sont des chiffres qui sont quand même assez éloquents et qui
viennent d'une étude sérieuse. Plus récemment, il y a des
données qui ne sont pas encore publiées mais qui relatent que,
parmi les médecins accoucheurs généralistes au
Québec, il y a à peu près 20 % de ces médecins qui
sont d'accord avec la participation des sages-femmes au processus de
périnatalité.
Autre point important en rapport avec ce fait, c'est qu'il est reconnu
dans plusieurs milieux, dans plusieurs autres pays, que les médecins qui
connaissent bien la façon de procéder, qui ont la formation et
qui peuvent avoir connaissance de l'expérience des sages-femmes sont
assez unanimes à dire que c'est un atout important dans le processus et
souhaitent pouvoir participer, avec les sages-femmes, au processus de
périnatalité.
Un autre fait d'Importance: les statistiques de plusieurs pays où
la pratique des sages-femmes est légale, est supportée,
démontrent une baisse de la surutilisation d'interventions telles les
césariennes, les éplsiotomles et certaines manoeuvres
d'extraction. Ces taux correspondent plus à ce qui est recommandé
par l'Organisation mondiale de la santé et, en conséquence, la
diminution d'interventions exagérées peut avoir une relation
avantageuse avec la morbidité, la mortalité et avec,
éventuellement, les coûts. Vous savez sûrement qu'un des
objectifs importants mentionnés dans le document d'orientation du
ministère, l'objectif 5, concernait justement la diminution de la
mortalité et de la morbidité périnatales s'exprimant par
la diminution des bébés de petit poids, des
prématurés et des malformés congénitaux. On a des
taux, au Québec, qui sont intéressants, si on se compare à
d'autres pays, mais on note sûrement qu'il y a place à
amélioration. L'objectif qu'on s'est donné, de réduire
à 4 %, est sûrement intéressant et nous partageons
entièrement cet objectif.
Le projet de loi actuel constitue un enjeu majeur, selon nous, soit la
reconnaissance de la pratique des sages-femmes, avec laquelle nous sommes
totalement en accord. Toutefois, nous pensons qu'il y aurait lieu de
réajuster certaines dispositions mineures du projet de loi qui, selon
nous, peuvent en réduire la portée. Nous souscrivons à la
légalisation de la pratique des sages-femmes dans le cadre des
projets-pilotes comme étape préliminaire et à la condition
qu'elle réflète et donne le ton à un cadre de politique
ultérieure sous une forme plus généralisée. En
clair, on signifie que les projets-pilotes sont très
intéressants, vont permettre d'évaluer une pratique, ses
modalités et, peut-être, ses impacts. Nous souhaitons que ces
projets-pilotes soient le début de recommandations beaucoup plus
générales et que, selon l'évaluation, on puisse avoir
certaines garanties de continuité de processus. Nous notons aussi que
les projets-pilotes, dans leur forme actuelle, sont un peu
restrictifs et ne représentent qu'une partie du champ de pratique
des sages-femmes en se limitant particulièrement à
l'événement accouchement. On voudrait éviter que le projet
de loi ne confine les sages-femmes à un rôle de technicienne de
l'accouchement, qu'il limite leur lieu de pratique au seul milieu hospitalier
et qu'il contribue à les isoler potentiellement sans faciliter leur
intégration à des équipes multidisciplinaires qui sont
pourtant nécessaires au soutien de la femme en période de
grossesse et au soutien de la famille.
On sait pertinemment que... D'ailleurs, encore une fois, dans l'objectif
5 qui a été travaillé récemment par le CRSSS et les
DSC, on mentionne l'importance d'un suivi périnatal global ayant comme
conséquence le bien-être et la santé de l'enfant et de la
famille.
En conséquence, on aurait des recommandations par rapport au
projet de loi et qui concerneraient particulièrement l'assurance que les
sages-femmes soient considérées comme des intervenantes à
part entière dans tout le processus de la périnatalité,
que les sages-femmes soient membres à part entière
d'équipes multidisciplinaires en périnatalité, que ce soit
à la période prénatale, à l'accouchement ou en
période postnatale et ce, si possible, dans tous les milieux,
c'est-à-dire les milieux privés, les CLSC, les centres
hospitaliers et les maternités. On voudrait aussi s'assurer que les
projets-pilotes permettent l'expérimentation de la pratique des
sages-femmes selon différents modèles et dans des lieux autres
que le seul milieu hospitalier.
Bien sûr, des nuances s'Imposent dans ces recommandations et
l'objectif des projets-pilotes, pour nous, serait de s'assurer et de faciliter
la faisabilité et les modalités d'établissement d'un
partenariat entre les différents Intervenants en
périnatalité. Dans plusieurs enquêtes et lors de plusieurs
colloques et rencontres de familles, on reproche continuellement au
réseau d'offrir des services fragmentés, de perdre de vue la
continuité, l'approche globale, le soutien à la famille, la prise
en charge aussi des familles et des femmes du processus d'accouchement et de
tout le processus de la périnatalité. On souhaiterait que les
projets-pilotes puissent permettre d'évaluer la faisabilité de
ces grands objectifs de santé.
On vous remercie de l'attention que vous portez à nos
commentaires bien humbles qui viennent d'un élan presque du coeur, je
dirais. On espère aussi que nos recommandations seront prises en
considération.
Je vais vous nommer les signataires, si vous le permettez.
Françoise Bouchard, médecin à Hull; Christiane Brunelle,
que j'ai déjà mentionnée, qui est présente;
Christine Colin, médecin de Montréal; Richard Côté,
médecin de Valleyfield; Louise Denhez, médecin de
Trois-Riviè- res; Pierre Duplessis, médecin de Montréal;
France Filiatrault, de Laval; Pierre Gosselin, médecin de Québec;
Gilles Julien, de Québec; Mireille Lajoie, médecin de
Trois-Rivières; Odette Laplante, médecin de Lévis;
Francine Leduc, médecin de Valleyfield; Réjean Paradis,
médecin de Québec; Michel Vézina, médecin de
Québec; Jocelyne Gagné, qui est présente aussi; Nicole
April, médecin de Québec; Geneviève Tremblay,
médecin de Québec.
La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie beaucoup et,
sur ce cri du coeur, je vais demander au ministre s'il a des questions à
poser.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. Julien. Dans le
dernier paragraphe de votre lettre, il est dit: "Chez plusieurs
médecins, on observe un abandon de la pratique obstétricale et
une perte d'Intérêt concernant le suivi complet avant, pendant et
après l'accouchement. " C'est, bien sûr, assez
conséquentiel sur le plan de l'affirmation, je pense, et nous aurons
l'occasion, avec ceux qui vous suivront, de l'aborder aussi. Et vous dites, si
j'ai bien compris, bien entendu, que 25 % des médecins favorisent, sont
d'accord avec les sages-femmes. Ça me paraît un petit peu
étonnant, là; ça me paraît moins étonnant en
en voyant autant qui signent un document. Ça me paraît un petit
peu étonnant sur le plan des pourcentages, 25 %. Vous tenez ça de
quelle source, ce pourcentage-là? D'un sondage maison, Léger, pas
Léger ou autre, mais d'un sondage qui pourrait donner un peu de
crédibilité à cela.
M. Julien: Je parle - je ne sais pas si je l'ai bien
précisé - des médecins accoucheurs
généralistes qui représentent, finalement, peu de
médecins, si on tient compte du nombre de médecins qui font des
accouchements. Si on se fie à la statistique qui nous donne 80 % de
médecins au Québec qui ne font plus d'accouchement, les
médecins généralistes, il reste à peu près
20 %, puis probablement moins, de ces médecins-là qui sont des
médecins accoucheurs. Parmi ceux-là, il y en a 20 % qui sont
d'accord avec l'implication des sages-femmes. Ça, c'est un sondage
maison qui n'est pas encore publié à l'intérieur du groupe
de médecins accoucheurs et qu'on pourra vous fournir
éventuellement.
M. Côté (Charlesbourg): C'est une première,
à ce que je comprends, avant.
M. Julien: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord. Je reviens au
paragraphe que je viens de citer. On disait qu'il y avait un manque
d'intérêt à avoir un suivi avant, pendant et après;
on a entendu ça tout l'après-midi. D'après vous, qu'est-ce
qui
permettrait d'avoir ce suivi-là, parce qu'il semble bien que tout
le monde s'entend qu'il y a une obligation ou même une
nécessité pour la santé des bénéficiaires
qu'il y ait ce suivi avant, pendant et après?
Ce que je comprends, c'est que vous mettez le doigt sur un bobo à
peu près comme tout le monde. Qu'est-ce qui nous permettrait d'avoir ce
suM-là tout au long de la durée non seulement de l'accouchement,
mais avant, pendant et après?
M. Julien: Je pense que peut-être le meilleur exemple que
je pourrais donner, c'est un peu un retour en arrière au moment
où II y avait les médecins de famille, visiteurs à
domicile, qui prenaient en considération l'ensemble de la famille dans
leur approche. En prenant en considération l'ensemble de la famille,
bien sûr, on ne peut distinguer les périodes, on ne peut
fragmenter ces périodes là. Ce qui se passe avant, ce qui se
passe pendant l'accouchement et ce qui se passe après, ça a des
liens, ça ne peut pas être séparé. Je parle d'une
approche globale de santé avec un objectif qui vise non seulement
à une Issue de grossesse, à un accouchement, mais bien à
un processus complet où la participation et le support de l'ensemble de
la famille sont essentiels.
À ma connaissance, les sages-femmes sont des intervenantes
formées avec approche globale en périnatalité. Ce sont des
spécialistes de la périnatalité globale qui ne font pas de
distinction entre l'avant, le pendant et l'après. Il s'agit là
d'un tout. On a la chance d'avoir accès à ces ressources qui sont
formées comme telles. En médecine, on s'est malheureusement un
peu éloigné de ce type d'approche pour toutes sortes de raisons
qui seraient longues à discuter, mais c'est un constat et c'est une
évidence. Cette fois-ci, on a la chance de pouvoir avoir comme
partenaires des intervenants formés à cette approche-là,
qui considèrent l'ensemble du processus comme un tout indissociable.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Je tiens toujours
à mon paragraphe parce qu'il est, d'après moi, extrêmement
important. J'ajoute même l'autre phrase qui était: "D'ailleurs la
formation médicale oriente peu en ce sens. " Est-ce que je comprends
qu'on aurait, à ce moment là une carence sur le plan de la
formation? On forme pour pendant, mais on ne forme pas pour avant, ni
après. Est-ce que c'est ça que vous voulez dire?
M. Julien: Ce que je veux dire, c'est qu'on a une formation qui
est limitée dans le temps et qui est fragmentée. Il n'y a pas,
à ma connaissance - et s'il y en a, j'aimerais qu'on me le dise, je ne
suis pas un expert pour l'ensemble de la province - de formation
intégrée, où les gens vont suivre un processus du
début à la fin. C'est compliqué; cela Impliquerait des
séjours dans les milieux de CLSC avant et après coordonnés
avec des séjours hospitaliers. À ma connaissance, ça
n'existe pas, et la formation est forcément spécialisée et
fragmentée. C'est une des raisons, probablement, de cette fragmentation,
c'est la surspécialisation.
Le temps aussi, la durée d'exposition des étudiants en
médecine en périnatalité est assez brève. À
ma connaissance, ça ne s'est pas beaucoup modifié depuis les
années antérieures où, moi, j'ai été
formé. Je peux vous dire que quand je suis sorti de mon cours de
médecine, j'étais loin d'etre prêt à faire des
accouchements. Je n'avais absolument pas la compétence et je n'en ai pas
fait non plus. L'exposition est extrêmement importante dans le
développement de ces habiletés-là, l'exposition constante
et continue. Et ce n'est pas le cas dans la formation médicale. (20 h
30)
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que vous...
La Présidente (Mme Marois): Est-ce que vous voulez poser
une sous-question sur cette question?
M. Gautrin: Une sous-question. Moi, j'ai... Vous parlez de la
formation des médecins, mais qu'est-ce que ça devrait être
la formation des sages-femmes ou qu'est-ce que c'est que la formation des
sages-femmes ici au Québec?
Mme Gagné (Jocelyne): Ce qui est recommandé pour la
formation des sages-femmes, c'est une formation au niveau universitaire de
trois années, qui inclut des notions... c'est sûr qu'actuellement,
elles sont dans le curriculum des médecins, qui sont aussi dans le
curriculum des Infirmières mais avec une approche, une concentration
suivi de grossesse et accouchement normaux et, évidemment, des notions
sur la pathologie de la grossesse. Parce que les sages-femmes doivent
être préparées à identifier des déviances
à la normale et à les référer au moment voulu.
C'est pour ça qu'on dit qu'elles doivent aussi travailler en
équipe et non pas travailler isolées.
Maintenant, juste une mention. Je pense que la SMOQ, dans un
comité de travail sur lu périnatalité, les personnes qui
faisaient partie de ce comité ont reconnu des lacunes au niveau de la
formation. Je pense que c'est vraiment à leur crédit de le
reconnaître et de dire aussi qu'elles n'étaient pas suffisamment
formées pour accompagner des femmes qui présentent des grossesses
normales. Je pense qu'on peut apporter des nuances. Je pense qu'il y a des
choses qui devraient se rétablir, en tout cas, s'ajuster de ce
côté-là.
La formation des sages-femmes, pour revenir à votre question,
habiliterait des femmes
ou des hommes - parce qu'en France, il y a des sages-hommes aussi,
même en Hollande - une personne à faire un suivi complet d'une
femme du début de la grossesse jusqu'à l'accouchement et dans les
premières semaines suivant l'accouchement. Maintenant,
évidemment, les soins au nouveau-né. C'est une formation qui est
beaucoup axée sur l'approche communautaire, sur une approche
préventive aussi, dépister suffisamment tot durant la grossesse
des complications qui risquent de survenir pour ne pas qu'on se ramasse, au
moment de l'accouchement, avec des problèmes et ce qui peut s'ensuivre.
Mais c'est un travail en équipe multidisciplinaire aussi.
La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Dr Julien, est-ce que vous
considérez le support médical comme essentiel?
M. Julien: Je pense que le support médical est
complémentaire. Il faut mettre des nuances. Parlez-vous de support
médical dans tous les cas, dans les cas d'exception, dans les cas de
complications ou dans les cas de processus tout à fait normal?
Pouvez-vous préciser?
M. Côté (Charlesbourg): Ma question vise,
évidemment, à tenter d'en arriver à un compromis qui sera
éventuellement acceptable par tout le monde et viable par tout le monde.
Évidemment, la crainte de bien des gens, c'est que dans la mesure
où il y a une problématique qu'on ne puisse pas avoir recours,
sur-le-champ, à un médecin, donc un support médical qui,
à ce moment-là, serait nécessaire. De notre point de vue
à nous, on a à garantir la sécurité et la
santé des bénéficiaires. Il est clair que tout le monde
s'entend sur le fait que dans les accouchements normaux, il n'y a pas de
problème. L'encadrement médical n'est probablement pas
nécessaire. C'est à partir du moment où il y a des
grossesses à risques où il y aurait transfert simplement à
des médecins ou, évidemment, accompagnement d'un médecin.
Quand on dit dans le cas normal, ça me paraît tomber sous le sens.
Dans le cas des accouchements normaux, est-ce que, dans ce cas-ci, vous croyez
qu'on a besoin d'un support médical? Le croyez-vous essentiel?
M. Julien: Je pense, personnellement, je vais m'exprimer aussi
personnellement parce qu'il y a le texte qui correspond à l'ensemble des
gens qui ont signé, mais je voudrais bien préciser que dans les
réponses, il peut y avoir des connotations personnelles. C'est pour moi
assez évident qu'une grossesse normale ne nécessite pas
l'intervention d'un intervenant médical. Une grossesse normale,
ça se fait dans des conditions normales et ça ne demande qu'un
accompagnement, à mon sens, empathique et parfois techni- que
léger ou doux. Dans ce sens-là, je ne pense pas que les
médecins aient nécessairement à être
impliqués.
Je pense... Cependant, on a parlé de la notion d'équipe
multidisciplinaire qui, pour moi, est très importante. Il doit y avoir
des mécanismes de concertation pour pallier les craintes, les dangers et
les risques potentiels. Je dois quand même préciser que le suivi
d'une grossesse, un suivi global, un suivi bien fait sur le plan
médical, sur le plan psychosocial, en surveillant l'environnement, avec
quelqu'un de confiance, permet de déceler la majorité des
grossesses à risques et de les orienter rapidement vers des milieux
aptes à en prendre charge. À ce moment-là, l'interrelation
qu'il peut y avoir, la complémentarité entre un groupe de
professionnels comme les sages-femmes et le milieu médical
spécialisé est sûrement essentielle.
Il s'agit d'articuler les différentes ressources pour que chacun
y aille de son meilleur et qu'il y ait complémentarité
éventuellement. Actuellement, on assiste à un braquage de deux
mondes qui, dans le fond, devraient être tout à fait
complémentaires en ayant comme objectif principal, justement, la famille
qui est en train de se former ou se confirmer dans une certaine mesure.
La Présidente (Mme Marois): Mme Gagné, vous vouliez
ajouter quelque chose.
Mme Gagné: II n'est absolument pas question d'avoir une
professionnelle qui travaille Isolée. On insiste vraiment sur la notion
d'équipe, on insiste sur le fait aussi qu'une grossesse normale peut
présenter certaines complications. Il doit y avoir une ligne directe de
communication et de collaboration entre médecins et sages-femmes ou
d'autres professionnels, comme les infirmières aussi, ou d'autres -
travailleuses sociales, psychologues, je ne sais pas - le temps venu, si besoin
est. Il ne faut pas vraiment perdre du terrain. Il ne faut pas perdre des
acquis. C'est absolument essentiel de toujours garder présente la notion
de travail en équipe. Ce n'est pas les sages-femmes d'un bord, les
médecins de l'autre, c'est vraiment en collaboration. Je pense que c'est
à ce prix-là qui semble un peu dur à payer par les temps
qui courent, mais je pense que c'est absolument essentiel que médecins
et sages-femmes travaillent en collaboration et non en compétition.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Peut-être M. Julien
qui est docteur en...
La Présidente (Mme Marois): Voulez-vous rajouter quelque
chose?
M. Julien: Oui, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Marois): Non, ça va?
M. Julien: Je voulais juste préciser que j'ai eu dans ma
pratique connaissance d'événements fâcheux, effectivement
imprévisibles, et qui auraient pu être prévenus facilement
et être réglés facilement si cette concertation-là
avait existé. Elle n'existe pas et elle empêche effectivement les
choses de se passer comme elles devraient se passer avec compétence et
avec souci de maintien de santé, si on veut, des personnes en cause.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Oui?
M. Côté (Charlesbourg): Dernière question
pour le moment. Au bas de la page 2, vous dites: "que les sages-femmes soient
membres à part entière d'équipes multidisciplinaires en
périnatalité... " Est-ce que ça signifie pour vous que les
sages-femmes devraient faire partie du Conseil des médecins, dentistes
et pharmaciens des hôpitaux ou dans le cas des CLSC où il y a plus
de cinq médecins?
M. Julien: J'ai un peu de difficulté dans la structure, je
dois vous avouer. Moi, je pense qu'on est en présence d'une situation
où il s'agit de professionnels qu'on voudrait autonomes, au même
titre que n'importe quel autre professionnel, qui devraient être
intégrés dans une équipe, c'est-à-dire qu'à
part entière on travaille en équipe. Vous êtes
sûrement habitué à travailler en équipe. En
santé, c'est la même chose. Si on travaille auprès... Je
vais donner un exemple qui est différent pour bien illustrer... Si je
travaille avec un enfant handicapé et sa famille, il y a un psychologue,
un ergothérapeute, un physiothérapeute, un médecin, un
pédiatre, etc., chacun est un professionnel autonome qui vient apporter
sa collaboration. Et les parents eux-mêmes sont à ce
moment-là des intervenants et des collaborateurs. Si on fait la somme de
tout ça, on arrive à un résultat, c'est-à-dire une
intervention appropriée. Si on ne fait pas la somme de tout ça et
qu'il y a juste un médecin qui intervient - ça, on en a des
preuves quotidiennement - ou juste un physiothérapeute, ou juste un
psychologue et que les parents sont exclus, ça ne marche pas. Les
résultats sont toujours nuls ou décevants. Mais l'équipe
qui se constitue et qui travaille d'un commun accord avec respect mutuel, c'est
la façon de faire.
Je pense que ça s'applique aussi par rapport à la
grossesse, l'accouchement et le suivi postnatal; II s'agit d'équipes.
Comment on va les intégrer dans les milieux hospitaliers, dans les CLSC?
Quel genre d'autonomie vont-ils avoir? Est-ce qu'ils vont être
reliés au CMD? Est-ce qu'ils vont avoir une organisation autonome? J'ai
un peu de difficulté. Je pense qu'on doit respecter... Ce qui m'importe,
en fait, c'est l'aspect du rôle, l'intégration du rôle dans
un processus d'ensemble. La structure qui favorisera ça sera la
meilleure. Ça ne vous aide pas plus que ça, mais...
M. Côté (Charlesbourg): Vous ne la connaissez pas,
cette structure-là?
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): Est-ce que quelqu'un du groupe
veut... Mme Brunelle ou Dr Vézina?
M. Vézina (Michel): Moi, je pense que la structure,
c'est... Il n'y a pas une structure unique et, qu'on appelle ça un
conseil des médecins, dentistes, pharmaciens et sages-femmes ou qu'on
appelle ça le conseil des sages-femmes tout court, l'objectif est le
même. L'objectif de ces conseils-là, c'est de s'assurer du respect
des critères de compétence, du respect de la qualité de
l'acte professionnel en cause et de l'élaboration de normes de pratique
professionnelle et de leur suivi de sorte que... et c'est toujours fait, c'est
comme ça que ça se fait avec les médecins, par des pairs.
Si on dit que, comme on le dit ici, "les sages-femmes sont membres à
part entière de l'équipe multidisciplinaire", qu'elles sont des
professionnelles autonomes, c'est à elles de déterminer, en
fonction, on l'a dit, des critères qui existent sur le plan
international, des critères de qualité et de compétence.
Ce conseil des sages-femmes ou conseil des médecins et dentistes
élargi devrait avoir ça comme mandat, s'assurer que les personnes
qui ont recours à ces professionnels-là aient recours à
des professionnels qui ont une bonne formation et qui donnent des services de
qualité.
La Présidente (Mme Marois): Est ce que vous voulez ajouter
quelque chose, Mme Brunelle? Ça va? Merci. Ça va, M. le ministre?
Oui, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: J'avais quelques questions, Mme la
Présidente, mais je vais faire d'abord un commentaire. Ce qui me frappe
dans votre approche, Dr Julien, et même dans l'approche de celui qui est
à votre droite, M. Vézina, c'est que j'ai remarqué que
c'était toujours des médecins salariés qui étaient
ouverts à des mesures nouvelles; ça me frappe. Deuxième
chose qui me frappe: Comment ça se fait que vous ayez attendu aussi
longtemps pour lancer un tel cri du coeur? Comment ça se lait que vous
ayez attendu aussi longtemps pour lancer un appel à la
compréhension dans un secteur aussi - Louise, s'il vous plaît! -
important? Cela me surprend.
M. Julien: La question est bonne et receva-ble.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): Vous la jugez recevable, vous
y répondrez donc. Ha, ha, ha!
M. Julien: Vous avez probablement raison en termes de retard
d'intervention. Je pense que... Enfin, il faut connaître un peu... Il y a
plusieurs aspects à votre question. D'abord, effectivement, plusieurs
des signataires sont des médecins salariés.
M. Chevrette: Y en a-t-il qui ne le sont pas?
M. Julien: Moi, je le suis aussi à demi et je suis
à l'acte à demi, à peu près. Je suis
pédiatre, donc, je ne fais pas d'accouchement, mais je fais quand
môme du suivi postnatal, de l'accompagnement de familles qui ont des
difficultés et du counseling. Je dois vous dire que si je limitais mes
heures aux heures payées par le salaire, je ne dépasserais
probablement pas ie cadre des interventions habituelles. Je parle pour moi. En
dehors des 35 heures... Les 35 heures me sont bien payées, je dois dire,
et ça me permet de dépasser les 35 heures pour pouvoir faire des
interventions auprès de familles, qui durent deux et trois heures, sans
avoir à demander un salaire. C'est très facilitant.
M. Chevrette: Est-ce que ça fait longtemps que vous avez
observé que la profession médicale s'est autant
éloignée sur le plan humain de sa responsabilité
vis-à-vis de l'accouchement? (20 h 45)
M. Julien: Je pense qu'il y a encore beaucoup de médecins
qui, au plan humain, sont extrêmement compétents. Je ne pense pas
qu'on doive généraliser de cette façon. Je pense que
chaque médecin garde probablement une volonté d'établir
des relations humaines - entre guillemets - avec les gens, les patients, les
familles. Le système, malheureusement, ne nous facilite pas la
tâche, effectivement. La complexité aussi des
spécialisations, de la tâche... Pour un omnipratlcien, être
compétent dans différents champs, ce n'est pas facile, ça
demande beaucoup d'énergie, une formation continue. C'est la même
chose pour les spécialistes. Ça a pu permettre... C'est
très différent depuis... On nous disait, dans le temps, en
formation: Vous allez voir, dans cinq ans, vous allez être
dépassés si vous ne vous tenez pas à date Je dois dire
qu'aujourd'hui, probablement, al on no se tient pas à date, dans un an,
on est dépassé. Ça, ça demande
énormément, qu'on le veuille ou pas, et ça peut contribuer
à diminuer notre temps d'écoute. Je ne sais pas qui en est
responsable - la science en est responsable, le système, etc. - mais
ça a pu contribuer à nous enlever en tout cas cette
partie-là.
M. Chevrette: Les groupes qui vous ont
précédé ont exclu à peu près unanimement le
lieu que représente le centre hospitalier comme milieu
d'expérimentation. Vous qui lancez un tel cri du coeur, comment se
fait-il que vous mainteniez le milieu hospitalier comme lieu
d'expérimentation?
M. Julien: Pour plusieurs raisons, dont une en particulier, c'est
qu'il y a encore beaucoup de femmes qui veulent accoucher en milieu
hospitalier, qui se sentent plus en sécurité. Notre approche est
une approche dite globale qui se doit de respecter les gens dans les lieux
où ils veulent accoucher. C'est vrai pour l'hôpital, c'est vrai
pour d'autres milieux en dehors de l'hôpital, ça pourrait
éventuellement être vrai pour les accouchements hors
établissement reconnu. L'argumentation la plus fondamentale, c'est le
respect des gens dans cette approche. À celles qui veulent accoucher
à l'hôpital, je pense qu'on doit offrir des services globaux. Le
fait d'aller accoucher à l'hôpital, ça n'exclut pas ce
droit à des services intégrés, incluant une
sage-femme.
La Présidente (Mme Marois): Moi. je vais nuancer un petit
peu. Dans le fond, on disait: Oui, en centre hospitalier, avec bien des
réserves, mais si on le fait en centre hospitalier, on voudrait que ce
soit un lieu distinct de là où ça se fait d'une
façon un peu plus médicalisée, habituellement. Est-ce que
c'est aussi votre point de vue à cet égard? C'était celui,
entre autres, de la Fédération des infirmiers et
infirmières, cet après-midi. Eux disaient: Oui, dans les centres
hospitaliers, mais, à ce moment-là, ce sera un lieu qu'on
consacrera essentiellement à la naissance, au suivi des grossesses,
etc., et qui sera donc un peu particulier à la pratique des
sages-femmes. Oui, madame...
Mme Gagné: Je pense que ça aurait l'avantage
d'être un lieu distinct, une aile distincte ou une unité, si vous
voulez, un centre de maternité à l'intérieur d'un centre
hospitalier, parce que l'approche est très différente, la
clientèle est très différente, aussi, les besoins sont
très différents, les horaires sont très différents.
Mais je pense qu'il ne faut pas que ce soit un ghetto à
l'intérieur de l'hôpital. Il faudrait vraiment que ce soit
accepté d'emblée par le conseil d'administration, par les
équipes d'autres professionnels qui sont là. Mais je crois
essentiel - je pense que tout le monde est d'accord avec ça - qu'il y
ait des projets-pilotes à l'intérieur d'un milieu hospitalier
parce que c'est là où la majorité des femmes vont
continuer à aller accoucher de toute façon et elles ne
devraient
pas être privées pour autant d'avoir accès à
ce type de service. La démonstration ne serait pas complète s'il
n'y avait pas une démonstration en milieu hospitalier, comme elle ne
serait pas complète s'il n'y en avait pas dans d'autres lieux
alternatifs.
La Présidente (Mme Marois): Dans d'autres lieux de
pratique.
Mme Gagné: Tout à fait.
La Présidente (Mme Marois): Oui.
M. Chevrette: Mme la Présidente, je voudrais continuer mes
questions. Compte tenu de...
La Présidente (Mme Marois): Rien ne vous en empêche,
cher ami et collègue.
M. Chevrette: C'est ce que je vous souligne comme v?u.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'on peut vous
réconcilier?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Je peux m'offrir comme
conciliateur, si vous voulez.
Mme Harel: On va proposer le ministre pour arbitrer.
M. Chevrette: Pardon?
La Présidente (Mme Marois): Allez-y, M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: M. le ministre, vous seriez peut-être mieux
d'en engager un juste pour régler la question de I'ancienneté des
infirmières. vous.
Ma question est la suivante. Vous êtes des médecins
oeuvrant au niveau d'un DSC, la majorité, à ce moment-là,
dans un centre hospitalier. Vous savez comment est structuré un centre
hospitalier avec un conseil des médecins, dentistes et pharmaciens. Il y
a un conseil d'administration dans un centre hospitalier. Vous avez lu le
projet de loi. Quant à la structure, vous ne dites pas un mot. Ça
me surprend que vous ne disiez pas un mot sur la structure qui est
proposée dans le projet de loi 4 alors que la structure propose un
comité de sélection national qui se réfère à
un comité de sages-femmes au niveau des centres hospitaliers, qui se
réfère à une autorité dépendante,
c'est-à-dire que ce conseil dépend d'un autre conseil qui est le
conseil d'administration; il y a un conseil exécutif. Comment voyez-vous
ça, d'une façon fonctionnelle, une expérience dans un
centre hospitalier, parce que vous avez l'air d'y tenir plus que tous les
autres groupes jusqu'à date. J'aimerais que vous me disiez comment vous
pensez que ça va fonctionner correctement. Est-ce que ce sont les DSC
qui devront remplacer tout ça?
Une voix: C'est une bonne idée. Des voix: Ha, ha,
ha!
La Présidente (Mme Marois): Vous êtes d'accord?
M. Chevrette: Vous avez eu un réflexe corporatif.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Vézlna: On n'excluait pas la pratique, dans notre
position à l'extérieur de l'hôpital. On a maintenu, on a
mentionné que ça pouvait être à l'hôpital
comme dans une maternité. Dans ce sens-là, on est d'accord...
M. Chevrette: Non, mais prenons à l'hôpital,
ça fonctionnerait comment?
M. Vézina:... avec le projet de loi qui propose un conseil
des sages-femmes qui est responsable, comme je le disais tantôt, du
contrôle de l'appréciation de la qualité des actes et qui
en réfère au conseil d'administration parce que, ultimement, dans
un hôpital, le conseil d'administration est responsable de tout ce qui se
passe dans la boîte de sorte qu'à ce moment-là,
l'important, comme je le disais tantôt, c'est de trouver un conseil qui
garantisse la qualité, qui garantisse à toute personne qui vient
accoucher à l'hôpital qu'elle est en droit d'attendre des services
de qualité et qu'on puisse se référer à une
structure si jamais.
M. Chevrette: Docteur, ne faites pas votre politicien. Question
indirecte: Quelle structure vous voyez?
M. Vézina: Conseil des sages-femmes.
M. Chevrette: Je ne vous demande pas de me dire qu'il s'en
réfère à une structure, je vous demande quel type de
structure à laquelle il devrait se référer.
M. Vézina: C'est celle qui est là, le conseil des
sages-femmes qui serait à côté des conseils des
médecins et dentistes, à côté du conseil consultatif
du personnel clinique et qui relève...
M. Chevrette: Et qui relèverait de qui?
M. Vézina: Qui relève du conseil d'administration.
Actuellement, le conseil des médecins et dentistes, le conseil
consultatif du personnel clinique, c'est un nouveau conseil. Ce que j'ai
compris, c'est un troisième conseil qui vient au monde à
l'hôpital; les deux autres marchent bien, pourquoi ce troisième
marcherait-il mal?
M. Chevrette: vous êtes d'accord avec la structure
proposée dans le projet de loi 4, y compris le conseil exécutif
de qui relève le conseil des sages-femmes? est-ce qu'on a lu le
même projet de loi?
M. Vézina: Le conseil exécutif, le
comité...
M. Chevrette: On va prendre le projet de loi et on va vous le
dire. Ce ne sera pas long. Vous savez que, dans un centre hospitalier, le
conseil des sages-femmes établit son mode de fonctionnement.
D'accord?
M. Vézina: Oui.
M. Chevrette: II relève de qui, le conseil des
sages-femmes?
M. Vézina: Le conseil des sages-femmes relève... Il
peut se donner un conseil exécutif...
M. Chevrette: II relève du conseil d'administration.
M. Vézina: Du conseil d'administration, comme le conseil
des médecins et dentistes, comme le conseil...
M. Chevrette: Les pouvoirs des sages-femmes relèvent de
qui à l'intérieur d'un hôpital?
M. Vézina: On dit un comité exécutif comme
II y a un comité éxécutif du conseil des médecins
et dentistes, comme le comité exécutif du conseil consultatif du
personnel clinique. Un conseil regroupe tous les professionnels. Il y a des
décisions qui ne peuvent pas se prendre... Il y a des hôpitaux
où II y a plus de cent médecins, les décisions ne peuvent
pas toujours se prendre à l'assemblée générale. Les
gens, pour être plus fonctionnels, conviennent de se donner un
exécutif. Ce que je vois là-dedans, c'est que l'ensemble du
conseil des sages-femmes, pour être plus efficace, plus fonctionnel, se
donne un exécutif qui règle plus les choses courantes, qui
s'occupe plus...
M. Chevrette: Avez-vous remarqué, M. le médecin,
à l'article 17 du projet de loi que le conseil exécutif n'est pas
le conseil exécutif des sages-femmes? C'est un conseil exécutif
expressément nommé, dont la composition figure à l'article
17 et non pas ce que vous venez de m'expllquer, à savoir que le conseil
exécutif relèverait du conseil exécutif des sages-femmes.
Le conseil exécutif, quand vous vous référez à
l'article 17, c'est un conseil exécutif spécifique pour
contrôler le pouvoir des sages-femmes. Que je sache, ce sont deux
sages-femmes, deux médecins, le coordonnateur qui est nommé par
le conseil d'administration de l'hôpital...
M. Vézina: Puis un infirmier ou une infirmière.
M. Chevrette:... un infirmier ou une infirmière.
M. Vézina: On a parlé de la nécessité
de ne pas marginaliser la pratique des sages -femmes en centre hospitalier. Je
trouve que, dans cet article, c'est une mécanique supplémentaire
qu'on impose au conseil des sages-femmes, à l'exécutif du conseil
des sages-femmes et qu'on n'impose pas aux autres exécutifs.
M. Chevrette: Donc, vous êtes en désaccord avec
l'article 17.
M. Vézina: Non, je suis d'accord avec l'article pour
favoriser l'intégration des sages-femmes aux autres professionnels dans
l'hôpital.
La Présidente (Mme Marois): Pour éviter ce que
madame mentionnait tout à l'heure, à savoir que ça se
ghettoïse et se marginalise à ce niveau-là aussi. Oui?
M. Chevrette: Une autre question, Mme la Présidente.
Êtes-vous en faveur de l'autonomie des sages-femmes?
M. Julien: Dans notre document, c'est assez clair.
M. Chevrette: Comment pouvez-vous soutenir que vous êtes en
accord avec l'autonomie des sages-femmes, puis accepter la structure du projet
de loi numéro 4?
M. Julien: Je pense que ce dont on parle, c'est une autonomie
professionnelle. À partir du moment où elle s'exerce dans un
établissement où il y a des règles, il faut que les
règles s'appliquent pour tout le monde: les sages-femmes, les
médecins, etc. Ça n'empêche pas...
M. Chevrette: je vais vous poser ma question autrement.
considérez-vous que le projet de loi numéro 4 assure l'autonomie
aux sages-femmes?
M. Julien: Je pense qu'on parle actuellement d'un projet-pilote
qui va, éventuellement, définir
la pratique sage-femme dans le milieu. Le type d'autonomie, je pense que
c'est difficile de répondre à cette question-là. On est en
expérimentation de l'ajout d'une nouvelle ressource qu'on veut autonome.
On pense qu'on a besoin d'une étape d'évaluation qui s'appelle,
en l'ocurrence. pour les besoins de la cause, un projet pilote ou des projets
pilotes. L'évaluation va nous donner beaucoup plus de renseignements sur
la faisabilité, quel mode va être le meilleur, comment ça
va pouvoir procéder, quel type d'autonomie, etc. Je pense que le projet
est, volontairement, un projet d'expérimentation. L'autonomie n'est
peut-être pas complète dans la structure, mais comme c'est un
projet d'expérimentation, il va nous aider, justement, à
préciser avec une évaluation appropriée. Mais je pense que
l'évaluation appropriée est extrêmement importante.
M. Chevrette: moi, mme la présidente, je ferais un
commentaire pour terminer mon droit de parole. personnellement, je respecte
beaucoup plus le point de vue des sages-femmes, en ce sens qu'on doit d'abord
créer la corporation ou la vocation ou la profession. ensuite, par des
projets-pilotes, on met à l'épreuve cette nouvelle profession.
mais ce n'est surtout pas - je suis d'accord avec elles - en lançant des
projets-pilotes sans créer cette profession, surtout dans un centre
hospitalier, avec ce paquet de structures qui risquent de la faire mourir dans
l'oeuf, parce qu'on dira que ça n'a pas été fonctionnel,
que ça a provoqué des chicanes, que ça a fait ci, que
ça a fait ça. je crois beaucoup plus à l'approche des
sages-femmes qu'à l'approche des dsc.
La Présidente (Mme Marois): merci, m. le leader. est-ce
qu'il y a d'autres questions? il reste encore quelques minutes au temps de
l'autre formation politique. est-ce qu'il y a d'autres questions? non? moi,
j'en aurais une, si vous me le permettez. vous parliez tout à l'heure de
la formation. évidemment, on a devant nous des gens qui ont
été formés en médecine et des gens qui ont
pratiqué comme sages-femmes et qui ont une formation de sage-femme.
quand on fait sa médecine, combien de temps. à peu près,
consacre t on à ce qui concerne le suivi d'une grossesse, avant, pendant
et après, et non pas, bien sûr, seulement à l'acte
d'accoucher, parce qu'on sait que c'est une approche plus globalisante. je ne
veux pas avoir une réponse: on passe 50 heures ou... mais, globalement,
est-ce que c'est 10 %, 15 %, 20 % de toute la formation qui est accordée
à cette réalité en particulier? et j'aurai une
sous-question par la suite.
M. Julien: Personnellement, je pense qu'on ne passe pas de temps
au suivi global de la grossesse et de la période périnatale. On
passe du temps dans le suivi médical prénatal, le suivi postnatal
des bébés à la salle d'accouchement - peu de temps,
d'ailleurs, mais on fragmente, comme je l'ai dit tantôt. À votre
question, à savoir combien de temps passe-t-on au suivi périnatal
global, à mon sens, c'est zéro.
La Présidente (Mme Marois): D'accord Maintenant, Mme
Gagné, avez-vous eu une formation de sage-femme?
Mme Gagné: oui. j'ai eu une formation de sage-femme dans
le temps où ça se donnait ici à l'hôpital
saint-sacrement, pour aller travailler en pays en développement.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Combien de temps
passiez-vous... Évidemment, j'imagine que vous abordez d'autres
matières ou d'autres éléments de formation que ce qui
concerne spécifiquement le suivi d'une grossesse, mais combien de temps
passez-vous, à peu près, dans la formation que vous avez eue,
à étudier toute cette réalité là. à
voir un peu comment devait se faire ce suivi là et tout le reste?
Mme Gagné: Le suivi prénatal?
La Présidente (Mme Marois): Oui, prénatal.
Mme Gagné: L'ensemble?
La Présidente (Mme Marois): C'est ça, dans
l'ensemble.
Mme Gagné: L'ensemble. La formation que j'ai reçue
avait une forte concentration en pathologie de la grossesse.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. (21 heures)
Mme Gagné: À ce moment-là, il faut se
reporter en 1972, au Québec, où, de toute façon,
l'accouchement en Cadillac, c'était épldurale, épisiotomie
et forceps. Donc, il ne fallait pas que ça détonne trop trop.
Puis, j'ai eu une formation d'infirmière. La base d'infirmière,
on ne la répétait pas. J'ai eu une formation de neuf mois avec,
bien sûr, un stage pratique.
Combien de temps en tout? C'étaient neuf mois qui étaient
répartis entre les pathologies de la grossesse, la grossesse normale,
pédiatrie, urgence, anesthésie...
La Présidente (Mme Marois): Ce qui est
périphérique donc. Ce qui concerne proprement la grossesse, son
suivi et ce qui lui est périphérique, à peu près
neuf mois.
Mme Gagné: C'est ça, oui.
La Présidente (Mme Marois): Maintenant...
Mme Gagné: Je vous arrête tout de suite, parce
qu'une formation spécifique aux sages-femmes, avec entrée directe
et sans nécessairement avoir une formation d'infirmière, c'est
trois ans. Ce qui est recommandé, c'est d'avoir aussi une période
d'internat d'une année. Je pourrais être sous observation, si vous
voulez, pendant une année. Donc, c'est beaucoup plus complet que ce
qu'on a vu.
La Présidente (Mme Marois): Je pense que le ministre va
sûrement me voir venir. Je vais me permettre maintenant un commentaire,
si vous me le permettez, particulièrement, madame. Je pense au temps que
l'on accorde à cette réalité-là dans une formation
de généraliste, versus le temps qu'on lui accorderait, si on
prenait pour acquis que la formation sera de trois ans à
l'université. Évidemment, on aborderait sûrement d'autres
réalités. J'imagine que la formation préparerait
particulièrement bien à assumer la fonction.
Oui, voulez-vous commenter cela?
M. Julien: Oui. Après discussion, je voudrais dire que,
quand j'ai dit zéro, ça concernait un suivi périnatal
global. Je voudrais bien spécifier qu'il y a une formation
médicale obstétricale en milieu hospitalier d'autour de trois
mois en général. Ce que je mentionne, c'est ce qu'on appelle le
suivi périnatal global.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Je vous
remercie.
M. le ministre, avez-vous des choses à ajouter? Il vous resterait
deux minutes.
M. Côté (Charlesbourg): En terminant, juste pour
remercier le Dr Julien, ainsi que les personnes qui l'accompagnent, d'avoir
bien voulu se déplacer. Le député de Joliette disait
tantôt: C'est un cri du coeur. Moi, j'appelle ça du courage de
venir exprimer son opinion et de signer un document. Dans le contexte que vous
connaissez, on peut partager ou ne pas partager vos opinions. Je pense que
c'est une situation qui est normale. A tout le moins, vous avez le
mérite d'être venus l'exprimer devant une commission
parlementaire. Vous auriez pu faire comme bien des gens: penser comme vous mais
rester à la maison, en laissant à la corporation le soin de
défendre les intérêts collectifs. Alors, je vous remercie
et vous avez très certainement compris que le projet de loi
lui-même, dans sa forme actuelle, n'est pas un projet de loi qui sera
proposé à l'Assemblée nationale pour adoption et,
nécessairement, des aménagements substantiels qui seront
apportés grâce à l'éclairage que tout le monde
voudra bien nous donner en commission parlementaire. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie
particulièrement de votre présentation. J'aimerais maintenant que
nous entendions...
M. Chevrette: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Marois): Oui, monsieur.
M. Chevrette: Je voudrais souligner que les travaux de la Chambre
seront peut-être ajournés dans quelques minutes. Un massacre,
inexplicable, se produit présentement à l'École
polytechnique de Montréal. Il y aurait douze morts à date.
La Présidente (Mme Marois): Qu'est-ce que vous
racontez?
M. Chevrette: Un "crackpot" a tiré sur une douzaine de
personnes: douze morts et une dizaine de blessés. La Chambre ajournera
dans quelques minutes. Cependant, on nous demande de continuer les travaux des
commissions, compte tenu des groupes qui se sont déplacés. C'est
un peu cette raison qui m'a fait sortir.
M. Ryan et M. Gendron vont souligner ce fait à la
télé de l'Assemblée nationale. Ici, on nous demande de
continuer. Les deux chefs de parti auront un message spécial à
l'ouverture de la séance demain. C'est une catastrophe plus grande que
celle de l'Assemblée nationale en 1984. Douze décès
à date au moins ont été constatés.
La Présidente (Mme Marois): C'est le genre de chose qu'on
ne souhaite pas qu'il arrive. Nous allons continuer l'audition des personnes
présentes.
La Fédération des médecins omnipraticiens du
Québec, s'il vous plaît! Est-ce que les membres de la commission
sont à leur siège? Oui? Quelques secondes. Alors, je
répète les règles: 20 minutes pour la présentation,
40 minutes de questions et d'échanges de vues avec vous. Vous nous
présentez les gens qui vont défendre votre point de vue, s'il
vous plaît.
Fédération des médecins
omnipraticiens du Québec
M. Richer (Clément): Très bien, merci, Mme la
Présidente. M. le ministre, MM. et Mmes les députés, dans
la délégation qui m'accompagne, il y a le Dr Marie Girard, qui
est présidente de l'Association des médecins omnipraticiens de
Québec et qui est deuxième vice-présidente à la
Fédération; le Dr Boileau, à l'extrême droite, qui
est un médecin omnipraticien, directeur des communications; le Dr
Georges-Henri Gagnon, à ma gauche, qui est médecin omnipraticien,
directeur des affaires professionnelles.
On a la qualité de médecins omnipraticiens. De toute
évidence, on n'est pas une corporation, M. le ministre, mais on va
essayer de défendre
nos intérêts quand môme. Je dois vous dire
qu'à nous quatre dans notre carrière, on représente quand
même 3000 accouchements et peut-être un peu plus que ça. On
est assez vieux, le Dr Gagnon et moi, pour avoir fait une centaine
d'accouchements à domicile, lui en périphérie de Rimouski
et, moi, à Montréal, dans un quartier tout à fait
résidentiel, tout près de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont.
Donc, on a une certaine expérience dans les accouchements et on va
essayer d'en parler un petit peu.
Une voix:...
M. Richer: Le Dr Boileau aussi. On a le même âge, ce
qui fait qu'il a eu le temps d'en faire à domicile aussi.
Tout d'abord, je vous dépose la demande, Mme la
Présidente, d'inscrire notre mémoire au Journal des
débats. Je ne lirai pas notre mémoire, je pense que c'est
déjà fait.
La Présidente (Mme Marois): Ceci se fait
automatiquement.
M. Richer: Parfait. Je vais faire quelques remarques
générales et, par la suite, quelques remarques sur le projet de
loi 4 pour terminer avec certaines interrogations. Le tout sera suffisamment
court pour nous permettre d'avoir le temps d'échanger un peu par la
suite.
Vous savez que le concept d'obstétrique a évolué
énormément depuis les 30 ans que je suis médecin.
Auparavant, l'obstétrique, c'est vrai, c'était la notion qui se
rapportait à la grossesse et à l'accouchement. On faisait
d'ailleurs un cours, un stage en obstétrique, et c'était surtout
relié à la grossesse et à l'accouchement. Maintenant, on
évolue graduellement depuis quelques années vers le concept
beaucoup plus large de périnatalité. Cela consiste à
s'occuper des soins médicaux qui sont requis avant la naissance,
à la naissance, après la naissance et à s'occuper aussi de
cette espèce d'ensemble, l'agglomérat parents enfants. C'est
ça la périnatalité.
Nous, on pense que le médecin omnipraticien est le professionnel
dont la formation est probablement la plus appropriée pour pratiquer en
périnatalité, surtout maintenant qu'après des longs
débats on a obtenu une formation complémentaire en omnipratique.
Cela nous a pris quinze ans à convaincre les autorités
gouvernementales d'allonger notre cours de médecine et de faire deux
années de résidence plutôt qu'une, justement pour
acquérir une meilleure formation et, entre autres choses, en
obstétrique. Il y avait l'urgence, la gériatrie qui
étaient importantes, mais il y avait également pour
l'omnipraticien, le médecin de famille, le fait de devoir
présider au début de la formation de la famille. Pour nous,
c'était Important.
Vous savez, on n'en fait peut-être plus beaucoup d'accouchements
et il y a une diminution des médecins omnipraticiens, mais plus ou moins
50 % des accouchements par voie vaginale sont faits par des médecins
omnipraticiens au Québec. On n'en parle nulle part, mais c'est un fait.
Il y a une augmentation des femmes omnipraticiens en
périnatalité. On est passé de 8, 3 % en 1981 à 13.
9 % de femmes qui font de l'obstétrique chez les médecins
omnipraticiens.
La Présidente (Mme Marois): Je m'excuse, je n'ai pas
entendu.
M. Richer: 8, 3 %. Ce sont des études que je peux vous
fournir, ce ne sont pas des études à venir, j'en al des copies.
Si cela vous agrée, ces études-là sont toutes ici.
La Présidente (Mme Marois): de 8, 3 % à 13, 9 %,
est-ce bien ça?
M. Richer: De 8, 3 % à 13, 9 % sur une période de
cinq ans, de 1981 à 1986. Les omnipraticiens sont évidemment les
professionnels de la santé les plus répartis sur le territoire du
Québec. Je vous ferai remarquer qu'il y a encore 38 % des omnipraticiens
qui pratiquent l'obstétrique en milieu urbain. Je devrais dire
périnatalité, mais l'un ou l'autre, peu importe. C'est donc qu'il
y en a 62 % qui pratiquent en milieu non urbain. C'est à
considérer pour un territoire aussi vaste que le nôtre, avec une
population aussi peu dense.
Il y a une diminution de l'âge moyen. Il n'y a plus
d'omnipraticiens qui veulent faire de l'obstétrique. Cependant, ce sont
des études sérieuses, elles sont faites même par un
département de santé communautaire. Ça doit être
sérieux. Il y a une diminution de l'âge moyen des médecins
omnipraticiens accoucheurs au Québec. Cet âge est passé de
43, 5 ans à 40, 1 ans. C'est donc un apport nouveau de médecins.
Je pense quo le médecin omnipraticien a participé
également à l'augmentation de l'humanisation des soins. C'est
vrai qu'il y avait peut-être Intérêt à humaniser
davantage les soins et on a essayé de le faire. Les omnipraticiens ont
été peut-être les premiers à s'impliquer
sérieusement dans ce domaine. Pensez à l'hôpital Fleury
à Montréal, pensez à l'hôpital Pierre-Boucher,
à la Cité de la santé où il se fait beaucoup trop
d'accouchements d'ailleurs, à l'hôpital Christ-Roi ici à
Québec. Je pense qu'on a tenté de participer à cet effort
et on est prêt à continuer.
Quant au projet de loi 4, la Fédération est opposée
à ce projet-là, totalement. Pourquoi? Pour nous autres, il n'y a
eu aucune démonstration valable du besoin d'un nouvel intervenant en
périnatalité. Il y a le taux de mortalité maternelle jo
n'y reviendrai pas, ce sont dos chiffres que vous vous êtes fait sans
doute
répéter - le taux de mortalité infantile... Le
Québec est la province où ce taux est le meilleur au Canada. On a
un championnat pour une fois et c'en est un bon celui-là, on le
souhaite. Notre taux de mortalité infantile est parmi les plus bas au
monde des pays industrialisés et cela, avec l'équipe actuelle. De
la sorte, on dit qu'il n'y a pas un besoin évident qui a
été démontré, à notre satisfaction en tout
cas.
On trouve que la loi a beaucoup de caractères d'exception.
D'abord, la loi repose sur des clauses "nonobstant", c'est populaire de ce
temps-là: Nonobstant la Loi médicale, nonobstant la Loi sur les
infirmières et les infirmiers. On fait abstraction de certaines lois. On
crée une deuxième structure dans un hôpital - on pourra en
parler de structures tout à l'heure - une deuxième structure
hospitalière pour un même service rendu à la population. On
crée un service de maternité à côté d'un
service d'obstétrique ou de périnatalogie, un service de
maternité pour les sages-femmes, un service d'obstétrique et de
périnatalogie pour les médecins, et ce, dans la même
boîte complexe d'opération. Ça m'apparaît un peu
utopique.
On crée un nouveau conseil, une nouvelle sorte de choses, un
conseil des sages-femmes parallèle au CMDP. On peut faire le CMDPSF
probablement, mais on a créé un conseil des sages-femmes et on a
nommé au préalable un exécutif. Cet exécutif, qui
est censé représenter la communauté des sages-femmes, si
vous voulez, comprend également deux médecins. Je trouve
ça un petit peu paradoxal. Entre autres choses, ce conseil de
sages-femmes aura la responsabilité d'élaborer des règles
de soins. Comme vous le savez, ces règles font l'objet de plusieurs
discussions dans un hôpital et on se demande si cette nouvelle structure
va élaborer des règles do soins qui vont être conformes, ou
parallèles, ou quoi, aux règles de soins qui sont
élaborées dans les départements médicaux.
Il y a certaines interrogations aussi pour lesquelles je ne trouve pas
de réponse. Je les pose tout simplement. Peut-être j'ai mal lu le
projet de loi, mais est-ce qu'il y aura vraiment une différence sur le
plan juridique entre une sage-femme et un médecin en termes d'exercice
professionnel? Par quels mécanismes les projets-pilotes seront-ils
approuvés? Est-ce que la sage-femme va être autonome,
semi-autonome? Sous quelle autorité va-t-elle agir? Comment
partage-ra-t-on la responsabilité professionnelle? Quelle partie du
budget cela prendra, qui pourrait être employée, bien sûr,
à corriger certains problèmes dans le réseau? Quelle
partie du budget pourra être affectée à cette solution
qu'on appelle, nous autres, une solution à la recherche d'un
problème, parce qu'on ne voit pas le problème encore? Pourquoi
fragmenter l'exercice de la médecine au Québec?
On pense qu'il serait peut-être plus logique de continuer à
favoriser la globalité, l'omniprati-que dans la foulée des
ententes qu'on négocie avec le ministère depuis plusieurs
années. C'est pour ça qu'en conclusion, Mme la Présidente,
la Fédération s'oppose au projet de loi 4. Cependant, la
Fédération serait ouverte à ce qu'une politique
cohérente de périnatalité soit développée
par le ministère. La Fédération collaborerait très
certainement à travailler à l'élaboration de cette
politique.
La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le président.
M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente. Quelque chose me parait important à ce moment-ci,
puisque je pense qu'on est dans une deuxième phase de cette commission
parlementaire. Nous en avons connu une première et vous avez l'avantage
d'être de la deuxième. À la fois, il y a des avantages et
des désavantages à pouvoir exprimer votre point de vue ayant
entendu l'autre point de vue, je serais même porté à dire
l'autre côté de la médaille. (21 h 15)
II me semble extrêmement important de prendre quelques minutes
pour au moins exprimer très clairement un certain nombre de choses,
à ce moment-ci, avant de passer à la période de questions.
Je veux rappeler ce qu'est le projet de loi, peu importe si c'est le projet de
loi 4, peu importe si c'est un projet de loi modifié. D'ailleurs, ce
n'est un secret pour personne maintenant. Dans toutes les rencontres que j'ai
eues avec des fédérations ou des corporations, j'ai toujours dit:
II y aura un projet de loi. Je ne l'ai jamais caché et il y aura des
projets-pilotes. Donc, à partir de ce moment-là, je le
répète, c'est très clair pour moi.
Le projet de loi, celui qui est devant nous ou celui à venir, n'a
pas eu et n'aura pas pour conséquence de limiter, premièrement,
la responsabilité des médecins en regard de la pathologie et du
caractère anormal des grossesses et des accouchements;
deuxièmement, la possibilité pour les médecins de suivre
et d'effectuer des accouchements normaux. Il ne fait et il ne fera qu'offrir
une alternative aux femmes. Troisièmement, ce n'est pas l'État ni
l'établissement, mais la femme elle-même qui choisira le mode
d'intervention qu'elle préférera. Quatrièmement, il n'est
pas question d'obliger quelque établissement que ce soit à
démarrer un projet-pilote; un tel projet sera librement soumis par les
établissements qui le désirent.
Pour la réalisation des projets-pilotes, il me semble que deux
conditions sont essentielles: premièrement, offrir une autonomie
certaine aux sages-femmes et, deuxièmement, assurer le support
médical lorsque requis. Pour moi, le deuxième point est tout
aussi important que le premier. Je sais, à la lecture...
M. Chevrette: SI M. le ministre me le permettait.
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
M. Chevrette: Tout en comptant ça sur mon temps.
La Présidente (Mme Marois): Comme c'est Mme la
Présidente, Je vais vous le permettre quand même. On va finir par
s'y habituer, enfin.
M. Chevrette: On en a déjà eu, madame. C'est juste
parce qu'on se trompe.
La Présidente (Mme Marois): Oui, ça arrive comme
ça à l'occasion. Ha, ha, ha! Vous avez remarqué que ce
n'est pas mon cas.
M. Chevrette: Est-ce que le ministre me permet sur sa
question...
M. Côté (Charlesbourg): Je n'avais pas fini. M.
Chevrette: C'est sur un point précis. M. Côté
(Charlesbourg): Oui.
M. Chevrette: Ça compterait sur mon temps, parce que vous
venez d'affirmer des choses qui ne font pas partie du projet de loi comme
tel.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais je...
M. Chevrette: Étant donné que ce sont des
consultations sur le projet de loi, II faut comprendre que les gens se sont
préparés en fonction de ce projet de loi.
M. Côté (Charlesbourg): J'y arrive. Si vous voulez
me le permettre, j'y arrive.
La Présidente (Mme Marois): M. le ministre, si vous
êtes d'accord?
M. Côté (Charlesbourg): D'ailleurs, il a toujours
été clair dans mon esprit qu'il fallait avoir cet exercice. Si on
a un exercice qui ne débouche pas sur autre chose que le projet de loi,
bien, n'ayons pas cet exercice. Si on pensait que, dans le projet de loi 4, on
avait la vérité et qu'elle était absolue, ne tenons pas de
commission parlementaire et allons de l'autre côté dans le grand
salon finir le travail. Je pense que c'est pour le bonifier qu'on est ici et
pour tenir compte des expériences de chacun.
Je terminerai en disant qu'il est évident que plusieurs points de
ce projet de loi sont des irritants pour les médecins. C'est pour
ça qu'on est dans la deuxième phase et je tenais à le dire
à ce moment-ci. Premièrement, il y a le champ de pratique des
sages-femmes et, deuxièmement, les structures d'encadrement de la
pratique des sages-femmes en centres hospitaliers pour le moment et les
privilèges d'admission des sages-femmes dans les centres hospitaliers.
Je le fais très ouvertement et très volontairement. Comme on a
dit qu'il y aurait un projet de loi, qu'il y aurait des expériences et
qu'on connaît une bonne partie des propos de chacun, moi, j'aimerais
connaître, ce sera ma première question, de vous qui avez une
vaste expérience - à quatre, 2000 accouchements, c'est autant que
des sages-femmes nous disaient avoir fait aujourd'hui et Je constate qu'il y a
au moins des "sages-hommes* là-dedans - comment on peut faire pour
corriger ces irritants tout en respectant les deux conditions que j'ai
évoquées tantôt et qui me paraissent essentielles. Est-ce
impossible ou est-ce possible? Est-ce que vous avez la volonté de le
faire ou n'avez-vous pas la volonté de le faire?
M. Richer: Ça ne se pose pas tellement pour nous autres,
M. le ministre, en termes d'irritants ou non. En fait, on ne croit pas aux
sages-femmes, littéralement. On n'a pas la preuve qu'il y a un besoin
pour des sages-femmes au Québec, avec les statistiques auxquelles on est
parvenu maintenant. On pense que le médecin omnipraticien a une
formation. Indépendamment de ce que nos prédécesseurs
peuvent avoir dit, on pense que les médecins omnipratlciens ont une
formation qui leur permet d'agir en périnata-lité. S'il faut
l'améliorer, la formation, on est d'accord. En fait, on l'a
demandé et obtenu, d'allonger le temps de la résidence. Mais ce
n'est pas en termes véritables.
Il ne faut pas penser que les omnipratlciens craignent que les
accouchements ne soient dorénavant le champ exclusif de pratique des
sages-femmes. Il y a un danger bien plus grand que ça qui existe pour
les omnipraticiens; en fait, c'est la baisse du taux de la natalité au
Québec. Les sages-femmes, aux États-Unis, c'est légal
depuis plusieurs années. Elles font moins de 4 % des accouchements aux
États-Unis. Donc, ce n'est pas parce que les sages-femmes feraient 4 %
de 80 000 accouchements, c'est-à-dire 3200 accouchements, que ça
va changer grand-chose dans notre affaire. Il ne faut pas entendre uniquement
ce point-là quand on parie de ça. Comme médecins, on a
été formés à l'université, peut-être
à tort, à être les avocats de nos patients et on pense...
On a appris ça. Or, peut-être qu'on a mal appris des choses. On a
appris que les actes médicaux devaient être posés par des
médecins; comme les ponts, c'est peut-être mieux qu'ils soient
construits par des ingénieurs. C'est dans ce sens-là. C'est pour
ça que ce ne sont pas des irritants, c'est le projet de loi en soi qui,
pour nous autres, n'est pas utile.
M. Côté (Charlesbourg): C'est très
Intéres-
sant de vous entendre parce que vous dites: On ne croit pas aux
sages-femmes, on n'en a pas besoin. Est-ce qu'on n'en a pas besoin ou si on n'y
croit pas, tout simplement? Et comment est-ce qu'on peut expliquer qu'au
Québec on n'y croie pas, alors qu'à travers le monde on y
croit?
M. Richer: Oui, ça, c'est vrai. Il y a 208 pays qui en
ont. Il y a juste nous autres et d'autres pays...
M. Côté (Charlesbourg): II y en avait huit,
là...
La Présidente (Mme Marois): II semble, huit pays, et nous
sommes parmi les exceptions.
M. Richer: C'est ça. Mais ce qu'on oublie de regarder
aussi, c'est que, dans la plupart des pays, en particulier en Europe...
Ça aussi, il y a une étude que j'ai ici, si vous voulez, une
étude qui a été faite sur la pratique des sages-femmes...
En Europe, ça régresse partout, les sages-femmes; en France, en
particulier. Bien sûr, il y a 300 ans, il y avait beaucoup de
sages-femmes, il y avait presque rien que ça. Il n'y avait pas
d'hôpitaux, il n'y avait pas de cliniques, il n'y avait pas de
médecins. Maintenant qu'il y a des hôpitaux, des cliniques et des
médecins, il y a un retour de la femme enceinte vers la clinique.
L'accouchement clinique prend une popularité; c'est en voie ascendante.
En République fédérale allemande, il y a une diminution de
l'utilisation de la sage-femme. Môme en Angleterre, il y a une diminution
de l'utilisation de la sage-femme. De sorte que, c'est comme si on partait,
nous autres, pour se doter d'une structure... Dans les autres pays qui en ont
eu besoin - parce qu'il faut admettre qu'au Xllle siècle, ici, il n'y
avait probablement pas beaucoup de Canadiens, pas beaucoup d'entre nous, en
tout cas - il fallait qu'il y ait un autre mécanisme, II n'y en avait
pas, de médecins. Mais depuis que ça existe, cette
affaire-là, de moins en moins de pays européens ont recours aux
sages-femmes.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, dans ce
genre de discussion, on prend toujours les exemples qui satisfont notre cause,
de part et d'autre. Tout ce qu'on a entendu depuis le matin, et j'aimerais vous
entendre là-dessus, c'est qu'on doit davantage aller maintenant, en
présupposant que ça n'a pas nécessairement
été le cas auparavant, vers la globalité: l'avant, le
pendant et l'après. Et des conclusions que je tire de ce que j'ai
entendu cet après-midi, ce n'est pas tellement vos
préoccupations, l'avant et l'après. Le pendant, c'est votre
préoccupation. L'avant et l'après, vous laissez ça
à d'autres. C'est vrai ou ce n'est pas vrai?
M. Richer: Non, je suis complètement en désaccord.
Vous avez entendu parler un pédiatre et un médecin en
santé communautaire pour lesquels j'ai beaucoup de respect. Sauf que, M.
le ministre...
M. Côté (Charlesbourg): Pas seulement eux
autres...
La Présidente (Mme Marois): Parce que, cet
après-midi, d'autres...
M. Richer: Peut-être. Mais, moi, je les ai entendus,
ceux-là, et je vois leurs arguments.
La Présidente (Mme Marois): D'accord.
M. Richer: Mais, moi, j'en al fait un cours de médecine.
Et quand j'étais en résidence, je le savais que je m'en allais en
omnipratique. Si mon collègue qui était à
côté de moi s'en allait en neurochirurgie, II me disait:
Clément, si tu veux faire des accouchements dans le département,
dans le service, fais-les; moi, je n'en ferai jamais, je m'en vais en
neurochirurgie. Alors, lui, peut-être que, parce qu'il s'en allait en
pédiatrie, il a laissé son collègue à lui faire des
accouchements. De sorte que, moi, je calcule avoir eu une bonne
préparation en obstétrique et ça se fait encore. Ça
se fait encore, une bonne préparation en obstétrique. On a voulu
l'améliorer, mais il y a encore une bonne préparation. Je pense
qu'on ne peut pas nier le fait que le cours de médecine, au
Québec, est un cours de médecine adéquat. Il peut sans
doute être amélioré. C'est perfectible. Tout est
perfectible. Mais quand on dit qu'on passe un certain nombre d'heures... Par
rapport à trois ans pour la sage-femme en formation, il faut dire qu'on
passe cinq ans à apprendre la médecine. Le cours est rendu
à sept ans, maintenant. Bon! Bien, pendant ces sept ans-là,
même si ce n'est pas uniquement de l'obstétrique ou le
système gynéco-obstétrical qu'on apprend, on apprend la
physiologie en générai; on n'impute pas ça à
l'apprentissage de l'obstétrique. On apprend de la neurologie; on
n'impute pas ça à l'apprentissage de l'obstétrique, mais
tout est relié là-dedans, dans le corps humain. De sorte qu'il
faut quand même répartir les choses et voir que notre formation
est beaucoup plus grande que le nombre d'heures mis spécifiquement
à l'obstétrique.
La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Je ne sais pas si j'ai
vu ça dans le mémoire. Corrigez-moi si j'ai tort ou si je fais
une affirmation saugrenue par rapport à ce qu'il y a dans votre
document. Je suis habitué de me faire corriger, donc...
M. Richer: Pas de problème.
M. Côté (Charlesbourg):... tout ce qui peut
m'arriver, c'est de rougir.
La Président» (Mme Marois): II ne hait pas
ça, des fois.
M. Côté (Charlesbourg): Je ne hais pas ça, je
l'ai toujours dit, j'étais rouge partout. Est-ce que j'ai vu quelque
part, dans un document, sur le plan d'une affirmation, que l'intégration
des sages-femmes serait préjudiciable à la santé des
mères et des enfants?
M. Richer: Quoi? À la santé? M.
Côté (Charlesbourg): Oui. Une voix: Serait
préjudiciable.
M. Côté (Charlesbourg): Préjudiciable
à la santé des mères et des enfants.
M. Richer: Vous l'avez peut-être vu, mais pas dans notre
document. Je ne pense pas qu'on ait écrit un document à cet
effet-là.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, je l'ai vu
ailleurs. Ce sera les prochains qui vous suivent. Alors, c'est peut-être
là que je l'ai...
La Présidente (Mme Marois): Prenez avis de la
question.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. C'est peut-être
là où je l'ai vu, mais je vous pose la question. Est-ce que ce
serait préjudiciable?
M. Richer: Moi, avec la façon dont j'ai été
formé, je serais porté à croire que oui,
éventuellement, on va avoir des problèmes. Je me demande, moi, si
on pense... Parce qu'on ne vit pas dans un monde utopique et on ne peut pas
créer de toutes pièces une structure, l'imposer et dire aux
médecins: Vous allez collaborer. Nous, on est très peu
touchés là-dedans, on fait des accouchements normaux, comme des
sages-femmes. On va continuer à en faire, comme vous nous l'avez
assuré, et la pratique va continuer. On a très peu à
offrir de collaboration aux sages-femmes puisqu'on fait exactement la
même chose qu'elles. Quand on a un accouchement anormal,
évidemment, on se réfère à un confrère
spécialiste, nous. Alors, on n'est pas... Je ne sais pas comment on
pourrait les aider.
Dans l'enseignement? Non, parce qu'on a beaucoup de difficultés,
nous autres mêmes, à s'auto-enseigner, actuellement. On essaie de
prendre de plus en plus de place pour former d'autres médecins
omnipraticiens, de sorte que nos énergies sont dévouées
à l'enseignement pour les médecins omnipraticiens.
M. Côté (Charlesbourg): O. K. Dr Richer,
tantôt, vous avez évoqué des expériences
européennes où peut-être qu'au Xllle siècle II y
avait une pratique plus Intense, compte tenu de la rareté des
médecins, j'imagine, à l'époque, et peut-être aussi
des territoires moins peuplés, plus isolés un peu et qu'on
n'avait pas cette expérience-là au niveau du Canada et du
Québec. par contre, en lisant un peu de "littérature" sur ce qui
s'est passé aux états-unis, où ils sont arrivés
à peu près en même temps que nous autres, il y a des
expériences un petit peu partout qui se sont produites dans
différents états et qui semblent donner des résultats pas
si mauvais que ça. vous avez vous-même cité que 4 % des
accouchements aux états-unis étaient faits par des sages-femmes
et qu'au bout de la ligne il n'y aurait à peu près rien là
s'il y avait 4 % des accouchements au québec qui étaient faits
par des sages-femmes. alors, si ç'a été bon aux etats-unis
et que ça n'a pas créé de catastrophe, qu'est ce qui fait
que ce ne serait pas bon chez nous de le faire, compte tenu du fait...
M. Richer: Oui.
M. Côté (Charlesbourg):... il faut bien l'admettre,
qu'il y a une volonté aussi de la part des femmes que les sages-femmes
puissent pratiquer leur métier légalement?
M. Richer: oui, oui, ça... remarquez que je respecte la
volonté des autres. je viens ici pour vous donner mon opinion, mais dans
le respect de la volonté des autres, sauf que si c'est demandé
ici... pour, disons, prendre votre question en miroir, si les femmes d'ici
demandent tellement de sages-femmes, ça devait être la même
chose aux états-unis et ils en ont eu, aux états-unis. mais on se
rend compte que c'est 4 % qui les utilise. alors, c'est une grosse structure...
ce sont plusieurs millions de dollars, m. le ministre, à mettre en
marche pour 4 % de la population. je ne dis pas qu'on ne doit pas le faire, si
on a les sous, si on peut se payer ce luxe là. mais je pense qu'il y a
des priorités qu'on devrait peut-être regarder. aux
états-unis, vous savez, m. le ministre, les visites prénatales
qui sont faites par les sages-femmes ont une durée de quinze minutes, la
première étant généralement de trente minutes. et
selon les sages-femmes elles-mêmes, interviewées, toujours dans la
même étude que je pourrai vous passer, il y a trop peu de temps
alloué aux échanges entre les patientes et les sages-femmes.
peut-être que c'est une amélioration, mais on constate qu'il y a
une tendance, également, à l'augmentation de la technologie et
à l'augmentation des interventions. les sages-femmes deviennent de plus
en plus proches de la technologie, c'est normal. tout le monde médical
devient... la
technologie, l'évolution de la science fait que la technologie
nous aide, si vous voulez, jusqu'à un certain point. Les sages-femmes
qui sont dans cet environnement-là aux États-Unis se servent
davantage de la technologie et, de ce fait, elles ressemblent
énormément, dans le type de leur pratique, à ce que fait
un médecin omnipraticien avec une patiente enceinte. Elle n'offre que
très peu de suivi. Il y a des quarts de travail. À 4 heures de
l'après-midi, un peu comme une infirmière, c'est normal aussi,
ça se comprend, la sage-femme a fini son quart de travail; c'est une
autre sage-femme qui accouche. La continuité des soins est
assurée comme si c'était un groupe de trois ou quatre
médecins qui donneraient des services obstétricaux à des
patientes.
On ne crée pas un monde Idéal parce qu'il y a des
sages-femmes, en termes de continuité, de globalité des soins.
(21 h 30)
La Présidente (Mme Marois): Je crois que le docteur
Boileau veut intervenir. C'est ça?
M. Boileau (Georges): Voici, Mme la Présidente, il faut
être prudent quand on parle des États-Unis. On a l'Impression que,
parce qu'on a les mêmes télévisions et les mêmes
autos, la situation est la même dans tous les domaines. Dans le domaine
de la santé aux États-Unis, les médecins omnipraticiens ne
représentent qu'environ 15 % de la population médicale. Donc, II
y a très peu de médecins omnlpraticiens disponibles pour faire
des accouchements aux États-Unis. Ici, au Québec, c'est autour de
50 %, d'ailleurs comme dans toutes les autres provinces. Mais c'est très
difficile de faire une comparaison globale entre le Canada et les
États-Unis en termes d'effectifs médicaux. Quand on parle des
"primary care physiciens" aux États-Unis, ça représente 40
% de la population, mais dans l'ensemble de la population médicale, il
n'y a que 15 % de médecins omnlpratlciens.
M. Côté (Charlesbourg): Dr Richer, tout à
l'heure je vous ai entendu dire que si on avait de l'argent à investir,
vous présupposez que ça coûterait, avec les
expériences-pilotes, plus cher que ça ne coûte aujourd'hui,
alors que, très certainement, les sages-femmes seraient
rémunérées de manière moins importante sur le plan
financier que le sont les médecins. J'aimerais peut-être vous
entendre un petit peu plus là-dessus parce que, évidemment, je le
prends avec beaucoup... Parce que les études, on se l'est dit
tantôt... La vôtre, j'aimerais l'avoir au cas où je ne
l'aurais pas. L'expérience ontarienne nous dit qu'il y a 270 $
d'économie par accouchement si c'est une sage-femme. Je le donne comme
ça pour fins de discussion. Je ne voudrais pas, demain matin, être
cité comme ayant dit la vérité si ce n'est pas la
vérité.
M. Richer: Je n'ai pas les chiffres dont vous me parlez. II est
possible qu'il y ait une économie sur un nombre d'accouchements si on le
prend au prorata de l'accouchement. Mais je pense qu'au Québec la
médecine à honoraires fixes est possible presque uniquement parce
qu'il y a des médecins à l'acte et vice versa, si vous voulez,
parce qu'on a un choix entre les deux. Parce que si on n'était, tous les
médecins, que rémunérés à honoraires fixes,
II y a quelques ministres avant vous qui ont fait le décompte de
ça et il paraît que ça ne serait pas très
très rentable pour le Trésor du ministère. Il y a bien des
ministres... Depuis M. Castonguay qu'on se fait dire ça. Mais mettre
tous les médecins à honoraires fixes... On n'est pas plus
vertueux que les autres; probablement qu'on va travailler 35 heures par semaine
et, après ça, ça va être du temps
supplémentaire et on va demander d'être payés à
temps et demi et à temps double, je ne sais quoi. On négociera
ensemble à ce moment-là. On n'est pas plus vertueux que personne
et la médecine a honoraires fixes au Québec, elle est
Intégrée dans le système parce qu'il y a des
médecins à l'acte et vice versa. C'est facile parce qu'on a les
deux sortes. Même si un CLSC ferme a cinq heures à
côté de chez nous, ce n'est pas grave parce qu'il y a une clinique
où il y a sûrement un médecin qui reste ouverte. Et
à l'hôpital en face, II y a des médecins aussi qui
travaillent à l'urgence. Mais si tout le monde est à honoraires
fixes, peut-être que tout le monde va vouloir fermer à cinq
heures. Évidemment, la loi va faire que les hôpitaux vont
être ouverts quand même et, donc, il va falloir qu'on paie du temps
supplémentaire. C'est 168 heures, le problème, la semaine en
médecine, pas partout mais dans tous les hôpitaux du
Québec. Vous le savez, on a assez de misère à en trouver
pour combler tous les services d'urgence.
M. Côté (Charlesbourg): II y a mon collègue
de Verdun qui avait une question. Comme il reste peu de temps...
M. Gautrin: Brièvement, Mme la Présidente, moi,
j'aimerais revenir sur une question qui me préoccupe et qui est la
formation des sages-femmes. Je pense que le ministre l'a dit, on va
probablement aller de l'avant avec une expérience-pilote pour les
sages-femmes. Pour vous qui êtes des spécialistes qui, quand
même, êtes des médecins, quelle serait la formation que vous
verriez ou qui, disons, assurerait la sécurité? Quelle formation
souhaiteriez-vous que les sages-femmes aient?
M. Richer: La formation d'un médecin omnipraticien.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gautrin: Oui, je comprends. Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): II y a au moins une chose dont
on va convenir, c'est que votre position est très claire. N'est-ce pas?
Alors, ça va, M. le député de Verdun? M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Mol, ]e voudrais
d'abord demander au Dr Richer, si c'est des pinottes, 4 %, comment se fait-il
que vous y teniez tant? Si ce sont des plnottes pour vous, 4 % seulement qui
serait fait par les sages-femmes, comment se fait-il que vous y teniez
tant?
M. Richer: Ah! non, non! Ce n'est pas ça que je dis, M.
Chevrette. Je dis, comprenez-moi bien, que ce qui menace les médecins,
si on le prend comme ça - on parlait des Irritants tout à l'heure
avec M. Côté - s'il y a quelque chose qui menace le volume
d'accouchements faits par les médecins, ça n'est pas les
sages-femmes en sol, c'est la baisse de la natalité. Regardez comment
cela a baissé. Cela a baissé de beaucoup plus que 4 % dans les
quinze dernières années et ça, c'est un
phénomène auquel on doit probablement s'attaquer comme
société pour essayer, si vous voulez, de restaurer un petit peu
le niveau de natalité au Québec. Alors, cela, en soi, c'est un
problème qui est plus menaçant. Ce n'est pas le fait que je ne
considère pas comme importants ces 4 % d'accouchements-là, pas du
tout. Je constate les deux phénomènes et je compare l'un par
rapport à l'autre et je dis que l'autre est beaucoup plus important que
ces 4 %.
M. Chevrette: Comment expliquez-vous qu'autant de
gynécologues et même d'omnls abandonnent l'obstétrique
comme telle?
M. Richer: Comme Je vous disais iI y peut-être des omnis - c'est
vrai, on fait un gros plat de cela - qui abandonnent l'obstétrique. Il y
en plusieurs qui commencent à faire de l'obstétrique qui... C'est
un cycle qui s'établit. Vous savez, on est 7000 omnipraticiens au
Québec. SI on faisait tous de l'obstétrique, on ferait dix
accouchements par année chacun. Il y a 75 000 accouchements. Là,
je ne compte pas les 400 obstétriciens-gynécologues. De sorte que
la médecine aujourd'hui, c'est sectorisé. C'est peut-être
une... Il y a des avantages certainement pour la qualité en
général, et la qualité de vie du médecin et la
qualité de la pratique, mais il y a quand même au-delà de
700... Encore là, ce sont des chiffres d'aujourd'hui, il y a 798
médecins omnipraticlens qui font de l'obstétrique et qui font une
moyenne de 38 accouchements par médecin. Ce n'est pas six ou sept, on
les exclut ceux-là, ce sont des accoucheurs occasionnels. C'est quand
même un nombre important. Il y a 400
obstétriciens-gynécologues en plus, dont la majorité fait
des accouchements, de toute évidence.
On a une petite population au Québec. À ce nombre
d'accoucheurs bien répartis sur le territoire, je pense qu'on ne manque
pas d'effectifs pour accoucher. Qu'il y ait des gens qui quittent, c'est vrai,
mais il y a un renouvellement, si vous voulez, du personnel médical.
M. Chevrette: Mais s'il y a un désir aussi fort, Dr
Richer, de la part de l'élément féminin qui, me dit-on, au
dernier sondage, à 60%, désirait la venue des sages-femmes, en
particulier en raison de la façon humanitaire avec laquelle se ferait
l'accouchement, qu'est-ce que vous avez à répondre à
ça?
M. Richer: Je pense que si on veut avoir des accouchements qui
sont plus humanitaires, il va falloir qu'on ait une formation qui nous permette
de le faire à l'université, qui nous incite à faire cela.
Je pense que le médecin peut être aussi humanitaire qu'une
sage-femme. Je ne connais pas les tarifs chargés. On me dit que c'est
entre 500 $ et 700 $. Si le ministre veut nous payer entre 500 $ et 700 $,
peut-être qu'il va y avoir de l'humanité pour 500 $ à 700
$, je ne le sais pas. Probablement que toutes ces choses-là peuvent
être reconsidérées. Vous savez que le tarif de
rémunération d'un accouchement pour un médecin
omnipraticien, c'est 225 $. Je ne dis pas ça parce que c'est mauvais en
soi, mais je dis qu'il faut placer les choses dans leur juste perspective. Je
pense que les actes médicaux qui sont faits par les médecins,
autant obstétriciens qu'omnipraticiens, ne sont pas dénués
d'humanité parce qu'ils sont faits par les médecins. Je ne me
suis jamais considéré comme étant moins humain ou plus
humain dans mon approche avec un patient parce que Je tape plus ou moins
longtemps dans le dos. Il y a des gens qui demandent beaucoup plus de temps que
d'autres pour avoir une compréhension de leur problème, je pense
que cela leur est accordé en général, et il y en a que
c'est moins de temps. On ne peut pas donner du temps juste pour en donner non
plus.
La Présidente (Mme Marois). Dr Gagnon, vous vouliez
ajouter quelque chose?
M. Gagnon (Georges-Henri): Je pourrais peut-être faire une
petite intervention étant donné qu'il semble que les gens qui
viennent de Rimouski ne sont pas tous de la même opinion parce que les
gens qui sont passés avant moi venaient aussi de Rimouski, le Dr
Vézlna et Mme Gagné. On n'est pas tous sur la même longueur
d'onde.
Ce que je voulais dire, c'est que dan» ma région
où j'ai pratiqué pendant 25 ans et j'ai fait près de 2000
accouchements, j'ai eu l'oc-
caslon même d'en faire à domicile et j'étais
très insécure à ce moment-là. Ce que je veux dire,
pour répondre à M. Chevrette, c'est que peut-être qu'on a
encore quelque 800 omnlpratlclens qui font de l'obstétrique, avec une
moyenne de 38. Il y a quelques années, il y en avait peut-être
1100 ou 1200 qui en faisaient, mais il y en avait plusieurs qui en faisaient
10, 15 ou 20 par année. Ces gens-là, pour des raisons de
qualité de vie, ont arrêté d'en faire. Donc, les
omnipraticiens sont moins nombreux, mais ceux qui en font en font plus
qu'auparavant. Je pense que ce n'est pas mauvais en sol. Je pense que c'est
même meilleur pour la profession. Ça explique la diminution.
M. Chevrette: Mais ce besoin ou ce sentiment qui s'exprime en
tout cas assez massivement de la part des femmes, 60 %, c'est gros, comme
collectivité, il me semble.
M. Gagnon: Mais là, je ne comprends pas votre question. 60
%? Voulez-vous dire que les femmes à 60 % veulent avoir des
sages-femmes? Je n'ai jamais... On ne m'a jamais...
M. Chevrette: Elles ont manifesté le désir de voir
naître cette profession, de voir oeuvrer cette profession.
M. Gagnon: Où avez-vous pris cela?
M. Chevrette: II y a même 80 % des Québécois
qui sont en faveur d'une reconnaissance légale des sages-femmes.
Ça comprend même les hommes.
M. Gagnon: On n'a pas été consultés
là-dedans. Moi, je n'ai jamais répondu à cela.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Non, bien... Vous faites partie des 20 %.
M. Gagnon: Je me demande où ça a passé cette
affaire-là. Moi, je ne l'ai jamais vue.
Une voix: On n'était pas là.
M. Gagnon: Je n'étais pas là certain. Ce n'est pas
passé chez nous...
La Présidente (Mme Marois): Si vous me le permettez, on
fait référence, Je crois, à un sondage
général.
M. Chevrette: Oui, mais à écouter vos
réponses, je le savais, je ne vous l'avais pas demandé, je vous
avais classé dans les 20 %
M. Gagnon: Je suis dans ces 20 % certain.
La Présidente (Mme Marois): Je crois que le Dr Girard
voulait...
M. Chevrette: Mais je reprends ma question.
Je voudrais reprendre ma question, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Marois): D'accord.
M. Chevrette:... parce qu'elle ne semble pas comprise. Comment
expliquez-vous que 80 % de la population québécoise désira
voir une reconnaissance légale de cette profession? Comment
expliquez-vous ça, d'abord? Est-ce le fruit de la
spontanéité d'un illuminé de leader en Eupope qui a
réussi à convaincre le monde de s'aligner derrière
ça ou est-ce que ce n'est pas un besoin quelconque, aujourd'hui, de voir
l'accouchement comme un geste beaucoup plus humain, beaucoup plus
encadré?
M. Richer: M. Chevrette, il y a 100 % des Québécois
qui aimeraient mieux avoir des meilleurs services à l'urgence dans tous
les hôpitaux du Québec. Comment expliquez-vous ça? Au fond,
les gens veulent toujours avoir mieux, peut-être, que ce qu'ils
espèrent, puis...
M. Chevrette: Êtes-vous en train de me dire que les
sages-femmes, ce serait mieux que ce qu'il y a là?
M. Richer: Non, je ne dis pas ça, mais je dis... Vous
savez, les sondages! On peut en parler longtemps à des politiciens des
sondages. Vous savez ce que c'est: avant Léger ou moins Léger,
comme dit le ministre, je pense qu'on peut leur faire dire à peu
près n'importe quoi. Voulez-vous vous promener plutôt dans un
système de transport en commun luxueux ou pas luxueux? C'est bien
sûr que la réponse va venir rapidement. Voulez-vous avoir un
intervenant nouveau qui pourrait peut-être vous aider? Pourquoi ne pas
dire oui à une chose comme ça? Je trouve ça normal que la
société réponde ça. Peut-être que c'est un
sondage "at large". Il n'y a pas beaucoup de médecins qui ont
été sondés là-dedans, mais en tout cas.
La Présidente (Mme Marois): Dr Girard, vous voulez
intervenir? Oui.
Mme Girard: En réponse à M. Chevrette qui parlait
du désir des femmes, je pense qu'on est passé à
côté d'un élément; c'est la féminisation de
la pratique médicale. Être accouchée par une femme, c'est
quand même un élément qui est possible partout au
Québec, à cause du nombre de femmes qui pratiquent la
médecine actuellement, et c'est normal aussi que les femmes veuillent
rapatrier leur accouchement. Il y a quand même une certaine
complicité qu'on
reconnaît, qui existe entre femmes.
Quand on regarde, depuis une douzaine d'années, plus de 50 % des
étudiants en médecine sont de sexe féminin et, depuis
quelques années, dans le programme de médecine familiale, plus de
60 % des étudiants sont de sexe féminin. Ce programme favorise
vraiment une approche globale de toute la périnatalité et on sait
que, dès 1987, la gente féminine a franchi le tiers des effectifs
médicaux en omnipratique. Alors, je pense que les femmes peuvent penser
être accouchées par une femme qui a toute la formation d'un
omnipraticien et je ne vols pas du tout en quoi la pratique des sages-femmes
amènerait quelque chose de supplémentaire en termes
d'humanisation des soins ou de personnalisation des soins, car elles aussi
devront effectuer des gardes et se partager la tâche.
M. Chevrette: Je suis embêté de vous poser ma
prochaine question. Je ne vous parlerai pas de formation, la réponse est
claire; je vais vous parler, par exemple, de la pratique à
l'intérieur d'un centre hospitalier. Même si vous êtes
contre, si le gouvernement dit que c'est ça, vous allez devoir vous
plier. Comment voyez-vous la complémentarité à
l'intérieur d'un centre hospitalier?
M. Richer: Je la vois très difficilement. Il va y avoir
quelques sages-femmes parmi 150, 250 ou 300 médecins dans les grands
centres hospitaliers, puisque j'entends dire que ça va être fait
dans les grosses boîtes. Ce ne sera pas facile pour eux autres.
Je la vois très difficilement: un conseil des sages-femmes,
parallèlement au conseil des médecins, dont un des rôles
sera de faire des règles de soins. Qu'est-ce que vous voulez? Les
règles de soins sont faites par des médecins. Si ce n'est pas
conforme aux règles de soins des médecins, lesquelles auront la
priorité? Ce sera quoi, au fond, la possibilité? Comment va-ton
pouvoir se comprendre, nous, les médecins, à travers cette
structure à deux têtes? C'est déjà complexe le monde
hospitalier, vous le savez; si on le complexifie davantage, je ne pense pas
qu'on rende service à grand monde, dans mon livre à moi.
M. Chevrette: Mais si je vous disais que l'accouchement, vu par
un médecin, c'est un acte médical, mais, vu par plusieurs
citoyens et peut-être par plusieurs autres professions, ça peut
être vu comme un geste naturel. À ce compte-là, est-ce que
vous préconisez, advenant que le ministre soutienne son projet ou le
projet de Mme Lavoie-Roux réécrit, est-ce que vous pensez que
ça devrait être en dehors des centres hospitaliers?
M. Richer: Moi, en tout cas, comme médecin qui a fait un
peu d'accouchements - puis, là, mes collègues
gynécologues-obstétriciens vont probablement être plus
qualifiés que mol - je ne conseillerais à personne d'accoucher
à domicile, dans le contexte d'aujourd'hui. Si on parle d'en dehors de
l'hôpital et que l'on veut dire domicile, la réponse d'un
médecin, c'est non. C'est une consultation professionnelle, si vous
voulez. Je peux avoir tort ou raison. Je pense que j'ai raison, mais j'accepte
que mon opinion soit différente de celle des autres. Mais si vous parlez
de maisons de naissances qui sont reliées par un corridor à
l'hôpital, quant à moi, c'est l'hôpital, mais, finalement,
on tourne autour du pot; c'est dans l'hôpital qu'on veut les
Intégrer. Je n'ai pas grand rôle a faire pour aider les
sages-femmes dans les hôpitaux, parce que les sages-femmes, semble-t-il,
si elles existaient et si elles étalent mal prises - parce que ça
va être des spécialistes d'accouchements normaux, ce que je suis
aussi - elles vont référer les cas quand Ils vont être
anormaux. Ce n'est pas à moi qu'elles vont les référer, je
ne suis pas dans le décor à ce moment-là, ce sera à
mes confrères obstétriciens et gynécologues. On pourrait
leur poser la question: Est-ce qu'on va s'asseoir sur notre chaise pendant que
les sages-femmes font les accouchements normaux, en attendant qu'elles nous
renvoient celui qui ne sera pas normal? Est-ce qu'on aura un système de
garde pour les accouchements anormaux, au cas où? (21 h 45)
C'est bien beau de dire qu'on est des spécialistes en
accouchements normaux, mais il faut avoir fait un peu d'obstétrique,
juste assez, pour savoir que, lorsqu'un accouchement est normal, on le sait
après qu'on a accouché. J'ai accouché pas loin de 2000
patientes et il y en avait où j'avais toutes les raisons du monde de
penser que tout serait normal, mais, malheureusement, on ne s'en rend compte
qu'au moment de l'accouchement. Il faut être organisé, à ce
moment-là, et c'est probablement dans le milieu hospitalier. Qu'est-ce
que la sage-femme ferait? Elle ferait sans doute ce que j'ai fait: se
référer au confrère spécialiste. Maintenant, est-ce
qu'on va demander au confrère spécialiste d'être assis
là et d'attendre qu'il y ait des cas de référence? Est-ce
qu'on va faire seulement les accouchements pathologiques, pour les
médecins, et pas d'accouchements normaux? Est-ce qu'on va créer
un "gap" des générations? Est-ce que les médecins vont
désapprendre à faire de l'obstétrique?
En Hollande, c'est bien beau, c'est bien le "fun", les médecins
omnipraticiens n'ont pas le droit d'accoucher à l'hôpital. Il n'y
a plus un médecin omnipraticien, en Hollande, qui sait faire des
accouchements. O. K., on se repose sur les sages-femmes. Les Hollandais le
font, c'est bien correct, mais je ne pense pas que ce soit conforme aux
aspirations d'une société que de
créer un "gap" de connaissances dans une génération
de médecins, ni en obstétrique, ni en rien d'autre. On est des
médecins de famille, et un médecin de famille, pour moi,
ça pivote autour de la famille. Si je n'avais pas eu le bonheur de faire
de l'obstétrique dans les douze ou quinze premières années
de ma pratique, je pense que je n'aurais pas fait le genre de médecine
que j'ai faite. J'aspirais à faire ça parce que je trouvais que
c'était une médecine intéressante. Si on enlève cet
attrait à la pratique générale, à la
médecine familiale, je trouve qu'indirectement on crée des
techniciens de la pratique, ce qui n'est pas souhaitable, à mon
sens.
La Présidente (Mme Marois): Est-ce qu'il y a d'autres
questions?
M. Chevrette: Vous avez lu le projet de loi, qui sera sans doute
réécrit, d'après ce que je viens de comprendre. S'il est
réécrit, c'est qu'il va introduire de nouveaux principes et,
donc, qu'il va être redéposé, d'après ce que je
comprends. Mais tel que libellé, la chose qui m'intrigue le plus, c'est
l'article 15. J'en ai parlé au ministre, ce matin, dans mon
exposé. L'article 15 traite de responsabilité. Il y a une
responsabilité qui, à mon point de vue, est clairement
établie dans le projet de loi, c'est une grossesse à risque, mais
le reste n'est pas défini. Je comprends que c'est difficile de vous
questionner, puisque vous êtes contre, mais prenez pour acquis que
ça se fait. Quel est le "départage" que vous verriez entre un
projet-pilote sur les sages-femmes et la profession d'omnipraticien?
Une voix: Je n'ai pas compris la fin.
M. Chevrette: C'est compliqué?
M. Richer: Et la profession d'omnipratlcien?
M. Chevrette: Quels sont les actes qu'on devrait suspendre, qui
sont faits par les omnis et qui devraient être faits par les
sages-femmes?
M. Richer: Comme je vous l'ai dit, il m'apparaît que
l'obstétrique, c'est un champ d'activité où, heureusement,
dans la grande majorité des cas, on est dans la normalité. Il y
en a qui prétendent que ce n'est pas un acte médical, que c'est
un acte naturel. Moi, je trouve que c'est de la sémantique. Si c'est si
peu médical que ça, il va falloir que le ministre les
"désassure" parce que c'est non médicalement requis. Il y a une
cohérence quelque part dans le système.
Comme je vous l'ai dit, l'obstétrique, c'est une pratique de
normalité dans 85 % des cas, et peut-être un peu plus, mais cette
normalité n'est constatée, dans la totalité des cas,
qu'après l'événement. Maintenant, dans les cas anormaux,
dans ce qu'on appelle les grossesses à risque, c'est un
phénomène connu en médecine. Même un omnipraticien
consulte un confrère spécialiste quand il suit une patiente qui a
une grossesse à risque. Il y a des services de garde dans les
hôpitaux, d'ailleurs, pour les grossesses à risque.
Je pense que le tour de la question est fait quand on le voit de cette
façon.
M. Gagnon: Je veux juste ajouter un mot à ce que le Dr
Richer vient de dire. Quand vous parlez d'accouchement normal, j'en ai fait pas
mal et j'ai toujours eu de grandes difficultés à dire, même
si la grossesse se déroulait normalement, que l'accouchement se
déroulerait normalement aussi. Quand on dit qu'un accouchement est
normal, ça ne veut pas dire qu'il nous tombe dans les mains comme
ça et qu'on n'a qu'à le ramasser; ça, ce sont les
très très normaux, les très très naturels. Mais il
y en a qui sont un peu plus compliqués que ça et ça reste
encore dans les limites du normal, mais il faut savoir quoi faire au bon
moment. Les présentations en transverse, ça n'arrive pas à
tous les cas, mais ça arrive assez souvent, et il faut faire des
manoeuvres. Ce ne sont pas encore des grossesses à risque, ce sont des
grossesses normales, mais un peu plus compliquées. À ce
moment-là, je pense qu'il faut avoir une bonne expertise pour les faire
et je ne suis pas sûr, ni convaincu que la formation que les sages-femmes
vont avoir, dans le moment, va leur permettre de faire ces accouchements.
La Présidente (Mme Marois): Merci. Est-ce que ça
va, M. le leader? Mme la députée de
Chutes-de-la-Chaudière.
Mme Carrier-Perreault: Évidemment, j'aurais une petite
question. Je ne suis pas sûre, je pense que je n'ai pas très bien
compris votre dernière réponse. Vous dites qu'il n'y a pas
nécessairement de besoins à ce niveau-là. Par contre, nous
autres, on voit que les gens - en fait, dans un sondage, entre autres, qu'on a
devant nous - la population désirerait avoir des sages-femmes. En tout
cas, il y a un fort pourcentage qui le désire. Qu'est-ce que c'est qui
serait acceptable pour vous comme projet de loi à ce niveau? C'est quoi?
Quel compromis pourrait-on avoir?
M. Gagnon: Comme je vous le dis...
Une voix: On ne peut pas être contre et pour en môme
temps.
M. Gagnon: Je ne peux pas être contre et être pour en
même temps, comme le dit mon collègue. Je suis contre le projet de
loi tel qu'il est présenté parce que je ne crois pas qu'on
ait
besoin de sages-femmes au Québec, sans égard aux sondages.
Comme je vous le dis, les sondages peuvent faire dire oui à la
population sur à peu près n'Importe quoi. C'est selon ce que vous
lui demandez. Quand on sait que c'est légalisé dans d'autres pays
comme aux Etats-Unis, où ce sont des Nord-Américains comme nous
autres, peut-être qu'il y avait 60 % des gens qui étaient en
faveur là aussi mais, en réalité, 4 % vont voir les
sages-femmes. Je connais beaucoup de gens qui sont pour les sages-femmes, mais
qui se feraient accoucher par un médecin pareil. On est favorable pour
les autres, c'est bon pour toutes les autres; ce n'est pas tout à fait
bon pour nous autres. J'en ai connu plusieurs comme ça. C'est comme
l'avortement. Ce n'est pas beau l'avortement, sauf que quand c'est ma fille,
bien, peut-être qu'on pourrait faire une petite exception. Je connais
ça. J'en ai vu, des énoncés de principe trop rigides.
La Présidente (Mme Marois): Ça va? Merci. Je vais
me permettre quelques commentaires. J'ai beaucoup de respect pour ce que vous
représentez, ce que vous êtes et la franchise avec laquelle,
d'ailleurs, vous faites votre présentation. Vous défendez votre
point de vue. Je ne le partage pas personnellement et je crois que la demande
qui est faite par un certain nombre de personnes, de femmes
particulièrement, et de praticiennes aussi, ce n'est pas seulement de
dire: Nous voulons être de bonnes accoucheuses et nous voulons accoucher
avec de bonnes accoucheuses, mais c'est de dire: Nous voulons avoir des gens
qui vont être capables, d'une façon continue, en faisant de la
prévention, de l'éducation, du suivi, de suivre une grossesse
pendant tout son déroulement. D'une part, c'est pour prévenir,
effectivement, les problèmes que l'on connaît chez les enfants qui
naissent dans des conditions où II y a eu problème de nutrition,
où il y a eu de mauvaises conditions de vie en général,
conditions de travail, etc.
Donc, c'est une approche très globable, si on veut, qui est
proposée, qui est demandée, qui, à mon point de vue, n'est
pas nécessairement menaçante pour votre profession. Vous le
reconnaissez vous-mêmes, vous dites: Là où c'est permis. On
regarde vers les États-Unis, on parle de 4 %. Ce n'est donc pas
menaçant pour vous. Ça vous permettra sûrement de continuer
à exercer votre pratique, mais ça permettra... Et là, je
vais citer vos propres propos. Vous dites: Je respecte la volonté des
autres. Ça permettra peut-être à d'autres, qui ont une
volonté différente et qui veulent vivre une réalité
différemment, de le faire dans un contexte sécuritaire.
Mon dernier commentaire est le suivant. Je crois que vous avez
effectivement, sûrement, une formation correcte, intéressante,
bonne. Qu'elle mérite d'être améliorée, c'est
probablement le cas pour beaucoup d'autres formations, mais vous allez convenir
avec mol que, si on donne une formation de trois ans en milieu universitaire
à des gens qui vont ensuite pratiquer - utilise/ les termes que vous
voudrez, Je pense qu'on se comprend et on sait de quoi on parle - auprès
de femmes qui attendent un enfant, qui vont donner naissance et qui vont en
prendre soin par la suite, je pense qu'on se retrouvera devant des gens
sûrement très compétents dont, je pense, la
compétence pourra se comparer, particulièrement si la pratique
vient sous supervision pendant un temps - parce que j'imagine qu'il y aura, au
début, une supervision - et que, par la suite on pourra exercer sa
profession en toute sécurité pour les gens qui se dirigeront vers
cette profession. Dans ce sens-là, j'ai un peu de difficulté
à accepter votre ton qui m'apparaît alarmiste.
M. Richer: Non. Si j'ai eu un ton qui vous semble alarmiste, je
le regrette, c'est ma façon à moi. Ceux qui me connaissent vont
savoir. Vous allez me connaître un de ces jours.
La Présidente (Mme Marois): Je vous connais un peu, mais
je me permets de vous le dire quand même.
M. Richer: Sauf que, comme vous le dites, vous ne partagez pas
mon opinion. Je respecte ça. Je ne peux pas empêcher le
gouvernement de faire une loi, mais le gouvernement ne peut pas me forcer
à être d'accord quand il me consulte. Ce serait une fausse
consultation, ce serait bidon si je disais: Je suis d'accord. Ce serait
être hypocrite. Je ne suis pas hypocrite, madame. Je souffre que vous
ayez...
La Présidente (Mme Marois):... d'ailleurs.
M. Rlcher: Je souffre que vous ayez une opinion
différente, c'est bien parfait, je peux vivre avec ça mais, si
vous me demandez mon opinion sur le projet de loi 4, je vous la donne. Avec
tout ça, on ne sera pas pires amis.
La Présidente (Mme Marois): Vous n'avez pas de
commentaires à faire sur l'aspect de la formation?
M. Richer: Non. Je pense que, sur l'aspect de la formation, on en
a parié un petit peu tout à l'heure. Je réitère que
la formation des médecins omnipraticiens et, bien sûr, des
médecins spécialistes, est bonne en obstétrique. Elle peut
sans doute être améliorée et c'est ce qu'on tente de faire
depuis l'an passé, finalement.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Je vous remercie. M.
le ministre, est-ce que vous avez un mot à ajouter?
M. Côté (Charlesbourg): Oui, c'est parce que,
tantôt, on a commencé à parler de chiffres un petit peu et,
évidemment, Dr Rlcher qui connaît la partie davantage que mol...
On parlait de 500 $ à 700 $ pour une sage-femme et vous avez dit
tantôt: Si on veut nous payer 500 $ à 700 $, vous aurez
probablement des soins humanitaires pour 500 $à700 $.
Juste pour tenter... Je ne connais pas les chiffres, très
honnêtement, ce n'est pas un domaine où... On me dit que c'est 225
$ pour l'accouchement.
M. Richer: Le jour. De jour.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, c'est davantage le
soir et la nuit.
M. Richer: 300 $ la nuit.
M. Côté (Charlesbourg): Ça veut dire que de
500 $ à 700 $ pour une sage-femme, c'est avant, pendant et après.
Là, on est à 225 $ pendant. C'est combien avant et après?
Pour qu'on tente de trouver les chiffres que ça donne.
Une voix: On ne se rend pas à 700 $.
M. Richer: On ne se rend pas à 700 $. Il faudrait voir
combien il y a de consultations prénatales parce que, des fois, ce n'est
pas toujours le médecin qui ne fait pas l'avant. Des fois, la patiente
vient après quelques mois de grossesse, vous savez. Mais la moyenne,
c'est probablement six ou sept consultations prénatales, en
général, chez l'omnipratlcien, peut-être un peu plus.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, on se retrouve
à peu près dans les mêmes chiffres que les
sages-femmes.
M. Richer: Possiblement, ce qui n'est pas déraisonnable,
finalement.
M. Côté (Charlesbourg): Je voulais comprendre
tantôt ce que vous vouliez nous dire: Si on nous payait le même
prix que les sages-femmes, ce serait encore peut-être plus
humanitaire.
Une voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): Ça va?
M. Côté (Charlesbourg): Je vous remercie.
La Présidente (Mme Marois): Merci beaucoup de votre
présentation.
M. Chevrette: Messieurs, dames, excusez, madame.
M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup.
Fédération des médecins
spécialistes du Québec
La Présidente (Mme Marois): J'appellerais maintenant la
Fédération des médecins spécialistes du
Québec, s'il vous plaît.
Les membres de la commission sont bien présents. Bienvenue.
J'aimerais, M. le président, que vous nous présentiez les membres
qui vous accompagnent, les personnes qui vont défendre avec vous le
mémoire et, par la suite, que vous preniez le temps nécessaire,
une vingtaine de minutes tout au plus, pour présenter votre point de
vue, 40 minutes demeurant aux membres de la commission pour vous questionner.
(22 heures)
M. Desjardins (Paul): Merci, Mme la Présidente. Mon nom
est Paul Desjardins, je représente la Fédération des
médecins spécialistes du Québec. A ma gauche, le Dr Villa,
obstétricienne-gynécologue de Québec; à ma gauche,
un peu plus loin, le Dr Morrie Gelfand, vice-président de la
fédération; à ma droite, François Aquin, conseiller
juridique de notre fédération; à côté, le Dr
Pichette, médecin néonatalogiste de Québec; à
côté, le Dr Rochette, président de l'Association des
obstétriciens et gynécologues du Québec et, à mon
extrême droite, le Dr Guay, président de l'Association des
pédiatres de la province de Québec.
Là-dessus, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM.
les députés, la Fédération des médecins
spécialistes du Québec est fière d'être en mesure de
répondre à la consultation que vous nous avez demandée sur
le projet de loi 4, même si, peut-être, nos commentaires peuvent ne
pas plaire à tout le monde.
La Fédération a contribué à la
réflexion sur la place que pouvaient occuper les sages-femmes dans le
domaine de la périnatalité, au Québec. Prenant appui, par
exemple, sur les commentaires qu'elle formulait en novembre 1987 concernant le
document "La périnatalité au Québec, étude d'un
moyen pour atteindre les objectifs: la pratique des sages-femmes", la
fédération estime que le contexte entourant ces commentaires n'a
pas changé. La convergence des opinions scientifiques exprimées
par les associations de spécialistes concernés et par la
profession médicale permet de poser que le dépôt du projet
de loi 4 survient dans un climat trouble. Tout se passe comme si le ministre de
la Santé et des Services sociaux, Incapable de résister à
la pression exercée par des revendicateurs de statut professionnel dont
l'activité n'a pas encore fait la preuve de sa pertinence et de son
efficacité, a renoncé à l'arbitrage nécessaire des
intérêts en présence et a tout concédé.
Manifestement conçu et rédigé pour satisfaire des
impératifs idéologiques, le projet de loi 4 est en rupture totale
avec l'économie générale
de la reconnaissance et de la réglementation des professions au
Québec, de même qu'il est en rupture totale avec l'économie
générale de l'organisation et de la réglementation des
services de santé. On comprendra donc que la Fédération
renonce à une critique du projet qui porterait sur le caractère
approprié ou inadéquat de ses diverses dispositions. On
comprendra également que ce n'est pas le propos de la
Fédération de suggérer une rédaction alternative
des dispositions d'un projet de loi dont la structure est affectée de
vices aussi sérieux. La Fédération des médecins
spécialistes du Québec espère plutôt convaincre le
ministre que rien n'exige, dans le contexte actuel, la mise à
l'écart des principes essentiels ayant guidé le
législateur québécois en matière de droit
professionnel et de droit de la santé depuis près de vingt ans.
Le respect élémentaire de ces principes exige, au contraire, la
mise à l'écart d'un projet prématuré et
improvisé.
La section suivante de notre mémoire traite du projet de loi qui
rompt avec les principes fondamentaux du droit professionnel
québécois. Le développement scientifique, la
multiplication des techniques spécialisées et la mise en place de
nombreux programmes d'études collégiales et universitaires
favorisaient alors l'émergence de nouveaux groupes qui revendiquaient la
plus grande autonomie dans leur domaine disciplinaire. Sans reprendre ici le
phénomène de la stratification des professions de la santé
ou celui du difficile appariement de la formation et de l'autonomie, on peut
convenir que le régime mis en place par le Code des professions et par
les lois professionnelles permettait de concilier les objectifs de la
progression sociale de groupes organisés et scolarisés avec ceux
de la protection du public auquel de nouveaux services allaient être
offerts. Ce régime, quoique critiqué et probablement perfectible,
constitue l'un des jalons les plus remarquables de l'organisation
professionnelle québécoise.
Le projet de loi rompt avec le régime professionnel lorsqu'il ne
prévoit aucun processus indépendant de contrôle de
l'activité des sages-femmes et qu'il confond l'évaluation d'un
projet-pilote avec celle de la compétence ou de
l'intégrité des sages-femmes qui ne seront, du reste, assujetties
à aucune règle déontologique formelle et à aucune
obligation professionnelle ou personnelle à l'égard de la
clientèle des femmes auxquelles elles offriront leurs services.
Le projet de loi rompt encore avec le régime professionnel
lorsqu'il écarte, de façon péremptoire, les dispositions
de deux lois professionnelles actuellement en vigueur et applicables à
d'autres secteurs pour préférer à la sagesse et à
l'autorité du législateur québécois des ententes
convenues entre des centres hospitaliers et deux ministres du gouvernement.
Outre le peu d'égard qui est ainsi porté à la
souveraineté de l'As- semblée nationale, le projet de loi propose
à cette même Assemblée de renoncer à son rôle
de régulation des activités professionnelles et de s'en remettre
à des conventions locales pour déterminer l'étendue des
actes médicaux ou des actes Infirmiers. Toute la cohérence de la
prestation des soins médicaux et toute la logique inhérente
à la reconnaissance de l'autonomie de l'acte médical se trouvent
ainsi soumises à des considérations étrangères aux
objectifs poursuivis par le régime professionnel
québécois.
Dans ce seul volet, le projet de loi 4 survient comme un
élément de perturbation profonde que rien ne justifie et qu'aucun
intérêt n'autorise.
La section suivante traite surtout de la relation avec la Loi sur les
services de santé et les services sociaux. Comme pour aménager un
espace qui met les sages-femmes à l'abri de celles et de ceux qu'elles
identifient comme des obstacles à la pratique qu'elles souhaitent
accomplir, le projet de loi 4 propose la mise en place de nouvelles structures
hospitalières qui nient l'existence des structures actuelles et qui
ignorent l'organisation des soins de santé pourvus par la Loi sur les
services de santé et les services sociaux.
Faut-il rappeler que cette loi, de même que le texte que le
ministre a récemment déposé pour la remplacer,
reconnaît que la responsabilité de l'organisation des soins
médicaux passe par des départements cliniques qui sont
dirigés par des médecins. Soumis à l'autorité des
conseils des médecins, dentistes et pharmaciens, de même
qu'à celle du directeur des services professionnels, les chefs de
départements cliniques détiennent la maîtrise d'oeuvre de
la prestation des soins médicaux. Ces soins, qui incluent autant les
actes diagnostiques que thérapeutiques ainsi que les Indications de
même nature, sont la raison d'être des centres hospitaliers.
Le rôle du médecin dans l'hôpital est central et
vital. Les nombreux autres professionnels de la santé qui y oeuvrent
aujourd'hui avec compétence et intégrité conçoivent
fort bien la complémentarité de leur expertise avec l'expertise
médicale et, de façon générale du moins,
l'indication médicale demeure le pivot de la fourniture des soins de
santé. L'émergence et le développement d'interventions
multidisciplinaires rendent compte de l'évolution des pratiques vers un
concept de soins intégrés et unifiés.
À l'inverse, le projet de loi 4 entend greffer au centre
hospitalier une structure calquée sur la structure médicale
jusqu'à emprunter le vocabulaire législatif de la Loi sur les
services de santé et les services sociaux. En prenant soin
d'éviter tout maillage avec les structures existantes, le projet
écarte l'interaction avec les ressources ordinaires du centre
hospitalier.
L'opération qui consiste à soustraire des actes
médicaux et des actes infirmiers, actes appartenant à des champs
de pratique exclusive, une liste qui constitue le domaine des pratiques des
sages-femmes, n'est accompagnée d'aucune des modalités de
supervision et de contrôle que les pratiques ordinaires de
délégation exigent. C'est au conseil des sages-femmes, dont le
comité exécutif est composé de manière à
assurer la prédominance de celles-ci, que reviendrait le pouvoir
d'apprécier la compétence d'une sage-femme à poser un acte
médical et celui de juger de sa qualité. À cette
incongruité, il faut encore ajouter l'absence de disposition sur
l'identité de ceux qui assumeront la responsabilité de poser des
diagnostics et d'évaluer les risques d'une grossesse.
L'indisponibilité de normes relatives à l'admission dans un
service do maternité, aux transferts en milieu clinique et aux
activités accomplies hors du milieu hospitalier, sont autant de silences
qui portent à penser que les concepteurs ont naïvement cru que
l'aménagement d'une structure parallèle emporterait une forme de
sérénité assurant aux femmes enceintes l'accès
à des soins de qualité.
Conçu pour faire échec à la législation
professionnelle et pour contourner le cadre sanitaire prévu à la
Loi sur les services de santé et les services sociaux, le projet de loi
4 cherche à imposer ses postulats au mépris des professionnels de
la santé qui assument chaque jour les responsabilités
liées à leur statut et qui dispensent des soins et services dans
des lieux où l'intensité des contrôles garantit la
qualité. Pour satisfaire les revendications d'un groupe restreint de
personnes, il crée des failles qui minent la confiance que chaque
citoyen doit porter au système de santé
québécois.
L'argument selon lequel ces failles ne sont que des difficultés
que les projets-pilotes permettront de dissiper ne saurait faire obstacle au
fondement de la critique qu'énonce la Fédération des
médecins spécialistes du Québec. On conçoit mal
comment on pourrait démontrer la pertinence de la reconnaissance d'une
nouvelle catégorie de professionnels de la santé et
évaluer l'efficacité de leur pratique dans le domaine de la
périnata-lité en ayant recours à des projets-pilotes qui
s'écartent fondamentalement des principes auxquels II est d'ordinaire
fait appel pour procéder à de telles évaluations.
L'émergence des professions de la santé ne s'est pas faite
au Québec, ni ailleurs, par des essais successifs plus ou moins
présentés comme réussis. Elle est le produit d'une
réflexion sur la formation académique, sur l'implantation de
programmes articulés et concertés et sur la reconnaissance
scientifique. Sans ces assurances élémentaires, c'est la
santé des femmes enceintes qui sera le lieu d'expérimentation de
techniques et de méthodes aussi incertaines que disparates.
Les critères d'échec d'un projet-pilote devront-Ils
être liés au décès d'une parturlente pour qu'enfin
on admette que la grossesse, sans être une pathologie, est un état
qui requiert la disponibilité et la proximité de soins
médicaux, de médecins et de professionnels de la santé,
notamment les Infirmières spécialisées du bloc
obstétrical, en antepartum, en intrapartum et en postpartum - tant pour
les patientes admises que pour les patientes inscrites - dont la
compétence est acquise plutôt que présumée ou
simplement souhaitée.
Dans ce contexte, la Fédération des médecins
spécialistes du Québec réitère que le projet de loi
4 devrait simplement et rapidement être retiré de l'univers
législatif.
En résumé, la Fédération des médecins
spécialistes du Québec considère le projet de loi 4
totalement Irrecevable. Ce projet de loi est en rupture complète avec
l'économie générale de la reconnaissance et de la
réglementation des professions au Québec. Rien ne justifie cette
mise en veilleuse du Code des professions ainsi que des divers
mécanismes qui y sont prévus pour assurer la protection du
public. Le projet de loi est également en rupture complète avec
l'organisation des soins médicaux en milieu hospitalier. Le projet de
loi 4 nie le rôle central et vital du médecin dans l'hôpital
et instaure pour les sages-femmes une structure qui ne possède aucun
lien organique avec les structures existantes. Pour satisfaire des
impératifs idéologiques, on définit donc pour des
personnes qui ne sont même pas des professionnels de la santé un
espace indépendant à l'intérieur de l'hôpital.
Par ailleurs, la Fédération des médecins
spécialistes du Québec, en conclusion, désire vous
recommander: 1° que le gouvernement du Québec se dote d'une
politique de périnatalité; 2° que ladite politique contienne
un programme de santé spécifique à la grossesse et en
prévoie la mise en application; 3° que cette politique vise les
secteurs suivants: la prématurlté, les bébés de
petit poids, les anomalies congénitales, les handicaps d'origine
prénatale et périnatale, et l'humanisation des soins; 4° que
le ministre de la Santé et des Services sociaux base sa politique sur
les objectifs qui pourraient être les suivants: abaisser à 6 pour
1000 naissances vivantes d'ici 1995 le taux de mortalité
périnatale, diminuer les handicaps d'origine prénatale et
périnatale; humaniser les soins aux différentes périodes
de la reproduction, tant prénatals, périnatals que postnatals.
(22 h 15)
La Présidente (Mme Marois): Je m'excuse. Est-ce que je
peux vous arrêter juste un moment? Nous n'avons pas cette partie du
texte, je crois, ici.
M. Desjardins: C'est vrai, oui.
La Présidente (Mme Marois): Sans nous
faire de cachette, est-ce que vous avez des copies du document? C'est
parce que c'est souvent plus facile de vous suivre et comme, en plus, vous
donnez des chiffres... Vous n'en avez pas de copies?
M. Desjardins: Oui, J'en ai quelques copies.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Est-ce que c'est
possible...
M. Desjardins: Je peux vous les remettre? La Présidente
(Mme Marois): Oui. Madame... M. Desjardins: Est-ce que je peux
terminer?
La Présidente (Mme Marois): Très certainement.
Madame va les prendre, s'il vous plaît. EHe va prendre ras copies.
M. Desjardins: J'en états au quatrième...
La Présidente (Mme Marois): D'accord, je m'excuse.
Allez.
M. Desjardins: ...point de mon 4°: abaisser à 6 pour
1000 naissances vivantes d'ici 1995 le taux de mortalité
périnatale; diminuer les handicaps d'origine prénatale et
périnatale; humaniser les soins aux différentes périodes
de la reproduction tant prénatals, périnatals que postnatals;
maintenir la mortalité maternelle à un taux inférieur
à 5 pour 100 000 naissances vivantes; 5° que le ministre de la
Santé et des Services sociaux tente de rechercher un consensus de tous
les intervenants en périnatalité. À cette fin, la
Fédération des médecins spécialistes du
Québec suggère de mettre sur pied une table de concertation dont
le mandat serait de recommander au ministre de la Santé et des Services
sociaux les objectifs d'un programme de périnatalité et les
moyens à prendre pour les réaliser. Cette table de concertation
pourrait également, le cas échéant, seconder le ministre
dans l'élaboration de programmes visant l'Implantation d'une telle
politique de périnatalité, la désignation des populations
cibles et la formation d'équipes pluridisciplinaires; 6° que le
gouvernement du Québec adopte un programme de mesures sociales pour
assurer aux femmes enceintes un niveau de vie adéquat - je pense Ici,
entre autres, alimentation et médication - 7° que le gouvernement du
Québec améliore et facilite l'application du droit au retrait
préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite.
VoHà, Mme la Présidente, les commentaires de la
Fédération des médecins spécialistes du
Québec.
La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie de votre
présentation. M. le ministre.
M. Coté (Charlesbourg): Merci, Mme la Présidente.
Dr Desjardins, ainsi que ceux qui vous accompagnent, nous sommes très
heureux de vous avoir avec nous ce soir pour un sujet qui est, à tout le
moins, à la lecture du mémoire, contesté.
Comme vous l'avez dit dans votre présentation, évidemment,
ce sont des opinions que vous exprimez et que votre Fédération
partage ainsi que vos membres. Elles ont au moins le mérite d'être
très claires sur le plan de l'expression, sans équivoque. Je vais
aller mol aussi droit au but. Évidemment, comme vous n'êtes pas
les premiers à passer, vous connaissez le genre d'exercice et on ne peut
pas inventer les questions, non plus, chaque fois qu'on rencontre des
groupes.
Je commencerai par une première question où, dans votre
document, à tout le moins celui que j'avais, à la page 4, dans
l'avant-dernler paragraphe, il est dit, à la dernière phrase:
Toute la cohérence de la prestation des soins médicaux et toute
la logique Inhérente à la reconnaissance de l'autonomie de l'acte
médical se trouvent ainsi soumises à des considérations
étrangères aux objectifs poursuivis par le régime
professionnel québécois."
Ce matin, lorsqu'on a commencé la commission, j'ai encore
fraîche à l'esprit la réaction de Mme la
députée de Malsonneuve qui venait d'apprendre que l'accouchement,
c'est un acte médical, alors que tout le monde était à peu
près convaincu autour de cette table que c'est naturel. On parie d'acte
médical Ici. Est-ce que vous croyez, vous, que la naissance est un acte
naturel ou si c'est un acte médical?
M. Desjardins: La naissance, c'est un acte médical et
naturel, les deux. Voici pourquoi: C'est la femme qui accouche; c'est elle qui
est en travail et c'est elle qui a l'ouvrage à faire durant cette
période. Cependant, dans la société dans laquelle nous
vivons, avec le degré de raffinement que nous connaissons, nous avons
confié aux médecins la responsabilité de faire en sorte
que ce processus dit naturel soit un processus de sécurité et
cette sécurité s'exprime par deux moyens de mesure. Le premier,
c'est la mortalité maternelle et le deuxième, c'est la
mortalité périnatale, le deuxième se divisant
également en deux éléments. Donc, le médecin est
là pour empêcher la femme de mourir au moment de son accouchement
et la plus grande contribution qui a pu être faite dans le domaine de la
médecine, c'a été l'invention des banques de sang. Avant
les banques de sang, H y avait des décès causés par des
hémorragies et les médecins étaient relativement
impuissants. Depuis l'avènement des banques de sang dans les centres
hospitaliers, le mécanisme possible de la transfusion sanguine fait en
sorte, entre autres choses, que la mortalité maternelle a
baissé
énormément et qu'elle est relativement stable dans le
moment.
L'autre facteur, c'est le facteur de la mortalité
périnatale et je disais que celui-ci se divise en deux
éléments. Le premier, c'est la mort in utero avant le processus
dit normal d'un accouchement, donc une femme qui accouche d'un
bébé mort-né. Le deuxième élément,
c'est celui de la mortalité néonatale et ça, c'est le
bébé avec les différentes complications, d'où la
suggestion qu'on tente de faire, d'avoir une politique de
périnatalité qui, elle, va viser les différents
éléments qui sont à notre disposition dans le moment, dont
celui qui va porter sur la diminution de la mortalité périnatale,
surtout le volet de la mortalité néonatale. C'est pour ça
qu'on parle de la prématurité et qu'on parle des
bébés de petit poids. C'est là que sont concentrés
les problèmes les plus sérieux qui amènent des
décès ou qui amènent des handicaps dans la vie future et
qui font qu'un citoyen est peut-être moins productif, pour ne pas dire
pas productif. Donc, c'est un acte qui se veut tant naturel que
médical.
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que j'aurais raison
de dire, tout en soutenant que c'est un acte médical et naturel, les
deux, que c'est d'abord un acte naturel avant d'être un acte
médical?
M. Desjardins: C'est un acte naturel qui doit être fait
sous surveillance médicale pour la sécurité de la
femme.
La Présidente (Mme Marois): Môme si je ne suis pas
d'accord, j'aime quand même mieux ça.
M. Desjardins: Pardon?
La Présidente (Mme Marois): J'ai dit: Je ne suis pas
d'accord, mais j'aime mieux comprendre cela de votre intervention. D'accord?
Excusez-moi, M. le ministre.
M. Desjardins: L'autre élément que je peux
peut-être ajouter là-dessus et qui vient faire un impact dans les
années actuelles, c'est que nous, au Québec, nous vivons un taux
de natalité qui est moindre qu'il l'était il y a 25 ans ou 50
ans. Ce taux de natalité fait en sorte que les bébés sont
plus précieux qu'ils ne l'étaient. Je n'ai peut-être pas le
droit de dire ça. Ce n'est peut-être pas gentil de dire ça
de même, mais au moment où une femme pouvait en avoir
peut-être six, huit ou douze, chacun avait une importance
évidente, mais ce n'est peut-être pas pareil aujourd'hui pour
celle qui n'en a qu'un ou deux. À ce moment-là on se doit
d'Injecter dans notre société des éléments de
sécurité additionnels pour garantir, dans un taux de
natalité qui se chiffre autour de un point quelque chose, que la
mère et le père vont avoir un enfant qui, d'abord, va survivre,
que la mère va survivre aussi et que l'enfant aura les meilleures
chances de se développer et de devenir un citoyen productif dans la
société. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien que maintenant, quand
on se promène dans le trafic, les autos ont des affaires jaunes, en
arrière, où c'est marqué "Bébé à
bord". Soyez prudent, ne le cognez pas, n'ayez pas d'accident.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, vous
attendez ma question parce que je l'ai posée à la
Fédération des médecins omnipraticiens et je vous avais
avisé que je vous la poserais. À la page 7, vous dites, au milieu
du paragraphe: "Sans ces assurances élémentaires, c'est la
santé des femmes enceintes qui sera le lieu d'expérimentation de
techniques et- de méthodes aussi incertaines que disparates. "
Évidemment, je ne l'affirme pas et je ne me sens pas dans une position
pour être capable de l'affirmer non plus... En quoi l'intégration
des sages-femmes est-elle préjudiciable à la santé de la
mère et des enfants au Québec alors qu'elle ne le serait pas dans
des endroits comme l'Europe ou les États-Unis, où ça a
été pratiqué?
M. Desjardins: D'abord, vous avez viré la phrase de bord,
ce n'est pas ce qu'elle dit. Ce qu'on essaie d'exprimer ici, c'est qu'il n'y a
pas de justification, actuellement, au fait d'avoir des sages-femmes. Il y a
une justification d'avoir une politique de périnatalité qui va
viser, supposément, les problèmes les plus sérieux que
j'ai mentionnée tantôt. SI on crée une nouvelle structure
et qu'on fait des projets-pilotes, à ce moment-là, ce sont les
femmes enceintes qui sont l'expérimentation. Il n'y a pas lieu de lire
là-dedans que ça va leur nuire. On dit que ça va faire en
sorte que ce sont elles qui seront l'expérimentation, au lieu d'avoir
une politique de périnatalité. Peut-être, à
l'intérieur de cette politique, qu'il y aurait un consensus si jamais
vous acceptiez notre recommandation de la mise sur pied d'une table de
concertation. Peut-être qu'à un moment donné il y aurait
lieu de prévoir un nouvel intervenant et qu'il y aurait un consensus.
Pour le moment, on ne voit pas l'utilité, la pertinence de créer
un nouvel intervenant.
M. Côté (Charlesbourg): Je vais y aller directement.
Je sais que vous êtes un homme direct; d'ailleurs, le mémoire
le... Ce que vous me dites, c'est: II y a une certaine ouverture de notre part,
dans la mesure où ça s'Inscrit dans une politique plus globale
sur la périnatalité, et peut-être que, dans tout ça,
on finira pas accoucher du principe des sages-femmes, mais on n'est pas
sûr, il y a plusieurs conditions qui devront être
respectées, et on n'est pas sûr
qu'on va y arriver. Évidemment, pour être capable de
répondre à la proposition que vous faites, il faut savoir si,
effectivement, il y a l'ouverture d'esprit et la volonté d'arriver
à la reconnaissance de la pratique des sages-femmes. Si on fait
l'ouverture pour mieux fermer la porte par un carcan sur le plan d'une table de
concertation où on n'en sortira jamais, on est aussi bien de se le dire
dès maintenant. C'est pour ça que, avant de répondre,
c'est à cette question qu'il faudra répondre
éventuellement.
M. Desjardins: Je n'ai pas de problème avec cette
question, en aucune façon. D'ailleurs, je suis en présence de M.
Chevrette qui, lui, lorsqu'il était ministre de la Santé et des
Services sociaux, a jugé opportun la mise sur pied d'une table de
concertation dans le dossier des effectifs syndicaux, dossier encore beaucoup
plus difficile que le dossier des sages-femmes. L'expérience que j'en
tire, c'est que ça a été une création pertinente,
adéquate, fonctionnelle et qui remet au ministre, actuellement,
peut-être môme aux deux ministres parce qu'il y en a un
deuxième qui est responsable dans ce dossier, des opinions, des
consultations qui ont été quasi unanimes et qui ont permis aux
deux ministres de prendre les décisions appropriées dans ce
dossier. Je ne vois pas pourquoi, si le ministre actuel décidait de
créer une table de concertation sur la périnatalité et
qu'on avait à débattre les quelques sujets - et II y en a
peut-être d'autres, je ne dis pas que ma liste est exhaustive - que j'ai
énumérés, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas faire
progresser le dossier vers des objectifs et des moyens d'implantation et de
réalisation de ces objectifs. Donc, ça se veut positif, ça
se veut constructif. (22 h 30)
M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui. En tout cas, vous
êtes très habile en répondant par une expérience
passée et je trouve que c'est une réponse qui est très
acceptable, compte tenu de ce que vous avez vécu dans le
passé.
M. Desjardins: M. le ministre...
La Présidente (Mme Marois): C'est de bonne guerre, c'est
très bien même.
M. Dssjardlns: Je peux sûrement vous laisser entrevoir en
quelques secondes que, dans ce dossier, il y avait encore plus de tiraillements
autour du ministre à cette époque et que c'est un coup de
génie que d'avoir trouvé cette solution. Remarquez qu'on ne s'est
pas toujours entendus si bien que ça, M. Chevrette et mol, mais sur ce
dossier, c'est une réalisation concrète qui a permis à des
gens qui étaient en opposition de se réunir et, finalement, de
trouver un consensus, voire quasiment l'unanimité.
M. Chevrette: Vous avez l'air à avoir toujours un penchant
pour l'Opposition.
La Présidente (Mme Marois): II y a un peu de
mémoire dans tout ça. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je trouve ma consolation
là-dedans. C'est dans la reconnaissance qu'un ministre de la
Santé qui n'est pas un médecin puisse faire quelque chose.
M. Desjardins: Je me dois de dire que |e reconnais mon
collègue, le Dr Lazure, qui lui aussi a été ministre avant
et avec qui notre fédération a transigé des dossiers
difficiles. Ce n'est pas parce qu'il est médecin que ça allait
mal ou que ça allait bien. Je pense qu'un non-médecin peut faire
un excellent travail comme ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Alors, on part de quelque
part. Je veux revenir sur le principe parce que la FMOQ a fait le môme
constat. On dit: On n'est pas dans une situation où. au Québec,
on a besoin d'une profession additionnelle compte tenu du nombre de naissances
et compte tenu du fait qu'on va aller dans des projets-pilotes alors qu'on se
retrouve dans des expériences ailleurs, aux États-Unis. On disait
tantôt: 4 % des accouchements aux États-Unis sont faits par des
sages-femmes. Ce n'est pas si mauvais. Je pense que là-bas on ne s'en
plaint pas plus qu'il ne le faut au niveau du résultat. Pourquoi cette
expérience dans les pays européens, pourquoi cette
expérience en Amérique du Nord, dans un pays voisin qui est celui
des États-Unis, serait profitable, donnerait des résultats
intéressants et pourquoi, chez nous, ça n'en donnerait pas?
M. Desjardins: Je n'ai pas dit ça. Je ne dis pas
ça. Je prétends que cela s'inscrit à l'intérieur
d'une politique de périnatalité. Malheureusement, je constate
qu'on n'a pas, au Québec, de politique de périnatalité et
que notre organisme, entre autres, n'a pas été consulté
par le gouvernement, le ministère, pour la mise sur pied d'une politique
de périnatalité. Nous avons reçu des documents en 1985,
d'autres documents en 1987, mais les documents émis visaient, je dirais,
uniquement, seulement ou exclusivement la reconnaissance des sages-femmes. On
n'est pas prêts à dire, sans justification additionnelle, sans que
le ministère puisse nous faire comprendre pourquoi il serait opportun de
reconnaître les sages-femmes, on n'est pas prêts à endosser
un tel projet. On pense que, d'abord, une politique de
périnatalité visant des problèmes précis où
le Québec a fait beaucoup d'améliorations ces dernières
années et où II reste des problèmes sérieux,
difficiles à attaquer comme la prématurité, comme les
bébés de petit poids et que ces
sortes de dossiers-là ne sont pas des dossiers qui peuvent,
à notre point de vue, être améliorés par la
reconnaissance des sages-femmes. Est-ce que, après ça, il y
aurait lieu de rediscuter d'un intervenant additionnel? Là, il faudrait
voir la progression des travaux, de ce que nous avons tenté de
suggérer: être une table de concertation sur la
périnatallté.
M. Côté (Charlesbourg): Ce sera ma dernière
question pour le moment. À la page 2 de votre mémoire, vous dites
dans le deuxième paragraphe, à la dernière phrase: 'Tout
se passe comme si le ministre de la Santé et des Services sociaux,
incapable de résister à la pression exercée par des
revendicateurs de statut professionnel dont l'activité n'a pas encore
fait la preuve de sa pertinence et de son efficacité, a renoncé
à l'arbitrage nécessaire des Intérêts en
présence et a tout concédé."
La question est fort simple. Bon, on peut toujours dire que la question
qui a été posée dans le sondage est une question
très vertueuse et qu'on l'a libellée de manière telle
qu'on voulait avoir une réponse, un taux de satisfaction très
élevé au niveau de la réponse. Je l'ai dit tantôt,
sur le plan des questions, vous pouvez même, à l'occasion,
rédiger la réponse avant même de poser la question et de
faire votre question, en termes de... C'est possible dans le cas des sondages.
On l'a vu dans le passé. Il reste un fait, c'est qu'il y a quand
même tout près de 80 % de la population qui veulent voir
reconnaître légalement la pratique des sages-femmes. Est-ce que
cela ne vous fait pas réfléchir un petit peu, à ce
niveau-là, sur ce que nous devrions faire?
M. Desjardins: Non. Absolument pas. La Président* (Mme
Marois): C'est clair.
M. Desjardins: Je vous répondrai là-dessus, sans
dévoiler ce que d'autres mémoires peuvent contenir, parce vous
les avez déjà, les mémoires, la Corporation
professionnelle des médecins du Québec a, elle aussi, fait un
sondage et le sondage démontre une satisfaction des femmes de se faire
accoucher par des médecins dans une proportion du genre de 98,6 %.
Deuxièmement, l'Association médicale canadienne a, elle aussi,
fait un sondage sur le même sujet et a un taux de réponse qui est
à peu près équivalent; admettons que je dise 95 % parce
que je ne suis pas sûr de ce taux-là. Ce sont des taux de sondage
qui peuvent paraître peut-être conflictuels et difficiles
d'interprétation.
La façon dont nous autres, on voit ça, vous autres, vous
êtes le gouvernement; vous avez des pressions qui sont des pressions
réelles, des pressions politiques, des pressions économiques et
toutes sortes d'autres pressions que je ne connais pas et que je ne comprends
pas. Vous avez l'intention de reconnaître les sages-femmes. Vous nous
demandez notre opinion. Nous autres, on essaie de vous dire: On ne comprend pas
pourquoi il est opportun de reconnaître les sages-femmes. On vous
répond: La périnatalité, ça devrait être un
objectif prioritaire, primordial pour notre gouvernement; de fixer des
objectifs les plus précis possible, d'essayer de les régulariser
et de travailler là-dessus. À partir de là, on a
émis notre opinion. C'est sûr que... Quelqu'un a dit tantôt:
Vous pouvez changer de salle, vous en aller dans l'autre à
côté et finir le débat. C'est évidemment le
privilège qu'on vous reconnaît et devant lequel on s'incline.
La Présidente (Mme Marois): Oui.
M. Côté (Charlesbourg): C'est très important
ce que vous dites. Est-ce que ça signifie "devant lequel on s'incline"
que, dans la mesure où il y aura cette étape-là, nous
pourrions compter sur la collaboration des spécialistes pour la
réalisation de l'expérience-pilote?
M. Desjardins: Ça, je crois que non, dépendant quel
sera le libellé de la loi qui sera entérinée par
l'Assemblée nationale et dans quelle mesure cette loi-là
reconnaîtra peut-être quelques-unes des suggestions qu'on a pu vous
faire, ou sera proche du texte actuel que nous rejetons complètement. Je
ne crois pas que les médecins spécialistes, de quelque
catégorie qu'ils soient, puissent collaborer à la mise en
application d'une loi avec laquelle Ils ne sont pas d'accord.
Quand je dis qu'on s'incline, je veux dire qu'on accepte que cette
responsabilité appartienne à l'ensemble des élus de notre
société dans un processus démocratique.
M. Côté (Charlesbourg): Mais vous me semblez moins
ferme dans votre non que ce qu'on a dans votre mémoire, si jamais le
gouvernement décidait d'aller de l'avant. On verra avec le nouveau
projet de loi, si on allait de l'avant.
La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre. M. le
leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente, je me suis
habitué. Une première question. Je reconnais beaucoup de
fermeté dans vos propos. Donc, je n'irai pas sur votre position
vis-à-vis des sages-femmes. Je voudrais peut-être parler un peu
droit avec Me Aquin.
Dans votre mémoire, vous faites allusion carrément au
droit, en particulier à l'aspect de la reconnaissance d'une profession a
posteriori et non a priori quant à l'exercice d'une profession. Est-ce
que j'interprète bien votre mémoire sur cet aspect en disant que
vous trouvez
Illogique qu'on puisse soustraire des obligations législatives
qui sont conférées à un groupe pour les conférer
à un autre groupe dont la profession n'est pas reconnue? Est-ce que
c'est ça que vous voulez dire dans votre mémoire?
M. Aquin (François): Oui, alors voici. D'abord, quand on
lit le texte de loi, c'est juste un exemple, c'est assez mystérieux de
voir qu'on a toujours évité le mot "profession" pour le remplacer
par le mot "pratique'1. Mais ce n'est pas parce que c'est un
mystère que ça veut dire que c'est nécessairement mauvais
comme tel. Cela dit, on en a parlé tout à l'heure et je pense
bien que le Code des professions, dans les 20 dernières années,
au Québec, a été une loi majeure. Il y a à peu
près aujourd'hui 42 professions, 42 corporations professionnelles
reconnues. L'objectif, c'est le bien public. Alors, le bien public est servi,
parce que c'est organisé. Il y a un office, il y a des bureaux où
le public peut siéger. Il y a des syndics. Il y a aussi un comité
d'inspection professionnelle. Il y a un tribunal, un comité de
discipline dont les séances sont maintenant publiques et ça a
fait un gros changement au Québec. Au-dessus, il y a un Tribunal des
professions. Les professions ont des codes de déontologie, avec le
secret professionnel dans le code de déontologie et, ici, vous ne l'avez
nulle part. Et aussi, il y a tout un encadrement au point de vue de la
responsabilité professionnelle. Alors, j'écoute le discours ici
et le discours m'apparaît un peu à double sens. Il y a une
volonté de reconnaître les sages-femmes. Ce n'est pas à mol
de dire si la volonté est légitime ou non, mais il y a une
différence entre reconnaître les sages-femmes et adopter ce projet
de loi. Ce sont deux choses qui m'apparaissent complètement
différentes. S'il fallait les reconnaître, est-ce qu'il y avait
une raison pour court-circuiter tout le Code des professions, toute la
jurisprudence et tout l'encadrement qu'on a depuis 1973? Alors, c'est
sûrement un point qui ressort du mémoire et un point qui
apparaît fondamental, je pense bien, à beaucoup de juristes, en
tout cas à moi.
M. Chevrette: Vous allez quasiment dans le sens où
j'allais avant le souper. Je disais au ministre que ce serait peut-être
mieux - et je pense que Ies sages-femmes accepteraient ça - de
créer d'abord une corporation, de ne pas l'ouvrir nécessairement
"at large" au début, parce qu'on y va avec des projets-pilotes, mais au
moins ça correspondrait à une structure reconnue dans
l'économie de nos législations. Tu crées une profession,
tu lui donnes des pouvoirs et tu dis: Oui, mais je ne peux pas l'ouvrir tout de
suite, parce qu'on ne crée pas ça spontanément. On va
faire deux, trois, quatre, cinq, dix, quinze projets-pilotes parce qu'il y a
quinze régions, par exemple, et puis, après ça on jugera.
Moi, c'est ce que je crains. Je suis sûr que ce n'est pas ça que
le ministre a entre les deux oreilles, mais c'est ce qui pourrait arriver. Tel
que libellé présentement, faire un projet-pilote sans
reconnaître une profession, ça peut être une façon
fort habile... Les anglais diraient "image management", gérer l'image,
c'est donner l'impression, créer l'impression que tu veux faire quelque
chose pour les sages-femmes, mais que, dans le fond, tu ne fais pas
grand-chose. Tu fais une expérience-pilote qui peut mourir dans l'oeuf,
parce que toutes les professions ne fonctionnent pas dans le
multidisciplinarisme ou le pluralisme des disciplines. Et, après une
expérience négative, la profession ne se crée pas, pas du
tout, parce que les projets-pilotes ont échoué. À mon
point de vue, c'est là le danger qui nous guette. Je suis content de
voir que même les sages-femmes, tantôt, ont compris très
rapidement cette partie-là. (22 h 45)
Je voudrais vous demander maintenant - et je vais aller directement au
Dr Desjardins, parce que l'avocat-conseil ne voudra pas me répondre, si
on reconnaissait, si on créait une corporation dès le
départ, l'accepteriez vous?
M. Desjardins: Vous me posez la question à moi?
M. Chevrette: Oui.
M. Desjardins: Non pas à Me Aquin.
M. Chevrette: Non, parce que Me Aquin va dire: Ça, ce
n'est pas ma volonté politique à moi.
M. Desjardins: Oui. Ça dépend ce que vous allez
faire avec la corporation après l'avoir créée.
M. Chevrette: On va suspendre normalement. Si le ministre est
cohérent, il va enlever des pouvoirs aux omnipraticiens et aux
médecins qui font des accouchements et il va les donner aux
sages-femmes, mais pour celles qui pratiqueront d'abord dans le cadre d'un
projet-pilote. Mais, au moins, ce sera une profession, il y aura un code de
déontologie. Le ministre l'a dit au départ et il a pris le soin
de faire une mini-déclaration ce soir. Il a dit: Elles auront une
autonomie. Eh bien, II faut avoir une assise légale pour avoir une
autonomie. Là, je pourrais aussi bien m'adresser à Me Aquin, mais
je ne crois pas qu'on puisse créer une personne dans un projet-pilote,
donner à une personne dans un projet-pilote l'autonomie de ses actes
sans assise légale. Le ministère de la Santé,
continuellement - je voyais Mme la directrice du contentieux tantôt -
à chaque Noël comme à chaque mois de juin, nous arrive avec
une série de projets de loi pour se donner des assises
légales,
parce que, précisément, les règlements ne
résistent plus et que, devant les tribunaux, on est
débouté à tout moment.
Moi, je suis persuadé à la lecture du projet de loi 156
qu'il n'y a aucune assise légale. Je suis, encore une fois, convaincu de
ça qu'on va arriver et être débouté par des
médecins, ou par des omnipraticiens, ou par des spécialistes, qui
vont aller en Cour et qui vont gagner. Rétroactivement, le contentieux
va arriver avec un petit projet de loi et un article pour suspendre telle chose
pour donner une assise légale au règlement, parce que cela
n'existait pas.
M. Aquin: J'ai l'impression...
M. Chevrette: Moi, à partir du moment où on suspend
des actes normalement dévolus aux médecins et qui seraient
ultérieurement confiés à des sages-femmes, je voudrais
savoir si ce ne serait pas préférable de créer une
corporation. Si tel était le cas, est-ce que vous l'accepteriez dans le
cadre d'un projet-pilote, cependant à partir du fait qu'il y ait une
corporation de créée?
M. Desjardins: Je pense que la question préalable, c'est:
A-t-on besoin de sages-femmes dans notre politique de
périnatallté? Ça, c'est la question préalable.
M. Chevrette: Bien, il y a de la cohérence dans vos
propos.
M. Desjardins: II reste ce que vous soulevez concernant
l'assiette Juridique. Je n'ai pas de formation légale, vous comprendrez
ça, mais notre mémoire semble indiquer ce que vous dites et la
façon dont vous l'interprétez semble être correcte avec
notre mémoire. On dit justement que le projet de loi va à
rencontre de deux séries de lois très importantes, celle qu'on a
qualifiée de l'Office des professions, le Code des professions et celle
que l'on connaît peut-être mieux, la Loi sur les services de
santé et les services sociaux. Alors, si on est assis entre deux lois et
qu'on est inconfortable, eh bien, à ce moment-là, on a les
conclusions que vous tirez et je suis obligé de dire que je suis
d'accord avec vous. De là à ajouter qu'il faudrait créer
une corporation pour éviter ça, je ne suis pas suffisamment
compétent pour répondre, mais je dis: Avant de faire ça,
évaluons si on a vraiment besoin d'un nouvel intervenant dans le domaine
de la périnatal ité. Oui ou non.
M. Chevrette: Oui.
La Présidente (Mme Marois): Je veux bien comprendre, dans
votre mémoire, l'une de vos thèses de fond, c'est que le projet
rompt avec les principes fondamentaux du droit professionnel
québécois et vous vous référez au Code des
professions.
M. Desjardins: C'est ça.
La Présidente (Mme Marois): Donc, la question qui est
posée, c'est si le gouvernement se conformait au Code des professions,
seriez-vous d'accord? À cela, vous répondez autre chose. Mais
à cette question, précisément?
M. Desjardins: Nous ne reconnaissons pas la
nécessité de créer une nouvelle profession. Si le
gouvernement va de l'avant et la crée, cette profession-là, j'ai
répondu tantôt au ministre...
La Présidente (Mme Marois): Que vous vous incliniez.
M. Desjardins: Oui, voilà.
La Présidente (Mme Marois): D'accord, merci, M. le
Président. Oui, M. le leader.
M. Chevrette: II s'incline, mais ne participera pas. C'est
ce...
M. Desjardins: Voilà!
M. Chevrette: ...que j'ai compris. Ma question était
claire à mon point de vue, dans le sens où moi, je demeure
convaincu - c'est un commentaire que je veux faire - face à un projet de
loi qui crée des projets-pilotes sans créer une corporation
professionnelle, ou sans reconnaître explicitement une profession, qu'on
ne fait pas d'essai dans ce secteur-là. Tu peux corriger des statuts
professionnels à l'usage, par le fait qu'il y a une pratique, mais tu ne
crées pas de projets-pilotes en leur confiant une autorité, une
responsabilité, que ce soit pour un acte naturel, ou l'acte d'une
mère naturelle, pas un acte médical. Je ne m'obstinerai pas
là-dessus, je dis que c'est impossible qu'on accepte de créer un
projet-pilote sans reconnaître, sans faire la reconnaissance juridique,
légale de la profession. J'en demeure convaincu.
Ça a l'air d'être le monde à l'envers. Tu dis:
Pratique donc en médecine et après ça je te dirai si je
pourrai te reconnaître en tant que médecin. Ou, pratique la
profession de sage-femme et peut-être que je reconnaîtrai la
profession de sage-femme si jamais les sages-femmes réusissent à
s'entendre avec les omnipraticiens, avec le directeur de l'hôpital, avec
le coordonnateur de la maternité, avec le comité exécutif
chargé des pouvoirs. Cela n'a pas d'allure. Je pense que, si on verse
dans ça, il faut être clair. On reconnaît la profession des
sages-femmes. On leur dit: Pour le projet-pilote, II y a tels gestes
normalement dévolus au corps
médical qui seront exercés par les sages-femmes dans le
cadre de tel projet-pilote et, en bout de course, après les
expériences-pilotes, on étend cota plu» largement.
Ça m'apparaît un processus un peu plus logique, en tout cas, que
celui qui est décrit dans le projet de loi 156. À mon point de
vue, le projet de loi 156, à la veille des fêtes, de même,
ça a l'air d'un suçon mal enrobé. C'est un attrape-nigaud.
Déchirez-vous entre vous autres et, dans cinq ans, moi j'aurai fait voir
que j'ai fait quelque chose à court terme pour les sages-femmes, mais
dans cinq ans, tout le monde se sera chicané, on déchirera le
projet de loi 156 et il n'y aura pas de reconnaissance de la profession et il
n'y aura rien.
La Présidente (Mme Marois): C'était un commentaire.
À ce commentaire, est-ce que vous voulez répondre à votre
tour, M. le président?
M. Desjardins: Je pense que je suis d'accord avec M. Chevrette
sur les difficultés à caractère légal. Je voudrais
juste ajouter qu'au-delà de ça, si jamais on les solutionne, il
ne faut pas oublier l'aspect scientifique, la sécurité de la
femme au moment de sa grossesse et la nécessité d'avoir des
bébés avec le potentiel optimal de développement et de
productivité subséquents dans notre société.
La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le président.
Est-ce qu'il y a d'autres questions ou commentaires? M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Un seul commentaire sur ce
que disait à la fin le député de Joliette, qui me
paraît un peu gros, sur l'attrape-nigaud ou l'épouvantail qu'on
sort juste avant Noël comme un cadeau ou juste pour faire semblant,
l'image. Ça me paraît gros comme affirmation, compte tenu du fait
que ce même projet de loi-là a été
déposé au mois de juin et, n'eût été les
élections, aurait certainement été en commission
parlementaire bien avant le moment où nousy sommes. Dans ce cas
là. Je dis juste au député de Joliette: Attendez, vous
porterez votre jugement, vous aurez l'occasion de le faire sur le plan des
principes lorsqu'on redéposera le projet de loi à
l'Assemblée nationale. Je pense que c'est être un peu plus prudent
dans ce sens-là.
M. Chevrette: Mme la Présidente, II reste huit minutes de
mon temps. Je vais en prendre quatre certain pour répondre à
ça. D'abord, le Parlement devait siéger au moins le 15 novembre
pour que le projet soit accepté comme législation.
Deuxièmement, ça devait être une consultation
générale et le ministre a reviré ça en consultation
particulière avant les fêtes. Vous ne nierez toujours pas ces
faits-là. On avait annoncé une consultation
générale sur ce projet et tout d'un coup ça pressait,
ça urgealt. Les gens ont été obligés de venir.
Même jusqu'à la dernière minute, on a
téléphoné à du monde pour leur dire:
Préparez-vous, ça urge. Ce n'est plus une consultation
générale, c'est une consultation particulière. On n'a pas
voulu que les gens soient brimés. On a dit: II y a 20 groupes, on va
entendre les 20 groupes. Là-dessus, le ministre s'est montré
disponible pour au moins ajouter les groupes qui voulaient s'ajouter. Mais
c'est très sérieux comme législation. On ne prend pas
ça à la légère un projet de loi aussi important, si
important qu'à mon point de vue cela nécessite beaucoup de
dialogue, beaucoup de concertation. Si le ministre, par exemple, continuait
dans son idée de mettre ça dans les hôpitaux absolument,
moi je ne suis pas convaincu que les projets-pilotes vont être heureux.
C'est drôle! Quand un médecin comme le Dr Desjardins nous
répond qu'il ne participera pas et que c'est une clarté, d'une
limpidité sans équivoque, je serais Inquiet en maudit pour le
projet. S'il ne faut pas le changer tout de suite, on est malade. Si ceux qui
devraient participer dans des équipes multidisciplinaires nous le disent
carrément, aux yeux et au su de tout le monde, au cours d'un
enregistrement pour la postérité, si on ne change pas notre fusil
d'épaule Immédiatement, on est des malades. On accepte des
projets en fonction de quoi, si ce n'est pas de l'Image management"? C'est
ça que je veux dire. J'y tiens mordicus. Si on légifère,
on va légiférer dans le sens où on en a parlé. On
va donner des assurances pour que les projets aient toutes les chances de
réussir et rendent service à la collectivité. Ce n'est pas
se donner un projet de loi pour essayer de faire plaisir à quatre ou
cinq. Ce n'est pas de même que ça marche dans la
législation.
C'est dans ce sens-là que je dis que ce projet de loi
mérite énormément d'attention, mérite beaucoup
d'études et mérite également beaucoup de concertation,
d'autant plus que si on a fait notre lit pour les hôpitaux, cela change
bien l'approche par rapport, par exemple, à des projets pilotes qui
pourraient se tenir dans un CLSC ou dans une maison des naissances sous la
responsabilité d'un CLSC. Il y a aussi toute la dépendance
à l'égard des professionnels. Les sages-femmes demandent de
l'autonomie, le ministre la leur a garantie, les CLSC demandent que cela
dépende d'eux qu'elles soient des salariées du CLSC et qu'elles
exercent dans l'équipe de médecine de première ligne,
d'après ce que j'ai compris. Les omnipraticiens disent qu'ils ne veulent
pas participer, les spécialistes disent qu'ils ne veulent pas participer
et le ministre dit: Cela va se faire dans les hôpitaux et les
sages-femmes vont avoir de l'autonomie. C'est quoi, cela? Cela prend un
discours clair, simple aussi et pas 4012 structures pour contrôler tout
cela, quelque chose de très simple, de très cohérent qui
s'appuie sur un Code de
professions qui reconnaisse des pouvoirs, des privilèges, des
prérogatives, un code de déontologie, etc. Voyons. On ne s'en va
pas de môme à la va-comme-je-te-pousse, môme si Noël
approche.
La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le leader. Je ne
ferai pas de commentaires. Je pense que les gens qui présentent leur
mémoire ont ontendu ceux que j'ai faits tout à l'heure,
alor» Ils peuvent les extenslonner, si vous me pardonnez l'expression. M.
le ministre, je vous rappelle que votre temps est écoulé. Si, de
votre part, il y avait des commentaires, il y a un groupe qui suit et cela vous
permettra de les faire à ce moment-là, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je les ferai
définitivement à ce moment-là, parce qu'il y a des propos
du député de Joliette qui...
La Présidente (Mme Marois): Vous les ferez à ce
moment-là si vous le permettez, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, si vous me laissiez
terminer, s'il vous plaît. Les parlementaires ont encore quelques droits
autour de cette table, j'imagine.
La Présidente (Mme Marois): Très certainement et,
comme vous avez pu le constater, vous n'avez pas été brimé
à cet égard jusqu'à main-tonant.
M. Côté (Charlesbourg): Non, et je n'entends pas
l'être non plus. Je veux remercier M. Desjardins ainsi que ceux qui
l'accompagnent de leur présentation. Elle était très
franche du début à la fin et fort consistante. Je pense qu'on a
la position très claire de la Fédération et on va
très certainement se revoir, soit sur la périnatalité,
soit sur les sages-femmes.
Association des obstétriciens et
gynécologues du Québec
La Présidente (Mme Marois): Je remercie aussi la
Fédération. Merci, M. le ministre. J'appellerai maintenant
l'Association des obstétriciens et gynécologues du
Québec.
Si les membres de la commission veulent prendre leurs sièges,
s'il vous plaît. J'imagine, M. le président, que vous allez nous
présenter les gens qui vous accompagnent. Nous vous remercions
d'être là. Je voudrais, avant de vous laisser la parole, bien
indiquer aux membres de cette commission que jusqu'à maintenant aucun de
ceux-ci n'a été brimé dans son droit d'expression et
qu'aucun ne le sera pour le reste du temps que nous aurons à travailler
ensemble aux audiences concernant le projet de loi 4. À vous,
M. le président.
M. Rochette (Antonin): Je vous remercie, Mme la
Présidente. Je voudrais aussi vous remercier tout d'abord de nous avoir
offert de nous entendre lundi soir à 18 heures, mais, comme vous le
savez, les obstétriciens-gynécologues avaient déjà
prévu ce soir à 23 heures. Soirée pour soirée, on
est habitué, comme vous d'alllourH, à travailler à ces
heures peut êtro un peu Indues. (23 heures)
Mon nom est Antonin Rochette, président de l'Association des
obstétriciens et gynécologues du Québec. J'aimerais vous
présenter le Or Rodolphe Maheux, obstétricien-gynécologue,
à ma droite; le Dr Vita-Marya Senikas et le Dr Anne Fortin,
obstétriciennes-gynécologues, ainsi que le Dr Julia Villa,
obstétricienne-gynécologue et le Dr Marc Bureau, notre
président du comité de périnatalogie et
obstétricien-gynécologue.
J'aimerais tout d'abord, avant de lire, vous demander, s'il est
possible... J'ai un autre exposé à vous présenter dont
vous n'avez pas copie. Vous avez copie de notre mémoire. Maintenant,
j'ai des copies Ici, si vous voulez les avoir, et j'aimerais...
La Présidente (Mme Marois): Oui, nous aimerions. C'est
plus simple pour nous parce que, au fur et à mesure que vous en faites
la présentation, on peut annoter, on peut se préparer, quoi.
M. Rochette: Voilà! Mme la Présidente, M. le
ministre, Mmes et MM. les députés, les
obstétriciens-gynécologues du Québec, par la voie de leur
association, sont heureux d'avoir été invités à
vous donner leur opinion sur le projet de loi concernant la légalisation
des sages-femmes au Québec. En effet, un lobbying important à
l'intérieur même du ministère et par les divers
médias a permis à une minorité "surexprimée"
d'influencer les décisions ministérielles. Malheureusement, on
n'a pas jugé bon de nous consulter. Nous sommes donc très heureux
de pouvoir vous présenter ce soir notre point de vue sur la pertinence
d'un nouvel intervenant en périnatallté au Québec.
Nous devons vous rappeler que nous avons au Québec un des
meilleurs systèmes de santé au monde. En
périnatalité nos statistiques sont excellentes, tant du point de
vue de la mortalité périnatale que de la mortalité
maternelle. Le taux de mortalité périnatale, à 8,5 pour
1000 au Québec, se compare avantageusement à celui de tous les
pays développés. Très souvent, le Québec est
comparé aux Pays-Bas où on retrouve des sages-femmes et,
pourtant, leur taux de mortalité périnatale est de 10,4 pour
1000. Nos services de périnatalité sont donc excellents. Le
pourcentage des naissances de bébés de poids inférieur
à 2500
grammes est de 4 % aux Pays-Bas, alors qu'au Québec le taux est
de 6, 4 %. Il est vrai que nous avons plus de bébés de petits
poids mais, malgré cela, notre taux de mortalité
périnatale est meilleur. Cependant, nous reconnaissons que la naissance
de bébés de petit poids et la prématurité sont des
phénomènes fréquents chez nous.
Dans diverses régions de la province, il existe des
problèmes socio-économiques et c'est à ces endroits
principalement que nous retrouvons ces phénomènes. Nous ne voyons
pas ce qu'un nouvel intervenant en grossesse normale pourrait apporter à
l'équipe déjà existante des médecins, des
infirmières, des diététistes, des travailleuses et
travailleurs sociaux pour la prévention de la prématurité,
problème numéro un au Québec. C'est plutôt en
utilisant à meilleur escient ce personnel déjà en place et
ayant déjà identifié les problèmes que nous
rejoindrons ces gens des milieux défavorisés. C'est à ces
endroits qu'il faut mettre les ressources et non dans un nouvel Intervenant en
grossesse normale.
La santé de la mère et du bébé a toujours
été une priorité pour les infirmières, les
pédiatres, les médecins de famille et les
obstétriciens-gynécologues, lesquels ont tous contribué
à l'humanisation des soins en obstétrique en favorisant notamment
l'aménagement de chambres de naissances dans les centres hospitaliers et
en réhabilitant l'allaitement maternel. Jusqu'à 70 % à 80
% des femmes allaitent leur bébé. Elles sont aidées par
l'enseignement et par la participation du conjoint.
Au cours des dernières années, de grands pas ont
été franchis. Les chambres de naissances sont passées de
43, en 1983, à 81, en 1986, et le mouvement continue. Les vieilles
routines ont été abandonnées et remplacées par de
nouvelles. Les pères assistent à l'accouchement et à la
césarienne et, très souvent, les enfants et les
grands-parents.
Depuis toujours, les obstétriciens-gynécologues ont
été extrêmement préoccupés par la
santé de la mère et de l'enfant et sans cosse à
l'écoute des besoins de leur clientèle. Il y a quelques
années, le comité des femmes médecins de la Corporation
professionnelle des médecins du Québec a fait une étude
chez plus de 1000 Québécoises ayant accouché: 98, 5 %
étaient satisfaites de leur accouchement. Ces chiffres parlent
d'eux-mêmes. En 1986, une étude de l'Association médicale
canadienne montrait un taux de satisfaction de 97 %. Nous avons les meilleures
statistiques et on nous reproche des interventions telles la césarienne
et l'épisiotomie. Pourtant, le taux de césariennes de 17, 5 % au
Québec, actuellement, se compare à ceux du Canada et des
États-Unis. Quelles sont donc les principales causes des
césariennes, les césariennes itératives ou
répétitives, les sièges et les dystocies?
Césarienne un jour, césarienne toujours, disait-on
autrefois. Grâce à nous, cette affirmation n'est plus vraie. La
recherche faite par les obstétriciens-gynécologues a permis de
recommander, les conditions s'y prêtant, l'accouchement vaginal
après césarienne. Nous comptons sur le gouvernement pour pourvoir
ces centres obstétricaux de ressources adéquates afin de
favoriser cette pratique. Malheureusement, une femme sur deux ayant eu une
césarienne antérieure demande encore une deuxième
césarienne. Or, nous ne croyons pas qu'il soit possible, dans le
contexte actuel, d'obliger une femme ayant eu une césarienne
antérieure de tenter l'accouchement naturel si elle n'a pas le
désir de le faire. Les obstétriciens-gynécologues tentent
de convaincre par tous les moyens à leur disposition les femmes ayant eu
une césarienne antérieure d'accoucher par voie vaginale.
Dans la présentation du siège, les
obstétriciens-gynécologues pratiquent l'inversion par manoeuvre
externe afin d'éviter les risques Inhérents à un
accouchement par le siège. Avec ces méthodes, le taux de
césarienne est en diminution jusqu'à 50 %, dans certains centres,
et ce, grâce aux informations et à la recherche permettant de
rassurer quant à la faible morbidité de cette approche.
Cependant, nous devons souvent faire face au refus de la femme de courir un
risque, même minime, en présence d'une présentation du
siège. Lorsque nous expliquons à une femme que l'accouchement
vaginal du siège peut présenter un risque aussi petit que 1 %
pour son enfant, elle opte la plupart du temps pour la césarienne. Pour
la femme et son conjoint, la sécurité est primordiale pour son
enfant et pour elle-même.
Quant à la dystocie, il y a des projets de recherche, dont un
international coordonné au Québec et qui a reçu une
subvention d'un demi-million de dollars du Conseil de recherche médicale
du Canada.
Au sujet des épisiotomies, l'attitude générale des
obstétriciens-gynécologues est de pratiquer une
épisiotomie lorsqu'il y a des tensions importantes du
périnée et des possibilités de déchirure majeure
des organes génitaux externes, telle une lacération
para-urétrale ou clitoridienne. Il y a des indications précises
à l'épisiotomie. Si l'épisiotomie est aussi
décriée, pourquoi les sages-femmes veulent-elles avoir le
privilège de la pratiquer?
La situation budgétaire vécue dans les hôpitaux du
Québec a entraîné une augmentation des tâches des
infirmières dans les départements d'obstétrique avec une
diminution des postes permanents d'infirmières, ce qui a amené
une diminution de la présence constante d'infirmières
d'expérience auprès des femmes en travail. Il est plus Important
d'augmenter le nombre de ces infirmières faisant partie de
l'équipe de périnatalité dans les départements
d'obstétrique que d'ajouter un nouvel intervenant consacré
à une
minorité de Québécoises.
Nous serions intéressés de savoir si la population ne
désirerait pas, dans le cadre d'une politique gouvernementale nataliste,
une augmentation des fonds disponibles dans le retrait préventif et un
système de garderies beaucoup plus adéquat, tel qu'on en retrouve
en Europe et ailleurs. Nous serions intéressés de savoir
également si la population n'aimerait pas plutôt voir une
diminution de la prématurité en allant retrouver dans les milieux
socio-économiquement défavorisés les femmes les plus
à risque de prématurité et de morbidité
périnatale. De plus, l'état de grossesse de la femme n'est pas
toujours respecté au travail. La femme enceinte doit souvent travailler
dans des conditions difficiles et le retrait préventif n'est pas
toujours accordé.
Quant aux aspects médico-légaux, on pour se poser de
sérieuses questions. En effet, II existe actuellement plusieurs groupes
de sages-femmes et on retrouve, dans le projet de loi, un comité
formé de trois sages-femmes, d'une infirmière et d'un
médecin que j'appellerai le médecin de service. Les opinions de
ce médecin de service seront noyées à l'intérieur
de ce comité d'évaluation des critères de
compétence et de formation. Aux États-Unis, les sages-femmes qui
ne travaillent pas de concert avec les obstétriciens ne peuvent trouver
d'assurance-responsabilité professionnelle.
Dans le contexte actuel, avec toutes les pressions
médico-légales et l'intérêt croissant pour une
meilleure qualité de vie, il est sans conteste que les
obstétriciens-gynécologues accomplissent leur fonction avec
intérêt et un souci marqué de la santé des femmes et
des enfants du Québec. Les obstétriciens-gynécologues sont
aussi des chirurgiens. Ils n'ont pas été formés seulement
pour intervenir, tel que déjà mentionné, mais plutôt
pour offrir aux femmes une qualité de soins dépassant le simple
accompagnement.
Accoucher est un acte naturel, un événement normal et
heureux. Cependant, II peut devenir dramatique en l'espace de quelques
secondes, même avec une grossesse normale, et nécessiter des
interventions qui peuvent être accomplies seulement par un
médecin. Par exemple, une baisse soudaine du coeur foetal ou une
hémorragie importante peut survenir à tout moment, sans aucun
avertissement, et cela nécessitera une intervention immédiate
afin d'éviter un manque d'oxygène au cerveau du
bébé, conséquence si dramatique pour les parents et pour
la société.
Les femmes désirent la sécurité pour elles et leur
enfant. Pour assurer une sécurité maximale en dehors du centre
hospitalier, il faudrait des maisons de naissances avec un personnel et un
équipement adéquats équivalents à ceux des centres
hospitaliers. Si le gouvernement a de l'argent à investir, pourquoi ne
pas l'investir dans un hôpital plutôt que de dédoubler les
équipements? Il est illusoire de penser qu'on pourra
sélectionner, sans erreur ni conséquence dramatique, des
patientes pouvant accoucher dans de telles maisons. En cas d'urgence, un
transfert dans un hôpital, même très rapproché, peut
faire perdre de précieuses minutes souvent essentielles à la
naissance d'un enfant sain de corps et d'esprit. L'accouchement à
domicile est absolument inacceptable en termes de sécurité,
à partir du moment où la société s'est donné
un régime d'assurance-hospitalisation et d'assurance-maladie.
Notre perception du désir des femmes du Québec est que
tout doit être mis en oeuvre pour assurer le maximum de
sécurité à la mère et au nouveau-né, ce qui
a toujours été notre objectif. Nous pensons qu'avec les
ressources actuellement disponibles au Québec, II n'est point besoin de
sages-femmes. En cotte période d'austérité, telle
qu'annoncée récemment par le premier ministre, si le gouvernement
a encore des fonds disponibles en périnatalité, nous vous
recommandons de ne pas les gaspiller en faveur de nouvelles intervenantes dans
la grossesse et l'accouchement normal, mais bien plutôt de les utiliser
là où la population en a réellement besoin, soit dans la
prévention de la prématurité et de la naissance de
bébés de petit poids.
Dans le but d'humaniser tous les accouchements au Québec, il
faudrait encore donner aux centres hospitaliers des ressources pouvant assurer
dans les blocs obstétricaux un personnel permanent et suffisant à
la tâche. Pour consolider une politique nataliste, un support serait
nécvessaire pour la femme à la maison et la femme enceinte au
travail. Les politiques de garderie et le retrait préventif devraient
devenir des mesures sociales. (23 h 15)
Pour conclure cet exposé, nous sommes convaincus que de forcer
l'entrée d'un nouvel intervenant dans ce secteur est un danger pour la
santé de la mère et de l'enfant. Les fonds disponibles devraient
être investis dans les véritables priorités du
Québec. Le gouvernement devrait discuter avec les membres de
l'équipe de périnatalité et le projet de loi 4 devrait
être retiré.
Nous nous tenons à votre disposition pour discuter des vrais
problèmes d'obstétrique et élaborer avec vous une
véritable politique de périnatalité. Je vous remercie, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie, M. le
président. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente. C'est un mémoire qui est très dur,
livré de manière très dure aussi et qui fait son lot d'un
certain nombre d'affirmations que, personnellement, je ne peux pas laisser
passer. Ça commence dès le premier paragraphe où vous
dites: "En effet, un lobbying important à l'intérieur
même du ministère et par divers médias a permis à
une minorité "surexprimée" d'influencer les décisions
ministérielles. Malheureusement, on n'a pas jugé bon de nous
consulter". Je pense que ce sont des affirmations qui sont un petit peu
grosses.
On a parlé de sondages depuis tantôt, où 80 % de la
population désire qu'il y ait reconnaissance de la pratique des
sages-femmes. Si 80 % est une minorité, je n'y comprends plus rien Vous
dites ne |amais avoir été consultés On m'Informe - je
n'étais pas là - que, dans le petit document "La
périnatalité, la pratique des sages-femmes au Québec", un
document qui date de 1987, vous avez été associés à
cette démarche et que M. Pierre Blanchette,
gynécologue-obstétricien à l'hôpital du
Saint-Sacrement, était d'ailleurs un des membres... Ce que je comprends,
c'est qu'il y a quand même eu une certaine forme de consultation. Est-ce
qu'au moins, celle-là, vous la reconnaissez?
M. Rochette: Le Dr Pierre Blanchette? M. Côté
(Charlesbourg): Oui.
M. Rochette: C'est un obstétricien-gynécologue
à Québec, c'est un excellent bonhomme, mais c'est à titre
privé qu'il a été consulté.
M. Côté (Charlesbourg): À titre
privé?
M. Rochette: Ce n'est pas comme membre de notre association qu'il
a été consulté, mais bien à titre privé.
M. Côté (Charlesbourg): Et, en aucun temps, vous
n'avez été saisis de ce document pour exprimer votre opinion
comme regroupement.
M. Rochette: À ma connaissance, non, sauf pour un document
que nous avons fait parvenir, il y a plusieurs années, au
ministère. Je ne pourrais pas vous dire l'année.
M. Côté (Charlesbourg): En 1987. C'est à la
suite de ce document, semble-t-il.
M. Rochette: c'était... je ne me rappelle pas si c'est...
je ne peux pas répondre. je ne me rappelle pas, je n'étais pas
président à ce moment-là.
M. Côté (Charlesbourg): On me dit...
M. Rochette: Peut-être que d'autres se rappellent.
Rodolphe, est-ce que tu te...
M. Maheux (Rodolphe): Cela n'a pas été
sollicité par le ministère, mais dans l'élaboration de la
politique on a jugé bon, à un moment donné, de dire ce
qu'on pensait et d'écrire une politique sur ce qu'on devait penser parce
que jamais le ministère n'a sollicité les
obstétriciens-gynécologues qui sont pourtant ceux qui, sur le
plancher des vaches, ont leur opinion dans ce dossier-là; ce qui est
quand même surprenant.
M. Côté (Charlesbourg): Si jamais c'est ça,
c'est surprenant. Si jamais c'est ça - vous allez au moins me donner la
liberté, comme je n'étais pas là, de vérifier, mais
soyez sûrs qu'on va revenir, que ce soit oui ou non, avec des faits
précis, des dales et des documents s'il le faut.
Comment réagissez-vous devant un sondage qui dit que 80 % de la
population du Québec souhaite qu'il y ait reconnaissance de la pratique
des sages-femmes? Est-ce que vous ne vous sentez pas complètement
à contre-courant?
M. Rochette: Bon, est-ce que vous y croyez vraiment à ce
sondage de 80 %? J'aimerais bien connaître les modalités du
sondage. Parce que si, en 1986, l'Association médicale canadienne a fait
un sondage et que 97 % des femmes étaient satisfaites des soins qu'elles
ont obtenus... La même chose pour la Corporation il y a quelques
années, si on fait des sondages et on en a fait dans nos hôpitaux
ici à Québec, par exemple, je pourrais vous donner... Alors, les
gens sont satisfaits à 90 %, ou en haut de 90 %, à 95 %. Si, dans
votre sondage, vous parlez de 80 %, je serais curieux de savoir le nombre de
personnes interrogées qui savaient qui était une sage-femme,
qu'est-ce que ça faisait, une sage-femme.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, je ne
pense pas que l'un présume que l'autre n'est pas bon. Il est fort
possible quo les femmes dénotent 97 % de satisfaction à votre
endroit. Je pense que c'est normal et ce n'est peut-être pas contestable.
Ça n'empêche pas pour autant les femmes, au niveau du
Québec ou de la population en général, d'exprimer qu'elles
veulent la reconnaissance de la pratique des sages-femmes à 80 %.
Évidemment, vous savez, il y a toujours quelqu'un qui commande le
sondage. En règle générale, c'est pour avoir de
l'information et peut-être pour des fins précises, mais, au moins,
il y a une indication. Admettons que ce n'est pas 80 %, que c'est 60 %. C'est
déjà suffisamment important pour être capable d'en tenir
compte. Et moi, ça me paraît une indication assez importante.
À la page 2 de votre mémoire, au premier paragraphe, vous
dites: "Cependant, nous reconnaissons que la naissance de bébés
de petit poids et de prématurité sont des
phénomènes fréquents chez nous. " Pourriez-vous me dire
qu'est-ce que vous avez fait pour contrer ces phénomènes?
M. Rochette: Est-ce que tu veux répondre, Marc? Notre
périnatalogiste va... Alors, le Dr
Bureau.
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le président.
Oui, très certainement.
M. Bureau (Marc): Disons que c'est un problème qui
concerne tous les pays, la lutte contre la prématurité.
Actuellement, II y a des études qui ont été faites depuis
plusieurs années, entre autres en France, par un dénommé
Papler-nick, qui est très bien connu internationalement, ainsi que par
d'autres médecins en Californie. Ils ont été en mesure de
démontrer qu'on pouvait, avec des interventions sociales d'importance,
diminuer ce taux de prématurité et qu'on pouvait le diminuer
peut-être de moitié. Maintenant, l'implication que ça
avait, quant à toutes les structures en place pour le réaliser,
était dans le cadre de projets-pilotes qu'on pouvait augmenter
difficilement à l'échelle d'un pays. Alors, ils en sont
là. Justement, après avoir identifié, dans des
projets-pilotes, que ça pouvait fonctionner, ils en sont justement
à demander des ressources sociales pour pouvoir les réaliser,
pour pouvoir atteindre les gens les plus concernés par la
prématurité. Nous, ce qu'on fait, c'est que, d'abord, on a
sensibilisé nos membres aux facteurs de risque de
prématurité par le biais de l'éducation médicale
continue. On a aidé nos membres à essayer de les rechercher et
les dépister le mieux possible. Maintenant, tout le monde a fait le
constat que ça prend plus que des connaissances. Ça prend tout un
support, une structure sociale. On en est rendu là, à demander
cette structure sociale pour pouvoir le réaliser. Alors, c'est faisable,
médicalement. Ça s'est fait dans des projets-pilotes. On
espérerait pouvoir le faire le plus possible et tous les médecins
en sont bien conscients dans notre association.
M. Côté (Charlesbourg): Je l'ai dit ce matin et je
pense que c'est probablement une vérité de La Palice, vous le
dites vous-même, ce sont, en règle générale, chez
des adolescentes; deuxièmement, dans des endroits où
l'économie est faible et, troisièmement, dans des réglons
éloignées ou isolées. Un des problèmes très
importants au niveau du Québec, au moment où on se parle, c'est
d'avoir des médecins dans les réglons éloignées.
Donc, la troisième clientèle, qu'est-ce qu'on peut faire pour
régler ce problème-là? Parce que c'est ça. Tout le
monde vient ici et tout le monde nous parle de périnatalité et
d'efforts qu'on doit faire pour tenter de solutionner les problèmes et
d'avoir une politique de périnatalité. Ça inclut qu'on
devrait tenter de solutionner les problèmes de ces trois
catégories-là. Qu'est-ce qu'on peut faire pour régler le
problème des régions éloignées?
M. Rochette: Oui. Écoutez, je pense que le gouvernement a
déjà tenté et essaie encore de régler le
problème des régions éloignées. Il faut bien se
rappeler le décret, par exemple, où les jeunes médecins,
où les gens qui vont travailler dans les régions
éloignées sont mieux rémunérés que ceux qui
travaillent dans les villes; ça crée même certains
problèmes. Mais il y a certainement plus de médecins dans les
régions éloignées qu'il n'y en avait, je pense. Je pense
que, tout de môme, ça aide à solutionner le problème
des régions éloignées. Je ne travaille pas personnellement
en région éloignée, mais il semble bien que, dans
plusieurs régions, ça fonctionne, tout de même.
M. Côté (Charlesbourg): C'est-à-dire qu'on a
une bonne collaboration des fédérations, je pense, pour tenter
de...
M. Rochette: Je pense.
M. Côté (Charlesbourg): ...régler des
problèmes ponctuels.
M. Rochette: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Reste que le problème
de fond lui-même n'est pas réglé. Quand on parle de
périnatalité, des couches auxquelles il faut s'adresser, c'en est
une en particulier où il va falloir régler. Alors, si les
sages-femmes ont une bonne expérience pour régler les
problèmes à Povungnituk, peut-être que ça peut
être bon ailleurs aussi pour régler la sorte de problème
qu'on a. Est-ce que ça voudrait dire, dans ces cas-là, que les
sages-femmes seraient bonnes pour régler les problèmes là
où les médecins ne veulent pas aller?
M. Rochette: Pas nécessairement. Je ne vois pas pourquoi
elles pourraient.... Les médecins y vont; il y en a des médecins,
à Povungnituk, je pense, ou à ces endroits-là.
Rodolphe.
M. Maheux (Rodolphe): Moi, j'ai été dans les
régions éloignées; j'ai pratiquée dans le Nord du
Québec deux ans; je parle par expérience, j'y ai
été. Je suis revenu en spécialité et en
surspécialité, mais j'ai été en région
éloignée. Ici, on parle de prématurité, on ne parle
pas d'accouchement normal en région éloignée parce qu'en
région éloignée, quand un accouchement n'est pas normal,
on l'envoie en bas et on l'accouche en bas. Alors, on n'a pas de complications,
les accouchements vont tout le temps bien. Mais il y a une affaire qui est bien
importante: quand on parle de prématurité et de faire de la
prévention de la prématurité, ça ne prendra pas une
intervenante dans l'accouchement normal, ça va prendre des gens qui
seront capables d'aller la chercher, l'adolescente qui reste à
Saint-Sauveur, à Saint-Roch ou dans le bas de Montréal, et lui
dire: Viens consulter et, voilà, arrête de manger
des chips et de la liqueur et prends-toi une diète qui a du bon
sens. Ce n'est pas en ayant une nouvelle intervenante qui, foncièrement,
est spécialisée dans l'accouchement normal qu'on va régler
ce problème-là et c'est notre problème chez nous, c'est
là qu'est notre trouble. On perd des bébés parce qu'ils
naissent avant le temps. Et notre problème, on ne le réglera pas
en ayant une nouvelle intervenante dans un accouchement normal, c'est bien
évident, l'accouchement n'est pas normal dans ces cas-là.
M. Côté (Charlesbourg): Je pense qu'on va finir par
se comprendre et se rejoindre, à un moment donné, parce qu'on
parle d'avant, pendant et après. Vous voyez que j'ai bien appris mes
leçons. C'est un problème... Quand on s'adresse à ces
problèmes spécifiques, c'est un problème d'avant et c'est
un problème d'après, ce n'est pas un problème de pendant.
Qu'est-ce que vous avez fait ou qu'est-ce que vous suggérez au
gouvernement de faire, autrement que d'investir des sommes d'argent, pour
régler ces problèmes-là?
M. Maheux: Qu'est-ce qu'on a fait au départ, dans le
passé? On peut facilement dire que le comité de mortalité
périnatale au Québec, c'est un
gynécologue-obstétricien qui l'a fondé sans une mosus de
cenne, le gars l'a fait de ses soirs et de ses fins de semaine. D'abord,
simplement répertorier qui mourait au Québec et savoir dans
quelle région ils mouraient et pourquoi, s'il y avait quelque chose
qu'on pouvait faire. Au départ, c'était un travail de
défrichage qui a été fait par un gynécologue de
Québec, Dr Roger Brault qui est décédé mais qui,
quand même, a défriché pas mal de terrain pour identifier
quels étaient les facteurs de risque. Je pense qu'actuellement, ce qu'on
peut faire... Je pense qu'un "screenlng" Important doit être fait en
début de grossesse, cela veut dire Identifier si la grossesse va se
dérouler de façon normale ou anormale. Il y a des facteurs de
risque qui peuvent être identifiés là-desssus. Je pense que
le gouvernement peut insister à partir des structures mêmes qu'il
a actuellement: les départements de santé communautaire, les
CLSC, toutes les structures qu'il a à sa disposition pour essayer de
retrouver, d'aller chercher par les écoles, les CLSC, par des programmes
dans les... Je ne sais pas, moi, elle doit avoir passé un test de
grossesse quelque part, cette petite fille-là, pour savoir qu'elle est
enceinte. Il s'agit de retrouver ces gens-là pour essayer de les amener
à avoir, d'abord, une certaine éducation pour savoir de quelle
façon la grossesse va se dérouler et les aider. II peut y avoir
des grossesses qui, souvent, sont très difficiles. Ce sont souvent des
grossesses plus ou moins désirées, qui peuvent être
cachées, dans certains cas, et elles ont besoin d'une aide qui ne se
fera pas avec une inter- venante dans un accouchement normal.
M. Côté (Charlesbourg): À l'occasion, vous
feriez un bon politicien qui ne veut pas répondre à la question.
Mais, évidemment, on me dit que... Dr Brault, je pense qu'il faut lui
rendre un témoignage tout à fait vibrant, effectivement, c'est
vrai qu'il faut le reconnaître. Alors, comme vous le soulignez, aussi
bien que la commission l'admette elle-même d'emblée.
A la page 2 toujours, vous dites: "La santé de la mère et
du bébé ont toujours été une priorité pour
les infirmières, les pédiatres, les médecins de famille et
les obstétriciens-gynécologues. " Quand j'ai entendu ça
tantôt, j'ai dit: Oui, c'est vrai, tout le monde... Je pense que personne
ne peut mettre ça en doute. Cependant, j'ai dit: Partait! une
priorité pour les infirmières! Cela m'a rappelé que, cet
après-midi, la Fédération des infirmières et
infirmiers du Québec est venue ici déposer un mémoire de
43 pages, très étoffé, dans lequel elles disent: II est
clair, nous devons reconnaître la pratique des sages-femmes et, nous
aussi, on parle d'expérience parce qu'on est là, nous aussi, dans
les centres hospitaliers quand ça se passe, et un peu partout. Je trouve
ça... J'ai de la misère à concilier les deux parce que
vous êtes deux et vous sembliez dire, tantôt: Elles sont tellement
bonnes, puis il n'y en a pas assez, vous devriez en ajouter et, celles à
temps partiel, les rendre permanentes et mettre de l'argent là. Elles
sont tellement bonnes que vous devriez faire ça. Leur opinion à
elles, c'est qu'on devrait reconnaître la pratique des sages-femmes.
Qu'est-ce que vous pensez de ça? (23 h 30)
M. Rochette: C'est leur opinion. Je n'ai pas à juger leur
opinion.
M. Côté (Charlesbourg): Elle est aussi valable que
la vôtre, co que je comprends.
M. Rochette: Absolument.
M. Côté (Charlesbourg): Partait!
M. Rochette: Sûrement.
M. Côté (Charlesbourg): Si on continue, on arrive
à la page 6 et, là, vous n'êtes pas très tendre
vis-à-vis de celui qui oserait se sacrifier pour être au
comité d'évaluation. Il est dit: Les opinions de ce
médecin de service - on le qualifie déjà avant même
qu'il accepte de faire la job - seront noyées à
l'intérieur d'un comité d'évaluation des critères
de compétence et de formation. Ça me tente presque de vous dire
une chose: Vous, Dr Rochette, ça ne vous Intéresse pas
d'être dessus?
M. Rochette: Non, certainement pas parce qu'il va y avoir trois
sages-femmes qui vont tout
décider. Il n'y a aucune...
M. Côté (Charlesbourg): C'est parce que si vous
acceptiez, vous ne seriez pas de service.
M. Rochette: Je serais peut-être de service, mais je pense
qu'on aurait de fortes discussions.
M. Côté (Charlesbourg): Pourquoi pas? M.
Rochette: Pourquoi pas?
M. Côté (Charlesbourg): Donc, la proposition reste
ouverte.
M. Rochette: Ça reste ouvert.
M. Côté (Charlesbourg): La proposition reste ouverte
et je pense que ça pourrait être très intéressant
parce que l'idée n'est pas de faire un beau petit comité
paqueté d'avance qui va finir par aider ces choses-là. C'est trop
sérieux pour qu'on l'envisage de cette manière. Vous serez
très certainement la première personne que l'on appellera pour
lui offrir la possibilité.
À la page 7, très rapidement, il est dit à la fin
du dernier paragraphe, dernière phrase: Les femmes désirent la
sécurité pour elles et leur enfant. Il y a un principe
extrêmement important dans tout ce qu'on a dit depuis le début,
c'est la liberté de choix de la femme. Est-ce qu'on ne peut pas, en
disant ce beau principe, cette belle phrase, admettre qu'elle aura la
liberté de choisir si elle veut se faire accoucher ou non par une sage
femme? Est-ce qu'elles n'ont pas aussi cette liberté?
M. Rochette: J'espère qu'elles vont la conserver.
La Présidente (Mme Marois): Pour la conserver, ça
prend un certain nombre de conditions, dont la possibilité qu'elles
aient accès à des services de sages-femmes.
M. Côté (Charlesbourg): Ça va pour le
moment.
M. Rochette: Je pense qu'on respecte absolument la liberté
de chaque femme. Ce que l'on veut, ce que l'on dit, c'est qu'un accouchement
normal peut se compliquer extrêmement rapidement. Ce n'est pas vrai de
dire qu'une femme qui a eu une grossesse parfaitement normale, un travail
parfaitement normal, un accouchement parfaitement normal... Dans les trois ou
quatre dernières minutes, ça peut se compliquer extrêmement
rapidement. Le meilleur intervenant, le meilleur obstétricien, le
meilleur médecin ne peut pas nécessairement le prévoir.
C'est là qu'est lé danger. Quand on volt, dans des revues, des
cours de sage-femme par cor- respondance, madame, ça nous
inquiète. N'est-ce pas?
La Présidente (Mme Marois): Je partage tout à fait
votre point de vue.
M. Rochette: Voilà!
La Présidente (Mme Marois): S'il fallait que...
M. Rochette: Ça, c'est primordial.
La Présidente (Mme Marois):... nous allions vers des cours
pour sage-femme par correspondance, je m'objecterais formellement à une
telle chose. Est-ce que, M. le ministre, vous avez d'autres questions à
poser?
M. Côté (Charlesbourg): Ça va pour le
moment.
La Présidente (Mme Marois): Ça va. Oui, vous avez
une question, M. le député de Verdun, parce que le temps est
réduit. Il ne nous reste plus beaucoup...
M. Gautrin: Merci, Mme la Présidente. Quand vous
êtes rentré sur la question de la formation des sages-femmes par
correspondance, je voudrais revenir toujours sur cette espèce de
question: Quelle serait, d'après vous, une formation adéquate
d'une sage-femme? Est-ce que vous éliminez le principe...
M. Rochette: C'est un cours de médecine, c'est aussi
simple que ça.
M. Gautrin: Vous ne répondez pas à ma question.
M. Rochette: Vous avez quatre ans de médecine. Ce n'est
pas seulement une question de technique, il y a une question de physiologie, il
y a une question de pathologie, il y a une question d'anatomie. C'est beaucoup
plus complexe. Dr Bureau...
La Présidente (Mme Marois): Oui, Dr Bureau.
M. Bureau: II y aurait un commentaire à ce sujet. On parle
de globalité, c'est un terme qui est revenu et qui a l'air
extrêmement populaire. Je tiens à dire, d'abord, que les
médecins accordent des soins globaux aux patientes. C'est très
important que ce soit compris comme ça. On fait de l'antepartum, on voit
les patientes pratiquement une dizaine de fois si elles se présentent
tôt en grossesse avant l'accouchement. On a le temps de jaser amplement
des problèmes qu'elles ont. On les voit à l'accouchement,
après
l'accouchement et on s'informe des problèmes qu'il pourrait y
avoir. On est entièrement disponible pour les aider en ce sens.
Maintenant, il y a quelque chose de plus. A un moment donné, c'a
été mentionné, c'est que l'accouchement et tout ce qui
l'entoure concernent le système reproducteur chez la femme. Le
médecin peut offrir, en plus de ses connaissances en obstétrique
et en gynécologie, ses connaissances sur toute la personne. La
globalité des connaissances sur toute la personne est importante pour
déceler des problèmes. On dit, quand on fait un cours de
médecine - et ça semble assez clair - qu'on va trouver ce que
l'on cherche, et pour chercher des choses II faut savoir des choses. On n'a pas
trop d'un cours de médecine pour apprendre tout ce qui peut être
complexe et "intertriqué" dans le corps humain. C'est pour ça
qu'on pense que le médecin a un avantage: en plus de faire la
globalité obstétricale et gynécologique, il a la
globalité médicale.
La Présidente (Mme Marois): Vous vouliez ajouter quelque
chose à cette Intervention?
M. Maheux: On rit quand on dit que ça prend un cours de
médecine ou quoi que ce soit, mais je vous réfère à
l'article 2 de votre projet de loi déposé où on dit:
"...l'exercice de la pratique des sages-femmes comprend notamment
l'éducation prénatale des parents, l'éducation sanitaire
de la famille, les soins préventifs, le suivi de grossesse, le
dépistage de conditions anormales chez la mère ou l'enfant,
l'accouchement, la planification familiale et l'enseignement des soins à
donner au nouveau-né." Sacrifice! c'est un cours de médecine que
ça prend pour faire ça! Je pense que, dans le cadre qui est
défini, ce n'est pas tel que défini dans un projet de
sages-femmes qu'on rencontre aux États-Unis, par exemple, ou dans
d'autres pays.
Le député de Charlesbourg a dit que la patiente va garder
la possibilité de choisir si elle veut être accouchée par
un obstétricien ou par une sage-femme. C'est vrai mais, d'un autre
côté, comme législateurs, vous avez le devoir de vous
assurer qu'elle aura autant de sécurité dans une hypothèse
que dans l'autre. Quand vous disiez tout à l'heure que les
infirmières étaient peut-être d'accord avec un projet de
sages-femmes et que ce ne serait peut-être pas dangereux, c'est dans le
cadre d'une équipe où les gens travaillent ensemble.
Actuellement, vous faites un projet de loi où les sages-femmes sont dans
un ghetto, dans un petit coin de l'hôpital, à part. On ne parle
pas d'équipe, on dit qu'elles ont leur conseil des sages-femmes, elles
sont hors des structures qui contrôlent normalement un hôpital,
dans un endroit tout à fait à part. Ce n'est pas un travail
d'équipe, M. Côté.
M. Côté (Charlesbourg): Mais vous êtes
prêt à participer à un travail d'équipe.
M. Maheux: Bien, on verra, d'abord, comment vous allez le
définir, dans un premier temps.
M. Côté (Charlesbourg): Ah!
M. Maheux: Je pense qu'au départ, dans la
définition telle que vous l'apportez actuellement, une sage-femme fait
de la planification familiale. Je dois vous dire que quand on donne des pilules
anticonceptionnelles a une femme et qu'elle a des migraines, il faut savoir si
elle risque de faire une embolie cérébrale ou non. Et ça,
ce n'est pas drôle. Quand on dit que ça prend un cours de
médecine, il faut qu'elle ait ces compétences si vous lui donnez
ces pouvoirs.
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): C'est trop invitant, surtout
quand on m'identifie comme le député de Charlesbourg. Je ne
déteste pas ça, d'ailleurs. C'est simplement pour vous dire qu'il
serait très intéressant que vous acceptiez ce principe d'un
comité plus ouvert auquel vous pourriez participer, exactement comme
ça se passe ailleurs, en Europe. Il n'y a personne, jusqu'à
maintenant, qui n'en a fait la démonstration, autrement que de dire que
la pratique, en Europe, est en perte de vitesse, mais qu'il y a quand
même pratique, qu'elle est reconnue et, là aussi comme ailleurs,
il y a des spécialistes, il y a des omnis. Cette pratique est reconnue
là-bas et elle se fait, semble-t-il - en tout cas, il n'y a pas grand
monde qui a réussi à prouver le contraire - dans des conditions
très acceptables pour la santé et la sécurité des
femmes. Je ne comprends pas la résistance qu'il y a à vivre cette
expérience cho/ nous alors qu'elle est vécue aux
États-Unis, qu'elle est vécue en Europe et qu'elle donne des
résultats qui ne sont pas si mauvais, lorsqu'on compare les
statistiques.
La Présidente (Mme Marois): Oui, une réponse...
Une voix: Dr Villa voulait intervenir.
La Présidente (Mme Marois): ...et, par la suite, je vais
passer la parole aux gens de l'Opposition.
Mme Villa (Julia): Je voulais revenir sur le dépistage et
sur la façon de traiter des patientes qui ont un accouchement
prématuré. On tient à vous dire qu'en 1974 on a
commencé à fonder des cliniques de grossesse qui sont
multidis-clplinaires parce qu'il y a une infirmière, un travailleur
social ou une travailleuse sociale, une
diététicienne, et tout le monde s'occupe de ces femmes
enceintes pour éviter ces problèmes et pour travailler avec les
personnes qui ont des problèmes surtout psychosociaux. On a fait
beaucoup. On a demandé, déjà, au niveau des comités
de périnatalité, d'Implanter ces cliniques de grossesse dans tous
les hôpitaux du Québec, ce qui pourra aider
énormément cette cause-là, mais je pense qu'ils n'ont pas
d'argent pour ça.
D'autre part, quand le ministre parle des sondages, on tenait à
vous dire que 50 % des femmes du Québec veulent accoucher sous
péridurale. Cela ne les intéresse pas du tout, l'accouchement
naturel. Alors, au départ, vous avez 80 % des patientes qui veulent une
sage-femme, mais il y a 50 % qui veulent une péridurale. Alors, il y a
quelque chose qui ne marche pas dans ça, certain. Nous, dans les
hôpitaux, à la suite de l'accouchement, on leur fait remplir une
feuille et on a 97 % qui sont contentes de l'accoucheur et du personnel de
l'admission. Alors, je vois mal comment vos sondages et nos sondages peuvent
tous se rencontrer à un point.
La Présidente (Mme Marois): Si vous le permettez, les
sondages peuvent se rencontrer dans le sens où je ne pense pas que ce
qui est remis en question, ce soit la qualité de votre pratique. C'est
le fait que des personnes puissent souhaiter avoir le choix d'une autre
pratique. C'est ça, dans le fond, la question qui est soulevée et
à laquelle une majorité de personnes répondent oui. Ce qui
ne remet pas en question les services rendus et, justement, c'est pour
ça que je suis toujours un peu étonnée de vous entendre,
parce que vous ave/ l'air, chaque fols, du vous sentir très
menacés, alors qu'il ne m'apparaît pas, dans toute la perspective
et dans tout le débat que l'on a, que vous soyez menacés, que
votre pratique soit remise en cause, que la qualité de votre pratique
soit remise en cause. On dit: On veut pouvoir avoir accès - et c'est ce
que je comprends du résultat du sondage - à un autre type de
pratique qui peut être tout aussi intéressant et se
présenter dans un contexte différent.
Vous pourrez sûrement avoir l'occasion d'y revenir. Il reste
quelques minutes. J'ai des choses avec lesquelles j'ai de la difficulté
à être d'accord, a moins que vous ne me donniez une information
différente, et que vous présentez dans votre mémoire.
À la page 2 vous mentionnez que la santé de la mère et du
bébé ont toujours été une priorité pour les
infirmières. Je suis tout à fait d'accord avec ça, ce
n'est pas là que j'en suis. On dit: ...lesquels ont tous
contribué à l'humanisation des soins en obstétrique en
favorisant, notamment, l'aménagement de chambres de naissances dans les
centres hospitaliers et en réhabilitant l'allaitement maternel.
Jusqu'à 70 % à 80 % des femmes allaitent leur bébé.
Elles sont aidées par l'enseignement et la participation du
conjoint.
Mon souvenir, et il est peut-être mauvais, c'est qu'il y a eu des
batailles épiques - et le Dr Villa va sûrement s'en souvenir aussi
- pour implanter des chambres de naissances dans les centres hospitaliers et
où il y a eu une résistance épouvantable à cette
implantation-là. Mes souvenirs sont peut-être mauvais - et quand
je m'adresse au Dr Villa je ne pense surtout pas au Christ-Roi où elle a
pratiqué; je ne sais pas si elle pratique toujours là où
ça s'est implanté relativement facilement - mais j'ai en
mémoire des cas un peu plus difficiles, disons. Alors, j'ai de la
difficulté à accepter cette affirmation-là dans votre
mémoire.
M. Rochette: Écoutez, ce n'est pas mon expérience.
Chez moi, ça n'a pas été un problème pour une
chambre de naissances et dans d'autres hôpitaux, je pense qu'à
Montréal le Dr Senikas pourrait peut-être vous dire...
Mme Senikas: Je peux vous dire qu'à Montréal,
à l'hôpital Royal-Victoria, au Jewish General, les hôpitaux
qui font encore de l'obstétrique, la salle... Nous, on a de nouveaux
plans selon notre budget et le problème pour avoir des chambres de
naissances, c'était justement de trouver des fonds budgétaires
parce que c'est cher pour faire une rénovation pour des naissances
naturelles à l'hôpital. Finalement on a tiré de l'argent
d'un autre centre, on a eu moins de choses là pour avoir une chambre de
naissances, mais la plupart des hôpitaux, chacun à
Montréal, ont des chambres de naissances sans problème, puis
c'était suscité par les obstétriciens
La Présidente (Mme Marois): Maintenant. Mais je vous
rappelle qu'il y a un temps où ce n'était pas le cas et qu'il y
avait manifestement des objections dans le milieu.
Mme Senikas (Vita-Marya): madame, je peux vous dire, je suis en
pratique depuis dix ans, résidente depuis 1974. peut-être avant
ça, je ne suis pas si vieille que ça...
La Présidente (Mme Marois): Pas avant ça.
Mme Senikas: ...mais depuis les quinze dernières
années les démarches qu'on a faites ont été faites
avec de bonnes intentions. Nos problèmes étaient de trouver des
fonds pour faire les changements. On a encore des problèmes pour trouver
des fonds, même pour faire de meilleures améliorations dans nos
salles d'accouchement, des améliorations qui vont
bénéficier aux femmes.
(23 h 45)
La Présidente (Mme Marois): J'ai remarqué que, sur
cet aspect-là, j'ai toujours trouvé aussi un peu bizarre que
finalement, pour organiser une chambre des naissances qui, pour
l'essentiel,
est une chambre où la couleur est un peu plus douce et où
il y a des rideaux et un bon lit, ça coûtait bien plus cher qu'une
autre chambre à côté. Remarquez que je peux, encore
là, être dans l'erreur et je peux me tromper, mais J'ai osé
croire parfois que cette objection sur les budgets cachait d'autres types
d'objections.
Mme Senikas: Du tout. Un lit pour accoucher, c'est 18 000 $, un
lit de type comme ça. C'est cher de faire de la rénovation; c'est
cher de faire de la peinture; c'est cher de trouver des rideaux et de faire des
changements. C'est cher de trouver des chambres et c'est une question de
travailler dans le sens budgétaire.
La Présidente (Mme Marois): D'accord, je vais...
M. Maheux: Mme Marois.
La Présidente (Mme Marois): Oui.
M. Maheux: Juste pour vous dire aussi, c'est qu'il y a... Il faut
que vous tassiez le rideau pour regarder ce qu'il y a en arrière, parce
que dans cette chambre de naissances, vous avez tout le "backup" donné
d'un hôpital. Vous avez des entrées d'oxygène...
La Présidente (Mme Marois): Vous parlez à quelqu'un
qui a eu quelques expériences à cet égard!
M. Maheux: C'est ça, exactement. Alors, c'est pour
ça que ça coûte peut-être un peu cher.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Vous mentionnez
à la page 5 de votre mémoire qu'on devrait aller plutôt, si
on veut avoir une politique gouvernementale nataliste, vers une augmen tation
des fonds disponibles dans le retrait préventif, un système de
garderies, etc. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Mais vous
semblez, par une approche comme celle-là nous dire que d'implanter des
expériences-pilotes de sages-femmes va générer à ce
point des coûts que ce même argent que l'on mettrait là, on
devrait le virer vers d'autres activités. Or, que je sache, il ne
naîtra pas... C'est vrai que des mesures comme celles-là
pourraient faciliter le choix des parents de mettre au monde des enfants. Mais,
que je sache, il ne naîtra pas, dans les quelques années qui
viennent, beaucoup plus d'enfants que le nombre qui naît maintenant. Or,
il s'agit tout simplement, si on veut implanter une nouvelle approche, de
réallouer des ressources. Ça ne devrait pas - et le ministre
lui-même a posé des questions à cet égard à
d'autres qui sont venus avant vous - coûter substantiellement des sommes
beaucoup plus importantes. Alors, j'ai de la difficulté à
accepter ce point de vue, en disant: Les ressources que l'on mettra à
reconnaître la pratique des sages-femmes devraient être des
ressources qu'on diversifie vers d'autres types de projets.
Mme Senikas: Si je peux... Je peux juste faire le commentaire...
Mol, je suis membre du comité qui fait les statistiques chaque mois au
Royal Victoria au niveau du nombre d'accouchements et tout ça. Le
gouvernement veut qu'on ait plus de bébés. Le gouvernement donne
des bénéfices d'impôt et tout ça pour avoir des
enfants. Nous, on a déjà vu une augmentation du nombre
d'accouchements à notre centre hospitalier de 15 %.
Je ne peux pas vous dire qu'on a nécessairement reçu les
fonds pour ces 15 % d'augmentation. La politique est... Maintenant, on a 1,2
enfants par famille. On veut que ces statistiques augmentent. Alors, on
prévoit une augmentation du nombre d'accouchements dans l'avenir et il
faut quand même avoir des fonds pour ça.
La Présidente (Mme Marois): Oui, je suis d'accord avec
vous que ça prend des fonds pour cela. Mais je ne crois pas - vous
n'avez pas répondu à ma question - que le fait que l'on permette
la pratique des sages-femmes fasse en sorte que l'on augmente, d'une
façon importante, toutes choses étant égales par ailleurs,
les sommes allouées lors de la naissance d'enfants.
Mme Villa: Cela dépend comment vous allez l'organiser. Si
vous organisez des chambres de naissances, si vous organisez des maisons
à l'extérieur avec un petit laboratoire, avec tout, ça va
coûter très cher.
La Présidente (Mme Marois): Ça coûtera un
investissement de départ, j'imagine bien.
Mme Villa: Oui, et...
La Présidente (Mme Marois): Cependant, comme vous
êtes d'accord aussi pour qu'il y ait des chambres de naissances et pour
qu'il y ait d'autres types de pratique qui se développent, si je
comprends bien, même si c'est vous qui les supervisez, ça
coûtera aussi des investissements à ce moment-là.
Mme Villa: Oui mais, ça, c'est déjà en
place. Il faut recommencer à neuf.
La Présidente (Mme Marois): D'accord, merci. Mon
collègue veut aussi poser une question. Je vais en poser une
dernière: c'est sur la formation. Vous m'avez entendue aussi tout
à l'heure, donc vous savez où je veux en venir. Il me semble que,
si on va trois ans à l'université, ce qui est le cas dans les
propositions que l'on
nous fait à cet égard, pour être reconnue comme
sage-femme, j'imagine qu'on va nous expliquer un certain nombre de
phénomènes dont, bien sûr, le système reproducteur
et, évidemment, tout ce qui entoure la planification des naissances,
j'imagine. Donc, on expliquera les risques qu'il y a à prendre ou non
des contraceptifs, de quel type, etc.
Vous ne réussisez pas à me convaincre - j'aimerais bien
que vous le fassiez - que trois ans de formation dans une université,
avec des spécialistes, avec des gens qui ont des expériences, qui
va concerner, pour l'essentiel, le suivi d'une grossesse, ne va pas donner les
outils nécessaires aux personnes pour ensuite pratiquer, compte tenu
qu'un médecin, bien sûr, il a cinq ans de formation, il a des
années de supervision, mais il est un généraliste que je
sache et il fait, quoi, 30 accouchements, dit-on, en moyenne - du moins ceux
qui vous ont précédé - nous disait-on, par année,
quand on est un généraliste. On ne remet pas en question leur
pratique, et je ne la remets pas en question non plus. Alors, j'ai de la
difficulté à vous suivre quand vous me dites que ce sera
insuffisant.
Mme Senikas: Moi, madame, j'ai fait quatre années
d'université - je suis de l'ancienne école - quatre années
de médecine, une année d'internat, cinq années de
résidence et une année de périnatalogie, mais je peux
encore apprendre quelque chose. Trois années de formation ne sont pas
assez pour tout ce que vous avez dans votre projet ici. On voit maintenant des
étudiants en médecine qui, au lieu de prendre une année
d'internat, doivent prendre deux années d'internat. C'est la fameuse
médecine de famille. On revient maintenant à l'ancien temps de
mon père où on faisait deux années d'internat. Même
à la suite de ça, quand on voit des médecins qui sortent
et surtout des médecins qui veulent faire de l'obstétrique, ils
font des stages spéciaux supplémentaires. Chaque année,
c'est nous qui prenons les appels de Povungnltuk, Fort Chlmo, Kuujjuaq
où les médecins nous demandent de faire des stages de trois mois,
six mois. Pourquoi? Parce qu'ils ne se sentent pas confortables et ça,
c'est après quatre années de médecine, des années
d'université et des années d'internat. Vous, vous parlez de trois
années seulement.
La Présidente (Mme Marois): Oui, mais attention! Vous
parlez, vous, d'une pratique d'obstétricienne ou de
gynécologue.
Mme Senikas: Moi, je me réfère à ce qu'il y
a dans le projet, le paragraphe dans le projet.
La Présidente (Mme Marois): D'accord, mais j'imagine que,
lorsque vous me parlez de votre formation, c'est celle d'une
obstétricienne ou d'une gynécologue. Oui ou non?
Mme Senikas: Non, je peux vous dire que ce que j'ai est conforme
à ce que vous demandez dans votre projet. Quand j'y fais
référence, c'est parce que je suis impliquée dans
l'enseignement des étudiants. Alors, quand on prend notre livre, les
étudiants, ce qu'ils doivent connaître, c'est ce qui est dans
votre projet, et pour les résidents, le CROG, le Conseil des
résidents, des obstétriciens et gynécologues, c'est la
même chose.
La Présidente (Mme Marois): Nous pourrions débattre
longuement encore, sûrement, la question, parce que je ne partage pas
votre point de vue et vous n'avez pas répondu à une partie de ma
question. M. le leader, vous aviez une question.
M. Chevrette: J'en avals deux. Mais je vais être
obligé de n'en poser qu'une.
La Présidente (Mme Marois): Parfait, ça ne fait
rien.
M. Chevrette: Si je la posais en deux volets? M. le
président, comment expliquez-vous que, dans certains milieux, les
gynécologues, entre autres, ne veulent plus faire d'accouchements?
Comment expliquez-vous ça?
M. Rochette: Ce n'est pas la majorité, d'abord, des
obstétriciens et des gynécologues. Il y a plusieurs raisons. Il y
a la question de la qualité de vie, n'est-ce pas? C'est un travail
extrêmement dur. Personnellement, ça fait 21 ans, je m'en vais sur
22 ans; la nuit, les fins de semaine, c'est dur. Il y a aussi
l'assurance-responsabilité professionnelle. On ne peut pas le nier.
Cette année... Quand j'ai commencé en pratique, M. Chevrette,
ça me coûtait 25 $ pour m'assurer, en 1968. Aujourd'hui, en 1989,
1990 l'an prochain, ça va me coûter 11 950 $. Ce n'est pas cher,
lorsqu'on compare avec les États-Unis. Mais II y a eu un
phénomène quelque part.
Ce sont des facteurs qui font que les obstétriciens qui
vieillissent, aussi, délaissent l'obstétrique pour se concentrer
plus sur la gynécologie. Par contre, les jeunes obstétriciens
font de l'obstétrique parce qu'il faut bien penser qu'il y aura toujours
une clientèle qui choisira un obstétricien-gynécologue
pour être suivie en grossesse. C'est son droit le plus strict. Une autre
choisira un omnipraticien. J'étais heureux d'entendre, encore ce soir,
qu'il y a une augmentation des jeunes omnipraticiens pratiquant
l'obstétrique.
M. Chevrette: Dans votre mémoire...
M. Rochette: Un facteur, c'est certainement la qualité de
vie, on ne peut pas le nier.
M. Bureau: D'ailleurs, ce qui nous déçoit dans les
poursuites, c'est que, malgré tout l'intérêt et tous les
efforts qu'on met pour assurer la sécurité de la mère et
de l'enfant, quand il y a des poursuites, justement, malgré tout, les
gens ont l'impression, fondée ou non - la plupart du temps, non - qu'il
n'y a pas eu les normes de sécurité requises. Donc, ça
veut dire que c'est une préoccupation majeure de la population qui est
prête, d'ailleurs, à guetter la moindre faute ou manquement
à la sécurité de la mère et de l'enfant. On est
préoccupé de voir comment la population pourrait réagir
vis-à-vis des sages-femmes à cet égard.
La Présidente (Mme Marois): Est-ce que ça va?
M. Chevrette: J'aurais une petite question. Dans votre
mémoire - ça m'a frappé - vous dites que des femmes
demandent des césariennes à répétition par
convenance sociale. Pourriez-vous m'expliquer ça?
M. Rochette: C'est malheureux à dire, mais c'est
ça, c'est un fait qu'on vit fréquemment. Une femme a eu une
césarienne à cause d'une présentation du siège ou
d'une dystocie, mais disons à cause d'une présentation du
siège. On discute avec elle, on lui offre d'essayer d'accoucher
naturellement par voie vaginale et elle nous dit: Non, je veux avoir ma
césarienne tel jour, à telle heure. Cela va être
cédulé et je vais entrer à l'hôpital. Si je lui dis:
Madame, il faut que vous accouchiez naturellement, qu'elle accouche
naturellement et qu'il arrive un accident, que l'utérus se rupture et
que le bébé ait un problème neurologique Encore tout
récemment, l'Association canadienne de protection médicale nous
disait d'être très prudents dans les accouchements après
césarienne à cause des risques de poursuite. Si, à ce
moment-là, je la refuse à la patiente, elle pourrait toujours
aller en voir un autre qui va lui faire sa césarienne, mais si je la lui
refuse, qu'elle accouche et qu'elle a un problème, qu'est-ce qui va
arriver? Ça va être ma faute parce qu'elle va dire: Si vous aviez
fait ma césarienne, parce que j'avais eu une césarienne
antérieurement, mon bébé serait correct. Ce sont des
problèmes qu'on vit, je ne dirais pas à tous les jours, mais
qu'on vit au moins quelques fois durant un mois.
La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie. M. le
ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je veux vous remercier de
cette présentation très sincère, j'en suis totalement
convaincu, du début à la fin, qui éclaire la commission
sur les suites à donner. Évidemment, possiblement qu'en bout de
piste on no partagera pas certains points de vue. mais on aura des choix
à faire et on va les faire. On compte sur votre collaboration. Je vous
appellerai.
La Présidente (Mme Marois): Merci encore. Nous ajournons
nos travaux sine die.
(Fin de la séance à 23 h 59)