(Dix heures)
Le
Président (M. Lemay) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
travail de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de
l'énergie et des ressources naturelles
ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de
bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Alors, la commission
est réunie afin de procéder à des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 34, la Loi visant à
simplifier le processus d'établissement des tarifs de distribution
d'électricité.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Campeau (Bourget) est remplacé par M. Martel
(Nicolet-Bécancour); M. Tardif
(Rivière-du-Loup—Témiscouata) est
remplacé par M. Lafrenière (Vachon); Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice) est remplacée par M. Thouin
(Rousseau); Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue) est remplacée par
M. Marissal (Rosemont); M. Roy (Bonaventure) est remplacé par
M. Gaudreault (Jonquière).
Le
Président (M. Lemay) : Merci. Alors, cet avant-midi, nous allons
débuter par les remarques préliminaires, puis nous entendrons
Hydro-Québec et la Fédération canadienne des contribuables.
Remarques préliminaires
Alors, les
temps de parole ont déjà été fixés par nos formations respectives, les bureaux
des leaders. Alors, je cède la parole
au ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles pour ses remarques
préliminaires. M. le ministre, vous avez six minutes.
M. Jonatan Julien
M.
Julien : Alors, merci. Merci, M. le Président. Bonjour, bonjour, chers
collègues. Grand plaisir d'être ici avec vous aujourd'hui.
Comme vous le
savez, le 12 juin dernier, j'ai présenté le projet de loi n° 34,
projet de loi visant à simplifier le processus d'établissement des tarifs de distribution d'électricité. Aujourd'hui,
j'ai le plaisir de soumettre ce projet de loi aux consultations
particulières.
Tout d'abord,
je dois souligner que notre gouvernement a écouté les Québécois. On a bien entendu leurs préoccupations, et c'est pourquoi nous avons pris la décision, M. le
Président, de simplifier la manière dont les tarifs d'électricité au
Québec seront établis, afin d'y ajouter un aspect de prévisibilité.
Au moment
de présenter le projet de loi, nous avons eu l'occasion d'exposer l'essentiel
de son contenu. Permettez-moi aujourd'hui, M. le Président, d'en revenir
sur les grandes lignes.
Notre
intention, au gouvernement, est claire : offrir une tarification
prévisible, avec des hausses limitées à l'inflation, et une tarification
revue sur une base quinquennale par la Régie de l'énergie. C'est
essentiellement ce que le projet de loi
n° 34 vient faire, vient proposer. Les mesures que nous souhaitons mettre
en place dès janvier 2020 permettront de retourner l'équivalent de
1,5 milliard de dollars, en cinq ans, à la clientèle.
Ce projet de
loi va permettre trois choses importantes, M. le Président. Premièrement,
simplifier la réglementation, ce qui
permettra d'éliminer la notion d'écart de rendement. La régie continuera de
jouer son rôle d'approbation des tarifs aux cinq ans. Deux effets importants découlent de ce choix :
premièrement, une économie annuelle et récurrente de plusieurs millions de dollars, qui sont investis à chaque
année dans le cadre des audiences, et, deuxièmement, l'implantation d'une gestion,
d'une gestion du risque plus serrée du côté de la société d'État, qui devra
justement gérer ses risques, tout en continuant de respecter ses obligations.
Deuxièmement,
on propose un gel de tarifs pour l'année 2020, qui resteront donc au même
niveau que 2019, un effet important. C'est quoi, l'effet? Pas de surprise pour
personne. En 2020, on paie ce qu'on payait en 2009, de la prévisibilité.
Et,
troisièmement, le projet de loi n° 34 va permettre, pour les
années 2021 à 2024, de fixer la hausse annuelle des tarifs à
l'inflation et de garantir ainsi une prévisibilité pour l'ensemble de la
clientèle d'Hydro-Québec.
Alors, je
souhaite ici rappeler que, contrairement à ce qui a été dit, la Régie de
l'énergie conserve ses pouvoirs, ses responsabilités
et son indépendance en matière de fixation de tarifs. La Régie de l'énergie du
Québec conserve toute sa pertinence, et nous ne remettons pas cela en
cause. Hydro-Québec continuera de se présenter devant la régie pour faire
approuver ses tarifs, comme c'est le cas aujourd'hui, mais elle le fera
dorénavant aux cinq ans.
De plus,
rappelons aussi que le p.l. n° 34 ne change en rien la réglementation
d'Hydro-Québec Trans-Énergie, afin notamment
de respecter les obligations d'Hydro-Québec envers les régulateurs américains.
Cela veut dire également que les
grands projets, les grands projets de lignes de transport d'énergie vont
continuer d'être analysés par la Régie de l'énergie. Il est d'autant plus important,
M. le Président, que ces lignes de transport soient régulées afin
justement d'obtenir toutes les certifications nécessaires
aux États-Unis, entre autres.
Alors,
pour rassurer les intervenants et la population, Hydro-Québec n'aura pas le champ libre pour faire ce qu'elle
veut durant la période de cinq ans. Si elle
souhaite fixer, par exemple, un nouveau tarif ou en modifier un déjà
existant, elle devra présenter une
requête devant la Régie de l'énergie en ayant préalablement obtenu l'autorisation du gouvernement. De même, si des circonstances particulières exigeaient des
ajustements aux tarifs de distribution d'électricité durant la période d'analyse, cette dernière pourrait rendre une
décision, la régie, sur une demande de modification des tarifs de distribution,
à la demande d'Hydro-Québec, sous l'autorisation du gouvernement.
Alors,
la Régie de l'énergie continue d'être l'organisme responsable de la fixation
des tarifs, et ceux qui se demandent quel
est le gain pour la clientèle d'Hydro-Québec, l'indexation à l'inflation, ça
permet d'assurer une prévisibilité. Pour les grands clients industriels, pas de modification, le tarif L,
l'indexation est inférieure à l'indice des prix à la consommation, comme c'est
déjà prévu, pour assurer le développement économique. L'indexation à
l'inflation donne une prévisibilité pour l'ensemble des clients.
Alors,
quand on regarde l'historique, dans les 15 dernières années, l'inflation
100 $, 2003; 128,40 $, 2019; et les tarifs ont augmenté à
132,60 $. Donc, l'indexation à l'inflation est meilleure que l'historique,
et la révision sera sur base quinquennale, donc plus d'agilité, plus de
prévisibilité, des tarifs plus prévisibles. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Lemay) : Merci, M. le ministre. Alors, j'invite
maintenant le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie et de ressources naturelles
et député de Laval-des-Rapides à faire ses remarques préliminaires pour
une durée maximale de quatre minutes.
M. Saul Polo
M.
Polo : Merci beaucoup, M. le Président. Vous excuserez ma voix. La
proposition qui est faite par le gouvernement et son ministre se veut une réponse à un engagement de la CAQ, mais on
croirait lire le projet de loi lorsqu'il a été dessiné sur un coin de table. Personnellement, ma
formation politique et moi, nous avons de grandes inquiétudes face à ce projet
de loi.
Le
but du projet de loi annoncé par le ministre est de rembourser ce que sa
formation politique appelle les trop-perçus d'Hydro-Québec. Le gouvernement avait une solution simple devant lui,
c'est-à-dire rembourser par un chèque à la poste ce qu'ils estimaient être des
trop-perçus. La députée de Saint-Hyacinthe et le premier ministre actuel ont
semé la pluie et le beau temps
pendant quatre ans sur ce sujet. Les Québécois étaient en droit de penser
qu'ils recevraient rapidement un chèque soit de la part d'Hydro-Québec soit de la part du gouvernement de la
CAQ : il l'avait tellement promis. Finalement, on a vécu la valse-hésitation du ministre, du premier
ministre et le profond malaise des membres du caucus, qui se disaient à mal
avec la position du premier ministre lorsqu'il revenait sur ses fausses promesses
du passé.
Maintenant,
il y a un projet de loi, mais on se demande pourquoi il est aussi complexe. Le
ministre a dû faire une démonstration
de plusieurs minutes, je dirais, plusieurs dizaines de minutes, avec des
tableaux, pour essayer d'expliquer son
projet de loi. Vous savez, quand ça prend 30 minutes à expliquer comment on
sera remboursé, disons que ça amène des questions. Cette semaine, il
aura la chance, avec l'aide des différentes présentations, de nous l'expliquer
correctement.
Tout
d'abord, si on regarde la situation de 2016 à 2019, le ministre nous a sorti un
tableau au cours des 15 dernières
années, moi, je l'invite à regarder la hausse de l'inflation au cours des
trois, quatre dernières années, elle était nettement supérieure au juste prix établi par la Régie de l'énergie. On
constate d'ailleurs que la hausse moyenne des coûts aurait été du double
si nous avions utilisé l'inflation comme référence.
• (10 h 10) •
L'avantage
d'avoir un organisme comme la Régie de l'énergie, un organisme indépendant,
c'est qu'il nous indique justement quel est le juste prix. Avec ce qui a été
proposé par la CAQ, les citoyens, les entreprises devront... seront soumis
aux aléas du marché. Ceci peut amener un manque de prévisibilité qui pourrait
avoir des impacts surtout au niveau du développement des entreprises.
En
plus, ce projet de loi aura un impact à très long terme sur le rôle de la Régie
de l'énergie, qui, je le rappelle, est un organisme qui vise à encadrer un
monopole, parce que nous sommes ici devant un monopole, M. le Président, c'est
pour éviter des abus qu'elle existe. Alors, en plus de ne plus évaluer les
dossiers tarifaires annuellement, ce sera aux cinq ans, je me pose la question,
si l'inflation était plus élevée que le juste prix, est-ce qu'Hydro ou le
gouvernement rembourserait.
En
plus, sinon, plusieurs pouvoirs ont été retirés des mains de la régie,
notamment pour ce qui est de l'évaluation des projets d'investissement
d'Hydro-Québec. Vous savez, les coûts de production sont un intrant du prix de
l'électricité. Donc, moins de transparence égale moins d'information pour le
consommateur.
Finalement,
ce pour quoi tout le monde se questionne ici, qui voulait vraiment simplifier
ce processus? Ça avantage qui, M. le
Président? Parce qu'honnêtement, ça fait plusieurs
années que je travaille ici, personne, aucun citoyen, aucun citoyen industriel ne nous a parlé de cet
enjeu-là. Ceci m'amène réellement à
me questionner, à savoir : Pour quel but a été écrit ce projet de loi? Peut-être est-ce pour répondre à un
engagement d'augmenter les revenus de la société d'État? Qui sait? Merci.
Le
Président (M. Lemay) : Merci, M. le député. J'invite maintenant
le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député de Rosemont à
faire ses remarques préliminaires pour une durée d'une minute.
M. Vincent Marissal
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Chers collègues, vous aurez compris que je suis ici en remplacement
de ma collègue de Mercier, qui se joindra à vous avec grand plaisir.
Il
me reste 50 secondes, ça ne fait pas longtemps pour... ça ne fait pas long
pour critiquer une démarche qui nous semble
assez douteuse. Sans grande surprise, je vous annonce tout de suite que nous ne
sommes pas du tout favorables à ce projet de loi. Le ministre a dit tout
à l'heure que la Régie de l'énergie continue d'exister. Mais, dans les faits,
avec ce projet de loi, elle devient
pratiquement accessoire. En gros, vous voulez mettre le chien de garde dans une
cage et lui permettre de sortir aux
cinq ans, et encore, avec une laisse très, très courte. Et la fixation des
tarifs basée sur l'inflation, ça devient comme un dogme, et on a fait la démonstration au cours des dernières années
que la régie, par son rôle de chien de garde, a permis aux Québécois de
payer parfois moins que l'inflation.
Je termine
sur une note philosophique ici. Vous savez comme moi qu'Hydro-Québec n'est pas
une société d'État comme les autres.
C'est un objet de très, très grande fierté, à juste titre, au Québec, et je
crois que la règle, ici, toujours, doit être plus de transparence et pas moins.
Et je vous remercie, M. le Président, de m'avoir donné 17 secondes de
plus.
Le Président (M. Lemay) :
Merci, M. le député de Rosemont. J'invite maintenant le porte-parole du
troisième groupe d'opposition en matière d'énergie et député de Jonquière à
faire ses remarques préliminaires pour un maximum d'une minute.
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault :
Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je vous le dis, j'aime Hydro, puis je
veux saluer d'ailleurs cette
incroyable pièce de Mme Beaulieu, qui a fait le tour du Québec. Mais
j'aime Hydro, et c'est pour ça que je veux garder, auprès d'Hydro, un bras de distance important avec
une régie de l'énergie non partisane, dépolitisée, qui permet à Hydro-Québec
d'éviter de devenir ce qu'elle est déjà, c'est-à-dire un État dans l'État. Il
faut éviter que cette pratique, que ce travers d'Hydro-Québec, avec le temps, devienne de plus en plus gros et
s'engraisse avec le temps. Donc, il faut éviter la politisation d'Hydro-Québec, de la fixation des tarifs. Le
ministre aime bien parler de prévisibilité, moi, je vais lui ressortir un autre
mot qui commence par «p» qui est la «politisation» d'une fixation des tarifs.
Le ministre lui-même l'a dit tout à l'heure, Hydro-Québec pourra retourner
devant la régie, mais avec autorisation du gouvernement. Ça, ça veut... voilà.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, M. le député de Jonquière.
Auditions
Alors, à mon
tour de souhaiter la bienvenue aux représentants d'Hydro-Québec. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission.
Je vous invite donc à vous présenter, ainsi
que les personnes qui vous accompagnent, et à procéder à votre exposé. La
parole est à vous.
Hydro-Québec (HQ)
M. Filion
(Éric) : Oui. Bon matin. Donc, Éric Filion, je suis le président
d'Hydro-Québec Distribution puis je suis accompagné de mon
collègue.
M. Rhéaume
(Dave) : Dave Rhéaume, je suis directeur principal des affaires
réglementaires et des approvisionnements en électricité pour
Hydro-Québec Distribution.
M. Filion
(Éric) : Bon matin, M. le Président, M. le ministre. Bon matin à tous.
Hydro-Québec tient à remercier les
membres de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des
ressources naturelles de cette invitation à participer aux consultations
particulières pour le projet de loi n° 34.
Le monde de
l'énergie connaît présentement de profondes transformations. Les technologies
évoluent à un rythme accéléré, les
besoins des clients sont de plus en plus diversifiés, et la lutte contre les
changements climatiques impose le remplacement des énergies fossiles par
des énergies renouvelables.
Nous
considérons que le projet de loi qui est proposé ici permet d'assurer la
flexibilité et la vélocité nécessaires pour faire face à la transition
énergétique tout en maintenant le rôle de surveillance de la Régie de
l'énergie. En ce sens, il est équilibré.
Nous résumerons aujourd'hui notre appui à
l'approche préconisée par ce projet de loi en nous appuyant sur trois raisons principales : premièrement,
elle assurerait aux clients des tarifs plus bas et plus prévisibles sur la
période de cinq ans, elle
simplifierait la façon de fixer les tarifs d'électricité, et finalement elle
rendrait Hydro-Québec encore plus efficace.
Des tarifs
plus bas et plus prévisibles pour nos clients. Au cours des 50 dernières
années, les tarifs d'électricité ont augmenté au même rythme que l'inflation,
ce qui a permis à nos clients de bénéficier de tarifs les plus bas de
l'Amérique du Nord. L'approche
proposée dans le projet de loi n° 34 accentuerait cette tendance avec des
économies substantielles pour nos clients.
Dès 2020,
Hydro-Québec remettrait directement à ses clients une somme d'environ
500 millions de dollars sous forme d'un crédit sur la facture. Les comptes
d'écart où est actuellement comptabilisée cette somme nous servent à faire
face à différents aléas. Selon l'approche
actuelle, les 500 millions de dollars auraient été remis progressivement
aux clients dans le cadre des ajustements tarifaires des prochaines
années. Le projet de loi propose d'accélérer cette remise.
Les
tarifs actuels seraient aussi gelés pour la période du 1er avril 2020
au 31 mars 2021. Par rapport à des hausses selon le taux
d'inflation, ce gel représenterait des économies de près de 1 milliard de
dollars pour la clientèle sur les cinq années suivantes.
Enfin, entre
2021 et 2024, les tarifs seraient ajustés en fonction de l'inflation. Nous
considérons qu'il s'agit d'une variable,
donc, l'inflation, très pertinente pour déterminer les ajustements tarifaires.
Premièrement, elle permet d'arrimer la
croissance des tarifs d'électricité à l'augmentation du coût de la vie au
Québec. Elle correspond également à la tendance historique de croissance des tarifs d'électricité, et ce, depuis
50 ans. Il s'agit également d'une donnée économique objective qui
est mesurée de façon complètement indépendante.
Un processus
qui serait simplifié et assurant la transparence. Hydro-Québec considère que le
projet de loi mettrait en place un processus simplifié de fixation des
tarifs, tout en préservant la transparence. À l'heure actuelle, les tarifs d'électricité sont fixés annuellement par la Régie
de l'énergie, qui évalue les coûts nécessaires pour livrer l'électricité aux
Québécois. Si les revenus générés au moyen
des tarifs ne sont pas suffisants pour couvrir ces coûts, elle autorise
l'ajustement tarifaire nécessaire l'année suivante.
Ce processus s'étend sur huit mois et mobilise
des ressources considérables chez Hydro-Québec. Or, depuis que la Régie de l'énergie a commencé à fixer les
tarifs, en 2003, les tarifs d'électricité ont continué à évoluer selon la même
tendance qu'auparavant, soit globalement au
rythme de l'inflation. L'approche mise de l'avant dans le projet de loi
n° 34 allégerait le processus
réglementaire en faisant passer à cinq ans l'intervalle entre les examens
complets des coûts par la Régie de l'énergie.
Cela dit, Hydro-Québec continuerait à rendre des
comptes à la Régie de l'énergie chaque année au sujet de plusieurs activités importantes, notamment la
qualité de nos services, les conditions de service, la performance en matière de service à la clientèle, le traitement des
plaintes des clients, notre plan d'approvisionnement, qui va être déposé
prochainement, en novembre, pour une période de 10 ans, l'efficacité
énergétique, et bien entendu le dossier complet du transporteur. De plus, d'autres documents produits par Hydro-Québec,
par exemple le rapport annuel et le rapport sur le développement durable, contribueraient à cette transparence comme par
le passé. La transparence et la responsabilité des dirigeants à cet égard sont également encadrées
par notre conseil d'administration, dont les membres sont nommés par le
gouvernement du Québec, et par les travaux du Vérificateur général du Québec.
Un incitatif
à l'amélioration de la performance. Hydro-Québec croit également que l'approche
mise de l'avant dans le projet de loi n° 34 constituerait un
incitatif à poursuivre ses efforts pour être plus efficiente et plus
productive.
Le gel des
tarifs de 2020 et les hausses de tarifs en fonction de l'inflation pour les
quatre années suivantes feraient en
sorte que nos revenus connaîtraient une croissance limitée pour cette période.
Cette réalité créerait un défi puisqu'Hydro-Québec
doit faire face à une constante pression à la hausse sur ses coûts, par exemple
en raison de la hausse des coûts du carburant et de l'indexation prévue
des prix de nos contrats d'achat d'électricité.
• (10 h 20) •
Également, le projet de loi n° 34
transférerait certains risques à Hydro-Québec, notamment ceux liés aux aléas climatiques. Présentement, l'impact financier des
variations de la météo par rapport à la normale est assumé par la clientèle et
se répercute sur les ajustements tarifaires des années subséquentes. Désormais,
Hydro-Québec assumerait cet impact à même la croissance des revenus que
permettrait l'indexation à l'inflation.
Le projet
de loi n° 34 est par ailleurs équilibré. Il force Hydro-Québec à continuer d'améliorer sa productivité en limitant la croissance des tarifs
pour les cinq prochaines années, mais lui confère une certaine flexibilité qui
lui permettrait de rapidement mettre en oeuvre des programmes ou
d'investir dans les infrastructures pour faire face aux changements
climatiques, électrifier notre économie et améliorer nos services.
À cet égard,
le cadre réglementaire actuel nous a empêchés au cours des dernières années
d'instaurer rapidement des programmes
visant notre adaptation aux nouvelles réalités, notamment la mise en place d'un
programme de conversion du mazout à l'électricité, grâce auquel nous
souhaitions aider financièrement les institutions et les PME, l'élargissement
d'un programme de gestion de la puissance à
un plus grand nombre d'entreprises, l'augmentation des ressources financières
consacrées à nos efforts de maîtrise de la végétation pour limiter les pannes
chez nos clients, le déploiement à grande échelle
d'un réseau de bornes de recharge publiques rapides, et finalement l'encadrement
rapide du secteur des chaînes de blocs
dans le contexte d'une demande de raccordement soudaine et massive. Tous ces
programmes présentaient des bénéfices pour notre clientèle ou
l'environnement et ils ont été refusés ou retardés.
En conclusion,
nous avons besoin que notre cadre réglementaire continue à évoluer pour nous
adapter avec vélocité aux
transformations que nous vivons. La proposition du gouvernement permet de le
faire de manière équitable en maintenant des acquis fondamentaux pour les Québécois, par exemple des tarifs bas
et prévisibles. Elle permettrait aussi de simplifier le processus d'établissement des tarifs, tout en
maintenant la transparence. Enfin, la nouvelle loi créerait un cadre incitant
Hydro-Québec à continuer à améliorer son efficience. Merci.
Le
Président (M. Lemay) : Alors, je vous remercie, M. Filion,
pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période
d'échange. Et, M. le ministre, la parole est à vous.
M. Julien :
Oui. Oui, merci, M. le Président. Alors, merci à vous, messieurs, et toute
votre équipe, là, de vous prêter à cette période de consultation. Merci
également pour votre présentation.
On dit, en
réalité, que le projet de loi, le p.l. n° 34, a comme effet de
transférer, transférer les risques à Hydro-Québec puisque dorénavant la
hauteur des revenus par rapport à la clientèle seront prévisibles, alors c'est
un bénéfice pour la clientèle, mais seront
ainsi fixés dans le temps. Comment Hydro-Québec compte faire pour, justement, faire
face et gérer ces risques-là qui lui sont dorénavant transférés?
M. Filion
(Éric) : Oui, M. le ministre, oui, c'est sûr qu'en ayant une
croissance limitée de nos revenus on va devoir travailler davantage à créer de
l'efficience à même nos charges d'exploitation. Donc, il y a plusieurs
opportunités. Il y a des choses qui
sont déjà en cours, mais on va également continuer à... c'est ça, à bien
investir dans nos réseaux. Je pense qu'on a parlé de ça plus tôt, il faut être responsables dans nos niveaux d'investissement.
On a un réseau qui va devoir s'adapter à une transition énergétique, donc la
nature des investissements également va changer, mais la volumétrie de nos
investissements aussi doit être bien contrôlée.
Aussi, à
travers toutes nos activités, on l'a démontré dans les dernières années à
travers des indicateurs qu'on dépose à
la régie, et qu'on va continuer à déposer, on génère de l'efficience à
partir... à même nos propres opérations, puis c'est ce qu'on va devoir
faire pour le futur.
Vous parlez
des aléas. Il y a plusieurs aléas qui peuvent faire soit une pression à la
hausse ou à la baisse, entre autres des
aléas climatiques, des aléas sur la demande. Ces aléas-là vont demeurer dans le
futur. Maintenant, auparavant... ou dans le modèle actuel, lorsqu'il y a des surcoûts, ils sont transmis à la
clientèle à travers les tarifs. Dans le projet de loi proposé,
évidemment, c'est des éléments qu'on va devoir absorber à même nos activités.
M. Julien :
On a également entendu, depuis le dépôt du projet de loi, des craintes par
rapport à vos investissements, là. Donc, je conçois, là, que vos
principaux investissements se font beaucoup sur les lignes de transport.
Le projet de
loi, là, le p.l. n° 34, là, qu'est-ce qu'il vient modifier par rapport
à vos grands investissements sur les lignes de transport?
M. Filion
(Éric) : Il n'y a aucun changement pour les investissements au niveau
du transport. Donc, comme vous avez mentionné d'entrée de jeu, tout ce qui est
activité de TransÉnergie demeure présenté à la régie sur une base annuelle,
pour les hausses de tarifs, là, pour
ce qu'on appelle le point à point, là, les clients direct du transporteur, mais également tous les investissements majeurs vont être
présentés, puis ça, c'est... Il n'y a aucun changement, avec le projet de loi
qui est proposé ici, à ce niveau-là, pour le transport.
M. Julien : O.K. Dans la proposition
du projet de loi, là il y a trois éléments, là, pour la clientèle, là, qui sont
importants, là, c'est le retour, dès le
début de l'année 2020, d'un 500 millions, là, de compte d'écart que..
J'aimerais que vous m'expliquiez un
peu plus avant il était constitué de quoi. Après ça, il y a un gel tarifaire
pour l'exercice l'an prochain et,
pour les quatre années subséquentes, une augmentation à l'inflation. Le gel
tarifaire, qui représente, je pense, pour l'an un, corrigez-moi, là, mais sur une inflation projetée
de 1,7 %, là, qui est un peu l'historique, 195 millions. Ce
195 millions là, il se compare comment à la moyenne des écarts de
rendement qu'on a connus peut-être dans les 10, 15 dernières années?
M. Filion (Éric) : Oui, je vais
laisser la parole à mon collègue pour...
Le Président (M. Lemay) : Parfait.
M. Rhéaume, allez-y.
M. Rhéaume
(Dave) : La remise de 195...
l'économie de 195 millions
de dollars, il faut voir, c'est le
résultat de prendre la somme des
revenus qu'Hydro-Québec génère auprès des Québécois à chaque année, donc
plus de 11 milliards de dollars,
et, plutôt que d'y appliquer l'inflation, ce qui est notre
moyenne historique, de 1,7 %... ça, ça aurait créé une pression à la hausse, sur les revenus à générer
des Québécois, de 195 millions de dollars. En appliquant le gel et en le gardant
récurrent année après année, ça, c'est vraiment une économie de 1 milliard
sur les cinq premières années d'impact du projet
de loi. Cette économie-là
est de beaucoup supérieure à l'impact qu'on pouvait voir. Dans
les dernières années, le montant des écarts de rendement s'est avéré
être inférieur à un montant de l'ordre de 195 millions.
Je renchérirais aussi à l'effet que le 500 millions,
il est remis en sus du gel, alors que, dans les dernières années... — vous
posiez la question sur la mécanique — alors
que, dans les dernières années, des comptes d'écart pouvaient se matérialiser,
avoir des sommes qui devaient être reversées dans les années subséquentes à la
clientèle. C'est souvent cet argent-là
qui permettait de garder des hausses tarifaires de l'ordre de l'inflation ou
légèrement en bas de l'inflation. Par contre,
dans ce cas-ci, on va remettre l'argent, indépendamment, et, de surcroît, on va
ajouter un gel. C'est vraiment, donc, un
effet combiné qui permet à la clientèle de payer des coûts d'électricité, en
2020, qui vont être inférieurs à l'année 2019.
Le Président (M. Lemay) : M. le
ministre.
M.
Julien : Tout à l'heure, M. Fillion, dans votre intervention, vous
avez parlé d'agilité, de performance, d'efficience que le p.l. n° 34 donne à
Hydro-Québec. Bon, a contrario, est-ce que ces éléments-là... J'aimerais mieux
évaluer le volet efficience par rapport au processus de cause tarifaire,
là. Vous dites : Bien, on mettait beaucoup de temps ou d'énergie là-dedans. Ça pouvait ressembler à quoi, à chaque
année, là, les efforts d'Hydro-Québec lors du processus, là, auprès de la
régie, de la cause tarifaire?
M. Filion
(Éric) : Oui. Donc, M. le ministre, comme j'ai mentionné, c'est un
effort qui est considérable, en termes de
ressources, à l'intérieur d'Hydro-Québec, autant chez le transporteur que chez
le distributeur. Normalement, la préparation d'un dossier tarifaire,
qu'on dépose au 1er août, à chacun des étés, ça nous prend environ huit
mois à préparer ça, avec différentes
ressources dans les équipes d'affaires réglementaires, mais aussi des
ressources à travers l'organisation, qui sont sollicitées dans le processus. On planifie aussi... ou on dépose,
je vous dirais, des cartables de documentation pour venir supporter ce
même dossier tarifaire là. Donc, c'est un effort important.
Puis moi, je veux revenir sur le
message, ici, qui... Si on regarde la performance des 50 dernières années
ou même des 20 dernières années,
alors que la Régie de l'énergie a commencé à établir les tarifs, à partir de
2003, pas sur une période d'une
année, mais sur une période plus moyen, long terme, c'est très clair que les
hausses ont été à l'inflation. Donc, c'est beaucoup d'efforts pour un
résultat qui est prévisible.
• (10 h 30) •
M.
Julien : Toutefois, si on... Parce que les gens disaient... On entend
également, là : La régie perd beaucoup de pouvoirs dans le processus. Bon, là, ici, quand on regarde tous les
éléments, les responsabilités de la régie face à Hydro-Québec, dans l'énumération, on voit essentiellement que le volet cause tarifaire passe d'une période
annuelle à 60 mois, donc une périodicité plus longue. Naturellement, en maintenant... en considérant l'historique des
50 dernières années, des 15 dernières années également, là, c'est un petit peu supérieur, même,
à l'inflation, ce qui a été observé comme... Mais, toutes choses étant égales par ailleurs, pouvez-vous
mentionner qu'est-ce qui est conservé dans le rôle de la régie par rapport à vos obligations et par rapport à la transparence que vous
devez faire face avec la Régie de l'énergie?
M. Rhéaume
(Dave) : Au niveau
de la transparence, c'est important, puis c'est quelque chose qui a été
mentionné en entrée, l'information disponible sur les activités d'Hydro-Québec, qui est présentée sur une base annuelle aujourd'hui, va continuer de l'être. En
fin d'année, dans le cadre des dépôts à la Régie de l'énergie, Hydro-Québec va essentiellement ouvrir ses livres. Donc, les activités du
distributeur vont être présentées de façon détaillée sur l'évolution
des coûts, l'évolution des mesures d'efficacité énergétique, l'évolution
des investissements qui auront été faits. Il y aura
de la reddition de comptes aussi, au
niveau des plaintes, de la
performance, au niveau de la qualité et de la fiabilité du service.
Donc, en ce qui a trait à l'information disponible pour évaluer la performance d'Hydro-Québec, la qualité du
service offert aux Québécois, ça, ça va demeurer à 100 %.
De la même façon, au
niveau... Le plan d'approvisionnement, qui va être déposé, là, le prochain
plan, le 1er novembre 2019, c'est
un exercice qui, généralement, dure plus de 12 mois devant la Régie de l'énergie, où l'ensemble des prévisions
de la demande d'électricité au Québec va être présenté par Hydro-Québec, qui va faire l'objet aussi d'audiences, de demande de renseignements, où le processus va être très transparent pour voir où s'en va la
demande d'électricité au Québec
puis comment Hydro-Québec pense être capable d'arriver à répondre à cette
demande-là.
Les
seuls, donc, éléments qui étaient autrefois devant la régie qui, là, vont être
simplement déplacés, comme information,
davantage vers la fin de l'année, c'est de demander une autorisation préalable,
par exemple, à un projet d'investissement ou à la fixation des tarifs. Mais prenons l'exemple
de la fixation des tarifs, on sait qu'on va arriver dans le même ordre d'évolution
des tarifs que ce qui a prévalu jusqu'ici. Puis, au niveau des projets d'investissement,
ça ne veut pas dire que la population
ne pourra pas avoir accès à l'information sur les investissements qui ont été faits, simplement qu'Hydro-Québec n'aura pas à demander une autorisation préalable pour aller de l'avant avec ce genre d'investissement là. Donc, prenons l'exemple
des bornes de recharge rapide, qui est un projet sur lequel Hydro-Québec travaille dans les dernières années,
bien, plutôt que de passer à travers
un processus à la Régie de l'énergie, Hydro-Québec pourra aller de l'avant avec
le déploiement des bornes et, dans le cadre
de ses dépôts à la régie, informera sur l'évolution des investissements, des
revenus associés à cette nouvelle voie de l'avenir.
Le Président
(M. Lemay) : ...M. Rhéaume. M. le ministre.
M. Julien :
Pour ce qui est du retour de 500 millions, là, au début de l'exercice
prochain, là, 2020, comment Hydro-Québec va
s'assurer de répartir cette somme-là de manière adéquate auprès de l'ensemble
de la clientèle et comment va se faire ce remboursement-là?
Le Président
(M. Lemay) : M. Fillion.
M. Filion
(Éric) : Oui. Toujours dans un souci d'être efficient, la remise...
Puis là je vais spécifier, le 500 millions, évidemment, va être confirmé
au 31 décembre de cette année, selon l'évolution des comptes d'écart
présentement en cours. Mais, lorsque
ce montant-là sera fixé, il va être remis à nos clients à travers leur propre
facturation, leurs factures, pour utiliser les systèmes qui sont déjà en
place à l'intérieur d'Hydro-Québec. Donc, ça va se faire de façon très
efficiente.
Maintenant,
comment la remise, en soi, va être effectuée, ça va être sur la base du niveau
de consommation des clients par rapport à nos ventes totales pour les
années 2018, 2019. Donc, c'est la période où les comptes d'écart auront
été accumulés. Ce qui veut dire que,
pour un petit client, comme mon collègue mentionnait, un petit client plus
résidentiel, on parle d'une maison unifamiliale qui pourrait avoir une facture
annuelle d'environ 1 500 $, ce serait une remise d'environ 60 $, pour donner un ordre de grandeur, mais
les grands clients industriels comme... bien, en fait, les grands clients
industriels auraient des remises
beaucoup plus importantes, là, de l'ordre de 250 000 $ et plus, tout
dépendamment de leur niveau de consommation.
Donc, c'est vraiment au prorata de la consommation pour ces deux années-là et
ce sera remis à travers la facture, pour simplifier le processus.
M. Julien :
Le montant de 500 millions de dollars, là, qui va être peaufiné, là, à la fin de l'exercice, pour être
très, très précis, était composé, rappelez-moi, d'écarts et aussi, de
mémoire, de certaines provisions qui, par le fait même, en fin de compte, puisqu'ils
sont remis... ça devait être utile à quelque
chose chez Hydro-Québec. Donc, vous prenez le risque, en réalité, de ces éléments-là,
connaissant vos nouveaux revenus?
M. Filion
(Éric) : Oui. Je vais
laisser mon collègue vous expliquer les comptes d'écart, mais, en gros, ça
permettait de pallier à certains aléas qu'on va devoir gérer de façon
responsable maintenant à travers le nouveau projet de loi.
M. Rhéaume
(Dave) : C'est vraiment une transformation de la façon dont les tarifs
vont être établis. Alors qu'auparavant,
à chaque année, Hydro-Québec avait le loisir de demander à ce que les tarifs
soient fixés pour couvrir exactement ses coûts en fonction de conditions
climatiques, appelons-les normales... Hydro-Québec était en mesure, à la fin de chaque année, de
dire que les éléments en dehors de son contrôle, comme la température, qui
pouvaient avoir un impact à la hausse
ou à la baisse sur ses revenus, son bénéfice, ses coûts, devaient être
normalisés. Donc, essentiellement, c'était la clientèle qui jouait le rôle
d'absorber à la hausse ou à la baisse l'impact de ces aléas climatiques là.
Donc, dans les dernières années, Hydro-Québec a eu des situations où, versus la prévision qui était faite en début
d'année, il y a eu des écarts, qui, dans ce cas-ci, sont principalement favorables, et Hydro-Québec a donc accumulé cette somme estimée aujourd'hui, qui sera connue à
la fin de l'année, d'approximativement 500 millions de dollars, du à des circonstances, donc, qui ont été avantageuses pour
Hydro-Québec, mais que le cadre réglementaire faisait en sorte
que ça devait être remis à la clientèle. Donc, c'est ce 500 millions
de dollars là qui sera remis dès le premier trimestre de 2020 directement sur la facture des clients existants.
Et donc les gens qui auront contribué à accumuler ces comptes-là recevront
un chèque, là, même s'ils ne sont plus clients d'Hydro-Québec.
Le Président
(M. Lemay) : M. le ministre.
M. Julien : Oui. À chaque année, là, les intervenants qui vont pour la cause tarifaire, là, vous remboursez des frais
par rapport à ça? Comment ça fonctionne? Puis à quelle hauteur?
M. Rhéaume
(Dave) : C'est à hauteur de plusieurs
millions de dollars à chaque année.
La façon dont ça fonctionne, c'est que la Régie de l'énergie fait
essentiellement un appel aux gens qui veulent faire des interventions pour se
faire entendre. Il y a traditionnellement
une dizaine, douzaine d'associations, au Québec, qui interviennent
systématiquement dans les dossiers d'Hydro-Québec. Puis, à la fin du dossier,
bien, ces gens-là déposent une demande de paiement de frais, donc ils
sont payés de l'heure pour la quantité de travail qu'ils ont eu à encourir dans
le cadre du dossier.
Donc,
les analystes, les avocats au dossier présentent essentiellement leurs
factures, ce qu'ils estiment être un frais raisonnable, puis c'est la régie qui nous ordonne de rembourser ces
intervenants-là à chaque année, selon les dossiers. Donc, si les dossiers sont
plus longs puis s'étirent, bien évidemment, ça implique plus de coûts. On a des
années où on a des frais de l'ordre
de 5 à 10 millions de dollars au niveau des frais, alors que, certaines
années, ça peut être un peu moins, mais c'est toujours plusieurs
millions de dollars à chaque année.
M. Julien :
Merci.
Le
Président (M. Lemay) : M. le ministre de... Ah! en fait... O.K., parfait,
d'accord, alors, Mme la députée d'Abitibi-Ouest, le mot de la fin,
20 secondes.
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : 20 secondes? Merci beaucoup. Alors, j'aurais
aimé qu'on parle de réseau municipal, mais ce sera à suivre.
Le Président
(M. Lemay) : Merci, Mme la députée. Donc, sur ce, je vais passer
la parole au porte-parole de l'opposition officielle. M. le député de
Laval-des-Rapides, la parole est à vous.
M. Polo :
Merci beaucoup. Merci beaucoup, M. le Président. Je commencerais tout d'abord,
pour revenir sur la question du
dossier tarifaire 2020-2021, par questionner nos invités — tout d'abord, bonjour — à savoir pour quelle raison vous
n'avez pas déposé de projet tarifaire pour cette année. Vous savez,
l'impression que ça donne, nous, comme parlementaires,
ou, enfin, même comme consommateurs, mais surtout comme parlementaires, c'est
que vous avez présumé de
l'aboutissement d'un débat parlementaire que nous venons à peine de commencer.
Vous avez présumé de l'aboutissement du p.l. n° 34.
Alors, pourquoi ne
pas avoir déposé un dossier tarifaire?
Le Président
(M. Lemay) : M. Filion.
• (10 h 40) •
M. Filion
(Éric) : Bien, je vous donnerais deux raisons principales. La
première, puis c'est enchâssé dans la loi, Hydro-Québec Distribution, dans un cas où on anticipe un gel, donc un
maintien des tarifs, on n'est pas obligé à toutes les années de déposer un
dossier tarifaire. Donc, ça, c'est un premier point, évidemment très important.
Le projet de loi prévoit un gel en
2020, donc c'est pour cette raison-là, avec le maintien des tarifs en vigueur,
qu'on ne voyait pas la nécessité de le faire.
Deuxièmement,
comme j'ai expliqué d'entrée de jeu, c'est un exercice qui est colossal, de
préparer ce dossier-là. C'est des
mois de travail, beaucoup de ressources, qu'on a redéployées étant donné, là,
la volonté du gouvernement d'aller de l'avant avec un projet de loi.
Le Président
(M. Lemay) : M. le député.
M. Polo :
Justement, vous parlez d'un travail colossal, vous parlez d'un travail colossal
pour déposer un projet tarifaire. Ici, là,
votre dernier état financier, là, de... rapport annuel pour 2018, à la page 96,
données financières consolidées, produits : 14 milliards, O.K.,
14 milliards, et on parle de charges totales, si je me... en fait, un
dividende d'à peu près 2,4 milliards, O.K.?
Pouvez-vous
chiffrer qu'est-ce que ça représente, qu'est-ce
que ça représente, déposer un projet
tarifaire? Combien que ça vous coûte?
Parce que je vous ai entendu clairement le mentionner
auprès du ministre, que ça représente huit mois, neuf mois de
travail, des équipes, et tout ça. Ça représente combien en bout de ligne?
Une voix : ...M. Rhéaume
Le Président (M. Lemay) : Ah!
M. Rhéaume. Allez-y, M. Rhéaume.
M. Rhéaume
(Dave) : Il y a
une distinction importante à faire, puis ça a été précisé d'emblée, c'est
que le dossier tarifaire qui n'aura pas lieu cette année, c'est le
dossier tarifaire d'Hydro-Québec Distribution. Le dossier tarifaire du
transporteur, TransÉnergie, lui, demeure. Et, dans les chiffres que vous avez
cités, on parle de l'ensemble des activités d'Hydro-Québec
lorsqu'on parle d'un bénéfice de 2,4 milliards de dollars. Le bénéfice
d'Hydro-Québec Distribution, c'est un
bénéfice qui est de l'ordre de 300 millions de dollars par année, et donc
on parle de 300 millions de dollars sur des revenus tirés de la
clientèle, de plus de 11 milliards de dollars. Donc, je pense, c'est
important de le mettre dans ce cadre-là.
Donc,
lorsqu'on parle d'économiser plusieurs millions de dollars sur un bénéfice de
300 millions de dollars, on est quand même dans une zone, selon
nous, significative. Ça, c'est le premier point.
Le deuxième,
c'est : on ne dit pas... puis, dans les représentations que nous avons
l'intention de faire devant la Régie de l'énergie, nous ne disons pas que le
dossier tarifaire 2020-2021 ne devrait jamais se faire. Si jamais le
projet de loi n° 34 n'était pas adopté, bien, c'est évident qu'Hydro-Québec va être appelée
à déposer un dossier tarifaire devant la Régie de l'énergie.
Nous, notre
représentation, c'est à l'effet qu'il n'y a pas d'obligation de déposer à un
moment fixe dans l'année...
Le Président (M. Lemay) : Si
vous pouvez condenser, M. Rhéaume.
M. Rhéaume (Dave) : Oui. Bien,
simplement...
M. Polo : Bien, je vais...
Le Président (M. Lemay) :
M. le député.
M. Polo :
...vous amener à faire une précision, si vous permettez, M. le Président.
Précisez-moi... Vous avez séparé les revenus, bénéfices Hydro-Québec
Distribution versus le reste. Précisez-moi : Quels sont les coûts de part
et d'autre? Combien que ça coûte exactement?
«Plusieurs
millions», pour moi, là, ça peut représenter 2, 3 millions, ça peut
représenter une quinzaine de millions. Ça coûte combien exactement?
Juste pour chiffrer. Soyons clairs.
Le Président (M. Lemay) :
M. Rhéaume.
M. Rhéaume
(Dave) : Les coûts réglementaires du côté des activités d'Hydro-Québec
Distribution sont de l'ordre de 10 à
15 millions de dollars par année, si on regarde dans l'ensemble de ce que
ça représente comme coûts. Comme je l'ai répété précédemment, il y a des
années où il y a des gros dossiers qui se passent puis qui peuvent être très
dispendieux, il y a des années plus basses,
mais, en moyenne, je pense que, de l'ordre de 10 à 15 millions de dollars
par année, on a une bonne zone de...
M. Polo : Sur des profits de
300 millions. Ça, c'est pour Hydro-Québec Distribution. Et de l'autre
côté?
M. Rhéaume
(Dave) : Je suis désolé, moi, je suis responsable des affaires
réglementaires puis des approvisionnements du distributeur. Je ne
connais pas bien les profits du producteur.
M. Polo : Bien, on s'entend,
sur un dividende de 2,4 milliards.
M. Filion (Éric) : Pour
l'ensemble d'Hydro-Québec...
M. Rhéaume (Dave) : Pour
l'ensemble d'Hydro-Québec.
M. Polo :
Pour l'ensemble d'Hydro-Québec. Parfait. Donc, pourquoi je vous amène là, c'est
parce qu'aujourd'hui on est en
train... et mon collègue de Rosemont l'a mentionné, on est en train de mettre
en cage, on est en train, essentiellement, de dégriffer la Régie de l'énergie. On est en train essentiellement de
lui dire : Bien, vous savez, pour des montants, oui, substantiels,
mais des montants de 10, 15 milliards de dollars... 10, 15 millions
de dollars, pour une société qui produit 2,4 milliards de dollars, bien, on
vous retire le mandat de faire cet exercice annuel, puis de vous revoir
seulement dans cinq ans. Vous savez, dans le
cas d'un monopole d'État, c'est inquiétant. C'est inquiétant parce que vous
avez une obligation non seulement
morale, mais une obligation d'être plus blanc que blanc, plus transparent que
possible. Et donc, pour des motifs
financiers, de proposer un projet de loi dans lequel on retire à l'organe qui
vient encadrer un monopole d'État, c'est difficilement conciliable.
Je
sais que, peut-être dans la population générale, c'est beaucoup de chiffres,
c'est très technique, là, mais vous êtes... Ce projet de loi remet en question un fondement même de comment
s'encadre un monopole d'État alors qu'il n'y a pas de concurrence. Donc,
ça, c'était mon premier point.
Quelle est la dernière année pour laquelle la Régie
de l'énergie vous a octroyé une hausse tarifaire que vous demandiez? Parce que,
dans les dernières années...
Le Président (M. Lemay) :
Allez-y.
M. Polo : ...vous avez fait des demandes autour de 1,4 %, 1,5 %, vous avez eu des hausses
tarifaires d'à peu près 0,9 %. Quelle est la dernière année pour
laquelle vous avez obtenu une hausse qui correspond à votre demande?
Le Président (M. Lemay) :
M. Filion.
M. Filion
(Éric) : Je vais commencer... Évidemment, la création de la régie,
1996. Les tarifs ont été autorisés par la
régie à partir de 2003. Juste regarder cette période-là, c'est sûr qu'il y a
toujours une différence entre la demande et l'autorisé. Mais, si on ramène ça dans le contexte de nos
discussions ici, oui, les dernières trois, quatre années, il y a eu des hausses
plus basses que l'inflation, mais je vous
ramène juste à la période avant, partager des chiffres : 2013, la régie a
autorisé une hausse à 2,4 %; 2014,
4,3 %; et, 2015, 2,9 %. Pour cette même période là, ça équivaut à
9,6 % de hausse. L'inflation était de 3,2 %.
Donc, c'est
pour ça que les tarifs... Je nous ramène à l'historique, qui est, dans ce
cas-ci, gage du futur. Si on regarde ça sur une période de quatre, cinq ans...
les tarifs, là, pendant les 50 dernières années, donc la période avant la
régie et pendant la régie, ont clairement suivi l'inflation.
Le Président (M. Lemay) :
M. le député.
M. Polo :
Est-ce qu'Hydro-Québec a déjà demandé par le passé de simplifier le processus,
le processus de tarification?
Le Président (M. Lemay) :
M. Rhéaume.
M. Rhéaume
(Dave) : Hydro-Québec a participé au dossier de la Régie de l'énergie
dans les dernières années sur les
modes de réglementation incitative, qui sont des modes de fixation des tarifs
qui visent davantage à simplifier le processus de fixation des tarifs. Donc, comme on l'a dit d'emblée, lorsque la
régie démarre un dossier et demande à Hydro-Québec d'être présent, nous sommes présents dans ces
dossiers-là, puis nous faisons l'examen, puis nous répondons aux questions
de la Régie de l'énergie à cet effet-là.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député.
M. Polo :
Est-ce que c'était suite à la demande d'Hydro-Québec ou c'était suite à une
demande du gouvernement de simplifier? Moi, ce que je veux...
Le Président (M. Lemay) :
M. Filion.
M. Filion
(Éric) : Mais ce qu'on appelle le MRI, le mécanisme de réglementation
incitative, c'était dans la loi. Ça a été débattu devant la régie pour qu'il y
ait un mécanisme d'établi. Mais ce qui est important, je vais juste souligner,
pour moi, comme président d'Hydro-Québec
Distribution, je vais qualifier ça... ça n'a pas vraiment simplifié
l'établissement des tarifs.
Je vous donne juste un exemple. L'an passé,
pendant la période des audiences devant la régie, on a reçu plus de 1 000... ou 1 200 questions des
différents intervenants, qui nécessitent, encore là, beaucoup de travail, puis
c'est le même nombre de questions
qu'on avait auparavant, avant ce même mécanisme là. Ça fait que le mécanisme
n'a pas allégé, de mon point de vue, toute la pratique réglementaire
comme on l'avait souhaité.
Le Président (M. Lemay) :
Parfait. M. le député.
M. Polo : Il reste combien de
temps, M. le Président?
Le Président (M. Lemay) :
Environ 1 min 30 s.
M. Polo :
O.K. Je vais terminer mes 90 secondes, M. le Président, en disant la chose
suivante : Au printemps dernier, là, suite à notre pause parlementaire au
début du mois de mars, là, le premier ministre a dit publiquement qu'il
allait... parce qu'il y avait eu des
sondages puis il y avait eu du remous également dans le caucus du gouvernement,
il avait annoncé qu'il allait avoir des discussions avec le P.D.G.
d'Hydro-Québec pour essayer de trouver une formule.
Vous savez ce
que je pense, M. le Président? On est ici aujourd'hui parce que le premier
ministre a demandé l'aide d'Hydro-Québec, et Hydro-Québec lui a dit : Ah!
bien, coudon, on a peut-être quelque chose qui pourrait vous aider et
qui pourrait également nous aider. Parce
que, voyez-vous, là, je pense que ce qu'Hydro-Québec a répondu au premier
ministre, c'est : Aidez-nous à
vous aider, aidez-nous à nous enlever la Régie de l'énergie dans nos pattes,
puis nous, on va vous patenter une formule que les Québécois ne comprendront pas,
pour essayer de répondre à leurs attentes, là, les fausses promesses
présentées par le gouvernement sur la question des trop-perçus.
Alors,
aujourd'hui, on se retrouve à lancer des auditions, à écouter différents
intervenants, pour la plupart qui se questionnent sur ça vient de qui. Ça
va avantager qui, ce projet de loi là? Parce qu'en bout de ligne les Québécois
ne verront que du vent.
Le
Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, M. le député. Alors, sur
ce, je cède la parole au député de Rosemont, pour votre échange.
M. Marissal :
Merci. Alors, merci, messieurs, d'être là. J'ai 2 min 45 s, alors on va couper court aux salutations.
Ce n'est pas par manque de politesse, c'est par manque de temps.
De quelle
façon, et à quelle cadence, et comment avez-vous été impliqués, directement ou indirectement, dans la rédaction du projet de loi n° 34?
• (10 h 50) •
M. Filion
(Éric) : En fait, évidemment,
c'est un projet de loi du gouvernement, mais, comme dans différents projets, on a été sollicités avant le dépôt de juin, mais seulement
sollicités, comme, probablement, ils le font avec d'autres parties
prenantes dans ces dossiers-là.
M. Marissal : Vous comprenez le sens de ma question.
C'est que, de toute évidence, ce
projet de loi là vous enlève une épine du pied, qui est la régie. Ce sont mes
mots, pas les vôtres, mais vous avez dit quelque chose qui ressemble
pas mal à ça tout à l'heure, j'y reviens dans quelques secondes.
Avez-vous
participé à des discussions avec le gouvernement quant à une réforme du mode de la Régie de l'énergie?
M. Filion
(Éric) : Premièrement, je veux juste revenir sur le commentaire. Pour moi, ça ne nous enlève
pas une épine, là, Hydro-Québec Distribution demeure complètement réglementée. On va rendre des comptes à toutes
les années devant la régie, même avec le projet de loi. Ça, ce n'est pas
changé. Cependant, ça nous amène, comme j'ai mentionné d'entrée de jeu, une certaine flexibilité, qui va être au bénéfice, je
crois, de nos clients et de l'environnement. Plusieurs projets qui
ont été soit retardés ou refusés qu'on pourrait mettre de l'avant dans ce
nouveau contexte là. Puis ça, je pense, c'est important, puis on... Ce n'est pas au bénéfice d'Hydro-Québec, c'est vraiment au bénéfice de nos clients et de l'environnement,
qui sont des priorités pour la société.
M. Marissal : Je parle d'épine, M. Filion, parce que
vous avez dit tout à l'heure qu'à cause de la régie ça vous prend beaucoup,
beaucoup de temps, huit mois, beaucoup
de ressources pour établir les tarifs, ce qui, moi, me semble être assez
normal, là, considérant qu'Hydro-Québec, c'est à nous et que la charte d'Hydro-Québec, c'est de produire de l'hydroélectricité au meilleur coût pour nous qui en sommes les
actionnaires. Ça ne me paraît pas une tâche incommensurable ni un fardeau,
là. Ce n'est pas un chemin de croix que de faire ce pour quoi vous êtes là, me
semble-t-il.
Vous avez dit
aussi que la régie vous a empêché de faire certaines choses. Je citerais un de
mes enfants : La régie, vous trouvez ça gossant, hein? C'est l'impression
qu'on a. Ça vous empêche d'aller de l'avant, ça serait plus simple si on
la ressortait juste aux cinq ans. Est-ce que je me trompe, que la régie, pour
vous, c'est un frein?
M. Filion
(Éric) : Pas du tout. En
fait, moi, je pense, le bénéfice, dans ce projet de loi là, quand on
parle de simplifier la réglementation...
Vous faites référence à certains dossiers que j'ai parlés plus tôt, dans
l'allocution, bornes de recharge rapide, conversion du mazout, électricité. En n'ayant pas ce dossier-là à
défendre devant la régie alors qu'on sait très bien que les tarifs ont
été ajustés dans le temps, pendant 50 ans, à l'inflation, je pense
que ça va nous permettre à nous, Hydro-Québec,
les intervenants et la régie de se consacrer
davantage à d'autres projets puis de les accélérer. Puis je ne veux pas reciter
tous les projets que j'ai mentionnés, mais, pour moi, il y a
des projets, là-dedans... Les bornes de recharge rapide, c'en est
vraiment un bon. Le «blockchain», ou la cryptomonnaie, c'est un autre élément,
là, qui perdure depuis plus d'un an.
Le
Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, M. Filion. Ceci termine ce
bloc d'échange avec le député de Rosemont. Je cède maintenant la parole
au député de Jonquière.
M. Gaudreault :
Oui, merci. Moi aussi, je n'ai pas beaucoup de temps. Transition énergétique,
je suis le premier à défendre ça, j'ai une auto électrique, je veux juste avoir
le plus de BRCC partout sur le territoire. Maintenant, j'admets que la
Régie de l'énergie a été créée à une époque où on se souciait peu ou pas des
changements climatiques, mais je trouve que
c'est peut-être un peu fort de café, là, de dire : On va tout jeter le
bébé avec l'eau du bain parce qu'il y a des empêchements réglementaires
à déployer de façon plus importante des bornes de recharge rapide ou faire des
programmes de transition du mazout à l'hydroélectricité.
Alors, entre cet objectif et la totale qui a été déposée par le projet... par
le ministre, dans son projet de loi, ciblez-moi précisément là où ça bloquait
avec la régie pour déployer plus rapidement des bornes de recharge
rapide.
Le Président (M. Lemay) :
M. Rhéaume.
M. Rhéaume
(Dave) : En fait,
spécifiquement, pour les bornes de recharge rapide, il n'y a toujours pas de décision qui a été
rendue dans le cadre de ce dossier-là. Comme M. Filion l'a répondu à la
question précédente, la régie a un rôle absolument essentiel à jouer. Toutefois,
lorsqu'on regarde la tendance à long terme sur l'évolution des tarifs, on
constate qu'il y a un coût aussi à ce processus réglementaire là, puis
pas juste en matière de dollars, mais aussi en matière de flexibilité puis de capacité à répondre aux
attentes de la clientèle puis aux attentes au niveau climatique. Donc, si on
pense qu'à l'intérieur d'une tendance qui suit l'historique on est capable de
donner un peu plus de flexibilité à Hydro-Québec pour déployer davantage de programmes qui répondent
soit aux besoins de la clientèle soit aux besoins environnementaux... Nous, on
trouve que c'est pour ça que ce projet de loi là est bien équilibré pour
répondre aux besoins.
M. Gaudreault :
Moi, je suis d'accord avec vous pour plus de flexibilité, mais pas au prix de
la transparence, pas au prix de repolitiser la fixation de tarifs entre les
mains du gouvernement et pas au prix de faire disparaître le mécanisme de traitement des écarts de rendement à
l'intérieur de la régie. Parce que, là, le remboursement des écarts de
rendement, là, si le projet de loi
est adopté, finalement, vous allez en être clearés pour les années futures, là.
Donc, la question de rembourser les
trop-perçus, là, c'est comme hyperimportant présentement dans l'actualité,
mais, si le projet de loi n° 34 est adopté, les écarts de rendement, dans les prochaines années,
vous n'aurez pas d'obligation de les rembourser en fonction de ces nouveaux
pouvoirs qui seraient accordés à la régie.
M. Rhéaume (Dave) : Le
processus de fixation des tarifs va être complètement différent. Alors
qu'aujourd'hui Hydro-Québec a l'opportunité
à chaque année de déposer le 11 milliards de coûts très détaillé, la
prévision de volume, puis dire à la régie : Pouvez-vous me fixer,
s'il vous plaît, les tarifs qui permettent d'arriver exactement au bon point
sur le rendement que je veux générer... Puis
c'est pour ça que, forcément, à la fin de l'année, on arrivait, puis il y avait
des écarts, certains à la hausse, certains à la baisse. Là, maintenant, ce
qu'on dit à Hydro-Québec, c'est : Gérez Hydro-Québec avec une enveloppe de... avec un tarif déjà prédéfini,
indépendamment de certains aléas, puis trouvez des solutions pour être le
plus efficace puis le plus performant
possible. Si ça veut dire investir plus en végétation pour être capable de
prévenir les coûts associés à des pannes, bien, faites-le. Si ça veut
dire déployer plus de bornes de recharge en courant continu pour inciter les gens à s'acheter des véhicules
électriques, pour générer plus de revenus d'électricité au Québec, bien,
faites-le.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, M. Rhéaume, pour vos commentaires. Ceci met un terme à cette
période d'échange. M. Filion, M. Rhéaume, je vous remercie pour votre
contribution aux travaux de la commission.
Je suspends donc les travaux quelques instants
afin de permettre aux représentants de la Fédération canadienne des
contribuables de prendre place.
(Suspension de la séance à 10 h 56)
(Reprise à 11 heures)
Le
Président (M. Lemay) :
Merci. Nous reprenons nos travaux. Alors, je souhaite la bienvenue au représentant de la Fédération canadienne des contribuables. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé. Puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à
procéder à votre exposé. Et la parole est à vous.
Fédération canadienne des contribuables (FCC)
M. Brossard
(Renaud) : Merci. Alors, mon
nom est Renaud Brossard. Je suis le directeur Québec pour la Fédération
canadienne des contribuables.
J'aimerais commencer en remerciant la commission
pour cette invitation pour discuter d'un sujet qui me tient à coeur, qui tient aussi à coeur aux dizaines de
milliers de supporteurs de la FCC au Québec, et aussi à une très vaste majorité de Québécois, soit le remboursement
des trop-perçus et le projet de loi n° 34.
D'emblée,
j'aimerais commencer en disant qu'on est généralement favorables au projet de loi n° 34. On pense qu'à long terme ce projet de loi va mener à une réduction tarifaire par rapport au mécanisme actuellement en vigueur. Cependant, il reste encore des améliorations à
apporter, et j'espère pouvoir vous en faire part aujourd'hui.
Au niveau de la réduction tarifaire, pourquoi est-ce
qu'on le voit de manière très, très positive, si on regarde la variation de l'IPC québécois au cours des années
écoulées depuis 2003, depuis que la Régie
de l'énergie a commencé à réguler les hausses tarifaires d'Hydro-Québec, on remarque, les Québécois ont payé leur électricité plus cher que si les
tarifs avaient suivi l'inflation.
Selon nos calculs, en fait, depuis l'année tarifaire 2004, la première où
les hausses tarifaires acceptées par la
Régie de l'énergie sont entrées en vigueur, depuis ce temps,
les Québécois ont payé autour de 2,4 milliards de plus pour leur tarif domestique que s'ils avaient suivi... si les
tarifs avaient suivi l'inflation. Pour l'année 2018 seulement,
ça représente une somme de 249 millions.
Le
fait de limiter l'augmentation des tarifs à l'inflation, en fait, vient
justement changer qui est responsable du risque. On voit que, jusqu'à présent, étant donné que le
profit d'Hydro-Québec était réglementé avec le bénéfice net réglementé, les
coûts pouvaient augmenter ou descendre autant qu'Hydro-Québec le voulait. C'est qu'Hydro-Québec n'avait aucun
mécanisme qui encourageait un contrôle des coûts, ce qui a causé certaines
hausses très, très, très fortes approuvées par
la Régie de l'énergie. En changeant le mécanisme d'ajustement tarifaire pour
que ce soit plutôt le tarif qui soit réglementé, donc le revenu total qui soit réglementé, on vient ajouter un incitatif
additionnel pour qu'Hydro-Québec cherche des sources d'efficience. On vient aussi protéger les clients
contre les impacts liés à la mise en service de nouveaux projets. On sait que la Vérificatrice générale du Québec avait fait un
long rapport sur la mise en service des projets éoliens qui avaient coûté
très, très cher en termes d'augmentations
tarifaires aux Québécois. En limitant les augmentations de tarifs à
l'inflation, on vient ainsi protéger les Québécois de ces problèmes-là.
Donc, c'est pour ça qu'on voit ça de manière très, très positive sur le fait qu'à long terme ça nous assure une
baisse tarifaire par rapport à ce que le mécanisme actuel... à ce à quoi on
peut s'attendre par rapport au mécanisme actuel.
Là où on voit des
problèmes par contre : le projet de loi n° 34 ne remboursera pas la
totalité des trop-perçus, selon ce qu'on
peut en faire une lecture. Le premier mécanisme, qui est le gel tarifaire d'un
an, on doit d'abord concéder qu'il est
vrai qu'il va causer une baisse, une certaine épargne par rapport à ce que les
clients auraient payé dans un temps normal. Par contre, l'absence de données... l'absence de dossier tarifaire
d'Hydro-Québec fait en sorte qu'on n'a pas les données nécessaires pour confirmer que cette baisse
équivaut bel et bien à 1 350 000 000 $.
En fait, la Régie de l'énergie a historiquement approuvé des hausses
entre 5,33 % et des baisses minimes d'un demi-point de pourcentage. Le
fait de présumer que la hausse aurait été à 1,7 % l'an prochain ne tient
pas compte de ce fait de la Régie de l'énergie.
En
fait, ce qu'on aimerait demander à la commission et à M. le ministre serait de
faire pression sur Hydro-Québec, sur
Hydro-Québec Distribution, pour qu'elle présente un dossier tarifaire afin que
vous, Mmes et MM. les élus, nous, les groupes
de la société civile et l'ensemble des citoyens à l'extérieur de cette salle
puissent faire leur travail, faire des évaluations, faire des analyses
pour pouvoir confirmer ou infirmer l'affirmation du gouvernement voulant que ce
gel puisse remettre 1 milliard de dollars.
L'autre
point où on voit que ce projet de loi ne remboursera pas l'ensemble des
milliards et demi en trop-perçu est le fait que le rabais tarifaire de 500 millions provenant des comptes
d'écart est tout simplement une somme qui aurait déjà été remise de toute
façon. Comme les témoins précédents l'ont dit, c'est un compte qui aurait été
remis dans un espace de trois à cinq
ans. Or, les trop-perçus, le milliard et demi en trop-perçu depuis 2005,
n'allaient pas être remis normalement. Cette
remise sur trois à cinq ans est simplement... Cette remise ponctuelle, au lieu
d'une remise sur trois à cinq ans, n'est rien d'autre qu'un
remboursement anticipé.
Ce
qu'on aimerait proposer à la commission, étant donné que l'argent des
trop-perçus est allé dans le fonds consolidé du gouvernement, c'est de la bonifier par une compensation additionnelle
de 500 millions de dollars provenant des fonds consolidés du
gouvernement.
À
la base, pourquoi est-ce qu'on est ici pour parler du projet de loi n° 34? C'est parce que les Québécois reconnaissent que la crise des trop-perçus a assez duré. Si un
Québécois doit de l'argent à Hydro-Québec, Hydro-Québec s'attend à recevoir
son argent, et c'est parfaitement normal. Si
Hydro-Québec a surchargé les Québécois, a été chercher des profits additionnels
à ce qui lui était permis au cours des
années, les Québécois s'attendent à Hydro-Québec et à leur gouvernement de
rembourser cet argent. Merci.
Le
Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, M. Brossard, pour votre
exposé. Avant de poursuivre avec le bloc d'échange, j'aimerais demander le consentement à ce que le troisième
groupe d'opposition donne son temps au deuxième groupe d'opposition.
Est-ce que j'ai le consentement?
Des voix :
Oui.
Le
Président (M. Lemay) : Parfait. Merci beaucoup. Donc, nous allons
maintenant commencer la période d'échange. Alors, M. le ministre, la
parole est à vous.
M.
Julien : Oui. Oui, merci, M. le Président. Donc, merci beaucoup pour
votre énoncé, puis il y a des choses que vous avez dites qui
m'interpellent un peu. Je vais aller un peu plus loin avec vous, là, dans cette
réflexion-là.
Vous
avez mentionné, en réalité, que, puis vous me corrigerez quand j'aurai fini,
là, si je me trompe, là, si on prenait, en fin de compte, l'écart entre l'inflation et le tarif, effectivement,
d'Hydro-Québec sur une période de 15 ans, les 15 dernières
années, 2,4 milliards, en réalité, c'est l'effet cumulatif, en réalité, de
ce qui a été chargé en supplément de l'inflation. Donc, je comprends ici, là, avec le tableau, là, quand il y a un écart
entre la courbe de l'inflation et la courbe tarifaire, c'est la somme des
montants annualisée qui donne 2,4 milliards. Sur cette période de temps,
les écarts de rendement cumulatifs, 1,5 %,
1,7 %, si on prend les dernières années, donc, en réalité, l'écart entre
l'inflation et le tarif a été supérieur, en réalité, à l'écart de
rendement qui s'est créé, qui aurait dû être retourné, le cas échéant, selon
vos prétentions.
Alors,
c'est certain que, quand la décision du p.l. n° 34,
qu'on souhaite voir appliquer... Le gel tarifaire de la première année,
quand vous dites : On n'est pas sûr que c'est 1,7 %, en réalité, on
prend 1,7 % comme étant le taux d'inflation. Si c'est 2,3 %, ça sera 2,3 %, si c'est 1,2 %, ça sera
1,2 %, mais on vient dire, on l'estime à 1,7 % à l'heure
actuelle : 1,7 %, c'est
l'équivalent, en fin de compte, de l'inflation qu'on vient geler dans le temps
pour venir justement éliminer, un tant soit peu, l'écart entre la courbe
à l'inflation et le tarif actuel, pour venir dire : Je suis au-dessus de
la courbe, je viens de réduire, et après ça je me projette à l'inflation pour
les quatre prochaines années, et je retournerai à la régie après cinq ans pour voir s'il n'y a pas eu de distorsion
créée. Malgré que, dans les 50 dernières années, c'était à l'inflation,
dans les 15 années également,
une corrélation presque parfaite, mais on ne prend pas de chance, on retourne à
la régie pour être certain que notre modèle tient toujours.
Ce
faisant, ma question, ce modèle-là de proposition, qui se veut une correction
dans le temps d'une situation connue dans le passé, qui démontre que l'écart
était supérieur même au mécanisme d'écart de rendement, ne corrige pas la
situation, justement, des écarts de
rendement dans le futur et n'assure pas, en fin de compte, à la clientèle,
justement, qu'on n'a plus besoin de ce mécanisme d'écart de rendement?
M.
Brossard (Renaud) : ...que
partiellement. Et c'est ça qu'on reconnaît, qu'il y a une correction partielle
qui est faite par ça. Par contre,
pour en faire la correction... La correction est faite par rapport à la
hausse qui aurait été approuvée pour
l'an prochain. Or, on n'a aucune idée qu'elle aurait été cette hausse. On n'a
aucune idée si elle aurait été de 5,33 %, de 1,7 % ou de 0 %. En l'absence de ces
chiffres-là, on n'a pas moyen de confirmer ou d'infirmer votre affirmation. Il
faudrait qu'Hydro-Québec dévoile ces chiffres-là afin de nous permettre
de faire cette évaluation-là, de permettre aux élus de pouvoir faire cette
évaluation-là et de permettre aux citoyens aussi de faire cette évaluation-là.
• (11 h 10) •
M.
Julien : Alors, je vous rejoins quand vous mentionnez qu'on n'a pas la
démonstration, mais, si on y va sur la prémisse... puis le passé n'est
pas toujours garant du futur, mais, si on prend 50 ans, on a cette
tendance-là parfaitement corrélée,
15 ans, la même chose. Donc, si on vient dire... Si on avait appliqué
durant toute cette période-là, effectivement, l'inflation, à peu de chose près, l'augmentation tarifaire aurait été la
même que celle qu'on a obtenue via des mécanismes plus complexes depuis les 15 dernières
années. Et, ce faisant, on vient donner l'assurance sur une longue période.
C'est-à-dire qu'on ne peut pas le
regarder ponctuellement année, année,
vous avez raison, peut-être que la hausse tarifaire aurait été différente dans le processus l'an prochain et
différente dans trois ans, comme on a pu voir dans le passé des 4 % d'augmentation ou pas d'augmentation.
Mais, quand on regarde la courbe, on constate, historiquement, qu'elle était
légèrement supérieure à l'inflation.
Quel risque on prend, en fin de compte, avec ce système-là, considérant que,
dans cinq ans, on va pouvoir aller faire justement un «rebasing»,
excusez-moi le terme, pour s'assurer qu'on ne s'est pas égaré?
M.
Brossard (Renaud) : Écoutez,
on vous rejoint sur le fait que, oui, ça
va provoquer une diminution par rapport à ce que la Régie de
l'énergie aurait approuvé, on est parfaitement d'accord et on le concède. C'est la base même de
notre point pour lequel on est favorables
à ce projet de loi, c'est qu'il assure une diminution à long terme
par rapport au cadre tarifaire existant. Cependant,
là où on ne se rejoint pas est le fait que cette épargne de 1 milliard provient justement de la différence entre l'inflation et le taux qui aurait
été approuvé pour l'an prochain. Donc, cette épargne provient uniquement
de là. Le risque qu'on court, en fait, c'est que, dans cinq ans, ce ne soit pas
1 milliard qui a été remis, que ce soit entre deux et 500 millions et que les Québécois se ramassent, encore une
fois, avoir un 500 millions manquants dans leurs proches par
rapport au montant des trop-perçus.
M.
Julien : Parfait. Donc, il y a toujours
un risque puis, a contrario, une opportunité dans le système
qu'on a là, puis le risque pourrait
être d'un côté ou de l'autre. À terme, c'est : on vient donner une
prévisibilité à la clientèle, en termes de coûts d'énergie, et effectivement on peut énoncer que, toutes choses étant égales par ailleurs, ça aurait pu être mieux, toutes choses étant égales par
ailleurs, ça aurait pu être pire. Mais, quand on regarde les 50 dernières
années ou les 15 dernières années,
c'est parfaitement corrélé, si ce n'est que l'inflation, en réalité,
est un peu inférieure à la hausse tarifaire. Donc, le risque que vous percevez, après cinq ans, si on vient faire justement
une cause tarifaire pour s'assurer qu'on ne s'est pas écarté, est-ce qu'il
n'est pas, en réalité, à ce moment-là, opportun de venir dire qu'on couvre ce
risque-là?
M.
Brossard (Renaud) : En fait,
je pense que le seul risque qui est encouru, avec ce projet de loi, sur ce point-là, c'est le remboursement du 1 milliard et le fait
que les contribuables ne reçoivent pas le milliard, en fait, qui est ici. Entre
le fait que le gouvernement remette un petit peu trop d'argent aux citoyens ou
que le gouvernement ne remette pas assez d'argent aux citoyens, je
préfère encourir que le gouvernement remette un petit peu trop l'argent aux
citoyens.
M. Julien : Je vais passer...
Le Président (M. Lemay) : Parfait.
Donc, M. le député de Lac-Saint-Jean, la parole est à vous.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Oui.
Alors, merci, M. le Président. Mes salutations. Je vois que vous êtes quand même une
organisation... une très grande organisation, vous avez beaucoup
de membres et vous ne dépendez pas d'affiliation institutionnelle ou
partisane, donc vous êtes très indépendants. Et ce que je vois, c'est que, dans
votre mémoire, le principe de prévisibilité
est donc bien reçu par votre organisation, donc, vous l'avez bien mentionné, et de flexibilité aussi. Alors, j'aimerais peut-être
un peu plus que vous élaboriez au niveau du principe de prévisibilité, au niveau
de votre organisation.
M.
Brossard (Renaud) : Effectivement. Et merci pour les bons mots. En fait, les principes de prévisibilité
viennent du fait qu'il n'y a rien de pire en affaires que l'incertitude.
Il n'y a rien de pire aussi pour les clients que l'incertitude. Le problème qu'on a avec la Régie de l'énergie et le
mécanisme actuel, pas celui du projet
de loi, mais le mécanisme existant,
est le fait qu'on joue un petit peu avec une
montagne russe, les Québécois ne savent pas s'ils vont piger une augmentation tarifaire de 5 % l'an prochain ou une diminution tarifaire de
0,5 %. Ce manque de prévisibilité, en fait, rend ça très difficile,
pour les Québécois, de faire un budget. Et
aussi, pour les grandes entreprises, pour les grands consommateurs énergétiques,
c'est encore plus difficile pour eux de
faire leurs prévisions budgétaires. Avec une prévisibilité, avec le fait que ça
reste à l'inflation, qui est quand même beaucoup plus stable que les hausses
accordées par la Régie de l'énergie, on voit ça d'un très, très, très
bon oeil, et, on pense, c'est clairement une victoire pour les Québécois.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député. Ah! M. le ministre. Allez-y, M. le ministre.
M.
Julien : Donc, si je vous écoute, par rapport à la dernière
intervention que vous venez de faire, cette prévisibilité-là, en fin de
compte, qui est un enjeu majeur pour les consommateurs, justement pour être en
mesure, de manière... de pouvoir budgéter et voir venir,
qui est un atout important pour les consommateurs, pour la clientèle, mais, a contrario, vous mentionnez, d'entrée de jeu,
qu'«on aurait préféré autre chose que qu'est-ce qui est proposé là», mais, pour
nous, en réalité, quand on le regarde dans le projet de loi : Oui, mais on
va y retourner dans 60 mois. Donc, on se donne un laps de temps de prévisibilité, qui, force est
de constater, historiquement, n'amène pas grand risque puisque la corrélation
entre l'inflation et la hausse autorisée par
la Régie de l'énergie, à travers tout le mécanisme annuel... corrélation
presque parfaite. Et, si écart il
y avait, d'un côté ou
de l'autre, on va venir le corriger au terme de cinq ans dans un processus
qui actuellement est aux 12 mois, qui est somme toute assez
lourd et pertinent, dans le sens que, sur une base tarifaire, là, on
regarde la corrélation, elle est presque parfaite.
Donc, ce
«rebasing» là après cinq ans n'est pas ce qu'on doit faire pour assurer la
prévisibilité tant importante qui fait en sorte qu'une année on soit à quatre
point quelque, avec la courbe qui augmente, puis après ça on soit à 0,5 %.
En réalité, le consommateur ou la clientèle, à chaque année, c'est un
peu : Bon, qu'est-ce qui m'attend cette année? Ça peut être plus quatre comme plus zéro. Puis là on
dit : Ça va être l'inflation. Puis, après 60 mois, là, on va revenir
s'assurer que c'est le bon tarif pour vous. Alors, en quoi ce
système-là, pour vous, est perfectible?
Le Président (M. Lemay) :
M. Brossard.
M. Brossard (Renaud) : En fait,
il est perfectible dans le sens où on évalue le projet de loi sous trois angles
différents, le premier qui est le côté
prévisibilité, le côté d'avoir les tarifs ajustés à l'inflation, et ça, on est
100 % d'accord, on pense que
c'est la bonne chose. On évalue aussi en termes du rabais de 500 millions
de dollars qui est accordé, qu'on pense qui devrait être bonifié. Et on
l'évalue aussi en termes du gel tarifaire ponctuel. Pour nous, le problème est
au niveau du gel tarifaire ponctuel qui n'assure pas le remboursement
des trop-perçus.
Ce projet de
loi fait deux choses, ou l'objectif de ce projet de loi, selon ce qu'on en
comprend, est deux choses : un, rembourser
les trop-perçus et, deux, assurer un mécanisme différent pour la fixation des
tarifs d'Hydro-Québec pour ne plus qu'il y ait de trop-perçus. On pense
que le mécanisme va mettre fin aux trop-perçus futurs. On ne pense pas que le mécanisme permet de rembourser les trop-perçus du
passé. Et, comme le gouvernement, même si la personne à la tête du gouvernement a changé... Comme le gouvernement a
récolté l'argent des trop-perçus, a récolté ce 1,5 milliard en trop dans
les poches des Québécois, on demande au
gouvernement de remettre ce 1,5 milliard, au total, dans les poches des
Québécois.
Le Président (M. Lemay) : M. le
ministre.
M. Julien :
Donc, encore là, juste pour être sûr de bien comprendre, les deux éléments, en
fin de compte, qui... pour vous, le
1,7 % qui est l'hypothèse prise pour dire : Bien, l'inflation
historique, à peu près, c'est 1,7 %, puis on vient le calculer. Si effectivement l'inflation était de 2 %, le
gel, à la place d'être 200 millions, il serait supérieur. S'il était de
1,5 %, c'est un peu inférieur. Alors, pour vous, ça serait de venir
le fixer autrement?
M. Brossard
(Renaud) : Non. En fait, ce
serait d'évaluer le gel par rapport à la hausse qui aurait été consentie par
la Régie de l'énergie dans le mécanisme
actuel. Si on veut faire un remboursement de 1 milliard, il faut le faire
par rapport au système actuel et non en disant : On va changer
notre système pour quelque chose qui pourrait rapporter davantage, rapporter moins, et par rapport au nouveau système
qui n'existait pas autrefois, il y aura 1 milliard qui va être remboursé.
Il faut le faire par rapport à l'ancien système.
M. Julien : Donc, pour vous, en
réalité, le «cutoff» qui vient se faire à l'an un, où on vient dire : Nous
autres, dorénavant, là, le projet de loi, le
p.l. n° 34, va être à l'inflation, vous nous dites :
Oui, mais sur la donnée de départ, j'aimerais ça retourner sur l'ancien modèle
puis, après ça, appliquer l'inflation. Mais, plutôt que de venir dire :
L'historique 50 ans nous dit que
c'est l'inflation, je pars immédiatement an un, gel, comparativement à
l'inflation, puis après ça inflation. Alors, c'est comme de venir dire : Je voudrais avoir une
espèce de système hybride où je prends l'ancienne méthode pour fixer le départ,
puis après ça je suis à l'inflation.
M. Brossard
(Renaud) : Du tout. C'est
plutôt qu'on va évaluer le fait que ce milliard-là soit remis ou non en
fonction du système qui existait
déjà, uniquement pour l'évaluation du fait que le milliard soit remis ou non.
N'oubliez pas qu'au-delà de... Dans les 50 ans dont vous parlez, il y a eu
plusieurs changements drastiques dans le mode de fixation des tarifs
d'Hydro-Québec. Les modes de fixation des
tarifs ont changé. Mais, pour évaluer si une remise va être faite par rapport à
ce que les clients ont payé, il faut regarder
d'abord est-ce que cette remise-là va être... est-ce que cette remise-là aurait
eu lieu normalement et quelle est la
taille de cette remise-là par rapport à la situation actuelle. Dans le fond,
toutes choses étant égales par ailleurs, est-ce que ce sera
1 milliard qui va être remis ou ce sera 200 millions ou
500 millions?
Le Président (M. Lemay) : M. le
ministre.
M. Julien : Alors, on sera en
mesure d'évaluer la valeur de cette remise-là au terme de cinq ans.
M. Brossard
(Renaud) : Le problème qu'on
voit est que, si, dans cinq ans, cette remise-là a été de 200 millions,
est-ce que les Québécois vont se refaire
remettre un autre 800 millions ou est-ce que les Québécois vont tout
simplement laisser cet argent-là dans les poches du gouvernement? Nous,
ce qu'on veut s'assurer, c'est que les Québécois reçoivent le 1,5 milliard qu'ils ont payé en trop. Ce
qu'on voit avec ce projet de loi, c'est que le mécanisme de remboursement est incomplet, qu'on n'a pas de moyen d'évaluer si ce
1,5 milliard là va réellement être remis aux Québécois, et c'est là où
on voit un problème.
• (11 h 20) •
M. Julien : Si on va sur le
remboursement de 500 millions, qui n'est pas, en réalité, l'écart de
rendement de 1,5 milliard, là, c'est un
compte d'écart de rendement, est-ce que vous trouvez que la redistribution de
ce 500 millions là est équitable?
M.
Brossard (Renaud) : Écoutez,
ce n'est pas un compte d'écart de rendement, c'est un compte d'écart, il y a
une différence entre les deux. Les écarts de rendement sont les profits
additionnels au profit maximal d'Hydro-Québec, les comptes d'écart servent à amenuiser l'impact d'aléas sur les profits
d'Hydro-Québec. C'est un compte de stabilisation, d'une
certaine façon. Donc là, on parle de deux choses différentes.
On pense que c'est équitable de le remettre au
prorata du tarif. C'est sûr que, si on demande aux Québécois, puis effectivement on a demandé aux Québécois, qu'est-ce qu'ils
préfèrent entre recevoir cet argent-là par une légère baisse de tarif ou un chèque à la maison, ils préfèrent
le recevoir par un chèque à la maison. Par
contre, on reconnaît qu'une baisse
tarifaire va être une façon de le remettre plus ou moins complètement à
chaque personne qui en a payé. C'est une façon beaucoup plus simple, beaucoup
moins coûteuse et qui va permettre une remise, qui va aussi permettre de directement remettre de l'argent dans les poches des Québécois.
M. Julien : Ces comptes d'écart là,
en réalité, qui étaient effectivement, là, des comptes qui permettaient à Hydro-Québec, sous l'ancien modèle, de se prévaloir de certains aléas, donc c'est
les comptes de provision... La redistribution au pro rata, pour vous, vous convient, mais les gens que vous
représentez préféreraient un chèque qu'une réduction sur facture parce
que?
M.
Brossard (Renaud) : Parce
que c'est beaucoup plus clair avec un chèque, c'est beaucoup
plus simple. Pour la personne qui ne suit pas régulièrement les audiences de
la Régie de l'énergie, les audiences de la commission
d'aujourd'hui, par exemple, le fait de recevoir un
chèque qui dit : Voici le montant que vous avez payé en trop-perçu, c'est beaucoup
plus clair. On a demandé à nos supporteurs,
on a demandé plusieurs questions, on a demandé aux signataires de notre pétition,
et, dans une vaste majorité, ils préfèrent recevoir un chèque. Ils considèrent
qu'une réduction tarifaire est une façon acceptable de le remettre, même si ce
n'est pas aussi populaire, et c'est pour ça qu'on défend cette position aujourd'hui,
c'est, entre autres, parce que nos
supporteurs la trouvent acceptable. On regarde le point de vue économique, on regarde le point de vue de coûts, on la
trouve acceptable aussi, bien qu'imparfaite. J'aime beaucoup
le proverbe : Mieux est l'ennemi de bien. Je pense que c'est une
façon qui est bien.
M. Julien : Parfait. Et, pour
revenir encore sur les gens que vous représentez, qu'est-ce qu'ils vous disent par
rapport à tout l'aspect prévisibilité, qui, pour nous, quand on a réfléchi l'élaboration de ce projet de loi, était un enjeu important? Parce qu'on voyait,
effectivement, bien que, sur une longue période, c'est corrélé, il y a des
swings importants, il y a des écarts importants. Comment c'est perçu,
ça?
Le
Président (M. Lemay) : Bon, M. Brossard, peut-être que vous aurez la
chance de répondre dans un prochain bloc d'échange, mais, pour le moment, je vais céder la parole au député...
Allez-y, M. le député de Rosemont, vous avez une question.
M.
Marissal : Excusez-moi, j'ai un point d'ordre. Le ministre manie
depuis tout à l'heure des tableaux. Est-ce qu'il serait possible de les
déposer, s'il vous plaît, pour le bénéfice de tous?
M. Julien : Certainement, oui.
Le
Président (M. Lemay) : Oui. M. le député, c'est aussi un tableau qui
est à la page 5 du mémoire de la Fédération canadienne des
contribuables, mais, oui, effectivement, on peut en faire la distribution.
Alors, M. le député de Laval-des-Rapides, la
parole est à vous.
M. Polo :
Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour la présentation. En effet, je
reviens sur des éléments de votre
mémoire, notamment à la page 7, où vous décortiquez le mécanisme de
remboursement. En fait, c'est écrit littéralement «mécanisme de remboursement défaillant». Et,
malgré les bonnes intentions du gouvernement, vous trouvez que l'application
ou la démonstration est intellectuellement
malhonnête. Vous la phrasez différemment, vous la phrasez : «...nous
considérons qu'il [serait] plus
intellectuellement honnête — donc on peut interpréter le contraire — de se reporter plutôt aux derniers
changements [au cours des dernières années].» Vous avez fait la démonstration
que de se baser sur un argumentaire de
prendre les 50 dernières années comme justification pour utiliser l'IPC,
l'indice d'inflation, était... amenait un élément de prévisibilité, et
vous, vous avez réussi... Enfin, je vous demanderais de poursuivre votre
explication. De quelle façon justement cette prémisse-là est intellectuellement
malhonnête?
M.
Brossard (Renaud) : Merci.
Je préfère ne pas utiliser les mots «intellectuellement malhonnête», mais je
pense qu'il y a de meilleures façons de le faire et je pense qu'une des façons
qui seraient importantes, c'est de le considérer par rapport au dernier mécanisme de fixation des
tarifs. Parce qu'ultimement, ce que vient faire le projet de loi, c'est modifier le mécanisme existant. Il ne vient pas modifier
les quatre, cinq ou six autres mécanismes d'avant. Donc, pourquoi est-ce
que... Ce n'est pas important de considérer
les quatre, cinq ou six mécanismes d'avant lorsqu'on vient uniquement modifier
le mécanisme existant. Et c'est pour ça qu'on tenait à faire ce point. C'est
vrai, sur les 50, 60 dernières années, effectivement, les augmentations tarifaires d'Hydro-Québec ont suivi l'inflation, mais ça ne me dit rien de plus que de dire qu'il
y a des pâquerettes dans un champ présentement.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député.
M.
Polo : Est-ce que
vous pensez que le mécanisme proposé par le projet de loi n° 34
pourrait atténuer ou accentuer des chocs tarifaires sur une base de cinq
ans?
M. Brossard (Renaud) : En fait, on
pense qu'il nous manque des données, notamment. Et c'est une des raisons pourquoi on demande le dépôt d'un dossier
tarifaire d'Hydro-Québec. Sans dossier tarifaire d'Hydro-Québec, on n'a pas l'ensemble des
données nécessaires pour évaluer quel va être l'impact de ce projet de loi sur cinq ans. Ce qu'on sait, c'est que, si on regarde par rapport au mécanisme existant, sur un
long terme, c'est bénéfique pour les Québécois.
Sur un court terme de cinq ans, il nous faudrait avoir davantage de
données de la part d'Hydro-Québec pour pouvoir le faire.
M. Polo : Alors, quand...
M.
Brossard (Renaud) :
D'ailleurs, notre conclusion qu'on dit : C'est impossible de confirmer ou
d'infirmer les affirmations du ministre sur ce point.
M. Polo : Quand vous regardez les
fluctuations de l'inflation au cours des 100 dernières années et qu'on
recule même, disons, à la fin des
années 60, pour reprendre les 50 dernières années... Dans les
années 70, vous êtes à même de le savoir, on avait des taux d'inflation
qui dépassaient les 10 %, jusqu'au début, au milieu, presque au milieu des
années 80, qui arrivaient autour de 5 %. Si on prend le projet
de loi n° 34 tel qu'il est présenté et qu'on prend des scénarios des crises pétrolières des années 70, des crises
géopolitiques des années 80, comment ce scénario-là... Puis, regardez, je
ne veux pas être alarmiste comme tel,
mais, il y a deux jours, moi-même, je me suis surpris à écouter à la télé qu'il
y avait eu une attaque par des drones
sur des installations pétrolières au Moyen‑Orient. Donc, c'est quand même assez
nouveau. Je pensais que les drones servaient juste à filmer puis à
prendre des photos, mais, bon...
Comment
pensez-vous qu'un contexte comme ça, historique, pourrait... Quelles
répercussions pourraient avoir sur le consommateur final d'avoir des
taux d'inflation à 10 %, 11 %, 12 %, 13 %, selon vous?
M. Brossard
(Renaud) : En fait, il ne
faut pas oublier qu'un taux d'inflation, c'est l'augmentation moyenne des prix,
ce qui veut dire aussi : souvent, les salaires vont être augmentés à l'inflation,
les coûts vont monter aussi, généralement, à l'inflation. Le fait d'avoir un
tarif qui est fixé à l'inflation, pour nous, c'est une bonne chose, parce que,
de toute façon, dans des chocs tarifaires comme ça... dans des chocs pétroliers
ou des chocs économiques comme ça, il
y a un impact sur l'inflation,
il y a un impact aussi sur les tarifs d'Hydro-Québec et les coûts d'Hydro-Québec.
Là où on voit un avantage avec ce mécanisme-là,
c'est que le mécanisme vient fixer d'une certaine façon les tarifs, donc les revenus. Quelle que soit
l'augmentation des coûts d'Hydro-Québec, les clients en sont, d'une certaine façon,
protégés. Et c'est là où on voit quelque chose de bénéfique, où le risque lié
au projet d'Hydro-Québec, le risque lié à divers...
un manque de contrôle des coûts chez Hydro-Québec, par
exemple, est envoyé au niveau d'Hydro-Québec et non envoyé aux clients.
M.
Polo : Ceci dit, l'inverse,
si l'inflation, comme on l'a vu au cours des dernières années, est à
1,5 %, 1,6 %, 1,7 % et que le juste prix déterminé par le
processus de la Régie de l'énergie est établi à 0,8 %, 0,9 %, et tout ça,
actuellement le consommateur, selon
le projet de loi n° 34, ne sortirait pas gagnant des contextes à très
faible inflation ou même à travers un mécanisme de justes prix comme on
l'a vu au cours des dernières années.
M. Brossard (Renaud) : Je vous
dirais, ce qu'on voit, c'est simplement que, depuis que la Régie de l'énergie a commencé à faire cette fixation de tarifs, étant
donné qu'il y a eu un certain effet multiplicateur, les Québécois
auraient été mieux si les tarifs
avaient suivi l'inflation que s'ils étaient soumis à la montagne russe de la Régie de l'énergie, d'une certaine façon. C'est vrai que, dans certains cas
ponctuels, les Québécois vont perdre, dans certains cas ponctuels, les Québécois
vont gagner. Ce qu'on remarque, c'est que, sur un long terme, les Québécois
risquent de gagner.
M.
Polo : O.K.
J'aimerais ça vous entendre de nouveau sur votre affirmation que le mécanisme
proposé par le p.l. 34 ne fait pas la démonstration que les Québécois vont
recevoir le milliard annoncé. On le sait, là, 500 millions, ils vont
l'avoir dans leur facturation l'année prochaine. Il y a un gel des tarifs
pendant un an également. Mais le milliard en question?
• (11 h 30) •
M.
Brossard (Renaud) : Le
problème avec... le manque de données d'Hydro-Québec ne nous permet pas de
savoir quelle aurait été la hausse en suivant le mécanisme actuel,
quelle aurait été la hausse tarifaire. Pour pouvoir comparer l'impact du gel tarifaire sur les Québécois,
sur les ménages québécois, il faudrait savoir quelle aurait été cette
hausse et ensuite la soustraire par rapport à... en soustraire le montant gelé pendant un an et voir l'impact à
long terme que ça aurait eu sur cinq
ans. En l'absence de données de la part d'Hydro-Québec, on n'est pas
en mesure d'arriver à ça. En fait, à ce qu'on en sache, la Régie de l'énergie aurait
autant pu approuver de fortes hausses que de légères baisses l'an prochain. On
n'en a tout simplement aucune idée avec les données qui nous sont présentées.
M.
Polo : O.K. Et
vous avez également dit que le 500 millions aurait été
remboursé de toute façon. Donc, en fait, ce n'est pas un cadeau, vous
l'écrivez tel quel, ce n'est pas un cadeau à la population, le
500 millions a été prévu d'être remboursé sur une période de trois à cinq
ans. C'est ce que vous nous dites.
M. Brossard
(Renaud) : Exact. Ça provient des comptes d'écart, qui sont une
certaine réserve de stabilisation d'Hydro-Québec.
Ce n'est pas les écarts de rendement. On parle d'écart pour... Par exemple,
l'an dernier, quand il y a eu des
grosses coupures de courant aux Îles-de-la-Madeleine, le compte d'écart
climatique d'Hydro-Québec a été fortement sollicité pour pouvoir payer les interventions ponctuelles. C'est pour
s'assurer que, lorsqu'il y a une catastrophe naturelle, les tarifs
d'Hydro-Québec n'augmentent pas de manière drastique.
Ces
comptes d'écart là sont généralement amortis sur une période de trois à cinq
ans, ce qui veut dire qu'ils retombent à
zéro, d'un point de vue financier, sur une période de trois à cinq ans. C'est
tout simplement un remboursement anticipé. Et c'est pour ça qu'on demande une bonification de 500 millions,
provenant du fonds consolidé, à ce remboursement de 500 millions
déjà existant.
M. Polo :
Alors, comment vous... Et vous avez dit que vous auriez préféré... en fait,
«vous»... comment... vos membres? Ce n'est pas vraiment vos membres...
Une voix :
...supporteurs.
M. Polo :
Vos supporteurs, vos amis Facebook, disons-le comme ça...
M. Brossard (Renaud) : Nos 215 000 supporteurs à travers le
pays et les plusieurs dizaines de milliers au Québec.
M.
Polo : Auraient préféré recevoir ça sous forme de chèque ou sous forme
de remboursement sur leurs factures. Ça, ça a été quantifié, démontré.
M. Brossard (Renaud) : Oui. On a sondé nos supporteurs au mois de mai
dernier, si je me souviens bien. On les a sondés sur la question, leur
demandant entre trois mécanismes de remboursement différents, soit un gel tarifaire
jusqu'au remboursement complet, l'envoi d'un chèque ou une réduction
tarifaire ponctuelle échelonnée sur un certain nombre d'années et qui soit quantifiée, entre les trois mécanismes, le
mécanisme favorisé était le chèque, suivi de la réduction tarifaire
ponctuelle quantifiée, suivie ensuite du gel de tarifs. Le chèque est
clairement le moyen le plus simple et qui assure un remboursement intégral à
chaque personne.
Comme
je vous dis, je considère que le mieux est l'ennemi de bien. Si on est en
mesure d'avoir un remboursement de 95 % de la somme, je considère que
c'est bien. On pourrait avoir mieux, on aimerait avoir mieux, mais je
préfère m'assurer qu'au minimum les Québécois aient droit à bien.
M.
Polo : En effet, en effet. Ceci dit, ce n'est pas la totalité de
1,5 milliard qui va être retournée aux Québécois, c'est
500 millions. Le milliard en question est questionnable.
Est-ce
que vous vivez bien avec le fait qu'on change complètement, drastiquement le
mécanisme pour supposément répondre à
cette fausse promesse électorale, mais, en contrepartie, on ne fait pas la
démonstration que le milliard en question va être remboursé?
M. Brossard (Renaud) : On vit bien avec le fait que le tarif soit
modifié parce qu'on considère que le tarif actuel diminution à long
terme. était ce qui permettait la situation
des trop-perçus. C'est le mécanisme actuel qui a créé cette problématique-là.
Et le changement, le changement tarifaire... Le changement au mécanisme
tarifaire met fin à cette situation-là et assure aussi une
Une voix :
...
M.
Polo : 15 secondes. Une grosse partie de la différence des
trop-perçus, c'était aussi la surestimation des coûts d'Hydro-Québec
lorsqu'elle déposait ses projets tarifaires. C'est bien ça?
M. Brossard
(Renaud) : Oui.
Le
Président (M. Lemay) : Merci beaucoup. Ceci complète ce bloc
d'échange. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont.
M.
Marissal : Merci, M. le Président. Merci, cher collègue, de votre
flexibilité quant au temps disponible. Je dis souvent que la flexibilité, c'est la meilleure façon de ne pas casser
quand on plie. Alors, j'apprécie beaucoup quand on peut faire preuve de
ce genre d'arrangement ici.
Merci aussi, M. Brossard,
pour votre présentation. Je vais commencer par une boutade. Je me dis que,
quand la Fédération canadienne des contribuables et QS se rejoignent... pas
partout mais quelque part, c'est probablement qu'il y a quelque chose qui
cloche dans le projet de loi qu'on est en train d'étudier parce que nous
sommes...
M. Brossard (Renaud) : ...loto en
sortant.
M. Marissal : Pardon?
M. Brossard (Renaud) : J'ai le goût
de m'acheter un billet de loto en sortant.
M. Marissal : Vous pouvez prendre
les cartes de QS aussi. C'était une boutade, je tiens à le dire. Je ne fais pas
de politique ici.
Alors, merci,
je disais, pour votre présentation. Vous avez dit quelque chose, tout à l'heure, qui m'a un peu surpris. Vous
avez dit : Avec ce mécanisme-là, qui serait éventuellement implanté avec
le projet de loi, les contribuables sont assurés d'avoir une baisse de tarifs.
J'ai bien compris?
M. Brossard (Renaud) : Oui.
M.
Marissal : Pouvez-vous
expliquer? Parce que, si, d'emblée, le plancher, c'est l'inflation et
qu'il est arrivé dans le passé que l'augmentation était parfois sous l'inflation, il n'y a
donc pas de garantie de baisse de tarif, il y a une garantie de
plancher.
M. Brossard (Renaud) : Effectivement.
Je tiens à le préciser, ce à quoi je faisais référence par rapport à cette garantie de baisse de tarif était par rapport au gel tarifaire, où c'est une garantie à 95 %, dans le fond. Dans les dernières années,
il y a eu uniquement deux cas où la Régie de
l'énergie a approuvé des baisses de tarifs d'électricité. Le reste des
dernières années a été une
augmentation des tarifs. La norme a été une augmentation des tarifs, puis la
norme sur un grand nombre d'années a été une augmentation des tarifs
supérieure à l'inflation.
M.
Marissal : D'accord.
Je comprends. Faisons un peu de logique mathématique. Si effectivement on est à l'inflation, à peu
près, là... C'est ce qu'on nous dit, c'est ce que le ministre
dit, c'est ce qu'Hydro-Québec dit, grosso modo, mal an, mal an, depuis
50 ans, on est à peu près à l'inflation. Mais, malgré tout, on se
retrouve, pour les dernières années, à un trop-payé
ou écart de 1,5 milliard. L'inflation n'est donc pas la garantie que les
contribuables et les consommateurs québécois paient leur électricité au
meilleur tarif.
M.
Brossard (Renaud) : En fait,
par rapport à ça, c'est pourquoi on regarde... Notre analyse, on la fait par
rapport à l'instauration du dernier
mode de fixation des tarifs, soit depuis 2004. Ce qu'on remarque, c'est que,
depuis 2004, par rapport à l'IPC du
Québec, la variation de l'IPC du Québec, les hausses tarifaires ont été en
moyenne 0,25 % plus élevées que la variation de l'IPC du Québec. Ça n'a
l'air de rien, 0,25 %, mais il y a un effet cumulatif, il y a un effet
multiplicateur qui se fait, et c'est
ce qui nous a donné le chiffre de 2,4 milliards de plus que les clients...
que les consommateurs résidentiels et agricoles, uniquement, ont payé en
plus de... qu'ils ont payé en plus que si les tarifs avaient été indexés à
l'inflation depuis 2004.
M. Marissal : Je continue. Si les 50 dernières
années forment l'étalon de mesure en faveur de l'IPC, on peut présumer qu'au cours des prochaines années, dans
10 ans, dans 20 ans, on aura payé trop cher encore. Il y aura encore
un surplus, qui, cette fois-ci, ne sera pas remboursé d'aucune façon,
puisqu'il n'y aura pas de mesure correctrice.
M.
Brossard (Renaud) :
Excusez-moi, je... La mesure du gouvernement est par rapport aux 50 dernières
années. La nôtre, pour arriver à
cette conclusion, est uniquement à partir du dernier changement de mécanisme.
Et ce qu'on voit, c'est que, depuis le dernier changement de mécanisme, les
Québécois ont payé 2,4 milliards de plus que ce qu'ils auraient payé
normalement, ce qui est une somme encore plus élevée que les trop-perçus. C'est
pour ça qu'on voit d'un bon oeil ce changement
tarifaire, parce que le passé n'est pas toujours garant du futur, mais c'est
certainement une indication de ce qui peut s'en venir.
M.
Marissal : Très bien. Si on poursuit sur cette logique, là, de
l'inflation comme plancher, je comprends que vous êtes totalement d'accord avec
ça. Par contre, vous considérez que, dans le résultat actuel, les Québécois ne
retoucheront pas toutes les sommes
qu'ils ont payées en trop. Vous parlez même... puis vous avez refusé le terme
«malhonnêteté intellectuelle» tout à l'heure, mais vous parlez de
tromperie. Pouvez-vous élaborer un peu là-dessus, s'il vous plaît?
M.
Brossard (Renaud) : En fait,
si je me souviens bien, ce terme-là, on l'utilise par rapport au remboursement
de 500 millions des comptes d'écart. Ce remboursement aurait de
toute façon été fait sur trois à cinq ans. C'est un compte amorti sur trois à
cinq ans. Donc, d'un point de vue financier, il revient à zéro sur une période
de trois à cinq ans.
Le fait de le
remettre de manière ponctuelle, c'est bien, ça met plus d'argent dans les
poches des Québécois plus rapidement.
En fait, non, ça ne met pas plus d'argent dans les poches des Québécois,
excusez-moi, ça remet de l'argent dans les
poches des Québécois plus rapidement qu'ils ne l'auraient eu normalement et
c'est pourquoi on demande, d'ailleurs, la bonification de ça par un 500 millions de
dollars provenant du fonds consolidé, pour assurer qu'il y a un remboursement
des trop-perçus.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député, en conclusion.
M.
Marissal : Oui. Vous avez dit aussi tout à l'heure qu'Hydro-Québec
pouvait augmenter comme il le voulait. Mais n'était-ce pas justement...
ou n'est-ce pas le rôle de la régie de s'assurer que ce ne soit pas le cas?
Le Président
(M. Lemay) : Alors, M. Brossard, sur ces paroles, je vous remercie
pour votre contribution à nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'après
les affaires courantes.
(Suspension de la séance à 11 h 40)
(Reprise à 15 h 28)
Le
Président (M. Lemay) :
Alors, à l'ordre, s'il
vous plaît! La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de
l'énergie et des ressources naturelles reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes
présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
appareils électroniques.
Cet après-midi,
nous allons entendre l'Association de l'industrie électrique du Québec,
l'Association québécoise des consommateurs industriels d'électricité
ainsi que le Conseil de la transformation alimentaire du Québec.
Alors, je
souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association
de l'industrie électrique du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, puis nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous demande de
vous présenter, ainsi que les personnes qui vous accompagnent, et ensuite vous pouvez
débuter votre exposé. La parole est à vous.
Association de l'industrie électrique du Québec (AIEQ)
M.
Tremblay (Denis) : Parfait.
D'abord, j'aimerais remercier la commission de donner le privilège de nous entendre aujourd'hui, puis en espérant que ça puisse apporter un éclairage peut-être
différent ou complémentaire des mémoires que vous avez pu recevoir.
Mon nom est
Denis Tremblay. Je suis P.D.G. de l'Association
de l'industrie électrique du Québec et je suis accompagné de François
Toussaint, qui est analyste pour l'association.
Alors, peut-être,
dans mon 10 minutes, je pensais peut-être, dans
un premier temps, présenter un peu
qui nous sommes, parce que je
pense que l'AIEQ est peut-être
un peu moins connue que d'autres organismes qui sont plus habitués des commissions
parlementaires.
• (15 h 30) •
Alors, l'AIEQ
est un organisme à but non lucratif qui a célébré ses 100 ans il y a déjà quelque temps. On représente divers
groupes, organismes qui représentent l'industrie électrique du Québec.
C'est un secteur économique de premier plan qui emploie 63 000 personnes,
qui contribue aux exportations du Québec à hauteur de 5 milliards de
dollars par année et il représente
4,4 % du PIB de la province. L'AIEQ contribue au rayonnement de
l'expertise et du savoir-faire de la capacité de l'industrie électrique
du Québec partout dans le monde.
On réunit, en
fait, cinq grandes catégories d'entreprises, que ce
soient des producteurs,
transporteurs, distributeurs d'électricité publics et privés; les fabricants d'équipement servant à la production,
au transport, distribution d'électricité; les fabricants de matériels électriques; les firmes de génie-conseil qui
ont une expertise liée à la production, au transport, distribution
d'électricité; et les entrepreneurs en construction qui ont une expertise liée
à la production, au transport, distribution d'électricité.
L'AIEQ
favorise le rayonnement au Québec et à l'international des entreprises
québécoises oeuvrant en énergie, tout
en favorisant le développement des connaissances en production, transport
d'énergies renouvelables à faibles émissions.
L'AIEQ est
intervenue à plusieurs reprises dans les grands débats publics liés à
l'énergie, et ce, tant au niveau des audiences publiques du BAPE, de la
Régie de l'énergie et en commissions parlementaires.
Peut-être
un petit sommaire de notre position par
rapport au projet de loi n° 34. L'AIEQ est favorable à l'initiative du gouvernement de simplifier le processus d'établissement des
tarifs de distribution d'électricité et surtout de les maintenir compétitifs et
prévisibles, et ce, sur une longue période. L'électricité occupe une place
prépondérante sur le développement et la capacité industriels du Québec. En
particulier, l'industrie lourde, qui constitue l'épine dorsale économique de plusieurs régions du Québec, a besoin
de tarifs d'électricité compétitifs et prévisibles. Cette vision à long terme du paysage énergétique du Québec est de
nature à favoriser les décisions d'investissement dont le Québec a grand
besoin et de poursuivre la croissance économique du Québec.
La décision du gouvernement de fixer les tarifs
sur une période de cinq ans et de les maintenir compétitifs est également très importante pour le distributeur
d'électricité. En connaissant les tarifs de la distribution d'électricité sur
une longue période, le distributeur a
une meilleure lecture du marché de l'énergie, ce qui lui permet de diminuer ses
risques d'affaires.
Par sa
fiabilité, son tarif compétitif et prévisible et ses émissions de GES minimes,
notre électricité suscite l'intérêt d'investisseurs étrangers nombreux,
soucieux de saisir les occasions d'affaires sobres en carbone.
L'établissement
de tarifs de distribution d'électricité compétitifs échelonnés sur une longue
période est de nature à encourager la consommation d'électricité verte au Québec,
au détriment d'autres sources énergétiques plus polluantes. La transition
énergétique qui transformera nos habitudes de consommation en énergie en sera
d'autant facilitée.
L'AIEQ est
d'avis que l'allègement du processus réglementaire, et la modification du rôle
de la Régie de l'énergie,
permettra d'accélérer les décisions d'investissement du distributeur. Ce
dernier pourra aussi diriger plus librement ses investissements en fonction des
besoins en évolution rapide des clients. Certains investissements pour
implanter les nouvelles technologies
requises pour poursuivre les efforts de réduction de GES ou répondre aux
besoins de leurs clients seront facilités. En somme, il nous apparaît
clairement que l'allègement du processus réglementaire sera bénéfique, car il sera de nature à simplifier les
investissements effectués par le distributeur en électricité au cours des
prochaines années et à améliorer la productivité dans la mise à niveau
de ses infrastructures.
L'AIEQ
souligne également que l'investissement effectué par le distributeur en électricité
génère d'importantes activités
économiques au Québec. En effet, les entreprises d'ici fournissent la très
grande majorité des produits et services nécessaires à la réalisation ou
à la réfection des projets d'infrastructures du distributeur, ce qui signifie
des retombées économiques importantes qui
sont générées grâce à la réalisation de ces travaux. Et ces investissements
effectués par le distributeur offrent de nombreuses occasions de
développement et d'innovation pour l'industrie électrique du Québec.
Alors, s'il
me reste quelques minutes encore, je voudrais juste compléter peut-être
sur un aspect qui est bien important
pour notre industrie, le fait aussi que
la simplification du processus tarifaire permettrait également
aux fournisseurs externes du
distributeur d'électricité de connaître plus rapidement les intentions de ce
dernier en ce qui a trait à ses investissements et aux projets d'infrastructures qu'ils souhaitent réaliser au cours de
l'année. Or, il est très important pour les entreprises de l'industrie électrique du Québec de bien connaître
les intentions du distributeur en électricité en ce qui a trait à ses
investissements afin de faciliter l'adaptation de leurs usines dans ce
contexte d'affaires.
L'AIEQ
rappelle qu'Hydro-Québec Distribution
a investi 665 millions de
dollars en 2018 et a réalisé plusieurs projets d'infrastructures.
Aussi, nous
insistons sur le fait que... la nécessité pour le distributeur en électricité
de poursuivre ses efforts de modernisation
en favorisant l'implantation de nouvelles technologies. L'innovation est un
élément essentiel au succès de la transition énergétique. En effet, la
réussite de cette transition repose en grande partie sur les technologies
particulières dans le domaine suivant :
production décentralisée, microréseaux, réseaux autonomes, stockage d'énergie,
mobilité électrique, cybersécurité, la liste est très longue, je vais
l'arrêter là. Mais je peux vous dire que c'est probablement une très bonne période pour considérer, de la part du gouvernement, de donner d'une certaine façon un peu plus de latitude aux
distributeurs pour exercer des choix
qui vont être de nature à stimuler l'innovation et implanter des nouvelles
technologies. Alors, je pense
que ça résume notre position.
Le
Président (M. Lemay) :
Parfait. Donc, si ça complète votre résumé, je vais céder la parole, à ce
moment-là, au ministre pour une période d'échange.
M.
Julien : Oui, merci. Merci, M. le Président. Merci beaucoup de venir
nous parler et de venir divulguer votre point de vue, qui est intéressant. Vous avez mentionné la notion de
tarifs compétitifs et la prévisibilité. Naturellement, là, je pense
qu'il n'y a personne qui peut nier qu'au Québec les tarifs d'électricité sont
compétitifs. Naturellement, je serais curieux
de vous entendre sur le fait de la prévisibilité, qu'on vient ici, avec le projet de loi, dire : Bien, c'est un gel,
première année, c'est pour, en fin de
compte, poser un geste jalon, et après ça on y va à l'inflation pendant les
quatre années suivantes.
Le marché ou les investisseurs, face à cette
proposition-là, vont se comporter comment? C'est quoi, l'avantage pour eux d'avoir ça comme énoncé, puisque, quand
on regarde l'historique, 15 ans, 50 ans, sur une période assez
longue, c'est quand même à
l'inflation un peu supérieure mais à la marge? C'est quoi, cet incitatif-là?
Qu'est-ce que ça procure aux investisseurs quand ils regardent le Québec
comme terre d'accueil?
Le Président (M. Lemay) : M.
Tremblay.
M.
Tremblay (Denis) : D'abord,
il faut dire qu'au Québec on a la chance d'avoir des tarifs d'électricité
les plus faibles en Amérique du Nord. Donc, au départ, je pense
que ça, c'est un élément très
important pour tout investisseur qui considère, disons, un endroit
intéressant pour investir ses sous.
Je dirais que
la prévisibilité, puis je pense que... Pour avoir siégé sur quelques
conseils d'administration, je vous
dirais, c'est extrêmement important de pouvoir compter sur des plans d'affaires
qui puissent s'appuyer sur des données économiques qui puissent être crédibles
dans le temps. Puis s'appuyer aussi sur des paramètres au niveau des intrants, puis l'énergie est un intrant très important pour
plusieurs décisions d'affaires, puissent être, d'une certaine façon,
extrêmement bien appuyés, et que le
gouvernement montre une préoccupation par rapport au maintien de conditions
prévisibles, ça nous apparaît un
élément très important, qui va être considéré sûrement de façon favorable par
plusieurs conseils d'administration d'entreprises qui vont avoir à
prendre des décisions d'affaires, d'investir au Québec.
M.
Julien : Parfait. Donc, quand vous mentionnez ça, bon, deux éléments,
là, que j'aimerais vous entendre, là. A
contrario, l'absence de prévisibilité du système actuel, puis je le réitère,
là, qui, dans le passé, a quand même donné des hausses plus ou moins marquées qui, sur une longue période, ressemblent
à l'inflation, un peu plus élevée. Mais est-ce que le fait que, bon an, mal an, un investisseur n'est pas en mesure de
projeter plus loin, en réalité, que 12 mois la hausse tarifaire de l'énergie fait en sorte que certains
investissements au Québec, dans le plan d'affaires, ont été plus complexes?
• (15 h 40) •
M. Tremblay
(Denis) : Moi, je pense que ça introduit une variable de plus. Puis je
pense que, dans tout plan d'affaires, quand
on peut éliminer des variables puis remplacer ça par des constantes puis de la
prévisibilité, ça donne beaucoup de
crédibilité, ça rajoute à la
crédibilité, finalement, des dossiers qui peuvent être présentés au niveau
des investisseurs. Alors, je
pense que ça, c'est très clair.
Puis on a
mentionné aussi un aspect très important qui a tendance à être négligé, c'est
que les manufacturiers au Québec sont
les premiers fournisseurs. Les premiers fournisseurs de ces investissements-là
sont des entreprises québécoises pour
la grande, grande majorité. Et souvent le fait du processus réglementaire qui
était quand même assez lourd, on parle de plusieurs mois, je dirais, avant
qu'il puisse y avoir des décisions de prises, que ce soit au niveau des tarifs
ou au niveau des plans d'investissement également, bien, ça crée des
délais aussi au niveau des entreprises du Québec, qui tardent, qui ne peuvent
pas savoir, finalement, très rapidement quels genres d'investissements vont
être faits, à quelle hauteur ça va être
fait, dans quels domaines, puis, éventuellement, ça peut nuire aussi à l'ajustement
de leur chaîne de production ou des investissements qu'eux-mêmes ont à
faire pour répondre à cette demande-là.
Donc, il y a
deux volets, à mon avis, là-dedans. Il y a le volet des entreprises québécoises
qui, quand même, vont bénéficier
d'une plus grande certitude par rapport aux investissements qui vont pouvoir se
faire. Le distributeur va pouvoir, d'une certaine façon, divulguer plus
rapidement ses intentions, parce qu'il ne peut pas divulguer rien tant que ça
n'a pas été approuvé, d'une certaine façon,
au niveau de l'investissement, par la régie. Alors, le fait qu'il puisse être
plus libre, d'une certaine façon,
d'exercer ses choix en fonction des priorités de ses clients, c'est de nature à
aider les entreprises du Québec et à aider aux investissements aussi.
Donc, la prévisibilité est très, très importante.
M.
Julien : Parfait. Mais est-ce que les gens, quand ils vous parlent de
cette prévisibilité-là et de l'importance de cette prévisibilité-là... Parce
qu'on a entendu certains groupes dans les médias, puis on va en entendre dans
les consultations, qui mentionnent : Oui, c'est beau, la prévisibilité,
mais on n'est pas sûrs qu'on paie le juste prix. On va juste le savoir
après cinq ans. Ça aurait pu être moindre
que l'inflation. Bon, a contrario, ça aurait pu être plus que l'inflation.
Alors, la valeur de la prévisibilité
par rapport au caractère précis, adéquat au temps réel... C'est quoi, en fin de
compte, la valeur qu'ils accordent à ces deux attributs-là? Parce qu'on
comprend que c'est gel plus augmentation à l'inflation, avec «rebasing» après
60 mois, s'il y a des écarts qui sont créés,
dans un processus de prévisibilité. Alors, un dans l'autre, là, qu'est-ce qui a
le plus de valeur pour l'industrie?
Le Président (M. Lemay) : M. Tremblay.
M.
Tremblay (Denis) : Oui,
bien, je pense qu'encore une fois le fait de rendre ça prévisible, à quelque
part, ça rend les choses beaucoup plus faciles pour tout le monde. Le fait
aussi que ce n'est quand même pas... Il y a un processus, après 60 mois, de revoir, finalement, tout ça
puis de repenser ça. Et, comme on dit, le passé est garant de l'avenir. Si on
regarde les 50 dernières années et
plus, les décisions vont plutôt dans le sens de supporter une désaugmentation à
l'inflation, peut-être un peu plus dans certains cas.
Donc, le fait
que le gouvernement considère qu'actuellement ce serait souhaitable d'axer sur
la prévisibilité, basée sur un
scénario qui est quand même assez raisonnable d'augmentation à l'inflation,
basée aussi sur le passé, bien, ça nous semble être une bonne décision. Donc,
ça va rendre les choses beaucoup plus transparentes, on peut dire, au niveau
des entreprises qui vont avoir à naviguer
dans ce nouveau contexte là. Elles vont pouvoir avoir accès peut-être à plus
d'information de la part du distributeur pour être capables de s'ajuster
correctement puis éventuellement de répondre à la demande correctement.
Et moi,
j'ajouterais une chose très importante aussi qu'il ne faut jamais perdre de
vue, c'est que c'est une industrie qui exporte beaucoup. Le Québec est un
champion de l'exportation au niveau manufacturier, en particulier, puis du
côté de l'expertise en énergie. Le fait
qu'on ait un contexte qui soit favorable pour que les décisions se prennent
plus rapidement, que les
investissements puissent se faire et qu'ils puissent être orientés de façon un
peu plus librement par le distributeur, c'est de nature à encourager les entreprises québécoises à innover
beaucoup et éventuellement à créer des produits qui vont être encore plus
en demande, on peut dire, à l'exportation.
M. Julien : Bien, c'est ça que je
voulais... Il me reste encore du temps, oui?
Le Président (M. Lemay) : Oui.
M.
Julien : Je voulais vous amener sur cet élément-là que vous avez
introduit dans votre discours tout à l'heure, là, la notion de l'efficience ou
de l'agilité du distributeur, qui favorise... qui favorise quoi pour les gens,
en fin de compte, de l'industrie?
M. Tremblay
(Denis) : Bien, on est dans
un contexte où, je vous dirais... Ce matin, puis ces temps-ci, à Montréal,
il y a le grand congrès CIGRE, la commission
internationale des grands réseaux électriques. Il y a 450 spécialistes, de
partout dans le monde, qui sont à
Montréal actuellement pour discuter des grandes tendances en termes
d'innovation, etc. Et j'ai été appelé à animer un panel, ce matin, disons, de
différents représentants de cette industrie-là, et ce qui nous attend,
c'est une révolution, c'est une révolution du côté de l'énergie, à quelque
part. Donc, ce qu'il faut voir, c'est qu'il faut donner un peu plus de coudées franches, je pense, au distributeur en
particulier, parce que la révolution, elle est beaucoup dans sa cour, contrairement au passé, où, peut-être, le
transporteur était un peu plus interpelé. Il y avait beaucoup de développements
technologiques à faire. Il y en a encore mais pas aussi fondamentaux, on peut
dire.
Actuellement, je dirais, si on peut
dire, la game, ça passe beaucoup au niveau de l'innovation du côté du
distributeur. Donc, il faut voir que
ça, ça va donner une certaine latitude, sans être un chèque en blanc, parce que
c'est quand même assez bien balisé par cette loi-là, pour que le distributeur
puisse exercer des choix sans avoir constamment à justifier, des fois,
je dirais, des essais ou de l'innovation qui peut être par nature même un peu
plus audacieuse et éventuellement nécessaire. Parce
que, si on n'innove pas, à la limite, on régresse dans un contexte comme ça. Il
y a beaucoup, actuellement, d'exemples de
régions, dans le monde, qui innovent énormément, qui... Donc, le Québec doit
suivre la cadence, à quelque part. Je pense que ce contexte-là va permettre, à
notre avis, au distributeur de mieux... avoir plus de coudées franches par
rapport à ses investissements par rapport à ça.
M.
Julien : Juste pour être bien certain de saisir... parce que, quand
vous parlez de coudées franches, c'est... On donne quand même des
paramètres assez prescrits... La coudée franche, est-ce que je dois la
concevoir, là... puis c'est comme ça que
moi, je la conçois, là, c'est : dorénavant, vous connaissez vos revenus,
vos revenus sont fixés de cette façon, vous
gérez vos risques, et à la fin, oui, ça donne... il y a de l'imputabilité par
rapport, en réalité, à la gestion de risque, qui permet d'innover. Mais ils vont connaître les revenus qui sont
sous-jacents de toute façon. C'est gel, inflation. Donc, est-ce que
coudées franches égale risques supplémentaires pour la clientèle, ou non, pour
vous?
M. Tremblay (Denis) : Je pense qu'il y a quand même
un certain risque qu'il faut reconnaître du côté du distributeur, parce qu'il y a quand même un cadre qui est assez
restrictif, hein? L'inflation, ce n'est quand même pas le Klondike, comme
on dit, mais c'est un cadre qui a été bien établi puis qui est basé sur des
données historiques, à quelque part.
Et
donc il y a un certain risque du côté du distributeur, mais je pense que c'est
un risque qui est balancé, à quelque part. Parce que, d'une certaine façon, le
distributeur est appelé à innover, il doit le faire dans un cadre qui est assez...
qui n'est pas pénalisant pour la clientèle,
puis ça, c'est très important. Il n'y a pas de perte, on peut dire, qu'on peut
imaginer... On peut toujours argumenter
qu'il y aurait peut-être un plus, un moins une année, puis peut-être un moins,
un plus l'année suivante, mais, au
total, je pense que, basé sur l'historique, tout le monde va reconnaître qu'il
n'y aura pas de grands écarts par rapport, on peut dire, aux
augmentations qui, dans le passé, ont été accordées, à quelque part.
M.
Julien : Parfait. Donc, quand vous dites : «Risque pour le
distributeur», c'est-à-dire que, quand on mentionne, nous, que le p.l. n° 34,
là, puis quand on l'a réfléchi, puis la proposition qu'on fait aujourd'hui,
c'est de dire : On transfère le risque au distributeur, la
clientèle sait à quoi s'attendre. Naturellement, après cinq ans, on va venir
revalider qu'il n'y a pas eu, en fin de compte, d'écart qui s'est créé. On l'a
basé sur l'historique, un peu sous l'historique.
Mais le distributeur
maintenant gère son risque, est imputable de son risque et de sa performance
sur certaines innovations. Donc, je
m'interroge... Le contrecoup clientèle, industrielle ou résidentielle, on sait
où on s'en va, c'est prévisible?
M. Tremblay (Denis) : Tout à fait, je pense que vous avez raison de penser... de présenter ça
de cette façon-là. Je pense que,
d'une certaine façon, comme dans toute entreprise, soit dit en passant, qui a
un conseil d'administration qui va
challenger beaucoup... Hein, c'est là pour ça, un conseil d'administration,
aussi, pour challenger les plans d'investissement, les orientations
stratégiques.
Alors,
on a quand même une gouvernance qui est éprouvée depuis bien des années, à
Hydro-Québec. Moi, je pense qu'on peut avoir confiance que cette
gouvernance-là, avec la latitude quand même raisonnable qui est donnée dans
le projet de loi n° 34, prenne les
bonnes décisions et éventuellement donne au distributeur, finalement,
l'opportunité de diriger ses investissements d'une façon qui puisse
être...
Mais,
d'une certaine... Vous avez raison, à mon avis, de considérer que c'est un
risque qui est, d'une certaine façon, transféré au distributeur, parce qu'il
n'y aura plus d'augmentation, on peut dire, en fonction de paramètres qui
peuvent être plus comptables, basée
sur le passé. On parle de lui donner une certaine latitude pour qu'il
accomplisse sa mission, qu'il innove aussi beaucoup dans les prochaines
années.
Dans
les quatre prochaines années, c'est une période très charnière au niveau de
l'innovation dans ce secteur-là. Et je suis certain que le conseil
d'administration va être particulièrement exigeant par rapport à cet
impératif-là d'innover et va pouvoir
donner finalement encore plus de pression, je ne sais pas si on peut dire, au
niveau du distributeur, pour atteindre ces objectifs-là.
• (15 h 50) •
M.
Julien : Parfait. Dernier élément, Association de l'industrie
électrique du Québec, vous avez parlé, en fin de compte, qu'on fait face, en fait, à une situation de bouleversements en
termes électriques. Puis je pense qu'on doit... ça doit faire cinq, six ans que
c'est comme ça, puis ça s'accentue. Donc, peut-être que c'est le temps
opportun, justement, d'amener une
révision, considérant que probablement qu'il y a 10, 15, 20 ans ça
naviguait plus tranquille, mais là c'est des changements, transition
énergétique, véhicules électriques, etc.
Donc, c'est une
effervescence nouvelle dans l'écosystème depuis cinq, six ans?
M. Tremblay (Denis) : Absolument. Du côté du distributeur, il n'y a pas
de doute que c'est un élément nouveau. Moi, je dirais, je suis quand même dans
l'industrie depuis quelques années, il y a quelques années, le distributeur,
c'était là où il ne se passait pas
grand-chose, là, tu sais, sans vouloir être... Mais maintenant c'est tout le
contraire. Toute la dynamique, actuellement, de l'innovation, de la relation
client qui est complètement bouleversée, des agrégateurs qui viennent...
demain matin qui vont offrir des solutions nouvelles aux clients, parce qu'ils
ont des relations aussi intéressantes avec le client, bien, il faut
qu'Hydro-Québec se prépare à ça, puis il faut que le distributeur aussi se
prépare à ça correctement.
Et le Québec est peut-être un peu plus
épargné, on peut dire, qu'ailleurs par rapport à ces grands bouleversements là
parce qu'on a la chance d'avoir des tarifs quand même très avantageux. Mais le
Québec ne sera pas épargné, c'est clair et net qu'il y a, je dirais, un
raz-de-marée en termes de changements, qui sont beaucoup supportés par la
disponibilité d'information, qu'on n'avait
pas dans le passé. Vous savez, si on pense que, dans le taxi, ça a brassé
beaucoup, imaginez-vous ce que ça
peut être dans le domaine de l'énergie. Parce que c'est la même dynamique, là,
c'est la numérisation, c'est la
transformation de l'industrie à partir d'un flot d'informations qui n'étaient
absolument pas disponibles dans le passé. Le client qui va pouvoir exercer des
choix, qui va pouvoir peut-être même produire sa propre énergie, va peut-être
pouvoir en vendre demain matin à
Hydro-Québec, c'est une dynamique complètement différente. Ça exige des technologies
qui n'existent même pas, dans lesquelles le Québec devrait se démarquer.
M. Julien :
Merci. Merci beaucoup.
Le Président
(M. Lemay) : Merci beaucoup, M. Tremblay. Donc, je vous
remercie pour votre exposé.
Nous
allons maintenant commencer la période d'échange avec le député de l'opposition
officielle, M. le député de Laval-des-Rapides. La parole est à vous.
M. Polo :
Merci beaucoup, M. le Président. Je voulais tout d'abord saluer
M. Tremblay et son collègue M. Toussaint. Merci pour votre
présentation.
M. Tremblay,
en tant que P.D.G. de l'Association de l'industrie électrique du Québec, vous
représentez combien de membres?
M. Tremblay
(Denis) : On représente un écosystème d'à peu près
350 entreprises. Bon an, mal an, l'AIEQ a à peu près 100 à
125 membres qui représentent cet écosystème-là.
M. Polo :
Est-ce que le ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles est membre de
votre association?
M. Tremblay
(Denis) : Non.
M. Toussaint
(François) : Oui...
M. Tremblay
(Denis) : Est-ce que vous l'êtes? Je...
M. Toussaint
(François) : Oui, ils le sont.
M. Tremblay
(Denis) : O.K., ils le sont, excusez-moi. Je n'avais pas cette
information...
M. Polo :
La réponse est oui, c'est même disponible sur votre site Internet. Est-ce
qu'Hydro-Québec est membre de votre organisation?
M. Tremblay
(Denis) : ...au même titre que les 125 autres, oui.
M. Polo :
Est-ce qu'Hydro-Québec est membre de votre conseil d'administration?
M. Tremblay
(Denis) : Oui, absolument.
M. Polo :
Parfait. M. le Président, honnêtement, vous êtes témoin des échanges que les
différentes formations politiques, nous avons
lorsque vient le temps de préparer des audiences publiques. Et vous savez que
c'est une formule de négociation
entre les différentes formations publiques, entre nos leaders, pour déterminer
l'ordre, déterminer la séquence des organisations que nous recevons.
Malheureusement,
en tout respect, M. Tremblay, l'exercice que nous faisons aujourd'hui,
c'est un exercice où nous cherchons à, si on peut dire, décortiquer le projet
de loi n° 34. Et, lorsque nous avons une association, en tout respect
encore, qui vient nous présenter son
mémoire, qui vient, si on peut dire, supporter à 100 % la proposition du
gouvernement sous la forme du p.l.
n° 34 et que non seulement le ministère de l'Énergie et des Ressources
naturelles est membre de l'organisation, mais qu'Hydro-Québec, qui est
au centre même du projet de loi n° 34, est non seulement membre, mais
membre du conseil d'administration, je pense
que les gens qui nous écoutent ici pourraient se questionner à savoir quelle
est l'indépendance des propos
tenus — indépendamment
de M. Tremblay ou qui que ce soit — quelle est l'indépendance des propos tenus,
quel est l'apport de l'argumentaire qui est
présenté aujourd'hui face au projet de loi n° 34 si on a devant nous une
organisation qui a pour membres
autant le ministère que la société d'État visée par le projet de loi
n° 34, et la société d'État est membre du conseil d'administration. À une
autre époque, M. le Président, vous étiez membre du parti de l'opposition, vous
auriez dit : Ça ressemble à des questions plantées.
M.
Martel : M. le Président, écoutez, je ne sais pas, mais je ne suis pas habitué à
cette formule-là, mais on a des invités ici, il me semble que le
député...
M. Polo : Est-ce que c'est une question
de règlement, M. le Président?
M.
Martel : ...devrait profiter de la présence des députés pour
les questionner.
M. Polo :
Est-ce que c'est une question de règlement?
Le
Président (M. Lemay) : M. le député, je comprends que le député
de Laval-des-Rapides est en train
de me poser une question,
donc j'attends la fin de sa question avant de lui répondre. Mais, M. le député, si vous voulez procéder avec la fin de votre question.
M.
Polo : Bien, en fait, je...
la fin de ma question, je
pense que c'est une question
ouverte qui reste en suspens, parce
que
vous comprendrez que j'ai un malaise, en tant que parlementaire, et pas juste de ce côté-ci de la table, je regarde mes collègues
de l'autre côté... Nous essayons de faire un travail en toute transparence,
dans lequel nous essayons de décortiquer le projet de loi n° 34, de questionner les différents intervenants, de les écouter
et, par la suite, de les questionner en tout respect. Mais ce que nous souhaitons
aussi, c'est d'avoir des intervenants qui viennent apporter de façon
indépendante une contribution
à l'exercice parlementaire, à l'exercice démocratique que nous faisons. Et
aujourd'hui nous avons une association — j'ai posé des questions très
tranquillement — une
association qui a pour membres autant le ministère duquel découlent les
responsabilités du ministre, autant la société d'État qui est visée par le
projet de loi lui-même.
Alors, je peux
procéder avec mes questions...
Le
Président (M. Lemay) : Bien sûr, M. le député de Laval-des-Rapides. En
fait, je comprends que le choix des groupes, c'est le choix, comme vous l'avez
si bien mentionné, d'une discussion entre les différents bureaux des leaders.
Donc, je vous invite maintenant à procéder à votre question avec les témoins
qui sont ici présentement.
M.
Polo : C'est ce que je disais, je vais procéder avec mes questions, M.
le Président. Ceci dit, je pense que j'ai semé assez de doute sur l'indépendance des propos qui sont tenus ici par
cette association-là. Merci beaucoup, M. le Président.
M.
Tremblay, selon vous, le projet de loi répond-il à la promesse de la CAQ de
rembourser l'ensemble des trop-perçus?
M. Tremblay (Denis) : Là-dessus, je vous dirais qu'on n'a pas nécessairement fait une analyse
spécifique de... Parce qu'on n'analyse pas les plateformes politiques,
là, ce n'est pas, je dirais, notre mandat premier, là. Moi, je ne pourrais pas être en mesure de répondre à cette
question-là. Je pense que vous allez probablement recevoir des économistes
qui vont être probablement plus équipés
qu'on peut l'être pour répondre spécifiquement à ça. Donc, je ne pense pas que
je puisse répondre à cette question-là.
Le Président (M.
Lemay) : M. le député, pour votre prochaine question.
M.
Polo : M. Tremblay, pensez-vous qu'Hydro-Québec devrait déposer un
dossier tarifaire pour l'année 2020-2021?
M. Tremblay
(Denis) : Moi, je pense qu'on est ici pour commenter le projet de loi
qui nous est... Puis nous, on l'a évalué de cette façon-là. Le gouvernement
propose, finalement, de reporter pour le distributeur, et non pas pour le transporteur mais uniquement pour le
distributeur. Nous, on a évalué... Dans le fond, on a basé notre avis, qu'on
partage avec vous, avec le plus
d'indépendance possible, en tout cas, je tiens à vous rassurer là-dessus, qui
représente très bien le point de vue
de l'industrie qu'on représente, ça, je peux... L'industrie qu'on représente,
bien, c'est beaucoup de monde, alors on pense que c'est quand même assez
représentatif.
Par rapport à ça, je
vous dirais, nous, on considère que le projet de loi n° 34 arrive à un bon
moment parce que ça va donner, d'une certaine façon, au distributeur, la
latitude qui lui manquait jusqu'à maintenant pour pouvoir investir dans des... de la bonne façon dans un contexte de
changements extrêmement rapides. On parle d'agilité. Alors, cette agilité-là
est absolument essentielle dans le contexte, là.
Donc,
je veux vous dire qu'à choisir entre ce que vous venez de dire et le projet de
loi n° 34 on pense que le projet de loi n° 34 apporte quelque
chose de plus dans ce contexte-là.
Le Président (M.
Lemay) : M. le député de Laval-des-Rapides.
M.
Polo : M. Tremblay, la présentation d'un dossier tarifaire une fois
aux cinq ans permettra-t-elle de nous assurer du juste prix pour
l'ensemble de la période à venir?
M. Tremblay
(Denis) : À notre avis, considérant le passé, les 50 dernières
années, puis considérant le fait que ces augmentations-là sont probablement
légèrement en deçà de l'historique passé, on pense que oui.
M. Polo :
M. Tremblay, selon vous, est-ce que la mesure de l'inflation est assez
prévisible comme impact sur l'inflation? Est-ce que les prévisions sur
50 ans aident à déterminer un juste prix?
• (16 heures) •
M. Tremblay (Denis) : Il faudrait définir qu'est-ce que c'est, un juste prix, exactement. Si
on considère de façon globale qu'au Québec on paie, je dirais, les taux
les plus avantageux en Amérique du Nord, on peut d'ores et déjà considérer qu'on est dans une position très
avantageuse. Et les augmentations qui sont proposées sont à l'évidence, à leur
face même, raisonnables, d'une certaine
façon. Donc, dans ce sens-là, on peut dire que c'est un contexte qui augmente
la prévisibilité.
Puis,
encore une fois, on a eu beaucoup de questions sur la prévisibilité, c'est un
facteur extrêmement important pour les investissements. Puis vous le savez, les
investissements, au Québec, c'est quelque chose qui est... une lacune qu'il faut essayer de corriger, parce que... Il y a
un déficit d'investissement, au Québec, qu'il faut essayer de corriger, alors la prévisibilité,
à notre avis, est un élément fondamental qui peut aider.
Le Président
(M. Lemay) : M. le député.
M. Polo : M. Tremblay, en tant que P.D.G.
de votre organisation, avez-vous déjà demandé une
simplification du processus de tarification?
M. Tremblay (Denis) : Non, on n'a pas demandé de simplification du processus. Je ne sais pas en vertu de
quelle tribune on aurait pu le faire, mais ce n'est pas notre rôle premier, je
dirais, d'initier ce genre de demande là, comme tel.
M. Polo : Est-ce que vos membres vous ont fait part que le
processus actuel est un processus qui nécessite d'être simplifié?
M. Tremblay (Denis) : Je dirais que, de façon générale, ce que tout le
monde constate... Et je parlais tout à l'heure de la prévisibilité. Au niveau
des entreprises manufacturières, en particulier, le constat qu'on entend
souvent, puis peut-être qu'il y a un
corollaire avec la question de la prévisibilité, c'est qu'il n'y a pas assez de
vision sur les investissements, il manque
de vision au niveau des investissements parce qu'il y a une lourdeur au niveau
du processus. Ça, on entend souvent ça dans l'industrie. Donc, il n'y a pas
personne dans l'industrie qui m'a dit : Va donc demander une révision,
parce que ce n'est pas notre mandat, mais je peux vous dire que le sentiment
général, dans l'industrie, c'est qu'il y a de la place à de
l'amélioration puis à rendre ça plus fluide.
Le Président
(M. Lemay) : M. le député, vous avez encore du temps.
M. Polo :
M. Tremblay, pour toute modification des tarifs, Hydro-Québec devra
demander une autorisation au gouvernement pour modifier les tarifs, qui, par la
suite, devra faire un décret de préoccupation. Selon vous, est-ce que la régie
est 100 % indépendante si le gouvernement est impliqué dans le dépôt de la
demande tarifaire?
M. Tremblay
(Denis) : Vous rentrez dans le processus, je pense, qui est proposé
par le projet de loi n° 34, ce que je comprends. On n'a pas fait l'analyse
détaillée du processus dans le sens de votre question, donc on n'est pas en
mesure de répondre vraiment adéquatement.
M. Polo :
Excusez-moi, je perds ma voix. Écoutez, M. le Président, je vais terminer en
quelques instants, là, mais en vous disant : Moi, tout comme mes collègues
des deux côtés, ici, de la table, nous prenons notre travail très au
sérieux. Et je sais que ce n'est pas facile,
les leaders négocient, on aboutit à une liste de différents groupes, mais, afin
de prendre notre travail au sérieux, il faudrait avoir des organisations
qui sont complètement indépendantes.
M. Girard
(Lac-Saint-Jean) : M. le Président, question de règlement.
Le Président
(M. Lemay) : M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : J'invoque l'article 211, on remet en doute,
là, le choix des groupes qui ont été déjà entendus, préalablement. Donc, moi, j'aimerais
qu'on revienne à la pertinence du débat. Et on a des gens, ici, qui sont là
afin d'être consultés.
Le
Président (M. Lemay) :
Merci, M. le député. En fait, M. le
député de Laval-des-Rapides, vous avez une opportunité de pouvoir discuter avec les témoins. Ceci étant dit, votre
temps est maintenant écoulé, je vais céder la parole au député de
Jonquière pour sa période d'échange.
M. Gaudreault :
Oui, M. le Président. Merci. Je pense que j'ai besoin du consentement pour que
le deuxième groupe d'opposition transfère son temps sur le mien, alors
je demande le consentement des collègues.
Le Président
(M. Lemay) : Est-ce qu'il y a consentement?
Des voix :
Consentement.
Le Président
(M. Lemay) : Allez-y, M. le député.
M. Gaudreault :
Merci. Merci beaucoup. Bienvenue. Bon, votre présentation est très
intéressante, mais il y a un élément,
c'est peut-être moi qui ne comprends pas, là... Je voudrais être sûr de bien
comprendre le lien que vous faites entre le projet de loi n° 34 et la transition énergétique. Quand vous nous
dites, à la page 7, en bas de votre mémoire... en bas de la page, c'est-à-dire : «Cette transition
énergétique, et les stratégies gouvernementales qui sont élaborées pour assurer
son succès, exigera des changements importants dans nos habitudes de
consommation — moi,
je suis super d'accord avec ça, là. Il
s'avère donc très important que le Québec maintienne les tarifs de distribution
d'électricité compétitifs et prévisibles...» Je veux bien comprendre en
quoi le projet de loi n° 34 devient soudainement le
Saint-Graal de la transition énergétique.
M. Tremblay
(Denis) : Non, je ne pense
pas que ce soit le Saint-Graal, M. Gaudreault, mais je pense qu'il faut
reconnaître que ça donne une latitude
supplémentaire au distributeur. Je pense qu'il y a beaucoup d'exemples, qui ont
été, d'ailleurs, cités encore, je vais utiliser un petit peu le verbatim, ce
matin, de M. Fillion, entre autres la conversion au mazout qui a été
bloquée par la régie à une certaine étape. On parle bien de la conversion au
mazout, là, c'est-à-dire, on est dans
un contexte d'urgence climatique, de réduction de gaz à effet de serre. Il
reste qu'on voit bien les limitations d'un processus réglementaire qui
est bien intentionné mais qui, dans certains cas, peut entraîner des lourdeurs
puis éventuellement freiner les efforts
légitimes que le distributeur est prêt à faire, probablement, puis dans le contexte d'une nécessité d'agir. Donc, c'est dans ce sens-là. Je ne pense pas qu'on
parle de Saint-Graal, là, ce n'est pas ça qu'on a dit dans le document, là.
M. Gaudreault :
Non, ça, c'est mon expression à moi, là, mais c'était pour bien comprendre.
Mais je trouve que c'est quand même gros, là, la réforme du projet de loi
n° 34, par rapport à l'objectif d'avoir plus de flexibilité, d'avoir
une régie de l'énergie qui est davantage adaptée à la réalité de l'urgence
climatique, comme vous le dites. Il me semble qu'il y aurait un juste milieu. Si c'est juste d'avoir des règlements qui sont désuets,
c'est une chose, mais, de changer la loi
pour permettre au gouvernement d'agir politiquement dans la fixation des
tarifs, je trouve que c'est comme vouloir tuer une mouche avec un bat de
baseball, là.
Le Président (M. Lemay) :
M. Tremblay.
M. Tremblay
(Denis) : Oui. Bien, on peut
argumenter un peu autour de ça, mais je pense que ce qui est quand même...
qui nous apparaît raisonnable dans ça, parce
qu'il y a une recherche de balance, je pense, dans tout projet de loi, puis je
pense qu'il faut essayer de la retracer aussi dans ce projet de loi là, c'est
que, premièrement, on instaure une prévisibilité, finalement, qui est
encadrée par une augmentation à l'inflation qui est quand même, on peut dire,
basée sur les données historiques raisonnables. Donc, dans ce sens-là, nous, on
voit une forme de recherche de balance et d'équilibre par rapport à ça. Parce que, d'une certaine façon, on
essaie de donner des moyens au distributeur, je pense, à travers ce projet
de loi là, de faire sa mission dans un
contexte d'urgence, dans un contexte de transformation. Donc, on pense que,
dans ce sens-là, la lourdeur du processus, qui était décrite encore ce matin
par M. Filion, quand on parle de huit mois pour arriver à, finalement, une réponse qui est presque déjà
écrite d'avance... Si on se fie sur le passé, on se dit : Si ces
énergies-là pouvaient être consacrées
à des choses, peut-être, encore plus du domaine de la transformation puis de
l'agilité, bien, ce serait bon pour tout le monde. Finalement, c'est ce
qu'on dit.
M. Gaudreault :
O.K. Bon, vous insistez beaucoup dans votre présentation sur la compétitivité
industrielle du Québec, sur les
opportunités d'affaires reliées à l'énergie hydroélectrique, qui est propre,
qui est à bon marché. Mais je suis allé lire le mémoire de l'Association
québécoise des consommateurs industriels d'électricité, bien, eux autres, pour
les mêmes raisons de compétitivité, de croissance économique, ils ont un point
de vue complètement contraire au vôtre. Parce qu'ils nous disent que, finalement, il va y avoir une augmentation des
tarifs, et ça, ça devient une taxe déguisée. C'est leurs propos. Et, en raison
de la vive concurrence internationale, ça va nuire à des décisions
d'investissement puis d'implantation d'entreprises
au Québec, et ce, malgré que le projet de loi n° 34 donne une chance de
plus au tarif L par rapport au tarif résidentiel,
par exemple, là, dans... parce qu'il doit être indexé, multiplié par 0.65, là,
selon l'article 2 du projet de loi n° 34.
Comment vous
pouvez expliquer que vous êtes autant à des antipodes avec les consommateurs
industriels d'énergie?
M. Tremblay
(Denis) : Bien, je pense que
c'est... En fait, c'est une position qui n'est pas surprenante, là, venant
des consommateurs industriels, puis c'est
tout à fait légitime de leur part, je pense, de demander ce genre de... de
faire ce genre de demande là. Moi, je ne le vois pas comme étant une
contradiction par rapport à ce qu'on décrit ici.
Ce qu'il faut voir, c'est que le contexte des
tarifs, c'est un... c'est-à-dire, les discussions sur les tarifs sont très polarisantes. Ce n'est pas d'hier, je ne vous
apprends rien en vous disant ça, là. D'ailleurs, l'AIEQ, historiquement, s'est
très peu prononcée sur les tarifs, entre
autres pour cette raison-là, parce que c'est un lieu de polarisation extrême,
là. Il y en a qui vont prétendre
qu'il faut augmenter les taux pour des questions d'efficience, d'efficacité,
etc. Il y en a d'autres, comme l'AQCIE, qui vont plutôt, évidemment,
plaider pour une réduction.
M. Gaudreault : Mais c'est...
Le Président (M. Lemay) :
Alors, M. le député, désolé, c'est ce qui termine votre période d'échange.
Donc, M. Tremblay et M. Toussaint, je vous remercie pour votre
contribution aux travaux de la commission.
Je suspends
donc les travaux quelques instants afin de permettre aux représentants de l'Association
québécoise des consommateurs industriels d'électricité de prendre place.
Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 10)
(Reprise à 16 h 13)
Le Président (M. Lemay) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Et je souhaite la bienvenue aux représentants
de l'Association québécoise des
consommateurs industriels d'électricité, et je vous rappelle que vous disposez
de 10 minutes pour votre exposé,
puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter, ainsi que les personnes qui vous
accompagnent, ainsi qu'ensuite à procéder à votre exposé. Donc, la parole
est à vous.
Association québécoise des
consommateurs
industriels d'électricité (AQCIE)
M. Allard
(Jocelyn B.) : Merci, M. le Président. M. le ministre de l'Énergie et
des Ressources naturelles, Mmes et MM. les
députés, permettez-moi tout d'abord de remercier la commission de nous permettre
de participer aux discussions entourant l'analyse du projet de loi
n° 34.
Je
me présente : Jocelyn B. Allard, président de l'Association québécoise des
consommateurs industriels d'électricité, l'AQCIE. Je suis accompagné de Mme Marianne Huot, première vice-présidente du conseil d'administration de l'AQCIE; de Mme Lynne Raymond, trésorière de l'AQCIE; et de M. Olivier
Charest, président du conseil
d'administration de l'AQCIE.
Ces personnes sont des dirigeants de trois grandes entreprises industrielles du
Québec membres de l'AQCIE.
Alors,
nous avons soumis un mémoire détaillé à cette commission et nous souhaitons aujourd'hui souligner les grandes lignes
de notre analyse et ainsi apporter des pistes de réflexion supplémentaires aux membres de la commission, ce
qui, nous l'espérons, favorisera un encadrement de la tarification de l'électricité, pour les consommateurs industriels, qui
soit aligné avec la réalité des entreprises.
Alors,
nous représentons les plus importants consommateurs d'électricité à des fins
industrielles, ceux qui paient les
factures d'Hydro-Québec. Nos membres sont actifs dans plusieurs
secteurs de l'économie québécoise, comme l'agroalimentaire, l'aluminium, l'acier et les produits chimiques.
Les industries dont nous défendons les intérêts consomment plus du tiers de l'électricité vendue par Hydro-Québec Distribution. Nos membres sont
présents dans plusieurs des régions du
Québec. Ils offrent des dizaines de milliers d'emplois parmi les mieux
rémunérés du secteur industriel et, en plus, ceux soutenus chez leurs
fournisseurs de biens et services.
Depuis
sa création, en 1997, la Régie de l'énergie remplit, de manière efficace et
transparente, son mandat de concilier l'intérêt
des consommateurs d'électricité et les demandes du monopole d'État qu'est
Hydro-Québec. Nous tenons à réitérer aujourd'hui l'importance de
maintenir un forum indépendant pour fixer les tarifs d'électricité du monopole
qu'est Hydro-Québec Distribution. La régie
donne l'opportunité aux consommateurs d'examiner les demandes de la société
d'État, de questionner et, au besoin,
effectivement, de contester les budgets réclamés par celle-ci, vu l'impact sur
les tarifs résultant des dépenses et
des investissements d'HQD. Les grandes entreprises industrielles jugent
essentielle la transparence de ces échanges publics annuels devant la
Régie de l'énergie. C'est la meilleure façon de limiter l'appétit du monopole.
L'expérience
nous a d'ailleurs démontré que, lorsque la régie agit comme un régulateur
indépendant, sans ingérence politique,
les consommateurs ont payé des tarifs d'électricité inférieurs à l'inflation. À
l'inverse, on se souviendra de la saga de l'énergie éolienne achetée à
prix fort et en situation de surplus au détriment des clients d'Hydro-Québec.
C'est en effet le gouvernement, et non la régie, qui avait obligé Hydro-Québec
à acheter cette énergie superflue, entraînant du coup d'importantes hausses de
tarifs. Notons qu'il n'a été possible d'arrêter l'hémorragie qu'à la suite de
reportages médias qui tiraient leurs
renseignements dans les données publiques contenues aux dossiers de la régie,
ce que le projet de loi n° 34, malheureusement, propose maintenant
d'abroger ou de sérieusement limiter.
Le système en vigueur
présentement correspond d'ailleurs à la manière de réglementer les monopoles
d'utilité publique en Amérique du Nord.
C'est ce qui avait mené à la création de la Régie de l'énergie à l'origine. Et
suivre la voie proposée par le projet
de loi n° 34 est un recul pour le Québec. Les dirigeants des usines
grandes consommatrices d'électricité d'ici
ne veulent pas voir le Québec faire bande à part en matière de fixation de
tarifs d'électricité. Le respect des principes de base en matière de
réglementation d'un monopole comme HQD est primordial pour maintenir la
confiance des clients et de leurs hauts dirigeants, souvent localisés à
l'extérieur du Québec. Ils ne veulent pas que ces dirigeants-là croient
que la fixation des tarifs au Québec est un exercice aléatoire, une espèce de
boîte noire.
À
toutes fins pratiques, le projet de loi n° 34 élimine ce système
transparent de fixation des tarifs au détriment de tous les consommateurs d'électricité. Nous devons donc
nous opposer aux changements majeurs que le projet de loi introduit, notamment la suppression des outils pour défendre les droits des
consommateurs d'électricité du Québec tout en donnant plus de
pouvoir au monopole qu'est HQD. De plus, nous constatons que les tarifs qui
seraient payés au terme de ce projet de loi seraient plus élevés pour
l'ensemble des consommateurs du Québec.
L'approche
proposée dans le projet de loi n° 34 sépare les tarifs des coûts qu'ils
sont censés refléter. En prévoyant indexer
les tarifs selon le taux d'inflation plutôt qu'en fonction de l'évolution des
coûts réellement requis par HQD pour servir ses clients, on favorise des tarifs
qui permettront à HQD de générer des revenus supérieurs à ses besoins. On
mettrait donc en place une tarification qui
permettra au gouvernement du Québec d'encaisser, sans suivi et sans partage
avec les clients, comme c'est le cas présentement, la totalité des
futurs trop-perçus.
À
cet effet, nous avons calculé, vous avez dans les annexes à notre mémoire, les
rendements excédentaires qu'HQD engendrerait sur la période de cinq ans
de 2020 à 2025 grâce au projet de loi n° 34. Nous avons constaté que le
projet de loi n° 34 permettrait à HQD de générer 559,3 millions de
dollars de trop-perçus additionnels sur cette seule période. Un ajout de cet ordre à la facture d'électricité
des Québécois représente une augmentation de 35 % des trop-perçus. Le
projet de loi n° 34 engendrera donc des
tarifs qui ne seront pas justes et raisonnables, expression de la loi, et qui
généreront des rendements au-delà du rendement raisonnable, également
expression de la loi, pour l'actionnaire d'HQD. Le projet de loi n° 34 vient d'ailleurs neutraliser le
mécanisme de partage des surplus futurs que la régie avait mis en place depuis
2018, et ce, en éliminant la possibilité pour les clients d'obtenir leur juste
part des trop-perçus d'HQD. Les tarifs n'étant plus fixés en fonction des besoins réels d'Hydro-Québec, il s'agit ni
plus ni moins de taxation déguisée et non de tarification de
l'électricité.
• (16 h 20) •
Une
tarification plus élevée que requise aura un impact direct négatif sur la
production des grandes entreprises du Québec,
industrielles, pour qui l'achat d'électricité, chez nos membres par exemple,
représente de 25 % à 70 % des coûts d'exploitation. Le
gouvernement du Québec a lui-même reconnu ce fait à maintes occasions,
notamment dans sa plus récente politique
énergétique, où on peut y lire que les tarifs d'électricité avantageux
expliquent que les industries grandes consommatrices d'électricité se
sont installées en sol québécois. Effectivement, les opportunités
d'investissement ne manquent pas à l'échelle
planétaire. En raison de l'importance qu'occupe l'achat d'électricité dans les
coûts d'exploitation des industries
grandes consommatrices d'électricité, ainsi qu'à la perspective de long terme
associée à leur investissement, ces
derniers ne peuvent être consentis que dans un contexte de compétitivité et de
transparence dans la fixation des tarifs.
L'arbitrage des investissements de leurs
différentes filiales est aisé à faire pour les entreprises mondialisées qui
fabriquent souvent les mêmes produits à différents endroits dans le monde.
Toute diminution de l'attrait des tarifs d'électricité
québécois représente une menace bien concrète. Au niveau des consommateurs
industriels, le projet de loi n° 34 ajoutera 140 520 000
de dollars à la facture des clients au tarif L et 53 millions à la
facture des clients au tarif M, comparativement au système actuel sur la
période de cinq ans de 2020 à 2025.
Comment prétendre qu'un tel projet de loi créera
un climat propice pour le développement de nos industries québécoises alors qu'on leur impose des coûts
additionnels injustifiés pour l'électricité dont elles sont dépendantes? Ces
usines n'obtiendront aucun nouveau service d'Hydro-Québec ni aucune qualité de
service additionnel pour ces coûts supplémentaires. Ces usines devront réduire
d'autres dépenses d'exploitation à chaque année pour rester dans la même
situation concurrentielle. Vous savez, nos usines ne peuvent pas repasser
l'inflation à leurs clients. Elles sont dans un monde hypercompétitif et
doivent toujours faire mieux et, permettez-moi l'expression, battre
l'inflation. Pourquoi pas Hydro-Québec?
Par ailleurs, nous considérons qu'un
examen des tarifs aux cinq ans est totalement inapproprié, d'autant plus que
le projet de loi n° 34
supprime les obligations de transparence auxquelles est astreinte Hydro-Québec
pour ses investissements majeurs,
deuxièmement, ses propositions de programmes commerciaux et, enfin,
l'information de suivi qu'elle doit rendre annuellement.
Le projet de
loi n° 34 dit qu'il vise à simplifier le processus d'établissement des
tarifs. La vraie question demeure : Pour qui souhaite-t-on simplifier le processus de tarification? Pour
Hydro-Québec Distribution ou pour les consommateurs?
Selon le système actuel, la régie a presque
toujours octroyé des tarifs moins élevés que ceux demandés par Hydro-Québec. Les trois dernières années sont
particulièrement éloquentes. Les hausses de tarifs autorisées ont été bien
en deçà de l'inflation et grandement
inférieures à ce que demandé par Hydro. Le projet de loi n° 34 ne permet
certainement pas de sauver de l'argent
aux consommateurs, qui sont pourtant ceux qui paient les coûts de la
transparence et de la réglementation par la Régie de l'énergie. Vous
savez, les redevances à la régie, les frais d'intervenant dont on a entendu parler, les coûts internes d'Hydro-Québec, là,
c'est tout payé par les clients dans leurs tarifs. Nous avons d'ailleurs
calculé que ces coûts de réglementation équivalent à moins de 1/10 de
1 %, 0,009 %, du seul revenu requis d'Hydro-Québec Distribution qu'il
exige à chaque année dans ses tarifs. Les clients industriels du monopole de
l'État sont heureux de payer ce coût minime
pour s'assurer d'obtenir des tarifs justes et raisonnables. Cette transparence
est primordiale dans leurs décisions d'investissement au Québec.
Pour
terminer, nous réitérons notre opposition aux modifications fondamentales que
le projet de loi n° 34 prévoit vu
son impact négatif quant à la transparence et à la crédibilité du processus de
fixation des tarifs d'électricité au Québec. Le mécanisme prévu par le
projet de loi n° 34 n'est rassurant ni pour les industries québécoises ni
pour les investisseurs étrangers. Pour
inspirer confiance et être crédibles, ces tarifs doivent refléter les seuls
coûts induits par chaque classe de consommateurs,
et ce, au terme de débats publics
réguliers, annuels, devant un régulateur indépendant. Mmes et MM. les députés, M. le ministre, merci de
votre attention.
Le
Président (M. Lemay) : M. Allard, je vous remercie pour
votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange avec
les membres de la commission. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Julien :
Oui, oui, merci, M. le Président. Merci, M. Allard, et à votre équipe. J'ai
bien entendu ce que vous avez énoncé.
Naturellement, vous comprendrez que
je ne suis pas du tout en accord avec ce que vous mentionnez, mais c'est
correct parce qu'on est ici pour en discuter
et pour avoir, en fin de compte, la différence des points de vue face à une
situation.
Je comprends
également que vous avez modélisé sur les prochaines années, sur une base d'un certain modèle, pour arriver avec des quantums qui nous disent qu'il y
aurait des valeurs, qu'il y aurait des réductions supplémentaires et que la
cause tarifaire annuelle donnerait des résultats, dans les quatre prochaines années, complètement en deçà de ce qui est proposé au p.l. n° 34.
Mais je réitère, là... Puis c'est vrai que le
passé n'est pas garant du futur. Puis je vous ai entendu dire : Oui, mais, les trois dernières années, c'était nettement
moins. Oui. Puis c'est vrai que, si je fais du «cherry picking», que je viens
prendre certaines périodes dans le temps puis je dis : Oui, mais, cette
année-là, ici, c'était moins... Oui, mais n'oubliez pas 2013, 2014, 2015. Oui, mais c'étaient les éoliennes! Alors, ça, l'intervention politique, pour moi, quand on dit : Politiser un système, c'est plus ça que de venir fixer pour
une période, augmenter la périodicité de 12 à 60 mois pour un processus
de cause tarifaire devant la régie.
Et la régie
conserve bien des pouvoirs, mais, sur la période, ça ne sera plus, effectivement, si le p.l. n° 34 est adopté, aux 12 mois, sur une
base annuelle, mais ça sera sur 60 mois, sur base quinquennale. Parce que
tout le processus, toutes les interventions, tout le manque d'agilité
lié à la cause tarifaire, à terme, 15 ans...
Les chiffres ont la tête dure. 15 ans, si
on avait appliqué l'inflation aux tarifs d'Hydro-Québec, ce qui valait, en
2003, 100 $, c'est 128,40 $ en 2019 et c'est 132,60 $, le tarif.
Donc, il y a un écart qui s'est créé, qui ponctuellement varie, qui ponctuellement, en fin de compte, se
rétrécit, augmente, mais, à terme, on n'a pas fait mieux que l'inflation, on a
fait pire que l'inflation, et il y a plein de bons motifs pour ça, plein de
bons motifs.
Nous, on
dit : Non, le risque, là, on le transfère à la société d'État. La société
d'État va se gouverner avec les revenus. Les revenus seront un gel en
2020, seront à l'inflation par la suite, et on fera un «rebasing» après cinq
ans.
Il n'y aura
pas création, en réalité, d'incohérence puisque la corrélation historique
50 ans, 15 ans, même cinq ans... Si on prend cinq ans, c'est un petit peu au-dessus de l'inflation. C'est sûr que, si je prends les deux, trois
dernières années, ponctuellement, je
peux faire dire des choses. Puis, si, en plus, je modélise ça pour me projeter,
je peux faire dire à peu près n'importe quoi. Mais, à terme, c'est quoi,
le risque qu'on encourt? Le risque qu'on encourt, c'est de dire : Gel,
inflation, quatre ans. Puis, après cinq ans,
on va regarder ça sur la même base qu'on l'avait regardé sur base annuelle,
pour voir, en fin de compte, est-ce qu'on a créé des écarts qui, somme
toute, sur base historique, ne sont pas démontrés.
Alors, a contrario, a contrario, qu'est-ce qu'on
offre à la clientèle? Qu'est-ce qu'on offre à la clientèle dans le processus actuel? Oui, on offre, en réalité, un
retour de 500 millions au jour 1, 2020. Là, les gens, ils nous
disent : Oui, mais, cet
argent-là, les gens l'auraient obtenu de toute façon sur trois à sept ans,
c'est des comptes d'écart. Oui, effectivement, ils l'auraient obtenu sur une période de trois à sept
ans. En même temps, on les aurait recréés. C'est des comptes d'écart, en
réalité, qui étaient des provisions pour nous prémunir face à des situations
puis pour faire face. Donc, oui, je les élimine, trois à cinq ans, mais on en recrée d'autres. C'est des provisions, en
réalité, que la société d'État, sous l'ancien modèle, devait cumuler.
Alors,
oui, le 500 millions, on l'aurait retourné, mais on aurait créé un
autre 500 millions, qui est le compte provisionnel pour faire face à des situations. Il aurait
toujours été là. Ça n'aurait plus été le même 500 millions, ça aurait été
un nouveau 500 millions, lié à d'autres effets.
Qu'est-ce
qu'on fait, également? On vient appliquer un gel. Pourquoi le gel? Parce qu'il
y avait un mécanisme d'écart de rendement, sur base annuelle, qui, de manière
cumulative, a donné 1,5 milliard d'écart sur une certaine période,
et même plus si on continue d'y aller.
Ce matin, j'ai bien aimé l'intervention :
Oui, 1,5 milliard d'écart de rendement, mais, si on avait pris l'inflation
sur 15 ans et tous les écarts de courbe
qu'on observe, si on les avait cumulés, c'est 2,4 milliards que
l'intervenant nous a dit ce matin. Ça
veut dire que, toutes choses étant égales par ailleurs, si on avait appliqué
l'inflation au cours des 15 dernières années, la notion d'écart de
rendement serait inexistante à la face même des tarifs et des revenus
d'Hydro-Québec.
Donc, on gèle
pour se ramener sur la courbe de l'inflation, et après ça on repart à
l'inflation sur une base de quatre ans, et, après quatre ans, on ira, en
fin de compte, à la cause tarifaire. Donc, c'est ça, le processus ici.
• (16 h 30) •
Donc, quand
vous mentionnez, en réalité, que c'est sur base aléatoire qu'on vient faire ça,
c'est-à-dire qu'on augmente la
périodicité. On vient dire : Pour les 60 mois à venir, c'est comme ça
que la tarification va se comporter. On dit à la clientèle : C'est ça que vous allez devoir, en fin de compte,
assumer. Vous allez pouvoir prévoir, et éventuellement on retournera en
cause tarifaire.
Sinon, pourquoi la période de 12 mois est
la plus optimale? Pourquoi ce n'est pas 60 mois?
Et là où je
m'interroge, c'est les interventions faites lors du processus de cause tarifaire
annuel. De quelle nature sont vos interventions, votre groupe, lors du processus
de cause tarifaire annuel et en quoi une périodicité de 60 mois ne répond pas aux préoccupations que vous avez,
tout en donnant l'avantage, en fin de
compte, à l'ensemble de la clientèle, de manière prévisible, à pouvoir
budgéter les cinq prochaines années?
Le Président (M. Lemay) :
Alors, M. Allard, vous avez plusieurs questionnements ici. La parole est à
vous.
M. Allard
(Jocelyn B.) : Oui, bien, écoutez,
dans un premier temps, comment est-ce qu'on peut parler de prévision?
Vous savez, l'inflation, plusieurs
de mes membres me l'ont dit, ce n'est pas prévisible, hein? On ne sait pas ce
que ça va être dans deux ou trois ans. Ça, c'est un premier élément.
Un des grands défauts dans le projet de loi n° 34, quand vous parlez de périodicité de 60 mois,
c'est le fait que, justement, on va parler de «rebasing», j'ai entendu
l'expression, je parle de recalibrage, après cinq ans, quand on va se représenter. Hydro-Québec, d'ailleurs,
Distribution, ce matin, j'ai entendu son président nous dire qu'ils étaient
pour représenter un dossier en coûts de service. Alors, c'est ça qui est
inquiétant.
Parce que
l'expérience a été vécue dans d'autres juridictions, puis là ce qui arrive, c'est que, la nature
humaine étant ce qu'elle est... C'est que, quand on repousse des dépenses vers
l'avant, on a des surprises. C'est ça qui est imprévisible. La meilleure façon, c'est d'avoir des tarifs basés
sur les réels besoins d'Hydro-Québec. Et, pour les faire, là, ce sont des dossiers
tarifaires annuels, c'est de la façon que c'est vérifié partout en Amérique du
Nord.
Il y a
des expériences qui ont été tentées sous la gouvernance d'une régie
indépendante, pas dans un cadre d'une législation, dans d'autres juridictions, et le problème
qu'on voit, c'est que, justement, le fameux «rebasing», là, ça crée des ballounes, ça crée... On repousse vers l'avant des
dépenses, et ça, ça crée de l'imprévisibilité
puis ça crée de l'incertitude pour
les investisseurs, parce qu'on dit : Qu'est-ce qu'il va nous arriver quand
ils vont vouloir récupérer certains coûts qu'ils auraient besoin pour
rajuster les services qu'ils rendent à leur clientèle? La meilleure façon,
c'est justement d'intervenir à chaque année.
Puis, comme
je le mentionnais, les coûts... Si je prends l'AQCIE, là, les membres paient
des cotisations pour payer une partie de ces coûts d'intervention dans
la régie. On n'a évidemment pas les moyens d'Hydro-Québec, on n'a pas... qui d'ailleurs sont payés par les clients dans
leurs tarifs, mais, quand on se présente devant la régie, on est obligés de
faire des choix. On ne peut pas se
présenter dans tous les dossiers puis évidemment on choisit nos enjeux dans
chaque dossier. On ne peut pas faire
tous les enjeux dans chaque dossier, alors on choisit, à chaque année, ce qui
peut être le plus intéressant et le plus payant pour nos
clients, qui ne veulent pas justement de surqualité, qui veulent être capables
de poser des questions, ils veulent être capables de contrôler ce qu'il
en est.
Vous avez parlé d'inflation dans votre longue
question, alors un des facteurs, dans le mécanisme de rendement incitatif qui a été mis en place par la régie
depuis 2018... on a passé beaucoup de temps à le mettre en place, par
définition, l'inflation, il y a un
facteur de productivité qui s'applique. Donc, les tarifs, 60 % des coûts
du distributeur sont supposés être l'inflation
moins un facteur de productivité de 0,3 %. Alors, quand on nous parle de
l'inflation, c'est loin d'être satisfaisant pour les clients, parce que
le mécanisme qu'on avait en place permettait justement de forcer Hydro-Québec à
être plus performante et à rendre des
comptes, puis ça nous permettait de vérifier à chaque année puis être sûrs que
les trop-perçus soient remis à la
clientèle dans le cadre d'un mécanisme qui existait, également. Et tout ça
semble être jeté... J'ai entendu l'expression : On a jeté le bébé
avec l'eau du bain. Moi, je dis qu'on jette le bébé, le bain avec l'eau, puis
tout le kit.
Le Président (M. Lemay) : M. le
ministre.
M. Julien : Encore là, bien,
vous mentionnez tous ces mécanismes-là, puis en plus de venir dire que
l'inflation n'est peut-être pas la bonne base. Ça fait 15 ans que la régie
travaille, en réalité, sur les causes tarifaires et la tarification. Puis l'inflation... 2,4 milliards de trop
payés par l'ensemble des clientèles par rapport à une courbe inflationniste. Si
on avait fixé ça à l'inflation...
Tout le discours que vous tenez actuellement, malheureusement, les faits, les
faits nous disent : Non, ça ne
marche pas. On a dépassé l'inflation sur la cause tarifaire. Je le sais, vous
allez me dire, pour différents motifs.
Donc, vous avez cheminé à travers des causes
tarifaires, avec vos groupes, pour des interventions, et, quand on regarde les faits, les hausses tarifaires d'Hydro-Québec
ont été supérieures à l'inflation. Nous, non seulement on ne va pas à
l'inflation, on préconise un gel pour corriger l'écart momentané, et après ça à
l'inflation, et, en plus, on dit : Dans cinq
ans, cause tarifaire. Dans cinq ans, on remet ça sur la table, on fait toute
l'analyse, mais on va se donner un laps de temps, je réitère, pour la clientèle. Quand on pense à la clientèle
résidentielle, quand on pense à la clientèle de prévisibilité, de savoir
exactement que le taux d'inflation... qui, effectivement, varie, tu sais, il
fluctue, mais habituellement le taux d'inflation,
coût de la vie, rémunération, tout suit. Si on suit l'inflation, la clientèle
voit la prévisibilité, peut budgéter.
Ça a un mérite, la prévisibilité.
Donc,
historiquement, plus cher qu'à l'inflation, puis vous évacuez totalement le
mérite de la prévisibilité pour la clientèle et les citoyens. Pourquoi
le volet prévisible, pour vous, n'a pas de valeur?
Le Président (M. Lemay) :
M. Allard.
M. Allard
(Jocelyn B.) : Oui. Dans un premier temps, les chiffres, si on regarde
la création de la Régie de l'énergie en
1997, nous, on a pris une facture d'un client au tarif L, par exemple, et,
lorsqu'on prend la même facture pour la même consommation au tarif L... un client du tarif L, sa facture,
elle est 19,2 % inférieure à l'inflation entre 1997, date de la création
de la régie, et 2019. Ça, c'est une première chose.
Quand on
parle de 2003, ce qu'il faut comprendre, c'est qu'entre 1997 et 2003 il y a eu
un gel de tarifs. Ce qui est proposé
quand vous dites : On va geler pendant un certain temps ou inflationner
une partie des coûts, c'est justement ce qui est inquiétant. La démonstration, on l'a dans le passé, parce qu'en 2004
il y a eu une augmentation importante, il y a eu un rattrapage dans les
tarifs. On a pété la balloune, à ce moment-là. Puis c'est ça qui est le
problème, c'est ça qui est inquiétant, dans
cinq ans, pour les clients industriels, qui ont besoin de regarder vers l'avant
puis de se rassurer qu'au Québec ce n'est pas fait de façon aléatoire
puis qu'ils sont capables d'avoir une tarification qui est basée vraiment sur
les coûts. Parce que c'est un monopole qui est... On est supposé être protégés
contre les... On est les clients captifs du monopole.
Alors, quand
on regarde entre... Si on prend l'année 2010 à aujourd'hui, on est en
dessous de l'inflation. Nous, on pense
que les dernières années, dans le cadre réglementaire actuel, c'est encore plus
parlant. Alors, on est beaucoup en bas de l'inflation, et les années qui s'en
viennent, par définition... La régie avait instauré un système qui était
l'inflation moins un facteur de
productivité, que le projet de loi n° 34 enlève dans le
mécanisme de réglementation incitative, enlève cette obligation à
Hydro-Québec — je
comprends qu'ils trouvaient ça fatigant — puis, de l'autre côté, en
même temps, le projet de loi... en parlant de distribution de tarifs, il passe
un petit article dans le projet de loi en disant : On va l'enlever à HQT également. Le transporteur qui était soumis
à ce mécanisme de réglementation incitative, on est en train de l'abolir.
Puis on passait ça en douce, parce qu'on
était rendu dans un mécanisme où on était pour commencer des études multifactorielles, comparer Hydro-Québec avec
d'autres juridictions nord-américaines. La régie était en train d'encadrer
ça, puis ça, je peux comprendre que c'est très inconfortable pour Hydro-Québec,
parce que, là, on était capable de savoir, finalement,
qu'est-ce qui en était vraiment de la performance chez Hydro-Québec puis
comment on est capable, justement, de se comparer avec d'autres
juridictions.
Le Président (M. Lemay) : M. le
ministre.
M. Julien :
Alors, revenons à la proposition du p.l. n° 34, où on a un gel
tarifaire puis, après ça, inflation quatre ans. Inflation quatre ans,
gel tarifaire. Prenons une inflation projetée de 2 % pour les fins de la
discussion. Sur la période des cinq
prochaines années, 0 %, 2 %, 2 %, 2 % plus 8 %, taux
composé plus 8 point quelques. 80 %, à peu près, de l'inflation
sur cette période-là avec un recalibrage
après cinq ans. Quel est le risque pour la clientèle face à cette
prévisibilité-là que ces augmentations-là ne soient pas compétitives et
raisonnables?
Le Président (M. Lemay) :
M. Allard.
M. Allard (Jocelyn B.) : Oui. Alors, écoutez, on a fait l'exercice au
début, quand on a vu le projet de loi. On a commencé
avec des prévisions à 2 %
d'inflation. Ce qu'on a fait, c'est que, dans notre mémoire, vous allez voir en
annexe, les annexes 1, 2 et 3,
vous avez justement le scénario qu'on a développé avec nos analystes, avec le
peu de moyens que nous avons,
contrairement à Hydro-Québec, on a fait faire le scénario : projet de loi n° 34 avec 1,7 % d'inflation, parce que c'est le taux utilisé
par Hydro-Québec dans son dossier tarifaire déposé au mois d'août, pour le
transporteur.
• (16 h 40) •
Alors,
on a fait une comparaison entre le projet de loi n° 34
sur cinq ans et la prévision en vertu du mécanisme de la réglementation
actuelle, et, pour le faire, on a fait... puis partout, là, on est très
transparents, vous avez tout ça dans les annexes, on a pris les prévisions d'Hydro-Québec, tout ce qui était
disponible, là, dans les dossiers tarifaires, les plus récents, les plus
récentes données d'Hydro-Québec. Alors, on a pris ça puis on a dit : Bien,
voici où est-ce qu'on s'en va pour les cinq prochaines années en vertu
de mécanismes incitatifs de réglementation actuelle versus le projet de loi n° 34. Avec l'inflation à 1,7 %, on a modélisé, on a
fait, les deux côtés, la même application, on a été des pommes avec des pommes,
et on se retrouve avec 2,14 % supérieur
pour les tarifs L à chaque année. Puis, sur une facture de... je l'ai dans le
mémoire, j'ai donné quatre exemples
de clients, alors des clients réels, là, je peux vous dire, on les a
identifiés, alors un client qui paie
60 millions de dollars de factures d'électricité au tarif L, là, on
parle de 1 284 000 $ de plus par année à payer avec cette
augmentation de 2,14 %.
Alors,
la modélisation, on l'a faite, on l'a regardée en prenant les chiffres
d'Hydro-Québec, chiffres, d'ailleurs, qu'on va avoir de la difficulté à avoir
dans les prochaines années, parce qu'évidemment, les obligations de suivi qui
sont prévues dans le projet de loi
n° 34, on vient de beaucoup alléger pour Hydro-Québec, on prévoit les
alléger, on ne sera pas capable de suivre de la même façon. Alors, c'est pour
ça qu'on dit : La meilleure garantie de prévisibilité pour les clients
industriels, c'est d'être capable de savoir
que les tarifs sont basés sur les coûts, parce qu'on ne peut pas aller en appel
d'offres pour avoir les meilleurs prix d'électricité, on est captifs
d'un monopole. On doit rassurer nos gens.
Le
Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, M. Allard. Merci,
M. Allard, c'est ce qui termine cette période d'échange avec la partie du gouvernement. Je cède
maintenant la parole au député de l'opposition officielle, M. le député
de Laval-des-Rapides.
M. Polo :
Merci beaucoup, M. le Président. M. Allard, et vos collègues, merci pour
votre présentation. Je vais commencer par une question à laquelle vous avez
abordé indirectement. Est-ce qu'il y a d'autres juridictions, soit en Amérique du Nord ou en Europe, où un projet de loi
semblable vise à déréglementer ou à enlever un encadrement réglementaire
auprès d'une société d'État? Est-ce qu'à votre connaissance ça existe ailleurs
dans le monde?
Le Président
(M. Lemay) : M. Allard.
M. Allard
(Jocelyn B.) : Oui, nous avons fait... J'ai tenté, comme je disais,
avec les ressources que j'ai, de parler à des experts à l'extérieur même du
Québec pour comprendre, des gens qui avaient témoigné devant la régie, et ce
qu'on me rapporte... D'ailleurs,
c'est une première, hein, c'est pour ça que je dis : C'est inquiétant pour
les sièges sociaux de nos membres, parce que c'est la première fois
qu'on aurait quelque chose de tout prévu dans la loi, les prix, les conditions tarifaires. On ne pourra même pas parler à
Hydro-Québec pour répondre à nos besoins puis modifier pendant ces cinq ans-là,
parce que tout va être prévu dans le projet de loi. Ce n'est pas évident, là,
de changer, dire : On aurait besoin de changer telle clause dans la façon
qu'on applique le programme d'option interruptible, mais là il va falloir une
législation de l'Assemblée nationale
pour être capable de changer la condition tarifaire qui est dans une loi. C'est
totalement non flexible, ça ne répond pas aucunement aux besoins de
l'industrie puis des grands clients, à tout le moins, les clients industriels.
Et
ce qu'on me confirme, moi, les experts à qui j'ai parlé, là, c'est que ça ne se
fait pas nulle part ailleurs de geler ça dans une législation. C'est pour ça
que ça nous inquiète de faire que le Québec soit bande à part. Puis, quand on
parle à nos sièges sociaux, les
membres, là, qui ont des sièges sociaux aux États-Unis, puis ailleurs au
Canada, puis à Londres, puis en Australie, de leur expliquer qu'au
Québec je ne peux pas aller en appel d'offres, puis qu'en plus de ça je suis obligé de prendre le monopole, puis que, les
tarifs, tu sais, je ne suis pas capable de négocier rien, je ne peux pas leur
parler, je ne peux pas changer rien, c'est... Alors, au moins, quand tu
te présentes à la régie, tu as des possibilités de faire des changements. Mais là on va être complètement à l'extérieur de ce qui se
fait partout ailleurs.
Le Président
(M. Lemay) : M. le député.
M. Polo :
Donc, est-ce que c'est un risque pour les entreprises membres de votre
association?
M. Allard
(Jocelyn B.) : Est-ce que c'est un risque? Bon, les membres... On
avait discuté de cette question-là, alors pourquoi est-ce que le projet
de loi n° 34 nous... c'est ça. Alors, je vais laisser Mme Huot...
Mme Huot (Marianne) : Donc, de notre côté, les grands industriels, on
doit aller en appel d'offres pour tous les achats de commodité. Pour nous, c'est important, pour les grands
dirigeants, ça met de la crédibilité dans notre approche si l'électricité, c'est fixé. Évidemment, ce qui
redonne de la crédibilité aux tarifs qui nous sont imposés, c'est le fait
d'aller devant la régie. Si une fois
par cinq ans seulement on peut aller se présenter devant la régie, puis, encore
là, le processus est allégé, ça enlève beaucoup de crédibilité au processus vis-à-vis de nos
dirigeants, qui doivent se fier à la bonne volonté.
Puis,
deuxième chose, l'inflation, ce n'est pas nécessairement juste et équitable.
Oui, ça apparaît, à première vue, intéressant. Par
contre, si nous, on va voir nos
clients puis qu'on leur dit : Écoutez, pour les cinq prochaines années, je vais vous vendre mon concentré de fer à un tel prix, puis ça va
suivre l'inflation ou un pourcentage de l'inflation, il n'y a aucun de mes clients qui va être intéressé à cette
méthode-là. Il faut toujours s'améliorer, il faut être... il faut
faire preuve de... Il faut améliorer nos processus pour devenir plus
compétitifs. Donc, on ne peut pas, de notre côté, se fixer sur l'inflation.
Ce serait inacceptable.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député.
M. Polo : Pourquoi c'est primordial pour les investisseurs
étrangers, M. Allard, que le prix payé pour l'électricité soit le
plus bas possible et qu'un processus d'établissement tarifaire soit le plus
indépendant possible?
M. Allard
(Jocelyn B.) : Bien,
évidemment, comme je le mentionnais dans ma présentation, puis on le décrit
dans notre mémoire,
M. le député, on a des membres, là, les grands industriels,
que, dans les coûts d'exploitation, là, ça représente entre 20 %, 25 %, jusqu'à 70 % dans l'industrie, par exemple, de la chimie, on parle dans le chlorure de sodium, là, qui est à
60 quelques pour cent des coûts d'exploitation.
Et
évidemment, au Québec, on ne veut pas... Pour les industries, là,
l'idée ce n'est pas de compétitionner en baissant les coûts de la main-d'oeuvre. On ne veut pas
du cheap labor au Québec, on ne veut pas avoir des règles
environnementales plus relâchées,
alors on veut faire les meilleures choses possible. Mais, à un moment donné, là, il faut être capable d'être compétitif puis de garder la compétition. Parce que,
les membres, ce qui arrive, la compétition, c'est entre eux autres mêmes.
Dans le même groupe corporatif, il y a
des usines partout dans le monde. Alors, l'usine du Québec,
si elle lui coûte plus cher, puis
chaque point de pourcentage est
important, à ce moment-là, il faut que tu trouves une autre façon de
compétitionner vis-à-vis l'usine du
même groupe, l'usine soeur qui, elle, va être capable d'avoir le contrat du
siège social parce qu'ils vont avoir réussi à battre les frais, les
coûts d'exploitation.
Donc, 2,14 %, dans le cadre des industriels
qui paient déjà plus que le coût de service qu'ils représentent à Hydro-Québec, on parle d'interfinancement, vous
avez sûrement entendu parler de ça, alors rajoutez par-dessus cet inter...
On paie déjà plus cher que le tarif qu'on devrait payer, rajoutez en plus de ça
un autre 2,14 % par année, avec le... dans l'exercice qui est présent, ce n'est pas acceptable. Ça crée des
dépenses, on parle de plusieurs millions de dollars, les grands clients.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député de Laval-des-Rapides.
M. Polo : Merci. Revenons au
processus proposé par le p.l. n° 34, de modification
aux cinq ans. Pour toute modification des tarifs, Hydro-Québec devra demander
une autorisation au gouvernement pour modifier des tarifs, qui par la suite
devra faire preuve d'un décret de préoccupation. Selon vous, est-ce que la
régie est 100 % indépendante si le gouvernement est impliqué dans le dépôt
de la demande tarifaire?
M. Allard
(Jocelyn B.) : Écoutez,
ça, dans toutes les juridictions, en
matière de réglementation, de monopole, là, que ce soit dans le gaz, dans le gaz naturel, dans
l'électricité, partout en Amérique du Nord, il y a toujours la même problématique, c'est l'asymétrie d'information, de
ressources entre les utilités, les monopoles et les représentants, notamment,
des clients, qui, eux autres, sont obligés
de payer. Et, dans le projet de loi n° 34, on ne vient pas corriger rien
de ça. On empire la situation. Le
Québec va devenir l'endroit où les clients, on nous enlève le droit de même...
de faire des demandes de modification de tarifs en cours de route. La
régie perd le droit de demander à l'utilité de venir se présenter devant elle, et le seul qui aurait le droit, à ce
moment-là, c'est... l'utilité, c'est Hydro-Québec qui aurait le droit... Puis,
écoute, un droit, là... S'ils veulent
modifier le tarif, fixer le tarif... l'article 8, je pense, du projet de
loi, qui prévoit qu'à ce moment-là ils vont aller se présenter au gouvernement,
ils vont obtenir un décret puis... Donc, c'est à leur bon vouloir, puis ça ne
sera certainement pas faire des demandes pour baisser les tarifs, comme
nous avons fait présentement.
Avec la législation actuelle, on a réussi à
faire une demande de baisse de tarifs... assez spécial, parce que c'est la première fois qu'on est capable de travailler
avec toutes les classes de clients. On a fait une demande conjointe avec les
représentants des clients domestiques, des clients commerciaux petits et des
clients industriels. C'est la demande que nous
avons présentée il y a déjà, quoi, deux semaines, maintenant, devant la Régie
de l'énergie, parce qu'Hydro-Québec refusait
de se présenter en vertu de la législation actuelle, pour faire baisser les
tarifs, qui ne devraient pas être seulement de 500 millions... la baisse dont on parlait, on parle beaucoup, là,
mais il y a un 124 millions de trop dans ces tarifs-là, en plus du
500 millions.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député.
M. Polo :
On s'entend, M. Allard, lors du dépôt du projet de loi ou de la
présentation du projet de loi, le gouvernement a annoncé que c'était aussi une formule, non seulement de rembourser les
500 millions, mais aussi le 1 milliard, à terme, selon leur promesse de l'époque. Selon vous,
est-ce que le projet de loi répond à cette promesse de rembourser l'ensemble
des trop-perçus?
M. Allard (Jocelyn B.) :
Aucunement. On le mentionne dans notre mémoire. Si on avait offert de la
nouvelle argent, là, j'appellerais ça de la
nouvelle argent. Si on avait offert de diminuer les dividendes d'Hydro-Québec,
au gouvernement, pour rembourser les
clients pour les fameux trop-perçus, là, je ne veux pas embarquer... ça, ça
aurait été de la nouvelle argent. Mais, en ce moment, tout ce qu'on a
entendu, c'est le 500 millions, c'est... Premièrement, dans ce 500 millions là,
c'est clair pour tout le monde, il y a 106 millions qui viennent des
trop-perçus de 2018 de la part des clients. C'est dans le rapport annuel
d'Hydro-Québec au 31 décembre 2018. Le reste de cet argent-là, on a
pris l'information d'Hydro-Québec, on nous dit que c'est les comptes
d'écart.
Vous savez,
il n'y a pas de cadeau. C'est tout de l'argent que les clients ont payé, qui
sont là, qui nous appartient. Alors,
on nous dit : On va vous la remettre en mars 2020 plutôt que de
l'avoir dans les tarifs 2020. Nous, ce qu'on propose, c'est de le mettre dans les tarifs 2020 comme
d'habitude en baisse de tarifs, comme les processus devant la régie, en plus
des autres baisses que le mécanisme
incitatif actuellement engendre et qui rend Hydro-Québec... devant être plus
compétitive, baisser de 124 millions de plus, et non pas un gel des
tarifs.
Parce que,
dans le mécanisme actuel, ce n'est pas l'inflation qu'ils doivent rencontrer,
ou un gel des tarifs, c'est l'inflation
moins un facteur de productivité. Puis c'est ça qu'Hydro-Québec n'aime pas,
parce qu'ils sont obligés d'en faire plus
puis d'en faire mieux, comme mes membres sont obligés de faire. Ils sont
obligés de se battre pour essayer de survivre, puis battre l'inflation.
Puis ce n'est pas ce qui est arrivé chez Hydro-Québec.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député.
M. Polo : Est-ce
qu'Hydro-Québec devrait déposer un dossier tarifaire pour 2020-2021, selon
vous?
• (16 h 50) •
M. Allard
(Jocelyn B.) : Bien, on a demandé effectivement, publiquement, à ce
que... Nous, on l'a déposé, parce que la législation actuelle nous permet
encore de le faire. Et, comme je vous disais, on l'a fait conjointement avec
les autres associations de consommateurs, donc les gens qui paient les
vrais... C'est ceux qui paient, hein? Il n'y a pas personne chez Hydro-Québec... le gouvernement paie... Tu sais, tout ça, ça repasse dans les
tarifs. Puis, même la Régie de
l'énergie, c'est des redevances qui sont payées à la régie, c'est hors
du périmètre comptable du gouvernement.
Alors, tout
ça, là, c'est à l'extérieur, c'est tout repassé dans les tarifs, ce sont mes
membres qui paient ça. Et mes membres, en plus de ça, ils me paient une cotisation, parce qu'on essaie, je m'excuse de l'expression, de pooler,
de mettre en commun nos ressources
pour être capables d'intervenir puis de faire en sorte que ça ne soit
pas aussi dommageable puis qu'on puisse convaincre nos autorités, dans
chacune de nos organisations, qu'au Québec, bien, ça fonctionne de façon... comme les règles normales pour fixer des tarifs, il y a
un tribunal indépendant qui est capable... On aurait dû renforcer la juridiction
de la régie, puis l'indépendance de la régie, puis les pouvoirs de la régie, et
non pas les diminuer.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député.
M. Polo : En terminant,
M. Allard, moi, une des choses qui m'ennuient de ce projet de loi là, et
c'est... Il y a plusieurs experts qui ont expliqué que la source même de la
problématique des trop-perçus, c'est la surestimation de la croissance des coûts par Hydro-Québec, directement. Et là ce projet de loi vient, en
partie, régler ou supposément régler la problématique des trop-perçus,
d'une problématique créée par Hydro-Québec elle-même dans le dépôt... dans ses
demandes d'augmentation tarifaire où elle-même a créé cette problématique-là en
surestimant la croissance des coûts. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Allard (Jocelyn B.) : Bien, effectivement,
les...
Le Président (M. Lemay) : Rapidement.
M. Allard
(Jocelyn B.) : Oui. Alors,
les trop-perçus viennent effectivement du jeu de la
prévision, évidemment, parce que
tu fais les tarifs d'avance. Mais ce qu'il ne faut pas perdre de vue, c'est
que, depuis 2018, il y en a un, mécanisme
qui venait, c'est le mécanisme
de traitement des écarts de rendement. La problématique... Il n'y en avait plus, de problème. On essaie de... Là, on a une solution à
la recherche d'un problème, parce que le problème, il était réglé. La régie le faisait, puis on était capables d'avoir une bonne
partie de ces trop-perçus-là, et donc il y avait moins d'incitatifs
pour le distributeur de jouer la game d'essayer de se garder des petits
coussins, là, puis de jouer la game des trop-perçus.
Le
Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, M. Allard. Sur ce, je passe la parole au député de Jonquière
pour sa période d'échange.
M. Gaudreault : Oui, M.
le Président. Vu que la collègue
de Mercier est absente, je demande le consentement pour obtenir le temps de l'opposition.
Le
Président (M. Lemay) :
Bon, en vous rappelant, M. le député de Jonquière, là, qu'on ne signifie pas l'absence d'une
collègue de travail.
M. Gaudreault : Ah! excusez.
Le
Président (M. Lemay) :
Mais, bon, est-ce qu'il y a consentement pour que le temps non utilisé soit redistribué?
Parfait, consentement. Allez-y, M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Merci, merci,
merci. Je les prends toutes, M. le Président.
Je
veux vous remercier, votre présentation est... elle fesse, là, pour reprendre une
expression bien connue. Puis, je
trouve, c'est tout un paradoxe de
dire que, finalement, Hydro-Québec, c'est parce
qu'il ne veut pas le... Hydro-Québec ne veut pas faire plus, ne veut pas faire mieux qu'on se retrouve aujourd'hui avec le projet de loi
n° 34. C'est comme un
paradoxe par rapport à un slogan qu'on connaît bien, là, du côté du gouvernement.
Moi, je
voudrais savoir de votre part... Parce
qu'à l'article 2, vous connaissez très bien le projet de loi, il y a un
multiplicateur, là, de 0,65 pour le
tarif L. Alors, on peut le prendre de l'autre bord, c'est comme un rabais,
d'une certaine manière, de 35 %
qui est accordé par rapport au tarif chez les autres consommateurs, en fonction
de ce qui va être créé par le projet
de loi n° 34. Donc, même avec ça, même avec ce multiplicateur-là, qui
amène une analyse différenciée ou un résultat différencié pour les
grands consommateurs, qui sont avec le tarif L, vous maintenez votre
point.
Le Président (M. Lemay) :
M. Allard.
M. Allard
(Jocelyn B.) : Oui. Bien, d'abord, effectivement, nos... Vous allez le
voir dans le mémoire, là, le calcul pour
les tarifs L, nous l'avons fait évidemment en tenant compte de 65 %
du taux d'inflation. Donc, on n'a pas présumé que c'était l'inflation
pour les tarifs L.
Et ce qu'il
faut savoir, c'est... D'ailleurs, j'ai entendu encore aujourd'hui, là, nous
dire que les tarifs d'électricité étaient
les meilleurs au monde, etc., puis c'est les plus compétitifs. Mais, dans le
domaine industriel, vous savez que la loi
avait été modifiée, la loi actuellement en vigueur, pour justement ne pas
indexer de la même façon la portion patrimoniale de l'électricité pour les grands industriels, justement pour préserver
leur compétitivité. Alors, quand on me dit qu'il n'y a pas de problème puis que les tarifs, ils sont déjà
tellement bons, on n'a pas besoin de se préoccuper, le gouvernement puis
les anciens gouvernements, les anciens législateurs, là, s'étaient préoccupés
de mettre dans la loi... de s'assurer qu'il n'y ait pas la même indexation.
Je comprends
qu'on a tenté dans le projet de loi n° 34 de faire... de refléter... Pour
ne pas que ça fasse trop mal aux grands industriels, qui sont en
compétition encore plus... mondiale, de façon encore plus précise, on a tenté
de refléter ça avec le facteur de 65 %
d'inflation. On a fait le calcul, là, puis, pour que ça arrive flush, en bon
québécois, là, que ça arrive au même
niveau pour le scénario projet de loi n° 34 versus la réglementation actuelle,
ce n'est pas 65 % de l'indexation qu'il
faudrait, c'est 20 %. Alors, pour vous dire... Alors, tout le monde va
payer... toutes les classes de clients vont payer plus cher. Puis, parce que le 65 % ne capte
par la réalité actuelle dans la tarification des tarifs qui sont imputés au
tarif L, c'est encore pire pour les tarifs L que pour les
autres classes de clients. Mais tout le monde va payer plus.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député.
M. Gaudreault : J'aurais mille questions, là. Est-ce que vous
êtes capable rapidement de nous donner des exemples d'impact sur
les investissements qu'il pourrait y avoir au Québec avec l'adoption du projet
de loi n° 34?
M. Allard
(Jocelyn B.) : Bien, écoutez,
je le disais tout à l'heure, dans une des pages, là, j'ai pris des cas
d'espèce de quatre clients, là, que
je ne pouvais pas nommer parce qu'il
y a des questions
de compétition... mais je pourrais peut-être passer la parole à
Mme Raymond, qui représente, qui dirige plusieurs usines.
Le Président (M. Lemay) :
Allez-y, Mme Raymond.
Mme Raymond (Lynne) : Oui.
Airco mondial a plusieurs usines à travers les différentes provinces au Canada ainsi qu'en Amérique du Nord, et je peux
vous dire que les tarifs d'Hydro-Québec ne sont pas les meilleurs. Donc, on a des endroits où la facture électrique, elle est moins
élevée que nos opérations à nous, et je peux vous dire que ça a un impact,
quand on regarde le mémoire qu'on vous a
soumis, où on parle de plus... plus de 700 000 $ par année. Donc, nous aussi, c'est des sommes d'argent qu'on aimerait pouvoir
utiliser pour innover dans notre secteur. Donc, nous aussi, nous sommes très... nous aimerions innover, au même titre
qu'Hydro-Québec, dans l'industrie et demeurer aussi compétitifs, là, parmi
les autres compagnies qui font le même produit que nous, soit le chlorate de
sodium et le chlore-alcali.
M. Gaudreault : Merci.
Le Président (M. Lemay) :
Merci, Mme Raymond. M. le député.
M. Gaudreault : Oui. Sur la question du fameux MTER, là, le
mécanisme de traitement des écarts de rendement, dans le fond, ce que vous dites, c'est qu'à la faveur du projet de loi n° 34, pfft! le gouvernement le fait complètement disparaître, ce qui veut dire que, encore là, c'est un autre paradoxe, par ça, il fait disparaître, sous couvert de
rembourser des trop-perçus, sur lequel on pourrait discuter en soi, mais, sous
couvert de rembourser des trop-perçus... En faisant disparaître le mécanisme de traitement des écarts de
rendement, ça veut dire que, dans le futur, on ne pourra plus, au fond,
rembourser, d'une manière ou d'une
autre, les trop-perçus à la clientèle ou aux consommateurs. Est-ce que je vous
comprends bien?
Le Président (M. Lemay) :
M. Allard.
M. Allard (Jocelyn B.) : Oui,
mais, effectivement... Puis, parlant de paradoxe, là... Vous avez raison que,
pour l'avenir, là, on va perdre la trace,
là, comment on va être capable de calculer ces trop-perçus, on va la perdre.
Mais, parlant de paradoxe, là, j'en ai entendu un à plusieurs reprises aujourd'hui dans la tarification, c'est la question de flexibilité, dont Hydro-Québec dit : J'ai besoin de plus de flexibilité,
et on revient continuellement avec l'exemple du programme commercial mazout.
Vous savez, puis je n'ai rien contre le programme commercial mazout en tant...
la finalité qu'on recherchait... Il y avait de l'argent dans le Fonds vert, il
y avait de l'argent ailleurs qu'on aurait pu faire pour essayer d'améliorer
puis changer des choses, là, puis on a essayé, nous autres, ça pouvait peut-être
s'adresser à des industriels.
Mais savez-vous ce
qu'on n'a pas entendu ce matin de la part de personne, là? C'est pourquoi le programme
mazout a été refusé par la régie. Parce qu'il y a
des intervenants qui ont commencé à poser des questions, dont nous, puis,
même
si c'était supposé s'adresser à des industriels, on a fait faire des... on a
regardé. Puis la preuve, après un grand temps de débat, c'est qu'au bout de sept ans les tarifs de toutes les classes
de clients étaient pour augmenter à cause de ce programme-là. C'est pour ça que la régie a dit non à Hydro-Québec puis c'est pour ça que nous, on pense que c'est important
qu'on se représente, qu'on ait encore
ce pouvoir d'être capables de contrôler les fameux programmes
commerciaux. Hydro-Québec, il dit : On s'est fait dire non dans ce
dossier-là, on aurait voulu faire ce qu'on veut. Bien, ça, c'est carte blanche,
puis c'est des clients, tous les
clients, toutes les classes de clients, qui auraient payé plus cher, parce que
la preuve au dossier, puis c'est une preuve débattue, argumentée, les
experts...
Le Président
(M. Lemay) : Merci beaucoup, M. Allard.
M. Allard
(Jocelyn B.) : ...contre-interrogés.
Le
Président (M. Lemay) :
M. Allard, c'est ce qui termine la période d'échange, mais je vous
remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre aux représentants du Conseil de la
transformation alimentaire du Québec de prendre place.
(Suspension de la séance à
16 h 59)
(Reprise à 17 h 03)
Le
Président (M. Lemay) :
Alors, nous reprenons nos travaux, et je souhaite la bienvenue aux
représentants du Conseil de la
transformation alimentaire du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis
nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission.
Je vous invite donc à vous présenter, ainsi que les personnes qui vous
accompagnent, et à procéder à votre exposé. La parole est à vous.
Conseil de la transformation
alimentaire du Québec (CTAQ)
M. Fraeys (Dimitri) : Bonjour. Pour ceux qui le désirent, nous avons
des mémoires ici, en avant. Je ne sais pas... en tout cas, si vous le
désirez. Donc, merci, M. le Président, M. le
ministre, MM. et Mmes les députés.
Permettez-moi tout d'abord de
remercier la commission de nous permettre de participer aux discussions
entourant l'analyse du projet de loi
n° 34.
Je
me présente, Dimitri Fraeys. Je suis vice-président Innovation et Affaires économiques au Conseil de
la transformation alimentaire du
Québec. Je suis accompagné de M. Sylvain Mayrand, qui est directeur général des opérations pour Lassonde, et M. Hamid Ghannou, qui est
directeur Valorisation de l'énergie chez Olymel.
Le
Conseil de la transformation alimentaire, le CTAQ, c'est le principal
regroupement d'entreprises dans le secteur de la transformation
alimentaire au Québec dont la mission est d'appuyer les entrepreneurs dans
l'atteinte de leur plein potentiel pour
assurer la pérennité de l'industrie alimentaire au Québec. Nous sommes une fédération de
12 associations sectorielles et une consolidation des forces de
l'industrie avec plus de 550 membres qui représentent 80 % du volume
d'affaires, qui est de plus de 30 milliards au Québec.
Le CTAQ, c'est donc
un appui constant à l'industrie. Nous avons développé des outils afin de
valoriser notre industrie, mais surtout d'améliorer la compétitivité de nos
membres.
Notre
industrie de la transformation alimentaire est un puissant levier de
développement économique pour le Québec et pour la société québécoise. C'est le
premier secteur manufacturier en importance au Québec. C'est également le premier employeur manufacturier avec plus de
70 000 emplois et au-delà de 100 000 emplois indirects. Les
livraisons manufacturières dépassent
les 30 milliards. Nous sommes en croissance de plus de 4 % au cours
des 10 dernières années. Il y a environ 1 600 entreprises
réparties sur l'ensemble du territoire.
C'est
un secteur qui est très bénéfique pour les gouvernements, principalement pour
le Québec, au niveau de la taxation
et de la parafiscalité, puisque nous versons plus de 3,3 milliards dans
les coffres gouvernementaux. Nous représentons 8,8 milliards du
produit intérieur brut, bien entendu puisque nous sommes le premier secteur
manufacturier, et nous exportons pour plus
de 8,6 milliards. Notre balance commerciale a toujours été positive. C'est
une des seules industries où la balance commerciale est positive d'année
en année.
La
transformation agroalimentaire occupe une place centrale dans la structure
agroalimentaire, puisqu'elle achète plus
de 70 % de tout ce qui est produit. Donc, nous sommes le principal client
des producteurs agricoles et nous représentons environ 80 % des
exportations.
Donc,
les entreprises de transformation alimentaire sont réparties sur tout le
territoire, dans chacune des régions, et, chose très importante, ça représente régulièrement le principal
employeur dans plusieurs villes et villages. C'est donc un outil de
développement économique pour l'occupation du territoire.
Une étude de la Banque de
développement du Canada montre un écart grandissant de productivité entre le
Canada et les États-Unis. Les
entreprises du Canada atteignent 73 % de la productivité des entreprises
américaines. Même si cette étude
n'est pas récente, elle date de 2013, nous constatons toutefois que la tendance
de l'écart de compétitivité ne va pas en s'améliorant au niveau de la
productivité des entreprises du Québec.
Selon
les calculs de l'AQCIE, donc, l'organisme qui nous a précédés, la
simplification du processus d'établissement des tarifs de distribution électrique aurait un impact de 0,4 % sur la croissance du tarif M et
2,4 % sur le tarif L calculé sur une période de cinq ans. C'est les chiffres qui vous ont été présentés
précédemment. Même si l'impact de 0,4 % du p.l. n° 14
sur le tarif M semble peu important, il faut se rappeler que le
tarif M est déjà lourdement taxé puisque nous... Le tarif M supporte 127,5 % des coûts attribuables à
cette classe de clients, au bénéfice des clients résidentiels, qui, eux, ne
représentent... ne paient que
86,9 % de leurs coûts. En fixant les augmentations futures selon
l'inflation, le gouvernement du Québec vient geler le fardeau de
l'interfinancement sur les tarifs et perpétuer ce déséquilibre. La fixation des
hausses tarifaires à l'inflation vient également séparer les tarifs des
coûts réels justifiés qu'ils sont censés refléter.
La
Régie de l'énergie est le seul rempart face aux demandes tarifaires du monopole
qu'est Hydro-Québec et permet donc d'assurer la transparence, mais surtout la
confiance du consommateur. Hydro-Québec, c'est un monopole avec lequel les consommateurs sont obligés de faire affaire.
Il n'y a pas d'alternative. Cette entité monopolistique qui livre un produit
essentiel est une société d'État bénéficiant
du pouvoir et de l'influence de son seul actionnaire, le gouvernement du Québec.
Afin de permettre que cet exercice de fixation des tarifs soit transparent et
crédible, les manufacturiers alimentaires demandent
de préserver les audiences annuelles et l'analyse de l'organisme indépendant de
régulation économique afin de pouvoir questionner, contester, et, au
besoin, faire des demandes du... face au monopole qu'est Hydro-Québec.
Donc, c'est la
nécessité de réglementer le monopole d'État qui avait mené à la création de la
Régie de l'énergie, organisme indépendant pouvant fournir cette transparence
dans la fixation des tarifs industriels pour les entreprises de Québec. Le projet de loi n° 34 engendrera
donc des tarifs qui, selon nous, sont inéquitables... seront inéquitables. Le
processus de réglementation de
l'énergie, qui, dans l'ensemble, a fait ses preuves, a permis un certain
contrôle. Et donc, malheureusement, le
projet de loi abolit la revue annuelle des tarifs puisqu'il va y avoir un gel
ou un... quelque chose de... une fixation en fonction de l'inflation.
Au
cours des dernières années, les hausses tarifaires acceptées par la Régie de
l'énergie ont toutes été inférieures aux demandes d'Hydro-Québec. Bon,
c'est pour les trois dernières années. Au cours des trois dernières années, les
différences ont été les suivantes, elles vous
ont déjà été présentées : pour le tarif M, c'est de 3,48 % au
lieu de 0,5 % pour le
tarif M, et, les autres, on parle de 5,35 % versus un réel de
1,9 %. Donc, le p.l. n° 34 imposerait des tarifs plus élevés aux
consommateurs.
Vous devez comprendre
que les consommateurs industriels s'opposent aux changements majeurs
qu'introduit le p.l. n° 34, car ils
perdront le seul forum public qui leur est donné pour questionner et se
défendre. Puis je vous rappelle que
le prix de l'eau et de l'électricité permet aux entreprises du Québec de se
démarquer. Le projet de loi n° 34 viendra donc réduire l'avantage
compétitif et surtout distinctif du Québec.
• (17 h 10) •
Pour nous, le secteur
manufacturier alimentaire, nous sommes pris entre un monopole et surtout un
oligopsone, c'est-à-dire que nous avons
seulement cinq acheteurs, les cinq distributeurs alimentaires qui achètent les
produits mis en marché par
1 600 entreprises manufacturières. Puis les entreprises du Québec
sont des entreprises de taille modeste, donc le pouvoir de négociation est
entre les mains des acheteurs, les distributeurs alimentaires. Ces entreprises
de transformation n'ont pas la
capacité de transférer à leurs clients les hausses de tarifs. Pour nous, une
hausse de tarifs basée sur l'inflation, ce n'est tout simplement pas
viable.
Les marges
bénéficiaires des entreprises du Québec, au niveau de la transformation
alimentaire, sont les plus faibles du
Canada. On parle d'environ 6,9 %, comparé à une moyenne canadienne de
8 % et comparé à l'Ontario qui est à 10 %. Donc, on voit qu'on
est déjà affaiblis face aux autres provinces.
Donc,
réduire des augmentations tarifaires de 0,4 %, pour le tarif M, ou
2,14 % vient réduire davantage la marge déjà la plus faible au Canada. Donc ce sera autant d'argent de moins
pour investir, que ce soit en innovation, que ce soit en développement
durable ou que ce soit en virage numérique. Et également, étant donné qu'on est
une industrie très réglementée, nous avons
énormément à investir pour nous adapter au niveau réglementaire. En plus, les
parts des cotisations sociales du
Québec à la charge des employeurs sont plus élevées au Québec que la moyenne
canadienne. Donc, le projet de loi n° 34 affaiblit notre industrie,
qui aura de la difficulté à combler l'écart de compétitivité face aux
compétiteurs canadiens et internationaux.
En conclusion. Au
départ, l'objectif du p.l. n° 34, c'était de remettre
un petit peu d'argent dans les poches des consommateurs,
ce qui ne semblera pas le cas pour notre industrie. Les manufacturiers
alimentaires se sentent les oubliés du
projet de loi n° 34 et demandent le statu quo. Ce sont des entreprises qui
n'ont pas de rapport de force pour transférer ces coûts et qui devront
assumer pleinement une baisse de leurs marges. Je vous remercie de votre
attention.
Le Président
(M. Lemay) : Parfait. Donc, juste pour m'assurer que je suis
correct dans ma prononciation : M. Fraeys, c'est ça?
M. Fraeys
(Dimitri) : Oui.
Le
Président (M. Lemay) : Excellent. Donc, merci pour votre exposé.
Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec les membres de
la commission. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Julien :
Oui, merci, M. le Président. Écoutez, encore une fois, j'ai bien entendu
l'exposé. Juste, d'entrée de jeu,
M. Fraeys, donc, vous prenez pour acquis que... Les hypothèses émises par
l'Association québécoise des consommateurs industriels d'électricité sur
les projections qui ont été énoncées, vous les faites vôtres actuellement.
M. Fraeys (Dimitri) : Oui,
exactement.
M. Julien : Parfait.
M. Fraeys
(Dimitri) : Nous n'avons pas
cette compétence, donc nous avons un partenariat avec eux pour effectivement
nous conseiller et nous aiguiller dans cette direction.
M. Julien : Parfait. Donc, on
part sur les mêmes hypothèses que le groupe précédent qui est venu ici.
Parfait.
Bien,
j'entends bien ce que vous dites. Je ne rejoins pas vos conclusions, comme je
ne le faisais pas tout à l'heure avec le groupe précédent. Mais ce que
vous nous dites, c'est : Il faut préserver la compétitivité, et, pour
nous, les tarifs d'électricité rentrent, en
réalité, dans nos coûts de manière importante, et on pense que le p.l. n° 34, dans sa forme actuelle, va faire en sorte de diminuer même
nos marges sur base de comparaison.
Je réitère,
là, quand on tient ce discours-là, naturellement, sur des modélisations que
vous faites vôtres, je réitère, dans
les 15 dernières années, là, vous auriez été tellement gagnants d'avoir un
tarif à l'inflation par rapport à une fluctuation dans le temps suite à une cause tarifaire. On
préconise un gel, inflation, inflation, inflation, inflation, et on va se
requestionner après cinq ans, ce qu'on faisait sur base annuelle, si le
p.l. n° 34 est adopté, on va le faire sur base de
cinq ans.
Donc, vous présumez d'entrée de jeu que tout le
processus de cause tarifaire va donner mieux que gel-inflation, bien que, le passé, ce n'est pas ça qu'il dit. Et
naturellement, sur cette base-là, naturellement... Parce que le processus de
cause tarifaire est basé sur un rendement
qu'on autorise, en fin de compte, à Hydro-Québec, de 8,2 %, puis c'est
tout sur cette base-là, en fin de compte, que les discussions se font,
là, a posteriori.
Alors, je
suis surpris que la prévisibilité des tarifs avec, a posteriori, après 60 mois,
un «rebasing» qui ferait en sorte que, si, effectivement, il y a eu des
écarts, puis, dans un processus de cause tarifaire, on pourrait les observer...
cette prévisibilité-là pour vos membres,
pour les gens que vous représentez, ça ne vaut pas le coût. Vous préférez pour
vous, en fin de compte, une fluctuation, en ayant bonne foi que la modélisation
discutée par le groupe qui vous précédait est la bonne, ce que le passé
ne nous démontre pas, mais pas du tout. Donc, c'est ça que vous nous dites?
M. Fraeys (Dimitri) : Je vais
laisser mon collègue répondre.
Le Président (M. Lemay) : Oui,
allez-y, M. Mayrand.
M. Mayrand (Sylvain) : Merci.
M. le ministre, c'est très intéressant. Les 15 dernières années, vous référez à
2004 à aujourd'hui?
M. Julien : 2003.
M. Mayrand
(Sylvain) : 2003. On sait tous que, de 1997 à 2003, il y a eu un gel.
Donc, c'est un peu normal qu'après un gel pendant sept ans les tarifs
augmentent drastiquement. Donc, moi, ce que j'aimerais partager, c'est que, si on prend un exemple... Parce que
je trouve ça un peu biaisé comme référence. Si on prend depuis 1997, comme ça a
été mentionné voilà quelques minutes, c'est une augmentation de 19,2 %.
Puis, si je
peux faire un commentaire supérieur, vous avez une équipe exceptionnelle à
Hydro-Québec, beaucoup, beaucoup de
changements de faits dans les dernières années, on a eu l'opportunité de les
rencontrer, beaucoup, beaucoup, beaucoup
de compétences. Et nous, quand on fait des plans stratégiques ou quand on fait
des investissements, on ne regarde pas
voilà 15 ans, voilà 20 ans, on regarde dans les trois dernières
années. Et, dans les trois dernières années, on ne répétera pas les
chiffres, mais il y a eu 0,16 % d'augmentation pour les L et 0,65 %
pour les M.
Ça fait que je trouve ça un peu inapproprié de
faire des références à 2004 quand, honnêtement, le business était tout à fait, mais tout à fait différent qu'aujourd'hui.
Ça fait que ça, pour moi, ce n'est pas vraiment un commentaire que je
suis confortable avec.
Le Président (M. Lemay) : M. le
ministre.
M. Julien :
Alors, vous n'êtes pas confortable avec ce commentaire-là, mais, quand je vous
dis que c'est un gel avec inflation quatre ans et, après cette période-là qui a
été prévisible, qui, à tout le moins, là, sur une période... toutes choses
étant égales par ailleurs, ça va représenter 80 % de l'inflation sur la
période, parce que j'ai un gel, on peut revenir faire le processus de
cause tarifaire qu'on fait sur base annuelle actuellement. On change la
périodicité puis on l'amène sur
60 mois. Si, grand bien vous fasse, que vous avez raison, on corrigera, le
cas échéant. Alors, c'est quoi, le risque qu'on prend à donner une prévisibilité connue, raisonnable, gel, inflation,
puisqu'après cinq ans on va revenir en processus de cause tarifaire et
on va faire le même processus qu'on fait sur base de 12 mois, à tous les
12 mois?
Alors, à la
fin, on pourrait dire : Oui, les trois dernières années sont beaucoup plus
représentatives parce que, dans nos
business, nous autres, on pense que les trois dernières années, c'est
représentatif. Oui, mais le processus que propose le p.l. n° 34
nous prémunit, en réalité, d'écarts trop importants, le cas échéant.
Le
Président (M. Lemay) : M. Mayrand.
M. Mayrand
(Sylvain) : On va être trois à faire un commentaire...
Le Président
(M. Lemay) : Allez-y, il n'y a pas de problème.
M. Mayrand
(Sylvain) : ...sur cette question-là. M. le ministre, vous êtes au
courant que la survie des entreprises... C'est excessivement difficile
de demeurer compétitifs. On compétitionne contre des géants mondiaux. Nous,
chez Lassonde — j'espère
que vous avez pris votre jus Oasis ce matin — on compétitionne, là, contre
des petits joueurs.
M. Julien :
Lassonde fournit les pommes, puis je connais bien votre secteur.
M. Mayrand
(Sylvain) : C'est bon, c'est excellent. C'est excellent. Donc, nous,
on compétitionne contre des petits joueurs,
Coke et Pepsi, Coke étant Minute Maid, Pepsi étant Tropicana. On a célébré
notre 100e anniversaire, et on a des usines
aux États-Unis, et on a des usines en Amérique du Nord, et, pour nous,
l'inflation, M. le ministre, c'est un concept qui n'existe pas. De me faire dire, moi, qu'on va avoir 0,80 % ou
0,8 %, 0,6 % de l'inflation, M. le ministre, on n'est pas capable de repasser ces augmentations de coûts là
à nos clients. Comme on l'a expliqué, on n'a pas beaucoup de clients qui
ont énormément de puissance.
J'aimerais entendre,
Hamid, de ton côté...
M. Ghannou
(Hamid) : Bonjour. Mon nom est Hamid Ghannou. Je suis représentant
pour Olymel, aujourd'hui qui emploie à peu près
9 500 employés, femmes et hommes, dans la province de Québec, avec
27 établissements. La majorité de nos installations se trouvent au Québec.
Pourquoi? Parce qu'Olymel est fier de ses origines québécoises.
Donc, en partant de
ça, notre business, à nous, c'est vraiment année après année. Donc, ce qu'on
planifie, ce qu'on doit faire cette année, on ne peut pas le reporter à l'année
prochaine, on ne peut pas à l'autre, donc encore moins cinq ans pour s'asseoir et dire : Ah! l'inflation, on a un retour
ou non. Donc, les investissements sont, année après année, planifiés
dans notre budget.
Ceci
étant dit, donc, nous, ce qu'on voit comme... Ce qu'on... Excuse-moi. Donc, ce
qu'on prévoit, c'est : avec ce projet
de loi, ça nous empêche d'avancer, parce que les seuls leviers qu'on a au
Québec et que les Québécois... fiers partout, c'est l'eau et l'électricité. Donc, depuis que je suis au Québec, ils
m'ont dit : Écoute, les entreprises québécoises doivent se
développer à cause de l'eau et de l'électricité.
• (17 h 20) •
Aujourd'hui,
quand on regarde, parce qu'on a d'autres usines à travers le Canada, quand on
regarde ces usines-là, et on compare... Parce que vous l'avez dit, M. le
ministre, c'est que ces tarifs-là sont compétitifs. Mais ajoute à ça le transport, parce que nous autres, on exporte.
Donc, on regarde le dossier dans l'ensemble, nos projets, année après année,
sont à fleur de peau. Donc, des fois, là, on va lui dire : Regarde
celui-là, il ne va pas aller de l'avant, celui-là, il ne va pas aller de l'avant. Et, comme on est une
organisation fière d'être québécoise, on va implanter nos entreprises ici, au
Québec, la plupart du temps. Donc, quand on les envoie à l'extérieur, c'est
parce qu'on est obligés et parce qu'ils sont proches de nos clients. Donc, imagine Olymel qui exporte à
l'étranger et donc on va s'asseoir avec un client, on va dire : Écoute, on
va transférer l'inflation. Ce n'est
pas une discussion avec lui parce que lui a d'autres avantages que le Québec, il ne peut même
pas rêver d'avoir.
Donc,
on est dans un contexte mondial qui n'accepte pas ça. On est d'accord avec la
simplification, mais, grâce, il faut que ça ne soit pas une augmentation
déguisée. Merci.
M. Julien : O.K. Alors, je comprends ce que vous mentionnez, et,
pour avoir déjà travaillé un peu dans des dossiers de financement
ou des enjeux, en réalité, de compétitivité, Olymel, à titre d'exemple...
Vous dites : Nous, là, l'inflation, on ne peut pas dire ça parce
qu'on veut se maintenir concurrentiels, puis c'est année après année. Je suis
surpris, quand vous dites ça, que vous
préfériez un modèle où, une année, ça peut être 3,4 %, puis, l'année
suivante, c'est 0,2 %, l'année suivante,
c'est 0,38 %, et, l'année d'après, c'est 2,6 %. Alors, pour moi,
c'est... On vient dire «un gel», qu'on préconise, en réalité, que... On annonce que ça va être
l'inflation les quatre prochaines et qu'on pourra, le cas échéant, après 60 mois, refaire le processus de cause tarifaire.
J'ai comme l'impression qu'on donne plus d'assurance dans les discussions,
mais peut-être que je me trompe, que de venir dire : Vous
savez, le tarif d'électricité, l'an prochain, je ne sais pas à quoi il va
ressembler. Je ne le sais pas.
Le Président
(M. Lemay) : M. Fraeys.
M. Ghannou
(Hamid) : M. le ministre, je veux juste...
Le Président
(M. Lemay) : Oh! M. Ghannou, allez-y.
M. Ghannou
(Hamid) : Je vais, après ça,
transférer la parole de suite. Ce qu'on demande, c'est des tarifs transparents,
des coûts équitables et les plus bas au Québec. C'est ça,
ce qu'on demande, je pense que ce n'est pas compliqué, pour continuer à
développer et créer des emplois qui ont des salaires élevés au Québec. C'est ce
qu'on demande.
M. Julien : Je pense que c'est
ce qu'on offre.
Le
Président (M. Lemay) : M. Fraeys, allez-y.
M. Fraeys (Dimitri) : Pour nous, aussi, la Régie de l'énergie, c'est un rempart, c'est une façon de pouvoir exprimer une réalité. Pour un transformateur, c'est
impossible de transférer ces augmentations de coûts aux distributeurs. Les distributeurs... Quand vous faites votre épicerie,
votre volonté, c'est d'acheter des produits qui n'augmentent pas à l'inflation.
C'est ce que le distributeur, il nous
demande également. Ça fait que, pour nous, l'inflation, comme dit
M. Mayrand, ce n'est pas viable.
Et,
oui, c'est vrai, on aime bien pouvoir aller défendre notre cause devant la
régie, parce que la Régie de
l'énergie, pour nous, c'est un rempart, c'est une façon de
pouvoir nous exprimer. Donc, c'est un organisme indépendant et qui permet effectivement d'établir une confiance et une transparence. Ça fait que, oui, ce n'est peut-être
jamais le meilleur du système, mais, au moins, on a la possibilité de
nous exprimer et on peut défendre notre opinion.
Le Président
(M. Lemay) : M. le ministre.
M. Julien :
J'aime bien cette possibilité-là. Rappelez-moi, monsieur de Lassonde, votre nom
de famille.
M. Mayrand (Sylvain) :
Mayrand.
M. Julien : Alors, j'aime bien cette possibilité-là de s'exprimer, et, pour nous, en réalité, oui, il va y avoir possibilité de s'exprimer, ça va être spécifiquement sur la cause tarifaire, aux cinq ans. Et tantôt
on mentionnait : Oui, mais c'est certain que, si on prend les 15 dernières années puis on retournait ici, il y a
eu des gels. On a fait l'exercice, les 50, les 40... Bon, c'est sûr que, si je prends un bout de courbe ici,
ce n'est pas bon, puis ici... mais, sur 50 ans, c'est encore bon. Puis ça,
bien, naturellement, c'est par rapport à la présence de la régie, mais,
à la fin, nous, on pense que l'inflation ne s'éloigne pas beaucoup
de la réalité du passé. Il y a une corrélation, et on vient dire : Après
60 mois, là, on va regarder ça, on va faire une cause tarifaire.
J'ai
de la misère à concevoir le risque d'augmenter la périodicité de 12 à
60 mois, en termes de compétitivité. Je sais qu'il faut la regarder
globalement, la compétitivité. Je pense que, par rapport aux tarifs d'électricité,
le Québec est compétitif. Et, quand on regarde la courbe du passé, l'inflation
n'est pas aberrante. Puis on corrigera aux 60 mois.
Le Président
(M. Lemay) : M. Mayrand.
M. Mayrand
(Sylvain) : C'est des concepts intéressants. Moi, j'aimerais tellement
ça, avoir une entreprise où est-ce que j'irais présenter mes budgets aux cinq
ans, où est-ce que j'aurais carte blanche pendant cinq ans, puis d'avoir l'inflation comme marge de manoeuvre. Moi, je ne
connais pas ça. Je ne connais pas d'entreprises qui ont cette flexibilité-là.
M. le ministre, voilà 50 ans, hein, c'était Jean Béliveau qui était capitaine du
Canadien, ça, on s'en rappelle, tous les deux, mais, moi, de parler de voilà
50 ans puis de parler de voilà 15 ans... Moi, je ne vois pas comment
est-ce qu'on pourrait avoir des
augmentations de 3,8 %, 4 % dans les prochaines années quand on a eu
des trop-perçus de 106 millions l'année
dernière. Je ne vois pas ça, M. le ministre. Puis je ne vois pas de tempête à
l'horizon qui va amener des augmentations, quand on a eu, encore une fois, 0,16 % et 0,65 %...
0,16 % pour L, 0,65 %. Ça fait que je ne la vois pas, la tempête,
puis ce qu'on essaie de vous dire, c'est que l'inflation, ça n'existe
pas chez nous.
Ça fait que moi, je
ne vois pas de tempête, puis, de donner carte blanche à un monopole où est-ce
qu'on ne pourra pas à chaque année aller se
défendre puis questionner... Parce
que moi, je siège sur l'AQCIE depuis
plus de 10 ans, puis c'est très
intéressant, d'année en année Hydro-Québec arrive toujours avec des augmentations supérieures, puis, en
challengeant, on est toujours
capables de couper, des fois de réduire à 100 % l'augmentation demandée,
et même arriver avec des baisses.
Puis là, de donner monopole avec l'inflation, M. le ministre, c'est là que
j'ai le problème, avec l'inflation. Vous auriez 0,10 % de
l'inflation, on serait pas mal plus confortables.
Le
Président (M. Lemay) :
M. Mayrand, pour ma part, il y a 50 ans, je n'étais pas né, mais, il y a
40 ans, par exemple, c'était Serge Savard, le capitaine des
Canadiens. Mais, sur ce, M. le ministre est de retour.
M. Julien : Puis moi, je n'en ai pas l'air, mais moi non
plus, je n'étais pas né. Non, mais j'entends ce que vous me dites, mais carte blanche, pour moi, là... Ici, là,
c'est tout le détail de ce que la Régie
de l'énergie fait par rapport
à Hydro-Québec, avec les dépôts, en fin de compte, des états
financiers, toute la surveillance qui est maintenue. C'est la cause tarifaire, là. Alors, ce n'est pas une carte
blanche, c'est par rapport à la cause tarifaire. Ça, pour moi, c'est une
chose, et, naturellement...
Le
volet prévisibilité, pour vous, en fin de compte, ça n'a pas de valeur, la
prévisibilité sur quatre ans... si ce n'est, comme vous mentionnez
vous-même : Naturellement, si on suggérait 0,10 % de l'inflation, on
serait intéressés à vous écouter.
Mais une prévisibilité à l'inflation, ce n'est pas très souhaitable pour vous.
Mais je réitère, je le sais, il y a 50 ans, c'était Jean Béliveau, puis le passé n'est pas garant du futur, mais on
regarde le passé, on dit : À l'inflation, on ne fait pas... ce
n'est pas déraisonnable, et on pourra toujours corriger après 60 mois.
Donc,
je comprends qu'on ne s'entendra pas là-dessus, mais, pour moi, là, carte
blanche, là... La régie maintient tous ses pouvoirs par rapport à
l'élément de cause tarifaire. On s'en va sur une périodicité plus longue, mais
la surveillance d'Hydro-Québec par rapport à ses résultats financiers, ça existe
encore.
Le Président (M. Lemay) :
M. Mayrand, 30 secondes environ.
M. Mayrand
(Sylvain) : Oui. Bien, 30 secondes... M. le ministre,
Hydro-Québec, dans les trois dernières années, a demandé 2,7 %, et, à cause de la régie... pour les L, et, à cause
de la régie, il y a eu 0,5 % de donné, et, pour les M, ils ont
demandé 3,7 %, et il y a eu 1,9 %.
M. Julien : Ça, ce n'est pas la
demande faite à la régie, c'est la régie qui a autorisé.
M. Mayrand
(Sylvain) : Non, mais... Oui, mais vous me dites de donner... ils
n'auront pas carte blanche, mais ils ont demandé, dans les trois
dernières années, 2,7 %...
M. Julien : Ça va être à
l'inflation. Ce n'est pas qu'est-ce qu'ils demandent, c'est à l'inflation.
M. Mayrand (Sylvain) : Non,
mais ils ont demandé 2,7 %, puis la régie...
M. Julien : Ce n'est pas ce
qu'ils demandent.
M. Mayrand
(Sylvain) : Oui, mais ils ont demandé 2,7 %, si la régie n'aurait
pas été là, ils auraient eu 2,7 %, puis ils ont eu 0,5 %. Ça
fait que la régie a toujours été le rempart pour s'assurer que les demandes
d'Hydro-Québec soient contrôlées.
Le
Président (M. Lemay) : C'est terminé. Merci beaucoup. Ça conclut
cette période d'échange avec la partie du gouvernement. Maintenant, je
vais céder la parole à l'opposition officielle. M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum :
Merci, M. le Président. Merci, messieurs. Vous représentez un secteur
névralgique pour le Québec, essentiel
pour nos régions, et vous parlez de milliers de monde qui sont employés dans
vos industries, et vous parlez d'une concurrence
féroce et une marge de manoeuvre... une marge de profit assez restreinte. Donc,
il me semble que les arguments que vous avez mis de l'avant dans votre
mémoire et lors de votre présentation sont préoccupants.
Écoutez, nous
sommes ici pour chercher l'équité, pour chercher une imputabilité de ce
«monopoly», qui est un bijou pour nous tous au Québec, et nous sommes ici, de
toute évidence, aussi pour parler des dernières années, et justement un
trop-perçu assez important, et de trouver la façon correcte de remettre les
pendules à l'heure.
Alors, je vous invite, dans un premier temps, de
vous prononcer sur ce projet de loi en termes de ce trop-perçu. Est-ce que ça
risque de répondre à la promesse de la CAQ de rembourser l'ensemble des
trop-perçus?
M. Mayrand (Sylvain) : Oui.
Bien, comme il a été mentionné...
Le Président (M. Lemay) :
M. Mayand.
• (17 h 30) •
M. Mayrand
(Sylvain) : Oui. Comme il a été mentionné tout à l'heure par mon
collègue Jocelyn, les trop-perçus... il
y a eu 106 millions de trop-perçus en 2018 et il y avait eu un mécanisme
de mis en place pour s'assurer que les trop-perçus n'allaient pas continuer à être perçus en trop.
Donc, si on fait disparaître ce mécanisme-là et qu'on donne, encore une fois,
carte blanche à Hydro-Québec, bien, nous,
notre position, c'est qu'on ne s'améliore... on ne va pas en s'améliorant dans
cette position-là.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Maintenant, quand on
parle du dossier tarifaire, là, on songe, avec le projet de loi, de changer la donne, de changer l'échéancier, et tout ça, et
on est devant un projet de loi où les réalités actuelles sont en place. Dans
ce contexte, est-ce que vous pensez qu'Hydro-Québec devrait déposer un dossier
tarifaire pour 2020 et 2021?
Le Président (M. Lemay) : M. Fraeys.
M. Fraeys (Dimitri) : La réponse est
oui. Nous pensons qu'effectivement Hydro-Québec devrait déposer une demande tarifaire et que l'AQCIE et les parties
aient la possibilité de le discuter et de le débattre, comme ça a toujours été
fait. C'est ce que nous demandons, effectivement, un statu quo. C'est
exactement en ligne avec notre position.
M. Birnbaum : Vous avez répondu un
petit peu quand on parlait de l'idée que, suite à l'adoption de ce projet de loi, on verrait soumis un dossier tarifaire une
fois par cinq ans. Si j'ai bien compris, ça vous préoccupe beaucoup en termes de l'impact potentiel sur le bien-être,
l'activité de vos industries. Je vous invite, dans un premier temps, d'en
élaborer un petit peu et de nous
donner l'autre côté de médaille, comment ça vous protège comme industrie
névralgique, comme je dis, d'avoir une régie assortie d'un mandat
d'examiner un dossier tarifaire annuellement.
Le Président (M. Lemay) : M.
Mayrand.
M. Mayrand (Sylvain) : Oui, bien,
écoutez, comme on a mentionné tout à l'heure, pour moi, c'est tout à fait impensable d'avoir une entreprise qui ne va avoir
aucun compte à rendre à ses clients à tous les cinq ans. Ça, pour moi...
C'est un monopole. On
fait face à un monopole. Ça fait qu'on ne va avoir aucune, pour les cinq
prochaines années... Puis on savait, hein, on savait qu'il y a de
l'argent qui s'en venait, là. Cet argent-là n'est pas apparu avec un coup de
baguette magique, là. Les surplus, là, qui
vont être redonnés par la CAQ, on a hâte de les avoir, mais on savait qu'ils
existaient. Ça fait que, pour nous,
c'est impensable de n'avoir aucune... de donner carte blanche sans avoir
l'option, à toutes les années, d'aller challenger...
Je l'ai dit et je le
répète, dans les trois dernières années, Hydro-Québec a demandé 2,7 %,
2,7 % qu'ils ont demandé en 2017, 2018,
2019 pour les tarifs L. Après avoir débattu devant la régie, qu'est-ce qui a
été donné? 0,5 %. Si on le fait
pour les tarifs M et les gens, les résidentiels, tous les gens qui ont un
compte d'électricité à payer aujourd'hui au Québec, Hydro-Québec avait demandé, dans les mêmes trois dernières
années, 3,7 %. Et, avec le mécanisme de la régie, à engager des spécialistes et à aller challenger les
demandes faites par ce monopole, qu'on adore, qu'on adore — moi, je n'ai aucun problème avec
Hydro-Québec, beaucoup, beaucoup de compétences — bien, il a été accordé
1,9 %.
Donc, c'est ça qui
est inquiétant, d'avoir... S'ils avaient demandé, dans les dernières années...
Ils demandent toujours plus. Ils ont
toujours demandé plus que qu'est-ce qui a été alloué. Ça fait que c'est ça qui
est inquiétant. Puis ça, il n'y aura
plus aucun rempart. Ils ont toujours demandé plus que qu'est-ce qui a été
alloué. Ça fait que c'est ça qui est inquiétant, puis ça, il n'y aura plus aucun rempart. C'est un monopole. On fait face
à un monopole. Moi, je ne peux pas... Moi, mes clients, là, si j'augmente mon tarif, là, demain matin, là, il va
appeler tous les compétiteurs puis il va demander qui qui est prêt à me
vendre les produits qu'on fabrique à moins cher. Ça fait que nous, on trouve ça
tout à fait impensable, encore une fois,
qu'un monopole n'ait pas à toutes les années d'aller se défendre, expliquer. À
toutes les années, on doit aller devant nos conseils d'administration, devant les patrons pour défendre nos
augmentations, puis d'expliquer pourquoi que les coûts augmentent, puis d'expliquer qu'est-ce qui se
passe puis qu'est-ce qu'on fait pour s'améliorer. Pour moi, c'est impensable
d'éliminer ce concept-là.
Le Président (M.
Lemay) : Merci, M. Mayrand. Sur ce, je cède la parole au député de
Laval-des-Rapides.
M. Polo :
Merci beaucoup, M. le Président. Il me reste combien de temps?
Le Président (M.
Lemay) : Environ cinq minutes...
M. Polo :
C'est bon. Je vais y aller...
Des voix :
...
M. Mayrand
(Sylvain) : Il reste 12 minutes.
M.
Polo : Je vais y aller en rafale, si vous permettez, puis excusez ma
voix. M. Ghannou — c'est
bien ça? — vous
avez mentionné que vous représentez des PME ou des entreprises membres du
Conseil de la transformation alimentaire. Faites juste répondre à ma
question : Combien de membres font partie du conseil de la transformation?
M. Fraeys
(Dimitri) : 550. On a 550 membres, qui représentent 80 % de
l'industrie, donc une industrie...
M. Polo :
...établie partout au Québec?
M. Fraeys (Dimitri) : ...établie partout au Québec. Des grandes, des petites, des moyennes.
Ça part de cinq employés jusqu'à 16 000 employés. Nous
représentons l'ensemble de l'industrie.
M.
Polo : Parfait. J'aimerais revenir auprès de M. Mayrand. C'est bien
ça, hein? O.K. Vous avez fait souvent référence au fait que la prévisibilité
est basée sur une moyenne d'inflation au cours des 50 dernières années.
Selon vous, c'est une fausse prémisse, c'est un mauvais benchmark, pour
le dire en bon français, là, mauvais point de comparaison. Ceci dit, quelles seraient les conséquences, selon
vous, pour certains de vos membres, de... Dans l'application du projet de
loi n° 34, quelles seraient les conséquences pour certains de vos
membres de justement tomber dans cette fausse prévisibilité? Et, comme vous l'avez mentionné, il
n'y a aucune entreprise qui pourrait se payer le luxe, à part peut-être
Hydro-Québec, avec ce projet de loi
là, d'avoir à déposer des états financiers à tous les cinq ans, disons-le comme
ça. Donc, j'aimerais parler de la...
M.
Fraeys (Dimitri) : ...une entreprise... Réponds.
M.
Ghannou (Hamid) : Merci. Donc, si on parle... Parce que, là, après
avoir analysé le projet de loi, tu sais, on voit, la tendance, on va vers des
augmentations pour nos entreprises. Donc, en partant de ce point-là, donc, tous
les investissements... Et surtout qu'on est
appelés... Avec la main-d'oeuvre qui devient très difficile à trouver, donc, on
est appelés à automatiser.
Le gouvernement nous demande de baisser nos gaz à effet de
serre, donc on doit faire des projets de modernisation et d'enlever les gaz à
effet de serre. Quand on veut enlever les gaz à effet de serre, qu'est-ce qu'on
doit faire ? Bien, on doit aller vers l'énergie
renouvelable. Par conséquent, c'est l'électricité. Donc, encore là, il y a des
investissements.
Donc, la partie la plus sensible, c'est que ces
investissements-là, ils vont être, à certains moments, compromis au Québec, parce que le choix, il va être :
Est-ce qu'on les fait au Québec ou on les fait en Ontario ? Notre
compétiteur direct n'est pas venu au Québec, il avait 660 millions...
M.
Polo : Je vous écoute.
M. Ghannou (Hamid) : ... — je sais que vous m'écoutez, mais je veux que ça soit bien entendu — parce qu'il n'est pas venu au Québec, il est resté en Ontario pour
mettre son usine. Donc, c'est de la compétition, je ne parle pas de la compétition encore
internationale, je parle de notre voisin en Ontario. Donc, tu sais, c'est...
Quand on parle, on dit : On a les meilleurs tarifs au monde, il
faut le mettre dans la globalité et regarder dans l'investissement.
Donc, il y a plein de projets qui risquent de quitter le
Québec. Pour nous, c'est une possibilité réelle. Et pourtant on est purs, bons Québécois et on veut développer le Québec.
Le
Président (M. Lemay) : M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Polo : Il me reste 50 secondes. Je vais
répondre à votre place. Vous ne devez pas avoir beaucoup d'entreprises, de PME qui sont dans Laval-des-Rapides, on s'entend. O.K.
M.
Fraeys (Dimitri) : ...des entreprises dans toutes
les régions.
M.
Polo : Non, mais je connais quand même assez... J'ai un secteur
industriel dans mon comté. Mais peut-être qu'il y en a une ou deux.
Ceci dit, en terminant, M. le Président, pourquoi je
soulevais, pour des PME, la conséquence pour des investissements étrangers, là, c'est parce qu'on a
des collègues, ici, autour de la table, qui viennent de toutes les régions du
Québec. Et je vous invite, les
collègues qui participez à ce débat-là, à non seulement serrer la main des
invités qu'on a ici, mais demander quelles entreprises sont situées dans
vos comtés et quel impact le projet de loi n° 34 peut avoir non seulement
pour les entreprises, mais pour les
travailleurs de chez vous et des investissements étrangers qui ne pourraient
pas être effectués dans vos entreprises, et peut-être même des emplois
compromis par des gens chez vous. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, M. le député. Sur ce, je vais
céder la parole au député du troisième groupe d'opposition. M. le député
de Jonquière, la parole est à vous.
M.
Gaudreault : Oui. Devinez ce que je vais vous demander préalablement,
M. le Président.
Le
Président (M. Lemay) : Bien sûr, de pouvoir utiliser le temps non
utilisé par le deuxième groupe. Est-ce qu'il y a consentement?
Des
voix : Consentement.
Le
Président (M. Lemay) : Parfait. Allez-y, M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Merci. Merci beaucoup de votre
présence. Je veux savoir : Est-ce que vous plaidez souvent devant la Régie de l'énergie ?
M.
Fraeys (Dimitri) : Non, pas du tout, nous ne
plaidons pas du tout, nous ne sommes pas accrédités. C'est l'AQCIE qui plaide devant la Régie de l'énergie.
C'est pour ça que j'ai dit au départ, quand... Vous n'étiez pas là, mais,
quand vous étiez absent, j'ai dit...
M.
Gaudreault : O.K. Je suis désolé.
M. Fraeys (Dimitri) : Quand vous étiez absent, ce que j'ai
mentionné, c'est que nous n'avons pas cette compétence, donc nous nous sommes associés avec l'AQCIE, qui
nous conseille et qui nous donne... qui nous aiguille dans ce domaine.
Et, également, les deux personnes qui m'entourent sont membres de l'AQCIE, oui,
puis M. Mayrand est sur le conseil d'administration.
• (17 h 40) •
M. Gaudreault : Parfait. Le ministre, avec le
projet de loi n° 34, base beaucoup son argumentaire sur la croissance de l'inflation et se coller à
l'inflation. Mais il présente ça comme si c'était le seul facteur, dans
l'industrie de l'énergie, sur lequel on doit se baser, tu sais, pour fixer des
tarifs ou pour intervenir dans le vaste secteur de l'énergie. Mais l'inflation, je veux dire, ça peut être
influencé par plein de choses, là, mais comme le secteur de l'énergie aussi
peut être influencé par plein de
choses. Est-ce que vous trouvez que c'est trop limitatif d'être collé à
l'inflation, dans le sens que ce qui
est arrivé... Présentement, ce qui arrive en Arabie saoudite, par exemple... ou plutôt au Yémen, avec
des attentats sur des... ou des attaques sur des raffineries ou des puits de pétrole, bon, bien, vont faire
monter les prix de l'essence? Donc, il y a différents facteurs qui rentrent en
ligne de compte. Est-ce que vous trouvez que c'est trop limitatif pour une
industrie comme la vôtre?
Le Président (M. Lemay) :
M. Mayrand.
M. Mayrand (Sylvain) :
Bien oui. Comme on l'a déjà mentionné, l'inflation, pour nous, ce n'est pas un
terme qui existe. Ça existe juste
dans le dictionnaire. On compétitionne contre des géants. Le problème qu'on a
au Québec, c'est un... Moi, je suis
un petit gars de Baie-Comeau, un petit gars de la Côte-Nord, c'est une province
fantastique, mais on est loin de
tout. On a une usine à New York, à Seabrook... ou à Philadelphie plutôt,
et il y a 20 millions d'habitants à quelques heures de camion versus qu'au Québec on est loin, on est
collés sur la côte atlantique et on doit énormément payer des frais de
transport.
Donc,
c'est pour ça qu'on discutait tout à l'heure avec M. le ministre, nous, de
fonctionner avec l'inflation, ce n'est pas une option, surtout, encore une fois,
qu'Hydro-Québec, dans les trois dernières années, a livré une performance
tout à fait spectaculaire, de loin des
fractions de l'inflation, et on ne voit pas, en tant que gestionnaires, comment
cette entreprise aussi bien gérée
pourrait soudainement dérailler et d'arriver avec des augmentations de
2,5 %, 3 %, tout dépendamment. On ne voit pas ça, de notre côté. Donc, c'est pour ça que l'inflation,
pour nous, ce n'est pas vraiment la référence. Vous seriez arrivés avec
0,1 % de l'inflation, on aurait été très intéressés à discuter, mais pas
avec l'inflation ou 0,65 % d'inflation.
M. Gaudreault :
Oui, c'est ça. Donc, c'est là que vous dites : Ça va venir à... Il va y
avoir des dommages collatéraux sur
notre compétitivité, à cause des autres facteurs qui viennent donner un impact
sur votre industrie, comme la distance, le transport, etc.
Donc,
pour vous, au fond, la fameuse prévisibilité... Parce qu'il y a deux mots qui
reviennent souvent dans la bouche du
ministre, c'est l'inflation et la prévisibilité. Mais, dans le fond, vous
dites : Comme industrie, la prévisibilité est importante, mais le pouvoir discrétionnaire que le ministre ou
le gouvernement et Hydro-Québec s'arrogent dans la fixation des tarifs
est pire qu'une soi-disant prévisibilité sur cinq ans.
M. Mayrand
(Sylvain) : C'est intéressant de parler de prévisibilité. Moi, en
étant sur le conseil d'administration de
l'AQCIE, ce qu'on avait en prévision, c'est que, l'année prochaine, on allait
avoir une baisse. Hein, c'est ce qu'on prévoyait l'année prochaine,
d'avoir une baisse.
M. Gaudreault :
Avec le régime actuel.
M. Mayrand
(Sylvain) : Mais avec des surplus, là, qui sont dans le coffre. Donc,
la prévisibilité, c'était d'avoir une
baisse, puis, l'année d'après, probablement une autre baisse ou des
augmentations très, très, très faibles avec encore une fois l'excellente performance qui est faite
par la société d'État. Donc, la prévisibilité, pour moi, on ne parle pas
pendant les cinq prochaines années...
cinq ans, c'est beaucoup trop loin, mais, dans les deux, trois prochaines
années, on ne prévoyait pas de l'inflation au niveau des augmentations
au niveau d'Hydro-Québec.
M. Ghannou
(Hamid) : La présivibilité... excuse-moi...
M. Mayrand
(Sylvain) : Prévisibilité.
M. Ghannou
(Hamid) : ... — exactement, merci — est
importante pour nous aussi. Parce que, tu sais, avec la
régie, avec les discussions avec la régie, le risque est éliminé à 90 %.
Donc, s'il y a un 10 %, on est capables de vivre
avec. On est des entreprises,
on est dans le risque. Donc, à ce
moment-là... mais sauf qu'on le sait
dans l'année. Là, on va le savoir aux
cinq ans. J'ai donné un exemple aléatoire comme ça de 10 %, si j'additionne 10 % plus 10 %, plus 10 % en cinq ans, ils m'arrivent
avec ça, tu sais, on n'est...
M. Gaudreault :
Ça commence à faire, là.
M. Ghannou
(Hamid) : Donc, l'inflation, pour nous, ça n'existe pas. Le client est
toujours... Hydro-Québec, comme fournisseur, si on doit le traiter comme
d'autres fournisseurs... parce que c'est un monopole, on ne peut pas le faire. Mais, si on pouvait le faire, on n'aurait
pas parlé d'inflation, on aurait parlé : Voilà le tarif qu'on veut. Est-ce que vous êtes capable de nous le
donner ou on va ailleurs? Mais ça, on ne peut pas le faire, malheureusement.
Le Président
(M. Lemay) : M. le député de Jonquière, c'était tout le temps
qu'on avait. Donc, M. Ghannou, M. Fraeys, M. Mayrand, merci
beaucoup pour votre contribution à nos travaux.
Sur ce, je suspends
la commission jusqu'à 19 h 30.
(Suspension de la séance à
17 h 45)
(Reprise à 19 h 31)
Le Président
(M. Lemay) : Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de
l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie
et des ressources naturelles reprend ses travaux. Je demande à toutes les
personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
appareils électroniques.
Ce soir, nous entendons le Conseil du patronat du Québec. Et je souhaite
maintenant la bienvenue aux représentants du Conseil du patronat du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter, ainsi
que les personnes qui vous accompagnent, et à procéder à votre exposé.
La parole est à vous.
Conseil du patronat du Québec
(CPQ)
M. Dorval (Yves-Thomas) : Bonjour, M.
le Président. Mon nom est Yves-Thomas
Dorval. Je suis président et chef de la direction du CPQ, le Conseil du patronat du Québec, et je suis
accompagné, à ma gauche, de Mme Norma Kozhaya, qui est
vice-présidente à la recherche et économiste en chef au CPQ.
Alors, merci, M. le
Président, merci, membres de cette commission, de nous avoir invités. Et,
d'entrée de jeu, peut-être préciser que le
CPQ représente environ 70 000 employeurs qui ont des activités au
Québec, des employeurs dans tous les
secteurs, dans toutes les régions, de toutes les tailles, des employeurs autant
du secteur privé que parapublic et péripublic.
M. le Président, ce
n'était pas facile de venir ce soir, pour nous, parce que, d'habitude,
lorsqu'une association se prononce sur un
sujet, il le fait quand il y a un consensus dans son membership. Et je dois
avouer qu'on n'a pas de consensus dans
notre membership, alors je vais vous le dire d'emblée. Et on aurait pu
dire : Bon, bien, comme on n'a pas de consensus, on ne se présente
pas, puis on a dit non.
Vous
savez, on a été créé il y a 50 ans cette année, et notre mission première,
notre ADN, c'est d'essayer de favoriser le dialogue social, de participer au
dialogue social. Ça, ça veut dire qu'on est prêt à écouter les différentes
parties, les différents points de vue, essayer de les comprendre puis essayer
d'avancer ensemble pour essayer de trouver des solutions gagnant-gagnant
pour toutes les parties. Alors, c'est dans cette optique-là qu'on a dit :
On va participer à l'exercice, parce qu'on
croit que cet exercice-là est très important. On pense que, si on nous convoque
ici, c'est parce que vous croyez que
le CPQ a des choses intéressantes à partager avec vous. Mais, en même temps, on
doit prendre acte qu'ici on n'arrive pas
avec une position pour, contre, il y en a qui dirait : Bien au contraire.
Mais la réalité, c'est de dire : Bien, on a pris le temps de consulter,
parmi nos membres, ceux qui sont favorables, et pourquoi, ceux qui sont moins
favorables, et pourquoi, et tenté de
voir, à travers ça, y a-t-il des pistes de solution pour essayer de regrouper,
de rassembler ces points de vue là. Donc, ça, c'est la première des
choses que j'avais à vous dire.
C'est
sûr que, l'électricité, ça, on y croit fortement, c'est un outil de
développement économique extraordinaire pour le Québec. Je pense qu'il
n'y a aucun parti politique autour de la table qui ne le croit pas, qui ne le
partage pas, et ça, c'est à tous les
niveaux. Donc, c'est important qu'on le regarde sous cet angle-là, même si,
hein, le service d'électricité et son
tarif, c'est aussi une offre d'un service, au plan de la société, qui est très importante, c'est aussi, et très important,
un vecteur de développement économique.
L'offre énergétique
doit être prévisible pour les clients. Ça doit être sa preuve d'une certaine
stabilité, mais ça doit aussi être
compétitif à l'échelle mondiale. C'est sûr qu'au Québec c'est un monopole, la
distribution d'électricité. Mais, quand on se compare avec l'étranger
puis qu'on a des investissements à faire venir ici, il faut prendre en
considération l'offre d'énergie, parfois à
rabais, dans d'autres États à travers le monde et comment le Québec,
qui bénéficie non seulement d'une
source d'énergie extrêmement intéressante avec son potentiel hydroélectrique
et ses autres potentiels, qu'on néglige de parler trop souvent, en
énergies renouvelables... Alors, pour nous, c'est extrêmement important.
Je pense que, quand le gouvernement ou les membres de l'Assemblée nationale... les parties prenantes, Hydro-Québec,
les clients industriels, petites
entreprises, moyennes entreprises, et tout ça, elles voient toutes des besoins.
Le gouvernement, à travers l'analyse de la situation,
croit important d'avoir, à sa façon, une certaine stabilité, une certaine
prévisibilité. Hydro-Québec, une société parapublique, et c'est légitime,
voudrait aussi voir, probablement, un allègement réglementaire, parce que
c'est très lourd actuellement, le cadre, le fardeau réglementaire de ce côté-là.
Les clientèles, ce qu'elles veulent avoir, c'est un approvisionnement
fiable à un taux le plus intéressant possible. Et le citoyen, qui, dans le
fond, à travers l'État, est un actionnaire,
il veut s'assurer également de la bonne gestion et s'assurer qu'à la fin il n'y aura
pas de gaspille. À travers ça, il y a
d'autres partenaires, la Régie de l'énergie en est un important, parce qu'elle doit... quand je dis partenaire,
plutôt partie prenante, je m'excuse, parce
qu'à travers son examen, elle tend à exercer son mandat et sa mission pour
rendre des décisions par rapport aux demandes tarifaires qui lui sont
faites, notamment.
Donc, quand on
regarde ces différents objectifs là, est-ce que c'est réconciliable? Je pense
que ce que le gouvernement essaie de faire... Puis la discussion qu'il doit y
avoir entre les législateurs, ici, c'est de savoir comment on peut arriver à ces objectifs-là d'une manière
la plus efficace possible. On a besoin, c'est très clair, d'un petit peu plus
d'agilité au niveau des décisions qui sont prises. Ce n'est pas le cas
présentement. Et on est dans une période de transition énergétique très
importante pour le Québec, pour la société, pour la population actuelle et la
population future. Et une transition énergétique,
ce n'est pas toujours axé sur les mêmes types de décisions, par exemple de
retour sur l'investissement à court terme,
etc. Donc, il faut regarder ça d'une manière différente et c'est pour ça qu'on
a pris le temps, l'exercice de passer au travers ce qui était proposé
ici.
Prenons juste la
question des programmes d'efficacité énergétique. Tout le monde sait, par
exemple, quand on s'achète un véhicule
électrique, par exemple, actuellement, que le rendement, le retour sur
l'investissement, il n'est pas évident à court terme. Il est assez dispendieux.
Mais on doit aller au-delà de ça. On doit regarder également l'effet que
ça produit en réduisant les émissions de gaz à effet de serre, par exemple. Ça,
je parle juste de la question de l'énergie utilisée
pour le transport. Je ne rentrerai pas dans le débat de la fabrication des
véhicules, des batteries, puis tout ça. Mais c'est la même chose quand il y a des programmes qui sont présentés
devant la Régie de l'énergie, comment on peut faire en sorte de trouver, hein, des programmes qui
peuvent avoir un effet sur les tarifs ou sur les consommateurs, puis le retour n'est
pas nécessairement évident.
Alors, on comprend tous ces
éléments-là. Il y a d'autres intervenants, aussi, qui pourraient, entre autres,
garder... de bénéficier de certains allègements dans ce processus-là.
• (19 h 40) •
Donc,
il y a des aspects positifs que j'ai mentionnés, mais plusieurs y voient aussi
des impacts négatifs, et vous avez eu l'occasion, je pense, d'en
entendre au cours de la journée. Et c'est légitime que les gens regardent ça à
travers leurs lunettes, puis regarder quels
sont les impacts négatifs, quels sont les impacts positifs. Ce qui est le plus
délicat dans tout ça, c'est qu'on va
regarder toujours... on va faire, toujours, nos évaluations en fonction de
certains paramètres. C'est quoi, les dates
couvertes? C'est quoi, les tarifs, exactement? L'impact? Puis là chacun va
avoir sa vision ou sa façon de voir les choses.
Chose certaine, au
niveau des impacts négatifs potentiels, une hausse des tarifs qui pourrait être
plus élevée qu'auparavant pour les
entreprises, selon certains commentaires recueillis, notamment
auprès des représentants industriels, si on se fie aux quatre
dernières années. Par ailleurs, si on regarde depuis 2003, il semble que les
tarifs ont correspondu en gros à
l'inflation. Donc, ça dépend comment on le regarde, sur quelle période, puis,
nous, je pense qu'à la fin on ne peut pas dire : C'est une façon ou une
autre. On peut juste reconnaître qu'il y a des points de vue différents sur
ces aspects-là.
Un mécanisme
d'indexation des tarifs pouvant créer l'équivalent d'autres écarts de rendement
ne serait pas non plus intéressant, puisque l'objectif, à la base, le premier
incitatif, ça a été de régler la question des trop-perçus. Et là-dessus, on s'est déjà prononcé, que les
trop-perçus, c'est relatif, parce qu'à la fin c'est redistribué à l'ensemble
des citoyens, alors que ces écarts de
rendement font partie des raisons ayant motivé, justement, le gouvernement à
aller de l'avant avec ça.
La
discussion doit être élargie à d'autres éléments, nous le croyons, notamment la
question de l'interfinancement. Puis
c'est drôle, on n'en parle pas. Or, on sait très bien que, principalement, les
PME, dans le domaine commercial et industriel, mais, en fait, c'est tous les
clients, commercial et industriel, ne paient pas le prix exactement que ça
coûte pour le rendre... leur fournir
l'énergie, alors que le citoyen résident, le consommateur individuel, lui,
bénéficie d'un tarif plus faible que ce que ça coûte vraiment pour l'obtenir.
Ça a été une décision, puis ça a été une décision qui a été faite par les
précédents gouvernements. Mais, si on
regarde les questions tarifaires, on devrait se poser ces questions-là
également. Pourquoi est-ce que, par exemple, les PME paieraient plus
cher dans les faits?
Le Président
(M. Lemay) : M. Dorval.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Malgré...
Le Président
(M. Lemay) : M. Dorval.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Oui?
Le Président
(M. Lemay) : Est-ce que vous étiez sur votre conclusion?
M. Dorval (Yves-Thomas) : Oh! Alors,
vous regarderez notre mémoire qu'on vous a présenté, ou je répondrai à vos questions, mais nous, on regardait une piste
de solution. Et on pense que, si le gouvernement va de l'avant, puis il y a des raisons positives pour le faire, tant pour Hydro-Québec que pour la prévisibilité, etc.,
peut-être qu'on pourrait se dire
qu'au lieu de regarder... par exemple, un retour en révision tarifaire à la régie, au lieu de le faire sur
cinq ans, on devrait réduire la période à mi-chemin, peut-être trois
ans, comme ça les clients pourraient bénéficier effectivement d'une réduction réelle, puisqu'il y a un gel pendant un an, puis
une augmentation selon l'inflation pendant deux ans. Puis ça
laisserait le temps, après trois ans,
de regarder ça de façon très reposée, très calme et très indépendante puis
regarder, finalement : On est-u
dans la bonne direction?
Le Président
(M. Lemay) : Merci beaucoup.
M. Dorval (Yves-Thomas) : Alors, c'est notre suggestion à ce moment-ci pour réconcilier à la fois la volonté du gouvernement et ceux
qui sont préoccupés par un potentiel de hausses de tarifs qui ne serait pas
adéquat. Merci.
Le
Président (M. Lemay) :
Merci, M. Dorval. Donc, maintenant, on va débuter la période d'échange avec la partie
du gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Julien : Oui, merci, M. le Président. Merci beaucoup,
M. Dorval. Merci à vous et votre équipe de se présenter ici aujourd'hui
pour pouvoir justement discuter du p.l. n° 34 et de
ses différents enjeux, c'est très apprécié.
Je comprends que vous
avez une position, par rapport à vos membres et les gens que vous représentez,
un peu à cheval, en réalité, certains
trouvent des mérites, d'autres moins, alors, sur différents éléments. J'ai bien
entendu, naturellement, là, il y a une espèce de triade, là,
distributeur-clientèle-clientèle industrielle, avec une partie prenante, potentiellement,
qui serait la Régie de l'énergie, qui se trouve à être à travers tous ces éléments-là. Et, quand vous êtes venu sur la situation de ceux qui
n'adhèrent pas à la proposition du projet de loi n° 34,
en disant : Bien, peut-être que la hausse qui serait fixée,
c'est-à-dire un gel avec une inflation... Alors, certains de vos membres
disent : Oui, mais peut-être que la hausse, autrement, via le principe ou bien le processus de causes tarifaires
aurait été mieux, nettement mieux, puis peut-être qu'on va payer trop
cher, en réalité, via cette hausse-là. Puis, à la fin, on a eu des discussions
avec d'autres groupes, avec des modélisations, on a eu tout et son contraire,
en réalité, parce qu'à la fin...
On
le constatera au moment où on sera en mesure de le faire, mais, a priori, c'est
des éventualités qu'on observe. Puis
nous, naturellement, on a pris le principe de la base historique, là, on a pris
15 ans, on a pris 50 ans, puis on a regardé ça, puis on a dit : La corrélation est pas
mal bonne avec l'inflation. Je réitère que, dans les 15 dernières années,
c'est même au-dessus de l'inflation, l'augmentation des tarifs. D'autres
diront : Oui, mais, les trois dernières années, c'était moins que l'inflation. Mais c'est certain que, sans
faire du «cherry picking», on essaie de se projeter puis d'allonger un peu le
temps. Puis on dit : Cette
corrélation-là est pas mal bonne. On voit qu'il y a eu des écarts de
rendement qui ont été créés dans les 15 dernières années à hauteur
de 1,5, 1,6 milliard. D'un autre côté, quand on observe la différence
entre les deux courbes, c'est 2,4 milliards, qu'on nous disait ce matin.
Donc, si on avait suivi parfaitement l'inflation, c'est... Il n'y aurait pas
eu, en fin de compte, d'écart de rendement, puisqu'on a chargé 2,4 milliards
de plus sur 15 ans.
Une
fois qu'on a dit ça... Puis vous parlez avec vos parties prenantes, avec vos
membres, là, quand on vient dire que, dans cinq ans, gel, inflation, inflation,
inflation, inflation, on va venir refaire le recalibrage pour s'assurer que, sur
cette période-là, avec une cause tarifaire comme on la fait actuellement aux
12 mois, on va refaire le processus, donc, leur crainte, c'est que
ça serait nettement trop élevé sur la période de cinq ans, pour ramener ça à
trois ans?
Le Président (M. Lemay) :
M. Dorval.
M. Dorval (Yves-Thomas) : La première partie, c'est que la façon de
regarder les tarifs, ça peut être basé sur les coûts réels, sur les coûts d'exploitation, sur le contexte. On sait que
le coût va varier dans le temps selon toutes sortes de caractéristiques. Alors,
il y a des économistes qui vont dire : Bien, écoutez, il faut regarder ça
en fonction de la réalité. D'autres
vont dire : Bien, la prévisibilité, c'est intéressant, mais, attention,
l'inflation, ce n'est pas toujours tout à fait prévisible non plus, surtout pas
sur cinq ans.
Alors,
la question, qui est légitime, c'est : Comment on peut apporter plus de
prévisibilité? Comment on peut rassurer
quand même les clientèles potentielles qu'il n'y aura pas de hausses tarifaires
qui vont dépasser... Il faut faire attention dans le temps. Mais, quand on parle avec les membres, certains nous
disent : Écoutez, dans le fond, là, effectivement, le processus, pour certains, arriverait à peu près à
la même chose. Puis ça comporte un fardeau réglementaire très important,
se présenter, puis etc. Puis c'est toute une «all» chibagne. Puis finalement la
prévisibilité ou la transparence n'est pas nécessairement là, sauf pour
quelques spécialistes qui peuvent essayer de comprendre derrière ça. Donc,
c'est une motivation pour aller dans ce
sens-là. Mais d'autres disent : Écoutez, on ne peut pas la prédire non
plus, l'inflation, dans cinq ans,
dans quatre ans. Et peut-être que, si on regarde, justement, des cycles ou des
périodes où, dans le fond, on voit que,
pendant les quatre dernières années, par exemple, ça aurait pu être plus bas,
le tarif, que l'inflation, bien là, on se dit : On va-tu
s'embarquer dans cinq ans par rapport à ça? Alors, c'est des questions
légitimes.
Je vous réponds
essentiellement que c'est une préoccupation, puis, à mon avis, il faut essayer
de trouver un mi-chemin à travers ça pour rassurer les clientèles qui font des
investissements importants dans le développement économique du Québec dans les régions, puis en même temps une
préoccupation réelle d'un fardeau réglementaire, et tout ça, et une volonté de la part du gouvernement de
signaler qu'on va s'assurer que les tarifs ne seront pas haussés de manière
inconsidérée.
Je
pense qu'il y a moyen de trouver, je dirais, un entre-deux dans ça. Et, nous,
quand on pose la question, il n'y a personne qui est intéressé au fardeau
réglementaire, qui que ce soit. Mais, en même temps, tout le monde veut
s'assurer de payer le juste prix. Et on ne peut pas prédire quelles
seront les conditions, dans quatre, cinq ans, qui auront eu un effet, peut-être, dans un cadre de récession, dans un
cadre d'inflation, et ainsi de suite. Alors, je pense qu'il y a moyen de
trouver à quelque part un juste milieu.
Le Président
(M. Lemay) : Parfait. M. le ministre.
M. Julien :
Pour revenir sur... Alors, quand vous mentionnez... Oui, l'inflation, elle non
plus, n'est pas prévisible. Naturellement, bon, on est capable de voir poindre
des tendances, mais il n'y a pas d'assurance par rapport à ça. D'un
autre côté, les membres que vous représentez, là, 70 000...
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Employeurs.
• (19 h 50) •
M. Julien :
...employeurs, plusieurs d'entre elles, toutes choses étant égales par
ailleurs, dans leurs structures de coûts, en période inflationniste où est-ce
qu'il y a de l'inflation qui monte, mettons, à 3 %, 4 %, bien, je
suppose que leurs coûts de main-d'oeuvre... leurs coûts de
main-d'oeuvre, leurs coûts d'approvisionnement, en fin de compte leurs
structures de coûts, bien que ce n'est pas, en fin de compte, calqué un sur
l'autre, là, ce n'est pas du un pour un, mais il
y a une logique, là, en période d'inflation, il y a des coûts qui augmentent,
puis, en même temps, il y a une rémunération qui augmente, puis c'est le
propre d'une période d'inflation, si on était à 8 % d'inflation versus
1 % d'inflation... J'essaie de voir
pourquoi, en réalité, pour eux, ça deviendrait un choc, même si on ne prévoit
pas, en fin de compte, des inflations,
là, de dire : Bien, on est à l'inflation, puis si, par exemple, l'année
prochaine, c'est 1,7 %, puis, l'autre année après, c'est
2,8 %, l'autre année après, c'est 1,9 %... qu'ils n'adhèrent pas à
cette logique-là inflationniste.
Le Président
(M. Lemay) : M. Dorval.
M. Dorval (Yves-Thomas) : Nos membres ne nous ont pas parlé d'un choc, M. le Président, mais je vais laisser notre économiste en chef en parler, ils nous ont
parlé plutôt d'une façon d'approcher des prix, est-ce que
c'est basé sur le coût, les prospectives de rendement, les considérations, même,
climatiques, en passant, et des considérations de transition
énergétique, et tout ça, versus une stabilité, une prévisibilité relative,
parce qu'on ne peut pas prévoir non plus. Mais je vais laisser
Mme Kozhaya, M. le Président, apporter des informations complémentaires.
Le Président
(M. Lemay) : Allez-y, Mme Kozhaya.
Mme Kozhaya
(Norma) : Oui. Bon, effectivement, il y a plusieurs raisons pour lesquelles certains membres qui...
ont des préoccupations, des inquiétudes, c'est qu'ils disent
qu'ultimement, même au terme de cinq ans, la régie, lorsqu'il va y avoir une cause tarifaire, on va regarder les
revenus, les coûts d'Hydro-Québec et puis s'assurer, bon, d'avoir le rendement
de 8,2 %, donc est-ce qu'à ce moment-là ça va dépendre aussi... est-ce
que les coûts d'Hydro-Québec, eux, ont augmenté au même rythme que l'inflation? Ça se peut. Il y a une bonne partie,
c'est la rémunération, peut-être, qui... peut-être, elle augmente autant, peut-être plus, dépendamment des
conventions collectives. Donc, ce n'est pas clair qu'au terme de cinq ans les
coûts... les revenus vont augmenter, mettons, au terme de l'inflation, mais pas
nécessairement les coûts. C'est là le risque de choc tarifaire. Ça ne veut pas dire que c'est ce qui va arriver,
c'est... probablement, ce n'est pas quelque chose qui va arriver, mais
il y a une certaine inquiétude.
L'autre
chose, c'est qu'ils disent : Il faut aussi conserver l'expertise, et ça,
ce serait important, et on peut la conserver même si ce n'est pas aux cinq ans,
mais aussi parce que c'est un processus complexe. Par ailleurs, pour ceux qui
vont, des fois, dans des marchés de
commodité que les prix sont déterminés à l'international, des fois les prix
peuvent diminuer. Donc, eux, ce n'est pas non plus toujours l'inflation.
Donc, c'est ce genre d'inquiétude là.
Et, pour ceux qui ne sont pas au tarif L, qui
sont au tarif M, bon, encore là, ça dépend quelle période de temps on a pris. Ils voient que, si on prend une autre
période de temps, les tarifs vont augmenter moins que l'inflation, donc ils
risquent de... Donc, c'est ces préoccupations-là.
M. Julien :
Parfait. D'un autre côté, puis je réitère, là... Puis, tu sais, je ne veux pas
avoir une vision, là, trop réductrice, bien au contraire, là. On l'a dit, puis
on le répète, puis on va le redire, tu sais, on a fait l'exercice 50 ans, on a
fait l'exercice 40 ans avec des modèles de tarification qui ont
changé dans le temps. On a fait le modèle 15 ans, puis même qu'on fait le modèle cinq ans, tu sais. La
corrélation entre l'inflation... et les méthodes tarifaires de
l'hydroélectricité au Québec, même avec la régie, ont été quand même,
somme toute, assez corrélées.
Qu'est-ce que
ça veut dire, ça, pour vous, dans une perspective d'économiste, sur la suite
des choses? Il pourrait, après ça, avoir une espèce d'écartèlement un par
rapport à l'autre, bien qu'historiquement, à tous égards, là, la corrélation
est là, presque parfaite.
Le Président (M. Lemay) :
Mme Kozhaya.
Mme Kozhaya (Norma) :
Parfait. Donc, si on regarde simplement le passé, c'est sûr qu'on peut
s'attendre à ce que, logiquement, la
tendance se poursuit. Maintenant, s'il y a des nouvelles réalités qui émergent,
la tendance peut aussi changer. Et,
s'il y a des décisions, des fois, qui sont prises, en termes d'investissement
ou de programme, qui font que les coûts,
par exemple, augmentent plus ou moins, c'est ça qui risque d'affecter. Donc, si
on regarde de façon prospective, des fois, ce n'est pas... Encore là, il y en a
qui ont dit que, bon, effectivement, ça peut peut-être... vu que par le passé
c'était ça, donc peut-être que ça ne
causera pas de problème pour le futur. Mais sauf que c'est un peu que l'horizon
de cinq ans semble un peu long, du
moins peut-être dans une phase de transition, comme M. Dorval l'a
mentionné, peut-être, où on apprivoise le nouveau système. Et
effectivement il y a moyen, il y a moyen que... d'avoir un processus allégé, et
nous, on croit effectivement à l'allègement réglementaire.
Et d'ailleurs
il est prévu qu'Hydro-Québec continue de déposer son rapport annuel, mais aussi
une liste d'informations. Peut-être que cette liste d'informations pourrait
aussi être bonifiée pour refléter vraiment l'ensemble des coûts, pour
s'assurer qu'il n'y ait pas éventuellement de changement qui peut être plus
important que prévu.
M. Lemay : M. le ministre.
M. Julien : Un volet qu'on
trouvait intéressant aussi, à l'élaboration du projet de loi n° 34,
c'était le fait qu'Hydro-Québec, puis on a
cette prétention-là, puis je pense qu'elle est bonne parce qu'on se le fait
dire aussi par eux... on transfère le
risque à Hydro-Québec puis on leur met une pression supplémentaire pour
augmenter leur efficience puis leur performance, contrairement à
l'ancien modèle. Parce que, l'ancien modèle, 8,2 % de rendement attendu,
on monte une structure de coûts, un
appariement plus 8,2 % de rendement, voici ce que devrait être les
revenus, puis on tarifie. Là, on
vient dire : C'est convenu, là, vos revenus, ça va être un gel, inflation
quatre ans, puis donnez-nous des résultats par rapport à cette situation-là, on vous transfère le risque. Parce que,
oui, effectivement, suite à des situations exceptionnelles, ils
pourraient demander par décret, avec autorisation... mais on ne voit pas
poindre ça, là.
Nous, on dit : On veut que le transfert de
risque soit à la société d'État, une plus grande imputabilité justement pour que tous les efforts par rapport à la
performance soient clairement, en fin de compte, à la charge d'Hydro-Québec, et
la clientèle, elle, saura à quoi s'attendre avec une prévisibilité basée sur un
gel et une augmentation de tarification à l'inflation. Comment vous voyez ce transfert de risque et
d'obligation de performance? Est-ce que vous le percevez? Est-ce que vos
membres vous en parlent?
Le Président (M. Lemay) :
Allez-y, M. Dorval.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Oui, M. le Président. D'abord, la première des choses, je ne voudrais pas qu'on soit perçus ici comme étant... défendre l'intérêt
des clientèles ou... versus Hydro-Québec, on essaie de vous faire le plus possible transparence de ce qu'on a reçu comme
commentaires. Et la première des choses, à notre avis, Hydro-Québec l'a démontré depuis quelques années, vraiment un effort... d'abord, virage
client très fort, qui est remarqué, deuxièmement, aussi, prend des décisions pas toujours faciles pour
améliorer sa productivité, et ainsi de suite. À notre avis, elle a démontré des
bonnes choses dans ses actions au cours des dernières années.
Au niveau des clients, la
question, c'est... Vous dites : «Le transfert de risque», mais, en
fait, à l'origine, le gouvernement a décidé de dire : Il y a des
trop-perçus, on va essayer de les régler. Mais vous ne le savez pas, si le taux
d'inflation va générer ou non des
trop-perçus. Or, à ce moment-là, cet élément-là n'est pas nécessairement réglé.
Moi, je n'ai pas de doute, de toute façon, qu'une situation de... une entreprise comme celle d'Hydro-Québec va faire son possible, mais le citoyen est en droit aussi de
vouloir avoir cette preuve-là.
Et, ce que je
suis en train de vous dire, il y a plusieurs parties prenantes, il faut trouver la façon
d'accommoder toutes ces parties prenantes là. Mais le fait est qu'il y a
un risque qui lui est transféré puis il
y a un risque de surplus aussi
qui peut arriver. Alors, dépendamment de la situation,
il y a un risque aussi pour le client, par exemple, industriel.
Vous savez, à 0,65 — c'est ça? — de l'inflation, pour des clientèles
industrielles qui sont en compétition mondiale sur des décisions
d'investir ou non, bien, peut-être qu'ailleurs, dans un contexte x, ce
sera différent.
Le
Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, M. Dorval. Je vais
devoir vous arrêter sur ce point-là, le temps étant écoulé avec la
partie gouvernementale. Je vais céder la parole au député de D'Arcy-McGee.
• (20 heures) •
M. Birnbaum : Merci, M. le
Président. M. Dorval, Mme Kozhaya, merci beaucoup de votre exposé. Et
je vous salue d'avoir pris la décision de venir avec, si j'ai bien compris, une
certaine ambivalence, avec la réalité que vos membres sont partagés en ce qui a
trait à ce projet de loi, mais, de mon expérience, c'est bien avant. Et, pour
les années à venir, je n'ai aucun doute que
le conseil va continuer à alimenter de façon positive les délibérations des
parlementaires. Alors, je trouve que
c'est tout à fait légitime que vous soyez ici pour partager en toute franchise
le fait qu'il y a des nuances. Souvent, dans la politique, on oublie
cette grande réalité, qui devrait nous interpeler chaque jour.
Vous avez parlé, M. Dorval, en quelque
part, d'essayer de trouver le juste équilibre, mi-chemin. Il me semble qu'on va s'entendre que le mi-chemin passe par la
transparence, en quelque part, surtout si on parle d'un bijou qui nous appartient
tous, qui est en situation de...
(Interruption)
M. Birnbaum : ...«monopoly».
Merci pour la chorégraphie, ça...
Une voix : ...
M. Birnbaum : C'est ça, on parle d'un joueur clé avec un statut
assez particulier, c'est-à-dire notre Hydro-Québec. Et, bon, quand on parle de la transparence, de
trouver le juste équilibre qui va protéger l'investissement, on a entendu
plusieurs des consommateurs industriels d'électricité, et, leur préoccupation, tout à
fait légitime, on parle évidemment
de consommateurs, on parle de la responsabilité de l'État
d'assurer que le trop-perçu est retourné aux contribuables de toutes
catégories. Alors donc, tout ça me semble que de trouver le mi-chemin est de
mise, et de miser sur la transparence.
Là, on se trouve devant un projet de loi, par
définition, qui est un projet qui nous invite à songer à plusieurs
éventualités, une loi adoptée, une loi amendée, et d'autres. Dans ce contexte,
de votre avis, ce n'est pas le cas actuel, est-ce qu'Hydro-Québec devrait
déposer un dossier tarifaire pour 2020-2021?
Le Président (M. Lemay) :
M. Dorval, sur la question du député de D'Arcy-McGee.
M. Dorval (Yves-Thomas) : En fait, vraiment, je ne peux pas répondre à
votre question. Je pense que le gouvernement a annoncé ses intentions. À
partir du moment où le gouvernement a énoncé ses intentions, de dire
qu'Hydro-Québec devrait déposer une demande tarifaire... C'est ça que vous
dites?
M. Birnbaum :
C'est ça. Parce que, si on se situe dans la situation actuelle, aujourd'hui,
ils auraient eu à le faire. Bon.
Est-ce que ça ne suggère pas que, dans la bonne gestion, dans toute
transparence, pour équiper les gens à contextualiser le projet qu'on a devant nous, ça serait
intéressant de voir comment Hydro-Québec prévoit la situation actuelle et la
situation à venir pour un échéancier qui est l'échéancier utilisé
actuellement?
Le Président (M. Lemay) :
M. Dorval, allez-y.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Moi, je vous dirais, M. le Président, que la
société d'État, à la fin, a reçu un message du gouvernement en disant :
Nous, on va arriver avec cette proposition-là. Alors, la société d'État n'a pas
à intervenir. Je veux dire, à quelque
part, il y a une décision gouvernementale qui vient lui dire : C'est ça,
l'orientation tarifaire qu'on va déposer,
puis il y a un projet de loi qui est déposé pour modifier. Alors, j'ai de la
misère... Honnêtement, j'ai de la misère à répondre à une question comme
celle-là.
M. Birnbaum : Je m'excuse, je
vais me permettre de pousser l'affaire un petit peu parce qu'on parle d'un projet de loi. On parle d'un projet de loi, M. le
Président, qui propose de changer une situation et un régime à un autre. Je
me demande si... Est-ce que les membres, avec tout le respect, du CPQ, quand
ils lisent des manchettes qui suggèrent, peut-être avec grande crédibilité, qu'il y aurait
changement x ou y dans un régime qui touche à leur façon de comptabiliser
leurs exportations, j'invente un exemple...
Est-ce que vous conseillez à ces membres... ou ces membres eux-mêmes risquent
de décider de changer leurs façons de faire jusqu'à tant qu'une telle
proposition devienne la réalité?
Le Président (M. Lemay) :
M. Dorval.
M. Dorval (Yves-Thomas) :
M. le Président, même si Hydro-Québec avait déposé une demande tarifaire, la décision ne se prendrait pas à la régie avant une
certaine période de temps, ça fait que l'information ne serait pas non plus
connue de la part du client.
Je vous dirais que la perspective d'un projet de
loi... D'abord, un, c'est vrai, et, comme législateurs, comme membres de l'Assemblée nationale, vous êtes tout à
fait légitimes de dire : Écoutez, ce n'est pas parce qu'il y a un projet
de loi qui est déposé qu'il va être
autorisé. Et, tu sais, c'est vrai, puis il faut faire... il faut aussi avoir
une certaine déférence au processus...
pas une certaine, une déférence à l'égard du processus législatif et du rôle
des parlementaires. Mais c'est la même
chose, je veux dire, si Hydro-Québec avait déposé une demande tarifaire à la
régie, vous n'auriez pas la réponse non plus aujourd'hui.
Alors, la
question, ici, c'est, à la fin... Vous avez raison, c'est une bonne question,
mais je pense que c'est vraiment une question entre parlementaires. De notre
côté, je pense que la seule chose qu'on peut vous dire, c'est que le client
n'aurait pas plus un signal sur la décision
de la régie. Et d'ailleurs la régie a modifié presque
régulièrement les propositions. Ça fait que le client, il ne le
saurait toujours pas non plus exactement, ce qu'il a. Mais c'est une question
tout à fait légitime. Puis on est toujours confronté à ça. Le projet de loi, ça
ne veut pas dire que la décision est prise.
Le Président (M. Lemay) : Parfait.
M. le député D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum :
Merci, M. le Président. En parlant de votre approche nuancée exigée par vos
membres, vous avez fait quelques interventions où vous avez... vous vous êtes
questionné sur l'échéancier. Y a-t-il un mi-chemin à considérer? Cinq
ans? On peut avoir des études très réfléchies sur le taux d'inflation, des
tendances, et tout ça, mais les économistes vont
être les premiers à admettre que c'est une science inexacte et que, bon, les
prévisions nous aident à la planification, mais il faut être souple, et
flexible, et prêt à envisager d'autres scénarios.
Vous avez parlé peut-être de quelque chose comme
trois ans. Je veux vous inviter à élaborer là-dessus. Là, on est devant un
projet qui parle, toutes fins pratiques, de présenter de... de présentation
d'un dossier tarifaire une fois par cinq
ans. De votre lecture, est-ce que ça va nous permettre, avec toutes les
retombées qui en découlent, de nous assurer un juste prix pour l'ensemble de cette période-là? Vous allez ouvrir la
porte à une autre formule. Quel genre de facteurs devraient nous aider à
valider la bonne cible?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : M. le
Président, la première des choses, si on ramène ça à trois ans, c'est qu'on
aurait un gel d'une année puis une
inflation... une augmentation d'inflation sur deux ans. Je pense qu'au niveau
du résultat net ce n'est pas négatif, là, pour les clients, parce que ce
serait moins que l'inflation annualisée sur trois ans.
Alors, dans
ce sens-là, la crainte de problèmes est amoindrie. Mais, en même temps, ça
laisserait, justement parce qu'on arrive avec un changement... Puis je vais
être honnête avec vous, le monde des affaires, de façon générale, avait demandé
une dépolitisation de la décision dans le passé. Et la question, puis ce que le
ministre a dit tout à l'heure... Et l'analyse
qui a été faite, c'est que, même s'il y a eu une dépolitisation, à la fin ça
revient, selon une analyse sur le long terme, à à peu près la même
chose. Alors, la question...
Le Président (M. Lemay) :
M. Dorval...
M. Dorval
(Yves-Thomas) : La question, c'est qu'une décision d'une
entreprise ne se prend pas seulement sur
25 ans ou 15 ans, elle varie aussi dans une période de trois à quatre
ans dans son plan stratégique, c'est pour ça qu'on propose trois ans, en
se disant : Je pense que c'est une période...
Le
Président (M. Lemay) : M. Dorval, excusez-moi, c'est juste
que j'ai une nouvelle question, par le député de Laval-des-Rapides.
Donc, je vais céder la parole au député.
M. Polo :
Merci beaucoup. M. Dorval, Mme Kozhaya. On s'est déjà rencontrés par
le passé. Je tiens à souligner effectivement,
comme mon collègue l'a mentionné, le fait que, dans votre conclusion, vous
proposez déjà une possible solution ou
une piste d'atterrissage pour ce projet de loi là. On va se le dire
aujourd'hui, il y a eu très peu de gens qui ont salué le projet de loi n° 34 dans son entièreté, à
part bien sûr Hydro-Québec puis l'Association de l'industrie électrique, qui,
comme je l'ai démontré précédemment, avait peut-être un parti pris, là,
à ce niveau-là. Ceci dit, je remercie et je souligne votre ouverture. J'espère que le ministre va faire
preuve de la même ouverture également lorsque viendra le moment d'étudier
article par article le projet de loi.
Avant de terminer, Mme Kozhaya, vous avez
mentionné quelque chose, parce que l'argumentaire du ministre se base énormément sur le mot «prévisibilité», et
vous l'avez corrigé en disant : «Le passé n'est pas garant du futur», même
si le passé nous donne un portrait de
comment peuvent fluctuer les choses, mais c'est très difficile, même sur une
période de cinq ans, d'avoir une
prévisibilité aussi loin que possible. Vous, étant une économiste accomplie,
chevronnée, je vous inviterais peut-être à élaborer sur ça.
Le Président
(M. Lemay) : Mme Kozhaya, si vous êtes capable en environ
30 secondes...
• (20 h 10) •
Mme Kozhaya (Norma) :
Oui, effectivement, bon, les prévisions, c'est toujours difficile. Je ne vous
apprends rien de nouveau. Et effectivement, bon, le fait que... Si on prend une
période de temps assez longue, c'est intéressant de voir qu'effectivement ça correspondait à l'inflation. Par contre, au
cours des dernières années, des fois il a pu y avoir des décisions
politiques ou autres qui ont influencé ces résultats. Donc, c'est pourquoi,
pour le futur... Mais, des fois, il y a des
tendances, et, comme ça a été mentionné, si on regarde 20 ans ou
50 ans, je crois que c'est quand même une tendance lourde, mais si on regarde les dernières années,
est-ce que, là, il y a des changements très importants que... C'est pour ça
qu'on ne dit pas qu'il faut que ça soit un
an, parce qu'en dedans de trois ans je crois qu'il y a peu de chances d'avoir
des changements importants, quand même.
Le
Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, Mme Kozhaya. Avant de
procéder, c'est une formalité, simplement savoir si on a le consentement pour que la députée de Mercier puisse
prendre part à la discussion en remplacement de la députée de
Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
Est-ce qu'il y a consentement?
Des voix : Consentement.
Le Président (M. Lemay) :
Merci. Donc, Mme la députée de Mercier, la parole est à vous.
Mme Ghazal :
Merci, M. le Président. Merci beaucoup pour votre présentation. Là, j'ai
2 min 45 s, c'est bien ça? Donc, je vais aller
rapidement.
Je trouve que c'est intéressant, quand même, que
vous ayez fait l'effort, premièrement, de venir et, aussi, même d'apporter des propositions, notamment de
réduire... des propositions de compromis, de cinq à trois ans, malgré le fait
que vos membres n'étaient pas tous
d'accord sur... disons, sur la même longueur d'onde par rapport à ce projet de
loi. Je suis curieuse de savoir, sans
le nommer, les membres, ceux qui sont pour, ceux qui sont contre, peut-être
quels sont ceux qui voient des
avantages et quels sont ceux qui voient des désavantages, quels secteurs
d'activité ou quelles industries, si c'est possible, ceux qui
sentiraient qu'ils seraient plus pénalisés que d'autres, par exemple.
Le Président (M. Lemay) :
M. Dorval.
M. Dorval
(Yves-Thomas) :
Bien, écoutez, ceux
qui souffrent du fardeau réglementaire, ça peut être toute organisation qui est obligée de, je dirais, se
préparer pour une demande, pour valider, pour vérifier, pour présenter tous ses
arguments, et ainsi de suite, y compris le distributeur lui-même. Ça peut être
un exemple. Un autre exemple, de l'autre côté,
ça peut être une organisation qui dit, par exemple : Bien, nous, dans le
contexte, on peut avoir eu à négocier certaines choses aussi; là, on
nous coule dans quelque chose de très rigide, donc on ne pourra
nécessairement... Si je prends certaines
PME, il y a des PME qui peuvent dire : Ouf, enfin, au moins, dans ma
planification, parce que je ne commencerai pas à faire des calculs
mathématiques, puis etc., je sais à peu près où est-ce que je m'en vais, au
moins pour une période, comme j'ai
dit, il ne faudrait pas que ça soit de cinq ans, mais pour une certaine
période. D'autres vont dire : Non, moi, je suis prêt à vivre avec le risque plus grand, mais il y a peut-être, à la
ligne... à la marge, un bénéfice plus grand aussi. Donc, je ne peux pas
vous dire, parce que ça serait...
Mme Ghazal : ...d'industries...
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Non, parce que ça ne peut pas nécessairement
être tout monolithique. Mais vous avez eu
des présentations d'une association industrielle, aujourd'hui, qui représente l'intérêt de ses membres... qu'elle a fait part de ses
objectifs. Moi, ce que je vous dirais, là, n'oublions pas qu'on est dans une
période de transition énergétique. Moi,
ça me préoccupe, ça. Le gouvernement devra arriver avec un plan de transition... un plan
vert, un plan d'électrification. Moi,
ça me préoccupe, ça. Et moi, bien, j'aimerais ça que le gouvernement, quand il va faire son plan, il analyse aussi le tarif d'électricité dans tout ça, comment il vient jouer
contre ou pour. Puis, à mon avis, ça, c'est le genre de situation
où est-ce que, pour les trois
prochaines...
Le
Président (M. Lemay) :
M. Dorval, je dois vous interrompre. Je dois vous interrompre, c'est déjà
terminé pour cette période d'échange.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : ...pour les trois prochaines années, il me
semble qu'il faut calmer le jeu, là.
Le Président (M. Lemay) : Donc,
je cède maintenant la parole au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Merci
beaucoup pour votre présentation. Comment vous expliquez que des entreprises ou des représentants du monde des affaires, des
investisseurs, des grands consommateurs d'énergie ont des points de vue différents sur les impacts quant à leur compétitivité... du projet de loi n° 34, des gens qui nous disent : Bien, la
compétitivité, c'est de maintenir le
statu quo, puis d'autre qui nous disent : Bien, la compétitivité, c'est
d'aller dans le sens qui est proposé par
le ministre? Alors, j'imagine, vous avez des discussions avec
vos membres. Est-ce que vous êtes capable de nous éclairer un peu là-dessus?
Le Président
(M. Lemay) : M. Dorval.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Bien, je pense
qu'il y en a qui sont plus confrontés que d'autres à une
compétitivité internationale, d'une
part, et d'autres qui font des investissements où ils préfèrent avoir, je
dirais, un horizon un petit peu
plus prévisible. Mais, attention, encore une fois, l'inflation, ce n'est pas totalement
prévisible.
En fait, il
n'y a pas de monde parfait. Ce que je suis en train d'essayer de vous
expliquer, c'est qu'il y a des organisations
pour ou contre, qui voient qu'il y a des avantages et des inconvénients. Il y a
des organisations plus sujettes à prise de risque que d'autres. Puis il y a des
organisations qui peuvent prévoir que, dans leur domaine, les coûts vont
plus être maîtrisés de cette façon-là qu'une autre. Alors, essentiellement,
c'est la réalité d'entreprise.
Maintenant, encore
une fois, tant pour ceux qui
préfèrent avoir une... Je dirais, l'allègement réglementaire, c'est vrai pour tout le monde, puis l'allègement réglementaire, il ne
faut pas le nier, il y a
un impact, là. Puis, entre autres, on parle d'efficacité puis de
productivité, même Hydro-Québec, je
veux dire, quand ils font quelque chose, il faut que
ce soit aussi à valeur ajoutée. Puis de se
présenter toujours, à chaque année, devant une régie, ce n'est peut-être
pas non plus à valeur ajoutée pour l'organisation.
M. Gaudreault : Et je suis d'accord pour l'allègement réglementaire, mais pas au prix, quand même, de la
compétitivité, ou des règles de transparence, ou de l'absence d'information, ou du retour à un arbitraire ou à un discrétionnaire à l'égard...
au gouvernement.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : C'est exactement...
Le Président (M. Lemay) :
M. Dorval, en 20 secondes.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : M. le Président, c'est exactement
les arguments que les gens qui sont préoccupés vont faire valoir. Ils préfèrent avoir un signal de prix basé sur le coût
qu'une perspective. Et c'est pour ça qu'on dit : O.K.,
prenons ça dans son portrait. Ne mettons pas la période trop longue. Revenons à
un petit peu plus court. Mais donnons-nous peut-être ce
trois ans-là pour examiner comment ça va se passer.
Le
Président (M. Lemay) :
Alors, M. Dorval, Mme Kozhaya, je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.
La commission
ajourne ses travaux au mercredi 18 septembre, après les affaires
courantes, où elle poursuivra son mandat.
(Fin de la séance à 20 h 17)