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Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles

Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mercredi 5 février 2020 - Vol. 45 N° 33

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 48, Loi visant principalement à contrôler le coût de la taxe foncière agricole et à simplifier l’accès au crédit de taxes foncières agricoles


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Table des matières

Remarques préliminaires

M. André Lamontagne

M. Gregory Kelley

M. Sylvain Roy

Mme Émilise Lessard-Therrien

Auditions

Association des évaluateurs municipaux du Québec (AEMQ)

Fédération québécoise des municipalités (FQM)

Union des municipalités du Québec (UMQ)

Document déposé

Producteurs de grains du Québec (PGQ)

Autres intervenants

M. Mathieu Lemay, président

M. Richard Campeau

Mme Marie-Louise Tardif

M. Luc Provençal

Mme Marie Montpetit

M. Carlos J. Leitão

*          Mme Alexandra Boivin, AEMQ

*          M. Éric Racine, idem

*          M. Jacques Demers, FQM

*          M. Pierre Châteauvert, idem

*          M. David Boulet, idem

*          Mme Suzanne Roy, UMQ

*          M. Guy Charbonneau, idem

*          M. Jean-François Sabourin, idem

*          M. Christian Overbeek, PGQ

*          M. Alain Gervais, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Quinze heures deux minutes)

Le Président (M. Lemay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles ouverte et je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie aujourd'hui afin de procéder à des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 48, la Loi visant principalement à contrôler le coût de la taxe foncière agricole et à simplifier l'accès au crédit de taxes foncières agricoles

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Provençal (Beauce-Nord) remplace M. Bélanger (Orford); M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata) remplace M. Girard (Lac-Saint-Jean); et M. Kelley (Jacques-Cartier) remplace M. Polo (Laval-des-Rapides).

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Merci. Alors, aujourd'hui, cet après-midi, nous allons débuter par les remarques préliminaires puis nous entendrons l'Association des évaluateurs municipaux du Québec, la Fédération québécoise des municipalités, l'Union des municipalités du Québec ainsi que les Producteurs de grains du Québec.

Remarques préliminaires

Alors, je cède maintenant la parole au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation pour ses remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez de six minutes.

M. André Lamontagne

M. Lamontagne : Merci, M. le Président de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles. Mes collègues de la CAPERN, chers invités, messieurs dames, c'est un plaisir, vraiment, d'être ici.

Écoutez, la commission entreprend des consultations particulières sur un projet de loi qui est réclamé depuis des années par le milieu agricole, par le milieu forestier aussi, dans un contexte où, en 2017, il y avait eu une tentative de réformer le programme, puis, malheureusement, cette tentative-là ne s'était pas avérée. Alors, très, très heureux, aujourd'hui, qu'on puisse entreprendre les consultations particulières sur ce nouveau projet de loi qui a été déposé.

Je dois, d'entrée de jeu, exprimer ma reconnaissance envers... Il y a 10 organismes, au total, qui vont venir nous faire part de leurs commentaires face au projet de loi qui a été déposé, notamment des gens du secteur agricole, forestier, municipal, mais aussi des ordres professionnels. Alors, c'est très important d'avoir l'opinion, d'avoir les commentaires de ces groupes-là qui s'intéressent à ce projet de loi là mais aussi à son application dans le quotidien une fois qu'il sera adopté. Alors, un gros merci pour votre implication auprès de la commission.

Aussi, la consultation, bien, c'est sûr que ça me tient à coeur, parce que, pour moi, ça marque une étape très importante, puis c'est dans la concrétisation de ce qui est le premier projet de loi. Moi, à titre de ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, bien, c'est le premier projet de loi que j'ai déposé à l'Assemblée nationale, le 5 novembre. Alors, aujourd'hui, naturellement, il y a eu des consultations pour arriver à la mise en oeuvre de ce projet de loi là, mais, aujourd'hui, bien, de démarrer les consultations, bien, c'est une étape très importante, là, vers, ultimement, l'objectif, qui est d'adopter cette réforme-là qui est très importante. Alors, très, très heureux, aujourd'hui, de pouvoir procéder, là, au lancement des consultations particulières.

Une autre chose aussi, naturellement, on a à échanger, parce que le projet de loi vise à mettre en place un nouveau programme de crédit de taxes foncières agricoles, mais d'avoir un programme qui va être efficace puis qui va être fiable. En même temps, c'est un projet qui vise à proposer des solutions pour contrôler le coût de la taxe foncière puis son impact sur la compétitivité des entreprises du secteur, puis c'est un projet de loi qui donne suite à l'engagement de notre gouvernement de faciliter la vie des citoyens puis des entreprises puis de réduire la bureaucratie.

Concrètement, cinq objectifs qui sont visés par le projet de loi : un premier viserait à protéger les producteurs agricoles contre les valeurs extrêmes des terres agricoles en plafonnant leur valeur imposable; un deuxième préviendrait les augmentations extrêmes de la valeur des terres, notamment en élargissant le bassin des comparables pour les évaluateurs municipaux; troisièmement, simplifier les modalités d'accès au Programme de crédit de taxes foncières agricoles et son administration. Puis, en faisant ça, là, on s'attend à réduire des deux tiers les communications annuelles et interventions entre le ministère puis les producteurs agricoles. On a fait répertorier. Là, aujourd'hui, avec le programme qui est en cours, il y a à peu près 290 000 transactions qui se font annuellement entre les producteurs agricoles et puis les fonctionnaires. Avec l'adoption du projet de loi qui est proposé, la réforme qui est proposée, on tomberait à 90 000, ce qui est très important. Et puis, en plus de ça, naturellement, bien, le projet de loi va permettre de réduire le fardeau réglementaire de 40 % pour les producteurs agricoles. Quatrièmement, il propose de créer une catégorie d'immeubles forestiers afin d'offrir aux municipalités la possibilité d'appliquer un taux de taxation distinct pour les propriétaires de boisés privés dans le but de favoriser l'aménagement de nos forêts, puis ça, c'est une disposition qui répond à une demande de longue date des producteurs forestiers; et, cinquièmement, bien, c'est dans la foulée de la stratégie pour la transformation numérique de l'État, il jette les bases d'un guichet unique de collecte de données entre le ministère et La Financière agricole du Québec.

Puis, le projet de loi, naturellement, prévoit également un accompagnement pour les municipalités les plus touchées par le projet de loi. Ainsi, elles seront compensées de façon transitoire pour le manque à gagner occasionné par l'application du plafond de valeur imposable des terres agricoles.

Alors, en conclusion, M. le Président, je souhaite que les travaux contribuent à bonifier notre projet de loi puis à le faire progresser vers son adoption. Puis, honnêtement, je suis ici en mode écoute et puis de bien accueillir les commentaires des gens. Puis une chose qui est certaine, c'est qu'en simplifiant un programme qui est trop complexe puis en réduisant les tracas administratifs des citoyens et des entreprises, le gouvernement veut contribuer à rendre l'État québécois plus efficace.

Alors, je remercie à nouveau les groupes qui viendront nous éclairer de leurs commentaires. Et puis, naturellement, M. le Président, et tous mes collègues de la CAPERN, je sollicite votre collaboration pour mener à terme ce processus législatif qui va profiter aux acteurs d'un secteur d'activité qui est essentiel pour le Québec, pour ses régions puis pour ses citoyens. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, j'invite maintenant le député de Jacques-Cartier, député de l'opposition officielle, à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de quatre minutes.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je veux juste commencer par féliciter le ministre, c'est son premier projet de loi, puis j'espère qu'on va collaborer ensemble. Puis, juste très rapidement, il y a beaucoup des éléments du projet de loi qui sont très intéressants pour les gens dans les régions et aussi les gens autour de nos municipalités partout au Québec. Alors, c'est sûr, sur notre côté, on va être ici, pour commencer, juste en mode écoute, pour écouter des différents groupes et des différents acteurs, puis, après ça, pendant la phase de l'étude détaillée, on va être ici pour proposer des suggestions, des amendements, si nécessaire, pour juste améliorer le projet de loi. Alors, je suis très content et fier d'être ici aujourd'hui puis, comme je dis, je suis ici pour collaborer de bonne foi à ce projet de loi. Merci.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Merci beaucoup, M. le député. Alors, j'invite maintenant le porte-parole du troisième groupe d'opposition en matière d'agriculture et d'alimentation et député de Bonaventure à faire ses remarques préliminaires pour une période d'environ une minute. Bon, si ça déborde un peu, monsieur, pas de problème.

M. Sylvain Roy

M. Roy : Je reconnais votre générosité, M. le Président. Écoutez, bon, bien, je suis très heureux d'être ici pour parler d'un dossier qui est extrêmement important, c'est les conditions de survie économique du secteur agricole au Québec. D'entrée de jeu, M. le ministre, oui, la taxe foncière, tout ça, c'est un enjeu important, mais il y a d'autres, aussi, enjeux qui actuellement devront être soulevés dans, peut-être, d'autres commissions, entre autres l'augmentation faramineuse du coût des assurances des agriculteurs. On a aussi le partage de la richesse dans l'économie agricole. Et, en dernier lieu, bien, le surplus de 1 milliard de La Financière, depuis les 10 dernières années, qui devra être analysé en rapport avec les besoins des agriculteurs. Sur ces mots, bonne commission.

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, M. le député de Bonaventure. J'invite maintenant la porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'agriculture, de pêcheries et d'alimentation et députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue à faire ses remarques préliminaires. Vous disposez d'environ une minute.

• (15 h 10) •

Mme Lessard-Therrien : C'est à moi? O.K.

Le Président (M. Lemay) : C'est à vous, Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Mme Émilise Lessard-Therrien

Mme Lessard-Therrien : Merci, M. le Président. Bien, tout simplement, dire merci à tous les parlementaires d'être présents, merci aux groupes qui vont témoigner. Donc, on a bien hâte d'entendre les échanges et de poser nos questions. Merci.

Auditions

Le Président (M. Lemay) : Très bien, Mme la députée. Alors, maintenant, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association des évaluateurs municipaux du Québec, en vous rappelant que vous disposez d'environ 10 minutes pour faire votre présentation. Ensuite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Et je vous invite, donc, de vous présenter, d'abord, ainsi que les personnes qui vous accompagnent, puis procéder à votre exposé. La parole est à vous.

Association des évaluateurs municipaux du Québec (AEMQ)

Mme Boivin (Alexandra) : M. le Président, M. le ministre Lamontagne, Mmes et MM. les députés, l'Association des évaluateurs municipaux du Québec vous remercie de lui offrir l'opportunité de s'exprimer sur les enjeux relatifs au projet de loi n° 48 en lien avec le domaine de l'évaluation foncière.

Mon nom est Alexandra Boivin. Je suis présidente de l'Association des évaluateurs municipaux du Québec et directrice du service d'évaluation de la ville de Gatineau. Je suis accompagnée de M. Martin Houde, à ma droite, vice-président de l'association et directeur du service d'évaluation de la ville de Laval, et je suis accompagnée de M. Martin... pardon, Éric Racine, secrétaire-trésorier de l'association et directeur par intérim du service d'évaluation de la ville de Québec.

Donc, d'emblée, il nous semble opportun de vous présenter brièvement notre organisation. L'Association des évaluateurs municipaux du Québec, soit l'AEMQ, est un organisme à but non lucratif regroupant principalement des évaluateurs agréés oeuvrant dans le domaine de l'évaluation foncière municipale à travers toute la province. Notre conseil d'administration est composé de 15 membres provenant des secteurs public et privé. Fondée en 1959, l'AEMQ est le plus ancien regroupement de praticiens de l'évaluation foncière municipale au Québec. Nous comptons environ 300 membres, qui oeuvrent principalement à la confection et à la tenue à jour des rôles d'évaluation des municipalités du Québec. Les rôles d'évaluation sont à la base de la taxation foncière municipale. Comme vous le savez, celle-ci constitue la principale source de revenus pour les municipalités du Québec.

L'un des objectifs premiers de notre association est de représenter l'intérêt des membres. Ainsi, notre intervention d'aujourd'hui porte sur des enjeux pragmatiques, simples mais importants, en lien avec l'adoption du projet de loi n° 48 et de ses répercussions significatives pour les évaluateurs municipaux. Nous allons donc aborder deux éléments en particulier, soit l'application des prescriptions du projet de loi et l'élargissement du bassin des comparables aux fins de l'établissement des valeurs foncières des terres agricoles.

L'enjeu principal pour l'AEMQ porte sur le délai imparti pour l'application des prescriptions du projet de loi. Selon le libellé de l'article 38 du projet, les rôles déposés dès septembre 2020 pour une entrée en vigueur en janvier 2021 devront présenter les modifications apportées par le projet de loi. Or, celles-ci commandent des changements informatiques et des gestes professionnels importants puisqu'elles visent plusieurs obligations de l'évaluateur, entre autres la production du sommaire du rôle, la production des avis d'évaluation, les modifications des répartitions fiscales, l'ajustement de l'image du rôle et l'ajout de la catégorie forestière. Par exemple, la structure même des sommaires d'évaluation devra être revue. Ceux-ci compilent toutes les données du rôle des municipalités du Québec et représentent l'un des outils à la base de notre système fiscal municipal. De même, l'affichage public des renseignements disponibles pour les citoyens sera à modifier.

Donc, concrètement, dans le contexte où le projet de loi s'appliquera aux nouveaux rôles 2021, la situation est critique pour les évaluateurs municipaux, qui sont d'ailleurs des acteurs importants dans la mise en oeuvre. Lors de la confection des rôles, les évaluateurs ont besoin de stabilité au niveau de leurs systèmes. D'ailleurs, la confection des rôles est déjà débutée pour 2021. Le court délai entre l'adoption du projet de loi et le dépôt des prochains rôles, en septembre, pourrait créer de l'instabilité dans nos systèmes, sans compter que les estimations initiales de plusieurs fournisseurs informatiques nous indiquent qu'il faudra plusieurs mois de développement.

Par ailleurs, outre la modification législative, nous aurons à analyser les modifications qui seront apportées au Manuel d'évaluation foncière du Québec en lien avec le projet. Nous devrons donc effectuer, dans un premier temps, l'analyse d'affaires et fonctionnelle, puis tester la solution, enfin, faire la formation en vue de l'utilisation en production. Cela mettrait les évaluateurs municipaux de la province à coup sûr dans une position difficile.

Par ailleurs, au niveau des gestes professionnels, nous devrons mettre en place de nouvelles façons de faire pour la cueillette des renseignements puis valider les données obtenues. Mentionnons qu'en septembre 2020, c'est 365 municipalités, par le biais des OMRE, qui déposeront un nouveau rôle d'évaluation 2021, soit 32 % des municipalités au Québec. De notre point de vue, il nous apparaît également pertinent de mentionner qu'il y aura des impacts similaires sur les systèmes de taxation et leurs processus.

Parallèlement, la dernière vague de municipalités à devoir se conformer à la modernisation réglementaire implantée par le MAMH pour les immeubles non résidentiels des unités d'évaluation est prévue pour les dépôts de rôles 2021. Ainsi, certaines municipalités doivent déjà composer avec des enjeux importants de modification de leurs données et de leurs systèmes cette année même. Par conséquent, l'Association des évaluateurs municipaux du Québec recommande de reporter d'une année l'application du projet de loi n° 48, soit au 31 décembre 2021, pour une entrée en vigueur des rôles d'évaluation dont le cycle triennal débutera en 2022.

Maintenant, pour les mesures complémentaires, l'élargissement du bassin des comparables entre les organismes municipaux responsables de l'évaluation aux fins d'établissement de la valeur foncière reçoit l'appui de l'AEMQ. Cet assouplissement est tout à fait pertinent pour améliorer le travail de l'évaluateur et, incidemment, permettre une meilleure vue d'ensemble du marché immobilier agricole pour ce dernier. Nous sommes donc très favorables avec cette mesure.

En terminant, nous ne saurions insister davantage sur l'importance de revoir la date d'entrée en vigueur afin d'assurer une mise en oeuvre efficace et réaliste du projet de loi n° 48 pour les évaluateurs municipaux du Québec. Merci.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Merci beaucoup, Mme Boivin. Alors, sur ce, je vais céder la parole au ministre pour une période d'échange, environ 16 minutes.

M. Lamontagne : Merci beaucoup, madame. Écoutez, dans un premier temps, quand on parle de l'élargissement du bassin des comparables, concrètement, pour vous, comment ça peut vous être utile? Comment ça se passerait? Comment ça se ferait?

Mme Boivin (Alexandra) : On n'a pas encore déterminé de quelle façon ça se ferait, parce que je pense que ce n'est pas de notre ressort de le faire. Par contre, on entrevoit très favorablement cette mesure qui nous permettrait d'avoir accès à plus de données dans le cadre de notre travail. Et, bien entendu, bien, plus de données va nous permettre de faire des analyses plus complètes, O.K., et peut-être même de combler parfois des informations manquantes. Parce que, lorsqu'on se limite à un territoire donné, bien, bien entendu, on est un petit peu tributaire de ce qui existe en termes de marché sur ce territoire-là. Donc, concrètement, je ne peux pas vous dire la mise en oeuvre se ferait de quelle façon, mais on entrevoit de façon très positive cette opportunité.

Le Président (M. Lemay) : M. le ministre.

M. Lamontagne : Ce que vous dites, ultimement, c'est d'avoir la possibilité d'élargir les bassins des comparables va vous permettre de faire un travail qui est encore plus pointu, si on veut, là, par rapport à la justesse, un peu, des évaluations que vous allez faire, là.

Mme Boivin (Alexandra) : Oui, exactement. Ça va nous permettre d'améliorer la qualité de notre travail.

• (15 h 20) •

M. Lamontagne : Excellent. Vous avez mentionné, au niveau des délais, là, que vous trouvez qu'ils sont courts, et tout ça. Même, vous allez jusqu'à recommander de reporter la mise en oeuvre. Mais ce que vous nous dites, c'est qu'en fonction du travail qui a à être fait, là, il y a une diligence certaine à appliquer, là, si on veut, dans l'étude et aussi, là, le travail qu'on a à faire par rapport à ce projet de loi là, puis l'échéancier, là, que le gouvernement s'est fixé, là.

Mme Boivin (Alexandra) : Bien, pour nous, d'appliquer le projet de loi, en fait, c'est assez transparent pour l'évaluateur, parce qu'au-delà de la catégorisation de certains immeubles l'évaluateur va devoir encore établir la valeur réelle des immeubles. Donc, pour nous, c'est assez transparent en ce sens-là.

Le Président (M. Lemay) : Oui, parfait, le député de Bourget, vous avez une question. Allez-y.

M. Campeau : Ah! O.K. Bonjour. Je me demandais, actuellement — je suis vraiment un néophyte, là — est-ce que vous évaluez déjà les immeubles forestiers?

Mme Boivin (Alexandra) : Oui, oui. C'est des immeubles qui sont déjà évalués.

M. Campeau : O.K. Donc, ce serait juste de continuer à faire le même travail mais en les considérant dans une catégorie à part.

Mme Boivin (Alexandra) : Exactement. Par contre, ça commande certains gestes professionnels, donc on va devoir recalculer certains éléments pour les isoler, entre autres.

M. Campeau : D'accord. Vous mentionnez, dans le mémoire, là, que vous êtes en faveur de l'élargissement du bassin des comparables, là, mais je crois comprendre que, quand on parle d'un plafond, vous préférez y aller par région administrative. Est-ce que je comprends bien? Non?

Mme Boivin (Alexandra) : Bien, au niveau des plafonds, là, je vous dirais qu'on... Nous, ce qu'on dit, c'est que, comme on établit la valeur réelle des immeubles, c'est ce qui nous importe, au-delà de tout, si on veut, là. C'est vraiment à ce niveau-là où est-ce que le geste professionnel de l'évaluateur compte, c'est au niveau de l'établissement de la valeur réelle. Et ça, d'après notre compréhension, on a compris que, dans le cadre du projet de loi, nous allions continuer à produire les valeurs réelles, et, à ce moment-là, on n'avait pas nécessairement, je vous dirais, d'autre commentaire à faire sur le sujet.

M. Campeau : O.K. Comme le ministre l'a déjà mentionné, on voulait protéger des valeurs extrêmes de certaines terres agricoles. Est-ce que vous croyez que le projet de loi, dans son libellé actuel, devrait nous protéger contre ça? Avez-vous confiance que ça va aider? Juste votre opinion, parce que, là, je pense que vous êtes extrêmement bien placés pour en parler.

Mme Boivin (Alexandra) : En effet, c'est nous qui déterminons les valeurs au rôle d'évaluation. Les valeurs, à mon point de vue, vont continuer à être établies de la même façon. Donc, ce que vous qualifiez de valeur extrême, peu importe le projet de loi, on va continuer à établir les valeurs de la même façon. Donc, au niveau de l'impact sur les agriculteurs, là, je ne serais pas en mesure de juger, là.

M. Campeau : Merci.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. M. le ministre, j'ai cru comprendre que vous aviez une autre question.

M. Lamontagne : Oui, juste en lien avec la mise en oeuvre, si on veut, l'élargissement des comparables, là, je comprends... Tantôt, j'ai dit dans la forme, mais, en bout de ligne, on a une réglementation qu'on va devoir constituer, si on veut, là. Est-ce que vous auriez des recommandations à nous faire par rapport à cette réglementation-là, là, qu'on va devoir mettre en place?

Mme Boivin (Alexandra) : Ma première recommandation serait sans doute de faire en sorte que les règles soient claires pour l'évaluateur pour éviter toute confusion. Donc, ça, c'est peut-être, pour nous, la base, là. Ça serait d'avoir une clarté dans les règles qui vont régir l'élargissement du bassin des comparables. Ce qu'on entrevoit, c'est un possible échange d'information entre évaluateurs des différentes OMRE, ce qui, présentement, n'est pas prévu dans la Loi sur la fiscalité municipale, entre autres. Donc, c'est sûr que ces éléments-là vont devoir être précisés, encadrés de manière claire. Et, bien entendu, on souhaite pouvoir échanger avec nos collègues professionnels des informations qui vont nous permettre de faire des meilleures analyses ou des analyses plus pointues, si on veut, pour les terres agricoles, notamment.

Le Président (M. Lemay) : ...

M. Lamontagne : Oui, au niveau des terres agricoles, l'expérience que vous avez déjà avec l'évaluation, au niveau des immeubles forestiers, dans le cas, encore là, qu'on aurait l'élargissement des catégories, et tout ça, qu'est-ce que vous verriez aussi ce qui serait optimal, là, au niveau forestier? Voyez-vous quelque chose de différencié?

Mme Boivin (Alexandra) : Oui. Bien entendu, on souhaite fortement qu'au niveau forestier les immeubles qui vont être identifiés dans la catégorie des immeubles forestiers le soient par le ministère concerné, là, le ministère des Forêts et de la Faune, pour qu'on puisse avoir une instance centrale qui nous indique, de façon encore une fois claire, qui doit bénéficier de la catégorie en question. Donc, ce qu'on préfère, c'est que ce ne soit pas l'évaluateur qui fasse la catégorisation et la gestion des propriétés forestières.

Le Président (M. Lemay) : Merci, Mme Boivin. Sur ce, je cède la parole à la députée de Laviolette—Saint-Maurice.

Mme Tardif : Merci, M. le Président. Bonjour. Merci beaucoup d'être ici. Je suis contente... et corrigez-moi, mais je suis contente d'entendre ou de déduire, à la lecture de votre rapport et à l'écoute de votre présentation, que vous êtes en faveur de ce projet de loi là, et le seul bémol que je perçois étant celui du délai, le délai nécessaire. Vous dites qu'il y a un délai nécessaire pour la mise en place, étant donné, là, tout ce qu'il y aura à faire, surtout au niveau informatique et collecte de données. Est-ce bien ça? Oui? Non... Oui? Parfait.

Et ma question étant... Il y a deux évaluations, l'évaluation de façon générale et l'évaluation, je crois bien, des immeubles qui sont non résidentiels. Il y avait deux dates, 2020 et 2021, pour les immeubles non résidentiels. En fait, le portrait, là, que j'essaie d'avoir c'est : Pour vous, quel serait le délai? À partir du moment où le système informatique est installé chez vous, tout est fonctionnel, on peut se dire que... Si on veut que ce projet-là ne soit pas reporté à dans un an et demi, que devrait-on faire pour que ce soit bien fait, mais quel est le délai qui est nécessaire pour vous?

Mme Boivin (Alexandra) : O.K. Bien, premièrement, là, je peux peut-être juste préciser au niveau des dates. Bien entendu, lorsqu'on parle des dates qui sont actuellement prévues, ça implique que le rôle d'évaluation qu'on doit déposer en vertu de la loi, le 15 septembre 2020 et qui rentre en vigueur en 2021, bien, ce rôle-là devra être modifié, là, pour correspondre au projet de loi.

Donc, ça nous laisse très peu de temps. C'est ce qu'on essayait de souligner, c'est que, dans le fond, on doit avoir tout terminé le projet bien avant le 15 septembre 2020.

Mme Tardif : Et c'est là ma question, ma question étant : Combien de temps ça vous prend? Une fois que le système informatique est fonctionnel et que tout est parfait, vous demandez un délai de combien de mois ou de semaines pour faire la collecte et tout?

Mme Boivin (Alexandra) : Bien, le travail se situe non seulement au niveau de l'informatique, mais aussi des gestes professionnels et de la collecte de données. Et ça, bien, ça peut se faire dans différents scénarios d'étapes, là. Mais il y a non seulement le système informatique à modifier mais aussi les gestes professionnels à poser.

Et je dirais, au-delà de tout ça, aussi c'est qu'on doit avoir accès aux modifications qui vont être faites dans le Manuel d'évaluation foncière du Québec. Donc, on est un petit peu à la remorque de plusieurs éléments, que ça soit les modifications du manuel d'évaluation foncière, les modifications informatiques, la collecte de données, et c'est tous des éléments qui s'additionnent, dans le fond, dans le processus, là.

Mme Tardif : Je ne crois pas — M. le Président, je m'excuse — avoir entendu la réponse à ma question. Si on veut vous aider, aidez-nous à vous aider. Donc, quel est le délai? Quel est le nombre de semaines et de mois que vous exigez, que vous avez besoin?

• (15 h 30) •

Le Président (M. Lemay) : Mme Boivin, s'il y a quelqu'un d'autre qui veut répondre, il n'y a aucune problématique.

Mme Boivin (Alexandra) : Oui, mais, je pense, M. Racine voudrait répondre à la question.

M. Racine (Éric) : Oui. Moi, je vous dirai qu'à ce moment-ci, lorsqu'on commence le processus de dépôt de rôle, qui prend environ, là, dans le meilleur des cas, une année, là, plusieurs mois, il faudrait avoir terminé. Il faudrait que les systèmes informatiques, tel que vous le demandez, seraient en place pour permettre aux évaluateurs d'avoir eu la quincaillerie, si vous voulez, les systèmes nécessaires pour être capables de produire un travail de qualité. À ce moment-ci, les gens qui vont déposer en septembre 2020 ont déjà commencé les processus. C'est pour ça qu'on est ici pour vous dire : Bien, ce n'est pas qu'on est de mauvaise foi par rapport à ça, c'est... tout simplement, on veut bien le faire et avoir le temps de le faire correctement.

Et, bon, le délai, dans le fond, c'est que, pour moi, là, il faudrait vraiment que, exemple, là, la ville de Québec qui dépose l'an prochain, les systèmes soient prêts à la fin de cette année, O.K.? Alors, dans le fond, là, vous voyez un peu l'urgence de la situation. Et, comme l'information risque d'être disponible, à quelque part, là, ce qu'on en comprend, peut-être cet été, le temps de faire les analyses fonctionnelles et d'affaires de la nouvelle législation, le temps de faire programmer tout ça, le temps de faire tester tout ça, de faire la formation, de mettre en production, de créer les données, de mettre tout ça droit, de valider tout ça... Alors, vous voyez un peu le processus, ça fait partie des étapes normales d'un dépôt de rôle, et ces étapes-là, en général, prennent plusieurs mois, voire une année, en général. Il y a bien des organisations qui vont prendre une année et demie, des plus grandes organisations. Alors, je ne sais pas si ça répond à votre question, mais je vous dirai qu'à ce moment-ci on est déjà à court.

Mme Tardif : Merci.

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, M. Racine, pour cette réponse. M. le ministre, allez-y.

M. Lamontagne : Un petit commentaire pour vous dire qu'on est tout à fait mobilisés, là, au ministère, dès l'adoption du projet de loi, là, de vous fournir les informations dans des délais, là, qui vont être très, très, très à point, si on veut, là.

Le Président (M. Lemay) : Merci pour cette précision. M. le député de Beauce-Nord, j'ai cru comprendre que vous avez une question.

M. Provençal : Merci, M. le Président. J'aurais deux points. J'aimerais revenir sur l'élargissement des comparables. Est-ce que vous croyez que cet élargissement-là va faire en sorte que ça va vous permettre d'aller chercher des données supplémentaires qui vont permettre, un, d'avoir une meilleure évaluation du domaine agricole et forestier mais aussi qui va permettre d'éviter des écarts qu'on voyait très, très, très fortement dans des régions qui étaient limitrophes?

Mme Boivin (Alexandra) : Effectivement, ça va nous permettre d'avoir une meilleure harmonisation entre les secteurs limitrophes où est-ce que, présentement, là, les évaluateurs des deux régions limitrophes ne peuvent pas échanger d'information. Donc, on sait très bien que ce n'est pas parce qu'une ligne territoriale est tracée à un endroit que l'information tout juste à côté ne pourrait pas servir et être pertinente pour évaluer, surtout dans le cas où est-ce qu'on a un petit peu moins de données. Chaque donnée peut nous permettre d'améliorer la qualité de notre travail, là.

M. Provençal : Donc, ça devient un plus pour le rôle que vous avez à jouer comme évaluateur.

Mme Boivin (Alexandra) : Exactement.

M. Provençal : M. le Président, est-ce que j'ai droit à un point complémentaire? Écoutez, j'ai cru percevoir, dans votre mémoire, qu'au niveau des... Vous êtes favorables, là, à la catégorie des immeubles forestiers. Bon. Malgré ça, je le sais qu'au niveau... avec le MAPAQ, pour tout ce qui est agricole, il y a des échanges au niveau des données qui vont très, très bien. Du moment où est-ce qu'on crée une catégorie au niveau... forestière, qu'est-ce que vous aimeriez... Sur quoi on devrait porter une attention particulière pour être sûr qu'on va avoir un succès quand il va arriver le temps de faire ces échanges de données là?

Le Président (M. Lemay) : Très rapidement.

Mme Boivin (Alexandra) : Bien, je pense qu'il y a déjà un modèle qui existe, un modèle d'échange d'information qui existe déjà avec le MAPAQ, qui fonctionne très bien. Je pense que ce serait peut-être juste de répéter le modèle puis peut-être, éventuellement, voir s'il y a des pistes d'améliorations. Mais, pour l'instant, ça fonctionne bien.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Merci beaucoup, Mme Boivin. Alors, ceci complète cette période d'échange. Et j'invite maintenant la députée porte-parole de l'opposition officielle en matière d'agriculture, vice-présidente de la commission et députée de Maurice-Richard à procéder à sa période d'échange.

Mme Montpetit : Je vous remercie. Bonjour à vous trois. Merci d'être là avec nous aujourd'hui. Juste avant d'aller plus loin dans les questions — je comprends que vous n'avez pas nécessairement de mémoire qui est déposé à la commission — est-ce qu'il serait possible, pour la suite de nos travaux... Je ne sais pas si vous voulez nous faire suivre une liste de recommandations ou peut-être votre allocution, au moins, de départ, qui pourrait être transférée au secrétariat, juste pour qu'on puisse en prendre connaissance plus attentivement puis que... Lorsqu'on aura des échanges, ça va nous aider également pour la suite, là.

Mme Boivin (Alexandra) : Je ne sais pas. Si personne n'y voit d'objection, nous, on est ouverts à vous partager la présentation d'ouverture qu'on a faite.

Le Président (M. Lemay) : Oui, bien sûr. Donc, à ce moment-là, je vous invite à le transmettre au secrétariat qui le rendra disponible à l'ensemble des membres de la commission.

Mme Montpetit : Je ne pense pas qu'il y ait d'objection, quand vous venez présenter, à ce que vous déposiez votre texte. Puis, si vous avez... Si vous voulez faire une synthèse des recommandations que vous faites, comme vous venez vous présenter, vous avez demandé d'être entendus, en tout cas, où vous êtes présents en consultation, je pense que ça nous aide, après ça, à bonifier le projet de loi qui est devant nous.

Vous avez fait référence à l'élargissement des bases des comparables. Est-ce que, selon vous, dans le projet de loi qui est devant nous, il y a des correctifs qui devaient être apportés, en ce sens que... Est-ce qu'il y a une possibilité que certaines régions soient désavantagées par rapport à d'autres?

Mme Boivin (Alexandra) : Au niveau des évaluateurs, je peux affirmer sans nul doute que l'ajout d'informations ou l'ajout de données à notre travail va nous permettre d'améliorer notre travail, ça fait que je pense que tout le monde est assez d'accord sur ce point-là. Sans avoir fait de sondage formel auprès de tous nos membres, le fait d'avoir accès à davantage de données, là, est très, très favorable de notre point de vue. Je ne vois pas de quelle façon ça pourrait désavantager soit une région ou soit un propriétaire en particulier, là.

Mme Montpetit : O.K., mais je comprends que vous ne l'avez pas évalué non plus. Ce n'est pas dans cet angle-là, nécessairement, que vous venez vous présenter. Vous, c'est l'accès aux données, c'est ce que je comprends, qui vous...

Mme Boivin (Alexandra) : Bien, l'objectif, en évaluation, c'est d'établir une valeur réelle, et, pour établir une valeur réelle qui correspond à nos standards professionnels, bien, on doit avoir la donnée en conséquence.

Mme Montpetit : Une des demandes aussi... Puis on aura l'occasion certainement de... bien, pas certainement, mais on les rencontre la semaine prochaine, qui seront présents, l'UPA sera présente en consultation, une de leurs demandes historiques, c'est de revoir la méthode d'évaluation du prix des terres agricoles pour tenir compte de l'évaluation agronomique. Est-ce que, pour vous... Bien, est-ce que vous avez une opinion là-dessus? Peut-être pas. Vous me faites signe que...

Mme Boivin (Alexandra) : Je pourrais vous dire qu'on n'a pas... On ne s'est positionnés ou questionnés sur le sujet en tant que tel. Nous, je réitère peut-être juste qu'on établit la valeur réelle, là, selon la définition qui est prévue dans la Loi sur la fiscalité municipale.

Mme Montpetit : Je vais reposer ma question. Je vais recommencer autrement, d'abord. Est-ce que vous avez des suggestions de bonification à faire au projet de loi qui est sur la table? Parce que, quand on va tomber en étude détaillée, on est bien intéressés à... Je ne pense pas qu'on est des experts en fiscalité agricole, personne, autour de la table, ni en fiscalité, d'ailleurs, mais peut-être que vous avez des suggestions très concrètes sur certains des articles du projet de loi ou des ajouts qui pourraient être faits aussi.

Mme Boivin (Alexandra) : L'AEMQ, là, a décidé vraiment, je dirais, de soulever la principale problématique du délai d'application. Pour ce qui est du reste du projet de loi, on l'a regardé puis on n'avait pas nécessairement soulevé d'éléments qui nous paraissaient être problématiques, là.

Mme Montpetit : Parfait. Bien, je vous remercie beaucoup.

Mme Boivin (Alexandra) : Dans le cadre de notre travail, bien entendu.

Mme Montpetit : Oui, oui, c'est ça. Bien, je comprends, c'est ça, vous avez pris un angle au niveau du délai. C'est parfait. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Lemay) : M. le député de Jacques-Cartier, est-ce que vous vouliez...

Mme Montpetit : Non, on peut...

Le Président (M. Lemay) : Non. Ça va, parfait. Donc, à ce stade-ci, je vais céder maintenant la parole à Mme la députée de Rouyn-Noranda–Témiscamingue pour sa période d'échange.

• (15 h 40) •

Mme Lessard-Therrien : Merci, M. le Président. Je vais continuer un petit peu dans la même veine que ma collègue par rapport à l'établissement de la valeur des terres. Dans un tableau que j'avais tout près, dans un tableau de La Financière agricole, là, on parle que, de 2017 à 2018, il y a quand même eu une hausse de 16 % de la valeur des terres agricoles. Bon, qui dit hausse de valeur des terres, hausse des taxes, évidemment. Donc, on comprend que, là, le programme va continuer de rembourser.

Moi, j'aimerais peut-être que vous nous expliquiez comment on explique, en fait, une telle flambée des prix. 16 %, j'imagine que ce n'est quand même pas rien, là, surtout quand on a des si grandes superficies. Donc, pouvez-vous nous expliquer un peu comment s'explique cette flambée-là?

Mme Boivin (Alexandra) : Bien, c'est toujours le jeu de l'offre et la demande, là, en évaluation. Puis, au niveau des prix, la tendance des prix est fortement influencée par l'offre et la demande. La demande pour les terres agricoles est forte, particulièrement, on le sait, dans certaines régions du Québec où est-ce qu'il y a une très grande demande par rapport à ces produits-là. Mais je pourrais vous dire plus largement que, dans l'ensemble du marché immobilier, au cours des dernières années, on a remarqué que les immeubles, toutes catégories confondues, ont augmenté en termes de valeur, mais, au niveau de l'agricole, ça pourrait s'expliquer vraiment par la demande. Puis c'est sûr qu'il y a une certaine rareté aussi au niveau des très bonnes terres, ça fait qu'à ce moment-là ça met une pression sur les prix. Ça serait mon explication générale, là.

Mme Lessard-Therrien : Est-ce que vous anticipez que le phénomène continue de s'accroître dans les prochaines années?

Mme Boivin (Alexandra) : Ça serait difficile de prédire parce que je n'ai pas la boule de cristal. Nous, on analyse vraiment l'historique des transactions, la tendance des prix, on travaille avec des données du passé. Par contre, ce n'est pas exclu que les valeurs continuent de monter si la demande est toujours présente.

Mme Lessard-Therrien : Parce que, bon, avant l'atteinte, là, il y a le plafonnement, maintenant, à 32 100 $ l'hectare, mais, quand même, pour plusieurs entreprises agricoles, on n'en est pas là encore. Donc, on peut s'attendre à ce que, tu sais, le remboursement de taxes va toujours augmenter jusqu'à cette valeur-là.

Dans une optique de saine gestion des fonds publics, là, parce que c'est un peu notre rôle en tant que parlementaires, d'être un peu le chien de garde de comment les sous, chaque dollar est dépensé, puis là je fais encore un peu de pouce sur ce que ma collègue a dit, mais ça serait quoi, la meilleure façon d'évaluer les terres pour s'assurer que ce programme-là ne soit pas, finalement, une caisse sans fond? Puis, bien sûr, on comprend que c'est pour soutenir nos agriculteurs, c'est l'objectif, puis c'est ça qu'il ne faut pas perdre de vue, mais est-ce qu'il n'y aurait pas une meilleure façon de procéder pour que cette caisse-là ne devienne pas sans fond?

Mme Boivin (Alexandra) : C'est sûr qu'en tant que professionnel avec un titre professionnel je dois me conformer à une certaine méthodologie quand vient le temps d'évaluer. Donc, on est un petit peu contraints par ça. Si vous parlez de façons différentes pour donner que ce soit des allègements, ou peu importe, bien là, on peut plus peut-être penser à agir plutôt sur d'autres éléments comme les taux de taxation, ou peu importe... qui n'est pas nécessairement de notre ressort en tant qu'évaluateurs, là.

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, Mme Boivin. Maintenant, je vais céder la parole au député de la troisième opposition. M. le député de Bonaventure, la parole est à vous.

M. Roy : Merci, M. le Président. Écoutez, je ne savais pas, dans mon existence, qu'il existait un manuel de modification, en tout cas, un manuel d'évaluation foncière. Bon, ça, j'ai appris ça. Et vous avez soulevé un enjeu extrêmement important, à mon avis, c'est... vous avez dit : Si les règles ne sont pas claires, ça va être difficile. Et là vous avez parlé de modifications du Manuel d'évaluation foncière du Québec pour établir les règles. Est-ce que c'est...

Mme Boivin (Alexandra) : En fait, les indications dans le manuel découlent de la loi.

M. Roy : Admettons, dans un cas hypothétique où les règles ont un certain flou artistique et que vous ayez l'obligation d'interpréter un tantinet certaines règles, est-ce qu'on pourrait se ramasser dans une situation où on aurait une pluie, pour ne pas dire une grêle, de contestations d'évaluations? Est-ce qu'il va y avoir une phase transitoire dans les modifications qui peuvent amener des contestations si les règles ne sont pas claires puis si vous n'avez pas le temps de bien faire ça? Écoutez, ce n'est pas pantoute mon domaine, là, mais...

Mme Boivin (Alexandra) : Lorsque je faisais référence à la clarté, c'était vraiment au niveau de de quelle façon on va pouvoir échanger des données avec d'autres organisations, d'autres OMRE, d'autres organismes responsables, ce que, présentement, on n'a pas le droit de faire. Donc, c'était plus à ce niveau-là. Je voulais juste que les règles soient claires, qu'on... qu'est-ce qu'on pouvait échanger, qu'est-ce qu'on ne pourrait pas échanger, de quelle façon ça allait se produire. Donc, c'était plus à ce niveau-là.

Au niveau du manuel d'évaluation foncière en général, c'est extrêmement clair et limpide, là, les règles. Justement, ce manuel-là est là pour guider l'évaluateur de façon claire, parce que, bon... pour s'assurer qu'il n'y ait pas, justement, d'interprétation. Puis je ne vois pas en quoi il pourrait y avoir des contestations en lien avec ça, pour l'instant. Je ne sais pas si mes collègues avaient quelque chose, là.

M. Roy : Non, mais vous clarifiez. Bien, je parlais de contestation en termes de nouvelles évaluations potentielles qui vont être faites à partir de toutes les règles, puis... Parce qu'on jase, là, on est tout seuls, il n'y a personne qui nous entend, là, mais vous comprenez? Non, mais je le sais que ça... quand on refait des rôles, chez nous, entre autres, quand... Bon, écoute, des fois, tu dis : Tu exagères un petit peu, là, puis on essaie de rectifier le tir par des contestations, ça existe. Écoutez, c'était ce que je voulais savoir. Sinon, bien, je pense que ça va faire le tour de mes questions. Merci beaucoup.

Le Président (M. Lemay) : Très bien, M. le député de Bonaventure. Ça fait contraste avec le député de Jonquière, qui a l'habitude de nous dire : Pour le bénéfice des citoyens qui nous écoutent... Donc, le... Mais bon, très bien.

M. Roy : ...mettre à l'aise, M. le Président.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Donc, je vous remercie beaucoup pour votre contribution à nos travaux.

Je vais suspendre les travaux quelques instants afin de permettre aux représentants de la Fédération québécoise des municipalités de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 15 h 47)

(Reprise à 15 h 50)

Le Président (M. Lemay) : Alors, nous reprenons nos travaux. Et je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Fédération québécoise des municipalités, en vous rappelant que vous disposez de 10 minutes pour procéder à votre exposé. Ensuite, nous aurons une période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent, puis vous pourrez procéder à votre exposé. La parole est à vous.

Fédération québécoise des municipalités (FQM)

M. Demers (Jacques) : Parfait. Bonjour, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés. Bonjour, je me présente, Jacques Demers, maire de Sainte-Catherine-de-Hatley, préfet de la MRC Memphrémagog et président de la Fédération québécoise des municipalités. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Pierre Châteauvert, directeur des politiques à la Fédération québécoise des municipalités, et de David Boulet, conseiller économique à la fédération, celui qui a travaillé nos chiffres, qui a regardé ça dans tous les sens.

Merci d'accueillir la Fédération québécoise des municipalités dans le cadre de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 48 visant principalement à contrôler le coût de taxation foncière agricole et simplifier l'accès au crédit des taxes foncières agricoles. C'est en tant que porte-parole des régions que la FQM vous transmet aujourd'hui ses recommandations sur le projet de loi n° 48.

Mais, d'abord, la fédération, bien, on représente 1 000 municipalités puis MRC au Québec. Pour ceux qui ne le sachent pas, il y en a environ 1 008, municipalités. Il y en a 1 000, et les MRC sont toutes membres de la fédération. On est là, on est sur le territoire. Quand on parle d'agriculture, bien, c'est souvent notre première économie. On parle de foresterie. C'est ça qu'on retrouve sur le territoire du Québec. Ça fait qu'on est vraiment fiers d'être parmi vous aujourd'hui.

Je vais laisser M. Châteauvert faire la présentation.

M. Châteauvert (Pierre) : Merci, M. le Président. M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, les présents commentaires sur le projet de loi n° 48 font suites aux discussions menées au sein de nos instances, c'est-à-dire des commissions permanentes, l'assemblée des MRC, qui réunit la totalité des MRC, et le conseil d'administration de la fédération.

Au Québec, les politiques fiscales touchant les propriétés agricoles furent mises en place afin de favoriser le développement d'une économie agricole de type familial basée sur des fermes de petites et de moyennes tailles. Depuis plusieurs années, le milieu agricole demande une révision en profondeur de la fiscalité municipale agricole en raison de l'augmentation de la valeur des taxes agricoles et des taxes foncières.

Rappelons toutefois que l'augmentation du prix des taxes agricoles n'est pas un phénomène nouveau ni circonscrit au Québec. Par ailleurs, le processus d'évaluation au Québec est basé sur la valeur marchande des immeubles fonciers, un système qui offre une référence commune pour l'ensemble des immeubles fonciers. Le processus d'évaluation du Québec est de qualité et sert de référence pour plusieurs de nos voisins.

Selon le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, le projet de loi n° 48 vise à simplifier le programme pour les producteurs agricoles et le MAPAQ, à renforcer la compétitivité des entreprises agricoles sur le plan de la fiscalité foncière et à contrôler la croissance du coût du programme. La FQM souhaite signifier son désaccord avec le projet de loi. La réforme proposée est inadaptée et porte atteinte aux principes régissant la gestion des gouvernements de proximité.

La FQM représente 1 000 membres, on l'a dit, est située dans toutes les régions du Québec, et est, à ce titre, la porte-parole des régions, et défend les intérêts des municipalités du Québec et des principes qui guident leur action au quotidien. Citons parmi ces principes : le respect de l'autonomie municipale, l'équité entre les contribuables et l'occupation et la vitalité des territoires. La réforme et le plafonnement de... l'évaluation, pardonnez-moi, vont à l'encontre de ces principes.

Tout d'abord, l'autonomie municipale, c'est-à-dire la capacité des municipalités à décider pour les responsabilités qui leur incombent, repose sur un certain nombre de conditions. Parmi celles-ci, des outils de taxation efficaces, cohérents et simples. Ces outils doivent s'appuyer sur un processus d'évaluation objectif et reconnu pour permettre une comparaison entre les différentes catégories d'immeubles fonciers. Avec le projet de loi n° 48, via le plafonnement de l'évaluation foncière agricole, le gouvernement porte atteinte à l'intégrité du processus d'évaluation, et donc à l'autonomie des municipalités, en retirant de l'assiette de taxation une partie de la valeur foncière, le premier principe.

Le second, les municipalités du Québec doivent maintenir un équilibre entre les contributions au financement des services municipaux de chaque classe de contribuables. Cet équilibre est garant de l'acceptabilité des décisions des conseils municipaux par les citoyens et d'un climat serein dans les communautés. Les élus doivent pouvoir défendre leurs décisions en s'appuyant sur un processus clair et des critères objectifs. En imposant un plafond sur la valeur imposable des terres agricoles, le gouvernement créera ainsi un manque à gagner pour les municipalités, estimé entre 3 et 5 millions annuellement par le MAPAQ, lequel devrait nécessairement être récupéré sur l'ensemble des contribuables de la municipalité concernée. Cela est contraire au principe d'équité, les contribuables de ces municipalités ne doivent pas payer pour le financement de l'agriculture.

En sa qualité de porte-parole des régions, la FQM défend une agriculture dynamique à l'échelle familiale qui puisse assurer l'occupation et la vitalité du territoire, le troisième principe. L'agriculture est un fondement de l'économie des membres de la FQM. Nos membres sont d'ailleurs engagés dans le développement de l'agriculture à travers les PDZA, les plans de développement de la zone agricole, par exemple. Toutefois, le soutien des activités agricoles, soutien financier, et autres, des activités agricoles doit venir principalement et surtout du gouvernement du Québec et non des collectivités locales, l'ensemble des Québécoises et des Québécois profitant de cette importante activité économique.

Le principe d'occupation et de vitalité des territoires est remis en cause par la réforme. Les mesures principales d'aide financière du gouvernement favorisent déjà l'agriculture de plus grande taille. Cela est contraire au soutien à une agriculture familiale et présente sur tout le territoire. Nous croyons que le plafonnement accentuera la dynamique d'intégration dans le monde agricole. Le problème est donc mal posé, et la réforme est inadaptée. De façon générale, l'agriculture devrait servir à nourrir les Québécoises et les Québécois. De plus, puisque tous doivent avoir accès à ces produits, l'agriculture doit servir à une occupation dynamique du territoire.

Le contexte entourant l'agriculture est changeant, et l'évolution des différents facteurs impose une pression financière sur les producteurs. Parmi les éléments ayant une influence directe sur la rentabilité de l'agriculture, on peut noter l'évolution du commerce international et les différents accords de libre-échange, l'évolution du coût des intrants agricoles, l'augmentation des standards environnementaux et l'augmentation des attentes des consommateurs. Cette pression financière sur le monde agricole se traduit par une consolidation soutenue des fermes. Entre 2001 et 2016, le nombre d'exploitants agricoles au Québec a diminué de 5 390. Ce phénomène diminue la capacité du Québec à assurer son autonomie alimentaire de façon générale et à l'échelle locale. D'ailleurs, ce sont les achats de terres par des agriculteurs voisins qui ont provoqué la hausse marquée de la valeur des terres. Une vérification auprès de plusieurs municipalités de la Montérégie a permis de démontrer que le problème a donc été principalement causé par les agriculteurs eux-mêmes.

Le monde agricole se tourne à tort vers les municipalités pour trouver un allègement de son fardeau financier. Bien que les taxes foncières et les dépenses totales du programme ont crû constamment au fil des dernières années, les municipalités n'ont pas cherché à transférer le fardeau fiscal vers l'agriculture. D'abord, il est important de noter que les phénomènes de croissance foncière sont cycliques. Les croissances résidentielles et agricoles se sont alternées au Québec dans les dernières années. Entre 2006 et 2016, c'est la part du résidentiel qui a crû à l'échelle du Québec. Il est par ailleurs faux d'affirmer que le poids des taxes foncières agricoles est plus élevé au Québec qu'ailleurs. Selon Statistique Canada, c'est 3 360 $ d'impôt foncier net par exploitation qui a été payé au Québec en 2018 contre 5 160 $ en Ontario. De plus, depuis l'instauration du taux différencié agricole facultatif en 2007, ce sont 92 municipalités qui ont adopté cet outil, ce qui indique une tendance des municipalités à diminuer le taux... le fardeau fiscal des producteurs agricoles. Le milieu municipal n'est donc pas la source principale de pression financière pour les agriculteurs et constitue en quelque sorte une échappatoire pour donner de l'air aux producteurs.

Nous reconnaissons les enjeux auxquels font face les agriculteurs et, en tant que porte-parole des régions, nous savons à quel point l'agriculture est essentielle à l'autonomie alimentaire du Québec et à la vitalité de nos communautés. C'est d'ailleurs pourquoi le FQM questionne la réforme et ses objectifs. La réforme actuelle s'inscrit dans une approche essentiellement financière qui vise la viabilité du programme. Bien que cet objectif soit noble, on en convient, s'en tenir exclusivement à celui-ci aurait des conséquences indues. Nous suggérons au gouvernement d'élargir les objectifs de la réforme et de les arrimer à ses priorités pour les régions et l'économie de façon à éviter des conséquences involontaires. Il est impératif que le financement gouvernemental soit destiné aux petites exploitations agricoles qui répondent aux besoins alimentaires et économiques du Québec. Une solution viable et bénéfique pour tous serait le fruit d'une analyse commune basée sur des constats solides. Cela n'est possible que si toutes les parties pertinentes participent à la réflexion, ce qui n'a pas été le cas.

Considérant que cette réforme inadaptée affecterait le développement des régions, la FQM invite donc le gouvernement à retirer son projet de loi et offre sa collaboration pour travailler à des solutions visant à pérenniser et à développer l'agriculture en assurant une relève dynamique et l'occupation et la vitalité de toutes les régions du Québec. Nous vous remercions.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Est-ce que vous voulez rajouter quelque chose d'autre?

Une voix : ...

Le Président (M. Lemay) : Non? Parfait. Alors, nous allons procéder à la période d'échange, et, M. le ministre, la parole est à vous.

• (16 heures) •

M. Lamontagne : Merci, M. le Président. Merci beaucoup, M. Châteauvert, M. Demers, monsieur... excusez-moi, M. Boulet. Ça fait plaisir de vous accueillir.

Je ne peux pas échapper, là, M. Châteauvert, vous dites, tu sais, qu'il n'y a pas eu de consultation, il n'y a pas eu... À ma connaissance, là, à moins qu'on m'ait désinformé, là, 16 mars 2019, 31 juillet 2019, 17 octobre, 3 octobre, les appels téléphoniques qu'il y a eu entre le personnel du MAPAQ, les échanges techniques entre nos organisations, votre organisation... Je peux comprendre qu'ultimement le fruit de ces échanges-là ne semble pas, là, aller dans le même sens que ce que vous auriez souhaité, mais, par contre, je pense qu'il y a certainement eu des échanges, là, entre le ministère... Et puis je pense que... Puis moi, le rapport que j'avais, là, c'est que ces échanges-là se faisaient de façon bien cordiale avec le personnel chez vous. Je voulais juste m'assurer, dans les échanges, est-ce que vous avez eu une bonne collaboration de la part des fonctionnaires? Est-ce qu'on a eu des manquements? Au départ, là, je voudrais juste, tu sais...

M. Demers (Jacques) : Oui. Puis, même, personnellement, on s'est rencontrés sur ce dossier-là aussi. Ce qu'on dit, c'est qu'on aurait dû travailler de façon collective dans ce dossier-là. Quand il nous a été déposé puis ce qu'on voit aujourd'hui, on n'y voit pas de changement. Oui, le personnel nous a fourni des chiffres, on leur a fourni aussi des chiffres, des questionnements, des choses qu'on se dit : Il faudrait travailler là-dessus. Ça, ça a été fait, on n'a pas de problème sur ces éléments-là, oui.

M. Lamontagne : Parfait. Bien, merci beaucoup. Écoutez, d'entrée de jeu, là, c'est certain que moi, ça fait six ans, là, que je suis député, puis aussi, au Centre-du-Québec, Johnson, j'ai une grosse partie de mon comté, naturellement, c'est des producteurs agricoles. Puis je dois vous confesser, bien honnêtement, avant d'être député, même si je viens de Saint-Félicien, au Lac-Saint-Jean, là, ça fait longtemps que je suis parti, je n'avais pas un grand éveil, une grande sensibilité ou compréhension par rapport aux enjeux qui peuvent toucher le monde agricole. Puis c'est certain qu'au fil des années, bien, comme député, au même titre que quand on rencontre les gens de la FQM, bien, vous nous faites certaines représentations, à un moment donné, on rencontre les agriculteurs, les fédérations, on a certaines représentations, mais, de façon générale, ma compréhension, un peu, des revendications du monde agricole, depuis des années et des années, là, c'est qu'en bout de ligne ce qu'ils vont dire, c'est qu'ultimement la façon dont les taxes sont faites, notre système de taxation qui vient à aller sur la valeur... Bien, au départ, ils vont nous faire la représentation que leurs terres, c'est leur principal outil de production, hein? Puis, après ça, ils vont nous sensibiliser au fait qu'ultimement, que ta terre ait un acre ou que ta terre ait 10 acres, ou 10 000 pieds, ou 50 acres, bien, ils vont nous dire : Écoutez, je n'ai pas davantage de service d'égout, je n'ai pas davantage de service de rebuts, je n'ai pas davantage de services municipaux. Puis c'est dans cette optique-là que le monde agricole, depuis des années, demande d'avoir un traitement différencié au niveau de la taxation. Bon, ceci étant dit, est-ce que vous reconnaissez une certaine légitimité à ce discours-là ou pas du tout? J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Demers (Jacques) : Oui, oui, puis on pourrait l'expliquer. Puis vu que vous jouez un peu dans votre passé puis vos connaissances, bien, je vais faire un peu la même chose. Moi, je viens du milieu agricole directement. Chez nous, mes parents, ma soeur, mes frères, tout le monde est en agriculture. J'étais même président, il y a plus de 25 ans, de la Fédération de la relève agricole du Québec. Ça fait que le monde agricole, j'avais une entreprise dans ce domaine-là, j'ai fait ma vie là-dedans, ça fait que c'est un monde que je connais, j'ose dire, relativement bien.

Quand on nous dit que les coûts ne sont pas reliés avec les taxes, bien, ce serait... là-dessus, c'est des points qu'on devrait travailler ensemble, parce qu'un des coûts principaux, là, qu'on a... Bien, il y en a deux, trois. On pourrait prendre la Sûreté du Québec. Mais la Sûreté du Québec, elle nous est chargée par le gouvernement, basé sur la valeur de ces terres-là. Ça fait que ce qu'on charge, bien, c'est leur facture que... Le gouvernement a souhaité facturer les municipalités sur cette base-là. Si le gouvernement est prêt à changer sa facturation, bien, automatiquement, il va y avoir une diminution pour l'agriculture. Quand on nous dit que les services ne sont pas les mêmes, de façon générale... puis je vais prendre la municipalité chez nous, il n'y en a pas, de service d'égout puis d'aqueduc, nulle part, nulle part, pas plus au village que dans les autres. On ne l'a pas. C'est tout individuel, qu'on a nos puits, comme l'agriculture, mais l'agriculture, on va la retrouver dans des rangs, on va la trouver dans le milieu agricole. Alors donc, on a des rangs, on a des chemins. Pour se rendre sur les fermes, souvent, on fait des kilomètres. Dans la dernière année, à peu près partout, puis je pourrais vous montrer les dépôts de déneigement, on a doublé le coût pour le déneigement de ces mêmes routes là. Ça fait que les services, quand on dit : Il n'y en a pas plus, c'est faux. L'agriculture se trouve sur le territoire, puis ça prend un territoire vaste pour avoir une ferme qui a des acres suffisantes pour pouvoir faire de l'agriculture.

Ça fait que ces terres-là, il y a un coût, et on n'a pas choisi. On aurait pu choisir de charger au mètre linéaire pour le déneigement. On aurait le droit de faire ça, ça nous le permet, mais on n'est pas là. On dit : Non, non, on le fait de façon collective, même si on a des kilomètres de... Ça fait qu'il faut regarder l'ensemble des éléments, puis on peut prouver que, oui, les services sont reliés à des coûts aussi.

La problématique, c'est que, là, dans le programme qu'on nous présente, on dit : Ces coûts-là, bien, on va les diminuer. Puis nous, on se fait dire qu'on est un gouvernement de proximité. On impose une nouvelle façon à dire à un gouvernement : Vous n'avez plus le droit de taxer comme vous faisiez présentement. Ah bien! C'est directement dans nos revenus qu'on nous impose quelque chose. À ce moment-là, qu'est-ce qu'on fait? On diminue ça puis on le transfère aux autres résidents, qui sont à la même place mais qui ne font pas d'agriculture. C'est à eux qu'on va transférer le coût.

Si, au Québec, on veut subventionner l'agriculture, comment ça se fait qu'on ne choisit pas de la faire de façon collective? Si, le Québec, on veut, puis je suis de ceux qui y croient... puis de choisir une particularité pour la foresterie, très, très bonne idée, à l'intérieur de ça, mais il faut la regarder globalement. Ce n'est pas normal que les gens de la ville de Montréal ou de Québec n'auraient pas à payer pour ce que les autres citoyens vont avoir à payer parce qu'on diminue la valeur de l'agriculture. C'est un impact sur le voisinage. Puis même pour l'ambiance collective, j'ai hâte de voir le lien que ça va pouvoir faire. Il va y avoir des discussions locales là-dessus, là.

M. Lamontagne : O.K. Puis, dans ce contexte-là, dans le contexte un peu des revendications aussi du milieu agricole, comment verriez-vous d'autres alternatives, mettons, pour venir intervenir au niveau, mettons, du contrôle du coût de la taxation ou de ces augmentations extrêmes là? Verriez-vous d'autres façons de faire, là?

M. Demers (Jacques) : Je pense que s'il y a une problématique en agriculture où est-ce que... En tout cas, du moins, j'oserais dire, j'ai toujours été d'accord avec l'UPA de ce côté-là, c'est de dire : Peut-être que de la façon que l'évaluation est faite... C'est-à-dire que, dans bien des cas, on n'a pas de transfert. Je ne sais pas si vous savez, mais, quand une ferme agricole est transférée, il n'y a pas de taxe de bienvenue, là, en agriculture, qu'on retrouve pour une résidence ou pour d'autres choses. C'est quand même un coût de moins qu'on met à ces entreprises-là, qu'on va donner au résidentiel, même si on est au même taux de taxation.

Peut-être qu'il faudrait regarder de quelle façon on évalue réellement les terres, parce qu'elles sont souvent transférées de façon globale d'une génération à l'autre. C'est-à-dire que, quand on parle d'une ferme laitière, mettons, il y en a quand même passablement, mais que ça soit le quota, les vaches, la terre, la machinerie, tout est d'un bloc et c'est vendu... Comment, après ça, pour les évaluateurs... Puis j'aurais aimé les entendre répondre à ça tantôt, comment qu'ils feraient pour être capables de déterminer, dans ce qui vient d'être vendu, transféré, la valeur de la terre, la valeur foncière sur laquelle on taxe.

La problématique est peut-être qu'on est toujours, en évaluation, à regarder la parcelle qui est plus petite qui est vendue entre deux agriculteurs. Puis, oui, de façon générale, c'est des agriculteurs, mais souvent la parcelle est petite, puis, après ça, j'ai l'impression, du moins, qu'on prend ces chiffres-là pour l'étendre sur l'ensemble du territoire. Il y a probablement une problématique, de ce côté-là, qu'il faut revoir. Trouvons une façon pour être juste sur la valeur, mais sur la réelle valeur. Présentement, on n'a peut-être, dans bien des régions, pas suffisamment de ventes de terres dans notre MRC pour pouvoir dire : Bien, ça, c'est la nouvelle valeur. Ça fait que ça serait à vérifier. Moi, je pense que c'est une des pistes qu'il faut regarder, réellement, là.

M. Lamontagne : Vous faites allusion, là, à des transferts familiaux, et tout ça. Est-ce que vous seriez prêts à considérer la possibilité de pouvoir considérer les transactions apparentées? Présentement, ce n'est pas le cas. C'est des choses que vous favoriseriez, ça, de pouvoir considérer les transactions apparentées dans les évaluations?

M. Demers (Jacques) : Bien, absolument. Je pense qu'il faut être capable de trouver une façon qu'on détermine le prix de la terre. Puis on a probablement, à bien des endroits, pas assez d'échantillonnage. Il y a bien des... Les fermes se sont tellement fusionnées, dans les dernières années, qu'il y a bien des municipalités qu'il en reste juste une, deux ou trois, fermes, sur l'ensemble qui est en action, là. Mais, quand même, les évaluateurs ont à déterminer des valeurs là-dessus. Ça fait que de quelle façon on pourrait le faire, de revoir cette façon-là, moi, je pense que c'est là-dessus qu'il faut s'asseoir si on a une vision à long terme pour l'agriculture.

Sinon, ce qu'on est en train de faire, bien, dire : Oui, on diminue, bien, à la vitesse que ça augmente, on aura beau baisser de 10 %... Tantôt, il y avait des exemples qui parlaient au moins de 16 % d'une évaluation à l'autre. Puis normalement on évalue aux trois ans, à certains endroits, six, là, mais c'est à peu près le rythme, ça fait qu'on fait juste reporter dans trois ans la même problématique qu'on a aujourd'hui. On ne vient pas de régler le problème de l'agriculture, selon moi, à long terme.

• (16 h 10) •

M. Lamontagne : ...de l'importance, là, du fait que, souvent, on n'a pas assez de données, on n'a pas assez de transactions. Qu'est-ce que vous pensez de l'idée, dans le projet de loi, d'introduire, là, l'élargissement du bassin des comparables, à ce moment-là, pour les fins des évaluateurs?

M. Demers (Jacques) : Oui. Moi, je pense que c'est des éléments intéressants. Il ne faut vraiment pas... Parce que, parfois, vous allez voir, dans la limite d'une MRC, comment qu'aussitôt on passe à côté il y a une variation importante. C'est normal, ces terres-là se touchent, on a un grand territoire. Moi, je ne vois pas de problématique à voir plus large là-dessus.

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup. Sur ce, je cède la parole au député de Bourget.

M. Campeau : Merci pour votre présentation. J'ai essentiellement deux questions. Vous mentionnez que, selon vous, la FQM n'a pas eu un effet très fort sur la taxation au niveau des agriculteurs. Est-ce que c'est dans votre municipalité, dans votre MRC ou si c'est vraiment général à toute l'association?

M. Demers (Jacques) : Je ne comprends pas votre question. Vous dites que la FQM... La FQM ne taxe pas personne, là, je ne comprends pas.

M. Campeau : Non, d'accord. Dans les municipalités... Les municipalités n'ont pas exagéré le niveau de taxation pour les agriculteurs. Vous pensez que le problème n'est pas là.

M. Demers (Jacques) : Bien, on ne peut pas avoir exagéré, parce que... dans le sens que la loi nous limite de toute façon. Tu sais, comparativement — puis j'espère que tout le monde le sait — comparativement à un commerce, une industrie, quelque chose qui est sur le territoire qui est taxé différemment du résidentiel, bien, dans l'agriculture, on ne taxe jamais plus que le résidentiel. Et on vous donnait l'exemple, tantôt, de 92 municipalités, puis je pense que c'est augmenté récemment, mais il y a des municipalités qui ont même fait un taux variable pour l'agriculture. Le taux variable fait que, lorsque l'agriculture monte plus vite que les autres, bien, le... pour l'agriculture, lui, descend. Ça fait que l'écart reste au même endroit. Puis ça, c'est important. De cette façon-là... Mais quand le jour sera inverse, bien, c'est l'agriculture qui va monter, mais, dans la loi, de la façon que c'est fait, ne dépassera quand même jamais le résidentiel. Il peut être en bas, mais il ne peut pas être au-dessus. Ça fait que, si quelqu'un pense que le monde municipal peut avoir exagéré, il faudrait me dire sur quelle base. Il n'y a personne qui ne peut taxer au-delà.

M. Campeau : Autre chose. Il y a une lettre de l'UPA qui a été déposée aux membres de la commission qui répond à la position de la FQM. Puis, si on prend quelques citations, on dit que : «La FQM [demande actuellement] à ses membres d'adopter et de transmettre aux parlementaires une résolution critiquant sévèrement le projet de loi n° 48», loi visant à contrôler, simplifier l'accès, etc. On y parle, là-dedans, d'atteindre l'autonomie municipale, iniquité envers les contribuables, on va même jusqu'à «dévitalisation des communautés agricoles». Je suis un petit peu surpris de l'ampleur des termes. Et M. Groleau, qui a signé cette lettre-là, dit avoir eu plusieurs discussions avec vous à ce sujet-là. Êtes-vous d'accord avec ça?

M. Demers (Jacques) : Bien là, vous vous référez à une lettre que quelqu'un d'autre a faite. Si vous voulez vous référer à mon mémoire... Parce que ce que M. Groleau a, c'est la même chose qu'on vous dépose. Ça fait que ce qu'on dit... Puis quand on parle de résolution, vous venez du monde municipal, c'est vrai, il y en a sûrement déjà 300, 400, ou 500 de faites, des résolutions de MRC, de municipalités qui, déjà, sont... Si les gens sont d'accord avec ce qu'on dépose, ils font des résolutions puis ils les envoient, comme qu'on fait dans beaucoup de dossiers. C'est absolument vrai.

M. Campeau : Je suis surtout surpris, là, de l'ampleur. Ça m'a l'air un petit peu déconcertant quand on dit «de dévitalisation des communautés agricoles». Vous avez vraiment cette crainte-là?

M. Demers (Jacques) : Veux-tu donner un exemple?

M. Châteauvert (Pierre) : Oui. M. le député, on peut simplement vous donner un petit exemple. En fait, on a tenu une séance de travail avec plusieurs municipalités à Saint-Sébastien, le 3 juillet, je crois, là-dessus, à partir des informations qu'on avait à l'époque. Puis ce que les maires disaient, c'était bien simple, c'est que, là, actuellement, c'est les agriculteurs qui s'achètent, l'un dans l'autre, et là, au lieu d'avoir quatre, cinq familles sur un rang, bien, à un moment donné, il y en a juste une. Et ça, ça s'appelle de la dévitalisation. Et là il y a une accélération de ce processus-là. Et, à long terme, moins le territoire est occupé, plus il est dévitalisé, même si, des fois, la richesse, peut-être, est plus importante, mais non pas répartie dans plusieurs familles, mais dans une seule entreprise.

Et nous, on pense que ce processus-là, cette voie-là, effectivement, ça peut paraître peu d'argent, mais l'impact, dans certains territoires, cette voie-là empruntée, si on continue d'y aller sans qu'on s'assoie puis qu'on regarde tout ça ensemble, là, si on continue de développer dans cette voie-là, on risque de favoriser la dévitalisation de plusieurs territoires. Et c'est les territoires, actuellement, au niveau de l'agriculture, qui sont probablement les plus riches qui vivent ça de façon la plus intense avec ce phénomène-là.

M. Campeau : Merci.

Le Président (M. Lemay) : Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice, en conclusion.

Mme Tardif : En conclusion?

Le Président (M. Lemay) : Une question de conclusion, une minute.

Mme Tardif : Une minute? Ouille ouille ouille! Bien, juste pour vous dire que je ne suis pas d'accord avec votre interprétation, là, parce qu'il y a moins d'enfants qu'il y avait il y a 40 ou 50 ans, donc c'est normal que... Et c'est de vitaliser, justement, notre territoire. On est bien contents puis on est chanceux qu'il y ait des agriculteurs qui achètent les fermes des autres qui sont devenus trop âgés. Mais là n'est pas ma question.

Vous parlez d'un impact financier, de l'impact financier que ça va avoir sur les municipalités. Est-ce que vous avez évalué cet impact-là? Parce que j'aimerais, avant d'entendre votre réponse, vous donner les faits. Et nos gens, nos experts au ministère ont évalué que l'application du plafond, celui qui vous fatigue, au 90e percentile va affecter 500 municipalités, d'accord? On s'entend jusque-là? Par contre, le manque à gagner pour les municipalités, 60 % de ces municipalités-là, le manque à gagner sera de 500 $ et moins. Je poursuis. Pour 90 % d'entre elles, on estime à moins de 0,5 % le budget des taxes foncières générales et moins de 1 % l'impact que ça va avoir sur leur budget pour 95 % des municipalités.

Et je me dépêche en vous disant — vous l'avez sûrement vu, mais vous ne voulez pas nous le dire parce que vous êtes trop contents de ça — qu'il va y avoir un programme de compensation. Parce que, oui, on est conscients, oui, on est à l'écoute, et, oui, on veut que les régions se développent. Parce que c'est... Et pas juste les régions, mais, dans ce cas-ci, les régions font vivre les villes, il faut bien se le dire. Et il y a donc un programme de compensation substantiel...

Le Président (M. Lemay) : Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice, je dois vous interrompre...

Mme Tardif : Ah! c'est dommage.

Le Président (M. Lemay) : ...parce que le temps est amplement écoulé. Je vais maintenant céder la parole au député de Jacques-Cartier.

M. Kelley : Vous pouvez, sur notre temps, répondre à ma collègue.

M. Demers (Jacques) : O.K. Parce que je trouve ça intéressant, quand même, comme question, où est-ce qu'on parle de beaucoup de municipalités qui... à peine 500 $. On est ici, là, pour aider l'agriculture. Puis ce qu'on me dit au niveau du gouvernement, bien : La plupart des municipalités, les agriculteurs, là, on va leur donner comme 500 $. Tu sais, on peut le virer à l'envers. Si vous considérez que ça n'a pas d'impact, c'est... La fiscalité agricole, la façon qu'elle est présentée, on la prend au municipal, ce qui est enlevé d'un côté s'en va de l'autre. Ça fait que le montant qui est donné, c'est le même montant. Si cet argent-là ne signifie rien, bien, il ne signifie rien non plus pour l'agriculture si on parle de 500 $. Ça marche d'un côté et ça marche de l'autre. Mais ces chiffres-là, oui, vous avez raison en ce que ça touche plus certaines municipalités, c'est dans le principe. Puis d'aider l'agriculture, puis qu'il y ait de la relève, on est pour ça, 200 milles à l'heure. C'est nos revenus économiques au niveau des régions. Mais ce qui est important, c'est qu'on le fasse collectivement, et non pas dans les endroits qu'on a même, certains endroits, peur de perdre parce qu'on perd des services locaux, des dépanneurs, des caisses, des choses qui ferment. On a besoin de garder du monde puis de la vitalité à ces endroits-là, mais là ce n'est pas ce qu'on donne comme signal. On dit : On déplace l'agriculture vers les autres résidents.

Le Président (M. Lemay) : M. le député de Jacques-Cartier, veuillez poursuivre.

M. Kelley : Oui. Merci. Dans votre mémoire, il y a une section où vous mentionnez le 70 % de remboursement de taxes foncières applicable au niveau municipal et scolaire. Puis, après ça, le FQM salue le maintien d'un crédit au niveau actuel. Mais, après ça, vous avez mentionné qu'il y a un impact sur les petits producteurs. Première chose, est-ce que vous pouvez juste expliquer l'impact sur eux autres? Puis aussi, est-ce que vous avez des suggestions sur comment on peut améliorer notre projet de loi pour mieux encadrer et protéger des petits producteurs du Québec?

Le Président (M. Lemay) : Oui, je crois que M. Boulet veut répondre.

M. Boulet (David) : Pouvez-vous répéter la deuxième partie? J'étais...

M. Kelley : Oui, c'est juste de bien comprendre si vous avez des suggestions sur comment on peut bien protéger des petits producteurs du Québec, et comment, si vous avez des amendements, et tout ça, et juste bien expliquer votre idée.

M. Boulet (David) : Oui. Donc, au niveau du crédit, le projet de loi a quelques dispositions. On retire un remboursement à 100 % pour les 300 premiers dollars, je crois, mais certains nouveaux producteurs sont intégrés via le retrait de la condition du 5 $ de revenu par 100 $ d'évaluation. Donc, il y a comme un jeu d'on donne, on retire. Nous, ce qu'on dit par rapport au 300 $, c'est que, oui, ça enlève de l'argent à certains petits producteurs, mais certains autres intègrent le programme. Donc, c'est simplement un commentaire spécifique sur le 300 $.

Par rapport à la deuxième partie, c'est-à-dire comment aider, bien, dans le mémoire, on dit que, finalement, l'aide à l'agriculture, que ce soit dans le cadre du programme ou en général, doit être faite par tous les Québécois puis qu'on souhaite que ça soit fait avec des critères qui favorisent l'émergence d'une relève, d'une agriculture familiale. Donc, ça s'applique autant de façon générale que dans le cadre de ce programme-là.

• (16 h 20) •

M. Kelley : Parfait, merci beaucoup.

Le Président (M. Lemay) : Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Merci. Bonjour à vous trois. Je ne vous sens pas heureux, aujourd'hui, vis-à-vis le projet de loi qui est présenté, hein, je pense que c'est le moins qu'on puisse dire. Vous n'y allez pas avec le dos de la main morte, le dos de la cuillère, le dos de... ça fait plusieurs fois que je m'enfarge dans ce genre d'expression là, le dos de la cuillère, quand vous demandez... Vous ne demandez pas des modifications, vous ne demandez pas des bonifications, vous demandez le retrait pur et simple du projet de loi qui est sur la table. Je pense que, déjà, ça nous positionne sur votre appréciation du projet qui est déposé.

Vous parlez d'une attaque frontale à l'autonomie des municipalités, aux gouvernements de proximité. Je me questionne beaucoup sur cet aspect-là, parce que je pense que le projet de loi, à mon avis, a un certain intérêt pour certains aspects au niveau agricole. Au niveau des municipalités, puis je ne sais pas si vous partagerez ma lecture, mais ça donne un peu l'impression que le gouvernement, avec le pacte fiscal, est venu donner d'une main puis est en train de reprendre de l'autre avec ce projet de loi.

Est-ce que c'est... Est-ce que, justement, le manque à gagner n'aurait pas pu être incorporé d'une autre façon? Plus simplement, là, ce que je voudrais vous demander, parce que... Encore là, pour être sûre de bien comprendre, à moins que le ministre nous annonce qu'il a l'intention de retirer son projet de loi, j'imagine que ce n'est pas vers là qu'il va aller, si on doit travailler avec ce qui est proposé actuellement par le ministre de l'Agriculture, est-ce qu'une compensation financière... Parce que vous parlez beaucoup d'un manque à gagner pour les municipalités. Est-ce que c'est une compensation financière, que vous demandez? Est-ce que ça, ça viendrait régler le problème ou, même ça, ça ne viendrait pas régler ce qui est présenté, là?

M. Demers (Jacques) : C'est un principe sur lequel... qu'on touche. Au début, vous avez raison quand vous dites : Vous n'avez pas l'air content. C'est qu'on y tient tellement, à notre agriculture puis à notre foresterie, c'est le domaine qu'on doit défendre tous les jours. C'est ça qu'il y a sur notre territoire, c'est notre économie. Puis là certains peuvent nous percevoir comme des gens en confrontation contre l'agriculture. Au contraire, on dit : L'agriculture doit être défendue par tous, pas par le milieu où il se trouve. C'est ça qui est le risque, dans ce projet de loi là, c'est à ce niveau-là qu'on... Puis vraiment, là, on ne peut pas être d'accord avec ce bout-là.

De faire une entité spéciale pour ce qui est la foresterie, parfait, bravo!, M. le ministre. De penser à l'agriculture puis de dire : Les taxes sont un coût important... Mais supportons-les pas dans nos villages, prenons ça de façon collective. C'est une belle décision, au Québec, de choisir de se nourrir puis d'être sur le territoire, mais la journée que les territoires ne seront plus là ou que les gens, pour aller faire de l'agriculture, se déplacent puis ils n'auront plus de services, on pense que c'est là qu'on va avoir une problématique. C'est pour ça qu'on a l'air... Puis c'est sûr qu'on a peu de temps, on s'est dit : Si on arrive icitte puis on a l'air content... Je pense qu'on y va plus dans les éléments qu'on aime moins.

Mme Montpetit : Mais je ne suis pas certaine de comprendre. Vous dites que l'intention est bonne, mais le moyen n'est pas le bon. C'est quoi que vous proposeriez, concrètement, pour répondre à la problématique du milieu agricole?

M. Demers (Jacques) : La diminution qui est là, là, elle est simple. On dit : Si vous voulez qu'on la fasse, faisons-la de façon collective. Ce qui est déposé, ça tombe sur les municipalités, ça tombe sur le local. Il y a des endroits... Puis, oui, on a regardé pour pallier sur deux, trois ans, pour regarder pour que ce montant-là soit réparti, mais, après ça, il se passe quoi? C'est que c'est le milieu municipal qui va absorber la différence. C'est à ça qu'on ne peut pas être d'accord, là.

Mme Montpetit : Puis, quand vous dites : C'est le milieu municipal qui va absorber la différence, est-ce que vous faites la lecture... Je pense que j'ai vu, dans votre communiqué de presse, vous faites la lecture que c'est les citoyens, finalement, qui vont absorber, et en perte de services et financièrement. On peut penser à une augmentation de taxes pour venir compenser cette perte de revenus?

M. Demers (Jacques) : C'est sûr. Parce qu'on reste avec les mêmes dépenses, même si on a moins de revenus, ça fait que c'est un déplacement de l'agriculture vers les autres citoyens de la municipalité, là. Ça, j'espère que c'est clair pour tout le monde, oui.

Mme Montpetit : Bien, c'est pour ça que je vous pose la question. Donc, le...

M. Demers (Jacques) : Oui, oui, oui. C'est tellement... C'est en plein...

Mme Montpetit : Vous, ce que vous voyez, c'est que, s'il n'y a pas, à tout le moins, une compensation du manque à gagner, ça ne se traduit pas par une diminution des services, de façon générale, ça va plutôt se traduire par une augmentation des taxes pour maintenir ces services.

M. Demers (Jacques) : C'est qu'on ne peut pas en avoir, de diminution de services, dans le sens qu'on ne peut pas ouvrir les chemins aux deux jours au lieu de les rouvrir à chaque fois qu'il tombe de la neige. Les travaux restent les mêmes. La Sûreté du Québec, qui est basée aussi sur l'évaluation foncière, les coûts ne seront pas abaissés. J'imagine qu'ils vont l'abaisser s'ils baissent les valeurs, mais on continue à payer ces choses-là, la même chose, tous nos services restent les mêmes. Ce n'est pas le fait qu'on va avoir moins de revenus qu'on a moins de dépenses. Il n'y a rien de relié entre les deux. Or donc, ces dépenses-là vont être basculées vers les autres, c'est sûr.

Mme Montpetit : O.K. Je vous remercie. Ça va être... C'est complet pour moi. Merci.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Merci beaucoup. Sur ce, je cède maintenant la parole à la porte-parole du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Mme Lessard-Therrien : Merci, M. le Président. D'abord, je tiens à vous dire que je suis très sensible, là, aux besoins des municipalités. C'est quelque chose que je connais bien. Venant du comté de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, je suis confrontée à beaucoup des enjeux qui touchent les municipalités. Je veux vous dire aussi qu'on est très solidaires dans les besoins que les municipalités ont pour maintenir leurs services et aussi de revoir le modèle de financement un peu archaïque, on va se le dire, dans lequel vous êtes enfermés depuis assez longtemps.

Pour moi, ce projet de loi là, c'est plus un plasteur qu'une vraie réforme. Mais, ceci étant dit, le projet de loi, pour les objectifs qu'il poursuit, c'est-à-dire d'alléger le fardeau fiscal des entreprises agricoles, je pense qu'on est quand même là-dedans.

Moi, je suis un peu... Je vous écoute, là, depuis tantôt puis j'ai quand même quelques questions, parce que ce que je crois comprendre, c'est que vous trouvez quand même, le projet de loi, qu'il est bon à certains égards, notamment avec l'abolition des critères, là, qui visaient les revenus agricoles, où on parle qu'on a quand même 800 entreprises de petite taille qui vont maintenant pouvoir intégrer le programme.

Là, vraiment, où le bât blesse, c'est le plafonnement à 32 000 $. Pourtant, quand on regarde, tu sais, la carte de La Financière agricole, porte-parole des régions, la FQM, en ce moment, dans les valeurs moyennes, les seules régions qui sont touchées par le 32 100 $ et plus de valeur à l'hectare, c'est la Montérégie. L'Abitibi-Témiscamingue, on est très loin de là, Bas-Saint-Laurent, même l'Estrie, on est vraiment loin de là. Donc, tout le financement des municipalités dans ces autres régions là ne sera pas touché.

Donc, moi, je rejoins un peu les commentaires, peut-être, des autres. Je comprends, là, il va y avoir un programme de compensation. Je comprends qu'il est temporaire. Là-dessus, je pense qu'on va être plusieurs ici, autour de la table, à s'entendre qu'il faudrait le pérenniser. Quand vous dites qu'il faut soutenir le financement et les services collectivement, bien, je pense que cette compensation-là, elle est collective aussi.

Donc, j'aimerais peut-être vous entendre plus... Tu sais, là, comme ma collègue du Parti libéral disait, on est pris, entre guillemets, avec ce projet de loi là. Forcément, il sera adopté, on sait à qui on a affaire devant nous, mais comment est-ce qu'on peut le bonifier? Comment est-ce qu'on peut travailler à ça?

Puis je n'ai pas beaucoup de temps, là, mais, tantôt, vous avez parlé de la dévitalisation. Moi, j'étais quand même curieuse, tu sais, je suis très sensible à ça, là. Je veux qu'on ait plus de gens qui habitent dans nos rangs, ça, c'est clair, mais à quel point ça a une incidence, au niveau des taxes puis de vos revenus municipaux, que le rang appartienne à une famille ou qu'il appartienne à cinq familles? Voilà mes questions.

M. Châteauvert (Pierre) : En fait, il y a plusieurs questions. Premièrement, sur l'évolution des valeurs, c'est évident, actuellement, c'est la Montérégie, c'est dans le coin de Rouville, dans le coin des Jardins-de-Napierville, dans le coin du Haut-Richelieu. Effectivement, c'est là où est-ce que... l'épicentre du phénomène. Et, comme on a dit tantôt, c'est essentiellement des agriculteurs qui achètent leurs voisins. On a fait une recherche, et tout ça. Ce n'est que ça. Les fonds ne sont pas là. Les fonds spéculatifs, ce n'est pas eux autres qui sont vers le 32 000 $. Simplement pour votre information, on arrive près du 32 000 $ dans le coin de Lotbinière actuellement aussi. Ce n'est pas vrai que c'est seulement là, c'est en train de croître, puis on ne sait pas où est-ce que ça s'en va par rapport à ça.

Mais je reviens sur votre dernière question. Donc, il y a une question de principe aussi à quelque part, là-dedans, là. La municipalité, elle gère. Ce n'est pas... On ne fait pas ce qu'on veut avec l'évaluation. Il y a une loi, et, à ce moment-là, on applique le même taux à tout le monde. Donc, il y a une question d'équité.

Les municipalités qui se sont implantées, qui ont implanté un taux différencié, ça a créé énormément de chicanes à l'intérieur de la municipalité. Ça, pour des mairesses, des maires qui sont venus nous raconter l'histoire, leur histoire, là, quand ils ont implanté, ce n'est pas le fun, faire ça. Mais donc, à ce moment-là, on arrive avec projet de loi où est-ce qu'on va avoir, à certains endroits, on en convient, actuellement, dans certains endroits, un taux différencié, dans le fond, tu sais, une taxe de...

• (16 h 30) •

Une voix : Une valeur.

M. Châteauvert (Pierre) : ...une valeur différente, tu sais, de façon différente. Nous autres, ce qu'on dit, simplement, c'est : Faites attention avec ça parce que ça va... à l'intérieur des communautés, ça risque de créer beaucoup de problèmes, et des problèmes que, là... où est-ce que cette problématique-là est déjà observable.

Sur la dévitalisation, et ça, ce sont nos propres membres qui sont venus nous le dire, dans un rang, quand tu avais un rang de quelques kilomètres de long, où est-ce que tu pouvais avoir sept, huit familles puis où est-ce qu'il t'en reste une, bien, là, c'est certain qu'il y a moins de maisons. Il y a moins de monde, il y a moins de... tu sais. Donc, peut-être que la valeur a pu augmenter, mais si... quand tu as plus de familles, et tout ça, c'est beaucoup plus intéressant, tu as plus de monde pour la capacité de dynamiser le secteur puis de faire vivre ta communauté. Parce que, quand tu as moins de monde dans ta communauté, souvent, tu as moins de commerces, tu as moins ci... Donc, la municipalité se retrouve avec une question de revenu, et c'est... Et même si ce sont des territoires qu'on peut dire riches, tu sais, dans ces régions-là qui sont dans le sud de la Montérégie, le long de la frontière, on a suffisamment... quand... On a juste besoin de se promener pour voir certains villages qui ont des problématiques de vitalité, là, au niveau de leur activité économique. On sait que ce n'est pas la même chose que dans certaines régions où est-ce que tu as une vitalisation très prononcée, mais où est-ce qu'on l'observe, et c'est ce qu'on... on a un problème.

Puis, au niveau des principes, ça, c'est l'autre principe, c'est l'équité. C'est que là, actuellement, l'agriculture, bon, ils sont victimes d'énormément de pression, des ententes internationales, des intrants, et tout ça, puis là, bon, là, ils cherchent des façons de baisser leurs coûts, puis là ils se tournent vers la fiscalité municipale. Donc, c'est ça.

Le Président (M. Lemay) : Bon, très bien. Donc, merci beaucoup, M. Châteauvert, pour cet élément de réponse. Je cède maintenant la parole au député de Bonaventure.

M. Roy : Merci, M. le Président. Effectivement, la fiscalité municipale est un enjeu important qui est débattu depuis une quinzaine d'années, peut-être même plus, et ces gens-là, écoutez, quand tu regardes les conditions d'existence des agriculteurs, là, ils ne l'ont pas facile, hein? Et, bon, l'enjeu de la fiscalité fait partie d'une des pistes de solution mais pas la seule, hein? Ça va prendre un parapluie de mesures pour soutenir l'agriculture au Québec.

Moi, je vais aller directement au point. Ça va vous coûter combien par année? Quelles sont les pertes évaluées pour les municipalités avec cette nouvelle mouture?

M. Demers (Jacques) : C'est 5 millions.

M. Roy : 5 millions?

M. Châteauvert (Pierre) : Oui. C'est les chiffres que vous devez avoir aussi.

M. Roy : En tout, pour tout le Québec?

M. Châteauvert (Pierre) : Oui, les chiffres du ministère de l'Agriculture sont bons, là, on utilise les mêmes. C'est effectivement l'évaluation faite par le ministère, c'est exactement ça.

M. Roy : Écoutez, si on regarde les budgets du gouvernement du Québec, on s'entend que ce n'est pas grand-chose. Quand même, c'est beaucoup d'argent, là, pour les municipalités. Est-ce que vous avez fait des demandes au gouvernement pour avoir des mesures compensatoires pour supporter les municipalités par rapport aux pertes évaluées?

M. Demers (Jacques) : On le retrouve dans le mémoire. Oui, c'est sûr qu'on vise à pérenniser ça si jamais on passe par là. Mais, au-delà de ça, c'est de dire... ce n'est pas... on est en train de revoir l'agriculture au Québec. Moi, je calcule dans... aujourd'hui, puis on parle de 5 millions, ça fait que les gens qui vont me dire que ce n'est pas beaucoup, ils ont sûrement raison. Je considère qu'on n'est pas en train de la revoir à la bonne place puis à long terme. Là, on est en train de mettre quelque chose à court terme qui... certains ont utilisé le mot «plaster». Peut-être. C'est quelque chose qu'on fait là, pour l'instant, mais qui n'a pas d'impact au bout d'un certain temps. Mais ce que ça a... À court terme, le seul qui a à l'absorber, c'est le monde municipal. Si on modifie le projet de loi puis on n'a pas à l'absorber, bien, c'est différent, on parlera d'autre chose à ce moment-là.

M. Roy : Bien, c'est sûr, quand on regarde le nouveau pacte fiscal, bon, on est passés de 160 millions à 267 millions, c'est quand même important comme augmentation de budget. Puis je ne dis pas qu'il faut prendre des sous là-dedans pour soutenir l'agriculture et la ponction que vous allez subir au travers, bon, la réforme, bon, de tout ça, sauf qu'il y a quand même une solidarité à avoir avec le secteur de l'agriculture, actuellement, au Québec, qui... Ils ne l'ont pas facile, et vous le savez autant que moi.

M. Demers (Jacques) : Bien, l'agriculture... On dit la même chose depuis le début, mais là, on mélange deux choses. On prend les millions sur 1 100 quelques municipalités, et les gens nous disent : Ça touche surtout 20, 30 municipalités. Là, il y a une corrélation qui n'est pas bonne. Le 260 millions ne s'en va pas dans les municipalités, nécessairement, qui sont touchées, mais sur l'ensemble du Québec.

Si ce principe-là est bon, il devrait l'être dans l'autre sens, la même chose, c'est-à-dire qu'on l'absorbe de façon collective. Là, là, on parle de quelque chose qui est collectif, mais ce n'est pas ce qui se fait présentement. On vise des municipalités, et l'impact... chaque sou qui sera donné d'un côté s'en va de l'autre. C'est ce qui se passe, mais localement, dans les villages, et non pas au niveau du Québec.

M. Roy : Merci.

M. Demers (Jacques) : Merci à vous.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Donc, M. Châteauvert, M. Demers, M. Boulet, je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.

Et je vais suspendre les travaux quelques instants afin de permettre aux représentants de l'Union des municipalités du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 35)

(Reprise à 16 h 38)

Le Président (M. Lemay) : Alors, nous reprenons nos travaux. Et je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Union des municipalités du Québec en vous rappelant que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. Ensuite, on va procéder à la période d'échange avec les membres de la commission. Donc, je vous invite à vous présenter, ainsi que les personnes qui vous accompagnent, puis vous pourrez procéder à votre exposé. La parole est à vous.

Union des municipalités du Québec (UMQ)

Mme Roy (Suzanne) : Merci beaucoup, M. le Président de la commission. M. le ministre, Mmes, MM. les parlementaires, permettez-moi d'entrée de jeu de vous remercier pour l'invitation à vous présenter le point de vue des municipalités dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 48. Peut-être vous allez y retrouver plusieurs éléments similaires à la Fédération québécoise des municipalités. Alors, comme elle en a l'habitude, l'Union des municipalités du Québec soumettra ses propositions pour bonifier le projet de loi afin qu'il atteigne rapidement les objectifs annoncés.

D'abord, au bénéfice des parlementaires, j'aimerais vous rappeler que, depuis maintenant plus de 100 ans, l'Union des municipalités du Québec rassemble les gouvernements de proximité de toutes les régions du Québec afin de mobiliser l'expertise municipale, accompagner ses membres dans l'exercice de leurs compétences et valoriser la démocratie municipale. Nos membres représentent 85 % de la population et du territoire québécois. Ils sont regroupés par caucus d'affinités : les municipalités locales, les municipalités de centralité, les cités régionales, les grandes villes, les municipalités de la métropole.

• (16 h 40) •

C'est en ma qualité de présidente intérimaire de l'Union des municipalités que je prends aujourd'hui la parole. Je suis accompagnée, très bien accompagnée, de M. Guy Charbonneau, qui prendra aussi la parole, bien sûr, comme maire de Sainte-Anne-des-Plaines, mais aussi comme agriculteur. Je veux également mentionner la présence de M. Jean-François Sabourin, qui est conseiller aux politiques de l'Union des municipalités du Québec.

Vous avez sans doute entre vos mains le mémoire de l'union, et je vous encourage à y référer pendant notre présentation.

Alors, MM., Mmes les députés, dans un premier temps, l'Union des municipalités du Québec salue la volonté du gouvernement d'aider les producteurs, les productrices agricoles. Nos agriculteurs, nos agricultrices travaillent fort, produisent des aliments de bonne qualité et font la fierté des Québécois et des Québécoises. Ils ont besoin d'un coup de pouce dans leurs conditions, où leur travail n'est pas toujours récompensé à sa juste valeur. Alors que la valeur de leurs propriétés agricoles augmente de plus en plus, les revenus générés ne suivent pas le même cycle haussier.

En ce sens, l'UMQ est généralement en faveur de la mise à jour du Programme de crédit de taxes foncières agricoles contenue dans le projet de loi, qui permettra sans aucun doute un meilleur soutien au monde agricole. La réforme proposée traduit une intention claire de simplifier l'administration du programme, et, selon nous, les modifications envisagées, notamment le déplafonnement de la croissance des coûts, devraient donner un sérieux coup de pouce aux producteurs et productrices agricoles. Cependant, et cela ferait l'objet de nos premiers commentaires, le plafonnement de la valeur imposable des terres agricoles, selon nous, est une mauvaise solution, que le législateur serait avisé de ne pas retenir.

De quoi parle-t-on ici? En fait, le plafonnement de la valeur imposable des terres agricoles cause plusieurs problèmes selon nous. D'abord, il intervient directement dans la fiscalité municipale en désavantageant les milieux agricoles, puis, je vous dirais, d'autant plus les milieux agricoles dynamiques par rapport aux milieux urbanisés. Pour les municipalités rurales les plus affectées, le plafonnement entraînera un transfert fiscal notable dans le secteur résidentiel. C'est simple, en réduisant la tarte de revenus, le gouvernement forcera les municipalités en milieux agricoles à se tourner vers d'autres types de propriétés, notamment le résidentiel, pour combler le manque à gagner. Selon nos calculs, dans ma MRC, par exemple, la croissance du compte de taxes pourrait doubler par rapport à l'année précédente.

Je pourrai vous donner certains exemples. Je viens de la Montérégie, qui est une région où nous avons de bonnes terres, où l'agriculture est dynamique. On ne devrait pas pénaliser ces municipalités parce que l'agriculture est dynamique. En plus, pour les régions agricoles qui sont dynamiques comme celles de la Montérégie, le plafonnement ne pourra être compensé par une autre source de revenus fonciers parce que le développement même de la municipalité dépend largement de sa zone agricole.

Ensuite, la proposition du gouvernement crée une iniquité entre les différentes industries. Je veux être bien claire, le monde agricole doit compter sur l'appui du gouvernement et, à travers lui, de tous les contribuables québécois. Mais nous notons tout de même que cette industrie sera la seule à bénéficier d'une intervention dans la fiscalité municipale. Ainsi, le système imaginé pour compenser les municipalités pour le manque à gagner risque d'entraîner en plus son lot de paperasse. Alors, ça ne simplifiera pas nécessairement la situation, alors qu'une aide directe aux producteurs, qui existe déjà... Et on pourrait l'inclure dans le Programme de crédit de taxes foncières plutôt que d'imaginer un service de compensation pour les municipalités, qui va finir par coûter le même prix que les montants qu'on va vouloir compenser. Plutôt que de déshabiller Pierre pour habiller Paul, nous encourageons le gouvernement à respecter l'autonomie fiscale des municipalités et à se concentrer sur le programme, qui, lui, a fait ses preuves. J'invite M. Charbonneau à continuer.

M. Charbonneau (Guy) : Merci. Bonjour, M. le ministre, Mmes et MM. les députés. Nous souhaitons également attirer votre attention, du législateur, sur une opportunité à ne pas manquer. Le déplafonnement du programme est certes une bonne nouvelle. Il y a de bons éléments dans ce programme-là, mais il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain, comme disent nos amis du reste du Canada. Nous suggérons d'en profiter pour maintenir et même élargir les conditions d'écoconditionnalité pour l'admissibilité au programme.

En d'autres mots, un producteur qui bénéficie du programme, mais qui a reçu un constat d'infraction en vertu de la politique de la protection des rives, et du littoral, et des plaines inondables, notamment les règles entourant les bandes riveraines, ne devrait pas être admissible au programme pour une durée déterminée, par exemple trois ans, deux ans. On vous laisse le choix.

Je pense que vous serez d'accord avec nous pour dire qu'il est aberrant que des personnes délinquantes puissent bénéficier de congés fiscaux, peu importe l'origine du financement. Il serait opportun d'utiliser tous les leviers disponibles pour protéger la qualité de l'environnement, spécialement quand on en parle autant qu'on en parle actuellement, et ce, particulièrement dans un contexte de lutte, d'adaptation aux changements climatiques. On peut penser aux inondations printanières, si vous voulez, aux zones de protection de... les ZPEGT, les zones potentiellement exposées aux glissements de terrain, etc. Il y a des gens qui ne respectent pas la bande riveraine et il faut y penser, à ces choses-là, et ça, ça serait une façon, l'écoconditionnalité, et je comprends que vous n'avez pas tous les inspecteurs pour surveiller tout ça. Cette suggestion est en droite ligne avec cette priorité. Mme Roy.

Mme Roy (Suzanne) : Alors, finalement, l'Union des municipalités du Québec aimerait conclure cet exposé en attirant l'attention des députés sur un problème qui contribue à augmenter le prix des terres agricoles et qui constitue, encore aujourd'hui, un sujet de discussion dans le milieu. Les terres en friche au Québec posent un problème. Évidemment, il faut respecter les bonnes pratiques agricoles, mais, à l'heure actuelle, la tendance est plutôt au désintérêt, voire à l'abandon de certaines terres. En conséquence, les règles de l'offre et de la demande sont implacables : la valeur des terrains agricoles monte en flèche.

Pour solutionner ce problème, nous croyons qu'il serait judicieux d'octroyer aux municipalités la possibilité d'imposer une surtaxe sur une terre intentionnellement inutilisée. Si nous sommes ici aujourd'hui, si le projet de loi n° 48 est à l'étude, c'est que nous cherchons collectivement à limiter la hausse des valeurs des terres agricoles. Les municipalités apportent une solution qui, nous l'espérons, sera évaluée avec sérieux.

Merci beaucoup de votre attention, et nous sommes disponibles pour répondre à vos questions.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Merci beaucoup, Mme Roy, M. Charbonneau, pour votre exposé. Je cède maintenant la parole au ministre pour une période d'échange.

M. Lamontagne : Merci. Bonjour, Mme Roy, c'est un plaisir de vous accueillir. M. Charbonneau, on a toujours l'occasion de se rencontrer dans toutes sortes de situations. Aujourd'hui, c'est une nouvelle situation, alors c'est un plaisir de vous accueillir, M. Sabourin aussi.

Écoutez, bien, d'entrée de jeu, ce que j'entends, là, c'est la volonté... Un, l'Union des municipalités est sensible à la condition des agriculteurs au Québec et puis l'Union des municipalités du Québec est partante pour s'asseoir puis contribuer de la meilleure façon possible à rendre la vie de nos agriculteurs plus stable, et tout ça. Puis, en même temps, ce que j'entends, puis aussi j'ai pris connaissance de votre mémoire aussi, c'est des ouvertures ou des suggestions que vous faites qui, à mon sens, ont une très grande valeur. Parce que c'est certain que toute la question de la spéculation foncière a son impact aussi, on l'entend, pour le milieu agricole. Alors, quand je lis dans le mémoire que vous verriez d'un bon oeil d'avoir une possibilité de surtaxer au niveau des terres en friche, les terres qui ne sont pas exploitées, écoutez, un, première chose, c'est quelque chose qui a déjà été considéré dans le passé, là, par le gouvernement précédent, et je pense qu'il avait contemplé cet aspect-là, mais au niveau de la CMM, là. Mais de contempler la possibilité de surtaxer au niveau des terres en friche... Est-ce que vous avez une idée de l'ampleur que ça, ça peut représenter sur la spéculation immobilière, la spéculation des terres, si on veut, là?

Mme Roy (Suzanne) : Alors, peut-être, là, M. Sabourin.

Le Président (M. Lemay) : Oui. M. Sabourin.

• (16 h 50) •

M. Sabourin (Jean-François) : Oui, parfait. Oui, en fait, on peut évaluer à peu près à 90 000 hectares, là, les terres en friche, là. C'est ce qui était en friche entre 1990 et 2010, c'est ce qui a été évalué par la commission, ici même. Donc, on peut imaginer, avec une valeur moyenne à l'hectare autour d'à peu près 4 000 $ l'hectare, on se ramasse avec des montants qui ne sont pas très élevés, donc. Mais, quand même, nous, ce qu'on pense, c'est que, quand même, sur des grandes superficies, ça peut faire la différence. Ça ne fait pas un coût supplémentaire pour les productrices, les producteurs agricoles qui décident de laisser leur terre en friche qui est complètement, complètement rédhibitoire. Par contre, ça reste quand même un incitatif certain. C'est les calculs, là, qu'on mettait justement dans notre mémoire, là, donc c'est pour ça qu'on veut aller vers un trois fois le taux de base pour vraiment que ça puisse constituer un incitatif. Donc, c'est notre demande actuelle, là. On peut en discuter avec vous.

M. Lamontagne : Écoutez, j'accueille cette proposition-là avec beaucoup d'ouverture, parce que, c'est certain, tu sais, on vise avec notre projet de loi à contrer les valeurs extrêmes. On vise à contrer les augmentations extrêmes. Puis la question des terres en friche et puis des usagers de ces terres en friche là, si on veut, vient certainement, à sa façon, contribuer dans cette espèce de recette là aussi, là. Ça fait que de voir que l'UMQ est ouverte, là, pour qu'on regarde cet aspect-là, je dois vous dire que j'accueille ça très, très favorablement.

L'autre mesure aussi, honnêtement, que je trouve intéressante, c'est toute la question d'écoconditionnalité, de lier l'éligibilité au programme à des mesures d'écoconditionnalité, surtout dans le contexte, là, où c'est d'actualité, la question de l'environnement et tout ça. Alors, encore là, je vous dirais, c'est certain, il y a peut-être... Ce que vous dites, là, vous verriez, là, quelqu'un, mettons, qui a été pris en infraction... Pouvez-vous développer un petit peu davantage comment vous verriez, un peu, l'opérationnalisation de ça sur le terrain?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, c'est ça, les municipalités régionales de comté sont responsables, entre autres, au niveau des cours d'eau. Donc, on marche déjà nos cours d'eau, on doit faire l'entretien, et tout ça. On a des inspecteurs sur le terrain, donc au moment où, par exemple, on se rendrait compte qu'il y a une problématique importante et qu'il y a effectivement un constat d'émis, il pourrait être transféré aussi simplement que ça, transféré au ministère, et que ce soit appliqué tel que ça serait élaboré par exemple dans la loi.

M. Lamontagne : O.K., excellent.

Mme Roy (Suzanne) : Le plus simple possible pour tous.

M. Lamontagne : Écoutez, j'ai hâte de discuter de ça avec des gens qui vont se présenter ici, là, qui sont à venir. Mais c'est une belle surprise, Mme Roy.

Dans votre esprit, aussi, de ce que j'ai entendu, vraiment l'esprit de contribution puis de collaboration, naturellement, à la suggestion de la FQM, on a vraiment enchâssé l'idée d'avoir un comité de suivi. Parce qu'on s'entend, entre le moment où le projet de loi serait adopté et le moment où il serait mis en oeuvre, il y a une période de temps considérable qui va être allouée. Et puis, dans nos intentions, c'est de faire en sorte que la façon d'appliquer, la façon de compenser, l'objectif du gouvernement, ce n'est pas de mettre à mal personne. C'est sûr qu'il y a un signal qu'on veut envoyer puis il y a une certaine réalité qu'on veut encadrer, mais on fait vraiment ça dans un esprit de collaboration aussi.

Alors, tu sais, le comité, c'est prévu qu'il va y avoir l'UMQ, qu'il va y avoir la FQM, qu'il va y avoir le MAMH, qu'il va y avoir le monde agricole. Et puis, moi, j'ai reçu une lettre, aussi, de la CMM, la Communauté métropolitaine, qu'on a rencontrée, et puis qui terminent leur lettre en disant : «La rencontre du 21 janvier [avait] été [très] fructueuse et constructive. La communauté est disposée à poursuivre, [...]cette base, [des] discussions avec votre ministère quant aux modalités du projet de loi n° 48 et, plus particulièrement, celles du futur programme d'aide financière.» Alors, la CMM manifeste de l'intérêt à participer à ce comité-là.

Est-ce que l'UMQ verrait d'un bon oeil que la CMM se joigne au groupe et puisse participer dans le comité de suivi pour la mise en oeuvre? Mais, une fois... L'objectif du comité aussi, c'est que, oui, il va y avoir, à un moment donné, une mise en oeuvre, mais, après ça, il va y avoir un suivi de cette mise en oeuvre là pour voir l'impact, puis, si, après ça, il y a des ajustements à apporter, des choses comme ça. Ça fait que ça se passe vraiment dans un mode de collaboration puis la CMM offre sa collaboration. Comment vous accueillez ça?

Mme Roy (Suzanne) : Très bien. J'ai d'ailleurs la lettre de la CMM avec moi, qui m'a été transmise par les gens...

M. Lamontagne : Pourtant c'était adressé à moi.

Des voix : Ha! Ha! Ha!

Mme Roy (Suzanne) : ...qui m'a été transmise pour bien nous informer, justement dans un but de collaboration entre les différents intervenants municipaux.

M. Lamontagne : Bien, merci. Merci, Mme Roy.

M. Charbonneau (Guy) : Si je peux...

Le Président (M. Lemay) : Oui, allez-y, M. Charbonneau.

M. Charbonneau (Guy) : Si je peux ajouter, M. le ministre, à votre questionnement, la CMM a déjà dans son PMAD un large programme, une partie de... pour la protection des terres agricoles. Et on s'est engagé là-dedans, là, les villes rurales, les 16... 19 villes rurales de la CMM, on s'est engagé dans ce genre de programme là. Oui, on y croit, mais donc, les urbains de Montréal, les montréalistes, sont prêts à payer, à donner un peu de sous pour supporter l'agriculture. Mais c'est surtout une responsabilité du gouvernement provincial ou d'un gouvernement fédéral, mais pas d'un gouvernement local. La ville de Rosemère, à côté de chez moi, qui a zéro agriculteur, mais qui est la plus riche de ma MRC, bien, ne contribuerait pas à ça et ce sont les gens les mieux nantis. Il y a quelque chose qui est... il y a une dichotomie qui s'exerce, là, et il ne faudrait pas que ça arrive comme ça. C'est une très bonne idée d'aborder le sujet. Ça fait 20 ans qu'on aurait dû l'aborder. Mais on s'attaque au problème, mais on ne s'attaque pas à la cause du problème.

Si je peux élaborer, là, puis je ne veux pas faire le rôle de... votre rôle, mais si je peux élaborer, les gens qui achètent les terres actuellement n'ont pas des noms à consonance arabe ou chinoise, ils ont des noms très québécois. Chez nous, dans ma grande ville de 92 kilomètres carrés, à 90 % zonée agricole, j'ai cinq familles qui achètent les terres et qui les achètent à des prix pharaoniques. Pourquoi? C'est simple, le gouvernement endosse les prêts à la caisse populaire ou à la banque et les prêts sont négociés à du 3 %, et donc... puis ils sont remboursés à 70 % des taxes. On est en business.

Écoutez, ça veut dire, ça, là, que c'est plus payant actuellement investir dans de la terre agricole que... mais ne partez pas tous à aller investir là-dedans demain matin. C'est plus payant investir dans de la terre agricole, actuellement, que d'investir à la bourse, que d'investir... bien, pas un prêt à la caisse populaire ou à la banque, là, oubliez ça, là. C'est ça qui est le plus payant. C'est plus payant que des blocs. Et c'est un peu de la faute des gouvernements parce qu'on ne s'est pas ajusté avec le temps.

Et ce qu'il faut trouver, c'est une façon... Vous avez dit tantôt, là : On essaie de contrer les valeurs des terres agricoles, M. le ministre. Je pense qu'on n'adresse pas le problème avec ce projet-là, mais c'est ça qu'il faut s'occuper, d'abord et avant tout. Je pense que ceux qui nous ont précédés vous ont parlé d'élargir, c'est une bonne idée, mais je ne veux pas prendre trop de temps, M. le Président.

Le Président (M. Lemay) : C'est très apprécié. Donc, je vais céder la parole au député de Bourget, qui a une nouvelle question.

M. Campeau : Très apprécié que vous n'arriviez pas juste avec : On n'est pas contents, mais que vous arrivez avec des solutions. Toute petite question : Au sujet des bandes riveraines, vous dites qu'il y a un manque d'inspecteurs. Vous dites que vous iriez aider à l'inspection?

Mme Roy (Suzanne) : On a déjà des inspecteurs dans plusieurs MRC puisqu'on a, dans nos compétences, au niveau des MRC, la gestion des cours d'eau. Donc, on a déjà des gens qui marchent, on a déjà des inspecteurs. Puis, effectivement, ces gens-là peuvent être mis à contribution dans le cadre, par exemple, d'un règlement comme celui-là où ils devraient tout simplement transmettre les constats au gouvernement pour que ça puisse être appliqué.

M. Campeau : ...

Mme Roy (Suzanne) : Ça me fait plaisir.

Le Président (M. Lemay) : Donc, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Lamontagne : On peut...

Le Président (M. Lemay) : Ah! je crois qu'il avait terminé sa question.

M. Lamontagne : Ah! parfait, excellent. Écoutez, quand on parle de... Le milieu agricole, souvent, a réclamé, là, de revoir, tu sais, la fiscalité municipale, la fiscalité foncière agricole. Quand vous entendez ces demandes-là, là, comment vous réagissez à ces demandes-là? Et puis quelles pistes que vous voyez, là, au-delà de... Ce qu'on présente, là, c'est plus large puis ça ne se veut pas une réforme de la fiscalité, on s'entend là-dessus, là, c'est un projet de loi qui couvre toute une palette d'enjeux. Mais quand on aborde ce sujet spécifique là, puis avec l'expérience que vous avez, un, comment vous réagissez par rapport à ces demandes-là? Puis, après ça, bien, si vous accueillez ces demandes-là avec une certaine ouverture, quelle sorte de voie de passage vous voyez pour réformer cette fiscalité municipale agricole là?

Mme Roy (Suzanne) : Vous voulez dire la fiscalité agricole?

M. Lamontagne : La fiscalité agricole.

Mme Roy (Suzanne) : La fiscalité agricole. On a aussi la fiscalité municipale.

M. Lamontagne : Vous êtes vite, vous êtes vite.

• (17 heures) •

Mme Roy (Suzanne) : Alors, on comprend effectivement le besoin de réformer la fiscalité... la fiscalité agricole — vous voyez, je fais le même lapsus — alors, la fiscalité agricole, mais ça ne doit pas se faire en allant jouer dans la fiscalité municipale, qui, elle aussi, a un grand besoin de modernisation. Alors, bien sûr, au niveau de la fiscalité agricole, on fait juste regarder le programme puis on parle de simplification, puis on regarde le projet de loi. L'idée de compenser les municipalités pour trois ans, c'est une fausse bonne idée. Je vais vous expliquer pourquoi. Je ne viens pas dire qu'il ne faut pas compenser les municipalités, ce n'est pas ça mon propos. Mais mon propos est que, sur un programme de cette ampleur-là, pour 5 millions, aller mettre en place la bureaucratie puis la paperasse qu'il faut faire pour faire des calculs pour trois ans de compensation et arriver à l'année quatre puis on a pelleté en avant — parce que c'est ça qui va arriver — alors, on va se ramasser qu'on va avoir créé... alors que, si on prend tout simplement cette même somme d'argent et qu'on l'injecte dans le programme, là, on vient de simplifier les affaires. Alors, ça, je pense que ce besoin de simplifier là, il est réel, il est vrai pour le monde agricole, il est aussi vrai pour le monde municipal, il faut... Tous nos modèles, hein? Le modèle agricole est aussi mouvant, alors on n'a pas les agriculteurs d'hier, ils ne sont pas dans le même système qu'aujourd'hui. On en parlait, avant de venir à la commission parlementaire, comment ça a évolué, comment c'est différent, comment ça a grossi, parce qu'on est aussi... c'est aussi une industrie qui est en compétition, alors... Mais on est prêts à travailler avec le monde agricole, ça fait partie des contribuables de nos municipalités, mais ça ne doit pas se faire dans notre champ fiscal. On a fait tous les deux le lapsus agricole, municipal, mais on ne doit pas le faire dans la vraie vie, donc on ne doit pas confondre les fiscalités municipales et agricoles.

Le Président (M. Lemay) : Très bien.

M. Charbonneau (Guy) : Si je pouvais compléter.

Le Président (M. Lemay) : M. Charbonneau, allez-y.

M. Charbonneau (Guy) : La fiscalité... L'agriculture, c'est du secteur primaire, tout comme les mines, les forêts et les pêches, et les villes n'ont pas à subventionner ou à supporter directement par les deniers des citoyens dans ce domaine-là. À Val-d'Or, ce n'est pas la ville de Val-d'Or qui supporte les mines qui sont alentour — ou la MRC. Alors, je pense que c'est le même principe au niveau de l'agriculture, ça devrait être la société québécoise ou canadienne, si on veut, mais... Et, si on regarde dans le monde, ce n'est pas localement qu'on supporte l'agriculture. On la supporte à notre façon, dans bien des choses. Nos territoires sont protégés depuis très longtemps.

Est-ce à dire que la municipalité de Sainte-Anne-des-Plaines, que je représente, qui a conservé à 90 % sa zone agricole, s'est tirée dans le pied, elle aurait dû construire toutes ses terres comme d'autres villes ont fait aux alentours? Je trouve que vous venez nous pénaliser. On est dans les Basses-Laurentides, les terres valent très cher, et ceux qui achètent actuellement à 48 000 $, la dernière transaction que j'ai vue, 48 000 $ l'hectare, ce n'est pas des... c'est des agriculteurs de chez nous, à côté de chez nous, là. Ça n'a pas de bon sens, là, il faut trouver une façon de leur dire : Aïe! garçon, c'est assez.

Dans les quotas de lait, pour ceux qui ne connaissent pas ça, les quotas de lait, on a capé, c'est en anglais, on a plafonné — bien, excusez, on va essayer de parler en français ici, dans ce Parlement — on a plafonné le prix des quotas. Il faut qu'on trouve une façon de plafonner, ou ceux qui veulent payer au-dessus, bien, payez 100 % de la taxe qui vient avec. Je prends toujours comme exemple, si je me suis acheté un VUS à 50 000 $ ou... puis je sais qu'il y a 15 % de taxes, au Québec, dessus, si je n'avais pas voulu payer 15 % de taxes, je l'aurais acheté en bas. Écoutez, je représente la 11e génération d'agriculteurs de père en fils au Québec, puis ma plus grande fierté, c'est d'avoir... Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemay) : M. le ministre.

M. Lamontagne : M. Charbonneau, dans vos discussions que vous avez, l'organisation avec les producteurs agricoles... Puis ils vous disent : Écoute, il faudrait qu'il y ait un plafond sur la valeur des terres agricoles, la valeur imposable. Alors, vous leur répondez quoi quand vous avez des échanges avec eux?

M. Charbonneau (Guy) : Oui. Oui, je vais essayer... Les gens, chez nous, il y a des gens, ils disent : Ce n'est pas grave, c'est le meilleur placement — ce que je vous ai répondu tantôt, là — c'est le meilleur placement qu'on ne peut pas faire, O.K.? C'est ça, le problème. Il faut qu'on arrête, là, d'aider ceux qui sont déjà riches. Quand le tas est ça de haut, c'est assez, ça, ce n'est pas nécessaire. C'est ce que mon père me disait.

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup. Alors, sur ce, je cède la parole au député de Robert-Baldwin, mais, avant de faire cela, je dois demander le consentement puisqu'on n'a pas mentionné le remplacement au préalable. Est-ce qu'il y a consentement pour remplacer le député de Marquette? Oui? Consentement. Donc, M. le député de Robert-Baldwin, la parole est à vous.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, les collègues. Merci, merci beaucoup. Alors, j'ai trouvé votre intervention, M. Charbonneau, assez intéressante. J'aimerais continuer un peu avec vous, mais, avant d'y arriver, Mme Roy, vous avez aussi mentionné des choses intéressantes, surtout concernant les mécanismes de compensation. Donc, si j'ai bien compris, vous, vous préféreriez que l'intervention gouvernementale soit envoyée directement aux agriculteurs, sans trop compliquer les histoires de taxes municipales.

Mme Roy (Suzanne) : Bien oui, parce que ce que ça va nous obliger à faire... Bien, on parle d'une compensation, donc il va falloir mettre en place la structure, aller compenser les municipalités. On parlait d'un temps déterminé, alors la quatrième année... on parlait de trois ans, donc la quatrième année... Je vais prendre l'exemple de Calixa-Lavallée chez nous. C'est le fun de travailler avec des exemples concrets, là, pour voir c'est quoi, l'impact réel. Calixa-Lavallée, là, c'est 32,75 $ par résidence. C'est 2 % de hausse de leur compte de taxes. Ils ont haussé, en 2019, 1,5 %. C'est plus que le double de ce qu'ils ont haussé dans... parce que c'est une municipalité foncièrement agricole. Il n'y a pas un garage, hein? Alors, à qui ils vont passer ça? Ils vont passer ça aux résidents dans le village de Calixa-Lavallée, parce qu'ils vont devoir continuer à ouvrir les routes. Puis là on parle de services minimums dans ce village-là, là, ils vont devoir continuer à ouvrir les routes, à offrir un minimum de loisirs aux jeunes, et tout ça. Puis c'est un petit budget, donc c'est ou tu coupes tes dépenses ou bien tu taxes d'autres personnes. Donc, si c'était inclus déjà dans le programme, envoyé directement aux agriculteurs, et ça ne toucherait pas la fiscalité municipale, je pense que, déjà, ça serait plus simple. On atteindrait les mêmes objectifs pour les trois années, mais on ne peut pas parler de période de transition, parce que la quatrième année, à Calixa-Lavallée, les terres ne se vendront pas moins cher. Ça reste encore dans les meilleures terres au Québec, donc elles vont se vendre encore extrêmement cher. Donc, la quatrième année, ils vont faire face au même mur, ils vont juste faire face trois ans plus tard.

M. Leitão : Donc, c'est que l'action gouvernementale n'ait pas une influence directe sur les taux de taxation, mais que ce soit l'aide... agriculteurs, c'est ça?

Mme Roy (Suzanne) : L'aide en agriculture, on parle de fiscalité agricole.

M. Leitão : C'est ça, c'est ça. Et l'autre chose aussi, et vous avez mentionné : Ce n'est pas le cas dans toutes les municipalités. Mais je pense que, dans un grand nombre, ça peut créer aussi de l'iniquité entre les différentes industries parce qu'on donne un traitement préférentiel à l'agriculture, ce qui complique votre vie et... Très bien. Il y a aussi des questions d'écoconditionnalité, mais je pense que ma collègue va y aller.

Moi, M. Charbonneau, ça m'avait beaucoup intéressé ce que vous avez mentionné. Alors, j'aimerais qu'on poursuive un peu plus sur, donc, la valeur des terres, là, le mécanisme que vous avez mentionné où des individus, des personnes achètent des terres en empruntant de l'argent, ils achètent des terres et puis ils remboursent l'emprunt avec les crédits de taxes. Donc, pouvez-vous... Prenez le temps que vous voulez là-dessus, là, parce que j'aimerais bien qu'on comprenne cette chose-là, c'est important.

M. Charbonneau (Guy) : Ce n'est pas tout à fait ça que j'ai dit, mais j'ai dit que l'impact était moins grand parce que, déjà, on a remboursement de taxes de 70 %. Si, demain matin, il y avait 70 % de remboursement sur l'exemple du VUS que je vous ai donné tout à l'heure, il y aurait encore beaucoup plus de VUS sur les routes, O.K.? Ils contribueraient davantage aux gaz à effet de serre.

Alors, c'est ça, là, qui est pernicieux un petit peu, qu'il faut faire attention, et le fait aussi que le gouvernement garantit les prêts via La Financière agricole. Il n'y a aucun risque, personne ne prend de risque là-dedans, alors c'est un excellent placement. Il faut nuancer. Je n'ai pas tous les outils, là, je ne suis pas un expert, mais je pense que, si on allait taxer ceux qui paient plus cher à un pourcentage plus élevé, peut-être qu'ils ralentiraient leurs appétits.

M. Leitão : Vous pensez que les personnes qui achètent ces terres-là, elles le font pour continuer l'activité agricole ou c'est pour...

M. Charbonneau (Guy) : Non, ce sont des agriculteurs spéculateurs. On est tous spéculateurs. Quand on achète quelque chose, on spécule qu'on va le garder un bout de temps, là, on achète notre voiture, on spécule. Alors, c'est la même chose. Mais ce sont des gens qui investissent, qui produisent dans l'agriculture, mais qui, en même temps, ce faisant, nuisent à nos beaux programmes qu'on veut, d'avoir de la relève agricole, qui eux ne sont pas capables d'acheter ça.

C'est comme les gens qui sont... M. le Président, je vous surveille, vous me faites signe. C'est comme les personnes âgées, autour des lacs dans le nord de ma région des Laurentides, qui ne sont plus capables de payer leurs taxes, parce qu'il y a des gens qui sont venus s'installer autour avec des gros châteaux, qui ont fait monter le prix, et qui ne sont plus capables de s'offrir... d'être capables de demeurer chez eux, et ils n'ont pas les moyens. C'est à peu près la même chose qui se passe actuellement. Et ça, je trouve ça déplorable, parce que, moi, la relève, c'est très important. Ma plus grande fierté, c'est d'avoir transmis à la douzième génération d'agriculteurs de père en fils.

M. Leitão : Très bien, mais là, bon, c'est peut-être une autre discussion pour un autre jour, mais aussi il n'y a pas l'intérêt à avoir des fermes un peu plus grandes pour que le producteur puisse baisser ses coûts de production?

• (17 h 10) •

M. Charbonneau (Guy) : Mon vieux professeur de latin me disait : In medio stat virtus, c'est au centre qu'est l'équilibre, il faut garder un équilibre, à un moment donné. J'essaie. Des fois, je ne réussis pas.

M. Leitão : Très bien. Et donc vous pensez qu'avec ce... donc peut-être en mieux calibrant les mécanismes de compensation, ça pourrait favoriser la ferme familiale plus...

M. Charbonneau (Guy) : Si vous voulez avoir vraiment le fond de ma pensée, là...

M. Leitão : Je veux.

M. Charbonneau (Guy) : Je pense que vous avez apporté le problème sur la table, vous l'avez abordé, bravo! Il était temps, mais, je dirais, temps mort, on va le regarder, on va trouver des solutions, on va y revenir, il ne faut pas aller trop vite. Il est urgent de ne pas se presser, actuellement, là-dedans.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Oui. Donc, Mme la députée de Maurice-Richard, la parole est à vous.

Mme Montpetit : Bonjour à vous trois. Merci d'être avec nous. Vous avez abordé plusieurs éléments qui font écho, vous savez sûrement que les membres de cette commission se sont donné un mandat d'initiative sur l'impact des pesticides au Québec. J'espère, je souhaite qu'il y aura un rapport sous peu qui sera déposé, on souhaite, avec des recommandations ambitieuses et fortes, et j'en profite pour passer le message à mes collègues de la partie gouvernementale.

Et, lors des consultations, un des éléments qui est revenu à plusieurs reprises, c'est la question des bandes riveraines. On l'a vu non seulement lors des consultations, on l'a vu dans La rivière aux horreurs, je pense que ça s'appelait comme ça, le reportage qui a été fait par Daphné Cameron, de La Presse, donc toute la question de la contamination de nos cours d'eau par le glissement, souvent, dans le fond, des bords de terrains agricoles par l'absence de bandes riveraines. Vous abordez cette question-là. Je sais que mon collègue... je suis à peu près certaine que c'est là qu'il voulait aller, sur les questions d'écoconditionnalité et d'écofiscalité. Et vous faites différentes propositions pour venir... bon, vous avez abordé la question, aussi, du nombre d'inspecteurs. Donc, j'aimerais ça que vous me parliez d'écoconditionnalité dans le contexte des bandes riveraines, mais il y a aussi un autre élément où vous avez soulevé... où vous avez dit : Les MRC s'occupent des bandes riveraines. Et, lors des consultations aussi, on a des groupes qui sont venus nous dire que, dans de petites municipalités agricoles, souvent, c'était justement la municipalité qui devait faire appliquer les bandes riveraines et que ça posait des problèmes, je vais dire, de conflits, parce que ce sont des petites municipalités, justement, et les gens se connaissent, et il n'y avait pas la notion d'inspection par les MRC, justement. Donc, je serais curieuse de vous entendre là-dessus aussi.

Mme Roy (Suzanne) : ...question de compétence. Il y a les compétences des cours d'eau qui sont dédiées aux municipalités régionales de comté. Donc, effectivement, dans un milieu plus petit, ça peut créer toutes sortes de problématiques d'ordre social, je vous dirais, mais les MRC, à ce niveau-là, est un palier intéressant où, justement, on a souvent des inspecteurs qui, déjà, pour les travaux qui doivent être faits en cours d'eau, qui sont demandés par les agriculteurs et qui sont faits par la MRC, donc, on a déjà des gens sur le terrain qui connaissent nos cours d'eau, c'est déjà cartographié dans nos MRC. Et donc, à ce moment-là, ils pourraient très bien être les inspecteurs qui pourraient émettre des constats dans le cas où il y a non-respect de la bande riveraine.

Mme Montpetit : Ah! O.K. C'est ce que vous suggérez, dans le fond?

Mme Roy (Suzanne) : Tout à fait.

Mme Montpetit : Je pensais que vous disiez que c'était... que ça fonctionnait comme ça, et j'étais surprise. O.K.

Mme Roy (Suzanne) : Déjà, la compétence, elle est là. Déjà, la compétence, elle est là, dans certaines MRC, c'est déjà mis en application, donc, chez nous, donc je peux en parler. Et on a déjà des inspecteurs qui vont marcher dans les cours d'eau et qui interviennent. Et on travaille même avec l'UPA dans notre MRC pour sensibiliser les agriculteurs à un meilleur respect des bandes riveraines dans le cadre de leur agriculture.

Mme Montpetit : Mais vous suggérez, dans le fond...

Mme Roy (Suzanne) : D'aller plus loin.

Mme Montpetit : ...que ça pourrait être systématisé pour éviter, justement... C'est ça, c'est vraiment dans des petits villages où on nous a dit : Malheureusement, ça devient très difficile pour les inspecteurs de faire appliquer ça, parce que, souvent, le beau-frère, ou le cousin, ou le... Donc, ça crée des difficultés. Donc, ça enlèverait peut-être cette proximité-là en ramenant la compétence vers la MRC, là.

Mme Roy (Suzanne) : Oui. Et ce n'est pas nécessaire que ce soit l'inspecteur municipal. Quelqu'un qui a le mandat, au niveau de la MRC, peut très bien exécuter ces mandats.

Mme Montpetit : Parfait. Puis au niveau, donc, de l'écoconditionnalité, comment vous voyez, justement, qu'on pourrait, je vais dire, améliorer la situation du respect des bandes riveraines au Québec?

Mme Roy (Suzanne) : Ce qu'on disait, c'est de pouvoir, dans le cas où il y a non-respect... ou ça pourrait être dans le cas de récidive, tout ça est à définir, mais on pourrait s'assurer que, par exemple, il y a des avantages financiers qui sont perdus. Parce que, vous savez, sur des grandes surfaces, c'est facile de calculer que, si j'ai une amende de 250 $, j'ai tant de mètres, ça va être plus payant de continuer à ne pas respecter la bande riveraine puis de continuer à l'utiliser, puis que l'amende, finalement, va avoir un impact... le bénéfice va être moins grand, je vais le dire comme ça. Alors, si, par contre, ça amenait jusqu'à une pénalité, au niveau du programme, ça peut être un montant, oui, c'est... Mais c'est comme ça où il faut faire avancer les choses si on veut véritablement être capables d'avoir un impact sur nos bandes riveraines, qui nous coûtent très cher à nettoyer, qui nous occasionnent des problèmes. On a à vivre des réalités avec les changements climatiques sur lesquelles, justement, les bandes riveraines peuvent avoir un impact très positif.

Mme Montpetit : Est-ce qu'il me reste un petit peu de temps?

Le Président (M. Lemay) : Oui, vous pouvez y aller, Mme la députée.

Mme Montpetit : Merci. Vous abordez aussi la question de la taxation des terres exploitables mais non exploitées. Je présume que vous sous-entendez non exploitées sur une longue période, pas une terre qui est laissée en jachère, par exemple, pour une saison ou... Parce que ce n'est pas précisé dans votre document.

Mme Roy (Suzanne) : Oui, tout à fait. Et c'est vraiment ce qu'on appelle communément, dans notre jargon, quand on discute de réserve foncière... Alors, on voit des terres où des gens, volontairement, la laissent devenir en friche en se disant qu'elle va avoir moins de valeur et qu'elle pourra passer à d'autres utilisations, espèrent d'autres utilisations. Alors, c'est une mauvaise pratique puis c'est une pratique qui a un impact sur le prix des terres qui sont cultivées, important. Donc, je pense que, là aussi, il y a des solutions à apporter au niveau fiscal pour décourager cette pratique.

Mme Montpetit : Puis c'est dans un objectif... Quand vous voyez cette pratique-là, juste pour bien comprendre, c'est... Votre lecture, c'est pour, donc, changer la nature de...

Mme Roy (Suzanne) : ...

Mme Montpetit : ...d'utilisation de cette terre.

Mme Roy (Suzanne) : Oui, tout à fait.

Mme Montpetit : O.K., d'accord.

Mme Roy (Suzanne) : Pour qu'on fasse de l'agriculture sur les terres agricoles et non pas de la réserve foncière spéculative.

Mme Montpetit : Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup. Ceci termine ce bloc d'échange. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue du deuxième groupe d'opposition.

Mme Lessard-Therrien : Merci, M. le Président. J'aimerais aussi revenir sur les bandes riveraines, juste pour être certaine d'avoir bien compris. En ce moment, c'est la compétence des MRC, des municipalités, vous avez des inspecteurs. Est-ce que vous auriez le pouvoir d'émettre des amendes, vous-mêmes, directement?

Mme Roy (Suzanne) : On a tout à fait... On a déjà le pouvoir d'émettre des amendes.

Mme Lessard-Therrien : O.K. Puis là la question, c'est : Est-ce que vous voulez relayer cette compétence-là au ministère ou vous voulez la garder?

Mme Roy (Suzanne) : Pas du tout, pas du tout, c'est nous qui sommes le plus près, alors, même si on l'envoie au ministère, je ne pense pas qu'il y ait le personnel pour aller marcher nos cours d'eau dans chacune de nos régions. Sauf qu'on dit : À un moment donné, ce qu'on s'est aperçu, par la pratique, c'est que les amendes, certains vont faire le calcul que c'est plus payant...

Mme Lessard-Therrien : Mais pouvez-vous les augmenter, ces amendes-là?

Mme Roy (Suzanne) : Oui, mais, à un moment donné, on n'atteint pas l'objectif. Si on va vraiment, fiscalement, dire, s'il y a une récidive : Tu vas avoir un impact réel, tu n'auras plus ton programme d'aide, ton remboursement de terres pour une année, je pense que l'impact va être plus grand puis que le calcul va être différent à ce moment-là. Vraiment, là, il faut développer cette culture de respect de nos bandes riveraines.

Mme Lessard-Therrien : Ça fait qu'une des solutions, ça serait vraiment, c'est ça, de mettre, d'ajouter ce critère-là. Comme il faut être membre de l'UPA pour bénéficier du programme, il pourrait y avoir un critère qui dit : Vous devez respecter vos bandes riveraines.

Mme Roy (Suzanne) : Oui, tout à fait.

M. Charbonneau (Guy) : C'est déjà dans votre loi. C'est dans votre loi, vous le dites, qu'il doit rencontrer les principes d'écoconditionnalité, c'est dans le projet n° 48. Il est là, là. Vous l'avez là-dedans, excepté qu'il faut l'appliquer. Alors là, c'est dans l'application. Nous autres, on va aller les inspecter. S'ils ne sont pas conformes... Et, encore là, là, faites attention, parce qu'il y a toujours le principe du 80-20. 80 % des agriculteurs font ça comme il faut, il y a 20 %... en tout cas, il y a peut-être 20 % qui... mauvaise façon.

Le Président (M. Lemay) : Nuance.

M. Charbonneau (Guy) : Oui, il ne faut pas faire des affirmations, peut-être, mais il reste que vous l'avez dans votre loi, alors nous autres, on pourrait dire : Celui-là, ce monsieur ou madame X, ne sera pas conforme, allez voir. Si vous êtes d'accord avec nous autres, vous suspendez le programme, et ça, ça va faire mal. Parce que nos petites amendes de 1 000 $, là, ça n'a pas d'impact.

Le Président (M. Lemay) : Mme la députée.

Mme Lessard-Therrien : Je comprends. Je suis comme dans les derniers, ça fait que j'ai un peu moins de questions, mais je vous trouve extrêmement intéressants et pertinents. J'aimerais vous entendre sur les meilleurs moyens de freiner la spéculation.

Mme Roy (Suzanne) : Tu veux te lancer? Bonne chance, Jean-François.

Le Président (M. Lemay) : Allez-y.

Mme Lessard-Therrien : Là, tout de suite, ou...

Le Président (M. Lemay) : Non, non, vas-y. Il va faire sa conclusion.

• (17 h 20) •

M. Sabourin (Jean-François) : Oui, bien, effectivement, c'est un gros enjeu, là, il n'y a pas de solution simple, évidemment. Les municipalités, nous, ce qu'on propose, justement, c'est d'agir sur l'offre et la demande à la hauteur de nos outils fiscaux qu'on a, notamment la taxation des terres en friche. Effectivement, il y a d'autres modèles ailleurs dans le monde, mais nous, on a... Bon, on reconnaît, là, que le choix qui a été fait au Québec, c'est d'aller vers la compensation des taxes foncières aux agriculteurs comme manière de les aider. On sait qu'en France, par exemple, ce n'est pas du tout la même manière, des sociétés d'aménagement, bon, mais on comprend tout à fait que ce n'est pas le modèle qui est au Québec, mais, dans notre situation, on a une approche qui est beaucoup plus financière, beaucoup plus fiscale, pour essayer de contrer la spéculation. Et nous, c'est ce qu'on propose, on propose d'aller vers ça. Et puis, après ça, si on peut adapter, continuer de bonifier le programme, le PCTFA, là, pour qu'il puisse s'adapter aux différents cas de figure, nous, on est tout à fait d'accord avec ça pour appuyer les productrices et les producteurs agricoles directement plutôt que par une mécanique détournée, ce qui est notre proposition. Voilà.

Le Président (M. Lemay) : Merci, M. Sabourin. M. le député de Bonaventure, la parole est à vous.

M. Roy : Merci, M. le Président. Écoutez, très bon exposé. Vous avez quand même un langage coloré, sauf que moi, habituellement, je dis que 90 % des gens sont corrects, il y a un 10 % qui pèche par excès, puis l'autre, un 10 %, par réticence.

Ceci étant dit, peut-être juste un chiffre, vous nous dites que la... Bon, dans le cas de certaines municipalités, on peut voir doubler la croissance des taux de taxe. Pouvez-vous me donner un exemple concret, là, de quelqu'un que... Vous m'avez parlé des personnes âgées sur le bord d'un lac, là, tout à l'heure, mais de quelqu'un, là, qui est dans une municipalité où on va voir la plus haute augmentation de taxes liée à ce changement-là de fiscalité, là, un exemple de M., Mme Tout-le-monde.

Mme Roy (Suzanne) : Bien, par exemple, dans Saint-Roch-Ouest, on peut parler d'un transfert par unité, donc un montant augmenté sur le compte de taxes, de 209 $. Bien, c'est quand même important, et on parle là d'un 7,6 %. Puis on comprend, là, que c'est une municipalité qui n'a pas nécessairement beaucoup de ressources, d'ailleurs, qui ont dû subir une forte hausse de taxes pour être capables d'offrir les services, de 16 %. Si j'y ajoute ça, là, on vient de parler de 23 % de hausse de taxes d'une année à l'autre. Alors, c'est pour ça que, quand je parlais du principe de compensation, là, sur la quatrième année, là, c'est tout simplement qu'on a pelleté en avant les trois premières années, là. Et là ces municipalités-là vont faire face à ça.

Et puis la fédération québécoise, tantôt, l'a bien dit, hein, nous sommes 100 % d'accord avec eux, l'agriculture, c'est une responsabilité collective à tous. Pourquoi on va demander aux gens de Saint-Roch, où l'agriculture est dynamique, aux gens de Calixa-Lavallée, aux gens de Verchères, aux gens de Richelieu de dire : Vous autres, là, dans le village, vous allez payer plus cher parce que votre milieu agricole est plus dynamique, alors que nos Montréalais, bien, ils n'auront pas cette contribution-là à faire parce qu'ils ne font pas face à ça. Si on veut vraiment aider nos agriculteurs, s'il y a un message positif à lancer, c'est que ça appartient à l'ensemble du Québec, que c'est une ressource importante pour l'ensemble du Québec, et qu'on le mette dans l'ensemble du programme. Je pense que, ça, c'est un message fort à laisser à nos agriculteurs, plutôt que, là, aller se chicaner localement avec nos agriculteurs puis nos villageois parce qu'on va se passer une facture.

Le Président (M. Lemay) : M. le député de Bonaventure.

M. Roy : Merci. C'était très clair.

Mme Roy (Suzanne) : Merci.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Donc, sur ce, je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.

Et je vais suspendre les travaux quelques instants afin de permettre aux représentants des Producteurs de grains du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 17 h 24)

(Reprise à 17 h 28)

Le Président (M. Lemay) : Alors, nous reprenons nos travaux. Et, juste avant de vous présenter notre nouveau groupe, M. le ministre, je crois que vous aviez un dépôt de documents à faire en lien avec le groupe précédent.

M. Lamontagne : Oui, M. le Président. J'ai fait allusion à la lettre que la Communauté métropolitaine de Montréal m'a fait parvenir, alors je voudrais la déposer, là, à la commission.

Document déposé

Le Président (M. Lemay) : Parfait. Il y a consentement? Très bien. Donc, merci.

Alors, maintenant, je cède la bienvenue aux représentants des Producteurs de grains du Québec, en vous rappelant que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. Et je vous invite à vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent, puis vous pourrez procéder à une période d'échange avec les membres de la commission après votre exposé. La parole est à vous.

Producteurs de grains du Québec (PGQ)

M. Overbeek (Christian) : Merci, M. le Président. M. le ministre, distingués membres de la commission, je suis Christian Overbeek, président des Producteurs de grains du Québec. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Alain Gervais et de M. Pierre Murray, dignes membres de notre comité exécutif.

Nous représentons quelque 9 500 producteurs et productrices de grains présents dans toutes les régions du Québec. Ces grains sont principalement des céréales, dont le maïs, le blé, l'orge et l'avoine, ainsi que des oléagineux et protéagineux tels que le soya et le canola. Cultivés sur près de 1 million d'hectares de terres, ils génèrent un chiffre d'affaires annuel d'environ 1,3 milliard de dollars. La production de grains est ainsi le troisième secteur agricole québécois en importance. En plus de contribuer à nourrir l'ensemble des autres productions, ces denrées contribuent à une saine alimentation humaine ainsi qu'à l'épanouissement de l'économie québécoise.

Merci de nous recevoir aujourd'hui afin de nous permettre de vous présenter notre point de vue et nos recommandations concernant le projet de loi n° 48. Nous concentrerons notre exposé d'aujourd'hui sur les aspects du projet de loi qui concernent le programme de crédit de taxes foncières agricoles que nous nommerons «le programme» pour plus de simplicité.

• (17 h 30) •

Avant d'aller plus loin, il est important de rappeler d'où vient ce programme et à quoi il sert. Comme dans le cas de plusieurs propriétés, les producteurs agricoles paient des taxes foncières. Or, la taille relative et l'utilisation de nos terres n'ont strictement rien à voir avec un usage résidentiel, commercial ou manufacturier. Notons toutefois que les terres agricoles sont taxées au niveau municipal alors que la majorité des actifs de production des autres industries en sont exemptés. Cela dit, en proportion de leur taille, nos terres ne reçoivent à peu près pas de services municipaux, même si nous en payons le prix. Dit autrement, un producteur de grains paie des taxes élevées basées sur la valeur de sa terre même s'il ne reçoit à peu près... ou peu de services pour cette terre. Cette situation engendre une importante iniquité fiscale. Comme vous le verrez plus en détail dans quelques instants, le programme vise à corriger en partie cette situation.

Par ailleurs, la question de la valeur des terres agricoles a fait couler beaucoup d'encre ces dernières années. Même après d'importants travaux, le problème n'a pas été réglé durablement. Chose certaine, la valeur commerciale des terres est à la hausse, et le phénomène ne semble pas en voie de se résorber. Je me permets de vous signaler à ce moment qu'une terre qui vaut plus cher à un moment donné ne produit pas davantage que l'année précédente. D'ailleurs, sur le terrain, très peu de terres sont vendues. Ce n'est donc pas un facteur d'enrichissement des producteurs, bien au contraire. En effet, comme les taxes foncières sont basées sur la valeur commerciale des terres, c'est donc dire que les producteurs doivent payer des taxes dont les fluctuations sont essentiellement basées sur des facteurs spéculatifs. Pire encore, cette analyse ne tient pas compte de la vente ou du transfert à la relève, réalisés à une fraction des prix considérés par l'évaluation actuelle. Au final, cela crée une pression à la hausse sur la valeur considérée pour la taxation des terres agricoles, qui devient une valeur spéculative et non économique ou agronomique.

Revenons maintenant au programme qui est l'objet de modifications par l'intermédiaire du projet de loi n° 48. Ce programme permet essentiellement de compenser les producteurs pour le paiement de taxes foncières aux municipalités, taxes qui n'ont rien à voir avec leur réalité de producteurs, que ce soit sur le plan économique ou simplement de l'équité fiscale. Il importe de rappeler que le programme couvre seulement une part des taxes foncières. À titre d'illustration, une terre dont la valeur commerciale est d'environ 1 million de dollars, en vertu du programme, serait taxée comme si elle était de la même valeur qu'une maison unifamiliale, par exemple, d'environ 150 000 $, mais la terre est taxée tout de même.

Au net, les entreprises agricoles du Québec versent annuellement plus de 67 millions en taxes municipales et scolaires. La balance est assumée par le programme. Cela dit, malgré l'existence du programme, les taxes assumées par les entreprises agricoles ont crû de plus de 180 % depuis 2007, le tout même si cette terre ne bouge pas, consomme peu de services et n'est utilisée que pour la production de grains. Cette situation problématique fait également en sorte d'augmenter la place de la production agricole dans l'assiette fiscale des municipalités. À notre connaissance, le Québec est le seul endroit où il a été décidé de rembourser à travers un programme provincial agricole une portion des taxes payées par les entreprises agricoles aux municipalités. Ailleurs, les entreprises agricoles bénéficient directement d'un traitement fiscal ajusté et adapté.

Cela étant dit, et bien que les PGQ apprécient le travail effectué par le ministre avec ce projet de loi, nous aimerions suggérer quelques améliorations. D'abord, le projet de loi n° 48 perpétue le problème de fond, à savoir que la fiscalité agricole doit être révisée afin d'atteindre une meilleure équité sans mettre en péril les finances de la municipalité. Ce programme ressemble à une aspirine. Ça soulage temporairement, mais ça ne guérit pas la maladie. À notre avis, une réforme complète du système de taxation foncière pour les agriculteurs doit être réalisée conjointement avec les acteurs du milieu.

Parmi les éléments à examiner prioritairement, un taux de taxation distinct pour le secteur agricole devrait être envisagé. De même, le plafond d'imposition devrait être libéré de la contrainte des facteurs commerciaux et se baser davantage sur la valeur agronomique des terres. Ces éléments nous semblent fondamentaux.

Maintenant, si nous devons, pour le moment, continuer à vivre avec ce programme, il est important d'examiner d'autres particularités. Parmi celles-ci, nous relevons principalement le plafonnement des dépenses du programme, ce qui fait que les producteurs assument seuls les effets de la hausse de la valeur des terres dans le programme actuel. Nous relevons aussi l'absence de plafond de taxation des actifs agricoles pour les municipalités, qui représente une menace constante pour les producteurs. Et enfin vous avez certainement entendu parler de la complexité administrative de ce programme, qui a fait les manchettes ces dernières années. En ce sens, notre compréhension est que le principe du projet de loi vise à corriger ces défauts importants et nous appuyons donc le principe du projet de loi n° 48.

Cela dit, nous nous opposons formellement à l'idée que ce programme soit considéré comme une aide aux producteurs, avec pour conséquence que la hausse du prix des terres tende à faire diminuer à chaque année le soutien à l'agriculture. En réalité, ce programme est une aide qui finit sa course dans les coffres des municipalités du Québec. Plus important encore, comme nous vous l'avons exposé, ce programme est en place afin de pallier à une structure de taxation qui est déficiente. En ce sens, nous recommandons que le programme relève des crédits budgétaires alloués aux municipalités et non au secteur agricole.

Le dépôt de projet de loi n° 48 par le ministre de l'Agriculture est un pas dans la bonne direction. Selon notre analyse de ce projet de loi, le gouvernement souhaite corriger certains défauts, ce qui est fort louable. Cependant, nous croyons que le gouvernement doit se pencher sur une réforme complète du système de taxes foncières pour les agriculteurs. Afin qu'on se comprenne bien, nous voulons continuer de contribuer au développement de nos municipalités, mais de façon équitable. Nous sommes d'avis que nous pouvons en faire davantage tous ensemble. Surtout, nous souhaitons demeurer un milieu compétitif pour assurer un développement économique profitable à tous.

Avant de terminer, nous ne pouvons pas passer sous silence la volonté du gouvernement de maintenir un comité de suivi avec les instances municipales et le milieu agricole. C'était un des engagements pris à l'endroit du secteur des grains lors de la dernière campagne électorale, et nous tenons à le souligner d'une façon très positive.

Voici donc le résumé de nos recommandations concernant le projet de loi lui-même ainsi que le programme principal auquel il fait référence : que l'Assemblée nationale adopte le principe du projet de loi n° 48, que le Programme de crédit de taxes foncières agricoles relève des crédits budgétaires alloués à l'aide aux municipalités et non aux crédits budgétaires alloués à l'aide aux agriculteurs, qu'une réforme complète du système de taxation foncière pour les agriculteurs soit réalisée conjointement avec les acteurs du milieu, que l'application d'un taux distinct pour le secteur agricole soit obligatoire pour l'ensemble des municipalités, et que le mode d'indexation du plafond d'imposition soit basé sur une valeur agronomique plutôt que sur l'augmentation moyenne de la valeur des terres.

Merci de votre attention. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Donc, avant de céder la parole aux membres de la commission pour une période d'échange, j'aimerais savoir si c'est possible de faire le dépôt de vos notes d'allocution?

M. Overbeek (Christian) : Bien, les miennes sont barbouillées, là, mais on va trouver une solution.

Le Président (M. Lemay) : Donc, vous pouvez transmettre une version électronique au secrétariat, qui en fera la distribution aux membres de la commission.

M. Overbeek (Christian) : On nous fait signe que oui.

Le Président (M. Lemay) : Très bien, merci beaucoup. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Lamontagne : Oui. Bonjour, M. Overbeek, messieurs. Merci de votre présence en commission.

Écoutez, j'apprécie les commentaires que vous avez faits. Avant vous, on a les gens de la Fédération québécoise des municipalités qui nous ont fait état qu'ils considéraient que le projet de loi était inéquitable puis qu'il allait desservir les grands producteurs et les intérêts particuliers. Puis là j'aimerais vous entendre un petit peu, voir qu'est-ce que vous comprenez de ces commentaires-là ou qu'est-ce que...

Le Président (M. Lemay) : Allez-y.

M. Overbeek (Christian) : Moi, je vous dirai que j'ai eu quand même une certaine difficulté à bien comprendre les propos que j'ai entendus tantôt, là, mais ce n'était pas à mon tour, là, d'y parler.

Moi, je veux revenir aux aurores du programme, là, à tous les débuts du programme. Aux aurores, au début du programme, de l'existence du programme, c'était pour corriger une iniquité fiscale, parce que le gouvernement provincial avait reconnu que les apports financiers demandés auprès des agriculteurs via leur valeur de taxation des actifs agricoles devenaient inéquitables en fonction des services qui étaient rendus par les municipalités, avec les proportions, là, d'assiette fiscale qui existaient, là, au début du programme. Puis je pense qu'au fil du temps tout le monde a bien constaté que l'évolution de la valeur des maisons unifamiliales, des usines, des bâtiments agricoles et des terres agricoles n'ont pas suivi la même tendance ou la même rapidité, en termes d'augmentation.

Et c'est facile de conclure, à la fin... qu'on peut qualifier, là, d'un transfert fiscal vers les actifs agricoles dans les recettes monétaires des différentes municipalités juste par l'imposition à un même taux de taxation entre une maison unifamiliale et un actif agricole. Donc, j'ai eu comme un peu de misère, là, à comprendre que les résidences du village étaient en train de subventionner, là, les actifs, là, de la campagne. C'est plutôt le contraire.

• (17 h 40) •

M. Lamontagne : Mais plus loin que ça, un peu, parce que c'est certain qu'on a 25 000 producteurs agricoles qui sont enregistrés puis qui peuvent bénéficier du programme, selon vous, le projet de loi qui est déposé, là, si, demain matin, on devait l'adopter et l'appliquer, là, est-ce qu'il favorise en particulier des grands producteurs? Est-ce qu'il favorise... Ou vous pensez que c'est un projet de loi, dans les zones concernées, et tout ça, là, qui peut avoir un impact équivalent pour tous les types de producteurs?

M. Overbeek (Christian) : ...que la portée du projet de loi n° 48 est équitable puisqu'elle rend un service commun à l'ensemble des entreprises agricoles. Puis, comme ça a été indiqué tantôt, il y a quand même des éléments contenus dans la réforme qu'on se doit d'accueillir de façon positive, mais on demeure quand même en attente ou en appétit sur d'autres changements qu'on a discutés ou présentés, là, dans les années précédentes.

M. Lamontagne : Dans un autre registre, M. Overbeek, on a l'Union des municipalités qui a amené l'idée de lier un peu, d'amener un facteur d'écoconditionnalité qui serait lié aux remboursements, là, dans le cadre du Programme de crédit de taxes foncières agricoles, au niveau des bandes riveraines, au sens où si... Rapidement, là, sans aller dans le détail, mais l'esprit de ce qu'ils ont dit, c'est qu'advenant qu'on aurait des producteurs agricoles qui ne respectent pas les bandes riveraines puis seraient trouvés en infraction avec les dispositions qui sont demandées sur les bandes riveraines, bien, d'imposer que ces gens-là ne puissent pas avoir accès au programme pendant un temps x, là, mettons, là. Ça fait qu'on... Les producteurs de grains, vous êtes des gens de grandes cultures. La question des bandes riveraines, c'est certainement quelque chose qui est présent dans votre quotidien puis présent dans le quotidien de tous vos membres, là. Comment vous accueillez une proposition comme ça de l'Union des municipalités?

M. Overbeek (Christian) : Bien, je pense que, quand même, là... pas très différente de la réalité actuelle des producteurs de grains, dans le sens, là, qu'on se doit de respecter l'ensemble des règles d'écoconditionnalité de l'ensemble des programmes gouvernementaux, je vous dirai, d'une façon plus particulière, là, des programmes qui sont offerts par La Financière agricole. Donc, de facto, les producteurs ont à respecter, là, l'ensemble des lois, là, qui protègent le mieux possible, là, les éléments environnementaux.

Puis je vous dirai que les producteurs de grains — puis on a encore fait un exercice, la semaine passée, d'identification des besoins en recherche — les producteurs de grains sont toujours à l'affût de nouvelles connaissances pour pouvoir les transposer dans leurs activités agricoles, et un des éléments qui a été discuté la semaine passée, là, c'est comment améliorer le respect mais surtout l'efficacité de la bande riveraine, qui se doit d'être présente, là, dans les milieux agricoles et autres milieux.

M. Lamontagne : Bien, mettons, arrivés à un point où on dirait... il y aurait vraiment un lien qu'on ferait entre le respect des bandes agricoles puis le respect des bandes... c'est-à-dire, le respect des bandes riveraines et puis l'éligibilité au Programme de crédit de taxes foncières agricoles, est-ce que c'est quelque chose que les producteurs de grains accueilleraient favorablement, si c'était bien balisé et bien encadré, là?

M. Overbeek (Christian) : ...bien, comme je vous l'ai dit, c'est un concept, là, qui est correct à être mis en place, mais dans la mesure où de nouvelles connaissances viennent en aide aux producteurs, là, à améliorer en même temps l'efficacité des bandes riveraines, donc recherche de nouvelles connaissances pour que nos gestes portent le meilleur fruit possible.

M. Lamontagne : Excellent. Dans vos recommandations, vous mentionnez... vous voulez soustraire, si on veut, du chapeau du MAPAQ la question du programme de compensation pour fiscalité agricole puis d'envoyer ça dans les municipalités, mais, en réalité, l'UPA demande que ça demeure sous le MAPAQ. Vous parlez... ou comment vous conciliez votre demande puis la demande l'UPA?

M. Overbeek (Christian) : Bien, nous, là... Le point de vue des producteurs de grains, c'est qu'on ne veut pas que la société civile en général vienne dire que les producteurs sont largement subventionnés dans le paramètre de la taxation fiscale municipale, puisque, comme on l'a dit dans le texte, l'argent qui est prévu au programme, les crédits qui sont prévus au programme sont versés directement dans les coffres des municipalités. Ça ne passe même pas par l'entremise, là, de la main du producteur. Puis c'est pour corriger une iniquité fiscale à sa base même. Si les actifs agricoles étaient bien taxés puis qu'il y ait un programme de compensation directement entre le gouvernement et des municipalités, il n'y aurait pas lieu d'avoir ce programme de crédit de taxes foncières, parce qu'on n'aurait pas à subventionner des taxes qui seraient correctement établies.

M. Lamontagne : Dernier point, M. Overbeek. Quand vous parlez de l'indexation du plafond qui est proposée, vous savez que ce mécanisme d'indexation là va être prévu par réglementation, après ça. Il va y avoir un comité de suivi aussi qui... Tu sais, l'idée, là-dedans, c'est qu'on attache quelque chose, puis qu'on le suive, puis que, s'il y a des corrections à faire, on les fasse. Mais, si vous avez à nous donner des recommandations, comment vous verriez cette indexation-là, qui viendrait soutenir la pertinence du geste qu'on pose, mais aussi, toujours dans un contexte, aussi, d'équité, là, tu sais, les contribuables, puis tout ça, là? Quelle approche vous verriez pour l'établissement de...

M. Overbeek (Christian) : Je pense que l'imposition d'un plafond de taxation sur les terres agricoles est une mesure temporaire. Je pense qu'à sa finalité il faut s'assurer que le fonds de terre soit taxé correctement à sa base. Donc, l'idée peut paraître correcte, mais c'est en attendant la bonne façon de taxer le fonds de terre. Puis, au niveau de l'indexation, reprendre l'exercice sur une base triennale va apporter peu d'effets et va continuer à maintenir l'exaspération des agriculteurs quand ils reçoivent leurs comptes de taxes municipales.

M. Lamontagne : C'est bon pour moi.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Donc, je cède maintenant la parole au député de Bourget.

M. Campeau : J'ai juste une question : Quel effet ça aurait, selon vous, à court terme et à long terme, d'utiliser la valeur agronomique plutôt que la valeur marchande d'un terrain?

M. Overbeek (Christian) : Ça aurait probablement un impact plus grand que celui qui est prévu dans le projet de loi n° 48. Le défi d'une valeur agronomique, c'est d'en connaître ses paramètres. Puis, dans les discussions qu'on a eues antérieurement avec plusieurs membres de l'Assemblée nationale, c'est de vouloir mettre en place un système de taxation qui... Je me répète, là, mais l'exercice qu'on a fait, là, je dirai, depuis les 15 dernières années, c'est de s'assurer d'avoir un système de taxation qui est équitable sur les actifs agricoles. Puis, quelle que soit sa valeur de référence, à la fin de l'exercice, les producteurs sont prêts à payer leur juste part de taxation municipale en fonction des services qu'ils ont reçus ou qu'ils ont demandés.

M. Campeau : Ça va. Merci.

Le Président (M. Lemay) : Parfait. Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice, la parole est à vous.

Mme Tardif : Merci. Pour des fins de compréhension, là, pour l'ensemble du public qui vous écoute, vous souhaitez que le mode de taxation soit basé sur la valeur agronomique. Quelle est la différence entre la valeur foncière, qui est évaluée par un évaluateur, et la valeur agronomique, qui découle d'un agronome, j'imagine, de par son nom? Et peut-être que je suis complètement à côté de la track, comme on dit, là. Est-ce que c'est plutôt relié au type de production? En fait, ce que je veux savoir, c'est pourquoi... Justifiez-moi et aidez-nous, là, à comprendre pourquoi ça serait et en quoi ça serait avantageux que ce soit sur cette valeur-là que le taux de taxe soit basé.

• (17 h 50) •

M. Overbeek (Christian) : La valeur agronomique, elle va souvent être référée en transfert de la ferme, là, entre deux générations, ou entre deux générations qui sont apparentées, ou entre deux entités familiales, puisque l'entité exploitrice n'a pas de relève en tant que telle. Et cette valeur-là est généralement reconnue.

La problématique entre la valeur foncière actuelle et la valeur agronomique, c'est que, présentement, quand c'est le temps de faire l'évaluation des actifs agricoles, on ne retient que les ventes entre personnes non apparentées, donc, principalement, comme ça a été qualifié par le groupe précédent, basées sur des valeurs plutôt spéculatives que plutôt sur une rentabilité à 100 % de l'entreprise. Donc là, une entreprise, là, je vous dirai, qui a un désir de vouloir s'agrandir, va toujours être prête à payer un prix supplémentaire que quelqu'un qui a assumé pleinement son achat, a une capacité de remboursement qui est plus élevée, et c'est une distinction qui est importante, dans le système actuel, de ne pas prendre en considération les valeurs de transaction entre des gens apparentés.

Mme Tardif : Donc, malgré l'appellation, ça n'a pas rapport à la production agricole et ça n'a pas rapport à un agronome non plus, c'est une valeur réelle de vente qui se fait entre parents. C'est ça, la valeur agronomique, qui est souvent, par obligation, plus basse qu'une valeur spéculative, bien entendu.

M. Overbeek (Christian) : Elle serait plus près.

Mme Tardif : C'est ça. Ça n'a pas rapport au terme. «Agronomique» ne réfère pas à «agronome» ou à «production», pas du tout. C'est ça.

M. Overbeek (Christian) : Regardez, madame, là...

Mme Tardif : Je veux juste comprendre.

M. Overbeek (Christian) : Non, non, mais, de par ma formation en agroéconomie, moi, j'aime ça placer le mot «agronomique» une fois de temps en temps.

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Tardif : On parle de la même chose?

M. Overbeek (Christian) : Oui, madame.

Mme Tardif : Parfait, merci. Je vais revenir... C'est un très beau terme, merci beaucoup. Je ne remets pas en question l'appellation du tout, là.

Le Président (M. Lemay) : Alors, ceci termine ce bloc d'échange. M. le...

M. Gervais (Alain) : ...complément de réponse?

Le Président (M. Lemay) : Il reste un peu de temps, M. Gervais. Vous pouvez y aller.

M. Gervais (Alain) : O.K., juste pour compléter sur les transactions familiales entre apparentés, puis tout ça, dans le programme d'évaluation des fonds de terre, ce n'est pas tenu en compte, comme M. Overbeek a dit, et il y a, en tout cas, plus ou moins 15 % à 20 % des transactions qui sont prises en compte pour faire l'évaluation des fonds de terre. Il y a pratiquement 80 % des transactions agricoles qui sont faites dans les familles, puis ce n'est pas tenu en compte lors... programme d'évaluation du municipal. Ça fait qu'il y a une problématique là, mais il y a l'autre problématique après.

Le Président (M. Lemay) : Merci, M. Gervais. Sur ce, je cède la parole à la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Bonjour à M. Overbeek, bonjour à vous trois. Merci d'être là avec nous en ce début de consultations sur le projet de loi.

Votre intervention est très claire, et maintenant qu'on sait qu'on aura une version de votre allocution, annotée ou pas, on pourra en prendre encore davantage connaissance. J'aurais des questions sur des propositions qui ont été faites pour bonifier le projet de loi n° 48, qui ne sont pas vos propositions directement, mais je suis certaine que vous avez une opinion sur celles-ci.

Comme proposition, il y a eu celle d'établir la valeur du plafond de taxation à l'hectare à la moyenne de la valeur des terres du Québec et indexer cette valeur selon l'IPC pour les années subséquentes, en lien, évidemment, avec le fait que, si je ne me trompe pas, c'est entre 8 % et 12 % d'augmentation du prix de la valeur des terres, annuellement, là, dans les dernières années. J'aimerais ça vous entendre sur le fait... si vous êtes favorable, dans le fond, à cette bonification-là et si vous y voyez un manque à bonifier, dans le fond, au niveau du projet de loi qui est devant nous.

M. Overbeek (Christian) : Comme je l'ai dit, précédemment, notre souhait ultime, c'est d'être taxés selon les services rendus sur les actifs agricoles. Tout moyen temporaire, en attendant que cela arrive, est quand même bienvenu, puis une indexation à l'IPC plutôt qu'une indexation sur l'évolution de la valeur des fonds de terre nous amène vers cet élément-là. Mais vous comprendrez, là, qu'il ne faut pas que ça soit la dernière solution appliquée. Ce sont des mesures qu'on considère ou qu'on souhaite temporaires.

Le Président (M. Lemay) : Mme la députée de Maurice-Richard, juste pour vous mentionner que le document est sur le site Greffier.

Mme Montpetit : Il vient d'être ajouté?

Le Président (M. Lemay) : Oui.

Mme Montpetit : Merci. Parce que, dans le fond, le projet de loi qui est déposé par le ministre, est-ce qu'il vous apparaît pérenne? Est-ce qu'il règle un problème, justement, à long terme ou assez rapidement, tu sais? Comment vous voyez la longévité de son application? Est-ce que, dans un an, deux ans, trois ans, quatre ans, on se retrouve avec un problème qui est encore très présent? Est-ce qu'il y a des ajustements, justement, particulièrement au niveau des articles, qui vont devoir être faits? Comme parlementaires, on aura des discussions en étude détaillée. J'imagine qu'il y a des éléments, peut-être, qui vous ont apparu qui devraient être bonifiés plus spécifiquement, là.

M. Overbeek (Christian) : C'est certain qu'un des éléments sécurisants, c'est l'enlèvement du plafond des crédits budgétaires. Ça, je pense que c'est un élément qui est extrêmement réconfortant pour les producteurs. Mais, quand on se dit que ça va être réconfortant, c'est qu'en même temps ça amène l'autre côté de la médaille, là, qui fait que ça va être encore un programme qui va être extrêmement exigeant, en termes de crédits budgétaires, auprès du gouvernement provincial, parce qu'à sa base même les actifs agricoles ne sont pas encore, là, suffisamment bien taxés. Et, tant que cet élément-là ne se retrouvera pas en équilibre — une justesse dans l'équité fiscale des actifs agricoles avec le restant de l'assiette fiscale des différentes municipalités — ce programme-là va demeurer à propos. Mais, comme je vous dis, au tout début de ce programme-là, il y a eu une reconnaissance de l'inéquité fiscale. Qu'est-ce qui est plate à constater, là, après plusieurs dizaines d'années, c'est que les crédits sont en forte augmentation, ce qui indique directement que l'iniquité a été grandissante au fil des années. Et la part assumée par les producteurs a aussi été en croissance exponentielle, de la même façon que les crédits du programme lui-même. C'est ça, je pense, que ça devrait être, l'objectif à atteindre, ultimement.

Puis, comme on l'a dit, le projet de loi n° 48 est un pas dans la bonne direction, mais c'est comme une longue marche, il y a d'autres pas à faire encore par après. Mais, au moins, ça a commencé, je pense que c'est ça qui est important.

Le Président (M. Lemay) : M. Gervais veut faire un complément. Allez-y.

Mme Montpetit : Oui, oui, absolument.

M. Gervais (Alain) : Oui, merci. Puis je veux revenir aussi sur l'histoire de l'iniquité entre le monde agricole, urbain, et toute cette problématique-là. C'est que, là, tantôt, l'union municipale est arrivée avec ses arguments. C'est parce que, nous autres, l'iniquité, là, ça fait 10 ans, là, qu'on la vit, qu'elle augmente tout le temps. C'est sûr que, si on prend le portrait à matin, on dit, bon, là, ma municipalité qui est... Parce que, tantôt, l'union municipale a fait référence à certaines municipalités. Je suis à Saint-Denis-sur-Richelieu. Il y a 10 ans, les producteurs agricoles de la municipalité, le monde agricole apportait 22 % des taxes à la municipalité. Avec le remboursement des taxes et les montants que les producteurs payaient à la municipalité, l'assiette de revenus, c'était 22 % que le monde agricole apportait à la municipalité. Cette année, avec le nouveau rôle d'évaluation, on apporterait 44 % des revenus de la municipalité, le monde agricole.

Heureusement, la municipalité est allée vers un taux varié, mais pas à la hauteur qu'elle aurait dû aller. Le monde... Mon garçon a une maison dans le village, il a zéro augmentation de taxe pour cette année. Zéro. Au net, il paie... sur 2 000 $ de taxes, il n'a pas 1 $ d'augmentation. Les 70 propriétaires fonciers, on va apporter, avec l'aide du MAPAQ, 145 000 $, puis on nous dit que c'est équitable. Ça fait que l'iniquité, elle est déjà faite sur notre bord. Quand les municipalités disent : Bien là, c'est inéquitable, parce qu'il va falloir retaxer d'autre monde, bien, on l'a déjà fait sur notre bord. C'est un commentaire.

• (18 heures) •

Mme Montpetit : On a abordé, avec le groupe qui vous précédait, la question des bandes riveraines. Je profiterais de l'occasion... Parce que, la dernière fois que vous êtes venus en consultation devant la commission, c'était dans le mandat d'initiative sur les pesticides, et vous aviez, à cette occasion, abordé la question, justement, de la fiscalité, d'éviter... dans le fond, qu'une des solutions, au niveau des bandes riveraines, ce serait de ne pas taxer la partie sur laquelle, dans le fond, si je ne me trompe pas, là, je ne veux pas vous mettre des propos en bouche, là, vous me direz si ce n'était pas ça, mais que c'était de ne pas... d'exclure, dans le fond, de la valeur ou de ne pas taxer la partie bande riveraine puisque vous ne pouvez pas la cultiver, vous ne pouvez pas l'exploiter, dans le fond, vous ne pouvez pas la cultiver. Si je ne me trompe pas, c'est bien ce que vous aviez présenté. Puis là on ne le retrouve pas dans un... C'est un projet qui vient quand même corriger certains aspects au niveau de la fiscalité agricole. Est-ce que ce ne serait pas l'occasion... bien, nous rafraîchir la mémoire par rapport à ce concept-là, mais ce serait peut-être l'occasion de venir répondre à cette demande.

M. Overbeek (Christian) : Là, on fait référence à un mémoire, vous savez que la mienne est défaillante, puis je vous avouerai, là, que je suis incertain, là, mais regardez, là, si vous affirmez qu'on l'a dit, là, je vais le prendre comme ça. Et nous, aujourd'hui, on s'était concentrés sur le projet de loi n° 48 puis des éléments qu'on voulait y apporter, là, comme bonification, là, auprès du programme, puis on ne voulait pas le mettre en fonction ou en relation avec de l'écoconditionnalité ou autres éléments.

Moi, je veux juste vous affirmer qu'en ce qui concerne les bandes riveraines les producteurs ont un souhait de réduire leur empreinte environnementale de par leurs activités agricoles. Et, si les bandes riveraines sont une solution durable et efficace, ils vont être présents puis ils vont continuer à les améliorer, les bandes riveraines, mais c'est en fonction des connaissances qu'on reçoit. Puis je vous avouerai que, comme agriculteur, dans les 15 dernières années, on m'a suggéré différentes façons de construire, et d'aménager, et d'entretenir des bandes riveraines. C'est au fil des connaissances qu'on fait tout ça, là.

Mme Montpetit : Bien, si jamais la mémoire vous revient, n'hésitez pas à nous le soumettre, à nous le resoumettre, ou on retournera voir dans le mémoire que vous aviez déposé à l'époque. Mais ce que vous aviez souligné, justement, c'était une perte de productivité pour cette bande-là, puis qu'il était intéressant d'avoir des aspects d'écoconditionnalité. Comme on est sur un projet de loi sur la fiscalité... ça s'appliquait plus ou moins dans l'autre mandat, mais je pense que ce serait de bon augure, si c'est une demande, de la réitérer, puisque c'est ce qui va faire l'objet de notre étude détaillée.

Est-ce qu'aussi... Tant qu'à être sur ce sujet-là, en corollaire, l'UMQ, qui était avant vous, demandait justement qu'il y ait, si on veut, un lien qui soit mis entre certaines compensations fiscales en lien avec le respect des bandes riveraines. Vous vous situez où par rapport à ça, vos membres se situent où?

M. Overbeek (Christian) : Bien, je pense que j'y ai répondu tantôt, que le programme de crédit de taxes foncières, moi, je pensais qu'il était assujetti de la même façon que les autres programmes de soutien à l'agriculture, que les producteurs ont à respecter, là, un ensemble, là, de mesures de respect de protection de l'environnement et que ces programmes-là étaient assujettis à un principe d'écoconditionnalité. Donc, si tu ne respectes pas les conditions de protection de l'environnement, tu viens mettre un peu à mal, là, ton... voyons, ton... regarde, tu n'as pas accès à ça, baptême! Je ne sais pas comment dire ça, là, le mot me manque, madame, je m'excuse.

Mme Montpetit : Il n'y a aucun problème. C'est très clair. On peut finir là-dessus.

M. Overbeek (Christian) : Je n'ai pas accès.

Mme Montpetit : Merci.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Merci beaucoup, M. Overbeek. Sur ce...

M. Leitão : Est-ce qu'il nous reste du temps ou pas?

Le Président (M. Lemay) : Ça complétait la période avec l'opposition officielle. Donc, Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, la parole est à vous.

Mme Lessard-Therrien : Merci, M. le Président. Vous avez dit, dans votre allocution d'introduction, que, pour vous, ce projet de loi là, c'était un peu une aspirine. Nous, on dit que c'est un plasteur, on ne vient pas régler en profondeur le problème. On parle vraiment d'un programme. Pour nous, ce n'est pas une réforme, puis on se rejoint sur le fait qu'il faut réformer en profondeur ce programme-là. Puis je vous comprends très bien quand vous dites que les crédits devraient aller au ministère des Affaires municipales, parce qu'il y a une très grande proportion du budget du MAPAQ qui est allouée au remboursement des taxes foncières, ce qui fait qu'on a l'air d'avoir un ministère qui a beaucoup d'argent, mais, au bout du compte, c'est versé directement dans le coffre des municipalités. Donc, je vous comprends bien à ce niveau-là.

Tantôt, le précédent groupe, l'UMQ, qui était là, nous parlait de la problématique de la spéculation dans certaines régions, qu'on peut parfois traduire avec un phénomène qui s'apparente à l'accaparement des terres où de très grandes familles possèdent d'énormes superficies. Au niveau du plafonnement, là, à 32 100 $ l'hectare, il y avait M. Charbonneau qui avançait tantôt l'idée qu'à partir d'un moment où tu es assez gros, bien, assume tes taxes toi-même, quand tu es rendu à une entreprise avec une certaine envergure. Puis, quand on regarde les tableaux de La Financière agricole du Québec, en ce moment, il n'y a pas une région qui atteint cette valeur-là en moyenne. Je comprends qu'il y a des entreprises que oui, mais, en moyenne, on n'en est pas là. Donc, est-ce qu'il ne faudrait pas transformer cette mesure-là, faire plutôt l'inverse? Je vous pose la question, là, candidement. Au-delà de ce 32 100 $ l'hectare là, si on disait : Bien, à partir de ce moment-là, ce n'est pas : vous ne payez plus vos taxes, c'est : vous payez, vous assumez vos taxes à 100 %, comme mesure dissuasive pour favoriser que les entreprises soient davantage diversifiées sur le territoire et que la relève ait accès aux terres. Qu'est-ce que vous pensez de ça?

M. Overbeek (Christian) : Moi, je vous dirai, là, qu'on parle ici de modulation en termes de taxation. On va parler, là, d'éléments de vérification administratifs qui vont, eux, amener un certain niveau plus élevé de complexité dans la taxation. Moi, je pense que par un certain souci, je pense que c'est important que la machine gouvernementale aspire à des éléments où les coûts administratifs doivent être les plus bas possible. Moduler l'accès à des programmes gouvernementaux en fonction de la taille de l'entreprise, je ne pense pas que c'était le propos, là, du groupe précédent. Moi, j'avais cru comprendre qu'ils voulaient les moduler en fonction des prix payés par chacune des unités acquises, qui est une formule complètement différente, là.

Puis je m'inscris un peu en faux là-dessus, parce qu'une relève qui veut s'établir, puis qu'il a besoin d'acheter un fond de terre, il va falloir qu'il le paie au prix du marché, en plus de celle qu'il veut acquérir de sa propre famille. Puis il va être comme obligé de payer un prix surélevé. Puis, en plus, on va lui dire : Bienvenue dans le club, tu vas payer une taxe municipale supplémentaire. Puis ça, je pense que c'est contre-productif à inviter une nouvelle relève, là, dans le milieu agricole. Je pense qu'il y a d'autres façons de favoriser l'établissement d'une relève diversifiée dans le paysage agricole que de tenter de moduler l'accès au programme de crédit de taxes foncières ou de moduler...

Le Président (M. Lemay) : M. Overbeek, ceci termine ce bloc d'échange. Je cède maintenant la parole au député de Bonaventure.

M. Roy : Merci, M. le Président. Écoutez, bon, je ne suis pas un fiscaliste, je ne suis pas spécialiste du tout là-dedans, mais j'ai comme l'impression que... Je ne dirais pas que c'est une boîte de Pandore, là, mais qu'il y a de quoi là, là, qui va créer de la bisbille. Vous savez, tout à l'heure, bon, j'ai demandé à une dame : Ça veut dire quoi, là, pour un résident, là? Elle m'a dit : 200 $ d'augmentation de taxes. Bon, c'est très, très pointu, un village quelconque. Bien, il me semble que je vois la personne recevoir le compte de taxes, puis se virer devant... bien, regarder l'agriculteur dans le coin, puis dire : C'est toi, là? Est-ce qu'on n'est pas dans une situation où on va assister à une émergence de rapports conflictuels entre le monde agricole puis ceux qui... Et, tout à l'heure, c'était le contraire, vous m'avez dit : Votre fils n'a pas eu... Et là l'agriculteur va dire... Je ne sais pas, on dirait qu'on s'en va vers quelque chose qui va amener énormément de conflits. Et là on parlait d'un montant de 3 à 5 millions tout à l'heure. Ce n'est pas... Il y a de quoi que je ne comprends pas dans tout ça. Le montant n'est pas significatif par rapport à la problématique que ça va engendrer. Puis je ne porte pas de jugement outre mesure sur ça, mais c'est une impression. J'aimerais vous entendre sur le climat que ça peut engendrer.

M. Overbeek (Christian) : Regardez, le climat est déjà malsain. Il y a déjà un clivage, là, entre les producteurs et, mettons, lui, il a appelé ça les habitants au village, là, mais entre les autres membres, là, les autres résidents de la municipalité, là. Tout le monde reconnaît le fait que les producteurs, là, paient amplement leur part, là, de l'assiette fiscale municipale, malgré la présence du programme de crédit de taxes foncières et malgré le projet de loi n° 48. L'iniquité est déjà existante.

Qu'est-ce qui serait frustrant, c'est qu'il y ait des gens qui pensent qu'en tentant de corriger cette iniquité ils se retrouvent pénalisés, mais c'est quand même eux qui bénéficient, présentement, d'une surcharge imposée auprès des agriculteurs. Puis je vais reprendre, là, les propos, là, d'un directeur général d'une municipalité de mon coin. Il dit : Tu as raison, mais, d'un point de vue démocratique, ça va péter si on veut ramener une certaine forme d'équité fiscale mal expliquée.

C'est pour ça qu'on en revient à ce qu'il y ait un programme gouvernemental qui vient aider à réduire les impacts dans la correction de l'iniquité fiscale vers les municipalités, et, avec ça, tu n'auras pas une pression supplémentaire sur les autres résidents que ceux agricoles dans les municipalités.

M. Roy : Merci beaucoup.

Le Président (M. Lemay) : Alors, merci beaucoup, M. Murray, M. Overbeek, M. Gervais, pour votre contribution à nos travaux.

La commission ajourne ses travaux jusqu'au jeudi 6 février, après les affaires courantes, où elle poursuivra son mandat.

(Fin de la séance à 18 h 11)

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