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(Onze heures trente et une minutes)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles
ouverte et je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien
vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Alors, aujourd'hui, nous sommes réunis
afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques
sur le projet de loi n° 21, la Loi visant
principalement à mettre fin à la recherche et à la production d'hydrocarbures
ainsi qu'au financement public de ces activités.
Alors, M. le secrétaire, est-ce qu'il y a
des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Tanguay (LaFontaine) est remplacé par M. Arcand
(Mont-Royal—Outremont).
Le Président (M. Lemay) : Très
bien, merci. Alors, ce matin, nous entendrons Nature Québec conjointement avec
Greenpeace. Et je souhaite d'ailleurs la bienvenue aux représentants de Nature
Québec et de Greenpeace, et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé. Par la suite, il y aura une période d'échange avec les
membres de la commission, mais je vous invite d'abord à vous nommer, ainsi que
la personne qui vous accompagne, et débuter votre exposé. La parole est à vous.
Mme Simard (Alice-Anne) : Merci,
M. le Président. Bonjour. Bonjour, M. le ministre, bonjour, les députés. Mon
nom est Alice-Anne Simard. Je suis la directrice générale de Nature Québec. Je
suis accompagnée de M. Patrick Bonin, qui est responsable de la campagne
Climat-Énergie chez Greenpeace Canada.
Donc, d'emblée, Nature Québec et
Greenpeace appuient le projet de loi n° 21, qui est
le fruit d'une décennie de mobilisation contre les hydrocarbures par des
centaines de milliers de citoyens et citoyennes et des centaines de groupes
citoyens, environnementaux et sociaux au Québec. Il est toutefois essentiel,
là, que le gouvernement québécois ne cède pas au chantage des compagnies
pétrolières et gazières qui mendient des fonds publics pour fermer leurs puits,
nettoyer leurs dégâts et rembourser leurs dépenses d'opération. Notre mémoire
se concentre donc particulièrement sur cette notion d'indemnisation et détaille
les raisons pour lesquelles aucun sou public ne devrait être donné en cadeau
aux pétrolières et gazières.
Donc, tout d'abord, on tient à souligner
que, malgré ce que le ministre et les employés de son ministère ont mentionné à
plusieurs reprises, il n'est pas nécessaire que le gouvernement paie des
indemnisations pour préserver l'image du Québec, là, face aux investisseurs
potentiels. La charte québécoise, d'ailleurs, stipule que nul ne peut prétendre
avoir l'assurance qu'il n'y aura aucun changement législatif ni jouir d'une
absolue garantie à la pérennité d'une loi. Les compagnies ne pouvaient donc pas
prétendre qu'elles avaient la certitude que leurs droits d'exploration ne
seraient jamais révoqués.
De plus, les pétrolières et les gazières,
là, connaissaient les risques environnementaux et financiers inhérents au
développement de leurs activités. Plusieurs de ces compagnies, là, connaissent
depuis au moins les années 1970 l'impact du gaz et du pétrole sur les
changements climatiques grâce à des études internes, mais elles ont préféré
mentir et alimenter une machine à nier colossale pour bloquer l'action en
finançant les climatosceptiques, en contestant la science et en entretenant le
doute sur la crise climatique. Même au Québec, là, ces compagnies continuent de
dire n'importe quoi pour assurer leur survie, comme Éric Tétrault, qui est venu
ici, en commission parlementaire, dire que le Québec ne peut pas se fier à l'énergie
éolienne et solaire, franchement.
Les compagnies pétrolières et gazières
savent donc depuis les années 70 que leurs activités devront bientôt
cesser. Le gouvernement ne peut pas les récompenser, là, d'avoir investi dans
une industrie qui est vouée à la mort et en leur offrant des indemnisations.
Elles n'ont pas non plus à être récompensées, là, parce qu'elles ont préféré
financer des campagnes de désinformation plutôt que d'aider la société à mettre
en oeuvre la nécessaire transition énergétique dont on a besoin.
L'image du Québec face aux investisseurs
serait aussi préservée, là, parce qu'abandonner les énergies fossiles, c'est la
tendance que l'on voit partout dans le monde. Au total, à ce jour, il y a 180 pays,
États ou villes qui ont mis en place une interdiction, un moratoire ou une
limitation de l'extraction ou de la production de charbon, de pétrole ou de gaz,
et ça, ça inclut des pays comme l'Allemagne, le Danemark, l'Espagne, la France,
le Luxembourg, les Pays-Bas, l'Irlande et la Nouvelle-Zélande.
Donc, à croire l'argument du gouvernement,
il aurait fallu s'attendre à ce que tous ces pays-là perdent la face devant les
investisseurs, alors que ce n'est clairement pas ce qui s'est passé. Il est
intéressant toutefois de noter que, à notre connaissance il n'y a aucun État
qui est allé aussi loin que légiférer pour interdire toutes les activités d'exploration
et d'exploitation pétrolière et gazière sur l'ensemble de son territoire comme
le Québec s'apprête à le faire. Donc, bien sûr, chapeau, mais... et le Québec
est un précurseur. Par contre, il ne va pas faire cavalier seul et il sera
bientôt rejoint par plusieurs autres États qui vont suivre son leadership.
Le ministre et les employés de son
ministère ont aussi répété que de donner 100 millions de dollars en
indemnisations est essentiel pour réduire les risques de recours devant les
tribunaux dans une tentative, là, qu'on pourrait qualifier, là, d'acheter la
paix. Pourtant, ce montant, ce n'est toujours <pas...
Mme Simard (Alice-Anne) :
…
toujours
>pas suffisant pour l'industrie et ses lobbys. L'Association pétrolière
et gazière du Québec a même mentionné à plusieurs reprises qu'elle poursuivra
en cour le gouvernement parce qu'elle estime que ces montants-là sont risibles,
finalement.
Donc, comme avec des enfants gâtés, là,
qui ont l'habitude... qui n'ont pas l'habitude de se faire dire non, la
technique d'acheter la paix, là, ne va jamais fonctionner parce que l'industrie
va toujours en demander plus. Donc, on recommande au gouvernement de fermer la
porte à toute forme de négociation sur le montant des indemnisations en retirant
complètement le programme d'indemnisation du projet de loi parce que, comme l'industrie
voudra toujours en vouloir plus, sinon elle va menacer de recourir aux
tribunaux, aussi bien ne rien lui donner.
Alors, avant de céder la parole à mon collègue,
je terminerais en soulignant que, pour Greenpeace et Nature Québec, il est
clair que l'argent des Québécois et Québécoises ne doit pas servir à renflouer
les coffres des pétrolières et gazières, mais qu'il doit plutôt servir à
financer les priorités de la société, comme la santé, les services sociaux, la
transition, l'éducation et le soutien aux personnes qui sont déjà victimes des
changements climatiques. Merci.
M. Bonin (Patrick) : M. le
Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, merci de nous recevoir
aujourd'hui. Et je pense qu'on a été relativement clairs dans notre mémoire, les
pétrolières et les gazières ont pris un pari, elles l'ont perdu à plusieurs
égards. Regardez ce qui se passe au niveau de l'acceptabilité sociale, il n'y a
jamais eu de consentement, au Québec, et il n'y en aura jamais, pour l'exploration
et l'exploitation pétrolière et gazière. Les compagnies ont débarqué au Québec,
elles ont eu des licences à bas prix, et ce, à l'abri des yeux du public
souvent, et, même, je dirais qu'elles sont débarquées en cow-boys.
Souvenez-vous-en, et M. Arcand, le député,
nous étions, à l'époque des gaz de schiste, en discussions fréquentes, les
entreprises sont arrivées au Québec, et ça fait une décennie, même plus qu'une
décennie, qu'on voit ces luttes citoyennes, que ce soient des pétitions, que ce
soient des manifestations, et ça, partout, en Gaspésie, Anticosti, Montréal,
Lotbinière, des manifestations, jusqu'à 500 000 personnes. Et je vous
rappelle que, dès 2011, on a eu un premier moratoire sur exploration, exploitation
des gaz de schiste. Donc, il n'y a rien de nouveau dans cette opposition-là, et
les entreprises savent très bien… toutes celles qui ont des licences, depuis
2015 jusqu'à 2021, savent très bien qu'il y a de fortes chances que ces
investissements-là ne soient jamais rentabilisés parce que le critère d'acceptabilité
sociale n'est pas là.
Et je reprendrais les mots du Pr Éric
Pineault dans le mémoire qu'il a déposé à la commission où il dit très
clairement, et je cite : «Ce n'est pas à la société québécoise d'indemniser
des entrepreneurs qui ont entrepris ces investissements spéculatifs en
connaissance de cause et qui ont, malheureusement, pour eux, perdu leur mise.»
Et, si vous regardez ce qui se passe à l'industrie au cours des dernières
années, et particulièrement depuis 2015, les investissements ont chuté, elles
le savent très bien, et ça se... On est presque à zéro en termes d'investissements
au cours des derniers mois et années.
Et, au niveau de l'acceptabilité sociale,
on l'a mentionné, nous avons déposé un sondage qui a été fait pas plus tard que
la semaine passée auprès de plus de 1 000 Québécois, Québécoises, et
le sondage est très clair, il y a deux fois plus de gens au Québec qui appuient
l'interdiction des forages que de gens qui sont contre, donc, clairement, deux
fois plus de gens qui appuient l'idée d'interdire les forages au Québec, et ce
n'est pas nouveau. Il y a 70 % des répondants qui ont été interrogés qui
disent que ce devrait être seulement les entreprises qui soient tenues
financièrement responsables des dégâts qu'elles ont causé, donc, seulement les
entreprises, 70 %, et les gens disent, à seulement 4 %, que ce
serait... ça devrait être le gouvernement qui finance.
Donc, c'est très clair où logent les
Québécois, Québécoises. Et, quand on regarde au niveau du 100 millions de
dollars proposé par le gouvernement, c'est plus de la majorité des gens qui
disent que 100 millions de dollars, c'est trop élevé pour les entreprises,
et, en comparaison, il y a seulement 4 % des gens qui disent que ce n'est
pas assez élevé. Donc, non seulement on l'a vu sur le terrain, mais on le voit
également dans les sondages.
• (11 h 40) •
Parlons maintenant science du climat.
2015, c'est la création de l'Accord de Paris. Donc, depuis 2015, les
entreprises savent très clairement où s'en va le monde, à moins qu'elles
habitent sur une autre planète, ce qui est possible à certains égards, mais,
très clairement, ça a été dit, l'ère et le début de l'ère de la fin des combustibles
fossiles, il est amorcé.
Et regardez l'Agence internationale de l'énergie,
historiquement très conservatrice, elle a sorti un rapport explicite, l'année
passée, qui statue qu'on ne peut plus exploiter de nouveaux gisements
pétroliers et gaziers si on veut limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C,
et ce genre de conclusion, qu'on ne peut plus exploiter de nouveaux gisements,
on le retrouve également à travers le rapport du GIEC qu'on vous a présenté
dans un mémoire, justement, un rapport qu'on a sorti la semaine passée, avec l'Institut
international du développement durable, qui décompose ou, plutôt, décortique le
rapport du GIEC et arrive à la même conclusion.
Si on commence à indemniser les
entreprises pétrolières, eh bien, il faudrait également leur demander d'être...
que la société soit indemnisée pour les coûts liés à leurs activités.
Actuellement, et c'est l'INSPQ <qui le...
M. Bonin (Patrick) :
...l'INSPQ
>qui le dit, on parle de dizaines de milliards de dollars par année en
coûts de santé au Canada, vous vous imaginez, c'est des milliards de dollars au
Québec également, en raison de l'utilisation des combustibles fossiles. Le
Fonds monétaire international arrive aux mêmes conclusions. Les subventions
indirectes à l'industrie fossile, quand on entre les coûts des impacts des
changements climatiques, les coûts sur la qualité de l'air, sur la santé, ils
parlent de 60 milliards de dollars par année de coûts absorbés par la
société. Donc, il faut tenir ça en compte également.
Donc, je le rappelle, les entreprises,
elles le savent depuis longtemps, elles ont pris un risque, elles ont perdu.
Elles ont misé sur l'échec de l'Accord de Paris. Elles ont misé sur le fait que
les gouvernements n'allaient pas respecter leurs engagements et réduire les
émissions, mais malheureusement le développement de leurs entreprises est
complètement incompatible avec une planète saine, avec des communautés en
santé, avec le respect de nos engagements internationaux. Donc, pour nous, il
serait particulièrement inacceptable qu'on commence à rembourser des salaires,
différents paiements, des activités des entreprises qui savent très bien... qui
savaient très bien dans quoi elles s'embarquaient.
En terminant, je dirais, le Québec peut et
doit donner l'exemple au niveau de ces indemnités-là. Ces entreprises-là ont
une dette envers la société. Ce n'est pas la société qui a une dette envers
elles. Donc, le Québec doit lancer un message au niveau international. C'est
une excellente nouvelle qu'on ferme la porte à l'industrie pétrolière et
gazière, mais ne mettons pas de précédent où on donnerait des centaines ou,
dans ce cas-ci, probablement plus de 100 millions de dollars de fonds
publics à une entreprise qui ne le mérite surtout pas. Merci.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Merci beaucoup, Mme Simard et M. Bonin, pour votre exposé. Nous
allons maintenant procéder à la période d'échange avec les membres de la
commission. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Julien : Oui, merci.
Merci, M. le Président. Bien, merci à vous deux, Mme Simard,
M. Bonin, là, pour la documentation. Également, là, les résultats du
sondage, honnêtement, j'aurais été tellement surpris que le résultat soit
autrement que ça, parce que, moi le premier, là, ce n'est pas... Quand on dit :
On va indemniser une industrie, parce qu'on leur enlève, en réalité, un droit
qui, légalement, est actuellement autorisé, bien, j'aurais trouvé très
particulier que les gens disent : On fait la vague puis on trouve ça bien.
Maintenant, on a des... Je pense qu'on est des enjeux de responsabilité. Avant
de poser ma question, je veux quand même juste être certain, Mme Simard,
vous avez dit : Les employés et le ministre ont régulièrement parlé d'acheter
la paix. Pouvez-vous dire quand on est-ce qu'on a dit ça?
Mme Simard (Alice-Anne) : Non,
non, ce n'est absolument pas ça que j'ai dit. J'ai dit que vous avez dit à
plusieurs reprises que c'était nécessaire de payer des indemnisations pour
préserver l'image du Québec face aux investisseurs potentiels, ça, c'est vrai
que vous l'avez dit, et que c'était essentiel aussi pour réduire les risques de
recours devant les tribunaux.
M. Julien : O.K. Bien, écoutez,
moi, quand je dis ça, puis c'est là-dessus... Bon, ce que j'apprécie… C'est
assez clair, votre position. On ne peut pas avoir plus clair que ça. Et, dans
tout le projet de loi qu'on a devant nous, l'enjeu des indemnisations apparaît
l'enjeu qui vous amène des doléances et des tracas. Donc, ça veut dire que... Est-ce
que je comprends que, pour le reste, vous êtes assez confortables avec le
projet de loi qu'on a devant nous?
M. Bonin (Patrick) : Au
niveau des indemnités, évidemment, je pense qu'on a mentionné que ça devrait
être retiré, selon nous. Il y a quand même certains questionnements qu'on a sur
les projets pilotes. Donc, on pense que ça devrait être très clairement... et,
je pense, vous l'avez dit, vous l'avez répété, ça, dans le communiqué, là. Donc,
on ferme la porte complètement à exploration, exploitation pétrolière et
gazière là-dedans. Pour nous, on aurait aimé que le projet aille plus loin,
entre autres sur la question des infrastructures, par exemple, pipelinières et
gazières. Dans ce cas-ci, on s'est arrêtés davantage à documenter les
indemnités, mais, sur le principe, on vous suit tout à fait. On félicite le
gouvernement d'aller là. Sur la question des indemnités, par contre, là-dessus,
on pense que le gouvernement devrait faire encore du chemin, oui.
M. Julien : Parfait. Alors, c'est
ce que j'avais bien compris et bien conçu. Avant d'arriver sur la question des
indemnités encore… Mme Simard, vous avez mentionné que la tendance partout
dans le monde... mais, pour finir, quand même votre... parce que, là, vous avez
parlé de plein de choses dans cette tendance, mais, pour revenir sur l'exploitation
et l'exploration des hydrocarbures, une interdiction légale, vous l'avez
mentionné en fin... en chute de discours, on est les premiers.
Mme Simard (Alice-Anne) : En
fait, on est les premiers à faire à la fois les interdictions pour les forages
de pétrole et de gaz puis sur l'ensemble du territoire, mais, par exemple, le
Danemark interdit tous les forages aussi de pétrole et de gaz sur l'ensemble de
son territoire terrestre et de ses eaux intérieures. Les seuls endroits où il
va rester des forages, c'est dans la mer du Nord. Donc, ça reste que la grande
majorité des forages sont arrêtés, et il n'y a pas... Les investisseurs, là, ne
se sont... n'ont pas quitté le Danemark, là, au contraire. Et il y a plusieurs
autres endroits comme ça aussi où est ce que, par exemple, les forages de
pétrole sont complètement arrêtés sur tout le territoire, mais il y a certains
forages de gaz qui demeurent.
Donc, oui, on est les premiers, à notre
connaissance, du moins, mais il reste qu'il y a beaucoup de forages, d'exploration,
de production d'hydrocarbures, dans le monde, qui ont été arrêtés, et ce,
depuis plusieurs années. En fait, ce n'est pas juste l'année dernière, et on n'a
pas vu, là, des investisseurs quitter les pays, là.
M. Julien : Parfait. Donc, ce
que <vous…
M. Julien :
...donc,
ce que >vous me dites, c'est… Quand on reçoit le Pr Richard Ouellet, là,
avocat et professeur titulaire à l'Université Laval, spécialisé en droits
internationaux de commerce et d'investissement, qui nous dit... écoutez, là, à
sa lecture, qui est un spécialiste dans ce domaine-là, on doit avoir un projet
de loi qui est équilibré par rapport au volet indemnisation pour à la fois,
oui, l'image puis également pour se préserver des ententes internationales, vous,
vous dites : M. Ouellet, il ne connaît pas ça.
Mme Simard (Alice-Anne) : Écoutez,
pour chaque professeur puis chaque universitaire qui a un point de vue, moi, je
peux vous en trouver un autre qui a un point de vue différent, c'est certain.
Je pense que Mme Chaloux, qui est venue ici, elle, elle vous a... elle est
venue vous mentionner qu'il n'y aurait pas de risque pour l'image du Québec à l'international.
Donc, évidemment, il y a toujours... Chaque professeur peut avoir son point de
vue, ses biais, mais, nous, ce qu'on dit, c'est qu'on a regardé ce qui s'est
fait à l'international, dans d'autres pays qui ont fait les mêmes choses que le
Québec s'apprête à faire, et, dans les faits, on n'a pas vu là, des retraits
des investisseurs du tout…
M. Julien : Mme Simard,
quand vous dites qu'ils ont fait les mêmes choses qu'on s'apprête à faire, je
pense qu'on est les premiers à le faire. Donc, encore là, il y a peut-être des
similitudes que vous avez trouvées ailleurs, mais...
Puis, pour revenir sur Mme Chaloux,
elle convenait, en fin de compte, peut-être, que, par rapport à l'image... mais,
par rapport au commerce international, elle convient que le projet de loi était
équilibré et que l'indemnisation basée sur des critères assez stricts de
remboursement de dépenses était appropriée. Donc, alors, pour moi, c'est... Tu
sais, pour moi, il y a l'industrie, là, qui dit des choses où on n'est pas là
dans le projet de loi, mais ces deux professeurs-là ont été assez clairs.
Maintenant, pour revenir sur
M. Bonin, vous avez dit des choses qui m'ont interpelé également. Vous
avez dit : «On a émis des licences à bas prix, et, au cours des six
dernières années, on observe qu'il n'y a presque pas eu d'investissement.» Puis
ça tombe bien, nous autres, c'est ce qu'on est prêts à rembourser, le coût des
licences. Elles n'ont pas coûté cher. Donc, on ne remboursera pas grand-chose.
Puis le fait qu'il n'y ait pas eu beaucoup d'investissement, bien, c'est les
six dernières années.
Et je réitère la position qu'on défend
ici, là, d'équilibre, qu'on a discutée hier et avant-hier, c'est : Le
Québec, l'État du Québec, par sa loi, par ses règlements, bien que certains
disent que ça fait longtemps qu'on sait que cette industrie-là périclitait et
qu'on devait s'en retirer, ce n'est pas ce que l'État québécois a fait. L'État
québécois a continué de mettre des lois en place et des règlements qui
permettaient à des industries d'acheter des licences et de faire... de défrayer
des frais pour s'y conformer. Donc, à mon avis, on a une part de
responsabilité. Peut-être qu'on aurait dû agir plus tôt, mais on cautionnait
ces investissements-là puisqu'on les acceptait légalement et de manière
réglementaire.
Alors, c'est sur cet aspect-là que j'ai l'impression
qu'on a besoin d'un équilibre en indemnisant minimalement. Alors, il n'y a
pas... Il n'y a pas… Tu sais, il n'y a pas... Quand je disais… cadeau,
récompenser, il n'y a pas de rendement sur les investissements. Bien au
contraire, là, c'est certains investissements qui ont été nécessaires pour se
conformer parce qu'on a donné le droit. Alors, pour vous, ça, ce n'est pas
crédible.
M. Bonin (Patrick) : Bien,
d'emblée, on pense que le gouvernement du Québec devrait travailler avec l'alliance
qu'il a jointe, la Beyond Oil and Gas Alliance, pour justement s'assurer de
mettre un précédent qui ne crée pas de problèmes partout à travers la planète
en termes d'indemnités. Donc, on a mentionné plusieurs juridictions à plusieurs
égards, que ce soient villes, que ce soient des États, des infranationaux,
comme le Québec, ou même des pays… ont des parties de territoire qui, très
clairement, bannissent ou interdisent pétrole, gaz ou charbon, exploitation.
Donc, on pense qu'il y a déjà beaucoup de précédents.
Le Centre québécois du droit de l'environnement
est très clair sur le fait que le gouvernement pourrait légiférer et pourrait
ne pas donner d'indemnité. Et donc c'est le Centre québécois de droit de l'environnement,
il a un rapport. Ils ont présenté également et ils disent que c'est un choix
politique. Et c'est là qu'on dit : Selon nous, le gouvernement devrait
faire le choix politique de ne pas aller là. Pourquoi, essentiellement? Bien,
écoutez, quand on regarde 100 millions de dollars, vous pensez que c'est
peu. Pour nous, c'est beaucoup. Les entreprises n'ont jamais été autorisées à
exploiter au Québec. Elles n'ont jamais fait la démonstration de l'innocuité de
ce qu'elles proposaient comme développement. Au contraire, on a vu des enjeux
majeurs avec les... pensons à la fracturation qui a eu lieu au Québec, aux
puits qui fuient encore, aux enjeux de contamination d'eau potable qu'on a à
Bourque, par exemple.
• (11 h 50) •
Donc, l'entreprise a vendu quelque chose
au gouvernement… en n'étant pas la réalité de l'impact environnemental de son
industrie, a vendu également le fait qu'elle allait être capable d'aller
chercher l'acceptabilité sociale, chose qui n'est pas le cas depuis 2010. Donc,
il n'y a personne au gouvernement qui a autorisé de l'exploitation sur le
terrain, et l'entreprise n'a pas fait... Les entreprises n'ont <pas…
M. Bonin (Patrick) :
...les
entreprises n'ont >pas fait leurs devoirs, et c'est là qu'on dit :
On n'a pas à rembourser des entreprises qui sont arrivées avec des vœux pieux ou
plutôt des solutions miracles éventuelles, comme M. Tétrault, qui, encore une
fois, cette semaine, disait qui'ils ont la magie entre les mains, mais personne
ne la voit nulle part. Donc, ça ne cadre pas, et la science a évolué, encore
une fois.
Et je reviens à l'Agence internationale de
l'énergie. Ce n'est pas Greenpeace, l'Agence internationale de l'énergie a
souligné à gros traits, pour la première fois, l'année passée, le fait qu'on ne
peut plus exploiter de nouveaux gisements pétroliers et gaziers, et l'État est
responsable au niveau climatique pour l'ensemble du territoire, et c'est la
normalité maintenant de dire : Non, on ne peut plus aller là. Il n'y a
aucune évaluation environnementale qui permettrait de faire de l'exploitation
pétrolière et gazière dans de nouveaux gisements sur la base de la science
actuelle, qui est reconnue.
M. Julien : Parfait. Mais,
M. Bonin, si je... parce que j'entends ce que vous dites puis j'ai entendu
d'autres groupes mentionner ça, et le positionnement qu'on prend aujourd'hui,
là, naturellement, puisqu'on est tous d'accord avec le principe, si on s'en va
vers ça, on est les premiers à le faire. Donc, on est les premiers à le faire,
mais, je réitère, la responsabilité gouvernementale, la responsabilité de l'État
québécois, qui a vendu, qui a récupéré des sommes sur les licences… On le
mentionne bien dans le projet de loi, là, tout investissement qui sera
indemnisé sera a posteriori des travaux de restauration à la satisfaction du
MELCC, puis on aura des discussions sur la force qu'on veut donner à ça. Donc,
aucun remboursement des investissements ne sera fait tant et aussi longtemps qu'on
n'aura pas la restauration éprouvée selon les critères qu'on a au Québec, et ça
sera au net des aides financières gouvernementales obtenues.
Donc, s'il y a eu des crédits d'impôt, si
ça a coûté 5 millions puis il y a eu 3 millions de crédits d'impôt,
bien, ce sera 2 millions qui sera remboursé, et ça sera seulement les
éléments qui ont été pour être conforme aux lois et règlements du Québec. Donc,
j'entends qu'aujourd'hui, tu sais, on dit : C'est plus... on ne peut plus
admettre ça. Je comprends qu'on est les premiers à le faire. Donc, entre le
dire et le faire, on est les premiers, mais je comprends également que, comme
État, on a une responsabilité parce qu'on a autorisé... C'était une entente qu'on
avait avec ces entreprises-là. Alors, on ne peut toujours pas nier cette
entente-là.
Mme Simard (Alice-Anne) : Vous
êtes ici aujourd'hui, vous siégez ici en tant que représentants, représentantes
de la population québécoise, et ce qu'on nous a montré clairement, c'est qu'il
n'y a jamais eu d'acceptabilité sociale pour ces forages-là. Le gouvernement a
quand même décidé d'aller de l'avant puis d'autoriser, de donner des licences à
très bas prix à des compagnies la plupart étrangères. Et là, maintenant, bien,
ils se retrouvent à devoir en plus rembourser ces frais de licences là qui ont
été données, alors que la population n'en voulait pas, ne voulait pas que le territoire
soit foré. Et là ce que la population nous dit aussi, c'est qu'elle ne veut pas
qu'on les rembourse en plus. Donc, comme on l'a dit, il y a au moins 70 %
de la population québécoise qui trouve qu'un montant de 100 millions de
dollars, c'est beaucoup trop élevé pour donner des indemnisations. Donc, on
espère vraiment que, cette fois-ci, le gouvernement va écouter la population,
alors qu'il ne l'a pas fait, là, dans les dernières années, quand il a offert
ces licences-là.
M. Bonin (Patrick) : Peut-être
rapidement, si vous permettez…
M. Julien : Oui, je vous
permets certainement.
M. Bonin (Patrick) : On
se pose beaucoup de questions aussi sur la provenance du 75 % que vous
proposez pour la fermeture et la restauration des puits. On n'a vu aucune
documentation qui justifie ce 75 % là et on ne comprend pas comment vous
arrivez à ce calcul-là. Oui, on est bien conscients qu'il y a des entreprises
qui ont peu dans leurs coffres, mais pourquoi donner 75 % aux entreprises
qui ont la responsabilité, selon la législation québécoise, de fermer leurs
puits, de ne pas contaminer l'environnement, de restaurer également, par le
fait même? Donc, ce calcul-là, 75 %, c'est énorme, là, en termes de
contribution, et on ne pense pas que c'est à l'État... Donc, ça, on aimerait ça,
également, voir quelle est la base du calcul et le rationnel de la part du
gouvernement, parce que, pour nous, c'est littéralement de permettre aux
entreprises justement de socialiser les coûts de leurs activités.
M. Julien : Parfait.
Alors, sur cet élément-là, la réflexion qu'il y a derrière l'aide
gouvernementale… On va prendre une autre industrie qui serait moins dans la
perception… qui ne serait pas celle du pétrole. Je vous donne un droit pour
faire un camping puis je vous dis : À la fin de votre exploitation, vous
devez remettre le terrain comme on vous l'a émis. Chemin faisant, bien, vous
commencez à faire des travaux sur le terrain pour éventuellement faire en sorte
qu'il y ait un camping. Et, soudainement, je vous dis : C'est fini, votre
droit pour le terrain de <camping…
M. Julien :
...le
terrain de >camping. Avant même que vous ayez pu terminer vos travaux,
là, c'est fini, puis je voudrais que vous refassiez le terrain comme il était à
l'origine.
Donc, on fait un choix, nous autres, ici,
au gouvernement, si le projet de loi est adopté, de mettre un terme, de manière
momentanée et de manière devancée, sur une perspective de l'entreprise qui
souhaite développer ce qui était prévu à l'intérieur des lois et règlements, et
c'est pour ça qu'on contribue, c'est derrière cette pensée-là. Maintenant, on
aura l'occasion, à l'article par article, de discuter avec les collègues de ce
niveau-là. C'est certain qu'on ne veut pas contribuer au complet non plus,
parce qu'à partir de ce moment-là c'est un chèque en blanc, et les coûts
pourraient être astronomiques. Donc, on veut qu'il y ait un partage de cette
responsabilité-là.
Donc, alors là, à l'article par article,
on aura l'occasion de discuter sur ces éléments-là. L'objectif, à la fin, qu'on
souhaite tous, je suis certain, c'est que les puits soient réhabilités, et
correctement réhabilités, et cet objectif-là, c'est lui qu'on doit maintenir, mais,
naturellement, on aura l'occasion de discuter du quantum et de la participation
gouvernementale, le cas échéant, à l'intérieur de ces frais-là.
M. Bonin (Patrick) : ...dans
les discussions et notre compréhension, entre autres, sur le 75 %, c'est
que c'est un calcul qui est fait à l'interne, pour lequel on n'a pas toutes les
informations sur... Évidemment, il y a des informations au niveau,
probablement, des finances de ces entreprises-là, et on pense que la
transparence serait requise pour essayer de comprendre, parce que, pour nous,
pourquoi 75 %? Pourquoi pas 0 %? Si vous me dites qu'il y a deux
entreprises qui vont fermer si on leur demande de payer à 100 % les coûts,
bien, deux entreprises sur l'ensemble des entreprises, peut-être que ce n'est
pas si grand que ça et que le gouvernement aurait tout intérêt à ne pas
charger... en fait, ne pas donner zéro du tout. Donc, c'est sur ce calcul-là qu'on
ne comprend pas également la logique.
M. Julien : Alors, comme
je vous dis, on aura l'occasion, à la fois pour le programme d'indemnisation et
le volet du 33 millions estimé sur les 44 millions de coûts, de venir
expliquer ces éléments-là, mais jamais je ne mentionne dans ma réponse que c'est
parce qu'il y a une réalité financière des entreprises. Je mentionne dans ma
réponse qu'on pose un choix comme gouvernement suite à des autorisations qui
ont été données légalement, conformément à des éléments qu'on a acceptés. Donc,
c'est la responsabilité, en réalité, d'entreprises qui ont été conformes dans
un processus et auxquelles on dit : C'est terminé. Donc, je comprends que
ces des enjeux qui... puis je vois bien que c'est des enjeux qu'on aura à
discuter à l'article par article avec les différents points de vue qui ont été
amenés au cours des trois dernières journées.
Je crois que le temps est presque écoulé
puis je tenais à vous remercier, M. Bonin, Mme Simard, pour votre
contribution à ce débat qui est fort intéressant.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Merci, M. le ministre. Ceci complète le temps pour la partie gouvernementale.
Nous allons maintenant passer la parole à l'opposition officielle, le député de
Mont-Royal—Outremont.
M. Arcand : Merci, M. le
Président. Bonjour, M. Bonin, bonjour, Mme Simard, bienvenue. M. le
ministre, je fais juste vous dire quelque chose, là, puis ce n'est pas... J'ai
entendu... Vous avez dit : «Notre intention est de mettre un terme
momentané à l'exploitation des hydrocarbures.» J'imagine que ce n'est pas ça que…
J'ai mal entendu ou... parce que je vous ai entendu dire tout à l'heure : «Notre
intention est de mettre un terme momentané à l'exploitation des hydrocarbures.»
M. Julien : Bien, je ne
me rappelle pas ce que j'ai dit. Si vous dites que je l'ai dit…
M. Arcand : Bien, non,
je ne sais pas, j'ai peut-être mal entendu.
M. Julien : Je pense que
le projet de loi met un terme à l'exploration et à l'exploitation.
M. Arcand : Bien, il me
semble, c'est ce que je croyais. Alors...
M. Julien : Je suis
désolé si la teneur de mes propos n'était pas adéquate.
M.
Arcand
:
Non, non, je voulais juste être sûr que c'était correct.
M. Bonin et Mme Simard, d'abord,
très heureux de vous revoir, dans un premier temps. Et, moi, la question que je
me posais par rapport à ça, c'est simplement de vous demander, premièrement…
parce que vous comprenez que, sur l'essence du projet de loi, les partis
politiques ici sont d'accord. Il y aura peut-être un autre parti politique, un
jour, qui va faire son entrée à l'Assemblée nationale. Il y a peut-être des
conservateurs qui, eux, ont l'air à être en faveur de l'exploitation des
hydrocarbures, mais, en tout cas, pour l'instant, ce n'est pas le cas. Il y a
une unanimité ici, autour de la table.
• (12 heures) •
Vous dites... Bon, on va... Évidemment,
nous, l'idée, c'est de dire : Il faut… évidemment, s'il y a des
compensations à y avoir, il faut payer le moins possible. Là, ça, on est tous d'accord
avec ça, mais vous dites à l'intérieur de ça, bon : Doit-on rembourser à une
personne morale, bon, les sommes qu'elle a versées pour obtenir une
autorisation désormais révoquée? Et l'impression que j'ai, puis vous me direz
si j'ai une mauvaise impression, vous me dites... j'ai l'impression que vous
dites Ça dépend uniquement de la réputation...
M. Arcand : ...ça dépend
uniquement de la réputation de la personne morale à nos yeux. Alors, la
question, c'est : L'État de droit, est-ce que c'est bon seulement pour les
entreprises qui sont vertueuses? Et, les entreprises qui ne sont pas
vertueuses, on ne devrait pas appliquer l'État de droit? C'est ça, un peu, ma
question.
M. Bonin (Patrick) : Bonne
question. Mais je reviendrai sur la base. Ces entreprises-là ont pris un pari.
Elles ont dit : On va être capables d'aller chercher l'acceptabilité
sociale du Québec. Et le type de développement qu'on propose cadrait avec le
type de société dont on a besoin, où est-ce qu'il faut qu'on s'en aille. Et c'est
là que ça ne fonctionne pas. C'est là qu'on dit qu'il n'y en a pas, d'acceptabilité
sociale. Il n'y en a jamais eu et il n'y en aura jamais.
Donc, pourquoi payer des entreprises qui
ont sciemment développé leur modèle d'affaires dans un contexte hostile qui ne
permettait pas, justement, ultimement, d'arriver à leurs fins? Si elles ont été
incapables de démontrer le bienfait de leurs entreprises et de ce qu'elles
promettaient, elles sont les seules responsables. Ce n'est pas une question. Et,
oui, on peut regarder à quel genre d'entreprise on fait affaire. Et je pense
que, là-dessus, c'est très clair que ce qu'on voit... quand M. Tétrault,
de l'Association pétrolière et gazière, vient ici et dit qu'ils ont les
meilleures technologies au monde, mais incapable de prouver aucunement que ces
technologies-là existent, sont déployées, et qui discrédite la science, même,
des changements climatiques — si vous écoutez bien son intervention,
c'est ce que les entreprises ont fait et tablent là-dessus — donc il
est là, le problème. C'est qu'ils ont fait miroiter qu'il y avait une
possibilité de développer ce type d'entreprise là ici, au Québec, alors qu'il n'y
en a pas, d'un point de vue scientifique et d'un point de vue d'acceptabilité
sociale.
M. Arcand : Non, je
comprends. Je comprends. Et la seule chose là-dedans, c'est... puis, hier, on
avait un échange avec Mme Waridel, je pense, et qui... À tout le moins,
quand quelqu'un obtient un permis, la personne obtient un permis, le groupe
obtient un permis, il y a des exigences du ministère de l'Environnement, et ce
dont le ministre parle, c'est un remboursement, d'abord et avant tout, là, des
permis ou, enfin, de ce que ça a coûté, les coûts directs, finalement, de l'entreprise.
Ce que vous nous dites, c'est que, même ça, pour vous, c'est un «no go», si
vous vous me permettez l'expression.
Mme Simard (Alice-Anne) : Oui.
Puis, en fait, ce que je voudrais vous dire là-dessus, c'est que la crise
climatique, là, c'est la plus grave crise... auquel l'humanité va faire face,
là. Et à crise exceptionnelle vient aussi des mesures exceptionnelles. On est d'ailleurs
toujours en état d'urgence, là, présentement, pour la crise sanitaire. Donc,
évidemment, c'est un cas très particulier, là, ici, où est-ce que ces
entreprises-là, elles ont menti, elles ont retardé l'action climatique, elles
ont pris un risque, même s'il n'y avait pas d'acceptabilité sociale. Même
Questerre le disait dans ses rapports annuels, à chaque année, il n'y a pas d'acceptabilité
sociale au Québec. Ils essayaient de rassurer leurs actionnaires, et tout ça.
Donc, le Québec, là, c'est une démocratie
qui est capable de légiférer pour prendre les meilleures décisions possibles,
pour adopter des lois qui vont venir au service de la population, et non pas au
service des intérêts corporatifs. Donc, c'est ça ici. C'est une mesure
exceptionnelle dont on a besoin. Et comme on est le premier pays... premier
État, excusez-moi, au monde qui va vraiment aller légiférer aussi loin, même s'il
y en a plusieurs qui l'ont déjà fait, en partie, on a vraiment une responsabilité
de donner un message pour le restant du monde puis s'assurer que, dans d'autres
États qui... dont l'économie dépend beaucoup plus des forages de pétrole et de
gaz, par exemple, ça ne va pas aller coûter des centaines et même des milliards
de dollars, finalement, pour se sortir de la transition. Sinon, la nécessaire
transition mondiale, là, qu'il faut réaliser, bien, on ne sera jamais capable
de la faire parce qu'elle va être beaucoup trop coûteuse.
Donc, présentement, il y a énormément d'États
qui regardent le Québec en ce moment, et c'est à nous de s'assurer qu'on fasse
les choses comme il faut pour que les autres États puissent aussi aller de l'avant
vers cette interdiction-là.
M. Arcand : D'accord.
Vous dites...
M. Bonin (Patrick) : Si vous
permettez...
M.
Arcand
: Oui,
allez-y.
M. Bonin (Patrick) : Peut-être,
on serait intéressés à voir aussi, et peut-être que le ministère peut aider là-dessus,
là, à voir le nombre de licences qui ont été octroyées depuis 2015, depuis l'entrée
en vigueur de l'Accord de Paris, parmi l'ensemble des licences et des
remboursements dont on parle. Parce qu'il est très clair qu'en 2015, là, c'était
sur toutes les TV partout dans le monde, là, qu'on rentre dans l'Accord de
Paris, qu'on doit sortir du pétrole. Donc, d'avoir également ces informations-là
sur combien de licences, par exemple, depuis 2015, je pense que ce serait une
information importante dans vos réflexions comme parlementaires.
M. Arcand : D'accord
avec vous là-dessus. Vous dites, d'une part, les chances de réussite devant les
tribunaux sont faibles. Et moi, j'ai... Est-ce que vous avez... Est-ce que,
Greenpeace ou Nature Québec, vous avez des exemples, un peu, à nous donner, où
des entreprises ont poursuivi des États, par exemple, <et...
M. Arcand :
...un
peu, à nous donner, où des entreprises ont poursuivi des États, par exemple,
>et quelqu'un... Je veux juste vous donner un exemple, là. Cette
semaine, lorsqu'on a eu les consultations, on parlait de Lone Pine Resources,
là, qui poursuivait, puis qu'on parlait d'une poursuite, au départ, de 100
quelques millions de dollars, et qui avait été réduite, à un moment donné, que
la compagnie l'avait réduite à 10 millions, ou quelque chose comme ça.
Mais est-ce que vous avez des exemples de compagnies pétrolières qui ont été
carrément... dont les poursuites ont été rejetées par la cour? Est-ce que vous
avez ça dans vos...
Mme Simard (Alice-Anne) : Bien,
l'affirmation qu'on faisait, en fait, c'est : On se base sur les
conclusions du Centre québécois du droit de l'environnement, qui venaient dire
la même chose, finalement, que les risques de poursuites étaient assez faibles.
Et, pour Lone Pine Resources, si, moi, j'ai bien compris, ça, c'est dans le
cadre de l'ALENA, et maintenant, avec le nouvel accord de libre-échange, là,
cette poursuite-là ne serait plus possible déjà, là, en partant.
Donc, sinon, après ça, pour des exemples
plus concrets, je ne sais pas si...
M. Bonin (Patrick) : Écoutez,
on pourrait vérifier, évidemment, avec nos collègues à l'international. Vous
comprendrez que les délais pour la commission, ça nous fait plaisir de
participer, mais étaient relativement restreints, d'où l'importance de passer
rapidement ce projet de loi avant la fin de la session, évidemment.
On pense qu'il doit... devrait aussi
regarder du côté de ce qui s'est passé avec Strateco et la Cour suprême, qui a
refusé de recevoir Strateco. On est conscients que ce n'est pas le même cas.
Strateco avait une poursuite judiciaire envers le gouvernement du Québec, où le
gouvernement avait refusé, justement, d'octroyer et de permettre à l'entreprise
d'aller de l'avant malgré des frais dépensés — je pense que c'était
de l'ordre de près de 200 millions de dollars. Ce n'est pas le même cas,
évidemment, et je ne suis pas juriste, mais on pense que c'est un cas qui doit
quand même être regardé pour voir des parallèles potentiels avec la situation
actuelle pour les pétrolières et les gazières.
M. Arcand : Moi, il y a
une chose, je veux juste que ce soit clair, vous demandez d'introduire un
article dans le projet de loi pour rendre ces poursuites inadmissibles. Est-ce
que c'est essentiellement la même chose que demandait le Centre québécois du
droit de l'environnement ou s'il y a quelque chose de différent dans ce que
vous demandez?
Mme Simard (Alice-Anne) : ...mais
je ne me souviens pas qu'on ait inclus ça, dans le... dans notre mémoire. Je
dois avouer que notre principale recommandation dans le mémoire, c'est vraiment
uniquement, là, de... aucune indemnisation, là.
M. Arcand : Oui, c'est
ça. C'est essentiellement, là, le point de vue du Centre québécois...
Mme Simard (Alice-Anne) : Oui,
c'est ça. Ah oui! Oui, exactement. Bien... Excusez-moi. Oui, je vois ce que
vous faites référence. À ce moment-là, on fait référence, là, à la loi, là, sur
les ressources hydriques de la rivière Richelieu, ou quelque chose comme ça,
là, finalement, où est-ce qu'on dit qu'on pourrait tout simplement avoir un
article de loi qui viendrait prémunir le Québec de poursuites éventuelles parce
qu'on le dirait, à ce moment-là, bien précisément dans la loi, ce qu'on
demande. Donc, oui, qu'il n'y aurait aucune demande en justice qui serait
admise contre l'État ou contre toute autre personne pour réclamer, directement
ou indirectement, le remboursement de frais ou d'autres sommes, non plus que
pour obtenir quelque compensation, indemnité ou réparation en raison, par la
suite, des effets de la présente loi.
Donc, selon le Centre québécois du droit à
l'environnement, si on inclut un article comme ça, semblable à ça, dans la loi,
bien, à ce moment-là, on peut venir se prémunir, toute chose étant possible,
là, évidemment, là, de poursuites.
M. Arcand : Ma question
porte sur... essentiellement, ce dont on a parlé beaucoup, entre autres, ça a
été l'intervention de l'INRS sur tout ce qui touche, par exemple, la géothermie
sur la capture du carbone, le captage de carbone, le stockage d'hydrogène, etc.
J'aimerais juste que vous me situiez où vous... Parce que le ministre, dans son
projet de loi, veut faire des projets pilotes possibles de ce côté-là. Est-ce
que vous avez une opinion par rapport à ces différentes technologies-là?
Le Président (M. Lemay) : Brièvement.
M. Bonin (Patrick) : Bien,
encore une fois, on a souvent plusieurs opinions. Il y a plusieurs
technologies, donc il faudrait voir exactement de quoi on parle. Mais, à la
base, le principe de pollueur doit être appliqué ici. Donc, si on parle de
payer des entreprises pour qu'elles fassent de la recherche sur la capture et
séquestration du carbone, on croit que c'est aux pollueurs à faire leurs
propres démarches.
Deuxièmement, on croit que ces
technologies-là, dans plusieurs cas, n'ont pas été démontrées, donc ça ne doit
pas être un prétexte à ne pas réduire nos émissions au Québec. Par la suite, s'il
y a des projets qui sont proposés, ils doivent être évalués correctement, donc
des évaluations environnementales en bonne et due forme, avec le principe de
précaution...
• (12 h 10) •
Le Président (M. Lemay) : Merci,
M. Bonin.
M. Bonin (Patrick) : ...avec également
des consultations publiques et de l'acceptabilité sociale, bien sûr.
Le Président (M. Lemay) : C'est
ce qui complète le temps qu'on avait pour cette période d'échange. Et je cède
maintenant la parole à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé : Oui. Bonjour
à vous deux. On a 2 min 45 s, alors on va aller au coeur du
sujet. Vous êtes d'accord pour stopper le plus rapidement possible extraction
et exploration. Vous dites qu'on ne devrait pas compenser et vous l'avez
articulé largement, mais vous abordez un autre... et c'est là-dessus que j'aimerais
nous concentrer, c'est la question des pipelines. Aucun <nouveau...
Mme Massé :
...mais
vous abordez un autre... et c'est là-dessus que j'aimerais nous concentrer,
c'est la question des pipelines. Aucun >nouveau pipeline. Et, dans ce
sens, vous faites référence à ce que nous dicte la science.
Mais par contre, dans votre mémoire, et c'est
là-dessus que j'aimerais vous entendre... Parce qu'on s'entend là-dessus, je l'avais
mis moi-même dans mon mémoire au mois de septembre. Mais vous dites : Oui,
mais, s'il faut... s'il faut se battre là-dessus, ça risque de retarder le
projet de loi. J'aimerais vous entendre sur... pour m'aider à voir quel type de
bataille, moi, je vais faire là-dessus. Parce que, des nouvelles canalisations,
c'est de maintenir la pérennité, c'est de s'attacher les mains pour la suite
des choses, permettre au gaz naturel de continuer de circuler. Alors,
guidez-moi là-dessus.
M. Bonin (Patrick) : Bien,
on se rejoint là-dessus. C'est la même logique que si on autorise, par
exemple... Et souvent on a financé, dans les derniers mois, voire années, ce
type de canalisation. Évidemment, les entreprises vont dire : Bien, vous
nous permettez de développer des infrastructures qu'on ne pourra pas utiliser à
moyen terme parce qu'ultimement il faut réduire la consommation drastiquement.
Et vous allez avoir des entreprises qui vont dire : Bien, le gouvernement
nous avait autorisé... un peu la même logique utilisée par le gouvernement.
Donc, on ne doit pas aller là, selon nous.
Et, quand on regarde la science, c'est
très clair, on ne peut pas rajouter d'infrastructures pétrolières, gazières et
charbonnières, et ce type de nouvelles infrastructures là n'a pas sa place.
Et, oui, on aurait aimé que ce soit dans
le projet de loi. Vous en avez parlé et, je pense, vous avez même présenté un
projet de loi qui allait dans ce sens-là. On pense que ça mérite d'être
débattu.
Ce qui nous inquiète, c'est qu'il semble
que le gouvernement n'a pas fait suffisamment de chemin en ce sens-là, et on
pense qu'on est mûrs pour avoir une véritable discussion. On invite le
gouvernement à ouvrir le livre de cette discussion-là parce qu'on parle de
crise climatique, mais... le premier ministre parle d'urgence climatique, et la
science, elle est très claire là-dessus.
Et vous allez avoir le rapport du GIEC qui
sort la semaine prochaine, là, c'est le rapport sur les impacts climatiques,
semaine prochaine. Au mois d'avril, on aura le rapport du GIEC sur la réduction
des émissions nécessaire et qu'est-ce que... ce qu'on doit faire. Et le gouvernement
doit être à l'avant-plan, doit suivre ce qui s'en vient, doit être au courant
de la science exacte actuellement. Et la science, elle dit : Pas de
nouvelles infrastructures pétrolières et gazières, surtout pas de subventions
pour ce type d'infrastructures.
Mme Simard (Alice-Anne) : ...pour
nous, c'est vraiment important que ce projet de loi là soit adopté avant les
prochaines élections, qu'il ne meure pas au feuilleton, c'est essentiel. Donc,
c'est pour ça qu'on... Une fois que ça va être adopté, on sera prêts pour mener
les autres combats, puis s'assurer qu'il n'y aura pas de nouveaux pipelines
aussi, puis qu'on ne perde pas encore du temps sur des Énergie Est puis des
GNL... Énergie Saguenay, GNL, et tout ça.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, Mme Simard. Et nous allons maintenant céder la parole au député
de Jonquière pour son intervention.
M. Gaudreault : Oui.
Merci beaucoup pour votre présence. On sait que vous allez être prêts pour
mener d'autres combats, on vous connaît bien.
Donc, ce que je comprends, pour compléter
sur ce que ma collègue vous a posé comme question, vous dites, au fond, le
mieux est l'ennemi du bien ou... je ne me souviens plus c'est quoi, le dicton,
là. Donc, on aurait aimé avoir les pipelines dans le projet de loi, mais là,
pour être... vu qu'on s'en va en élections après le mois de juin, on ne revient
pas ici le... on aime mieux, au moins, ramasser nos billes avec le projet de
loi n° 21, même s'il est imparfait.
Mme Simard (Alice-Anne) : Oui,
exactement. Puis c'est... on veut s'assurer qu'on ferme la porte à double tour,
parce qu'après tout, comme on l'a dit en introduction, ça fait plus d'une
décennie que la population se bat contre les forages pétroliers et gaziers. Ça
va être un immense soupir de soulagement, là, qui va être lancé.
M. Gaudreault : Tout à fait.
Maintenant, les projets pilotes, vous n'en avez pas parlé beaucoup dans les
échanges, là. Avec les quelques secondes qu'il nous reste, c'est quoi, vos
craintes, particulièrement? Est-ce que vous trouvez que le projet de loi, à l'heure
actuelle, capte, c'est le cas de le dire, bien ça, là, les projets pilotes?
Est-ce qu'on... Qu'est-ce qu'on doit ajouter?
Mme Simard (Alice-Anne) : Bien,
dans le langage, là, bon, c'est indiqué, ça sous-entend, là, que, par exemple,
la capture, le stockage du carbone puis l'hydrogène font partie des solutions,
finalement, à la transition énergétique, là, comment que c'est écrit. Donc,
pour nous, c'est sûr que le captage puis le stockage du carbone, pour l'instant,
ce n'est pas prouvé du tout que c'est une solution pour la transition
énergétique. Donc, peut-être venir revoir un petit peu ce langage-là, s'assurer
que c'est vraiment uniquement pour l'acquisition de connaissances, s'assurer
aussi, comme disait mon collègue, qu'il y a des évaluations environnementales
qui sont menées pour ces projets-là, comme le CQDE aussi l'a recommandé, s'assurer
aussi qu'il y a de l'acceptabilité sociale pour ces projets-là et s'assurer que
ce soit, c'est ça, vraiment juste dans un délai très, très défini, là.
M. Gaudreault : O.K. Deux
secondes? Une seconde? Une minute? En tout cas, peu importe. On s'est fait
suggérer d'adopter un préambule qui serait un peu plus englobant, qui serait
aussi une clause interprétative pour le projet de loi qui permettrait de se
projeter aussi sur là où on s'en va. Qu'est-ce que vous en pensez, de cette
idée de préambule?
M. Bonin (Patrick) : Bien,
tout dépend de ce qu'il y aura dans le préambule. Je pense qu'une référence
explicite à la science et l'état de la science, particulièrement avec le
nouveau rapport du GIEC qui sort aux sept ans — encore une fois, ces
rapports-là, on les a cette année — je pense qu'on devrait y faire
référence, probablement.
M. Gaudreault : C'est <bon...
M. Gaudreault : ...c'est >bon.
Le Président (M. Lemay) : Alors,
Mme Simard et M. Bonin, je vous remercie pour votre contribution aux
travaux de la commission.
J'ai un petit message à faire avant de
suspendre. Donc, avant de conclure, je procède au dépôt des mémoires des
personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus lors des auditions
publiques. Et je vous remercie tous, chers membres de la commission, pour la
qualité de vos échanges ainsi que tous les groupes qui ont participé au cours
des trois derniers jours.
Et maintenant la commission, ayant
accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 16)